L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission permanente de la présidence du Conseil et de la Constitution

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission permanente de la présidence du Conseil et de la Constitution

Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le vendredi 11 février 1983 - Vol. 26 N° 238

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes sur la situation de Schefferville et les solutions possibles


Journal des débats

 

(Dix heures neuf minutes)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution reprend donc ses travaux suspendus hier. Je voudrais, avant d'entamer l'audition des mémoires - on me corrige en me disant que c'est ce matin, c'est vraiment exact - vous rappeler les noms des membres de la commission, comme il faut le faire au début de chaque séance.

Les membres de la commission pour aujourd'hui sont: MM. Chevrette (Joliette), Ciaccia (Mont-Royal), Dauphin (Marquette), Dean (Prévost), Duhaime (Saint-Maurice), Fallu (Groulx), Fortier (Outremont), Gendron (Abitibi-Ouest), Kehoe (Chapleau), Lafrenière (Ungava), Lemay (Gaspé), Marois (Victorin), Middlemiss (Pontiac), Perron (Duplessis), Rocheleau (Hull), Sirros (Laurier).

À l'ordre du jour, pour aujourd'hui, nous avons huit mémoires. Le premier, tel qu'il avait été prévu est celui du Syndicat des métallos, représenté par MM. Clément Godbout, Lawrence McBrearty, Fernand Daoust, Claude Carbonneau, Jean-Guy Frenette. Je m'aperçois qu'il y a d'autres personnes. M. Godbout, si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous et y aller avec votre mémoire.

Syndicat des métallos (FTQ)

M. Godbout (Clément): M. le Président, je voudrais tout d'abord remercier les deux syndicats locaux des métallos de Schefferville, le local 5567 des employés de production et de maintenance et le local 6503 des employés de bureau de la compagnie Iron Ore, qui ont participé avec nous à la rédaction du mémoire, la Fédération des travailleurs du Québec, la ville de Schefferville, les groupes de citoyens et d'autres groupes.

Je voudrais vous présenter immédiatement, à ma gauche, le secrétaire général de la FTQ, M. Fernand Daoust, suivi de M. Jean-Claude Carbonneau représentant du syndicat, M. Alain Jalbert, permanent et représentant de la FTQ dans la région CÔte-Nord. À ma droite, M. Jean-Guy Frenette, directeur du département de services de la FTQ, M. Lawrence McBrearty, coordonnateur régional pour le Labrador terre-neuvien, la Côte-Nord et la péninsule gaspésienne, M.

Otto Sajerman, président du local 5567 des employés à l'heure et le confrère M. Julien Caissy, président du local 6503 des employés de bureau.

Vous me permettrez également de remercier de façon toute particulière les interventions et le travail faits par le député du comté de Duplessis, M. Denis Perron, afin de permettre à cette commission de se rendre sur place pour entendre les parties et également les membres du gouvernement et de l'Opposition qui se sont rendus sur place pour venir écouter les mémoires qui sont présentés.

M. le Président, c'est à la demande du Syndicat du métallos que se tient cette commission parlementaire sur l'avenir de Schefferville, territoire qui, jadis, était un symbole de prospérité du Nord, voire même du Québec. Aujourd'hui, c'est toute une population qui déchante, sachant qu'elle a été leurrée par une société minière, par des gouvernements, si bien que Schefferville est devenue le symbole éhonté d'un manque de planification de la part d'une compagnie qui a tiré d'énormes profits de son exploitation pour, ensuite, s'enfuir sans trop de souci des torts considérables qu'elle a causés aux travailleurs, aux travailleuses, à la population, à la municipalité et à la Côte-Nord.

Pour connaître toute l'ampleur de la brutalité dont fait preuve la Compagnie minière IOC en fermant ses opérations de Schefferville et d'ailleurs sur la Côte-Nord, il faudrait que cette compagnie remette à la commission et rende public l'état financier de ses activités à Schefferville et sur la Côte-Nord, non pas des états financiers consolidés avec les autres partenaires dans tout le continent, mais les états financiers touchant spécifiquement Schefferville et la Côte-Nord.

Nous demandons donc à la commission d'obliger la société minière à déposer ses états financiers de la Côte-Nord, y compris les transferts d'argent et bénéfices ailleurs en Amérique du Nord. Ainsi, les travailleurs et travailleuses, la population de Schefferville et de la Côte-Nord pourront véritablement connaître le vrai visage de cette société.

La décision de la société minière de mettre fin à ses opérations avait été prévue. Elle a été annoncée et faite de façon brutale. Tout le monde conviendra aujourd'hui que la société IOC savait depuis longtemps

qu'elle fermerait ses portes à Schefferville. Dès le mois de mars 1982, elle faisait une demande à la Commission canadienne des transports pour se départir de son service de trains par chemin de fer sur la voie menant à Schefferville à partir de l'embranchement vers Labrador City. Ces démarches n'ont pas été communiquées au syndicat ni à la population de Schefferville. Pendant des mois, les travailleurs et la population ont été victimes de rumeurs qui ont semé l'inquiétude, la panique, le désarroi, voire, le désespoir. La compagnie niait les rumeurs parce qu'elle avait besoin des travailleurs pour former le noeud coulant jusqu'à l'étranglement.

Le 22 octobre, à Schefferville, un vice-président de la compagnie nie les rumeurs de fermeture de Schefferville et dit que si jamais cela venait à se produire, l'annonce serait faite face à face avec la population. Le 23 octobre, dans le journal Le Soleil, on annonce la fermeture de Schefferville, la compagnie Iron Ore nie. Le 1er novembre, c'est l'ouverture officielle du poste de télévision de Radio-Canada à Sept-Îles. La première nouvelle du premier bulletin de nouvelles, c'est l'annonce de la fin des opérations de l'IOC à Schefferville. Par télégramme, les métallos demandent des explications au président de la compagnie et M. Mulroney le confirme. Le 2 novembre, le président de la compagnie est à Ottawa et discute avec les ministres. Les dirigeants des syndicats locaux rencontrent les responsables régionaux de l'Iron Ore. (10 h 15)

Ce 2 novembre, à la télévision, la population apprend officiellement, et lors des réunions, bien sûr, la fin des activités de l'IOC à Schefferville par la bouche du président de la compagnie. M. Mulroney se rend à Schefferville. Il y a un refus de face à face avec la population. Il veut rencontrer les présidents des syndicats locaux qui refusent l'invitation en disant que tous les dirigeants devraient être présents. Rencontre il y a. M. Mulroney rencontre quelques commerçants, puis, l'avion retourne vers le sud. L'annonce de la fermeture des activités de l'Iron Ore est consommée.

Nous faisons remarquer que cette compagnie, si elle avait été le moindrement civilisée et soucieuse des intérêts de ses travailleurs, aurait dû avoir la décence de parler avec le syndicat pour amoindrir l'inquiétude, l'insécurité et la souffrance de la population. Je reviendrai sur ce sujet, parce qu'il en a été amplement question, hier.

La compagnie Iron Ore, qui est partie dans les débuts des années cinquante, a fait miroiter tous les avantages qu'auraient des milliers de travailleurs et de familles à faire leur vie à Schefferville. Schefferville devait durer cent ans. Des familles s'y sont installées, ont fondé un foyer, des enfants sont nés, sont ici à Schefferville. Aujourd'hui, cette génération n'a plus de racine. Au cours des années cinquante, soixante et soixante-dix, des gens se sont déracinés, des parents sont montés à Schefferville à partir de plusieurs régions du Québec. En 1983, l'Iron Ore déracine une génération de jeunes citoyens et citoyennes travailleurs et travailleuses qui descendent dans plusieurs régions du Québec, maintenant, à partir de Schefferville.

Donc, annonce de la fermeture de l'exploitation le 3 novembre. L'avis est donné. Le 16 novembre, il ne reste que quelques travailleurs à l'ouvrage. C'est, à toutes fins utiles, un avis de quelques jours, ce court délai est illégal au sens de la loi, selon nous. Les travailleurs et la population subissent alors un choc considérable, aux prises avec l'inconnu et l'insécurité totale. Si la compagnie avait joué franc jeu au tout début, c'est-à-dire lorsqu'elle a pris sa décision il y a plusieurs mois, il aurait pu y avoir des négociations pour amoindrir le choc chez la population, répondre aux nombreuses questions des travailleurs et atténuer le désarroi. La société minière IOC a choisi de refuser la négociation avec le syndicat. Début de novembre, la compagnie décide d'aller à la pêche, de tester les travailleurs et la population. Elle soumet des premières propositions qui sont jugées inacceptables. Devant les pressions de toutes sortes, devant la présence syndicale et les démarches des métallos qui sollicitent la tenue d'une commission parlementaire, la compagnie retire la ligne de l'eau, abondonne son leurre et rend publiques, le 26 janvier, de nouvelles propositions. Le directeur des métallos, Clément Godbout, déclare: La proposition de l'Iron Ore repose sur une base assez solide pour qu'elle puisse faire l'objet d'un terrain d'entente à partir duquel une loi éventuelle sur les fermetures d'usines et des mines puisse être préparée. Il mentionne, entre autres, les principes qu'on y retrouve en ce qui a trait à la paie de séparation, le logement, le déménagement et l'aide aux employés.

Nous avons bien noté hier, si vous me permettez, la déclaration et la prise de position - je pense que cela n'est pas trop fort - de la part du président de la compagnie lorsqu'il a déclaré qu'il était d'accord avec une loi qui pourrait aider les travailleurs impliqués par des mises à pied. Nous sommes heureux de cette déclaration. Nous espérons, en tout cas, qu'elle n'a pas tombé, à la commission parlementaire, dans des oreilles de sourds. Et, même si elle arrive tardivement, elle est quand même là et il faudrait en profiter.

Nous formulerons, dans les prochains chapitres de ce mémoire, nos considérations et nos propositions quand survient une

fermeture de mine.

Pour ce qui est des propositions proprement dites de l'Iron Ore, celles du 26 janvier, la compagnie aurait du avoir la décence élémentaire en relation du travail de les négocier avec le syndicat. Il y aurait eu moins de trous. Nous ne passerons pas en revue toutes les propositions de la compagnie. Nous allons nous contenter d'en citer quelques exemples. La compagnie n'offre pas de paie de séparation aux travailleurs qui prennent leur retraite immédiatement. Les travailleurs injustement considérés comme saisonniers par la compagnie sont pénalisés. Les travailleurs du chemin de fer, entretien de la voie et des ateliers de réparations, ainsi que les métallos du quai de chargement à Sept-Îles, dont le travail dépend directement de Schefferville, sont complètement oubliés. La compagnie aurait pu adopter une attitude plus souple, accorder des droits de retraite aux travailleurs qui sont juste en deçà des critères d'éligibilité.

L'offre sur les logements semble généreuse. Cependant, il faut se demander comment un employé pourrait défrayer les coûts d'entretien d'une maison, par exemple: le chauffage et les taxes, avec les prestations sociales ou sa pension. Le seul chapitre du chauffage lui coûte 3500 $ par année pour une maison à Schefferville. Les frais de déménagement. Une partie des déménagements payés par le gouvernement fédéral sera versée à la société minière qui est propriétaire du chemin de fer. La liste pourrait s'allonger.

Avant que ne survienne une fermeture de mine dans une région éloignée, là où la municipalité ne dépend que d'une seule industrie, comme c'est le cas de Schefferville, il est essentiel d'avoir des politiques qui tiennent compte d'abord des intérêts des travailleurs et de la population. Je ne pense pas qu'on puisse laisser à une entreprise seule cette responsabilité.

À Schefferville, la fermeture est brutale. Les dirigeants n'ont pas fait preuve de compassion, ni envers les nouveaux pionniers qui ont construit la ville, ni envers les jeunes qui aiment leur milieu, ni envers la population en général. Pour absorber le choc, il aurait fallu du temps; du temps pour analyser la situation, du temps pour réagir et du temps pour préparer un programme d'action.

Dans les circonstances, étant donné que la société minière n'a pas voulu négocier avec les comités de négociation les droits et les bénéfices à accorder aux travailleurs, nous demandons à cette commission parlementaire de forcer la compagnie à s'asseoir avec les dirigeants des syndicats locaux du Syndicat des métallos, pour véritablement négocier les conditions de séparation, toutes les conditions, y compris celles des travailleurs de Sept-Îles, des chemins de fer, des ateliers de réparations, qui sont directement touchés par la fermeture de l'exploitation.

Nous vous demandons de prendre la décision, ici même, sur place, de nommer un médiateur spécial pour que le syndicat et la compagnie s'assoient à une table pour que des négociations se fassent. Vous comprendrez qu'il s'agit d'une opération d'urgence. Le rapport du médiateur spécial doit être déposé dans un délai ne dépassant pas un mois.

M. le Président, vous me permettrez certainement de mettre les choses en perspective, telles qu'elles se sont passées. Je voudrais ouvrir une parenthèse pour dire que, d'abord, les discussions avec le directeur d'un syndicat et d'un président d'une compagnie, à notre sens, ce ne sont pas des négociations. C'est important que des discussions se fassent et tout le monde le sait. Que cela se fasse dans un monde civilisé avec un respect mutuel, c'est normal et c'est comme cela que cela devrait se faire. Il n'en reste pas moins que le directeur d'un syndicat comme le nôtre, en l'occurrence, se rapporte à des mandats précis qui sont exécutés par des officiers et des permanents.

Dans ce sens, on a cru comprendre dans la réponse du président de la compagnie, hier, qu'il n'y aurait pas de négociations avec les comités en place; qu'il n'y aurait pas de négociations avec les permanents en place; qu'il n'y avait pas d'objection à des discussions avec le directeur des métallos.

Je vous dirai que certainement partout où je pourrai donner un coup de main, personnellement, pour aider un travailleur ou une travailleuse ou un citoyen d'ici, je vais le faire avec plaisir et avec responsabilité, mais je n'ai peut-être pas le droit de remplacer ceux qui ont l'habileté et la compétence pour discuter sur place des problèmes.

Notre suggestion quant à un médiateur, il ne faut pas la voir de façon trop épeurante, et je m'explique. On ne demande pas que le Code du travail soit amendé pour établir des négociations. Vous l'avez très bien compris. Le rôle du médiateur est très souple. Il se rapporte aux ministres. Il peut travailler de différentes et de multiples façons. Il y a des millions d'approches qui sont à la disposition d'un médiateur, que ce soit par discussions ex parte ou que ce soit par différentes approches. C'est cette approche souple qu'on propose ici aux métallos de Schefferville, aux employés de bureau et à ceux qui sont frappés ailleurs dans la compagnie, qui puisse permettre de connaître comment s'appliquent les avantages qui sont offerts.

La réalité, c'est ceci. Il est exact que

j'ai été informé des démarches de la compagnie. Je voudrais remercier, bien sûr, tous ceux qui les ont faites, y compris le député fédéral, M. Maltais, lequel a joué un rôle important dans ces démarches également. Il est exact qu'on en a été informé. Il est exact aussi que, lors de l'annonce de la compagnie en janvier, lors de la conférence de presse, nous avons salué l'approche et je n'ai pas déclaré plus que ce que j'ai déclaré. C'est clair. C'est écrit en pures lettres dans notre mémoire et on le retrouve également dans le communiqué de presse et dans le mémoire de la compagnie IOC. Les termes sont exacts.

Je déplore cependant, et je le déplore profondément, que dans le journal Le Dialogue on n'ait pas été capable de répéter les mêmes mots. Si cela continue, le prochain article sera que nous avons signé une entente. Cela n'a pas beaucoup de bon sens. Je ne lance la pierre à personne en particulier. Il y a peut-être des vérifications à faire sur ce qui s'est passé dans cette propagande. J'ai réagi au mémoire de la compagnie, lors de la conférence de presse de la compagnie. Je pense - et nous l'avons dit - que la décision a pu être prise ailleurs et que les Québécois qui étaient pris avec cette décision ont fait leur possible.

Nous avons dit également que nous saluons et que nous trouvons que cela fait une très bonne base de discussion pour une législation. Tant mieux et bravo! Si cela peut aider aux travailleurs et aux travailleuses de Schefferville, tant mieux! Si on peut faire encore mieux pour les aider davantage, on va faire plus. C'est dans notre mandat, c'est notre rôle. Mais cela n'a pas été plus que cela. Je ne dis pas que cela a été dit, mais il y a eu une espèce de nuage qui s'est promené autour de la commission, hier, et dans le journal qui est sorti et qui ne reflète pas la réalité - je parle du Dialogue - une espèce de nuage laissait entendre qu'il avait pu y avoir une négociation quelque part. C'est inexact. Il y a eu des échanges d'information et des demandes précises quant à notre position sur des choses. Elles ont été expliquées, telles que rédigées dans le mémoire de la compagnie. Je l'admets. Elles sont exactes. Ce sont celles-là et pas plus que cela.

Dans le domaine des relations du travail, entre le Syndicat des métallos et la compagnie Iron Ore, cela va pas mieux et pas pire qu'ailleurs. Je ne dirai pas qu'il n'y a pas eu une tentative et des efforts d'amélioration, mais nous ne sommes pas rendus, quant à la compagnie Iron Ore et au Syndicat des métallos, dans une société qui se voudrait d'adoration mutuelle. C'est un peu comme dans d'autres situations, avant même l'arrivée du président actuel - et nous l'avons dit - il y a eu certainement plus de discussions et d'ouvertures maintenant qu'avant. Mais pendant les bonnes années, pendant que le fer se vendait et pendant que la compagnie fonctionnait - je parle de 1970 à 1975 et 1976, en gros - les métallos, par l'entremise de comités de négociation, ont fait leur travail de négociation, des revendications dures, mais en même temps responsables. Nous avons eu des conflits et des grèves et, pendant ce temps-là, on nous traitait d'emmerdeurs. Tant pis! C'est comme cela qu'on était. Peut-être!

Maintenant que nous sommes tous dans cette situation, dans le fossé jusqu'ici, qu'on a peine à se tenir le nez en dehors de l'eau, pour tout le monde, nous sommes rendus des partenaires. Ce sont des choses qu'il faudrait mettre en perspective, à un moment donné. C'est que le rôle du mouvement syndical en sera un de revendications se rapportant à des membres. Nous allons continuer le travail dans le respect mutuel, chacun de son côté. Qu'on soit président d'une compagnie, qu'on soit directeur d'un syndicat, qu'on soit gérant d'une usine ou qu'on soit président d'une section locale, nous avons des rôles à jouer et ces rôles doivent être respectés et doivent s'exercer.

J'espère que c'est clair. Je l'ai dit une fois pour toutes. Ce qui s'est passé dans ce dossier, c'est cela. Il y a eu des discussions. Il y a eu des informations. J'ai été informé, toujours, bien sûr, après l'annonce que la compagnie allait fermer, de ce qui se faisait. Ce que vous retrouvez dans notre mémoire, ce que vous retrouvez dans les communiqués et dans le mémoire de l'Iron Ore, c'est exact.

Je voudrais me permettre une autre parenthèse pour mettre les choses au point également sur une chose qui a été dite, hier, et qui nous dérange. Elle nous dérange parce que, je pense, qu'elle ne reflète plus la réalité. Je pense également que le dossier aurait dû rester fermé. Je parle des années compliquées, à Sept-Îles, des relations du travail - relations du travail, ce n'est peut-être pas exact, mais en tout cas - du climat qui a été décrit par le président de l'Iron Ore, hier.

Vous savez, dans les années 1970 à 1976 - c'est un secret de polichinelle - il y a eu beaucoup d'agitation et d'infiltration dans les syndicats au Québec, un peu partout. Des gens qui croyaient à une théorie marxiste, à mon sens, ont cherché pendant des années et continuent à tenter de découvrir lequel est arrivé le premier, soit la poule ou l'oeuf. Il n'en reste pas moins qu'ils ont fait beaucoup d'agitation dans les usines. Je dis, bien sûr, que c'est exact que, dans le local 5569, il y avait cette présence, mais il y avait des présences beaucoup plus marquées et beaucoup plus difficiles dans d'autres syndicats au Québec, pas seulement chez les métallos ou ailleurs. Mais notre syndicat a été visé de façon plus

particulière. Nous avons eu ce problème-là et, vous le savez, le directeur de notre syndicat l'a dénoncé ouvertement dans plusieurs rapports moraux. À Sept-Îles, il y a eu cette agitation, mais ce n'est pas exact de prétendre que tout ce qu'on a dit s'est passé là. Comme on l'a dit hier, je pense qu'il faut nuancer. (10 h 30)

Ce qui reste, c'est que dans le local 5569, il y a là des travailleurs et des travailleuses responsables qui ont joué un rôle important. Il y a une vie démocratique qui fonctionne à l'intérieur du syndicat local, qui a fonctionné à l'intérieur du syndicat local et si, en 1978, il y a eu grève, c'est qu'il y avait certainement d'autres sortes de problèmes également et que cela pouvait servir de "spring-board" pour les gens qui voulaient le faire, bien sûr.

Je dirai, en terminant, que c'est possible qu'il y ait eu des "maringouins" dans les usines de l'Iron Ore, mais ce n'est pas nous qui les avions fait entrer. Nous, comme syndicat, on travaille avec les membres qu'on nous donne, qu'on embauche. Alors, il faudrait peut-être mettre en perspective le fait que - personnellement, je souhaite qu'on n'en parle plus - cela a été, bien sûr, des difficultés pour tout le monde. Je ne pense pas qu'on gagne à en parler.

Deuxièmement, peu importent les croyances politiques d'un travailleur, nous allons respecter la Charte des droits et libertés de la personne. Si quelqu'un est élu démocratiquement officier d'un syndicat local, nous allons travailler avec les personnes élues et nous n'avons pas à juger de leurs croyances. Cela étant dit, il me semble que cela met en perspective ceci: il y a eu des problèmes, mais nous on souhaite ne plus en parler. Parce que, aujourd'hui, je pense que ces problèmes-là - comme le disait hier M. Mulroney - se sont estompés.

À Schefferville, on l'a dit, ça doit fermer. Ainsi la compagnie Iron Ore en a décidé. Tant pis pour ces hommes et ces femmes qui avaient construit leur vie dans cette région isolée, dans plusieurs cas, depuis près de trente ans. Tant pis pour les Montagnais et les Naskapis qui trouvaient un gagne-pain pour leurs communautés ainsi bouleversées et pour nous, le Syndicat des métallos. L'histoire de Schefferville est une autre dramatique illustration de l'insécurité qui afflige les mineurs québécois, de l'irresponsabilité sociale dont ils sont l'objet; une preuve encore une fois de la nécessité de mettre sur pied une structure spéciale d'aide aux mineurs et de promotion de leur statut. Cette structure a un nom, cela s'appelle le fonds minier. Nous en parlons depuis 1967, depuis seize ans.

À l'origine, notre projet de fonds minier s'adressait spécifiquement aux métaux non-ferreux. Nous ne saisissions pas alors que les mines de fer québécoises étaient également menacées à court terme - et vous noterez, M. le Président que nous avions exclu à ce moment-là les mines d'amiante également - tant pour leur moindre qualité, à comparer avec celles du Brésil, par exemple, que par suite des politiques d'investissement et de rentabilité des compagnies minières. Nous avons compris que le fonds minier se révèle une nécessité pour tous les mineurs. Une fermeture de mine dans une ville isolée revêtira toujours une tournure dramatique, constituera toujours un drame pour la collectivité touchée. Cependant, notre proposition de fonds minier vise à atténuer l'impact de la fermeture en assurant une protection et les services minimaux aux travailleurs individuels et à leur famille.

Aujourd'hui, les mineurs de Schefferville se retrouvent dans un cul-de-sac complet. Ils ont 40 ou 50 ans, ils sont sans soutien institutionnel, ils ont un degré de scolarité qui ne suffit plus aux exigences du marché du travail, leur ville semble pratiquement condamnée à brève échéance et le Québec compte plus de chômeurs que jamais. Qu'ont fait les gouvernements québécois successifs pour aider les mineurs? Pourquoi, pendant six années et plus de pouvoir, le gouvernement du Québec n'a-t-il pas écouté nos revendications et formulé un projet acceptable de fonds minier? Tout ce que le gouvernement a proposé, c'est un mauvais devoir, intitulé "projet de loi no 3", qui a été bien vite remis sur la tablette d'où il n'aurait jamais dû être sorti. Et pourtant, le fonds minier tel que les métallos et la FTQ le préconisent, ce n'est pas un gros chambardement social. Cela ne demande pas quatre commissions d'étude. Tout ce que cela prend, c'est de la volonté politique, la conscience que les mineurs forment une catégorie de travailleurs ayant des problèmes particuliers: emplois condamnés dans des villes généralement isolées, travail dur qui invite à la discrimination à l'embauche.

Les travailleurs de la construction aussi vivaient une situation similaire ou particulière. Ils ont un statut, eux, des institutions, des soutiens particuliers. Pourquoi les mineurs ne pourraient-ils pas jouir, eux aussi, d'une reconnaissance sociale minimale? Que demandions-nous, en effet, quand nous parlions de fonds minier? Un ensemble de réformes qui allégeraient le fardeau des mineurs, leur donneraient une chance de repartir du bon pied. Passons-les en revue, une par une, afin de mesurer la distance entre nos revendications et les cadeaux offerts par l'IOC après de pénibles tentatives de négociations de la part des syndicats locaux.

Nous demandions que les compagnies minières soient tenues de prévenir les syndicats de leur intention de fermeture bien

avant que cette dernière ne soit mise en branle. La législation sur les fermetures et les licenciements collectifs que nous réclamons, de concert avec la FTQ, exigerait que des avis soient donnés entre six mois et vingt-quatre mois à l'avance.

Dans le cas de Schefferville, par exemple, le nombre élevé de travailleurs concernés et le contexte géographique auraient justifié un préavis de deux ans. Ce préavis aurait permis aux parties concernées de discuter les raisons et, le cas échéant, les modalités de la fermeture. Les pouvoirs publics auraient pu s'impliquer. Une procédure de justification aurait pu être mise en plan. Rien de tout cela n'est arrivé puisque IOC a pris le monde par surprise, s'entêtant, en outre, à refuser de négocier avec le syndicat les conditions de cessation des activités.

Vue dans cette perspective, cette générosité tardive n'est qu'une faible réparation pour l'ensemble des demandes de préavis raisonnables. Nous demandions une indemnité de licenciement tenant compte de facteurs tels que l'âge, l'ancienneté, de même qu'un régime de prestations supplémentaires de chômage et la prise en charge par le fonds des régimes d'assurance collective pour une période pouvant aller jusqu'à deux ans après la fermeture.

L'IOC offre une indemnité de licenciement mais cela ne représente qu'une partie de la sécurité financière à laquelle nous estimons qu'ont droit les mineurs. Vous noterez - le président de l'Iron Ore le dit, et cela devrait faire honte un peu aux représentants et au gouvernement - que ce qu'il donne, il n'est même pas obligé de le donner. Ce qui est exact.

Pour ce qui est des paies de séparation, des démarches devront être faites auprès des gouvernements pour que l'impôt ne gruge pas tout ronds les travailleurs qui y ont droit. Les gouvernements ont la responsabilité d'offrir des aménagements qui ne pénalisent pas les travailleurs déjà aux prises avec des problèmes financiers dont ils ne sont pas responsables.

Je ne sais pas si vous vous êtes arrêtés deux minutes mais dans la réglementation fiscale actuelle, si les offres que la compagnie IOC sont de, prenons 12 000 000 $ ou 10 000 000 $ - le chiffre importe peu pour le commentaire que je veux faire - c'est que presque la moitié de cela va être avalé d'une bouchée par les deux niveaux de gouvernement, un peu comme un goéland vole un morceau de poisson. Cela n'a pas beaucoup de bon sens et ce sont les travailleurs ici qui paieront une note et ce sera la compagnie qui aura versé au gouvernement des montants de milliers de dollars qui auraient du être versés aux travailleurs, comme la compagnie l'a souhaité. M. Mulroney, le président de l'Iron Ore, vous a présenté un mémoire là-dessus, hier, un mémoire que nous appuyons, bien sûr, et nous l'avons salué dans le temps.

La taxe sur les bénéfices nordiques. Le syndicat et les entreprises dans les régions isolées ont été laissés à eux seuls pendant des années et des années pour négocier les conditions de vie, y compris les poignées de portes des maisons.

J'ai souvent dit, en caricature, quand je venais dans les régions du Nord, que la seule chose que le gouvernement du Québec faisait pour les travailleurs des régions isolées, c'était de leur offrir une ouverture d'un magasin de la Régie des alcools. Parce que c'était peut-être payant. Je ne le sais pas. Mais il reste que la proposition qu'on a faite sur le moratoire, le moratoire proposé par M. Lalonde qui doit se terminer en décembre si je ne m'abuse, nous sommes d'accord qu'il doit être discuté une fois pour toutes. Nous avons besoin de l'appui de tous les partis politiques, nous avons besoin de l'appui du gouvernement et de l'Opposition pour être capables de geler une fois pour toutes les bénéfices nordiques. Une compagnie comme IOC qui donnait pas loin de 1 $ l'heure, grosso modo, de bénéfices nordiques et les gouvernements en prenaient à peu près 0,60 $, c'est rire d'une situation nordique comme la nôtre.

Nous avons tenu deux réunions de mineurs qui travaillent dans des régions nordiques. Une à Calgary, l'autre à Toronto. Nous avons présenté des propositions et des mémoires sur le plan canadien. Nous avons présenté un mémoire à M. MacEachen dans ce sens. Il y a eu une rencontre il y a à peine deux semaines entre M. Lalonde et le directeur de notre syndicat, M. Docquier, pour demander... je sais que la compagnie minière IOC comme les autres compagnies qui sont dans la région du Nord, Wabush Mines et la compagnie minière Québec et, également, SIDBED ont fait leur possible de ce côté. On a hâte que la maladie industrielle de la surdité de nos édiles gouvernementaux se passe une fois pour toutes, que des examens médicaux se fassent s'ils doivent se faire et qu'on nous comprenne. Dans des régions nordiques, on n'a pas le droit de faire ce qu'on a fait traditionnellement. On doit tenir compte de ces réalités-là. Nous réclamions la couverture complète des frais de déménagement de mineurs, de citoyens et citoyennes reliés à l'activité de la mine, commerçants, services, autres travailleurs et travailleuses des compagnies. C'était notre demande.

L'offre ne concerne qu'une partie de la population. D'autre part, nous exigeons le plein déménagement de la perte de valeur d'une maison, de la relocalisation dans une autre demeure, l'offre de IOC sur ce point est également partielle, mais nous y reviendrons.

Nous réclamions également la mise sur pied d'une politique sectorielle de main-d'oeuvre visant à assurer le plus possible une sécurité d'emploi aux mineurs, même si ces derniers, pour cela, doivent faire plusieurs mines. Ceci impliquait et implique toujours une structure institutionnelle qui prendra en charge tous les aspects tel que l'inventaire de la main-d'oeuvre, prévisions d'exploitation, demandes de main-d'oeuvre, recyclage et formation professionnelle, incitation pour les compagnies minières à embaucher les mineurs ayant perdu leur emploi par le biais d'une prime d'embauchage, reconnaissance par l'ensemble des employeurs des droits reliés à l'ancienneté. Tout cela avait pour but de faire en sorte qu'on reconnaisse aux mineurs un véritable statut professionnel. Le seul travailleur que je connaisse dans ce Québec, c'est le mineur qui n'a pas de statut. Tous les autres en ont, mais le mineur n'en a pas. Il peut passer huit, dix mines dans sa vie, puis se ramasser à la fin de la course avec zéro comme fonds de retraite, puis on lui dit qu'est-ce que tu as fait comme métier? Il dit je n'en ai pas. Cela n'a pas de bon sens cela non plus. Les députés d'Abitibi-Est et Ouest en savent quelque chose.

Qu'on reconnaisse aux mineurs un véritable statut, que l'on prenne des moyens pour leur assurer concrètement la jouissance de ce statut. Sur ce point, là aussi, les mineurs de Schefferville sont formellement au même point que leurs confrères victimes de fermeture dans les années précédentes. En pratique leur situation est pire à cause de la situation actuelle du chômage.

Nous réclamions, enfin, l'établissement dans le cadre du fonds minier, d'une caisse de retraite permanente aux mineurs d'une part, d'avoir accès à la préretraite, de même qu'à une retraite décente, et d'autre part de transférer leur régime de retraite d'un employeur à l'autre. Les problèmes de la préretraite et de la transférabilité demeurent entiers pour les mineurs de Schefferville. Là, encore ils sont victimes de l'incurie des gouvernements qui se sont succédé.

Le drame de Schefferville illustre une fois de plus et à quel point les travailleurs miniers québécois ont besoin d'un fonds minier. L'établissement de ce fonds et des structures qu'il implique relève de la responsabilité du gouvernement du Québec qui les mettra sur pied à partir de cotisations obligatoires des compagnies minières. Il est grand temps que les compagnies minières soient contraintes à assumer leurs responsabilités sociales. Les syndicats et les travailleurs n'ont pas à porter seuls, au prix des grèves et d'angoisses sans nom, le fardeau des pressions sur les compagnies minières. Là-dessus, je dirais: si on avait pris notre courage à deux mains, il y a quelques années, et si on avait formé un fonds minier, on serait peut-être placé différemment et de façon un peu plus équitable vis-à-vis la compagnie qui ferme présentement. C'est à elle seule, à cause du manque de volonté politique des gouvernements, c'est à elle seule que reviennent maintenant les responsabilités sociales, alors que ce devrait être une mise en commun comme cela s'est fait dans d'autres domaines. Une entreprise, à elle seule, n'a pas toujours les capacités financières de rencontrer des responsabilités comme celles-là.

Le Syndicat des métallos demande au gouvernement de procéder immédiatement en légiférant pour établir un fonds minier. Dans le cas de Schefferville et des mineurs d'IOC, puisqu'il est trop tard pour que le fonds minier constitue une planche de salut, nous estimons qu'il revient à la compagnie d'assumer l'ensemble des réparations auxquelles ont droit les mineurs en vertu des principes que nous avons précédemment énoncés. On ne voit pas beaucoup d'autres sortes de solutions.

Les mineurs de Schefferville ont droit au fonds minier, ont droit à leur dignité. Ce droit à la dignité est bien peu compatible avec la publicisation par la IOC des cadeaux aux mineurs, comme si le Syndicat des métallos ne tentait pas d'améliorer les conditions de séparation depuis l'annonce de la fermeture. Comme si tout cela relevait de la générosité et n'avait rien à voir avec des notions comme celle du droit individuel et collectif des responsabilités sociales.

Les compagnies minières ont toujours exercé des pressions contre notre projet de fonds minier. La compagnie autant que les autres, qu'elle en subisse les conséquences maintenant en assurant les dédommagements conformes à nos revendications de toujours.

Le Syndicat des métallos (FTQ) réitère sa demande au gouvernaient du Québec de s'impliquer dans ce dossier, de le soutenir pour faire en sorte que la compagnie IOC soit contrainte à assumer toutes ses responsabilités. La fermeture brutale et unilatérale de la mine place tous les partenaires dans une situation tragique. Depuis deux mois et demi déjà, nous sommes encore au stade de l'improvisation avec tout l'arbitraire que cela implique. Il nous faut travailler avec une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes: la fermeture peut-être définitive de la ville, décidée par IOC, le 1er juillet 1983. Notre proposition sur ce sujet est claire. Une fermeture de ville, si tel est le cas, doit se planifier avec tous les intéressés en tenant compte de toutes les implications humaines, matérielles et financières sur les personnes, les collectivités autochtones, les services privés et publics, les commerces qui composent le tableau et le tissu urbain de Schefferville. (10 h 45)

C'est pour bâtir une ville et développer une région riche en ressources naturelles que des travailleurs, il y a un quart de siècle -et d'autres ont suivi leurs traces depuis -ont abandonné leur coin de pays en venant s'installer dans une région hostile au peuplement, dans l'espoir de participer à la construction d'un milieu de vie et de travail difficile mais stable et prometteur. Tous: travailleurs, commerçants, services publics et privés sont venus appuyer le projet d'une compagnie qui n'hésitait pas à promettre la prospérité et un avenir pour eux et leurs enfants. La compagnie utilisait comme moyen de recrutement l'argument des ressources inépuisables du minerai de la région. C'est ainsi que l'IOC a fortement contribué à développer dans l'esprit et les mentalités les structures d'une ville permanente qui serait le point de développement urbain le plus avancé dans le Moyen-Nord et la rampe de lancement de futurs projets d'exploitation minière.

Nous sommes aujourd'hui confrontés à la réalité. Schefferville est une ville temporaire dont la mort a été décrétée pour le 1er juillet 1983. Deux types de problèmes doivent trouver des voies de solution rapidement. D'une part, les ex-travailleurs d'IOC et des citoyens ont pris des engagements financiers à long terme en devenant propriétaires de leur résidence. Il était légitime qu'ils agissent ainsi à l'époque. D'autre part, les ex-travailleurs et citoyens ont pris racine dans cette ville, en ont fait leur milieu de vie permanent et n'ont donc plus d'autre point d'attache au Québec. Ceci est encore plus dramatique pour les jeunes qui sont nés ici, qui ont été élevés pour construire leur vie ici et qui formaient la relève pour le développement du Moyen-Nord. Parmi les travailleurs licenciés figurent d'ailleurs des jeunes qui n'ont jamais vécu ailleurs. Ces deux types de problème, les engagements financiers à long terme et l'enracinement des ex-travailleurs et citoyens, sont dramatiquement amplifiés par la crise économique actuelle qui leur ferme tous les horizons. Ce ne sont que des perspectives de chômage et de dépendance qui se présentent à bon nombre d'entre eux partout ailleurs au Québec.

Si on ne peut, aujourd'hui, corriger les erreurs du passé, il est de notre responsabilité commune de tenter tout au moins d'en minimiser les conséquences. Il faut se donner les moyens de prendre le temps nécessaire pour que la population de Schefferville puisse se retourner de bord et que nous puissions étudier ensemble l'avenir de cette ville. C'est pourquoi il nous faut régler rapidement les problèmes les plus urgents et réaménager temporairement un milieu de vie. Nos propositions sur ce sujet s'appuient, entre autres, sur les considérations suivantes: la crise économique n'offre pas de perspective d'emploi au Québec pour les ex-travailleurs et citoyens de Schefferville; le gouvernement du Québec et la compagnie sont également responsables de ne pas avoir planifié au cours des années une certaine diversification des infrastructures économiques de Schefferville et de la région. Le gouvernement du Québec, mais principalement la compagnie sont responsables de ne pas avoir prévu l'arrêt graduel des opérations minières, la planification du ralentissement et de la fin des opérations de Schefferville et la fermeture éventuelle de la ville, si tel est le cas; les travailleurs et travailleuses et citoyens qui ont été tenus dans l'ignorance la plus totale des intentions de la compagnie afin de ne pas affecter le moral des travailleurs et par conséquent leur productivité au travail pour réaliser des bénéfices possibles pour les actionnaires. La préoccupation des bénéfices de la compagnie et des dividendes aux actionnaires a continuellement primé les intérêts des travailleurs et des citoyens, ce qui sera toujours odieux et inacceptable pour nous, même si c'est censé être là un comportement normal.

Les gouvernements successifs ont malheureusement fait preuve d'irresponsabilité et d'absence de volonté politique face aux problèmes des mineurs en régions isolées. Nous espérons malgré tout que le gouvernement québécois, devant la situation actuelle, saura se démarquer des attitudes passées. Nous demandons, et cela pour tout le temps et aussi longtemps que l'avenir à court, moyen et long terme de Schefferville ne sera pas déterminé dans l'accord que nous proposons plus loin, que soit maintenu à Schefferville un milieu de vie adéquat avec tous les services essentiels; que les ex-travailleurs et citoyens aient l'entière liberté de choix de demeurer ou de quitter la ville; que leur redéploiement et leur insertion dans un autre milieu soient facilités; qu'ils soient pleinement compensés pour les engagements financiers qu'ils ont contractés, que des conditions raisonnables d'habitat et de vie soient garanties aux résidents; qu'ils aient priorité d'emploi pour tous les projets d'importance dans la région et que la IOC leur garantisse le maintien de leurs droits acquis en cas de développement de projets futurs et de création d'emploi; que la CSST procède à l'analyse de l'état de santé de ex-travailleurs d'IOC; que l'ensemble de la réflexion sur Schefferville tienne compte des droits et des aspirations collectifs des autochtones.

Puisque la compagnie veut rapidement se dégager de toute responsabilité à l'égard de ces ex-travailleurs et travailleuses, des citoyens de la ville de Schefferville, il revient au gouvernement du Québec, appuyé par la ville de Schefferville, de s'assurer

qu'il y soit maintenu un minimum de vie adéquat. Cela suppose le maintien des services publics essentiels, des commerces nécessaires pour que la population qui aura décidé de demeurer ici vive convenablement, tant qu'une décision de l'avenir à long terme de Schefferville ne sera pas prise par tous les intéressés. Il est de la responsabilité du gouvernement du Québec de se porter immédiatement garant du maintien d'un milieu de vie adéquat et de négocier directement avec la compagnie toutes les compensations nécessaires pour rencontrer cette responsabilité. Il importe que la population connaisse immédiatement l'intention du gouvernement de maintenir les services essentiels dans les domaines de la santé, de l'éducation, des services municipaux, des commerces et le maintien du moyen de transport par air ou par chemin de fer. Sur ce dernier point, le gouvernement doit intervenir avec la population pour que le gouvernement fédéral maintienne les obligations actuelles des principaux transbordeurs qui sont Québecair et Québec North Shore and Labrador Railway.

Durant cette période transitoire, nécessaire pour déterminer l'avenir de Schefferville, les ex-travailleurs d'IOC et les citoyens doivent avoir la liberté de décider librement de quitter ou de demeurer sur place. Pour que ce choix s'exerce librement, il faut, entre autres, que tous les avantages de déménagement qui seront négociés pour ceux qui quittent, vaillent en tout temps pour ceux qui décident de demeurer jusqu'à l'échéance de la période de transition. Ceux qui décideront d'attendre le résultat des travaux et des recherches sur l'avenir de Schefferville pourront exercer en tout temps d'ici là leur option de quitter sans qu'ils soient pénalisés d'aucune manière. Pour cela, ils ont besoin de garanties de la part du gouvernement que leur droit sera intégralement respecté.

Si un quelconque avenir est déterminé pour Schefferville et que la ville peut être maintenue ouverte, ceux qui décideront de demeurer en toute connaissance de cause devront avoir la garantie que les avantages obtenus pour ceux qui ont quitté leur seront versés avec indexation et sans condition, à leur départ éventuel, à leur retraite ou à leur décès.

Durant toute la période de transition et d'attente pour retrouver un emploi, ceux qui ont fait le choix de demeurer ici devront pouvoir bénéficier d'une aide financière spéciale pour qu'ils puissent aller explorer un autre milieu de vie ou de travail ailleurs. Chaque résident devra pouvoir recevoir une compensation satisfaisante pour ses dépenses de transport et de séjour à l'extérieur lorsqu'il manifestera sa volonté de recommencer sa vie ailleurs.

Cette mesure spéciale d'aide au redéploiement de la population devrait prévoir un nombre déterminé de séjours possibles à l'extérieur et un maximum de frais de séjour. Pour tous les ex-travailleurs d'IOC et des citoyens de Schefferville qui se sont engagés dans des obligations à long terme pour l'achat de maisons, nous demandons le plein remboursement des versements effectués, des coûts d'amélioration qui ont été apportés ainsi qu'une indemnité pour la relocalisation dans une autre demeure. Cette pleine compensation des engagements doit être versée sans délai à tous les propriétaires de maison de Schefferville sans que cela n'affecte leur statut de propriétaire. Les propriétaires actuels doivent avoir le choix, durant toute la période de transition, de conserver leur maison ou de la remettre aux autorités en place. Tous les propriétaires de maison pourront, même après compensation, conserver leur demeure jusqu'à leur départ définitif alors que la maison serait alors remise aux autorités en place.

Nous croyons qu'il revient au gouvernement du Québec, appuyé en cela par la municipalité de Schefferville, de garantir à ses résidents, et tant qu'une option définitive sur l'avenir de la ville ne sera pas prise, des conditions raisonnables d'habitat. Nous ne sommes pas entichés de la suggestion de l'IOC de donner des maisons aux résidents temporaires, mais il s'agit là d'une option personnelle que chaque ex-travailleur de l'IOC pourrait exercer. Nous préférerions plutôt que ce soit la municipalité qui détienne les maisons et qu'elle négocie une indemnité globale pour entretenir ces maisons, maintenir les services municipaux essentiels durant toute la période de transition et absorber la dette de la ville.

Compte tenu que le coût de la vie est de 20% plus élevé ici que dans les grands centres urbains du Québec et que les prestations d'assurance-chômage et de salaire des programmes de création d'emplois temporaires ne sont pas ajustés en conséquence, nous considérons normal que le logement soit gratuit pour tous les citoyens et résidents qui n'ont pas un emploi régulier. Pour les mêmes raisons, le gouvernement québécois doit alors négocier avec IOC une réduction des coûts de transport - pour diminuer le haut coût de la vie - et le maintien de la subvention du coût de chauffage. En période normale, c'était par des salaires élevés que le haut coût de la vie était compensé. Mais, en ce moment, puisque le niveau des prestations d'assurance-chômage et de salaire des programmes de création d'emplois temporaires sont uniformes au pays et au Québec, il faut donc réduire le coût de la vie par des mesures comme celles que nous proposons, afin que les résidents de Schefferville soient traités équitablement par rapport aux autres

citoyens du Québec. Il paraît essentiel que le gouvernement du Québec force l'IOC à assumer ses responsabilités financières là-dessus. Mais il est bien entendu que la compagnie IOC devra maintenir le service d'électricité à la population à partir du barrage hydroélectrique qu'elle possède sur la rivière Menihek.

Il va de soi que les résidents de Schef-ferville obtiennent une priorité d'emploi dans tous les projets qui pourront être développés dans la région pour quelque compagnie que ce soit. Un effort spécial devrait être fait, notamment, auprès des compagnies qui ont des programmes d'exploration dans la fosse du Labrador. Nous exigeons qu'IOC reconnaisse immédiatement que tout développement futur ou éventuel qui pourrait être réalisé dans la région soit effectivement considéré, pour ce qui est de la main-d'oeuvre, comme un prolongement de ses activités de Schefferville. En ce sens, qu'elle reconnaisse les droits acquis, dont l'ancienneté, à ses ex-employés de Schefferville. Si IOC doit développer d'autres projets dans la région dans les quelques années qui viennent, les emplois créés doivent revenir à ses ex-employés, afin d'éviter que le décalage entre la fermeture de Schefferville et l'ouverture d'un projet n'ait servi à l'IOC qu'à se débarrasser de sa main-d'oeuvre. Nous demandons au gouvernement de prendre les moyens nécessaires pour que l'IOC reconnaisse que tout nouveau projet qu'elle pourra développer dans la région soit considéré, sur le plan de la main-d'oeuvre, comme une continuité des opérations de Schefferville. Il est évident que si une telle éventualité se produisait, cela ne modifierait en rien les indemnisations et les dédommagements que les travailleurs auraient touchés entre-temps. Car ils sont placés aujourd'hui dans un contexte de fermeture définitive et doivent être indemnisés immédiatement.

La compagnie possède les dossiers médicaux sur chacun de ses ex-salariés travailleurs. Comme il s'agit de travailleurs qui exerçaient une activité pouvant entraîner des problèmes de santé, le Syndicat des métallos exige que la CSST récupère, si ce n'est déjà fait, l'ensemble des dossiers médicaux établis par l'IOC. Après l'analyse de ces dossiers, nous demandons, en outre, que toute étude et examen complémentaire soient effectués par la CSST dans le cadre d'une mission spéciale à Schefferville. Il nous apparaît primordial que nos membres licenciés disposent d'un bilan médical complet et fiable pour savoir précisément à quoi s'en tenir sur leurs possibilités futures. Il est en outre probable que certains d'entre eux auront droit à des indemnisations.

Nous ne sommes pas habilités à parler au nom des Amérindiens de Schefferville. Il demeure que l'ouverture de la ville a bouleversé le mode de vie des Amérindiens et on discute maintenant de fermer la ville sans trop tenir compte, je crois, de l'effet, déstabilisateur sur la collectivité autochtone de cette fermeture.

La question du maintien des services de transport, des services sociaux et de santé, de commerce, d'alimentation, doit être envisagée en tenant compte des besoins et des aspirations des Amérindiens. Il apparaît donc indispensable que le peuple autochtone de Schefferville soit partie aux discussions sur l'avenir de la ville, afin de reconnaître les droits des premiers occupants du territoire et aussi parce que plusieurs d'entre eux ont effectivement travaillé, en partie grâce à notre action syndicale, à l'IOC.

Nous croyons, M. le Président, que cette commission doit reconnaître, ici même à Schefferville, la nécessité et l'urgence, pour tous les ex-travailleurs et citoyens de la ville, de régler ces problèmes, et nous fournir l'engagement que le gouvernement du Québec va immédiatement se mettre à la tâche avec nous et les autres parties intéressées pour négocier des conditions acceptables d'habitat et de vie à Schefferville en attendant qu'on ait statué définitivement sur le sort de cette ville. Cet engagement, nous l'attendons aujourd'hui même, tant de votre part que de celle de la IOC. (11 heures)

M. le Président, nous avons toujours soutenu que dès qu'une mine ouvre quelque part, il faut immédiatement commencer à penser à sa fermeture. Les richesses naturelles sont épuisables. Elles ne deviennent plus rentables à exploiter. Il n'y a pas de substitut possible à la fabrication de ce produit qu'est le minerai.

Ce que nous dénonçons aujourd'hui et que nous n'accepterons jamais, c'est qu'une fermeture de mine ne soit pas préparée de longue date et que tous les problèmes qu'elle entraîne ne soient pas réglés de façon civilisée, de concert avec les parties concernées. Après avoir découvert un minerai exploitable, les compagnies mettent de trois à cinq ans pour planifier l'ouverture de la mine. Mais quand elles décident de fermer, elles le font de façon brutale et veulent économiser le maximum de coûts. Nous soutenons qu'une fermeture de mine, et surtout dans le cas qui nous concerne, doit être planifiée à moyen terme dans le but de répondre aux besoins et aux attentes, non seulement des travailleurs et des citoyens, mais également des autres entreprises et commerces qui composent le tissu urbain de cette ville, de façon également à permettre au pouvoir public d'assumer leurs pleines responsabilités.

L'IOC a joué à la cachette avec nous tous, nous ne nous laisserons pas "bulldozer" dans les pays d'en bas. Cela ne doit pas se

passer ainsi et le gouvernement doit prendre les moyens pour changer des comportements moyenâgeux.

Que le gouvernement décrète une période transitoire d'un an pour, à la fois, régler les problèmes immédiats et étudier toutes les possibilités de développement éventuel de Schefferville; que le gouvernement forme un comité spécial d'étude - "task force" - relevant du ministère de l'Énergie et des Ressources, chargé de déterminer les conditions d'habitat et de vie à court terme à Schefferville et d'étudier les différentes hypothèses de projets de développement à moyen et à long terme pour l'avenir de cette ville.

Ce comité d'étude spécial devrait être formé des représentants des gouvernements, des ministères concernés, de ia ville de Schefferville, des citoyens, de la compagnie IOC et du Syndicat des métallos. Que le mandat soit ainsi défini: Déterminer et assurer les conditions d'habitat et de vie adéquates aux citoyens de Schefferville; analyser et faire rapport sur les possibilités de développement à moyen et à long terme pour la ville; faire toute recommandation générale de nature à protéger les travailleurs et la population en pareille circonstance; que la première partie du mandat soit réalisée à l'intérieur d'une échéance de trois mois et que les seconde et troisième parties à l'intérieur d'une échéance d'un an, c'est-à-dire le rapport sur la possibilité du développement et les recommandations générales de nature à protéger les travailleurs en pareille circonstance.

Le comité devrait voir à coordonner toutes les études et les analyses de projets de création d'emplois dans le cadre de différents programmes actuels et de faire rapport régulièrement à la population de l'état de ses travaux. Pour l'analyse des projets dans le secteur minier, le comité devrait revoir les programmes d'exploration des compagnies dans la fosse du Labrador, accélérer s'il y a lieu cette programmation et participer aux études de faisabilité qui peuvent être requises ou qui sont en cours pour l'exploitation minière.

La population de Schefferville et du Québec a le droit de connaître l'état réel de l'exploration minière dans la fosse du Labrador et l'état d'avancement des études de faisabilité en cours chez les différentes compagnies minières. Ce sera la responsabilité du comité d'éviter que des rumeurs sans fondement viennent créer de faux espoirs. C'est pourquoi nous exigeons que tous les projets, de quelque nature que ce soit, soient acheminés au comité pour analyse et recommandation.

M. le Président, nous constatons chaque jour le fouillis indescriptible qui prévaut actuellement dans la recherche d'un avenir pour Schefferville. Chaque ministère québécois a sa petite idée et son petit projet. Chaque citoyen a aussi sa petite idée sur le sujet. Même l'IOC vient de créer des espoirs avec le projet du Strange Lake. Les discussions s'enchevêtrent entre les projets de l'exploitation commerciale de caribous, du service national des jeunes, la culture en serre, l'élevage d'animaux domestiques, l'implantation d'un casino, et j'en passe. Ce ne sera certainement pas du chaos actuel que pourra surgir une ville. Toutes les possibilités avancées de bonne foi par une population en désarroi et des organismes gouvernementaux isolés et jaloux de leurs prérogatives ne mèneront sûrement nulle part si on ne fait pas l'effort requis et sans précédent, de concertation pour déterminer l'avenir d'hommes, de femmes et de jeunes qui ont cru et qui croient encore dans la région.

Nous croyons que le gouvernement du Québec a eu tort de se fier uniquement à une compagnie pour assurer la survie d'une ville. Nous le tenons responsable de ne pas avoir prévu la mort de cette ville, alors que depuis quelques ahnées, des signes évidents de vieillissement précoce sont apparus: des licenciements collectifs importants, une réduction de près de 50% de la main-d'oeuvre au cours des cinq dernières années, en plus de la crise mondiale de l'acier. Le gouvernement du Québec n'a pas voulu, depuis 1954, planifier une certaine diversification industrielle à Schefferville et n'a surtout pas voulu forcer les compagnies minières à déposer leurs prévisions de production ni leurs états financiers afin d'être en mesure d'analyser correctement l'évolution de ia situation. Nous ne pouvons pas racheter en quelques jours ce manque de planification et de prévoyance gouvernemental ni cette obstination des compagnies minières à agir en secret et à mettre les travailleurs et les citoyens devant une situation de fait catastrophique. C'est pour ces raisons, entre autres, que nous exigeons qu'un comité d'étude spécial fasse le travail qui n'a pas été fait, ni par le gouvernement, ni par la compagnie, pour planifier l'avenir de Schefferville.

Il va de soi que, durant cette période, aucune aide gouvernementale ne soit accordée à l'entreprise IOC. C'est la compagnie qui devrait plutôt défrayer les coûts de cette opération, et le gouvernement devrait consacrer toute son aide financière aux ex-travailleurs et citoyens de Schefferville. Nous ne voulons pas, à ce moment-ci, prendre position sur les différentes hypothèses de projets qui ont été avancées. Ce n'est pas, selon nous, par l'addition de projets disparates et sans analyse sérieuse de faisabilité que se définira l'avenir de Schefferville. C'est autour d'un projet sérieux, basé sur l'exploitation des richesses naturelles de la région, que peut se décider

l'avenir de Schefferville. À court terme, cela ne peut être dans le minerai de fer, car nous connaissons très bien la conjoncture mondiale dans ce domaine. Pour le moment, un tel projet est inexistant.

Ce qui est le plus inquiétant, c'est que la recherche dans la fosse du Labrador est à son plus bas niveau depuis 30 ans. D'après nos informations et les rapports des géologues résidents, le nombre de programmes d'exploitation est passé de dix, en 1979, à cinq, en 1980, et à deux, en 1981. On poursuit aussi des travaux d'exploration pour une quatrième année et on rapporte avoir trouvé des quantités intéressantes de matériaux stratégiques, tels que ceux qui sont mentionnés ici, ainsi que des métaux rares. Ce projet, qui est au stade de l'étude de faisabilité, nous inquiète grandement dans ses orientations. En effet, nous avons déjà pris connaissance de dossiers sur ce sujet et nous sommes convaincus que si le gouvernement du Québec et les citoyens de Schefferville ne sont pas impliqués dans le développement de ce projet, Schefferville risque de devenir une ville dortoir et que le développement risque de se faire du côté de Terre-Neuve plutôt qu'au Québec. Il est donc de la plus haute importance, pour l'avenir de Schefferville, que le projet du lac Brisson soit étudié par le comité d'étude spécial et que la compagnie accepte d'en discuter les orientations. Ceci est d'autant plus important qu'il re faut plus, au Québec, laisser les compagnies, en milieu éloigné, définir, seules et en cachette, les projets de développement et les conditions d'habitat et de vie où seront appelés à évoluer des hommes et des femmes qui doivent avoir leur mot à dire sur le sort qu'on veut leur aménager.

Si, entre autres, le projet du lac Brisson doit voir le jour, nous voulons être impliqués à l'avance dans la définition de ce projet, afin qu'on y prévoie un milieu de vie et de travail acceptable pour les travailleurs et les travailleuses. Nous pouvons, ajourd'hui, voir un peu plus clair dans les démarches planifiées de fermeture, depuis plusieurs années. Il s'agit, de toute évidence, d'une politique d'étranglement graduel. La compagnie a, a son siège social, à Hanna Mining, diversifié ses sources d'approvisionnement en investissant au Brésil dans les années 1970.

Là-dessus, nous voudrions commenter très rapidement les chiffres qui nous ont été donnés par le président de la minière IOC, hier. La compagnie IOC a tenté, hier, de justifier la fermeture de la mine pour des raisons financières et, du même souffle, a tenté de nous faire croire que cette entreprise n'a pas réalisé de bénéfices au cours des années 1970. À la fois la démonstration faite et les réponses évasives - il faut bien le noter - n'ont pas réussi, selon nous, à lever le voile sur le mystère des opérations financières de la compagnie IOC sur la Côte-Nord. C'est pourquoi nous maintenons toujours notre demande du dépôt des états financiers de la compagnie.

Ce n'est qu'à l'analyse des états financiers vérifiés que nous pourrons mesurer la rentabilité réelle de la compagnie IOC au cours des années 1970. Nous n'aurons pas de difficulté à nous convaincre que c'est le siège social IOC et non la filiale qui détermine où doivent se réaliser les bénéfices. Pour de multiples raisons, il est parfois plus intéressant de faire réaliser des bénéfices par les producteurs d'acier plutôt que par le fournisseur de matière première.

Il faut analyser toutes les politiques et pratiques commerciales entre la société mère et sa filiale pour connaître la rentabilité réelle des opérations d'IOC sur la Côte-Nord. Or, le survol fait hier par le président d'IOC sur le sujet ne nous a pas - en tout cas, nous - convaincus. Pour ce qui concerne la tentative de justification financière de la fermeture, là encore, à notre avis, le devoir a été mal fait et est incomplet.

Selon les propres prévisions d'IOC, datant d'avril 1982 et dont nous avons, par hasard, obtenu une copie, il ressort qu'IOC prévoyait des profits consolidés pour Schefferville et Labrador City, après impôt, de 91 600 000 $ en 1983, de 85 800 000 $ en 1984 et de 73 000 000 $ en 1985. C'est autour, donc, de 90 000 000 $ que se situent les profits nets d'IOC depuis trois ans. C'est vers les 80 000 000 $ par an que HOC se dirige pour les trois prochaines années, selon l'étude que nous avons vue. Avec le maintien des opérations de Schefferville, ce n'est pas la faillite pour demain.

Dans ces prévisions, les pertes pour Schefferville oscillaient, dans l'étude que nous avons vue, entre 1,39 $ et 2,31 $ la tonne pour les coûts d'opération, auxquels montants il faut ajouter, bien sûr, les coûts d'administration et d'intérêts pour obtenir la perte totale de Schefferville sur des prévisions de 2 500 000 de tonnes de production.

Deux constatations s'imposent. Si, au pire de la crise économique, IOC peut maintenir ses profits dans l'ordre de 80 000 000 $ à 90 000 000 $, vous comprendrez qu'au plus fort de la conjoncture économique des années soixante-dix nous avons de la difficulté à croire que ses opérations n'étaient pas rentables.

En avril 1982, IOC prévoit le maintien des opérations à Schefferville jusqu'en 1985, au moins, dans le dossier que nous avons vu, tout en réalisant des profits nets fort importants. Alors, la fermeture a été décrétée, selon nous - et c'est très important de le noter - je le répète, la fermeture a été décrétée, selon nous, rapidement et plus que probablement au niveau de la maison mère, afin d'augmenter

les profits nets des opérations d'IOC.

C'est ce qui est inacceptable. Il est socialement irresponsable de prendre de telles décisions dans la conjoncture déjà pénible pour les travailleurs. Je pense que cela se comprend un peu mieux maintenant, quand on a pu voir le dossier, les délais d'annonce et pourquoi les bénéfices aux salariés n'ont pas été connus avant l'annonce de la fermeture.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Godbout.

M. Godbout: Elle a abandonné tout réinvestissement à Schefferville...

Le Président (M. Bordeleau): M.

Godbout.

M. Godbout: ...au cours des dernières décennies.

Le Président (M. Bordeleau): Excusez-moi, M. Godbout. C'est simplement pour vous mentionner que j'apprécierais que vous puissiez conclure dans les prochaines minutes.

M. Godbout: Elle s'est retirée graduellement de ses obligations municipales. Elle a engagé la bataille en 1973 en arrêtant ses subventions d'équilibre budgétaire à la municipalité de Schefferville. Elle a graduellement augmenté le coût de la vie lié à l'éloignement et à la vie dans les régions nordiques en doublant les coûts de transport pour passagers, en 1980, en augmentant de 50% le coût de transport des marchandises à la même période et en n'indexant pas ses subventions aux achats d'électricité et d'huile à chauffage. Ce que je veux dire par là, c'est que les subventions n'ont pas augmenté depuis plusieurs années.

Sur le plan de la main-d'oeuvre, elle a réduit les effectifs réguliers de 50%, de 1976 à 1981, et, finalement, elle a délibérément installé un climat de panique en faisant circuler des rumeurs fondées qu'elle s'empressait de nier aussitôt mais qu'elle concrétisait après coup afin de déstabiliser la population. Toutes les actions concouraient vers le même objectif: celui de fermer Schefferville. IOC maintenait, malgré tout, sa politique de vente de maisons, réduisant ainsi la mobilité géographique des travailleurs en augmentant de fait leur sentiment d'appartenance et de dépendance à la ville. Elle pouvait ainsi transférer sur le dos des citoyens ses obligations envers la municipalité.

C'est notamment pour ces raisons que nous croyons que la décision de fermer Schefferville planait depuis plusieurs années dans la tête de ceux que j'ai mentionnés tout à l'heure. La compagnie n'a, cependant, jamais mis cartes sur table et a développé, ici même, un climat de panique et d'instabilité de la communauté afin de mieux pouvoir les manoeuvrer et, éventuellement, les acheter avec des cadeaux.

On peut, d'ailleurs, faire la même analyse pour ce qui est des autres populations qui vivent en fonction des installations d'ici: entretien de la voie, ateliers de réparation, quais de chargement à Sept-Îles. À travers ces manoeuvres, elle a nié, en pratique, au syndicat le droit fondamental - et j'ai expliqué pourquoi tout à l'heure et ce qu'on veut dire par là - de négocier les conditions de séparation et de vie à Schefferville. Les métallos ont été, ici, le seul obstacle réel au parachèvement du scénario.

L'aventure de la compagnie IOC sur la Côte-Nord et dans le Moyen-Nord démontre hors de tout doute la nécessité et l'urgence d'une planification coordonnée de développement économique. Les Québécois ne peuvent plus se permettre d'abandonner l'exploitation de nos régions nordiques à des compagnies comme celle d'IOC. C'est le gouvernement qui doit être le maître d'oeuvre du développement économique et cela apparaît des plus essentiels dans les régions nordiques où c'est l'ensemble des conditions de vie des populations qui dépendent des décisions des employeurs.

Nous demandons, en outre, au gouvernement qu'il assume ses responsabilités en matière de développement économique des régions nordiques et qu'il se donne les outils nécessaires en termes de fonds et d'institutions pour accomplir cette tâche.

M. le Président, messieurs les membres de la commission, nous sommes convaincus que vous allez vous mettre sérieusement à la tâche et, bien que l'on ne puisse racheter les erreurs passées, il est important que vous établissiez ici un climat de confiance, de concertation, pour tenter tous ensemble un ultime effort pour dégager l'avenir de Schefferville et régler adéquatement les problèmes de conditions de vie des habitants de cette ville. Nous n'avons pas de solution miracle pour la survie de cette ville mais nous espérons vous avoir convaincus que la façon de procéder que nous proposons offre les meilleures garanties de succès dans la tâche qui nous attend. Nous voulons vous certifier que, si vous acceptez notre proposition de comité d'étude spécial, nous collaborerons avec tous les partenaires pour tenter de sortir de cette impasse dans le plus grand respect des intérêts en cause et pour le mieux-être des Scheffervillois.

En terminant, je le répète, nous vous demandons - et nous demandons des réponses immédiates de la commission premièrement, le dépôt des états financiers d'IOC à Schefferville et sur la Côte-Nord; deuxièmement, qu'un médiateur spécial soit nommé dans le contexte que nous avons

décrit; troisièmement, un engagement de votre part, de la part des représentants du gouvernement et de l'Opposition officielle, que vous allez recommander à l'Assemblée nationale une loi sur les fermetures d'usines et de mines et une loi sur le fonds minier; quatrièmement, qu'un moratoire d'un an soit mis, avec le "task force", de façon que les bénéfices aux employés soient maintenus après la date décrétée par la compagnie; et, cinquièmement, que vous acceptiez les termes de référence de notre "task force". Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Godbout. M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Marois: M. le Président, je voudrais, en mon nom et au nom de mes collègues, remercier la FTQ et les métallos, leur porte-parole à cette table, M. Godbout, de leur mémoire. Il va sans dire, je pense - je vous expliquerai pourquoi je vais le dire quand même - que c'est sûrement un des mémoires importants que nous avons devant nous et que nous avons à examiner. Je le dis d'avance parce que je ne voudrais pas qu'on me fasse le même genre de reproches voilés que j'ai cru comprendre que certains - je ne fais pas nécessairement allusion à des membres de cette commission - m'ont faits lorsque j'ai pris beaucoup de temps, avec mon collègue de l'Énergie et des Ressources, pour interroger la minière IOC. Dans le cas de la minière IOC, j'ai posé - et mon collègue aussi - des questions très précises. À l'occasion, je me suis permis, avec le plus de délicatesse qu'on pouvait le faire, d'interrompre pour obtenir des précisions dans les réponses. Certains sont allés jusqu'à dire que j'avais même poussé l'obtention de réponses. Oui, j'ai poussé pour obtenir des réponses parce qu'il me semblait extrêmement important qu'on ait des réponses précises et tout le monde conviendra qu'on a pu obtenir un certain nombre de réponses très précises sur certaines questions de la part de la minière qui présentent une ouverture. D'ailleurs, je pense que les métallos l'indiquent, le reconnaissent eux aussi ce matin. J'entends bien faire la même chose, avec mes collègues, en ce qui concerne cet important mémoire des métallos.

Il y a une première remarque que je voudrais faire au point de départ. Revenant à nouveau sur certains des commentaires que nous venons d'entendre, qui rejoignent des questions très précises qui ont été posées par mon collègue, le ministre de l'Énergie et des Ressources, sur lesquelles j'ai moi-même renchéri, questions qui s'adressaient à la minière IOC, et que nous maintenons d'ailleurs nous l'avons dit très franchement, je pense qu'on s'est parlé très franchement - il y a une chose qui se dégage. D'ailleurs, M. Godbout, le président des métallos, vient à nouveau lui-même de l'indiquer, ce n'est pas parce qu'on se parle franchement -comme on dit dans notre jargon québécois: qu'on se parle dans le nez - qu'il est exclu que cela puisse permettre l'ouverture d'un climat de coopération pour essayer de régler les problèmes qu'on vit ensemble. L'un n'exclut pas l'autre.

C'est vrai - et j'y reviens à nouveau, nous l'avons dit, mon collègue M. Duhaime et moi-même - que nous considérons que nous n'avons pas obtenu de réponses précises sur ce qui s'est vraiment passé car, en un certain sens, la question demeure entière: pourquoi? quand on considère les chiffres mêmes qui nous ont été présentés par la minière IOC, quand on regarde les chiffres de profits des années 1979, 1980 et 1981, à partir des tableaux mêmes qui nous ont été présentés. Alors que, durant ces années-là, la production en tonnes diminue tandis que, dans les années antérieures, le tonnage produit - et les tableaux sont très clairs -était plus élevé, les profits étaient, à toutes fins utiles, nuls. Et, dans les années 1979, 1980 et 1981 - il ne s'agit pas de parler de profits exorbitants quand on parle d'un rendement de 10% sur la base des chiffres qui nous ont été communiqués, les chiffres connus, en tout cas, on ne peut pas dire que ce sont des profits mirobolants - il n'en reste pas moins qu'ils ont atteint 10%. En 1979, 1980 et 1981, au moment où la production en tonnage diminue, c'est pendant ces années que le taux de retour sur l'investissement atteint 10%, ce qui donne quand même une moyenne, sur l'ensemble des années, réduite. La question demeure entière, il y a quelque chose qui n'est pas clair. Pourquoi, à ce moment précis, en 1982, dans la foulée de 1979, 1980 et 1981, bang! cette décision arrive, qui demeure une décision, jusqu'à nouvel ordre, subite? La façon aussi. Finalement - ce que vous avez relevé à nouveau - qui vraiment a pris la décision? Encore là, je ne porte pas de blâme, je ne porte pas de jugement, je repose ces questions qui demeurent entières.

Hier soir - malheureusement, il était 1 h 15 du matin - nous avons abordé un petit mémoire qui nous a été présenté par des spécialistes de l'Université McGill - et j'ai dit que je le relèverais ce matin - présenté par M. Bouffard qui était le porte-parole. À la page 18 de leur mémoire - et j'ai dit qu'on comprenait, tout le monde; bien sûr les journalistes n'étaient pas là à 1 h 15 du matin et cela se comprend - ils mettaient le doigt sur une question fondamentale qui demeure posée et je cite: "Il faut considérer que l'annonce de cet..." Il parlait de certaines parties des plans d'indemnité et de relance qui ont été annoncés en janvier 1983. Pourquoi alors l'annonce de la fermeture

arrive-t-elle le 2 novembre 1982? Ce n'est que trois mois plus tard qu'un plan d'indemnité est annoncé. Comment concilie-ton cela avec justement cette annonce qui est venue à la suite d'années où les bénéfices s'amélioraient avec un tonnage et une production réduits s'il est exact qu'il y avait déjà des indications depuis 1978, 1979 etc.? À ce moment-là, les choses devaient être planifiées, et si les choses étaient planifiées, il n'y a pas de raison pour que les plans de bénéfices et d'avantages pour les travailleurs, les citoyens n'aient pas été prévus en même temps. Enfin, il y a quelque chose qui reste entier comme question et, dans ce sens, c'est certain qu'il y a quelque chose qui n'a pas de sens.

Ceci étant dit, il n'en reste pas moins qu'il y a des ouvertures intéressantes, valables qui ont été faites de la part du président de la minière IOC et que nous avons tous reçues très favorablement, dans l'état de la situation dans laquelle on se trouve. C'est le premier commentaire, la première remarque que je voulais faire.

Deuxièmement, il y a évidemment beaucoup de recommandations dans votre mémoire. Je ne les couvrirai pas seul, un certain nombre de mes collègues, ministres, députés, vont intervenir sur le mémoire.

Une de vos demandes - et cela vient à la page 11 de votre mémoire - concerne la nomination de ce que vous appelez un médiateur spécial - si je comprends le sens de votre demande - pour que, dites-vous, les avantages qui ont été proposés soient - je pense que je reprends à peu près textuellement votre expression véritablement négociés, discutés. Vous avez, vous-même, M. Godbout - d'ailleurs les déclarations de presse sont très claires -dit et je pense que c'est à peu près l'expression que vous avez utilisée dans une déclaration de presse: II y a là une base valable, intéressante, permettant, en tout cas, d'ouvrir sur quelque chose, une base de négociation et d'échange qui permettrait d'en arriver à quelque chose qui pourrait être valable. Je pense que c'est à peu près ce que vous avez dit et je ne veux pas tronquer ni vos paroles, ni votre pensée "que c'était une base valable."

Vous vous souviendrez que j'ai posé une question très précise au président de la minière concernant cela justement: "Est-ce que oui, la minière était d'accord pour s'asseoir avec le syndicat et discuter?" Discuter, bien sûr, dans le sens d'examiner tout cela et voir quelle sorte d'aménagement, et le reste, et je pense que la réponse de la minière était très claire. On a reçu une réponse favorable à cette demande.

Cependant, vous insistez à nouveau ce matin pour qu'un médiateur spécial soit nommé. Je vais vous donner la réponse suivante très précise. Vous savez qu'en vertu du nouvel article 3.1 de la Loi sur le ministère du Travail, lorsque le ministère du Travail a été scindé, qu'il y a eu création du ministère du Travail et, d'autre part, du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, il y a deux lois qui ont été adoptées créant ces ministères et il y a des articles de ces deux lois qui sont passés passablement inaperçus. L'article 3.1 de la Loi du ministère donne au ministre du Travail le pouvoir de nommer ce que les uns appellent un médiateur spécial, ce que d'autres appellent une personne-ressource, peu importe l'expression, pour aider les parties à en venir à une entente sur des conditions de séparation.

Le texte va plus loin que cela parce que, dans les cas où il y aurait refus de coopérer, de collaborer, de l'une ou l'autre des parties, le ministre a même des pouvoirs de poursuite en vertu de cet article. La personne-ressource ou médiateur spécial pourrait, en vertu de cet article, être disponible pour venir à Schefferville rapidement. Je peux vous dire tout de suite qu'elle pourrait être nommée, j'ai consulté mon collègue, le ministre du Travail, et si vous pensez que cela demeure un instrument, un élément valable et même nécessaire, nous sommes d'accord pour répondre favorablement à votre demande. Je vous le dis au nom de mon collègue, le ministre du Travail, il m'a indiqué qu'il était d'accord pour nommer, en vertu de cet article, une personne-ressource qu'on peut appeler médiateur spécial, pour donner un coup de main dans le but de favoriser - c'est son mandat, en vertu de la loi - une entente entre les parties dans les meilleurs délais sur les conditions de séparation. (11 h 30)

Deuxièmement, je voudrais tout de suite aller à une autre proposition. Je m'excuse si je vais maintenant à la fin de votre mémoire, c'est parce que je voudrais revenir sur un troisième point qui concerne toute la question du fonds minier, des fermetures d'usines, de la protection de l'emploi, etc., en dernier lieu. Je voudrais revenir, deuxièmement, sur votre recommandation qui apparaît aux pages 34 et 35 de votre mémoire concernant ce que vous appelez un "task force" qui relèverait du ministre de l'Énergie et des Ressources et là, avec des éléments de mandat et un échéancier que vous proposez.

Vous vous souviendrez que j'ai posé une question très précise au président de la minière, à savoir s'il accepterait. Je lui ai dit que la réponse du gouvernement du Québec, d'emblée, était oui, qu'il accepterait, en ce qui le concerne, de participer à un "task force" pour qu'on s'assoit ensemble. Vous vous souviendrez de la réponse qui a été faite par le président

de la minière, qui nous a dit qu'il acceptait d'emblée de participer à un tel groupe de travail.

J'irais cependant un peu plus loin quant à une partie de votre demande qui concerne la composition. Il nous semble important, en tout cas, de tenter d'obtenir, dans la composition de ce groupe de travail sur l'avenir de Schefferville pour l'examen des problèmes à court terme, à moyen terme et à long terme, que non seulement y participe la minière, que non seulement y participe le Syndicat des métallos, que non seulement y participe la ville de Schefferville, que non seulement y participe le groupe de citoyens, mais qu'y participe aussi le gouvernement fédéral. Qu'on se mette tous ensemble.

On a entendu, hier, la réponse du président de la minière qui a accueilli, si ma mémoire est bonne - on relèvera les transcriptions très précises parce que je ne voudrais pas tronquer la pensée ou les paroles des intervenants, pas plus que celles du président de la minière - favorablement cette recommandation-là. Nous tenons à ce que dans ce "task force" - je voudrais savoir si vous êtes d'accord - à moins qu'un élément ne m'échappe, que le gouvernement fédéral aussi y participe; en tout cas, qu'on le lui demande pour qu'il soit participant à part entière.

Vous suggérez que la présidence soit remise au ministère de l'Énergie et des Ressources. Nous en avons parlé entre nous, les collègues, et nous avons convenu plutôt -je vais vous dire pourquoi - de demander à notre collègue, le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, d'en assumer la présidence. Ceci n'exclut pas, bien sûr - cela va de soi, d'emblée, au point de départ - que, forcément, aussi bien mon collègue de l'Énergie et des Ressources que des gens de chez nous y participent à part entière. C'est précisément pour cela qu'on croit préférable d'en confier la présidence à notre collègue, le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional, parce qu'il y a toute une série d'éléments qui sont sectoriels et qui impliquent toute une batterie de ministères. Donc, dans ces conditions, il est préférable, à notre point de vue, que la présidence relève de notre collègue qui pourra aussi y mettre à contribution des personnes-ressources de l'Office de planification de développement du Québec, etc. Que le mandat général soit de coordonner l'ensemble des efforts visant à assurer l'avenir de Schefferville et la possibilité pour sa population d'identifier des perspectives concrètes d'emploi et de développement pour que toutes les dimensions y soient, aussi bien celles du court, du moyen que du long terme, avec un certain nombre de mandats spécifiques.

Premièrement, identifier, discerner les services essentiels qui doivent être maintenus: éducation, santé, services municipaux, électricité, transport, habitation. À quelles conditions? comment? et le reste. Les façons de les maintenir; là il pourrait paraître raisonnable de se fixer une échéance qui pourrait tourner autour du début de mai 1983; ce ne sont pas des choses qui doivent traîner; ce sont des choses sur lesquelles il faut que des décisions sur des choses concrètes sur le court terme aboutissent vite.

Deuxièmement, identifier et évaluer les projets possibles de création d'emplois et de développement économique de la région de Schefferville et ce, dans une perspective tant à court, qu'à moyen et qu'à long terme; préciser les rôles possibles de chacun des intervenants dans la réalisation de ces projets, c'est-à-dire les gouvernements, les municipalités, la minière, les métallos, etc., avec quelque chose qui pourrait paraître raisonnable comme échéancier, une période de six mois.

Troisième élément de mandat plus spécifique: faire toute recommandation générale ou spécifique de nature à orienter les politiques et stratégies gouvernementales relatives au développement du territoire du Nord. Là je crois qu'on pourrait se donner une échéance d'un an, et d'ailleurs, vous vous souviendrez que j'avais demandé au président de la minière si, précisément dans cette perspective où il faut qu'on se donne du délai pour non seulement regarder les problèmes du court terme mais voir comment se présente l'avenir sur le moyen et le long terme, s'il accepterait de considérer de reporter - j'avais indiqué de six mois à un an, quitte à examiner les cas où cela peut être six mois de plus et les autres cas où cela peut être un an de plus - et on se souviendra que, je crois que c'était l'expression qu'il a lui-même utilisée - je ne voudrais pas encore là lui imputer des réponses qu'il n'aurait pas faites mais, si ma mémoire est bonne c'est l'expression qu'il a utilisée - que les choses n'étaient pas "coulées dans le béton" et qu'il y avait possibilité d'ouvrir sur cette perspective d'un minimum de six mois, en n'excluant pas d'autres possibilités qui pourraient être examinées. Donc...

Le Président (M. Bordeleau):

Simplement pour vous indiquer que vous avez écoulé 20 minutes. Je l'indique, sans vouloir vous restreindre, en vous demandant peut-être d'être le plus concis possible.

M. Marois: Oui. J'essaie d'être le plus concis possible, M. le Président, mais je crois que sur des choses aussi fondamentales... Il s'agit de l'avenir d'une population. C'est l'un des mémoires importants devant nous. Je ne veux pas

abuser vraiment du temps. Je ne crois pas en avoir abusé depuis le début des travaux de cette commission. Je vais essayer de faire l'impossible pour me discipliner et me restreindre, mais si on veut avoir des réponses précises...

M. Fortier: Il n'a pas utilisé son temps.

Le Président (M. Bordeleau): J'aimerais bien quand même que... je pense qu'on veut donner tout le temps aux parlementaires à tour de rôle de participer. Mais le ministre dit qu'il veut poser des questions. Oui, s'il les posait, on pourrait avoir des réponses.

M. Marois: Je voulais d'abord formuler des commentaires, M. le Président. Je n'ai pas l'habitude d'interrompre les membres de l'Opposition. Je n'ai pas l'habitude non plus, jamais, de tenter de guider les membres de l'Opposition ni de leur indiquer s'ils doivent faire des commentaires, poser des questions, la façon de le faire. J'ai l'habitude de respecter cela et j'entends bien demander aussi qu'on respecte le même droit que j'ai. J'ai des choses à dire et j'entends bien les dire. J'entends aussi respecter le droit des autres membres de cette commission parlementaire. J'ai fait des commentaires d'ordre général. Je viens de donner deux réponses très précises. J'aimerais avoir la réaction des métallos sur ces deux premières réponses, quitte à revenir ultérieurement sur toute la question du fonds minier et la question des fermetures, quitte à revenir plus tard.

M. Fortier: Simplement le ministre, comme il l'a dit, a des droits. Il a droit de faire des commentaires pendant 20 minutes et il a le droit de poser des questions pendant 20 minutes. Mais les autres parlementaires ont le droit d'exiger qu'après 20 minutes, le droit de parole passe à quelqu'un d'autre.

M. Marois: M. le Président, je vais m'en tenir à cela pour l'instant.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord.

M. Fortier: Si le ministre veut poser une question, qu'il y aille.

Le Président (M. Bordeleau): M.

Godbout, vous voulez réagir aux commentaires du ministre.

M. Godbout: Lorsque le ministre reviendra, j'aurai peut-être quelques questions. Première remarque, c'est qu'on n'a certainement pas d'objection à inviter le gouvernement fédéral dans l'affaire du "task force". Je pense que - je l'ai dit tout à l'heure - le député du comté de Manicouagan a certainement joué un rôle également là-dedans et on n'a pas d'objection là-dessus. Ce qu'il faudrait peut-être que vous nous disiez, M. le ministre, quand vous aurez une chance, c'est ce que vous entendez par services essentiels.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député...

M. Fortier: Si le ministre veut répondre, il me fera plaisir de laisser le droit de parole au ministre.

M. Marois: Peut-être que je l'ai indiqué trop rapidement au moment où je suis passé sur cet élément du mandat spécifique. Lorsque je parlais d'identifier les services essentiels à maintenir avec une échéance à court terme, j'ai parlé de mai 1983. J'ai donné des exemples concrets comme l'éducation, la santé, les services municipaux, l'électricité, le transport, l'habitation...

M. Fortier: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: ...j'ai bien noté les paroles du ministre au début où, depuis hier, il exige des réponses de tout le monde et, heureusement qu'il a commencé à en donner un petit peu ce matin. Hier, il était meilleur pour exiger des réponses du président de la minière. Les ministériels n'en donnaient que très peu.

Ce que j'ai aimé dans les paroles de M. Godbout et, sans vouloir lui mettre des mots dans la bouche, c'est qu'il notait le rôle du mouvement syndical et il disait: Ce n'est pas de l'adoration mutuelle entre le syndicat et la compagnie, une société d'adoration mutuelle; c'est un rôle de revendication. Je crois que vous vouliez vous délimiter et, sans vouloir vous mettre des paroles dans la bouche, je crois qu'il y a une certaine ressemblance entre le rôle que vous jouez et le nôtre. Certainement que nous ne sommes pas ici une société d'adoration mutuelle vis-à-vis les ministériels et certainement que nous avons également un rôle de revendication.

Encore là, le ministre pose des questions et dit: "Comment se fait-il que les propositions de la minière ne sont venues qu'au mois de janvier?" Et moi, la question que j'aimerais poser - je ne lui pose pas la question parce que je ne voudrais pas qu'il prenne la parole maintenant - mais il faudrait bien qu'il nous dise à un moment donné qu'est-ce que le ministre Marois a fait après le 2 novembre. À-t-il convoqué le président de la minière pour lui demander, justement, quelles seraient les conditions qui seraient faites aux travailleurs? Autrement

dit, c'est bien beau de jouer à la vierge offensée, mais il faudrait bien que le gouvernement assume une certaine responsabilité une fois que la décision a été prise par la minière et une fois que les décisions ont été connues.

Également, ce que j'ai remarqué, M. Godbout, c'est que vous avez insisté sur le fait - et vous vouliez peut-être corriger ou, du moins, tempérer les propos du président de la minière hier concernant l'action des marxistes-léninistes, mais sans vouloir trop faire de politique, j'ai remarqué que vous aviez dit que c'était une situation bien difficile de 1970 à 1976 - qu'il n'y a plus de marxistes-léninistes dans les mouvements syndicaux. Je me demande pour quelles raisons le gouvernement a tellement de difficultés avec les relations syndicales-patronales présentement.

Mais, M. le Président, pour revenir... Je crois que, dans votre mémoire, vous parlez justement du fait que vous donnez une certaine responsabilité au gouvernement, et que vous avez eu d'autres propos où vous disiez: C'était difficile de prévoir; je n'ai pas la page ici, mais à un moment donné dans votre mémoire, vous êtes très précis pour indiquer que vous imputez une responsabilité de ne pas avoir prévu cela.

Hier, je ne sais pas si vous étiez ici mais j'ai cité une déclaration de votre prédécesseur; j'aimerais savoir s'il y a eu des suites à cette demande que votre prédécesseur avait faite. J'avais cité, à ce moment, un article de Louis-Gilles Francoeur dans le Devoir du 7 octobre 1980 où M. Jean Gérin-Lajoie parlait justement des mises à pied faites en août 1980 et je cite: "Les 497 mises à pied décrétées en août par la compagnie Iron Ore, à sept milles de Schef-ferville, mettent présentement en cause la survie même de cette municipalité de 3000 habitants" a affirmé M. Jean Gérin-Lajoie.

Afin d'éviter le départ définitif d'une bonne partie de la main-d'oeuvre locale et pour faire cesser les effets saisonniers du chômage dans cette ville minière, le directeur des métallos a réclamé l'intervention du gouvernement pour examiner, notamment, la possibilité d'établir conjointement avec la compagnie et le syndicat un programme de stabilisation et de planification de la main-d'oeuvre. (11 h 45)

Alors, la question que je pose est: Est-ce que ces demandes que M. Jean Gérin-Lajoie avait faites au gouvernement, ont eu des suites? Est-ce que, à votre connaissance, le gouvernement a donné suite à cette demande formelle de M. Jean Gérin-Lajoie?

M. Godbout: Bon, écoutez. Là-dessus, je pense qu'on le dit de façon très claire dans notre mémoire, il n'y a pas de politique déterminée et définie en matière de mobilité de main-d'oeuvre, en matière de reclassification ou en matière de problèmes de mises à pied. Nous avons déploré je ne sais combien de fois l'absence de législation dans le domaine des fermetures, dans le domaine du licenciement collectif. Dans les congrès - je suis certain que vous les avez suivis avec intérêt - de la Fédération des travailleurs du Québec, des résolutions ont été adoptées les unes après les autres. On est rendu au point où, à chaque congrès, on n'a qu'à photocopier la résolution du congrès précédent. Cela fait des années qu'on demande cette législation. On ne peut pas dire que nous avons senti, de notre côté en tout cas, un coup de main véritable de la part du gouvernement pour nous appuyer face à cela. Cela a été laissé dans les mains du syndicat et de l'entreprise; on n'a pas senti un coup de main très sérieux de ce côté-là. Je le dis dans mon mémoire, je reproche aux gouvernements qui se sont succédé, les uns après les autres, ce manque de législation.

M. Fortier: Je ne parlais pas tellement de législation. Je crois que la référence de M. Jean Gérin-Lajoie était justement une appréhension, dès juillet 1980, qu'il y aurait peut-être fermeture de la ville de Schefferville. Le dirigeant de votre syndicat, dont vous étiez l'adjoint à ce moment-là, je crois, avait fait une demande formelle, selon M. Louis-Gilles Francoeur. Je me demandais s'il y avait eu des suites à cela.

M. Godbout: S'il y en a eu, on ne le sait pas.

M. Fortier: Bon. La deuxième chose, c'est que, dans votre mémoire, vous dénoncez, vous dites que vous remettez en question les décisions de la minière sur les indemnités qui seront, qui seraient ou qui ont déjà été payées - je ne sais trop - et vous demandez une médiation à ce sujet. Je crois que vous avez tenté ce matin de corriger -je ne sais pas - votre attitude dans ce domaine, mais je voulais juste vous le demander. Dans le Soleil du 27 janvier, vous êtes cité, vous avez eu des propos, où vous semblez dire que vous êtes extrêmement heureux des propositions faites par la minière. Je ne sais pas si, à ce moment-là, vous vous étiez trop avancé et que maintenant vous voulez revenir un peu sur les paroles que vous aviez dites, mais je me demandais ce qui a fait que, maintenant, vous exigez davantage. Est-ce que, à ce moment-là, les propositions qu'avait faites la minière ne vous semblaient pas adéquates et pourquoi avez-vous tenu les propos que le Soleil vous attribue à savoir que les propositions de la compagnie minière reposent sur une base assez solide pour qu'elles puissent fournir un terrain d'entente? Il semblerait qu'il y a une certaine

contradiction entre les propos que vous avez tenus le 27 janvier et les propos que vous tenez ce matin.

M. Godbout: Non. Je pense qu'on dit exactement la même chose. Ce que j'ai déclaré, vous le retrouverez de façon très précise à la page 8 de notre mémoire. Je pense que c'est à la suite de cela que vous retrouvez un article dans le journal. Je pense également que la minière IOC a repris cette déclaration dans son mémoire, si je ne me trompe, à la page 32 ou 33. Ce que j'ai dit, c'est que nous avons salué l'approche. Je ne pense pas que j'aie dit ce matin qu'il n'y avait rien là. On a dit qu'il y avait eu des propositions qui pouvaient fournir un terrain d'entente à partir de ce que pourrait être une loi éventuelle. C'était un jalon de posé, qui était important. La raison pour laquelle on demande un médiateur, c'est qu'on ne sait pas exactement comment cela va s'appliquer. Je peux donner un exemple précis de ce que je veux dire. Il arrive toujours, excusez l'expression, des maudites situations, juste sur le bord de la ligne, comme, par exemple, un travailleur qui, avec son ancienneté, ses années de service dans la compagnie et son âge, est à court de sept, huit ou dix jours pour les programmes gouvernementaux et tout cela. Donc, comment se fait l'application de ces avantages? À qui? Et de quelle façon? Une fois que le principe est établi et les montants d'argent sont donnés, si vous voulez, qu'ils sont là, il faut regarder comment on les applique. Je ne me sens pas habilité à faire seul tout ce travail. Ce que je dis, c'est qu'il y a des gens en place qui ont plus de connaissance du dossier et des problèmes régionaux; il y a des permanents; il y a un directeur régional; il y a des techniciens au dossier; il y a des officiers de syndicats locaux. Il me semble qu'avec un médiateur, toute cette inquiétude... Parce qu'il est arrivé souvent, depuis que je suis ici, qu'un travailleur me rencontre et me dise: Je ne suis pas certain d'avoir droit à cela. Je ne peux pas répondre, je ne le sais pas comment cela s'applique. Alors, avec un coup de main dans ce sens, de quelle façon est-ce que cette application se fera? C'est ce qu'on veut regarder.

M. Fortier: Personnellement, remarquez bien que je crois que si on peut bonifier, améliorer ou définir d'une façon plus avantageuse pour ceux qui perdent leur emploi les avantages auxquels ils ont droit, cela a certainement notre appui. Mais ce que j'essaie de comprendre, c'est que... Je crois que vous avez dit - encore là, je ne veux pas mettre des mots dans votre bouche - que les relations étaient tout de même assez bonnes avec la minière. Vous avez peut-être voulu atténuer ce que le président de la minière avait dit: "qu'elles étaient très très bonnes" et vous disiez qu'elles étaient "bonnes". Je n'ai pas l'expérience que vous avez dans les relations du travail. J'ai toujours cru comprendre que tant et aussi longtemps qu'une compagnie et qu'un syndicat se parlaient, il n'était pas nécessaire d'avoir de médiateur. J'essaie de comprendre la raison qui vous pousse maintenant à exiger un médiateur alors que, du moins de la façon que nous voyons la situation - c'est la raison pour laquelle je vous pose la question peut-être qu'on n'a pas la compréhension totale du dossier - il semblerait que la compagnie et le syndicat peuvent encore se parler. Dans ce sens, pourquoi demandez-vous un médiateur?

M. Godbout: J'ai dit, et le je répète, qu'il n'y a aucune difficulté de ma part. Je pense que cela fait partie de mes responsabilités de faire tout en mon possible pour que les communications se maintiennent dans le meilleur intérêt de nos membres. Je pense que je ne prête pas de mauvaises intentions à personne, je pense que c'est vrai pour tout le monde. Il reste que dans la proposition, c'est évident que cela exclut d'autres travailleurs qui sont impliqués par la mise à pied, qui sont à Sept-Îles ou le long de la voie ferrée, et qui seront mis à pied de façon permanente, à cause de la diminution de la production ici. On fermera, donc, cela a des effets directs.

Deuxièmement, j'aimerais, si vous me permettez, vous expliquer que le dossier n'est pas très facile. Vous avez sur la Côte-Nord, et cela n'est pas la faute de l'entreprise ni du syndicat, on vit dans ce monde, une situation qui est exceptionnelle dans le sens suivant: vous avez des installations qui sont de juridiction québécoise. Alors, il y a les lois québécoises; il y a l'approche québécoise; il y a le Code du travail, il y a tout cela. Vous avez des installations qui sont de juridiction terre-neuvienne et là aussi, c'est un autre gouvernement, c'est une autre loi, c'est un autre code.

M. Fortier: Est-ce que c'est un autre syndicat ou si vous représentez...

M. Godbout: Non, c'est le même syndicat.

M. Fortier: C'est le même syndicat.

M. Godbout: Et vous avez le chemin de fer qui traverse les provinces qui est de juridiction fédérale. Quand on arrive pour négocier une convention collective, c'est toujours passablement compliqué, merci! Personnellement, je sais qu'à plusieurs reprises, et je pense que cela a dû être vrai pour les responsables de la compagnie, il a fallu faire passablement de gymnastique pour

pouvoir asseoir les trois représentants, le cas échéant, de différentes provinces ou juridictions. C'étaient des journées de débat à savoir qui serait le président de tout cela. Toute cette complication légale de trois juridictions n'a pas aidé. Un exemple précis de ce que je veux dire: il y a eu des travailleurs qui ont été mis à pied à Schefferville; ce sont des gens d'ici; ils ont eu un emploi ailleurs dans la compagnie et ils sont touchés par une autre mise à pied maintenant, à cause de cette fermeture. Qu'est-ce qu'on fait avec ces gens? Jusqu'à maintenant, à moins qu'on se trompe et qu'on ait très mal compris - cela peut arriver - notre compréhension du dossier, c'est que la compagnie résiste férocement à s'asseoir à des tables de négociation. Il nous semble que si on essaie de forcer des tables de négociation, à nous seuls, vous savez que cela peut être passablement compliqué et qu'un conseiller spécial ou un médiateur dans le dossier peut nous aider. Dans ce sens, il peut faire du travail ex parte, il peut faire toutes sortes de travaux. C'est dans ce sens... Je ne mets pas en doute ce que j'ai dit, je ne le reprends pas non plus de façon différente, je dis qu'il y a des choses qui doivent être ajustées, il faut regarder de quelle façon cela s'applique. Vous avez toutes ces juridictions qui font que le dossier est lourd.

M. Fortier: Oui, d'ailleurs j'ai noté que le gouvernement était plus enclin à accepter votre recommandation de nommer un médiateur qu'il était prêt à l'accepter lui-même, la semaine dernière ou la semaine avant, pour ses propres employés. Compte tenu de ce que vous venez de dire, si j'ai bien compris, il faudrait que ce médiateur soit acceptable non seulement au gouvernement provincial mais également au gouvernement fédéral parce que cela déborde, comme vous dites. Il s'agit de médiation autour des lois de deux provinces et d'un gouvernement fédéral.

M. Godbout: II n'y a pas de problème à faire la demande à différents niveaux. Nous sommes devant les instances québécoises et nous faisons une demande dans ce sens. Je peux vous dire que je ne peux pas parler pour la minière IOC mais, à ce jour, lorsqu'un médiateur ou quelqu'un avait été nommé, je sais qu'il a été très bien accepté et reçu et cela s'est effectué dans un cadre acceptable. Je ne verrais pas pourquoi on commencerait à mettre des objections aujourd'hui. Je ne crois pas que ce serait l'approche de l'IOC, je ne peux pas parler pour elle. Dans notre cas, on n'a pas d'objection. Bien sûr, cela fait partie de l'ensemble du problème à regarder et, étant devant les instances québécoises, nous posons une demande devant vous.

M. Fortier: Une dernière question avant de laisser la parole à mes collègues peut-être...

Le Président (M. Bordeleau): M. Daoust.

M. Daoust (Fernand): Je voudrais faire quelques commentaires à l'égard de ce que vous avez dit au tout début. L'idée d'un médiateur spécial vient du Syndicat des métallos. Elle est sans aucun doute symptomatique des relations du travail qui ont toujours existé entre le Syndicat des métallos et cette compagnie. Vous avez parlé de dialogue. Vous avez dit: Puisque, somme toute, le dialogue n'a jamais été rompu et n'est pas rompu, pourquoi faut-il qu'un tiers intervienne? Il y a des dialogues de sourds et Dieu sait que, sans faire le procès des relations du travail entre les deux parties, il est peut-être bon de mentionner que, dans le passé, il n'y a pas eu ces échanges fondamentaux dans des cas comme celui qui nous touche.

C'est une chose pour le président de l'IOC de venir ici, de faire l'exposé que l'on sait, auquel on a tous assisté hier et d'ouvrir des avenues; c'est une autre chose de voir de façon concrète comment cela peut se réaliser. Un tiers qui intervient est un peu la conscience de tous ceux qui nous voient fonctionner. C'est un témoin aussi et il est là souvent pour vérifier la bonne foi des parties en présence.

Il ne faut pas que cela se fasse en catimini. Il faut, encore une fois, pousser les ouvertures qui ont été faites et vérifier la volonté de chacune des parties de trouver des solutions. Quant à nous, notre volonté correspond à celle des métallos, elle est largement fondée sur des propositions, sur des attitudes, sur des comportements qui sont connus et qui ont toujours été extraordinairement transparents, d'une transparence limpide. (12 heures)

On ne peut pas dire la même chose à l'égard de la compagnie. Si un tiers ou un médiateur est indispensable à ce moment-ci, c'est que, préalablement, tout le phénomène que l'on vit et qui provoque cette commission parlementaire n'a jamais été abordé entre les parties. On l'a dit au moment de l'annonce de la fermeture. On a parlé d'une décision brutale et sauvage qui, normalement, aurait dû faire l'objet de multiples échanges entre les parties. Cela a été un jeu de cache-cache depuis de nombreuses années, depuis toujours.

Il faut qu'il y ait des dialogues entre les parties et Dieu sait qu'on les suscite et qu'on les accueille avec toute l'ouverture d'esprit qui doit caractériser le mouvement syndical et quelque syndicat que ce soit, mais quand il y a une fin de non-recevoir d'un côté, il faut absolument que quelqu'un

d'autre intervienne. C'est pour cela que le Syndicat des métallos a insisté fortement pour qu'il y ait un médiateur, encore une fois, un témoin, un arbitre - appelons-le comme on voudra - quelqu'un qui puisse être témoin de ce qui se passe entre les parties et qui puisse vérifier - je le répète, cela me semble fondamental - et pousser à fond les ouvertures qui ont été faites hier.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. Godbout, vous êtes venu ici aujourd'hui pour avoir des réponses à votre demande qu'un médiateur spécial soit nommé, si je comprends bien, ce qui est un peu en dehors des lois normales puisque cela couvrirait plusieurs juridictions. J'oserais espérer que, dès aujourd'hui, on puisse peut-être demander, sans vouloir l'imposer, au président de la minière de nous dire quels sont les motifs d'une acceptation, d'un refus ou de modifications à la proposition que vous faites.

J'aimerais juste poser une dernière question avant de passer la parole à mes collègues. C'est au sujet du fonds minier. J'ai participé à l'étude du projet de loi et le ministre, M. Marois, lorsqu'il avait présenté son projet de loi, avait dit très clairement que ce projet de loi était proposé à la demande même des syndicats; il avait mentionné les métallos, en particulier. Ce qui m'a le plus surpris, lorsque nous sommes allés en commission parlementaire, c'est que non seulement ceux qui représentaient les patrons, mais aussi les métallos, je crois - si ma mémoire est fidèle - avaient dit très clairement que le projet de loi n'était nullement satisfaisant et qu'il devait être rejeté. Cela m'a surpris parce que j'aurais cru qu'un ministre, agissant un peu à la demande des représentants syndicaux, aurait présenté un projet de loi reflétant vos demandes.

À ce sujet, j'ai deux questions. Bien sûr, on se rend compte qu'une fermeture d'usine ou de mine dans un endroit éloigné comme Schefferville, c'est beaucoup plus grave qu'une fermeture d'usine ou de mine dans la région de Montréal; ce n'est pas du tout la même chose. Dans le domaine minier, bien sûr, les mines, normalement, ne se retrouvent pas dans la région de Montréal, elles se retrouvent plutôt en région périphérique. Il reste quand même qu'une fermeture à Schefferville, dans une région très éloignée, c'est beaucoup plus grave qu'une fermeture de mine qui pourrait être quand même assez près de grands centres ou de moyens centres et, surtout, où il y aurait des moyens de communication plus faciles.

J'aimerais que vous nous disiez très brièvement - j'ai peut-être manqué les explications que vous nous donniez - quels seraient les critères importants qu'un tel projet de loi devrait couvrir. Vous dites, dans votre mémoire, que vous aviez demandé dans le passé que le fonds minier ne s'applique qu'aux métaux non ferreux. Bien sûr, même si le projet de loi avait été accepté, cela n'aurait pas réglé le cas de Schefferville puisqu'il s'agit d'une mine de fer.

Par ailleurs, et contrairement, je crois, à ce que d'autres représentants ont dit hier - ils parlaient d'un fonds minier mais, si je me souviens bien, leur fonds minier ne créait un fonds que pour les employés de la mine, que pour les mineurs eux-mêmes - on se rend bien compte que si on parle de la fermeture de Schefferville, en particulier, si on ferme l'Iron Ore, en plus des problèmes qui sont créés aux mineurs, il y a des problèmes qui sont créés à d'autres gens qui ne sont pas des employés ou à d'autres personnes qui sont des commerçants ou des entrepreneurs ou des gens qui vivent dans la ville de Schefferville.

J'aimerais que vous me disiez si, dans votre idée, le fonds minier, ou la loi que vous demandez à ce sujet, ne devrait couvrir que les employés de la mine, ce qui me semblerait normal quoique, encore là, cela crée des problèmes comme on en a souvent, en commission parlementaire, lorsqu'on étudie un projet de loi, puisqu'il faut tenir compte des fonds de retraite et de tous ces problèmes. D'autre part, est-ce que vous feriez une distinction quand il s'agit de la fermeture d'une usine ou de la fermeture d'une mine en région éloignée, comme celle de Schefferville?

M. Godbout: D'abord, la première partie de votre question: les métaux non ferreux. Cela oblige à une petite rétrospective, si vous le permettez. Nous avons présenté notre projet de fonds minier en 1967; on en retrouve les principes généraux de la page 12 à la page 17 de notre mémoire. Vous retrouvez les revendications de ce qui est le squelette d'un fonds minier. Il y avait un principe important dans notre requête du fonds minier qui était la transférabilité des régimes de retraite. Nous avions pu négocier avec les compagnies minières du fer et les compagnies de l'amiante des régimes de retraite qui avaient du sens par rapport à d'autres industries minières. Dans les métaux non ferreux qu'on retrouve en gros dans le Nord-Ouest québécois, il n'y avait à toutes fins utiles aucun régime de retraite. On avait réussi à négocier avec les entreprises dans le temps pour une bonne raison, c'est que les mines ouvraient pour quelques années et elles fermaient. Il n'y avait pas beaucoup de volonté de revendication pour un fonds minier; on essayait surtout de négocier des clauses de fermeture. Je pense que le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional et M. Bordeleau s'en

souviendront très bien, c'était notre revendication d'avoir des clauses, des mécanismes de fermeture de mines.

Alors, nous avions pris comme décision, avec les mineurs impliqués, de présenter au gouvernement du Québec un programme sur un fonds minier couvrant les métaux non ferreux, excluant le fer et l'amiante pour les raisons que je viens de vous donner, de façon que les compagnies minières dans les métaux non ferreux puissent faire un fonds collectif dans un fonds commun, si vous voulez, un fonds qui puisse les aider à faire face aux problèmes de fermeture. Cela voulait dire: déplacement, récupération scolaire, formation professionnelle, retraite anticipée ou retraite d'invalidité, le cas échéant; cela voulait dire une coup de main d'un déplacement à l'autre.

Il y avait une chose dans notre fonds minier, qu'on a jamais enlevée et qu'on continue à revendiquer, c'est que les gens qui gravitent autour de l'industrie minière, qui viennent donner les services, devraient être couverts. Je prendrai l'exemple de Schefferville: si on n'avait pas eu d'hôtels dans les années de bonne production, s'il n'y avait pas eu de magasins, s'il n'y avait pas eu de nettoyeurs, s'il n'y avait pas eu de médecins, la compagnie aurait été obligée de faire tout cela. Au début, elle a construit des bâtisses, mis des choses en place, des infrastructures. Des gens sont venus et ont exercé, comme le décrivait hier le président d'IOC, leur métier de services; ils étaient autour de l'industrie et, en même temps, l'industrie profitait de ces services, bien sûr! Alors, on dit que tout ces gens frappés par une fermeture devraient être protégés par un fonds minier.

Par la suite, la première chose qu'a fait à son arrivée au pouvoir, le gouvernement actuel a été d'accepter d'étudier notre proposition du mémoire. Pour la première fois, un gouvernement avait accepté de se pencher pour défricher les coûts; cela ne s'était jamais fait auparavant. Avant cela, je me souviens d'avoir rencontré moi-même - vous le connaissez très bien -M. Maurice Bellemarre, du temps où il était ministre du Travail pour lui dire: II faut que tu fasses quelque chose. Il n'y avait rien à faire là; on frappait une fin de non-recevoir à tous les niveaux. Le gouvernement présentement au pouvoir a accepté d'étudier et de défricher les coûts du fonds minier. Nous avons reçu les études des coûts, nous nous sommes rajustés à ces études; nous avons proposé des projets, attaché à cela le chiffrage, le mieux fait possible avec les moyens qu'on possède. Finalement, cela a abouti à une promesse, la veille des dernières élections: il y a aura un fonds minier.

Le fonds minier nous est apparu, mais dans une proposition qui était intenable. Pour la première fois, on avait une proposition, mais une proposition qui, à toutes fins utiles, était un peu le principe de placer un poisson dans un trop grand bocal et on noyait le projet. Le statut du mineur n'était pas reconnu, dans le projet. C'était un principe qui était fondamental, quant à nous. On ne parlait pas du statut du mineur. Deuxièmement, on arrivait avec un projet de régime de retraite, de plan de pension, si vous voulez, qui était complètement au-dessus de n'importe quel régime de retraite qu'on avait pu négocier. C'était dans le pourcentage de 2% du salaire, multiplié par les années de service, basé sur les trois meilleures années. Je pense qu'on n'a même pas cela, actuellement, dans le secteur public. Ce régime de retraite, - je ne sais pas pourquoi c'est arrivé ainsi - aurait coûté à chaque mineur un minimum de 2000 $ par année. Alors, vous comprenez qu'on a dit: Écoutez, cela n'a pas de sens.

Depuis ce temps-là, on attend parce qu'on a demandé des propositions ajustées et nous avons des résolutions à chaque année. Nous avons l'appui, des recommandations et des demandes de la FTQ et des métallos là-dessus. Dans les dernières années - M. Marois pourra me reprendre si je me trompe - je pense que et la CSD et la CSN ont appuyé cette revendication. Nous l'avons étendue dans le domaine de l'amiante et du fer, dans le contexte que vous connaissez maintenant. Et on attend pour savoir quel doit être le projet d'un fonds minier qui, dans le fond, est assez simple. C'est une mise en commun pour protéger et aider les travailleurs et les citoyens frappés par une mine qui ferme parce qu'elle s'épuise ou parce qu'il y a un problème de marché.

Mais vous allez noter que cela fait un peu les cornes, cela fait un peu le cercle dans notre mémoire, parce qu'on parle de projets de protection pour faire face aux mises à pied et aux fermetures. Le président de la compagnie Iron Ore en a parlé hier; il serait d'accord avec un projet pour aider les travailleurs impliqués. Peut-être que cela fait un lien quelque part. Finalement, si le gouvernement arrivait avec un projet non pas sectoriel, mais qui serait plus global, je vous assure que l'on ne s'en irait pas sans connaissance dans le champ pour dire: Qu'est-ce qui vient d'arriver? On le recevrait avec plaisir.

Mais on a cru bon, par les discussions qu'on a entendues et par stratégie de prendre un secteur qui est celui de l'industrie minière qui, au début de ses activités est appelé à mourir et on a dit: Ce secteur-là est particulier. Il y a des statuts un peu particuliers à l'entreprise minière. Le mineur, lui, n'a pas de statut particulier et on devrait peut-être avoir un projet pour ce secteur industriel. Maintenant, si on est capable d'avoir un projet plus large - et je

ne veux pas mettre des paroles dans la bouche du président de la compagnie, mais peut-être que c'est ce qu'il a indiqué - on n'est certainement pas contre cela.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Oui, M. Daoust.

M. Daoust: Dans la foulée de ce que vient de mentionner M. Clément Godbout et en réponse aussi à vos remarques, je tiens à vous dire que notre impatience à la FTQ est en train de se transformer en hostilité déclarée à l'égard des tergiversations gouvernementales au sujet d'une politique globale sur le phénomène des licenciements collectifs et des fermetures d'usines. Profonde déception. Nous trouvons que le gouvernement est d'une timidité inacceptable, qu'il a une attitude froussarde à l'égard d'un projet de loi qui est tellement attendu par l'ensemble de la population du Québec.

Ce type d'accusation peut être fait aussi à l'égard de l'Opposition qui se garde bien de se mouiller les pieds de façon très concrète à l'égard des grandes revendications syndicales dans le domaine des fermetures d'usines et des licenciements collectifs. C'est vrai qu'une décision comme celle qui a été prise par la compagnie Iron Ore provoque un incroyable désarroi. C'est vrai que c'est plus dramatique ici à cause de la vocation mono-industrielle de Schefferville. Mais les fermetures d'usines et les licenciements collectifs créent aussi énormément d'angoisse dans tous les milieux qui sont frappés.

Il n'y a pas eu, à notre connaissance, de changements législatifs depuis quinze ans dans ce domaine alors qu'on sait tous - et les données sont connues - qu'il y a entre 40 000 et 50 000 travailleurs par année qui subissent des licenciements collectifs et des fermetures. Et cela, c'est avant les deux ou trois dernières années alors que c'est quasiment par centaines de milliers par année que les travailleurs subissent des conditions brutales de fermetures d'usines, d'entreprises, de mines et d'ateliers au Québec. Les revendications de la FTQ sont connues depuis une dizaine d'années. Nous voulons qu'enfin un gouvernement ait le courage de voter une véritable loi qui protégera les travailleurs dans les cas de licenciements collectifs et de fermetures d'usines.

Les positions de la FTQ, je l'ai mentionné, ont été explicitées à l'occasion de colloques, de congrès, de multiples prises de position. Nous savons que les ministres qui se sont succédé au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre ont toutes sortes de projets dans leurs cahiers. (12 h 15)

II serait bon de prendre quelques minutes, pas trop longuement, pour rappeler en gros quels seraient les éléments constitutifs d'une véritable politique, d'une véritable loi dans le domaine des fermetures d'usines. Il faudrait, à notre sens, que quelque entreprise que ce soit au Québec puisse justifier non pas après coup - ou tenter de justifier après coup, comme l'a fait la Compagnie minière IOC - mais avant que la décision soit prise, avec preuves à l'appui, dépôt des états financiers, dévoilement de tous les documents pertinents les raisons du licenciement collectif ou de la fermeture devant un comité qui pourrait s'appeler un comité de justification. C'est ce qu'on appelle une procédure de justification qui ne se fait pas à la sauvette, à l'occasion de moments aussi spectaculaires que ceux que l'on vit en commission parlementaire, mais qui est entourée de toutes les précautions, de tous les éléments, de tous les documents afin que les parties soient munies de tous les renseignements. Donc, justifier de façon publique son intention de fermer l'entreprise ou de licencier un nombre de travailleurs.

Un autre élément. Avant qu'une autorisation de procéder à la fermeture d'une entreprise, d'une mine, ou de décider d'un licenciement collectif soit donnée, nous voulons que les entreprises soient tenues de négocier de bonne foi toutes les conditions de réparation pour les employés concernés. Nous ne voulons plus quémander et nous faire offrir toutes sortes de petits cadeaux après coup. Nous voulons que ce soit l'objet d'une véritable négociation où les responsabilités sociales des entreprises subiraient le test véritable de façon publique et de façon formelle. Nous voulons que dans la loi il y ait des préavis beaucoup plus étendus. Je ne dirai pas généreux, il n'y a pas de générosité quand on se fait couper le cou et qu'on se fait dire qu'à compter de tel moment on va perdre son emploi après y avoir consacré, comme c'est le cas des gens de Schefferville, dix, quinze, vingt ou trente ans de leur vie et avoir atteint 40 ou 50 ans d'âge. Donc, des avis étendus dans le cas des congédiements, des fermetures et des licenciements collectifs.

Nous voulons que les indemnités de séparation soient beaucoup plus adéquates. Encore une fois, on n'emploie pas le mot généreuses. Il n'y a pas de générosité là-dedans. Il y a tout simplement des obligations morales, des obligations formelles que doivent prendre les compagnies à l'égard des travailleurs qui sont jetés sur le pavé. Donc, nous voulons que la loi prévoie des indemnités beaucoup plus adéquates qui, elles, tiendront compte de toutes les situations, de l'âge et de l'ancienneté des employés. Nous voulons aussi et, ce sont là des éléments, qu'on prévoie la création de caisses d'indemnisation. Qu'elles soient globales ou sectorielles - je ne dirai pas peu importe - cela fera l'objet d'études et

d'échanges entres les parties. Au moment où le projet de loi sera soumis, il fera l'objet d'une commission parlementaire. Ce sont des pistes que nous dégageons à ce moment-ci. Caisses d'indemnisation ou de stabilisation, appelons cela comme on voudra, constituées par la contribution des entreprises pour indemniser les travailleurs. C'est là que se mesure la responsabilité sociale des entreprises. C'est à ce moment-là seulement qu'on sera en mesure de porter des jugements.

C'est un peu à travers tout cela que ce situe le fonds minier. Qu'il y ait un fonds minier dans une loi plus globale ou qu'il y ait un fonds minier spécifique, ce sont des choses qui peuvent faire l'objet d'études. Ce sur quoi je voulais insister, M. Gendron l'a mentionné hier, c'est l'opération Schefferville qui est engagée à ce moment-ci, il a parlé de remettre l'imagination au pouvoir. On l'a dit à quelques reprises. Le pouvoir est fatigué, l'imagination est endormie. On souhaite, nous autres - malheureusement, c'est dramatique de le rappeler pour ces travailleurs et travailleuses de Schefferville qui sont affectés par le drame que l'on connaît - que ce soit l'électrochoc à l'égard de ceux qui détiennent le pouvoir politique et qu'enfin on puisse voir au bout du tunnel une lueur, mais une lueur perceptible, non pas brumeuse, à l'égard d'un projet de loi qui est tellement attendu par les travailleurs québécois.

M. Mulroney, qui n'est pas le moindre des personnages à ce moment-ci et peut-être éventuellement, qui est le président de cette entreprise que l'on connaît, qui est un homme autorisé pour parler de tous ces sujets, a ouvert une porte toute grande, hier, en disant - je ne veux pas lui mettre les mots dans la bouche - que, quant à lui, il ne voyait pas d'objection à une loi sur les fermetures d'usines. Je ne dirais pas qu'il applaudit à un tel projet, mais l'autorité qu'il a, le poste qu'il détient à la compagnie, cela devrait faire en sorte, à mon sens, que le gouvernement saute sur l'occasion, en profite tout au moins et n'hésite plus, cesse de tergiverser à l'égard d'une loi sur les licenciements collectifs et les fermetures d'usines.

Vous aussi, de l'Opposition - c'est bien beau, le gouvernement - soyez peut-être un peu plus volubiles. Vous l'êtes sur tellement de sujets. Je ne vous le reproche pas, c'est votre rôle. Vous n'êtes pas une société d'adoration mutuelle et vous aviez raison de le dire, mais poussez-leur dans le dos. Nous leur poussons dans le dos aussi. Peut-être qu'à un moment donné nous allons les mettre en mouvement. Ils ne ratent pas d'occasion d'être en mouvement sur certains cas et on voudrait qu'ils manifestent autant d'imagination à l'égard de ces centaines de milliers de travailleurs québécois qu'ils en ont manifesté au cours des derniers mois dans un domaine que vous connaissez fort bien.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. On va avoir un problème d'horaire. Je voudrais en aviser tous les participants et leur demander de collaborer et de ramasser leurs questions et leurs réponses parce que je me demande à quelle heure on pourra terminer ce soir, si on regarde un peu les mémoires qu'il nous reste à entendre. Comme je voudrais bien pouvoir entendre tout le monde, je demanderais à tous d'essayer de se restreindre un peu.

Oui, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, je pense que nous allons collaborer, mais j'aimerais dire ceci. Nous sommes venus à Schefferville pour écouter les gens qui avaient des problèmes et le gouvernement a décidé, pour une raison que je ne connais pas, de convoquer la commission parlementaire les jeudi et vendredi. S'il l'avait convoquée le mardi, on aurait eu le mardi, le mercredi, le jeudi et le vendredi. Maintenant qu'on est ici, pour ma part, je suis prêt à partir plus tard ou demain, si nécessaire, mais tout en voulant collaborer - je ne dis pas cela pour faire de la petite politique - je crois quand même qu'il faut donner le temps aux gens qui ont des problèmes de s'exprimer.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, j'aurais apprécié que le député d'Outremont ait la même tolérance à mon égard tantôt, quand il m'a rappelé à l'ordre parce que je dépassais les 20 minutes. J'aurais voulu poursuivre.

M. Fortier: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Sans vouloir imputer des responsabilités à quiconque, une revue du procès-verbal vous dira, M. le ministre, que mes questions n'étaient pas si longues, mais je crois qu'elles commandaient à la FTQ de nous donner des réponses. J'apprécie, pour ma part, la longueur des réponses puisque je crois que c'était nécessaire.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Gendron: Très rapidement, au nom du gouvernement, sur la question de règlement, j'aimerais expliquer pourquoi on a planifié la commission parlementaire sur deux

jours. C'est tout simplement parce que ce n'est pas nous qui avons inventé le règlement concernant les commissions parlementaires; il y a des droits de parole qui sont connus. La règle voulait que, normalement, ce soit 20 minutes de présentation et 20 minutes pour chacun des deux partis. On avait une quinzaine de mémoires; en répartissant le temps, c'était une tâche qui pouvait se faire sur deux jours, en acceptant, bien sûr, de dépasser les heures traditionnelles, ce que nous avons fait hier en travaillant jusqu'à 1 h 30 du matin. Si on se disciplinait un peu plus, on serait capable d'entendre tout le monde, en respectant chaque intervention, pour finir les travaux cet après-midi.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Dans ce sens-là, je ne veux pas, non plus, partir de polémique, ni brimer qui que ce soit de son droit de parole. Au contraire, je veux simplement rappeler à tout le monde qu'il y a des horaires à respecter et qu'autant que possible, tout en s'exprimant et en gardant le droit de parole que tout le monde a, il faudrait tenter de résumer ou de dire ce qu'on a à dire le plus succinctement possible. M. le député de Prévost.

M. Dean: M. le Président, je suis heureux de me sentir appuyé par l'Opposition, parce que j'étais justement pour dire que la question de Schefferville et la grande question des fermetures d'entreprises est trop importante pour qu'on ne profite pas de l'occasion pour vider, le plus humainement possible, de la part de tous les citoyens et des partis politiques et par les journalistes interposés pour l'information et la sensibilisation de la population, ce drame épouvantable que créent les fermetures d'entreprises et d'autant plus les fermetures d'entreprises dans les régions éloignées. Comme je n'ai pas été le plus volubile des députés autour de cette table depuis le début, je suis prêt à m'engager à me fermer la boîte une fois pour toutes après cette intervention, pour faciliter les choses. Mais je me trouve dans l'obligation d'avoir des choses à dire et des questions à poser sur le sujet et, aussi, à cause du respect antérieur des règlements, de répondre, au nom du ministre de la Main-d'Oeuvre, à un certain nombre de problèmes ainsi que d'apporter des réflexions du gouvernement sur les questions importantes qui sont devant nous.

Donc, d'abord, je voudrais profiter de l'occasion pour rendre hommage au Syndicat des métallos (FTQ), le plus grand syndicat industriel au Québec, pour plus de 40 ans de services acharnés de représentation et de défense des travailleurs et des travailleuses du Québec. Leur témoignage devant cette commission parlementaire est très symbolique de leur façon de se comporter depuis ces 40 années. D'abord, la défense acharnée, militante, mais toujours responsable des travailleurs et travailleuses qu'ils représentent. Mais aussi le fait qu'ils ont toujours, tant au Québec que dans toute l'Amérique du Nord, marqué leur action par cette capacité d'aller au-delà de la défense de leurs membres et de discuter et de prendre parti dans les grandes causes sociales et humaines de la société entière, tant au Québec qu'en Amérique du Nord. Je trouve que leur mémoire, dans ce sens, est symbolique, parce que ce mémoire comporte, d'abord, des critiques franches et dures à l'égard de quiconque, que ce soit les gouvernements, les partis, les employeurs -et avec raison - mais aussi une démarche concrète et pratique, surtout des suggestions positives pour apporter des solutions au problème qu'on vit. Cela, non seulement c'est reflété dans le mémoire pour leurs membres, mais pour tous les éléments de la société de Schefferville, en ce sens qu'ils prennent la défense des petits commerçants, des travailleurs non syndiqués, des chômeurs, des peuples amérindiens et de tous les intervenants de la communauté. Finalement, leurs démarches débouchent aussi sur une demande de législation, non seulement pour les mineurs, non seulement pour leurs membres, mais en quelque sorte, de façon très concrète, pour tous les travailleurs et toutes les travailleuses du Québec. Il ne faut pas oublier que la commission parlementaire existe à cause du Syndicat des métallos et, encore une fois, c'est typique de la démarche des métallos que, malgré les frustrations et même la révolte que peuvent vivre et subir les membres, il y a toujours ce respect pour nos institutions démocratiques, dont l'institution parlementaire n'est pas la moindre, et pour le parti au pouvoir, quel qu'il soit. Alors, je tiens à souligner ces points en partant.

Je veux aussi souligner un fait très important et, j'espère, symbolique pour l'avenir: la première fois qu'une commission parlementaire sort des murs poussiéreux, si respectables et traditionnels de l'Assemblée nationale c'est pour aller sur place se sensibiliser à un drame humain que, je pense, il faut vivre, toucher et sentir pour le comprendre. J'espère que c'est prometteur pour l'avenir et que les parlementaires vont se déplacer, vont sortir de leur train de vie, en bien des cas confortable, pour voir le vrai monde et vivre les vrais problèmes du peuple québécois. (12 h 30)

Avec tout le respect que je leur dois je souhaite que nos amis journalistes, surtout ceux et celles de la presse dite nationale, puissent vivre cette expérience et, par le fait d'avoir senti et observé des drames humains, qu'ils puissent mieux jouer leur rôle d'informateurs et de sensibilisateurs de la

population dans le sens démocratique et, par là toucher le drame que peuvent connaître tous ces travailleurs et travailleuses frappés par une fermeture totale ou partielle. C'est déjà assez traumatisant de recevoir un avis de mise à pied pour une période indéfinie, non seulement pour la dignité du travailleur, mais aussi pour son bien-être psychologique, économique, social, familial. C'est encore pire quand il s'agit du problème de licenciement définitif et encore plus catastrophique et dramatique quand il s'agit de ce que peut représenter une fermeture d'industrie dans une ville comme Schefferville, qui représente non seulement une perte de son orientation du travail, de sa sécurité économique, mais aussi l'impact familial, l'impact social et l'impact sur toute sa vie. Après avoir invité, incité du monde à venir ici s'enraciner, à un moment donné, brutalement on l'arrache à ses racines et on pousse cette population vers un avenir inconnu et d'autant plus incertain à cause de la situation économique.

Pour toucher les problèmes devant nous, j'aimerais poser un certain nombre de questions accompagnées d'un certain nombre de commentaires. On a référé deux fois aux affirmations de M. Mulroney, hier, au sujet des relations syndicales. Quand M. Mulroney, subitement, a parlé de ML hier, je me demandais pour un instant ce que les militants libéraux auraient pu faire pour envenimer les relations patronales-syndicales à Iron Ore, mais très vite M. Mulroney a corrigé cela en disant qu'il s'agissait bel et bien de marxisme-léninisme. M. Godbout, ce matin, a dit qu'il en parlait un peu, mais qu'il ne voulait plus en parler.

Il y a une question que je voudrais poser. D'après les métallos, quand on parle "de mauvaises relations patronales- syndicales", c'est ce qui est souvent invoqué par des ennemis économiques et politiques du Québec comme raison pour laquelle des entreprises ne s'implantent pas ou quittent. Je voudrais savoir des métallos, quel rôle ces périodes difficiles sur le plan des relations patronales-syndicales ont pu avoir dans la décision d'Iron Ore de fermer?

Deuxièmement, explications sur les propositions d'Iron Ore pour les travailleurs affectés par cette fermeture ou cette annonce de fermeture - je ne pense pas que ce soit sorti clairement - est-ce que Iron Ore a négocié ou discuté ces modalités avec le Syndicat des métallos? Même si, publiquement, le directeur des métallos avait en quelque sorte dit: C'est une bonne base de négociation, est-ce que des discussions, des négociations concrètes et pratiques ont eu lieu entre le Syndicat des métallos et Iron Ore?

Maintenant, je voudrais, si vous me le permettez, M. le Président, faire des commentaires et adresser des questions sur un éventuel projet de loi sur le fonds minier ou sur les fermetures de mines et entreprises. Pour avoir travaillé dans le dossier, je fais miennes les expressions de frustration des métallos et de la FTQ. D'ailleurs, ceux qui connaissent mon passé savent que pendant bien des années j'ai vécu ces revendications de l'autre côté de la table et je les ai toujours endossées. Je les connais par coeur. Ce n'est pas difficile de dire que je suis d'accord avec ces questions et aussi avec les reproches qui les accompagnent.

Cependant, pour avoir travaillé le dossier, il faut quand même dire que, lorsqu'on parle des cadres d'une éventuelle loi sur les fermetures de mines ou d'entreprises, on touche des questions importantes, fondamentales et qui constituent des premières nord-américaines. Il y a des projets de loi dans au-delà de 20 États américains et un projet de loi sur le plan fédéral aux États-Unis sur les fermetures d'entreprises qui dorment dans le débat public quelque part depuis quelques années. Ce n'est sûrement pas pendant le règne de M. Reagan que la situation va s'améliorer.

Le fait demeure que tout ce qu'on essaie de faire dans ce domaine constitue un précédent nord-américain et ce, dans une période de difficultés économiques, de sorte qu'il y en a qui se promènent dans le paysage et qui ne manquent pas de prendre le crachoir public, via les moyens de communication, pour dire: Les temps économiques sont difficiles, il ne faut pas imposer des coûts, il ne faut pas adopter des lois sociales de cette envergure. C'est pour cela que je suis très heureux des remarques de M. Mulroney. J'appuie les remarques du ministre quand il disait: On fait confiance à M. Mulroney de faire de l'apostolat auprès de ses semblables, dirigeants d'entreprises, et surtout, peut-être, concernant M. Dufour pour qu'on développe une espèce de concertation et de consensus dans la direction de l'approbation de tels projets de loi.

Aussi, pour avoir vu, à la télévision, mon collègue de Brome-Missisquoi exprimer son accord, selon ce que j'ai cru comprendre, au nom du Parti libéral du Québec, avec les grandes lignes d'un tel projet de loi, au canal 10, à l'émission de M. Laplante, je suis convaincu qu'on peut compter sur l'appui acharné de l'Opposition dans ce dossier. Pour que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu puisse piloter ce dossier et le mener à bonne fin, malgré les études, malgré les difficultés, cela prend l'appui tant des députés et des ministres du parti ministériel, que de l'Opposition, du monde patronal, et de l'opinion publique pour qu'on arrive, malgré la situation économique difficile, à réaliser un tel projet de loi.

Il faut quand même dire qu'au moment

où le débat a eu lieu, ainsi qu'une commission parlementaire sur le projet de loi no 3, la demande des métallos était dans le sens d'une loi pour les mineurs. Donc, on peut dire que si, à ce moment, on avait adopté la loi, cela n'aurait peut-être pas touché la situation à Schefferville, mais je dois dire que je suis très heureux que les métallos, dans le mémoire, tout en insistant sur des conditions particulières pour les régions minières isolées, aient ouvert des perspectives qui ouvrent la porte à une loi générale sur les fermetures d'entreprises.

Aussi, sur la question des préavis plus longs, de 6 à 24 mois, il n'y a pas de problème, ni avec le gouvernement, ni, paraît-il, avec le parti de l'Opposition. C'est, justement, par ce préavis obligatoire pour les entreprises annonçant à l'avance leurs intentions en matière de licenciement possible, total ou partiel, on donne à toutes les parties, dans le sens du "task force" qui a été évoqué par les métallos et qui est accepté par toutes les parties ici présentes, on donne à tous les partenaires: le syndicat, l'entreprise, la communauté, les gouvernements, la possibilité d'évaluer la situation, de chercher des solutions aux problèmes, d'éviter les licenciements si possible ou de prendre des mesures et de préparer des projets de recyclage, soit de l'entreprise, soit de la communauté, par le développement de nouvelles industries.

Sur la question des indemnités de déménagement, le gouvernement est aussi d'accord, il va sans dire, et nous sommes d'accord particulièrement pour les travailleurs qui perdent leurs emplois et qui vivent dans un milieu nordique ou une ville isolée comme Schefferville et les autres villes nordiques. C'est une réalité, mais ce qu'on espère, c'est réussir à obtenir ce minimum de consensus social de la part du monde patronal et aussi des partis politiques pour nous permettre d'avancer dans cette voie.

Sur la question d'une politique sectorielle de main-d'oeuvre, il y a des choses qui se font dans le domaine de la formation professionnelle des adultes, des besoin de recyclage et de formation de la main-d'oeuvre. De récentes ententes faciliteront des mesures concrètes dans ces domaines. On peut aussi dire que plusieurs mesures suggérées par les métallos sont encore inexistantes, mais je sais que le gouvernement partage maintenant l'opinion des métallos et de la FTQ à savoir qu'on ne peut pas aborder les questions de licenciements collectifs et de fermetures sans en parler et sans les intégrer au sein d'une politique massive et cohérente d'emploi qui vise, en fait, le plein emploi. Le ministre de la Main-d'Oeuvre a fait cette déclaration à quelques reprises depuis un certain temps, et les travaux sont en cours au sein du ministère de la Main-d'Oeuvre tant sur la question d'une politique d'emploi que sur la question d'une législation concernant les fermetures.

Une question, en passant, au Syndicat des métallos. Quand on parle du statut professionnel du mineur, est-ce qu'on envisage une sorte de carte de compétence qui serait émise après un certain nombre d'années ou une certaine période d'expérience ou de formation professionnelle?

Sur la question des régimes d'assurance collective, je voudrais aussi poser une question en faisant ce commentaire. Ne serait-il pas vrai que des formules de prolongation de la couverture des régimes d'assurance collective des travailleurs sont déjà prévues dans un certain nombre de conventions collectives qui existent dans certaines des grandes entreprises du Québec? Donc, ce serait d'autant moins coûteux, possiblement, de rendre ce genre de mesure qui existe déjà en partie dans les conventions collectives de l'industrie obligatoire pour toute la collectivité par voie législative.

Ensuite, la question des régimes de retraite. Plusieurs des recommandations des métallos sur le fonds minier et sur les questions de fermetures et de licienciements touchent les régimes de retraite et de préretraite. Là, je pose la question: Quelle serait la réaction des métallos et de la FTQ à la possibilité qu'une bonne partie du problème soit résolue par des modifications importantes au Régime de rentes du Québec, dans le sens d'une valorisation du niveau de prestation et également par des amendements à la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes pour rendre plus faciles les questions de transférabilité des régimes de retraite? C'est une question que je poserais aux métallos parce qu'il m'apparaît souhaitable que ce qu'on pourrait faire dans l'industrie minière par législation générale touche toutes les industries du Québec. D'autant plus que j'ai été, un peu par accident, témoin d'une conversation entre un président et un vice-président d'une multinationale implantée au Canada et au Québec où ils discutaient des formules possibles de transférabilité des régimes. Leur conclusion, après quinze minutes de discussion en dînant, a été de dire: Bien, ceux qui disent qu'un régime public serait la meilleure solution ont raison au fond. Je ne divulgue pas mes sources, mais j'ai été bel et bien témoin de cette discussion et j'aimerais bien que les métallos commentent cette question.

Finalement, permettez-moi, M. le Président - je m'enligne pour terminer - en attendant ces études et ces efforts que le gouvernement déploie dans une période économique très difficile, d'aborder la question d'une politique visant le plein emploi et celle du licenciement collectif. Le

gouvernement va continuer à agir avec les moyens qu'il possède. D'ailleurs, l'article 45 de la loi existante sera poussé. Même si cela est tout à fait inadéquat considérant la situation, le gouvernement a l'intention de continuer ses démarches pour faire respecter cet article. (12 h 45)

Aussi, par la nouvelle loi qui créait le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu juste avant les fêtes, il faut souligner que le ministre a maintenant de nouveaux pouvoirs, dont les pouvoirs d'enquête, le mandat d'assurer des actions concertées des différents ministères dans les situations de licenciement collectif, le mandat d'aborder des politiques cohérentes d'emploi. Même si la loi sur les licenciements n'est pas encore adoptée, les nouveaux pouvoirs donnés au ministre permettent un certain nombre d'actions qui n'étaient pas permises par les législations qui existaient avant la nouvelle loi qui a créé le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Bref, nous agissons en cette matière et nous continuerons d'agir avec le plus de rapidité possible. Il faut insister et "réinsister" sur le fait de lancer ce débat public, de le lancer rapidement et de rallier un minimum de force de concertation dans la société. Il faut que toutes les entreprises qui disent avoir des responsabilités sociales et communautaires, les partis politiques qui disent que c'est un problème humain, angoissant et inacceptable, ce problème que vit une ville comme Schefferville ou les fermetures d'autres communautés, que tout ce beau monde se rassemble pour appuyer le ministre et le gouvernement dans l'adoption rapide de ces projets de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. LeMay): Merci. M. Godbout.

M. Godbout: Je tenterai de répondre le plus rapidement possible à vos six questions. À mon point de vue, il n'a aucune relation entre la fermeture de Schefferville et les problèmes de relations du travail qui ont pu exister.

Deuxièmement, quant aux négociations, je pense qu'il faut toujours essayer d'éclaircir et d'expliquer les mandats dans lesquels nous, du mouvement syndical, travaillons. Il me semble que je les ai expliqués assez clairement ce matin. Les mandats précis que nous avons sont de nos assemblées générales, de membres qui nous demandent d'intervenir auprès de la compagnie pour que des négociations aient lieu avec les comités de négociation. Je sais qu'il y a eu des lettres d'envoyées par les sections locales à la compagnie Iron Ore et la réponse a été non. C'est la réponse qu'on m'a donnée et c'est la connaissance des choses que j'en ai. C'est pour cela qu'on demande une médiation pour permettre ces discussions. Je ne reviendrai pas sur les autres points de la discussion; je pense qu'ils ont été bien établis hier et aujourd'hui.

Quant à la troisième question, sur les lois, vous avez fait une intervention que nous appuyons, bien sûr, et que nous saluons quant aux fermetures d'usines et de mines. Je demande en ce moment - et je le demande au nom des travailleurs et des travailleuses de Schefferville et au nom du Syndicat des métallos et je pense que je peux le demander au nom de la FTQ, comme vice-président, le secrétaire général étant à côté de moi, s'il n'est pas d'accord, il me le dira - à tous ceux qui sont ici, à tous les membres de la commission - je voudrais être bien entendu - si vous êtes prêts, tous ensemble, à recommander une loi dans ce sens à l'Assemblée nationale.

Le statut du mineur. J'ai étudié le dossier des cartes de compétence. Par exemple, il y a eu des études de faites à Thompson, au Manitoba, en Colombie britannique et ailleurs. Les cartes de compétence comportent certains inconvénients et nous n'en sommes pas tout à fait rendus à la décision, à savoir si le mineur devrait avoir une carte de compétence ou pas. Ce qui existe à l'heure actuelle, c'est une carte de santé que le mineur doit détenir; c'est ce qu'on appelle la carte des mineurs. Quand nous parlons, pour les métallos, de statut, on dit qu'un travailleur dans le secteur minier, s'il suit son industrie qui est l'industrie minière, à l'instar des travailleurs de la construction qui peuvent passer d'un employeur à un autre, d'une région à l'autre, d'une ville à l'autre, conserve un statut de travailleur de la construction. Peu importe si c'est dans la même entreprise ou dans une autre, peu importe si c'est pour la même compagnie ou pas, peu importe si c'est dans la même région ou pas, il conserve un statut, on lui reconnaît un statut de travailleur du secteur minier.

Cela veut dire - et là je m'en vais à la dernière question que vous soulevez - que si on avait la transférabilité des fonds de retraite, c'est qu'un mineur pourrait se faire une carrière honorable dans l'industrie minière et se retirer après trente ou trente-cinq ans de travail dans l'industrie (ou vingt, vingt-cinq ans) avec un fonds de retraite qui se tient. Je prends, par exemple, les métaux non-ferreux: c'est dramatique. Vous pouvez avoir des mineurs qui font dix, quinze mines dans leur vie pour nourrir leur famille. Ils ont gagné honorablement leur vie et rendus en fin de piste, il leur reste zéro comme pension, parce que, d'une entreprise à l'autre et d'une mine à l'autre, même à l'intérieur de la même compagnie, ils perdaient leurs

droits d'ancienneté ou leur pension, dans le cas où ils en avaient.

Alors ce qu'on veut, nous, c'est que le mineur, dans son métier de mineur, puisse se faire une carrière comme mineur, qu'il ait un statut. Les détails, la carte de membre et tout cela, il faut le regarder, cela comporte certains inconvénients.

L'assurance-collective? Oui, il existe des prolongations d'assurance dans certaines de nos conventions collectives. Ici, avec la compagnie IOC, il y a certaines prolongations, mais elles sont limitées. Non, nous n'avons pas de programme de supplément d'assurance-chômage à l'IOC. Quant à la pension, modifier les régimes du Québec - la transférabilité, je pense que j'en ai parlé - nous sommes d'accord avec la revalorisation du Régime de rentes du Québec. Nous participons à l'étude du projet qui est présentement au conseil consultatif.

Il y a une chose qui nous tient toujours à coeur. On est très fragile là-dessus et vous le savez: c'est l'ingérence dans le domaine des relations du travail. Cela, ça nous fatigue. Cela veut dire que, où il y a des fonds privés, ce n'est peut-être pas - à l'heure actuelle en tout cas - acceptable qu'il y ait des interventions pendant que les parties peuvent faire des choses. Mais qu'on puisse "matcher" quelque chose qui fasse en sorte qu'un programme, une loi fasse des transférabilités... Un travailleur qui part de l'Iron Ore demain matin, qui a un fonds de retraite et qui s'en va travailler pour, je ne sais pas, moi, Noranda, ailleurs, devrait être transféré. C'est de cela qu'on parle. Il devrait conserver ses crédits et continuer à accumuler de nouveaux crédits. Et si, parallèlement à cela, on avait une espèce de programme, un véritable régime de retraite au Québec qui soit gouvernemental, je pense qu'une fois que le régime public serait un régime qui est capable de permettre à son monde de manger et de vivre honorablement, cela pourrait peut-être faire en sorte qu'aux tables de négociation, industrielles ou sectorielles, les revendications et les problèmes de négociations dans le domaine des pensions auraient beaucoup moins d'importance si on avait un régime public qui se tient.

Le Président (M. Bordeieau): Merci. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Dans ce dossier, M. le Président, on a toujours l'impression que le gouvernement essaie de se disculper. Et, je pense que c'est de bonne guerre parce que s'il peut réussir à se disculper, naturellement cela va réduire ses responsabilités dans son esprit. Réduire ses responsabilités, peut-être se fournir des excuses pour ne pas agir encore vis-à-vis des citoyens de Schefferville. Et le ministre du

Travail - je ne sais pas si le ministre de l'Énergie avait tenu les mêmes propos hier -semble se surprendre. Il dit: Écoutez, comment cela se fait-il? Il y a quelque chose qui ne va pas. Les profits augmentent; dans les deux dernières années, il y a eu des profits. Une année, 81 000 000 $, l'autre, 92 000 000 $ et c'est à ce moment-là que la compagnie Iron Ore décide de fermer Schefferville.

Remarquez bien, je prends les commentaires de M. Godbout. Quant aux chiffres, quant aux états financiers, je ne porte pas de jugement à savoir s'ils ont été bien préparés ou non. Cela peut être susceptible de vérification. Cependant, il ne faudrait pas que les propos du ministre induisent la population en erreur. Il ne faudrait pas qu'on ne prenne pas certaines leçons de ce qui se produit ici pour pouvoir les appliquer à l'avenir dans d'autres domaines. Parce que quand on voit les profits et les pertes d'après les chiffres - et encore je le dis d'après les chiffres qui ont été produits par Iron Ore - entre l'opération au Québec et l'opération au Labrador, on voit qu'au Québec, il y a une hausse des profits, de 1962 à 1981, de 22 000 000 $. Et maintenant, au Labrador, des profits de 493 000 000 $. Moi, cela me porte à me poser certaines questions. Je ne sais pas, peut-être que cela pourrait être l'une des explications pour le ministre de dire pourquoi les 22 000 000 $ reflètent la condition de l'industrie minière, du minerai de Schefferville, la question des boulettes. Cela mériterait peut-être une analyse plus profonde. Je pense qu'il y a un principe. Des fois, il faut dire des choses qui ne sont pas trop trop populaires. Comme le disait Charles de Gaulle, la surenchère de la démagogie, c'est bien facile. On peut attaquer les multinationales. Ce serait bien facile, et la population va dire que ce sont de gros méchants.

Je pense qu'il y a là un principe fondamental qu'il va falloir accepter en Amérique du Nord c'est que si on ne peut pas avoir des entreprises rentables - cela s'applique aussi aux sociétés d'État - il n'y aura pas d'emploi. C'est un élément qu'il faudrait explorer aussi et voir ce que le gouvernement a fait. Même si on parle du 2 novembre ou du 2 janvier, qu'est-ce que le gouvernement a fait? Quand on parle des actions gouvernementales, il avait été averti par d'autres rapports. Je pense qu'il faudrait situer les responsabilités où elles sont exactement et ne pas excuser le gouvernement qui a une responsabilité majeure.

Maintenant, on parle du règlement de l'IOC. Je suis loin d'être un expert dans le domaine des règlements et des relations ouvrières. Une des façons, il me semble, de savoir si c'est un bon règlement ou non

serait de faire des comparaisons. Est-ce qu'il est possible de faire une comparaison entre ce règlement d'IOC à Schefferville et un autre endroit où cela se serait produit, la fermeture d'une mine par une société privée ou même par une société d'État dans une région périphérique ou une région lointaine? Est-ce qu'il y a une base de comparaison? S'il y avait une base de comparaison, cela donnerait plus d'arguments à tout le monde pour dire: Ecoutez, ne venez pas, IOC, nous dire que vous êtes très généreux parce que dans tel, tel cas on a fait beaucoup mieux. M. Godbout, est-ce que vous êtes au courant d'autres situations semblables et d'autres règlements qui auraient pu être faits par d'autres sociétés?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Godbout.

M. Godbout: Un dossier que j'ai connu où il y a eu des bénéfices intéressants accordés, c'est le cas d'Uranium City. Il faut bien dire qu'il s'agissait d'un organisme paragouvernemental. Je dirai qu'en gros, à ma connaissance, dans nos dossiers à nous, il est arrivé très souvent que des entreprises aient fermé leurs portes sans rien donner. C'est arrivé. J'en connais qui ont donné très peu. Je dirai, sans entrer dans les détails de l'application parce qu'on veut regarder les détails de l'application des bénéfices; les bénéfices accordés, nous l'avons dit, nous avons salué l'approche et nous avons dit que cela faisait une base sérieuse pour que le gouvernement regarde ce que pourrait être une loi. Cela veut donc dire - ce qu'on a dit à ce moment-là - que les offres de la compagnie, sans en connaître l'application individuelle pour chaque travailleur, parce qu'on ne le sait pas à ce moment-ci, mais comme proposition globale - parce que cela couvre le licenciement, la retraite, la retraite anticipée, le déplacement, l'aide et tout cela - c'est un projet qui est intéressant.

M. Ciaccia: Vous avez parlé d'Uranium City, je pense que Québec Cartier Mining a fait des congédiements, des licenciements...

M. Godbout: Dans le cas...

M. Ciaccia: ...même SIDBEC. Quelle est la situation dans ces... (13 heures)

M. Godbout: Dans le cas des mises à pied, c'est là que cela peut mêler les choses, à Québec Cartier Mining il n'y a pas eu de fermeture. À la SIDBEC, jusqu'à maintenant, il n'a pas eu de fermeture. Les travailleurs qui ont été mis à pied ont rencontré des comités de reclassement. Les compagnies Québec Cartier et SIDBEC ont travaillé au comité de reclassement et, exactement dans le même cadre, avec l'Iron Ore, nous avons travaillé dans les cas de mises à pied.

M. Ciaccia: Je sais que le temps avance, alors je vais essayer de limiter mes questions et mes commentaires. Vous avez fait des représentations dans votre mémoire, dans votre présentation, sur les compensations que les compagnies paient dans les régions nordiques et qui sont taxées par les gouvernements. Hier, nous avons pris l'engagement de la part de l'Opposition d'appuyer une représentation au gouvernement fédéral à savoir que ces montants ne devraient pas être taxés. Je pense que c'est complètement justifiable parce que les gouvernements retirent des bénéfices des exploitations minières; toutes les retombées économiques, les gouvernements en bénéficient beaucoup. Ils ont des revenus. Cela permet le développement des territoires et a des retombées dans d'autres domaines. Cela n'est pas comme, disons, je ne veux pas le minimiser, un épicier du coin qui a, lui, une entreprise de services. Cela a moins de retombées pour un gouvernement que les développements dans ces régions-ci, dans les régions nordiques. Alors, cela peut être complètement justifié. Premièrement, nous sommes prêts à faire les représentations qui s'imposent vis-à-vis du gouvernement fédéral. Deuxièmement, et je pense qu'ici, cela serait opportun pour le gouvernement, nous sommes même prêts à appuyer le gouvernement à faire ces représentations auprès du gouvernement fédéral. On peut être solidaires. On peut faire quelque chose, un front commun vis-à-vis du gouvernement fédéral sur cet article. Mais il faudrait au moins, pour démontrer sa bonne foi aussi, si le gouvernement du Québec est sérieux, qu'il prenne l'engagement ici, devant la commission parlementaire - je l'inviterais à prendre cet engagement - qu'il va, comme gouvernement, appliquer cette règle lui aussi, que le gouvernement du Québec ne lèvera pas des impôts sur les indemnités qui sont payées pour les régions nordiques, les régions éloignées.

Si le gouvernement est prêt à prendre cet engagement, au moins qu'il dise qu'il est prêt à recommander cela. Je sais que le ministre du Revenu n'est pas ici, mais comme il y a quatre ministres, l'adjoint parlementaire du ministre du Travail l'adjoint parlementaire du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et d'autres ministériels, s'ils sont prêts à s'engager, et je pense que c'est le moindre qu'on pourrait faire... Cela fait deux jours qu'on parle devant cette commission. Les engagements du gouvernement n'ont pas été trop nombreux vis-à-vis des citoyens de Schefferville dans le contexte actuel, mais je pense que ce serait une occasion. Je n'en ferai pas une résolution parce que je ne veux pas faire

de procédure. On est ici pour entendre les mémoires des intervenants. Mais je pense que si vous pouviez vous engager, on pourrait tous les deux ensemble, et on le ferait dès notre retour dans nos bureaux respectifs, faire les représentations qui s'imposent au gouvernement fédéral. Cela aurait au moins l'avantage de dire: Voici, au Québec, on est solidaires. On appuie complètement cela, les deux partis, le gouvernement et l'Opposition. Le gouvernement du Québec s'engagerait à mettre en vigueur cette politique. Même si le gouvernement du Québec ne le fait pas, nous nous engageons, comme Opposition, individuellement et au nom du Parti libéral, à demander au gouvernement fédéral d'appuyer et de mettre en vigueur la demande de ne pas imposer ces indemnités.

M. Godbout: M. Ciaccia, vous soulevez une question très importante. On vous remercie de l'appui que vous donnez. Je voudrais vous mentionner deux choses que j'ai en main, qui démontrent la situation. La première est la déclaration faite à l'occasion de la conférence de presse du 26 janvier par le président de l'IOC. Si vous permettez, je noterai ceci: "La compagnie et le syndicat croient fermement qu'un allégement fiscal approprié doit être accordé aux employés des communautés nordiques par le gouvernement du Québec, ainsi que par le gouvernement du Canada. À cette fin, Clément Godbout, au nom du Syndicat des métallos, et moi-même, au nom de la compagnie minière IOC et de ses employés, nous ferons des représentations conjointes aux représentants gouvernementaux afin d'essayer d'obtenir un traitement plus équitable que celui qui existe à l'heure actuelle." À la suite de cette déclaration, sur laquelle nous étions, bien sûr, d'accord de faire une demande conjointe le plus rapidement possible, j'ai fait des travaux de mon côté et je peux vous dire que j'ai une lettre en date du 3 février du ministère du Revenu du Québec. Je vais vous la lire: Le ministère du Revenu du Québec, ayant appris la fermeture des installations de la compagnie Iron Ore à Schefferville, juge opportun de vous aviser que des règles particulières s'appliquent aux bénéfices, tels que primes de fermeture, frais de déménagement ou allocations diverses généralement accordées à cette occasion aux employés d'une entreprise. Il s'est avéré par le passé que des employeurs et des employés soient sous l'impression que les bénéfices payés à cette occasion étaient libres d'impôt, alors qu'il n'en est nécessairement pas ainsi. De plus, il peut arriver que la position de notre ministère, quant à l'imposition de certains de ces bénéfices, soit différente de celle adoptée par Revenu Canada. Pour ces raisons et afin d'éviter des malentendus et des inconvénients possibles pour les employés affectés par cette fermeture, nous tenons à vous informer que votre syndicat peut, si le paiement de certains bénéfices est prévu, obtenir du ministère l'interprétation désirée à l'égard de ceux-ci. À cet effet, il vous sera loisible de communiquer avec le directeur de la Direction des particuliers et des régimes sociaux à la Direction générale de la législation en lui fournissant les circonstances et les conditions préalables pour les paiements de bénéfices que la compagnie minière a l'intention de verser à ses salariés. Il dit cela, mais, en même temps, on reçoit une autre correspondance qui nous dit: Toutes les paies de séparation seront taxables. Tout ce que les gens recevront sera taxable, sauf les frais de déménagement. Si la compagnie IOC vend la maison 1 $ et si, nous, on calcule que la maison vaut 10 000 $, elle va être taxée pour le montant qu'elle vaut. Cela n'a pas de bon sens.

M. Ciaccia: Je suis entièrement d'accord avec vous. La première lettre que vous avez lue, elle ne vous dit rien. Elle vous dit strictement qu'ils interpréteront la loi; mais la loi est claire, c'est taxable. Ce qu'on demande serait d'avoir un engagement voulant que cela ne soit pas taxable, spécialement dans le contexte actuel. On a été à Port-Cartier il y a quelques jours. Les gens qui ont été licenciés et ont reçu certaines primes de séparation, certains montants de compensation, le gouvernement est derrière eux pour obtenir des impôts. Je pense qu'il y a une limite à pouvoir aller chercher de l'argent chez les contribuables. C'est une justice sociale, dans des cas comme ceux-là, de faire des exceptions. J'inviterais le gouvernement à les considérer et à s'engager formellement.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: M. le Président, je voudrais revenir sur un des points qui a été soulevé dans le mémoire des métallos au sujet des programmes d'exploration. Je n'ai pas la page en mémoire. Vous mentionniez une inquiétude voulant qu'il y aurait eu des programmes de réduits au ministère de l'Énergie. C'est exact que la quantité des programmes a été réduite, pour une raison assez simple: il y a eu une concentration de la dépense. Je voudrais essentiellement dire ceci: Le budget du ministère de l'Énergie et des Ressources, sur une base annuelle, pour ce qui est des mines, est d'environ 30 000 000 $. Il y a 10 000 000 $ par année qui sont affectés à des dépenses d'exploration. Nous sommes passés, de 1982 à 1983, en arrondissant les chiffres... Nous allons consacrer, en 1983, 20% du budget d'exploration du ministère dans la fosse du Labrador.

J'ajoute aussi que nous avons, au

Centre de recherche minérale, pour la période de 1978 à 1982, cumulé, en dépenses affectées à la recherche, essentiellement sur le minerai de fer, un montant de 1 700 000 $. Je pense que c'est important de le souligner. Nous sommes dans un ordre de grandeur de dépenses de l'ordre de 2 000 000 $, en 1983.

J'ajoute, M. le Président, que, si nous voulons donner à la région de la Côte-Nord une vocation autre que celle de l'activité économique de l'exploitation du minerai de fer, il nous faudra y consacrer davantage d'argent. De l'argent public, bien sûr, mais aussi de l'argent des compagnies privées. Quelqu'un disait hier qu'un gouvernement, ça n'a pas d'argent. C'est vrai et c'est faux en même temps. Si le gouvernement décide de consacrer une enveloppe de 20 000 000 $, 25 000 000 $, 30 000 000 $, sur une période de quatre ou cinq ans, à un programme d'exploration accélérée dans la fosse du Labrador, il est évident que nous prendrons l'argent quelque part.

Ces décisions ne seront pas annoncées ici, à cette commission parlementaire, malgré les appels du pied que l'on reçoive. Je pense qu'il est tout à fait normal que cette commission parlementaire remplisse d'abord et avant tout sa première mission et son mandat qui est d'entendre les gens qui ont des choses à dire dans ce dossier.

M. le Président, j'ajouterais essentiellement ceci. Le député de Mont-Royal, tantôt, faisait un exposé qu'on entend très souvent, nous, à l'Assemblée nationale. Je voudrais dire une chose claire: Sur ce continent, une entreprise qui ne fait pas de profits est condamnée à mourir. Une entreprise qui fait des profits, c'est une entreprise qui est en mesure de retourner des dividendes à ses actionnaires, qui est en mesure de réinvestir et de créer des emplois. Cela, c'est marqué à peu près partout. C'est écrit presque partout sur ce continent. D'où ma surprise, lorsque la compagnie IOC fait des profits, retourne des dividendes, fait des investissements, mais n'est plus capable de maintenir ses emplois. Chacun évaluera les explications qui ont été fournies.

M. le Président, il faudrait que l'on mette les cartes sur la table. La situation des activités dans le minerai de fer au Québec est menacée. C'est certain, tout le monde sait cela. Peut-être seulement les libéraux l'apprennent maintenant. C'est vrai que la concurrence vient du Brésil. Elle vient aussi de l'Australie, de la Suède. À partir de la proposition qui est faite par M. Godbout de mettre sur pied un "task force" pour Schefferville, je pense qu'on raterait une occasion. Les événements que nous vivons depuis quelques mois ici à Schefferville, qui ont une répercussion sur tout le Québec, sont une grande leçon pour tout le monde: une leçon pour les compagnies, une leçon pour les syndiqués, une leçon pour les travailleurs, une leçon pour les gouvernements aussi.

Je pense qu'on doit élargir le débat. Les activités d'extraction de minerai de fer, de boulettage et d'expédition, il faut tenir compte dans quelle perspective cela se situe. C'est sur un marché international. Il n'y a personne qui va se lever ici, devant cette commission parlementaire, pour soutenir que, si nous ne restons pas concurrentiels, nous allons continuer de vivre quand même. C'est impossible. Pour être concurrentiel, il faut voir l'ensemble de tout le dossier.

Il y a, bien sûr, la question des salaires et des conditions de travail. Il y a les conditions climatiques, il n'y a pas grand-chose qu'on peut faire là-dessus. Il y a la question de l'énergie, le coût du mazout, les possibilités de conversion du mazout à l'hydroélectricité. Il y a la question des tarifs de transport aussi, qui sont administrés par le gouvernement fédéral. Il y a la question des royalties. Il faut penser maintenant que, dans quelques années, si le projet minier de Carajas au Brésil entre en exploitation, c'est 35 000 000 de tonnes de minerai de fer qui viennent sur le marché international. Si nous ne sommes pas concurrentiels à ce moment-là, je pense que les événements que nous vivons ici sont seulement un préavis de ce qui s'en vient. Cela veut dire une concertation solide. Nous, de notre côté, nous sommes prêts à faire ce pas. Je suis convaincu que nous en sommes capables, avec les métallos qui représentent l'ensemble, sinon la totalité des travailleurs impliqués dans le dossier du minerai de fer au Québec. (13 h 15)

Nous devrons aussi, bien sûr, compter sur l'appui et une réponse favorable des compagnies. Il y a IOC, mais il y a aussi Québec Fer et Titane. Il y a Québec Cartier Mining. Il y a SIDBEC-Normines. Il y a la mine Wabush et il y en a d'autres aussi. Je pense que nous devrions, à partir de la proposition d'un "task force", mettre sur pied une table où l'on dirait: C'est cartes sur table. Une table de concertation, je ne voudrais pas qu'on prenne des mois à la préparer. Une table de concertation où les municipalités seraient présentes, bien sûr. Je retiens davantage cette proposition. Cela n'exclut en aucune manière que le "task force" puisse fonctionner ici même à Schefferville pour les problèmes directement reliés à Schefferville, mais, si on veut avancer dans le dossier, penser à moyen et à long terme, il faudrait qu'on enclenche et qu'on saisisse cette occasion qui est, à mon sens, un signal d'alarme parce qu'une des plus grandes compagnies sur ce continent qui exploite, qui a réussi, suivant les dires du président de la compagnie hier et suivant ce que les travailleurs viennent de dire ce matin, un effort de redressement à même les

grands tableaux qu'on a pu examiner, la productivité a été améliorée, le seuil de production avait été ramené, on tourne à profit, et on arrive un bon matin devant la situation où on doit cesser l'exploitation. Si c'est vrai dans un cas, cela pourrait être vrai dans d'autres et on n'aurait pas le droit de dire qu'on n'a pas eu l'occasion de bouger.

M. le Président, c'est dans ce sens que je termine ici en demandant une réaction de la part des métallos sur cette proposition d'aller tout de suite vers une table de concertation.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Ce serait un mot de conclusion en même temps, M. Godbout; d'accord?

M. Godbout: Sur cette question précise, nous disons oui à une table de concertation plus large, mais pas dans le cadre du "task force" dont nous avons parlé dans notre mémoire. Nous croyons que cela doit se faire avec un forum différent. Nous avons une proposition précise qui s'attache à l'avenir de Schefferville, mais nous sommes d'accord avec une table comme celle que vous proposez, qui est plus large et qui implique beaucoup plus de personnes.

M. le ministre, vous avez parlé de la conclusion... M. le Président, je m'excuse.

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Godbout: Vous avez changé de titre. J'ai posé une question qui n'a pas reçu de réponse. Si vous le permettez, avant de faire la conclusion, je voudrais avoir la réponse. Nous sommes ici à Schefferville. C'est la première fois qu'une commission se déplace dans une région. Les gens d'ici attendent beaucoup de la commission, en droit, à part cela; je crois qu'ils ont raison d'attendre. Nous avons posé une question à tous les membres présents à la commission, du gouvernement et de l'Opposition et je la réitère: Êtes-vous prêts, ensemble, à recommander à l'Assemblée nationale une législation sur les fermetures de mines et d'usines? J'ai posé cette question et j'attends la réponse.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Marois: M. le Président, je pense que mon ancien adjoint parlementaire, le député de Prévost, a expliqué l'ensemble de la problématique, l'ensemble des travaux qu'on a faits. Je sais que cela n'avance pas au rythme de votre impatience et je pourrais vous dire aussi que cela n'avance pas au rythme de mon impatience personnelle. Mais je peux vous garantir une chose. En ce qui me concerne, je vais faire tout ce qui est humainement possible pour qu'en concertation avec les parties... Parce qu'il y a des morceaux dont il va falloir discuter. Votre propre conception des choses évolue parce que les réalités changent. La nôtre aussi et on devra travailler ensemble. On avance, on a fait beaucoup de travail de déblayage, le député de Prévost l'a bien résumé; c'est notre volonté arrêtée d'aboutir là-dessus. La réponse à votre question en ce qui me concerne - je parle en tant que ministre, membre d'un gouvernement - est d'aboutir dans les meilleurs délais possible.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député d'Outremont.

M. Fortier: II faudrait être aveugle, M. Godbout, pour ne pas constater, à la suite de cette visite à Schefferville, qu'il s'impose d'avoir une loi, surtout lorsqu'il s'agit de mines. Si la même loi peut s'appliquer à d'autres cas semblables dans le domaine industriel, tant mieux. Certainement qu'à la suite de l'engagement du gouvernement, je peux vous assurer que nous ne pouvons pas dès maintenant appuyer la loi qui n'existe pas, mais nous croyons qu'il est opportun d'agir dans ce sens.

M. Godbout: Des représentants du gouvernement et de l'Opposition, de MM. les membres de l'Assemblée nationale qui sont ici, nous avons reçu des réponses claires et positives, à mon sens, à chacune de nos demandes et de nos conclusions principales. Nous avons insisté pour avoir des réponses immédiates. Nous les avons eues. C'est au nom des travailleurs et des citoyens de Schefferville que nous voulons vous remercier chaleureusement parce qu'ils n'ont pas eu la chance de vous voir souvent dans le coin. Nous avons aujourd'hui l'espoir que nous pourrons ensemble, avec toute notre bonne volonté, régler rapidement tous les problèmes urgents que confrontent les citoyens et les travailleurs de Schefferville et analyser rapidement les chances de survie de cette ville. Je dirai, en terminant, que le voyage de la commission à Schefferville, malgré toutes les difficultés que cela a pu causer à tout le monde, à notre sens, a été fructueux. On vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie également. Merci, M. Godbout, ainsi que les autres membres du Syndicat des Métallos qui vous accompagnaient. Pour éclairer tout le monde, comme ce serait à peu près l'heure d'une suspension normale, je voudrais indiquer qu'à la suite des ententes entre les deux partis, il arriverait ce qui suit: On entreprendrait immédiatement l'étude du mémoire du Conseil des Indiens montagnais de Schefferville, en revenant à

l'ordre régulier, et on suspendrait les travaux après ce mémoire, ce qui nous amènerait vers 2 h 25. On arrêterait pour une heure seulement pour épargner du temps, non pas sur les mémoires, mais sur le temps du dîner des membres de la commission. C'est l'entente que j'avais comprise, si je n'ai pas de... Alors, on me dit qu'il ne faudrait pas que les gens qui nous regardent soient choqués de voir les parlementaires manger un sandwich, à l'occasion, à la table, en continuant de travailler. J'espère que vous serez indulgents.

J'appelle immédiatement le Conseil des Indiens montagnais de Schefferville, représenté par le chef de bande, M. Gaston McKenzie, ainsi que d'autres personnes qu'il voudra bien nous présenter lui-même.

S'il vous plaît! Tout le monde va s'installer. Je demande le silence. S'il y a des caucus à faire dans la salle, on pourrait peut-être les faire à l'arrière.

Alors, tout le monde est en place. Je demande donc au chef de bande des Indiens montagnais, M. Gaston McKenzie, de nous présenter les personnes qui sont avec lui et de procéder à la lecture de son mémoire. M. McKenzie.

Conseil des Indiens montagnais de Schefferville

M. McKenzie (Gaston): Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous plaît!

M. McKenzie: À ma droite, M. Alexandre McKenzie, membre du conseil; M. René Simon, président du Conseil attikamèque-montagnais; M. Augustin Vollant, membre du conseil; M. Georges André, membre du conseil.

Le Président (M. Bordeleau): Excusez, M. McKenzie. Changez donc de micro, j'ai l'impression que le vôtre ne fonctionne pas bien.

M. McKenzie: (S'exprime dans sa langue).

Ce que j'ai dit en montagnais, je vais le répéter en français. Je remercie les Naskapis et les Montagnais d'être venus assister à la réunion pour entendre nos demandes.

Je vais procéder tout de suite à la lecture du mémoire. Vous remarquerez qu'il y a trois parties à notre mémoire: la première partie, les déclarations; la deuxième partie, notre situation socio-économique de 1955 à aujourd'hui et, la troisième partie, les recommandations.

Les Montagnais qui vivent à Matimékosh, réserve indienne aménagée à l'intérieur des limites de la municipalité, ainsi qu'au lac John, qui se situe à deux kilomètres environ du centre de la ville, sont une composante essentielle de la situation de Schefferville. Ils forment une communauté bien organisée, ayant leur vie propre et leur autonomie. Cette communauté représente, avec les Naskapis, le seul élément stable de la région, quelles que soient l'offre et la demande de la ressource minière.

La communauté indienne réside au Québec et elle a un statut juridique défini. Les parcelles de terrain que le Québec a bien voulu concéder au gouvernement fédéral "pour être administrées par lui en fidéicommis pour les Sauvages de l'endroit aux conditions précitées par l'article 67 de la Loi des Terres et Forêts", selon les termes de l'arrêté en conseil du 7 juin 1960, consituant la réserve indienne du lac John, sont de responsabilité fédérale. Mais cette communauté indienne est au Québec. Cela a été signifié formellement par le gouvernement québécois qui a reconnu l'existence des droits des autochtones.

Enfin, la communauté montagnaise locale, de concert avec le Conseil Attikamègue-montagnais, a entrepris un processus de négocation avec les gouvernements fédéral et provincial en ce qui concerne les droits aboriginaux.

Nous voulons que le gouvernement provincial prenne acte des particularités de notre situation et des implications qu'elle comporte pour l'avenir de Schefferville. Nous voulons signifier clairement notre intention de continuer à y vivre et d'occuper toute la place qui nous revient aux plans social, culturel, économique et même politique.

Nous présumons fermement que les demandes exprimées par nous, dans le cadre des travaux de cette commission, ne porteront aucun préjudice aux revendications fondamentales faisant l'objet de négocations en cours entre nous et les gouvernements.

Nous espérons une action concertée de toutes les instances politiques et économiques face aux problèmes créés par l'arrêt des opérations minières. Nous voulons désormais participer pleinement aux décisions qui seront déterminantes pour l'avenir de Schefferville et de la région.

Quels que soient le mandat et les contraintes auxquels est soumise la commission parlementaire, nous tenons à ce que tous les éléments de notre déclaration demeurent à l'arrière-plan de ses préoccupations. (13 h 30)

Deuxième partie: Données essentielles de notre situation. Historique de notre implantation. Bien longtemps avant l'IOC, les Montagnais ont occupé le territoire de la ville de Schefferville ainsi que les sites des opérations minières ultérieures. Les premiers prospecteurs de la région pourraient en

témoigner. La plupart d'entre eux ont été assistés par des trappeurs montagnais, alors établis autour de Sept-Îles en période estivale. Aux autres saisons, avec toute leur famille, ces trappeurs venaient vivre sur le territoire de trappe aux environs de Schef-ferville.

C'est à partir de 1950, avec les premières installations de la ville, que nous avons commencé à y vivre toute l'année. Il faut se rappeler qu'à cette époque, les activités de chasse, de trappe et de pêche constituaient encore la base de notre économie et de notre façon de vivre. Il était avantageux pour nous de nous établir près d'un centre urbain pour écouler nos fourrures et obtenir quelques services. En 1950, nous étions 40 familles environ à l'endroit où se situe maintenant la piste d'atterrissage de l'aéroport.

Puis, en 1955, date de la fondation de Schefferville, nous nous établissions près du lac John qui devient réserve indienne en 1960. Nous vivions alors dans des tentes ou des cabanes sans aucun service d'aqueduc et d'égout et cela, jusqu'en 1976.

En 1976, la plupart des familles montagnaises et naskapis ont emménagé dans des immeubles à logements multiples à Matimékosh, constitué en réserve par arrêté en conseil le 21 avril 1968.

Par la suite, en 1976, un système d'aqueduc et d'égout fut construit au lac John pour desservir une dizaine de nouvelles maisons construites pour les familles qui avaient refusé de s'installer à Matimékosh. C'est ainsi que les familles montagnaises sont maintenant réparties, selon les priorités et les goûts de chacun, en deux réserves distinctes: celle de Matimékosh et celle du lac John.

Notre situation socio-économique de 1955 à aujourd'hui. En 1955, alors que la population de la ville de Schefferville comptait 3479 personnes, nous représentions 5,5% de la population. Présentement, en excluant les Naskapis, nous représentons 27% de la population. Avec ces derniers, nous sommes 41% de la population totale de la région. Selon les mouvements de la population blanche anticipés pour les prochains mois, ce pourcentage risque d'augmenter substantiellement.

Si l'on examine la structure d'âge de notre population actuelle, nous constatons qu'il s'agit d'une population jeune puisque 65,5% d'entre nous avons moins de 25 ans.

Emploi. Dans les années cinquante, lors de la construction du chemin de fer, de la mine et de la ville de Schefferville, les chefs de familles montagnaises étaient à peu près sans instruction, ce qui les rendait inaptes à occuper des emplois autres que ceux de manoeuvres. Nos enfants, par contre, ont pu acquérir une certaine instruction, mais, lorsqu'ils furent en âge de travailler, la plupart des emplois intéressants étaient déjà occupés. L'expansion économique était terminée et l'on assistait même déjà à une amorce de déclin de l'exploitation minière.

De 1976 à 1981, sur les 100 à 125 personnes de notre population active, le nombre de Montagnais qui travaillaient à l'exploitation minière est demeuré stable, soit 25 ou 26 personnes. En ce qui concerne les emplois dans les services, commerces et industries locales occupés par les Indiens, ils étaient pratiquement inexistants en dehors de la communauté indienne. La situation de l'emploi s'est détériorée considérablement: en 1981, il ne restait que 7 travailleurs montagnais à l'IOC. Enfin, pour les étudiants qui sortent du secondaire, le conseil de bande, les institutions de santé et d'enseignement demeurent jusqu'à présent les seuls débouchés.

Scolarisation. En 1981-1982, les jeunes à l'école représentaient 35% de la population montagnaise. Au cours des années qui viennent, ces jeunes entreront graduellement sur le marché du travail, venant sans doute grossir les rangs des assistés sociaux et chômeurs, à moins, bien sûr, que des changements importants ne se produisent dans l'économie régionale et que des programmes spéciaux ne soient mis en place pour que notre population active puisse occuper, contrairement à ce qui est prévu jusqu'à maintenant, la part d'emplois qui lui revient dans le secteur de l'exploitation des ressources et dans les secteurs secondaires et tertiaires.

Par ailleurs, n'ayant pu apprendre à l'école une langue d'enseignement étrangère en plus des autres matières enseignées, sans parler des modèles culturels différents, nos élèves ont pris du retard par rapport aux jeunes non-Indiens, ce qui a pour effet de freiner l'accès aux qualifications pour l'emploi.

Le système d'enseignement actuel auquel nos enfants doivent s'adapter ne tient pas réellement compte de leur spécificité linguistique et culturelle. C'est là, sans doute, la cause principale des problèmes scolaires que nos élèves ont connus jusqu'à présent. Si on examine le tableau de l'annexe 3, on constate que presque la moitié des élèves montagnais inscrits au secondaire en 1981-1982 étaient dans des classes dites spéciales, bilan peu enviable. Des changements profonds au système d'enseignement s'imposent donc si on veut que nos jeunes aient une certaine égalité de chances en instruction, éducation et emploi.

Impacts économiques de la communauté montagnaise sur Schefferville. En 1981, nous avons évalué la somme totale des montants perçus par notre communauté et par ceux qui nous fournissent des services (services sociaux, de la santé, éducation, services municipaux, etc.) à quelque 2 500 000 $.

Quelle que soit la provenance de ces fonds, ils sont en quasi-totalité dépensés ici même à Schefferville pour les divers services et biens de consommation. Il s'agit là d'un apport direct à l'économie locale, apport qui contribue par effet d'entraînement au maintien d'un grand nombre d'emplois et de services pour les résidents de Schefferville.

Perspectives d'avenir. L'emploi. Au plan démographique, nos projections révèlent que la population active montagnaise, aujourd'hui de 252, atteindra, en 1991, quelque 377 personnes. En dépit du fait qu'en 1981 un nombre restreint de Montagnais occupaient des emplois à temps plein et que des travaux saisonniers ont procuré de l'emploi à quelques autres, nous avons connu un taux de chômage se situant autour de 50%. À la suite de l'arrêt des opérations de la mine, ce taux dépassera probablement 75%. Cette situation de sous-emploi est d'ailleurs illustrée par le nombre de bénéficiaires d'aide sociale et par les montants versés, tel qu'indiqué dans l'annexe 5.

Le mode de vie. Nous avons été témoins, au cours des 30 dernières années, du développement rapide d'une ville minière avec toute sa gamme de services et d'entreprises qui prospéraient, alors que nous n'avions ni l'instruction ni la formation professionnelle requises pour y participer pleinement et en tirer profit.

D'autre part, nous n'avons jamais abandonné notre mode de vie traditionnel car il est pour nous, Montagnais, le fondement de notre culture. Il va sans dire que la situation économique actuelle dans la région nous incite à recourir encore davantage à la chasse, la trappe, la pêche, comme moyens de subsistance. Les recommandations et exigences que j'ai énumérées en conclusion de ce mémoire indiquent d'ailleurs clairement le sens de nos aspirations légitimes dans ce domaine.

La jeunesse. Au cours des dix dernières années, nous prévoyons que nos jeunes seront de plus en plus nombreux à terminer leurs études. Ils seront ainsi mieux préparés à occuper la place qui leur reviendrait sur le marché du travail. Mais trouveront-ils de l'emploi?

Les ressources naturelles. Il est certain que notre sol contient des ressources encore inexploitées et qu'il y aura reprise économique d'ici quelques années. Cependant, contrairement à ce qui est arrivé il y a 30 ans, nous entendons cette fois réclamer notre pleine participation à tout développement futur de nos ressources.

La ressource humaine. Certaines actions devront être prises pour assurer que les autochtones du territoire soient dès à présent considérés comme étant une ressource humaine importante pour le développement de la région. Alors, plutôt que de miser exclusivement, ou presque, sur une main- d'oeuvre importée et entretenue à grands frais, les gouvernements et le secteur privé auraient intérêt à investir dès maintenant dans une formation professionnelle et polyvalente de notre population active. À tout projet de cet ordre, nous sommes toujours prêts à collaborer.

La présence montagnaise. Notre communauté a souvent été perçue comme négligeable dans l'économie locale et régionale. Pourtant, elle constitue un marché essentiel de biens et de services et ce, tout particulièrement dans le contexte actuel lorsque nous permettons à plusieurs établissements et institutions de se maintenir. De plus, nous représentons encore le seul élément de stabilité dans la région et nous demeurons une ressource humaine importante pour tout développement futur.

La troisième partie, les recommandations. Considérations. Considérant que nous avons habité cette région depuis des temps immémoriaux, que nous vivons ici et que nous continuerons à y vivre; considérant que le mode de vie traditionnel est nécessaire à notre survivance, à notre cohésion sociale et à notre épanouissement culturel; considérant que nous entendons participer conjointement à tout développement futur dans le territoire; considérant que nous entendons être partie intégrante du processus décisionnel qui affectera directement et indirectement notre communauté et son environnement; enfin, considérant que le gouvernement provincial a déjà reconnu les droits aborigènes;

Nous exigeons que les services actuels d'aqueduc, égouts, routes, loisirs, santé, éducation, soient maintenus, de même que les moyens de communication, en particulier, le chemin de fer essentiel à notre approvisionnement de base; que le gouvernement provincial maintienne le statu quo en ce qui concerne les quotas de chasse et de pêche touristiques, ainsi que la réglementation afférente à ces activités de façon à conserver les ressources fauniques nécessaires à notre alimentation et à l'exercice de notre mode de vie traditionnel, et ce, jusqu'à ce qu'il y ait une entente à ce sujet entre le gouvernement et la partie indienne; que soit confiée aux Montagnais l'élaboration d'un plan de gestion et d'exploitation de la faune, incluant la création de pourvoiries, de tanneries, la transformation et la commercialisation, les services de guides touristiques, etc.; que soit fournie aux Montagnais une information précise sur chaque projet éventuel d'aménagement et d'exploitation du territoire; enfin, que leur soient garantis une large participation, un droit de regard et un pouvoir décisionnel dans tous les projets de développement effectués sur le territoire.

Je voudrais demander au président de la commission de donner la parole à notre

président du Conseil attikamèque.

Le Président (M. Bordeleau): Oui. M. Simon.

M. Simon (René): Je vais essayer d'être bref. Je sais qu'il y a plusieurs autres mémoires qui vont être présentés à cette commission. Au tout début de l'exposé de M. McKenzie, chef de bande de Schefferville, il y a un point qui a été soulevé en ce qui a trait aux négociations que notre organisation, le Conseil attikamèque-montagnais, doit entreprendre avec les deux paliers de gouvernement, c'est-à-dire le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. (13 h 45)

Nous avons déjà eu l'occasion, du moins à deux reprises, lors de commissions parlementaires, de soulever ces points, notamment, au niveau de la Loi sur la conservation de la faune. Je pense qu'il y a eu une autre commission sur la question énergétique. Nous avons eu l'occasion de soulever certains faits. J'aimerais vous exposer certaines réalités qui, je pense, seront beaucoup plus au profit de l'Opposition, certaines réalités lorsqu'on parle de négociations qu'on doit entreprendre avec le gouvernement provincial.

Je pense qu'en tant qu'organisation indienne, cela fait au-delà de dix ans qu'on essaie d'entreprendre de vraies négociations avec le gouvernement provincial et avec le gouvernement fédéral. Maintenant, depuis 1979, nous avons eu la confirmation que le gouvernement fédéral acceptait le mémoire qu'on lui avait déposé pour fins de négociations avec le gouvernement provincial. Cela fera quatre ans cette année. Il n'y a pas eu réellement un vrai processus de négociation. Il y a certains points qu'on a essayé de soulever, il y a certains éléments qu'on a essayé de clarifier avec le gouvernement provincial. Je vais vous donner quelques exemples. Je sais que, à cette commission parlementaire, on parle de maintenir la ville de Schefferville sous prétexte qu'il y a des citoyens qui veulent y rester. D'un autre côté, on dit: II faudrait maintenir la ville de Schefferville sous prétexte qu'il y a des Indiens. Il y a les Naskapis et les Montagnais. Avant l'ouverture de la ville de Schefferville, il y a toujours eu des Montagnais, il y a toujours eu des Naskapis dans ce territoire. Cela, je pense que c'est un élément assez important pour nous autres, de façon à ne cautionner aucune recommandation dans ce sens. Je pense que les Indiens veulent rester dans ce territoire, que c'est la position des Montagnais et celle des Naskapis.

Quand on parle de négociations à entreprendre avec le gouvernement du Québec, je sais que la plupart... J'ai essayé de lire de long en large les principaux mémoires qui sont présentés ici et surtout les recommandations. Si ma mémoire est fidèle, il y a un an ou deux, il y a eu une série d'articles de la part des mass media, surtout des chroniqueurs de chasse et de pêche, où on accusait les Indiens, surtout le peuple montagnais, d'être des éléments destructeurs de la nature, d'être des exterminateurs de troupeaux de caribous. Maintenant, on parle, dans les principales recommandations, de libéraliser cette chasse, de commercialiser le caribou. À ce sujet, il y a un élément qui est incompréhensible. Il y a deux ans, on nous accusait d'exterminer les troupeaux de caribous; maintenant, on veut commercialiser le caribou. Je pense qu'il y a un éclaircissement qui doit être fait de ce côté, si on parle uniquement de la chasse au caribou.

Quand on parle de la situation indienne, surtout en matière de revendications, les principales recommandations que le conseil de bande a émises, on les a faites en tant qu'organisation indienne, parce que cela rejoint les idées, cela rejoint aussi les principes directeurs qu'on veut véhiculer lors des négociations qui, soit dit en passant, débuteront le mois prochain. Si on se réfère aux principales politiques des différents gouvernements qui ont gouverné ce pays, ce Québec, on peut se remémorer certains projets, des grands projets, qui ont eu des effets assez néfastes sur le mode de vie des Indiens. On peut se remémorer Hydro-Québec qui a développé des barrages sur la Manic, l'Outarde et la Bersimis. Quand on parle de ces barrages, encore là, je sais qu'il y a eu des articles de journaux qui ont paru où on accusait les Indiens de Bersimis d'exterminer le saumon. Si les parlementaires connaissent leur géographie, la rivière Bersimis, ils savent que le barrage de la rivière Bersimis est situé à 45 milles de l'embouchure. Or les Indiens demeurent à l'embouchure de la rivière. Encore là, on a accusé les Indiens d'être le groupe exterminateur du saumon.

Toujours dans le même cadre, quand on parle de négociation, il y a quelque deux ans, on a essayé d'amorcer un processus de négociation qui, à nos yeux, était très sincère, dans le but de régler le conflit des rivières à saumon. Au sujet de ces négociations, on peut se remémorer deux faits. Le gouvernement s'est toujours dit prêt à écouter les Indiens, prêt à leur accorder les droits qui leur revenaient, à faire des concessions, à les compenser pour les accrocs passés, pour toute forme de destruction, que ce soit en matière territoriale ou au niveau de la faune. J'ai soulevé la question des rivières à saumon. Je vais vous remémorer un fait qui semble à mes yeux être assez important quand on parle de négociations avec le gouvernement provincial.

Il y a une réserve indienne de la Basse-Côte-Nord qui s'appelle la Romaine, où il y

a quelque 600 personnes indiennes montagnaises. Il y a deux ans, comme je le disais, on a essayé d'amorcer un processus de négociation, de règlement sur cette rivière. Sur cette même rivière, il y a six actionnaires américains qui détiennent tous les droits. On n'a jamais donné l'occasion aux Indiens de pêcher le saumon, sinon que les Indiens pêchent de façon illégale, et ce, depuis 1800, 1900... C'est une rivière assez... Lorsqu'on a amorcé le processus de négociation pour essayer d'en arriver à une entente avec le gouvernement provincial, on a dit aux Indiens: Vous avez tant de pieds de la rive pour pêcher, pour mettre vos filets. On a dit aux Indiens: Vous avez des quotas à respecter, des journées de pêche à respecter. Vous allez rendre compte aux gardes-chasse, aux gardes-pêche du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de toutes les prises que vous ferez.

Ce qui est important là-dedans, c'est qu'on a dit aux Indiens: Vous prendrez X saumons selon la prise que feront les sept actionnaires du club. Si les sept actionnaires prennent 120 saumons, les Indiens auront le droit de prendre 120 saumons. Encore là, c'est un fait inexplicable si on fait le rapport: sept actionnaires pour 120 saumons, puis sept actionnaires pour une population de 600 personnes qui essaie de maintenir un mode de vie traditionnel, qui essaie, disons, de garder cette pêche de subsistance pour une réserve indienne.

L'autre fait est au niveau des rivières à saumon, je pense que cela a fait passablement la manchette des journaux. Il y a un an et demi à peu près, on a essayé, encore là, d'entreprendre un vrai processus de négociation avec le gouvernement provincial. Cela concerne la rivière Mingan. Sur la rivière Mingan, il y a un propriétaire américain qui détient un droit foncier, un droit sur le fond de la rivière ou une certaine partie du territoire. On a essayé de faire une démonstration en tant que groupe montagnais avec les douze réserves qu'on regroupait à ce moment-là. Au lieu d'essayer d'en arriver à une entente, M. Lessard, qui était ministre à ce moment-là, nous a envoyé le groupe de la Sûreté du Québec avec deux hélicoptères pour justement effectuer l'opération. Il nous a aussi envoyé l'escouade antiémeute de la Sûreté du Québec pour justement dire aux Indiens: Allez-vous-en de cette rivière, vous n'avez pas le droit de pêcher. Laissez donc l'Américain, qui est seul propriétaire de cette rivière, pêcher le saumon à sa guise. Ça, c'est un fait.

Il y a d'autres faits que je pourrais énumérer, toujours, disons, dans le cadre de la négociation qu'on veut entreprendre avec le gouvernement du Québec. C'est pour cela que, pour nous autres, c'est très important lorsqu'on dit qu'on veut négocier avec le gouvernement du Québec. Je sais qu'hier on a soulevé plusieurs points, plusieurs bons éléments. On a parlé d'équité. On a parlé de civiliser les relations. On a parlé d'harmoniser les relations humaines. Je pense que ce sont des mots qui reviennent de façon assez régulière lors des rencontres avec le gouvernement. On dit: Bon, vous êtes un peuple différent, vous avez droit à la différence en tant que groupe autochtone, vous avez aussi certains droits sur le territoire en tant que premiers occupants.

Dans le cadre justement de cette commission parlementaire, je pense que le groupe montagnais, et encore là je pense que cela va être probablement au profit de l'Opposition, n'a jamais signé d'entente officielle. Donc, on ne demande pas à la commission de respecter une convention. On est en voie de s'embarquer dans un processus pour en arriver justement à une entente. Mais j'aimerais, en tant que représentant de ce groupe des Attikamèques-Montagnais, soulever un autre point qui va expliquer un peu la phobie que l'on a de cette commission quant aux orientations qui vont être prises, quant aux politiques qui vont être mises en place.

Il y a quelques années, on a parlé de la démocratisation du territoire québécois. On n'a pas tenu compte de la présence indienne dans le territoire québécois. On a ouvert des ZEC, des zones d'exploitation contrôlée, sans tenir compte du fait que les Indiens pratiquaient leur mode de vie traditionnel. Et pour comble, on a exigé des Indiens de payer des droits de passage afférents aux ZEC. Et pour comble, à l'heure actuelle, je pense qu'il y a au-delà de trois cents causes indiennes devant les cours qui attendent de passer, pour diverses raisons, en matière de chasse et de pêche. Je pense qu'à ce point de vue, pour nous, c'est pas mal important. On est prêt, en tant que groupe, à entreprendre un processus de négociation avec le gouvernement provincial, c'est-à-dire avec le gouvernement en place. Mais, une question est importante pour nous, dans les diverses recommandations, comme je le disais tout à l'heure. Qu'est-ce qui va ressortir? Quelle politique le gouvernement du Québec va-t-il mettre en place pour maintenir soi-disant la ville de Schefferville?

Nous n'avons rien contre le maintien d'une ville comme Schefferville. Mais ce qui nous fait peur, ce qui nous effraie un peu, c'est qu'on est en voie de s'embarquer dans un processus et qu'on parle dans les recommandations de libéraliser la chasse au caribou, d'ouvrir des pourvoiries. Ce sont là les deux principaux points qui, à mon avis, bloquent dans un certain sens la négociation qu'on veut entreprendre avec le gouvernement du Québec. Parce qu'il n'y a aucun règlement actuellement là-dessus. Il n'y a aucune entente qui est stipulée entre

la partie indienne et le gouvernement provincial.

Ce sont des points que je voulais soulever pour justement donner aux parlementaires l'idée qu'on a, comment on perçoit une commission parlementaire. Personnellement, je participe à la quatrième commission parlementaire, et on n'a jamais tenu compte de la présence indienne. On n'a jamais tenu compte de ce que les Indiens voulaient réellement. On nous a toujours dit: Le développement du Québec va se faire selon la majorité. Vous autres, Indiens, peut-être qu'on peut vous écouter. Peut-être qu'on peut vous donner certains projets. Peut-être que vous pouvez participer à l'élaboration de certaines orientations, certaines politiques, en tant que groupe autochtone, mais pas plus. Pour nous, je pense que c'est cautionner d'une façon morale le parti qui est au pouvoir. Il n'y a pas réellement de négociation. Je pense qu'hier, quand la compagnie Iron Ore a passé et les métallos, ce matin, on a surtout parlé de négociation des conditions de travail. Mais pour nous, Indiens, ce n'est pas une négociation des conditions de travail, c'est une négociation de nos vies présentes et c'est une négociation de celles des enfants qui vont venir, de notre avenir. C'est un élément assez important. On se dit deux peuples fondateurs au Québec. Nous, on se dit qu'en tant qu'Indiens, sommes le premier peuple. Avant que Schefferville naisse, il y avait des Indiens ici. Et c'est un peu dans ce cadre que je voulais faire mon intervention, non pas pour dire que je suis contre toute recommandation, mais je pense qu'on est placés dans une situation très délicate en tant que Montagnais, surtout pour le développement du Nord, surtout pour l'application des politiques de la part du gouvernement provincial. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Simon. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. (14 heures)

M. Chevrette: M. le Président, je remercie tout d'abord les deux intervenants. Je voudrais me permettre de situer certains points de l'intervention, tout d'abord, de M. Simon; ensuite, je passerai à des questions spécifiques à M. McKenzie. Tout d'abord, M. Simon, quand vous parlez de la détérioration du troupeau de caribous pour les Montagnais, je suppose que vous ne parlez pas du tout du troupeau de la rivière George, mais bien de celui de la Basse-Côte-Nord. Est-ce qu'on se comprend bien là-dessus?

M. Simon: Quand on parle de troupeaux de caribous, on ne parle pas du territoire de la Basse-Côte-Nord ou du territoire de Schefferville, cela englobe le territoire indien.

M. Chevrette: Les événements que vous soulignez, ce n'est pas dans la région ici, mais bien dans la Basse-Côte-Nord.

M. Simon: Pour votre information personnelle, je sais que, lorsque vous parlez d'un troupeau de caribous, je sais qu'il y a eu un massacre de caribous qui s'élevait à trente ou quarante têtes de caribous à la Basse-Côte-Nord. Le chef de la Romaine était au courant de la situation. On a avisé le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour justement envoyer des gardes-chasse, parce que ce n'étaient pas des Indiens qui avaient fait le massacre. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous a dit: On n'a pas d'argent, on ne peut pas y aller. Deux semaines après, il y avait un autre groupe indien qui descendait par le train. C'étaient des Indiens de Sept-Îles qui ramenaient, justement, des troupeaux de caribous. Là, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est intervenu en disant: Vous n'avez pas le droit de tuer des caribous. Ces gens les attendaient à la sortie du train à Sept-Îles.

M. Chevrette: Ce que je voulais préciser, c'est que ce n'était pas dans la région ici. Est-ce que c'est bien cela?

M. Simon: Je vous demande pardon.

M. Chevrette: L'événement auquel vous avez fait allusion s'était déroulé dans la Basse-Côte-Nord.

M. Simon: Non. Il y a eu un massacre dans la Basse-Côte-Nord. Il y a eu d'autres massacres dans d'autres régions aussi. J'englobe le territoire au complet.

M. Chevrette: Je pense que vous faites allusion beaucoup plus à certains contenus de journaux qu'à certaines déclarations ministérielles ou gouvernementales, si je me fie à ce que vous m'avez dit? Ceci dit. M. Simon, vous dites que les rencontres sont difficiles, qu'il n'y a pas de négociation, qu'il n'y a pas de rencontre. J'aimerais vous rappeler ceci: Le 13 septembre dernier - je pense que vous l'avez reçue le 30 - nous vous écrivions, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, une lettre dans laquelle nous disions être prêts à parler de la rivière des Escoumins, de la rivière Natashquan, de la rivière la Romaine et de la rivière Saint-Augustin et on vous disait un peu comment on voulait amorcer certains programmes. Enfin, on concluait en disant ceci: II semble donc impérieux que nous nous rencontrions pour établir un plan de travail et un mécanisme de fonctionnement dans le but de donner suite aux activités précitées.

Je tiens à vous souligner que toute démarche ou conclusion issue de ces discussions sera sans préjudice à toute négociation future de quelque nature que ce soit, parce qu'on ne veut pas non plus se substituer au SAGMAI qui a la responsabilité des négociations. Mais en tant que ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, nous étions prêts à établir avec vous un certain cadre dans lequel on pourrait fonctionner. D'ailleurs, depuis mon arrivée au ministère, j'ai fait cette démarche avec le chef Jacques, de Restigouche, où je l'ai rencontré personnellement et j'ai établi un cadre pour permettre une négociation plus ordonnée, plus structurée et qui corresponde aux visées autant du ministre que du chef. De sorte que c'est un peu la même procédure qu'on vous offrait.

Par la suite, j'ai demandé à mes fonctionnaires d'entrer en communication avec vous à plusieurs reprises.

Malheureusement, il n'y a pas eu d'échange téléphonique par la suite. Je vais vous réitérer mon invitation. Dès que vous serez disponible pour établir un cadre, je le serai. Je suis prêt à vous rencontrer personnellement. En ce qui concerne mes responsabilités, je ne peux pas me substituer à d'autres ministères ou à d'autres organismes, mais en ce qui concerne le cadre de mes juridictions, je suis prêt à vous rencontrer personnellement, établir les cadres dans lesquels mes fonctionnaires ou vos représentants ou vous-même, comme vous voudrez, pourront oeuvrer d'une façon efficace et rapide.

M. Simon: Merci de l'invitation, monsieur. J'aimerais clarifier une situation. Quand on parle de négociation globale d'une façon très générale, je sais que SAGMAI a reçu le mandat de négocier avec notre groupe. Maintenant, je sais que dans les négociations passées, notamment avec votre prédécesseur M. Lessard, on a débuté les négociations avec SAGMAI, cela allait bon train, jusqu'au jour où le ministre Lessard est intervenu dans le portrait en disant: C'est moi qui suis responsable du dossier. Vous, représentants de SAGMAI, prenez vos places ailleurs, c'est moi qui négocie. C'est là que les négociations ont achoppé. C'est pour cela que, quand on parle de négociation globale, on a toujours essayé de clarifier cette situation: Avec qui négocie-t-on? C'est le SAGMAI qui a le mandat de négocier avec notre groupe, on est parfaitement d'accord là-dessus. Maintenant, la façon dont on envisage les négociations pour notre groupe est d'une façon très générale, c'est-à-dire qu'on ne veut pas s'embarquer dans le processus dit sectoriel, c'est-à-dire prendre ministère par ministère. Peut-être que, de la façon dont vous nous parlez, il y a certaines choses qui peuvent se régler entre temps sans porter préjudice à une entente ultérieure, à une entente finale. Je suis parfaitement d'accord dans ce sens.

M. Chevrette: C'est exactement dans ce sens que je vous lance l'invitation, parce qu'il m'apparaît qu'on est capable d'établir des modus vivendi, des façons de vivre en attendant le fruit de vos négociations dont je ne suis pas responsable. Vous le savez comme moi. Moi, je veux demeurer à l'intérieur de mes juridictions, mais je suis prêt, avec vous, à faire des aménagements, des modes de gestion à court terme. On peut discuter d'homme à homme, je pense, et fixer un cadre, des délais et un échancier à part de cela. Je peux vous donner un exemple de ce que j'ai fait avec M. Jacques: On a signé un échéancier jusqu'au 31 mars. Si nos fonctionnaires et leurs représentants ne se sont pas entendus, M. Jacques et moi-même nous rencontrerons à nouveau pour regarder ce qu'il y a à faire et où sont les points d'accrochage. Je pense que, de part et d'autre, on peut s'entendre si on agit de cette façon. Je vous offre cette occasion. C'est à vous d'en juger, bien sûr, mais je suis toujours disponible et quand bon vous semblera de me contacter - je vais vous laisser toutes mes adresses et mes numéros de téléphone - cela me fera plaisir de vous recevoir.

Maintenant, quant au mémoire des Montagnais de Schefferville, je voudrais faire quelques remarques et vous poser une couple de questions. Je voudrais tout d'abord savoir si vous êtes conscients que nous avons un cheptel de caribous d'au-delà de 400 ODQ, que la régénération est à peu près de l'ordre de 13% par année, alors que les prises sont à peine de 2%? Tout au moins, selon nos spécialistes, on nous dit que de 35 000 à 50 000 prises ne présenteraient pas de danger pour le troupeau lui-même. Est-ce que vous partagez ces avancées? Dans un premier temps, je vous pose la question suivante: Est-ce que vous partagez ces avancées que nous faisons au ministère?

Le Président (M. Bordeleau): M.

McKenzie.

M. McKenzie: Je pense que je peux donner une réponse comme ceci: Vous avez des spécialistes. Les biologistes disent: D'accord, c'est dangereux dans le moment. Mais quant à dire que nous partageons ce qu'ils disent, ce qu'on demande depuis toujours, c'est qu'on soit impliqués dans tout cela. Depuis toujours, on demande d'être impliqués au point de vue discussion, décision, avec les gouvernements. Depuis toujours, on fait des demandes là-dessus. On demande à être présents à la table de discussion pour savoir exactement de quelle façon on doit prendre une position. C'est tout ce que je peux vous répondre.

M. Chevrette: Vous êtes en faveur de la "commercialisation" du caribou?

M. McKenzie: Je n'ai pas dit que j'étais en faveur de la commercialisation du caribou. Quand j'ai parlé de commercialisation, de transformation dans le mémoire, j'ai bien spécifié qu'il s'agissait d'une tannerie. Je n'ai pas parlé de commercialiser le caribou.

M. Chevrette: J'interprétais que vous ouvriez la porte, dans votre mémoire, à une certaine forme de commercialisation, pour autant que vous étiez impliqués dans le mode de gestion. J'avais compris - je vais reprendre - dans votre mémoire que vous étiez ouverts à une forme de commercialisation, pour autant que vous soyiez directement impliqués dans la gestion.

M. Simon: Je pense que ce qui est important dans le mémoire du conseil de bande de Schefferville, c'est que quand on parlait d'une tannerie, avec la fermeture de la ville de Schefferville, les Indiens n'ont aucun moyen, à l'heure actuelle, d'avoir des revenus, sinon par l'assistance sociale. Pour combler cette assistance sociale, je pense que les Indiens aussi ont droit, et c'est tout à fait naturel de leur part, de prendre une partie de leur subsistance dans leur territoire. Et je pense qu'avec la fermeture de la ville de Schefferville, quand on parlait d'une tannerie, je pense que pour nous, Indiens, on n'a jamais profité de la chasse au caribou, c'est-à-dire de la part des revenus que les Indiens pouvaient en retirer. Actuellement, qu'est-ce qu'on fait des peaux de caribou, avec la chasse qui se fait à l'heure actuelle? Qu'est-ce qu'on fait des bois de caribou?

Il y a une section chez les Indiens qui, je pense, apporte un revenu assez substantiel, et qui est tout de même assez intéressante. C'est toute la question de l'artisanat. C'est un peu dans ce sens qu'à Schefferville, on parlait d'une tannerie. Mais je pense que Schefferville est contre la commercialisation du caribou. C'est un peu ce que je disais: avec la fermeture de la ville de Schefferville, les Montagnais n'ont pas d'autre choix que de retourner à leur mode de vie traditionnel.

M. Chevrette: Je voudrais vous rassurer sur un point et après cela vous posez une question additionnelle. Tout d'abord, vous faites allusion aux services d'éducation, de loisirs et de santé et M. le ministre d'État à l'Aménagement et au Développement régional a assuré la population autochtone tout autant que la population blanche, si elle décide de demeurer à Schefferville, des services de base tant sur le plan éducation, loisirs, sur le plan de la santé. Il n'est pas question d'éliminer cela. C'est un engagement ferme et on va maintenir et respecter nos engagements là-dessus.

Maintenant, vous faites allusion, dans votre mémoire, au besoin que vous avez de conserver les moyens de transport ferroviaire, puisque c'est une source d'alimentation pour vous, d'appro- visionnement. Vous faites également allusion au fait que vous avez des services existants tels que certains magasins, épiceries, etc. Je voudrais vous poser une question. Si un nombre X de non-Indiens demeurait - décidait de demeurer, parce que c'est une décision personnelle et individuelle - si un groupe de non-Indiens, dis-je, décidait de demeurer à Schefferville, ne croyez-vous pas qu'on doive exploiter l'une des richesses naturelles du milieu, une richesse qui est renouvelable, par exemple le caribou, pour lui permettre de subsister et de travailler? Et cette négociation-là ne pourrait-elle pas se faire conjointement entre les non-Indiens et les autochtones? Entre ceux qui décident de rester ici avec vos communautés réciproques, vos conseils réciproques, puisque vous affirmez, vous aussi, que vous avez besoin de conserver une structure de marchés, de restaurants, d'épiceries, etc.? Tout en désirant conserver vos droits culturels qui vous sont propres, je le reconnais, est-ce que vous reconnaissez, d'autre part, de votre côté, que ceux qui, depuis tout près de trente ans, sont venus s'établir ici - il y en a même un groupe qui a vu le jour ici - est-ce que vous leur reconnaissez une certaine forme de droit qui leur permettrait à eux aussi de décider de rester ici, d'y vivre et d'y gagner leur pain?

M. McKenzie: Je pense que nous, ce dont on a peur un peu, la raison pour laquelle on a demandé une non-commercialisation du caribou, c'est parce que la mine a marché pendant X années, pendant un certain temps et après c'est fini, tout le monde s'en va. Mais qui reste? Ce sont les Indiens qui vont rester majoritaires ici quand même sur le territoire. Après avoir commercialisé le caribou, une fois exterminé le caribou, qu'est-ce qui va rester pour nous après? C'est là qu'on peut faire une étude déjà et dire: d'accord, étant donné que nous, on va demeurer dans le territoire, la mine c'est fini, tout le monde s'en va et nous n'avons pas le choix d'aller ailleurs. Il faut rester ici pour encore bien des années. Nos enfants vont vivre ici. C'est pour cela qu'il nous faut faire attention... (14 h 15)

M. Chevrette: ...dans votre sens, M. McKenzie, qu'on ne doit pas d'aucune façon, même si un jour on devait accepter la commercialisation, il ne faudrait surtout pas permettre la commercialisation "at large" qui aurait pour conséquences précisément

l'extermination du troupeau. Je pense qu'il faudrait être assez brillant et travailler tout le monde ensemble pour fixer des quotas maximums qui ne devraient absolument pas être dépassés. Je pense que cela va de soi et je peux vous assurer que si on allait dans ce sens-là, jamais on n'accepterait une commercialisation "at large", sans fixer des normes. Si on n'en fixait pas cela mettrait en péril la survie même du troupeau et à ce moment-là, je vous donnerais totalement raison.

Je vais poser une dernière question.

M. McKenzie: Je voudrais faire une remarque avant que vous me posiez une autre question. Il y a des réserves sur la Basse Côte-Nord et d'autres réserves comme la rivière Bersinis. Ils n'ont pas gardé le saumon quand ils ont fait le barrage. Après avoir fait le barrage, c'était fini le saumon. Ils n'ont pas pensé que les Indiens étaient là. lis n'ont pas pensé à faire un barrage pour que le saumon passe pareil. Des fois on dit... C'est la majorité toujours qui l'emporte.

M. Chevrette: Est-ce que vous seriez d'accord pour vous asseoir avec les Naskapis et les non-Indiens pour discuter des éventuels modes de gestion advenant la commercialisation?

M. McKenzie: Nous sommes toujours prêts à discuter avec tout le monde. C'est toujours très difficile, dès le départ, de s'accorder à cause du principe... Les gouvernements ont déjà fait... Un peu comme René Simon, le président du Conseil le dit, cela fait longtemps qu'on essaie de discuter. Etant donné qu'on met toujours des points, ils ne veulent plus discuter dans le sens qu'on veut discuter. Si tout le monde veut discuter à une même table et discuter pour vrai, nous sommes prêts à discuter.

M. Simon: J'aurais un point à ajouter à ce que le chef vient de dire. Je pense qu'on n'a jamais été en désaccord pour toute participation conjointe, de quelque forme que ce soit et surtout à la ville de Schefferville, quand vous parlez des soi-disant autochtones, les gens qui sont nés ici. Je pense qu'il est parfaitement raisonnable d'emboîter le pas dans ce sens-là pour que les gens, comme vous le dites, prennent une décision très personnelle de rester à Schefferville. Je pense qu'un autre élément, ce que M. McKenzie vient de dire, est qu'une fois que la mine est fermée, il y a deux groupes qui restent de façon prioritaire et ce sont les Indiens. Pour ajouter à ce que M. McKenzie disait, ce dont on a peur dans tout cela, c'est qu'il n'y ait aucune part de consultation auprès des Indiens. On essaie de maintenir une ville, comme je le disais dans l'exposé que j'ai fait, mais à qui donnera-t- on la priorité? Aux Indiens ou aux non-Indiens? On est prêt à participer, à travailler de façon conjointe.

Il y a aussi un autre élément fondamental pour nous. On n'a jamais signé d'entente, contrairement à nos frères Naskapis. Eux se sont fait reconnaître certains droits par la Convention du Nord-Est. On essaie d'entreprendre un tel processus. Il y a peut-être un danger pour nous d'amorcer ou d'essayer de cautionner toute forme de politique à venir.

M. Chevrette: Je remarque dans vos propos - pour autant qu'il y ait une consultation valable et que cela se fasse conjointement, tout le monde à une même table - que l'idée n'est pas rejetée d'une façon catégorique. Je vous ferai remarquer que l'avantage d'une telle approche, si on devait la discuter tout le monde ensemble -et je pense que cela doit se faire de cette façon - c'est la retombée économique du milieu. On évalue à près de 15 000 000 $ annuellement la retombée économique possible pour le milieu de Schefferville, compte tenu du potentiel du cheptel que nous avons. Il nous apparaît drôlement important qu'on puisse discuter et je pense que vous avez raison de souligner que cela ne peut pas se faire unilatéralement. Je pense qu'il faut respecter chacune des communautés, mais comme ces trois communautés vivent sur un même territoire -on verra combien prendront la décision de rester; à ce moment-ci on ne peut même pas envisager quel sera le nombre de non-Indiens qui décideront de se prévaloir de leur droit de demeurer à Schefferville - cela devrait se faire conjointement, je suis d'accord avec vous, quant aux trois groupes bien identifiés. À ce moment-là, on pourrait peut-être vous donner les instruments et les outils vous permettant d'entreprendre une discussion avec toutes les données essentielles pour en arriver à une entente avec les trois groupes.

M. Simon: Je vais ajouter un élément qui me semble assez important lorsqu'on parle de consultation conjointe avec différents intervenants dans un dossier quelconque. Je vais vous présenter le cas -disons la réalité - de la route de la rivière La Croche, à la hauteur de La Tuque. Une route avait été planifiée, une route soi-disant forestière. Ce que les Attikamègues ont fait, c'est de l'opposition au gouvernement en disant: II n'y a aucune consultation au préalable de faite avec la partie indienne. Il y a eu une soi-disant consultation. C'est dans ce sens-là que j'abonde quand on parle d'une crainte à l'endroit des politiques du gouvernement du Québec. Il y a eu une consultation. Il y a différents intervenants, notamment le ministère de l'Énergie et des Ressources, secteurs des forêts et des mines,

la compagnie en question, la CIP, et la partie indienne. Ce que les Indiens rejetaient, c'était justement qu'une route soit construite sans leur participation, sans leur accord préalable. On a dit aux Indiens: D'accord, on va vous consulter. Quelle est la forme d'entente que vous voulez? Qu'est-ce que vous voulez dans cette route?

Cela rejoint aussi l'idée qu'on vient de soulever. Lorsqu'on ouvre une route - je pense que les Montagnais en ont l'expérience - soi-disant forestière, il y a un apport économique assez important pour la région; il y a des emplois qui sont créés, mais ce qui reste aux Indiens, c'est nul. La plupart des coupes sont des coupes à blanc. En plus de cela, il n'y a pas de gibier et, pour comble de tout cela, on dit aux Indiens: Vous n'occupez pas vos territoires, donc, le gouvernement va les récupérer. Qu'est-ce que les Indiens pourraient faire dans un territoire qui est complètement dévasté quant aux activités de chasse et de pêche?

C'est un peu dans ce sens-là que j'abonde quand je dis qu'on a une certaine crainte de voir une politique gouvernementale s'établir à Schefferville sans tenir compte de la présence indienne et sans pour autant dire: Le gouvernement est prêt à consulter de façon sérieuse, de façon équitable, la partie indienne. Ce dont on a peur, c'est qu'on établisse une politique en disant aux Indiens: On a consulté les Indiens, seulement - comme je le disais au début - pour cautionner le gouvernement en place. Ce n'est pas cela qu'on veut.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Simon: Lorsqu'on parle de territoire, lorsqu'on parle de faune on demande qu'on essaie de considérer, d'une façon prioritaire, l'approche indienne.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Chevrette: Je voudrais purement et simplement vous dire ceci. Compte tenu des décisions éventuelles qui seront prises ou à prendre, je vous certifie que je tiendrai compte de vos remarques. Je peux vous donner l'assurance d'une consultation véritable. Je peux même prendre l'engagement de rencontrer personnellement les chefs des deux groupes autochtones ici, d'établir les cadres des discussions et d'assurer que vous soyez véritablement consultés. J'en prends l'engagement public.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, il semble que ça prenne toujours une crise ou une quasi-crise, à la suite d'événements qui sont provoqués par les non-Indiens, pour qu'on puisse discuter ou parler des droits des Indiens. Ce n'est que dans ce contexte-là qu'on semble s'en occuper. En 1973, c'était le projet de la baie James. Là, on s'est occupé des Cris et des Inuits de la baie James. L'année dernière, c'était le problème des Micmacs avec le général Custer Lessard, et là on a essayé de régler ce problème spécifique. Aujourd'hui, on a la fermeture de la mine IOC. Là, on invite les Montagnais à venir nous présenter un mémoire. Vous savez, je ne doute pas de la bonne foi du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, mais le mémoire qui nous a été présenté souligne les problèmes des autochtones à tous les niveaux: l'emploi, le système d'éducation, les problèmes d'ordre culturel. Dans le passé, et on semble répéter les mêmes erreurs, les communautés ont été mises de côté. De temps en temps, il fallait régler certains problèmes à notre façon, on l'a fait. Mais aujourd'hui, je pense, on se rend compte que nous avons le devoir de répondre à leur appel pour arrêter de perpétuer les mêmes problèmes que par le passé. Il faut tenir compte de leurs besoins, non seulement de ce dont nous avons besoin nous. Cela prendrait peut-être un changement d'attitude, un changement de mentalité pour enlever les préjugés que nous avons tous.

C'est un problème d'ordre culturel. Je ne fais pas une critique personnelle, vous êtes de bonne foi, vous voulez entamer des négociations. Quand vous parlez des troupeaux de caribous, des retombées économiques, la question que peut-être un Indien pourrait vous poser est la suivante: est-ce que pour des raisons de retombées économiques, vous abandonneriez votre langue, vous abandonneriez vos droits culturels? Vous ne le feriez pas. On connaît les problèmes qu'on a eus au Québec pour ces raisons. Ce sont les mêmes problèmes que les Indiens ont. Vous ne pouvez pas essayer de régler le problème du caribou à la pièce. On va essayer de régler le problème de la pêche. C'est un problème global. C'est une entente globale. Il faut que vous compreniez le message que ces gens sont venus vous donner aujourd'hui. Certainement il y a des problèmes spécifiques: les services de santé, les services sanitaires, les maisons et tout le reste.

Cela, c'est à la pièce. Si vous voulez vraiment - je ne doute pas de votre bonne foi - faire avancer le dossier de la justice pour les Indiens, vraiment essayez de commencer à résoudre un peu leurs problèmes parce que si vous commencez à résoudre leurs problèmes, vous allez résoudre nos problèmes aussi. Je pense qu'il va falloir que vous changiez votre approche des négociations. Quand j'ai lu dans le mémoire des autochtones, des Montagnais, qu'il y avait des négociations, j'étais un peu surpris.

Je m'en réjouissais parce que je me disais: finalement quelque chose arrive. Mais je vois que cela ne procède pas de la bonne façon et c'est un manque d'approche. Ce n'est pas une négociation sur les caribous, la chasse et la pêche, mais cela va prendre un mandat du premier ministre, qui va mandater une ou des personnes dûment qualifiées qui comprennent le milieu des Amérindiens, qui ont une sympathie, une compréhension de ce qui se passe. Et ce groupe, il va falloir qu'il négocie globalement.

Il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs. Vous dites que vous avez des troupeaux de caribous. Ce n'est pas là que vous allez arriver à une solution parce qu'ils n'ont pas de protection. C'est bien beau, aujourd'hui, quand vous dites que vous faites des représentations et qu'on va prendre des décisions ensemble. Cela fait, savez-vous, des centaines d'années qu'ils se font dire cela. On a même une entente de la Baie-James et ils ont des problèmes et l'entente est signée. Imaginez-vous que si les Montagnais n'ont pas d'entente, ils ne faisaient pas partie de l'entente de la Baie-James, aujourd'hui on essaie de leur dire: Écoutez, fiez-vous, on va prendre des décisions ensemble... Ne les blâmez pas s'ils sont un peu sceptiques et doutent un peu de nos paroles et de nos représentations. La suggestion que je pourrais faire...

M. Chevrette: M. le député... M. Ciaccia: Oui.

M. Chevrette: Est-ce que vous étiez à l'origine de la Convention de la Baie-James? M. Simon au début de son exposé a dit qu'il y a des problèmes avec les gouvernements depuis une dizaine d'années. Vous avez siégé de l'autre côté de la Chambre à ce moment. J'aimerais savoir quels sont les motifs et raisons pour lesquels ils n'ont pas été inclus dans la convention de la Baie-James qui leur reconnaît des droits. (14 h 30)

M. Ciaccia: Je crois qu'ils n'étaient pas inclus dans l'entente...

Une voix: Ah bon!

M. Ciaccia: ...du territoire de la Baie-James. D'après les représentations qui avaient été faites au gouvernement, c'étaient les Cris et les Inuits qui avaient pris des procédures contre le gouvernement et les négociations ont été faites avec les Cris et les Inuits. Maintenant, il ne faudrait pas se limiter strictement au point juridique, sur une base juridique; c'est une autre erreur que le gouvernement a tendance à faire. Si vous vous situez strictement sur une base juridique, vous pourrez discuter, d'ici à l'an 2000, à savoir qui a des droits, qui n'en a pas, qui a des obligations, qui n'en a pas. Comprenez que ces gens étaient ici longtemps avant nous; ils ont des problèmes aujourd'hui et essayez de les régler de cette façon.

Prenons certains aspects. Quand M. Simon a parlé, c'était vraiment un cri du coeur, si vous avez écouté les représentations qu'il vous a faites. Il vous a donné une description des problèmes qu'ils vivent, qu'ils ont vécus et ils ne voient pas de fin à ces problèmes. Ce n'est pas une question d'une retombée économique; ils vous l'ont dit. C'est une question de survie pour eux, de survie de leur mode de vie, de leur mode de pensée, de leurs traditions et de leurs moeurs. Alors, la meilleure chose que le gouvernement pourrait faire, ce serait d'obtenir du premier ministre un mandat clair de vouloir vraiment négocier, s'asseoir, mais non pas négocier dans le sens d'un syndicat qui négocie avec le patronat, mais négocier dans le sens d'une volonté de résoudre les problèmes et de comprendre ce que ces gens sont venus vous dire aujourd'hui.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va?

M. Ciaccia: Oui. J'aurais pu poser plusieurs questions relativement à votre mémoire, mais je pense que ce seraient des détails. La meilleure chose qui pourrait arriver serait que le premier ministre mandate quelqu'un afin d'entreprendre de vraies négociations avec les Montagnais. Vous avez beaucoup de précédents. Quand les Montagnais disent: On veut participer. Vous avez un régime de chasse et de pêche à la Baie-James. Vous avez la participation des autochtones, ils siègent au comité conjoint; c'est administré par eux. C'est cela qu'ils veulent. Je pense que c'est un précédent dans le Canada, en Amérique du Nord. Cela fonctionne bien et cela a ramené l'entente de la Baie-James, avec tous les défauts qu'elle peut avoir et les réticences que certaines critiques ont exprimées. Cela a ramené la paix sociale parmi les bandes indiennes, parmi les Cris, parmi les Inuits. Cela leur a permis d'évoluer à leur façon et de faire eux-mêmes les choix avec certaines balises qui ont été négociées et qui sont entendues. Si vous prenez cette approche de bonne foi, je pense bien que vous pourrez non seulement régler les problèmes des Montagnais, mais vous aiderez aussi la population de Schefferville, parce que cela éliminera beaucoup de problèmes qui existent aujourd'hui entre ces différentes communautés.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Très brièvement parce que je ne veux pas sous-estimer l'appétit des membres de la commission. Dans le même ordre d'idées, j'avais l'intention d'aborder le sujet de la commercialisation du caribou. Maintenant, le ministre et mon collègue se sont expliqués quelque peu. Le gouvernement est certainement au courant de ce point sur le plan culturel. Je me reporte à une publication du ministère des Affaires culturelles du gouvernement du Québec. On y dit en toutes lettres, toujours relativement au caribou, qu'il est un des éléments principaux de leur subsistance et il devient opportun pour cette société de chasseurs -en parlant des Indiens - de connaître cet animal et d'élaborer des stratégies pour s'assurer de la continuité de cette ressource renouvelable. Le ministre nous a un peu rassurés tantôt en nous disant que rien ne se ferait, il en a pris l'engagement, avant qu'il s'assoie avec vous. Justement, on sera là pour le surveiller. Cette publication du gouvernement du Québec précise que le caribou est un élément essentiel à la vie des Montagnais. On parle de la Moyenne-Côte-Nord: Le caribou se fait très rare. Maintenant, le ministre, selon ses experts -je n'essaie pas d'infirmer des chiffres, mais selon vous - à mon point de vue, il n'y a pas de meilleur biologiste qu'un Indien - on parle de la Moyenne-Côte-Nord, mais pour la région, ici, est-ce qu'il n'y a absolument aucun danger en ouvrant toutes grandes les portes à la commercialisation, sous toute réserve d'un quota, d'une limitation? J'aimerais avoir votre point de vue là-dessus parce que, dans l'ensemble des mémoires, les propositions justement nous suggéraient la commercialisation du caribou comme une des solutions à la fermeture de la mine. Considérant toute l'importance du caribou pour le peuple montagnais, j'aimerais avoir votre son de cloche là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): M.

McKenzie.

M. McKenzie: Je ne suis pas un expert dans ce domaine, mais je discute quand même souvent avec mon comité de la chasse. Nous pensons que c'est quand même dangereux. De quelle façon? Cela dépendra toujours de la façon dont ce dossier sera étudié par le gouvernement, de la façon dont on procédera à la commercialisation. Au départ, nous pouvons dire que c'est dangereux pour l'extermination du caribou. Dans tout cela, quand même, on n'a jamais tenu compte de la présence indienne. En regardant les expériences passées au point de vue du saumon, comme je l'ai mentionné, pour nous, c'est dangereux parce qu'on sait d'avance que, si le gouvernement prend une position là-dessus, peut-être va-t-on dire, comme le premier ministre René Lévesque: II y a 6 000 000 de Québécois, il faut regarder les 6 000 000; nous sommes élus par les Québécois, il faut que les projets marchent.

Le Président (M. Bordeleau): Comme on a déjà un peu dépassé l'heure...

M. Dauphin: M. le Président, je m'excuse, mais je n'avais pas tout à fait fini.

Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse, M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Juste un dernier point qui...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, en vous demandant que ce soit la conclusion, très brièvement.

M. Dauphin: Très brièvement, en 30 secondes, un dernier point qui est également extrêmement important et qui me concerne, parce que je m'occupe de ces dossiers pour les jeunes et vous parlez beaucoup des jeunes dans votre mémoire.

Évidemment, la situation est catastrophique, dans l'ensemble du Québec, et elle s'accentue dans la région de Schef-ferville avec la fermeture de la mine. Mais, tantôt, il y a un groupe de jeunes qui vont présenter un mémoire à ce sujet et nous aurons l'occasion de commenter davantage ce sujet. Effectivement, les jeunes Montagnais, ce sont des Québécois et, s'il y a éventuellement des projets à mettre en place dans la région, les Montagnais vont être inclus dans toute forme de projet communautaire ou autre qui aurait cours dans la région.

M. Simon: Pour ajouter à ce que le député vient de dire, quand on parle de jeunesse montagnaise, c'est purement dans la tradition, dans le concept justement d'une préservation de notre mode de vie, préservation de la culture, de l'identité culturelle indienne-montagnaise. C'est dans ce cadre que le mémoire a été présenté, parce que l'avenir appartient aux jeunes et, avec la fermeture de la mine, il n'y a pas beaucoup d'espoir, sinon, comme on l'a stipulé dans le mémoire, par l'entremise du territoire indien et de la faune. C'est la seule porte de sortie pour la jeunesse montagnaise de Schefferville, de s'asseoir sur une activité économique enviable pour l'avenir.

Le Président (M. Bordeleau): En conclusion, M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais simplement dire que le juridisme n'est pas d'aujourd'hui, il est de toujours. Si

le juridisme nous emmerde aujourd'hui, il nous emmerdait sans doute en 1975, quand vous avez signé la Convention de la Baie-James, pour ne pas inclure d'autres territoires ou d'autres communautés autochtones.

Je voudrais dire, en tout cas en ce qui me concerne, que si j'ai entendu le cri du coeur de M. Simon j'ose espérer qu'il entendra notre coup de fil et qu'on pourra se rencontrer dans les meilleurs délais et que, si on devait donner suite aux recommandations de la commission en ce qui regarde la commercialisation, les engagements que j'ai pris seront réalisés.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je vous remercie également, M. McKenzie, M. Simon, ainsi que les personnes qui étaient avec vous.

M. McKenzie: Au nom du Conseil montagnais, la population vous remercie d'avoir écouté ce qu'on a présenté comme mémoire. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Il est tout près de 14 h 45, la commission va suspendre ses travaux pour une heure, ce qui nous ramènera ici à 15 h 45.

(Suspension de la séance à 14 h 40)

(Reprise de la séance à 16 h 16)

Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de la présidence du conseil et de la constitution reprend ses travaux. Je voudrais, au nom de tous les membres de la commission m'excuser et excuser aussi mes collègues d'avoir commencé un peu en retard par rapport à l'horaire prévu. Mais il y a eu des rencontres avec la presse qui ont duré quelques minutes de plus, c'est ce qui nous a amenés à reprendre un peu plus tard. Mais on est prêts à commencer. Je voudrais rappeler que cet après-midi, comme je l'ai été pour le dernier mémoire avant qu'on aille manger, je serai assez strict sur le temps en revenant à l'heure normalement réservée pour un mémoire. Alors, j'espère que tout le monde voudra bien collaborer dans ce sens. Il y aura eu deux exceptions, le mémoire, de ce matin, des métallos et celui de la compagnie IOC, hier. Pour les autres, je vais tenter de demeurer dans l'heure. On m'indique - oui, je vous donnerai la parole, si vous voulez, juste après - qu'à la suite des rencontres et des discussions avec les deux partis, on tenterait d'entendre les cinq mémoires qui restent avant d'aller souper, avant de lever la séance de la commission, à moins que des choses ne perturbent nos travaux.

M. le député de Laurier.

M. Sirros: M. le Président, c'est seulement pour souligner le fait que mes autres collègues sont actuellement en conférence de presse, étant donné que ceux qui nous ont précédés semblent avoir été un peu volubiles.

Une voix: Et ceux qui les ont précédés.

M. Sirros: Et probablement ceux qui les ont précédés; c'est cela, il faut toujours chercher un coupable. On va continuer quand même. On est prêts à commencer et ils nous rejoindront en cours de route aussitôt qu'ils auront terminé.

Le Président (M. Bordeleau): On appelle donc dès maintenant la Commission scolaire de Schefferville. Alors, je demanderais à ses représentants de se présenter. Si vous voulez nous présenter les personnes à la table.

Commission scolaire de Schefferville

M. Ménard (Raymond): M. le Président, à ma gauche, M. Léo Patry, membre de l'exécutif de la commission, et M. Yvon Sirois, vice-président de la commission; à ma droite, Mme Madeleine Powell, directrice générale de la commission, et Mme Francine Gagnon, secrétaire générale, et moi-même, Raymond Ménard, président.

M. le Président, MM. les ministres, MM. les députés, mesdames et messieurs, avant d'aborder toute question touchant l'avenir de Schefferville et celui de notre commission scolaire, nous espérons que votre séjour dans notre ville a été agréable. Nous vous remercions aussi d'avoir bien voulu honorer notre ville de votre présence pendant ces deux jours de réflexion sur l'avenir de notre municipalité, de ses divers organismes et de sa population. Il est rassurant pour nous de constater que vous accordez suffisamment d'importance à nos problèmes et à la recherche de solutions à ceux-ci pour consentir à vous déplacer vers notre région et, de ce fait, apprendre à la connaître un peu mieux. Vos décisions futures ne pourront qu'en être plus éclairées.

Dans un premier temps, nous voulons vous situer quant aux origines et fonctions de la commission scolaire de Schefferville. Par un arrêté en conseil, en juillet 1955, le gouvernement du Québec érigeait la ville minière de Schefferville afin de contribuer et de collaborer avantageusement au grand essor économique occasionné par les immenses développements des entreprises minières de la région. Indirectement, mais pour les mêmes raisons, le gouvernement du Québec autorisait, par un arrêté en conseil en janvier 1956, la formation de la commission scolaire de Schefferville.

En effet, le développement et la mise en valeur des ressources minières de la région ne pouvaient se réaliser sans une main-d'oeuvre stable et qualifiée. Le travail seul n'aurait pu retenir longtemps le travailleur minier dans une ville comme Schefferville. Il fallait que l'employé de la compagnie minière puisse aussi y retrouver des services pour lui-même et les siens. C'est dans ce sens qu'il est possible de dire que la commission scolaire de Schefferville devait aider au développement de la ville et à la stabilité de la main-d'oeuvre. La commission scolaire de Schefferville est donc un organisme de services essentiels pour le bien-être de la population de la ville.

Voici que, le 2 novembre 1982, la Compagnie minière IOC décide de procéder à la fermeture de ses installations minières de Schefferville d'ici le mois d'août 1983. À la suite de cette décision, Schefferville risque de devenir littéralement une ville fantôme, danger qui guette toute agglomération entièrement concentrée autour d'une seule industrie majeure. La ville de Gagnon, avec la menace de fermeture de SIDBEC-Normines, est dans la même situation. Tous les secteurs d'activités à Schefferville seront touchés par une telle fermeture: les services municipaux, les services de santé et les services éducatifs qui nous intéressent au plus haut point. De plus, Schefferville possède des infrastructures d'accueil dont un service aérien, un transport ferroviaire, de l'hébergement et de la restauration. Que deviendront-elles? Finalement, on y retrouve un laboratoire de recherche sur l'environnement, de l'Université McGill. Quel avenir lui est réservé?

La population de la ville, qui atteignait plus de 5000 âmes en 1975, s'établit présentement à un peu plus de 2000 personnes, dont 15% à 20% sont des anglophones. Est-ce une saignée qui durera encore longtemps? La situation est plus que problématique. Ainsi, avant toute mesure et toute action dans le cadre d'une fermeture de la ville, il est essentiel que des discussions s'instaurent rapidement entre les deux paliers de gouvernement, provincial et fédéral, et la Compagnie minière IOC, dans le sens d'une révision de son projet de fermeture. La conjoncture actuelle est peut-être difficile pour la compagnie et le minerai de fer lui-même, mais il n'est pas dit que la situation se perpétuera indéfiniment. De plus, compte tenu du contexte économique dans lequel travaille la Compagnie minière IOC, une collaboration spéciale des gouvernements est souhaitable. Il y a aussi des développements possibles dans la région, telles les entreprises de pourvoirie de chasse et de pêche, par exemple, et des espoirs sont permis en ce sens.

M. le Président, la commission scolaire de Schefferville - je répète: la commission scolaire de Schefferville - demande une reprise immédiate et intensive des discussions entre les deux paliers de gouvernement et la municipalité pour trouver quels types de diversification pourraient être envisagés.

Cela étant dit, il faut néanmoins que la situation de la commission scolaire de Schefferville soit analysée dans le cadre du maintien ou de la fermeture de la compagnie, ce qui fait l'objet principal du mémoire.

La commission scolaire de Schefferville offre des services éducatifs à des élèves de langue maternelle française, anglaise et amérindienne, catholique et de niveau primaire. De plus, elle met les équipements, les bâtisses, à la disposition de la commission scolaire régionale du Golfe, laquelle offre des services éducatifs à des élèves de langue maternelle française et amérindienne, catholique et de niveau secondaire.

Au 30 septembre 1982, elle comptait 238 élèves, 151 de langues française et anglaise, et 87 de langue amérindienne, 14 anglophones et 137 francophones. Elle oeuvre au niveau d'une école seulement (l'école Notre-Dame) avec deux cadres, aucun professionnel, 24 enseignants et 3 employés de soutien non syndiqués. Son budget total est d'un peu plus de 1 900 000 $. Avec la fermeture de la Compagnie minière IOC, elle prévoit une baisse d'environ 100 élèves de langues française et anglaise, ce qui donnera alors une majorité à la population amérindienne. Le conseil de bande parle de se prendre en charge depuis quelques années, la situation lui semble propice.

Mais a quels services aura droit alors la population de langue maternelle française et catholique?

Au secondaire, la commission scolaire régionale du Golfe comptait 96 élèves le 30 septembre 1982, pour du secondaire de I à III et de l'adoptation scolaire: 53 de langue française et 43 de langue amérindienne. Vous avez la description des élèves, où ils sont placés dans chaque division, à chaque endroit. Ces élèves sont dans une école qui compte comme personnel 13 enseignants, un agent de bureau à temps plein et un autre à demi-temps, un animateur à la vie étudiante, un animateur de pastorale à temps partiel et un psychoéducateur.

En éducation des adultes, la commission scolaire régionale du Golfe a donné des services pour 450 heures-groupes à 162 inscrits en 1981-1982 et les prévisions pour 1982-1983 étaient de 620 heures-groupes pour 150 inscrits. Cette commission scolaire connaîtra également des problèmes avec la fermeture de la Compagnie minière IOC.

La fermeture des installations minières met donc en danger les services éducatifs à la population: une clientèle scolaire prévisible de 140 élèves dont 50 de langues française

et anglaise et 90 de langue amérindienne remet en question l'existence de la commission scolaire de Schefferville, surtout avec la prise en charge possible par les Amérindiens de leurs propres services éducatifs.

Cependant, il y aurait peut-être lieu de prévoir un regroupement de tous les effectifs scolaires présents sur le territoire de la ville de Schefferville: catholiques, protestants, Amérindiens, anglophones et francophones. La commission scolaire de Schefferville souhaite la collaboration de tous les organismes concernés pour étudier cette possibilité.

La commission scolaire de Schefferville demande l'application et le respect de toutes les mesures favorisant l'accès à l'éducation et l'égalité des chances pour tous, spécialement pour des personnes vivant dans les régions éloignées.

M. le Président, la commission scolaire demande une assurance du ministère de l'Éducation qu'elle continuera à exister et à offrir des services éducatifs de qualité comparables à ceux qui sont offerts dans les autres régions du Québec, et ce, que la clientèle soit restreinte et majoritairement amérindienne ou qu'elle soit restreinte et exclusivement blanche.

La commission scolaire croit qu'il est essentiel qu'il existe un minimum d'encadrement local pour la gestion des activités éducatives et cela, dans le respect du sentiment d'appartenance, surtout pour les régions éloignées; la population doit être représentée par des commissaires élus au suffrage universel.

La commission scolaire demande, dans le but d'assurer son fonctionnement minimal, un financement des coûts réels au maintien des écoles et cela, pour les ressources humaines, matérielles et financières.

Un accord est indispensable entre la commission scolaire et le ministère de l'Éducation pour déterminer les coûts réels appropriés à un budget répondant aux véritables besoins de la population. De plus, la commission scolaire juge important que l'impôt foncier scolaire soit exclusivement réservé aux services adaptés et propres aux désirs et aux besoins de la population de la région. (16 h 30)

La commission scolaire demande qu'un financement approprié relatif aux résidences d'enseignants lui soit garanti (mesure 5800 des allocations supplémentaires). Il en est de même pour les résidences à la disposition des autres personnes.

La commission scolaire tient à continuer d'assurer des services de logement aux enseignants qui demeureront en poste à Schefferville et aux autres personnels qui seront retenus pour certains services jugés essentiels. Pour cela, elle souhaite des conditions et des mesures avantageuses: frais de location, chauffage, électricité et autres. Elle s'en remet à des ententes tripartites entre les commissions scolaires, le ministère de l'Éducation et la compagnie, dans le cadre d'un transfert de la propriété des résidences de la compagnie à la commission scolaire.

Relativement aux normes d'allocation, la commission scolaire demande d'être incluse dans les commissions scolaires du Nord (mesure 400 des allocations supplémentaires) si ces normes semblent plus adaptées et avantageuses à la région. Je le répète: Si ces normes semblent plus adaptées et avantageuses à la région.

La commission scolaire de Schefferville souhaite donc pouvoir continuer à offrir des services à une clientèle scolaire. Elle souhaite offrir des services de qualité avec un personnel qualifié et d'expérience. Comme employeur, la commission scolaire de Schefferville a le devoir de respecter les obligations qui lui sont faites par les conventions collectives et d'offrir aux personnels qui demeureront à son service une qualité de vie et des conditions de travail acceptables. Par contre, il est assuré pour le moment qu'il y aura une baisse prévue de la clientèle, ce qui aura pour effet que plusieurs personnes pourront se retrouver sans emploi. La commission scolaire de Schefferville veut pouvoir offrir à tous ses personnels des conditions aussi favorables que celles qui sont offertes aux employés de la Compagnie minière IOC: primes de séparation adéquates, allocation de vacances intéressante, etc.

Conséquemment, M. le Président, la commission scolaire de Schefferville demande que tous les services, tels le logement, le chauffage, l'électricité et autres, soient garantis à ceux qui demeureront au service de la commission scolaire.

L'article 12-9.00 des dispositions constituant des conventions collectives liant, entre autres, les enseignants à l'emploi des commissions scolaires pour 1983-1985 ne doit pas être une entrave à de meilleures conditions en ce sens.

La commission scolaire demande que le Bureau national de placement et, conséquemment, le Bureau régional de placement soient sensibilisés, le plus tôt possible, à la situation des personnels de la commission scolaire de Schefferville qui seront mis en disponibilité, pour des mesures spéciales quant à la sécurité d'emploi et aux primes de séparation en particulier. Par exemple, les mesures suivantes doivent être regardées: possibilité de prêt de services des employés, prime de séparation spécifique, relocalisation des personnels disponibles dans d'autres régions - cette solution évite les coûts de logement et de prime d'éloignement - et préretraite.

La commission scolaire demande que le Comité de résorption des disponibles (train

des petites mesures) adopte le plus tôt possible des mesures ad hoc pour Schefferville compte tenu de sa situation particulière.

Les articles 5-4.04 et 5-4.05 des dispositions ci-haut mentionnées sont deux exemples des quinze mesures spéciales possibles pour les mises en disponibilité. De plus, des ententes avec des compagnies ou groupements pour faciliter l'utilisation et le replacement des disponibles peuvent être étudiées et un examen de programmes spéciaux avec la Direction de l'enseignement aux adultes doit être fait.

Conclusion. M. le Président, la commission scolaire de Schefferville souhaite donc pouvoir continuer à offrir des services, mais les conditions de travail, de logement et autres devront être appropriées. Elle croit qu'il y a des développements possibles dans la région et, conséquemment, qu'elle peut continuer à offrir des services. Elle croit même que la conjoncture actuelle dans laquelle vit le minerai de fer ne se perpétuera pas.

Avant tout, la commission scolaire demande de nouvelles discussions entre les deux paliers de gouvernement et la municipalité. Elle souhaite que la commission parlementaire qui se tient présentement sensibilisera tous et chacun à une collaboration maximale pour une solution aux problèmes de Schefferville. Cependant, si la commission scolaire doit disparaître, elle souhaite que les conditions de cessation d'emploi soient au moins aussi avantageuses que les conditions offertes aux employés de la Compagnie minière IOC. Elle souhaite même des mesures spéciales et urgentes des comités responsables dans une telle situation.

En priorité, dans le contexte du maintien de la commission scolaire, cette dernière veut faire dégager les sommes d'argent requises pour faire fonctionner un tel milieu particulier: assistance financière gouvernementale complète. Je le répète: assistance financière gouvernementale complète. Dans le contexte d'un non-maintien, la commission scolaire demande pour ses personnels les meilleures conditions possible de cessation d'emploi. La commission scolaire de Schefferville a confiance que vous saurez apporter des solutions équitables aux problèmes qu'on vous a soulignés. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Ménard.

Période de questions et de commentaires.

M. le ministre délégué au Développement régional.

M. Gendron: M. Ménard, je voudrais vous remercier, au nom des parlementaires et au nom de tous les membres de cette commission, d'avoir, sûrement avec raison, prétendu qu'il était opportun que les porte-parole du monde de l'éducation communiquent leur point de vue par rapport à ce qui nous réunit ici depuis hier. Bien sûr, lorsqu'on oeuvre dans le monde de l'éducation et qu'il se produit une situation difficile comme celle que nous analysons, il est important, je pense, et opportun de s'assurer que la majorité des citoyens et des citoyennes de Schefferville, s'ils font le choix d'y demeurer, recevront les garanties requises du gouvernement pour que des services éducatifs continuent de leur être offerts. Tout le monde a convenu, je pense -et cela ne fait pas l'ombre d'une opposition de qui que ce soit - que tout avenir commence par un minimum de formation et d'éducation. C'est ce que vous voulez donner aux jeunes qui continueront d'y demeurer.

À la page 5 de votre mémoire - je vais y aller de quelques commentaires et de quelques questions - vous demandez formellement "une reprise immédiate et intensive des discussions." Je veux tout simplement vous dire que, quant à nous, nous croyons - l'engagement a été donné à plusieurs reprises depuis qu'on a l'occasion d'entendre des mémoires - que l'espèce de groupe de travail, qu'on appelle communément un "task force", sera sûrement l'intervenant privilégié pour servir de véhicule approprié à l'analyse de votre recommandation de la page 5.

J'ai un autre commentaire. Cette fois-ci, je voudrais le formuler et, par la suite, vous poser une question, M. Ménard. Si nos informations sont exactes au gouvernement du Québec, ici, à Schefferville, il existe quatre commissions scolaires. Il existe deux commissions scolaires catholiques et deux commissions scolaires protestantes: Schefferville et du Golfe pour ce qui est des catholiques et Greater Seven Islands et Eastern Québec pour les protestants. Au total, cela fait quand même une population étudiante passablement réduite. Ce ne sont quand même pas les normes que nous retrouvons dans d'autres secteurs de population ou dans d'autres coins du Québec.

Dans ce sens-là, vous mentionnez qu'il y aurait peut-être lieu de prévoir un regroupement de tous ces effectifs. Sans me déguiser en spécialiste de ces questions, je suis pas mal convaincu qu'on aurait dû prévoir depuis un bon bout de temps un regroupement de ces quatre commissions scolaires. Je comprends qu'on nous signale cette problématique, mais je ne comprends pas qu'on l'associe à la problématique des deux jours qui ont fait que nous sommes ici, c'est-à-dire la fermeture d'IOC. À ma connaissance, il me semble que c'est une évidence qu'il y aurait eu lieu de regarder cela entre vous depuis fort longtemps, parce que c'est pour le moins irrégulier d'avoir

quatre commissions scolaires pour une si petite clientèle.

Ma question est la suivante: Pourquoi cette possibilité de regroupement de tous les effectifs n'a-t-elle pas été analysée antérieurement à ce qui nous réunit ici depuis hier?

Le Président (M. Bordeleau): M.

Ménard.

M. Ménard: Votre question est très bonne, M. le ministre.

M. Gendron: Je pense qu'elle est meilleure.

M. Ménard: II y a eu peut-être un manquement là-dedans; je crois qu'on ne s'est pas toujours entendu entre le côté anglais et le côté français ou avec la régionale du Golfe. En tout cas, c'est une chose qu'on perçoit qu'on devrait regarder dans le moment, puisque la population va diminuer de plus en plus.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Gendron: Un peu plus loin, je pense que vous faisiez appel à des ressources externes pour analyser cette problématique. Quant à moi, je prétends que, dans un premier temps en tout cas, il y aurait lieu de poser des gestes officiels de regroupement. C'est un peu cela aussi ma question. Sans porter de jugement de valeur, est-ce que vous, M. Ménard, avez l'intention d'être un leader de cette démarche vers un regroupement éventuel?

M. Ménard: Oui, M. le ministre.

M. Gendron: J'aurais une autre question. Vous suggérez, à la page 11 de votre mémoire concernant les normes d'allocation, d'être inclus dans les commissions scolaires du Nord, selon la mesure 400 des allocations supplémentaires. Encore là, ce serait à peu près la même question. Puisque vous n'êtes pas en mesure, en tout cas, selon votre propre jugement, d'évoquer tout de suite si ce serait un avantage réel pour vous, je voudrais tout simplement savoir ce qui vous a amené à suggérer cela aujourd'hui, tout en vous interrogeant à savoir si cela représente un avantage ou non.

Mme Powell (Madeleine): Les commissions scolaires du Nord ont, comme toutes les autres commissions scolaires, des enveloppes budgétaires globales, mais je crois que leurs paramètres de base sont peut-être différents. Alors, c'est ce que nous aimerions qui soit étudié. Il faudrait que les paramètres de la commission scolaire de Schefferville soient réétudiés et peut-être ajustés pour tenir compte de la baisse de clientèle que nous prévoyons.

M. Gendron: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Laurier.

M. Sirros: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi remercier la commission scolaire pour sa présentation et j'aimerais axer mes questions sur la situation actuelle.

D'après ce que je comprends, il y a quatre écoles aussi à Schefferville: deux écoles élémentaires, l'une française et l'autre anglaise; deux écoles secondaires, l'une française et l'autre anglaise. Au moment où on se parle, quel est le nombre total d'élèves inscrits à ces écoles? Est-ce que vous avez aussi une idée concernant les autres commissions scolaires?

Mme Powell: Oui, nous avons une idée: environ 520 élèves au 30 septembre 1982.

M. Sirros: En tout et partout?

Mme Powell: En tout: au primaire, au secondaire, aux secteurs catholique et protestant.

M. Sirros: Est-ce que la commission scolaire de Schefferville offre tous les niveaux? Y a-t-il un niveau secondaire?

Mme Powell: C'est la commission scolaire régionale du Golfe qui est responsable du secondaire. Les cours se donnent jusqu'en secondaire III.

M. Sirros: Qu'est-ce qui arrive après le secondaire III?

Mme Powell: Les étudiants doivent aller à l'extérieur pour les secondaires IV, V et le cégep, naturellement.

M. Sirros: Quand vous dites à l'extérieur, j'imagine que cela veut dire Sept-Îles, probablement?

Mme Powell: Normalement, c'est Sept-îles. En fait, s'ils retrouvent à Sept-Îles les cours ou les options qu'ils désirent suivre, les étudiants s'inscrivent dans les écoles de la régionale du Golfe. Ils sont logés dans les résidences de la régionale du Golfe. Par contre, si les étudiants ne retrouvent pas les options qu'ils désirent suivre, ils doivent s'inscrire dans d'autres régionales de la province de Québec.

M. Sirros: Ils sont considérés comme des élèves de la régionale du Golfe quand ils

sont de Sept-Îles? En ce sens, il doit y avoir quand même des frais assez importants qui sont rattachés à cela? (16 h 45)

Mme Powell: Pour l'étudiant qui doit fréquenter l'école à Sept-Îles et qui est en résidence, la commission régionale du Golfe habituellement demande une contribution des parents. Celle-ci se chiffre à environ 520 $, je crois. Si d'autres étudiants doivent s'inscrire dans des régionales à l'extérieur de Sept-Îles, à ce moment-là, les parents doivent voir à loger leurs enfants. La régionale donne alors une allocation de 1500 $ aux parents. Il faudrait peut-être noter que le coût moyen pour loger un étudiant à l'extérieur, que ce soit dans une famille, chez de la parenté ou ailleurs, est d'environ 3000 $. Les 1500 $ ne couvrent certainement pas tous les frais que les parents doivent encourir. C'est peut-être l'occasion, pour nous, de vous le souligner et de vous demander le retrait de ces frais pour les parents dans la situation actuelle à Schefferville. Il est certain que c'est une surcharge pour le parent qui doit fournir 520 $ ou même 1500 $.

M. Sirros: J'allais vous demander si vous connaissiez beaucoup de parents qui sont probablement sans emploi et qui peuvent payer 1500 $ pour envoyer leurs enfants terminer leurs études secondaires. J'imagine que la réponse est non. Est-ce qu'à votre connaissance des représentations ont été faites au gouvernement relativement à ces cas particuliers, c'est-à-dire pour défrayer le coût des élèves qui vont à Sept-Îles terminer leurs études secondaires?

Mme Powell: Je peux seulement répondre pour la commission scolaire de Schefferville. Nous n'en avons pas fait jusqu'à maintenant. C'est sûrement une de nos intentions.

M. Sirros: Vous pourriez donc soulever la question aujourd'hui, étant donné que les ministériels sont ici pour l'entendre. Je pense qu'il s'agit d'une demande assez légitime, étant donné la gratuité de l'éducation et l'accessibilité pour tous. Je pense que la situation particulière mérite que quelqu'un se penche rapidement sur cette question.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le député de Gaspé.

M. LeMay: Merci, M. le Président. J'aurais plusieurs questions à vous poser, mais je vais éviter d'être trop long. À la page 10 de votre mémoire, vous parlez de frais de location, chauffage, électricité et autres services. Ce sont des avantages que vous voulez donner au personnel de votre école. Je voudrais savoir, d'abord, quels sont les avantages actuels que les professeurs qui enseignent ici ont par rapport à ceux qui enseignent à l'extérieur, c'est-à-dire en ville. Est-ce que vous incluez ces avantages-là dans votre mémoire parce que vous avez de la difficulté à recruter du personnel?

Le Président (M. Bordeleau): Mme

Powell.

Mme Powell: Je voudrais d'abord répondre à la deuxième question. Ces avantages-là ont été placés pour aider à obtenir la stabilité de notre personnel. Les avantages existaient déjà. Cela existe depuis longtemps et c'est la raison pour laquelle cela fait maintenant partie de la convention collective ou des dispositions dont tient compte une convention collective.

M. LeMay: Est-ce que vous avez de la difficulté à recruter du personnel?

Mme Powell: Présentement, non.

M. LeMay: Vous parlez, à la page 6 de votre mémoire, d'une possibilité pour le conseil de bande des autochtones de se dissocier de votre commission scolaire, de se prendre en main. On en a entendu parler au début de l'après-midi. Quelle est votre opinion là-dessus? Il semble y avoir de la difficulté d'intégration. Les autochtones soulignaient ce point ce matin.

Mme Powell: Disons que les autochtones y pensent depuis plusieurs années. C'est une de leurs aspirations. Je crois que la commission scolaire de Schefferville doit les seconder, les aider à prendre une décision. Ce n'est peut-être pas quelque chose qui va se faire demain. À court terme, je crois que la clientèle autochtone demeurera avec la commission scolaire, nous le souhaitons. Il est très difficile de prévoir ce qu'il en sera dans trois ou quatre ans. Je pense qu'eux aussi veulent étudier le problème. Nous avons eu des rencontres dans ce sens-là.

M. LeMay: Merci, madame.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Vous avez mentionné à la page 8, et le ministre Gendron l'a mentionné aussi, la possibilité de solutions prévoyant un regroupement des différentes commissions scolaires lors de la fermeture ou si la fermeture de la ville se fait. Est-ce que, jusqu'à maintenant, il y a eu des démarches, des négociations? Est-ce que quelque chose a été fait? Parce que, à toutes fins utiles, cela semble être la solution la plus réaliste, la plus logique. Si Schefferville ferme, la clientèle des

commissions scolaires regroupées va se chiffrer à quoi? Moins, peut-être, de cent et quelques élèves? Il y a déjà, en place, 24 enseignants. Dans l'ensemble, ce semble être, d'après votre mémoire, la meilleure solution possible. C'est cela que je me demande. À l'heure actuelle et compte tenu du fait qu'on est au courant de la fermeture depuis le mois novembre, est-ce que des démarches en ce sens ont été faites?

Mme Powell: Nous avons eu quelques contacts, mais rien de définitif.

M. Ménard: C'est quelque chose qu'on veut mettre de l'avant. Une chose que je voulais préciser là-dessus, c'est qu'on parle de commission scolaire locale, une commission scolaire pour Schefferville seulement. C'est de cela qu'on parle.

M. Kehoe: Dans votre mémoire, vous mentionnez que vous allez demander que, si le personnel de la commission scolaire est réduit, vous ayez les mêmes conditions que celles offertes par la Compagnie minière IOC. D'après votre convention collective, est-ce qu'il y aurait une grande différence entre les deux? Avez-vous fait une analyse de la situation pour voir si la convention collective que vous avez actuellement pour régler le problème présente une différence assez importante entre ce qui est là et ce qui est prévu par la compagnie?

Mme Powell: II y a certainement des différences car il faut faire une distinction entre le personnel qui a été engagé à l'extérieur de Schefferville et le personnel engagé sur place. Les avantages dans la convention collective ne sont pas les mêmes pour les deux groupes d'enseignants. De plus, nous avons aussi du personnel de soutien non syndiqué. Auparavant, nous appliquions la convention collective de la minière pour ce personnel-là. Maintenant, naturellement, ces personnes voudraient profiter, et très légitimement, des avantages que la compagnie minière offre à ses employés. Mais, pour nous, la commission scolaire, c'est tout à fait à l'extérieur de nos budgets ou de nos normes.

M. Kehoe: II faudrait que la province vous subventionne si vous voulez offrir la même chose et il pourrait s'agir de montants assez importants.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. En rapport avec les coûts que les parents doivent absorber pour envoyer leurs enfants au secondaire à l'extérieur, est-ce qu'il serait possible pour vous, dans un délai assez court, de préparer un genre de dossier pour le faire parvenir au ministre de l'Éducation sur ce sujet précis afin qu'on puisse commencer le processus d'examen plus approfondi? Est-ce qu'il serait possible de faire cela dans un court délai?

Mme Powell: Certainement, M. le député.

M. Perron: Merci. Vous me corrigerez si je n'ai pas raison, il y a beaucoup d'enseignants et d'enseignantes qui ont des conjoints ou conjointes qui travaillaient pour la minière ou encore dans l'entreprise privée antérieurement à la décision de la minière IOC de fermer ses exploitations. Est-ce que vous prévoyez que, à cause de ce fait -parce qu'il y a beaucoup de conjoints et conjointes qui devraient bénéficier de l'assurance-chômage actuellement, des gens qui sont à la recherche d'un travail à l'extérieur et possiblement ici même sur place, mais on sait qu'il n'y a pas de création d'emplois à part les programmes gouvernementaux - cela peut vous causer des problèmes à un moment donné, disons à compter de septembre de cette année?

Mme Powell: Assurément, parce que ces personnes, que ce soit le conjoint ou la conjointe d'ex-employés de la minière, auparavant étaient logées dans des maisons appartenant à la minière. Pour que l'enseignant et l'enseignante fassent un choix éclairé, ils doivent savoir s'ils vont avoir des possibilités de logement. Tout de suite, c'est un problème parce que, si la commission scolaire veut les retenir, elle doit loger ces personnes.

M. Perron: Merci beaucoup, Mme Powell.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, Mme Powell et M. Ménard.

M. Ménard: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle donc maintenant le groupe suivant, qui est le Comité organisateur scheffervillois d'emploi, COSE, à se présenter. Le porte-parole est M. Bernard Bizier. M. Bizier, si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous et procéder immédiatement à la lecture de votre mémoire.

Comité organisateur scheffervillois d'emploi (COSE)

M. Bizier (Benoît): M. le Président, premièrement, ce n'est pas Bernard Bizier, c'est Benoît. Je m'excuse.

Le Président (M. Bordeleau): J'aurais dû

le savoir d'ailleurs, mais je corrige: c'est M. Benoît Bizier.

M. Bizier: C'est cela. À ma droite, il y a M. Dany Ménard et M. Rénado Batisti. À ma gauche, il y a M. Frédéric Chevary et M. Sylvain Poirier, tous des directeurs de projets COSE.

Je vais commencer la lecture du mémoire. La problématique du tourisme à Schefferville. En préambule, l'attrait exercé par les ressources fauniques de Schefferville est certain. L'invasion annuelle de milliers de chasseurs et de pêcheurs témoigne de notre potentiel touristique. Ce potentiel n'est cependant pas exploité adéquatement. Nous voulons ici présenter un aperçu des problèmes se rattachant à ce secteur d'activité. En second lieu, nous indiquerons quelques-unes des solutions envisagées. Nous terminerons notre mémoire par une liste des recommandations qui, d'après plusieurs, pourraient résoudre certains problèmes mentionnés.

La situation actuelle. La chasse et la pêche sportive sont présentement les seuls produits touristiques locaux dignes de mention. Ces deux domaines sont exploités exclusivement par des entreprises privées. Des lois limitent le nombre de ces pourvoyeurs. Ceux-ci agissent à l'intérieur de territoires réservés situés au coeur de la zone la plus giboyeuse. Leurs clients, des Nord-Américains pour la plupart, s'inscrivent à l'avance. Aux dates fixées, ils arrivent à Schefferville par avion ou par train. Après leurs derniers achats, ils s'envolent en avion de brousse vers les pourvoiries localisées approximativement à 150 milles de Schefferville. Les services offerts par les pourvoyeurs sont de qualité, la satisfaction des clients étant un gage de rentabilité à long terme.

Ce tourisme, de type saisonnier, enrichit tout d'abord les pourvoyeurs. Les services connexes, soit l'hôtellerie, la restauration, le transport, reçoivent, eux aussi, leur juste part. Là encore, la qualité et les prix des services, compte tenu du contexte, sont acceptables. Ajoutons, toutefois, que ces services se voient parfois débordés. Certains particuliers récoltent alors des miettes.

Une certaine insatisfaction. Les commentaires de plusieurs touristes font néanmoins réfléchir. Certains, en effet, se disent déçus de l'accueil qui leur est fait. Ces critiques portent sur plusieurs points. (17 heures) a) Québecair. On se plaint, tout d'abord, des tarifs de Québecair en regard de la qualité des services qu'offre cette compagnie. Ces critiques visent le transport des passagers et celui du gibier récolté. À titre d'exemple, le transport jusqu'à Montréal d'un panache de caribou peut coûter 200 $.

Le "traitement de faveur" accordé aux prises des chasseurs, les retards et les escales n'aident pas à préserver la viande des avatars du voyage. La politique des réservations laisse aussi à désirer. Un chasseur retenu en forêt en raison du mauvais temps - c'est fréquent ici - perdra son tour à l'aéroport. Exceptionnellement, Québecair ajoutera un vol à son horaire, pour autant que les retardataires soient en nombre suffisant. Les coûts qu'impliquent ces délais suffisent souvent à être dégoûté de Schefferville. b) La QNS&L. Cette filiale de l'IOC transporte, à l'aller comme au retour, les touristes de Sept-Îles à Schefferville. La durée de cette expédition ferroviaire est rarement inférieure à douze heures. L'inconfort notoire des wagons utilisés suscite, par ailleurs, de nombreux commentaires désobligeants. Les tarifs, selon plusieurs, ne coïncident pas non plus avec les services offerts. Plusieurs, en effet, soulignent la rareté du personnel de cargo. Les passagers doivent faire le voyage de douze heures sans service de restaurant à bord. Les passagers, dans la pagaille la plus totale, font alors eux-mêmes l'ouvrage. Au retour, la QNS&L met un wagon réfrigéré à la disposition des chasseurs. La viande est alors empilée sans aucune précaution, d'où de nombreuses pertes. Les horaires et la fréquence des arrivées et des départs laissent aussi à désirer. Il en est de même du pointillisme administratif de cette compagnie. Les procédures de facturation pourraient en ce sens être abrégées. c) Les services spécialisés. Plusieurs chasseurs ont déploré l'insuffisance des services reliés à la conservation du gibier (taxidermie, boucherie etc.) D'autres aimeraient louer sur place, à des prix abordables, certaines pièces d'équipement trop encombrantes. d) Le vide socioculturel. Certains auraient aimé entrer en contact avec les Scheffervillois, les occasions de rencontres étant rares. Les échanges, en effet, se limitent pour la plupart à des relations commerciales, ce qui à la longue dessine une fausse image de notre population.

Les possibilités. Ce survol rapide de la situation touristique ne fait qu'effleurer le sujet. Une analyse plus sérieuse des problèmes s'impose. D'une telle analyse résulteraient certaines mesures correctives. Il y a également place pour l'innovation. C'est ce que nous voulons présenter ici. Là encore, des études plus poussées seraient requises. Notre tourisme local, selon nous, doit être envisagé en fonction d'une certaine diversification. II s'agit ainsi d'enrichir le paysage existant déjà, d'ouvrir de nouvelles perspectives. Cette diversification a donc une double fonction. D'abord, développer le tourisme, nous l'avons dit. Et, en second

lieu, et c'est essentiel, fournir de l'emploi à la main-d'oeuvre locale. Les projets que nous voulons énumérer ici jouent tous ce double rôle. Certains présenteront peut-être un indice de rentabilité plus élevé. Tous, cependant, sont interdépendants: ils constitueraient ainsi un ensemble touristique de haut niveau.

La liste des projets. Projet de villégiature. Les buts sont de permettre aux chasseurs et aux pêcheurs de goûter à toutes les possibilités de la région; ceci créerait des emplois locaux. Les grandes lignes: établissement de camps à proximité de la ville, accessibilité rapide, tarifs réduits, pêche de rivière et de lac, chasse au petit gibier et le canotage.

Projet de pisciculture. Buts: diversification des centres d'intérêt, ensemencement des lacs et des rivières, pêche touristique - qui créerait encore des emplois - commercialisation. Les grandes lignes: proximité de la ville, poissons: truite grise, ouananiche, truite mouchetée.

Projet d'élevage. Buts: diversification des centres d'intérêt, emplois locaux, commercialisation des fourrures, développement de l'artisanat vestimentaire. Les grandes lignes: élevage du caribou, élevage expérimental du loup, élevage commercial du vison et du renard, proximité de la ville, capture des animaux sauvages pour les jardins zoologiques et les parcs nationaux.

Projet de festival. Buts: susciter des contacts humains, diversifier les centres d'intérêt, mise en marché du potentiel touristique de Schefferville. Les grandes lignes: concours sportifs, trophées, rencontres sociales.

Projet de casino. Buts: injecter des revenus, remettre au gouvernement les subventions avancées, ajouter un atout majeur, doubler la clientèle - exemple, le chasseur qui va amener son épouse et ses amis - améliorer la qualité de l'ensemble touristique. Les grandes lignes: casino de type saisonnier sous le contrôle exclusif du gouvernement, impacts sociaux moindres.

Projet d'hivernage. Buts: prolonger la saison touristique, rentabiliser le projet de villégiature, rentabiliser le projet de casino, rentabiliser l'artisanat, utilisation des guides. Les grandes lignes: safari-photo, pêche sur glace, chasse à la perdrix blanche, location de motoneige, camping d'hiver, chasse d'hiver au caribou, expéditions et randonnées en traîneaux à chiens, ski de fond, ski alpin.

Projet de services spécialisés. Buts: compléter les autres projets, fournir à la clientèle les services requis, cela créerait encore des emplois. Les grandes lignes: mettre sur pied les services suivants: armurerie, location d'embarcations, de moteurs et de motoneiges, boucherie, taxidermie, guides expérimentés, congélation et entreposage, expédition du gibier et du poisson, canotage.

Conclusions. Certaines parties de ces projets sont déjà en marche. COSE, par exemple, a en chantier des projets d'écoles de guides, des projets d'élevage et de pisciculture. De plus, quelques employés travaillent actuellement au projet de pistes de motoneige. Il s'agirait donc de faire converger les efforts des différents intervenants impliqués.

Nous recommandons ces mesures correctives: la prolongation de la saison de chasse au caribou; la légalisation de la pêche sur la glace et de la chasse à la perdrix blanche; la légalisation de la commercialisation de la truite grise, de la truite mouchetée et de la ouananiche; l'augmentation des salaires offerts dans le cadre des projets communautaires; le contrôle de la qualité des services aériens et ferroviaires.

Nous recommandons aussi ces mesures innovatrices: des études de faisabilité et de rentabilité relativement à l'implantation d'un casino, la formation d'un comité touristique composé des intervenants impliqués; la mise en marche du tourisme scheffervillois; la venue à Schefferville des aides techniques nécessaires.

Aussi, si vous me le permettez...

Le Président (M. Bordeleau): Oui.

M. Bizier: ...au mémoire que vous avez en main, j'aimerais ajouter deux annexes que nous n'avons pas pu remettre au préalable. Il s'agit d'une annexe sur un bassin de pisciculture et d'une étude sur le caribou.

Le Président (M. Bordeleau): Avez-vous déjà des copies pour les gens de la commission?

M. Bizier: Oui, nous avons des copies.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, il y a quelqu'un qui les distribuera aux membres de la commission.

M. Bizier: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Bizier. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, tout d'abord, féliciter le groupe COSE pour son mémoire, le remercier et dire à son porte-parole que, pour un gars nerveux, il s'en est bien tiré. C'est mon collègue de droite qui vous a trahi!

M. Bizier: C'est la première fois!

M. Chevrette: Je voudrais vous dire,

dans un premier temps que je note avec beaucoup de plaisir tout l'intérêt que vous portez au développement touristique et économique à partir de la ressource naturelle renouvelable du milieu. C'est fort intéressant. Je pense que c'est une façon constructive d'aborder un problème, surtout celui qu'on vit présentement, que de l'aborder par le biais des ressources du milieu et, en particulier, par le biais des ressources renouvelables du milieu, ce qui pourrait permettre un point de départ à la diversification dont on parle dans plusieurs mémoires.

Cela dit, vous faites des recommandations. Je vais les commenter. Je suis d'accord avec certaines, un peu perplexe devant d'autres et en désaccord avec certaines. Mais je pense bien que vous pourrez accepter ces remarques. Elles ne sont pas négatives; elles veulent peut-être, purement et simplement, vous donner l'orientation vers laquelle vous pourriez gratter davantage et nous présenter des projets encore plus précis, développer les suggestions que vous nous faites d'une façon encore plus précise.

En ce qui regarde la pêche et la chasse d'hiver, j'ai déjà annoncé au cours des deux dernières journées que c'était une chose envisageable. Il nous faut, bien sûr, obtenir les autorisations en vertu de la négociation qui doit être conduite devant le comité conjoint, mais c'est une des possibilités qui sont offertes et qui pourraient apporter sûrement des retombées économiques intéressantes pour la ville de Schefferville. Également, pour ce qui est de l'implantation de services spécialisés d'entreposage frigorifique, de boucherie, etc., je trouve votre approche intéressante et cohérente, puisque, si vous demandez la commercialisation, eh bien, il est évident qu'il faut répondre à ce moment-là, en toute logique, aux exigences minimales de base. Cela s'inscrit carrément dans la logique de vos suggestions et je trouve cela fort intéressant. D'autant plus que la commercialisation elle-même est une hypothèse sur laquelle mon ministère a déjà travaillé, sur laquelle, également, on a eu d'autres mémoires, comme celui de la SDBJ. J'ai remarqué que presque tous les mémoires touchent d'une certaine façon à cet aspect bien spécifique de la commercialisation puisque c'est là une ressource du milieu. C'est tout à fait normal que les mémoires se recoupent là-dessus, je crois bien.

Je voudrais, cependant, vous mettre en garde contre certains projets. Tout d'abord, le casino. Je dois vous dire en toute franchise qu'après toutes les études qui ont été faites au cours des dernières années la récente décision du Conseil des ministres est de surseoir pour au moins une période de deux ans à toute décision sur le sujet. Je ne vous conseillerais pas de concentrer vos efforts là-dessus. Je serais l'homme le plus surpris qu'on étudie à très court terme cette possiblité, et même, à moyen et long terme, une exploitation sur une base annuelle, parce que cela exige une base annuelle et une région climatique ordinairement assez favorable. De toute façon, libre à vous de continuer à persévérer si vous le voulez, mais, personnellement, je vous dis que ce serait peut-être un peu rêver en couleur de croire qu'à très court terme on puisse obtenir du positif de ce côté.

En ce qui a trait au festival, j'aimerais vous entendre tantôt me dire exactement quel en serait le thème, parce que, pour créer un genre de festival où il y aurait une attraction majeure, il faut avoir un thème. Vous savez qu'il y a le festival de la crevette, le festival des fraises, le festival western de Saint-Tite et le festival de la patate. On est rendu qu'on en a un pour chaque fruit et pour chaque légume.

Une voix: Du homard, oui. (17 h 15)

M. Chevrette: II pourrait y avoir le festival du caribou. C'est sûrement cela que vous aviez en tête, mais j'ai hâte que vous me le disiez. D'ailleurs, je dois vous dire que je dois prononcer le mot "caribou" souvent parce qu'on a fait un pari avec l'Opposition là-dessus. Je vous conterai cela après.

En ce qui regarde l'élevage des animaux. Là-dessus, nos études nous démontrent que le caribou étant un animal nomade, il semble présenter beaucoup de difficultés d'élevage en captivité. Je suis prêt à mettre à votre disposition les informations qu'on a au ministère, quitte à ce que vous les évaluiez, parce que vous savez fort bien que l'alimentation pour les zoos est très minime; ce n'est pas cela qui assurerait une très grande rentabilité, je crois. Quelques zoos pourraient se porter acquéreur de quelques caribous, mais cela ne serait pas générateur d'emplois à très court terme, je pense, et c'est ce que vous visez.

Pour ce qui est de la pisciculture, j'ai des questions là-dessus. Je n'ai pas de commentaire à faire, parce que je ne perçois pas tellement vos objectifs, puisque vous les avez exprimés dans un style télégraphique. Donc, je vais plutôt vous questionner.

Tout d'abord, au point de vue ensemencement, me dites-vous, un point qui est précis, c'est l'ensemencement des lacs. Vous ne pensez pas que la région de fort potentiel que vous avez ne nécessite pas de pisciculture pour fins d'alimentation dans le milieu? On me dit que vous avez déposé une certaine étude, je ne l'ai pas eue avant le... Je voudrais savoir, tout d'abord, quels seraient vos éventuels clients?

M. Bizier: Actuellement, je crois que,

côté pisciculture, ce serait de former une pisciculture ici de façon qu'on puisse ensemencer quelques lacs autour de la ville, mettons trois lacs. On pourrait utiliser trois lacs à proximité de la ville lesquels, actuellement, n'ont presque plus de poissons. Pour aller à la pêche à la truite, actuellement, il faut aller assez loin. On pourrait utiliser, par exemple, trois lacs à proximité de Schefferville et les ensemencer: un avec de la truite rouge, l'autre avec de la truite grise et l'autre avec de la ouananiche. Ensuite, faire des chalets autour, en face, et les louer pour les touristes. C'est au niveau touristique.

De plus, quant à la pisciculture, on voudrait avoir la commercialisation du poisson. C'est-à-dire que le surplus qu'on pourrait obtenir en pisciculture, on pourrait le vendre sur le marché, ce qui donnerait à la place un apport financier assez important.

M. Chevrette: Pour la villégiature et le tourisme, ne craignez-vous pas d'entrer en compétition avec les pourvoyeurs et risquer de créer des emplois à un endroit et d'en enlever à l'autre et que, au bout de la course, il n'y ait pas plus d'emplois de créés?

M. Bizier: Absolument pas, parce qu'il y a du poisson à vendre dans les magasins partout, en bas et les gens montent ici quand même pour la pêche sportive. C'est la même chose pour la chasse au caribou. Le gars qui monte à la chasse, même si vous lui vendiez de la viande en bas, c'est le sport qu'il veut avoir. C'est la chasse sportive. Il va monter de la même façon pour le sport et peut-être que cela pourra en faire monter d'autres après qu'ils y auront goûté.

M. Chevrette: En fait, ce que vous voulez, c'est attirer des villégiateurs.

M. Bizier: Le tourisme.

M. Chevrette: Oui, mais vous parlez de construction de chalets dont ils pourraient se porter acquéreurs et en même temps ils en bénéficieraient.

M. Bizier: Pas qu'ils soient acquéreurs, qu'on leur loue les chalets pour une période. Si le gars veut passer une semaine à la pêche à la truite, on lui loue un chalet avec un canot et un guide, s'il en a besoin d'un, pour qu'il puisse aller à la pêche et être sûr de prendre du poisson, de la truite. Il n'a pas besoin, une fois à Schefferville, de reprendre l'avion. Actuellement, ce que les principales pourvoiries ont, c'est la pêche au saumon et la chasse au caribou. Mais on n'ensemencera pas le saumon dans un lac, cela va dans les rivières. Cela ne dérange absolument pas les pourvoiries.

M. Chevrette: Maintenant, vous savez que l'exploitation des ressources fauniques est un élément de discussion très fort avec les groupes autochtones. Est-ce que vous avez entrepris des démarches en tant que groupe? Est-ce que vous avez commencé à avoir des pourparlers avec les Naskapis et les Montagnais?

M. Bizier: J'ai rencontré les Naskapis dernièrement, on a tout simplement parlé de guides. On est d'accord; même, on a besoin d'eux à cause de leur expérience de la chasse, de la trappe et de la pêche. Ils connaissent sérieusement la région. En tout temps, on est prêt à s'asseoir avec eux et à discuter des possibilités d'intervenir ensemble. Eux vivent ici depuis 30 ans et nous aussi. Comme on a toujours vécu ensemble, on peut continuer de vivre ensemble, il n'y a rien là. C'est quasiment une nécessité aussi. Si l'on va dans la commercialisation du caribou, c'est absolument nécessaire d'avoir les Indiens aussi.

M. Chevrette: Cela quand vous...

M. Bizier: ...des Naskapis, soit les uns ou les autres.

M. Chevrette: ...c'est ce que j'allais vous demander comme complément, puisqu'il y a un engagement que les Montagnais aussi soient, même s'ils n'ont pas d'entente spécifique, consultés dans cette démarche.

M. Bizier: Certainement.

M. Chevrette: Je vous ai demandé tantôt de commenter la notion de festival.

M. Bizier: C'est une chose qui a déjà été essayée ici, le festival du caribou. Ceci a été essayé à deux reprises; à cause du manque de financement, ça n'a pas pu fonctionner. Il s'agirait de créer une publicité autour de la chasse et de la pêche au niveau national de façon à amener du tourisme ici. Si on veut amener du tourisme, il va falloir passer par la publicité, comme n'importe quelle autre organisation. En faisant un festival du caribou, à l'intérieur de la période de chasse, il pourrait y avoir des concours de panaches, de la qualité des panaches, et de toutes ces choses-là. Il pourrait y avoir beaucoup de rencontres sociales. Cela mettrait un contact entre les touristes et la population de la place.

M. Chevrette: Un dernier petit commentaire. Quand vous parlez de main-d'oeuvre spécialisée, je dois vous dire que l'entente Canada-Québec, qui a été signée dernièrement, nous permet justement d'organiser des cours de formation

professionnelle qui correspondent au besoin du milieu. De sorte que parmi les projets que vous soulignez, vous pourriez vous prévaloir de ces programmes de formation professionnelle pour préparer votre main-d'oeuvre en fonction du nouveau défi que nous avons tous à relever.

M. Bizier: On a fait une demande dans le but de former des guides spécialisés dans la taïga québécoise. Comme vous le savez, ici dans la région, quelqu'un qui s'aventure trop loin, s'il n'est pas bien formé... L'idéal serait de prendre des gens de la place qui connaissent parfaitement la région.

Si vous regardez les accidents qu'il y a eu dans le passé, les gens de Schefferville s'en sont toujours sortis. Ce sont des gens de l'extérieur qui ont des problèmes. On pourrait former des guides sur place, quitte à ouvrir une école de guides ici, par la suite. Cela créerait de l'emploi automatiquement.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. On aimerait se joindre aux autres afin de remercier les gens du groupe COSE d'avoir soumis leur mémoire. J'aurais quelques petites questions.

Lorsque vous parlez des problèmes de transport avec Québecair, est-ce que vos plaintes sont surtout basées sur les voyages spécialisés dans le temps de la chasse, ou si vous incluez aussi le transport aérien qui existe entre Sept-Îles, Schefferville et d'autres endroits au Québec?

M. Bizier: Actuellement, le premier défaut, c'est que Québecair ne se rend plus ici et c'est rendu qu'on voyage avec Air Schefferville, c'est peut-être une filiale, je n'en sais rien. Pendant le temps de la chasse, par exemple, ils arrivent avec des 737 ici, et c'est plein. Seulement, la qualité du service est moindre pour le prix. C'est très cher de se rendre à Montréal. Il y aurait lieu peut-être de mettre des avions nolisés, des voyages directs Montréal-Schefferville, Québec-Schefferville, cela diminuerait les coûts.

On sait très bien que ce qui coûte cher en avion, c'est de décoller et d'atterrir. Quand ils font la "run de lait", qu'on appelle, nous autres, ils partent de Montréal et arrêtent à Québec, Rimouski, Sept-Îles, Wabush et ils remontent jusqu'ici. Ils arrêtent partout. Ce n'est quand même pas plus loin, de Montréal à Schefferville, que de Montréal à Miami, mais quand ils font un vol direct de Montréal à Miami, cela coûte beaucoup moins cher.

M. Middlemiss: Maintenant, depuis combien d'années êtes-vous malheureux avec le service qui vous est rendu?

M. Bizier: Cela fait neuf ans que nous sommes ici et cela fait neuf ans que nous avons des problèmes avec eux. Il y a eu plusieurs plaintes portées.

M. Middlemiss: Si cela fait neuf ans, d'une part, depuis l'implication du gouvernement du Québec dans Québecair, est-ce que le service s'est amélioré?

M. Bizier: Je ne crois pas que le service ait été amélioré, non. Il n'était pas mieux avant et il n'est pas mieux actuellement.

M. Middlemiss: D'accord. Merci. Vous mentionnez que les coûts impliqués ainsi que les retards créent souvent une situation où les gens sont dégoûtés de venir à Schefferville. Est-ce que ceci se présente souvent, à toutes les saisons? Combien de fois par saison?

M. Bizier: Pendant la saison de la chasse et de la pêche, il n'y a pas plus de retards que pendant l'année courante. C'est la même chose. C'est souvent à cause de la température.

M. Middlemiss: Dans ce cas-là, est-ce que vous auriez des suggestions à faire pour que ce service soit amélioré?

M. Bizier: Qu'ils fassent des vols directs. Cela va faire diminuer les prix, tout au moins pour la période touristique. Cela diminuerait beaucoup les prix.

M. Middlemiss: En d'autres mots, si les gens viennent de Montréal ou de Québec, ce seraient des vols directs de Montréal ou de Québec à Schefferville, sans arrêt en cours de route?

M. Bizier: C'est cela.

M. Middlemiss: C'est tout pour le moment.

M. Bizier: Si d'autres ont de meilleures solutions... Québecair doit sûrement avoir des solutions...

Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci, M. le député. Merci aussi à M. Bizier, ainsi qu'aux personnes qui étaient avec vous, de vous être prêtés à l'exercice.

M. Bizier: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle maintenant le Comité des natifs de

Schefferville. Alors, si vous voulez vous présenter.

Comité des natifs de Schefferville

M. Scherrer (Rémi): Oui, nous représentons le Comité des natifs de Schefferville. Je suis le président, Rémi Scherrer. À ma droite, M. Daniel Plourde, vice-président. À ma gauche, Mme Jocelyne Lemay, secrétaire.

Notre but. Au départ, vu la jeunesse du comité et notre manque d'information, nous nous contenterons de faire ressortir la valeur de la présence de la génération québécoise née au Nouveau-Québec, afin de voir la grande importance de sa continuité.

Nous savons, et vous savez que nous sommes des gardiens de frontières. Schefferville ne contient pas que des mines de fer, il y a aussi la présence d'un peuple typiquement québécois. Des gens sont venus de tous les coins de la belle province et d'ailleurs. Ils y ont bâti le Nouveau-Québec et y ont élevé une famille.

Attiré ici par une compagnie qui fermera ses portes hypocritement, comme si elle ignorait totalement qu'une population dépendait d'elle, ce peuple ne peut mourir de la même façon qu'une poignée de mines. Il construit sa propre mentalité et, pour aucune considération, il ne devrait avoir à se disperser. (17 h 30)

Souvenez-vous de ceux qui ont tracé les lignes entre le Québec, le Labrador et Terre-Neuve. Ils l'ont fait à leur façon, de manière à tirer le plus de profits possible. Souvenez-vous aussi que, durant les dernières années, IOC n'a presque pas sorti de minerai provenant du Québec; donc, aucune redevance au trésor québécois. Nous sommes tous prêts à continuer l'oeuvre déjà commencée dans le but de garder notre coin de pays qui a déjà commencé à se faire gruger.

Regardons la province voisine à qui, jadis, on a donné la permission de débarquer sur notre territoire pour approvisionner ses bateaux en eau et en bois et qui, maintenant, se dit propriétaire de presque toutes nos richesses naturelles. Les natifs de Schefferville savent très bien que les citoyens du Québec ont déjà perdu le cinquième de leur province. Étant tous nés de pères pionniers, venant de tous les coins de pays, ayant comme première option le développement des richesses naturelles du Québec, nous attendons du gouvernement du Québec une aide qui remplacerait les promesses mensongères de la compagnie Iron Ore. Depuis deux bonnes générations, du travail et des avantages sont promis aux enfants des employés. Après avoir lancé ces belles paroles, la compagnie en question part sans crier gare, avec tous ses profits accumulés, laissant derrière elle une ville qui sent l'inquiétude et qui pue même la solitude, une ville pouvant abriter actuellement 5000 habitants, une ville qui s'est fait connaître par des gens bien de chez nous sous plusieurs aspects: entre autres, par le sport, le tourisme et les arts. De même, plusieurs grandes personnalités sont venues voir ce merveilleux coin de pays, du premier ministre à la reine d'Angleterre.

Nous sommes convaincus que le gouvernement du Québec, ses ministres et tous les députés, ceux de l'Opposition comme ceux au pouvoir, sauront voir la grande importance et surtout la nécessité de sauver Schefferville. Nous demandons que cette commission parlementaire tienne compte que les natifs forment les trois quarts de la population qui restera. Nous voulons d'abord du travail. Nous voulons aussi le droit d'acheter ou de louer les logements de la compagnie avec les mêmes privilèges que les employés de l'IOC qui sont nos pères. Nous voulons aussi l'amélioration des services sociaux, considérant que ceux-ci sont déjà très restreints. Nous voulons que le gouvernement du Québec fasse en sorte que nos richesses naturelles se développent. Nous demandons une ou plusieurs industries nouvelles, qui pourraient prendre la relève, une industrie qui pourrait donner espoir à l'industrie touristique, qui pourrait hausser l'économie de la région et celle du Québec, qui pourrait remettre sur pied tous les commerces de Schefferville, qui pourrait profiter aux PME et qui pourrait enfin mettre en branle divers projets.

Pour satisfaire à tous ces avantages socio-économiques et culturels, le comité des natifs appuie ici la demande d'implantation d'un ou de plusieurs casinos à Schefferville. Nous demandons donc au gouvernement du Québec d'étudier sérieusement cette possibilité très avantageuse. Le comité des natifs appuie aussi les projets suivants déjà en demande: le projet de villégiature, le projet de pisciculture, le projet d'élevage, le projet de festival et le projet hivernal.

Pour ce qui est des bénéficiaires de l'aide sociale, nous demandons, pour ceux de moins de 30 ans une somme additionnelle de 150 $ tous les quatre mois, une somme qui servirait à l'habillement et à divers besoins personnels.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous êtes prêts pour les questions?

Une voix: Non.

Le Président (M. Bordeleau): Bon, d'accord; allez-y, M. Scherrer.

M. Scherrer: On va parler un petit peu de la Compagnie minière IOC.

Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.

M. Scherrer: La compagnie minière, elle aussi, a convoqué hier une conférence de presse, pendant le mémoire du comité de citoyens. Et on voit tout de suite que c'est dans le but d'accaparer les journalistes, ce qui démontre une impolitesse et un manque de civisme éhontés de la part du président de cette compagnie minière, M. Mulroney.

De plus, on sait que ce mémoire, le mémoire du comité des citoyens, reflète les meilleures idées de tous nos citoyens. Ceci démontre que l'IOC veut garder le monopole sur tout ce qui se passe ici. Les conséquences de cela: dans le seul journal disponible aujourd'hui, un seul article est paru et c'est celui de M. Mulroney. C'est tout.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Scherrer. M. le député de Groulx et adjoint parlementaire aux Affaires municipales.

M. Fallu: Oui, M. le Président. En lisant la première version de votre mémoire, la semaine dernière, un mémoire signé par les "natifs de", j'avais l'impression de le lire en anglais et de lire "native from", c'est-à-dire les premiers habitants, les tout tout premiers habitants. Les "natifs", à ce moment-là, prend un sens qui est peut-être un anglicisme, mais un sens d'une très grande profondeur. Ce ne sont plus les résidents de, les exportés, les déportés, les gens qui sont allés faire la piastre, les gens qui sont allés sur les jobs un bout de temps et qui s'en retournent.

Vous êtes de la première génération de nordiques, de Québécois, de blancs nordiques; de ceux qui sont nés dans le Nord, de ceux qui ont vécu dans le Nord, qui sont adaptés au Nord. Vous formez donc une richesse de la première génération de richesse de la jeunesse québécoise nordique. Pour vous, les schèmes de référence ne sont plus l'endroit où vous êtes nés, quelque part en Beauce, en Gaspésie ou dans les Cantons de l'Est. Vos schèmes de référence maintenant sont nordiques. Vous avez, pour la société québécoise, des qualités que peu de Québécois blancs ont jusqu'à maintenant. Et cette richesse, je pense, va nous obliger à faire un certain nombre de choses que peut-être on n'avait pas vues collectivement, avant, parce qu'on s'était fié essentiellement à des sociétés privées pour faire le développement et la planification du Nord.

Vous dites d'ailleurs avec force, à l'avant-dernière page de votre mémoire: Nous attendons maintenant du gouvernement du Québec une aide qui remplacerait les promesses mensongères de la compagnie minière. Vous en êtes là. Vous aussi, vous vous étiez fiés au développement exponentiel, éternel quasiment. Je me souviens d'un de mes frères qui était venu ici et, lorsqu'il est revenu en 1958, il disait: "Avoir voulu rester, j'aurais pu élever mes enfants là". Bien, il aurait votre âge aujourd'hui, mais il serait dans la même situation que vous. Parce qu'à l'époque, tout le monde s'imaginait que c'était éternel.

Il y a des responsabilités qui n'ont pas été prises. Il va falloir que, collectivement, on fasse autre chose. Il y a une chose qui m'étonne à cette commission parlementaire, c'est qu'il y a des gens qui tiennent un langage similaire. Il y a le comité des citoyens, le groupe COSE, les natifs de Schefferville, et les groupes amérindiens. Ils tiennent tous le même langage. Qu'est-ce qu'on fait demain? Comment va-t-on, non pas survivre, mais continuer à vivre et se développer? C'est assez frappant de voir cette similitude de pensée entre notamment les Amérindiens et vous. Vous êtes en fait les natifs, ceux qui avez envie de vivre dans le Nord. J'aurais deux questions précises à poser. Vous exigez le droit de rachat de maisons - c'est même émouvant, parce que je croyais entendre "maison paternelle" pour ainsi dire - vous qui n'êtes pas personnellement employés de la minière. Est-ce que vous avez déjà exprimé ce voeu ailleurs qu'ici?

M. Scherrer: Non. On n'avait pas la chance. On a la chance de se faire entendre et on en profite pour le demander.

M. Fallu: Donc, qui veut l'entendre, l'entende. Quant aux services sociaux, vous en demandez l'amélioration. Est-ce que, pour vous, il y a une traduction en termes de quantité ou de qualité qui vous vient à l'esprit, à prime abord?

M. Scherrer: Dans les services sociaux, nous avons les avions dont M. Bizier a parlé tantôt. On a aussi le train. On sait tous qu'il faut environ 10 heures pour se rendre à Sept-Îles. Il faut un habit de motoneige pour monter à bord. Ce n'est pas chauffé.

M. Fallu: Mais c'est commode pour conserver les caribous, l'automne. On n'a pas besoin de wagons réfrigérés pour conserver les caribous à bord du train.

M. Scherrer: Pas du tout. On les met sur les bancs et ils congèlent.

M. Fallu: Quels sont les autres services, vous parlez de services sociaux notamment?

M. Scherrer: II y a tout le point sportif de la ville. Le centre sportif est fermé. Il y a plein de jeunes à l'école à qui cela manque. Il y a même les moins jeunes et les plus vieux.

M. Fallu: Si vous aviez des recommandations à faire par rapport aux services qui ont été fermés, on sait que sur six gros services il y en a trois qui ont été fermés...

M. Scherrer: L'amélioration des services sociaux.

M. Fallu: Pas nécessairement la réouverture de l'un ou de l'autre.

M. Scherrer: C'est l'amélioration. Actuellement le centre est fermé. Si on l'ouvre, cela améliorera les choses.

M. Fallu: D'accord. On va s'adresser au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, notamment pour cela. Il a fait quelques ouvertures hier. Mais n'ayant pas assisté à la conférence de presse tout à l'heure, je ne sais pas à quoi il s'est engagé exactement. Je vous remercie. C'était un témoignage extrêmement émouvant. Je pense que cela nous rappelle les obligations que toute la société québécoise a, à votre égard. Merci.

M. Scherrer: Écoutez...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Laurier.

M. Sirros: J'aimerais d'abord féliciter le Comité des natifs de Schefferville pour la présentation qu'il a faite. Je pense que cela a été un effort très louable, une initiative très louable, surtout venant des gens qui sont nés ici et qui ont le goût et le désir d'y rester. Je vous ferai remarquer - vous étiez probablement dans la salle tout à l'heure quand le ministre Chevrette a parlé clairement du projet de casino et je pense avec justesse et raison - qu'il faudrait peut-être se tourner vers des choses un peu plus possibles ou réalistes étant donné ce qu'on a connu ici, jusqu'à maintenant, avec ce genre de projets. Je n'ai pas de questions précises.

Je suis venu dans la région pour la première fois de ma vie. Ce que je vois finalement, c'est une ville qui s'est vidée à 75% et qui, dans l'espace de trois mois, se trouve dépourvue de toute possibilité d'avenir pour l'instant avec une ferveur très tenace de rester ici et de chercher quelque chose à faire pour maintenir la vie de la ville. Je ne peux, à ce moment-là, qu'essayer de soutenir et inciter le gouvernement à être beaucoup plus près. Je réitère ce que j'ai dit, hier, et ce qu'on a dit aujourd'hui en conférence de presse, soit que j'aurais cru que, dès le moment où la compagnie a annoncé que sa mine fermait et où on a constaté que 75% de la population était disparue - et c'était très prévisible à ce moment-là - il aurait dû y avoir une présence immédiate auprès des citoyens qui tiennent à rester ici, qui tiennent à chercher d'autres vocations pour leur ville. (17 h 45)

Encore une fois je souligne et je crois que le gouvernement devrait prendre l'engagement formel, aujourd'hui, d'envoyer quelqu'un sur place avec de pleins pouvoirs pour faire des recommandations concernant une enveloppe budgétaire globale qui pourrait être mise à la disposition des citoyens pour faire ce que le comité de citoyens disait hier: offrir le choix aux citoyens qui sont ici soit de rester, soit de quitter. Mais il faudrait, de toute façon, que le gouvernement assume cette responsabilité auprès des citoyens de la ville.

On a passé beaucoup de temps, pendant deux jours, à parler de toutes sortes de choses. On a parlé beaucoup moins des problèmes immédiats que vivent les gens qui sont encore ici. Ce matin, on a fait un débat sur le licenciement collectif, etc., etc. C'est un débat qu'il faut faire mais je me demande si c'était l'endroit pour le faire ici, étant donné qu'il y a des gens qui vivent, à l'heure actuelle, sans une perspective d'avenir. On met de l'avant tout ce qu'on peut, des casinos, n'importe quoi. Je ne dis pas n'importe quoi dans le sens que cela ne vaut pas beaucoup mais dans le sens que c'est un effort très louable et que les gens qui tiennent à leur ville cherchent une solution. Je redis que je pense que l'appareil de l'État devrait les appuyer dans ce sens-là. J'arrêterai là, M. le Président, merci.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le député de Laurier. Un dernier petit commentaire M. Scherrer?

M. Scherrer: Je vais revenir encore sur la compagnie. Je pensais que vous alliez me demander pourquoi je disais qu'elle avait fermé hypocritement. Vous ne l'avez pas fait, je vais vous le dire quand même. Si elle avait été franche et honnête, elle aurait carrément averti de sa fermeture à Schefferville il y a au moins un an et demi ou deux ans. En plus, M. Mulroney aurait dû s'asseoir avec la population pour lui faire savoir ses intentions afin de négocier avec la population. Donc, l'information a été complètement cachée de sa part.

Le Président (M. Bordeleau): Un dernier petit mot de conclusion, M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: M. Scherrer, je voudrais simplement vous rappeler que, quand vous mentionnez "sans aucune agressivité", vous vous attendiez qu'on pose cette question-là. On l'a posée tout au cours des travaux de cette commission. On l'a posée en

conférence de presse et on a toujours mentionné, quant à nous, qu'il est pour le moins curieux qu'on ait attendu trois mois pour annoncer des mesures de "réparation". La même question, toujours fondamentale quant à nous, a été exposée et surexposée et ce sera toujours, d'après nous, la responsabilité du gouvernement de chercher davantage à avoir de meilleurs éléments de réponse que ceux que nous avons eus, au moins pour cette partie-là, par rapport à une fermeture beaucoup trop abrupte, où on n'a pas la conviction de toutes les justifications. En plus de cela, on a la conviction - et je vais y revenir en conclusion à la fin des audiences - que pour certaines compensations ou certains choix qu'on demande aux citoyens et citoyennes de Schefferville de faire, nous sommes conscients que les délais sont trop courts. Dans ce sens-là, nous allons solliciter, auprès de la minière, une reconsidération de ces délais.

M. Scherrer: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Scherrer de vous être présenté devant la commission.

M. Scherrer: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): J'appelle maintenant le Père Marcel Mongeau. M. Mongeau, si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous.

Père Marcel Mongeau, o.m.i.

M. Mongeau: À ma droite, Mgr Peter Sutton, évêque de Schefferville, Labrador-Schefferville; Marie Saintonge, Montagnaise qui représente la communauté des Montagnais; Vital Simard, professeur au secondaire. À ma gauche, il y a Erika Guertin, épouse d'un travailleur de l'IOC qui est dans le groupe des Catholic Women's League; Blandine Rondeau, professeur au primaire, à l'élémentaire; Laurent Canuel, travailleur pendant 25 ans pour la compagnie IOC.

Cela fait drôle de prendre la parole après les jeunes natifs de Schefferville qui ont tous été baptisés dans notre église.

Schefferville est devenue un symbole pour le Québec. La dramatique vécue à Schefferville a déjà fait la manchette des mass médias et nous n'avons pas à en faire la présentation dans le contexte des auditions de la présente commission. Une chose est cependant certaine: les solutions à apporter deviennent de première importance pour que des populations retrouvent la confiance dans les institutions gouvernementales et socio-économiques. Sans responsabilité de sa part, une communauté devient victime d'un effritement d'importance. Ce phénomène se produit après des années vécues loin des grands centres et malgré toute une étape de vie consacrée au développement d'un territoire qu'on avait dit plein d'espoir et pour longtemps.

Par les gens concernés, tant d'efforts ont été faits pour un centre important d'exploitation minière! Après avoir quitté un milieu, ces gens ont créé des liens, trouvé des solidarités et vécu des responsabilités sociales et économiques. C'est un événement pénible que nous avons à vivre présentement. Cette appartenance sociale, à refaire ailleurs par un grand nombre, comporte bien des entraves, lorsque l'emploi est si rare dans le Sud, et est encore plus difficile pour ceux qui dépassent 40, 45, 50 ans. Les chrétiens engagés dans la pastorale d'église ne peuvent rester indifférents à une telle situation, et pas davantage leur pasteur. L'église catholique est présente depuis très longtemps au Nouveau-Québec. Les Inuits, les Indiens, les populations de la Côte-Nord, les travailleurs de tous les métiers ont reconnu ses oeuvres d'éducation, de bienfaisance et de témoignage chrétien bien avant l'arrivée des prospecteurs.

Notre ville doit son nom à l'un de ses pionniers, Mgr Lionel Scheffer, avec qui nous avons travaillé pendant quinze ans. À Schefferville, Labrador City et Sept-Îles, les missionnaires Oblats de Marie-Immaculée ont contribué à une vie communautaire nourrie par des relations mutuelles de collaboration et de bonne entente. La justice sociale envers tous, sans distinction de race et de religion, a toujours été une de leurs préoccupations majeures. Ce mémoire veut être un écho fidèle des nombreuses voix des gens de Schefferville avec qui nous vivons, personnellement, depuis dix ans, mais Schefferville où je viens depuis une vingtaine d'années, 25 ans, et où les missionnaires ont pris racines depuis 25 à 30 ans. La rédaction de ce mémoire a été précédée de consultations, en particulier, avec des Oblats et des membres de l'Office de la pastorle sociale du diocèse de Québec. Ce mémoire est fait principalement de recommandations.

Première recommandation: de justes compensations. Attendu que le plus grand nombre des travailleurs concernés étaient devenus spécialisés; attendu, en raison de la rareté de l'emploi dans les autres milieux de la province et de l'âge des ouvriers, les difficultés de trouver un emploi et les risques de changer entièrement d'emploi pour une deuxième ou troisième carrière; attendu que les frais de déplacement et de réinstallation ailleurs sont considérables, exorbitants; attendu que des économies ont été réalisées dans des conditions particulièrement difficiles; attendu que tous les citoyens employés directement ou non de l'Iron Ore, de la Compagnie minière IOC, ont contribué au bien-être de notre ville minière;

nous recommandons trois choses:

Premièrement, de justes compensations pour toutes les personnes impliquées; deuxièmement, nous recommandons qu'on évite les négociations dans lesquelles les individus sont isolés et en position de faiblesse - on a appelé cela des négociations à la pièce - troisièmement, que les compensations soient pondérées et sans discrimination à l'endroit de ceux qui n'étaient pas directement employés de la Compagnie minière IOC.

Deuxième groupe de recommandations. En titre, les responsabilités partagées. Attendu les avantages fiscaux consentis par les gouvernements pendant les premières années de fonctionnement; attendu le coût minime négocié pour l'exploitation du minerai pendant plusieurs années d'exploitation; attendu les bénéfices accumulés pendant environ 20-25 ans; attendu le bon renom de la Compagnie minière IOC en matière de justice pendant toute cette durée - renom qu'elle veut d'ailleurs conserver - nous recommandons trois choses: Que la Compagnie minière IOC apporte de justes compensations à la population touchée par les événements actuels; que la Compagnie minière IOC, en collaboration avec les paliers gouvernementaux, apporte une généreuse contribution, afin d'atténuer les coûts sociaux entraînés par l'arrêt de l'exploitation du fer dans la région; troisièmement, que la Compagnie minière IOC facilite les ententes qui assurent la continuation des services à des coûts raisonnables et rende possible l'application de nos recommandations.

Troisième groupe de recommandations. Pour ceux qui restent, attendu que certains citoyens choisiront de demeurer à Schefferville, par devoir, par obligation ou par décision personnelle; attendu que ces personnes auront besoin d'un gîte et de certains services, nous recommandons six points: Nous recommandons le maintien de services aériens et ferroviaires adéquats. Nous recommandons le maintien des services hydroélectriques. Nous recommandons les services communautaires essentiels qui ont déjà été énumérés. Nous recommandons que les services mentionnés soient fournis à des conditions abordables à des tarifs comparables à ceux des autres centres de la province. Nous recommandons que la compagnie reconsidère encore son ultimatum décrétant qu'on libère ses maisons pour le 1er juillet - aujourd'hui, on a dit le 1er août. Nous recommandons que l'accessibilité à ces immeubles soit favorisée pour la population qui demeurera à Schefferville. (18 heures)

Quatrième groupe de recommandations. Droits, concertation et solidarité. Attendu que le droit élémentaire de tous à l'information sur les questions qui les concernent; attendu qu'aucune décision, dans la situation présente, ne devrait se prendre sans la participation des populations concernées; attendu et tenant compte des exigences d'une vraie solidarité au sein d'un population composée de travailleurs et d'autochtones Montagnais et Naskapis; attendu que des décisions justes seront possibles seulement avec la participation des différents groupes et institutions; attendu que des rumeurs insécurisantes polluent l'atmosphère et plongent une population dans le marasme; nous recommandons trois choses: Qu'un réseau efficace d'échange de communication et d'information soit mis sur pied dans les plus brefs délais; qu'un mécanisme adéquat de concertation soit aménagé entre les différentes populations locales concernées et que des liens constants soient maintenus avec les différentes instances gouvernementales, la Compagnie minière IOC et les représentants des groupes et des institutions de Schefferville. Nous sommes déjà rendus à la conclusion un peu sentimentale.

En terminant, je ne peux résister à vous faire part de quelques idées qui me sont chères et qui me reviennent à l'esprit très souvent depuis le 2 ou le 3 novembre 1982. Premièrement, nous espérons, dans la conjoncture actuelle, que les hommes, les femmes et les enfants seront traités dignement en prévision d'heureux lendemains. Deuxièmement, dans l'option de solutions de rechange et d'alternatives, je souhaite qu'on tienne compte des coûts sociaux qui en découleraient et qu'on donne priorité aux valeurs humaines en jeu. Par valeurs humaines, nous entendons l'honorabilité et la valorisation du travail, l'importance et le prix de la vie familiale, et une attention primordiale et prioritaire à la jeunesse et au Québec de l'avenir. Troisièmement, dans les projets de travaux à Schefferville, je souhaite que l'on se préoccupe de réalisations utiles, productives et créatrices.

Quatrièmement, en union avec la communauté chrétienne, je fais appel à un véritable esprit de solidarité qui marque déjà profondément la population de Schefferville. Les épreuves et l'angoisse actuelles ont contribué à rapprocher encore davantage les familles. Elles méritent notre admiration. Qu'elles soient imitées aux divers échelons de notre société par les gens de bonne volonté qui veulent sincèrement le bonheur et le progrès de notre société québécoise.

C'est notre communiqué. Nous avons bien l'impression que ces phrases sont peut-être intellectuelles plus qu'autre chose, mais ce sont les principes qui ont été amplement développés par les autres mémoires.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Mongeau.

Période de questions et de commentai-

res. M. le ministre au Développement régional.

M. Gendron: Mgr l'évêque, M. le vicaire général, autres membres de la communauté chrétienne, je voudrais, comme on l'a fait pour les autres, vous remercier d'avoir cru opportun de vous exprimer au nom de votre communauté, à la suite des difficultés que nous analysons depuis deux jours. Je suis convaincu que la population de Schefferville souhaitait effectivement que les dirigeants de sa communauté chrétienne puissent également s'associer à tous ceux qui voulaient exprimer des considérations et des points de vue. Vous parliez d'une analyse rapide, lorsque vous mentionniez tantôt qu'il s'agirait peut-être de considérations à caractère plus sensible; je crois, au contraire, que vous avez développé, succinctement j'en conviens, mais avec passablement d'exactitude des points importants qui avaient été d'ailleurs soulignés dans la plupart des autres mémoires. Lorsqu'on se donne la peine d'analyser votre mémoire et d'en faire un certain résumé, on constate que vous touchez des points sur lesquels les porte-parole du gouvernement ont déjà fait des commentaires ou donné certaines assurances qui nous apparaissent ultimement requises.

Je voudrais prendre quelques minutes pour relever quelques points, avant d'en arriver à une question ou deux. Lorsque vous dites que, face à un problème comme celui que votre population vit, la meilleure concertation possible entre tous les intervenants est requise, je pense que vous rejoignez une des préoccupations que nous avons. Depuis deux jours, on a parlé beaucoup de la nécessité d'une grande concertation pour faire face aux difficultés.

Vous dites également qu'il est important d'éviter que, dans une telle situation, les négociations se fassent sur une base individuelle ou dans un rapport de faiblesse, parce que c'est souvent ce que cela veut dire dans un contexte comme celui-là. Il faut toujours envisager que toutes les personnes soient traitées avec le plus d'équité possible. C'est pourquoi nous avons retenu la suggestion qui nous a été faite à plusieurs reprises d'envisager qu'une personne-ressource - certains ont parlé d'un médiateur, mais peu importe le nom - puisse venir dans les meilleurs délais et qu'une équipe de travail puisse réévaluer et apprécier davantage les éléments de réparation qui ont été suggérés par la minière IOC pour s'assurer que l'ensemble des citoyens et des citoyennes y trouve une forme de compensation équitable.

Il y a également un autre point de votre analyse qu'il est important de faire ressortir. Cela va en contradiction avec ce qu'on a entendu de la part de l'Opposition à plusieurs reprises qui aurait souhaité que nous soyons en mesure, en tant que gouvernement, de donner suite dès aujourd'hui à une série de mesures qui étaient suggérées dans les mémoires, alors que vous, vous parlez de faire une analyse sérieuse, en termes de coûts, des éléments de rechange ou des projets envisagés. Vous mentionnez très concrètement dans votre mémoire la nécessité que les coûts sociaux et humains des solutions de rechange soient évalués sérieusement. Je pense que cela fait responsable et c'était dans ce sens qu'il nous apparaissait non approprié d'arriver ici rapidement avec une partie du trésor québécois et de dire, sur le bras, comme cela, que nous pourrions donner suite à une série de mesures.

Bien sûr, on serait probablement plus populaire, on serait probablement plus applaudi dans la salle si on pouvait donner, dès aujourd'hui, une série de réponses qu'on n'aurait pas eu le temps de chiffrer, qu'on n'aurait pas eu le temps d'évaluer. On ne serait pas en mesure tout de suite d'établir la manière dont cela pourrait arriver dans votre milieu en vous donnant la conviction que ce sont des choses qui permettraient de garantir un peu mieux votre avenir. C'est pour cela qu'il va falloir analyser toutes ces choses et, dans ce sens, lorsque vous faites des références comme celles-là dans votre mémoire, on est tout à fait d'accord.

Vous parlez également de reconsidérer l'ultimatum qui a été décrété par la minière IOC, particulièrement là où il y a des délais assez courts dans le temps. Il y a une bonne part de délais pour certaines situations - je n'ai pas à les rappeler, vous les connaissez beaucoup mieux que moi, puisque c'est vous, malheureusement, qui avez à les vivre - au 1er juillet 1983. Dans ce sens, on a rappelé à plusieurs reprises qu'on trouverait plus équitable, plus juste et beaucoup plus normal d'envisager effectivement une reconsidération. Nous, on l'exige. On va continuer de l'exiger pour que les citoyens et les citoyennes puissent faire des choix en meilleure connaissance de cause. Donc, on est tout à fait d'accord sur cette recommandation.

Enfin, strictement un autre commentaire important que vous faisiez. Que les services publics et communautaires soient maintenus à des coûts abordables. Encore là, je trouvais que c'était une recommandation qui était teintée d'un sain réalisme. J'ai dit dès l'ouverture que, pour ce qui est du gouvernement du Québec, il est certain que tout sera mis en oeuvre pour qu'on maintienne des services de qualité sur le plan éducatif, sur le plan des conditions de santé et sur le plan de certaines activités de loisirs normales, mais en regardant cela par rapport à ce que j'appellerais, moi, l'évolution démographique. Et, dans ce sens-là, c'est pour faire référence effectivement

aux coûts.

J'aurais en terminant, parce que je ne veux pas être trop long, une seule question mais elle m'apparaît valable. Il y en a plusieurs qui l'ont évoquée. J'aimerais cela avoir votre propre évaluation. Vous avez parlé dans votre mémoire, à plusieurs reprises, d'avoir des compensations pour ceux qu'on appelle "les indirectement touchés", que ce soient les commençants, les citoyens. Nous dans notre jargon on dit: Toutes les personnes en dehors du "payroll" de la minière IOC. J'aimerais que vous puissiez peut-être nous donner quelques balises, quelques critères, faire une courte réflexion, comment vous voyez cette forme de compensation, surtout si vous aviez à la chiffrer, comment cela devrait être de tel ordre plutôt que de tel autre.

M. Mongeau: Vous touchez là un point difficile à résoudre. Quand même, nous ne sommes pas dans une grande ville, comparable à Labrador City, Wabush. Surtout, plusieurs de ces gens-là, qui étaient, on pourrait dire marginaux par rapport à la minière IOC, sont déjà partis. Il reste plusieurs classes de gens, comme professeurs, attachés à l'hôpital ou employés municipaux, commerçants. Ces gens-là, je crois, s'attendent à une attention individuelle. Chaque cas serait à résoudre en particulier. C'est là qu'entrerait en oeuvre le rôle de quelqu'un, d'un comité de concertation et de décision. Ce n'est pas facile de fixer la compensation à donner à chacun.

On ne peut pas s'attendre non plus que la compagnie minière soit intéressée à aider ces gens-là sur le même pied que ses propres employés. Qu'elle contribue proportionnellement à chaque individu selon une norme fixée, mais elle se doit de contribuer pour aider ces gens-là soit à partir, soit à rester.

Vous savez peut-être justement ce qu'on mentionnait, on a donné un communiqué à plusieurs sur le départ des employés d'Uranium City. On a fixé un montant, on les a transportés d'Uranium City à Saskatoon par avion, s'il vous plaît, gratuitement. Rendu à Saskatoon, on leur a donné 9000 $. C'est un beau chiffre, un exemple à dépasser.

M. Gendron: Je vous remercie, M. le vicaire général.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député d'Outremont. (18 h 15)

M. Fortier: Mon père, au nom de l'Opposition officielle, j'aimerais vous féliciter de vous être engagé dans cette présentation aujourd'hui. Il semblerait que l'exemple vient de haut puisqu'on entend de plus en plus les autorités religieuses et les communautés chrétiennes s'exprimer.

Dernièrement, les évêques canadiens se sont exprimés sur les politiques économiques canadiennes. Ils ont animé le débat dans la bonne direction, je crois, pour s'assurer que les travailleurs auraient des emplois et que les politiques gouvernementales iraient dans la bonne direction. Aujourd'hui, je vois que la communauté chrétienne désire encore s'exprimer publiquement. Peut-être que cette façon de faire diffère de celle qui prévalait il y a de nombreuses années. Je crois que c'est dans le meilleur sens de la vivacité de la démocratie.

Nous avons pris bonne note de vos recommandations quant aux justes compensations pour les responsabilités partagées pour ceux qui restent, ainsi que les droits, concertation et solidarité. Je vois, à la fin du mémoire, que vous avez déjà fait parvenir une copie de votre mémoire à M. Mulroney. Je crois que vous l'avez fait, il y a quelque temps déjà. Est-ce qu'on pourrait vous demander si, depuis l'envoi de la copie de votre mémoire, vous avez reçu des réponses de M. Mulroney lui-même, et si vous avez eu des indications quant à l'acceptation de quelques-unes de vos recommandations?

M. Mongeau: M. Mulroney ne m'a donné encore aucune réponse. Mais je pense que M. Mulroney est très sensible aux bonnes relations et aux bonnes manières. Je pense qu'il veut être bien accueilli. Il veut que les compagnies qui investissent leurs capitaux soient bien accueillies dans la province.

M. Fortier: ...à part cela. Catholique.

M. Mongeau: Oui, mais d'origine bien québécoise et catholique. Alors, je lui ai envoyé le mémoire. Il ne m'a pas répondu. Mais je pense bien qu'il l'a accueilli avec attention. On compte bien sur ses bonnes manières et sur ses bonnes relations avec toute la population de Schefferville, comme il s'attend qu'on en ait pour les compagnies qui viennent investir chez nous.

M. Fortier: D'ailleurs, je note dans votre mémoire que vous dites que la compagnie avait quand même une bonne réputation et que, d'après vous, elle voudrait la garder. J'espère que c'est un gage que votre mémoire va être entendu et que les demandes qui y sont formulées, non seulement pour les employés, mais pour les autres également, vont trouver des solutions aux problèmes de ces personnes qui doivent les affronter dans les semaines qui viennent. Je vous remercie.

M. Mongeau: J'aurais encore un mot à dire.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Mongeau.

M. Mongeau: M. le ministre - de je ne sais pas quoi - tout à l'heure, vous avez fait allusion à une phrase de mon mémoire. J'ai peur que vous vous gargarisiez et que vous disiez qu'on a le temps. Il nous l'a dit dans son mémoire: On a bien le temps. On va apporter cela à Québec. Là, cela va s'empiler par-dessus les autres papiers. Puis, cela va durer longtemps. Il faut analyser cela.

Une voix: Tu as voulu faire de la politique!

M. Fortier: Mon père, je n'ai pas voulu.

J'avais l'intention de le faire et je ne l'ai pas fait parce que je ne voulais pas faire de politique avec cela.

M. Mongeau: C'est la première fois que vous perdez votre chance. Parce que, dans les deux jours qu'on a passés ici, je voulais justement - ce n'est peut-être pas la place -mais, en tout cas, je voulais vous souligner cela. J'ai dit à votre président, en privé, de faire une évaluation de nos réunions, que les allusions politiques étaient une déformation professionnelle. Vous ne pouvez y échapper. Mais, quand même, il y en avait peut-être trop dans une assemblée comme la nôtre. Vous êtes venus entendre et c'est ce qu'on a voulu, que vous écoutiez. On a été heureux aussi de vous entendre, même si vous n'étiez pas tellement limités. Vous avez parlé et, au bout du compte, on a acquis bien des choses.

Alors, je reviens un peu sur l'allusion. On était bien d'accord que l'analyse se ferait avec attention et réflexion. Mais on ne voudrait pas que cela dure trop longtemps. C'est notre grand voeu, qu'il y ait des signes de vie de la part du gouvernement du Québec.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre délégué à l'Aménagement et au Développement régional.

M. Gendron: Oui, M. le vicaire, je voudrais dire une chose. Si vous aviez effectivement la conviction que j'allais me gargariser en laissant voir qu'on a tout le temps devant nous, vous avez bien fait de revenir à la charge et de me préciser tout de suite que ce n'était pas dans ce sens que vous parliez de prendre le temps d'analyser les impacts des coûts sociaux. Je ne sais pas à quelle heure est votre prochain office, mais si vous avez l'occasion de rester ici pour entendre la conclusion, vous verrez qu'à certains endroits, quant à certaines décisions que nous pensons pouvoir prendre dès aujourd'hui, on va placer des échéanciers précis.

On ne s'est pas déplacés pendant deux jours pour venir rencontrer la population et lui dire que selon la suggestion de l'Opposition, nous allons faire une autre commission parlementaire dans un an pour voir si on a donné suite à quelques-unes de vos recommandations. Je pense que vous méritez plus que cela et nous allons tout mettre en oeuvre pour ne pas retarder les choses qu'on peut mettre en place tout de suite. Par contre, on ne peut pas rebâtir l'économie d'une ville qui était sur un concept monoindustriel, avec une seule entreprise, du jour au lendemain, et être crédible devant une population responsable.

Mgr Sutton (Peter): M. le Président, si vous permettez un mot à un autre Irlandais, je crois, catholique...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Mgr Sutton: Un peu en retard, je voulais vous souhaiter la bienvenue dans ce coin du diocèse qui n'est pas des plus petits. Il mesure une fois et demi la grandeur de la France. Vous savez bien que dans la chancellerie, c'est un peu comme au gouvernement, les papiers se tassent. Dernièrement, quand un groupe d'évêques canadiens ont fait une déclaration au pays, de tous les coins il y a eu des réactions. Entre autres, les évêques du Québec ont donné leur appui à ce document. Nous croyons que c'est un peu un reflet de ce que nous faisons aujourd'hui. Cela ne s'est pas fait automatiquement; on parle des gens et non pas des bâtisses et des institutions. On parle de souffrance et d'angoisse, de questions que se posent les gens de chez nous.

Nous tenons à vous remercier d'être venus chez nous. En passant, vous pouvez arrêter de l'autre côté de la frontière, comme c'est défini. Nous vous souhaitons un bon voyage ce soir. On vous a donné du mauvais temps en arrivant pour que vous goûtiez au pays, pour ceux qui ont fait du "jogging" à l'heure du midi. Le beau temps est garanti pour le retour dans le sud. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mgr Sutton, ainsi que le Père Mongeau, de vous être présentés devant cette commission pour nous faire part de vos bonnes paroles. Merci beaucoup.

J'appelle donc maintenant le groupe suivant, les Conspirateurs de l'an 2000. Je les inviterais à prendre place à l'avant. Je demanderais à celui qui va présenter le mémoire de s'asseoir de ce côté pour faciliter le jeu des caméras.

Je reconnais M. Gilles Baril, en tout cas, en compagnie d'autres personnes.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Térniscamingue): Vous n'avez pas le choix!

M. Fortier: On le connaît jusqu'à preuve du contraire.

Conspirateurs de l'an 2000

Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez nous présenter les personnes qui sont avec vous, M. Baril.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Oui, à mon extrême gauche, M. Roger Falardeau, industriel, Mme Monique Lemen, de Clarke-City; à mon extrême droite, M. Guy Rousset, Mme Nicole Blackburn, M. Michel Champagne, maire de Saint-Séverin-de-Proulxville, dans le comté de Laviolette, il y a M. Sylvain Vaugeois, qui n'est pas arrivé, et M. Serge Moussaly, docteur et responsable de l'équipe de recherche à l'Université du Moyen-Nord, à l'UQAC, à l'Université du Québec à Chicoutimi. Donc, sans plus tarder - je suis persuadé d'ailleurs que les gens sont intéressés à nous entendre - nous allons commencer.

Membres de la commission, population de Schefferville, communautés autochtones, jeunes du Nord et jeunes du Québec, je parle au nom des Conspirateurs de l'an 2000. C'est une corporation de jeunes et de moins jeunes, d'hommes et de femmes, de syndiqués et de non-syndiqués, de travailleurs et de chômeurs, bref des gens de tous les milieux, de toutes les couches sociales et de toutes les régions qui ont ceci en commun: ils ont une ferme volonté d'aller au-delà des chicanes de partis politiques ou des guerres idéologiques, ils ont cette ferme volonté positive, acharnée et constructive de travailler ensemble pour bâtir l'avenir.

Ils sont Conspirateurs de l'an 2000, car ils ne veulent pas d'un mode de développement trop contraignant pour l'avenir. Ils sont conspirateurs car ils veulent participer avec d'autres à corriger cette trajectoire qui mine notre sous-sol sous nos pieds, sans respect de nos lendemains. L'euphorie des salaires doit désormais céder la place à la lucidité. Aujourd'hui, un exemple criant sonne l'alarme sur un mode de développement québécois ou plutôt sur un mode d'exploitation du Québec plus ou moins révolu. Schefferville se meurt, demain d'autres situations criantes risquent de plonger encore des populations dans la grande noirceur.

Si nous sommes ici, vous comprendrez que ce n'est pas à cause du seul problème de Schefferville, mais aussi à cause d'un Québec que certains qualifient de sans espoir à cause d'un Nord qui se perd, à cause d'une jeunesse qui a besoin d'action, qui est sans emploi et qui aspire à l'espoir d'une vie nouvelle. Nous pensons que tous les mémoires présentés ici sont en accord avec nous pour dire que ce vieux modèle, hérité du duplessisme, doit se rajeunir, sinon être réinventé selon d'autres valeurs, d'autres intérêts.

Parallèlement, les jeunes du Québec -et d'abord ceux du Moyen-Nord québécois -ont besoin d'être valorisés, non pas dans des programmes de rempotage de fleurs ou de balayage en usine sur le bord de la fermeture, mais dans des secteurs où ils auront la ferme conviction de travailler à ces objectifs nobles de redressement de l'économie et de l'équilibre social.

Ce défi - car seul un défi peut relancer à la fois le Nord et la jeunesse -nous devons le relever ici même, à Schefferville, pour ensuite le propulser à l'ensemble des villes qui en auront, tôt ou tard, le plus grand besoin.

Le service civil nordique que nous proposons, et que nous préférons appeler le nouveau défi québécois, nous semble la juste mesure pour répondre à deux urgences nationales: c'est-à-dire relever le défi du Nord et parier sur la jeunesse pour relancer l'espoir des jeunes et du Québec.

Je voudrais quand même faire une mise au point sur la question du service civil nordique proposé par les Conspirateurs de l'an 2000. Le service civil nordique n'est pas militaire, n'est pas un cadre pour des délinquants et n'est surtout pas une Sibérie québécoise, comme se sont amusés à le dire certains journalistes de notre presse québécoise. Le succès du service civil nordique repose sur le potentiel et la qualification de sa jeunesse, sa capacité technologique mise au point par ses chercheurs et ses universitaires, sa capacité administrative et financière pour reconvertir ses structures et faire face aux nouvelles exigences du développement des années quatre-vingt et l'expérience et la renommée de ses professionnels dans beaucoup de domaines d'avant-garde par ailleurs.

Le cadre d'intervention. Nous proposons une reconversion économique, politique et culturelle en développant un modèle alternatif, jusqu'à la relance probable de l'industrie minière à partir de 1985 et bien au-delà, qui permettrait de vivre et de bien vivre dans un autre contexte, aussi bien ici qu'à Rouyn-Noranda.

À court et moyen terme, il faut assurer la viabilité de la ville localisée au centre du bassin du Labrador. Il faut propulser le développement pour l'ensemble du secteur des ressources minières et touristiques. (18 h 30)

À long terme, nos projets s'inscrivent dans le cadre d'une nouvelle stratégie de développement pour le Québec tout entier par la voie du développement nordique.

Tout en étant conscients des difficultés

financières et économiques qui limitent la liberté de manoeuvre du gouvernement du Québec, nous considérons que les pertes partielles ou totales des villes concernées sont trop énormes à tous points de vue: pertes en coût du capital existant à Schefferville, pertes en coûts sociaux, pertes au niveau des réactions en chaîne que provoque la fermeture de Schefferville, et cela, notamment, jusqu'à Sept-Îles.

Trois éléments sont décisifs pour le développement du projet de service civil nordique: l'utilisation des équipements disponibles; la possibilité pour les jeunes de vivre une expérience nordique dans le domaine de leur compétence et d'acquérir une expérience pluridisciplinaire indispensable à leur épanouissement; troisièmement, permettre aux populations concernées de lancer des projets et de participer activement à leur évolution. Les objectifs du service civil nordique, c'est-à-dire le nouveau défi québécois sont: proposer aux populations des villes touchées des solutions durables; expérimenter un nouveau cadre de vie, professionnel, économique, éducatif, social et de loisirs; mettre en valeur de façon appliquée les acquis technologiques des centres de recherche nordiques avec la volonté d'une partie de la jeunesse québécoise de bâtir un espace nouveau répondant à ses aspirations de développement et de contribution active à la collectivité.

Pour ce faire, nous proposons l'implantation de trois catégories de projets spécifiques. La première catégorie de projets, qui s'inscrit dans une vision à très court terme - il en va de la survie de la ville -sont ceux qui utilisent une technique de pointe ou bénéficient de recherches approfondies et bénéficiant d'un marché local ou national. Exemple, la "serriculture" ou culture en serres abritées utilisant une technologie peu consommatrice d'énergie. Dans ce domaine, une entreprise modèle existe sur la Côte-Nord, à Clarke-City. Mme Monique Lemen pourra répondre à vos questions à ce sujet puisque c'est elle qui est responsable du projet. Deuxièmement, il y a l'élevage; troisièmement, la chasse sélective du caribou; quatrièmement, la production de vêtements nordiques, la solarisation de l'habitat, le tourisme d'hiver et d'été par l'aménagement de toute une infrastructure touristique basée sur la pêche, la chasse, l'écologie, la survie dans la nature et le concept de village vacances-famille.

La deuxième catégorie de projets s'inscrit dans un temps à plus moyen terme. Ce sont les projets à rentabilité retardée, conditionnels à la mise au point d'une nouvelle technologie adaptée au contexte nordique et susceptibles d'exercer des effets d'entraînement sur l'économie québécoise. Exemple: implanter l'activité industrielle de pointe non liée au facteur du coût du transport et qui peut bénéficier des commandes des secteurs public, parapublic et privé. On dirait, par exemple, la micromécanique, la micro-informatique, la biotechnologie; les nouvelles optiques, la métallurgie de pointe et logicielle pour répondre aux commandes des hôpitaux, d'Hydro-Québec, de l'entreprise privée, consommateurs de ces produits.

La troisième catégorie de projets s'inscrit dans une visée plus à long terme et est axée sur la formation et la recherche. La troisième catégorie de projets concerne le développement de l'individu, la formation, la recherche et la protection de l'environnement. Le projet d'associer les jeunes au développement du Moyen-Nord québécois est une entreprise qui coïncide tout à fait avec cette orientation d'entreprises humaines qui construisent le présent et l'avenir. La description serait de créer un centre national de recherche en technologie nordique pour l'exploration minière, la métallurgie, l'environnement, les techniques du froid, la ville et l'habitat -des activités liées aux technologies de pointe pourraient avoir comme base la participation du Centre de recherche du Moyen-Nord de l'Université du Québec à Chicoutimi, de l'Université Laval, de l'Université McGill, de l'IREQ, du CRIQ et du Centre de recherches minérales du Québec - un centre de santé et du bien-être axé sur le développement de la prévention et la survie en forêt; un centre universitaire des civilisations et des cultures autochtones; un centre des communications et d'informatique.

L'informatique et le projet. De façon particulière, un des volets de ce projet Moyen-Nord québécois pourrait coïncider avec une préoccupation qui serait importante au cours de l'année 1983, c'est-à-dire l'année internationale des communications. La dernière technologie née pour les Québécois dans ce domaine est la télématique. Elle tient des télécommunications et de l'informatique à la fois. La pertinence de cette technologie dans un projet de développement du Moyen-Nord québécois auquel les jeunes sont associés est des plus importantes. Associer de façon marquée les jeunes d'aujourd'hui à un tel projet de service civil nordique ne demande-t-il pas qu'on tienne compte de leur habileté presque naturelle pour les technologies qui font appel à l'informatique?

Actuellement, au Québec, on s'entend sur l'urgenge d'un virage technologique. Trois dimensions, c'est-à-dire l'information à distance, la formation à distance et l'expertise télématique rendraient notre projet de service civil nordique compatible avec les exigences d'une nouvelle dynamique économique et sociale au Québec. Il est à noter qu'il est facile et peu coûteux aujourd'hui d'avoir accès à des banques de

données comme Médiatex, Agora et Polytechnique.

En ce qui concerne la formation à distance, une approche est susceptible d'être intéressante ici: Organiser une sorte d'école à distance qui innoverait tant au niveau des contenus qu'au niveau du processus pédagogique. Cette approche aurait l'avantage d'expérimenter des modèles d'éducation qui rencontreraient actuellement trop d'opposition dans des milieux ou des régions à population dense et donc déjà très lourdement structurées mais trop rigides vis-à-vis l'innovation.

L'expertise télématique. La télématique est une nouvelle technologie qui devient très rapidement à la mode et on est sur le point d'y consacrer de plus en plus de ressources, au gouvernement, dans les milieux d'affaires, dans les institutions. Il reste qu'au Québec, à part quelques centres, c'est-à-dire la Direction générale des moyens d'enseignement du ministère de l'Éducation du Québec, Télé-Unversité, l'UQUAM et Vidéotron, il y a actuellement bien peu d'expertise développée dans ce domaine.

Bref, la dimension informatique est indispensable au développement nordique, surtout pour Schefferville, qui ne bénéficie pas d'un réseau de communications terrestres reliant la ville efficacement aux autres centres nordiques et du Québec, mais qui pourrait bénéficier très facilement du satellite Anik C et de Symphonie pour réduire le facteur éloignement.

La dimension autochtone. Schefferville est un point de convergence de la civilisation amérindienne. Trop méconnue ou trop oubliée, la civilisation amérindienne est une richesse immense de notre patrimoine. Redonnons aux autochtones le Nord, redéfinissons ensemble les rapports mutuels et initions ensemble de nouvelles valeurs qui correspondent à la culture autochtone qui respecte un épanouissement autonome de sa civilisation.

En ce sens, nous recommandons que Schefferville soit le centre universitaire d'étude de civilisation et de culture autochtones comprenant une école des langues autochtones, un centre d'étude de la médecine amérindienne, une école de vie amérindienne, une banque de données informatisée amérindienne et un centre de gestion de la faune et de la flore. Cette dimension nouvelle permettra de créer un cadre véritablement amérindien qui respectera la culture autochtone locale et nationale avec des codes culturels vraiment autochtones et donnera un premier point de convergence dans les rapports entre nos deux civilisations.

En somme, nous recommandons que le gouvernement du Québec prenne en charge la création urgente d'un service civil nordique, tel que défini dans Le Nouveau Défi

Québécois, comme projet-pilote pour Schefferville en impliquant 1500 jeunes susceptibles d'être impliqués ici, et la possibilité de voir ce projet implanté de façon concluante, positive, dans d'autres villes du Moyen-Nord.

Les moyens. Avec les gens du milieu et d'ici, les autochtones, les jeunes, les universitaires et le gouvernement, sur la base des projets que nous proposons et en fonction d'un nouveau concept de développement, nous recommandons la création d'un "task force": Que soit formé un groupe d'intervention qui se diviserait en deux comités distincts, un comité national chargé de faire l'étude, c'est-à-dire la faisabilité des différents projets et, dans un autre ordre d'idées, comité local pour le démarrage des projets selon un échéancier à établir sur un plan triennal à compter de juillet 1983.

Que soit créé un fonds de développement nordique qui recueillerait les sommes nécessaires au projet avec la participation du gouvernement du Québec, du gouvernement fédéral et de l'entreprise privée. Nous recommandons que soit trouvée une formule pour que le modèle puisse s'appliquer aux autres villes nordiques. En somme, notre projet s'articule autour de deux idées simples: la contribution volontaire des jeunes et l'utilisation des ressources existant ici et au Québec.

Nous sommes actuellement devant un défi de taille, celui des défis à l'occasion desquels l'être humain opte pour des changements sociaux et économiques fondamentaux. MM. les parlementaires, réalisez bien que rien n'est possible si on n'est pas visionnaire. L'utopie dont on nous affuble est plus créatrice et riche d'avenir que les prévisions à court terme pour gérer une crise qui nous échappe. La jeunesse et la situation nordique du Québec, ces deux paramètres fondamentaux du changement assureront l'avenir du Québec tout entier si nous savons l'entreprendre. Ce modèle alternatif basé sur l'humanisation de l'économie, basé sur un nouveau cadre social, nous voulons qu'il puisse se transporter partout où le système actuel déclarera faillite.

Nos ressources sont énormes parce qu'elles se situent d'abord dans le cerveau des jeunes et des moins jeunes qui possèdent une puissance créatrice formidable. Ils sont de la race des pionniers et des bâtisseurs de notre pays. C'est justement de ces hommes nouveaux, véritables géants du défi québécois, que nous avons besoin. Nous voulons construire en harmonie avec la nature dans un esprit de dépassement qui se situe au-delà du profit essentiellement matériel. Construire n'est pas seulement la juxtaposition des choses. Schefferville deviendra alors une plaque tournante du développement québécois, un modèle de

société et ainsi le Québec aura, pour la première fois, intériorisé les racines profondes de sa longue trajectoire vers sa nordicité. Il l'aura vécue et désirée en toute liberté. Encore une fois, cette approche nouvelle doit faire l'objet d'un consensus, peu importe qui l'a entreprise.

Permettez-moi, en terminant, de vous citer le Dr Alexander King, fondateur du Club de Rome qui disait: "Tout groupe de réflexion est condamné, comme tout prospectiviste, au destin de Cassandre. Quand on n'écoutait pas Cassandre, ses prévisions se réalisaient. Quand, au contraire, on l'écoutait, ses prévisions ne se réalisaient pas car on prenait alors les mesures correctives."

Pour terminer, MM. les parlementaires, il est intéressant de constater qu'en chinois les mots "crise" et "opportunité" sont un seul et même mot. Donc, toute crise est mère de changement et donc, riche en opportunités. Schefferville doit vivre, la jeunesse du Québec aussi. Les Conspirateurs de l'an 2000. Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Baril. M. le ministre au Développement régional.

M. Gendron: Mesdames et messieurs les Conspirateurs de l'an 2000, je voudrais d'abord faire deux remarques d'ordre général. Pour ma part, je ne suis pas déçu et même je suis plutôt content de voir que c'est le dernier mémoire pour analyse - puisque le prochain ne sera que déposé - parce que dans les faits, quand même, il nous livre un nouveau défi. Quant à l'évaluer, je ne suis pas en mesure d'évaluer dès aujourd'hui les possibilités concrètes de mesurer si, pour nous ou les jeunes qui bâtiront la société de demain, nous serons en mesure de relever le nouveau défi qui nous est proposé par vous... Il est certain qu'il y a plusieurs éléments très avant-gardistes qui sont traités. Par contre, vous conviendrez que même si les idées sont avant-gardistes, souvent, les moyens demeurent moins avant-gardistes pour les réaliser. C'est certain que si on faisait une analyse très détaillée des coûts pour envisager concrètement de donner suite à plusieurs des mesures suggérées, je n'ai aucune espèce d'idée du portrait réel que cela donnerait. Je pense que vous en êtes conscients, puisque vous suggérez vous-mêmes de confier cette réflexion à un groupe de travail qui pourrait creuser davantage, pas uniquement le modèle, mais surtout son application. Dans ce sens, c'était mon premier commentaire. (18 h 45)

Quant au deuxième commentaire, je pense que la population de Schefferville aura compris, bien sûr, qu'un tel mémoire s'inscrit dans un défi ou une préoccupation beaucoup plus large que strictement le cadre ou la problématique que vous vivez présentement, à la suite de l'annonce de la fermeture de la minière IOC. Il apporte quand même une réflexion qui, après l'avoir analysée, après l'avoir creusée davantage, pourrait permettre que la vocation dite monoindustrielle de Schefferville soit modifiée si jamais il était possible, après plus d'analyses, de donner suite aux recommandations de votre mémoire. Dans ce sens, je pense que ce n'était pas inopportun de venir le présenter dans le contexte que nous vivons depuis deux jours.

J'aimerais poser quelques questions qui nous permettraient peut-être de préciser davantage l'état de votre réflexion quant au nouveau défi. Mais, avant de les poser, je ne détesterais pas, pour l'information de mes collègues et de tous les citoyens et citoyennes qui nous écoutent, que vous nous définissiez ce que vous entendez par "conspirateur". Que je sache, cela n'a pas le même sens que celui qu'on lui prête traditionnellement. Pour éviter toute confusion, j'aimerais vous entendre là-dessus. Cela sera très court. Donnez-nous la définition de "conspirateur", selon vous.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscaminque): C'est une très bonne indication. Le mot "conspirateur" n'est pas puisé du sens négatif, mais du sens positif qui vient du mot "conspirare", du XVIe siècle, et qui veut dire: Souffler ensemble vers quelque chose, c'est-à-dire bâtir vers l'avenir dans un élan positif.

M. Gendron: Merci. À la page 9 de votre mémoire - et j'aimerais que vous essayiez, M. Baril ou un de vos collaborateurs, d'être le plus précis possible -vous avez une suggestion. Vous mentionnez que ce que vous proposez s'inscrit dans une nouvelle stratégie de développement pour tout le Québec, donc le Québec dans son entier, uniquement par la voie du développement nordique. Alors, je reprends, très précisément. Vous dites: Nos projets s'inscrivent dans le cadre d'une nouvelle stratégie de développement pour le Québec tout entier par la voie du développement nordique. J'ai beaucoup de difficulté, intellectuellement en tout cas, à essayer de ramasser et de voir concrètement que, pour le Québec tout entier, uniquement la voie du développement nordique serait une voie de développement à épouser pour l'ensemble du Québec en termes de développement économique.

M. Moussaly (Serge): Si vous permettez. Je suis économiste, donc la question s'adresse à moi en particulier, au groupe de travail avec qui on a travaillé.

Lorsqu'on a analysé ce qui se passe à Schefferville, il n'y a pas de doute, c'est le

sort des autres villes minières du Québec également qui plus ou moins... Donc, Schef-ferville a été la première ville où il y a eu cette décision de fermeture. Néanmoins, le risque de fermeture des autres villes minières s'annonce, y compris Gagnon, Chibougamau, Rouyn.

Pour nous, le problème de Schefferville, c'est le symbole de tout un processus de développement qui a été engagé depuis les années cinquante et qui, à travers Schefferville, devrait être repensé complètement. Lorsqu'on dit que le Québec doit changer de stratégie, ce qu'on veut dire c'est qu'il ne s'agit pas pour Schefferville de faire un redressement partiel ou compensatoire qu'on retrouverait dans les autres villes du Québec.

Donc, cela pose la question de l'orientation économique de la structure même de l'économie québécoise, de sa capacité de devenir, d'être à l'abri des variations du marché international. La voie, les moyens pour arriver à assurer cette sorte de protection à l'égard des variations du marché international, il faudrait que le Québec se définisse une nouvelle compétence distinctive dans le nouveau système international des échanges qui va se créer à partir de la crise. Or, cette nouvelle compétence distinctive que le Québec pourra acquérir, à notre avis, restera, demeurera orientée vers les avantages en ressources naturelles du Québec. Je ne voudrais pas m'étendre sur les autres options que le Québec pourra choisir, en particulier celles qui misent sur les petites et les moyennes entreprises. Je ne voudrais pas faire la comparaison sur cet aspect-là. L'évidence, pour nous, est qu'on ne peut pas concevoir que l'économie québécoise dans son entier pourra fonctionner et prospérer si la frontière économique descend au niveau du 50 ou du 45 parallèle. Cela est essentiel pour nous. L'avenir de tout le Québec est lié au développement du Moyen-Nord et de son potentiel énergétique, minier et forestier.

M. Gendron: Vous abordez également, dans votre mémoire, la possibilité d'aller plus loin dans la question qui a été fouillée passablement, du moins dans le domaine universitaire, qu'on appelle la culture en serre. Je voudrais seulement vérifier auprès de vous si vous avez analysé les types de production qui pourraient être produits et jusqu'à quel point vous avez regardé les conditions de marché. Est-ce que vous envisagez des productions à caractère autosuffisant uniquement pour la population limitrophe du bassin dans lequel on est ou si vous avez également regardé la possibilité d'avoir des types de production qui permettraient d'envisager un minimum d'exportation?

Mme Lemen (Monique): Oui, ces notions ont été envisagées. Je pourrais peut-être décrire un peu le modèle qu'on propose au service civil en ce qui a trait à l'implantation d'un réseau de serres de production de légumes divers, douze mois par année, dans chaque ville nordique. La centralisation du projet de développement de serres, au niveau du suivi technique de l'apprentissage du mode de production, des cédules de production, de l'approvisionnement, des équipements et des produits servant à la production, pourra être assurée par les serres abritées à Clarke-City. La main-d'oeuvre nécessaire à l'encadrement et à la réalisation de ces projets varie de l'agronome au menuisier, en passant par le chimiste, le géologue, l'architecte, l'électricien, le soudeur, le plombier et toutes les compétences administratives.

Ainsi, on recrute parmi la jeunesse le maximum de compétences jusqu'à maintenant non éprouvées à cause de la situation économique qui ne leur offre pas d'emploi. À court terme le réseau d'implantation de serres est réalisable dès avril 1983 et déclenche un démarrage économique local et régional orienté vers l'autosuffisance, la diminution des coûts de production et d'importation en plus de fournir une meilleure qualité de produits. À moyen terme, si le réseau se développe dans chaque ville nordique, six à dix serres, pour un coût d'investissement de base de 40 000 $, peuvent suffire à une population de 2000 habitants en légumes essentiels tels la tomate, la laitue et le concombre.

Une centaine d'emplois sont directement créés dès la mise en branle de la production légumière. À long terme, la région peut développer ses propres moyens d'approvisionnement en ce qui a trait aux composés du sol d'exploitation dans les serres; par exemple, le bran de scie. Une scierie dort à La Romaine qui peut produire du bran de scie pour fournir le sol adéquat à l'exploitation des légumes en serre, la tourbe de sphaigne qui est produite à Sept-Îles est déjà éprouvée dans nos sols de culture à Clarke-City et la chaux nécessaire pour l'amendement des sols et la préparation des engrais chimiques peut être produite par la récupération et la transformation de tout le volume de déchets de crustacés rapportés au quai par les pêcheurs de la côte.

À long terme, on peut aussi envisager une diversification des méthodes de production de légumes en allant recruter parmi les jeunes diplômés les compétences particulières des chercheurs. Tout ce processus en branle est sujet à créer environ 300 emplois régionaux dont la majorité de la main-d'oeuvre se composerait de jeunes. Ce modèle de fonctionnement et d'implantation de serres dans les villes nordiques est applicable à tout autre projet de développement: par ses structures de

financement qui pourraient être composées d'actionnaires participants, d'actionnaires extérieurs et d'investissements gouvernementaux, par sa structure de gestion composée d'un conseil d'administration doté d'un comité de finances, d'un comité exécutif et d'un comité de recherche, le comité exécutif étant chargé de coordonner les projets régionaux.

M. Gendron: Je terminerais là-dessus avec une toute petite dernière question. J'aimerais que vous me citiez une expérience simplement de culture en serre basée sur douze mois et que vous me disiez si vous avez envisagé quel type d'énergie vous utiliseriez.

Mme Lemen: Les énergies sont adaptables aux ressources naturelles locales. Cela peut varier de l'électricité, au chauffage au bois. Tout dépend de la richesse locale en alimentation.

M. Gendron: Alors, les énergies traditionnelles?

Mme Lemen: Elles varient, oui; traditionnelles, oui.

M. Gendron: Et puis, sur les douze mois?

Mme Lemen: Sur les douze mois?

M. Gendron: Oui. Vous êtes convaincus qu'il est possible de faire une culture en serre sur une base de douze mois.

Mme Lemen: Absolument, oui.

M. Gendron: Est-ce que vous connaissez une expérience quelque part où on l'a fait?

Mme Lemen: Eh bien, on le fait à Clarke-City.

M. Gendron: À Clarke-City, vous produisez sur douze mois?

Mme Lemen: Oui. On a un programme de production progressive, de telle sorte que, l'hiver, on produit la laitue; l'été, la tomate, le concombre. La production de tomates peut s'échelonner jusqu'en novembre, tard en décembre. M. Moussaly pourrait peut-être vous expliquer.

M. Moussaly: Alors, pour le bénéfice des membres de la commission parlementaire, j'aimerais signaler que le projet de Clarke-City, qui fonctionne sur une base économique depuis bientôt deux ans, fait suite à des travaux de recherche sur les cultures abritées que le Centre de recherche du Moyen-Nord à Chicoutimi a amorcés il y a quelques années. On a expérimenté, à la Baie-James, le processus au point de vue du fonctionnement. C'est à partir de cette expérience-là que le projet de Clarke-City a fonctionné et le même type de projet fonctionne actuellement à Fermont, c'est-à-dire a commencé à fonctionner à Fermont.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président. En mon nom et au nom de mes collègues, j'aimerais également remercier les conspirateurs de la présentation de leur mémoire. On a assisté à des événements assez particuliers ces derniers jours. À ce que j'ai su, plusieurs d'entre vous ont couché à l'extérieur, ont couché dehors. On assiste également à une autre première, celle de voir un député ministériel présenter un mémoire à une commission parlementaire. Comme M. Baril le sait sûrement, c'est un sujet qui m'intéresse d'une façon assez particulière puisque, depuis mon élection, c'est en principe un de mes dossiers, avec les loisirs, à l'Assemblée nationale.

J'aimerais faire un léger commentaire général avant de m'intéresser particulièrement à votre mémoire. Depuis environ un an, on assiste à une série de projets de service civil. Entre autres, on a fait allusion au service civil obligatoire que M. le député de Sainte-Marie avait présenté et auquel l'accueil fait par le premier ministre avait été défavorable à la suite d'une question de ma part. Ensuite, on l'a modifié pour en faire un service civil volontaire qui, au départ, s'accepte beaucoup mieux qu'un service obligatoire, à mon humble avis. Nous avons entendu parler aussi de différents projets dont celui du député fédéral du comté, le député Maltais; aussi du projet Katimavik de M. Hébert. On a entendu parler également du plan de M. Marois qui est ici. On se souvient que, dans le Soleil, il y a quelques mois, M. Marois devait présenter un projet de service civil communautaire au comité des priorités. À ce qu'on m'a dit, l'accueil n'a pas été plus favorable que pour le projet Bisaillon. Maintenant, on assiste au projet de service civil nordique. (19 heures)

Personnellement, j'ai eu l'occasion de rencontrer un paquet de groupes, de mouvements de jeunes du Québec dont certains se sont réunis les 3 et 4 décembre 1982 à Montréal. Ce qui est ressorti, finalement, après deux jours de réunion avec les groupements de jeunes du Québec, c'est qu'ils étaient contre toute formule d'embrigadement ou de service civil embrigadé. Ils en ont conclu également qu'ils étaient tous contre un exil, si vous me permettez l'expression, ou un dépaysement ou

le fait de sortir de leur milieu propre pour s'expatrier dans une région donnée pour un service civil.

Maintenant, vous parliez tantôt de 15Q0 jeunes qui seraient impliqués dans votre service civil. Est-ce que les jeunes de la région, ici - j'ai lu que vous en aviez consultés quelques-uns à Clarke-City - de façon générale, diffèrent d'opinion relativement à un service civil volontaire en relation ou en comparaison avec les mouvements de jeunes dont on a entendu parler et que je vous énumérais tantôt? C'est ma première question: Est-ce que les jeunes de la région diffèrent à ce niveau-là?

Maintenant, quelques petites questions sur les projets d'activités proposés qui ne nécessitent pas nécessairement, selon vos dires, un gros investissement. Entre autres, relativement à l'élevage du mouton, ici, à Schefferville, je ne suis point un expert en la matière, mais, à ma connaissance, c'est un animal relativement fragile. Si on a à lui couper la laine, j'ai l'impression qu'il va falloir faire bien attention parce que ce n'est pas tellement chaud dans le coin. Avant que la repousse de la laine se fasse, il faudrait les garder à l'intérieur. Ce sont des critiques constructives, on pourra en discuter tantôt. Ensuite, sans faire de jeu de mots, à ma connaissance, il n'y a pas de fourrage ici, ni de prés pour les moutons. Je présume que vous pourrez répondre tantôt. J'aimerais savoir aussi s'il y a eu d'autres expériences d'élevage de moutons ou de lapins en région ou à Québec. À ma connaissance, il y a eu des expériences pilotes à ce sujet.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Du lapin?

M. Dauphin: Du vison et du lapin. Ensuite de cela, les déchets ligneux - je ne sais pas si j'ai bien compris - est-ce que ce serait les panaches de caribous, comme projet d'activités?

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Oui, oui.

M. Dauphin: Je pourrai revenir tantôt avec d'autres questions sur les coûts. Vous pouvez répondre à celles-là.

Le Président (M. Bordeleau): M. Baril.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Pour la première, en ce qui concerne la question que certains mouvements étudiants ont rejeté le concept du service civil, il va être difficile de rejeter le nôtre parce que, pour la première fois, de façon claire et explicite, il vient d'être présenté à l'opinion publique par l'entremise de cette commission parlementaire. Donc, c'est peut-être vrai que le projet Bisaillon, le projet

Maltais ou les autres projets ont été discutés dans les milieux des associations étudiantes au Québec. Quant au nôtre, il est difficile de dire si les gens étaient pour ou contre puisque c'est la première fois qu'on a la chance de l'exprimer publiquement. Il y a eu quelques fuites, mais c'était très sommaire, parce que l'essentiel du projet est expliqué et résumé ici aujourd'hui à cette commission parlementaire.

D'autre part, je dois vous faire savoir que nous avons reçu au-delà de 300 lettres d'un peu partout dans le Québec - à peu près 50% de ces gens-là ont un bac universitaire, c'était quand même assez remarquable - demandant si le projet du service civil était une chose - on parlait du service civil nordique - qui va se concrétiser à la suite de la commission parlementaire. Il est évident que seuls les membres de la commission parlementaire pourront donner suite aux différents mémoires qui sont présentés, entre autres le nôtre; donc, ce sera à vous d'y répondre. Donc, en ce qui concerne le projet de service civil, de prime abord comme je vous le dis, c'est la première fois aujourd'hui qu'on a la chance de l'expliquer.

Vous parliez tantôt de l'élevage du mouton. Je ne sais pas si vous vous êtes trompé de mémoire, on n'a pas parlé de cela.

Une voix: Parce que le vison n'est plus rentable.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamin- que): On a parlé de l'élevage du vison et pas du mouton.

M. Dauphin: C'est parce qu'on a reçu un autre mémoire cinq minutes avant votre présentation.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Nous parlions de l'élevage du vison.

M. Dauphin: Ah bon!

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Pas du mouton.

M. Dauphin: C'est parce que j'avais surtout lu le mémoire qu'on avait en main et qui avait été distribué à tous les membres.

Mme Lemen: Je vais peut-être me permettre une réflexion. Étant donné que l'élevage du vison n'est plus rentable, peut-être qu'on pourrait le remplacer par l'élevage du mouton.

M. Dauphin: C'était dans votre mémoire qu'on avait en main. C'est pour cela que j'ai posé une question à cet effet.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va?

M. Dauphin: D'accord. Je sais pertinemment que vous êtes très bien placé au sein du caucus. Vous en faites la présentation aujourd'hui pour la première fois. Est-ce que vous avez eu un écho des ministres?

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Je ne sais pas quelles seront les suites de la commission parlementaire, mais je vais essayer d'effectuer du lobbying pour qu'effectivement... Un projet de ce genre, qui est quand même axé sur des technologies nouvelles, implique des coûts assez considérables, mais il répond sans aucun doute à des défis de la collectivité québécoise, entre autres sur la formation de l'individu par rapport aux nouvelles technologies. Pour ma part, je vais en faire une priorité pour obtenir les sommes nécessaires. Cela ne répond peut-être pas aux programmes et aux critères des différents projets gouvernementaux, mais le gouvernement pourrait en faire une priorité nationale et en faire un projet national. À ce moment-là, cela pourrait être hors cadres et hors critères.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord? M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout comme l'ont fait les autres intervenants, remercier toutes les personnes qui ont bien voulu accompagner mon collègue de l'Assemblée nationale, M. Baril, pour présenter ce mémoire. Je dois vous avouer être très heureux de remarquer que vous ne vous êtes pas servis de l'article de Normand Girard pour préparer votre mémoire, parce qu'il y aurait eu des répercussions assez drôles ici même, à Schefferville.

J'aurais quelques questions à vous poser, deux en particulier. La première s'adresse à Mme Lemen et je voudrais qu'elle nous donne une idée générale de la façon dont sont construites ces serres, incluant la dimension. À un certain moment, si vous vous le rappelez bien, j'avais eu une discussion avec quelqu'un, à Québec, au sujet d'une serre qui serait construite ici, à Schefferville, et dont on avait fait mention, d'ailleurs, dans l'article de Normand Girard: 2500 pieds de long, 250 pieds de large, pour nourrir 30 000 personnes. Je commençais à penser, disons, au transport pour amener cela vers la population, parce que l'absorption ici ne serait pas pour 30 000 personnes.

D'autre part, je dois vous avouer franchement que, si je vous pose la question, c'est parce que j'ai eu connaissance d'ailleurs, j'en ai discuté amplement avec la population de Schefferville et on l'a même mentionné lors des assemblées publiques - que, concernant les légumes et les fruits, la population de Schefferville n'est pas gâtée. Je peux vous avouer cela. Il y a le problème du transport par train, de la température à l'intérieur des wagons et également du temps que cela prend pour se rendre d'un endroit à un autre. Encore une fois, je répète que la population n'est pas gâtée. Pourriez-vous vous expliquer un peu plus relativement à votre serre?

Le Président (M. Bordeleau): Mme

Lemen.

Mme Lemen: Je dois vous répondre que je n'ai jamais conspiré avec M. Normand Girard. Même si je m'inscris dans le groupe des conspirateurs qui ont peut-être l'air un peu farfelus, on n'a pas l'intention de faire pousser, dans nos serres, du caribou ou des légumes ultra-géants.

Nos serres, c'est tout simplement une technique qu'on a améliorée à partir de celle déjà existante à l'Université du Québec à Chicoutimi qui était une serre gothique en lattes de bois. Nous l'avons améliorée en remplaçant les lattes de bois par des cerceaux de métal. C'est une serre de 14 pieds et demi de large et de 100 pieds de long, jamais plus de 100 pieds de long pour justement éviter l'achat de systèmes d'aération d'été. Il suffit d'ouvrir les portes en avant et en arrière et l'aération est automatique. Maintenant, le coût de ces serres - je peux enchaîner avec cela? - de production ne dépasse pas 4600 $. Ce sont les coûts qu'on a établis avant la commission parlementaire.

Il y a aussi ce qu'on appelle la serre domestique, pour un jardin familial, en arrière d'une cour. C'est une serre d'une longueur de 35 pieds, toujours avec la même largeur. La serre de 35 pieds offre une variété de légumes pour suffire à la demande d'une famille. Le coût d'achat est de 1875 $. Maintenant, pour rentabiliser une production, si je reprends l'exemple que j'ai donné au début en disant qu'il fallait six serres de production pour réaliser l'autosuffisance de 2000 habitants en légumes divers et essentiels, tomate, laitue, concombre, pour l'achat de six serres de production, c'est 40 000 $, grosso modo, ce qui fournit un chiffre d'affaires de 60 000 $, et 50% du chiffre d'affaires vont en semences et fertilisants et 7% en coûts énergétiques. Je pourrais fournir des données plus volumineuses parce qu'on a des études, mais je ne les ai pas avec moi.

M. Perron: Merci, Mme Lemen. Je voudrais revenir maintenant à la question des 1500 jeunes que vous mentionnez dans votre mémoire. Lors d'une discussion que nous avions eue ensemble et avec votre groupe, je vous avais dit, que la première phase d'un

tel projet que vous auriez en vue pour Schefferville devrait être axée sur la création d'emplois pour les jeunes et ce, prioritairement ici même à Schefferville. D'ailleurs, on a eu l'occasion d'entendre le groupe des natifs, cet après-midi, qui nous ont exposé qu'eux-mêmes étaient prêts à rester ici, à demeurer sur place. Je pense que cela serait drôlement intéressant que ce soit ces gens qui soient touchés en premier lieu si jamais le projet était mis en marche. D'autre part - et c'est la question que je vous pose - de quel endroit proviendraient ces jeunes, lorsque vous parlez de 1500, comme deuxième phase, parce que moi je le vois comme une deuxième phase? Est-ce que ce serait de la Côte-Nord? Est-ce qu'ils arriveraient d'un coup sec à Schefferville? Là, cela ferait sauter du monde? Cela me ferait sauter, moi aussi, en passant. Pourriez-vous vous expliquer là-dessus?

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): D'une part, le projet vise certainement les gens d'ici; dans une deuxième phase, les gens de la Côte-Nord et, dans une perspective d'élargissement, justement, si le projet était concluant, il pourrait y avoir un comité de sélection local qui viserait à faire du recrutement en ce qui concerne certaines compétences qui pourraient être exigées, qu'on ne pourrait pas retrouver ici et qui viendraient du reste du Québec, dans une phase III, comme on pourrait dire. Cela vise d'abord et avant tout les gens d'ici, les gens de la Côte-Nord et, par la suite, si on a à faire appel à des gens du Québec, là je pense qu'il y aurait lieu de former un genre de comité de recrutement avec les gens responsables du projet qui viendraient d'ici pour, justement, s'assurer que de bonnes compétences pourraient venir s'établir ici.

M. Perron: Je vous remercie beaucoup, M. Baril, ainsi que votre groupe.

Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie également, M. Baril, ainsi que les gens qui vous accompagnaient.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Cela termine les mémoires qui sont présentés. Il en reste un qui est celui de M. Jan Czarlinski, qui est pour dépôt seulement et qui sera donc déposé au secrétariat des commissions. Ce serait à peu près la fin de notre commission parlementaire.

M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue): En espérant que la prochaine ne sera pas à Rouyn-Noranda.

Le Président (M. Bordeleau): Merci, M.

Baril. Pour la conclusion de notre commission, M. Fortier.

Conclusions M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, mes remarques seront brèves parce que je sais que le maire nous attend impatiemment pour la réception qui devait avoir lieu à 18 heures. J'aimerais quand même féliciter tous les groupes, toutes les associations et les citoyens de Schefferville. Nous étions venus ici pour vous rencontrer, pour cerner la réalité de plus près. Je crois qu'au nom de mes collègues du Parti libéral du Québec et, j'en suis sûr, au nom de tous mes collègues de l'Assemblée nationale, nous pouvons nous dire satisfaits de cette commission parlementaire pour autant qu'elle nous a permis d'avoir un éclairage adéquat, je crois, sur les problèmes auxquels vous faites face et en espérant que le gouvernement prendra les décisions qui s'imposent. (19 h 15)

J'aimerais, dans un deuxième temps, féliciter tous les employés de l'Assemblée nationale. Vous devez savoir, M. le Président, que le public ne fait peut-être pas la différence, mais il y a le gouvernement d'une part et il y a l'Assemblée nationale présidée par son président. Ce sont les employés de cette dernière qui ont organisé cette commission parlementaire à

Schefferville. Je voudrais rendre hommage à leur esprit d'organisation et aux services qu'ils nous ont rendus durant cette commission parlementaire.

Je n'ai pas de félicitations à faire au gouvernement, bien sûr. Cela dépend de la tradition parlementaire, sûrement. Mais j'ai retenu tout à l'heure que le ministre porte-parole du gouvernement, le ministre responsable de l'Aménagement, a dit qu'il avait établi un calendrier et il faisait allusion au fait qu'il ne voudrait pas que, par la suite, l'Opposition demande une commission parlementaire dans quelques mois. Je voudrais en expliquer la raison à la population qui nous écoute. Nous étions à Port-Cartier mardi ou mercredi matin. Alors que les gens de Port-Cartier voulaient absolument savoir quand il y aurait des décisions de prises pour la réouverture de l'usine de Port-Cartier et alors que le ministre se faisait très vague, j'ai demandé qu'on se retrouve en séance publique dans six mois et le ministre a accepté. Je suis sûr qu'il a eu sa leçon, parce que, ayant été pris de court à Port-Cartier, il voulait prendre les devants pour ne pas se placer dans la même situation maintenant. Mais quand même je crois que, pour les gens de Schefferville, c'est une bonne décision et vous pouvez être assurés que l'Opposition

libérale se fera un devoir de s'assurer que les décisions gouvernementales seront appliquées.

Je ne sais pas quelles sont les décisions que le gouvernement ou ses représentants ont prises puisque je n'ai pas eu le loisir d'assister à leur conférence de presse, mais, pour notre part, nous avons indiqué qu'indépendamment des problèmes à moyen terme, qui pourraient commander la réalisation d'un "task force" pour les étudier de part et d'autre, il était urgent d'avoir un délégué, un haut fonctionnaire plénipotentiaire, comme l'a demandé le comité des citoyens, pour voir aux problèmes les plus urgents. J'ose espérer que le gouvernement prendra cette décision de nommer un haut fonctionnaire plénipotentiaire, que cette personne sera ici la semaine prochaine pour déterminer un programme d'action et qu'ensuite des budgets seront votés pour qu'au plus tard dans trois mois le gouvernement puisse aider les gens qui devront être aidés, en plus de l'argent qui pourrait venir, bien sûr, de la Compagnie minière Iron Ore.

Je vous remercie, M. le Président. Je veux remercier tous mes collègues; nous avons travaillé en équipe. Je remercie également mes collègues du parti ministériel avec qui nous avons eu le plaisir d'avoir une commission parlementaire très efficace. Je vous remercie.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre délégué à l'Aménagement et au

Développement régional et porte-parole du gouvernement.

M. François Gendron

M. Gendron: Merci, M. le Président. Je vais essayer de faire assez rapidement. Tout le monde sait que ces deux jours ont été très longs et qu'on est attendu. Mais vous me permettrez sans doute de rappeler quelques temps forts de cette commission. Je voudrais, d'abord, repréciser le mandat de la commission en vous disant simplement que, bien sûr, on a pris deux jours pour entendre tous les intervenants qui avaient des choses à nous dire, mais il est important de rappeler que, lorsque M. Duhaime est venu ici rencontrer la population et qu'il a pris l'engagement au nom du gouvernement de venir en commission parlementaire, il avait mentionné que nous viendrions d'abord et avant tout, dans un premier temps, pour prendre connaissance non seulement des revendications, mais des solutions et de certaines recommandations qui nous seraient faites par le milieu et, dans ce sens, c'est ce que nous avons fait.

Nous avons également, dans un second temps, lorsqu'il a été possible de le faire, pris des engagements sur-le-champ, parce qu'il y avait certaines recommandations qui nous paraissaient tout à fait valables, justifiées. C'était le cas de la plupart de vos recommandations, mais, pour certaines, nous avions la conviction nécessaire et le degré de responsabilité pour être tout de suite en mesure de prendre des engagements.

Nous avons également constaté - cela a été exprimé à plusieurs reprises - une volonté très ferme des citoyens et des citoyennes de Schefferville de tout mettre en oeuvre pour être capables de dégager des voies d'avenir, dans les moments les plus douloureux, ceux qui font immédiatement suite à une décision qu'on ne comprend toujours pas, pour des raisons que j'ai eu l'occasion d'expliquer en conférence de presse, pour des raisons qu'on a également expliquées lors de la commission, particulièrement dans les interventions de mes collègues Marois et Duhaime, à la minière IOC.

Il y avait également des choses à envisager à moyen terme. Très rapidement, dans quelques minutes, je vais vous rappeler ces points où le gouvernement du Québec a décidé non seulement de prendre acte, mais de confirmer tout de suite à la population de Schefferville qu'il était important de prendre des décisions. On nous a demandé à plusieurs reprises d'envisager un groupe de travail -peu importe l'appellation, un "task force" -rapidement pour venir étudier ici les mesures les plus immédiates qui devaient être prises. On a immédiatement donné suite à cette demande.

M. Duhaime a également fait une suggestion qui a eu l'heur de plaire aux métallos et à d'autres personnes, parce que nous sommes dans une région nordique, mais nous sommes dans une région où la richesse la plus fondamentale - peut-être "jadis", puisque, malheureusement cela semble en voie de perdition - s'appelle le fer. Or, l'industrie du fer a des problèmes. Nous savions cela, nous l'avions vu dans les journaux, et l'Opposition nous avait conseillé d'agir à plusieurs reprises. Ce que nous avions moins vu, c'est l'arrêt brusque, subit, presque sans raison, particulièrement dans les trois dernières années. Mais les problèmes du marché du fer, on les avait vus. C'est dans ce sens que, comme la Côte-Nord est d'abord et avant tout basée sur l'industrie du fer, M. Duhaime a pris l'engagement, au nom du gouvernement et au nom des collègues, d'organiser une table de concertation où on fera le tour de cette industrie, mais sur la Côte-Nord spécifiquement.

Il y a eu également des engagements très fermes quant aux cours accélérés de formation professionnelle pour la main-d'oeuvre, afin de déceler rapidement quel type de formation on peut offrir à vos commettants dans une perspective de recyclage. Aussi, il y a eu une confirmation

du fonds spécial de création d'emplois qui est requis pour des projets permanents et temporaires. Également, l'espèce de médiateur ou de personne-ressource avec des mandats assez précis a été confirmé par le gouvernement. Mise en place ici même d'un bureau de Travail Québec pour placement accéléré.

Subvention spéciale de 40 000 $ au Comité action Côte-Nord. Cela nous avait été demandé à Port-Cartier. Contrairement à ce que M. Fortier mentionnait tantôt, je ne pense pas que les gens pensaient que le ministre Duhaime pouvait dire: Oui, je pars les machines parce que le gouvernement vient de décider qu'on repart ITT. Ils auraient été les premiers à nous le reprocher comme chaque fois qu'on fait une intervention dans un domaine où, d'après eux, on ne devrait pas avoir d'affaire, car il faut respecter l'entreprise privée, et je suis d'accord. Nous, nous parlons plutôt de "partnership", d'association à des industries de base. Il faut que le Québec prenne sa place et il faut que le gouvernement du Québec s'associe, mais il n'appartenait pas au gouvernement du Québec de repartir ITT. Bien sûr, cela nous aurait plu si nous avions pu repartir les machines et dire: C'est devenu une entreprise nationalisée, cela appartient au gouvernement du Québec et, le lendemain, dans les journaux, on se serait fait ramasser. Surtout dans la conjoncture actuelle, nous n'avons pas les moyens d'être le seul partenaire de relance d'une telle industrie. On va tout mettre en oeuvre pour trouver des investisseurs et on sera partenaire - peu importe la formule - pour permettre de relancer ces entreprises le plus rapidement possible.

Dans le domaine du loisir - je ne le rappelle pas, parce que cela a été mentionné à plusieurs reprises - on va tout faire pour aider ce qui existe déjà, c'est-à-dire augmentation des quotas de prises, augmentation de la période, toujours en respectant les contraintes qui nous ont été exprimées par les populations amérindiennes, parce que je pense que c'est simplement les respecter dans leurs droits fondamentaux. Je pourrais peut-être en appliquer quelques-unes, mais je pense qu'il se fait tard; alors, je vous dis juste ceci, population de Schefferville: Je veux bien croire que l'Opposition a un rôle, celui de nous pousser dans le dos; j'espère qu'elle va le faire comme des groupes qui nous ont dit qu'ils ne nous lâcheraient pas et qu'ils nous pousseraient dans le dos.

Mais, de temps en temps, je pense qu'il faut avoir un peu d'honnêteté et ne pas essayer de faire croire que nous sommes venus uniquement avec l'objectif d'entendre la population sans prendre aucun engagement et sans préparation, ni analyse. Au contraire, il y a des équipes de travail qui ont oeuvré presque jour et nuit depuis un mois pour préparer cette commission parlementaire parce qu'on voulait respecter la population de Schefferville et vous dire qu'il était normal, sur certaines choses, de prendre des engagements et, sur d'autres, qu'il était normal de retourner faire nos devoirs, de fouiller cela davantage et de mettre cela sur les tables de travail. Il y a des institutions qui sont là pour prendre des décisions. Cela s'appelle le comité de priorités, cela s'appelle le Conseil des ministres et il y en a d'autres.

En terminant, je voudrais remercier M. le maire Bégin qui nous a bien reçus, tous les citoyens de la ville, tous ceux qui ont participé à l'organisation de ces deux jours de travail parce que je pense qu'on a travaillé intensivement, les représentants du clergé, ceux de la commission scolaire, les employés de l'Assemblée nationale - ce n'est pas une mince tâche - les fonctionnaires tant des ministères que de l'OPDQ, les journalistes, les membres de la commission bien sûr, son président, le personnel politique qui nous accompagnait et qui nous a été d'un précieux secours, les participants qui ont préparé et présenté les mémoires, le public de la salle, l'ensemble de la population qui a eu l'occasion d'écouter nos délibérations et ceux qui ont permis que ce soit comme cela via la télé communautaire.

Également, en terminant, pour véritablement répondre à la question du député d'Outremont, je pense qu'il avait raison de ne pas vous laisser aller sans avoir au moins une sorte d'échéancier. Quant à moi, par ailleurs, comme ministre répondant de cette commission au nom du gouvernement, je fais rapport, mais je dirai également au Conseil des ministres que mes collègues ont pris la décision que, sur les trois mandats précis, qu'on veut voir confier à l'équipe de travail, on veut y attacher des échéanciers.

Pour ce qui est d'identifier les services essentiels à maintenir: éducation, santé, électricité etc., nous voudrions que, d'ici le mois de mai au maximum, nous ayons une appréciation définitive de ces besoins. Quant à identifier et à évaluer les projets possibles de développement économique de la région de Schefferville et de création d'emploi tant à court, qu'à moyen ou à long terme et à préciser les rôles de chacun des divers intervenants dans la réalisation de ces projets, nous ferons la recommandation d'un échéancier de six mois. Dans six mois, il faudra voir clair pour tout ce que je viens de mentionner. Également, pour ce qui est des orientations plus larges - on a parlé de stratégies d'intervention, de politiques gouvernementales quant au développement des milieux nordiques - je pense que cela a beaucoup plus d'envergure, on sera obligé de donner une échéance d'un an. Il me semble

que ce sont des choses concrètes.

En terminant véritablement, je vous remercie tous et je remercie les collègues des deux côtés de la table parce que je pense que cela a été une commission parlementaire active et dynamique. Je souhaite que, pour la population, dans les meilleurs délais, il y ait des choses qui soient observables, mesurables pour enfin vous redonner cette dignité qui est toujours nécessaire quand on veut continuer à être actif pour le développement du Québec. Merci.

Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! Une minute! S'il vous plaît! Un instant! Ce n'est pas tout à fait terminé. Vous me donnerez peut-être deux minutes pour ajourner. Sans cela, on n'aurait pas terminé nos travaux, si vous voulez continuer comme vous avez commencé la commission. C'est donc la fin de nos travaux. Je pense que la commission a rempli son mandat, celui qui lui avait été donné par l'Assemblée nationale. Cela a été une nouvelle expérience de deux jours pour l'ensemble des parlementaires de l'Assemblée nationale et pour moi aussi, comme président de commission, de siéger à l'extérieur. Si je peux reprendre une expression qu'on utilise à Québec, lorsqu'on siège au salon rouge à l'occasion et au salon bleu à d'autres occasions, je dirais que cela a été les deux premiers jours de session dans le salon orange à Schefferville, à l'extérieur de Québec.

Je voudrais simplement remercier l'organisation technique de l'Assemblée nationale qui a supporté nos débats, soit le secrétariat des commissions qui a fait un très bon travail d'organisation et, également, nos techniciens de la radio télévision des débats qui permettront que tout cela soit inscrit, écrit et demeure écrit. Pour moi, même si cela n'a pas été facile de toujours prévoir et de garder des horaires bien précis, j'ai tenté d'être le plus équitable possible pour l'ensemble des groupes qui se sont présentés devant nous et aussi pour les parlementaires. Je remercie donc tout le monde de sa bonne collaboration. Nous avons été très bien reçus à Schefferville. Comme mot de la fin, on vient de m'apprendre que c'est l'anniversaire du maire de Schefferville. Alors, je veux lui souhaiter un très bon anniversaire aujourd'hui. C'est sûrement une bonne coïncidence.

M. le maire, oui, je peux vous laisser dire un petit mot de la fin.

M. Bégin (Charles): Je vous remercie. Évidemment, comme cadeau, une commission parlementaire, c'est dur à absorber, mais je l'accepte de bon coeur, soyez assurés de cela.

Le Président (M. Bordeleau): Merci. Je voudrais demander au rapporteur de la commission, comme ce sera son mandat, de faire rapport de nos débats à l'Assemblée nationale à la prochaine occasion. La commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution est donc ajournée sine die.

(Fin de la séance à 19 h 31)

Document(s) associé(s) à la séance