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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le mercredi 19 mai 1982 - Vol. 26 N° 103

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Ministère du Revenu


Journal des débats

 

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Gratton): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente du revenu est réunie ce matin pour étudier les crédits du ministère du Revenu.

Pour les fins de la séance d'aujourd'hui, les membres de la commission sont: MM. Blank (Saint-Louis), Desbiens (Dubuc), Dubois (Huntingdon), Forget (Saint-Laurent), Fréchette (Sherbrooke), Lachance (Bellechasse), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Marquis (Matapédia), M. Martel (Richelieu) est remplacé par M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Ouellette (Beauce-Nord) est remplacé par M. Lafrenière (Ungava), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).

Les intervenants sont: M. Houde (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord) remplace M. Lafrenière (Ungava), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Lincoln (Nelligan), M. Maciocia (Viger), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Perron (Duplessis), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Avant d'aborder nos travaux, est-ce que la commission voudrait désigner un de ses membres comme rapporteur?

M. Fréchette: M. le Président, à l'occasion de la loi 39, on en avait choisi un qui a fait un magnifique travail, vous le savez.

M. Blank: On prendrait le même? M. Fréchette: Oui.

M. Blank: Le député de Rivière-du-Loup.

Le Président (M. Gratton): Alors, M. Boucher (Rivière-du-Loup) agira comme rapporteur. Quant à la procédure, je laisse au ministre et au député de Saint-Louis le soin de s'entendre là-dessus.

M. Blank: Je suggérerais qu'on fasse la même chose qu'on a faite l'année dernière. Un petit discours d'entrée du ministre et je donnerai quelques réponses, et après cela on peut faire...

M. Fréchette: Questions et réponses.

M. Blank: Questions et réponses "at large", dans ce sens-là.

M. Fréchette: On s'entend également sur l'enveloppe de temps dont on dispose, trois heures.

M. Blank: Oui, trois heures, même... M. Fréchette: Un peu moins.

M. Blank: ... un peu moins. À moins qu'il y en ait d'autres de mon côté qui viennent pour des questions particulières.

Le Président (M. Gratton): Si la commission y consent, M. le ministre.

Exposés généraux M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: M. le Président, avant d'entreprendre l'étude détaillée des crédits du ministère et à l'invitation du député de Saint-Louis, j'aimerais faire un rapide survol des principales initiatives qui ont été prises au ministère du Revenu au cours de l'exercice qui vient de se terminer. J'attire votre attention sur l'esprit d'innovation qui a caractérisé toute l'activité du ministère depuis un an, et pour vous signaler que cet esprit d'innovation continuera de se manifester dans les orientations prévues au calendrier de l'exercice qui débute, surtout dans le domaine prioritaire de l'humanisation des relations entre le ministère et le public.

Le dernier exercice a été marqué par la nomination d'un nouveau sous-ministre, M. Alban d'Amours, qui a succédé à M. André Gauvin qui occupait ce poste - on le sait, je pense - depuis douze ans. Par ailleurs, deux nouveaux sous-ministres adjoints sont aussi entrés en fonction: Me André Saint-Jean a succédé à M. Hugues Fontaine, à titre de sous-ministre adjoint et directeur général de la législation, et M. Jean Laurin a été nommé sous-ministre adjoint et directeur général de la nouvelle Direction générale des services au public et à l'entreprise. D'autre part, M. Paul-Émile Moreau, sous-ministre adjoint et directeur général de la vérification, a quitté le ministère pour prendre sa retraite. L'intérim est assuré par M. Gaston L'Anglais qui agit effectivement depuis le départ de M. Moreau à titre de directeur de la vérification

Ce renouvellement des cadres supérieurs à la direction du ministère a eu pour effet de rendre encore plus vif le désir

d'innovation et d'humanisation déjà existant. C'est même dans le but de concrétiser cette aspiration que le ministère a entrepris, avec la collaboration de tous ses cadres et gestionnaires, une réflexion poussée sur sa mission et ses structures administratives.

L'effort de réorganisation en cours à Revenu-Québec est, à mon avis, une première dans la fonction publique québécoise. Aucun ministère, sous réserve évidemment de l'erreur qui est toujours possible, mais il nous semble qu'aucun ministère ou alors aucun organisme n'a associé de si près son personnel à la définition même de son mandat.

D'autre part, des dispositions ont été prises en vue de régler le problème des oppositions. Dans un premier temps, tout le processus de traitement des cas a été intégré à la Direction générale de la législation au lieu d'être réparti entre cette direction générale et celle de la vérification. Dans un deuxième temps, une plus grande autorité a été donnée aux bureaux régionaux qui peuvent maintenant prendre des décisions permettant de régler un plus grand nombre de cas au premier niveau d'intervention.

Au chapitre des oppositions, il me semble important de signaler que cette décentralisation dont je viens de parler a déjà commencé à produire des effets intéressants. On se rappellera que, par les années passées, il fallait un très long délai pour arriver à une décision sur une opposition déposée par un contribuable qui contestait son avis de cotisation. Tout cela, maintenant, a été centralisé à la Direction générale de la législation, et nous sommes actuellement à disposer des oppositions qui étaient déjà là pour viser l'objectif de pouvoir à l'avenir en disposer à l'intérieur d'un délai d'à peu près six mois, entre trois et six mois, contrairement à un an et demi, deux ans, trois ans que cela prenait jusqu'à maintenant.

Grâce à ces changements nous pourrons accélérer le règlement des oppositions et ainsi fournir un service de meilleure qualité aux contribuables qui ne sont pas d'accord avec les décisions prises à leur égard en ce qui concerne leur fardeau fiscal.

La Direction générale de la législation a aussi mené à bonne fin un projet que le ministère caressait depuis longtemps mais que les circonstances l'avait toujours empêché de réaliser. Depuis la fin d'avril en effet, le ministère du Revenu publie des bulletins d'interprétation intitulés "Interprétation Revenu-Québec". Ces bulletins sont distribués par voie d'abonnement avec la collaboration du ministère des Communications, et à ce chapitre je vous signale qu'effectivement il y a deux semaines maintenant, nous avons procédé au lancement de cette nouvelle initiative de la publication des bulletins d'interprétation. Et, comme je le signale dans mon intervention, toutes les personnes qui seraient désireuses d'obtenir ce bulletin d'interprétation peuvent le faire par la voie d'un abonnement qui leur permet de recevoir cette publication d'interprétation qui touche à tous les secteurs de la taxe et de l'impôt. Il semble que particulièrement dans les milieux spécialisés de la fiscalité on est satisfait de cette initiative.

Nous avons également été en mesure d'apporter une solution définitive aux nombreux problèmes que posait l'imposition des travailleurs québécois oeuvrant à l'extérieur du Québec pour une période prolongée. Tous, nous avons entendu parler de ce qu'on avait convenu d'appeler le problème des non résidents, les Québécois qui travaillaient à l'extérieur pour des périodes de temps plus ou moins prolongées et qui se sont retrouvés avec un problème particulier. Nous avons trouvé une solution définitive à ce problème-là, et nous avons également amendé la loi de façon à éviter la répétition des mêmes problèmes pour l'avenir.

Au cours de la dernière année, nous avons également procédé à la publication d'un guide de vulgarisation des droits successoraux qui s'ajoute à celui des artistes et la fiscalité; c'est notre intention d'intensifier la publication de ces guides afin de mieux faire comprendre la fiscalité québécoise.

La nouvelle Direction générale des services au public et à l'entreprise, dont j'avais annoncé la création l'an dernier, a été mise sur pied au cours du dernier exercice financier. Cette nouvelle direction générale prévoit être en mesure de devenir entièrement opérationnelle avant la fin de cette année. Les effectifs qui la composent ont cependant commencé à faire leurs preuves au cours de la période de pointe de l'impôt qui s'achève, ce qui est, il me semble, de bon augure pour l'avenir.

Cette nouvelle Direction générale du service à la clientèle et à l'entreprise, qui comptera quelque 300 employés, se subdivise en deux directions, l'une préposée aux renseignements et l'autre préposée aux communications. Son effectif a été recruté en grande partie dans les directions générales existantes afin que cette initiative puisse être menée à bien sans qu'il en résulte des augmentations de coûts importantes pour l'État.

Le mandat confié à cette direction générale est non seulement d'informer et de renseigner le public et les entreprises sur leurs droits et obligations en matière de fiscalité, mais surtout de le faire avec empressement, courtoisie et efficacité. Nous n'insisterons jamais assez sur les objectifs poursuivis d'une plus grande humanisation de nos relations avec les contribuables et les mandataires que nous servons.

Le premier objectif visé est celui de

l'accessibilité. Étant dégagé d'autres responsabilités administratives, le personnel de la nouvelle direction générale est là pour répondre aux besoins du public et des entreprises.

Le deuxième objectif de cette direction générale est de fournir avec diligence des services courtois, adéquats et équitables. Pour que ces services soient accessibles à un plus grand nombre de citoyens, la nouvelle direction se propose d'accroître graduellement le nombre de bureaux de renseignements mis à la disposition de la population habitant les diverses régions de la province. Elle se propose ainsi d'ouvrir, dès l'automne prochain, un bureau permanent à Sept-Îles, lequel s'ajoutera à ceux de Québec, Montréal, Sherbrooke, Hull, Rouyn, Trois-Rivières, Jonquière et Rimouski.

Grâce à un réseau de télécommunications plus complet et plus perfectionné, ces bureaux régionaux sont en mesure de fournir plus rapidement aux contribuables et aux mandataires des renseignements plus complets, que ce soit au comptoir d'accueil ou au téléphone. Des cours de perfectionnement sont également donnés aux préposés au téléphone, afin qu'ils puissent renseigner les contribuables sans avoir à les référer à d'autres spécialistes. Quant aux contribuables qui doivent recourir à l'interurbain pour communiquer avec le ministère, il va de soi qu'ils pourront continuer à le faire sans frais.

Quant à cette division des renseignements, M. le Président, il m'apparaît important de faire rapport à la commission du résultat d'une initiative qui a été prise à l'occasion de la dernière période de pointe de l'impôt. (10 h 15)

Nous avons, cette année, strictement à titre expérimental, demandé à des bénévoles qui en auraient le goût d'aider les contribuables qui ont besoin de procéder à l'opération fiscale avant le 30 avril de chaque année et qui rencontrent des difficultés de toute espèce, on le sait. Nous avons fait appel à des bénévoles qui accepteraient de suivre certains cours ou alors qui avaient déjà une expertise de la fiscalité pour avoir travaillé au ministère du Revenu. Nous avons demandé à ce groupe de personnes si elles étaient intéressées à aider les contribuables qui avaient, effectivement, besoin d'aide pour remplir leur formulaire d'impôt dans les cas, évidemment, de fiscalité simple.

À notre grande surprise, sur l'ensemble du territoire, 350 personnes se sont déclarées prêtes et ont effectivement travaillé pendant la période de pointe à aider la clientèle des CLSC, par exemple, des centres d'accueil, la clientèle étudiante dans certains cégeps, certaines universités. Cette clientèle a été aidée par ces bénévoles et le résultat que nous avons obtenu m'apparaît à ce point révélateur qu'il nous faudra continuer et amplifier pour la prochaine année fiscale l'expérience des bénévoles qui s'est avérée très heureuse.

Il est clair, par ailleurs, que ces bénévoles se sont déclarés disponibles auprès des contribuables qui ont une fiscalité simple, qui doivent produire une déclaration d'impôt, mais pour qui l'opération est simple. Alors, 350, encore une fois, de ces personnes ont accepté de se livrer à cette activité pour venir en aide à ceux qui en manifestaient le désir.

De son côté, la Direction des communications a pour mandat de faire mieux connaître le ministère, les lois qu'il administre et les services qu'il offre à la population. Cela dans un langage, pour autant que cela est possible, à la fois plus simple et facilement compréhensible.

Même si nous avons pu réduire cette année du quart le budget consacré aux formulaires, la Direction des communications verra à améliorer la présentation graphique et à simplifier le langage administratif de l'ensemble des formulaires du ministère. Une équipe déjà formée étudie actuellement la formule de déclaration des revenus des particuliers et toutes les formules qui s'y rattachent en vue d'y apporter des modifications majeures quant à leur simplification. Elle a pour mandat de formuler des recommandations dès cet été.

Mentionnons enfin que la nouvelle Direction générale des services au public et à l'entreprise est très bien située pour identifier les besoins et les attentes des diverses clientèles du ministère, ce qui lui permettra de recommander aux autorités les modifications à apporter aux lois, aux règlements, aux politiques et aux procédures. Je suis, quant à moi, convaincu que cette direction contribuera ainsi à reléguer au second rang la "machine" et à rapprocher le ministère de sa clientèle en lui fournissant des services plus courtois, plus efficaces et plus humains.

D'autre part, la Direction générale de la planification, de la recherche et du développement a entrepris une restructuration des systèmes touchant les services au public et à l'entreprise. Cette restructuration vise trois buts principaux: rendre ces systèmes informatisés ou manuels, plus aptes à répondre aux besoins nouveaux du ministère; deuxièmement, accroître le degré d'efficacité du ministère et, finalement, favoriser une plus grande rentabilité en cette période où il faut à la fois comprimer les coûts et effectuer un volume croissant de travail. C'est également cette direction générale qui a compilé les données du recueil intitulé "Statistiques financières et fiscales des corporations", recueil qui a été publié pour la première fois cette année. Ce

volume est venu s'ajouter à celui des statistiques fiscales des particuliers publié depuis sept ans. Ces deux volumes diffusés par l'entremise de l'Éditeur officiel permettent à tous ceux qui s'intéressent à l'économie du Québec d'en suivre l'évolution.

Une des causes de l'accroissement continu du volume de travail a été cette année la création du programme d'allocation de disponibilité. Ce programme, dont l'administration a été confiée au ministère du Revenu, a pour but de fournir une aide financière aux familles qui ont des enfants âgés de moins de six ans. Il est le quatrième programme à caractère social dont l'administration est confiée au Revenu, les trois autres étant le remboursement des impôts fonciers, le supplément au revenu de travail et l'allocation logement aux personnes âgées connue sous l'appellation de Logirente.

En matière de compression des effectifs, je tiens à signaler que tout en ayant à assumer des tâches nouvelles, le ministère a connu une diminution appréciable de ses postes autorisés. Au 1er avril de chaque année, l'effectif autorisé a été fixé à 4642 en 1979, 4630 en 1980, 4510 en 1981 et 4475 en 1982. Dans ce contexte de compression des ressources humaines et budgétaires dont il est fait mention à quelques reprises, permettez-moi de préciser que le ministère a dû procéder à des réaménagements de ressources afin de donner suite aux objectifs de compression demandés au ministère.

Je vous ai parlé précédemment des efforts accomplis au niveau des dépenses de formulaires. En outre, le ministère a mis en place certains mécanismes afin de mieux régler les ressources budgétaires, régler et gérer bien sûr. Un processus de prévisions et de révisions trimestrielles a été mis en place, un processus de suivi budgétaire particulier a été utilisé pour certains postes budgétaires, amélioré, et a aussi été mis à la disposition des gérants du ministère du Revenu du Québec.

Avec votre permission, M. le Président, j'aimerais maintenant présenter un bref rapport sur l'état de la situation en ce qui a trait au traitement des déclarations des revenus à des particuliers pour l'année 1981 et des démarches touchant les programmes "socio-fiscaux" qui y sont connexes. Ainsi, par exemple, si je vous donnais l'évolution du programme d'allocation de disponibilité au moment où on se parle à ce jour, 76 014 600 $ ont déjà été retournés aux différents bénéficiaires, lesquels on estime à près de 210 000. Si l'on fait, à partir de l'allocation de disponibilité et des chiffres dont je viens de vous parler, un parallèle avec la possibilité d'obtenir un crédit d'impôt pour frais de garde d'enfants, pour l'année d'imposition 1980, le montant réclamé en vertu des frais de garde s'élevait à 58 079 000 $ et avait bénéficié à 44 264 personnes. Pour la première année d'application de l'allocation de disponibilité, en frais de garde le montant attribué est descendu de 58 000 000 $ à 37 000 000 $ à cause, évidemment, du choix qu'avaient les bénéficiaires de pouvoir se prévaloir du programme d'allocations de disponibilité plutôt que des frais de garde. Les allocations en frais de garde ont évidemment diminué.

Maintenant, en ce qui concerne l'évolution de la situation au niveau du traitement de l'ensemble de la fiscalité, nous avons reçu jusqu'à maintenant 3 460 861 formules TP-1. Ces formules ont été traitées dans le cours normal des opérations. À ce jour, nous avons émis 1 405 682 avis de cotisation. Nous avons, par ailleurs, retourné 1 246 561 chèques, - je parle évidemment toujours de l'impôt sur le revenu - pour un montant global de 378 412 922 $, dont 271 000 000 $ sont déjà expédiés.

Maintenant, l'opération générale fonctionne comme prévu. Il y a évidemment à tenir compte du fait que pour la première année nous avons administré le programme d'allocations de disponibilité. Cela a pu, en cours d'opération, créer certains retards dans le traitement de l'ensemble de la fiscalité, mais nous sommes quand même, au moment où on se parle, à l'intérieur du délai normalement prévu pour le traitement de l'ensemble de la fiscalité, c'est-à-dire qu'à la fin de juin nous prévoyons que toute l'opération sera complétée.

Si, en termes de remboursements, les membres de la commission sont intéressés à obtenir des chiffres, je vous dirai qu'en date du 19 mai, donc ce matin, en remboursements d'impôt sur le revenu, nous avons retourné 282 093 596 $, en remboursements d'impôt foncier, 29 064 626 $ et en allocations de disponibilité, - je l'ai souligné tout à l'heure -67 254 700 $.

Alors, je réitère que le processus fonctionne normalement et que, même avec le mandat que nous avons d'administrer le programme d'allocations disponibilité, à la fin du mois de juin, nous aurons complété l'ensemble de l'opération.

Voilà, M. le Président, pour les remarques générales que j'avais à communiquer aux membres de la commission. Je terminerai simplement en vous présentant, si vous me le permettez, les hauts fonctionnaires du ministère qui sont là pour répondre aux questions des membres de la commission. Il y a M. D'Amours, sous-ministre en titre; M. Lionel Labbé, directeur de cabinet; M. Alain Dompierre, sous-ministre adjoint aux opérations; M. Denis Rheault, sous-ministre adjoint à la planification, à la recherche et au développement; M. Pierre Langevin, président de la Régie des loteries et courses; M. Jean

Laurin, sous-ministre adjoint à la direction générale des services au public et à l'entreprise; M. Michel Vaillancourt, qui est directeur du personnel et Me André Saint-Jean, sous-ministre adjoint à la Direction générale de la législation. Quant à moi, M. le Président, je vous remercie, c'est complété.

Le Président (M. Gratton): Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Louis.

M. Harry Blank

M. Blank: M. le Président, le ministère du Revenu représente au plan administratif un très gros ministère. Il est chargé de la perception des impôts et des taxes au sein de l'administration provinciale la plus vorace, la plus gloutonne au Canada et probablement en Amérique du Nord... mais c'est votre job.

En 1981-1982, ce ministère s'occupait de la perception d'environ 8 300 000 000 $ en impôts sur le revenu, de celle de 3 200 000 000 $ en taxes à la consommation et de quelques centaines de millions de dollars en droits, permis et revenus divers, soit un total d'environ 12 000 000 000 $. Lorsque nous connaîtrons le détail du prochain budget, il faudra sans doute révéler que ce montant s'élève à environ 14 000 000 000 $ ou davantage, selon l'humeur du ministre des Finances.

En termes d'effectifs, il s'agit de 5445 employés, dont 4472 à temps plein; c'est donc à ce titre le troisième ministère en importance du gouvernement, immédiatement après celui de la Justice et des Transports.

C'est aussi un ministère très présent, très visible dans la population. Par la nature de ses exploitations, il risque d'être associé intimement à tout ce que le gouvernement comporte comme source de désagrément et d'embêtement. C'est dommage, mais...

M. Fréchette: C'est comme cela.

M. Blank: C'est comme cela. Cette image négative risque de s'aggraver lorsque le gouvernement est financièrement aux abois, comme c'est le cas présentement. Sur ce sujet, j'ai des questions particulières à poser, sur la façon de percevoir des comptes. Celui-ci est alors tenté de sortir tous les trucs possibles, de faire usage de tous les règlements écrits en "fine print", comme on dit en anglais, pour presser le citron que constitue le contribuable. Le véritable défi d'un ministère comme le Revenu est donc de conserver un visage humain malgré le caractère difficile et souvent pénible de sa mission.

Or, justement, il nous semble que cela n'a pas toujours été le cas au cours de la dernière année. Nous pensons ici à trois pratiques administratives particulières qui ont été l'objet de commentaires parfois acerbes de la part des citoyens affectés; nous comptons interroger le ministre sur ces questions. (10 h 30)

II y a eu premièrement cette mesure, contenue dans la fameuse loi 29, qui autorisait le ministre du Revenu à déduire, à même les remboursements d'impôt, des sommes dues au gouvernement en vertu d'autres programmes. Le ministère tente de récupérer ainsi les malversations de l'aide sociale et, semble-t-il, les prêts aux étudiants lorsque les anciens bénéficiaires ont un revenu imposable. Nous sommes, pour notre part, inquiets de la possibilité que cette pratique qui, à première vue, peut sembler justifiée, soit étendue davantage et généralisée à d'autres fins, comme la récupération des amendes imposées par les tribunaux, ou à celle des pensions alimentaires en souffrance. On voit alors quels genres de doutes et d'inquiétudes cela entraînerait, parmi les contribuables, sur le caractère confidentiel de l'information confiée au ministère du Revenu.

Il y a eu, deuxièmement, ce zèle soudain et intempestif des inspecteurs de l'impôt concernant les pourboires des employés de restaurant. Le ministre du Revenu croit qu'il y a là une possibilité d'évasion fiscale de l'ordre de 75 000 000 $. C'est un montant très modeste par rapport à l'ensemble de l'évasion fiscale estimée à environ 1 000 000 000 $ par année, selon un article paru dans la Presse du 19 mars dernier. Mais c'est quand même beaucoup pour un gouvernement désemparé financièrement. Selon les rapports que nous avons, il semble qu'une fois les victimes choisies, les inspecteurs d'impôts commencent par estimer, de façon plus ou moins arbitraire, un montant fictif de pourboire pour un employé à partir des ventes ou du chiffre d'affaires du restaurant. Puis, ils exigent le paiement d'impôts sur cette somme, qui est souvent considérable puisqu'elle porte non seulement sur l'année courante, mais aussi sur plusieurs années antérieures. On voit facilement ce qu'un tel harcèlement peut donner pour des personnes qui ont déjà des problèmes à joindre les deux bouts, comme les "waitresses", les "bus boys" et les gens comme eux.

Troisièmement, nous aimerions que le ministre fasse le point sur la santé actuelle de ses plus précieux "collaborateurs forcés", les détaillants d'essence qui recueillent, pour le compte du gouvernement, les produits de la sinistre taxe ascenseur de 40% sur l'essence. Nous aimerions, entre autres, savoir s'il a poursuivi les études sur l'évolution comparative du chiffre d'affaires des détaillants dans leur ensemble, à partir de décembre 1981, sur celle des détaillants directement exposés à la concurrence de

ceux des autres provinces ou des États-Unis, sur le fonctionnement des "zones d'exception" près des frontières de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, croit-il enfin que la paix fragile rétablie après la grève des détaillants d'essence va durer?

Nous aimerions également savoir ce qui en est des retards dans le versement des allocations de disponibilité - le ministre a répondu un peu ici - Cette mesure avait été annoncée à grand renfort de publicité dans le budget de 1981-1982. On sait maintenant que la promesse initiale a été retouchée une fois l'élection passée; on avait promis 400 $ pour le premier enfant de moins de 6 ans, mais c'est 300 $ seulement qui sont offerts aujourd'hui. Quand c'est le temps de payer, on a la social-démocratie qu'on peut. Nous aimerions signaler à ce sujet que c'est justement sur l'insistance de l'Opposition que la mesure législative concernée a pu être votée avant l'ajournement de décembre. Nous pensions que cela permettrait au ministre d'éviter les retards de remboursements d'impôt imputables à ce nouveau programme. On constate aujourd'hui qu'il y aura quand même des retards, mais ce seront certainement le gouvernement et le ministre du Revenu qui porteront la responsabilité entière de ces retards.

Je constate que l'arrêté en conseil n'avait pas encore été adopté dans cette affaire à la fin de janvier...

M. Fréchette: ... les allocations?

M. Blank: Les allocations de disponibilité. Même si la loi a été adoptée vers le 15 ou le 18 décembre, je pensais qu'au moins on serait prêt à adopter un arrêté en conseil à la prochaine séance du cabinet, après que la loi a été sanctionnée, pour vous donner trois ou quatre semaines de plus. Mais c'est certainement sur le gouvernement et sur le ministre du Revenu que repose la responsabilité entière de ces retards.

Finalement, nous avons l'intention de questionner le ministre sur le fonctionnement d'une autre trouvaille de la social-démocratie péquiste, le programme du supplément de revenu au travail. Au moment de sa création, soit en 1979-1980, le gouvernement a affecté un crédit de 31 000 000 $ à ce programme. Ce crédit a baissé à 27 200 000 $ l'année suivante, puis à 21 000 000 $ seulement en 1981-1982, soit une diminution de 32% en dollars et d'environ 50%, si on tient compte de l'inflation. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce programme n'a pas été la réussite du siècle. Pour la première fois cette année, en 1982-1983, le gouvernement prévoit augmenter les crédits à ce poste, soit de 20 000 000 $ à 23 000 000 $. Nous voulons connaître les raisons de ce renversement de tendance. C'est sur la base de ces idées qu'on peut avoir une discussion; au moins que le ministre réponde à quelques questions immédiatement.

Réponse du ministre

M. Fréchette: J'ai noté quelques-unes des interrogations que vous avez soulevées. La première m'apparaît être le principe de la compensation entre différentes dettes; c'est cela? Il y a peut-être lieu de procéder à un court historique de l'évolution législative de cette situation. Avant l'adoption de la loi no 11 le printemps dernier, la compensation n'était possible qu'en vertu de dettes fiscales. Je vais illustrer ma pensée par un exemple. À supposer qu'un contribuable qui était mandataire du ministère pour la perception de taxes devait un montant en taxes et que par ailleurs nous lui devions de l'impôt sur son revenu, nous faisions la compensation parce qu'il s'agissait de deux dettes également liquides et exigibles, mais de fiscalité strictement.

Cette disposition a été changée, - je pense que c'est dans la loi no 29 - et la compensation a été élargie pour s'appliquer à des dettes d'aide sociale dans les cas où des gens avaient reçu de l'aide sociale et que, pour n'importe quel motif, il y avait eu des paiements faits en trop. Il fallait au ministère des Affaires sociales procéder à la récupération de ces paiements faits en trop. Effectivement, la loi 29 a permis que cette compensation puisse se faire entre une dette que le ministère devait aux contribuables concernés et le payé en trop qu'ils avaient reçu de l'aide sociale.

Je signalerai aux membres de la commission que le seul mandat qui nous est confié, c'est de procéder à la perception de ces payés en trop.

Les renseignements nous arrivent du ministère des Affaires sociales et c'est à la suite de ces renseignements que l'opération se fait. Il existe, me dit-on - là, je ne peux pas en donner un assurance formelle à la commission - une directive administrative en vertu de laquelle, dans les cas où ces assistés sociaux ont pris une entente pour rembourser le trop payé et dans les cas où cette entente est respectée, on ne doit pas procéder à la compensation, quand l'entente existe et qu'elle a été respectée. Mais les cas qui nous sont envoyés par le ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu sont pour nous des cas dans lesquels il faut en vertu de la loi procéder à la compensation.

Je signalerai au député de Saint-Louis que cette opération nous a permis jusqu'à maintenant de récupérer quelque 4 085 602 $ du montant payé en trop en aide sociale. Cela a touché 20 213

bénéficiaires de l'aide sociale.

Je réitère, par ailleurs - cela m'apparaît important de le faire - que, dans les cas où une entente existe et dans les cas où cette entente est respectée, il y a une directive administrative en vertu de laquelle on ne doit pas procéder à la compensation.

Dans le cas des prêts aux étudiants, je signalerai simplement au député de Saint-Louis que nous n'avons pas, cette année, procédé à la compensation dans le cas des étudiants qui doivent encore des montants à partir des prêts qu'ils ont reçus pendant qu'ils étaient aux études.

À ce chapitre, je soulignerai un dernier aspect qui m'apparaît important. Nous n'allons pas utiliser l'allocation de supplément au revenu du travail, ni non plus de Logirente pour donner cette compensation, sauf dans les cas où un contribuable bénéficiaire de l'un ou l'autre des deux programmes aurait, en vertu de ce programme, reçu en trop. Là, nous ferions la compensation, mais nous n'allons pas utiliser le supplément de revenu au travail pour compenser une dette d'impôt, une dette de taxe de vente ou de toute autre nature; seulement en fonction des deux mêmes programmes, s'il y a eu des payés en trop.

Le député de Saint-Louis a soulevé - il me semble fort à propos - le problème des employés...

Confidentialité M. Blank: Avant d'en arriver là...

M. Fréchette: Voulez-vous poser des questions là-dessus?

M. Blank: ... on pourrait vider cette question. Le gros problème que je vois dans cela, à part le fait que cela peut augmenter toutes les dettes envers le gouvernement, comme je l'ai mentionné dans mon discours, même des amendes, voyant que le gouvernement est maintenant le percepteur des pensions alimentaires, ce serait possible d'utiliser cette même loi 29 pour percevoir ces dettes. Même à ce stade, ce ne serait pas la fin du monde. Mais là où je vois le problème, c'est que des gens font leur rapport d'impôt... Je pense que c'est dans l'intérêt du gouvernement de préserver la confidentialité. Si vous perdez cela, vous perdrez de l'argent. Même une prostituée peut écrire sa profession, si elle paie ses impôts, c'est légal, et personne ne doit savoir comment elle gagne son argent.

La confidentialité, c'est la base de toute la perception des impôts, pas seulement ici mais partout dans le monde. La question est: Quelles précautions prend-on ici sur la confidentialité? Est-ce que le ministre des Affaires sociales vous a envoyé une liste de tous les gens qui lui doivent de l'argent ou s'il vous demande s'il y a quelque chose dans vos coffres pour cette personne? Comment cela fonctionne-t-il? Comment protège-t-on cette confidentialité?

Vous me direz peut-être que les fonctionnaires du ministère des Affaires sociales ont prêté le serment de confidentialité et tout cela, mais il y a un esprit différent dans les ministères autres que le ministère du Revenu où la confidentialité, ce serment, est pris avec un certain sérieux, un sérieux à 100%. Le sérieux du serment est plus fort aux ministères du Revenu et des Finances que dans les autres ministères, même quand on prête le serment. J'ai peur, et c'est la peur des éditorialistes, des gens qui ont écrit sur ce sujet, ce n'est pas tellement le mauvais goût avec lequel on fait la perception, pire que cela, c'est la possibilité de perdre la confidentialité dans les rapports d'impôt.

M. Fréchette: M. le Président, la question du député de Saint-Louis est fort pertinente et il me semble que la réponse qu'on peut lui donner est de la nature suivante: D'abord, il faut retenir que, dans la loi du ministère, il y a cette obligation à la confidentialité à partir du ministre jusqu'à tous les employés du ministère. Il y a aussi ce serment dont parle le député de Saint-Louis que tous les employés du ministère doivent prêter et en vertu duquel ils s'engagent à une stricte confidentialité.

Quand on arrive dans le cas pratique soulevé par le député de Saint-Louis, celui de la compensation, je lui signalerai qu'en aucune espèce de façon, à mon sens, la confidentialité n'est mise en danger, parce que les renseignements qui nous sont nécessaires pour procéder à cette perception dont on parle, ce n'est pas nous qui allons les fournir ces renseignements à la Sécurité du revenu, au ministère de l'Éducation ou à n'importe quel autre ministère. Ce sont ces ministères qui nous fournissent à nous les renseignements. En ce sens, cela a exactement la même nature que n'importe lequel autre renseignement qui peut nous venir de n'importe laquelle autre source. Ce n'est pas nous qui allons dire au ministère des Affaires sociales ou à la Sécurité du revenu: Ce contribuable est un bon contribuable, il a toujours payé ses impôts, il n'y a pas de retard. Ce n'est pas comme cela que cela fonctionne. C'est la Sécurité du revenu qui nous envoie une liste de noms avec les renseignements qui nous sont nécessaires pour faire l'évaluation du dossier et procéder, s'il y a lieu, à la récupération des sommes dues. Encore une fois, et je m'excuse de me répéter, mais cela m'apparaît important de le faire, nous n'allons en aucune espèce de circonstance et pour aucune considération donner quelque renseignement que ce soit à qui que ce soit

et à quelque organisme que ce soit. Je ne vois pas, dans ces conditions, comment il y aurait un danger que la confidentialité ne soit pas respectée.

M. Blank: Si le ministre des Affaires sociales vous donne une liste de 5000 noms de gens qui vous doivent des sommes et que vous lui retournez la liste en lui disant que vous allez faire la perception de ces sommes auprès de certaines gens parce que vous leur devez de l'argent tandis qu'à d'autres vous ne devez rien, à ce moment-là, il y a un bris de confidentialité.

M. Fréchette: On ne fait jamais cela, M. le Président. Effectivement, ce que j'ai essayé d'expliquer au député de Saint-Louis, peut-être n'ai-je pas été assez explicite, assez clair... Je vous réitère que nous n'allons et ne communiquons à personne ni à aucun organisme ou autorité gouvernementale quelque renseignement de la nature de ceux dont parle le député de Saint-Louis ou de toute autre nature. On ne fait rapport à personne, sauf pour dire que nous avons perçu tel montant.

M. Blank: Comment le ministre des Affaires sociales va-t-il savoir qu'il doit rayer cela de ses livres ou mettre votre perception dans son budget? Comment va-t-il savoir que vous avez perçu les sommes? (10 h 45)

M. Fréchette: Je vais ajouter un détail qui va peut-être répondre à la question, un détail qu'on vient de me fournir. En plus de donner le chiffre quant au montant global qui a été perçu, on va aussi fournir à l'organisme qui nous a demandé de faire la perception le numéro d'assurance sociale des individus qui -avaient des redevances.

M. Blank: Oui, mais à ce moment-là...

M. Fréchette: Et alors, ça permet d'éliminer des comptes.

M. Blank: Oui, peut-être que ce n'est pas tellement tragique mais techniquement, vous brisez la confidentialité parce que des gens au ministère des Affaires sociales, qui ont reçu cette liste d'assurance sociale, vont dire: Ce monsieur a fait de l'argent l'année passée et ce monsieur n'en a pas fait.

M. Fréchette: Bien, écoutez.

M. Blank: Je sais que ce n'est pas la fin du monde mais techniquement je ne vois pas, si on veux avoir une confidentialité de 100%... C'est la loi, je le sais, mais il y a des lois qu'on vote ici qui ne sont pas les meilleures au monde.

M. Fréchette: Ah! je suis tout à fait d'accord.

M. Boucher: Mais, du côté des affaires sociales, n'est-il pas vrai que l'assisté social qui est encore sur les listes du ministère comme bénéficiaire ne peut pas être imposé du côté du ministère du Revenu? Il s'agit d'un assisté social qui a repris le travail et qui fait un rapport d'impôt.

M. Blank: Oui, mais un rapport d'impôt qui fait qu'il ne paie pas ou qu'il paie. Il y a des gens qui ne sont pas sur le bien-être social et qui ne paient pas d'impôt, avec les exemptions et tout ça. Ce n'est pas tout le monde qui n'est pas sur le bien-être social qui paie de l'impôt; les gens font un rapport. Tous ces gens ne paient pas d'impôt. Mais avec ça, il y a une façon de savoir qui fait quoi, pas les chiffres exacts, mais au moins qui est dans une certaine catégorie.

M. Fréchette: Sur un certain plan, je suis disposé à suivre le député de Saint-Louis dans son raisonnement dans le sens que peut-être que théoriquement, il pourrait y avoir un danger de manquer à cette confidentialité qui est stricte en vertu de la loi de l'impôt. Sauf que la loi 29 qui le permet nous autorise à procéder de cette façon. On ne procède de façon illégale en le faisant comme ça. C'est le danger que vous soulevez.

M. Blank: C'est le danger que j'ai soulevé. Peut-être que c'est un danger qu'on n'a pas vu quand on a adopté le bill 29. Peut-être que le ministre peut le présenter au Conseil des ministres pour suggérer d'autres façons de faire ça. Et une autre question que je me pose, ces dettes ou prétendues dettes sont-elles de vraies dettes ou de prétendues dettes? Est-ce que le contribuable à qui on demande cet argent a une chance de se défendre? Est-ce que le montant a été fixé? Est-ce que c'est un jugement? Est-ce que c'est une admission ou quoi? Comment ça arrive? Est-ce qu'il y a une chance de débattre ce droit de perception par le gouvernement de cette dette?

M. Fréchette: Moi, je souhaiterais pouvoir répondre au député de Saint-Louis de façon très précise à la question qu'il pose et je lui signale à nouveau que quant à nous, toute la situation nous est soumise par la sécurité du revenu. Quel a été le processus qui a précédé l'envoi au ministère du Revenu de ces renseignements? Je ne saurais le dire, mais je présume qu'on a dû procéder comme la loi le prévoit en matière de remboursement de trop payé. Le contribuable à qui on réclame ce montant en vertu de la loi sur la sécurité doit certainement avoir les moyens à sa disposition pour contester la

réclamation qu'on lui fait et si on a perçu jusqu'à maintenant au-delà de 4 000 000 $, c'est que la plupart de ceux à qui on a envoyé des réclamations de cette nature ont convenu ou ont accepté qu'effectivement, ils devaient ce montant.

M. Blank: Est-ce qu'il y a eu des protestations des contribuables sur cette façon de procéder avec leur...

M. Fréchette: On m'informe qu'en effet certains contribuables à qui ces réclamations ont été faites, ont protesté du fait qu'ils devaient ces montants. Ce que l'on fait, nous, à ce moment, on les retourne à la Sécurité du revenu en les informant que la contestation qu'ils veulent engager doit se faire au niveau de la Sécurité du revenu.

M. Blank: Que faites-vous avec l'argent en attendant?

M. Fréchette: Ceux qui contestent n'ont généralement pas payé.

M. Blank: Je parle de l'argent. Est-ce que vous le percevez et le gardez en fiducie jusqu'à ce que la chicane soit réglée entre les Affaires sociales et le particulier?

M. Fréchette: C'est évident que, si on a payé sous protêt, si on peut parler comme cela...

M. Blank: Pas payé, perçu sous protêt.

M. Fréchette: Parlons autrement. Si on a perçu des sommes sous la réserve, de la part de celui qui paie, de faire constater le droit que nous avions de percevoir et que finalement, après contestation, il obtient gain de cause, il est clair qu'il sera remboursé avec les intérêts prévus dans des situations semblables.

M. Blank: Par qui?

M. Fréchette: Si c'est nous qui avons perçu l'argent et que nous l'avons au ministère, nous allons le rembourser.

M. Blank: Si c'était donné au ministère, ce serait celui-ci qui paierait.

M. Fréchette: Le ministère des Affaires sociales?

M. Blank: Oui.

M. Fréchette: C'est le ministère des Affaires sociales qui va rembourser.

M. Blank: Qui va payer.

M. Maciocia: Pour revenir sur la confidentialité, je pense que vous étiez en train de nous dire quelque chose. Justement, on disait tout à l'heure que la loi 29 permet au ministère ou au ministre d'aller chercher cet argent des contribuables du ministère des Affaires sociales, du ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du Revenu, etc., en disant après aux ministères en question: On a perçu tel montant pour tel numéro d'assurance sociale, tel montant pour tel autre numéro d'assurance sociale. Automatiquement, on connaît le nom de la personne à ce moment.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Parce que par son numéro d'assurance sociale...

M. Fréchette: Pour donner une quittance, pour donner un reçu attestant le paiement.

M. Maciocia: C'est pour cela que je dis qu'avec le numéro d'assurance sociale on connaît l'identité de la personne.

M. Fréchette: De toute façon... M. Maciocia: Est-ce que... M. Fréchette: Je m'excuse.

M. Maciocia: Probablement que le ministre ou le ministère, au moment de la préparation du projet de loi no 29, n'a pas pensé à cette confidentialité tellement stricte au ministère du Revenu. Si vous croyez et si vous voyez vraiment un danger menaçant la confidentialité, est-ce qu'il n'y aurait pas une façon, au Conseil des ministres, de voir comment on pourrait remédier à la situation?

M. Fréchette: Remédier à la situation.

M. Blank: Voyant que le montant au Québec est de 4 000 000 $ sur un budget de 23 000 000 000 $, je ne sais pas si on pense que cela vaut la peine de sauvegarder cette confidentialité pour ce montant. 4 000 000 $, c'est beaucoup d'argent mais, comparativement au budget de la province, c'est minime. Je ne sais pas si cela vaut ça.

M. Maciocia: Est-ce que je pourrais avoir...

M. Fréchette: Lorsqu'on retourne à la Sécurité du revenu les renseignements pertinents quant aux paiements qui nous ont été faits, en donnant le numéro d'assurance sociale du contribuable qui nous a payé et le montant qu'on a retenu, je ne pense pas que l'on manque à la confidentialité parce qu'on retourne aux gens de la Sécurité du revenu

des renseignements que eux avaient déjà. C'est parce qu'on les a reçus d'eux effectivement; les noms, les montants dus, c'est la Sécurité du revenu qui nous les a envoyés. Quand on retourne, après l'opération de perception, ces renseignements aux gens de la Sécurité du revenu, on ne leur annonce rien de nouveau. On ne dévoile pas non plus des choses qu'ils ne savaient pas déjà, c'est eux qui nous l'ont dit. Je ne sais pas comment...

M. Blank: Ils ne savaient pas avant si telle personne recevait une ristourne d'impôt ou non. Maintenant, ils le savent.

M. Fréchette: Enfin, j'ai l'impression que, sur le principe général de la confidentialité, on ne permettra jamais, il me semble, à la Sécurité du revenu ou à n'importe quel autre organisme de savoir combien d'impôts, nous, on retourne à un individu. On ne saura pas non plus quelles sont ses allocations de disponibilité, son revenu, etc. Enfin, l'état de son dossier fiscal n'est pas dévoilé par la nature des renseignements qu'on fournit.

M. Maciocia: Le ministère, en réalité, va seulement savoir de cette personne qu'elle a eu un emploi ou qu'elle a eu un montant d'argent à déclarer. Disons, qu'elle avait un montant à recevoir et que, sur ce montant à recevoir, on a déduit tel montant qu'elle devait au ministère. C'est cela, en réalité.

M. Fréchette: Je suis tout à fait disposé à prendre acte des suggestions qui me sont faites par les membres...

M. Maciocia: Juste sur la confidentialité, pas pour autre chose.

M. Fréchette: Oui, d'accord, on peut très bien examiner davantage la situation. Je ne voudrais pas être méchant, mais je me permets de souligner que lorsque la loi 29 a été étudiée, cela a été adopté à l'unanimité.

M. Blank: Personne n'en a réalisé les effets.

M. Maciocia: Des fois, on ne peut pas prévoir les effets avant l'application de la loi.

M. Blank: Oui, mais il y a une façon peut-être juridique, dans un sens. Si le ministre de la Sécurité du revenu ou d'autres ont un jugement de la cour - peut-être qu'ils peuvent avoir un jugement rapide comme vous en avez le droit à la Cour provinciale -et ils saisissent des montants dus, à ce moment-là, c'est une autre affaire.

M. Fréchette: II est peut-être important d'ajouter...

M. Blank: Peut-être que cela revient au même.

M. Fréchette: Je voudrais bien qu'on ajoute à la discussion l'élément suivant: Quand le service de la Sécurité du revenu va être informé que M. X a payé ses dus, il ne saura jamais à partir de quelle ressource fiscale cela a été payé. Est-ce en fonction de l'impôt sur le revenu, un retour ou un remboursement d'impôt? Est-ce l'allocation de disponibilité? Est-ce l'un ou l'autre des autres programmes d'aide sociale? Ce renseignement n'est pas fourni, on dit à la Sécurité du revenu: M. X dont vous nous aviez fait retenir le compte pour perception a effectivement payé.

M. Maciocia: A effectivement payé le montant, c'est tout.

M. Blank: Maintenant, le pourboire. Le pourboire

M. Fréchette: Oui et c'est avec plaisir d'ailleurs que j'aborde ce chapitre. M. le Président, vous allez me permettre à cet égard un petit retour historique très bref. Au mois d'octobre l'année dernière, assez curieusement, c'est dans la région de l'Estrie que le problème s'est premièrement soulevé.

M. Blank: ... les inspecteurs que vous, nous n'aimez pas!

M. Fréchette: Un instant, vous allez me laisser finir et vous allez voir que ce n'est pas tout à fait comme vous le pensez. Les employés à pourboire de la région de l'Estrie ont communiqué avec moi vers cette époque pour me dire: On vient d'être l'objet d'une vérification du gouvernement fédéral, mais qui n'a presque pas de fin. C'est le gouvernement fédéral qui, le premier, en vertu de la procédure qu'on appelle de "spot check", a décidé de procéder à une vérification, et par surcroît, en Estrie, de la situation fiscale des employés à pourboire, serveurs et serveuses à pourboire.

Évidemment, comme c'est un domaine dans lequel les deux paliers de gouvernement s'entendent très bien, l'information nous a été refilée et nous avons alors procédé, pas à la même opération, parce que déjà, le fédéral l'avait fait, mais à des cotisations à partir des données que le fédéral avait recueillies dans sa vérification. Les avis de cotisation ont commencé à être expédiés aux personnes concernées et les conséquences se sont aussi rapidement fait sentir.

J'ai donc, au mois d'octobre dernier, dans la région de l'Estrie, rencontré cette association nouvellement formée à la suite

de ces événements et dont l'objectif était précisément d'arriver à faire une situation claire pour ces employés, ces travailleurs et travailleuses. Nous avons obtenu avec eux deux réunions au mois d'octobre dernier, nous avons échangé sur la nature du problème et nous avons convenu ensemble à ce moment-là de nous donner une période d'à peu près une année, pour faire le tour du problème - il n'est pas nouveau, le problème, d'ailleurs, il existe depuis de nombreuses années maintenant - et essayer de voir ensemble quel moyen pourrait être arrêté et utilisé pour éviter pour l'avenir ce genre d'embêtement que ces gens ont subi. Effectivement, depuis une année, ils nous ont présenté un mémoire, se sont formés en fédération sur l'ensemble du territoire du Québec. Nous avons également rencontré l'Association des hôteliers, l'Association des restaurateurs, le Conseil du patronat et nous avons recueilli des opinions de tous ces intervenants dans le champ précis du pourboire. (11 heures)

Au moment où on se parle, il y a une équipe au ministère du Revenu qui a comme mandat très précis de faire le tour du dossier et d'arriver à trouver une solution qui ferait qu'il atteindrait deux objectifs. D'une part, régulariser cette situation pour les employés à pourboire et, en régularisant la situation, puisque le pourboire est un revenu, leur permettre également de pouvoir bénéficier des avantages sociaux qui sont déterminés par le revenu. Je pense, par exemple, à la Régie des rentes, je pense également à l'assurance-chômage. Vous allez comprendre qu'au niveau de l'assurance-chômage, il n'y a rien que nous puissions faire, mais quant aux autres lois, il y a moyen de trouver une solution qui pourrait être satisfaisante pour tout le monde. Les solutions sont nombreuses, elles pourraient être de toute espèce de nature, mais nous ne voulons en arrêter aucune sans aller jusqu'à la limite de la consultation avec tous ces intervenants dont j'ai parlé tout à l'heure. C'est ce que nous sommes en train de réaliser. Le lundi, 31 mai - pas lundi prochain, l'autre lundi - je dois, et avec plaisir d'ailleurs, rencontrer les membres de l'exécutif de la Fédération des serveurs et serveuses à pourboire du Québec pour leur faire état de la situation jusqu'à maintenant et également les informer sur les intentions que nous avons pour en arriver, comme je le disais tout à l'heure, à faire une situation claire pour tout le monde.

Si mes objectifs pouvaient être atteints - je vous donne cela sous toute réserve, c'est une solution à laquelle nous songeons -ce que nous pourrions faire comme processus, ce pourrait être de préparer une espèce de mini-livre vert dans lequel on retrouverait les avenues possibles, dans lequel on pourrait retrouver également les résumés des argumentations de l'un ou l'autre des groupes et - je vous réitère que c'est sous la réserve stricte qu'on puisse concrétiser l'objectif -peut-être bien qu'au mois d'août ou quelque part au début du mois de septembre, nous pourrions procéder à l'audition en commission parlementaire de ceux et celles qui sont intéressés par ce problème et essayer ensemble de trouver une solution.

M. Blank: Je pense que ce serait la meilleure façon parce que j'ai des lettres et des demandes pour toutes sortes de rendez-vous, cela ne vaut pas la peine qu'ils vous rencontrent une journée et qu'une autre journée, ils me rencontrent; on n'arrivera à rien. Si le ministre veut s'engager dans cette possibilité, je ne dis pas que je veux un engagement formel, mais la possibilité d'avoir une commission parlementaire durant l'intersession où les gens puissent se présenter. On peut au moins étudier le problème et essayer de trouver une solution. Dans une question, le ministre a mentionné que c'est le gouvernement fédéral qui a commencé ces vérifications dans l'Estrie..

M. Fréchette: Remarquez que l'inverse se produit également.

M. Blank: C'est cela que j'essaie de savoir. Est-ce que chez vous, on a commencé aussi à faire certaines vérifications?

M. Fréchette: Non. Pas dans le champ précis des employés à pourboire. On n'a pas fait de vérification semblable ailleurs, pas que je sache en tout cas.

M. Blank: C'est dire que vos cotisations sont basées sur les données du fédéral.

M. Fréchette: Voilà; c'est cela. Maintenant, quant à la possibilité de tenir une commission parlementaire sur le sujet, vous avez vu la précaution que j'ai prise; c'est un objectif que je vise...

M. Blank: Oui, je dirais même...

M. Fréchette: ... mais il y a lieu de songer que peut-être quand nous aurons complété l'étude de tout ce que nous avons comme matériel maintenant, avec tous les intervenants nous pourrions en arriver à une solution sans qu'il soit nécessaire effectivement au mois d'août ou au mois de septembre de procéder à l'audition de témoins à l'occasion d'une commission parlementaire. Si c'était cela, tant mieux! Sinon, je vous signale que, quant à moi, je vais déployer tous les efforts possibles pour qu'elle ait lieu, cette commission.

M. Boucher: M. le ministre, sans trahir

les possibilités de solutions, est-ce que la rumeur qui circulait d'imposer le pourboire obligatoire tient toujours?

M. Fréchette: Remarquez que la rumeur tient toujours. Comme je le disais tout à l'heure, c'est une avenue parmi d'autres. Quant à nous, nous n'avons pas manifesté de préférence ni retenu aucune de l'une ou l'autre des solutions. Pour le moment, nous les recevons, nous procédons à leur évaluation et à leur étude, mais avant d'arrêter quelque décision que ce soit, s'il nous fallait malheureusement nous imposer d'office, nous voulons procéder à la consultation la plus vaste possible.

M. Maciocia: M. le ministre, je vous dis d'avance que je vais m'opposer de toutes mes forces...

M. Fréchette: Au pourboire obligatoire.

M. Maciocia: ... au pourboire obligatoire parce que cela va tuer encore plus l'industrie touristique au Québec. D'après moi, avec le pourboire obligatoire...

M. Fréchette: Je ne peux que prendre acte de votre opinion. Quant à moi, je ne peux pas...

M. Maciocia: Je vais essayer de tout faire ce qu'il me sera possible en tant que parlementaire pour m'opposer vigoureusement à cette mesure.

M. Blank: Le pourboire serait de quel montant? 25% qu'on paie de plus sur les repas?

M. Fréchette: Écoutez, je suis tout à fait conscient du sérieux du problème que ces travailleurs et travailleuses vivent, conscient du fait que, s'ils déclarent l'ensemble des pourboires qu'ils reçoivent, on les considère comme du revenu et on les impose, mais par ailleurs ils ne bénéficient pas des programmes sociaux en fonction des revenus qui sont imposés. C'est très clair que, dans l'ensemble du dossier, c'est une situation qu'il faut de toute évidence corriger.

Maintenant, lorsque vous me parlez de votre position face à l'imposition du pourboire obligatoire, j'en prends bonne note pour le moment, et peut-être pourrais-je me risquer à demander au député de Viger si lui n'aurait pas des suggestions à nous faire ce matin.

M. Maciocia: Non, je le dis en toute sincérité.

M. Fréchette: Non.

M. Maciocia: Non, parce que je n'ai pas étudié en profondeur le dossier.

M. Fréchette: D'accord, on pourra y revenir.

M. Maciocia: Mais je l'avais bien pris en note dans mes démarches, disons, dans mes recommandations à l'intérieur, si on peut le nommer, du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Le pourboire obligatoire va tuer encore plus une ressource tellement vitale pas seulement pour le Canada, mais pour le Québec, l'industrie touristique.

M. Fréchette: II faudrait qu'on soit bien clairs...

M. Maciocia: On se trouve déjà...

M. Fréchette: J'ai signalé aux membres de la commission que c'est parmi plusieurs autres une des avenues qui est sur papier.

M. Maciocia: Oui, je comprends.

M. Fréchette: II est clair qu'il n'y a pas de décision de prise à cet égard.

M. Maciocia: Parfait. Une chose que je voulais vous demander...

M. Fréchette: Sur le même sujet?

L'effectif du ministère

M. Maciocia: Non, sur l'effectif du ministère.

M. Fréchette: Ah! oui. L'effectif, je vous l'ai donné.

M. Maciocia: Oui, vous avez mentionné tout à l'heure qu'en 1978 ils étaient de 4642. C'est cela?

M. Fréchette: En 1979.

M. Maciocia: 1979.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Et 4630...

M. Fréchette: En 1980.

M. Maciocia: 4510 en 1981.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: 4475 en 1982. C'est cela?

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: II y a une diminution de

l'effectif, en réalité.

M. Fréchette: C'est exact.

M. Maciocia: Est-ce que, d'après vous, c'est suffisant pour le ministère? Il y a eu des compressions; je sais qu'on a eu des compressions budgétaires, mais cette compression qu'on doit voir sur le personnel, est-ce qu'elle a des conséquences, d'après vous, sur les services que le ministère doit donner?

M. Fréchette: II y a une première remarque qui est sans doute pertinente, c'est que les chiffres que je vous ai transmis ne tiennent pas compte du personnel occasionnel qui est engagé au moment de la période de pointe de l'impôt.

M. Maciocia: Je comprends.

M. Fréchette: Je ne sais pas ce que cela représente en termes de chiffres absolus, mais cela dépasse largement les 5000 en période de pointe.

M. Maciocia: Oui.

M. Fréchette: Quant au reste, je l'ai dit dans mon exposé, c'est en fonction d'une réorganisation qui est en train de se faire au ministère et en fonction également des efforts de compression qui nous sont demandés que cette diminution est ce qu'elle est. Combien?

M. Maciocia: Autour de 1000, je pense. M. Fréchette: Pardon?

M. Maciocia: Les employés occasionnels sont autour de 1000, je pense.

M. Fréchette: 976.

M. Maciocia: Vous voyez!

M. Fréchette: Vous êtes tout près de la réalité. Nous avons récemment obtenu du Conseil du trésor une autorisation de procéder à l'engagement de 95 autres employés pour le ministère, occasionnels, j'entends.

M. Maciocia: Toujours occasionnels.

M. Fréchette: C'est cela, mais ça n'affecte pas...

M. Maciocia: Les employés occasionnels, excusez-moi, M. le ministre, c'est pour combien de temps?

M. Fréchette: C'est pour la période de pointe. Alors, c'est du mois de mars probablement jusqu'au mois de juin, à la fin du mois de juin. Évidemment, au fur et à mesure que les opérations se font, que certains dossiers se ferment, il y en a qui quittent avant la fin du mois de juin, sauf que toute l'opération se termine vers cette époque-là.

M. Maciocia: Comme cela, ce n'est pas, d'après vous, sur les services...

M. Fréchette: Non.

M. Maciocia: ... qu'on donne à la population. Là-dessus, la baisse des 60 ou 70 employés à l'intérieur du ministère du Revenu, n'a pas de conséquence.

M. Fréchette: Non.

M. Maciocia: Est-ce que ces coupures de personnel, c'est sur le personnel intérieur ou sur les inspecteurs qui font les vérifications d'impôt?

M. Fréchette: Non, il n'y a pas de diminution de personnel qui se fait au niveau des programmes de vérification, c'est à l'égard d'autres programmes à l'intérieur même que cette diminution s'est faite, mais, au niveau de la vérification, il n'y a pas de diminution.

M. Maciocia: Parfait.

M. Blank: Avez-vous non pas des inspecteurs, mais des gens pour surveiller l'effort de vos employés? Donnent-ils assez d'ouvrage pour leur paie, dans un sens? Avez-vous fait des études ou des choses comme cela?

M. Fréchette: J'ai rapidement touché à cet aspect tout à l'heure, dans mon intervention du début. C'est précisément ce à quoi nous sommes affectés, si je peux me permettre l'expression, actuellement. Quand je vous ai parlé d'une réorganisation globale du ministère, c'est à l'intérieur de cette opération de réorganisation que l'évaluation de la productivité se fait.

M. Blank: "Productivité", c'est le mot que je cherchais.

M. Fréchette: Oui. C'est à l'intérieur de cette réorganisation administrative qu'on est en mesure de toucher du doigt et d'évaluer la productivité.

M. Blank: J'ai eu une expérience personnelle avec le ministère pour un client dans une affaire de succession. Cela a pris plus d'un mois pour avoir une formule de trois lignes. C'est seulement après mon intervention personnelle, en téléphonant, que

j'ai eu le document et la réponse. On m'a dit que, dans certaines sections, il y avait 17 téléphonistes dans un "pool"...

M. Fréchette: Oui.

M. Blank: ... et que 3 seulement travaillaient. Il y avait des congés annuels, des congés de maternité, des congés de ceci, des congés de cela et que 3 sur 17 travaillaient. 17 employés peuvent faire un job, 5 ou 6 peuvent être en congé en même temps, mais en trouver 14 sur 17 en congé en même temps...

M. Fréchette: Cela ne devait pas être le lundi non plus.

M. Blank: Je ne me souviens pas de la date. Pour ce document que je cherchais, je savais par mon bureau, mon cabinet, que c'est un document qui en suit un autre. Pourquoi ne pas le faire en même temps? Il n'y avait pas de signature. Je ne sais pas pourquoi.

Quand on fait la demande pour le deuxième document, on dit: Normalement, cela doit prendre trois semaines. Après cinq semaine, c'est là que je commence à faire du bruit.

M. Fréchette: Évidemment, le problème que soulève le député de Saint-Louis, il est vrai, il est clair, il existe et c'est sûr qu'il se présente. Dans l'ensemble des activités, quand on a une clientèle d'individus et de corporations d'au-delà de 3 600 000, c'est sûr que, dans le traitement de cas particuliers, il peut arriver des embêtements de la nature de ceux que décrit le député de Saint-Louis.

Par ailleurs, je lui signalerai que la Direction générale du service au public et à l'entreprise a justement comme vocation de corriger ces situations. Cela ne fait pas encore une année que le sous-ministre adjoint est là. Il est là depuis le 3 août dernier, le temps de structurer administrativement cette direction générale. Il est clair que nous n'avons pas encore réalisé tous les objectifs précis que nous visons, sauf que je pense qu'avec encore une année, il y aura moyen d'arriver à quelque chose.

M. Blank: A-t-on utilisé du nouvel équipement, comme des "word processors", des affaires comme cela, au ministère?

M. Fréchette: Cela retient également notre attention et nous voulons, dans ce sens, faire un pas en avant important. Si les objectifs qu'on veut atteindre se réalisent, il me semble que, dans deux années, on devrait avoir tout un système nouveau à cet égard.

Le Président (M. Gratton): M. le député de Bellechasse.

Travailleurs à l'étranger

M. Lachance: Oui, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre et elle concerne les citoyens du Québec qui travaillent à l'étranger. Il y a un certain nombre de mes commettants qui travaillent présentement en Algérie, principalement les citoyens de la municipalité de Buckland. Ces gens sont préoccupés évidemment par la fiscalité et tout ce qui tourne autour des exemptions ou de l'impôt à payer. J'aimerais savoir du ministre quels sont les paramètres ou les éléments de la politique concernant les citoyens du Québec qui travaillent à l'étranger en ce qui concerne en particulier le domaine de l'impôt, la question de temps pour être considérés comme non-résidents. J'aimerais avoir des précisions là-dessus. (11 h 15)

M. Fréchette: De toute évidence, M. le Président, le député de Bellechasse fait allusion, en première instance, à une situation qui a prévalu, à un certain moment, pour certains travailleurs qui sont effectivement partis à l'extérieur du Québec et qui, à leur retour, après une année, deux années ou plus, se sont retrouvés dans une situation embarrassante, difficile, face à la fiscalité.

À partir de ce problème très précis que nous avons vécu presque quotidiennement pendant un certain temps, nous avons d'abord procédé à régulariser cette situation vis-à-vis de ces contribuables qu'on est convenu d'appeler des non-résidents. Toujours à partir de la même expérience, nous avons procédé à une modification de la loi pour, effectivement, toucher ce genre de contribuables québécois qui partent à l'extérieur pour des périodes de temps plus ou moins longues et qui veulent savoir de façon très précise quel sera l'état de leur fiscalité à leur retour.

En conséquence de cela, nous avons, l'automne dernier je pense - je n'ai malheureusement pas la date précise - arrêté - on peut retrouver cela dans la loi et dans la réglementation - les conditions qui seront faites à ces contribuables qui iront à l'extérieur. De façon à ne pas faire d'erreurs, je vais me permettre de lire rapidement ces conditions.

Maintenant la loi est ainsi faite: Un contribuable qui va travailler à l'étranger pour une période de 24 mois consécutifs ou plus, bien sûr, ne sera pas assujetti aux déductions à la source, à la condition bien précise qu'avant de quitter pour l'extérieur il puisse obtenir le statut de non-résident. Il devra prendre la précaution de venir rencontrer les gens qui sont affectés à ce travail avant de quitter pour donner les conditions qui prévaudront pendant son

absence: est-ce qu'il quitte seul, est-ce que la famille le suit, est-ce qu'il garde un domicile au Québec? enfin toutes les circonstances qui font qu'on peut arriver à la conclusion qu'il a encore une résidence au Québec ou qu'il n'en a plus. On procède à l'analyse de ces circonstances et on lui dit: Compte tenu de l'ensemble des circonstances, vous pouvez quitter et vous êtes considéré comme un non-résident. Donc, pas de déductions à la source.

Pour ceux et celles qui partiraient pour moins de 24 mois...

M. Lachance: Précisément, M. le Président, c'est le cas en ce qui concerne mes concitoyens. Ce sont habituellement des contrats d'une durée de trois mois ou six mois.

M. Fréchette: Alors, un contribuable va continuer d'être considéré comme résident du Québec si son absence est d'une durée de moins de douze mois consécutifs. Quand vous me parlez d'un travailleur ou d'une travailleuse du Québec qui partirait à l'extérieur du Québec pour une période de moins de douze mois, il continuera, dans l'état actuel de la loi et de la réglementation, d'être considéré comme un résident du Québec, donc soumis à la fiscalité.

C'est exactement ce que je viens de dire au député de Bellechasse, peut-être avec quelques variantes. Par ailleurs, le contribuable qui va à l'extérieur pour moins de 24 mois, donc qui continue d'être considéré comme résident, a la déduction qui est prévue par la loi. C'est-à-dire que pour les premiers 55 000 $, travaillant à l'étranger, il n'est pas du tout taxé. S'il gagne moins de 55 000 $, il ne sera pas taxé. À cet égard, je dois dire, après avoir regardé de près presque toutes les législations qui existent, que c'est le Québec qui est le plus généreux à l'égard des travailleurs qui vont à l'étranger.

Le cas que vous soumettez, à première vue, avec les circonstances que vous nous expliquez, il m'apparaîtrait qu'il continue d'être considéré comme résident, mais, s'il gagne moins de 55 000 $ pendant qu'il est parti, il n'est pas imposable.

M. Lachance: Dernière question, M. le Président. On a parlé des personnes, des travailleurs qui oeuvrent à l'étranger. Quand on parle d'"étranger", est-ce qu'on circonscrit à l'extérieur du Québec ou si c'est en dehors du Canada?

M. Fréchette: À l'extérieur du Canada.

M. Lachance: Donc, un Québécois qui travaille en Alberta est obligé de payer de l'impôt; il est considéré comme résident du

Québec, il est obligé de payer de l'impôt au Québec...

M. Fréchette: C'est ça. C'est précisément ce que le député de Bellechasse explique, sauf qu'il a droit à des exemptions particulières que je n'ai pas en mémoire, mais des exemptions auxquelles d'autres résidents du Québec n'ont pas droit.

M. Lachance: Merci.

M. Blank: J'ai un cas ici, je ne vais pas mentionner les noms. Un monsieur qui a toujours travaillé en Ontario est arrivé au Québec au mois d'octobre de l'année 1979 exactement et on lui a fait faire un rapport d'impôt du Québec. Il va payer les taxes complètes au Québec et il a eu des déductions en Ontario. Est-ce qu'il y a un accord entre l'Ontario et le Québec ou est-ce que ce monsieur paie deux fois?

M. Fréchette: II ne paie pas deux fois. Il y a un remboursement qui se fait si...

M. Blank: Par qui?

M. Fréchette: Le fédéral qui perçoit...

M. Blank: Le fédéral?

M. Fréchette: ... nous retourne, avec beaucoup de retard, souvent, les sommes qui sont dues à ces travailleurs et nous procédons au remboursement.

M. Blank: Mais, c'est le contraire ici. Vous avez cotisé...

M. Fréchette: Si au 31 décembre, il est résident ou domicilié au Québec, on va effectivement le cotiser et après ça, on va procéder au réajustement qui s'impose en proportion de ce qu'il a payé en Ontario, après avoir reçu du fédéral l'ensemble de son état fiscal, de son dossier fiscal et il est remboursé, évidemment.

M. Blank: Aussi, dans ce cas, voyant que le monsieur a payé ses taxes en plein... Il ne savait pas que... S'il n'était pas ici pour un an, vous avez ajouté l'intérêt et une pénalité.

M. Fréchette: Oui, mais s'il a droit à un remboursement et qu'effectivement l'intérêt et la pénalité ont été injustement chargés, ça va évidemment être remboursé "in toto" si vous me permettez l'expression, à ce contribuable.

M. Maciocia: Sur ce sujet, j'ai une question. Admettons qu'un employé travaille en Ontario, comme on l'a dit tout à l'heure, pendant neuf mois par année, disons de

janvier à octobre...

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: ... et qu'il revient au Québec au mois d'octobre...

M. Fréchette: Oui, oui.

M. Maciocia: ... automatiquement avant le 31 décembre, il est au Québec et il doit faire un rapport d'impôt.

M. Fréchette: S'il y est encore au 31 décembre.

M. Maciocia: S'il est encore au 31 décembre ici au Québec, pendant les neuf ou dix mois qu'il est resté en Ontario ou en Alberta, n'importe où, à ce moment, quelle loi va s'appliquer sur l'imposition fiscale? Est-ce la loi de l'Ontario ou la loi du Québec?

M. Fréchette: Ecoutez, on entre dans de la technique un peu légale. Me Saint-Jean, donnez donc la réponse, vous le pouvez.

Alors, c'est la table fédérale qui va prévoir les déductions à la source et quand il y aura des ajustements par après, à la fin de l'année... Mais tout le temps qu'il va rester en Ontario et travailler en Ontario, son employeur va lui prélever la déduction à la source selon la table prévue par le gouvernement du Canada qui...

M. Maciocia: Je comprends.

M. Fréchette: ... inclut une partie d'impôt payable à l'Ontario.

M. Maciocia: Je comprends très bien. Ma question est justement: Étant donné que le 31 décembre, il est au Québec et produit une déclaration d'impôt ici au Québec, on sait que la table d'imposition du Québec est différente de celle de l'Ontario, laquelle s'applique à ce moment, étant donné qu'il fait sa déclaration ici au Québec? Mais en réalité, il a travaillé en Ontario. Est-ce que c'est la table d'imposition du Québec ou est-ce la table...

M. Fréchette: Cela va être la table du Québec parce qu'il aura été considéré comme étant résident du Québec pour l'année d'imposition.

M. Blank: Même s'il est ici, justement, un jour.

M. Maciocia: Même s'il a été ici seulement quinze jours, quoi.

M. Fréchette: C'est comme ça que la loi est faite.

M. Maciocia: C'est ça que je voulais savoir parce qu'il y a une grosse différence dans ça. Est-ce que sur la question...

M. Blank: Est-ce qu'il paie l'impôt sur la table du Québec pour une journée et 364 jours, sur la table fédérale?

M. Maciocia: C'est l'année complète... M. Blank: C'est un peu dur.

M. Fréchette: On doit faire des ententes avec le fédéral pour que dans le cas des individus qui le désirent, lorsqu'ils travaillent en Ontario et sont considérés comme résidents du Québec, la retenue à la source en Ontario se fasse à partir de nos tables.

M. Maciocia: Oui, je comprends.

M. Fréchette: C'est lorsque c'est le gouvernement fédéral qui est employeur. Lorsque c'est une entreprise qui est employeur, là, c'est plus difficile.

M. Maciocia: C'est cela.

M. Blank: La chose que je vous demande, c'est si une personne qui arrive au Québec pour la première fois de sa vie le 31 décembre, va payer pour cette année-là les impôts du Québec pour toute l'année, nonobstant qu'elle ait vécu au Québec seulement une journée.

M. Fréchette: Oui. Évidemment, c'est un cas particulier...

M. Blank: Oui, je sais.

M. Fréchette: ... où quelqu'un serait pressé de déménager le 31 décembre.

M. Blank: On doit lui conseiller d'attendre encore une journée.

M. Fréchette: D'attendre le 2 janvier. M. Maciocia: Je voulais vous dire...

M. Blank: Mais ne fait-on pas au prorata...

M. Fréchette: La notion de résidence ne s'acquiert pas uniquement à une date...

M. Blank: C'est six mois dans l'année.

M. Fréchette: Quiconque est résident le 31 décembre, cela ne veut pas dire physiquement, et ainsi de suite. Donc, le type qui arrive au Québec le 31 décembre,

avant qu'il ait acquis le statut de résident, il faudrait que ce soit clair que c'est dans ses intentions qu'il déménage au Québec de façon permanente, etc. C'est très peu probable.

M. Blank: II y a un cas ici. Il est entré le 31 octobre.

M. Fréchette: Le 31 décembre.

M. Blank: Le 31 octobre, cela veut dire qu'il est ici depuis deux mois et qu'il aura payé tous les impôts québécois pour l'année. C'était sa première visite au Québec; maintenant, il est résident du Québec. Il travaille au Québec, mais il n'a jamais habité le Québec avant. Il a payé les impôts québécois pour toute l'année nonobstant le fait qu'il n'a demeuré ici que deux mois.

M. Maciocia: Pour revenir à la question qui a été posée par le député de...

M. Fréchette: Bellechasse.

M. Maciocia: Bellechasse. Les gens du Québec qui travaillent en Alberta ou n'importe où, vous avez dit tout à l'heure qu'ils sont sujets à l'imposition fiscale du Québec. C'est cela? Vous n'avez pas mentionné si c'est seulement s'ils habitent l'Ontario ou l'Alberta depuis trois mois ou un an ou deux.

M. Fréchette: On ne tient pas compte de la période de temps.

M. Maciocia: On ne tient pas compte de la période de temps.

M. Fréchette: Quand on parle d'un contribuable non résident, il s'agit d'un contribuable qui est à l'extérieur des limites du Canada. C'est celui-là qui est considéré comme non-résident au sens de la loi. Le contribuable qui est en Alberta, qui est en Ontario, peu importe la période de temps pendant laquelle il s'y trouve, il est toujours considéré au plan de la fiscalité comme un contribuable du Québec.

M. Maciocia: Même à l'endroit de l'Ontario ou de l'Alberta?

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Même si cela fait deux ans qu'il est là?

M. Fréchette: À moins bien sûr qu'il ait définitivement quitté le Québec de façon claire comme, par exemple, s'il n'a plus de domicile, si sa famille l'a suivi, s'il n'a plus de compte de banque nulle part. Si les circonstances sont telles qu'on ne peut pas raisonnablement arriver à d'autres conclusions qu'effectivement il a arrêté l'intention de faire son domicile et sa résidence dans l'une ou l'autre des provinces dont on parle, il ne sera plus considéré comme résident du Québec, c'est évident. S'il a gardé famille au Québec, résidence, comptes de banque, s'il continue de faire affaires généralement ici, peu importe la période de temps pendant laquelle il est ou bien en Alberta, ou au Nouveau-Brunswick, ou ailleurs, il est toujours résident du Québec au plan de la fiscalité.

M. Maciocia: Est-ce qu'il y a des cas qui se sont présentés au ministère du Revenu de personnes qui travaillent en Alberta ou en Ontario, comme je le disais tout à l'heure, depuis douze ou treize mois, disons, depuis le 1er janvier d'une année jusqu'au mois de février l'année suivante, et qui ont fait leur déclaration d'impôt en Alberta le 31 décembre puisqu'elles restaient là-bas? Pour le Québec, on les considère comme résidents du Québec.

M. Fréchette: Vous me demandez s'il y a des cas de cette nature?

M. Maciocia: II y a probablement quelques cas comme ceux-là. C'est pour cela que je vous dis qu'ils ont payé de par la loi fiscale de l'Alberta, mais le Québec les considère comme citoyens du Québec et ils doivent faire leur rapport d'impôt ici.

M. Fréchette: Le député de Viger me demande s'il y a des cas de cette nature...

M. Maciocia: Je ne vous demande pas une réponse tout de suite.

M. Fréchette: C'est cela. J'allais suggérer que je puisse prendre acte de la question, faire une vérification et fournir...

M. Maciocia: C'est cela, parce qu'il y en a quelques-uns. C'est pour cela que je vous demande si c'est possible d'avoir... même si cette personne a sa famille ici. Automatiquement, cela veut dire que pour le Québec elle est résidente du Québec. En réalité, elle a payé de par la loi fiscale de l'Alberta.

M. Fréchette: On prend acte de la question. On pourra faire une vérification dans ce sens et fournir les renseignements.

Le Président (M. Gratton): M. le député de Rivière-du-Loup. (11 h 30)

Les déclarations des revenus

M. Boucher: Merci, M. le Président. Dans son discours inaugural, M. le

ministre a fait état d'une expérience pilote de bénévoles qui aidaient à compléter les formulaires d'impôt. Il a même mentionné qu'il y avait des cours qui se donnaient à des bénévoles pour aider les gens à remplir leur rapport d'impôt. Est-ce que vous avez l'intention d'étendre cette expérience à l'ensemble de la province et de quelle façon il y aurait lieu de procéder pour que les personnes qui, bénévolement, veulent s'impliquer dans cette opération puissent le faire?

M. Fréchette: Comme je le disais tout à l'heure, l'expérience a été, quant à nous, à ce point heureuse qu'il nous faut, de toute évidence, l'intensifier pour les années à venir. Je vous disais que plus de 300 personnes se sont déclarées disponibles pour aider cette clientèle dont on parlait tout à l'heure, les centres d'accueil, la clientèle de CLSC et étudiants. 300 personnes et plus se sont déclarées disponibles pour faire cette opération et y ont effectivement participé. Les premiers résulats qu'on en a, qui nous permettent de faire une appréciation préliminaire nous amènent à la conclusion qu'il faudra de toute évidence intensifier le processus du bénévolat.

Comment y arriver, pour ceux qui seraient intéressés à le faire? Dans les régions où nous avons des bureaux régionaux, dans les sept régions où il y a déjà des bureaux régionaux plus celui qui s'implantera à Sept-Îles à l'automne, les gens qui seraient désireux de pouvoir s'impliquer dans cette opération de bénévolat pourraient s'adresser au bureau régional de leur région pour poser leur candidature. Il y a, évidemment, toujours les deux bureaux de Montréal et de Québec où on recevra avec plaisir les candidatures de ceux qui ont le goût de s'engager dans cette opération. Il y a effectivement, comme le député de Rivière-du-Loup le signalait, une période d'à peu près deux semaines de cours qui sont donnés à ceux qui le veulent, pour procéder à l'opération. Il y a aussi parmi les 350, plusieurs personnes qui sont d'anciens fonctionnaires du ministère du Revenu, qui ont donc l'expertise nécessaire pour aider cette clientèle que l'on visait de façon très précise par l'opération.

En conclusion, je dirai tout simplement que l'expérience s'est avérée heureuse, il nous semble qu'elle a contribué à humaniser ce ministère et en conséquence, il nous faut, non seulement la garder, mais l'intensifier pour l'avenir.

M. Boucher: Sur le plan de la responsabilité, la personne qui remplit le rapport d'impôt pour une autre personne, jusqu'à quel point peut-elle être responsable? Il y a des gens qui sont inquiets un peu de cela. Si on remplit un rapport d'impôt pour un autre, s'il y a des chiffres qui ne sont pas exacts, jusqu'à quel point peut-on en être responsable.

M. Fréchette: Quant à moi, je ne crois pas qu'il y ait de disposition dans les lois fiscales ou ailleurs qui déterminent que celui qui procède à compléter le rapport d'impôt d'un contribuable puisse s'engager de quelque façon que ce soit au niveau d'une responsabilité. À moins, évidemment, qu'on puisse retrouver une erreur absolument -comment dirais-je? - grossière, une erreur qui est à toutes fins utiles impardonnable, qui serait l'équivalent ou le commencement de la fraude. Je ne vois pas comment on pourrait exercer quelque recours que ce soit contre une personne qui a aidé ou elle-même complété la déclaration fiscale d'un contribuable. Je ne crois pas que ce soit jamais arrivé.

M. Maciocia: Je pense que c'est toujours le contribuable qui est responsable de la déclaration d'impôt, ce n'est pas la personne qui le remplit pour lui ou qu'il l'aide à la remplir.

M. Fréchette: Si jamais il se produisait ce genre d'erreur dont on vient de parler, c'est-à-dire une erreur flagrante, une erreur que normalement on ne commettrait pas, ce n'est pas le ministère du Revenu qui pourrait exercer un recours contre le contribuable. Si, par exemple, cette erreur est telle qu'elle occasionne au contribuable un paiement plus élevé que celui qui avait été prévu, par l'erreur, la relation de faute va exister entre le contribuable et celui qui a procédé à compléter son rapport d'impôt. Mais le ministère lui-même n'a pas de relation juridique avec celui qui aide ou qui complète. Le ministère comme tel ne peut pas exercer de recours de cette nature. Le contribuable qui aurait subi des dommages parce qu'on a mal procédé à compléter son rapport d'impôt, lui pourrait, en vertu des règles normales du droit civil - le principe de la faute et de tout ce qui en découle -pourrait sans doute exercer un recours contre celui qui l'a aidé, mais certainement pas le ministère.

M. Maciocia: Si c'est le revers de la médaille. Si c'est le ministère qui reçoit moins qu'il devrait, en réalité, recevoir du contribuable, le ministère a toujours un recours contre le contribuable, jamais contre la personne qui a rempli ou qui a complété la déclaration.

M. Fréchette: C'est sûr. C'est absolument sûr.

Le Président (M. Gratton): M. le député de Saint-Louis.

La taxe sur l'essence

M. Blank: Le troisième volet sur la fameuse question de la taxe sur l'essence.

M. Fréchette: Oui.

M. Blank: La question de l'exemption pour les territoires près des frontières. Pour appuyer ce que je vais dire, je veux simplement lire deux paragraphes d'une lettre datée du 12 mai 1982, à Maniwaki, par la Société de développement économique de Haute-Gatineau, adressée au ministre Landry; ceci est une copie: "À la demande du président de l'Association des vendeurs d'essence à la pompe, M. Marcel Gauthier, il me fait plaisir de vous faire parvenir un argument des plus révélateurs, ayant un effet dévastateur sur l'économie de la région, sur la surtaxe de 0,30 $ le gallon décrétée par notre gouvernement. Comparativement aux ventes effectuées aux mois de janvier, février et mars 1981, sur un relevé de seulement 18 stations-service sur un total de 60, il est assuré d'une perte nette de l'ordre de 206 748 litres d'essence pour cette période en 1982. Pour l'ensemble des stations-service, les pertes équivaudront à quelque 682 268 litres pour seulement trois mois de fonctionnement, comparativement à 1981." "Également, un fait à souligner, cette période ne représente pas le fort de l'industrie touristique, c'est-à-dire que ce n'est pas encore la saison touristique et déjà, dans ce petit territoire, il y a une perte de presque 700 000 litres d'essence, et une perte de taxes aussi pour le gouvernement. Même s'ils ne perçoivent que la moitié des taxes, ils perçoivent quelque chose. La taxe sur 700 000 litres va en Ontario parce que la Gatineau est juste à côté de l'Ontario. Ce qui est le pire dans toute l'affaire, je vais citer les remarques du président de notre commission, quand il a parlé en Chambre récemment, il a dit, et je le cite: "J'ai des témoignages où on fait état de 14, 15 et 20 ans de dur labeur pour bâtir un petit commerce dans nos régions plutôt rurales qu'on risque de voir disparaître à très courte échéance si le ministre ne reconnaît pas qu'il faut faire une exemption sur l'ensemble de la région." Fin du plaidoyer.

M. Fréchette: M. le Président, M. le député de Saint-Louis a été très prudent, je vais l'être aussi. Je ne voudrais pas vous faire sursauter, connaissant votre implication dans ce dossier. Il me semble que la discussion qu'amorce le député de Saint-Louis est fort intéressante, mais on a, à toutes fins utiles, à plusieurs reprises en Chambre, grâce à la ténacité des députés de la région, brassé tout le problème, si on me permet l'expression que je viens d'utiliser.

Évidemment, peut-être bien qu'on pourrait avoir des renseignements qui seraient contraires, mais c'est un fait que, dans les premiers mois de l'application de la mesure, plus particulièrement dans les trois premiers mois de l'application de la mesure, il a existé des situations qui approchaient le pénible, si je peux m'exprimer comme cela. Mais si les renseignements et les informations qui nous sont acheminés sont exacts, il semblerait, au moment où l'on se parle, que cette situation est en train de se corriger, ne serait-ce que partiellement, mais en tout cas, elle est en train de se corriger. Dans quelle proportion précise? Je ne suis pas en mesure de le dire ce matin. Je pourrais, par ailleurs, prendre les informations qu'il faut pour les fournir; mais cette situation se corrige.

Vous savez, il y a un phénomène dont il faut tenir compte et qui a prévalu non seulement dans ces régions qu'on a convenu d'appeler frontalières, mais qui a prévalu dans l'ensemble du territoire du Québec, c'est que, indépendamment de l'endroit où on était situé, il y a quand même eu une diminution de la consommation, et partout à travers le territoire, une diminution qu'on a évaluée - et nous parlons strictement en termes de moyenne, on ne peut pas être très précis à cet égard - une diminution qu'on a évaluée dans une proportion variant de 8% à 10%. Ce seul phénomène en lui-même a aussi, il me semble, contribué à faire la situation dont on vient de parler, qu'on vient de décrire. Évidemment, il reste que le site géographique de ces stations-service a occasionné des inconvénients additionnels dont on est conscient, c'est sûr. Mais je vous réitère que si l'on devait continuer la discussion je n'aurais pas d'objection à le faire, mais je ne pourrais que reprendre tout ce qui s'est déjà dit à l'Assemblée nationale à cet égard. Je n'ai pas d'objection à le faire.

M. Blank: Vous constaterez que la lettre que je vous ai lue, ce n'est pas une lettre qui est datée du mois passé, c'est daté du 12 mai, cela fait seulement 7 jours aujourd'hui.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: M. le ministre, est-ce que vous croyez que cette diminution de 8% à 10% de la consommation de l'essence c'est l'effet direct de la surtaxe sur l'essence?

M. Fréchette: C'est-à-dire qu'il n'y a pas que la surtaxe sur l'essence qui a occasionné cette diminution. Il y aussi certaines habitudes qui ont été modifiées, d'abord dans l'utilisation du véhicule automobile, l'usage qu'on en fait régulièrement et quotidiennement. On n'a pas

sur papier de constatations de cette nature-là, mais la logique nous amène à la conclusion qu'on a peut-être rationalisé l'utilisation du véhicule automobile.

Deuxièmement, le genre de véhicule qu'on utilise aussi, les véhicules à moins forte cylindrée. Il semble que là aussi il y a eu un changement assez fondamental dans les us et coutumes; on diminue la cylindrée du véhicule et, par voie de conséquence, la consommation.

Un troisième phénomène qui se constate particulièrement dans les centres urbains, c'est que l'utilisation du transport en commun s'est intensifiée; c'est peut-être la conséquence des deux premiers, mais l'utilisation du transport en commun s'est considérablement intensifiée.

Alors, je ne plaiderai pas évidemment que la surtaxe sur l'essence n'est pas une des causes de la diminution, mais elle n'est pas la seule; elle est même minime. Quand on fait des comparaisons par rapport à la situation qui existe en Ontario et au Nouveau-Brunswick - je pense que le ministre des Finances a déjà soulevé cet aspect à l'Assemblée nationale - lorsqu'on fait différentes comparaisons entre les différentes provinces, on réalise bien que ce n'est pas essentiellement la taxe qui a occasionné cette diminution-là parce que dans ces provinces où elle n'existe pas la consommation a diminué dans à peu près les mêmes proportions et, à certains égards, dans de plus fortes proportions.

Donc, les autres aspects dont on vient de parler...

M. Maciocia: Probablement il y a d'autres raisons dans ces provinces-là pour une diminution semblable. Aujourd'hui, cette constatation que vous avez faite, et vous l'avez mentionné en Chambre, qu'il y a eu une diminution approximative de 9%...

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Une moyenne de 9%, cela a été fait après l'imposition de la surtaxe sur l'essence. Alors, je pense que le ministre en est conscient et, disons, d'accord avec moi pour dire que probablement ce n'est pas la seule et unique cause, mais probablement la principale cause de cette diminution.

M. Fréchette: M. le Président, je reviendrai à mon exemple de l'Ontario, la diminution dont on parle en Ontario fut constatée précisément au moment où au mois de novembre dernier nous avons annoncé cette taxe-là. C'est cela qui nous amène à la conclusion qu'effectivement ce n'est pas principalement la taxe sur l'essence qui a occasionné cette diminution-là. Le phénomène existe ailleurs, et je ne vois pas en vertu de quelle logique ou de quelle argumentation on pourrait arriver à la conclusion que c'est uniquement à cause de la taxe.

M. Maciocia: Est-ce que le ministère du Revenu a fait un relevé montrant la différence entre le produit de la surtaxe sur l'essence et le 9% de moins en ventes d'essence?

M. Fréchette: Je ne pense pas qu'on se soit livré à cette opération, je ne sais pas non plus si elle est possible; je signalerai simplement au député de Viger que si elle est possible nous allons... Oui, c'est probablement possible...

Les études qui ont été faites s'appuient sur les données de Statistique Canada et elles démontrent qu'en Ontario et au Nouveau-Brunswick, à partir du mois de novembre, la chute dans la consommation de l'essence a été du même ordre que celle du Québec, davantage au Nouveau-Brunswick, où cela a chuté de 18%, alors que cela a chuté entre 10% et 12% en Ontario, et ça a été le même phénomène au Québec. Il faut ajouter à cela que c'est une tendance nord-américaine à laquelle s'inscrivent maintenant les provinces de l'Ontario et du Canada tout entier depuis que nous rejoignons le prix mondial. (11 h 45)

M. Maciocia: Oui, mais vous n'allez pas nous laisser croire par cela, M. le sous-ministre, que la surtaxe sur l'essence n'a pas influencé la chute des ventes, parce que, par cela, vous voulez démontrer qu'en Ontario et au Nouveau-Brunswick, c'est la même chose qu'au Québec, même sans la surtaxe.

M. Fréchette: On pourrait produire de grandes études économétriques pour démontrer...

M. Maciocia: Qu'il y aurait eu une diminution.

M. Fréchette: ... que, dans la diminution de 10% d'essence au Québec, un point de pourcentage pourrait être attribué à cela, mais c'est finalement de la spéculation, puisque, lorsque nous regardons l'évolution et les statistiques canadiennes, celles de l'Ontario, du Québec et du Nouveau-Brunswick en particulier, le comportement des données statistiques se ressemble étrangement, les données sont collées les unes sur les autres.

M. Maciocia: De toute façon, si le ministre, après la question que je lui ai posée, pouvait savoir la différence entre les deux, cela me ferait vraiment plaisir.

M. Fréchette: D'accord.

M. Boucher: On pourrait penser qu'on vit dans un système où, lorsque les gens commencent à économiser, cela le brise totalement.

M. Blank: Quand les gens ne travaillent pas, ils ne paient pas de taxes. On n'a pas d'argent pour payer l'aide sociale. C'est un cercle vicieux.

M. Maciocia: Cela peut arriver.

M. Boucher: À l'ère de l'économie d'énergie.

M. Fréchette: II s'agit d'un quatrième point.

M. Blank: Le quatrième point n'est pas dans mon discours, mais je vous en ai parlé hier.

M. Fréchette: Ah bon! j'avais noté le retard dans le paiement de l'allocation de disponibilité.

M. Blank: Ah oui! mais j'ai parlé de cela en passant.

M. Fréchette: Est-ce d'accord?

Les mandataires de la taxe

M. Blank: C'est d'accord. Je me pose une question. C'est arrivé souvent dans le centre-ville de Montréal, dans mon comté en particulier. De mémoire, il y a cinq ou six restaurants qu'on peut dire de première qualité qui ont fermé leurs portes ou qui sont en train de fermer leurs portes à cause de la taxe sur les repas. D'après les informations qu'on m'a données, il y a des pertes d'emplois à cause de cela. L'un d'entre eux, qui s'apprête à fermer ses portes cette semaine, avait 90 employés; un autre qui a fermé ses portes, il y a deux mois, avait 20 employés. Il y a une couple d'année, une maison de crêpes bretonnes a fermé sept restaurants qui assuraient presque 200 emplois. La question que ces restaurants ne paient pas leurs taxes, c'est une autre affaire; mais la plainte que j'ai eue, c'est sur la façon de les cotiser. Cela veut dire que ce n'est pas basé sur des chiffres exacts, mais sur des spéculations d'inspecteurs. Ce ne sont même pas des "spot-checks".

Dans un cas récemment qui a même fait l'objet d'un article dans un des journaux de Montréal, il paraît qu'un monsieur avait une bouteille de quarante onces, et normalement, on donne une once et demie par "shot", comme on dit, et il y en a 25 par bouteille. Ce monsieur, dans ce restaurant, pour les fins de son commerce, donne deux onces pour attirer la clientèle.

Cela a toujours été son attitude de donner deux onces. Nonobstant cela, l'inspecteur est venu compter le nombre de bouteilles qu'il a vendues, calculé cela sur un chiffre d'une once et demie et, d'après l'information qu'il m'a donnée, l'inspecteur a dit: Vous avez seulement le droit de vendre une once et demie. Je veux savoir si maintenant le ministre s'ingère dans la restauration en disant comment vendre la boisson. Comment en arriver à ces chiffres? Le gros problème...

M. Fréchette: Je m'excuse, quelle est la question précise?

M. Blank: Avez-vous un système particulier? Comment en arrivez-vous à cotiser ces gens? Dans les autres restaurants, non pas ceux du coin, mais ceux où on vend certaines choses pour emporter qui sont moins que la chose imposable, cela a l'air que lorsque l'inspecteur arrive, il dit: Ce ne peut pas être cela. Ce doit être cela, le pourcentage de vos ventes, c'est comme cela. Il fait cela sur les pourcentages et il fait une prolongation de l'affaire. C'est là que cela arrive. Le problème est que même si ces gens font une opposition, ils doivent attendre six mois, un an, deux ans avant que cela vienne en cour. En attendant, ils doivent payer. Ils n'ont pas l'argent pour payer. Ils ne sont pas des millionnaires. Ces places ferment en attendant.

Je sais que la loi est la loi, mais, avec la situation de chômage au Québec, on doit trouver des moyens d'éviter le plus possible de fermetures, même si on doit être moins dur dans certains cas.

M. Fréchette: Alors, M. le Président, je saisis très bien la question du député de Saint-Louis. Si vous me le permettiez, je m'en tiendrais, quant à moi, à des considérations de principe et d'ordre général. Me Saint-Jean, qui est à la législation, pourra donner plus de détails sur la façon de procéder.

Le député de Saint-Louis l'a signalé lui-même, il y a une seconde, il est clair que les premiers éléments en vertu desquels nous devons opérer, particulièrement à la vérification, c'est vrai pour partout ailleurs, ce sont évidemment les dispositions de la loi et les dispositions de la réglementation. "Dura lex, sed lex", mais c'est comme cela. Tant et aussi longtemps qu'on se tient à l'intérieur des limites que nous permettent les lois et les règlements, il me semble qu'on ne déborde pas la juridiction qui est la nôtre.

Quant à la technique utilisée, M. Saint-Jean pourra vous donner un peu plus de renseignements tout à l'heure. Le député de Saint-Louis signale que cette situation est apparue dans les restaurants de première

qualité. Je n'en disconviens pas et cela arrive d'ailleurs dans plusieurs restaurants et cela arrive dans plusieurs commerces d'hôtellerie. Il arrive très souvent que les mandataires, c'est-à-dire ceux qui doivent retenir la taxe et l'acheminer au ministère le 15 de chaque mois, pour des motifs tout à fait corrects... Il n'y a pas de mauvaise foi, il n'y a pas d'intention de frauder, mais peut-être un peu de négligence. Du 15 au 15 de chaque mois, on ne retourne pas la taxe qu'on a perçue ou qu'on devait percevoir et on semble, dans certains cas, s'installer dans cette espèce de procédure avec le résultat net que six mois, un an, dix-huit mois, deux ans plus tard, nous arrive en pleine figure une cotisation avec un montant considérable à rembourser. C'est un montant auquel on doit ajouter, parce que cela n'a pas été payé dans les délais prévus, la pénalité et les intérêts prévus par la loi.

Le résultat net de cela, c'est qu'effectivement beaucoup de commerces ou beaucoup d'institutions de cette nature se retrouvent avec un tel montant de remboursement à acquitter qu'ils ne peuvent, à toutes fins utiles, le faire. Cela donne quoi, comme résultat net? Fermetures et évidemment, cela entraîne le congédiement des employés qui sont là.

En considération de cette situation, et après l'avoir analysée, à la demande même de l'Association des restaurateurs du Québec, nous songeons très sérieusement - et cela devrait effectivement se réaliser dans un assez court délai - à exiger un cautionnement que le restaurateur fournirait justement pour garantir le paiement de la taxe. Nous n'allons pas, évidemment, si jamais cela se concrétisait, exiger un cautionnement d'un contribuable qui a toujours été parfaitement en règle avec la fiscalité, qui a toujours remis régulièrement, le 15 de chaque mois, les taxes qu'il percevait. Nous n'allons pas exiger de ce contribuable qu'il fournisse un cautionnement.

Au contribuable qui, par exemple, aurait eu des difficultés dans le passé, des difficultés de perception et de remises, à celui-là nous pourrions demander un cautionnement pour garantir le paiement de la taxe. Nous pourrions également l'exiger de celui qui déciderait de commencer un commerce, d'ouvrir un commerce. À celui-là aussi, pour vérifier le sérieux de l'entreprise, le sérieux de l'intention qu'il a, nous pourrions demander de fournir un cautionnement. En fait, cela lui rendrait service. Parce que s'il lui arrive qu'un mois il ne fait pas sa remise et qu'il y a une accumulation progressive, le cautionnement qui est là servirait justement à payer ces retards. C'est un aspect qui est sérieusement envisagé actuellement.

Il y a un autre aspect pour lequel il me semble qu'une décision comme celle dont je vous parle maintenant contribuerait à éviter. Il arrive très souvent que ces mandataires, comme d'ailleurs beaucoup d'autres contribuables, se retrouvent avec un compte élevé, parce qu'ils ne le reçoivent que six mois, un an, dix-huit mois ou deux ans après qu'il a commencé de courir. Ce que nous voulons instaurer, et cela incessamment, c'est d'envoyer à la fois au contribuable qui paie de l'impôt sur le revenu et aux mandataires qui doivent percevoir la taxe, un état de compte mensuel. Tous les mois, ils seraient informés du montant qui est dû, pour éviter effectivement la mauvaise surprise de se retrouver au bout d'un an, dix-huit mois ou deux ans avec un compte épouvantable qu'on n'est pas capable de payer et qui conduit fatalement à des situations aussi pénibles que celles que le député de Saint-Louis vient de décrire. Il y a ces deux objectifs qui sont actuellement sur le métier et que nous devrions pouvoir réaliser avant l'ajournement de la session. Je vous signale que quant à la question du cautionnement, c'est à la demande même de l'association des restaurateurs que nous avons considéré la possibilité de l'introduire dans nos lois.

M. Blank: Oui, mais là, il y a un danger. Les gens qui paient actuellement, n'auront pas besoin d'un cautionnement, seulement les gens qui accumulent du retard ou les nouveaux. Ce qui veut dire qu'il y aura une certaine restriction à l'ouverture de nouveaux restaurants. Peut-être, est-ce l'intention de cette association de restaurateurs de limiter la concurrence? C'est là le problème, le danger. Ou tout le monde doit le faire, ou personne ne doit le faire. Si le gouvernement établit une catégorie où des gens qui sont déjà en affaire n'auraient pas besoin d'avoir un cautionnement, seulement les nouveaux, cela va empêcher l'ouverture de nouveaux restaurants.

M. Fréchette: Remarquez qu'il n'est pas dans l'intention du ministre, ni du gouvernement ni du ministère, d'imposer cette obligation. Dans le cas de la personne qui envisage d'ouvrir un commerce de restauration ou d'hôtellerie et qui pourra faire la preuve de sa solvabilité, qui sera en mesure de démontrer que, toutes choses étant normales, il n'y aura pas de problèmes dans la perception des taxes, on ne va pas exiger de lui un cautionnement, définitivement pas, ni non plus de celui qui est déjà en affaires depuis un bon moment et qui, de toute évidence, depuis qu'il est en affaires, est un excellent contribuable, dans le sens qu'il remplit correctement les exigences du mandat qui lui est confié par la loi. Mais je voudrais vous faire un parallèle entre deux situations. Je prends l'individu qui

se présente à un bureau des permis du bureau des véhicules automobiles et qui, pour la première fois, requiert qu'on lui délivre un permis de conduire. Avez-vous pensé à quelle procédure il doit se livrer? Il doit suivre un cours théorique d'une durée de deux à trois semaines. Il doit aller sur la route avec un inspecteur du ministère des Transports pour voir s'il conduit bien. Si l'on prend toutes ces précautions pour délivrer un permis de conduire à quelqu'un qui vient le demander, pourquoi conserverait-on l'habitude qu'on a au ministère du Revenu, de délivrer un permis de taxe sur simple demande, sans aucune autre espèce de vérification?

M. Blank: Mais il y a une grande différence. Dans un cas, c'est une question de sécurité...

M. Fréchette: La différence, c'est écoutez...

M. Blank: ... une personne peut en tuer une autre. S'il doit conduire, il peut alors causer des dommages à une tierce personne, c'est une question de danger pour l'Etat dans un sens. Dans l'autre, si c'est une question de perception de taxes. Il y a une grande différence là.

M. Fréchette: Si je comprends bien...

M. Blank: D'un côté, il y a une personne qui veut avoir un privilège de conduire un véhicule sur la voie publique. De l'autre, c'est quelqu'un qui veut entrer dans l'entreprise privée, qui veut travailler pour lui-même, produire quelque chose. Je pense qu'il y a une grande différence entre les deux et dès le moment où le gouvernement pense décider qui ira en affaires, qui n'y ira pas, ce n'est plus une démocratie.

M. Fréchette: Le député de Saint-Louis est en train de plaider fermement pour essayer de me convaincre que celui qui aurait le goût de partir en affaires, mais qui, par les années passées, aurait été impliqué dans trois ou quatre faillites de suite ou aurait de même négligé à plusieurs occasions de remettre les taxes qu'il percevait, il est donc en train de plaider pour me convaincre qu'on ne doit pas, pour aucune considération, tenir compte de cette situation. (12 heures)

M. Blank: Vous pouvez certainement tenir compte du fait qu'on ne peut pas refuser à la personne le droit d'essayer de gagner sa vie. Si vous savez l'argent qu'il vous doit, vous percevrez ce montant quand il aura gagné cette somme. Mais ne l'empêchez pas de travailler en disant: Parce que vous êtes un mauvais garçon... Sur la question des faillites qu'il aurait faites auparavant, ce sont ses créanciers qui vont décider s'ils vont lui donner encore du crédit. Si c'est un mauvais administrateur qui n'a pas d'argent, il n'aura pas l'argent pour ouvrir son commerce. Il ne se lancera jamais en affaires. Ce n'est pas à nous de décider qui aura du succès en affaires et qui n'en aura pas.

M. Fréchette: Je voudrais bien qu'on soit clairs et qu'on s'entende. On aura sans doute l'occasion de rediscuter de la manière dont je vois les choses se présenter.

M. Blank: Oui. C'est la marque de commerce de ce gouvernement que de s'ingérer partout.

M. Fréchette: On va sûrement avoir l'occasion d'en rediscuter. Je voudrais simplement, de l'argumentation du député de Saint-Louis, retenir un ou deux points. D'abord, il faudrait bien être conscients du fait que ce n'est pas le ministère du Revenu qui va émettre un permis autorisant quelqu'un à ouvrir un restaurant, un hôtel ou tout autre commerce de même nature. Nous n'avons rien à voir dans cela. La seule assurance que l'on veut avoir, et j'aimerais qu'on me convainque qu'on voit mal la situation, c'est que celui qui va commencer à exploiter un commerce comme celui-là, qui en vertu de la loi va devenir le mandataire du gouvernement - et c'est une obligation prévue dans la loi - on veut simplement s'assurer que celui qui va assumer les fonctions et les obligations de mandataire pourra le faire correctement au niveau de la solvabilité. Est-ce que le député de Saint-Louis est en train de me dire que le contribuable qui a vécu de mauvaises expériences en affaires, qui a exploité un commerce, hier, sous le nom de X Y Z Inc., qui a, pendant un an, négligé de nous remettre la taxe qu'il percevait, qui a été impliqué malgré lui, bien sûr, dans deux ou trois faillites, que ce X Y Z Inc., qui a vécu ces problèmes, hier, pourra, demain, sous la raison sociale de A B C Inc., recommencer le même manège?

M. Blank: Oui.

M. Fréchette: C'est ce que vous êtes en train de me dire.

M. Blank: Oui. Parce que le système de l'entreprise privée va l'arrêter s'il est aussi mauvais que vous venez de le décrire. Mais, comme gouvernement, vous n'avez pas le droit de l'empêcher d'ouvrir un commerce.

M. Fréchette: Ce n'est pas cela qu'on veut faire non plus.

M. Blank: Mais si vous ne lui accordez pas de permis, il n'a pas le droit d'exploiter de commerce. On n'a pas besoin de garanties.

M. Fréchette: Ah.

M. Blank: Pourquoi, parce que j'ai déjà un commerce, je vais empêcher la concurrence, c'est cela que vous voulez?

M. Fréchette: Absolument pas.

M. Blank: C'est cela que l'Association des restaurateurs demande. Lisez leur mémoire. Vous allez voir que ce qu'ils disent dès le début, dans le premier paragraphe, c'est qu'il y a trop de restaurants à Québec. C'est cela que dit le mémoire. Ce serait une façon d'empêcher de nouveaux restaurants d'ouvrir. Si on laisse ouvrir des restaurants, les mauvais vont fermer, mais les bons vont rester. Nous sommes encore dans une société libre. Ce n'est pas le gouvernement qui va décider si moi j'ai le droit d'ouvrir un restaurant ou non.

M. Fréchette: M. le Président, je signale simplement et je vous réitère qu'on aura sans doute l'occasion d'aller dans une discussion de fond. Je vous réitère simplement que ce ne serait pas original, ce ne serait pas du nouveau parce que déjà, dans les lois fiscales, la Loi sur les permis, par exemple, oblige celui qui est encanteur à fournir un cautionnement...

M. Blank: Oui. Mais c'est très différent.

M. Fréchette: ... qu'il paiera la taxe.

M. Blank: II a dans ses mains une propriété qui appartient à un autre. C'est cela.

M. Fréchette: C'est la même chose pour le mandataire en hôtellerie et en restauration.

M. Blank: Non, il ne vous doit rien avant de se lancer en affaires. Il ne vous doit rien. Au moment où il demande son permis, il ne vous doit pas un sou.

M. Fréchette: D'accord.

M. Blank: Seulement à la fin du mois. S'il a fait des ventes qui sont taxables, il doit prendre l'argent et vous le donner.

M. Fréchette: Le 15e jour de chaque mois.

M. Blank: D'accord.

M. Fréchette: C'est l'argent du gouvernement.

M. Blank: C'est l'argent du gouvernement. Je pense que vous devriez faire une démarcation. C'est cela que je veux plaider pour commencer. Ce n'est pas sur cela que j'avais fait des plaintes dans mon argument au sujet des restaurants de Montréal. Ce n'est pas cela du tout. La plainte que j'avais faite portait sur la façon d'arriver à une cotisation. Les gens dont je parle ont fait leur rapport chaque mois. Deux ans après, il y a quelqu'un qui est venu et qui a dit: Vos rapports ne sont pas précis, vous avez fait plus de ventes que cela. Appuyé sur on ne sait quoi? C'est cela que je me demande, à partir de quel barème faites-vous de nouvelles cotisations?

M. Fréchette: J'ajouterai simplement en remarque générale et le sous-ministre à la Législation pourra compléter sur le plan de la technique. Le contribuable qui se retrouve dans la situation que le député de Saint-Louis décrit a quand même à sa disposition des mesures et des recours prévus par la loi qu'il peut exercer.

M. Blank: Vous-même m'avez dit...

M. Fréchette: ... je parle de vos leviers d'opposition.

M. Blank: ... que vous essayiez de réduire le temps de deux ans à six mois, d'accord. Durant ces six mois, un an ou deux ans, il doit payer le montant. C'est là qu'est le problème.

M. Fréchette: C'est une forme de cautionnement aussi.

M. Maciocia: II y a un danger, M. le ministre, dans ce que vous venez de dire, c'est-à-dire d'empêcher de nouveaux restaurateurs ou de nouveaux restaurants, non pas d'empêcher en réalité, mais de demander un cautionnement pour quelqu'un qui n'a pas fait preuve de solvabilité ou qui a négligé de payer, pendant un certain temps, des remboursements de taxe de vente au gouvernement. Est-ce que vous ne voyez pas ce danger? Dans le cas de ce même contribuable qui probablement a été coupable de négligence, ou même plus, qui aurait payé, disons, purgé la peine ou la sentence ou n'importe quoi vis-à-vis du ministère du Revenu ou vis-à-vis du gouvernement, à ce moment-là, vous le considérez quasiment insolvable, puisqu'il doit cautionner pour ouvrir une autre affaire. C'est très dangereux, parce que le principe même de la justice est mis en cause à ce moment-là; il a payé pour quelque chose qu'il avait fait. Et, après vous lui dites: tu as fait cela, on

t'empêche de faire cela, cela prend cela pour faire cela. Je trouve que c'est le principe même qui est très dangereux. Ne croyez-vous pas?

M. Fréchette: II nous apparaît que la méthode du cautionnement est le moyen approprié d'atteindre l'objectif visé. C'est simplement de nous assurer que ce mandataire pourra, mensuellement, faire ses remises de taxe. C'est de l'argent qui appartient au gouvernement, que celui-ci a l'obligation de percevoir en vertu du mandat que la loi lui confère. Ce n'est pas volontairement qu'il va percevoir ou non. Est-ce que vous ne croyez pas qu'il soit plus logique d'avoir une preuve, une garantie de cette solvabilité et également une preuve et une garantie que l'argent appartenant au gouvernement, lui seront finalement remis?

Si vous me le permettez, je vous donne la parole tout de suite après. Cela va même, à mon sens, rendre service à ceux-là mêmes qui sont des mandataires, parce qu'ils vont se préoccuper davantage de l'obligation qu'ils ont de faire les remises. S'ils ne le font pas, ils vont devoir payer davantage pour obtenir ce bon de cautionnement.

M. Maciocia: Oui, mais vous ne croyez pas...

M. Fréchette: Cela et le compte mensuel.

M. Maciocia: ... que vous allez avoir ou créer, à un certain moment, deux classes de citoyens, les bons et les mauvais, dans le sens que, si je n'ai rien eu à faire avec le ministère, si je n'ai eu aucun problème avec lui, j'ai le droit d'ouvrir un commerce, sans avoir à cautionner. Alors qu'il y en a un autre, qui a eu un problème pour une raison ou une autre, qui n'a pas le même droit que moi.

M. Fréchette: Oui, mais...

M. Maciocia: Est-ce que vous comprenez, c'est le principe...

M. Fréchette: Oui, je comprends.

M. Maciocia: ... même de la justice sociale qui est mis en cause avec cela.

M. Fréchette: Je comprends très bien.

M. Maciocia: Deuxièmement, je voulais vous poser une autre question, après que vous m'aurez répondu, à la première. Ou j'ai mal saisi ou j'ai mal compris, je ne le sais pas, vous avez dit tout à l'heure que le ministère du Revenu va envoyer des comptes mensuels...

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: ... aux restaurateurs ou aux mandataires...

M. Fréchette: C'est à dire que c'est un projet, je ne vous...

M. Maciocia: ... ou à n'importe quel pour se faire rembourser. Mais, comment le ministère peut-il envoyer un compte à la fin de chaque mois, pour se faire rembourser?

M. Fréchette: On a un service qui s'appelle le service des comptes à recevoir et on sait quotidiennement...

M. Maciocia: Oui.

M. Fréchette: ... l'état des comptes à recevoir.

M. Maciocia: Non, probablement que c'est ce que je disais, j'ai mal saisi.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Vous avez dit tout à l'heure que le gouvernement va envoyer un état de compte au restaurateur ou mandataire pour...

M. Fréchette: C'est-à-dire que c'est un projet.

M. Maciocia: ... se faire rembourser, j'imagine, la taxe de vente qu'il a perçue pendant ce mois-là. C'est cela?

M. Fréchette: Je vois...

M. Maciocia: C'est cela, j'ai mal saisi, pourriez-vous me...

M. Fréchette: Non. Prenons un cas concret qui illustrerait, il me semble, la situation. À supposer qu'un contribuable, tant au niveau de l'impôt sur le revenu qu'à celui des différentes taxes à la consommation, a accumulé du retard dans le remboursement des sommes qu'il doit au ministère, et que, pour toutes sortes de motifs, il n'y porte pas l'attention qu'il devrait y porter, il oublie, il laisse le temps courir, mais personne ne lui rappelle que...

M. Maciocia: Vous dites qu'il fait son rapport en réalité?

M. Fréchette: Oui, bien sûr.

M. Maciocia: II fait son rapport et il doit un montant de X au gouvernement.

M. Fréchette: Après six mois, ce n'est toujours pas payé...

M. Maciocia: Parfait, j'ai compris.

M. Blank: II faut suivre le mois après, ne pas attendre six mois.

M. Fréchette: C'est cela. Écoutez.

M. Blank: Ce n'est pas de ces cas que je parle. Je parle du cas du monsieur qui a fait un rapport et payé ses taxes chaque mois. Trois ans après, on arrive et on dit: Sur les formules que vous avez remplies il y a trois ans, trente-six formules, vous n'avez pas rapporté toutes vos ventes; il y a des ventes que vous avez oublié ou négligé de déclarer. Le monsieur dit: non, ce n'est pas vrai. L'inspecteur répond: mais vous avez vendu cent bouteilles de scotch, cela fait tel nombre de verres. Le monsieur ajoute: moi, je donne plus. Cela ne fait rien. Notre calcul est celui-là. C'est là le problème.

M. Fréchette: L'activité que décrit le député de Saint-Louis s'inscrit, il me semble, dans le cadre normal d'une vérification que le ministère peut aller faire dans un secteur donné, à des périodes données...

M. Blank: D'accord, d'accord. Je n'ai aucune objection à cela.

M. Fréchette: C'est la méthode qui ne vous plaît pas.

M. Blank: Quel est votre barème? Comment arrivez-vous à cela, sur quoi basez-vous vos chiffres?

M. Fréchette: C'est à cet égard... Me Saint-Jean.

D'abord, je précise que je ne suis pas en charge de la vérification, mais cependant, à multiples reprises, j'ai eu à étudier de tels dossiers au niveau des oppositions et des appels devant la Cour provinciale. Les vérificateurs procèdent selon des méthodes scientifiques qui varient selon le genre de restaurant ou d'entreprise. Par exemple, dans le type de restaurant dont vous parlez, on vérifie le livre des achats, le livre des ventes, le chiffre d'affaires, etc. Il apparaît, à l'occasion, qu'il y a des différences entre les montants de taxe déclarés mensuellement et le chiffre des achats et il apparaît alors impossible qu'on ait si peu vendu pour les montants achetés par exemple; cela pourrait être un élément. À partir de cela, il y a souvent une vérification par méthode d'échantillonnage statistique effectuée pour chacune des notes de repas. Ce sont des méthodes de vérification reconnues tant par les comptables agréés que par les tribunaux. Nous avons plaidé plusieurs causes là-dessus. Les tribunaux, y compris la Cour d'appel, ont reconnu comme valables, ces méthodes de vérification. D'ailleurs, les tribunaux sont garants de l'orthodoxie qu'on peut mettre dans ces vérifications. Je peux vous donner un élément d'information publique: dans la cause de l'auberge Saint-Tropez, le ministère a perdu parce que...

M. Blank: ... la cotisation, non.

M. Fréchette: ... il y avait un vice dans l'application de la méthode d'échantillonnage statistique. Nous avons fait corriger ces choses. Donc, vous voyez que le système fonctionne.

M. Blank: Voilà, l'auberge Saint-Tropez a fermé ses portes à cause de sa cotisation...

M. Fréchette: C'est discutable pour la cause, cependant.

M. Blank: ... et elle n'est pas rouverte encore. Une vingtaine d'employés sont partis, parce que le propriétaire n'avait pas assez d'argent pour fournir la garantie du cautionnement. C'était un bon restaurant, à part de cela.

M. Fréchette: Je ne peux pas réfuter la cause ou ainsi de suite, mais je peux vous expliquer la méthode.

M. Blank: Je connais cela.

M. Fréchette: II reste une chose cependant. Je ne crois pas que l'auberge

Saint-Tropez ait payé son compte au moment du procès.

M. Blank: Non, ils n'avaient pas d'argent.

M. Fréchette: Ils n'avaient pas payé, alors ce n'est pas cela qui les a mis en faillite, ils n'avaient pas payé la cotisation.

M. Blank: Mais vous avez une saisie et le compte de banque s'est vidé. Ils n'avaient pas les fonds nécessaires.

M. Fréchette: Là, je ne peux pas m'embarquer là-dedans, je ne suis pas assez au courant des faits. Cela s'est passé il y a plus d'un an. Ensuite, lorsque le projet de cotisation est dressé, il est aussi discuté avec le mandataire. Donc, le cotiseur discute le projet de cotisation et le mandataire peut lui faire valoir certains faits, par exemple, qu'il met un peu plus qu'une once et demie dans un verre, ainsi de suite...

M. Blank: Ce n'est pas à l'auberge Saint-Tropez qu'on dit cela, c'est à un autre restaurant.

M. Fréchette: Oui, je le sais. Je ne

parle pas du cas de l'auberge Saint-Tropez, je parle en général. Le vérificateur, selon la vraisemblance des motifs et des raisons données par le mandataire, va les accepter ou les refuser. Ce n'est pas toutefois le premier stade. Admettons qu'il les refuse, alors, le restaurateur ou notre mandataire peut faire opposition, et là, intervient le problème du paiement de la cotisation. Cependant, le ministère, que je sache, ne met jamais les gens en faillite, il peut accepter des garanties. Pour autant que le compte est encore sous opposition ou en appel devant les tribunaux, on peut accepter des garanties ou alors des paiements échelonnés, et là-dessus le ministère est très compréhensif... Enfin... (12 h 15)

M. Blank: Enfin! Avec les garanties, c'est clair que si la personne n'a pas d'argent pour le payer, elle n'a pas de garanties non plus. C'est cela le gros problème.

M. Fréchette: Elle a des garanties bancaires.

M. Blank: Si la personne a des garanties bancaires, la banque va lui prêter l'argent pour payer; si elle ne peut pas avoir de garanties bancaires, c'est parce qu'elle n'a pas d'argent, c'est cela.

M. Fréchette; Mais, même dans le cas où elle n'aurait pas de garanties, elle pourrait payer par versements échelonnés.

M. Blank: Oui, je sais... M. Fréchette: Donc le...

M. Gagnon: ... vous permettez, je suis entièrement d'accord avec le député de l'Opposition, qui n'est pas tout à fait d'accord. Oui.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Champlain, étant donné que vous n'êtes pas membre, est-ce que la condition...

M. Blank: Oui.

M. Fréchette: Surtout qu'il est d'accord avec le député de Saint-Louis.

M. Gagnon: J'aimerais que l'on me prouve ce qu'on vient d'annoncer parce que j'ai eu des cas où j'ai personnellement travaillé et transigé avec Je ministère du Revenu. J'ai offert moi-même, au nom de mon commettant, des arrangements au ministère du Revenu, on n'a pas pu, dans un cas bien précis où, à mon point de vue, les arrangements qu'offrait le commerçant en question étaient extrêmement valables et auraient été acceptés par beaucoup d'institutions financières, conclure une entente. Finalement, il a dû fermer ses portes, comme vous avez mentionné. Ce n'est pas parce qu'il a payé qu'il a fermé ses portes, mais c'est parce que vous avez tout simplement mis la clef dans la porte.

J'avais eu l'occasion, M. le ministre, de vous en parler. Je pense que, dans ce sens-là, il y aurait peut-être des choses à regarder. Si je prends le cas d'un commerce que j'ai en tête, il offrait - par exemple, pour la somme X qu'il devait au ministère du Revenu - la possibilité de le payer en trois ans. Évidemment, il ne pouvait pas donner de garanties, mais il en donnait tout de même plus en restant ouvert qu'en fermant, parce qu'à ce moment-là on perdait tout simplement le compte. Je pense que c'est aussi dans ce sens que le député de Saint-Louis parle. J'ai l'impression que de ce côté-là, il y aurait certainement possibilité de montrer un petit peu plus de souplesse. Cela ne veut pas dire perdre les comptes, mais ça veut dire qu'au moins donner une chance au coureur de continuer d'exploiter son commerce et aussi de récupérer les comptes.

M. Blank: Mais je parle de quatre restaurants de Montréal. Je pense qu'ils ont fermé leurs portes cette semaine. Il s'agit du Café Martin, du Pescatore, de la Tour Eiffel, et du Roma. Quatre restaurants de premier ordre appartenant au même propriétaire. À cause d'une cotisation qu'il ne peut pas payer et de garanties qu'il ne peut pas fournir, les quatre vont fermer, entraînant la mise à pied de 90 employés.

M. Fréchette: Le député de Saint-Louis va comprendre qu'il nous est difficile de rester dans la limite de la confidentialité et de traiter de cas particuliers. Il y a un risque très grand et je pense que tout le monde convient de cela; sauf que, sur le principe général soulevé tant par le député de Saint-Louis que par le député de Champlain, il me semble qu'il y a là des informations de nature à nous inciter à revoir davantage le modus operandi, la façon de procéder, et je suis content de ces témoignages. Ils ne peuvent que contribuer effectivement à attirer notre attention sur des situations particulières qui existent. Je n'ai pas besoin de vous dire qu'effectivement, quotidiennement, de la part de tous les collègues de l'Assemblée nationale, je suis confronté à des situations de cette nature-là, et très souvent je suis de ceux qui se retrouvent fort malheureux de se qui se produit.

Les deux interventions qu'on a faites, en tout cas, retiennent sérieusement mon attention et il nous faudra voir de plus près à essayer par tous les moyens possibles d'améliorer cette situation.

M. Blank: Merci.

M. Gagnon: Justement, M. le ministre, depuis qu'on a eu l'occasion de s'en parler, j'ai personnellement eu des témoignages m'assurant qu'actuellement il y a une grosse amélioration, mais c'est réellement des cas; il va falloir y regarder de très près.

M. Fréchette: D'accord.

Rapport du Vérificateur général

M. Blank: Maintenant qu'on a fini avec les grosses affaires, j'ai quelques petites affaires. Dans le rapport du vérificateur de 1980-1981, il est fait mention de trois ou quatre affaires et, dans sa réaction, le ministre a dit que ces affaires allaient se régler. Est-ce que...

M. Fréchette: C'est quoi, ces trois, quatres petites affaires?

M. Blank: Des droits de succession. "La division des successions du Service de la vérification des impôts est responsable, entre autres, de vérifier l'établissement des droits et pénalités... "Cette division doit revoir les déclarations relatives aux droits successoraux pour pouvoir émettre les permis de libérer les actifs des personnes décédées. "Nous avons constaté que les personnes affectées à la cotisation de ces déclarations ne possèdent pas de programme-guide de vérification. De plus, les cotisations ne sont pas approuvées par le supérieur immédiat ou hiérarchique du cotiseur."

Est-ce que cette affaire est réglée?

M. Fréchette: Si je comprends très bien la situation que soulève le député de Saint-Louis, ce serait réglé effectivement.

M. Blank: C'est en haut de la page, à 2.

M. Fréchette: L'observation faite par le Vérificateur général concernant les permis de disposer a été effectivement retenue et la décision de corriger la situation est prise.

M. Blank: Est-ce que cela veut dire que les deux ou trois choses que le vérificateur a suggérées ont été changées?

M. Fréchette: C'est cela.

M. Blank: Parlant des droits successoraux, le ministre a-t-il des chiffres? Combien est-ce que cela coûte à la province pour faire la perception de ces comptes?

M. Fréchette: Là, par exemple...

M. Blank: Je me demande si cela vaut la peine d'avoir encore des droits de succession ici au Québec, qui est la seule province au Canada qui les a. Cela coûte-t-il plus cher pour les percevoir?

M. Fréchette: Je ne sais pas si on dispose de ce renseignement, M. le Président. Est-ce qu'on en dispose?

M. Blank: Si ce n'est pas disponible aujourd'hui, vous pouvez m'envoyer cela.

M. Fréchette: D'accord, on en prend note et on vous le fournira.

M. Blank: Deuxièmement, une petite chose, j'ai constaté que presque toutes les formules du ministère sont ou en anglais ou en français ou bilingues. Comme je le dis, la formule pour le supplément de revenu est en anglais. Mais la chose que je trouve curieuse, c'est que, le 16 mars de cette année, dans la Gazette, un journal anglais, il y a eu une très grande annonce pour le supplément de revenu, mais elle était en français.

M. Fréchette: II n'y a pas seulement le député de Saint-Louis qui l'a trouvée curieuse.

M. Blank: Oui, je l'ai trouvée curieuse.

M. Fréchette: Oui. Effectivement, je pense que c'est la journée même ou peut-être bien le lendemain matin que notre attention a été attirée là-dessus. Dès le lendemain, disais-je, où la situation nous a été soulignée par des gens qui avait vu la publication dans le journal The Gazette, elle a été corrigée. Il y a eu de la publicité, mais en anglais cette fois-là. Cela a été fort cocasse effectivement.

M. Blank: Non, mais certains ministères font toutes leurs affaires en français. Je comprends qu'ils veulent publier seulement en français, mais le ministre du Revenu, le percepteur, parle toutes les langues pour avoir son argent et je trouve toujours cela curieux.

Ici, dans votre étude des crédits, à la page 9, vous parlez de campagnes de publicité. Il y a eu un changement radical, non pas seulement une augmentation d'environ 50 000 $, mais la campagne annuelle est tombée de 140 000 $ à 98 000 $. Cependant, la campagne ponctuelle est montée de 22 000 $ à 57 000 $ et il y a une nouvelle campagne institutionnelle de 52 000 $. Qu'est-ce que c'est cela?

M. Fréchette: Si l'on prend les chiffres les uns à la suite des autres, c'est là que vous arrivez à 50 000 $ de plus, globalement? C'est cela?

M. Blank: Oui, globalement.

M. Fréchette: Vous allez comprendre avec moi que, si l'on a une Direction générale du service au public et à la clientèle, une des vocations de cette direction est précisément de faire connaître ces programmes à l'ensemble des contribuables et des bénéficiaires des différents programmes.

M. Blank: Je ne fais pas une critique, je pose une question.

M. Fréchette: Non, mais je vous dis essentiellement que l'augmentation du budget à cet égard a été effectivement consacrée à la Direction générale du service au public et à la clientèle dans le but précisément de publiciser les différents programmes que nous administrons. Il y a quatre programmes sociaux, comme vous le savez. Il y a le budget de novembre également. Il y a eu la publication de la petite plaquette sur les droits successoraux. Enfin, c'est strictement parce qu'il s'agit de crédits dont la Direction générale du service au public et à la clientèle a essentiellement besoin pour remplir le mandat qui lui a été confié. C'est uniquement cela.

M. Blank: Je note qu'on me donne la liste des fichiers que vous avez à votre ministère aux pages 13 et 14. On a des fichiers pour les compensations des comptes à recevoir du ministre des Affaires sociales. On a déjà discuté de cela.

M. Fréchette: Oui.

M. Blank: Mais, ici, vous parlez à la page 14 d'échange de renseignements.

M. Fréchette: À la page 14, dites-vous?

M. Blank: Vous fournissez à la Régie des rentes les données prescrites par la loi relativement à l'établissement du registre des gains des cotisants. C'est quoi? Vous donnez les montants que le contribuable déclare à la Régie des rentes? C'est cela?

M. Fréchette: On remet à la Régie des rentes des sommes.

M. Blank: Vous les remettez à la Régie des rentes?

M. Fréchette: Oui. Ce sont les salaires qui sont exigés pour établir le montant de la rente.

M. Blank: Ah oui. Très bien.

M. Fréchette: C'est en vertu de la loi finalement qu'on est forcé de faire cela.

M. Blank: C'est très bien. Je comprends cela. Et au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, vous parlez de données, sont-ce les mêmes données dont vous parliez avant?

M. Fréchette: Oui.

M. Blank: Je trouve cela curieux: les données prescrites par décret, pas par la loi, mais par décret.

M. Fréchette: C'est par la loi. C'est effectivement par la loi.

M. Blank: II n'y a pas un décret? M. Fréchette: Non, non.

M. Blank: S'il y a un décret, j'aimerais avoir une copie. Mais s'il n'y en a pas...

M. Fréchette: Écoutez...

M. Blank: Commission administrative des régimes de retraite. C'est quoi?...

M. Fréchette: Juste une seconde. On va voir. Dans ce cas, c'est tout simplement un service qu'on a rendu à la commission. Elle voulait retrouver des cotisants qui devaient de l'argent et elle n'avait plus leurs adresses. Comme nous ne pouvions pas donner ces renseignements, nous avons nous-mêmes adressé ce que la commission voulait faire parvenir à ces personnes.

M. Blank: Vous n'avez pas donné les adresses de ces personnes?

M. Fréchette: Non. Nous l'avons fait nous-mêmes.

M. Blank: Très bien. À la page 16, vous parlez d'éthique.

M. Fréchette: De quoi?

M. Blank: Des règles d'éthique régissant l'échange donné entre fichiers gouvernementaux ou privés. Au deuxième paragraphe de la fin: Tout renseignement transmis par le ministre du Revenu à un organisme autorisé demeure confidentiel, etc., c'est là que j'ai peur au sujet de la confidentialité dans les autres ministères.

M. Fréchette: D'accord. C'est ce que vous avez soulevé au début de nos travaux.

M. Blank: C'est très dangeureux... Ce sont là toutes les questions que j'ai à date sauf que je constate ici que le ministre du Revenu a fait un voyage à Atlantic City. J'espère qu'il a fait quelques dollars en jouant au casino.

M. Fréchette: N'allez pas au-delà de ce que la confidentialité permet.

Le Président (M. Gratton): Le député de Viger.

Les casinos

M. Maciocia: Est-ce qu'on pourrait tomber justement un peu sur les casinos, M. le ministre?

M. Fréchette: Tomber sur les casinos? Tomber et se relever! Bien sûr, vous avez droit à toutes les questions qui vous paraissent pertinentes.

M. Maciocia: C'est bien dire tomber sur les casinos, M. le ministre. Si c'est possible - j'ai oublié de vous poser une question en Chambre, comme vous savez, je vous dis d'habitude que j'aurai une question à poser sur ce sujet-là - j'aimerais savoir, car vous m'aviez répondu le 7 avril dernier à la question que je vous aurait posée en Chambre, si le Conseil des ministres a pris une décision sur cela. Vous m'avez répondu que ce n'était pas encore au Conseil des ministres, mais au Comité des priorités ministérielles.

On sait que ce document de travail, le dernier depuis 1976, a été achevé à la fin du mois de février et déposé au Comité des priorités ministérielles le 5 mars dernier. Cela va faire bientôt trois mois. Premièrement, est-ce que le Comité des priorités ministérielles a pris une décision, ce document est-il rendu actuellement au Conseil des ministres? Deuxièmement, y a-t-il eu une décision de prise par le Conseil des ministres, étant donné qu'après Pâques, vous avez eu une entrevue ou une ligne ouverte, je ne sais trop, à Sherbrooke, où vous avez laissé entendre que la réponse du Conseil des ministres ou plutôt du gouvernement était positive sur la question des casinos? C'est l'information que j'ai eue. Ce n'était pas que vous aviez dit que c'était positif, mais les gens ont cru, d'après votre argumentation, que c'était favorable à l'implantation de casinos, ici au Québec. (12 h 30)

M. Fréchette: À l'égard de la dernière remarque du député de Viger, je me permets de présumer qu'il se réfère sans doute à une intervention que j'ai faite devant la Chambre de commerce de Sherbrooke, au cours de laquelle j'ai essayé, avec autant de minutie que possible, de faire ressortir d'une part les avantages d'une semblable institution - il me semble qu'il en existe - mais aussi, avec tout autant de précaution et de minutie, les objections ou les désavantages que ça pourrait entraîner. Je suis l'un de ceux, et je pense qu'on le sait maintenant, qui croient que ça pourrait, économiquement et particulièrement au niveau du tourisme, être intéressant de pouvoir procéder à la création de semblables institutions au Québec. Je crois à la présomption d'innocence des casinos tant et aussi longtemps que la preuve de leur culpabilité ne m'est pas faite. Ce sont probablement les suites de cette intervention que j'ai faite devant la Chambre de commerce à Sherbrooke, tout récemment au milieu du mois d'avril. Je pourrais en remettre le texte au député de Viger et il verrait très précisément ce qui a été dit.

Quant à l'autre aspect de sa question, il n'y a pas, au moment où on se parle, de décisions prises par le Conseil des ministres, sauf simplement ceci pour fins d'information. Au mois d'avril dernier, quand nous avons pour la première fois discuté du dossier au CMPDE, il y a un mandat très précis qui a été confié à trois ministères pour compléter des informations manquantes dont nous avions besoin dans un domaine bien spécifique. Cette opération est maintenant terminée et nous reparaissons à l'agenda du CMPDE le 10 juin prochain, avec cette fois tout le matériel dont nous aurons besoin pour décider si effectivement il nous faut aller au Conseil des ministres ou ce sera si clair à ce stade qu'il n'y aura pas lieu de cheminer plus loin.

M. Maciocia: Dois-je comprendre qu'il n'y a pas de décisions de prises encore au Comité des priorités ministérielles?

M. Fréchette: Vous comprenez très bien.

M..Maciocia: Je dois vous poser d'autres questions, parce que vous savez très bien que depuis 1976, le gouvernement ou la Société d'exploitation des loteries et courses du Québec fait des études sur l'implantation d'un casino au Québec, Vous avez eu depuis trois rapports, à part ceux de la partie policière ou concernant tous les autres aspects de ce sujet. Je crois qu'en six ans, le gouvernement a eu tout en sa possession pour prendre une décision face à l'implantation de casinos. Le 7 avril, quand vous avez répondu à ma question à savoir si le Conseil des ministres avait une décision, vous m'avez dit: Ce n'est pas le Conseil des ministres, c'est le Comité des priorités ministérielles. À ce moment, je suis resté vraiment bouleversé à moins que j'aie mal compris ou mal saisi. Je vous cite, répondant à ma question à savoir si vous étiez en faveur de l'implantation de casinos au Québec. Vous disiez: Le député de Marguerite-Bourgeoys m'avait posé une question au mois de février me demandant si j'étais conscient de l'incidence, par exemple sur la criminalité, que pourrait avoir une institution comme celle-là. Il est évident -et c'est votre réponse - qu'il s'agit encore

d'un aspect capital, important du dossier et qu'à cause de tout ce qu'il contient, il me semble qu'il faut prendre le temps nécessaire pour procéder à une analyse sérieuse, importante et profonde de celui-ci.

Ce qui m'inquiète dans cette réponse, c'est que vous avez donné votre accord sur l'implantation de casinos au Québec sans considérer l'aspect social du problème. Vous dites: C'est évident qu'il s'agit encore une fois de l'aspect capital, important du dossier et qu'il faut procéder à une analyse sérieuse, importante et profonde de ce dossier. Vous avez dit que vous étiez pour l'implantation des casinos au Québec. Je vois mal comment un ministre aussi responsable que vous ait donné son consentement sans considérer l'aspect social du projet.

Je vous pose d'autres questions. Probablement que c'est mieux que je vous les pose une après l'autre et qu'après vous répondiez, ou préférez-vous répondre à chaque question que je vais vous poser sur cela?

M. Fréchette: Non, non. Je vais noter et, si mes réponses n'étaient pas complètes tout à l'heure, vous me le signalerez.

M. Maciocia: Sur cela, j'aimerais avoir une réponse. Je vous aurais posé une question supplémentaire, mais, malheureusement, le président a annoncé la fin de la période des questions.

M. Fréchette: Cela arrive!

M. Maciocia: Je n'ai pas eu l'occasion de vous poser cette question. À ce moment, probablement que cela aurait été mieux. Ma question est la suivante: II y a eu un rapport en avril 1979 de la Société des loteries et courses du Québec dans lequel on disait, entre autres, on soulignait que le seul motif invocable pour justifier la légalisation des casinos au Québec était l'impact touristique. C'est clair dans le rapport qui a été fait à ce moment. On disait aussi que la localisation de tels établissements devrait s'inscrire dans une perspective de décentralisation des activités touristiques au Québec. Est-ce que c'est clair dans votre esprit?

M. Fréchette: Oui, cela va.

M. Maciocia: Après, dans le deuxième rapport, au mois de mars 1981, on dit qu'on remet en question le principe du casino comme facteur de décentralisation. Disons que, dans le premier rapport, le seul motif invocable était l'impact touristique et la décentralisation de cet impact touristique sur le Québec. Dans le deuxième rapport, c'est complètement le contraire. On dit qu'on remet en question le principe du casino comme facteur de décentralisation, car les tests effectués auprès des clientèles cibles révélaient que le concept de casino urbain situé dans un hôtel ou à proximité d'hôtels présente l'attrait le plus fort.

Pourriez-vous nous dire si le rapport a été fait par deux personnes ou deux équipes différentes et si vraiment, pour le gouvernement, c'est la décentralisation qui devrait être le motif principal de l'implantation des casinos, la décentralisation touristique, ou si c'est le contraire, parce que les deux rapports se contredisent l'un l'autre?

M. Fréchette: C'est complet?

M. Maciocia: Oui, pour le moment.

M. Fréchette: De toute évidence...

M. Maciocia: Si vous me le permettez, dans le deuxième rapport au chapitre de l'impl, tation des casinos pour stimuler l'indu: trie touristique, on dit très clairement que de tels établissements ne constituent pas une panacée aux carences du secteur touristique québécois. Je vois de totales contradictions entre le premier rapport et le deuxième.

M. Fréchette: Ce ne serait pas du nouveau. Il n'y a rien d'absolument extraordinaire que deux rapports traitant du même sujet puissent arriver à des conclusions différentes. Il y a des tribunaux qui arrivent à des jugements différents sur un même sujet quand il y a deux juges qui président deux tribunaux. Il n'y a rien d'extraordinaire là, il me semble.

M. Maciocia: Ce n'est pas la même chose.

M. Fréchette: De toute évidence, le député de Viger a le goût qu'on fasse le tour de l'ensemble du dossier. Vous allez comprendre que, dans l'état actuel des choses, il y a certains éléments sur lesquels je peux discuter alors que certains autres ne m'apparaissent pas pour le moment susceptibles de discussion, dans le sens que nous ne sommes pas à ce stade en mesure d'aller... Par exemple, quand vous me parlez de localisation, ne vous attendez pas de ma part que je vous dise: Demain, il y en aura un à tel endroit.

M. Maciocia: Vous vous êtes déjà... M. Fréchette: C'est dans ce sens.

M. Maciocia: Vous vous êtes déjà prononcé en disant qu'il y en aurait dans les Cantons de l'Est.

M. Fréchette: Oui, oui.

M. Maciocia: À Mont-Orford ou à d'autres endroits des Cantons de l'Est.

M. Fréchette: Je signale que le député de Gatineau fait des représentations ici.

M. Maciocia: C'est cela. Au mont Sainte-Marie, par exemple.

Une voix: J'y souscris moi aussi. M. Fréchette: Voyez-vous!

M. Maciocia: La question que je vous pose...

M. Fréchette: C'est assez curieux de voir le phénomène.

M. Blank: J'ai un projet dans mon comté.

M. Fréchette: Voilà! Le phénomène est extraordinaire. Il y a des gens qui sont contre et qui nous disent: À moins qu'ils soient chez nous, là, je pourrai peut-être reconsidérer cela.

M. Blank: Non, non, je ne le veux pas, mais si vous insistez, j'accepterai.

M. Maciocia: M. le ministre, si on se fie aux rapports, c'est très clair que ce n'est pas dans des comtés urbains, comme Montréal, Québec, qu'on pourrait avoir des casinos, d'après le rapport. Autrement, ces casinos n'auraient même pas l'impact, sur le plan économique, que le gouvernement prétend avoir avec l'implantation des casinos. Est-ce que vous êtes d'accord avec ce principe du document? Oui ou non?

M. Fréchette: Cela fait justement l'objet de la discussion que nous avons eue à la fin du mois d'avril et que nous allons devoir reprendre au début du mois de juin. Il va falloir attendre qu'on ait fait le tour de l'ensemble de toute la question avant que je puisse répondre à cette question. J'aimerais, si vous me le permettez, revenir sur l'ensemble de votre intervention à travers laquelle vous avez semé plein de questions. Vous nous dites que c'est depuis 1976 qu'il y a des études qui sont accumulées, qui existent quelque part. Je vais peut-être vous surprendre, mais je vous dirai que c'est depuis 1967...

M. Maciocia: Cela se peut.

M. Fréchette: ... que l'on a commencé à publier des études sur le sujet, que des associations touristiques, par exemple, qui ne s'appelaient pas comme cela à cette époque, mais des organismes voués à la promotion du tourisme, ont produit des rapports. Je parle de 1967, parce que j'ai été impliqué, à ce moment-là, dans un de ces dossiers-la.

Depuis une année ou à peu près, alors que la discussion a refait surface, qu'elle est allée sur la place publique, il y a - appelons cela des rapports ou pas - au moins une trentaine de nouveaux documents qui nous sont parvenus tant d'individus que d'organismes qui voulaient s'exprimer sur le sujet. Qu'on pense, par exemple, simplement à l'ouvrage réalisé par la Fraternité des policiers de Montréal, qui a poussé l'étude jusque dans ses détails les plus précis. Cela nous est arrivé assez récemment quand même. Nous n'allions pas entamer tout le processus sans tenir compte des représentations qui nous sont faites dans ces ouvrages et ces travaux que nous recevons de part et d'autre.

Je vous signalais, il y a un instant, que nous avions, à la fin du mois d'avril, amorcé de façon concrète l'étude du dossier au comité ministériel, qu'à la suite de cette première discussion, il avait été convenu que nous allions clarifier une situation, que nous allions préciser une situation, ce qui est maintenant fait. Nous reprenons la discussion, toute chose étant normale, le 10 juin prochain.

Je voudrais simplement revenir sur une chose que j'ai dite à plusieurs reprises, mais qui m'apparaît importante. Je vous ai dit tout à l'heure que j'étais de ceux qui croyaient à la présomption d'innocence, jusqu'à ce que la preuve du contraire soit faite. Il est clair que si on réussit à me convaincre qu'effectivement il y a plus de dangers que d'avantages, je n'ai pas les deux pieds coulés dans le ciment et je ne considérerai pas comme une défaite le fait de me rallier à l'option contraire. Je le ferais sans aucune amertume et sans aucune espèce de réserve. Par ailleurs - et cela rejoint ce qu'on disait tout à l'heure, quant à la période de temps qui s'est écoulée depuis le temps qu'on en parle - ce qui m'apparaît important, qu'ils soient d'un côté ou de l'autre, c'est que les intervenants dans le dossier qui dépensent du temps, de l'énergie et, dans bien des cas, de l'argent depuis aussi longtemps soient en droit de savoir à quelle antenne se loge le gouvernement. La réponse devrait-elle être négative qu'au moins on aura fait ce bout de chemin, c'est-à-dire que ces intervenants sauront que le gouvernement actuel n'est pas disposé à légaliser l'institution qui s'appelle casino. C'est l'un des objectifs fondamentaux. Il me semble que celui-là, on va l'atteindre facilement.

Pour ce qui est de ma position, je vous réitère ce que je disais très précisément devant la Chambre de commerce; je peux vous le répéter, ma position a été et reste

la même. Vous me permettrez d'utiliser une paraphrase qui sied à l'avocat de la défense que j'ai été pendant 20 ans: Les casinos sont innocents jusqu'à ce qu'ils soient trouvés coupables ou, si vous préférez, je suis pour l'implantation de casinos au Québec, dont un dans l'Estrie, je l'ai dit, à moins qu'on me prouve qu'il ne faut pas le faire. C'est ma position très ferme; elle a toujours été ce que je viens de vous dire. Évidemment, on en a tellement parlé depuis un an qu'il peut bien y avoir eu du sable dans l'engrenage à quelques occasions, mais c'est là où nous en sommes et nous devrions, je le souhaite en tout cas, être en mesure, dès le 6 juin, de prendre cette décision dont je viens de parler. (12 h 45)

M. Maciocia: Mais, comme je vous le disais au commencement de mes remarques, vous avez toujours laissé l'impression, même dans la réponse que vous m'avez donnée le 7 avril, que vous avez considéré seulement l'aspect économique du problème et non l'aspect social, que je considère, à tort ou à raison - je ne veux pas dire que j'ai tort ou raison - comme celui qu'on devrait considérer en premier lieu et, ensuite, l'aspect économique. L'impression que les gens ont eue à un certain moment, c'est justement que le ministre du Revenu, étant donné qu'il vient de l'Estrie, de Sherbrooke, sachant que, dans cette partie du Québec on a besoin d'une implantation touristique, a lancé l'idée du casino, mais un peu à l'aveuglette, si on peut dire, sans considérer l'aspect le plus important du sujet, c'est-à-dire l'aspect social, l'aspect de la criminalité, l'aspect, comme quelqu'un le disait, que les casinos sont des moyens de faire entrer l'argent sale le matin et de le sortir propre l'après-midi. Je ne sais pas si cet aspect a été considéré par le ministre avant de donner son consentement et son appui à un projet de loi aussi important pour la vie sociale du Québec en général, pas seulement le territoire où le casino serait implanté.

Deuxièmement, M. le ministre, si vous le permettez encore, - je ne sais pas si c'est de source confidentielle ou quoi - on a su dans le rapport qu'on rejette complètement le casino du type centre-ville Las Vegas ou du type Atlantic City, et tout cela. On serait pour l'implantation de casinos de type européen. Est-ce que le ministre sait - ou ceux qui ont rédigé le rapport - que le casino de type européen n'est même pas rentable économiquement? On peut le prouver à n'importe quel moment. Il y a des casinos en Europe, comme celui de Monte-Carlo, qui seraient même prêts à fermer, mais vous savez très bien qu'il y a tant de choses qui sont rattachées à ces casinos qu'aujourd'hui ils ne peuvent même pas le faire. Il n'y a pas de rentabilité, même pas économique, à ce moment-là. Est-ce que cet aspect a été considéré aussi? Je voudrais dire que le gouvernement ne sait pas si c'est le type européen ou le type centre-ville Las Vegas qu'on aimerait avoir ici au Québec.

M. Fréchette: M. le Président, je suis finalement assez heureux de la discussion parce que le député de Viger, au fur et à mesure qu'avance cette discussion, est en train de nous dire de façon assez claire à quelle enseigne il loge.

M. Maciocia: Moi, c'est clair, je suis contre, je vous le dis en partant. Alors...

M. Fréchette: Alors, ce sera au moins cela d'acquis pour la discussion que nous aurons possiblement.

M. Maciocia: Je ne veux pas dire que je n'aime pas les casinos parce que, quand j'en ai l'occasion, j'y vais.

M. Fréchette: Ce que je voudrais vous dire, quant au dernier aspect de votre question, la rentabilité face aux casinos de type européen, de type américain, c'est qu'il s'agit précisément de modalités qui font actuellement l'objet d'une évaluation. C'est ce genre de situation dont il faut tenir compte dans la décision à prendre. Je ne pourrais pas, au moment où on se parle, en arriver à des conclusions fermes quant à cet aspect de la situation que soulève le député de Viger.

Dans le premier volet de sa question, il me dit: Vous n'êtes pas sérieux dans votre affaire, parce que vous avez pris une décision en vous en tenant strictement...

M. Maciocia: Vous avez laissé cette impression.

M. Fréchette: C'est de l'interprétation peut-être, je m'excuse, je me suis peut-être mal exprimé, mais le député de Viger me signale que, pour me faire une opinion, j'aurais pu tenir compte davantage de l'aspect économique de la situation plutôt que de l'aspect social; de là, il tire la conclusion que j'en serais arrivé à une conclusion trop rapide en n'ayant pas tous les éléments.

Je vous signalerai que, depuis une dizaine de mois, personnellement évidemment je ne vous dis pas que la même chose s'est produite en d'autres instances -avec des collaborateurs, bien sûr, nous avons procédé à une étude du dossier qui m'a permis de me faire ce genre d'opinion que vous savez. Évidemment - là-dessus, la question du député de Marguerite-Bourgeoys était pertinente - il est clair qu'il y a des conséquences d'ordre social, des conséquences d'incidence sur la criminalité, c'est très vrai,

sauf qu'il faut aller au fond des choses. Est-ce que, par exemple, c'est l'institution casino qui engendre la criminalité ou l'augmentation de la population et des activités économiques que cette même institution entraîne qui engendre la criminalité? Enfin, voilà une question importante, une question de fond, il me semble.

Est-ce que, par exemple, l'incidence sociale ne sera pas exactement la même si, demain matin, dans les limites du Maine ou du New Hampshire ou de l'Ontario, il s'installe des institutions comme celles-là? Qu'est-ce qui va arriver? Est-ce qu'il va y avoir des "junkets" à longueur de journée, quotidiennement, avec 1000 Québécois, qui vont se distribuer un peu partout dans le paysage et qui vont revenir, avec des conséquences sociales? Cela aussi, c'est important à considérer. S'il s'installait des institutions comme celles-là un peu partout à travers les frontières, frontières proches, quelles seraient les conséquences sociales? On les subirait quand même sans avoir les retombées qui peuvent être avantageuses. En tout cas, là on est dans le creux du sujet, on est dans le creux de la discussion. Je suis content que le député de Viger s'intéresse de près à ce dossier-là, je suis content de connaître son opinion; maintenant, ça va me forcer à trouver de l'argumentation qui pourrait l'amener à revoir peut-être sa position.

M. Maciocia: Je vous conseille de le faire avant tout auprès de vos ministres, au Conseil des ministres, avant moi, non pas que je sache quelque chose, mais j'ai un peu discuté comme cela, comme j'en discute avec vous; cependant, je pense que, même au Conseil des ministres, il y en a probablement qui ne sont pas d'accord.

M. Fréchette: Je terminerai la discussion là-dessus, enfin, si vous n'avez pas autre chose, en vous disant tout simplement que si une décision est prise, peu importe sa nature, il y aura eu un bout de chemin de fait, je pense.

M. Maciocia: Oui, probablement une dernière question, parce que c'est très difficile d'étoffer le sujet aujourd'hui dans une séance comme cela. Vous avez dit que le Comité des priorités ministérielles se réunira encore le 10 juin...

M. Fréchette: C'est cela.

M. Maciocia: ... si j'ai bien compris. Cela veut dire qu'à ce moment-là, il y aura une décision de prise sur la possibilité ou non d'implanter des casinos à l'intérieur du Québec. Voulez-vous dire que, si la décision du Comité des priorités ministérielles est positive, elle va se rendre au Conseil des ministres et que, si elle n'est pas positive, elle sera mise sur les tablettes et oubliée? D'après moi, c'est cela.

M. Fréchette: M. le Président, je ne suis qu'un membre du comité ministériel.

M. Maciocia: Oui.

M. Fréchette: Je ne peux pas présumer de la décision qui sera prise à ce moment-là.

M. Maciocia: Non, mais vous avez dit tout à l'heure qu'au mois d'avril dernier...

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: ... le sujet avait été étoffé au comité des priorités ministérielles. Disons que vous en avez discuté.

M. Fréchette: Oui.

M. Maciocia: Le 10 juin, le Comité des priorités ministérielles prendra une décision finale sur ce projet d'implantation, si on peut l'appeler comme cela. C'est au moins ce que j'ai compris.

M. Fréchette: Je ne me souviens pas d'avoir fait une déclaration de cette nature. Je ne pense pas m'être engagé à ce qu'une décision finale soit prise à ce moment-là, à moins qu'on me réfère de façon très claire...

M. Maciocia: Non, probablement que...

M. Fréchette: Ce que je vous dis, c'est que je suis un membre du comité ministériel; j'ai pris les dispositions nécessaires pour qu'à l'ordre du jour de la réunion du 10 juin le sujet soit là. Je ne peux certainement pas ici m'engager à vous dire qu'une décision définitive sera prise à ce moment-là. Le comité décidera ce qu'il voudra bien décider et je ne suis qu'un membre parmi six ou sept autres.

M. Maciocia: Je comprends.

M. Fréchette: II ne faudrait pas...

M. Maciocia: Mais vous avez pris la décision de référer cela à la réunion du 10 juin. À la fin du mois d'avril, vous avez dit que vous aviez reçu tous les rapports et que vous en aviez discuté à la fin du mois d'avril au Comité des priorités ministérielles. Est-ce bien cela?

M. Fréchette: À la fin du mois d'avril, le comité ministériel a donné un mandat à un comité tripartite formé du ministère des Finances, du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme et du ministère du Revenu pour procéder à l'analyse d'un

dernier volet du dossier. Cela a été fait. M. Maciocia: Oui, d'accord.

M. Fréchette: On a reçu, hier, le dernier document qui complète l'étude qui avait été commandée par le comité ministériel. C'est pour cela que, maintenant, on a pris des dispositions pour que, le 10 juin, nous revenions sur le sujet, mais ne me demandez pas de m'engager au nom du comité à ce que, le 11 juin dans la matinée ou le 10 juin après-midi, on en arrive publiquement à annoncer une décision dans un sens ou dans un autre. Je ne peux pas prendre un engagement de cette nature.

M. Maciocia: Mais vous pouvez nous dire, par exemple, que le comité des priorités aura tous les atouts en main pour prendre une décision.

M. Fréchette: À cet égard-là, je pense que oui.

M. Maciocia: Alors, c'est cela en réalité...

M. Fréchette: Je ne vous dis pas, par exemple, qu'il n'aura pas besoin de deux séances de discussion.

M. Maciocia: Probablement. Très bien. Mais vous venez de mentionner que ce sont le ministère du Revenu, le ministère des Finances et le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui sont les trois organismes qui se sont mis ensemble...

M. Fréchette: Le comité ministériel.

M. Maciocia: ... pour étudier cela. Comment se fait-il que vous n'ayez même pas - et j'en reviens encore à mes doutes -appelé le ministère des Affaires sociales à l'intérieur de tout cela?

M. Fréchette: Le ministère de la Justice. Je vous signalerai que le ministère de la Justice est très présent dans l'évolution du dossier.

M. Maciocia: Mais il ne fait pas partie du triumvirat?

M. Fréchette: Non, mais le mandat que le comité ministériel a donné à la fin du mois d'avril était de nature strictement économique.

M. Maciocia: Économique?

M. Fréchette: Strictement économique.

M. Maciocia: Est-ce que l'aspect social a été considéré?

M. Fréchette: II est dans le dossier, l'aspect social, l'aspect de la justice et l'aspect de la criminalité est également...

M. Maciocia: C'est cela.

M. Fréchette: ... c'est clair. On ne peut faire cheminer un dossier comme celui-là sans que toutes les composantes...

M. Maciocia: C'est pour cela que je vous disais que les ministères de la Justice et des Affaires sociales devraient...

M. Fréchette: Le ministère de la Justice et le ministre de la Justice sont très présents.

M. Maciocia: Ils devraient faire partie du triumvirat, parce que c'est très important.

M. Fréchette: C'est un mandat à vocation strictement économique, encore une fois. C'est la seule raison pour laquelle les ministères des Affaires sociales et de la Justice n'étaient pas présents dans ce volet du mandat. Mais, pour le reste, ils sont là, c'est bien sûr.

M. Maciocia: Comme cela, le mont Sainte-Marie à Gatineau doit attendre encore longtemps avant de savoir s'il va y avoir une implantation de casino là-bas?

M. Fréchette: II faudrait qu'ils vous parlent, j'ai l'impression.

M. Blank: Je constate qu'il ne nous reste que trois minutes. J'ai ici une lettre, je pense, d'un comptable qui se plaint des complications de notre loi.

M. Fréchette: Quelle loi?

M. Blank: La Loi sur le ministère du revenu, la Loi sur les impôts. On a essayé de rendre notre loi proche de celle du fédéral, des gens, de ceux dont on parle. La loi fédérale a 259 articles; celle du Québec en a 1129.

Il se plaint ici du fait que, nonobstant tout cela, presque toutes les décisions sont prises suivant la loi fédérale et on ajuste la loi provinciale après. Il se demande pourquoi ces lois. C'est une trop longue affaire, je vais vous donner cette lettre, M. le ministre, et j'aimerais avoir vos observations un de ces jours.

M. Fréchette: La première réaction, c'est effectivement vrai qu'on a beaucoup plus d'articles dans notre loi que dans la loi fédérale, sauf qu'on a rarement des articles qui font trois pages de texte, par exemple, ils sont plus succincts.

M. Blank: Je vais donner au ministre une copie de la lettre...

M. Fréchette: Oui, oui, d'accord.

M. Blank: ... et s'il y a des corrections à faire...

M. Fréchette: Très bien.

Le Président (M. Gratton): Messieurs, est-ce que le programme 1, Administration fiscale, est adopté?

M. Blank: Adopté.

Le Président (M. Gratton): Est-ce que le programme 2, Supplément au revenu de travail et administration de logirente, est adopté?

M. Blank: Adopté.

Le Président (M. Gratton): Est-ce que le programme 3, Remboursements à certains travailleurs autonomes d'une partie de leurs contributions au Régime de rentes du Québec, est adopté?

M. Blank: Adopté.

Le Président (M. Gratton): Le programme 4, Contrôle des jeux de hasard et des courses, est-il adopté?

M. Blank: Adopté.

Le Président (M. Gratton): Le programme 5, Aide financière à l'industrie des courses de chevaux est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Gratton): Messieurs, ceci complète l'étude des crédits du ministère du Revenu. À tous les membres de la commission, merci. À la prochaine. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 59)

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