Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(29 novembre 2022 au 10 septembre 2025)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Le
mercredi 15 mars 2023
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Vol. 47 N° 3
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et d’autres dispositions législatives
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Intervenants par tranches d'heure
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Poulet, Isabelle
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Schmaltz, Valérie
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Gendron, Marie-Belle
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Maccarone, Jennifer
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Lecours, Lucie
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Labrie, Christine
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Tardif, Marie-Louise
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Bélanger, Sonia
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Picard, Marilyne
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Picard, Marilyne
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Lecours, Lucie
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Schmaltz, Valérie
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Prass, Elisabeth
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Labrie, Christine
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Tardif, Marie-Louise
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Schmaltz, Valérie
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Schmaltz, Valérie
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Lecours, Lucie
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Blais, Suzanne
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Maccarone, Jennifer
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Labrie, Christine
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Tardif, Marie-Louise
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Poulet, Isabelle
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Schmaltz, Valérie
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Maccarone, Jennifer
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Prass, Elisabeth
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Lecours, Lucie
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Labrie, Christine
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Bélanger, Sonia
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Guillemette, Nancy
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Guillemette, Nancy
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Lecours, Lucie
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Poulet, Isabelle
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Maccarone, Jennifer
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Labrie, Christine
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Tardif, Marie-Louise
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Picard, Marilyne
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Guillemette, Nancy
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Prass, Elisabeth
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Prass, Elisabeth
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Lecours, Lucie
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Labrie, Christine
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Tardif, Marie-Louise
11 h (version révisée)
(Onze heures vingt-sept minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le
projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de
vie et d'autres dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Garceau (Robert-Baldwin) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis) et Mme Massé (Sainte-Marie—Saint-Jacques) est
remplacée par Mme Labrie (Sherbrooke).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, nous entendrons ce matin, pour une
deuxième journée d'auditions, les organismes suivants : l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec, que nous avons avec vous... avec nous en
ce moment, ainsi que l'Office des personnes handicapées du Québec.
Alors, bienvenue, bienvenue à M. Luc
Martineau, président, maître...
La Secrétaire
: ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Luc... Je m'excuse. Ça fait deux fois que je change votre...
votre nom de famille. M. Luc Mathieu, président, Mme Pénélope Fortin
ainsi que madame... Me Pénélope Fortin, pardon, ainsi que Mme Caroline
Roy, directrice, Développement et soutien professionnel. Alors, bienvenue à la
commission. Je vous rappelle que vous allez avoir 10 minutes pour... pour vous
présenter ainsi que pour procéder à votre exposé, et le temps commence
maintenant.
Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ)
M. Mathieu (Luc) :Alors, merci beaucoup. Alors, Mme la Présidente, Mme la
ministre déléguée, Mmes les... les parlementaires, alors, nous vous remercions de
votre invitation à émettre nos commentaires sur le projet de loi n° 11
concernant la Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et
d'autres dispositions législatives. Le droit de mourir dans la dignité est un
enjeu de société de première importance qui met en cause le droit à l'autodétermination
d'une personne apte et le droit à la dignité humaine.
Nous sommes à même de constater que les
échanges soutenus depuis le printemps dernier entre le ministère de la Santé et
des Services sociaux, l'Office des professions du Québec, l'OIIQ et le Collège
des médecins du Québec auront contribué à permettre aux infirmières
praticiennes spécialisées, les IPS, de participer activement à ces soins
sensibles et délicats dans une perspective d'accessibilité et d'interdisciplinarité.
Nos recommandations portent sur le
handicap neuromoteur grave et incurable, sur les mécanismes mis en place pour
procéder à l'évaluation de la qualité des soins fournis et sur l'entrée en
vigueur des dispositions relatives au constat de décès.
Nous saluons les modifications apportées
notamment au Code civil du Québec visant à permettre aux infirmières et
infirmiers du Québec de constater le décès d'une personne et d'en dresser le
constat.
Nous énonçons également certaines
recommandations visant à bonifier le projet de loi, lesquelles sont formulées
dans une perspective de maximiser l'accessibilité aux soins de fin de vie et
dans un souci d'assurer un arrimage cohérent des mécanismes entourant l'évaluation
de la qualité des soins fournis. De plus, nous saluons l'ouverture quant à l'ajout
de la clientèle ayant un handicap neuromoteur grave et incurable.
• (11 h 30) •
Pour nous, l'aptitude à consentir aux
soins est impérative en tout temps et reste un critère essentiel pour l'exécution
d'un soin. Toutefois, les modalités de consentement à l'aide médicale à mourir
doivent évoluer pour s'adapter à l'expression par notre société de l'importance
de mourir dans la dignité, de l'autodétermination des soins et de l'inviolabilité
des droits. Ainsi, nous accueillons favorablement l'ajout de la possibilité,
pour les personnes atteintes de maladies graves et incurables menant à l'aptitude
à consentir aux soins, de formuler une demande anticipée d'aide médicale à <mourir...
>
11 h 30 (version révisée)
< M. Mathieu (Luc) :
...accueillons favorablement l'ajout de la
possibilité pour les personnes atteintes de maladies graves et incurables
menant à l'aptitude à consentir aux soins de formuler une demande anticipée d'aide
médicale à >mourir.
L'OIIQ désire une fois de plus souligner l'ouverture
du gouvernement de permettre aux IPS d'évaluer l'admissibilité des personnes à
recevoir l'aide médicale à mourir et de pouvoir l'administrer en plus de les
désigner comme professionnels compétents en lien avec la sédation palliative
continue, et ce, indépendamment de leur lieu d'exercice. Nous nous réjouissons
de constater que les IPS exerçant hors des établissements publics pourront
également prodiguer l'aide médicale à mourir et la sédation palliative continue,
tel que nous l'avions recommandé dans notre mémoire déposé en mai dernier dans
le cadre des travaux du projet de loi n° 38. Par cette ouverture, le
Québec vient diminuer l'écart avec les autres provinces canadiennes où les IPS
participent à l'aide médicale à mourir et à la sédation palliative continue, et
ce, depuis 2016.
L'OIIQ salue de plus l'initiative
gouvernementale concernant l'ajout des personnes atteintes d'un handicap
neuromoteur grave et incurable qui pourront formuler une demande contemporaine
d'aide médicale à mourir. Les souffrances physiques et psychiques qui accablent
ces personnes sont bien réelles et justifient de pouvoir recourir au soin qu'est
l'aide médicale à mourir. Par cet ajout à la loi sur les soins de fin de vie,
nous respectons par le fait même le droit à l'autodétermination et le droit à
la dignité humaine de ces personnes.
Préoccupés à l'effet qu'il n'existe pas de
définition précise de ce qu'est un handicap neuromoteur grave et incurable, le
terme «neuromoteur» ne se trouvant pas, d'ailleurs, au Code criminel, il sera
donc nécessaire de s'assurer que l'ajout du terme «neuromoteur» ne vienne pas
limiter l'accès à ce soin à des clientèles lourdement handicapées dont la
situation médicale se caractérise par un déclin avancé et irréversible de leurs
capacités et dont les souffrances physiques ou psychiques sont constantes,
insupportables, et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions qu'elles
jugent tolérables.
Bien que cette avancée représente un
soulagement pour ces personnes, nous recommandons toutefois qu'un groupe d'experts
s'y penche afin d'établir une définition claire sur la notion de handicap
neuromoteur et ainsi bien encadrer la pratique de l'aide médicale à mourir
auprès de ces personnes. Nous offrons notre entière collaboration pour
participer aux débats et réflexions à ce sujet.
Sur ce, je vous présente notre première
recommandation à l'effet que les lignes directrices soient établies par des
experts afin d'assurer une définition commune et consensuelle de la notion de
handicap neuromoteur grave et incurable.
Voici maintenant nos recommandations sur l'évaluation
de la qualité des soins fournis. La compétence professionnelle est l'une des
valeurs fondamentales du Code de déontologie des infirmières et infirmiers et
elle constitue l'un des éléments essentiels à la qualité des soins et des
services. Dans un contexte aussi délicat et éthique que le processus d'aide
à... d'aide médicale à mourir, l'évaluation de la qualité des soins fournis
prend une ampleur particulière et nécessite que nous y accordions la plus
grande importance. Il ne fait aucun doute que, grâce à leurs connaissances et
compétences cliniques avancées, les IPS sont des professionnels tout indiqués
pour accompagner des patients ainsi que leurs familles en leur permettant de
mourir dans la dignité.
Toutefois, à titre d'ordre professionnel
ayant comme mission principale la protection du public, nous sommes soucieux de
nous assurer que le mécanisme visant à assurer l'évaluation de la qualité des
soins fournis soit déployé indistinctement du professionnel qui l'effectue de
manière harmonisée et dans une perspective de collaboration
interprofessionnelle.
Donc, dans cet esprit, l'OIIQ tient à
manifester des préoccupations à l'égard du projet de loi qui prévoit des
mécanismes d'évaluation différents en fonction du professionnel et du lieu de
prestation des soins. De fait, le projet de loi prévoit que ce sont les
conseils des médecins, dentistes et pharmaciens, les CMDP des établissements
qui procèdent à l'évaluation de la qualité des soins fournis par les médecins
qui administrent l'aide médicale à mourir ou la sédation palliative continue
dans le secteur public. Ils évaluent, notamment, le respect des normes
cliniques et peuvent émettre un signalement au Collège des médecins du Québec,
le cas échéant.
Pour ce qui est de l'aide médicale à
mourir ou de la sédation palliative continue administrée par un médecin dans le
secteur privé, le collège est responsable d'évaluer la qualité des soins
fournis par l'intermédiaire du comité sur les soins de fin de vie. Celui-ci
évalue également le respect des normes cliniques puis pourrait émettre un
signalement, le cas échéant. Il faut également souligner que la Commission sur
les soins de fin de vie peut aussi faire un signalement au collège si elle a un
doute sur la qualité des soins fournis par le médecin.
Pour les IPS, le projet de loi prévoit que
l'évaluation de la qualité des soins fournis devra être effectuée par la
directrice ou le directeur des soins infirmiers de l'établissement lorsque les
IPS exercent dans un centre exploité par un établissement.
Nous avons été surpris de constater que
les conseils des infirmières et infirmiers, les CII, institués au sein des
établissements <publics...
M. Mathieu (Luc) :
...centre exploité par un établissement.
Nous avons été surpris de constater que
les conseils des infirmières et infirmiers, les CII, institués au sein des
établissements >publics ne soient pas impliqués dans l'évaluation de la
qualité des soins fournis par les IPS, à l'instar des CMDP. En effet, selon
l'article 220 de la Loi sur les services de santé et des services sociaux,
le CII a notamment pour fonction d'apprécier la qualité des soins infirmiers de
l'établissement. En ce sens, il nous apparaît nécessaire et primordial que le
projet de loi prévoie explicitement la participation de cette instance à
l'évaluation de la qualité de l'acte entourant l'aide médicale à mourir ainsi
que la sédation palliative continue par les IPS. Pour ce qui est des IPS
exerçant hors des établissements publics, selon le projet de loi, il incombe à
l'OIIQ de procéder à cette évaluation. Alors, dans ce contexte, il y aurait
alors la présence de quatre mécanismes distincts pour procéder à l'évaluation
d'un même acte en fonction des mêmes critères.
Ainsi, notre deuxième recommandation vise
l'harmonisation des mécanismes pour l'évaluation de la qualité des soins
fournis relativement à la... à la sédation palliative continue et à l'aide
médicale à mourir, et ce, pour l'ensemble des professionnels compétents des
CII. Considérant que le mandat du CII, la direction des soins infirmiers et du
CMDP consiste, notamment, à apprécier la qualité des actes posés, nous
recommandons que soit réfléchie la possibilité d'instituer des comités
conjoints, CII-CMDP, pour procéder à l'évaluation de la qualité des soins
fournis pour la sédation palliative continue et l'aide médicale à mourir.
Notre troisième recommandation vise à ce
que le CII soit impliqué et participe au processus de l'évaluation de la
qualité des soins fournis par les IPS relativement à la sédation palliative
continue et à l'aide médicale à mourir dans le secteur public.
Notre quatrième recommandation propose que
le terme «respectif» soit retiré à l'article 26 du projet de loi pour
permettre la constitution d'un comité conjoint, OIIQ-CMQ, pour l'évaluation de
la qualité des soins fournis par les IPS et les médecins exerçants dans le
secteur privé.
Notre cinquième et dernière recommandation
porte sur les constats de décès par les infirmières et infirmiers et suggère
l'entrée en vigueur immédiate des dispositions relatives au constat de décès.
Donc, nous sommes maintenant prêts à
répondre à vos questions. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Mathieu. Alors, nous allons débuter
la période d'échange. Je vais, par contre, donner le temps aux différents
groupes parce qu'il est différent d'hier. Étant donné qu'on a deux groupes, on
veut respecter le temps qui est imparti ce matin : 14 minutes pour la
ministre et ses... et les députés, 8 min 24 s pour l'opposition
officielle, 2 min 48 s pour le deuxième groupe d'opposition et
2 min 48 s pour la députée indépendante. Donc, j'aimerais bien
qu'on puisse respecter questions et réponses incluses dans votre temps, merci
beaucoup. La parole est à vous, Mme la ministre.
Mme Bélanger : Oui. Alors,
bonjour, M. Mathieu, c'est un plaisir de vous revoir. Bonjour, Me Fortin,
Mme Roy. Je veux saluer la qualité de votre mémoire. On reconnaît là le
grand professionnalisme de votre ordre professionnel. C'est très bien rédigé,
c'est clair.
Alors, j'ai quelques questions,
naturellement, puis c'est une... en fait, c'est vraiment sur le concept de l'handicap
neuromoteur. Alors, une question, peut-être... qui va peut-être vous
surprendre, mais est-ce que vous allez, dans votre réflexion... vous ne l'avez
pas écrit, vous ne le recommandez pas, mais est-ce que vous avez réfléchi au
fait de ne pas... de retirer... de proposer de retirer, dans le projet de loi,
le thème «neuromoteur»?
• (11 h 40) •
M. Mathieu (Luc) :On n'est pas allés jusque-là dans notre réflexion, là. Ce
qui est écrit dans le mémoire, c'est ce que je vais dire, peut-être, en
d'autres mots, c'est qu'il faut... il va falloir, par contre, baliser ce qu'on
veut dire par thème «neuromoteur», parce que la notion de handicap, c'est un...
c'est... ça peut être large, là. Et, dans une question aussi délicate que
l'aide médicale à mourir ou la sédation palliative continue, il faut... il faut
se donner des... des balises et s'assurer que, comment je pourrais dire ça, le
consensus social qui pourrait se dégager, là, suite aux audiences de la
commission puis du... de la loi qui serait... qui serait adoptée, bien, que...
que ce consensus-là soit... soit respecté, compte tenu de la nature, comme je
viens de le mentionner, là, délicate de la question. Mais il faut... comme on
l'écrit aussi, il ne faut pas... il ne faudrait pas faire en sorte d'exclure les
gens qui correspondraient, là, qui ont des... qui ont des souffrances qui sont
autant physiques, psychologiques, qui sont... qui sont <intolérables...
M. Mathieu (Luc) :
...les gens qui correspondraient, là, qui ont des...
qui ont des souffrances qui sont autant physiques, psychologiques, qui sont...
qui sont >intolérables. L'idée, c'est de baliser la question du trouble
neuromoteur, du trouble moteur grave.
Mme Bélanger : Mais il y a
deux éléments dans ce que vous mentionnez, de baliser le terme «neuromoteur»,
mais, en même temps, vous indiquez que, par ailleurs, il y a un risque que
d'autres personnes — c'est comme ça que je l'interprète — ayant
des handicaps et ayant des souffrances graves et inapaisantes n'aient pas accès
à l'aide médicale à mourir. Vous laissez quand même... vous ouvrez en même
temps la porte en disant : Bien, il va falloir, d'un côté, bien définir le
concept neuromoteur. Puis, en même temps, vous dites : Bien, il ne
faudrait pas non plus que ça ait pour effet de restreindre l'accès à d'autres
personnes ayant des handicaps et répondant aux autres critères, là, bien sûr.
M. Mathieu (Luc) :Oui. Bien, c'est un peu ça, parce qu'en cette matière-là il
n'y a pas de... il n'y a pas de... ce n'est pas blanc puis noir, hein? Il y
a... il y a des... il y a des éléments, c'est pour ça qu'on recommande qu'il y
ait un groupe d'experts qui se penche là-dessus, voir jusqu'où on peut aller,
si on peut définir la... si on peut bien encadrer la notion du... du handicap,
là, neuromoteur grave. Parce qu'il y a... si on mettait juste «handicap», ça
peut laisser de la place à... des gens pourraient percevoir que ça laisse la
place à certaines dérives, là. Et, pour la population, c'est... Parce que nous,
on est là pour protéger le public, bien, il faut être... il faut être soucieux
de ça.
Alors, c'est un... c'est un peu le...
la... c'est la réflexion qui nous habite, là. Je ne sais pas si, Caroline, tu
voudrais ajouter quelque chose là-dessus.
Mme Roy (Caroline) : Bien
non. Bien, en fait, c'est ça, c'est sûr que le Code criminel au Canada ne
prévoit pas la notion de neuromoteur, donc ce qui fait que ça amène un concept
qui est nouveau au Québec. Donc, il faut s'assurer de... si... le cas échéant,
s'il demeure à la loi, il faut s'assurer de bien le... le baliser, mais, si...
s'il n'est pas là, il va falloir aussi qu'il y ait des balises, justement, pour
s'assurer que ce soit bien... ce soit bien objectivable, là, ce que... les
personnes qui pourraient être admissibles, là, advenant qu'ils soient atteints
d'un handicap.
Mme Bélanger : OK. Merci. Une
autre question. Concernant le... dans le projet de loi, la possibilité, pour
les IPS, là, d'agir à même titre qu'un médecin dans le processus complet de
l'aide médicale à mourir, vous avez salué, là, dans le fond, cette grande
ouverture là, et je pense que c'est une très bonne chose pour faciliter l'accès
aux Québécois et aux Québécoises, mais comment entrevoyez-vous de façon
spécifique la formation des IPS au niveau de l'aide médicale à mourir?
M. Mathieu (Luc) :Je vais laisser ma collègue, là, Mme Roy répondre.
Mme Roy (Caroline) : Oui.
Bien, d'abord, les infirmières praticiennes spécialisées sont des infirmières
qui sont détentrices d'un diplôme de deuxième cycle, donc d'une maîtrise et un
diplôme d'études supérieures. À l'heure actuelle, l'aide médicale à mourir est
abordée dans certains programmes universitaires. C'est certain que nous, on a
sollicité l'avis du comité de la formation qui... qui est un comité qui relève
de l'Ordre des infirmières, et ce qui a été recommandé, c'est qu'il y ait un
ajout au niveau de la formation, là, de trois à six... à six heures. Donc,
c'est... L'ordre travaille, là, avec les partenaires pour s'assurer qu'il y ait
des ajustements à la formation. Mais, à l'heure actuelle, les infirmières
praticiennes disposent de toute la formation requise, là, pour accompagner les
personnes. Donc, c'est plus au niveau, là, des dispositions spécifiques à
l'aide médicale à mourir, qu'il y a un ajout, là, entre trois à six heures qui
serait recommandé et qu'on va travailler déjà avec des instances pour mettre ça
en place.
Mme Bélanger : OK. Merci. Et,
concernant le constat de décès, bon, vous... On le sait, là, durant la
pandémie, les infirmières ont eu, donc, l'autorisation de procéder au constat
de décès dans le contexte de crise sociosanitaire importante. Puis je pense
qu'il y a eu... on a vu aussi des résultats positifs de ça. Ça s'est bien
passé. Vous voyez que c'est repris dans le projet de loi pas seulement pour les
personnes qui décèdent suite à un AMM, mais pour tous les décès. Alors,
j'aimerais peut-être que vous abordiez un petit peu plus cette question-là, là,
pour l'ensemble de mes collègues. Vous... vous souhaitez que ce soit mis en
application très rapidement. Alors, j'aimerais vous entendre, là, sur...
advenant que ce soit... que le projet de loi passe, et qu'on... qu'on aille avec
la possibilité du constat de décès par les infirmières. Comment vous voyez la
suite, là? Parce que des infirmières, il y en a des milliers au Québec. Alors,
comment vous voyez ça?
M. Mathieu (Luc) :Bien, déjà dans la formation des infirmières, c'est...
c'est prévu, ça. Une infirmière, là, quand elle rentre sur le marché du
travail, elle a les... les habiletés et les compétences, là, pour constater le
décès. Et pourquoi qu'on voudrait que ce soit possible, c'est pour des
questions de... je dirais ça, de un, d'abord auprès des... des proches qui... Ils
ont des décès dans certains milieux, je pense aux CHSLD, par exemple, où il n'y
a pas beaucoup de médecins, et des fois, entre le moment du décès puis pour
faire le constat de décès, le temps que le médecin <vienne...
M. Mathieu (Luc) :
...je pense aux CHSLD par exemple, où il n'y a pas
beaucoup de médecins, et, des fois, entre le moment du décès puis pour faire le
constat de décès, le temps que le médecin >vienne, bien, des fois, c'est
très long. Puis il nous a été reporté, puis ce n'est pas nécessairement
anecdotique, que, des fois, bien, vu qu'il n'y a pas de médecin, bien, on met
la dépouille dans une ambulance, on apporte ça dans une salle d'urgence pour
faire un constat de décès. C'est complètement inefficient en termes de
fonctionnement du réseau, là, mais c'est surtout... ce n'est pas... ce n'est
pas prendre soin des proches pour qu'après ça, bien, les gens puissent
commencer à faire leur deuil. Et puis les infirmières sont tout à fait formées
pour accompagner les familles dans ce sens-là une fois que le constat de décès,
là, si jamais le projet de loi...
Puis on l'a vu, là, vous l'avez mentionné,
Mme Bélanger, en parlant de la pandémie, là, ça a amené... ça a aidé à la
fluidité des activités du réseau pendant la pandémie. Et, quand ça a été mis
fin, nous, on a reçu beaucoup... les directions de soins aussi dans les
établissements, beaucoup de commentaires à l'effet... parce que les gens
pensaient que c'était nous qui aviez mis fond à ça... mis fin à ça, mais
c'était la fin d'urgence sanitaire puis... qui faisait ça.
Alors, c'est pour ça qu'on insiste puis
qu'on insiste aussi que ce soit mis en vigueur rapidement et... dans
l'éventualité où le projet de loi est adopté.
Mme Bélanger : OK. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Je pense que, la députée
de Laporte, vous avez des questions.
Mme Poulet : Oui. Alors,
bonjour. Bienvenue à vous trois. Dans votre mémoire, vous ne parlez pas de
refus, je n'ai pas lu quoi que ce soit par rapport au refus. Si une personne
refuse la demande, l'aide médicale à mourir, quelle est votre position par
rapport à ce niveau-là? Certaines personnes nous ont mentionné que l'on... qu'il
pourrait y avoir une deuxième demande, qu'il y ait un report. Dans notre projet
de loi, on mentionne que la demande devrait être radiée, dans les plus brefs
délais, du registre. J'aimerais vous... vous entendre par rapport à ce... à ce
niveau-là.
M. Mathieu (Luc) :Veux-tu répondre, Caroline?
Mme Roy (Caroline) : C'est
certain qu'au niveau du refus ce qu'on veut... ce qu'on veut s'assurer, c'est
que ce soit peut-être clarifié pour s'assurer qu'est-ce qu'on entend par refus.
Et il faudrait s'assurer qu'il y ait des dispositions advenant que... pour respecter
aussi les volontés de la personne parce qu'on parle de demande médicale
anticipée. Donc, s'assurer que, si c'était les volontés de la personne avant
d'être inapte parce que... J'ai l'impression que votre question porte sur les
demandes anticipées, est-ce que c'est... est-ce que j'ai bien compris?
Mme Poulet : Exactement.
Mme Roy (Caroline) : Oui.
Donc, il faudrait s'assurer, en tout cas, que ce soit, à tout le moins,
clarifié, la notion de refus, qu'est-ce qu'on entend, là, par la notion de
refus. Et c'est sûr qu'il faut considérer la personne, là, qui pourrait avoir
des manifestations cliniques qui s'attachent à sa maladie. Donc, c'est quand
même des situations où c'est flou, et on devrait effectivement s'assurer de
clarifier à la loi, qu'est-ce qu'on entend par refus.
Mme Poulet : OK. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée de Vimont.
Mme Schmaltz : ...M. Mathieu,
Mme Fortin, Mme Roy. Ma question est sur le droit à
l'autodétermination, on en a parlé beaucoup hier, on en a discuté. Vous avez
pris position là-dedans, naturellement, en disant que vous étiez... que vous
étiez en accord avec ça. Et la question, souvent, pose sur, justement, en
situation de handicap. Comment on peut favoriser l'autodétermination lorsqu'on
est en situation de handicap?
M. Mathieu (Luc) :Pouvez-vous préciser votre question? Parce que, si la
personne... on comprend que la personne est apte à faire... à faire une
demande, là, d'aide... d'aide médicale à mourir, ça fait que, si elle est apte,
bien là l'autodétermination, c'est elle qui va... qui va juger si c'est
approprié dans sa condition. Mais à moins qu'il ait autre chose, là, dans
votre... dans votre question.
• (11 h 50) •
Mme Schmaltz : Bien, en fait,
c'était... En fait, je voulais englober le... la notion de handicap là-dedans,
parce qu'on sait que, des fois dans certaines institutions, on peut être plus
encadré, à ce moment-là, peut-être être moins informé de... du droit à
l'autodétermination. C'est un peu ça, ma question.
M. Mathieu (Luc) :Bien, dans les... Quelqu'un qui... qui ferait une demande
d'aide, une personne handicapée, là, selon la nature de ce qui sera adopté dans
le projet de loi, qui ferait une demande, bien là il y a un professionnel
compétent... il y a deux professionnels compétents qui vont la rencontrer pour
faire... pour voir si c'est... si la personne a toute l'information, puis si
elle prend une décision en toute connaissance de cause, puis voir si elle
répond, entre autres, aux différents critères. Bien là, c'est là qu'il y a de
l'information, éventuellement, qui pourrait être donnée à cette personne-là sur
les choix qu'elle s'apprête... qu'elle s'apprête à faire, mais toujours dans un
contexte, là, que la personne est apte, là, et puis elle comprend ce qu'on
lui... ce qui lui est communiqué.
Mme Schmaltz : OK.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Je vais maintenant me tourner du côté...
s'il n'y a pas d'autre question, je vais me tourner du côté...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Un petit... un petit peu... On est... on est terminé. Bon.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
C'est terminé, c'est terminé.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste deux minutes? D'accord. Alors, le temps est à <vous
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
...tourner du côté...
Des voix :
...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
Un petit... un petit peu... On est... on est
terminé. Bon.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
C'est terminé, c'est terminé.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
Il reste deux minutes? D'accord. Alors, le temps est
à >vous.
Mme Gendron : Parfait. Je
vais être rapide, pour que vous puissiez répondre. Bonjour à vous trois. En
fait, je voulais savoir : L'accompagnement des infirmières au niveau,
justement, de l'administration de l'AMM, est-ce que la formation, d'après vous,
est adéquate? Est-ce qu'ils auront besoin d'un soutien par la suite, après
avoir donné l'AMM? De quelle façon voyez-vous ça?
Mme Roy (Caroline) : Est-ce...
Juste peut-être préciser votre question. Est-ce que vous parlez des infirmières
ou vous parlez des infirmières praticiennes spécialisées?
Mme Gendron : Des infirmières
praticiennes spécialisées. Excusez-moi.
Mme Roy (Caroline) : Oui. Bien,
en fait, à l'heure actuelle, les infirmières praticiennes spécialisées
disposent de la formation requise, là, pour tout ce qui touche leur rôle qui a
été dévolu par le projet de loi n° 6, qui est en vigueur.
Pour ce qui est de l'aide médicale à mourir,
c'est à géométrie variable à l'heure actuelle, mais il y a des... il y a quand
même de la formation qui est donnée sur l'aide médicale à mourir, mais notre
comité de la formation recommande à ce qu'il y ait un ajout, là, de trois à six
heures pour tout ce qui est des modalités entourant l'aide médicale à mourir en
complément, là, pour la formation des infirmières praticiennes spécialisées,
mais, d'office, l'ensemble des infirmières praticiennes spécialisées sont
formées pour accompagner les... la population, là, atteinte de maladies graves.
C'est plus les dispositions entourant l'aide médicale à mourir, là, qu'il y
aurait un complément qui serait requis.
Mme Gendron : Merci.
M. Mathieu (Luc) :Si je peux donner un complément, le trois à six heures,
c'est pour les IPS qui sont déjà en exercice...
Mme Roy (Caroline) : Exact.
M. Mathieu (Luc) :...puis qui pratiquent déjà. Et, comme l'a mentionné Mme Roy
dans une réponse précédente, pour... je dirais que celles, actuellement, qui
sont en formation et celles à venir, là, il y a un travail d'arrimage, là,
entre les différentes universités pour s'assurer que c'est bien couvert par
l'ensemble des universités, parce qu'actuellement, comme ça a été mentionné,
c'est à géométrie variable, cette question-là.
Mme Gendron : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cet échange. Donc, pour la poursuite,
justement, de ces échanges, je me tourne du côté de la députée de Westmount—Saint-Louis.
Votre temps commence, la parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup. Bienvenue et merci beaucoup pour votre témoignage ainsi que votre
mémoire. Je vais prendre la balle au bond de la question de la collègue. Si,
par exemple, un patient ou une personne qui demande d'avoir de l'aide médicale
à mourir décide qu'il préfère avoir l'administration par un médecin, est-ce que
ça, ce serait mal vu ou est-ce qu'il y aura quand même une ouverture? Parce
que, malgré qu'on dit que c'est important, et on constate que votre implication
est importante, et on veut élargir la possibilité d'offrir des soins aux
patients ou aux gens qui demandent avoir aide médicale à mourir, est-ce que ça,
ce serait mal vu ou pensez-vous que ce serait aussi une façon d'avoir une
collaboration puis assurer que la personne concernée serait rassurée?
M. Mathieu (Luc) :Bien, si la personne préfère que ce soit le médecin, là, qui...
qui fasse le processus d'évaluation puis d'admission de l'aide médicale à
mourir, il n'y a aucun problème, on va... ça va être respecté. Ça, c'est le
choix... c'est le choix des patients. Mais moi, je dirais que, comme pour
depuis le début du déploiement de la fonction des IPS dans le réseau de la santé,
au fur et à mesure que la population va apprendre à connaître ce que font les
IPS, ce qu'elles peuvent faire, comment c'est apprécié, bien, ça risque
d'arriver de moins en moins.
Mais, pour être bien précis par rapport à
votre question, oui, ça va être respecté, ça, là, de... puis c'est... ce n'est
pas de notre ressort à nous, mais ça va être dans les établissements de santé.
Mais, dans la... je pense que, dans la loi sur le service santé, ça le dit, là,
le patient... c'est la notion de faire son choix des intervenants qui le soignent
compte tenu de l'organisation des soins et services qui sont offerts aussi.
Alors, c'est dans ce cadre-là, là, que cette décision-là sera prise.
Mme Maccarone : Dans la
mesure du possible, oui, c'est... je comprends. Dans votre mémoire... Puis,
encore une fois, je vais renchérir un peu sur les questions de Mme la ministre
parce qu'on a parlé beaucoup de la notion de handicap. Merci de l'avoir inclus
dans votre mémoire. Plusieurs entre nous puis plusieurs personnes qui sont déjà
passées en commission ont fait un témoignage où c'est une notion qui est très
sensible. Nous avons besoin d'avoir une définition, une compréhension commune
de c'est quoi pour éviter des dérives et pour s'assurer aussi qu'on respecte le
plus possible l'autonomie puis le choix, les droits civils de tous les citoyens
qui souhaitent avoir accès à l'aide médicale à mourir.
Puis vous avez fait que... Puis je vais
vous citer de votre mémoire : «Bien que cette avancée représente un
soulagement pour cette clientèle, nous recommandons toutefois qu'un groupe
d'experts s'y penche afin d'établir une définition claire sur la notion de
handicap neuromoteur et aussi de bien encadrer la pratique d'AMM auprès de
cette clientèle.» Puis vous avez dit que vous... vous seriez intéressé d'abord
de participer à ceci. Dans le passé, on sait qu'il y a quand même eu des forums
qui ont eu lieu. Mme McCann, quand elle était ministre de la Santé à l'époque,
elle avait convoqué un forum pour se pencher sur les troubles mentaux, et notre
ministre de la Santé actuel a aussi fait une <demande...
Mme Maccarone :
...était
ministre de la Santé à l'époque, elle avait convoqué un forum pour se pencher
sur les troubles mentaux et notre ministre de la Santé actuel a aussi fait une >demande
d'un forum, alors... Puis c'est une journée, ça peut être deux journées, tout
dépendamment comment le gouvernement voit la mise en place d'un tel forum, mais
un ou deux jours où les comités d'experts, les personnes concernées peuvent venir
s'exprimer en ce qui concerne l'enjeu de l'inclusion de la notion de handicap
dans cette loi, qui est fort important. Est-ce que, selon vous, ce serait une
façon de rejoindre votre recommandation, d'avoir un comité d'experts, et
peut-être élargir la notion, puis de trouver un consensus ou, au moins, avoir
le pouls de la population et de groupes concernés comme vous?
M. Mathieu (Luc) :Oui. Bien, c'est tout à fait... c'est tout à fait le sens
de la recommandation, là, que... que vous retrouvez dans... dans notre mémoire.
Et puis de mettre à contribution aussi que... que la population suive ce que
les experts... voit un consensus qui se dégagerait, parce que, comme ça a été
mentionné par plusieurs, et puis que nous, on est à cette pensée-là aussi, il
faut s'assurer qu'il y a un consensus large au sein de la population québécoise.
Consensus, ça ne veut pas dire unanimité, là, mais que, compte tenu des
questions délicates, là, tout ce qui sous-tend l'aide médicale à mourir puis de
la sédation palliative continue.
Mme Maccarone : Oui.
Excellent. Je suis d'avis... je trouve que ce serait une belle avancée, une
façon d'essayer de trouver... Comme vous dites, ça va être très difficile de
trouver un consensus, mais parce que c'est sensible. Puis nous avons une
crainte d'envoyer un mauvais message à des personnes qui vivent avec des
handicaps que leur vie vaut moins, parce qu'on parle d'une ouverture pour
respecter les droits de tous les citoyens qui souhaitent avoir accès à ce soin
de fin de vie.
Alors, je suis contente qu'on pourrait
faire ceci puis je pense même qu'on pourrait faire un forum en parallèle avec
les travaux qu'on fait ici pendant que nous sommes en train de faire une
consultation sur la loi. Parce que le but, c'est... Parce que je comprends, on
a tous lu la revue de presse, ce n'était pas retardé, nos travaux. Je pense que
ça peut être fait en même temps que nous sommes en train de faire notre
consultation auprès de vous puis auprès des citoyens pour s'assurer qu'on
entend bien tous les parties prenantes puis que tous les parlementaires
pourront aussi participer.
S'il n'y a pas de compréhension commune de
la définition de handicap, selon vous, ce serait quoi, les dérives possibles
quand on parle de l'application de l'aide médicale à mourir?
M. Mathieu (Luc) :Bien, les dérives possibles, c'est parce que, si on s'en
tient juste au mot «handicap», je comprends qu'il y a les autres critères de la
loi en fin de vie, là, puis... Mais, en même temps, pour la population, un peu
comme vous l'avez dit... Puis souvent on est dans la perception, hein? Si
quelqu'un qui a un handicap, puis je ne veux pas minimiser les choses, là, mais
pas grave, là, qu'on pourrait qualifier de pas grave, puis dire : Bien,
est-ce que quelqu'un pourrait se qualifier, alors que ce n'est pas
nécessairement grave, là, au sens où on pourrait l'entendre? Alors, c'est... c'est
pour ça qu'il faut être prudent dans... dans... en cette matière.
Mme Maccarone : Je veux aussi
revenir sur la notion de refus. Ça a été des bonnes questions. Puis moi aussi,
j'étais surprise que ce n'était pas évoqué, parce que, dans le fond, vous serez
les professionnels qui seront sur place pour l'administration lors de
l'adoption de la loi. Ça fait que la notion de refus, si vous étiez à la place
de la ministre, qu'aimeriez-vous voir dans la loi pour que ce soit clair,
encore une fois, pour éviter des possibles dérives, mais de s'assurer que la
clarité dans la loi est là? Parce qu'actuellement on a entendu autres groupes
qui sont venus témoigner hier, qui ont dit que c'est flou. On essaie avoir une
clarité. On a parlé d'un refus versus un refus catégorique qui est écrit dans
le Code civil mais qui ne fait pas partie de le projet de loi n° 11.
Alors, comment verriez-vous cette notion de refus dans la loi pour vous aider à
bien accompagner des personnes concernées?
• (12 heures) •
M. Mathieu (Luc) :
Bien, il faudra voir les... C'est les circonstances cliniques qui feraient en
sorte qu'un refus serait... Une fois que la personne a, préalablement, là, dans
le cadre d'une demande médicale anticipée, une fois que la personne aurait donné
son... aurait fait une demande, et puis là elle serait apte. Mais, si, par
exemple, quelqu'un qui a... il a la maladie d'Alzheimer puis présente ce qu'on
appelle des SCPD, là, des syndromes comportementaux de la démence, puis devient
agité, puis qu'il dit... il manifeste, là, de l'agitation, bien, ça ne veut pas
dire nécessairement qu'il faut interpréter ça comme un refus. Ça, c'est des
manifestations cliniques. Il faut se rappeler que la personne, au préalable,
elle a dit : Si je me retrouve dans telle, telle condition. Puis là il y
aurait le tiers, là, le... comment on l'appelle dans la loi?
Mme Roy (Caroline) : Le tiers
de confiance.
M. Mathieu (Luc) :
Le tiers de confiance, avec l'équipe, l'équipe interprofessionnelle, l'équipe médicale,
l'équipe de soins. C'est un... c'est un travail d'équipe, que je dirais, pour
juger si la personne est vraiment au refus ou pas. Alors, si on a à clarifier
la <notion de refus...
>
12 h (version révisée)
< M. Mathieu (Luc) :
...avec l'équipe interprofessionnelle, l'équipe
médicale, l'équipe de soins, bien, c'est un travail d'équipe, que je dirais,
pour juger si la personne est vraiment en refus ou pas. Alors, si on a à
clarifier la >notion de refus, il faudrait voir c'est quoi, les... puis
là on ne pourra pas couper ça au couteau, hein? Il va rester une zone grise. C'est
pour ça que l'intelligence de l'équipe, là, va être importante à un moment
donné, mais, si on veut baliser un peu la notion de refus, c'est en fonction...
bien, ce serait dans quel type de... quelles sont les manifestations de refus
qu'on pourrait vraiment interpréter comme un refus, alors que, dans d'autres
cas, c'est plus des manifestations cliniques de la maladie de laquelle la personne
est atteinte.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Mathieu. Nous apprécions ces
échanges. On va les poursuivre avec la députée de Sherbrooke pour 2 min 48 s.
Le temps est à vous.
Mme Labrie : Merci, Mme la Présidente.
Je vais vous ramener sur la notion de handicap. Vous nous parlez d'un comité d'experts.
Est-ce qu'il y a déjà des lieux où des gens réfléchissent ensemble, de manière
interdisciplinaire, pour définir la notion de handicap ou est-ce qu'il y a des
gens que vous recommanderiez de nommer sur un tel comité pour définir la notion
de handicap?
Mme Roy (Caroline) : Bien, c'est
certain que les professionnels compétents, là, devraient être assis autour de
la table avec des experts dans le domaine. On pense que la population, aussi,
atteinte de handicaps devrait être entendue à cet égard-là. Donc, c'est sûr qu'il
n'y a pas de table, officiellement, en tout cas, à ma connaissance... pas à ma
connaissance, qui ont été mises sur pied, mais ça pourrait être très bien des
travaux, là, qui soient mis sur place avec des médecins, des infirmières, d'autres
professionnels de la santé, là, qui travaillent avec cette clientèle-là pour s'assurer
de vraiment bien circonscrire, là, ce qu'on vise comme portée. Ça pourrait être
avec des... c'est ça, des professionnels de la santé, des experts dans le
domaine, des patients qui sont atteints... pour aider à déterminer les balises
qui devraient être mises de l'avant, là, pour cette clientèle-là.
Mme Labrie : Puis il n'y a
pas, à votre connaissance, déjà une instance existante qui regrouperait ces
acteurs-là qui auraient l'expertise sur les enjeux de handicaps, qui pourraient
être spécifiquement consultés, plutôt que de former une nouvelle instance de
consultation?
M. Mathieu (Luc) :À notre connaissance, pas. Tu sais, il y a des chercheurs,
là, probablement, dans les facultés de médecine, sciences de la santé, qui
réfléchissent à ça, mais il faudrait les regrouper... les identifier, les
regrouper puis les joindre aux autres intervenants, là, comme ma collègue vient
de...
Mme Labrie : Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour ces réponses. Alors, je cède la parole à la
députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Mme Tardif : Bonjour. Merci d'avoir
pris le temps de préparer cet important dossier. Je retiens votre demande, de
la possibilité de mettre sur pied un comité conjoint CII-CMDP pour procéder à l'évaluation,
là, de la qualité des soins qui sont administrés. Je retiens aussi... Je
comprends que vous souhaiteriez que les conseils des infirmiers et infirmières,
dans les établissements publics, soient impliqués dans l'évaluation de la
qualité des soins fournis par les IPS à l'instar, je dirais, des conseils des
médecins et des pharmaciens, là.
M. Mathieu (Luc) :C'est ça.
Mme Tardif : C'est ça? D'autre
part, pour les IPS qui travaillent dans le secteur privé, on retient que ce
serait l'Ordre des infirmières qui procéderait à l'évaluation. Vous soulevez qu'il
y a quatre mécanismes ou quatre organismes. Si on ajoute le conseil conjoint, CII...
ça en ferait cinq. Là, je me demande comment on va faire pour s'assurer que l'évaluation
soit juste, équitable, mais surtout standard, conforme, la même pour tous les
professionnels.
Mme Roy (Caroline) : En fait,
c'est un peu la recommandation qu'on fait, de s'assurer qu'il y ait justement
un jumelage entre les différentes instances au lieu de le faire tous
séparément. Ce qu'on recommande, c'est que, par exemple, dans les... Parce que
ce qui est prévu à la loi à l'heure actuelle, c'est les établissements publics,
c'est les CMDP et les directions de soins infirmiers. Donc, nous, ce qu'on
demande, c'est que ces instances-là se regroupent dans les établissements pour
faire l'évaluation et non pas que chacun le fasse, quand c'est une infirmière,
c'est la DSI, quand c'est un médecin, c'est le CMDP, mais que ça se fasse
conjointement.
Donc, dans ce cas-ci, on aurait un seul
mécanisme pour le public. C'est sûr que la loi, aussi, à l'heure actuelle, pour
le privé, ce qui est prévu, c'est le Collège des médecins et l'Ordre des
infirmières. Nous, on a entrepris des discussions avec le Collège des médecins
aussi pour que ce comité-là soit conjoint et qu'on soit ensemble pour le regarder.
Donc, ça en fait deux, dans le fond, le public et le privé, au lieu d'en avoir
quatre, instances différentes. Nous, c'est ce qu'on recommande. L'implication
des CII, c'est de... parce qu'à l'heure actuelle la loi prévoit seulement les
directions de soins infirmiers... c'est de s'assurer que les CII soient aussi
partie prenante de cette évaluation-là parce que ça fait partie fait partie de
leur rôle <selon la loi sur la santé et services sociaux...
Mme Roy (Caroline) :
...fait
partie de leur rôle >selon la loi sur la santé et services sociaux.
Mme Tardif : Merci.
M. Mathieu (Luc) :Si vous permettez, en complément, c'est pour ça qu'on
demande que, dans l'article 26, le mot «respectif» soit enlevé pour
permettre cet arrimage-là. Puis, l'autre chose aussi, on anticipe peut-être ce
qui s'en vient, là, dans le projet de loi qui va créer l'agence Santé Québec et
on va peut-être toucher la gouvernance clinique dans les établissements de
santé. Alors, il faudrait que, bien, si c'est le cas, bien, que les CII, au
même titre que le CMDP puis le conseil... c'est un autre conseil dans les
établissements de santé, bien, soient... contribuent ensemble à l'évaluation
des soins. Et là c'est pour ça que, particulièrement ici, dans le cas des IPS
qui donnent l'aide médicale à mourir... de là notre recommandation que les CII
soient impliqués dans le processus d'évaluation de la qualité des soins.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci à vous trois pour cette excellente présentation.
Merci aux collègues pour les échanges. Alors, je vous souhaite une bonne fin de
journée.
Et, d'ici le prochain groupe, je suspends
les travaux. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 10)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous recevons l'Office des personnes
handicapées du Québec. Nous avons avec nous M. Daniel Jean, directeur
général, Mme Frances Champigny, présidente du conseil d'administration,
ainsi que M. Maxime Bélanger, directeur du secrétariat général,
communication et affaires publiques.
Bienvenue à vous. Vous allez disposer
d'une période de 10 minutes pour procéder, d'abord, à votre... à une
présentation ainsi qu'à votre propos, s'ensuivront ensuite les périodes
d'échange. Alors, la parole est à vous.
Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ)
Mme Champigny (Frances) : Merci,
Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, mon nom est Frances Champigny. Je
suis la présidente du conseil d'administration de l'Office des personnes
handicapées du Québec. D'abord, on vous remercie d'avoir invité l'office à
participer à ces consultations.
L'OPHQ, je vous rappelle, est un organisme
gouvernemental qui met tout en œuvre <pour faire du Québec...
Mme Champigny (Frances) :
...je
vous rappelle, est un organisme gouvernemental qui met tout en œuvre >pour
faire du Québec une société plus inclusive. Notre objectif est de... les
obstacles rencontrés par les personnes handicapées, leurs familles et leurs
proches, poursuivant une gestion au plan individuel en offrant des services à
ces personnes et une gestion aussi au plan cognitif en travaillant avec le
gouvernement, des municipalités ainsi que des organismes privés et
communautaires. Nous réalisons également des travaux d'évaluation pour bien
documenter la situation des personnes handicapées du Québec.
L'office est appuyé par un conseil
d'administration qui est composé en majorité de personnes handicapées et de
membres de leurs familles, des membres de... provenant de différents horizons
de la société civile... la mission de notre organisme, nous sommes
particulièrement interpelés sur le sujet de l'aide médicale à mourir, qui
soulève des enjeux importants pour les personnes handicapées.
Je vais donc laisser la parole à M. Jean
pour vous faire part de nos commentaires et nos recommandations à ce sujet. M. Jean.
M. Jean (Daniel) : Bonjour. Merci
pour votre invitation. Comme vient de le mentionner Mme Champigny, le projet
de loi n° 11 soulève des enjeux très importants pour les personnes
handicapées. Rappelons qu'elles représentent 16,1 % de la population et
que 61 % d'entre elles ont des incapacités liées à la douleur. Il est
important de reconnaître la pleine autonomie décisionnelle de celles-ci au même
titre que toutes les autres personnes de la société. Nous saluons le fait que
le législateur veuille faire évoluer la Loi concernant les soins de fin de vie.
C'est une volonté exprimée par la société québécoise ces dernières années.
En ce sens, nous appuyons globalement le
projet de loi. Il donne suite à plusieurs recommandations. Notre principale
préoccupation est en rapport avec l'introduction dans la loi du handicap
neuromoteur grave et incurable. Comme vous le savez, la Loi concernant les
soins de fin de vie prévoit déjà que toute personne handicapée atteinte d'une
maladie grave et incurable, répondant à toutes les conditions admissibles, est
admissible à recevoir l'aide médicale à mourir comme toute autre personne. Cependant,
le projet de loi, lui, modifie ou modifie cette donnée-là pour inclure
expressément les personnes ayant un handicap neuromoteur grave et incurable.
Celles-ci pourront dorénavant demander l'aide médicale à mourir si elles
répondent à toutes les autres conditions d'admissibilité.
Nous considérons que l'introduction du
handicap neuromoteur grave et incurable soulève des enjeux importants qui méritent
d'être examinés. Nos commentaires à cet égard seront de deux ordres.
Premièrement, le terme «handicap
neuromoteur grave» n'est pas défini par le projet de loi. Il n'existe aucun
renvoi à ce terme dans le corpus législatif québécois. S'il n'est pas défini
clairement dans la loi, ce terme pourrait être sujet à des interprétations
diverses. De plus, cette appellation renvoie à une approche de diagnostic
médical qui est peu compatible avec le Modèle de développement humain — Processus
de production du handicap. C'est sur ce modèle que repose la définition de «personne
handicapée» incluse dans la Loi assurant l'exercice des droits des personnes
handicapées au Québec. Sans vouloir soulever un débat sémantique, nous tenons à
souligner que l'utilisation du terme «handicap neuromoteur» introduit une
incohérence dans la terminologie québécoise du handicap.
Nous comprenons toutefois que ce choix est
dicté dans un souci d'harmonisation avec le Code criminel. Celui-ci fait
référence uniquement au terme «handicap» sans le qualifier. À cet égard,
l'incohérence entre la loi québécoise et la loi fédérale risque de perdurer. La
loi québécoise serait plus restrictive que la loi fédérale parce qu'elle limite
l'accès à l'aide médicale à mourir aux seules personnes ayant un handicap
neuromoteur grave et incurable.
Pour éviter toute divergence dans
l'interprétation de ce terme, nous recommandons que l'on précise dans la loi ce
que l'on entend par ce terme ou que l'on mandate la Commission sur les soins de
fin de vie pour le faire. Dans le fond, ce qu'il faudrait, c'est, à tout le
moins, dresser la liste des diagnostics auxquels ce terme renvoie pour savoir,
bien, qui est visé par ça.
Deuxièmement, le deuxième point qu'on
voulait apporter sur cet enjeu-là, c'est que le projet de loi ne vise qu'un
segment de la population des personnes handicapées. L'office ne <dispose
d'aucune...
M. Jean (Daniel) :
...de
la population des personnes handicapées. L'office ne >dispose d'aucune
donnée démontrant que ce groupe présente des caractéristiques particulières qui
les différencient des autres personnes handicapées ayant des incapacités. Donc,
dans ce contexte-là, cibler spécifiquement ce groupe-là peut potentiellement
être discriminatoire et ouvrir à des recours devant les tribunaux.
Enfin, nous tenons à souligner que
l'utilisation du terme «handicap» dans le contexte particulier de la loi sur
l'aide médicale à mourir est loin d'être banale. Bon, c'est un terme qui peut
renvoyer à des préjugés qui sont encore véhiculés au sujet des personnes
handicapées : dévalorisation, fardeau qu'elles peuvent représenter pour
les proches et la société, etc. Donc, il s'agit d'une question très sensible,
d'où l'importance de mettre l'accent sur les autres critères d'admissibilité à
l'aide médicale à mourir plutôt que sur le handicap ou la maladie.
Cela étant dit, nous saluons la volonté du
législateur de prendre en compte la réalité des personnes handicapées dont la
condition entraîne des souffrances constantes et insupportables qui ne peuvent
être apaisées dans des conditions que ces personnes jugent tolérables. Nous
comprenons aussi qu'il veuille procéder avec prudence avant d'élargir davantage
l'accès à l'aide médicale à mourir. Cette façon de faire permet de mieux gérer
les risques et de protéger les personnes les plus vulnérables.
Nous tenons à signaler un élément que le
législateur sera peut-être appelé à prendre en compte concernant l'introduction
dans la loi du handicap neuromoteur grave et incurable. Le comité fédéral mixte
spécial sur l'aide médicale à mourir a présenté tout récemment son rapport. Ce
comité a abordé la question de l'accès à l'aide médicale à mourir aux personnes
handicapées et de la protection des personnes plus vulnérables. Ce rapport
mentionne qu'il est important de clarifier que les personnes handicapées
peuvent être admissibles à l'aide médicale à mourir, mais que leur seul
handicap ne suffit pas à permettre de déterminer leur admissibilité.
Il recommande que le gouvernement du
Canada examine la possibilité d'apporter des modifications au Code criminel
afin de permettre d'éviter toute stigmatisation des personnes handicapées, sans
pour autant les priver de l'accès à l'aide médicale à mourir. Les options
devraient inclure le remplacement des références au handicap dans le Code
criminel en portant attention aux ramifications juridiques potentielles d'une
telle modification à travers le Canada.
Nous considérons qu'à terme ce n'est pas
la maladie ou la situation de handicap qui doivent dicter nos actions, mais
précisément les critères de l'article 26 de la loi, c'est-à-dire
l'aptitude à consentir, le déclin avancé et irréversible des capacités, éprouver
des souffrances physiques ou psychologiques constantes, insupportables et qui
ne peuvent être apaisées dans des conditions jugées tolérables.
J'aimerais maintenant aborder la question
de l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul problème médical est un
trouble mental. Nous avions recommandé, en 2021, de ne pas élargir l'aide
médicale à mourir à ces personnes, et ce, tant qu'il n'y aurait pas une
évidence scientifique reconnue appuyant celle-ci. Comme le projet de loi n° 11 va dans le même sens de notre recommandation, nous
appuyons les modifications proposées à cet égard.
Cependant, nous croyons qu'il faudrait
poursuivre la réflexion. La question va inévitablement se poser. Dans le cadre
de la loi fédérale, ces personnes seront admissibles à l'aide médicale à mourir
à partir du 17 mars 2024. Enfin, nous insistons à nouveau sur l'importance
d'améliorer l'accès aux soins et aux services en santé mentale pour soulager
les souffrances de ces personnes.
• (12 h 20) •
Concernant les demandes anticipées d'aide
médicale à mourir, nous y sommes favorables. Nous appuyons la modification à la
loi permettant qu'une personne majeure et apte puisse faire une demande
anticipée d'aide médicale à mourir à la suite de l'obtention d'un diagnostic de
maladie grave et incurable menant à l'inaptitude. Elle a fait l'objet d'un
large débat social durant... duquel s'est dégagé un consensus. Nous souscrivons
aussi aux diverses règles qui seront applicables à une telle demande. Un tel
encadrement est essentiel pour éviter toute dérive possible.
Pour terminer, la question de l'accès à
l'aide médicale à mourir est un sujet complexe et qui évolue. Il faut
poursuivre la réflexion et mener des travaux. L'office offre son entière
collaboration pour participer à tous les travaux visant l'accès à l'aide
médicale à mourir aux personnes handicapées. En ce sens, nous recommandons,
d'une part, de poursuivre la réflexion sur l'élargissement éventuel de l'aide
médicale à mourir à l'ensemble des personnes handicapées, incluant
éventuellement celles dont le seul problème médical est un trouble mental. Deuxièmement,
on recommande de produire annuellement des données sur les personnes
handicapées demandant l'aide médicale à mourir, l'ayant reçue ou pas, en
prenant en compte les données socioéconomiques et les services dont elles <ont
bénéficié...
M. Jean (Daniel) :
...en
prenant en compte les données socioéconomiques et les services dont elles >ont
bénéficié. Enfin, on recommande de mettre sur pied un groupe d'experts chargé
d'étudier les besoins de l'ensemble des personnes handicapées en ce qui
concerne l'aide médicale à mourir. On recommande d'y associer l'office et les
représentants des personnes handicapées.
Je vous remercie pour votre attention.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Mme Champigny, M. Jean, M. Bélanger, merci beaucoup pour cet
exposé. Ces recommandations et ces observations vont certainement susciter des
questions.
On va commencer avec la banquette de la
ministre. Vous avez une période de 13 min 18 s. Le temps est à
vous.
Mme Bélanger : Oui. Alors,
bonjour. Merci de participer, là, à cette commission. Merci beaucoup, Mme Champigny,
pour votre présentation, et M. Jean.
Alors, bien, c'est une bonne... c'est des
bons sujets que vous déployez ce matin, et puis je comprends très bien que la
notion de handicap neuromoteur, en fait, il n'y a pas de définition précise, il
n'y a pas de consensus scientifique. Vous avez inscrit dans votre mémoire que
ça renvoie nécessairement à des diagnostics médicaux, ce qui va un peu, je
dirais... pas à l'encontre, mais qui va... qui ne fait pas partie, dans le
fond, des approches reconnues en réadaptation. Vous avez vraiment une vision
beaucoup plus globale. Alors, il y a un glissement, à ce niveau-là, qu'en
définissant le volet neuromoteur on glisse vers, nécessairement, des
diagnostics médicaux.
Ma question, c'est... Vous avez participé
à la Commission sur les soins de fin de vie, la Commission spéciale sur les
soins de fin de vie. Vous étiez présents aussi dans toutes les réflexions qu'il
y a eu, au fil des dernières années, en lien avec la première... l'adoption de
la première loi sur les soins de fin de vie. Est-ce que vous avez réfléchi à la
définition de l'handicap neuromoteur? Comme office, comme office, est-ce que
vous avez été tentés de vous donner une propre définition qui ne serait pas une
définition avec des diagnostics médicaux?
M. Jean (Daniel) : Pour nous,
si on allait dans cette voie-là, il faudrait regarder la question d'incapacité
qui découle de la condition de la personne. Il faudrait regarder plus cet
élément-là. L'élément qui nous embête un peu là-dedans.... Puis, dans les
faits, pour être clairs, on salue les avancées qui sont sur la table, parce
qu'actuellement une personne pourrait avoir un AVC, OK, puis, suite à sa
condition, là, OK, tout dépendant si c'est quelque chose qui découle d'une
maladie ou si c'est quelque chose qui découle d'un traumatisme, si elle est,
disons, paralysée, on n'aura pas... elle n'aura pas accès aux mêmes services.
Pourtant, elle va vivre les mêmes souffrances.
Nous, notre réflexion, c'est sous l'angle
de dire... On n'est pas en train de dire qu'il faut nécessairement que toutes
les personnes handicapées aient l'aide médicale à mourir. Ce qu'on dit, c'est
que les personnes qui sont aptes, les personnes qui, dans le fond, ont des
souffrances qu'on n'est pas capables de régler et qu'on a tout fait, bien là
ils devraient avoir un service comparable aux gens qui ont la même condition
suite à une maladie.
Donc, l'approche du projet de loi, d'y
aller par étapes puis, après ça, de se rendre éventuellement... c'est l'esprit
d'une de nos recommandations, de se rendre à ceux qui ne sont pas visés par le
handicap neuromoteur qui pourrait venir plus tard, bien, prenons le temps de
faire les travaux. Ça fait que j'aurais tendance à parler de la notion
d'incapacité, autrement dit, reliée à la condition neuromotrice.
Mme Bélanger : Une question
de précision. Êtes-vous à l'aise avec le concept élargi qu'on retrouve au
niveau du Code criminel fédéral, qui mentionne la notion de handicap, point,
sans préciser... Est-ce que vous, comme office, vous êtes à l'aise avec ça?
M. Jean (Daniel) : Sur le
fond, oui, mais ça, ça implique deux choses. Ça implique des ajustements dans
les pratiques. Ce que je veux dire par là, c'est que, dans la loi à l'heure
actuelle, c'est une maladie, OK? Donc, c'est normal qu'on ait une équipe
médicale qui voit à assurer le traitement puis à suivre... puis ce que je
comprends, la volonté du projet de loi, c'est d'assurer que le soin soit en
continuité avec tout ce qui s'est fait auparavant. Donc, on est dans une
logique de maladie.
Si on introduit les personnes qui ont une
condition qui n'est pas reliée à une maladie, donc qui est en... la personne
est en situation de handicap, là, ça amène complètement une autre réalité, c'est-à-dire
qu'à mon point de vue, dans l'équipe qui doit encadrer les demandes, il devrait
y avoir une plus grande présence des acteurs provenant du secteur de la
réadaptation. Et, quand on parle de personnes handicapées puis qu'on ne parle
pas de la notion de maladie, on <parle, dans le fond...
M. Jean (Daniel) :
...et,
quand on parle de personnes handicapées puis qu'on ne parle pas de la notion de
maladie, on >parle, dans le fond, d'une interaction avec une communauté,
c'est-à-dire que le handicap, c'est le fruit d'une interaction entre une
personne avec sa condition puis les obstacles qu'elle va rencontrer. Quand les
obstacles sont reliés à la douleur et que ce n'est pas relié à une maladie, ça
demande des interventions spécifiques, des expertises spécifiques en
réadaptation, notamment.
Mme Bélanger : OK. Une dernière
question, de mon côté. Je vais laisser mes collègues par la suite... mais c'est
vraiment intéressant. Vous êtes... Dans le fond, vous représentez l'Office des
personnes handicapées du Québec. Est-ce que vous avez des vis-à-vis dans les
autres provinces ou dans d'autres pays? Avez-vous des rencontres avec d'autres
partenaires de type office de personnes handicapées comme on a au Québec? Et,
si oui, est-ce qu'à votre connaissance, en particulier au Canada, ils ont
discuté de la notion de handicap?
M. Jean (Daniel) : Actuellement,
on n'a pas d'équivalent, en Amérique du Nord ni ailleurs dans le monde,
d'organismes qui ont exactement cette mission-là. Il y a des organismes qui
existent ailleurs dans le monde où ils vont avoir la responsabilité... La
première mission de l'office, c'était de donner des services directement, de
lui-même, aux personnes handicapées, puis la loi a été modifiée pour que ce
soit l'ensemble des ministères, organismes gouvernementaux, municipalités qui
donnent des services.
Donc, d'avoir un organisme comme au Québec,
qui assure l'application cohérente de la loi puis qui assure les liens, ça, il
n'y a pas d'équivalent. Les tribunes où on peut parler de ce genre de dossier
là, ça va être au niveau de l'ONU, pour l'international, et, au niveau du
Canada, ça va être sur des comités spécifiques, mais, sur la notion de handicap
telle qu'on l'entend là, je vous dirais qu'aussi vrai que pour l'aide
financière de dernier recours ils n'ont pas de programme vraiment spécifique.
On commence à les voir émerger. Le Québec était assez avancé là-dessus et aussi
sur tout le débat de handicap. Le handicap n'est pas... Si on considère que la
personne handicapée est... a les mêmes droits que les autres personnes, il faut
se poser la question : En vertu de quoi on lui donnerait accès à l'aide
médicale à mourir? Et, pour moi, le critère qui demeure, c'est uniquement la
souffrance ou une maladie qu'elle a.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci, Mme la ministre. Je
pense que, la députée de Soulanges, vous avez quelques questions. La parole est
à vous.
Mme Picard : Bonjour. Merci
beaucoup pour votre présence. C'est toujours intéressant de vous avoir en
commission parlementaire avec nous.
Moi, j'ai beaucoup entendu, là, de
certains contacts, des gens qui disaient que... qui sont porteurs... qui ont
une situation en handicap, qui me disaient que ça envoie un mauvais message, le
fait qu'on inclue le handicap. En fait, ça a déjà été fait au fédéral, mais
comment nous, on pourrait... c'est très délicat, mais comment on pourrait aider
à ce que le message soit plus clair, passe mieux? Comment on peut représenter
ça dans cet écrit-là qui est si important?
M. Jean (Daniel) : Bien,
d'une part, l'angle sous lequel on regarde la problématique, et, comme je le
disais tantôt, c'est en vertu de la loi québécoise, puis la loi québécoise nous
dit : Dans tout projet de loi ou dans tout programme, dans tout service
qui est fait, il faut se poser la question : Est-ce qu'on discrimine au
regard des personnes handicapées ou on a une approche inclusive?
Ça fait que, quand on regarde l'aide
médicale à mourir, c'est pour ça que, dans notre mémoire, on rappelait quelque
chose de très important, c'est-à-dire qu'une personne, actuellement, qui est
handicapée et qui a une maladie, OK, qui répond aux critères de l'aide médicale
à mourir aurait droit actuellement à l'aide médicale à mourir. Donc, ce n'est
pas en fonction de son handicap mais de sa maladie. Quand on regarde du côté de
la maladie, l'enjeu fondamental, c'est : Pourquoi je ne respecterais pas
le choix d'autodétermination d'une personne dont l'origine de sa condition
n'est pas liée à une maladie? Donc, ça, c'est l'enjeu.
• (12 h 30) •
Votre question, c'est : Quel message
qu'on peut envoyer? Bien, pour moi, c'est justement de ne pas insister
nécessairement sur l'enjeu de handicap, quoiqu'il faut le nommer, il ne faut
pas le cacher, mais c'est de dire : Écoutez, il y a des critères très
précis, là, OK, le consentement... Il n'est pas question de rentrer, autrement
dit, dans une ressource de soins palliatifs puis de dire : Bien, tous
ceux-là, là, ils ont droit à l'aide médicale à mourir. Non, non, ça prend,
d'une part : est-ce qu'il y a consentement, est-ce qu'il y a eu les
services, bon, etc., tous les critères.
Donc, pour moi, en termes de message, si
on veut être le plus inclusif possible, ça doit comprendre les personnes
handicapées, mais ça doit en même temps protéger leurs droits. Donc, ça, ça
amène deux choses, ça veut dire d'être clairs dans notre message puis aussi
être clairs sur les <services qu'on...
>
12 h 30 (version révisée)
< M. Jean (Daniel) :
...deux
choses : ça veut dire d'être clairs dans notre message puis aussi être
clairs sur les >services qu'on leur offre. Parce que, si on ne donne pas
des services de qualité, bien, c'est sûr que la condition de la personne va se détériorer
puis... Donc, il y a cet équilibre-là qu'il faut maintenir. Et c'est pour ça
que c'est un soin. Nous, on le voit comme un soin fin de vie dans un continuum.
Et les parties du continuum doit être robustes. Et mon point de vue, si on
disait que maintenant on inclurait certaines situations... certaines personnes
handicapées en fonction non pas de leur maladie, mais de leur condition qui
entraîne des souffrances... Je... dans le mémoire, là, 61 % des personnes
handicapées ont des... ont des incapacités liées à la douleur. Ce ne sont pas
toutes des douleurs extrêmes, mais il y en a, il faut le reconnaître. Donc,
comment on peut les aider là-dedans, ce n'est pas uniquement en disant :
Ils auront droit à l'aide médicale à mourir, mais aussi et surtout ils ont
droit à des services adaptés à leur condition. Et c'est cet équilibre-là qu'il
faut essayer de trouver. Et c'est ça que... qu'on apprécie, nous, comme office,
dans le débat qui est en train de se faire actuellement, parce qu'on se... on
regarde le problème sous les deux aspects.
Mme Picard : J'ai une
dernière question. Je voudrais vous parler justement des gens qui n'ont pas de
diagnostic, des... ou des gens qui ont des maladies orphelines. Pensez-vous que
ça peut avoir un enjeu aussi, là, ça peut les pénaliser, à quelque part, dans
le... dans la loi actuelle, comment c'est écrit? Ou bien comment vous voyez ça,
les gens avec des maladies orphelines?
M. Jean (Daniel) : Avec les
maladies orphelines, si ce n'est pas relié à la situation... à la définition de
«personne handicapée», là on tombe dans... dans un domaine médical puis on a
moins cette expertise-là, comme office. Mais, si on regarde des gens qui, dans
le fond, ont un profil qu'on nomme actuellement «maladie», mais qui serait une
condition qui s'apparenterait, là, donc qui répondrait, à terme, à la
définition de «personne handicapée», nous, on pense qu'il faut aller... aller de
l'avant là-dedans pour... sur la réflexion. Parce qu'il y a... Ce n'est pas... Ce
n'est pas nécessairement une condition ou un diagnostic qui devrait déterminer
si tu souffres plus ou moins. C'est pour ça que, nous, notre recommandation, c'est
de mettre sur pied un comité : ils sont où, les personnes qui souffrent, c'est
quoi le volume. Je suis sûr que, si on se mettait à regarder les chiffres, on
ne verrait pas des centaines et des centaines de personnes, on verrait des
petits nombres par groupes puis on verrait... Peut-être, ça nous aiderait même
à nous poser la question : Qu'est ce qu'on est capables de faire en amont
pour mieux prévenir? D'où la réflexion, je pense. C'est important de... de continuer
la réflexion pour aller le plus loin possible sur les deux axes.
Mme Picard : Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci, Mme la députée. Est-ce
que j'ai d'autres questions? Petite question rapide. Mme la députée de Vimont.
Mme Schmaltz : ...est-ce
qu'il y a une différence entre une personne handicapée et une personne en
situation de handicap ou ça veut dire la même chose?
M. Jean (Daniel) : Dans les
faits, il y a une appellation, il y a un courant de pensée à l'heure actuelle
de dire qu'on devrait dire «des personnes en situation de handicap». On a une
publication à l'office qu'on pourrait rendre disponible à la commission et qui
vient... un article qui vient expliquer les... les éléments. Une personne qui
est en situation de handicap, techniquement, elle pourrait être en situation de
handicap temporaire comme elle pourrait être en situation de handicap permanente.
Cette appellation-là ne vient pas capter cet élément-là. Par contre, il y a des
gens qui aiment mieux cette appellation-là que «personne handicapée», parce qu'ils
disent : Quand on dit «personne handicapée», c'est comme si on mettait
toute... toute la... la pression sur l'individu. Puis, le modèle de handicap, c'est
justement de dire : C'est l'interaction entre un individu et sa condition
et l'environnement qui va faire qu'il va être en situation de handicap. Si j'ai
des incapacités motrices, je suis au quatrième étage, il n'y a pas d'ascenseur,
j'ai un obstacle, je suis en situation de handicap. S'il y a un ascenseur, je
suis capable de me déplacer.
Donc, nous, ce qu'on dit, à l'office, on
dit : Vous pouvez utiliser «les personnes en situation de handicap», mais,
quand vous faites référence à des programmes qui... Parce que la notion de «personne
handicapée», c'est persistant, hein? C'est... Ce n'est pas une condition
temporaire, c'est une question... une condition permanente. Donc, dans ce cas-là,
ce qu'on dit tout simplement, c'est qu'ici vous utilisez «une personne en
situation de handicap», qui répond aux critères du programme. «Personne
handicapée», exemple, c'est... Parce qu'il faut... il faut... il faut bien
départager les choses, sinon on est en... on serait en train de dire qu'il faut
ouvrir les programmes à toute personne qui a une incapacité. J'ai une opération
puis je vais avoir des difficultés à me déplacer pendant un mois, j'aurais
droit à tous les services. Et ce n'était pas l'esprit du législateur. L'esprit
du législateur, c'était de s'occuper spécifiquement des personnes qui étaient
les plus négligées dans les services publics, à cette époque-là, en... de 1998
à 2004.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean.
M. Jean (Daniel) : OK.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Ce que je vais faire, je vais vous demander de nous
envoyer... envoyer à la secrétaire le document, on va le déposer. Tout le monde
va y avoir accès, ce qui est une... une question très importante.
M. Jean (Daniel) : Parfait.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Je vais me tourner maintenant du côté de la députée de D'Arcy-McGee
pour une période de 8 min 24 s. Le temps est à vous.
Mme Prass : Merci. Bien,
merci pour votre présence et votre mémoire, ça aide à alimenter nos <discussions...
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...Le temps est à vous.
Mme Prass :
Merci.
Bien, merci pour votre présence et votre mémoire, ça aide à alimenter nos >discussions.
Donc, je vais aller sur justement ce qu'on
parlait, de la définition de «handicap neuromoteur». Comme la ministre l'a dit,
comme vous l'avez dit, il n'y a pas de consensus scientifique à cet égard, de
la définition. Évidemment, c'est un projet de loi avec des... avec des impacts
qui auront une grande répercussion, donc. Et, de ce que je comprends, dans le
passé, ça a toujours été des comités d'experts quand il y a eu des enjeux de
définition de termes dans le cadre de l'aide médicale à mourir. Et donc je
pense que, plutôt que de laisser cette définition à des fonctionnaires ou nous
autour de la table, qui ne sont pas des experts là-dessus, que, justement, il
devrait y avoir un forum en parallèle de la commission pour amener autour de la
table des groupes comme le vôtre et d'autres qui pourront contribuer à cette
définition.
Donc, première question : Seriez-vous
intéressés, si c'est... si c'est le cas, de participer à cette... à ce forum, à
cette réflexion-là? Et, justement, quels sont les différents éléments de
société ou les différents groupes que vous pensez devraient être présents pour
pouvoir contribuer à cette définition?
M. Jean (Daniel) : Bien, d'une
part, il faut rappeler que l'Office des personnes handicapées est un organisme
gouvernemental dont le conseil d'administration est composé effectivement de
personnes nommées, qui sont des personnes qui sont en situation de handicap.
Donc, on est un organisme gouvernemental. Donc, nous, on est habitués autant de
travailler avec les municipalités, avec les ministères et organismes
gouvernementaux que les organismes communautaires.
L'esprit de la loi, à l'heure actuelle,
c'est de dire : Les personnes handicapées ont les mêmes droits que tout le
monde, OK? Et actuellement, si on devrait faire... si on avait à faire une
réflexion pour les personnes handicapées, bien, il faut que ce soit pour et
avec eux. Donc, nous, la proposition, et c'est... c'est ce qu'on dit dans notre
mémoire, nous, on pense qu'à l'heure actuelle on... on voit juste en disant
qu'il y a un groupe de personnes dans la communauté actuellement qui... comme
dans l'exemple que j'expliquais tantôt, de la paralysie, là, que, peu importe
l'origine de la... de... bien, pas «peu importe», du fait de l'origine de la
paralysie, je n'aurais pas le même... les mêmes droits, les mêmes accès. Donc,
il faut essayer de corriger cette situation-là.
Et, s'il y a un débat public à faire, OK,
peu importe le... le médium qu'on va prendre, moi, je pense, ça prend les...
les personnes handicapées, les représentants de personnes handicapées puis,
j'insiste aussi là-dessus, les intervenants du volet social. C'est-à-dire que,
quand on était dans une logique de maladie uniquement, c'est normal qu'on
retrouve tous les grands spécialistes qui oeuvrent dans le champ de... dans...
dans le secteur des maladies. Quand on est dans les conditions, OK, qui se
définissent par une interaction sociale, c'est là que ça nous prend des
travailleurs sociaux, des psychologues, ça nous prend des ergothérapeutes, ça
nous prend différents... Ça fait que moi, je dis : Un débat qui est... qui
est sain, les personnes elles-mêmes, leurs représentants, ça, c'est... c'est les
premières voix, les proches aidants, les... les membres de la famille, on est
au cœur, là, OK, des... des personnes qui vivent ça au quotidien, puis après ça
rajoutons les expertises que ça prend pour bien capter leurs préoccupations.
Mme Prass : Oui. Dans le même
sens, ça pourrait contribuer à échanger sur l'intention législative...
d'élargir la... l'aide médicale à mourir, parce que, justement, on sait que...
bien là on est à, je pense, la troisième mouture, donc c'est une conversation
qui continue. Et, comme vous avez dit, c'est fondamental que les personnes qui
sont visées vont être impliquées dans la définition et comment ça va se faire.
Donc, encore une fois, je pense qu'il est nécessaire que ce ne soit pas dans...
dans... justement, juste dans la... entre les mains des fonctionnaires, si vous
voulez, que ce soit justement de la part de ceux qui le vivent et qui vivent
dans cette réalité-là. Donc, je suis contente d'entendre que vous êtes d'accord
et que vous voyez les différents éléments, les différents groupes, les
différents représentants qui devraient en faire part pour vraiment s'assurer
que c'est une définition qui n'est pas... qui n'est... qui n'est pas négatif,
justement, pour les personnes qui vont être inclus.
• (12 h 40) •
Je sais que vous n'en avez pas parlé dans
votre mémoire, mais je voudrais vous poser une question à propos de la notion
du refus. Parce que, là, ce qu'on... de ce qu'on comprend, c'est que, pour les
demandes anticipées, évidemment, la demande est faite au moment où la personne
est encore apte de prendre cette décision-là, mais que, dans le projet de loi, on...
il y a un... un article pour référer au fait que, si la personne refuse au
moment de recevoir le traitement, donc en état inapte, que le refus va être...
donc le... la demande anticipée va être rejetée, le refus va être... va être accordé.
Et je vous... Et, moi, ma question, c'est justement : Le but d'avoir la
demande anticipée, c'est quand on est apte, on prend une décision, donc
pensez-vous qu'il est de justesse que, quand la personne n'est plus apte,
qu'elle puisse revenir sur cette décision en ne pas... en ne sachant pas
nécessairement... ne comprenant pas nécessairement le... l'impact de ce
geste-là?
M. Jean (Daniel) : La demande
anticipée, on< réfère...
Mme Prass :
...ne
comprenant pas nécessairement le... l'impact de... de ce geste-là?
M. Jean (Daniel) :
La
demande anticipée, on >réfère à autre chose que l'article 26 dans
le projet de loi, OK? Ça vient... Ça vient capter une problématique très
spécifique. Et vous avez raison de poser la question, parce que, dans le fond,
cette personne-là, qui est atteinte d'une maladie dégénérative qui... on le
sait qu'à terme va altérer, là... elle ne sera pas capable d'exprimer son... sa
volonté. Donc, dans ce contexte-là, on le permet. Et il faut... il faut être conscients,
tu sais, ça pourrait être une personne handicapée qui est atteinte de cette
maladie-là, OK? C'est ça, la réalité.
Donc, pour moi, le débat est le même pour
les personnes avec incapacité ou sans incapacité. C'est-à-dire que, pour moi,
si on exprime un choix puis qu'on le valide à la... à la toute fin, tant qu'on
est capables d'avoir un consentement de la personne, il faut toujours suivre
ça. Nous, la position de l'office, ça a toujours été... pas juste pour la
demande anticipée, mais pour toute... toute demande dans le processus, on a
toujours dit qu'il ne devrait pas y avoir une demande qui est faite par
quelqu'un d'autre, c'est toujours la personne qui devrait être en contrôle.
Donc, de ce que j'en comprends de votre
question, ma réponse, ce serait d'avoir la même approche qu'avec une personne
qui est avec incapacité ou sans incapacité.
Mme Prass : Et justement je
pense que, comme je dis, la question de... de ce forum pourrait justement aider
à... à définir toutes ces réalités-là et tous ces termes en l'entendant de
la... de la bouche, justement, des gens qui ont fait de l'accompagnement ou
qui... qui l'ont vécu d'une façon, donc je pense que c'est important. Encore
une fois, on a des termes qui sont très spécifiques, qui vont avoir un grand
impact, donc je pense qu'il... il faut vraiment qu'on fasse attention à la
façon dont on va les définir, parce que c'est quelque chose qui va être compris
dans la loi et qui va avoir des répercussions par la suite.
Donc, moi, ma dernière question pour vous,
ce serait votre... une de vos recommandations également est de mettre sur pied
un groupe d'experts chargé d'étudier les besoins de l'ensemble des personnes
handicapées en... ce qui concerne l'aide médicale à mourir. Pensez-vous
justement que, dans le cadre de ce projet de loi, que ça a été... que... qu'on
a vraiment pensé aux différents aspects, justement, comment ça va affecter les
personnes handicapées? Êtes-vous un petit peu réticents, disons, envers la façon
dont ça a été approché?
M. Jean (Daniel) : Actuellement,
les questions qu'on a posées à cet égard-là, ça a été de... de dire : Bon,
on... comme j'ai fait l'intervention tantôt en disant : L'équipe qui va...
qui va entourer le traitement de la demande doit être conséquente si on
élargit. Et ça, ce n'est pas des éléments qui sont à prescrire dans la loi,
mais dans les directives. Et moi, j'ai eu toutes les assurances que, si on
ouvrait pour les personnes handicapées, qu'on allait toujours le faire dans un
juste équilibre entre les services que les personnes doivent recevoir puis le
constat qu'on n'est pas capables d'aller plus loin puis on est rendus dans ce
soin-là, OK? Donc, il n'y a aucune indication, à l'heure actuelle du côté de l'office,
que, dans le fond, les personnes handicapées seraient stigmatisées dans
l'approche, bien au contraire. Et le fait qu'il y a des groupes de
représentants de personnes handicapées qui sont invités à la commission, nous,
ça nous rassure parce que c'est... dans le fond, on se dit : Pour et par
les personnes, ce que je disais tantôt, peu importe le véhicule de discussion,
tant que les personnes handicapées peuvent se faire entendre, nous, on est
satisfaits.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci pour vos questions. Je
vais me tourner maintenant du côté de la députée de Sherbrooke pour 2 min 48 s.
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente.
Je vais essayer quelque chose avec vous. Je
vais mettre une idée au jeu pour tâter le terrain. Parce qu'on discute beaucoup
de la notion de handicap puis, au final, je me demande si on a besoin de la
définir. Donc, je... je vous soumets humblement l'idée. Si la formulation,
plutôt que d'écrire comme critère «la personne est atteinte d'une maladie grave
et incurable» ou «elle a un handicap neuromoteur grave et incurable», si on
parlait plutôt de «condition médicale» puis qu'on disait «elle est atteinte
d'une condition médicale grave et incurable», est-ce que ça viendrait répondre
aux préoccupations? Est-ce que ça viendra englober ce qu'on souhaite englober ou
la notion de condition médicale n'est pas la bonne pour parler de ça?
M. Jean (Daniel) : Bien,
la... la question est vraiment intéressante. Mais, quand on parle de «condition
médicale», on parle nécessairement de médical, on ne parle pas de social, OK? Ça,
c'est clair. Mais la question que vous posez me suscite une réflexion que
quelqu'un m'a déjà partagée à l'office. C'était de dire : Si on enlève
justement de l'article la référence à une maladie ou à un handicap, bien là on
reste au cœur du problème, c'est-à-dire est-ce qu'il y a une souffrance, est-ce
qu'il y a un consentement, est-ce que... peu importe l'origine, OK, puis
toujours dans une logique d'un soin continu puis d'un service qui est offert,
approprié à la personne. Et je n'ai pas... on n'a pas testé cette idée-là, l'office,
mais il y aurait quelque chose d'intéressant à valider au niveau juridique,
est-ce qu'on a besoin de préciser. Mais, si on enlève ces deux termes-là,
demeure toujours la question. Il faut toujours <avoir...
M. Jean (Daniel) :
...est-ce
qu'on a besoin de préciser. Mais, si on enlève ces deux termes là, demeure
toujours la question. Il faut toujours >avoir l'approche médicale,
l'approche sociale, je ne dis pas un sans l'autre, c'est les deux, les deux
doivent travailler main dans la main pour... au service de la personne et de
l'entourage.
Mme Labrie : Alors, est-ce
que, si je vous comprends bien, vous parleriez... Sans nommer «médical», vous
parleriez d'une «condition grave et incurable», évidemment. Puis on garde le
critère de souffrance, là, assurément, il n'est pas question de... de changer
ça ici. Ça, c'est quelque chose qui permettrait de peut-être répondre?
M. Jean (Daniel) : ...je vous
dis ça, je n'ai pas validé, il y a quelque chose d'intéressant là-dedans.
J'aurais... J'aurais une petite réserve parce que j'ai toujours horreur de
donner un conseil qui ne s'avère pas utile après ça. J'aurais tendance à dire :
Il faudrait le valider, là, auprès des... de spécialistes. Mais, dans le fond, l'idée
de base qu'on a soulevée au début, c'est qu'on disait : Si une personne a
une paralysie, si c'est issu d'une maladie, elle est couverte, si ce n'est pas
issu d'une maladie, elle n'est pas couverte. Puis pourtant c'est la même
souffrance, puis qu'on a tout fait. Donc, c'est ça, l'enjeu fondamental pour
moi.
Mme Labrie : Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Vraiment intéressant. Merci beaucoup, M. Jean. Alors,
on va terminer ce... la... nos périodes d'échange avec la députée indépendante.
Voilà. Le temps est à vous pour 2 min 48 s.
Mme Tardif : Bonjour. Merci
beaucoup à vous trois.
Vous avez compris que nous souhaitons, en
tant que législateurs, éviter à tout prix toute stigmatisation et qu'on veut...
on veut s'appuyer sur des critères stricts, sur des critères précis, comme
l'aptitude à consentir, les critères de maladie grave, la souffrance,
l'incurable. Bon, je voulais voir avec vous trois comment vous voyez le rôle du
tiers de confiance lors de la prise de décision. Comment faire pour que cette
personne-là... pour cette personne-là, la pression ne soit pas trop forte pour
elle, dépendamment des handicaps?
M. Jean (Daniel) : Mme la présidente.
Mme Champigny (Frances) : On
sait bien! On en a parlé suffisamment en CA hier, comment prévoir que... Il va
falloir qu'on mette des mécanismes en marche pour prévoir, pour prévenir ça.
C'est de l'inquiétude qu'on retenait, ça, nous autres : Qu'est-ce qui
empêcherait la famille à dire : Ah! va-t'en, tu sais? La... Il va falloir
mettre des mécanismes... Vous savez, on dit... on a des limites de vitesse sur l'autoroute,
c'est parce qu'il y a du monde qui ne les respecte pas. Ça fait que je pense
qu'il va falloir mettre des mécanismes en marche.
M. Jean (Daniel) : Il faut
que ce soit le plus clair possible entre... Dans le fond, c'est toujours pour
l'intérêt de la personne. Ça fait que, si on implique le proche, ce n'est
toujours pas pour l'intérêt uniquement du proche, mais l'intérêt premier. Et
beaucoup de parents, de proches ont cette préoccupation-là, donc il faut aller
les capter. Mais effectivement, comme dit Mme la présidente, si on ne met pas
des règles claires, bien, on risque d'avoir des petits dérapages ici et là.
Mme Tardif : Merci, merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Alors, il me reste à vous remercier,
au nom de l'ensemble des parlementaires ici, d'avoir justement fait des bonnes
propositions, d'avoir débattu aussi... non pas débattu, mais d'échanger avec
nous. Je vous souhaite une excellente fin de journée.
Et, pour nous les parlementaires, nous
allons suspendre jusqu'à 15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 h 10)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
relations avec les citoyens va reprendre ses travaux.
Cet après-midi, nous allons recevoir le Barreau
du Québec — bienvenue — la Chambre des notaires du Québec,
le Regroupement provincial des comités des usagers ainsi que le Conseil pour la
protection des malades.
Alors, pour l'heure, nous allons donc
recevoir le Barreau du Québec, qui est représenté par Me Catherine Claveau, bâtonnière,
Me Hélène Guay, membre du groupe de travail sur l'aide médicale à mourir, ainsi
que Me Sylvie Champagne, secrétaire et directrice des affaires juridiques.
Bienvenue à la commission. Je pense que vous êtes... vous êtes un peu... vous
connaissez un peu le processus. Vous allez avoir 10 minutes pour vous
présenter ainsi qu'exposer votre vision sur le projet de loi. Alors, la parole
est à vous.
Barreau du Québec
Mme Claveau (Catherine) : Merci,
Mme la Présidente. Mmes les députées, alors, effectivement, je suis Catherine
Claveau, bâtonnière du Québec. Je suis accompagnée de Me Sylvie Champagne, qui
est à ma gauche, ici, <directrice...
Mme Claveau (Catherine) :
...bâtonnière
du Québec. Je suis accompagnée de Me Sylvie Champagne, qui est à ma gauche, ici,
>directrice de l'ordre... des affaires juridiques de l'ordre, ainsi que
de Me Hélène Guay, qui est membre de notre groupe de travail sur l'aide
médicale à mourir.
Au nom du Barreau du Québec, je vous
remercie de nous avoir invitées à participer aux consultations particulières
entourant ce projet de loi si important. Le Barreau a participé à l'évolution
juridique du dossier de l'aide médicale à mourir avec grand intérêt depuis le
tout début, soit à partir de la consultation dans le cadre de la commission
spéciale de l'Assemblée nationale sur la question mourir dans la dignité, qui
s'est tenue, on se rappellera, en mai 2010. D'emblée, rappelons que le
Barreau du Québec ne promeut pas l'administration de l'aide médicale à mourir.
Il défend plutôt le droit de tous les citoyens aptes à donner un consentement
libre et éclairé de décider des soins qu'ils préconisent lorsqu'ils sont
affectés de problèmes de santé graves et irrémédiables leur causant des
souffrances persistantes, qui leur sont intolérables au regard de leur
condition.
Il faut admettre que la pensée de la
population québécoise a évolué au fil du temps, et le droit de l'aide médicale
à mourir, sujet sensible et délicat s'il en est un, mérite une attention
particulière de la part des parlementaires. À cet égard, l'élargissement de
l'aide médicale à mourir soulève des questions sérieuses, tant du point de vue
juridique qu'éthique. C'est pourquoi nous sommes guidés, dans notre réflexion,
par les principes fondamentaux suivants : le droit à l'autodétermination
de la personne et de sa dignité, le droit à l'accès aux soins de fin de vie et
à l'aide médicale à mourir partout sur le territoire du Québec, le droit à
l'égalité, droit incontournable lorsque vient le temps de réaliser pleinement
le droit à la vie et le droit à l'autonomie de chaque personne apte à consentir
à l'aide médicale à mourir, ainsi que la protection contre la discrimination,
plus particulièrement en évitant de perpétuer les stéréotypes visant les
groupes de personnes considérées vulnérables en concluant, d'entrée de jeu, à
leur incapacité à pleinement consentir à l'aide médicale à mourir.
C'est dans ce contexte que nous souhaitons
vous faire part de certains commentaires concernant divers aspects du projet de
loi n° 11. Premièrement, nous réitérons la nécessité de suivre les
enseignements de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Carter. Rappelons qu'en
2015 la Cour suprême a reconnu que l'aide médicale à mourir devrait être
accessible selon les conditions suivantes : un, la personne touchée
consent clairement à mettre fin à ses jours et, deux, la personne est affectée
de problèmes de santé graves et irrémédiables, y compris une infection, une
maladie ou un handicap lui causant des souffrances persistantes qui lui sont
intolérables au regard de sa condition.
Afin d'établir un régime clair, égalitaire
et bienveillant en matière d'accessibilité à l'aide médicale à mourir, en 2019,
la Cour supérieure abonde dans le même sens dans la décision Truchon.
Malheureusement, le projet de loi n° 11 ne se conforme pas aux
enseignements de cet arrêt parce que, notamment, il reconnaît uniquement le
handicap neuromoteur, il maintient l'exigence d'un déclin avancé et
irréversible des capacités de la personne et il exclut le trouble mental.
Nous estimons que la qualification de «neuromoteur»
ajoute une condition supplémentaire, alors que cela n'est pas prévu au Code
criminel. En effet, l'article 241.2 du Code criminel prévoit les critères
de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir, et seul un handicap grave et
incurable est suffisant pour remplir la condition d'être affecté d'un problème
de santé grave et irrémédiable. Néanmoins, nous reconnaissons qu'il existe un
besoin criant d'accommodement et d'adaptation concernant la manière dont seront
évalués les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les
personnes vivant avec une déficience intellectuelle, de même que de la
formation adaptée à ces situations destinée aux professionnels traitant ces
demandes.
Enfin, il faut tenir compte du fait que,
le 10 mars dernier, le projet de loi C-39, le projet de loi fédéral qui
contient des dispositions sur l'aide médicale à mourir, a reçu la sanction
royale et est entré en vigueur immédiatement. Rappelons que ce projet de loi
prévoit que les personnes dont le seul problème médical est une maladie mentale
seront admissibles à l'aide médicale à mourir à partir du 17 mars 2024.
En conséquence, le Barreau est favorable au report de l'inclusion du trouble
mental comme condition d'accès à l'aide médicale à mourir dans la Loi
concernant les soins de fin de vie.
Le deuxième aspect qui ne peut demeurer
sous silence est l'absence d'harmonisation du Code criminel et de la Loi
concernant les soins de fin de vie. Nous reconnaissons que le Québec a été la
première province à légiférer sur cette question. Toutefois, depuis 2015, il y
a eu une valse de projets de loi qui font en sorte qu'il est difficile, voire <périlleux...
Mme Claveau (Catherine) :
...Toutefois, depuis 2015, il y a eu une valse de projets de
loi qui font en sorte qu'il est difficile, voire >périlleux pour les
juristes, patients et médecins de s'y retrouver. Ainsi, nous sommes d'avis
qu'il est primordial, pour la protection du public et les professionnels
autorisés qui auront à administrer l'aide médicale à mourir, que les conditions
soient claires, précises et, surtout, qu'elles ne soient pas contradictoires.
Cet aspect est interrelié avec notre
prochain commentaire, qui touche les nouvelles dispositions particulières
concernant les demandes anticipées d'aide médicale à mourir. Pour l'instant, le
Code criminel ne prévoit que deux exceptions pour lesquelles l'aide médicale à
mourir peut être prodiguée sans le consentement contemporain de la personne. Il
y a d'abord la renonciation au consentement final, qui est permise pour la
personne dont la mort est raisonnablement prévisible, puis lors de l'autoadministration
de l'aide médicale à mourir, lorsque la personne a commencé
l'autoadministration et perd conscience.
Afin de rencontrer les objectifs de rendre
rapidement accessibles aux citoyens les demandes anticipées d'aide médicale à
mourir, nous préconisons la mise sur pied, par le gouvernement fédéral, d'un
projet pilote au Québec. Ce projet pilote permettrait aux citoyens du Québec de
bénéficier de la possibilité de formuler une demande anticipée d'aide médicale
à mourir dès l'adoption du projet de loi. Par ailleurs, nous croyons qu'il
serait bénéfique pour tous que les demandeurs puissent obtenir des conseils
juridiques de la part d'un juriste afin que ce dernier leur explique les
tenants et aboutissants d'une demande anticipée d'aide médicale à mourir. À
l'instar de ce qui se fait déjà en matière de médiation familiale, pour
laquelle le gouvernement offre des heures payées avec un médiateur accrédité,
le Barreau est d'avis qu'une consultation avec un juriste, qu'il soit avocat ou
notaire, d'une durée d'une heure et demie devrait être offerte par le
gouvernement.
Aussi, le Barreau du Québec s'interroge
sur la notion de souffrance objectivable par un professionnel compétent lorsque
ce dernier évalue si l'administration de l'aide médicale à mourir doit être
pratiquée. En effet, la souffrance est une notion subjective qui relève
essentiellement de la perception de la personne elle-même et non d'un standard
objectif. Les souffrances éprouvées par les personnes sont l'un des critères
les plus personnalisés et les plus respectueux de l'autonomie des volontés de
la personne dans la loi québécoise, la loi fédérale et les décisions
jurisprudentielles sur lesquelles l'aide médicale à mourir se base.
Nous saluons enfin l'ouverture à la
possibilité, pour les infirmières praticiennes spécialisées, d'administrer
l'aide médicale à mourir. Et nous accueillons également favorablement la
modification visant à interdire aux maisons de soins palliatifs d'exclure
l'aide médicale à mourir. Ces deux nouveautés contribueront à améliorer l'accès
à ce soin partout au Québec.
Je termine ma présentation en vous
rappelant que le Barreau a exprimé d'autres commentaires, qui se trouvent dans
notre mémoire, dont vous avez déjà pu prendre connaissance. Nous vous
remercions encore une fois pour cette invitation et nous sommes maintenant
prêtes à recevoir vos questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Claveau, pour la précision, la clarté de
vos commentaires et de vos recommandations. On ouvre donc la période d'échange
avec les parlementaires qui sont membres de la commission. On va commencer avec
Mme la ministre. La parole est à vous, pour une période de 16 min 30 s.
• (15 h 20) •
Mme Bélanger : C'est bon.
Alors, merci beaucoup, Mme la Présidente. Mme la bâtonnière du Québec, Me
Catherine Claveau, et vos collègues, bienvenue. Merci d'avoir déposé ce
mémoire, merci pour la présentation, beaucoup d'énoncés très importants. Et je
comprends bien que, dans les recommandations que vous faites, c'est vraiment
d'aller vers l'harmonisation avec le Code criminel canadien, notamment sur la
notion de handicap, et j'aimerais vous entendre à ce sujet-là.
La notion de handicap, au niveau canadien,
nous apparaissait très large, pas bien définie, et, dans les travaux qui ont
été faits ici, au Québec, puis à la lumière de ce qu'on entend de différents
groupes, il y avait un besoin de bien baliser, par devoir de prudence, la
notion de handicap. Donc, est apparue, dans le projet de loi, la notion de
handicap neuromoteur. J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je pense
que c'est vraiment important, c'est un élément assez costaud du projet de loi,
donc c'est bien important, là, de bien comprendre pourquoi. Parce que je
comprends qu'il y a le volet de l'harmonisation, mais, au-delà de
l'harmonisation... Parce que, quand même, je pense qu'au Québec on a été quand
même précurseurs, on a été les premiers à adopter une loi sur les soins de fin
de vie, avant <même...
Mme Bélanger :
...a
été quand même précurseurs, on a été les premiers à adopter une loi sur les
soins de fin de vie, avant >même que, donc, ceci soit prévu dans le Code
criminel canadien. Alors donc, je voudrais vous entendre sur la notion de
handicap versus handicap neuromoteur.
Mme Champagne (Sylvie) : Alors,
au niveau de la notion de handicap, c'est vrai qu'on indique dans notre mémoire
qu'on veut une harmonisation avec le Code criminel, mais ce qu'on doit retenir
c'est que le gouvernement fédéral a donné suite à l'arrêt Carter de la Cour
suprême, qui énonçait les critères pour être admissible à une... de l'aide
médicale à mourir, et, dans son arrêt, la Cour suprême ne fait pas cette
distinction. Quand elle parle de maladie grave, elle dit bien que ça peut être
une maladie, une affliction ou un handicap, sans le définir. Et nous, au
Barreau, on est d'avis qu'il faut se coller aux enseignements de la Cour
suprême pour éviter, dans le fond, de faire une discrimination au niveau des
citoyens qui pourraient être admissibles à cette aide médicale à mourir.
Et, quand on vient préciser... au niveau
du handicap, si on dit «neuromoteur», c'est parce qu'on veut, donc, écarter
d'autres handicaps. Et, nous, ce qu'on pense qui doit guider, dans le fond,
l'admissibilité, c'est est-ce que la personne, elle est apte ou non à consentir
aux soins, qu'elle ait une maladie, un handicap ou une affliction. C'est, dans
le fond, son droit à l'autodétermination, son droit de consentir aux soins
qu'elle souhaite, puisque l'aide médicale à mourir est un soin. Alors, on vous
encourage à ne pas faire cette distinction-là au niveau du handicap. Je ne sais
pas si, Me Guay, vous voulez ajouter quelque chose.
Mme Guay
(Hélène) :Bien, oui, j'irais aussi... j'attirerais l'attention
des membres de cette commission sur le fait que non seulement Carter, mais
aussi la juge Baudouin, dans sa décision en septembre 2019, a bien
souligné, dans des termes très éloquents, la raison pour laquelle il ne faut
pas faire cette distinction-là, à savoir catégoriser en fonction d'une
déficience ou d'un handicap. Il ne faudrait pas priver les personnes qui
souffrent d'un handicap, soit à la naissance ou soit par accident, d'avoir
accès à l'aide médicale à mourir, qui est un soin qu'on reconnaît, comme vous
l'avez dit, au Québec depuis tant d'années. Dans le mémoire, on le mentionne,
notamment, sauf erreur, à la page 10, et on vous cite un extrait du
jugement Truchon. Je vais vous en glisser un mot :
«La condition physique ou mentale des
personnes handicapées ne constitue pas un élément parmi d'autres qui pourra
éventuellement les rendre admissibles à l'aide médicale à mourir. Leur aptitude
à consentir, les souffrances ressenties objectivées, le déclin avancé de leurs
capacités constituent tous des éléments pertinents dans l'évaluation globale de
la demande. Même s'il faut rester vigilant, il est loin d'être évident qu'une
personne pourra ou voudra recevoir l'aide médicale à mourir uniquement en
raison de son handicap.»
On peut comprendre la prudence ou la
préoccupation que le législateur a, mais, plus loin, même, dans le jugement, l'honorable
Baudouin le mentionne, la prudence et la préoccupation que la juge... dont la
juge Baudouin était saisie à ce moment-là, c'était de retrancher de la loi la
fin de vie, la notion de fin de vie ou la mort raisonnablement prévisible.
L'exercice qui a été fait a été un exercice fort éloquent dans le sens où elle
a retourné toutes les pierres pour voir pourquoi on est en mesure d'adhérer à
la demande des demandeurs de retirer ce critère-là. Et elle a pris soin,
justement, d'aborder la question des personnes handicapées en disant :
Finalement, il faut effectivement permettre à toutes et à tous d'avoir accès,
même s'il y a... même s'il y a présence d'un handicap.
Donc, je pense qu'au... il nous semble
qu'au Québec nous avons ce qu'il faut pour nous conforter avec le fait que, si
tant est qu'il y ait une préoccupation — elle était très grande,
devant la juge Beaudoin, par tous les experts et par tous les avocats des
procureurs généraux — si tant est qu'on a une préoccupation, bien, il
faut se rassurer sur le fait qu'il y a dans la loi des balises, des critères
qui doivent être rencontrés, qui viennent, justement, conforter le fait que ce
n'est pas parce qu'une personne a un handicap qu'il faut la considérer comme
étant inapte à consentir à l'aide médicale à mourir. Et ça, ça m'apparaît... ça
nous apparaît très important de reconnaître cette aptitude-là au départ, parce
qu'aller dans le sens inverse c'est d'exercer, d'une certaine façon, un
paternalisme médical <envers...
Mme Guay (Hélène) :
...parce qu'aller dans le sens
inverse c'est d'exercer, d'une certaine façon, un paternalisme médical >envers
ces personnes-là, de les considérer comme étant inaptes à former cette... ce consentement-là.
Et c'est pour ça qu'au Barreau on considère qu'ajouter le terme «handicap» est
une chose, mais il ne faudrait pas restreindre à un handicap neuromoteur.
Mme Bélanger : Intéressant.
Puis, puisqu'on parle des critères, donc, vous avez mentionné la volonté de la
personne, d'abord, hein, qui devrait primer, l'aptitude à consentir, bien sûr.
Le caractère de fin de vie a été retiré du projet de loi qui a été déposé. Il y
a d'autres critères, et j'aimerais vous entendre sur ceux-là. Je ne suis pas
certaine, tantôt, d'avoir bien compris, là, dans votre mémoire, c'était bien
écrit, mais je ne suis pas certaine, là, que j'ai bien entendu... sur le
caractère grave, et incurable, et irréversible. Vous n'avez pas parlé de ça
tantôt, caractère grave, incurable et irréversible. Et quelle est votre
position?
En fait, bien, je vais répéter ma question.
J'aimerais vous entendre sur les deux autres critères qui sont dans la loi, le
caractère grave, incurable et irréversible, ainsi que l'autre élément, qui est
très important, qui est la souffrance physique, psychologique, persistante, non
apaisante, là, ces deux éléments-là.
Mme Champagne (Sylvie) : Alors,
on est d'accord à conserver ces deux éléments-là parce qu'ils font
effectivement l'objet des balises que la Cour suprême a énoncées dans Carter.
Par contre, le critère qui est supplémentaire, qui n'apparaît pas dans les
conditions énoncées par la Cour suprême, c'est celui du déclin avancé et
irréversible de ses capacités. Alors, ça, c'est un critère supplémentaire qu'a
ajouté le gouvernement fédéral. Et ce n'était pas dans Carter. Alors, selon
nous, quelqu'un pourrait contester cette exigence-là, et il y a un risque, là,
de contestation, étant donné que la Cour suprême ne l'avait pas mise dans ses
conditions. Donc, on veut éviter, là, des litiges à venir et on pense qu'on
pourrait retirer ce critère-là.
Mme Bélanger : Le critère de
l'irréversibilité?
Mme Champagne (Sylvie) : Le
critère du déclin avancé et irréversible de ses capacités. Donc, ce n'est pas
la maladie qui est incurable et irréversible, c'est plus au niveau du déclin
avancé de ses capacités. Dans le fond, c'est le critère 4° de l'arrêt...
de l'article 26, parce que celui qui est incurable, c'est le
critère 3°.
Mme Bélanger : OK. On va
prendre ça en note. On va revenir tantôt, je suis certaine que d'autres
personnes vont vouloir préciser.
Sur les autres volets, bien, le trouble
mental, donc, je comprends... là, je ne sais pas si je dois dire «en faveur»,
mais, pour l'instant, en faveur du fait qu'on le repousse ou qu'on... qu'il ne
soit pas inclus dans le projet de loi actuel?
Une voix : Oui.
Mme Bélanger : Puis pourquoi?
Parce... J'aimerais ça savoir pourquoi, parce que, puisque ça aussi, c'est
prévu dans le Code criminel. Ils ont repoussé l'application, mais pourquoi
celui-là, vous êtes en faveur qu'on le... qu'il ne soit pas inclus dans notre
projet de loi?
Mme Claveau (Catherine) : Disons
qu'on en suspende l'application. C'est un ajout très important, puis je pense
effectivement que ça nécessite une réflexion profonde, provenant de différents
acteurs, qui, pour nous, peut justifier un délai additionnel, notamment. Je ne
sais pas si on peut compléter avec ça.
Mme Bélanger : ...c'est
intéressant. Pourquoi vous pensez que, pour le trouble mental, il faut
poursuivre la discussion? Est-ce que c'est en lien avec la vulnérabilité des
personnes, en lien avec, je ne sais pas, le volet de l'aptitude à consentir?
• (15 h 30) •
Mme Champagne (Sylvie) : Non,
je pense que... je pense que c'est plutôt au niveau de la formation des
professionnels sur le terrain, et des directives, et des protocoles. Vous avez
entendu le Collège des médecins, hier, vous dire qu'ils ont fait un rapport et
que ça va prendre des balises peut-être un peu différentes pour les personnes
qui ont des problèmes de santé mentale. Alors, nous, ce qu'on voudrait, c'est
que ce soit inclusif et que, donc, ces personnes, qui ont un trouble de santé
mentale, puissent éventuellement bénéficier de l'aide médicale à mourir s'ils
respectent les autres conditions. Mais on comprend que, peut-être, sur le
terrain, les professionnels ne sont pas prêts, et donc le report d'un an nous
paraît adéquat.
Mme Bélanger : Ça va. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci, Mme la ministre. Je pense que la députée
de Vimont avait levé sa main. Allez-y.
Mme Schmaltz : Oui, parfait.
Merci. Bonjour, mesdames...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste... je vous informe qu'il reste <4 min 50 s...
>
15 h 30 (version révisée)
<17949
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...la députée de
Vimont avait levé sa main. Allez-y.
Mme Schmaltz :
Oui,
parfait. Merci. Bonjour, mesdames.
La Présidente (Mme Lecours,
Les Plaines) :
Je vous informe qu'il reste >4 min 50 s.
Mme Schmaltz : OK. Alors,
on a le temps?
Une voix : On a le temps.
Mme Schmaltz : J'ai une
question qui concerne la formulation de la demande anticipée. Vous mentionnez
au... Vous mentionnez que les intervenants sont trop nombreux. On note... Vous
dites que la procédure prévue quant aux demandes anticipées est associée à un
formalisme lourd qui risque de réduire l'accès et l'utilisation de ces demandes
à l'AMM à de nombreuses personnes. Est-ce qu'il y a des données qui prouvent
que les gens puissent, si je comprends bien, que les gens, en cours de route,
parce que la formulation est trop lourde, qu'ils puissent décider de ne pas
aller de l'avant? Est-ce que c'est ça que je lis, que je comprends?
Mme Guay (Hélène) :Bien, en fait, la réflexion qu'on a eue
sur cette suggestion, c'est la suivante. Il faut que... Pour que les gens
formulent la demande, il faut d'abord que ce soit clair, simple, facile. Et
aussi on a... On considère, nous, que la suggestion d'inclure plusieurs
intervenants au stade de la demande et même par la suite, ça ne va pas
nécessairement aider à la formulation et à la mise en œuvre.
Je vais vous donner des exemples. Dans la
pratique, ce qu'on a, on a certains outils. Depuis 1990, on a le mandat de
protection. Depuis 2015, on a les directives médicales anticipées. Ce qui est
intéressant avec le projet de loi, c'est qu'on permet qu'il y ait, pour la
personne qui formule la demande, la possibilité, si elle le souhaite, d'inclure
une personne, d'inclure, de faire participer un proche, mais, pour la suite, on
s'inquiète du fait qu'il y ait plusieurs intervenants à plusieurs niveaux. Eut
égard, justement, à l'application et la mise en œuvre du mandat de protection,
c'est le mandat en prévision d'inaptitude. Donc on prévoit qu'on va être inapte,
on s'aperçoit qu'il y a plusieurs possibilités de personnes qui participent à
la décision qui a été prise par la personne, à savoir, quand on la met en
œuvre, on va avoir un proche, un proche aidant, un conjoint, une cousine, etc.
Et là il faut... Il faut... Probablement, la meilleure des choses, c'est de s'en
tenir à avoir une personne qui ne... Le moins de personnes possible pour éviter
d'engendrer des conflits potentiels entre ces personnes-là pour la suite de...
pour la suite des choses.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste encore du temps.
Mme Schmaltz : Bien,
c'est ça, vous pensez qu'une personne, c'est suffisant?
Mme Guay (Hélène) :Le tiers de confiance a été identifié
dans le projet de loi. On laisse aussi la possibilité à la personne d'en
référer, si elle le désire, à ce qu'il y ait la présence d'un proche. Ça va. Je
ne vois pas l'intérêt d'avoir plus qu'un tiers de confiance.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. La députée d'Abitibi-Ouest voulait poser une
question. Il reste 1 min 40 s
Mme Blais : Merci, Mme
la Présidente. Mesdames, bonjour. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors,
moi, je me réfère à votre mémoire, page 8, recommandation 13, article 1.2 :
Les maisons de soins palliatifs ne peuvent exclure l'aide médicale à mourir.
Alors, «Les maisons des soins palliatifs déterminent les soins de fin de vie qu'elles
offrent dans leurs locaux. Toutefois, elles ne peuvent exclure l'aide médicale
à mourir des soins qu'elles offrent. Toute maison de soins palliatifs doit,
avant de recevoir une personne, lui indiquer les soins de fin de vie qu'elle
offre.» Alors, j'aimerais vous entendre, j'aimerais que vous élaboriez sur ça
parce que c'est mêlant un petit peu.
Mme Guay (Hélène) :Bien, ce qu'on se rappelle, c'est qu'à l'adoption
de la loi il y a eu des maisons de soins palliatifs qui ont eu l'opportunité de
ne pas offrir l'aide médicale à mourir, alors que c'est un soin reconnu par le
législateur. Et on a adhéré à cette position-là. On a eu plusieurs discussions
aussi, on était conscientes de ça, mais là ce qu'on voit dans l'article, c'est
qu'on constate qu'il y a eu un changement depuis le projet de loi n° 38,
et on voit qu'on suggère qu'à ce moment-là toutes les maisons de soins
palliatifs vont devoir offrir l'aide médicale à mourir comme soins. Alors, il y
a eu... Certaines de ces maisons de soins palliatifs ont eu l'opportunité de ne
pas les offrir. Alors, l'objectif ici, c'est de vous demander de clarifier la
situation pour ces établissements-là qui vont désormais être tenus, sinon
autorisés à les exclure. Alors, on <comprend qu'ils ne devraient plus les
exclure...
Mme Guay (Hélène) :
...être tenus, sinon autorisés à
les exclure. Alors, on >comprend qu'elles ne devraient plus être exclues,
mais il faudrait clarifier si ça s'applique à toutes les maisons de soins
palliatifs, même celles qui avaient eu cette autorisation-là.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci beaucoup. C'est tout le temps que
nous avions pour cette portion des échanges. On va poursuivre avec la députée
de Westmount—Saint-Louis pour une période de 9 min 54 s.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, Mme la bâtonnière. Bonjour, maître.
Bonjour, maître. Un plaisir de vous avoir avec nous. Puis merci beaucoup pour
votre mémoire et votre témoignage. Je pense que ça va vraiment nous aider en ce
qui concerne la bonification de ce projet de loi. Puis merci beaucoup parce que
vous parlez de la distinction entre maladie et handicap, ce qui est fort
important, parce que ce n'est pas tous les handicaps qui découlent d'une
maladie et ce n'est pas toutes les souffrances qui ont besoin d'être liées à la
maladie aussi. Alors, je pense que c'est très important qu'on s'en... qu'on tienne
compte de ça dans nos délibérations.
Vous avez aussi fait la mention de...
C'est l'autodétermination que je trouve aussi fort intéressante et importante. Si
on enlève la notion de neuromoteur, on peut inclure, par exemple, les personnes
qui souffrent d'une déficience intellectuelle, des personnes qui souffrent de
l'autisme, par exemple, s'ils sont aptes à consentir à un soin et s'ils souffrent
d'une maladie, par exemple, comme le cancer. Mais je vous mets au défi, là, parce
que ce qu'on a entendu beaucoup en commission spéciale, parce qu'on a parlé un
peu de la notion d'autodétermination et comment nous pouvons aussi protéger ces
personnes qui se retrouvent souvent en situation de vulnérabilité ou qui sont elles-mêmes
vulnérables, on a entendu aussi hier que nous devons exclure déficience
intellectuelle. Puis on peut imaginer que, quand on dit une exclusion de
déficience intellectuelle, on parle d'une déficience intellectuelle grave, en
conséquence quelqu'un qui n'est pas apte. Devons-nous prévoir quelque chose
dans la loi pour protéger aussi ces personnes qui sont vulnérables?
Vous savez, je suis mère de deux enfants,
probablement... et qui sont autistes, qui sont aptes, pas aptes. Ce serait
difficile pour moi-même de... Écoute, j'espère. Évidemment, je ne souhaite pas
que ça arrive à quelqu'un proche de moi puis surtout pas à mes enfants, mais,
si, mettons, ils tombent malades puis ils se retrouvent dans une situation où
ils souffrent et ils ont de la misère à exprimer leurs souffrances, mais c'est
rendu à cause d'un accident d'auto, je ne sais pas si je serais en mesure de
déterminer s'ils sont eux-mêmes capables de consentir à un soin, malgré que je
considère mes enfants aptes. C'est qui qui devrait faire la détermination dans
un cas de même?
Mme Guay (Hélène) :Bien, c'est un privilège d'être... de
recevoir ce que vous nous dites. Ceci dit, moi, je peux vous dire qu'une partie
de ma clientèle, c'est ça, des gens qui... C'est dans ma pratique de
représenter soit les proches, soit les parents, soit les personnes elles-mêmes.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a déjà dans notre loi, dans notre Code
civil et dans nos lois, il y a des mécanismes de protection et de
représentation des personnes qui sont inaptes à prendre des décisions pour
elles, on parle en matière de capacités, et qui doivent être représentées. Et
on a aussi un régime de représentation en matière de soins. Et c'est là où
intervient le parent ou la personne qui peut consentir pour...
• (15 h 40) •
Donc, il y a déjà, dans nos lois, les
mesures, les règles nécessaires pour s'assurer qu'une décision de soins va être
prise dans l'intérêt de la personne. Et, si cette personne-là devait être
évaluée au niveau de son inaptitude, bien, à ce moment-là, il y a tout un
mécanisme, puis vous le connaissez probablement, qui... auquel est tenu le
médecin. Donc, ces évaluations-là de l'inaptitude, de toute façon, elles ne
sont pas esquivées du fait qu'on voudrait... Ce qu'on propose, c'est d'élargir
la loi, l'accès à l'aide médicale à mourir. Ils vont rester là, et les critères
vont rester là, et les critères très stricts de l'accès à l'aide médicale à
mourir vont rester là. Et il y a tout le processus, comme je le disais,
d'évaluation de l'inaptitude.
Donc, on veut... On veut peut-être être
très prudents, mais, en même temps, il faut se rendre aussi à l'évidence qu'il
y a, dans nos lois, des protections qui existent et il y a une égalité aussi,
un droit à l'égalité et à la protection de ce droit-là aussi. Alors, je pense
que je ne voudrais pas répéter, mais j'espère <avoir un peu répondu à
votre question...
Mme Guay (Hélène) :
...répéter, mais j'espère >avoir
un peu répondu à votre question.
Mme Maccarone : Oui. Et
je présume que c'est la même chose en ce qui concerne une demande anticipée.
Mme Guay (Hélène) :Bien, sur les demandes anticipées, on a
aussi beaucoup réfléchi à la question, puis ce sur quoi on voudrait surtout
insister, je pense, c'est que c'est sûr que c'est une situation particulière où
la personne décide de vouloir, de manière anticipée, évaluer sa situation et
prendre une décision pour le futur potentiel ou prévisible, mais il va falloir
s'assurer qu'elle ait toutes les informations nécessaires, tant médicales que
juridiques. Parce qu'on s'aperçoit qu'ici on est aux confins de ce qui décide
de ce qui est le plus important pour la personne, sa capacité et son intégrité.
Et ces deux concepts-là sont très bien traités par notre législateur dans nos
chartes, dans nos lois. Alors, il faut se rendre à l'évidence que c'est une
situation qui va mériter conseils et réflexion.
Dr Naud, hier, parlait de cinq heures
de rencontre avec une personne pour une demande contemporaine, alors que la
personne est apte. Bien, on va être dans la même situation, une personne apte,
mais pour une demande anticipée, pour le futur. Alors, il va falloir mettre
beaucoup de temps. Alors, c'est certain qu'il faut s'assurer de prendre le
temps de bien informer la personne pour que son consentement soit éclairé. Et
c'est un consentement pour le futur. Aujourd'hui, on n'a rien de ça, là. Tout
ce qu'on a... On anticipe des décisions pour le futur, mais, pour les soins, on
s'assure toujours que la personne est apte au moment où elle accepte ou refuse
les soins.
Mme Maccarone : À date,
nous n'avons pas vu le formulaire en question. Je relance encore la demande de
vouloir évidemment en faire le débat, en faire une discussion pour s'assurer
que ce que vous dites sera aussi pris en considération avant qu'on termine de
faire l'étude de ce projet de loi. Dans un cadre juridique, si la demande
anticipée, on présume, formulaire x, y, z, là, n'est pas une réflexion de la
souffrance identifiée par la personne considérée au moment que le tiers de
confiance lève la main pour dire : Je crois que c'est le moment,
pouvez-vous faire une évaluation de ma mère, mon père, mon conjoint, si ce
n'est pas une réflexion exacte de la souffrance qui est identifiée, mais on
décide que c'est probablement le moment, est-ce qu'on fait fausse route? Est-ce
que, légalement, on va se retrouver peut-être devant le tribunal?
Vous avez fait mention de... Il faut faire
attention le nombre de personnes qui seront là aussi au moment que nous allons
remplir la demande anticipée. Vous faites mention qu'on devrait avoir seulement
un tiers de confiance qui est nommé. Quel sera l'impact législatif si ce n'est
pas une exacte réflexion de ce que nous avons identifié? Et, dans votre
réponse, si vous pouvez aussi répondre, parce que je ne sais pas combien de
minutes qu'il me reste, mais c'est parce que ça va faire partie un peu de la
même question, un refus. Au Code civil, on dit «refus catégorique». Dans le projet
de loi n° 11, on dit «refus». Ce n'est pas clair. Alors, est-ce qu'il y a
quelque chose aussi dont nous allons faire face, peut-être, à... fausse route
côté juridique puis on va se retrouver devant le tribunal?
Mme Claveau (Catherine) : Disons,
pour la première question, c'est sûr qu'on partage vos préoccupations, puis
l'importance du questionnaire, que ce soit le plus, tu sais, le plus
objectivable possible, en tout cas, qu'il y ait plusieurs critères. Puis les
travaux vont se continuer. Puis on offre aussi notre collaboration si jamais
vous avez besoin d'un éclairage juridique sur les questions à mettre dans le formulaire,
ça va nous faire plaisir, là, de continuer, là, à vous accompagner dans la
réflexion.
Maintenant, quant à la deuxième question,
pour le refus...
Mme Champagne (Sylvie) : Le
refus catégorique. Hélène?
Mme Guay (Hélène) :Oui. Bien, juste une chose, sur le rôle
du tiers aussi, nous, on pense qu'au moment où... Au moment où la démarche sera
entamée, on voudrait... on insiste sur le fait qu'il n'y a pas lieu d'avoir un
tiers qui pourrait, étant manquant au premier appel, qui soit substitué par un
deuxième. Sauf en cas d'empêchement du premier, on ne voit aucun intérêt à ce
qu'il y ait deux tiers qui puissent être appelés parce que, là, c'est une
source de conflit très claire.
Sur la notion du refus, je pense qu'on
a... Vous avez peut-être entendu certaines références, certaines mentions hier,
mais il faut s'assurer de ne pas mêler les cartes, à savoir qu'il n'y a pas
d'équation dans les deux concepts de «refus», tel qu'il est mentionné ici, et
«refus catégorique». Le refus catégorique est invoqué à l'égard d'une personne <majeure
inapte qui refuse de recevoir...
Mme Guay (Hélène) :
...Le refus catégorique est
invoqué à l'égard d'une personne >majeure inapte qui refuse de recevoir
des soins. C'est bien clair dans le Code civil, c'est l'article 16. C'est
une demande qui est évaluée de manière contemporaine. Ici, on fait face, dans
le processus... on vise la demande anticipée. Donc, c'est un consentement
anticipé. Donc, la notion de refus, ou d'un geste, ou d'une parole, ou d'une
attitude de refus, il ne faut pas la comprendre, il ne faut pas l'assimiler ni
même la comparer à la notion de refus catégorique qu'on retrouve au moment où
on va chercher l'assentiment d'une personne majeure inapte à des soins qui
seraient requis par son état de santé. Donc, c'est deux contextes différents. Donc,
il n'y a pas lieu de... d'importer ni plus ni moins l'interprétation du refus
catégorique dans le contexte.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Guay. On va poursuivre nos échanges
avec la députée de Sherbrooke pour une période de 3 min 18 s. La
parole est à vous.
Mme Labrie : Merci, Mme
la Présidente. Je vais avoir deux questions. Je commence par la première. Je
vais vous demander effectivement un éclairage juridique. Vous nous invitez à
inclure la notion de handicap et à laisser tomber la notion de handicap
neuromoteur. J'ai tâté le terrain plus tôt aujourd'hui avec un autre groupe. Est-ce
que, si la formulation, c'était plutôt que la personne soit atteinte d'une
condition grave et incurable, est-ce que ça nous permettrait d'englober ce
qu'on souhaite englober sans discrimination puis sans nécessairement avoir à
définir la notion de handicap?
Mme Champagne (Sylvie) : C'est
une bonne question. Je vous dirais que l'arrêt Carter dit «problème de santé
grave et irrémédiable». Là, vous nous proposez «condition grave et irrémédiable».
On n'est pas loin. Je vous dirais que le Barreau, on n'a pas de position, mais
je trouve que ça va quand même... on avance. Donc, je vous encourage à
continuer dans ce sens-là.
Mme Labrie : Bien, merci.
Puis la deuxième question, c'est que vous nous proposez d'offrir une
consultation avec un juriste. Quel type de questions pourraient être posées à
un juriste? Parce qu'a priori on a tendance à penser qu'un citoyen pourrait
avoir des questions en termes de soins, des questions plus d'ordre médical par
rapport à l'aide médicale à mourir, puisque c'est un soin. Quel type de
questions vous pensez que quelqu'un pourrait poser à un juriste?
Mme Guay (Hélène) :Bien, on... Le projet doit faire
référence au tiers de confiance, c'est qui, votre tiers de confiance, c'est à
qui vous pourriez référer, tu sais. Dans la pratique, les gens me demandent souvent :
Ah, qui devrait être un mandataire? Est-ce que je peux... Est-ce que je peux
inclure telle personne? Bien, c'est ce genre de question là qui... L'éclairage
qui peut être apporté à la personne qui va décider sur est-ce que je devrais ou
pas faire une demande anticipée. Il est important qu'ils voient plus loin que
juste les connaissances générales qu'ils ont ou qu'ils ont attrapées au fur et
à mesure de... des... je ne sais pas, moi, des nouvelles qui passent. Pourquoi?
Bien, parce que c'est important que les personnes sachent non seulement
l'évolution médicale, mais aussi l'évolution juridique. Il y a le tiers. Après
ça, est-ce que je peux retirer ma demande? Est-ce que je peux la reformuler? Est-ce
qu'elle va devenir caduque si, justement, je refuse, dans le... Dans la
démarche, combien de fois je vais pouvoir la présenter? Combien de tiers je
pourrais avoir? Est-ce que je suis obligé d'inclure mes proches? Si je n'ai pas
de proches, si je n'ai personne, si je n'ai pas de tiers, est-ce que j'ai le droit
de faire une demande? Donc, il y a beaucoup de questions, et je m'arrête là, il
y a beaucoup de questions qui...
Mme Labrie : C'est
surtout pour la demande anticipée, en fait, que vous nous invitez à prévoir
l'accès à la consultation.
Mme Guay (Hélène) :Oui, définitivement.
Mme Labrie : Parfait.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer cette ronde de...
d'échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice pour une période de 3 min 18 s.
La parole est à vous.
• (15 h 50) •
Mme Tardif : En fait,
plus ça allait, plus mes questions s'effritaient, s'effeuillaient. Vous avez
donc répondu à plusieurs de mes questions, mais il m'en reste une. Vous parlez
d'harmonisation, puis on en a discuté, là, avec le Code criminel, le fédéral et
le provincial, et vous avez soumis l'idée qu'il serait opportun d'avoir un
projet pilote. Comment vous voyez ça?
Mme Champagne (Sylvie) : Alors,
après ce projet de loi n° 38, évidemment, on savait que ça allait revenir
parce que c'est un projet de loi qui est important. Et comme on le disait, on
est en faveur de l'élargissement pour les demandes anticipées. Puis on se
disait : Mais comment concilier le fait qu'au Québec, on est prêts, mais que,
dans le reste, peut-être, du Canada, ils ne sont pas prêts à le mettre tout de
suite? Mais on voit qu'ils y réfléchissent avec les rapports qui ont été
produits. Et, en réfléchissant, on a eu comme une idée, on pense, intéressante
et on a regardé que, des fois, le fédéral peut donner des exemptions. Au niveau
de ses lois d'application provinciale, on vous a donné <deux exemples
dans le mémoire...
Mme Champagne (Sylvie) :
...provinciale,
on vous a donné >deux exemples dans le mémoire, donc un centre d'injection
supervisée pour des drogues fortes à Vancouver, et aussi, en
Colombie-Britannique, on a décidé de décriminaliser la possession personnelle
de drogues illicites, et ça va rentrer en vigueur... en fait, c'est rentré en
vigueur. C'est le 31 janvier 2023 jusqu'au 31 janvier 2026.
Alors, on se disait, bien, vu que le
Québec, on est prêt, on pourrait demander à ce que le Code criminel permette
cette exemption-là au Québec et qu'on puisse la faire, la demande anticipée,
sur un projet pilote. Et moi, je suis convaincue qu'étant donné que ça va être
bien balisé, ça va être bien encadré, on pourrait démontrer que c'est très
viable de permettre des demandes anticipées et qu'il n'y ait pas les dérives
auxquelles on pense ou on a peur. Et donc c'est pour ça qu'on vous propose
cette option-là.
Mme Tardif : Merci.
Est-ce que les projets dont... auxquels vous faites référence en
Colombie-Britannique, est-ce que ça a été long? Parce qu'on ne veut pas non
plus aller trop vite pour notre projet de loi, mais on ne veut pas que ça soit
retardé par le fédéral non plus. Est-ce que c'est long d'obtenir l'accord ou
l'exemption du fédéral?
Mme Champagne (Sylvie) : Bien,
je vous dirais que le Parlement siège. Ils sont capables de déposer
habituellement des projets de loi puis aller rapidement quand il y a la
volonté. Donc, ça, là-dessus, je vous laisse, aux parlementaires, là, de faire
vos démarches. Mais c'est quelque chose qu'on pensait qui pourrait être
intéressant pour les Québécois et les Québécoises.
Mme Tardif : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la bâtonnière, Me Guay, Me Champagne.
Merci, au nom de mes collègues, pour l'apport à nos travaux.
Je vais vous souhaiter une bonne fin de
journée et je vais suspendre, le temps de recevoir notre prochain groupe. Merci
beaucoup.
(Suspension de la séance à 15 h 53)
(Reprise à 15 h 56)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux. Nous recevons la Chambre des
notaires du Québec.
Alors, monsieur, madame, je vais vous
demander de vous présenter dans quelques instants. Vous aurez une période de 10 minutes
également pour faire votre exposé, mais je vais vous demander de vous présenter
dans un premier temps. La parole est à vous.
Chambre des notaires du Québec (CNQ)
Mme Potvin (Hélène) : Alors,
bonjour à tous. Donc, je me présente, Hélène Potvin. Je suis notaire et
présidente de la <Chambre des notaires du Québec...
Mme Potvin (Hélène) :
...à
tous. Donc, je me présente, Hélène Potvin. Je suis notaire et présidente de la >Chambre
des notaires du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui par Me Jean
Lambert, notaire émérite, ancien président de la Chambre des notaires. Me Lambert
est notre expert-conseil sur cette question depuis de nombreuses années. Alors,
c'est pour cette raison qu'il m'accompagne aujourd'hui.
Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre,
Mmes les députées, au nom de la Chambre des notaires du Québec, je vous
remercie pour votre invitation à m'adresser à vous aujourd'hui. Tout d'abord,
je tiens à féliciter et remercier la ministre pour ce projet de loi qui vient
rejoindre les préoccupations et la volonté de la population québécoise en
matière de soins de fin de vie. Merci d'avoir écouté les citoyens. La demande
anticipée sera maintenant permise, oui, mais il faut maintenant travailler
ensemble à rendre son utilisation sécuritaire et permettre les meilleures
conditions possibles pour son application pratique, et ce, dans le respect de
la personne qui la formulera. Il est essentiel de préserver l'intégrité de la
demande anticipée afin d'éviter des dérapages ou des utilisations
inappropriées.
La mort fait partie de la vie, les
notaires sont bien placés pour en parler. Les discussions autour de la mort
font partie du quotidien pour des centaines, voire même pour des milliers de
notaires. Des notaires accompagnent depuis toujours les personnes qui
souhaitent établir leurs volontés dans un testament. Nous en avons des millions,
d'inscriptions dans notre registre. Les notaires traitent des sujets sensibles,
on parle des modes de disposition du corps, on parle du choix des personnes qui
s'occuperont de régler la succession. On parle de dévolution des biens,
d'impôt, mais aussi beaucoup d'émotion et de tranquillité d'esprit, enfin, pour
que tout soit clair pour ceux qui resteront.
Et maintenant le législateur introduit
cette nouvelle mesure pour les personnes qui font face à de sombres diagnostics,
soit la demande anticipée d'aide médicale à mourir. Il ne faut surtout pas
laisser les citoyens seuls devant cette situation fort désolante et hautement
émotive. Bien sûr, il est essentiel que cette nouvelle mesure soit faite dans
un écrit. Toutefois, on ne devrait pas permettre l'utilisation d'un formulaire.
En fait, on devrait l'éviter à tout prix. Ce formulaire ne pourra jamais donner
les meilleures garanties que la demande anticipée a été formulée avec toute la
clarté requise et que le consentement de la personne a été donné de manière
libre et éclairée. Un formulaire, c'est un acte sous seing privé qui n'a pas de
garantie de fiabilité, aucune exigence non plus sur sa compréhension, ce qui
ouvre facilement à la contestation, une fragilité impensable pour une demande
anticipée d'aide médicale à mourir.
D'ailleurs ,et à titre comparatif, le
testament notarié est le seul testament à ne pas nécessiter une procédure
judiciaire de vérification au décès. Les testaments signés devant témoin, donc
comme un formulaire ou olographe, soit ceux écrits et signés à la main, doivent
faire l'objet d'une vérification judiciaire établissant que le testament a bien
été rédigé et signé par une personne bien identifiée qui a confirmé que le
document contient l'expression de ses dernières volontés.
• (16 heures) •
Le législateur ne se contente donc pas du
contenu du testament complété comme un formulaire pour le règlement d'une
succession. Alors, pourquoi se contenterait-il du contenu d'un formulaire pour
qu'une personne décide du moment venu de mettre fin à ses souffrances? Est-ce à
dire que c'est moins important de faire une demande anticipée d'aide médicale à
mourir que de prévoir la dévolution de ses biens? La réponse me semble
évidente. Le législateur a l'obligation de rassurer les citoyens en leur
offrant la plus haute sécurité juridique. Les conséquences sont trop
importantes. C'est pour cette raison que nous croyons que la demande anticipée
d'aide médicale à mourir ne devrait être formulée que sous forme notariée.
Et je m'explique. Tout d'abord, la
description des souffrances physiques et psychiques devra être précise,
personnalisée et rédigée sans ambiguïté. Bref, du sur mesure difficilement
conciliable avec une approche formatée de cases à cocher. Pour nous, l'intervention
du notaire, ici, est capitale. Il accompagnera le professionnel compétent à qui
revient la lourde responsabilité de s'assurer que les souffrances décrites dans
la demande sont médicalement reconnues comme il pourrait en découler de la
maladie dont la <personne est atteinte...
>
16 h (version révisée)
< Mme Potvin (Hélène) :
...pouvant
découler de la maladie, dont la >personne est atteinte, et qu'elles sont
objectivables. Le notaire pourra poser les questions pertinentes en vue de s'assurer
du respect de la Loi concernant les soins de fin de vie et pourra ainsi rédiger
la description des souffrances en termes clairs. Cette description, je vous le
rappelle, peut être très personnelle et différente d'une personne à l'autre. On
est bien loin des cases à cocher.
Ensuite, la demande anticipée doit être d'une
fiabilité du plus haut degré. L'intervention du notaire, puisqu'il est un
vulgarisateur reconnu, favorisera la compréhension par la personne des critères
essentiels mentionnés à la loi et qui doivent être pris en compte pour fonder
sa décision. Ceci viendra assurer à tous que le consentement de la personne a
vraiment été donné de manière libre et éclairée au moment de sa demande
anticipée. Et c'est encore plus vrai pour le professionnel compétent qui
administrera l'aide médicale à mourir. L'acte notarié, ne l'oublions pas, fait
preuve à l'égard de tous de son contenu, de sa date et de la validité du
consentement. Il est pratiquement incontestable.
Certains pourraient mentionner que l'acte
notarié vient alourdir le processus de la demande anticipée. En fait, encadrer
un acte juridique par des formalités ne vient pas alourdir une démarche mais
vient plutôt donner des garanties de sécurité. Ainsi s'adjoindre un notaire
pour voir au respect des formalités mentionnées à la loi vient permettre à la
personne et aux professionnels compétents de se concentrer sur les vrais enjeux
de cette bataille contre la maladie.
Mais revenons à l'exigence du formulaire.
Il est également question, dans le projet de loi, d'un formulaire qui serait
annexé à l'acte notarié. Il est impensable de prévoir une telle façon de faire,
et la chambre s'y oppose vivement. C'est mal comprendre la valeur de l'acte
notarié que de prévoir une telle disposition. L'annexe n'est qu'un accessoire
qui vient compléter un acte. On pense ici à une résolution de compagnie, à un
acte de financement, on parle d'un plan, un acte de servitude, on ne parle pas
du fond de l'acte. En exigeant que la demande anticipée soit incluse dans un
formulaire qui est annexé à l'acte notarié, le législateur dénature ainsi l'acte
notarié. À la place de prévoir un formulaire en annexe, la chambre demande
plutôt qu'un règlement vienne encadrer le contenu minimum qui devra se
retrouver... pardon, dans la demande anticipée sous forme notariée.
Alors, comme je l'ai dit plus tôt, le
document notarié assure la sécurité, la fiabilité, et est presque
incontestable, mais, bien au-delà de ces attributs, un acte notarié est le
résultat d'une démarche, d'un processus, enfin, c'est le résultat d'un
accompagnement. C'est cet accompagnement qui explique, entre autres, la haute
cote de confiance que le public porte aux notaires, soit près de 90 %
selon les derniers sondages. Ainsi, la demande anticipée d'aide médicale à
mourir pourra, comme on le fait actuellement dans les testaments notariés, être
personnalisée pour être vécue par la personne comme elle le souhaite. Je vous
rappelle qu'il est question ici d'un événement avec une grande charge émotive.
Il est important que la personne puisse vivre ce moment comme elle l'entend, qu'elle
puisse dicter ses volontés, ses choix qui sauront rendre ce moment à son image.
Alors, on nous parle aussi de l'accessibilité
pour tous. Alors, si le législateur reconnaît l'importance de la demande
anticipée d'aide médicale à mourir pour la population québécoise et veut en
assurer la plus haute sécurité juridique, il exigera que la demande anticipée
ne puisse être formulée que par acte notarié. Et, dans ce cas, s'il en souhaite
l'accès universel, l'État devra en assumer les coûts, comme il l'a fait pour
les autres professionnels impliqués dans la démarche, afin que toutes les
personnes qui en auront besoin puissent y avoir recours sans égard à leurs
capacités financières.
Alors, en terminant, je vous rappelle que
les notaires sont déjà présents pour accompagner les citoyens dans la rédaction
de leurs dispositions testamentaires et leur mandat de protection en prévision
de leur inaptitude. Année après année, des centaines de milliers de personnes
consultent leur notaire et signent ces deux documents importants pour la suite
de leur vie. Le notaire a cette expertise de consigner les volontés des
citoyens en ces matières qu'il traite avec humanisme et empathie. Alors,
pourquoi s'en priver? Il est important de préserver la qualité de vie, la
tranquillité d'esprit par un accompagnement adéquat d'un professionnel qualifié,
qui agira comme pivot dans cette démarche qui pourrait s'avérer complexe si la
personne est laissée à elle-même. Alors, ceci permettrait à toute personne aux
prises avec des problèmes de santé importants de continuer sa vie en toute
quiétude quant au respect de ses choix et, ultimement, vivre ses <derniers
moments...
Mme Potvin (Hélène) :
...aux
prises avec des problèmes de santé importants, de continuer sa vie en toute
quiétude quant au respect de ses choix et, ultimement, vivre ses >derniers
moments selon ses volontés.
Alors, je vous remercie de votre
attention. Nous sommes disponibles pour recevoir vos questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Potvin, pour cet exposé. Vous
soulevez des enjeux et des questionnements importants. Donc, on va ouvrir la
période de discussion avec les parlementaires. Je vais commencer par la
ministre, alors, pour une période de 16 min 30 s. La parole est
à vous.
Mme Bélanger : Mme la
Présidente, Me Potvin, bonjour. Me Lambert, bonjour. Et puis, si je ne me
trompe pas, Me Lambert, je crois que vous avez siégé pendant quelques années
sur la Commission des soins de fin de vie, n'est-ce pas?
M. Lambert (Jean) : Je
siège actuellement...
Mme Bélanger : Vous siégez.
OK. Bien...
M. Lambert (Jean) : ...encore
depuis le début. Maintenant, je... mais je ne parlerai pas au nom de la
commission, on se comprend bien.
Mme Bélanger : D'accord.
M. Lambert (Jean) : Cependant,
dans certaines de mes réponses, je ne pourrai pas faire fi des connaissances
que j'ai eues dans ce rôle.
Mme Bélanger : Oui, tout
à fait. Je comprends qu'aujourd'hui vous ne représentez pas la commission, mais
c'est votre expérience, là, simplement, qui va être quand même très importante.
N'hésitez pas à échanger avec nous. Et puis je veux saluer votre engagement,
tant qu'à y être, à la Commission des soins de fin de vie, parce que je sais
que c'est quand même beaucoup de travail, étant donné que tous les dossiers de
demande d'aide médicale à mourir passent par la Commission des soins de fin de
vie et sont analysés, entre autres, là, par une équipe. Alors donc, voilà.
Écoutez, peut-être simplement commencer, en
vous disant, bon, l'aide médicale à mourir est conçue comme un soin et il est
vraiment conçu au même titre que des soins palliatifs, avec la... avec le
soulagement de la douleur, la sédation palliative continue où là... donc là, on
parle maintenant d'une autre possibilité avec l'aide médicale à mourir, en
autant que ça répond aux critères qui sont prévus dans la loi, mais c'est conçu
comme un soin. Donc, ce n'est pas surprenant que l'implication des
professionnels, et le rôle des médecins, et éventuellement des IPS, si notre
projet de loi passe, soit un rôle important dans l'évaluation de la demande. Et
j'aimerais vous entendre à ce sujet-là. Comment concilier le tout? Je reconnais
toute l'expertise des notaires, effectivement, là, dans tout ce qui est acte
notarié, mais comment concilier le fait que l'aide médicale à mourir est conçue
comme un soin? Comment on arrime ça pour que ça soit efficace avec la démarche
que vous proposez d'en faire un acte notarié?
• (16 h 10) •
M. Lambert (Jean) : Alors,
ma présidente me fait signe de prendre la question au vol. On comprend qu'un
acte notarié peut toucher un ensemble très vaste de préoccupations, des
éléments de la vie, que ce soit commercial, que ce soient des relations de
personnes qui vont décider de faire vie commune, etc. Donc, il faut comprendre
que l'acte notarié en lui-même est un instrument de sécurité juridique dans une
situation donnée. L'aide médicale à mourir n'existe que parce que,
collectivement, on a décidé, par une loi, que c'est possible. Il n'y a pas si
longtemps, tuer était un crime. Maintenant, on a dit : Dans certaines
circonstances, alléger les souffrances en mettant fin à la vie d'une personne
selon son désir et son consentement — c'est les mots-clés — ce
n'est plus un crime, et c'était le jugement Carter, entre autres, et toutes les
modifications qui ont suivi.
Ici, au Québec, on est allé... on a établi,
dès le départ, qu'il s'agissait d'un soin qui s'inscrit dans un continuum.
Voici donc une demande, contrairement à la demande contemporaine qui est
exécutée, le président de la commission l'a dit, habituellement dans les six
mois et même à 70 % dans les trois mois, ici, on est en présence d'une
demande d'une personne qui ne veut pas mettre fin à ses jours prématurément,
qui veut vivre sa vie tant et aussi longtemps qu'elle sera apte et qu'elle ne
sera pas... qu'elle pourra endurer le niveau de souffrance. Donc, on parle ici
en termes de mois, d'années. Donc, d'avoir un document qui sera exécuté par des
personnes qui, peut-être, n'étaient pas là au moment où elle a formulé ses
voeux, je pense ici au professionnel compétent qui pourrait en être un autre, à
un moment donné arrivera le moment venu, et ceux qui auront à exécuter auront
besoin de savoir si, un, le document qu'ils ont devant eux, c'est le document
le plus <fiable possible...
M. Lambert (Jean) :
...à
un moment donné arrivera le moment venu, et ceux qui auront à exécuter auront
besoin de savoir si, un, le document qu'ils ont devant eux, c'est le document
le plus >fiable possible, et on croit que c'est l'acte notarié,
contrairement aux documents privés. Il devrait savoir aussi la description
précise ou aussi précise que possible des souffrances que cette personne-là
considérera comme intolérables. Alors, il faudra que le professionnel compétent
puisse être capable, à la lecture et à son propre constat, parce qu'on comprend
bien que le notaire ne joue pas le rôle du médecin, là, l'évaluation et les
intrants... D'ailleurs, la description qui devra être faite à l'acte, c'est le
résultat d'un concours de collaboration avec le professionnel compétent qui va
accompagner la personne. L'avantage du notaire ici, c'est qu'il est un
excellent rédacteur d'actes, et c'est reconnu, et ainsi il vient soutenir le
médecin.
Je puis vous dire, pour avoir vu, dans les
premières années, les formulaires remplis à la main par les médecins, où il
fallait, à peu près dans 40 % des cas, demander des compléments
d'information aux médecins parce qu'on ne s'y comprenait pas, et même avec
SAFIR où il y a eu un formatage informatisé, il reste encore un nombre
important, de 10 % à 15 %, où on doit encore revenir aux médecins
pour demander des précisions. On comprend que les médecins, ce ne sont pas des
rédacteurs. Pourquoi? Ils sont dans la tourmente, ils sont sollicités de toutes
parts. Et de pouvoir compter sur une personne qui a... qui est un officier
public — ça, c'est l'autre élément de la clé — donc
quelqu'un qui a une loyauté envers la société, envers l'État, donc, de
s'assurer que le contenu de ce document-là sera aussi fiable que possible... Et
il y a tout un domaine de conseils. Alors, lorsqu'il y aura l'échange entre le
professionnel compétent et la personne qui demande, il pourra, à l'aide de ces
questions, clarifier, demander au médecin, par exemple, si ce que la personne
vient de décrire comme souffrant, est-ce que c'est une souffrance qui est
objectivable, est-ce qu'elle correspond à la loi.
Maintenant, on n'a pas parlé encore du
tiers de confiance. J'espère qu'on va pouvoir en parler, parce qu'on a des
solutions aussi, surtout lorsque la personne est seule. Mais là je pense que
j'ai parlé beaucoup, j'aimerais vous remettre la parole, mais lisez notre... et
ça, je dis ça aux parlementaires qui n'auraient pas eu le temps de le faire,
parce que vous êtes bousculés, de lire notre mémoire.
Mme Bélanger : Bien, écoutez,
c'est intéressant, je pense, la discussion. Peut-être poursuivre dans le sens
d'un formulaire, d'un acte notarié. Vous savez que ce qui est prévu dans les
modalités, c'était plutôt un dépôt dans le registre de la demande anticipée
obligatoire. Et là c'est peut-être une question technique, là, mais, en termes
de sauvegarde de documents, si un notaire était impliqué, ça voudrait dire...
est-ce que ça remet en question le registre?
M. Lambert (Jean) : Non, non,
pas du tout. Non, on le fait pour les DMA notariées. On les dépose, on a conclu
avec un véhicule et on n'a pas besoin d'annexer le formulaire. Et là on se
comprend que, dans les DMA, c'est des refus de soins, essentiellement, c'est la
signification. J'étais sur le comité ministériel qui a élaboré le formulaire.
Mais la demande anticipée, c'est une demande de soins, là on est dans un autre
ordre de préoccupations.
Mme Bélanger : OK. Allons-y,
donc. Vous avez ouvert, il y a quelques instants, sur le tiers de confiance.
Alors, dans un processus où on irait avec un acte notarié, comment vous voyez
le rôle du tiers de confiance et aussi celui du proche?
M. Lambert (Jean) : Bon, alors,
le tiers de confiance... C'est juste qu'on a un écho, là, je ne sais pas s'il y
a un micro d'ouvert... Alors, le tiers de confiance, c'est une personne qui
sera choisie par la personne qui fait la demande. Je réponds tout de suite à
une question qui a été donnée : Est-ce qu'il y en a deux en même temps?
Non, mais qu'on puisse prévoir un substitut, ça, je pense que c'est de bonne
prudence, parce qu'on parle d'un acte dont l'exécution sera probablement de
deux, trois, quatre, cinq ans plus tard. Alors, les gens ont le droit de
décéder, ont le droit d'être malades, d'avoir un accident ou encore d'être
rendus à un point où ils ne sont plus capables de subir la charge émotive. Ça,
c'est un des éléments que le notaire va discuter avec le tiers de confiance.
Donc, la personne qui sera choisie va avoir besoin <elle-même de
conseils...
M. Lambert (Jean) :
...de
subir la charge émotive. Ça, c'est un des éléments que le notaire va discuter
avec le tiers de confiance. Donc, la personne qui sera choisie va avoir besoin >elle-même
de conseils. Elle va... savoir, c'est quoi, son rôle, par exemple, de voir
périodiquement la personne, devoir s'assurer à sa santé et de savoir si, et ça,
c'est l'élément surtout qui est... importe, est-ce qu'elle maintient toujours
sa volonté d'avoir l'aide médicale à mourir lorsque les souffrances qu'elle a
décrites dans sa demande arriveront, seront constatées par l'équipe médicale.
Ensuite de ça, le tiers de confiance
devra, lorsqu'il aura constaté lui-même que le moment est venu... il ne prend
pas la décision, on se comprend, là, d'administrer, mais il alerte l'équipe, il
l'informe pour dire : D'après moi, je pense que madame, monsieur, qui a
fait la demande, est rendu au moment venu, je pense qu'il y aurait lieu qu'on
l'évalue. Alors, ça, c'est son rôle, et je pense que c'est un rôle qui est très
important. Ce n'est pas la chambre qui a sorti ça de son chapeau, il y a eu un
travail magnifique sur la question de l'aide médicale à mourir par un comité
qui s'appelle le comité... le conseil canadien des académies, et ils ont
consacré la question du tiers de confiance comme étant un élément qui vient
rassurer le professionnel compétent qui viendra administrer. Alors, il viendra
lui dire : La dernière fois que j'ai parlé à la personne, lorsqu'elle
était apte, elle a dit : N'oublie pas de voir à ce que mes volontés soient
exécutées.
Mme Bélanger : Alors, c'est
très bien. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci, Mme la ministre. Je pense que j'ai
une question du côté de la députée de Laporte.
Mme Poulet : Oui. Merci
beaucoup de votre participation. Pendant votre introduction, j'ai... ça m'a
fait penser au mandat d'inaptitude. Alors, je me questionnais, sachant que
l'aide médicale à mourir doit avoir... il doit y avoir un diagnostic, est-ce
qu'il y a moyen d'initier ses propres... ses volontés en ce sens-là dans un
mandat d'inaptitude? Et aussi vous aviez mentionné que vous voulez éviter des
dérapages. Est-ce que, par le passé, vous avez été sensibilisés à certaines...
à certains dérapages dans... dans tout le processus?
Mme Potvin (Hélène) : Alors,
je crois que c'est important de laisser, donc, la demande anticipée dans un
document à part. Alors, on ne traite pas ici, là, du même enjeu. Alors, c'est
pour ça que c'est important de laisser vraiment le mandat de protection en
prévision de l'inaptitude de la personne. Alors, je ne sais pas si c'était ça,
le sens de votre question, Mme la députée.
Mme Poulet : ...
• (16 h 20) •
Mme Potvin (Hélène) : Oui.
Alors, je ne sais pas, Me Lambert, qui est un grand passionné, vous le voyez,
avait un complément d'information sur le document.
M. Lambert (Jean) : Sans
vouloir me péter les bretelles, je suis celui qui a amené cette innovation en
1988 à l'occasion, justement, d'une commission parlementaire dans le cadre des
travaux du Code civil. À ce moment-là, on disait que c'était une hérésie
puisque le mandat doit tomber lorsque la personne perd son... sa capacité, et
moi, je venais dire : On en fait un spécial qui va justement prendre force
parce que... Alors, compte tenu d'un document qui est fait dans un cadre
normal, ça peut être une personne qui a un diagnostic, mais c'est souvent, et
le plus souvent, des personnes qui ne sont pas nécessairement malades ou qui
n'ont pas un diagnostic sombre, et le législateur a voulu, dans la première
mouture de la loi, de ne pas confondre les deux... les deux véhicules
juridiques, et je pense que c'est une bonne chose. Ce que le législateur a
voulu, c'est que, lorsque la personne va exprimer ses volontés par
anticipation, c'est que cette personne-là, maintenant, vit une réalité, elle
sait quelle est la trajectoire qui est devant elle au niveau de la qualité de
vie qui va décliner. Et je pense que le législateur, dans le projet sous étude
actuellement, a maintenu cette même prudence, de voir à ce que ce soit un
document distinct. Alors, je pense que, sur ce point-là...
Maintenant, au niveau des dérives,
évidemment, il y a des décisions judiciaires où ils ont vu qu'effectivement il
y a eu des mandataires qui en ont peut-être pris trop large, alors qu'ici notre
tiers de confiance, ce n'est pas un mandataire, il ne viendra pas prendre,
comme un tuteur... ne viendra pas décider à la place. Ce n'est pas lui qui va
donner le consentement, la personne va l'avoir déjà donné, et c'est le
professionnel compétent qui va évaluer si, maintenant, le moment fixé par cette
personne-là est arrivé. Le tiers de confiance, lui, tout ce qu'il fait, c'est
qu'il alerte le milieu médical, <l'équipe soignante...
M. Lambert (Jean) :
...par cette personne-là est arrivé. Le tiers de confiance,
lui, tout ce qu'il fait, c'est qu'il alerte le milieu médical, >l'équipe
soignante, pour dire : Je pense qu'il est temps d'évaluer la personne.
Alors, c'est vraiment très différent.
Mme Poulet : OK. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour la question. Il reste encore 1 min 43 s
pour la députée de Vimont, question, réponse incluses. Merci.
Mme Schmaltz : Parfait, je
vais aller rapidement. Concernant les incertitudes, vous en avez parlé tantôt,
Me Lambert. Vous parlez de l'identification précise des souffrances ou des conditions
qui détermineront l'arrivée du moment venu. Moi, c'est le moment venu, comment
on détermine le moment venu? Est-ce qu'on parle d'heures? Est-ce qu'on parle de
jours? Est-ce qu'on parle de... Je ne sais pas. C'est quoi, le moment venu? Je
comprends le sens de la phrase, là, c'est... ça, c'est sûr, mais c'est quoi? C'est
quoi, le moment venu, pour vous?
M. Lambert (Jean) : Le moment
venu, c'est lorsqu'on informe l'équipe médicale qu'on croit que l'étape des
souffrances intolérables atteint le niveau que la personne a fixé comme devant
justifier qu'on lui administre l'aide médicale à mourir. Donc, ce n'est pas une
question d'heures ou de jours. Le moment venu, ça veut dire que l'équipe
soignante va procéder à ces évaluations. Si ça correspond aux critères de la
loi, là on va administrer. C'est tout ça ensemble qui constitue le moment venu
de l'administration. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question.
Mme Schmaltz : Bien, je
pense, je n'ai plus le temps. Oui, oui, ça répond.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mesdames les députées, Mme la ministre, merci beaucoup.
Alors, je me tourne maintenant du côté de la députée de Westmount—Saint-Louis pour
une période de huit minutes... 9 min 54 s.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Me Potvin. Bonjour, Me Lambert. Merci beaucoup de
votre présence et votre témoignage. Votre mémoire, c'est fort intéressant. Dans
le sommaire de vos recommandations, recommandation 1, vous dites que ça va
être important, dans le fond, d'ajouter le mot «uniquement» quand on parle
de... «soit formulé uniquement par un acte notarié en minutes» quand on parle
de dépôt d'une demande de l'aide médicale à mourir par anticipation.
Je veux mieux comprendre la nécessité
d'avoir le mot «uniquement». Parce qu'actuellement dans la loi soins de fin de
vie on dit que ça prend un acte notarié, on n'a pas le mot «uniquement». Puis,
dans la loi, le projet de loi n° 11, même chose dans l'article 29.8,
on dit «doit être faite par [un] acte notarié». Alors, quelle est la
différence? Pour vous, est-ce que ça veut dire : Actuellement,
aujourd'hui, les gens peuvent faire une demande puis la faire légaliser, à
quelque part, par un avocat, par exemple, ou par autre professionnel?
Mme Potvin (Hélène) : Oui,
alors ce que le projet de loi prévoit, c'est qu'il y aura deux façons de faire
une demande anticipée, alors le formulaire ou le document notarié. Alors, c'est
là que le mot «uniquement» est important puisque, comme je le disais dans mon
allocution, on voit mal l'utilisation d'un formulaire, surtout on parlait du
moment venu, on parle des conditions, on parle de la description des
souffrances, qui devrait être personnalisée. Alors, c'est là que, pour nous, on
voit mal l'utilisation d'un formulaire, et c'est pour ça qu'on recommande de
préciser que ce soit uniquement par acte notarié.
M. Lambert (Jean) : Est-ce
que je peux rajouter qu'entre autres il... décrire précisément le rôle du tiers
de confiance également? Probablement aussi que la personne voudra lorsque... le
moment venu, et elle voudra que ses proches soient invités. D'autres ne
voudront pas que les proches soient là, comme on le voit actuellement dans
l'administration des AMM contemporaines. Certains pourront vouloir avoir un
accompagnement musical, etc., donc, plein de petits éléments humains qui...
qu'on voit mal dans un formulaire.
Mais, nous, ce qu'on en a, c'est que le
formulaire n'est pas un véhicule juridique fiable. Et, quand on dit «uniquement»,
c'est que ça devrait être obligatoirement sous la forme notariée. Actuellement,
la demande contemporaine d'AMM n'est pas notariée, elle ne peut pas l'être, ça,
c'est les DMA, mais pourquoi? Parce que l'exécution est proche, est rapprochée.
La personne est dans un cadre où elle est continuellement en présence d'une
équipe soignante, ce qui est complètement différent d'une personne qui dit :
Peut-être dans trois, quatre ans, on devra me mettre dans une résidence, parce
que, là, je serais rendu incapable de voir à moi-même, mon alzheimer sera rendu
à un stade où j'aurai vraiment besoin d'être soutenu. C'est un autre monde.
Mme Maccarone : Je vous
entends. J'ai lu le mémoire puis j'ai vu le mot «fragile» avec le formulaire,
je comprends puis je pense que tout le monde a aussi constaté que ce ne sera
pas facile de déterminer le contenu de le formulaire. Puis aussi, au moment
d'administrer l'aide médicale à mourir, comment <mettre à l'œuvre...
Mme Maccarone :
...«fragile» avec le formulaire, je comprends puis je
pense que tout le monde a aussi constaté que ce ne sera pas facile de
déterminer le contenu de le formulaire. Puis aussi au moment d'administrer
l'aide médicale à mourir, comment >mettre à l'œuvre le formulaire,
si ce n'est pas exactement écrit de la même façon que la souffrance est en
train de se manifester pour la personne concernée?
Mais vous, vous faites mention aussi
que... parce que vous parliez de... On a besoin peut-être de signataires. Vous
dites que vous-mêmes, vous pourriez être signataires témoins en ce qui concerne
cet acte, parce qu'on demande d'avoir deux personnes. Puis vous, vous dites,
dans votre mémoire, que vous pourriez être un des signataires comme témoins.
Est-ce que le tiers de confiance devrait aussi signer quelque chose? Puis, dans
votre recommandation 2, si la personne n'est pas capable de signer, vous
dites que ça va être important d'avoir des témoins, mais est-ce que, mettons,
un vidéo suffira aussi pour s'assurer? Parce que souvent on se retrouve
beaucoup de personnes qui sont seules, on parle beaucoup de ces personnes qui
sont isolées, puis on veut aussi s'assurer que leurs droits sont également
protégés.
Mme Potvin (Hélène) : Bien,
quand vous parlez d'un témoin, alors c'est sûr qu'un acte notarié n'a pas
besoin de témoins à la signature. Le notaire est en soi... étant un officier
public, donc, on n'a pas besoin d'avoir de témoin. C'est sûr qu'il faudra
réunir les gens. Donc, oui, effectivement, on aura la signature du professionnel
compétent, on aura le tiers de confiance, on l'a dit. C'est sûr que cette
personne-là doit être informée de ses obligations, doit être informée de la
responsabilité, du rôle qu'il jouera plus tard. Alors, c'est certain que cet
accompagnement-là, on doit... on doit le faire vivre dans l'acte notarié. Alors,
c'est pour ça que les témoins, pour nous, c'est vraiment dans le cas... alors
vous faites référence à la recommandation 2, c'est vraiment lorsque la personne
n'est pas capable de signer.
Alors, présentement, il existe, dans le
Code civil, une procédure où un témoin vient recevoir la déclaration de la
personne qui dit qu'elle ne peut pas signer. Alors, il signe à titre de témoin
qui vient vraiment recevoir la déclaration du testateur. Alors, nous, on fait
un parallèle avec la demande où on devrait avoir un tel... une telle façon, là,
de compléter l'acte notarié, là.
Mme Maccarone : Merci. Ma
collègue, elle aurait des questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. On va donc poursuivre pour une période de 3 min 54 s
avec la députée de D'Arcy-McGee. La parole est à vous.
Mme Prass : Merci. Pour
renchérir sur les commentaires de mon collègue, est-ce que vous pensez dans ce
cas-là que... Parce que, là, la façon dont vous avez expliqué, plutôt que le
formulaire, comment vous aiderez la personne à rédiger le document, je trouve
ça intéressant, les éléments beaucoup plus personnels, comment la personne veut
vivre ce moment, etc. Pensez-vous, dans ce cas-là, que, justement, il y aurait
une certaine rigidité avec un formulaire qui ne permettrait pas à la personne
de vraiment pouvoir faire le tour et expliquer les différentes circonstances,
les différentes situations, par exemple, donc, pas juste côté souffrances, côté
moment, mais vraiment, comment on veut vivre ça? Parce qu'on ne le sait pas, on
n'a pas vu le formulaire, on ne sait pas de quoi il consiste, mais j'imagine
que ça serait plus rigide, plus côté médical que côté... Bien qu'il ne
comprendrait pas nécessairement tous les éléments que quelqu'un voudrait y
inclure. Donc, est-ce que je comprends de votre part qu'il y a une certaine
rigidité que vous voyez avec la formule formulaire plutôt que ce que vous
suggérez?
• (16 h 30) •
Mme Potvin (Hélène) : Bien,
c'est sûr que nous, le formulaire, ce qu'on comprend d'un formulaire, c'est
qu'il va être très, très homogène pour tout le monde. Alors, oui, la rigidité,
c'est certain qu'elle est là. Alors, on a... si on fait le parallèle avec un
testament, on a les clauses minimales qui sont donc... que le notaire utilise
dans le Code civil, mais il vient bonifier. Il vient ajouter, il vient vraiment
personnaliser le document. Alors, c'est sûr que le formulaire, pour nous, nous
croyons qu'il faut vraiment l'éviter à tout prix, parce que, sinon, ça sera des
cases à cocher, et on va dénaturer vraiment la personnalisation de la demande.
On va se retrouver avec les mêmes clauses pour tout le monde, là. Alors, ça, je
pense que, oui, effectivement, la rigidité, pour nous, là, c'est vraiment... le
formulaire est à éviter. Mon collègue Me Lambert voulait ajouter.
M. Lambert (Jean) : Alors,
très... très rapidement, c'est que l'acte notarié, l'intervention du notaire,
d'abord, il va y avoir... Le notaire ne tirera pas d'un tiroir un formulaire,
justement, on parle justement que ce n'est pas le cas. Donc, il va avoir du
conseil, le notaire va aviser la personne des <éléments...
>
16 h 30 (version révisée)
< M. Lambert (Jean) :
...le
notaire ne tirera pas d'un tiroir, là, un formulaire, justement, on parle
justement que ce n'est pas le cas. Donc, il va y avoir du conseil, le notaire
va aviser la personne des >éléments qu'elle aura... peut-être de
rencontrer une ressource en psychiatrie ou psychologique. D'ailleurs, ça
pourrait être même la même chose, le même conseil qu'il donnera au tiers de
confiance, de dire : Ce serait bon que vous sachiez si vous allez être
capable de surmonter l'émotion, le moment venu, puis de jouer votre rôle. Donc,
ça va être... l'acte va être un aboutissement de rencontres. Le notaire va
probablement, avec l'autorisation de la personne, parler au médecin pour qu'il
puisse, justement, préparer la description des souffrances, de sorte que, quand
cette réunion-là va arriver, ça va être un aboutissement d'un processus.
Et j'ai tellement peur que le temps passe
sans que je ne vous parle de la solution pour le tiers de confiance. Lorsqu'une
personne est fin seule, bien, il y a... j'ai vu rapidement qu'il y a deux
solutions. Hier, la société d'Alzheimer vous ont dit, ils sont 20 chapitres
au Québec, qu'ils ont des gens qui accompagnent les gens qui ont eu le
diagnostic d'Alzheimer. Et ça pourrait être là une place où on pourrait aller
chercher des gens qui accepteront de jouer le rôle de tiers de confiance, d'autant
plus qu'ils connaissent bien la maladie. Mais j'ai aussi parlé à des
travailleurs sociaux. Vous savez, les travailleuses sociales dans les CLSC, elles
rencontrent les gens régulièrement, c'est dans leur ADN, si je peux dire, c'est
dans leur culture, d'accompagner les gens. Or, une personne pourrait très bien
demander à des travailleurs sociaux qui auront eu une formation par leur ordre
professionnel et qui accepteront de jouer ce rôle-là. On comprend que ceux-là n'auront
pas besoin de rencontrer deux, trois fois par semaine la personne, mais
peut-être passer un coup de fil aux trois mois, rencontrer aux six mois,
vérifier en disant : Bon, bien, vous allez bien?, etc. Avez-vous vu votre
médecin? Y a-tu eu quelque chose? Vous rappelez-vous que vous aviez un
rendez-vous, bon, pour telle chose? Et maintenant est-ce que vous demeurez...
Est-ce que votre volonté est toujours là? Alors, ces gens-là sont formés pour
ce genre de rôle là. Donc ça permet d'avoir des ressources pour les personnes
qui sont absolument seules.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Lambert. On va terminer, donc,
cette ronde d'échanges avec la députée de Sherbrooke pour une période de 3 min 18 s.
La parole est à vous.
Mme Labrie : Merci. Je vais
rester sur le thème de la formation, parce que j'avoue que c'est assez
intéressant, la réflexion sur laquelle vous nous amenez sur la question de l'acte
notarié pour ça. Mais je me demande : Est-ce que les notaires,
actuellement, sont suffisamment formés pour préparer ce type de demande
anticipée? Je dois dire que, quand... là, j'oublie son nom, à ce moment-ci,
mais la dame qui oeuvre chez Carpe Diem, qui est venue nous voir, nous parlait notamment
des réalités des personnes qui vivent avec l'alzheimer et était capable de
témoigner d'un certain nombre de situations, par exemple, qui peuvent être vues
comme de la souffrance, pour certaines personnes, qu'on n'est peut-être pas
tous en mesure d'imaginer, peut-être pas tous les notaires non plus. Donc,
est-ce que ça prendrait des formations spécifiques ou est-ce que vous estimez
être suffisamment équipés, déjà, pour jouer ce rôle-là?
Mme Potvin (Hélène) : Alors,
c'est sûr que les notaires qui travaillent en droit de la personne ont déjà une
base. Dans notre code de déontologie, c'est clair, donc, on doit prendre des
mandats où on a des connaissances requises. Alors, c'est certain qu'il va
devoir y avoir des formations complémentaires, bien entendu. Comme quand on
parle d'inaptitude, donc on parle des soins, on parle de la capacité, on a des
formations par des personnels... des professionnels compétents. Alors, bien
sûr, il va falloir mettre sur pied des formations pour accompagner les notaires.
Mais, les notaires, il faut que vous sachiez qu'ils ne partent pas de rien.
Donc, ceux qui travaillent déjà en inaptitude ont déjà des connaissances sur
les maladies, participent beaucoup, là, à des ateliers. Alors, ça, je ne crois
pas qu'il y ait de problème de ce côté-là.
Mme Labrie : Puis où vous le
voyez, le niveau de collaboration entre, par exemple, quelqu'un de l'équipe de
soins, un professionnel de la santé puis le notaire pour préparer une demande
anticipée?
Mme Potvin (Hélène) : Allez-y,
Me Lambert.
M. Lambert (Jean) : Alors,
écoutez, d'abord, on comprend que le notaire ne joue pas au médecin. Il s'agit
qu'il ait une formation spécifique, comme on a donné lorsqu'on a ouvert les
ouvertures d'origine de protection en dehors du tribunal. Les notaires avaient
deux jours de formation avec un psychiatre, justement, pour être capables... d'être
capables de se rendre au chevet d'une personne, par exemple à l'hôpital ou dans
un CHSLD, et d'être capables de comprendre l'atmosphère, la dynamique de ces
personnes-là. Moi, je l'ai vécu pendant six ans où j'étais infirmier à
Notre-Dame-de-la-Merci. Ça vient de là, l'idée. Donc, à l'époque, j'avais
suggéré à la chambre de faire cette formation-là, et elle a été un gage de
succès. Et ce sera également, encore une fois, une formation spécifique,
obligatoire pour les notaires qui vont <oeuvrer là-dedans...
M. Lambert (Jean) :
...
encore une fois, une formation spécifique, obligatoire pour les notaires qui
vont >oeuvrer là-dedans. Et, c'est certain, qui va nous aider là-dedans?
Bien, c'est les professionnels compétents, c'est des médecins, c'est des IPS.
Alors, vous voyez, sans jouer au médecin, on aura quand même le bagage
suffisant pour savoir est-ce qu'il y a des questions, est-ce que c'est clair,
tel sujet, est-ce que... Et souvent on va agir comme un peu quelqu'un qui va
rappeler, peut-être, au médecin qu'il a oublié un point, parce qu'on va,
évidemment, développer aussi une compétence à cet égard-là.
Mme Labrie : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, c'est ce qui conclut nos travaux pour cette
séance-ci. Me Potvin, Me Lambert, merci beaucoup. Au nom de tous mes collègues,
au nom de la ministre, je vous remercie pour l'apport à nos travaux. Je vous
souhaite une bonne fin de journée.
Et je vais suspendre, le temps de recevoir
le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 37)
(Reprise à 16 h 41)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous en sommes maintenant avec... rendus
avec le Regroupement provincial des comités des usagers, qui est représenté
aujourd'hui par Mme Sylvie Tremblay, directrice générale. Bonjour,
Mme Tremblay, bienvenue à la commission. Donc, vous allez bénéficier d'une
période de 10 minutes, d'abord, pour vous présenter, ensuite pour exposer
votre opinion sur le projet de loi. La parole est à vous.
Regroupement provincial des comités des usagers
(RPCU)
Mme Tremblay (Sylvie) : Merci,
Mme la Présidente et Mme la ministre, ainsi que toutes ces dames qui sont
membres de la commission. Très heureuse de voir que... On voit que c'est toutes
des femmes, qui sont autour de la commission. Alors, merci de m'accueillir. Sylvie
Tremblay, donc, directrice générale du RPCU.
Le Regroupement provincial des comités des
usagers du réseau de la santé et des services sociaux défend les droits des
usagers et représente plus de 540 comités d'usagers et de résidents dans
les établissements de la santé et des services sociaux au Québec, qu'ils soient
publics, privés, conventionnés ou autofinancés, et au-delà, en exerçant un
leadership à l'égard de l'amélioration de la qualité de soins et de la sécurité
des services de santé et de services sociaux au Québec.
Qu'est-ce qu'un usager? Les usagers ne
sont pas que des personnes malades, ce sont toutes les personnes qui, à un moment
de leur vie, utilisent les services de l'ensemble du réseau de la santé et des
services sociaux. Le RPCU les représente.
Le RPCU est satisfait de voir que le
projet de loi n° 11 tient compte d'abord des
personnes et de leurs besoins. Cela démontre bien que l'on doit s'occuper de
l'humain avant tout et qu'il faut reconnaître que les soins de fin de vie font
partie de notre parcours de vie. D'emblée, le RPCU félicite toutes les députées
de toutes les... de tous les partis politiques pour avoir fait preuve de
courage dans ce dossier sensible depuis le début. Sans votre travail, sans
votre ouverture, sans votre écoute, les usagers qui sont... qui ont ces besoins
particuliers n'auraient pas d'espoir d'avoir de meilleures conditions de fin de
vie, malgré leur situation de vulnérabilité.
Le RPCU voit d'un bon oeil et comprend la
nécessité de bien baliser les notions que sont les directives anticipées et les
demandes contemporaines ainsi... pour permettre à la personne de pouvoir faire
une demande d'AMM selon ses choix et ses besoins en se basant sur les
conditions prévues au projet de loi, et ce, notamment à l'article 14 et à
l'article 18.
Les directives anticipées et les demandes
contemporaines pour les personnes ayant une maladie neurocognitive. Nous
connaissons de mieux en mieux les aspects cliniques de ces maladies et nous
sommes d'avis que les... la personne devrait avoir la capacité de décider pour
elle-même de sa fin de vie à un stade précoce. Cette ouverture est aussi une
question de dignité et de respect pour l'usager et permettra à cette personne,
de façon libre et éclairée, de formuler sa demande. Elle devra, de plus, être
accompagnée professionnellement dans l'ensemble du processus d'AMM le temps
venu.
L'accès aux services et aux soins
palliatifs de fin de vie est un incontournable. Le RPCU aimerait souligner aux
membres de la commission que l'ensemble des soins et des services en ce domaine
doivent être évalués de façon continue, que le gouvernement du Québec adopte
des budgets en conséquence afin de répondre adéquatement aux demandes et à
l'accompagnement nécessaire pour que les personnes qui font la démarche d'une
demande d'AMM... et ce, partout sur le territoire québécois. De plus, l'offre
de soins palliatifs à domicile et dans les établissements de santé doit être le
plus possible en lien avec la volonté et les besoins des personnes. Des équipes
compétentes en nombre suffisant et dédiées devraient y être associées.
Dans cette perspective, nous voulons
souligner l'importance que l'usager ou l'usagère, en toute dignité et respect,
devrait avoir la possibilité de recevoir l'AMM dans les maisons de soins
palliatifs, cette maison qui l'héberge, que cette personne a choisie et qui, pour
elle, est un lieu de réconfort et de soins respectant ses besoins et son état,
et ce, <jusqu'à l'AMM...
Mme Tremblay (Sylvie) :
...
lieu de réconfort et de soins respectant ses besoins et son état, et ce, >jusqu'à
l'AMM. Les personnes en grande vulnérabilité en fin de vie doivent demeurer là
où elles sont et recevoir l'ensemble des soins de soins palliatifs à la fin de
vie. Nous espérons que ces dispositions seront appliquées rapidement. Le RPCU
supporte cette initiative nécessaire afin d'éviter toute dérive au mépris des
droits des usagers que sont le droit aux services et, plus particulièrement, le
droit de recevoir les soins que requiert son état.
L'information relative à la loi, la
formation des professionnels et les usagers. Le RPCU aimerait sensibiliser la
commission au fait que nos membres nous indiquent souvent que la population,
les professionnels de la santé et des services sociaux ainsi que les usagers
eux-mêmes ne sont pas au fait des mécanismes de la loi, de sa portée, des
démarches pour faire... pour avoir accès à l'AMM. Nous pouvons dire sans
l'ombre d'un doute que l'information populationnelle est défaillante. Nous
recevons de nos membres des demandes d'information sur l'ensemble des
mécanismes de l'aide... des directives médicales anticipées à l'AMM. La société
civile et l'ensemble des usagers se doivent de bien saisir les notions et les
actions liées à l'AMM.
Nous vous recommandons donc de lancer une
campagne de sensibilisation et d'information sur l'ensemble de la loi, ses
modifications, que cette campagne soit diffusée à l'ensemble de la population,
et que ce soit pour que les utilisateurs et les intervenants du réseau de la
santé et des services sociaux la comprennent, et, dans le cadre de cette
campagne, une attention particulière soit portée aux clientèles issues des
communautés culturelles diverses.
Nous sommes très heureux de voir
l'ouverture aux infirmières praticiennes spécialisées, en plus des médecins,
pour administrer l'AMM. Nous sommes... Nous trouvons que c'est une avancée
importante en regard des compétences de celles-ci. De plus, nous tenons à
souligner l'importance de la Commission sur les soins de fin de vie et son
apport aux échanges, aux débats et surtout à la surveillance au fil des
changements législatifs en cette matière.
Ainsi, la... nous recommandons la création
d'un comité d'experts sur la notion de handicap. Le RPCU est sensible à la
volonté de tout usager de mourir dignement. Il en va de même pour toute
personne en situation de handicap. Ces personnes, en grande majorité, vivent
avec des souffrances physiques, psychologiques depuis de nombreuses années. Les
pertes d'autonomie deviennent sévères, et des changements drastiques aux
conditions de vie apportent des stress supplémentaires et des souffrances. Nous
sommes d'avis que les services d'adaptation, de réadaptation, de maintien,
d'accompagnement par des professionnels pour ces personnes sont aussi au centre
des discussions par rapport à leurs besoins, que l'évaluation des besoins,
l'accès aux services doit se faire de façon continue, de qualité, afin
d'améliorer les conditions de vie et surtout la participation sociale pleine et
entière des personnes handicapées.
La PL n° 1 introduit
ici qu'une personne ayant un handicap neuromoteur grave et incurable peut faire
une demande. Nous sommes d'avis de créer un comité d'experts qui se penche très
rapidement sur la notion de handicap et ainsi éviter toute dérive au niveau de
la fin de vie des personnes ayant un handicap qui demandent l'AMM, et, de plus,
que la Commission sur les soins de fin de vie veille de façon spécifique
l'application, s'il y a ouverture, afin d'éviter toute dérive.
Le RPCU vous remercie de prendre en compte
les propos que nous avons émis dans notre mémoire. Merci beaucoup.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme Tremblay, pour votre présentation.
Vous avez soulevé des questions, alors, avec les membres, on va ouvrir la
discussion. On va commencer par Mme la ministre pour une période de 16 min 30 s.
La parole est à vous, Mme la ministre.
Mme Bélanger : Oui. Alors, Mme Tremblay,
bonjour. Ça fait plaisir de vous revoir. Merci pour le mémoire, là, qui nous
est déposé aujourd'hui par le Regroupement provincial du comité des usagers et pour
votre présentation.
Première question de mon côté. Vous êtes
favorable avec l'ensemble... un grand ensemble des éléments, là,
essentiellement, du projet de loi n° 11, vous faites des recommandations
très pertinentes. Mais peut-être, avant d'aller dans certaines de vos
recommandations, qui sont intéressantes, j'aimerais juste m'assurer, au niveau
de la vision que le RPCU a concernant le volet de l'handicap : Est-ce que
le fait de mettre le handicap et de le <spécifier...
Mme Bélanger :
...
concernant le volet de l'handicap : Est-ce que le fait de mettre le
handicap et de le >spécifier pour le volet neuromoteur représente un
enjeu pour le RPCU, en termes d'accès, pour d'autres usagers qui ne seraient
pas dans la classification de handicap neuromoteur, mais qui seraient... qui
présenteraient d'autres situations de handicap?
Mme Tremblay (Sylvie) : Cette
question est à double volet, je vous dirais. Je comprends, par les discussions
qu'il y a eu préalablement sur le projet de loi n° 38, qu'il y avait des
ouvertures et qu'il fallait encore discuter à cet effet. J'ai été DG de l'OPHQ
il y a quelques années, en 2013 jusqu'en 2015, et je vous dirais que, pour les
personnes handicapées, même celles qui sont sur nos tables de mission, chez
nous, c'est un peu épidermique, tout le volet fin de vie. On est toujours en
lien, historiquement... avec un historique qui est lié beaucoup à l'euthanasie,
on revient à des mots très, très particuliers, là. Et je faisais encore des...
j'ai réfléchi et j'ai demandé à quelques personnes des tables de mission de
nous parler de ça, et c'est toujours épidermique.
Ce qui me réjouit malgré tout, c'est qu'on
puisse en discuter à la commission, on puisse arriver à des discussions
ouvertes et qu'on puisse ouvrir le débat de façon sain et respectueux sur
l'ensemble des interrogations liées aux handicaps neuromoteurs, qui sont de tous
ordres. Bien sûr, il y a des gens qui ont des AVC et puis qui sont dans des
situations particulières, on peut parler de paraplégie, quadraplégie, mais il y
a aussi des gens qui ont des déficiences et qui ne sont pas intégrés dans ce
concept, et là il y a beaucoup de confusion.
Alors, je pense que la commission fait un
bon travail. Il y a une évolution, il y a encore une évolution à vos travaux,
et il ne faut pas que cette évolution-là soit déterminée par certaines
problématiques. C'est pour ça qu'on vous dit : Peut-être, dans un
contexte... prenez une pause. Un comité d'experts pourrait se pencher sur cette...
ces notions de handicaps. Mais, au-delà, la commission de fin de vie pourrait
aussi valider très spécifiquement pour qu'il n'y ait pas de dérive en cette
matière.
Alors, nous, on pense que la société
québécoise est mûre pour une avancée au niveau des problématiques neuromoteurs,
mais, chez nos membres, il y a encore beaucoup, beaucoup de réticence et
beaucoup d'incompréhension, aussi, en fonction de l'ensemble des handicaps.
Mme Bélanger : En fonction de
l'ensemble des handicaps. OK, je comprends. Peut-être juste nous expliquer qu'est-ce
que c'est, les tables de mission, juste pour que l'ensemble de mes collègues
comprennent bien, oui.
Mme Tremblay (Sylvie) : Alors,
le RPCU, on est... on représente à la fois les personnes en centre jeunesse
jusqu'à des personnes en fin de vie. Donc, nous, on a des comités d'usagers qui
sont dans toutes les missions, que ce soit l'hébergement, les personnes âgées,
les personnes handicapées, réadaptation, déficience physique, intellectuelle,
santé mentale, dépendance. Donc, toutes les personnes sont représentées chez
nous, et on a des tables spécifiques où on discute, bien sûr, des droits, mais
aussi des grands sujets qui sont en lien avec les droits des usagers, et ce,
partout au Québec. Et c'est pour ça qu'on vous dit aussi : Au niveau des
soins palliatifs à domicile, il y a beaucoup de besoins aussi, par ailleurs.
Alors, c'est ça, nos tables de mission. Et on a une table spécifique, là, pour
la réadaptation, donc, santé mentale, déficience intellectuelle, déficience
physique et troubles graves de l'autisme. Donc, on a des tables spécifiques à
ce niveau-là.
Mme Bélanger : OK. Peut-être...
je veux juste revenir sur... Bon, dans la loi, dans le projet de loi
n° 11, on parle de handicaps neuromoteurs. Je comprends qu'à la lumière de
ce que vous nous dites, si on n'avait pas mis, dans le projet de loi, le volet
neuromoteur, ça aurait fait probablement réagir beaucoup de vos membres, parce
que, là, dans le fond, on aurait élargi le concept encore plus large.
Mme Tremblay (Sylvie) : Absolument.
Mais, au-delà, le concept neuromoteur, pour certaines personnes, il est un peu
flou aussi, alors il faut peut-être le définir davantage pour ne pas créer de
confusion supplémentaire. Moi, je pense que c'est une ouverture qui peut être
faite. Mais, en même temps, il faut bien, bien la baliser, il faut bien
exprimer la portée de ça, parce qu'il y a <effectivement la notion...
Mme Tremblay (Sylvie) :
...
bien la baliser, il faut bien exprimer la portée de ça, parce qu'il y a >effectivement
la notion de maladie grave et incurable et l'historique du mouvement des
personnes handicapées et celles dont je vous parlais en préambule. Donc, il
faut être très, très conscients aussi que c'est sensible, là, pour ces
personnes.
Mme Bélanger : Je termine
avec une dernière question. Je vais laisser mes collègues, par la suite, poser
des questions, mais, sur le trouble mental, c'est... vous savez, on l'exclut,
là, du projet de loi, mais, comme vous représentez différents groupes
d'usagers, est-ce que ça a été salué, remarqué par vos membres, le fait qu'on a
exclu du projet de loi les personnes ayant un trouble mental?
Mme Tremblay (Sylvie) : Je
pense que les gens étaient satisfaits de ne pas se retrouver dans le projet de
loi parce que... Je pense qu'il y a beaucoup de discussions qui ont encore à
avoir au niveau des problématiques de santé mentale et je pense que c'est très
bien de continuer la réflexion et de voir comment éventuellement, dans
l'exercice que vous faites et qui sera fait dans les prochaines années aussi,
il pourra y avoir des discussions sur ces problématiques-là. C'est plutôt
positif, en fait.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Je vais me tourner maintenant du
côté de la députée de Roberval pour... Il reste encore 9 min 10 s.
Mme Guillemette : Merci, Mme
la Présidente. Merci, Mme Tremblay d'être avec nous aujourd'hui. J'aimerais,
moi, vous entendre sur le handicap. Dans le projet de loi, c'est «handicap
neuromoteur». Vous ne croyez pas que, si on ne les inclut pas, ces... les
handicaps, ces gens-là pourraient se sentir... pourraient sentir de la
discrimination ou... Parce qu'il ne faut jamais oublier qu'il y a la notion de
souffrance, hein, qui doit venir avec ça. Donc, ça ne veut pas dire que, parce
qu'ils peuvent faire une demande d'aide médicale à mourir, qu'ils auront accès
et qu'ils pourront faire une demande. En fait, s'il n'y a pas de notion de souffrance,
quelqu'un ne pourra pas, que sur la base, là, qu'il est... qu'il a un handicap,
faire une demande.
Mme Tremblay (Sylvie) : Je
comprends. On parle de maladie grave et incurable. Je comprends très bien. Vous
et moi, on le comprend. Mais, les personnes handicapées, la notion de handicap,
les limitations fonctionnelles, on arrive à la commission, et, à chaque étape
de cette commission, il y a eu des débats. Vous vous souviendrez, les premières
démarches étaient sur le cancer, ensuite il y a eu d'autres démarches. On peut
faire l'historique de ça. Votre commission aura à se pencher sur la notion de
handicap, les personnes handicapées, ce qu'elles vivent, ce qu'elles vous
demandent, et les besoins en fonction de la discrimination ou pas. Et ça, je pense
que c'est à la commission de bien circonscrire la notion neuromotrice avec la
maladie grave et incurable, de bien, bien organiser et de spécifier en quoi...
Alors, si c'est de l'AVC, de la dystrophie musculaire, une amputation liée à
une maladie vasculaire, il y a déjà des avancées à ce niveau-là, mais il y a
d'autres personnes handicapées qui pourraient ne pas se reconnaître et qui
pourraient, éventuellement... Il pourrait y avoir des dérives.
• (17 heures) •
Alors, c'est plutôt positif, ce qui vous
arrive, en fait, parce qu'à chaque fois qu'on arrive sur cette merveilleuse
commission, où on est capables, nous, comme société, d'évoluer en fonction de
la fin de vie, on est capables aussi d'adresser les problématiques qui sont de
plus en plus complexes. Et, au niveau des personnes handicapées, je vous dirais
qu'il y a de la complexité et il y a aussi des gens qui pourraient se sentir
discriminés en fonction de ça. Donc, c'est une avancée. C'est des discussions
qui doivent se faire, se faire sainement, vous le faites, et je pense qu'il y a
de l'ouverture. Alors, s'il faut prendre un peu plus de temps puis qu'un comité
d'experts puisse se pencher là-dessus, tant mieux. Si la commission de fin de
vie a une vision très, très particulière sur cette ouverture et qu'ils voient
qu'il y a de la dérive, ils pourront aussi revenir à la commission et au
législateur pour avancer.
Moi, je pense que la prudence est toujours
de rigueur. Vous le savez, nous le savons. Et, dans ce contexte-là, vous devez
avoir la vision la plus éclairée possible. On peut se revoir dans six mois. Ça
peut être adopté, aussi, avec la notion neuromoteur avec maladie grave et
incurable maintenant, mais gardez-vous de l'espace pour... gardez-vous de
l'espace pour de l'évaluation très, très, très rapide, parce qu'il pourrait y
avoir des dérives. Puis moi, j'ai été DG de <l'OPHQ, là, puis, vraiment...
>
17 h (version révisée)
< Mme Tremblay (Sylvie) :
...très,
très, très rapide, parce qu'il pourrait y avoir des dérives. Puis moi, j'ai été
DG de >l'OPHQ, là, puis, vraiment, c'est très épidermique. À partir du
moment où on parle de fin de vie, les personnes handicapées sont souvent très,
très bouleversées par ce qui s'est passé historiquement dans leur vie. Alors,
moi, je pense qu'il faut... il faut... Vous avez un bon... un beau problème
puis vous êtes... vous avez toute la sérénité, là, pour prendre en main cet...
ce nouveau débat, je dirais.
Mme Guillemette : Justement,
c'est l'intérêt, là, de vous entendre. Et est-ce qu'un véhicule comme... bon,
vous avez parlé d'un comité d'experts, ou d'un forum, ou... pourrait faire en
sorte que, rapidement, on puisse statuer? Ma première question, et, dans le
projet de loi, on a «handicap neuromoteur», tant qu'à être là, et de travailler,
et de se questionner sur le sujet, est-ce qu'on devrait y aller pour les
handicaps en considérant qu'il y a toujours le volet de la souffrance qui est
là? Est-ce qu'on devrait y aller dans le handicap, grand... grand terme?
Mme Tremblay (Sylvie) : Votre
première question... votre premier préambule, c'est... rapidement, à votre fin
de question, je vous dirais que ce ne sera pas rapide si on ajoute l'ensemble
des handicaps. Et je vous prendrais comme exemple les personnes qui ont un
handicap intellectuel ou un handicap... un handicap intellectuel, prenons cet
exemple-là, qui ne sont... ce n'est pas un handicap neuromoteur. Donc, à partir
du moment où on ouvre l'ensemble de la notion de handicap, ce ne sera pas,
probablement rapide.
Moi, ce que je vous dis, c'est : Vous
avez circonscrit un peu la notion neuromoteur sur une maladie grave et
incurable, pour certaines problématiques, je pense qu'il faut le fouiller
davantage. À cet aspect-là, peut-être qu'un comité d'experts pourrait vraiment
le baliser correctement pour demander aussi à la commission de le baliser
aussi. Et moi... Et, si c'est un débat sur le handicap, moi, je pense qu'il
faut prendre le temps, comme on s'était dit précédemment pour la santé mentale,
prendre le temps de reprendre le pouls de la population, des personnes
handicapées elles-mêmes. L'office est là pour donner des conseils aussi, l'OPHQ
est là pour ça, donc de refaire un peu le tour et d'arriver avec une vision
éclairée.
C'est mieux de prendre le temps qu'il faut
pour que la population embrasse, comme vous êtes en train de faire, et que
nous, on puisse, comme comité d'usagers, le défendre et permettre au comité d'usagers
aussi de bien l'expliquer au niveau des missions respectives des
établissements. Tout ça... tout ça est positif en soi, mais il y a toujours la
question de temps puis il y a toujours la question de compréhension aussi.
Mme Guillemette : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Nous avons encore le temps pour une
dernière question. Mme la députée de Laporte, il vous reste 2 min 15 s.
Mme Poulet : Bien, ça a
été... Bonjour, madame. Merci beaucoup de votre participation. Mme la
Présidente, merci. Ça a été partiellement répondu, vous avez couvert certains
éléments. Comment se vit aujourd'hui la demande contemporaine? Quelle est la
réalité de vos usagers? Vous êtes là pour prendre le pouls de la population, de
vos usagers sur... qui vivent cette demande-là.
Votre recommandation n° 4, c'est de
lancer une campagne de sensibilisation et d'information. J'ai parlé avec des
collègues tantôt, avant de rentrer, de commencer la commission, on parlait
justement que... de l'information d'un endroit n'est pas nécessairement la même
information qu'un autre endroit. Est-ce qu'il y a une problématique, au niveau
des usagers, quant à l'information qui est diffusée aujourd'hui dans la demande
contemporaine? Et, si oui, de quelle façon on peut s'assurer que, pour la
demande anticipée, l'information soit claire pour tous?
Mme Tremblay (Sylvie) : Bien,
c'est beaucoup plus large que... Ce que je vous dis puis ce que nos membres
nous disent, c'est qu'il y a beaucoup de confusion sur l'ensemble de l'oeuvre.
Alors, les gens, ils adhèrent à la loi, ils adhèrent au changement, ils vous
écoutent, et c'est très... Et les gens sont heureux de voir que vous prenez un
soin très extrême à baliser l'ensemble de la fin de vie et l'aide médicale à
mourir, mais, au-delà, nous, on reçoit des demandes de... les demandes
médicales anticipées. Comment on peut travailler? Comment... comment... comment
répondre à une personne qui pense que de demander l'anticipé peut aller
directement à l'AMM? Il y a de la <confusion...
Mme Tremblay (Sylvie) :
...comment
on peut travailler? Comment... comment... comment répondre à une personne
qui... qui pense que de demander l'anticipé peut aller directement à l'AMM? Il
y a de la >confusion assez générale dans l'ensemble de la population
puis de nos membres aussi sur, je vous dirais, la ligne, là. Et ça, je pense
que vous devez être conscient que plus ça se complexifie, plus ça devient... Il
faut l'expliquer davantage. Et nous, on travaille avec des bénévoles qui sont
dans tous les milieux, et là on en perd un peu notre latin. Alors, nous, ce
qu'on vous dit, c'est : On peut-tu adapter des mécanismes de communication?
Nous, on peut vous aider à faire la formation. Il y a des... on rencontre des
intervenants, quelquefois, qui ne comprennent même pas la différence, là. Alors,
je comprends qu'il y a toutes sortes de monde dans le réseau, là, mais, si,
nous, il faut les accompagner pour bien expliquer aux usagers, là, ça devient
un peu particulier. Alors...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme Tremblay. Cette portion d'échange
avec la ministre et les députés étant terminée, je vais me tourner du côté de
l'opposition officielle, merci, mesdames, merci, Mme la ministre, avec
l'opposition officielle, représentée par Mme la députée de Westmount—Saint-Louis,
pour une période de 9 min 54 s. La parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Mme Tremblay. Merci beaucoup pour votre exposé, votre
calme et la façon équilibrée que vous partagez le point de vue de vos usagers
puis vos membres. Parce que je trouve très intéressant que vous nous dites
d'aller avec prudence. Je vous entends quand vous parlez d'un comité d'experts.
Je suis d'avis que ça va être très important d'avoir une consultation et de
prendre le pouls de la population, parce que nous sommes en train d'introduire
une notion qui n'a pas eu une consultation large, dont nous n'avons pas entendu
vraiment la voix de beaucoup de groupes concernés. Entre autres, la Société
québécoise de la déficience intellectuelle m'ont envoyé un message juste... ça
fait juste quelques heures, pour dire : Ils souhaitent venir témoigner et
partager leur point de vue. Alors, vous avez des alliés en ce qui concerne la
demande d'avoir un comité d'experts ou avoir un forum.
Moi, je souhaite savoir comment vous, vous
travaillez pour consulter vos membres. Parce que vous avez dit à plusieurs
reprises «vous pensez», mais est-ce qu'il y a un mécanisme que vous avez en
place pour faire de la consultation puis de prendre le pouls des gens que vous
représentez?
Mme Tremblay (Sylvie) : Je
disais précédemment à Mme la ministre qu'on est des tables de mission. Alors, les
tables de mission, comme je vous disais, c'est que, dans chaque mission, on a
des comités d'usagers sur différentes problématiques qui sont rencontrés, sur
l'accès, sur les droits et les problématiques associées. Donc, c'est par ce
biais-là qu'on le fait. Et aussi on se permet d'aller voir nos quelques
établissements ciblés en fonction de problématiques, les comités, dans toutes
les régions du Québec, sur certaines autres problématiques. Donc, il y a
plusieurs façons de consulter nos membres, et les grandes associations,
probablement que les collègues qui viendront diront la même chose, c'est que la
base, c'est... la base, c'est nos membres, et nos membres, ils sont dans tout...
dans tout le réseau au Québec. Alors, des fois... des fois, on prend acte puis,
des fois, on pousse davantage, mais c'est d'eux que vient l'information, c'est
d'eux que... c'est à eux que reviennent la défense des droits. Donc, il faut
les consulter constamment.
• (17 h 10) •
Mme Maccarone : Merci. Je
suis d'avis, comme vous, que d'ajouter la notion de handicap, que ce soit
handicap neuromoteur ou handicap, sans critère, mais avec une définition,
évidemment, c'est un enjeu très sensible et que nous devons se préoccuper aussi
de le message que nous envoie... que nous sommes en train d'envoyer à tous nos
citoyens qui sont présentement en situation de handicap. On ne veut pas
stigmatiser leur vie et leur qualité de vie. Alors, très important d'aller avec
de la prudence.
Mais je veux vous entendre juste pour la
clarté en ce qui concerne déficience intellectuelle, vous l'avez évoqué plus
tôt avec mes collègues, trouble du spectre de l'autisme, par exemple, puis le
désir de cette population, de ces citoyens aussi, qui sont aptes à consentir,
de respecter leur droit à l'autonomie et autodétermination. Si jamais, parce
qu'on parle d'une... on ne parle plus d'état, maintenant. Dans cette loi, ce n'est
plus l'état. Là, maintenant, on parle de maladie, et il y a une distinction
entre maladie et handicap. Ce n'est pas tous les handicaps qui découlent d'une
maladie. Ce n'est pas... Les <souffrances...
Mme Maccarone :
...il
y a une distinction entre maladie et handicap. Ce n'est pas tous les handicaps
qui... qui découlent d'une maladie. Ce n'est pas... Les >souffrances ne
sont pas nécessairement liées à la maladie. Alors, comment prévoyez-vous...
Comme, par exemple, une personne qui souffre d'une déficience intellectuelle
peut être atteinte d'un cancer et est en train de souffrir. Puis la souffrance
aussi, la notion de souffrance et aptitude... Comment voyez-vous le mécanisme à
l'intérieur de cette loi pour non seulement respecter le droit
d'autodétermination de ces personnes, mais aussi de les protéger? Parce que,
c'est sûr, c'est aussi des gens qui sont vulnérables.
Mme Tremblay (Sylvie) : C'est
là où je trouve que vous avez des bonnes... des bonnes... des bonnes réflexions
à faire en commission, mais, au-delà, les discussions doivent revenir à
l'essentiel dans le sens où la participation pleine et entière des personnes
handicapées, que ce soient des personnes ayant des limitations fonctionnelles
en déficience intellectuelle, autisme, les personnes sourdes, les personnes...
bon, toutes catégories de handicap confondues, ce que je disais dans le
mémoire, c'est que la participation pleine et entière des personnes handicapées
ne se réduit pas à la maladie, c'est sûr. Et il y a d'autres volets que la
santé pour les personnes dans la participation sociale, qu'on peut penser à
l'emploi ou autres. Tu sais, c'est des personnes à part entière. Et
effectivement ce qui arrive à la commission, c'est : plus vous avancez...
plus nous avançons en tant que population sur la fin de vie, plus on se
questionne sur des éléments encore plus sensibles au fil du temps.
Alors, il y a eu... comme je vous disais
précédemment, il y a eu, au début, qu'est-ce que c'étaient, les maladies, le
cancer, qu'est-ce que ça voulait dire, la fin de vie, et tout. Et là on est
dans des discussions où on parle de la notion de handicap. Il y avait une
vision particulière pour les maladies neuromotrices, maladies incurables
graves, par exemple l'AVC, tout le monde peut comprendre ça. Et là vous ouvrez,
et la société civile ouvre le débat sur la notion de handicap.
Alors, comme législateurs, comme membres
de la commission, que pouvez-vous faire? Alors, il faut entendre ça. Est-ce que
ça doit vous ralentir? Peut-être que vous allez me dire non, peut-être qu'entre
vous vous allez dire non. Alors, il faut vous... il faut vous outiller. Donc,
ça peut peut-être prendre un comité d'experts qui vous permettra de baliser
qu'est-ce que les handicaps neuromoteurs associés, qu'est-ce que ça veut dire,
la notion de handicap plus large et comment ces personnes-là pourront
éventuellement, comme toute personne, comme vous et moi, avoir accès à l'aide
médicale à mourir. Mais, de ces... de ces travaux-là, je pense qu'il va émerger
d'autres discussions, et, dans peut-être quelques années, nous aurons encore
des discussions sur d'autres problématiques qui sont liées à la fin de vie, qui
font partie de la vie.
Alors, il y a une capacité d'avoir un
groupe d'experts. L'Office des personnes handicapées est là pour vous supporter
aussi. Et, dans ce contexte-là, nous, on vous dit : C'est... c'est bien
sûr fragile, mais les gens, ils sont quand même contents de voir qu'il y a des
avancées dans l'aide médicale à mourir et qu'on peut aussi en discuter en
fonction des handicaps.
Mme Maccarone : Merci. Il me
reste très peu de temps, mais je souhaite vous entendre en ce qui concerne la
position du regroupement en... pour le rôle du tiers de confiance. On a entendu
la société d'Alzheimer qui nous ont dit que... Parce que, dans la loi, c'est
marqué, on peut déterminer ou nommer, et eux, ils disent qu'on devra. Alors,
votre position en ce qui concerne le rôle de cette personne clé?
Mme Tremblay (Sylvie) : Je ne
suis pas sûre qu'on devrait dire «devra».
Mme Maccarone : OK. Ça fait
que, selon vous, ça devrait être un choix?
Mme Tremblay (Sylvie) : Oui.
Mme Maccarone : Alors, ça se
peut qu'on va se retrouver avec des personnes qui n'auront pas un tiers de
confiance, et ce serait une personne dans le corps professionnel médical, de
santé qui va déclencher la demande anticipée, par exemple, d'aide médicale à
mourir. Comment voyez-vous le processus si nous n'avons pas un tiers de
confiance nommé?
Mme Tremblay (Sylvie) : Bien,
ce n'est pas tout le monde qui a des tiers de confiance.
Mme Maccarone : Oui, c'est
vrai, on... il y a du monde qui se retrouve seul, tout à fait, mais ça ne nous
empêche pas de nommer quelqu'un. Par exemple, on vient <d'entendre...
Mme Maccarone :
...oui,
c'est vrai, on... il y a du monde qui se retrouve seul, tout à fait, mais ça ne
nous empêche pas de nommer quelqu'un. Par exemple, on vient >d'entendre
le groupe précédent, ils ont dit que ça se peut que nous devons interpeler
aussi l'ordre des travailleuses et travailleurs sociaux, que ça peut être aussi
quelqu'un proche, mais pas nécessairement un proche aidant. Ça peut être un
regroupement, un organisme, la société d'Alzheimer aussi. Il y avait quand même
des recommandations en ce qui concerne ceci, mais vous, vous ne pensez pas que
c'est une nécessité?
Mme Tremblay (Sylvie) : Alors,
moi, ce que je vous dis, c'est... Bien, dans ce contexte-là, ce que je vous
dis, l'ordre... Les professionnels de la santé et services sociaux, dans ce
contexte-là, doivent... pourraient être habiletés, j'en suis. Parce que ça protège
les droits de chacun et de ceux qui sont seuls et qui n'ont pas de famille et
de capacité aussi. Alors, c'est... plus... plus on est proche des
professionnels de la santé, plus c'est adéquat.
Mme Maccarone : Mieux que
c'est. Et, dans les dernières secondes, en ce qui concerne le formulaire, parce
que je peux imaginer, pour le regroupement des... des comités d'usagers, comme
vous représentez, ça va être important d'avoir un formulaire qui est adapté,
par exemple, pour les personnes avec des difficultés de vision, par exemple, ça
fait qu'adapté vraiment pour toutes les personnes, mais avez-vous des
recommandations pour nous, comme membres?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement, parce le temps est déjà écoulé.
Mme Maccarone : Ah! voilà.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement, rapidement.
Mme Tremblay (Sylvie) : Alors,
pour tout document du gouvernement, ça devrait être adapté et simplifié. Alors,
il y a toutes sortes de façons de les faire. Là aussi, on peut vous donner un
coup de main, l'office est là aussi, il y a des personnes très, très habilitées
à le faire. Oui, le plus possible. C'est comme la campagne populationnelle, il
faut que les gens comprennent ce à quoi ils s'attendent quand ils demandent
l'aide médicale à mourir. Tout ça doit être simple.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci, Mme Tremblay. Alors, je poursuis. On
poursuit la discussion avec la députée de Sherbrooke pour une période de 3 min 18 s.
La parole est à vous.
Mme Labrie : Merci. Je vais
vous poser une question spécifiquement liée à votre qualité de représentante
des comités d'usagers. Il y aura des gens qui auront un tiers de confiance, il
y a des gens qui n'en auront peut-être pas. Et, pour ces personnes-là, ça
pourrait reposer sur des membres de l'équipe de soins de lever le drapeau quand
c'est le temps de mettre en oeuvre le processus de demande anticipée. Par
contre, il y a quand même, je vais dire, du roulement de personnel. Parfois,
dans certains milieux, on fonctionne avec des agences, donc le roulement est...
est quand même fréquent, de sorte qu'il n'y a pas nécessairement des gens qui
sont en mesure de voir l'évolution de la situation d'un usager dans le temps et
encore moins d'apprendre à les connaître.
Comment vous pensez que ça va être
possible d'appliquer ça, ces demandes-là anticipées pour les personnes qui
n'ont pas de tiers de confiance? Est-ce qu'en ce moment dans nos établissements
de soins de longue durée on devrait prévoir des moyens particuliers pour
s'assurer de ne pas échapper personne, notamment celles qui n'auront pas de
tiers de confiance?
Mme Tremblay (Sylvie) : Donc,
si je comprends votre question, c'est : Peut-on se fier au personnel
existant pour bien supporter les personnes qui n'ont pas de proche aidant ou de
tiers autour d'eux?
• (17 h 20) •
Mme Labrie : Oui. Puis je
pose la question... parce qu'évidemment personne n'est mal intentionné, là,
puis je ne veux pas présumer d'une négligence quelconque, mais c'est-à-dire que
le simple fait qu'il y ait un roulement fréquent de personnel rend peut-être ça
difficile, pour... pour une équipe de soins, de voir qu'une personne vit plus
de souffrance, d'être au courant qu'il n'y a personne qui fait la surveillance
pour voir si c'est le temps de mettre en oeuvre la demande anticipée, par
exemple.
Mme Tremblay (Sylvie) : Alors,
moi, j'ai confiance à ce réseau-là. Je suis dedans depuis 35 ans. Il y a
des chefs de service, il y a des gens qui sont des infirmières, qui sont là
depuis longtemps. On parle de... d'infirmières spécialisées, il y a des
médecins aussi derrière ça. Alors, moi, je fais confiance au personnel pour
être capable d'accompagner les personnes qui sont en grande vulnérabilité. Et là
qu'on se dit : Bien là, il y a quelque chose, il y a... il y a quelque
chose qui n'est pas tout à fait cachère, dirons-nous, mais moi, je... je
fais... Je... malgré tout, et malgré tout ce que j'entends à toutes les
semaines, et tous les déboires, et toutes les plaintes que nous avons, je fais
quand même confiance. Parce que ce débat, que nous avons et que vous avez sur
la fin de vie pour tous et toutes, que nous soyons usagères nous aussi, est
préoccupant. Et je pense que les gens sont très, très au fait de ça. Les
dérives ne se font pas là.
Et je parlais de soins palliatifs, je parlais
de soins palliatifs à domicile, c'est là que ça se passe, les problématiques,
et les dérives sont beaucoup là. Alors, revenir à ça aussi et se dire :
Mon Dieu! Que les gens soient à l'hôpital et que, là, il n'y a pas eu de place
en palliatif, c'est ça aussi ce qui <amène...
Mme Tremblay (Sylvie) :
...les
dérives sont beaucoup là. Alors, revenir à ça aussi et se dire : Mon Dieu!
Que les gens soient à l'hôpital et que là, il n'y a pas eu de place en
palliatif, c'est ça aussi ce qui >amène vos discussions, et la commission
va répondre à ça. Alors, je pense que c'est là qu'il faut pousser davantage.
Mme Labrie : Donc, ce ne
serait pas nécessaire de nommer quelqu'un responsable de faire ce suivi. Vous
avez confiance que ça va se faire.
Mme Tremblay (Sylvie) : Bien,
ça va se faire.
Mme Labrie : Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup. Nous allons terminer, donc, cet échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice
pour une période de 3 min 18 s.
Mme Tardif : Merci, Mme la
Présidente. Merci, merci d'être là cet après-midi en virtuel avec nous, mais
d'avoir préparé le rapport, c'est quand même un travail exhaustif, on le sait,
on le reconnaît. Vous avez des centaines, voire des milliers, devrais-je dire,
de gens que vous servez et vous avez, dans votre rapport, fait mention que
beaucoup de citoyens au Québec, et même des soignants, ne connaissent pas très
bien la loi sur l'aide médicale à mourir. Et vous avez... vous nous invitez à
réfléchir sur la question de lancer une campagne d'information, une campagne de
sensibilisation, tant sur ce qui existe, mais aussi et davantage sur ce qui
s'en vient. J'aimerais vous entendre parler de ça un petit peu. Merci.
Mme Tremblay (Sylvie) : Je
ferais le lien avec la campagne du curateur, là, sur l'accompagnateur, qui se
fait ces temps-ci, où on voit une dame qui parle qu'est-ce qu'elle a fait
aujourd'hui, et son fils dit : Bien, moi, j'ai accompagné ma mère. Alors, c'est
une campagne que le Curateur public a faite. C'est une campagne populationnelle
et qui amène les gens à réfléchir sur l'âge, et l'accompagnement qu'on peut
avoir, et la demande qu'on peut faire au curateur. C'est dans le même sens,
c'est-à-dire que la fin de vie, la vision que nous avons au Québec, qui est
assez... qui est assez incroyable dans le sens positif du terme, je pense que
plus les gens seront sensibilisés, moins il y aura de dérives à l'entrée et à
la sortie, plus les gens vont encore plus adhérer à ce que vous faites et ce que...
ce sur quoi nous discutons aujourd'hui.
La... les membres de la... Je vous
donnerais un exemple. Les membres de la commission de fin de vie sont venus à
notre congrès en octobre à Rivière-du-Loup, et... il y avait 600 personnes,
et émergeait de là toutes sortes de questions qui étaient plutôt sur les
directives médicales anticipées, qui n'étaient pas sur l'AMM, ou d'autres
questions sur... bien, toutes sortes de questions, qui peut amener des dérives.
Alors, vous faites bien votre travail, la commission le fait et l'a fait
précédemment, mais plus on avance, plus je pense qu'il faut démystifier. Dans
un contexte aussi où on a eu une pandémie, vous vous souviendrez, et là je
pense qu'à ce moment-là il faut encore plus être vigilant sur les messages à la
population pour qu'il n'y ait pas de dérive derrière ce que vous faites
aujourd'hui puis ce qu'on va faire demain.
Mme Tardif : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Donc, c'est ce qui met fin
à nos échanges, Mme Tremblay. À nouveau, au nom de tous mes collègues, au
nom de la ministre, merci. Ce fut des échanges fructueux. Alors, je vais vous
souhaiter une bonne fin de journée.
Et je vais suspendre les travaux, le temps
de recevoir le prochain groupe. Merci, Mme Tremblay.
(Suspension de la séance à 17 h 25)
17 h 30 (version révisée)
(Reprise à 17 h 33)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Les travaux de la Commission
des relations avec les citoyens reprend.
Alors, nous avons... nous recevons, pour
cette fin de journée, le Conseil pour la protection des malades, qui est
représenté par M. Daniel Pilote, membre du conseil d'administration.
Bienvenue, M. Pilote. Donc, la procédure est la suivante, vous allez vous
présenter et vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre
exposé, et va s'ensuivre la période de discussion avec les membres de la
commission. Alors, la parole est à vous.
Conseil pour la
protection des malades (CPM)
M. Pilote (Daniel) : Bien, je
vous remercie infiniment. Juste me mettre... Oups! Ce ne sera pas long, mes
chers amis, on va juste... parce que j'ai perdu ma page. Ce ne sera pas long.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Si vous avez besoin de temps, faites juste me le dire, on
peut suspendre.
M. Pilote (Daniel) : Pas de
problème. Non, je veux juste... je veux juste... OK, j'ai perdu ma page. On va
la remettre. Voilà, c'est fait...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Vous l'avez?
M. Pilote (Daniel) : Bien oui,
je l'ai retrouvée.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, allez-y, on vous écoute.
M. Pilote (Daniel) : Bon,
bien, donc, je vous remercie. Donc, le CPM est honoré d'avoir été invité à
commenter le projet de la loi... le projet de loi n° 11. Nous remercions Mme Sonia
Bélanger, ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, pour la confiance témoignée
à l'oeuvre de Claude Brunet. Le Conseil pour la protection des malades, constitué
en 1974, va célébrer ses 50 ans en 2024. Donc, pour débuter, j'aimerais,
au nom du conseil de la protection des malades... de mentionner que nous sommes
d'accord avec le projet de loi n° 11.
Donc, j'aimerais vous mettre dans le
contexte que moi, je vis actuellement, bien sûr. Je suis atteint de la
dystrophie musculaire Becker. C'est une maladie qui est relativement grave,
mais... et incurable pour le moment, bien sûr. Et, il y a 10 ans, j'ai été
hospitalisé à Charles-Le Moyne suite à une pneumonie grave, et je remercie la
science médicale de m'avoir sauvé. Cependant, en ce qui concerne le projet de
loi, j'ai toujours eu l'idée du prochoix des citoyens.
Donc, pour ma part, je ne suis pas atteint
d'une maladie grave, mais cependant elle est incurable. S'il était nécessaire,
moi, je veux une sédation pour soulager mes souffrances. Or, je veux que la vie
décide de mon sort. Je crois que la vie d'un être humain est sacrée.
Je pense que l'aide médicale à mourir
permet aux citoyens de choisir le moment approprié pour mettre un terme à des
souffrances inutiles. L'idée du projet de loi est qu'on peut choisir le moment
approprié pour une maladie grave et incurable.
Pour qui la personne peut anticiper de le
faire avec un choix <éclairé...
M. Pilote (Daniel) :
...choix
>éclairé dans les circonstances évidentes et les limites raisonnables
pour mettre fin à la vie, je crois que... qu'une personne ne peut... une
personne qui ne peut plus communiquer, dans une position foetale depuis
plusieurs jours, donc, qui serait peut-être... un temps approprié pour un choix
anticipé pour l'aide médicale à mourir.
Je suis arrivé à réfléchir à certaines
inquiétudes concernant l'aide médicale à mourir pour ne pas banaliser et
faciliter cette alternative à la souffrance. Je ne veux pas que l'aide médicale
à mourir qui serait accordée pour des raisons soit de manque de soins ou... ou
à cause d'une... d'une maltraitance. Je pense que cela ne serait pas une raison
valable.
J'aimerais vous raconter un fait d'une personne
avec une paralysie des membres inférieurs causée par un accident couvert par
une agence gouvernementale. Et le responsable du dossier de cette agence pour
les soins de cette personne a osé dire que peut-être l'aide médicale à mourir
serait une solution.
Alors, je pense à une situation où une
personne serait atteinte d'une maladie incurable, et l'idée malveillante de
diminuer petit à petit les soins et les services dans l'espoir qu'elle,
peut-être, utilise l'aide médicale à mourir. Je suggère de faire une analyse
sur... vraiment pour être sûrs et certains qu'il n'y a pas une autre idée en
arrière de tout ça. Alors donc, ce serait, je pense, une façon, là, de... Il
faudrait bien analyser puis... pour voir si ce n'est pas ces raisons-là.
C'est plutôt de l'aide médicale à vivre,
plutôt, qu'il nous faut. J'espère que le réseau de la santé ne diminuera pas
les soins et les services offerts aux prestataires, surtout dans un avenir
rapproché. Il y a beaucoup de plaintes actuellement, et on peut donner... oui,
et peut-être ça peut donner le goût de peut-être recevoir l'aide médicale à
mourir.
Moi, j'ai été sauvé il y a 10 ans. Et
j'ai remarqué et vécu avec plusieurs situations de maltraitance et de
négligence. J'ai pensé souvent que c'était de l'aide pour vraiment aller vers de
l'aide médicale à mourir. Donc, il serait très difficile de... à cause d'une
négligence parce qu'on dirait : De toute façon, dans le fond, on ne
pouvait pas rien faire pour cette personne souffrant d'une maladie incurable.
Je ne voudrais pas que ce soit une alternative pour banaliser l'aide médicale à
mourir pour toutes sortes de maladies curatives.
Donc, je vous remercie. Et le Conseil pour
la protection des malades, nous apprécions. Et, justement, merci pour nous
avoir donné la chance de parler.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien. Eh bien, merci beaucoup, M. Pilote, pour votre
témoignage, votre expérience et vos recommandations. Alors, on va débuter la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vais me tourner du côté de la
ministre. La ministre a une période de 16 min 30 s pour discuter avec
vous ainsi que les députés de la banquette. La parole est à vous, Mme la
ministre.
Mme Bélanger : Bonjour, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Bonjour.
• (17 h 40) •
Mme Bélanger : C'est un
plaisir de vous revoir. Vous m'impressionnez toujours, constamment, par votre
énergie, votre militantisme, la défense des droits des usagers. Je sais que
c'est... c'est très, très important. Je ne savais pas que ça allait faire
50 ans. Déjà 50 ans en 2024?
M. Pilote (Daniel) : Exact.
Oui, déjà.
Mme Bélanger : OK. Bien, en
tout cas, si... si on reçoit une invitation, on ira certainement faire un tour.
Vous allez certainement célébrer.
M. Pilote (Daniel) : Excellent.
Mme Bélanger : Mais je
reconnais... et puis, en même temps, j'en profite, là, aujourd'hui, on vous
reçoit, et je sais que, tu sais, les relations avec le Conseil pour la
protection des malades, vous êtes là vraiment dans une perspective de défendre
les droits des malades, vous le faites très bien. Puis, des fois, ce n'est pas
toujours facile entre les différentes instances gouvernementales,
ministérielles, les conseils de protection de malades. Mais aujourd'hui je veux
quand même vous dire un grand merci pour votre <prestation...
Mme Bélanger :
...pour
votre >prestation, pour le document que vous avez écrit. J'ai beaucoup
aimé votre entrée en matière en disant que la vie d'un être humain, c'est
sacré, et puis... Et vous êtes quelqu'un qui a une expérience, en plus, parce
que vous avez, donc, une maladie. Et vous êtes quelqu'un qui est actif, qui a
pris sa vie en main et qui est très impliqué. Vous avez aussi parlé que c'est
important, pour vous, de choisir le moment, puis je fais référence aussi au
volet de mourir dans la dignité, parce que, là, vous avez parlé de personnes en
position foetale, avec impossibilité de communication. Pour moi, ça, c'est la
dignité, hein, des personnes.
Est-ce que... Question que j'ai à vous
poser : Quand vous avez lu le projet de loi n° 11, est-ce que vous
ressentez que ce projet de loi répond à la philosophie que vous prônez? Est-ce
que ça...
M. Pilote (Daniel) : Oui,
absolument.
Mme Bélanger : Oui? OK.
M. Pilote (Daniel) : Absolument,
oui. Oui, je trouve que, vraiment, c'est... De toute façon, ça fait longtemps
qu'on en parle. Là, c'est parce qu'on va la modifier pour l'amender. Justement,
oui, je pense qu'il fallait aller jusque là parce que, quand que, justement,
une personne... Parce que moi, j'en côtoie souvent ici, hein, dans le CHSLD, et
puis, oui, on voit qu'à un moment donné la qualité de vie... quand qu'il n'y a
plus de qualité de vie, c'est une façon, je pense, de... peut-être d'anticiper
aussi, hein, pas attendre, vraiment, à être... parce que, de toute façon, la personne
qui est dans cette position-là ne peut plus choisir. Donc, je pense qu'une
façon anticipée serait... c'est une bonne solution.
Mme Bélanger : Oui, et ça,
c'est pour la demande anticipée. Puis vous savez que, dans le projet de loi, on
a aussi intégré le volet des personnes ayant un handicap neuromoteur.
J'aimerais ça vous entendre par rapport à l'handicap neuromoteur. Oui.
M. Pilote (Daniel) : D'accord.
Donc, qu'est-ce que je peux vous dire pour ça? Écoutez, moi, je suis justement
atteint d'une maladie neuromotrice, sauf que, comme je l'ai dit tantôt, ce
n'est pas mon choix personnel. Tu sais, je veux dire, j'ai choisi que la vie
décide de mon sort, d'accord? Donc... Mais je respecte ceux, bien sûr, qui
veulent quand même peut-être dire... ou qui n'ont peut-être pas... une sorte de
souffrance, la souffrance surtout, hein, qui est peut-être difficile là-dedans.
Heureusement, mon problème moteur n'est pas souffrant. Une chance pour ça. Ça,
merci pour... la vie pour ça. Mais, justement, ceux qui ont des problèmes
neuromoteurs, et que c'est souffrant, et puis que... n'ont pas le goût de vivre
cette souffrance-là, bien, au moins, ils peuvent se permettre d'avoir cette
possibilité-là.
Mme Bélanger : ...Pilote,
vous savez, on a commencé, hier, les consultations, puis il y a des groupes qui
nous disent qu'on aurait dû indiquer, dans notre projet de loi, seulement les
personnes aux prises ou vivant avec un handicap et retirer complètement le thème
neuromoteur. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Pilote (Daniel) : Bien,
oui, c'est sûr et certain, tout dépendant du type de neuromoteur qu'on parle,
hein? Il y a beaucoup de types. Mais, dans l'ensemble, on en arrive au même
résultat, sauf que... tout dépendant du choix de la personne, bien sûr. Mais,
pour nous autres... pour nous autres... pour moi, en tout cas, je crois qu'il y
a plusieurs types de maladies qu'on pourrait inclure. Mais, je ne sais pas, là,
vous avez marqué «neuromoteur» seulement, mais il y aurait possibilité
peut-être de mieux, peut-être, le préciser.
Mme Bélanger : OK. Je vous
remercie. Je vais laisser la parole à mes collègues.
M. Pilote (Daniel) : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la ministre. Donc, M. Pilote, on va continuer
avec la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour, M.
Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Bonjour,
bonjour.
Mme Picard : Ça va bien?On
s'écrit, mais on ne se parle pas souvent.
M. Pilote (Daniel) : Oui.
Voilà.
Mme Picard : Je vais <aller...
Mme Picard :
...Je
vais >aller un petit peu dans la même direction que Mme la ministre,
parce que c'était... c'était un petit peu mon questionnement aussi, où, si on
enlevait le «neuromoteur», comme certains l'ont proposé, je me pose la
question, là, ça serait... ça deviendrait un handicap «at large», là, dans
quelle mesure une personne... J'aimerais ça avoir des exemples concrets, si
vous en avez, de certaines personnes qui, si on met «neuromoteur», n'auraient
pas accès à l'aide médicale à mourir et ils le devraient. Je ne sais pas si
vous en avez en tête.
M. Pilote (Daniel) : Bien, je
veux dire, oui, c'est ça qui est... Peut-être une personne qui est totalement
paralysée et qui est barrée dans son corps. Ça, c'est vraiment difficile. Je
pense qu'on peut aller jusque là, à ce problème neuromoteur là, et justement
que la personne a des souffrances. Donc, on pourrait aller jusqu'à une personne
qui ne peut bouger aucun membre, aucun membre.
Mme Picard : OK, oui, ça, je
comprends. Dans votre introduction, vous avez surtout parlé... J'ai beaucoup
aimé ça parce que vous avez bien décrit que ça reste un choix de la personne.
En fait, c'est que tout le monde a le choix, là, je veux dire, on peut décider
de ne pas l'avoir ou de l'avoir, ça reste un choix qui est... qui va être un
peu plus accessible après cette loi. Je voulais savoir : Est-ce que, selon
vous... Est-ce que toutes les personnes seraient capables de se trouver un tiers
de confiance pour les accompagner? Est-ce que vous pensez qu'il y a des gens
qui auraient besoin de... qui n'en auraient pas, supposons?
M. Pilote (Daniel) : Bien,
tout dépendant... Comme je le disais aussi, c'est pour quelle raison, hein,
que c'est... c'est important. Parce que, des fois, il peut y avoir quelque
chose qui n'est pas clair dans cette demande-là pour l'aide médicale à mourir.
Peut-être, justement, c'est des raisons qui sont autres. Donc, il faut être sûr
de bien analyser ça, pour ne pas justement arriver à un... à cause d'une raison
qui est externe, hein, et puis dire : De toute façon, c'est ça que je
veux, mais, en réalité, ce n'est peut-être pas ça. Donc, c'est peut-être une
question de qualité de vie qui est peut-être en jeu. Donc, c'est ça, là, qu'il
faut faire attention.
Et les personnes de confiance... Oui, ça
prend des personnes de confiance. Vraiment, c'est quand même... ça peut être
compliqué des fois. Je veux dire, il ne faut pas que ces personnes-là envoient
la personne à cette idée-là. Donc, c'est ça, là, qui... hein, l'idée que ça
soit éclairé comme démarche. Il faut que ça soit vraiment éclairé puis il ne
faut pas qu'il y ait eu, justement, des abus là-dedans.
Mme Picard : Oui, c'est ça. Dans
le fond, le tiers de confiance, vous pourriez le désigner, puis... bien, en
fait, le patient le désigne, et puis, arrivé au moment où... lever le drapeau
pour dire : Je pense que c'est ce moment-là où cette personne-là avait
décidé. Donc, je pense que c'est un gros poids pour la personne. Mais, comme
usager, j'imagine que c'est difficile aussi de choisir son tiers de confiance,
là.
• (17 h 50) •
M. Pilote (Daniel) : Ah oui!
Absolument. Absolument, et puis... Mais c'est quand même... c'est un choix,
hein, comme on dit, un choix assez difficile, quand même. Et, des fois, c'est
un choix qui est difficile pour l'entourage, hein? C'est un choix pour
l'entourage, qui ne sont peut-être pas d'accord, et puis que, peut-être, il y
avait le moyen de pouvoir continuer à avoir une qualité de vie.
Je veux dire, comme moi, moi, à m'écouter,
depuis le commencement de la pandémie, grâce au virtuel, ça me permet de
pouvoir vraiment participer à une vie citoyenne, hein? Donc, c'est à partir de
là. Écoutez, je suis membre dans cinq organismes. Et là, maintenant, c'est
de savoir comment, comment ne pas trop en faire. C'est ça, là, l'équilibre.
Donc...
Mme Picard : Ah! bien, c'est
un beau problème, ça, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Bien
oui. Non, mais, je veux dire... je veux dire... Dans le fond, quand je suis
égal à tout le monde, je suis assis, puis qu'on discute ensemble, et puis... justement,
pour... Donc, il y a moyen de... Bien, je veux trouver aussi... Et pour dire
que la vie, si on veut la vivre, bien, on a présentement beaucoup, beaucoup
d'options qui nous est offert, donc, aussi, également.
Donc, j'arrive avec deux <choix...
M. Pilote (Daniel) :
...
deux >choix, le choix... Bien, c'est sûr que, si la personne a des
souffrances, il faut quand même respecter son choix aussi, également, hein,
mais, quand même, il faut... je crois que ça... Il y a maintenant,
actuellement, au niveau médical, la science. C'est grâce à la science si je
suis là avec vous autres, c'est grâce à la science. Je suis bien content.
Mme Picard : Merci. Je n'ai
plus de question, Mme la Présidence, s'il y a quelqu'un qui veut...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. La députée de Roberval, je pense que vous
avez des questions, oui.
Mme Guillemette : Oui, mais surtout
quelques observations. Merci d'être avec nous, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Ça fait
plaisir.
Mme Guillemette : C'est
vraiment intéressant de pouvoir discuter avec vous à nouveau. Je voudrais
seulement que... peut-être vous réconforter sur l'aspect des services, de dire
que les gens, bon, parce qu'ils manquent de services, on les pousserait vers
l'aide médicale à mourir. Puis je sais que vous avez une réalité que... vous le
vivez au quotidien, là, l'aspect des services, je sais que ce n'est pas
toujours simple. Puis on s'est rencontrés pendant la pandémie, justement,
pendant la commission spéciale, puis je le sais que ce n'était pas simple, là,
pour vous, là.
Mais quelqu'un qui va faire une demande
d'aide médicale à mourir, il devra toujours y avoir l'aspect de souffrance. Et
cette souffrance-là, cet aspect-là, elle est importante, et il faut qu'elle
demeure. Il y a la souffrance psychologique, qu'on dit, bon, qui peut peut-être
être plus difficile, mais les médecins nous ont dit qu'il y avait quand même,
là, des moyens, là, pour mettre cet aspect-là en lumière. Donc, je veux vous
rassurer là-dessus. Et la commission des soins de fin de vie regarde chaque cas
qui est administré. Je ne sais pas si vous avez été témoin, vous, des gens qui
ont reçu ou qui ont demandé l'aide médicale à mourir par faute de soins, là.
M. Pilote (Daniel) : Oui. Oui,
c'est ça qui est... qui m'a interpelé, justement, du monde, justement, qui ont
été... qui avait dit ça, justement, dans un centre d'hébergement, OK, qui avait
dit ça. Ça m'avait frappé, ça. J'ai dit : Comment ça que cette personne-là
peut quand même à cause de cette raison-là? Je pense que ça ne devrait
peut-être pas, là, exister, là, cette raison-là.
Mme Guillemette : Bien, en
fait, c'est ça, la personne, peut-être, peut penser ça, mais elle n'est pas
admissible sous cet aspect-là. Donc, la notion de souffrance, pendant la
commission spéciale, a été, pour nous, une balise, et il faut qu'elle demeure,
dans le projet de loi n° 11, une balise également, là, pour... C'est une
mesure de protection, en fait, également aussi, là.
M. Pilote (Daniel) : Mais,
comme je disais, il ne faut pas banaliser, hein, je veux dire, le fait de...
Parce que, moi, la vie, c'est vraiment sacré. Et puis donc... Mais il y a des
moments donnés que je pense que les souffrances sont très difficiles à vivre,
et puis donc il faut penser à ces gens-là aussi, également, qui, de toute façon,
seraient en sédation peut-être extrême.
Mme Guillemette : Et
peut-être, s'il me reste quelques minutes... Et, si, vous, à ce moment, au
moment où on est à étudier le projet de loi n° 11, on vous disait :
On enlève les gens avec un handicap du projet de loi, est-ce que vous verriez
ça comme une discrimination?
M. Pilote (Daniel) : Bien, je
veux dire, ça serait un recul, plutôt, ce serait un recul pour notre société.
Et puis est-ce qu'il y a beaucoup de gens là-dedans, vraiment... Comme je vous
disais, là, c'est vraiment intenable et insoutenable, la souffrance qu'ils ont.
Donc, oui, pour ces gens-là, ça serait peut-être difficile, parce qu'ils ne
veulent pas souffrir et être d'une manière ou d'une façon... une vie qui est,
justement, invivable. Donc, oui, ça serait discriminatoire, oui.
Mme Guillemette : Donc, vous
nous suggérez de conserver le handicap mais de... excusez, mais de bien le
baliser.
M. Pilote (Daniel) : Oui, ça,
c'est très, très important, parce que ça dépend des raisons. Parce que, comme
j'ai dit, on peut aller d'un extrême à l'autre, hein, pour des raisons qui...
Mais, je veux dire, moi, tu sais, je suis dans cette <situation-là...
M. Pilote (Daniel) :
...je
suis dans cette >situation-là, et je veux continuer jusqu'au bout,
jusqu'au bout, parce que, comme je vous l'ai dit tantôt, c'est grâce à la
science médicale si je suis là, vraiment, vraiment, ça, c'est... bien, regardez
ce que je peux faire. Donc, c'est l'important pour d'autres gens. Donc, je
donne espoir aussi, il faut donner l'espoir en même temps.
Mme Guillemette : Oui, tout à
fait. Puis je vous remercie pour tout cet espoir-là que vous donnez et pour
toutes les heures que vous investissez au niveau de plusieurs organisations.
Vous êtes un apport inestimable pour ces organismes-là, mais aussi pour la société.
Merci beaucoup, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Ça fait
plaisir. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mmes les députées, Mme la ministre, merci beaucoup. Alors, M. Pilote,
je me tourne maintenant du côté de l'opposition officielle pour une période de 9 min
54 s et je laisse la parole à la députée de D'Arcy-McGee. La parole est à
vous, madame.
Mme Prass : Merci. Bonjour,
M. Pilote, et merci.
M. Pilote (Daniel) : Bonjour,
bonjour.
Mme Prass : Merci de
participer et de nous avoir fourni votre mémoire. Ça aide à alimenter nos
discussions. Donc, vous avez abordé un aspect particulier qui n'a pas été
abordé jusqu'à présent par les autres intervenants. Donc, vos inquiétudes,
comme ma collègue vient de le mentionner, à propos de l'aide médicale à mourir
qui serait accordée dans des raisons de manque de soins, de services ou de
maltraitance. Et vous citez même un exemple d'un responsable de dossier d'une
agence pour les soins qui a dit à une personne... qui a osé leur dire que
peut-être l'aide médicale à mourir serait la solution pour eux.
M. Pilote (Daniel) : Oui.
Mme Prass : Donc, évidemment,
le but du projet de loi, c'est d'éviter des situations telles que celles, mais
on ne peut pas se mettre à la place des autres. On ne sait pas comment des
professionnels vont aborder l'enjeu quand ils vont en discuter avec des
patients, etc. Donc, est-ce que vous avez des idées comment on pourrait
protéger contre de telles situations, si ça serait un encadrement des relations,
justement, entre les gens dans les agences de services et les patients? Mais,
c'est ça, je voudrais savoir qu'est-ce que vous pensez qu'ils pourraient mettre
en œuvre justement pour éviter de telles situations.
M. Pilote (Daniel) : Bien,
tout dépendant de comment que la demande va être faite. Et puis s'assurer,
justement, par, peut-être, une tierce personne, là, qui est ou qui n'a... qui
n'a pas un rapport, peut-être, émotionnel avec qu'est-ce qui se passe, pour
pouvoir voir exactement... parce que je ne sais pas combien exactement
d'intervenants qui peuvent mettre un holà si jamais il s'aperçoit qu'il y a
quelque chose qui ne va pas. Donc, ça prendrait peut-être une personne
impartiale, justement. Je sais qu'il y a des demandes qui sont faites, mais
est-ce qu'il faut plus de personnes? Peut-être que oui, là, pour être sûr, sûr,
sûr de la procédure. Parce que je ne veux pas que ça soit une facilité aussi,
là, que... en soi, là.
• (18 heures) •
Mme Prass : Oui, parce que
vous dites... vous continuez pour dire qu'il serait difficile de prouver une
négligence causant la mort, si jamais c'était le cas, qu'il y avait du
personnel qui a encouragé ce choix-là. Donc, encore une fois, nous, on veut
s'assurer que les gens sont protégés, leurs droits sont protégés, que, si une
personne décide d'aller de l'avant, c'est vraiment de leur propre gré.
Donc, est-ce qu'il y aurait peut-être une
période d'adaptation qui devrait être incluse? Parce que je pense que ce que
vous dites, c'est... Vous parlez un petit peu du rôle du tiers de confiance, justement,
une tierce personne qui parlerait, disons, au nom de la personne qui est
malade. Mais, si le tiers n'est... si la personne ne nomme pas un tiers, donc,
c'est les responsables en santé qui vont justement être ceux qui vont déduire
quand le moment sera enclenché pour l'aide médicale à mourir. Donc, encore une
fois, est-ce que vous voyez des conditions, des balises qui pourraient être
introduites, justement, pour s'assurer que ces personnes-là prennent une
décision qui est dans le meilleur... pour le meilleur de la personne et non
pour des raisons de s'en débarrasser, disons?
M. Pilote (Daniel) : Bien,
oui, c'est ça, c'est justement ça. Je vais dans le même sens que vous,
justement. Je ne sais pas, là, si, vraiment, là, les balises ont été faites ou elles
vont être faites, mais j'espère qu'il y en ait justement pour ne pas qu'il y
ait... mais il ne faut pas banaliser le fait aussi... pour donner l'aide
médicale à mourir. Donc, oui, ça prendrait des balises. Maintenant, il faut
savoir lesquelles, balises, qu'il faudrait pour, justement, qu'ils puissent
obtenir, là, l'aide médicale à mourir.
Mme Prass : Exact. Et question
peut-être un petit peu <personnelle...
>
18 h (version révisée)
<
Mme Prass :
...Et,
question peut-être un petit peu >personnelle, mais vous êtes, comme vous
l'avez dit plus tôt, en situation où vous avez une maladie neuromoteur. Est-ce
que vous pensez que le terme, justement, qui est utilisé dans ce projet de loi
pourrait amener préjudice à des gens comme vous, qui n'êtes pas en situation où
c'est... c'est peut-être incurable, mais vous avez pris acte de votre
situation, vous vivez avec. Pensez-vous que le... la terminologie, justement,
pourrait amener un certain effet négatif pour des gens qui se retrouvent dans
des situations comme les vôtres mais qui veulent continuer à vivre dans leur
situation?
M. Pilote (Daniel) : Bien,
oui, tout dépend... ça, là, c'est vraiment tout dépendant de quelle... c'est
quoi, la philosophie de cette personne-là, bien sûr. Mais, en tout cas, je veux
dire, il y a... Les personnes comme nous, quand on a des situations, parce que
ce n'est pas facile, hein, parce que nous, on dépend, justement, de... de gens
pour qu'on puisse justement... ça nous prend des assistants pour qu'on puisse
continuer et à vivre la vie quotidienne. Donc, oui, ça, c'est... Justement, si
ces aspects-là pourraient peut-être amener à dire : Bon, bien, moi, j'en
ai assez, comme le monsieur que je vous parlais tantôt, là, qui a décidé et...
et j'avais trouvé ça un peu spécial de savoir que c'était à cause qu'il en
avait assez de vivre de la façon que... qu'on donnait ses soins. Ça, ça m'avait
vraiment touché quand j'avais entendu ça, là.
Donc, il faut absolument... Bien, c'est
important, je pense que l'important, je vous dis, là, moi, là, les personnes
qui m'aident, c'est... je les remercie tout le temps, tous les jours, tous les
jours, tous les jours. C'est important de les remercier, OK, même si je sais
que ce n'est pas facile avec... avec tout qu'est-ce qu'ils vivent, mais, si le
personnel est bien, je crois que les prestataires vont l'être.
Mme Prass : Là, j'aurais une
question, vous ne l'avez pas abordée dans votre mémoire, mais sur toute la
question du refus. Parce que je trouve qu'il y a une certaine incohérence dans
ce qui est proposé, dans le sens que la personne fait une demande anticipée de
l'aide médicale à mourir quand ils sont aptes de le faire, et c'est déclenché
au moment où c'est jugé qu'ils ne sont plus aptes. Et à ce moment-là, quand ils
ne sont plus aptes, s'ils refusent la demande qu'ils ont faite, bien, elle est
rejetée, et la personne n'a plus accès à l'aide médicale à mourir.
Moi, personnellement, je vois une
incohérence dans tout ça, parce qu'on demande qu'on soit apte pour prendre la
décision, mais, quand la personne n'est plus apte, on... on accepte leur
décision, même si elle contrevient à celle qu'ils ont faite quand ils étaient
aptes. Donc, je voudrais vous entendre là-dessus également.
M. Pilote (Daniel) : Bien,
tout dépendant, parce que, quand on... Si vous parlez que la personne, mettons,
change d'idée par... juste par une réponse incohérente, tu sais, donc... Mais,
comme je le disais tantôt, ça va prendre un... une situation comme, exemple, en
position foetale et aucune communication depuis plusieurs jours, peut-être, c'est
à ce moment-là qu'il faudrait peut-être décider que ce soit... l'anticipation
soit valide. Donc, ça... ça prend une situation extrême où est-ce que la
personne ne peut plus communiquer. Puis, justement, si elle ne peut plus
communiquer, puis il n'y a plus de communication possible, là, peut-être ce
serait le moment qu'on pourrait mentionner dans une demande anticipée.
Maintenant, c'est... ça peut... parce que
j'y ai pensé, j'ai dit : Il faut absolument qu'il y ait une situation
pour... pour dire que c'est le moment, que le moment... à quel moment la
personne aimerait dans son anticipation. Et là, maintenant, là, c'est les
balises, à savoir à quel moment vraiment on peut autoriser et accepter une
demande, à quelle situation. C'est ça, là, qui est la... la question
importante. Moi, je suggère, justement, quand la personne ne peut plus
communiquer puis, vraiment, elle n'est... il y aucune possibilité de
communication avec elle, là.
Mme Prass : Bien, si je peux
vous donner l'hypothèse, par exemple, d'une personne qui souffre de la maladie
d'Alzheimer, qui continue à communiquer, mais on comprend bien qu'ils ne sont
plus conscients de leur entourage, de leur environnement, etc., mais, comme je
dis, qu'ils peuvent toujours communiquer, donc les éléments sont... les
éléments dont ils ont <décrit...
Mme Prass :
...mais,
comme je dis, qu'ils peuvent toujours communiquer, donc les éléments sont...
les éléments dont ils ont >décrit pour leurs souffrances sont atteints,
mais la personne dit : Moi, je refuse, qu'ils sont considérés en situation
inapte. Donc, est-ce que ce refus... Est-ce qu'il devrait y avoir un délai?
Est-ce qu'on devrait... Bien, la question, c'est : Est-ce qu'on... est-ce
que ce refus devrait être automatiquement un rejet de leur demande qu'ils ont
faite au moment où ils étaient aptes?
M. Pilote (Daniel) : Je veux
dire, c'est sûr, c'est ça, c'est cette situation-là que moi, là... c'est sûr
que je ne peux pas vraiment bien évaluer ça pour ça, mais je crois qu'il
faudrait qu'il y ait une étape plus... d'une manière où est-ce que la
communication n'est plus possible, vraiment, qui serait dans ces situations-là,
OK? Dans les situations où est-ce que, là... que la communication est encore
possible, peut-être ce n'est pas le moment, là, il faut attendre que la
communication soit vraiment hors de tout doute, là, OK, qu'elle est
inexistante.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
Mme Prass : Merci beaucoup,
M. Pilote.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. Pilote. Alors, on va poursuivre la
discussion avec la députée de Sherbrooke pour une période de 3 min 18 s.
La parole est à vous, madame.
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Pilote. Vous nous parlez de la notion de libre
choix dans votre mémoire. C'est une notion qui est très importante.
Effectivement, c'est ce qu'on vise. Puis, pour avoir un libre choix, vous avez
raison de nommer que ça prend l'accès aux services souhaités. Ça prend aussi
une connaissance de ses droits pour pouvoir exercer un libre choix. Puis là ça
m'amène à une question pour vous, parce que vous nommez un exemple, dans votre
mémoire, d'une personne qui s'est fait parler d'aide médicale à mourir par un
service gouvernemental, je peux comprendre à quel point ça peut être très
difficile pour une personne de vivre ça. En même temps, il faut trouver une
façon d'informer les gens sur leurs droits. Donc, je me demande, est-ce que
vous pouvez nous orienter un peu sur comment faire pour informer les gens de
leur droit à l'aide médicale à mourir sans que ce soit offensant?
M. Pilote (Daniel) : Oui, je
pense qu'elle devrait avoir, justement, un conseiller juridique pour,
justement, qu'elle sache exactement ses droits, OK, ou un organisme quelconque
qui pourrait mentionner les droits de cette personne-là pour lui expliquer bien
comme il faut, vraiment, sa décision... que le réseau de la santé, exemple, OK,
ou son docteur. Donc, il faudrait absolument qu'il y ait une... il faudrait
qu'il y ait des conseils juridiques, justement, pour les droits pour... oui, qui...
je pense, ce serait une très bonne idée pour... justement, pour être sûr et que
la personne comprenne toutes les avenues, là, qui va arriver, pour sa décision.
Mme Labrie : C'est
intéressant que vous nous disiez ça parce que c'était une recommandation du Barreau
également d'offrir des conseils juridiques. Donc, j'entends que, pour vous, ce
serait une bonne manière de s'assurer que les gens sont informés sans créer des
situations vraiment délicates où quelqu'un a l'impression qu'un fonctionnaire,
par exemple, l'incite à avoir recours à l'aide médicale à mourir, ce qui n'est
pas nécessairement le cas, là.
• (18 h 10) •
M. Pilote (Daniel) : Non,
non, non, c'est ça, c'est qu'on peut présumer, mais c'est juste, justement,
oui, si jamais il y avait un cas comme ça, oui, justement, s'il y avait une
personne... C'est ça, je parlais de la tierce personne, tantôt, là, qui est
complètement... qui est en dehors des émotions familiales ou amicales, un des
deux, là, donc qui pourrait justement donner des conseils juridiques à cette
personne-là.
Mme Labrie : Merci. Puis,
s'il me reste quelques instants, j'en profiterais peut-être pour vous demander,
je ne sais pas, moi, si c'est la première fois que vous participez à des
commissions parlementaires. Je ne sais pas si le fait de pouvoir participer en
ligne, c'est facilitant pour vous. Est-ce que c'est quelque chose qui vous aide
à participer aux travaux de l'Assemblée nationale?
M. Pilote (Daniel) : Oui, et
pas juste à l'Assemblée nationale, partout. Écoutez, comme on dit, j'ai... je
participe à... j'ai un blogue et puis j'aide les gens, justement, à améliorer
notre réseau de la santé. Donc, non, je suis un peu partout grâce, justement,
au virtuel, hein? Vous voyez, des fois, d'autres qui ont de la difficulté avec
ça, mais, moi c'est plutôt une aide vraiment précieuse. Et ça me rappelle L'odyssée
de 2001, quand la petite fille parlait au monsieur à l'écran, donc ça me
rappelle à ça. Je ne sais pas si vous avez vu le film, mais, en tout cas, à un
moment donné, la petite fille parle à son père à l'écran. Et ça, ça m'a
toujours impressionné. Et puis là on est <rendus...
M. Pilote (Daniel) :
...à
son père à l'écran. Et ça, ça m'a toujours impressionné. Et puis là on est >rendus
là. Vraiment, c'est... je suis vraiment content que ça puisse exister.
Mme Labrie : Bien, merci
beaucoup, M. pilote.
M. Pilote (Daniel) : Ça fait
plaisir.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée, très bonne question.
Continuez votre bon travail. On a besoin
des échanges comme ça avec vous par le moyen du virtuel. Alors, bien, on va
terminer cette période avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice, encore une
fois, pour une période de 3 min 18 s.
Mme Tardif : M. Pilote, bonjour.
Merci d'être là, mais merci aussi pour le bien que... je dis que vous me faites
à l'âme, mais je pense que vous faites du bien à l'âme de bien des personnes.
Vous êtes un modèle. Vous êtes définitivement un modèle, un modèle de
détermination. Quand vous dites : La vie est sacrée, et l'aide médicale à
mourir doit être là pour vivre, je vous rejoins. Je suis d'accord avec vous que
l'aide médicale à mourir doit venir uniquement dans les derniers moments, en
fin de vie ou lorsque les souffrances sont extrêmes et ne sont plus tolérables.
Donc, je pense que c'est ce qu'on a mis dans le projet de loi. Il reste du
travail à faire, et vous nous apportez un bel éclairage, parce qu'il faut
évidemment éviter les dérapages.
Et je lis des commentaires que plusieurs
citoyens nous écrivent sur le site, et, effectivement, la crainte vient soit de
la méconnaissance du projet de loi, mais aussi de la crainte des dérapages. Ça
fait qu'on va avoir un travail à faire puis on va avoir besoin de vous pour
sensibiliser, informer, communiquer les bonnes choses, les vraies choses pour
ne pas que ça ait l'air des projets... un projet de dérapage et un projet
d'euthanasie.
M. Pilote (Daniel) : Exactement,
et de banalité, là.
Mme Tardif : Oui. Puis je
pense que j'en profiterais pour saluer... je ne sais pas si Mme Solange
Miller est là, dans mon comté, mais Mme Miller a cette crainte-là. Et
sachez que je lis les commentaires, et on est à l'écoute de vous. Elle nous dit :
«Oui pour les soins palliatifs, non à l'euthanasie.» Elle fait référence à la
dénatalité, elle fait référence à Dieu et au sens sacré de la vie. Donc,
effectivement, c'est un volet qu'on doit aussi considérer parce qu'il y a
beaucoup de gens qui sont religieux et qui ne seront pas nécessairement enclins
à donner carte blanche sans connaître...
M. Pilote (Daniel) : Je les
comprends.
Mme Tardif : Vous les
comprenez, hein?
M. Pilote (Daniel) : Oui.
Mme Tardif : Merci. Bonne
soirée.
M. Pilote (Daniel) : Bien,
merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée.
Alors, c'est ce qui met fin à nos
échanges, M. Pilote. Encore une fois, merci beaucoup pour votre
participation. Continuez aussi à évoluer avec les moyens virtuels que vous
connaissez maintenant. Alors, au nom de Mme la ministre et de tous les
parlementaires ici, membres de cette commission, je vous remercie et je vous
souhaite une bonne fin de journée.
Et je vais ajourner les travaux de la
commission jusqu'au jeudi 16 mars 2023, après les avis touchant les
travaux des commissions, où nous allons poursuivre notre mandat. Bonne soirée,
mesdames.
(Fin de la séance à 18 h 15)