(Onze heures vingt-sept minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte.
La commission est réunie afin de poursuivre les
consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi
n° 11, Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et d'autres
dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La
Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Garceau (Robert-Baldwin) est remplacée par Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis) et Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques)
est remplacée par Mme Labrie (Sherbrooke).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, nous entendrons ce matin, pour une
deuxième journée d'auditions, les organismes suivants : l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec, que nous avons avec vous... avec nous en
ce moment, ainsi que l'Office des personnes handicapées du Québec.
Alors, bienvenue, bienvenue à M. Luc
Martineau, président, maître...
La Secrétaire : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Luc... Je m'excuse. Ça fait deux fois que je change
votre... votre nom de famille. M. Luc Mathieu, président,
Mme Pénélope Fortin ainsi que madame... Me Pénélope Fortin, pardon, ainsi que Mme Caroline Roy,
directrice, Développement et soutien professionnel. Alors, bienvenue à la
commission. Je vous rappelle que vous allez avoir 10 minutes
pour... pour vous présenter ainsi que pour procéder à votre exposé, et le temps
commence maintenant.
Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec (OIIQ)
M.
Mathieu (Luc) : Alors, merci beaucoup. Alors, Mme la Présidente,
Mme la ministre déléguée, Mmes les... les
parlementaires, alors, nous vous remercions de votre invitation à émettre nos
commentaires sur le projet de loi n° 11 concernant la Loi modifiant
la Loi concernant les soins de fin de vie et d'autres dispositions législatives.
Le droit de mourir dans la dignité est un enjeu de société de première
importance qui met en cause le droit à l'autodétermination d'une personne apte
et le droit à la dignité humaine.
Nous sommes à même de constater que les échanges
soutenus depuis le printemps dernier entre le ministère de la Santé et des Services sociaux, l'Office des professions du Québec, l'OIIQ et le Collège des
médecins du Québec auront contribué à
permettre aux infirmières praticiennes spécialisées, les IPS, de participer
activement à ces soins sensibles et délicats dans une perspective
d'accessibilité et d'interdisciplinarité.
Nos recommandations portent sur le handicap
neuromoteur grave et incurable, sur les mécanismes mis en place pour procéder à l'évaluation de la qualité
des soins fournis et sur l'entrée en vigueur des dispositions relatives au constat
de décès.
Nous saluons
les modifications apportées notamment au Code civil du Québec visant à
permettre aux infirmières et infirmiers du Québec de constater le décès
d'une personne et d'en dresser le constat.
Nous énonçons
également certaines recommandations visant à bonifier le projet de loi,
lesquelles sont formulées dans une perspective de maximiser l'accessibilité aux
soins de fin de vie et dans un souci d'assurer un arrimage cohérent des mécanismes entourant l'évaluation de la
qualité des soins fournis. De plus, nous saluons l'ouverture quant à l'ajout
de la clientèle ayant un handicap neuromoteur grave et incurable.
• (11 h 30) •
Pour nous, l'aptitude à consentir aux soins est
impérative en tout temps et reste un critère essentiel pour l'exécution d'un
soin. Toutefois, les modalités de consentement à l'aide médicale à mourir
doivent évoluer pour s'adapter à
l'expression par notre société de l'importance de mourir dans la dignité, de
l'autodétermination des soins et de l'inviolabilité des droits. Ainsi,
nous accueillons favorablement l'ajout de la possibilité, pour les personnes
atteintes de maladies graves et incurables menant à l'aptitude à consentir aux
soins, de formuler une demande anticipée d'aide médicale à mourir.
L'OIIQ désire
une fois de plus souligner l'ouverture du gouvernement de permettre aux IPS
d'évaluer l'admissibilité des personnes à recevoir l'aide médicale à mourir et
de pouvoir l'administrer en plus de les désigner comme professionnels
compétents en lien avec la sédation palliative continue, et ce, indépendamment
de leur lieu d'exercice. Nous nous réjouissons de constater que les IPS
exerçant hors des établissements publics pourront également prodiguer l'aide médicale à mourir et la sédation palliative continue, tel
que nous l'avions recommandé dans notre mémoire déposé en mai dernier dans le
cadre des travaux du projet de loi n° 38. Par cette ouverture, le Québec
vient diminuer l'écart avec les autres
provinces canadiennes où les IPS participent à l'aide médicale à mourir et à la
sédation palliative continue, et ce, depuis 2016.
L'OIIQ salue de plus l'initiative
gouvernementale concernant l'ajout des personnes atteintes d'un handicap
neuromoteur grave et incurable qui pourront formuler une demande contemporaine
d'aide médicale à mourir. Les souffrances physiques et psychiques qui accablent
ces personnes sont bien réelles et justifient de pouvoir recourir au soin
qu'est l'aide médicale à mourir. Par cet ajout à la loi sur les soins de fin de
vie, nous respectons par le fait même le droit à l'autodétermination et le
droit à la dignité humaine de ces personnes.
Préoccupés à l'effet qu'il n'existe pas de
définition précise de ce qu'est un handicap neuromoteur grave et incurable,
le terme «neuromoteur» ne se trouvant
pas, d'ailleurs, au Code criminel, il sera donc nécessaire de s'assurer que
l'ajout du terme «neuromoteur» ne vienne pas limiter l'accès à ce soin à des
clientèles lourdement handicapées dont la situation médicale se caractérise par
un déclin avancé et irréversible de leurs capacités et dont les souffrances
physiques ou psychiques sont constantes, insupportables, et qui ne peuvent être
apaisées dans des conditions qu'elles jugent tolérables.
Bien que cette avancée représente un soulagement
pour ces personnes, nous recommandons toutefois qu'un groupe d'experts s'y
penche afin d'établir une définition claire sur la notion de handicap
neuromoteur et ainsi bien encadrer la
pratique de l'aide médicale à mourir auprès de ces personnes. Nous offrons
notre entière collaboration pour participer aux débats et réflexions à
ce sujet.
Sur ce, je
vous présente notre première recommandation à l'effet que les lignes
directrices soient établies par des experts afin d'assurer une définition commune
et consensuelle de la notion de handicap neuromoteur grave et incurable.
Voici maintenant nos recommandations sur
l'évaluation de la qualité des soins fournis. La compétence professionnelle est
l'une des valeurs fondamentales du Code de déontologie des infirmières et
infirmiers et elle constitue l'un des
éléments essentiels à la qualité des soins et des services. Dans un contexte
aussi délicat et éthique que le processus d'aide à... d'aide médicale à mourir,
l'évaluation de la qualité des soins fournis prend une ampleur
particulière et nécessite que nous y accordions la plus grande importance. Il
ne fait aucun doute que, grâce à leurs connaissances et compétences cliniques
avancées, les IPS sont des professionnels tout indiqués pour accompagner des
patients ainsi que leurs familles en leur permettant de mourir dans la dignité.
Toutefois, à
titre d'ordre professionnel ayant comme mission principale la protection du
public, nous sommes soucieux de nous assurer que le mécanisme visant à assurer
l'évaluation de la qualité des soins fournis soit déployé
indistinctement du professionnel qui l'effectue de manière harmonisée et dans
une perspective de collaboration interprofessionnelle.
Donc, dans cet esprit, l'OIIQ tient à manifester
des préoccupations à l'égard du projet de loi qui prévoit des mécanismes
d'évaluation différents en fonction du professionnel et du lieu de prestation
des soins. De fait, le projet de loi prévoit que ce sont les conseils des
médecins, dentistes et pharmaciens, les CMDP des établissements qui procèdent à
l'évaluation de la qualité des soins fournis par les médecins qui administrent
l'aide médicale à mourir ou la sédation palliative continue dans le secteur public.
Ils évaluent, notamment, le respect des normes cliniques et peuvent émettre un
signalement au Collège des médecins du Québec, le cas échéant.
Pour ce qui est de l'aide médicale à mourir ou
de la sédation palliative continue administrée par un médecin dans le secteur
privé, le collège est responsable d'évaluer la qualité des soins fournis par
l'intermédiaire du comité sur les soins de
fin de vie. Celui-ci évalue également le respect des normes cliniques puis
pourrait émettre un signalement, le
cas échéant. Il faut également souligner que la Commission sur les soins de fin
de vie peut aussi faire un signalement au collège si elle a un doute sur
la qualité des soins fournis par le médecin.
Pour les IPS, le projet de loi prévoit que
l'évaluation de la qualité des soins fournis devra être effectuée par la
directrice ou le directeur des soins infirmiers de l'établissement lorsque les
IPS exercent dans un centre exploité par un établissement.
Nous avons été surpris de constater que les
conseils des infirmières et infirmiers, les CII, institués au sein des
établissements publics ne soient pas impliqués dans l'évaluation de la qualité
des soins fournis par les IPS, à l'instar des
CMDP. En effet, selon l'article 220 de la Loi sur les services de santé et
des services sociaux, le CII a notamment pour fonction d'apprécier la
qualité des soins infirmiers de l'établissement. En ce sens, il nous apparaît
nécessaire et primordial que le projet de loi prévoie explicitement la
participation de cette instance à l'évaluation de la qualité de l'acte
entourant l'aide médicale à mourir ainsi que la sédation palliative continue
par les IPS. Pour ce qui est des IPS exerçant hors des établissements publics,
selon le projet de loi, il incombe à l'OIIQ de procéder à cette évaluation. Alors, dans ce contexte, il y aurait alors la
présence de quatre mécanismes distincts pour procéder à l'évaluation d'un même
acte en fonction des mêmes critères.
Ainsi, notre deuxième recommandation vise
l'harmonisation des mécanismes pour l'évaluation de la qualité des soins fournis relativement à la... à la
sédation palliative continue et à l'aide médicale à mourir, et ce, pour l'ensemble
des professionnels compétents des CII.
Considérant que le mandat du CII, la direction des soins infirmiers et du CMDP consiste,
notamment, à apprécier la qualité des actes posés, nous recommandons que soit
réfléchie la possibilité d'instituer des
comités conjoints, CII-CMDP, pour procéder à l'évaluation de la qualité des
soins fournis pour la sédation palliative continue et l'aide médicale à
mourir.
Notre troisième recommandation vise à ce que le
CII soit impliqué et participe au processus de l'évaluation de la qualité des soins fournis par les IPS
relativement à la sédation palliative continue et à l'aide médicale à mourir
dans le secteur public.
Notre
quatrième recommandation propose que le terme «respectif» soit retiré à
l'article 26 du projet de loi pour permettre la constitution d'un comité
conjoint, OIIQ-CMQ, pour l'évaluation de la qualité des soins fournis par les
IPS et les médecins exerçants dans le secteur privé.
Notre cinquième et
dernière recommandation porte sur les constats de décès par les infirmières et
infirmiers et suggère l'entrée en vigueur immédiate des dispositions relatives
au constat de décès.
Donc, nous sommes
maintenant prêts à répondre à vos questions. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup, M. Mathieu. Alors, nous allons débuter la période d'échange. Je
vais, par contre, donner le temps aux différents groupes parce qu'il est
différent d'hier. Étant donné qu'on a deux groupes, on veut respecter le temps
qui est imparti ce matin : 14 minutes pour la ministre et ses... et
les députés,
8 min 24 s pour l'opposition officielle,
2 min 48 s pour le deuxième groupe d'opposition et
2 min 48 s pour la députée
indépendante. Donc, j'aimerais bien qu'on puisse respecter questions et
réponses incluses dans votre temps, merci beaucoup. La parole est à
vous, Mme la ministre.
Mme Bélanger :
Oui. Alors, bonjour, M. Mathieu,
c'est un plaisir de vous revoir. Bonjour, Me Fortin, Mme Roy. Je
veux saluer la qualité de votre mémoire. On reconnaît là le grand
professionnalisme de votre ordre professionnel. C'est très bien rédigé, c'est
clair.
Alors,
j'ai quelques questions, naturellement, puis c'est une... en fait, c'est
vraiment sur le concept de l'handicap neuromoteur. Alors, une question,
peut-être... qui va peut-être vous surprendre, mais est-ce que vous allez, dans
votre réflexion... vous ne l'avez pas écrit, vous ne le recommandez pas, mais
est-ce que vous avez réfléchi au fait de ne pas... de retirer... de proposer de
retirer, dans le projet de loi, le thème «neuromoteur»?
• (11 h 40) •
M.
Mathieu (Luc) : On n'est pas allés
jusque-là dans notre réflexion, là. Ce qui est écrit dans le mémoire, c'est ce
que je vais dire, peut-être, en d'autres mots, c'est qu'il faut... il va
falloir, par contre, baliser ce qu'on veut dire par thème «neuromoteur», parce
que la notion de handicap, c'est un... c'est... ça peut être large, là. Et,
dans une question aussi délicate que l'aide médicale à mourir ou la sédation
palliative continue, il faut... il faut se donner des... des balises et s'assurer que, comment je pourrais
dire ça, le consensus social qui pourrait se dégager, là, suite aux audiences
de la commission puis du... de la loi qui
serait... qui serait adoptée, bien, que... que ce consensus-là soit... soit
respecté, compte tenu de la nature, comme je viens de le mentionner, là,
délicate de la question. Mais il faut... comme on l'écrit aussi, il ne faut
pas... il ne faudrait pas faire en sorte d'exclure les gens qui
correspondraient, là, qui ont des... qui ont des souffrances qui sont autant physiques, psychologiques, qui sont... qui
sont intolérables. L'idée, c'est de baliser la question du trouble
neuromoteur, du trouble moteur grave.
Mme
Bélanger : Mais il y a deux éléments dans ce que vous mentionnez, de
baliser le terme «neuromoteur», mais, en
même temps, vous indiquez que, par ailleurs, il y a un risque que d'autres
personnes — c'est
comme ça que je l'interprète — ayant des handicaps et ayant
des souffrances graves et inapaisantes n'aient pas accès à l'aide médicale à
mourir. Vous laissez quand même... vous ouvrez en même temps la porte en
disant : Bien, il va falloir, d'un côté, bien
définir le concept neuromoteur. Puis, en même temps, vous dites : Bien, il
ne faudrait pas non plus que ça ait pour effet de restreindre l'accès à
d'autres personnes ayant des handicaps et répondant aux autres critères, là,
bien sûr.
M.
Mathieu (Luc) : Oui. Bien, c'est un peu
ça, parce qu'en cette matière-là il n'y a pas de... il n'y a pas de... ce n'est pas blanc puis noir, hein? Il y a... il y
a des... il y a des éléments, c'est pour ça qu'on recommande qu'il y ait un
groupe d'experts qui se penche là-dessus, voir jusqu'où on peut aller, si on
peut définir la... si on peut bien encadrer la notion du... du handicap, là,
neuromoteur grave. Parce qu'il y a... si on mettait juste «handicap», ça peut
laisser de la place à... des gens pourraient
percevoir que ça laisse la place à certaines dérives, là. Et, pour la
population, c'est... Parce que nous, on est là pour protéger le public,
bien, il faut être... il faut être soucieux de ça.
Alors,
c'est un... c'est un peu le... la... c'est la réflexion qui nous habite, là. Je
ne sais pas si, Caroline, tu voudrais ajouter quelque chose là-dessus.
Mme Roy
(Caroline) : Bien non. Bien, en fait, c'est ça, c'est sûr que le Code
criminel au Canada ne prévoit pas la notion de neuromoteur, donc ce qui fait
que ça amène un concept qui est nouveau au Québec. Donc, il faut s'assurer de... si... le cas échéant, s'il demeure
à la loi, il faut s'assurer de bien le... le baliser, mais, si... s'il n'est
pas là, il va falloir aussi qu'il y ait des balises, justement, pour s'assurer
que ce soit bien... ce soit bien objectivable, là, ce que... les personnes qui
pourraient être admissibles, là, advenant qu'ils soient atteints d'un handicap.
Mme
Bélanger : OK. Merci. Une autre question. Concernant le... dans le
projet de loi, la possibilité, pour les IPS,
là, d'agir à même titre qu'un médecin dans le processus complet de l'aide
médicale à mourir, vous avez salué, là, dans le fond, cette grande ouverture là, et je pense que c'est une très
bonne chose pour faciliter l'accès aux Québécois et aux Québécoises, mais
comment entrevoyez-vous de façon spécifique la formation des IPS au niveau de
l'aide médicale à mourir?
M.
Mathieu (Luc) : Je vais laisser ma
collègue, là, Mme Roy répondre.
Mme Roy
(Caroline) : Oui. Bien, d'abord, les infirmières praticiennes
spécialisées sont des infirmières qui sont détentrices d'un diplôme de deuxième
cycle, donc d'une maîtrise et un diplôme d'études supérieures. À l'heure actuelle, l'aide médicale à mourir est abordée dans certains
programmes universitaires. C'est certain que nous, on a sollicité l'avis du
comité de la formation qui... qui est un comité qui relève de l'Ordre des
infirmières, et ce qui a été recommandé, c'est qu'il y ait un ajout au niveau
de la formation, là, de trois à six... à six heures. Donc, c'est... L'ordre travaille, là, avec les partenaires pour
s'assurer qu'il y ait des ajustements à la formation. Mais, à l'heure actuelle,
les infirmières praticiennes disposent de toute la formation requise, là, pour
accompagner les personnes. Donc, c'est plus
au niveau, là, des dispositions spécifiques à l'aide médicale à mourir, qu'il y
a un ajout, là, entre trois à six heures qui serait recommandé et qu'on
va travailler déjà avec des instances pour mettre ça en place.
Mme Bélanger :
OK. Merci. Et, concernant le
constat de décès, bon, vous... On le sait, là, durant la pandémie, les
infirmières ont eu, donc, l'autorisation de procéder au constat de décès dans
le contexte de crise sociosanitaire importante. Puis je pense qu'il y a eu...
on a vu aussi des résultats positifs de ça. Ça s'est bien passé. Vous voyez que
c'est repris dans le projet de loi pas seulement pour les personnes qui
décèdent suite à un AMM, mais pour tous les décès.
Alors, j'aimerais peut-être que vous abordiez un petit peu plus cette
question-là, là, pour l'ensemble de mes collègues. Vous... vous
souhaitez que ce soit mis en application très rapidement. Alors, j'aimerais
vous entendre, là, sur... advenant que ce soit... que le projet de loi passe,
et qu'on... qu'on aille avec la possibilité du constat de décès par les
infirmières. Comment vous voyez la suite, là? Parce que des infirmières, il y
en a des milliers au Québec. Alors, comment vous voyez ça?
M.
Mathieu (Luc) : Bien, déjà dans la
formation des infirmières, c'est... c'est prévu, ça. Une infirmière, là, quand
elle rentre sur le marché du travail, elle a les... les habiletés et les
compétences, là, pour constater le décès. Et pourquoi
qu'on voudrait que ce soit possible, c'est pour des questions de... je dirais
ça, de un, d'abord auprès des... des proches qui... Ils ont des décès
dans certains milieux, je pense aux CHSLD, par exemple, où il n'y a pas
beaucoup de médecins, et des fois, entre le moment du décès puis pour faire le
constat de décès, le temps que le médecin vienne, bien, des fois, c'est très long. Puis il nous a été reporté, puis ce
n'est pas nécessairement anecdotique, que, des fois, bien, vu qu'il n'y
a pas de médecin, bien, on met la dépouille dans une ambulance, on apporte ça
dans une salle d'urgence pour faire un constat de décès. C'est complètement
inefficient en termes de fonctionnement du réseau, là, mais c'est surtout... ce
n'est pas... ce n'est pas prendre soin des proches pour qu'après ça, bien, les
gens puissent commencer à faire leur deuil. Et puis les infirmières sont tout à
fait formées pour accompagner les familles dans ce sens-là une fois que le
constat de décès, là, si jamais le projet de loi...
Puis on l'a vu, là,
vous l'avez mentionné, Mme Bélanger, en parlant de la pandémie, là, ça a
amené... ça a aidé à la fluidité des
activités du réseau pendant la pandémie. Et, quand ça a été mis fin, nous, on a
reçu beaucoup... les directions de soins aussi dans les établissements,
beaucoup de commentaires à l'effet... parce que les gens pensaient que c'était
nous qui aviez mis fond à ça... mis fin à ça, mais c'était la fin d'urgence sanitaire
puis... qui faisait ça.
Alors, c'est pour ça
qu'on insiste puis qu'on insiste aussi que ce soit mis en vigueur rapidement
et... dans l'éventualité où le projet de loi est adopté.
Mme
Bélanger : OK. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup, Mme la ministre. Je pense que, la députée de Laporte, vous
avez des questions.
Mme Poulet : Oui.
Alors, bonjour. Bienvenue à vous trois. Dans votre mémoire, vous ne parlez pas
de refus, je n'ai pas lu quoi que ce soit par rapport au refus. Si une personne
refuse la demande, l'aide médicale à mourir, quelle est votre position par
rapport à ce niveau-là? Certaines personnes nous ont mentionné que l'on...
qu'il pourrait y avoir une deuxième demande, qu'il y ait un report. Dans notre
projet de loi, on mentionne que la demande devrait être radiée, dans les plus
brefs délais, du registre. J'aimerais vous... vous entendre par rapport à ce...
à ce niveau-là.
M.
Mathieu (Luc) : Veux-tu répondre,
Caroline?
Mme Roy (Caroline) :
C'est certain qu'au niveau du refus ce qu'on veut... ce qu'on veut
s'assurer, c'est que ce soit peut-être
clarifié pour s'assurer qu'est-ce qu'on entend par refus. Et il faudrait
s'assurer qu'il y ait des dispositions advenant que... pour respecter
aussi les volontés de la personne parce qu'on parle de demande médicale
anticipée. Donc, s'assurer que, si c'était
les volontés de la personne avant d'être inapte parce que... J'ai l'impression
que votre question porte sur les demandes anticipées, est-ce que
c'est... est-ce que j'ai bien compris?
Mme Poulet : Exactement.
Mme Roy (Caroline) : Oui. Donc, il faudrait
s'assurer, en tout cas, que ce soit, à tout le moins, clarifié, la notion de
refus, qu'est-ce qu'on entend, là, par la notion de refus. Et c'est sûr qu'il
faut considérer la personne, là, qui pourrait avoir des manifestations cliniques qui s'attachent à sa maladie. Donc,
c'est quand même des situations où c'est flou, et on devrait
effectivement s'assurer de clarifier à la loi, qu'est-ce qu'on entend par
refus.
Mme Poulet : OK.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée de Vimont.
Mme Schmaltz : ...M. Mathieu,
Mme Fortin, Mme Roy. Ma question est sur le droit à
l'autodétermination, on en a parlé beaucoup
hier, on en a discuté. Vous avez pris position là-dedans, naturellement, en
disant que vous étiez... que vous
étiez en accord avec ça. Et la question, souvent, pose sur, justement, en
situation de handicap. Comment on peut favoriser l'autodétermination
lorsqu'on est en situation de handicap?
M. Mathieu (Luc) : Pouvez-vous préciser votre question? Parce que, si la
personne... on comprend que la personne est
apte à faire... à faire une demande, là, d'aide... d'aide médicale à mourir, ça
fait que, si elle est apte, bien là l'autodétermination, c'est elle qui
va... qui va juger si c'est approprié dans sa condition. Mais à moins qu'il ait
autre chose, là, dans votre... dans votre question.
• (11 h 50) •
Mme
Schmaltz : Bien, en fait, c'était... En fait, je voulais
englober le... la notion de handicap là-dedans, parce qu'on sait que,
des fois dans certaines institutions, on peut être plus encadré, à ce
moment-là, peut-être être moins informé de... du droit à l'autodétermination.
C'est un peu ça, ma question.
M.
Mathieu (Luc) : Bien, dans les... Quelqu'un qui... qui ferait une
demande d'aide, une personne handicapée, là, selon la nature de ce qui sera
adopté dans le projet de loi, qui ferait une demande, bien là il y a un
professionnel compétent... il y a
deux professionnels compétents qui vont la rencontrer pour faire... pour voir
si c'est... si la personne a toute l'information, puis si elle prend une
décision en toute connaissance de cause, puis voir si elle répond, entre
autres, aux différents critères. Bien là, c'est là qu'il y a de l'information,
éventuellement, qui pourrait être donnée à cette personne-là sur les choix
qu'elle s'apprête... qu'elle s'apprête à faire, mais toujours dans un contexte,
là, que la personne est apte, là, et puis elle comprend ce qu'on lui... ce qui
lui est communiqué.
Mme Schmaltz : OK.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Je vais maintenant me tourner du côté...
s'il n'y a pas d'autre question, je vais me tourner du côté...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Un petit... un petit peu... On est... on est terminé. Bon.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : C'est terminé, c'est terminé.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste deux minutes? D'accord. Alors, le temps est à
vous.
Mme Gendron : Parfait. Je vais être
rapide, pour que vous puissiez répondre. Bonjour à vous trois. En fait, je voulais savoir : L'accompagnement des
infirmières au niveau, justement, de l'administration de l'AMM, est-ce que la
formation, d'après vous, est adéquate? Est-ce qu'ils auront besoin d'un soutien
par la suite, après avoir donné l'AMM? De quelle façon voyez-vous ça?
Mme Roy
(Caroline) : Est-ce... Juste peut-être préciser votre question.
Est-ce que vous parlez des infirmières ou vous parlez des infirmières
praticiennes spécialisées?
Mme Gendron : Des infirmières
praticiennes spécialisées. Excusez-moi.
Mme Roy
(Caroline) : Oui. Bien, en fait, à l'heure actuelle, les
infirmières praticiennes spécialisées disposent de la formation requise,
là, pour tout ce qui touche leur rôle qui a été dévolu par le projet de loi
n° 6, qui est en vigueur.
Pour ce qui
est de l'aide médicale à mourir, c'est à géométrie variable à l'heure actuelle,
mais il y a des... il y a quand même de la formation qui est donnée sur l'aide
médicale à mourir, mais notre comité de la formation recommande à ce
qu'il y ait un ajout, là, de trois à six heures pour tout ce qui est des
modalités entourant l'aide médicale à mourir en
complément, là, pour la formation des infirmières praticiennes spécialisées,
mais, d'office, l'ensemble des infirmières praticiennes spécialisées
sont formées pour accompagner les... la population, là, atteinte de maladies
graves. C'est plus les dispositions entourant l'aide médicale à mourir, là,
qu'il y aurait un complément qui serait requis.
Mme Gendron : Merci.
M. Mathieu (Luc) : Si je peux donner un complément, le trois à six heures,
c'est pour les IPS qui sont déjà en exercice...
Mme Roy (Caroline) : Exact.
M. Mathieu (Luc) : ...puis
qui pratiquent déjà. Et, comme l'a mentionné Mme Roy dans une réponse
précédente, pour... je dirais que celles, actuellement, qui sont en formation
et celles à venir, là, il y a un travail d'arrimage, là, entre les différentes
universités pour s'assurer que c'est bien couvert par l'ensemble des
universités, parce qu'actuellement, comme ça a été mentionné, c'est à géométrie
variable, cette question-là.
Mme Gendron : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup pour cet échange. Donc, pour la poursuite, justement, de ces échanges, je me tourne du côté
de la députée de Westmount—Saint-Louis. Votre temps commence, la parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci beaucoup.
Bienvenue et merci beaucoup pour votre témoignage ainsi que votre mémoire. Je
vais prendre la balle au bond de la question de la collègue. Si, par exemple,
un patient ou une personne qui demande
d'avoir de l'aide médicale à mourir décide qu'il préfère avoir l'administration
par un médecin, est-ce que ça, ce
serait mal vu ou est-ce qu'il y aura quand même une ouverture? Parce que,
malgré qu'on dit que c'est important, et on constate que votre
implication est importante, et on veut élargir la possibilité d'offrir des
soins aux patients ou aux gens qui demandent
avoir aide médicale à mourir, est-ce que ça, ce serait mal vu ou pensez-vous
que ce serait aussi une façon d'avoir une collaboration puis assurer que
la personne concernée serait rassurée?
M. Mathieu (Luc) : Bien, si la personne préfère que ce soit le médecin, là,
qui... qui fasse le processus d'évaluation puis d'admission de l'aide médicale
à mourir, il n'y a aucun problème, on va... ça va être respecté. Ça, c'est le
choix... c'est le choix des patients. Mais moi, je dirais que, comme pour
depuis le début du déploiement de la fonction des IPS dans le réseau de la
santé, au fur et à mesure que la population va apprendre à connaître ce que
font les IPS, ce qu'elles peuvent faire, comment c'est apprécié, bien, ça
risque d'arriver de moins en moins.
Mais, pour être bien précis par rapport à votre
question, oui, ça va être respecté, ça, là, de... puis c'est... ce n'est pas de
notre ressort à nous, mais ça va être dans les établissements de santé. Mais,
dans la... je pense que, dans la loi sur le
service santé, ça le dit, là, le patient... c'est la notion de faire son choix
des intervenants qui le soignent compte tenu de l'organisation des soins et services qui sont offerts aussi.
Alors, c'est dans ce cadre-là, là, que cette décision-là sera prise.
Mme
Maccarone : Dans la mesure du possible, oui, c'est... je
comprends. Dans votre mémoire... Puis, encore une fois, je vais renchérir un
peu sur les questions de Mme la ministre parce qu'on a parlé beaucoup de la
notion de handicap. Merci de l'avoir inclus dans votre mémoire.
Plusieurs entre nous puis plusieurs personnes qui sont déjà passées en
commission ont fait un témoignage où c'est une notion qui est très sensible.
Nous avons besoin d'avoir une définition,
une compréhension commune de c'est quoi pour éviter des dérives et pour
s'assurer aussi qu'on respecte le plus
possible l'autonomie puis le choix, les droits civils de tous les citoyens qui
souhaitent avoir accès à l'aide médicale à mourir.
Puis vous avez fait que... Puis je vais vous
citer de votre mémoire : «Bien que cette avancée représente un soulagement
pour cette clientèle, nous recommandons toutefois qu'un groupe d'experts s'y
penche afin d'établir une définition claire sur la notion de handicap
neuromoteur et aussi de bien encadrer la pratique d'AMM auprès de cette
clientèle.» Puis vous avez dit que vous... vous seriez intéressé d'abord de
participer à ceci. Dans le passé, on sait qu'il y a quand même eu des forums
qui ont eu lieu. Mme McCann, quand elle était ministre de la Santé à l'époque,
elle avait convoqué un forum pour se pencher sur les troubles mentaux, et notre
ministre de la Santé actuel a aussi fait une
demande d'un forum, alors... Puis c'est une journée, ça peut être deux
journées, tout dépendamment comment le gouvernement voit la mise en place d'un
tel forum, mais un ou deux jours où les comités d'experts, les personnes
concernées peuvent venir s'exprimer en ce qui concerne l'enjeu de l'inclusion
de la notion de handicap dans cette loi, qui
est fort important. Est-ce que, selon vous, ce serait une façon de rejoindre
votre recommandation, d'avoir un comité d'experts, et peut-être élargir la notion, puis de trouver un consensus
ou, au moins, avoir le pouls de la population et de groupes concernés
comme vous?
M. Mathieu (Luc) : Oui. Bien, c'est tout à fait... c'est tout à fait le sens
de la recommandation, là, que... que vous retrouvez dans... dans notre mémoire.
Et puis de mettre à contribution aussi que... que la population suive ce que
les experts... voit un consensus qui se dégagerait, parce que, comme ça a été
mentionné par plusieurs, et puis que nous, on est à cette pensée-là aussi, il
faut s'assurer qu'il y a un consensus large au sein de la population québécoise.
Consensus, ça ne veut pas dire unanimité,
là, mais que, compte tenu des questions délicates, là, tout ce qui sous-tend
l'aide médicale à mourir puis de la sédation palliative continue.
Mme Maccarone : Oui. Excellent. Je
suis d'avis... je trouve que ce serait une belle avancée, une façon d'essayer
de trouver... Comme vous dites, ça va être très difficile de trouver un
consensus, mais parce que c'est sensible. Puis nous avons une crainte d'envoyer
un mauvais message à des personnes qui vivent avec des handicaps que leur vie vaut moins, parce qu'on parle d'une
ouverture pour respecter les droits de tous les citoyens qui souhaitent
avoir accès à ce soin de fin de vie.
Alors, je suis contente qu'on pourrait faire
ceci puis je pense même qu'on pourrait faire un forum en parallèle avec les travaux qu'on fait ici pendant
que nous sommes en train de faire une consultation sur la loi. Parce que le
but, c'est... Parce que je comprends, on a tous lu la
revue de presse, ce n'était pas retardé, nos travaux. Je pense que ça peut être fait en même temps que nous sommes en
train de faire notre consultation auprès de vous puis auprès des citoyens
pour s'assurer qu'on entend bien tous les parties prenantes puis que tous les
parlementaires pourront aussi participer.
S'il n'y a pas de
compréhension commune de la définition de handicap, selon vous, ce serait quoi,
les dérives possibles quand on parle de l'application de l'aide médicale à
mourir?
M.
Mathieu (Luc) : Bien, les dérives
possibles, c'est parce que, si on s'en tient juste au mot «handicap», je
comprends qu'il y a les autres critères de la loi en fin de vie, là, puis...
Mais, en même temps, pour la population, un peu
comme vous l'avez dit... Puis souvent on est dans la perception, hein? Si
quelqu'un qui a un handicap, puis je ne veux pas minimiser les choses, là, mais pas grave, là, qu'on pourrait
qualifier de pas grave, puis dire : Bien, est-ce que quelqu'un pourrait se
qualifier, alors que ce n'est pas nécessairement grave, là, au sens où on
pourrait l'entendre? Alors, c'est... c'est pour ça qu'il faut être
prudent dans... dans... en cette matière.
Mme Maccarone :
Je veux aussi revenir sur la
notion de refus. Ça a été des bonnes questions. Puis moi aussi, j'étais
surprise que ce n'était pas évoqué, parce que, dans le fond, vous serez les
professionnels qui seront sur place pour l'administration lors de
l'adoption de la loi. Ça fait que la notion de refus, si vous étiez à la place
de la ministre, qu'aimeriez-vous voir dans
la loi pour que ce soit clair, encore une fois, pour éviter des possibles
dérives, mais de s'assurer que la clarité dans la loi est là? Parce
qu'actuellement on a entendu autres groupes qui sont venus témoigner hier, qui ont dit que c'est flou. On essaie avoir
une clarité. On a parlé d'un refus versus un refus catégorique qui est écrit dans
le Code civil mais qui ne fait pas partie de
le projet de loi n° 11. Alors, comment verriez-vous cette notion de refus
dans la loi pour vous aider à bien accompagner des personnes concernées?
• (12 heures) •
M.
Mathieu (Luc) : Bien, il faudra voir les... C'est les
circonstances cliniques qui feraient en sorte qu'un refus serait... Une fois que la personne a, préalablement, là, dans le
cadre d'une demande médicale anticipée, une fois que la personne aurait donné
son... aurait fait une demande, et puis là elle serait apte. Mais, si, par
exemple, quelqu'un qui a... il a la maladie d'Alzheimer puis présente ce
qu'on appelle des SCPD, là, des syndromes comportementaux de la démence, puis
devient agité, puis qu'il dit... il manifeste, là, de l'agitation, bien, ça ne
veut pas dire nécessairement qu'il faut interpréter ça comme un refus. Ça,
c'est des manifestations cliniques. Il faut se rappeler que la personne, au préalable, elle a dit : Si je me retrouve
dans telle, telle condition. Puis là il y aurait le tiers, là, le... comment on
l'appelle dans la loi?
Mme Roy
(Caroline) : Le tiers de confiance.
M.
Mathieu (Luc) : Le tiers de confiance, avec l'équipe, l'équipe
interprofessionnelle, l'équipe médicale, l'équipe de soins. C'est un... c'est
un travail d'équipe, que je dirais, pour juger si la personne est vraiment au
refus ou pas. Alors, si on a à clarifier la
notion de refus, il faudrait voir c'est quoi, les... puis là on ne pourra pas
couper ça au couteau, hein? Il va rester une zone grise. C'est pour ça
que l'intelligence de l'équipe, là, va être importante à un moment donné, mais, si on veut baliser un peu la notion
de refus, c'est en fonction... bien, ce serait dans quel type de... quelles sont
les manifestations de refus qu'on pourrait vraiment interpréter comme un refus,
alors que, dans d'autres cas, c'est plus des manifestations cliniques de la
maladie de laquelle la personne est atteinte.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. Mathieu. Nous
apprécions ces échanges. On va les poursuivre avec la députée de Sherbrooke
pour 2 min 48 s. Le temps est à vous.
Mme Labrie : Merci, Mme la Présidente. Je vais vous ramener sur
la notion de handicap. Vous nous parlez d'un comité d'experts. Est-ce
qu'il y a déjà des lieux où des gens réfléchissent ensemble, de manière
interdisciplinaire, pour définir la notion
de handicap ou est-ce qu'il y a des gens que vous recommanderiez de nommer sur
un tel comité pour définir la notion de handicap?
Mme Roy
(Caroline) : Bien, c'est certain que les professionnels compétents,
là, devraient être assis autour de la table avec des experts dans le domaine.
On pense que la population, aussi, atteinte de handicaps devrait être entendue
à cet égard-là. Donc, c'est sûr qu'il n'y a pas de table, officiellement, en
tout cas, à ma connaissance... pas à ma
connaissance, qui ont été mises sur pied, mais ça pourrait être très bien des
travaux, là, qui soient mis sur place avec des médecins, des infirmières, d'autres professionnels de la santé, là,
qui travaillent avec cette clientèle-là pour s'assurer de vraiment bien circonscrire, là, ce qu'on vise
comme portée. Ça pourrait être avec des... c'est ça, des professionnels
de la santé, des experts dans le domaine,
des patients qui sont atteints... pour aider à déterminer les balises qui
devraient être mises de l'avant, là, pour cette clientèle-là.
Mme Labrie : Puis
il n'y a pas, à votre connaissance, déjà une instance existante qui
regrouperait ces acteurs-là qui auraient
l'expertise sur les enjeux de handicaps, qui pourraient être spécifiquement
consultés, plutôt que de former une nouvelle instance de consultation?
M.
Mathieu (Luc) : À notre connaissance, pas.
Tu sais, il y a des chercheurs, là, probablement, dans les facultés de médecine,
sciences de la santé, qui réfléchissent à ça, mais il faudrait les regrouper...
les identifier, les regrouper puis les joindre aux autres intervenants, là,
comme ma collègue vient de...
Mme Labrie : Je
vous remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour ces réponses. Alors, je cède la parole à la
députée de Laviolette—Saint-Maurice.
Mme Tardif : Bonjour. Merci d'avoir
pris le temps de préparer cet important dossier. Je retiens votre demande, de la possibilité de mettre sur pied un
comité conjoint CII-CMDP pour procéder à l'évaluation, là, de la qualité
des soins qui sont administrés. Je retiens aussi... Je comprends que vous
souhaiteriez que les conseils des infirmiers et
infirmières, dans les établissements publics, soient impliqués dans
l'évaluation de la qualité des soins fournis par les IPS à l'instar, je
dirais, des conseils des médecins et des pharmaciens, là.
M. Mathieu (Luc) : C'est ça.
Mme Tardif : C'est ça? D'autre part,
pour les IPS qui travaillent dans le secteur privé, on retient que ce serait
l'Ordre des infirmières qui procéderait à l'évaluation. Vous soulevez qu'il y a
quatre mécanismes ou quatre organismes. Si on ajoute le conseil conjoint, CII...
ça en ferait cinq. Là, je me demande comment on va faire pour s'assurer que l'évaluation soit juste, équitable,
mais surtout standard, conforme, la même pour tous les professionnels.
Mme Roy (Caroline) : En fait, c'est
un peu la recommandation qu'on fait, de s'assurer qu'il y ait justement un
jumelage entre les différentes instances au lieu de le faire tous séparément.
Ce qu'on recommande, c'est que, par exemple, dans les... Parce que ce qui est
prévu à la loi à l'heure actuelle, c'est les établissements publics, c'est les
CMDP et les directions de soins infirmiers. Donc, nous, ce qu'on demande, c'est
que ces instances-là se regroupent dans les établissements pour faire
l'évaluation et non pas que chacun le fasse, quand c'est une infirmière, c'est la
DSI, quand c'est un médecin, c'est le CMDP, mais que ça se fasse conjointement.
Donc, dans ce cas-ci, on aurait un seul
mécanisme pour le public. C'est sûr que la loi, aussi, à l'heure actuelle, pour
le privé, ce qui est prévu, c'est le Collège des médecins et l'Ordre des
infirmières. Nous, on a entrepris des discussions avec le Collège des médecins
aussi pour que ce comité-là soit conjoint et qu'on soit ensemble pour le
regarder. Donc, ça en fait deux, dans le fond, le public et le privé, au lieu
d'en avoir quatre, instances différentes. Nous, c'est ce qu'on recommande.
L'implication des CII, c'est de... parce qu'à l'heure actuelle la loi prévoit
seulement les directions de soins infirmiers... c'est de s'assurer que les CII
soient aussi partie prenante de cette évaluation-là parce que ça fait partie
fait partie de leur rôle selon la loi sur la santé et services sociaux.
Mme Tardif : Merci.
M. Mathieu (Luc) : Si vous permettez, en complément, c'est pour ça qu'on
demande que, dans l'article 26, le mot «respectif» soit enlevé pour
permettre cet arrimage-là. Puis, l'autre chose aussi, on anticipe peut-être ce
qui s'en vient, là, dans le projet de loi
qui va créer l'agence Santé Québec et on va peut-être toucher la gouvernance
clinique dans les établissements de santé. Alors, il faudrait que, bien,
si c'est le cas, bien, que les CII, au même titre que le CMDP puis le
conseil... c'est un autre conseil dans les établissements de santé, bien,
soient... contribuent ensemble à l'évaluation des soins. Et là c'est pour ça
que, particulièrement ici, dans le cas des IPS qui donnent l'aide médicale à mourir... de là notre recommandation que les CII
soient impliqués dans le processus d'évaluation de la qualité des soins.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci à vous trois pour cette excellente
présentation. Merci aux collègues pour les échanges. Alors, je vous souhaite
une bonne fin de journée.
Et, d'ici le prochain groupe, je suspends les
travaux. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 10)
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous
plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses
travaux.
Nous recevons
l'Office des personnes handicapées du
Québec. Nous avons avec nous
M. Daniel Jean, directeur général, Mme Frances Champigny, présidente
du conseil d'administration, ainsi que M. Maxime Bélanger, directeur
du secrétariat général, communication et affaires publiques.
Bienvenue à vous. Vous allez disposer d'une
période de 10 minutes pour procéder, d'abord, à votre... à une
présentation ainsi qu'à votre propos, s'ensuivront ensuite les périodes
d'échange. Alors, la parole est à vous.
Office des personnes
handicapées du Québec (OPHQ)
Mme Champigny
(Frances) : Merci, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés,
mon nom est Frances Champigny. Je
suis la présidente du conseil d'administration de l'Office des personnes
handicapées du Québec. D'abord, on vous remercie d'avoir invité l'office
à participer à ces consultations.
L'OPHQ, je vous rappelle,
est un organisme gouvernemental qui met tout en oeuvre pour faire du Québec une société plus inclusive. Notre objectif est
de... les obstacles rencontrés par les personnes handicapées, leurs familles
et leurs proches, poursuivant une gestion au plan individuel en offrant des
services à ces personnes et une gestion aussi
au plan cognitif en travaillant avec le gouvernement, des municipalités ainsi
que des organismes privés et communautaires.
Nous réalisons également des travaux d'évaluation pour bien documenter la
situation des personnes handicapées du Québec.
L'office est appuyé par un conseil
d'administration qui est composé en majorité de personnes handicapées et de
membres de leurs familles, des membres de... provenant de différents horizons
de la société civile... la mission de notre organisme, nous sommes
particulièrement interpelés sur le sujet de l'aide médicale à mourir, qui
soulève des enjeux importants pour les personnes handicapées.
Je vais donc laisser la parole à M. Jean
pour vous faire part de nos commentaires et nos recommandations à ce sujet.
M. Jean.
M. Jean (Daniel) : Bonjour. Merci
pour votre invitation. Comme vient de le mentionner Mme Champigny, le projet de loi n° 11 soulève des enjeux
très importants pour les personnes handicapées. Rappelons qu'elles représentent
16,1 % de la population et que
61 % d'entre elles ont des incapacités liées à la douleur. Il est
important de reconnaître la pleine autonomie décisionnelle de celles-ci
au même titre que toutes les autres personnes de la société. Nous saluons le fait que le législateur veuille faire
évoluer la Loi concernant les soins
de fin de vie. C'est une volonté
exprimée par la société québécoise ces dernières années.
En ce sens, nous appuyons globalement le projet
de loi. Il donne suite à plusieurs recommandations. Notre principale
préoccupation est en rapport avec l'introduction dans la loi du handicap
neuromoteur grave et incurable. Comme vous le savez, la Loi concernant les
soins de fin de vie prévoit déjà que toute personne handicapée atteinte d'une maladie grave et incurable, répondant à
toutes les conditions admissibles, est admissible à recevoir l'aide médicale
à mourir comme toute autre personne. Cependant, le projet de loi, lui, modifie
ou modifie cette donnée-là pour inclure expressément les personnes ayant un
handicap neuromoteur grave et incurable. Celles-ci pourront dorénavant demander
l'aide médicale à mourir si elles répondent à toutes les autres conditions
d'admissibilité.
Nous considérons que l'introduction du handicap
neuromoteur grave et incurable soulève des enjeux importants qui méritent
d'être examinés. Nos commentaires à cet égard seront de deux ordres.
Premièrement, le terme «handicap neuromoteur
grave» n'est pas défini par le projet de loi. Il n'existe aucun renvoi à ce
terme dans le corpus législatif québécois. S'il n'est pas défini clairement
dans la loi, ce terme pourrait être sujet à
des interprétations diverses. De plus, cette appellation renvoie à une approche
de diagnostic médical qui est peu compatible avec le Modèle de développement
humain — Processus
de production du handicap. C'est sur ce modèle que repose la définition
de «personne handicapée» incluse dans la Loi assurant l'exercice des droits des
personnes handicapées au Québec. Sans vouloir soulever un débat sémantique,
nous tenons à souligner que l'utilisation du terme «handicap neuromoteur»
introduit une incohérence dans la terminologie québécoise du handicap.
Nous comprenons toutefois que ce choix est dicté
dans un souci d'harmonisation avec le Code criminel. Celui-ci fait référence
uniquement au terme «handicap» sans le qualifier. À cet égard, l'incohérence
entre la loi québécoise et la loi fédérale risque de perdurer. La loi
québécoise serait plus restrictive que la loi fédérale parce qu'elle limite l'accès à l'aide médicale à mourir
aux seules personnes ayant un handicap neuromoteur grave et incurable.
Pour éviter
toute divergence dans l'interprétation de ce terme, nous recommandons que l'on
précise dans la loi ce que l'on entend par ce terme ou que l'on mandate la Commission
sur les soins de fin de vie pour le faire. Dans le fond, ce qu'il faudrait, c'est, à tout le moins, dresser la liste des
diagnostics auxquels ce terme renvoie pour savoir, bien, qui est visé
par ça.
Deuxièmement, le deuxième point qu'on voulait
apporter sur cet enjeu-là, c'est que le projet de loi ne vise qu'un segment de
la population des personnes handicapées. L'office ne dispose d'aucune donnée
démontrant que ce groupe présente des
caractéristiques particulières qui les différencient des autres personnes
handicapées ayant des incapacités. Donc, dans ce contexte-là, cibler
spécifiquement ce groupe-là peut potentiellement être discriminatoire et ouvrir
à des recours devant les tribunaux.
Enfin, nous tenons à souligner que l'utilisation
du terme «handicap» dans le contexte particulier de la loi sur l'aide médicale
à mourir est loin d'être banale. Bon, c'est un terme qui peut renvoyer à des
préjugés qui sont encore véhiculés au sujet des personnes handicapées :
dévalorisation, fardeau qu'elles peuvent représenter pour les proches et la société, etc. Donc, il s'agit d'une question
très sensible, d'où l'importance de mettre l'accent sur les autres critères
d'admissibilité à l'aide médicale à mourir plutôt que sur le handicap ou la
maladie.
Cela étant dit, nous saluons la volonté du
législateur de prendre en compte la réalité des personnes handicapées dont la
condition entraîne des souffrances constantes et insupportables qui ne peuvent
être apaisées dans des conditions que ces
personnes jugent tolérables. Nous comprenons aussi qu'il veuille procéder avec
prudence avant d'élargir davantage l'accès à l'aide médicale à mourir.
Cette façon de faire permet de mieux gérer les risques et de protéger les
personnes les plus vulnérables.
Nous tenons à signaler un élément que le
législateur sera peut-être appelé à prendre en compte concernant l'introduction
dans la loi du handicap neuromoteur grave et incurable. Le comité fédéral mixte
spécial sur l'aide médicale à mourir a
présenté tout récemment son rapport. Ce comité a abordé la question de l'accès
à l'aide médicale à mourir aux personnes handicapées et de la protection
des personnes plus vulnérables. Ce rapport mentionne qu'il est important de clarifier que les personnes
handicapées peuvent être admissibles à l'aide médicale à mourir, mais que leur seul
handicap ne suffit pas à permettre de déterminer leur admissibilité.
Il
recommande que le gouvernement du Canada examine la possibilité d'apporter des
modifications au Code criminel afin de permettre d'éviter toute stigmatisation
des personnes handicapées, sans pour autant les priver de l'accès à l'aide
médicale à mourir. Les options devraient inclure le remplacement des références
au handicap dans le Code criminel en portant
attention aux ramifications juridiques potentielles d'une telle modification à
travers le Canada.
Nous considérons qu'à
terme ce n'est pas la maladie ou la situation de handicap qui doivent dicter
nos actions, mais précisément les critères de l'article 26 de la loi,
c'est-à-dire l'aptitude à consentir, le déclin avancé et irréversible des
capacités, éprouver des souffrances physiques ou psychologiques constantes,
insupportables et qui ne peuvent être apaisées dans des conditions jugées tolérables.
J'aimerais maintenant
aborder la question de l'aide médicale à mourir aux personnes dont le seul
problème médical est un trouble mental. Nous avions recommandé, en 2021, de ne
pas élargir l'aide médicale à mourir à ces personnes, et ce, tant qu'il n'y aurait
pas une évidence scientifique reconnue appuyant celle-ci. Comme le projet de
loi n° 11 va dans le même sens de notre
recommandation, nous appuyons les modifications proposées à cet égard.
Cependant, nous
croyons qu'il faudrait poursuivre la réflexion. La question va inévitablement
se poser. Dans le cadre de la loi fédérale,
ces personnes seront admissibles à l'aide médicale à mourir à partir du
17 mars 2024. Enfin, nous
insistons à nouveau sur l'importance d'améliorer l'accès aux soins et aux
services en santé mentale pour soulager les souffrances de ces
personnes.
• (12 h 20) •
Concernant les
demandes anticipées d'aide médicale à mourir, nous y sommes favorables. Nous
appuyons la modification à la loi permettant qu'une personne majeure et apte
puisse faire une demande anticipée d'aide médicale à mourir à la suite de
l'obtention d'un diagnostic de maladie grave et incurable menant à
l'inaptitude. Elle a fait l'objet d'un large débat social durant... duquel
s'est dégagé un consensus. Nous souscrivons aussi aux diverses règles qui
seront applicables à une telle demande. Un tel encadrement est essentiel pour
éviter toute dérive possible.
Pour terminer, la
question de l'accès à l'aide médicale à mourir est un sujet complexe et qui
évolue. Il faut poursuivre la réflexion et
mener des travaux. L'office offre son entière collaboration pour participer à
tous les travaux visant l'accès à l'aide médicale à mourir aux personnes
handicapées. En ce sens, nous recommandons, d'une part, de poursuivre la réflexion sur l'élargissement
éventuel de l'aide médicale à mourir à l'ensemble des personnes handicapées,
incluant éventuellement celles dont le seul problème médical est un trouble
mental. Deuxièmement, on recommande de
produire annuellement des données sur les personnes handicapées demandant
l'aide médicale à mourir, l'ayant reçue ou pas, en prenant en compte les données socioéconomiques et les
services dont elles ont bénéficié. Enfin, on recommande de mettre sur
pied un groupe d'experts chargé d'étudier les besoins de l'ensemble des
personnes handicapées en ce qui concerne
l'aide médicale à mourir. On recommande d'y associer l'office et les
représentants des personnes handicapées.
Je vous remercie pour
votre attention.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Mme Champigny, M. Jean,
M. Bélanger, merci beaucoup pour cet exposé. Ces recommandations et ces
observations vont certainement susciter des questions.
On
va commencer avec la banquette de la ministre. Vous avez une période de
13 min 18 s. Le temps est à vous.
Mme Bélanger : Oui. Alors, bonjour. Merci de participer, là, à
cette commission. Merci beaucoup, Mme Champigny, pour votre
présentation, et M. Jean.
Alors, bien, c'est
une bonne... c'est des bons sujets que vous déployez ce matin, et puis je
comprends très bien que la notion de handicap neuromoteur, en fait, il n'y a
pas de définition précise, il n'y a pas de consensus scientifique. Vous avez
inscrit dans votre mémoire que ça renvoie nécessairement à des diagnostics
médicaux, ce qui va un peu, je dirais... pas à l'encontre, mais qui va... qui
ne fait pas partie, dans le fond, des approches reconnues en réadaptation. Vous
avez vraiment une vision beaucoup plus globale. Alors, il y a un glissement, à
ce niveau-là, qu'en définissant le volet neuromoteur on glisse vers,
nécessairement, des diagnostics médicaux.
Ma question, c'est...
Vous avez participé à la Commission sur les soins de fin de vie, la Commission
spéciale sur les soins de fin de vie. Vous
étiez présents aussi dans toutes les réflexions qu'il y a eu, au fil des
dernières années, en lien avec la première... l'adoption de la première
loi sur les soins de fin de vie. Est-ce que vous avez réfléchi à la définition de l'handicap neuromoteur? Comme
office, comme office, est-ce que vous avez été tentés de vous donner une
propre définition qui ne serait pas une définition avec des diagnostics
médicaux?
M. Jean
(Daniel) : Pour nous, si on allait dans cette voie-là, il faudrait
regarder la question d'incapacité qui découle
de la condition de la personne. Il faudrait regarder plus cet élément-là.
L'élément qui nous embête un peu là-dedans... Puis, dans les faits, pour être clairs, on salue les avancées qui sont
sur la table, parce qu'actuellement une personne pourrait avoir un AVC, OK, puis, suite à sa condition, là,
OK, tout dépendant si c'est quelque chose qui découle d'une maladie ou si c'est quelque chose qui découle d'un
traumatisme, si elle est, disons, paralysée, on n'aura pas... elle n'aura pas
accès aux mêmes services. Pourtant, elle va vivre les mêmes souffrances.
Nous, notre
réflexion, c'est sous l'angle de dire... On n'est pas en train de dire qu'il
faut nécessairement que toutes les personnes handicapées aient l'aide médicale
à mourir. Ce qu'on dit, c'est que les personnes qui sont aptes, les personnes
qui, dans le fond, ont des souffrances qu'on n'est pas capables de régler et
qu'on a tout fait, bien là ils devraient avoir un service comparable aux gens
qui ont la même condition suite à une maladie.
Donc, l'approche du
projet de loi, d'y aller par étapes puis, après ça, de se rendre
éventuellement... c'est l'esprit d'une de nos recommandations, de se rendre à
ceux qui ne sont pas visés par le handicap neuromoteur qui pourrait venir plus
tard, bien, prenons le temps de faire les travaux. Ça fait que j'aurais
tendance à parler de la notion d'incapacité, autrement dit, reliée à la
condition neuromotrice.
Mme
Bélanger : Une question de précision. Êtes-vous à l'aise avec le
concept élargi qu'on retrouve au niveau du
Code criminel fédéral, qui mentionne la notion de handicap, point, sans
préciser... Est-ce que vous, comme office, vous êtes à l'aise avec ça?
M. Jean
(Daniel) : Sur le fond, oui, mais ça, ça implique deux choses. Ça implique
des ajustements dans les pratiques. Ce que
je veux dire par là, c'est que, dans la loi à l'heure actuelle, c'est une
maladie, OK? Donc, c'est normal qu'on ait une équipe médicale qui voit à
assurer le traitement puis à suivre... puis ce que je comprends, la volonté du
projet de loi, c'est d'assurer que le soin soit en continuité avec tout ce qui
s'est fait auparavant. Donc, on est dans une logique de maladie.
Si on introduit les
personnes qui ont une condition qui n'est pas reliée à une maladie, donc qui
est en... la personne est en situation de handicap, là, ça amène complètement
une autre réalité, c'est-à-dire qu'à mon point de vue, dans l'équipe qui doit encadrer les demandes, il devrait y avoir
une plus grande présence des acteurs provenant du secteur de la réadaptation. Et, quand on parle de
personnes handicapées puis qu'on ne parle pas de la notion de maladie,
on parle, dans le fond, d'une interaction avec une communauté, c'est-à-dire que
le handicap, c'est le fruit d'une interaction entre une personne avec sa
condition puis les obstacles qu'elle va rencontrer. Quand les obstacles sont
reliés à la douleur et que ce n'est pas relié à une maladie, ça demande des
interventions spécifiques, des expertises spécifiques en réadaptation,
notamment.
Mme
Bélanger : OK. Une dernière question, de mon côté. Je vais laisser mes
collègues par la suite... mais c'est
vraiment intéressant. Vous êtes... Dans le fond, vous représentez l'Office des
personnes handicapées du Québec. Est-ce que vous avez des vis-à-vis dans les
autres provinces ou dans d'autres pays? Avez-vous des rencontres avec
d'autres partenaires de type office de personnes handicapées comme on a au
Québec? Et, si oui, est-ce qu'à votre connaissance, en particulier au Canada,
ils ont discuté de la notion de handicap?
M. Jean
(Daniel) : Actuellement, on n'a pas d'équivalent, en Amérique du Nord
ni ailleurs dans le monde, d'organismes qui ont exactement cette mission-là. Il
y a des organismes qui existent ailleurs dans le monde où ils vont avoir la responsabilité... La première
mission de l'office, c'était de donner des services directement, de lui-même,
aux personnes handicapées, puis la loi a été modifiée pour que ce soit
l'ensemble des ministères, organismes gouvernementaux, municipalités qui
donnent des services.
Donc, d'avoir un
organisme comme au Québec, qui assure l'application cohérente de la loi puis
qui assure les liens, ça, il n'y a pas d'équivalent. Les tribunes où on peut
parler de ce genre de dossier là, ça va être au niveau de l'ONU, pour
l'international, et, au niveau du Canada, ça va être sur des comités
spécifiques, mais, sur la notion de handicap telle qu'on l'entend là, je vous
dirais qu'aussi vrai que pour l'aide financière de dernier recours ils n'ont
pas de programme vraiment spécifique. On commence à les voir émerger. Le Québec
était assez avancé là-dessus et aussi sur tout le débat de handicap. Le
handicap n'est pas... Si on considère que la personne handicapée est... a les
mêmes droits que les autres personnes, il faut se poser la question : En
vertu de quoi on lui donnerait accès à l'aide médicale à mourir? Et, pour moi,
le critère qui demeure, c'est uniquement la souffrance ou une maladie qu'elle
a.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci, Mme la
ministre. Je pense que, la députée de Soulanges, vous avez quelques questions.
La parole est à vous.
Mme Picard : Bonjour.
Merci beaucoup pour votre présence. C'est toujours intéressant de vous avoir en
commission parlementaire avec nous.
Moi, j'ai beaucoup
entendu, là, de certains contacts, des gens qui disaient que... qui sont
porteurs... qui ont une situation en handicap, qui me disaient que ça envoie un
mauvais message, le fait qu'on inclue le handicap. En fait, ça a déjà été fait
au fédéral, mais comment nous, on pourrait... c'est très délicat, mais comment
on pourrait aider à ce que le message soit
plus clair, passe mieux? Comment on peut représenter ça dans cet écrit-là qui
est si important?
M. Jean
(Daniel) : Bien, d'une part, l'angle sous lequel on regarde la
problématique, et, comme je le disais tantôt,
c'est en vertu de la loi québécoise, puis la loi québécoise nous dit :
Dans tout projet de loi ou dans tout programme, dans tout service qui est fait, il faut se poser la question :
Est-ce qu'on discrimine au regard des personnes handicapées ou on a une
approche inclusive?
Ça fait que, quand on
regarde l'aide médicale à mourir, c'est pour ça que, dans notre mémoire, on
rappelait quelque chose de très important, c'est-à-dire qu'une personne,
actuellement, qui est handicapée et qui a une maladie, OK, qui répond aux critères de l'aide médicale à mourir aurait droit
actuellement à l'aide médicale à mourir. Donc, ce n'est pas en fonction de son handicap mais de sa
maladie. Quand on regarde du côté de la maladie, l'enjeu fondamental, c'est : Pourquoi je ne respecterais pas le
choix d'autodétermination d'une personne dont l'origine de sa condition n'est
pas liée à une maladie? Donc, ça, c'est l'enjeu.
• (12 h 30) •
Votre question,
c'est : Quel message qu'on peut envoyer? Bien, pour moi, c'est justement
de ne pas insister nécessairement sur l'enjeu de handicap, quoiqu'il faut le
nommer, il ne faut pas le cacher, mais c'est de dire : Écoutez, il y a des
critères très précis, là, OK, le consentement... Il n'est pas question de
rentrer, autrement dit, dans une ressource de soins palliatifs puis de dire : Bien, tous
ceux-là, là, ils ont droit à l'aide médicale à mourir. Non, non, ça
prend, d'une part : est-ce qu'il y a consentement, est-ce qu'il y a eu les
services, bon, etc., tous les critères.
Donc, pour moi, en termes de message, si on veut
être le plus inclusif possible, ça doit comprendre les personnes handicapées,
mais ça doit en même temps protéger leurs droits. Donc, ça, ça amène deux
choses, ça veut dire d'être clairs dans notre message puis aussi être clairs
sur les services qu'on leur offre. Parce que, si on ne donne pas des services
de qualité, bien, c'est sûr que la condition de la personne va se détériorer
puis... Donc, il y a cet équilibre-là qu'il faut maintenir. Et c'est pour ça
que c'est un soin. Nous, on le voit comme un soin fin de vie dans un continuum. Et les parties du continuum doit
être robustes. Et mon point de vue, si on disait que maintenant on inclurait
certaines situations... certaines personnes handicapées en fonction non pas de
leur maladie, mais de leur condition qui
entraîne des souffrances... Je... dans le mémoire, là, 61 % des personnes
handicapées ont des... ont des incapacités liées à la douleur. Ce ne
sont pas toutes des douleurs extrêmes, mais il y en a, il faut le reconnaître.
Donc, comment on peut les aider là-dedans, ce n'est pas uniquement en
disant : Ils auront droit à l'aide médicale à mourir, mais aussi et
surtout ils ont droit à des services adaptés à leur condition. Et c'est cet
équilibre-là qu'il faut essayer de trouver. Et c'est ça que... qu'on apprécie,
nous, comme office, dans le débat qui est en train de se faire actuellement,
parce qu'on se... on regarde le problème sous les deux aspects.
Mme
Picard : J'ai une dernière question. Je voudrais vous
parler justement des gens qui n'ont pas de diagnostic, des... ou des
gens qui ont des maladies orphelines. Pensez-vous que ça peut avoir un enjeu
aussi, là, ça peut les pénaliser, à quelque
part, dans le... dans la loi actuelle, comment c'est écrit? Ou bien comment
vous voyez ça, les gens avec des maladies orphelines?
M. Jean (Daniel) : Avec les maladies
orphelines, si ce n'est pas relié à la situation... à la définition de «personne
handicapée», là on tombe dans... dans un domaine médical puis on a moins cette
expertise-là, comme office. Mais, si on
regarde des gens qui, dans le fond, ont un profil qu'on nomme actuellement
«maladie», mais qui serait une condition qui s'apparenterait, là, donc
qui répondrait, à terme, à la définition de «personne handicapée», nous, on
pense qu'il faut aller... aller de l'avant là-dedans pour... sur la réflexion.
Parce qu'il y a... Ce n'est pas... Ce n'est pas nécessairement une condition ou
un diagnostic qui devrait déterminer si tu souffres plus ou moins. C'est pour
ça que, nous, notre recommandation, c'est de
mettre sur pied un comité : ils sont où, les personnes qui souffrent,
c'est quoi le volume. Je suis sûr que, si on se mettait à regarder les
chiffres, on ne verrait pas des centaines et des centaines de personnes, on verrait des petits nombres par
groupes puis on verrait... Peut-être, ça nous aiderait même à nous poser la
question : Qu'est ce qu'on est capables
de faire en amont pour mieux prévenir? D'où la réflexion, je pense. C'est
important de... de continuer la réflexion pour aller le plus loin
possible sur les deux axes.
Mme Picard : Merci beaucoup. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci, Mme la députée. Est-ce
que j'ai d'autres questions? Petite question rapide. Mme la députée de Vimont.
Mme
Schmaltz : ...est-ce qu'il y a une différence entre une
personne handicapée et une personne en situation de handicap ou ça veut
dire la même chose?
M. Jean (Daniel) : Dans les faits,
il y a une appellation, il y a un courant de pensée à l'heure actuelle de dire
qu'on devrait dire «des personnes en situation de handicap». On a une
publication à l'office qu'on pourrait rendre disponible à la commission et qui
vient... un article qui vient expliquer les... les éléments. Une personne qui
est en situation de handicap, techniquement, elle pourrait être en situation de
handicap temporaire comme elle pourrait être en
situation de handicap permanente. Cette appellation-là ne vient pas capter cet
élément-là. Par contre, il y a des gens qui aiment mieux cette appellation-là que «personne handicapée», parce
qu'ils disent : Quand on dit «personne handicapée», c'est comme si
on mettait toute... toute la... la pression sur l'individu. Puis, le modèle de
handicap, c'est justement de dire :
C'est l'interaction entre un individu et sa condition et l'environnement qui va
faire qu'il va être en situation de handicap.
Si j'ai des incapacités motrices, je suis au quatrième étage, il n'y a pas
d'ascenseur, j'ai un obstacle, je suis en situation de handicap. S'il y
a un ascenseur, je suis capable de me déplacer.
Donc, nous, ce qu'on dit, à l'office, on
dit : Vous pouvez utiliser «les personnes en situation de handicap», mais, quand vous faites référence à des programmes
qui... Parce que la notion de «personne handicapée», c'est persistant,
hein? C'est... Ce n'est pas une condition temporaire, c'est une question... une
condition permanente. Donc, dans ce cas-là, ce qu'on dit tout simplement, c'est
qu'ici vous utilisez «une personne en situation de handicap», qui répond aux critères du programme. «Personne handicapée»,
exemple, c'est... Parce qu'il faut... il faut... il faut bien départager
les choses, sinon on est en... on serait en
train de dire qu'il faut ouvrir les programmes à toute personne qui a une
incapacité. J'ai une opération puis je vais avoir des difficultés à me déplacer
pendant un mois, j'aurais droit à tous les services. Et ce n'était pas l'esprit du législateur. L'esprit du
législateur, c'était de s'occuper spécifiquement des personnes qui étaient
les plus négligées dans les services publics, à cette époque-là, en... de 1998
à 2004.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean.
M. Jean (Daniel) : OK.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Ce que je vais faire, je vais
vous demander de nous envoyer... envoyer à la secrétaire le document, on va le
déposer. Tout le monde va y avoir accès, ce qui est une... une question très
importante.
M. Jean
(Daniel) : Parfait.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Je
vais me tourner maintenant du côté de la députée de D'Arcy-McGee pour
une période de 8 min 24 s. Le temps est à vous.
Mme Prass : Merci.
Bien, merci pour votre présence et votre mémoire, ça aide à alimenter nos
discussions.
Donc, je vais aller
sur justement ce qu'on parlait, de la définition de «handicap neuromoteur».
Comme la ministre l'a dit, comme vous l'avez
dit, il n'y a pas de consensus scientifique à cet égard, de la définition.
Évidemment, c'est un projet de loi
avec des... avec des impacts qui auront une grande répercussion, donc. Et, de
ce que je comprends, dans le passé, ça a toujours été des comités
d'experts quand il y a eu des enjeux de définition de termes dans le cadre de
l'aide médicale à mourir. Et donc je pense que, plutôt que de laisser cette
définition à des fonctionnaires ou nous autour de la table, qui ne sont pas des
experts là-dessus, que, justement, il devrait y avoir un forum en parallèle de
la commission pour amener autour de la table des groupes comme le vôtre et
d'autres qui pourront contribuer à cette définition.
Donc,
première question : Seriez-vous intéressés, si c'est... si c'est le cas,
de participer à cette... à ce forum, à cette réflexion-là? Et,
justement, quels sont les différents éléments de société ou les différents
groupes que vous pensez devraient être présents pour pouvoir contribuer à cette
définition?
M. Jean (Daniel) : Bien, d'une part, il faut
rappeler que l'Office des personnes handicapées est un organisme gouvernemental
dont le conseil d'administration est composé effectivement de personnes
nommées, qui sont des personnes qui sont en situation de handicap. Donc,
on est un organisme gouvernemental. Donc, nous, on est habitués autant de
travailler avec les municipalités, avec les ministères et organismes
gouvernementaux que les organismes communautaires.
L'esprit de la loi, à
l'heure actuelle, c'est de dire : Les personnes handicapées ont les mêmes
droits que tout le monde, OK? Et actuellement, si on devrait faire... si on
avait à faire une réflexion pour les personnes handicapées, bien, il faut que
ce soit pour et avec eux. Donc, nous, la proposition, et c'est... c'est ce
qu'on dit dans notre mémoire, nous, on pense
qu'à l'heure actuelle on... on voit juste en disant qu'il y a un groupe de
personnes dans la communauté actuellement qui... comme dans l'exemple
que j'expliquais tantôt, de la paralysie, là, que, peu importe l'origine de la... de... bien, pas «peu importe», du fait de
l'origine de la paralysie, je n'aurais pas le même... les mêmes droits, les
mêmes accès. Donc, il faut essayer de corriger cette situation-là.
Et, s'il y a un débat
public à faire, OK, peu importe le... le médium qu'on va prendre, moi, je
pense, ça prend les... les personnes
handicapées, les représentants de personnes handicapées puis, j'insiste aussi
là-dessus, les intervenants du volet
social. C'est-à-dire que, quand on était dans une logique de maladie
uniquement, c'est normal qu'on retrouve tous les grands spécialistes qui
oeuvrent dans le champ de... dans... dans le secteur des maladies. Quand on est
dans les conditions, OK, qui se définissent par une interaction sociale, c'est
là que ça nous prend des travailleurs sociaux, des psychologues, ça nous prend
des ergothérapeutes, ça nous prend différents... Ça fait que moi, je dis :
Un débat qui est... qui est sain, les personnes elles-mêmes, leurs
représentants, ça, c'est... c'est les premières voix, les proches aidants, les... les membres de la famille, on est
au coeur, là, OK, des... des personnes qui vivent ça au quotidien, puis après
ça rajoutons les expertises que ça prend pour bien capter leurs préoccupations.
Mme Prass : Oui.
Dans le même sens, ça pourrait contribuer à échanger sur l'intention
législative... d'élargir la... l'aide médicale à mourir, parce que, justement,
on sait que... bien là on est à, je pense, la troisième mouture, donc c'est une conversation qui continue. Et,
comme vous avez dit, c'est fondamental que les personnes qui sont visées
vont être impliquées dans la définition et comment ça va se faire. Donc, encore
une fois, je pense qu'il est nécessaire que
ce ne soit pas dans... dans... justement, juste dans la... entre les mains des
fonctionnaires, si vous voulez, que ce soit justement de la part de ceux
qui le vivent et qui vivent dans cette réalité-là. Donc, je suis contente
d'entendre que vous êtes d'accord et que vous voyez les différents éléments,
les différents groupes, les différents représentants qui devraient en faire part pour vraiment s'assurer
que c'est une définition qui n'est pas... qui n'est... qui n'est pas négatif,
justement, pour les personnes qui vont être inclus.
• (12 h 40) •
Je sais que vous n'en
avez pas parlé dans votre mémoire, mais je voudrais vous poser une question à
propos de la notion du refus. Parce que, là, ce qu'on... de ce qu'on comprend,
c'est que, pour les demandes anticipées, évidemment,
la demande est faite au moment où la personne est encore apte de prendre cette
décision-là, mais que, dans le projet de loi, on... il y a un... un article
pour référer au fait que, si la personne refuse au moment de recevoir le
traitement, donc en état inapte, que le refus va être... donc le... la
demande anticipée va être rejetée, le refus va être... va être accordé. Et je vous... Et, moi, ma question, c'est
justement : Le but d'avoir la demande anticipée, c'est quand on est apte,
on prend une décision, donc pensez-vous qu'il est de justesse que, quand la
personne n'est plus apte, qu'elle puisse revenir sur cette décision en ne pas... en ne sachant pas nécessairement... ne
comprenant pas nécessairement le... l'impact de ce geste-là?
M.
Jean (Daniel) : La demande anticipée, on réfère à autre chose que
l'article 26 dans le projet de loi, OK? Ça vient... Ça vient capter une
problématique très spécifique. Et vous avez raison de poser la question, parce
que, dans le fond, cette personne-là, qui est atteinte d'une maladie
dégénérative qui... on le sait qu'à terme va altérer, là... elle ne sera pas
capable d'exprimer son... sa volonté. Donc, dans ce contexte-là, on le permet.
Et il faut... il faut être conscients, tu
sais, ça pourrait être une personne handicapée qui est atteinte de cette
maladie-là, OK? C'est ça, la réalité.
Donc, pour moi, le
débat est le même pour les personnes avec incapacité ou sans incapacité.
C'est-à-dire que, pour moi, si on exprime un choix puis qu'on le valide à la...
à la toute fin, tant qu'on est capables d'avoir un consentement de la personne, il faut toujours suivre ça. Nous, la
position de l'office, ça a toujours été... pas juste pour la demande
anticipée, mais pour toute... toute demande dans le processus, on a toujours
dit qu'il ne devrait pas y avoir une demande qui est faite par quelqu'un
d'autre, c'est toujours la personne qui devrait être en contrôle.
Donc, de ce que j'en
comprends de votre question, ma réponse, ce serait d'avoir la même approche
qu'avec une personne qui est avec incapacité ou sans incapacité.
Mme Prass : Et
justement je pense que, comme je dis, la question de... de ce forum pourrait
justement aider à... à définir toutes ces
réalités-là et tous ces termes en l'entendant de la... de la bouche, justement,
des gens qui ont fait de l'accompagnement ou qui... qui l'ont vécu d'une
façon, donc je pense que c'est important. Encore une fois, on a des termes qui
sont très spécifiques, qui vont avoir un grand impact, donc je pense qu'il...
il faut vraiment qu'on fasse attention à la
façon dont on va les définir, parce que c'est quelque chose qui va être compris
dans la loi et qui va avoir des répercussions par la suite.
Donc, moi, ma
dernière question pour vous, ce serait votre... une de vos recommandations
également est de mettre sur pied un groupe d'experts chargé d'étudier les besoins
de l'ensemble des personnes handicapées en... ce qui concerne l'aide médicale à mourir. Pensez-vous justement que, dans
le cadre de ce projet de loi, que ça a été... que... qu'on a vraiment pensé aux différents aspects,
justement, comment ça va affecter les personnes handicapées? Êtes-vous
un petit peu réticents, disons, envers la façon dont ça a été approché?
M. Jean
(Daniel) : Actuellement, les questions qu'on a posées à cet égard-là,
ça a été de... de dire : Bon, on... comme j'ai fait l'intervention tantôt
en disant : L'équipe qui va... qui va entourer le traitement de la demande
doit être conséquente si on élargit. Et ça,
ce n'est pas des éléments qui sont à prescrire dans la loi, mais dans les
directives. Et moi, j'ai eu toutes les assurances que, si on ouvrait
pour les personnes handicapées, qu'on allait toujours le faire dans un juste
équilibre entre les services que les personnes doivent recevoir puis le constat
qu'on n'est pas capables d'aller plus loin puis on est rendus dans ce soin-là,
OK? Donc, il n'y a aucune indication, à l'heure actuelle du côté de l'office,
que, dans le fond, les personnes handicapées seraient stigmatisées dans
l'approche, bien au contraire. Et le fait
qu'il y a des groupes de représentants de personnes handicapées qui sont
invités à la commission, nous, ça nous rassure parce que c'est... dans le fond,
on se dit : Pour et par les personnes, ce que je disais tantôt, peu
importe le véhicule de discussion, tant que les personnes handicapées
peuvent se faire entendre, nous, on est satisfaits.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, M. Jean. Merci pour vos
questions. Je vais me tourner maintenant du côté de la députée de Sherbrooke
pour 2 min 48 s.
Mme Labrie : Merci,
Mme la Présidente.
Je
vais essayer quelque chose avec vous. Je vais mettre une idée au jeu pour tâter
le terrain. Parce qu'on discute beaucoup de la notion de handicap puis, au
final, je me demande si on a besoin de la définir. Donc, je... je vous soumets
humblement l'idée. Si la formulation, plutôt que d'écrire comme critère «la
personne est atteinte d'une maladie grave et
incurable» ou «elle a un handicap neuromoteur grave et incurable», si on
parlait plutôt de «condition médicale» puis qu'on disait «elle est
atteinte d'une condition médicale grave et incurable», est-ce que ça viendrait
répondre aux préoccupations? Est-ce que ça viendra englober ce qu'on souhaite
englober ou la notion de condition médicale n'est pas la bonne pour parler de
ça?
M. Jean
(Daniel) : Bien, la... la question est vraiment intéressante. Mais,
quand on parle de «condition médicale», on parle nécessairement de médical, on
ne parle pas de social, OK? Ça, c'est clair. Mais la question que vous posez me suscite une réflexion que quelqu'un
m'a déjà partagée à l'office. C'était de dire : Si on enlève justement
de l'article la référence à une maladie ou à
un handicap, bien là on reste au coeur du problème, c'est-à-dire est-ce qu'il y
a une souffrance, est-ce qu'il y a un
consentement, est-ce que... peu importe l'origine, OK, puis toujours dans une
logique d'un soin continu puis d'un
service qui est offert, approprié à la personne. Et je n'ai pas... on n'a pas
testé cette idée-là, l'office, mais il y aurait quelque chose
d'intéressant à valider au niveau juridique, est-ce qu'on a besoin de préciser.
Mais, si on enlève ces deux termes-là, demeure toujours la question. Il faut
toujours avoir l'approche médicale, l'approche sociale, je ne dis pas un sans
l'autre, c'est les deux, les deux doivent travailler main dans la main pour...
au service de la personne et de l'entourage.
Mme Labrie : Alors,
est-ce que, si je vous comprends bien, vous parleriez... Sans nommer «médical»,
vous parleriez d'une «condition grave et
incurable», évidemment. Puis on garde le critère de souffrance, là, assurément,
il n'est pas question de... de changer ça ici. Ça, c'est quelque chose
qui permettrait de peut-être répondre?
M. Jean (Daniel) : ...je vous dis
ça, je n'ai pas validé, il y a quelque chose d'intéressant là-dedans. J'aurais...
J'aurais une petite réserve parce que j'ai toujours horreur de donner un
conseil qui ne s'avère pas utile après ça. J'aurais
tendance à dire : Il faudrait le valider, là, auprès des... de
spécialistes. Mais, dans le fond, l'idée de base qu'on a soulevée au début, c'est qu'on disait : Si une personne a
une paralysie, si c'est issu d'une maladie, elle est couverte, si ce n'est pas
issu d'une maladie, elle n'est pas couverte. Puis pourtant c'est la même
souffrance, puis qu'on a tout fait. Donc, c'est ça, l'enjeu fondamental
pour moi.
Mme Labrie : Je vous remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Vraiment intéressant. Merci beaucoup, M. Jean. Alors,
on va terminer ce... la... nos périodes d'échange avec la députée indépendante.
Voilà. Le temps est à vous pour 2 min 48 s.
Mme Tardif : Bonjour. Merci beaucoup
à vous trois.
Vous avez compris que nous souhaitons, en tant
que législateurs, éviter à tout prix toute stigmatisation et qu'on veut... on veut s'appuyer sur des critères
stricts, sur des critères précis, comme l'aptitude à consentir, les critères
de maladie grave, la souffrance, l'incurable. Bon, je voulais voir avec vous
trois comment vous voyez le rôle du tiers de
confiance lors de la prise de décision. Comment faire pour que cette
personne-là... pour cette personne-là, la pression ne soit pas trop
forte pour elle, dépendamment des handicaps?
M. Jean (Daniel) : Mme la
présidente.
Mme Champigny (Frances) : On sait
bien! On en a parlé suffisamment en CA hier, comment prévoir que... Il va falloir qu'on mette des mécanismes en marche
pour prévoir, pour prévenir ça. C'est de l'inquiétude qu'on retenait, ça, nous autres : Qu'est-ce qui empêcherait
la famille à dire : Ah! va-t'en, tu sais? La... Il va falloir mettre des mécanismes...
Vous savez, on dit... on a des limites de vitesse sur l'autoroute, c'est parce
qu'il y a du monde qui ne les respecte pas. Ça fait que je pense qu'il va
falloir mettre des mécanismes en marche.
M. Jean (Daniel) : Il faut que ce
soit le plus clair possible entre... Dans le fond, c'est toujours pour
l'intérêt de la personne. Ça fait que, si on implique le proche, ce n'est
toujours pas pour l'intérêt uniquement du proche, mais l'intérêt premier. Et
beaucoup de parents, de proches ont cette préoccupation-là, donc il faut aller
les capter. Mais effectivement, comme dit Mme la présidente, si on ne met pas
des règles claires, bien, on risque d'avoir des petits dérapages ici et là.
Mme Tardif : Merci, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Alors, il me reste à vous remercier,
au nom de l'ensemble des parlementaires ici, d'avoir justement fait des bonnes
propositions, d'avoir débattu aussi... non pas débattu, mais d'échanger avec
nous. Je vous souhaite une excellente fin de journée.
Et, pour nous les parlementaires, nous allons
suspendre jusqu'à 15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 50)
(Reprise à 15 h 10)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des
relations avec les citoyens va reprendre ses travaux.
Cet
après-midi, nous allons recevoir le Barreau
du Québec — bienvenue — la
Chambre des notaires du Québec, le Regroupement provincial des comités
des usagers ainsi que le Conseil pour la protection des malades.
Alors, pour
l'heure, nous allons donc recevoir le Barreau du Québec, qui est représenté par
Me Catherine Claveau, bâtonnière, Me
Hélène Guay, membre du groupe de travail sur l'aide médicale à mourir, ainsi
que Me Sylvie Champagne, secrétaire
et directrice des affaires juridiques. Bienvenue à la commission. Je pense que
vous êtes... vous êtes un peu... vous connaissez un peu le processus.
Vous allez avoir 10 minutes pour vous présenter ainsi qu'exposer votre
vision sur le projet de loi. Alors, la parole est à vous.
Barreau du Québec
Mme Claveau (Catherine) : Merci, Mme
la Présidente. Mmes les députées, alors, effectivement, je suis Catherine
Claveau, bâtonnière du Québec. Je suis accompagnée de Me Sylvie Champagne, qui
est à ma gauche, ici, directrice de
l'ordre... des affaires juridiques de l'ordre, ainsi que de Me Hélène Guay, qui
est membre de notre groupe de travail sur l'aide médicale à mourir.
Au nom du Barreau du Québec, je vous remercie de
nous avoir invitées à participer aux consultations particulières entourant ce
projet de loi si important. Le Barreau a participé à l'évolution juridique du
dossier de l'aide médicale à mourir avec
grand intérêt depuis le tout début, soit à partir de la consultation dans le
cadre de la commission spéciale de
l'Assemblée nationale sur la question mourir dans la dignité, qui s'est tenue,
on se rappellera, en mai 2010. D'emblée,
rappelons que le Barreau du Québec ne promeut pas l'administration de l'aide
médicale à mourir. Il défend plutôt le droit de tous les citoyens aptes à
donner un consentement libre et éclairé de décider des soins qu'ils préconisent
lorsqu'ils sont affectés de problèmes de santé graves et irrémédiables leur
causant des souffrances persistantes, qui leur sont intolérables au regard de
leur condition.
Il faut admettre que
la pensée de la population québécoise a évolué au fil du temps, et le droit de
l'aide médicale à mourir, sujet sensible et
délicat s'il en est un, mérite une attention particulière de la part des
parlementaires. À cet égard, l'élargissement de l'aide médicale à mourir
soulève des questions sérieuses, tant du point de vue juridique qu'éthique.
C'est pourquoi nous sommes guidés, dans notre réflexion, par les principes
fondamentaux suivants : le droit à l'autodétermination de la personne et
de sa dignité, le droit à l'accès aux soins de fin de vie et à l'aide médicale
à mourir partout sur le territoire du Québec, le droit à l'égalité, droit
incontournable lorsque vient le temps de réaliser pleinement le droit à la vie
et le droit à l'autonomie de chaque personne apte à consentir à l'aide médicale
à mourir, ainsi que la protection contre la discrimination, plus
particulièrement en évitant de perpétuer les stéréotypes visant les groupes de
personnes considérées vulnérables en concluant, d'entrée de jeu, à leur
incapacité à pleinement consentir à l'aide médicale à mourir.
C'est dans ce
contexte que nous souhaitons vous faire part de certains commentaires
concernant divers aspects du projet de loi n° 11. Premièrement, nous
réitérons la nécessité de suivre les enseignements de la Cour suprême du Canada
dans l'arrêt Carter. Rappelons qu'en 2015 la Cour suprême a reconnu que l'aide
médicale à mourir devrait être accessible selon les conditions suivantes :
un, la personne touchée consent clairement à mettre fin à ses jours et, deux,
la personne est affectée de problèmes de santé graves et irrémédiables, y
compris une infection, une maladie ou un
handicap lui causant des souffrances persistantes qui lui sont intolérables au
regard de sa condition.
Afin d'établir un
régime clair, égalitaire et bienveillant en matière d'accessibilité à l'aide
médicale à mourir, en 2019, la Cour supérieure abonde dans le même sens dans la décision Truchon. Malheureusement, le
projet de loi n° 11 ne se
conforme pas aux enseignements de cet arrêt parce que, notamment, il reconnaît
uniquement le handicap neuromoteur, il maintient l'exigence d'un déclin
avancé et irréversible des capacités de la personne et il exclut le trouble
mental.
Nous estimons que la
qualification de «neuromoteur» ajoute une condition supplémentaire, alors que
cela n'est pas prévu au Code criminel. En effet, l'article 241.2 du Code
criminel prévoit les critères de l'admissibilité à l'aide médicale à mourir, et
seul un handicap grave et incurable est suffisant pour remplir la condition
d'être affecté d'un problème de santé grave
et irrémédiable. Néanmoins, nous reconnaissons qu'il existe un besoin criant
d'accommodement et d'adaptation concernant la manière dont seront évalués les
critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir pour les personnes vivant
avec une déficience intellectuelle, de même que de la formation adaptée à ces
situations destinée aux professionnels traitant ces demandes.
Enfin,
il faut tenir compte du fait que, le 10 mars dernier, le projet de loi
C-39, le projet de loi fédéral qui contient des dispositions sur l'aide
médicale à mourir, a reçu la sanction royale et est entré en vigueur
immédiatement. Rappelons que ce projet de loi prévoit que les personnes dont le
seul problème médical est une maladie mentale seront admissibles à l'aide médicale
à mourir à partir du 17 mars 2024. En conséquence, le Barreau est
favorable au report de l'inclusion du trouble mental comme condition d'accès à
l'aide médicale à mourir dans la Loi concernant les soins de fin de vie.
Le deuxième aspect
qui ne peut demeurer sous silence est l'absence d'harmonisation du Code
criminel et de la Loi concernant les soins de fin de vie. Nous reconnaissons
que le Québec a été la première province à légiférer sur cette question. Toutefois, depuis 2015, il y a eu
une valse de projets de loi qui font en sorte qu'il est difficile, voire périlleux pour
les juristes, patients et médecins de s'y retrouver. Ainsi, nous sommes d'avis
qu'il est primordial, pour la protection du public et les professionnels
autorisés qui auront à administrer l'aide médicale à mourir, que les conditions
soient claires, précises et, surtout, qu'elles ne soient pas contradictoires.
Cet aspect est
interrelié avec notre prochain commentaire, qui touche les nouvelles
dispositions particulières concernant les
demandes anticipées d'aide médicale à mourir. Pour l'instant, le Code criminel
ne prévoit que deux exceptions pour
lesquelles l'aide médicale à mourir peut être prodiguée sans le consentement
contemporain de la personne. Il y a d'abord la renonciation au
consentement final, qui est permise pour la personne dont la mort est
raisonnablement prévisible, puis lors de
l'autoadministration de l'aide médicale à mourir, lorsque la personne a
commencé l'autoadministration et perd conscience.
Afin de rencontrer
les objectifs de rendre rapidement accessibles aux citoyens les demandes
anticipées d'aide médicale à mourir, nous
préconisons la mise sur pied, par le gouvernement fédéral, d'un projet pilote
au Québec. Ce projet pilote permettrait aux citoyens du Québec de
bénéficier de la possibilité de formuler une demande anticipée d'aide médicale
à mourir dès l'adoption du projet de loi. Par ailleurs, nous croyons qu'il
serait bénéfique pour tous que les demandeurs puissent obtenir des conseils
juridiques de la part d'un juriste afin que ce dernier leur explique les
tenants et aboutissants d'une demande anticipée d'aide médicale à mourir. À
l'instar de ce qui se fait déjà en matière de
médiation familiale, pour laquelle le gouvernement offre des heures payées avec
un médiateur accrédité, le Barreau est
d'avis qu'une consultation avec un juriste, qu'il soit avocat ou notaire, d'une
durée d'une heure et demie devrait être offerte par le gouvernement.
Aussi,
le Barreau du Québec s'interroge sur la notion de souffrance objectivable par
un professionnel compétent lorsque ce dernier évalue si l'administration de
l'aide médicale à mourir doit être pratiquée. En effet, la souffrance
est une notion subjective qui relève essentiellement de la perception de la
personne elle-même et non d'un standard objectif. Les souffrances éprouvées par
les personnes sont l'un des critères les plus personnalisés et les plus
respectueux de l'autonomie des volontés de la personne dans la loi québécoise,
la loi fédérale et les décisions jurisprudentielles sur lesquelles l'aide
médicale à mourir se base.
Nous saluons enfin
l'ouverture à la possibilité, pour les infirmières praticiennes spécialisées,
d'administrer l'aide médicale à mourir. Et
nous accueillons également favorablement la modification visant à interdire aux
maisons de soins palliatifs d'exclure l'aide médicale à mourir. Ces deux
nouveautés contribueront à améliorer l'accès à ce soin partout au Québec.
Je termine ma
présentation en vous rappelant que le Barreau a exprimé d'autres commentaires,
qui se trouvent dans notre mémoire, dont vous avez déjà pu prendre
connaissance. Nous vous remercions encore une fois pour cette invitation et
nous sommes maintenant prêtes à recevoir vos questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup, Me Claveau, pour la précision, la clarté de vos
commentaires et de vos recommandations. On ouvre donc la période d'échange avec
les parlementaires qui sont membres de la
commission. On va commencer avec Mme la ministre. La parole est à vous, pour
une période de 16 min 30 s.
• (15 h 20) •
Mme
Bélanger : C'est bon. Alors, merci beaucoup, Mme la
Présidente. Mme la bâtonnière du Québec, Me Catherine Claveau, et vos
collègues, bienvenue. Merci d'avoir déposé ce mémoire, merci pour la
présentation, beaucoup d'énoncés très
importants. Et je comprends bien que, dans les recommandations que vous faites,
c'est vraiment d'aller vers l'harmonisation avec le Code criminel
canadien, notamment sur la notion de handicap, et j'aimerais vous entendre à ce
sujet-là.
La notion de handicap, au niveau canadien, nous
apparaissait très large, pas bien définie, et, dans les travaux qui ont été faits ici, au Québec, puis à la
lumière de ce qu'on entend de différents groupes, il y avait un besoin de bien
baliser, par devoir de prudence, la notion de handicap. Donc, est apparue, dans
le projet de loi, la notion de handicap neuromoteur. J'aimerais vous
entendre là-dessus, parce que je pense que c'est vraiment important, c'est un
élément assez costaud du projet de loi, donc c'est bien important, là, de bien
comprendre pourquoi. Parce que je comprends qu'il
y a le volet de l'harmonisation, mais, au-delà de l'harmonisation... Parce que,
quand même, je pense qu'au Québec on a été quand même précurseurs, on a
été les premiers à adopter une loi sur les soins de fin de vie, avant même que,
donc, ceci soit prévu dans le Code criminel
canadien. Alors donc, je voudrais vous entendre sur la notion de handicap versus
handicap neuromoteur.
Mme Champagne (Sylvie) : Alors, au
niveau de la notion de handicap, c'est vrai qu'on indique dans notre mémoire
qu'on veut une harmonisation avec le Code criminel, mais ce qu'on doit retenir
c'est que le gouvernement fédéral a donné suite à l'arrêt Carter de la Cour
suprême, qui énonçait les critères pour être admissible à une... de l'aide
médicale à mourir, et, dans son arrêt, la Cour suprême ne fait pas cette
distinction. Quand elle parle de maladie grave, elle dit bien que ça peut être
une maladie, une affliction ou un handicap, sans le définir. Et nous, au
Barreau, on est d'avis qu'il faut se coller
aux enseignements de la Cour suprême pour éviter, dans le fond, de faire une
discrimination au niveau des citoyens qui pourraient être admissibles à
cette aide médicale à mourir.
Et, quand on vient préciser... au niveau du
handicap, si on dit «neuromoteur», c'est parce qu'on veut, donc, écarter
d'autres handicaps. Et, nous, ce qu'on pense qui doit guider, dans le fond,
l'admissibilité, c'est est-ce que la personne,
elle est apte ou non à consentir aux soins, qu'elle ait une maladie, un
handicap ou une affliction. C'est, dans le fond, son droit à
l'autodétermination, son droit de consentir aux soins qu'elle souhaite, puisque
l'aide médicale à mourir est un soin. Alors,
on vous encourage à ne pas faire cette distinction-là au niveau du handicap. Je
ne sais pas si, Me Guay, vous voulez ajouter quelque chose.
Mme Guay (Hélène) : Bien, oui,
j'irais aussi... j'attirerais l'attention des membres de cette commission sur
le fait que non seulement Carter, mais aussi la juge Baudouin, dans sa décision
en septembre 2019, a bien souligné, dans des termes très éloquents, la
raison pour laquelle il ne faut pas faire cette distinction-là, à savoir
catégoriser en fonction d'une déficience ou d'un handicap. Il ne faudrait pas
priver les personnes qui souffrent d'un handicap, soit à la naissance ou soit
par accident, d'avoir accès à l'aide médicale à mourir, qui est un soin qu'on
reconnaît, comme vous l'avez dit, au Québec
depuis tant d'années. Dans le mémoire, on le mentionne, notamment, sauf erreur,
à la page 10, et on vous cite un extrait du jugement Truchon. Je
vais vous en glisser un mot :
«La condition physique ou mentale des personnes
handicapées ne constitue pas un élément parmi d'autres qui pourra éventuellement les rendre admissibles à l'aide médicale à
mourir. Leur aptitude à consentir, les souffrances ressenties
objectivées, le déclin avancé de leurs capacités constituent tous des éléments
pertinents dans l'évaluation globale de la demande. Même s'il faut rester
vigilant, il est loin d'être évident qu'une personne pourra ou voudra recevoir
l'aide médicale à mourir uniquement en raison de son handicap.»
On peut comprendre la prudence ou la
préoccupation que le législateur a, mais, plus loin, même, dans le jugement,
l'honorable Baudouin le mentionne, la prudence et la préoccupation que la
juge... dont la juge Baudouin était saisie à
ce moment-là, c'était de retrancher de la loi la fin de vie, la notion de fin
de vie ou la mort raisonnablement prévisible. L'exercice qui a été fait
a été un exercice fort éloquent dans le sens où elle a retourné toutes les
pierres pour voir pourquoi on est en mesure
d'adhérer à la demande des demandeurs de retirer ce critère-là. Et elle a pris
soin, justement, d'aborder la question des personnes handicapées en
disant : Finalement, il faut effectivement permettre à toutes et à tous
d'avoir accès, même s'il y a... même s'il y a présence d'un handicap.
Donc, je pense qu'au... il nous semble qu'au
Québec nous avons ce qu'il faut pour nous conforter avec le fait que, si tant
est qu'il y ait une préoccupation — elle était très grande,
devant la juge Beaudoin, par tous les experts et par tous les avocats des procureurs généraux — si
tant est qu'on a une préoccupation, bien, il faut se rassurer sur le fait
qu'il y a dans la loi des balises, des critères qui doivent être rencontrés,
qui viennent, justement, conforter le fait que ce n'est
pas parce qu'une personne a un handicap qu'il faut la considérer comme étant
inapte à consentir à l'aide médicale à mourir. Et ça, ça m'apparaît... ça nous
apparaît très important de reconnaître cette aptitude-là au départ, parce qu'aller dans le sens inverse c'est
d'exercer, d'une certaine façon, un paternalisme médical envers ces
personnes-là, de les considérer comme
étant inaptes à former cette... ce consentement-là. Et c'est pour ça qu'au
Barreau on considère qu'ajouter le terme «handicap» est une chose, mais
il ne faudrait pas restreindre à un handicap neuromoteur.
Mme
Bélanger : Intéressant. Puis, puisqu'on parle des critères, donc, vous
avez mentionné la volonté de la personne, d'abord, hein, qui devrait primer,
l'aptitude à consentir, bien sûr. Le caractère de fin de vie a été retiré du
projet de loi qui a été déposé. Il y a d'autres critères, et j'aimerais vous
entendre sur ceux-là. Je ne suis pas certaine, tantôt, d'avoir bien compris, là, dans votre mémoire, c'était bien
écrit, mais je ne suis pas certaine, là, que j'ai bien entendu... sur le
caractère grave, et incurable, et irréversible. Vous n'avez pas parlé de ça
tantôt, caractère grave, incurable et irréversible. Et quelle est votre
position?
En fait, bien, je
vais répéter ma question. J'aimerais vous entendre sur les deux autres critères
qui sont dans la loi, le caractère grave,
incurable et irréversible, ainsi que l'autre élément, qui est très important,
qui est la souffrance physique, psychologique, persistante, non
apaisante, là, ces deux éléments-là.
Mme Champagne
(Sylvie) : Alors, on est d'accord à conserver ces deux éléments-là
parce qu'ils font effectivement l'objet des
balises que la Cour suprême a énoncées dans Carter. Par contre, le critère qui
est supplémentaire, qui n'apparaît pas dans les conditions énoncées par
la Cour suprême, c'est celui du déclin avancé et irréversible de ses capacités. Alors, ça, c'est un critère
supplémentaire qu'a ajouté le gouvernement fédéral. Et ce n'était pas dans
Carter. Alors, selon nous, quelqu'un pourrait contester cette
exigence-là, et il y a un risque, là, de contestation, étant donné que la Cour
suprême ne l'avait pas mise dans ses conditions. Donc, on veut éviter, là, des
litiges à venir et on pense qu'on pourrait retirer ce critère-là.
Mme
Bélanger : Le critère de l'irréversibilité?
Mme Champagne
(Sylvie) : Le critère du déclin avancé et irréversible de ses
capacités. Donc, ce n'est pas la maladie qui est incurable et irréversible,
c'est plus au niveau du déclin avancé de ses capacités. Dans le fond, c'est le
critère 4° de l'arrêt... de l'article 26, parce que celui qui est
incurable, c'est le critère 3°.
Mme
Bélanger : OK. On va prendre ça en note. On va revenir tantôt, je suis
certaine que d'autres personnes vont vouloir préciser.
Sur
les autres volets, bien, le trouble mental, donc, je comprends... là, je ne
sais pas si je dois dire «en faveur», mais, pour l'instant, en faveur du fait
qu'on le repousse ou qu'on... qu'il ne soit pas inclus dans le projet de loi
actuel?
Une voix : Oui.
Mme
Bélanger : Puis pourquoi? Parce... J'aimerais ça savoir pourquoi,
parce que, puisque ça aussi, c'est prévu dans le Code criminel. Ils ont
repoussé l'application, mais pourquoi celui-là, vous êtes en faveur qu'on le...
qu'il ne soit pas inclus dans notre projet de loi?
Mme Claveau
(Catherine) : Disons qu'on en suspende l'application. C'est un ajout
très important, puis je pense effectivement que ça nécessite une réflexion
profonde, provenant de différents acteurs, qui, pour nous, peut justifier un
délai additionnel, notamment. Je ne sais pas si on peut compléter avec ça.
Mme
Bélanger : ...c'est intéressant. Pourquoi vous pensez que, pour le
trouble mental, il faut poursuivre la discussion? Est-ce que c'est en lien avec
la vulnérabilité des personnes, en lien avec, je ne sais pas, le volet de
l'aptitude à consentir?
• (15 h 30) •
Mme Champagne
(Sylvie) : Non, je pense que... je pense que c'est plutôt au niveau de
la formation des professionnels sur le terrain, et des directives, et des
protocoles. Vous avez entendu le Collège des médecins, hier, vous dire qu'ils
ont fait un rapport et que ça va prendre des balises peut-être un peu différentes
pour les personnes qui ont des problèmes de santé mentale. Alors, nous, ce
qu'on voudrait, c'est que ce soit inclusif et que, donc, ces personnes, qui ont
un trouble de santé mentale, puissent éventuellement bénéficier de l'aide
médicale à mourir s'ils respectent les autres conditions. Mais on comprend que,
peut-être, sur le terrain, les professionnels ne sont pas prêts, et donc le
report d'un an nous paraît adéquat.
Mme
Bélanger : Ça va. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup. Merci, Mme la ministre. Je pense que la députée de Vimont avait levé sa main.
Allez-y.
Mme
Schmaltz : Oui, parfait. Merci. Bonjour, mesdames...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il reste... je vous informe qu'il reste
4 min 50 s.
Mme Schmaltz :
OK. Alors, on a le temps?
Une voix : On a le temps.
Mme Schmaltz : J'ai une
question qui concerne la formulation de la demande anticipée. Vous mentionnez
au... Vous mentionnez que les intervenants sont trop nombreux. On note... Vous
dites que la procédure prévue quant aux
demandes anticipées est associée à un formalisme lourd qui risque de réduire
l'accès et l'utilisation de ces demandes à l'AMM à de nombreuses
personnes. Est-ce qu'il y a des données qui prouvent que les gens puissent, si
je comprends bien, que les gens, en cours de
route, parce que la formulation est trop lourde, qu'ils puissent décider de ne
pas aller de l'avant? Est-ce que c'est ça que je lis, que je comprends?
Mme Guay (Hélène) : Bien, en
fait, la réflexion qu'on a eue sur cette suggestion, c'est la suivante. Il faut
que... Pour que les gens formulent la
demande, il faut d'abord que ce soit clair, simple, facile. Et aussi on a... On
considère, nous, que la suggestion
d'inclure plusieurs intervenants au stade de la demande et même par la suite,
ça ne va pas nécessairement aider à la formulation et à la mise en
oeuvre.
Je vais vous donner des exemples. Dans la
pratique, ce qu'on a, on a certains outils. Depuis 1990, on a le mandat de
protection. Depuis 2015, on a les directives médicales anticipées. Ce qui est
intéressant avec le projet de loi, c'est
qu'on permet qu'il y ait, pour la personne qui formule la demande, la
possibilité, si elle le souhaite, d'inclure une personne, d'inclure, de
faire participer un proche, mais, pour la suite, on s'inquiète du fait qu'il y
ait plusieurs intervenants à plusieurs niveaux. Eut égard, justement, à
l'application et la mise en oeuvre du mandat de protection, c'est le mandat en
prévision d'inaptitude. Donc on prévoit qu'on va être inapte, on s'aperçoit
qu'il y a plusieurs possibilités de
personnes qui participent à la décision qui a été prise par la personne, à
savoir, quand on la met en oeuvre, on
va avoir un proche, un proche aidant, un conjoint, une cousine, etc. Et là il
faut... Il faut... Probablement, la meilleure des choses, c'est de s'en
tenir à avoir une personne qui ne... Le moins de personnes possible pour éviter
d'engendrer des conflits potentiels entre ces personnes-là pour la suite de...
pour la suite des choses.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste encore du temps.
Mme Schmaltz : Bien, c'est ça,
vous pensez qu'une personne, c'est suffisant?
Mme Guay (Hélène) : Le tiers de
confiance a été identifié dans le projet de loi. On laisse aussi la possibilité
à la personne d'en référer, si elle le désire, à ce qu'il y ait la présence
d'un proche. Ça va. Je ne vois pas l'intérêt d'avoir plus qu'un tiers de
confiance.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. La députée d'Abitibi-Ouest voulait poser une
question. Il reste 1 min 40 s
Mme Blais : Merci, Mme la
Présidente. Mesdames, bonjour. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors, moi,
je me réfère à votre mémoire, page 8, recommandation 13,
article 1.2 : Les maisons de soins palliatifs ne peuvent exclure
l'aide médicale à mourir. Alors, «Les maisons des soins palliatifs déterminent
les soins de fin de vie qu'elles offrent
dans leurs locaux. Toutefois, elles ne peuvent exclure l'aide médicale à mourir
des soins qu'elles offrent. Toute maison
de soins palliatifs doit, avant de recevoir une personne, lui indiquer les
soins de fin de vie qu'elle offre.» Alors, j'aimerais vous entendre,
j'aimerais que vous élaboriez sur ça parce que c'est mêlant un petit peu.
Mme Guay (Hélène) : Bien, ce
qu'on se rappelle, c'est qu'à l'adoption de la loi il y a eu des maisons de
soins palliatifs qui ont eu l'opportunité de ne pas offrir l'aide médicale à
mourir, alors que c'est un soin reconnu par le
législateur. Et on a adhéré à cette position-là. On a eu plusieurs discussions
aussi, on était conscientes de ça, mais là ce qu'on voit dans l'article,
c'est qu'on constate qu'il y a eu un changement depuis le projet de loi
n° 38, et on voit qu'on suggère qu'à ce moment-là toutes les maisons de
soins palliatifs vont devoir offrir l'aide médicale à mourir comme soins. Alors,
il y a eu... Certaines de ces maisons de soins palliatifs ont eu l'opportunité
de ne pas les offrir. Alors, l'objectif ici, c'est de vous demander de
clarifier la situation pour ces établissements-là qui vont désormais être
tenus, sinon autorisés à les exclure. Alors, on comprend qu'elles ne devraient
plus être exclues, mais il faudrait clarifier si ça s'applique à toutes les
maisons de soins palliatifs, même celles qui avaient eu cette autorisation-là.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Merci
beaucoup. C'est tout le temps que nous avions pour cette portion des
échanges. On va poursuivre avec la députée de Westmount—Saint-Louis pour une période
de 9 min 54 s.
Mme Maccarone : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Bonjour, Mme la bâtonnière. Bonjour, maître. Bonjour,
maître. Un plaisir de vous avoir avec nous. Puis merci beaucoup pour votre
mémoire et votre témoignage. Je pense que ça
va vraiment nous aider en ce qui concerne la bonification de ce projet de loi.
Puis merci beaucoup parce que vous parlez de la distinction entre
maladie et handicap, ce qui est fort important, parce que ce n'est pas tous les
handicaps qui découlent d'une maladie et ce
n'est pas toutes les souffrances qui ont besoin d'être liées à la maladie aussi.
Alors, je pense que c'est très important qu'on s'en... qu'on tienne compte de
ça dans nos délibérations.
Vous
avez aussi fait la mention de... C'est l'autodétermination que je trouve aussi
fort intéressante et importante. Si on enlève la notion de neuromoteur,
on peut inclure, par exemple, les personnes qui souffrent d'une déficience
intellectuelle, des personnes qui souffrent de l'autisme, par exemple, s'ils
sont aptes à consentir à un soin et s'ils souffrent d'une maladie, par exemple,
comme le cancer. Mais je vous mets au défi, là, parce que ce qu'on a entendu beaucoup en commission spéciale, parce qu'on a
parlé un peu de la notion d'autodétermination et comment nous pouvons aussi protéger ces personnes qui se retrouvent
souvent en situation de vulnérabilité ou qui sont elles-mêmes vulnérables,
on a entendu aussi hier que nous devons exclure déficience intellectuelle. Puis
on peut imaginer que, quand on dit une
exclusion de déficience intellectuelle, on parle d'une déficience
intellectuelle grave, en conséquence quelqu'un qui n'est pas apte. Devons-nous prévoir quelque chose
dans la loi pour protéger aussi ces personnes qui sont vulnérables?
Vous savez, je suis mère de deux enfants,
probablement... et qui sont autistes, qui sont aptes, pas aptes. Ce serait
difficile pour moi-même de... Écoute, j'espère. Évidemment, je ne souhaite pas
que ça arrive à quelqu'un proche de moi puis surtout pas à mes enfants, mais,
si, mettons, ils tombent malades puis ils se retrouvent dans une situation où
ils souffrent et ils ont de la misère à exprimer leurs souffrances, mais c'est
rendu à cause d'un accident d'auto, je ne
sais pas si je serais en mesure de déterminer s'ils sont eux-mêmes capables de
consentir à un soin, malgré que je considère mes enfants aptes. C'est
qui qui devrait faire la détermination dans un cas de même?
• (15 h 40) •
Mme Guay (Hélène) : Bien, c'est
un privilège d'être... de recevoir ce que vous nous dites. Ceci dit, moi, je
peux vous dire qu'une partie de ma clientèle, c'est ça, des gens qui... C'est
dans ma pratique de représenter soit les proches,
soit les parents, soit les personnes elles-mêmes. Ce que je peux vous dire,
c'est qu'il y a déjà dans notre loi, dans notre Code civil et dans nos lois, il y a des mécanismes de protection
et de représentation des personnes qui sont inaptes à prendre des
décisions pour elles, on parle en matière de capacités, et qui doivent être
représentées. Et on a aussi un régime de
représentation en matière de soins. Et c'est là où intervient le parent ou la
personne qui peut consentir pour...
Donc, il y a déjà, dans nos lois, les mesures,
les règles nécessaires pour s'assurer qu'une décision de soins va être prise
dans l'intérêt de la personne. Et, si cette personne-là devait être évaluée au
niveau de son inaptitude, bien, à ce moment-là, il y a tout un mécanisme, puis
vous le connaissez probablement, qui... auquel est tenu le médecin. Donc, ces
évaluations-là de l'inaptitude, de toute façon, elles ne sont pas esquivées du
fait qu'on voudrait... Ce qu'on propose, c'est d'élargir la loi, l'accès à
l'aide médicale à mourir. Ils vont rester là, et les critères vont rester là,
et les critères très stricts de l'accès à l'aide médicale à mourir vont rester
là. Et il y a tout le processus, comme je le disais, d'évaluation de
l'inaptitude.
Donc, on
veut... On veut peut-être être très prudents, mais, en même temps, il faut se
rendre aussi à l'évidence qu'il y a, dans nos lois, des protections qui
existent et il y a une égalité aussi, un droit à l'égalité et à la protection
de ce droit-là aussi. Alors, je pense que je ne voudrais pas répéter, mais
j'espère avoir un peu répondu à votre question.
Mme Maccarone : Oui. Et je
présume que c'est la même chose en ce qui concerne une demande anticipée.
Mme Guay (Hélène) : Bien, sur
les demandes anticipées, on a aussi beaucoup réfléchi à la question, puis ce
sur quoi on voudrait surtout insister, je pense, c'est que c'est sûr que c'est
une situation particulière où la personne décide
de vouloir, de manière anticipée, évaluer sa situation et prendre une décision
pour le futur potentiel ou prévisible, mais il va falloir s'assurer
qu'elle ait toutes les informations nécessaires, tant médicales que juridiques.
Parce qu'on s'aperçoit qu'ici on est aux confins de ce qui décide de ce qui est
le plus important pour la personne, sa capacité et son intégrité. Et ces deux
concepts-là sont très bien traités par notre législateur dans nos chartes, dans
nos lois. Alors, il faut se rendre à l'évidence que c'est une situation qui va
mériter conseils et réflexion.
Dr Naud, hier, parlait de cinq heures de
rencontre avec une personne pour une demande contemporaine, alors que la personne est apte. Bien, on va être dans la
même situation, une personne apte, mais pour une demande anticipée, pour le futur. Alors, il va falloir mettre
beaucoup de temps. Alors, c'est certain qu'il faut s'assurer de prendre le temps
de bien informer la personne pour que son
consentement soit éclairé. Et c'est un consentement pour le futur. Aujourd'hui,
on n'a rien de ça, là. Tout ce qu'on
a... On anticipe des décisions pour le futur, mais, pour les soins, on s'assure
toujours que la personne est apte au moment où elle accepte ou refuse
les soins.
Mme Maccarone : À date, nous
n'avons pas vu le formulaire en question. Je relance encore la demande de
vouloir évidemment en faire le débat, en faire une discussion pour s'assurer
que ce que vous dites sera aussi pris en considération
avant qu'on termine de faire l'étude de ce projet de loi. Dans un cadre
juridique, si la demande anticipée, on présume,
formulaire x, y, z, là, n'est pas une réflexion de la souffrance identifiée par
la personne considérée au moment que le tiers de confiance lève la main
pour dire : Je crois que c'est le moment, pouvez-vous faire une évaluation
de ma mère, mon père, mon conjoint, si ce n'est pas une réflexion exacte de la
souffrance qui est identifiée, mais on décide que c'est probablement le moment,
est-ce qu'on fait fausse route? Est-ce que, légalement, on va se retrouver
peut-être devant le tribunal?
Vous avez fait mention de... Il faut faire
attention le nombre de personnes qui seront là aussi au moment que nous allons
remplir la demande anticipée. Vous faites mention qu'on devrait avoir seulement
un tiers de confiance qui est nommé. Quel sera l'impact législatif si ce n'est
pas une exacte réflexion de ce que nous avons identifié? Et, dans votre
réponse, si vous pouvez aussi répondre, parce que je ne sais pas combien de
minutes qu'il me reste, mais c'est parce que ça va faire partie un peu de la
même question, un refus. Au Code civil, on dit «refus catégorique». Dans le projet de loi n° 11, on dit «refus».
Ce n'est pas clair. Alors, est-ce qu'il y a quelque chose aussi dont nous allons
faire face, peut-être, à... fausse route côté juridique puis on va se retrouver
devant le tribunal?
Mme Claveau
(Catherine) : Disons, pour la première question, c'est sûr qu'on
partage vos préoccupations, puis l'importance du questionnaire, que ce soit le
plus, tu sais, le plus objectivable possible, en tout cas, qu'il y ait
plusieurs critères. Puis les travaux vont se continuer. Puis on offre aussi
notre collaboration si jamais vous avez besoin d'un éclairage juridique sur les
questions à mettre dans le formulaire, ça va nous faire plaisir, là, de
continuer, là, à vous accompagner dans la réflexion.
Maintenant, quant à
la deuxième question, pour le refus...
Mme Champagne
(Sylvie) : Le refus catégorique. Hélène?
Mme Guay
(Hélène) : Oui. Bien, juste une chose, sur le rôle du tiers aussi,
nous, on pense qu'au moment où... Au moment où la démarche sera entamée, on
voudrait... on insiste sur le fait qu'il n'y a pas lieu d'avoir un tiers qui
pourrait, étant manquant au premier appel, qui soit substitué par un deuxième.
Sauf en cas d'empêchement du premier, on ne voit aucun intérêt à ce qu'il y ait
deux tiers qui puissent être appelés parce que, là, c'est une source de conflit
très claire.
Sur
la notion du refus, je pense qu'on a... Vous avez peut-être entendu certaines
références, certaines mentions hier, mais il faut s'assurer de ne pas
mêler les cartes, à savoir qu'il n'y a pas d'équation dans les deux concepts de
«refus», tel qu'il est mentionné ici, et «refus catégorique». Le refus
catégorique est invoqué à l'égard d'une personne majeure inapte qui refuse de
recevoir des soins. C'est bien clair dans le Code civil, c'est
l'article 16. C'est une demande qui est
évaluée de manière contemporaine. Ici, on fait face, dans le processus... on
vise la demande anticipée. Donc, c'est un consentement anticipé. Donc,
la notion de refus, ou d'un geste, ou d'une parole, ou d'une attitude de refus,
il ne faut pas la comprendre, il ne faut pas l'assimiler ni même la comparer à
la notion de refus catégorique qu'on retrouve au moment où on va chercher
l'assentiment d'une personne majeure inapte à des soins qui seraient requis par son état de santé. Donc, c'est deux
contextes différents. Donc, il n'y a pas lieu de... d'importer ni plus ni moins
l'interprétation du refus catégorique dans le contexte.
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Me Guay. On va
poursuivre nos échanges avec la députée de Sherbrooke pour une période de
3 min 18 s. La parole est à vous.
Mme Labrie :
Merci, Mme la Présidente. Je vais avoir deux questions. Je commence par la
première. Je vais vous demander effectivement un éclairage juridique. Vous nous
invitez à inclure la notion de handicap et à laisser tomber la notion de
handicap neuromoteur. J'ai tâté le terrain plus tôt aujourd'hui avec un autre
groupe. Est-ce que, si la formulation, c'était plutôt que la personne soit
atteinte d'une condition grave et incurable, est-ce que ça nous permettrait
d'englober ce qu'on souhaite englober sans discrimination puis sans nécessairement
avoir à définir la notion de handicap?
Mme Champagne
(Sylvie) : C'est une bonne question. Je vous dirais que l'arrêt Carter
dit «problème de santé grave et irrémédiable». Là, vous nous proposez
«condition grave et irrémédiable». On n'est pas loin. Je vous dirais que le Barreau, on n'a pas de position,
mais je trouve que ça va quand même... on avance. Donc, je vous encourage
à continuer dans ce sens-là.
Mme Labrie :
Bien, merci. Puis la deuxième question, c'est que vous nous proposez
d'offrir une consultation avec un juriste. Quel type de questions pourraient
être posées à un juriste? Parce qu'a priori on a tendance à penser qu'un
citoyen pourrait avoir des questions en termes de soins, des questions plus
d'ordre médical par rapport à l'aide médicale à mourir, puisque c'est un soin.
Quel type de questions vous pensez que quelqu'un pourrait poser à un juriste?
Mme Guay
(Hélène) : Bien, on... Le projet doit faire référence au tiers de
confiance, c'est qui, votre tiers de confiance, c'est à qui vous pourriez
référer, tu sais. Dans la pratique, les gens me demandent souvent : Ah,
qui devrait être un mandataire? Est-ce que je peux... Est-ce que je peux
inclure telle personne? Bien, c'est ce genre de question là qui... L'éclairage
qui peut être apporté à la personne qui va décider sur est-ce que je devrais ou
pas faire une demande anticipée. Il est important qu'ils voient plus loin que
juste les connaissances générales qu'ils ont ou qu'ils ont attrapées au fur et
à mesure de... des... je ne sais pas, moi, des nouvelles qui passent. Pourquoi?
Bien, parce que c'est important que les personnes sachent non seulement
l'évolution médicale, mais aussi l'évolution juridique. Il y a le tiers. Après
ça, est-ce que je peux retirer ma demande? Est-ce que je peux la reformuler?
Est-ce qu'elle va devenir caduque si, justement, je refuse, dans le... Dans la
démarche, combien de fois je vais pouvoir la présenter? Combien de tiers je pourrais avoir? Est-ce que je suis obligé d'inclure
mes proches? Si je n'ai pas de proches, si je n'ai personne, si je n'ai
pas de tiers, est-ce que j'ai le droit de faire une demande? Donc, il y a
beaucoup de questions, et je m'arrête là, il y a beaucoup de questions qui...
Mme Labrie :
C'est surtout pour la demande anticipée, en fait, que vous nous invitez à
prévoir l'accès à la consultation.
Mme Guay
(Hélène) : Oui, définitivement.
Mme Labrie : Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va terminer cette ronde
de... d'échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice pour une
période de 3 min 18 s. La parole est à vous.
• (15 h 50) •
Mme Tardif :
En fait, plus ça allait, plus mes questions s'effritaient, s'effeuillaient.
Vous avez donc répondu à plusieurs de mes questions, mais il m'en reste une.
Vous parlez d'harmonisation, puis on en a discuté, là, avec le Code criminel, le fédéral et le provincial, et
vous avez soumis l'idée qu'il serait opportun d'avoir un projet pilote. Comment
vous voyez ça?
Mme Champagne
(Sylvie) : Alors, après ce projet de loi n° 38, évidemment, on
savait que ça allait revenir parce que c'est un projet de loi qui est
important. Et comme on le disait, on est en faveur de l'élargissement pour les
demandes anticipées. Puis on se disait : Mais comment concilier le fait
qu'au Québec, on est prêts, mais que, dans le reste,
peut-être, du Canada, ils ne sont pas prêts à le mettre tout de suite? Mais on
voit qu'ils y réfléchissent avec les rapports qui ont été produits. Et,
en réfléchissant, on a eu comme une idée, on pense, intéressante et on a regardé
que, des fois, le fédéral peut donner des
exemptions. Au niveau de ses lois d'application provinciale, on vous a donné
deux exemples dans le mémoire, donc un centre d'injection supervisée
pour des drogues fortes à Vancouver, et aussi, en Colombie-Britannique, on a
décidé de décriminaliser la possession personnelle de drogues illicites, et ça
va rentrer en vigueur... en fait, c'est rentré en vigueur. C'est le
31 janvier 2023 jusqu'au 31 janvier 2026.
Alors, on se disait,
bien, vu que le Québec, on est prêt, on pourrait demander à ce que le Code
criminel permette cette exemption-là au Québec et qu'on puisse la faire, la
demande anticipée, sur un projet pilote. Et moi, je suis convaincue qu'étant donné que ça va être bien balisé, ça va être
bien encadré, on pourrait démontrer que c'est très viable de permettre des demandes anticipées et
qu'il n'y ait pas les dérives auxquelles on pense ou on a peur. Et donc c'est pour
ça qu'on vous propose cette option-là.
Mme Tardif :
Merci. Est-ce que les projets dont... auxquels vous faites référence en
Colombie-Britannique, est-ce que ça a été long? Parce qu'on ne veut pas non
plus aller trop vite pour notre projet de loi, mais on ne veut pas que ça soit
retardé par le fédéral non plus. Est-ce que c'est long d'obtenir l'accord ou
l'exemption du fédéral?
Mme Champagne (Sylvie) : Bien,
je vous dirais que le Parlement siège. Ils sont capables de déposer
habituellement des projets de loi puis aller rapidement quand il y a la
volonté. Donc, ça, là-dessus, je vous laisse, aux parlementaires, là, de faire
vos démarches. Mais c'est quelque chose qu'on pensait qui pourrait être
intéressant pour les Québécois et les Québécoises.
Mme Tardif :
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup, Mme la bâtonnière, Me Guay, Me Champagne. Merci, au
nom de mes collègues, pour l'apport à nos travaux.
Je
vais vous souhaiter une bonne fin de journée et je vais suspendre, le temps de
recevoir notre prochain groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
15 h 53)
(Reprise à 15 h 56)
La Présidente
(Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la
Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Nous recevons
la Chambre des notaires du Québec.
Alors,
monsieur, madame, je vais vous demander de vous présenter dans quelques
instants. Vous aurez une période de
10 minutes également pour faire votre exposé, mais je vais vous demander
de vous présenter dans un premier temps. La parole est à vous.
Chambre des notaires du Québec (CNQ)
Mme Potvin (Hélène) : Alors,
bonjour à tous. Donc, je me présente, Hélène Potvin. Je suis notaire et
présidente de la Chambre des notaires du Québec. Je suis accompagnée
aujourd'hui par Me Jean Lambert, notaire émérite, ancien président de la
Chambre des notaires. Me Lambert est notre expert-conseil sur cette
question depuis de nombreuses années. Alors, c'est pour cette raison qu'il
m'accompagne aujourd'hui.
Alors, Mme la
Présidente, Mme la ministre, Mmes les députées, au nom de la Chambre des
notaires du Québec, je vous remercie pour
votre invitation à m'adresser à vous aujourd'hui. Tout d'abord, je tiens à
féliciter et remercier la ministre pour ce projet de loi qui vient
rejoindre les préoccupations et la volonté de la population québécoise en matière de soins de fin de vie. Merci d'avoir
écouté les citoyens. La demande anticipée sera maintenant permise, oui, mais il faut maintenant travailler ensemble à rendre
son utilisation sécuritaire et permettre les meilleures conditions possibles
pour son application pratique, et ce, dans le respect de la personne qui la
formulera. Il est essentiel de préserver l'intégrité de la demande anticipée
afin d'éviter des dérapages ou des utilisations inappropriées.
La mort fait partie de la vie, les notaires sont
bien placés pour en parler. Les discussions autour de la mort font partie du
quotidien pour des centaines, voire même pour des milliers de notaires. Des
notaires accompagnent depuis toujours les personnes qui
souhaitent établir leurs volontés dans un testament. Nous en avons des
millions, d'inscriptions dans notre registre. Les notaires traitent des sujets
sensibles, on parle des modes de disposition du corps, on parle du choix des personnes qui s'occuperont de régler la
succession. On parle de dévolution des biens, d'impôt, mais aussi
beaucoup d'émotion et de tranquillité d'esprit, enfin, pour que tout soit clair
pour ceux qui resteront.
Et maintenant le
législateur introduit cette nouvelle mesure pour les personnes qui font face à
de sombres diagnostics, soit la demande anticipée d'aide médicale à mourir. Il
ne faut surtout pas laisser les citoyens seuls devant cette situation fort
désolante et hautement émotive. Bien sûr, il est essentiel que cette nouvelle
mesure soit faite dans un écrit. Toutefois,
on ne devrait pas permettre l'utilisation d'un formulaire. En fait, on devrait
l'éviter à tout prix. Ce formulaire ne pourra jamais donner les
meilleures garanties que la demande anticipée a été formulée avec toute la
clarté requise et que le consentement de la personne a été donné de manière
libre et éclairée. Un formulaire, c'est un
acte sous seing privé qui n'a pas de garantie de fiabilité, aucune exigence non
plus sur sa compréhension, ce qui ouvre facilement à la contestation,
une fragilité impensable pour une demande anticipée d'aide médicale à mourir.
D'ailleurs, et à
titre comparatif, le testament notarié est le seul testament à ne pas
nécessiter une procédure judiciaire de vérification au décès. Les testaments
signés devant témoin, donc comme un formulaire ou olographe, soit ceux écrits et signés à la main, doivent
faire l'objet d'une vérification judiciaire établissant que le testament a bien
été rédigé et signé par une personne bien identifiée qui a confirmé que le
document contient l'expression de ses dernières volontés.
• (16 heures) •
Le législateur ne se
contente donc pas du contenu du testament complété comme un formulaire pour le
règlement d'une succession. Alors, pourquoi se contenterait-il du contenu d'un
formulaire pour qu'une personne décide du
moment venu de mettre fin à ses souffrances? Est-ce à dire que c'est moins
important de faire une demande anticipée d'aide médicale à mourir que de
prévoir la dévolution de ses biens? La réponse me semble évidente. Le
législateur a l'obligation de rassurer les citoyens en leur offrant la plus
haute sécurité juridique. Les conséquences sont trop importantes. C'est pour
cette raison que nous croyons que la demande anticipée d'aide médicale à mourir
ne devrait être formulée que sous forme notariée.
Et je m'explique.
Tout d'abord, la description des souffrances physiques et psychiques devra être
précise, personnalisée et rédigée sans ambiguïté. Bref, du sur mesure
difficilement conciliable avec une approche formatée de cases à cocher. Pour
nous, l'intervention du notaire, ici, est capitale. Il accompagnera le
professionnel compétent à qui revient la lourde responsabilité de s'assurer que
les souffrances décrites dans la demande sont médicalement reconnues comme il
pourrait en découler de la maladie dont la personne est atteinte, et qu'elles
sont objectivables. Le notaire pourra poser les questions pertinentes en vue de
s'assurer du respect de la Loi concernant les soins de fin de vie et pourra
ainsi rédiger la description des souffrances en termes clairs. Cette
description, je vous le rappelle, peut être très personnelle et différente
d'une personne à l'autre. On est bien loin des cases à cocher.
Ensuite, la demande
anticipée doit être d'une fiabilité du plus haut degré. L'intervention du
notaire, puisqu'il est un vulgarisateur reconnu, favorisera la compréhension
par la personne des critères essentiels mentionnés à la loi et qui doivent être
pris en compte pour fonder sa décision. Ceci viendra assurer à tous que le
consentement de la personne a vraiment été donné de manière libre et éclairée
au moment de sa demande anticipée. Et c'est encore plus vrai pour le
professionnel compétent qui administrera l'aide médicale à mourir. L'acte
notarié, ne l'oublions pas, fait preuve à
l'égard de tous de son contenu, de sa date et de la validité du consentement.
Il est pratiquement incontestable.
Certains pourraient
mentionner que l'acte notarié vient alourdir le processus de la demande
anticipée. En fait, encadrer un acte
juridique par des formalités ne vient pas alourdir une démarche mais vient
plutôt donner des garanties de sécurité. Ainsi s'adjoindre un notaire
pour voir au respect des formalités mentionnées à la loi vient permettre à la
personne et aux professionnels compétents de se concentrer sur les vrais enjeux
de cette bataille contre la maladie.
Mais revenons à
l'exigence du formulaire. Il est également question, dans le projet de loi,
d'un formulaire qui serait annexé à l'acte notarié. Il est impensable de
prévoir une telle façon de faire, et la chambre s'y oppose vivement. C'est mal
comprendre la valeur de l'acte notarié que de prévoir une telle disposition.
L'annexe n'est qu'un accessoire qui vient compléter un acte. On pense ici à une
résolution de compagnie, à un acte de financement, on parle d'un plan, un acte
de servitude, on ne parle pas du fond de l'acte. En exigeant que la demande
anticipée soit incluse dans un formulaire qui est annexé à l'acte notarié, le
législateur dénature ainsi l'acte notarié. À la place de prévoir un formulaire
en annexe, la chambre demande plutôt qu'un règlement vienne encadrer le contenu
minimum qui devra se retrouver... pardon, dans la demande anticipée sous forme
notariée.
Alors,
comme je l'ai dit plus tôt, le document notarié assure la sécurité, la fiabilité,
et est presque incontestable, mais,
bien au-delà de ces attributs, un acte notarié est le résultat d'une démarche,
d'un processus, enfin, c'est le résultat d'un accompagnement. C'est cet
accompagnement qui explique, entre autres, la haute cote de confiance que le public
porte aux notaires, soit près de 90 % selon les derniers sondages. Ainsi,
la demande anticipée d'aide médicale à mourir
pourra, comme on le fait actuellement dans les testaments notariés, être
personnalisée pour être vécue par la personne comme elle le souhaite. Je
vous rappelle qu'il est question ici d'un événement avec une grande charge
émotive. Il est important que la personne
puisse vivre ce moment comme elle l'entend, qu'elle puisse dicter ses volontés,
ses choix qui sauront rendre ce moment à son image.
Alors, on nous parle
aussi de l'accessibilité pour tous. Alors, si le législateur reconnaît
l'importance de la demande anticipée d'aide médicale à mourir pour la
population québécoise et veut en assurer la plus haute sécurité juridique, il
exigera que la demande anticipée ne puisse être formulée que par acte notarié.
Et, dans ce cas, s'il en souhaite l'accès
universel, l'État devra en assumer les coûts, comme il l'a fait pour les autres
professionnels impliqués dans la démarche, afin que toutes les personnes
qui en auront besoin puissent y avoir recours sans égard à leurs capacités
financières.
Alors, en terminant, je
vous rappelle que les notaires sont déjà présents pour accompagner les citoyens
dans la rédaction de leurs dispositions testamentaires et leur mandat de
protection en prévision de leur inaptitude. Année après année, des centaines de
milliers de personnes consultent leur notaire et signent ces deux documents
importants pour la suite de leur vie. Le
notaire a cette expertise de consigner les volontés des citoyens en ces
matières qu'il traite avec humanisme
et empathie. Alors, pourquoi s'en priver? Il est important de préserver la
qualité de vie, la tranquillité d'esprit par un accompagnement adéquat
d'un professionnel qualifié, qui agira comme pivot dans cette démarche qui
pourrait s'avérer complexe si la personne est laissée à elle-même. Alors, ceci
permettrait à toute personne aux prises avec
des problèmes de santé importants de continuer sa vie en toute quiétude quant
au respect de ses choix et, ultimement, vivre ses derniers moments selon
ses volontés.
Alors, je vous remercie de votre attention. Nous
sommes disponibles pour recevoir vos questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Potvin, pour cet exposé. Vous
soulevez des enjeux et des questionnements importants. Donc, on va ouvrir la
période de discussion avec les parlementaires. Je vais commencer par la
ministre, alors, pour une période de 16 min 30 s. La parole est
à vous.
Mme Bélanger : Mme la
Présidente, Me Potvin, bonjour. Me Lambert, bonjour. Et puis, si je ne me
trompe pas, Me Lambert, je crois que vous avez siégé pendant quelques années
sur la Commission des soins de fin de vie, n'est-ce pas?
M. Lambert (Jean) : Je siège
actuellement...
Mme Bélanger : Vous siégez. OK.
Bien...
M. Lambert
(Jean) : ...encore depuis le
début. Maintenant, je... mais je ne parlerai pas au nom de la commission,
on se comprend bien.
Mme Bélanger : D'accord.
M. Lambert (Jean) : Cependant, dans
certaines de mes réponses, je ne pourrai pas faire fi des connaissances que
j'ai eues dans ce rôle.
Mme Bélanger : Oui, tout à
fait. Je comprends qu'aujourd'hui vous ne représentez pas la commission, mais
c'est votre expérience, là, simplement, qui va être quand même très importante.
N'hésitez pas à échanger avec nous. Et puis je veux saluer votre engagement,
tant qu'à y être, à la Commission des soins de fin de vie, parce que je sais
que c'est quand même beaucoup de travail, étant donné que tous les dossiers de
demande d'aide médicale à mourir passent par la Commission des soins de fin de
vie et sont analysés, entre autres, là, par une équipe. Alors donc, voilà.
Écoutez, peut-être simplement commencer, en vous
disant, bon, l'aide médicale à mourir est conçue comme un soin et il est
vraiment conçu au même titre que des soins palliatifs, avec la... avec le
soulagement de la douleur, la sédation
palliative continue où là... donc là, on parle maintenant d'une autre possibilité
avec l'aide médicale à mourir, en autant que ça répond aux critères qui
sont prévus dans la loi, mais c'est conçu comme un soin. Donc, ce n'est pas
surprenant que l'implication des professionnels, et le rôle des médecins, et
éventuellement des IPS, si notre projet de loi passe, soit un rôle important
dans l'évaluation de la demande. Et j'aimerais vous entendre à ce sujet-là.
Comment concilier le tout? Je reconnais toute l'expertise des notaires,
effectivement, là, dans tout ce qui est acte notarié, mais comment concilier le
fait que l'aide médicale à mourir est conçue comme un soin? Comment on arrime
ça pour que ça soit efficace avec la démarche que vous proposez d'en faire un
acte notarié?
• (16 h 10) •
M. Lambert (Jean) : Alors, ma
présidente me fait signe de prendre la question au vol. On comprend qu'un acte
notarié peut toucher un ensemble très vaste de préoccupations, des éléments de
la vie, que ce soit commercial, que ce
soient des relations de personnes qui vont décider de faire vie commune, etc.
Donc, il faut comprendre que l'acte notarié en lui-même est un
instrument de sécurité juridique dans une situation donnée. L'aide médicale à
mourir n'existe que parce que,
collectivement, on a décidé, par une loi, que c'est possible. Il n'y a pas si longtemps,
tuer était un crime. Maintenant, on a
dit : Dans certaines circonstances, alléger les souffrances en mettant fin
à la vie d'une personne selon son désir et son consentement — c'est
les mots-clés — ce
n'est plus un crime, et c'était le jugement Carter, entre autres, et toutes les
modifications qui ont suivi.
Ici, au Québec, on est allé... on a établi, dès
le départ, qu'il s'agissait d'un soin qui s'inscrit dans un continuum. Voici
donc une demande, contrairement à la demande contemporaine qui est exécutée, le
président de la commission l'a dit, habituellement dans les six mois et même à
70 % dans les trois mois, ici, on est en présence d'une demande d'une
personne qui ne veut pas mettre fin à ses jours prématurément, qui veut vivre
sa vie tant et aussi longtemps qu'elle sera apte et qu'elle ne sera pas...
qu'elle pourra endurer le niveau de souffrance. Donc, on parle ici en termes de
mois, d'années. Donc, d'avoir un document qui sera exécuté par des personnes
qui, peut-être, n'étaient pas là au moment où elle a formulé ses voeux, je
pense ici au professionnel compétent qui pourrait en être un autre, à un moment
donné arrivera le moment venu, et ceux qui auront à exécuter auront besoin de
savoir si, un, le document qu'ils ont devant eux, c'est le document le plus
fiable possible, et on croit que c'est l'acte notarié, contrairement aux
documents privés. Il devrait savoir aussi la description précise ou aussi
précise que possible des souffrances que cette
personne-là considérera comme intolérables. Alors, il faudra que le
professionnel compétent puisse être capable, à la lecture et à son propre
constat, parce qu'on comprend bien que le notaire ne joue pas le rôle du
médecin, là, l'évaluation et les intrants... D'ailleurs, la description qui
devra être faite à l'acte, c'est le résultat d'un concours de collaboration
avec le professionnel compétent qui va accompagner la personne. L'avantage du
notaire ici, c'est qu'il est un excellent rédacteur d'actes, et c'est reconnu,
et ainsi il vient soutenir le médecin.
Je puis vous dire, pour avoir vu, dans les
premières années, les formulaires remplis à la main par les médecins, où il
fallait, à peu près dans 40 % des cas, demander des compléments
d'information aux médecins parce qu'on ne s'y comprenait pas, et même avec
SAFIR où il y a eu un formatage informatisé, il reste encore un nombre
important, de 10 % à 15 %, où on doit encore revenir aux médecins
pour demander des précisions. On comprend que les médecins, ce ne sont pas des
rédacteurs. Pourquoi? Ils sont dans la tourmente, ils sont sollicités de toutes
parts. Et de pouvoir compter sur une personne qui a... qui est un officier
public — ça,
c'est l'autre élément de la clé — donc quelqu'un qui a une loyauté envers
la société, envers l'État, donc, de s'assurer que le contenu de ce document-là
sera aussi fiable que possible... Et il y a
tout un domaine de conseils. Alors, lorsqu'il y aura l'échange entre le professionnel
compétent et la personne qui demande, il
pourra, à l'aide de ces questions, clarifier, demander au médecin, par exemple,
si ce que la personne vient de décrire comme souffrant, est-ce que c'est une
souffrance qui est objectivable, est-ce qu'elle correspond à la loi.
Maintenant, on n'a pas parlé encore du tiers de
confiance. J'espère qu'on va pouvoir en parler, parce qu'on a des solutions
aussi, surtout lorsque la personne est seule. Mais là je pense que j'ai parlé
beaucoup, j'aimerais vous remettre la parole, mais lisez notre... et ça, je dis
ça aux parlementaires qui n'auraient pas eu le temps de le faire, parce que
vous êtes bousculés, de lire notre mémoire.
Mme Bélanger : Bien, écoutez, c'est
intéressant, je pense, la discussion. Peut-être poursuivre dans le sens d'un
formulaire, d'un acte notarié. Vous savez que ce qui est prévu dans les
modalités, c'était plutôt un dépôt dans le registre
de la demande anticipée obligatoire. Et là c'est peut-être une question
technique, là, mais, en termes de sauvegarde de documents, si un notaire
était impliqué, ça voudrait dire... est-ce que ça remet en question le
registre?
M. Lambert (Jean) : Non, non, pas du
tout. Non, on le fait pour les DMA notariées. On les dépose, on a conclu avec
un véhicule et on n'a pas besoin d'annexer le formulaire. Et là on se comprend
que, dans les DMA, c'est des refus de soins, essentiellement, c'est la
signification. J'étais sur le comité ministériel qui a élaboré le formulaire.
Mais la demande anticipée, c'est une demande de soins, là on est dans un autre
ordre de préoccupations.
Mme Bélanger : OK. Allons-y, donc.
Vous avez ouvert, il y a quelques instants, sur le tiers de confiance. Alors,
dans un processus où on irait avec un acte notarié, comment vous voyez le rôle
du tiers de confiance et aussi celui du proche?
M. Lambert (Jean) : Bon, alors, le
tiers de confiance... C'est juste qu'on a un écho, là, je ne sais pas s'il y a un micro d'ouvert... Alors, le tiers de confiance,
c'est une personne qui sera choisie par la personne qui fait la demande. Je
réponds tout de suite à une question qui a été donnée : Est-ce qu'il y en
a deux en même temps? Non, mais qu'on puisse prévoir un substitut, ça, je pense
que c'est de bonne prudence, parce qu'on parle d'un acte dont l'exécution sera
probablement de deux, trois, quatre, cinq ans plus tard. Alors, les gens ont le
droit de décéder, ont le droit d'être malades,
d'avoir un accident ou encore d'être rendus à un point où ils ne sont plus
capables de subir la charge émotive. Ça, c'est un des éléments que le
notaire va discuter avec le tiers de confiance. Donc, la personne qui sera
choisie va avoir besoin elle-même de conseils. Elle va... savoir, c'est quoi,
son rôle, par exemple, de voir périodiquement la personne, devoir s'assurer à sa santé et de savoir si, et ça, c'est
l'élément surtout qui est... importe, est-ce qu'elle maintient toujours
sa volonté d'avoir l'aide médicale à mourir lorsque les souffrances qu'elle a
décrites dans sa demande arriveront, seront constatées par l'équipe médicale.
Ensuite de ça, le tiers de confiance devra,
lorsqu'il aura constaté lui-même que le moment est venu... il ne prend pas la
décision, on se comprend, là, d'administrer, mais il alerte l'équipe, il
l'informe pour dire : D'après moi, je pense que madame, monsieur, qui a
fait la demande, est rendu au moment venu, je pense qu'il y aurait lieu qu'on l'évalue. Alors, ça, c'est son rôle, et je pense
que c'est un rôle qui est très important. Ce n'est pas la chambre qui a sorti ça
de son chapeau, il y a eu un travail magnifique sur la question de l'aide
médicale à mourir par un comité qui s'appelle le comité... le conseil canadien
des académies, et ils ont consacré la question du tiers de confiance comme
étant un élément qui vient rassurer le professionnel compétent qui viendra
administrer. Alors, il viendra lui dire : La dernière fois que j'ai parlé
à la personne, lorsqu'elle était apte, elle a dit : N'oublie pas de voir à
ce que mes volontés soient exécutées.
Mme Bélanger : Alors, c'est très
bien. Merci.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Merci,
Mme la ministre. Je pense que j'ai une question du côté de la députée de
Laporte.
Mme
Poulet : Oui. Merci beaucoup de votre participation.
Pendant votre introduction, j'ai... ça m'a fait penser au mandat d'inaptitude.
Alors, je me questionnais, sachant que l'aide médicale à mourir doit avoir...
il doit y avoir un diagnostic, est-ce qu'il y a moyen d'initier ses
propres... ses volontés en ce sens-là dans un mandat d'inaptitude? Et aussi vous aviez mentionné que vous voulez éviter des
dérapages. Est-ce que, par le passé, vous avez été sensibilisés à certaines...
à certains dérapages dans... dans tout le processus?
Mme Potvin (Hélène) : Alors, je
crois que c'est important de laisser, donc, la demande anticipée dans un
document à part. Alors, on ne traite pas ici, là, du même enjeu. Alors, c'est
pour ça que c'est important de laisser vraiment
le mandat de protection en prévision de l'inaptitude de la personne. Alors, je
ne sais pas si c'était ça, le sens de votre question, Mme la députée.
Mme Poulet : ...
• (16 h 20) •
Mme Potvin (Hélène) : Oui. Alors, je
ne sais pas, Me Lambert, qui est un grand passionné, vous le voyez, avait un
complément d'information sur le document.
M. Lambert (Jean) : Sans vouloir me
péter les bretelles, je suis celui qui a amené cette innovation en 1988 à
l'occasion, justement, d'une commission parlementaire dans le cadre des travaux
du Code civil. À ce moment-là, on disait que c'était une hérésie puisque le
mandat doit tomber lorsque la personne perd son... sa capacité, et moi, je
venais dire : On en fait un spécial qui va justement prendre force parce que...
Alors, compte tenu d'un document qui est fait dans un cadre normal, ça peut
être une personne qui a un diagnostic, mais c'est souvent, et le plus souvent,
des personnes qui ne sont pas nécessairement malades ou qui n'ont pas un
diagnostic sombre, et le législateur a voulu, dans la première mouture de la
loi, de ne pas confondre les deux... les deux véhicules juridiques, et je pense
que c'est une bonne chose.
Ce que le législateur a voulu, c'est que,
lorsque la personne va exprimer ses volontés par anticipation, c'est que cette personne-là, maintenant, vit une
réalité, elle sait quelle est la trajectoire qui est devant elle au niveau de
la qualité de vie qui va décliner. Et je pense que le législateur, dans
le projet sous étude actuellement, a maintenu cette même prudence, de voir à ce
que ce soit un document distinct. Alors, je pense que, sur ce point-là...
Maintenant,
au niveau des dérives, évidemment, il y a des décisions judiciaires où ils ont
vu qu'effectivement il y a eu des mandataires qui en ont peut-être pris
trop large, alors qu'ici notre tiers de confiance, ce n'est pas un mandataire,
il ne viendra pas prendre, comme un tuteur... ne viendra pas décider à la
place. Ce n'est pas lui qui va donner le consentement, la personne va l'avoir
déjà donné, et c'est le professionnel compétent qui va évaluer si, maintenant,
le moment fixé par cette personne-là est arrivé. Le tiers de confiance, lui,
tout ce qu'il fait, c'est qu'il alerte le milieu médical, l'équipe soignante, pour dire : Je pense qu'il est
temps d'évaluer la personne. Alors, c'est vraiment très différent.
Mme Poulet : OK. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci pour la question. Il reste encore
1 min 43 s pour la députée de Vimont, question, réponse
incluses. Merci.
Mme
Schmaltz : Parfait, je vais aller rapidement. Concernant les
incertitudes, vous en avez parlé tantôt, Me Lambert. Vous parlez de
l'identification précise des souffrances ou des conditions qui détermineront
l'arrivée du moment venu. Moi, c'est le
moment venu, comment on détermine le moment venu? Est-ce qu'on parle d'heures?
Est-ce qu'on parle de jours? Est-ce qu'on parle de... Je ne sais pas.
C'est quoi, le moment venu? Je comprends le sens de la phrase, là, c'est... ça,
c'est sûr, mais c'est quoi? C'est quoi, le moment venu, pour vous?
M. Lambert (Jean) : Le moment venu,
c'est lorsqu'on informe l'équipe médicale qu'on croit que l'étape des
souffrances intolérables atteint le niveau que la personne a fixé comme devant
justifier qu'on lui administre l'aide médicale à mourir. Donc, ce n'est pas une
question d'heures ou de jours. Le moment venu, ça veut dire que l'équipe
soignante va procéder à ces évaluations. Si ça correspond aux critères de la
loi, là on va administrer. C'est tout ça
ensemble qui constitue le moment venu de l'administration. Alors, je ne sais
pas si ça répond à votre question.
Mme Schmaltz : Bien, je pense, je
n'ai plus le temps. Oui, oui, ça répond.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mesdames les députées, Mme la ministre, merci beaucoup. Alors, je me tourne maintenant du côté de la
députée de Westmount—Saint-Louis pour une période de huit minutes... 9 min 54 s.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Me Potvin. Bonjour, Me Lambert. Merci beaucoup de votre présence et votre témoignage. Votre
mémoire, c'est fort intéressant. Dans le sommaire de vos recommandations,
recommandation 1, vous dites que ça va être important, dans le fond,
d'ajouter le mot «uniquement» quand on parle de... «soit formulé uniquement par
un acte notarié en minutes» quand on parle de dépôt d'une demande de l'aide
médicale à mourir par anticipation.
Je veux mieux comprendre la nécessité d'avoir le
mot «uniquement». Parce qu'actuellement dans la loi soins de fin de vie on dit que ça prend un acte notarié,
on n'a pas le mot «uniquement». Puis, dans la loi, le projet de loi n° 11,
même chose dans l'article 29.8, on dit «doit être faite par [un] acte
notarié». Alors, quelle est la différence? Pour vous,
est-ce que ça veut dire : Actuellement, aujourd'hui, les gens peuvent
faire une demande puis la faire légaliser, à quelque part, par un avocat, par
exemple, ou par autre professionnel?
Mme Potvin
(Hélène) : Oui, alors ce que le projet de loi prévoit, c'est qu'il y
aura deux façons de faire une demande anticipée, alors le formulaire ou le
document notarié. Alors, c'est là que le mot «uniquement» est important
puisque, comme je le disais dans mon allocution, on voit mal l'utilisation d'un
formulaire, surtout on parlait du moment venu, on parle des conditions, on
parle de la description des souffrances, qui devrait être personnalisée. Alors,
c'est là que, pour nous, on voit mal l'utilisation d'un formulaire, et c'est
pour ça qu'on recommande de préciser que ce soit uniquement par acte notarié.
M. Lambert
(Jean) : Est-ce que je peux rajouter qu'entre autres il... décrire
précisément le rôle du tiers de confiance
également? Probablement aussi que la personne voudra lorsque... le moment venu,
et elle voudra que ses proches soient
invités. D'autres ne voudront pas que les proches soient là, comme on le voit
actuellement dans l'administration des
AMM contemporaines. Certains pourront vouloir avoir un accompagnement musical,
etc., donc, plein de petits éléments humains qui... qu'on voit mal dans
un formulaire.
Mais, nous, ce qu'on
en a, c'est que le formulaire n'est pas un véhicule juridique fiable. Et, quand
on dit «uniquement», c'est que ça devrait
être obligatoirement sous la forme notariée. Actuellement, la demande
contemporaine d'AMM n'est pas
notariée, elle ne peut pas l'être, ça, c'est les DMA, mais pourquoi? Parce que
l'exécution est proche, est rapprochée. La personne est dans un cadre où elle
est continuellement en présence d'une équipe soignante, ce qui est complètement différent d'une personne qui
dit : Peut-être dans trois, quatre ans, on devra me mettre dans une
résidence, parce que, là, je serais rendu incapable de voir à moi-même,
mon alzheimer sera rendu à un stade où j'aurai vraiment besoin d'être soutenu.
C'est un autre monde.
Mme
Maccarone : Je vous entends. J'ai lu le mémoire puis j'ai vu le mot
«fragile» avec le formulaire, je comprends puis je pense que tout le monde a
aussi constaté que ce ne sera pas facile de déterminer le contenu de le formulaire. Puis aussi, au moment d'administrer
l'aide médicale à mourir, comment mettre à l'oeuvre le
formulaire, si ce n'est pas
exactement écrit de la même façon que la souffrance est en train de se
manifester pour la personne concernée?
Mais vous, vous
faites mention aussi que... parce que vous parliez de... On a besoin peut-être
de signataires. Vous dites que vous-mêmes,
vous pourriez être signataires témoins en ce qui concerne cet acte, parce qu'on
demande d'avoir deux personnes. Puis vous, vous dites, dans votre
mémoire, que vous pourriez être un des signataires comme témoins. Est-ce que le
tiers de confiance devrait aussi signer quelque chose? Puis, dans votre
recommandation 2, si la personne n'est
pas capable de signer, vous dites que ça va être important d'avoir des témoins,
mais est-ce que, mettons, un vidéo suffira aussi pour s'assurer? Parce
que souvent on se retrouve beaucoup de personnes qui sont seules, on parle
beaucoup de ces personnes qui sont isolées, puis on veut aussi s'assurer que
leurs droits sont également protégés.
Mme Potvin (Hélène) : Bien, quand vous parlez
d'un témoin, alors c'est sûr qu'un acte notarié n'a pas besoin de témoins à la
signature. Le notaire est en soi... étant un officier public, donc, on n'a pas
besoin d'avoir de témoin. C'est sûr qu'il faudra réunir les gens. Donc,
oui, effectivement, on aura la signature du professionnel compétent, on aura le
tiers de confiance, on l'a dit. C'est sûr que cette personne-là doit être
informée de ses obligations, doit être informée
de la responsabilité, du rôle qu'il jouera plus tard. Alors, c'est certain que
cet accompagnement-là, on doit... on doit le faire vivre dans l'acte notarié.
Alors, c'est pour ça que les témoins, pour nous, c'est vraiment dans le cas...
alors vous faites référence à la recommandation 2, c'est vraiment lorsque
la personne n'est pas capable de signer.
Alors, présentement,
il existe, dans le Code civil, une procédure où un témoin vient recevoir la
déclaration de la personne qui dit qu'elle
ne peut pas signer. Alors, il signe à titre de témoin qui vient vraiment
recevoir la déclaration du testateur.
Alors, nous, on fait un parallèle avec la demande où on devrait avoir un tel...
une telle façon, là, de compléter l'acte notarié, là.
Mme
Maccarone : Merci. Ma collègue, elle aurait des questions.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. On va donc poursuivre pour une
période de 3 min 54 s avec la députée de D'Arcy-McGee. La parole
est à vous.
Mme Prass : Merci.
Pour renchérir sur les commentaires de mon collègue, est-ce que vous pensez
dans ce cas-là que... Parce que, là, la façon dont vous avez expliqué, plutôt
que le formulaire, comment vous aiderez la personne
à rédiger le document, je trouve ça intéressant, les éléments beaucoup plus
personnels, comment la personne veut vivre ce moment, etc. Pensez-vous, dans ce
cas-là, que, justement, il y aurait une certaine rigidité avec un formulaire qui ne permettrait pas à la personne de vraiment
pouvoir faire le tour et expliquer les différentes circonstances, les
différentes situations, par exemple, donc, pas juste côté souffrances, côté
moment, mais vraiment, comment on veut vivre ça? Parce qu'on ne le sait pas, on
n'a pas vu le formulaire, on ne sait pas de quoi il consiste, mais j'imagine
que ça serait plus rigide, plus côté médical que côté... Bien qu'il ne
comprendrait pas nécessairement tous les éléments que quelqu'un voudrait y
inclure. Donc, est-ce que je comprends de votre part qu'il y a une certaine rigidité
que vous voyez avec la formule formulaire plutôt que ce que vous suggérez?
• (16 h 30) •
Mme Potvin (Hélène) : Bien, c'est
sûr que nous, le formulaire, ce qu'on comprend d'un formulaire, c'est qu'il va
être très, très homogène pour tout le monde. Alors, oui, la rigidité, c'est
certain qu'elle est là. Alors, on a... si on fait le parallèle avec un testament, on a les
clauses minimales qui sont donc... que le notaire utilise dans le Code civil,
mais il vient bonifier. Il vient ajouter, il vient vraiment personnaliser le
document. Alors, c'est sûr que le formulaire, pour nous, nous croyons qu'il
faut vraiment l'éviter à tout prix, parce que, sinon, ça sera des cases à
cocher, et on va dénaturer vraiment la personnalisation de la demande. On va se
retrouver avec les mêmes clauses pour tout le monde,
là. Alors, ça, je pense que, oui, effectivement, la rigidité, pour nous, là,
c'est vraiment... le formulaire est à éviter. Mon collègue
Me Lambert voulait ajouter.
M. Lambert
(Jean) : Alors, très... très rapidement, c'est que l'acte
notarié, l'intervention du notaire, d'abord, il va y avoir... Le notaire
ne tirera pas d'un tiroir un formulaire, justement, on parle justement que ce
n'est pas le cas. Donc, il va avoir du conseil, le notaire va aviser la
personne des éléments qu'elle aura... peut-être de rencontrer une ressource en
psychiatrie ou psychologique. D'ailleurs, ça pourrait être même la même chose,
le même conseil qu'il donnera au tiers de
confiance, de dire : Ce serait bon que vous sachiez si vous allez être
capable de surmonter l'émotion, le moment venu, puis de jouer votre
rôle. Donc, ça va être... l'acte va être un aboutissement de rencontres. Le
notaire va probablement, avec l'autorisation
de la personne, parler au médecin pour qu'il puisse, justement, préparer la
description des souffrances, de sorte que, quand cette réunion-là va
arriver, ça va être un aboutissement d'un processus.
Et j'ai tellement peur que le temps passe sans
que je ne vous parle de la solution pour le tiers de confiance. Lorsqu'une personne est fin seule, bien, il y a...
j'ai vu rapidement qu'il y a deux solutions. Hier, la société d'Alzheimer
vous ont dit, ils sont 20 chapitres au Québec, qu'ils ont des gens qui
accompagnent les gens qui ont eu le diagnostic d'Alzheimer. Et ça pourrait être
là une place où on pourrait aller chercher des gens qui accepteront de jouer le
rôle de tiers de confiance, d'autant plus qu'ils connaissent bien la maladie.
Mais j'ai aussi parlé à des travailleurs sociaux. Vous savez, les travailleuses
sociales dans les CLSC, elles rencontrent les gens régulièrement, c'est dans
leur ADN, si je peux dire, c'est dans leur culture, d'accompagner les gens. Or,
une personne pourrait très bien demander à des travailleurs sociaux qui auront
eu une formation par leur ordre professionnel et qui accepteront de jouer ce
rôle-là. On comprend que ceux-là n'auront
pas besoin de rencontrer deux, trois fois par semaine la personne, mais
peut-être passer un coup de fil aux trois mois, rencontrer aux six mois,
vérifier en disant : Bon, bien, vous allez bien?, etc. Avez-vous vu votre
médecin? Y a-tu eu quelque chose? Vous rappelez-vous que vous aviez un
rendez-vous, bon, pour telle chose? Et maintenant est-ce que vous demeurez...
Est-ce que votre volonté est toujours là? Alors, ces gens-là sont formés pour
ce genre de rôle là. Donc ça permet d'avoir des ressources pour les personnes
qui sont absolument seules.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Me Lambert. On va terminer, donc,
cette ronde d'échanges avec la députée de Sherbrooke pour une période de
3 min 18 s. La parole est à vous.
Mme
Labrie : Merci. Je vais rester sur le thème de la
formation, parce que j'avoue que c'est assez intéressant, la réflexion
sur laquelle vous nous amenez sur la question de l'acte notarié pour ça. Mais
je me demande : Est-ce que les notaires, actuellement, sont suffisamment
formés pour préparer ce type de demande anticipée? Je dois dire que, quand...
là, j'oublie son nom, à ce moment-ci, mais la dame qui oeuvre chez Carpe Diem,
qui est venue nous voir, nous parlait
notamment des réalités des personnes qui vivent avec l'alzheimer et était
capable de témoigner d'un certain nombre
de situations, par exemple, qui peuvent être vues comme de la souffrance, pour
certaines personnes, qu'on n'est peut-être pas tous en mesure
d'imaginer, peut-être pas tous les notaires non plus. Donc, est-ce que ça
prendrait des formations spécifiques ou est-ce que vous estimez être
suffisamment équipés, déjà, pour jouer ce rôle-là?
Mme Potvin (Hélène) : Alors, c'est
sûr que les notaires qui travaillent en droit de la personne ont déjà une base. Dans notre code de déontologie, c'est clair,
donc, on doit prendre des mandats où on a des connaissances requises. Alors, c'est certain qu'il va devoir y avoir des
formations complémentaires, bien entendu. Comme quand on parle d'inaptitude, donc on parle des soins, on parle de la capacité,
on a des formations par des personnels... des professionnels compétents.
Alors, bien sûr, il va falloir mettre sur pied des formations pour accompagner
les notaires. Mais, les notaires, il faut que
vous sachiez qu'ils ne partent pas de rien. Donc, ceux qui travaillent déjà en
inaptitude ont déjà des connaissances sur
les maladies, participent beaucoup, là, à des ateliers. Alors, ça, je ne crois
pas qu'il y ait de problème de ce côté-là.
Mme Labrie : Puis où vous le voyez, le
niveau de collaboration entre, par exemple, quelqu'un de l'équipe de soins, un
professionnel de la santé puis le notaire pour préparer une demande anticipée?
Mme Potvin (Hélène) : Allez-y, Me
Lambert.
M. Lambert (Jean) : Alors, écoutez,
d'abord, on comprend que le notaire ne joue pas au médecin. Il s'agit qu'il ait une formation spécifique, comme on a
donné lorsqu'on a ouvert les ouvertures d'origine de protection en dehors
du tribunal. Les notaires avaient deux jours de formation avec un psychiatre,
justement, pour être capables... d'être capables de se rendre au chevet d'une
personne, par exemple à l'hôpital ou dans un CHSLD, et d'être capables de
comprendre l'atmosphère, la dynamique de ces personnes-là. Moi, je l'ai vécu
pendant six ans où j'étais infirmier à Notre-Dame-de-la-Merci. Ça vient de là,
l'idée. Donc, à l'époque, j'avais suggéré à la chambre de faire cette formation-là, et elle a été un gage de succès. Et
ce sera également, encore une fois, une formation spécifique, obligatoire
pour les notaires qui vont oeuvrer
là-dedans. Et, c'est certain, qui va nous aider là-dedans? Bien, c'est les
professionnels compétents, c'est des médecins, c'est des IPS. Alors, vous
voyez, sans jouer au médecin, on aura quand même le bagage suffisant
pour savoir est-ce qu'il y a des questions, est-ce que c'est clair, tel sujet,
est-ce que... Et souvent on va agir comme un peu
quelqu'un qui va rappeler, peut-être, au médecin qu'il a oublié un point, parce
qu'on va, évidemment, développer aussi une compétence à cet égard-là.
Mme Labrie : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, c'est ce qui conclut nos travaux pour cette
séance-ci. Me Potvin, Me Lambert, merci
beaucoup. Au nom de tous mes collègues, au nom de la ministre, je vous remercie
pour l'apport à nos travaux. Je vous souhaite une bonne fin de journée.
Et je vais suspendre, le temps de recevoir le
prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 37)
(Reprise à 16 h 41)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, la Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux.
Nous en sommes maintenant avec... rendus avec le
Regroupement provincial des comités des usagers, qui est représenté aujourd'hui par Mme Sylvie
Tremblay, directrice générale. Bonjour, Mme Tremblay, bienvenue à la
commission. Donc, vous allez
bénéficier d'une période de 10 minutes, d'abord, pour vous présenter,
ensuite pour exposer votre opinion sur le projet de loi. La parole est à
vous.
Regroupement provincial
des comités des usagers (RPCU)
Mme Tremblay (Sylvie) : Merci,
Mme la Présidente et Mme la ministre, ainsi que toutes ces dames qui sont
membres de la commission. Très heureuse de voir que... On voit que c'est toutes
des femmes, qui sont autour de la commission. Alors, merci de m'accueillir.
Sylvie Tremblay, donc, directrice générale du RPCU.
Le Regroupement provincial des comités des
usagers du réseau de la santé et des services sociaux défend les droits des
usagers et représente plus de 540 comités d'usagers et de résidents dans
les établissements de la santé et des services sociaux au Québec, qu'ils soient
publics, privés, conventionnés ou autofinancés, et au-delà, en exerçant un
leadership à l'égard de l'amélioration de la qualité de soins et de la sécurité
des services de santé et de services sociaux au Québec.
Qu'est-ce qu'un usager? Les usagers ne sont pas
que des personnes malades, ce sont toutes les personnes qui, à un moment de
leur vie, utilisent les services de l'ensemble du réseau de la santé et des
services sociaux. Le RPCU les représente.
Le RPCU est satisfait de voir que le projet de
loi n° 11 tient compte d'abord des personnes et
de leurs besoins. Cela démontre bien que l'on doit s'occuper de l'humain avant
tout et qu'il faut reconnaître que les soins de fin de vie font partie de notre parcours de vie. D'emblée, le RPCU
félicite toutes les députées de toutes les... de tous les partis
politiques pour avoir fait preuve de courage dans ce dossier sensible depuis le
début. Sans votre travail, sans votre
ouverture, sans votre écoute, les usagers qui sont... qui ont ces besoins
particuliers n'auraient pas d'espoir d'avoir de meilleures conditions de
fin de vie, malgré leur situation de vulnérabilité.
Le RPCU voit d'un bon oeil et comprend la
nécessité de bien baliser les notions que sont les directives anticipées et les demandes contemporaines ainsi...
pour permettre à la personne de pouvoir faire une demande d'AMM selon
ses choix et ses besoins en se basant sur les conditions prévues au projet de
loi, et ce, notamment à l'article 14 et à l'article 18.
Les
directives anticipées et les demandes contemporaines pour les personnes ayant
une maladie neurocognitive. Nous
connaissons de mieux en mieux les aspects cliniques de ces maladies et nous
sommes d'avis que les... la personne devrait avoir la capacité de décider pour
elle-même de sa fin de vie à un stade précoce. Cette ouverture est aussi une question
de dignité et de respect pour l'usager et permettra à cette personne, de façon
libre et éclairée, de formuler sa demande.
Elle devra, de plus, être accompagnée professionnellement dans l'ensemble du
processus d'AMM le temps venu.
L'accès aux services et aux soins palliatifs de
fin de vie est un incontournable. Le RPCU aimerait souligner aux membres de la
commission que l'ensemble des soins et des services en ce domaine doivent être
évalués de façon continue, que le gouvernement du Québec adopte des budgets en
conséquence afin de répondre adéquatement aux demandes et à l'accompagnement
nécessaire pour que les personnes qui font la démarche d'une demande d'AMM...
et ce, partout sur le territoire québécois. De plus, l'offre de soins
palliatifs à domicile et dans les établissements de santé doit être le plus possible
en lien avec la volonté et les besoins des personnes. Des équipes compétentes
en nombre suffisant et dédiées devraient y être associées.
Dans cette perspective, nous voulons souligner
l'importance que l'usager ou l'usagère, en toute dignité et respect, devrait avoir la possibilité de recevoir
l'AMM dans les maisons de soins palliatifs, cette maison qui l'héberge,
que cette personne a choisie et qui, pour elle, est un lieu de réconfort et de
soins respectant ses besoins et son état, et ce, jusqu'à l'AMM. Les personnes
en grande vulnérabilité en fin de vie doivent demeurer là où elles sont et
recevoir l'ensemble des soins de soins palliatifs à la fin de vie. Nous
espérons que ces dispositions seront appliquées rapidement. Le RPCU supporte
cette initiative nécessaire afin d'éviter toute dérive au mépris des droits des
usagers que sont le droit aux services et, plus particulièrement, le droit de
recevoir les soins que requiert son état.
L'information relative à
la loi, la formation des professionnels et les usagers. Le RPCU aimerait
sensibiliser la commission au fait que nos membres nous indiquent souvent que
la population, les professionnels de la santé et des services sociaux ainsi que
les usagers eux-mêmes ne sont pas au fait des mécanismes de la loi, de sa
portée, des démarches pour faire... pour avoir accès à l'AMM. Nous pouvons dire
sans l'ombre d'un doute que l'information populationnelle est défaillante. Nous
recevons de nos membres des demandes d'information sur l'ensemble des mécanismes de l'aide... des directives médicales
anticipées à l'AMM. La société civile et l'ensemble des usagers se doivent
de bien saisir les notions et les actions liées à l'AMM.
Nous vous recommandons donc de lancer une
campagne de sensibilisation et d'information sur l'ensemble de la loi, ses modifications, que cette campagne
soit diffusée à l'ensemble de la population, et que ce soit pour que les utilisateurs
et les intervenants du réseau de la santé et des services sociaux la
comprennent, et, dans le cadre de cette campagne, une attention particulière
soit portée aux clientèles issues des communautés culturelles diverses.
Nous sommes
très heureux de voir l'ouverture aux infirmières praticiennes spécialisées, en
plus des médecins, pour administrer l'AMM. Nous sommes... Nous trouvons que
c'est une avancée importante en regard des compétences de celles-ci. De plus, nous tenons à souligner
l'importance de la Commission sur les soins de fin de vie et son apport aux
échanges, aux débats et surtout à la surveillance au fil des changements
législatifs en cette matière.
Ainsi, la... nous recommandons la création d'un
comité d'experts sur la notion de handicap. Le RPCU est sensible à la volonté
de tout usager de mourir dignement. Il en va de même pour toute personne en
situation de handicap. Ces personnes, en
grande majorité, vivent avec des souffrances physiques, psychologiques depuis
de nombreuses années. Les pertes
d'autonomie deviennent sévères, et des changements drastiques aux conditions de
vie apportent des stress supplémentaires
et des souffrances. Nous sommes d'avis que les services d'adaptation, de
réadaptation, de maintien, d'accompagnement par des professionnels pour
ces personnes sont aussi au centre des discussions par rapport à leurs besoins,
que l'évaluation des besoins, l'accès aux services doit se faire de façon
continue, de qualité, afin d'améliorer les conditions de vie et surtout la
participation sociale pleine et entière des personnes handicapées.
La PL n° 1 introduit
ici qu'une personne ayant un handicap neuromoteur grave et incurable peut faire
une demande. Nous sommes d'avis de créer un comité d'experts qui se penche très
rapidement sur la notion de handicap et
ainsi éviter toute dérive au niveau de la fin de vie des personnes ayant un
handicap qui demandent l'AMM, et, de plus, que la Commission sur les
soins de fin de vie veille de façon spécifique l'application, s'il y a
ouverture, afin d'éviter toute dérive.
Le RPCU vous remercie de prendre en compte les
propos que nous avons émis dans notre mémoire. Merci beaucoup.
• (16 h 50) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme Tremblay, pour votre présentation.
Vous avez soulevé des questions, alors, avec
les membres, on va ouvrir la discussion. On va commencer par Mme la ministre
pour une période de 16 min 30 s. La parole est à vous,
Mme la ministre.
Mme
Bélanger : Oui. Alors, Mme Tremblay, bonjour. Ça fait
plaisir de vous revoir. Merci pour le mémoire, là, qui nous est déposé
aujourd'hui par le Regroupement provincial du comité des usagers et pour votre
présentation.
Première question de mon côté. Vous êtes
favorable avec l'ensemble... un grand ensemble des éléments, là, essentiellement, du projet de loi n° 11, vous
faites des recommandations très pertinentes. Mais peut-être, avant d'aller dans
certaines de vos recommandations, qui sont intéressantes, j'aimerais juste
m'assurer, au niveau de la vision que le RPCU a concernant le volet de
l'handicap : Est-ce que le fait de mettre le handicap et de le spécifier
pour le volet neuromoteur représente un enjeu pour le RPCU, en termes d'accès,
pour d'autres usagers qui ne seraient pas dans la classification de handicap
neuromoteur, mais qui seraient... qui présenteraient d'autres situations de
handicap?
Mme Tremblay (Sylvie) : Cette
question est à double volet, je vous dirais. Je comprends, par les discussions qu'il y a eu préalablement sur le projet de loi
n° 38, qu'il y avait des ouvertures et qu'il fallait encore discuter à cet
effet. J'ai été DG de l'OPHQ il y a quelques années, en 2013 jusqu'en
2015, et je vous dirais que, pour les personnes handicapées, même celles qui sont sur nos tables de mission,
chez nous, c'est un peu épidermique, tout le volet fin de vie. On est toujours en lien, historiquement...
avec un historique qui est lié beaucoup à l'euthanasie, on revient à des mots très,
très particuliers, là. Et je faisais encore des... j'ai réfléchi et j'ai
demandé à quelques personnes des tables de mission de nous parler de ça, et
c'est toujours épidermique.
Ce qui me réjouit malgré tout, c'est qu'on
puisse en discuter à la commission, on puisse arriver à des discussions ouvertes et qu'on puisse ouvrir le
débat de façon sain et respectueux sur l'ensemble des interrogations liées
aux handicaps neuromoteurs, qui sont de tous ordres. Bien sûr, il y a des gens
qui ont des AVC et puis qui sont dans des
situations particulières, on peut parler de paraplégie, quadraplégie, mais il y
a aussi des gens qui ont des déficiences et qui ne sont pas intégrés
dans ce concept, et là il y a beaucoup de confusion.
Alors, je pense que la commission fait un bon
travail. Il y a une évolution, il y a encore une évolution à vos travaux, et il
ne faut pas que cette évolution-là soit déterminée par certaines
problématiques. C'est pour ça qu'on vous
dit : Peut-être, dans un contexte... prenez une pause. Un comité d'experts
pourrait se pencher sur cette... ces notions de handicaps. Mais, au-delà, la commission de fin de vie pourrait aussi
valider très spécifiquement pour qu'il n'y ait pas de dérive en cette
matière.
Alors, nous, on pense que la société québécoise
est mûre pour une avancée au niveau des problématiques neuromoteurs, mais, chez nos membres, il y a encore beaucoup, beaucoup
de réticence et beaucoup d'incompréhension, aussi, en fonction de
l'ensemble des handicaps.
Mme Bélanger : En
fonction de l'ensemble des handicaps. OK, je comprends. Peut-être juste nous
expliquer qu'est-ce que c'est, les tables de mission, juste pour que l'ensemble
de mes collègues comprennent bien, oui.
Mme Tremblay (Sylvie) : Alors, le
RPCU, on est... on représente à la fois les personnes en centre jeunesse
jusqu'à des personnes en fin de vie. Donc, nous, on a des comités d'usagers qui
sont dans toutes les missions, que ce soit l'hébergement, les personnes âgées,
les personnes handicapées, réadaptation, déficience physique, intellectuelle, santé mentale, dépendance. Donc, toutes les
personnes sont représentées chez nous, et on a des tables spécifiques où on
discute, bien sûr, des droits, mais aussi des grands sujets qui sont en lien
avec les droits des usagers, et ce, partout au Québec. Et c'est pour ça qu'on
vous dit aussi : Au niveau des soins palliatifs à domicile, il y a
beaucoup de besoins aussi, par ailleurs.
Alors, c'est ça, nos tables de mission. Et on a une table spécifique, là, pour
la réadaptation, donc, santé mentale,
déficience intellectuelle, déficience physique et troubles graves de l'autisme.
Donc, on a des tables spécifiques à ce niveau-là.
Mme Bélanger : OK. Peut-être... je veux
juste revenir sur... Bon, dans la loi, dans le projet de loi n° 11, on
parle de handicaps neuromoteurs. Je comprends qu'à la lumière de ce que vous
nous dites, si on n'avait pas mis, dans le
projet de loi, le volet neuromoteur, ça aurait fait probablement réagir
beaucoup de vos membres, parce que, là, dans le fond, on aurait élargi
le concept encore plus large.
Mme Tremblay (Sylvie) : Absolument.
Mais, au-delà, le concept neuromoteur, pour certaines personnes, il est un peu
flou aussi, alors il faut peut-être le définir davantage pour ne pas créer de
confusion supplémentaire. Moi, je pense que c'est une ouverture qui peut être
faite. Mais, en même temps, il faut bien, bien la baliser, il faut bien
exprimer la portée de ça, parce qu'il y a effectivement la notion de maladie
grave et incurable et l'historique du
mouvement des personnes handicapées et celles dont je vous parlais en
préambule. Donc, il faut être très, très conscients aussi que c'est
sensible, là, pour ces personnes.
Mme Bélanger : Je termine avec une
dernière question. Je vais laisser mes collègues, par la suite, poser des questions, mais, sur le trouble mental, c'est...
vous savez, on l'exclut, là, du projet de loi, mais, comme vous représentez
différents groupes d'usagers, est-ce que ça a été salué, remarqué par vos
membres, le fait qu'on a exclu du projet de loi les personnes ayant un trouble
mental?
Mme Tremblay (Sylvie) : Je pense que
les gens étaient satisfaits de ne pas se retrouver dans le projet de loi parce
que... Je pense qu'il y a beaucoup de discussions qui ont encore à avoir au
niveau des problématiques de santé mentale
et je pense que c'est très bien de continuer la réflexion et de voir comment
éventuellement, dans l'exercice que vous
faites et qui sera fait dans les prochaines années aussi, il pourra y avoir des
discussions sur ces problématiques-là. C'est plutôt positif, en fait.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la ministre.
Je vais me tourner maintenant du côté de la députée de Roberval pour...
Il reste encore 9 min 10 s.
Mme
Guillemette : Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Tremblay
d'être avec nous aujourd'hui. J'aimerais, moi, vous entendre sur le
handicap. Dans le projet de loi, c'est «handicap neuromoteur». Vous ne croyez
pas que, si on ne les inclut pas, ces... les handicaps, ces gens-là pourraient
se sentir... pourraient sentir de la discrimination ou... Parce qu'il ne faut
jamais oublier qu'il y a la notion de souffrance, hein, qui doit venir avec ça.
Donc, ça ne veut pas dire que, parce qu'ils
peuvent faire une demande d'aide médicale à mourir, qu'ils auront accès et
qu'ils pourront faire une demande. En fait, s'il n'y a pas de notion de
souffrance, quelqu'un ne pourra pas, que sur la base, là, qu'il est... qu'il a
un handicap, faire une demande.
Mme Tremblay (Sylvie) : Je
comprends. On parle de maladie grave et incurable. Je comprends très bien. Vous
et moi, on le comprend. Mais, les personnes handicapées, la notion de handicap,
les limitations fonctionnelles, on arrive à la commission, et, à chaque étape
de cette commission, il y a eu des débats. Vous vous souviendrez, les premières
démarches étaient sur le cancer, ensuite il y a eu d'autres démarches. On peut
faire l'historique de ça. Votre commission
aura à se pencher sur la notion de handicap, les personnes handicapées, ce
qu'elles vivent, ce qu'elles vous demandent, et les besoins en fonction
de la discrimination ou pas. Et ça, je pense que c'est à la commission de bien
circonscrire la notion neuromotrice avec la maladie grave et incurable, de
bien, bien organiser et de spécifier en quoi...
Alors, si c'est de l'AVC, de la dystrophie musculaire, une amputation liée à
une maladie vasculaire, il y a déjà des avancées à ce niveau-là, mais il y a d'autres personnes handicapées qui
pourraient ne pas se reconnaître et qui pourraient, éventuellement... Il
pourrait y avoir des dérives.
• (17 heures) •
Alors, c'est plutôt positif, ce qui vous arrive,
en fait, parce qu'à chaque fois qu'on arrive sur cette merveilleuse commission,
où on est capables, nous, comme société, d'évoluer en fonction de la fin de
vie, on est capables aussi d'adresser les problématiques qui sont de plus en
plus complexes. Et, au niveau des personnes handicapées, je vous dirais qu'il y
a de la complexité et il y a aussi des gens qui pourraient se sentir
discriminés en fonction de ça. Donc, c'est une avancée. C'est des discussions
qui doivent se faire, se faire sainement, vous le faites, et je pense qu'il y a
de l'ouverture. Alors, s'il faut prendre un peu plus de temps puis qu'un comité
d'experts puisse se pencher là-dessus, tant mieux. Si la
commission de fin de vie a une vision très, très particulière sur cette
ouverture et qu'ils voient qu'il y a de la dérive, ils pourront aussi revenir à
la commission et au législateur pour avancer.
Moi, je pense que la
prudence est toujours de rigueur. Vous le savez, nous le savons. Et, dans ce
contexte-là, vous devez avoir la vision la plus éclairée possible. On peut se
revoir dans six mois. Ça peut être adopté, aussi, avec la notion neuromoteur
avec maladie grave et incurable maintenant, mais gardez-vous de l'espace
pour... gardez-vous de l'espace pour de
l'évaluation très, très, très rapide, parce
qu'il pourrait y avoir des dérives.
Puis moi, j'ai été DG de l'OPHQ, là,
puis, vraiment, c'est très épidermique. À partir du moment où on parle de fin
de vie, les personnes handicapées sont souvent très, très bouleversées
par ce qui s'est passé historiquement dans leur vie. Alors, moi, je pense qu'il
faut... il faut... Vous avez un bon... un
beau problème puis vous êtes... vous avez toute la sérénité, là, pour prendre
en main cet... ce nouveau débat, je dirais.
Mme
Guillemette : Justement, c'est l'intérêt, là, de vous entendre. Et
est-ce qu'un véhicule comme... bon, vous avez parlé d'un comité d'experts, ou
d'un forum, ou... pourrait faire en sorte que, rapidement, on puisse statuer?
Ma première question, et, dans le projet de loi, on a «handicap neuromoteur»,
tant qu'à être là, et de travailler, et de se questionner sur le sujet, est-ce
qu'on devrait y aller pour les handicaps en considérant qu'il y a toujours le
volet de la souffrance qui est là? Est-ce qu'on devrait y aller dans le
handicap, grand... grand terme?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Votre première question... votre premier préambule,
c'est... rapidement, à votre fin de question, je vous dirais que ce ne sera pas
rapide si on ajoute l'ensemble des handicaps. Et je vous prendrais comme
exemple les personnes qui ont un handicap intellectuel ou un handicap... un
handicap intellectuel, prenons cet
exemple-là, qui ne sont... ce n'est pas un handicap neuromoteur. Donc, à partir
du moment où on ouvre l'ensemble de la notion de handicap, ce ne sera
pas, probablement rapide.
Moi, ce que je vous
dis, c'est : Vous avez circonscrit un peu la notion neuromoteur sur une
maladie grave et incurable, pour certaines problématiques, je pense qu'il faut
le fouiller davantage. À cet aspect-là, peut-être qu'un comité d'experts pourrait
vraiment le baliser correctement pour demander aussi à la commission de le
baliser aussi. Et moi... Et, si c'est un
débat sur le handicap, moi, je pense qu'il faut prendre le temps, comme on
s'était dit précédemment pour la
santé mentale, prendre le temps de reprendre le pouls de la population, des
personnes handicapées elles-mêmes. L'office est là pour donner des conseils
aussi, l'OPHQ est là pour ça, donc de refaire un peu le tour et d'arriver
avec une vision éclairée.
C'est mieux de
prendre le temps qu'il faut pour que la population embrasse, comme vous êtes en
train de faire, et que nous, on puisse,
comme comité d'usagers, le défendre et permettre au comité d'usagers aussi de
bien l'expliquer au niveau des
missions respectives des établissements. Tout ça... tout ça est positif en soi,
mais il y a toujours la question de temps puis il y a toujours la
question de compréhension aussi.
Mme
Guillemette : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup. Nous avons encore le temps pour une dernière question. Mme la
députée de Laporte, il vous reste 2 min 15 s.
Mme Poulet : Bien,
ça a été... Bonjour, madame. Merci beaucoup de votre participation. Mme la
Présidente, merci. Ça a été partiellement répondu, vous avez couvert certains
éléments. Comment se vit aujourd'hui la demande contemporaine? Quelle est la réalité de vos usagers? Vous êtes là pour
prendre le pouls de la population, de vos usagers sur... qui vivent
cette demande-là.
Votre recommandation
n° 4, c'est de lancer une campagne de sensibilisation et d'information.
J'ai parlé avec des collègues tantôt, avant de rentrer, de commencer la
commission, on parlait justement que... de l'information d'un endroit n'est pas
nécessairement la même information qu'un autre endroit. Est-ce qu'il y a une
problématique, au niveau des usagers, quant
à l'information qui est diffusée aujourd'hui dans la demande contemporaine? Et,
si oui, de quelle façon on peut s'assurer que, pour la demande anticipée,
l'information soit claire pour tous?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Bien, c'est beaucoup plus large que... Ce que je vous dis
puis ce que nos membres nous disent, c'est qu'il y a beaucoup de confusion sur
l'ensemble de l'oeuvre. Alors, les gens, ils adhèrent à la loi, ils adhèrent au changement, ils vous écoutent, et c'est
très... Et les gens sont heureux de voir que vous prenez un soin très
extrême à baliser l'ensemble de la fin de vie et l'aide médicale à mourir,
mais, au-delà, nous, on reçoit des demandes de... les demandes médicales
anticipées. Comment on peut travailler? Comment... comment... comment répondre à une personne qui pense que de demander
l'anticipé peut aller directement à l'AMM? Il y a de la confusion assez
générale dans l'ensemble de la population puis de nos membres aussi sur, je
vous dirais, la ligne, là. Et ça, je pense que vous devez être conscient que
plus ça se complexifie, plus ça devient... Il faut l'expliquer davantage. Et nous, on travaille avec des bénévoles qui sont
dans tous les milieux, et là on en perd un peu notre latin. Alors, nous, ce
qu'on vous dit, c'est : On peut-tu
adapter des mécanismes de communication? Nous, on peut vous aider à faire la
formation. Il y a des... on rencontre des intervenants, quelquefois, qui
ne comprennent même pas la différence, là. Alors, je comprends qu'il y a toutes sortes de monde dans le réseau, là, mais, si,
nous, il faut les accompagner pour bien expliquer aux usagers, là, ça
devient un peu particulier. Alors...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme Tremblay. Cette portion d'échange
avec la ministre et les députés étant terminée, je vais me tourner du côté de
l'opposition officielle, merci, mesdames, merci, Mme la
ministre, avec l'opposition officielle, représentée par Mme la députée de Westmount—Saint-Louis,
pour une période de 9 min 54 s. La parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Mme Tremblay. Merci beaucoup pour votre exposé, votre
calme et la façon équilibrée que vous partagez le point de vue de vos usagers
puis vos membres. Parce que je trouve très intéressant que vous nous dites
d'aller avec prudence. Je vous entends quand vous parlez d'un comité d'experts.
Je suis d'avis que ça va être très important d'avoir une consultation et de
prendre le pouls de la population, parce que nous sommes en train d'introduire
une notion qui n'a pas eu une consultation large, dont nous n'avons pas entendu
vraiment la voix de beaucoup de groupes concernés. Entre autres, la Société québécoise
de la déficience intellectuelle m'ont envoyé
un message juste... ça fait juste quelques heures, pour dire : Ils
souhaitent venir témoigner et partager leur point de vue. Alors, vous
avez des alliés en ce qui concerne la demande d'avoir un comité d'experts ou
avoir un forum.
Moi, je souhaite savoir comment vous, vous
travaillez pour consulter vos membres. Parce que vous avez dit à plusieurs
reprises «vous pensez», mais est-ce qu'il y a un mécanisme que vous avez en
place pour faire de la consultation puis de prendre le pouls des gens que vous
représentez?
Mme Tremblay (Sylvie) : Je disais
précédemment à Mme la ministre qu'on est des tables de mission. Alors, les tables de mission, comme je vous disais, c'est
que, dans chaque mission, on a des comités d'usagers sur différentes
problématiques qui sont rencontrés, sur l'accès, sur les droits et les
problématiques associées. Donc, c'est par ce biais-là qu'on le fait. Et aussi
on se permet d'aller voir nos quelques établissements ciblés en fonction de
problématiques, les comités, dans toutes les régions du Québec, sur certaines
autres problématiques. Donc, il y a plusieurs façons de consulter nos membres,
et les grandes associations, probablement que les collègues qui viendront
diront la même chose, c'est que la base, c'est... la base, c'est nos membres,
et nos membres, ils sont dans tout... dans tout
le réseau au Québec. Alors, des fois... des fois, on prend acte puis, des fois,
on pousse davantage, mais c'est d'eux que vient l'information, c'est d'eux que... c'est à eux que reviennent la
défense des droits. Donc, il faut les consulter constamment.
• (17 h 10) •
Mme Maccarone : Merci. Je suis
d'avis, comme vous, que d'ajouter la notion de handicap, que ce soit handicap
neuromoteur ou handicap, sans critère, mais avec une définition, évidemment,
c'est un enjeu très sensible et que nous
devons se préoccuper aussi de le message que nous envoie... que nous sommes en
train d'envoyer à tous nos citoyens qui sont présentement en situation
de handicap. On ne veut pas stigmatiser leur vie et leur qualité de vie. Alors,
très important d'aller avec de la prudence.
Mais je veux vous entendre juste pour la clarté
en ce qui concerne déficience intellectuelle, vous l'avez évoqué plus tôt avec
mes collègues, trouble du spectre de l'autisme, par exemple, puis le désir de
cette population, de ces citoyens aussi, qui sont aptes à consentir, de respecter
leur droit à l'autonomie et autodétermination. Si jamais, parce qu'on parle
d'une... on ne parle plus d'état, maintenant. Dans cette loi, ce n'est plus
l'état. Là, maintenant, on parle de maladie,
et il y a une distinction entre maladie et handicap. Ce n'est pas tous les
handicaps qui découlent d'une maladie.
Ce n'est pas... Les souffrances ne sont pas nécessairement liées à la maladie.
Alors, comment prévoyez-vous... Comme, par exemple, une personne qui
souffre d'une déficience intellectuelle peut être atteinte d'un cancer et est
en train de souffrir. Puis la souffrance aussi, la notion de souffrance et
aptitude... Comment voyez-vous le mécanisme à l'intérieur de cette loi pour non
seulement respecter le droit d'autodétermination de ces personnes, mais aussi
de les protéger? Parce que, c'est sûr, c'est aussi des gens qui sont
vulnérables.
Mme Tremblay (Sylvie) : C'est là où
je trouve que vous avez des bonnes... des bonnes... des bonnes réflexions à faire en commission, mais, au-delà,
les discussions doivent revenir à l'essentiel dans le sens où la participation
pleine et entière des personnes handicapées,
que ce soient des personnes ayant des limitations fonctionnelles en déficience
intellectuelle, autisme, les personnes sourdes, les personnes... bon, toutes
catégories de handicap confondues, ce que je disais dans le mémoire, c'est que
la participation pleine et entière des personnes handicapées ne se réduit pas à
la maladie, c'est sûr. Et il y a d'autres
volets que la santé pour les personnes dans la participation sociale, qu'on
peut penser à l'emploi ou autres. Tu sais, c'est des personnes à part
entière. Et effectivement ce qui arrive à la commission, c'est : plus vous avancez... plus nous
avançons en tant que population sur la fin de vie, plus on se questionne sur
des éléments encore plus sensibles au fil du temps.
Alors, il y a
eu... comme je vous disais précédemment, il y a eu, au début, qu'est-ce que
c'étaient, les maladies, le cancer, qu'est-ce que ça voulait dire, la fin de
vie, et tout. Et là on est dans des discussions où on parle de la notion
de handicap. Il y avait une vision
particulière pour les maladies neuromotrices, maladies incurables graves, par
exemple l'AVC, tout le monde peut
comprendre ça. Et là vous ouvrez, et la société civile ouvre le débat sur la
notion de handicap.
Alors, comme législateurs, comme membres de la
commission, que pouvez-vous faire? Alors, il faut entendre ça. Est-ce que ça
doit vous ralentir? Peut-être que vous allez me dire non, peut-être qu'entre
vous vous allez dire non. Alors, il faut vous... il faut vous outiller. Donc,
ça peut peut-être prendre un comité d'experts qui vous permettra de baliser
qu'est-ce que les handicaps neuromoteurs associés, qu'est-ce que ça veut dire,
la notion de handicap plus large et comment ces personnes-là pourront
éventuellement, comme toute personne, comme vous et moi, avoir accès à l'aide
médicale à mourir. Mais, de ces... de ces travaux-là, je pense qu'il va émerger
d'autres discussions, et, dans peut-être quelques années, nous aurons encore
des discussions sur d'autres problématiques qui sont liées à la fin de vie, qui
font partie de la vie.
Alors,
il y a une capacité d'avoir un groupe d'experts. L'Office des personnes
handicapées est là pour vous supporter aussi. Et, dans ce contexte-là, nous, on
vous dit : C'est... c'est bien sûr fragile, mais les gens, ils sont quand
même contents de voir qu'il y a des avancées dans l'aide médicale à mourir et
qu'on peut aussi en discuter en fonction des handicaps.
Mme
Maccarone : Merci. Il me reste très peu de temps, mais je souhaite
vous entendre en ce qui concerne la position du regroupement en... pour le rôle
du tiers de confiance. On a entendu la société d'Alzheimer qui nous ont dit que... Parce que, dans la loi, c'est marqué,
on peut déterminer ou nommer, et eux, ils disent qu'on devra. Alors, votre
position en ce qui concerne le rôle de cette personne clé?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Je ne suis pas sûre qu'on devrait dire «devra».
Mme
Maccarone : OK. Ça fait que, selon vous, ça devrait être un choix?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Oui.
Mme
Maccarone : Alors, ça se peut qu'on va se retrouver avec des personnes
qui n'auront pas un tiers de confiance, et
ce serait une personne dans le corps professionnel médical, de santé qui va
déclencher la demande anticipée, par exemple, d'aide médicale à mourir.
Comment voyez-vous le processus si nous n'avons pas un tiers de confiance
nommé?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Bien, ce n'est pas tout le monde qui a des tiers de
confiance.
Mme
Maccarone : Oui, c'est vrai, on... il y a du monde qui se retrouve
seul, tout à fait, mais ça ne nous empêche pas de nommer quelqu'un. Par
exemple, on vient d'entendre le groupe précédent, ils ont dit que ça se peut que nous devons interpeler aussi l'ordre des
travailleuses et travailleurs sociaux, que ça peut être aussi quelqu'un proche,
mais pas nécessairement un proche aidant. Ça peut être un regroupement, un
organisme, la société d'Alzheimer aussi. Il y avait quand même des recommandations
en ce qui concerne ceci, mais vous, vous ne pensez pas que c'est une nécessité?
Mme Tremblay
(Sylvie) : Alors, moi, ce que je vous dis, c'est... Bien, dans ce
contexte-là, ce que je vous dis, l'ordre... Les professionnels de la santé et
services sociaux, dans ce contexte-là, doivent... pourraient être habiletés, j'en suis. Parce que ça protège les
droits de chacun et de ceux qui sont seuls et qui n'ont pas de famille et de
capacité aussi. Alors, c'est... plus... plus on est proche des professionnels
de la santé, plus c'est adéquat.
Mme
Maccarone : Mieux que c'est. Et, dans les dernières secondes, en ce
qui concerne le formulaire, parce que je
peux imaginer, pour le regroupement des... des comités d'usagers, comme vous
représentez, ça va être important d'avoir un formulaire qui est adapté,
par exemple, pour les personnes avec des difficultés de vision, par exemple, ça
fait qu'adapté vraiment pour toutes les
personnes, mais avez-vous des recommandations pour nous, comme membres?
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Rapidement, parce le temps est déjà écoulé.
Mme
Maccarone : Ah! voilà.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Rapidement, rapidement.
Mme Tremblay
(Sylvie) : Alors, pour tout document du gouvernement, ça devrait être
adapté et simplifié. Alors, il y a toutes sortes de façons de les faire. Là
aussi, on peut vous donner un coup de main, l'office est là aussi, il y a des personnes très, très habilitées à le
faire. Oui, le plus possible. C'est comme la campagne populationnelle, il faut
que les gens comprennent ce à quoi ils s'attendent quand ils demandent l'aide
médicale à mourir. Tout ça doit être simple.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci, Mme Tremblay. Alors, je poursuis.
On poursuit la discussion avec la députée de Sherbrooke pour une période de
3 min 18 s. La parole est à vous.
Mme Labrie : Merci.
Je vais vous poser une question spécifiquement liée à votre qualité de
représentante des comités d'usagers. Il y
aura des gens qui auront un tiers de confiance, il y a des gens qui n'en auront
peut-être pas. Et, pour ces personnes-là, ça pourrait reposer sur des
membres de l'équipe de soins de lever le drapeau quand c'est le temps de mettre en oeuvre le processus de demande
anticipée. Par contre, il y a quand même, je vais dire, du roulement de
personnel. Parfois, dans certains milieux, on fonctionne avec des agences, donc
le roulement est... est quand même fréquent,
de sorte qu'il n'y a pas nécessairement des gens qui sont en mesure de voir
l'évolution de la situation d'un usager dans le temps et encore moins
d'apprendre à les connaître.
Comment
vous pensez que ça va être possible d'appliquer ça, ces demandes-là anticipées
pour les personnes qui n'ont pas de tiers de confiance? Est-ce qu'en ce moment
dans nos établissements de soins de longue durée on devrait prévoir des moyens
particuliers pour s'assurer de ne pas échapper personne, notamment celles qui
n'auront pas de tiers de confiance?
Mme
Tremblay (Sylvie) : Donc, si je comprends votre question, c'est :
Peut-on se fier au personnel existant pour bien supporter les personnes qui
n'ont pas de proche aidant ou de tiers autour d'eux?
• (17 h 20) •
Mme Labrie : Oui.
Puis je pose la question... parce qu'évidemment personne n'est mal intentionné,
là, puis je ne veux pas présumer d'une négligence quelconque, mais c'est-à-dire
que le simple fait qu'il y ait un roulement fréquent de personnel rend
peut-être ça difficile, pour... pour une équipe de soins, de voir qu'une
personne vit plus de souffrance, d'être au
courant qu'il n'y a personne qui fait la surveillance pour voir si c'est le
temps de mettre en oeuvre la demande anticipée, par exemple.
Mme Tremblay
(Sylvie) : Alors, moi, j'ai confiance à ce réseau-là. Je suis dedans
depuis 35 ans. Il y a des chefs de service, il y a des gens qui sont des
infirmières, qui sont là depuis longtemps. On parle de... d'infirmières
spécialisées, il y a des médecins aussi derrière ça. Alors, moi, je fais
confiance au personnel pour être capable d'accompagner
les personnes qui sont en grande vulnérabilité. Et là qu'on se dit : Bien
là, il y a quelque chose, il y a... il y a quelque chose qui n'est pas
tout à fait cachère, dirons-nous, mais moi, je... je fais... Je... malgré tout,
et malgré tout ce que j'entends à toutes les
semaines, et tous les déboires, et toutes les plaintes que nous avons, je fais
quand même confiance. Parce que ce débat, que nous avons et que vous avez sur
la fin de vie pour tous et toutes, que nous soyons usagères nous aussi, est
préoccupant. Et je pense que les gens sont très, très au fait de ça. Les
dérives ne se font pas là.
Et je parlais de
soins palliatifs, je parlais de soins palliatifs à domicile, c'est là que ça se
passe, les problématiques, et les dérives sont beaucoup là. Alors, revenir à ça
aussi et se dire : Mon Dieu! Que les gens soient à l'hôpital et que, là,
il n'y a pas eu de place en palliatif, c'est ça aussi ce qui amène vos
discussions, et la commission va répondre à ça. Alors, je pense que c'est là qu'il
faut pousser davantage.
Mme Labrie : Donc, ce ne serait pas nécessaire de nommer
quelqu'un responsable de faire ce suivi. Vous avez confiance que ça va
se faire.
Mme Tremblay
(Sylvie) : Bien, ça va se faire.
Mme Labrie : Parfait.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci
beaucoup. Nous allons terminer, donc, cet échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice
pour une période de 3 min 18 s.
Mme Tardif : Merci,
Mme la Présidente. Merci, merci d'être là cet après-midi en virtuel avec nous,
mais d'avoir préparé le rapport, c'est quand
même un travail exhaustif, on le sait, on le reconnaît. Vous avez des
centaines, voire des milliers, devrais-je dire, de gens que vous servez et vous
avez, dans votre rapport, fait mention que beaucoup de citoyens au
Québec, et même des soignants, ne connaissent pas très bien la loi sur l'aide
médicale à mourir. Et vous avez... vous nous
invitez à réfléchir sur la question de lancer une campagne d'information, une
campagne de sensibilisation, tant sur ce qui existe, mais aussi et
davantage sur ce qui s'en vient. J'aimerais vous entendre parler de ça un petit
peu. Merci.
Mme Tremblay
(Sylvie) : Je ferais le lien avec la campagne du curateur, là, sur
l'accompagnateur, qui se fait ces temps-ci, où on voit une dame qui parle
qu'est-ce qu'elle a fait aujourd'hui, et son fils dit : Bien, moi, j'ai
accompagné ma mère. Alors, c'est une campagne que le Curateur public a faite.
C'est une campagne populationnelle et qui amène les gens à réfléchir sur l'âge,
et l'accompagnement qu'on peut avoir, et la demande qu'on peut faire au
curateur. C'est dans le même sens, c'est-à-dire que la fin de vie, la vision
que nous avons au Québec, qui est assez... qui est assez incroyable dans le sens
positif du terme, je pense que plus les gens seront sensibilisés, moins il y
aura de dérives à l'entrée et à la sortie, plus les gens vont encore plus
adhérer à ce que vous faites et ce que... ce sur quoi nous discutons
aujourd'hui.
La... les membres de
la... Je vous donnerais un exemple. Les membres de la commission de fin de vie
sont venus à notre congrès en octobre à Rivière-du-Loup, et... il y avait
600 personnes, et émergeait de là toutes sortes de questions qui étaient
plutôt sur les directives médicales anticipées, qui n'étaient pas sur l'AMM, ou
d'autres questions sur... bien, toutes sortes de questions, qui peut amener des
dérives. Alors, vous faites bien votre travail, la commission le fait et l'a
fait précédemment, mais plus on avance, plus je pense qu'il faut démystifier.
Dans un contexte aussi où on a eu une pandémie, vous vous souviendrez, et là je
pense qu'à ce moment-là il faut encore plus être vigilant sur les messages à la
population pour qu'il n'y ait pas de dérive derrière ce que vous faites
aujourd'hui puis ce qu'on va faire demain.
Mme Tardif : Merci.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Donc, c'est ce
qui met fin à nos échanges, Mme Tremblay. À nouveau, au nom de tous mes
collègues, au nom de la ministre, merci. Ce fut des échanges fructueux. Alors,
je vais vous souhaiter une bonne fin de journée.
Et je vais suspendre
les travaux, le temps de recevoir le prochain groupe. Merci, Mme Tremblay.
(Suspension de la séance à
17 h 25)
(Reprise
à 17 h 33)
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Les travaux
de la Commission des relations avec les citoyens reprend.
Alors, nous avons...
nous recevons, pour cette fin de journée, le Conseil pour la protection des
malades, qui est représenté par
M. Daniel Pilote, membre du conseil d'administration. Bienvenue,
M. Pilote. Donc, la procédure est la suivante, vous allez vous
présenter et vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour votre
exposé, et va s'ensuivre la période de discussion avec les membres de la
commission. Alors, la parole est à vous.
Conseil pour la protection des
malades (CPM)
M. Pilote (Daniel) : Bien, je vous remercie
infiniment. Juste me mettre... Oups! Ce ne sera pas long, mes chers
amis, on va juste... parce que j'ai perdu ma page. Ce ne sera pas long.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Si vous avez besoin de temps, faites juste me
le dire, on peut suspendre.
M. Pilote
(Daniel) : Pas de problème. Non, je veux juste... je veux juste... OK,
j'ai perdu ma page. On va la remettre. Voilà, c'est fait...
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Vous l'avez?
M. Pilote
(Daniel) : Bien oui, je l'ai retrouvée.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Alors, allez-y, on vous écoute.
M. Pilote
(Daniel) : Bon, bien, donc, je vous remercie. Donc, le CPM est honoré
d'avoir été invité à commenter le projet de la loi... le projet de loi
n° 11. Nous remercions Mme Sonia Bélanger, ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, pour la confiance témoignée à
l'oeuvre de Claude Brunet. Le Conseil pour la protection des malades,
constitué en 1974, va célébrer ses 50 ans en 2024. Donc, pour débuter,
j'aimerais, au nom du conseil de la protection des malades... de mentionner que
nous sommes d'accord avec le projet de loi n° 11.
Donc, j'aimerais vous
mettre dans le contexte que moi, je vis actuellement, bien sûr. Je suis atteint
de la dystrophie musculaire Becker. C'est une maladie qui est relativement
grave, mais... et incurable pour le moment, bien
sûr. Et, il y a 10 ans, j'ai été hospitalisé à Charles-Le Moyne suite à
une pneumonie grave, et je remercie la science médicale de m'avoir sauvé. Cependant, en ce qui concerne le projet de
loi, j'ai toujours eu l'idée du prochoix des citoyens.
Donc, pour ma part,
je ne suis pas atteint d'une maladie grave, mais cependant elle est incurable.
S'il était nécessaire, moi, je veux une
sédation pour soulager mes souffrances. Or, je veux que la vie décide de mon
sort. Je crois que la vie d'un être humain est sacrée.
Je pense que l'aide
médicale à mourir permet aux citoyens de choisir le moment approprié pour
mettre un terme à des souffrances inutiles. L'idée du projet de loi est qu'on
peut choisir le moment approprié pour une maladie grave et incurable.
Pour qui la personne
peut anticiper de le faire avec un choix éclairé dans les circonstances
évidentes et les limites raisonnables pour mettre fin à la vie, je crois que...
qu'une personne ne peut... une personne qui ne peut plus communiquer, dans une
position foetale depuis plusieurs jours, donc, qui serait peut-être... un temps
approprié pour un choix anticipé pour l'aide médicale à mourir.
Je suis arrivé à
réfléchir à certaines inquiétudes concernant l'aide médicale à mourir pour ne
pas banaliser et faciliter cette alternative
à la souffrance. Je ne veux pas que l'aide médicale à mourir qui serait
accordée pour des raisons soit de
manque de soins ou... ou à cause d'une... d'une maltraitance. Je pense que cela
ne serait pas une raison valable.
J'aimerais vous
raconter un fait d'une personne avec une paralysie des membres inférieurs causée
par un accident couvert par une agence
gouvernementale. Et le responsable du dossier de cette agence pour les soins de
cette personne a osé dire que peut-être l'aide médicale à mourir serait
une solution.
Alors, je pense à une
situation où une personne serait atteinte d'une maladie incurable, et l'idée
malveillante de diminuer petit à petit les soins et les services dans l'espoir
qu'elle, peut-être, utilise l'aide médicale à mourir. Je suggère de faire une analyse sur... vraiment pour
être sûrs et certains qu'il n'y a pas une autre idée en arrière de tout ça.
Alors donc, ce serait, je pense, une façon, là, de... Il faudrait bien analyser
puis... pour voir si ce n'est pas ces raisons-là.
C'est plutôt de l'aide
médicale à vivre, plutôt, qu'il nous faut. J'espère que le réseau de la santé
ne diminuera pas les soins et les services offerts aux prestataires, surtout
dans un avenir rapproché. Il y a beaucoup de plaintes actuellement, et on peut donner... oui, et peut-être ça peut donner le
goût de peut-être recevoir l'aide médicale à mourir.
Moi, j'ai été sauvé
il y a 10 ans. Et j'ai remarqué et vécu avec plusieurs situations de
maltraitance et de négligence. J'ai pensé souvent que c'était de l'aide pour
vraiment aller vers de l'aide médicale à mourir. Donc, il serait très difficile
de... à cause d'une négligence parce qu'on dirait : De toute façon, dans
le fond, on ne pouvait pas rien faire pour cette personne souffrant d'une
maladie incurable. Je ne voudrais pas que ce soit une alternative pour
banaliser l'aide médicale à mourir pour toutes sortes de maladies curatives.
Donc, je vous remercie. Et le Conseil pour la
protection des malades, nous apprécions. Et, justement, merci pour nous avoir
donné la chance de parler.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien. Eh bien, merci beaucoup, M. Pilote,
pour votre témoignage, votre
expérience et vos recommandations. Alors, on va débuter la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vais me tourner du côté de la
ministre. La ministre a une période de 16 min 30 s pour discuter avec
vous ainsi que les députés de la banquette. La parole est à vous, Mme la
ministre.
Mme
Bélanger : Bonjour, M. Pilote.
M. Pilote
(Daniel) : Bonjour.
• (17 h 40) •
Mme
Bélanger : C'est un plaisir de vous revoir. Vous m'impressionnez
toujours, constamment, par votre énergie,
votre militantisme, la défense des droits des usagers. Je sais que c'est...
c'est très, très important. Je ne savais pas que ça allait faire
50 ans. Déjà 50 ans en 2024?
M. Pilote
(Daniel) : Exact. Oui, déjà.
Mme
Bélanger : OK. Bien, en tout cas, si... si on reçoit une invitation,
on ira certainement faire un tour. Vous allez certainement célébrer.
M. Pilote
(Daniel) : Excellent.
Mme
Bélanger : Mais je reconnais... et puis, en même temps, j'en profite,
là, aujourd'hui, on vous reçoit, et je sais que, tu sais, les relations avec le
Conseil pour la protection des malades, vous êtes là vraiment dans une perspective de défendre les droits des malades,
vous le faites très bien. Puis, des fois, ce n'est pas toujours facile entre
les différentes instances gouvernementales, ministérielles, les conseils de
protection de malades. Mais aujourd'hui je veux
quand même vous dire un grand merci pour votre prestation, pour le document que
vous avez écrit. J'ai beaucoup aimé votre entrée en matière en disant
que la vie d'un être humain, c'est sacré, et puis... Et vous êtes quelqu'un qui
a une expérience, en plus, parce que vous avez,
donc, une maladie. Et vous êtes quelqu'un qui est actif, qui a pris sa vie
en main et qui est très impliqué. Vous avez aussi parlé que c'est important,
pour vous, de choisir le moment, puis je fais
référence aussi au volet de mourir dans la dignité, parce que, là, vous avez
parlé de personnes en position foetale, avec impossibilité de
communication. Pour moi, ça, c'est la dignité, hein, des personnes.
Est-ce que...
Question que j'ai à vous poser : Quand vous avez lu le projet de loi
n° 11, est-ce que vous ressentez que ce projet de loi répond à la
philosophie que vous prônez? Est-ce que ça...
M. Pilote
(Daniel) : Oui, absolument.
Mme
Bélanger : Oui? OK.
M. Pilote
(Daniel) : Absolument, oui. Oui, je trouve que, vraiment, c'est... De
toute façon, ça fait longtemps qu'on en
parle. Là, c'est parce qu'on va la modifier pour l'amender. Justement, oui, je
pense qu'il fallait aller jusque là parce que, quand que, justement, une
personne... Parce que moi, j'en côtoie souvent ici, hein, dans le CHSLD, et puis, oui, on voit qu'à un moment donné la qualité
de vie... quand qu'il n'y a plus de qualité de vie, c'est une façon, je pense, de... peut-être d'anticiper aussi, hein,
pas attendre, vraiment, à être... parce que, de toute façon, la personne qui
est dans cette position-là ne peut plus choisir. Donc, je pense qu'une façon
anticipée serait... c'est une bonne solution.
Mme
Bélanger : Oui, et ça, c'est pour la demande anticipée. Puis vous
savez que, dans le projet de loi, on a aussi
intégré le volet des personnes ayant un handicap neuromoteur. J'aimerais ça
vous entendre par rapport à l'handicap neuromoteur. Oui.
M. Pilote (Daniel) : D'accord. Donc, qu'est-ce
que je peux vous dire pour ça? Écoutez, moi, je suis justement atteint
d'une maladie neuromotrice, sauf que, comme je l'ai dit tantôt, ce n'est pas
mon choix personnel. Tu sais, je veux dire, j'ai choisi que la vie décide de
mon sort, d'accord? Donc... Mais je respecte ceux, bien sûr, qui veulent quand
même peut-être dire... ou qui n'ont peut-être pas... une sorte de souffrance,
la souffrance surtout, hein, qui est peut-être difficile là-dedans.
Heureusement, mon problème moteur n'est pas souffrant. Une chance pour ça. Ça, merci pour... la vie pour ça. Mais, justement,
ceux qui ont des problèmes neuromoteurs, et que c'est souffrant, et puis que...
n'ont pas le goût de vivre cette souffrance-là, bien, au moins, ils peuvent se
permettre d'avoir cette possibilité-là.
Mme
Bélanger : ...Pilote, vous savez, on a commencé, hier, les
consultations, puis il y a des groupes qui nous disent qu'on aurait dû
indiquer, dans notre projet de loi, seulement les personnes aux prises ou
vivant avec un handicap et retirer complètement le thème neuromoteur. Qu'est-ce
que vous en pensez?
M. Pilote
(Daniel) : Bien, oui, c'est sûr et certain, tout dépendant du type de
neuromoteur qu'on parle, hein? Il y a beaucoup de types. Mais, dans l'ensemble,
on en arrive au même résultat, sauf que... tout dépendant du choix de la personne, bien sûr. Mais, pour nous
autres... pour nous autres... pour moi, en tout cas, je crois qu'il y a
plusieurs types de maladies qu'on
pourrait inclure. Mais, je ne sais pas, là, vous avez marqué «neuromoteur»
seulement, mais il y aurait possibilité peut-être de mieux, peut-être,
le préciser.
Mme Bélanger : OK.
Je vous remercie. Je vais laisser la parole à mes collègues.
M. Pilote (Daniel) : Merci beaucoup.
La
Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la ministre.
Donc, M. Pilote, on va continuer avec la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Bonjour,
bonjour.
Mme Picard : Ça va bien?On s'écrit,
mais on ne se parle pas souvent.
M. Pilote (Daniel) : Oui. Voilà.
Mme Picard : Je vais aller un petit
peu dans la même direction que Mme la ministre, parce que c'était... c'était un
petit peu mon questionnement aussi, où, si on enlevait le «neuromoteur», comme
certains l'ont proposé, je me pose la
question, là, ça serait... ça deviendrait un handicap «at large», là, dans
quelle mesure une personne... J'aimerais ça avoir des exemples concrets, si vous en avez, de certaines personnes
qui, si on met «neuromoteur», n'auraient pas accès à l'aide médicale à
mourir et ils le devraient. Je ne sais pas si vous en avez en tête.
M. Pilote (Daniel) : Bien, je veux
dire, oui, c'est ça qui est... Peut-être une personne qui est totalement paralysée et qui est barrée dans son corps. Ça,
c'est vraiment difficile. Je pense qu'on peut aller jusque là, à ce problème
neuromoteur là, et justement que la personne a des souffrances. Donc, on
pourrait aller jusqu'à une personne qui ne peut bouger aucun membre, aucun
membre.
Mme Picard : OK, oui, ça, je
comprends. Dans votre introduction, vous avez surtout parlé... J'ai beaucoup
aimé ça parce que vous avez bien décrit que ça reste un choix de la personne.
En fait, c'est que tout le monde a le choix, là, je veux dire, on peut décider
de ne pas l'avoir ou de l'avoir, ça reste un choix qui est... qui va être un
peu plus accessible après cette loi. Je
voulais savoir : Est-ce que, selon vous... Est-ce que toutes les personnes
seraient capables de se trouver un tiers
de confiance pour les accompagner? Est-ce que vous pensez qu'il y a des gens
qui auraient besoin de... qui n'en auraient pas, supposons?
M. Pilote (Daniel) : Bien, tout
dépendant... Comme je le disais aussi, c'est pour quelle raison, hein, que
c'est... c'est important. Parce que, des fois, il peut y avoir quelque chose
qui n'est pas clair dans cette demande-là pour
l'aide médicale à mourir. Peut-être, justement, c'est des raisons qui sont
autres. Donc, il faut être sûr de bien analyser ça, pour ne pas
justement arriver à un... à cause d'une raison qui est externe, hein, et puis
dire : De toute façon, c'est ça que je veux, mais, en réalité, ce n'est
peut-être pas ça. Donc, c'est peut-être une question de qualité de vie qui est
peut-être en jeu. Donc, c'est ça, là, qu'il faut faire attention.
Et les personnes de confiance... Oui, ça prend
des personnes de confiance. Vraiment, c'est quand même... ça peut être compliqué
des fois. Je veux dire, il ne faut pas que ces personnes-là envoient la
personne à cette idée-là. Donc, c'est ça, là, qui... hein, l'idée que ça soit
éclairé comme démarche. Il faut que ça soit vraiment éclairé puis il ne faut
pas qu'il y ait eu, justement, des abus là-dedans.
Mme Picard : Oui, c'est ça. Dans le
fond, le tiers de confiance, vous pourriez le désigner, puis... bien, en fait,
le patient le désigne, et puis, arrivé au moment où... lever le drapeau pour
dire : Je pense que c'est ce moment-là où
cette personne-là avait décidé. Donc, je pense que c'est un gros poids pour la
personne. Mais, comme usager, j'imagine que c'est difficile aussi de
choisir son tiers de confiance, là.
• (17 h 50) •
M. Pilote (Daniel) : Ah oui!
Absolument. Absolument, et puis... Mais c'est quand même... c'est un choix, hein, comme on dit, un choix assez difficile,
quand même. Et, des fois, c'est un choix qui est difficile pour l'entourage, hein?
C'est un choix pour l'entourage, qui ne sont peut-être pas d'accord, et puis
que, peut-être, il y avait le moyen de pouvoir continuer à avoir une qualité de
vie.
Je veux dire, comme moi, moi, à m'écouter,
depuis le commencement de la pandémie, grâce au virtuel, ça me permet de pouvoir vraiment participer à une vie
citoyenne, hein? Donc, c'est à partir de là. Écoutez, je suis membre dans cinq organismes. Et là, maintenant,
c'est de savoir comment, comment ne pas trop en faire. C'est ça, là,
l'équilibre. Donc...
Mme Picard : Ah! bien, c'est un beau
problème, ça, M. Pilote.
M. Pilote (Daniel) : Bien oui. Non,
mais, je veux dire... je veux dire... Dans le fond, quand je suis égal à tout le monde, je suis assis, puis qu'on discute
ensemble, et puis... justement, pour... Donc, il y a moyen de... Bien, je veux trouver
aussi... Et pour dire que la vie, si on veut la vivre, bien, on a présentement
beaucoup, beaucoup d'options qui nous est offert, donc, aussi, également.
Donc,
j'arrive avec deux choix, le choix... Bien, c'est sûr que, si la personne
a des souffrances, il faut quand même respecter son choix aussi, également,
hein, mais, quand même, il faut... je crois que ça... Il y a maintenant, actuellement, au niveau médical, la science. C'est
grâce à la science si je suis là avec vous autres, c'est grâce à la science.
Je suis bien content.
Mme Picard : Merci.
Je n'ai plus de question, Mme la Présidence, s'il y a quelqu'un qui veut...
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. La députée de Roberval, je
pense que vous avez des questions, oui.
Mme
Guillemette : Oui, mais surtout quelques observations. Merci d'être
avec nous, M. Pilote.
M. Pilote
(Daniel) : Ça fait plaisir.
Mme
Guillemette : C'est vraiment intéressant de pouvoir discuter avec vous
à nouveau. Je voudrais seulement que... peut-être vous réconforter sur l'aspect
des services, de dire que les gens, bon, parce qu'ils manquent de services, on les pousserait vers l'aide
médicale à mourir. Puis je sais que vous avez une réalité que... vous le vivez
au quotidien, là, l'aspect des
services, je sais que ce n'est pas toujours simple. Puis on s'est rencontrés
pendant la pandémie, justement, pendant la commission spéciale, puis je
le sais que ce n'était pas simple, là, pour vous, là.
Mais quelqu'un qui va
faire une demande d'aide médicale à mourir, il devra toujours y avoir l'aspect
de souffrance. Et cette souffrance-là, cet aspect-là, elle est importante, et
il faut qu'elle demeure. Il y a la souffrance psychologique, qu'on dit, bon,
qui peut peut-être être plus difficile, mais les médecins nous ont dit qu'il y
avait quand même, là, des moyens, là, pour mettre cet aspect-là en lumière.
Donc, je veux vous rassurer là-dessus. Et la commission
des soins de fin de vie regarde chaque cas qui est administré. Je ne sais pas
si vous avez été témoin, vous, des gens qui ont reçu ou qui ont demandé
l'aide médicale à mourir par faute de soins, là.
M. Pilote
(Daniel) : Oui. Oui, c'est ça qui est... qui m'a interpelé, justement,
du monde, justement, qui ont été... qui avait dit ça, justement, dans un centre
d'hébergement, OK, qui avait dit ça. Ça m'avait frappé, ça. J'ai dit :
Comment ça que cette personne-là peut quand même à cause de cette raison-là? Je
pense que ça ne devrait peut-être pas, là, exister, là, cette raison-là.
Mme
Guillemette : Bien, en fait, c'est ça, la personne, peut-être, peut
penser ça, mais elle n'est pas admissible sous cet aspect-là. Donc, la notion
de souffrance, pendant la commission spéciale, a été, pour nous, une balise, et il faut qu'elle demeure, dans le projet
de loi n° 11, une balise également, là, pour... C'est une mesure de
protection, en fait, également aussi, là.
M. Pilote
(Daniel) : Mais, comme je disais, il ne faut pas banaliser, hein, je
veux dire, le fait de... Parce que, moi, la vie, c'est vraiment sacré. Et puis
donc... Mais il y a des moments donnés que je pense que les souffrances sont
très difficiles à vivre, et puis donc il faut penser à ces gens-là aussi,
également, qui, de toute façon, seraient en sédation peut-être extrême.
Mme
Guillemette : Et peut-être, s'il me reste quelques minutes... Et, si,
vous, à ce moment, au moment où on est à étudier le projet de loi n° 11,
on vous disait : On enlève les gens avec un handicap du projet de loi,
est-ce que vous verriez ça comme une discrimination?
M. Pilote
(Daniel) : Bien, je veux dire, ça serait un recul, plutôt, ce serait
un recul pour notre société. Et puis est-ce qu'il y a beaucoup de gens
là-dedans, vraiment... Comme je vous disais, là, c'est vraiment intenable et insoutenable, la souffrance qu'ils ont. Donc, oui,
pour ces gens-là, ça serait peut-être difficile, parce qu'ils ne veulent pas souffrir et être d'une manière ou d'une façon...
une vie qui est, justement, invivable. Donc, oui, ça serait discriminatoire,
oui.
Mme Guillemette : Donc, vous nous suggérez
de conserver le handicap mais de... excusez, mais de bien le baliser.
M. Pilote
(Daniel) : Oui, ça, c'est très, très important, parce que ça dépend
des raisons. Parce que, comme j'ai dit, on peut aller d'un extrême à l'autre,
hein, pour des raisons qui... Mais, je veux dire, moi, tu sais, je suis dans
cette situation-là, et je veux continuer jusqu'au bout, jusqu'au bout, parce
que, comme je vous l'ai dit tantôt, c'est grâce
à la science médicale si je suis là, vraiment, vraiment, ça, c'est... bien,
regardez ce que je peux faire. Donc, c'est l'important pour d'autres
gens. Donc, je donne espoir aussi, il faut donner l'espoir en même temps.
Mme
Guillemette : Oui, tout à fait. Puis je vous remercie pour tout cet
espoir-là que vous donnez et pour toutes les heures que vous investissez au
niveau de plusieurs organisations. Vous êtes un apport inestimable pour ces
organismes-là, mais aussi pour la société. Merci beaucoup, M. Pilote.
M. Pilote
(Daniel) : Ça fait plaisir. Merci.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Mmes les députées, Mme la ministre, merci
beaucoup. Alors, M. Pilote, je me tourne maintenant du côté de
l'opposition officielle pour une période de 9 min 54 s et je laisse
la parole à la députée de D'Arcy-McGee. La parole est à vous, madame.
Mme Prass : Merci. Bonjour, M.
Pilote, et merci.
M. Pilote (Daniel) : Bonjour,
bonjour.
Mme Prass : Merci de participer et
de nous avoir fourni votre mémoire. Ça aide à alimenter nos discussions. Donc,
vous avez abordé un aspect particulier qui n'a pas été abordé jusqu'à présent
par les autres intervenants. Donc, vos inquiétudes, comme ma collègue vient de
le mentionner, à propos de l'aide médicale à mourir qui serait accordée dans des raisons de manque de soins, de services
ou de maltraitance. Et vous citez même un exemple d'un responsable de
dossier d'une agence pour les soins qui a dit à une personne... qui a osé leur
dire que peut-être l'aide médicale à mourir serait la solution pour eux.
M. Pilote (Daniel) : Oui.
Mme Prass : Donc, évidemment, le but
du projet de loi, c'est d'éviter des situations telles que celles, mais on ne
peut pas se mettre à la place des autres. On ne sait pas comment des
professionnels vont aborder l'enjeu quand ils vont en discuter avec des
patients, etc. Donc, est-ce que vous avez des idées comment on pourrait
protéger contre de telles situations, si ça
serait un encadrement des relations, justement, entre les gens dans les agences
de services et les patients? Mais,
c'est ça, je voudrais savoir qu'est-ce que vous pensez qu'ils pourraient mettre
en oeuvre justement pour éviter de telles situations.
M. Pilote (Daniel) : Bien, tout
dépendant de comment que la demande va être faite. Et puis s'assurer,
justement, par, peut-être, une tierce personne, là, qui est ou qui n'a... qui
n'a pas un rapport, peut-être, émotionnel avec
qu'est-ce qui se passe, pour pouvoir voir exactement... parce que je ne sais
pas combien exactement d'intervenants qui peuvent mettre un holà si jamais il
s'aperçoit qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Donc, ça prendrait peut-être
une personne impartiale, justement. Je sais
qu'il y a des demandes qui sont faites, mais est-ce qu'il faut plus de
personnes? Peut-être que oui, là, pour être sûr, sûr, sûr de la procédure.
Parce que je ne veux pas que ça soit une facilité aussi, là, que... en
soi, là.
• (18 heures) •
Mme Prass : Oui, parce que vous
dites... vous continuez pour dire qu'il serait difficile de prouver une
négligence causant la mort, si jamais c'était le cas, qu'il y avait du
personnel qui a encouragé ce choix-là. Donc, encore une fois, nous, on veut
s'assurer que les gens sont protégés, leurs droits sont protégés, que, si une
personne décide d'aller de l'avant, c'est vraiment de leur propre gré.
Donc, est-ce qu'il y aurait peut-être une
période d'adaptation qui devrait être incluse? Parce que je pense que ce que
vous dites, c'est... Vous parlez un petit peu du rôle du tiers de confiance,
justement, une tierce personne qui parlerait, disons, au nom de la personne qui
est malade. Mais, si le tiers n'est... si la personne ne nomme pas un tiers,
donc, c'est les responsables en santé qui vont justement être ceux qui vont
déduire quand le moment sera enclenché pour
l'aide médicale à mourir. Donc, encore une fois, est-ce que vous voyez des
conditions, des balises qui pourraient être introduites, justement, pour
s'assurer que ces personnes-là prennent une décision qui est dans le meilleur...
pour le meilleur de la personne et non pour des raisons de s'en débarrasser,
disons?
M. Pilote (Daniel) : Bien, oui,
c'est ça, c'est justement ça. Je vais dans le même sens que vous, justement. Je
ne sais pas, là, si, vraiment, là, les balises ont été faites ou elles vont
être faites, mais j'espère qu'il y en ait justement pour ne pas qu'il y ait...
mais il ne faut pas banaliser le fait aussi... pour donner l'aide médicale à
mourir. Donc, oui, ça prendrait des balises. Maintenant, il faut savoir
lesquelles, balises, qu'il faudrait pour, justement, qu'ils puissent obtenir,
là, l'aide médicale à mourir.
Mme Prass : Exact. Et question
peut-être un petit peu personnelle, mais vous êtes, comme vous l'avez dit plus
tôt, en situation où vous avez une maladie neuromoteur. Est-ce que vous pensez
que le terme, justement, qui est utilisé
dans ce projet de loi pourrait amener préjudice à des gens comme vous, qui
n'êtes pas en situation où c'est... c'est peut-être incurable, mais vous avez
pris acte de votre situation, vous vivez avec. Pensez-vous que le... la terminologie,
justement, pourrait amener un certain effet
négatif pour des gens qui se retrouvent dans des situations comme les vôtres mais
qui veulent continuer à vivre dans leur situation?
M. Pilote (Daniel) : Bien, oui, tout
dépend... ça, là, c'est vraiment tout dépendant de quelle... c'est quoi, la
philosophie de cette personne-là, bien sûr. Mais, en tout cas, je veux dire, il
y a... Les personnes comme nous, quand on a
des situations, parce que ce n'est pas facile, hein, parce que nous, on dépend,
justement, de... de gens pour qu'on puisse justement... ça nous prend
des assistants pour qu'on puisse continuer et à vivre la vie quotidienne. Donc,
oui, ça, c'est... Justement, si ces
aspects-là pourraient peut-être amener à dire : Bon, bien, moi, j'en ai
assez, comme le monsieur que je vous
parlais tantôt, là, qui a décidé et... et j'avais trouvé ça un peu spécial de
savoir que c'était à cause qu'il en avait assez de vivre de la façon
que... qu'on donnait ses soins. Ça, ça m'avait vraiment touché quand j'avais
entendu ça, là.
Donc, il faut
absolument... Bien, c'est important, je pense que l'important, je vous dis, là,
moi, là, les personnes qui m'aident,
c'est... je les remercie tout le temps, tous les jours, tous les jours, tous
les jours. C'est important de les
remercier, OK, même si je sais que ce n'est pas facile avec... avec tout
qu'est-ce qu'ils vivent, mais, si le personnel est bien, je crois que
les prestataires vont l'être.
Mme Prass : Là, j'aurais une
question, vous ne l'avez pas abordée dans votre mémoire, mais sur toute la
question du refus. Parce que je trouve qu'il y a une certaine incohérence dans
ce qui est proposé, dans le sens que la personne
fait une demande anticipée de l'aide médicale à mourir quand ils sont aptes de
le faire, et c'est déclenché au moment
où c'est jugé qu'ils ne sont plus aptes. Et à ce moment-là, quand ils ne sont
plus aptes, s'ils refusent la demande qu'ils ont faite, bien, elle est
rejetée, et la personne n'a plus accès à l'aide médicale à mourir.
Moi, personnellement, je vois une incohérence
dans tout ça, parce qu'on demande qu'on soit apte pour prendre la décision,
mais, quand la personne n'est plus apte, on... on accepte leur décision, même
si elle contrevient à celle qu'ils ont faite quand ils étaient aptes. Donc, je
voudrais vous entendre là-dessus également.
M. Pilote (Daniel) : Bien, tout
dépendant, parce que, quand on... Si vous parlez que la personne, mettons,
change d'idée par... juste par une réponse incohérente, tu sais, donc... Mais,
comme je le disais tantôt, ça va prendre un... une situation comme, exemple, en
position foetale et aucune communication depuis plusieurs jours, peut-être, c'est à ce moment-là qu'il faudrait peut-être
décider que ce soit... l'anticipation soit valide. Donc, ça... ça prend une
situation extrême où est-ce que la personne ne peut plus communiquer.
Puis, justement, si elle ne peut plus communiquer, puis il n'y a plus de communication possible, là, peut-être ce serait le
moment qu'on pourrait mentionner dans une demande anticipée.
Maintenant, c'est... ça peut... parce que j'y ai
pensé, j'ai dit : Il faut absolument qu'il y ait une situation pour... pour dire que c'est le moment, que le
moment... à quel moment la personne aimerait dans son anticipation. Et là, maintenant,
là, c'est les balises, à savoir à quel moment vraiment on peut autoriser et
accepter une demande, à quelle situation. C'est ça, là, qui est la... la
question importante. Moi, je suggère, justement, quand la personne ne peut plus
communiquer puis, vraiment, elle n'est... il y aucune possibilité de
communication avec elle, là.
Mme Prass : Bien, si je peux vous
donner l'hypothèse, par exemple, d'une personne qui souffre de la maladie
d'Alzheimer, qui continue à communiquer, mais on comprend bien qu'ils ne sont
plus conscients de leur entourage, de leur environnement, etc., mais, comme je
dis, qu'ils peuvent toujours communiquer, donc les éléments sont... les
éléments dont ils ont décrit pour leurs souffrances sont atteints, mais la
personne dit : Moi, je refuse, qu'ils sont considérés en situation inapte.
Donc, est-ce que ce refus... Est-ce qu'il devrait y avoir un délai? Est-ce
qu'on devrait... Bien, la question, c'est : Est-ce qu'on... est-ce que ce
refus devrait être automatiquement un rejet de leur demande qu'ils ont faite au
moment où ils étaient aptes?
M. Pilote (Daniel) : Je veux dire,
c'est sûr, c'est ça, c'est cette situation-là que moi, là... c'est sûr que je
ne peux pas vraiment bien évaluer ça pour ça, mais je crois qu'il faudrait
qu'il y ait une étape plus... d'une manière où est-ce que la communication
n'est plus possible, vraiment, qui serait dans ces situations-là, OK? Dans les
situations où est-ce que, là... que la communication est encore possible,
peut-être ce n'est pas le moment, là, il faut attendre que la communication
soit vraiment hors de tout doute, là, OK, qu'elle est inexistante.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup.
Mme Prass : Merci beaucoup,
M. Pilote.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. Pilote. Alors, on va poursuivre la
discussion avec la députée de Sherbrooke pour une période de
3 min 18 s. La parole est à vous, madame.
Mme Labrie : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Pilote. Vous nous parlez de la notion de libre choix
dans votre mémoire. C'est une notion qui est très importante. Effectivement,
c'est ce qu'on vise. Puis, pour avoir un libre
choix, vous avez raison de nommer que ça prend l'accès aux services souhaités.
Ça prend aussi une connaissance de
ses droits pour pouvoir exercer un libre choix. Puis là ça m'amène à une
question pour vous, parce que vous nommez un exemple, dans votre mémoire, d'une personne qui s'est fait parler
d'aide médicale à mourir par un service gouvernemental, je peux
comprendre à quel point ça peut être très difficile pour une personne de vivre
ça. En même temps, il faut trouver une façon d'informer les gens sur leurs
droits. Donc, je me demande, est-ce que vous pouvez nous orienter un peu sur
comment faire pour informer les gens de leur droit à l'aide médicale à mourir
sans que ce soit offensant?
M. Pilote (Daniel) : Oui, je pense
qu'elle devrait avoir, justement, un conseiller juridique pour, justement,
qu'elle sache exactement ses droits, OK, ou un organisme quelconque qui
pourrait mentionner les droits de cette personne-là pour lui expliquer bien
comme il faut, vraiment, sa décision... que le réseau de la santé, exemple, OK,
ou son docteur. Donc, il faudrait absolument
qu'il y ait une... il faudrait qu'il y ait des conseils juridiques, justement,
pour les droits pour... oui, qui... je pense, ce serait une très bonne idée
pour... justement, pour être sûr et que la personne comprenne toutes les
avenues, là, qui va arriver, pour sa décision.
Mme
Labrie : C'est intéressant que vous nous disiez ça parce que c'était
une recommandation du Barreau également d'offrir des conseils juridiques. Donc,
j'entends que, pour vous, ce serait une bonne manière de s'assurer que les gens sont informés sans créer des
situations vraiment délicates où quelqu'un a l'impression qu'un fonctionnaire,
par exemple, l'incite à avoir recours à l'aide médicale à mourir, ce qui n'est
pas nécessairement le cas, là.
• (18 h 10) •
M. Pilote
(Daniel) : Non, non, non, c'est ça, c'est qu'on peut présumer, mais
c'est juste, justement, oui, si jamais il y
avait un cas comme ça, oui, justement, s'il y avait une personne... C'est ça,
je parlais de la tierce personne, tantôt,
là, qui est complètement... qui est en dehors des émotions familiales ou
amicales, un des deux, là, donc qui pourrait justement donner des
conseils juridiques à cette personne-là.
Mme Labrie : Merci.
Puis, s'il me reste quelques instants, j'en profiterais peut-être pour vous
demander, je ne sais pas, moi, si c'est la première fois que vous participez à
des commissions parlementaires. Je ne sais pas si le fait de pouvoir participer en ligne, c'est facilitant pour vous. Est-ce
que c'est quelque chose qui vous aide à participer aux travaux de
l'Assemblée nationale?
M. Pilote
(Daniel) : Oui, et pas juste à l'Assemblée nationale, partout.
Écoutez, comme on dit, j'ai... je participe à... j'ai un blogue et puis j'aide
les gens, justement, à améliorer notre réseau de la santé. Donc, non, je suis
un peu partout grâce, justement, au virtuel, hein? Vous voyez, des fois,
d'autres qui ont de la difficulté avec ça, mais, moi c'est plutôt une aide vraiment précieuse. Et ça me rappelle L'odyssée
de 2001, quand la petite fille parlait au monsieur à l'écran, donc
ça me rappelle à ça. Je ne sais pas si vous avez vu le film, mais, en tout cas,
à un moment donné, la petite fille parle à
son père à l'écran. Et ça, ça m'a toujours impressionné. Et puis là on est
rendus là. Vraiment, c'est... je suis vraiment content que ça puisse
exister.
Mme Labrie : Bien,
merci beaucoup, M. pilote.
M. Pilote
(Daniel) : Ça fait plaisir.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci, Mme la députée, très bonne question.
Continuez votre bon
travail. On a besoin des échanges comme ça avec vous par le moyen du virtuel.
Alors, bien, on va terminer cette période avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice,
encore une fois, pour une période de 3 min 18 s.
Mme Tardif : M. Pilote,
bonjour. Merci d'être là, mais merci aussi pour le bien que... je dis que vous
me faites à l'âme, mais je pense que vous faites du bien à l'âme de bien des
personnes. Vous êtes un modèle. Vous êtes définitivement un modèle, un modèle
de détermination. Quand vous dites : La vie est sacrée, et l'aide médicale
à mourir doit être là pour vivre, je vous rejoins. Je suis d'accord avec vous
que l'aide médicale à mourir doit venir uniquement dans les derniers moments,
en fin de vie ou lorsque les souffrances sont extrêmes et ne sont plus tolérables. Donc, je pense que c'est ce qu'on a
mis dans le projet de loi. Il reste du travail à faire, et vous nous apportez
un bel éclairage, parce qu'il faut évidemment éviter les dérapages.
Et je lis des
commentaires que plusieurs citoyens nous écrivent sur le site, et,
effectivement, la crainte vient soit de la méconnaissance du projet de loi,
mais aussi de la crainte des dérapages. Ça fait qu'on va avoir un travail à
faire puis on va avoir besoin de vous pour sensibiliser, informer, communiquer
les bonnes choses, les vraies choses pour ne pas que ça ait l'air des
projets... un projet de dérapage et un projet d'euthanasie.
M. Pilote (Daniel) :
Exactement, et de banalité, là.
Mme Tardif : Oui.
Puis je pense que j'en profiterais pour saluer... je ne sais pas si
Mme Solange Miller est là, dans mon
comté, mais Mme Miller a cette crainte-là. Et sachez que je lis les
commentaires, et on est à l'écoute de vous. Elle nous dit : «Oui
pour les soins palliatifs, non à l'euthanasie.» Elle fait référence à la
dénatalité, elle fait référence à Dieu et au
sens sacré de la vie. Donc, effectivement, c'est un volet qu'on doit aussi
considérer parce qu'il y a beaucoup de gens qui sont religieux et qui ne
seront pas nécessairement enclins à donner carte blanche sans connaître...
M. Pilote
(Daniel) : Je les comprends.
Mme Tardif : Vous
les comprenez, hein?
M. Pilote
(Daniel) : Oui.
Mme Tardif : Merci.
Bonne soirée.
M. Pilote
(Daniel) : Bien, merci beaucoup.
La Présidente (Mme
Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée.
Alors, c'est
ce qui met fin à nos échanges, M. Pilote. Encore une fois, merci beaucoup
pour votre participation. Continuez aussi à évoluer avec les moyens
virtuels que vous connaissez maintenant. Alors, au nom de Mme
la ministre et de tous les parlementaires ici, membres de cette commission, je
vous remercie et je vous souhaite une bonne fin de journée.
Et je vais ajourner les travaux de la commission
jusqu'au jeudi 16 mars 2023, après les avis touchant les travaux des
commissions, où nous allons poursuivre notre mandat. Bonne soirée, mesdames.
(Fin de la séance à 18 h 15)