Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures neuf minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission permanente de la présidence du conseil et de
la constitution reprend donc ses travaux suspendus hier. Je voudrais, avant
d'entamer l'audition des mémoires - on me corrige en me disant que c'est
ce matin, c'est vraiment exact - vous rappeler les noms des membres de la
commission, comme il faut le faire au début de chaque séance.
Les membres de la commission pour aujourd'hui sont: MM. Chevrette
(Joliette), Ciaccia (Mont-Royal), Dauphin (Marquette), Dean (Prévost),
Duhaime (Saint-Maurice), Fallu (Groulx), Fortier (Outremont), Gendron
(Abitibi-Ouest), Kehoe (Chapleau), Lafrenière (Ungava), Lemay
(Gaspé), Marois (Victorin), Middlemiss (Pontiac), Perron (Duplessis),
Rocheleau (Hull), Sirros (Laurier).
À l'ordre du jour, pour aujourd'hui, nous avons huit
mémoires. Le premier, tel qu'il avait été prévu est
celui du Syndicat des métallos, représenté par MM.
Clément Godbout, Lawrence McBrearty, Fernand Daoust, Claude Carbonneau,
Jean-Guy Frenette. Je m'aperçois qu'il y a d'autres personnes. M.
Godbout, si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous
et y aller avec votre mémoire.
Syndicat des métallos (FTQ)
M. Godbout (Clément): M. le Président, je voudrais
tout d'abord remercier les deux syndicats locaux des métallos de
Schefferville, le local 5567 des employés de production et de
maintenance et le local 6503 des employés de bureau de la compagnie Iron
Ore, qui ont participé avec nous à la rédaction du
mémoire, la Fédération des travailleurs du Québec,
la ville de Schefferville, les groupes de citoyens et d'autres groupes.
Je voudrais vous présenter immédiatement, à ma
gauche, le secrétaire général de la FTQ, M. Fernand
Daoust, suivi de M. Jean-Claude Carbonneau représentant du syndicat, M.
Alain Jalbert, permanent et représentant de la FTQ dans la région
CÔte-Nord. À ma droite, M. Jean-Guy Frenette, directeur du
département de services de la FTQ, M. Lawrence McBrearty, coordonnateur
régional pour le Labrador terre-neuvien, la Côte-Nord et la
péninsule gaspésienne, M.
Otto Sajerman, président du local 5567 des employés
à l'heure et le confrère M. Julien Caissy, président du
local 6503 des employés de bureau.
Vous me permettrez également de remercier de façon toute
particulière les interventions et le travail faits par le
député du comté de Duplessis, M. Denis Perron, afin de
permettre à cette commission de se rendre sur place pour entendre les
parties et également les membres du gouvernement et de l'Opposition qui
se sont rendus sur place pour venir écouter les mémoires qui sont
présentés.
M. le Président, c'est à la demande du Syndicat du
métallos que se tient cette commission parlementaire sur l'avenir de
Schefferville, territoire qui, jadis, était un symbole de
prospérité du Nord, voire même du Québec.
Aujourd'hui, c'est toute une population qui déchante, sachant qu'elle a
été leurrée par une société minière,
par des gouvernements, si bien que Schefferville est devenue le symbole
éhonté d'un manque de planification de la part d'une compagnie
qui a tiré d'énormes profits de son exploitation pour, ensuite,
s'enfuir sans trop de souci des torts considérables qu'elle a
causés aux travailleurs, aux travailleuses, à la population,
à la municipalité et à la Côte-Nord.
Pour connaître toute l'ampleur de la brutalité dont fait
preuve la Compagnie minière IOC en fermant ses opérations de
Schefferville et d'ailleurs sur la Côte-Nord, il faudrait que cette
compagnie remette à la commission et rende public l'état
financier de ses activités à Schefferville et sur la
Côte-Nord, non pas des états financiers consolidés avec les
autres partenaires dans tout le continent, mais les états financiers
touchant spécifiquement Schefferville et la Côte-Nord.
Nous demandons donc à la commission d'obliger la
société minière à déposer ses états
financiers de la Côte-Nord, y compris les transferts d'argent et
bénéfices ailleurs en Amérique du Nord. Ainsi, les
travailleurs et travailleuses, la population de Schefferville et de la
Côte-Nord pourront véritablement connaître le vrai visage de
cette société.
La décision de la société minière de mettre
fin à ses opérations avait été prévue. Elle
a été annoncée et faite de façon brutale. Tout le
monde conviendra aujourd'hui que la société IOC savait depuis
longtemps
qu'elle fermerait ses portes à Schefferville. Dès le mois
de mars 1982, elle faisait une demande à la Commission canadienne des
transports pour se départir de son service de trains par chemin de fer
sur la voie menant à Schefferville à partir de l'embranchement
vers Labrador City. Ces démarches n'ont pas été
communiquées au syndicat ni à la population de Schefferville.
Pendant des mois, les travailleurs et la population ont été
victimes de rumeurs qui ont semé l'inquiétude, la panique, le
désarroi, voire, le désespoir. La compagnie niait les rumeurs
parce qu'elle avait besoin des travailleurs pour former le noeud coulant
jusqu'à l'étranglement.
Le 22 octobre, à Schefferville, un vice-président de la
compagnie nie les rumeurs de fermeture de Schefferville et dit que si jamais
cela venait à se produire, l'annonce serait faite face à face
avec la population. Le 23 octobre, dans le journal Le Soleil, on annonce la
fermeture de Schefferville, la compagnie Iron Ore nie. Le 1er novembre, c'est
l'ouverture officielle du poste de télévision de Radio-Canada
à Sept-Îles. La première nouvelle du premier bulletin de
nouvelles, c'est l'annonce de la fin des opérations de l'IOC à
Schefferville. Par télégramme, les métallos demandent des
explications au président de la compagnie et M. Mulroney le confirme. Le
2 novembre, le président de la compagnie est à Ottawa et discute
avec les ministres. Les dirigeants des syndicats locaux rencontrent les
responsables régionaux de l'Iron Ore. (10 h 15)
Ce 2 novembre, à la télévision, la population
apprend officiellement, et lors des réunions, bien sûr, la fin des
activités de l'IOC à Schefferville par la bouche du
président de la compagnie. M. Mulroney se rend à Schefferville.
Il y a un refus de face à face avec la population. Il veut rencontrer
les présidents des syndicats locaux qui refusent l'invitation en disant
que tous les dirigeants devraient être présents. Rencontre il y a.
M. Mulroney rencontre quelques commerçants, puis, l'avion retourne vers
le sud. L'annonce de la fermeture des activités de l'Iron Ore est
consommée.
Nous faisons remarquer que cette compagnie, si elle avait
été le moindrement civilisée et soucieuse des
intérêts de ses travailleurs, aurait dû avoir la
décence de parler avec le syndicat pour amoindrir l'inquiétude,
l'insécurité et la souffrance de la population. Je reviendrai sur
ce sujet, parce qu'il en a été amplement question, hier.
La compagnie Iron Ore, qui est partie dans les débuts des
années cinquante, a fait miroiter tous les avantages qu'auraient des
milliers de travailleurs et de familles à faire leur vie à
Schefferville. Schefferville devait durer cent ans. Des familles s'y sont
installées, ont fondé un foyer, des enfants sont nés, sont
ici à Schefferville. Aujourd'hui, cette génération n'a
plus de racine. Au cours des années cinquante, soixante et soixante-dix,
des gens se sont déracinés, des parents sont montés
à Schefferville à partir de plusieurs régions du
Québec. En 1983, l'Iron Ore déracine une génération
de jeunes citoyens et citoyennes travailleurs et travailleuses qui descendent
dans plusieurs régions du Québec, maintenant, à partir de
Schefferville.
Donc, annonce de la fermeture de l'exploitation le 3 novembre. L'avis
est donné. Le 16 novembre, il ne reste que quelques travailleurs
à l'ouvrage. C'est, à toutes fins utiles, un avis de quelques
jours, ce court délai est illégal au sens de la loi, selon nous.
Les travailleurs et la population subissent alors un choc considérable,
aux prises avec l'inconnu et l'insécurité totale. Si la compagnie
avait joué franc jeu au tout début, c'est-à-dire
lorsqu'elle a pris sa décision il y a plusieurs mois, il aurait pu y
avoir des négociations pour amoindrir le choc chez la population,
répondre aux nombreuses questions des travailleurs et atténuer le
désarroi. La société minière IOC a choisi de
refuser la négociation avec le syndicat. Début de novembre, la
compagnie décide d'aller à la pêche, de tester les
travailleurs et la population. Elle soumet des premières propositions
qui sont jugées inacceptables. Devant les pressions de toutes sortes,
devant la présence syndicale et les démarches des métallos
qui sollicitent la tenue d'une commission parlementaire, la compagnie retire la
ligne de l'eau, abondonne son leurre et rend publiques, le 26 janvier, de
nouvelles propositions. Le directeur des métallos, Clément
Godbout, déclare: La proposition de l'Iron Ore repose sur une base assez
solide pour qu'elle puisse faire l'objet d'un terrain d'entente à partir
duquel une loi éventuelle sur les fermetures d'usines et des mines
puisse être préparée. Il mentionne, entre autres, les
principes qu'on y retrouve en ce qui a trait à la paie de
séparation, le logement, le déménagement et l'aide aux
employés.
Nous avons bien noté hier, si vous me permettez, la
déclaration et la prise de position - je pense que cela n'est pas trop
fort - de la part du président de la compagnie lorsqu'il a
déclaré qu'il était d'accord avec une loi qui pourrait
aider les travailleurs impliqués par des mises à pied. Nous
sommes heureux de cette déclaration. Nous espérons, en tout cas,
qu'elle n'a pas tombé, à la commission parlementaire, dans des
oreilles de sourds. Et, même si elle arrive tardivement, elle est quand
même là et il faudrait en profiter.
Nous formulerons, dans les prochains chapitres de ce mémoire, nos
considérations et nos propositions quand survient une
fermeture de mine.
Pour ce qui est des propositions proprement dites de l'Iron Ore, celles
du 26 janvier, la compagnie aurait du avoir la décence
élémentaire en relation du travail de les négocier avec le
syndicat. Il y aurait eu moins de trous. Nous ne passerons pas en revue toutes
les propositions de la compagnie. Nous allons nous contenter d'en citer
quelques exemples. La compagnie n'offre pas de paie de séparation aux
travailleurs qui prennent leur retraite immédiatement. Les travailleurs
injustement considérés comme saisonniers par la compagnie sont
pénalisés. Les travailleurs du chemin de fer, entretien de la
voie et des ateliers de réparations, ainsi que les métallos du
quai de chargement à Sept-Îles, dont le travail dépend
directement de Schefferville, sont complètement oubliés. La
compagnie aurait pu adopter une attitude plus souple, accorder des droits de
retraite aux travailleurs qui sont juste en deçà des
critères d'éligibilité.
L'offre sur les logements semble généreuse. Cependant, il
faut se demander comment un employé pourrait défrayer les
coûts d'entretien d'une maison, par exemple: le chauffage et les taxes,
avec les prestations sociales ou sa pension. Le seul chapitre du chauffage lui
coûte 3500 $ par année pour une maison à Schefferville. Les
frais de déménagement. Une partie des déménagements
payés par le gouvernement fédéral sera versée
à la société minière qui est propriétaire du
chemin de fer. La liste pourrait s'allonger.
Avant que ne survienne une fermeture de mine dans une région
éloignée, là où la municipalité ne
dépend que d'une seule industrie, comme c'est le cas de Schefferville,
il est essentiel d'avoir des politiques qui tiennent compte d'abord des
intérêts des travailleurs et de la population. Je ne pense pas
qu'on puisse laisser à une entreprise seule cette
responsabilité.
À Schefferville, la fermeture est brutale. Les dirigeants n'ont
pas fait preuve de compassion, ni envers les nouveaux pionniers qui ont
construit la ville, ni envers les jeunes qui aiment leur milieu, ni envers la
population en général. Pour absorber le choc, il aurait fallu du
temps; du temps pour analyser la situation, du temps pour réagir et du
temps pour préparer un programme d'action.
Dans les circonstances, étant donné que la
société minière n'a pas voulu négocier avec les
comités de négociation les droits et les bénéfices
à accorder aux travailleurs, nous demandons à cette commission
parlementaire de forcer la compagnie à s'asseoir avec les dirigeants des
syndicats locaux du Syndicat des métallos, pour véritablement
négocier les conditions de séparation, toutes les conditions, y
compris celles des travailleurs de Sept-Îles, des chemins de fer, des
ateliers de réparations, qui sont directement touchés par la
fermeture de l'exploitation.
Nous vous demandons de prendre la décision, ici même, sur
place, de nommer un médiateur spécial pour que le syndicat et la
compagnie s'assoient à une table pour que des négociations se
fassent. Vous comprendrez qu'il s'agit d'une opération d'urgence. Le
rapport du médiateur spécial doit être déposé
dans un délai ne dépassant pas un mois.
M. le Président, vous me permettrez certainement de mettre les
choses en perspective, telles qu'elles se sont passées. Je voudrais
ouvrir une parenthèse pour dire que, d'abord, les discussions avec le
directeur d'un syndicat et d'un président d'une compagnie, à
notre sens, ce ne sont pas des négociations. C'est important que des
discussions se fassent et tout le monde le sait. Que cela se fasse dans un
monde civilisé avec un respect mutuel, c'est normal et c'est comme cela
que cela devrait se faire. Il n'en reste pas moins que le directeur d'un
syndicat comme le nôtre, en l'occurrence, se rapporte à des
mandats précis qui sont exécutés par des officiers et des
permanents.
Dans ce sens, on a cru comprendre dans la réponse du
président de la compagnie, hier, qu'il n'y aurait pas de
négociations avec les comités en place; qu'il n'y aurait pas de
négociations avec les permanents en place; qu'il n'y avait pas
d'objection à des discussions avec le directeur des métallos.
Je vous dirai que certainement partout où je pourrai donner un
coup de main, personnellement, pour aider un travailleur ou une travailleuse ou
un citoyen d'ici, je vais le faire avec plaisir et avec responsabilité,
mais je n'ai peut-être pas le droit de remplacer ceux qui ont
l'habileté et la compétence pour discuter sur place des
problèmes.
Notre suggestion quant à un médiateur, il ne faut pas la
voir de façon trop épeurante, et je m'explique. On ne demande pas
que le Code du travail soit amendé pour établir des
négociations. Vous l'avez très bien compris. Le rôle du
médiateur est très souple. Il se rapporte aux ministres. Il peut
travailler de différentes et de multiples façons. Il y a des
millions d'approches qui sont à la disposition d'un médiateur,
que ce soit par discussions ex parte ou que ce soit par différentes
approches. C'est cette approche souple qu'on propose ici aux métallos de
Schefferville, aux employés de bureau et à ceux qui sont
frappés ailleurs dans la compagnie, qui puisse permettre de
connaître comment s'appliquent les avantages qui sont offerts.
La réalité, c'est ceci. Il est exact que
j'ai été informé des démarches de la
compagnie. Je voudrais remercier, bien sûr, tous ceux qui les ont faites,
y compris le député fédéral, M. Maltais, lequel a
joué un rôle important dans ces démarches également.
Il est exact qu'on en a été informé. Il est exact aussi
que, lors de l'annonce de la compagnie en janvier, lors de la conférence
de presse, nous avons salué l'approche et je n'ai pas
déclaré plus que ce que j'ai déclaré. C'est clair.
C'est écrit en pures lettres dans notre mémoire et on le retrouve
également dans le communiqué de presse et dans le mémoire
de la compagnie IOC. Les termes sont exacts.
Je déplore cependant, et je le déplore
profondément, que dans le journal Le Dialogue on n'ait pas
été capable de répéter les mêmes mots. Si
cela continue, le prochain article sera que nous avons signé une
entente. Cela n'a pas beaucoup de bon sens. Je ne lance la pierre à
personne en particulier. Il y a peut-être des vérifications
à faire sur ce qui s'est passé dans cette propagande. J'ai
réagi au mémoire de la compagnie, lors de la conférence de
presse de la compagnie. Je pense - et nous l'avons dit - que la décision
a pu être prise ailleurs et que les Québécois qui
étaient pris avec cette décision ont fait leur possible.
Nous avons dit également que nous saluons et que nous trouvons
que cela fait une très bonne base de discussion pour une
législation. Tant mieux et bravo! Si cela peut aider aux travailleurs et
aux travailleuses de Schefferville, tant mieux! Si on peut faire encore mieux
pour les aider davantage, on va faire plus. C'est dans notre mandat, c'est
notre rôle. Mais cela n'a pas été plus que cela. Je ne dis
pas que cela a été dit, mais il y a eu une espèce de nuage
qui s'est promené autour de la commission, hier, et dans le journal qui
est sorti et qui ne reflète pas la réalité - je parle du
Dialogue - une espèce de nuage laissait entendre qu'il avait pu y avoir
une négociation quelque part. C'est inexact. Il y a eu des
échanges d'information et des demandes précises quant à
notre position sur des choses. Elles ont été expliquées,
telles que rédigées dans le mémoire de la compagnie. Je
l'admets. Elles sont exactes. Ce sont celles-là et pas plus que
cela.
Dans le domaine des relations du travail, entre le Syndicat des
métallos et la compagnie Iron Ore, cela va pas mieux et pas pire
qu'ailleurs. Je ne dirai pas qu'il n'y a pas eu une tentative et des efforts
d'amélioration, mais nous ne sommes pas rendus, quant à la
compagnie Iron Ore et au Syndicat des métallos, dans une
société qui se voudrait d'adoration mutuelle. C'est un peu comme
dans d'autres situations, avant même l'arrivée du président
actuel - et nous l'avons dit - il y a eu certainement plus de discussions et
d'ouvertures maintenant qu'avant. Mais pendant les bonnes années,
pendant que le fer se vendait et pendant que la compagnie fonctionnait - je
parle de 1970 à 1975 et 1976, en gros - les métallos, par
l'entremise de comités de négociation, ont fait leur travail de
négociation, des revendications dures, mais en même temps
responsables. Nous avons eu des conflits et des grèves et, pendant ce
temps-là, on nous traitait d'emmerdeurs. Tant pis! C'est comme cela
qu'on était. Peut-être!
Maintenant que nous sommes tous dans cette situation, dans le
fossé jusqu'ici, qu'on a peine à se tenir le nez en dehors de
l'eau, pour tout le monde, nous sommes rendus des partenaires. Ce sont des
choses qu'il faudrait mettre en perspective, à un moment donné.
C'est que le rôle du mouvement syndical en sera un de revendications se
rapportant à des membres. Nous allons continuer le travail dans le
respect mutuel, chacun de son côté. Qu'on soit président
d'une compagnie, qu'on soit directeur d'un syndicat, qu'on soit gérant
d'une usine ou qu'on soit président d'une section locale, nous avons des
rôles à jouer et ces rôles doivent être
respectés et doivent s'exercer.
J'espère que c'est clair. Je l'ai dit une fois pour toutes. Ce
qui s'est passé dans ce dossier, c'est cela. Il y a eu des discussions.
Il y a eu des informations. J'ai été informé, toujours,
bien sûr, après l'annonce que la compagnie allait fermer, de ce
qui se faisait. Ce que vous retrouvez dans notre mémoire, ce que vous
retrouvez dans les communiqués et dans le mémoire de l'Iron Ore,
c'est exact.
Je voudrais me permettre une autre parenthèse pour mettre les
choses au point également sur une chose qui a été dite,
hier, et qui nous dérange. Elle nous dérange parce que, je pense,
qu'elle ne reflète plus la réalité. Je pense
également que le dossier aurait dû rester fermé. Je parle
des années compliquées, à Sept-Îles, des relations
du travail - relations du travail, ce n'est peut-être pas exact, mais en
tout cas - du climat qui a été décrit par le
président de l'Iron Ore, hier.
Vous savez, dans les années 1970 à 1976 - c'est un secret
de polichinelle - il y a eu beaucoup d'agitation et d'infiltration dans les
syndicats au Québec, un peu partout. Des gens qui croyaient à une
théorie marxiste, à mon sens, ont cherché pendant des
années et continuent à tenter de découvrir lequel est
arrivé le premier, soit la poule ou l'oeuf. Il n'en reste pas moins
qu'ils ont fait beaucoup d'agitation dans les usines. Je dis, bien sûr,
que c'est exact que, dans le local 5569, il y avait cette présence, mais
il y avait des présences beaucoup plus marquées et beaucoup plus
difficiles dans d'autres syndicats au Québec, pas seulement chez les
métallos ou ailleurs. Mais notre syndicat a été
visé de façon plus
particulière. Nous avons eu ce problème-là et, vous
le savez, le directeur de notre syndicat l'a dénoncé ouvertement
dans plusieurs rapports moraux. À Sept-Îles, il y a eu cette
agitation, mais ce n'est pas exact de prétendre que tout ce qu'on a dit
s'est passé là. Comme on l'a dit hier, je pense qu'il faut
nuancer. (10 h 30)
Ce qui reste, c'est que dans le local 5569, il y a là des
travailleurs et des travailleuses responsables qui ont joué un
rôle important. Il y a une vie démocratique qui fonctionne
à l'intérieur du syndicat local, qui a fonctionné à
l'intérieur du syndicat local et si, en 1978, il y a eu grève,
c'est qu'il y avait certainement d'autres sortes de problèmes
également et que cela pouvait servir de "spring-board" pour les gens qui
voulaient le faire, bien sûr.
Je dirai, en terminant, que c'est possible qu'il y ait eu des
"maringouins" dans les usines de l'Iron Ore, mais ce n'est pas nous qui les
avions fait entrer. Nous, comme syndicat, on travaille avec les membres qu'on
nous donne, qu'on embauche. Alors, il faudrait peut-être mettre en
perspective le fait que - personnellement, je souhaite qu'on n'en parle plus -
cela a été, bien sûr, des difficultés pour tout le
monde. Je ne pense pas qu'on gagne à en parler.
Deuxièmement, peu importent les croyances politiques d'un
travailleur, nous allons respecter la Charte des droits et libertés de
la personne. Si quelqu'un est élu démocratiquement officier d'un
syndicat local, nous allons travailler avec les personnes élues et nous
n'avons pas à juger de leurs croyances. Cela étant dit, il me
semble que cela met en perspective ceci: il y a eu des problèmes, mais
nous on souhaite ne plus en parler. Parce que, aujourd'hui, je pense que ces
problèmes-là - comme le disait hier M. Mulroney - se sont
estompés.
À Schefferville, on l'a dit, ça doit fermer. Ainsi la
compagnie Iron Ore en a décidé. Tant pis pour ces hommes et ces
femmes qui avaient construit leur vie dans cette région isolée,
dans plusieurs cas, depuis près de trente ans. Tant pis pour les
Montagnais et les Naskapis qui trouvaient un gagne-pain pour leurs
communautés ainsi bouleversées et pour nous, le Syndicat des
métallos. L'histoire de Schefferville est une autre dramatique
illustration de l'insécurité qui afflige les mineurs
québécois, de l'irresponsabilité sociale dont ils sont
l'objet; une preuve encore une fois de la nécessité de mettre sur
pied une structure spéciale d'aide aux mineurs et de promotion de leur
statut. Cette structure a un nom, cela s'appelle le fonds minier. Nous en
parlons depuis 1967, depuis seize ans.
À l'origine, notre projet de fonds minier s'adressait
spécifiquement aux métaux non-ferreux. Nous ne saisissions pas
alors que les mines de fer québécoises étaient
également menacées à court terme - et vous noterez, M. le
Président que nous avions exclu à ce moment-là les mines
d'amiante également - tant pour leur moindre qualité, à
comparer avec celles du Brésil, par exemple, que par suite des
politiques d'investissement et de rentabilité des compagnies
minières. Nous avons compris que le fonds minier se révèle
une nécessité pour tous les mineurs. Une fermeture de mine dans
une ville isolée revêtira toujours une tournure dramatique,
constituera toujours un drame pour la collectivité touchée.
Cependant, notre proposition de fonds minier vise à atténuer
l'impact de la fermeture en assurant une protection et les services minimaux
aux travailleurs individuels et à leur famille.
Aujourd'hui, les mineurs de Schefferville se retrouvent dans un
cul-de-sac complet. Ils ont 40 ou 50 ans, ils sont sans soutien institutionnel,
ils ont un degré de scolarité qui ne suffit plus aux exigences du
marché du travail, leur ville semble pratiquement condamnée
à brève échéance et le Québec compte plus de
chômeurs que jamais. Qu'ont fait les gouvernements
québécois successifs pour aider les mineurs? Pourquoi, pendant
six années et plus de pouvoir, le gouvernement du Québec n'a-t-il
pas écouté nos revendications et formulé un projet
acceptable de fonds minier? Tout ce que le gouvernement a proposé, c'est
un mauvais devoir, intitulé "projet de loi no 3", qui a
été bien vite remis sur la tablette d'où il n'aurait
jamais dû être sorti. Et pourtant, le fonds minier tel que les
métallos et la FTQ le préconisent, ce n'est pas un gros
chambardement social. Cela ne demande pas quatre commissions d'étude.
Tout ce que cela prend, c'est de la volonté politique, la conscience que
les mineurs forment une catégorie de travailleurs ayant des
problèmes particuliers: emplois condamnés dans des villes
généralement isolées, travail dur qui invite à la
discrimination à l'embauche.
Les travailleurs de la construction aussi vivaient une situation
similaire ou particulière. Ils ont un statut, eux, des institutions, des
soutiens particuliers. Pourquoi les mineurs ne pourraient-ils pas jouir, eux
aussi, d'une reconnaissance sociale minimale? Que demandions-nous, en effet,
quand nous parlions de fonds minier? Un ensemble de réformes qui
allégeraient le fardeau des mineurs, leur donneraient une chance de
repartir du bon pied. Passons-les en revue, une par une, afin de mesurer la
distance entre nos revendications et les cadeaux offerts par l'IOC après
de pénibles tentatives de négociations de la part des syndicats
locaux.
Nous demandions que les compagnies minières soient tenues de
prévenir les syndicats de leur intention de fermeture bien
avant que cette dernière ne soit mise en branle. La
législation sur les fermetures et les licenciements collectifs que nous
réclamons, de concert avec la FTQ, exigerait que des avis soient
donnés entre six mois et vingt-quatre mois à l'avance.
Dans le cas de Schefferville, par exemple, le nombre élevé
de travailleurs concernés et le contexte géographique auraient
justifié un préavis de deux ans. Ce préavis aurait permis
aux parties concernées de discuter les raisons et, le cas
échéant, les modalités de la fermeture. Les pouvoirs
publics auraient pu s'impliquer. Une procédure de justification aurait
pu être mise en plan. Rien de tout cela n'est arrivé puisque IOC a
pris le monde par surprise, s'entêtant, en outre, à refuser de
négocier avec le syndicat les conditions de cessation des
activités.
Vue dans cette perspective, cette générosité
tardive n'est qu'une faible réparation pour l'ensemble des demandes de
préavis raisonnables. Nous demandions une indemnité de
licenciement tenant compte de facteurs tels que l'âge,
l'ancienneté, de même qu'un régime de prestations
supplémentaires de chômage et la prise en charge par le fonds des
régimes d'assurance collective pour une période pouvant aller
jusqu'à deux ans après la fermeture.
L'IOC offre une indemnité de licenciement mais cela ne
représente qu'une partie de la sécurité financière
à laquelle nous estimons qu'ont droit les mineurs. Vous noterez - le
président de l'Iron Ore le dit, et cela devrait faire honte un peu aux
représentants et au gouvernement - que ce qu'il donne, il n'est
même pas obligé de le donner. Ce qui est exact.
Pour ce qui est des paies de séparation, des démarches
devront être faites auprès des gouvernements pour que
l'impôt ne gruge pas tout ronds les travailleurs qui y ont droit. Les
gouvernements ont la responsabilité d'offrir des aménagements qui
ne pénalisent pas les travailleurs déjà aux prises avec
des problèmes financiers dont ils ne sont pas responsables.
Je ne sais pas si vous vous êtes arrêtés deux minutes
mais dans la réglementation fiscale actuelle, si les offres que la
compagnie IOC sont de, prenons 12 000 000 $ ou 10 000 000 $ - le chiffre
importe peu pour le commentaire que je veux faire - c'est que presque la
moitié de cela va être avalé d'une bouchée par les
deux niveaux de gouvernement, un peu comme un goéland vole un morceau de
poisson. Cela n'a pas beaucoup de bon sens et ce sont les travailleurs ici qui
paieront une note et ce sera la compagnie qui aura versé au gouvernement
des montants de milliers de dollars qui auraient du être versés
aux travailleurs, comme la compagnie l'a souhaité. M. Mulroney, le
président de l'Iron Ore, vous a présenté un mémoire
là-dessus, hier, un mémoire que nous appuyons, bien sûr, et
nous l'avons salué dans le temps.
La taxe sur les bénéfices nordiques. Le syndicat et les
entreprises dans les régions isolées ont été
laissés à eux seuls pendant des années et des
années pour négocier les conditions de vie, y compris les
poignées de portes des maisons.
J'ai souvent dit, en caricature, quand je venais dans les régions
du Nord, que la seule chose que le gouvernement du Québec faisait pour
les travailleurs des régions isolées, c'était de leur
offrir une ouverture d'un magasin de la Régie des alcools. Parce que
c'était peut-être payant. Je ne le sais pas. Mais il reste que la
proposition qu'on a faite sur le moratoire, le moratoire proposé par M.
Lalonde qui doit se terminer en décembre si je ne m'abuse, nous sommes
d'accord qu'il doit être discuté une fois pour toutes. Nous avons
besoin de l'appui de tous les partis politiques, nous avons besoin de l'appui
du gouvernement et de l'Opposition pour être capables de geler une fois
pour toutes les bénéfices nordiques. Une compagnie comme IOC qui
donnait pas loin de 1 $ l'heure, grosso modo, de bénéfices
nordiques et les gouvernements en prenaient à peu près 0,60 $,
c'est rire d'une situation nordique comme la nôtre.
Nous avons tenu deux réunions de mineurs qui travaillent dans des
régions nordiques. Une à Calgary, l'autre à Toronto. Nous
avons présenté des propositions et des mémoires sur le
plan canadien. Nous avons présenté un mémoire à M.
MacEachen dans ce sens. Il y a eu une rencontre il y a à peine deux
semaines entre M. Lalonde et le directeur de notre syndicat, M. Docquier, pour
demander... je sais que la compagnie minière IOC comme les autres
compagnies qui sont dans la région du Nord, Wabush Mines et la compagnie
minière Québec et, également, SIDBED ont fait leur
possible de ce côté. On a hâte que la maladie industrielle
de la surdité de nos édiles gouvernementaux se passe une fois
pour toutes, que des examens médicaux se fassent s'ils doivent se faire
et qu'on nous comprenne. Dans des régions nordiques, on n'a pas le droit
de faire ce qu'on a fait traditionnellement. On doit tenir compte de ces
réalités-là. Nous réclamions la couverture
complète des frais de déménagement de mineurs, de citoyens
et citoyennes reliés à l'activité de la mine,
commerçants, services, autres travailleurs et travailleuses des
compagnies. C'était notre demande.
L'offre ne concerne qu'une partie de la population. D'autre part, nous
exigeons le plein déménagement de la perte de valeur d'une
maison, de la relocalisation dans une autre demeure, l'offre de IOC sur ce
point est également partielle, mais nous y reviendrons.
Nous réclamions également la mise sur pied d'une politique
sectorielle de main-d'oeuvre visant à assurer le plus possible une
sécurité d'emploi aux mineurs, même si ces derniers, pour
cela, doivent faire plusieurs mines. Ceci impliquait et implique toujours une
structure institutionnelle qui prendra en charge tous les aspects tel que
l'inventaire de la main-d'oeuvre, prévisions d'exploitation, demandes de
main-d'oeuvre, recyclage et formation professionnelle, incitation pour les
compagnies minières à embaucher les mineurs ayant perdu leur
emploi par le biais d'une prime d'embauchage, reconnaissance par l'ensemble des
employeurs des droits reliés à l'ancienneté. Tout cela
avait pour but de faire en sorte qu'on reconnaisse aux mineurs un
véritable statut professionnel. Le seul travailleur que je connaisse
dans ce Québec, c'est le mineur qui n'a pas de statut. Tous les autres
en ont, mais le mineur n'en a pas. Il peut passer huit, dix mines dans sa vie,
puis se ramasser à la fin de la course avec zéro comme fonds de
retraite, puis on lui dit qu'est-ce que tu as fait comme métier? Il dit
je n'en ai pas. Cela n'a pas de bon sens cela non plus. Les
députés d'Abitibi-Est et Ouest en savent quelque chose.
Qu'on reconnaisse aux mineurs un véritable statut, que l'on
prenne des moyens pour leur assurer concrètement la jouissance de ce
statut. Sur ce point, là aussi, les mineurs de Schefferville sont
formellement au même point que leurs confrères victimes de
fermeture dans les années précédentes. En pratique leur
situation est pire à cause de la situation actuelle du
chômage.
Nous réclamions, enfin, l'établissement dans le cadre du
fonds minier, d'une caisse de retraite permanente aux mineurs d'une part,
d'avoir accès à la préretraite, de même qu'à
une retraite décente, et d'autre part de transférer leur
régime de retraite d'un employeur à l'autre. Les problèmes
de la préretraite et de la transférabilité demeurent
entiers pour les mineurs de Schefferville. Là, encore ils sont victimes
de l'incurie des gouvernements qui se sont succédé.
Le drame de Schefferville illustre une fois de plus et à quel
point les travailleurs miniers québécois ont besoin d'un fonds
minier. L'établissement de ce fonds et des structures qu'il implique
relève de la responsabilité du gouvernement du Québec qui
les mettra sur pied à partir de cotisations obligatoires des compagnies
minières. Il est grand temps que les compagnies minières soient
contraintes à assumer leurs responsabilités sociales. Les
syndicats et les travailleurs n'ont pas à porter seuls, au prix des
grèves et d'angoisses sans nom, le fardeau des pressions sur les
compagnies minières. Là-dessus, je dirais: si on avait pris notre
courage à deux mains, il y a quelques années, et si on avait
formé un fonds minier, on serait peut-être placé
différemment et de façon un peu plus équitable
vis-à-vis la compagnie qui ferme présentement. C'est à
elle seule, à cause du manque de volonté politique des
gouvernements, c'est à elle seule que reviennent maintenant les
responsabilités sociales, alors que ce devrait être une mise en
commun comme cela s'est fait dans d'autres domaines. Une entreprise, à
elle seule, n'a pas toujours les capacités financières de
rencontrer des responsabilités comme celles-là.
Le Syndicat des métallos demande au gouvernement de
procéder immédiatement en légiférant pour
établir un fonds minier. Dans le cas de Schefferville et des mineurs
d'IOC, puisqu'il est trop tard pour que le fonds minier constitue une planche
de salut, nous estimons qu'il revient à la compagnie d'assumer
l'ensemble des réparations auxquelles ont droit les mineurs en vertu des
principes que nous avons précédemment énoncés. On
ne voit pas beaucoup d'autres sortes de solutions.
Les mineurs de Schefferville ont droit au fonds minier, ont droit
à leur dignité. Ce droit à la dignité est bien peu
compatible avec la publicisation par la IOC des cadeaux aux mineurs, comme si
le Syndicat des métallos ne tentait pas d'améliorer les
conditions de séparation depuis l'annonce de la fermeture. Comme si tout
cela relevait de la générosité et n'avait rien à
voir avec des notions comme celle du droit individuel et collectif des
responsabilités sociales.
Les compagnies minières ont toujours exercé des pressions
contre notre projet de fonds minier. La compagnie autant que les autres,
qu'elle en subisse les conséquences maintenant en assurant les
dédommagements conformes à nos revendications de toujours.
Le Syndicat des métallos (FTQ) réitère sa demande
au gouvernaient du Québec de s'impliquer dans ce dossier, de le soutenir
pour faire en sorte que la compagnie IOC soit contrainte à assumer
toutes ses responsabilités. La fermeture brutale et unilatérale
de la mine place tous les partenaires dans une situation tragique. Depuis deux
mois et demi déjà, nous sommes encore au stade de l'improvisation
avec tout l'arbitraire que cela implique. Il nous faut travailler avec une
épée de Damoclès au-dessus de nos têtes: la
fermeture peut-être définitive de la ville, décidée
par IOC, le 1er juillet 1983. Notre proposition sur ce sujet est claire. Une
fermeture de ville, si tel est le cas, doit se planifier avec tous les
intéressés en tenant compte de toutes les implications humaines,
matérielles et financières sur les personnes, les
collectivités autochtones, les services privés et publics, les
commerces qui composent le tableau et le tissu urbain de Schefferville. (10 h
45)
C'est pour bâtir une ville et développer une région
riche en ressources naturelles que des travailleurs, il y a un quart de
siècle -et d'autres ont suivi leurs traces depuis -ont abandonné
leur coin de pays en venant s'installer dans une région hostile au
peuplement, dans l'espoir de participer à la construction d'un milieu de
vie et de travail difficile mais stable et prometteur. Tous: travailleurs,
commerçants, services publics et privés sont venus appuyer le
projet d'une compagnie qui n'hésitait pas à promettre la
prospérité et un avenir pour eux et leurs enfants. La compagnie
utilisait comme moyen de recrutement l'argument des ressources
inépuisables du minerai de la région. C'est ainsi que l'IOC a
fortement contribué à développer dans l'esprit et les
mentalités les structures d'une ville permanente qui serait le point de
développement urbain le plus avancé dans le Moyen-Nord et la
rampe de lancement de futurs projets d'exploitation minière.
Nous sommes aujourd'hui confrontés à la
réalité. Schefferville est une ville temporaire dont la mort a
été décrétée pour le 1er juillet 1983. Deux
types de problèmes doivent trouver des voies de solution rapidement.
D'une part, les ex-travailleurs d'IOC et des citoyens ont pris des engagements
financiers à long terme en devenant propriétaires de leur
résidence. Il était légitime qu'ils agissent ainsi
à l'époque. D'autre part, les ex-travailleurs et citoyens ont
pris racine dans cette ville, en ont fait leur milieu de vie permanent et n'ont
donc plus d'autre point d'attache au Québec. Ceci est encore plus
dramatique pour les jeunes qui sont nés ici, qui ont été
élevés pour construire leur vie ici et qui formaient la
relève pour le développement du Moyen-Nord. Parmi les
travailleurs licenciés figurent d'ailleurs des jeunes qui n'ont jamais
vécu ailleurs. Ces deux types de problème, les engagements
financiers à long terme et l'enracinement des ex-travailleurs et
citoyens, sont dramatiquement amplifiés par la crise économique
actuelle qui leur ferme tous les horizons. Ce ne sont que des perspectives de
chômage et de dépendance qui se présentent à bon
nombre d'entre eux partout ailleurs au Québec.
Si on ne peut, aujourd'hui, corriger les erreurs du passé, il est
de notre responsabilité commune de tenter tout au moins d'en minimiser
les conséquences. Il faut se donner les moyens de prendre le temps
nécessaire pour que la population de Schefferville puisse se retourner
de bord et que nous puissions étudier ensemble l'avenir de cette ville.
C'est pourquoi il nous faut régler rapidement les problèmes les
plus urgents et réaménager temporairement un milieu de vie. Nos
propositions sur ce sujet s'appuient, entre autres, sur les
considérations suivantes: la crise économique n'offre pas de
perspective d'emploi au Québec pour les ex-travailleurs et citoyens de
Schefferville; le gouvernement du Québec et la compagnie sont
également responsables de ne pas avoir planifié au cours des
années une certaine diversification des infrastructures
économiques de Schefferville et de la région. Le gouvernement du
Québec, mais principalement la compagnie sont responsables de ne pas
avoir prévu l'arrêt graduel des opérations minières,
la planification du ralentissement et de la fin des opérations de
Schefferville et la fermeture éventuelle de la ville, si tel est le cas;
les travailleurs et travailleuses et citoyens qui ont été tenus
dans l'ignorance la plus totale des intentions de la compagnie afin de ne pas
affecter le moral des travailleurs et par conséquent leur
productivité au travail pour réaliser des bénéfices
possibles pour les actionnaires. La préoccupation des
bénéfices de la compagnie et des dividendes aux actionnaires a
continuellement primé les intérêts des travailleurs et des
citoyens, ce qui sera toujours odieux et inacceptable pour nous, même si
c'est censé être là un comportement normal.
Les gouvernements successifs ont malheureusement fait preuve
d'irresponsabilité et d'absence de volonté politique face aux
problèmes des mineurs en régions isolées. Nous
espérons malgré tout que le gouvernement québécois,
devant la situation actuelle, saura se démarquer des attitudes
passées. Nous demandons, et cela pour tout le temps et aussi longtemps
que l'avenir à court, moyen et long terme de Schefferville ne sera pas
déterminé dans l'accord que nous proposons plus loin, que soit
maintenu à Schefferville un milieu de vie adéquat avec tous les
services essentiels; que les ex-travailleurs et citoyens aient l'entière
liberté de choix de demeurer ou de quitter la ville; que leur
redéploiement et leur insertion dans un autre milieu soient
facilités; qu'ils soient pleinement compensés pour les
engagements financiers qu'ils ont contractés, que des conditions
raisonnables d'habitat et de vie soient garanties aux résidents; qu'ils
aient priorité d'emploi pour tous les projets d'importance dans la
région et que la IOC leur garantisse le maintien de leurs droits acquis
en cas de développement de projets futurs et de création
d'emploi; que la CSST procède à l'analyse de l'état de
santé de ex-travailleurs d'IOC; que l'ensemble de la réflexion
sur Schefferville tienne compte des droits et des aspirations collectifs des
autochtones.
Puisque la compagnie veut rapidement se dégager de toute
responsabilité à l'égard de ces ex-travailleurs et
travailleuses, des citoyens de la ville de Schefferville, il revient au
gouvernement du Québec, appuyé par la ville de Schefferville, de
s'assurer
qu'il y soit maintenu un minimum de vie adéquat. Cela suppose le
maintien des services publics essentiels, des commerces nécessaires pour
que la population qui aura décidé de demeurer ici vive
convenablement, tant qu'une décision de l'avenir à long terme de
Schefferville ne sera pas prise par tous les intéressés. Il est
de la responsabilité du gouvernement du Québec de se porter
immédiatement garant du maintien d'un milieu de vie adéquat et de
négocier directement avec la compagnie toutes les compensations
nécessaires pour rencontrer cette responsabilité. Il importe que
la population connaisse immédiatement l'intention du gouvernement de
maintenir les services essentiels dans les domaines de la santé, de
l'éducation, des services municipaux, des commerces et le maintien du
moyen de transport par air ou par chemin de fer. Sur ce dernier point, le
gouvernement doit intervenir avec la population pour que le gouvernement
fédéral maintienne les obligations actuelles des principaux
transbordeurs qui sont Québecair et Québec North Shore and
Labrador Railway.
Durant cette période transitoire, nécessaire pour
déterminer l'avenir de Schefferville, les ex-travailleurs d'IOC et les
citoyens doivent avoir la liberté de décider librement de quitter
ou de demeurer sur place. Pour que ce choix s'exerce librement, il faut, entre
autres, que tous les avantages de déménagement qui seront
négociés pour ceux qui quittent, vaillent en tout temps pour ceux
qui décident de demeurer jusqu'à l'échéance de la
période de transition. Ceux qui décideront d'attendre le
résultat des travaux et des recherches sur l'avenir de Schefferville
pourront exercer en tout temps d'ici là leur option de quitter sans
qu'ils soient pénalisés d'aucune manière. Pour cela, ils
ont besoin de garanties de la part du gouvernement que leur droit sera
intégralement respecté.
Si un quelconque avenir est déterminé pour Schefferville
et que la ville peut être maintenue ouverte, ceux qui décideront
de demeurer en toute connaissance de cause devront avoir la garantie que les
avantages obtenus pour ceux qui ont quitté leur seront versés
avec indexation et sans condition, à leur départ éventuel,
à leur retraite ou à leur décès.
Durant toute la période de transition et d'attente pour retrouver
un emploi, ceux qui ont fait le choix de demeurer ici devront pouvoir
bénéficier d'une aide financière spéciale pour
qu'ils puissent aller explorer un autre milieu de vie ou de travail ailleurs.
Chaque résident devra pouvoir recevoir une compensation satisfaisante
pour ses dépenses de transport et de séjour à
l'extérieur lorsqu'il manifestera sa volonté de recommencer sa
vie ailleurs.
Cette mesure spéciale d'aide au redéploiement de la
population devrait prévoir un nombre déterminé de
séjours possibles à l'extérieur et un maximum de frais de
séjour. Pour tous les ex-travailleurs d'IOC et des citoyens de
Schefferville qui se sont engagés dans des obligations à long
terme pour l'achat de maisons, nous demandons le plein remboursement des
versements effectués, des coûts d'amélioration qui ont
été apportés ainsi qu'une indemnité pour la
relocalisation dans une autre demeure. Cette pleine compensation des
engagements doit être versée sans délai à tous les
propriétaires de maison de Schefferville sans que cela n'affecte leur
statut de propriétaire. Les propriétaires actuels doivent avoir
le choix, durant toute la période de transition, de conserver leur
maison ou de la remettre aux autorités en place. Tous les
propriétaires de maison pourront, même après compensation,
conserver leur demeure jusqu'à leur départ définitif alors
que la maison serait alors remise aux autorités en place.
Nous croyons qu'il revient au gouvernement du Québec,
appuyé en cela par la municipalité de Schefferville, de garantir
à ses résidents, et tant qu'une option définitive sur
l'avenir de la ville ne sera pas prise, des conditions raisonnables d'habitat.
Nous ne sommes pas entichés de la suggestion de l'IOC de donner des
maisons aux résidents temporaires, mais il s'agit là d'une option
personnelle que chaque ex-travailleur de l'IOC pourrait exercer. Nous
préférerions plutôt que ce soit la municipalité qui
détienne les maisons et qu'elle négocie une indemnité
globale pour entretenir ces maisons, maintenir les services municipaux
essentiels durant toute la période de transition et absorber la dette de
la ville.
Compte tenu que le coût de la vie est de 20% plus
élevé ici que dans les grands centres urbains du Québec et
que les prestations d'assurance-chômage et de salaire des programmes de
création d'emplois temporaires ne sont pas ajustés en
conséquence, nous considérons normal que le logement soit gratuit
pour tous les citoyens et résidents qui n'ont pas un emploi
régulier. Pour les mêmes raisons, le gouvernement
québécois doit alors négocier avec IOC une
réduction des coûts de transport - pour diminuer le haut
coût de la vie - et le maintien de la subvention du coût de
chauffage. En période normale, c'était par des salaires
élevés que le haut coût de la vie était
compensé. Mais, en ce moment, puisque le niveau des prestations
d'assurance-chômage et de salaire des programmes de création
d'emplois temporaires sont uniformes au pays et au Québec, il faut donc
réduire le coût de la vie par des mesures comme celles que nous
proposons, afin que les résidents de Schefferville soient traités
équitablement par rapport aux autres
citoyens du Québec. Il paraît essentiel que le gouvernement
du Québec force l'IOC à assumer ses responsabilités
financières là-dessus. Mais il est bien entendu que la compagnie
IOC devra maintenir le service d'électricité à la
population à partir du barrage hydroélectrique qu'elle
possède sur la rivière Menihek.
Il va de soi que les résidents de Schef-ferville obtiennent une
priorité d'emploi dans tous les projets qui pourront être
développés dans la région pour quelque compagnie que ce
soit. Un effort spécial devrait être fait, notamment,
auprès des compagnies qui ont des programmes d'exploration dans la fosse
du Labrador. Nous exigeons qu'IOC reconnaisse immédiatement que tout
développement futur ou éventuel qui pourrait être
réalisé dans la région soit effectivement
considéré, pour ce qui est de la main-d'oeuvre, comme un
prolongement de ses activités de Schefferville. En ce sens, qu'elle
reconnaisse les droits acquis, dont l'ancienneté, à ses
ex-employés de Schefferville. Si IOC doit développer d'autres
projets dans la région dans les quelques années qui viennent, les
emplois créés doivent revenir à ses ex-employés,
afin d'éviter que le décalage entre la fermeture de Schefferville
et l'ouverture d'un projet n'ait servi à l'IOC qu'à se
débarrasser de sa main-d'oeuvre. Nous demandons au gouvernement de
prendre les moyens nécessaires pour que l'IOC reconnaisse que tout
nouveau projet qu'elle pourra développer dans la région soit
considéré, sur le plan de la main-d'oeuvre, comme une
continuité des opérations de Schefferville. Il est évident
que si une telle éventualité se produisait, cela ne modifierait
en rien les indemnisations et les dédommagements que les travailleurs
auraient touchés entre-temps. Car ils sont placés aujourd'hui
dans un contexte de fermeture définitive et doivent être
indemnisés immédiatement.
La compagnie possède les dossiers médicaux sur chacun de
ses ex-salariés travailleurs. Comme il s'agit de travailleurs qui
exerçaient une activité pouvant entraîner des
problèmes de santé, le Syndicat des métallos exige que la
CSST récupère, si ce n'est déjà fait, l'ensemble
des dossiers médicaux établis par l'IOC. Après l'analyse
de ces dossiers, nous demandons, en outre, que toute étude et examen
complémentaire soient effectués par la CSST dans le cadre d'une
mission spéciale à Schefferville. Il nous apparaît
primordial que nos membres licenciés disposent d'un bilan médical
complet et fiable pour savoir précisément à quoi s'en
tenir sur leurs possibilités futures. Il est en outre probable que
certains d'entre eux auront droit à des indemnisations.
Nous ne sommes pas habilités à parler au nom des
Amérindiens de Schefferville. Il demeure que l'ouverture de la ville a
bouleversé le mode de vie des Amérindiens et on discute
maintenant de fermer la ville sans trop tenir compte, je crois, de l'effet,
déstabilisateur sur la collectivité autochtone de cette
fermeture.
La question du maintien des services de transport, des services sociaux
et de santé, de commerce, d'alimentation, doit être
envisagée en tenant compte des besoins et des aspirations des
Amérindiens. Il apparaît donc indispensable que le peuple
autochtone de Schefferville soit partie aux discussions sur l'avenir de la
ville, afin de reconnaître les droits des premiers occupants du
territoire et aussi parce que plusieurs d'entre eux ont effectivement
travaillé, en partie grâce à notre action syndicale,
à l'IOC.
Nous croyons, M. le Président, que cette commission doit
reconnaître, ici même à Schefferville, la
nécessité et l'urgence, pour tous les ex-travailleurs et citoyens
de la ville, de régler ces problèmes, et nous fournir
l'engagement que le gouvernement du Québec va immédiatement se
mettre à la tâche avec nous et les autres parties
intéressées pour négocier des conditions acceptables
d'habitat et de vie à Schefferville en attendant qu'on ait statué
définitivement sur le sort de cette ville. Cet engagement, nous
l'attendons aujourd'hui même, tant de votre part que de celle de la IOC.
(11 heures)
M. le Président, nous avons toujours soutenu que dès
qu'une mine ouvre quelque part, il faut immédiatement commencer à
penser à sa fermeture. Les richesses naturelles sont épuisables.
Elles ne deviennent plus rentables à exploiter. Il n'y a pas de
substitut possible à la fabrication de ce produit qu'est le minerai.
Ce que nous dénonçons aujourd'hui et que nous
n'accepterons jamais, c'est qu'une fermeture de mine ne soit pas
préparée de longue date et que tous les problèmes qu'elle
entraîne ne soient pas réglés de façon
civilisée, de concert avec les parties concernées. Après
avoir découvert un minerai exploitable, les compagnies mettent de trois
à cinq ans pour planifier l'ouverture de la mine. Mais quand elles
décident de fermer, elles le font de façon brutale et veulent
économiser le maximum de coûts. Nous soutenons qu'une fermeture de
mine, et surtout dans le cas qui nous concerne, doit être
planifiée à moyen terme dans le but de répondre aux
besoins et aux attentes, non seulement des travailleurs et des citoyens, mais
également des autres entreprises et commerces qui composent le tissu
urbain de cette ville, de façon également à permettre au
pouvoir public d'assumer leurs pleines responsabilités.
L'IOC a joué à la cachette avec nous tous, nous ne nous
laisserons pas "bulldozer" dans les pays d'en bas. Cela ne doit pas se
passer ainsi et le gouvernement doit prendre les moyens pour changer des
comportements moyenâgeux.
Que le gouvernement décrète une période transitoire
d'un an pour, à la fois, régler les problèmes
immédiats et étudier toutes les possibilités de
développement éventuel de Schefferville; que le gouvernement
forme un comité spécial d'étude - "task force" - relevant
du ministère de l'Énergie et des Ressources, chargé de
déterminer les conditions d'habitat et de vie à court terme
à Schefferville et d'étudier les différentes
hypothèses de projets de développement à moyen et à
long terme pour l'avenir de cette ville.
Ce comité d'étude spécial devrait être
formé des représentants des gouvernements, des ministères
concernés, de ia ville de Schefferville, des citoyens, de la compagnie
IOC et du Syndicat des métallos. Que le mandat soit ainsi défini:
Déterminer et assurer les conditions d'habitat et de vie
adéquates aux citoyens de Schefferville; analyser et faire rapport sur
les possibilités de développement à moyen et à long
terme pour la ville; faire toute recommandation générale de
nature à protéger les travailleurs et la population en pareille
circonstance; que la première partie du mandat soit
réalisée à l'intérieur d'une échéance
de trois mois et que les seconde et troisième parties à
l'intérieur d'une échéance d'un an, c'est-à-dire le
rapport sur la possibilité du développement et les
recommandations générales de nature à protéger les
travailleurs en pareille circonstance.
Le comité devrait voir à coordonner toutes les
études et les analyses de projets de création d'emplois dans le
cadre de différents programmes actuels et de faire rapport
régulièrement à la population de l'état de ses
travaux. Pour l'analyse des projets dans le secteur minier, le comité
devrait revoir les programmes d'exploration des compagnies dans la fosse du
Labrador, accélérer s'il y a lieu cette programmation et
participer aux études de faisabilité qui peuvent être
requises ou qui sont en cours pour l'exploitation minière.
La population de Schefferville et du Québec a le droit de
connaître l'état réel de l'exploration minière dans
la fosse du Labrador et l'état d'avancement des études de
faisabilité en cours chez les différentes compagnies
minières. Ce sera la responsabilité du comité
d'éviter que des rumeurs sans fondement viennent créer de faux
espoirs. C'est pourquoi nous exigeons que tous les projets, de quelque nature
que ce soit, soient acheminés au comité pour analyse et
recommandation.
M. le Président, nous constatons chaque jour le fouillis
indescriptible qui prévaut actuellement dans la recherche d'un avenir
pour Schefferville. Chaque ministère québécois a sa petite
idée et son petit projet. Chaque citoyen a aussi sa petite idée
sur le sujet. Même l'IOC vient de créer des espoirs avec le projet
du Strange Lake. Les discussions s'enchevêtrent entre les projets de
l'exploitation commerciale de caribous, du service national des jeunes, la
culture en serre, l'élevage d'animaux domestiques, l'implantation d'un
casino, et j'en passe. Ce ne sera certainement pas du chaos actuel que pourra
surgir une ville. Toutes les possibilités avancées de bonne foi
par une population en désarroi et des organismes gouvernementaux
isolés et jaloux de leurs prérogatives ne mèneront
sûrement nulle part si on ne fait pas l'effort requis et sans
précédent, de concertation pour déterminer l'avenir
d'hommes, de femmes et de jeunes qui ont cru et qui croient encore dans la
région.
Nous croyons que le gouvernement du Québec a eu tort de se fier
uniquement à une compagnie pour assurer la survie d'une ville. Nous le
tenons responsable de ne pas avoir prévu la mort de cette ville, alors
que depuis quelques ahnées, des signes évidents de vieillissement
précoce sont apparus: des licenciements collectifs importants, une
réduction de près de 50% de la main-d'oeuvre au cours des cinq
dernières années, en plus de la crise mondiale de l'acier. Le
gouvernement du Québec n'a pas voulu, depuis 1954, planifier une
certaine diversification industrielle à Schefferville et n'a surtout pas
voulu forcer les compagnies minières à déposer leurs
prévisions de production ni leurs états financiers afin
d'être en mesure d'analyser correctement l'évolution de ia
situation. Nous ne pouvons pas racheter en quelques jours ce manque de
planification et de prévoyance gouvernemental ni cette obstination des
compagnies minières à agir en secret et à mettre les
travailleurs et les citoyens devant une situation de fait catastrophique. C'est
pour ces raisons, entre autres, que nous exigeons qu'un comité
d'étude spécial fasse le travail qui n'a pas été
fait, ni par le gouvernement, ni par la compagnie, pour planifier l'avenir de
Schefferville.
Il va de soi que, durant cette période, aucune aide
gouvernementale ne soit accordée à l'entreprise IOC. C'est la
compagnie qui devrait plutôt défrayer les coûts de cette
opération, et le gouvernement devrait consacrer toute son aide
financière aux ex-travailleurs et citoyens de Schefferville. Nous ne
voulons pas, à ce moment-ci, prendre position sur les différentes
hypothèses de projets qui ont été avancées. Ce
n'est pas, selon nous, par l'addition de projets disparates et sans analyse
sérieuse de faisabilité que se définira l'avenir de
Schefferville. C'est autour d'un projet sérieux, basé sur
l'exploitation des richesses naturelles de la région, que peut se
décider
l'avenir de Schefferville. À court terme, cela ne peut être
dans le minerai de fer, car nous connaissons très bien la conjoncture
mondiale dans ce domaine. Pour le moment, un tel projet est inexistant.
Ce qui est le plus inquiétant, c'est que la recherche dans la
fosse du Labrador est à son plus bas niveau depuis 30 ans.
D'après nos informations et les rapports des géologues
résidents, le nombre de programmes d'exploitation est passé de
dix, en 1979, à cinq, en 1980, et à deux, en 1981. On poursuit
aussi des travaux d'exploration pour une quatrième année et on
rapporte avoir trouvé des quantités intéressantes de
matériaux stratégiques, tels que ceux qui sont mentionnés
ici, ainsi que des métaux rares. Ce projet, qui est au stade de
l'étude de faisabilité, nous inquiète grandement dans ses
orientations. En effet, nous avons déjà pris connaissance de
dossiers sur ce sujet et nous sommes convaincus que si le gouvernement du
Québec et les citoyens de Schefferville ne sont pas impliqués
dans le développement de ce projet, Schefferville risque de devenir une
ville dortoir et que le développement risque de se faire du
côté de Terre-Neuve plutôt qu'au Québec. Il est donc
de la plus haute importance, pour l'avenir de Schefferville, que le projet du
lac Brisson soit étudié par le comité d'étude
spécial et que la compagnie accepte d'en discuter les orientations. Ceci
est d'autant plus important qu'il re faut plus, au Québec, laisser les
compagnies, en milieu éloigné, définir, seules et en
cachette, les projets de développement et les conditions d'habitat et de
vie où seront appelés à évoluer des hommes et des
femmes qui doivent avoir leur mot à dire sur le sort qu'on veut leur
aménager.
Si, entre autres, le projet du lac Brisson doit voir le jour, nous
voulons être impliqués à l'avance dans la définition
de ce projet, afin qu'on y prévoie un milieu de vie et de travail
acceptable pour les travailleurs et les travailleuses. Nous pouvons,
ajourd'hui, voir un peu plus clair dans les démarches planifiées
de fermeture, depuis plusieurs années. Il s'agit, de toute
évidence, d'une politique d'étranglement graduel. La compagnie a,
a son siège social, à Hanna Mining, diversifié ses sources
d'approvisionnement en investissant au Brésil dans les années
1970.
Là-dessus, nous voudrions commenter très rapidement les
chiffres qui nous ont été donnés par le président
de la minière IOC, hier. La compagnie IOC a tenté, hier, de
justifier la fermeture de la mine pour des raisons financières et, du
même souffle, a tenté de nous faire croire que cette entreprise
n'a pas réalisé de bénéfices au cours des
années 1970. À la fois la démonstration faite et les
réponses évasives - il faut bien le noter - n'ont pas
réussi, selon nous, à lever le voile sur le mystère des
opérations financières de la compagnie IOC sur la
Côte-Nord. C'est pourquoi nous maintenons toujours notre demande du
dépôt des états financiers de la compagnie.
Ce n'est qu'à l'analyse des états financiers
vérifiés que nous pourrons mesurer la rentabilité
réelle de la compagnie IOC au cours des années 1970. Nous
n'aurons pas de difficulté à nous convaincre que c'est le
siège social IOC et non la filiale qui détermine où
doivent se réaliser les bénéfices. Pour de multiples
raisons, il est parfois plus intéressant de faire réaliser des
bénéfices par les producteurs d'acier plutôt que par le
fournisseur de matière première.
Il faut analyser toutes les politiques et pratiques commerciales entre
la société mère et sa filiale pour connaître la
rentabilité réelle des opérations d'IOC sur la
Côte-Nord. Or, le survol fait hier par le président d'IOC sur le
sujet ne nous a pas - en tout cas, nous - convaincus. Pour ce qui concerne la
tentative de justification financière de la fermeture, là encore,
à notre avis, le devoir a été mal fait et est
incomplet.
Selon les propres prévisions d'IOC, datant d'avril 1982 et dont
nous avons, par hasard, obtenu une copie, il ressort qu'IOC prévoyait
des profits consolidés pour Schefferville et Labrador City, après
impôt, de 91 600 000 $ en 1983, de 85 800 000 $ en 1984 et de 73 000 000
$ en 1985. C'est autour, donc, de 90 000 000 $ que se situent les profits nets
d'IOC depuis trois ans. C'est vers les 80 000 000 $ par an que HOC se dirige
pour les trois prochaines années, selon l'étude que nous avons
vue. Avec le maintien des opérations de Schefferville, ce n'est pas la
faillite pour demain.
Dans ces prévisions, les pertes pour Schefferville oscillaient,
dans l'étude que nous avons vue, entre 1,39 $ et 2,31 $ la tonne pour
les coûts d'opération, auxquels montants il faut ajouter, bien
sûr, les coûts d'administration et d'intérêts pour
obtenir la perte totale de Schefferville sur des prévisions de 2 500 000
de tonnes de production.
Deux constatations s'imposent. Si, au pire de la crise
économique, IOC peut maintenir ses profits dans l'ordre de 80 000 000 $
à 90 000 000 $, vous comprendrez qu'au plus fort de la conjoncture
économique des années soixante-dix nous avons de la
difficulté à croire que ses opérations n'étaient
pas rentables.
En avril 1982, IOC prévoit le maintien des opérations
à Schefferville jusqu'en 1985, au moins, dans le dossier que nous avons
vu, tout en réalisant des profits nets fort importants. Alors, la
fermeture a été décrétée, selon nous - et
c'est très important de le noter - je le répète, la
fermeture a été décrétée, selon nous,
rapidement et plus que probablement au niveau de la maison mère, afin
d'augmenter
les profits nets des opérations d'IOC.
C'est ce qui est inacceptable. Il est socialement irresponsable de
prendre de telles décisions dans la conjoncture déjà
pénible pour les travailleurs. Je pense que cela se comprend un peu
mieux maintenant, quand on a pu voir le dossier, les délais d'annonce et
pourquoi les bénéfices aux salariés n'ont pas
été connus avant l'annonce de la fermeture.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Godbout.
M. Godbout: Elle a abandonné tout réinvestissement
à Schefferville...
Le Président (M. Bordeleau): M.
Godbout.
M. Godbout: ...au cours des dernières
décennies.
Le Président (M. Bordeleau): Excusez-moi, M. Godbout.
C'est simplement pour vous mentionner que j'apprécierais que vous
puissiez conclure dans les prochaines minutes.
M. Godbout: Elle s'est retirée graduellement de ses
obligations municipales. Elle a engagé la bataille en 1973 en
arrêtant ses subventions d'équilibre budgétaire à la
municipalité de Schefferville. Elle a graduellement augmenté le
coût de la vie lié à l'éloignement et à la
vie dans les régions nordiques en doublant les coûts de transport
pour passagers, en 1980, en augmentant de 50% le coût de transport des
marchandises à la même période et en n'indexant pas ses
subventions aux achats d'électricité et d'huile à
chauffage. Ce que je veux dire par là, c'est que les subventions n'ont
pas augmenté depuis plusieurs années.
Sur le plan de la main-d'oeuvre, elle a réduit les effectifs
réguliers de 50%, de 1976 à 1981, et, finalement, elle a
délibérément installé un climat de panique en
faisant circuler des rumeurs fondées qu'elle s'empressait de nier
aussitôt mais qu'elle concrétisait après coup afin de
déstabiliser la population. Toutes les actions concouraient vers le
même objectif: celui de fermer Schefferville. IOC maintenait,
malgré tout, sa politique de vente de maisons, réduisant ainsi la
mobilité géographique des travailleurs en augmentant de fait leur
sentiment d'appartenance et de dépendance à la ville. Elle
pouvait ainsi transférer sur le dos des citoyens ses obligations envers
la municipalité.
C'est notamment pour ces raisons que nous croyons que la décision
de fermer Schefferville planait depuis plusieurs années dans la
tête de ceux que j'ai mentionnés tout à l'heure. La
compagnie n'a, cependant, jamais mis cartes sur table et a
développé, ici même, un climat de panique et
d'instabilité de la communauté afin de mieux pouvoir les
manoeuvrer et, éventuellement, les acheter avec des cadeaux.
On peut, d'ailleurs, faire la même analyse pour ce qui est des
autres populations qui vivent en fonction des installations d'ici: entretien de
la voie, ateliers de réparation, quais de chargement à
Sept-Îles. À travers ces manoeuvres, elle a nié, en
pratique, au syndicat le droit fondamental - et j'ai expliqué pourquoi
tout à l'heure et ce qu'on veut dire par là - de négocier
les conditions de séparation et de vie à Schefferville. Les
métallos ont été, ici, le seul obstacle réel au
parachèvement du scénario.
L'aventure de la compagnie IOC sur la Côte-Nord et dans le
Moyen-Nord démontre hors de tout doute la nécessité et
l'urgence d'une planification coordonnée de développement
économique. Les Québécois ne peuvent plus se permettre
d'abandonner l'exploitation de nos régions nordiques à des
compagnies comme celle d'IOC. C'est le gouvernement qui doit être le
maître d'oeuvre du développement économique et cela
apparaît des plus essentiels dans les régions nordiques où
c'est l'ensemble des conditions de vie des populations qui dépendent des
décisions des employeurs.
Nous demandons, en outre, au gouvernement qu'il assume ses
responsabilités en matière de développement
économique des régions nordiques et qu'il se donne les outils
nécessaires en termes de fonds et d'institutions pour accomplir cette
tâche.
M. le Président, messieurs les membres de la commission, nous
sommes convaincus que vous allez vous mettre sérieusement à la
tâche et, bien que l'on ne puisse racheter les erreurs passées, il
est important que vous établissiez ici un climat de confiance, de
concertation, pour tenter tous ensemble un ultime effort pour dégager
l'avenir de Schefferville et régler adéquatement les
problèmes de conditions de vie des habitants de cette ville. Nous
n'avons pas de solution miracle pour la survie de cette ville mais nous
espérons vous avoir convaincus que la façon de procéder
que nous proposons offre les meilleures garanties de succès dans la
tâche qui nous attend. Nous voulons vous certifier que, si vous acceptez
notre proposition de comité d'étude spécial, nous
collaborerons avec tous les partenaires pour tenter de sortir de cette impasse
dans le plus grand respect des intérêts en cause et pour le
mieux-être des Scheffervillois.
En terminant, je le répète, nous vous demandons - et nous
demandons des réponses immédiates de la commission
premièrement, le dépôt des états financiers d'IOC
à Schefferville et sur la Côte-Nord; deuxièmement, qu'un
médiateur spécial soit nommé dans le contexte que nous
avons
décrit; troisièmement, un engagement de votre part, de la
part des représentants du gouvernement et de l'Opposition officielle,
que vous allez recommander à l'Assemblée nationale une loi sur
les fermetures d'usines et de mines et une loi sur le fonds minier;
quatrièmement, qu'un moratoire d'un an soit mis, avec le "task force",
de façon que les bénéfices aux employés soient
maintenus après la date décrétée par la compagnie;
et, cinquièmement, que vous acceptiez les termes de
référence de notre "task force". Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Godbout. M. le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
M. Marois: M. le Président, je voudrais, en mon nom et au
nom de mes collègues, remercier la FTQ et les métallos, leur
porte-parole à cette table, M. Godbout, de leur mémoire. Il va
sans dire, je pense - je vous expliquerai pourquoi je vais le dire quand
même - que c'est sûrement un des mémoires importants que
nous avons devant nous et que nous avons à examiner. Je le dis d'avance
parce que je ne voudrais pas qu'on me fasse le même genre de reproches
voilés que j'ai cru comprendre que certains - je ne fais pas
nécessairement allusion à des membres de cette commission - m'ont
faits lorsque j'ai pris beaucoup de temps, avec mon collègue de
l'Énergie et des Ressources, pour interroger la minière IOC. Dans
le cas de la minière IOC, j'ai posé - et mon collègue
aussi - des questions très précises. À l'occasion, je me
suis permis, avec le plus de délicatesse qu'on pouvait le faire,
d'interrompre pour obtenir des précisions dans les réponses.
Certains sont allés jusqu'à dire que j'avais même
poussé l'obtention de réponses. Oui, j'ai poussé pour
obtenir des réponses parce qu'il me semblait extrêmement important
qu'on ait des réponses précises et tout le monde conviendra qu'on
a pu obtenir un certain nombre de réponses très précises
sur certaines questions de la part de la minière qui présentent
une ouverture. D'ailleurs, je pense que les métallos l'indiquent, le
reconnaissent eux aussi ce matin. J'entends bien faire la même chose,
avec mes collègues, en ce qui concerne cet important mémoire des
métallos.
Il y a une première remarque que je voudrais faire au point de
départ. Revenant à nouveau sur certains des commentaires que nous
venons d'entendre, qui rejoignent des questions très précises qui
ont été posées par mon collègue, le ministre de
l'Énergie et des Ressources, sur lesquelles j'ai moi-même
renchéri, questions qui s'adressaient à la minière IOC, et
que nous maintenons d'ailleurs nous l'avons dit très franchement, je
pense qu'on s'est parlé très franchement - il y a une chose qui
se dégage. D'ailleurs, M. Godbout, le président des
métallos, vient à nouveau lui-même de l'indiquer, ce n'est
pas parce qu'on se parle franchement -comme on dit dans notre jargon
québécois: qu'on se parle dans le nez - qu'il est exclu que cela
puisse permettre l'ouverture d'un climat de coopération pour essayer de
régler les problèmes qu'on vit ensemble. L'un n'exclut pas
l'autre.
C'est vrai - et j'y reviens à nouveau, nous l'avons dit, mon
collègue M. Duhaime et moi-même - que nous considérons que
nous n'avons pas obtenu de réponses précises sur ce qui s'est
vraiment passé car, en un certain sens, la question demeure
entière: pourquoi? quand on considère les chiffres mêmes
qui nous ont été présentés par la minière
IOC, quand on regarde les chiffres de profits des années 1979, 1980 et
1981, à partir des tableaux mêmes qui nous ont été
présentés. Alors que, durant ces années-là, la
production en tonnes diminue tandis que, dans les années
antérieures, le tonnage produit - et les tableaux sont très
clairs -était plus élevé, les profits étaient,
à toutes fins utiles, nuls. Et, dans les années 1979, 1980 et
1981 - il ne s'agit pas de parler de profits exorbitants quand on parle d'un
rendement de 10% sur la base des chiffres qui nous ont été
communiqués, les chiffres connus, en tout cas, on ne peut pas dire que
ce sont des profits mirobolants - il n'en reste pas moins qu'ils ont atteint
10%. En 1979, 1980 et 1981, au moment où la production en tonnage
diminue, c'est pendant ces années que le taux de retour sur
l'investissement atteint 10%, ce qui donne quand même une moyenne, sur
l'ensemble des années, réduite. La question demeure
entière, il y a quelque chose qui n'est pas clair. Pourquoi, à ce
moment précis, en 1982, dans la foulée de 1979, 1980 et 1981,
bang! cette décision arrive, qui demeure une décision,
jusqu'à nouvel ordre, subite? La façon aussi. Finalement - ce que
vous avez relevé à nouveau - qui vraiment a pris la
décision? Encore là, je ne porte pas de blâme, je ne porte
pas de jugement, je repose ces questions qui demeurent entières.
Hier soir - malheureusement, il était 1 h 15 du matin - nous
avons abordé un petit mémoire qui nous a été
présenté par des spécialistes de l'Université
McGill - et j'ai dit que je le relèverais ce matin -
présenté par M. Bouffard qui était le porte-parole.
À la page 18 de leur mémoire - et j'ai dit qu'on comprenait, tout
le monde; bien sûr les journalistes n'étaient pas là
à 1 h 15 du matin et cela se comprend - ils mettaient le doigt sur une
question fondamentale qui demeure posée et je cite: "Il faut
considérer que l'annonce de cet..." Il parlait de certaines parties des
plans d'indemnité et de relance qui ont été
annoncés en janvier 1983. Pourquoi alors l'annonce de la fermeture
arrive-t-elle le 2 novembre 1982? Ce n'est que trois mois plus tard
qu'un plan d'indemnité est annoncé. Comment concilie-ton cela
avec justement cette annonce qui est venue à la suite d'années
où les bénéfices s'amélioraient avec un tonnage et
une production réduits s'il est exact qu'il y avait déjà
des indications depuis 1978, 1979 etc.? À ce moment-là, les
choses devaient être planifiées, et si les choses étaient
planifiées, il n'y a pas de raison pour que les plans de
bénéfices et d'avantages pour les travailleurs, les citoyens
n'aient pas été prévus en même temps. Enfin, il y a
quelque chose qui reste entier comme question et, dans ce sens, c'est certain
qu'il y a quelque chose qui n'a pas de sens.
Ceci étant dit, il n'en reste pas moins qu'il y a des ouvertures
intéressantes, valables qui ont été faites de la part du
président de la minière IOC et que nous avons tous reçues
très favorablement, dans l'état de la situation dans laquelle on
se trouve. C'est le premier commentaire, la première remarque que je
voulais faire.
Deuxièmement, il y a évidemment beaucoup de
recommandations dans votre mémoire. Je ne les couvrirai pas seul, un
certain nombre de mes collègues, ministres, députés, vont
intervenir sur le mémoire.
Une de vos demandes - et cela vient à la page 11 de votre
mémoire - concerne la nomination de ce que vous appelez un
médiateur spécial - si je comprends le sens de votre demande -
pour que, dites-vous, les avantages qui ont été proposés
soient - je pense que je reprends à peu près textuellement votre
expression véritablement négociés, discutés. Vous
avez, vous-même, M. Godbout - d'ailleurs les déclarations de
presse sont très claires -dit et je pense que c'est à peu
près l'expression que vous avez utilisée dans une
déclaration de presse: II y a là une base valable,
intéressante, permettant, en tout cas, d'ouvrir sur quelque chose, une
base de négociation et d'échange qui permettrait d'en arriver
à quelque chose qui pourrait être valable. Je pense que c'est
à peu près ce que vous avez dit et je ne veux pas tronquer ni vos
paroles, ni votre pensée "que c'était une base valable."
Vous vous souviendrez que j'ai posé une question très
précise au président de la minière concernant cela
justement: "Est-ce que oui, la minière était d'accord pour
s'asseoir avec le syndicat et discuter?" Discuter, bien sûr, dans le sens
d'examiner tout cela et voir quelle sorte d'aménagement, et le reste, et
je pense que la réponse de la minière était très
claire. On a reçu une réponse favorable à cette
demande.
Cependant, vous insistez à nouveau ce matin pour qu'un
médiateur spécial soit nommé. Je vais vous donner la
réponse suivante très précise. Vous savez qu'en vertu du
nouvel article 3.1 de la Loi sur le ministère du Travail, lorsque le
ministère du Travail a été scindé, qu'il y a eu
création du ministère du Travail et, d'autre part, du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu,
il y a deux lois qui ont été adoptées créant ces
ministères et il y a des articles de ces deux lois qui sont
passés passablement inaperçus. L'article 3.1 de la Loi du
ministère donne au ministre du Travail le pouvoir de nommer ce que les
uns appellent un médiateur spécial, ce que d'autres appellent une
personne-ressource, peu importe l'expression, pour aider les parties à
en venir à une entente sur des conditions de séparation.
Le texte va plus loin que cela parce que, dans les cas où il y
aurait refus de coopérer, de collaborer, de l'une ou l'autre des
parties, le ministre a même des pouvoirs de poursuite en vertu de cet
article. La personne-ressource ou médiateur spécial pourrait, en
vertu de cet article, être disponible pour venir à Schefferville
rapidement. Je peux vous dire tout de suite qu'elle pourrait être
nommée, j'ai consulté mon collègue, le ministre du
Travail, et si vous pensez que cela demeure un instrument, un
élément valable et même nécessaire, nous sommes
d'accord pour répondre favorablement à votre demande. Je vous le
dis au nom de mon collègue, le ministre du Travail, il m'a
indiqué qu'il était d'accord pour nommer, en vertu de cet
article, une personne-ressource qu'on peut appeler médiateur
spécial, pour donner un coup de main dans le but de favoriser - c'est
son mandat, en vertu de la loi - une entente entre les parties dans les
meilleurs délais sur les conditions de séparation. (11 h 30)
Deuxièmement, je voudrais tout de suite aller à une autre
proposition. Je m'excuse si je vais maintenant à la fin de votre
mémoire, c'est parce que je voudrais revenir sur un troisième
point qui concerne toute la question du fonds minier, des fermetures d'usines,
de la protection de l'emploi, etc., en dernier lieu. Je voudrais revenir,
deuxièmement, sur votre recommandation qui apparaît aux pages 34
et 35 de votre mémoire concernant ce que vous appelez un "task force"
qui relèverait du ministre de l'Énergie et des Ressources et
là, avec des éléments de mandat et un
échéancier que vous proposez.
Vous vous souviendrez que j'ai posé une question très
précise au président de la minière, à savoir s'il
accepterait. Je lui ai dit que la réponse du gouvernement du
Québec, d'emblée, était oui, qu'il accepterait, en ce qui
le concerne, de participer à un "task force" pour qu'on s'assoit
ensemble. Vous vous souviendrez de la réponse qui a été
faite par le président
de la minière, qui nous a dit qu'il acceptait d'emblée de
participer à un tel groupe de travail.
J'irais cependant un peu plus loin quant à une partie de votre
demande qui concerne la composition. Il nous semble important, en tout cas, de
tenter d'obtenir, dans la composition de ce groupe de travail sur l'avenir de
Schefferville pour l'examen des problèmes à court terme, à
moyen terme et à long terme, que non seulement y participe la
minière, que non seulement y participe le Syndicat des métallos,
que non seulement y participe la ville de Schefferville, que non seulement y
participe le groupe de citoyens, mais qu'y participe aussi le gouvernement
fédéral. Qu'on se mette tous ensemble.
On a entendu, hier, la réponse du président de la
minière qui a accueilli, si ma mémoire est bonne - on
relèvera les transcriptions très précises parce que je ne
voudrais pas tronquer la pensée ou les paroles des intervenants, pas
plus que celles du président de la minière - favorablement cette
recommandation-là. Nous tenons à ce que dans ce "task force" - je
voudrais savoir si vous êtes d'accord - à moins qu'un
élément ne m'échappe, que le gouvernement
fédéral aussi y participe; en tout cas, qu'on le lui demande pour
qu'il soit participant à part entière.
Vous suggérez que la présidence soit remise au
ministère de l'Énergie et des Ressources. Nous en avons
parlé entre nous, les collègues, et nous avons convenu
plutôt -je vais vous dire pourquoi - de demander à notre
collègue, le ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional, d'en assumer
la présidence. Ceci n'exclut pas, bien sûr - cela va de soi,
d'emblée, au point de départ - que, forcément, aussi bien
mon collègue de l'Énergie et des Ressources que des gens de chez
nous y participent à part entière. C'est
précisément pour cela qu'on croit préférable d'en
confier la présidence à notre collègue, le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional, parce qu'il y a toute une série
d'éléments qui sont sectoriels et qui impliquent toute une
batterie de ministères. Donc, dans ces conditions, il est
préférable, à notre point de vue, que la présidence
relève de notre collègue qui pourra aussi y mettre à
contribution des personnes-ressources de l'Office de planification de
développement du Québec, etc. Que le mandat général
soit de coordonner l'ensemble des efforts visant à assurer l'avenir de
Schefferville et la possibilité pour sa population d'identifier des
perspectives concrètes d'emploi et de développement pour que
toutes les dimensions y soient, aussi bien celles du court, du moyen que du
long terme, avec un certain nombre de mandats spécifiques.
Premièrement, identifier, discerner les services essentiels qui
doivent être maintenus: éducation, santé, services
municipaux, électricité, transport, habitation. À quelles
conditions? comment? et le reste. Les façons de les maintenir; là
il pourrait paraître raisonnable de se fixer une échéance
qui pourrait tourner autour du début de mai 1983; ce ne sont pas des
choses qui doivent traîner; ce sont des choses sur lesquelles il faut que
des décisions sur des choses concrètes sur le court terme
aboutissent vite.
Deuxièmement, identifier et évaluer les projets possibles
de création d'emplois et de développement économique de la
région de Schefferville et ce, dans une perspective tant à court,
qu'à moyen et qu'à long terme; préciser les rôles
possibles de chacun des intervenants dans la réalisation de ces projets,
c'est-à-dire les gouvernements, les municipalités, la
minière, les métallos, etc., avec quelque chose qui pourrait
paraître raisonnable comme échéancier, une période
de six mois.
Troisième élément de mandat plus spécifique:
faire toute recommandation générale ou spécifique de
nature à orienter les politiques et stratégies gouvernementales
relatives au développement du territoire du Nord. Là je crois
qu'on pourrait se donner une échéance d'un an, et d'ailleurs,
vous vous souviendrez que j'avais demandé au président de la
minière si, précisément dans cette perspective où
il faut qu'on se donne du délai pour non seulement regarder les
problèmes du court terme mais voir comment se présente l'avenir
sur le moyen et le long terme, s'il accepterait de considérer de
reporter - j'avais indiqué de six mois à un an, quitte à
examiner les cas où cela peut être six mois de plus et les autres
cas où cela peut être un an de plus - et on se souviendra que, je
crois que c'était l'expression qu'il a lui-même utilisée -
je ne voudrais pas encore là lui imputer des réponses qu'il
n'aurait pas faites mais, si ma mémoire est bonne c'est l'expression
qu'il a utilisée - que les choses n'étaient pas "coulées
dans le béton" et qu'il y avait possibilité d'ouvrir sur cette
perspective d'un minimum de six mois, en n'excluant pas d'autres
possibilités qui pourraient être examinées. Donc...
Le Président (M. Bordeleau):
Simplement pour vous indiquer que vous avez écoulé 20
minutes. Je l'indique, sans vouloir vous restreindre, en vous demandant
peut-être d'être le plus concis possible.
M. Marois: Oui. J'essaie d'être le plus concis possible, M.
le Président, mais je crois que sur des choses aussi fondamentales... Il
s'agit de l'avenir d'une population. C'est l'un des mémoires importants
devant nous. Je ne veux pas
abuser vraiment du temps. Je ne crois pas en avoir abusé depuis
le début des travaux de cette commission. Je vais essayer de faire
l'impossible pour me discipliner et me restreindre, mais si on veut avoir des
réponses précises...
M. Fortier: Il n'a pas utilisé son temps.
Le Président (M. Bordeleau): J'aimerais bien quand
même que... je pense qu'on veut donner tout le temps aux parlementaires
à tour de rôle de participer. Mais le ministre dit qu'il veut
poser des questions. Oui, s'il les posait, on pourrait avoir des
réponses.
M. Marois: Je voulais d'abord formuler des commentaires, M. le
Président. Je n'ai pas l'habitude d'interrompre les membres de
l'Opposition. Je n'ai pas l'habitude non plus, jamais, de tenter de guider les
membres de l'Opposition ni de leur indiquer s'ils doivent faire des
commentaires, poser des questions, la façon de le faire. J'ai l'habitude
de respecter cela et j'entends bien demander aussi qu'on respecte le même
droit que j'ai. J'ai des choses à dire et j'entends bien les dire.
J'entends aussi respecter le droit des autres membres de cette commission
parlementaire. J'ai fait des commentaires d'ordre général. Je
viens de donner deux réponses très précises. J'aimerais
avoir la réaction des métallos sur ces deux premières
réponses, quitte à revenir ultérieurement sur toute la
question du fonds minier et la question des fermetures, quitte à revenir
plus tard.
M. Fortier: Simplement le ministre, comme il l'a dit, a des
droits. Il a droit de faire des commentaires pendant 20 minutes et il a le
droit de poser des questions pendant 20 minutes. Mais les autres parlementaires
ont le droit d'exiger qu'après 20 minutes, le droit de parole passe
à quelqu'un d'autre.
M. Marois: M. le Président, je vais m'en tenir à
cela pour l'instant.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord.
M. Fortier: Si le ministre veut poser une question, qu'il y
aille.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Godbout, vous voulez réagir aux commentaires du ministre.
M. Godbout: Lorsque le ministre reviendra, j'aurai
peut-être quelques questions. Première remarque, c'est qu'on n'a
certainement pas d'objection à inviter le gouvernement
fédéral dans l'affaire du "task force". Je pense que - je l'ai
dit tout à l'heure - le député du comté de
Manicouagan a certainement joué un rôle également
là-dedans et on n'a pas d'objection là-dessus. Ce qu'il faudrait
peut-être que vous nous disiez, M. le ministre, quand vous aurez une
chance, c'est ce que vous entendez par services essentiels.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député...
M. Fortier: Si le ministre veut répondre, il me fera
plaisir de laisser le droit de parole au ministre.
M. Marois: Peut-être que je l'ai indiqué trop
rapidement au moment où je suis passé sur cet
élément du mandat spécifique. Lorsque je parlais
d'identifier les services essentiels à maintenir avec une
échéance à court terme, j'ai parlé de mai 1983.
J'ai donné des exemples concrets comme l'éducation, la
santé, les services municipaux, l'électricité, le
transport, l'habitation...
M. Fortier: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: ...j'ai bien noté les paroles du ministre au
début où, depuis hier, il exige des réponses de tout le
monde et, heureusement qu'il a commencé à en donner un petit peu
ce matin. Hier, il était meilleur pour exiger des réponses du
président de la minière. Les ministériels n'en donnaient
que très peu.
Ce que j'ai aimé dans les paroles de M. Godbout et, sans vouloir
lui mettre des mots dans la bouche, c'est qu'il notait le rôle du
mouvement syndical et il disait: Ce n'est pas de l'adoration mutuelle entre le
syndicat et la compagnie, une société d'adoration mutuelle; c'est
un rôle de revendication. Je crois que vous vouliez vous délimiter
et, sans vouloir vous mettre des paroles dans la bouche, je crois qu'il y a une
certaine ressemblance entre le rôle que vous jouez et le nôtre.
Certainement que nous ne sommes pas ici une société d'adoration
mutuelle vis-à-vis les ministériels et certainement que nous
avons également un rôle de revendication.
Encore là, le ministre pose des questions et dit: "Comment se
fait-il que les propositions de la minière ne sont venues qu'au mois de
janvier?" Et moi, la question que j'aimerais poser - je ne lui pose pas la
question parce que je ne voudrais pas qu'il prenne la parole maintenant - mais
il faudrait bien qu'il nous dise à un moment donné qu'est-ce que
le ministre Marois a fait après le 2 novembre. À-t-il
convoqué le président de la minière pour lui demander,
justement, quelles seraient les conditions qui seraient faites aux
travailleurs? Autrement
dit, c'est bien beau de jouer à la vierge offensée, mais
il faudrait bien que le gouvernement assume une certaine responsabilité
une fois que la décision a été prise par la minière
et une fois que les décisions ont été connues.
Également, ce que j'ai remarqué, M. Godbout, c'est que
vous avez insisté sur le fait - et vous vouliez peut-être corriger
ou, du moins, tempérer les propos du président de la
minière hier concernant l'action des marxistes-léninistes, mais
sans vouloir trop faire de politique, j'ai remarqué que vous aviez dit
que c'était une situation bien difficile de 1970 à 1976 - qu'il
n'y a plus de marxistes-léninistes dans les mouvements syndicaux. Je me
demande pour quelles raisons le gouvernement a tellement de difficultés
avec les relations syndicales-patronales présentement.
Mais, M. le Président, pour revenir... Je crois que, dans votre
mémoire, vous parlez justement du fait que vous donnez une certaine
responsabilité au gouvernement, et que vous avez eu d'autres propos
où vous disiez: C'était difficile de prévoir; je n'ai pas
la page ici, mais à un moment donné dans votre mémoire,
vous êtes très précis pour indiquer que vous imputez une
responsabilité de ne pas avoir prévu cela.
Hier, je ne sais pas si vous étiez ici mais j'ai cité une
déclaration de votre prédécesseur; j'aimerais savoir s'il
y a eu des suites à cette demande que votre prédécesseur
avait faite. J'avais cité, à ce moment, un article de
Louis-Gilles Francoeur dans le Devoir du 7 octobre 1980 où M. Jean
Gérin-Lajoie parlait justement des mises à pied faites en
août 1980 et je cite: "Les 497 mises à pied
décrétées en août par la compagnie Iron Ore,
à sept milles de Schef-ferville, mettent présentement en cause la
survie même de cette municipalité de 3000 habitants" a
affirmé M. Jean Gérin-Lajoie.
Afin d'éviter le départ définitif d'une bonne
partie de la main-d'oeuvre locale et pour faire cesser les effets saisonniers
du chômage dans cette ville minière, le directeur des
métallos a réclamé l'intervention du gouvernement pour
examiner, notamment, la possibilité d'établir conjointement avec
la compagnie et le syndicat un programme de stabilisation et de planification
de la main-d'oeuvre. (11 h 45)
Alors, la question que je pose est: Est-ce que ces demandes que M. Jean
Gérin-Lajoie avait faites au gouvernement, ont eu des suites? Est-ce
que, à votre connaissance, le gouvernement a donné suite à
cette demande formelle de M. Jean Gérin-Lajoie?
M. Godbout: Bon, écoutez. Là-dessus, je pense qu'on
le dit de façon très claire dans notre mémoire, il n'y a
pas de politique déterminée et définie en matière
de mobilité de main-d'oeuvre, en matière de reclassification ou
en matière de problèmes de mises à pied. Nous avons
déploré je ne sais combien de fois l'absence de
législation dans le domaine des fermetures, dans le domaine du
licenciement collectif. Dans les congrès - je suis certain que vous les
avez suivis avec intérêt - de la Fédération des
travailleurs du Québec, des résolutions ont été
adoptées les unes après les autres. On est rendu au point
où, à chaque congrès, on n'a qu'à photocopier la
résolution du congrès précédent. Cela fait des
années qu'on demande cette législation. On ne peut pas dire que
nous avons senti, de notre côté en tout cas, un coup de main
véritable de la part du gouvernement pour nous appuyer face à
cela. Cela a été laissé dans les mains du syndicat et de
l'entreprise; on n'a pas senti un coup de main très sérieux de ce
côté-là. Je le dis dans mon mémoire, je reproche aux
gouvernements qui se sont succédé, les uns après les
autres, ce manque de législation.
M. Fortier: Je ne parlais pas tellement de législation. Je
crois que la référence de M. Jean Gérin-Lajoie
était justement une appréhension, dès juillet 1980, qu'il
y aurait peut-être fermeture de la ville de Schefferville. Le dirigeant
de votre syndicat, dont vous étiez l'adjoint à ce
moment-là, je crois, avait fait une demande formelle, selon M.
Louis-Gilles Francoeur. Je me demandais s'il y avait eu des suites à
cela.
M. Godbout: S'il y en a eu, on ne le sait pas.
M. Fortier: Bon. La deuxième chose, c'est que, dans votre
mémoire, vous dénoncez, vous dites que vous remettez en question
les décisions de la minière sur les indemnités qui seront,
qui seraient ou qui ont déjà été payées - je
ne sais trop - et vous demandez une médiation à ce sujet. Je
crois que vous avez tenté ce matin de corriger -je ne sais pas - votre
attitude dans ce domaine, mais je voulais juste vous le demander. Dans le
Soleil du 27 janvier, vous êtes cité, vous avez eu des propos,
où vous semblez dire que vous êtes extrêmement heureux des
propositions faites par la minière. Je ne sais pas si, à ce
moment-là, vous vous étiez trop avancé et que maintenant
vous voulez revenir un peu sur les paroles que vous aviez dites, mais je me
demandais ce qui a fait que, maintenant, vous exigez davantage. Est-ce que,
à ce moment-là, les propositions qu'avait faites la
minière ne vous semblaient pas adéquates et pourquoi avez-vous
tenu les propos que le Soleil vous attribue à savoir que les
propositions de la compagnie minière reposent sur une base assez solide
pour qu'elles puissent fournir un terrain d'entente? Il semblerait qu'il y a
une certaine
contradiction entre les propos que vous avez tenus le 27 janvier et les
propos que vous tenez ce matin.
M. Godbout: Non. Je pense qu'on dit exactement la même
chose. Ce que j'ai déclaré, vous le retrouverez de façon
très précise à la page 8 de notre mémoire. Je pense
que c'est à la suite de cela que vous retrouvez un article dans le
journal. Je pense également que la minière IOC a repris cette
déclaration dans son mémoire, si je ne me trompe, à la
page 32 ou 33. Ce que j'ai dit, c'est que nous avons salué l'approche.
Je ne pense pas que j'aie dit ce matin qu'il n'y avait rien là. On a dit
qu'il y avait eu des propositions qui pouvaient fournir un terrain d'entente
à partir de ce que pourrait être une loi éventuelle.
C'était un jalon de posé, qui était important. La raison
pour laquelle on demande un médiateur, c'est qu'on ne sait pas
exactement comment cela va s'appliquer. Je peux donner un exemple précis
de ce que je veux dire. Il arrive toujours, excusez l'expression, des maudites
situations, juste sur le bord de la ligne, comme, par exemple, un travailleur
qui, avec son ancienneté, ses années de service dans la compagnie
et son âge, est à court de sept, huit ou dix jours pour les
programmes gouvernementaux et tout cela. Donc, comment se fait l'application de
ces avantages? À qui? Et de quelle façon? Une fois que le
principe est établi et les montants d'argent sont donnés, si vous
voulez, qu'ils sont là, il faut regarder comment on les applique. Je ne
me sens pas habilité à faire seul tout ce travail. Ce que je dis,
c'est qu'il y a des gens en place qui ont plus de connaissance du dossier et
des problèmes régionaux; il y a des permanents; il y a un
directeur régional; il y a des techniciens au dossier; il y a des
officiers de syndicats locaux. Il me semble qu'avec un médiateur, toute
cette inquiétude... Parce qu'il est arrivé souvent, depuis que je
suis ici, qu'un travailleur me rencontre et me dise: Je ne suis pas certain
d'avoir droit à cela. Je ne peux pas répondre, je ne le sais pas
comment cela s'applique. Alors, avec un coup de main dans ce sens, de quelle
façon est-ce que cette application se fera? C'est ce qu'on veut
regarder.
M. Fortier: Personnellement, remarquez bien que je crois que si
on peut bonifier, améliorer ou définir d'une façon plus
avantageuse pour ceux qui perdent leur emploi les avantages auxquels ils ont
droit, cela a certainement notre appui. Mais ce que j'essaie de comprendre,
c'est que... Je crois que vous avez dit - encore là, je ne veux pas
mettre des mots dans votre bouche - que les relations étaient tout de
même assez bonnes avec la minière. Vous avez peut-être voulu
atténuer ce que le président de la minière avait dit:
"qu'elles étaient très très bonnes" et vous disiez
qu'elles étaient "bonnes". Je n'ai pas l'expérience que vous avez
dans les relations du travail. J'ai toujours cru comprendre que tant et aussi
longtemps qu'une compagnie et qu'un syndicat se parlaient, il n'était
pas nécessaire d'avoir de médiateur. J'essaie de comprendre la
raison qui vous pousse maintenant à exiger un médiateur alors
que, du moins de la façon que nous voyons la situation - c'est la raison
pour laquelle je vous pose la question peut-être qu'on n'a pas la
compréhension totale du dossier - il semblerait que la compagnie et le
syndicat peuvent encore se parler. Dans ce sens, pourquoi demandez-vous un
médiateur?
M. Godbout: J'ai dit, et le je répète, qu'il n'y a
aucune difficulté de ma part. Je pense que cela fait partie de mes
responsabilités de faire tout en mon possible pour que les
communications se maintiennent dans le meilleur intérêt de nos
membres. Je pense que je ne prête pas de mauvaises intentions à
personne, je pense que c'est vrai pour tout le monde. Il reste que dans la
proposition, c'est évident que cela exclut d'autres travailleurs qui
sont impliqués par la mise à pied, qui sont à
Sept-Îles ou le long de la voie ferrée, et qui seront mis à
pied de façon permanente, à cause de la diminution de la
production ici. On fermera, donc, cela a des effets directs.
Deuxièmement, j'aimerais, si vous me permettez, vous expliquer
que le dossier n'est pas très facile. Vous avez sur la Côte-Nord,
et cela n'est pas la faute de l'entreprise ni du syndicat, on vit dans ce
monde, une situation qui est exceptionnelle dans le sens suivant: vous avez des
installations qui sont de juridiction québécoise. Alors, il y a
les lois québécoises; il y a l'approche québécoise;
il y a le Code du travail, il y a tout cela. Vous avez des installations qui
sont de juridiction terre-neuvienne et là aussi, c'est un autre
gouvernement, c'est une autre loi, c'est un autre code.
M. Fortier: Est-ce que c'est un autre syndicat ou si vous
représentez...
M. Godbout: Non, c'est le même syndicat.
M. Fortier: C'est le même syndicat.
M. Godbout: Et vous avez le chemin de fer qui traverse les
provinces qui est de juridiction fédérale. Quand on arrive pour
négocier une convention collective, c'est toujours passablement
compliqué, merci! Personnellement, je sais qu'à plusieurs
reprises, et je pense que cela a dû être vrai pour les responsables
de la compagnie, il a fallu faire passablement de gymnastique pour
pouvoir asseoir les trois représentants, le cas
échéant, de différentes provinces ou juridictions.
C'étaient des journées de débat à savoir qui serait
le président de tout cela. Toute cette complication légale de
trois juridictions n'a pas aidé. Un exemple précis de ce que je
veux dire: il y a eu des travailleurs qui ont été mis à
pied à Schefferville; ce sont des gens d'ici; ils ont eu un emploi
ailleurs dans la compagnie et ils sont touchés par une autre mise
à pied maintenant, à cause de cette fermeture. Qu'est-ce qu'on
fait avec ces gens? Jusqu'à maintenant, à moins qu'on se trompe
et qu'on ait très mal compris - cela peut arriver - notre
compréhension du dossier, c'est que la compagnie résiste
férocement à s'asseoir à des tables de négociation.
Il nous semble que si on essaie de forcer des tables de négociation,
à nous seuls, vous savez que cela peut être passablement
compliqué et qu'un conseiller spécial ou un médiateur dans
le dossier peut nous aider. Dans ce sens, il peut faire du travail ex parte, il
peut faire toutes sortes de travaux. C'est dans ce sens... Je ne mets pas en
doute ce que j'ai dit, je ne le reprends pas non plus de façon
différente, je dis qu'il y a des choses qui doivent être
ajustées, il faut regarder de quelle façon cela s'applique. Vous
avez toutes ces juridictions qui font que le dossier est lourd.
M. Fortier: Oui, d'ailleurs j'ai noté que le gouvernement
était plus enclin à accepter votre recommandation de nommer un
médiateur qu'il était prêt à l'accepter
lui-même, la semaine dernière ou la semaine avant, pour ses
propres employés. Compte tenu de ce que vous venez de dire, si j'ai bien
compris, il faudrait que ce médiateur soit acceptable non seulement au
gouvernement provincial mais également au gouvernement
fédéral parce que cela déborde, comme vous dites. Il
s'agit de médiation autour des lois de deux provinces et d'un
gouvernement fédéral.
M. Godbout: II n'y a pas de problème à faire la
demande à différents niveaux. Nous sommes devant les instances
québécoises et nous faisons une demande dans ce sens. Je peux
vous dire que je ne peux pas parler pour la minière IOC mais, à
ce jour, lorsqu'un médiateur ou quelqu'un avait été
nommé, je sais qu'il a été très bien accepté
et reçu et cela s'est effectué dans un cadre acceptable. Je ne
verrais pas pourquoi on commencerait à mettre des objections
aujourd'hui. Je ne crois pas que ce serait l'approche de l'IOC, je ne peux pas
parler pour elle. Dans notre cas, on n'a pas d'objection. Bien sûr, cela
fait partie de l'ensemble du problème à regarder et, étant
devant les instances québécoises, nous posons une demande devant
vous.
M. Fortier: Une dernière question avant de laisser la
parole à mes collègues peut-être...
Le Président (M. Bordeleau): M. Daoust.
M. Daoust (Fernand): Je voudrais faire quelques commentaires
à l'égard de ce que vous avez dit au tout début.
L'idée d'un médiateur spécial vient du Syndicat des
métallos. Elle est sans aucun doute symptomatique des relations du
travail qui ont toujours existé entre le Syndicat des métallos et
cette compagnie. Vous avez parlé de dialogue. Vous avez dit: Puisque,
somme toute, le dialogue n'a jamais été rompu et n'est pas rompu,
pourquoi faut-il qu'un tiers intervienne? Il y a des dialogues de sourds et
Dieu sait que, sans faire le procès des relations du travail entre les
deux parties, il est peut-être bon de mentionner que, dans le
passé, il n'y a pas eu ces échanges fondamentaux dans des cas
comme celui qui nous touche.
C'est une chose pour le président de l'IOC de venir ici, de faire
l'exposé que l'on sait, auquel on a tous assisté hier et d'ouvrir
des avenues; c'est une autre chose de voir de façon concrète
comment cela peut se réaliser. Un tiers qui intervient est un peu la
conscience de tous ceux qui nous voient fonctionner. C'est un témoin
aussi et il est là souvent pour vérifier la bonne foi des parties
en présence.
Il ne faut pas que cela se fasse en catimini. Il faut, encore une fois,
pousser les ouvertures qui ont été faites et vérifier la
volonté de chacune des parties de trouver des solutions. Quant à
nous, notre volonté correspond à celle des métallos, elle
est largement fondée sur des propositions, sur des attitudes, sur des
comportements qui sont connus et qui ont toujours été
extraordinairement transparents, d'une transparence limpide. (12 heures)
On ne peut pas dire la même chose à l'égard de la
compagnie. Si un tiers ou un médiateur est indispensable à ce
moment-ci, c'est que, préalablement, tout le phénomène que
l'on vit et qui provoque cette commission parlementaire n'a jamais
été abordé entre les parties. On l'a dit au moment de
l'annonce de la fermeture. On a parlé d'une décision brutale et
sauvage qui, normalement, aurait dû faire l'objet de multiples
échanges entre les parties. Cela a été un jeu de
cache-cache depuis de nombreuses années, depuis toujours.
Il faut qu'il y ait des dialogues entre les parties et Dieu sait qu'on
les suscite et qu'on les accueille avec toute l'ouverture d'esprit qui doit
caractériser le mouvement syndical et quelque syndicat que ce soit, mais
quand il y a une fin de non-recevoir d'un côté, il faut absolument
que quelqu'un
d'autre intervienne. C'est pour cela que le Syndicat des métallos
a insisté fortement pour qu'il y ait un médiateur, encore une
fois, un témoin, un arbitre - appelons-le comme on voudra - quelqu'un
qui puisse être témoin de ce qui se passe entre les parties et qui
puisse vérifier - je le répète, cela me semble fondamental
- et pousser à fond les ouvertures qui ont été faites
hier.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont.
M. Fortier: M. Godbout, vous êtes venu ici aujourd'hui pour
avoir des réponses à votre demande qu'un médiateur
spécial soit nommé, si je comprends bien, ce qui est un peu en
dehors des lois normales puisque cela couvrirait plusieurs juridictions.
J'oserais espérer que, dès aujourd'hui, on puisse peut-être
demander, sans vouloir l'imposer, au président de la minière de
nous dire quels sont les motifs d'une acceptation, d'un refus ou de
modifications à la proposition que vous faites.
J'aimerais juste poser une dernière question avant de passer la
parole à mes collègues. C'est au sujet du fonds minier. J'ai
participé à l'étude du projet de loi et le ministre, M.
Marois, lorsqu'il avait présenté son projet de loi, avait dit
très clairement que ce projet de loi était proposé
à la demande même des syndicats; il avait mentionné les
métallos, en particulier. Ce qui m'a le plus surpris, lorsque nous
sommes allés en commission parlementaire, c'est que non seulement ceux
qui représentaient les patrons, mais aussi les métallos, je crois
- si ma mémoire est fidèle - avaient dit très clairement
que le projet de loi n'était nullement satisfaisant et qu'il devait
être rejeté. Cela m'a surpris parce que j'aurais cru qu'un
ministre, agissant un peu à la demande des représentants
syndicaux, aurait présenté un projet de loi reflétant vos
demandes.
À ce sujet, j'ai deux questions. Bien sûr, on se rend
compte qu'une fermeture d'usine ou de mine dans un endroit
éloigné comme Schefferville, c'est beaucoup plus grave qu'une
fermeture d'usine ou de mine dans la région de Montréal; ce n'est
pas du tout la même chose. Dans le domaine minier, bien sûr, les
mines, normalement, ne se retrouvent pas dans la région de
Montréal, elles se retrouvent plutôt en région
périphérique. Il reste quand même qu'une fermeture à
Schefferville, dans une région très éloignée, c'est
beaucoup plus grave qu'une fermeture de mine qui pourrait être quand
même assez près de grands centres ou de moyens centres et,
surtout, où il y aurait des moyens de communication plus faciles.
J'aimerais que vous nous disiez très brièvement - j'ai
peut-être manqué les explications que vous nous donniez - quels
seraient les critères importants qu'un tel projet de loi devrait
couvrir. Vous dites, dans votre mémoire, que vous aviez demandé
dans le passé que le fonds minier ne s'applique qu'aux métaux non
ferreux. Bien sûr, même si le projet de loi avait été
accepté, cela n'aurait pas réglé le cas de Schefferville
puisqu'il s'agit d'une mine de fer.
Par ailleurs, et contrairement, je crois, à ce que d'autres
représentants ont dit hier - ils parlaient d'un fonds minier mais, si je
me souviens bien, leur fonds minier ne créait un fonds que pour les
employés de la mine, que pour les mineurs eux-mêmes - on se rend
bien compte que si on parle de la fermeture de Schefferville, en particulier,
si on ferme l'Iron Ore, en plus des problèmes qui sont
créés aux mineurs, il y a des problèmes qui sont
créés à d'autres gens qui ne sont pas des employés
ou à d'autres personnes qui sont des commerçants ou des
entrepreneurs ou des gens qui vivent dans la ville de Schefferville.
J'aimerais que vous me disiez si, dans votre idée, le fonds
minier, ou la loi que vous demandez à ce sujet, ne devrait couvrir que
les employés de la mine, ce qui me semblerait normal quoique, encore
là, cela crée des problèmes comme on en a souvent, en
commission parlementaire, lorsqu'on étudie un projet de loi, puisqu'il
faut tenir compte des fonds de retraite et de tous ces problèmes.
D'autre part, est-ce que vous feriez une distinction quand il s'agit de la
fermeture d'une usine ou de la fermeture d'une mine en région
éloignée, comme celle de Schefferville?
M. Godbout: D'abord, la première partie de votre question:
les métaux non ferreux. Cela oblige à une petite
rétrospective, si vous le permettez. Nous avons présenté
notre projet de fonds minier en 1967; on en retrouve les principes
généraux de la page 12 à la page 17 de notre
mémoire. Vous retrouvez les revendications de ce qui est le squelette
d'un fonds minier. Il y avait un principe important dans notre requête du
fonds minier qui était la transférabilité des
régimes de retraite. Nous avions pu négocier avec les compagnies
minières du fer et les compagnies de l'amiante des régimes de
retraite qui avaient du sens par rapport à d'autres industries
minières. Dans les métaux non ferreux qu'on retrouve en gros dans
le Nord-Ouest québécois, il n'y avait à toutes fins utiles
aucun régime de retraite. On avait réussi à
négocier avec les entreprises dans le temps pour une bonne raison, c'est
que les mines ouvraient pour quelques années et elles fermaient. Il n'y
avait pas beaucoup de volonté de revendication pour un fonds minier; on
essayait surtout de négocier des clauses de fermeture. Je pense que le
ministre délégué à l'Aménagement et au
Développement régional et M. Bordeleau s'en
souviendront très bien, c'était notre revendication
d'avoir des clauses, des mécanismes de fermeture de mines.
Alors, nous avions pris comme décision, avec les mineurs
impliqués, de présenter au gouvernement du Québec un
programme sur un fonds minier couvrant les métaux non ferreux, excluant
le fer et l'amiante pour les raisons que je viens de vous donner, de
façon que les compagnies minières dans les métaux non
ferreux puissent faire un fonds collectif dans un fonds commun, si vous voulez,
un fonds qui puisse les aider à faire face aux problèmes de
fermeture. Cela voulait dire: déplacement, récupération
scolaire, formation professionnelle, retraite anticipée ou retraite
d'invalidité, le cas échéant; cela voulait dire une coup
de main d'un déplacement à l'autre.
Il y avait une chose dans notre fonds minier, qu'on a jamais
enlevée et qu'on continue à revendiquer, c'est que les gens qui
gravitent autour de l'industrie minière, qui viennent donner les
services, devraient être couverts. Je prendrai l'exemple de
Schefferville: si on n'avait pas eu d'hôtels dans les années de
bonne production, s'il n'y avait pas eu de magasins, s'il n'y avait pas eu de
nettoyeurs, s'il n'y avait pas eu de médecins, la compagnie aurait
été obligée de faire tout cela. Au début, elle a
construit des bâtisses, mis des choses en place, des infrastructures. Des
gens sont venus et ont exercé, comme le décrivait hier le
président d'IOC, leur métier de services; ils étaient
autour de l'industrie et, en même temps, l'industrie profitait de ces
services, bien sûr! Alors, on dit que tout ces gens frappés par
une fermeture devraient être protégés par un fonds
minier.
Par la suite, la première chose qu'a fait à son
arrivée au pouvoir, le gouvernement actuel a été
d'accepter d'étudier notre proposition du mémoire. Pour la
première fois, un gouvernement avait accepté de se pencher pour
défricher les coûts; cela ne s'était jamais fait
auparavant. Avant cela, je me souviens d'avoir rencontré moi-même
- vous le connaissez très bien -M. Maurice Bellemarre, du temps
où il était ministre du Travail pour lui dire: II faut que tu
fasses quelque chose. Il n'y avait rien à faire là; on frappait
une fin de non-recevoir à tous les niveaux. Le gouvernement
présentement au pouvoir a accepté d'étudier et de
défricher les coûts du fonds minier. Nous avons reçu les
études des coûts, nous nous sommes rajustés à ces
études; nous avons proposé des projets, attaché à
cela le chiffrage, le mieux fait possible avec les moyens qu'on possède.
Finalement, cela a abouti à une promesse, la veille des dernières
élections: il y a aura un fonds minier.
Le fonds minier nous est apparu, mais dans une proposition qui
était intenable. Pour la première fois, on avait une proposition,
mais une proposition qui, à toutes fins utiles, était un peu le
principe de placer un poisson dans un trop grand bocal et on noyait le projet.
Le statut du mineur n'était pas reconnu, dans le projet. C'était
un principe qui était fondamental, quant à nous. On ne parlait
pas du statut du mineur. Deuxièmement, on arrivait avec un projet de
régime de retraite, de plan de pension, si vous voulez, qui était
complètement au-dessus de n'importe quel régime de retraite qu'on
avait pu négocier. C'était dans le pourcentage de 2% du salaire,
multiplié par les années de service, basé sur les trois
meilleures années. Je pense qu'on n'a même pas cela, actuellement,
dans le secteur public. Ce régime de retraite, - je ne sais pas pourquoi
c'est arrivé ainsi - aurait coûté à chaque mineur un
minimum de 2000 $ par année. Alors, vous comprenez qu'on a dit:
Écoutez, cela n'a pas de sens.
Depuis ce temps-là, on attend parce qu'on a demandé des
propositions ajustées et nous avons des résolutions à
chaque année. Nous avons l'appui, des recommandations et des demandes de
la FTQ et des métallos là-dessus. Dans les dernières
années - M. Marois pourra me reprendre si je me trompe - je pense que et
la CSD et la CSN ont appuyé cette revendication. Nous l'avons
étendue dans le domaine de l'amiante et du fer, dans le contexte que
vous connaissez maintenant. Et on attend pour savoir quel doit être le
projet d'un fonds minier qui, dans le fond, est assez simple. C'est une mise en
commun pour protéger et aider les travailleurs et les citoyens
frappés par une mine qui ferme parce qu'elle s'épuise ou parce
qu'il y a un problème de marché.
Mais vous allez noter que cela fait un peu les cornes, cela fait un peu
le cercle dans notre mémoire, parce qu'on parle de projets de protection
pour faire face aux mises à pied et aux fermetures. Le président
de la compagnie Iron Ore en a parlé hier; il serait d'accord avec un
projet pour aider les travailleurs impliqués. Peut-être que cela
fait un lien quelque part. Finalement, si le gouvernement arrivait avec un
projet non pas sectoriel, mais qui serait plus global, je vous assure que l'on
ne s'en irait pas sans connaissance dans le champ pour dire: Qu'est-ce qui
vient d'arriver? On le recevrait avec plaisir.
Mais on a cru bon, par les discussions qu'on a entendues et par
stratégie de prendre un secteur qui est celui de l'industrie
minière qui, au début de ses activités est appelé
à mourir et on a dit: Ce secteur-là est particulier. Il y a des
statuts un peu particuliers à l'entreprise minière. Le mineur,
lui, n'a pas de statut particulier et on devrait peut-être avoir un
projet pour ce secteur industriel. Maintenant, si on est capable d'avoir un
projet plus large - et je
ne veux pas mettre des paroles dans la bouche du président de la
compagnie, mais peut-être que c'est ce qu'il a indiqué - on n'est
certainement pas contre cela.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Oui, M. Daoust.
M. Daoust: Dans la foulée de ce que vient de mentionner M.
Clément Godbout et en réponse aussi à vos remarques, je
tiens à vous dire que notre impatience à la FTQ est en train de
se transformer en hostilité déclarée à
l'égard des tergiversations gouvernementales au sujet d'une politique
globale sur le phénomène des licenciements collectifs et des
fermetures d'usines. Profonde déception. Nous trouvons que le
gouvernement est d'une timidité inacceptable, qu'il a une attitude
froussarde à l'égard d'un projet de loi qui est tellement attendu
par l'ensemble de la population du Québec.
Ce type d'accusation peut être fait aussi à l'égard
de l'Opposition qui se garde bien de se mouiller les pieds de façon
très concrète à l'égard des grandes revendications
syndicales dans le domaine des fermetures d'usines et des licenciements
collectifs. C'est vrai qu'une décision comme celle qui a
été prise par la compagnie Iron Ore provoque un incroyable
désarroi. C'est vrai que c'est plus dramatique ici à cause de la
vocation mono-industrielle de Schefferville. Mais les fermetures d'usines et
les licenciements collectifs créent aussi énormément
d'angoisse dans tous les milieux qui sont frappés.
Il n'y a pas eu, à notre connaissance, de changements
législatifs depuis quinze ans dans ce domaine alors qu'on sait tous - et
les données sont connues - qu'il y a entre 40 000 et 50 000 travailleurs
par année qui subissent des licenciements collectifs et des fermetures.
Et cela, c'est avant les deux ou trois dernières années alors que
c'est quasiment par centaines de milliers par année que les travailleurs
subissent des conditions brutales de fermetures d'usines, d'entreprises, de
mines et d'ateliers au Québec. Les revendications de la FTQ sont connues
depuis une dizaine d'années. Nous voulons qu'enfin un gouvernement ait
le courage de voter une véritable loi qui protégera les
travailleurs dans les cas de licenciements collectifs et de fermetures
d'usines.
Les positions de la FTQ, je l'ai mentionné, ont été
explicitées à l'occasion de colloques, de congrès, de
multiples prises de position. Nous savons que les ministres qui se sont
succédé au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre ont
toutes sortes de projets dans leurs cahiers. (12 h 15)
II serait bon de prendre quelques minutes, pas trop longuement, pour
rappeler en gros quels seraient les éléments constitutifs d'une
véritable politique, d'une véritable loi dans le domaine des
fermetures d'usines. Il faudrait, à notre sens, que quelque entreprise
que ce soit au Québec puisse justifier non pas après coup - ou
tenter de justifier après coup, comme l'a fait la Compagnie
minière IOC - mais avant que la décision soit prise, avec preuves
à l'appui, dépôt des états financiers,
dévoilement de tous les documents pertinents les raisons du licenciement
collectif ou de la fermeture devant un comité qui pourrait s'appeler un
comité de justification. C'est ce qu'on appelle une procédure de
justification qui ne se fait pas à la sauvette, à l'occasion de
moments aussi spectaculaires que ceux que l'on vit en commission parlementaire,
mais qui est entourée de toutes les précautions, de tous les
éléments, de tous les documents afin que les parties soient
munies de tous les renseignements. Donc, justifier de façon publique son
intention de fermer l'entreprise ou de licencier un nombre de travailleurs.
Un autre élément. Avant qu'une autorisation de
procéder à la fermeture d'une entreprise, d'une mine, ou de
décider d'un licenciement collectif soit donnée, nous voulons que
les entreprises soient tenues de négocier de bonne foi toutes les
conditions de réparation pour les employés concernés. Nous
ne voulons plus quémander et nous faire offrir toutes sortes de petits
cadeaux après coup. Nous voulons que ce soit l'objet d'une
véritable négociation où les responsabilités
sociales des entreprises subiraient le test véritable de façon
publique et de façon formelle. Nous voulons que dans la loi il y ait des
préavis beaucoup plus étendus. Je ne dirai pas
généreux, il n'y a pas de générosité quand
on se fait couper le cou et qu'on se fait dire qu'à compter de tel
moment on va perdre son emploi après y avoir consacré, comme
c'est le cas des gens de Schefferville, dix, quinze, vingt ou trente ans de
leur vie et avoir atteint 40 ou 50 ans d'âge. Donc, des avis
étendus dans le cas des congédiements, des fermetures et des
licenciements collectifs.
Nous voulons que les indemnités de séparation soient
beaucoup plus adéquates. Encore une fois, on n'emploie pas le mot
généreuses. Il n'y a pas de générosité
là-dedans. Il y a tout simplement des obligations morales, des
obligations formelles que doivent prendre les compagnies à
l'égard des travailleurs qui sont jetés sur le pavé. Donc,
nous voulons que la loi prévoie des indemnités beaucoup plus
adéquates qui, elles, tiendront compte de toutes les situations, de
l'âge et de l'ancienneté des employés. Nous voulons aussi
et, ce sont là des éléments, qu'on prévoie la
création de caisses d'indemnisation. Qu'elles soient globales ou
sectorielles - je ne dirai pas peu importe - cela fera l'objet d'études
et
d'échanges entres les parties. Au moment où le projet de
loi sera soumis, il fera l'objet d'une commission parlementaire. Ce sont des
pistes que nous dégageons à ce moment-ci. Caisses d'indemnisation
ou de stabilisation, appelons cela comme on voudra, constituées par la
contribution des entreprises pour indemniser les travailleurs. C'est là
que se mesure la responsabilité sociale des entreprises. C'est à
ce moment-là seulement qu'on sera en mesure de porter des jugements.
C'est un peu à travers tout cela que ce situe le fonds minier.
Qu'il y ait un fonds minier dans une loi plus globale ou qu'il y ait un fonds
minier spécifique, ce sont des choses qui peuvent faire l'objet
d'études. Ce sur quoi je voulais insister, M. Gendron l'a
mentionné hier, c'est l'opération Schefferville qui est
engagée à ce moment-ci, il a parlé de remettre
l'imagination au pouvoir. On l'a dit à quelques reprises. Le pouvoir est
fatigué, l'imagination est endormie. On souhaite, nous autres -
malheureusement, c'est dramatique de le rappeler pour ces travailleurs et
travailleuses de Schefferville qui sont affectés par le drame que l'on
connaît - que ce soit l'électrochoc à l'égard de
ceux qui détiennent le pouvoir politique et qu'enfin on puisse voir au
bout du tunnel une lueur, mais une lueur perceptible, non pas brumeuse,
à l'égard d'un projet de loi qui est tellement attendu par les
travailleurs québécois.
M. Mulroney, qui n'est pas le moindre des personnages à ce
moment-ci et peut-être éventuellement, qui est le président
de cette entreprise que l'on connaît, qui est un homme autorisé
pour parler de tous ces sujets, a ouvert une porte toute grande, hier, en
disant - je ne veux pas lui mettre les mots dans la bouche - que, quant
à lui, il ne voyait pas d'objection à une loi sur les fermetures
d'usines. Je ne dirais pas qu'il applaudit à un tel projet, mais
l'autorité qu'il a, le poste qu'il détient à la compagnie,
cela devrait faire en sorte, à mon sens, que le gouvernement saute sur
l'occasion, en profite tout au moins et n'hésite plus, cesse de
tergiverser à l'égard d'une loi sur les licenciements collectifs
et les fermetures d'usines.
Vous aussi, de l'Opposition - c'est bien beau, le gouvernement - soyez
peut-être un peu plus volubiles. Vous l'êtes sur tellement de
sujets. Je ne vous le reproche pas, c'est votre rôle. Vous n'êtes
pas une société d'adoration mutuelle et vous aviez raison de le
dire, mais poussez-leur dans le dos. Nous leur poussons dans le dos aussi.
Peut-être qu'à un moment donné nous allons les mettre en
mouvement. Ils ne ratent pas d'occasion d'être en mouvement sur certains
cas et on voudrait qu'ils manifestent autant d'imagination à
l'égard de ces centaines de milliers de travailleurs
québécois qu'ils en ont manifesté au cours des derniers
mois dans un domaine que vous connaissez fort bien.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. On va avoir un
problème d'horaire. Je voudrais en aviser tous les participants et leur
demander de collaborer et de ramasser leurs questions et leurs réponses
parce que je me demande à quelle heure on pourra terminer ce soir, si on
regarde un peu les mémoires qu'il nous reste à entendre. Comme je
voudrais bien pouvoir entendre tout le monde, je demanderais à tous
d'essayer de se restreindre un peu.
Oui, M. le député d'Outremont.
M. Fortier: M. le Président, je pense que nous allons
collaborer, mais j'aimerais dire ceci. Nous sommes venus à Schefferville
pour écouter les gens qui avaient des problèmes et le
gouvernement a décidé, pour une raison que je ne connais pas, de
convoquer la commission parlementaire les jeudi et vendredi. S'il l'avait
convoquée le mardi, on aurait eu le mardi, le mercredi, le jeudi et le
vendredi. Maintenant qu'on est ici, pour ma part, je suis prêt à
partir plus tard ou demain, si nécessaire, mais tout en voulant
collaborer - je ne dis pas cela pour faire de la petite politique - je crois
quand même qu'il faut donner le temps aux gens qui ont des
problèmes de s'exprimer.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Marois: M. le Président, j'aurais
apprécié que le député d'Outremont ait la
même tolérance à mon égard tantôt, quand il
m'a rappelé à l'ordre parce que je dépassais les 20
minutes. J'aurais voulu poursuivre.
M. Fortier: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Sur
une question de règlement, M. le député d'Outremont.
M. Fortier: Sans vouloir imputer des responsabilités
à quiconque, une revue du procès-verbal vous dira, M. le
ministre, que mes questions n'étaient pas si longues, mais je crois
qu'elles commandaient à la FTQ de nous donner des réponses.
J'apprécie, pour ma part, la longueur des réponses puisque je
crois que c'était nécessaire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Gendron: Très rapidement, au nom du gouvernement, sur
la question de règlement, j'aimerais expliquer pourquoi on a
planifié la commission parlementaire sur deux
jours. C'est tout simplement parce que ce n'est pas nous qui avons
inventé le règlement concernant les commissions parlementaires;
il y a des droits de parole qui sont connus. La règle voulait que,
normalement, ce soit 20 minutes de présentation et 20 minutes pour
chacun des deux partis. On avait une quinzaine de mémoires; en
répartissant le temps, c'était une tâche qui pouvait se
faire sur deux jours, en acceptant, bien sûr, de dépasser les
heures traditionnelles, ce que nous avons fait hier en travaillant
jusqu'à 1 h 30 du matin. Si on se disciplinait un peu plus, on serait
capable d'entendre tout le monde, en respectant chaque intervention, pour finir
les travaux cet après-midi.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Dans
ce sens-là, je ne veux pas, non plus, partir de polémique, ni
brimer qui que ce soit de son droit de parole. Au contraire, je veux simplement
rappeler à tout le monde qu'il y a des horaires à respecter et
qu'autant que possible, tout en s'exprimant et en gardant le droit de parole
que tout le monde a, il faudrait tenter de résumer ou de dire ce qu'on a
à dire le plus succinctement possible. M. le député de
Prévost.
M. Dean: M. le Président, je suis heureux de me sentir
appuyé par l'Opposition, parce que j'étais justement pour dire
que la question de Schefferville et la grande question des fermetures
d'entreprises est trop importante pour qu'on ne profite pas de l'occasion pour
vider, le plus humainement possible, de la part de tous les citoyens et des
partis politiques et par les journalistes interposés pour l'information
et la sensibilisation de la population, ce drame épouvantable que
créent les fermetures d'entreprises et d'autant plus les fermetures
d'entreprises dans les régions éloignées. Comme je n'ai
pas été le plus volubile des députés autour de
cette table depuis le début, je suis prêt à m'engager
à me fermer la boîte une fois pour toutes après cette
intervention, pour faciliter les choses. Mais je me trouve dans l'obligation
d'avoir des choses à dire et des questions à poser sur le sujet
et, aussi, à cause du respect antérieur des règlements, de
répondre, au nom du ministre de la Main-d'Oeuvre, à un certain
nombre de problèmes ainsi que d'apporter des réflexions du
gouvernement sur les questions importantes qui sont devant nous.
Donc, d'abord, je voudrais profiter de l'occasion pour rendre hommage au
Syndicat des métallos (FTQ), le plus grand syndicat industriel au
Québec, pour plus de 40 ans de services acharnés de
représentation et de défense des travailleurs et des
travailleuses du Québec. Leur témoignage devant cette commission
parlementaire est très symbolique de leur façon de se comporter
depuis ces 40 années. D'abord, la défense acharnée,
militante, mais toujours responsable des travailleurs et travailleuses qu'ils
représentent. Mais aussi le fait qu'ils ont toujours, tant au
Québec que dans toute l'Amérique du Nord, marqué leur
action par cette capacité d'aller au-delà de la défense de
leurs membres et de discuter et de prendre parti dans les grandes causes
sociales et humaines de la société entière, tant au
Québec qu'en Amérique du Nord. Je trouve que leur mémoire,
dans ce sens, est symbolique, parce que ce mémoire comporte, d'abord,
des critiques franches et dures à l'égard de quiconque, que ce
soit les gouvernements, les partis, les employeurs -et avec raison - mais aussi
une démarche concrète et pratique, surtout des suggestions
positives pour apporter des solutions au problème qu'on vit. Cela, non
seulement c'est reflété dans le mémoire pour leurs
membres, mais pour tous les éléments de la société
de Schefferville, en ce sens qu'ils prennent la défense des petits
commerçants, des travailleurs non syndiqués, des chômeurs,
des peuples amérindiens et de tous les intervenants de la
communauté. Finalement, leurs démarches débouchent aussi
sur une demande de législation, non seulement pour les mineurs, non
seulement pour leurs membres, mais en quelque sorte, de façon
très concrète, pour tous les travailleurs et toutes les
travailleuses du Québec. Il ne faut pas oublier que la commission
parlementaire existe à cause du Syndicat des métallos et, encore
une fois, c'est typique de la démarche des métallos que,
malgré les frustrations et même la révolte que peuvent
vivre et subir les membres, il y a toujours ce respect pour nos institutions
démocratiques, dont l'institution parlementaire n'est pas la moindre, et
pour le parti au pouvoir, quel qu'il soit. Alors, je tiens à souligner
ces points en partant.
Je veux aussi souligner un fait très important et,
j'espère, symbolique pour l'avenir: la première fois qu'une
commission parlementaire sort des murs poussiéreux, si respectables et
traditionnels de l'Assemblée nationale c'est pour aller sur place se
sensibiliser à un drame humain que, je pense, il faut vivre, toucher et
sentir pour le comprendre. J'espère que c'est prometteur pour l'avenir
et que les parlementaires vont se déplacer, vont sortir de leur train de
vie, en bien des cas confortable, pour voir le vrai monde et vivre les vrais
problèmes du peuple québécois. (12 h 30)
Avec tout le respect que je leur dois je souhaite que nos amis
journalistes, surtout ceux et celles de la presse dite nationale, puissent
vivre cette expérience et, par le fait d'avoir senti et observé
des drames humains, qu'ils puissent mieux jouer leur rôle d'informateurs
et de sensibilisateurs de la
population dans le sens démocratique et, par là toucher le
drame que peuvent connaître tous ces travailleurs et travailleuses
frappés par une fermeture totale ou partielle. C'est déjà
assez traumatisant de recevoir un avis de mise à pied pour une
période indéfinie, non seulement pour la dignité du
travailleur, mais aussi pour son bien-être psychologique,
économique, social, familial. C'est encore pire quand il s'agit du
problème de licenciement définitif et encore plus catastrophique
et dramatique quand il s'agit de ce que peut représenter une fermeture
d'industrie dans une ville comme Schefferville, qui représente non
seulement une perte de son orientation du travail, de sa sécurité
économique, mais aussi l'impact familial, l'impact social et l'impact
sur toute sa vie. Après avoir invité, incité du monde
à venir ici s'enraciner, à un moment donné, brutalement on
l'arrache à ses racines et on pousse cette population vers un avenir
inconnu et d'autant plus incertain à cause de la situation
économique.
Pour toucher les problèmes devant nous, j'aimerais poser un
certain nombre de questions accompagnées d'un certain nombre de
commentaires. On a référé deux fois aux affirmations de M.
Mulroney, hier, au sujet des relations syndicales. Quand M. Mulroney,
subitement, a parlé de ML hier, je me demandais pour un instant ce que
les militants libéraux auraient pu faire pour envenimer les relations
patronales-syndicales à Iron Ore, mais très vite M. Mulroney a
corrigé cela en disant qu'il s'agissait bel et bien de
marxisme-léninisme. M. Godbout, ce matin, a dit qu'il en parlait un peu,
mais qu'il ne voulait plus en parler.
Il y a une question que je voudrais poser. D'après les
métallos, quand on parle "de mauvaises relations patronales-
syndicales", c'est ce qui est souvent invoqué par des ennemis
économiques et politiques du Québec comme raison pour laquelle
des entreprises ne s'implantent pas ou quittent. Je voudrais savoir des
métallos, quel rôle ces périodes difficiles sur le plan des
relations patronales-syndicales ont pu avoir dans la décision d'Iron Ore
de fermer?
Deuxièmement, explications sur les propositions d'Iron Ore pour
les travailleurs affectés par cette fermeture ou cette annonce de
fermeture - je ne pense pas que ce soit sorti clairement - est-ce que Iron Ore
a négocié ou discuté ces modalités avec le Syndicat
des métallos? Même si, publiquement, le directeur des
métallos avait en quelque sorte dit: C'est une bonne base de
négociation, est-ce que des discussions, des négociations
concrètes et pratiques ont eu lieu entre le Syndicat des métallos
et Iron Ore?
Maintenant, je voudrais, si vous me le permettez, M. le
Président, faire des commentaires et adresser des questions sur un
éventuel projet de loi sur le fonds minier ou sur les fermetures de
mines et entreprises. Pour avoir travaillé dans le dossier, je fais
miennes les expressions de frustration des métallos et de la FTQ.
D'ailleurs, ceux qui connaissent mon passé savent que pendant bien des
années j'ai vécu ces revendications de l'autre côté
de la table et je les ai toujours endossées. Je les connais par coeur.
Ce n'est pas difficile de dire que je suis d'accord avec ces questions et aussi
avec les reproches qui les accompagnent.
Cependant, pour avoir travaillé le dossier, il faut quand
même dire que, lorsqu'on parle des cadres d'une éventuelle loi sur
les fermetures de mines ou d'entreprises, on touche des questions importantes,
fondamentales et qui constituent des premières nord-américaines.
Il y a des projets de loi dans au-delà de 20 États
américains et un projet de loi sur le plan fédéral aux
États-Unis sur les fermetures d'entreprises qui dorment dans le
débat public quelque part depuis quelques années. Ce n'est
sûrement pas pendant le règne de M. Reagan que la situation va
s'améliorer.
Le fait demeure que tout ce qu'on essaie de faire dans ce domaine
constitue un précédent nord-américain et ce, dans une
période de difficultés économiques, de sorte qu'il y en a
qui se promènent dans le paysage et qui ne manquent pas de prendre le
crachoir public, via les moyens de communication, pour dire: Les temps
économiques sont difficiles, il ne faut pas imposer des coûts, il
ne faut pas adopter des lois sociales de cette envergure. C'est pour cela que
je suis très heureux des remarques de M. Mulroney. J'appuie les
remarques du ministre quand il disait: On fait confiance à M. Mulroney
de faire de l'apostolat auprès de ses semblables, dirigeants
d'entreprises, et surtout, peut-être, concernant M. Dufour pour qu'on
développe une espèce de concertation et de consensus dans la
direction de l'approbation de tels projets de loi.
Aussi, pour avoir vu, à la télévision, mon
collègue de Brome-Missisquoi exprimer son accord, selon ce que j'ai cru
comprendre, au nom du Parti libéral du Québec, avec les grandes
lignes d'un tel projet de loi, au canal 10, à l'émission de M.
Laplante, je suis convaincu qu'on peut compter sur l'appui acharné de
l'Opposition dans ce dossier. Pour que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu puisse piloter ce dossier et le mener à
bonne fin, malgré les études, malgré les
difficultés, cela prend l'appui tant des députés et des
ministres du parti ministériel, que de l'Opposition, du monde patronal,
et de l'opinion publique pour qu'on arrive, malgré la situation
économique difficile, à réaliser un tel projet de loi.
Il faut quand même dire qu'au moment
où le débat a eu lieu, ainsi qu'une commission
parlementaire sur le projet de loi no 3, la demande des métallos
était dans le sens d'une loi pour les mineurs. Donc, on peut dire que
si, à ce moment, on avait adopté la loi, cela n'aurait
peut-être pas touché la situation à Schefferville, mais je
dois dire que je suis très heureux que les métallos, dans le
mémoire, tout en insistant sur des conditions particulières pour
les régions minières isolées, aient ouvert des
perspectives qui ouvrent la porte à une loi générale sur
les fermetures d'entreprises.
Aussi, sur la question des préavis plus longs, de 6 à 24
mois, il n'y a pas de problème, ni avec le gouvernement, ni,
paraît-il, avec le parti de l'Opposition. C'est, justement, par ce
préavis obligatoire pour les entreprises annonçant à
l'avance leurs intentions en matière de licenciement possible, total ou
partiel, on donne à toutes les parties, dans le sens du "task force" qui
a été évoqué par les métallos et qui est
accepté par toutes les parties ici présentes, on donne à
tous les partenaires: le syndicat, l'entreprise, la communauté, les
gouvernements, la possibilité d'évaluer la situation, de chercher
des solutions aux problèmes, d'éviter les licenciements si
possible ou de prendre des mesures et de préparer des projets de
recyclage, soit de l'entreprise, soit de la communauté, par le
développement de nouvelles industries.
Sur la question des indemnités de déménagement, le
gouvernement est aussi d'accord, il va sans dire, et nous sommes d'accord
particulièrement pour les travailleurs qui perdent leurs emplois et qui
vivent dans un milieu nordique ou une ville isolée comme Schefferville
et les autres villes nordiques. C'est une réalité, mais ce qu'on
espère, c'est réussir à obtenir ce minimum de consensus
social de la part du monde patronal et aussi des partis politiques pour nous
permettre d'avancer dans cette voie.
Sur la question d'une politique sectorielle de main-d'oeuvre, il y a des
choses qui se font dans le domaine de la formation professionnelle des adultes,
des besoin de recyclage et de formation de la main-d'oeuvre. De récentes
ententes faciliteront des mesures concrètes dans ces domaines. On peut
aussi dire que plusieurs mesures suggérées par les
métallos sont encore inexistantes, mais je sais que le gouvernement
partage maintenant l'opinion des métallos et de la FTQ à savoir
qu'on ne peut pas aborder les questions de licenciements collectifs et de
fermetures sans en parler et sans les intégrer au sein d'une politique
massive et cohérente d'emploi qui vise, en fait, le plein emploi. Le
ministre de la Main-d'Oeuvre a fait cette déclaration à quelques
reprises depuis un certain temps, et les travaux sont en cours au sein du
ministère de la Main-d'Oeuvre tant sur la question d'une politique
d'emploi que sur la question d'une législation concernant les
fermetures.
Une question, en passant, au Syndicat des métallos. Quand on
parle du statut professionnel du mineur, est-ce qu'on envisage une sorte de
carte de compétence qui serait émise après un certain
nombre d'années ou une certaine période d'expérience ou de
formation professionnelle?
Sur la question des régimes d'assurance collective, je voudrais
aussi poser une question en faisant ce commentaire. Ne serait-il pas vrai que
des formules de prolongation de la couverture des régimes d'assurance
collective des travailleurs sont déjà prévues dans un
certain nombre de conventions collectives qui existent dans certaines des
grandes entreprises du Québec? Donc, ce serait d'autant moins
coûteux, possiblement, de rendre ce genre de mesure qui existe
déjà en partie dans les conventions collectives de l'industrie
obligatoire pour toute la collectivité par voie législative.
Ensuite, la question des régimes de retraite. Plusieurs des
recommandations des métallos sur le fonds minier et sur les questions de
fermetures et de licienciements touchent les régimes de retraite et de
préretraite. Là, je pose la question: Quelle serait la
réaction des métallos et de la FTQ à la possibilité
qu'une bonne partie du problème soit résolue par des
modifications importantes au Régime de rentes du Québec, dans le
sens d'une valorisation du niveau de prestation et également par des
amendements à la Loi sur les régimes supplémentaires de
rentes pour rendre plus faciles les questions de transférabilité
des régimes de retraite? C'est une question que je poserais aux
métallos parce qu'il m'apparaît souhaitable que ce qu'on pourrait
faire dans l'industrie minière par législation
générale touche toutes les industries du Québec. D'autant
plus que j'ai été, un peu par accident, témoin d'une
conversation entre un président et un vice-président d'une
multinationale implantée au Canada et au Québec où ils
discutaient des formules possibles de transférabilité des
régimes. Leur conclusion, après quinze minutes de discussion en
dînant, a été de dire: Bien, ceux qui disent qu'un
régime public serait la meilleure solution ont raison au fond. Je ne
divulgue pas mes sources, mais j'ai été bel et bien témoin
de cette discussion et j'aimerais bien que les métallos commentent cette
question.
Finalement, permettez-moi, M. le Président - je m'enligne pour
terminer - en attendant ces études et ces efforts que le gouvernement
déploie dans une période économique très difficile,
d'aborder la question d'une politique visant le plein emploi et celle du
licenciement collectif. Le
gouvernement va continuer à agir avec les moyens qu'il
possède. D'ailleurs, l'article 45 de la loi existante sera
poussé. Même si cela est tout à fait inadéquat
considérant la situation, le gouvernement a l'intention de continuer ses
démarches pour faire respecter cet article. (12 h 45)
Aussi, par la nouvelle loi qui créait le ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu juste avant les
fêtes, il faut souligner que le ministre a maintenant de nouveaux
pouvoirs, dont les pouvoirs d'enquête, le mandat d'assurer des actions
concertées des différents ministères dans les situations
de licenciement collectif, le mandat d'aborder des politiques cohérentes
d'emploi. Même si la loi sur les licenciements n'est pas encore
adoptée, les nouveaux pouvoirs donnés au ministre permettent un
certain nombre d'actions qui n'étaient pas permises par les
législations qui existaient avant la nouvelle loi qui a
créé le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
Bref, nous agissons en cette matière et nous continuerons d'agir
avec le plus de rapidité possible. Il faut insister et
"réinsister" sur le fait de lancer ce débat public, de le lancer
rapidement et de rallier un minimum de force de concertation dans la
société. Il faut que toutes les entreprises qui disent avoir des
responsabilités sociales et communautaires, les partis politiques qui
disent que c'est un problème humain, angoissant et inacceptable, ce
problème que vit une ville comme Schefferville ou les fermetures
d'autres communautés, que tout ce beau monde se rassemble pour appuyer
le ministre et le gouvernement dans l'adoption rapide de ces projets de loi.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. LeMay): Merci. M. Godbout.
M. Godbout: Je tenterai de répondre le plus rapidement
possible à vos six questions. À mon point de vue, il n'a aucune
relation entre la fermeture de Schefferville et les problèmes de
relations du travail qui ont pu exister.
Deuxièmement, quant aux négociations, je pense qu'il faut
toujours essayer d'éclaircir et d'expliquer les mandats dans lesquels
nous, du mouvement syndical, travaillons. Il me semble que je les ai
expliqués assez clairement ce matin. Les mandats précis que nous
avons sont de nos assemblées générales, de membres qui
nous demandent d'intervenir auprès de la compagnie pour que des
négociations aient lieu avec les comités de négociation.
Je sais qu'il y a eu des lettres d'envoyées par les sections locales
à la compagnie Iron Ore et la réponse a été non.
C'est la réponse qu'on m'a donnée et c'est la connaissance des
choses que j'en ai. C'est pour cela qu'on demande une médiation pour
permettre ces discussions. Je ne reviendrai pas sur les autres points de la
discussion; je pense qu'ils ont été bien établis hier et
aujourd'hui.
Quant à la troisième question, sur les lois, vous avez
fait une intervention que nous appuyons, bien sûr, et que nous saluons
quant aux fermetures d'usines et de mines. Je demande en ce moment - et je le
demande au nom des travailleurs et des travailleuses de Schefferville et au nom
du Syndicat des métallos et je pense que je peux le demander au nom de
la FTQ, comme vice-président, le secrétaire général
étant à côté de moi, s'il n'est pas d'accord, il me
le dira - à tous ceux qui sont ici, à tous les membres de la
commission - je voudrais être bien entendu - si vous êtes
prêts, tous ensemble, à recommander une loi dans ce sens à
l'Assemblée nationale.
Le statut du mineur. J'ai étudié le dossier des cartes de
compétence. Par exemple, il y a eu des études de faites à
Thompson, au Manitoba, en Colombie britannique et ailleurs. Les cartes de
compétence comportent certains inconvénients et nous n'en sommes
pas tout à fait rendus à la décision, à savoir si
le mineur devrait avoir une carte de compétence ou pas. Ce qui existe
à l'heure actuelle, c'est une carte de santé que le mineur doit
détenir; c'est ce qu'on appelle la carte des mineurs. Quand nous
parlons, pour les métallos, de statut, on dit qu'un travailleur dans le
secteur minier, s'il suit son industrie qui est l'industrie minière,
à l'instar des travailleurs de la construction qui peuvent passer d'un
employeur à un autre, d'une région à l'autre, d'une ville
à l'autre, conserve un statut de travailleur de la construction. Peu
importe si c'est dans la même entreprise ou dans une autre, peu importe
si c'est pour la même compagnie ou pas, peu importe si c'est dans la
même région ou pas, il conserve un statut, on lui reconnaît
un statut de travailleur du secteur minier.
Cela veut dire - et là je m'en vais à la dernière
question que vous soulevez - que si on avait la transférabilité
des fonds de retraite, c'est qu'un mineur pourrait se faire une carrière
honorable dans l'industrie minière et se retirer après trente ou
trente-cinq ans de travail dans l'industrie (ou vingt, vingt-cinq ans) avec un
fonds de retraite qui se tient. Je prends, par exemple, les métaux
non-ferreux: c'est dramatique. Vous pouvez avoir des mineurs qui font dix,
quinze mines dans leur vie pour nourrir leur famille. Ils ont gagné
honorablement leur vie et rendus en fin de piste, il leur reste zéro
comme pension, parce que, d'une entreprise à l'autre et d'une mine
à l'autre, même à l'intérieur de la même
compagnie, ils perdaient leurs
droits d'ancienneté ou leur pension, dans le cas où ils en
avaient.
Alors ce qu'on veut, nous, c'est que le mineur, dans son métier
de mineur, puisse se faire une carrière comme mineur, qu'il ait un
statut. Les détails, la carte de membre et tout cela, il faut le
regarder, cela comporte certains inconvénients.
L'assurance-collective? Oui, il existe des prolongations d'assurance
dans certaines de nos conventions collectives. Ici, avec la compagnie IOC, il y
a certaines prolongations, mais elles sont limitées. Non, nous n'avons
pas de programme de supplément d'assurance-chômage à l'IOC.
Quant à la pension, modifier les régimes du Québec - la
transférabilité, je pense que j'en ai parlé - nous sommes
d'accord avec la revalorisation du Régime de rentes du Québec.
Nous participons à l'étude du projet qui est présentement
au conseil consultatif.
Il y a une chose qui nous tient toujours à coeur. On est
très fragile là-dessus et vous le savez: c'est l'ingérence
dans le domaine des relations du travail. Cela, ça nous fatigue. Cela
veut dire que, où il y a des fonds privés, ce n'est
peut-être pas - à l'heure actuelle en tout cas - acceptable qu'il
y ait des interventions pendant que les parties peuvent faire des choses. Mais
qu'on puisse "matcher" quelque chose qui fasse en sorte qu'un programme, une
loi fasse des transférabilités... Un travailleur qui part de
l'Iron Ore demain matin, qui a un fonds de retraite et qui s'en va travailler
pour, je ne sais pas, moi, Noranda, ailleurs, devrait être
transféré. C'est de cela qu'on parle. Il devrait conserver ses
crédits et continuer à accumuler de nouveaux crédits. Et
si, parallèlement à cela, on avait une espèce de
programme, un véritable régime de retraite au Québec qui
soit gouvernemental, je pense qu'une fois que le régime public serait un
régime qui est capable de permettre à son monde de manger et de
vivre honorablement, cela pourrait peut-être faire en sorte qu'aux tables
de négociation, industrielles ou sectorielles, les revendications et les
problèmes de négociations dans le domaine des pensions auraient
beaucoup moins d'importance si on avait un régime public qui se
tient.
Le Président (M. Bordeieau): Merci. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Dans ce dossier, M. le
Président, on a toujours l'impression que le gouvernement essaie de se
disculper. Et, je pense que c'est de bonne guerre parce que s'il peut
réussir à se disculper, naturellement cela va réduire ses
responsabilités dans son esprit. Réduire ses
responsabilités, peut-être se fournir des excuses pour ne pas agir
encore vis-à-vis des citoyens de Schefferville. Et le ministre du
Travail - je ne sais pas si le ministre de l'Énergie avait tenu
les mêmes propos hier -semble se surprendre. Il dit: Écoutez,
comment cela se fait-il? Il y a quelque chose qui ne va pas. Les profits
augmentent; dans les deux dernières années, il y a eu des
profits. Une année, 81 000 000 $, l'autre, 92 000 000 $ et c'est
à ce moment-là que la compagnie Iron Ore décide de fermer
Schefferville.
Remarquez bien, je prends les commentaires de M. Godbout. Quant aux
chiffres, quant aux états financiers, je ne porte pas de jugement
à savoir s'ils ont été bien préparés ou non.
Cela peut être susceptible de vérification. Cependant, il ne
faudrait pas que les propos du ministre induisent la population en erreur. Il
ne faudrait pas qu'on ne prenne pas certaines leçons de ce qui se
produit ici pour pouvoir les appliquer à l'avenir dans d'autres
domaines. Parce que quand on voit les profits et les pertes d'après les
chiffres - et encore je le dis d'après les chiffres qui ont
été produits par Iron Ore - entre l'opération au
Québec et l'opération au Labrador, on voit qu'au Québec,
il y a une hausse des profits, de 1962 à 1981, de 22 000 000 $. Et
maintenant, au Labrador, des profits de 493 000 000 $. Moi, cela me porte
à me poser certaines questions. Je ne sais pas, peut-être que cela
pourrait être l'une des explications pour le ministre de dire pourquoi
les 22 000 000 $ reflètent la condition de l'industrie minière,
du minerai de Schefferville, la question des boulettes. Cela mériterait
peut-être une analyse plus profonde. Je pense qu'il y a un principe. Des
fois, il faut dire des choses qui ne sont pas trop trop populaires. Comme le
disait Charles de Gaulle, la surenchère de la démagogie, c'est
bien facile. On peut attaquer les multinationales. Ce serait bien facile, et la
population va dire que ce sont de gros méchants.
Je pense qu'il y a là un principe fondamental qu'il va falloir
accepter en Amérique du Nord c'est que si on ne peut pas avoir des
entreprises rentables - cela s'applique aussi aux sociétés
d'État - il n'y aura pas d'emploi. C'est un élément qu'il
faudrait explorer aussi et voir ce que le gouvernement a fait. Même si on
parle du 2 novembre ou du 2 janvier, qu'est-ce que le gouvernement a fait?
Quand on parle des actions gouvernementales, il avait été averti
par d'autres rapports. Je pense qu'il faudrait situer les
responsabilités où elles sont exactement et ne pas excuser le
gouvernement qui a une responsabilité majeure.
Maintenant, on parle du règlement de l'IOC. Je suis loin
d'être un expert dans le domaine des règlements et des relations
ouvrières. Une des façons, il me semble, de savoir si c'est un
bon règlement ou non
serait de faire des comparaisons. Est-ce qu'il est possible de faire une
comparaison entre ce règlement d'IOC à Schefferville et un autre
endroit où cela se serait produit, la fermeture d'une mine par une
société privée ou même par une société
d'État dans une région périphérique ou une
région lointaine? Est-ce qu'il y a une base de comparaison? S'il y avait
une base de comparaison, cela donnerait plus d'arguments à tout le monde
pour dire: Ecoutez, ne venez pas, IOC, nous dire que vous êtes
très généreux parce que dans tel, tel cas on a fait
beaucoup mieux. M. Godbout, est-ce que vous êtes au courant d'autres
situations semblables et d'autres règlements qui auraient pu être
faits par d'autres sociétés?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Godbout.
M. Godbout: Un dossier que j'ai connu où il y a eu des
bénéfices intéressants accordés, c'est le cas
d'Uranium City. Il faut bien dire qu'il s'agissait d'un organisme
paragouvernemental. Je dirai qu'en gros, à ma connaissance, dans nos
dossiers à nous, il est arrivé très souvent que des
entreprises aient fermé leurs portes sans rien donner. C'est
arrivé. J'en connais qui ont donné très peu. Je dirai,
sans entrer dans les détails de l'application parce qu'on veut regarder
les détails de l'application des bénéfices; les
bénéfices accordés, nous l'avons dit, nous avons
salué l'approche et nous avons dit que cela faisait une base
sérieuse pour que le gouvernement regarde ce que pourrait être une
loi. Cela veut donc dire - ce qu'on a dit à ce moment-là - que
les offres de la compagnie, sans en connaître l'application individuelle
pour chaque travailleur, parce qu'on ne le sait pas à ce moment-ci, mais
comme proposition globale - parce que cela couvre le licenciement, la retraite,
la retraite anticipée, le déplacement, l'aide et tout cela -
c'est un projet qui est intéressant.
M. Ciaccia: Vous avez parlé d'Uranium City, je pense que
Québec Cartier Mining a fait des congédiements, des
licenciements...
M. Godbout: Dans le cas...
M. Ciaccia: ...même SIDBEC. Quelle est la situation dans
ces... (13 heures)
M. Godbout: Dans le cas des mises à pied, c'est là
que cela peut mêler les choses, à Québec Cartier Mining il
n'y a pas eu de fermeture. À la SIDBEC, jusqu'à maintenant, il
n'a pas eu de fermeture. Les travailleurs qui ont été mis
à pied ont rencontré des comités de reclassement. Les
compagnies Québec Cartier et SIDBEC ont travaillé au
comité de reclassement et, exactement dans le même cadre, avec
l'Iron Ore, nous avons travaillé dans les cas de mises à
pied.
M. Ciaccia: Je sais que le temps avance, alors je vais essayer de
limiter mes questions et mes commentaires. Vous avez fait des
représentations dans votre mémoire, dans votre
présentation, sur les compensations que les compagnies paient dans les
régions nordiques et qui sont taxées par les gouvernements. Hier,
nous avons pris l'engagement de la part de l'Opposition d'appuyer une
représentation au gouvernement fédéral à savoir que
ces montants ne devraient pas être taxés. Je pense que c'est
complètement justifiable parce que les gouvernements retirent des
bénéfices des exploitations minières; toutes les
retombées économiques, les gouvernements en
bénéficient beaucoup. Ils ont des revenus. Cela permet le
développement des territoires et a des retombées dans d'autres
domaines. Cela n'est pas comme, disons, je ne veux pas le minimiser, un
épicier du coin qui a, lui, une entreprise de services. Cela a moins de
retombées pour un gouvernement que les développements dans ces
régions-ci, dans les régions nordiques. Alors, cela peut
être complètement justifié. Premièrement, nous
sommes prêts à faire les représentations qui s'imposent
vis-à-vis du gouvernement fédéral. Deuxièmement, et
je pense qu'ici, cela serait opportun pour le gouvernement, nous sommes
même prêts à appuyer le gouvernement à faire ces
représentations auprès du gouvernement fédéral. On
peut être solidaires. On peut faire quelque chose, un front commun
vis-à-vis du gouvernement fédéral sur cet article. Mais il
faudrait au moins, pour démontrer sa bonne foi aussi, si le gouvernement
du Québec est sérieux, qu'il prenne l'engagement ici, devant la
commission parlementaire - je l'inviterais à prendre cet engagement -
qu'il va, comme gouvernement, appliquer cette règle lui aussi, que le
gouvernement du Québec ne lèvera pas des impôts sur les
indemnités qui sont payées pour les régions nordiques, les
régions éloignées.
Si le gouvernement est prêt à prendre cet engagement, au
moins qu'il dise qu'il est prêt à recommander cela. Je sais que le
ministre du Revenu n'est pas ici, mais comme il y a quatre ministres, l'adjoint
parlementaire du ministre du Travail l'adjoint parlementaire du ministre de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et d'autres ministériels, s'ils
sont prêts à s'engager, et je pense que c'est le moindre qu'on
pourrait faire... Cela fait deux jours qu'on parle devant cette commission. Les
engagements du gouvernement n'ont pas été trop nombreux
vis-à-vis des citoyens de Schefferville dans le contexte actuel, mais je
pense que ce serait une occasion. Je n'en ferai pas une résolution parce
que je ne veux pas faire
de procédure. On est ici pour entendre les mémoires des
intervenants. Mais je pense que si vous pouviez vous engager, on pourrait tous
les deux ensemble, et on le ferait dès notre retour dans nos bureaux
respectifs, faire les représentations qui s'imposent au gouvernement
fédéral. Cela aurait au moins l'avantage de dire: Voici, au
Québec, on est solidaires. On appuie complètement cela, les deux
partis, le gouvernement et l'Opposition. Le gouvernement du Québec
s'engagerait à mettre en vigueur cette politique. Même si le
gouvernement du Québec ne le fait pas, nous nous engageons, comme
Opposition, individuellement et au nom du Parti libéral, à
demander au gouvernement fédéral d'appuyer et de mettre en
vigueur la demande de ne pas imposer ces indemnités.
M. Godbout: M. Ciaccia, vous soulevez une question très
importante. On vous remercie de l'appui que vous donnez. Je voudrais vous
mentionner deux choses que j'ai en main, qui démontrent la situation. La
première est la déclaration faite à l'occasion de la
conférence de presse du 26 janvier par le président de l'IOC. Si
vous permettez, je noterai ceci: "La compagnie et le syndicat croient fermement
qu'un allégement fiscal approprié doit être accordé
aux employés des communautés nordiques par le gouvernement du
Québec, ainsi que par le gouvernement du Canada. À cette fin,
Clément Godbout, au nom du Syndicat des métallos, et
moi-même, au nom de la compagnie minière IOC et de ses
employés, nous ferons des représentations conjointes aux
représentants gouvernementaux afin d'essayer d'obtenir un traitement
plus équitable que celui qui existe à l'heure actuelle." À
la suite de cette déclaration, sur laquelle nous étions, bien
sûr, d'accord de faire une demande conjointe le plus rapidement possible,
j'ai fait des travaux de mon côté et je peux vous dire que j'ai
une lettre en date du 3 février du ministère du Revenu du
Québec. Je vais vous la lire: Le ministère du Revenu du
Québec, ayant appris la fermeture des installations de la compagnie Iron
Ore à Schefferville, juge opportun de vous aviser que des règles
particulières s'appliquent aux bénéfices, tels que primes
de fermeture, frais de déménagement ou allocations diverses
généralement accordées à cette occasion aux
employés d'une entreprise. Il s'est avéré par le
passé que des employeurs et des employés soient sous l'impression
que les bénéfices payés à cette occasion
étaient libres d'impôt, alors qu'il n'en est nécessairement
pas ainsi. De plus, il peut arriver que la position de notre ministère,
quant à l'imposition de certains de ces bénéfices, soit
différente de celle adoptée par Revenu Canada. Pour ces raisons
et afin d'éviter des malentendus et des inconvénients possibles
pour les employés affectés par cette fermeture, nous tenons
à vous informer que votre syndicat peut, si le paiement de certains
bénéfices est prévu, obtenir du ministère
l'interprétation désirée à l'égard de
ceux-ci. À cet effet, il vous sera loisible de communiquer avec le
directeur de la Direction des particuliers et des régimes sociaux
à la Direction générale de la législation en lui
fournissant les circonstances et les conditions préalables pour les
paiements de bénéfices que la compagnie minière a
l'intention de verser à ses salariés. Il dit cela, mais, en
même temps, on reçoit une autre correspondance qui nous dit:
Toutes les paies de séparation seront taxables. Tout ce que les gens
recevront sera taxable, sauf les frais de déménagement. Si la
compagnie IOC vend la maison 1 $ et si, nous, on calcule que la maison vaut 10
000 $, elle va être taxée pour le montant qu'elle vaut. Cela n'a
pas de bon sens.
M. Ciaccia: Je suis entièrement d'accord avec vous. La
première lettre que vous avez lue, elle ne vous dit rien. Elle vous dit
strictement qu'ils interpréteront la loi; mais la loi est claire, c'est
taxable. Ce qu'on demande serait d'avoir un engagement voulant que cela ne soit
pas taxable, spécialement dans le contexte actuel. On a
été à Port-Cartier il y a quelques jours. Les gens qui ont
été licenciés et ont reçu certaines primes de
séparation, certains montants de compensation, le gouvernement est
derrière eux pour obtenir des impôts. Je pense qu'il y a une
limite à pouvoir aller chercher de l'argent chez les contribuables.
C'est une justice sociale, dans des cas comme ceux-là, de faire des
exceptions. J'inviterais le gouvernement à les considérer et
à s'engager formellement.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Duhaime: M. le Président, je voudrais revenir sur un
des points qui a été soulevé dans le mémoire des
métallos au sujet des programmes d'exploration. Je n'ai pas la page en
mémoire. Vous mentionniez une inquiétude voulant qu'il y aurait
eu des programmes de réduits au ministère de l'Énergie.
C'est exact que la quantité des programmes a été
réduite, pour une raison assez simple: il y a eu une concentration de la
dépense. Je voudrais essentiellement dire ceci: Le budget du
ministère de l'Énergie et des Ressources, sur une base annuelle,
pour ce qui est des mines, est d'environ 30 000 000 $. Il y a 10 000 000 $ par
année qui sont affectés à des dépenses
d'exploration. Nous sommes passés, de 1982 à 1983, en
arrondissant les chiffres... Nous allons consacrer, en 1983, 20% du budget
d'exploration du ministère dans la fosse du Labrador.
J'ajoute aussi que nous avons, au
Centre de recherche minérale, pour la période de 1978
à 1982, cumulé, en dépenses affectées à la
recherche, essentiellement sur le minerai de fer, un montant de 1 700 000 $. Je
pense que c'est important de le souligner. Nous sommes dans un ordre de
grandeur de dépenses de l'ordre de 2 000 000 $, en 1983.
J'ajoute, M. le Président, que, si nous voulons donner à
la région de la Côte-Nord une vocation autre que celle de
l'activité économique de l'exploitation du minerai de fer, il
nous faudra y consacrer davantage d'argent. De l'argent public, bien sûr,
mais aussi de l'argent des compagnies privées. Quelqu'un disait hier
qu'un gouvernement, ça n'a pas d'argent. C'est vrai et c'est faux en
même temps. Si le gouvernement décide de consacrer une enveloppe
de 20 000 000 $, 25 000 000 $, 30 000 000 $, sur une période de quatre
ou cinq ans, à un programme d'exploration accélérée
dans la fosse du Labrador, il est évident que nous prendrons l'argent
quelque part.
Ces décisions ne seront pas annoncées ici, à cette
commission parlementaire, malgré les appels du pied que l'on
reçoive. Je pense qu'il est tout à fait normal que cette
commission parlementaire remplisse d'abord et avant tout sa première
mission et son mandat qui est d'entendre les gens qui ont des choses à
dire dans ce dossier.
M. le Président, j'ajouterais essentiellement ceci. Le
député de Mont-Royal, tantôt, faisait un exposé
qu'on entend très souvent, nous, à l'Assemblée nationale.
Je voudrais dire une chose claire: Sur ce continent, une entreprise qui ne fait
pas de profits est condamnée à mourir. Une entreprise qui fait
des profits, c'est une entreprise qui est en mesure de retourner des dividendes
à ses actionnaires, qui est en mesure de réinvestir et de
créer des emplois. Cela, c'est marqué à peu près
partout. C'est écrit presque partout sur ce continent. D'où ma
surprise, lorsque la compagnie IOC fait des profits, retourne des dividendes,
fait des investissements, mais n'est plus capable de maintenir ses emplois.
Chacun évaluera les explications qui ont été fournies.
M. le Président, il faudrait que l'on mette les cartes sur la
table. La situation des activités dans le minerai de fer au
Québec est menacée. C'est certain, tout le monde sait cela.
Peut-être seulement les libéraux l'apprennent maintenant. C'est
vrai que la concurrence vient du Brésil. Elle vient aussi de
l'Australie, de la Suède. À partir de la proposition qui est
faite par M. Godbout de mettre sur pied un "task force" pour Schefferville, je
pense qu'on raterait une occasion. Les événements que nous vivons
depuis quelques mois ici à Schefferville, qui ont une
répercussion sur tout le Québec, sont une grande leçon
pour tout le monde: une leçon pour les compagnies, une leçon pour
les syndiqués, une leçon pour les travailleurs, une leçon
pour les gouvernements aussi.
Je pense qu'on doit élargir le débat. Les activités
d'extraction de minerai de fer, de boulettage et d'expédition, il faut
tenir compte dans quelle perspective cela se situe. C'est sur un marché
international. Il n'y a personne qui va se lever ici, devant cette commission
parlementaire, pour soutenir que, si nous ne restons pas concurrentiels, nous
allons continuer de vivre quand même. C'est impossible. Pour être
concurrentiel, il faut voir l'ensemble de tout le dossier.
Il y a, bien sûr, la question des salaires et des conditions de
travail. Il y a les conditions climatiques, il n'y a pas grand-chose qu'on peut
faire là-dessus. Il y a la question de l'énergie, le coût
du mazout, les possibilités de conversion du mazout à
l'hydroélectricité. Il y a la question des tarifs de transport
aussi, qui sont administrés par le gouvernement fédéral.
Il y a la question des royalties. Il faut penser maintenant que, dans quelques
années, si le projet minier de Carajas au Brésil entre en
exploitation, c'est 35 000 000 de tonnes de minerai de fer qui viennent sur le
marché international. Si nous ne sommes pas concurrentiels à ce
moment-là, je pense que les événements que nous vivons ici
sont seulement un préavis de ce qui s'en vient. Cela veut dire une
concertation solide. Nous, de notre côté, nous sommes prêts
à faire ce pas. Je suis convaincu que nous en sommes capables, avec les
métallos qui représentent l'ensemble, sinon la totalité
des travailleurs impliqués dans le dossier du minerai de fer au
Québec. (13 h 15)
Nous devrons aussi, bien sûr, compter sur l'appui et une
réponse favorable des compagnies. Il y a IOC, mais il y a aussi
Québec Fer et Titane. Il y a Québec Cartier Mining. Il y a
SIDBEC-Normines. Il y a la mine Wabush et il y en a d'autres aussi. Je pense
que nous devrions, à partir de la proposition d'un "task force", mettre
sur pied une table où l'on dirait: C'est cartes sur table. Une table de
concertation, je ne voudrais pas qu'on prenne des mois à la
préparer. Une table de concertation où les municipalités
seraient présentes, bien sûr. Je retiens davantage cette
proposition. Cela n'exclut en aucune manière que le "task force" puisse
fonctionner ici même à Schefferville pour les problèmes
directement reliés à Schefferville, mais, si on veut avancer dans
le dossier, penser à moyen et à long terme, il faudrait qu'on
enclenche et qu'on saisisse cette occasion qui est, à mon sens, un
signal d'alarme parce qu'une des plus grandes compagnies sur ce continent qui
exploite, qui a réussi, suivant les dires du président de la
compagnie hier et suivant ce que les travailleurs viennent de dire ce matin, un
effort de redressement à même les
grands tableaux qu'on a pu examiner, la productivité a
été améliorée, le seuil de production avait
été ramené, on tourne à profit, et on arrive un bon
matin devant la situation où on doit cesser l'exploitation. Si c'est
vrai dans un cas, cela pourrait être vrai dans d'autres et on n'aurait
pas le droit de dire qu'on n'a pas eu l'occasion de bouger.
M. le Président, c'est dans ce sens que je termine ici en
demandant une réaction de la part des métallos sur cette
proposition d'aller tout de suite vers une table de concertation.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Ce
serait un mot de conclusion en même temps, M. Godbout; d'accord?
M. Godbout: Sur cette question précise, nous disons oui
à une table de concertation plus large, mais pas dans le cadre du "task
force" dont nous avons parlé dans notre mémoire. Nous croyons que
cela doit se faire avec un forum différent. Nous avons une proposition
précise qui s'attache à l'avenir de Schefferville, mais nous
sommes d'accord avec une table comme celle que vous proposez, qui est plus
large et qui implique beaucoup plus de personnes.
M. le ministre, vous avez parlé de la conclusion... M. le
Président, je m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Godbout: Vous avez changé de titre. J'ai posé
une question qui n'a pas reçu de réponse. Si vous le permettez,
avant de faire la conclusion, je voudrais avoir la réponse. Nous sommes
ici à Schefferville. C'est la première fois qu'une commission se
déplace dans une région. Les gens d'ici attendent beaucoup de la
commission, en droit, à part cela; je crois qu'ils ont raison
d'attendre. Nous avons posé une question à tous les membres
présents à la commission, du gouvernement et de l'Opposition et
je la réitère: Êtes-vous prêts, ensemble, à
recommander à l'Assemblée nationale une législation sur
les fermetures de mines et d'usines? J'ai posé cette question et
j'attends la réponse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
M. Marois: M. le Président, je pense que mon ancien
adjoint parlementaire, le député de Prévost, a
expliqué l'ensemble de la problématique, l'ensemble des travaux
qu'on a faits. Je sais que cela n'avance pas au rythme de votre impatience et
je pourrais vous dire aussi que cela n'avance pas au rythme de mon impatience
personnelle. Mais je peux vous garantir une chose. En ce qui me concerne, je
vais faire tout ce qui est humainement possible pour qu'en concertation avec
les parties... Parce qu'il y a des morceaux dont il va falloir discuter. Votre
propre conception des choses évolue parce que les réalités
changent. La nôtre aussi et on devra travailler ensemble. On avance, on a
fait beaucoup de travail de déblayage, le député de
Prévost l'a bien résumé; c'est notre volonté
arrêtée d'aboutir là-dessus. La réponse à
votre question en ce qui me concerne - je parle en tant que ministre, membre
d'un gouvernement - est d'aboutir dans les meilleurs délais
possible.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: II faudrait être aveugle, M. Godbout, pour ne
pas constater, à la suite de cette visite à Schefferville, qu'il
s'impose d'avoir une loi, surtout lorsqu'il s'agit de mines. Si la même
loi peut s'appliquer à d'autres cas semblables dans le domaine
industriel, tant mieux. Certainement qu'à la suite de l'engagement du
gouvernement, je peux vous assurer que nous ne pouvons pas dès
maintenant appuyer la loi qui n'existe pas, mais nous croyons qu'il est
opportun d'agir dans ce sens.
M. Godbout: Des représentants du gouvernement et de
l'Opposition, de MM. les membres de l'Assemblée nationale qui sont ici,
nous avons reçu des réponses claires et positives, à mon
sens, à chacune de nos demandes et de nos conclusions principales. Nous
avons insisté pour avoir des réponses immédiates. Nous les
avons eues. C'est au nom des travailleurs et des citoyens de Schefferville que
nous voulons vous remercier chaleureusement parce qu'ils n'ont pas eu la chance
de vous voir souvent dans le coin. Nous avons aujourd'hui l'espoir que nous
pourrons ensemble, avec toute notre bonne volonté, régler
rapidement tous les problèmes urgents que confrontent les citoyens et
les travailleurs de Schefferville et analyser rapidement les chances de survie
de cette ville. Je dirai, en terminant, que le voyage de la commission à
Schefferville, malgré toutes les difficultés que cela a pu causer
à tout le monde, à notre sens, a été fructueux. On
vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie
également. Merci, M. Godbout, ainsi que les autres membres du Syndicat
des Métallos qui vous accompagnaient. Pour éclairer tout le
monde, comme ce serait à peu près l'heure d'une suspension
normale, je voudrais indiquer qu'à la suite des ententes entre les deux
partis, il arriverait ce qui suit: On entreprendrait immédiatement
l'étude du mémoire du Conseil des Indiens montagnais de
Schefferville, en revenant à
l'ordre régulier, et on suspendrait les travaux après ce
mémoire, ce qui nous amènerait vers 2 h 25. On arrêterait
pour une heure seulement pour épargner du temps, non pas sur les
mémoires, mais sur le temps du dîner des membres de la commission.
C'est l'entente que j'avais comprise, si je n'ai pas de... Alors, on me dit
qu'il ne faudrait pas que les gens qui nous regardent soient choqués de
voir les parlementaires manger un sandwich, à l'occasion, à la
table, en continuant de travailler. J'espère que vous serez
indulgents.
J'appelle immédiatement le Conseil des Indiens montagnais de
Schefferville, représenté par le chef de bande, M. Gaston
McKenzie, ainsi que d'autres personnes qu'il voudra bien nous présenter
lui-même.
S'il vous plaît! Tout le monde va s'installer. Je demande le
silence. S'il y a des caucus à faire dans la salle, on pourrait
peut-être les faire à l'arrière.
Alors, tout le monde est en place. Je demande donc au chef de bande des
Indiens montagnais, M. Gaston McKenzie, de nous présenter les personnes
qui sont avec lui et de procéder à la lecture de son
mémoire. M. McKenzie.
Conseil des Indiens montagnais de
Schefferville
M. McKenzie (Gaston): Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous
plaît!
M. McKenzie: À ma droite, M. Alexandre McKenzie, membre du
conseil; M. René Simon, président du Conseil
attikamèque-montagnais; M. Augustin Vollant, membre du conseil; M.
Georges André, membre du conseil.
Le Président (M. Bordeleau): Excusez, M. McKenzie. Changez
donc de micro, j'ai l'impression que le vôtre ne fonctionne pas bien.
M. McKenzie: (S'exprime dans sa langue).
Ce que j'ai dit en montagnais, je vais le répéter en
français. Je remercie les Naskapis et les Montagnais d'être venus
assister à la réunion pour entendre nos demandes.
Je vais procéder tout de suite à la lecture du
mémoire. Vous remarquerez qu'il y a trois parties à notre
mémoire: la première partie, les déclarations; la
deuxième partie, notre situation socio-économique de 1955
à aujourd'hui et, la troisième partie, les recommandations.
Les Montagnais qui vivent à Matimékosh, réserve
indienne aménagée à l'intérieur des limites de la
municipalité, ainsi qu'au lac John, qui se situe à deux
kilomètres environ du centre de la ville, sont une composante
essentielle de la situation de Schefferville. Ils forment une communauté
bien organisée, ayant leur vie propre et leur autonomie. Cette
communauté représente, avec les Naskapis, le seul
élément stable de la région, quelles que soient l'offre et
la demande de la ressource minière.
La communauté indienne réside au Québec et elle a
un statut juridique défini. Les parcelles de terrain que le
Québec a bien voulu concéder au gouvernement
fédéral "pour être administrées par lui en
fidéicommis pour les Sauvages de l'endroit aux conditions
précitées par l'article 67 de la Loi des Terres et Forêts",
selon les termes de l'arrêté en conseil du 7 juin 1960, consituant
la réserve indienne du lac John, sont de responsabilité
fédérale. Mais cette communauté indienne est au
Québec. Cela a été signifié formellement par le
gouvernement québécois qui a reconnu l'existence des droits des
autochtones.
Enfin, la communauté montagnaise locale, de concert avec le
Conseil Attikamègue-montagnais, a entrepris un processus de
négocation avec les gouvernements fédéral et provincial en
ce qui concerne les droits aboriginaux.
Nous voulons que le gouvernement provincial prenne acte des
particularités de notre situation et des implications qu'elle comporte
pour l'avenir de Schefferville. Nous voulons signifier clairement notre
intention de continuer à y vivre et d'occuper toute la place qui nous
revient aux plans social, culturel, économique et même
politique.
Nous présumons fermement que les demandes exprimées par
nous, dans le cadre des travaux de cette commission, ne porteront aucun
préjudice aux revendications fondamentales faisant l'objet de
négocations en cours entre nous et les gouvernements.
Nous espérons une action concertée de toutes les instances
politiques et économiques face aux problèmes créés
par l'arrêt des opérations minières. Nous voulons
désormais participer pleinement aux décisions qui seront
déterminantes pour l'avenir de Schefferville et de la région.
Quels que soient le mandat et les contraintes auxquels est soumise la
commission parlementaire, nous tenons à ce que tous les
éléments de notre déclaration demeurent à
l'arrière-plan de ses préoccupations. (13 h 30)
Deuxième partie: Données essentielles de notre situation.
Historique de notre implantation. Bien longtemps avant l'IOC, les Montagnais
ont occupé le territoire de la ville de Schefferville ainsi que les
sites des opérations minières ultérieures. Les premiers
prospecteurs de la région pourraient en
témoigner. La plupart d'entre eux ont été
assistés par des trappeurs montagnais, alors établis autour de
Sept-Îles en période estivale. Aux autres saisons, avec toute leur
famille, ces trappeurs venaient vivre sur le territoire de trappe aux environs
de Schef-ferville.
C'est à partir de 1950, avec les premières installations
de la ville, que nous avons commencé à y vivre toute
l'année. Il faut se rappeler qu'à cette époque, les
activités de chasse, de trappe et de pêche constituaient encore la
base de notre économie et de notre façon de vivre. Il
était avantageux pour nous de nous établir près d'un
centre urbain pour écouler nos fourrures et obtenir quelques services.
En 1950, nous étions 40 familles environ à l'endroit où se
situe maintenant la piste d'atterrissage de l'aéroport.
Puis, en 1955, date de la fondation de Schefferville, nous nous
établissions près du lac John qui devient réserve indienne
en 1960. Nous vivions alors dans des tentes ou des cabanes sans aucun service
d'aqueduc et d'égout et cela, jusqu'en 1976.
En 1976, la plupart des familles montagnaises et naskapis ont
emménagé dans des immeubles à logements multiples à
Matimékosh, constitué en réserve par arrêté
en conseil le 21 avril 1968.
Par la suite, en 1976, un système d'aqueduc et d'égout fut
construit au lac John pour desservir une dizaine de nouvelles maisons
construites pour les familles qui avaient refusé de s'installer à
Matimékosh. C'est ainsi que les familles montagnaises sont maintenant
réparties, selon les priorités et les goûts de chacun, en
deux réserves distinctes: celle de Matimékosh et celle du lac
John.
Notre situation socio-économique de 1955 à aujourd'hui. En
1955, alors que la population de la ville de Schefferville comptait 3479
personnes, nous représentions 5,5% de la population.
Présentement, en excluant les Naskapis, nous représentons 27% de
la population. Avec ces derniers, nous sommes 41% de la population totale de la
région. Selon les mouvements de la population blanche anticipés
pour les prochains mois, ce pourcentage risque d'augmenter
substantiellement.
Si l'on examine la structure d'âge de notre population actuelle,
nous constatons qu'il s'agit d'une population jeune puisque 65,5% d'entre nous
avons moins de 25 ans.
Emploi. Dans les années cinquante, lors de la construction du
chemin de fer, de la mine et de la ville de Schefferville, les chefs de
familles montagnaises étaient à peu près sans instruction,
ce qui les rendait inaptes à occuper des emplois autres que ceux de
manoeuvres. Nos enfants, par contre, ont pu acquérir une certaine
instruction, mais, lorsqu'ils furent en âge de travailler, la plupart des
emplois intéressants étaient déjà occupés.
L'expansion économique était terminée et l'on assistait
même déjà à une amorce de déclin de
l'exploitation minière.
De 1976 à 1981, sur les 100 à 125 personnes de notre
population active, le nombre de Montagnais qui travaillaient à
l'exploitation minière est demeuré stable, soit 25 ou 26
personnes. En ce qui concerne les emplois dans les services, commerces et
industries locales occupés par les Indiens, ils étaient
pratiquement inexistants en dehors de la communauté indienne. La
situation de l'emploi s'est détériorée
considérablement: en 1981, il ne restait que 7 travailleurs montagnais
à l'IOC. Enfin, pour les étudiants qui sortent du secondaire, le
conseil de bande, les institutions de santé et d'enseignement demeurent
jusqu'à présent les seuls débouchés.
Scolarisation. En 1981-1982, les jeunes à l'école
représentaient 35% de la population montagnaise. Au cours des
années qui viennent, ces jeunes entreront graduellement sur le
marché du travail, venant sans doute grossir les rangs des
assistés sociaux et chômeurs, à moins, bien sûr, que
des changements importants ne se produisent dans l'économie
régionale et que des programmes spéciaux ne soient mis en place
pour que notre population active puisse occuper, contrairement à ce qui
est prévu jusqu'à maintenant, la part d'emplois qui lui revient
dans le secteur de l'exploitation des ressources et dans les secteurs
secondaires et tertiaires.
Par ailleurs, n'ayant pu apprendre à l'école une langue
d'enseignement étrangère en plus des autres matières
enseignées, sans parler des modèles culturels différents,
nos élèves ont pris du retard par rapport aux jeunes non-Indiens,
ce qui a pour effet de freiner l'accès aux qualifications pour
l'emploi.
Le système d'enseignement actuel auquel nos enfants doivent
s'adapter ne tient pas réellement compte de leur
spécificité linguistique et culturelle. C'est là, sans
doute, la cause principale des problèmes scolaires que nos
élèves ont connus jusqu'à présent. Si on examine le
tableau de l'annexe 3, on constate que presque la moitié des
élèves montagnais inscrits au secondaire en 1981-1982
étaient dans des classes dites spéciales, bilan peu enviable. Des
changements profonds au système d'enseignement s'imposent donc si on
veut que nos jeunes aient une certaine égalité de chances en
instruction, éducation et emploi.
Impacts économiques de la communauté montagnaise sur
Schefferville. En 1981, nous avons évalué la somme totale des
montants perçus par notre communauté et par ceux qui nous
fournissent des services (services sociaux, de la santé,
éducation, services municipaux, etc.) à quelque 2 500 000 $.
Quelle que soit la provenance de ces fonds, ils sont en
quasi-totalité dépensés ici même à
Schefferville pour les divers services et biens de consommation. Il s'agit
là d'un apport direct à l'économie locale, apport qui
contribue par effet d'entraînement au maintien d'un grand nombre
d'emplois et de services pour les résidents de Schefferville.
Perspectives d'avenir. L'emploi. Au plan démographique, nos
projections révèlent que la population active montagnaise,
aujourd'hui de 252, atteindra, en 1991, quelque 377 personnes. En dépit
du fait qu'en 1981 un nombre restreint de Montagnais occupaient des emplois
à temps plein et que des travaux saisonniers ont procuré de
l'emploi à quelques autres, nous avons connu un taux de chômage se
situant autour de 50%. À la suite de l'arrêt des opérations
de la mine, ce taux dépassera probablement 75%. Cette situation de
sous-emploi est d'ailleurs illustrée par le nombre de
bénéficiaires d'aide sociale et par les montants versés,
tel qu'indiqué dans l'annexe 5.
Le mode de vie. Nous avons été témoins, au cours
des 30 dernières années, du développement rapide d'une
ville minière avec toute sa gamme de services et d'entreprises qui
prospéraient, alors que nous n'avions ni l'instruction ni la formation
professionnelle requises pour y participer pleinement et en tirer profit.
D'autre part, nous n'avons jamais abandonné notre mode de vie
traditionnel car il est pour nous, Montagnais, le fondement de notre culture.
Il va sans dire que la situation économique actuelle dans la
région nous incite à recourir encore davantage à la
chasse, la trappe, la pêche, comme moyens de subsistance. Les
recommandations et exigences que j'ai énumérées en
conclusion de ce mémoire indiquent d'ailleurs clairement le sens de nos
aspirations légitimes dans ce domaine.
La jeunesse. Au cours des dix dernières années, nous
prévoyons que nos jeunes seront de plus en plus nombreux à
terminer leurs études. Ils seront ainsi mieux préparés
à occuper la place qui leur reviendrait sur le marché du travail.
Mais trouveront-ils de l'emploi?
Les ressources naturelles. Il est certain que notre sol contient des
ressources encore inexploitées et qu'il y aura reprise économique
d'ici quelques années. Cependant, contrairement à ce qui est
arrivé il y a 30 ans, nous entendons cette fois réclamer notre
pleine participation à tout développement futur de nos
ressources.
La ressource humaine. Certaines actions devront être prises pour
assurer que les autochtones du territoire soient dès à
présent considérés comme étant une ressource
humaine importante pour le développement de la région. Alors,
plutôt que de miser exclusivement, ou presque, sur une main- d'oeuvre
importée et entretenue à grands frais, les gouvernements et le
secteur privé auraient intérêt à investir dès
maintenant dans une formation professionnelle et polyvalente de notre
population active. À tout projet de cet ordre, nous sommes toujours
prêts à collaborer.
La présence montagnaise. Notre communauté a souvent
été perçue comme négligeable dans l'économie
locale et régionale. Pourtant, elle constitue un marché essentiel
de biens et de services et ce, tout particulièrement dans le contexte
actuel lorsque nous permettons à plusieurs établissements et
institutions de se maintenir. De plus, nous représentons encore le seul
élément de stabilité dans la région et nous
demeurons une ressource humaine importante pour tout développement
futur.
La troisième partie, les recommandations. Considérations.
Considérant que nous avons habité cette région depuis des
temps immémoriaux, que nous vivons ici et que nous continuerons à
y vivre; considérant que le mode de vie traditionnel est
nécessaire à notre survivance, à notre cohésion
sociale et à notre épanouissement culturel; considérant
que nous entendons participer conjointement à tout développement
futur dans le territoire; considérant que nous entendons être
partie intégrante du processus décisionnel qui affectera
directement et indirectement notre communauté et son environnement;
enfin, considérant que le gouvernement provincial a déjà
reconnu les droits aborigènes;
Nous exigeons que les services actuels d'aqueduc, égouts, routes,
loisirs, santé, éducation, soient maintenus, de même que
les moyens de communication, en particulier, le chemin de fer essentiel
à notre approvisionnement de base; que le gouvernement provincial
maintienne le statu quo en ce qui concerne les quotas de chasse et de
pêche touristiques, ainsi que la réglementation afférente
à ces activités de façon à conserver les ressources
fauniques nécessaires à notre alimentation et à l'exercice
de notre mode de vie traditionnel, et ce, jusqu'à ce qu'il y ait une
entente à ce sujet entre le gouvernement et la partie indienne; que soit
confiée aux Montagnais l'élaboration d'un plan de gestion et
d'exploitation de la faune, incluant la création de pourvoiries, de
tanneries, la transformation et la commercialisation, les services de guides
touristiques, etc.; que soit fournie aux Montagnais une information
précise sur chaque projet éventuel d'aménagement et
d'exploitation du territoire; enfin, que leur soient garantis une large
participation, un droit de regard et un pouvoir décisionnel dans tous
les projets de développement effectués sur le territoire.
Je voudrais demander au président de la commission de donner la
parole à notre
président du Conseil attikamèque.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. M. Simon.
M. Simon (René): Je vais essayer d'être bref. Je
sais qu'il y a plusieurs autres mémoires qui vont être
présentés à cette commission. Au tout début de
l'exposé de M. McKenzie, chef de bande de Schefferville, il y a un point
qui a été soulevé en ce qui a trait aux
négociations que notre organisation, le Conseil
attikamèque-montagnais, doit entreprendre avec les deux paliers de
gouvernement, c'est-à-dire le gouvernement provincial et le gouvernement
fédéral. (13 h 45)
Nous avons déjà eu l'occasion, du moins à deux
reprises, lors de commissions parlementaires, de soulever ces points,
notamment, au niveau de la Loi sur la conservation de la faune. Je pense qu'il
y a eu une autre commission sur la question énergétique. Nous
avons eu l'occasion de soulever certains faits. J'aimerais vous exposer
certaines réalités qui, je pense, seront beaucoup plus au profit
de l'Opposition, certaines réalités lorsqu'on parle de
négociations qu'on doit entreprendre avec le gouvernement
provincial.
Je pense qu'en tant qu'organisation indienne, cela fait au-delà
de dix ans qu'on essaie d'entreprendre de vraies négociations avec le
gouvernement provincial et avec le gouvernement fédéral.
Maintenant, depuis 1979, nous avons eu la confirmation que le gouvernement
fédéral acceptait le mémoire qu'on lui avait
déposé pour fins de négociations avec le gouvernement
provincial. Cela fera quatre ans cette année. Il n'y a pas eu
réellement un vrai processus de négociation. Il y a certains
points qu'on a essayé de soulever, il y a certains
éléments qu'on a essayé de clarifier avec le gouvernement
provincial. Je vais vous donner quelques exemples. Je sais que, à cette
commission parlementaire, on parle de maintenir la ville de Schefferville sous
prétexte qu'il y a des citoyens qui veulent y rester. D'un autre
côté, on dit: II faudrait maintenir la ville de Schefferville sous
prétexte qu'il y a des Indiens. Il y a les Naskapis et les Montagnais.
Avant l'ouverture de la ville de Schefferville, il y a toujours eu des
Montagnais, il y a toujours eu des Naskapis dans ce territoire. Cela, je pense
que c'est un élément assez important pour nous autres, de
façon à ne cautionner aucune recommandation dans ce sens. Je
pense que les Indiens veulent rester dans ce territoire, que c'est la position
des Montagnais et celle des Naskapis.
Quand on parle de négociations à entreprendre avec le
gouvernement du Québec, je sais que la plupart... J'ai essayé de
lire de long en large les principaux mémoires qui sont
présentés ici et surtout les recommandations. Si ma
mémoire est fidèle, il y a un an ou deux, il y a eu une
série d'articles de la part des mass media, surtout des chroniqueurs de
chasse et de pêche, où on accusait les Indiens, surtout le peuple
montagnais, d'être des éléments destructeurs de la nature,
d'être des exterminateurs de troupeaux de caribous. Maintenant, on parle,
dans les principales recommandations, de libéraliser cette chasse, de
commercialiser le caribou. À ce sujet, il y a un élément
qui est incompréhensible. Il y a deux ans, on nous accusait d'exterminer
les troupeaux de caribous; maintenant, on veut commercialiser le caribou. Je
pense qu'il y a un éclaircissement qui doit être fait de ce
côté, si on parle uniquement de la chasse au caribou.
Quand on parle de la situation indienne, surtout en matière de
revendications, les principales recommandations que le conseil de bande a
émises, on les a faites en tant qu'organisation indienne, parce que cela
rejoint les idées, cela rejoint aussi les principes directeurs qu'on
veut véhiculer lors des négociations qui, soit dit en passant,
débuteront le mois prochain. Si on se réfère aux
principales politiques des différents gouvernements qui ont
gouverné ce pays, ce Québec, on peut se remémorer certains
projets, des grands projets, qui ont eu des effets assez néfastes sur le
mode de vie des Indiens. On peut se remémorer Hydro-Québec qui a
développé des barrages sur la Manic, l'Outarde et la Bersimis.
Quand on parle de ces barrages, encore là, je sais qu'il y a eu des
articles de journaux qui ont paru où on accusait les Indiens de Bersimis
d'exterminer le saumon. Si les parlementaires connaissent leur
géographie, la rivière Bersimis, ils savent que le barrage de la
rivière Bersimis est situé à 45 milles de l'embouchure. Or
les Indiens demeurent à l'embouchure de la rivière. Encore
là, on a accusé les Indiens d'être le groupe exterminateur
du saumon.
Toujours dans le même cadre, quand on parle de négociation,
il y a quelque deux ans, on a essayé d'amorcer un processus de
négociation qui, à nos yeux, était très
sincère, dans le but de régler le conflit des rivières
à saumon. Au sujet de ces négociations, on peut se
remémorer deux faits. Le gouvernement s'est toujours dit prêt
à écouter les Indiens, prêt à leur accorder les
droits qui leur revenaient, à faire des concessions, à les
compenser pour les accrocs passés, pour toute forme de destruction, que
ce soit en matière territoriale ou au niveau de la faune. J'ai
soulevé la question des rivières à saumon. Je vais vous
remémorer un fait qui semble à mes yeux être assez
important quand on parle de négociations avec le gouvernement
provincial.
Il y a une réserve indienne de la Basse-Côte-Nord qui
s'appelle la Romaine, où il y
a quelque 600 personnes indiennes montagnaises. Il y a deux ans, comme
je le disais, on a essayé d'amorcer un processus de négociation,
de règlement sur cette rivière. Sur cette même
rivière, il y a six actionnaires américains qui détiennent
tous les droits. On n'a jamais donné l'occasion aux Indiens de
pêcher le saumon, sinon que les Indiens pêchent de façon
illégale, et ce, depuis 1800, 1900... C'est une rivière assez...
Lorsqu'on a amorcé le processus de négociation pour essayer d'en
arriver à une entente avec le gouvernement provincial, on a dit aux
Indiens: Vous avez tant de pieds de la rive pour pêcher, pour mettre vos
filets. On a dit aux Indiens: Vous avez des quotas à respecter, des
journées de pêche à respecter. Vous allez rendre compte aux
gardes-chasse, aux gardes-pêche du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche de toutes les prises que vous ferez.
Ce qui est important là-dedans, c'est qu'on a dit aux Indiens:
Vous prendrez X saumons selon la prise que feront les sept actionnaires du
club. Si les sept actionnaires prennent 120 saumons, les Indiens auront le
droit de prendre 120 saumons. Encore là, c'est un fait inexplicable si
on fait le rapport: sept actionnaires pour 120 saumons, puis sept actionnaires
pour une population de 600 personnes qui essaie de maintenir un mode de vie
traditionnel, qui essaie, disons, de garder cette pêche de subsistance
pour une réserve indienne.
L'autre fait est au niveau des rivières à saumon, je pense
que cela a fait passablement la manchette des journaux. Il y a un an et demi
à peu près, on a essayé, encore là, d'entreprendre
un vrai processus de négociation avec le gouvernement provincial. Cela
concerne la rivière Mingan. Sur la rivière Mingan, il y a un
propriétaire américain qui détient un droit foncier, un
droit sur le fond de la rivière ou une certaine partie du territoire. On
a essayé de faire une démonstration en tant que groupe montagnais
avec les douze réserves qu'on regroupait à ce moment-là.
Au lieu d'essayer d'en arriver à une entente, M. Lessard, qui
était ministre à ce moment-là, nous a envoyé le
groupe de la Sûreté du Québec avec deux
hélicoptères pour justement effectuer l'opération. Il nous
a aussi envoyé l'escouade antiémeute de la Sûreté du
Québec pour justement dire aux Indiens: Allez-vous-en de cette
rivière, vous n'avez pas le droit de pêcher. Laissez donc
l'Américain, qui est seul propriétaire de cette rivière,
pêcher le saumon à sa guise. Ça, c'est un fait.
Il y a d'autres faits que je pourrais énumérer, toujours,
disons, dans le cadre de la négociation qu'on veut entreprendre avec le
gouvernement du Québec. C'est pour cela que, pour nous autres, c'est
très important lorsqu'on dit qu'on veut négocier avec le
gouvernement du Québec. Je sais qu'hier on a soulevé plusieurs
points, plusieurs bons éléments. On a parlé
d'équité. On a parlé de civiliser les relations. On a
parlé d'harmoniser les relations humaines. Je pense que ce sont des mots
qui reviennent de façon assez régulière lors des
rencontres avec le gouvernement. On dit: Bon, vous êtes un peuple
différent, vous avez droit à la différence en tant que
groupe autochtone, vous avez aussi certains droits sur le territoire en tant
que premiers occupants.
Dans le cadre justement de cette commission parlementaire, je pense que
le groupe montagnais, et encore là je pense que cela va être
probablement au profit de l'Opposition, n'a jamais signé d'entente
officielle. Donc, on ne demande pas à la commission de respecter une
convention. On est en voie de s'embarquer dans un processus pour en arriver
justement à une entente. Mais j'aimerais, en tant que
représentant de ce groupe des Attikamèques-Montagnais, soulever
un autre point qui va expliquer un peu la phobie que l'on a de cette commission
quant aux orientations qui vont être prises, quant aux politiques qui
vont être mises en place.
Il y a quelques années, on a parlé de la
démocratisation du territoire québécois. On n'a pas tenu
compte de la présence indienne dans le territoire
québécois. On a ouvert des ZEC, des zones d'exploitation
contrôlée, sans tenir compte du fait que les Indiens pratiquaient
leur mode de vie traditionnel. Et pour comble, on a exigé des Indiens de
payer des droits de passage afférents aux ZEC. Et pour comble, à
l'heure actuelle, je pense qu'il y a au-delà de trois cents causes
indiennes devant les cours qui attendent de passer, pour diverses raisons, en
matière de chasse et de pêche. Je pense qu'à ce point de
vue, pour nous, c'est pas mal important. On est prêt, en tant que groupe,
à entreprendre un processus de négociation avec le gouvernement
provincial, c'est-à-dire avec le gouvernement en place. Mais, une
question est importante pour nous, dans les diverses recommandations, comme je
le disais tout à l'heure. Qu'est-ce qui va ressortir? Quelle politique
le gouvernement du Québec va-t-il mettre en place pour maintenir
soi-disant la ville de Schefferville?
Nous n'avons rien contre le maintien d'une ville comme Schefferville.
Mais ce qui nous fait peur, ce qui nous effraie un peu, c'est qu'on est en voie
de s'embarquer dans un processus et qu'on parle dans les recommandations de
libéraliser la chasse au caribou, d'ouvrir des pourvoiries. Ce sont
là les deux principaux points qui, à mon avis, bloquent dans un
certain sens la négociation qu'on veut entreprendre avec le gouvernement
du Québec. Parce qu'il n'y a aucun règlement actuellement
là-dessus. Il n'y a aucune entente qui est stipulée entre
la partie indienne et le gouvernement provincial.
Ce sont des points que je voulais soulever pour justement donner aux
parlementaires l'idée qu'on a, comment on perçoit une commission
parlementaire. Personnellement, je participe à la quatrième
commission parlementaire, et on n'a jamais tenu compte de la présence
indienne. On n'a jamais tenu compte de ce que les Indiens voulaient
réellement. On nous a toujours dit: Le développement du
Québec va se faire selon la majorité. Vous autres, Indiens,
peut-être qu'on peut vous écouter. Peut-être qu'on peut vous
donner certains projets. Peut-être que vous pouvez participer à
l'élaboration de certaines orientations, certaines politiques, en tant
que groupe autochtone, mais pas plus. Pour nous, je pense que c'est cautionner
d'une façon morale le parti qui est au pouvoir. Il n'y a pas
réellement de négociation. Je pense qu'hier, quand la compagnie
Iron Ore a passé et les métallos, ce matin, on a surtout
parlé de négociation des conditions de travail. Mais pour nous,
Indiens, ce n'est pas une négociation des conditions de travail, c'est
une négociation de nos vies présentes et c'est une
négociation de celles des enfants qui vont venir, de notre avenir. C'est
un élément assez important. On se dit deux peuples fondateurs au
Québec. Nous, on se dit qu'en tant qu'Indiens, sommes le premier peuple.
Avant que Schefferville naisse, il y avait des Indiens ici. Et c'est un peu
dans ce cadre que je voulais faire mon intervention, non pas pour dire que je
suis contre toute recommandation, mais je pense qu'on est placés dans
une situation très délicate en tant que Montagnais, surtout pour
le développement du Nord, surtout pour l'application des politiques de
la part du gouvernement provincial. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Simon. M. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. (14 heures)
M. Chevrette: M. le Président, je remercie tout d'abord
les deux intervenants. Je voudrais me permettre de situer certains points de
l'intervention, tout d'abord, de M. Simon; ensuite, je passerai à des
questions spécifiques à M. McKenzie. Tout d'abord, M. Simon,
quand vous parlez de la détérioration du troupeau de caribous
pour les Montagnais, je suppose que vous ne parlez pas du tout du troupeau de
la rivière George, mais bien de celui de la Basse-Côte-Nord.
Est-ce qu'on se comprend bien là-dessus?
M. Simon: Quand on parle de troupeaux de caribous, on ne parle
pas du territoire de la Basse-Côte-Nord ou du territoire de
Schefferville, cela englobe le territoire indien.
M. Chevrette: Les événements que vous soulignez, ce
n'est pas dans la région ici, mais bien dans la
Basse-Côte-Nord.
M. Simon: Pour votre information personnelle, je sais que,
lorsque vous parlez d'un troupeau de caribous, je sais qu'il y a eu un massacre
de caribous qui s'élevait à trente ou quarante têtes de
caribous à la Basse-Côte-Nord. Le chef de la Romaine était
au courant de la situation. On a avisé le ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche pour justement envoyer des gardes-chasse, parce
que ce n'étaient pas des Indiens qui avaient fait le massacre. Le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous a dit: On
n'a pas d'argent, on ne peut pas y aller. Deux semaines après, il y
avait un autre groupe indien qui descendait par le train. C'étaient des
Indiens de Sept-Îles qui ramenaient, justement, des troupeaux de
caribous. Là, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche est intervenu en disant: Vous n'avez pas le droit de tuer des
caribous. Ces gens les attendaient à la sortie du train à
Sept-Îles.
M. Chevrette: Ce que je voulais préciser, c'est que ce
n'était pas dans la région ici. Est-ce que c'est bien cela?
M. Simon: Je vous demande pardon.
M. Chevrette: L'événement auquel vous avez fait
allusion s'était déroulé dans la
Basse-Côte-Nord.
M. Simon: Non. Il y a eu un massacre dans la
Basse-Côte-Nord. Il y a eu d'autres massacres dans d'autres
régions aussi. J'englobe le territoire au complet.
M. Chevrette: Je pense que vous faites allusion beaucoup plus
à certains contenus de journaux qu'à certaines
déclarations ministérielles ou gouvernementales, si je me fie
à ce que vous m'avez dit? Ceci dit. M. Simon, vous dites que les
rencontres sont difficiles, qu'il n'y a pas de négociation, qu'il n'y a
pas de rencontre. J'aimerais vous rappeler ceci: Le 13 septembre dernier - je
pense que vous l'avez reçue le 30 - nous vous écrivions, le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, une lettre dans
laquelle nous disions être prêts à parler de la
rivière des Escoumins, de la rivière Natashquan, de la
rivière la Romaine et de la rivière Saint-Augustin et on vous
disait un peu comment on voulait amorcer certains programmes. Enfin, on
concluait en disant ceci: II semble donc impérieux que nous nous
rencontrions pour établir un plan de travail et un mécanisme de
fonctionnement dans le but de donner suite aux activités
précitées.
Je tiens à vous souligner que toute démarche ou conclusion
issue de ces discussions sera sans préjudice à toute
négociation future de quelque nature que ce soit, parce qu'on ne veut
pas non plus se substituer au SAGMAI qui a la responsabilité des
négociations. Mais en tant que ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche, nous étions prêts à établir
avec vous un certain cadre dans lequel on pourrait fonctionner. D'ailleurs,
depuis mon arrivée au ministère, j'ai fait cette démarche
avec le chef Jacques, de Restigouche, où je l'ai rencontré
personnellement et j'ai établi un cadre pour permettre une
négociation plus ordonnée, plus structurée et qui
corresponde aux visées autant du ministre que du chef. De sorte que
c'est un peu la même procédure qu'on vous offrait.
Par la suite, j'ai demandé à mes fonctionnaires d'entrer
en communication avec vous à plusieurs reprises.
Malheureusement, il n'y a pas eu d'échange
téléphonique par la suite. Je vais vous réitérer
mon invitation. Dès que vous serez disponible pour établir un
cadre, je le serai. Je suis prêt à vous rencontrer
personnellement. En ce qui concerne mes responsabilités, je ne peux pas
me substituer à d'autres ministères ou à d'autres
organismes, mais en ce qui concerne le cadre de mes juridictions, je suis
prêt à vous rencontrer personnellement, établir les cadres
dans lesquels mes fonctionnaires ou vos représentants ou
vous-même, comme vous voudrez, pourront oeuvrer d'une façon
efficace et rapide.
M. Simon: Merci de l'invitation, monsieur. J'aimerais clarifier
une situation. Quand on parle de négociation globale d'une façon
très générale, je sais que SAGMAI a reçu le mandat
de négocier avec notre groupe. Maintenant, je sais que dans les
négociations passées, notamment avec votre
prédécesseur M. Lessard, on a débuté les
négociations avec SAGMAI, cela allait bon train, jusqu'au jour où
le ministre Lessard est intervenu dans le portrait en disant: C'est moi qui
suis responsable du dossier. Vous, représentants de SAGMAI, prenez vos
places ailleurs, c'est moi qui négocie. C'est là que les
négociations ont achoppé. C'est pour cela que, quand on parle de
négociation globale, on a toujours essayé de clarifier cette
situation: Avec qui négocie-t-on? C'est le SAGMAI qui a le mandat de
négocier avec notre groupe, on est parfaitement d'accord
là-dessus. Maintenant, la façon dont on envisage les
négociations pour notre groupe est d'une façon très
générale, c'est-à-dire qu'on ne veut pas s'embarquer dans
le processus dit sectoriel, c'est-à-dire prendre ministère par
ministère. Peut-être que, de la façon dont vous nous
parlez, il y a certaines choses qui peuvent se régler entre temps sans
porter préjudice à une entente ultérieure, à une
entente finale. Je suis parfaitement d'accord dans ce sens.
M. Chevrette: C'est exactement dans ce sens que je vous lance
l'invitation, parce qu'il m'apparaît qu'on est capable d'établir
des modus vivendi, des façons de vivre en attendant le fruit de vos
négociations dont je ne suis pas responsable. Vous le savez comme moi.
Moi, je veux demeurer à l'intérieur de mes juridictions, mais je
suis prêt, avec vous, à faire des aménagements, des modes
de gestion à court terme. On peut discuter d'homme à homme, je
pense, et fixer un cadre, des délais et un échancier à
part de cela. Je peux vous donner un exemple de ce que j'ai fait avec M.
Jacques: On a signé un échéancier jusqu'au 31 mars. Si nos
fonctionnaires et leurs représentants ne se sont pas entendus, M.
Jacques et moi-même nous rencontrerons à nouveau pour regarder ce
qu'il y a à faire et où sont les points d'accrochage. Je pense
que, de part et d'autre, on peut s'entendre si on agit de cette façon.
Je vous offre cette occasion. C'est à vous d'en juger, bien sûr,
mais je suis toujours disponible et quand bon vous semblera de me contacter -
je vais vous laisser toutes mes adresses et mes numéros de
téléphone - cela me fera plaisir de vous recevoir.
Maintenant, quant au mémoire des Montagnais de Schefferville, je
voudrais faire quelques remarques et vous poser une couple de questions. Je
voudrais tout d'abord savoir si vous êtes conscients que nous avons un
cheptel de caribous d'au-delà de 400 ODQ, que la
régénération est à peu près de l'ordre de
13% par année, alors que les prises sont à peine de 2%? Tout au
moins, selon nos spécialistes, on nous dit que de 35 000 à 50 000
prises ne présenteraient pas de danger pour le troupeau lui-même.
Est-ce que vous partagez ces avancées? Dans un premier temps, je vous
pose la question suivante: Est-ce que vous partagez ces avancées que
nous faisons au ministère?
Le Président (M. Bordeleau): M.
McKenzie.
M. McKenzie: Je pense que je peux donner une réponse comme
ceci: Vous avez des spécialistes. Les biologistes disent: D'accord,
c'est dangereux dans le moment. Mais quant à dire que nous partageons ce
qu'ils disent, ce qu'on demande depuis toujours, c'est qu'on soit
impliqués dans tout cela. Depuis toujours, on demande d'être
impliqués au point de vue discussion, décision, avec les
gouvernements. Depuis toujours, on fait des demandes là-dessus. On
demande à être présents à la table de discussion
pour savoir exactement de quelle façon on doit prendre une position.
C'est tout ce que je peux vous répondre.
M. Chevrette: Vous êtes en faveur de la "commercialisation"
du caribou?
M. McKenzie: Je n'ai pas dit que j'étais en faveur de la
commercialisation du caribou. Quand j'ai parlé de commercialisation, de
transformation dans le mémoire, j'ai bien spécifié qu'il
s'agissait d'une tannerie. Je n'ai pas parlé de commercialiser le
caribou.
M. Chevrette: J'interprétais que vous ouvriez la porte,
dans votre mémoire, à une certaine forme de commercialisation,
pour autant que vous étiez impliqués dans le mode de gestion.
J'avais compris - je vais reprendre - dans votre mémoire que vous
étiez ouverts à une forme de commercialisation, pour autant que
vous soyiez directement impliqués dans la gestion.
M. Simon: Je pense que ce qui est important dans le
mémoire du conseil de bande de Schefferville, c'est que quand on parlait
d'une tannerie, avec la fermeture de la ville de Schefferville, les Indiens
n'ont aucun moyen, à l'heure actuelle, d'avoir des revenus, sinon par
l'assistance sociale. Pour combler cette assistance sociale, je pense que les
Indiens aussi ont droit, et c'est tout à fait naturel de leur part, de
prendre une partie de leur subsistance dans leur territoire. Et je pense
qu'avec la fermeture de la ville de Schefferville, quand on parlait d'une
tannerie, je pense que pour nous, Indiens, on n'a jamais profité de la
chasse au caribou, c'est-à-dire de la part des revenus que les Indiens
pouvaient en retirer. Actuellement, qu'est-ce qu'on fait des peaux de caribou,
avec la chasse qui se fait à l'heure actuelle? Qu'est-ce qu'on fait des
bois de caribou?
Il y a une section chez les Indiens qui, je pense, apporte un revenu
assez substantiel, et qui est tout de même assez intéressante.
C'est toute la question de l'artisanat. C'est un peu dans ce sens qu'à
Schefferville, on parlait d'une tannerie. Mais je pense que Schefferville est
contre la commercialisation du caribou. C'est un peu ce que je disais: avec la
fermeture de la ville de Schefferville, les Montagnais n'ont pas d'autre choix
que de retourner à leur mode de vie traditionnel.
M. Chevrette: Je voudrais vous rassurer sur un point et
après cela vous posez une question additionnelle. Tout d'abord, vous
faites allusion aux services d'éducation, de loisirs et de santé
et M. le ministre d'État à l'Aménagement et au
Développement régional a assuré la population autochtone
tout autant que la population blanche, si elle décide de demeurer
à Schefferville, des services de base tant sur le plan éducation,
loisirs, sur le plan de la santé. Il n'est pas question
d'éliminer cela. C'est un engagement ferme et on va maintenir et
respecter nos engagements là-dessus.
Maintenant, vous faites allusion, dans votre mémoire, au besoin
que vous avez de conserver les moyens de transport ferroviaire, puisque c'est
une source d'alimentation pour vous, d'appro- visionnement. Vous faites
également allusion au fait que vous avez des services existants tels que
certains magasins, épiceries, etc. Je voudrais vous poser une question.
Si un nombre X de non-Indiens demeurait - décidait de demeurer, parce
que c'est une décision personnelle et individuelle - si un groupe de
non-Indiens, dis-je, décidait de demeurer à Schefferville, ne
croyez-vous pas qu'on doive exploiter l'une des richesses naturelles du milieu,
une richesse qui est renouvelable, par exemple le caribou, pour lui permettre
de subsister et de travailler? Et cette négociation-là ne
pourrait-elle pas se faire conjointement entre les non-Indiens et les
autochtones? Entre ceux qui décident de rester ici avec vos
communautés réciproques, vos conseils réciproques, puisque
vous affirmez, vous aussi, que vous avez besoin de conserver une structure de
marchés, de restaurants, d'épiceries, etc.? Tout en
désirant conserver vos droits culturels qui vous sont propres, je le
reconnais, est-ce que vous reconnaissez, d'autre part, de votre
côté, que ceux qui, depuis tout près de trente ans, sont
venus s'établir ici - il y en a même un groupe qui a vu le jour
ici - est-ce que vous leur reconnaissez une certaine forme de droit qui leur
permettrait à eux aussi de décider de rester ici, d'y vivre et
d'y gagner leur pain?
M. McKenzie: Je pense que nous, ce dont on a peur un peu, la
raison pour laquelle on a demandé une non-commercialisation du caribou,
c'est parce que la mine a marché pendant X années, pendant un
certain temps et après c'est fini, tout le monde s'en va. Mais qui
reste? Ce sont les Indiens qui vont rester majoritaires ici quand même
sur le territoire. Après avoir commercialisé le caribou, une fois
exterminé le caribou, qu'est-ce qui va rester pour nous après?
C'est là qu'on peut faire une étude déjà et dire:
d'accord, étant donné que nous, on va demeurer dans le
territoire, la mine c'est fini, tout le monde s'en va et nous n'avons pas le
choix d'aller ailleurs. Il faut rester ici pour encore bien des années.
Nos enfants vont vivre ici. C'est pour cela qu'il nous faut faire attention...
(14 h 15)
M. Chevrette: ...dans votre sens, M. McKenzie, qu'on ne doit pas
d'aucune façon, même si un jour on devait accepter la
commercialisation, il ne faudrait surtout pas permettre la commercialisation
"at large" qui aurait pour conséquences précisément
l'extermination du troupeau. Je pense qu'il faudrait être assez
brillant et travailler tout le monde ensemble pour fixer des quotas maximums
qui ne devraient absolument pas être dépassés. Je pense que
cela va de soi et je peux vous assurer que si on allait dans ce sens-là,
jamais on n'accepterait une commercialisation "at large", sans fixer des
normes. Si on n'en fixait pas cela mettrait en péril la survie
même du troupeau et à ce moment-là, je vous donnerais
totalement raison.
Je vais poser une dernière question.
M. McKenzie: Je voudrais faire une remarque avant que vous me
posiez une autre question. Il y a des réserves sur la Basse
Côte-Nord et d'autres réserves comme la rivière Bersinis.
Ils n'ont pas gardé le saumon quand ils ont fait le barrage.
Après avoir fait le barrage, c'était fini le saumon. Ils n'ont
pas pensé que les Indiens étaient là. lis n'ont pas
pensé à faire un barrage pour que le saumon passe pareil. Des
fois on dit... C'est la majorité toujours qui l'emporte.
M. Chevrette: Est-ce que vous seriez d'accord pour vous asseoir
avec les Naskapis et les non-Indiens pour discuter des éventuels modes
de gestion advenant la commercialisation?
M. McKenzie: Nous sommes toujours prêts à discuter
avec tout le monde. C'est toujours très difficile, dès le
départ, de s'accorder à cause du principe... Les gouvernements
ont déjà fait... Un peu comme René Simon, le
président du Conseil le dit, cela fait longtemps qu'on essaie de
discuter. Etant donné qu'on met toujours des points, ils ne veulent plus
discuter dans le sens qu'on veut discuter. Si tout le monde veut discuter
à une même table et discuter pour vrai, nous sommes prêts
à discuter.
M. Simon: J'aurais un point à ajouter à ce que le
chef vient de dire. Je pense qu'on n'a jamais été en
désaccord pour toute participation conjointe, de quelque forme que ce
soit et surtout à la ville de Schefferville, quand vous parlez des
soi-disant autochtones, les gens qui sont nés ici. Je pense qu'il est
parfaitement raisonnable d'emboîter le pas dans ce sens-là pour
que les gens, comme vous le dites, prennent une décision très
personnelle de rester à Schefferville. Je pense qu'un autre
élément, ce que M. McKenzie vient de dire, est qu'une fois que la
mine est fermée, il y a deux groupes qui restent de façon
prioritaire et ce sont les Indiens. Pour ajouter à ce que M. McKenzie
disait, ce dont on a peur dans tout cela, c'est qu'il n'y ait aucune part de
consultation auprès des Indiens. On essaie de maintenir une ville, comme
je le disais dans l'exposé que j'ai fait, mais à qui donnera-t-
on la priorité? Aux Indiens ou aux non-Indiens? On est prêt
à participer, à travailler de façon conjointe.
Il y a aussi un autre élément fondamental pour nous. On
n'a jamais signé d'entente, contrairement à nos frères
Naskapis. Eux se sont fait reconnaître certains droits par la Convention
du Nord-Est. On essaie d'entreprendre un tel processus. Il y a peut-être
un danger pour nous d'amorcer ou d'essayer de cautionner toute forme de
politique à venir.
M. Chevrette: Je remarque dans vos propos - pour autant qu'il y
ait une consultation valable et que cela se fasse conjointement, tout le monde
à une même table - que l'idée n'est pas rejetée
d'une façon catégorique. Je vous ferai remarquer que l'avantage
d'une telle approche, si on devait la discuter tout le monde ensemble -et je
pense que cela doit se faire de cette façon - c'est la retombée
économique du milieu. On évalue à près de 15 000
000 $ annuellement la retombée économique possible pour le milieu
de Schefferville, compte tenu du potentiel du cheptel que nous avons. Il nous
apparaît drôlement important qu'on puisse discuter et je pense que
vous avez raison de souligner que cela ne peut pas se faire
unilatéralement. Je pense qu'il faut respecter chacune des
communautés, mais comme ces trois communautés vivent sur un
même territoire -on verra combien prendront la décision de rester;
à ce moment-ci on ne peut même pas envisager quel sera le nombre
de non-Indiens qui décideront de se prévaloir de leur droit de
demeurer à Schefferville - cela devrait se faire conjointement, je suis
d'accord avec vous, quant aux trois groupes bien identifiés. À ce
moment-là, on pourrait peut-être vous donner les instruments et
les outils vous permettant d'entreprendre une discussion avec toutes les
données essentielles pour en arriver à une entente avec les trois
groupes.
M. Simon: Je vais ajouter un élément qui me semble
assez important lorsqu'on parle de consultation conjointe avec
différents intervenants dans un dossier quelconque. Je vais vous
présenter le cas -disons la réalité - de la route de la
rivière La Croche, à la hauteur de La Tuque. Une route avait
été planifiée, une route soi-disant forestière. Ce
que les Attikamègues ont fait, c'est de l'opposition au gouvernement en
disant: II n'y a aucune consultation au préalable de faite avec la
partie indienne. Il y a eu une soi-disant consultation. C'est dans ce
sens-là que j'abonde quand on parle d'une crainte à l'endroit des
politiques du gouvernement du Québec. Il y a eu une consultation. Il y a
différents intervenants, notamment le ministère de
l'Énergie et des Ressources, secteurs des forêts et des mines,
la compagnie en question, la CIP, et la partie indienne. Ce que les
Indiens rejetaient, c'était justement qu'une route soit construite sans
leur participation, sans leur accord préalable. On a dit aux Indiens:
D'accord, on va vous consulter. Quelle est la forme d'entente que vous voulez?
Qu'est-ce que vous voulez dans cette route?
Cela rejoint aussi l'idée qu'on vient de soulever. Lorsqu'on
ouvre une route - je pense que les Montagnais en ont l'expérience -
soi-disant forestière, il y a un apport économique assez
important pour la région; il y a des emplois qui sont
créés, mais ce qui reste aux Indiens, c'est nul. La plupart des
coupes sont des coupes à blanc. En plus de cela, il n'y a pas de gibier
et, pour comble de tout cela, on dit aux Indiens: Vous n'occupez pas vos
territoires, donc, le gouvernement va les récupérer. Qu'est-ce
que les Indiens pourraient faire dans un territoire qui est complètement
dévasté quant aux activités de chasse et de
pêche?
C'est un peu dans ce sens-là que j'abonde quand je dis qu'on a
une certaine crainte de voir une politique gouvernementale s'établir
à Schefferville sans tenir compte de la présence indienne et sans
pour autant dire: Le gouvernement est prêt à consulter de
façon sérieuse, de façon équitable, la partie
indienne. Ce dont on a peur, c'est qu'on établisse une politique en
disant aux Indiens: On a consulté les Indiens, seulement - comme je le
disais au début - pour cautionner le gouvernement en place. Ce n'est pas
cela qu'on veut.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Simon: Lorsqu'on parle de territoire, lorsqu'on parle de faune
on demande qu'on essaie de considérer, d'une façon prioritaire,
l'approche indienne.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Chevrette: Je voudrais purement et simplement vous dire ceci.
Compte tenu des décisions éventuelles qui seront prises ou
à prendre, je vous certifie que je tiendrai compte de vos remarques. Je
peux vous donner l'assurance d'une consultation véritable. Je peux
même prendre l'engagement de rencontrer personnellement les chefs des
deux groupes autochtones ici, d'établir les cadres des discussions et
d'assurer que vous soyez véritablement consultés. J'en prends
l'engagement public.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: M. le Président, il semble que ça
prenne toujours une crise ou une quasi-crise, à la suite
d'événements qui sont provoqués par les non-Indiens, pour
qu'on puisse discuter ou parler des droits des Indiens. Ce n'est que dans ce
contexte-là qu'on semble s'en occuper. En 1973, c'était le projet
de la baie James. Là, on s'est occupé des Cris et des Inuits de
la baie James. L'année dernière, c'était le
problème des Micmacs avec le général Custer Lessard, et
là on a essayé de régler ce problème
spécifique. Aujourd'hui, on a la fermeture de la mine IOC. Là, on
invite les Montagnais à venir nous présenter un mémoire.
Vous savez, je ne doute pas de la bonne foi du ministre du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche, mais le mémoire qui nous a été
présenté souligne les problèmes des autochtones à
tous les niveaux: l'emploi, le système d'éducation, les
problèmes d'ordre culturel. Dans le passé, et on semble
répéter les mêmes erreurs, les communautés ont
été mises de côté. De temps en temps, il fallait
régler certains problèmes à notre façon, on l'a
fait. Mais aujourd'hui, je pense, on se rend compte que nous avons le devoir de
répondre à leur appel pour arrêter de perpétuer les
mêmes problèmes que par le passé. Il faut tenir compte de
leurs besoins, non seulement de ce dont nous avons besoin nous. Cela prendrait
peut-être un changement d'attitude, un changement de mentalité
pour enlever les préjugés que nous avons tous.
C'est un problème d'ordre culturel. Je ne fais pas une critique
personnelle, vous êtes de bonne foi, vous voulez entamer des
négociations. Quand vous parlez des troupeaux de caribous, des
retombées économiques, la question que peut-être un Indien
pourrait vous poser est la suivante: est-ce que pour des raisons de
retombées économiques, vous abandonneriez votre langue, vous
abandonneriez vos droits culturels? Vous ne le feriez pas. On connaît les
problèmes qu'on a eus au Québec pour ces raisons. Ce sont les
mêmes problèmes que les Indiens ont. Vous ne pouvez pas essayer de
régler le problème du caribou à la pièce. On va
essayer de régler le problème de la pêche. C'est un
problème global. C'est une entente globale. Il faut que vous compreniez
le message que ces gens sont venus vous donner aujourd'hui. Certainement il y a
des problèmes spécifiques: les services de santé, les
services sanitaires, les maisons et tout le reste.
Cela, c'est à la pièce. Si vous voulez vraiment - je ne
doute pas de votre bonne foi - faire avancer le dossier de la justice pour les
Indiens, vraiment essayez de commencer à résoudre un peu leurs
problèmes parce que si vous commencez à résoudre leurs
problèmes, vous allez résoudre nos problèmes aussi. Je
pense qu'il va falloir que vous changiez votre approche des
négociations. Quand j'ai lu dans le mémoire des autochtones, des
Montagnais, qu'il y avait des négociations, j'étais un peu
surpris.
Je m'en réjouissais parce que je me disais: finalement quelque
chose arrive. Mais je vois que cela ne procède pas de la bonne
façon et c'est un manque d'approche. Ce n'est pas une négociation
sur les caribous, la chasse et la pêche, mais cela va prendre un mandat
du premier ministre, qui va mandater une ou des personnes dûment
qualifiées qui comprennent le milieu des Amérindiens, qui ont une
sympathie, une compréhension de ce qui se passe. Et ce groupe, il va
falloir qu'il négocie globalement.
Il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs. Vous dites que vous
avez des troupeaux de caribous. Ce n'est pas là que vous allez arriver
à une solution parce qu'ils n'ont pas de protection. C'est bien beau,
aujourd'hui, quand vous dites que vous faites des représentations et
qu'on va prendre des décisions ensemble. Cela fait, savez-vous, des
centaines d'années qu'ils se font dire cela. On a même une entente
de la Baie-James et ils ont des problèmes et l'entente est
signée. Imaginez-vous que si les Montagnais n'ont pas d'entente, ils ne
faisaient pas partie de l'entente de la Baie-James, aujourd'hui on essaie de
leur dire: Écoutez, fiez-vous, on va prendre des décisions
ensemble... Ne les blâmez pas s'ils sont un peu sceptiques et doutent un
peu de nos paroles et de nos représentations. La suggestion que je
pourrais faire...
M. Chevrette: M. le député... M. Ciaccia:
Oui.
M. Chevrette: Est-ce que vous étiez à l'origine de
la Convention de la Baie-James? M. Simon au début de son exposé a
dit qu'il y a des problèmes avec les gouvernements depuis une dizaine
d'années. Vous avez siégé de l'autre côté de
la Chambre à ce moment. J'aimerais savoir quels sont les motifs et
raisons pour lesquels ils n'ont pas été inclus dans la convention
de la Baie-James qui leur reconnaît des droits. (14 h 30)
M. Ciaccia: Je crois qu'ils n'étaient pas inclus dans
l'entente...
Une voix: Ah bon!
M. Ciaccia: ...du territoire de la Baie-James. D'après les
représentations qui avaient été faites au gouvernement,
c'étaient les Cris et les Inuits qui avaient pris des procédures
contre le gouvernement et les négociations ont été faites
avec les Cris et les Inuits. Maintenant, il ne faudrait pas se limiter
strictement au point juridique, sur une base juridique; c'est une autre erreur
que le gouvernement a tendance à faire. Si vous vous situez strictement
sur une base juridique, vous pourrez discuter, d'ici à l'an 2000,
à savoir qui a des droits, qui n'en a pas, qui a des obligations, qui
n'en a pas. Comprenez que ces gens étaient ici longtemps avant nous; ils
ont des problèmes aujourd'hui et essayez de les régler de cette
façon.
Prenons certains aspects. Quand M. Simon a parlé, c'était
vraiment un cri du coeur, si vous avez écouté les
représentations qu'il vous a faites. Il vous a donné une
description des problèmes qu'ils vivent, qu'ils ont vécus et ils
ne voient pas de fin à ces problèmes. Ce n'est pas une question
d'une retombée économique; ils vous l'ont dit. C'est une question
de survie pour eux, de survie de leur mode de vie, de leur mode de
pensée, de leurs traditions et de leurs moeurs. Alors, la meilleure
chose que le gouvernement pourrait faire, ce serait d'obtenir du premier
ministre un mandat clair de vouloir vraiment négocier, s'asseoir, mais
non pas négocier dans le sens d'un syndicat qui négocie avec le
patronat, mais négocier dans le sens d'une volonté de
résoudre les problèmes et de comprendre ce que ces gens sont
venus vous dire aujourd'hui.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va?
M. Ciaccia: Oui. J'aurais pu poser plusieurs questions
relativement à votre mémoire, mais je pense que ce seraient des
détails. La meilleure chose qui pourrait arriver serait que le premier
ministre mandate quelqu'un afin d'entreprendre de vraies négociations
avec les Montagnais. Vous avez beaucoup de précédents. Quand les
Montagnais disent: On veut participer. Vous avez un régime de chasse et
de pêche à la Baie-James. Vous avez la participation des
autochtones, ils siègent au comité conjoint; c'est
administré par eux. C'est cela qu'ils veulent. Je pense que c'est un
précédent dans le Canada, en Amérique du Nord. Cela
fonctionne bien et cela a ramené l'entente de la Baie-James, avec tous
les défauts qu'elle peut avoir et les réticences que certaines
critiques ont exprimées. Cela a ramené la paix sociale parmi les
bandes indiennes, parmi les Cris, parmi les Inuits. Cela leur a permis
d'évoluer à leur façon et de faire eux-mêmes les
choix avec certaines balises qui ont été négociées
et qui sont entendues. Si vous prenez cette approche de bonne foi, je pense
bien que vous pourrez non seulement régler les problèmes des
Montagnais, mais vous aiderez aussi la population de Schefferville, parce que
cela éliminera beaucoup de problèmes qui existent aujourd'hui
entre ces différentes communautés.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Marquette.
M. Dauphin: Très brièvement parce que je ne veux
pas sous-estimer l'appétit des membres de la commission. Dans le
même ordre d'idées, j'avais l'intention d'aborder le sujet de la
commercialisation du caribou. Maintenant, le ministre et mon collègue se
sont expliqués quelque peu. Le gouvernement est certainement au courant
de ce point sur le plan culturel. Je me reporte à une publication du
ministère des Affaires culturelles du gouvernement du Québec. On
y dit en toutes lettres, toujours relativement au caribou, qu'il est un des
éléments principaux de leur subsistance et il devient opportun
pour cette société de chasseurs -en parlant des Indiens - de
connaître cet animal et d'élaborer des stratégies pour
s'assurer de la continuité de cette ressource renouvelable. Le ministre
nous a un peu rassurés tantôt en nous disant que rien ne se
ferait, il en a pris l'engagement, avant qu'il s'assoie avec vous. Justement,
on sera là pour le surveiller. Cette publication du gouvernement du
Québec précise que le caribou est un élément
essentiel à la vie des Montagnais. On parle de la
Moyenne-Côte-Nord: Le caribou se fait très rare. Maintenant, le
ministre, selon ses experts -je n'essaie pas d'infirmer des chiffres, mais
selon vous - à mon point de vue, il n'y a pas de meilleur biologiste
qu'un Indien - on parle de la Moyenne-Côte-Nord, mais pour la
région, ici, est-ce qu'il n'y a absolument aucun danger en ouvrant
toutes grandes les portes à la commercialisation, sous toute
réserve d'un quota, d'une limitation? J'aimerais avoir votre point de
vue là-dessus parce que, dans l'ensemble des mémoires, les
propositions justement nous suggéraient la commercialisation du caribou
comme une des solutions à la fermeture de la mine. Considérant
toute l'importance du caribou pour le peuple montagnais, j'aimerais avoir votre
son de cloche là-dessus.
Le Président (M. Bordeleau): M.
McKenzie.
M. McKenzie: Je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais je
discute quand même souvent avec mon comité de la chasse. Nous
pensons que c'est quand même dangereux. De quelle façon? Cela
dépendra toujours de la façon dont ce dossier sera
étudié par le gouvernement, de la façon dont on
procédera à la commercialisation. Au départ, nous pouvons
dire que c'est dangereux pour l'extermination du caribou. Dans tout cela, quand
même, on n'a jamais tenu compte de la présence indienne. En
regardant les expériences passées au point de vue du saumon,
comme je l'ai mentionné, pour nous, c'est dangereux parce qu'on sait
d'avance que, si le gouvernement prend une position là-dessus,
peut-être va-t-on dire, comme le premier ministre René
Lévesque: II y a 6 000 000 de Québécois, il faut regarder
les 6 000 000; nous sommes élus par les Québécois, il faut
que les projets marchent.
Le Président (M. Bordeleau): Comme on a déjà
un peu dépassé l'heure...
M. Dauphin: M. le Président, je m'excuse, mais je n'avais
pas tout à fait fini.
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, M. le
député de Marquette.
M. Dauphin: Juste un dernier point qui...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, en vous demandant que ce
soit la conclusion, très brièvement.
M. Dauphin: Très brièvement, en 30 secondes, un
dernier point qui est également extrêmement important et qui me
concerne, parce que je m'occupe de ces dossiers pour les jeunes et vous parlez
beaucoup des jeunes dans votre mémoire.
Évidemment, la situation est catastrophique, dans l'ensemble du
Québec, et elle s'accentue dans la région de Schef-ferville avec
la fermeture de la mine. Mais, tantôt, il y a un groupe de jeunes qui
vont présenter un mémoire à ce sujet et nous aurons
l'occasion de commenter davantage ce sujet. Effectivement, les jeunes
Montagnais, ce sont des Québécois et, s'il y a
éventuellement des projets à mettre en place dans la
région, les Montagnais vont être inclus dans toute forme de projet
communautaire ou autre qui aurait cours dans la région.
M. Simon: Pour ajouter à ce que le député
vient de dire, quand on parle de jeunesse montagnaise, c'est purement dans la
tradition, dans le concept justement d'une préservation de notre mode de
vie, préservation de la culture, de l'identité culturelle
indienne-montagnaise. C'est dans ce cadre que le mémoire a
été présenté, parce que l'avenir appartient aux
jeunes et, avec la fermeture de la mine, il n'y a pas beaucoup d'espoir, sinon,
comme on l'a stipulé dans le mémoire, par l'entremise du
territoire indien et de la faune. C'est la seule porte de sortie pour la
jeunesse montagnaise de Schefferville, de s'asseoir sur une activité
économique enviable pour l'avenir.
Le Président (M. Bordeleau): En conclusion, M. le
ministre.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais simplement dire
que le juridisme n'est pas d'aujourd'hui, il est de toujours. Si
le juridisme nous emmerde aujourd'hui, il nous emmerdait sans doute en
1975, quand vous avez signé la Convention de la Baie-James, pour ne pas
inclure d'autres territoires ou d'autres communautés autochtones.
Je voudrais dire, en tout cas en ce qui me concerne, que si j'ai entendu
le cri du coeur de M. Simon j'ose espérer qu'il entendra notre coup de
fil et qu'on pourra se rencontrer dans les meilleurs délais et que, si
on devait donner suite aux recommandations de la commission en ce qui regarde
la commercialisation, les engagements que j'ai pris seront
réalisés.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je vous remercie
également, M. McKenzie, M. Simon, ainsi que les personnes qui
étaient avec vous.
M. McKenzie: Au nom du Conseil montagnais, la population vous
remercie d'avoir écouté ce qu'on a présenté comme
mémoire. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Il est tout
près de 14 h 45, la commission va suspendre ses travaux pour une heure,
ce qui nous ramènera ici à 15 h 45.
(Suspension de la séance à 14 h 40)
(Reprise de la séance à 16 h 16)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de la présidence du conseil et de la constitution
reprend ses travaux. Je voudrais, au nom de tous les membres de la commission
m'excuser et excuser aussi mes collègues d'avoir commencé un peu
en retard par rapport à l'horaire prévu. Mais il y a eu des
rencontres avec la presse qui ont duré quelques minutes de plus, c'est
ce qui nous a amenés à reprendre un peu plus tard. Mais on est
prêts à commencer. Je voudrais rappeler que cet après-midi,
comme je l'ai été pour le dernier mémoire avant qu'on
aille manger, je serai assez strict sur le temps en revenant à l'heure
normalement réservée pour un mémoire. Alors,
j'espère que tout le monde voudra bien collaborer dans ce sens. Il y
aura eu deux exceptions, le mémoire, de ce matin, des métallos et
celui de la compagnie IOC, hier. Pour les autres, je vais tenter de demeurer
dans l'heure. On m'indique - oui, je vous donnerai la parole, si vous voulez,
juste après - qu'à la suite des rencontres et des discussions
avec les deux partis, on tenterait d'entendre les cinq mémoires qui
restent avant d'aller souper, avant de lever la séance de la commission,
à moins que des choses ne perturbent nos travaux.
M. le député de Laurier.
M. Sirros: M. le Président, c'est seulement pour souligner
le fait que mes autres collègues sont actuellement en conférence
de presse, étant donné que ceux qui nous ont
précédés semblent avoir été un peu
volubiles.
Une voix: Et ceux qui les ont précédés.
M. Sirros: Et probablement ceux qui les ont
précédés; c'est cela, il faut toujours chercher un
coupable. On va continuer quand même. On est prêts à
commencer et ils nous rejoindront en cours de route aussitôt qu'ils
auront terminé.
Le Président (M. Bordeleau): On appelle donc dès
maintenant la Commission scolaire de Schefferville. Alors, je demanderais
à ses représentants de se présenter. Si vous voulez nous
présenter les personnes à la table.
Commission scolaire de Schefferville
M. Ménard (Raymond): M. le Président, à ma
gauche, M. Léo Patry, membre de l'exécutif de la commission, et
M. Yvon Sirois, vice-président de la commission; à ma droite, Mme
Madeleine Powell, directrice générale de la commission, et Mme
Francine Gagnon, secrétaire générale, et moi-même,
Raymond Ménard, président.
M. le Président, MM. les ministres, MM. les
députés, mesdames et messieurs, avant d'aborder toute question
touchant l'avenir de Schefferville et celui de notre commission scolaire, nous
espérons que votre séjour dans notre ville a été
agréable. Nous vous remercions aussi d'avoir bien voulu honorer notre
ville de votre présence pendant ces deux jours de réflexion sur
l'avenir de notre municipalité, de ses divers organismes et de sa
population. Il est rassurant pour nous de constater que vous accordez
suffisamment d'importance à nos problèmes et à la
recherche de solutions à ceux-ci pour consentir à vous
déplacer vers notre région et, de ce fait, apprendre à la
connaître un peu mieux. Vos décisions futures ne pourront qu'en
être plus éclairées.
Dans un premier temps, nous voulons vous situer quant aux origines et
fonctions de la commission scolaire de Schefferville. Par un
arrêté en conseil, en juillet 1955, le gouvernement du
Québec érigeait la ville minière de Schefferville afin de
contribuer et de collaborer avantageusement au grand essor économique
occasionné par les immenses développements des entreprises
minières de la région. Indirectement, mais pour les mêmes
raisons, le gouvernement du Québec autorisait, par un
arrêté en conseil en janvier 1956, la formation de la commission
scolaire de Schefferville.
En effet, le développement et la mise en valeur des ressources
minières de la région ne pouvaient se réaliser sans une
main-d'oeuvre stable et qualifiée. Le travail seul n'aurait pu retenir
longtemps le travailleur minier dans une ville comme Schefferville. Il fallait
que l'employé de la compagnie minière puisse aussi y retrouver
des services pour lui-même et les siens. C'est dans ce sens qu'il est
possible de dire que la commission scolaire de Schefferville devait aider au
développement de la ville et à la stabilité de la
main-d'oeuvre. La commission scolaire de Schefferville est donc un organisme de
services essentiels pour le bien-être de la population de la ville.
Voici que, le 2 novembre 1982, la Compagnie minière IOC
décide de procéder à la fermeture de ses installations
minières de Schefferville d'ici le mois d'août 1983. À la
suite de cette décision, Schefferville risque de devenir
littéralement une ville fantôme, danger qui guette toute
agglomération entièrement concentrée autour d'une seule
industrie majeure. La ville de Gagnon, avec la menace de fermeture de
SIDBEC-Normines, est dans la même situation. Tous les secteurs
d'activités à Schefferville seront touchés par une telle
fermeture: les services municipaux, les services de santé et les
services éducatifs qui nous intéressent au plus haut point. De
plus, Schefferville possède des infrastructures d'accueil dont un
service aérien, un transport ferroviaire, de l'hébergement et de
la restauration. Que deviendront-elles? Finalement, on y retrouve un
laboratoire de recherche sur l'environnement, de l'Université McGill.
Quel avenir lui est réservé?
La population de la ville, qui atteignait plus de 5000 âmes en
1975, s'établit présentement à un peu plus de 2000
personnes, dont 15% à 20% sont des anglophones. Est-ce une
saignée qui durera encore longtemps? La situation est plus que
problématique. Ainsi, avant toute mesure et toute action dans le cadre
d'une fermeture de la ville, il est essentiel que des discussions s'instaurent
rapidement entre les deux paliers de gouvernement, provincial et
fédéral, et la Compagnie minière IOC, dans le sens d'une
révision de son projet de fermeture. La conjoncture actuelle est
peut-être difficile pour la compagnie et le minerai de fer
lui-même, mais il n'est pas dit que la situation se perpétuera
indéfiniment. De plus, compte tenu du contexte économique dans
lequel travaille la Compagnie minière IOC, une collaboration
spéciale des gouvernements est souhaitable. Il y a aussi des
développements possibles dans la région, telles les entreprises
de pourvoirie de chasse et de pêche, par exemple, et des espoirs sont
permis en ce sens.
M. le Président, la commission scolaire de Schefferville - je
répète: la commission scolaire de Schefferville - demande une
reprise immédiate et intensive des discussions entre les deux paliers de
gouvernement et la municipalité pour trouver quels types de
diversification pourraient être envisagés.
Cela étant dit, il faut néanmoins que la situation de la
commission scolaire de Schefferville soit analysée dans le cadre du
maintien ou de la fermeture de la compagnie, ce qui fait l'objet principal du
mémoire.
La commission scolaire de Schefferville offre des services
éducatifs à des élèves de langue maternelle
française, anglaise et amérindienne, catholique et de niveau
primaire. De plus, elle met les équipements, les bâtisses,
à la disposition de la commission scolaire régionale du Golfe,
laquelle offre des services éducatifs à des élèves
de langue maternelle française et amérindienne, catholique et de
niveau secondaire.
Au 30 septembre 1982, elle comptait 238 élèves, 151 de
langues française et anglaise, et 87 de langue amérindienne, 14
anglophones et 137 francophones. Elle oeuvre au niveau d'une école
seulement (l'école Notre-Dame) avec deux cadres, aucun professionnel, 24
enseignants et 3 employés de soutien non syndiqués. Son budget
total est d'un peu plus de 1 900 000 $. Avec la fermeture de la Compagnie
minière IOC, elle prévoit une baisse d'environ 100
élèves de langues française et anglaise, ce qui donnera
alors une majorité à la population amérindienne. Le
conseil de bande parle de se prendre en charge depuis quelques années,
la situation lui semble propice.
Mais a quels services aura droit alors la population de langue
maternelle française et catholique?
Au secondaire, la commission scolaire régionale du Golfe comptait
96 élèves le 30 septembre 1982, pour du secondaire de I à
III et de l'adoptation scolaire: 53 de langue française et 43 de langue
amérindienne. Vous avez la description des élèves,
où ils sont placés dans chaque division, à chaque endroit.
Ces élèves sont dans une école qui compte comme personnel
13 enseignants, un agent de bureau à temps plein et un autre à
demi-temps, un animateur à la vie étudiante, un animateur de
pastorale à temps partiel et un psychoéducateur.
En éducation des adultes, la commission scolaire régionale
du Golfe a donné des services pour 450 heures-groupes à 162
inscrits en 1981-1982 et les prévisions pour 1982-1983 étaient de
620 heures-groupes pour 150 inscrits. Cette commission scolaire connaîtra
également des problèmes avec la fermeture de la Compagnie
minière IOC.
La fermeture des installations minières met donc en danger les
services éducatifs à la population: une clientèle scolaire
prévisible de 140 élèves dont 50 de langues
française
et anglaise et 90 de langue amérindienne remet en question
l'existence de la commission scolaire de Schefferville, surtout avec la prise
en charge possible par les Amérindiens de leurs propres services
éducatifs.
Cependant, il y aurait peut-être lieu de prévoir un
regroupement de tous les effectifs scolaires présents sur le territoire
de la ville de Schefferville: catholiques, protestants, Amérindiens,
anglophones et francophones. La commission scolaire de Schefferville souhaite
la collaboration de tous les organismes concernés pour étudier
cette possibilité.
La commission scolaire de Schefferville demande l'application et le
respect de toutes les mesures favorisant l'accès à
l'éducation et l'égalité des chances pour tous,
spécialement pour des personnes vivant dans les régions
éloignées.
M. le Président, la commission scolaire demande une assurance du
ministère de l'Éducation qu'elle continuera à exister et
à offrir des services éducatifs de qualité comparables
à ceux qui sont offerts dans les autres régions du Québec,
et ce, que la clientèle soit restreinte et majoritairement
amérindienne ou qu'elle soit restreinte et exclusivement blanche.
La commission scolaire croit qu'il est essentiel qu'il existe un minimum
d'encadrement local pour la gestion des activités éducatives et
cela, dans le respect du sentiment d'appartenance, surtout pour les
régions éloignées; la population doit être
représentée par des commissaires élus au suffrage
universel.
La commission scolaire demande, dans le but d'assurer son fonctionnement
minimal, un financement des coûts réels au maintien des
écoles et cela, pour les ressources humaines, matérielles et
financières.
Un accord est indispensable entre la commission scolaire et le
ministère de l'Éducation pour déterminer les coûts
réels appropriés à un budget répondant aux
véritables besoins de la population. De plus, la commission scolaire
juge important que l'impôt foncier scolaire soit exclusivement
réservé aux services adaptés et propres aux désirs
et aux besoins de la population de la région. (16 h 30)
La commission scolaire demande qu'un financement approprié
relatif aux résidences d'enseignants lui soit garanti (mesure 5800 des
allocations supplémentaires). Il en est de même pour les
résidences à la disposition des autres personnes.
La commission scolaire tient à continuer d'assurer des services
de logement aux enseignants qui demeureront en poste à Schefferville et
aux autres personnels qui seront retenus pour certains services jugés
essentiels. Pour cela, elle souhaite des conditions et des mesures
avantageuses: frais de location, chauffage, électricité et
autres. Elle s'en remet à des ententes tripartites entre les commissions
scolaires, le ministère de l'Éducation et la compagnie, dans le
cadre d'un transfert de la propriété des résidences de la
compagnie à la commission scolaire.
Relativement aux normes d'allocation, la commission scolaire demande
d'être incluse dans les commissions scolaires du Nord (mesure 400 des
allocations supplémentaires) si ces normes semblent plus adaptées
et avantageuses à la région. Je le répète: Si ces
normes semblent plus adaptées et avantageuses à la
région.
La commission scolaire de Schefferville souhaite donc pouvoir continuer
à offrir des services à une clientèle scolaire. Elle
souhaite offrir des services de qualité avec un personnel
qualifié et d'expérience. Comme employeur, la commission scolaire
de Schefferville a le devoir de respecter les obligations qui lui sont faites
par les conventions collectives et d'offrir aux personnels qui demeureront
à son service une qualité de vie et des conditions de travail
acceptables. Par contre, il est assuré pour le moment qu'il y aura une
baisse prévue de la clientèle, ce qui aura pour effet que
plusieurs personnes pourront se retrouver sans emploi. La commission scolaire
de Schefferville veut pouvoir offrir à tous ses personnels des
conditions aussi favorables que celles qui sont offertes aux employés de
la Compagnie minière IOC: primes de séparation adéquates,
allocation de vacances intéressante, etc.
Conséquemment, M. le Président, la commission scolaire de
Schefferville demande que tous les services, tels le logement, le chauffage,
l'électricité et autres, soient garantis à ceux qui
demeureront au service de la commission scolaire.
L'article 12-9.00 des dispositions constituant des conventions
collectives liant, entre autres, les enseignants à l'emploi des
commissions scolaires pour 1983-1985 ne doit pas être une entrave
à de meilleures conditions en ce sens.
La commission scolaire demande que le Bureau national de placement et,
conséquemment, le Bureau régional de placement soient
sensibilisés, le plus tôt possible, à la situation des
personnels de la commission scolaire de Schefferville qui seront mis en
disponibilité, pour des mesures spéciales quant à la
sécurité d'emploi et aux primes de séparation en
particulier. Par exemple, les mesures suivantes doivent être
regardées: possibilité de prêt de services des
employés, prime de séparation spécifique, relocalisation
des personnels disponibles dans d'autres régions - cette solution
évite les coûts de logement et de prime d'éloignement - et
préretraite.
La commission scolaire demande que le Comité de résorption
des disponibles (train
des petites mesures) adopte le plus tôt possible des mesures ad
hoc pour Schefferville compte tenu de sa situation particulière.
Les articles 5-4.04 et 5-4.05 des dispositions ci-haut
mentionnées sont deux exemples des quinze mesures spéciales
possibles pour les mises en disponibilité. De plus, des ententes avec
des compagnies ou groupements pour faciliter l'utilisation et le replacement
des disponibles peuvent être étudiées et un examen de
programmes spéciaux avec la Direction de l'enseignement aux adultes doit
être fait.
Conclusion. M. le Président, la commission scolaire de
Schefferville souhaite donc pouvoir continuer à offrir des services,
mais les conditions de travail, de logement et autres devront être
appropriées. Elle croit qu'il y a des développements possibles
dans la région et, conséquemment, qu'elle peut continuer à
offrir des services. Elle croit même que la conjoncture actuelle dans
laquelle vit le minerai de fer ne se perpétuera pas.
Avant tout, la commission scolaire demande de nouvelles discussions
entre les deux paliers de gouvernement et la municipalité. Elle souhaite
que la commission parlementaire qui se tient présentement sensibilisera
tous et chacun à une collaboration maximale pour une solution aux
problèmes de Schefferville. Cependant, si la commission scolaire doit
disparaître, elle souhaite que les conditions de cessation d'emploi
soient au moins aussi avantageuses que les conditions offertes aux
employés de la Compagnie minière IOC. Elle souhaite même
des mesures spéciales et urgentes des comités responsables dans
une telle situation.
En priorité, dans le contexte du maintien de la commission
scolaire, cette dernière veut faire dégager les sommes d'argent
requises pour faire fonctionner un tel milieu particulier: assistance
financière gouvernementale complète. Je le répète:
assistance financière gouvernementale complète. Dans le contexte
d'un non-maintien, la commission scolaire demande pour ses personnels les
meilleures conditions possible de cessation d'emploi. La commission scolaire de
Schefferville a confiance que vous saurez apporter des solutions
équitables aux problèmes qu'on vous a soulignés. Merci, M.
le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Ménard.
Période de questions et de commentaires.
M. le ministre délégué au Développement
régional.
M. Gendron: M. Ménard, je voudrais vous remercier, au nom
des parlementaires et au nom de tous les membres de cette commission, d'avoir,
sûrement avec raison, prétendu qu'il était opportun que les
porte-parole du monde de l'éducation communiquent leur point de vue par
rapport à ce qui nous réunit ici depuis hier. Bien sûr,
lorsqu'on oeuvre dans le monde de l'éducation et qu'il se produit une
situation difficile comme celle que nous analysons, il est important, je pense,
et opportun de s'assurer que la majorité des citoyens et des citoyennes
de Schefferville, s'ils font le choix d'y demeurer, recevront les garanties
requises du gouvernement pour que des services éducatifs continuent de
leur être offerts. Tout le monde a convenu, je pense -et cela ne fait pas
l'ombre d'une opposition de qui que ce soit - que tout avenir commence par un
minimum de formation et d'éducation. C'est ce que vous voulez donner aux
jeunes qui continueront d'y demeurer.
À la page 5 de votre mémoire - je vais y aller de quelques
commentaires et de quelques questions - vous demandez formellement "une reprise
immédiate et intensive des discussions." Je veux tout simplement vous
dire que, quant à nous, nous croyons - l'engagement a été
donné à plusieurs reprises depuis qu'on a l'occasion d'entendre
des mémoires - que l'espèce de groupe de travail, qu'on appelle
communément un "task force", sera sûrement l'intervenant
privilégié pour servir de véhicule approprié
à l'analyse de votre recommandation de la page 5.
J'ai un autre commentaire. Cette fois-ci, je voudrais le formuler et,
par la suite, vous poser une question, M. Ménard. Si nos informations
sont exactes au gouvernement du Québec, ici, à Schefferville, il
existe quatre commissions scolaires. Il existe deux commissions scolaires
catholiques et deux commissions scolaires protestantes: Schefferville et du
Golfe pour ce qui est des catholiques et Greater Seven Islands et Eastern
Québec pour les protestants. Au total, cela fait quand même une
population étudiante passablement réduite. Ce ne sont quand
même pas les normes que nous retrouvons dans d'autres secteurs de
population ou dans d'autres coins du Québec.
Dans ce sens-là, vous mentionnez qu'il y aurait peut-être
lieu de prévoir un regroupement de tous ces effectifs. Sans me
déguiser en spécialiste de ces questions, je suis pas mal
convaincu qu'on aurait dû prévoir depuis un bon bout de temps un
regroupement de ces quatre commissions scolaires. Je comprends qu'on nous
signale cette problématique, mais je ne comprends pas qu'on l'associe
à la problématique des deux jours qui ont fait que nous sommes
ici, c'est-à-dire la fermeture d'IOC. À ma connaissance, il me
semble que c'est une évidence qu'il y aurait eu lieu de regarder cela
entre vous depuis fort longtemps, parce que c'est pour le moins
irrégulier d'avoir
quatre commissions scolaires pour une si petite clientèle.
Ma question est la suivante: Pourquoi cette possibilité de
regroupement de tous les effectifs n'a-t-elle pas été
analysée antérieurement à ce qui nous réunit ici
depuis hier?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Ménard.
M. Ménard: Votre question est très bonne, M. le
ministre.
M. Gendron: Je pense qu'elle est meilleure.
M. Ménard: II y a eu peut-être un manquement
là-dedans; je crois qu'on ne s'est pas toujours entendu entre le
côté anglais et le côté français ou avec la
régionale du Golfe. En tout cas, c'est une chose qu'on perçoit
qu'on devrait regarder dans le moment, puisque la population va diminuer de
plus en plus.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Gendron: Un peu plus loin, je pense que vous faisiez appel
à des ressources externes pour analyser cette problématique.
Quant à moi, je prétends que, dans un premier temps en tout cas,
il y aurait lieu de poser des gestes officiels de regroupement. C'est un peu
cela aussi ma question. Sans porter de jugement de valeur, est-ce que vous, M.
Ménard, avez l'intention d'être un leader de cette démarche
vers un regroupement éventuel?
M. Ménard: Oui, M. le ministre.
M. Gendron: J'aurais une autre question. Vous suggérez,
à la page 11 de votre mémoire concernant les normes d'allocation,
d'être inclus dans les commissions scolaires du Nord, selon la mesure 400
des allocations supplémentaires. Encore là, ce serait à
peu près la même question. Puisque vous n'êtes pas en
mesure, en tout cas, selon votre propre jugement, d'évoquer tout de
suite si ce serait un avantage réel pour vous, je voudrais tout
simplement savoir ce qui vous a amené à suggérer cela
aujourd'hui, tout en vous interrogeant à savoir si cela
représente un avantage ou non.
Mme Powell (Madeleine): Les commissions scolaires du Nord ont,
comme toutes les autres commissions scolaires, des enveloppes
budgétaires globales, mais je crois que leurs paramètres de base
sont peut-être différents. Alors, c'est ce que nous aimerions qui
soit étudié. Il faudrait que les paramètres de la
commission scolaire de Schefferville soient réétudiés et
peut-être ajustés pour tenir compte de la baisse de
clientèle que nous prévoyons.
M. Gendron: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Laurier.
M. Sirros: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi
remercier la commission scolaire pour sa présentation et j'aimerais axer
mes questions sur la situation actuelle.
D'après ce que je comprends, il y a quatre écoles aussi
à Schefferville: deux écoles élémentaires, l'une
française et l'autre anglaise; deux écoles secondaires, l'une
française et l'autre anglaise. Au moment où on se parle, quel est
le nombre total d'élèves inscrits à ces écoles?
Est-ce que vous avez aussi une idée concernant les autres commissions
scolaires?
Mme Powell: Oui, nous avons une idée: environ 520
élèves au 30 septembre 1982.
M. Sirros: En tout et partout?
Mme Powell: En tout: au primaire, au secondaire, aux secteurs
catholique et protestant.
M. Sirros: Est-ce que la commission scolaire de Schefferville
offre tous les niveaux? Y a-t-il un niveau secondaire?
Mme Powell: C'est la commission scolaire régionale du
Golfe qui est responsable du secondaire. Les cours se donnent jusqu'en
secondaire III.
M. Sirros: Qu'est-ce qui arrive après le secondaire
III?
Mme Powell: Les étudiants doivent aller à
l'extérieur pour les secondaires IV, V et le cégep,
naturellement.
M. Sirros: Quand vous dites à l'extérieur,
j'imagine que cela veut dire Sept-Îles, probablement?
Mme Powell: Normalement, c'est Sept-îles. En fait, s'ils
retrouvent à Sept-Îles les cours ou les options qu'ils
désirent suivre, les étudiants s'inscrivent dans les
écoles de la régionale du Golfe. Ils sont logés dans les
résidences de la régionale du Golfe. Par contre, si les
étudiants ne retrouvent pas les options qu'ils désirent suivre,
ils doivent s'inscrire dans d'autres régionales de la province de
Québec.
M. Sirros: Ils sont considérés comme des
élèves de la régionale du Golfe quand ils
sont de Sept-Îles? En ce sens, il doit y avoir quand même
des frais assez importants qui sont rattachés à cela? (16 h
45)
Mme Powell: Pour l'étudiant qui doit fréquenter
l'école à Sept-Îles et qui est en résidence, la
commission régionale du Golfe habituellement demande une contribution
des parents. Celle-ci se chiffre à environ 520 $, je crois. Si d'autres
étudiants doivent s'inscrire dans des régionales à
l'extérieur de Sept-Îles, à ce moment-là, les
parents doivent voir à loger leurs enfants. La régionale donne
alors une allocation de 1500 $ aux parents. Il faudrait peut-être noter
que le coût moyen pour loger un étudiant à
l'extérieur, que ce soit dans une famille, chez de la parenté ou
ailleurs, est d'environ 3000 $. Les 1500 $ ne couvrent certainement pas tous
les frais que les parents doivent encourir. C'est peut-être l'occasion,
pour nous, de vous le souligner et de vous demander le retrait de ces frais
pour les parents dans la situation actuelle à Schefferville. Il est
certain que c'est une surcharge pour le parent qui doit fournir 520 $ ou
même 1500 $.
M. Sirros: J'allais vous demander si vous connaissiez beaucoup de
parents qui sont probablement sans emploi et qui peuvent payer 1500 $ pour
envoyer leurs enfants terminer leurs études secondaires. J'imagine que
la réponse est non. Est-ce qu'à votre connaissance des
représentations ont été faites au gouvernement
relativement à ces cas particuliers, c'est-à-dire pour
défrayer le coût des élèves qui vont à
Sept-Îles terminer leurs études secondaires?
Mme Powell: Je peux seulement répondre pour la commission
scolaire de Schefferville. Nous n'en avons pas fait jusqu'à maintenant.
C'est sûrement une de nos intentions.
M. Sirros: Vous pourriez donc soulever la question aujourd'hui,
étant donné que les ministériels sont ici pour l'entendre.
Je pense qu'il s'agit d'une demande assez légitime, étant
donné la gratuité de l'éducation et l'accessibilité
pour tous. Je pense que la situation particulière mérite que
quelqu'un se penche rapidement sur cette question.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Gaspé.
M. LeMay: Merci, M. le Président. J'aurais plusieurs
questions à vous poser, mais je vais éviter d'être trop
long. À la page 10 de votre mémoire, vous parlez de frais de
location, chauffage, électricité et autres services. Ce sont des
avantages que vous voulez donner au personnel de votre école. Je
voudrais savoir, d'abord, quels sont les avantages actuels que les professeurs
qui enseignent ici ont par rapport à ceux qui enseignent à
l'extérieur, c'est-à-dire en ville. Est-ce que vous incluez ces
avantages-là dans votre mémoire parce que vous avez de la
difficulté à recruter du personnel?
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Powell.
Mme Powell: Je voudrais d'abord répondre à la
deuxième question. Ces avantages-là ont été
placés pour aider à obtenir la stabilité de notre
personnel. Les avantages existaient déjà. Cela existe depuis
longtemps et c'est la raison pour laquelle cela fait maintenant partie de la
convention collective ou des dispositions dont tient compte une convention
collective.
M. LeMay: Est-ce que vous avez de la difficulté à
recruter du personnel?
Mme Powell: Présentement, non.
M. LeMay: Vous parlez, à la page 6 de votre
mémoire, d'une possibilité pour le conseil de bande des
autochtones de se dissocier de votre commission scolaire, de se prendre en
main. On en a entendu parler au début de l'après-midi. Quelle est
votre opinion là-dessus? Il semble y avoir de la difficulté
d'intégration. Les autochtones soulignaient ce point ce matin.
Mme Powell: Disons que les autochtones y pensent depuis plusieurs
années. C'est une de leurs aspirations. Je crois que la commission
scolaire de Schefferville doit les seconder, les aider à prendre une
décision. Ce n'est peut-être pas quelque chose qui va se faire
demain. À court terme, je crois que la clientèle autochtone
demeurera avec la commission scolaire, nous le souhaitons. Il est très
difficile de prévoir ce qu'il en sera dans trois ou quatre ans. Je pense
qu'eux aussi veulent étudier le problème. Nous avons eu des
rencontres dans ce sens-là.
M. LeMay: Merci, madame.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Vous avez mentionné à la page 8, et le
ministre Gendron l'a mentionné aussi, la possibilité de solutions
prévoyant un regroupement des différentes commissions scolaires
lors de la fermeture ou si la fermeture de la ville se fait. Est-ce que,
jusqu'à maintenant, il y a eu des démarches, des
négociations? Est-ce que quelque chose a été fait? Parce
que, à toutes fins utiles, cela semble être la solution la plus
réaliste, la plus logique. Si Schefferville ferme, la clientèle
des
commissions scolaires regroupées va se chiffrer à quoi?
Moins, peut-être, de cent et quelques élèves? Il y a
déjà, en place, 24 enseignants. Dans l'ensemble, ce semble
être, d'après votre mémoire, la meilleure solution
possible. C'est cela que je me demande. À l'heure actuelle et compte
tenu du fait qu'on est au courant de la fermeture depuis le mois novembre,
est-ce que des démarches en ce sens ont été faites?
Mme Powell: Nous avons eu quelques contacts, mais rien de
définitif.
M. Ménard: C'est quelque chose qu'on veut mettre de
l'avant. Une chose que je voulais préciser là-dessus, c'est qu'on
parle de commission scolaire locale, une commission scolaire pour Schefferville
seulement. C'est de cela qu'on parle.
M. Kehoe: Dans votre mémoire, vous mentionnez que vous
allez demander que, si le personnel de la commission scolaire est
réduit, vous ayez les mêmes conditions que celles offertes par la
Compagnie minière IOC. D'après votre convention collective,
est-ce qu'il y aurait une grande différence entre les deux? Avez-vous
fait une analyse de la situation pour voir si la convention collective que vous
avez actuellement pour régler le problème présente une
différence assez importante entre ce qui est là et ce qui est
prévu par la compagnie?
Mme Powell: II y a certainement des différences car il
faut faire une distinction entre le personnel qui a été
engagé à l'extérieur de Schefferville et le personnel
engagé sur place. Les avantages dans la convention collective ne sont
pas les mêmes pour les deux groupes d'enseignants. De plus, nous avons
aussi du personnel de soutien non syndiqué. Auparavant, nous appliquions
la convention collective de la minière pour ce personnel-là.
Maintenant, naturellement, ces personnes voudraient profiter, et très
légitimement, des avantages que la compagnie minière offre
à ses employés. Mais, pour nous, la commission scolaire, c'est
tout à fait à l'extérieur de nos budgets ou de nos
normes.
M. Kehoe: II faudrait que la province vous subventionne si vous
voulez offrir la même chose et il pourrait s'agir de montants assez
importants.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. En rapport avec les
coûts que les parents doivent absorber pour envoyer leurs enfants au
secondaire à l'extérieur, est-ce qu'il serait possible pour vous,
dans un délai assez court, de préparer un genre de dossier pour
le faire parvenir au ministre de l'Éducation sur ce sujet précis
afin qu'on puisse commencer le processus d'examen plus approfondi? Est-ce qu'il
serait possible de faire cela dans un court délai?
Mme Powell: Certainement, M. le député.
M. Perron: Merci. Vous me corrigerez si je n'ai pas raison, il y
a beaucoup d'enseignants et d'enseignantes qui ont des conjoints ou conjointes
qui travaillaient pour la minière ou encore dans l'entreprise
privée antérieurement à la décision de la
minière IOC de fermer ses exploitations. Est-ce que vous prévoyez
que, à cause de ce fait -parce qu'il y a beaucoup de conjoints et
conjointes qui devraient bénéficier de l'assurance-chômage
actuellement, des gens qui sont à la recherche d'un travail à
l'extérieur et possiblement ici même sur place, mais on sait qu'il
n'y a pas de création d'emplois à part les programmes
gouvernementaux - cela peut vous causer des problèmes à un moment
donné, disons à compter de septembre de cette année?
Mme Powell: Assurément, parce que ces personnes, que ce
soit le conjoint ou la conjointe d'ex-employés de la minière,
auparavant étaient logées dans des maisons appartenant à
la minière. Pour que l'enseignant et l'enseignante fassent un choix
éclairé, ils doivent savoir s'ils vont avoir des
possibilités de logement. Tout de suite, c'est un problème parce
que, si la commission scolaire veut les retenir, elle doit loger ces
personnes.
M. Perron: Merci beaucoup, Mme Powell.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, Mme Powell
et M. Ménard.
M. Ménard: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelle donc maintenant le
groupe suivant, qui est le Comité organisateur scheffervillois d'emploi,
COSE, à se présenter. Le porte-parole est M. Bernard Bizier. M.
Bizier, si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous
et procéder immédiatement à la lecture de votre
mémoire.
Comité organisateur scheffervillois d'emploi
(COSE)
M. Bizier (Benoît): M. le Président,
premièrement, ce n'est pas Bernard Bizier, c'est Benoît. Je
m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): J'aurais dû
le savoir d'ailleurs, mais je corrige: c'est M. Benoît Bizier.
M. Bizier: C'est cela. À ma droite, il y a M. Dany
Ménard et M. Rénado Batisti. À ma gauche, il y a M.
Frédéric Chevary et M. Sylvain Poirier, tous des directeurs de
projets COSE.
Je vais commencer la lecture du mémoire. La problématique
du tourisme à Schefferville. En préambule, l'attrait
exercé par les ressources fauniques de Schefferville est certain.
L'invasion annuelle de milliers de chasseurs et de pêcheurs
témoigne de notre potentiel touristique. Ce potentiel n'est cependant
pas exploité adéquatement. Nous voulons ici présenter un
aperçu des problèmes se rattachant à ce secteur
d'activité. En second lieu, nous indiquerons quelques-unes des solutions
envisagées. Nous terminerons notre mémoire par une liste des
recommandations qui, d'après plusieurs, pourraient résoudre
certains problèmes mentionnés.
La situation actuelle. La chasse et la pêche sportive sont
présentement les seuls produits touristiques locaux dignes de mention.
Ces deux domaines sont exploités exclusivement par des entreprises
privées. Des lois limitent le nombre de ces pourvoyeurs. Ceux-ci
agissent à l'intérieur de territoires réservés
situés au coeur de la zone la plus giboyeuse. Leurs clients, des
Nord-Américains pour la plupart, s'inscrivent à l'avance. Aux
dates fixées, ils arrivent à Schefferville par avion ou par
train. Après leurs derniers achats, ils s'envolent en avion de brousse
vers les pourvoiries localisées approximativement à 150 milles de
Schefferville. Les services offerts par les pourvoyeurs sont de qualité,
la satisfaction des clients étant un gage de rentabilité à
long terme.
Ce tourisme, de type saisonnier, enrichit tout d'abord les pourvoyeurs.
Les services connexes, soit l'hôtellerie, la restauration, le transport,
reçoivent, eux aussi, leur juste part. Là encore, la
qualité et les prix des services, compte tenu du contexte, sont
acceptables. Ajoutons, toutefois, que ces services se voient parfois
débordés. Certains particuliers récoltent alors des
miettes.
Une certaine insatisfaction. Les commentaires de plusieurs touristes
font néanmoins réfléchir. Certains, en effet, se disent
déçus de l'accueil qui leur est fait. Ces critiques portent sur
plusieurs points. (17 heures) a) Québecair. On se plaint, tout d'abord,
des tarifs de Québecair en regard de la qualité des services
qu'offre cette compagnie. Ces critiques visent le transport des passagers et
celui du gibier récolté. À titre d'exemple, le transport
jusqu'à Montréal d'un panache de caribou peut coûter 200
$.
Le "traitement de faveur" accordé aux prises des chasseurs, les
retards et les escales n'aident pas à préserver la viande des
avatars du voyage. La politique des réservations laisse aussi à
désirer. Un chasseur retenu en forêt en raison du mauvais temps -
c'est fréquent ici - perdra son tour à l'aéroport.
Exceptionnellement, Québecair ajoutera un vol à son horaire, pour
autant que les retardataires soient en nombre suffisant. Les coûts
qu'impliquent ces délais suffisent souvent à être
dégoûté de Schefferville. b) La QNS&L. Cette filiale de
l'IOC transporte, à l'aller comme au retour, les touristes de
Sept-Îles à Schefferville. La durée de cette
expédition ferroviaire est rarement inférieure à douze
heures. L'inconfort notoire des wagons utilisés suscite, par ailleurs,
de nombreux commentaires désobligeants. Les tarifs, selon plusieurs, ne
coïncident pas non plus avec les services offerts. Plusieurs, en effet,
soulignent la rareté du personnel de cargo. Les passagers doivent faire
le voyage de douze heures sans service de restaurant à bord. Les
passagers, dans la pagaille la plus totale, font alors eux-mêmes
l'ouvrage. Au retour, la QNS&L met un wagon réfrigéré
à la disposition des chasseurs. La viande est alors empilée sans
aucune précaution, d'où de nombreuses pertes. Les horaires et la
fréquence des arrivées et des départs laissent aussi
à désirer. Il en est de même du pointillisme administratif
de cette compagnie. Les procédures de facturation pourraient en ce sens
être abrégées. c) Les services spécialisés.
Plusieurs chasseurs ont déploré l'insuffisance des services
reliés à la conservation du gibier (taxidermie, boucherie etc.)
D'autres aimeraient louer sur place, à des prix abordables, certaines
pièces d'équipement trop encombrantes. d) Le vide socioculturel.
Certains auraient aimé entrer en contact avec les Scheffervillois, les
occasions de rencontres étant rares. Les échanges, en effet, se
limitent pour la plupart à des relations commerciales, ce qui à
la longue dessine une fausse image de notre population.
Les possibilités. Ce survol rapide de la situation touristique ne
fait qu'effleurer le sujet. Une analyse plus sérieuse des
problèmes s'impose. D'une telle analyse résulteraient certaines
mesures correctives. Il y a également place pour l'innovation. C'est ce
que nous voulons présenter ici. Là encore, des études plus
poussées seraient requises. Notre tourisme local, selon nous, doit
être envisagé en fonction d'une certaine diversification. II
s'agit ainsi d'enrichir le paysage existant déjà, d'ouvrir de
nouvelles perspectives. Cette diversification a donc une double fonction.
D'abord, développer le tourisme, nous l'avons dit. Et, en second
lieu, et c'est essentiel, fournir de l'emploi à la main-d'oeuvre
locale. Les projets que nous voulons énumérer ici jouent tous ce
double rôle. Certains présenteront peut-être un indice de
rentabilité plus élevé. Tous, cependant, sont
interdépendants: ils constitueraient ainsi un ensemble touristique de
haut niveau.
La liste des projets. Projet de villégiature. Les buts sont de
permettre aux chasseurs et aux pêcheurs de goûter à toutes
les possibilités de la région; ceci créerait des emplois
locaux. Les grandes lignes: établissement de camps à
proximité de la ville, accessibilité rapide, tarifs
réduits, pêche de rivière et de lac, chasse au petit gibier
et le canotage.
Projet de pisciculture. Buts: diversification des centres
d'intérêt, ensemencement des lacs et des rivières,
pêche touristique - qui créerait encore des emplois -
commercialisation. Les grandes lignes: proximité de la ville, poissons:
truite grise, ouananiche, truite mouchetée.
Projet d'élevage. Buts: diversification des centres
d'intérêt, emplois locaux, commercialisation des fourrures,
développement de l'artisanat vestimentaire. Les grandes lignes:
élevage du caribou, élevage expérimental du loup,
élevage commercial du vison et du renard, proximité de la ville,
capture des animaux sauvages pour les jardins zoologiques et les parcs
nationaux.
Projet de festival. Buts: susciter des contacts humains, diversifier les
centres d'intérêt, mise en marché du potentiel touristique
de Schefferville. Les grandes lignes: concours sportifs, trophées,
rencontres sociales.
Projet de casino. Buts: injecter des revenus, remettre au gouvernement
les subventions avancées, ajouter un atout majeur, doubler la
clientèle - exemple, le chasseur qui va amener son épouse et ses
amis - améliorer la qualité de l'ensemble touristique. Les
grandes lignes: casino de type saisonnier sous le contrôle exclusif du
gouvernement, impacts sociaux moindres.
Projet d'hivernage. Buts: prolonger la saison touristique, rentabiliser
le projet de villégiature, rentabiliser le projet de casino,
rentabiliser l'artisanat, utilisation des guides. Les grandes lignes:
safari-photo, pêche sur glace, chasse à la perdrix blanche,
location de motoneige, camping d'hiver, chasse d'hiver au caribou,
expéditions et randonnées en traîneaux à chiens, ski
de fond, ski alpin.
Projet de services spécialisés. Buts: compléter les
autres projets, fournir à la clientèle les services requis, cela
créerait encore des emplois. Les grandes lignes: mettre sur pied les
services suivants: armurerie, location d'embarcations, de moteurs et de
motoneiges, boucherie, taxidermie, guides expérimentés,
congélation et entreposage, expédition du gibier et du poisson,
canotage.
Conclusions. Certaines parties de ces projets sont déjà en
marche. COSE, par exemple, a en chantier des projets d'écoles de guides,
des projets d'élevage et de pisciculture. De plus, quelques
employés travaillent actuellement au projet de pistes de motoneige. Il
s'agirait donc de faire converger les efforts des différents
intervenants impliqués.
Nous recommandons ces mesures correctives: la prolongation de la saison
de chasse au caribou; la légalisation de la pêche sur la glace et
de la chasse à la perdrix blanche; la légalisation de la
commercialisation de la truite grise, de la truite mouchetée et de la
ouananiche; l'augmentation des salaires offerts dans le cadre des projets
communautaires; le contrôle de la qualité des services
aériens et ferroviaires.
Nous recommandons aussi ces mesures innovatrices: des études de
faisabilité et de rentabilité relativement à
l'implantation d'un casino, la formation d'un comité touristique
composé des intervenants impliqués; la mise en marche du tourisme
scheffervillois; la venue à Schefferville des aides techniques
nécessaires.
Aussi, si vous me le permettez...
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Bizier: ...au mémoire que vous avez en main, j'aimerais
ajouter deux annexes que nous n'avons pas pu remettre au préalable. Il
s'agit d'une annexe sur un bassin de pisciculture et d'une étude sur le
caribou.
Le Président (M. Bordeleau): Avez-vous déjà
des copies pour les gens de la commission?
M. Bizier: Oui, nous avons des copies.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, il y a quelqu'un qui
les distribuera aux membres de la commission.
M. Bizier: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Bizier. M. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, tout d'abord,
féliciter le groupe COSE pour son mémoire, le remercier et dire
à son porte-parole que, pour un gars nerveux, il s'en est bien
tiré. C'est mon collègue de droite qui vous a trahi!
M. Bizier: C'est la première fois!
M. Chevrette: Je voudrais vous dire,
dans un premier temps que je note avec beaucoup de plaisir tout
l'intérêt que vous portez au développement touristique et
économique à partir de la ressource naturelle renouvelable du
milieu. C'est fort intéressant. Je pense que c'est une façon
constructive d'aborder un problème, surtout celui qu'on vit
présentement, que de l'aborder par le biais des ressources du milieu et,
en particulier, par le biais des ressources renouvelables du milieu, ce qui
pourrait permettre un point de départ à la diversification dont
on parle dans plusieurs mémoires.
Cela dit, vous faites des recommandations. Je vais les commenter. Je
suis d'accord avec certaines, un peu perplexe devant d'autres et en
désaccord avec certaines. Mais je pense bien que vous pourrez accepter
ces remarques. Elles ne sont pas négatives; elles veulent
peut-être, purement et simplement, vous donner l'orientation vers
laquelle vous pourriez gratter davantage et nous présenter des projets
encore plus précis, développer les suggestions que vous nous
faites d'une façon encore plus précise.
En ce qui regarde la pêche et la chasse d'hiver, j'ai
déjà annoncé au cours des deux dernières
journées que c'était une chose envisageable. Il nous faut, bien
sûr, obtenir les autorisations en vertu de la négociation qui doit
être conduite devant le comité conjoint, mais c'est une des
possibilités qui sont offertes et qui pourraient apporter sûrement
des retombées économiques intéressantes pour la ville de
Schefferville. Également, pour ce qui est de l'implantation de services
spécialisés d'entreposage frigorifique, de boucherie, etc., je
trouve votre approche intéressante et cohérente, puisque, si vous
demandez la commercialisation, eh bien, il est évident qu'il faut
répondre à ce moment-là, en toute logique, aux exigences
minimales de base. Cela s'inscrit carrément dans la logique de vos
suggestions et je trouve cela fort intéressant. D'autant plus que la
commercialisation elle-même est une hypothèse sur laquelle mon
ministère a déjà travaillé, sur laquelle,
également, on a eu d'autres mémoires, comme celui de la SDBJ.
J'ai remarqué que presque tous les mémoires touchent d'une
certaine façon à cet aspect bien spécifique de la
commercialisation puisque c'est là une ressource du milieu. C'est tout
à fait normal que les mémoires se recoupent là-dessus, je
crois bien.
Je voudrais, cependant, vous mettre en garde contre certains projets.
Tout d'abord, le casino. Je dois vous dire en toute franchise qu'après
toutes les études qui ont été faites au cours des
dernières années la récente décision du Conseil des
ministres est de surseoir pour au moins une période de deux ans à
toute décision sur le sujet. Je ne vous conseillerais pas de concentrer
vos efforts là-dessus. Je serais l'homme le plus surpris qu'on
étudie à très court terme cette possiblité, et
même, à moyen et long terme, une exploitation sur une base
annuelle, parce que cela exige une base annuelle et une région
climatique ordinairement assez favorable. De toute façon, libre à
vous de continuer à persévérer si vous le voulez, mais,
personnellement, je vous dis que ce serait peut-être un peu rêver
en couleur de croire qu'à très court terme on puisse obtenir du
positif de ce côté.
En ce qui a trait au festival, j'aimerais vous entendre tantôt me
dire exactement quel en serait le thème, parce que, pour créer un
genre de festival où il y aurait une attraction majeure, il faut avoir
un thème. Vous savez qu'il y a le festival de la crevette, le festival
des fraises, le festival western de Saint-Tite et le festival de la patate. On
est rendu qu'on en a un pour chaque fruit et pour chaque légume.
Une voix: Du homard, oui. (17 h 15)
M. Chevrette: II pourrait y avoir le festival du caribou. C'est
sûrement cela que vous aviez en tête, mais j'ai hâte que vous
me le disiez. D'ailleurs, je dois vous dire que je dois prononcer le mot
"caribou" souvent parce qu'on a fait un pari avec l'Opposition
là-dessus. Je vous conterai cela après.
En ce qui regarde l'élevage des animaux. Là-dessus, nos
études nous démontrent que le caribou étant un animal
nomade, il semble présenter beaucoup de difficultés
d'élevage en captivité. Je suis prêt à mettre
à votre disposition les informations qu'on a au ministère, quitte
à ce que vous les évaluiez, parce que vous savez fort bien que
l'alimentation pour les zoos est très minime; ce n'est pas cela qui
assurerait une très grande rentabilité, je crois. Quelques zoos
pourraient se porter acquéreur de quelques caribous, mais cela ne serait
pas générateur d'emplois à très court terme, je
pense, et c'est ce que vous visez.
Pour ce qui est de la pisciculture, j'ai des questions là-dessus.
Je n'ai pas de commentaire à faire, parce que je ne perçois pas
tellement vos objectifs, puisque vous les avez exprimés dans un style
télégraphique. Donc, je vais plutôt vous questionner.
Tout d'abord, au point de vue ensemencement, me dites-vous, un point qui
est précis, c'est l'ensemencement des lacs. Vous ne pensez pas que la
région de fort potentiel que vous avez ne nécessite pas de
pisciculture pour fins d'alimentation dans le milieu? On me dit que vous avez
déposé une certaine étude, je ne l'ai pas eue avant le...
Je voudrais savoir, tout d'abord, quels seraient vos éventuels
clients?
M. Bizier: Actuellement, je crois que,
côté pisciculture, ce serait de former une pisciculture ici
de façon qu'on puisse ensemencer quelques lacs autour de la ville,
mettons trois lacs. On pourrait utiliser trois lacs à proximité
de la ville lesquels, actuellement, n'ont presque plus de poissons. Pour aller
à la pêche à la truite, actuellement, il faut aller assez
loin. On pourrait utiliser, par exemple, trois lacs à proximité
de Schefferville et les ensemencer: un avec de la truite rouge, l'autre avec de
la truite grise et l'autre avec de la ouananiche. Ensuite, faire des chalets
autour, en face, et les louer pour les touristes. C'est au niveau
touristique.
De plus, quant à la pisciculture, on voudrait avoir la
commercialisation du poisson. C'est-à-dire que le surplus qu'on pourrait
obtenir en pisciculture, on pourrait le vendre sur le marché, ce qui
donnerait à la place un apport financier assez important.
M. Chevrette: Pour la villégiature et le tourisme, ne
craignez-vous pas d'entrer en compétition avec les pourvoyeurs et
risquer de créer des emplois à un endroit et d'en enlever
à l'autre et que, au bout de la course, il n'y ait pas plus d'emplois de
créés?
M. Bizier: Absolument pas, parce qu'il y a du poisson à
vendre dans les magasins partout, en bas et les gens montent ici quand
même pour la pêche sportive. C'est la même chose pour la
chasse au caribou. Le gars qui monte à la chasse, même si vous lui
vendiez de la viande en bas, c'est le sport qu'il veut avoir. C'est la chasse
sportive. Il va monter de la même façon pour le sport et
peut-être que cela pourra en faire monter d'autres après qu'ils y
auront goûté.
M. Chevrette: En fait, ce que vous voulez, c'est attirer des
villégiateurs.
M. Bizier: Le tourisme.
M. Chevrette: Oui, mais vous parlez de construction de chalets
dont ils pourraient se porter acquéreurs et en même temps ils en
bénéficieraient.
M. Bizier: Pas qu'ils soient acquéreurs, qu'on leur loue
les chalets pour une période. Si le gars veut passer une semaine
à la pêche à la truite, on lui loue un chalet avec un canot
et un guide, s'il en a besoin d'un, pour qu'il puisse aller à la
pêche et être sûr de prendre du poisson, de la truite. Il n'a
pas besoin, une fois à Schefferville, de reprendre l'avion.
Actuellement, ce que les principales pourvoiries ont, c'est la pêche au
saumon et la chasse au caribou. Mais on n'ensemencera pas le saumon dans un
lac, cela va dans les rivières. Cela ne dérange absolument pas
les pourvoiries.
M. Chevrette: Maintenant, vous savez que l'exploitation des
ressources fauniques est un élément de discussion très
fort avec les groupes autochtones. Est-ce que vous avez entrepris des
démarches en tant que groupe? Est-ce que vous avez commencé
à avoir des pourparlers avec les Naskapis et les Montagnais?
M. Bizier: J'ai rencontré les Naskapis
dernièrement, on a tout simplement parlé de guides. On est
d'accord; même, on a besoin d'eux à cause de leur
expérience de la chasse, de la trappe et de la pêche. Ils
connaissent sérieusement la région. En tout temps, on est
prêt à s'asseoir avec eux et à discuter des
possibilités d'intervenir ensemble. Eux vivent ici depuis 30 ans et nous
aussi. Comme on a toujours vécu ensemble, on peut continuer de vivre
ensemble, il n'y a rien là. C'est quasiment une nécessité
aussi. Si l'on va dans la commercialisation du caribou, c'est absolument
nécessaire d'avoir les Indiens aussi.
M. Chevrette: Cela quand vous...
M. Bizier: ...des Naskapis, soit les uns ou les autres.
M. Chevrette: ...c'est ce que j'allais vous demander comme
complément, puisqu'il y a un engagement que les Montagnais aussi soient,
même s'ils n'ont pas d'entente spécifique, consultés dans
cette démarche.
M. Bizier: Certainement.
M. Chevrette: Je vous ai demandé tantôt de commenter
la notion de festival.
M. Bizier: C'est une chose qui a déjà
été essayée ici, le festival du caribou. Ceci a
été essayé à deux reprises; à cause du
manque de financement, ça n'a pas pu fonctionner. Il s'agirait de
créer une publicité autour de la chasse et de la pêche au
niveau national de façon à amener du tourisme ici. Si on veut
amener du tourisme, il va falloir passer par la publicité, comme
n'importe quelle autre organisation. En faisant un festival du caribou,
à l'intérieur de la période de chasse, il pourrait y avoir
des concours de panaches, de la qualité des panaches, et de toutes ces
choses-là. Il pourrait y avoir beaucoup de rencontres sociales. Cela
mettrait un contact entre les touristes et la population de la place.
M. Chevrette: Un dernier petit commentaire. Quand vous parlez de
main-d'oeuvre spécialisée, je dois vous dire que l'entente
Canada-Québec, qui a été signée
dernièrement, nous permet justement d'organiser des cours de
formation
professionnelle qui correspondent au besoin du milieu. De sorte que
parmi les projets que vous soulignez, vous pourriez vous prévaloir de
ces programmes de formation professionnelle pour préparer votre
main-d'oeuvre en fonction du nouveau défi que nous avons tous à
relever.
M. Bizier: On a fait une demande dans le but de former des guides
spécialisés dans la taïga québécoise. Comme
vous le savez, ici dans la région, quelqu'un qui s'aventure trop loin,
s'il n'est pas bien formé... L'idéal serait de prendre des gens
de la place qui connaissent parfaitement la région.
Si vous regardez les accidents qu'il y a eu dans le passé, les
gens de Schefferville s'en sont toujours sortis. Ce sont des gens de
l'extérieur qui ont des problèmes. On pourrait former des guides
sur place, quitte à ouvrir une école de guides ici, par la suite.
Cela créerait de l'emploi automatiquement.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Pontiac.
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. On aimerait se
joindre aux autres afin de remercier les gens du groupe COSE d'avoir soumis
leur mémoire. J'aurais quelques petites questions.
Lorsque vous parlez des problèmes de transport avec
Québecair, est-ce que vos plaintes sont surtout basées sur les
voyages spécialisés dans le temps de la chasse, ou si vous
incluez aussi le transport aérien qui existe entre Sept-Îles,
Schefferville et d'autres endroits au Québec?
M. Bizier: Actuellement, le premier défaut, c'est que
Québecair ne se rend plus ici et c'est rendu qu'on voyage avec Air
Schefferville, c'est peut-être une filiale, je n'en sais rien. Pendant le
temps de la chasse, par exemple, ils arrivent avec des 737 ici, et c'est plein.
Seulement, la qualité du service est moindre pour le prix. C'est
très cher de se rendre à Montréal. Il y aurait lieu
peut-être de mettre des avions nolisés, des voyages directs
Montréal-Schefferville, Québec-Schefferville, cela diminuerait
les coûts.
On sait très bien que ce qui coûte cher en avion, c'est de
décoller et d'atterrir. Quand ils font la "run de lait", qu'on appelle,
nous autres, ils partent de Montréal et arrêtent à
Québec, Rimouski, Sept-Îles, Wabush et ils remontent jusqu'ici.
Ils arrêtent partout. Ce n'est quand même pas plus loin, de
Montréal à Schefferville, que de Montréal à Miami,
mais quand ils font un vol direct de Montréal à Miami, cela
coûte beaucoup moins cher.
M. Middlemiss: Maintenant, depuis combien d'années
êtes-vous malheureux avec le service qui vous est rendu?
M. Bizier: Cela fait neuf ans que nous sommes ici et cela fait
neuf ans que nous avons des problèmes avec eux. Il y a eu plusieurs
plaintes portées.
M. Middlemiss: Si cela fait neuf ans, d'une part, depuis
l'implication du gouvernement du Québec dans Québecair, est-ce
que le service s'est amélioré?
M. Bizier: Je ne crois pas que le service ait été
amélioré, non. Il n'était pas mieux avant et il n'est pas
mieux actuellement.
M. Middlemiss: D'accord. Merci. Vous mentionnez que les
coûts impliqués ainsi que les retards créent souvent une
situation où les gens sont dégoûtés de venir
à Schefferville. Est-ce que ceci se présente souvent, à
toutes les saisons? Combien de fois par saison?
M. Bizier: Pendant la saison de la chasse et de la pêche,
il n'y a pas plus de retards que pendant l'année courante. C'est la
même chose. C'est souvent à cause de la température.
M. Middlemiss: Dans ce cas-là, est-ce que vous auriez des
suggestions à faire pour que ce service soit amélioré?
M. Bizier: Qu'ils fassent des vols directs. Cela va faire
diminuer les prix, tout au moins pour la période touristique. Cela
diminuerait beaucoup les prix.
M. Middlemiss: En d'autres mots, si les gens viennent de
Montréal ou de Québec, ce seraient des vols directs de
Montréal ou de Québec à Schefferville, sans arrêt en
cours de route?
M. Bizier: C'est cela.
M. Middlemiss: C'est tout pour le moment.
M. Bizier: Si d'autres ont de meilleures solutions...
Québecair doit sûrement avoir des solutions...
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci, M. le
député. Merci aussi à M. Bizier, ainsi qu'aux personnes
qui étaient avec vous, de vous être prêtés à
l'exercice.
M. Bizier: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelle maintenant le
Comité des natifs de
Schefferville. Alors, si vous voulez vous présenter.
Comité des natifs de Schefferville
M. Scherrer (Rémi): Oui, nous représentons le
Comité des natifs de Schefferville. Je suis le président,
Rémi Scherrer. À ma droite, M. Daniel Plourde,
vice-président. À ma gauche, Mme Jocelyne Lemay,
secrétaire.
Notre but. Au départ, vu la jeunesse du comité et notre
manque d'information, nous nous contenterons de faire ressortir la valeur de la
présence de la génération québécoise
née au Nouveau-Québec, afin de voir la grande importance de sa
continuité.
Nous savons, et vous savez que nous sommes des gardiens de
frontières. Schefferville ne contient pas que des mines de fer, il y a
aussi la présence d'un peuple typiquement québécois. Des
gens sont venus de tous les coins de la belle province et d'ailleurs. Ils y ont
bâti le Nouveau-Québec et y ont élevé une
famille.
Attiré ici par une compagnie qui fermera ses portes
hypocritement, comme si elle ignorait totalement qu'une population
dépendait d'elle, ce peuple ne peut mourir de la même façon
qu'une poignée de mines. Il construit sa propre mentalité et,
pour aucune considération, il ne devrait avoir à se disperser.
(17 h 30)
Souvenez-vous de ceux qui ont tracé les lignes entre le
Québec, le Labrador et Terre-Neuve. Ils l'ont fait à leur
façon, de manière à tirer le plus de profits possible.
Souvenez-vous aussi que, durant les dernières années, IOC n'a
presque pas sorti de minerai provenant du Québec; donc, aucune redevance
au trésor québécois. Nous sommes tous prêts à
continuer l'oeuvre déjà commencée dans le but de garder
notre coin de pays qui a déjà commencé à se faire
gruger.
Regardons la province voisine à qui, jadis, on a donné la
permission de débarquer sur notre territoire pour approvisionner ses
bateaux en eau et en bois et qui, maintenant, se dit propriétaire de
presque toutes nos richesses naturelles. Les natifs de Schefferville savent
très bien que les citoyens du Québec ont déjà perdu
le cinquième de leur province. Étant tous nés de
pères pionniers, venant de tous les coins de pays, ayant comme
première option le développement des richesses naturelles du
Québec, nous attendons du gouvernement du Québec une aide qui
remplacerait les promesses mensongères de la compagnie Iron Ore. Depuis
deux bonnes générations, du travail et des avantages sont promis
aux enfants des employés. Après avoir lancé ces belles
paroles, la compagnie en question part sans crier gare, avec tous ses profits
accumulés, laissant derrière elle une ville qui sent
l'inquiétude et qui pue même la solitude, une ville pouvant
abriter actuellement 5000 habitants, une ville qui s'est fait connaître
par des gens bien de chez nous sous plusieurs aspects: entre autres, par le
sport, le tourisme et les arts. De même, plusieurs grandes
personnalités sont venues voir ce merveilleux coin de pays, du premier
ministre à la reine d'Angleterre.
Nous sommes convaincus que le gouvernement du Québec, ses
ministres et tous les députés, ceux de l'Opposition comme ceux au
pouvoir, sauront voir la grande importance et surtout la
nécessité de sauver Schefferville. Nous demandons que cette
commission parlementaire tienne compte que les natifs forment les trois quarts
de la population qui restera. Nous voulons d'abord du travail. Nous voulons
aussi le droit d'acheter ou de louer les logements de la compagnie avec les
mêmes privilèges que les employés de l'IOC qui sont nos
pères. Nous voulons aussi l'amélioration des services sociaux,
considérant que ceux-ci sont déjà très restreints.
Nous voulons que le gouvernement du Québec fasse en sorte que nos
richesses naturelles se développent. Nous demandons une ou plusieurs
industries nouvelles, qui pourraient prendre la relève, une industrie
qui pourrait donner espoir à l'industrie touristique, qui pourrait
hausser l'économie de la région et celle du Québec, qui
pourrait remettre sur pied tous les commerces de Schefferville, qui pourrait
profiter aux PME et qui pourrait enfin mettre en branle divers projets.
Pour satisfaire à tous ces avantages socio-économiques et
culturels, le comité des natifs appuie ici la demande d'implantation
d'un ou de plusieurs casinos à Schefferville. Nous demandons donc au
gouvernement du Québec d'étudier sérieusement cette
possibilité très avantageuse. Le comité des natifs appuie
aussi les projets suivants déjà en demande: le projet de
villégiature, le projet de pisciculture, le projet d'élevage, le
projet de festival et le projet hivernal.
Pour ce qui est des bénéficiaires de l'aide sociale, nous
demandons, pour ceux de moins de 30 ans une somme additionnelle de 150 $ tous
les quatre mois, une somme qui servirait à l'habillement et à
divers besoins personnels.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous êtes
prêts pour les questions?
Une voix: Non.
Le Président (M. Bordeleau): Bon, d'accord; allez-y, M.
Scherrer.
M. Scherrer: On va parler un petit peu de la Compagnie
minière IOC.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Scherrer: La compagnie minière, elle aussi, a
convoqué hier une conférence de presse, pendant le mémoire
du comité de citoyens. Et on voit tout de suite que c'est dans le but
d'accaparer les journalistes, ce qui démontre une impolitesse et un
manque de civisme éhontés de la part du président de cette
compagnie minière, M. Mulroney.
De plus, on sait que ce mémoire, le mémoire du
comité des citoyens, reflète les meilleures idées de tous
nos citoyens. Ceci démontre que l'IOC veut garder le monopole sur tout
ce qui se passe ici. Les conséquences de cela: dans le seul journal
disponible aujourd'hui, un seul article est paru et c'est celui de M. Mulroney.
C'est tout.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Scherrer. M. le
député de Groulx et adjoint parlementaire aux Affaires
municipales.
M. Fallu: Oui, M. le Président. En lisant la
première version de votre mémoire, la semaine dernière, un
mémoire signé par les "natifs de", j'avais l'impression de le
lire en anglais et de lire "native from", c'est-à-dire les premiers
habitants, les tout tout premiers habitants. Les "natifs", à ce
moment-là, prend un sens qui est peut-être un anglicisme, mais un
sens d'une très grande profondeur. Ce ne sont plus les résidents
de, les exportés, les déportés, les gens qui sont
allés faire la piastre, les gens qui sont allés sur les jobs un
bout de temps et qui s'en retournent.
Vous êtes de la première génération de
nordiques, de Québécois, de blancs nordiques; de ceux qui sont
nés dans le Nord, de ceux qui ont vécu dans le Nord, qui sont
adaptés au Nord. Vous formez donc une richesse de la première
génération de richesse de la jeunesse québécoise
nordique. Pour vous, les schèmes de référence ne sont plus
l'endroit où vous êtes nés, quelque part en Beauce, en
Gaspésie ou dans les Cantons de l'Est. Vos schèmes de
référence maintenant sont nordiques. Vous avez, pour la
société québécoise, des qualités que peu de
Québécois blancs ont jusqu'à maintenant. Et cette
richesse, je pense, va nous obliger à faire un certain nombre de choses
que peut-être on n'avait pas vues collectivement, avant, parce qu'on
s'était fié essentiellement à des sociétés
privées pour faire le développement et la planification du
Nord.
Vous dites d'ailleurs avec force, à l'avant-dernière page
de votre mémoire: Nous attendons maintenant du gouvernement du
Québec une aide qui remplacerait les promesses mensongères de la
compagnie minière. Vous en êtes là. Vous aussi, vous vous
étiez fiés au développement exponentiel, éternel
quasiment. Je me souviens d'un de mes frères qui était venu ici
et, lorsqu'il est revenu en 1958, il disait: "Avoir voulu rester, j'aurais pu
élever mes enfants là". Bien, il aurait votre âge
aujourd'hui, mais il serait dans la même situation que vous. Parce
qu'à l'époque, tout le monde s'imaginait que c'était
éternel.
Il y a des responsabilités qui n'ont pas été
prises. Il va falloir que, collectivement, on fasse autre chose. Il y a une
chose qui m'étonne à cette commission parlementaire, c'est qu'il
y a des gens qui tiennent un langage similaire. Il y a le comité des
citoyens, le groupe COSE, les natifs de Schefferville, et les groupes
amérindiens. Ils tiennent tous le même langage. Qu'est-ce qu'on
fait demain? Comment va-t-on, non pas survivre, mais continuer à vivre
et se développer? C'est assez frappant de voir cette similitude de
pensée entre notamment les Amérindiens et vous. Vous êtes
en fait les natifs, ceux qui avez envie de vivre dans le Nord. J'aurais deux
questions précises à poser. Vous exigez le droit de rachat de
maisons - c'est même émouvant, parce que je croyais entendre
"maison paternelle" pour ainsi dire - vous qui n'êtes pas personnellement
employés de la minière. Est-ce que vous avez déjà
exprimé ce voeu ailleurs qu'ici?
M. Scherrer: Non. On n'avait pas la chance. On a la chance de se
faire entendre et on en profite pour le demander.
M. Fallu: Donc, qui veut l'entendre, l'entende. Quant aux
services sociaux, vous en demandez l'amélioration. Est-ce que, pour
vous, il y a une traduction en termes de quantité ou de qualité
qui vous vient à l'esprit, à prime abord?
M. Scherrer: Dans les services sociaux, nous avons les avions
dont M. Bizier a parlé tantôt. On a aussi le train. On sait tous
qu'il faut environ 10 heures pour se rendre à Sept-Îles. Il faut
un habit de motoneige pour monter à bord. Ce n'est pas
chauffé.
M. Fallu: Mais c'est commode pour conserver les caribous,
l'automne. On n'a pas besoin de wagons réfrigérés pour
conserver les caribous à bord du train.
M. Scherrer: Pas du tout. On les met sur les bancs et ils
congèlent.
M. Fallu: Quels sont les autres services, vous parlez de services
sociaux notamment?
M. Scherrer: II y a tout le point sportif de la ville. Le centre
sportif est fermé. Il y a plein de jeunes à l'école
à qui cela manque. Il y a même les moins jeunes et les plus
vieux.
M. Fallu: Si vous aviez des recommandations à faire par
rapport aux services qui ont été fermés, on sait que sur
six gros services il y en a trois qui ont été
fermés...
M. Scherrer: L'amélioration des services sociaux.
M. Fallu: Pas nécessairement la réouverture de l'un
ou de l'autre.
M. Scherrer: C'est l'amélioration. Actuellement le centre
est fermé. Si on l'ouvre, cela améliorera les choses.
M. Fallu: D'accord. On va s'adresser au ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, notamment pour cela. Il a fait quelques ouvertures
hier. Mais n'ayant pas assisté à la conférence de presse
tout à l'heure, je ne sais pas à quoi il s'est engagé
exactement. Je vous remercie. C'était un témoignage
extrêmement émouvant. Je pense que cela nous rappelle les
obligations que toute la société québécoise a,
à votre égard. Merci.
M. Scherrer: Écoutez...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Laurier.
M. Sirros: J'aimerais d'abord féliciter le Comité
des natifs de Schefferville pour la présentation qu'il a faite. Je pense
que cela a été un effort très louable, une initiative
très louable, surtout venant des gens qui sont nés ici et qui ont
le goût et le désir d'y rester. Je vous ferai remarquer - vous
étiez probablement dans la salle tout à l'heure quand le ministre
Chevrette a parlé clairement du projet de casino et je pense avec
justesse et raison - qu'il faudrait peut-être se tourner vers des choses
un peu plus possibles ou réalistes étant donné ce qu'on a
connu ici, jusqu'à maintenant, avec ce genre de projets. Je n'ai pas de
questions précises.
Je suis venu dans la région pour la première fois de ma
vie. Ce que je vois finalement, c'est une ville qui s'est vidée à
75% et qui, dans l'espace de trois mois, se trouve dépourvue de toute
possibilité d'avenir pour l'instant avec une ferveur très tenace
de rester ici et de chercher quelque chose à faire pour maintenir la vie
de la ville. Je ne peux, à ce moment-là, qu'essayer de soutenir
et inciter le gouvernement à être beaucoup plus près. Je
réitère ce que j'ai dit, hier, et ce qu'on a dit aujourd'hui en
conférence de presse, soit que j'aurais cru que, dès le moment
où la compagnie a annoncé que sa mine fermait et où on a
constaté que 75% de la population était disparue - et
c'était très prévisible à ce moment-là - il
aurait dû y avoir une présence immédiate auprès des
citoyens qui tiennent à rester ici, qui tiennent à chercher
d'autres vocations pour leur ville. (17 h 45)
Encore une fois je souligne et je crois que le gouvernement devrait
prendre l'engagement formel, aujourd'hui, d'envoyer quelqu'un sur place avec de
pleins pouvoirs pour faire des recommandations concernant une enveloppe
budgétaire globale qui pourrait être mise à la disposition
des citoyens pour faire ce que le comité de citoyens disait hier: offrir
le choix aux citoyens qui sont ici soit de rester, soit de quitter. Mais il
faudrait, de toute façon, que le gouvernement assume cette
responsabilité auprès des citoyens de la ville.
On a passé beaucoup de temps, pendant deux jours, à parler
de toutes sortes de choses. On a parlé beaucoup moins des
problèmes immédiats que vivent les gens qui sont encore ici. Ce
matin, on a fait un débat sur le licenciement collectif, etc., etc.
C'est un débat qu'il faut faire mais je me demande si c'était
l'endroit pour le faire ici, étant donné qu'il y a des gens qui
vivent, à l'heure actuelle, sans une perspective d'avenir. On met de
l'avant tout ce qu'on peut, des casinos, n'importe quoi. Je ne dis pas
n'importe quoi dans le sens que cela ne vaut pas beaucoup mais dans le sens que
c'est un effort très louable et que les gens qui tiennent à leur
ville cherchent une solution. Je redis que je pense que l'appareil de
l'État devrait les appuyer dans ce sens-là. J'arrêterai
là, M. le Président, merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le
député de Laurier. Un dernier petit commentaire M. Scherrer?
M. Scherrer: Je vais revenir encore sur la compagnie. Je pensais
que vous alliez me demander pourquoi je disais qu'elle avait fermé
hypocritement. Vous ne l'avez pas fait, je vais vous le dire quand même.
Si elle avait été franche et honnête, elle aurait
carrément averti de sa fermeture à Schefferville il y a au moins
un an et demi ou deux ans. En plus, M. Mulroney aurait dû s'asseoir avec
la population pour lui faire savoir ses intentions afin de négocier avec
la population. Donc, l'information a été complètement
cachée de sa part.
Le Président (M. Bordeleau): Un dernier petit mot de
conclusion, M. le ministre délégué à
l'Aménagement et au Développement régional.
M. Gendron: M. Scherrer, je voudrais simplement vous rappeler
que, quand vous mentionnez "sans aucune agressivité", vous vous
attendiez qu'on pose cette question-là. On l'a posée tout au
cours des travaux de cette commission. On l'a posée en
conférence de presse et on a toujours mentionné, quant
à nous, qu'il est pour le moins curieux qu'on ait attendu trois mois
pour annoncer des mesures de "réparation". La même question,
toujours fondamentale quant à nous, a été exposée
et surexposée et ce sera toujours, d'après nous, la
responsabilité du gouvernement de chercher davantage à avoir de
meilleurs éléments de réponse que ceux que nous avons eus,
au moins pour cette partie-là, par rapport à une fermeture
beaucoup trop abrupte, où on n'a pas la conviction de toutes les
justifications. En plus de cela, on a la conviction - et je vais y revenir en
conclusion à la fin des audiences - que pour certaines compensations ou
certains choix qu'on demande aux citoyens et citoyennes de Schefferville de
faire, nous sommes conscients que les délais sont trop courts. Dans ce
sens-là, nous allons solliciter, auprès de la minière, une
reconsidération de ces délais.
M. Scherrer: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Scherrer de vous
être présenté devant la commission.
M. Scherrer: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelle maintenant le
Père Marcel Mongeau. M. Mongeau, si vous voulez nous présenter
les personnes qui sont avec vous.
Père Marcel Mongeau, o.m.i.
M. Mongeau: À ma droite, Mgr Peter Sutton,
évêque de Schefferville, Labrador-Schefferville; Marie Saintonge,
Montagnaise qui représente la communauté des Montagnais; Vital
Simard, professeur au secondaire. À ma gauche, il y a Erika Guertin,
épouse d'un travailleur de l'IOC qui est dans le groupe des Catholic
Women's League; Blandine Rondeau, professeur au primaire, à
l'élémentaire; Laurent Canuel, travailleur pendant 25 ans pour la
compagnie IOC.
Cela fait drôle de prendre la parole après les jeunes
natifs de Schefferville qui ont tous été baptisés dans
notre église.
Schefferville est devenue un symbole pour le Québec. La
dramatique vécue à Schefferville a déjà fait la
manchette des mass médias et nous n'avons pas à en faire la
présentation dans le contexte des auditions de la présente
commission. Une chose est cependant certaine: les solutions à apporter
deviennent de première importance pour que des populations retrouvent la
confiance dans les institutions gouvernementales et socio-économiques.
Sans responsabilité de sa part, une communauté devient victime
d'un effritement d'importance. Ce phénomène se produit
après des années vécues loin des grands centres et
malgré toute une étape de vie consacrée au
développement d'un territoire qu'on avait dit plein d'espoir et pour
longtemps.
Par les gens concernés, tant d'efforts ont été
faits pour un centre important d'exploitation minière! Après
avoir quitté un milieu, ces gens ont créé des liens,
trouvé des solidarités et vécu des responsabilités
sociales et économiques. C'est un événement pénible
que nous avons à vivre présentement. Cette appartenance sociale,
à refaire ailleurs par un grand nombre, comporte bien des entraves,
lorsque l'emploi est si rare dans le Sud, et est encore plus difficile pour
ceux qui dépassent 40, 45, 50 ans. Les chrétiens engagés
dans la pastorale d'église ne peuvent rester indifférents
à une telle situation, et pas davantage leur pasteur. L'église
catholique est présente depuis très longtemps au
Nouveau-Québec. Les Inuits, les Indiens, les populations de la
Côte-Nord, les travailleurs de tous les métiers ont reconnu ses
oeuvres d'éducation, de bienfaisance et de témoignage
chrétien bien avant l'arrivée des prospecteurs.
Notre ville doit son nom à l'un de ses pionniers, Mgr Lionel
Scheffer, avec qui nous avons travaillé pendant quinze ans. À
Schefferville, Labrador City et Sept-Îles, les missionnaires Oblats de
Marie-Immaculée ont contribué à une vie communautaire
nourrie par des relations mutuelles de collaboration et de bonne entente. La
justice sociale envers tous, sans distinction de race et de religion, a
toujours été une de leurs préoccupations majeures. Ce
mémoire veut être un écho fidèle des nombreuses voix
des gens de Schefferville avec qui nous vivons, personnellement, depuis dix
ans, mais Schefferville où je viens depuis une vingtaine
d'années, 25 ans, et où les missionnaires ont pris racines depuis
25 à 30 ans. La rédaction de ce mémoire a
été précédée de consultations, en
particulier, avec des Oblats et des membres de l'Office de la pastorle sociale
du diocèse de Québec. Ce mémoire est fait principalement
de recommandations.
Première recommandation: de justes compensations. Attendu que le
plus grand nombre des travailleurs concernés étaient devenus
spécialisés; attendu, en raison de la rareté de l'emploi
dans les autres milieux de la province et de l'âge des ouvriers, les
difficultés de trouver un emploi et les risques de changer
entièrement d'emploi pour une deuxième ou troisième
carrière; attendu que les frais de déplacement et de
réinstallation ailleurs sont considérables, exorbitants; attendu
que des économies ont été réalisées dans des
conditions particulièrement difficiles; attendu que tous les citoyens
employés directement ou non de l'Iron Ore, de la Compagnie
minière IOC, ont contribué au bien-être de notre ville
minière;
nous recommandons trois choses:
Premièrement, de justes compensations pour toutes les personnes
impliquées; deuxièmement, nous recommandons qu'on évite
les négociations dans lesquelles les individus sont isolés et en
position de faiblesse - on a appelé cela des négociations
à la pièce - troisièmement, que les compensations soient
pondérées et sans discrimination à l'endroit de ceux qui
n'étaient pas directement employés de la Compagnie minière
IOC.
Deuxième groupe de recommandations. En titre, les
responsabilités partagées. Attendu les avantages fiscaux
consentis par les gouvernements pendant les premières années de
fonctionnement; attendu le coût minime négocié pour
l'exploitation du minerai pendant plusieurs années d'exploitation;
attendu les bénéfices accumulés pendant environ 20-25 ans;
attendu le bon renom de la Compagnie minière IOC en matière de
justice pendant toute cette durée - renom qu'elle veut d'ailleurs
conserver - nous recommandons trois choses: Que la Compagnie minière IOC
apporte de justes compensations à la population touchée par les
événements actuels; que la Compagnie minière IOC, en
collaboration avec les paliers gouvernementaux, apporte une
généreuse contribution, afin d'atténuer les coûts
sociaux entraînés par l'arrêt de l'exploitation du fer dans
la région; troisièmement, que la Compagnie minière IOC
facilite les ententes qui assurent la continuation des services à des
coûts raisonnables et rende possible l'application de nos
recommandations.
Troisième groupe de recommandations. Pour ceux qui restent,
attendu que certains citoyens choisiront de demeurer à Schefferville,
par devoir, par obligation ou par décision personnelle; attendu que ces
personnes auront besoin d'un gîte et de certains services, nous
recommandons six points: Nous recommandons le maintien de services
aériens et ferroviaires adéquats. Nous recommandons le maintien
des services hydroélectriques. Nous recommandons les services
communautaires essentiels qui ont déjà été
énumérés. Nous recommandons que les services
mentionnés soient fournis à des conditions abordables à
des tarifs comparables à ceux des autres centres de la province. Nous
recommandons que la compagnie reconsidère encore son ultimatum
décrétant qu'on libère ses maisons pour le 1er juillet -
aujourd'hui, on a dit le 1er août. Nous recommandons que
l'accessibilité à ces immeubles soit favorisée pour la
population qui demeurera à Schefferville. (18 heures)
Quatrième groupe de recommandations. Droits, concertation et
solidarité. Attendu que le droit élémentaire de tous
à l'information sur les questions qui les concernent; attendu qu'aucune
décision, dans la situation présente, ne devrait se prendre sans
la participation des populations concernées; attendu et tenant compte
des exigences d'une vraie solidarité au sein d'un population
composée de travailleurs et d'autochtones Montagnais et Naskapis;
attendu que des décisions justes seront possibles seulement avec la
participation des différents groupes et institutions; attendu que des
rumeurs insécurisantes polluent l'atmosphère et plongent une
population dans le marasme; nous recommandons trois choses: Qu'un réseau
efficace d'échange de communication et d'information soit mis sur pied
dans les plus brefs délais; qu'un mécanisme adéquat de
concertation soit aménagé entre les différentes
populations locales concernées et que des liens constants soient
maintenus avec les différentes instances gouvernementales, la Compagnie
minière IOC et les représentants des groupes et des institutions
de Schefferville. Nous sommes déjà rendus à la conclusion
un peu sentimentale.
En terminant, je ne peux résister à vous faire part de
quelques idées qui me sont chères et qui me reviennent à
l'esprit très souvent depuis le 2 ou le 3 novembre 1982.
Premièrement, nous espérons, dans la conjoncture actuelle, que
les hommes, les femmes et les enfants seront traités dignement en
prévision d'heureux lendemains. Deuxièmement, dans l'option de
solutions de rechange et d'alternatives, je souhaite qu'on tienne compte des
coûts sociaux qui en découleraient et qu'on donne priorité
aux valeurs humaines en jeu. Par valeurs humaines, nous entendons
l'honorabilité et la valorisation du travail, l'importance et le prix de
la vie familiale, et une attention primordiale et prioritaire à la
jeunesse et au Québec de l'avenir. Troisièmement, dans les
projets de travaux à Schefferville, je souhaite que l'on se
préoccupe de réalisations utiles, productives et
créatrices.
Quatrièmement, en union avec la communauté
chrétienne, je fais appel à un véritable esprit de
solidarité qui marque déjà profondément la
population de Schefferville. Les épreuves et l'angoisse actuelles ont
contribué à rapprocher encore davantage les familles. Elles
méritent notre admiration. Qu'elles soient imitées aux divers
échelons de notre société par les gens de bonne
volonté qui veulent sincèrement le bonheur et le progrès
de notre société québécoise.
C'est notre communiqué. Nous avons bien l'impression que ces
phrases sont peut-être intellectuelles plus qu'autre chose, mais ce sont
les principes qui ont été amplement développés par
les autres mémoires.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M.
Mongeau.
Période de questions et de commentai-
res. M. le ministre au Développement régional.
M. Gendron: Mgr l'évêque, M. le vicaire
général, autres membres de la communauté
chrétienne, je voudrais, comme on l'a fait pour les autres, vous
remercier d'avoir cru opportun de vous exprimer au nom de votre
communauté, à la suite des difficultés que nous analysons
depuis deux jours. Je suis convaincu que la population de Schefferville
souhaitait effectivement que les dirigeants de sa communauté
chrétienne puissent également s'associer à tous ceux qui
voulaient exprimer des considérations et des points de vue. Vous parliez
d'une analyse rapide, lorsque vous mentionniez tantôt qu'il s'agirait
peut-être de considérations à caractère plus
sensible; je crois, au contraire, que vous avez développé,
succinctement j'en conviens, mais avec passablement d'exactitude des points
importants qui avaient été d'ailleurs soulignés dans la
plupart des autres mémoires. Lorsqu'on se donne la peine d'analyser
votre mémoire et d'en faire un certain résumé, on constate
que vous touchez des points sur lesquels les porte-parole du gouvernement ont
déjà fait des commentaires ou donné certaines assurances
qui nous apparaissent ultimement requises.
Je voudrais prendre quelques minutes pour relever quelques points, avant
d'en arriver à une question ou deux. Lorsque vous dites que, face
à un problème comme celui que votre population vit, la meilleure
concertation possible entre tous les intervenants est requise, je pense que
vous rejoignez une des préoccupations que nous avons. Depuis deux jours,
on a parlé beaucoup de la nécessité d'une grande
concertation pour faire face aux difficultés.
Vous dites également qu'il est important d'éviter que,
dans une telle situation, les négociations se fassent sur une base
individuelle ou dans un rapport de faiblesse, parce que c'est souvent ce que
cela veut dire dans un contexte comme celui-là. Il faut toujours
envisager que toutes les personnes soient traitées avec le plus
d'équité possible. C'est pourquoi nous avons retenu la suggestion
qui nous a été faite à plusieurs reprises d'envisager
qu'une personne-ressource - certains ont parlé d'un médiateur,
mais peu importe le nom - puisse venir dans les meilleurs délais et
qu'une équipe de travail puisse réévaluer et
apprécier davantage les éléments de réparation qui
ont été suggérés par la minière IOC pour
s'assurer que l'ensemble des citoyens et des citoyennes y trouve une forme de
compensation équitable.
Il y a également un autre point de votre analyse qu'il est
important de faire ressortir. Cela va en contradiction avec ce qu'on a entendu
de la part de l'Opposition à plusieurs reprises qui aurait
souhaité que nous soyons en mesure, en tant que gouvernement, de donner
suite dès aujourd'hui à une série de mesures qui
étaient suggérées dans les mémoires, alors que
vous, vous parlez de faire une analyse sérieuse, en termes de
coûts, des éléments de rechange ou des projets
envisagés. Vous mentionnez très concrètement dans votre
mémoire la nécessité que les coûts sociaux et
humains des solutions de rechange soient évalués
sérieusement. Je pense que cela fait responsable et c'était dans
ce sens qu'il nous apparaissait non approprié d'arriver ici rapidement
avec une partie du trésor québécois et de dire, sur le
bras, comme cela, que nous pourrions donner suite à une série de
mesures.
Bien sûr, on serait probablement plus populaire, on serait
probablement plus applaudi dans la salle si on pouvait donner, dès
aujourd'hui, une série de réponses qu'on n'aurait pas eu le temps
de chiffrer, qu'on n'aurait pas eu le temps d'évaluer. On ne serait pas
en mesure tout de suite d'établir la manière dont cela pourrait
arriver dans votre milieu en vous donnant la conviction que ce sont des choses
qui permettraient de garantir un peu mieux votre avenir. C'est pour cela qu'il
va falloir analyser toutes ces choses et, dans ce sens, lorsque vous faites des
références comme celles-là dans votre mémoire, on
est tout à fait d'accord.
Vous parlez également de reconsidérer l'ultimatum qui a
été décrété par la minière IOC,
particulièrement là où il y a des délais assez
courts dans le temps. Il y a une bonne part de délais pour certaines
situations - je n'ai pas à les rappeler, vous les connaissez beaucoup
mieux que moi, puisque c'est vous, malheureusement, qui avez à les vivre
- au 1er juillet 1983. Dans ce sens, on a rappelé à plusieurs
reprises qu'on trouverait plus équitable, plus juste et beaucoup plus
normal d'envisager effectivement une reconsidération. Nous, on l'exige.
On va continuer de l'exiger pour que les citoyens et les citoyennes puissent
faire des choix en meilleure connaissance de cause. Donc, on est tout à
fait d'accord sur cette recommandation.
Enfin, strictement un autre commentaire important que vous faisiez. Que
les services publics et communautaires soient maintenus à des
coûts abordables. Encore là, je trouvais que c'était une
recommandation qui était teintée d'un sain réalisme. J'ai
dit dès l'ouverture que, pour ce qui est du gouvernement du
Québec, il est certain que tout sera mis en oeuvre pour qu'on maintienne
des services de qualité sur le plan éducatif, sur le plan des
conditions de santé et sur le plan de certaines activités de
loisirs normales, mais en regardant cela par rapport à ce que
j'appellerais, moi, l'évolution démographique. Et, dans ce
sens-là, c'est pour faire référence effectivement
aux coûts.
J'aurais en terminant, parce que je ne veux pas être trop long,
une seule question mais elle m'apparaît valable. Il y en a plusieurs qui
l'ont évoquée. J'aimerais cela avoir votre propre
évaluation. Vous avez parlé dans votre mémoire, à
plusieurs reprises, d'avoir des compensations pour ceux qu'on appelle "les
indirectement touchés", que ce soient les commençants, les
citoyens. Nous dans notre jargon on dit: Toutes les personnes en dehors du
"payroll" de la minière IOC. J'aimerais que vous puissiez
peut-être nous donner quelques balises, quelques critères, faire
une courte réflexion, comment vous voyez cette forme de compensation,
surtout si vous aviez à la chiffrer, comment cela devrait être de
tel ordre plutôt que de tel autre.
M. Mongeau: Vous touchez là un point difficile à
résoudre. Quand même, nous ne sommes pas dans une grande ville,
comparable à Labrador City, Wabush. Surtout, plusieurs de ces
gens-là, qui étaient, on pourrait dire marginaux par rapport
à la minière IOC, sont déjà partis. Il reste
plusieurs classes de gens, comme professeurs, attachés à
l'hôpital ou employés municipaux, commerçants. Ces
gens-là, je crois, s'attendent à une attention individuelle.
Chaque cas serait à résoudre en particulier. C'est là
qu'entrerait en oeuvre le rôle de quelqu'un, d'un comité de
concertation et de décision. Ce n'est pas facile de fixer la
compensation à donner à chacun.
On ne peut pas s'attendre non plus que la compagnie minière soit
intéressée à aider ces gens-là sur le même
pied que ses propres employés. Qu'elle contribue proportionnellement
à chaque individu selon une norme fixée, mais elle se doit de
contribuer pour aider ces gens-là soit à partir, soit à
rester.
Vous savez peut-être justement ce qu'on mentionnait, on a
donné un communiqué à plusieurs sur le départ des
employés d'Uranium City. On a fixé un montant, on les a
transportés d'Uranium City à Saskatoon par avion, s'il vous
plaît, gratuitement. Rendu à Saskatoon, on leur a donné
9000 $. C'est un beau chiffre, un exemple à dépasser.
M. Gendron: Je vous remercie, M. le vicaire
général.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député
d'Outremont. (18 h 15)
M. Fortier: Mon père, au nom de l'Opposition officielle,
j'aimerais vous féliciter de vous être engagé dans cette
présentation aujourd'hui. Il semblerait que l'exemple vient de haut
puisqu'on entend de plus en plus les autorités religieuses et les
communautés chrétiennes s'exprimer.
Dernièrement, les évêques canadiens se sont
exprimés sur les politiques économiques canadiennes. Ils ont
animé le débat dans la bonne direction, je crois, pour s'assurer
que les travailleurs auraient des emplois et que les politiques
gouvernementales iraient dans la bonne direction. Aujourd'hui, je vois que la
communauté chrétienne désire encore s'exprimer
publiquement. Peut-être que cette façon de faire diffère de
celle qui prévalait il y a de nombreuses années. Je crois que
c'est dans le meilleur sens de la vivacité de la démocratie.
Nous avons pris bonne note de vos recommandations quant aux justes
compensations pour les responsabilités partagées pour ceux qui
restent, ainsi que les droits, concertation et solidarité. Je vois,
à la fin du mémoire, que vous avez déjà fait
parvenir une copie de votre mémoire à M. Mulroney. Je crois que
vous l'avez fait, il y a quelque temps déjà. Est-ce qu'on
pourrait vous demander si, depuis l'envoi de la copie de votre mémoire,
vous avez reçu des réponses de M. Mulroney lui-même, et si
vous avez eu des indications quant à l'acceptation de quelques-unes de
vos recommandations?
M. Mongeau: M. Mulroney ne m'a donné encore aucune
réponse. Mais je pense que M. Mulroney est très sensible aux
bonnes relations et aux bonnes manières. Je pense qu'il veut être
bien accueilli. Il veut que les compagnies qui investissent leurs capitaux
soient bien accueillies dans la province.
M. Fortier: ...à part cela. Catholique.
M. Mongeau: Oui, mais d'origine bien québécoise et
catholique. Alors, je lui ai envoyé le mémoire. Il ne m'a pas
répondu. Mais je pense bien qu'il l'a accueilli avec attention. On
compte bien sur ses bonnes manières et sur ses bonnes relations avec
toute la population de Schefferville, comme il s'attend qu'on en ait pour les
compagnies qui viennent investir chez nous.
M. Fortier: D'ailleurs, je note dans votre mémoire que
vous dites que la compagnie avait quand même une bonne réputation
et que, d'après vous, elle voudrait la garder. J'espère que c'est
un gage que votre mémoire va être entendu et que les demandes qui
y sont formulées, non seulement pour les employés, mais pour les
autres également, vont trouver des solutions aux problèmes de ces
personnes qui doivent les affronter dans les semaines qui viennent. Je vous
remercie.
M. Mongeau: J'aurais encore un mot à dire.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Mongeau.
M. Mongeau: M. le ministre - de je ne sais pas quoi - tout
à l'heure, vous avez fait allusion à une phrase de mon
mémoire. J'ai peur que vous vous gargarisiez et que vous disiez qu'on a
le temps. Il nous l'a dit dans son mémoire: On a bien le temps. On va
apporter cela à Québec. Là, cela va s'empiler par-dessus
les autres papiers. Puis, cela va durer longtemps. Il faut analyser cela.
Une voix: Tu as voulu faire de la politique!
M. Fortier: Mon père, je n'ai pas voulu.
J'avais l'intention de le faire et je ne l'ai pas fait parce que je ne
voulais pas faire de politique avec cela.
M. Mongeau: C'est la première fois que vous perdez votre
chance. Parce que, dans les deux jours qu'on a passés ici, je voulais
justement - ce n'est peut-être pas la place -mais, en tout cas, je
voulais vous souligner cela. J'ai dit à votre président, en
privé, de faire une évaluation de nos réunions, que les
allusions politiques étaient une déformation professionnelle.
Vous ne pouvez y échapper. Mais, quand même, il y en avait
peut-être trop dans une assemblée comme la nôtre. Vous
êtes venus entendre et c'est ce qu'on a voulu, que vous écoutiez.
On a été heureux aussi de vous entendre, même si vous
n'étiez pas tellement limités. Vous avez parlé et, au bout
du compte, on a acquis bien des choses.
Alors, je reviens un peu sur l'allusion. On était bien d'accord
que l'analyse se ferait avec attention et réflexion. Mais on ne voudrait
pas que cela dure trop longtemps. C'est notre grand voeu, qu'il y ait des
signes de vie de la part du gouvernement du Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional.
M. Gendron: Oui, M. le vicaire, je voudrais dire une chose. Si
vous aviez effectivement la conviction que j'allais me gargariser en laissant
voir qu'on a tout le temps devant nous, vous avez bien fait de revenir à
la charge et de me préciser tout de suite que ce n'était pas dans
ce sens que vous parliez de prendre le temps d'analyser les impacts des
coûts sociaux. Je ne sais pas à quelle heure est votre prochain
office, mais si vous avez l'occasion de rester ici pour entendre la conclusion,
vous verrez qu'à certains endroits, quant à certaines
décisions que nous pensons pouvoir prendre dès aujourd'hui, on va
placer des échéanciers précis.
On ne s'est pas déplacés pendant deux jours pour venir
rencontrer la population et lui dire que selon la suggestion de l'Opposition,
nous allons faire une autre commission parlementaire dans un an pour voir si on
a donné suite à quelques-unes de vos recommandations. Je pense
que vous méritez plus que cela et nous allons tout mettre en oeuvre pour
ne pas retarder les choses qu'on peut mettre en place tout de suite. Par
contre, on ne peut pas rebâtir l'économie d'une ville qui
était sur un concept monoindustriel, avec une seule entreprise, du jour
au lendemain, et être crédible devant une population
responsable.
Mgr Sutton (Peter): M. le Président, si vous permettez un
mot à un autre Irlandais, je crois, catholique...
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Mgr Sutton: Un peu en retard, je voulais vous souhaiter la
bienvenue dans ce coin du diocèse qui n'est pas des plus petits. Il
mesure une fois et demi la grandeur de la France. Vous savez bien que dans la
chancellerie, c'est un peu comme au gouvernement, les papiers se tassent.
Dernièrement, quand un groupe d'évêques canadiens ont fait
une déclaration au pays, de tous les coins il y a eu des
réactions. Entre autres, les évêques du Québec ont
donné leur appui à ce document. Nous croyons que c'est un peu un
reflet de ce que nous faisons aujourd'hui. Cela ne s'est pas fait
automatiquement; on parle des gens et non pas des bâtisses et des
institutions. On parle de souffrance et d'angoisse, de questions que se posent
les gens de chez nous.
Nous tenons à vous remercier d'être venus chez nous. En
passant, vous pouvez arrêter de l'autre côté de la
frontière, comme c'est défini. Nous vous souhaitons un bon voyage
ce soir. On vous a donné du mauvais temps en arrivant pour que vous
goûtiez au pays, pour ceux qui ont fait du "jogging" à l'heure du
midi. Le beau temps est garanti pour le retour dans le sud. Je vous remercie,
M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mgr Sutton, ainsi que
le Père Mongeau, de vous être présentés devant cette
commission pour nous faire part de vos bonnes paroles. Merci beaucoup.
J'appelle donc maintenant le groupe suivant, les Conspirateurs de l'an
2000. Je les inviterais à prendre place à l'avant. Je demanderais
à celui qui va présenter le mémoire de s'asseoir de ce
côté pour faciliter le jeu des caméras.
Je reconnais M. Gilles Baril, en tout cas, en compagnie d'autres
personnes.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Térniscamingue): Vous n'avez pas
le choix!
M. Fortier: On le connaît jusqu'à preuve du
contraire.
Conspirateurs de l'an 2000
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez nous
présenter les personnes qui sont avec vous, M. Baril.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Oui, à mon
extrême gauche, M. Roger Falardeau, industriel, Mme Monique Lemen, de
Clarke-City; à mon extrême droite, M. Guy Rousset, Mme Nicole
Blackburn, M. Michel Champagne, maire de Saint-Séverin-de-Proulxville,
dans le comté de Laviolette, il y a M. Sylvain Vaugeois, qui n'est pas
arrivé, et M. Serge Moussaly, docteur et responsable de l'équipe
de recherche à l'Université du Moyen-Nord, à l'UQAC,
à l'Université du Québec à Chicoutimi. Donc, sans
plus tarder - je suis persuadé d'ailleurs que les gens sont
intéressés à nous entendre - nous allons commencer.
Membres de la commission, population de Schefferville,
communautés autochtones, jeunes du Nord et jeunes du Québec, je
parle au nom des Conspirateurs de l'an 2000. C'est une corporation de jeunes et
de moins jeunes, d'hommes et de femmes, de syndiqués et de
non-syndiqués, de travailleurs et de chômeurs, bref des gens de
tous les milieux, de toutes les couches sociales et de toutes les
régions qui ont ceci en commun: ils ont une ferme volonté d'aller
au-delà des chicanes de partis politiques ou des guerres
idéologiques, ils ont cette ferme volonté positive,
acharnée et constructive de travailler ensemble pour bâtir
l'avenir.
Ils sont Conspirateurs de l'an 2000, car ils ne veulent pas d'un mode de
développement trop contraignant pour l'avenir. Ils sont conspirateurs
car ils veulent participer avec d'autres à corriger cette trajectoire
qui mine notre sous-sol sous nos pieds, sans respect de nos lendemains.
L'euphorie des salaires doit désormais céder la place à la
lucidité. Aujourd'hui, un exemple criant sonne l'alarme sur un mode de
développement québécois ou plutôt sur un mode
d'exploitation du Québec plus ou moins révolu. Schefferville se
meurt, demain d'autres situations criantes risquent de plonger encore des
populations dans la grande noirceur.
Si nous sommes ici, vous comprendrez que ce n'est pas à cause du
seul problème de Schefferville, mais aussi à cause d'un
Québec que certains qualifient de sans espoir à cause d'un Nord
qui se perd, à cause d'une jeunesse qui a besoin d'action, qui est sans
emploi et qui aspire à l'espoir d'une vie nouvelle. Nous pensons que
tous les mémoires présentés ici sont en accord avec nous
pour dire que ce vieux modèle, hérité du duplessisme, doit
se rajeunir, sinon être réinventé selon d'autres valeurs,
d'autres intérêts.
Parallèlement, les jeunes du Québec -et d'abord ceux du
Moyen-Nord québécois -ont besoin d'être valorisés,
non pas dans des programmes de rempotage de fleurs ou de balayage en usine sur
le bord de la fermeture, mais dans des secteurs où ils auront la ferme
conviction de travailler à ces objectifs nobles de redressement de
l'économie et de l'équilibre social.
Ce défi - car seul un défi peut relancer à la fois
le Nord et la jeunesse -nous devons le relever ici même, à
Schefferville, pour ensuite le propulser à l'ensemble des villes qui en
auront, tôt ou tard, le plus grand besoin.
Le service civil nordique que nous proposons, et que nous
préférons appeler le nouveau défi québécois,
nous semble la juste mesure pour répondre à deux urgences
nationales: c'est-à-dire relever le défi du Nord et parier sur la
jeunesse pour relancer l'espoir des jeunes et du Québec.
Je voudrais quand même faire une mise au point sur la question du
service civil nordique proposé par les Conspirateurs de l'an 2000. Le
service civil nordique n'est pas militaire, n'est pas un cadre pour des
délinquants et n'est surtout pas une Sibérie
québécoise, comme se sont amusés à le dire certains
journalistes de notre presse québécoise. Le succès du
service civil nordique repose sur le potentiel et la qualification de sa
jeunesse, sa capacité technologique mise au point par ses chercheurs et
ses universitaires, sa capacité administrative et financière pour
reconvertir ses structures et faire face aux nouvelles exigences du
développement des années quatre-vingt et l'expérience et
la renommée de ses professionnels dans beaucoup de domaines
d'avant-garde par ailleurs.
Le cadre d'intervention. Nous proposons une reconversion
économique, politique et culturelle en développant un
modèle alternatif, jusqu'à la relance probable de l'industrie
minière à partir de 1985 et bien au-delà, qui permettrait
de vivre et de bien vivre dans un autre contexte, aussi bien ici qu'à
Rouyn-Noranda.
À court et moyen terme, il faut assurer la viabilité de la
ville localisée au centre du bassin du Labrador. Il faut propulser le
développement pour l'ensemble du secteur des ressources minières
et touristiques. (18 h 30)
À long terme, nos projets s'inscrivent dans le cadre d'une
nouvelle stratégie de développement pour le Québec tout
entier par la voie du développement nordique.
Tout en étant conscients des difficultés
financières et économiques qui limitent la liberté
de manoeuvre du gouvernement du Québec, nous considérons que les
pertes partielles ou totales des villes concernées sont trop
énormes à tous points de vue: pertes en coût du capital
existant à Schefferville, pertes en coûts sociaux, pertes au
niveau des réactions en chaîne que provoque la fermeture de
Schefferville, et cela, notamment, jusqu'à Sept-Îles.
Trois éléments sont décisifs pour le
développement du projet de service civil nordique: l'utilisation des
équipements disponibles; la possibilité pour les jeunes de vivre
une expérience nordique dans le domaine de leur compétence et
d'acquérir une expérience pluridisciplinaire indispensable
à leur épanouissement; troisièmement, permettre aux
populations concernées de lancer des projets et de participer activement
à leur évolution. Les objectifs du service civil nordique,
c'est-à-dire le nouveau défi québécois sont:
proposer aux populations des villes touchées des solutions durables;
expérimenter un nouveau cadre de vie, professionnel, économique,
éducatif, social et de loisirs; mettre en valeur de façon
appliquée les acquis technologiques des centres de recherche nordiques
avec la volonté d'une partie de la jeunesse québécoise de
bâtir un espace nouveau répondant à ses aspirations de
développement et de contribution active à la
collectivité.
Pour ce faire, nous proposons l'implantation de trois catégories
de projets spécifiques. La première catégorie de projets,
qui s'inscrit dans une vision à très court terme - il en va de la
survie de la ville -sont ceux qui utilisent une technique de pointe ou
bénéficient de recherches approfondies et
bénéficiant d'un marché local ou national. Exemple, la
"serriculture" ou culture en serres abritées utilisant une technologie
peu consommatrice d'énergie. Dans ce domaine, une entreprise
modèle existe sur la Côte-Nord, à Clarke-City. Mme Monique
Lemen pourra répondre à vos questions à ce sujet puisque
c'est elle qui est responsable du projet. Deuxièmement, il y a
l'élevage; troisièmement, la chasse sélective du caribou;
quatrièmement, la production de vêtements nordiques, la
solarisation de l'habitat, le tourisme d'hiver et d'été par
l'aménagement de toute une infrastructure touristique basée sur
la pêche, la chasse, l'écologie, la survie dans la nature et le
concept de village vacances-famille.
La deuxième catégorie de projets s'inscrit dans un temps
à plus moyen terme. Ce sont les projets à rentabilité
retardée, conditionnels à la mise au point d'une nouvelle
technologie adaptée au contexte nordique et susceptibles d'exercer des
effets d'entraînement sur l'économie québécoise.
Exemple: implanter l'activité industrielle de pointe non liée au
facteur du coût du transport et qui peut bénéficier des
commandes des secteurs public, parapublic et privé. On dirait, par
exemple, la micromécanique, la micro-informatique, la biotechnologie;
les nouvelles optiques, la métallurgie de pointe et logicielle pour
répondre aux commandes des hôpitaux, d'Hydro-Québec, de
l'entreprise privée, consommateurs de ces produits.
La troisième catégorie de projets s'inscrit dans une
visée plus à long terme et est axée sur la formation et la
recherche. La troisième catégorie de projets concerne le
développement de l'individu, la formation, la recherche et la protection
de l'environnement. Le projet d'associer les jeunes au développement du
Moyen-Nord québécois est une entreprise qui coïncide tout
à fait avec cette orientation d'entreprises humaines qui construisent le
présent et l'avenir. La description serait de créer un centre
national de recherche en technologie nordique pour l'exploration
minière, la métallurgie, l'environnement, les techniques du
froid, la ville et l'habitat -des activités liées aux
technologies de pointe pourraient avoir comme base la participation du Centre
de recherche du Moyen-Nord de l'Université du Québec à
Chicoutimi, de l'Université Laval, de l'Université McGill, de
l'IREQ, du CRIQ et du Centre de recherches minérales du Québec -
un centre de santé et du bien-être axé sur le
développement de la prévention et la survie en forêt; un
centre universitaire des civilisations et des cultures autochtones; un centre
des communications et d'informatique.
L'informatique et le projet. De façon particulière, un des
volets de ce projet Moyen-Nord québécois pourrait coïncider
avec une préoccupation qui serait importante au cours de l'année
1983, c'est-à-dire l'année internationale des communications. La
dernière technologie née pour les Québécois dans ce
domaine est la télématique. Elle tient des
télécommunications et de l'informatique à la fois. La
pertinence de cette technologie dans un projet de développement du
Moyen-Nord québécois auquel les jeunes sont associés est
des plus importantes. Associer de façon marquée les jeunes
d'aujourd'hui à un tel projet de service civil nordique ne demande-t-il
pas qu'on tienne compte de leur habileté presque naturelle pour les
technologies qui font appel à l'informatique?
Actuellement, au Québec, on s'entend sur l'urgenge d'un virage
technologique. Trois dimensions, c'est-à-dire l'information à
distance, la formation à distance et l'expertise
télématique rendraient notre projet de service civil nordique
compatible avec les exigences d'une nouvelle dynamique économique et
sociale au Québec. Il est à noter qu'il est facile et peu
coûteux aujourd'hui d'avoir accès à des banques de
données comme Médiatex, Agora et Polytechnique.
En ce qui concerne la formation à distance, une approche est
susceptible d'être intéressante ici: Organiser une sorte
d'école à distance qui innoverait tant au niveau des contenus
qu'au niveau du processus pédagogique. Cette approche aurait l'avantage
d'expérimenter des modèles d'éducation qui rencontreraient
actuellement trop d'opposition dans des milieux ou des régions à
population dense et donc déjà très lourdement
structurées mais trop rigides vis-à-vis l'innovation.
L'expertise télématique. La télématique est
une nouvelle technologie qui devient très rapidement à la mode et
on est sur le point d'y consacrer de plus en plus de ressources, au
gouvernement, dans les milieux d'affaires, dans les institutions. Il reste
qu'au Québec, à part quelques centres, c'est-à-dire la
Direction générale des moyens d'enseignement du ministère
de l'Éducation du Québec, Télé-Unversité,
l'UQUAM et Vidéotron, il y a actuellement bien peu d'expertise
développée dans ce domaine.
Bref, la dimension informatique est indispensable au
développement nordique, surtout pour Schefferville, qui ne
bénéficie pas d'un réseau de communications terrestres
reliant la ville efficacement aux autres centres nordiques et du Québec,
mais qui pourrait bénéficier très facilement du satellite
Anik C et de Symphonie pour réduire le facteur éloignement.
La dimension autochtone. Schefferville est un point de convergence de la
civilisation amérindienne. Trop méconnue ou trop oubliée,
la civilisation amérindienne est une richesse immense de notre
patrimoine. Redonnons aux autochtones le Nord, redéfinissons ensemble
les rapports mutuels et initions ensemble de nouvelles valeurs qui
correspondent à la culture autochtone qui respecte un
épanouissement autonome de sa civilisation.
En ce sens, nous recommandons que Schefferville soit le centre
universitaire d'étude de civilisation et de culture autochtones
comprenant une école des langues autochtones, un centre d'étude
de la médecine amérindienne, une école de vie
amérindienne, une banque de données informatisée
amérindienne et un centre de gestion de la faune et de la flore. Cette
dimension nouvelle permettra de créer un cadre véritablement
amérindien qui respectera la culture autochtone locale et nationale avec
des codes culturels vraiment autochtones et donnera un premier point de
convergence dans les rapports entre nos deux civilisations.
En somme, nous recommandons que le gouvernement du Québec prenne
en charge la création urgente d'un service civil nordique, tel que
défini dans Le Nouveau Défi
Québécois, comme projet-pilote pour Schefferville en
impliquant 1500 jeunes susceptibles d'être impliqués ici, et la
possibilité de voir ce projet implanté de façon
concluante, positive, dans d'autres villes du Moyen-Nord.
Les moyens. Avec les gens du milieu et d'ici, les autochtones, les
jeunes, les universitaires et le gouvernement, sur la base des projets que nous
proposons et en fonction d'un nouveau concept de développement, nous
recommandons la création d'un "task force": Que soit formé un
groupe d'intervention qui se diviserait en deux comités distincts, un
comité national chargé de faire l'étude,
c'est-à-dire la faisabilité des différents projets et,
dans un autre ordre d'idées, comité local pour le
démarrage des projets selon un échéancier à
établir sur un plan triennal à compter de juillet 1983.
Que soit créé un fonds de développement nordique
qui recueillerait les sommes nécessaires au projet avec la participation
du gouvernement du Québec, du gouvernement fédéral et de
l'entreprise privée. Nous recommandons que soit trouvée une
formule pour que le modèle puisse s'appliquer aux autres villes
nordiques. En somme, notre projet s'articule autour de deux idées
simples: la contribution volontaire des jeunes et l'utilisation des ressources
existant ici et au Québec.
Nous sommes actuellement devant un défi de taille, celui des
défis à l'occasion desquels l'être humain opte pour des
changements sociaux et économiques fondamentaux. MM. les parlementaires,
réalisez bien que rien n'est possible si on n'est pas visionnaire.
L'utopie dont on nous affuble est plus créatrice et riche d'avenir que
les prévisions à court terme pour gérer une crise qui nous
échappe. La jeunesse et la situation nordique du Québec, ces deux
paramètres fondamentaux du changement assureront l'avenir du
Québec tout entier si nous savons l'entreprendre. Ce modèle
alternatif basé sur l'humanisation de l'économie, basé sur
un nouveau cadre social, nous voulons qu'il puisse se transporter partout
où le système actuel déclarera faillite.
Nos ressources sont énormes parce qu'elles se situent d'abord
dans le cerveau des jeunes et des moins jeunes qui possèdent une
puissance créatrice formidable. Ils sont de la race des pionniers et des
bâtisseurs de notre pays. C'est justement de ces hommes nouveaux,
véritables géants du défi québécois, que
nous avons besoin. Nous voulons construire en harmonie avec la nature dans un
esprit de dépassement qui se situe au-delà du profit
essentiellement matériel. Construire n'est pas seulement la
juxtaposition des choses. Schefferville deviendra alors une plaque tournante du
développement québécois, un modèle de
société et ainsi le Québec aura, pour la
première fois, intériorisé les racines profondes de sa
longue trajectoire vers sa nordicité. Il l'aura vécue et
désirée en toute liberté. Encore une fois, cette approche
nouvelle doit faire l'objet d'un consensus, peu importe qui l'a entreprise.
Permettez-moi, en terminant, de vous citer le Dr Alexander King,
fondateur du Club de Rome qui disait: "Tout groupe de réflexion est
condamné, comme tout prospectiviste, au destin de Cassandre. Quand on
n'écoutait pas Cassandre, ses prévisions se réalisaient.
Quand, au contraire, on l'écoutait, ses prévisions ne se
réalisaient pas car on prenait alors les mesures correctives."
Pour terminer, MM. les parlementaires, il est intéressant de
constater qu'en chinois les mots "crise" et "opportunité" sont un seul
et même mot. Donc, toute crise est mère de changement et donc,
riche en opportunités. Schefferville doit vivre, la jeunesse du
Québec aussi. Les Conspirateurs de l'an 2000. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Baril. M. le
ministre au Développement régional.
M. Gendron: Mesdames et messieurs les Conspirateurs de l'an 2000,
je voudrais d'abord faire deux remarques d'ordre général. Pour ma
part, je ne suis pas déçu et même je suis plutôt
content de voir que c'est le dernier mémoire pour analyse - puisque le
prochain ne sera que déposé - parce que dans les faits, quand
même, il nous livre un nouveau défi. Quant à
l'évaluer, je ne suis pas en mesure d'évaluer dès
aujourd'hui les possibilités concrètes de mesurer si, pour nous
ou les jeunes qui bâtiront la société de demain, nous
serons en mesure de relever le nouveau défi qui nous est proposé
par vous... Il est certain qu'il y a plusieurs éléments
très avant-gardistes qui sont traités. Par contre, vous
conviendrez que même si les idées sont avant-gardistes, souvent,
les moyens demeurent moins avant-gardistes pour les réaliser. C'est
certain que si on faisait une analyse très détaillée des
coûts pour envisager concrètement de donner suite à
plusieurs des mesures suggérées, je n'ai aucune espèce
d'idée du portrait réel que cela donnerait. Je pense que vous en
êtes conscients, puisque vous suggérez vous-mêmes de confier
cette réflexion à un groupe de travail qui pourrait creuser
davantage, pas uniquement le modèle, mais surtout son application. Dans
ce sens, c'était mon premier commentaire. (18 h 45)
Quant au deuxième commentaire, je pense que la population de
Schefferville aura compris, bien sûr, qu'un tel mémoire s'inscrit
dans un défi ou une préoccupation beaucoup plus large que
strictement le cadre ou la problématique que vous vivez
présentement, à la suite de l'annonce de la fermeture de la
minière IOC. Il apporte quand même une réflexion qui,
après l'avoir analysée, après l'avoir creusée
davantage, pourrait permettre que la vocation dite monoindustrielle de
Schefferville soit modifiée si jamais il était possible,
après plus d'analyses, de donner suite aux recommandations de votre
mémoire. Dans ce sens, je pense que ce n'était pas inopportun de
venir le présenter dans le contexte que nous vivons depuis deux
jours.
J'aimerais poser quelques questions qui nous permettraient
peut-être de préciser davantage l'état de votre
réflexion quant au nouveau défi. Mais, avant de les poser, je ne
détesterais pas, pour l'information de mes collègues et de tous
les citoyens et citoyennes qui nous écoutent, que vous nous
définissiez ce que vous entendez par "conspirateur". Que je sache, cela
n'a pas le même sens que celui qu'on lui prête traditionnellement.
Pour éviter toute confusion, j'aimerais vous entendre là-dessus.
Cela sera très court. Donnez-nous la définition de
"conspirateur", selon vous.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscaminque): C'est une
très bonne indication. Le mot "conspirateur" n'est pas puisé du
sens négatif, mais du sens positif qui vient du mot "conspirare", du
XVIe siècle, et qui veut dire: Souffler ensemble vers quelque chose,
c'est-à-dire bâtir vers l'avenir dans un élan positif.
M. Gendron: Merci. À la page 9 de votre mémoire -
et j'aimerais que vous essayiez, M. Baril ou un de vos collaborateurs,
d'être le plus précis possible -vous avez une suggestion. Vous
mentionnez que ce que vous proposez s'inscrit dans une nouvelle
stratégie de développement pour tout le Québec, donc le
Québec dans son entier, uniquement par la voie du développement
nordique. Alors, je reprends, très précisément. Vous
dites: Nos projets s'inscrivent dans le cadre d'une nouvelle stratégie
de développement pour le Québec tout entier par la voie du
développement nordique. J'ai beaucoup de difficulté,
intellectuellement en tout cas, à essayer de ramasser et de voir
concrètement que, pour le Québec tout entier, uniquement la voie
du développement nordique serait une voie de développement
à épouser pour l'ensemble du Québec en termes de
développement économique.
M. Moussaly (Serge): Si vous permettez. Je suis
économiste, donc la question s'adresse à moi en particulier, au
groupe de travail avec qui on a travaillé.
Lorsqu'on a analysé ce qui se passe à Schefferville, il
n'y a pas de doute, c'est le
sort des autres villes minières du Québec également
qui plus ou moins... Donc, Schef-ferville a été la
première ville où il y a eu cette décision de fermeture.
Néanmoins, le risque de fermeture des autres villes minières
s'annonce, y compris Gagnon, Chibougamau, Rouyn.
Pour nous, le problème de Schefferville, c'est le symbole de tout
un processus de développement qui a été engagé
depuis les années cinquante et qui, à travers Schefferville,
devrait être repensé complètement. Lorsqu'on dit que le
Québec doit changer de stratégie, ce qu'on veut dire c'est qu'il
ne s'agit pas pour Schefferville de faire un redressement partiel ou
compensatoire qu'on retrouverait dans les autres villes du Québec.
Donc, cela pose la question de l'orientation économique de la
structure même de l'économie québécoise, de sa
capacité de devenir, d'être à l'abri des variations du
marché international. La voie, les moyens pour arriver à assurer
cette sorte de protection à l'égard des variations du
marché international, il faudrait que le Québec se
définisse une nouvelle compétence distinctive dans le nouveau
système international des échanges qui va se créer
à partir de la crise. Or, cette nouvelle compétence distinctive
que le Québec pourra acquérir, à notre avis, restera,
demeurera orientée vers les avantages en ressources naturelles du
Québec. Je ne voudrais pas m'étendre sur les autres options que
le Québec pourra choisir, en particulier celles qui misent sur les
petites et les moyennes entreprises. Je ne voudrais pas faire la comparaison
sur cet aspect-là. L'évidence, pour nous, est qu'on ne peut pas
concevoir que l'économie québécoise dans son entier pourra
fonctionner et prospérer si la frontière économique
descend au niveau du 50 ou du 45 parallèle. Cela est essentiel pour
nous. L'avenir de tout le Québec est lié au développement
du Moyen-Nord et de son potentiel énergétique, minier et
forestier.
M. Gendron: Vous abordez également, dans votre
mémoire, la possibilité d'aller plus loin dans la question qui a
été fouillée passablement, du moins dans le domaine
universitaire, qu'on appelle la culture en serre. Je voudrais seulement
vérifier auprès de vous si vous avez analysé les types de
production qui pourraient être produits et jusqu'à quel point vous
avez regardé les conditions de marché. Est-ce que vous envisagez
des productions à caractère autosuffisant uniquement pour la
population limitrophe du bassin dans lequel on est ou si vous avez
également regardé la possibilité d'avoir des types de
production qui permettraient d'envisager un minimum d'exportation?
Mme Lemen (Monique): Oui, ces notions ont été
envisagées. Je pourrais peut-être décrire un peu le
modèle qu'on propose au service civil en ce qui a trait à
l'implantation d'un réseau de serres de production de légumes
divers, douze mois par année, dans chaque ville nordique. La
centralisation du projet de développement de serres, au niveau du suivi
technique de l'apprentissage du mode de production, des cédules de
production, de l'approvisionnement, des équipements et des produits
servant à la production, pourra être assurée par les serres
abritées à Clarke-City. La main-d'oeuvre nécessaire
à l'encadrement et à la réalisation de ces projets varie
de l'agronome au menuisier, en passant par le chimiste, le géologue,
l'architecte, l'électricien, le soudeur, le plombier et toutes les
compétences administratives.
Ainsi, on recrute parmi la jeunesse le maximum de compétences
jusqu'à maintenant non éprouvées à cause de la
situation économique qui ne leur offre pas d'emploi. À court
terme le réseau d'implantation de serres est réalisable
dès avril 1983 et déclenche un démarrage économique
local et régional orienté vers l'autosuffisance, la diminution
des coûts de production et d'importation en plus de fournir une meilleure
qualité de produits. À moyen terme, si le réseau se
développe dans chaque ville nordique, six à dix serres, pour un
coût d'investissement de base de 40 000 $, peuvent suffire à une
population de 2000 habitants en légumes essentiels tels la tomate, la
laitue et le concombre.
Une centaine d'emplois sont directement créés dès
la mise en branle de la production légumière. À long
terme, la région peut développer ses propres moyens
d'approvisionnement en ce qui a trait aux composés du sol d'exploitation
dans les serres; par exemple, le bran de scie. Une scierie dort à La
Romaine qui peut produire du bran de scie pour fournir le sol adéquat
à l'exploitation des légumes en serre, la tourbe de sphaigne qui
est produite à Sept-Îles est déjà
éprouvée dans nos sols de culture à Clarke-City et la
chaux nécessaire pour l'amendement des sols et la préparation des
engrais chimiques peut être produite par la récupération et
la transformation de tout le volume de déchets de crustacés
rapportés au quai par les pêcheurs de la côte.
À long terme, on peut aussi envisager une diversification des
méthodes de production de légumes en allant recruter parmi les
jeunes diplômés les compétences particulières des
chercheurs. Tout ce processus en branle est sujet à créer environ
300 emplois régionaux dont la majorité de la main-d'oeuvre se
composerait de jeunes. Ce modèle de fonctionnement et d'implantation de
serres dans les villes nordiques est applicable à tout autre projet de
développement: par ses structures de
financement qui pourraient être composées d'actionnaires
participants, d'actionnaires extérieurs et d'investissements
gouvernementaux, par sa structure de gestion composée d'un conseil
d'administration doté d'un comité de finances, d'un comité
exécutif et d'un comité de recherche, le comité
exécutif étant chargé de coordonner les projets
régionaux.
M. Gendron: Je terminerais là-dessus avec une toute petite
dernière question. J'aimerais que vous me citiez une expérience
simplement de culture en serre basée sur douze mois et que vous me
disiez si vous avez envisagé quel type d'énergie vous
utiliseriez.
Mme Lemen: Les énergies sont adaptables aux ressources
naturelles locales. Cela peut varier de l'électricité, au
chauffage au bois. Tout dépend de la richesse locale en
alimentation.
M. Gendron: Alors, les énergies traditionnelles?
Mme Lemen: Elles varient, oui; traditionnelles, oui.
M. Gendron: Et puis, sur les douze mois?
Mme Lemen: Sur les douze mois?
M. Gendron: Oui. Vous êtes convaincus qu'il est possible de
faire une culture en serre sur une base de douze mois.
Mme Lemen: Absolument, oui.
M. Gendron: Est-ce que vous connaissez une expérience
quelque part où on l'a fait?
Mme Lemen: Eh bien, on le fait à Clarke-City.
M. Gendron: À Clarke-City, vous produisez sur douze
mois?
Mme Lemen: Oui. On a un programme de production progressive, de
telle sorte que, l'hiver, on produit la laitue; l'été, la tomate,
le concombre. La production de tomates peut s'échelonner jusqu'en
novembre, tard en décembre. M. Moussaly pourrait peut-être vous
expliquer.
M. Moussaly: Alors, pour le bénéfice des membres de
la commission parlementaire, j'aimerais signaler que le projet de Clarke-City,
qui fonctionne sur une base économique depuis bientôt deux ans,
fait suite à des travaux de recherche sur les cultures abritées
que le Centre de recherche du Moyen-Nord à Chicoutimi a amorcés
il y a quelques années. On a expérimenté, à la
Baie-James, le processus au point de vue du fonctionnement. C'est à
partir de cette expérience-là que le projet de Clarke-City a
fonctionné et le même type de projet fonctionne actuellement
à Fermont, c'est-à-dire a commencé à fonctionner
à Fermont.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. En mon nom et au nom
de mes collègues, j'aimerais également remercier les
conspirateurs de la présentation de leur mémoire. On a
assisté à des événements assez particuliers ces
derniers jours. À ce que j'ai su, plusieurs d'entre vous ont
couché à l'extérieur, ont couché dehors. On assiste
également à une autre première, celle de voir un
député ministériel présenter un mémoire
à une commission parlementaire. Comme M. Baril le sait sûrement,
c'est un sujet qui m'intéresse d'une façon assez
particulière puisque, depuis mon élection, c'est en principe un
de mes dossiers, avec les loisirs, à l'Assemblée nationale.
J'aimerais faire un léger commentaire général avant
de m'intéresser particulièrement à votre mémoire.
Depuis environ un an, on assiste à une série de projets de
service civil. Entre autres, on a fait allusion au service civil obligatoire
que M. le député de Sainte-Marie avait présenté et
auquel l'accueil fait par le premier ministre avait été
défavorable à la suite d'une question de ma part. Ensuite, on l'a
modifié pour en faire un service civil volontaire qui, au départ,
s'accepte beaucoup mieux qu'un service obligatoire, à mon humble avis.
Nous avons entendu parler aussi de différents projets dont celui du
député fédéral du comté, le
député Maltais; aussi du projet Katimavik de M. Hébert. On
a entendu parler également du plan de M. Marois qui est ici. On se
souvient que, dans le Soleil, il y a quelques mois, M. Marois devait
présenter un projet de service civil communautaire au comité des
priorités. À ce qu'on m'a dit, l'accueil n'a pas
été plus favorable que pour le projet Bisaillon. Maintenant, on
assiste au projet de service civil nordique. (19 heures)
Personnellement, j'ai eu l'occasion de rencontrer un paquet de groupes,
de mouvements de jeunes du Québec dont certains se sont réunis
les 3 et 4 décembre 1982 à Montréal. Ce qui est ressorti,
finalement, après deux jours de réunion avec les groupements de
jeunes du Québec, c'est qu'ils étaient contre toute formule
d'embrigadement ou de service civil embrigadé. Ils en ont conclu
également qu'ils étaient tous contre un exil, si vous me
permettez l'expression, ou un dépaysement ou
le fait de sortir de leur milieu propre pour s'expatrier dans une
région donnée pour un service civil.
Maintenant, vous parliez tantôt de 15Q0 jeunes qui seraient
impliqués dans votre service civil. Est-ce que les jeunes de la
région, ici - j'ai lu que vous en aviez consultés quelques-uns
à Clarke-City - de façon générale, diffèrent
d'opinion relativement à un service civil volontaire en relation ou en
comparaison avec les mouvements de jeunes dont on a entendu parler et que je
vous énumérais tantôt? C'est ma première question:
Est-ce que les jeunes de la région diffèrent à ce
niveau-là?
Maintenant, quelques petites questions sur les projets
d'activités proposés qui ne nécessitent pas
nécessairement, selon vos dires, un gros investissement. Entre autres,
relativement à l'élevage du mouton, ici, à Schefferville,
je ne suis point un expert en la matière, mais, à ma
connaissance, c'est un animal relativement fragile. Si on a à lui couper
la laine, j'ai l'impression qu'il va falloir faire bien attention parce que ce
n'est pas tellement chaud dans le coin. Avant que la repousse de la laine se
fasse, il faudrait les garder à l'intérieur. Ce sont des
critiques constructives, on pourra en discuter tantôt. Ensuite, sans
faire de jeu de mots, à ma connaissance, il n'y a pas de fourrage ici,
ni de prés pour les moutons. Je présume que vous pourrez
répondre tantôt. J'aimerais savoir aussi s'il y a eu d'autres
expériences d'élevage de moutons ou de lapins en région ou
à Québec. À ma connaissance, il y a eu des
expériences pilotes à ce sujet.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Du lapin?
M. Dauphin: Du vison et du lapin. Ensuite de cela, les
déchets ligneux - je ne sais pas si j'ai bien compris - est-ce que ce
serait les panaches de caribous, comme projet d'activités?
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Oui, oui.
M. Dauphin: Je pourrai revenir tantôt avec d'autres
questions sur les coûts. Vous pouvez répondre à
celles-là.
Le Président (M. Bordeleau): M. Baril.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Pour la
première, en ce qui concerne la question que certains mouvements
étudiants ont rejeté le concept du service civil, il va
être difficile de rejeter le nôtre parce que, pour la
première fois, de façon claire et explicite, il vient
d'être présenté à l'opinion publique par l'entremise
de cette commission parlementaire. Donc, c'est peut-être vrai que le
projet Bisaillon, le projet
Maltais ou les autres projets ont été discutés dans
les milieux des associations étudiantes au Québec. Quant au
nôtre, il est difficile de dire si les gens étaient pour ou contre
puisque c'est la première fois qu'on a la chance de l'exprimer
publiquement. Il y a eu quelques fuites, mais c'était très
sommaire, parce que l'essentiel du projet est expliqué et
résumé ici aujourd'hui à cette commission
parlementaire.
D'autre part, je dois vous faire savoir que nous avons reçu
au-delà de 300 lettres d'un peu partout dans le Québec - à
peu près 50% de ces gens-là ont un bac universitaire,
c'était quand même assez remarquable - demandant si le projet du
service civil était une chose - on parlait du service civil nordique -
qui va se concrétiser à la suite de la commission parlementaire.
Il est évident que seuls les membres de la commission parlementaire
pourront donner suite aux différents mémoires qui sont
présentés, entre autres le nôtre; donc, ce sera à
vous d'y répondre. Donc, en ce qui concerne le projet de service civil,
de prime abord comme je vous le dis, c'est la première fois aujourd'hui
qu'on a la chance de l'expliquer.
Vous parliez tantôt de l'élevage du mouton. Je ne sais pas
si vous vous êtes trompé de mémoire, on n'a pas
parlé de cela.
Une voix: Parce que le vison n'est plus rentable.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamin- que): On a
parlé de l'élevage du vison et pas du mouton.
M. Dauphin: C'est parce qu'on a reçu un autre
mémoire cinq minutes avant votre présentation.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Nous parlions de
l'élevage du vison.
M. Dauphin: Ah bon!
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Pas du mouton.
M. Dauphin: C'est parce que j'avais surtout lu le mémoire
qu'on avait en main et qui avait été distribué à
tous les membres.
Mme Lemen: Je vais peut-être me permettre une
réflexion. Étant donné que l'élevage du vison n'est
plus rentable, peut-être qu'on pourrait le remplacer par l'élevage
du mouton.
M. Dauphin: C'était dans votre mémoire qu'on avait
en main. C'est pour cela que j'ai posé une question à cet
effet.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va?
M. Dauphin: D'accord. Je sais pertinemment que vous êtes
très bien placé au sein du caucus. Vous en faites la
présentation aujourd'hui pour la première fois. Est-ce que vous
avez eu un écho des ministres?
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Je ne sais pas
quelles seront les suites de la commission parlementaire, mais je vais essayer
d'effectuer du lobbying pour qu'effectivement... Un projet de ce genre, qui est
quand même axé sur des technologies nouvelles, implique des
coûts assez considérables, mais il répond sans aucun doute
à des défis de la collectivité québécoise,
entre autres sur la formation de l'individu par rapport aux nouvelles
technologies. Pour ma part, je vais en faire une priorité pour obtenir
les sommes nécessaires. Cela ne répond peut-être pas aux
programmes et aux critères des différents projets
gouvernementaux, mais le gouvernement pourrait en faire une priorité
nationale et en faire un projet national. À ce moment-là, cela
pourrait être hors cadres et hors critères.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord? M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout comme
l'ont fait les autres intervenants, remercier toutes les personnes qui ont bien
voulu accompagner mon collègue de l'Assemblée nationale, M.
Baril, pour présenter ce mémoire. Je dois vous avouer être
très heureux de remarquer que vous ne vous êtes pas servis de
l'article de Normand Girard pour préparer votre mémoire, parce
qu'il y aurait eu des répercussions assez drôles ici même,
à Schefferville.
J'aurais quelques questions à vous poser, deux en particulier. La
première s'adresse à Mme Lemen et je voudrais qu'elle nous donne
une idée générale de la façon dont sont construites
ces serres, incluant la dimension. À un certain moment, si vous vous le
rappelez bien, j'avais eu une discussion avec quelqu'un, à
Québec, au sujet d'une serre qui serait construite ici, à
Schefferville, et dont on avait fait mention, d'ailleurs, dans l'article de
Normand Girard: 2500 pieds de long, 250 pieds de large, pour nourrir 30 000
personnes. Je commençais à penser, disons, au transport pour
amener cela vers la population, parce que l'absorption ici ne serait pas pour
30 000 personnes.
D'autre part, je dois vous avouer franchement que, si je vous pose la
question, c'est parce que j'ai eu connaissance d'ailleurs, j'en ai
discuté amplement avec la population de Schefferville et on l'a
même mentionné lors des assemblées publiques - que,
concernant les légumes et les fruits, la population de Schefferville
n'est pas gâtée. Je peux vous avouer cela. Il y a le
problème du transport par train, de la température à
l'intérieur des wagons et également du temps que cela prend pour
se rendre d'un endroit à un autre. Encore une fois, je
répète que la population n'est pas gâtée.
Pourriez-vous vous expliquer un peu plus relativement à votre serre?
Le Président (M. Bordeleau): Mme
Lemen.
Mme Lemen: Je dois vous répondre que je n'ai jamais
conspiré avec M. Normand Girard. Même si je m'inscris dans le
groupe des conspirateurs qui ont peut-être l'air un peu farfelus, on n'a
pas l'intention de faire pousser, dans nos serres, du caribou ou des
légumes ultra-géants.
Nos serres, c'est tout simplement une technique qu'on a
améliorée à partir de celle déjà existante
à l'Université du Québec à Chicoutimi qui
était une serre gothique en lattes de bois. Nous l'avons
améliorée en remplaçant les lattes de bois par des
cerceaux de métal. C'est une serre de 14 pieds et demi de large et de
100 pieds de long, jamais plus de 100 pieds de long pour justement
éviter l'achat de systèmes d'aération d'été.
Il suffit d'ouvrir les portes en avant et en arrière et
l'aération est automatique. Maintenant, le coût de ces serres - je
peux enchaîner avec cela? - de production ne dépasse pas 4600 $.
Ce sont les coûts qu'on a établis avant la commission
parlementaire.
Il y a aussi ce qu'on appelle la serre domestique, pour un jardin
familial, en arrière d'une cour. C'est une serre d'une longueur de 35
pieds, toujours avec la même largeur. La serre de 35 pieds offre une
variété de légumes pour suffire à la demande d'une
famille. Le coût d'achat est de 1875 $. Maintenant, pour rentabiliser une
production, si je reprends l'exemple que j'ai donné au début en
disant qu'il fallait six serres de production pour réaliser
l'autosuffisance de 2000 habitants en légumes divers et essentiels,
tomate, laitue, concombre, pour l'achat de six serres de production, c'est 40
000 $, grosso modo, ce qui fournit un chiffre d'affaires de 60 000 $, et 50% du
chiffre d'affaires vont en semences et fertilisants et 7% en coûts
énergétiques. Je pourrais fournir des données plus
volumineuses parce qu'on a des études, mais je ne les ai pas avec
moi.
M. Perron: Merci, Mme Lemen. Je voudrais revenir maintenant
à la question des 1500 jeunes que vous mentionnez dans votre
mémoire. Lors d'une discussion que nous avions eue ensemble et avec
votre groupe, je vous avais dit, que la première phase d'un
tel projet que vous auriez en vue pour Schefferville devrait être
axée sur la création d'emplois pour les jeunes et ce,
prioritairement ici même à Schefferville. D'ailleurs, on a eu
l'occasion d'entendre le groupe des natifs, cet après-midi, qui nous ont
exposé qu'eux-mêmes étaient prêts à rester
ici, à demeurer sur place. Je pense que cela serait drôlement
intéressant que ce soit ces gens qui soient touchés en premier
lieu si jamais le projet était mis en marche. D'autre part - et c'est la
question que je vous pose - de quel endroit proviendraient ces jeunes, lorsque
vous parlez de 1500, comme deuxième phase, parce que moi je le vois
comme une deuxième phase? Est-ce que ce serait de la Côte-Nord?
Est-ce qu'ils arriveraient d'un coup sec à Schefferville? Là,
cela ferait sauter du monde? Cela me ferait sauter, moi aussi, en passant.
Pourriez-vous vous expliquer là-dessus?
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): D'une part, le
projet vise certainement les gens d'ici; dans une deuxième phase, les
gens de la Côte-Nord et, dans une perspective d'élargissement,
justement, si le projet était concluant, il pourrait y avoir un
comité de sélection local qui viserait à faire du
recrutement en ce qui concerne certaines compétences qui pourraient
être exigées, qu'on ne pourrait pas retrouver ici et qui
viendraient du reste du Québec, dans une phase III, comme on pourrait
dire. Cela vise d'abord et avant tout les gens d'ici, les gens de la
Côte-Nord et, par la suite, si on a à faire appel à des
gens du Québec, là je pense qu'il y aurait lieu de former un
genre de comité de recrutement avec les gens responsables du projet qui
viendraient d'ici pour, justement, s'assurer que de bonnes compétences
pourraient venir s'établir ici.
M. Perron: Je vous remercie beaucoup, M. Baril, ainsi que votre
groupe.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie
également, M. Baril, ainsi que les gens qui vous accompagnaient.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Je vous
remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Cela termine les
mémoires qui sont présentés. Il en reste un qui est celui
de M. Jan Czarlinski, qui est pour dépôt seulement et qui sera
donc déposé au secrétariat des commissions. Ce serait
à peu près la fin de notre commission parlementaire.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): En espérant
que la prochaine ne sera pas à Rouyn-Noranda.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M.
Baril. Pour la conclusion de notre commission, M. Fortier.
Conclusions M. Pierre-C. Fortier
M. Fortier: M. le Président, mes remarques seront
brèves parce que je sais que le maire nous attend impatiemment pour la
réception qui devait avoir lieu à 18 heures. J'aimerais quand
même féliciter tous les groupes, toutes les associations et les
citoyens de Schefferville. Nous étions venus ici pour vous rencontrer,
pour cerner la réalité de plus près. Je crois qu'au nom de
mes collègues du Parti libéral du Québec et, j'en suis
sûr, au nom de tous mes collègues de l'Assemblée nationale,
nous pouvons nous dire satisfaits de cette commission parlementaire pour autant
qu'elle nous a permis d'avoir un éclairage adéquat, je crois, sur
les problèmes auxquels vous faites face et en espérant que le
gouvernement prendra les décisions qui s'imposent. (19 h 15)
J'aimerais, dans un deuxième temps, féliciter tous les
employés de l'Assemblée nationale. Vous devez savoir, M. le
Président, que le public ne fait peut-être pas la
différence, mais il y a le gouvernement d'une part et il y a
l'Assemblée nationale présidée par son président.
Ce sont les employés de cette dernière qui ont organisé
cette commission parlementaire à
Schefferville. Je voudrais rendre hommage à leur esprit
d'organisation et aux services qu'ils nous ont rendus durant cette commission
parlementaire.
Je n'ai pas de félicitations à faire au gouvernement, bien
sûr. Cela dépend de la tradition parlementaire, sûrement.
Mais j'ai retenu tout à l'heure que le ministre porte-parole du
gouvernement, le ministre responsable de l'Aménagement, a dit qu'il
avait établi un calendrier et il faisait allusion au fait qu'il ne
voudrait pas que, par la suite, l'Opposition demande une commission
parlementaire dans quelques mois. Je voudrais en expliquer la raison à
la population qui nous écoute. Nous étions à Port-Cartier
mardi ou mercredi matin. Alors que les gens de Port-Cartier voulaient
absolument savoir quand il y aurait des décisions de prises pour la
réouverture de l'usine de Port-Cartier et alors que le ministre se
faisait très vague, j'ai demandé qu'on se retrouve en
séance publique dans six mois et le ministre a accepté. Je suis
sûr qu'il a eu sa leçon, parce que, ayant été pris
de court à Port-Cartier, il voulait prendre les devants pour ne pas se
placer dans la même situation maintenant. Mais quand même je crois
que, pour les gens de Schefferville, c'est une bonne décision et vous
pouvez être assurés que l'Opposition
libérale se fera un devoir de s'assurer que les décisions
gouvernementales seront appliquées.
Je ne sais pas quelles sont les décisions que le gouvernement ou
ses représentants ont prises puisque je n'ai pas eu le loisir d'assister
à leur conférence de presse, mais, pour notre part, nous avons
indiqué qu'indépendamment des problèmes à moyen
terme, qui pourraient commander la réalisation d'un "task force" pour
les étudier de part et d'autre, il était urgent d'avoir un
délégué, un haut fonctionnaire plénipotentiaire,
comme l'a demandé le comité des citoyens, pour voir aux
problèmes les plus urgents. J'ose espérer que le gouvernement
prendra cette décision de nommer un haut fonctionnaire
plénipotentiaire, que cette personne sera ici la semaine prochaine pour
déterminer un programme d'action et qu'ensuite des budgets seront
votés pour qu'au plus tard dans trois mois le gouvernement puisse aider
les gens qui devront être aidés, en plus de l'argent qui pourrait
venir, bien sûr, de la Compagnie minière Iron Ore.
Je vous remercie, M. le Président. Je veux remercier tous mes
collègues; nous avons travaillé en équipe. Je remercie
également mes collègues du parti ministériel avec qui nous
avons eu le plaisir d'avoir une commission parlementaire très efficace.
Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional et porte-parole du
gouvernement.
M. François Gendron
M. Gendron: Merci, M. le Président. Je vais essayer de
faire assez rapidement. Tout le monde sait que ces deux jours ont
été très longs et qu'on est attendu. Mais vous me
permettrez sans doute de rappeler quelques temps forts de cette commission. Je
voudrais, d'abord, repréciser le mandat de la commission en vous disant
simplement que, bien sûr, on a pris deux jours pour entendre tous les
intervenants qui avaient des choses à nous dire, mais il est important
de rappeler que, lorsque M. Duhaime est venu ici rencontrer la population et
qu'il a pris l'engagement au nom du gouvernement de venir en commission
parlementaire, il avait mentionné que nous viendrions d'abord et avant
tout, dans un premier temps, pour prendre connaissance non seulement des
revendications, mais des solutions et de certaines recommandations qui nous
seraient faites par le milieu et, dans ce sens, c'est ce que nous avons
fait.
Nous avons également, dans un second temps, lorsqu'il a
été possible de le faire, pris des engagements sur-le-champ,
parce qu'il y avait certaines recommandations qui nous paraissaient tout
à fait valables, justifiées. C'était le cas de la plupart
de vos recommandations, mais, pour certaines, nous avions la conviction
nécessaire et le degré de responsabilité pour être
tout de suite en mesure de prendre des engagements.
Nous avons également constaté - cela a été
exprimé à plusieurs reprises - une volonté très
ferme des citoyens et des citoyennes de Schefferville de tout mettre en oeuvre
pour être capables de dégager des voies d'avenir, dans les moments
les plus douloureux, ceux qui font immédiatement suite à une
décision qu'on ne comprend toujours pas, pour des raisons que j'ai eu
l'occasion d'expliquer en conférence de presse, pour des raisons qu'on a
également expliquées lors de la commission,
particulièrement dans les interventions de mes collègues Marois
et Duhaime, à la minière IOC.
Il y avait également des choses à envisager à moyen
terme. Très rapidement, dans quelques minutes, je vais vous rappeler ces
points où le gouvernement du Québec a décidé non
seulement de prendre acte, mais de confirmer tout de suite à la
population de Schefferville qu'il était important de prendre des
décisions. On nous a demandé à plusieurs reprises
d'envisager un groupe de travail -peu importe l'appellation, un "task force"
-rapidement pour venir étudier ici les mesures les plus
immédiates qui devaient être prises. On a immédiatement
donné suite à cette demande.
M. Duhaime a également fait une suggestion qui a eu l'heur de
plaire aux métallos et à d'autres personnes, parce que nous
sommes dans une région nordique, mais nous sommes dans une région
où la richesse la plus fondamentale - peut-être "jadis", puisque,
malheureusement cela semble en voie de perdition - s'appelle le fer. Or,
l'industrie du fer a des problèmes. Nous savions cela, nous l'avions vu
dans les journaux, et l'Opposition nous avait conseillé d'agir à
plusieurs reprises. Ce que nous avions moins vu, c'est l'arrêt brusque,
subit, presque sans raison, particulièrement dans les trois
dernières années. Mais les problèmes du marché du
fer, on les avait vus. C'est dans ce sens que, comme la Côte-Nord est
d'abord et avant tout basée sur l'industrie du fer, M. Duhaime a pris
l'engagement, au nom du gouvernement et au nom des collègues,
d'organiser une table de concertation où on fera le tour de cette
industrie, mais sur la Côte-Nord spécifiquement.
Il y a eu également des engagements très fermes quant aux
cours accélérés de formation professionnelle pour la
main-d'oeuvre, afin de déceler rapidement quel type de formation on peut
offrir à vos commettants dans une perspective de recyclage. Aussi, il y
a eu une confirmation
du fonds spécial de création d'emplois qui est requis pour
des projets permanents et temporaires. Également, l'espèce de
médiateur ou de personne-ressource avec des mandats assez précis
a été confirmé par le gouvernement. Mise en place ici
même d'un bureau de Travail Québec pour placement
accéléré.
Subvention spéciale de 40 000 $ au Comité action
Côte-Nord. Cela nous avait été demandé à
Port-Cartier. Contrairement à ce que M. Fortier mentionnait
tantôt, je ne pense pas que les gens pensaient que le ministre Duhaime
pouvait dire: Oui, je pars les machines parce que le gouvernement vient de
décider qu'on repart ITT. Ils auraient été les premiers
à nous le reprocher comme chaque fois qu'on fait une intervention dans
un domaine où, d'après eux, on ne devrait pas avoir d'affaire,
car il faut respecter l'entreprise privée, et je suis d'accord. Nous,
nous parlons plutôt de "partnership", d'association à des
industries de base. Il faut que le Québec prenne sa place et il faut que
le gouvernement du Québec s'associe, mais il n'appartenait pas au
gouvernement du Québec de repartir ITT. Bien sûr, cela nous aurait
plu si nous avions pu repartir les machines et dire: C'est devenu une
entreprise nationalisée, cela appartient au gouvernement du
Québec et, le lendemain, dans les journaux, on se serait fait ramasser.
Surtout dans la conjoncture actuelle, nous n'avons pas les moyens d'être
le seul partenaire de relance d'une telle industrie. On va tout mettre en
oeuvre pour trouver des investisseurs et on sera partenaire - peu importe la
formule - pour permettre de relancer ces entreprises le plus rapidement
possible.
Dans le domaine du loisir - je ne le rappelle pas, parce que cela a
été mentionné à plusieurs reprises - on va tout
faire pour aider ce qui existe déjà, c'est-à-dire
augmentation des quotas de prises, augmentation de la période, toujours
en respectant les contraintes qui nous ont été exprimées
par les populations amérindiennes, parce que je pense que c'est
simplement les respecter dans leurs droits fondamentaux. Je pourrais
peut-être en appliquer quelques-unes, mais je pense qu'il se fait tard;
alors, je vous dis juste ceci, population de Schefferville: Je veux bien croire
que l'Opposition a un rôle, celui de nous pousser dans le dos;
j'espère qu'elle va le faire comme des groupes qui nous ont dit qu'ils
ne nous lâcheraient pas et qu'ils nous pousseraient dans le dos.
Mais, de temps en temps, je pense qu'il faut avoir un peu
d'honnêteté et ne pas essayer de faire croire que nous sommes
venus uniquement avec l'objectif d'entendre la population sans prendre aucun
engagement et sans préparation, ni analyse. Au contraire, il y a des
équipes de travail qui ont oeuvré presque jour et nuit depuis un
mois pour préparer cette commission parlementaire parce qu'on voulait
respecter la population de Schefferville et vous dire qu'il était
normal, sur certaines choses, de prendre des engagements et, sur d'autres,
qu'il était normal de retourner faire nos devoirs, de fouiller cela
davantage et de mettre cela sur les tables de travail. Il y a des institutions
qui sont là pour prendre des décisions. Cela s'appelle le
comité de priorités, cela s'appelle le Conseil des ministres et
il y en a d'autres.
En terminant, je voudrais remercier M. le maire Bégin qui nous a
bien reçus, tous les citoyens de la ville, tous ceux qui ont
participé à l'organisation de ces deux jours de travail parce que
je pense qu'on a travaillé intensivement, les représentants du
clergé, ceux de la commission scolaire, les employés de
l'Assemblée nationale - ce n'est pas une mince tâche - les
fonctionnaires tant des ministères que de l'OPDQ, les journalistes, les
membres de la commission bien sûr, son président, le personnel
politique qui nous accompagnait et qui nous a été d'un
précieux secours, les participants qui ont préparé et
présenté les mémoires, le public de la salle, l'ensemble
de la population qui a eu l'occasion d'écouter nos
délibérations et ceux qui ont permis que ce soit comme cela via
la télé communautaire.
Également, en terminant, pour véritablement
répondre à la question du député d'Outremont, je
pense qu'il avait raison de ne pas vous laisser aller sans avoir au moins une
sorte d'échéancier. Quant à moi, par ailleurs, comme
ministre répondant de cette commission au nom du gouvernement, je fais
rapport, mais je dirai également au Conseil des ministres que mes
collègues ont pris la décision que, sur les trois mandats
précis, qu'on veut voir confier à l'équipe de travail, on
veut y attacher des échéanciers.
Pour ce qui est d'identifier les services essentiels à maintenir:
éducation, santé, électricité etc., nous voudrions
que, d'ici le mois de mai au maximum, nous ayons une appréciation
définitive de ces besoins. Quant à identifier et à
évaluer les projets possibles de développement économique
de la région de Schefferville et de création d'emploi tant
à court, qu'à moyen ou à long terme et à
préciser les rôles de chacun des divers intervenants dans la
réalisation de ces projets, nous ferons la recommandation d'un
échéancier de six mois. Dans six mois, il faudra voir clair pour
tout ce que je viens de mentionner. Également, pour ce qui est des
orientations plus larges - on a parlé de stratégies
d'intervention, de politiques gouvernementales quant au développement
des milieux nordiques - je pense que cela a beaucoup plus d'envergure, on sera
obligé de donner une échéance d'un an. Il me semble
que ce sont des choses concrètes.
En terminant véritablement, je vous remercie tous et je remercie
les collègues des deux côtés de la table parce que je pense
que cela a été une commission parlementaire active et dynamique.
Je souhaite que, pour la population, dans les meilleurs délais, il y ait
des choses qui soient observables, mesurables pour enfin vous redonner cette
dignité qui est toujours nécessaire quand on veut continuer
à être actif pour le développement du Québec.
Merci.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Une
minute! S'il vous plaît! Un instant! Ce n'est pas tout à fait
terminé. Vous me donnerez peut-être deux minutes pour ajourner.
Sans cela, on n'aurait pas terminé nos travaux, si vous voulez continuer
comme vous avez commencé la commission. C'est donc la fin de nos
travaux. Je pense que la commission a rempli son mandat, celui qui lui avait
été donné par l'Assemblée nationale. Cela a
été une nouvelle expérience de deux jours pour l'ensemble
des parlementaires de l'Assemblée nationale et pour moi aussi, comme
président de commission, de siéger à l'extérieur.
Si je peux reprendre une expression qu'on utilise à Québec,
lorsqu'on siège au salon rouge à l'occasion et au salon bleu
à d'autres occasions, je dirais que cela a été les deux
premiers jours de session dans le salon orange à Schefferville, à
l'extérieur de Québec.
Je voudrais simplement remercier l'organisation technique de
l'Assemblée nationale qui a supporté nos débats, soit le
secrétariat des commissions qui a fait un très bon travail
d'organisation et, également, nos techniciens de la radio
télévision des débats qui permettront que tout cela soit
inscrit, écrit et demeure écrit. Pour moi, même si cela n'a
pas été facile de toujours prévoir et de garder des
horaires bien précis, j'ai tenté d'être le plus
équitable possible pour l'ensemble des groupes qui se sont
présentés devant nous et aussi pour les parlementaires. Je
remercie donc tout le monde de sa bonne collaboration. Nous avons
été très bien reçus à Schefferville. Comme
mot de la fin, on vient de m'apprendre que c'est l'anniversaire du maire de
Schefferville. Alors, je veux lui souhaiter un très bon anniversaire
aujourd'hui. C'est sûrement une bonne coïncidence.
M. le maire, oui, je peux vous laisser dire un petit mot de la fin.
M. Bégin (Charles): Je vous remercie. Évidemment,
comme cadeau, une commission parlementaire, c'est dur à absorber, mais
je l'accepte de bon coeur, soyez assurés de cela.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je voudrais demander
au rapporteur de la commission, comme ce sera son mandat, de faire rapport de
nos débats à l'Assemblée nationale à la prochaine
occasion. La commission parlementaire de la présidence du conseil et de
la constitution est donc ajournée sine die.
(Fin de la séance à 19 h 31)