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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le vendredi 2 novembre 1979 - Vol. 21 N° 199

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat: Les questions du transport dans la région de Montréal


Journal des débats

 

Question avec débat

Les questions du transport dans la région de Montréal

(Dix heures quinze minutes)

La Présidente (Mme Cuerrier): À l'ordre! Veuillez vous asseoir.

La commission est réunie ce matin pour discuter la question avec débat du député de Saint-Laurent au ministre des Transports. Le sujet d'aujourd'hui est le suivant: Les problèmes du transport dans la région de Montréal. Il est bien entendu que le député qui a donné avis de la question et le ministre ont des droits de parole privilégiés mais, bien sûr, non exclusifs.

M. le député de Saint-Laurent.

Exposé du sujet M. Claude Forget

M. Forget: Merci, Mme la Présidente. Nous abordons ce matin l'étude d'un sujet qui intéresse vitalement un très grand nombre de nos concitoyens, tous ceux qui vivent dans la grande région de Montréal. Il s'agit de tous les problèmes relatifs au transport dans cette région. Il ne sera pas question des difficultés dans le domaine des relations de travail, mais plutôt des problèmes de nature plus permanente qui affectent la vie quotidienne des Montréalais et des résidents des banlieues de Montréal qui, tous les jours, sont confrontés par des problèmes de fonctionnement et l'incertitude qui entoure le fonctionnement, par exemple, des trains de banlieue dans la région de Montréal. Il y a là un très grand nombre de problèmes non résolus que nous aimerions éclaircir ce matin.

Il y a aussi les questions relatives au prolongement du métro. Là aussi, un très grand nombre de points d'interrogation se posent sur la levée du moratoire, les intentions gouvernementales, les retombées du réaménagement de la fiscalité municipale sur le financement de l'infrastructure du métro et sur le financement de son fonctionnement. Il y a également les problèmes de transport qui ont été soulevés par l'implantation à Mirabel d'un aéroport et la nécessité, selon certains, d'envisager la construction d'un lien direct ferroviaire avec Mirabel liant ce dernier et le centre de la ville de Montréal. Il y a enfin des problèmes qui demeurent dans le domaine de la circulation routière à Montréal, qui impliquent le gouvernement du Québec puisqu'il y a eu une interruption. On a mis fin à la construction de l'autoroute est-ouest dans le centre-ville de Montréal et on demeure dans la confusion la plus totale sur ce qui va prendre la place de ce projet ou s'il y aura même quelque chose qui en prendra la place.

Donc, nous avons un certain nombre de problèmes, mais je ne mentionne que ces quatre, les plus importants: les trains de banlieue, le métro, le lien direct entre Mirabel et Montréal et l'autoroute est-ouest pour illustrer que nous sommes dans la troisième année, nous achevons la troisième année de ce gouvernement et nous devons constater que, relativement à chacun de ces problèmes, nous n'avons aucune espèce d'orientation claire, aucune décision véritable de la part du gouvernement. Il y a là un attentisme, une hésitation qui était peut-être normale, la première année, mais qui n'est plus tolérable maintenant.

Tous ces sujets, tous ces problèmes ont fait l'objet de nombreux rapports, de nombreuses études. Certaines ont, d'ailleurs, coûté fort cher aux contribuables déjà. Malgré tout, malgré ces études, malgré ces rapports, malgré les recommandations de tous les organismes impliqués dans les problèmes de transport à Montréal, qu'il s'agisse des municipalités ou qu'il s'agisse de la communauté urbaine, le gouvernement persiste à se traîner les pieds. Nous voyons donc le débat de ce matin comme une occasion pour demander au gouvernement, par son porte-parole qui est le ministre des Transports, de formuler la position gouvernementale dans chacun de ces dossiers.

On pourrait prétendre que, le ministre étant nouveau, il a le droit de s'attendre que tout le monde lui accorde un certain délai de réflexion pour l'étude de dossiers qu'il ne connaîtrait pas. Mais tel n'est pas le cas, Mme la Présidente. Nous avons, en face de nous, un ministre qui effectivement est nouveau — il est là depuis deux mois environ — mais qui connaît de longue date et intimement tous les dossiers auxquels j'ai fait allusion et d'autres également que l'on pourrait mentionner relatifs au transport dans la région de Montréal. Il était fonctionnaire du ministère des Transports avant de devenir député et il a fonctionné à ce titre-là au sein de comités d'étude à l'intérieur du ministère lui-même et il a participé directement à la formulation d'un certain nombre de recommandations relatives, par exemple — si ma mémoire est bonne — au lien direct entre Mirabel et Montréal. Mais il y a d'autres domaines avec lesquels il est très familier.

Il n'est donc pas injuste, à ce moment-ci, de poser au gouvernement des questions directes quant à ses intentions. Ce n'est pas injuste parce que le gouvernement est là depuis trois ans et qu'il a eu amplement de temps pour faire le tour des problèmes et pas injuste vis-à-vis du ministre qui connaît intimement, encore une fois, tous ces dossiers. S'il ne peut pas nous répondre, Mme la Présidente, nous devrons en conclure que le gouvernement n'accorde aucune espèce d'intérêt aux problèmes de transport de la région de Montréal.

C'était assez évident avec son prédécesseur, un député d'une des régions les plus éloignées de Montréal, qui était d'une ignorance manifeste vis-à-vis des problèmes vécus par les gens de Montréal et qui, de toute manière, dans la mesure où il s'y intéressait, ne s'y intéressait que pour des raisons partisanes et pour faire, à l'occasion, à

l'Assemblée nationale, quelles que soient les questions qu'on lui adresse, des déclarations tonitruantes sur les difficultés de ses négociations avec Ottawa, comme si c'était à Ottawa que se trouvait la réponse à toutes ces questions et à toutes ces interrogations.

Avec le ministre actuel, nous avons au moins le privilège d'avoir un ministre qui, même s'il n'est pas à Montréal, est certainement conscient de ces problèmes et en connaît l'aspect technique. Il pourra peut-être faire une évaluation plus compétente et plus sobre des priorités et de l'urgence d'en venir à des conclusions.

Nous allons donc systématiquement attaquer chacun de ces sujets dans l'ordre que j'ai indiqué. Ce n'est pas pour rien, Mme la Présidente, que nous posons des questions ce matin. Nous avons fait une recherche soigneuse de toutes les déclarations faites à l'Assemblée nationale ou en dehors de l'Assemblée nationale, des documents publics qui sont à notre disposition et nous nous trouvons, à l'occasion de chacun de ces sujets, devant l'image d'une confusion, de contradictions, d'absence de prise de responsabilité et c'est assez désolant. Par exemple — et c'est le premier sujet que j'aborde — la question des trains de banlieue. Nous avons là une longue série de déclarations qui nous amènent à conclure que, dans le fond, nous ne sommes pas plus avancés aujourd'hui que nous pouvions l'être il y a un an ou deux. Rappelons que la question des trains de banlieue dans la région de Montréal se pose relativement à la survie des services aux voyageurs pour les banlieues qui sont fournis respectivement par le Canadien National sur la ligne qui passe sous le mont Royal et qui se rend jusqu'à Deux-Montagnes en passant par ville Mont-Royal, Saint-Laurent, Roxboro, etc., et ville Laval, bien sûr.

Une voix: Pierrefonds.

M. Forget: Pierrefonds. Ce service, le Canadien National a indiqué, il y a quelque temps, qu'il l'interromprait définitivement le 1er juillet 1980 et ce n'est que dans les dernières semaines qu'il a indiqué qu'il prolongerait de six mois le fonctionnement du train en attendant que le gouvernement se décide enfin. Or, qu'a dit le gouvernement? Qu'a dit le prédécesseur du ministre des Transports actuel relativement aux trains de banlieue? Il a dit toutes sortes de choses. Il a dit en particulier, en octobre 1977, qu'il attendait des rapports; avant octobre 1977. Donc, pendant la première année, il a dit qu'il attendait des rapports, le rapport du CTRM qui fut effectivement publié en octobre 1977, je crois, et qui contenait là-dessus des recommandations précises.

Après la publication du rapport, il ne pouvait plus prétendre qu'il attendait des avis et des recommandations. Il a donc dit que c'était une chose qui devait être facile et, en particulier, dès la fin de 1978 quand il a été pressé davantage par un deuxième rapport, celui publié par la Communauté urbaine de Montréal, le rapport Gascon, du nom de son auteur, il a dit qu'il donnerait plus tard les réponses et particulièrement les réponses pertinentes au problème des trains de banlieue.

Au début de 1979, près d'un an et demi après avoir reçu les premières recommandations relativement aux trains de banlieue, le ministre Lessard a parlé, avec enthousiasme, du potentiel des trains de banlieue et il s'est engagé à partager le déficit de ces trains de banlieue si la communauté urbaine en arrivait à des conclusions et réussissait à s'entendre sur la question de l'intégration.

Un peu plus tard, au printemps, il a adopté un ton plus menaçant. Il a a laissé croire que si la communauté urbaine ne réussissait pas à s'entendre, parce que effectivement, il y a une impasse entre la ville de Montréal, d'une part, et certains maires de banlieue, il prendrait ses responsabilités sans préciser davantage, si ce n'est qu'à la fin de juin il a indiqué qu'une loi spéciale serait introduite, que les travaux de fin de session, à ce moment-là, ne le permettaient pas, mais qu'on s'en allait vers une loi spéciale.

Pendant tout ce temps-là, certains de ses collègues du Conseil des ministres ont émis des opinions différentes de la sienne. En particulier, au début de juin de cette année encore, le ministre Tardif a déclaré dans une entrevue qu'il s'opposait à l'intégration des trains de banlieue et qu'il s'agissait d'une mesure qui n'était pas souhaitable étant donné la politique de concentration urbaine sur l'île de Montréal, qu'il n'était pas souhaitable de favoriser la dispersion de la population dans les banlieues à l'extérieur de Montréal et que, par conséquent, il était inapproprié d'intégrer les trains de banlieue.

Mme la Présidente, il faudrait savoir du ministre sa position. Quelle est la position du gouvernement? Est-ce que le gouvernement favorise l'intégration des trains de banlieue? Est-ce qu'il lie l'intégration des trains de banlieue à la solution d'autres problèmes? En particulier, refusera-t-il de prendre ses responsabilités avant que, par exemple, il n'ait reçu un rapport d'une étude qui a été commandée il y a quelques mois sur les problèmes des services de liaison avec la région de Repentigny et de L'Assomption: par exemple, toute la question de l'est de Montréal? Certaines déclarations du ministre Lessard tendent à faire croire qu'on ne pourra pas résoudre le problème du train de banlieue dans le nord-ouest de l'île avant de savoir ce qu'on doit faire vis-à-vis de l'est de Montréal.

Est-ce que le gouvernement actuel veut nous dire catégoriquement que les deux problèmes sont liés ou non? Est-ce que c'est lié au problème du lien avec Mirabel ou, en d'autres termes, est-ce que la question des trains de banlieue ne pourra être résolue à moins de résoudre tous les problèmes des liens extra-métropolitains?

Est-ce qu'il est raisonnable, selon le ministre, de faire payer Montréal pour des services vers la banlieue, et surtout des services vers des points en dehors de l'île de Montréal? Est-ce qu'il est raisonnable de demander aux contribuables de Montréal de payer une subvention aux résidents de la région de Saint-Eustache et du comté de

Deux-Montagnes? Est-ce que le gouvernement est prêt à assumer une part plus que proportionnelle des coûts de fonctionnement et du financement de la dette qui serait encourue pour la rénovation de l'équipement, plus que ce n'est le cas pour le transport en commun sur l'île de Montréal?

Vu l'impasse entre la ville de Montréal et certains maires de banlieue, le gouvernement a-t-il l'intention de légiférer, et comment? Le ministre devrait également nous dire si le REM, le Réseau express de Montréal, dont on a discuté à certaines reprises dans le passé et qui a fait l'objet de certains rapports, si ce concept d'express métropolitain qui débouche dans toutes les directions à l'extérieur de l'île de Montréal est compatible avec la politique de son gouvernement quant au zonage agricole et à la densification de l'île de Montréal.

Il a là, Mme la Présidente, énormément de questions qui devront trouver des réponses.

Relativement au métro, on trouve une succession non pas de contradictions ou de déclarations contradictoires de la part du prédécesseur du ministre actuel; on trouve au contraire une succession de silences. Il n'a parlé qu'une fois du métro, et il en a parlé pour lever de façon très partielle le moratoire qui s'appliquait, jusque là, en mars 1978. Cette levée de moratoire est insatisfaisante en elle-même. Le moratoire n'a jamais été conçu comme la fin de la construction du métro, comme une remise aux calendes grecques de la construction du métro, mais plutôt comme un moment d'arrêt nécessaire pour fabriquer un nouvel échéancier, un nouveau plan de construction échelonné sur un plus grand nombre d'années, étant donné les coûts considérables de la construction. Ce plan, ce nouvel échéancier, on ne l'a jamais vu. Le gouvernement actuel n'a jamais formulé sa conception d'un rythme souhaitable de construction du métro et on se retrouve, à l'automne 1979, devant les illogismes flagrants à au moins deux parties du réseau du métro, c'est-à-dire l'illogisme qu'on retrouve dans la situation où une ligne se termine à du Collège, dans la ville de Saint-Laurent, ce qui ne peut en aucun temps être un point terminal pour une ligne de métro. (10 h 30)

II y a là une solution qui n'est que temporaire et qui ne peut pas être présentée comme une solution acceptable à long terme. Il faudra un garage au bout de la ligne et le garage ne peut pas se trouver à du Collège, il n'y a pas l'espace pour faire un garage à du Collège, et le ministre le sait très bien. Il y a là une impasse qu'il faudra résoudre. Il y a aussi une impasse qu'il faudra résoudre dans l'espèce de bouchon qui se trouve entre deux parties de l'autre ligne, la ligne no 5. On a construit deux bouts de tunnel, Mme la Présidente, qui ne débouchent nulle part, mais qui font soi-disant partie de la même ligne et qui sont séparés par un mille. Un des bouts de tunnel qui ne débouche nulle part est déjà terminé depuis un certain temps. Il est bétonné. Le tunnel est creusé. Ce sera bientôt la même chose pour l'autre bout de tunnel. Ils sont séparés par un mille. Le ministre, le gouvernement prétend qu'il n'est pas urgent de lever le moratoire. Il y a pourtant là des investissements pour lesquels les contribuables paient déjà, qui seront inutiles et qui continueront d'être inutiles à moins de réviser ce moratoire, de le lever en tout ou en partie ou, du moins, si on le lève en partie, que l'on nous dise quand les autres phases pourront être abordées.

Quant au lien Mirabel-Montréal, il y a là aussi tout un tas de déclarations contradictoires. C'était, selon les époques et selon le prédécesseur du ministre, un problème entièrement fédéral. C'est la première façon dont cela a été abordé. Le fédéral, nous disait M. Lessard au tout début de son règne, a décidé d'implanter Mirabel à l'endroit où il est. C'est son problème de construire et de financer un lien avec le centre-ville; mais c'était en 1977. Un peu plus tard, c'était complètement différent. Dans un grand reportage sur les priorités du ministère des Transports publié en février 1978, le lien avec Mirabel était devenu la priorité no 1 du ministère des Transports du Québec. Un revirement de 180° à l'intérieur de quelques mois. Pourtant, depuis ce temps, depuis qu'on a annoncé cette grande priorité du lien avec Mirabel, on a même annoncé à cette époque que les contrats avaient été donnés pour développer des prototypes de wagons — je ne sais pas si des dépenses ont été engagées; il serait temps qu'on sache lesquelles et à quelles fins — on a tergiversé sans fin, en arguant que les problèmes de financement étaient insurmontables, qu'Ottawa ne donnait pas de réponse claire et, malgré tout, on a demandé à la ville de Laval, à plusieurs reprises maintenant, de figer dans l'immobilité un certain nombre de terrains qui soi-disant seront requis pour la construction de stations.

Cela fait désormais plus de trois ans que ces terrains sont réservés pour la construction de stations d'un réseau rapide reliant le centre-ville à Mirabel. Pourtant, on semble ne pas avoir pris de décision. À la toute fin, dans des documents que le gouvernement n'a pas rendus publics, même si nous les avions demandés par une question écrite inscrite au feuilleton et qui appartenait à la période pour laquelle nous demandions ces documents, le chef de cabinet de l'ancien ministre a déclaré qu'aucune décision n'était prise mais que, cependant, l'une des options qui ont fait l'objet de ses nombreux rapports avait déjà été exclue.

Il y a donc déjà des décisions, on ne sait pas lesquelles, des dépenses engagées, des options exclues, on ne sait pas lesquelles, mais, de toute façon, persiste toujours l'immobilité et le secret sur des décisions qui ont peut-être été prises, qui ne l'ont peut-être pas été, mais qui, de toute façon, devront tôt ou tard être prises. Est-ce que cette question du lien avec Mirabel dépend d'une décision fédérale de changer de Dorval à Mirabel un certain nombre d'envolées qui font leurs départs ou leurs arrivées à partir de Dorval? Si c'est le cas, si c'est une exigence préalable du gouvernement du Québec, il serait bon de le savoir, mais si c'est le cas, nous aimerions également connaître les études d'impact qui ont été réalisées par le ministère des Transports et qui permettraient aux

citoyens de juger si cette exigence du gouvernement du Québec et du ministère des Transports en particulier est une exigence raisonnable et comment elle va affecter les industries, les emplois qui gravitent autour de Dorval et qui bénéficient de leur proximité d'un aéroport pour des liens avec le reste du pays et le reste de l'Amérique du Nord.

Mme la Présidente, j'ai illustré, je pense, assez bien, que les problèmes du transport dans la région de Montréal sont extrêmement nombreux, extrêmement graves et qu'ils n'ont pas reçu de solution de la part de ce gouvernement qui ne sait pas où il va dans le domaine du transport et qui s'en moque éperdument, d'après ce qu'on peut juger des déclarations du ministre antérieur.

J'espère que le ministre actuel, qui connaît les dossiers, sera capable de nous donner le point de vue du gouvernement, non pas des opinions personnelles, non pas des dissertations sur les difficultés de ceci ou cela, mais la position du gouvernement, les décisions auxquelles on peut s'attendre, les lois et les financements auxquels on peut s'attendre, de manière qu'on fasse enfin un peu de lumière dans un domaine qui affecte, encore une fois, 2,5 millions de gens qui vivent dans Montréal ou dans la région de Montréal et qui attendent depuis trois ans que le gouvernement se branche. Non seulement les citoyens, mais les organismes élus par les citoyens, les municipalités, la Communauté urbaine de Montréal, indirectement, attendent de la part du gouvernement des indications plus claires qu'ils n'en ont eu jusqu'à maintenant.

On a vaguement brandi des menaces d'intervention quand telle ou telle décision ne semblait pas aller dans la direction que l'on souhaitait, sans être spécifique, sans être explicite. On veut exercer du pouvoir dans la région de Montréal sans assumer des responsabilités, c'est ça le grand problème. Est-ce que le ministre actuel sera prêt à assumer ses responsabilités? C'est essentiellement là la question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Bellechasse me fait signe. M. le ministre, vous pourriez répondre immédiatement, si vous le désirez. M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, Mme la Présidente. Je remercie également mes collègues, le député de Saint-Laurent et le ministre, de me permettre de formuler quelques questions avant que le ministre puisse répondre.

Je suis heureux, aujourd'hui, de prendre la parole sur cette question des problèmes du transport en commun dans la région de Montréal. Vous conviendrez avec moi que la question posée par le député de Saint-Laurent est très vaste et, par conséquent, laisse place à une multitude de sujets connexes touchant tout le système du transport dans la région de Montréal.

J'ai choisi d'axer mon exposé principalement sur les perspectives d'avenir du transport en commun dans la région de Montréal et peut-être même dans d'autres régions. Je vous ferai remarquer, Mme la Présidente, que la même question aurait pu tout aussi bien se poser dans le cas d'autres régions du Québec qui, elles aussi, sont assaillies par des problèmes de transport qui, même s'ils ne sont pas du même ordre de grandeur qu'à Montréal, n'en représentent pas moins un problème de taille auquel nous, les élus, auquel les ministériels ont à faire face et pour lesquels ils doivent essayer de trouver des solutions le plus rapidement possible.

Quoi qu'il en soit, Mme la Présidente, de peur d'être en dehors du sujet, je ne voudrais pas m'étendre davantage sur les problèmes de transport en commun des autres régions du Québec, je voulais seulement souligner qu'ils sont tout aussi apparents que ceux de la région de Montréal et qu'ils sont bel et bien présents et nombreux, même s'ils ne sont pas du même ordre de grandeur et qu'ils sont de type différent. Tout dépend des villes.

Pour revenir au sujet qui nous préoccupe particulièrement ce matin, il suffit de mentionner la grève à la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal pour se rendre compte comme il est important d'avoir un service de transport en commun pour la région de Montréal. En effet, nous avons tous été à même de constater ces derniers jours les problèmes aigus auxquels ont eu à faire face les Montréalais. On sait avec quelle exaspération le public a subi cette grève, on sait également quel genre de danger constitue la grève dans un service aussi essentiel que le transport en commun, nous l'avons tous constaté, cette grève nous a permis de le constater davantage.

Par ailleurs, comme vient de l'évoquer le député de Saint-Laurent, les problèmes du transport en commun pour la région de Montréal sont considérables. Pour ma part, j'aimerais aborder le sujet sur les perspectives d'avenir du transport en commun. Vous me direz peut-être: Réglons les problèmes actuels et après, nous penserons à ce qu'il adviendra dans dix ou quinze ans. Je pense que tout gouvernement prévoyant, soucieux du bien-être de la population et en tant que bon gestionnaire des affaires publiques, se doit de faire des perspectives d'avenir. On dit souvent que gouverner, c'est prévoir; je pense que ce dicton est valable, surtout au niveau des transports.

Étant donné la croissance de la population, les contraintes énergétiques que nous subirons dans un avenir rapproché — nous les subissons même maintenant — et le besoin de plus en plus grand de la population de vivre dans un environnement sain — il faut également tenir compte de cette donnée — nous voulons savoir si le gouvernement a entrepris ou est sur le point d'entreprendre des études sur des perspectives d'avenir du transport en commun à Montréal. J'ouvre une parenthèse pour dire: Et même ailleurs au Québec, si le député de Saint-Laurent me permet d'émettre ce point sans se détourner volontairement du sujet. J'ai bien dit, Mme la Présidente,

seulement une parenthèse en parlant de Montréal et d'autres villes.

A-t-on une idée actuellement du type de transport qu'on devra privilégier dans l'avenir? Je me souviens d'avoir assisté à une commission parlementaire, il y a deux ou trois ans, où nous en avions discuté. Qu'est-ce qui a été fait depuis ce temps? Est-ce, par exemple, l'autobus où on pourrait peut-être envisager, selon les contraintes écologiques ou énergétiques, un nouveau type d'autobus? Est-ce qu'on a étudié les nouveaux types d'autobus?

Nous avons, ici, à Québec, les corridors pour autobus. Est-ce qu'on les a étudiés? Est-ce qu'on a des données précises sur le bien-fondé d'un tel système pour la région de Montréal? Les corridors pour autos, par exemple, comme on en voit aux États-Unis. Les autos qui, aux heures de pointe, logent trois ou quatre occupants ont prédominance sur d'autres voitures et ont des corridors spéciaux. Est-ce qu'il y a des études en cours là-dessus, des données précises?

Des parcs de stationnement à l'entrée des villes et, une fois arrivés à l'entrée de la ville, obliger les gens à utiliser le transport en commun. Je pense que le meilleur exemple qu'on peut avoir, en tout cas, c'est — je suis toujours mêlé entre Beloeil et Longueuil, Mme la Présidente — le métro de l'autre côté du fleuve; nous avons un bon parc autos et, avec le métro, on peut avoir accès assez rapidement et assez facilement à l'île de Montréal.

Les taxibus, comme on en voit en Europe, dans certaines villes d'Europe; est-ce qu'on a des données sur cela? Est-ce qu'il y a des calculs actuellement qui se font, des études qui se font au niveau des autorails, par exemple, des trains de banlieue? Le député de Saint-Laurent en a parlé tout à l'heure. Je ne m'attarderai pas sur ce sujet, mais l'ex-ministre des Transports nous en a parlé souvent. Où en est-on avec ces trains de banlieue?

Les trains ou autobus fonctionnant à l'électricité, parce qu'en plus d'étudier, madame, les nouvelles méthodes de transport et de viser à donner un meilleur service — je pense que c'est le premier but qu'on doit viser — il faut tenir compte également et de plus en plus des contraintes écologiques, surtout avec la formation du ministère de l'Environnement cette semaine, et, deuxièmement, des contraintes énergétiques qui sont très importantes. Je pense que c'est très important. Il faut viser à donner un meilleur service, mais est-ce que ces études sont en cours? Est-ce qu'elles sont complétées? Je suis convaincu que le ministre pourra nous renseigner davantage tout à l'heure, parce qu'il ne servirait à rien de créer d'autres ministères et d'ouvrir d'autres Baie James si, au niveau du transport, on ne tient pas compte de ces caractéristiques. Est-ce que l'on a pensé à une éventuelle transformation des autobus pour le transport en commun? Ce sont des questions auxquelles le ministre pourrait nous répondre et je me plais à dire qu'elles sont formulées dans la plus grande objectivité.

On sait également que le COTREM, le Conseil des transports de la région de Montréal, étudie un dossier très complexe, qui est celui du double tarif. Enfin, on essaie actuellement de scruter la possibilité que tous les usagers des transports en commun, qu'ils utilisent le train de banlieue, l'autobus, le métro ou toute autre méthode qu'on pourra trouver éventuellement et que ces gens proviennent de n'importe où, de Beloeil, de l'ouest, puissent payer un seul tarif, tout en correspondant d'une zone à l'autre ou d'un mode de transport à l'autre. On l'a avec l'autobus et le métro, mais est-ce qu'on a fait des calculs pour d'autres méthodes qu'on pourrait trouver éventuellement? J'aimerais, Mme la Présidente, demander au ministre s'il suit ce dossier de près, car je trouve cette possibilité extrêmement intéressante et très originale.

On pourrait également parler des trains de banlieue, sujet qu'affectionne particulièrement l'actuel ministre des Loisirs — je l'ai dit tout à l'heure — car cela lui permettait — je ne voudrais pas lancer d'accusations — de faire du capital référendaire pour la thèse de son parti. On sait que le transport par trains de banlieue est extrêmement déficient et inadéquat actuellement. Est-ce que le nouveau ministre des Transports envisage, dans un avenir rapproché, de tout simplement laisser de côté ou d'abandonner les trains de banlieue comme mode de transport interurbain? En tout cas, du moins d'après ce qui se passe actuellement, on semble le laisser croire. Mme la Présidente, j'ouvre une parenthèse: Je veux être assez objectif pour dire que nous avons à faire face à un nouveau ministre. Je comprends qu'avec tous les programmes qu'il retrouve dans son ministère, allant du transport aérien jusqu'au — comme on dit dans Bellechasse — "patchage", le ministre a à faire face à de nombreux problèmes et je comprends qu'il n'a peut-être pas toutes les données vu qu'il est nouveau dans ce ministère, mais, quand même, il faudra que prochainement il puisse répondre à ces questions. (10 h 45)

Finalement, Mme la Présidente, je termine sur un point majeur: la fiscalité municipale versus le transport en commun. Dans le journal La Presse du 22 octobre, on rapportait ceci sur le transport en commun par rapport à la fiscalité municipale et on expliquait ce qu'en pensait le comité conjoint Québec-municipalités lorsqu'il parlait de la réforme de la fiscalité municipale et du transport en commun. Au chapitre du transport, le comité disait: "En premier lieu, nous estimons que l'infrastructure du métro doit être considérée comme un substitut aux autoroutes urbaines que Québec subventionne à 100%. Par conséquent, le comité demande que l'infrastructure du métro de Montréal soit subventionnée à 100% et non à 75% tel que proposé présentement dans le projet de la réforme." Je fais un parallèle ici entre la question posée pour le métro de Montréal au même titre que pour les autobus ici, par exemple, à Québec ou dans d'autres villes, toujours lorsqu'on parle de transport en commun. Le comité conjoint parlait du métro. Étant donné qu'on subventionne les au-

toroutes, qu'on subventionne de même le transport en commun, si nous réglons le problème du transport en commun, nous aurons peut-être moins à faire face au problème des autoroutes.

Le comité continuait, Mme la Présidente, en disant: Nous voulons, de plus, que Québec — en parlant du gouvernement — défraie lui-même le manque à gagner provenant de toute politique gouvernementale de tarif réduit à l'intention des étudiants, des personnes âgées, des personnes handicapées ou autres, tout ce qui touche le transport en commun. Il disait, pour la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal: On subventionnerait à raison de 33% ou du tiers contre les coûts d'immobilisation et de fonctionnement, laissant ainsi les deux tiers des coûts aux municipalités tandis que, pour les autres commissions de transport, la subvention en paierait 40%. C'est de la cuisine, Mme la Présidente, et je suis d'accord sur le principe contenu dans la question formulée dans le rapport du comité conjoint.

Je voudrais, Mme la Présidente, en terminant, demander au ministre des Transports s'il est d'accord sur les propositions du comité conjoint en ce qui concerne le transport en commun et la fiscalité municipale, et finalement, si le gouvernement envisage de lever le moratoire gouvernemental sur l'extension du métro vers Ville Saint-Laurent, Montréal-Ouest et Montréal-Nord. Je pense que le député de Saint-Laurent serait extrêmement heureux d'obtenir une réponse à cette question. Mme la Présidente, ayant formulé toutes ces questions, je laisse la parole au ministre pour qu'il puisse nous dire où il en est rendu avec ces dossiers.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Transports.

Réponse du ministre M. Denis de Belleval

M. de Belleval: Mme la Présidente, je voudrais d'abord féliciter mes deux collègues de l'Opposition, le député de Bellechasse et le député de Saint-Laurent, pour la pertinence et l'érudition aussi que démontrent les questions qu'ils ont posées ce matin. En particulier, du côté du député de Saint-Laurent, je dois noter qu'au sein de sa formation politique, il couvre un champ extrêmement vaste de préoccupations. Son chef l'a nommé comme son ambassadeur à travers le Canada pour étudier, avec les chefs politiques de ces provinces, l'ensemble du dossier constitutionnel, dossier mouvant s'il en est un et imprécis en ce qui concerne l'option de son parti, et qui donne d'autant plus de mérite à celui qui en est chargé. Au sein de cette Assemblée aussi, le député de Saint-Laurent est, à toutes fins utiles, le principal critique de son parti en matière d'affaires sociales, compte tenu des fonctions qu'il a occupées dans le passé comme ministre des Affaires sociales. On le retrouve aussi en tête de ligne en ce qui concerne les dossiers de négociations dans les secteurs public et parapublic. Et ce matin, on le retrouve — d'une façon très compétente, je dois dire — dans le dossier du transport en commun dans la région de Montréal, tandis que le critique officiel du Parti libéral en matière de transport est absent de cette Chambre ce matin. Cette illustration des mérites du député de Saint-Laurent que...

M. Forget: Mme la Présidente, si le ministre me le permet, il vient de faire allusion d'une façon un peu désobligeante — j'hésite à le souligner parce qu'il me comble de fleurs pour l'instant — à mon collègue de Charlevoix, ex-ministre des Transports, qui est celui à qui il fait allusion comme critique en matière de transports. Il devait s'absenter et, en plus de cela, je pense qu'il appartenait à un député de la région de Montréal, à deux députés de la région de Montréal, puisque mon collègue de Robert Baldwin est aussi présent, de soulever un problème qui nous affecte directement, qui affecte directement les citoyens que nous représentons ici.

M. de Belleval: Mme la Présidente, je vais simplement corriger avec le plus de sympathie possible le député de Saint-Laurent. Ce n'est pas l'ex-ministre des Transports, le député de Charlevoix, qui est le critique officiel de son parti en matière de transports, mais c'est plutôt le député de Gatineau qui est ce critique officiel. Le député de Gatineau, pas plus que l'ex-ministre des Transports et député de Charlevoix, n'est présent en cette Chambre ce matin.

Ces remarques visent non pas à déprécier — c'est tout le contraire — l'action du député de Saint-Laurent en cette Chambre, mais à démontrer aussi, d'une certaine façon, les problèmes de renouvellement auxquels fait face, en matière de personnel politique, le Parti libéral, qui doit utiliser certaines Madeleine-de-Verchères pour étudier un certain nombre de dossiers. À mon avis, cela démontre que ce parti, de toute évidence, n'est pas prêt à constituer un gouvernement de rechange puisqu'il doit ainsi utiliser à toutes les sauces un nombre très limité de députés et, en particulier, le député de Saint-Laurent.

Mais comme il vient de me le faire remarquer, avec justesse d'ailleurs, il est aussi légitime qu'un député de la région de Montréal s'occupe de cette question.

Le député a posé — je le répète — des questions pertinentes comme d'ailleurs le député de Bellechasse. Il n'a pu s'empêcher, bien sûr — c'est son droit — d'assortir ses remarques de quelques phrases acidulées de nature, cette fois-là, franchement partisane. Pour ma part, bien que cela fasse partie des règles du jeu, je pense que nous avons tous intérêt ce matin à étudier ensemble, de façon sereine, un dossier qui est un des plus importants actuellement dans la société québécoise. J'admets avec le député de Bellechasse que Montréal n'est pas tout le Québec et qu'il faut aussi s'occuper des problèmes de transport et des problèmes de transport en commun pour l'ensemble des Québécois. On reconnaîtra aussi que, quant à notre métropole qui comprend, dans sa

grande région, environ la moitié de toute la population du Québec, il est important que cette Assemblée se penche sur les problèmes de transport qui affectent actuellement cette région. D'autant plus que, en discutant du dossier du transport en commun dans la région de Montréal, on se trouve aussi à toucher au dossier de l'urbanisation, de l'urbanisme, de l'aménagement de cette région, en particulier de l'île de Montréal, mais aussi, bien sûr, de la grande conurbation qui entoure l'île de Montréal proprement dite.

En prenant des décisions en matière de transport, nous prenons aussi des décisions qui affecteront l'avenir de la région de Montréal d'une façon très profonde pour au moins les 20 ou 30 prochaines années, dans le domaine de l'urbanisme en général et de l'aménagement de ce territoire, de la protection de son territoire agricole et de ses espaces verts, etc.

On touche aussi un dossier très important en ce qui concerne le développement industriel du Québec puisque le Québec possède quelques industries importantes en matière de matériel de transport, industries qu'il convient de promouvoir et qui peuvent effectivement jouer un rôle très important non seulement au Québec en matière de fabrication, entre autres, de voitures de métro, mais aussi — on le verra tout à l'heure — de trains de banlieue ou de métros régionaux, de tramway ou d'autres techniques nouvelles auxquelles a fait référence, en particulier, le député de Bellechasse, mais qui peuvent aussi, grâce à l'impulsion que nous donnerons à ces moyens de transport au Québec, en particulier, dans la région de Montréal, obtenir des atouts importants en ce qui concerne l'exportation de ces mêmes matériaux dans le reste du monde et en particulier en Amérique du Nord où ces moyens sont à la veille d'être utilisés sur une très grande échelle par nos voisins immédiats.

En ce qui concerne le dossier concret de la région de Montréal, le député de Saint-Laurent a fait allusion à un certain nombre de carences dont serait responsable le présent gouvernement depuis trois ans. Je voudrais, à ce sujet, compléter quand même l'image qu'il a donnée — c'est son droit, c'est un député d'opposition — image essentiellement défavorable mais qui, à mon avis, n'est pas tout à fait juste, pour ne pas dire carrément injuste.

Tout d'abord, je lui rappellerai que le moratoire sur l'expansion du métro de Montréal a été décrété sous l'ancien gouvernement, à la suite de trois années d'étude auxquelles, il a raison de le rappeler, j'ai été mêlé étroitement.

Trois années qui ont permis, justement, au précédent gouvernement de se rendre compte qu'il n'y avait pas de pensée directrice en matière de développement des transports en commun dans la région de Montréal; qu'en continuant le métro sans réfléchir d'abord à une conception d'ensemble du développement de ces réseaux de transport, on risquait de donner lieu à des investissements extrêmement coûteux et pas nécessairement optimaux. Entre 1973 et 1976, une équipe avait été constituée au sein du ministère des Transports pour justement réfléchir sur ces questions en dehors des corps établis qui travaillaient à ce moment-là dans la région de Montréal, essentiellement les commissions de transport et, en particulier, le Bureau de transport métropolitain de la Communauté urbaine de Montréal, de façon à prendre un point de vue plus général, moins intéressé et, de cette façon, faire assumer par le gouvernement du Québec des responsabilités qui ne pouvaient être assumées régionalement.

Trois ans d'études, entre 1973 et 1976, pour en arriver à la conclusion qu'il fallait momentanément arrêter les travaux du métro de façon à se donner le temps d'établir cette stratégie d'ensemble.

C'est ce que le nouveau gouvernement élu en 1976 a fait dans la foulée de ce que le précédent avait commencé entre 1973 et 1976. Je dois dire — le député de Saint-Laurent le reconnaîtra — que ce n'était pas une mince tâche — comme, d'ailleurs, pour l'ancien gouvernement — de constituer de but en blanc, pour étudier ces questions, pour lesquelles il n'avait pas d'experts, des équipes qui ont dû apprendre leur métier sur le tas et, ensuite, trouver des solutions nouvelles alors que — il faut le reconnaître — jusqu'à ce moment-là, le ministère des Transports n'avait pas de responsabilité directe en matière de gestion de ces moyens de transport urbain.

Malgré tout, nos équipes techniques ont fait suffisamment de progrès pour que... Malgré, d'ailleurs, les difficultés politiques de tout ordre qui sont normales dans un contexte métropolitain où il faut ajuster des intérêts fort divergents entre les différentes municipalités intéressées — le député de Saint-Laurent admettra qu'en cette matière, il est normal pour un gouvernement, quand il veut établir une coordination, de le faire, autant que possible, et jusqu'à la limite des efforts possibles, avec le concours et l'accord des municipalités intéressées — malgré ces difficultés, le gouvernement n'est pas resté inactif durant ces trois années. (11 heures)

Bien sûr, il a confié aux équipes de techniciens du ministère des Transports, en collaboration avec les commissions de transport, le soin d'élaborer des propositions nouvelles, des propositions d'ensemble, propositions, d'ailleurs, qui sont sur le point d'aboutir dans des rapports écrits dont j'ai pris connaissance dès mon arrivée au ministère sous forme d'ébauches presque finales, que je fais actuellement corriger et qui seront mises à la disposition, d'abord, du Comité ministériel permanent de l'aménagement du territoire, qui est responsable de ces questions au sein du gouvernement, ensuite, du Conseil des ministres, et qui pourront ensuite aussi être communiquées à la population de Montréal, aux édiles de la région de Montréal et aux corps municipaux, aux corps intéressés, aux corps constitués de la région de Montréal, c'est mon ferme objectif, d'ici la fin de la présente année. Pendant que ces études

complètes se poursuivaient, le gouvernement non plus n'est pas resté inactif, puisque, au fur et à mesure que les rapports intérimaires entraient, il a pris un certain nombre de décisions.

En particulier, le député de Saint-Laurent l'a fait remarquer en minimisant la portée du geste. À ce point de vue, je le répète, il est injuste. Nous avons levé le moratoire sur la construction d'une partie du métro, mais pas sur des parties insignifiantes, puisque c'est une valeur de $300 millions de travaux dont on a ainsi permis la poursuite, essentiellement, sur la ligne 2 ouest du métro, entre la station Snowdon et la station du Collège et aussi sur la ligne 5 du métro, entre la station du Parc et la station Saint-Michel, à l'est. D'ailleurs, je dois dire qu'à mon avis le rythme de construction du métro durant ces derniers mois, ces dernières années, à la suite de la levée de ce moratoire, la poursuite de ces travaux peut être considérée comme constituant un rythme normal d'expansion du métro. Nous avons pu le faire, parce qu'à la suite d'études en cours, nous pensions qu'en toute hypothèse, quel que soit le plan d'ensemble qui serait finalement adopté, il était opportun de construire ces parties du système de métro. Nous avons pris aussi des décisions importantes en matière de financement des trains de banlieue et des circuits d'autobus qui, jusqu'à maintenant, ne sont pas intégrés avec le circuit d'autobus de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal.

En ce qui concerne les trains de banlieue, il s'agit d'un montant d'environ $3 millions qui, en 1978, a servi à éponger une partie du déficit des trains de banlieue, qui a permis de ralentir le désengagement adopté par les compagnies de chemin de fer, le désengagement des services actuels de la part de ces compagnies de chemin de fer et de ralentir aussi le rythme d'augmentation de la tarification. Le député de Saint-Laurent admettra, je pense, que c'est le premier gouvernement au Québec qui ainsi consent à subventionner un système de transport qui jusque-là était de la responsabilité des compagnies de chemin de fer sous compétence du gouvernement fédéral et non pas sous compétence du gouvernement québécois. Compagnies, d'ailleurs, et gouvernement fédéral qui ont laissé détériorer de façon constante et depuis de nombreuses années un service que tous reconnaissent comme absolument important en matière de transport en commun dans la région de Montréal. Nous sommes donc intervenus de façon concrète pour soulager essentiellement les citoyens du West Island de Montréal, en l'occurrence. Du côté des autobus, nous sommes aussi intervenus en subventionnant au rythme d'environ maintenant $5 millions les compagnies privées de l'île de Montréal, à savoir, la compagnie Métropolitain provincial et la compagnie Trans-urbain, en attendant qu'une solution définitive concernant l'intégration de ces services à ceux de la Commission de transport de la Communauté urbaine de Montréal soit trouvée.

Il s'agit donc, là encore, d'un geste concret, qui démontre bien l'importance pratique que le gouvernement actuel accorde à ces systèmes de transport et des gestes qui constituent des précédents, des gestes qui n'avaient pas été posés par les administrations précédentes.

Nous avons aussi créé le Conseil des transports de la région de Montréal, qui permet de planifier le réseau d'avenir en collaboration étroite avec les commissions de transport existantes. Ce comité met la dernière main, comme je l'ai souligné tout à l'heure, aux rapports qui permettront au gouvernement, de concert avec les municipalités, d'adopter ce plan de transport de l'avenir et ce plan de transport cohérent qui nous faisait défaut jusqu'à maintenant.

Nous avons pris aussi un certain nombre d'autres mesures ponctuelles, mais qui ne sont pas sans importance et qui constituent aussi, dans certains cas, des précédents dans la région de Montréal. En particulier, nous avons mis en service une voie express d'autobus entre la rive sud de Montréal et le centre-ville de Montréal, par l'entremise du pont Champlain, système de voie réservée, auquel faisait allusion d'ailleurs le député de Bellechasse tout à l'heure, qui constitue un succès éclatant puisque l'achalandage de ce système est d'environ, je crois, actuellement 5000 ou 6000 passagers par jour, ce qui équivaut en gros à environ 4000 automobiles de moins dans le centre-ville de Montréal. Et nous allons compléter très bientôt ce système de voie réservée par la construction d'un important "parking" d'incitation à Brassard, qui permettra aux automobilistes, justement comme le suggérait le député de Bellechasse, de stationner leur voiture sur la rive sud et de pouvoir ainsi, grâce au système de voies réservées, avoir accès directement au centre-ville de Montréal.

À la station Longueuil, aussi, du métro, autre point important de transbordement auquel faisait allusion le député de Bellechasse, les travaux débuteront incessamment, de façon à améliorer le système de transfert entre les différentes lignes d'autobus de la rive sud qui aboutissent à ces stations, de façon à rendre encore plus attrayante l'utilisation de la ligne 4 du métro entre Longueuil et le centre-ville de Montréal.

Maintenant du côté de l'autoroute Est-Ouest, travaux qui étaient arrêtés. Au moment où nous avons pris charge des affaires gouvernementales en 1976, nous avons — et l'arrêt des travaux sur cette autoroute avait aussi été décrété durant les dernières semaines de la vie de l'ancien gouvernement — poursuivi les discussions avec la ville de Montréal. Finalement, le gouvernement rendait une décision, à savoir que les travaux de I autoroute seraient définitivement arrêtés, qu'on ne poursuivrait pas ces travaux vers l'est sous forme d'autoroute, mais sous forme d'un boulevard urbain, qui serait de nature à donner un bon service en particulier au transport lourd qui doit s'effectuer dans le centre-ville de Montréal ou entre la partie est de Montréal et le centre-ville, mais qui. en même temps, sera de nature à mieux préserver l'environnement des quartiers avoisinants et particulièrement entre la rue de Lorimier et les points

plus à l'est jusque vers le boulevard Viau, etc., dans l'est de Montréal.

Nous sommes actuellement en train de terminer avec la ville de Montréal, qui a un intérêt extrêmement important en matière d'aménagement du territoire dans ce dossier, les consultations de façon qu'il y ait une entente définitive quant au plan de ce nouveau boulevard urbain. Le député de Saint-Laurent admettra que la mise sur papier de nouveaux plans prend un certain temps, d'autant plus qu'il faut que la préparation de ces plans soit coordonnée de façon très étroite avec l'autorité municipale concernée qui a des intérêts légitimes et qui veut les faire valoir, qui veut, elle aussi, comme nous d'ailleurs, que les multiples options qui s'offrent à un constructeur en cette matière soient bien examinées avant qu'une décision soit prise. Le député de Saint-Laurent admettra aussi que quand nous prenons une décision dans cette matière, c'est l'avenir de 30, 40 ou 50 ans que nous engageons; ce n'est pas une décision que nous pouvons prendre à la légère. Il est peut-être bon de consacrer six mois de plus à la réflexion pour éviter des erreurs coûteuses que nous vivons actuellement, dont nous connaissons actuellement de nombreux exemples dans la région de Montréal.

Donc, Mme la Présidente, le gouvernement a pris un certain nombre de décisions en cette matière, décisions que mon prédécesseur a pilotées lui-même et auquel nous sommes d'autant plus redevables que, comme l'a fait remarquer le député de Saint-Laurent, il n'est pas un député d'une région métropolitaine, mais je pense qu'on peut dire à bon droit que, dans la foulée du député de Charlevoix qui, lui non plus, n'était pas un ministre représentant une région métropolitaine, elles constituent les premiers exemples d'une intervention vigoureuse d'un gouvernement québécois en matière de transport collectif dans la région de Montréal. J'ai bien l'intention, effectivement, de faire en sorte que tous les efforts qui ont été faits depuis six ans par les gouvernements québécois se poursuivent de façon vigoureuse et que, d'ici la fin de l'année, nous en arrivions à un véritable plan de développement des systèmes de transport en commun dans la région de Montréal, ce qui marquera véritablement le prolongement non seulement de ces moyens, mais aussi l'amélioration de l'urbanisation, de l'urbanisme, de l'aménagement du territoire dans la grande région de Montréal.

J'arrêterai à ce moment-ci, Mme la Présidente. Je reconnais que, pour l'instant, je n'ai pas répondu encore aux multiples questions que m'ont posées le député de Saint-Laurent et le député de Bellechasse, mais je suppose que c'est justement l'objet des minutes qu'il nous reste maintenant entre 11 h 10 et 12 h 30 ou 13 heures, c'est justement l'objet maintenant des échanges qui auront lieu entre nous et qui nous permettront de donner réponse à ces multiples questions. Pour ma part, je suis tout à fait disponible pour fournir ces réponses.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent me faisait déjà signe. Vous avez la parole, M. le député.

Discussion générale

M. Forget: Merci, Mme la Présidente. Je remercie le ministre pour son tour d'horizon général par lequel il a donné un certain début de réponse malgré tout à certaines questions. J'essaierai, au cours du temps qu'il nous reste, et je le suggère à mes collègues de la commission, de m'en tenir à chaque sujet et de vider un sujet avant de passer à un autre de manière à ne pas perdre le fil et à faire une discussion qui soit la plus éclairante possible pour ceux qui nous écoutent.

Autoroute est-ouest

J'aborderai en premier lieu le dernier sujet mentionné par le ministre, justement pour qu'on perde le moins possible le fil de la discussion. Il s'agit de l'autoroute est-ouest. Là-dessus, le ministre vient de nous dire que la construction avait été arrêtée par le gouvernement précédent et qu'il n'a fait en cela, comme dans le cas du moratoire du métro, que suivre ou prolonger les politiques déjà adoptées. J'aimerais rappeler que, dans le cas du métro, il est vrai qu'il y a eu un moratoire imposé par le gouvernement précédent, mais nous y reviendrons plus tard. Dans le cas de l'autoroute, la situation est différente. Il y avait eu, bien sûr, une interruption dans le rythme des travaux puisque les travaux entrepris avant 1976 se sont terminés pour 1976 et il n'était évidemment pas question de faire des travaux majeurs de voirie urbaine dans l'est de Montréal l'année des Jeux olympiques. N'y aurait-il eu que cette seule raison, elle eût été suffisante. Il y en avait d'autres également. (11 h 15)

Cependant, des dépenses avaient été engagées pour la poursuite de l'autoroute est-ouest, si bien que le ministre des Transports, M. Lessard, dix jours après avoir occupé pour la première fois son poste de ministre, annonçait dans un communiqué de presse du 9 décembre 1976 qu'il avait "décidé d'interrompre les travaux préparatoires de plans et devis que l'administration libérale précédente avait demandés à certaines firmes d'ingénieurs en vue du prolongement de l'autoroute est-ouest à Montréal. M. Lessard devait préciser — je cite toujours le communiqué de presse — sa position en mentionnant que cette remise en question s'inscrit dans la ligne de pensée du gouvernement québécois visant à favoriser le développement des réseaux adéquats de transport en commun, etc., plutôt que de privilégier l'automobile."

Sur cette position de principe, Mme la Présidente, nous sommes, bien sûr, d'accord que l'heure n'est plus au développement massif d'autoroutes dans les régions urbaines. Nos grands centres urbains ont été pourvus des équipements nécessaires et loin de nous la pensée d'inviter le gouvernement à construire des autoroutes à tort et à tra-

vers. Il reste qu'il y a un bouchon dans le territoire de Montréal, puisqu'il y a deux autoroutes qui étaient destinées à se raccorder et qui, qu'on le veuille ou non, vont engendrer entre les deux points limites de l'échangeur Ville-Marie au centre-ville de Montréal et l'entrée du pont-tunnel Hippolyte-Lafontaine un trafic important. Il est donc, à plus forte raison, important qu'un lien routier soit développé dans les plus brefs délais. Il semble qu'on soit à la recherche d'une solution qui est dictée par des impératifs, soi-disant sociaux, mais qui sont, dans le fond, essentiellement politiques et partisans dans le choix des solutions. Et je vais vous donner la raison de cette affirmation.

J'ai devant moi le rapport d'un comité du gouvernement, qui a été préparé à la demande du gouvernement en décembre 1978 et qui porte précisément sur cette question du lien au centre-ville, soit par une autoroute, soit par un boulevard métropolitain. Mais, enfin, il ne s'agit pas de choisir entre les deux, parce que déjà, préalablement, le 31 mai 1978, on nous informe que le Conseil des ministres a décidé que soit réalisé dans l'emprise expropriée de l'autoroute un boulevard de type urbain.

Donc, on ne demande pas à des experts de dire s'ils sont en faveur ou non de cette solution. C'est une solution qui a été prédéterminée lors d'une conférence de presse donnée par M. Couture, le ministre actuel de l'Immigration, à l'automne de 1976, en octobre, bien avant, donc, qu'il soit élu, disant qu'il fallait faire un boulevard urbain, que c'était là la position du Parti québécois et qu'il fallait également prévoir des îlots d'habitation parce que autour de ce boulevard urbain des emplacements avaient été expropriés en trop qui devraient être consacrés à l'habitation. C'était donc là une position du Parti québécois qui ne s'appuyait sur rien d'autre qu'une croyance sans fondement, dans le fond, à la priorité d'un boulevard urbain sur une autoroute, sans même qu'on sache quelles étaient les implications de ce choix.

Or, les implications de ce choix apparaissent dans le rapport de ce comité pour l'aménagement de la région de Montréal, mais qui est effectivement un regroupement de l'OPDQ, l'Office de planification et de développement du Québec, et des services d'habitation des Affaires municipales, etc., qui sont intéressés, bien sûr, à l'aménagement d'autoroutes. Or, qu'est-ce que l'on retrouve dans ce rapport, Mme la Présidente? On trouve des affirmations qui démontrent clairement que cette orientation actuelle du gouvernement face à l'autoroute Est-Ouest ne se justifie pas. En effet, dans la mesure même où on parle de transport, on fait l'observation suivante, qui est évidemment tout à fait juste, que le volume de trafic à envisager est tellement considérable que, même si on veut appeler cela désespérément un boulevard urbain, on se trouve de fait devant une circulation d'autoroute.

Je cite ceci, à la page 5 de ce rapport: "Toutefois, l'élargissement proposé de la rue Notre-Dame pour en faire un boulevard urbain à six voies contribuera à augmenter le nombre de véhicules par heure aux heures de pointe de 800 à 1500, dépendant des intersections. Des prévisions laissent entrevoir des volumes de 3500 véhicules par heure dans une seule direction aux heures d'affluence à Fullum, et de 2800 au boulevard Pie IX. Ces volumes sont très élevés pour un boulevard urbain". Ce sont des fonctionnaires qui commentent une décision déjà prise par le Conseil des ministres, d'où la prudence des mots, mais on dit: "Malgré tout, ces volumes sont très élevés pour un boulevard urbain et atteignent presque ceux d'une autoroute du fait qu'à chaque extrémité du tronçon à l'étude, des prolongements sont effectivement en autoroute." Il y a une conséquence à tout ceci. On dit au paragraphe suivant: "Le bruit provenant de la circulation routière dans l'axe de la rue Notre-Dame constitue une contrainte importante pour l'aménagement des îlots pour fins d'habitation. En effet, les relevés effectués par la division de la salubrité et du contrôle du bruit de la ville de Montréal révèlent que le bruit actuel en rapport avec le logement est passablement plus intense que le niveau jugé comme normalement acceptable pour un développement résidentiel". Il y a, au niveau des recommandations bien sûr, les conséquences de ces affirmations puisque l'on note que les niveaux de bruit prévus laissent entrevoir des seuils près de la limite acceptable pour la construction d'habitations. Il y a d'autres attendus: "Nous considérons que la fonction résidentielle est difficilement recommandable sur les terrains expropriés." Ceci démontre une chose: la formule du boulevard urbain est indissolublement liée à la notion d'îlots d'habitations à développer dans son voisinage, ce qui ne serait pas possible avec une véritable autoroute. Tout ceci découle d'une décision politique plutôt que du bon sens...

M. de Belleval: Pourrais-je répondre maintenant?

M. Forget: Oui, après. M. de Belleval: D'accord.

M. Forget: "... attendu aussi — parmi les autres attendus — qu'une zone industrielle importante longe la rue Notre-Dame et le port de Montréal et que l'on prévoit une augmentation des activités industrielles dans ce secteur; attendu que la rue Notre-Dame est l'une des artères urbaines où la circulation des véhicules lourds est la plus forte du réseau d'artères urbaines dans la région de Montréal." Toutes ces observations, Mme la Présidente, d'un comité d'experts en transport et en aménagement urbain démontrent que cette orientation qu'on est en voie de prendre pour les 30, 50 ou 75 années, comme le dit le ministre, est une orientation totalement déterminée non pas par des études, mais par une conférence de presse donnée par M. Couture, candidat péquiste au moment des dernières élections. Selon ce dernier, c'était la politique du gouvernement relativement au lien est-ouest et, du revers de la main, on pouvait déterminer la politique gouvernemen-

tale, indépendamment des constatations objectives que n'importe qui peut faire. C'est une fausse orientation, c'est une zone qui n'a pas une destination résidentielle, mais une destination portuaire, industrielle et commerciale, et en voulant faire de ce lien un boulevard urbain, on fait une erreur pour la mauvaise raison, on se détourne de la solution autoroute. Je me permets de faire remarquer que dans le rapport que je viens de citer, on signale que la ville de Montréal est en désaccord avec cette option...

M. de Belleval: Puis-je répondre maintenant?

M. Forget: ... mais, bien sûr, elle sera assez prudente, étant donné que tout est financé par Québec, pour ne pas faire entendre trop publiquement son désaccord. Mais c'est, malgré tout, une source d'inquiétude considérable.

Pour ce qui est de cette question du lien est-ouest, je crois, Mme la Présidente, que le ministre se doit de revoir cette décision et de ne pas tolérer qu'un investissement qui sera là pour 50 ans soit, dans le fond, le fruit d'une conférence de presse donnée par son collègue, M. Couture, au moment des dernières élections.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Mme la Présidente, le député de Saint-Laurent est en train de me faire regretter les remarques que j'ai formulées à son endroit tout à l'heure. Non pas que les documents qu'il cite soient sans valeur. Bien au contraire. Bien au contraire. De ce point de vue, je dois dire que son recherchiste ou ses recherchistes et lui-même possèdent du matériel valable et important. Mais évidemment, il gâte toute son argumentation par une attaque partisane, malheureuse et, qui plus est, incorrecte. Et je vais le démontrer, Mme la Présidente. Il dit: La décision du gouvernement du mois de mai 1978 de construire un boulevard de type urbain dans l'axe de l'ancienne autoroute Ville-Marie est une décision partisane qui a été décrétée, à toutes fins utiles, par le ministre actuel de l'Immigration, mon collègue, M. Couture.

Or, qu'en est-il véritablement, Mme la Présidente? Sous l'ancien gouvernement, un comité avait été constitué qui s'appelait le CTRM, Comité de transport de la région métropolitaine. De qui était-il constitué, Mme la Présidente? Du sous-ministre des Transports d'alors et ensuite de son successeur, l'actuel sous-ministre des Transports, des présidents des commissions de transport de la Communauté urbaine de Montréal, de Laval et de la rive sud, MM. Beaulieu, Gilbert et Hanigan, d'un haut fonctionnaire du ministère des Transports qui agissait comme secrétaire, M. Jacques Hébert, assistés de nombreux experts délégués par différents organismes dont, entre autres, le Bureau de transport métropolitain, le Canadien Pacifique, des gens, comme vous le savez, Mme la Présidente, qui sont des partisans de la souveraineté-association et du gouvernement actuel d'une façon délirante. Je parle du Canadien Pacifique, du Canadien National, qui ont fourni $75 000 à la caisse libérale ou paralibérale du comité du non lors du référendum, du Service de planification de la Communauté urbaine de Montréal, de la Division des projets spéciaux du développement du ministère des Transports. La direction générale des études avait été confiée d'ailleurs, entre autres, à M. Aimé Desautels, qui est l'actuel directeur de l'urbanisme ou de la planification de la ville de Montréal.

Que disait ce comité qu'on ne peut assimiler — le député de Saint-Laurent l'admettra — au Parti québécois, créé sous l'ancien gouvernement et constitué de ces personnalités non politiques? Sous l'ancien gouvernement comme sous le nouveau, que disait ce comité dans un rapport dont j'ai ici copie? Est-ce que le député de Saint-Laurent a une copie de ce rapport?

M. Forget: Le transport des personnes, n'est-ce pas?

M. de Belleval: Le transport...

M. Forget: CTRM.

M. de Belleval: ... des personnes.

M. Forget: Publié en octobre 1977.

M. de Belleval: Est-ce que vous l'avez?

M. Forget: Oui.

M. de Belleval: Vous l'avez? Le député de Saint-Laurent est d'autant moins excusable qu'il a ce rapport et qu'il ne l'a pas cité. Que dit ce rapport à la page 57? En ce qui concerne l'autoroute Ville-Marie, il est recommandé que soit abandonnée la construction de l'autoroute Ville-Marie, telle que conçue originalement. Il reste que cette autoroute inachevée s'intègre mal, à son extrémité est, à la trame urbaine. Elle engendre nombre de problèmes de circulation. Plusieurs solutions ont été envisagées dont la réalisation en deux étapes d'un boulevard de facture urbaine en lieu et place du projet initial. Le rapport poursuit son analyse et il continue avec une nouvelle recommandation. En conséquence, il est recommandé — c'est toujours le CTRM qui parle, pas le Part* québécois, pas le ministre de l'Immigration, mais un comité créé par l'ancien gouvernement composé essentiellement de hauts fonctionnaires de toutes origines — que soit réalisé dans l'emprise expropriée de l'autoroute Ville-Marie un boulevard de type urbain. Page 58. Si l'on prend la décision du Conseil des ministres de mai 1978, "que soit abandonnée la construction de l'autoroute Ville-Marie et que soit réalisé dans son emprise expropriée un boulevard de type urbain", c'est presque le mot-à-mot du libellé de la recommandation du CTRM. Ensuite, le député de Saint-Laurent aura le front de venir nous dire que c'est une décision partisane et politique inspirée du ministre de l'Immigration. Il ne s'agit pas d'une

telle décision. Il s'agit d'une décision mûrie, dont le mûrissement d'ailleurs avait commencé sous l'ancien gouvernement, que le nouveau gouvernement a considérée quand il est arrivé au pouvoir. Compte tenu de la pertinence des recommandations des hauts fonctionnaires et des différents organismes impliqués, c'est la décision qu'il a prise à ce moment-là à la lumière de ces recommandations non pas partisanes, mais techniques et fort bien mûries et dont le mûrissement avait commencé — je le reconnais — sous l'ancien gouvernement. (11 h 30)

Voilà la vérité. En acceptant cette recommandation, nous pensons que nous pourrons malgré tout permettre une bonne circulation des marchandises et des personnes entre l'autoroute Ville-Marie actuelle et le pont Hippolyte-Lafontaine et que nous minimiserons les dommages à l'environnement des quartiers urbains avoisinants. Bien entendu, il sera possible, le long de l'emprise expropriée, d'en utiliser une partie pour l'habitation et aussi pour le développement industriel léger. Nous faisons cette planification, actuellement, en collaboration avec la ville de Montréal, et j'espère que, d'ici quelques semaines, nous serons capables de faire connaître à la population la solution adoptée conjointement par la ville de Montréal et le ministère des Transports.

M. Forget: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pour terminer sur ce sujet, le ministre nous réfère au rapport sur le transport des personnes publié en octobre 1977 comme étant la base d'une décision.

M. de Belleval: C'est le mot à mot.

M. Forget: Je veux bien qu'il y ait eu des recommandations d'un comité d'étude. Il y a deux choses qu'on peut dire à ce sujet. Premièrement, est-ce que le ministre prétend que ce rapport doit être considéré dans tous ses éléments comme étant le dernier mot de l'histoire? Il sait très bien que sur d'autres recommandations, son gouvernement n'a pas encore osé prendre des décisions. Est-ce qu'il faut présumer que c'est seulement la date de la décision qui est en question ou si c'est même son contenu? Autrement dit, est-ce qu'il va souscrire à 100% à toutes les recommandations de ce rapport? Il sait très bien que non. Il y a une décision politique qui est requise au-delà des rapports des commissions d'enquête. Or, la seule décision politique qu'on peut retracer à l'origine du boulevard urbain, c'est la conférence de presse de M. Couture qui est rapportée dans le Devoir du 12 novembre 1976 où, pour la première fois, une formation politique dit: Voici ce que nous allons faire.

Deuxièmement, le ministre sait très bien que le rapport d'un comité "d'experts", entre guille- mets — certaines des personnes de ce comité étaient absolument des experts dans le meilleur sens du terme — ne peut pas, malgré tout, ne pas être influencé par un climat qui avait fait de la question de l'autoroute est-ouest pratiquement une question de crois ou meurs, une question quasi religieuse et symbolique, tant il était inconcevable pour certains groupes de considérer la construction d'une autoroute dans le centre-ville. Le ministre sait très bien qu'un comité d'experts ne peut pas ne pas tenir compte d'une telle recommandation. Comment se fait-il que le gouvernement, trois ans après, se sente tellement enferré par la déclaration de M. Couture en campagne électorale qu'il refuse de reconsidérer une décision quand d'autres experts, également savants, également compétents, lui disent: Cette orientation est une orientation stupide, elle n'a pas de sens. Une illustration de cela, c'est que les habitations, si on en construit autour de ce boulevard urbain, avec une circulation analogue à celle d'une autoroute, il va falloir les insonoriser, et cela va produire des coûts absolument loufoques pour des habitations dans un quartier qui, quand même, n'est pas un quartier de luxe.

On prédit un loyer — et ce sont des estimations qui datent de 1978, presque deux ans — de $500 par mois par logement, et ce ne sont pas des logements énormément grands. Quand on voit tout cela, Mme la Présidente, on se demande pourquoi le gouvernement refuse de reconsidérer sa décision et va de l'avant, en dépit de l'avis d'un comité également expert qui émet des doutes sérieux malgré que la décision du Conseil des ministres ait été prise. Cela prend beaucoup de courage pour les fonctionnaires de dire: Cette décision, vous l'avez prise, mais elle est à la limite du bon sens. Il faut quand même lire entre les lignes. Qu'est-ce qu'ils auraient écrit si la décision n'avait pas été prise?

M. de Belleval: Mme la Présidente...

M. Forget: Mme la Présidente, il me semble évident que la décision devrait être révisée, d'autant plus qu'il semble bien que la ville de Montréal — le rapport en fait état — est dissidente sur la question même de la conception de ce boulevard urbain qu'on juge présumément trop étroit pour satisfaire aux exigences des heures de pointe avec une circulation aussi dense que celle que l'on envisage.

La Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Mme la Présidente, je crois qu'on va terminer maintenant cette discussion parce que, de toute évidence, le député de Saint-Laurent est en train, comme on dit chez nous, de ramer — je pense que l'expression n'est pas parlementaire — dans un jus qu'on ne peut assimiler à de l'eau claire.

M. Forget: Est-ce que vous refusez de reconsidérer votre décision?

M. de Belleval: Mme la Présidente...

M. Forget: Est-ce là votre réponse? Vous refusez de reconsidérer votre décision.

M. de Belleval: Le député... M. Forget: C'est définitif.

M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent commence par dire qu'il s'agit d'une décision politique, et non seulement cela, mais une décision partisane. Quand je lui démontre qu'il s'agit d'une décision appuyée sur celle d'un comité d'experts mis sur pied sous l'ancien gouvernement, il me dit que les gouvernements ne sont pas obligés d'accepter les recommandations des experts. Finalement, il a dit dans son préambule qu'il ne proposait pas de son côté que l'autoroute soit continuée. Donc, il est d'accord avec la proposition du gouvernement de continuer en boulevard urbain...

M. Forget: Mme la Présidente... M. de Belleval: Finalement...

M. Forget: ... on me cite incorrectement. J'ai dit que, en général et en principe, dans les zones urbaines, nous ne recommandions pas les autoroutes à tort et à travers, mais qu'il y avait un bouchon. Il y a une exception, parce que c'est une autoroute non terminée essentiellement.

M. de Belleval: Je suis d'accord. Peut-être que le député de Saint-Laurent mentionnait un principe général, mais cela ne s'applique pas dans le cas de l'autoroute Ville-Marie. Si je comprends bien, le député de Saint-Laurent est favorable à la construction de l'autoroute Ville-Marie selon le plan original. Est-ce là son avis?

M. Forget: Comme je n'ai pas les douze experts qui sont alentour de lui, je demande au ministre: Étant donné cet avis dissident de ce dernier rapport que j'ai cité, qui montre les désavantages et même les dangers sur le plan du bruit, d'en faire une zone d'habitation, est-ce qu'il n'est pas d'avis qu'il devrait réviser sa décision, la reconsidérer, plutôt que de dire: Cela, on s'est engagé dans une ornière et on n'en sort pas, la décision est prise en 1978, c'est un boulevard urbain, quels que soient les arguments qu'on nous amène après coup, c'est figé dans le ciment? Je veux savoir si le ministre accepte oui ou non de reconsidérer cette décision.

M. de Belleval: Je me rends compte, tout d'abord, que le député de Saint-Laurent refuse de répondre à ma question sous prétexte qu'il n'a pas tous les experts. D'accord.

Deuxièmement, je pense avoir démontré, tout à l'heure, Mme la Présidente, qu'il ne s'agissait pas d'une décision politique, mais d'une décision appuyée sur des rapports sérieux d'un comité technique dont la valeur ne peut pas être mise en doute. La recommandation adoptée par le Conseil des ministres est presque le libellé exact de la recommandation du rapport qu'il admet, d'ailleurs, avoir entre les mains, mais qu'il n'a pas cité pour faire sa démonstration parce que, évidemment, cela ne servait pas sa démonstration. Je crois avoir démontré cela hors de tout doute.

Que le candidat du Parti québécois, lors de l'élection 1976, ait pris une attitude confirmée par les experts en 1977, cela démontre que les Québécois ont eu raison d'élire le député en question comme leur représentant, parce qu'il faisait, lors de la campagne électorale, des suggestions intelligentes qui se sont avérées ensuite tout à fait justes telles que corroborées par des fonctionnaires de haut calibre, fonctionnaires nommés par l'ancien gouvernement, d'ailleurs.

Maintenant, qu'est-ce qu'on fait pour l'avenir? Le député de Saint-Laurent dit: Vous devriez reconsidérer quand même cette décision, même si elle est dictée par un rapport d'experts, parce qu'il y a un autre comité qui dit autre chose. C'est faux. L'autre comité ne dit pas de remettre en question la décision de poursuivre les travaux de l'autoroute Ville-Marie sous forme de boulevard urbain. Ce comité ne remet d'aucune façon cette décision en question. Ce qu'il dit, c'est que l'ensemble des emprises libérées ne se prête pas nécessairement à de l'habitation et qu'il faudra prendre certaines précautions si on désire mettre de l'habitation le long de cette emprise; recommandation que je trouve effectivement raisonnable. Le long d'un boulevard urbain, quel qu'il soit, il faut effectivement, quand on construit des habitations, prendre un certain nombre de précautions, en particulier relativement à l'insonorisation, etc.

C'est le seul point sur lequel le comité en question attire l'attention du gouvernement et c'est normal. C'est pour ça d'ailleurs que nous avions mis sur pied ce comité de fonctionnaires, c'est pour étudier les modalités d'application de cette recommandation du CTRM d'abord, telle qu'entérinée par le Conseil des ministres.

Par conséquent, il ne peut être question actuellement de remettre en cause cette décision, d'autant plus que nous n'avons pas d'élément pour remettre cette décision en cause. Ce qu'il s'agit de faire maintenant, c'est de voir comment on peut élaborer des plans précis qui vont satisfaire à la fois les besoins de la circulation et la protection de l'environnement urbain et les besoins légitimes aussi de la ville de Montréal en cette matière. C'est ce que nous sommes en train de faire.

M. O'Gallagher: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: Je voudrais revenir au problème de la CTCUM...

M. de Belleval: Mme la Présidente, juste un moment, je m'excuse, j'ai oublié un renseigne-

ment important que je dois donner, un élément financier très important qui démontre aussi pourquoi cette décision de continuer en boulevard urbain a été prise. Le coût de construction en 1976 de l'autoroute Ville-Marie entre son point actuel et le pont Hippolyte-Lafontaine, selon les plans originaux, serait de $46 millions le mille et le coût de construction projeté d'un boulevard de type urbain sera de $11 millions le mille. Je pense aussi qu'il s'agit de chiffres qui donneront à réfléchir au député de Saint-Laurent.

M. Forget: Est-ce que ce coût-là sera assumé en totalité par la province?

M. de Belleval: Oui.

M. Forget: Et non pas par la ville de Montréal?

M. de Belleval: Par la province.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Robert Baldwin.

Trains de banlieue

M. O'Gallagher: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais aborder le problème de l'extension de la CTCUM à l'ouest de l'île et l'intégration des trains de banlieue, CN et CP. Le ministre, dans son rapport, a tout simplement dit que le gouvernement est figé, qu'il ne peut pas prendre de décision parce qu'il attend des rapports, des études, des études même presque finales. Il a aussi dit que le gouvernement adopte de maintenir le statu quo sur les transport en commun sur l'île de Montréal parce qu'il subventionne encore des systèmes de transport désuets comme Métropolitain Transport et Trans Urbain, en plus de subventionner aussi le système de transport du CNR, la ligne Deux-Montagnes, tout en mettant le problème sur le dos du fédéral.

Au point de vue des rapports, on en a vu une tonne. Il y a eu le projet de schéma d'aménagement de la communauté produit en 1973 et la commission Alie en 1975. On a eu le rapport de la Commission Lamarre au cours de la même année. On a eu le Comité de transport de la région de Montréal en 1977. Tout cela a été repris dans un rapport préparé par la Communauté urbaine de Montréal avec l'aide du CNR et de toutes les commissions de transport en dehors de l'île de Montréal qu'on appelle le rapport Gascon, qui a été produit en novembre 1978.

Il y a eu aussi des études par COTREM, BAREM et REM. Des rapports, on en a eu beaucoup trop. Je prétends que c'est le temps d'agir. On a eu aussi les déclarations du prédécesseur du ministre actuel, M. Lessard, faites devant la Conférence des maires le 1er mars 1979. À ce moment-là le ministre a déclaré ceci: "II est absolument évident que le gouvernement sera obligé d'intervenir comme, d'ailleurs, il en avait déjà manifesté l'intention l'automne dernier ". Tout de suite après cela, le ministre Lessard, dans cette

Chambre...

(11 h 45)

La Présidente (Mme Cuerrier): Le député de Saguenay ou l'actuel ministre des Loisirs.

M. O'Gallagher: ... le député de Saguenay, oui, le prédécesseur de M. le ministre, en réponse à une question que je lui posais le 4 juin 1979, a répondu ce qui suit: "M. le Président, nous aurions aimé beaucoup mieux que la Communauté urbaine de Montréal prenne ses responsabilités comme le projet de loi 56, que nous avons adopté ici, à l'Assemblée, le lui permet. Comme ce n'est pas le fait, le gouvernement du Québec prendra ses responsabilités en temps et lieu." C'est la déclaration du prédécesseur du présent ministre des Transports. En plus, le ministre d'État à l'Aménagement a déclaré, à la Conférence des maires de banlieue, en mars 1979, ce qui suit: "Nous reconnaissons clairement la nécessité d'une intégration des différents réseaux de transport en commun: autobus, métro, trains de banlieue, etc." Un peu plus loin, dans la même déclaration, le ministre continuait dans ce sens: "Mais une chose est claire dans toute la question du transport en commun, l'opinion nous dicte une priorité pour l'intégration des réseaux et c'est la qualité de la vie sur l'île de Montréal."

J'aimerais savoir du ministre et de ses experts quels sont les éléments précis qu'il attend dans les rapports avant de prendre une décision afin de régler cette question une fois pour toutes.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: Nous n'attendons plus de précisions, d'études supplémentaires, non pas que des précisions ou des études supplémentaires ne seraient pas utiles, mais il vient un moment où, effectivement...

M. O'Gallagher: II faut prendre une décision.

M. de Belleval:... il faut prendre une décision. Même si nous n'avons pas 100% des renseignements, à un moment donné, on pense qu'on a suffisamment de renseignements, on a répondu à suffisamment de questions pour prendre une décision. Nous en sommes arrivés à cette étape, ou nous croyons, en tout cas, en être arrivés à cette étape au sein du ministère des Transports actuellement. C'est ce que j'expliquais tantôt au député. Nous avons rédigé une espèce de synthèse de tous ces renseignements, de toutes ces recommandations, synthèse qui est en voie d'être corrigée et qui sera, comme je l'ai dit, acheminée à très court terme au comité ministériel permanent de l'aménagement du territoire et ensuite au Conseil des ministres.

En ce qui nous concerne, nous pensons que les trois dernières années de travaux intenses de ce point de vue sont maintenant suffisamment

fructueuses pour prendre une décision. Le député verra, quand les rapports seront rendus publics, qu'il s'agit de dossiers complexes où le ministère des Transports n'avait pas d'expertise jusqu'à récemment, où toute l'expertise était au sein des commissions de transport de la région de Montréal comme telle, en particulier, au sein du Bureau de transport métropolitain, dossier qui met aussi en cause des intérêts politiques légitimes — je le dis — de nombreuses municipalités de la région de Montréal. Il faut donc convaincre un certain nombre d'élus municipaux — c'est normal, c'est correct de le faire — de la justesse des points de vue qu'on met de l'avant. Amener des gens à repenser certaines décisions qui ont déjà été prises pour leur montrer que des facteurs nouveaux doivent les faire changer d'idée, le député admettra aussi que c'est une tâche complexe et pas seulement technique.

Il faut également soumettre nos rapports à la critique de ces organismes, de ces experts, entre autres du Bureau de transport métropolitain et nous assurer, nous aussi, à la suite de ces critiques, que nos positions sont exactes, les modifier, refaire d'autres études. C'est un processus complexe et je pense que trois ans, quatre ans ne sont pas de trop pour faire de telles études, pour ceux qui connaissent, disons, la complexité de ces sujets où il ne s'agit pas seulement, comme je l'ai dit, de décisions techniques qui peuvent être prises par des technocrates en circuit fermé, mais de décisions qui doivent recevoir l'assentiment, comme c'est normal, je dirais, de dizaines d'élus municipaux, en même temps que de députés et de ministres, des deux côtés de la Chambre d'ailleurs, si on veut que finalement, sinon une unanimité, du moins un consensus assez large existe là-dessus.

Vous savez que souvent c'est sur ces problèmes d'aménagement qu'on retrouve les écoles et les batailles les plus acharnées quand vient le temps de prendre une décision. Pour ma part, je pense que ce processus, qui avait été mis en branle, comme je l'ai dit à toutes fins utiles, il y a maintenant cinq ans peut-être au Québec, aboutit maintenant à un résultat suffisamment clair pour que le gouvernement prenne position et invite l'ensemble de la population, des élus municipaux, des députés à se rallier derrière une proposition globale. C'est ce que j'ai l'intention de mettre sur la table durant les prochaines semaines.

Maintenant, il y a un certain nombre de principes qui ont déjà été mis de l'avant par un peu tout le monde, en particulier l'importance d'avoir un système intégré et non pas trois ou quatre systèmes. Chaque mode de transport a un rôle à jouer: l'autobus, l'autobus en voie réservée, le train de banlieue, le métro, et il ne faut pas privilégier un seul mode. En particulier — je pense, entre autres, au Bureau de transport métropolitain, à la ville de Montréal, même aux citoyens également qui ont reçu un service de très bonne qualité de la part du métro — la tendance, c'est de croire qu'un seul mode de transport, entre autres le métro qui est déjà bien intégré sur les plans urbain, administratif et financier, peut résoudre un problème de transport. Simplement amener des gens à sortir de leur vision axée sur un système qu'ils connaissent bien, qui donne un bon service et à penser plus large de façon à mettre en accord des intérêts parfois divergents entre un quartier d'une municipalité et un autre, tout cela représente, je pense, un tour de force considérable.

M. O'Gallagher: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Robert Baldwin.

M. O'Gallagher: ... le ministre a bien dit que les rapports sont tous complétés et que c'est le temps d'agir. Je voudrais lui demander de préciser une espèce de programme d'actions précises auxquelles on pourrait s'attendre d'ici les prochains mois pour régler cette situation de transport dans l'île qui traîne depuis tellement longtemps. C'est le temps d'agir, comme vous l'avez admis, mais la population voudrait savoir quand. Dans douze mois, dans 24 mois ou dans six mois?

M. de Belleval: Je pense que la réponse classique d'un homme politique prudent dans ces matières, c'est de ne jamais trop se mouiller et de donner des échéances un peu floues, etc. Je pense qu'on a pratiqué et qu'on pratique régulièrement ce genre de réponses des deux côtés de la Chambre à l'occasion. Tout en admettant que je ne contrôle par l'ensemble de ce dossier, que je dois faire rapport à un comité permanent, comme je l'ai expliqué, de collègues au Conseil des ministres, que je dois voir également d'autres députés, des deux côtés de la Chambre d'ailleurs, et les représentants municipaux, personnellement, mon ambition, mon objectif, c'est de faire en sorte que, d'ici à la fin de l'année, la population de Montréal, la population du Québec, d'ailleurs, prenne connaissance de nos propositions en cette matière.

M. Forget: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député.

M. Forget: ... quand le ministre nous annonce ce plan d'ensemble du transport, il veut bien dire qu'on va traiter là de ce qui advient du moratoire du métro, mais aussi de chacun des éléments qui ont fait l'objet des questions de mon collègue de Robert Baldwin, c'est-à-dire la question des trains de banlieue, la question des autobus dans la partie ouest de l'île de Montréal...

M. de Belleval: Et dans la partie est.

M. Forget: ... et dans la partie est. C'est donc une solution d'ensemble qu'il va proposer et il vise pour cela le 31 décembre de cette année. Mme la Présidente, le ministre ne pourrait-il pas convenir avec nous que vouloir tout régler d'un coup est peut-être le genre de façon de poser le problème qui est presque sûr de l'empêcher de rencontrer son objectif.

Relativement aux trains de banlieue, on a un précédent dans une ville qui n'est pas quand même tellement différente ni loin de nous, Toronto. Et plus généralement en Ontario, il y a maintenant plus d'une dizaine d'années, le gouvernement de l'Ontario a pris complètement à sa charge, sur le plan des équipements, des frais de fonctionnement et des déficits possibles de fonctionnement, les services de trains pour les "commuters", les banlieusards qui voyagent le matin et le soir vers le centre-ville. C'est un service qui donne satisfaction. C'est un service qui est financé provincialement parce que précisément, les bénéficiaires de ce service ne sont pas des contribuables seulement de la Communauté urbaine de Toronto, de Toronto métro, mais résident en dehors de la communauté.

De la même façon, à Montréal, vous avez deux trains de banlieue, au moins les deux ou trois qui restent qui, justement, ont le même rôle de prendre des gens dans les banlieues hors métropole et les amener au centre-ville. Est-il raisonnable, M. le ministre, de demander aux contribuables de la CUM et en particulier aux contribuables de la ville de Montréal, dont la masse de la contribution au financement total est prépondérante, de payer pour un service qui, largement, sert surtout — parce que ce sont eux qui ont le moins de choix valables — les gens qui vivent de l'autre côté de la rivière des Mille Îles, à Saint-Eustache et dans les environs, ou dans le cas du service de trains du Canadien Pacifique, à Dorion, à Vaudreuil, à Saint-Hilaire, etc., et même jusqu'à Rigaud? Est-il raisonnable de placer le fardeau sur les autorités municipales? Ne serait-il pas plus normal et plus facile de s'entendre, évitant ainsi toutes les querelles au sein de la CUM, si le gouvernement du Québec, sans essayer de tout régler d'un seul coup, acceptait au moins d'admettre qu'il a nécessairement une responsabilité particulière pour cette forme de transport en commun qui est hors métropole?

M. de Belleval: Pour répondre adéquatement à la question du député de Saint-Laurent, je crois qu'il faudrait étendre ici une grande carte et voir comment, sur le terrain, les choses se présentent. Les comparaisons sont toujours déficientes. C'est la forme la plus faible du raisonnement, dit-on. Par conséquent, je pense qu'il faut faire très attention en comparant la situation du Toronto métropolitain avec celle du Montréal métropolitain en matière de services de banlieue en particulier. Je ne veux pas ici commencer à faire toutes les distinctions qui devraient s'imposer. Je pense que cela nous sortirait trop du sujet et de la question particulière du député de Saint-Laurent. Mais il verra, quand nous présenterons notre rapport, qu'effectivement nous devons prendre une décision d'ensemble et qu'il n'est plus possible d'agir à la pièce dans ce dossier. Il verra que, techniquement, toutes les pièces du "puzzle" se rejoignent et doivent se rejoindre. Il s'agit véritablement d'un "puzzle" et non pas de pièces détachées d'un même ensemble qu'on peut traiter séparément, sur le plan purement technique.

Il verra aussi que sur le plan politique, dans le sens noble du terme, toutes ces pièces sont interreliées. Si quelqu'un, pour des motifs égoïstes ou pour des intérêts qu'il prétend légitimes dans son secteur de l'île de Montréal, prétend régler son problème sans, en même temps, régler les problèmes des autres, il va se rendre compte que c'est la voie qui a été empruntée dans le passé et c'est la voie qui nous a empêchés de progresser dans la région de Montréal au même rythme que les autres grandes régions métropolitaines du monde depuis quelques années.

Je voudrais donner des exemples de cette situation. Il dit: C'est encore la ville de Montréal, entre autres, qui aura à assumer une plus grande ou une part additionnelle du fardeau si le ministre veut procéder comme il semble vouloir procéder. Je dois dire qu'il y a de nombreuses municipalités dans la région de Montréal qui paient actuellement pour les services de transport en commun, en particulier du métro, et qui, depuis de nombreuses années, ne retirent aucun service du métro, parfois aucun service de niveau excellent sur le plan du transport par autobus. Ce n'est pas une situation qui affecte autant la ville de Montréal actuellement, mais qui affecte très directement plusieurs municipalités même du centre de Montréal. Je pense à Montréal-Nord, par exemple, et à d'autres municipalités.

M. Goulet: M. le Président.

M. de Belleval: Je voudrais dire aussi, pour donner d'autres exemples, que certaines décisions que nous prendrons, entre autres, concernant les trains de banlieue sont susceptibles de profiter considérablement aux citoyens de Montréal. Prenons un exemple: la ligne 2-Est du métro, celle qui va du centre-ville à Henri-Bourassa, a maintenant atteint — depuis quelques années — sa capacité ultime. Nous transportons à l'heure de pointe environ 30 000 personnes dans cette partie du métro. À la période de pointe, je pense, qui est d'un peu plus d'une heure, c'est environ 45 000 personnes. Autrement dit, cette ligne est saturée. Si nous continuons à construire des prolongements à cette ligne de métro ou des lignes qui viennent s'y rabattre, il va sans dire que nous essaierons de mettre davantage de clients dans une ligne qui est déjà saturée. Est-ce qu'on veut en arriver au système japonais, où on engage des pousseurs pour entrer de force les gens dans les portes de façon que celles-ci puissent se refermer et que le train puisse partir? Je ne pense pas que c'est ce qu'on veut vivre dans la région de Montréal. On est près de vivre cette situation dans la ligne 2 du métro.

Par contre, grâce à une bonne intégration des trains de banlieue et peut-être à une planification nouvelle des prolongements des lignes de métro, on pourrait, de façon significative, non pas seulement amener de nouveaux clients dans cette ligne, mais redistribuer ailleurs, en offrant un service non seulement équivalent, mais sans doute meilleur, des clients actuels au plus grand profit des citoyens de Montréal qui, en bas de ligne, doivent

actuellement entrer dans des voitures encombrées et qui le seraient davantage, si possible, si on continuait selon la voie qui est proposée.

Je donne simplement cela comme exemple pour démontrer qu'un geste que nous poserions dans les banlieues nord de Montréal aurait des conséquences directes sur les usagers actuels du métro. Je donnerai un autre exemple. Si, en ayant un plan intégré de transport, nous enlevons, dans le centre-ville de Montréal, des milliers de voitures — je parle effectivement de milliers de voitures chaque jour — est-ce que ce ne sera pas la qualité de la vie des quartiers centraux de Montréal qui en sera ainsi améliorée et est-ce que les citoyens de la rue Clark à Montréal ne seront pas avantagés par un geste que nous poserons du côté de Montréal-Nord, de Roxboro ou de Pierrefonds? J'entends démontrer que tel sera le cas si nous prenons la voie que nous proposons de prendre pour l'avenir à Montréal.

M. Forget: M. le Président, il y a des remarques qui ont été faites relativement au métro, nous y reviendrons, j'espère, tout à l'heure. Je voudrais revenir sur la question des trains de banlieue.

Le Président (M. Laberge): Entre-temps, M. le député de Bellechasse m'avait fait signe, si vous permettez.

M. Goulet: C'est sur le même sujet, M. le Président. Étant donné que c'est la question du député de Saint-Laurent qui prévaut aujourd'hui, je lui cède la parole, mais j'aimerais poser une courte question au ministre sur ce point.

M. Forget: Sur la question des trains de banlieue, bien sûr, le ministre peut nous expliquer très éloquemment que tout dépend de tout le reste et qu'on vit dans un monde interdépendant, que c'est pour cela que c'est compliqué et qu'il faut prendre les morceaux très gros. Il reste qu'il y a le problème des trains de banlieue. C'est un problème avec lequel un certain nombre de gens, quelques dizaines de milliers, vivent quotidiennement.

On sait que ces services vont être interrompus, c'est du moins la décision qui a été annoncée, en 1980; que ce soit en juillet ou en décembre, de toute façon, ça s'en vient. Faut-il comprendre des remarques du ministre qu'il nous annonce pour décembre, peut-être, il l'espère bien, un rapport d'ensemble? Donc les actions vont devoir suivre tout cela, elles ne pourront pas le précéder. Faut-il donc comprendre que, pour cet automne, la question des trains de banlieue ne connaîtra aucun développement à l'initiative du gouvernement? Autrement dit, que la loi dont son prédécesseur avait plus ou moins laissé entendre qu'elle s'en venait relativement à cette question ne verra pas le jour, qu'il n'y aura pas de geste posé par le gouvernement du Québec d'ici la fin de décembre pour nous rapprocher d'une solution? Si c'est cela qu'il faut comprendre, je pense qu'il est important que le public le sache parce que même au niveau des édiles municipaux, il y a un certain attentisme voulant que peut-être Québec va intervenir et va dispenser tout le monde de prendre des décisions.

M. de Belleval: La situation ne se présente pas, cependant, selon le dilemme ou selon la problématique que vient d'exposer le député de Saint-Laurent. Les compagnies de chemin de fer, compte tenu de la progression des travaux que nous faisons actuellement et auxquels, d'ailleurs, elles participent, étant à même de voir la teneur technique de ces travaux et leur sérieux; compte tenu, donc, de l'avancement de ces travaux d'étude, les compagnies de chemin de fer ont accepté elles-mêmes d'établir un moratoire quant au processus de désengagement qu'elles ont amorcé depuis quelques années. Cependant, elles nous ont fixé une date limite qui se situe durant 1980 pour qu'une décision ferme soit prise par le gouvernement, sinon, à ce moment-là, elles reprendront leur liberté d'action.

Pour quelques semaines et quelques mois encore, nous avons donc une situation qui est actuellement figée, qui nous donne le temps de prendre les décisions qui doivent être prises, de façon qu'on puisse passer du système actuel à un système futur qui fera l'objet des recommandations dont je parle et sans qu'entre-temps la situation ne se dégrade davantage. Je suis d'accord avec le député de Saint-Laurent sur le fait que nous sommes maintenant presque rendus à la fin des échéances. C'est ce qui explique aussi mon propre désir de faire en sorte qu'on sache où on s'en va avant la fin de la présente année.

M. Forget: Mais il n'y aura pas effectivement de gestes gouvernementaux, législatifs ou autres, d'ici les prochains mois.

M. de Belleval: Là-dessus, en ce qui concerne les gestes gouvernementaux de nature législative, je dois dire que la Communauté urbaine de Montréal a déjà pris un certain nombre de dispositions pour, entre autres, intégrer ces services périphériques. Une résolution a même été déposée sur la table du conseil de la Communauté urbaine de Montréal et, en vertu de sa charte actuelle, la Communauté urbaine de Montréal a elle-même suffisamment de pouvoirs pour prendre de telles décisions sans que le gouvernement ne les lui impose.

M. Forget: Vous savez qu'il y a actuellement, d'un côté, la ville de Montréal et, de l'autre côté, les maires de banlieue. Tout cela est figé depuis le mois de mars. Cela va bientôt faire six, sept ou huit mois, je ne sais pas, et personne ne fait de compromis, personne ne s'entend, parce qu'on dit: De toute manière, le ministre des Transports va nous dire quoi faire. Il semble que vous ne leur direz pas avant un certain nombre de mois, ce qui veut dire que même de leur côté, il n'y a aucune incitation à réviser leur position.

Il y a peut-être des possibilités de mouvement, de ce côté, que vous sous-estimez et que vous n'encouragez certainement pas en disant de façon

assez mystérieuse: Écoutez, l'État provincial paternaliste va venir régler tout cela avec un grand plan, un grand schéma d'aménagement et tout le monde n'aura qu'à s'y conformer. Est-ce qu'il ne serait pas plus sage, même dans le sens de Politique — avec un grand P — vous l'avez mentionné souvent ce matin, de dire: Écoutez, il y a des actions qui peuvent être prises? Est-ce qu'il est nécessaire ou non de relier de façon indissoluble la solution des trains de banlieue à la question de l'expropriation des deux compagnies d'autobus dans l'Ouest-de-l'Île? Est-ce que cela, selon vous, doit être relié de la façon dont cela l'a été, parce que c'est le levier qui a permis à certains membres de la communauté urbaine de bloquer toute décision même partielle?

M. de Belleval: J'allais justement aborder ce point, quand le député de Saint-Laurent a repris la parole. J'exposais la situation juridique actuelle. J'expliquais aussi que des mesures avaient été prises à l'initiative de la Communauté urbaine de Montréal dans le sens que le propose le député de Saint-Laurent. C'est ce que j'allais dire, en continuant. Cependant, ces initiatives n'ont pas abouti encore, parce qu'effectivement la ville de Montréal s'y est opposée. Toutefois, justement, j'espère que les consultations que j'ai actuellement avec les différents responsables municipaux dans la région de Montréal vont porter leurs fruits. J'espère que le rapport que nous produirons aura aussi une valeur pédagogique suffisante pour établir un certain consensus satisfaisant pour que, d'elle-même, la Communauté urbaine de Montréal prenne les décisions qu'elle a déjà manifesté l'intention de prendre, pour justement éviter que ce soit l'État paternaliste qui vienne imposer à certains conseils municipaux, à certains responsables de la région de Montréal, des décisions que ces responsables auront le pouvoir de prendre durant les prochains mois.

Quand vous demandez: Est-ce qu'il faudra attendre plusieurs mois? J'ai répondu: D'ici la fin de l'année. Il reste donc deux mois avant la fin de l'année. Nous aurons donc sur la table des propositions concrètes qui ne seront pas des propositions paternalistes du gouvernement du Québec, puisque ces propositions sont actuellement élaborées au sein du COTREM, en collaboration avec les responsables locaux en matière de transport en commun.

Cela étant dit, s'il n'y a pas unanimité et si le consensus n'est pas suffisant, il faudra bien, à un moment donné, que le gouvernement prenne ses responsabilités. Je pense que le député de Saint-Laurent...

M. Forget: On comprend cela, M. le ministre. On comprend qu'il va falloir que vous agissiez.

M. de Belleval: ... serait le premier à dire: Le gouvernement n'a pas raison de dire: Vu que vous n'êtes pas capables de prendre vos responsabilités vous-mêmes, arrangez-vous, je ne fais rien. Il me reprocherait pareille attitude. Mon ambition, c'est de faire en sorte que ces gens prennent leurs propres responsabilités. Nous les aiderons à les prendre.

M. Forget: Mme la Présidente, on est actuellement en train d'écouter le ministre qui nous débite des généralités, des voeux pieux depuis quand même un bon moment. Je comprends tout cela. C'est difficile, c'est long, vous attendez le consensus, vous attendez que les gens prennent leurs responsabilités. Qu'attendez-vous de la part des autres avant d'agir vous-même? Est-ce qu'au moins vous pourriez nous dire: On y réfléchit, on va agir éventuellement, on ne sait pas quand, cela va être plus tard? Au moins, à quoi vous attendez-vous de la part des dirigeants de la ville de Montréal, de la CUM, exactement? Ils vont devoir changer leur attitude. De quelle façon? Est-ce que vous essayez de produire un changement?

C'est très joli d'étudier et de faire ce genre de grande dissertation sur les difficultés de gouverner. Bon Dieu! à un moment donné il faut conclure. Il ne faut pas toujours tout renvoyer aux calendes grecques. Cela fait des années qu'on pose des questions sur les services de banlieue et, chaque fois, on nous dit: Attendez quelques mois, vous allez avoir la grande étude qui va faire le consensus. Ce n'est pas vrai. Vous êtes incapables de produire le consensus. Branchez-vous. Dites à quoi vous vous attendez de la part de la ville de Montréal. À quoi vous attendez-vous de la part des maires de banlieue? À défaut de l'obtenir, vous agirez; mais dites quelque chose. Ne nous dites pas que c'est difficile. C'est tout ce que vous dites. (12 h 15)

M. de Belleval: Je comprends le député de Saint-Laurent d'essayer de reprendre un peu l'initiative politique qu'il a perdue le long du débat, mais on ne s'énervera pas et on ne prendra pas trop non plus au pied de la lettre l'éclat, la colère feinte qu'il vient d'exprimer...

M. Forget: ... arrêtez donc au lieu de philosopher.

M. de Belleval: ... j'ai déjà expliqué tout à l'heure que nous sommes rendus à la fin de ce processus, que, d'ici quelques semaines au plus tard, nos positions seront rendues publiques et qu'entre-temps nous prenons les dispositions pour faire en sorte qu'il y ait effectivement un consensus, que des gens changent leur opinion...

M. Forget: Dans quel sens, dans quelle direction...

M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent le verra quand le rapport...

M. Forget: Serait-il possible de dire au public ce que vous voulez des partenaires avec lesquels vous discutez? C'est secret, c'est le secret diplomatique?

M. de Belleval: Voyons donc!

M. Forget: Allons donc!

M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent n'est pas obligé de jouer à la vierge offensée et de faire semblant qu'il ne comprend pas. Est-ce qu'il veut que je lui rende public ce matin un rapport qui sera rendu public de toute façon, comme je l'ai dit, d'ici quelques semaines...

M. Forget: Votre prédécesseur, il y a un an, nous promettait des rapports...

M. de Belleval: II sait bien que...

M. Forget: ... pour décembre 1978. On est rendu à novembre 1979 et on attend encore des rapports dans quelques mois. C'est toujours la même chose. Vous hésitez...

M. de Belleval: Je pense... M. le Président...

M. Forget: ... à prendre des décisions qui s'imposent. Vous hésitez à dire: Les trains de banlieue, il y a une responsabilité provinciale et on va l'assumer.

M. de Belleval: C'est faux. M. le Président, je demande la parole.

M. Forget: Tout ce que votre prédécesseur a réussi à dire, c'est qu'il considérait ça dans le déficit normal de la CTCUM.

M. de Belleval: M. le Président, je demande la parole parce que...

Le Président (M. Laberge): À l'ordre! M. le député de Saint-Laurent.

M. de Belleval: ... le député de Saint-Laurent, décidément, a choisi maintenant de voler bas plutôt que de garder le débat au niveau où nous l'avions commencé. J'ai expliqué tout à l'heure que nous avions été le premier gouvernement à intervenir, ce n'est pas son gouvernement. Le problème existait, au moment où il était ministre, ce n'est pas un problème nouveau qui est arrivé le 15 novembre 1976, il l'admettra. Nous sommes le premier gouvernement à être intervenu pour subventionner les trains de banlieue...

M. Forget: Temporairement, en 1978, pas en 1979.

M. de Belleval: Voulez-vous me laisser terminer?

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît!

M. Forget: Vous avez déjà dit ça.

M. de Belleval: Je l'ai déjà dit, mais le député de Saint-Laurent n'a pas l'air de se le rappeler, puisqu'il dit que nous n'avons rien fait, que nous ne faisons que des rapports et que nous n'intervenons pas, alors que, tout à l'heure, j'ai fait un bilan, que j'ai essayé de faire le plus sobre et le plus honnête possible, sur ce que nous avions fait depuis trois ans et qui, dans la plupart des cas, constituait des actions nouvelles, des précédents de la part d'un gouvernement du Québec.

Donc, nous avons déjà agi, nous avons poursuivi les études nécessaires, nous allons bientôt avoir un rapport, d'ici quelques jours, d'ici quelques semaines, et comme je l'ai dit, mon ambition c'est que tout ce dossier soit sur la place publique pour que le député de Saint-Laurent prenne d'ailleurs position et nous appuie, je l'espère, justement dans les actions que nous avons décidément l'intention de prendre, pas simplement des études que nous avons l'intention de faire, mais des décisions que nous avons l'intention de prendre et que nous prendrons d'ici la fin de l'année.

Je pense qu'à ce moment-là il admettra que ce n'est pas l'occasion ce matin de lui faire rapport sur les propositions concrètes que nous entendons soumettre dans chaque cas, que ceci doit suivre son cours. Le rapport est en voie d'être corrigé dans sa forme finale, il sera remis au COMPA d'ici quelques jours, au Conseil des ministres très bientôt, ensuite, il sera rendu public. Entre-temps, il est normal que le ministre des Transports consulte une dernière fois les représentants des municipalités intéressées et tente effectivement de leur soumettre des points de vue nouveaux, de façon que ces autorités soient en mesure elles-mêmes de prendre position quand le moment sera venu et d'assumer leur propre responsabilité que leur fournit la Loi actuelle de la Communauté urbaine de Montréal.

Ceci étant dit, nous ne nous attendons pas à l'unanimité. Nous espérons que le consensus sera suffisamment majoritaire pour qu'il puisse être mis en pratique par la Communauté urbaine de Montréal. Je pense que c'est légitime.

M. Goulet: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, On a dit tout au long du débat qu'on avait effectué des études, qu'on déposerait un rapport éventuellement. On a parlé de trains de banlieue. Tout ce qui touche ces rapports ou les discussions, c'est de trouver une solution pour une meilleure efficacité, un meilleur service au niveau du transport en commun. Je pense qu'on s'est entendu là-dessus. Le ministre a souligné tout à l'heure que les décisions que l'on prendrait seraient pour une période de 40, 50 ou 60 ans, ce qui est normal.

Est-ce qu'il y a seulement le critère ou quel pourcentage ce critère de la solution de l'efficacité d'un meilleur service vaut-il dans la grille de pondération? Y a-t-il d'autres critères dont on tient compte? Il y en a sûrement d'autres, mais dans quel pourcentage, par exemple, au niveau de l'économie de l'énergie, de la qualité de la vie? On

parle d'un problème énergétique, d'un problème écologique. Justement, puisque ces fameux rapports retardent, ce n'est pas parce qu'on doit remettre en question certaines solutions qu'on croyait bonnes l'an passé ou il y a deux ans, mais à cause de ce fameux problème énergétique qu'on connaît actuellement aux États-Unis plus qu'ici, en tout cas, que les Américains ont vécu le printemps dernier. Ils ont des autoroutes tout à fait remarquables et on ne peut plus s'en servir à cause du manque d'essence.

Des études ont été effectuées il y a deux, trois ou quatre ans et on semblait dans la bonne voie. Il semble qu'on doive les remettre en question avant qu'elles ne soient rendues publiques, ces solutions. Oublions le milieu écologique, qui est très important, et tenons-nous en au niveau énergétique. Dans quel pourcentage, actuellement, ce problème ou ces critères entrent-ils en ligne de compte comparativement à l'efficacité d'un très bon réseau routier et d'un meilleur service de transport en commun? Dans quel pourcentage, actuellement, l'énergie entre-t-elle en considération? Quand on parle de 40 ans, Dieu sait s'il va y en avoir des problèmes! Il va sûrement y avoir des inventions d'ici ce temps, mais les problèmes, on les connaît déjà, on les vit actuellement et je ne pense pas qu'ils diminuent, ils vont s'amplifier.

Est-ce que le ministère ou les gens qui s'occupent de la conservation de l'énergie participent à la fabrication des rapports ou aux travaux ou aux plans actuels du ministère des Transports?

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des Transports.

M. de Belleval: Oui, il faut considérer l'ensemble des facteurs et non pas simplement l'efficacité du système de transport lui-même, en dehors de toute autre considération d'efficacité ou de niveau de services. Un plan de transport, c'est essentiellement le résultat d'un certain nombre de compromis, c'est une espèce d'optimisation de solutions qui, individuellement, ne sont peut-être pas les meilleures mais qui, prises ensemble, constituent le meilleur compromis possible. Il ne faut pas simplement s'occuper du niveau de services ou du système de transport en vase clos.

L'économie d'énergie est un critère. Prenons un exemple. L'autobus de type urbain constitue un système de transport relativement peu coûteux à l'installation, à l'achat de l'équipement, comparativement, par exemple, à un système de tramways qui coûte assez cher à l'installation. Par contre, au niveau du service à l'heure de pointe, on sait qu'il faut multiplier les autobus, il faut donc engager plusieurs chauffeurs pour un même autobus tandis que le tramway, avec le même chauffeur, peut ajouter plusieurs voitures, l'une derrière l'autre, et augmenter ainsi la capacité à l'heure de pointe. Dans le cas du tramway, on utilise une forme d'énergie produite ici au Québec, l'électricité, tandis que dans le cas de l'autobus on utilise le pétrole. Les conséquences de l'utilisation d'un autobus en termes de bruit, en termes de l'utilisa- tion de l'espace urbain ne sont pas les mêmes que pour l'utilisation d'un tramway. La capacité non plus, à l'heure de pointe, n'est pas la même. On peut faire davantage de transport avec un tramway qu'avec un système d'autobus équivalent.

Si les coûts d'installation, d'immobilisation sont plus élevés dans le cas d'un tramway que dans le cas d'un autobus, par contre, les coûts de fonctionnement peuvent être moins élevés dans un cas que dans l'autre et à long terme, il faut faire une actualisation de tout cela. Il faut tenir compte de tous ces facteurs et essayer de les pondérer les uns par rapport aux autres. Je mentirais au député de Bellechasse si je lui disais qu'on peut faire une grille d'analyse et fixer un pourcentage dans la prise de décision à chacun de ces facteurs. On en tient compte, des experts en matière d'aménagement sont utilisés, les équipes que nous utilisons sont véritablement pluridisciplinaires, il y a des économistes, il y a des aménagistes, il y a des spécialistes des systèmes techniques de transport comme tel, des experts en circulation, des experts en économie d'énergie. On prend tous ces facteurs et, à partir aussi de l'expérience que d'autres pays, d'autres villes ont accumulée, du jugement pratique, donc, que toutes ces choses nous apportent, on est en mesure de prendre une décision qui fait quand même intervenir une part de bon sens, une part de jugement et pas seulement une décision qui peut être prise à partir de facteurs purement mathématiques.

C'est ce qui explique également qu'il peut y avoir des contestations, qu'on peut contester un choix sous tel ou tel aspect, qu'on peut décider qu'on n'est pas d'accord avec la pondération que l'organisme de décision a mise dans chacun des facteurs. Cela fait partie des règles du jeu. Si on pense que le rapport que je vais déposer va être un document pontifical, qu'il sera infaillible et qu'il n'y aura pas matière à contestation parce que tous les facteurs de décision sont tellement bien chiffrés à partir d'une grille d'analyse objective qu'il n'y aura plus de discussion possible, non, je ne peux pas promettre cela.

M. Goulet: Mme la Présidente, je ne sais pas si le député de Saint-Laurent me permettrait de compléter là-dessus? Il regarde l'heure.

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous disposez de très peu de minutes, M. le député de Bellechasse, sur le temps qui vous est imparti normalement dans ce débat. Alors, allez-y, trois ou quatre minutes tout au plus.

M. Goulet: Une minute. Est-ce qu'il y a des décisions ou des solutions qu'on avait trouvées il y a deux, trois ou quatre ans — quelque chose de concret, des exemples concrets — que l'on croyait bonnes et qui se défendaient avec chiffres à l'appui et qu'on doit remettre en question avant de les appliquer à cause du problème de l'énergie? C'est ce que je voulais savoir. Est-ce que vous avez des exemples?

M. de Belleval: À cause du problème de l'énergie comme tel?

M. Goulet: Oui.

M. de Belleval: Je dois dire qu'au Québec nous avons pris conscience de ces problèmes relativement tard par rapport à d'autres sociétés. Mais il est évident qu'entre autres la décision du Conseil des ministre de l'ancien gouvernement d'interrompre temporairement les travaux du métro et d'interrompre également la construction des grandes autoroutes en milieu urbain provenait, entre autres, de ces considérations de type aménagement, bien sûr, du territoire, de type financier également, mais aussi de type énergétique.

Alors, vous me demandez de citer un exemple particulier sur le plan purement énergétique. Je dois dire que oui, très certainement, la décision d'arrêter les autoroutes en milieu urbain est due à des facteurs énergétiques en particulier mais aussi à des facteurs d'aménagement du territoire. C'est rare, autrement dit, qu'on trouve un seul facteur comme facteur décisionnel. C'est plutôt un ensemble de facteurs et le facteur énergétique est très important.

M. Forget: Mme la Présidente, j'aimerais — parce qu'on a discuté suffisamment longuement, je pense, de la question des trains de banlieue — revenir à un autre aspect des problèmes de transport dans la région de Montréal qui a été soulevé, à l'occasion, lors de nos débats; c'est la question du métro.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent, est-ce que je pourrais vous proposer comme à M. le ministre, puisque vous êtes les intervenants privilégiés aujourd'hui, de déterminer dix minutes à chacun pour vos conclusions? Il faudrait peut-être restreindre, à ce moment-là, la prochaine intervention, de manière que, vers 12 h 40, vous puissiez utiliser dix minutes de conclusion et M. le ministre, ensuite, le même temps.

M. Forget: D'accord. J'ai des questions qui sont brèves et j'espère que les réponses le seront de la même façon.

M. de Belleval: J'essaierai d'être bref aussi.

M. Forget: II y a la question du métro. On nous dit: II va y avoir un grand document et, si je comprends bien les recommandations relativement à la levée du moratoire, un échéancier de construction du métro fera partie du document que vous nous annoncez. Parfaitement. À ce moment, est-ce que le ministre peut nous dire s'il accepte la proposition qui est contenue dans le rapport du comité conjoint Québec-municipalités, à savoir que, comme les autoroutes, en milieu urbain même, sont financées par le gouvernement du Québec, ce qui en tient lieu, qui est l'alternative pour le transport des personnes dans le milieu urbain, les infrastructures de transport en commun, particulièrement le métro, ce soit également financé, quant à l'infrastructure elle-même, à 100% par le gouvernement?

C'est une des recommandations qu'on trouve dans ce rapport où le comité conjoint se distingue de la proposition formulée par le ministre des Finances dans son discours du budget l'an dernier. Est-ce que, comme ministre des Transports, il est prêt à admettre le bien-fondé de cette recommandation?

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Le ministre des Transports est aussi membre d'un Conseil des ministres et il est assujetti comme tous les autres à la solidarité ministérielle. Je ne peux pas me permettre d'avoir des opinions personnelles sur une question qui doit faire l'objet d'une décision comme telle du Conseil des ministres. Est-ce que le député de Saint-Laurent veut avoir une opinion personnelle et est-ce qu'il pense que c'est légitime que je donne une opinion personnelle?

M. Forget: Rien n'interdit à un ministre de dire ce qu'il pense, surtout que la décision n'est pas prise, si je comprends bien, par le Conseil des ministres.

(12 h 30)

M. de Belleval: Donc, le député de Saint-Laurent ne reprochera pas au ministre des Transports de prendre des positions sans avoir consulté ses collègues et lui dire plus tard: Le ministre est irresponsable, il se prononce personnellement, alors que dans notre contexte de responsabilités ministérielles, tout le monde sait que ce que dit un ministre engage le reste du Conseil des ministres, etc.

M. Forget: J'aimerais, Mme la Présidente, que le ministre nous dise dans quel sens il va faire jouer l'influence sans aucun doute très grande qu'il a sur cette question au sein du Conseil des ministres.

M. de Belleval: Et ensuite, si cela ne réussit pas, il va dire: Le ministre des Transports a perdu la confiance de la Chambre et il n'est même pas capable de faire valoir ses opinions.

M. Forget: Ah! Ce sont les risques du métier.

M. de Belleval: Ce sont les risques du métier. Bon! On se comprend bien sur les règles du jeu. Autrement dit, on m'invite à prendre position avant même que le Conseil des ministres ne se prononce là-dessus, en me disant qu'on ne sera pas trop méchant envers moi, mais qu'on se réserve le droit de me donner un coup de cuiller à pot si cela fonctionne mal.

Il est normal, je pense, que le ministre des Transports soit favorable à toute proposition qui sera de nature à faciliter l'implantation de moyens de transport modernes et efficaces, et en particu-

lier plus efficaces que notre système d'autoroutes. Dans ce sens, je dirai oui, le ministre des Transports serait favorable à une position qui permettrait de financer de telles infrastructures de la façon la plus facile possible. C'est sûr. C'est certain.

M. Forget: ... %, tel que recommandé.

M. de Belleval: L'idéal, de ce point de vue, ce serait 100%, mais là encore, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a d'autres considérations qui peuvent entrer en ligne de compte.

M. Forget: Conscients de cela, on va attendre les décisions, mais il est intéressant d'avoir quand même un exposé de la position personnelle du ministre et celle qu'il va faire valoir au Conseil des ministres sur ce point. C'est un sujet de grande actualité, bien sûr, surtout qu'au moment où il va annoncer son grand plan de développement, sa réalisation est conditionnée par les possibilités financières.

M. de Belleval: Ce serait plus facile de ce point de vue de réaliser un certain nombre de choses.

M. Forget: Toujours relativement au métro, le ministre pourrait-il être d'accord pour dire que la question de la ligne qui se termine à du Collège représente cette décision de ne pas aller pour l'instant au-delà de du Collège? C'est une décision qui devra nécessairement être révisée étant donné qu'il y a un besoin pour un garage au bout de cette ligne et qu'il est impossible, actuellement, à moins de détruire tout le coeur de la ville de Saint-Laurent pour aménager un garage, il est impossible qu'il y ait un garage à cet endroit. Tant qu'il n'y aura pas un garage, des coûts supplémentaires de fonctionnement sont inévitables pour le métro de Montréal.

M. de Belleval: Seulement une petite remarque sur la question précédente. Actuellement, le métro est financé à 60%. La proposition du comité, effectivement, est de monter à 100%.

M. Forget: Et la proposition de M. Parizeau était de monter à 75%.

M. de Belleval: 75%.

M. Forget: C'est cela.

M. de Belleval: Comme on le voit, tout le monde est un peu dans la même direction.

M. Forget: Oui, la même direction.

M. de Belleval: II s'agit de savoir où on va arrêter.

M. Forget: C'est plus rassurant que cela augmente plutôt que de diminuer.

M. de Belleval: C'est cela. En ce qui concerne la station 2 ouest du métro, je répondrais oui carrément, et il y aura besoin de réviser cette décision dans le sens que ce n'était pas, de toute façon, une décision définitive. C'était une décision temporaire, essentiellement temporaire.

Est-il possible, en longue période, d'envisager que le métro arrête à du Collège? Je dirais que, techniquement, oui, c'est possible. Il y aurait même des terrains de disponibles, je crois, qui ne nécessiteraient pas, comme vous le dites, la destruction du centre-ville de Saint-Laurent. Je crois que c'est une vision un peu apocalyptique des choses. De toute façon, on s'y refuserait. C'est évident. Mais je pense qu'il y a des possibilités malgré tout d'arrêter définitivement à du Collège. Est-ce ce que nous proposerons? Là-dessus, j'aimerais attendre que nous puissions regarder le dossier d'ensemble, ce que je me suis engagé à produire d'ici quelques jours ou quelques semaines, mais il y a d'autres possibilités que celles qui avaient été proposées jusqu'à maintenant par le BTM qui existent aussi en ce qui concerne le prolongement de cette ligne. Il faudra aussi examiner ces possibilités avant de prendre une décision définitive.

Je veux seulement mentionner une hypothèse. Vous savez qu'il reste des terrains importants à développer dans le territoire de ville Saint-Laurent, notamment du côté ouest. Je pense qu'il faut examiner un peu ce qu'on veut faire éventuellement, en longue période, avec ces terrains. Quel genre d'urbanisation veut-on y faire et, si on veut y faire de l'urbanisation, dans quelle densité, avant de prendre une décision finale quant au prolongement de la route 2-Ouest? Tout ce que je veux plaider ce matin et ce que je continuerai d'ailleurs à plaider dans quelques semaines, c'est que, avant de prendre des décisions finales dans un secteur donné, il faut s'assurer qu'on a examiné suffisamment bien les options qui sont ouvertes devant nous. Il faut accepter d'examiner de nouvelles options.

Lien avec Mirabel

M. Forget: Une autre question précise, Mme la Présidente, la question de Mirabel. Malheureusement, nous ne pourrons pas aller dans les détails concernant la question du lien direct avec Mirabel. Y a-t-il des décisions? J'ai d'ailleurs posé, au tout début, un certain nombre de questions qui sont demeurées sans réponse. Il y a, cependant, une chose que j'aimerais obtenir du ministre. C'est qu'il rende publiques les études d'impact qui ont été faites relativement aux conséquences qui découleraient d'un transfert de vols de Dorval vers Mirabel. C'est, bien sûr, une question qui passionne — je pense que le mot n'est pas trop fort — un très grand nombre d'industriels qui sont situés en pourtour de l'aéroport de Dorval et qui voient là, à tort ou à raison — je pense qu'il faudrait les éclairer là-dessus — les conséquences néfastes et catastrophiques pour leurs industries d'un déménagement massif des activités de Dorval à Mirabel.

Si c'est là une considération — je pense que cela a d'ailleurs été mentionné par son prédécesseur comme une des considérations qui inspiraient le ministère des Transports du Québec dans la question de savoir si, oui ou non, on construit un lien ferroviaire avec Mirabel, à savoir s'il va y avoir plus de vols à Mirabel qu'il n'y en a dans le moment et ils ne peuvent venir d'ailleurs que de Dorval... On a fait des études d'impact et je pense — le ministre devra en convenir avec moi — que le public affecté, les populations affectées, qui vivent en pourtour des deux aéroports, mais particulièrement celui de Dorval, mais aussi la région de Saint-Jérôme, etc., ont le droit de savoir à quoi s'en tenir, quel effet cela produirait sur elles de manière à leur laisser le temps de réagir, d'en prendre connaissance, de les discuter et, au besoin, même de faire des représentations au ministre si des aspects avaient été omis.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: La Communauté urbaine de Montréal a effectué un certain nombre d'études sur l'impact éventuel d'un déménagement des vols actuels de Dorval vers Mirabel. Le gouvernement fédéral, que je sache, le ministère des Transports fédéral a aussi étudié un certain nombre de scénarios de transfert et les impacts consécutifs sur Dorval. Quant à nous, sachant que de telles études étaient en cours à la Communauté urbaine de Montréal et du côté du gouvernement fédéral, nous n'avons pas entrepris des études qui auraient tout simplement doublé les études de ces personnes. Je pense que l'étude de la Communauté urbaine de Montréal est déjà publique ou elle pourrait être rendue publique par la Communauté urbaine de Montréal.

Du côté du gouvernement fédéral, nous sommes actuellement en conversation avec le ministère des Transports de façon à connaître ses vues sur l'avenir éventuel du système aéroportuaire montréalais. Sans vouloir reprendre tout le dossier constitutionnel et tout le dossier politique de la souveraineté-association, le député de Saint-Laurent admettra que dans le contexte constitutionnel actuel, tant du côté des chemins de fer de banlieue, mais encore plus — je l'admets — du côté du système aéroportuaire montréalais, le gouvernement québécois est presque impuissant à amener une solution efficace en matière de transport aéroportuaire, de transport aérien à Montréal tant que le gouvernement fédéral ne sera pas prêt à prendre ses responsabilités. Il admettra aussi que justement dans le contexte politique actuel et depuis de nombreuses années, dans le contexte dans lequel la décision de construire Mirabel a été prise, dans le contexte des ambitions des gens de Toronto, des gens de l'Ouest canadien, le gouvernement québécois, le peuple québécois, dans son ensemble en tout cas — celui de la région de Montréal, en tout cas — est à la merci d'une technocratie et d'un système politique où il n'a à peu près aucune influence.

La preuve, c'est que nous avons déjà eu un ministre des Transports fédéral québécois, avec le "French power" qu'on a connu jusqu'à récemment à la tête du gouvernement fédéral, et maintenant c'est encore pire, avec la situation actuelle. Malgré tout cela, nous sommes ni plus ni moins des otages entre les mains du gouvernement fédéral en ce qui concerne l'avenir du développement aéroportuaire à Montréal. Cela pourra changer assez rapidement, je crois, si les Québécois disent oui à la souveraineté-association.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, je dois vous...

M. Forget: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Cuerrier): Vous auriez une dizaine de minutes pour conclure, M. le député de Saint-Laurent, et le ministre pourrait disposer de pas tout à fait dix minutes — vous avez un peu empiété, M. le ministre — quelques secondes de moins que dix minutes.

M. de Belleval: Je donne tout mon empiétement au député de Saint-Laurent.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Mme la Présidente, nous avons essayé de faire un tour d'horizon des problèmes de transport dans la région de Montréal. Pour ceux qui auraient pu s'étonner qu'on consacre trois heures à un sujet comme celui-là au début de notre débat, je pense qu'ils seraient éclairés, à la fin du débat, de constater que nous n'avons même pas épuisé la liste des sujets auxquels on aurait pu faire allusion. Nous n'avons pas mentionné un certain nombre de choses qui sont quand même très importantes pour les citoyens des régions tout près de Montréal. Je pense par exemple à toute la question relative au territoire des organismes de transport dans la région de Montréal. Il y a toutes sortes de rumeurs, fausses ou fondées, relativement au statut des empiétements de la CTCUM dans la direction de la rive sud, de Longueuil, et des conditions dans lesquelles cet empiétement se fait traditionnellement, jusqu'à quel point ça doit être maintenu, augmenté ou diminué. C'est un sujet fort intéressant.

Il y a également le problème de la CTRS, la Commission de transport de la rive sud et de son extension possible jusqu'à Chambly, etc. Il y a toutes sortes de possibilités, là aussi. Il y a quand même une zone en expansion démographique qui pose justement le problème de son organisation sur le plan du transport en commun. Il y a des problèmes analogues qui se posent du côté de Laval, de la Commission de transport de Laval. Il y a tout le problème, qui est fort familier, je n'en doute pas, au ministre des Transports, parce qu'il fait l'objet des préoccupations du ministre des Finances, de l'organisation du transport dans la

région de Repentigny, L'Assomption, Joliette, etc. Est-ce qu'il y aura une commission de transport régionale? Quel sera son lien avec l'île de Montréal?

Il y a tout le problème, évidemment, du réseau express métropolitain vers Repentigny, à savoir jusqu'à quel point tout ceci sera intégré. Cela touche des centaines de milliers de personnes dans chacun des cas. On n'a pu faire de discussion là-dessus, ce matin, malheureusement. J'espère que le ministre va trouver d'autres façons d'éclairer la population et les élus de ces différentes régions sans attendre les calendes grecques. Il y a des questions qui se posent. Je pense qu'il devrait s'employer à clarifier la situation. On entend de différents côtés des versions fort différentes de ce que l'avenir pourrait nous réserver. Dans la même veine, il y a les problèmes du pont Mercier, de l'autoroute 30 dans cette région et de la possibilité qui se découvre récemment, par le projet Archipel, d'établir un nouveau lien. Est-ce que cela sera compris dans le grand schéma d'ensemble ou s'il faudra attendre la version révisée et corrigée de 1985? C'est, j'espère, ce qu'on va découvrir au cours des prochains mois.

Il y a également le rôle de ces structures qui sont un peu entre ciel et terre, des structures de décision, de consultation, où les élus ne sont pas présents. Le gouvernement a créé le COTREM, la Commission de transport de la région de Montréal...

Une voix: Conseil des transports.

M. Forget: Conseil des transports... on ne s'y retrouve plus là. Mais c'est un organisme nouveau auquel siègent les directeurs exécutifs des commissions de transport de la rive sud de Montréal et de Laval et des représentants du ministère des Transports — du moins les représentants élus de la population s'en plaignent — non pas des représentants des conseils municipaux ou même des communautés urbaines comme telles. Est-ce là une situation satisfaisante ou non? S'agit-il simplement d'un organisme-conseil du ministère des Transports du Québec ou s'agit-il de quelque chose qui peut et qui doit s'intégrer dans la structure des organismes à vocation urbaine, mais avec une base démocratique, avec une base élue? Le problème est posé, mais il n'est pas résolu. Je ne suis pas sûr si le document que le ministre nous a promis va permettre de trancher ce débat. Il est relié à toute la réforme de la fiscalité municipale; mais on est à la veille d'y entrer, le 1er janvier 1980, et pourtant, il semble y avoir beaucoup d'imprécision là-dessus. (12 h 45)

Mme la Présidente, quant aux points dont nous avons, malgré tout, réussi à gratter la surface seulement, il y a, quant à moi, une grande déception que le ministre n'ait pas jugé bon, lui qui connaît ses dossiers et après trois ans que ce gouvernement est en fonction, qu'il n'ait pas jugé bon, dis-je, de nous révéler quoi que ce soit de nouveau. Il n'a pris aucun engagement. Il n'a fait aucune déclaration, sauf une à titre personnel, relativement au financement du métro.

Je lui en sais gré. C'est un acte de courage, mais c'est un acte isolé. On n'est pas plus avancé à 13 heures, ce 2 novembre 1979, sur la conception d'ensemble et les positions, la responsabilité, les dates, les engagements du gouvernement, qu'on pouvait l'être il y a un an, il y a deux ans ou il y a trois ans. On est encore à attendre les papiers. Les papiers vont précéder les décisions. Les décisions vont précéder les dates. Ce qui veut dire qu'avant qu'on agisse, il va s'écouler une bonne année encore. On sera loin dans le mandat d'un gouvernement de quatre ans. On aurait cru que le Parti québécois était plus sincère que cela quand il nous parlait de la priorité au transport en commun, de l'aménagement urbain, etc. On se rend compte que ce dossier, dont il avait fait un cheval de bataille, jadis, au cours des bonnes années de l'Opposition, il n'a pas su le traduire dans des gestes concrets et qu'encore aujourd'hui, après trois ans, il hésite, il tergiverse. Il nous invoque la difficulté de sa tâche de produire des consensus. Est-ce qu'il a été élu simplement pour être le secrétaire des consensus?

On distingue la ville de Montréal et la banlieue. Il y a ceux qui sont à l'extérieur de la CUM. Ce sont des intérêts divergents. On ne pourra pas faire plaisir à tout le monde. L'idéal, c'est au moins de faire plaisir au plus grand nombre de gens possible, mais si on leur fait un déplaisir, de le faire pour les meilleures raisons possible. Tout cela, ce sont des décisions qui doivent venir du gouvernement. Les études ne diminueront pas la difficulté du problème, au contraire. On l'a signalé. La crise de l'énergie... les gens sont quand même alertés à la difficulté qu'il y a de se déplacer, surtout qu'ils viennent de traverser une grève qui leur a très bien remis en mémoire les problèmes de se déplacer dans une région métropolitaine. Ils s'attendent qu'on donne un essor nouveau aux méthodes et aux mécanismes de transport en commun.

Cependant, à cet égard, on leur promet encore des délais. J'aurais voulu que le ministre s'engage davantage aussi à publier un peu plus les études qui se font. La réponse qu'il m'a donnée à la toute fin ne me satisfait pas totalement relativement à l'impact de transferts de vols de Dorval à Mirabel. Il nous dit: "Le gouvernement du Québec est le prisonnier, l'otage du gouvernement fédéral". Est-ce que le gouvernement du Québec — ceci étant dit, et sans vouloir entrer dans une controverse qui n'appartient pas à la Commission des transports — a au moins une opinion? Est-ce qu'il s'est fait une opinion informée sur le caractère désirable ou non d'un tel transfert de vols? Ou est-ce qu'il n'est que le témoin passif de ce que le fédéral peut faire ou que la Communauté urbaine peut faire là-dessus? Est-ce que vous avez des opinions? Est-ce que vous avez des choses que vous pourriez dire au moins en public? C'est un facteur, l'opinion publique, dont un homme politique devrait se souvenir. Est-ce que vous avez

une opinion sur le caractère désirable ou non de ces transferts? Est-ce que vous avez une idée précise ou imprécise sur l'impact que cela peut avoir sur la région de Saint-Jérôme, Saint-Laurent et l'ouest de Montréal? Est-ce qu'il y a là quelque chose que le gouvernement fait, pense, étudie, ou si on se borne à se tordre les mains en disant que cette décision-là appartient à d'autres?

Et seriez-vous prêt à dire que, quant à vous, les études auxquelles vous avez participé peuvent toutes être rendues publiques sans hésitation de votre part? Ce serait au moins une contribution au débat. S'il a des études, qu'on les connaisse, qu'on les rende publiques, qu'on ne nous dise pas, à la Communauté urbaine et au gouvernement fédéral: Écoutez, il y avait des fonctionnaires du Québec là-dessus, s'ils ne sont pas d'accord. on ne peut pas le rendre public. Qu'on franchisse au moins cette étape.

La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.

M. de Belleval: Mme la Présidente, je pense que, malgré tout, durant les trois heures, nous avons fait le tour d'un certain nombre d'aspects de la question. Peut-être pas encore aussi en profondeur qu'on pourrait le souhaiter, mais c'est justement dû, comme l'a reconnu le député de Saint-Laurent, à l'ampleur de la question, sur laquelle, d'ailleurs, il a soulevé d'autres aspects dans sa conclusion.

Malgré tout, nos avons fait un bout de chemin et on pourra en faire d'autres dans les semaines qui viendront, particulièrement lorsque je rendrai public le rapport du COTREM et les recommandations et les décisions du gouvernement, parce que, de ce point de vue, il ne s'agira pas simplement de recommandations appelant des décisions, appelant des réalisations, mais il s'agira aussi de toutes ces choses en même temps, c'est-à-dire de recommandations, de propositions, de décisions et, aussi, d'actions à très court terme. On retrouvera tous ces aspects dans notre rapport.

C'était de bonne guerre de la part de l'Opposition officielle de poser à ce moment-ci cette question avec débat, parce que le député de Saint-Laurent n'est pas sans savoir effectivement que je rendrai bientôt public un rapport et que c'est de bonne guerre pour l'Opposition de prétendre presser le gouvernement à la dernière minute, quand on sait que justement il est à la veille de produire un rapport et qu'on pourra dire ensuite: Grâce à notre action, vous voyez, le gouvernement s'est grouillé, c'est venu plus vite. C'est normal, nous aurions fait la même chose, je suppose, dans l'Opposition. Mais je pense bien aussi que la population connaît ces petits trucs politiques normaux.

Du côté de l'implication des élus, je voudrais revenir sur ce point-là en terminant. Je suis d'accord avec ce qui semble être la position du député de Saint-Laurent que les investissements, dans le domaine du transport, la gestion des systèmes de transport en commun, doivent être la responsabilité des élus et non pas seulement la responsabilité de techniciens, de fonctionnaires qui ne sont pas directement responsables des élus, en particulier des élus municipaux.

Je lui rappellerai que déjà, en ce qui concerne la Communauté urbaine de Québec, le gouvernement a pris une décision et a placé la Commission de transport de la Communauté urbaine de Québec sous la responsabilité directe de la communauté urbaine, des élus municipaux contrairement à ce qui était le cas auparavant. Pour ma part, je souhaite qu'éventuellement, le plus tôt possible, nous fassions la même chose ailleurs et qu'en particulier à Montréal ce soit la réalité. Quand cela se fera-t-il et comment? Je pense que la responsabilité de donner réponse à ces questions est plutôt du ressort du ministre des Affaires municipales que de mon ressort, mais la direction qu'entend suivre le gouvernement là-dessus a déjà été prise quand il a pris position sur le cas de Québec.

Est-ce que nous tenterons de régler tous les problèmes en même temps? Est-ce que le rapport sera si global que toutes les questions auxquelles veut une réponse le député de Saint-Laurent auront des réponses? Sous cet aspect, il faudra éviter deux écueils: il faudra éviter l'écueil d'une parcellisation excessive et aussi d'une globalisation excessive. Si on veut une réponse à toutes les questions, effectivement, il faudra continuer les études et retarder encore la décision. Si on pense pouvoir agir seulement sur des petits bouts du problème, on verra, quand je remettrai le rapport, qu'un certain nombre d'éléments, à tout le moins, sont interreliés et qu'il faut prendre une position sur un ensemble valable.

Est-ce qu'on a des opinions sur Mirabel et l'avenir du système aéroportuaire montréalais? Nous sortons à ce moment-ci du dossier proprement dit du transport en commun, bien qu'il y soit lié d'une certaine façon, mais en soi, cela prendrait une autre question avec débat. J'invite l'Opposition à la soumettre éventuellement et nous pourrons faire le point sur le dossier de Mirabel et expliquer effectivement les positions du gouvernement du Québec quant à l'avenir du système aéroportuaire montréalais. C'est une autre question que celle que nous abordions ce matin, d'autant plus que nous n'avons même pas vidé celle de ce matin à cause de son ampleur.

Est-ce que le gouvernement sera simplement le secrétaire du consensus local? Le député de Saint-Laurent me reprocherait et reprocherait au gouvernement, à bon droit, de se contenter de ce rôle. J'espère cependant que si, effectivement, nous sommes obligés d'agir au-dessus d'un certain consensus, si ce consensus est insuffisant, il ne viendra pas nous reprocher à ce moment-là un paternalisme de mauvais aloi, puisqu'il nous reprocherait de bon droit un attentisme de mauvais aloi. Nous aurons donc à évoluer entre ce Charybde et ce Scylla de toute décision politique, à savoir un paternalisme et un attentisme excessifs.

Je suis certain qu'entre ces deux voies, il y aura amplement matière non seulement à une décision gouvernementale mais à une critique,

constructive ou pas — on verra, la population en jugera — de l'Opposition.

La Présidente (Mme Cuerrier): Je tiens à remercier ceux qui sont ici, ce matin, à cette commission, de leur participation, sous une forme ou sous une autre, et de leur collaboration.

C'était la commission des transports qui se réunissait pour discuter des problèmes du trans- port dans la région de Montréal. M. le député de Saint-Laurent avait donné avis de ce débat et M. le ministre des Transports était l'autre intervenant privilégié.

La commission ajourne — j'ai déjà remercié les participants — ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 56)

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