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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le jeudi 11 novembre 1982 - Vol. 26 N° 196

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de personnes et d'organismes relativement au livre vert sur le statut des travailleurs au pourboire du Québec


Journal des débats

 

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission élue permanente du revenu se réunit ce matin aux fins d'entendre des personnes et des organismes en regard du livre vert sur la situation du travailleur au pourboire au Québec.

Sont membres de cette commission: MM. Blais (Terrebonne), Blank (Saint-Louis), Boucher (Rivière-du-Loup), Desbiens (Dubuc), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Marcoux (Rimouski), LeBlanc (Montmagny-L'Islet), Rocheleau (Hull), Mme Marois (La Peltrie), MM. Lachance (Bellechasse), Polak (Sainte-Anne).

Les intervenants sont les suivants - je vous demanderais si c'est M. Assad (Papineau) ou Mme Thérèse Lavoie-Roux (L'Acadie) à titre d'intervenant - MM. Assad (Papineau), Paré (Shefford), Lafrenière (Ungava), Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), French (Westmount), Maciocia (Viger), Bissonnet (Jeanne-Mance), Fréchette (Sherbrooke), Mme Juneau (Johnson).

Le rapporteur de cette commission est toujours Mme la députée de Johnson.

Ce matin, à l'ordre du jour, nous recevons en tout premier lieu l'Association des employés au pourboire de la Mauricie.

Oui, M. le député de Westmount.

M. French: Puis-je ajouter quelque chose très brièvement?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. French: Notre dernier témoin hier, M. Jolin, m'a demandé de vous passer un message qu'il avait oublié. Tout le monde constate le manque de renseignements dans le milieu pour les travailleurs. Il nous demande de réfléchir sur la nécessité qu'à l'avenir cette information contienne non seulement des renseignements sur les responsabilités fiscales des travailleurs, mais que dans le même document et dans la même dissémination de renseignements on informe les travailleuses et les travailleurs de leurs droits face à certains programmes fédéraux et provinciaux.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Je continue la nomenclature de l'ordre du jour: le Conseil régional de développement de l'Estrie, l'Association touristique régionale de Lanaudière, la Fédération des travailleurs du Québec, la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec, le Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec, le Parti québécois Montréal-Centre, l'Association de cosmétologie du Québec Inc., l'Association canadienne des franchisseurs, l'Association des petites et moyennes entreprises et le Conseil du patronat du Québec.

Il me fait plaisir d'inviter l'Association des employés au pourboire de la Mauricie à prendre place, s'il vous plaît, pour nous livrer son témoignage. M. Marcouiller, je vous cède la parole en vous souhaitant une bienvenue spéciale à cette commission, particulièrement parce que vous êtes de ma région. J'aimerais vous inviter à présenter les gens qui vous accompagnent.

Auditions

Association des employés au pourboire de la Mauricie

M. Marcouiller (Claude): Merci, M. le Président. Je voudrais saluer M. le ministre, MM. les députés et aussi présenter mes collègues qui m'accompagnent. À ma gauche, Lorraine Olivier, de Gentilly-Bécancour; Mme Thérèse Bédard, de Trois-Rivières; Mme Lucille Vadeboncoeur, de Trois-Rivières; Mme Lise Marchand, de Trois-Rivières, toutes de l'Association des employés au pourboire de la Mauricie.

En mon nom et au nom de mes collègues, je voudrais profiter de l'occasion pour dire merci à la commission parlementaire de nous avoir permis de nous exprimer. Dieu merci, il existe encore dans notre société une démocratie, un sens des valeurs et des conventions encore profondes qui nous permettent, justement, de dire ce que l'on pense. Sans plus tarder, je commence.

Comme prémisse au mémoire de l'ADEP-Mauricie, il serait bon de remémorer quelques objectifs à atteindre. D'abord, ces quelques lignes permettront de recueillir un supplément d'informations utiles à la compréhension du problème. Qui visent-elles? Les différentes associations, le public en général, mais surtout les législateurs, les membres du gouvernement en place et surtout l'Assemblée nationale qui, ne

l'oublions pas, a besoin d'entendre les individus et les organismes avant que le projet de loi soit rédigé.

Donc, ce mémoire est un bref exposé qui définit clairement la position du comité exécutif de l'ADEP-Mauricie et surtout des quelque 400 membres qu'elle représente. Nous sommes intéressés à présenter devant la commission parlementaire notre point de vue à l'égard de l'avant-projet de loi qui suivra le livre vert.

La problématique. Nous n'avons nullement insisté sur l'historique du pourboire, ni sur une description des conditions de travail du travailleur au pourboire; ceci expressément, car suffisamment décrits ont eu lieu à ce sujet. D'ailleurs, le livre vert résume en partie la position du travailleur au pourboire au Québec. Ce premier ayant été rédigé avec l'aide des différents mémoires présentés au gouvernement.

Pourtant, deux choses ont retenu notre attention dans le livre vert. Nous avons consacré un chapitre sur chacun de ces points pour déboucher sur une conclusion qui se veut une série de recommandations intenses de la part de notre organisme et de nos membres. En premier lieu, l'arrêt des poursuites pour les années antérieures par le ministère du Revenu pour les travailleurs au pourboire. Chapitre 2, réglementation quant à la perception de ces sommes d'argent.

L'arrêt des poursuites. "Bien qu'il ne soit pas régi par des règles fixes et statutaires comme le salaire, le pourboire, généralement payé en espèces, fait partie des revenus imposables. Le pourboire fait intégralement partie des revenus personnels et n'échappe pas à l'impôt sur le revenu des particuliers." J'ai cité intégralement le livre vert sur la situation au Québec des travailleurs au pourboire, page 11, paragraphe 5.4. Nous ne nions pas ces lignes. Un des points sur lesquels nous ne sommes pas d'accord, c'est le montant quantifié par le ministère du Revenu quant à ces pourboires supposément non déclarés. Nous reviendrons dans le chapitre 2 à ce sujet.

Premièrement, nous demandons catégoriquement le rejet et l'arrêt des poursuites pour les années antérieures, pour deux raisons. D'abord, tel qu'il est cité plus haut par le ministère du Revenu dans le livre vert: "Bien qu'il ne soit pas régi par des règles fixes et statutaires comme le salaire, le pourboire..." - ces quelques lignes parlent par elles-mêmes - il n'y a pas de règles fixes et statutaires de régie; le ministère l'admettant lui-même dans le livre vert.

Permettez-moi d'ouvrir ici une parenthèse. On entend souvent parler de conventions. On a eu les cas de conventions et de statu quo. Tout le monde connaît bien le mot convention. On pensait qu'on avait des droits par convention; c'est dans ce sens que je précise le mot convention. Bien sûr, les conventions peuvent être brisées, je ne le nie pas. Depuis les 15 dernières années, plusieurs travailleurs au pourboire ont recouru aux services de personnes compétentes - les comptables - pour ce qui a trait aux lois sur l'impôt; un comptable, qui connaît les lois fiscales, connaît la Loi sur l'impôt certainement mieux qu'un individu. Alors, ces gens, de bonne foi, vont voir ces personnes, payent pour des services. Depuis 15 ans, on dit que le comptable suggère, par convention, au travailleur au pourboire - ce qui s'est fait jusqu'à maintenant et ce qui est toujours accepté, c'est toujours toléré - de déclarer 10% ou 15% de ses revenus; je dis bien des revenus et non pas les factures.

La situation, on dit qu'elle est tolérée par convention depuis plus de 15 ans. Par qui? Par le ministère du Revenu, par les comptables et par le grand public. La preuve? Le comptable dit aux clients: Vous placez 15% de vos revenus bruts en pourboires, vous déclarez des pourboires, vous présentez cela comme déclaration d'impôt et, si le ministère du Revenu juge que vous n'en avez pas assez déclaré, il va vous envoyer un avis de cotisation. Pendant 15 ans, on n'a jamais reçu d'avis de cotisation. À un bon moment donné, le ministère du Revenu juge qu'il doit envoyer des avis de cotisation. On n'a rien contre le fait qu'il envoie des avis de cotisation, c'est simplement sur la manière de quantifier les montants et les années antérieures qu'il va chercher. Par convention, il n'en avait pas été question pendant les années antérieures.

Nous disons que, dans le domaine fiscal, c'est le comptable qui a toujours renseigné le client; le travailleur au pourboire a fait ses déclarations d'impôt et, par convention depuis 15 ans, la situation est tolérée par le ministère du Revenu. Une preuve? Depuis 15 ans, il n'y avait pas d'avis de cotisation d'envoyés. Je présume que cela marchait comme cela.

Pour bien illustrer mon exemple, j'ai un fait vécu à vous présenter et je vais ouvrir une autre parenthèse sur un autre fait qui peut peut-être donner matière à comparaison. Analysons ce que les législateurs ont fait lorsqu'ils ont voulu comptabiliser, recenser, cataloguer et inventorier les armes à feu au Québec. Qu'ont fait les gouvernements à cette époque? D'abord, décréter des lois et des règlements, c'est-à-dire établir noir sur blanc des normes qui définissaient et réglementaient les usagers d'armes à feu. Ils ne toléreraient plus les armes non déclarées. C'est un peu ce que le ministère fait aujourd'hui; il ne tolérera plus certaines choses au niveau des travailleurs au pourboire. Mais, pour en arriver à recenser ces armes, il a fallu déclarer une amnistie,

une période de temps, arrêt de poursuites, où les propriétaires d'armes non enregistrées pouvaient le faire sans pénalité. Parce qu'ils voulaient recenser, comptabiliser et inventorier, ils ont pris les moyens nécessaires.

Nous en avons un autre exemple actuellement avec ce qu'on appelle les squatters, les gens qui ont des propriétés ou chalets ou camps en forêt. On leur dit: On veux vous taxer sur ces propriétés; on vous donne une période pendant laquelle vous pouvez déclarer ces propriétés. Après ce temps, vous ne le pourrez plus et, si vous ne l'avez pas fait, vous allez être pénalisés. C'est un peu ce que les ministères font actuellement pour changer, si on veut, les conventions.

Nous avons pris cela comme exemple en pensant que les conventions fiscales entre les comptables, les travailleurs au pourboire et le ministère du Revenu avaient toujours fonctionné dans ce sens. On dit: Si vous voulez briser les conventions, votez des lois parce qu'il n'y en a pas. Nous disons que c'est la même chose pour le pourboire. Si vous voulez comptabiliser, recenser et recueillir ces sommes d'argent, vous devez légiférer, définir, réglementer, en plus de décréter une amnistie pour les années antérieures puisque les mêmes législateurs admettent que ces sommes en pourboire sont un revenu imposable, mais qu'elles ne sont pas régies par des règles fixes et statutaires comme le salaire, d'où la perte pour les travailleurs au pourboire des avantages sociaux que nous connaissons. Je n'en ferai pas la liste; tout le monde l'a faite. Le but de ce premier volet était de démontrer deux façons de voir ou de tenter, par une explication, de comprendre les agissements antérieurs des gouvernants face aux différents problèmes.

Dans un deuxième temps, la réglementation quant à la perception de cet argent. "En raison de la nature même du pourboire et des modalités de paiement, il est difficile d'évaluer l'évasion fiscale découlant de cette pratique et d'en quantifier les montants." C'est écrit textuellement dans le livre vert, à la page 11, paragraphe 3.4. Un peu plus loin : "De cette analyse du problème ressortent deux constatations importantes: l'injustice sociale à l'égard des travailleurs au pourboire et l'injustice fiscale à l'égard des autres contribuables." Ce sont les constatations du livre vert.

D'abord, disons tout de suite que ces deux constatations sont peut-être un peu contradictoires, mais elles sont néanmoins la preuve d'un grand malaise et du grand manque de réglementation chez les travailleurs au pourboire. Je parle toujours du point de vue de la fiscalité. Il y aura peut-être d'autres moments où on pourra parler des conditions de travail, mais on parle présentement de la fiscalité. Elles sont contradictoires en ce sens qu'elles admettent le manque des avantages sociaux tels que l'assurance-chômage injuste et toutes sortes de choses qui ne sont pas reconnues aux travailleurs au pourboire, mais qu'elles n'admettent pas qu'il n'y a pas de justice fiscale aux yeux des autres travailleurs quant aux impôts à payer.

Une fois pour toutes, appelons les choses par leur nom. Si le pourboire est réellement un salaire parallèle - pourboire ou frais de service, comme il a été mentionné hier, c'est l'une des réglementations qu'on pourrait peut-être faire, soit définir ce que peut être un frais de service ou un pourboire - il est grand temps d'aller chercher les avantages sociaux qui y sont reliés. Si le pourboire est un salaire parallèle et imposable, par le fait même, il faut au moins aller chercher les avantages sociaux qui y sont reliés, d'où l'importance que soit faite, dans les plus brefs délais, l'implantation d'une réglementation ou d'une législation quant à la perception de cet argent. On ne nie pas et on ne doute pas que le ministère du Revenu veuille percevoir cet argent; on le comprend très bien. C'est simplement la façon dont il le fait actuellement qu'on trouve tout à fait injuste.

On va apporter un témoignage humain, émotionnel peut-être, tantôt, un peu comme celui de M. Jolin, hier, qui vous a quand même sensibilisés en apportant du vécu. J'aimerais que vous teniez compte du vécu qu'on va aussi apporter.

Maintenant, quelle serait la forme de la réglementation? Certainement pas celle que le ministère du Revenu a trouvée pour envoyer les avis de cotisation aux travailleurs au pourboire. La méthode dite d'échantillonnage sur des pourboires laissés sur des cartes de crédit pour en conclure à un taux de 15% applicable sur toutes les factures nous apparaît des plus farfelues. Nous serions prêts à nous soumettre au jugement de n'importe quel jury que ce soit quant à l'affirmation que tous les clients laissent 15% de pourboire. Non, la réalité est tout autre, puisque, dans bien des cas, un client sur deux ne laisse presque rien. Je lance l'invitation à tous les gens de venir s'asseoir pendant une heure dans un restaurant pour constater qu'il y a encore des gens qui ne laissent rien. Si on fait un calcul rapide, cela ne fait plus 15% pour deux personnes, mais 6% ou 7% par client dans plusieurs cas. 15%, si vous l'appliquez pour tout le monde, d'accord, mais 15%, si vous l'appliquez pour deux, ce n'est plus 15%, c'est 6% ou 7% dans bien des cas. On lance l'invitation. Vous pourrez faire la preuve par votre propre témoignage humain en vous assoyant et en regardant. S'il vous plaît, ne prenez pas comme référence le

restaurant qui existe sur la colline parlementaire.

Des voix: Ah!

M. Marcouiller: On voit clairement que la méthode établie par le ministère vaut ce qu'elle vaut et on comprend très bien qu'il y ait tant d'avis d'opposition déposés au ministère relativement à cette méthode. J'aimerais savoir combien il peut y avoir d'avis d'opposition sur la table. Je ne sais pas si, M. le ministre, vous pouvez me répondre. Les avis d'opposition sur la table actuellement, pouvez-vous me dire combien il peut y en avoir? (10 h 30)

M. Marcoux: Je peux vous l'indiquer tout de suite. J'ai déjà indiqué qu'à partir de juillet 1979, provenant du ministère du Revenu du Québec, à partir des enquêtes de vérification que nous faisons, nous avons émis environ 900 avis de cotisation. En plus, entre 1350 et 1500 avis de cotisation ont été émis à la suite d'échanges d'information avec Revenu Canada.

M. Marcouiller: Vous parlez des avis de cotisation; moi, je vous demande les avis d'opposition. Simplement, la machine bureaucratique peut-elle vous dire: II y a 600 avis d'opposition sur la table?

M. Marcoux: Je crois avoir le renseignement. Je vais essayer de le vérifier et, tantôt, je vais vous le donner.

M. Marcouiller: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Si vous voulez bien continuer la lecture de votre mémoire, par la suite, on engagera le dialogue avec les membres de la commission.

M. Marcouiller: Merci, M. le Président, je m'excuse. Mais, nous direz-vous, plusieurs ont déjà payé, d'où l'admission d'avoir touché ces 15%. Ce qui s'en vient peut être intéressant. Oui, certains ont déjà payé, et je vais vous dire pourquoi: à cause du "trafiquage" de peur, de saisie, d'hypothèque judiciaire sur leur maison et de toutes sortes d'histoires abracadabrantes racontées par certains fonctionnaires peu soucieux du bien-être des travailleurs au pourboire. Quand on te téléphone et qu'on te dit: Si tu ne paies pas, on sait que ta maison est payée, on lève une hypothèque judiciaire de 8000 $ sur ta maison comme le gars n'a pas d'information, qu'il est plus ou moins instruit, il est pris de panique. Il se retourne, il emprunte et il vous paie.

Nous, on vous dit que ce n'est pas la reconnaissance d'avoir touché ces gains; c'est bien plus le tordage de bras et la panique, pour avoir la paix, un peu comme ce que M.

Jolin a dit hier. Ce n'est pas une situation vivable que de savoir que tu dois 5000 $ ou 6000 $. Certains des gars qui t'appellent -je ne dis pas que c'est M. le ministre qui appelle, mais les fonctionnaires - abusent de leurs fonctions. Ils abusent peut-être de l'ignorance de ces gens qui ne sont pas capables de se défendre et qui disent: Pour avoir la paix, je vais l'emprunter et le payer. Peut-être que le ministère peut interpréter ces paiements comme une reconnaissance d'avoir fait ces 15%. Moi, je vous dis que c'est le contraire.

J'en profite ici pour laisser la parole à Mme Lucille Vadeboncoeur, qui fait partie de l'ADEP de la Mauricie, qui est membre de notre comité et qui va faire un témoignage un peu dans le sens de celui de M. Jolin, hier soir, qui a ému quand même les gens de la commission. Je pense que le témoignage de Mme Vadeboncoeur peut aussi vous sensibiliser parce que c'est un fait vécu. Je laisse la parole à Lucille.

Mme Vadeboncoeur (Lucille): Bonjour à tout le monde. Je ne veux pas que personne pleure sur mon sort. Je viens ici seulement pour faire un témoignage de mon vécu. L'an passé, en juillet, alors que je revenais d'une opération, j'ai reçu un avis de cotisation du gouvernement provincial de - je vais vous donner le montant - 6898,69 $, pour quatre années antérieures. Alors, je regarde cela, je me dis: Qu'est-ce que cela? Je me fous de cela, c'est impossible, cela ne se peut pas, où va-t-il? Je me dis: Quand je serai bien revenue, je vais consulter quelqu'un et je vais m'informer. Je suis tellement certaine que c'est une erreur, je l'oublie. À un moment donné, je reçois une saisie de salaire. Heureusement que j'ai à ma charge six enfants, la saisie de salaire a été de 5,60 $ par semaine que je dois verser. Cela, je me dis: Ce n'est pas pire, cela ne paie même pas un dîner. Maintenant, en novembre, un bon midi, on dîne, mes six enfants et moi, on cogne à ma porte. C'est un huissier. On me réclame 7200 $. J'ai dit: Monsieur, si j'avais les 7200 $, je vous emmènerais en voyage.

Qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse? Je ne veux pas qu'on me pose des questions, je veux qu'on pense à une chose: Est-ce que moi, si je vivais aux crochets de la société, si on m'apportait mon chèque dans la boîte à malle, avec un timbre, que je n'aie même pas besoin de me déplacer, cela me donnerait peut-être le même salaire que je gagne aujourd'hui, parce qu'avec six enfants on a une aide assez bien proportionnée. Avec les allocations, cela me donnerait peut-être 250 $ par semaine. Est-ce que ce serait mieux que je sois aux crochets de la société, qu'on me fasse vivre, au lieu de prendre ces cotisations que je dois payer? Quand le fédéral arrivera, je vais

faire quoi? Je me le demande. Je vais faire une faillite personnelle, parce que les 800 $, je ne les ai pas. Je me demande aujourd'hui si ce ne serait pas plus avantageux, quand tout sera réglé et qu'on aura une loi, si je dois réellement payer cela, de vivre aux crochets de la société, qu'on me fasse vivre. Je n'ai pas cet argent. On va me dire: Ce sont des pourboires qui ne sont pas déclarés. Peut-être que je ne suis pas d'accord avec les montants qu'on vient me réclamer, des 1000 $ et des 2000 $ par année d'impôt, cela doit faire un bon montant de pourboires, quand vous faites votre déclaration d'impôt. Vous avez déjà six enfants à votre charge. Je vous dis que, si vous faites le calcul, on doit en donner, des pourboires, dans le restaurant où je travaille. À vous de conclure. Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Marcouiller: C'est un peu dans ce sens qu'on a dit tantôt pourquoi certains ont payé, pourquoi il y en a qui paniquent et pourquoi il y en a qui pensent même à faire une faillite personnelle. C'est bien beau qu'on ait entendu des gens qui pourraient peut-être aussi être acculés à la faillite face à des demandes, mais on vous démontre qu'il y a deux côtés à la médaille et, dans les solutions qu'on propose, on essaie quand même de tenir compte du fait que tout le monde doit manger la part du gâteau.

Mme Vadeboncoeur a fait son témoignage face aux poursuites qui - une fois encore, je le répète - sont faites, mais basées sur rien, puisque c'est bien mentionné dans le livre vert que le pourboire n'est régi par aucune loi, ni aucune règle statutaire. La méthode que le gouvernement, que le ministère du Revenu impose à la suite d'une enquête sur un échantillonnage de cartes de crédit qui ont laissé 15%, on vous dit que c'est faux. Quant à ceux qui ont payé - on m'a posé la question avant de partir de Trois-Rivières - moi, j'ai payé, parce que, justement, j'ai eu peur. J'ai payé 1300 $. Qu'arrive-t-il si jamais ils cassaient les poursuites et nous donnaient une chance? Cela peut être fait sous forme de crédit d'impôt, ces choses-là. Ce serait à voir. Ce serait peut-être dans une autre consultation avec le ministère du Revenu, comment établir ces choses. Tout ce qu'on dit, c'est qu'actuellement, par convention, depuis des années, avec les comptables et les gens, tout cela avait été toléré par le gouvernement, par le ministère du Revenu et, du jour au lendemain, que ce ne soit plus toléré, on n'est pas contre cela. C'est pour les années antérieures qu'on est contre. Lorsque les conventions sont brisées, on repart à zéro. On refait une loi et on fonctionne à partir de cela.

Nous disons tout de suite que la méthode utilisée par le ministère du Revenu n'est pas la bonne et nous prendrons tous les moyens légaux mis à notre disposition pour la combattre. Voilà pourquoi apparaît, de façon claire, l'importance d'une réglementation quant à la perception de ces sommes d'argent, si on ne veut pas se retrouver devant les tribunaux et admettre ainsi qu'il y ait, de part et d'autre, d'immenses pertes de temps, d'énergie et d'argent. Par la perception de ces montants, je parle de la définition des frais de service ou du pourboire, qui a été mentionnée tout au long de la commission.

En conclusion du mémoire, des deux chapitres dont on vient de parler et des solutions hypothétiques publiées dans le livre vert, nous, de l'Association des travailleurs au pourboire de la Mauricie, ADEP-Mauricie, recommandons ce qui suit: premièrement, que soit instauré par une loi dans les plus brefs délais que le pourboire ou frais de service soit fixé à 15%, réglant ainsi le problème de comptabiliser ces sommes d'argent. Quand on dit "le problème de comptabiliser ces sommes d'argent", si le "reading" ou la lecture de "cash" donne 400 $ pour une facturation totale pour un employé au pourboire, c'est 15% de cette somme et tout le monde sait où l'on s'en va. Le ministère du Revenu trouve la part qui lui revient, le travailleur au pourboire trouve la part de ses avantages sociaux. Jusqu'à maintenant lorsqu'il se présentait au bureau de l'assurance-chômage, on lui disait: Les deux tiers de ton salaire, les deux tiers de 3,28 $. Vous savez ce que cela donne, par semaine, les deux tiers de 3,28 $ multipliés par 40; je ne le compterai pas. Nous comprenons que cette Législature va en contradiction avec l'Association des consommateurs, mais nous nous apercevons aussi que la demande de hausser le salaire des travailleurs au pourboire à un niveau raisonnable: 7 $ l'heure - je pense qu'on peut s'entendre sur la définition de raisonnable à 7 $ - sans pourboire, irait, elle aussi, à l'encontre de l'Association des restaurateurs.

Comprenant très bien la situation dite de tamponnage dans laquelle nous, travailleurs au pourboire, nous nous retrouvons, nous abondons un peu dans le sens de la récente recommandation de l'Association des restaurateurs qui demandait de réduire la taxe de vente sur les repas à 5%, réduisant ainsi, par le fait même, la pression monétaire exercée sur le consommateur. Je pense que cela dit ce qu'on veut dire. Le client qui va au restaurant paie 5% de moins en taxes; le gouvernement récupère ainsi 5% sur toutes les factures et non seulement sur celles de plus de 3,25 $. Cette réglementation apporterait, du même coup, les avantages sociaux aux travailleurs au pourboire, ainsi que leur juste part d'impôt à payer face aux autres

contribuables, répondant ainsi à deux constatations du livre vert: d'un côté, l'équité, la justice sociale qui dit que tout le monde doit payer ses impôts et, de l'autre, l'injustice sociale qui dit que tu as droit aux deux tiers de 3,28 $.

Dans un premier temps, je pense que la réglementation dans un projet de loi pourrait être faite dans ce sens. Nous disons qu'il n'y a rien de réglementé là-dessus, c'est pour cela qu'on demande l'arrêt des poursuites; le pourboire n'ayant jamais fait l'objet de statuts ni de règlements dans aucune loi, simplement dans la Loi sur l'impôt qui dit que nous devons déclarer nos pourboires. Personnellement, cela fait cinq ans que je fais la déclaration d'impôt de ma femme, j'ai toujours mis de 15% à 20% du salaire brut en pourboires. Cela a toujours été toléré par le ministère du Revenu. Je pense que si cela n'avait pas été toléré, j'aurais reçu des avis de cotisation avant; maintenant, j'en reçois, d'accord. On veut modifier la loi, on veut percevoir et quantifier ces montants; on n'a rien contre. On a dit: Ne brisez pas la convention et ne reculez pas de cinq ans. Vous avez un exemple avec les armes à feu; vous avez un exemple avec les squatters; vous avez des tas d'exemples.

Pour en arriver à faire quelque chose, à un moment donné, il faut dire: D'accord, à partir d'un point zéro, on fait une loi, on réglemente; à partir de là, les règles du jeu seront celles-là, messieurs. Vous irez chercher ceux qui ne les déclarent pas, vous aurez la loi de votre côté. Mais de la façon dont vous avez quantifié ces pourboires, nous vous disons que nous constesterons cette méthode parce que vous, du ministère du Revenu, admettez vous-mêmes que le pourboire n'est pas réglementé ni statué par des règles fixes.

Cette réglementation apporterait, du même coup, les avantages sociaux aux travailleurs au pourboire ainsi que leur juste part d'impôt à payer. Deuxièmement, elle arrête les poursuites de la part du ministère pour les années antérieures. Nous ne sommes pas contre le fait que le ministère perçoive de l'argent - encore une fois je le répète -mais contre la façon dont il l'a fait; se basant unilatéralement - c'est un mot qu'on a entendu ces derniers mois - sur une méthode qui ne repose sur aucune règle fixe et statutaire régie, comme il l'admet lui-même, dans le livre vert. Je parle toujours du ministère du Revenu. (10 h 45)

En conclusion, nous ne voulons pas partir en guerre contre qui que ce soit. Nous désirons traiter d'égal à égal - encore une chose que j'ai déjà entendue - avec toutes les associations existantes ainsi que les législateurs qui font nos lois. Nous tenons à préciser que, dans un avenir prochain, nous défendrons non seulement nos droits, mais qu'en plus nous prônerons un code d'éthique qui aura pour but de rehausser le statut du travailleur au pourboire en une profession respectée, avec tout ce que cela peut entraîner pour l'essor de l'industrie touristique québécoise.

Bibliographie. Le mémoire a été rédigée à partir des mémoires de l'ADEP-Mauricie, de l'ADEP-Estrie, de l'AGAP-Montréal, de l'Association des restaurateurs du Québec, de l'Association de consommateurs du Québec et, enfin, du livre vert du gouvernement du Québec. Je vous remercie de votre attention, messieurs.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie les représentants de l'Association des employés au pourboire de la Mauricie. Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer hier et avant-hier, dans ce travail concernant la préparation du livre vert, de la commission parlementaire et des solutions qui pourraient être trouvées, j'ai voulu m'associer au maximum à mes collègues du parti ministériel. C'est pourquoi j'inviterais le député de Montmagny-L'Islet à engager le dialogue avec vous sur le mémoire. Je reviendrai tantôt pour des questions et des commentaires.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le ministre. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. LeBlanc: Merci, M. le Président. Je salue la délégation de la Mauricie, mesdames qui êtes en très grand nombre dans cette délégation et monsieur qui avez fait la lecture du mémoire et l'avez commenté. Je pense que le mémoire par lui-même ne suscite pas tellement de questions parce qu'il a été assez explicite sur ce sujet qui est en rapport, en parallèle avec le livre vert et qui traite spécifiquement des avis de cotisation.

Vous avez tout de même mentionné à l'intérieur de votre mémoire que vous étiez, comme les autres groupes auxquels vous faites référence dans la bibliographie qui a servi à la préparation de votre rapport, solidaires des 15% obligatoires, comme les autres organismes qui ont été dans le même sens que vous.

Ce problème soulevé, la commission vous permet, justement, aujourd'hui, en même temps qu'elle vous demande votre avis sur le système de réglementation du pourboire, de faire la représentation que vous faites sur un problème qui vous touche, comme madame l'a expliqué, très particulièrement. Les témoignages individuels, comme celui de madame, comme celui de M. Jolin hier soir, donnent justement la preuve que cette commission est une tribune qui

vous permet d'exprimer cela.

Je n'ai pas tellement de questions se rapportant directement à ce que vous avez énoncé. C'est relié directement au fonctionnement du ministère du Revenu. Pour en revenir à des questions qui ont été discutées hier et qui feront encore l'objet aujourd'hui de la discussion, n'avez-vous pas des craintes, vous aussi, que ces 15% obligatoires affectent justement l'entreprise au Québec qu'est la restauration et l'hôtellerie, qui est dans une situation assez difficile? On a signalé un nombre de membres assez élevé dans cette entreprise.

Je vous pose une question seulement sur un point. Vous parlez de la réduction de la taxe à 5%. J'aimerais que vous puissez préciser un peu là-dessus, par exemple, si la réduction à 5% pourrait avoir une influence, d'après vous, qui compenserait pour l'augmentation aux consommateurs. Est-ce dans ce sens que vous le prenez?

M. Marcouiller: Oui, effectivement, c'est dans ce sens. Vous savez que cela ne prend rien pour alarmer le consommateur. Du jour au lendemain, si une loi était adoptée et disait que les 15% sont obligatoires, il prendrait panique. C'est comme s'il partait de zéro et qu'il montait à 15%. L'Association des restaurateurs a demandé de baisser la taxe de vente un peu pour permettre aux consommateurs d'avoir une moindre grande pression pécuniaire et peut-être même de dépenser plus dans un restaurant parce que cela coûterait moins cher. C'est peut-être la mentalité. On abonde dans ce sens. Comme vous le dites, les 5% seraient pour diminuer le fardeau du consommateur.

M. LeBlanc: Je constate dans les premières phrases de votre réponse - c'est presque une admission - que vous êtes conscient du risque que les 15% vont alarmer le consommateur.

M. Marcouiller: Pas nécessairement. Je disais tantôt que cela ne prend rien pour alarmer le consommateur. Quand vous dites qu'hier il a été question d'entreprises qui pourraient être acculées à des difficultés financières, s'il y avait un pourboire de 15% d'établi, je vous dis tout de suite que, par conviction, nous n'y croyons pas. Je pense que la commission nous donne la permission de dire nos convictions. Chaque personne qui s'est fait entendre ici, dans les trois jours, est venue donner ses convictions. C'est un peu dans ce sens. On donne nos convictions et on ne croit pas que cela puisse affecter l'entreprise.

M. LeBlanc: Je pense que ce qu'on fait actuellement, c'est une recherche de la meilleure formule. Quand j'évoque cette possibilité, ce danger d'alarmer une clientèle et de compromettre peut-être aussi la survie de certains établissements, je le fais en fonction de ce que cela peut provoquer de chômage parmi les employés au pourboire.

M. Marcouiller: D'accord. Maintenant, en commission, ici, on a parlé beaucoup de l'impact des 15% sur les restaurateurs. Il ne faut pas perdre de vue que je présente un mémoire d'une association de travailleurs au pourboire. Ce travailleur, il est certain que ses premières priorités, un peu comme Mme Vadeboncoeur le disait, ce sont les siennes. Je comprends que pour l'Association des restaurateurs, c'est légitime de lancer que cela va la mettre en péril mais, hier, je pense qu'on a très bien mentionné que des commerces avaient fermé bien avant l'apparition dans le décor des 15% obligatoires. Encore une fois, je répète que nous sommes convaincus que ce n'est pas la cause.

M. LeBlanc: Mais, spécifiquement en fonction d'une augmentation éventuelle du chômage parmi vos membres, on a évoqué dans les premiers mémoires qui ont été soumis par les groupes syndiqués qu'il se fera un recyclage et que les établissements restants auront une augmentation de personnel. À la fin de l'opération et dans la période de transition, de disparition de certains établissements, est-ce qu'il ne restera pas des gens sur le carreau, sans emploi?

M. Marcouiller: Non, je ne le pense pas. Tous les organismes qui ont présenté des mémoires ici ont tenu à leurs convictions. C'est un peu dans ce sens que je dis, moi aussi, que je ne le pense pas. Vous savez, à un moment donné, j'ai entendu dire qu'en France cela se faisait. On avait boudé, on avait chialé, on avait critiqué pendant un mois, puis tout était revenu à la normale. Je ne sais pas ce qui pourrait arriver au Québec si, demain matin, les 15% étaient obligatoires. Nous le proposons comme une solution face au ministère du Revenu parce que, durant une Législature, on a des chiffres noir sur blanc, le ministère peut comptabiliser, percevoir les sommes qui lui sont dues. Le chiffre de 15% a été avancé par toutes les associations. On lance 15%, on tient à 15%. C'est certain que l'Association des restaurateurs, vous seriez très étonnés vous-mêmes, messieurs de la commission, si elle abondait dans ce sens. C'est la preuve qu'elle va défendre ses droits, un peu comme nous aussi, on va défendre nos droits.

Les implications que cela peut avoir, on les analyse ensemble et on est même prêts à faire partie d'une autre commission pour analyser encore plus profondément avec le ministère du Revenu toutes les implications.

Mais, dans un premier temps, on vous dit au moins de légiférer et qu'on ait un plancher. À partir de là, on pourra se rasseoir et ensemble, toutes les associations, essayer de s'entendre. Mais il est certain que chaque association revendique ses droits. Je ne peux pas appuyer l'Association des restaurateurs, elle ne nous appuiera pas.

M. LeBlanc: Je vous remercie, monsieur, et je remercie particulièrement madame qui nous a exposé son cas individuel. Je laisse la parole à d'autres, s'il y a d'autres commentaires.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Dans votre mémoire, vous accordez beaucoup de temps à cette question de poursuites et je vous en félicite, parce que cela a été mentionné par d'autres, mais vous êtes allés beaucoup plus en détail. Je n'aurai que quelques questions là-dessus.

Dans le livre vert, à la page 11, le ministère explique le processus de vérification. Pourriez-vous me clarifier quelques points? Je trouve ce système aberrant et inhumain; pourriez-vous me confirmer si mon opinion est correcte? Ils disent ici: "À partir du montant total des ventes déclarées dans un établissement, la contribution de chaque employé est fixée selon les heures de travail." Cela veut dire, selon moi, que tu peux avoir un employé qui vend très bien, qui attire la clientèle, tandis que, pour un autre, cela ne fonctionne pas bien, mais il a travaillé autant d'heures. Donc, le pauvre paie vraiment pour celui qui travaille bien. C'est notre première perception. Vous pourrez y répondre plus tard. Ensuite, on dit: On estime le taux de pourboire à 15%, tandis que tout le monde sait... Même moi, je suis un bon "tipper", mais je ne donne pas 15%. Je donne d'habitude 12% sur le total, la taxe comprise. Cela donne peut-être 15% net.

M. Marcouiller: Merci, M. le député.

M. Polak: Ce que je ne comprends pas, c'est que le gouvernement fixe obligatoirement 15% sur le total. Le fardeau de la preuve repose donc entièrement sur les épaules de la pauvre employée qui va dire: Écoutez, il y en a qui ne m'ont rien donné. Évidemment, nous ne sommes pas capables de prouver cela parce qu'il y a beaucoup de ventes qui se font en argent. C'est impossible d'établir cela. Si le ministère disait: On est d'accord avec l'Opposition, ce système est aberrant et inhumain et on veut faire quelque chose. D'un côté, on ne peut pas retirer ces poursuites carrément, parce que, tout de même, il faut qu'on paie des impôts sur le revenu. D'un autre côté, on est d'accord sur le fait que ce système ne fonctionne pas du tout, c'est un scandale. S'il disait: On va fixer cela, en tout et partout, pas à 15%, mais à 5%, on prend le bon et le mauvais, est-ce que ce serait acceptable, comme formule?

Dernière question: Jusqu'à quel moment va-t-il retourner en arrière? L'aspect rétroactif, je trouve cela un peu aberrant. Mme Vadeboncoeur a parlé de 6600 $. Cela couvre quelle période? Est-il retourné en arrière de trois, quatre ou cinq ans? Quelle est la ligne de conduite? Pouvez-vous rapidement répondre à ces questions?

M. Marcouiller: D'abord, dans votre première intervention, vous avez apporté vous-même la réponse. Le ministère a quantifié des montants. La dame disait justement: Je ne les ai pas faits. Vous avez apporté un élément de réponse. Dans un deuxième temps, vous parlez de 5%. Entre gens civilisés, il ne faudrait pas prendre les gens en face de soi pour des idiots. Vous avez vous-même dit que vous laissiez du pourboire. Ce serait bien stupide de dire que personne ne laisse de pourboire.

Quand on parle des poursuites des années antérieures, cela va jusqu'en 1976. On dit que c'est par convention. Les déclarations d'impôts sont faites depuis des dizaines d'années avec l'aide de comptables qui te disent: C'est toléré par le ministère. As-tu reçu un avis de cotisation l'an passé? Non. Alors, cela a passé. C'est indiqué: serveuse à tel restaurant. Le ministère est bien conscient que tu es un travailleur au pourboire. S'il avait voulu te cotiser, il aurait envoyé un avis de cotisation. En 1979, il décide d'envoyer des avis de cotisation. Je le répète, nous ne sommes pas contre le fait que vous vouliez percevoir des montants. C'est sur la méthode que le ministère a prise.

Je vous donne l'expérience de Trois-Rivières. Ils sont arrivés dans un restaurant. Ils ont pris les caisses de factures dans la cave, un peu dans la poussière et dans l'huile, et ils ont sorti un chiffre. Ils ont dit: II y a 500 000 $ de chiffre d'affaires. Il y a huit filles, chacune est imposable pour 60 000 $ de facturation par année. On établit cela a 15%, parce qu'on a relevé, pendant trois mois, sur des échantillonnages de cartes de crédit, que le pourboire de 15% était laissé. On va être bon prince. On m'a dit au téléphone: On va peut-être descendre cela à 12%, 12% de 60 000 $, voici le chiffre, c'est ce que vous devez payer pour les années antérieures. C'est là qu'on dit que c'est par convention, parce que le ministère du Revenu a, pendant des années, toléré cette situation. Les comptables, ce sont eux qui sont le plus à l'affût de tout ce qui sort du côté de la fiscalité, beaucoup de travailleurs au pourboire font faire leur

déclaration d'impôt par ces comptables et les paient en toute confiance. En plus, le comptable te dit: S'il y a quelque chose, ne t'inquiète pas, le gouvernement va te rejoindre et va te cotiser. Cela ne s'est pas fait. Du jour au lendemain, on veut cotiser. On n'est pas contre cela, mais contre le fait qu'il dise: On te cotise et, en plus, on va chercher les années antérieures, les années qu'on a tolérées, on ne les tolère plus. Si on peut reculer comme cela dans bien des secteurs, je ne pense pas qu'il y ait une évolution sociale au Québec. On va reculer au lieu d'avancer. Si on veut avancer, il faut dire: On s'assoit, on constate qu'on perd de l'argent. C'est légitime, de la part du ministère du Revenu, d'admettre qu'il perd de l'argent en ne légiférant pas. Légiférons, traçons des règles, peut-être un tableau, un plancher, on va avoir de quoi discuter et le travailleur au pourboire ne pourra même pas discuter; ça va être la loi. (11 heures)

M. Polak: D'accord, merci bien.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Terrebonne.

M. Blais Merci, M. le Président. C'est très difficile de séparer le rôle d'un député ministériel de positions, de faits ou de perceptions comme celles-là sans s'autocritiquer, parce qu'on fait partie d'un gouvernement. C'est sûr que vous faites ressortir là-dedans le côté un peu inhumain de la façon dont on perçoit ces cotisations. La politique fiscale des deux gouvernements, qui était de ne pas réclamer, c'était une tradition, et vous vous appuyez sur une tradition de non-perception pour faire vos revendications. J'y trouve une justification dans la base même de votre mémoire aujourd'hui, parce que le gouvernement, dites-vous, n'a pas de base fiable de répartition des pourboires antérieurs et que toute répartition serait faite presque, comme on pourrait dire entre nous, au pifomètre. Je comprends bien ce problème. Je suis content que vous nous disiez de regarder ça. On n'est pas placés pour prendre des positions; on est en période de consultation, bien sûr. On a tous des tendances personnelles, qui que l'on soit, autour de la table.

Quant à l'affaire du crédit futur, j'ai l'impression que le crédit d'impôt futur pour ceux qui ont déjà eu des perceptions me sourirait à moi, personnellement, en tant que député. Aussi, je suis surpris de m'avoir encore vu dans aucun des mémoires des gens au pourboire une demande pour un essai d'entente avec Ottawa en vue d'arrêter les perceptions et d'essayer d'attendre, de marquer un temps d'arrêt avant d'envoyer d'autres avis de cotisation pour tenter de s'entendre entre les deux gouvernements. Je pense que ce serait une bonne proposition à nous faire aussi.

Je pense que tout le monde ici, des deux côtés de la table, nous comprenons la situation de ceux qui ont des poursuites et nous trouvons ça humainement intolérable et malheureux. Là-dessus, je suis persuadé que tout le monde s'entend. Le ministre du Revenu aussi s'entend là-dessus avec nous, j'en suis persuadé.

Mais ce n'est pas là-dessus que j'en aurais. J'aurais une question beaucoup plus directe à vous poser. Nous sommes ici un peu comme "juges" à cette commission, indirectement et entre guillemets toujours -je ne veux pas m'approprier des titres que je n'ai pas - et nous entendons les patrons, nous entendons les employés. Dans les deux, il y a de bonnes choses; dans les deux, il y a de mauvaises choses. Mais ce mémoire-ci, vu que vous le braquez sur la situation des poursuites - à toutes fins utiles, il n'est braqué que sur ça - peut laisser croire - et je me demande si c'est ça que vous voulez nous dire par ce mémoire - que, les gens au pourboire étaient extrêmement heureux avant, que leur situation était très belle et que, si ces poursuites étaient toutes levées, la situation serait très belle et qu'on vit bien au Québec dans le monde au pourboire. Est-ce que c'est ça?

M. Marcouiller: Je ne peux pas approuver une chose comme ça, loin de là. Les gens au pourboire - je pense que la façon dont ils ont été cotisés individuellement le prouve, - n'avaient pas de ressources, n'étaient pas unis. Ils subissaient un métier, ils subissaient des lois - 3,28 $ l'heure au lieu de 4 $ parce que toi, tu as du pourboire - ils ne s'étaient jamais assis et dit: On va revendiquer des choses; maudit, on a droit à avoir des choses! Dans un sens, le ministère du Revenu a réveillé beaucoup de choses. Il y a quelqu'un hier qui a dit: Vous nous avez mis au monde. En un sens, sûrement que vous nous avez fait prendre conscience de beaucoup de choses. Mais ça fait longtemps que, aux normes du travail ou à l'assurance-chômage, on revendique les droits du pourboire. On dit les deux tiers du salaire. Savez-vous ce qu'on nous répond à l'assurance-chômage? Prouvez-le et apportez des attestations de votre employeur. Connaissez-vous la collaboration qui existe? Il n'y en a pas. Alors, la personne se présente au bureau et elle accepte les deux tiers de rien. Je comprends que vous disiez -peut-être sur un point - est-ce que ça allait bien avant ça? Non, ça n'allait pas bien. C'était loin de bien aller.

Maintenant, vous dites que nous avons braqué le mémoire sur les poursuites. Je suis content qu'on l'ait fait. Mais je vous précise qu'il a été fait en deux volets: une partie où on est contre les poursuites. On dit même pourquoi on est contre. Deuxièmement, on

vous dit qu'il est grand temps de légiférer et on vous apporte un élément de solution. Je ne voudrais pas que vous disiez que nous avons braqué le mémoire simplement sur les poursuites. Cela a peut-être été, dans un premier temps, les poursuites, mais, dans un deuxième temps, je pense qu'on propose des choses concrètes qui ont même été revendiquées par d'autres associations.

M. Blais: Une deuxième brève question sur le même sujet. On entend aussi que, dans l'ensemble, exception faite des poursuites, les travailleurs au pourboire ne sont pas si malheureux parce que plusieurs ont des bonnes places, c'est très rentable et ils sont très contents du système actuel. Deuxièmement, il y en a qui sont syndiqués et ont des salaires beaucoup plus élevés que le taux de 3,28 $. Troisièmement, dans toutes les entreprises familiales, les gens ont une vie très heureuse dans les restaurants. Il reste les autres, vous allez me dire. Mais, toutes proportions gardées, si on fait la somme de tout cela, est-ce que l'ensemble des employés au pourboire est malheureux dans le système actuel?

M. Marcouiller: Oui, c'est ce que j'ai précisé tantôt. Il ne faut pas croire, parce qu'il n'y avait pas d'associations, de regroupements ou de revendications, que tout allait bien dans ce sens-là. Cela a peut-être été l'élément pour partir, "starter", comme on dit, le mouvement, les avis de cotisation, pour simplement s'apercevoir, finalement, comme je l'ai entendu souvent: Maudit, je suis tanné de payer; on nous réclame toujours et on n'a rien à la fin. C'est un peu dans ce sens-là. Le travailleur au pourboire était conscient qu'il n'avait rien. Je pense que les avis de cotisation, pour les années antérieures en plus, cela a été la goutte qui a fait déborder le vase.

M. Blais: Je vous remercie. Je nous souhaite bonne chance vers une législation.

M. Marcouiller: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, je veux remercier M. Marcouiller - cela va dans le même sens, ce sont les mêmes réactions que mon collègue de Terrebonne - pour avoir axé son intervention, celle de l'Association des employés au pourboire de la Mauricie, résolument, au début du moins, sur les problèmes humains des travailleurs et travailleuses au pourboire.

Il est, pour ma part, extrêmement difficile de concevoir, en toute justice, le changement des règles du jeu implicites traditionnellement sanctionnées par les ministres du Revenu successifs et que, du jour au lendemain, on mette en branle la machine du fisc fédéral et la machine du fisc québécois sur le dos d'une classe de travailleurs qui non seulement ne gagnent pas beaucoup d'argent, mais le gagnent dans des circonstances, dans des situations extrêmement difficiles. Donc, l'intervention a le grand avantage de nous forcer à faire face à ce problème et de ne pas s'attarder à d'autres problèmes très importants qui ont été soulevés par d'autres intervenants, parce que c'était une tribune dont ils voulaient profiter, qu'ils voulaient utiliser.

Je n'arrive pas à imaginer que l'analyse coûts-bénéfices de l'exercice soit, en termes fiscaux, très positive pour le trésor public. C'est-à-dire que je me demande si ce qu'on paie en salaires, en services de contentieux, etc., aux employés du ministère du Revenu pour poursuivre l'étude du dossier des pourboires n'arrive pas sensiblement à totaliser le même montant d'argent qu'ils vont réussir, finalement, à récupérer de la classe des travailleurs en question. En tout cas, il ne s'agit que d'une goutte dans le contexte fiscal général.

Maintenant, le petit montant, c'est une chose. Parlons donc du principe. Si on impose des pénalités, si on exige des intérêts, si on veut revenir en arrière, c'est parce qu'on croit qu'il y a eu consciemment, sciemment une entrave à la justice, une désobéissance de la part d'un individu dans un contexte où on devrait raisonnablement imaginer qu'il aurait fait autrement. Or, la situation n'est pas celle-là. La situation me semble être qu'il y a une pratique courante qui a été sanctionnée implicitement, successivement sur toutes les déclarations de revenus faites par à peu près tous les travailleurs dans le domaine. Donc, pour rectifier une pratique courante dont toute la société a profité, on commence un par un à poursuivre les travailleurs et les individus et on les prend un peu comme les pommes d'un arbre. On ne sait jamais quelle pomme va être prise par quel niveau du gouvernement.

Les principes de responsabilité personnelle sous-jacents à notre système d'impôt me sont très chers. Je les opposerais, d'ailleurs, aux principes existant dans certains pays européens où il est présumé que c'est une espèce de jeu qui se joue entre le contribuable et le fisc et qu'à peu près tous les subterfuges possibles sont justifiés. Ce n'est pas notre système et je ne voudrais pas que cela le devienne. Mais si on veut que tous les citoyens respectent le système, encore faut-il que le système les informe de leurs obligations et responsabilités de façon systématique.

Quant à moi, je ne suis pas en mesure de prendre position sur l'avenir de la politique dans ce domaine, sur l'avenir pratiquement d'un contrat de travail décrété

par le gouvernement dans le domaine de la restauration. Voilà un sujet extrêmement complexe. Mais, pour ce qui est des poursuites, je demande au ministre d'arrêter cette espèce de harcèlement d'un travailleur après l'autre et je demande de geler la rétroactivité et de suggérer la même chose à son homologue fédéral. Je suis convaincu que le processus de sensibilisation parmi ces travailleurs s'est fait. C'est peut-être une bonne chose, malgré, encore une fois, que ce n'est qu'un petit nombre de personnes qui portent le fardeau par leurs problèmes personnels d'une prise de conscience qui aurait dû être faite de façon systématique par tous les intervenants du dossier, le législateur et le ministre les premiers.

J'imagine mal comment on va réussir à créer une situation susceptible d'améliorer les lieux de travail en question, les conditions de travail en question lorsque quelques individus paient un prix extrêmement élevé pour poursuivre certains principes qui, en toute honnêteté, ne peuvent pas s'appliquer à eux parce qu'ils n'ont pas été informés efficacement par l'État.

M. Marcouiller: M. le député, je vous remercie. Je pense que votre intervention se fait surtout vis-à-vis des députés en place. On a glissé, tantôt, un mot sur la proposition entre Québec et Ottawa. Tout ce qu'on a constaté, nous autres, c'est que, quand c'était le temps de se chamailler, ils étaient l'un contre l'autre; quand c'était le temps de percevoir de l'argent, ils se tenaient ensemble. Le principe de désobéissance auquel M. le député a référé tantôt, je veux bien le préciser encore. La personne, par convention, établissait son pourboire à 15% ou à 20% de son salaire brut et le mettait dans sa déclaration d'impôt et ceci était toléré. On en a la preuve que c'était toléré. Je ne vois pas là une désobéissance, ni une évasion fiscale de la part du contribuable. Je vois juste un manque de précision flagrant dans la réglementation pour la perception de cet argent.

Hier, on a débattu le terme frais de service et le terme pourboire. On a dit qu'il y avait des "peanuts". On a dit qu'il y avait d'autre argent. C'est dans ce sens qu'on vous dit: Légiférez pour qu'il y ait des définitions pour que tout le monde puisse prendre un document, avoir des lignes noir sur blanc et savoir qu'on va partir d'un plancher pour qu'on puisse éventuellement évoluer ensemble, toutes les associations existantes. Merci. (11 h 15)

M. French: M. le Président, seulement pour conclure là-dessus, mon collègue, le député de Maskinongé, m'a fait comprendre qu'il n'y a pas de principe fondamental mis en jeu par le moratoire qui est nécessaire. Il lui semble évident que, dans la mesure où les renseignements nécessaires n'étaient pas diffusés, disséminés dans le milieu, il ne s'agit pas d'une désobéissance consciente. Il s'agit de coutumes que nous avons tous utilisées à notre avantage, parce que, chaque fois qu'on entre dans un restaurant, on sait que les prix sont en fonction des coûts de l'employeur, et le coût de travail est, évidemment, un des plus importants dans ce domaine. Si on veut, à l'avenir, changer cet équilibre entre le consommateur, le restaurateur et les employés, qu'on le fasse devant tout le monde avec une approche qui est claire pour le tout le monde, qui va être débattue comme telle, et qu'on n'essaie pas de la rajuster rétroactivement d'une façon tout à fait répugnante comme on le fait actuellement.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marcoux: M. Marcouiller, je vous remercie à nouveau de la présentation de votre mémoire. Je vais, d'abord, répondre à la question que vous avez posée tantôt concernant le nombre d'avis d'opposition. Sur les 900 avis de cotisation émis depuis 1979 ou à peu près, il y a eu 250 oppositions de logées et, pour ces 250 oppositions, il y a environ 80% à 85% des cas qui sont réglés, c'est-à-dire soit qu'il y a eu une entente ou que l'opposition ait été réglée, ce qui fait environ 20% de cas qui restent à régler sur les 250 avis d'opposition.

Pour revenir aux questions fondamentales qui viennent d'être soulevées par votre mémoire, depuis deux jours, on a surtout parlé des solutions possibles pour l'avenir. Votre mémoire nous permet, ce matin, de discuter plus longuement du passé. En fait, c'est sûr que la situation est très difficile et qu'entre l'équité fiscale, l'arbitraire, l'humanité possible et le respect des lois, le jugement doit, évidemment, intervenir.

Je vais reprendre des choses que j'ai déjà dites mardi, mais, évidemment, comme les groupes varient, il y a peut-être une première chose à clarifier de façon très précise en ce qui concerne le ministère du Revenu du Québec. Cela n'excuse rien, mais je pense que cela situe le débat. À lire des déclarations ou des mémoires, on peut avoir l'impression que, depuis trois ou quatre ans, le ministère du Revenu du Québec a fait ce qu'on pourrait appeler une chasse systématique aux travailleurs et aux travailleuses au pourboire. Je ne crois pas qu'on puisse soutenir une perspective semblable. Comme je l'ai dit tantôt, nous avons émis environ 900 avis de cotisation et, comme on s'entendait à peu près sur le fait qu'il y a environ 60 000 à 70 000 travailleurs et travailleuses au pourboire et qu'il y a une très grande mobilité, même si

on parle d'une base annuelle de ce type de personnel, on ne peut pas soutenir - je le pense, en tout cas - qu'il y a eu une opération systématique entreprise auprès d'eux. J'ai dit que c'était à l'occasion de vérifications qui sont faites dans des restaurants et des hôtels donnés, pour d'autres motifs, qu'on vérifie l'ensemble de l'application des lois fiscales, ce qui est différent - je le donne juste comme information, sans arrière-pensée politique -de l'attitude de Revenu Canada qui procède différemment dans ses vérifications et qui établit des secteurs de population où il fait des vérifications durant quelques années, ce qui a conduit à la situation que vous savez.

En ce qui concerne les pénalités, je pense qu'il y a une chose qui doit être très claire. Lorsque le ministère du Revenu impose des pénalités, il n'indique pas par là qu'il y a eu fraude; il indique par là qu'il y a eu négligence. Lorsque le ministère est convaincu qu'il y a eu fraude, il entreprend des poursuites judiciaires et là, ce sont les tribunaux qui décident si le ministère a eu raison de juger qu'il y avait eu fraude. Si tel est le cas, le juge doit imposer une pénalité de 125% ou quelque chose comme cela, mais c'est au niveau judiciaire. Il n'y a eu, en ce qui concerne les travailleurs et les travailleuses au pourboire, aucune poursuite judiciaire d'intentée par le ministère du Revenu pour motif de fraude. Il y eu des pénalités dont vous avez parlé, comme pour l'ensemble des autres citoyens ou contribuables qui sont en défaut de payer leur impôt et qui se voient imposer une pénalité supplémentaire en intérêt.

En ce qui concerne la possibilité d'annuler - vous avez suggéré que la façon de rembourser pourrait être sous forme de crédit d'impôt - des avis de cotisation déjà émis, je serai très clair, comme je l'ai été mardi. Je me dois de le dire à nouveau: C'est sûr que la situation des travailleurs et des travailleuses au pourboire qui ont reçu ces avis de cotisation peut être difficile ou est difficile dans certains cas, j'ai reçu moi aussi des témoignages personnellement, mais il serait tout aussi arbitraire, face à l'ensemble des autres travailleurs du Québec - il y en a environ 600 000 qui sont près du salaire minimum et d'autres qui gagnent un peu plus que le salaire minimum, mais qui sont aussi des bas salariés - de dire: Pour un certain groupe de ces travailleurs, nous allons annuler ou oublier les avis de cotisation qui ont été émis à la suite d'enquêtes que le ministère du Revenu a faites. Je crois que cela deviendrait complètement arbitraire par rapport à d'autres avis de cotisation qui ont été émis à l'endroit d'autres travailleurs au Québec.

Il y a une chose qui doit être indiquée, c'est qu'avant que l'avis de cotisation soit émis, de façon normale, il y a une enquête de faite, il y a des discussions sur la base des données que nous avons. L'avis de cotisation peut être contesté. La loi prévoit une opposition possible. J'indiquais tantôt qu'environ le quart des personnes impliquées s'en sont prévalus, ce qui indique qu'il y a des recours. Lorsque la révision, à la suite de l'avis d'opposition, ne satisfait pas le citoyen, la contestation au niveau judiciaire est possible; ces moyens de recours existent.

Quant à l'arbitraire - on a parlé longuement des 15% - c'est le point de départ à partir duquel le gouvernement ou Revenu Québec fixe un montant possible d'avis de cotisation, mais ce n'est pas un point absolu et fixe, en ce sens qu'on tient compte d'autres facteurs qui font que, dans la plupart des cas, la moyenne des avis de cotisation émis correspondait à environ 8% ou 10% plutôt que 15% par rapport, disons, au chiffre d'affaires ou par rapport aux autres pourboires perçus. On tient compte du partage des pourboires; lorsque, dans une institution, il y a un partage des pourboires entre les différents employés, on en tient compte. On tient compte du type d'établissement; il y a des établissements où l'on sait que le pourboire, compte tenu de la nature des repas et de la clientèle, est plus élevé; pour d'autres, moins élevé. On tient compte de la nature de la clientèle. On tient compte du secteur où l'employé travaille. Les pourboires dans un bar et les pourboires dans un casse-croûte où on va dîner le midi sont différents. On tient compte de la période de travail de l'employé, etc. Donc, même si on part avec 15% et qu'on fait les déductions, en pratique, les avis de cotisation émis par Revenu Québec sont autour de 8% ou 10% plutôt que de 15%. Cela montre, en fait, qu'on tient compte d'une certaine réalité. J'ai indiqué tantôt les recours possibles.

Ce ne sont pas des situations faciles parce que si, aujourd'hui, nous sommes en commission parlementaire, s'il y a eu un livre vert, c'est parce qu'il y avait des problèmes importants, des problèmes, d'abord, pour les travailleuses et les travailleurs impliqués, mais pour le ministère du Revenu aussi. Si on est là, c'est pour essayer de trouver une ou des solutions pour l'avenir. Ce dont je peux vous assurer, c'est que vous nous avez demandé d'agir. Je me suis engagé, au début de cette commission, à agir. Vous pouvez être assurés que j'ai la volonté ferme d'arriver avec des recommandations au Conseil des ministres, parce que le seul engagement que j'ai pris depuis le début de la commission, c'est que le statu quo ne dure plus, parce que le statu quo perpétue l'inéquité fiscale et l'inéquité sociale. C'est peut-être facile de dire cela, mais je peux vous assurer qu'à la lecture de l'ensemble des mémoires et à la suite des contacts que j'ai pu établir depuis un mois

ou un mois et demi que je suis responsable de ce dossier, il pourrait être tout aussi facile de s'enfarger dans des études subséquentes, dans des consultations perpétuelles, dans le non-consensus des solutions proposées pour justifier le statu quo.

Je suis convaincu que, pas simplement parmi mes collègues, mais parmi la population, parmi les consommateurs, parmi même les travailleurs et travailleuses au pourboire, il peut y avoir une large proportion de gens qui peuvent favoriser le statu quo. Je peux vous assurer qu'en ce qui me concerne cela ne dépendra pas de moi si on en demeure au statu quo et qu'il y a une volonté d'agir le plus rapidement possible. Même si les consultations doivent se poursuivre entre nous et vous sur les modalités d'une solution ou de solutions qui pourraient être recommandées, je n'ai pas l'intention de prendre prétexte de ces consultations que nous devrons maintenir pour ne pas agir. Quant aux questions qui étaient soulevées dans votre mémoire, elles ont été posées par mes collègues. Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): M.

Marcouiller.

M. Marcouiller: Merci, M. le ministre. Je voudrais terminer en disant que, concernant les avis de cotisation que vous avez totalisés autour de 900, et 250 pour les avis d'opposition qui approchent les 30% de mécontentement, vous êtes conscient que la petite boule de neige est partie de cela. Peut-être que, dans six mois, ce sera 30% ou 40% de tous les travailleurs au pourboire qui vont faire des avis d'opposition. Un peu comme M. le député le disait tantôt, on voit à un moment donné apparaître dans le décor une grosse machine administrative, bureaucratique pour peut-être voir la récupération finalement de quatre trente sous pour une piastre. Dans le sens qu'on disait, par convention, cela avait toujours été toléré, les 10% ou 15% déclarés en pourboires sur le revenu. C'est pour cela qu'on dit que le gouvernement, en envoyant des avis pour les années antérieures, brise une convention existante. Nous ne sommes pas contre le fait, encore une fois, que vous envoyiez des avis de cotisation lorsque vous croyez que les gens ont fraudé. Nous sommes d'abord contre la méthode qui a été employée et sur le principe de dire: On recule pour les six années antérieures. Je vais vous demander à ce moment de reculer pour vingt années, parce que cela fait 50 ans que le métier existe.

Nos revendications contre le bris des conventions existantes, on s'accroche à cela, parce que beaucoup de gens se sont accrochés aussi à l'importance des conventions existantes. J'en ai fait mention tantôt dans les politiques entre Québec et Ottawa. On a vu ce qu'on faisait avec les conventions. On ne voudrait pas, non plus, se faire passer la même chose, dans le sens qu'on cotise et qu'on recule six années en arrière. Je termine en disant en mon nom et au nom de mes collègues, merci à cette commission pour nous avoir permis d'exprimer notre point de vue. Vous pouvez être assurés de notre collaboration pour tous les gestes conséquents de la commission. Je vous remercie messieurs les députés, messieurs les ministres. (11 h 30)

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marcoux: M. Marcouiller, j'aimerais ajouter un élément d'information concernant précisément l'information. Vous dites comme il n'y a pas eu suffisamment d'information dans le passé sur la nécessité, l'aspect de la loi...

M. Marcouiller: Ce n'est pas moi qui ai insisté sur le manque d'information, c'est M. le député. J'ai dit que par convention, il y avait des choses établies. C'est M. le député qui a parlé du manque d'information.

M. Marcoux: En tout cas.

Le Président (M. Gagnon): On va laisser la parole au ministre.

M. Marcoux: Je n'ai pas d'objection à ce qu'il intervienne. C'est justement, je voulais avoir sa version. Dans les formulaires d'impôt de Revenu Québec, comme dans les documents d'information, on a toujours eu cette information depuis des années à l'effet que le pourboire et les gratifications font partie des revenus imposables. Plus récemment, depuis déjà trois ou quatre ans, c'est un débat public. Je crois qu'on ne peut pas dire maintenant qu'il y ait beaucoup de travailleurs et travailleuses au pourboire qui ignorent le fait que la totalité de leurs revenus de pourboire est imposable. Et pourtant, pour l'année d'imposition 1981, il y a 18 000 travailleurs et travailleuses au pourboire sur environ 65 000, 70 000, qui ont révélé des revenus de pourboires pour environ 14 000 000 $, ce qui est 2 700 000 000 $ selon nos évaluations des chiffres d'affaires de ce secteur. Si on enlève 700 000 000 $ pour les "fast-foods", etc. disons environ 2 000 000 000 $. Cela est nettement inférieur en comparaison aux revenus de pourboires. Même dans des mémoires, hier, on indiquait qu'il n'y aurait pas de problème à décréter un 15% obligatoire sur la facture en abaissant la taxe de vente à 5%, puisque de toute façon, cela ferait simplement une augmentation de 10%, reconnaissant clairement, à ce moment,

entre autres - c'était le mémoire de la région de Québec de la C5N - même pas implicitement, qu'il y avait un pourboire d'environ 10%. Le pourboire est environ à 10% actuellement. C'est peut-être mon troisième motif pour dire que le statu quo, vous pouvez en être assuré, j'ai la conviction qu'il doit cesser, parce que malgré l'information qu'il a pu y avoir, indépendamment du ministère du Revenu, mais sur l'ensemble de la question qui est étudiée depuis deux ou trois ans, le nombre de travailleurs au pourboire qui révèlent leur revenu de pourboires comme la proportion des revenus révélés est vraiment différente de ce qu'elle devrait être normalement.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: M. le ministre, depuis qu'on est ici, avant-hier hier, et aujourd'hui, ce problème des poursuites, des cotisations vient dans presque chaque mémoire, des deux côtés, même des hôteliers. Cela veut dire que c'est un gros problème. Vous, ce matin, vous m'expliquiez qu'il y avait 900 cotisations à Québec et 250 oppositions.

M. Marcoux: Dont 80% des oppositions réglées.

M. Blank: Je suis étonné qu'il y ait même 250 oppositions c'est un peu illusoire. Pour commencer, on doit payer avant et cela prend trois, quatre ans avant d'aller en cour. On doit engager des avocats, des comptables. Comme M. Jolin l'a dit, hier soir, son affaire était de 7300 $. Ce n'est peut-être pas une fortune pour le ministre mais pour lui, c'en est une. S'il doit engager un avocat ou un comptable, cela va lui coûter plus que 7300 $ pour régler son affaire. Et dans toutes les remarques des intervenants, on a noté qu'il y avait quelque chose qui ne marchait pas dans cette affaire. On parle de 10%, et 15%. Le contribuable était en vacances quand on est venu le cotiser pour des factures qu'on ne trouvait pas. C'est très difficile pour ces gens de faire la preuve. Mais on est ici, devant 900 personnes, sur un cas d'espèce.

Je ferais une suggestion. Je suis d'accord avec le ministre. On ne peut pas annuler les cotisations parce que cela serait un précédent. Il y a d'autres travailleurs qui ont des problèmes de cotisation, mais si on avait un groupe bien identifié... Vous dites que le fédéral les identifie pour suivre un groupe. Dans certains secteurs, comme les médecins ou autres, vous avez un groupe de 900 personnes. Pourquoi ne suspendrait-on pas les procédures en donnant l'étude des cas à une ou deux personnes indépendantes? Pas à des fonctionnaires du ministère parce qu'il y a toujours cette possibilité qu'on ne veut pas se déranger mutuellement, etc. Il s'agirait de nommer un ombudsman fiscal dont la tâche consisterait à étudier ces cas avec un esprit large pour constater s'il n'y a vraiment pas quelque chose qui ne marche pas dans cette affaire. Cela coûterait moins cher que de poursuivre ces oppositions à la cour. Cela ne donne peut-être pas raison, mais cela donne au moins satisfaction à ces personnes.

M. Marcoux: Sur les avis d'opposition, on dit qu'il y en a eu 900 d'émis par Revenu Québec, qu'il y en a eu 250 en avis d'opposition, cela veut dire qu'en partant, il y en a eu 650 cas où il y a eu des ententes de paiement ou des paiements et que sur les 250 en avis d'opposition, il y en a déjà 80% de réglés, soit, encore là, en paiement ou en entente sur paiement. Ce que je peux dire et, je l'avais déjà indiqué mardi, l'engagement que je peux prendre est que -évidemment, il n'y a pas une infinité de cas, au point de vue des ententes sur paiement -le ministère du Revenu doit agir de la façon la plus humanitaire possible en protégeant quand même le principe que tout citoyen qui doit des impôts est dans l'obligation de les payer. L'engagement que j'ai pris, mardi, je suis prêt à le renouveler et, en ce sens, je pense qu'il y a des attitudes importantes qui peuvent être prises.

M. Blank: M. le ministre, je pense que nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde. Vous parlez d'ententes, de règlements. Si vous parlez des ententes sur un règlement pour payer le montant demandé, moi et ces messieurs parlons d'autre chose. Doit-il le montant pour faire une entente? Parce que si le monsieur ne peut se défendre, si on avait toute la pression du ministre du Revenu avec ses fonctionnaires, etc.

M. Marcoux: Non. Vous êtes très clair...

M. Blank: ... c'est facile de forcer une entente sur paiement, mais je pars du fond de l'affaire. L'argent est-il dû?

M. Marcoux: Sur les montants dus, il y a des discussions entre les fonctionnaires de Revenu Québec et les personnes qui reçoivent des avis de cotisation. Il est fréquent qu'il y ait des modifications à l'avis de cotisation émis à la suite des représentations qui nous sont faites. Lorsque j'ai dit qu'on part de 15% et que la moyenne réelle au niveau des cotisations est de 8% ou 10%, c'est parce qu'on tient compte des représentations qui nous sont faites indiquant la période travaillée, par exemple, par l'employé, l'ensemble des facteurs dont il faut tenir compte, le type de clientèle, etc.

M. Blank: Seulement une dernière

remarque. Il semble que le ministre est satisfait des ces arrangements, mais il semble qu'il y ait des clients de l'autre côté de la barre qui ne le sont pas.

M. Marcoux: M. le député de Saint-Louis, je comprends humainement que les personnes qui sont ici... D'ailleurs, je l'ai dit dès le début de mon intervention, tantôt, s'il y a une commission, s'il y a 25 groupes et des individus qui sont venus nous présenter des mémoires, ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de problème. Je pense que le livre vert reconnaît qu'il y a des problèmes importants que vivent des personnes et un groupe de travailleurs. Alors, je pense qu'on n'a pas nié les problèmes qui existent.

Le Président (M. Gagnon): M.

Marcouiller, avant de vous laisser la parole, si vous me le permettez, je passerais au député de Viger. Vous pourrez réagir peut-être à deux ou trois interventions. M. le député de Viger.

M. Maciocia: Seulement deux petites précisions que je voudrais obtenir de la part du ministre. Vous avez dit tantôt qu'il y a eu 250 avis d'opposition et que 80% de ces avis sont réglés. Ma première question est la suivante: Combien de ces 80% ont été réglés à la satisfaction des contribuables? Deuxièmement, combien y a-t-il de fonctionnaires au ministère du Revenu travaillant sur ce dossier des gens au pourboire actuellement?

M. Marcoux: Sur le dossier des travailleurs au pourboire?

M. Maciocia: C'est cela.

M. Marcoux: Alors, je vais essayer d'obtenir les renseignements précis que vous me demandez et de vous les donner au cours de la journée.

Le Président (M. Gagnon): M.

Marcouiller.

M. Marcouiller: Merci, M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi. M. le député de Viger.

M. Marcoux: Vous me demandez sur les 80% d'avis d'opposition qui sont réglés, combien l'ont été par entente et combien par décision du comité de révision? Votre deuxième question est la suivante: quelle est le nombre de personnes qui y travaillent? En fait, sur 4500 fonctionnaires, il y en a plusieurs qui travaillent à la vérification dans le domaine... Ce que je vais plutôt vous donner comme renseignement, c'est le nombre de personnes qui travaillent dans la vérification dans le domaine de la restauration, parce qu'on n'a pas d'employés qui travaillent uniquement à la vérification des travailleurs au pourboire. Il n'y a pas de secteur au ministère pour fouiller les dossiers des travailleurs au pourboire. Il y a un secteur de vérification, entre autres, dans le domaine de la restauration. Il arrive que nous vérifions des institutions d'hôtellerie et de restauration et, à cette occasion, on regarde le chiffre d'affaires et les revenus révélés en pourboires. Disons que ce deuxième chiffre va certainement être beaucoup plus vague et imprécis parce que nous n'avons pas de section spécialisée pour les travailleurs et travailleuses au pourboire. Nous avons une section spécialisée à la vérification dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie.

Le Président (M. Gagnon): M.

Marcouiller, là, vous avez la parole.

M. Marcouiller: Merci, M. le Président. Je suis content du débat qui s'engage ici à la table, parce que ça promet d'être bon à l'Assemblée nationale. Vous pouvez être assurés qu'on va suivre le dossier de très près.

M. Marcoux: On vous fait confiance.

M. Marcouiller: Pardon?

M. Marcoux: On vous fait confiance.

M. Marcouiller: Les 18 000 employés au pourboire qui ont déclaré des pourboires -dans votre intervention tantôt, M. le ministre - je suis conscient qu'il y en a plus que les autres années qui ont déclaré des pourboires à l'impôt et je pense que le mouvement est amorcé. Mais on est là aussi pour demander ce que ces 18 000 employés au pourboire, qui en ont déclaré, ont reçu en retour actuellement. Pas grand-chose encore une fois. Et c'est à cela que je voudrais qu'on s'attache beaucoup.

M. Marcoux: D'accord, si vous le permettez, même si on prend beaucoup de temps pour votre mémoire, je pense que vous attendez des questions de fond qui vont être utiles pour le reste de la journée. J'ai reconnu, et le gouvernement le reconnaît, qu'en ce qui concerne les avantages sociaux, la Régie des rentes du Québec, les accidents du travail, l'assurance automobile, vous n'êtes pas traités actuellement comme l'ensemble des autres travailleurs du Québec et vous n'êtes pas cotisés comme l'ensemble de ces autres travailleurs. Mais par rapport à l'impôt sur le revenu des particuliers, jusqu'à maintenant, vous avez payé de l'impôt sur le revenu sur la base du salaire minimum et

des pourboires révélés. Par contre, comme tous les autres citoyens du Québec, vous avez eu les mêmes services de l'ensemble du secteur de la santé et du secteur de l'éducation. Par rapport à l'impôt sur le revenu, il y a un aspect d'inéquité fiscale parce que, comme citoyens, vous avez eu droit à l'ensemble de ces services. Par rapport aux avantages sociaux, je suis entièrement d'accord avec vous pour dire qu'il y a un traitement d'inéquité entre vous et les autres travailleurs du Québec.

M. Marcouiller: Merci, M. le ministre, et je termine en disant encore merci à la commission.

Le Président (M. Gagnon): Vous n'avez pas encore terminé parce qu'il y a d'autres questions qui vont venir.

M. Marcouiller: Ah bon!

Le Président (M. Gagnon): J'ai des intervenants.

M. Marcouiller: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): Alors, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je tiens compte que dans la majorité des mémoires présentés jusqu'à maintenant il y a deux points qui ressortent constamment, celui qui touche les avantages sociaux des emloyés, serveurs et serveuses dans l'hôtellerie et dans la restauration, et la question qui revient toujours, soit celle des cotisations.

Quand on mentionne, M. le Président, qu'il n'y a pas de précédent pour tenir compte que les impôts dus doivent être payés, c'est un fait. Mais il n'en reste pas moins qu'il y a eu des conventions, des tolérances jusqu'au moment où le ministère a décidé d'accaparer des revenus additionnels par l'entremise des travailleurs au pourboire, serveurs et serveuses.

Quand je dis "précédent", M. le Président, c'est qu'en 1958, alors qu'il y avait une taxe de vente au Québec d'environ 2% et que la majeure partie des petits marchands et des petits commerçants ne faisaient pas leur rapport ou leur remise, on avait utilisé un peu le même procédé. Les marchands avaient été envahis par des inspecteurs, on avait envoyé des avis de cotisation et je me souviens qu'à ce moment-là des ententes avaient été faites à l'amiable: on a oublié en partie le passé, il y a eu des cotisations symboliques de faites et on a averti qu'à compter de telle date le ministère serait très vigilant quant à la récupération de ces taxes. On sait, M. le Président, qu'à ce moment-là la majeure partie des provinces canadiennes n'avaient pas de taxe de vente, qu'une taxe de vente existait uniquement au Québec. C'est un peu le même procédé qu'on emploie aujourd'hui. (11 h 45)

J'irai un peu plus loin que mon collègue quand, tantôt, il demandait le nombre de personnes affectées à la recherche ou à l'émission des avis de cotisation dans le domaine de l'hôtellerie. Nous traitons d'un aspect tout à fait particulier, ce matin, mais le même ministère du Revenu, actuellement, remonte à dix, douze et quatorze ans en arrière pour réclamer de l'argent des citoyens du Québec qui n'ont reçu aucun avis de cotisation au cours des dix ou douze dernières années.

M. le Président, cela ne touche pas uniquement les serveurs et les serveuses dans la restauration; cela touche les citoyens, globalement, au Québec. J'aimerais savoir, parce que je l'ai lu, à titre d'information -M. le ministre, cela reste à confirmer - s'il est vrai qu'on a affecté 500 "tablettés", c'est-à-dire des fonctionnaires de différents ministères qu'on a envoyés à votre ministère, simplement pour faire de la perception. Tenant compte que les négociations dans les secteurs public et parapublic, actuellement, sont plutôt à l'état chaud, n'y a-t-il pas un abus de vos fonctionnaires quant aux avis de cotisation et aux appels téléphoniques qui sont faits? Dans plusieurs cas, je vous avoue que c'est une inquiétude pour celui qu'on appelle. Comme l'a laissé entendre M. Jolin, hier soir, pour quelqu'un qui n'est pas habitué à se faire traiter de tous les noms et qui se fait appeler subitement pour se faire dire qu'il doit 2000 $ ou 2500 $ au fisc, pour un petit travailleur, c'est énormément d'argent dans le contexte économique actuel où il doit aller emprunter à 15%, 16%, 18% et 20%, si ce n'est pas plus. M. le Président, j'aimerais que le ministre du Revenu nous informe du nombre de fonctionnaires de tous les services du gouvernement qui ont été affectés à son service pour faire de la perception.

D'une part, je souhaiterais énormément que ce qui se passait dans le passé, la tolérance dont on a toujours fait preuve... Vous mentionniez qu'il y a un certain nombre de serveurs et de serveuses qui faisaient certaines déclarations. Mais on n'a pas tenu compte, M. le ministre, d'aspects importants dans les avis de cotisation que vous envoyez, des dépenses qu'auraient pu réclamer les serveurs et les serveuses, normalement, relativement à l'habillement, aux chaussures, aux vêtements ainsi qu'aux frais de déplacement. Pour quel montant de ces services ont-ils été cotisés alors qu'ils n'ont pas pu déclarer une dépense ou baisser les revenus comme tels? Ces mêmes serveurs et serveuses n'ont pas reçu d'avantages sociaux sur les montants pour lesquels vous les

cotisez aujourd'hui. S'il y en a qui ont été malades ou qui ont été chômeurs, à l'époque, ces derniers n'ont pu bénéficier de montants additionnels. Le ministère du Revenu, sans pour autant créer une évasion à la fiscalité ou au fisc, devrait sûrement conclure des ententes à l'amiable en tenant compte des montant symboliques pour montrer qu'il est sérieux et qu'à l'avenir tout le monde paiera ses impôts. Pour la façon dont vous le faites actuellement, M. le ministre, ce n'est pas vous que je blâme personnellement, parce que le ministre Fréchette, qui a commencé le ravage, est parti. C'est vous qui restez avec le pot. Je vous dis qu'on vous a passé la "canne" à vers et c'est vous qui êtes pris avec. Effectivement, il y a des façons de traiter le problème et je pense qu'il faut arrêter de harceler le petit contribuable, au Québec, celui qui est peut-être le moins bien nanti.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre, M. le député de Sainte-Anne a une question à vous poser et vous pourrez répondre en même temps. M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le ministre, je veux simplement ajouter à ce que le député de Hull a dit. Je ne comprends pas cet aspect rétroactif à 1976. Pourquoi 1976 comme année magique? Je ne voudrais pas me moquer de vous autres en disant qu'avant 1976, cela allait bien. C'est l'année de l'arrivée du régime péquiste, mais là on remonte à six ans...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne, je voudrais vous dire aussi que le mandat de la commission, c'est surtout d'entendre les témoins et, actuellement, on est en train de faire une discussion entre les membres de la commission, discussion qu'on pourrait faire en d'autres temps. Plusieurs témoins voudraient se faire entendre.

M. Polak: La seule chose que je veux ajouter, M. le Président, c'est l'aspect rétroactif à 1976 quand on sait que ces gens-là ne sont même pas en mesure de faire la preuve de la cotisation. C'est presque impossible. Tout le monde le sait très bien. Nous n'avons plus de documents d'il y a six ans.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Dernière réaction à ce mémoire parce qu'il va falloir y mettre fin très bientôt.

M. Marcoux: C'est surtout par rapport aux questions qui ont été soulevées. Concernant l'opération de perception entreprise au ministère du Revenu depuis quelques mois, je dois confirmer - je pense que c'était déjà connu, mais, en tout cas, si ce n'était pas suffisamment connu, on n'a aucune objection à le faire connaître - qu'au printemps dernier le ministère du Revenu s'est employé à mettre en oeuvre, en place, une équipe pour la perception des comptes dus au ministère du Revenu. C'étaient des comptes qui pouvaient remonter à quelques années ou à plusieurs années, c'est-à-dire des impôts qui étaient dus. Je peux vous assurer de deux choses: d'abord, par rapport à la quantité de personnes impliquées, la façon dont cela s'est déroulé, on a demandé à tous les ministères qui avaient du personnel qu'ils voulaient mettre en disponibilité de les référer au ministère du Revenu et il y a environ 110 à 120 fonctionnaires qui sont venus d'autres ministères et qui ont été affectés à cette opération et en plus, nous avons gardé environ 300 à 350 occasionnels pour cette opération.

Concrètement, cela a commencé en juin, juillet et, jusqu'à maintenant, 50 000 000 $ environ ont été payés par des gens - il y a des cas d'il y a quatre ans, cinq ans, d'autres de trois ans, d'autres de deux ans - qui avaient déjà eu des avis de cotisation du ministère du Revenu qu'ils n'avaient pas payés. Je me dis une chose: Je n'ai pas ici la quantité de citoyens que cela peut impliquer, mais si un bon nombre de citoyens ont versé 50 000 000 $ sur des avis de cotisation qu'ils avaient déjà eus dans le passé, mais qu'ils avaient omis de payer, je pense que cela indique que nous avions raison de mettre, en somme, de l'ordre dans nos comptes de perception.

Quant à la question que vous soulevez par rapport aux dépenses que doivent faire les travailleurs et travailleuses au pourboire en termes de vêtements, etc., cela peut être regardé, mais, actuellement, il y a une mesure qui est appliquée pour l'ensemble des travailleurs au Québec qui fait que, pour tout gain de travail, on peut déduire jusqu'à 3%, avec un maximum de 500 $ par année, pour des dépenses impliquées par le gain de travail. Cela, c'est sans preuves, évidemment. C'est automatique, quelqu'un qui gagne 10 000 $ peut déduire 300 $ de son revenu imposable, cette somme étant supposément des dépenses pour un gain de travail. Les travailleurs et travailleuses au pourboire sont admissibles parfaitement à cette déduction générale face au gain de travail pour l'ensemble des travailleurs. Je crois avoir touché les principaux points.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Le dernier mot, je vous le laisse, M. Marcouiller.

M. Marcouiller: Pour la troisième fois, je vous dis merci encore de votre attention.

M. Marcoux: Je vais vous dire une

chose: C'est souvent dur pour les députés d'écouter durant trois jours. J'ai l'impression que nos collègues voulaient échanger ce matin.

Le Président (M. Gagnon): Rapidement, M. Marcouiller.

M. Marcouiller: Quatrième fois, merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci infiniment de votre présence et de votre témoignage devant cette commission. J'invite maintenant le Conseil régional de développement de l'Estrie.

M. Lachance: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: ... ce n'est pas du tout pour essayer de bâillonner de quelque façon que ce soit ni les membres de l'Opposition, ni les membres du parti ministériel, ni encore moins les gens que nous entendons, mais si je regarde l'ordre du jour que nous avons aujourd'hui, il resterait sept groupes sans doute très intéressants à entendre. Moi, je vous ferais la suggestion, M. le Président, de demander au porte-parole de l'Opposition et peut-être au ministre s'il y avait possibilité durant trois ou quatre minutes de se réunir pour essayer de faire une espèce de partage équitable du temps. Autrement, on risque d'escamoter, ce qui serait malheureux, les derniers mémoires qui doivent être entendus aujourd'hui.

Le Président (M. Gagnon): Absolument. D'ailleurs, M. le député de Bellechasse, je dois vous dire que j'entends être un peu plus sévère sur les prochains mémoires pour qu'on ne se parle pas entre nous, mais qu'on interroge surtout nos témoins. M. le député de Westmount, aviez-vous quelque chose à ajouter là-dessus?

M. French: J'ai une suggestion pour mon collègue de Bellechasse, c'est que le Parti québécois fasse ses consultations en privé, plutôt que de gaspiller le temps de la commission en venant témoigner comme avec le mémoire no 7.

Une voix: Ce n'est pas gentil.

M. French: Oui, c'est cela. C'est ma suggestion.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! M. le ministre, aviez-vous demandé la parole là-dessus? M. le ministre.

M. Marcoux: Deux remarques. Je pense que l'intention du député de Bellechasse est saine, sauf qu'il est bon que dans une commission semblable on prenne, à un moment donné, une demi-heure ou trois quarts d'heure pour faire le point sur une question. Souvent, cela nous permet d'aller plus vite pour les autres mémoires qui, la plupart du temps, touchent les mêmes sujets. Je ne pense pas qu'on ait perdu les trois quarts d'heure ou l'heure supplémentaire qu'on a consacrée ce matin à ce mémoire. Je pense qu'il pouvait rejoindre les préoccupations des dix autres mémoires qu'on a déjà entendus et de ceux qui vont venir.

Quant à la remarque du député de Westmount, à moins qu'on ne décrète que les membres du Parti québécois ne sont plus des citoyens comme les autres au Québec et qu'ils ne peuvent plus se faire entendre, je ne crois pas que c'est le mémoire présenté par un groupe de la région de Montréal-centre qui fera que le temps de cette commission soit mal consacré. Franchement, c'est un peu déplacé.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Rendu à ce moment-ci, avant de donner la parole aux gens de l'Estrie, je me demande si on doit suspendre à midi, compte tenu que l'Assemblée...

Une voix: ...

Le Président (M. Gagnon): On se rend à 12 h 30? On m'a mentionné que le Parti libéral avait un caucus.

M. Blank: II est à 13 heures.

Le Président (M. Gagnon): À 13 heures?

M. Marcoux: Ne mangez-vous pas avant?

M. Polak: II faut manger quelque chose et après, les questions au ministre.

M. Marcoux: Parce que vous ne vous mangez pas entre vous autres?

Une voix: Nous autres, on mange au caucus.

M. Blank: On pourrait dire 12 h 15. On se donne 20 minutes.

Le Président (M. Gagnon): On pourrait entendre le mémoire et, par la suite, vous pourriez revenir pour les questions.

M. Blank: Ils pourraient peut-être en faire le résumé.

Le Président (M. Gagnon): Mme Estelle Gobeil, je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent - je vous souhaite d'abord la bienvenue à cette

commission - et de faire la lecture ou le résumé de votre mémoire, ce qui veut dire que vous auriez environ quinze minutes pour le faire.

Conseil régional de développement de l'Estrie

Mme Gobeil (Estelle): M. le Président, M. le ministre, Mme la députée, MM. les députés, d'abord, je vous remercie de certaines remarques que vous avez faites entre vous. Je vous dirai ceci: Je suis levée depuis 4 heures ce matin pour présenter un mémoire qui concerne toute une collectivité et je vous avouerai franchement que vous auriez avantage à vous brancher un peu. En plus du travail qu'on a fait - depuis le mois de mai qu'on travaille là-dessus - s'il faut écourter notre mémoire, vous admettrez, là aussi, que c'est assez pénible. De toute façon, c'est la vie. Je commence immédiatement. Mes collègues sont le directeur général, M. Roch Fortin et le professionnel, M. Myroslav Smereka.

Brièvement, je vais aussi, parce qu'en vous écoutant j'ai compris une chose; il fallait que quelqu'un fasse une synthèse et je vais la faire.

Des voix: Ah! Ah!

Mme Gobeil: Le Conseil régional de développement de l'Estrie désire remercier le ministère du Revenu de l'occasion qui lui est offerte aujourd'hui de présenter ses réflexions et commentaires sur le livre vert sur la situation au Québec des travailleurs et des travailleuses au pourboire.

Avant de passer à notre exposé comme tel, permettez-moi, M. le Président, de vous présenter brièvement le Conseil régional de développement de l'Estrie. Créé et incorporé sous la loi québécoise en 1967, le conseil a reçu le mandat de travailler en concertation au développement socio-économique de la région administrative 05. Le conseil régional est animé par un conseil d'administration de 32 membres et il dessert une population de plus de 229 600 personnes réparties dans les 105 municipalités des 6 comtés municipaux de l'Estrie, à savoir, Compton, Frontenac, Richmond, Sherbrooke, Stanstead et Wolfe.

Aux fins d'atteindre son objectif, le conseil régional promouvoit les études et interventions nécessaires portant sur les problèmes et réalités qui concernent plus d'un secteur socio-économique. De plus, il administre, au bénéfice des Estriens, différentes campagnes d'information relatives aux sujets traités. Déjà, M. le Président, le

Il mai dernier, le conseil publiait un document intitulé "La question du pourboire: un défi pour la concertation", dans lequel le conseil abordait les questions du marché de la restauration, du marché du travail du secteur de l'hôtellerie-restauration, de la motivation derrière la pratique du pourboire ainsi que quelques réflexions sur l'ensemble de la problématique du pourboire.

Notre conclusion était que "la solution recherchée risque d'être fort complexe et, en conséquence, toute décision discrétionnaire et unilatérale s'y rapportant n'engendrerait que de nouveaux problèmes. Le conseil recommandait également un éventuel projet élargi de concertation sur la question du pourboire. Le livre vert a alimenté la réflexion sur la question, et la tenue de la commission parlementaire manifeste concrètement la volonté de concertation qui doit animer dans ce cas la prise de décision. (12 heures)

Le Conseil régional de développement de l'Estrie souhaite saisir la commission parlementaire des trois dimensions de la problématique du pourboire qui nous amèneraient à rejeter à long terme - je dis bien à long terme, et j'insiste sur cela -pour faciliter vos questions et votre compréhension - à cause de leur caractère partiel, les quatre hypothèses du travail du livre vert. Ces trois dimensions sont les suivantes: 1. Le pourboire, pivot ou bouc-émissaire des relations entre employeurs et employés, entre les consommateurs et le gouvernement; 2. Les employés au pourboire dans la petite entreprise de la restauration et de l'hôtellerie versus la grande entreprise; 3. L'Association des restaurateurs du Québec et le contrôle du marché de la restauration.

Même si vous avez beaucoup de travail, je tiens pour acquis que vous avez lu le mémoire. Je passe donc les pages 2 et 3, parce que c'est le contenu du livre vert que vous devez connaître. Je reviens à la page 4 où je situe le pourboire.

Le Président (M. Gagnon): Si vous me donnez 30 secondes, je voudrais vous mettre parfaitement à l'aise. Même si je vous ai dit d'essayer de résumer en 15 minutes, vous avez aussi le droit de vous faire entendre, alors, allez-y, prenez le temps qu'il faut.

Mme Gobeil: Je vous remercie, M. le Président.

À la page 4, au dernier paragraphe, je situe le pourboire. Il faut donc s'arrêter sur le lien existant entre le salaire de base que reçoit le travailleur au pourboire et le pourboire en tant que tel. Selon le livre vert, les travailleurs au pourboire reçoivent un salaire minimum légal inférieur à celui légalement reçu par les autres travailleurs: 3,28 $ versus 4 $, en raison de l'existence d'une deuxième source de revenu: le pourboire. Voir à la page 8.

Cependant, cette déclaration n'est aucunement expliquée et il faudrait tenter de saisir la véritable dimension de cette question précise. Dans une étude intitulée

"Tipping Practices in Ontario in their Relationship in the Minimum Way", publiée en 1973, le ministère du Travail de l'Ontario affirmait ce qui suit: "La législation qui réduit les gains potentiels d'un individu en partie à cause de sa plus grande efficacité est difficile à justifier". D'autre part, l'Association des consommateurs du Québec acheminait, le 7 décembre 1981, la recommandation suivante au gouvernement du Québec: "de déduire l'imposition des pourboires, de n'en imposer que la moitié peut-être, car selon elle, les employés qui vivent des pourboires peuvent être comparés à de petites entreprises puisqu'ils assument des risques: celui d'avoir peu ou pas de pourboire de certaines personnes, d'avoir peu de clients et enfin, le risque le plus grand, celui de ne pouvoir espérer raisonnablement d'effectuer un tel travail jusqu'à 65 ans." La référence est dans le Journal de Montréal du 7 décembre 1981.

Selon ces observations, le pourboire dépendrait donc en partie de l'efficacité du travailleur ou de la travailleuse au pourboire, de même que d'un élément de risque. Ces deux éléments, de nature d'"entrepreneurship" sont toutefois difficilement utilisables pour discriminer entre diverses catégories de travailleurs et de travailleuses au salaire minimum. Il est évident que le fardeau fiscal doit être partagé entre tous les partenaires, mais dans le cas des employés au pourboire, en regard desquels le gouvernement recherche leur contribution fiscale, ceux-ci sont en quelque sorte pénalisés, car ils subissent déjà une première ponction monétaire attribuable à la différence qui existe entre leur salaire minimum légal et celui des autres travailleurs. Cette différence, comme on le voit, bénéficie à l'employeur, puisque celui-ci n'a pas à payer le salaire minimum généralement légal et qu'il profite en conséquence d'un transfert fiscal que le gouvernement cherche à combler d'autre part.

Le pourboire, comme deuxième source de revenu, ne saurait donc être la cause fondamentale d'un différentiel salarial et ce, d'autant plus que la province de Québec est la seule au Canada à avoir un salaire minimum pour les travailleurs au pourboire qui soit inférieur au salaire minimum général, comme le démontre le tableau ci-dessous.

On voit donc que non seulement le Québec fait exception - là, il aurait un statut particulier - sur la question du salaire minimum de la restauration-hôtellerie (outre le cas restrictif de l'Ontario) mais que la province du Nouveau-Brunswick de même que le territoire du Yukon ont statué un salaire identique pour tous, jeunes ou vieux, employés au pourboire ou non.

Le Québec doit donc justifier son statut particulier en matière de salaire minimum et les quatre hypothèses de travail du livre vert évacuent cette question de fond.

Les pages 6A, 6B et 6C concrétisent ce que je viens d'avancer dans la lecture que je viens de faire. Vous remarquerez, à la page 6B, le cas typique de l'Ontario, c'est spécifique pour les étudiants. Ce sont, pour aller vite, les employés qui servent la boisson, en Ontario.

La page 7 qu'on retrouve dans votre livre vert, je la passe donc, ainsi que la page 8, et je vais à la page 9 immédiatement, après les statistiques dont le titre est: Hôtels, restaurants et tavernes, février 1982, versus manufactures.

Il faut également noter que de tous les secteurs traités dans les statistiques officielles sur l'emploi, gain et durée du travail des grandes entreprises de 20 employés et plus, le secteur hôtels, restaurants et tavernes connaît la plus faible rémunération hebdomadaire moyenne (c'est-à-dire, 159,14 $ en février 1982) soit 42,2% de la moyenne de l'ensemble des industries (376,72 $ en février 1982), et le moins d'heures hebdomadaires moyennes (c'est-à-dire 26,9 en février 1982, comparativement à 38,4 pour les industries manufacturières). Il est à noter qu'en 1968, les heures hebdomadaires moyennes dans le secteur hôtels, restaurants et tavernes étaient de l'ordre de 37,1 et que depuis lors, elles ont diminué d'année en année (c'est-à-dire en 1971, 35,4; 33 en 1973, 30,1 en 1976, 28,1 en 1978, et 27,7 en 1980).

En résumé, les grandes entreprises de la restauration ont les traits suivants: 1. les emplois ont plus que doublé en 20 ans, tandis que ceux des industries manufacturières sont demeurés stationnaires. 2. Le pourcentage des emplois occupés par des femmes est près du double de celui que l'on observe dans l'industrie manufacturière. 3. La rémunération hebdomadaire moyenne des salariés est la plus faible de toutes les catégories de salariés. 4. La semaine de travail moyenne dans la restauration est équivalente à 70% de celle de l'industrie manufacturière et elle présente donc de plus en plus la caractéristique d'un travail à temps partiel.

Si les conditions d'emploi dans les grandes entreprises présentent tant de différence en comparaison de celles des autres secteurs d'activité économique, que dire alors des petites entreprises qui emploient plus de la moitié des travailleurs et travailleuses de ce secteur mais en regard desquels on connaît si peu ou rien?

Cette ignorance des conditions de travail de la petite et moyenne entreprise de la restauration et le statut particulier, en termes de rémunération hebdomadaire moyenne dans la grande entreprise de la restauration nous amène à conclure au rejet à long terme des quatre hypothèses de

travail formulées dans le livre vert, car il est impossible actuellement d'en saisir l'impact sur le secteur que nous étudions.

Je laisse tomber les deux premiers paragraphes du sous-titre de l'Association des restaurateurs du Québec et du contrôle du marché de la restauration, pour prendre le dernier paragraphe. Donc, l'Association des restaurateurs du Québec reconnaît, malgré son désir de défendre le système de libre entreprise, la nécessité d'un certain contrôle ou réglementation et cela s'explique du fait que celle-ci veuille assurer la valeur morale et financière des restaurateurs dans une province où quiconque peut ouvrir un établissement de restauration. La fragilité du secteur et le désir du contrôle de l'Association des restaurateurs du Québec militent à notre avis en faveur du rejet à long terme des quatre hypothèses de travail du livre vert, car une solution fiscale n'est pas nécessairement le meilleur outil de contrôle de ce secteur fragile.

Recommandations du Conseil régional de développement de l'Estrie. Les trois dimensions soulevées par notre conseil indiquent que la situation des travailleurs et des travailleuses au pourboire ne constitue pas qu'une question d'injustice relative à la fiscalité et aux avantages sociaux; la situation se présente beaucoup plus sous la forme d'une problématique sociale, industrielle et économique dont les facteurs ne peuvent être sérieusement envisagés que dans une perspective à long terme.

Au Québec, le débat sur cette question est né de l'intention gouvernementale visant à enrayer l'évasion fiscale et que le gouvernement lui-même a si longtemps tolérée. L'intervention gouvernementale souleva immédiatement cet autre aspect de la problématique qui marquait l'impossibilité pour les travailleurs et travailleuses de bénéficier des avantages sociaux qui devraient normalement découler de la comptabilisation des revenus de pourboires. Puisque la situation ne pourrait pas réellement s'améliorer qu'en référence à ces deux aspects, le Conseil régional de développement de l'Estrie recommande donc ce qui suit au ministère du Revenu: 1 - Qu'à court terme, la solution du livre vert demandant l'inscription par le client du pourboire sur la facture soit retenue, mais qu'en même temps on puisse assurer aux employés que le calcul de leurs avantages sociaux prenne en compte ce nouvel ensemble de revenus; 2 - Que soit créé un comité interministériel sur la restauration et l'hébergement composé des ministres du Travail; de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme; de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu: du Revenu, ainsi que de la Condition féminine, de façon que des solutions à long terme soient étudiées - vous voyez que c'est complet -; 3 - Que soit créé un comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, de la restauration et de l'hébergement composé de représentants des secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, des travailleurs et travailleuses syndiqués, des employés au pourboire, de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, du ministère du Travail du Québec et du ministère de l'Emploi et de l'Immigration Canada, de façon que les intervenants sectoriels soient engagés dans la recherche des solutions; 4 - Qu'une campagne de sensibilisation de la population sur l'industrie de la restauration et de l'hôtellerie de même que sur les employés au pourboire soit envisagée dans les plus brefs délais.

(12 h 15)

Avant de donner la conclusion, M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs, j'aimerais vous dire qu'il est bien certain que notre mémoire ne peut apporter de solutions miracles. Nous avons vraiment réfléchi et creusé tous les aspects que comporte le problème qui a été apporté par ce que le ministère du Revenu a appliqué d'une façon draconnienne. Il ne nous est pas permis d'apporter de solutions magiques parce trop de monde, pendant trop longtemps, ne s'est pas parlé.

Ce qui, à notre avis, est important, c'est que les amis, pas seulement ceux d'en face mais de tous les côtés, se parlent, s'écoutent et cherchent vraiment des solutions. À notre humble avis, le problème est beaucoup plus sérieux que vous ne le pensez. La solution à court terme peut être envisagée, mais c'est une solution à laquelle tôt ou tard vous aurez à revenir; vous aurez à chercher avec le monde les véritables ou la véritable solution. Et j'insiste sur ça. Vous aurez sûrement notre collaboration. C'est pourquoi les solutions que nous avons mises là ne plairont pas à tout le monde, c'est bien sûr, et le temps qui nous est alloué ne nous permet pas non plus de vouloir justifier... D'ailleurs, tous les gens qui ont eu raison sont morts quand même. Qu'on ait raison ou tort, on meurt tous un jour.

Alors, l'important, ce n'est pas nécessairement d'avoir raison, c'est de favoriser la réflexion et aujourd'hui c'est surtout ça. Nous n'avons rien à défendre en particulier. Je pense que vous nous reconnaissez comme des intervenants d'une belle et grande région et nous n'avons rien de spécifique à défendre, sauf que nous avons à défendre d'une façon dégagée, sans émotivité, toute une catégorie d'employés sur laquelle on ne s'est jamais penché et dont on n'a jamais pensé surtout à valoriser le rôle.

J'espère que notre intervention vous permettra de nous poser toutes les questions. Je vais vous avertir tout de suite que j'ai deux beaux hommes près de moi, je suis bien

encadrée, et je vais les inviter à répondre, non pas que je sois incapable de répondre mais parce qu'il y a des questions techniques et je ne veux pas courir de risques, je ne veux pas vous faire perdre de temps. Ces personnes sont compétentes et habilitées. Je vais donc les inviter à vous répondre.

Je conclus, M. le Président, en disant que nous désirons remercier le ministère d'avoir choisi de tenir cette commission parlementaire, dont les résultats permettent déjà de mesurer l'importance de la concertation nécessaire au renforcement de l'industrie de la restauration ainsi qu'à l'amélioration des conditions de travail des employés.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme Gobeil. Maintenant, étant donné l'entente qui est intervenue tantôt, je me permets de suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, vers 15 heures, alors que vous serez à la même table et qu'on entreprendra de vous poser des questions sur votre mémoire. Merci, beaucoup.

M. Blank: Cela va vous donner la chance de monter dans les galeries pour voir comment on se parle en Chambre.

Le Président (M. Gagnon): Merci. (Suspension de la séance à 12 h 19)

(Reprise de la séance à 15 h 51)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente du revenu est réunie aux fins d'entendre des personnes et des organismes en regard du livre vert sur la situation des travailleurs au pourboire au Québec. Vous allez me passer l'obligation d'énumérer de nouveau les membres de la commission. Je pense que ce sont les mêmes que dans la matinée. Lorsque nous avons suspendu nos travaux, nous avions terminé la lecture du mémoire du Conseil régional de développement de l'Estrie et nous en étions rendus à la période de questions. Alors, je cède immédiatement la parole à M. le ministre.

M. Marcoux: Je voudrais remercier le Conseil régional de développement de l'Estrie de nous avoir préparé ce mémoire, d'y avoir consacré certainement beaucoup d'énergie et je remercie de sa présentation la présidente, Mme Gobeil.

La première question que j'aimerais poser, c'est pour nous resituer dans votre mémoire. Vous dites à deux ou trois reprises: On n'est pas d'accord à long terme avec les quatre solutions que vous proposez. Donc, il y a une autre solution possible à long terme, je suppose, à laquelle vous avez peut-être pensé, mais qui n'est pas formulée. En tout cas, je ne me souviens pas de l'avoir lue dans le rapport ou de l'avoir saisie. Par contre, dans vos quatre recommandations finales, vous indiquez clairement que, à court terme, vous soutenez la position soutenue par un organisme de consommateurs hier, que c'est plutôt la formule 5.2, c'est-à-dire la formule où le client inscrirait le montant du pourboire sur sa facture, que vous retiendriez parce qu'elle permet, en somme, aux travailleurs et travailleuses au pourboire d'avoir les avantages sociaux impliqués puisque l'employeur cotiserait dans la même proportion que les pourboires révélés.

Je voudrais que vous me resituiez par rapport à ça. Vous répétez à plusieurs reprises: À long terme, on n'est pas d'accord avec les quatre solutions. Par contre, à court terme, c'est ce que vous choisissez clairement, et vous l'indiquez, comme l'ont fait hier plusieurs groupes, mais entre autres un groupe de consommateurs.

Mme Gobeil: M. le ministre, tout d'abord, je vais vous donner un élément de réponse et, comme je vous l'ai dit ce matin, je me suis fait accompagner et j'ai bien l'intention que mon professionnel gagne son salaire. Alors, je vais l'inviter à compléter ma réponse.

D'abord, la question du long terme et du court terme. À court terme, il y a un problème qu'il est urgent de régler. Nous avons étudié le cas en profondeur; on nous a présenté différents éléments au conseil d'administration et le conseil d'administration a retenu majoritairement comme court terme la solution 5.2. Pourquoi? C'est que, quand même, on se disait que ces employés sont pénalisés au point de vue des avantages marginaux. Il faut essayer de trouver une solution. Par contre, on sait que dans l'industrie de la restauration et de l'hôtellerie, il y a aussi des problèmes. C'est une industrie très fragile. Alors, on s'est dit que ce n'était pas la solution idéale mais, à court terme, vu qu'il y a un problème, il faut faire quelque chose, et nous sommes prêts à embarquer dans ça.

Cependant, nous sommes conscients que, vis-à-vis des employés au pourboire, et je tiens à le dire, ce n'est pas la solution idéale, mais on veut qu'ils aient au moins les avantages sociaux. C'est pour cette raison que notre prétention est que la véritable solution est à long terme. C'est vrai qu'on n'est pas arrivé avec quelque chose de précis. Ce qu'il y a cependant de plus précis dans la recommandation, c'est la formation des comités.

M. Marcoux: D'accord. Je vais y revenir et je vais y répondre.

Mme Gobeil: C'est surtout cela quant au long terme.

M. Marcoux: D'accord. Concernant la question du long terme, on s'est bien compris en disant qu'il n'y a pas dans votre texte une orientation précise à ce sujet.

Pour revenir maintenant à vos quatre recommandations, je peux vous dire que la première, ce sera une des hypothèses sur lesquelles on va continuer de réfléchir ensemble jusqu'à ce soir et dans les jours et les semaines qui vont venir. Quant à la deuxième, la création d'un comité interministériel, je peux vous assurer que je soulèverai cette question dans les rapports que j'aurai à faire des discussions qu'on a tenues ici comme étant une suggestion intéressante de mise en commun. De toute façon, cela a été souligné tout au long de la commission: On souhaite la participation des autres ministères impliqués dans la découverte de solutions à court terme comme de solutions globales ou à long terme.

Pour ce qui concerne la création du comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, de la restauration et de l'hébergement, je peux vous assurer que j'ai fait faire les recherches au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et on a trouvé le rapport. En somme, ce comité avait été formé en 1975. Il avait remis son rapport en 1976, mais il ne semble pas, en tout cas - je ne sais pas si c'était avant qu'on arrive - qu'il y ait eu un accent de mis ou que quelqu'un ait retrouvé ou donné une suite quelconque à ce rapport. On m'assure, au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qu'on va examiner les conclusions et tout ce que contient ce rapport. S'il y a lieu d'y donner suite dans le sens que vous proposez, en tout cas, ce sera examiné de façon positive. On m'a indiqué, au ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, que cette recommandation s'inscrit dans un esprit de prévention et que, dans ce sens-là, elle est très positive comme approche et probablement aussi dans le sens d'une revalorisation du statut professionnel de ce genre de travailleurs.

Je peux vous assurer que votre mémoire sera l'occasion de déterrer un rapport qui était sur une tablette probablement depuis 1976 et, à partir de là, on verra les possibilités d'aller plus de l'avant. Certainement que l'esprit de cette proposition, qui est celle de prévenir plutôt que de guérir, nous agrée.

Dans votre mémoire, vous indiquez trois dimensions concernant les travailleurs au pourboire, la situation de ce genre de petite entreprise et l'opinion de l'Association des restaurateurs du Québec et sa vision des choses. Vous avez dit tantôt qu'au conseil d'administration, de votre CRD, vous aviez discuté des différentes hypothèses. Les CRD doivent jouer un rôle de concertation. C'est un des mécanismes de concertation dans notre société. Quand vous avez discuté de cette question, est-ce qu'il y avait des restaurateurs, des hôteliers, des travailleurs et travailleuses au pourboire? Qu'est-ce qui a présidé aux démarches? Je sais que vous êtes impliqués dans ce dossier depuis déjà plusieurs mois, un an et demi, deux ans peut-être. Je voudrais connaître les démarches qui ont précédé la prise de position du CRD.

M. Smereka (Myroslav): Pour vous répondre, M. le ministre, il faut se situer dans le temps. Au mois d'avril 1982, nous avions reçu au conseil régional une lettre de l'Association des employés au pourboire de l'Estrie nous demandant de prendre position concernant cette question. À ce moment-là, la réaction du conseil d'administration et du comité exécutif a été la suivante: Écoutez, avant qu'on se prononce sur un tel sujet, il faudrait recueillir de l'information. Alors, on m'a demandé, à ce moment-là - j'ai été mandaté par le comité exécutif - de recueillir de l'information. Au mois de mai, on a sorti ce premier document auquel on se réfère et auquel le livre vert se réfère également en bibliographie: Le défi pour la concertation. (16 heures)

À la suite de cela, on a tout simplement attendu les événements puisqu'on s'attendait à la publication d'un livre par le gouvernement, soit un livre blanc - on le croyait originalement - ou finalement, un livre vert. Lorsque ce livre vert est sorti, on a donc repris le dossier et il faut avouer que, pendant les mois d'été aussi, on n'a pas cessé de continuer la cueillette de l'information puisque cela a été, évidemment, le problème no 1. Personnellement, j'a contacté même les centrales syndicales, entre autres la CSN, et elles n'avaient rien comme information ou presque rien.

M. Marcoux: La CSN de votre région ou la CSN...

M. Smereka: Non, le bureau de recherche de la CSN, entre autres, M. Peter Bakvis.

M. Marcoux: Je n'ai pas eu l'impression, lors des auditions, que la CSN venait à peine de se mêler du dossier. J'avais plutôt l'impression que cela faisait déjà plusieurs mois qu'elle...

M. Smereka: Je peux vous garantir qu'à l'époque, au mois de mars et avril, il y avait peu de recherche. Elle venait à peine d'affecter quelqu'un au dossier.

Donc, à ce moment-là, au cours de

l'été, on a continué. J'ai aussi contacté l'Association des restaurateurs du Québec, le Conseil du patronat, etc. Lorsque, cet automne, est arrivée la question du livre vert, nous avons procédé à la rédaction d'un premier document qui pourrait, en somme, être une première ébauche de document pour cet avis, qui serait la suite logique de cette idée de concertation, puisqu'on s'est aperçu que personne, vraiment, ne se prêtait à un dialogue avec ses partenaires autour de la question. Les restaurateurs, les employés au pourboire, c'était - on pourrait quasiment le dire - à couteaux tirés. Nous avons un peu servi d'élément neutre, on dirait quasiment d'extrême centre, ce qui, parfois, est très pénible.

Une fois rédigée une ébauche, on a réuni - cela a été tout de même pour la région un événement particulier l'Association des restaurateurs du Québec et son représentant dans l'Estrie, M. Roberge, les employés au pourboire de l'Estrie et une association culturelle touristique de l'Estrie représentant les hôteliers. Dans un premier temps, on a demandé leur opinion en général, leur position, et on a présenté notre document ébauche, notre premier document ébauche, avant qu'il ne soit soumis au conseil d'administration. La réaction a été très favorable en général. Évidemment, certains points spécifiques pour certains des groupes intéressés ont été soulevés, à savoir qu'il allait falloir dénoncer plus fort le gouvernement sur toute la question de la rétroactivité. On n'avait pas tellement insisté là-dessus. On a essayé d'avoir une espèce d'ouverture à des solutions. Règle générale, la séance a été très enrichissante parce que c'était la première fois qu'en région, les représentants des divers organismes abordaient ce sujet à une même table. On avait réussi cela.

M. Marcoux: Si je comprends bien, vous avez eu une commission parlementaire et votre conclusion, c'est la solution 5.2.

M. Smereka: Vous croyez peut-être qu'on aura failli faire notre livre vert régional, oui. Mais c'est, semble-t-il, le droit d'un autre palier.

Lorsque cette consultation a été faite, on l'a ensuite soumise au conseil d'administration qui, à ce moment-là, était composé de représentants de divers organismes. C'est un organisme très sectoriel. On a donc des représentants du monde municipal, des industriels, des représentants du monde syndical, etc. Dans le cadre de cette discussion, cette hypothèse 5.2 est ressortie majoritairement. C'est donc une nécessité pour notre organisme, puisqu'il en est un de concertation, d'intégrer la volonté du conseil d'administration à l'intérieur d'une vision globale que contient ce document.

Je voudrais répondre, pour compléter la réponse de Mme Gobeil, concernant la distinction de long terme et court terme. Nous devons accepter le fait qu'en 1982, il existe un équilibre entre le salaire et le pourboire comme étant deux formes de rémunération pour un certain travail qu'est le service de la restauration. On ne peut pas, du jour au lendemain, dire que tout cela ne vaut plus rien et qu'on prend quelque chose de nouveau. On est pris dans un cadre, dans une espèce de terrain de jeux et le livre vert nous a également mis dans ce même terrain de jeux. La logique de votre document, que l'on résume par le schéma no 1 de la page 3, dit bien que les revenus du travailleur au pourboire viennent d'abord des employeurs pour une somme de travail et des consommateurs selon la qualité du service, la générosité du client et le genre de clientèle. Le terrain de jeux est là, c'est-à-dire que le Québec, à travers les années, a dit que le travailleur au pourboire avait finalement deux patrons, un patron pour la quantité de travail, un patron pour la qualité du travail.

II n'est pas sûr qu'à long terme cette solution soit la meilleure et la seule façon de procéder à un réaménagement, c'est de mettre en branle des mécanismes comme des comités interministériels et des comités d'adaptation en vue, justement, de poser un nouvel équilibre entre ces deux entités. Mais à court terme, cependant, la réalité est là. Il y a, par exemple, comme on le disait dans notre premier document du mois de mai, des organismes aux États-Unis, des représentants de ces organismes au Canada, comme Tippers International, qui, au nom des consommateurs, laissent des cartes sur leurs tables lorsqu'ils sont servis, notant le client. Il y a donc un certain mouvement des consommateurs à l'égard de cette chose qu'est le pourboire.

On s'est dit, tenant compte qu'on ne peut pas tout chambarder et dire tout simplement: II n'y a rien de bon dans ce livre vert: il y a deux paliers de discussion. Le premier, c'est à partir de ce qu'on nous donne comme, disons, os dont on va grignoter le meilleur morceau possible. Dans l'optique du Conseil régional de développement...

M. Marcoux: Pour bien comprendre, l'association que vous avez mentionnée, c'est Tippers Association?

M. Smereka: International.

M. Marcoux: Son attitude face aux pourboires, quelle est-elle? C'est juste pour me situer.

M. Smereka: Si vous voulez...

M. Marcoux: C'est une association qui lutte contre le fait de donner des pourboires ou quoi?

M. Smereka: Que ce soit obligatoire. M. Marcoux: D'accord. Cela va.

M. Smereka: C'est dans le premier document qu'on vous a déjà soumis, qui est dans la bibliographie du livre vert.

Donc, dans cette optique, on s'est dit qu'il y a tout de même le fait qu'il faut arriver à un équilibre donné à l'intérieur des forces qui jouent actuellement pour les règles du jeu qui existent, mais nous sommes très conscients qu'en fin de compte, la viabilité à la fois de l'industrie de la restauration et de l'hôtellerie touristique est menacée par cet équilibre, mais il est là. On essaie, à court terme, de l'arranger et de mettre en branle le mécanisme qui puisse à long terme l'améliorer.

C'est donc une ouverture et non une limite de ce travail... La peur no 1 était que cette commission se limite au court terme. Le problème en est viscéralement un de long terme.

M. Marcoux: Simplement, une remarque concernant le salaire minimum qui est différent au Québec par rapport aux autres. En fait, vous avez assisté à la commission aussi. Il y a des nuances à apporter à ce que vous dites à la page 6, mais je ne peux pas y revenir longuement. On ne peut pas dire que le cas de l'Ontario soit un cas marginal. Quand on parle du Québec et de l'Ontario, je sais bien que le salaire minimum de 3 $ pour les travailleurs et travailleuses au pourboire qui travaillent dans des endroits où il y a des débits de boisson, c'est-à-dire au service des boissons, ce n'est pas pour l'ensemble, mais c'est quand même, quand on parle de l'Ontario, 3 $ là-bas, 3,28 $ ici. On ne parle pas de quelque chose de marginal par rapport au choix qu'on a à faire, vous qui savez les liens économiques entre les deux.

Je vous remercie. Je peux vous assurer d'une chose: c'est que le corps de votre document sur la description de la petite entreprise, etc., et le portrait général que vous en dégagez à la fin, c'est quelque chose que nous notons pour nos réflexions.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Smereka: Est-ce que je pourrais donner une petite réponse à ce que M. le ministre a dit?

Le Président (M. Gagnon): Oui.

M. Smereka: Concernant la comparaison entre l'Ontario et le Québec si on prend jus- tement le document du comité d'adaptation de la main-d'oeuvre qui a été fait en 1975-1976, on peut voir qu'en 1976, au Québec, 68% des établissements étaient sans permis et 32% avaient le permis. Donc, on peut dire qu'un tiers a un permis pour servir de la boisson. Si on met ceci au niveau de la province de l'Ontario, cela veut dire que la fameuse différence de salaire ne s'applique qu'à environ un tiers des établissements, si on compare les deux provinces. Cela veut dire que pour deux tiers des travailleurs au pourboire dans la province de l'Ontario, le salaire minimum est de 3,50 $ l'heure, le taux général.

M. Marcoux: Vous avez bien dit "les deux tiers des établissements"?

M. Smereka: C'est cela.

M. Marcoux: Vous avez dit, par la suite, "les deux tiers des travailleurs"?

M. Smereka: Oui, en termes de proportion.

M. Marcoux: On regardera... M. Smereka: Oui.

M. Marcoux: Oui, mais, parfois, c'est plus compliqué que cela.

M. Smereka: Je suis d'accord.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Madame, je vous remercie pour votre présentation et pour votre mémoire très bien préparé.

Je constate que vous avez dit à cette commission parlementaire que votre consensus était axé sur la solution no 2. Y a-t-il des raisons particulières pour lesquelles vous avez mis de côté celle qui est le plus prêchée ici, la solution 1? Je constate aussi, d'après le nom des comtés de votre région, qu'ils sont presque tous frontaliers, qu'ils touchent à la frontière américaine. La concurrence américaine a-t-elle quelque chose à voir avec votre choix?

Mme Corbeil: Absolument pas. C'est clair. Je peux vous répondre vite que c'est non.

M. Blank: Y a-t-il des raisons particulières pour lesquelles vos gens ne veulent pas de la solution no 1 ou de la solution 4, qui est à l'autre bout?

M. Smereka: En ce qui concerne la solution no 1, le taux obligatoire, je pense que les gens concevaient le monde de la

restauration exactement comme le livre vert l'avait présenté. Nous vous référons à la page 3 où il est dit que l'employeur détermine la quantité de travail et que le consommateur évalue la qualité. C'est, en filigrane, le consensus qui a joué en faveur de cela, à savoir que le fait de rendre le pourboire obligatoire modifiait des règles du jeu d'aujourd'hui d'une façon unilatérale, que cela était inacceptable, et qu'il fallait procéder, s'il devait y avoir un changement à travers le temps, en réglant à la fois les problèmes de l'industrie et des employés au pourboire ensemble, mais non pas par une décision à court terme qui serait tout simplement déposée et ensuite imposée.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Blank: On vous remercie beaucoup, au nom de l'Opposition, d'être venus ici aujourd'hui.

Le Président (M. Gagnon): Je remercie le Conseil régional de développement de l'Estrie de son mémoire et de sa participation à cette commission.

J'appellerais maintenant l'Association touristique régionale de Lanaudière.

Association touristique régionale de Lanaudière

M. Redmond et M. Boulanger, c'est cela?

M. Redmond (Jonh A.): Oui, M. Redmond.

Le Président (M. Gagnon): Oui, Redmond. Je vous laisse la parole.

M. Redmond: M. le ministre, MM. les députés, d'abord, on remercie le système et M. le ministre d'avoir organisé cette commission; nous sommes très heureux...

M. Paradis: On va retrouver nos documents. Cela va prendre deux secondes.

M. Marcoux: C'est la première fois que j'entends cela, remercier le système. Elle est bonne. Je la note. Il a dit: Je remercie le système d'avoir organisé cette commission. Vous n'aviez jamais entendu cela...

Une voix: Non.

M. Marcoux: ... même en commission parlementaire?

M. Redmond: M. le ministre, d'abord, je voudrais vous dire que ces trois pages sont le fruit d'un comité bipartite, c'est-à-dire des employés au pourboire et des propriétaires d'établissements. Comme vous avez pu le constater, il y a très peu de squelette et beaucoup de viande. Je vais le lire et on pourra en discuter après, si vous voulez. (16 h 15)

Opinion émise par les travailleurs au pourboire du comité. Dans les cas de repas peu dispendieux comme les déjeuners, le pourboire obligatoire de 15% pénaliserait les employés au pourboire qui, ordinairement, reçoivent plus de 15%. Pensons à un pourboire de 15% sur un café de 0,75 $. Il s'ensuivrait un problème de personnel pour le service aux comptoirs lunch et hors des moments de pointe que constituent les dîners et les soupers.

La rémunération que constitue le pourboire libre permet l'émergence d'un professionnalisme dans le métier. Un nivelage à 15% obligatoire réduirait la motivation des serveurs et serveuses et, par le fait même, la qualité du service. De plus, l'expérience dans le métier ne serait plus une dimension essentielle puisque gens de métier ou pas recevraient les mêmes pourboires. Le pourboire obligatoire n'est pas dans les moeurs des Québécois. L'imposition du pourboire obligatoire sur les factures risque d'être perçue par les clients comme une taxe supplémentaire et éliminerait toute la gratuité du geste qui limiterait automatiquement pour les serveurs et serveuses toute possibilité de pourboires supplémentaires.

Toute majoration du prix aux clients, ou perçue comme telle par les clients, risque de déplacer les habitudes de consommation des entreprises de restauration et d'hôtellerie vers les dépanneurs, la livraison à domicile, la livraison au comptoir, etc., et de réduire en définitive, par le fait même, la demande de serveurs et de serveuses dans les entreprises traditionnelles de restauration.

Seulement les employés au pourboire de l'hôtellerie et de la restauration, majoritairement des femmes, sont visés dans la consultation présente, alors que d'autres classes de travailleurs sont rémunérées par des pourboires telles que les chauffeurs de taxis, les livreurs de tous genres, les garagistes, etc.

Opinions émises par les entrepreneurs de l'hôtellerie et de la restauration du comité. Il ne peut être question d'imposer une charge fiscale supplémentaire aux entrepreneurs dans le secteur de la restauration qui constitue en soi un secteur peu rentable. Toute charge administrative supplémentaire imposée par la mise en place et l'opération de contrôles nécessaires, inhérents au pourboire obligatoire, ainsi qu'une hausse de la contribution automatique des employeurs aux différents programmes sociaux, entraînerait en définitive une hausse du coût des repas qui, à l'époque actuelle, risque de se traduire par une baisse de

l'achalandage des entreprises. Le repas passerait de 4 $ à 5,10 $.

Le prix des forfaits touristiques incluant entre autres les coûts de l'hébergement et/ou de la restauration seront automatiquement majorés si le pourboire de 15% devient obligatoire. Ceci rendrait encore moins concurrentielle la destination québécoise ou intraquébécoise, déjà chère, et affecterait toute l'économie touristique provinciale. Toute imposition obligatoire du pourboire dans les entreprises de restauration rendra non concurrentielles ces entreprises dans le secteur de la traitance des banquets, des mariages, des réunions d'affaires qui constituent un chiffre d'affaires important pour plusieurs entreprises et ce, au profit d'autres entreprises non assujetties au pourboire obligatoire telles que les salles de location, les écoles, les cabanes à sucre.

Les restaurateurs et hôteliers n'ont pas à jouer auprès de leurs employés un rôle de contrôleur fiscal, ce qui risquerait de tendre les relations. La responsabilité de la déclaration du revenu revient avant tout aux travailleurs. Le travail du travailleur au pourboire s'apparente davantage dans son essence à l'activité du travailleur autonome plutôt qu'à celui d'un travailleur salarié.

Recommandation du comité. Le comité croit que le pourboire doit être considéré comme le revenu d'un travailleur autonome. Le travailleur au pourboire doit donc jouir des avantages et responsabilités inhérentes à un statut de travailleur autonome. Par cette mesure, l'activité économique que sous-tendent la restauration et l'hôtellerie ne sera pas affectée ni par une hausse des prix, ni par une perte d'activité ou de marché, ni par une perception négative du public ou des travailleurs eux-mêmes.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marcoux: Je vous remercie beaucoup, monsieur, d'avoir présenté ce mémoire et je demanderais au député du comté de Bellechasse d'engager le dialogue avec votre organisme.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Merci, M. le Président. Ce qui me frappe dans ce mémoire, c'est la très grande parenté qui semble exister entre votre position, votre recommandation, et celle d'associations patronales qu'on a entendues ici depuis trois jours. Cela m'amène, M. Redmond, à vous poser une question concernant la façon dont vous en êtes venus à ces conclusions.

Premièrement, j'aimerais savoir de quel secteur vous-même et votre collègue provenez? Est-ce du côté patronal ou plutôt du côté des employés? En fait quelle est votre représentativité?

M. Redmond: D'abord, l'Association touristique régionale, que je sache, M. le député, représente l'entreprise privée au Québec.

M. Lachance: Donc, vous êtes du côté patronal?

M. Redmond: Ou côté patronal. M. Lachance: Est-ce que...

M. Redmond: Si vous remarquez bien, M. le député, ce court document est le fruit du travail et d'employés au pourboire et de propriétaires dans la restauration et l'hôtellerie.

M. Lachance: Vous me permettrez de vous demander, M. Redmond, la forme de consultation que vous avez prise pour avoir l'opinion, d'une part, des employés au pourboire et, d'autre part, des employeurs.

M. Redmond: Lors de la visite du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, M. Biron, dans Joliette, accompagné du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, M. Chevrette, on a réuni les employés au pourboire et certains propriétaires d'hôtels et de restaurants, on nous a demandé de former un comité et d'émettre un avis sur le livre vert qui circulait déjà et c'est ce que nous avons fait.

M. Lachance: Vous m'excuserez d'insister, mais j'aimerais savoir le nombre d'employés qui ont été consultés pour que vous en arriviez à la position retenue qui, si je comprends bien, est celle de l'hypothèse 5.4 du livre vert.

M. Redmond: Vous avez en annexe 1, M. le député, quatre employés au pourboire qui ont fait partie du comité. Nous n'avons pas fait une consultation, nous avons travaillé en comité.

M. Lachance: D'accord, je vous remercie. À la page 2, au dernier paragraphe, vous mentionnez que les restaurateurs et les hôteliers n'ont pas à jouer auprès de leurs employés un rôle de contrôleur fiscal. J'aimerais que vous m'expliquiez le sens de ces paroles ou de ces mots, compte tenu du fait que, si je ne me trompe, les employeurs ont déjà à émettre, pour les ministères du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec, des T4 et des TP4.

M. Redmond: C'est exact. Mais, dans

votre question sur les hypothèses que vous émettez, il va falloir que les restaurateurs ou les hôteliers aient une comptabilité à part pour ressortir chacun des pourboires et, sur plusieurs milliers de transactions, vous pouvez vous imaginer ce que cela amènera comme fardeau pour les propriétaires, mais aussi tout le découpage de ces pourboires. Comme vous savez, tous les restaurants et hôtels ne sont pas à l'ère électronique. Comment arriver à la fin de la journée à comptabiliser toutes les petites ou grosses transactions, à en faire l'addition le soir, à en faire rapport à l'employeur et ensuite, à faire les remises?

M. Lachance: Dans votre recommandation, vous semblez faire allusion au fait que si le service obligatoire de 15%, par exemple, était adopté, cette mesure aurait comme conséquence de pénaliser les employés au pourboire. En tout cas, c'est ce que je sens et j'aimerais savoir si ma perception est bonne.

M. Redmond: C'est exact.

M. Lachance: Est-ce que vous pourriez...?

M. Redmond: Nous croyons qu'avec l'imposition du pourboire, il y aura hors de tout doute une baisse d'achalandage, donc un manque d'emploi pour les employés au pourboire dans la restauration et dans l'hôtellerie. À la page 2, je dis qu'un repas de 4 $ passera à 5,10 $. Vous savez qu'en publicité et en promotion, qu'il soit pris globalement ou pas, tout prix qu'on regarde est celui qui nous est donné. Donc, dans les forfaits, dans tous les "packages", vous serez obligé de faire paraître cela pour les simples repas à 4 $ comme à 5,10 $. Donc, immédiatement, cela paraîtra très dispendieux.

M. Lachance: Est-ce que vous, M. Redmond, reconnaissez qu'il existe présentement un problème assez sérieux quant aux employés au pourboire, parce que, finalement, le fait d'adopter...

M. Redmond: Je vous dirais oui, mais explicitez votre question.

M. Lachance: Oui, parce que le fait de préconiser l'hypothèse de travailleurs autonomes, ni plus, ni moins, en tout cas dans mon esprit, cela ressemble beaucoup au statu quo.

M. Redmond: Non, du tout. Pour la première fois, les employés au pourboire pourraient être traités justement par la société, parce que ces employés, qui n'ont jamais pu calculer - je pense aux femmes - les frais de coiffure, les souliers, tout ce qui est inhérent à leur travail, du fait de devenir travailleurs autonomes, comme n'importe quel consultant ou n'importe quel travailleur autonome, ils pourraient bénéficier de tous ces avantages dans leur rapport d'impôt. Je crois qu'ils seraient bien plus encouragés à le faire équitablement.

M. Lachance: Cela ne revient-il pas à dire à ces gens que, s'ils veulent des améliorations de leurs conditions de vie, qu'ils se les paient?

M. Redmond: II y a deux choses qu'il faut regarder. La première des choses, c'est: Est-ce qu'on veut continuer de maintenir nos emplois vis-à-vis de cette activité économique ou est-ce que tout ce qui est important, c'est la charge sociale? Si c'est plus important la charge sociale, on va aller dans le sens du pourboire obligatoire; sinon, on donnera aux employés au pourboire un statut selon lequel ils vont pouvoir bénéficier de tous les avantages sociaux qui sont offerts à tous les autres citoyens et ils vont être heureux.

Je pense que l'on déplace la question, lorsqu'on veut jouer sur les dos d'une équité sociale à cette commission et qu'on arrive avec les propositions qui existent dans le livre vert, surtout les propositions 1, 2 et 3. En réalité, à mon sens, tout ce qu'on dit, c'est que les employés au pourboire, dans le passé, n'ont pas déclaré tous leurs revenus et, nous, comme ministre du Revenu, on veut récupérer cet argent. À mon sens, c'est la seule chose recherchée dans tout le beau système qu'on a ici. C'est tout ce qu'on fait.

M. Lachance: Est-ce qu'en même temps vous n'oubliez pas une partie importante, qui serait d'avoir un meilleur contrôle sur les déclarations des employeurs?

M. Redmond: Des employeurs? M. Lachance: Oui.

M. Redmond: Où se trouve la question des employeurs là-dedans?

M. Lachance: Si on imposait, par exemple, les frais de services obligatoires, à ce moment-là, il est bien évident que cela permettrait au gouvernement de savoir le chiffre d'affaires exact des employeurs.

M. Redmond: Mais avez-vous l'impression que vous ne l'avez pas, le vrai chiffre d'affaires?

M. Lachance: Je pose la question.

M. Redmond: Je pense que les études qui existent, M. le député, montrent que les

restaurants du Québec sont actuellement dans une situation lamentable. Une augmentation du prix ne viendra pas changer la situation, parce que si on regarde cela à peu près depuis 1978-1979, l'achalandage dans toute la restauration a baissé dans une mesure d'environ 45%. Je crois que ce que l'on recherche ici, c'est de satisfaire deux parties; la première partie, c'est le ministre du Revenu et la deuxième partie, c'est les employés au pourboire.

Je crois, et notre comité de même, qu'en fin de compte il faut donner aux employés au pourboire les outils nécessaires pour avoir droit à tous les avantages sociaux, parce que c'est ce qu'ils demandent en contrepartie de la déclaration pleine et entière de leurs revenus. Tout le monde va être content, mais qu'on aille augmenter actuellement les prix de toute la restauration et de l'hôtellerie au Québec... On est déjà non concurrentiels avec nos voisins de l'Est, de gauche et du Sud, je vois mal que le gouvernement actuel accentue les sommes d'argent investies dans la promotion du Québec si on a un produit qui va être complètement "outpriced". (16 h 30)

M. Lachance: Peut-être une dernière question, M. Redmond. Je ne sais pas si vous avez pris connaissance de la loi sanctionnée par la président Reagan en septembre dernier - c'est très récent - il y a deux mois, qui va faire qu'aux États-Unis, à partir du 1er janvier 1983, les employés au pourboire feront une déclaration périodique de leurs revenus sous forme de pourboires.

Une voix: L'hypothèse no 3.

M. Lachance: Oui, cela s'apparente beaucoup à l'hypothèse 5.3 du livre vert. J'aimerais savoir si vous en avez pris connaissance et ce que vous en pensez, parce qu'on se réfère souvent à nos voisins et ce sont nos voisins du sud.

M. Redmond: Je crois que dans la proposition Reagan - il faut la connaître un peu - ce qu'on exige, c'est de remettre 8%. Quant à la question de faire des rapports périodiques, si je ne m'abuse, les travailleurs autonomes au Québec ont le devoir de faire des rapports tous les trois mois. Donc, dans la proposition sur les travailleurs autonomes, on retrouve les trois mois et, dans la proposition Reagan de 7%, si on dit que tout le monde, que les employés au pourboire vont chercher 9%, 10% ou 12%, je pense qu'avec une proposition de 7% ou 8%, ils sont encore gagnants.

M. Lachance: Cela vous apparaît-il une position mitoyenne entre celle d'avoir des frais de service obligatoire et l'autre, à l'autre extrémité - qui est la vôtre - de statut de travailleur autonome?

M. Redmond: Ce que je crois voir dans la proposition Reagan, c'est qu'on officialise ce qu'on va demander aux employés au pourboire. Je pense que la grosse plainte des employés au pourboire, c'est que pour les cotisations qui ont été faites, jusqu'à ce jour, on est parti à 15% et on a rétrogradé. Mais si on officialise que c'est tel pourcentage, je ne sais pas si 7% ou 8% est justifiable. Je n'ai pas de dossier pour pouvoir analyser cela, mais cela pourrait s'y apparenter et tout le monde serait encore heureux. Avec cette proposition, je crois que les employés au pourboire sauraient exactement à quoi s'en tenir.

M. Lachance: Je vous remercie, M. Redmond et je voudrais bien que vous n'interprétiez pas mes propos comme étant agressifs envers votre groupe. Loin de là. Ce qui m'avait frappé, c'est que vous aviez des affinités très marquées par rapport à ce que nous avons vu au cours des trois dernières journées et je m'excuse si j'ai semblé être un peu dur. Ce n'était pas du tout ma volonté.

M. Redmond: J'en suis fort heureux, parce que je suis venu ici pour frapper.

Des voix: Ah! Ah!

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député. Merci, M. Redmond.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président. M. Redmond, l'argument de la hausse des prix dans les restaurants à la suite de l'imposition de frais de service obligatoires de 15% a été invoquée à plusieurs reprises. Vous en parlez en termes généraux ici. Vous avez mentionné par ailleurs dans votre témoignage que le prix d'un repas passerait, à titre d'exemple, de 4 $ à 5,10 $. J'ai eu personnellement l'impression que cette augmentation de l'ordre de 25% avait été contredite. Une démonstration qui m'a satisfait, en tout cas, a été soumise ici. J'ai essayé de voir, dans votre cas, comment vous aviez fait ces calculs.

M. Redmond: D'abord, on est parti d'un repas de 4 $. Avec la taxe de 10%, cela fait 4,40 $. Avec les 15% obligatoires, 0,60 $, cela fait 5 $. Après, il y a 0,10 $ de charge sociale et 0.10 $ de frais d'administration. Donc, en prenant un restaurant dont le chiffre d'affaires serait de 1 000 000 $, les 15% feraient 150 000 $ et la charge sociale - entre 12% et 13% -ferait 18 000 $. Donc, on devrait reporter ces 18 000 $ sur la facture totale. Je

prévoyais un comptable à tiers temps pour faire la comptabilisation de toutes ces factures et calculer le total dû à chacun des employés, ce qui me faisait penser que cela pourrait se chiffrer à environ 0,10 $. On arrive donc à une facture totale de 5,10 $. Encore là, les 5,10 $ affichés par rapport au "fast-food", je pense que vous pouvez déduire vous-même...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, écoutez, je pense que si l'on prend un repas de 4 $ et que le seul coût additionnel direct que l'imposition d'un service de 15% vous fait encourir comme restaurateur m'apparaît être les coûts sociaux sur les 15% de plus...

M. Redmond: Oui.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): qu'on a chiffrées à 13%; on s'est promené autour de 13%, 14%, quelque chose comme cela. 13% de 0,60 $, sauf erreur, cela fait 0,08 $ ou à peu près.

M. Redmond: Oui.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Alors, les coûts additionnels sur un repas de 4 $ sont de 0,08 $, excluons le comptable à tiers temps pour le moment. Si vous avez un menu 4 $ qui vous laisse un profit X, j'aurais pensé que le prix du repas de 4,08 $ vous permettait de récupérer votre profit, ce qui correspond, selon mes calculs, à une augmentation d'à peu près 2%. Ceci dit, je peux comprendre également qu'au-delà de ce calcul...

Vous dites que la perception du public -vous le mettez entre parenthèses, mais c'est ce qui m'apparaît important; la véritable augmentation de coût, d'après moi, n'est pas de 25%, elle est de 2% ou 3% - vous dites entre parenthèses: la perception que pourraient avoir le public, les gens, les consommateurs d'une hausse vertigineuse des prix à la suite de l'imposition des 15%, agmentation des prix qui serait au moins de 15%, manifestement, plus les frais directs que vous encourez que, légitimement, vous essayez de récupérer.

Ne pensez-vous pas qu'il y a des moyens de faire comprendre aux gens qu'ils n'auront pas de service à payer une fois qu'ils seront entrés dans le restaurant, une fois qu'ils auront vu le prix du menu? Je suis sûr que vous êtes déjà allé dans des restaurants où le service était compris dans le menu. Il y a le prix et vous savez que c'est un menu, service compris. Donc, vous ne paierez pas les 4%, comme disent beaucoup de serveuses, les 12%, comme dit le ministère, ou les 15%, comme on le suggère. Dans ce sens, il me semble que c'est beaucoup plus une question de sensibilisation des consommateurs. Vous pouvez me répondre et c'est là-dessus que je voudrais vous entendre. Vous évoquez qu'en Amérique, l'habitude de payer pour des services en se faisant imposer un frais de service obligatoire est loin d'être acquise et n'est pas à la veille de l'être par voie législative. J'aimerais savoir, selon votre raisonnement, ce que vous retenez comme étant le facteur le plus important, le plus déterminant, dans la perception qu'ont les consommateurs du véritable prix d'un repas.

M. Redmond: M. le député, j'ai nettement l'impression que, d'abord, dans les endroits où le service est déjà compris -vous y êtes probablement déjà allé vous-même - si vous voulez un bon service, vous êtes mieux de faire savoir que vous avez autre chose à ajouter, et j'en reste convaincu. Deuxièment, il y a encore le service qui en souffrira et notre produit touristique québécois est basé sur tout cela, sur tout ce qu'on est, sur notre cuisine, notre service, notre accueil. À partir de ce moment, il n'y a plus d'intérêt à donner un bon service et un bon accueil, et c'est cela qui est important.

Vous dites que la vraie augmentation est de 2%, mais en termes de vente - M. le député, je suis convaincu que vous avez travaillé avec des personnes en publicité et en marketing - ce n'est pas ce qui se passe. Il serait bien plus intéressant si le prix du repas pouvait commencer à 1 $, comme le style cafétéria, et après cela vous ajoutez votre verre de lait, votre coke, votre tarte, vos petits biscuits et vos sodas. C'était un repas à 1 $, mais ce n'est plus cela. L'apparence est la première chose, c'est celle qu'on retient. C'est bien sûr qu'après cela on vide ses poches du petit change, mais c'est comme si cela avait coûté juste 4 $ ou 4,40 $. Le plus important est la question de la compétition sur le marché touristique, à moins qu'on veuille l'oublier.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Je vous remercie de cet aspect, je vais revenir à la fin de votre réponse tout à l'heure. Je vous demanderais d'abord comment vous réagissez à l'opinion que des serveurs et serveuses selon lesquels, effectivement, il irait de leur intérêt de donner un meilleur service étant donné qu'ils vont être rémunérés carrément selon le volume. J'ai fait ressortir, hier, qu'il y a de la concurrence entre établissements. On n'est pas, j'espère, dans un contexte de concurrence entre les serveurs, les restaurateurs et le consommateur, en réalité. Mais il est dans l'intérêt de tous les gens qui sont dans l'hôtellerie et la restauration d'attirer la plus grosse clientèle possible, d'avoir du "repeat business" de préférence et de s'assurer que les gens vont acheter plus que moins, quand ils vont entrer dans

l'établissement. Si on a des frais de service de 15% et que là, c'est carrément de la vente à pourcentage, tu marches à la commission, ce serait plutôt un incitatif à une amélioration du service.

M. Redmond: Moi, je ne crois pas, M. le député, la nature humaine étant ce qu'elle est. Le plus bel exemple, ce sont les vendeurs. Si vous avez des vendeurs, est-ce que demain matin, vous leur offrez 100 000 $ ou si vous vous tournez le dos et vous leur donnez une base de 25 000 $ et vous leur dites: Va chercher les ventes et tu as la possibilité d'aller te faire 100 000 $.

Je reste convaincu que si le 15% est acquis, il est acquis. Parce que, à mon sens, c'est déjà plus que ce que les employés font actuellement.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est ressorti aussi de la plupart des témoignages, chose certaine. Mais indépendamment de cela, si c'est 15% d'un volume, il me semble que l'intérêt du vendeur, c'est de faire du volume.

M. Redmond: Ils ne sont pas vendeurs.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Vendeur, enfin... on a entendu d'autres témoignages, je pense même que vous reconnaissez que si on parle d'accueil, d'empressement, de chaleur, etc. un tas de qualités que les Québécois auraient, non pas en exclusivité, j'en suis sûr quand même...

M. Redmond: Non pas qu'on aurait, qu'on a!

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Qu'on a, oui, qu'on aurait, dans votre discours. Ce sont tous des attraits, ce sont toutes des choses positives. Si ce ne sont pas des qualités de vente que de faire preuve d'accueil dans la restauration, je cherche l'alternative. On laisse cela en plan, si je comprends bien. Vous n'avez pas de réaction particulière à cela.

M. Redmond: Non.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le deuxième aspect que vous avez fait valoir tout à l'heure, c'était du côté apparence, du côté marketing. Vous avez dit que pour la clientèle, la perception immédiate qu'elle a du coût d'un produit peut être déterminante dans l'achat de ce produit. Vous voyez un repas à 1,29 $ quelque part, vous entrez là et rendu au bout de la ligne, les biscuits soda n'étaient pas compris ni le carré de beurre, et on se ramasse avec une facture de 2,26 $. C'est là que j'aimerais vos commentaires. Au-delà de cette réalité, il y a le fait qu'elle n'est pas applicable dans tous les cas.

Je pense qu'il y a une telle variété d'établissements dans l'hôtellerie et la restauration que ce que vous faites valoir ne vaut peut-être effectivement que pour l'exemple que vous avez employé, la cafétéria où on achète à la pièce, où il y a une espèce de soi-disant menu complet que la plupart des gens assimilent à quatre ou cinq articles. Et rendu à la caisse, ils se sont aperçus qu'il y en avait deux qui n'étaient pas compris dans le prix du menu complet. J'essaie de voir dans quelle ampleur d'établissement on est en train de prétendre que le marketing, au point de vue du prix, est immédiatement perçu par le consommateur et si c'est un facteur. Parce que vous admettrez que ce n'est pas un facteur au Château.

M. Boulanger (Charles): Si vous me permettez de répondre. Je vais prendre l'exemple qui va être accepté de tous. Prenons le forfait touristique. Supposons un congrès X, une réunion d'affaires X ou un forfait carrément touristique pour groupes ou individus, le coût de l'hébergement et le coût de la restauration sont des facteurs énormes en plus du transport et d'autres facteurs.

Vous comme moi, lorsqu'on choisit une destination touristique, que ce soit par affaires dans le sens des congrès ou que ce soit vraiment par plaisir, on se présente dans une agence de voyages et on regarde le prix total de la facture. Il est sûr que lorsqu'on va dans le Sud, en Europe ou ailleurs, il y a toujours des extras qui sont inclus, mais parmi les facteurs déterminants d'un choix, le prix compte énormément. Il faut le voir peut-être au niveau du touriste mais il faut le voir aussi au niveau du grossiste qui, lui aussi, lorsqu'il choisit des destinations, va arriver à un moment donné où il connaît son marché et il sait que s'il passe de 699 $ pour deux semaines à 735 $, par rapport à des concurrents, automatiquement, il va perdre du marché, il le sait d'avance. Pourtant, la différence dans certains cas n'est peut-être pas énorme, mais le visiteur est prêt à économiser 50 $ et à changer de destination. (16 h 45)

II y a un magasinage effrayant qui se fait dans ce domaine. À ce niveau, je pense qu'on serait carrément perdants, les grossistes nous disant souvent que le prix de la facture totale au Québec est très cher. On peut égaler le service. Le service y est. Lorsqu'on est en France, lorsqu'on est aux États-Unis ou lorsqu'on est ailleurs et qu'on choisit, par exemple, un très grand congrès, une destination, le prix de la facture finale, avec 15% additionnels, peut être très significatif pour l'orientation d'une partie du marché de congrès, mais aussi une partie des

visiteurs individuels ou de groupes en autobus.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce qu'on est en train de présumer que la divulgation des éléments de prix d'un forfait n'est pas égale d'un grossiste à l'autre ou d'une occasion à l'autre? Par exemple, comme consommateur, je me demande où je vais aller en vacances; j'ai deux dépliants, les prix ne sont pas semblables, il y en a un où c'est écrit "boissons non comprises", l'autre "vin à tous les repas", l'autre "service non compris" et l'autre "service compris". Il me semble que tout le monde peut faire ces calculs. Dans le fond, on en est peut-être à se promener autour du taux de 15% que vous trouvez élevé ou simplement du principe même de dire que les gens sont simplement et bêtement affectés par un prix qui est plus gros que les autres, qui est en rouge, qui est souligné avec des rayons de soleil autour.

M. Boulanger: Exactement. Les gens choisissent de cette façon. Les gens qui font une recherche telle que vous la décrivez sont des gens assez exceptionnels en général.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si on évoquait la tenue de grands congrès, on ne peut pas les accuser d'être des amateurs et de faire cela vite et de se laisser embarquer par des grossistes quand ils vont envoyer 17 000 membres des clubs Lions à quelque part.

M. Boulanger: À ce niveau, il serait peut-être intéressant de demander l'opinion de quelqu'un comme M. Jean Labonté, qui sera au Palais des congrès à Montréal. Il vous donnerait un éclairage qui serait peut-être plus documenté que le nôtre. J'ai envie énormément de présumer de sa réponse. J'aime autant le laisser à John.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

Qu'est-ce que ce serait d'après vous? Vous pouvez lui téléphoner.

M. Marcoux: Je retiens la suggestion. J'aurai sûrement l'occasion de le rencontrer lors de l'inauguration du Palais des congrès en juin. On va s'arranger pour communiquer ensemble avant cela, parce que je voudrais bien régler le problème avant.

M. Blank: J'espère qu'on va m'inviter dans mon propre comté.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Terrebonne, après je reviendrai à vous, M. le député de Hull.

M. Blais: Je vais être très bref. Je tenais au moins à prendre la parole sur ce mémoire, parce que c'est le mémoire sur la situation des travailleurs et travailleuses au pourboire de la région qui est la mienne. Vous savez bien parce qu'on s'est rencontré, que l'association des restaurateurs m'a fait l'honneur de venir en entier dans mon comté il y a à peu près trois semaines. On s'est consulté pendant plusieurs heures à ce sujet. Je me souviens de votre présence d'ailleurs. Je trouvais que c'était de mon devoir en tant que député de consulter autant les patrons que les syndicats. J'ai consulté un grand nombre de syndicats et de représentants d'associations au pourboire aussi pour me préparer à cette commission parlementaire. J'y ai mis beaucoup d'heures. Malgré cette consultation que je me devais de faire comme député avant de venir à cette commission parlementaire - je me devais de la faire, et je trouve que c'est très peu ce que j'ai fait, malgré que j'ai fait une consultation assez forte auprès de beaucoup de restaurateurs, de l'association des restaurateurs, de plusieurs syndicats, de plusieurs associations au pourboire - je n'ai pas de position définitive non plus. C'est une consultation. Cela demeure quand même que cela me peine comme député de la région que je doive dire que ceci représente le statu quo. J'en ai horreur et je suis contre de façon totale et absolue.

Je voudrais poser une question qui sous-tend la consultation. Vous nous dites au tout début que vous n'avez pas consulté, mais que vous avez formé un comité. Est-ce que j'ai bien entendu? On regarde les villes d'où proviennent les personnes consultées. Elles semblent venir à peu près toutes de la même ville. Ai-je mal compris ou si c'est votre idée personnelle, la même que vous m'aviez dite lorsque je vous ai consultés, qui est transmise dans ce rapport?

M. Redmond: Non, non.

M. Blais: Non quoi? Non, vous n'avez pas consulté ou non... ?

M. Redmond: On n'a pas consulté. On a formé un comité que vous avez en annexe.

M. Blais: De quelle façon?

M. Redmond: De quelle façon? Des personnes qui avaient été invitées par le ministre Biron et le ministre Chevrette à une réunion qui s'est tenue à Joliette.

M. Blais: Sur quel sujet?

M. Redmond: Sur le pourboire.

M. Blais: Alors, c'est la consultation que vous avez faite?

M. Redmond: C'est le comité que nous avons formé. Ne me faites pas dire que c'est

de la consultation, j'ai dit que je n'en avais pas fait.

M. Blais: Ah, bon! C'est ce que je voulais vous entendre dire.

M. Redmond: On a formé un comité. M. Blais: Je vous remercie.

M. Redmond: Mais, M. le député, quand vous dites que c'est le statu quo, je regrette infiniment. Que les employés au pourboire deviennent des travailleurs autonomes, à mon sens, ce n'est pas le statu quo. Vous me permettrez moi aussi de différer d'opinion avec vous là-dessus.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci M. le Président. Je veux simplement faire remarquer au député de Terrebonne que mardi il mentionnait qu'il rejetait toutes les options que retenait le livre vert. De prime abord, il y a sûrement d'autres options que le député de Terrebonne va nous suggérer éventuellement en commission parlementaire ou ailleurs.

M. Polak: Mais il ne l'avait pas lu.

M. Rocheleau: J'aimerais poser une question à l'association touristique. Est-ce qu'on retrouve des associations touristiques dans toutes les régions du Québec actuellement?

M. Redmond: Oui, M. le député.

M. Rocheleau: II serait intéressant, étant donné que l'on constate, malheureusement, et cela a été mentionné dans le mémoire précédent du Conseil régional de développement de l'Estrie où on reconmandait la création d'un comité interministériel qui regrouperait, entre autres, les ministres du Travail, de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi que la ministre déléguée à la Condition féminine...

Il est malheureux de constater que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme n'est pas présent à cette commission parlementaire, étant donné qu'il représente un aspect fort important de l'industrie touristique au Québec. À moins que je ne fasse erreur, et je voudrais que M. le Président m'en informe... Comment se finance l'Association touristique régionale de Lanaudière ou de toutes les autres régions du Québec? Tantôt le député de Bellechasse faisait allusion au fait que vous représentiez le côté patronal mais vous avez été créées sur les instances de qui et vous êtes subventionnées par qui?

M. Redmond: On a été créé à l'instance du gouvernement actuel, en 1977, et nous sommes financés à 50% de nos activités. Nous devons faire la contrepartie: exemple, 1,00 $ pour 1,00 $. Donc, l'autre dollar, on va le chercher des intervenants en prestations touristiques, restaurateurs, pourvoyeurs et tous les autres de nos régions.

M. Rocheleau: Alors, M. le Président, est-ce qu'on pourrait prétendre, concernant les affirmations ou les recommandations que vous faites aujourd'hui, que si le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme était ici, il aurait sensiblement les mêmes opinions que vous, étant donné que vous relevez partiellement de ce ministère comme potentiel régional au point de vue...?

Le Président (M. Gagnon): Je m'excuse, M. le député de Hull. Vous aurez sûrement l'occasion de poser directement cette question au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Rocheleau: J'ai d'autres questions à poser.

Le Président (M. Gagnon): Ah, bon! Vous pouvez poser d'autres questions mais celle-là...

M. Rocheleau: Je me posais...

M. Redmond: Je ne voulais pas présumer mais j'oserais croire que oui.

M. Rocheleau: M. le Président, si vous permettez que je continue.

M. Redmond: II faudrait qu'il se dissocie du gouvernement.

M. Rocheleau: J'aimerais continuer parce que j'ai assisté, entre autres, M. le Président, au lancement de l'ATRO, dans l'Outaouais, sur les instances du ministre Biron, à l'époque. Le ministre Biron semblait très enchanté de voir naître au Québec l'Association touristique régionale qui regroupait en somme tout l'aspect touristique québécois, au point de vue commercial, l'hôtellerie, la restauration.

Il est quand même assez regrettable, M. le Président, qu'on n'ait pas eu l'occasion, durant cette commission parlementaire, d'avoir avec nous un ministre qui est tout à fait responsable de l'industrie touristique au Québec et, plus particulièrement, de ce qui traite du domaine hôtelier et de celui de la restauration. Nous avons eu l'occasion d'avoir Mme la ministre

déléguée à la Condition féminine, le ministre du Revenu, bien entendu, qui actuellement a créé de toutes pièces cette commission afin de se permettre une mesure échappatoire au vrai problème qui est celui d'aller percevoir des impôts d'une façon peut-être frustrante auprès de plusieurs serveurs et serveuses.

M. Marcoux: Question de règlement.

Le Président (M. Gagnon): Sur une question de règlement, M. le ministre.

M. Marcoux: Ce matin, des groupes ont indiqué que la commission n'était pas un lieu pour faire des discours de la part des intervenants. Le député de Hull peut continuer comme cela, mais je constate qu'il y a peut-être des gens qui attendent pour nous présenter leur opinion, d'autres souhaiteraient la connaître, mais chacun des députés ici aura largement l'occasion dans les mois qui vont venir de faire connaître son attitude personnelle ou l'attitude aussi de son parti.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Effectivement, sur...

M. Rocheleau: Je n'ai pas terminé, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Non, vous n'avez pas terminé, mais j'accepte la question de règlement, parce que le mandat de la commission, c'est d'interroger des gens sur la situation des travailleurs au pourboire au Québec. Cela fait je ne sais pas combien de fois, que je répète que le mandat de la commission est d'interroger ces gens. C'est la dernière journée et il y a encore beaucoup de témoins. Je voudrais que les reproches que vous aurez à faire au gouvernement, peu importe la situation, vous les fassiez à d'autres occasions. J'aimerais que vous profitiez de votre droit de parole pour interroger les gens sur cette situation.

M. Rocheleau: M. le Président, c'est tout à fait à l'intérieur des questions et des réponses qu'on se donne depuis mardi. À toutes fins utiles, je répète que je regrette l'absence d'un ministre fort important à cette commission parlementaire, qui est directement impliqué. On semble depuis mardi être en négociation tenant compte du salaire des employés de restaurant, ainsi que des avantages sociaux. Il est sûr qu'il y a un problème là qu'il faut régler. Il est sûr que le statu quo n'est probablement pas souhaitable, mais il n'en demeure pas moins que l'Association touristique régionale de Lanaudière nous fait valoir un point important au niveau des coûts, des augmentations de coûts, alors que l'industrie connaît actuellement une perte de vitesse importante au Québec depuis quelques années. Dans ce même contexte, j'aimerais savoir de la part de l'Association touristique régionale de Lanaudière si - elle n'a pas fait des consultations populaires - elle a fait une certaine consultation avec les autres associations touristiques en province tenant compte du même sujet.

M. Redmond: Non, malheureusement, nous ne l'avons pas fait. Je crois qu'il serait intéressant de le faire, mais, vu que nous sommes impliqués dans ce dossier depuis à peine une trentaine de jours, ce n'était pas possible.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le ministre.

M. Marcoux: Une première remarque. S'il y en a qui doutaient de l'intérêt de la question pour le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, ils ont eu leur réponse dans les propos même de M. Redmond qui dit que c'est à l'initiative du député de Joliette et du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qu'il y a eu une première rencontre pour lancer le débat dans l'Association touristique régionale de Lanaudière pour pouvoir émettre un avis et avoir une première discussion.

Je peux ajouter, comme pour mes autres collègues qui n'ont pu être ici pour la durée de la commission, que le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme a délégué un membre de son cabinet qui a assisté à toutes nos rencontres, à toutes les discussions depuis deux jours et demi et que l'intérêt du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme pour la question est manifeste. Vous en avez témoigné vous-même. Je vous remercie d'avoir pris l'initiative de venir nous présenter un mémoire parce qu'il ajoute un point de vue nouveau que nous n'avions pas entendu depuis le début, c'est-à-dire le point de vue d'une association touristique. Cela aurait peut-être été utile que d'autres associations touristiques le fassent, mais, en tout cas, vous avez pris l'initiative de le faire. Même si vous n'avez pas eu le temps de consulter des dizaines et des centaines de personnes, vous avez quand même pris le temps, à six ou à sept personnes, de vous réunir, de vous rencontrer et d'arriver à quelque chose de précis. (17 heures)

Ce qui m'a intéressé dans votre mémoire, c'est que, pour employer une expression populaire, j'ai l'impression qu'il nous a ramenés sur le terrain des vaches, sur le terrain concret. Vous dites des choses précises que j'ai entendues dans les

discussions avec les travailleurs et travailleuses au pourboire qu'aucun autre mémoire ne signifiait. Par exemple, un petit paragraphe indiquait que les travailleurs et travailleuses au pourboire dans des casse-croûte, qui servent beaucoup de café, des rôties, un léger dîner, etc., disent: "Si vous nous imposez les 15%, cela n'est pas compliqué, nos revenus viennent de tomber de façon importante." Vous l'indiquez et aucun autre mémoire, à ma souvenance, ne l'avait indiqué. Vous l'indiquez en une phrase, mais c'est très clair; c'est tout aussi percutant, à mon sens, que si vous l'aviez dit en plusieurs pages-Un autre fait que vous soulignez et dont il faut tenir compte dans l'analyse de toute solution, c'est les conséquences sur les relations, si l'hypothèse du frais de service obligatoire était choisie, l'espèce d'équilibre stable ou instable entre le réseau des services donnés dans les écoles, dans les cabanes à sucre et tous ces réseaux parallèles de banquets, etc., qui actuellement concurrencent déjà, on le sait, l'industrie de la restauration, l'industrie hôtelière et qui, souvent, ont des comportements économiques en marge des institutions qui donnent ce type de services. Je sais bien que, comme député peut-être davantage que comme ministre, j'ai eu des représentations dans le passé sur le type de problèmes que pouvait soulever cette concurrence existante. Je peux vous assurer, quant au point que vous soulevez, même si vous le faites brièvement, que je vais réfléchir à cette question de l'équilibre que je pourrais qualifier de fragile actuellement entre ces différentes institutions.

Ce serait pareil s'il y avait une augmentation des prix trop importante dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie - cela avait déjà été souligné par d'autres - cela aurait certainement des conséquences sur le genre de services demandés par les clients, soit en termes de livraison à domicile ou de livraison au comptoir, par rapport à la restauration ou à l'hôtellerie qui exige des services. En ce sens, vos descriptions concrètes de certains phénomènes ou de certaines situations, même s'il n'y a pas de longues analyses et de longues explications ou de longues hypothèses sur tout ce qui pourrait arriver ou ne pas arriver, je peux vous assurer que ces évocations ne resteront pas lettres mortes.

Un autre point que je voudrais ajouter et qui n'est pas sous forme de question, c'est plutôt pour continuer l'analyse qu'on a faite des conséquences économiques. Le député de Vaudreuil-Soulanges indiquait tantôt que l'augmentation des coûts serait d'environ 2% ou 3%, si on tient compte des avantages sociaux. Je crois que la discussion qu'on a eue depuis deux jours, deux jours et demi - on a pris des exemples précis - cela s'applique clairement, c'est clair et net. Si on choisissait les formules 2 et 3, où le travailleur au pourboire doit révéler l'ensemble de ses revenus de pourboires tandis que l'employeur doit payer ses cotisations sur l'ensemble des avantages sociaux, assurance-chômage et tout, ces 13% représentent environ 2% à 3% d'augmentation des coûts sur le chiffre d'affaires.

L'analyse qui n'est pas encore faite et qui doit être faite, c'est ceci. Si on pense aux frais de service obligatoires, là, il y a deux facteurs dont il faut tenir compte: l'augmentation des avantages sociaux, mais aussi l'effet, par rapport au chiffre d'affaires global, de l'augmentation de 10% à 15% ajoutés sur la facture qui est perçue non pas seulement par rapport au salaire, mais qui s'ajoute à l'ensemble du chiffre d'affaires. Quand vous recevez une facture de 4 $, cela inclut une partie du salaire minimum. Cela inclut l'alimentation et tous les autres services, comme les coûts d'hypothèque de l'entreprise, etc. Les 15% ou les 10% seraient ajoutés à la globalité. Or, si la solution 5.1 était choisie, avant de faire une analyse, je ne pourrais pas affirmer aujourd'hui que l'augmentation des coûts serait seulement de 2% ou 3%, tandis que selon l'hypothèse 2 ou 3 on peut affirmer clairement que l'augmentation des coûts risque d'être de 2% ou 3% globalement.

Ma seule question sera la suivante: Vous dites que le travailleur au pourboire s'apparente davantage dans son essence au travailleur autonome qu'au salarié. Sur ce, j'ai une question de fond, parce que, c'est au coeur de la conception qu'on a en somme de... Est-ce que le travailleur ou la travailleuse au pourboire est un salarié ou si c'est clairement comme quelqu'un qui a une épicerie à son compte, qui, à ce moment-là, est défini comme travailleur autonome? Je regarde l'ensemble de nos lois ou de nos habitudes, puis même de notre conception du rôle du travailleur autonome et j'ai bien l'impression que l'ensemble de la société le perçoit davantage comme un travailleur salarié que comme un travailleur autonome. Ce qui m'amène à la question de la responsabilité sociale. Si le travailleur au pourboire n'est pas un travailleur autonome, dans la réalité, comme dans la conception qu'on peut s'en faire, pourquoi l'entreprise n'aurait-elle pas à assumer sa part des responsabilités sociales par rapport au travailleur autonome, donc, accepter de payer sa part des avantages sociaux?

Le Président (M. Gagnon): M. Redmond.

M. Redmond: Je crois en réalité, qu'actuellement, malgré qu'il y a une partie du salaire des employés au pourboire, qui est fixe et que l'autre, dépende du service, le pourboire, lorsque vous posez la question à savoir: Qu'est-ce qui apparente cela à un

travailleur autonome? Je dis: c'est la qualité de service, la façon dont il va répondre à ses clients, qui fait, à mon sens, qu'il est un travailleur autonome.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marcoux: Alors, disons, que je vais réfléchir sur votre réponse. Je vous remercie à nouveau de votre mémoire. Si, vous avez l'occasion de rencontrer d'autres associations touristiques dans les semaines qui viennent, je serais heureux de prendre connaissance des analyses qu'ils pourraient en faire.

M. Redmond: Comme mot de la fin, à mon sens, l'analyse en regardant tout cela, c'est qu'actuellement la restauration et l'hôtellerie ne peuvent pas supporter une augmentation. Je demeure convaincu que ce n'est pas parce qu'on ne veut pas...

M. Marcoux: D'accord. Je vais vous poser une brève question. Si, la conjoncture était bonne - admettons, que l'on accepte que la conjoncture soit mauvaise - est-ce que, comme employeur, vous accepteriez que ce qui s'applique pour le salaire minimum, comme contribution des employeurs aux avantages sociaux, s'applique également aux pourboires révélés par le travailleur au pourboire?

M. Redmond: Je ne crois que cela soit une question de conjoncture, M. le ministre. Il faut encore se dire que c'est un produit qu'on offre dans l'Amérique.

M. Marcoux: Non, c'est parce que vous avez dit: La conjoncture n'est pas bonne. Je veux vous poser la question: Si la conjoncture était bonne?

M. Redmond: Si, j'ai dit: la conjoncture, c'est que tout dépend des comparaisons qu'on veut faire. Le salaire minimum dans les États du Sud est plus bas qu'ici; il est de 1,67 $.

M. Marcoux: D'accord.

M. Redmond: Si on regarde à côté, vous avez 3 $. Si on regarde sur le plan pan-canadien, actuellement, dans l'industrie touristique, la restauration, et l'hôtellerie, nous allons chercher à peine 2 000 000 000 $, alors que l'industrie totale au Canada est de 18 000 000 000 $. C'est dire qu'on ne va chercher ici, malgré qu'on soit 26% ou 27% de la population, que 12% de toute l'entrée de fonds touristiques au Canada. Allez donc dire: On n'est déjà pas concurrentiels, nous ne pouvons pas surcharger encore cette industrie.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, simplement, pour remercier, au nom de l'Opposition, M. Redmond, et son collègue d'être venus ici. Je crois que c'est avec beaucoup de vigueur que vous avez défendu le point de vue du comité régional, à la suite d'une technique d'interrogation - que j'ai peut-être empruntée - qui vous a poussé dans vos derniers retranchements, pour faire ressortir, avec beaucoup plus de clarté, et beaucoup de variétés dans la restauration et l'hôtellerie, qu'il y a des secteurs où les effets sont forts différents à comparer à ceux d'autres secteurs. Tout l'aspect de l'habitude... Oui, je dirais, la convention qui existe ici, depuis longtemps, comme partout en Amérique, de laisser le client choisir et apprécier. Il faudrait voir, si, dans les exemples que vous avez donnés - je pense que c'est utile que vous l'ayez mentionné -effectivement, tout cet aspect de perception que le client a d'un changement qui serait fait va tellement influencer les déplacements, va tellement influencer ce genre d'entreprise. Il faudrait y repenser extrêmement sérieusement pour se conformer au troisième critère de décision qui est dans le livre vert, c'est-à-dire qu'il ne faut pas s'arranger pour que l'industrie touristique se détériore à la suite de quelque décision que ce soit, dans ce dossier. Je vous remercie beaucoup, Messieurs.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. Redmond, M. Boulanger et l'Association touristique régionale de Lanaudière.

Maintenant, j'inviterais la Fédération des travailleurs du Québec, M. Fernand Daoust.

M. Daoust, si vous voulez nous présenter celui qui vous accompagne.

Fédération des travailleurs du Québec

M. Daoust: Je suis accompagné de Me Louis Duval, de l'Union des employés de service. Mon nom est Fernand Daoust, secrétaire général de la FTQ.

M. le Président, messieurs les ministres, la FTQ représente quelques milliers de travailleurs et travailleuses au pourboire dans les secteurs de l'hôtellerie et de la restauration du Québec, par l'intermédiaire de trois de ses syndicats: l'Union des employés de commerce, la Fraternité canadienne des cheminots et l'Union des employés de service.

Au-delà de ces membres, la FTQ se préoccupe vivement du sort de ces dizaines de milliers de travailleurs et travailleuses qui subissent des conditions de travail peu enviables et ne jouissent qu'en très faible

proportion d'une protection syndicale. Le mémoire qui suit constitue donc notre réaction aux propositions de travail énoncées dans le livre vert, en même temps qu'il propose notre lecture de la situation pénible vécue par cette catégorie de travailleurs et de travailleuses et des moyens privilégiés d'améliorer leur condition.

Premier point, les travailleurs et les travailleuses au pourboire, une main-d'oeuvre vulnérable et sous-syndiquée. Les travailleurs et les travailleuses du secteur de la restauration et de l'hôtellerie du Québec font partie de ce marché du travail périphérique qui se caractérise par l'ensemble des conditions suivantes: majorité féminine, présence d'une proportion importante de Néo-Québécois peu informés de leurs droits, caractère en grande partie saisonnier de l'industrie d'où fluctuation du volume de l'emploi, mobilité des travailleurs, instabilité patronale, sous-syndicalisation, piètres salaires, avantages sociaux et conditions de travail en général. Une bonne partie des travailleurs à l'oeuvre dans ce secteur ont aussi la particularité d'être assujettis à la règle du pourboire, en vertu de laquelle leur revenu réel est soumis non seulement aux aléas de la conjoncture économique mais aussi à la qualité d'ensemble du service, lequel ne dépend pas que du travail personnel de l'employé, ainsi qu'aux humeurs de la clientèle.

Cette iniquité engendre également des différences objectives entre employés, qui créent et entretiennent à leur tour des divisions et une compétition peu propice à l'éclosion d'une solidarité face à l'employeur.

Si le problème de l'évasion fiscale chez cette catégorie de travailleurs est réel et doit être effectivement pris en compte, il reste que pour notre centrale les conditions de travail de ces travailleurs constituent notre première préoccupation. Ces conditions sont mauvaises et l'institution du pourboire constitue une survivance archaïque qui a pour effet de saper la dignité individuelle et collective des employés concernés.

Le lot des travailleurs non syndiqués est celui de ceux qui sont laissés sans défense face à des employeurs qui exercent sans partage et dans tous les domaines les droits de la direction. Ils sont isolés et confrontés individuellement à leur employeur; rapport de forces donc inégal et faux. Ils sont dépourvus de droits réels, les droits qui leur sont consentis en vertu des lois à portée universelle étant peu ou pas applicables en l'absence d'un rapport de forces digne de ce nom. Ils connaissent un décalage estimé par le Conseil du statut de la femme à 18% dans leurs conditions de travail, lorsqu'elles sont comparées à celles de collègues syndiqués. La pratique du pourboire ouvre la porte aux tentatives de division et d'exploitation des préjugés raciaux et sexuels auxquels se livrent facilement les employeurs et prive ces travailleurs d'une couverture sociale minimale, comme plusieurs intervenants l'ont abondamment expliqué. Ajoutons à ce sujet qu'en matière de couverture sociale le problème réside non seulement dans l'application des lois, mais aussi dans la négociation par les syndicats de régimes d'avantages sociaux.

La FTQ, qui réclame depuis tant d'années déjà la syndicalisation multipatronale, voit en effet dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie un secteur type où l'accréditation unipatronale rend virtuellement impossible la syndicalisation d'une partie significative de travailleurs. D'après les statistiques, environ 7,2% seulement de la main-d'oeuvre de ce secteur étaient syndiqués en 1976. La concurrence farouche entre employeurs, l'instabilité du volume d'emploi et la mobilité de la main-d'oeuvre, le caractère précaire des emplois sont autant de facteurs pour que les syndicats essuient des échecs dans leurs tentatives de syndicalisation.

Or, pour les travailleurs, la possibilité concrète de se syndiquer constitue un facteur d'équité. C'est pourquoi nous ne pouvions intervenir sur le problème des travailleurs et travailleuses au pourboire de ces secteurs sans rappeler qu'à nos yeux, en plus des améliorations concrètes que nous suggérons, la dignité et l'amélioration significative des conditions de travail et de vie de ces travailleurs passent par la syndicalisation; une syndicalisation que la législation actuelle contrarie largement et qui ne pourrait être assurée que par une formule d'accréditation multipatronale et d'autres amendements de nature à faciliter l'accès à la syndicalisation.

Choix d'une hypothèse: frais de service obligatoires. Nous sommes conscients que le critère majeur, qui a jusqu'ici probablement guidé le gouvernement dans son approche du problème des travailleurs au pourboire, est celui de l'équité fiscale. C'est là un critère valable que nul ne saurait contester même si nous ne croyons pas que cette catégorie de travailleurs aux revenus en moyenne fort modestes constitue la principale source d'évasion fiscale chez nous. Critère valable, donc, mais largement insuffisant.

La question de la qualité de la protection sociale assurée à cette main-d'oeuvre nous apparaît un critère prioritaire. Le livre vert présente de façon adéquate la situation en regard de ce problème et nous n'insisterons pas. Nous ajouterions à ces critères de fiscalité et de protection sociale un troisième critère relatif à l'équité et à la dignité auxquelles ont droit ces travailleurs et ces travailleuses.

Compte tenu de l'ensemble de ces critères, c'est l'hypothèse no 1: frais de service obligatoires, qui nous apparaît non seulement la plus juste, mais, en fait, selon

nous, la seule digne de considération. Toutes les autres hypothèses constituent soit des solutions partielles, soit des déguisements du statu quo.

En regard de nos trois critères, l'imposition de frais de service obligatoires est, en effet, la seule solution adéquate. Par rapport à la question de la fiscalité, elle garantit l'officialisation de l'ensemble des revenus des travailleurs actuellement au pourboire dans l'industrie. Cette formule bloque au départ toute possibilité de collusion patron-employé ou, plus plausiblement, toute intimidation patronale. La fixation de ces frais de service à 15%, norme implicite, mais non respectée à l'heure actuelle, découragerait en outre les clients de recourir au pourboire parallèle. Il est, d'autre part, très important que le gouvernement légifère pour rendre obligatoires ces frais de service. Cela ne doit pas être une suggestion qui laisserait les employeurs libres de fonctionner à leur guise. Ainsi, nous rapporte-t-on que, dans certains grands hôtels où nous avons des membres, la règle veut que les groupes réservant des salles pour des banquets doivent en principe payer 15% en frais de service. Il est, cependant, de pratique courante que des groupes négocient l'abolition de ces frais de service avec les directions d'hôtel. Disparition donc des 15% qui devaient être répartis entre les employés. L'hôtel ne perd pas un cent; les invités ou participants ne payent pas le service et les employés sont les grands perdants de cette opération.

Le critère de la protection sociale de ces travailleurs suit de près la question de la fiscalité. Il va de soi que la formule garantissant le mieux l'officialisation de l'ensemble des revenus se trouve automatiquement à garantir le mieux la protection sociale, en regard de l'ensemble des régimes avec ou sans cotisations patronales et individuelles, de cette catégorie de la main-d'oeuvre. Ces deux critères sont, en fait, liés et, malgré un préjugé courant, les travailleurs de ce secteur ne s'y trompent pas. C'est particulièrement le cas, bien entendu, pour les travailleurs qui font carrière dans ce secteur et qui ont forcément des préoccupations par rapport à la légitimité de leur revenu et bien entendu, également, par rapport à l'ensemble de la protection sociale, terriblement déficitaire en ce qui les concerne. Les travailleurs permanents de ce secteur ne veulent plus être des travailleurs de seconde zone; ils veulent gagner leur vie au grand jour et jouir en retour des droits correspondants, au même titre que leurs camarades oeuvrant dans d'autres secteurs d'activité.

L'imposition de frais de service obligatoires nous apparaît enfin la seule solution compatible avec ces principes d'équité et de dignité qui nous apparaissent si fondamentaux. Cette formule est la seule à mettre un terme au caractère discrétionnaire du pourboire, qui est absolument incompatible avec ces principes. En rapport avec l'équité, le montant des pourboires peut varier actuellement selon une foule de facteurs: selon les caractéristiques personnelles des employés qui n'ont strictement rien à voir avec leur compétence objective, à commencer, bien sûr, nous le savons tous, par l'attrait physique; selon les dispositions, attitudes ou moyens financiers des clients plus ou moins généreux, plus ou moins portés à faire subir à l'employé les conséquences de leur insatisfaction; enfin, selon des facteurs reliés à l'organisation du travail (attribution des tables, horaires différents) ou à la qualité de la gestion partronale (repas de mauvaise qualité, nombre insuffisant de serveurs et de serveuses et le reste). En somme, la fraction du pourboire qui, à l'heure actuelle, évalue réellement le service fourni par l'employé est minime et est calculée de toute manière de façon inéquitable.

Au-delà de ces considérations, nous ne croyons pas compatible avec le droit à la dignité de ces travailleurs et de ces travailleuses de laisser à la discrétion et au bon jugement du client la détermination d'une fraction significative de leur revenu. Nous croyons que les facteurs d'iniquité qui pourraient subsister en dépit de l'imposition uniforme des 15%, le montant total des factures variant forcément sans que l'employé n'y soit pour quelque chose, de même que le temps d'occupation des tables par les clients, etc., sont de ceux qui peuvent être pris en charge adéquatement par les organisations syndicales.

La FTQ se prononce donc pour des frais de service obligatoires de 15% et nous avons la conviction que les autres hypothèses sont inadéquates, selon nos critères d'analyse. La formule du pourboire discrétionnaire inscrit par le client sur la facture ne bloque pas la possibilité d'un pourboire parallèle, d'où une possible évasion fiscale, des enquêtes du fisc et insuffisante protection sociale. Cette formule fait également bon marché de la dignité et de l'équité auxquelles ces travailleurs et ces travailleuses ont droit.

La déclaration périodique des pourboires ne garantit pas non plus l'"officialisation" des revenus, impose des corvées paperassières aux travailleurs et aux employeurs et rend incertaine la protection sociale. Elle ne modifie en rien le caractère humiliant et inéquitable de la pratique du pourboire.

Quant à l'octroi d'un statut de travailleur autonome, c'est une solution qui n'en est pas une et qui vise à institutionnaliser les pires aspects des conditions actuelles de travail des travailleurs et travailleuses au pourboire.

Quand on ne choisit pas ses heures de travail et qu'on a un pouvoir très limité sur la qualité du service rendu (exemple: qualité de la nourriture, rapidité du service qui est reliée au nombre d'employés en fonction) on est tout, sauf un travailleur autonome.

Recommandations complémentaires. Au règlement du problème fiscal et social actuellement vécu par les travailleurs au pourboire de la restauration et de l'hôtellerie se rattachent d'autres questions que nous examinerons maintenant fort brièvement.

Les poursuites du fisc à l'endroit de certains travailleurs et de certaines travailleuses au pourboire ont fait couler beaucoup d'encre et suscité à juste titre des regroupements d'employés au pourboire. Cette heureuse conséquence, les regroupements, n'enlève pas cependant le caractère discriminatoire des démarches gouvernementales; discimination entre les employés, d'une part, puisque tous ne sont pas touchés de la même façon; discrimination subie par l'ensemble de cette catégorie de travailleurs et de travailleuses, en second lieu, par rapport aux autres contribuables. La négligence passée du gouvernement dans ce dossier, l'incertitude sur le statut de ces revenus de pourboire, certaines caractéristiques sociales de cette main-d'oeuvre (faible scolarité, forte proportion de Néo-Québécois) sont autant de facteurs qui rendent les démarches du gouvernement ou des gouvernements passablement odieuses. Nous croyons, à la FTQ, que le gouvernement devrait interrompre immédiatement ses poursuites et faire pression sur le fédéral pour qu'il l'imite en cette matière.

La différence existant entre les salaires minimums des employés au pourboire et ceux des autres employés, s'appuyait vraisemblablement sur l'existence de revenus parallèles: les pourboires. Nous croyons que la différence n'a jamais vraiment eu sa raison d'être et que les seules justifications qu'on pouvait invoquer concernaient précisément l'évasion fiscale. L'imposition de frais de service obligatoires mettrait un terme à ce problème. La FTQ réclame donc la disparition d'un taux de salaire minimum différencié pour les travailleurs au pourboire, ce en quoi le Québec se rallierait à la vaste majorité, sinon - peut-être ici une correction - à la totalité des provinces canadiennes.

Le taux actuel du salaire minimum est déjà terriblement bas. Il est bien loin de suivre le coût de la vie depuis que son indexation a été supprimée. Les travailleurs et les travailleuses de la restauration et de l'hôtellerie n'ont pas à subventionner leurs employeurs grâce au maintien d'un taux aussi bas de salaire minimum, à 3,28 $ l'heure. Nous croyons qu'il sera avantageux pour l'ensemble de cette industrie et, pour les travailleurs qui y oeuvrent, que s'établissent des conditions de travail décentes. Une amélioration des conditions de travail entraînera une plus grande stabilité patronale et ouvrière et donc, une hausse de qualité pour le plus grand bien de l'économie québécoise.

Nous nous préoccupons également de l'impact que l'imposition de frais de service obligatoires peut avoir sur le consommateur et par extension, sur le volume global de la consommation et donc, sur la santé de l'industrie. Nous ne partageons certainement pas les craintes de ceux qui croient que l'industrie touristique pourrait être significativement affectée par les 15% de frais de service obligatoires. La santé de l'industrie touristique au Québec est tributaire de mesures d'envergure et bien plus déterminantes que 15% de plus sur les factures. Toutefois, pour permettre une transition en douceur et en pensant, d'ailleurs, essentiellement au petit consommateur québécois, la FTQ serait favorable à une réduction proportionnelle de la taxe de vente pour que le montant total des factures ne subisse pas une trop grosse augmentation. Les sommes perdues à ce poste par le gouvernement seraient largement compensées par les impôts perçus sur les 15%.

Les recommandations, rapidement: La FTQ demande au gouvernement de permettre un accès réel à la syndicalisation pour ces travailleurs, tout particulièrement par l'instauration de l'accréditation multipatronale. La FTQ recommande que le gouvernement solutionne l'actuel problème fiscal et social confrontant les travailleurs et les travailleuses au pourboire en imposant des frais de service obligatoires de 15% sur les factures. La FTQ recommande en outre que la taxe de vente soit réduite en proportion, qu'un moratoire - et notre demande est faite aux deux gouvernements -sur les poursuites fiscales à l'endroit de ces travailleurs et de ces travailleuses soit décrété et, enfin, que la pratique d'un taux différent de salaire minimum pour les travailleurs et les travailleuses au pourboire soit abolie, et que ces derniers et ces dernières voient, en conséquence, leur salaire de base haussé à 4 $.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. Daoust. M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie beaucoup la FTQ d'avoir accepté de présenter un mémoire à cette commission sur la situation des travailleurs et des travailleuses au pourboire. En fait, je crois que vous avez reconnu que le livre vert, même s'il n'apporte peut-être pas toutes les solutions ou la solution globale, veut quand même se préoccuper des différentes dimensions qui peuvent impliquer les travailleurs et les

travailleuses au pourboire.

Ma première question. Vous dites qu'à l'équité fiscale, il faut ajouter un troisième principe ou objectif: l'équité et la dignité des travailleurs. Vous le reprenez peut-être en filigrane tout le long du texte; j'aimerais que vous précisiez. Lorsqu'on a parlé d'équité fiscale, évidemment, on parlait du paiement des impôts par rapport aux autres travailleurs. L'équité sociale, c'est que les travailleurs et les travailleuses au pourboire aient droit à l'ensemble des avantages sociaux auxquels ont droit les autres travailleurs; et que le patron, comme l'employé, y cotise dans la même proportion. J'aimerais un peu que vous me précisiez le contenu de ce concept d'équité et de dignité des travailleurs en le rattachant à certains points précis. J'admets qu'il y en a dans votre mémoire. C'est ma première question. Je reviendrai avec une autre question par la suite.

Le Président (M. Gagnon): M. Daoust. (17 h 30)

M. Daoust: Ce troisième principe nous apparaît fondamental. Ceux qui oeuvrent dans le milieu vivent quotidiennement des situations épouvantables qui ont été, sans aucun doute, décrites à l'occasion, et peut-être même devant votre commission. Le pourboire constitue une partie du revenu qui a tout de même une certaine importance. Il est essentiellement lié, comme on le mentionne dans notre mémoire, à toutes sortes de considérations. On parle, entre autres, des caractéristiques personnelles des employés. C'est un peu à la tête du serveur et de le serveuse que le client va décider -c'est une des considérations qui passent dans la tête des clients - de la dimension du pourboire qu'il donnera. Il n'est pas nécessaire de faire de longs exposés là-dessus.

On connaît les problèmes de harcèlement sexuel que connaissent les serveuses de la part des clients et bien souvent de la part des employeurs. De la part des employeurs, c'est peut-être un peu le même phénomène qu'on retrouve dans tous les milieux de travail. En ce sens, les serveuses ne sont pas l'objet d'une plus grande discrimination. Ce sont toutes les femmes qui sont l'objet de harcèlement sexuel en milieu de travail.

Vous connaissez les préoccupations de ces dernières, du mouvement syndical et de tous les groupes qui se penchent sur ce problème dans notre société depuis quelques années. Mais là, il y a une double discrimination à l'égard tout au moins du harcèlement sexuel, et c'est le client qui la fait subir à la serveuse. Indépendamment de cet aspect, on mentionne que c'est lié à des caractéristiques personnelles de ceux et de celles qui donnent le service. C'est donc tout le problème de la dignité de la personne qui fait un certain travail qui est en jeu.

Le deuxième aspect qu'on souligne, ce sont les dispositions, les attitudes, les moyens financiers, les comportements des clients, qui varient énormément. On a tous des exemples multiples qu'on pourrait donner. On les a tous vécus dans notre milieu; il suffit de s'ouvrir les yeux pour le constater. Il y a des gens d'une mesquinerie incroyable comme il y en a qui sont d'une générosité peut-être un peu désinvolte, peut-être pour la première raison que j'ai mentionnée, mais de toute façon, cela n'est pas lié à la prestation du service comme tel, mais au comportement et à la philosophie du client.

L'autre raison que nous mentionnons, c'est que souvent la qualité de la prestation du service ou tout au moins de tout ce qui entoure le service ne dépend absolument pas du serveur ou de la serveuse. On parle de l'attribution des tables, des horaires, de la qualité de la nourriture, de l'environnement. Les travailleurs et les travailleuses de l'hôtellerie et de la restauration n'y sont pour rien. Ce sont plus ou moins des décisions et des prérogatives patronales. Le pourboire est donc lié à ces trois espèces de grandes considérations. Il y en a d'autres, sans aucun doute. On estime que de lier le salaire, sur des conditions terriblement subjectives, à une prestation de service qui dépend de toutes sortes de facteurs, abîme les gens qui travaillent dans le milieu sur le plan de leur dignité personnelle. C'est archaïque. Je ne sais pas si anciennement il y avait des pourboires, mais je pense que cela va contre le sens de toutes les orientations de tous ceux qui se penchent sur la dignité des travailleurs et des travailleuses.

Il ne nous vient pas à l'idée qu'il faille donner un pourboire au préposé au bénéficiaire dans un hôpital ou à quelque personne qui nous donne un service ou qui nous rend un service dans les secteurs public ou parapublic ou dans le secteur privé, parce que ce n'est pas seulement dans les secteurs public et parapublic. Cela ne nous vient pas à l'idée d'avoir toujours 2 $ ou 5 $ pour l'employé de Bell Canada qui vient réparer votre téléphone. En tout cas, cela dépasse l'entendement que cela se fasse, et ceux qui le font ne le font pas pour des raisons de prestation de service; ils le font peut-être pour d'autres considérations. Alors, tous ceux qui sont dans le domaine de la restauration subissent ce phénomène. Il y a des pays qui ont réussi à éliminer les pourboires. Écoutez! Je veux faire bien attention. Je ne veux pas nécessairement prendre des modèles et être mal cité, mais il y a certains endroits où cela n'existe pas. Peut-être que c'est utopique de penser - certains l'ont mentionné - qu'un de ces jour, les sociétés et la société qui est la nôtre élimineront

complètement le pourboire parce que, somme toute, c'est toujours le consommateur qui paie, quel qu'il soit. C'est peut-être la solution idéale lointaine. On n'est pas rendu là. On veut procéder par étapes. Dans un premier temps, on dit: Tout le monde sur le même pied, tous les clients sur le même pied et le pourboire obligatoire.

M. Marcoux: Je vais vous poser une question relative à la représentativité. La FTQ est largement représentative des préoccupations des travailleurs syndiqués au Québec et largement représentative des préoccupations de l'ensemble des travailleurs puisque, pour reprendre l'expression qui n'est plus tellement à la mode, vous agissez constamment sur le deuxième front également. Ma question est la suivante. Vous nous présentez aujourd'hui l'opinion d'une centrale syndicale concernant les travailleurs et les travailleuses au pourboire. Nous avons eu, au cours de cette commission, l'occasion d'entendre d'autres représentants d'employés syndiqués du même secteur, entre autres, l'Alliance des travailleurs du Québec, qui est surtout centrée dans la région de Québec et un peu dans les autres régions, qui a défendu un autre point de vue. J'ai posé la question puisqu'il y avait eu des sous-entendus: Est-ce que vous êtes un syndicat de boutique, oui ou non? C'était aussi direct que cela. On a dit: Non, on obtient des services; on a une entente de services avec la Fédération des travailleurs du Québec. Ce que je voudrais savoir, c'est ceci: À la Fédération des travailleurs du Québec, est-ce que vous avez actuellement une fédération? Combien de syndicats sont directement liés, pas à la fédération parce que votre fonctionnement, c'est qu'ils sont reliés non pas à une sous-centrale, mais à un conseil spécialisé... Combien de membres avez-vous qui proviennent du secteur de la restauration et de l'hôtellerie?

Le Président (M. Gagnon): Juste avant de vous laisser la parole, j'apprécierais qu'on trouve le moyen de raccourcir les questions et les réponses de façon que...

Une voix: Parfait.

M. Marcoux: J'en aurai une autre ensuite. Ce sera tout.

Le Président (M. Gagnon): ... les membres de la commission puissent vous poser d'autres questions.

M. Duval (Louis): Pour ce qui est du nombre, quelques milliers, nous le mentionnons, 2000 ou 3000 dans trois syndicats: le commerce, les employés de service et les employés de chemins de fer surtout dans les hôtels des grands réseaux ferroviaires.

M. Marcoux: Ce qui signifie environ 35% ou 40% au pourboire parmi ces 3000 employés. Si vous représentez un restaurant ou un hôtel, il y a peut-être 35% ou 40% des employés qui sont au pourboire.

M. Duval: Possiblement. Je n'ai pas de données fort précises. Pour ce qui est de la représentativité, notre façon de procéder a été de réunir des travailleurs au pourboire avec des porte-parole syndicaux, de procéder à des tables rondes sur l'ensemble des phénomènes, de soumettre le mémoire au bureau de direction de la FTQ et à son conseil général qui se réunissait à Jonquière, il y a deux jours, de provoquer un échange de vues chez l'ensemble des syndiqués de la FTQ par leurs représentants qui siègent au conseil général afin de dégager la position qui est devant vous. C'est pour la représentativité. C'est donc 2000 à 3000.

M. Marcoux: Cela va.

M. Duval: Le taux de syndicalisation, je ne veux pas allonger ma réponse...

M. Marcoux: Vous l'avez indiqué tantôt. M. Duval: ... est terriblement bas.

M. Marcoux: C'est cela. On a dit 2% ou 3% à cette commission.

M. Duval: Vous le savez.

M. Marcoux: J'ai une autre question d'ordre général concernant la possibilité de perte d'emplois. Il y a eu, on dirait, presque un accord au sein de cette commission entre les grandes associations d'hôtellerie et de restauration et les représentants des centrales syndicales ou des grands syndicats, à savoir que ce ne serait peut-être pas la fin du monde si disparaissaient du décor 1000, 1500, 2000, 2500 entreprises dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie, parce que les autres entreprises seraient plus stables, pourraient peut-être donner de meilleures conditions de travail en étant plus solides, etc. On a eu aussi le point de vue de particuliers, d'individus qui, dans un cas, celui d'une petite entreprise familiale, nous ont dit: Aujourd'hui (c'était un mardi soir), vous avez entendu le point de vue de ceux qui sont mieux installés dans le système, qui représentent les mieux installés; je voudrais vous faire entendre le point de vue des petits. J'en suis un petit, qui a investi 500 000 $...

M. Blank: C'est pas drôle quand tu viens de la banque.

M. Marcoux: Cela fait rire mais, en tout cas, c'est ce que j'ai compris à ce moment. Si je me souviens bien, c'était 400 000 $ d'emprunt, sur un investissement d'environ 500 000 $. Peut-être que j'erre dans les chiffres, je ne me souviens plus trop de ce qu'on me disait, mais j'ai compris que cela représentait de 20 à 25 emplois, quelque chose du genre, ou une quinzaine d'emplois. Il disait: Moi, je n'ai pas eu l'impression d'être entendu aujourd'hui, je n'ai pas eu l'impression que ma voix a pu s'exprimer à travers des organismes établis. Cela revenait à dire: Je voudrais bien que vous teniez compte de tous ceux qui sont petits dans le système. Face à ce problème - et je ne le développe pas davantage, je sais que des gens étaient ici, vous représentant durant ces trois jours - quelle est votre réaction, votre perception des choses?

M. Duval: II ne nous semble pas à nous - on le mentionne dans notre mémoire - que l'imposition obligatoire d'un montant sous forme de pourcentage, comme celui qu'on suggère, créerait des commotions économiques à l'intérieur de l'industrie. La santé de l'industrie dépend de multiples facteurs, on le sait tous. Je vous rappelle que nous avons tenu, nous, c'est-à-dire le gouvernement et les partenaires, une conférence à l'intérieur des mini-sommets économiques sur le tourisme, il y a déjà quelques années, et nous avions à ce moment fait le tour de tous les problèmes qui affectent l'industrie touristique au Québec. Je ne me souviens pas que le problème des pourboires obligatoires ou le phénomène du pourboire obligatoire ait été mentionné comme un facteur dangereux au point de vue de la santé économique.

Il y a un volume donné à l'intérieur du Québec, il y a une demande de services dans ce domaine qui ne subirait pas, selon nous et selon ce que nous connaissons du milieu, de fluctuation imposante, déterminante, si on retenait la proposition qui est la nôtre et qui est celle de bien des groupes. Nous mentionnons que de multiples facteurs assurent une santé économique de l'industrie touristique au Québec et Dieu sait qu'on a tout entendu dans le domaine. Je vous rappellerai que certains ont même prétendu, à un moment donné, que la loi 101 pouvait être un facteur de mauvaise santé économique de l'industrie touristique au Québec. Il y a des aberrations de ce type qui circulent et je ne vise personne en particulier, mais cela a circulé au moment où il en a été question.

Nous ne le croyons pas. Écoutez, il y a des milliers d'entreprises sans aucun doute. Nous estimons que, selon cette formule, qu'il y ait des changements ici et là, cela peut arriver, mais cela n'affecterait pas. Il n'y a pas une corrélation, il n'y a pas une incidence entre une formule comme celle-là et un déclin de l'activité économique pour ce qui est de la restauration et de l'hôtellerie.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Merci, M. le ministre. M. Daoust, je suis peut-être un peu naïf, mais je pense que je suis aussi objectif et je suis venu ici - je ne suis même pas membre de la commission - parce que le problème m'intéresse énormément et, là, j'ai écouté tous ces mémoires. Donc, seulement du côté syndical officiel, j'ai classé cela un peu. On a eu le point de vue de l'Alliance des travailleurs du Québec représenté par M. Côté, ensuite, le mémoire de la CSN et, finalement, celui de la FTQ. (17 h 45)

Ce que je ne comprends pas, c'est que, quand on prend la page 4 de votre mémoire, vous dites - et c'est votre ligne de conduite - que les frais de service obligatoires, c'est la seule option digne de considération. Ce n'est pas cela que l'Alliance des travailleurs a dit, elle qui d'ailleurs semble avoir ici à Québec, dans la ville de Québec et les environs, même plus de serveurs et de serveuses qui sont membres de leur syndicat; ils sont venus pour en parler. M. Côté a dit avec fierté, et je suis bien content d'entendre cela, qu'il est affilié à votre syndicat et pas avec la CSN. Je vois qu'à la page 9 de votre mémoire, vous dites: "Disparition d'un taux de salaire minimum différencié". Vous demandez de l'augmenter de 3,28$ à 4 $ et là vous avez encore mieux que la CSN. J'ai classé cela dans ma tête comme les syndicats 1, 2 et 3. Je me demande en toute sincérité s'il y a peut-être une sorte de motif pour rechercher la clientèle parce que moi, ce qui m'intéresse beaucoup, c'est d'essayer de résoudre le problème. Il y a un problème qui existe, tout le monde est d'accord là-dessus. J'aime beaucoup l'approche d'une objectivité modérée pour essayer de trouver une solution. J'ai l'impression qu'on demande le ciel et qu'on va régler pour un peu moins. Pouvez-vous donner des commentaires là-dessus? Je ne veux pas dire que vous êtes le plus dur syndicat à ce point de vue, mais les statistiques semblent indiquer que, dans ce dossier, vous promettez énormément.

Le Président (M. Gagnon): M. Daoust.

M. Daoust: Quand on dit que cette hypothèse est la seule digne de considération, c'est notre conviction profonde que d'autres ne partagent pas ce point de vue et que, par ailleurs, ils sont relativement près de nous sur bien des plans; c'est leur droit le plus strict. Je pense qu'il faut s'incliner devant des divergences de vues. Plusieurs

s'expriment au nom des travailleurs et des travailleuses du milieu avec leur connaissance d'un secteur professionnel fort complexe et avec des échéanciers qui ne sont pas nécessairement les mêmes. Cela me semble sain, cela vous rend peut-être la tâche plus difficile, mais cela prouve qu'il n'y a pas nécessairement unanimité de pensée à l'égard des façons de résoudre des problèmes aussi complexes que ceux qui sont devant nous à ce moment-ci. Ce n'est pas un mémoire complaisant à l'égard des travailleurs et des travailleuses au pourboire. Ce n'est pas cela qui va accentuer les chances de syndicalisation. Ce sont des changements beaucoup plus fondamentaux qu'une prise de position sur le type du pourboire, le montant ou telle hypothèse. On ne cesse de le répéter, c'est par des changements profonds et fondamentaux au Code du travail que l'on va permettre aux travailleurs, ceux-là entre autres et d'autres aussi, d'avoir véritablement accès au syndicalisme. Je ne veux pas en parler trop longtemps, parce que je risquerais de dépasser le temps qui nous est consacré, mais c'est vraiment dans ce sens et fondamentalement je pense qu'on l'a dit: qu'on permette à ces travailleurs de se donner une voix, et, pour nous, la voix la plus normale c'est la voix syndicale, par des changements profonds au Code du travail. On aura ainsi résolu je ne dis pas l'ensemble des problèmes, mais une bonne partie de ceux-ci. Sur le problème du pourboire, il y a peut-être des divergences de vue, tant mieux ou tant pis, mais elles sont là.

Pour ce qui est de l'Alliance des travailleurs du Québec, je comprends que M. Côté vous ait dit qu'il avait beaucoup d'amitié pour la FTQ. Certains de ces groupes ont des contrats de service avec certains syndicats de la FTQ, mais le groupe des travailleurs au pourboire de M. Côté, techniquement parlant, vous m'obligez à vous le dire...

M. Marcoux: Ils sont encore indépendants.

M. Daoust: ... est toujours indépendant, mais on espère bien réussir à convaincre les travailleurs et les travailleuses membres du syndicat dont M. Côté est le porte-parole du bien-fondé de notre solution.

M. Marcoux: On nous a dit qu'il y avait une entente de votre part pour ne pas faire de maraudage dans leur syndicat. On est allé loin, n'est-ce pas?

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne, c'est terminé?

M. Polak: Je remercie M. Daoust pour la réponse.

Le Président (M. Gagnon): Alors, M. le ministre.

M. Marcoux: Je désire remercier sincèrement M. Daoust pour la qualité du contenu du mémoire. Je peux vous assurer que l'essentiel de ce que j'ai compris dans votre mémoire, c'est qu'il y a des objectifs que vous nous fixez. Des objectifs par rapport aux conditions de vie, de travail des travailleurs et travailleuses au pourboire.

Je suis convaincu que comme votre centrale a participé régulièrement à ce qu'on pourrait appeler des débuts d'efforts de concertation - vous avez parlé des mini-sommets, vous avez parlé des grands sommets - vous comprendrez peut-être qu'il y a des étapes qu'il faut franchir pour arriver à ces solutions idéales. Je peux vous assurer qu'en ce qui nous concerne, je ne prendrai pas le fait qu'il y ait des divergences d'opinions entre à peu près tous les groupes qui sont venus nous rencontrer pour nous plonger, comme gouvernement ou comme ministre du Revenu, dans l'inaction par rapport à ce problème. Je ne peux pas assurer que nous pourrons trouver la meilleure solution, la solution idéale ou les solutions idéales, mais je peux vous assurer qu'au moins nous allons trouver une ou des solutions concrètes.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, au nom de l'Opposition, je voudrais également remercier, M. Daoust. Savez-vous, M. Daoust, jusqu'à récemment j'ai toujours pensé que les libéraux ne comprenaient rien du monde syndical, mais les temps changent, savez-vous. Je ne parle pas de la loi no 70, pas du tout.

Vous avez peut-être remarqué, ce matin, la manière dont on a posé les questions. Je prends, par exemple, le sujet de la poursuite où je crois que nous sommes beaucoup plus proches du problème du travailleur, pour le comprendre, que le gouvernement. J'espère qu'ils vont agir selon nos recommandations, qui sont les vôtres. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci.

M. Daoust: Merci. Je vais faire un dernier commentaire et vous m'en donnez l'occasion; c'est là-dessus que je voulais insister. Nous parlons de gestes odieux de la part du gouvernement et nous le croyons profondément. Il nous semble, que d'autres l'ont dit... J'ai écouté les témoignages de ces gens de la Mauricie, je crois, et il y a eu le témoignage de cette personne qui subit le harcèlement des enquêteurs du ministère du Revenu. Je ne reviendrai pas là-dessus,

mais il nous semble qu'il appartient au ministre, en temps et lieu - on souhaite que ce soit le plus rapidement possible - de tourner la page.

Il y a 900 travailleurs au Québec, puis je ne sais pas combien d'autres qui se sentent menacés; il y a là une forme de discrimination et de harcèlement qui nous semble, à nous, tout à fait inacceptable. Écoutez, sur l'évasion fiscale au Québec, les abris fiscaux, mon Dieu, qu'on peut vous citer des exemples à la centaine! Cela ne sera pas du côté des plus mal pris, de ceux que M. René Lévesque appelle les plus fragiles dans notre société, qu'on pourrait vous les donner. C'est chez ceux qui sont les plus nantis, les mieux organisés, les mieux équipés et qui connaissent à fond toutes les règles, tous les subterfuges - comme quelqu'un l'a mentionné de votre côté, le mot a été employé ce matin - et ces gens se tirent formidablement bien de tout le système. Alors, cela nous fait mal dans une société de voir que des gens démunis sur tous les plans - on l'a signalé dans notre mémoire - soient, à ce moment-ci, l'objet d'une espèce de chasse. Je reprends le mot que vous avez peut-être employé vous-même, je ne sais pas si c'est vous qui l'avez employé, mais quelqu'un a parlé d'une espèce de chasse. C'est peut-être le ministre. C'est le ministre. Mon Dieu! Peut-être que cela indique que, comme le temps de la chasse est fini, on nous annoncera de bonnes nouvelles, mais on voudrait tant que ce problème soit surmonté! Pour l'avenir, il y a un accord, je crois, généralisé, mais pour le passé, qu'on les laisse donc en paix et qu'on pourchasse d'autres personnes qui, abondamment, s'alimentent à même tous les problèmes d'évasion fiscale, puis d'abris fiscaux.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. Daoust. M. le député de Viger.

M. Maciocia: J'aurais seulement une petite question à M. Daoust. Vous avez dit tantôt: Je viens d'arriver. J'ai cru comprendre que vous aviez dit qu'il y avait des gens qui allaient aussi loin que dire que la loi no 101 empêchait quasiment le tourisme ici, au Québec. Croyez-vous, comme quelqu'un au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme qui s'est prononcé à ce sujet il y a environ deux ou trois mois, que la loi 101 a un attrait touristique?

M. Daoust: Est quoi?

M. Maciocia: Un attrait touristique.

M. Daoust: Fondamentalement, je pense que oui.

M. Maciocia: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. Daoust, et merci à la FTQ.

Avant de suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir, je voudrais dire que le prochain groupe qui sera entendu est la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. Les travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise de la séance à 20 h 13)

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

Avant de donner la parole à nos prochains invités, je voudrais souligner le fait que, mardi soir, nous avons eu un monsieur de Trois-Rivières, M. Papirakis, qui est venu témoigner devant la commission et à qui le ministre avait demandé de lui fournir des explications additionnelles, je crois, sur les informations qu'il nous donnait. Il a eu la gentillesse de revenir de Trois-Rivières, il est ici ce soir et on vous passe présentement les informations que M. Papirakis ajoute à son mémoire. Merci.

J'invite maintenant à la table la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec. D'abord, je vous souhaite la bienvenue. Vous êtes déjà à la table. J'invite Mme Désilets à nous présenter celui qui est avec elle et à nous faire lecture de son mémoire.

Fédération nationale des associations de consommateurs

M. Clavet (Bertrand): Tout d'abord, je dois apporter une correction à la présentation des personnes qui représentent notre organisme. La personne qui est à ma gauche est Mme Louise Larocque, qui remplace Mme Désilets, qui a dû s'absenter pour des circonstances indépendantes de sa volonté.

Le Président (M. Gagnon): Et vous êtes, Monsieur?

M. Clavet: Bertrand Clavet, secrétaire de la Fédération nationale des associations de consommateurs.

Le Président (M. Gagnon): Mme Louise Larocque...

M. Clavet: Mme Louise Larocque.

Le Président (M. Gagnon): ... et M.

Clavet. Alors, allez-y!

M. Clavet: Alors, on va parcourir notre mémoire d'une certaine façon, mais sans nécessairement le lire d'une façon

exhaustive. On sait que la question du pourboire, c'est une convention sociale qui est établie depuis longtemps au Québec, notamment dans les secteurs de la restauration et de l'hôtellerie. Cette convention sociale veut que le consommateur verse un pourboire au personnel pour souligner sa satisfaction relativement aux services rendus. Pour d'aucuns, le fait que des employés de ce secteur reçoivent un pourboire doit être considéré comme un privilège et vient justifier un salaire minimum aussi bas que 3,28 $ l'heure. Mais, quand on y regarde de plus près, ce privilège est à la base de bien des injustices. On retrouve ces injustices dans plusieurs domaines: le domaine fiscal, le domaine social et aussi dans les conditions de travail. On peut penser simplement aux avantages sociaux et à l'impôt; je pense que plusieurs intervenants vous ont fait valoir des injustices qui étaient flagrantes dans ces domaines et aussi pour la perception de l'impôt.

Quant aux conditions de travail, on sait que les secteurs de la restauration et de l'hôtellerie sont ceux où les travailleurs subissent les conditions de travail les plus dures. L'absence de représentation et un accès presque impossible à la syndicalisation n'ont pas favorisé, en tout cas, l'amélioration de ces conditions. Partout les employés au pourboire, et surtout les femmes, sont la cible d'injustices flagrantes. On voit leurs droits constamment bafoués par leurs employeurs. Dans notre mémoire, on en évoque quelques-uns, par exemple, le partage des pourboires avec d'autres employés qui sont souvent déjà payés plus cher l'heure que 3,28 $, les jours de maladie non payés, des employeurs qui jouent avec l'horaire des employés pour esquiver le paiement des congés fériés, le paiement des factures égarées ou non payées par le client, des bouteilles de vin refusées, de la vaisselle cassée, etc., sans parler évidemment du harcèlement sexuel et aussi des congédiements injustifiés.

L'instabilité économique que l'on connaît dans le secteur de la restauration et aussi la situation créée par l'insécurité financière précaire que vivent les employés au pourboire y font naître une espèce de climat de terreur qui rende impossible aussi l'application des normes minimales du travail, qui sont censées protéger les employés non syndiqués. Il y a des lacunes de ce côté. De toute façon, la recommandation qu'on fait là-dedans concerne moins le ministère du Revenu et peut-être plus le ministère du Travail, mais, dans un esprit de sensibilisation, on voulait quand même la rendre publique lors de cette commission.

Dans le livre vert, il y a des hypothèses de solutions au moins pour répondre à la question des injustices fiscales et sociales. Parmi les solutions qui sont présentées, la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec prévilégie la solution 5.1, qui vient en fin de compte consacrer l'imposition de frais de service inclus sur la facture émise au consommateur.

Cela aurait plusieurs avantages évidemment, surtout pour les employés au pourboire comme, par exemple, de les assurer de bénéficier des avantages sociaux qui sont redevables sur les pourboires. Aussi, cela leur permettrait une indexation, d'une certaine façon, un salaire qui deviendrait indexé au coût de la vie; chaque fois que les coûts de production des repas augmenteraient, il y aurait 15% qui viendraient ajuster leur salaire en conséquence. On y voit des avantages. Évidemment, il y a certaines objections qui circulent dans certains milieux, notamment dans les milieux de l'industrie de la restauration comme quoi cela serait une mesure susceptible d'augmenter considérablement les coûts. Il y a d'autres objections dans d'autres milieux, notamment dans le milieu des groupes de consommateurs, une objection, évidemment, qu'on ne partage pas, qui veut que ça puisse amener une détérioration du service ou même encore priver le consommateur de sa liberté de choix d'accorder un pourboire selon l'évaluation de la qualité du service qui est rendu.

Ce sont des objections, évidemment, que l'on conteste. On peut recommencer, par exemple, par la question de l'augmentation des coûts. Peut-être que je pourrais laisser ma collègue donner nos idées là-dessus.

Mme Larocque (Louise): Pour pallier l'augmentation des coûts encourus par l'inclusion des frais de service sur l'addition, la FNACQ propose de diminuer la taxe de vente et d'appliquer la taxe de vente à tous les repas y compris ceux de moins de 3,25 $. On a aussi dit, on l'a aussi entendu au cours de cette dernière commission, qu'une augmentation des coûts mettrait en danger l'industrie de l'hôtellerie et de la restauration déjà dans une position précaire. Or, à la FNACQ, on croit que l'exigence première des consommateurs qui est de payer le meilleur prix possible pour un bien de consommation ne doit pas nous conduire à sanctionner et à appuyer des entreprises qui vont être portées à sous-payer leurs employés. Nos associations ne sont pas prêtes à aller jusque-là, d'autant plus que ces travailleurs de la restauration sont des consommateurs dont les conditions salariales et de travail n'ont pas été bien protégées par les lois antérieures. C'est un lieu où la syndicalisation est quasiment absente, sauf dans quelques grandes entreprises, et on sait

à quel régime de terreur se sont parfois heurtés ces travailleurs. De plus, ces consommateurs sont, dans une part importante, des consommateurs à faible revenu qui viennent consulter nos associations de défense et qui sont des utilisateurs des services que nous offrons, la consultation budgétaire, puisque, on le sait, dans la conjoncture actuelle, les pourboires consentis aux travailleurs au pourboire baissent; leur pouvoir d'achat en est donc diminué et leur capacité de payer réduite. Finalement, les restaurateurs et hôteliers reconnaissent eux-mêmes la trop grande quantité d'établissements commerciaux de ce genre. On invoque le développement anarchique des années soixante-dix.

Nous reconnaissons que l'offre est excédentaire par rapport à la demande, mais les consommateurs, et plus particulièrement les travailleurs au pourboire, ne sont pas responsables de ce type de développement. Cela aurait été le rôle de l'Association des restaurateurs du Québec de planifier et de rationaliser davantage le développement de l'industrie hôtelière et de la restauration. Les employés n'ont pas à payer pour un type de développement dont ils ne sont pas responsables. De plus, s'il devait survenir des faillites attribuables partiellement à une loi qui irait dans le sens que nous souhaitons, on se gardera bien d'accuser les travailleurs au pourboire d'être les responsables de la faillite de certains établissements qui ne pourraient survivre à la concurrence. Des conditions de travail et des conditions salariales inadéquates ne sauraient justifier quoi que ce soit.

Il y a une deuxième objection dans le livre vert: la liberté de choix des consommateurs se verrait réduite par l'imposition d'un pourcentage fixe.

M. Clavet: On invoque dans certains milieux, notamment, une association de consommateurs dit que cela porterait atteinte à la liberté de choix du consommateur que d'imposer des frais de service obligatoires. Le consommateur perdrait son privilège d'évaluer le service reçu et de le récompenser par une gratification librement consentie, dit-on. Mais il y a un fait qu'il faut considérer: les employés au pourboire ont un salaire minimum de 3,28 $ l'heure. Les pourboires que nous, consommateurs, leur consentons viennent redresser substantiellement ce sous-salaire, parce qu'on peut parler d'un sous-salaire. On trouve, par contre, inconcevable qu'une grosse partie du revenu des employés au pourboire soit à la merci du jugement personnel et subjectif des consommateurs sur la qualité du service reçu, parce que la subjectivité, on peut en parler.

Par exemple, dans un document de réflexion produit par le Conseil régional de développement de l'Estrie, on fait référence à une étude de Mme Johanne M. May, "A study of factors affecting tipping behavior". On parle des facteurs qui influencent le comportement des consommateurs quand ils donnent des pourboires, et on y dit que les données traditionnellement associées à la vitesse et à l'efficacité du service n'ont pas d'impact significatif sur le pourboire. Les serveuses qui ont été évaluées comme donnant un service excellent étaient des serveuses très attrayantes qui recevaient un pourboire moyen de 17,3%, tandis que les serveuses moins attrayantes ne recevaient que 14,9%. De plus, on observera que lorsque les serveuses fournissaient un service médiocre, les serveuses les plus attrayantes recevaient quand même un pourboire moyen de 20%, tandis que les serveuses moins attrayantes ne recevaient que 11,9%.

Donc, les résultats suggèrent que toute chose étant égale, les serveuses moins attrayantes rendant un service excellent peuvent recevoir un pourboire inférieur aux serveuses très attrayantes donnant un service médiocre. Des études comme celle-là nous portent à croire, en fin de compte, que ce ne sont pas des critères objectifs qui motivent le consommateur à la prestation d'un pourboire. Ce sont des critères bien subjectifs. Il y a d'autres intervenants également qui, auparavant, ont fait valoir la même objection.

Notre opinion, c'est que l'intérêt du consommateur ne repose pas nécessairement sur le principe de la liberté de choix, c'est-à-dire son bon plaisir d'accorder ou non un pourboire. C'est plutôt celui d'obtenir un bon service et des repas de qualité. Si on n'obtient pas satisfaction, c'est de bon droit, en tant que consommateur, que de porter plainte auprès du patron, auprès de l'employeur. Mais, selon notre association, il ne devrait pas revenir à nous, consommateurs, le privilège de pénaliser nous-mêmes les employés sous le couvert de la sacro-sainte liberté de choix, le sacro-saint principe de la liberté de choix. C'est la réponse qu'on a à cette objection.

L'objection de la détérioration du service. Avec des frais de service inclus dans la facture, des frais de service obligatoires, si, à la suite de cette mesure, l'employeur est obligé de verser des contributions d'employeur au chapitre du Régime de rentes, de l'assurance-maladie et de l'assurance-chômage, il va probablement devenir beaucoup plus exigeant sur la qualité du personnel qu'il va embaucher et il va être porté à lui offrir une formation beaucoup plus adéquate. On pense que cela va occasionner plutôt une hausse de la qualité du service.

De plus - d'ailleurs les employés au pourboire l'ont dit par la voie de leurs associations - ils sont conscients que si, à

cause d'un mauvais service, le chiffre d'affaires des établissements diminue, le pourboire de 15% va également diminuer.

En conclusion, ce qu'on recommande, c'est tout cela, les frais de service inclus dans la facture et, pour contrer l'augmentation des coûts qui s'ensuivraient, au moins une diminution de la taxe de vente sur l'ensemble des repas.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie les représentants de la Fédération nationale des associations de consommateurs du Québec d'avoir bien voulu nous présenter ce mémoire. J'inviterais mon collègue, le député de Terrebonne, à engager le dialogue avec vous.

M. Blais: Merci, M. le ministre. Les explications ont été assez bonnes dans votre rapport. Je n'aurai pas beaucoup de questions à vous poser, peut-être une et demie.

Des voix: Ah!

M. Blais: D'abord, il y a un regroupement, l'Association des consommateurs du Québec. Est-ce qu'elle est membre de votre fédération?

M. Clavet: Non, parce qu'elle-même forme une fédération qui regroupe des unités locales partout au Québec.

M. Blais: Combien votre fédération représente-t-elle d'associations?

M. Clavet: À ce jour, nous avons cinq associations de membres qui sont... Je peux vous les nommer, si vous voulez.

M. Blais: Non, c'est le nombre de personnes.

M. Clavet: Cela ne se calcule pas par le nombre de personnes, c'est-à-dire que notre structure est la suivante: Nous regroupons des groupes de consommateurs qui, eux-mêmes, ont un "membership" qui est mixte, c'est-à-dire des individus et des organismes.

M. Blais: Merci.

M. Clavet: Alors, cela représente un bassin de population assez grand.

M. Blais: Vous ne suggérez pas de taux, mais vous dites qu'il devrait y avoir un taux de frais de service. Cela me fait plaisir que vous fassiez la différence entre les frais de service sur une facture et les pourboires, comme on l'entend de façon assez classique dans la population. Vous dites aussi que la taxe de vente devrait diminuer. Je me faisais dire par M. le député de Hull que je n'avais pas de position réelle. Je n'ai pas de position arrêtée complètement, même si j'ai dit que j'étais contre les positions du livre vert et que j'étais contre le statu quo. Il arrive que je serais tenté de penser à une diminution de la taxe de vente et à une imposition de frais de service qui seraient complètement à part, une conciliation entre la position patronale et la position du livre vert, disons, ou des syndicats plus précisément; j'ai bien l'impression que c'est entre les deux. Ce serait peut-être vers là que ma zone serait la moins grise, sans prendre position parce que c'est une commission de consultations. J'ai bien l'impression qu'entre les deux, si jamais c'était possible qu'il y ait diminution des exigences syndicales concernant les 15%, si jamais - je ne suis pas autorisé à le dire -une baisse de la taxe de vente par le gouvernement se produisait, une conciliation entre les deux pourrait faire l'affaire et votre association, je crois, semble tendre vers cette solution.

M. Clavet: C'est cela. De toute façon, on ne suggère pas de chiffre, c'est-à-dire les 15% qui sont généralement reconnus ou encore la diminution de 10% à 5% de la taxe de vente. On ne voulait pas s'embarquer dans une bataille de chiffres. En fin de compte, c'est aux experts à évaluer les impacts de ces mesures, à savoir si ce sera 7%, 6% ou 5% pour la diminution de la taxe, ou encore 10%, 12% ou 15% pour les frais de service. Ce sera justement aux économistes de faire cela. Mais, évidemment, ces taux seront à fixer en tenant compte des intérêts de tout le monde, y compris ceux des employés au pourboire. (20 h 30)

M. Blais: Pour moi, c'est tout, c'est très clair, je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): Merci beaucoup.

M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: J'ai seulement une question à poser. Depuis quand votre groupe est-il formé?

M. Clavet: Notre association est formée depuis 1978.

M. Blank: Vous êtes dans la région de l'Estrie, de Sherbrooke?

M. Clavet: Non, nous ne sommes pas seulement dans la région de Sherbrooke. Nous regroupons des organismes de la région de Montréal, de l'Estrie, de la région de Québec, de Granby, de Charlesbourg. Sans

être membres, il y a un tas d'organismes indépendants qui sont non affiliés à une fédération, qui participent avec notre fédération à des dossiers que nous menons sur le plan provincial. Il y a quand même une collaboration qui est menée avec la FNACQ au sujet de certains dossiers.

M. Blank: Quelle sorte de consultation avez-vous faite pour arriver à ce mémoire?

M. Clavet: La consultation qui s'est faite, c'est par le processus démocratique de nos structures, à savoir par notre conseil d'administration. Dans notre conseil d'administration, il y a des délégués de chacun des organismes membres qui se prononcent sur les questions. Évidemment, quand on est invité à donner notre opinion sur une question d'actualité ou qui concerne l'intérêt public ou les consommateurs surtout...

M. Blank: La raison pour laquelle je pose cette question, c'est parce qu'on a déjà eu un groupe de consommateurs qui est venu ici et qui avait une attitude complètement différente de la vôtre. Franchement, comme consommateur, j'aimerais mieux voir l'autre groupe me protéger que votre groupe.

M. Clavet: C'est votre opinion.

M. Blank: Quand quelqu'un vient ici pour demander une augmentation de taxes de 5%, de 0,01 $ à 3,26 $, cela ne protège pas le consommateur.

M. Clavet: Oui, mais, dans l'ensemble des consommateurs, il y a différentes analyses, selon les intérêts qu'on veut défendre ou pas.

M. Blank: C'est exactement cela. M. Clavet: Voilà.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Marcoux: J'aimerais que vous m'identifiiez les cinq membres de votre fédération pour un peu connaître leurs origines régionales. Indiquez simplement le nom et l'endroit.

M. Clavet: D'accord. En tout premier lieu, il y a l'Association coopérative d'économie familiale de Québec, l'Association coopérative d'économie familiale de l'Estrie, celle de Granby, celle de la rive sud de Montréal, il y a les quatre associations et il y a le service d'information et de recherche en consommation de Charlesbourg. Ce sont les membres en règle.

M. Marcoux: Vos principaux membres, c'est ce qu'on appelait autrefois les ACEF.

M. Clavet: II faut préciser qu'il y a d'autres ACEF qui sont membres, elles, de la Fédération des ACEF, qui est différente de la nôtre.

M. Marcoux: D'accord.

M. Clavet: II y a des conditions historiques qui ont amené...

M. Marcoux: Non, cela va, cela me situe par rapport aux noms. Je tiens à vous remercier au nom de notre groupe ministériel de votre participation à cette commission. Merci.

M. Blank: Moi aussi, au nom de notre groupe, je vous remercie, nonobstant que je ne vous engagerais pas comme défenseur.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme Larocque et M. Clavet, de votre participation à cette commission. J'invite maintenant le Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec.

À l'ordre, s'il vous plaît;

Regroupement des associations d'employés au pourboire

Mme Manon Vaillancourt, je vous souhaite la bienvenue à cette commission. Je voudrais que vous nous présentiez les gens qui vous accompagnent.

M. Blank: Je ne comprends pas, M. le ministre. On a déjà eu des mémoires individuels de ce même groupe ici, et, maintenant, il fait un autre mémoire pour nous redire la même chose.

Mme Vaillancourt (Manon): Non, monsieur.

M. Blank: Qu'est-ce qu'il y a de nouveau dans votre mémoire?

Le Président (M. Gagnon): On va le voir. Voulez-vous présenter votre groupe?

Mme Vaillancourt: On est ici depuis mercredi matin. On a suivi les débats attentivement. On est fier de revenir vous dire, après tout ce qui s'est dit ici, ce que le regroupement en pense. Au nom du regroupement, je vais vous présenter les gens qui sont ici: II y a Bernard Saint-Pierre, qui représente PRO-RESTEL Québec; il y a Francine, qui représente AGAP Montréal; il y a Rita Baillargeon qui va représenter le regroupement; il y a moi, ADEP Estrie; il y a Lise qui va représenter ADEP Drummondville et il y a Claude qui va

représenter ADEP Mauricie.

Le Président (M. Gagnon): Est-ce que vous voulez commencer? Compte tenu qu'on a eu l'occasion d'entendre un certain nombre d'arguments, y aurait-il possibilité de résumer votre mémoire? Après, on passerait aux questions.

Mme Vaillancourt: Quant aux mémoires, Lise va commencer. Juste une petite remarque... Avec M. Fréchette, on a constaté qu'à l'AGAP, l'ADEP Mauricie et l'ADEP Estrie, on a demandé de résumer les mémoires et on a constaté qu'à certains intervenants on ne demandait pas de résumer les mémoires. C'est juste une petite observation sur ce qu'on a pu constater.

Le Président (M. Gagnon): Si je vous ai demandé cela, c'est tout simplement qu'on est rendu à une heure assez tardive et chacun d'entre vous, si je ne m'abuse, a eu l'occasion de vous adresser à la commission, c'est tout simplement cela.

Mme Vaillancourt: Le mémoire conjoint est très court.

Le Président (M. Gagnon): C'est bien. Mme Vaillancourt: D'accord?

Mme Tétreault (Lise): M. le ministre, madame et messieurs les députés, au nom du Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec, nous voulons vous remercier de nous avoir mis au monde. Pour un premier né, l'accouchement fut quelque peu difficile et les cours prénatals absents. C'est la claque fiscale qui nous a fait lâcher notre cri primal. Il faut dire que nous sommes sortis de l'incubateur grâce à cette énergie inépuisable que les parents constatent chez le nouveau-né. Nous serons forts et tenaces.

Mme Vaillancourt: Dans le cadre de cette commission parlementaire, le

Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec a tenu à présenter ce mémoire conjoint pour affirmer ainsi la solidarité de toutes les associations créées dans le but de faire valoir les droits de l'employé au pourboire au Québec. Pour tracer un bref historique, rappelons qu'à Sherbrooke, en octobre 1979, les ministères du Revenu fédéral et provincial ont commencé à harceler les employés au pourboire pour des problèmes d'impôt. En effet, deux restaurants venaient d'être la première cible du projet pourboire amorcé. Soit dit en passant, Sherbrooke a toujours été considérée comme ville pilote; elle a été devant la même situation face à l'impôt. En effet, une serveuse, entre autres, apprenait à ce moment qu'elle venait de frauder le gouvernement de 10 000 $ sans même avoir été informée par les vérificateurs de ses droits et recours. Ils évaluaient de façon totalement arbitraire et injuste les cotisations à payer en y ajoutant en plus l'intérêt de 16% des années passées et l'amende de 25% la considérant comme fraudeuse.

On s'est servi de l'ignorance de ces employées pour les manipuler et faire du marchandage avec elles. On s'explique: Ici à Sherbrooke, c'est la première fois que cela nous tombait sur la tête. Les gens n'étaient vraiment pas au courant, on ne savait pas ce qui se passait. Quand je dis de l'ignorance, c'était vraiment de l'ignorance. Il n'y avait aucune association pour aider techniquement les gens à se défendre à ce moment. Dans le même restaurant, les taux de cotisation n'étaient pas les mêmes pour tout le monde. On évaluait cela à 14,2% et 12%, dans le même restaurant. Les vérificateurs faisaient pression et menaçaient même les serveuses si elles refusaient de faire une déclaration volontaire; les méthodes d'évaluation variaient d'une place à l'autre. Là, il y a eu des méthodes d'évaluation. On parlait des cartes de crédit, on parlait du chiffre d'affaires. On ajoute même que dans des bars, entre autres, en Beauce, on n'avait même pas de carte de crédit ni de chiffre d'affaires. À ce moment, on a évalué cela, par exemple, à 10 $ par jour rétroactifs pendant deux ans de temps. On y allait.

Ajoutons aussi que le gouvernement ayant toujours toléré jusqu'à ce moment que les employés ne déclarent qu'une partie de leurs revenus faute d'avantages sociaux, cette dernière se croyait dans la plus pure des légalités. C'est ce climat de confusion et de révolte qui provoqua le Regroupement des employés au pourboire de Sherbrooke. L'Association des employés au pourboire de l'Estrie vit le jour en février 1980. Par la suite, plusieurs autres associations furent créées: l'ADEP Drummondville, en octobre 1981, PRO-RESTEL Québec, en septembre 1981. On a dit que PRO-RESTEL a été formée en 1979, je dis ici en septembre 1981, car PRO-RESTEL a alors repris avec le regroupement; donc, c'est en septembre 1981; l'AGAP de Montréal, en janvier 1982; l'ADEP de la Mauricie en mars 1982 et l'ADEP de Granby en juin 1982.

Le regroupement travaille à élargir encore plus son champ d'action et à rejoindre éventuellement toutes les régions du Québec, car les régions isolées comme l'Abitibi et les Îles-de-la-Madeleine se feront pincer elles aussi par l'impôt et, éventuellement, ce seront toujours ces régions défavorisées. On songe éventuellement à faire quelque chose pour ces employés de là-bas aussi.

Les représentants des diverses

associations voyaient l'illogisme de nous demander de payer de l'impôt sur des montants non gagnés ou qui ne nous donnaient aucun avantage social. Plusieurs mémoires furent alors présentés aux instances politiques concernées, qui demandaient entre autres l'arrêt des poursuites et une solution à court terme pour régler les problèmes de l'impôt.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît! On chuchote tout autour de la table et on a de la difficulté à comprendre. Vous pouvez continuer.

M. Polak: Pas tout le tour.

Le Président (M. Gagnon): D'accord, pas tout le tour, vous venez d'arrêter.

M. Polak: C'est lui qui critiquait hier.

Le Président (M. Gagnon): Je pense qu'il y en a qui me comprennent.

Madame, vous pouvez continuer.

Mme Vaillancourt: Alors, je...

Le Président (M. Gagnon): De chaque côté.

Mme Vaillancourt: Alors, si j'ai l'attention de messieurs de la commission, je continue.

Les associations étaient aussi conscientes qu'elles s'attaquaient à toute une problématique qui débordait même le problème de l'impôt: congédiements abusifs et arbitraires, non-respect des normes minimales de travail, surexploitation des immigrés, harcèlement sexuel, discrimination des femmes, etc., etc. Il serait long ici de faire la liste exhaustive des conditions déplorables qui sévissent dans ce milieu de travail. Des copies du mémoire ont été remises, de toute façon; si messieurs de la commission n'ont pas tout reçu, on se fera un plaisir de le leur faire parvenir. Devant l'urgence de parer aux poursuites qui commençaient à affluer de partout, les associations entreprirent d'aller aider et d'encourager d'autres noyaux à se former dans la province. Depuis février 1982, le Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec coordonne les efforts et fait pression sur les gouvernements fédéral et provincial pour faire reconnaître les travailleurs et travailleuses de ce milieu et sensibiliser l'opinion publique sur les problèmes qu'ils vivent. Ajoutons aussi que, pour la première fois, les employés au pourboire prenaient conscience ensemble des conditions d'âge de pierre et de l'injustice flagrante qu'ils subissent dans leur milieu de travail. Les représentants du regroupement n'ont pu jusqu'à présent consacrer assez d'énergie pour élaborer à fond toute la problématique de ce secteur de travail. Ils devaient avant tout informer les employés au pourboire et les guider techniquement face au problème de l'impôt, ce qui demandait beaucoup de temps et de mobilisation. Nous sommes donc devant l'obligation de présenter des propositions de solutions qui demeurent, à notre avis, partielles, puisqu'elles ne règlent en fait qu'un aspect du problème. Nous tenons pourtant à dénoncer les conditions de travail qui sont le lot des travailleurs et des travailleuses de toute l'industrie de la restauration et de l'hôtellerie du Québec. Il nous apparaît urgent que le gouvernement - et plus particulièrement, le ministère du Travail - se penche sérieusement sur la question. Nous proposons donc une commission d'étude subséquente à celle-ci et à laquelle nous serons très heureux de travailler.

La problématique du pourboire. Le regroupement aimerait ici amener le gouvernement à se pencher sur toute la problématique qu'engendre la pratique du pourboire au Québec. L'étude du CRD de l'Estrie faite en mai dernier en élabore plusieurs aspects, mais il en est un qui n'a pas été soulevé: l'opinion du client face au pourboire. Le pourboire au Québec est très mal perçu par le client. Toute la mentalité est à changer. Les associations ont mis beaucoup d'énergie à sensibiliser les consommateurs sur la réalité de nos conditions de vie, réalité qu'ils ignorent généralement. Les gens croient que les employés au pourboire font plein d'argent. Ils ne savent pas que notre salaire horaire est en dessous du salaire minimum et que c'est avec le pourboire que serveurs, serveuses réussissent à survivre en 1982. Ce que le client semble ignorer, lorsqu'il vient manger au restaurant, c'est que le montant qu'il paie sur sa facture ne sert qu'à couvrir le coût de son repas; donc, il va au restaurateur. Ce qu'il laisse sur la table paie le service qu'il a reçu de l'employé au pourboire. Ici, on fait la différence entre frais de service et pourboires. (20 h 45)

Nous sommes dans un système économique où tout service se paie. Ainsi, le consommateur ne choisit pas le montant qu'il aura à payer pour son compte de téléphone. Lorsqu'on parle de la liberté de choix du client, c'est alimenter le mythe que l'employé au pourboire est un quémandeur. C'est clairi Pour nous, sa liberté réside dans le fait qu'il décide ou non d'aller manger dans un restaurant et non dans l'évaluation du professionnalisme et de l'efficacité du travail de l'employé au pourboire. Cet aspect relève de l'employeur. On est d'accord avec ce que la fédération des consommateurs vient justement de dire là-dessus.

Le regroupement ne comprend pas que

dans le livre vert on ait omis de traiter de cet aspect très important de la question. Au contraire, le ministre du Revenu, en considérant la liberté de choix du consommateur comme un avantage dans le point 5.2, perpétue ainsi ce mythe de quémandeur dont nous parlions. On n'est pas des toutous qui attendent un morceau de chocolat. On fait une profession, on veut que cela soit très clair pour ces messieurs de la commission.

Nous souhaitons que ce mince exposé sensibilise le gouvernement à cette question et l'influence dans ses décisions finales.

Nos revendications. Ce mémoire ne vise pas à reprendre les exposés que les associations ont faits. Nous voulons tout simplement vous faire prendre conscience de l'uniformité de plusieurs de nos revendications: arrêt des poursuites, mêmes avantages sociaux que tous les autres travailleurs, indexation au coût de la vie, abolition du statut de travailleur autonome, salaire minimum égal aux autres travailleurs. C'est pourquoi toutes les associations sont unanimes à dire que la seule solution du livre vert pouvant répondre à certaines de nos revendications demeure la solution 5.1, les frais de services obligtoires. Nous voudrions ces frais établis au taux de 15%. De plus, pour ne pas pénaliser le consommateur, nous proposons une réduction de la taxe de vente de 5% qui pourrait s'appliquer à partir de 0,01 $.

Cette solution donnerait ainsi une reconnaissance et une dignité aux travailleurs et travailleuses au pourboire du Québec perçus aujourd'hui comme des mendiants. Elle réglerait de plus les problèmes des avantages sociaux, du double statut et de l'indexation au coût de la vie.

Conclusion. Nous souhaitons qu'à l'issue de cette commission parlementaire, le gouvernement, éclairé par nos analyses, rende justice aux 60 000 travailleurs et travailleuses au pourboire de la province.

Dans un message publicitaire du gouvernement du Québec, ce dernier déclarait que dans l'intérêt de tout le monde le temps était venu de poser un geste qui démontre clairement que la protection des bas salariés est prioritaire pour lui. Nous sommes donc confiants qu'il sera conséquent avec ses affirmations, les employés au pourboire étant la catégorie de travailleurs et travailleuses la moins payée au Québec. Le temps presse, réglons maintenant!

Le Président (M. Gagnon): Merci beaucoup.

Mme Nemeh (Francine): J'aimerais ajouter quelque chose. On a voulu prendre position sur la question de la solution américaine, ce sera très bref.

Le regroupement s'est penché sur cette question et nos discussions nous amèment à la rejeter vigoureusement. Décider d'un pourcentage arbitraire, par exemple 8% de nos ventes, sur lequel nous serions imposés équivaudrait pour nous à signer un chèque en blanc. Rien ne nous garantit que nous recevrons effectivement ces 8% ou 7%. Avec la crise et ses conséquences sur les pourboires, nous pouvons très bien être obligés aujourd'hui de déclarer 8% et n'en recevoir que 7%. Dans cinq ans, si la situation économique ne s'arrange pas, nous pourrions ne recevoir que 5% et être toujours obligés d'en déclarer 8%. Dans la même veine, une solution comme celle-ci ne réglerait pas le problème de l'indexation. Notre salaire recule, il continuera de reculer. Dans l'immédiat, nous subirions une baisse du revenu compte tenu du fait que nous serions obligés de payer de l'impôt sur 8% et qu'il nous resterait environ 4%.

Cette solution ne réglerait pas non plus le contrôle des revenus des restaurateurs. Rappelons que l'inscription automatique de frais de service sur la facture parerait à ce problème. Nous revendiquons 15% de frais de service inscrits sur la facture. Nous ne reviendrons pas sur les arguments. La solution américaine ne répond pas du tout à nos besoins. Au contraire, elle ferait baisser nos revenus.

Mme Vaillancourt: II y a un autre point également. On a dit ce qu'on avait comme représentativité. On a élaboré notre pensée sur la représentativité. C'est le dernier point ajouté dans le mémoire.

M. Marcouiller: Nous voulons apporter une précision concernant la représentativité d'associations comme la nôtre.

Oui, nous sommes représentatifs de tous ceux qui ne pourront jamais se prononcer de peur de perdre leur emploi parce qu'ils sont en contradiction avec leur patron. Nous avons souvent eu l'occasion de discuter avec cette majorité silencieuse qui nous disait textuellement: Nous sommes d'accord; c'est la solution; cela réglerait notre problème, mais nous ne pouvons nous prononcer ouvertement; on risque de prendre la porte. Oui, nous sommes représentatifs de ces gens.

Parlons maintenant de ceux qui n'ont pas encore reçu de compte des ministères du Revenu. Souvent, en discutant avec certains employés, on peut constater un désir de conserver le statu quo ainsi que la certitude qu'ils ne seront pas touchés par l'impôt. Quand ces gens recevront leur compte, nous serons représentatifs de ceux-ci.

Maintenant, non, nous ne sommes pas représentatifs des employés de restaurants comme ici, au Parlement. Ces employés ont des conditions salariales tellement exceptionnelles, un milieu de travail tellement particulier, un type de clientèle

tellement privilégiée que nous considérons qu'ils ne sont pas représentatifs de la majorité des employés au pourboire et des conditions de travail qui se vivent dans le milieu.

De plus, en juin 1982, l'ADEP Estrie complétait une enquête dans le cadre d'un projet de développement communautaire du Canada. Cette enquête portait sur les conditions de travail et salariales du milieu, le taux de syndicalisation, les normes minimales, les problèmes d'impôt et les hypothèses de solution. L'enquête a donné comme résultat, entre autres, qu'une grande majorité d'employés au pourboire sont pour le service inclus. Cette enquête a été faite seulement auprès des employés au pourboire et non auprès de l'ensemble des employés de l'hôtellerie et de la restauration. Certaines enquêtes donnant des résultats contraires ont été effectuées auprès de tous les employés et nous considérons que cela fausse la représentativité. La compilation des résultats de l'enquête de l'ADEP-Estrie n'est pas terminée, étant donné tout le contexte temps de ces derniers mois. Actuellement, nous travaillons à la compilation de ces données et nous nous ferons un plaisir de fournir les données à la commission. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie les représentants du Regroupement des associations d'employés à pourboire du Québec. J'inviterais ma collègue, Mme la députée de Johnson, à engager le dialogue avec votre organisme.

Le Président (M. Gagnon): Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le ministre. Merci, M. le Président. Premièrement, je voudrais vous remercier parce que, durant ces trois jours, j'ai suivi tous les mémoires et je peux vous dire que vous m'avez appris beaucoup. Comme le ministre vous l'a dit au tout début de la commission parlementaire, mon idée n'était pas faite non plus, mais, avec l'éclaircissement que vous nous avez fourni par vos mémoires, je pense que ce sera plus facile pour nous de vous comprendre, d'essayer de faire des choses et d'appliquer certaines choses de façon plus équitable.

La première question qui me vient à l'esprit, c'est la suivante. Dans votre mémoire, à la page 5, vous dites: "Les frais de service obligatoires". Quand vous demandez d'appliquer les 15% sur le service de façon obligatoire, est-ce que vous préconisez que ces 15% seraient répartis entre les serveurs et les serveuses, le commis-débarrasseur, en fin de compte, tout le personnel de service dans un hôtel ou dans un restaurant? Pourriez-vous répondre à cela? Est-ce que c'est simplement pour la personne qui sert aux tables?

Mme Baillargeon (Rita): Actuellement, c'est moi qui suis mandatée pour répondre aux questions. Concernant la répartition des pourboires, on s'est déjà prononcé dans les mémoires individuels, c'est-à-dire qu'au niveau de l'ADEP Estrie on a dit qu'on trouvait inconcevable que les employés soient obligés de payer d'autres employés pour travailler. Cela concerne parfois les plongeurs qui sont payés et tous les gens qui ne touchent pas au service ou qui font du service comme barmaids, quelque chose comme cela. Là où on trouve qu'il y a un problème, c'est quand la même table est servie par plusieurs personnes. Nous autres, on a proposé dans notre mémoire qu'il y ait une commission d'étude pour voir comment on pourrait répartir les pourboires et qu'il y ait une réglementation à ce niveau. Actuellement, on sait que c'est d'une façon très injuste. Il y a 2% ou 3% de la caisse que les employés qui servent aux tables sont obligés de donner soit à l'hôtesse ou à la barmaid. Cela, on ne veut plus que ça se fasse.

Mme Juneau: Est-ce à comprendre, Mme Baillargeon, que les autres employés qui ne sont pas des serveurs ou des serveuses, comme les commis-débarrasseurs, les autres, ne sont pas sur la même base de salaire que vous autres, serveurs et serveuses?

Mme Baillargeon: Non, justement. Ils ne sont pas sur la même base de salaire. Ils ont le salaire minimum, mais ils ne sont pas considérés au niveau salarial comme des employés au pourboire, au niveau de l'impôt non plus. Qu'est-ce qu'on leur donne? Les 2% de la caisse ne sont pas calculés dans leurs déclarations de revenus. Moi, je n'ai pas de reçu de cela et quand le ministère du Revenu vient me trouver, il m'impose sur le montant global de mes factures. Il faut que je me batte pour faire comprendre au vérificateur de l'impôt que j'ai donné un pourcentage au commis-débarrasseur, que j'ai donné un pourcentage à l'hôtesse, même si elle n'est pas là des fois, que j'ai donné un montant pour faire balayer le plancher ou à la barmaid.

Mme Juneau: Je ne voudrais pas prolonger le débat trop longtemps parce que je suis certaine qu'au bout de trois jours vous autres aussi vous êtes fatigués et vous avez fait votre grosse part, mais j'aurais une toute petite question à poser, si vous le permettez, au monsieur de Québec. Est-ce que c'est plus facile de se regrouper en association dans les grandes villes qu'en

région?

M. Saint-Pierre (Bernard): Non, pas du tout. C'est plus difficile. Je dirais que s'il y a 150 000 personnes dans la région immédiate de la ville de Québec, c'est très difficile de rejoindre 150 000 personnes même s'il y a plus de médias d'information qu'à l'extérieur, que dans les régions périphériques de Québec.

M. Marcoux: II serait intéressant de savoir que la Communauté urbaine de Québec, c'est à peu près 500 000.

M. Saint-Pierre: Je vais me limiter à 150 000. On ne parlera pas de la communauté urbaine, je vais parler de la ville de Québec. D'accord?

M. Marcoux: Même la ville, 300 000 à peu près.

M. Saint-Pierre: On ne parlera pas de cela, je vais parler de la ville de Québec pour commencer parce que là on me posait une question bien définie.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Vous avez la parole... À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Polak: II parle de la ville de Québec. Oui, mais s'il vous plaît! II ne faut pas le mépriser.

Le Président (M. Gagnon): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Saint-Pierre: Pour satisfaire le député de Sainte-Anne, je vais englober la région de Québec, la communauté urbaine, parlons-en. Le regroupement est difficile à faire parce qu'il y a beaucoup de gens, c'est très éparpillé. Tandis que dans une région comme l'Estrie, la région est grande, mais le mouvement est parti de Sherbrooke, comme on a essayé de le partir de Québec, mais on s'est étendu ailleurs dans les autres régions de la province, on est allé à Sept-Îles, à Baie-Comeau, à La Malbaie, à Mont-Joli, tout cela. C'est très difficile, mais il y a de bonnes raisons à cela, c'est que, premièrement, il y a le chantage qui est fait par beaucoup de restaurateurs et d'employeurs vis-à-vis des travailleurs au pourboire et la crainte qu'exercent les associations vis-à-vis d'une hantise qui est véhiculée par les restaurateurs, à savoir que si c'est une association, cela va devenir un syndicat. C'est un peu cela qui fait qu'il y a beaucoup de gens qui refusent d'adhérer à des associations parce qu'il y a du chantage de fait à ce niveau.

Vous voulez être syndiqués, vous allez prendre la porte. On est une association, nous ne sommes pas un syndicat. C'est ce qui nuit beaucoup et ensuite il y a les disparités régionales parce que Sherbrooke ne vit pas le même problème que la région de Québec. Les gens de Mont-Joli et de la Gaspésie ne vivent pas le même problème que ceux de la région de Québec. Ils n'ont pas la même concentration de population. Ils n'ont pas, comment dirais-je, le même "standing" qu'à Québec, qui est une ville de fonctionnaires, une ville strictement gouvernementale, si on veut, tandis que Mont-Joli, c'est une ville touristique, de même que Matane et ailleurs.

Mme Juneau: Dans votre exposé, vous ne m'avez pas dit, par exemple, de quelle manière vous procédiez pour avoir des membres. Comment fonctionnez-vous?

M. Saint-Pierre: Vu les moyens financiers limités de nos associations, parce que nous ne sommes pas subventionnés, c'est le bouche à oreille et c'est difficile, je vous en passe un papier. Pour convaincre un membre, tu vas peut-être passer cinq heures avec lui et encore là il va demander à son "boss" s'il peut.

Mme Juneau: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci, Mme la députée de Johnson. M. le député de Vaudreuil-Soulanges. (21 heures)

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans votre présentation ou en ajout à votre présentation, Mme Nemeh, je pense, a évoqué le système américain, et cela lui inspirait des craintes. Cela a été proposé comme solution par certaines personnes. J'ai cru comprendre que vous aviez peur, que même dans les cas où vous n'aviez pas reçu 8%, ce qui pourrait être spécifié dans la loi ou les règlements, vous seriez quand même tenu de payer l'impôt, comme si vous aviez reçu 8% des ventes, à titre de pourboire; ce n'est pas du tout ma compréhension de la loi américaine qui entre en vigueur à la fin de l'année. Il est question de... D'abord, il y a une remise, cela s'apparente beaucoup à la troisième solution qu'il y a ici. C'est la deuxième solution, la déclaration faite -pardon, la troisième - par l'employé à l'employeur, qui déduit l'assurance-chômage, etc., la "social security" aux États-Unis.

Dans les cas où, en faisant les recoupements, par les rapports d'impôt de l'employeur et des employés, on s'aperçoit que les employés ont déclaré moins que 8%, qu'il y a moins que 8% quant aux déductions, à ce moment-là, il y a une raison pour aller y voir de plus près. L'employé doit démontrer si, effectivement, il prétend n'avoir reçu que 6,5%, que c'est véritablement, à l'aide des dossiers, des

factures, etc., qui sont disponibles, qu'il ne doit pas être taxé quand même pour plus que ce qu'il a véritablement reçu. C'est-à-dire que cela n'enlève pas l'obligation, qui existe encore aujourd'hui qu'on doit quand même, lorsqu'on déclare des revenus ou qu'on prétend qu'on n'en a pas beaucoup, pouvoir le démontrer. Cela est vrai pour tous les contribuables. Dans ce sens, je n'ai pas saisi, j'ai eu peur que vous pensiez véritablement qu'un tel système vous désavantageait, alors qu'en réalité, il y a contribution de l'employeur, etc.

Mme Nemeh: J'ai peut-être mal compris la façon dont ce système s'articulerait, mais, même si c'était le cas, de la façon que vous le mentionnez, cela n'enlève pas les autres désavantages dont nous parlions, qui sont l'indexation qu'on n'aurait pas et le fait que nous paierions l'impôt sur 8%, ce qui nous laisserait peut-être à peu près 4% de revenu.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Avec l'indexation, c'est toujours 8% du coût des repas, qui, eux, montent.

Mme Nemeh: Oui, mais le pourboire, avec la crise, n'augmente pas automatiquement avec le coût des repas; c'est cela notre crainte.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans ce sens, oui.

Mme Baillargeon: Je voudrais savoir, concernant le système américain, ce qu'on a mal compris. Il semblerait que M. le député ne perçoit pas cela de la même façon que nous. Nous, on a compris que dans le système américain il y aurait un pourcentage automatique à déclarer. Expliquez-nous en quoi cela consiste?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Non, les règlements de la loi américaine qui sera en vigueur le 31 décembre prévoient que les établissements perçoivent les déclarations des employés, d'abord et donc, sur la foi de ces déclarations, font les déductions, font les contributions auxquelles ils sont tenus, comme employeurs, et qu'éventuellement, lorsque les rapports d'impôt sont produits, le secrétaire au Trésor, en pratique le ministre du Revenu là-bas, regarde, si, à l'égard des pourboires, les employés ont déclaré ce qui est l'équivalent de 8% du volume des ventes.

Mme Baillargeon: Qu'est-ce que c'est la différence avec ce que je viens de dire? C'est qu'il s'attend qu'on déclare 8%.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est cela. Et, si c'est 8%, on l'accepte, cela finit là, on ne vous harasse pas.

Mme Baillargeon: Si, ce n'est pas 8%?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si ce n'est pas 8%, l'employé, comme tous les contribuables en Amérique du Nord, est tenu de démontrer...

Mme Baillargeon: Mais, s'il ne fait pas 8%? C'est exactement ce qu'on dit dans notre mémoire, on l'a très bien compris à ce moment, M. le député. On a compris le système. On s'attend à ce que les employés au pourboire déclarent 8%; même si on ne le fait pas, on s'en fout-

M. Polak: Mais ils font 8%. Mme Baillargeon: Pardon? M. Polak: Ils font 8%.

Mme Baillargeon: C'est faux, monsieur. Il y a des restaurants qui font 10%. Nous croyons qu'il y a des restaurants qui peuvent faire 12% ou 15%, cela peut exister; on dit, nous, que c'est une minorité. Ici, par exemple, au Parlementaire, on considère, que c'est vraiment une exception et que les restaurants qui font des pourcentages aussi élevés que cela sont des exceptions. Si, vous voulez que je vous parle d'expériences personnelles, comme cela a l'air de toucher beaucoup, c'est que, dans le milieu du restaurant... Je travaille dans un restaurant moyen le pourcentage de factures que je fais, c'est de 6%, monsieur. Vous pouvez être sceptique, mais venez travailler chez nous pendant six mois...

M. Polak: Je vais manger souvent, je me fais servir...

Mme Baillargeon: Monsieur, vous évaluez, parce que vous laissez un pourcentage de tant, que tout le monde le fait; vous devriez peut-être venir travailler; vous verriez qu'il y en qui viennent manger avec leur petite famille et qui nous laissent 0,50 $.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne, de toute façon, n'avait pas la parole; que je sache, il ne m'avait pas demandé la parole. C'est le député de Vaudreuil-Soulanges qui l'avait.

M. Polak: Je n'ai rien dit.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est très simple. Dans le fond, c'est pour vous vous rassurer. J'ai entendu - on pourra lire le journal des Débats, je ne veux pas en faire un plat - que vous aviez exprimé la crainte que la disposition des 7% ou des 8% qui seront dans la loi américaine obligerait l'employé à être taxé sur 7% du volume de

ventes. Ce n'est pas le cas. Tout ce que je vous dis, c'est que c'est une présomption à savoir si, oui ou non, il y a enquête. À ce moment, un inspecteur ira vérifier sur place de façon plus poussée si, effectivement, les pourboires sont aussi faibles que l'employé le déclare dans son...

Mme Baillargeon: Comme le pourboire ne peut pas être vérifié, voulez-vous me dire ce que cela change à ce qu'on vit actuellement? Il faudrait me l'expliquer en détail, je ne comprends pas. Si je sais que je fais 6% ou 7%, je vais essayer de le prouver au gars, mais il ne me croit pas. Plus les factures augmentent, plus notre pourcentage diminue. Cette année, j'ai de la difficulté à le convaincre que je fais 7%, il ne me croit pas. L'année prochaine, je sais que je vais faire moins dans le contexte qu'on connaît actuellement.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En l'occurrence, ce que j'ajouterais, c'est que cela demanderait la complicité... Il faudrait que, dans le cas qui vous préoccupe, l'employeur déclare des ventes qui sont supérieures à ce qu'elles ont été véritablement si l'employé fait ses déclarations exactement et déclare 6%. À chaque repas que vous servez, vous recevez 6%. À la fin du mois, vous déclarez à votre employeur: J'ai fait 6% sur le chiffre de vente. Quand il va faire son rapport d'impôt - il sait son chiffre de vente - le ministre du Revenu va voir qu'il déclare tant, il va faire le recoupement. Il va dire: C'est 6%, et vous avez déclaré 6%.

Mme Baillargeon: L'année suivante, alors que je constate que je fais 5,8%, et l'année suivante, alors que je fais 5,7%.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Même chose.

Mme Baillargeon: Je ne comprends pas votre système.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II y a même une disposition qui prévoit - je ne veux pas entrer dans les détails techniques -que cela peut descendre...

Mme Baillargeon: Vous ne répondez pas de toute façon au sujet de l'indexation au coût de la vie.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges):

L'effet que vous avez mentionné, que lorsque le coût du repas monte, votre pourcentage relativement au coût du repas descend? C'est ce que vous dites?

Mme Baillargeon: II descend et, en plus de cela, de toute façon, je ne vois pas du tout comment on va pouvoir prouver au ministère du Revenu qu'on ne fait pas les montants qu'ils s'attendent à nous voir déclarer. Ils s'attendent à quoi? À 15%, vous à 16%?

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Sainte-Anne, avez-vous demandé la parole?

M. Polak: Non, pas du tout.

Le Président (M. Gagnon): Ah bon!

M. Polak: Je réponds à une question de madame. Je suis bien impressionné par son...

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne...

M. Polak: Sur le plan humain...

Le Président (M. Gagnon): ... il y aurait toujours possibilité de vous adresser aux invités. Vous n'avez qu'à demander la parole.

M. le ministre.

M. Marcoux: J'aurais une première question à adresser aux représentants de PRO-RESTEL. PRO-RESTEL est un regroupement d'associations de travailleurs et travailleuses au pourboire. Pouvez-vous nous définir votre "membership" pour tout cela? C'est parce que d'autres groupes ont parlé de vous lors des journées antérieures. J'aimerais connaître davantage votre représentativité et savoir combien de personnes vous regroupez actuellement.

M. Saint-Pierre: D'accord. PRO-RESTEL est une association à but non lucratif incorporée sous la troisième partie de la Loi sur les compagnies du Québec, donc au même titre que la FNACQ ou que l'Association des consommateurs du Québec, c'est-à-dire qu'elle n'a aucun but lucratif, à savoir faire de l'argent. Après ce qui a été véhiculé par une certaine personne ici mardi, à savoir que nous étions l'antichambre de quelque syndicat, par ces affirmations gratuites, on a confirmé les craintes qui hantaient M. le ministre, à savoir que c'était un syndicat de boutique. C'est tout ce que j'ai à dire.

M. Marcoux: Combien regroupez-vous de personnes actuellement?

M. Saint-Pierre: Actuellement, on n'en regroupe pas tellement à cause d'un maraudage qu'il y a eu.

M. Marcoux: Ce n'est pas un reproche. Combien en regroupez-vous? 500? 200? 1000?

M. Saint-Pierre: Non, beaucoup moins

que cela. Le nombre a diminué d'autant que la syndicalisation s'est faite chez les membres.

Une voix: Deux, trois...

M. Saint-Pierre: Non, plus que cela, sinon je n'aurais pas les moyens de me payer un habit pour pouvoir venir ici, à ce point.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président...

Le Président (M. Gagnon): Excusez-moi, je...

M. Polak: ... je n'avais pas l'intention de poser une question, mais cela me choque parce que Mme Baillargeon, je m'en rappelle, la première journée, parce qu'à ce moment, elle représentait une association de l'Estrie, et maintenant elle est dans la fédération... Est-ce vrai que vous, personnellement, vous faites 6%?

Mme Baillargeon: Je vous l'ai dit. Vous mettez en doute ce que je vous ai dit.

M. Polak: Non, mais cela me surprend, parce que j'avais compris mardi - vous avez fait la distinction, selon l'ancien principe de belle, pas belle, toutes sortes de choses avec lesquelles je ne suis pas d'accord parce que moi je ne fais pas cette distinction. Savez-vous, on avait parlé entre 10% et 12%. Vous, vous dites je fais 6% et le gouvernement, le ministère du Revenu vient dire: Voici, selon le livre vert, on va vous cotiser 15%. Comment vas-tu être capable de prouver que vous avez fait justice?

Mme Baillargeon: Comment je suis capable de le prouver, dites-le-moi.

M. Polak: C'est ça que je demande. C'est encore pire pour celles qui ne sont peut-être pas aussi bien situées que vous. Cela est grave.

Mme Baillargeon: Je me permets de le prendre pour un compliment, merci, mais il reste que cela prouve que ce qu'on a dit, c'est que quand il s'agit de prouver, on n'a pas de critères.

M. Polak: Cela me choque.

Le Président (M. Gagnon): Merci, M. le député de Sainte-Anne. M. le ministre, je vous redonne la parole.

M. Marcoux: Vous affirmez, dans le mémoire, à la page 4, que le pourboire au

Québec est très mal perçu par le client. Je suis un peu étonné de cette affirmation. Évidemment, je pense que vous pouvez soutenir cela. Moi je pourrais soutenir autre chose. C'est difficile à prouver. C'est une question de perception, mais, en tout cas, j'ai rarement entendu des commentaires contre le fait que les pourboires existent ou voulant que le client québécois perçoive mal l'existence de pourboires. Disons que cela m'a surpris comme affirmation dans votre mémoire. Il y a une chose qui m'étonne aussi; c'est que vous indiquiez, d'une part, que si, par exemple, l'esprit de la loi américaine était appliqué ici avec les 8%, quelle que soit la façon dont elle serait appliquée, cela correspondrait pour vous, pour plusieurs, en tout cas, à une baisse de salaire. D'autre part, il y a une toute autre logique développée dans l'ensemble des mémoires que vous avez présentés qui suppose que le salaire que vous avez actuellement, comme pourboire, est supérieur à cet élément. D'ailleurs, vous l'affirmez dans quelques-uns des autres mémoires que vous évaluez vous-mêmes à environ 10% des revenus de pourboires. Là je pense qu'il y a un problème, en somme, je ne sais pas, de cohérence entre quelques-uns des mémoires qui ont été défendus précédemment par vos organismes.

À la suite de la question qui a été posée par ma collègue de Johnson, dans le fond, j'ai été un peu troublé par votre réaction sur la répartition des 15% ou des 10% ou 12% lorsque ma collègue vous a demandé quelle est votre attitude face à cette répartition par rapport aux employés directement affectés au service. Si j'ai bien compris, vous disiez - là je veux dire par rapport à l'espèce d'équité sociale de justice que vous revendiquez dans l'ensemble des mémoires - j'ai trouvé votre réaction rapide, carrée et drue en ce qui nous concerne. Les 15% doivent aller là. À un moment donné, quand je compare les différences de salaires entre ceux qui sont autour de vous autres parce que vous êtes dans un même bâtiment comme une même entreprise où d'autres sont payés au salaire minimum, 4,50 $ à 5 $, 5,50 $, 6 $, et que même en admettant que vous doublez votre salaire horaire, le salaire minimum par le pourboire, on atteint quand même autour de 6,50 $. En tout cas, j'ai des problèmes de conciliation d'attitude un peu qui ne m'étaient pas apparus lors de la présentation de vos autres mémoires, mais à la suite de la question de ma collègue...

Mme Baillargeon: On va commencer par la perception du pourboire par le client. Je ne sais pas si on s'est bien expliqué. Ce qu'on voudrait vous dire, c'est que le client qui va dans un restaurant ne perçoit pas le pourboire comme un moyen pour la fille de se compléter un salaire décent. D'accord? Il

le perçoit comme un montant qu'il va lui laisser pour se payer un petit peu de luxe. Est-ce que ce que je dis est clair? Le client...

M. Marcoux: C'est beaucoup plus clair que dans le texte. On peut être en accord ou en désaccord sur le fait que pour l'ensemble des Québécois, lorsqu'ils laissent un pourboire, pour eux, est-ce qu'ils sont conscients que cela fait partie du salaire, que c'est un complément de salaire ou si c'est simplement une bon!fication marginale? On peut discuter. D'accord, c'est plus clair, cela va pour cela. (21 h 15)

Mme Baillargeon: II s'agit juste de savoir combien de gens savent qu'on fait en bas du salaire minimum. Les gens ne le savent pas. Deuxièmement, vous demandez comment il se fait qu'avec les 8% - la loi américaine - on considère que cela baisserait nos salaires. En supposant qu'on soit obligé de déclarer les 8%, il faudrait payer de l'impôt là-dessus. On n'est pas sûr de faire les 8%, mais en supposant qu'on paie de l'impôt sur les 8% qu'on ne fait même pas, que va-t-il nous rester, en pourcentage, de nos pourboires? Est-ce clair?

M. Marcoux: Oui, d'accord. C'est parce que vous affirmez le principe qu'à partir du moment où vous ne faites pas les 8%, vous payez de l'impôt sur les 8%. Donc, vous avez une baisse de salaire.

Mme Baillargeon: Mais même si on avait...

M. Marcoux: Vous affirmez que le ministère du Revenu ou les ministères du

Revenu vous cotiseraient pour des revenus que vous ne faites pas.

Mme Baillargeon: Pardon?

M. Polak: ...

Une voix: C'est grave.

Mme Baillargeon: Mais en supposant que vous nous mettiez une obligation de déclarer un pourcentage - vous vous attendez qu'on déclare 8% et vous voulez qu'on paie de l'impôt là-dessus - que va-t-il nous rester en main, comme masse salariale? En plus, en supposant qu'on dise qu'on s'attend de déclarer 8%, on ne parle pas de la répartition des pourboires à ce niveau. Que va-t-il nous rester? Est-ce que je me fais bien comprendre?

M. Blank: Les 8% de la loi américaine, ce n'est pas obligatoire. Le gouvernement a fait une moyenne de 8% et, s'il y a des gens qui déclarent moins que 6%, il va vérifier pourquoi. S'ils ont raison, c'est moins. Cela peut être 6% , 5%, 4%, 3% ou 2%, mais...

Mme Baillargeon: II faut que je le prouve...

M. Blank: Mais la lumière rouge s'allume si c'est moins de 8%.

Mme Baillargeon: ... au ministère du Revenu, de la même façon.

M. Blank: Oui, mais c'est facile.

Mme Baillargeon: Comment?

M. Blank: Vous avez les factures.

Mme Baillargeon: Comment cela, "vous avez les factures"? On a un chiffre d'affaires.

M. Blank: On peut surveiller les factures. Il y a d'autres personnes qui travaillent avec vous. Vous n'êtes pas la seule personne à cet endroit. Que font les autres?

Mme Baillargeon: Comme c'est là, actuellement, nous ne sommes pas les seules à travailler à cet endroit, mais nous n'arrivons pas à prouver au ministère du Revenu qu'on ne fait pas les montants qu'il nous réclame. Nous allons en groupe rencontrer les gens des ministères et ils ne nous croient pas. Nous disons tous la même affaire. Nous, l'expérience.... M'écoutez-vous, monsieur?

Le Président (M. Gagnon): Oui. Il y avait quelqu'un.

Mme Baillargeon: L'expérience que nous avons vécue - je peux vous le dire - c'est qu'on est allé, un groupe de 25 personnes, rencontrer les gens du ministère du Revenu fédéral quand on a reçu nos comptes. Les 25 personnes disaient toutes la même chose et ils n'ont jamais voulu croire ce qu'on leur disait, qu'on ne faisait pas les 8% des factures. D'ailleurs, ils nous taxaient sur 13%. Ils n'ont jamais voulu croire qu'on faisait à peine 6%. On était tout un groupe. On disait tous la même chose et on y est allé en bloc. Alors, expliquez-moi ce que cela va changer à ce qu'on vit actuellement. Bon!

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Hull.

Mme Baillargeon: Je n'ai pas fini de répondre. M. le ministre Marcoux avait d'autres questions. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord.

Le Président (M. Gagnon): Allez-y.

Mme Baillargeon: Le monsieur disait qu'il n'était pas content de la façon dont j'avais réagi au niveau de la répartition des pourboires, c'est-à-dire que je dis "je", mais j'implique les gens aussi. Au niveau de la répartition des pourboires, quand il s'agit de donner les pourcentages de nos factures à la plonge en arrière, à des cuisiniers, à des hôtesses, à des barmaids et à des petits gars qui balaient le plancher, allez m'expliquer pourquoi je suis obligée de payer ces employés. Là où je suis d'accord pour qu'on réévalue et qu'on fasse une réglementation pour la répartition des pourboires, c'est là où il y a plusieurs personnes qui vont servir aux tables. Il y en a un qui va servir l'apéritif. L'autre va servir le repas. L'un va faire la flambée. L'autre apporte le dessert. L'autre sert le café. Là, c'est vrai qu'il faudrait qu'il y ait une réglementation et qu'on pense à une répartition des pourboires puisque les personnes ont servi à la même table, mais quand il s'agit de payer le plongeur, je ne vois pas pourquoi je lui donnerais un pourcentage. Est-ce clair?

Le Président (M. Gagnon): Oui, oui. Est-ce terminé, avec M. le ministre?

Mme Baillargeon: Oui, oui.

M. Marcoux: Je vous remercie d'être venue présenter un mémoire au nom du Regroupement des associations d'employés au pourboire du Québec.

Le Président (M. Gagnon): Je vous remercie beaucoup, Mesdames et Messieurs, de cette présentation.

J'inviterais maintenant le Parti québécois de Montréal-Centre à prendre place.

Oui. M. Cristel. Bienvenue à cette commission. Je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent et de faire la lecture de votre mémoire.

Parti québécois de Montréal-Centre

M. Paquin (Pierre): Mon nom est Pierre Paquin. Je suis accompagné de Denis Lachance et Hélène Lachance. On a travaillé ensemble à ce mémoire. Il y a une annexe, j'espère qu'elle circule; on l'a donnée aux gens en arrière pour la faire circuler, parce qu'on a désiré apporter des modifications au mémoire à la fin. Si vous n'en avez pas pris connaissance, de toute façon, je vais lire le texte en fonction de ces modifications. Vous l'avez?

M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs les députés. Dans l'organisation du Parti québécois, la région de Montréal-Centre représente le coeur du Montréal métropolitain. C'est un ensemble de 17 comtés au sein desquels on retrouve quelque 4500 établissements de tous genres, hôtels, bars, restaurants, fournissant du travail à environ 20 000 employés rémunérés au pourboire, syndiqués dans une proportion de 12%.

Parce que son territoire est un des principaux sites touristiques et le lieu gastronomique par excellence au Québec, et parce qu'il maintient un contact permanent avec la population qu'il représente et dont il désire ardemment refléter les réalités et les espoirs, le Parti québécois de Montréal-Centre s'intéresse à la situation complexe et à maints égards désolante des travailleurs au pourboire québécois.

Le présent mémoire n'est pas un exposé exhaustif de la situation des travailleurs au pourboire et nous n'avons pas, non plus, la prétention de cerner le dossier dans tous ses aspects. Il s'agit plutôt d'une prise de position claire et franche en faveur d'une catégorie de travailleurs particulièrement vulnérables en cette période économique troublée que nous devons traverser présentement, prise de position qui nous amène à reprendre certains arguments majeurs et à soutenir certaines revendications importantes, tout en émettant des hypothèses de travail qui, à notre sens, constituent des éléments de solution intéressants à l'intérieur de ce dossier.

Nous nous en tiendrons dans notre propos, vous le comprendrez aisément, aux aspects de la problématique relevant des actions et de la compétence du gouvernement du Québec, notre approche se préoccupant des éléments suivants: l'impôt provincial, les avantages sociaux, le Régime de rentes du Québec, la santé et la sécurité au travail, la situation des femmes et la normalisation du salaire minimum. En bref, nous aspirons à rendre aux travailleurs au pourboire un plein statut de travailleurs avec tous les avantages, droits et reconnaissance habituellement dévolus aux travailleurs ordinaires. Techniquement, cela signifie l'abolition pour le travailleur au pourboire de la notion périmée de travailleur autonome. La fin, par conséquent, de l'ambiguïté issue du régime du double statut et la reconnaissance du principe selon lequel le revenu déclaré d'un travailleur doit être l'équivalent de son revenu réel, ni plus, ni moins.

Comme on peut le constater, les problèmes soulevés relèvent en effet de la juridiction de plusieurs ministères québécois et seules la concertation et la volonté politique de tous les intervenants de donner aux travailleurs au pourboire les mêmes droits qu'à tous les travailleurs ordinaires peuvent venir à bout d'une situation que trop

de gens déplorent et qui maintient trop de nos concitoyens et concitoyennes dans un état de travailleurs de deuxième ordre, sous-payés et non protégés. Nous espérons que notre contribution saura être utile au redressement souhaité. C'est dans cet esprit de collaboration et de sérénité que nous vous soumettons nos réflexions.

Les travailleurs au pourboire et l'impôt. On retrouve dans le livre vert sur la situation au Québec des travailleurs et des travailleuses au pourboire le passage suivant: "Au Québec, il n'existe aucune législation concernant le contrôle ni la distribution des pourboires." Cependant, en 1940, la Loi du salaire minimum a établi des taux horaires et des heures de travail applicables à chaque zone et à chaque catégorie d'industrie. Un taux horaire particulier s'applique donc aux travailleurs et travailleuses au pourboire." L'une des conséquences de ces aménagements pour les travailleurs au pourboire est le fait que ceux-ci ne déclarent que 10% ou 15% de leur revenu de base en salaire propre, au chapitre des pourboires, règle bien établie et reconnue par toutes les parties depuis longtemps. Pourtant, il nous apparaît que, dans une situation normale, le travailleur doit déclarer 100% de ses revenus de tous ordres pour fins d'impôts. Le pourboire étant considéré comme un revenu pour le travailleur, pourquoi, alors, n'en déclarer qu'une portion? Cette situation dure et perdure avec la complicité, entre autres, du ministère du Revenu du Québec à cause de ce taux horaire particulier, c'est-à-dire d'un salaire minimum de deuxième ordre, fixé actuellement à 3,28 $ l'heure, auquel les travailleurs au pourboire sont assujettis et qui, de surcroît, a perdu environ 40% de sa valeur en termes de pouvoir d'achat réel depuis juillet 1976, tandis que pour la même période le salaire minimum normal perdait 32% de sa valeur. Cette tolérance est donc en quelque sorte un acte de compensation de la part du ministère, reconnaissance implicite d'une injustice à corriger.

Depuis environ deux ans, le ministère du Revenu du Québec a entrepris une véritable chasse aux sorcières dans le but de récupérer des sommes qui auraient été versées en impôt non prélevé sur les revenus en pourboires de très nombreux travailleurs au pourboire au cours des années antérieures. Nous comprenons bien qu'en période de crise le gouvernement doive tout mettre en oeuvre pour maximiser ses revenus insuffisants, mais l'opération récupération, tout en brisant le statu quo, viole en quelque sorte un usage reconnu et accepté de tous.

Ce faisant, le ministère, usant au besoin de mesures d'intimidation et de coercition, procède à des demandes de paiements rétroactifs, ce qui pénalise grandement les employés touchés qui doivent soudainement verser au ministère des sommes se chiffrant à plusieurs milliers de dollars. Une telle procédure est inacceptable pour plusieurs raisons.

Mentionnons simplement que le travailleur au pourboire doit fréquemment verser certaines sommes d'argent à d'autres employés, par exemple le maître d'hôtel et le commis-débarrasseur, ce qui représente une part importante de son revenu original dont il ne dispose plus comme revenu réel pour lui-même, mais pour lequel il doit quand même payer des impôts. Il en va de même des coûts d'achat et d'entretien des uniformes dans plusieurs cas, sans parler de la pratique courante des employeurs qui consiste à effectuer une ponction sur les pourboires afin de défrayer les frais d'administration des paiements effectués par cartes de crédit. En outre, notons au passage que cette situation amène dans les faits les travailleurs au pourboire à rémunérer directement d'autres employés de l'établissement et à assurer des responsabilités qui reviennent, dans une situation administrative saine, au patron.

Nous demandons au ministère de cesser les poursuites et enquêtes déjà entreprises dans le cadre de l'opération récupération et de rembourser aux travailleurs au pourboire ayant effectué des versements d'impôt rétroactifs les sommes ainsi payées, afin que cette injustice soit réparée.

Nous demandons de plus que des contrôles plus stricts soient instaurés sur le plan de la facturation afin de mettre un terme aux pratiques de certains restaurateurs d'utiliser n'importe quel bout de papier en guise de facture, ou encore d'imprimer toute une série de factures portant le même numéro, ce qui amène le restaurateur à ne pas déclarer les revenus de ces additions et, en conséquence, outre le fait que le ministère du Revenu soit berné par la manoeuvre et y perde des sommes importantes sur le plan de la taxation, des sommes touchées à titre de pourboires ne sont pas déclarées en entier comme revenus par les travailleurs au pourboire.

Le revenu réel par rapport au revenu déclaré, sur le plan des avantages sociaux. Les travailleurs au pourboire sont soumis aux mêmes obligations que les autres travailleurs. Il serait donc tout à fait juste, normal et convenable qu'ils bénéficient des mêmes avantages. Tel n'est pourtant pas le cas. Par exemple, les pourboires ne sont pas assurables pour les régimes de sécurité sociale ni les avantages sociaux. Les travailleurs au pourboire ont leurs congés payés au taux horaire de base de 3,28 $ l'heure, ainsi que leurs vacances. Les absences pour maladie ou autres absences ne sont pratiquement jamais payées, même pour fins de maternité. Les travailleurs au pourboire sont souvent dans l'obligation d'effectuer de nombreuses tâches connexes

pour lesquelles ils ne reçoivent aucun pourboire: laver la vaisselle, les planchers ou autres tâches comme cela.

En d'autres termes, les travailleurs au pourboire assument eux-mêmes leur sécurité sociale, dégageant ainsi les patrons de leur responsabilité sociale. Ils ont tout intérêt à avoir une santé de fer et doivent essayer de se payer des vacances ailleurs qu'à "Balconville" avec 4% de leur trop maigre salaire horaire de deuxième ordre.

Enfin, les travailleurs au pourboire ne possèdent aucune sécurité d'emploi et sont victimes plus souvent qu'à leur tour de congédiements abusifs relevant bien plus des caprices de l'employeur que de la compétence de l'employé ou de la qualité de son travail. Les femmes sont encore plus vulnérables que les hommes à ce chapitre, si l'on considère le harcèlement sexuel dont elles sont victimes tant de la part de la clientèle à qui elles doivent surtout plaire que des patrons, les congédiements ou pertes d'emploi, quand on veut être poli, pour cause de maternité et le chantage à l'emploi pour le cas où la travailleuse oserait se plaindre ou tenter de se faire respecter. On le voit bien, dans ce monde de travailleurs de seconde classe que sont les travailleurs au pourboire, les femmes n'ont le droit qu'à des miettes de seconde classe également, étant plus démunies et moins considérées que leurs confrères mâles.

Nous demandons donc pour les travailleurs au pourboire la sécurité sociale et les avantages sociaux qui leur reviennent de droit et ce, par rapport à la totalité de leurs revenus réels, pourboires inclus.

Le Régime de rentes du Québec. La portion du revenu que le travailleur touche comme pourboire n'étant pas assurable pour les avantages sociaux et les régimes de sécurité sociale, les travailleurs au pourboire se trouvent à payer, à cet égard, une cotisation dont le montant est nettement inférieur à celui qui serait versé proportionnellement à son revenu réel. En conséquence, les prestations et indemnisations auxquelles ont droit les travailleurs au pourboire s'en trouvent diminuées considérablement, autre injustice flagrante qu'il convient de compenser au plus tôt pour des raisons humanitaires et sociales évidentes.

Les accidents du travail. Le serveur ou la serveuse, de par ses attributions et à cause de ses conditions de travail (transport de plats au contenu brûlant, stress, nécessité de tout faire vite, obligation d'accomplir plusieurs tâches variées en même temps) est plus exposé que bien d'autres travailleurs de l'établissement à un accident du travail.

Lorsqu'il a un accident du travail, le travailleur au pourboire est compensé en fonction de son revenu réel total, à savoir le salaire de base et les pourboires. Cependant, il incombe au travailleur au pourboire d'établir la preuve de ces pourboires, ce qui demande une attestation de l'employeur, lequel refuse le plus souvent de collaborer, entre autres, à cause des pratiques douteuses citées plus haut au niveau du mode de facturation.

La situation des femmes. Les femmes représentent environ 60% des travailleurs au pourboire de l'industrie de l'hôtellerie et de la restauration et on les retrouve majoritairement dans les petits établissements de 20 employés et moins. Dans ces petits établissements, le chiffre d'affaires et, par conséquent, les pourboires, de même que l'importance relative du pourboire par rapport à la somme facturée, sont généralement moins importants que dans les établissements de plus grande envergure et ce sont ces petites entreprises qui portent le moins de respect aux normes du travail concernant tant les heures régulières que le temps supplémentaire, tant les taux horaires que les avantages sociaux de tous ordres.

Nous demandons donc au gouvernement du Québec de voir au respect et à l'application des normes minimales du travail dans l'industrie afin que les travailleurs au pourboire bénéficient, entre autres, d'une demi-heure de repos à toutes les périodes de cinq heures travaillées car le chantage à l'emploi, les diverses pressions des employeurs et autres modes de dissuasion empêchent ces employés de faire valoir leurs droits et de s'organiser dans un tel climat de peur et d'intransigeance.

Une solution équitable. Outre l'ensemble des demandes présentées tout au long du présent mémoire, nous croyons que le problème des gens au pourboire en est un d'une complexité et d'une importance telle qu'il appelle non seulement des correctifs particuliers et des palliatifs ponctuels, mais une intervention d'envergure, énergique et rigoureuse, susceptible d'amener une solution globale à la problématique dans son ensemble.

Il s'avère évident à nos yeux que l'objectif final est la réalisation de l'équation: revenu réel égale revenu déclaré, et que ce revenu doit être assez intéressant pour donner aux travailleurs au pourboire une situation de vie et des conditions de travail décentes.

Afin de réorienter de façon significative la situation des travailleurs au pourboire, nous croyons que la première solution envisagée par le livre vert, savoir l'approche des frais de service obligatoires, s'avérerait sûrement un élément de solution fort valable. Cette note de frais automatiques pourrait représenter 15% de la facture du client, mais, pour éviter que celui-ci se retrouve devant une facture trop lourde, nous proposons que la taxe de vente soit diminuée à 5% de la facture, pourboire

non inclus, pour toute facturation de repas excédant un montant de 3,25 $.

Les avantages d'un tel choix nous semblent importants et les désavantages réels si peu considérables que pour nous, du Parti québécois de Montréal-Centre, cette solution appelée communément "les 15% obligatoires" nous apparaît comme une solution équitable pour tous à l'épineux problème qui nous concerne.

L'ensemble des sommes versées en pourboires passe alors par la caisse de l'employeur qui se charge lui-même de la redistribution aux employés de l'établissement ainsi que les opérations de comptabilité pour chacun des employés concernés. Ces gratifications étant contrôlées, elles deviennent ainsi assurables pour les divers régimes de sécurité sociale ainsi que pour les fins de l'impôt et, au chapitre des avantages sociaux, l'employeur effectuera les déductions nécessaires à chacun de ces postes. Ainsi, l'établissement du revenu réel du travailleur au pourboire ne pose plus de problème. Le mystère se dissipe et les employés peuvent enfin bénéficier pleinement de tous les régimes sociaux auxquels ils ont droit.

Les seuls intervenants défavorisés par ce choix sont les clients qui ont l'habitude de lésiner sur les pourboires ou de ne pas en donner du tout et les employeurs à qui incombent les opérations de comptabilité et de redistribution en plus du fait que, dans ce système, ce sont eux qui défraient les dépenses relatives aux avantages sociaux sur une partie du salaire de leurs employés qu'ils ne paient pas eux-mêmes. Nous pensons que ces mêmes employeurs sont déjà privilégiés de ne pas avoir, justement, à payer une part du salaire de leurs employés, qui est assumée par leurs clients, et qu'ils auraient donc mauvaise grâce de chercher à reculer devant leurs responsabilités sociales en refusant, de surcroît, de payer pour les avantages sociaux s'y rattachant.

Pour ce qui est objections soulevées par le livre vert, nous laissons aux travailleurs au pourboire le soin d'y répondre eux-mêmes. Ils possèdent l'expertise nécessaire et sont mieux habilités que nous pour le faire.

En terminant, nous affirmons que le salaire minimum imposé aux travailleurs au pourboire doit être normalisé au plus tôt, c'est-à-dire qu'il doit être ramené au tarif de 4 $ l'heure, et ce pour plusieurs raisons. Entre autres, le travailleur au pourboire se voit souvent dans l'obligation d'effectuer diverses tâches pour lesquelles il ne reçoit aucun pourboire puisqu'il n'est pas en contact avec le client à ce moment. Étant privé de son privilège de recevoir un pourboire, il devrait bénéficier du même salaire minimum que tous les autres travailleurs ne percevant pas de pourboire. Ce sous-salaire minimum est très mal protégé, comme on l'a dit tantôt, ayant perdu 40% de sa valeur en termes de pouvoir d'achat depuis six ans par rapport à une perte de 32% pour le salaire minimum normal. Le ministère du Revenu lui-même, en tolérant les pratiques de déclarer 10% à 15% seulement du revenu de base du travailleur au pourboire, a historiquement reconnu de façon implicite que ce sous-salaire minimum est une injustice faite aux travailleurs au pourboire, comme nous l'avons déjà mentionné au chapitre premier du présent document.

En conclusion, il nous est apparu important, par notre intervention, d'appuyer les travailleurs au pourboire et leur association, l'AGAP, dans leur démarche pour l'obtention d'un statut clair et d'un mode de calcul de leur revenu réel conforme aux réalités qui sont les leurs. Il nous est apparu essentiel de soutenir leur demande afin que leur soit alloué le droit aux avantages sociaux et à la sécurité sociale qui leur reviennent afin que leur situation soit normalisée au plus tôt, à des fins tant humanitaires que sociales et économiques. Il nous apparaît nécessaire de faire nôtres les justes revendications de tout groupe de travailleurs ou de citoyens dont la voix n'a qu'un faible écho sur la place publique, mais qui, pourtant, ont des droits et entendent les faire valoir pour améliorer leurs conditions de vie et de travail. C'est ainsi que nous, du Parti québécois de Montréal-Centre, entendons jouer notre rôle de guide auprès du gouvernement. Nous croyons donc que ces deux solutions majeures que sont la normalisation du salaire minimum et le système des frais de service obligatoires, encadrées des autres revendications que nous soutenons pour les travailleurs au pourboire, constituent un train de mesures qui, tout en apportant une solution articulée et équitable à la problématique étudiée ici, répond aux principes élaborés par le livre vert relativement au redressement des trop nombreuses injustices faites aux travailleurs au pourboire. En conséquence, nous vous exhortons à mettre en oeuvre, sans plus de délai, les solutions que nous vous avons présentées.

Voici le résumé de nos revendications: l'abolition pour les travailleurs au pourboire du statut de travailleurs autonome; l'arrêt des poursuites et enquêtes en cours dans le cadre de l'opération de récupération des impôts et le remboursement des sommes versées au ministère dans ce contexte; l'instauration de contrôles plus stricts au niveau de la facturation; la sécurité sociale et les pleins avantages sociaux auxquels ont droit les travailleurs au pourboire; le respect et l'application des normes minimales du travail dans l'industrie de l'hôtellerie, du tourisme et de la restauration; l'instauration du système des frais de service obligatoires, accompagné d'une réduction de la taxe de vente sur les repas de 10% à 5%; la

normalisation du salaire minimum pour les travailleurs au pourboire et, enfin, on ajoute un dernier point qui dit que le prix indiqué sur les menus soit le prix total que le client devra débourser, incluant le prix du repas, le pourboire et la taxe, afin d'éviter de mauvaises surprises. Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie les représentants de l'Association du Parti québécois de Montréal-Centre d'avoir pensé à ce problème et pris l'initiative de présenter un mémoire sur ce sujet qui concerne - j'en suis convaincu - beaucoup de travailleurs dans votre région et également une très large proportion de citoyens du Québec. Je demanderais à mon collègue, le député de Bellechasse, d'engager le dialogue avec vous.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Oui, ce sera assez bref, M. le Président. Parmi les revendications qui sont exprimées par le Parti québécois de Montréal-Centre, il y en a une que j'aimerais relever. Vous préconisez l'instauration de contrôles plus stricts au niveau de la facturation. Je ne sais pas si vous pourriez être un peu plus précis et nous dire de quelle façon vous verriez ce contrôle.

M. Paquin: On n'a pas de moyens précis à proposer pour la bonne raison que notre étude n'a pas été jusque là. On avait à couvrir tout le dossier dans un temps relativement court. Ce qui est évident, par exemple, c'est qu'on s'est rendu compte - je l'ai vécu comme consommateur et c'est sûrement arrivé aussi à beaucoup de gens ici dans la salle - qu'on recevait des factures sur de petits blocs de papier rose, vert, jaune, de toutes les couleurs, sur de petits coins de serviettes ou sur des papiers qui, en tout cas, n'étaient pas des factures qu'on reconnaît comme étant celles du ministère du Revenu avec la présentation et le numéro de série en dessous. Ce qui est évident là-dedans, c'est: premièrement, cela nous empêche d'établir le revenu réel de l'employeur, c'est-à-dire de l'établissement, et par conséquent cela ne nous aide pas non plus à voir clair au niveau du pourboire, parce qu'une pratique comme celle-là fait en sorte, entre autres choses, que beaucoup d'argent au niveau de la taxation n'est pas touché par le ministère parce qu'on n'en a pas le contrôle. Ce sont les factures. Souvent, le client ne se plaindra pas ou le client ne se préoccupera pas tellement du genre de papier sur lequel on fait la facture: J'ai mangé, on me dit que cela coûte 3,25 $ ou 4,50 $, peu importe, on m'apporte le papier sur lequel c'est écrit, je paie et bonsoir.

Du point de vue du consommateur, cela n'a pas tellement d'incidence, c'est bien certain, mais du point de vue du travailleur et du point de vue de l'établissement, et même du point de vue du ministère, cela a comme conséquence qu'il y a une perte de revenu importante. C'est sûr que nous avons vu le problème, mais nous n'avons pas vu de solution. On n'a pas eu l'occasion de se pencher assez là-dessus pour en articuler une, mais on pense qu'il y aurait sûrement moyen de s'organiser pour obliger les employeurs à utiliser ces factures. Il doit y avoir des moyens de contrôle. Cela existe à d'autres niveaux avec des billets ou des choses comme cela. Il y a beaucoup d'endroits aussi où les factures, ce sont des coupons de caisse. C'est un autre problème. Il n'y a pas tellement de contrôle, ce n'est pas numéroté, que je sache, mais il y a sûrement moyen d'instaurer un système de contrôle. Cela ne devrait pas être tellement difficile techniquement, mais ce qu'on sait, c'est que c'est un problème et qu'on a pensé intéressant de le relever, parce que cela fait partie de la problématique, le problème de base étant qu'on n'est pas capable d'établir le revenu précis de ce monde.

M. Lachance: Je crois que vous avez soulevé un problème intéressant, mais si vous trouvez le truc ou la façon de le résoudre, je vous en prie, ce serait intéressant de le connaître, parce qu'à la lumière de ce qu'on a appris au cours des trois jours de cette commission parlementaire, il semble que ce soit extrêmement difficile de trouver un moyen absolument hermétique et efficace.

J'aurais une question importante à vous poser. Lorsque vous faites des recommandations pour améliorer le sort des employés au pourboire, vous énumérez une série d'éléments. J'en retiens seulement deux: l'instauration du système des frais de service obligatoires et la normalisation du salaire minimum. Même si cela s'accompagnait simultanément d'une réduction de la taxe de vente, reconnaissez-vous que l'adoption de ces deux mesures provoquerait inévitablement une hausse du prix des repas?

M. Paquin: Dans le cas de la normalisation du salaire minimum, c'est possible. Dans le cas de l'instauration des frais de service obligatoires, j'en doute, parce que en écoutant les discussions autour des mémoires qui ont précédé le nôtre -parce qu'on passe au septième rang aujourd'hui - j'ai cru comprendre...

M. Lachance: Je parle bien des deux propositions ou des deux revendications que vous faites. Si j'ai bien compris, vous les revendiquez simultanément, les deux en

même temps.

M. Paquin: Oui. Pour ce qui est des frais de service obligatoires, cela semble représenter une hausse de 2,5% du coût des repas. C'est ce que j'ai entendu, il en a été pas mal question aujourd'hui. On semblait s'entendre autour d'un chiffre qui variait de 2% à 3%. On demande simultanément une baisse de la taxe de vente de 5%. Je ne suis pas fort en chiffres, je risque de me tromper, mais nous sommes 2% en-dessous du prix actuel.

Pour ce qui est du salaire minimum, cela pourrait se refléter par une hausse du prix des repas, j'en conviens. Il s'agirait de faire une étude et de voir. Ce qu'on a essayé de voir, évidemment, c'est l'aspect social du problème en se disant: Ces gens sont souvent mis en situation d'être privés de leur privilège de percevoir le pourboire, qui est le privilège en vertu duquel on leur donne le salaire minimum de 3,28 $. Je ne sais pas effectivement si cela aurait une incidence. Je me doute que oui, mais ce que je me dis, c'est: Est-ce que le jeu en vaut la chandelle? Il faudrait faire des calculs pour établir le coût de cela, chose qu'on n'a pas pu faire, parce qu'il est bien clair qu'on ne dispose pas de ce renseignement. C'est plus le ministère qui dispose de cela.

M. Lachance: Merci.

Le Président (M. Gagnon): Merci. M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je ne vous demanderai ' pas d'identifier la totalité de vos membres. Vous n'avez sûrement pas de fichier sur chacun de ces membres.

M. Marcoux: C'est la GRC qui en a. M. Rocheleau: Ah bon!

M. Marcoux: Pour savoir où sont rendus nos membres, on va à la GRC et elle nous fournit ce renseignement.

M. Rocheleau: C'est pour cela que vous en avez sur les autres.

Regroupez-vous une association assez importante dans Montréal-Centre?

M. Paquin: À l'oeil, dans Montréal-Centre, il y a 17 comtés. Je peux faire une moyenne conservatrice de 1000 membres par association de comté. Cela représenterait un chiffre que je pourrais avancer sans me tromper de 20 000 à 25 000 membres pour le Parti québécois de Montréal-Centre, l'ensemble des 17 comtés. C'est probablement même plus que cela. (21 h 45)

M. Rocheleau: Je trouve un peu curieux le fait que le Parti québécois présente un mémoire, cela m'oblige à vous poser une question, à savoir, si vous vous parlez encore entre le gouvernement et les associations de comté?

M. Paquin: Cela m'oblige à vous demander: À quand remonte le dernier mémoire présenté par le Parti libéral?

M. Rocheleau: Ne vous en faites pas, on est dans tout le Québec, nous, dans toutes les associations. On se fie énormément partout à nos commettants.

M. Blais: Eux, ils n'ont pas de mémoire.

M. Paquin: Cela m'oblige aussi à vous faire remarquer que l'on se parle encore -j'ai même rencontré avec d'autres collègues, le ministre Marcoux, il y a une dizaine de jours - que malgré tout, je crois important justement de ne pas se parler en vacuum, mais de venir ici, parce que je pense toujours, malgré le genre de représentations que je reçois, que même un député libéral peut apporter quelque chose dans le dossier.

M. Rocheleau: Vous avez souligné un point qui revient souvent dans l'ensemble des mémoires qui ont été déposés. Vous demandez que soit clarifiée le plus rapidement possible la question des impôts perçus chez les employés ou les serveurs, et les serveuses. Cette question est aussi soulevée dans nombre de mémoires. Je crois, de plus en plus, que la commission a permis à l'ensemble de ceux qui ont soumis des mémoires de revendiquer auprès du ministre du Revenu, de tempérer sur l'identification qu'on peut pratiquement appeler, parce qu'on a traité beaucoup de harcèlement sexuel, cela semble un harcèlement du ministère du Revenu auprès des serveurs et des serveuses au pourboire. J'espère, que le ministre du Revenu va retenir, dans l'ensemble des mémoires présentés, l'objectif que semble poursuivre aussi la teneur de plusieurs de ces mémoires. En terminant, on vous remercie.

M. Paquin: Je vous remercie aussi.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Une petite question, si vous me permettez.

M. Paquin: Absolument.

M. Blais: Personnellement, j'aimais mieux la première version de la correction, à la page 9, partir de 0,00 $ au lieu de 3,25 $. Je désire vous poser une question à

ce sujet. Bien sûr, les associations défendent les employés, et les restaurateurs entre eux défendent leur position. Il y a une chose qui est constante: Cela fait au moins trois ans, sinon quatre ans, que le salaire minimum est à 3,25 $. Alors, dans la restauration 3,25 $ quatre ans après, c'est 4,62 $ à la défense du restaurateur lui-même. Il essaie, depuis ce temps, de tenir son repas à 3,25 $ sans taxe et c'est un repas semblable depuis quatre ans; ce que je voulais vous faire remarquer. Est-ce qu'à ce moment-là - il y a deux façons d'agir, soit qu'on mette la taxe à zéro ou qu'on décide d'indexer les 3,25 $; les deux positions s'affrontent - mais est-ce que vous avez pensé à ce côté aussi, du côté du restaurateur lui-même?

M. Paquin: Oui, et on voit bien que c'est un défi de plus en plus grand de fournir quelque chose de nourrissant et de potable pour 3,25 $, vous avez parfaitement raison là-dessus. Nous, on avait pensé à partir de zéro, dans un premier temps, pourquoi a-t-on rectifié la trajectoire? C'est qu'on s'est rendu compte, a un moment donné, que ceux qui vont manger des repas à 3,25 $, c'est offert dans les menus du jour, cela s'adresse aux gens qui n'ont pas beaucoup de temps, et pas beaucoup d'argent pour manger parce qu'ils doivent manger au restaurant pour le dîner, par exemple, en travaillant, cinq jours par semaine. Cinq fois par semaine, si cela leur coûte 6 $ ou 7 $ chaque fois, cela mange leur profit; ça ne vaudra plus la peine de travailler. Alors, on s'est dit: On va toucher, à ce moment-là, par la taxation, des gens qu'on ne devrait peut-être pas taxer. On devrait maintenir cette exemption tout simplement, parce qu'on s'adresse à des gens qui, premièrement, n'ont pas beaucoup de moyens; deuxièmement, n'ont pas le temps et pas le choix finalement: ils doivent aller au restaurant le midi. Probablement, que, s'ils pouvaient faire autrement, ils le feraient, mais ils n'ont pas le choix. Dans ce sens, je favoriserais plutôt qu'on indexe effectivement le niveau de base à partir duquel l'exemption va se manifester.

M. Blais: Question de principe, je suis d'accord avec vous. Il est préférable qu'il n'y ait pas de taxe, mais quand même, pour être équitable, si on avait un représentant, disons, de McDonald, qui nous disait que les deux tiers des gens qui mangeaient là payaient au-dessus de 3,25 $ quand même. Cela veut dire, que l'an prochain, il y aura peut-être 80% ou 85% du monde qui mangera au-dessus de 3,25 $, en payant la taxe de toute manière. Votre première position ne serait-elle pas mieux? Et je vous demande, une deuxième fois, de le mettre à zéro. Malgré qu'on ait tendance, lorsqu'on est dans le parti à vouloir enlever de la taxe, quand on est au gouvernement, on a tendance à réaliser un peu plus que parfois, il faut en mettre.

M. Paquin: Moi, je vais aller plus loin. Ma position personnelle est effectivement celle de la première version.

M. Blais: Ah! Bon! Merci.

M. Paquin: Nous autres, on travaille en comité et, à l'intérieur du comité, une position contraire s'est manifestée et s'est avérée majoritaire. Moi, je me rallie au comité et je présente la version que tout le monde a décidé d'amener.

M. Blais: Moi aussi, je serai solidaire de la solution qui sera adoptée par la commission parlementaire à laquelle j'assiste actuellement et je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre délégué au Travail.

M. Fréchette: M. Paquin, je vous réfère à la page 7 de votre mémoire, au dernier paragraphe qui traite des accidents du travail dans le secteur des travailleuses et des travailleurs au pourboire. Votre affirmation est d'ordre très général. Vous dites: Voici des travailleurs qui sont davantage exposés que d'autres à des accidents du travail pour des motifs que vous énumérez. C'est une information qu'il me serait simple de vérifier, mais, pour les fins du dossier et pour les fins du débat que l'on tient actuellement, je me demandais si vous aviez poussé l'exercice jusqu'à savoir dans quelle proportion cela peut aller et la fréquence de ces accidents, quelle est la nature des accidents qui se produisent. Si vous ne l'avez pas, je n'insisterai pas plus qu'il ne le faut parce qu'on peut effectivement avoir ces renseignements de façon très précise. Je vous réitère que c'est strictement pour les fins du dossier, du journal des Débats, etc. Avez-vous ces détails?

M. Paquin: On ne l'a pas fait de façon scientifique, on s'est fié à nos observations. Ce qui nous préoccupait le plus, c'était de voir que, lorsqu'il arrivait un accident à ces gens, c'est sur eux que reposait le fardeau de la preuve, à savoir: Je dois établir mon revenu en proportion des pourboires afin de retirer ma cotisation. C'est contre cela ou c'est à cela qu'on s'attaque à ce moment-ci. Savoir s'ils sont vraiment plus exposés ou non, c'est une simple observation qui n'est pas scientifiquement vérifiée. On pourrait le faire, il se pourrait qu'on ait tort, mais, à mon sens, même si on s'était trompé sur le dernier paragraphe de la page 7, ce qu'on demande au premier paragraphe de la page 8 demeure valable et demeure un problème à

résoudre.

M. Fréchette: L'affirmation que vous faites est plus en fonction des avantages sociaux que peut retirer le travailleur ou la travailleuse au pourboire à la suite d'un accident qu'en fonction de l'évaluation dont je vous parlais: le nombre, la nature, la fréquence, etc.

M. Paquin: Si on me demande une solution, je ne suis pas du tout - je n'en ai pas la prétention - un expert en sécurité du travail, mais, il y a sûrement...

M. Fréchette: Non, non.

M. Paquin: ... des moyens de s'organiser pour que ce soit plus sécuritaire. Mais cela, je le dis franchement, me dépasse. Pour ce qui est d'établir un revenu, cela reste un problème, mais cela me dépasse moins.

M. Fréchette: D'accord, merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre du Revenu.

M. Marcoux: J'aurais une première question et une ou deux remarques. Je suis heureux de constater que vous avez une position centrale en ce qui concerne le niveau de la taxe de vente et son prolongement.

M. Paquin: Ce n'est pas Montréal-gauche, c'est Montréal-Centre.

M. Marcoux: Je voudrais savoir combien de personnes ou d'associations... J'aimerais connaître le type de consultation que vous avez menée auprès de vos membres. Est-ce au niveau des associations de comté que vous avez mené votre consultation, au niveau du conseil régional, au niveau de l'exécutif régional? Jusqu'à quel niveau avez-vous fait des consultations par rapport à ce mémoire?

M. Paquin: C'est au niveau du conseil régional.

M. Marcoux: D'accord.

M. Paquin: En jargon, cela veut dire des représentants de chaque comté.

M. Marcoux: Des présidents de comté plus l'exécutif.

M. Paquin: Nous autres, on le sait, mais il y a peut-être d'autres personnes qui ne le savent pas. Enfin... Mais c'est au niveau de l'exécutif régional et du conseil régional que cela s'est passé.

M. Marcoux: D'accord. Concernant la diminution de moitié de la taxe de vente que vous proposez et de l'arrêter, comme c'est le cas actuellement, à 3,25 $, il y a une chose que je peux vous dire: Parmi ceux qui sont partisans de l'abaisser à 0,01 $, vous avez parlé de moyens tantôt pour lutter contre les fuites fiscales. Un des arguments - cela ne veut pas dire que cela doit être l'argument déterminant - contre les fuites fiscales veut qu'en généralisant la taxe de vente sur les repas à l'ensemble des repas, à partir de 0,01 $, à ce moment-là, le contrôle sur la taxe de vente, sur l'application de la facturation serait beaucoup plus facile et éviterait des fuites fiscales. Plusieurs représentations nous ont été faites dans ce sens-là indépendamment de la partie patronale ou par des travailleurs durant ces deux ou trois jours. Je pense que c'est un élément que vous pourriez considérer.

Quant à la chasse aux sorcières, on s'en est déjà parlé il y a quelques semaines, on en a parlé durant ces trois jours et je n'ai pas l'intention de me répéter, je sais que vous avez assisté à une bonne partie de nos discussions et sur les points que j'ai pu préciser sur l'ensemble du dossier. Je peux vous assurer que nous sommes très sensibles aux problèmes humains que des personnes ont pu vivre à la suite de l'intervention du ministère du Revenu. De façon globale, toutefois, je dois vous dire que je trouve que vous en demandez beaucoup. Quatre dollars, disons, le salaire minimum égal pour l'ensemble des employés au pourboire. Quinze pour cent de frais de service obligatoires et, en plus, de couper en deux la taxe de vente en ne l'abaissant pas! Vous prenez à peu près toutes les revendications diverses qu'on a entendues, vous faites le paquet et vous dites: Nous autres, on veut le paquet. De façon générale, la plupart des groupes qui sont intervenus demandaient un ou deux des trois ou quatre éléments dont vous parlez. En tout cas, à moins que ma mémoire ne faillisse, je n'ai pas vu un groupe qui demandait tout le paquet. Je vous suggérerais d'en rediscuter dans un conseil régional.

M. Paquin: J'ai deux remarques là-dessus. Je suis conscient qu'on en demande beaucoup, mais je pense que ces gens ont besoin de beaucoup, d'une part, et, d'autre part, la petite chose qu'on pourra obtenir, quelle qu'elle soit, sur l'ensemble de la liste, ce sera déjà une amélioration. Si vous pouvez aller le plus loin possible, vers la plus grosse amélioration possible, on ne vous en fera pas la remarque s'il reste un point ou deux sur la table.

M. Marcoux: On s'entend.

Le Président (M. Gagnon): Madame,

messieurs du Parti québécois de Montréal-Centre, on vous remercie pour votre... Oui, madame?

Mme Lachance: J'aurais peut-être quelque chose à ajouter.

Le Président (M. Gagnon): Oui.

Mme Lachance (Hélène): J'ai assisté à la commission parlementaire depuis trois jours. On a discuté durant cette commission, durant les trois jours; les normes minimales du travail sont revenues sur le sujet dans presque tous les mémoires, mais sans vraiment qu'on y aille plus profondément. Moi, j'ai douze ans d'expérience dans la restauration et l'hôtellerie comme serveuse et, dernièrement, j'ai relevé de la loi 126 des normes minimales du travail qui touchent les gens au pourboire, ce que je considère que j'ai vécu au mois de juillet, dans un restaurant - et je le nomme - la Casa grecque, rue Prince-Arthur. Les normes minimales du travail ne sont pas respectées, c'est ce qu'on a dit depuis le début de la commission, que je sache, et je suis d'accord avec cela. J'ai eu l'expérience, premièrement, de recevoir, tous les jeudis, une paie pour laquelle on me demandait, dans la matinée, le nombre d'heures faites la semaine précédente? Je ne l'ai pas noté. Je ne l'ai pas pris en note à tous les jours. Je dis: J'essaie de calculer comme il faut. D'accord, j'ai fait 35 heures la semaine dernière. Il va faire la paie en haut pour tous les employés, mais il demande cela juste aux trois filles. Pas aux 35 gars parce qu'il y a 35 Grecs dans la place qui travaillent pour les Grecs et il y a trois Québécoises. Vous voyez la minorité.

Il nous amène une paie dans une enveloppe brune, des enveloppes de la banque. On ouvre l'enveloppe, c'est de l'argent comptant. Sur l'enveloppe, c'est marqué Hélène, c'est tout. Donc, pas de talon de paie et, selon la Loi sur les normes du travail, le patron est obligé de te remettre un talon de paie. En plus, sur cette enveloppe, il n'y a pas de déductions inscrites. Alors, tu ne sais plus où tu t'en vas. Si tu demandes un talon de paie, il te dit: La semaine prochaine, ce n'est pas prêt, ce n'est pas important. D'accord. Ensuite, à cet endroit, on payait, le midi, 2 $ pour le laveur de vaisselle, le soir 3 $ pour le laveur de vaisselle. La différence c'était que le midi, les 2 $ qu'on donnait au laveur de vaisselle, on les lui donnait en main propre; le soir - étant donné qu'il y a plus d'employés, c'est-à-dire une vingtaine d'employés au pourboire sur le plancher -c'était 3 $ qu'on remettait au patron qui, lui, était supposé les remettre, à la fin de la semaine, au laveur de vaisselle. Je ne sais pas si pouvez vous imaginer que 30 employés au pourboire, le soir, à 3 $ chacun, tous les jours, je pense que cela paie le salaire complet de deux ou trois laveurs de vaisselle.

Et ce n'est pas tout. On faisait parfois des semaines de 52 ou 60 heures parce que, nous, les filles, on est engagées sur des quarts, de Il heures à 4 heures. À 3 h 55, le boss arrivait et disait: Toi, tu restes ce soir et toi, tu restes ce soir. Ce n'était pas: Veux-tu rester? Il n'y avait pas d'avis donné une journée d'avance. On le lui avait déjà demandé, mais il n'en était pas question. Tu n'avais pas le choix, si tu ne restais pas, eh bien on te disait: D'accord, cela ne fait plus ton affaire? Bang!i Alors, on restait, ce qui faisait que, parfois, sept jours ou huit jours de travail d'affilée sans congé nous amenaient facilement à 52 ou 60 heures par semaines en six ou sept jours. On n'était pas payées à temps et demi après 44 heures et, selon moi, les normes minimales du travail en parlent.

Ensuite, j'ai laissé ce travail au bout de trois semaines. Que ce soit au bout de trois semaines ou un mois, on a droit à 4% de ce qu'on a fait. Je suis allée m'informer au bas de l'échelle pour faire une plainte à la Commission des normes du travail - je l'ai faite et je l'ai ici - avant d'aller chercher ma paie, mes 4% et mon "slip", le papier pour l'assurance-chômage. Nous étions trois filles qui avions lâché en même temps ce jour-là. Nous étions littéralement vidées, plus capables de se faire piler sur les pieds et de manger de la "marde", excusez le mot. Nous sommes allées, toutes les trois, à la Commission des normes du travail et sommes retournées la semaine suivante chercher notre paie, nos 4% et notre papier d'assurance-chômage. Il était évident qu'en lâchant la "job", je ne m'attendais pas à ce qu'il écrive "manque de travail" sur le papier d'assurance-chômage. J'en étais très consciente. Mais il est arrivé avec son livre des employés et, à chaque page, un employé était inscrit avec les heures qu'il faisait chaque jour, les déductions faites sur son salaire et tout. J'en ai déduit que je n'étais même pas inscrite dans ce livre. Il m'a demandé mon nom.

M. Marcoux: Les noms de vos deux autres compagnes étaient-ils inscrits dans ce livre?

Mme Lachance: Mes deux compagnes étaient là depuis plus longtemps, un mois ou deux mois et elles étaient inscrites dans le livre, mais pour les trois semaines où j'ai été là, les paies et les déductions des deux filles n'étaient pas inscrites dans leur page, ce qui veut dire que, durant ces trois semaines, il s'était brassé quelque chose. À ce moment-là, il m'a demandé mon nom, mon adresse et mon numéro de téléphone. Je

lui ai dit: Écoute, c'est supposé être dans le livre en entrant. Je n'ai jamais vu la couleur de ce livre depuis que je suis ici. Il a dit: D'accord. Combien t'ai-je versé la première semaine? J'ai dit: Écoutez, monsieur, il y a trois semaines, les heures que j'ai faites? Ce n'est pas un horaire régulier, je veux dire que c'est supposé être de Il heures à 4 heures du lundi au vendredi, mais je travaille du lundi au dimanche de Il heures à minuit ou 1 heure, deux ou trois fois. Il n'y a rien de régulier là-dedans. J'ai dit: Je ne le sais pas, c'est à peu près. Je ne le sais pas. Ce n'est pas à moi de vous le dire. C'est à vous de le savoir. Il m'a dit: Combien je te donnais comme paie, pour la deuxième semaine, t'en rappelles-tu? Et pour la première semaine, t'en rappelles-tu? Il a fait cela aux trois filles. On a dit un peu la même chose: Ce n'est pas à nous de te dire combien tu nous a payé. Tu es supposé le savoir. Et quand, justement, il s'apprêtait à nous donner nos paies - je pense que je l'ai mentionné avant - il nous demandait combien d'heures on avait faites durant la semaine. Ensuite, j'ai dit: Oui, mais nos 4%? Comment allez-vous évaluer nos 4%? D'après moi, c'est impossible d'évaluer les 4%, si tu n'as pas les chiffres des paies que j'ai eues pendant trois semaines. Il m'a remis un chèque de 4%, soit un peu plus de 15 $, mais en chèque, cette fois-ci. J'ai dit: De toute façon, je ne sais pas où vous les trouvez; franchement, cela me dépasse. On ne lui avait pas dit qu'on était allées porter plainte à la Commission des normes du travail.

À ce moment-là, automatiquement, l'inspecteur va à la Casa grecque et s'informe; les 30 employés grecs de la place, dont les patrons sont grecs, ont témoigné que je n'avais jamais travaillé le soir. Alors, dites-moi si, en cinq ou six jours, je n'ai jamais travaillé le soir, comment puis-je avoir travaillé pendant 52 à 60 heures? C'est impossible. J'ai été très étonnée; il me semblait que j'avais travaillé le soir, mais eux disaient: Non, on ne l'a jamais vue le soir, elle n'a jamais travaillé pour nous le soir. L'inspecteur est allé voir dans les livres, mais il n'y avait rien d'inscrit. Quand j'étais allée chercher ma paie, ils m'avaient donné 4% dans les airs. Les livres étaient complets, se basant probablement, pour ma déduction, sur 4%; dans trois semaines, comment il pourrait répartir son affaire pour arriver à 4%.

Par la suite, je suis allée à la Commission des normes du travail pour rencontrer cet inspecteur et il m'a dit: Avez-vous des preuves? J'ai dit: Monsieur, on me payait comptant, on me donnait une enveloppe sur laquelle était inscrit Hélène -sans même mon nom de famille - et sans aucune déduction inscrite, aucun talon de paie, alors que le talon de paie semble être exigé à la Commission des normes du travail, c'est dans la loi. Je pourrais même vous dire à quelle page; c'est à la page 14 de la loi 126, article 46. Ce n'est pas tous les employeurs qui remettent un bulletin de paie. C'est à surveiller de la part des employeurs et à exiger, je vous le mentionne.

Même dans la Loi sur les normes de travail, on dit que, si nous travaillons moins de trois heures consécutives, nous avons droit à trois heures de paie au salaire habituel. Est-ce vrai? C'est à la page 16, article 58. Si on a droit à cela, comme se fait-il que dans plusieurs restaurants - je cite encore la Casa grecque parce qu'elle ne respecte, ni n'applique les normes minimales du travail -on arrivait à Il heures et, à 13 heures, on nous envoyait à la maison parce qu'il n'y avait pas assez de travail, mais on était payées pour deux heures et il nous demandait, en plus, de revenir à 17 heures pour aller travailler chez son beau-frère au restaurant d'à c&té, en payant 20 $ en dessous de la table. Je pense que ce restaurant couvre pas mal toutes les normes minimales du travail aux employés au pourboire qui ne sont pas respectées.

Je pense que c'était important d'aller plus en profondeur parce que, pendant les trois jours que j'ai passés ici, j'ai bien écouté, j'ai pris de notes, mais on n'a pas fait mention de cela en détail. Je pense que c'est à voir, c'est très important parce qu'on n'a aucun recours. Moi, à la Commission des normes du travail, on m'a dit: Vous n'avez pas de preuves, on ne peut rien faire pour vous. Pourquoi? Parce que vous n'avez pas de talon de paie. Vous avez été payée en argent, les gens témoignent que vous n'avez pas travaillé le soir. Les livres sont à jour. J'ai dit: Oui, le livre est à jour, mais il n'était pas à jour quand je suis allée chercher ma paie. On m'a donné 4% inventée, sur un chèque; donc, on a déduit que j'avais fait tant, pour me donner les 4%.

Je n'ai pas la solution, je vous offre de penser à cette solution qui est très importante. Pendant les douze ans où j'ai travaillé dans la restauration, j'ai rencontré ces choses-là très très souvent, si ce n'est pas en majorité. Merci, M. le ministre.

M. Marcoux: Je vous remercie de ce témoignage qui s'ajoute à certains autres que nous avons eus de particuliers ou d'individus concernant soit des restaurateurs, soit des travailleurs au pourboire. Vous avez raison de dire que la question des normes minimales de travail a été, peut-être un peu plus développée à une reprise, mais abordée quatre ou cinq fois par la bande, si vous voulez. Je pense que vous nous avez tracé un portrait vécu qui pose l'ensemble des problèmes. Vous savez que, durant toute la commission, il y avait ici - et elle y est encore - une représentante de la Commission

des normes du travail. Il y a également eu un représentant du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Vous pouvez être assurée que nous avions les deux oreilles ouvertes et que nous avons l'intention de poursuivre.

Mme Lachance: Je lui en ai parlé.

M. Marcoux: Cela va. Je vous remercie beaucoup.

Mme Lachance: D'accord.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre délégué au Travail.

M. Fréchette: Remarquez, Mlle Lachance, que je ne veux pas faire le procès d'un établissement plus que d'un autre, mais vous nous avez dit: Ce que je suis en train de vous décrire reflète relativement bien la situation qui existe dans plusieurs établissements. Est-ce que vous pourriez nous dire pendant combien de temps vous avez travaillé à cet endroit précis que vous avez nommé?

Mme Lachance: Trois semaines.

M. Fréchette: Vous avez été à l'emploi de cet employeur pendant trois semaines.

Mme Lachance: Oui. Comment peut-on travailler?

M. Fréchette: Non, non. Mme Lachance: En tout cas...

M. Fréchette: Je vous pose la question, même si je prévois déjà la réponse que vous allez me donner. Pourquoi ne pas avoir fait la démarche de porter votre requête à la Commission des normes dès la première semaine? Parce que déjà, d'après le témoignage que vous êtes en train de nous donner, vous pouviez constater qu'il y avait des choses qui, semble-t-il, en tout cas, étaient contradictoires par rapport aux exigences de la Loi sur les normes de travail.

Mme Lachance: Oui.

M. Fréchette: Remarquez que je devine un peu la réponse que vous me donnerez.

Mme Lachance: Je dois répondre à cette question que c'est depuis ce temps-là que je suis informée au maximum de la Loi sur les normes de travail parce que, avant, je dois dire que les restaurateurs, les gens autour, dans les restaurants où j'ai travaillé, on n'a jamais vraiment parlé de cela, on ne s'en est jamais vraiment préoccupé. On disait: Ce doit être correct. Quand on n'acceptait pas des choses, pour ma part, je le disais au patron, mais lui me disait: Écoute, si tu n'es pas contente...

M. Fréchette: Vous m'avez déjoué parce que ce n'est pas la réponse que j'attendais.

Mme Lachance: Est-ce que je pourrais connaître la réponse que vous attendiez?

M. Fréchette: Oui. Remarquez que, quand je dis que ce n'est pas nécessairement la réponse que j'attendais, je croyais que vous alliez me dire que vous n'osiez pas entreprendre la démarche parce que vous aviez peut-être la crainte qu'en le faisant, dès lors que vous deveniez à l'emploi du patron, vous risquiez un congédiement rapide.

Mme Lachance: Je peux répondre là-dessus. Quand je suis au courant de quelque chose et qu'on me met au courant de quelque chose, j'agis en conséquence. Je l'ai fait quand j'ai été au courant de cela, c'est-à-dire qu'après trois semaines, étant littéralement écoeurée de cette place-là parce que ce n'était pas vivable, pas "travaillable", me rendant compte des conditions, je me suis dit: II faut que je m'informe. Je suis allée au bas de l'échelle, à l'AGAP en premier, qui m'a envoyée pour la plainte à la Commission des normes de travail. C'est là que j'ai été le plus informée. Maintenant, à l'avenir, quand je travaillerai dans un restaurant, si de telles choses se reproduisent, je ne manquerai pas d'en parler. Je réagirai tout de suite. (22 h 15)

M. Fréchette: Je suis content que vous donniez ce renseignement parce que cela va m'amener à une autre question et ce sera la dernière. Vous nous expliquez que vous n'avez pas agi dès le début parce que vous ignoriez, en quelque sorte, les dispositions de la loi et les droits que cette loi peut vous conférer. Est-ce que vous avez le sentiment que c'est un peu la même chose chez vos collègues de travail?

Mme Lachance: Oui, puisque les deux autres filles ont lâché en même temps que moi et elles ont fait la même plainte à la Commission des normes du travail. Elles continuent leur plainte. Elles avaient quelques preuves. Elles ont noté les heures qu'elles travaillaient par semaine, mais la Commission des normes du travail disait que ce n'était pas encore suffisant, qu'il fallait que ce soit à la journée: tel jour, j'ai travaillé telles heures; sans cela, il n'y a pas de preuve. Comme les talons de paie n'existaient pas, il n'y a pas de preuve. Je n'ai pas encore eu de nouvelles, mais, selon l'inspecteur de la Commission des normes du travail, c'est encore en poursuite.

M. Fréchette: Dans votre cas, est-ce que vous vous êtes, de vous-même, désistée de votre demande?

Mme Lachance: Non.

M. Fréchette: Vous n'avez pas eu un jugement de tribunal.

Mme Lachance: Non.

M. Fréchette: Ah bon! Vous n'avez pas poursuivi la démarche jusqu'au bout.

Mme Lachance: J'ai poursuivi la démarche jusqu'au bout, jusqu'à ce qu'on me dise que je n'avais pas de preuve et que cela ne mènerait à rien, parce que je n'avais pas de talons de paie, parce que les gens témoignaient que je n'avais pas travaillé le soir. Et si 30 Grecs témoignent contre une fille, excusez-moi, mais je n'ai pas beaucoup de chances.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre du Revenu, vous avez une question à poser.

M. Marcoux: Vous dites que vous avez travaillé douze ans dans le domaine de la restauration. Dans combien de restaurants différents avez-vous travaillé depuis douze ans? Je suis quand même étonné qu'après douze ans de travail dans ce secteur vous disiez que... Dès la première semaine, en fait, il me semble que vous auriez pu voir que cela ne marchait pas dans la patente.

Mme Lachance: D'accord. Je peux répondre à cela tout de suite. En douze ans de restauration, c'est normal, quand je commence un travail, je vois si cela me satisfait ou pas. Évidemment, si je suis à court d'argent et que j'ai besoin d'argent, je vais continuer pendant deux ou trois semaines jusqu'à ce que je me trouve une autre "job" qui, je l'espère, sera meilleure. À ce moment-là, je garde mon emploi durant ce temps-là, mais je ne l'aime pas.

M. Marcoux: Est-ce que vous déclarez des revenus de pourboires?

Des voix: Ah!

Une voix: Ne réponds pas.

Une voix: Objection.

Le Président (M. Gagnon): Madame et messieurs du Parti québécois de Montréal-Centre, je vous remercie pour votre participation à cette commission. J'invite maintenant l'Association de cosmétologie du Québec Inc., à prendre place.

En attendant que vous preniez place, je voudrais aviser les membres de cette commission que nous avons reçu des mémoires pour dépôt seulement de l'Association canadienne des franchiseurs, de l'Association des petites et moyennes entreprises & Ass., et du Conseil du patronat du Québec. Ces mémoires ont été reçus pour dépôt seulement.

Une voix: On siège jusqu'à quelle heure?

Le Président (M. Gagnon): Je suis disposé à ce que vous preniez entente. Jusqu'à quelle heure, M. le ministre?

M. Marcoux: C'est un mémoire très bref.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Terrebonne, est-ce qu'il y a possibilité de discuter à l'extérieur pour que les autres témoins puissent prendre place? Est-ce que le groupe que j'ai appelé est présent? Oui. Voulez-vous prendre place, s'il vous plaît? M, Tremblay?

M. Tremblay (Jacques): C'est bien cela. Bonsoir!

Le Président (M. Gagnon): Bienvenu à cette commission. Si vous voulez nous présenter les gens qui vous accompagnent.

Association de cosmétologie du Québec Inc.

M. Tremblay (Jacques): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, avant de vous faire la lecture de ce mémoire, j'aimerais vous présenter deux directeurs du comité spécial: M. Jean-Guy Dupuis, qui est à ma gauche, et Jean-Claude Therrien, à ma droite.

L'Association de cosmétologie du Québec Inc., est une corporation qui regroupe 250 membres, employés et employeurs du domaine de la coiffure et de la cosmétologie de la région immédiate de Québec. Cette association existe depuis 1946. Elle était connue sous l'appellation d'Association patronale de la coiffure de Québec Inc., dont le nom fut changé pour celui de l'Association de cosmétologie du Québec Inc.

A la suite de la publication du livre vert sur la situation au Québec des travailleurs et travailleuses au pourboire, l'association a réuni tous ses membres et ces derniers ont étudié les implications y contenues. Il appert que le secteur de la coiffure est assimilé dans ce livre vert au domaine de la restauration et de l'hôtellerie, le pourboire constituant, semble-t-il une part importante du revenu, approche qui est inexacte, et ce, pour différentes raisons qui seront explicitées tout au cours de cet

exposé.

Situation de la coiffure. La rémunération diffère fondamentalement de celle des employés de l'hôtellerie et de la restauration et elle s'applique de deux façons pour l'employé, a) Employés d'expérience ou classés A ou B. La rémunération d'emploi de ces employés est un salaire fixe et une commission sur les revenus provenant de leur travail. Ces conditions de travail sont, d'une part, incluses dans le décret de la coiffure et, d'autre part, ces mêmes conditions existent dans les endroits non régis par un tel décret, b) Les employés apprentis sont rémunérés à salaire fixe qui est le salaire minimum dans les endroits non régis par le décret et appliqué suivant le décret dans les endroits dits zones, mais ce salaire se situe en bas du taux du salaire minimum. Il va de soi que la rémunération de l'employé est composée en très grande partie par du salaire ou par du salaire et une commission. La seule similitude qui pourrait exister entre les employés de la coiffure et les travailleurs et travailleuses du domaine de l'hôtellerie et de la restauration dans les conditions de travail est que les employés apprentis dans ces endroits régis par le décret sont payés au-dessous du salaire minimum. Il nous semble donc faux de prétendre que le domaine de la coiffure s'apparente à la notion des travailleurs et travailleuses au pourboire, lesquels tirent la majorité de leur rémunération du pourboire.

Le pourboire. Une brève étude auprès de nos membres nous a démontré que, dans le domaine de la coiffure, les pourboires représentent, contrairement aux prétentions incluses dans le livre vert, une infime partie de la rémunération. Le pourcentage de la rémunération par le pourboire s'élève en moyenne à 3%. Ce pourcentage varie suivant principalement deux critères, soit le site et la clientèle. Ce pourboire est d'autant plus élevé s'il s'agit d'un site à l'intérieur d'une place renommée, d'un centre commercial ou d'une clientèle de luxe, ou que le salon est situé dans des endroits commerciaux, ordinaires ou dans des résidences. Cette dernière catégorie, que l'on peut classer comme des salons appartenant à des artisans, regroupe environ 75% de la main-d'oeuvre travaillant en coiffure. Ce sont les salons qui emploient au plus trois employés. Les pourboires représentent un très minime pourcentage par rapport aux autres salons que l'on pourrait qualifier de salons de luxe. Il est à souligner qu'en coiffure l'apprenti, de par ses fonctions à l'intérieur d'un salon de coiffure, ne reçoit, ni ne partage de pourboires.

En résumé, le pourboire en coiffure ne constitue pas une rémunération qui serait une condition d'emploi ou d'engagement de l'employé face à son employeur. D'une part, le coiffeur qualifié retire sa rémunération d'un salaire fixe et d'un pourcentage élevé en commission sur les revenus produits par son travail. D'autre part, l'apprenti, qu'il soit au salaire minimum ou à salaire fixe, ne jouit d'aucun pourboire ou participation à un pourboire.

Cependant, il nous faut tout de même prendre en considération le fait que le ministre du Revenu, doit éliminer toute injustice fiscale à une ou à des catégories de travailleurs, ce qui nous amène à étudier des solutions possibles. Étude des solutions possibles: frais de service obligatoires. L'inclusion de frais de service obligatoires ne peut régler le problème de contrôle des revenus par le ministère du Revenu. Cette façon de procéder, soit d'inclure obligatoirement un pourcentage pour les frais de service, n'empêchera pas, après quelque temps, la rétribution par l'intermédiaire d'un pourboire. L'expérience nous prouve, tant aux États-Unis qu'en Europe, et plus spécialement en France où les frais de service sont inclus sur la facture, que des pourboires additionnels sont donnés et voire réclamés par les employés. Il suffit de voir leur réaction lorsque vous acquittez votre facture et qu'il semble qu'il n'y a pas de pourboire additionnel. Ils n'hésitent pas à démontrer leur mauvaise humeur et, dans certains cas, à tendre la main.

En coiffure, le pourcentage de pourboire étant de loin inférieur à celui des travailleurs de la restauration, toute fixation d'un pourcentage de frais de service obligatoire serait irréaliste et causerait un préjudice sérieux. Ce pourcentage de frais de service obligatoires constituerait une charge additionnelle et directe pour le consommateur.

Le pourboire inscrit sur la facture par le client. Cette solution, quant à nous, ne relève d'aucune façon réaliste qui apporterait une solution. Ainsi, cette solution ne fait que déplacer la crédibilité de l'employé vers le client, en ce qui concerne la déclaration des pourboires dont le ministère du Revenu veut avoir le contrôle absolu. Il est bien sûr qu'on ne peut obliger le client à inscrire lui-même le montant du pourboire sur la facture et, en fait, pourquoi le ferait-il alors qu'il n'y a aucun intérêt réel? Par ce système, on oblige l'employeur à se créer des dépenses additionnelles; donc, augmentation de la facture sur ie dos du consommateur et on n'assure en rien la véracité des sommes inscrites à titre de pourboires.

Déduction périodique des pourboires par l'employé. Il ne faut pas oublier que le pourboire est une gratification d'un client face à un service fourni par un employé. L'employeur n'a aucun contrôle sur ce pourboire et il ne peut en avoir, même l'employé refuse bien souvent de faire état de tous revenus provenant de pourboires. L'employeur ne possédant aucun contrôle sur

son employé, celui-ci, s'il est obligé de déclarer un pourboire, déclarera ce qu'il veut bien déclarer. L'employeur, dans ce cas, n'a aucun intérêt à vérifier les sommes perçues par son employé à titre de pourboires et, qui plus est, cette solution ne lui entraîne que des désavantages à cause des coûts additionnels de comptabilité et de participation à divers régimes sociaux, etc. Ni l'employé, ni l'employeur ne retrouvent d'intérêt à déclarer cette partie de leur rémunération.

Un revenu de travailleur autonome. De par sa notion même, le pourboire étant une gratification accordée par la clientèle à l'employé et vu le fait qu'il n'existe ou ne peut exister de contrôle efficace de l'employeur sur ce revenu, il en résulte que la solution à savoir que le pourboire est un revenu de travailleur autonome nous est acceptable et recommandable. Employés et employeurs interrogés souscrivent entièrement à cette proposition et rejettent toute autre solution qui amènerait des dépenses ou des frais additionnels qui ne feraient qu'augmenter une facture sur le dos du consommateur. Les désavantages qui pourraient exister de l'application de cette solution sont très minimes pour les employés de la coiffure. Tel que déjà mentionné, le pourcentage de pourboires reçus étant ce qu'il est, il ne peut porter préjudice à l'ensemble des employés de ce secteur. Les modalités de retenues à la source demeurent à la discrétion du ministère du Revenu, mais l'ensemble des personnes visées semblerait pencher pour les versements trimestriels (formule TP-7C). Cette façon de procéder ne semble pas constituer une difficulté quelconque pour ces employés interrogés, étant donné les montants en jeu qui ne peuvent affecter en aucune façon leur équilibre budgétaire. (22 h 30)

En conclusion, à l'Association de cosmétologie du Québec Inc., employeurs et emloyés font l'unanimité sur la solution de la déclaration des pourboires, et ce, en considérant ceux-ci comme un revenu de travailleur autonome. L'association croit que l'application de toute solution autre qui devrait créer des augmentations de coûts obligatoires ou afférents à toute autre solution ne peut être acceptée. La coiffure ne constitue pas, comme la restauration et l'hôtellerie, un secteur dont les employés sont laissés individuellement à eux-mêmes. La coiffure est structurée, l'application des conditions de travail est régie par un décret, mais là où elle n'est plus régie, par le fait des employés, il existe des conditions de travail qui semblent supérieures à celles des endroits régis par le décret de la coiffure.

Le Président (M. LeBlanc): M. le ministre.

M. Marcoux: Je remercie M. Tremblay d'avoir présenté ce mémoire au nom de l'Association de cosmétologie du Québec Inc. Vous indiquez à la page 2, à la première phrase, en haut: "Employés d'expérience ou classés A ou B. La rémunération d'emploi de ces employés est un salaire fixe et une commission sur les revenus provenant de leur travail". Je voudrais savoir comment cela fonctionne vraiment. Il y a un salaire de base qui est équivalent au salaire minimum de 4 $ pour les cosmétologues ou les coiffeurs.

M. Tremblay (Jacques): Pour y répondre, je vais passer la parole à M. Dupuis.

M. Dupuis (Jean-Guy): II faut comprendre qu'en coiffure, dans la région 03, il y a une partie qui est régie par décret et une partie qui n'est pas régie par décret. Si on comprend l'ensemble des municipalités de la Communauté urbaine de Québec où il n'y a pas de décret, où cela n'est pas régi et aussi les sections de Montréal, de la Côte-Nord et de la Gaspésie, la plus grande partie n'est pas régie par décret. Si on parle de décret, c'est 4,25 $ l'heure, plus les commissions après 300 $, ces choses-là.

M. Marcoux: La commission est-elle un pourcentage du chiffre d'affaires?

M. Dupuis: Du chiffre d'affaires du coiffeur ou de la coiffeuse.

M. Marcoux: De combien est-il, ce pourcentage, d'habitude?

M. Dupuis: II varie selon les montants. Si on parle de la région régie par décret, cela commence à 300 $, 400 $ ou 500 $, de 35%, 40%, 45%, 50% et 60%. Pour vous situer très bien, pour que vous compreniez...

M. Marcoux: D'accord. Disons que cela comprend le salaire de base 4,25 $, plus une commission sur le pourcentage du chiffre d'affaires.

M. Dupuis: Du chiffre d'affaires, oui.

M. Marcoux: Actuellement, payez-vous des avantages sociaux à l'employé.

M. Dupuis: Sur les commissions.

M. Marcoux: Je veux dire sur la base de la commission et sur la base du salaire minimum.

M. Dupuis: Oui, M. le ministre. M. Marcoux: Sur les deux?

M. Dupuis: Oui, sur les deux. Ensuite, pour vous situer, pour comprendre globablement la part imputée au budget salaires dans la coiffure; si on prend les associations américaines qui regroupent 170 000 membres - nous n'avons pas de données exactes, mais nous avons certaines données - aux États-Unis, sur 170 000 membres, c'est à peu près 52%. Dans la région de Québec, il semblerait, après consultation auprès de nos membres, qu'entre 50% et 60% du budget est imputé au budget salaires, ce qui est énorme.

M. Marcoux: Savez-vous si la nouvelle loi américaine sur les pourboires va s'appliquer au secteur des coiffeurs cosmétologues?

M. Dupuis: Aux États-Unis, la nouvelle loi qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 1983 ne s'applique pas. Elle a été complètement rejetée par l'Association de cosmétologie américaine. Elle ne s'applique pas.

M. Marcoux: D'accord. Là-bas, cela fonctionne comme ici jusqu'à maintenant, c'est-à-dire le salaire de base, plus les commissions et l'employeur paie la part des avantages sociaux sur les deux.

M. Dupuis: Sur les deux.

M. Marcoux: Donc, il reste finalement une marge que vous évaluez à 3% de pourboires.

M. Dupuis: Oui. Je peux vous répondre de quelle manière nous sommes arrivés à ces 3%. J'anticipais votre question.

M. Marcoux: Je vais vous poser la question suivante tout de suite. Je ne comprends pas pourquoi vous vous inquiétez, si c'est seulement 3%, les pourboires laissés en moyenne aux cosmétologues comme aux coiffeurs et aux coiffeuses. À ce moment-là, je me dis que le coût est tellement marginal (le coût pour les avantages sociaux ou l'impôt supplémentaire à payer) que vous ne devriez pas vous inquiéter.

M. Dupuis: On s'inquiète, parce que dans le livre vert, à la page 8, dans le premier paragraphe au haut de la page, on dit - je vais résumer, je ne lirai pas tout le paragraphe - que le pourboire constitue également une part importante du revenu, ce qui est faux. On n'est ici ce soir pour débattre de la restauration et de l'hôtellerie, ce n'est pas notre domaine; notre domaine, c'est celui de la coiffure. En assemblée, nous sommes l'association la plus démocrate que je connaisse. Notre mémoire a été conçu dans une assemblée générale spéciale où il y avait 250 membres inscrits et on a eu à peu près 125 autres membres. Cela veut dire 375 coiffeurs et coiffeuses de la région de Québec et il a été conçu en une soirée. Le mémoire n'a pas été écrit par nous autres; il a été écrit par un groupe, avec des exemples concrets. Les 3% partent de nombreux exemples - il y a des coiffeurs ici - pour une journée de travail. Si on prend l'exemple d'une permanente - il y en a qui en ont ici - dans un salon, elle coûtera 50 $, dans un autre 35 $; en moyenne, c'est moins d'une piastre de pourboire.

M. Marcoux: Ce que vous me dites, c'est qu'une personne qui va chez la coiffeuse, supposons que le coût est de 6 $ ou 10 $ - je pense que ce sont des coûts assez fréquents - sur 10$, la personne laissera environ 0,25 $ ou 0,50 $ de pourboire?

M. Dupuis: Je vais vous corriger, vous n'avez pas compris ce que j'ai dit tout à l'heure. On a pris la moyenne d'une journée. Si on se base sur une coupe de cheveux à 10 $, la cliente laissera peut-être 0,50 $, mais si on se base sur une permanente à 50 $, elle ne laissera pas 1,50 $; souvent, cela sera moins d'un dollar. Il y a une grosse différence entre le total de la facture et le pourcentage; c'est pour cela qu'il faut se baser sur la moyenne d'une journée.

M. Therrien (Jean-Claude): Je suis certain que plusieurs d'entre vous se sont déjà fait faire une permanente. Si vous payez 40 $ ou 50 $ pour une permanente, vous n'avez sûrement pas laissé 7,50 $ de pourboire au coiffeur, à part quelques exceptions.

M. Marcoux: Je vais m'informer à mes collègues qui ont déjà eu des permanentes, quoique cela ne serait pas un indicateur général, je l'admets. Est-ce qu'il y a déjà eu de vos membres qui ont eu des avis de cotisation de la part du ministère de Revenu du Québec sur les pourboires?

M. Dupuis: Je voulais en venir là. Je vais laisser M. Therrien parler sur cela, parce qu'il est familier avec ce sujet.

M. Therrien: Je suis un de ceux-là et je crois que plusieurs de mes confrères ont été cotisés ces dernières années. Nous nous sommes opposés à cela. Je crois que le ministère du Revenu attend la réponse de la commission parlementaire, parce qu'on n'a encore jamais eu de réponse à nos objections.

M. Marcoux: Mais vous étiez cotisés sur quelle base: 5%, 8%, 15%?

M. Therrien: 10%.

M. Marcoux: 10% en ce qui vous concerne.

M. Therrien: Mais sur quoi on se base pour cotiser à 10%, on se le demande.

M. Marcoux: II y en a sûrement qui ont émis des objections auxquelles on a donné gain de cause en partie ou pas. Finalement, à quel pourcentage cela s'est-il terminé à peu près pour ceux qui ont réglé?

M. Therrien: Les objections?

M. Marcoux: Après discussion, comme on l'a dit pour les travailleurs et travailleuses au pourboire dans le domaine de la restauration, le ministère part de 15% et déduit les pourboires partagés. Il tient compte du site, de la clientèle et, souvent, on est arrivé, en moyenne, à 8% ou 10%. Dans votre cas?

M. Therrien: Dans notre cas, on arrive à 3%.

M. Marcoux: Vous autres, mais le ministère du Revenu, lui, est arrivé à quoi?

M. Therrien: Le ministère du Revenu, lui, dit 10%. Mais si vous regardez dans notre mémoire, 75% de nos membres sont des artisans. Lorsque vous allez voir un artisan, dans n'importe quel métier, souvent, c'est le propriétaire lui-même qui fait les travaux et le client ne donne pas de pourboire à l'artisan.

M. Marcoux: Mais vous avez de plus en plus de salons de coiffure qui ont 5, 6, 7 ou 10 personnes.

M. Therrien: Non, ce n'est pas la majorité. Ce sont des exceptions à la règle, ce n'est pas la majorité. Dans plus de 60% des salons de coiffure, ce sont des artisans.

M. Dupuis: II n'y a pas 10 ou 12 salons à Québec qui emploient plus de 10 employés.

Il n'y en a pas 10.

M. Tremblay: La majorité, ce sont des artisans.

M. Dupuis: Nos 3%, on y est arrivé en assemblée générale spéciale. On a fermé les portes et on a dit: J'espère que le ministère du Revenu n'a pas mis de micro dans les murs.

M. Marcoux: Vous m'inquiétez.

M. Dupuis: On voulait débattre du fond de la question. J'ai animé le débat personnellement et la première chose que j'ai dite, c'est qu'il ne fallait pas se conter d'histoires. Je peux vous citer un exemple, parce qu'on comprend mieux avec des exemples. Une coiffeuse a sorti un petit calepin et elle a calculé ses gains en pourboires - elle les avait pour tous les jours. Elle arrivait à 312 $ par année pour un chiffre d'affaires de 19 000 $ environ.

M. Marcoux: Vous pensez que, pour 312 $ par année, elle les notait tous les jours.

M. Dupuis: Oui. Il y a des cas comme cela. C'est ce qui est arrivé. C'est un cas véridique, c'est arrivé.

M. Therrien: On parle du cas d'un artisan; évidemment, on ne parle pas du cas d'un ouvrier qui travaille dans un grand centre commercial.

M. Marcoux: Non, non.

M. Therrien: C'est quand même une exception si on regarde le nombre de centres commerciaux qu'il y a à Québec. À Québec, comme on vous le dit, les entreprises qui ont plus de dix employés, il n'y en a pas dix.

M. Marcoux: En somme, je vous remercie d'être venus nous présenter votre mémoire. Ce que je retiens, même si je n'ai pas tous les détails - et on pourrait poursuivre longtemps - c'est que la situation de vos membres est différente de ce qui se passe dans le secteur de la restauration ou de l'hôtellerie et que vous voudriez que, quelles que soient nos décisions, on en tienne vraiment compte.

M. Dupuis: C'est pour cela qu'on est ici.

M. Therrien: Je suis bien content de vous entendre dire que notre situation est vraiment différente du secteur de l'hôtellerie.

M. Marcoux: Je vous ai dit que c'est le message que vous vouliez me passer, ce que j'avais compris.

M. Blais: II ne faut pas le tirer par les cheveux.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Je voudrais seulement remercier ces gens pour la présentation du mémoire. Cela ouvre un autre volet à un problème qui semble affecter aussi les coiffeurs et les coiffeuses, tenant compte du fait qu'il semble y avoir eu des cotisations

de ce côté aussi, ce qui a amené en grande partie la présentation des mémoires sur les problèmes de la restauration. On pourrait éventuellement les retrouver dans d'autres domaines ou dans d'autres travaux où des gens reçoivent des pourboires. On tient à vous remercier pour le mémoire.

M. Dupuis: II y a un autre fait qu'il faudrait bien noter, c'est que les coiffeurs et les coiffeuses sont très bien rémunérés.

M. Rocheleau: Je vous avoue que je n'ai jamais eu de permanente moi-même, mais si j'avais à avoir une permanente et que cela coûtait 50 $, je ne verrais pas pourquoi je devrais donner un pourboire, en partant de ce principe. On peut peut-être demander cela à M. Blais.

M. Marcoux: Et vous acceptez de le donner pour un repas?

M. Rocheleau: Pour un repas, M. le ministre, je considère que c'est dans la coutume, c'est dans la convention, dans la pratique, alors que dans d'autres services, je pense que ce n'est pas...

M. Blais: M. le député de Hull, j'ai peut-être une tête qui se prêterait à faire une permanente, mais je tiens à vous dire que c'est complètement naturel. C'est pour cela que je suis toujours un peu dépeigné. Cela frise même le ridicule parfois.

M. Rocheleau: Cela vous va bien.

Le Président (M. Gagnon): Merci de votre participation à cette commission et, comme vous êtes les derniers intervenants, M. le ministre ou M. le député de Hull, je présume que vous avez des conclusions à tirer.

Conclusions M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: Je vous remercie, M. le Président. Sûrement qu'on aimerait émettre certaines conclusions à la suite de ces nombreux mémoires reçus, depuis mardi, tant de syndicats, d'associations de travailleurs au pourboire, des gens de la restauration, d'associations de restaurateurs et d'hôteliers que d'individus et qui mettent sûrement en lumière qu'il y a des problèmes qui existent actuellement au Québec dans le domaine de la restauration. Sûrement que certaines solutions devront être apportées. Souhaitons qu'elles soient les plus réfléchies et les plus logiques possible, tenant compte du fait que l'industrie de la restauration au Québec traverse actuellement une période assez difficile. La majeure partie des industries au

Québec connaît des problèmes aussi.

On doit tenter d'améliorer le sort de nos employés de la restauration. Si le livre vert a été déposé, tenant compte de différentes options qui ont été traitées au cours de ces derniers jours, il n'en demeure pas moins un élément important, c'est que nous avons retenu dans la grande majorité des mémoires une objection quasi systématique aux avis de cotisation; on demandait soit un moratoire ou une suspension des poursuites. Il est bien évident, M. le Président, que nous, du Parti libéral, avons demandé une suspension des poursuites, tenant compte du fait qu'on ne semble pas respecter l'équité dans l'ensemble des cas et que la façon dont cela s'est fait au cours des derniers mois ne ressemble pas du tout à une façon humanitaire de traiter les choses. (22 h 45)

Je considère que le ministère du Revenu, au cours des nombreuses années passées, a été complice de la situation actuelle, vu la tolérance qui a toujours été acceptée dans la pratique. Nous devrions possiblement penser à tourner la page en informant tout le secteur de la restauration que les impôts doivent être perçus, vu la réglementation et les avis qui devraient être normalement formulés. Aujourd'hui, la perception que fait le ministère du Revenu en appliquant un facteur d'environ 10% dans certains cas et peut-être de 8% dans d'autres, c'est une façon drôlement arbitraire de faire les choses. On aura sûrement l'occasion, au cours des prochaines semaines, d'en discuter avec le ministre du Revenu, tenant compte de l'ensemble des avis de cotisation que fait parvenir le ministère du Revenu aux citoyens et citoyennes du Québec, et cela à l'ensemble des travailleurs de tous les métiers et de toutes les professions.

Je pense, M. le Président, qu'il faut tenir compte aussi d'un phénomène très important. On a eu l'occasion d'entendre quelques mémoires en provenance d'associations de consommateurs. Par contre, je tiens tout de même à mettre un certain point d'interrogation sur le fait qu'il y a 6 000 000 de consommateurs au Québec. Nous avons eu l'occasion, au cours des derniers jours, d'entendre certains mémoires qui représentent un certain nombre de consommateurs regroupés à l'intérieur d'associations. Encore une fois, vu la situation économique, je pense que le consommateur ne doit pas être pénalisé en subissant éventuellement une augmentation du coût de l'alimentation parce qu'il y a environ 30% des consommateurs québécois qui s'alimentent actuellement dans les restaurants, à cause de leur travail, à cause de toutes sortes de raisons. Il va falloir tenir compte sûrement de cet ensemble. J'ose espérer que le ministre de l'Industrie, du

Commerce et du Tourisme pourra se pencher sur le sujet au cours des prochains mois, avec l'aide des autres ministères, dans le but de poursuivre les recherches et d'approfondir certaines études ou certaines situations ou de tenir compte de l'ensemble de la situation avant de prendre une décision qui pourrait ni plus ni moins causer des problèmes plutôt qu'apporter les solutions que nous recherchons.

En terminant, M. le Président, je pense que cela a été intéressant de rencontrer ces gens qui nous ont présenté des mémoires. Je tiens au nom de l'Opposition à les remercier. Cela nous a sûrement éclairés et j'espère que cela a éclairé autant le ministre du Revenu, qui vient à peine de prendre la responsabilité de ce ministère. Vu les nombreux problèmes qui pointent à l'horizon, je souhaite que les recommandations qui devront être apportées tiennent compte de l'ensemble. Sur cela, je vous dis merci.

Le Président (M. Gagnon): M. le ministre.

M. Alain Marcoux

M. Marcoux: Mes premiers mots s'inspireront, en fait, des derniers propos du député de Hull, au nom de l'Opposition, pour remercier l'ensemble de mes collègues de la qualité de leur participation à cette commission. J'avais souhaité que mes collègues du côté ministériel soient impliqués concrètement, activement dans la discussion, dans le dialogue sur chacun des mémoires et je suis heureux de constater que, tout au long de cette commission, ils ont participé activement à ce dialogue avec nos invités. Je voudrais les en remercier d'autant plus que mon intention est de les associer concrètement à la réflexion et aux propositions de solutions qui devront suivre cette commission.

Je dois en dire tout autant des collègues du Parti libéral. J'ai été très heureux de participer à cette commission compte tenu du climat positif, je pense, et du respect profond que nous avons eu pour l'ensemble des personnes et des groupes qui ont accepté de nous présenter des mémoires. Si je veux tenir compte au maximum de l'avis de mes collègues dans la préparation des solutions à envisager, je peux vous assurer que je serai attentif à toutes les suggestions qui pourront m'être faites par les députés de l'Opposition pour essayer d'en arriver à une solution qui, sans être parfaite, sans être idéale, fasse le consensus le plus large possible sur une ou des étapes à franchir immédiatement.

Évidemment, il n'est jamais agréable de parler de fiscalité, de revenu, mais je pense que, comme nous avons posé le problème d'une façon globale, à la fois sous des aspects d'équité sociale, d'équité fiscale et de protection de l'industrie touristique, pour assurer l'avenir de ce type d'entreprises, je compte bien être le plus attentif possible aux remarques, aux suggestions et aux avis que mes collègues et les députés de l'Opposition voudront bien me faire dans les jours ou les semaines qui viennent. Comme ce que nous allons toucher va fondamentalement poser un problème de changement de mentalités de l'ensemble des consommateurs par rapport aux travailleurs impliqués, par rapport aux entreprises et aux propriétaires dans le domaine, lorsqu'on parle de changements de mentalités, de changements d'attitudes, des changements de comportements aussi fondamentaux dans les secteurs qui touchent le revenu, qui nous touchent donc personnellement et qui touchent à l'équité sociale, dans la mesure où il est possible d'arriver à des consensus sur les objectifs et sur les modalités pratiques, je pense que c'est souhaitable. C'est dans cet esprit que je souhaiterais travailler dans les jours et les semaines à venir.

Je dois préciser - je l'ai dit à plusieurs reprises, mais peut-être pas aussi clairement chaque fois - que mon collègue, M. Biron, du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, aurait souhaité participer aux travaux de cette commission, mais vous savez qu'il a dû préparer hier, aujourd'hui et mardi la commission de l'industrie, du commerce et du tourisme sur l'important dossier de SIDBEC et SIDBEC-Normines. Je puis vous assurer qu'il a tenu à ce qu'un membre de son cabinet assiste à l'ensemble de nos travaux. J'ai l'intention de discuter avec lui, d'écouter et d'essayer d'en arriver à un consensus sur les solutions. Même s'il n'a pu être présent lui-même ici, je pense que le témoignage de l'Association touristique régionale de Lanaudière cet après-midi indiquait sa préoccupation puisqu'il a lui-même souhaité une rencontre avec cette association touristique pour discuter du livre vert et des perspectives qui y étaient incluses.

J'aurais le goût de poser une question à l'Opposition. M. le député de Hull a indiqué qu'il se posait des questions sur ce qu'était véritablement l'opinion de l'ensemble des consommateurs du Québec par rapport aux différentes formules ou par rapport aux objectifs que nous avions visés. Je voudrais lui demander s'il nous reprocherait de faire un sondage sur le sujet. Je ne lui dis pas que nous avons l'intention de faire un sondage sur le sujet, mais comme il a, je pense, ouvert la porte à une préoccupation sur la connaissance de ce que serait l'opinion publique par rapport aux pourboires, aux frais de service obligatoires à l'encontre des autres formules, en gros, je me suis permis de penser à cette hypothèse. Mais je sais

bien que, de façon classique, l'Opposition libérale nous reproche depuis quatre ou cinq ans de faire trop de sondages. J'aimerais qu'il me donne une indication sur cette question, soit tantôt, soit plus tard.

Pour revenir au contenu des journées que nous avons vécues, je veux dire que je sors extrêmement satisfait du déroulement de cette commission parlementaire. J'avais dit, au point de départ, qu'en ce qui me concernait j'étais venu ici pour écouter, que mon idée n'était pas faite. Je peux vous assurer que je disais exactement l'état de mes réflexions sur ce dossier. J'avais voulu donner l'assurance à chacun des groupes que nous les écouterions avec le maximum d'attention, que nous étions venus ici pour apprendre. Je suis heureux de noter que plusieurs de mes collègues ont indiqué qu'ils avaient beaucoup appris au cours de ces trois journées.

Je crois remarquer que, malgré qu'il y ait des points de divergence, il y a aussi des points de convergence dans les discussions que nous avons eues. Je veux noter que la majorité des représentants, entre autres des entreprises, ont indiqué qu'ils reconnaissaient une responsabilité sociale à l'entreprise et, donc, que - et plusieurs l'ont indiqué aussi -le pourboire étant une forme de revenu, une forme de salaire, ils étaient prêts à assumer une partie des responsabilités sociales que cela pouvait impliquer. Plusieurs l'ont reconnu explicitement en disant que la qualité du service entraînait ou ~ pouvait entraîner une partie de la rentabilité de l'entreprise et que, sous cet aspect-là, le pourboire était une façon de rémunérer ou une partie de la rémunération face à la qualité du service. Comme la qualité du service pouvait entraîner une partie de la rentabilité de l'entreprise et que cette qualité de service était en partie rémunérée par le pourboire, en somme, la vie de leur entreprise est aussi liée selon eux à ce facteur qu'est le pourboire. En conséquence, ils sont prêts à assumer une partie de la responsabilité sociale que cela peut impliquer.

Je peux vous dire que je retiens des commentaires qui ont été faits l'urgence d'agir. Je l'ai indiqué à quelques reprises, mais je peux vous assurer que cette conviction s'est accrue tout au long des travaux de cette commission. J'avais indiqué, au point de départ, que la seule formule que je rejetais était le statu quo. Je peux dire à la sortie de cette commission qu'en plus de rejeter le statu quo - qu'un seul groupe a d'ailleurs soutenu très clairement; peut-être deux ou trois autres informellement, mais clairement un seul groupe - en plus de sortir avec une conviction plus ferme que le statu quo est à éliminer, je sors aussi avec une conviction supplémentaire à la suite des témoignages humains particulièrement que j'ai entendus, c'est qu'il est urgent d'agir le plus tôt possible pour éviter que d'autres travailleurs ne soient placés dans des situations difficiles face au paiement d'impôts qu'on pourrait dire rétroactifs, même s'ils sont dus depuis quelques années.

Les hypothèses de travail maintenant. Si on se situe à partir du principe de la responsabilité sociale, je crois qu'il sera peut-être difficile de retenir une hypothèse comme celle indiquée à 5.4, c'est-à-dire de considérer le pourboire comme étant seulement un revenu de travailleur autonome. En effet, à partir du moment où le pourboire constitue une rémunération d'un travail, une forme de salaire et qu'il est lié à la rentabilité de l'entreprise, je crois, comme plusieurs groupes l'ont soutenu, pouvoir dire que la responsabilité sociale y est engagée. Je peux vous assurer que, parmi l'ensemble des hypothèses, le critère de la situation économique actuelle de ce secteur industriel, de ce secteur commercial comptera dans la balance des avantages et des inconvénients qu'il y aura à peser à propos de toute formule qui devrait être mise en place. Je l'ai dit à deux ou trois reprises, mais je pense qu'il est important, à la fin de ces travaux, de rappeler brièvement que, indépendamment de la conjoncture actuelle, toute mesure qui touche 80 000 travailleurs, 20 000 ou 15 000 entreprises dans le secteur de la restauration et de l'hôtellerie, probablement 3 000 000 ou 4 000 000 de clients, ne peut être adoptée à la légère sans en mesurer les conséquences économiques, en plus des conséquences sociales évidement, comme je l'ai déjà indiqué, et des conséquences fiscales. (23 heures)

II y a une demande que je souhaiterais faire aux différents organismes qui sont venus nous rencontrer. J'ai indiqué à différents organismes ma volonté de recevoir des informations et des commentaires supplémentaires. Déjà, M. Papirakis s'est déplacé et est venu nous revoir pour nous transmettre des informations supplémentaires. Je souhaite que d'autres groupes en fassent autant, mais j'aurais une demande supplémentaire. J'ai indiqué que cette commission parlementaire était, sous une certaine forme, un lieu de concertation. Je souhaiterais que les groupes impliqués commencent ou continuent à se parler, qu'ils continuent le dialogue commencé ici. C'est, en fait, un dialogue à quatre partenaires. Il y a eu des représentants des consommateurs, des travailleurs au pourboire, des entreprises impliquées de même que nous, comme responsables à l'Assemblée nationale de l'ensemble de cette société. Je souhaiterais que le dialogue qui a été commencé - je pense qu'on peut dire qu'il y a eu un esprit de dialogue tout au long de cette commission - se poursuive. Je suis convaincu que c'est

dans l'intérêt même des travailleurs et de l'entreprise que nous trouvions une solution qui aille dans le sens du progrès.

Aller dans le sens du progrès, c'est sûr que ce sont des responsabilités accrues pour chacune des parties: responsabilités accrues pour le travailleur qui, actuellement, ne paie pas d'impôt et qui aura à en payer, responsabilités accrues pour le propriétaire qui ne payait pas l'ensemble des avantages sociaux sur la part des pourboires et qui pourrait avoir à payer une part accrue dans ce secteur, responsabilités accrues aussi pour le consommateur, évidemment, puisque tous frais supplémentaires finalement - l'Opposition l'a souligné à quelques reprises et, je pense, à bon droit - toute mesure qui sera prise retombera inévitablement sur le consommateur.

Évidemment, comme responsables de la gestion des deniers publics et des politiques financières et fiscales, nous avons notre responsabilité. Je peux assurer les travailleurs et les travailleuses au pourboire que les critiques qu'ils ont faites au ministère du Revenu, en particulier sur la nécessité d'une meilleure information à leur endroit, à la fois sur leurs droits et leur devoir, ont fait réfléchir. Je peux les assurer que je songe à l'hypothèse suivante: le ministère du Revenu a déjà commencé à publier quelques guides, un, entre autres, sur les artistes et sur différents secteurs de l'activité avec lesquels le ministère du Revenu est en contact. Je peux vous assurer qu'on songera à la possibilité de publier un guide, le plus concret, le plus simple possible, qui pourrait indiquer l'ensemble des droits et devoirs qui peuvent en somme toucher le travailleur ou la travailleuse au pourboire, ceci dans le but d'accroître l'information et de donner l'information la plus complète et la plus exacte possible.

Évidemment, c'est difficile en cinq ou dix minutes d'arriver à tirer la ligne - je tire la ligne, M. le Président - d'une commission aussi riche en contenu où nous avons entendu le point de vue patronal, le point de vue des employés, le point de vue de regroupements d'employés, le point de vue des syndicats, des associations de consommateurs, le point de vue d'individus autant du côté des entreprises que des employés et d'autres associations à titre personnel ou à titre de représentantes d'un groupe de notre société.

Je voudrais, en terminant, remercier tous ceux qui ont consacré de nombreuses heures et probablement, dans plusieurs cas, quelques semaines, quelques mois de travail pour se préparer à cette commission. On a toujours le sentiment d'une certaine injustice lorsqu'on demande à un groupe de nous présenter en trois quarts d'heure ou une heure le travail qu'il a pris trois ou quatre mois à concevoir, mais la vie parlementaire est ainsi faite qu'il faut résumer certaines choses. Je peux vous assurer que, même si vous avez été condamnés à vous résumer, nous tiendrons toutefois compte de l'ensemble de ce que vous avez indiqué dans vos mémoires.

Mes derniers mots seront, évidemment, pour remercier les 25 groupes, environ, qui ont accepté de participer à la commission. Également, j'indique que l'Association canadienne des franchisseurs, l'Association des petites et moyennes entreprises & Ass., et le Conseil du patronat du Québec nous ont transmis des mémoires, mais n'ont pu venir les présenter. Nous tiendrons également compte des opinions formulées dans ces mémoires qui ont été envoyés à l'ensemble des parlementaires. Je vous remercie.

Le Président (M. Gagnon): M. le député de Hull, avant de vous laisser la parole, je voudrais être certain de pouvoir dire également trois mercis. Alors, je vais le faire immédiatement; après cela, je vous laisserai la parole. Je désirerais, d'abord, remercier les membres de cette commission. Je voudrais également remercier de leur collaboration les nombreux invités qui sont venus depuis trois jours devant cette commission; cela a été assez facile de présider cette commission, cela a été très agréable. Je désirerais remercier les travailleurs, parce qu'il y a des travailleurs à l'Assemblée nationale qui ne sont peut-être pas des travailleurs au pourboire, mais qui nous permettent d'enregistrer les débats et de faire un travail qui va pouvoir faire continuer la réflexion. Le ministre en aura besoin. Je remercie ces travailleurs de leur collaboration.

Là-dessus, je voudrais vous donner la parole, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je n'aurais pas voulu laisser en blanc la question que me posait, il y a quelques instants, le ministre du Revenu en ce qui a trait à la consultation, parce que j'ai toujours été un fort partisan de la consultation, dans tous ses modes. Je tiens à souligner au ministre que nous avons, il y a quelques jours, fait une consultation intéressante dans l'Outaouais, plus particulièrement à Hull. La seule chose que je pourrais souhaiter du gouvernement, comme du ministre du Revenu, c'est que si les gens qui sont consultés arrivent à des conclusions on respecte les conclusions auxquelles ils arrivent. Je souhaiterais que le gouvernement soit très attentif aux demandes qui sont faites par les citoyens de Hull, par l'entremise du conseil municipal, en tenant compte d'un aspect économique important aussi et d'une consultation sous une forme assez élaborée dans un référendum. Alors, sûrement que nous serons toujours prêts à

collaborer, à écouter les citoyens et les citoyennes du Québec dans leurs revendications afin d'améliorer le sort de la collectivité.

Le Président (M. Gagnon): Merci. Vous avez donné un autre mot de la fin.

M. Marcoux: Cela va être très court. Je peux rassurer tout de suite les travailleurs et les travailleuses au pourboire: Je n'ai pas l'intention de tomber dans la suggestion du député de Hull d'organiser un référendum pour savoir quelle est la solution ou quelles sont les solutions que nous devrions appliquer, parce que ce serait pour moi, en tout cas, une mesure dilatoire qui ferait que cela pourrait prendre quelques années, plutôt que quelques mois, avant que nous arrivions à mettre en place des solutions concrètes. Mais, sur l'idée de fond, je comprends le message de M. le député de Hull qui, en fait, accepte que nous fassions toutes les consultations, quels que soient les modes, pour arriver à la meilleure solution possible, si j'ai bien compris sa pensée.

M. Rocheleau: Pour autant que cela ne tient pas compte de la propagande ou de la partisanerie.

M. Marcoux: Cela, on sait que ça ne vous touche pas!

Le Président (M. Gagnon): Là-dessus, il me fait plaisir de déclarer que la commission élue permanente du revenu a terminé son mandat. Je prierais le rapporteur, Mme la députée de Johnson, d'en faire rapport à l'Assemblée nationale. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 08)

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