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(Dix heures trois minutes)
Le Président (M. Gratton): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission permanente du revenu est réunie ce matin pour
étudier les crédits du ministère du Revenu.
Pour les fins de la séance d'aujourd'hui, les membres de la
commission sont: MM. Blank (Saint-Louis), Desbiens (Dubuc), Dubois
(Huntingdon), Forget (Saint-Laurent), Fréchette (Sherbrooke), Lachance
(Bellechasse), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Marquis (Matapédia), M.
Martel (Richelieu) est remplacé par M. Boucher (Rivière-du-Loup),
M. Ouellette (Beauce-Nord) est remplacé par M. Lafrenière
(Ungava), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).
Les intervenants sont: M. Houde (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord)
remplace M. Lafrenière (Ungava), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Lincoln (Nelligan), M. Maciocia (Viger), M.
Paradis (Brome-Missisquoi), M. Perron (Duplessis), M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
Avant d'aborder nos travaux, est-ce que la commission voudrait
désigner un de ses membres comme rapporteur?
M. Fréchette: M. le Président, à l'occasion
de la loi 39, on en avait choisi un qui a fait un magnifique travail, vous le
savez.
M. Blank: On prendrait le même? M. Fréchette:
Oui.
M. Blank: Le député de Rivière-du-Loup.
Le Président (M. Gratton): Alors, M. Boucher
(Rivière-du-Loup) agira comme rapporteur. Quant à la
procédure, je laisse au ministre et au député de
Saint-Louis le soin de s'entendre là-dessus.
M. Blank: Je suggérerais qu'on fasse la même chose
qu'on a faite l'année dernière. Un petit discours d'entrée
du ministre et je donnerai quelques réponses, et après cela on
peut faire...
M. Fréchette: Questions et réponses.
M. Blank: Questions et réponses "at large", dans ce
sens-là.
M. Fréchette: On s'entend également sur l'enveloppe
de temps dont on dispose, trois heures.
M. Blank: Oui, trois heures, même... M.
Fréchette: Un peu moins.
M. Blank: ... un peu moins. À moins qu'il y en ait
d'autres de mon côté qui viennent pour des questions
particulières.
Le Président (M. Gratton): Si la commission y consent, M.
le ministre.
Exposés généraux M. Raynald
Fréchette
M. Fréchette: M. le Président, avant d'entreprendre
l'étude détaillée des crédits du ministère
et à l'invitation du député de Saint-Louis, j'aimerais
faire un rapide survol des principales initiatives qui ont été
prises au ministère du Revenu au cours de l'exercice qui vient de se
terminer. J'attire votre attention sur l'esprit d'innovation qui a
caractérisé toute l'activité du ministère depuis un
an, et pour vous signaler que cet esprit d'innovation continuera de se
manifester dans les orientations prévues au calendrier de l'exercice qui
débute, surtout dans le domaine prioritaire de l'humanisation des
relations entre le ministère et le public.
Le dernier exercice a été marqué par la nomination
d'un nouveau sous-ministre, M. Alban d'Amours, qui a succédé
à M. André Gauvin qui occupait ce poste - on le sait, je pense -
depuis douze ans. Par ailleurs, deux nouveaux sous-ministres adjoints sont
aussi entrés en fonction: Me André Saint-Jean a
succédé à M. Hugues Fontaine, à titre de
sous-ministre adjoint et directeur général de la
législation, et M. Jean Laurin a été nommé
sous-ministre adjoint et directeur général de la nouvelle
Direction générale des services au public et à
l'entreprise. D'autre part, M. Paul-Émile Moreau, sous-ministre adjoint
et directeur général de la vérification, a quitté
le ministère pour prendre sa retraite. L'intérim est
assuré par M. Gaston L'Anglais qui agit effectivement depuis le
départ de M. Moreau à titre de directeur de la
vérification
Ce renouvellement des cadres supérieurs à la direction du
ministère a eu pour effet de rendre encore plus vif le désir
d'innovation et d'humanisation déjà existant. C'est
même dans le but de concrétiser cette aspiration que le
ministère a entrepris, avec la collaboration de tous ses cadres et
gestionnaires, une réflexion poussée sur sa mission et ses
structures administratives.
L'effort de réorganisation en cours à Revenu-Québec
est, à mon avis, une première dans la fonction publique
québécoise. Aucun ministère, sous réserve
évidemment de l'erreur qui est toujours possible, mais il nous semble
qu'aucun ministère ou alors aucun organisme n'a associé de si
près son personnel à la définition même de son
mandat.
D'autre part, des dispositions ont été prises en vue de
régler le problème des oppositions. Dans un premier temps, tout
le processus de traitement des cas a été intégré
à la Direction générale de la législation au lieu
d'être réparti entre cette direction générale et
celle de la vérification. Dans un deuxième temps, une plus grande
autorité a été donnée aux bureaux régionaux
qui peuvent maintenant prendre des décisions permettant de régler
un plus grand nombre de cas au premier niveau d'intervention.
Au chapitre des oppositions, il me semble important de signaler que
cette décentralisation dont je viens de parler a déjà
commencé à produire des effets intéressants. On se
rappellera que, par les années passées, il fallait un très
long délai pour arriver à une décision sur une opposition
déposée par un contribuable qui contestait son avis de
cotisation. Tout cela, maintenant, a été centralisé
à la Direction générale de la législation, et nous
sommes actuellement à disposer des oppositions qui étaient
déjà là pour viser l'objectif de pouvoir à l'avenir
en disposer à l'intérieur d'un délai d'à peu
près six mois, entre trois et six mois, contrairement à un an et
demi, deux ans, trois ans que cela prenait jusqu'à maintenant.
Grâce à ces changements nous pourrons
accélérer le règlement des oppositions et ainsi fournir un
service de meilleure qualité aux contribuables qui ne sont pas d'accord
avec les décisions prises à leur égard en ce qui concerne
leur fardeau fiscal.
La Direction générale de la législation a aussi
mené à bonne fin un projet que le ministère caressait
depuis longtemps mais que les circonstances l'avait toujours
empêché de réaliser. Depuis la fin d'avril en effet, le
ministère du Revenu publie des bulletins d'interprétation
intitulés "Interprétation Revenu-Québec". Ces bulletins
sont distribués par voie d'abonnement avec la collaboration du
ministère des Communications, et à ce chapitre je vous signale
qu'effectivement il y a deux semaines maintenant, nous avons
procédé au lancement de cette nouvelle initiative de la
publication des bulletins d'interprétation. Et, comme je le signale dans
mon intervention, toutes les personnes qui seraient désireuses d'obtenir
ce bulletin d'interprétation peuvent le faire par la voie d'un
abonnement qui leur permet de recevoir cette publication
d'interprétation qui touche à tous les secteurs de la taxe et de
l'impôt. Il semble que particulièrement dans les milieux
spécialisés de la fiscalité on est satisfait de cette
initiative.
Nous avons également été en mesure d'apporter une
solution définitive aux nombreux problèmes que posait
l'imposition des travailleurs québécois oeuvrant à
l'extérieur du Québec pour une période prolongée.
Tous, nous avons entendu parler de ce qu'on avait convenu d'appeler le
problème des non résidents, les Québécois qui
travaillaient à l'extérieur pour des périodes de temps
plus ou moins prolongées et qui se sont retrouvés avec un
problème particulier. Nous avons trouvé une solution
définitive à ce problème-là, et nous avons
également amendé la loi de façon à éviter la
répétition des mêmes problèmes pour l'avenir.
Au cours de la dernière année, nous avons également
procédé à la publication d'un guide de vulgarisation des
droits successoraux qui s'ajoute à celui des artistes et la
fiscalité; c'est notre intention d'intensifier la publication de ces
guides afin de mieux faire comprendre la fiscalité
québécoise.
La nouvelle Direction générale des services au public et
à l'entreprise, dont j'avais annoncé la création l'an
dernier, a été mise sur pied au cours du dernier exercice
financier. Cette nouvelle direction générale prévoit
être en mesure de devenir entièrement opérationnelle avant
la fin de cette année. Les effectifs qui la composent ont cependant
commencé à faire leurs preuves au cours de la période de
pointe de l'impôt qui s'achève, ce qui est, il me semble, de bon
augure pour l'avenir.
Cette nouvelle Direction générale du service à la
clientèle et à l'entreprise, qui comptera quelque 300
employés, se subdivise en deux directions, l'une préposée
aux renseignements et l'autre préposée aux communications. Son
effectif a été recruté en grande partie dans les
directions générales existantes afin que cette initiative puisse
être menée à bien sans qu'il en résulte des
augmentations de coûts importantes pour l'État.
Le mandat confié à cette direction générale
est non seulement d'informer et de renseigner le public et les entreprises sur
leurs droits et obligations en matière de fiscalité, mais surtout
de le faire avec empressement, courtoisie et efficacité. Nous
n'insisterons jamais assez sur les objectifs poursuivis d'une plus grande
humanisation de nos relations avec les contribuables et les mandataires que
nous servons.
Le premier objectif visé est celui de
l'accessibilité. Étant dégagé d'autres
responsabilités administratives, le personnel de la nouvelle direction
générale est là pour répondre aux besoins du public
et des entreprises.
Le deuxième objectif de cette direction générale
est de fournir avec diligence des services courtois, adéquats et
équitables. Pour que ces services soient accessibles à un plus
grand nombre de citoyens, la nouvelle direction se propose d'accroître
graduellement le nombre de bureaux de renseignements mis à la
disposition de la population habitant les diverses régions de la
province. Elle se propose ainsi d'ouvrir, dès l'automne prochain, un
bureau permanent à Sept-Îles, lequel s'ajoutera à ceux de
Québec, Montréal, Sherbrooke, Hull, Rouyn, Trois-Rivières,
Jonquière et Rimouski.
Grâce à un réseau de
télécommunications plus complet et plus perfectionné, ces
bureaux régionaux sont en mesure de fournir plus rapidement aux
contribuables et aux mandataires des renseignements plus complets, que ce soit
au comptoir d'accueil ou au téléphone. Des cours de
perfectionnement sont également donnés aux préposés
au téléphone, afin qu'ils puissent renseigner les contribuables
sans avoir à les référer à d'autres
spécialistes. Quant aux contribuables qui doivent recourir à
l'interurbain pour communiquer avec le ministère, il va de soi qu'ils
pourront continuer à le faire sans frais.
Quant à cette division des renseignements, M. le
Président, il m'apparaît important de faire rapport à la
commission du résultat d'une initiative qui a été prise
à l'occasion de la dernière période de pointe de
l'impôt. (10 h 15)
Nous avons, cette année, strictement à titre
expérimental, demandé à des bénévoles qui en
auraient le goût d'aider les contribuables qui ont besoin de
procéder à l'opération fiscale avant le 30 avril de chaque
année et qui rencontrent des difficultés de toute espèce,
on le sait. Nous avons fait appel à des bénévoles qui
accepteraient de suivre certains cours ou alors qui avaient déjà
une expertise de la fiscalité pour avoir travaillé au
ministère du Revenu. Nous avons demandé à ce groupe de
personnes si elles étaient intéressées à aider les
contribuables qui avaient, effectivement, besoin d'aide pour remplir leur
formulaire d'impôt dans les cas, évidemment, de fiscalité
simple.
À notre grande surprise, sur l'ensemble du territoire, 350
personnes se sont déclarées prêtes et ont effectivement
travaillé pendant la période de pointe à aider la
clientèle des CLSC, par exemple, des centres d'accueil, la
clientèle étudiante dans certains cégeps, certaines
universités. Cette clientèle a été aidée par
ces bénévoles et le résultat que nous avons obtenu
m'apparaît à ce point révélateur qu'il nous faudra
continuer et amplifier pour la prochaine année fiscale
l'expérience des bénévoles qui s'est avérée
très heureuse.
Il est clair, par ailleurs, que ces bénévoles se sont
déclarés disponibles auprès des contribuables qui ont une
fiscalité simple, qui doivent produire une déclaration
d'impôt, mais pour qui l'opération est simple. Alors, 350, encore
une fois, de ces personnes ont accepté de se livrer à cette
activité pour venir en aide à ceux qui en manifestaient le
désir.
De son côté, la Direction des communications a pour mandat
de faire mieux connaître le ministère, les lois qu'il administre
et les services qu'il offre à la population. Cela dans un langage, pour
autant que cela est possible, à la fois plus simple et facilement
compréhensible.
Même si nous avons pu réduire cette année du quart
le budget consacré aux formulaires, la Direction des communications
verra à améliorer la présentation graphique et à
simplifier le langage administratif de l'ensemble des formulaires du
ministère. Une équipe déjà formée
étudie actuellement la formule de déclaration des revenus des
particuliers et toutes les formules qui s'y rattachent en vue d'y apporter des
modifications majeures quant à leur simplification. Elle a pour mandat
de formuler des recommandations dès cet été.
Mentionnons enfin que la nouvelle Direction générale des
services au public et à l'entreprise est très bien située
pour identifier les besoins et les attentes des diverses clientèles du
ministère, ce qui lui permettra de recommander aux autorités les
modifications à apporter aux lois, aux règlements, aux politiques
et aux procédures. Je suis, quant à moi, convaincu que cette
direction contribuera ainsi à reléguer au second rang la
"machine" et à rapprocher le ministère de sa clientèle en
lui fournissant des services plus courtois, plus efficaces et plus humains.
D'autre part, la Direction générale de la planification,
de la recherche et du développement a entrepris une restructuration des
systèmes touchant les services au public et à l'entreprise. Cette
restructuration vise trois buts principaux: rendre ces systèmes
informatisés ou manuels, plus aptes à répondre aux besoins
nouveaux du ministère; deuxièmement, accroître le
degré d'efficacité du ministère et, finalement, favoriser
une plus grande rentabilité en cette période où il faut
à la fois comprimer les coûts et effectuer un volume croissant de
travail. C'est également cette direction générale qui a
compilé les données du recueil intitulé "Statistiques
financières et fiscales des corporations", recueil qui a
été publié pour la première fois cette
année. Ce
volume est venu s'ajouter à celui des statistiques fiscales des
particuliers publié depuis sept ans. Ces deux volumes diffusés
par l'entremise de l'Éditeur officiel permettent à tous ceux qui
s'intéressent à l'économie du Québec d'en suivre
l'évolution.
Une des causes de l'accroissement continu du volume de travail a
été cette année la création du programme
d'allocation de disponibilité. Ce programme, dont l'administration a
été confiée au ministère du Revenu, a pour but de
fournir une aide financière aux familles qui ont des enfants
âgés de moins de six ans. Il est le quatrième programme
à caractère social dont l'administration est confiée au
Revenu, les trois autres étant le remboursement des impôts
fonciers, le supplément au revenu de travail et l'allocation logement
aux personnes âgées connue sous l'appellation de Logirente.
En matière de compression des effectifs, je tiens à
signaler que tout en ayant à assumer des tâches nouvelles, le
ministère a connu une diminution appréciable de ses postes
autorisés. Au 1er avril de chaque année, l'effectif
autorisé a été fixé à 4642 en 1979, 4630 en
1980, 4510 en 1981 et 4475 en 1982. Dans ce contexte de compression des
ressources humaines et budgétaires dont il est fait mention à
quelques reprises, permettez-moi de préciser que le ministère a
dû procéder à des réaménagements de
ressources afin de donner suite aux objectifs de compression demandés au
ministère.
Je vous ai parlé précédemment des efforts accomplis
au niveau des dépenses de formulaires. En outre, le ministère a
mis en place certains mécanismes afin de mieux régler les
ressources budgétaires, régler et gérer bien sûr. Un
processus de prévisions et de révisions trimestrielles a
été mis en place, un processus de suivi budgétaire
particulier a été utilisé pour certains postes
budgétaires, amélioré, et a aussi été mis
à la disposition des gérants du ministère du Revenu du
Québec.
Avec votre permission, M. le Président, j'aimerais maintenant
présenter un bref rapport sur l'état de la situation en ce qui a
trait au traitement des déclarations des revenus à des
particuliers pour l'année 1981 et des démarches touchant les
programmes "socio-fiscaux" qui y sont connexes. Ainsi, par exemple, si je vous
donnais l'évolution du programme d'allocation de disponibilité au
moment où on se parle à ce jour, 76 014 600 $ ont
déjà été retournés aux différents
bénéficiaires, lesquels on estime à près de 210
000. Si l'on fait, à partir de l'allocation de disponibilité et
des chiffres dont je viens de vous parler, un parallèle avec la
possibilité d'obtenir un crédit d'impôt pour frais de garde
d'enfants, pour l'année d'imposition 1980, le montant
réclamé en vertu des frais de garde s'élevait à 58
079 000 $ et avait bénéficié à 44 264 personnes.
Pour la première année d'application de l'allocation de
disponibilité, en frais de garde le montant attribué est descendu
de 58 000 000 $ à 37 000 000 $ à cause, évidemment, du
choix qu'avaient les bénéficiaires de pouvoir se prévaloir
du programme d'allocations de disponibilité plutôt que des frais
de garde. Les allocations en frais de garde ont évidemment
diminué.
Maintenant, en ce qui concerne l'évolution de la situation au
niveau du traitement de l'ensemble de la fiscalité, nous avons
reçu jusqu'à maintenant 3 460 861 formules TP-1. Ces formules ont
été traitées dans le cours normal des opérations.
À ce jour, nous avons émis 1 405 682 avis de cotisation. Nous
avons, par ailleurs, retourné 1 246 561 chèques, - je parle
évidemment toujours de l'impôt sur le revenu - pour un montant
global de 378 412 922 $, dont 271 000 000 $ sont déjà
expédiés.
Maintenant, l'opération générale fonctionne comme
prévu. Il y a évidemment à tenir compte du fait que pour
la première année nous avons administré le programme
d'allocations de disponibilité. Cela a pu, en cours d'opération,
créer certains retards dans le traitement de l'ensemble de la
fiscalité, mais nous sommes quand même, au moment où on se
parle, à l'intérieur du délai normalement prévu
pour le traitement de l'ensemble de la fiscalité, c'est-à-dire
qu'à la fin de juin nous prévoyons que toute l'opération
sera complétée.
Si, en termes de remboursements, les membres de la commission sont
intéressés à obtenir des chiffres, je vous dirai qu'en
date du 19 mai, donc ce matin, en remboursements d'impôt sur le revenu,
nous avons retourné 282 093 596 $, en remboursements d'impôt
foncier, 29 064 626 $ et en allocations de disponibilité, - je l'ai
souligné tout à l'heure -67 254 700 $.
Alors, je réitère que le processus fonctionne normalement
et que, même avec le mandat que nous avons d'administrer le programme
d'allocations disponibilité, à la fin du mois de juin, nous
aurons complété l'ensemble de l'opération.
Voilà, M. le Président, pour les remarques
générales que j'avais à communiquer aux membres de la
commission. Je terminerai simplement en vous présentant, si vous me le
permettez, les hauts fonctionnaires du ministère qui sont là pour
répondre aux questions des membres de la commission. Il y a M. D'Amours,
sous-ministre en titre; M. Lionel Labbé, directeur de cabinet; M. Alain
Dompierre, sous-ministre adjoint aux opérations; M. Denis Rheault,
sous-ministre adjoint à la planification, à la recherche et au
développement; M. Pierre Langevin, président de la Régie
des loteries et courses; M. Jean
Laurin, sous-ministre adjoint à la direction
générale des services au public et à l'entreprise; M.
Michel Vaillancourt, qui est directeur du personnel et Me André
Saint-Jean, sous-ministre adjoint à la Direction générale
de la législation. Quant à moi, M. le Président, je vous
remercie, c'est complété.
Le Président (M. Gratton): Merci, M. le ministre. M. le
député de Saint-Louis.
M. Harry Blank
M. Blank: M. le Président, le ministère du Revenu
représente au plan administratif un très gros ministère.
Il est chargé de la perception des impôts et des taxes au sein de
l'administration provinciale la plus vorace, la plus gloutonne au Canada et
probablement en Amérique du Nord... mais c'est votre job.
En 1981-1982, ce ministère s'occupait de la perception d'environ
8 300 000 000 $ en impôts sur le revenu, de celle de 3 200 000 000 $ en
taxes à la consommation et de quelques centaines de millions de dollars
en droits, permis et revenus divers, soit un total d'environ 12 000 000 000 $.
Lorsque nous connaîtrons le détail du prochain budget, il faudra
sans doute révéler que ce montant s'élève à
environ 14 000 000 000 $ ou davantage, selon l'humeur du ministre des
Finances.
En termes d'effectifs, il s'agit de 5445 employés, dont 4472
à temps plein; c'est donc à ce titre le troisième
ministère en importance du gouvernement, immédiatement
après celui de la Justice et des Transports.
C'est aussi un ministère très présent, très
visible dans la population. Par la nature de ses exploitations, il risque
d'être associé intimement à tout ce que le gouvernement
comporte comme source de désagrément et d'embêtement. C'est
dommage, mais...
M. Fréchette: C'est comme cela.
M. Blank: C'est comme cela. Cette image négative risque de
s'aggraver lorsque le gouvernement est financièrement aux abois, comme
c'est le cas présentement. Sur ce sujet, j'ai des questions
particulières à poser, sur la façon de percevoir des
comptes. Celui-ci est alors tenté de sortir tous les trucs possibles, de
faire usage de tous les règlements écrits en "fine print", comme
on dit en anglais, pour presser le citron que constitue le contribuable. Le
véritable défi d'un ministère comme le Revenu est donc de
conserver un visage humain malgré le caractère difficile et
souvent pénible de sa mission.
Or, justement, il nous semble que cela n'a pas toujours
été le cas au cours de la dernière année. Nous
pensons ici à trois pratiques administratives particulières qui
ont été l'objet de commentaires parfois acerbes de la part des
citoyens affectés; nous comptons interroger le ministre sur ces
questions. (10 h 30)
II y a eu premièrement cette mesure, contenue dans la fameuse loi
29, qui autorisait le ministre du Revenu à déduire, à
même les remboursements d'impôt, des sommes dues au gouvernement en
vertu d'autres programmes. Le ministère tente de récupérer
ainsi les malversations de l'aide sociale et, semble-t-il, les prêts aux
étudiants lorsque les anciens bénéficiaires ont un revenu
imposable. Nous sommes, pour notre part, inquiets de la possibilité que
cette pratique qui, à première vue, peut sembler
justifiée, soit étendue davantage et
généralisée à d'autres fins, comme la
récupération des amendes imposées par les tribunaux, ou
à celle des pensions alimentaires en souffrance. On voit alors quels
genres de doutes et d'inquiétudes cela entraînerait, parmi les
contribuables, sur le caractère confidentiel de l'information
confiée au ministère du Revenu.
Il y a eu, deuxièmement, ce zèle soudain et intempestif
des inspecteurs de l'impôt concernant les pourboires des employés
de restaurant. Le ministre du Revenu croit qu'il y a là une
possibilité d'évasion fiscale de l'ordre de 75 000 000 $. C'est
un montant très modeste par rapport à l'ensemble de
l'évasion fiscale estimée à environ 1 000 000 000 $ par
année, selon un article paru dans la Presse du 19 mars dernier. Mais
c'est quand même beaucoup pour un gouvernement désemparé
financièrement. Selon les rapports que nous avons, il semble qu'une fois
les victimes choisies, les inspecteurs d'impôts commencent par estimer,
de façon plus ou moins arbitraire, un montant fictif de pourboire pour
un employé à partir des ventes ou du chiffre d'affaires du
restaurant. Puis, ils exigent le paiement d'impôts sur cette somme, qui
est souvent considérable puisqu'elle porte non seulement sur
l'année courante, mais aussi sur plusieurs années
antérieures. On voit facilement ce qu'un tel harcèlement peut
donner pour des personnes qui ont déjà des problèmes
à joindre les deux bouts, comme les "waitresses", les "bus boys" et les
gens comme eux.
Troisièmement, nous aimerions que le ministre fasse le point sur
la santé actuelle de ses plus précieux "collaborateurs
forcés", les détaillants d'essence qui recueillent, pour le
compte du gouvernement, les produits de la sinistre taxe ascenseur de 40% sur
l'essence. Nous aimerions, entre autres, savoir s'il a poursuivi les
études sur l'évolution comparative du chiffre d'affaires des
détaillants dans leur ensemble, à partir de décembre 1981,
sur celle des détaillants directement exposés à la
concurrence de
ceux des autres provinces ou des États-Unis, sur le
fonctionnement des "zones d'exception" près des frontières de
l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, croit-il enfin que la paix fragile
rétablie après la grève des détaillants d'essence
va durer?
Nous aimerions également savoir ce qui en est des retards dans le
versement des allocations de disponibilité - le ministre a
répondu un peu ici - Cette mesure avait été
annoncée à grand renfort de publicité dans le budget de
1981-1982. On sait maintenant que la promesse initiale a été
retouchée une fois l'élection passée; on avait promis 400
$ pour le premier enfant de moins de 6 ans, mais c'est 300 $ seulement qui sont
offerts aujourd'hui. Quand c'est le temps de payer, on a la
social-démocratie qu'on peut. Nous aimerions signaler à ce sujet
que c'est justement sur l'insistance de l'Opposition que la mesure
législative concernée a pu être votée avant
l'ajournement de décembre. Nous pensions que cela permettrait au
ministre d'éviter les retards de remboursements d'impôt imputables
à ce nouveau programme. On constate aujourd'hui qu'il y aura quand
même des retards, mais ce seront certainement le gouvernement et le
ministre du Revenu qui porteront la responsabilité entière de ces
retards.
Je constate que l'arrêté en conseil n'avait pas encore
été adopté dans cette affaire à la fin de
janvier...
M. Fréchette: ... les allocations?
M. Blank: Les allocations de disponibilité. Même si
la loi a été adoptée vers le 15 ou le 18 décembre,
je pensais qu'au moins on serait prêt à adopter un
arrêté en conseil à la prochaine séance du cabinet,
après que la loi a été sanctionnée, pour vous
donner trois ou quatre semaines de plus. Mais c'est certainement sur le
gouvernement et sur le ministre du Revenu que repose la responsabilité
entière de ces retards.
Finalement, nous avons l'intention de questionner le ministre sur le
fonctionnement d'une autre trouvaille de la social-démocratie
péquiste, le programme du supplément de revenu au travail. Au
moment de sa création, soit en 1979-1980, le gouvernement a
affecté un crédit de 31 000 000 $ à ce programme. Ce
crédit a baissé à 27 200 000 $ l'année suivante,
puis à 21 000 000 $ seulement en 1981-1982, soit une diminution de 32%
en dollars et d'environ 50%, si on tient compte de l'inflation. Le moins qu'on
puisse dire, c'est que ce programme n'a pas été la
réussite du siècle. Pour la première fois cette
année, en 1982-1983, le gouvernement prévoit augmenter les
crédits à ce poste, soit de 20 000 000 $ à 23 000 000 $.
Nous voulons connaître les raisons de ce renversement de tendance. C'est
sur la base de ces idées qu'on peut avoir une discussion; au moins que
le ministre réponde à quelques questions
immédiatement.
Réponse du ministre
M. Fréchette: J'ai noté quelques-unes des
interrogations que vous avez soulevées. La première
m'apparaît être le principe de la compensation entre
différentes dettes; c'est cela? Il y a peut-être lieu de
procéder à un court historique de l'évolution
législative de cette situation. Avant l'adoption de la loi no 11 le
printemps dernier, la compensation n'était possible qu'en vertu de
dettes fiscales. Je vais illustrer ma pensée par un exemple. À
supposer qu'un contribuable qui était mandataire du ministère
pour la perception de taxes devait un montant en taxes et que par ailleurs nous
lui devions de l'impôt sur son revenu, nous faisions la compensation
parce qu'il s'agissait de deux dettes également liquides et exigibles,
mais de fiscalité strictement.
Cette disposition a été changée, - je pense que
c'est dans la loi no 29 - et la compensation a été élargie
pour s'appliquer à des dettes d'aide sociale dans les cas où des
gens avaient reçu de l'aide sociale et que, pour n'importe quel motif,
il y avait eu des paiements faits en trop. Il fallait au ministère des
Affaires sociales procéder à la récupération de ces
paiements faits en trop. Effectivement, la loi 29 a permis que cette
compensation puisse se faire entre une dette que le ministère devait aux
contribuables concernés et le payé en trop qu'ils avaient
reçu de l'aide sociale.
Je signalerai aux membres de la commission que le seul mandat qui nous
est confié, c'est de procéder à la perception de ces
payés en trop.
Les renseignements nous arrivent du ministère des Affaires
sociales et c'est à la suite de ces renseignements que
l'opération se fait. Il existe, me dit-on - là, je ne peux pas en
donner un assurance formelle à la commission - une directive
administrative en vertu de laquelle, dans les cas où ces assistés
sociaux ont pris une entente pour rembourser le trop payé et dans les
cas où cette entente est respectée, on ne doit pas
procéder à la compensation, quand l'entente existe et qu'elle a
été respectée. Mais les cas qui nous sont envoyés
par le ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu sont pour nous des cas dans lesquels il faut
en vertu de la loi procéder à la compensation.
Je signalerai au député de Saint-Louis que cette
opération nous a permis jusqu'à maintenant de
récupérer quelque 4 085 602 $ du montant payé en trop en
aide sociale. Cela a touché 20 213
bénéficiaires de l'aide sociale.
Je réitère, par ailleurs - cela m'apparaît important
de le faire - que, dans les cas où une entente existe et dans les cas
où cette entente est respectée, il y a une directive
administrative en vertu de laquelle on ne doit pas procéder à la
compensation.
Dans le cas des prêts aux étudiants, je signalerai
simplement au député de Saint-Louis que nous n'avons pas, cette
année, procédé à la compensation dans le cas des
étudiants qui doivent encore des montants à partir des
prêts qu'ils ont reçus pendant qu'ils étaient aux
études.
À ce chapitre, je soulignerai un dernier aspect qui
m'apparaît important. Nous n'allons pas utiliser l'allocation de
supplément au revenu du travail, ni non plus de Logirente pour donner
cette compensation, sauf dans les cas où un contribuable
bénéficiaire de l'un ou l'autre des deux programmes aurait, en
vertu de ce programme, reçu en trop. Là, nous ferions la
compensation, mais nous n'allons pas utiliser le supplément de revenu au
travail pour compenser une dette d'impôt, une dette de taxe de vente ou
de toute autre nature; seulement en fonction des deux mêmes programmes,
s'il y a eu des payés en trop.
Le député de Saint-Louis a soulevé - il me semble
fort à propos - le problème des employés...
Confidentialité M. Blank: Avant d'en arriver
là...
M. Fréchette: Voulez-vous poser des questions
là-dessus?
M. Blank: ... on pourrait vider cette question. Le gros
problème que je vois dans cela, à part le fait que cela peut
augmenter toutes les dettes envers le gouvernement, comme je l'ai
mentionné dans mon discours, même des amendes, voyant que le
gouvernement est maintenant le percepteur des pensions alimentaires, ce serait
possible d'utiliser cette même loi 29 pour percevoir ces dettes.
Même à ce stade, ce ne serait pas la fin du monde. Mais là
où je vois le problème, c'est que des gens font leur rapport
d'impôt... Je pense que c'est dans l'intérêt du gouvernement
de préserver la confidentialité. Si vous perdez cela, vous
perdrez de l'argent. Même une prostituée peut écrire sa
profession, si elle paie ses impôts, c'est légal, et personne ne
doit savoir comment elle gagne son argent.
La confidentialité, c'est la base de toute la perception des
impôts, pas seulement ici mais partout dans le monde. La question est:
Quelles précautions prend-on ici sur la confidentialité? Est-ce
que le ministre des Affaires sociales vous a envoyé une liste de tous
les gens qui lui doivent de l'argent ou s'il vous demande s'il y a quelque
chose dans vos coffres pour cette personne? Comment cela fonctionne-t-il?
Comment protège-t-on cette confidentialité?
Vous me direz peut-être que les fonctionnaires du ministère
des Affaires sociales ont prêté le serment de
confidentialité et tout cela, mais il y a un esprit différent
dans les ministères autres que le ministère du Revenu où
la confidentialité, ce serment, est pris avec un certain sérieux,
un sérieux à 100%. Le sérieux du serment est plus fort aux
ministères du Revenu et des Finances que dans les autres
ministères, même quand on prête le serment. J'ai peur, et
c'est la peur des éditorialistes, des gens qui ont écrit sur ce
sujet, ce n'est pas tellement le mauvais goût avec lequel on fait la
perception, pire que cela, c'est la possibilité de perdre la
confidentialité dans les rapports d'impôt.
M. Fréchette: M. le Président, la question du
député de Saint-Louis est fort pertinente et il me semble que la
réponse qu'on peut lui donner est de la nature suivante: D'abord, il
faut retenir que, dans la loi du ministère, il y a cette obligation
à la confidentialité à partir du ministre jusqu'à
tous les employés du ministère. Il y a aussi ce serment dont
parle le député de Saint-Louis que tous les employés du
ministère doivent prêter et en vertu duquel ils s'engagent
à une stricte confidentialité.
Quand on arrive dans le cas pratique soulevé par le
député de Saint-Louis, celui de la compensation, je lui
signalerai qu'en aucune espèce de façon, à mon sens, la
confidentialité n'est mise en danger, parce que les renseignements qui
nous sont nécessaires pour procéder à cette perception
dont on parle, ce n'est pas nous qui allons les fournir ces renseignements
à la Sécurité du revenu, au ministère de
l'Éducation ou à n'importe quel autre ministère. Ce sont
ces ministères qui nous fournissent à nous les renseignements. En
ce sens, cela a exactement la même nature que n'importe lequel autre
renseignement qui peut nous venir de n'importe laquelle autre source. Ce n'est
pas nous qui allons dire au ministère des Affaires sociales ou à
la Sécurité du revenu: Ce contribuable est un bon contribuable,
il a toujours payé ses impôts, il n'y a pas de retard. Ce n'est
pas comme cela que cela fonctionne. C'est la Sécurité du revenu
qui nous envoie une liste de noms avec les renseignements qui nous sont
nécessaires pour faire l'évaluation du dossier et
procéder, s'il y a lieu, à la récupération des
sommes dues. Encore une fois, et je m'excuse de me répéter, mais
cela m'apparaît important de le faire, nous n'allons en aucune
espèce de circonstance et pour aucune considération donner
quelque renseignement que ce soit à qui que ce soit
et à quelque organisme que ce soit. Je ne vois pas, dans ces
conditions, comment il y aurait un danger que la confidentialité ne soit
pas respectée.
M. Blank: Si le ministre des Affaires sociales vous donne une
liste de 5000 noms de gens qui vous doivent des sommes et que vous lui
retournez la liste en lui disant que vous allez faire la perception de ces
sommes auprès de certaines gens parce que vous leur devez de l'argent
tandis qu'à d'autres vous ne devez rien, à ce moment-là,
il y a un bris de confidentialité.
M. Fréchette: On ne fait jamais cela, M. le
Président. Effectivement, ce que j'ai essayé d'expliquer au
député de Saint-Louis, peut-être n'ai-je pas
été assez explicite, assez clair... Je vous réitère
que nous n'allons et ne communiquons à personne ni à aucun
organisme ou autorité gouvernementale quelque renseignement de la nature
de ceux dont parle le député de Saint-Louis ou de toute autre
nature. On ne fait rapport à personne, sauf pour dire que nous avons
perçu tel montant.
M. Blank: Comment le ministre des Affaires sociales va-t-il
savoir qu'il doit rayer cela de ses livres ou mettre votre perception dans son
budget? Comment va-t-il savoir que vous avez perçu les sommes? (10 h
45)
M. Fréchette: Je vais ajouter un détail qui va
peut-être répondre à la question, un détail qu'on
vient de me fournir. En plus de donner le chiffre quant au montant global qui a
été perçu, on va aussi fournir à l'organisme qui
nous a demandé de faire la perception le numéro d'assurance
sociale des individus qui -avaient des redevances.
M. Blank: Oui, mais à ce moment-là...
M. Fréchette: Et alors, ça permet d'éliminer
des comptes.
M. Blank: Oui, peut-être que ce n'est pas tellement
tragique mais techniquement, vous brisez la confidentialité parce que
des gens au ministère des Affaires sociales, qui ont reçu cette
liste d'assurance sociale, vont dire: Ce monsieur a fait de l'argent
l'année passée et ce monsieur n'en a pas fait.
M. Fréchette: Bien, écoutez.
M. Blank: Je sais que ce n'est pas la fin du monde mais
techniquement je ne vois pas, si on veux avoir une confidentialité de
100%... C'est la loi, je le sais, mais il y a des lois qu'on vote ici qui ne
sont pas les meilleures au monde.
M. Fréchette: Ah! je suis tout à fait d'accord.
M. Boucher: Mais, du côté des affaires sociales,
n'est-il pas vrai que l'assisté social qui est encore sur les listes du
ministère comme bénéficiaire ne peut pas être
imposé du côté du ministère du Revenu? Il s'agit
d'un assisté social qui a repris le travail et qui fait un rapport
d'impôt.
M. Blank: Oui, mais un rapport d'impôt qui fait qu'il ne
paie pas ou qu'il paie. Il y a des gens qui ne sont pas sur le bien-être
social et qui ne paient pas d'impôt, avec les exemptions et tout
ça. Ce n'est pas tout le monde qui n'est pas sur le bien-être
social qui paie de l'impôt; les gens font un rapport. Tous ces gens ne
paient pas d'impôt. Mais avec ça, il y a une façon de
savoir qui fait quoi, pas les chiffres exacts, mais au moins qui est dans une
certaine catégorie.
M. Fréchette: Sur un certain plan, je suis disposé
à suivre le député de Saint-Louis dans son raisonnement
dans le sens que peut-être que théoriquement, il pourrait y avoir
un danger de manquer à cette confidentialité qui est stricte en
vertu de la loi de l'impôt. Sauf que la loi 29 qui le permet nous
autorise à procéder de cette façon. On ne procède
de façon illégale en le faisant comme ça. C'est le danger
que vous soulevez.
M. Blank: C'est le danger que j'ai soulevé.
Peut-être que c'est un danger qu'on n'a pas vu quand on a adopté
le bill 29. Peut-être que le ministre peut le présenter au Conseil
des ministres pour suggérer d'autres façons de faire ça.
Et une autre question que je me pose, ces dettes ou prétendues dettes
sont-elles de vraies dettes ou de prétendues dettes? Est-ce que le
contribuable à qui on demande cet argent a une chance de se
défendre? Est-ce que le montant a été fixé? Est-ce
que c'est un jugement? Est-ce que c'est une admission ou quoi? Comment
ça arrive? Est-ce qu'il y a une chance de débattre ce droit de
perception par le gouvernement de cette dette?
M. Fréchette: Moi, je souhaiterais pouvoir répondre
au député de Saint-Louis de façon très
précise à la question qu'il pose et je lui signale à
nouveau que quant à nous, toute la situation nous est soumise par la
sécurité du revenu. Quel a été le processus qui a
précédé l'envoi au ministère du Revenu de ces
renseignements? Je ne saurais le dire, mais je présume qu'on a dû
procéder comme la loi le prévoit en matière de
remboursement de trop payé. Le contribuable à qui on
réclame ce montant en vertu de la loi sur la sécurité doit
certainement avoir les moyens à sa disposition pour contester la
réclamation qu'on lui fait et si on a perçu jusqu'à
maintenant au-delà de 4 000 000 $, c'est que la plupart de ceux à
qui on a envoyé des réclamations de cette nature ont convenu ou
ont accepté qu'effectivement, ils devaient ce montant.
M. Blank: Est-ce qu'il y a eu des protestations des contribuables
sur cette façon de procéder avec leur...
M. Fréchette: On m'informe qu'en effet certains
contribuables à qui ces réclamations ont été
faites, ont protesté du fait qu'ils devaient ces montants. Ce que l'on
fait, nous, à ce moment, on les retourne à la
Sécurité du revenu en les informant que la contestation qu'ils
veulent engager doit se faire au niveau de la Sécurité du
revenu.
M. Blank: Que faites-vous avec l'argent en attendant?
M. Fréchette: Ceux qui contestent n'ont
généralement pas payé.
M. Blank: Je parle de l'argent. Est-ce que vous le percevez et le
gardez en fiducie jusqu'à ce que la chicane soit réglée
entre les Affaires sociales et le particulier?
M. Fréchette: C'est évident que, si on a
payé sous protêt, si on peut parler comme cela...
M. Blank: Pas payé, perçu sous protêt.
M. Fréchette: Parlons autrement. Si on a perçu des
sommes sous la réserve, de la part de celui qui paie, de faire constater
le droit que nous avions de percevoir et que finalement, après
contestation, il obtient gain de cause, il est clair qu'il sera
remboursé avec les intérêts prévus dans des
situations semblables.
M. Blank: Par qui?
M. Fréchette: Si c'est nous qui avons perçu
l'argent et que nous l'avons au ministère, nous allons le
rembourser.
M. Blank: Si c'était donné au ministère, ce
serait celui-ci qui paierait.
M. Fréchette: Le ministère des Affaires
sociales?
M. Blank: Oui.
M. Fréchette: C'est le ministère des Affaires
sociales qui va rembourser.
M. Blank: Qui va payer.
M. Maciocia: Pour revenir sur la confidentialité, je pense
que vous étiez en train de nous dire quelque chose. Justement, on disait
tout à l'heure que la loi 29 permet au ministère ou au ministre
d'aller chercher cet argent des contribuables du ministère des Affaires
sociales, du ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du Revenu, etc., en disant après aux
ministères en question: On a perçu tel montant pour tel
numéro d'assurance sociale, tel montant pour tel autre numéro
d'assurance sociale. Automatiquement, on connaît le nom de la personne
à ce moment.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Parce que par son numéro d'assurance
sociale...
M. Fréchette: Pour donner une quittance, pour donner un
reçu attestant le paiement.
M. Maciocia: C'est pour cela que je dis qu'avec le numéro
d'assurance sociale on connaît l'identité de la personne.
M. Fréchette: De toute façon... M. Maciocia:
Est-ce que... M. Fréchette: Je m'excuse.
M. Maciocia: Probablement que le ministre ou le ministère,
au moment de la préparation du projet de loi no 29, n'a pas pensé
à cette confidentialité tellement stricte au ministère du
Revenu. Si vous croyez et si vous voyez vraiment un danger menaçant la
confidentialité, est-ce qu'il n'y aurait pas une façon, au
Conseil des ministres, de voir comment on pourrait remédier à la
situation?
M. Fréchette: Remédier à la situation.
M. Blank: Voyant que le montant au Québec est de 4 000 000
$ sur un budget de 23 000 000 000 $, je ne sais pas si on pense que cela vaut
la peine de sauvegarder cette confidentialité pour ce montant. 4 000 000
$, c'est beaucoup d'argent mais, comparativement au budget de la province,
c'est minime. Je ne sais pas si cela vaut ça.
M. Maciocia: Est-ce que je pourrais avoir...
M. Fréchette: Lorsqu'on retourne à la
Sécurité du revenu les renseignements pertinents quant aux
paiements qui nous ont été faits, en donnant le numéro
d'assurance sociale du contribuable qui nous a payé et le montant qu'on
a retenu, je ne pense pas que l'on manque à la confidentialité
parce qu'on retourne aux gens de la Sécurité du revenu
des renseignements que eux avaient déjà. C'est parce qu'on
les a reçus d'eux effectivement; les noms, les montants dus, c'est la
Sécurité du revenu qui nous les a envoyés. Quand on
retourne, après l'opération de perception, ces renseignements aux
gens de la Sécurité du revenu, on ne leur annonce rien de
nouveau. On ne dévoile pas non plus des choses qu'ils ne savaient pas
déjà, c'est eux qui nous l'ont dit. Je ne sais pas comment...
M. Blank: Ils ne savaient pas avant si telle personne recevait
une ristourne d'impôt ou non. Maintenant, ils le savent.
M. Fréchette: Enfin, j'ai l'impression que, sur le
principe général de la confidentialité, on ne permettra
jamais, il me semble, à la Sécurité du revenu ou à
n'importe quel autre organisme de savoir combien d'impôts, nous, on
retourne à un individu. On ne saura pas non plus quelles sont ses
allocations de disponibilité, son revenu, etc. Enfin, l'état de
son dossier fiscal n'est pas dévoilé par la nature des
renseignements qu'on fournit.
M. Maciocia: Le ministère, en réalité, va
seulement savoir de cette personne qu'elle a eu un emploi ou qu'elle a eu un
montant d'argent à déclarer. Disons, qu'elle avait un montant
à recevoir et que, sur ce montant à recevoir, on a déduit
tel montant qu'elle devait au ministère. C'est cela, en
réalité.
M. Fréchette: Je suis tout à fait disposé
à prendre acte des suggestions qui me sont faites par les membres...
M. Maciocia: Juste sur la confidentialité, pas pour autre
chose.
M. Fréchette: Oui, d'accord, on peut très bien
examiner davantage la situation. Je ne voudrais pas être méchant,
mais je me permets de souligner que lorsque la loi 29 a été
étudiée, cela a été adopté à
l'unanimité.
M. Blank: Personne n'en a réalisé les effets.
M. Maciocia: Des fois, on ne peut pas prévoir les effets
avant l'application de la loi.
M. Blank: Oui, mais il y a une façon peut-être
juridique, dans un sens. Si le ministre de la Sécurité du revenu
ou d'autres ont un jugement de la cour - peut-être qu'ils peuvent avoir
un jugement rapide comme vous en avez le droit à la Cour provinciale -et
ils saisissent des montants dus, à ce moment-là, c'est une autre
affaire.
M. Fréchette: II est peut-être important
d'ajouter...
M. Blank: Peut-être que cela revient au même.
M. Fréchette: Je voudrais bien qu'on ajoute à la
discussion l'élément suivant: Quand le service de la
Sécurité du revenu va être informé que M. X a
payé ses dus, il ne saura jamais à partir de quelle ressource
fiscale cela a été payé. Est-ce en fonction de
l'impôt sur le revenu, un retour ou un remboursement d'impôt?
Est-ce l'allocation de disponibilité? Est-ce l'un ou l'autre des autres
programmes d'aide sociale? Ce renseignement n'est pas fourni, on dit à
la Sécurité du revenu: M. X dont vous nous aviez fait retenir le
compte pour perception a effectivement payé.
M. Maciocia: A effectivement payé le montant, c'est
tout.
M. Blank: Maintenant, le pourboire. Le pourboire
M. Fréchette: Oui et c'est avec plaisir d'ailleurs que
j'aborde ce chapitre. M. le Président, vous allez me permettre à
cet égard un petit retour historique très bref. Au mois d'octobre
l'année dernière, assez curieusement, c'est dans la région
de l'Estrie que le problème s'est premièrement
soulevé.
M. Blank: ... les inspecteurs que vous, nous n'aimez pas!
M. Fréchette: Un instant, vous allez me laisser finir et
vous allez voir que ce n'est pas tout à fait comme vous le pensez. Les
employés à pourboire de la région de l'Estrie ont
communiqué avec moi vers cette époque pour me dire: On vient
d'être l'objet d'une vérification du gouvernement
fédéral, mais qui n'a presque pas de fin. C'est le gouvernement
fédéral qui, le premier, en vertu de la procédure qu'on
appelle de "spot check", a décidé de procéder à une
vérification, et par surcroît, en Estrie, de la situation fiscale
des employés à pourboire, serveurs et serveuses à
pourboire.
Évidemment, comme c'est un domaine dans lequel les deux paliers
de gouvernement s'entendent très bien, l'information nous a
été refilée et nous avons alors procédé, pas
à la même opération, parce que déjà, le
fédéral l'avait fait, mais à des cotisations à
partir des données que le fédéral avait recueillies dans
sa vérification. Les avis de cotisation ont commencé à
être expédiés aux personnes concernées et les
conséquences se sont aussi rapidement fait sentir.
J'ai donc, au mois d'octobre dernier, dans la région de l'Estrie,
rencontré cette association nouvellement formée à la
suite
de ces événements et dont l'objectif était
précisément d'arriver à faire une situation claire pour
ces employés, ces travailleurs et travailleuses. Nous avons obtenu avec
eux deux réunions au mois d'octobre dernier, nous avons
échangé sur la nature du problème et nous avons convenu
ensemble à ce moment-là de nous donner une période
d'à peu près une année, pour faire le tour du
problème - il n'est pas nouveau, le problème, d'ailleurs, il
existe depuis de nombreuses années maintenant - et essayer de voir
ensemble quel moyen pourrait être arrêté et utilisé
pour éviter pour l'avenir ce genre d'embêtement que ces gens ont
subi. Effectivement, depuis une année, ils nous ont
présenté un mémoire, se sont formés en
fédération sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous
avons également rencontré l'Association des hôteliers,
l'Association des restaurateurs, le Conseil du patronat et nous avons recueilli
des opinions de tous ces intervenants dans le champ précis du pourboire.
(11 heures)
Au moment où on se parle, il y a une équipe au
ministère du Revenu qui a comme mandat très précis de
faire le tour du dossier et d'arriver à trouver une solution qui ferait
qu'il atteindrait deux objectifs. D'une part, régulariser cette
situation pour les employés à pourboire et, en
régularisant la situation, puisque le pourboire est un revenu, leur
permettre également de pouvoir bénéficier des avantages
sociaux qui sont déterminés par le revenu. Je pense, par exemple,
à la Régie des rentes, je pense également à
l'assurance-chômage. Vous allez comprendre qu'au niveau de
l'assurance-chômage, il n'y a rien que nous puissions faire, mais quant
aux autres lois, il y a moyen de trouver une solution qui pourrait être
satisfaisante pour tout le monde. Les solutions sont nombreuses, elles
pourraient être de toute espèce de nature, mais nous ne voulons en
arrêter aucune sans aller jusqu'à la limite de la consultation
avec tous ces intervenants dont j'ai parlé tout à l'heure. C'est
ce que nous sommes en train de réaliser. Le lundi, 31 mai - pas lundi
prochain, l'autre lundi - je dois, et avec plaisir d'ailleurs, rencontrer les
membres de l'exécutif de la Fédération des serveurs et
serveuses à pourboire du Québec pour leur faire état de la
situation jusqu'à maintenant et également les informer sur les
intentions que nous avons pour en arriver, comme je le disais tout à
l'heure, à faire une situation claire pour tout le monde.
Si mes objectifs pouvaient être atteints - je vous donne cela sous
toute réserve, c'est une solution à laquelle nous songeons -ce
que nous pourrions faire comme processus, ce pourrait être de
préparer une espèce de mini-livre vert dans lequel on
retrouverait les avenues possibles, dans lequel on pourrait retrouver
également les résumés des argumentations de l'un ou
l'autre des groupes et - je vous réitère que c'est sous la
réserve stricte qu'on puisse concrétiser l'objectif
-peut-être bien qu'au mois d'août ou quelque part au début
du mois de septembre, nous pourrions procéder à l'audition en
commission parlementaire de ceux et celles qui sont intéressés
par ce problème et essayer ensemble de trouver une solution.
M. Blank: Je pense que ce serait la meilleure façon parce
que j'ai des lettres et des demandes pour toutes sortes de rendez-vous, cela ne
vaut pas la peine qu'ils vous rencontrent une journée et qu'une autre
journée, ils me rencontrent; on n'arrivera à rien. Si le ministre
veut s'engager dans cette possibilité, je ne dis pas que je veux un
engagement formel, mais la possibilité d'avoir une commission
parlementaire durant l'intersession où les gens puissent se
présenter. On peut au moins étudier le problème et essayer
de trouver une solution. Dans une question, le ministre a mentionné que
c'est le gouvernement fédéral qui a commencé ces
vérifications dans l'Estrie..
M. Fréchette: Remarquez que l'inverse se produit
également.
M. Blank: C'est cela que j'essaie de savoir. Est-ce que chez
vous, on a commencé aussi à faire certaines
vérifications?
M. Fréchette: Non. Pas dans le champ précis des
employés à pourboire. On n'a pas fait de vérification
semblable ailleurs, pas que je sache en tout cas.
M. Blank: C'est dire que vos cotisations sont basées sur
les données du fédéral.
M. Fréchette: Voilà; c'est cela. Maintenant, quant
à la possibilité de tenir une commission parlementaire sur le
sujet, vous avez vu la précaution que j'ai prise; c'est un objectif que
je vise...
M. Blank: Oui, je dirais même...
M. Fréchette: ... mais il y a lieu de songer que
peut-être quand nous aurons complété l'étude de tout
ce que nous avons comme matériel maintenant, avec tous les intervenants
nous pourrions en arriver à une solution sans qu'il soit
nécessaire effectivement au mois d'août ou au mois de septembre de
procéder à l'audition de témoins à l'occasion d'une
commission parlementaire. Si c'était cela, tant mieux! Sinon, je vous
signale que, quant à moi, je vais déployer tous les efforts
possibles pour qu'elle ait lieu, cette commission.
M. Boucher: M. le ministre, sans trahir
les possibilités de solutions, est-ce que la rumeur qui circulait
d'imposer le pourboire obligatoire tient toujours?
M. Fréchette: Remarquez que la rumeur tient toujours.
Comme je le disais tout à l'heure, c'est une avenue parmi d'autres.
Quant à nous, nous n'avons pas manifesté de
préférence ni retenu aucune de l'une ou l'autre des solutions.
Pour le moment, nous les recevons, nous procédons à leur
évaluation et à leur étude, mais avant d'arrêter
quelque décision que ce soit, s'il nous fallait malheureusement nous
imposer d'office, nous voulons procéder à la consultation la plus
vaste possible.
M. Maciocia: M. le ministre, je vous dis d'avance que je vais
m'opposer de toutes mes forces...
M. Fréchette: Au pourboire obligatoire.
M. Maciocia: ... au pourboire obligatoire parce que cela va tuer
encore plus l'industrie touristique au Québec. D'après moi, avec
le pourboire obligatoire...
M. Fréchette: Je ne peux que prendre acte de votre
opinion. Quant à moi, je ne peux pas...
M. Maciocia: Je vais essayer de tout faire ce qu'il me sera
possible en tant que parlementaire pour m'opposer vigoureusement à cette
mesure.
M. Blank: Le pourboire serait de quel montant? 25% qu'on paie de
plus sur les repas?
M. Fréchette: Écoutez, je suis tout à fait
conscient du sérieux du problème que ces travailleurs et
travailleuses vivent, conscient du fait que, s'ils déclarent l'ensemble
des pourboires qu'ils reçoivent, on les considère comme du revenu
et on les impose, mais par ailleurs ils ne bénéficient pas des
programmes sociaux en fonction des revenus qui sont imposés. C'est
très clair que, dans l'ensemble du dossier, c'est une situation qu'il
faut de toute évidence corriger.
Maintenant, lorsque vous me parlez de votre position face à
l'imposition du pourboire obligatoire, j'en prends bonne note pour le moment,
et peut-être pourrais-je me risquer à demander au
député de Viger si lui n'aurait pas des suggestions à nous
faire ce matin.
M. Maciocia: Non, je le dis en toute sincérité.
M. Fréchette: Non.
M. Maciocia: Non, parce que je n'ai pas étudié en
profondeur le dossier.
M. Fréchette: D'accord, on pourra y revenir.
M. Maciocia: Mais je l'avais bien pris en note dans mes
démarches, disons, dans mes recommandations à l'intérieur,
si on peut le nommer, du ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme. Le pourboire obligatoire va tuer encore plus une ressource tellement
vitale pas seulement pour le Canada, mais pour le Québec, l'industrie
touristique.
M. Fréchette: II faudrait qu'on soit bien clairs...
M. Maciocia: On se trouve déjà...
M. Fréchette: J'ai signalé aux membres de la
commission que c'est parmi plusieurs autres une des avenues qui est sur
papier.
M. Maciocia: Oui, je comprends.
M. Fréchette: II est clair qu'il n'y a pas de
décision de prise à cet égard.
M. Maciocia: Parfait. Une chose que je voulais vous
demander...
M. Fréchette: Sur le même sujet?
L'effectif du ministère
M. Maciocia: Non, sur l'effectif du ministère.
M. Fréchette: Ah! oui. L'effectif, je vous l'ai
donné.
M. Maciocia: Oui, vous avez mentionné tout à
l'heure qu'en 1978 ils étaient de 4642. C'est cela?
M. Fréchette: En 1979.
M. Maciocia: 1979.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Et 4630...
M. Fréchette: En 1980.
M. Maciocia: 4510 en 1981.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: 4475 en 1982. C'est cela?
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: II y a une diminution de
l'effectif, en réalité.
M. Fréchette: C'est exact.
M. Maciocia: Est-ce que, d'après vous, c'est suffisant
pour le ministère? Il y a eu des compressions; je sais qu'on a eu des
compressions budgétaires, mais cette compression qu'on doit voir sur le
personnel, est-ce qu'elle a des conséquences, d'après vous, sur
les services que le ministère doit donner?
M. Fréchette: II y a une première remarque qui est
sans doute pertinente, c'est que les chiffres que je vous ai transmis ne
tiennent pas compte du personnel occasionnel qui est engagé au moment de
la période de pointe de l'impôt.
M. Maciocia: Je comprends.
M. Fréchette: Je ne sais pas ce que cela représente
en termes de chiffres absolus, mais cela dépasse largement les 5000 en
période de pointe.
M. Maciocia: Oui.
M. Fréchette: Quant au reste, je l'ai dit dans mon
exposé, c'est en fonction d'une réorganisation qui est en train
de se faire au ministère et en fonction également des efforts de
compression qui nous sont demandés que cette diminution est ce qu'elle
est. Combien?
M. Maciocia: Autour de 1000, je pense. M. Fréchette:
Pardon?
M. Maciocia: Les employés occasionnels sont autour de
1000, je pense.
M. Fréchette: 976.
M. Maciocia: Vous voyez!
M. Fréchette: Vous êtes tout près de la
réalité. Nous avons récemment obtenu du Conseil du
trésor une autorisation de procéder à l'engagement de 95
autres employés pour le ministère, occasionnels, j'entends.
M. Maciocia: Toujours occasionnels.
M. Fréchette: C'est cela, mais ça n'affecte
pas...
M. Maciocia: Les employés occasionnels, excusez-moi, M. le
ministre, c'est pour combien de temps?
M. Fréchette: C'est pour la période de pointe.
Alors, c'est du mois de mars probablement jusqu'au mois de juin, à la
fin du mois de juin. Évidemment, au fur et à mesure que les
opérations se font, que certains dossiers se ferment, il y en a qui
quittent avant la fin du mois de juin, sauf que toute l'opération se
termine vers cette époque-là.
M. Maciocia: Comme cela, ce n'est pas, d'après vous, sur
les services...
M. Fréchette: Non.
M. Maciocia: ... qu'on donne à la population.
Là-dessus, la baisse des 60 ou 70 employés à
l'intérieur du ministère du Revenu, n'a pas de
conséquence.
M. Fréchette: Non.
M. Maciocia: Est-ce que ces coupures de personnel, c'est sur le
personnel intérieur ou sur les inspecteurs qui font les
vérifications d'impôt?
M. Fréchette: Non, il n'y a pas de diminution de personnel
qui se fait au niveau des programmes de vérification, c'est à
l'égard d'autres programmes à l'intérieur même que
cette diminution s'est faite, mais, au niveau de la vérification, il n'y
a pas de diminution.
M. Maciocia: Parfait.
M. Blank: Avez-vous non pas des inspecteurs, mais des gens pour
surveiller l'effort de vos employés? Donnent-ils assez d'ouvrage pour
leur paie, dans un sens? Avez-vous fait des études ou des choses comme
cela?
M. Fréchette: J'ai rapidement touché à cet
aspect tout à l'heure, dans mon intervention du début. C'est
précisément ce à quoi nous sommes affectés, si je
peux me permettre l'expression, actuellement. Quand je vous ai parlé
d'une réorganisation globale du ministère, c'est à
l'intérieur de cette opération de réorganisation que
l'évaluation de la productivité se fait.
M. Blank: "Productivité", c'est le mot que je
cherchais.
M. Fréchette: Oui. C'est à l'intérieur de
cette réorganisation administrative qu'on est en mesure de toucher du
doigt et d'évaluer la productivité.
M. Blank: J'ai eu une expérience personnelle avec le
ministère pour un client dans une affaire de succession. Cela a pris
plus d'un mois pour avoir une formule de trois lignes. C'est seulement
après mon intervention personnelle, en téléphonant,
que
j'ai eu le document et la réponse. On m'a dit que, dans certaines
sections, il y avait 17 téléphonistes dans un "pool"...
M. Fréchette: Oui.
M. Blank: ... et que 3 seulement travaillaient. Il y avait des
congés annuels, des congés de maternité, des congés
de ceci, des congés de cela et que 3 sur 17 travaillaient. 17
employés peuvent faire un job, 5 ou 6 peuvent être en congé
en même temps, mais en trouver 14 sur 17 en congé en même
temps...
M. Fréchette: Cela ne devait pas être le lundi non
plus.
M. Blank: Je ne me souviens pas de la date. Pour ce document que
je cherchais, je savais par mon bureau, mon cabinet, que c'est un document qui
en suit un autre. Pourquoi ne pas le faire en même temps? Il n'y avait
pas de signature. Je ne sais pas pourquoi.
Quand on fait la demande pour le deuxième document, on dit:
Normalement, cela doit prendre trois semaines. Après cinq semaine, c'est
là que je commence à faire du bruit.
M. Fréchette: Évidemment, le problème que
soulève le député de Saint-Louis, il est vrai, il est
clair, il existe et c'est sûr qu'il se présente. Dans l'ensemble
des activités, quand on a une clientèle d'individus et de
corporations d'au-delà de 3 600 000, c'est sûr que, dans le
traitement de cas particuliers, il peut arriver des embêtements de la
nature de ceux que décrit le député de Saint-Louis.
Par ailleurs, je lui signalerai que la Direction générale
du service au public et à l'entreprise a justement comme vocation de
corriger ces situations. Cela ne fait pas encore une année que le
sous-ministre adjoint est là. Il est là depuis le 3 août
dernier, le temps de structurer administrativement cette direction
générale. Il est clair que nous n'avons pas encore
réalisé tous les objectifs précis que nous visons, sauf
que je pense qu'avec encore une année, il y aura moyen d'arriver
à quelque chose.
M. Blank: A-t-on utilisé du nouvel équipement,
comme des "word processors", des affaires comme cela, au ministère?
M. Fréchette: Cela retient également notre
attention et nous voulons, dans ce sens, faire un pas en avant important. Si
les objectifs qu'on veut atteindre se réalisent, il me semble que, dans
deux années, on devrait avoir tout un système nouveau à
cet égard.
Le Président (M. Gratton): M. le député de
Bellechasse.
Travailleurs à l'étranger
M. Lachance: Oui, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre et elle concerne les citoyens du Québec qui travaillent
à l'étranger. Il y a un certain nombre de mes commettants qui
travaillent présentement en Algérie, principalement les citoyens
de la municipalité de Buckland. Ces gens sont préoccupés
évidemment par la fiscalité et tout ce qui tourne autour des
exemptions ou de l'impôt à payer. J'aimerais savoir du ministre
quels sont les paramètres ou les éléments de la politique
concernant les citoyens du Québec qui travaillent à
l'étranger en ce qui concerne en particulier le domaine de
l'impôt, la question de temps pour être considérés
comme non-résidents. J'aimerais avoir des précisions
là-dessus. (11 h 15)
M. Fréchette: De toute évidence, M. le
Président, le député de Bellechasse fait allusion, en
première instance, à une situation qui a prévalu, à
un certain moment, pour certains travailleurs qui sont effectivement partis
à l'extérieur du Québec et qui, à leur retour,
après une année, deux années ou plus, se sont
retrouvés dans une situation embarrassante, difficile, face à la
fiscalité.
À partir de ce problème très précis que nous
avons vécu presque quotidiennement pendant un certain temps, nous avons
d'abord procédé à régulariser cette situation
vis-à-vis de ces contribuables qu'on est convenu d'appeler des
non-résidents. Toujours à partir de la même
expérience, nous avons procédé à une modification
de la loi pour, effectivement, toucher ce genre de contribuables
québécois qui partent à l'extérieur pour des
périodes de temps plus ou moins longues et qui veulent savoir de
façon très précise quel sera l'état de leur
fiscalité à leur retour.
En conséquence de cela, nous avons, l'automne dernier je pense -
je n'ai malheureusement pas la date précise - arrêté - on
peut retrouver cela dans la loi et dans la réglementation - les
conditions qui seront faites à ces contribuables qui iront à
l'extérieur. De façon à ne pas faire d'erreurs, je vais me
permettre de lire rapidement ces conditions.
Maintenant la loi est ainsi faite: Un contribuable qui va travailler
à l'étranger pour une période de 24 mois
consécutifs ou plus, bien sûr, ne sera pas assujetti aux
déductions à la source, à la condition bien précise
qu'avant de quitter pour l'extérieur il puisse obtenir le statut de
non-résident. Il devra prendre la précaution de venir rencontrer
les gens qui sont affectés à ce travail avant de quitter pour
donner les conditions qui prévaudront pendant son
absence: est-ce qu'il quitte seul, est-ce que la famille le suit, est-ce
qu'il garde un domicile au Québec? enfin toutes les circonstances qui
font qu'on peut arriver à la conclusion qu'il a encore une
résidence au Québec ou qu'il n'en a plus. On procède
à l'analyse de ces circonstances et on lui dit: Compte tenu de
l'ensemble des circonstances, vous pouvez quitter et vous êtes
considéré comme un non-résident. Donc, pas de
déductions à la source.
Pour ceux et celles qui partiraient pour moins de 24 mois...
M. Lachance: Précisément, M. le Président,
c'est le cas en ce qui concerne mes concitoyens. Ce sont habituellement des
contrats d'une durée de trois mois ou six mois.
M. Fréchette: Alors, un contribuable va continuer
d'être considéré comme résident du Québec si
son absence est d'une durée de moins de douze mois consécutifs.
Quand vous me parlez d'un travailleur ou d'une travailleuse du Québec
qui partirait à l'extérieur du Québec pour une
période de moins de douze mois, il continuera, dans l'état actuel
de la loi et de la réglementation, d'être considéré
comme un résident du Québec, donc soumis à la
fiscalité.
C'est exactement ce que je viens de dire au député de
Bellechasse, peut-être avec quelques variantes. Par ailleurs, le
contribuable qui va à l'extérieur pour moins de 24 mois, donc qui
continue d'être considéré comme résident, a la
déduction qui est prévue par la loi. C'est-à-dire que pour
les premiers 55 000 $, travaillant à l'étranger, il n'est pas du
tout taxé. S'il gagne moins de 55 000 $, il ne sera pas taxé.
À cet égard, je dois dire, après avoir regardé de
près presque toutes les législations qui existent, que c'est le
Québec qui est le plus généreux à l'égard
des travailleurs qui vont à l'étranger.
Le cas que vous soumettez, à première vue, avec les
circonstances que vous nous expliquez, il m'apparaîtrait qu'il continue
d'être considéré comme résident, mais, s'il gagne
moins de 55 000 $ pendant qu'il est parti, il n'est pas imposable.
M. Lachance: Dernière question, M. le Président. On
a parlé des personnes, des travailleurs qui oeuvrent à
l'étranger. Quand on parle d'"étranger", est-ce qu'on circonscrit
à l'extérieur du Québec ou si c'est en dehors du
Canada?
M. Fréchette: À l'extérieur du Canada.
M. Lachance: Donc, un Québécois qui travaille en
Alberta est obligé de payer de l'impôt; il est
considéré comme résident du
Québec, il est obligé de payer de l'impôt au
Québec...
M. Fréchette: C'est ça. C'est
précisément ce que le député de Bellechasse
explique, sauf qu'il a droit à des exemptions particulières que
je n'ai pas en mémoire, mais des exemptions auxquelles d'autres
résidents du Québec n'ont pas droit.
M. Lachance: Merci.
M. Blank: J'ai un cas ici, je ne vais pas mentionner les noms. Un
monsieur qui a toujours travaillé en Ontario est arrivé au
Québec au mois d'octobre de l'année 1979 exactement et on lui a
fait faire un rapport d'impôt du Québec. Il va payer les taxes
complètes au Québec et il a eu des déductions en Ontario.
Est-ce qu'il y a un accord entre l'Ontario et le Québec ou est-ce que ce
monsieur paie deux fois?
M. Fréchette: II ne paie pas deux fois. Il y a un
remboursement qui se fait si...
M. Blank: Par qui?
M. Fréchette: Le fédéral qui
perçoit...
M. Blank: Le fédéral?
M. Fréchette: ... nous retourne, avec beaucoup de retard,
souvent, les sommes qui sont dues à ces travailleurs et nous
procédons au remboursement.
M. Blank: Mais, c'est le contraire ici. Vous avez
cotisé...
M. Fréchette: Si au 31 décembre, il est
résident ou domicilié au Québec, on va effectivement le
cotiser et après ça, on va procéder au réajustement
qui s'impose en proportion de ce qu'il a payé en Ontario, après
avoir reçu du fédéral l'ensemble de son état
fiscal, de son dossier fiscal et il est remboursé,
évidemment.
M. Blank: Aussi, dans ce cas, voyant que le monsieur a
payé ses taxes en plein... Il ne savait pas que... S'il n'était
pas ici pour un an, vous avez ajouté l'intérêt et une
pénalité.
M. Fréchette: Oui, mais s'il a droit à un
remboursement et qu'effectivement l'intérêt et la
pénalité ont été injustement chargés,
ça va évidemment être remboursé "in toto" si vous me
permettez l'expression, à ce contribuable.
M. Maciocia: Sur ce sujet, j'ai une question. Admettons qu'un
employé travaille en Ontario, comme on l'a dit tout à l'heure,
pendant neuf mois par année, disons de
janvier à octobre...
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: ... et qu'il revient au Québec au mois
d'octobre...
M. Fréchette: Oui, oui.
M. Maciocia: ... automatiquement avant le 31 décembre, il
est au Québec et il doit faire un rapport d'impôt.
M. Fréchette: S'il y est encore au 31 décembre.
M. Maciocia: S'il est encore au 31 décembre ici au
Québec, pendant les neuf ou dix mois qu'il est resté en Ontario
ou en Alberta, n'importe où, à ce moment, quelle loi va
s'appliquer sur l'imposition fiscale? Est-ce la loi de l'Ontario ou la loi du
Québec?
M. Fréchette: Ecoutez, on entre dans de la technique un
peu légale. Me Saint-Jean, donnez donc la réponse, vous le
pouvez.
Alors, c'est la table fédérale qui va prévoir les
déductions à la source et quand il y aura des ajustements par
après, à la fin de l'année... Mais tout le temps qu'il va
rester en Ontario et travailler en Ontario, son employeur va lui
prélever la déduction à la source selon la table
prévue par le gouvernement du Canada qui...
M. Maciocia: Je comprends.
M. Fréchette: ... inclut une partie d'impôt payable
à l'Ontario.
M. Maciocia: Je comprends très bien. Ma question est
justement: Étant donné que le 31 décembre, il est au
Québec et produit une déclaration d'impôt ici au
Québec, on sait que la table d'imposition du Québec est
différente de celle de l'Ontario, laquelle s'applique à ce
moment, étant donné qu'il fait sa déclaration ici au
Québec? Mais en réalité, il a travaillé en Ontario.
Est-ce que c'est la table d'imposition du Québec ou est-ce la
table...
M. Fréchette: Cela va être la table du Québec
parce qu'il aura été considéré comme étant
résident du Québec pour l'année d'imposition.
M. Blank: Même s'il est ici, justement, un jour.
M. Maciocia: Même s'il a été ici seulement
quinze jours, quoi.
M. Fréchette: C'est comme ça que la loi est
faite.
M. Maciocia: C'est ça que je voulais savoir parce qu'il y
a une grosse différence dans ça. Est-ce que sur la
question...
M. Blank: Est-ce qu'il paie l'impôt sur la table du
Québec pour une journée et 364 jours, sur la table
fédérale?
M. Maciocia: C'est l'année complète... M. Blank:
C'est un peu dur.
M. Fréchette: On doit faire des ententes avec le
fédéral pour que dans le cas des individus qui le
désirent, lorsqu'ils travaillent en Ontario et sont
considérés comme résidents du Québec, la retenue
à la source en Ontario se fasse à partir de nos tables.
M. Maciocia: Oui, je comprends.
M. Fréchette: C'est lorsque c'est le gouvernement
fédéral qui est employeur. Lorsque c'est une entreprise qui est
employeur, là, c'est plus difficile.
M. Maciocia: C'est cela.
M. Blank: La chose que je vous demande, c'est si une personne qui
arrive au Québec pour la première fois de sa vie le 31
décembre, va payer pour cette année-là les impôts du
Québec pour toute l'année, nonobstant qu'elle ait vécu au
Québec seulement une journée.
M. Fréchette: Oui. Évidemment, c'est un cas
particulier...
M. Blank: Oui, je sais.
M. Fréchette: ... où quelqu'un serait pressé
de déménager le 31 décembre.
M. Blank: On doit lui conseiller d'attendre encore une
journée.
M. Fréchette: D'attendre le 2 janvier. M. Maciocia:
Je voulais vous dire...
M. Blank: Mais ne fait-on pas au prorata...
M. Fréchette: La notion de résidence ne s'acquiert
pas uniquement à une date...
M. Blank: C'est six mois dans l'année.
M. Fréchette: Quiconque est résident le 31
décembre, cela ne veut pas dire physiquement, et ainsi de suite. Donc,
le type qui arrive au Québec le 31 décembre,
avant qu'il ait acquis le statut de résident, il faudrait que ce
soit clair que c'est dans ses intentions qu'il déménage au
Québec de façon permanente, etc. C'est très peu
probable.
M. Blank: II y a un cas ici. Il est entré le 31
octobre.
M. Fréchette: Le 31 décembre.
M. Blank: Le 31 octobre, cela veut dire qu'il est ici depuis deux
mois et qu'il aura payé tous les impôts québécois
pour l'année. C'était sa première visite au Québec;
maintenant, il est résident du Québec. Il travaille au
Québec, mais il n'a jamais habité le Québec avant. Il a
payé les impôts québécois pour toute l'année
nonobstant le fait qu'il n'a demeuré ici que deux mois.
M. Maciocia: Pour revenir à la question qui a
été posée par le député de...
M. Fréchette: Bellechasse.
M. Maciocia: Bellechasse. Les gens du Québec qui
travaillent en Alberta ou n'importe où, vous avez dit tout à
l'heure qu'ils sont sujets à l'imposition fiscale du Québec.
C'est cela? Vous n'avez pas mentionné si c'est seulement s'ils habitent
l'Ontario ou l'Alberta depuis trois mois ou un an ou deux.
M. Fréchette: On ne tient pas compte de la période
de temps.
M. Maciocia: On ne tient pas compte de la période de
temps.
M. Fréchette: Quand on parle d'un contribuable non
résident, il s'agit d'un contribuable qui est à
l'extérieur des limites du Canada. C'est celui-là qui est
considéré comme non-résident au sens de la loi. Le
contribuable qui est en Alberta, qui est en Ontario, peu importe la
période de temps pendant laquelle il s'y trouve, il est toujours
considéré au plan de la fiscalité comme un contribuable du
Québec.
M. Maciocia: Même à l'endroit de l'Ontario ou de
l'Alberta?
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Même si cela fait deux ans qu'il est
là?
M. Fréchette: À moins bien sûr qu'il ait
définitivement quitté le Québec de façon claire
comme, par exemple, s'il n'a plus de domicile, si sa famille l'a suivi, s'il
n'a plus de compte de banque nulle part. Si les circonstances sont telles qu'on
ne peut pas raisonnablement arriver à d'autres conclusions
qu'effectivement il a arrêté l'intention de faire son domicile et
sa résidence dans l'une ou l'autre des provinces dont on parle, il ne
sera plus considéré comme résident du Québec, c'est
évident. S'il a gardé famille au Québec, résidence,
comptes de banque, s'il continue de faire affaires généralement
ici, peu importe la période de temps pendant laquelle il est ou bien en
Alberta, ou au Nouveau-Brunswick, ou ailleurs, il est toujours résident
du Québec au plan de la fiscalité.
M. Maciocia: Est-ce qu'il y a des cas qui se sont
présentés au ministère du Revenu de personnes qui
travaillent en Alberta ou en Ontario, comme je le disais tout à l'heure,
depuis douze ou treize mois, disons, depuis le 1er janvier d'une année
jusqu'au mois de février l'année suivante, et qui ont fait leur
déclaration d'impôt en Alberta le 31 décembre puisqu'elles
restaient là-bas? Pour le Québec, on les considère comme
résidents du Québec.
M. Fréchette: Vous me demandez s'il y a des cas de cette
nature?
M. Maciocia: II y a probablement quelques cas comme
ceux-là. C'est pour cela que je vous dis qu'ils ont payé de par
la loi fiscale de l'Alberta, mais le Québec les considère comme
citoyens du Québec et ils doivent faire leur rapport d'impôt
ici.
M. Fréchette: Le député de Viger me demande
s'il y a des cas de cette nature...
M. Maciocia: Je ne vous demande pas une réponse tout de
suite.
M. Fréchette: C'est cela. J'allais suggérer que je
puisse prendre acte de la question, faire une vérification et
fournir...
M. Maciocia: C'est cela, parce qu'il y en a quelques-uns. C'est
pour cela que je vous demande si c'est possible d'avoir... même si cette
personne a sa famille ici. Automatiquement, cela veut dire que pour le
Québec elle est résidente du Québec. En
réalité, elle a payé de par la loi fiscale de
l'Alberta.
M. Fréchette: On prend acte de la question. On pourra
faire une vérification dans ce sens et fournir les renseignements.
Le Président (M. Gratton): M. le député de
Rivière-du-Loup. (11 h 30)
Les déclarations des revenus
M. Boucher: Merci, M. le Président. Dans son discours
inaugural, M. le
ministre a fait état d'une expérience pilote de
bénévoles qui aidaient à compléter les formulaires
d'impôt. Il a même mentionné qu'il y avait des cours qui se
donnaient à des bénévoles pour aider les gens à
remplir leur rapport d'impôt. Est-ce que vous avez l'intention
d'étendre cette expérience à l'ensemble de la province et
de quelle façon il y aurait lieu de procéder pour que les
personnes qui, bénévolement, veulent s'impliquer dans cette
opération puissent le faire?
M. Fréchette: Comme je le disais tout à l'heure,
l'expérience a été, quant à nous, à ce point
heureuse qu'il nous faut, de toute évidence, l'intensifier pour les
années à venir. Je vous disais que plus de 300 personnes se sont
déclarées disponibles pour aider cette clientèle dont on
parlait tout à l'heure, les centres d'accueil, la clientèle de
CLSC et étudiants. 300 personnes et plus se sont déclarées
disponibles pour faire cette opération et y ont effectivement
participé. Les premiers résulats qu'on en a, qui nous permettent
de faire une appréciation préliminaire nous amènent
à la conclusion qu'il faudra de toute évidence intensifier le
processus du bénévolat.
Comment y arriver, pour ceux qui seraient intéressés
à le faire? Dans les régions où nous avons des bureaux
régionaux, dans les sept régions où il y a
déjà des bureaux régionaux plus celui qui s'implantera
à Sept-Îles à l'automne, les gens qui seraient
désireux de pouvoir s'impliquer dans cette opération de
bénévolat pourraient s'adresser au bureau régional de leur
région pour poser leur candidature. Il y a, évidemment, toujours
les deux bureaux de Montréal et de Québec où on recevra
avec plaisir les candidatures de ceux qui ont le goût de s'engager dans
cette opération. Il y a effectivement, comme le député de
Rivière-du-Loup le signalait, une période d'à peu
près deux semaines de cours qui sont donnés à ceux qui le
veulent, pour procéder à l'opération. Il y a aussi parmi
les 350, plusieurs personnes qui sont d'anciens fonctionnaires du
ministère du Revenu, qui ont donc l'expertise nécessaire pour
aider cette clientèle que l'on visait de façon très
précise par l'opération.
En conclusion, je dirai tout simplement que l'expérience s'est
avérée heureuse, il nous semble qu'elle a contribué
à humaniser ce ministère et en conséquence, il nous faut,
non seulement la garder, mais l'intensifier pour l'avenir.
M. Boucher: Sur le plan de la responsabilité, la personne
qui remplit le rapport d'impôt pour une autre personne, jusqu'à
quel point peut-elle être responsable? Il y a des gens qui sont inquiets
un peu de cela. Si on remplit un rapport d'impôt pour un autre, s'il y a
des chiffres qui ne sont pas exacts, jusqu'à quel point peut-on en
être responsable.
M. Fréchette: Quant à moi, je ne crois pas qu'il y
ait de disposition dans les lois fiscales ou ailleurs qui déterminent
que celui qui procède à compléter le rapport d'impôt
d'un contribuable puisse s'engager de quelque façon que ce soit au
niveau d'une responsabilité. À moins, évidemment, qu'on
puisse retrouver une erreur absolument -comment dirais-je? - grossière,
une erreur qui est à toutes fins utiles impardonnable, qui serait
l'équivalent ou le commencement de la fraude. Je ne vois pas comment on
pourrait exercer quelque recours que ce soit contre une personne qui a
aidé ou elle-même complété la déclaration
fiscale d'un contribuable. Je ne crois pas que ce soit jamais
arrivé.
M. Maciocia: Je pense que c'est toujours le contribuable qui est
responsable de la déclaration d'impôt, ce n'est pas la personne
qui le remplit pour lui ou qu'il l'aide à la remplir.
M. Fréchette: Si jamais il se produisait ce genre d'erreur
dont on vient de parler, c'est-à-dire une erreur flagrante, une erreur
que normalement on ne commettrait pas, ce n'est pas le ministère du
Revenu qui pourrait exercer un recours contre le contribuable. Si, par exemple,
cette erreur est telle qu'elle occasionne au contribuable un paiement plus
élevé que celui qui avait été prévu, par
l'erreur, la relation de faute va exister entre le contribuable et celui qui a
procédé à compléter son rapport d'impôt. Mais
le ministère lui-même n'a pas de relation juridique avec celui qui
aide ou qui complète. Le ministère comme tel ne peut pas exercer
de recours de cette nature. Le contribuable qui aurait subi des dommages parce
qu'on a mal procédé à compléter son rapport
d'impôt, lui pourrait, en vertu des règles normales du droit civil
- le principe de la faute et de tout ce qui en découle -pourrait sans
doute exercer un recours contre celui qui l'a aidé, mais certainement
pas le ministère.
M. Maciocia: Si c'est le revers de la médaille. Si c'est
le ministère qui reçoit moins qu'il devrait, en
réalité, recevoir du contribuable, le ministère a toujours
un recours contre le contribuable, jamais contre la personne qui a rempli ou
qui a complété la déclaration.
M. Fréchette: C'est sûr. C'est absolument
sûr.
Le Président (M. Gratton): M. le député de
Saint-Louis.
La taxe sur l'essence
M. Blank: Le troisième volet sur la fameuse question de la
taxe sur l'essence.
M. Fréchette: Oui.
M. Blank: La question de l'exemption pour les territoires
près des frontières. Pour appuyer ce que je vais dire, je veux
simplement lire deux paragraphes d'une lettre datée du 12 mai 1982,
à Maniwaki, par la Société de développement
économique de Haute-Gatineau, adressée au ministre Landry; ceci
est une copie: "À la demande du président de l'Association des
vendeurs d'essence à la pompe, M. Marcel Gauthier, il me fait plaisir de
vous faire parvenir un argument des plus révélateurs, ayant un
effet dévastateur sur l'économie de la région, sur la
surtaxe de 0,30 $ le gallon décrétée par notre
gouvernement. Comparativement aux ventes effectuées aux mois de janvier,
février et mars 1981, sur un relevé de seulement 18
stations-service sur un total de 60, il est assuré d'une perte nette de
l'ordre de 206 748 litres d'essence pour cette période en 1982. Pour
l'ensemble des stations-service, les pertes équivaudront à
quelque 682 268 litres pour seulement trois mois de fonctionnement,
comparativement à 1981." "Également, un fait à souligner,
cette période ne représente pas le fort de l'industrie
touristique, c'est-à-dire que ce n'est pas encore la saison touristique
et déjà, dans ce petit territoire, il y a une perte de presque
700 000 litres d'essence, et une perte de taxes aussi pour le gouvernement.
Même s'ils ne perçoivent que la moitié des taxes, ils
perçoivent quelque chose. La taxe sur 700 000 litres va en Ontario parce
que la Gatineau est juste à côté de l'Ontario. Ce qui est
le pire dans toute l'affaire, je vais citer les remarques du président
de notre commission, quand il a parlé en Chambre récemment, il a
dit, et je le cite: "J'ai des témoignages où on fait état
de 14, 15 et 20 ans de dur labeur pour bâtir un petit commerce dans nos
régions plutôt rurales qu'on risque de voir disparaître
à très courte échéance si le ministre ne
reconnaît pas qu'il faut faire une exemption sur l'ensemble de la
région." Fin du plaidoyer.
M. Fréchette: M. le Président, M. le
député de Saint-Louis a été très prudent, je
vais l'être aussi. Je ne voudrais pas vous faire sursauter, connaissant
votre implication dans ce dossier. Il me semble que la discussion qu'amorce le
député de Saint-Louis est fort intéressante, mais on a,
à toutes fins utiles, à plusieurs reprises en Chambre,
grâce à la ténacité des députés de la
région, brassé tout le problème, si on me permet
l'expression que je viens d'utiliser.
Évidemment, peut-être bien qu'on pourrait avoir des
renseignements qui seraient contraires, mais c'est un fait que, dans les
premiers mois de l'application de la mesure, plus particulièrement dans
les trois premiers mois de l'application de la mesure, il a existé des
situations qui approchaient le pénible, si je peux m'exprimer comme
cela. Mais si les renseignements et les informations qui nous sont
acheminés sont exacts, il semblerait, au moment où l'on se parle,
que cette situation est en train de se corriger, ne serait-ce que
partiellement, mais en tout cas, elle est en train de se corriger. Dans quelle
proportion précise? Je ne suis pas en mesure de le dire ce matin. Je
pourrais, par ailleurs, prendre les informations qu'il faut pour les fournir;
mais cette situation se corrige.
Vous savez, il y a un phénomène dont il faut tenir compte
et qui a prévalu non seulement dans ces régions qu'on a convenu
d'appeler frontalières, mais qui a prévalu dans l'ensemble du
territoire du Québec, c'est que, indépendamment de l'endroit
où on était situé, il y a quand même eu une
diminution de la consommation, et partout à travers le territoire, une
diminution qu'on a évaluée - et nous parlons strictement en
termes de moyenne, on ne peut pas être très précis à
cet égard - une diminution qu'on a évaluée dans une
proportion variant de 8% à 10%. Ce seul phénomène en
lui-même a aussi, il me semble, contribué à faire la
situation dont on vient de parler, qu'on vient de décrire.
Évidemment, il reste que le site géographique de ces
stations-service a occasionné des inconvénients additionnels dont
on est conscient, c'est sûr. Mais je vous réitère que si
l'on devait continuer la discussion je n'aurais pas d'objection à le
faire, mais je ne pourrais que reprendre tout ce qui s'est déjà
dit à l'Assemblée nationale à cet égard. Je n'ai
pas d'objection à le faire.
M. Blank: Vous constaterez que la lettre que je vous ai lue, ce
n'est pas une lettre qui est datée du mois passé, c'est
daté du 12 mai, cela fait seulement 7 jours aujourd'hui.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: M. le ministre, est-ce que vous croyez que cette
diminution de 8% à 10% de la consommation de l'essence c'est l'effet
direct de la surtaxe sur l'essence?
M. Fréchette: C'est-à-dire qu'il n'y a pas que la
surtaxe sur l'essence qui a occasionné cette diminution. Il y aussi
certaines habitudes qui ont été modifiées, d'abord dans
l'utilisation du véhicule automobile, l'usage qu'on en fait
régulièrement et quotidiennement. On n'a pas
sur papier de constatations de cette nature-là, mais la logique
nous amène à la conclusion qu'on a peut-être
rationalisé l'utilisation du véhicule automobile.
Deuxièmement, le genre de véhicule qu'on utilise aussi,
les véhicules à moins forte cylindrée. Il semble que
là aussi il y a eu un changement assez fondamental dans les us et
coutumes; on diminue la cylindrée du véhicule et, par voie de
conséquence, la consommation.
Un troisième phénomène qui se constate
particulièrement dans les centres urbains, c'est que l'utilisation du
transport en commun s'est intensifiée; c'est peut-être la
conséquence des deux premiers, mais l'utilisation du transport en commun
s'est considérablement intensifiée.
Alors, je ne plaiderai pas évidemment que la surtaxe sur
l'essence n'est pas une des causes de la diminution, mais elle n'est pas la
seule; elle est même minime. Quand on fait des comparaisons par rapport
à la situation qui existe en Ontario et au Nouveau-Brunswick - je pense
que le ministre des Finances a déjà soulevé cet aspect
à l'Assemblée nationale - lorsqu'on fait différentes
comparaisons entre les différentes provinces, on réalise bien que
ce n'est pas essentiellement la taxe qui a occasionné cette
diminution-là parce que dans ces provinces où elle n'existe pas
la consommation a diminué dans à peu près les mêmes
proportions et, à certains égards, dans de plus fortes
proportions.
Donc, les autres aspects dont on vient de parler...
M. Maciocia: Probablement il y a d'autres raisons dans ces
provinces-là pour une diminution semblable. Aujourd'hui, cette
constatation que vous avez faite, et vous l'avez mentionné en Chambre,
qu'il y a eu une diminution approximative de 9%...
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Une moyenne de 9%, cela a été fait
après l'imposition de la surtaxe sur l'essence. Alors, je pense que le
ministre en est conscient et, disons, d'accord avec moi pour dire que
probablement ce n'est pas la seule et unique cause, mais probablement la
principale cause de cette diminution.
M. Fréchette: M. le Président, je reviendrai
à mon exemple de l'Ontario, la diminution dont on parle en Ontario fut
constatée précisément au moment où au mois de
novembre dernier nous avons annoncé cette taxe-là. C'est cela qui
nous amène à la conclusion qu'effectivement ce n'est pas
principalement la taxe sur l'essence qui a occasionné cette
diminution-là. Le phénomène existe ailleurs, et je ne vois
pas en vertu de quelle logique ou de quelle argumentation on pourrait arriver
à la conclusion que c'est uniquement à cause de la taxe.
M. Maciocia: Est-ce que le ministère du Revenu a fait un
relevé montrant la différence entre le produit de la surtaxe sur
l'essence et le 9% de moins en ventes d'essence?
M. Fréchette: Je ne pense pas qu'on se soit livré
à cette opération, je ne sais pas non plus si elle est possible;
je signalerai simplement au député de Viger que si elle est
possible nous allons... Oui, c'est probablement possible...
Les études qui ont été faites s'appuient sur les
données de Statistique Canada et elles démontrent qu'en Ontario
et au Nouveau-Brunswick, à partir du mois de novembre, la chute dans la
consommation de l'essence a été du même ordre que celle du
Québec, davantage au Nouveau-Brunswick, où cela a chuté de
18%, alors que cela a chuté entre 10% et 12% en Ontario, et ça a
été le même phénomène au Québec. Il
faut ajouter à cela que c'est une tendance nord-américaine
à laquelle s'inscrivent maintenant les provinces de l'Ontario et du
Canada tout entier depuis que nous rejoignons le prix mondial. (11 h 45)
M. Maciocia: Oui, mais vous n'allez pas nous laisser croire par
cela, M. le sous-ministre, que la surtaxe sur l'essence n'a pas
influencé la chute des ventes, parce que, par cela, vous voulez
démontrer qu'en Ontario et au Nouveau-Brunswick, c'est la même
chose qu'au Québec, même sans la surtaxe.
M. Fréchette: On pourrait produire de grandes
études économétriques pour démontrer...
M. Maciocia: Qu'il y aurait eu une diminution.
M. Fréchette: ... que, dans la diminution de 10% d'essence
au Québec, un point de pourcentage pourrait être attribué
à cela, mais c'est finalement de la spéculation, puisque, lorsque
nous regardons l'évolution et les statistiques canadiennes, celles de
l'Ontario, du Québec et du Nouveau-Brunswick en particulier, le
comportement des données statistiques se ressemble étrangement,
les données sont collées les unes sur les autres.
M. Maciocia: De toute façon, si le ministre, après
la question que je lui ai posée, pouvait savoir la différence
entre les deux, cela me ferait vraiment plaisir.
M. Fréchette: D'accord.
M. Boucher: On pourrait penser qu'on vit dans un système
où, lorsque les gens commencent à économiser, cela le
brise totalement.
M. Blank: Quand les gens ne travaillent pas, ils ne paient pas de
taxes. On n'a pas d'argent pour payer l'aide sociale. C'est un cercle
vicieux.
M. Maciocia: Cela peut arriver.
M. Boucher: À l'ère de l'économie
d'énergie.
M. Fréchette: II s'agit d'un quatrième point.
M. Blank: Le quatrième point n'est pas dans mon discours,
mais je vous en ai parlé hier.
M. Fréchette: Ah bon! j'avais noté le retard dans
le paiement de l'allocation de disponibilité.
M. Blank: Ah oui! mais j'ai parlé de cela en passant.
M. Fréchette: Est-ce d'accord?
Les mandataires de la taxe
M. Blank: C'est d'accord. Je me pose une question. C'est
arrivé souvent dans le centre-ville de Montréal, dans mon
comté en particulier. De mémoire, il y a cinq ou six restaurants
qu'on peut dire de première qualité qui ont fermé leurs
portes ou qui sont en train de fermer leurs portes à cause de la taxe
sur les repas. D'après les informations qu'on m'a données, il y a
des pertes d'emplois à cause de cela. L'un d'entre eux, qui
s'apprête à fermer ses portes cette semaine, avait 90
employés; un autre qui a fermé ses portes, il y a deux mois,
avait 20 employés. Il y a une couple d'année, une maison de
crêpes bretonnes a fermé sept restaurants qui assuraient presque
200 emplois. La question que ces restaurants ne paient pas leurs taxes, c'est
une autre affaire; mais la plainte que j'ai eue, c'est sur la façon de
les cotiser. Cela veut dire que ce n'est pas basé sur des chiffres
exacts, mais sur des spéculations d'inspecteurs. Ce ne sont même
pas des "spot-checks".
Dans un cas récemment qui a même fait l'objet d'un article
dans un des journaux de Montréal, il paraît qu'un monsieur avait
une bouteille de quarante onces, et normalement, on donne une once et demie par
"shot", comme on dit, et il y en a 25 par bouteille. Ce monsieur, dans ce
restaurant, pour les fins de son commerce, donne deux onces pour attirer la
clientèle.
Cela a toujours été son attitude de donner deux onces.
Nonobstant cela, l'inspecteur est venu compter le nombre de bouteilles qu'il a
vendues, calculé cela sur un chiffre d'une once et demie et,
d'après l'information qu'il m'a donnée, l'inspecteur a dit: Vous
avez seulement le droit de vendre une once et demie. Je veux savoir si
maintenant le ministre s'ingère dans la restauration en disant comment
vendre la boisson. Comment en arriver à ces chiffres? Le gros
problème...
M. Fréchette: Je m'excuse, quelle est la question
précise?
M. Blank: Avez-vous un système particulier? Comment en
arrivez-vous à cotiser ces gens? Dans les autres restaurants, non pas
ceux du coin, mais ceux où on vend certaines choses pour emporter qui
sont moins que la chose imposable, cela a l'air que lorsque l'inspecteur
arrive, il dit: Ce ne peut pas être cela. Ce doit être cela, le
pourcentage de vos ventes, c'est comme cela. Il fait cela sur les pourcentages
et il fait une prolongation de l'affaire. C'est là que cela arrive. Le
problème est que même si ces gens font une opposition, ils doivent
attendre six mois, un an, deux ans avant que cela vienne en cour. En attendant,
ils doivent payer. Ils n'ont pas l'argent pour payer. Ils ne sont pas des
millionnaires. Ces places ferment en attendant.
Je sais que la loi est la loi, mais, avec la situation de chômage
au Québec, on doit trouver des moyens d'éviter le plus possible
de fermetures, même si on doit être moins dur dans certains
cas.
M. Fréchette: Alors, M. le Président, je saisis
très bien la question du député de Saint-Louis. Si vous me
le permettiez, je m'en tiendrais, quant à moi, à des
considérations de principe et d'ordre général. Me
Saint-Jean, qui est à la législation, pourra donner plus de
détails sur la façon de procéder.
Le député de Saint-Louis l'a signalé
lui-même, il y a une seconde, il est clair que les premiers
éléments en vertu desquels nous devons opérer,
particulièrement à la vérification, c'est vrai pour
partout ailleurs, ce sont évidemment les dispositions de la loi et les
dispositions de la réglementation. "Dura lex, sed lex", mais c'est comme
cela. Tant et aussi longtemps qu'on se tient à l'intérieur des
limites que nous permettent les lois et les règlements, il me semble
qu'on ne déborde pas la juridiction qui est la nôtre.
Quant à la technique utilisée, M. Saint-Jean pourra vous
donner un peu plus de renseignements tout à l'heure. Le
député de Saint-Louis signale que cette situation est apparue
dans les restaurants de première
qualité. Je n'en disconviens pas et cela arrive d'ailleurs dans
plusieurs restaurants et cela arrive dans plusieurs commerces
d'hôtellerie. Il arrive très souvent que les mandataires,
c'est-à-dire ceux qui doivent retenir la taxe et l'acheminer au
ministère le 15 de chaque mois, pour des motifs tout à fait
corrects... Il n'y a pas de mauvaise foi, il n'y a pas d'intention de frauder,
mais peut-être un peu de négligence. Du 15 au 15 de chaque mois,
on ne retourne pas la taxe qu'on a perçue ou qu'on devait percevoir et
on semble, dans certains cas, s'installer dans cette espèce de
procédure avec le résultat net que six mois, un an, dix-huit
mois, deux ans plus tard, nous arrive en pleine figure une cotisation avec un
montant considérable à rembourser. C'est un montant auquel on
doit ajouter, parce que cela n'a pas été payé dans les
délais prévus, la pénalité et les
intérêts prévus par la loi.
Le résultat net de cela, c'est qu'effectivement beaucoup de
commerces ou beaucoup d'institutions de cette nature se retrouvent avec un tel
montant de remboursement à acquitter qu'ils ne peuvent, à toutes
fins utiles, le faire. Cela donne quoi, comme résultat net? Fermetures
et évidemment, cela entraîne le congédiement des
employés qui sont là.
En considération de cette situation, et après l'avoir
analysée, à la demande même de l'Association des
restaurateurs du Québec, nous songeons très sérieusement -
et cela devrait effectivement se réaliser dans un assez court
délai - à exiger un cautionnement que le restaurateur fournirait
justement pour garantir le paiement de la taxe. Nous n'allons pas,
évidemment, si jamais cela se concrétisait, exiger un
cautionnement d'un contribuable qui a toujours été parfaitement
en règle avec la fiscalité, qui a toujours remis
régulièrement, le 15 de chaque mois, les taxes qu'il percevait.
Nous n'allons pas exiger de ce contribuable qu'il fournisse un
cautionnement.
Au contribuable qui, par exemple, aurait eu des difficultés dans
le passé, des difficultés de perception et de remises, à
celui-là nous pourrions demander un cautionnement pour garantir le
paiement de la taxe. Nous pourrions également l'exiger de celui qui
déciderait de commencer un commerce, d'ouvrir un commerce. À
celui-là aussi, pour vérifier le sérieux de l'entreprise,
le sérieux de l'intention qu'il a, nous pourrions demander de fournir un
cautionnement. En fait, cela lui rendrait service. Parce que s'il lui arrive
qu'un mois il ne fait pas sa remise et qu'il y a une accumulation progressive,
le cautionnement qui est là servirait justement à payer ces
retards. C'est un aspect qui est sérieusement envisagé
actuellement.
Il y a un autre aspect pour lequel il me semble qu'une décision
comme celle dont je vous parle maintenant contribuerait à éviter.
Il arrive très souvent que ces mandataires, comme d'ailleurs beaucoup
d'autres contribuables, se retrouvent avec un compte élevé, parce
qu'ils ne le reçoivent que six mois, un an, dix-huit mois ou deux ans
après qu'il a commencé de courir. Ce que nous voulons instaurer,
et cela incessamment, c'est d'envoyer à la fois au contribuable qui paie
de l'impôt sur le revenu et aux mandataires qui doivent percevoir la
taxe, un état de compte mensuel. Tous les mois, ils seraient
informés du montant qui est dû, pour éviter effectivement
la mauvaise surprise de se retrouver au bout d'un an, dix-huit mois ou deux ans
avec un compte épouvantable qu'on n'est pas capable de payer et qui
conduit fatalement à des situations aussi pénibles que celles que
le député de Saint-Louis vient de décrire. Il y a ces deux
objectifs qui sont actuellement sur le métier et que nous devrions
pouvoir réaliser avant l'ajournement de la session. Je vous signale que
quant à la question du cautionnement, c'est à la demande
même de l'association des restaurateurs que nous avons
considéré la possibilité de l'introduire dans nos
lois.
M. Blank: Oui, mais là, il y a un danger. Les gens qui
paient actuellement, n'auront pas besoin d'un cautionnement, seulement les gens
qui accumulent du retard ou les nouveaux. Ce qui veut dire qu'il y aura une
certaine restriction à l'ouverture de nouveaux restaurants.
Peut-être, est-ce l'intention de cette association de restaurateurs de
limiter la concurrence? C'est là le problème, le danger. Ou tout
le monde doit le faire, ou personne ne doit le faire. Si le gouvernement
établit une catégorie où des gens qui sont
déjà en affaire n'auraient pas besoin d'avoir un cautionnement,
seulement les nouveaux, cela va empêcher l'ouverture de nouveaux
restaurants.
M. Fréchette: Remarquez qu'il n'est pas dans l'intention
du ministre, ni du gouvernement ni du ministère, d'imposer cette
obligation. Dans le cas de la personne qui envisage d'ouvrir un commerce de
restauration ou d'hôtellerie et qui pourra faire la preuve de sa
solvabilité, qui sera en mesure de démontrer que, toutes choses
étant normales, il n'y aura pas de problèmes dans la perception
des taxes, on ne va pas exiger de lui un cautionnement, définitivement
pas, ni non plus de celui qui est déjà en affaires depuis un bon
moment et qui, de toute évidence, depuis qu'il est en affaires, est un
excellent contribuable, dans le sens qu'il remplit correctement les exigences
du mandat qui lui est confié par la loi. Mais je voudrais vous faire un
parallèle entre deux situations. Je prends l'individu qui
se présente à un bureau des permis du bureau des
véhicules automobiles et qui, pour la première fois, requiert
qu'on lui délivre un permis de conduire. Avez-vous pensé à
quelle procédure il doit se livrer? Il doit suivre un cours
théorique d'une durée de deux à trois semaines. Il doit
aller sur la route avec un inspecteur du ministère des Transports pour
voir s'il conduit bien. Si l'on prend toutes ces précautions pour
délivrer un permis de conduire à quelqu'un qui vient le demander,
pourquoi conserverait-on l'habitude qu'on a au ministère du Revenu, de
délivrer un permis de taxe sur simple demande, sans aucune autre
espèce de vérification?
M. Blank: Mais il y a une grande différence. Dans un cas,
c'est une question de sécurité...
M. Fréchette: La différence, c'est
écoutez...
M. Blank: ... une personne peut en tuer une autre. S'il doit
conduire, il peut alors causer des dommages à une tierce personne, c'est
une question de danger pour l'Etat dans un sens. Dans l'autre, si c'est une
question de perception de taxes. Il y a une grande différence
là.
M. Fréchette: Si je comprends bien...
M. Blank: D'un côté, il y a une personne qui veut
avoir un privilège de conduire un véhicule sur la voie publique.
De l'autre, c'est quelqu'un qui veut entrer dans l'entreprise privée,
qui veut travailler pour lui-même, produire quelque chose. Je pense qu'il
y a une grande différence entre les deux et dès le moment
où le gouvernement pense décider qui ira en affaires, qui n'y ira
pas, ce n'est plus une démocratie.
M. Fréchette: Le député de Saint-Louis est
en train de plaider fermement pour essayer de me convaincre que celui qui
aurait le goût de partir en affaires, mais qui, par les années
passées, aurait été impliqué dans trois ou quatre
faillites de suite ou aurait de même négligé à
plusieurs occasions de remettre les taxes qu'il percevait, il est donc en train
de plaider pour me convaincre qu'on ne doit pas, pour aucune
considération, tenir compte de cette situation. (12 heures)
M. Blank: Vous pouvez certainement tenir compte du fait qu'on ne
peut pas refuser à la personne le droit d'essayer de gagner sa vie. Si
vous savez l'argent qu'il vous doit, vous percevrez ce montant quand il aura
gagné cette somme. Mais ne l'empêchez pas de travailler en disant:
Parce que vous êtes un mauvais garçon... Sur la question des
faillites qu'il aurait faites auparavant, ce sont ses créanciers qui
vont décider s'ils vont lui donner encore du crédit. Si c'est un
mauvais administrateur qui n'a pas d'argent, il n'aura pas l'argent pour ouvrir
son commerce. Il ne se lancera jamais en affaires. Ce n'est pas à nous
de décider qui aura du succès en affaires et qui n'en aura
pas.
M. Fréchette: Je voudrais bien qu'on soit clairs et qu'on
s'entende. On aura sans doute l'occasion de rediscuter de la manière
dont je vois les choses se présenter.
M. Blank: Oui. C'est la marque de commerce de ce gouvernement que
de s'ingérer partout.
M. Fréchette: On va sûrement avoir l'occasion d'en
rediscuter. Je voudrais simplement, de l'argumentation du député
de Saint-Louis, retenir un ou deux points. D'abord, il faudrait bien être
conscients du fait que ce n'est pas le ministère du Revenu qui va
émettre un permis autorisant quelqu'un à ouvrir un restaurant, un
hôtel ou tout autre commerce de même nature. Nous n'avons rien
à voir dans cela. La seule assurance que l'on veut avoir, et j'aimerais
qu'on me convainque qu'on voit mal la situation, c'est que celui qui va
commencer à exploiter un commerce comme celui-là, qui en vertu de
la loi va devenir le mandataire du gouvernement - et c'est une obligation
prévue dans la loi - on veut simplement s'assurer que celui qui va
assumer les fonctions et les obligations de mandataire pourra le faire
correctement au niveau de la solvabilité. Est-ce que le
député de Saint-Louis est en train de me dire que le contribuable
qui a vécu de mauvaises expériences en affaires, qui a
exploité un commerce, hier, sous le nom de X Y Z Inc., qui a, pendant un
an, négligé de nous remettre la taxe qu'il percevait, qui a
été impliqué malgré lui, bien sûr, dans deux
ou trois faillites, que ce X Y Z Inc., qui a vécu ces problèmes,
hier, pourra, demain, sous la raison sociale de A B C Inc., recommencer le
même manège?
M. Blank: Oui.
M. Fréchette: C'est ce que vous êtes en train de me
dire.
M. Blank: Oui. Parce que le système de l'entreprise
privée va l'arrêter s'il est aussi mauvais que vous venez de le
décrire. Mais, comme gouvernement, vous n'avez pas le droit de
l'empêcher d'ouvrir un commerce.
M. Fréchette: Ce n'est pas cela qu'on veut faire non
plus.
M. Blank: Mais si vous ne lui accordez pas de permis, il n'a pas
le droit d'exploiter de commerce. On n'a pas besoin de garanties.
M. Fréchette: Ah.
M. Blank: Pourquoi, parce que j'ai déjà un
commerce, je vais empêcher la concurrence, c'est cela que vous
voulez?
M. Fréchette: Absolument pas.
M. Blank: C'est cela que l'Association des restaurateurs demande.
Lisez leur mémoire. Vous allez voir que ce qu'ils disent dès le
début, dans le premier paragraphe, c'est qu'il y a trop de restaurants
à Québec. C'est cela que dit le mémoire. Ce serait une
façon d'empêcher de nouveaux restaurants d'ouvrir. Si on laisse
ouvrir des restaurants, les mauvais vont fermer, mais les bons vont rester.
Nous sommes encore dans une société libre. Ce n'est pas le
gouvernement qui va décider si moi j'ai le droit d'ouvrir un restaurant
ou non.
M. Fréchette: M. le Président, je signale
simplement et je vous réitère qu'on aura sans doute l'occasion
d'aller dans une discussion de fond. Je vous réitère simplement
que ce ne serait pas original, ce ne serait pas du nouveau parce que
déjà, dans les lois fiscales, la Loi sur les permis, par exemple,
oblige celui qui est encanteur à fournir un cautionnement...
M. Blank: Oui. Mais c'est très différent.
M. Fréchette: ... qu'il paiera la taxe.
M. Blank: II a dans ses mains une propriété qui
appartient à un autre. C'est cela.
M. Fréchette: C'est la même chose pour le mandataire
en hôtellerie et en restauration.
M. Blank: Non, il ne vous doit rien avant de se lancer en
affaires. Il ne vous doit rien. Au moment où il demande son permis, il
ne vous doit pas un sou.
M. Fréchette: D'accord.
M. Blank: Seulement à la fin du mois. S'il a fait des
ventes qui sont taxables, il doit prendre l'argent et vous le donner.
M. Fréchette: Le 15e jour de chaque mois.
M. Blank: D'accord.
M. Fréchette: C'est l'argent du gouvernement.
M. Blank: C'est l'argent du gouvernement. Je pense que vous
devriez faire une démarcation. C'est cela que je veux plaider pour
commencer. Ce n'est pas sur cela que j'avais fait des plaintes dans mon
argument au sujet des restaurants de Montréal. Ce n'est pas cela du
tout. La plainte que j'avais faite portait sur la façon d'arriver
à une cotisation. Les gens dont je parle ont fait leur rapport chaque
mois. Deux ans après, il y a quelqu'un qui est venu et qui a dit: Vos
rapports ne sont pas précis, vous avez fait plus de ventes que cela.
Appuyé sur on ne sait quoi? C'est cela que je me demande, à
partir de quel barème faites-vous de nouvelles cotisations?
M. Fréchette: J'ajouterai simplement en remarque
générale et le sous-ministre à la Législation
pourra compléter sur le plan de la technique. Le contribuable qui se
retrouve dans la situation que le député de Saint-Louis
décrit a quand même à sa disposition des mesures et des
recours prévus par la loi qu'il peut exercer.
M. Blank: Vous-même m'avez dit...
M. Fréchette: ... je parle de vos leviers
d'opposition.
M. Blank: ... que vous essayiez de réduire le temps de
deux ans à six mois, d'accord. Durant ces six mois, un an ou deux ans,
il doit payer le montant. C'est là qu'est le problème.
M. Fréchette: C'est une forme de cautionnement aussi.
M. Maciocia: II y a un danger, M. le ministre, dans ce que vous
venez de dire, c'est-à-dire d'empêcher de nouveaux restaurateurs
ou de nouveaux restaurants, non pas d'empêcher en réalité,
mais de demander un cautionnement pour quelqu'un qui n'a pas fait preuve de
solvabilité ou qui a négligé de payer, pendant un certain
temps, des remboursements de taxe de vente au gouvernement. Est-ce que vous ne
voyez pas ce danger? Dans le cas de ce même contribuable qui probablement
a été coupable de négligence, ou même plus, qui
aurait payé, disons, purgé la peine ou la sentence ou n'importe
quoi vis-à-vis du ministère du Revenu ou vis-à-vis du
gouvernement, à ce moment-là, vous le considérez quasiment
insolvable, puisqu'il doit cautionner pour ouvrir une autre affaire. C'est
très dangereux, parce que le principe même de la justice est mis
en cause à ce moment-là; il a payé pour quelque chose
qu'il avait fait. Et, après vous lui dites: tu as fait cela, on
t'empêche de faire cela, cela prend cela pour faire cela. Je
trouve que c'est le principe même qui est très dangereux. Ne
croyez-vous pas?
M. Fréchette: II nous apparaît que la méthode
du cautionnement est le moyen approprié d'atteindre l'objectif
visé. C'est simplement de nous assurer que ce mandataire pourra,
mensuellement, faire ses remises de taxe. C'est de l'argent qui appartient au
gouvernement, que celui-ci a l'obligation de percevoir en vertu du mandat que
la loi lui confère. Ce n'est pas volontairement qu'il va percevoir ou
non. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il soit plus logique d'avoir une preuve,
une garantie de cette solvabilité et également une preuve et une
garantie que l'argent appartenant au gouvernement, lui seront finalement
remis?
Si vous me le permettez, je vous donne la parole tout de suite
après. Cela va même, à mon sens, rendre service à
ceux-là mêmes qui sont des mandataires, parce qu'ils vont se
préoccuper davantage de l'obligation qu'ils ont de faire les remises.
S'ils ne le font pas, ils vont devoir payer davantage pour obtenir ce bon de
cautionnement.
M. Maciocia: Oui, mais vous ne croyez pas...
M. Fréchette: Cela et le compte mensuel.
M. Maciocia: ... que vous allez avoir ou créer, à
un certain moment, deux classes de citoyens, les bons et les mauvais, dans le
sens que, si je n'ai rien eu à faire avec le ministère, si je
n'ai eu aucun problème avec lui, j'ai le droit d'ouvrir un commerce,
sans avoir à cautionner. Alors qu'il y en a un autre, qui a eu un
problème pour une raison ou une autre, qui n'a pas le même droit
que moi.
M. Fréchette: Oui, mais...
M. Maciocia: Est-ce que vous comprenez, c'est le principe...
M. Fréchette: Oui, je comprends.
M. Maciocia: ... même de la justice sociale qui est mis en
cause avec cela.
M. Fréchette: Je comprends très bien.
M. Maciocia: Deuxièmement, je voulais vous poser une autre
question, après que vous m'aurez répondu, à la
première. Ou j'ai mal saisi ou j'ai mal compris, je ne le sais pas, vous
avez dit tout à l'heure que le ministère du Revenu va envoyer des
comptes mensuels...
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: ... aux restaurateurs ou aux mandataires...
M. Fréchette: C'est à dire que c'est un projet, je
ne vous...
M. Maciocia: ... ou à n'importe quel pour se faire
rembourser. Mais, comment le ministère peut-il envoyer un compte
à la fin de chaque mois, pour se faire rembourser?
M. Fréchette: On a un service qui s'appelle le service des
comptes à recevoir et on sait quotidiennement...
M. Maciocia: Oui.
M. Fréchette: ... l'état des comptes à
recevoir.
M. Maciocia: Non, probablement que c'est ce que je disais, j'ai
mal saisi.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Vous avez dit tout à l'heure que le
gouvernement va envoyer un état de compte au restaurateur ou mandataire
pour...
M. Fréchette: C'est-à-dire que c'est un projet.
M. Maciocia: ... se faire rembourser, j'imagine, la taxe de vente
qu'il a perçue pendant ce mois-là. C'est cela?
M. Fréchette: Je vois...
M. Maciocia: C'est cela, j'ai mal saisi, pourriez-vous me...
M. Fréchette: Non. Prenons un cas concret qui
illustrerait, il me semble, la situation. À supposer qu'un contribuable,
tant au niveau de l'impôt sur le revenu qu'à celui des
différentes taxes à la consommation, a accumulé du retard
dans le remboursement des sommes qu'il doit au ministère, et que, pour
toutes sortes de motifs, il n'y porte pas l'attention qu'il devrait y porter,
il oublie, il laisse le temps courir, mais personne ne lui rappelle que...
M. Maciocia: Vous dites qu'il fait son rapport en
réalité?
M. Fréchette: Oui, bien sûr.
M. Maciocia: II fait son rapport et il doit un montant de X au
gouvernement.
M. Fréchette: Après six mois, ce n'est toujours pas
payé...
M. Maciocia: Parfait, j'ai compris.
M. Blank: II faut suivre le mois après, ne pas attendre
six mois.
M. Fréchette: C'est cela. Écoutez.
M. Blank: Ce n'est pas de ces cas que je parle. Je parle du cas
du monsieur qui a fait un rapport et payé ses taxes chaque mois. Trois
ans après, on arrive et on dit: Sur les formules que vous avez remplies
il y a trois ans, trente-six formules, vous n'avez pas rapporté toutes
vos ventes; il y a des ventes que vous avez oublié ou
négligé de déclarer. Le monsieur dit: non, ce n'est pas
vrai. L'inspecteur répond: mais vous avez vendu cent bouteilles de
scotch, cela fait tel nombre de verres. Le monsieur ajoute: moi, je donne plus.
Cela ne fait rien. Notre calcul est celui-là. C'est là le
problème.
M. Fréchette: L'activité que décrit le
député de Saint-Louis s'inscrit, il me semble, dans le cadre
normal d'une vérification que le ministère peut aller faire dans
un secteur donné, à des périodes données...
M. Blank: D'accord, d'accord. Je n'ai aucune objection à
cela.
M. Fréchette: C'est la méthode qui ne vous
plaît pas.
M. Blank: Quel est votre barème? Comment arrivez-vous
à cela, sur quoi basez-vous vos chiffres?
M. Fréchette: C'est à cet égard... Me
Saint-Jean.
D'abord, je précise que je ne suis pas en charge de la
vérification, mais cependant, à multiples reprises, j'ai eu
à étudier de tels dossiers au niveau des oppositions et des
appels devant la Cour provinciale. Les vérificateurs procèdent
selon des méthodes scientifiques qui varient selon le genre de
restaurant ou d'entreprise. Par exemple, dans le type de restaurant dont vous
parlez, on vérifie le livre des achats, le livre des ventes, le chiffre
d'affaires, etc. Il apparaît, à l'occasion, qu'il y a des
différences entre les montants de taxe déclarés
mensuellement et le chiffre des achats et il apparaît alors impossible
qu'on ait si peu vendu pour les montants achetés par exemple; cela
pourrait être un élément. À partir de cela, il y a
souvent une vérification par méthode d'échantillonnage
statistique effectuée pour chacune des notes de repas. Ce sont des
méthodes de vérification reconnues tant par les comptables
agréés que par les tribunaux. Nous avons plaidé plusieurs
causes là-dessus. Les tribunaux, y compris la Cour d'appel, ont reconnu
comme valables, ces méthodes de vérification. D'ailleurs, les
tribunaux sont garants de l'orthodoxie qu'on peut mettre dans ces
vérifications. Je peux vous donner un élément
d'information publique: dans la cause de l'auberge Saint-Tropez, le
ministère a perdu parce que...
M. Blank: ... la cotisation, non.
M. Fréchette: ... il y avait un vice dans l'application de
la méthode d'échantillonnage statistique. Nous avons fait
corriger ces choses. Donc, vous voyez que le système fonctionne.
M. Blank: Voilà, l'auberge Saint-Tropez a fermé ses
portes à cause de sa cotisation...
M. Fréchette: C'est discutable pour la cause,
cependant.
M. Blank: ... et elle n'est pas rouverte encore. Une vingtaine
d'employés sont partis, parce que le propriétaire n'avait pas
assez d'argent pour fournir la garantie du cautionnement. C'était un bon
restaurant, à part de cela.
M. Fréchette: Je ne peux pas réfuter la cause ou
ainsi de suite, mais je peux vous expliquer la méthode.
M. Blank: Je connais cela.
M. Fréchette: II reste une chose cependant. Je ne crois
pas que l'auberge
Saint-Tropez ait payé son compte au moment du procès.
M. Blank: Non, ils n'avaient pas d'argent.
M. Fréchette: Ils n'avaient pas payé, alors ce
n'est pas cela qui les a mis en faillite, ils n'avaient pas payé la
cotisation.
M. Blank: Mais vous avez une saisie et le compte de banque s'est
vidé. Ils n'avaient pas les fonds nécessaires.
M. Fréchette: Là, je ne peux pas m'embarquer
là-dedans, je ne suis pas assez au courant des faits. Cela s'est
passé il y a plus d'un an. Ensuite, lorsque le projet de cotisation est
dressé, il est aussi discuté avec le mandataire. Donc, le
cotiseur discute le projet de cotisation et le mandataire peut lui faire valoir
certains faits, par exemple, qu'il met un peu plus qu'une once et demie dans un
verre, ainsi de suite...
M. Blank: Ce n'est pas à l'auberge Saint-Tropez qu'on dit
cela, c'est à un autre restaurant.
M. Fréchette: Oui, je le sais. Je ne
parle pas du cas de l'auberge Saint-Tropez, je parle en
général. Le vérificateur, selon la vraisemblance des
motifs et des raisons données par le mandataire, va les accepter ou les
refuser. Ce n'est pas toutefois le premier stade. Admettons qu'il les refuse,
alors, le restaurateur ou notre mandataire peut faire opposition, et là,
intervient le problème du paiement de la cotisation. Cependant, le
ministère, que je sache, ne met jamais les gens en faillite, il peut
accepter des garanties. Pour autant que le compte est encore sous opposition ou
en appel devant les tribunaux, on peut accepter des garanties ou alors des
paiements échelonnés, et là-dessus le ministère est
très compréhensif... Enfin... (12 h 15)
M. Blank: Enfin! Avec les garanties, c'est clair que si la
personne n'a pas d'argent pour le payer, elle n'a pas de garanties non plus.
C'est cela le gros problème.
M. Fréchette: Elle a des garanties bancaires.
M. Blank: Si la personne a des garanties bancaires, la banque va
lui prêter l'argent pour payer; si elle ne peut pas avoir de garanties
bancaires, c'est parce qu'elle n'a pas d'argent, c'est cela.
M. Fréchette; Mais, même dans le cas où elle
n'aurait pas de garanties, elle pourrait payer par versements
échelonnés.
M. Blank: Oui, je sais... M. Fréchette: Donc
le...
M. Gagnon: ... vous permettez, je suis entièrement
d'accord avec le député de l'Opposition, qui n'est pas tout
à fait d'accord. Oui.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Champlain, étant donné que vous n'êtes pas membre, est-ce
que la condition...
M. Blank: Oui.
M. Fréchette: Surtout qu'il est d'accord avec le
député de Saint-Louis.
M. Gagnon: J'aimerais que l'on me prouve ce qu'on vient
d'annoncer parce que j'ai eu des cas où j'ai personnellement
travaillé et transigé avec Je ministère du Revenu. J'ai
offert moi-même, au nom de mon commettant, des arrangements au
ministère du Revenu, on n'a pas pu, dans un cas bien précis
où, à mon point de vue, les arrangements qu'offrait le
commerçant en question étaient extrêmement valables et
auraient été acceptés par beaucoup d'institutions
financières, conclure une entente. Finalement, il a dû fermer ses
portes, comme vous avez mentionné. Ce n'est pas parce qu'il a
payé qu'il a fermé ses portes, mais c'est parce que vous avez
tout simplement mis la clef dans la porte.
J'avais eu l'occasion, M. le ministre, de vous en parler. Je pense que,
dans ce sens-là, il y aurait peut-être des choses à
regarder. Si je prends le cas d'un commerce que j'ai en tête, il offrait
- par exemple, pour la somme X qu'il devait au ministère du Revenu - la
possibilité de le payer en trois ans. Évidemment, il ne pouvait
pas donner de garanties, mais il en donnait tout de même plus en restant
ouvert qu'en fermant, parce qu'à ce moment-là on perdait tout
simplement le compte. Je pense que c'est aussi dans ce sens que le
député de Saint-Louis parle. J'ai l'impression que de ce
côté-là, il y aurait certainement possibilité de
montrer un petit peu plus de souplesse. Cela ne veut pas dire perdre les
comptes, mais ça veut dire qu'au moins donner une chance au coureur de
continuer d'exploiter son commerce et aussi de récupérer les
comptes.
M. Blank: Mais je parle de quatre restaurants de Montréal.
Je pense qu'ils ont fermé leurs portes cette semaine. Il s'agit du
Café Martin, du Pescatore, de la Tour Eiffel, et du Roma. Quatre
restaurants de premier ordre appartenant au même propriétaire.
À cause d'une cotisation qu'il ne peut pas payer et de garanties qu'il
ne peut pas fournir, les quatre vont fermer, entraînant la mise à
pied de 90 employés.
M. Fréchette: Le député de Saint-Louis va
comprendre qu'il nous est difficile de rester dans la limite de la
confidentialité et de traiter de cas particuliers. Il y a un risque
très grand et je pense que tout le monde convient de cela; sauf que, sur
le principe général soulevé tant par le
député de Saint-Louis que par le député de
Champlain, il me semble qu'il y a là des informations de nature à
nous inciter à revoir davantage le modus operandi, la façon de
procéder, et je suis content de ces témoignages. Ils ne peuvent
que contribuer effectivement à attirer notre attention sur des
situations particulières qui existent. Je n'ai pas besoin de vous dire
qu'effectivement, quotidiennement, de la part de tous les collègues de
l'Assemblée nationale, je suis confronté à des situations
de cette nature-là, et très souvent je suis de ceux qui se
retrouvent fort malheureux de se qui se produit.
Les deux interventions qu'on a faites, en tout cas, retiennent
sérieusement mon attention et il nous faudra voir de plus près
à essayer par tous les moyens possibles d'améliorer cette
situation.
M. Blank: Merci.
M. Gagnon: Justement, M. le ministre, depuis qu'on a eu
l'occasion de s'en parler, j'ai personnellement eu des témoignages
m'assurant qu'actuellement il y a une grosse amélioration, mais c'est
réellement des cas; il va falloir y regarder de très
près.
M. Fréchette: D'accord.
Rapport du Vérificateur
général
M. Blank: Maintenant qu'on a fini avec les grosses affaires, j'ai
quelques petites affaires. Dans le rapport du vérificateur de 1980-1981,
il est fait mention de trois ou quatre affaires et, dans sa réaction, le
ministre a dit que ces affaires allaient se régler. Est-ce que...
M. Fréchette: C'est quoi, ces trois, quatres petites
affaires?
M. Blank: Des droits de succession. "La division des successions
du Service de la vérification des impôts est responsable, entre
autres, de vérifier l'établissement des droits et
pénalités... "Cette division doit revoir les déclarations
relatives aux droits successoraux pour pouvoir émettre les permis de
libérer les actifs des personnes décédées. "Nous
avons constaté que les personnes affectées à la cotisation
de ces déclarations ne possèdent pas de programme-guide de
vérification. De plus, les cotisations ne sont pas approuvées par
le supérieur immédiat ou hiérarchique du cotiseur."
Est-ce que cette affaire est réglée?
M. Fréchette: Si je comprends très bien la
situation que soulève le député de Saint-Louis, ce serait
réglé effectivement.
M. Blank: C'est en haut de la page, à 2.
M. Fréchette: L'observation faite par le
Vérificateur général concernant les permis de disposer a
été effectivement retenue et la décision de corriger la
situation est prise.
M. Blank: Est-ce que cela veut dire que les deux ou trois choses
que le vérificateur a suggérées ont été
changées?
M. Fréchette: C'est cela.
M. Blank: Parlant des droits successoraux, le ministre a-t-il des
chiffres? Combien est-ce que cela coûte à la province pour faire
la perception de ces comptes?
M. Fréchette: Là, par exemple...
M. Blank: Je me demande si cela vaut la peine d'avoir encore des
droits de succession ici au Québec, qui est la seule province au Canada
qui les a. Cela coûte-t-il plus cher pour les percevoir?
M. Fréchette: Je ne sais pas si on dispose de ce
renseignement, M. le Président. Est-ce qu'on en dispose?
M. Blank: Si ce n'est pas disponible aujourd'hui, vous pouvez
m'envoyer cela.
M. Fréchette: D'accord, on en prend note et on vous le
fournira.
M. Blank: Deuxièmement, une petite chose, j'ai
constaté que presque toutes les formules du ministère sont ou en
anglais ou en français ou bilingues. Comme je le dis, la formule pour le
supplément de revenu est en anglais. Mais la chose que je trouve
curieuse, c'est que, le 16 mars de cette année, dans la Gazette, un
journal anglais, il y a eu une très grande annonce pour le
supplément de revenu, mais elle était en français.
M. Fréchette: II n'y a pas seulement le
député de Saint-Louis qui l'a trouvée curieuse.
M. Blank: Oui, je l'ai trouvée curieuse.
M. Fréchette: Oui. Effectivement, je pense que c'est la
journée même ou peut-être bien le lendemain matin que notre
attention a été attirée là-dessus. Dès le
lendemain, disais-je, où la situation nous a été
soulignée par des gens qui avait vu la publication dans le journal The
Gazette, elle a été corrigée. Il y a eu de la
publicité, mais en anglais cette fois-là. Cela a
été fort cocasse effectivement.
M. Blank: Non, mais certains ministères font toutes leurs
affaires en français. Je comprends qu'ils veulent publier seulement en
français, mais le ministre du Revenu, le percepteur, parle toutes les
langues pour avoir son argent et je trouve toujours cela curieux.
Ici, dans votre étude des crédits, à la page 9,
vous parlez de campagnes de publicité. Il y a eu un changement radical,
non pas seulement une augmentation d'environ 50 000 $, mais la campagne
annuelle est tombée de 140 000 $ à 98 000 $. Cependant, la
campagne ponctuelle est montée de 22 000 $ à 57 000 $ et il y a
une nouvelle campagne institutionnelle de 52 000 $. Qu'est-ce que c'est
cela?
M. Fréchette: Si l'on prend les chiffres les uns à
la suite des autres, c'est là que vous arrivez à 50 000 $ de
plus, globalement? C'est cela?
M. Blank: Oui, globalement.
M. Fréchette: Vous allez comprendre avec moi que, si l'on
a une Direction générale du service au public et à la
clientèle, une des vocations de cette direction est
précisément de faire connaître ces programmes à
l'ensemble des contribuables et des bénéficiaires des
différents programmes.
M. Blank: Je ne fais pas une critique, je pose une question.
M. Fréchette: Non, mais je vous dis essentiellement que
l'augmentation du budget à cet égard a été
effectivement consacrée à la Direction générale du
service au public et à la clientèle dans le but
précisément de publiciser les différents programmes que
nous administrons. Il y a quatre programmes sociaux, comme vous le savez. Il y
a le budget de novembre également. Il y a eu la publication de la petite
plaquette sur les droits successoraux. Enfin, c'est strictement parce qu'il
s'agit de crédits dont la Direction générale du service au
public et à la clientèle a essentiellement besoin pour remplir le
mandat qui lui a été confié. C'est uniquement cela.
M. Blank: Je note qu'on me donne la liste des fichiers que vous
avez à votre ministère aux pages 13 et 14. On a des fichiers pour
les compensations des comptes à recevoir du ministre des Affaires
sociales. On a déjà discuté de cela.
M. Fréchette: Oui.
M. Blank: Mais, ici, vous parlez à la page 14
d'échange de renseignements.
M. Fréchette: À la page 14, dites-vous?
M. Blank: Vous fournissez à la Régie des rentes les
données prescrites par la loi relativement à
l'établissement du registre des gains des cotisants. C'est quoi? Vous
donnez les montants que le contribuable déclare à la Régie
des rentes? C'est cela?
M. Fréchette: On remet à la Régie des rentes
des sommes.
M. Blank: Vous les remettez à la Régie des
rentes?
M. Fréchette: Oui. Ce sont les salaires qui sont
exigés pour établir le montant de la rente.
M. Blank: Ah oui. Très bien.
M. Fréchette: C'est en vertu de la loi finalement qu'on
est forcé de faire cela.
M. Blank: C'est très bien. Je comprends cela. Et au
ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu, vous parlez de données, sont-ce les mêmes données
dont vous parliez avant?
M. Fréchette: Oui.
M. Blank: Je trouve cela curieux: les données prescrites
par décret, pas par la loi, mais par décret.
M. Fréchette: C'est par la loi. C'est effectivement par la
loi.
M. Blank: II n'y a pas un décret? M. Fréchette:
Non, non.
M. Blank: S'il y a un décret, j'aimerais avoir une copie.
Mais s'il n'y en a pas...
M. Fréchette: Écoutez...
M. Blank: Commission administrative des régimes de
retraite. C'est quoi?...
M. Fréchette: Juste une seconde. On va voir. Dans ce cas,
c'est tout simplement un service qu'on a rendu à la commission. Elle
voulait retrouver des cotisants qui devaient de l'argent et elle n'avait plus
leurs adresses. Comme nous ne pouvions pas donner ces renseignements, nous
avons nous-mêmes adressé ce que la commission voulait faire
parvenir à ces personnes.
M. Blank: Vous n'avez pas donné les adresses de ces
personnes?
M. Fréchette: Non. Nous l'avons fait nous-mêmes.
M. Blank: Très bien. À la page 16, vous parlez
d'éthique.
M. Fréchette: De quoi?
M. Blank: Des règles d'éthique régissant
l'échange donné entre fichiers gouvernementaux ou privés.
Au deuxième paragraphe de la fin: Tout renseignement transmis par le
ministre du Revenu à un organisme autorisé demeure confidentiel,
etc., c'est là que j'ai peur au sujet de la confidentialité dans
les autres ministères.
M. Fréchette: D'accord. C'est ce que vous avez
soulevé au début de nos travaux.
M. Blank: C'est très dangeureux... Ce sont là
toutes les questions que j'ai à date sauf que je constate ici que le
ministre du Revenu a fait un voyage à Atlantic City. J'espère
qu'il a fait quelques dollars en jouant au casino.
M. Fréchette: N'allez pas au-delà de ce que la
confidentialité permet.
Le Président (M. Gratton): Le député de
Viger.
Les casinos
M. Maciocia: Est-ce qu'on pourrait tomber justement un peu sur
les casinos, M. le ministre?
M. Fréchette: Tomber sur les casinos? Tomber et se
relever! Bien sûr, vous avez droit à toutes les questions qui vous
paraissent pertinentes.
M. Maciocia: C'est bien dire tomber sur les casinos, M. le
ministre. Si c'est possible - j'ai oublié de vous poser une question en
Chambre, comme vous savez, je vous dis d'habitude que j'aurai une question
à poser sur ce sujet-là - j'aimerais savoir, car vous m'aviez
répondu le 7 avril dernier à la question que je vous aurait
posée en Chambre, si le Conseil des ministres a pris une décision
sur cela. Vous m'avez répondu que ce n'était pas encore au
Conseil des ministres, mais au Comité des priorités
ministérielles.
On sait que ce document de travail, le dernier depuis 1976, a
été achevé à la fin du mois de février et
déposé au Comité des priorités
ministérielles le 5 mars dernier. Cela va faire bientôt trois
mois. Premièrement, est-ce que le Comité des priorités
ministérielles a pris une décision, ce document est-il rendu
actuellement au Conseil des ministres? Deuxièmement, y a-t-il eu une
décision de prise par le Conseil des ministres, étant
donné qu'après Pâques, vous avez eu une entrevue ou une
ligne ouverte, je ne sais trop, à Sherbrooke, où vous avez
laissé entendre que la réponse du Conseil des ministres ou
plutôt du gouvernement était positive sur la question des casinos?
C'est l'information que j'ai eue. Ce n'était pas que vous aviez dit que
c'était positif, mais les gens ont cru, d'après votre
argumentation, que c'était favorable à l'implantation de casinos,
ici au Québec. (12 h 30)
M. Fréchette: À l'égard de la
dernière remarque du député de Viger, je me permets de
présumer qu'il se réfère sans doute à une
intervention que j'ai faite devant la Chambre de commerce de Sherbrooke, au
cours de laquelle j'ai essayé, avec autant de minutie que possible, de
faire ressortir d'une part les avantages d'une semblable institution - il me
semble qu'il en existe - mais aussi, avec tout autant de précaution et
de minutie, les objections ou les désavantages que ça pourrait
entraîner. Je suis l'un de ceux, et je pense qu'on le sait maintenant,
qui croient que ça pourrait, économiquement et
particulièrement au niveau du tourisme, être intéressant de
pouvoir procéder à la création de semblables institutions
au Québec. Je crois à la présomption d'innocence des
casinos tant et aussi longtemps que la preuve de leur culpabilité ne
m'est pas faite. Ce sont probablement les suites de cette intervention que j'ai
faite devant la Chambre de commerce à Sherbrooke, tout récemment
au milieu du mois d'avril. Je pourrais en remettre le texte au
député de Viger et il verrait très
précisément ce qui a été dit.
Quant à l'autre aspect de sa question, il n'y a pas, au moment
où on se parle, de décisions prises par le Conseil des ministres,
sauf simplement ceci pour fins d'information. Au mois d'avril dernier, quand
nous avons pour la première fois discuté du dossier au CMPDE, il
y a un mandat très précis qui a été confié
à trois ministères pour compléter des informations
manquantes dont nous avions besoin dans un domaine bien spécifique.
Cette opération est maintenant terminée et nous reparaissons
à l'agenda du CMPDE le 10 juin prochain, avec cette fois tout le
matériel dont nous aurons besoin pour décider si effectivement il
nous faut aller au Conseil des ministres ou ce sera si clair à ce stade
qu'il n'y aura pas lieu de cheminer plus loin.
M. Maciocia: Dois-je comprendre qu'il n'y a pas de
décisions de prises encore au Comité des priorités
ministérielles?
M. Fréchette: Vous comprenez très bien.
M..Maciocia: Je dois vous poser d'autres questions, parce que
vous savez très bien que depuis 1976, le gouvernement ou la
Société d'exploitation des loteries et courses du Québec
fait des études sur l'implantation d'un casino au Québec, Vous
avez eu depuis trois rapports, à part ceux de la partie policière
ou concernant tous les autres aspects de ce sujet. Je crois qu'en six ans, le
gouvernement a eu tout en sa possession pour prendre une décision face
à l'implantation de casinos. Le 7 avril, quand vous avez répondu
à ma question à savoir si le Conseil des ministres avait une
décision, vous m'avez dit: Ce n'est pas le Conseil des ministres, c'est
le Comité des priorités ministérielles. À ce
moment, je suis resté vraiment bouleversé à moins que
j'aie mal compris ou mal saisi. Je vous cite, répondant à ma
question à savoir si vous étiez en faveur de l'implantation de
casinos au Québec. Vous disiez: Le député de
Marguerite-Bourgeoys m'avait posé une question au mois de février
me demandant si j'étais conscient de l'incidence, par exemple sur la
criminalité, que pourrait avoir une institution comme celle-là.
Il est évident -et c'est votre réponse - qu'il s'agit encore
d'un aspect capital, important du dossier et qu'à cause de tout
ce qu'il contient, il me semble qu'il faut prendre le temps nécessaire
pour procéder à une analyse sérieuse, importante et
profonde de celui-ci.
Ce qui m'inquiète dans cette réponse, c'est que vous avez
donné votre accord sur l'implantation de casinos au Québec sans
considérer l'aspect social du problème. Vous dites: C'est
évident qu'il s'agit encore une fois de l'aspect capital, important du
dossier et qu'il faut procéder à une analyse sérieuse,
importante et profonde de ce dossier. Vous avez dit que vous étiez pour
l'implantation des casinos au Québec. Je vois mal comment un ministre
aussi responsable que vous ait donné son consentement sans
considérer l'aspect social du projet.
Je vous pose d'autres questions. Probablement que c'est mieux que je
vous les pose une après l'autre et qu'après vous
répondiez, ou préférez-vous répondre à
chaque question que je vais vous poser sur cela?
M. Fréchette: Non, non. Je vais noter et, si mes
réponses n'étaient pas complètes tout à l'heure,
vous me le signalerez.
M. Maciocia: Sur cela, j'aimerais avoir une réponse. Je
vous aurais posé une question supplémentaire, mais,
malheureusement, le président a annoncé la fin de la
période des questions.
M. Fréchette: Cela arrive!
M. Maciocia: Je n'ai pas eu l'occasion de vous poser cette
question. À ce moment, probablement que cela aurait été
mieux. Ma question est la suivante: II y a eu un rapport en avril 1979 de la
Société des loteries et courses du Québec dans lequel on
disait, entre autres, on soulignait que le seul motif invocable pour justifier
la légalisation des casinos au Québec était l'impact
touristique. C'est clair dans le rapport qui a été fait à
ce moment. On disait aussi que la localisation de tels établissements
devrait s'inscrire dans une perspective de décentralisation des
activités touristiques au Québec. Est-ce que c'est clair dans
votre esprit?
M. Fréchette: Oui, cela va.
M. Maciocia: Après, dans le deuxième rapport, au
mois de mars 1981, on dit qu'on remet en question le principe du casino comme
facteur de décentralisation. Disons que, dans le premier rapport, le
seul motif invocable était l'impact touristique et la
décentralisation de cet impact touristique sur le Québec. Dans le
deuxième rapport, c'est complètement le contraire. On dit qu'on
remet en question le principe du casino comme facteur de
décentralisation, car les tests effectués auprès des
clientèles cibles révélaient que le concept de casino
urbain situé dans un hôtel ou à proximité
d'hôtels présente l'attrait le plus fort.
Pourriez-vous nous dire si le rapport a été fait par deux
personnes ou deux équipes différentes et si vraiment, pour le
gouvernement, c'est la décentralisation qui devrait être le motif
principal de l'implantation des casinos, la décentralisation
touristique, ou si c'est le contraire, parce que les deux rapports se
contredisent l'un l'autre?
M. Fréchette: C'est complet?
M. Maciocia: Oui, pour le moment.
M. Fréchette: De toute évidence...
M. Maciocia: Si vous me le permettez, dans le deuxième
rapport au chapitre de l'impl, tation des casinos pour stimuler l'indu: trie
touristique, on dit très clairement que de tels établissements ne
constituent pas une panacée aux carences du secteur touristique
québécois. Je vois de totales contradictions entre le premier
rapport et le deuxième.
M. Fréchette: Ce ne serait pas du nouveau. Il n'y a rien
d'absolument extraordinaire que deux rapports traitant du même sujet
puissent arriver à des conclusions différentes. Il y a des
tribunaux qui arrivent à des jugements différents sur un
même sujet quand il y a deux juges qui président deux tribunaux.
Il n'y a rien d'extraordinaire là, il me semble.
M. Maciocia: Ce n'est pas la même chose.
M. Fréchette: De toute évidence, le
député de Viger a le goût qu'on fasse le tour de l'ensemble
du dossier. Vous allez comprendre que, dans l'état actuel des choses, il
y a certains éléments sur lesquels je peux discuter alors que
certains autres ne m'apparaissent pas pour le moment susceptibles de
discussion, dans le sens que nous ne sommes pas à ce stade en mesure
d'aller... Par exemple, quand vous me parlez de localisation, ne vous attendez
pas de ma part que je vous dise: Demain, il y en aura un à tel
endroit.
M. Maciocia: Vous vous êtes déjà... M.
Fréchette: C'est dans ce sens.
M. Maciocia: Vous vous êtes déjà
prononcé en disant qu'il y en aurait dans les Cantons de l'Est.
M. Fréchette: Oui, oui.
M. Maciocia: À Mont-Orford ou à d'autres endroits
des Cantons de l'Est.
M. Fréchette: Je signale que le député de
Gatineau fait des représentations ici.
M. Maciocia: C'est cela. Au mont Sainte-Marie, par exemple.
Une voix: J'y souscris moi aussi. M. Fréchette:
Voyez-vous!
M. Maciocia: La question que je vous pose...
M. Fréchette: C'est assez curieux de voir le
phénomène.
M. Blank: J'ai un projet dans mon comté.
M. Fréchette: Voilà! Le phénomène est
extraordinaire. Il y a des gens qui sont contre et qui nous disent: À
moins qu'ils soient chez nous, là, je pourrai peut-être
reconsidérer cela.
M. Blank: Non, non, je ne le veux pas, mais si vous insistez,
j'accepterai.
M. Maciocia: M. le ministre, si on se fie aux rapports, c'est
très clair que ce n'est pas dans des comtés urbains, comme
Montréal, Québec, qu'on pourrait avoir des casinos,
d'après le rapport. Autrement, ces casinos n'auraient même pas
l'impact, sur le plan économique, que le gouvernement prétend
avoir avec l'implantation des casinos. Est-ce que vous êtes d'accord avec
ce principe du document? Oui ou non?
M. Fréchette: Cela fait justement l'objet de la discussion
que nous avons eue à la fin du mois d'avril et que nous allons devoir
reprendre au début du mois de juin. Il va falloir attendre qu'on ait
fait le tour de l'ensemble de toute la question avant que je puisse
répondre à cette question. J'aimerais, si vous me le permettez,
revenir sur l'ensemble de votre intervention à travers laquelle vous
avez semé plein de questions. Vous nous dites que c'est depuis 1976
qu'il y a des études qui sont accumulées, qui existent quelque
part. Je vais peut-être vous surprendre, mais je vous dirai que c'est
depuis 1967...
M. Maciocia: Cela se peut.
M. Fréchette: ... que l'on a commencé à
publier des études sur le sujet, que des associations touristiques, par
exemple, qui ne s'appelaient pas comme cela à cette époque, mais
des organismes voués à la promotion du tourisme, ont produit des
rapports. Je parle de 1967, parce que j'ai été impliqué,
à ce moment-là, dans un de ces dossiers-la.
Depuis une année ou à peu près, alors que la
discussion a refait surface, qu'elle est allée sur la place publique, il
y a - appelons cela des rapports ou pas - au moins une trentaine de nouveaux
documents qui nous sont parvenus tant d'individus que d'organismes qui
voulaient s'exprimer sur le sujet. Qu'on pense, par exemple, simplement
à l'ouvrage réalisé par la Fraternité des policiers
de Montréal, qui a poussé l'étude jusque dans ses
détails les plus précis. Cela nous est arrivé assez
récemment quand même. Nous n'allions pas entamer tout le processus
sans tenir compte des représentations qui nous sont faites dans ces
ouvrages et ces travaux que nous recevons de part et d'autre.
Je vous signalais, il y a un instant, que nous avions, à la fin
du mois d'avril, amorcé de façon concrète l'étude
du dossier au comité ministériel, qu'à la suite de cette
première discussion, il avait été convenu que nous allions
clarifier une situation, que nous allions préciser une situation, ce qui
est maintenant fait. Nous reprenons la discussion, toute chose étant
normale, le 10 juin prochain.
Je voudrais simplement revenir sur une chose que j'ai dite à
plusieurs reprises, mais qui m'apparaît importante. Je vous ai dit tout
à l'heure que j'étais de ceux qui croyaient à la
présomption d'innocence, jusqu'à ce que la preuve du contraire
soit faite. Il est clair que si on réussit à me convaincre
qu'effectivement il y a plus de dangers que d'avantages, je n'ai pas les deux
pieds coulés dans le ciment et je ne considérerai pas comme une
défaite le fait de me rallier à l'option contraire. Je le ferais
sans aucune amertume et sans aucune espèce de réserve. Par
ailleurs - et cela rejoint ce qu'on disait tout à l'heure, quant
à la période de temps qui s'est écoulée depuis le
temps qu'on en parle - ce qui m'apparaît important, qu'ils soient d'un
côté ou de l'autre, c'est que les intervenants dans le dossier qui
dépensent du temps, de l'énergie et, dans bien des cas, de
l'argent depuis aussi longtemps soient en droit de savoir à quelle
antenne se loge le gouvernement. La réponse devrait-elle être
négative qu'au moins on aura fait ce bout de chemin, c'est-à-dire
que ces intervenants sauront que le gouvernement actuel n'est pas
disposé à légaliser l'institution qui s'appelle casino.
C'est l'un des objectifs fondamentaux. Il me semble que celui-là, on va
l'atteindre facilement.
Pour ce qui est de ma position, je vous réitère ce que je
disais très précisément devant la Chambre de commerce; je
peux vous le répéter, ma position a été et
reste
la même. Vous me permettrez d'utiliser une paraphrase qui sied
à l'avocat de la défense que j'ai été pendant 20
ans: Les casinos sont innocents jusqu'à ce qu'ils soient trouvés
coupables ou, si vous préférez, je suis pour l'implantation de
casinos au Québec, dont un dans l'Estrie, je l'ai dit, à moins
qu'on me prouve qu'il ne faut pas le faire. C'est ma position très
ferme; elle a toujours été ce que je viens de vous dire.
Évidemment, on en a tellement parlé depuis un an qu'il peut bien
y avoir eu du sable dans l'engrenage à quelques occasions, mais c'est
là où nous en sommes et nous devrions, je le souhaite en tout
cas, être en mesure, dès le 6 juin, de prendre cette
décision dont je viens de parler. (12 h 45)
M. Maciocia: Mais, comme je vous le disais au commencement de mes
remarques, vous avez toujours laissé l'impression, même dans la
réponse que vous m'avez donnée le 7 avril, que vous avez
considéré seulement l'aspect économique du problème
et non l'aspect social, que je considère, à tort ou à
raison - je ne veux pas dire que j'ai tort ou raison - comme celui qu'on
devrait considérer en premier lieu et, ensuite, l'aspect
économique. L'impression que les gens ont eue à un certain
moment, c'est justement que le ministre du Revenu, étant donné
qu'il vient de l'Estrie, de Sherbrooke, sachant que, dans cette partie du
Québec on a besoin d'une implantation touristique, a lancé
l'idée du casino, mais un peu à l'aveuglette, si on peut dire,
sans considérer l'aspect le plus important du sujet, c'est-à-dire
l'aspect social, l'aspect de la criminalité, l'aspect, comme quelqu'un
le disait, que les casinos sont des moyens de faire entrer l'argent sale le
matin et de le sortir propre l'après-midi. Je ne sais pas si cet aspect
a été considéré par le ministre avant de donner son
consentement et son appui à un projet de loi aussi important pour la vie
sociale du Québec en général, pas seulement le territoire
où le casino serait implanté.
Deuxièmement, M. le ministre, si vous le permettez encore, - je
ne sais pas si c'est de source confidentielle ou quoi - on a su dans le rapport
qu'on rejette complètement le casino du type centre-ville Las Vegas ou
du type Atlantic City, et tout cela. On serait pour l'implantation de casinos
de type européen. Est-ce que le ministre sait - ou ceux qui ont
rédigé le rapport - que le casino de type européen n'est
même pas rentable économiquement? On peut le prouver à
n'importe quel moment. Il y a des casinos en Europe, comme celui de
Monte-Carlo, qui seraient même prêts à fermer, mais vous
savez très bien qu'il y a tant de choses qui sont rattachées
à ces casinos qu'aujourd'hui ils ne peuvent même pas le faire. Il
n'y a pas de rentabilité, même pas économique, à ce
moment-là. Est-ce que cet aspect a été
considéré aussi? Je voudrais dire que le gouvernement ne sait pas
si c'est le type européen ou le type centre-ville Las Vegas qu'on
aimerait avoir ici au Québec.
M. Fréchette: M. le Président, je suis finalement
assez heureux de la discussion parce que le député de Viger, au
fur et à mesure qu'avance cette discussion, est en train de nous dire de
façon assez claire à quelle enseigne il loge.
M. Maciocia: Moi, c'est clair, je suis contre, je vous le dis en
partant. Alors...
M. Fréchette: Alors, ce sera au moins cela d'acquis pour
la discussion que nous aurons possiblement.
M. Maciocia: Je ne veux pas dire que je n'aime pas les casinos
parce que, quand j'en ai l'occasion, j'y vais.
M. Fréchette: Ce que je voudrais vous dire, quant au
dernier aspect de votre question, la rentabilité face aux casinos de
type européen, de type américain, c'est qu'il s'agit
précisément de modalités qui font actuellement l'objet
d'une évaluation. C'est ce genre de situation dont il faut tenir compte
dans la décision à prendre. Je ne pourrais pas, au moment
où on se parle, en arriver à des conclusions fermes quant
à cet aspect de la situation que soulève le député
de Viger.
Dans le premier volet de sa question, il me dit: Vous n'êtes pas
sérieux dans votre affaire, parce que vous avez pris une décision
en vous en tenant strictement...
M. Maciocia: Vous avez laissé cette impression.
M. Fréchette: C'est de l'interprétation
peut-être, je m'excuse, je me suis peut-être mal exprimé,
mais le député de Viger me signale que, pour me faire une
opinion, j'aurais pu tenir compte davantage de l'aspect économique de la
situation plutôt que de l'aspect social; de là, il tire la
conclusion que j'en serais arrivé à une conclusion trop rapide en
n'ayant pas tous les éléments.
Je vous signalerai que, depuis une dizaine de mois, personnellement
évidemment je ne vous dis pas que la même chose s'est produite en
d'autres instances -avec des collaborateurs, bien sûr, nous avons
procédé à une étude du dossier qui m'a permis de me
faire ce genre d'opinion que vous savez. Évidemment - là-dessus,
la question du député de Marguerite-Bourgeoys était
pertinente - il est clair qu'il y a des conséquences d'ordre social, des
conséquences d'incidence sur la criminalité, c'est très
vrai,
sauf qu'il faut aller au fond des choses. Est-ce que, par exemple, c'est
l'institution casino qui engendre la criminalité ou l'augmentation de la
population et des activités économiques que cette même
institution entraîne qui engendre la criminalité? Enfin,
voilà une question importante, une question de fond, il me semble.
Est-ce que, par exemple, l'incidence sociale ne sera pas exactement la
même si, demain matin, dans les limites du Maine ou du New Hampshire ou
de l'Ontario, il s'installe des institutions comme celles-là? Qu'est-ce
qui va arriver? Est-ce qu'il va y avoir des "junkets" à longueur de
journée, quotidiennement, avec 1000 Québécois, qui vont se
distribuer un peu partout dans le paysage et qui vont revenir, avec des
conséquences sociales? Cela aussi, c'est important à
considérer. S'il s'installait des institutions comme celles-là un
peu partout à travers les frontières, frontières proches,
quelles seraient les conséquences sociales? On les subirait quand
même sans avoir les retombées qui peuvent être avantageuses.
En tout cas, là on est dans le creux du sujet, on est dans le creux de
la discussion. Je suis content que le député de Viger
s'intéresse de près à ce dossier-là, je suis
content de connaître son opinion; maintenant, ça va me forcer
à trouver de l'argumentation qui pourrait l'amener à revoir
peut-être sa position.
M. Maciocia: Je vous conseille de le faire avant tout
auprès de vos ministres, au Conseil des ministres, avant moi, non pas
que je sache quelque chose, mais j'ai un peu discuté comme cela, comme
j'en discute avec vous; cependant, je pense que, même au Conseil des
ministres, il y en a probablement qui ne sont pas d'accord.
M. Fréchette: Je terminerai la discussion
là-dessus, enfin, si vous n'avez pas autre chose, en vous disant tout
simplement que si une décision est prise, peu importe sa nature, il y
aura eu un bout de chemin de fait, je pense.
M. Maciocia: Oui, probablement une dernière question,
parce que c'est très difficile d'étoffer le sujet aujourd'hui
dans une séance comme cela. Vous avez dit que le Comité des
priorités ministérielles se réunira encore le 10
juin...
M. Fréchette: C'est cela.
M. Maciocia: ... si j'ai bien compris. Cela veut dire qu'à
ce moment-là, il y aura une décision de prise sur la
possibilité ou non d'implanter des casinos à l'intérieur
du Québec. Voulez-vous dire que, si la décision du Comité
des priorités ministérielles est positive, elle va se rendre au
Conseil des ministres et que, si elle n'est pas positive, elle sera mise sur
les tablettes et oubliée? D'après moi, c'est cela.
M. Fréchette: M. le Président, je ne suis qu'un
membre du comité ministériel.
M. Maciocia: Oui.
M. Fréchette: Je ne peux pas présumer de la
décision qui sera prise à ce moment-là.
M. Maciocia: Non, mais vous avez dit tout à l'heure qu'au
mois d'avril dernier...
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: ... le sujet avait été
étoffé au comité des priorités
ministérielles. Disons que vous en avez discuté.
M. Fréchette: Oui.
M. Maciocia: Le 10 juin, le Comité des priorités
ministérielles prendra une décision finale sur ce projet
d'implantation, si on peut l'appeler comme cela. C'est au moins ce que j'ai
compris.
M. Fréchette: Je ne me souviens pas d'avoir fait une
déclaration de cette nature. Je ne pense pas m'être engagé
à ce qu'une décision finale soit prise à ce
moment-là, à moins qu'on me réfère de façon
très claire...
M. Maciocia: Non, probablement que...
M. Fréchette: Ce que je vous dis, c'est que je suis un
membre du comité ministériel; j'ai pris les dispositions
nécessaires pour qu'à l'ordre du jour de la réunion du 10
juin le sujet soit là. Je ne peux certainement pas ici m'engager
à vous dire qu'une décision définitive sera prise à
ce moment-là. Le comité décidera ce qu'il voudra bien
décider et je ne suis qu'un membre parmi six ou sept autres.
M. Maciocia: Je comprends.
M. Fréchette: II ne faudrait pas...
M. Maciocia: Mais vous avez pris la décision de
référer cela à la réunion du 10 juin. À la
fin du mois d'avril, vous avez dit que vous aviez reçu tous les rapports
et que vous en aviez discuté à la fin du mois d'avril au
Comité des priorités ministérielles. Est-ce bien cela?
M. Fréchette: À la fin du mois d'avril, le
comité ministériel a donné un mandat à un
comité tripartite formé du ministère des Finances, du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et du
ministère du Revenu pour procéder à l'analyse d'un
dernier volet du dossier. Cela a été fait. M. Maciocia:
Oui, d'accord.
M. Fréchette: On a reçu, hier, le dernier document
qui complète l'étude qui avait été commandée
par le comité ministériel. C'est pour cela que, maintenant, on a
pris des dispositions pour que, le 10 juin, nous revenions sur le sujet, mais
ne me demandez pas de m'engager au nom du comité à ce que, le 11
juin dans la matinée ou le 10 juin après-midi, on en arrive
publiquement à annoncer une décision dans un sens ou dans un
autre. Je ne peux pas prendre un engagement de cette nature.
M. Maciocia: Mais vous pouvez nous dire, par exemple, que le
comité des priorités aura tous les atouts en main pour prendre
une décision.
M. Fréchette: À cet égard-là, je
pense que oui.
M. Maciocia: Alors, c'est cela en réalité...
M. Fréchette: Je ne vous dis pas, par exemple, qu'il
n'aura pas besoin de deux séances de discussion.
M. Maciocia: Probablement. Très bien. Mais vous venez de
mentionner que ce sont le ministère du Revenu, le ministère des
Finances et le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui
sont les trois organismes qui se sont mis ensemble...
M. Fréchette: Le comité ministériel.
M. Maciocia: ... pour étudier cela. Comment se fait-il que
vous n'ayez même pas - et j'en reviens encore à mes doutes
-appelé le ministère des Affaires sociales à
l'intérieur de tout cela?
M. Fréchette: Le ministère de la Justice. Je vous
signalerai que le ministère de la Justice est très présent
dans l'évolution du dossier.
M. Maciocia: Mais il ne fait pas partie du triumvirat?
M. Fréchette: Non, mais le mandat que le comité
ministériel a donné à la fin du mois d'avril était
de nature strictement économique.
M. Maciocia: Économique?
M. Fréchette: Strictement économique.
M. Maciocia: Est-ce que l'aspect social a été
considéré?
M. Fréchette: II est dans le dossier, l'aspect social,
l'aspect de la justice et l'aspect de la criminalité est
également...
M. Maciocia: C'est cela.
M. Fréchette: ... c'est clair. On ne peut faire cheminer
un dossier comme celui-là sans que toutes les composantes...
M. Maciocia: C'est pour cela que je vous disais que les
ministères de la Justice et des Affaires sociales devraient...
M. Fréchette: Le ministère de la Justice et le
ministre de la Justice sont très présents.
M. Maciocia: Ils devraient faire partie du triumvirat, parce que
c'est très important.
M. Fréchette: C'est un mandat à vocation
strictement économique, encore une fois. C'est la seule raison pour
laquelle les ministères des Affaires sociales et de la Justice
n'étaient pas présents dans ce volet du mandat. Mais, pour le
reste, ils sont là, c'est bien sûr.
M. Maciocia: Comme cela, le mont Sainte-Marie à Gatineau
doit attendre encore longtemps avant de savoir s'il va y avoir une implantation
de casino là-bas?
M. Fréchette: II faudrait qu'ils vous parlent, j'ai
l'impression.
M. Blank: Je constate qu'il ne nous reste que trois minutes. J'ai
ici une lettre, je pense, d'un comptable qui se plaint des complications de
notre loi.
M. Fréchette: Quelle loi?
M. Blank: La Loi sur le ministère du revenu, la Loi sur
les impôts. On a essayé de rendre notre loi proche de celle du
fédéral, des gens, de ceux dont on parle. La loi
fédérale a 259 articles; celle du Québec en a 1129.
Il se plaint ici du fait que, nonobstant tout cela, presque toutes les
décisions sont prises suivant la loi fédérale et on ajuste
la loi provinciale après. Il se demande pourquoi ces lois. C'est une
trop longue affaire, je vais vous donner cette lettre, M. le ministre, et
j'aimerais avoir vos observations un de ces jours.
M. Fréchette: La première réaction, c'est
effectivement vrai qu'on a beaucoup plus d'articles dans notre loi que dans la
loi fédérale, sauf qu'on a rarement des articles qui font trois
pages de texte, par exemple, ils sont plus succincts.
M. Blank: Je vais donner au ministre une copie de la
lettre...
M. Fréchette: Oui, oui, d'accord.
M. Blank: ... et s'il y a des corrections à faire...
M. Fréchette: Très bien.
Le Président (M. Gratton): Messieurs, est-ce que le
programme 1, Administration fiscale, est adopté?
M. Blank: Adopté.
Le Président (M. Gratton): Est-ce que le programme 2,
Supplément au revenu de travail et administration de logirente, est
adopté?
M. Blank: Adopté.
Le Président (M. Gratton): Est-ce que le programme 3,
Remboursements à certains travailleurs autonomes d'une partie de leurs
contributions au Régime de rentes du Québec, est
adopté?
M. Blank: Adopté.
Le Président (M. Gratton): Le programme 4, Contrôle
des jeux de hasard et des courses, est-il adopté?
M. Blank: Adopté.
Le Président (M. Gratton): Le programme 5, Aide
financière à l'industrie des courses de chevaux est-il
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Gratton): Messieurs, ceci complète
l'étude des crédits du ministère du Revenu. À tous
les membres de la commission, merci. À la prochaine. La commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 59)