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Question avec débat
Les questions du transport dans la région de
Montréal
(Dix heures quinze minutes)
La Présidente (Mme Cuerrier): À l'ordre! Veuillez
vous asseoir.
La commission est réunie ce matin pour discuter la question avec
débat du député de Saint-Laurent au ministre des
Transports. Le sujet d'aujourd'hui est le suivant: Les problèmes du
transport dans la région de Montréal. Il est bien entendu que le
député qui a donné avis de la question et le ministre ont
des droits de parole privilégiés mais, bien sûr, non
exclusifs.
M. le député de Saint-Laurent.
Exposé du sujet M. Claude Forget
M. Forget: Merci, Mme la Présidente. Nous abordons ce
matin l'étude d'un sujet qui intéresse vitalement un très
grand nombre de nos concitoyens, tous ceux qui vivent dans la grande
région de Montréal. Il s'agit de tous les problèmes
relatifs au transport dans cette région. Il ne sera pas question des
difficultés dans le domaine des relations de travail, mais plutôt
des problèmes de nature plus permanente qui affectent la vie quotidienne
des Montréalais et des résidents des banlieues de Montréal
qui, tous les jours, sont confrontés par des problèmes de
fonctionnement et l'incertitude qui entoure le fonctionnement, par exemple, des
trains de banlieue dans la région de Montréal. Il y a là
un très grand nombre de problèmes non résolus que nous
aimerions éclaircir ce matin.
Il y a aussi les questions relatives au prolongement du métro.
Là aussi, un très grand nombre de points d'interrogation se
posent sur la levée du moratoire, les intentions gouvernementales, les
retombées du réaménagement de la fiscalité
municipale sur le financement de l'infrastructure du métro et sur le
financement de son fonctionnement. Il y a également les problèmes
de transport qui ont été soulevés par l'implantation
à Mirabel d'un aéroport et la nécessité, selon
certains, d'envisager la construction d'un lien direct ferroviaire avec Mirabel
liant ce dernier et le centre de la ville de Montréal. Il y a enfin des
problèmes qui demeurent dans le domaine de la circulation
routière à Montréal, qui impliquent le gouvernement du
Québec puisqu'il y a eu une interruption. On a mis fin à la
construction de l'autoroute est-ouest dans le centre-ville de Montréal
et on demeure dans la confusion la plus totale sur ce qui va prendre la place
de ce projet ou s'il y aura même quelque chose qui en prendra la
place.
Donc, nous avons un certain nombre de problèmes, mais je ne
mentionne que ces quatre, les plus importants: les trains de banlieue, le
métro, le lien direct entre Mirabel et Montréal et l'autoroute
est-ouest pour illustrer que nous sommes dans la troisième année,
nous achevons la troisième année de ce gouvernement et nous
devons constater que, relativement à chacun de ces problèmes,
nous n'avons aucune espèce d'orientation claire, aucune décision
véritable de la part du gouvernement. Il y a là un attentisme,
une hésitation qui était peut-être normale, la
première année, mais qui n'est plus tolérable
maintenant.
Tous ces sujets, tous ces problèmes ont fait l'objet de nombreux
rapports, de nombreuses études. Certaines ont, d'ailleurs,
coûté fort cher aux contribuables déjà.
Malgré tout, malgré ces études, malgré ces
rapports, malgré les recommandations de tous les organismes
impliqués dans les problèmes de transport à
Montréal, qu'il s'agisse des municipalités ou qu'il s'agisse de
la communauté urbaine, le gouvernement persiste à se
traîner les pieds. Nous voyons donc le débat de ce matin comme une
occasion pour demander au gouvernement, par son porte-parole qui est le
ministre des Transports, de formuler la position gouvernementale dans chacun de
ces dossiers.
On pourrait prétendre que, le ministre étant nouveau, il a
le droit de s'attendre que tout le monde lui accorde un certain délai de
réflexion pour l'étude de dossiers qu'il ne connaîtrait
pas. Mais tel n'est pas le cas, Mme la Présidente. Nous avons, en face
de nous, un ministre qui effectivement est nouveau il est là
depuis deux mois environ mais qui connaît de longue date et
intimement tous les dossiers auxquels j'ai fait allusion et d'autres
également que l'on pourrait mentionner relatifs au transport dans la
région de Montréal. Il était fonctionnaire du
ministère des Transports avant de devenir député et il a
fonctionné à ce titre-là au sein de comités
d'étude à l'intérieur du ministère lui-même
et il a participé directement à la formulation d'un certain
nombre de recommandations relatives, par exemple si ma mémoire
est bonne au lien direct entre Mirabel et Montréal. Mais il y a
d'autres domaines avec lesquels il est très familier.
Il n'est donc pas injuste, à ce moment-ci, de poser au
gouvernement des questions directes quant à ses intentions. Ce n'est pas
injuste parce que le gouvernement est là depuis trois ans et qu'il a eu
amplement de temps pour faire le tour des problèmes et pas injuste
vis-à-vis du ministre qui connaît intimement, encore une fois,
tous ces dossiers. S'il ne peut pas nous répondre, Mme la
Présidente, nous devrons en conclure que le gouvernement n'accorde
aucune espèce d'intérêt aux problèmes de transport
de la région de Montréal.
C'était assez évident avec son prédécesseur,
un député d'une des régions les plus
éloignées de Montréal, qui était d'une ignorance
manifeste vis-à-vis des problèmes vécus par les gens de
Montréal et qui, de toute manière, dans la mesure où il
s'y intéressait, ne s'y intéressait que pour des raisons
partisanes et pour faire, à l'occasion, à
l'Assemblée nationale, quelles que soient les questions qu'on lui
adresse, des déclarations tonitruantes sur les difficultés de ses
négociations avec Ottawa, comme si c'était à Ottawa que se
trouvait la réponse à toutes ces questions et à toutes ces
interrogations.
Avec le ministre actuel, nous avons au moins le privilège d'avoir
un ministre qui, même s'il n'est pas à Montréal, est
certainement conscient de ces problèmes et en connaît l'aspect
technique. Il pourra peut-être faire une évaluation plus
compétente et plus sobre des priorités et de l'urgence d'en venir
à des conclusions.
Nous allons donc systématiquement attaquer chacun de ces sujets
dans l'ordre que j'ai indiqué. Ce n'est pas pour rien, Mme la
Présidente, que nous posons des questions ce matin. Nous avons fait une
recherche soigneuse de toutes les déclarations faites à
l'Assemblée nationale ou en dehors de l'Assemblée nationale, des
documents publics qui sont à notre disposition et nous nous trouvons,
à l'occasion de chacun de ces sujets, devant l'image d'une confusion, de
contradictions, d'absence de prise de responsabilité et c'est assez
désolant. Par exemple et c'est le premier sujet que j'aborde
la question des trains de banlieue. Nous avons là une longue
série de déclarations qui nous amènent à conclure
que, dans le fond, nous ne sommes pas plus avancés aujourd'hui que nous
pouvions l'être il y a un an ou deux. Rappelons que la question des
trains de banlieue dans la région de Montréal se pose
relativement à la survie des services aux voyageurs pour les banlieues
qui sont fournis respectivement par le Canadien National sur la ligne qui passe
sous le mont Royal et qui se rend jusqu'à Deux-Montagnes en passant par
ville Mont-Royal, Saint-Laurent, Roxboro, etc., et ville Laval, bien
sûr.
Une voix: Pierrefonds.
M. Forget: Pierrefonds. Ce service, le Canadien National a
indiqué, il y a quelque temps, qu'il l'interromprait
définitivement le 1er juillet 1980 et ce n'est que dans les
dernières semaines qu'il a indiqué qu'il prolongerait de six mois
le fonctionnement du train en attendant que le gouvernement se décide
enfin. Or, qu'a dit le gouvernement? Qu'a dit le prédécesseur du
ministre des Transports actuel relativement aux trains de banlieue? Il a dit
toutes sortes de choses. Il a dit en particulier, en octobre 1977, qu'il
attendait des rapports; avant octobre 1977. Donc, pendant la première
année, il a dit qu'il attendait des rapports, le rapport du CTRM qui fut
effectivement publié en octobre 1977, je crois, et qui contenait
là-dessus des recommandations précises.
Après la publication du rapport, il ne pouvait plus
prétendre qu'il attendait des avis et des recommandations. Il a donc dit
que c'était une chose qui devait être facile et, en particulier,
dès la fin de 1978 quand il a été pressé davantage
par un deuxième rapport, celui publié par la Communauté
urbaine de Montréal, le rapport Gascon, du nom de son auteur, il a dit
qu'il donnerait plus tard les réponses et particulièrement les
réponses pertinentes au problème des trains de banlieue.
Au début de 1979, près d'un an et demi après avoir
reçu les premières recommandations relativement aux trains de
banlieue, le ministre Lessard a parlé, avec enthousiasme, du potentiel
des trains de banlieue et il s'est engagé à partager le
déficit de ces trains de banlieue si la communauté urbaine en
arrivait à des conclusions et réussissait à s'entendre sur
la question de l'intégration.
Un peu plus tard, au printemps, il a adopté un ton plus
menaçant. Il a a laissé croire que si la communauté
urbaine ne réussissait pas à s'entendre, parce que effectivement,
il y a une impasse entre la ville de Montréal, d'une part, et certains
maires de banlieue, il prendrait ses responsabilités sans
préciser davantage, si ce n'est qu'à la fin de juin il a
indiqué qu'une loi spéciale serait introduite, que les travaux de
fin de session, à ce moment-là, ne le permettaient pas, mais
qu'on s'en allait vers une loi spéciale.
Pendant tout ce temps-là, certains de ses collègues du
Conseil des ministres ont émis des opinions différentes de la
sienne. En particulier, au début de juin de cette année encore,
le ministre Tardif a déclaré dans une entrevue qu'il s'opposait
à l'intégration des trains de banlieue et qu'il s'agissait d'une
mesure qui n'était pas souhaitable étant donné la
politique de concentration urbaine sur l'île de Montréal, qu'il
n'était pas souhaitable de favoriser la dispersion de la population dans
les banlieues à l'extérieur de Montréal et que, par
conséquent, il était inapproprié d'intégrer les
trains de banlieue.
Mme la Présidente, il faudrait savoir du ministre sa position.
Quelle est la position du gouvernement? Est-ce que le gouvernement favorise
l'intégration des trains de banlieue? Est-ce qu'il lie
l'intégration des trains de banlieue à la solution d'autres
problèmes? En particulier, refusera-t-il de prendre ses
responsabilités avant que, par exemple, il n'ait reçu un rapport
d'une étude qui a été commandée il y a quelques
mois sur les problèmes des services de liaison avec la région de
Repentigny et de L'Assomption: par exemple, toute la question de l'est de
Montréal? Certaines déclarations du ministre Lessard tendent
à faire croire qu'on ne pourra pas résoudre le problème du
train de banlieue dans le nord-ouest de l'île avant de savoir ce qu'on
doit faire vis-à-vis de l'est de Montréal.
Est-ce que le gouvernement actuel veut nous dire catégoriquement
que les deux problèmes sont liés ou non? Est-ce que c'est
lié au problème du lien avec Mirabel ou, en d'autres termes,
est-ce que la question des trains de banlieue ne pourra être
résolue à moins de résoudre tous les problèmes des
liens extra-métropolitains?
Est-ce qu'il est raisonnable, selon le ministre, de faire payer
Montréal pour des services vers la banlieue, et surtout des services
vers des points en dehors de l'île de Montréal? Est-ce qu'il est
raisonnable de demander aux contribuables de Montréal de payer une
subvention aux résidents de la région de Saint-Eustache et du
comté de
Deux-Montagnes? Est-ce que le gouvernement est prêt à
assumer une part plus que proportionnelle des coûts de fonctionnement et
du financement de la dette qui serait encourue pour la rénovation de
l'équipement, plus que ce n'est le cas pour le transport en commun sur
l'île de Montréal?
Vu l'impasse entre la ville de Montréal et certains maires de
banlieue, le gouvernement a-t-il l'intention de légiférer, et
comment? Le ministre devrait également nous dire si le REM, le
Réseau express de Montréal, dont on a discuté à
certaines reprises dans le passé et qui a fait l'objet de certains
rapports, si ce concept d'express métropolitain qui débouche dans
toutes les directions à l'extérieur de l'île de
Montréal est compatible avec la politique de son gouvernement quant au
zonage agricole et à la densification de l'île de
Montréal.
Il a là, Mme la Présidente, énormément de
questions qui devront trouver des réponses.
Relativement au métro, on trouve une succession non pas de
contradictions ou de déclarations contradictoires de la part du
prédécesseur du ministre actuel; on trouve au contraire une
succession de silences. Il n'a parlé qu'une fois du métro, et il
en a parlé pour lever de façon très partielle le moratoire
qui s'appliquait, jusque là, en mars 1978. Cette levée de
moratoire est insatisfaisante en elle-même. Le moratoire n'a jamais
été conçu comme la fin de la construction du métro,
comme une remise aux calendes grecques de la construction du métro, mais
plutôt comme un moment d'arrêt nécessaire pour fabriquer un
nouvel échéancier, un nouveau plan de construction
échelonné sur un plus grand nombre d'années, étant
donné les coûts considérables de la construction. Ce plan,
ce nouvel échéancier, on ne l'a jamais vu. Le gouvernement actuel
n'a jamais formulé sa conception d'un rythme souhaitable de construction
du métro et on se retrouve, à l'automne 1979, devant les
illogismes flagrants à au moins deux parties du réseau du
métro, c'est-à-dire l'illogisme qu'on retrouve dans la situation
où une ligne se termine à du Collège, dans la ville de
Saint-Laurent, ce qui ne peut en aucun temps être un point terminal pour
une ligne de métro. (10 h 30)
II y a là une solution qui n'est que temporaire et qui ne peut
pas être présentée comme une solution acceptable à
long terme. Il faudra un garage au bout de la ligne et le garage ne peut pas se
trouver à du Collège, il n'y a pas l'espace pour faire un garage
à du Collège, et le ministre le sait très bien. Il y a
là une impasse qu'il faudra résoudre. Il y a aussi une impasse
qu'il faudra résoudre dans l'espèce de bouchon qui se trouve
entre deux parties de l'autre ligne, la ligne no 5. On a construit deux bouts
de tunnel, Mme la Présidente, qui ne débouchent nulle part, mais
qui font soi-disant partie de la même ligne et qui sont
séparés par un mille. Un des bouts de tunnel qui ne
débouche nulle part est déjà terminé depuis un
certain temps. Il est bétonné. Le tunnel est creusé. Ce
sera bientôt la même chose pour l'autre bout de tunnel. Ils sont
séparés par un mille. Le ministre, le gouvernement prétend
qu'il n'est pas urgent de lever le moratoire. Il y a pourtant là des
investissements pour lesquels les contribuables paient déjà, qui
seront inutiles et qui continueront d'être inutiles à moins de
réviser ce moratoire, de le lever en tout ou en partie ou, du moins, si
on le lève en partie, que l'on nous dise quand les autres phases
pourront être abordées.
Quant au lien Mirabel-Montréal, il y a là aussi tout un
tas de déclarations contradictoires. C'était, selon les
époques et selon le prédécesseur du ministre, un
problème entièrement fédéral. C'est la
première façon dont cela a été abordé. Le
fédéral, nous disait M. Lessard au tout début de son
règne, a décidé d'implanter Mirabel à l'endroit
où il est. C'est son problème de construire et de financer un
lien avec le centre-ville; mais c'était en 1977. Un peu plus tard,
c'était complètement différent. Dans un grand reportage
sur les priorités du ministère des Transports publié en
février 1978, le lien avec Mirabel était devenu la
priorité no 1 du ministère des Transports du Québec. Un
revirement de 180° à l'intérieur de quelques mois. Pourtant,
depuis ce temps, depuis qu'on a annoncé cette grande priorité du
lien avec Mirabel, on a même annoncé à cette époque
que les contrats avaient été donnés pour développer
des prototypes de wagons je ne sais pas si des dépenses ont
été engagées; il serait temps qu'on sache lesquelles et
à quelles fins on a tergiversé sans fin, en arguant que
les problèmes de financement étaient insurmontables, qu'Ottawa ne
donnait pas de réponse claire et, malgré tout, on a
demandé à la ville de Laval, à plusieurs reprises
maintenant, de figer dans l'immobilité un certain nombre de terrains qui
soi-disant seront requis pour la construction de stations.
Cela fait désormais plus de trois ans que ces terrains sont
réservés pour la construction de stations d'un réseau
rapide reliant le centre-ville à Mirabel. Pourtant, on semble ne pas
avoir pris de décision. À la toute fin, dans des documents que le
gouvernement n'a pas rendus publics, même si nous les avions
demandés par une question écrite inscrite au feuilleton et qui
appartenait à la période pour laquelle nous demandions ces
documents, le chef de cabinet de l'ancien ministre a déclaré
qu'aucune décision n'était prise mais que, cependant, l'une des
options qui ont fait l'objet de ses nombreux rapports avait déjà
été exclue.
Il y a donc déjà des décisions, on ne sait pas
lesquelles, des dépenses engagées, des options exclues, on ne
sait pas lesquelles, mais, de toute façon, persiste toujours
l'immobilité et le secret sur des décisions qui ont
peut-être été prises, qui ne l'ont peut-être pas
été, mais qui, de toute façon, devront tôt ou tard
être prises. Est-ce que cette question du lien avec Mirabel dépend
d'une décision fédérale de changer de Dorval à
Mirabel un certain nombre d'envolées qui font leurs départs ou
leurs arrivées à partir de Dorval? Si c'est le cas, si c'est une
exigence préalable du gouvernement du Québec, il serait bon de le
savoir, mais si c'est le cas, nous aimerions également connaître
les études d'impact qui ont été réalisées
par le ministère des Transports et qui permettraient aux
citoyens de juger si cette exigence du gouvernement du Québec et
du ministère des Transports en particulier est une exigence raisonnable
et comment elle va affecter les industries, les emplois qui gravitent autour de
Dorval et qui bénéficient de leur proximité d'un
aéroport pour des liens avec le reste du pays et le reste de
l'Amérique du Nord.
Mme la Présidente, j'ai illustré, je pense, assez bien,
que les problèmes du transport dans la région de Montréal
sont extrêmement nombreux, extrêmement graves et qu'ils n'ont pas
reçu de solution de la part de ce gouvernement qui ne sait pas où
il va dans le domaine du transport et qui s'en moque éperdument,
d'après ce qu'on peut juger des déclarations du ministre
antérieur.
J'espère que le ministre actuel, qui connaît les dossiers,
sera capable de nous donner le point de vue du gouvernement, non pas des
opinions personnelles, non pas des dissertations sur les difficultés de
ceci ou cela, mais la position du gouvernement, les décisions auxquelles
on peut s'attendre, les lois et les financements auxquels on peut s'attendre,
de manière qu'on fasse enfin un peu de lumière dans un domaine
qui affecte, encore une fois, 2,5 millions de gens qui vivent dans
Montréal ou dans la région de Montréal et qui attendent
depuis trois ans que le gouvernement se branche. Non seulement les citoyens,
mais les organismes élus par les citoyens, les municipalités, la
Communauté urbaine de Montréal, indirectement, attendent de la
part du gouvernement des indications plus claires qu'ils n'en ont eu
jusqu'à maintenant.
On a vaguement brandi des menaces d'intervention quand telle ou telle
décision ne semblait pas aller dans la direction que l'on souhaitait,
sans être spécifique, sans être explicite. On veut exercer
du pouvoir dans la région de Montréal sans assumer des
responsabilités, c'est ça le grand problème. Est-ce que le
ministre actuel sera prêt à assumer ses responsabilités?
C'est essentiellement là la question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Bellechasse me fait signe. M. le ministre, vous pourriez répondre
immédiatement, si vous le désirez. M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, Mme la Présidente. Je remercie
également mes collègues, le député de Saint-Laurent
et le ministre, de me permettre de formuler quelques questions avant que le
ministre puisse répondre.
Je suis heureux, aujourd'hui, de prendre la parole sur cette question
des problèmes du transport en commun dans la région de
Montréal. Vous conviendrez avec moi que la question posée par le
député de Saint-Laurent est très vaste et, par
conséquent, laisse place à une multitude de sujets connexes
touchant tout le système du transport dans la région de
Montréal.
J'ai choisi d'axer mon exposé principalement sur les perspectives
d'avenir du transport en commun dans la région de Montréal et
peut-être même dans d'autres régions. Je vous ferai
remarquer, Mme la Présidente, que la même question aurait pu tout
aussi bien se poser dans le cas d'autres régions du Québec qui,
elles aussi, sont assaillies par des problèmes de transport qui,
même s'ils ne sont pas du même ordre de grandeur qu'à
Montréal, n'en représentent pas moins un problème de
taille auquel nous, les élus, auquel les ministériels ont
à faire face et pour lesquels ils doivent essayer de trouver des
solutions le plus rapidement possible.
Quoi qu'il en soit, Mme la Présidente, de peur d'être en
dehors du sujet, je ne voudrais pas m'étendre davantage sur les
problèmes de transport en commun des autres régions du
Québec, je voulais seulement souligner qu'ils sont tout aussi apparents
que ceux de la région de Montréal et qu'ils sont bel et bien
présents et nombreux, même s'ils ne sont pas du même ordre
de grandeur et qu'ils sont de type différent. Tout dépend des
villes.
Pour revenir au sujet qui nous préoccupe particulièrement
ce matin, il suffit de mentionner la grève à la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Montréal pour se rendre
compte comme il est important d'avoir un service de transport en commun pour la
région de Montréal. En effet, nous avons tous été
à même de constater ces derniers jours les problèmes aigus
auxquels ont eu à faire face les Montréalais. On sait avec quelle
exaspération le public a subi cette grève, on sait
également quel genre de danger constitue la grève dans un service
aussi essentiel que le transport en commun, nous l'avons tous constaté,
cette grève nous a permis de le constater davantage.
Par ailleurs, comme vient de l'évoquer le député de
Saint-Laurent, les problèmes du transport en commun pour la
région de Montréal sont considérables. Pour ma part,
j'aimerais aborder le sujet sur les perspectives d'avenir du transport en
commun. Vous me direz peut-être: Réglons les problèmes
actuels et après, nous penserons à ce qu'il adviendra dans dix ou
quinze ans. Je pense que tout gouvernement prévoyant, soucieux du
bien-être de la population et en tant que bon gestionnaire des affaires
publiques, se doit de faire des perspectives d'avenir. On dit souvent que
gouverner, c'est prévoir; je pense que ce dicton est valable, surtout au
niveau des transports.
Étant donné la croissance de la population, les
contraintes énergétiques que nous subirons dans un avenir
rapproché nous les subissons même maintenant et le
besoin de plus en plus grand de la population de vivre dans un environnement
sain il faut également tenir compte de cette donnée
nous voulons savoir si le gouvernement a entrepris ou est sur le point
d'entreprendre des études sur des perspectives d'avenir du transport en
commun à Montréal. J'ouvre une parenthèse pour dire: Et
même ailleurs au Québec, si le député de
Saint-Laurent me permet d'émettre ce point sans se détourner
volontairement du sujet. J'ai bien dit, Mme la Présidente,
seulement une parenthèse en parlant de Montréal et
d'autres villes.
A-t-on une idée actuellement du type de transport qu'on devra
privilégier dans l'avenir? Je me souviens d'avoir assisté
à une commission parlementaire, il y a deux ou trois ans, où nous
en avions discuté. Qu'est-ce qui a été fait depuis ce
temps? Est-ce, par exemple, l'autobus où on pourrait peut-être
envisager, selon les contraintes écologiques ou
énergétiques, un nouveau type d'autobus? Est-ce qu'on a
étudié les nouveaux types d'autobus?
Nous avons, ici, à Québec, les corridors pour autobus.
Est-ce qu'on les a étudiés? Est-ce qu'on a des données
précises sur le bien-fondé d'un tel système pour la
région de Montréal? Les corridors pour autos, par exemple, comme
on en voit aux États-Unis. Les autos qui, aux heures de pointe, logent
trois ou quatre occupants ont prédominance sur d'autres voitures et ont
des corridors spéciaux. Est-ce qu'il y a des études en cours
là-dessus, des données précises?
Des parcs de stationnement à l'entrée des villes et, une
fois arrivés à l'entrée de la ville, obliger les gens
à utiliser le transport en commun. Je pense que le meilleur exemple
qu'on peut avoir, en tout cas, c'est je suis toujours mêlé
entre Beloeil et Longueuil, Mme la Présidente le métro de
l'autre côté du fleuve; nous avons un bon parc autos et, avec le
métro, on peut avoir accès assez rapidement et assez facilement
à l'île de Montréal.
Les taxibus, comme on en voit en Europe, dans certaines villes d'Europe;
est-ce qu'on a des données sur cela? Est-ce qu'il y a des calculs
actuellement qui se font, des études qui se font au niveau des
autorails, par exemple, des trains de banlieue? Le député de
Saint-Laurent en a parlé tout à l'heure. Je ne m'attarderai pas
sur ce sujet, mais l'ex-ministre des Transports nous en a parlé souvent.
Où en est-on avec ces trains de banlieue?
Les trains ou autobus fonctionnant à l'électricité,
parce qu'en plus d'étudier, madame, les nouvelles méthodes de
transport et de viser à donner un meilleur service je pense que
c'est le premier but qu'on doit viser il faut tenir compte
également et de plus en plus des contraintes écologiques, surtout
avec la formation du ministère de l'Environnement cette semaine, et,
deuxièmement, des contraintes énergétiques qui sont
très importantes. Je pense que c'est très important. Il faut
viser à donner un meilleur service, mais est-ce que ces études
sont en cours? Est-ce qu'elles sont complétées? Je suis convaincu
que le ministre pourra nous renseigner davantage tout à l'heure, parce
qu'il ne servirait à rien de créer d'autres ministères et
d'ouvrir d'autres Baie James si, au niveau du transport, on ne tient pas compte
de ces caractéristiques. Est-ce que l'on a pensé à une
éventuelle transformation des autobus pour le transport en commun? Ce
sont des questions auxquelles le ministre pourrait nous répondre et je
me plais à dire qu'elles sont formulées dans la plus grande
objectivité.
On sait également que le COTREM, le Conseil des transports de la
région de Montréal, étudie un dossier très
complexe, qui est celui du double tarif. Enfin, on essaie actuellement de
scruter la possibilité que tous les usagers des transports en commun,
qu'ils utilisent le train de banlieue, l'autobus, le métro ou toute
autre méthode qu'on pourra trouver éventuellement et que ces gens
proviennent de n'importe où, de Beloeil, de l'ouest, puissent payer un
seul tarif, tout en correspondant d'une zone à l'autre ou d'un mode de
transport à l'autre. On l'a avec l'autobus et le métro, mais
est-ce qu'on a fait des calculs pour d'autres méthodes qu'on pourrait
trouver éventuellement? J'aimerais, Mme la Présidente, demander
au ministre s'il suit ce dossier de près, car je trouve cette
possibilité extrêmement intéressante et très
originale.
On pourrait également parler des trains de banlieue, sujet
qu'affectionne particulièrement l'actuel ministre des Loisirs je
l'ai dit tout à l'heure car cela lui permettait je ne
voudrais pas lancer d'accusations de faire du capital
référendaire pour la thèse de son parti. On sait que le
transport par trains de banlieue est extrêmement déficient et
inadéquat actuellement. Est-ce que le nouveau ministre des Transports
envisage, dans un avenir rapproché, de tout simplement laisser de
côté ou d'abandonner les trains de banlieue comme mode de
transport interurbain? En tout cas, du moins d'après ce qui se passe
actuellement, on semble le laisser croire. Mme la Présidente, j'ouvre
une parenthèse: Je veux être assez objectif pour dire que nous
avons à faire face à un nouveau ministre. Je comprends qu'avec
tous les programmes qu'il retrouve dans son ministère, allant du
transport aérien jusqu'au comme on dit dans Bellechasse
"patchage", le ministre a à faire face à de nombreux
problèmes et je comprends qu'il n'a peut-être pas toutes les
données vu qu'il est nouveau dans ce ministère, mais, quand
même, il faudra que prochainement il puisse répondre à ces
questions. (10 h 45)
Finalement, Mme la Présidente, je termine sur un point majeur: la
fiscalité municipale versus le transport en commun. Dans le journal La
Presse du 22 octobre, on rapportait ceci sur le transport en commun par rapport
à la fiscalité municipale et on expliquait ce qu'en pensait le
comité conjoint Québec-municipalités lorsqu'il parlait de
la réforme de la fiscalité municipale et du transport en commun.
Au chapitre du transport, le comité disait: "En premier lieu, nous
estimons que l'infrastructure du métro doit être
considérée comme un substitut aux autoroutes urbaines que
Québec subventionne à 100%. Par conséquent, le
comité demande que l'infrastructure du métro de Montréal
soit subventionnée à 100% et non à 75% tel que
proposé présentement dans le projet de la réforme." Je
fais un parallèle ici entre la question posée pour le
métro de Montréal au même titre que pour les autobus ici,
par exemple, à Québec ou dans d'autres villes, toujours lorsqu'on
parle de transport en commun. Le comité conjoint parlait du
métro. Étant donné qu'on subventionne les au-
toroutes, qu'on subventionne de même le transport en commun, si
nous réglons le problème du transport en commun, nous aurons
peut-être moins à faire face au problème des
autoroutes.
Le comité continuait, Mme la Présidente, en disant: Nous
voulons, de plus, que Québec en parlant du gouvernement
défraie lui-même le manque à gagner provenant de toute
politique gouvernementale de tarif réduit à l'intention des
étudiants, des personnes âgées, des personnes
handicapées ou autres, tout ce qui touche le transport en commun. Il
disait, pour la Commission de transport de la Communauté urbaine de
Montréal: On subventionnerait à raison de 33% ou du tiers contre
les coûts d'immobilisation et de fonctionnement, laissant ainsi les deux
tiers des coûts aux municipalités tandis que, pour les autres
commissions de transport, la subvention en paierait 40%. C'est de la cuisine,
Mme la Présidente, et je suis d'accord sur le principe contenu dans la
question formulée dans le rapport du comité conjoint.
Je voudrais, Mme la Présidente, en terminant, demander au
ministre des Transports s'il est d'accord sur les propositions du comité
conjoint en ce qui concerne le transport en commun et la fiscalité
municipale, et finalement, si le gouvernement envisage de lever le moratoire
gouvernemental sur l'extension du métro vers Ville Saint-Laurent,
Montréal-Ouest et Montréal-Nord. Je pense que le
député de Saint-Laurent serait extrêmement heureux
d'obtenir une réponse à cette question. Mme la Présidente,
ayant formulé toutes ces questions, je laisse la parole au ministre pour
qu'il puisse nous dire où il en est rendu avec ces dossiers.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Transports.
Réponse du ministre M. Denis de
Belleval
M. de Belleval: Mme la Présidente, je voudrais d'abord
féliciter mes deux collègues de l'Opposition, le
député de Bellechasse et le député de
Saint-Laurent, pour la pertinence et l'érudition aussi que
démontrent les questions qu'ils ont posées ce matin. En
particulier, du côté du député de Saint-Laurent, je
dois noter qu'au sein de sa formation politique, il couvre un champ
extrêmement vaste de préoccupations. Son chef l'a nommé
comme son ambassadeur à travers le Canada pour étudier, avec les
chefs politiques de ces provinces, l'ensemble du dossier constitutionnel,
dossier mouvant s'il en est un et imprécis en ce qui concerne l'option
de son parti, et qui donne d'autant plus de mérite à celui qui en
est chargé. Au sein de cette Assemblée aussi, le
député de Saint-Laurent est, à toutes fins utiles, le
principal critique de son parti en matière d'affaires sociales, compte
tenu des fonctions qu'il a occupées dans le passé comme ministre
des Affaires sociales. On le retrouve aussi en tête de ligne en ce qui
concerne les dossiers de négociations dans les secteurs public et
parapublic. Et ce matin, on le retrouve d'une façon très
compétente, je dois dire dans le dossier du transport en commun
dans la région de Montréal, tandis que le critique officiel du
Parti libéral en matière de transport est absent de cette Chambre
ce matin. Cette illustration des mérites du député de
Saint-Laurent que...
M. Forget: Mme la Présidente, si le ministre me le permet,
il vient de faire allusion d'une façon un peu désobligeante
j'hésite à le souligner parce qu'il me comble de fleurs
pour l'instant à mon collègue de Charlevoix, ex-ministre
des Transports, qui est celui à qui il fait allusion comme critique en
matière de transports. Il devait s'absenter et, en plus de cela, je
pense qu'il appartenait à un député de la région de
Montréal, à deux députés de la région de
Montréal, puisque mon collègue de Robert Baldwin est aussi
présent, de soulever un problème qui nous affecte directement,
qui affecte directement les citoyens que nous représentons ici.
M. de Belleval: Mme la Présidente, je vais simplement
corriger avec le plus de sympathie possible le député de
Saint-Laurent. Ce n'est pas l'ex-ministre des Transports, le
député de Charlevoix, qui est le critique officiel de son parti
en matière de transports, mais c'est plutôt le
député de Gatineau qui est ce critique officiel. Le
député de Gatineau, pas plus que l'ex-ministre des Transports et
député de Charlevoix, n'est présent en cette Chambre ce
matin.
Ces remarques visent non pas à déprécier
c'est tout le contraire l'action du député de
Saint-Laurent en cette Chambre, mais à démontrer aussi, d'une
certaine façon, les problèmes de renouvellement auxquels fait
face, en matière de personnel politique, le Parti libéral, qui
doit utiliser certaines Madeleine-de-Verchères pour étudier un
certain nombre de dossiers. À mon avis, cela démontre que ce
parti, de toute évidence, n'est pas prêt à constituer un
gouvernement de rechange puisqu'il doit ainsi utiliser à toutes les
sauces un nombre très limité de députés et, en
particulier, le député de Saint-Laurent.
Mais comme il vient de me le faire remarquer, avec justesse d'ailleurs,
il est aussi légitime qu'un député de la région de
Montréal s'occupe de cette question.
Le député a posé je le répète
des questions pertinentes comme d'ailleurs le député de
Bellechasse. Il n'a pu s'empêcher, bien sûr c'est son droit
d'assortir ses remarques de quelques phrases acidulées de nature,
cette fois-là, franchement partisane. Pour ma part, bien que cela fasse
partie des règles du jeu, je pense que nous avons tous
intérêt ce matin à étudier ensemble, de façon
sereine, un dossier qui est un des plus importants actuellement dans la
société québécoise. J'admets avec le
député de Bellechasse que Montréal n'est pas tout le
Québec et qu'il faut aussi s'occuper des problèmes de transport
et des problèmes de transport en commun pour l'ensemble des
Québécois. On reconnaîtra aussi que, quant à notre
métropole qui comprend, dans sa
grande région, environ la moitié de toute la population du
Québec, il est important que cette Assemblée se penche sur les
problèmes de transport qui affectent actuellement cette région.
D'autant plus que, en discutant du dossier du transport en commun dans la
région de Montréal, on se trouve aussi à toucher au
dossier de l'urbanisation, de l'urbanisme, de l'aménagement de cette
région, en particulier de l'île de Montréal, mais aussi,
bien sûr, de la grande conurbation qui entoure l'île de
Montréal proprement dite.
En prenant des décisions en matière de transport, nous
prenons aussi des décisions qui affecteront l'avenir de la région
de Montréal d'une façon très profonde pour au moins les 20
ou 30 prochaines années, dans le domaine de l'urbanisme en
général et de l'aménagement de ce territoire, de la
protection de son territoire agricole et de ses espaces verts, etc.
On touche aussi un dossier très important en ce qui concerne le
développement industriel du Québec puisque le Québec
possède quelques industries importantes en matière de
matériel de transport, industries qu'il convient de promouvoir et qui
peuvent effectivement jouer un rôle très important non seulement
au Québec en matière de fabrication, entre autres, de voitures de
métro, mais aussi on le verra tout à l'heure de
trains de banlieue ou de métros régionaux, de tramway ou d'autres
techniques nouvelles auxquelles a fait référence, en particulier,
le député de Bellechasse, mais qui peuvent aussi, grâce
à l'impulsion que nous donnerons à ces moyens de transport au
Québec, en particulier, dans la région de Montréal,
obtenir des atouts importants en ce qui concerne l'exportation de ces
mêmes matériaux dans le reste du monde et en particulier en
Amérique du Nord où ces moyens sont à la veille
d'être utilisés sur une très grande échelle par nos
voisins immédiats.
En ce qui concerne le dossier concret de la région de
Montréal, le député de Saint-Laurent a fait allusion
à un certain nombre de carences dont serait responsable le
présent gouvernement depuis trois ans. Je voudrais, à ce sujet,
compléter quand même l'image qu'il a donnée c'est
son droit, c'est un député d'opposition image
essentiellement défavorable mais qui, à mon avis, n'est pas tout
à fait juste, pour ne pas dire carrément injuste.
Tout d'abord, je lui rappellerai que le moratoire sur l'expansion du
métro de Montréal a été
décrété sous l'ancien gouvernement, à la suite de
trois années d'étude auxquelles, il a raison de le rappeler, j'ai
été mêlé étroitement.
Trois années qui ont permis, justement, au
précédent gouvernement de se rendre compte qu'il n'y avait pas de
pensée directrice en matière de développement des
transports en commun dans la région de Montréal; qu'en continuant
le métro sans réfléchir d'abord à une conception
d'ensemble du développement de ces réseaux de transport, on
risquait de donner lieu à des investissements extrêmement
coûteux et pas nécessairement optimaux. Entre 1973 et 1976, une
équipe avait été constituée au sein du
ministère des Transports pour justement réfléchir sur ces
questions en dehors des corps établis qui travaillaient à ce
moment-là dans la région de Montréal, essentiellement les
commissions de transport et, en particulier, le Bureau de transport
métropolitain de la Communauté urbaine de Montréal, de
façon à prendre un point de vue plus général, moins
intéressé et, de cette façon, faire assumer par le
gouvernement du Québec des responsabilités qui ne pouvaient
être assumées régionalement.
Trois ans d'études, entre 1973 et 1976, pour en arriver à
la conclusion qu'il fallait momentanément arrêter les travaux du
métro de façon à se donner le temps d'établir cette
stratégie d'ensemble.
C'est ce que le nouveau gouvernement élu en 1976 a fait dans la
foulée de ce que le précédent avait commencé entre
1973 et 1976. Je dois dire le député de Saint-Laurent le
reconnaîtra que ce n'était pas une mince tâche
comme, d'ailleurs, pour l'ancien gouvernement de constituer de but en
blanc, pour étudier ces questions, pour lesquelles il n'avait pas
d'experts, des équipes qui ont dû apprendre leur métier sur
le tas et, ensuite, trouver des solutions nouvelles alors que il faut le
reconnaître jusqu'à ce moment-là, le
ministère des Transports n'avait pas de responsabilité directe en
matière de gestion de ces moyens de transport urbain.
Malgré tout, nos équipes techniques ont fait suffisamment
de progrès pour que... Malgré, d'ailleurs, les difficultés
politiques de tout ordre qui sont normales dans un contexte
métropolitain où il faut ajuster des intérêts fort
divergents entre les différentes municipalités
intéressées le député de Saint-Laurent
admettra qu'en cette matière, il est normal pour un gouvernement, quand
il veut établir une coordination, de le faire, autant que possible, et
jusqu'à la limite des efforts possibles, avec le concours et l'accord
des municipalités intéressées malgré ces
difficultés, le gouvernement n'est pas resté inactif durant ces
trois années. (11 heures)
Bien sûr, il a confié aux équipes de techniciens du
ministère des Transports, en collaboration avec les commissions de
transport, le soin d'élaborer des propositions nouvelles, des
propositions d'ensemble, propositions, d'ailleurs, qui sont sur le point
d'aboutir dans des rapports écrits dont j'ai pris connaissance
dès mon arrivée au ministère sous forme d'ébauches
presque finales, que je fais actuellement corriger et qui seront mises à
la disposition, d'abord, du Comité ministériel permanent de
l'aménagement du territoire, qui est responsable de ces questions au
sein du gouvernement, ensuite, du Conseil des ministres, et qui pourront
ensuite aussi être communiquées à la population de
Montréal, aux édiles de la région de Montréal et
aux corps municipaux, aux corps intéressés, aux corps
constitués de la région de Montréal, c'est mon ferme
objectif, d'ici la fin de la présente année. Pendant que ces
études
complètes se poursuivaient, le gouvernement non plus n'est pas
resté inactif, puisque, au fur et à mesure que les rapports
intérimaires entraient, il a pris un certain nombre de
décisions.
En particulier, le député de Saint-Laurent l'a fait
remarquer en minimisant la portée du geste. À ce point de vue, je
le répète, il est injuste. Nous avons levé le moratoire
sur la construction d'une partie du métro, mais pas sur des parties
insignifiantes, puisque c'est une valeur de $300 millions de travaux dont on a
ainsi permis la poursuite, essentiellement, sur la ligne 2 ouest du
métro, entre la station Snowdon et la station du Collège et aussi
sur la ligne 5 du métro, entre la station du Parc et la station
Saint-Michel, à l'est. D'ailleurs, je dois dire qu'à mon avis le
rythme de construction du métro durant ces derniers mois, ces
dernières années, à la suite de la levée de ce
moratoire, la poursuite de ces travaux peut être considérée
comme constituant un rythme normal d'expansion du métro. Nous avons pu
le faire, parce qu'à la suite d'études en cours, nous pensions
qu'en toute hypothèse, quel que soit le plan d'ensemble qui serait
finalement adopté, il était opportun de construire ces parties du
système de métro. Nous avons pris aussi des décisions
importantes en matière de financement des trains de banlieue et des
circuits d'autobus qui, jusqu'à maintenant, ne sont pas
intégrés avec le circuit d'autobus de la Commission de transport
de la Communauté urbaine de Montréal.
En ce qui concerne les trains de banlieue, il s'agit d'un montant
d'environ $3 millions qui, en 1978, a servi à éponger une partie
du déficit des trains de banlieue, qui a permis de ralentir le
désengagement adopté par les compagnies de chemin de fer, le
désengagement des services actuels de la part de ces compagnies de
chemin de fer et de ralentir aussi le rythme d'augmentation de la tarification.
Le député de Saint-Laurent admettra, je pense, que c'est le
premier gouvernement au Québec qui ainsi consent à subventionner
un système de transport qui jusque-là était de la
responsabilité des compagnies de chemin de fer sous compétence du
gouvernement fédéral et non pas sous compétence du
gouvernement québécois. Compagnies, d'ailleurs, et gouvernement
fédéral qui ont laissé détériorer de
façon constante et depuis de nombreuses années un service que
tous reconnaissent comme absolument important en matière de transport en
commun dans la région de Montréal. Nous sommes donc intervenus de
façon concrète pour soulager essentiellement les citoyens du West
Island de Montréal, en l'occurrence. Du côté des autobus,
nous sommes aussi intervenus en subventionnant au rythme d'environ maintenant
$5 millions les compagnies privées de l'île de Montréal,
à savoir, la compagnie Métropolitain provincial et la compagnie
Trans-urbain, en attendant qu'une solution définitive concernant
l'intégration de ces services à ceux de la Commission de
transport de la Communauté urbaine de Montréal soit
trouvée.
Il s'agit donc, là encore, d'un geste concret, qui
démontre bien l'importance pratique que le gouvernement actuel accorde
à ces systèmes de transport et des gestes qui constituent des
précédents, des gestes qui n'avaient pas été
posés par les administrations précédentes.
Nous avons aussi créé le Conseil des transports de la
région de Montréal, qui permet de planifier le réseau
d'avenir en collaboration étroite avec les commissions de transport
existantes. Ce comité met la dernière main, comme je l'ai
souligné tout à l'heure, aux rapports qui permettront au
gouvernement, de concert avec les municipalités, d'adopter ce plan de
transport de l'avenir et ce plan de transport cohérent qui nous faisait
défaut jusqu'à maintenant.
Nous avons pris aussi un certain nombre d'autres mesures ponctuelles,
mais qui ne sont pas sans importance et qui constituent aussi, dans certains
cas, des précédents dans la région de Montréal. En
particulier, nous avons mis en service une voie express d'autobus entre la rive
sud de Montréal et le centre-ville de Montréal, par l'entremise
du pont Champlain, système de voie réservée, auquel
faisait allusion d'ailleurs le député de Bellechasse tout
à l'heure, qui constitue un succès éclatant puisque
l'achalandage de ce système est d'environ, je crois, actuellement 5000
ou 6000 passagers par jour, ce qui équivaut en gros à environ
4000 automobiles de moins dans le centre-ville de Montréal. Et nous
allons compléter très bientôt ce système de voie
réservée par la construction d'un important "parking"
d'incitation à Brassard, qui permettra aux automobilistes, justement
comme le suggérait le député de Bellechasse, de stationner
leur voiture sur la rive sud et de pouvoir ainsi, grâce au système
de voies réservées, avoir accès directement au
centre-ville de Montréal.
À la station Longueuil, aussi, du métro, autre point
important de transbordement auquel faisait allusion le député de
Bellechasse, les travaux débuteront incessamment, de façon
à améliorer le système de transfert entre les
différentes lignes d'autobus de la rive sud qui aboutissent à ces
stations, de façon à rendre encore plus attrayante l'utilisation
de la ligne 4 du métro entre Longueuil et le centre-ville de
Montréal.
Maintenant du côté de l'autoroute Est-Ouest, travaux qui
étaient arrêtés. Au moment où nous avons pris charge
des affaires gouvernementales en 1976, nous avons et l'arrêt des
travaux sur cette autoroute avait aussi été
décrété durant les dernières semaines de la vie de
l'ancien gouvernement poursuivi les discussions avec la ville de
Montréal. Finalement, le gouvernement rendait une décision,
à savoir que les travaux de I autoroute seraient définitivement
arrêtés, qu'on ne poursuivrait pas ces travaux vers l'est sous
forme d'autoroute, mais sous forme d'un boulevard urbain, qui serait de nature
à donner un bon service en particulier au transport lourd qui doit
s'effectuer dans le centre-ville de Montréal ou entre la partie est de
Montréal et le centre-ville, mais qui. en même temps, sera de
nature à mieux préserver l'environnement des quartiers
avoisinants et particulièrement entre la rue de Lorimier et les
points
plus à l'est jusque vers le boulevard Viau, etc., dans l'est de
Montréal.
Nous sommes actuellement en train de terminer avec la ville de
Montréal, qui a un intérêt extrêmement important en
matière d'aménagement du territoire dans ce dossier, les
consultations de façon qu'il y ait une entente définitive quant
au plan de ce nouveau boulevard urbain. Le député de
Saint-Laurent admettra que la mise sur papier de nouveaux plans prend un
certain temps, d'autant plus qu'il faut que la préparation de ces plans
soit coordonnée de façon très étroite avec
l'autorité municipale concernée qui a des intérêts
légitimes et qui veut les faire valoir, qui veut, elle aussi, comme nous
d'ailleurs, que les multiples options qui s'offrent à un constructeur en
cette matière soient bien examinées avant qu'une décision
soit prise. Le député de Saint-Laurent admettra aussi que quand
nous prenons une décision dans cette matière, c'est l'avenir de
30, 40 ou 50 ans que nous engageons; ce n'est pas une décision que nous
pouvons prendre à la légère. Il est peut-être bon de
consacrer six mois de plus à la réflexion pour éviter des
erreurs coûteuses que nous vivons actuellement, dont nous connaissons
actuellement de nombreux exemples dans la région de Montréal.
Donc, Mme la Présidente, le gouvernement a pris un certain nombre
de décisions en cette matière, décisions que mon
prédécesseur a pilotées lui-même et auquel nous
sommes d'autant plus redevables que, comme l'a fait remarquer le
député de Saint-Laurent, il n'est pas un député
d'une région métropolitaine, mais je pense qu'on peut dire
à bon droit que, dans la foulée du député de
Charlevoix qui, lui non plus, n'était pas un ministre
représentant une région métropolitaine, elles constituent
les premiers exemples d'une intervention vigoureuse d'un gouvernement
québécois en matière de transport collectif dans la
région de Montréal. J'ai bien l'intention, effectivement, de
faire en sorte que tous les efforts qui ont été faits depuis six
ans par les gouvernements québécois se poursuivent de
façon vigoureuse et que, d'ici la fin de l'année, nous en
arrivions à un véritable plan de développement des
systèmes de transport en commun dans la région de
Montréal, ce qui marquera véritablement le prolongement non
seulement de ces moyens, mais aussi l'amélioration de l'urbanisation, de
l'urbanisme, de l'aménagement du territoire dans la grande région
de Montréal.
J'arrêterai à ce moment-ci, Mme la Présidente. Je
reconnais que, pour l'instant, je n'ai pas répondu encore aux multiples
questions que m'ont posées le député de Saint-Laurent et
le député de Bellechasse, mais je suppose que c'est justement
l'objet des minutes qu'il nous reste maintenant entre 11 h 10 et 12 h 30 ou 13
heures, c'est justement l'objet maintenant des échanges qui auront lieu
entre nous et qui nous permettront de donner réponse à ces
multiples questions. Pour ma part, je suis tout à fait disponible pour
fournir ces réponses.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent me faisait déjà signe. Vous avez la parole, M.
le député.
Discussion générale
M. Forget: Merci, Mme la Présidente. Je remercie le
ministre pour son tour d'horizon général par lequel il a
donné un certain début de réponse malgré tout
à certaines questions. J'essaierai, au cours du temps qu'il nous reste,
et je le suggère à mes collègues de la commission, de m'en
tenir à chaque sujet et de vider un sujet avant de passer à un
autre de manière à ne pas perdre le fil et à faire une
discussion qui soit la plus éclairante possible pour ceux qui nous
écoutent.
Autoroute est-ouest
J'aborderai en premier lieu le dernier sujet mentionné par le
ministre, justement pour qu'on perde le moins possible le fil de la discussion.
Il s'agit de l'autoroute est-ouest. Là-dessus, le ministre vient de nous
dire que la construction avait été arrêtée par le
gouvernement précédent et qu'il n'a fait en cela, comme dans le
cas du moratoire du métro, que suivre ou prolonger les politiques
déjà adoptées. J'aimerais rappeler que, dans le cas du
métro, il est vrai qu'il y a eu un moratoire imposé par le
gouvernement précédent, mais nous y reviendrons plus tard. Dans
le cas de l'autoroute, la situation est différente. Il y avait eu, bien
sûr, une interruption dans le rythme des travaux puisque les travaux
entrepris avant 1976 se sont terminés pour 1976 et il n'était
évidemment pas question de faire des travaux majeurs de voirie urbaine
dans l'est de Montréal l'année des Jeux olympiques. N'y aurait-il
eu que cette seule raison, elle eût été suffisante. Il y en
avait d'autres également. (11 h 15)
Cependant, des dépenses avaient été engagées
pour la poursuite de l'autoroute est-ouest, si bien que le ministre des
Transports, M. Lessard, dix jours après avoir occupé pour la
première fois son poste de ministre, annonçait dans un
communiqué de presse du 9 décembre 1976 qu'il avait
"décidé d'interrompre les travaux préparatoires de plans
et devis que l'administration libérale précédente avait
demandés à certaines firmes d'ingénieurs en vue du
prolongement de l'autoroute est-ouest à Montréal. M. Lessard
devait préciser je cite toujours le communiqué de presse
sa position en mentionnant que cette remise en question s'inscrit dans
la ligne de pensée du gouvernement québécois visant
à favoriser le développement des réseaux adéquats
de transport en commun, etc., plutôt que de privilégier
l'automobile."
Sur cette position de principe, Mme la Présidente, nous sommes,
bien sûr, d'accord que l'heure n'est plus au développement massif
d'autoroutes dans les régions urbaines. Nos grands centres urbains ont
été pourvus des équipements nécessaires et loin de
nous la pensée d'inviter le gouvernement à construire des
autoroutes à tort et à tra-
vers. Il reste qu'il y a un bouchon dans le territoire de
Montréal, puisqu'il y a deux autoroutes qui étaient
destinées à se raccorder et qui, qu'on le veuille ou non, vont
engendrer entre les deux points limites de l'échangeur Ville-Marie au
centre-ville de Montréal et l'entrée du pont-tunnel
Hippolyte-Lafontaine un trafic important. Il est donc, à plus forte
raison, important qu'un lien routier soit développé dans les plus
brefs délais. Il semble qu'on soit à la recherche d'une solution
qui est dictée par des impératifs, soi-disant sociaux, mais qui
sont, dans le fond, essentiellement politiques et partisans dans le choix des
solutions. Et je vais vous donner la raison de cette affirmation.
J'ai devant moi le rapport d'un comité du gouvernement, qui a
été préparé à la demande du gouvernement en
décembre 1978 et qui porte précisément sur cette question
du lien au centre-ville, soit par une autoroute, soit par un boulevard
métropolitain. Mais, enfin, il ne s'agit pas de choisir entre les deux,
parce que déjà, préalablement, le 31 mai 1978, on nous
informe que le Conseil des ministres a décidé que soit
réalisé dans l'emprise expropriée de l'autoroute un
boulevard de type urbain.
Donc, on ne demande pas à des experts de dire s'ils sont en
faveur ou non de cette solution. C'est une solution qui a été
prédéterminée lors d'une conférence de presse
donnée par M. Couture, le ministre actuel de l'Immigration, à
l'automne de 1976, en octobre, bien avant, donc, qu'il soit élu, disant
qu'il fallait faire un boulevard urbain, que c'était là la
position du Parti québécois et qu'il fallait également
prévoir des îlots d'habitation parce que autour de ce boulevard
urbain des emplacements avaient été expropriés en trop qui
devraient être consacrés à l'habitation. C'était
donc là une position du Parti québécois qui ne s'appuyait
sur rien d'autre qu'une croyance sans fondement, dans le fond, à la
priorité d'un boulevard urbain sur une autoroute, sans même qu'on
sache quelles étaient les implications de ce choix.
Or, les implications de ce choix apparaissent dans le rapport de ce
comité pour l'aménagement de la région de Montréal,
mais qui est effectivement un regroupement de l'OPDQ, l'Office de planification
et de développement du Québec, et des services d'habitation des
Affaires municipales, etc., qui sont intéressés, bien sûr,
à l'aménagement d'autoroutes. Or, qu'est-ce que l'on retrouve
dans ce rapport, Mme la Présidente? On trouve des affirmations qui
démontrent clairement que cette orientation actuelle du gouvernement
face à l'autoroute Est-Ouest ne se justifie pas. En effet, dans la
mesure même où on parle de transport, on fait l'observation
suivante, qui est évidemment tout à fait juste, que le volume de
trafic à envisager est tellement considérable que, même si
on veut appeler cela désespérément un boulevard urbain, on
se trouve de fait devant une circulation d'autoroute.
Je cite ceci, à la page 5 de ce rapport: "Toutefois,
l'élargissement proposé de la rue Notre-Dame pour en faire un
boulevard urbain à six voies contribuera à augmenter le nombre de
véhicules par heure aux heures de pointe de 800 à 1500,
dépendant des intersections. Des prévisions laissent entrevoir
des volumes de 3500 véhicules par heure dans une seule direction aux
heures d'affluence à Fullum, et de 2800 au boulevard Pie IX. Ces volumes
sont très élevés pour un boulevard urbain". Ce sont des
fonctionnaires qui commentent une décision déjà prise par
le Conseil des ministres, d'où la prudence des mots, mais on dit:
"Malgré tout, ces volumes sont très élevés pour un
boulevard urbain et atteignent presque ceux d'une autoroute du fait qu'à
chaque extrémité du tronçon à l'étude, des
prolongements sont effectivement en autoroute." Il y a une conséquence
à tout ceci. On dit au paragraphe suivant: "Le bruit provenant de la
circulation routière dans l'axe de la rue Notre-Dame constitue une
contrainte importante pour l'aménagement des îlots pour fins
d'habitation. En effet, les relevés effectués par la division de
la salubrité et du contrôle du bruit de la ville de
Montréal révèlent que le bruit actuel en rapport avec le
logement est passablement plus intense que le niveau jugé comme
normalement acceptable pour un développement résidentiel". Il y
a, au niveau des recommandations bien sûr, les conséquences de ces
affirmations puisque l'on note que les niveaux de bruit prévus laissent
entrevoir des seuils près de la limite acceptable pour la construction
d'habitations. Il y a d'autres attendus: "Nous considérons que la
fonction résidentielle est difficilement recommandable sur les terrains
expropriés." Ceci démontre une chose: la formule du boulevard
urbain est indissolublement liée à la notion d'îlots
d'habitations à développer dans son voisinage, ce qui ne serait
pas possible avec une véritable autoroute. Tout ceci découle
d'une décision politique plutôt que du bon sens...
M. de Belleval: Pourrais-je répondre maintenant?
M. Forget: Oui, après. M. de Belleval:
D'accord.
M. Forget: "... attendu aussi parmi les autres attendus
qu'une zone industrielle importante longe la rue Notre-Dame et le port
de Montréal et que l'on prévoit une augmentation des
activités industrielles dans ce secteur; attendu que la rue Notre-Dame
est l'une des artères urbaines où la circulation des
véhicules lourds est la plus forte du réseau d'artères
urbaines dans la région de Montréal." Toutes ces observations,
Mme la Présidente, d'un comité d'experts en transport et en
aménagement urbain démontrent que cette orientation qu'on est en
voie de prendre pour les 30, 50 ou 75 années, comme le dit le ministre,
est une orientation totalement déterminée non pas par des
études, mais par une conférence de presse donnée par M.
Couture, candidat péquiste au moment des dernières
élections. Selon ce dernier, c'était la politique du gouvernement
relativement au lien est-ouest et, du revers de la main, on pouvait
déterminer la politique gouvernemen-
tale, indépendamment des constatations objectives que n'importe
qui peut faire. C'est une fausse orientation, c'est une zone qui n'a pas une
destination résidentielle, mais une destination portuaire, industrielle
et commerciale, et en voulant faire de ce lien un boulevard urbain, on fait une
erreur pour la mauvaise raison, on se détourne de la solution autoroute.
Je me permets de faire remarquer que dans le rapport que je viens de citer, on
signale que la ville de Montréal est en désaccord avec cette
option...
M. de Belleval: Puis-je répondre maintenant?
M. Forget: ... mais, bien sûr, elle sera assez prudente,
étant donné que tout est financé par Québec, pour
ne pas faire entendre trop publiquement son désaccord. Mais c'est,
malgré tout, une source d'inquiétude considérable.
Pour ce qui est de cette question du lien est-ouest, je crois, Mme la
Présidente, que le ministre se doit de revoir cette décision et
de ne pas tolérer qu'un investissement qui sera là pour 50 ans
soit, dans le fond, le fruit d'une conférence de presse donnée
par son collègue, M. Couture, au moment des dernières
élections.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Mme la Présidente, le député
de Saint-Laurent est en train de me faire regretter les remarques que j'ai
formulées à son endroit tout à l'heure. Non pas que les
documents qu'il cite soient sans valeur. Bien au contraire. Bien au contraire.
De ce point de vue, je dois dire que son recherchiste ou ses recherchistes et
lui-même possèdent du matériel valable et important. Mais
évidemment, il gâte toute son argumentation par une attaque
partisane, malheureuse et, qui plus est, incorrecte. Et je vais le
démontrer, Mme la Présidente. Il dit: La décision du
gouvernement du mois de mai 1978 de construire un boulevard de type urbain dans
l'axe de l'ancienne autoroute Ville-Marie est une décision partisane qui
a été décrétée, à toutes fins utiles,
par le ministre actuel de l'Immigration, mon collègue, M. Couture.
Or, qu'en est-il véritablement, Mme la Présidente? Sous
l'ancien gouvernement, un comité avait été
constitué qui s'appelait le CTRM, Comité de transport de la
région métropolitaine. De qui était-il constitué,
Mme la Présidente? Du sous-ministre des Transports d'alors et ensuite de
son successeur, l'actuel sous-ministre des Transports, des présidents
des commissions de transport de la Communauté urbaine de
Montréal, de Laval et de la rive sud, MM. Beaulieu, Gilbert et Hanigan,
d'un haut fonctionnaire du ministère des Transports qui agissait comme
secrétaire, M. Jacques Hébert, assistés de nombreux
experts délégués par différents organismes dont,
entre autres, le Bureau de transport métropolitain, le Canadien
Pacifique, des gens, comme vous le savez, Mme la Présidente, qui sont
des partisans de la souveraineté-association et du gouvernement actuel
d'une façon délirante. Je parle du Canadien Pacifique, du
Canadien National, qui ont fourni $75 000 à la caisse libérale ou
paralibérale du comité du non lors du référendum,
du Service de planification de la Communauté urbaine de Montréal,
de la Division des projets spéciaux du développement du
ministère des Transports. La direction générale des
études avait été confiée d'ailleurs, entre autres,
à M. Aimé Desautels, qui est l'actuel directeur de l'urbanisme ou
de la planification de la ville de Montréal.
Que disait ce comité qu'on ne peut assimiler le
député de Saint-Laurent l'admettra au Parti
québécois, créé sous l'ancien gouvernement et
constitué de ces personnalités non politiques? Sous l'ancien
gouvernement comme sous le nouveau, que disait ce comité dans un rapport
dont j'ai ici copie? Est-ce que le député de Saint-Laurent a une
copie de ce rapport?
M. Forget: Le transport des personnes, n'est-ce pas?
M. de Belleval: Le transport...
M. Forget: CTRM.
M. de Belleval: ... des personnes.
M. Forget: Publié en octobre 1977.
M. de Belleval: Est-ce que vous l'avez?
M. Forget: Oui.
M. de Belleval: Vous l'avez? Le député de
Saint-Laurent est d'autant moins excusable qu'il a ce rapport et qu'il ne l'a
pas cité. Que dit ce rapport à la page 57? En ce qui concerne
l'autoroute Ville-Marie, il est recommandé que soit abandonnée la
construction de l'autoroute Ville-Marie, telle que conçue originalement.
Il reste que cette autoroute inachevée s'intègre mal, à
son extrémité est, à la trame urbaine. Elle engendre
nombre de problèmes de circulation. Plusieurs solutions ont
été envisagées dont la réalisation en deux
étapes d'un boulevard de facture urbaine en lieu et place du projet
initial. Le rapport poursuit son analyse et il continue avec une nouvelle
recommandation. En conséquence, il est recommandé c'est
toujours le CTRM qui parle, pas le Part* québécois, pas le
ministre de l'Immigration, mais un comité créé par
l'ancien gouvernement composé essentiellement de hauts fonctionnaires de
toutes origines que soit réalisé dans l'emprise
expropriée de l'autoroute Ville-Marie un boulevard de type urbain. Page
58. Si l'on prend la décision du Conseil des ministres de mai 1978, "que
soit abandonnée la construction de l'autoroute Ville-Marie et que soit
réalisé dans son emprise expropriée un boulevard de type
urbain", c'est presque le mot-à-mot du libellé de la
recommandation du CTRM. Ensuite, le député de Saint-Laurent aura
le front de venir nous dire que c'est une décision partisane et
politique inspirée du ministre de l'Immigration. Il ne s'agit pas
d'une
telle décision. Il s'agit d'une décision mûrie, dont
le mûrissement d'ailleurs avait commencé sous l'ancien
gouvernement, que le nouveau gouvernement a considérée quand il
est arrivé au pouvoir. Compte tenu de la pertinence des recommandations
des hauts fonctionnaires et des différents organismes impliqués,
c'est la décision qu'il a prise à ce moment-là à la
lumière de ces recommandations non pas partisanes, mais techniques et
fort bien mûries et dont le mûrissement avait commencé
je le reconnais sous l'ancien gouvernement. (11 h 30)
Voilà la vérité. En acceptant cette recommandation,
nous pensons que nous pourrons malgré tout permettre une bonne
circulation des marchandises et des personnes entre l'autoroute Ville-Marie
actuelle et le pont Hippolyte-Lafontaine et que nous minimiserons les dommages
à l'environnement des quartiers urbains avoisinants. Bien entendu, il
sera possible, le long de l'emprise expropriée, d'en utiliser une partie
pour l'habitation et aussi pour le développement industriel
léger. Nous faisons cette planification, actuellement, en collaboration
avec la ville de Montréal, et j'espère que, d'ici quelques
semaines, nous serons capables de faire connaître à la population
la solution adoptée conjointement par la ville de Montréal et le
ministère des Transports.
M. Forget: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: Pour terminer sur ce sujet, le ministre nous
réfère au rapport sur le transport des personnes publié en
octobre 1977 comme étant la base d'une décision.
M. de Belleval: C'est le mot à mot.
M. Forget: Je veux bien qu'il y ait eu des recommandations d'un
comité d'étude. Il y a deux choses qu'on peut dire à ce
sujet. Premièrement, est-ce que le ministre prétend que ce
rapport doit être considéré dans tous ses
éléments comme étant le dernier mot de l'histoire? Il sait
très bien que sur d'autres recommandations, son gouvernement n'a pas
encore osé prendre des décisions. Est-ce qu'il faut
présumer que c'est seulement la date de la décision qui est en
question ou si c'est même son contenu? Autrement dit, est-ce qu'il va
souscrire à 100% à toutes les recommandations de ce rapport? Il
sait très bien que non. Il y a une décision politique qui est
requise au-delà des rapports des commissions d'enquête. Or, la
seule décision politique qu'on peut retracer à l'origine du
boulevard urbain, c'est la conférence de presse de M. Couture qui est
rapportée dans le Devoir du 12 novembre 1976 où, pour la
première fois, une formation politique dit: Voici ce que nous allons
faire.
Deuxièmement, le ministre sait très bien que le rapport
d'un comité "d'experts", entre guille- mets certaines des
personnes de ce comité étaient absolument des experts dans le
meilleur sens du terme ne peut pas, malgré tout, ne pas
être influencé par un climat qui avait fait de la question de
l'autoroute est-ouest pratiquement une question de crois ou meurs, une question
quasi religieuse et symbolique, tant il était inconcevable pour certains
groupes de considérer la construction d'une autoroute dans le
centre-ville. Le ministre sait très bien qu'un comité d'experts
ne peut pas ne pas tenir compte d'une telle recommandation. Comment se fait-il
que le gouvernement, trois ans après, se sente tellement enferré
par la déclaration de M. Couture en campagne électorale qu'il
refuse de reconsidérer une décision quand d'autres experts,
également savants, également compétents, lui disent: Cette
orientation est une orientation stupide, elle n'a pas de sens. Une illustration
de cela, c'est que les habitations, si on en construit autour de ce boulevard
urbain, avec une circulation analogue à celle d'une autoroute, il va
falloir les insonoriser, et cela va produire des coûts absolument
loufoques pour des habitations dans un quartier qui, quand même, n'est
pas un quartier de luxe.
On prédit un loyer et ce sont des estimations qui datent
de 1978, presque deux ans de $500 par mois par logement, et ce ne sont
pas des logements énormément grands. Quand on voit tout cela, Mme
la Présidente, on se demande pourquoi le gouvernement refuse de
reconsidérer sa décision et va de l'avant, en dépit de
l'avis d'un comité également expert qui émet des doutes
sérieux malgré que la décision du Conseil des ministres
ait été prise. Cela prend beaucoup de courage pour les
fonctionnaires de dire: Cette décision, vous l'avez prise, mais elle est
à la limite du bon sens. Il faut quand même lire entre les lignes.
Qu'est-ce qu'ils auraient écrit si la décision n'avait pas
été prise?
M. de Belleval: Mme la Présidente...
M. Forget: Mme la Présidente, il me semble évident
que la décision devrait être révisée, d'autant plus
qu'il semble bien que la ville de Montréal le rapport en fait
état est dissidente sur la question même de la conception
de ce boulevard urbain qu'on juge présumément trop étroit
pour satisfaire aux exigences des heures de pointe avec une circulation aussi
dense que celle que l'on envisage.
La Président (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Mme la Présidente, je crois qu'on va
terminer maintenant cette discussion parce que, de toute évidence, le
député de Saint-Laurent est en train, comme on dit chez nous, de
ramer je pense que l'expression n'est pas parlementaire dans un
jus qu'on ne peut assimiler à de l'eau claire.
M. Forget: Est-ce que vous refusez de reconsidérer votre
décision?
M. de Belleval: Mme la Présidente...
M. Forget: Est-ce là votre réponse? Vous refusez de
reconsidérer votre décision.
M. de Belleval: Le député... M. Forget:
C'est définitif.
M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent commence
par dire qu'il s'agit d'une décision politique, et non seulement cela,
mais une décision partisane. Quand je lui démontre qu'il s'agit
d'une décision appuyée sur celle d'un comité d'experts mis
sur pied sous l'ancien gouvernement, il me dit que les gouvernements ne sont
pas obligés d'accepter les recommandations des experts. Finalement, il a
dit dans son préambule qu'il ne proposait pas de son côté
que l'autoroute soit continuée. Donc, il est d'accord avec la
proposition du gouvernement de continuer en boulevard urbain...
M. Forget: Mme la Présidente... M. de Belleval:
Finalement...
M. Forget: ... on me cite incorrectement. J'ai dit que, en
général et en principe, dans les zones urbaines, nous ne
recommandions pas les autoroutes à tort et à travers, mais qu'il
y avait un bouchon. Il y a une exception, parce que c'est une autoroute non
terminée essentiellement.
M. de Belleval: Je suis d'accord. Peut-être que le
député de Saint-Laurent mentionnait un principe
général, mais cela ne s'applique pas dans le cas de l'autoroute
Ville-Marie. Si je comprends bien, le député de Saint-Laurent est
favorable à la construction de l'autoroute Ville-Marie selon le plan
original. Est-ce là son avis?
M. Forget: Comme je n'ai pas les douze experts qui sont alentour
de lui, je demande au ministre: Étant donné cet avis dissident de
ce dernier rapport que j'ai cité, qui montre les désavantages et
même les dangers sur le plan du bruit, d'en faire une zone d'habitation,
est-ce qu'il n'est pas d'avis qu'il devrait réviser sa décision,
la reconsidérer, plutôt que de dire: Cela, on s'est engagé
dans une ornière et on n'en sort pas, la décision est prise en
1978, c'est un boulevard urbain, quels que soient les arguments qu'on nous
amène après coup, c'est figé dans le ciment? Je veux
savoir si le ministre accepte oui ou non de reconsidérer cette
décision.
M. de Belleval: Je me rends compte, tout d'abord, que le
député de Saint-Laurent refuse de répondre à ma
question sous prétexte qu'il n'a pas tous les experts. D'accord.
Deuxièmement, je pense avoir démontré, tout
à l'heure, Mme la Présidente, qu'il ne s'agissait pas d'une
décision politique, mais d'une décision appuyée sur des
rapports sérieux d'un comité technique dont la valeur ne peut pas
être mise en doute. La recommandation adoptée par le Conseil des
ministres est presque le libellé exact de la recommandation du rapport
qu'il admet, d'ailleurs, avoir entre les mains, mais qu'il n'a pas cité
pour faire sa démonstration parce que, évidemment, cela ne
servait pas sa démonstration. Je crois avoir démontré cela
hors de tout doute.
Que le candidat du Parti québécois, lors de
l'élection 1976, ait pris une attitude confirmée par les experts
en 1977, cela démontre que les Québécois ont eu raison
d'élire le député en question comme leur
représentant, parce qu'il faisait, lors de la campagne
électorale, des suggestions intelligentes qui se sont
avérées ensuite tout à fait justes telles que
corroborées par des fonctionnaires de haut calibre, fonctionnaires
nommés par l'ancien gouvernement, d'ailleurs.
Maintenant, qu'est-ce qu'on fait pour l'avenir? Le député
de Saint-Laurent dit: Vous devriez reconsidérer quand même cette
décision, même si elle est dictée par un rapport d'experts,
parce qu'il y a un autre comité qui dit autre chose. C'est faux. L'autre
comité ne dit pas de remettre en question la décision de
poursuivre les travaux de l'autoroute Ville-Marie sous forme de boulevard
urbain. Ce comité ne remet d'aucune façon cette décision
en question. Ce qu'il dit, c'est que l'ensemble des emprises
libérées ne se prête pas nécessairement à de
l'habitation et qu'il faudra prendre certaines précautions si on
désire mettre de l'habitation le long de cette emprise; recommandation
que je trouve effectivement raisonnable. Le long d'un boulevard urbain, quel
qu'il soit, il faut effectivement, quand on construit des habitations, prendre
un certain nombre de précautions, en particulier relativement à
l'insonorisation, etc.
C'est le seul point sur lequel le comité en question attire
l'attention du gouvernement et c'est normal. C'est pour ça d'ailleurs
que nous avions mis sur pied ce comité de fonctionnaires, c'est pour
étudier les modalités d'application de cette recommandation du
CTRM d'abord, telle qu'entérinée par le Conseil des
ministres.
Par conséquent, il ne peut être question actuellement de
remettre en cause cette décision, d'autant plus que nous n'avons pas
d'élément pour remettre cette décision en cause. Ce qu'il
s'agit de faire maintenant, c'est de voir comment on peut élaborer des
plans précis qui vont satisfaire à la fois les besoins de la
circulation et la protection de l'environnement urbain et les besoins
légitimes aussi de la ville de Montréal en cette matière.
C'est ce que nous sommes en train de faire.
M. O'Gallagher: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: Je voudrais revenir au problème de la
CTCUM...
M. de Belleval: Mme la Présidente, juste un moment, je
m'excuse, j'ai oublié un renseigne-
ment important que je dois donner, un élément financier
très important qui démontre aussi pourquoi cette décision
de continuer en boulevard urbain a été prise. Le coût de
construction en 1976 de l'autoroute Ville-Marie entre son point actuel et le
pont Hippolyte-Lafontaine, selon les plans originaux, serait de $46 millions le
mille et le coût de construction projeté d'un boulevard de type
urbain sera de $11 millions le mille. Je pense aussi qu'il s'agit de chiffres
qui donneront à réfléchir au député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Est-ce que ce coût-là sera assumé
en totalité par la province?
M. de Belleval: Oui.
M. Forget: Et non pas par la ville de Montréal?
M. de Belleval: Par la province.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Robert Baldwin.
Trains de banlieue
M. O'Gallagher: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais
aborder le problème de l'extension de la CTCUM à l'ouest de
l'île et l'intégration des trains de banlieue, CN et CP. Le
ministre, dans son rapport, a tout simplement dit que le gouvernement est
figé, qu'il ne peut pas prendre de décision parce qu'il attend
des rapports, des études, des études même presque finales.
Il a aussi dit que le gouvernement adopte de maintenir le statu quo sur les
transport en commun sur l'île de Montréal parce qu'il subventionne
encore des systèmes de transport désuets comme
Métropolitain Transport et Trans Urbain, en plus de subventionner aussi
le système de transport du CNR, la ligne Deux-Montagnes, tout en mettant
le problème sur le dos du fédéral.
Au point de vue des rapports, on en a vu une tonne. Il y a eu le projet
de schéma d'aménagement de la communauté produit en 1973
et la commission Alie en 1975. On a eu le rapport de la Commission Lamarre au
cours de la même année. On a eu le Comité de transport de
la région de Montréal en 1977. Tout cela a été
repris dans un rapport préparé par la Communauté urbaine
de Montréal avec l'aide du CNR et de toutes les commissions de transport
en dehors de l'île de Montréal qu'on appelle le rapport Gascon,
qui a été produit en novembre 1978.
Il y a eu aussi des études par COTREM, BAREM et REM. Des
rapports, on en a eu beaucoup trop. Je prétends que c'est le temps
d'agir. On a eu aussi les déclarations du prédécesseur du
ministre actuel, M. Lessard, faites devant la Conférence des maires le
1er mars 1979. À ce moment-là le ministre a déclaré
ceci: "II est absolument évident que le gouvernement sera obligé
d'intervenir comme, d'ailleurs, il en avait déjà manifesté
l'intention l'automne dernier ". Tout de suite après cela, le ministre
Lessard, dans cette
Chambre...
(11 h 45)
La Présidente (Mme Cuerrier): Le député de
Saguenay ou l'actuel ministre des Loisirs.
M. O'Gallagher: ... le député de Saguenay, oui, le
prédécesseur de M. le ministre, en réponse à une
question que je lui posais le 4 juin 1979, a répondu ce qui suit: "M. le
Président, nous aurions aimé beaucoup mieux que la
Communauté urbaine de Montréal prenne ses responsabilités
comme le projet de loi 56, que nous avons adopté ici, à
l'Assemblée, le lui permet. Comme ce n'est pas le fait, le gouvernement
du Québec prendra ses responsabilités en temps et lieu." C'est la
déclaration du prédécesseur du présent ministre des
Transports. En plus, le ministre d'État à l'Aménagement a
déclaré, à la Conférence des maires de banlieue, en
mars 1979, ce qui suit: "Nous reconnaissons clairement la
nécessité d'une intégration des différents
réseaux de transport en commun: autobus, métro, trains de
banlieue, etc." Un peu plus loin, dans la même déclaration, le
ministre continuait dans ce sens: "Mais une chose est claire dans toute la
question du transport en commun, l'opinion nous dicte une priorité pour
l'intégration des réseaux et c'est la qualité de la vie
sur l'île de Montréal."
J'aimerais savoir du ministre et de ses experts quels sont les
éléments précis qu'il attend dans les rapports avant de
prendre une décision afin de régler cette question une fois pour
toutes.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Transports.
M. de Belleval: Nous n'attendons plus de précisions,
d'études supplémentaires, non pas que des précisions ou
des études supplémentaires ne seraient pas utiles, mais il vient
un moment où, effectivement...
M. O'Gallagher: II faut prendre une décision.
M. de Belleval:... il faut prendre une décision.
Même si nous n'avons pas 100% des renseignements, à un moment
donné, on pense qu'on a suffisamment de renseignements, on a
répondu à suffisamment de questions pour prendre une
décision. Nous en sommes arrivés à cette étape, ou
nous croyons, en tout cas, en être arrivés à cette
étape au sein du ministère des Transports actuellement. C'est ce
que j'expliquais tantôt au député. Nous avons
rédigé une espèce de synthèse de tous ces
renseignements, de toutes ces recommandations, synthèse qui est en voie
d'être corrigée et qui sera, comme je l'ai dit, acheminée
à très court terme au comité ministériel permanent
de l'aménagement du territoire et ensuite au Conseil des ministres.
En ce qui nous concerne, nous pensons que les trois dernières
années de travaux intenses de ce point de vue sont maintenant
suffisamment
fructueuses pour prendre une décision. Le député
verra, quand les rapports seront rendus publics, qu'il s'agit de dossiers
complexes où le ministère des Transports n'avait pas d'expertise
jusqu'à récemment, où toute l'expertise était au
sein des commissions de transport de la région de Montréal comme
telle, en particulier, au sein du Bureau de transport métropolitain,
dossier qui met aussi en cause des intérêts politiques
légitimes je le dis de nombreuses municipalités de
la région de Montréal. Il faut donc convaincre un certain nombre
d'élus municipaux c'est normal, c'est correct de le faire
de la justesse des points de vue qu'on met de l'avant. Amener des gens à
repenser certaines décisions qui ont déjà
été prises pour leur montrer que des facteurs nouveaux doivent
les faire changer d'idée, le député admettra aussi que
c'est une tâche complexe et pas seulement technique.
Il faut également soumettre nos rapports à la critique de
ces organismes, de ces experts, entre autres du Bureau de transport
métropolitain et nous assurer, nous aussi, à la suite de ces
critiques, que nos positions sont exactes, les modifier, refaire d'autres
études. C'est un processus complexe et je pense que trois ans, quatre
ans ne sont pas de trop pour faire de telles études, pour ceux qui
connaissent, disons, la complexité de ces sujets où il ne s'agit
pas seulement, comme je l'ai dit, de décisions techniques qui peuvent
être prises par des technocrates en circuit fermé, mais de
décisions qui doivent recevoir l'assentiment, comme c'est normal, je
dirais, de dizaines d'élus municipaux, en même temps que de
députés et de ministres, des deux côtés de la
Chambre d'ailleurs, si on veut que finalement, sinon une unanimité, du
moins un consensus assez large existe là-dessus.
Vous savez que souvent c'est sur ces problèmes
d'aménagement qu'on retrouve les écoles et les batailles les plus
acharnées quand vient le temps de prendre une décision. Pour ma
part, je pense que ce processus, qui avait été mis en branle,
comme je l'ai dit à toutes fins utiles, il y a maintenant cinq ans
peut-être au Québec, aboutit maintenant à un
résultat suffisamment clair pour que le gouvernement prenne position et
invite l'ensemble de la population, des élus municipaux, des
députés à se rallier derrière une proposition
globale. C'est ce que j'ai l'intention de mettre sur la table durant les
prochaines semaines.
Maintenant, il y a un certain nombre de principes qui ont
déjà été mis de l'avant par un peu tout le monde,
en particulier l'importance d'avoir un système intégré et
non pas trois ou quatre systèmes. Chaque mode de transport a un
rôle à jouer: l'autobus, l'autobus en voie réservée,
le train de banlieue, le métro, et il ne faut pas privilégier un
seul mode. En particulier je pense, entre autres, au Bureau de transport
métropolitain, à la ville de Montréal, même aux
citoyens également qui ont reçu un service de très bonne
qualité de la part du métro la tendance, c'est de croire
qu'un seul mode de transport, entre autres le métro qui est
déjà bien intégré sur les plans urbain,
administratif et financier, peut résoudre un problème de
transport. Simplement amener des gens à sortir de leur vision
axée sur un système qu'ils connaissent bien, qui donne un bon
service et à penser plus large de façon à mettre en accord
des intérêts parfois divergents entre un quartier d'une
municipalité et un autre, tout cela représente, je pense, un tour
de force considérable.
M. O'Gallagher: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Robert Baldwin.
M. O'Gallagher: ... le ministre a bien dit que les rapports sont
tous complétés et que c'est le temps d'agir. Je voudrais lui
demander de préciser une espèce de programme d'actions
précises auxquelles on pourrait s'attendre d'ici les prochains mois pour
régler cette situation de transport dans l'île qui traîne
depuis tellement longtemps. C'est le temps d'agir, comme vous l'avez admis,
mais la population voudrait savoir quand. Dans douze mois, dans 24 mois ou dans
six mois?
M. de Belleval: Je pense que la réponse classique d'un
homme politique prudent dans ces matières, c'est de ne jamais trop se
mouiller et de donner des échéances un peu floues, etc. Je pense
qu'on a pratiqué et qu'on pratique régulièrement ce genre
de réponses des deux côtés de la Chambre à
l'occasion. Tout en admettant que je ne contrôle par l'ensemble de ce
dossier, que je dois faire rapport à un comité permanent, comme
je l'ai expliqué, de collègues au Conseil des ministres, que je
dois voir également d'autres députés, des deux
côtés de la Chambre d'ailleurs, et les représentants
municipaux, personnellement, mon ambition, mon objectif, c'est de faire en
sorte que, d'ici à la fin de l'année, la population de
Montréal, la population du Québec, d'ailleurs, prenne
connaissance de nos propositions en cette matière.
M. Forget: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le
député.
M. Forget: ... quand le ministre nous annonce ce plan d'ensemble
du transport, il veut bien dire qu'on va traiter là de ce qui advient du
moratoire du métro, mais aussi de chacun des éléments qui
ont fait l'objet des questions de mon collègue de Robert Baldwin,
c'est-à-dire la question des trains de banlieue, la question des autobus
dans la partie ouest de l'île de Montréal...
M. de Belleval: Et dans la partie est.
M. Forget: ... et dans la partie est. C'est donc une solution
d'ensemble qu'il va proposer et il vise pour cela le 31 décembre de
cette année. Mme la Présidente, le ministre ne pourrait-il pas
convenir avec nous que vouloir tout régler d'un coup est peut-être
le genre de façon de poser le problème qui est presque sûr
de l'empêcher de rencontrer son objectif.
Relativement aux trains de banlieue, on a un précédent
dans une ville qui n'est pas quand même tellement différente ni
loin de nous, Toronto. Et plus généralement en Ontario, il y a
maintenant plus d'une dizaine d'années, le gouvernement de l'Ontario a
pris complètement à sa charge, sur le plan des
équipements, des frais de fonctionnement et des déficits
possibles de fonctionnement, les services de trains pour les "commuters", les
banlieusards qui voyagent le matin et le soir vers le centre-ville. C'est un
service qui donne satisfaction. C'est un service qui est financé
provincialement parce que précisément, les
bénéficiaires de ce service ne sont pas des contribuables
seulement de la Communauté urbaine de Toronto, de Toronto métro,
mais résident en dehors de la communauté.
De la même façon, à Montréal, vous avez deux
trains de banlieue, au moins les deux ou trois qui restent qui, justement, ont
le même rôle de prendre des gens dans les banlieues hors
métropole et les amener au centre-ville. Est-il raisonnable, M. le
ministre, de demander aux contribuables de la CUM et en particulier aux
contribuables de la ville de Montréal, dont la masse de la contribution
au financement total est prépondérante, de payer pour un service
qui, largement, sert surtout parce que ce sont eux qui ont le moins de
choix valables les gens qui vivent de l'autre côté de la
rivière des Mille Îles, à Saint-Eustache et dans les
environs, ou dans le cas du service de trains du Canadien Pacifique, à
Dorion, à Vaudreuil, à Saint-Hilaire, etc., et même
jusqu'à Rigaud? Est-il raisonnable de placer le fardeau sur les
autorités municipales? Ne serait-il pas plus normal et plus facile de
s'entendre, évitant ainsi toutes les querelles au sein de la CUM, si le
gouvernement du Québec, sans essayer de tout régler d'un seul
coup, acceptait au moins d'admettre qu'il a nécessairement une
responsabilité particulière pour cette forme de transport en
commun qui est hors métropole?
M. de Belleval: Pour répondre adéquatement à
la question du député de Saint-Laurent, je crois qu'il faudrait
étendre ici une grande carte et voir comment, sur le terrain, les choses
se présentent. Les comparaisons sont toujours déficientes. C'est
la forme la plus faible du raisonnement, dit-on. Par conséquent, je
pense qu'il faut faire très attention en comparant la situation du
Toronto métropolitain avec celle du Montréal métropolitain
en matière de services de banlieue en particulier. Je ne veux pas ici
commencer à faire toutes les distinctions qui devraient s'imposer. Je
pense que cela nous sortirait trop du sujet et de la question
particulière du député de Saint-Laurent. Mais il verra,
quand nous présenterons notre rapport, qu'effectivement nous devons
prendre une décision d'ensemble et qu'il n'est plus possible d'agir
à la pièce dans ce dossier. Il verra que, techniquement, toutes
les pièces du "puzzle" se rejoignent et doivent se rejoindre. Il s'agit
véritablement d'un "puzzle" et non pas de pièces
détachées d'un même ensemble qu'on peut traiter
séparément, sur le plan purement technique.
Il verra aussi que sur le plan politique, dans le sens noble du terme,
toutes ces pièces sont interreliées. Si quelqu'un, pour des
motifs égoïstes ou pour des intérêts qu'il
prétend légitimes dans son secteur de l'île de
Montréal, prétend régler son problème sans, en
même temps, régler les problèmes des autres, il va se
rendre compte que c'est la voie qui a été empruntée dans
le passé et c'est la voie qui nous a empêchés de progresser
dans la région de Montréal au même rythme que les autres
grandes régions métropolitaines du monde depuis quelques
années.
Je voudrais donner des exemples de cette situation. Il dit: C'est encore
la ville de Montréal, entre autres, qui aura à assumer une plus
grande ou une part additionnelle du fardeau si le ministre veut procéder
comme il semble vouloir procéder. Je dois dire qu'il y a de nombreuses
municipalités dans la région de Montréal qui paient
actuellement pour les services de transport en commun, en particulier du
métro, et qui, depuis de nombreuses années, ne retirent aucun
service du métro, parfois aucun service de niveau excellent sur le plan
du transport par autobus. Ce n'est pas une situation qui affecte autant la
ville de Montréal actuellement, mais qui affecte très directement
plusieurs municipalités même du centre de Montréal. Je
pense à Montréal-Nord, par exemple, et à d'autres
municipalités.
M. Goulet: M. le Président.
M. de Belleval: Je voudrais dire aussi, pour donner d'autres
exemples, que certaines décisions que nous prendrons, entre autres,
concernant les trains de banlieue sont susceptibles de profiter
considérablement aux citoyens de Montréal. Prenons un exemple: la
ligne 2-Est du métro, celle qui va du centre-ville à
Henri-Bourassa, a maintenant atteint depuis quelques années
sa capacité ultime. Nous transportons à l'heure de pointe
environ 30 000 personnes dans cette partie du métro. À la
période de pointe, je pense, qui est d'un peu plus d'une heure, c'est
environ 45 000 personnes. Autrement dit, cette ligne est saturée. Si
nous continuons à construire des prolongements à cette ligne de
métro ou des lignes qui viennent s'y rabattre, il va sans dire que nous
essaierons de mettre davantage de clients dans une ligne qui est
déjà saturée. Est-ce qu'on veut en arriver au
système japonais, où on engage des pousseurs pour entrer de force
les gens dans les portes de façon que celles-ci puissent se refermer et
que le train puisse partir? Je ne pense pas que c'est ce qu'on veut vivre dans
la région de Montréal. On est près de vivre cette
situation dans la ligne 2 du métro.
Par contre, grâce à une bonne intégration des trains
de banlieue et peut-être à une planification nouvelle des
prolongements des lignes de métro, on pourrait, de façon
significative, non pas seulement amener de nouveaux clients dans cette ligne,
mais redistribuer ailleurs, en offrant un service non seulement
équivalent, mais sans doute meilleur, des clients actuels au plus grand
profit des citoyens de Montréal qui, en bas de ligne, doivent
actuellement entrer dans des voitures encombrées et qui le
seraient davantage, si possible, si on continuait selon la voie qui est
proposée.
Je donne simplement cela comme exemple pour démontrer qu'un geste
que nous poserions dans les banlieues nord de Montréal aurait des
conséquences directes sur les usagers actuels du métro. Je
donnerai un autre exemple. Si, en ayant un plan intégré de
transport, nous enlevons, dans le centre-ville de Montréal, des milliers
de voitures je parle effectivement de milliers de voitures chaque jour
est-ce que ce ne sera pas la qualité de la vie des quartiers
centraux de Montréal qui en sera ainsi améliorée et est-ce
que les citoyens de la rue Clark à Montréal ne seront pas
avantagés par un geste que nous poserons du côté de
Montréal-Nord, de Roxboro ou de Pierrefonds? J'entends démontrer
que tel sera le cas si nous prenons la voie que nous proposons de prendre pour
l'avenir à Montréal.
M. Forget: M. le Président, il y a des remarques qui ont
été faites relativement au métro, nous y reviendrons,
j'espère, tout à l'heure. Je voudrais revenir sur la question des
trains de banlieue.
Le Président (M. Laberge): Entre-temps, M. le
député de Bellechasse m'avait fait signe, si vous permettez.
M. Goulet: C'est sur le même sujet, M. le Président.
Étant donné que c'est la question du député de
Saint-Laurent qui prévaut aujourd'hui, je lui cède la parole,
mais j'aimerais poser une courte question au ministre sur ce point.
M. Forget: Sur la question des trains de banlieue, bien
sûr, le ministre peut nous expliquer très éloquemment que
tout dépend de tout le reste et qu'on vit dans un monde
interdépendant, que c'est pour cela que c'est compliqué et qu'il
faut prendre les morceaux très gros. Il reste qu'il y a le
problème des trains de banlieue. C'est un problème avec lequel un
certain nombre de gens, quelques dizaines de milliers, vivent
quotidiennement.
On sait que ces services vont être interrompus, c'est du moins la
décision qui a été annoncée, en 1980; que ce soit
en juillet ou en décembre, de toute façon, ça s'en vient.
Faut-il comprendre des remarques du ministre qu'il nous annonce pour
décembre, peut-être, il l'espère bien, un rapport
d'ensemble? Donc les actions vont devoir suivre tout cela, elles ne pourront
pas le précéder. Faut-il donc comprendre que, pour cet automne,
la question des trains de banlieue ne connaîtra aucun
développement à l'initiative du gouvernement? Autrement dit, que
la loi dont son prédécesseur avait plus ou moins laissé
entendre qu'elle s'en venait relativement à cette question ne verra pas
le jour, qu'il n'y aura pas de geste posé par le gouvernement du
Québec d'ici la fin de décembre pour nous rapprocher d'une
solution? Si c'est cela qu'il faut comprendre, je pense qu'il est important que
le public le sache parce que même au niveau des édiles municipaux,
il y a un certain attentisme voulant que peut-être Québec va
intervenir et va dispenser tout le monde de prendre des décisions.
M. de Belleval: La situation ne se présente pas,
cependant, selon le dilemme ou selon la problématique que vient
d'exposer le député de Saint-Laurent. Les compagnies de chemin de
fer, compte tenu de la progression des travaux que nous faisons actuellement et
auxquels, d'ailleurs, elles participent, étant à même de
voir la teneur technique de ces travaux et leur sérieux; compte tenu,
donc, de l'avancement de ces travaux d'étude, les compagnies de chemin
de fer ont accepté elles-mêmes d'établir un moratoire quant
au processus de désengagement qu'elles ont amorcé depuis quelques
années. Cependant, elles nous ont fixé une date limite qui se
situe durant 1980 pour qu'une décision ferme soit prise par le
gouvernement, sinon, à ce moment-là, elles reprendront leur
liberté d'action.
Pour quelques semaines et quelques mois encore, nous avons donc une
situation qui est actuellement figée, qui nous donne le temps de prendre
les décisions qui doivent être prises, de façon qu'on
puisse passer du système actuel à un système futur qui
fera l'objet des recommandations dont je parle et sans qu'entre-temps la
situation ne se dégrade davantage. Je suis d'accord avec le
député de Saint-Laurent sur le fait que nous sommes maintenant
presque rendus à la fin des échéances. C'est ce qui
explique aussi mon propre désir de faire en sorte qu'on sache où
on s'en va avant la fin de la présente année.
M. Forget: Mais il n'y aura pas effectivement de gestes
gouvernementaux, législatifs ou autres, d'ici les prochains mois.
M. de Belleval: Là-dessus, en ce qui concerne les gestes
gouvernementaux de nature législative, je dois dire que la
Communauté urbaine de Montréal a déjà pris un
certain nombre de dispositions pour, entre autres, intégrer ces services
périphériques. Une résolution a même
été déposée sur la table du conseil de la
Communauté urbaine de Montréal et, en vertu de sa charte
actuelle, la Communauté urbaine de Montréal a elle-même
suffisamment de pouvoirs pour prendre de telles décisions sans que le
gouvernement ne les lui impose.
M. Forget: Vous savez qu'il y a actuellement, d'un
côté, la ville de Montréal et, de l'autre
côté, les maires de banlieue. Tout cela est figé depuis le
mois de mars. Cela va bientôt faire six, sept ou huit mois, je ne sais
pas, et personne ne fait de compromis, personne ne s'entend, parce qu'on dit:
De toute manière, le ministre des Transports va nous dire quoi faire. Il
semble que vous ne leur direz pas avant un certain nombre de mois, ce qui veut
dire que même de leur côté, il n'y a aucune incitation
à réviser leur position.
Il y a peut-être des possibilités de mouvement, de ce
côté, que vous sous-estimez et que vous n'encouragez certainement
pas en disant de façon
assez mystérieuse: Écoutez, l'État provincial
paternaliste va venir régler tout cela avec un grand plan, un grand
schéma d'aménagement et tout le monde n'aura qu'à s'y
conformer. Est-ce qu'il ne serait pas plus sage, même dans le sens de
Politique avec un grand P vous l'avez mentionné souvent ce
matin, de dire: Écoutez, il y a des actions qui peuvent être
prises? Est-ce qu'il est nécessaire ou non de relier de façon
indissoluble la solution des trains de banlieue à la question de
l'expropriation des deux compagnies d'autobus dans l'Ouest-de-l'Île?
Est-ce que cela, selon vous, doit être relié de la façon
dont cela l'a été, parce que c'est le levier qui a permis
à certains membres de la communauté urbaine de bloquer toute
décision même partielle?
M. de Belleval: J'allais justement aborder ce point, quand le
député de Saint-Laurent a repris la parole. J'exposais la
situation juridique actuelle. J'expliquais aussi que des mesures avaient
été prises à l'initiative de la Communauté urbaine
de Montréal dans le sens que le propose le député de
Saint-Laurent. C'est ce que j'allais dire, en continuant. Cependant, ces
initiatives n'ont pas abouti encore, parce qu'effectivement la ville de
Montréal s'y est opposée. Toutefois, justement, j'espère
que les consultations que j'ai actuellement avec les différents
responsables municipaux dans la région de Montréal vont porter
leurs fruits. J'espère que le rapport que nous produirons aura aussi une
valeur pédagogique suffisante pour établir un certain consensus
satisfaisant pour que, d'elle-même, la Communauté urbaine de
Montréal prenne les décisions qu'elle a déjà
manifesté l'intention de prendre, pour justement éviter que ce
soit l'État paternaliste qui vienne imposer à certains conseils
municipaux, à certains responsables de la région de
Montréal, des décisions que ces responsables auront le pouvoir de
prendre durant les prochains mois.
Quand vous demandez: Est-ce qu'il faudra attendre plusieurs mois? J'ai
répondu: D'ici la fin de l'année. Il reste donc deux mois avant
la fin de l'année. Nous aurons donc sur la table des propositions
concrètes qui ne seront pas des propositions paternalistes du
gouvernement du Québec, puisque ces propositions sont actuellement
élaborées au sein du COTREM, en collaboration avec les
responsables locaux en matière de transport en commun.
Cela étant dit, s'il n'y a pas unanimité et si le
consensus n'est pas suffisant, il faudra bien, à un moment donné,
que le gouvernement prenne ses responsabilités. Je pense que le
député de Saint-Laurent...
M. Forget: On comprend cela, M. le ministre. On comprend qu'il va
falloir que vous agissiez.
M. de Belleval: ... serait le premier à dire: Le
gouvernement n'a pas raison de dire: Vu que vous n'êtes pas capables de
prendre vos responsabilités vous-mêmes, arrangez-vous, je ne fais
rien. Il me reprocherait pareille attitude. Mon ambition, c'est de faire en
sorte que ces gens prennent leurs propres responsabilités. Nous les
aiderons à les prendre.
M. Forget: Mme la Présidente, on est actuellement en train
d'écouter le ministre qui nous débite des
généralités, des voeux pieux depuis quand même un
bon moment. Je comprends tout cela. C'est difficile, c'est long, vous attendez
le consensus, vous attendez que les gens prennent leurs responsabilités.
Qu'attendez-vous de la part des autres avant d'agir vous-même? Est-ce
qu'au moins vous pourriez nous dire: On y réfléchit, on va agir
éventuellement, on ne sait pas quand, cela va être plus tard? Au
moins, à quoi vous attendez-vous de la part des dirigeants de la ville
de Montréal, de la CUM, exactement? Ils vont devoir changer leur
attitude. De quelle façon? Est-ce que vous essayez de produire un
changement?
C'est très joli d'étudier et de faire ce genre de grande
dissertation sur les difficultés de gouverner. Bon Dieu! à un
moment donné il faut conclure. Il ne faut pas toujours tout renvoyer aux
calendes grecques. Cela fait des années qu'on pose des questions sur les
services de banlieue et, chaque fois, on nous dit: Attendez quelques mois, vous
allez avoir la grande étude qui va faire le consensus. Ce n'est pas
vrai. Vous êtes incapables de produire le consensus. Branchez-vous. Dites
à quoi vous vous attendez de la part de la ville de Montréal.
À quoi vous attendez-vous de la part des maires de banlieue? À
défaut de l'obtenir, vous agirez; mais dites quelque chose. Ne nous
dites pas que c'est difficile. C'est tout ce que vous dites. (12 h 15)
M. de Belleval: Je comprends le député de
Saint-Laurent d'essayer de reprendre un peu l'initiative politique qu'il a
perdue le long du débat, mais on ne s'énervera pas et on ne
prendra pas trop non plus au pied de la lettre l'éclat, la colère
feinte qu'il vient d'exprimer...
M. Forget: ... arrêtez donc au lieu de philosopher.
M. de Belleval: ... j'ai déjà expliqué tout
à l'heure que nous sommes rendus à la fin de ce processus, que,
d'ici quelques semaines au plus tard, nos positions seront rendues publiques et
qu'entre-temps nous prenons les dispositions pour faire en sorte qu'il y ait
effectivement un consensus, que des gens changent leur opinion...
M. Forget: Dans quel sens, dans quelle direction...
M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent le verra
quand le rapport...
M. Forget: Serait-il possible de dire au public ce que vous
voulez des partenaires avec lesquels vous discutez? C'est secret, c'est le
secret diplomatique?
M. de Belleval: Voyons donc!
M. Forget: Allons donc!
M. de Belleval: Le député de Saint-Laurent n'est
pas obligé de jouer à la vierge offensée et de faire
semblant qu'il ne comprend pas. Est-ce qu'il veut que je lui rende public ce
matin un rapport qui sera rendu public de toute façon, comme je l'ai
dit, d'ici quelques semaines...
M. Forget: Votre prédécesseur, il y a un an, nous
promettait des rapports...
M. de Belleval: II sait bien que...
M. Forget: ... pour décembre 1978. On est rendu à
novembre 1979 et on attend encore des rapports dans quelques mois. C'est
toujours la même chose. Vous hésitez...
M. de Belleval: Je pense... M. le Président...
M. Forget: ... à prendre des décisions qui
s'imposent. Vous hésitez à dire: Les trains de banlieue, il y a
une responsabilité provinciale et on va l'assumer.
M. de Belleval: C'est faux. M. le Président, je demande la
parole.
M. Forget: Tout ce que votre prédécesseur a
réussi à dire, c'est qu'il considérait ça dans le
déficit normal de la CTCUM.
M. de Belleval: M. le Président, je demande la parole
parce que...
Le Président (M. Laberge): À l'ordre! M. le
député de Saint-Laurent.
M. de Belleval: ... le député de Saint-Laurent,
décidément, a choisi maintenant de voler bas plutôt que de
garder le débat au niveau où nous l'avions commencé. J'ai
expliqué tout à l'heure que nous avions été le
premier gouvernement à intervenir, ce n'est pas son gouvernement. Le
problème existait, au moment où il était ministre, ce
n'est pas un problème nouveau qui est arrivé le 15 novembre 1976,
il l'admettra. Nous sommes le premier gouvernement à être
intervenu pour subventionner les trains de banlieue...
M. Forget: Temporairement, en 1978, pas en 1979.
M. de Belleval: Voulez-vous me laisser terminer?
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Laurent, s'il vous plaît!
M. Forget: Vous avez déjà dit ça.
M. de Belleval: Je l'ai déjà dit, mais le
député de Saint-Laurent n'a pas l'air de se le rappeler,
puisqu'il dit que nous n'avons rien fait, que nous ne faisons que des rapports
et que nous n'intervenons pas, alors que, tout à l'heure, j'ai fait un
bilan, que j'ai essayé de faire le plus sobre et le plus honnête
possible, sur ce que nous avions fait depuis trois ans et qui, dans la plupart
des cas, constituait des actions nouvelles, des précédents de la
part d'un gouvernement du Québec.
Donc, nous avons déjà agi, nous avons poursuivi les
études nécessaires, nous allons bientôt avoir un rapport,
d'ici quelques jours, d'ici quelques semaines, et comme je l'ai dit, mon
ambition c'est que tout ce dossier soit sur la place publique pour que le
député de Saint-Laurent prenne d'ailleurs position et nous
appuie, je l'espère, justement dans les actions que nous avons
décidément l'intention de prendre, pas simplement des
études que nous avons l'intention de faire, mais des décisions
que nous avons l'intention de prendre et que nous prendrons d'ici la fin de
l'année.
Je pense qu'à ce moment-là il admettra que ce n'est pas
l'occasion ce matin de lui faire rapport sur les propositions concrètes
que nous entendons soumettre dans chaque cas, que ceci doit suivre son cours.
Le rapport est en voie d'être corrigé dans sa forme finale, il
sera remis au COMPA d'ici quelques jours, au Conseil des ministres très
bientôt, ensuite, il sera rendu public. Entre-temps, il est normal que le
ministre des Transports consulte une dernière fois les
représentants des municipalités intéressées et
tente effectivement de leur soumettre des points de vue nouveaux, de
façon que ces autorités soient en mesure elles-mêmes de
prendre position quand le moment sera venu et d'assumer leur propre
responsabilité que leur fournit la Loi actuelle de la Communauté
urbaine de Montréal.
Ceci étant dit, nous ne nous attendons pas à
l'unanimité. Nous espérons que le consensus sera suffisamment
majoritaire pour qu'il puisse être mis en pratique par la
Communauté urbaine de Montréal. Je pense que c'est
légitime.
M. Goulet: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Bellechasse.
M. Goulet: Merci, On a dit tout au long du débat qu'on
avait effectué des études, qu'on déposerait un rapport
éventuellement. On a parlé de trains de banlieue. Tout ce qui
touche ces rapports ou les discussions, c'est de trouver une solution pour une
meilleure efficacité, un meilleur service au niveau du transport en
commun. Je pense qu'on s'est entendu là-dessus. Le ministre a
souligné tout à l'heure que les décisions que l'on
prendrait seraient pour une période de 40, 50 ou 60 ans, ce qui est
normal.
Est-ce qu'il y a seulement le critère ou quel pourcentage ce
critère de la solution de l'efficacité d'un meilleur service
vaut-il dans la grille de pondération? Y a-t-il d'autres critères
dont on tient compte? Il y en a sûrement d'autres, mais dans quel
pourcentage, par exemple, au niveau de l'économie de l'énergie,
de la qualité de la vie? On
parle d'un problème énergétique, d'un
problème écologique. Justement, puisque ces fameux rapports
retardent, ce n'est pas parce qu'on doit remettre en question certaines
solutions qu'on croyait bonnes l'an passé ou il y a deux ans, mais
à cause de ce fameux problème énergétique qu'on
connaît actuellement aux États-Unis plus qu'ici, en tout cas, que
les Américains ont vécu le printemps dernier. Ils ont des
autoroutes tout à fait remarquables et on ne peut plus s'en servir
à cause du manque d'essence.
Des études ont été effectuées il y a deux,
trois ou quatre ans et on semblait dans la bonne voie. Il semble qu'on doive
les remettre en question avant qu'elles ne soient rendues publiques, ces
solutions. Oublions le milieu écologique, qui est très important,
et tenons-nous en au niveau énergétique. Dans quel pourcentage,
actuellement, ce problème ou ces critères entrent-ils en ligne de
compte comparativement à l'efficacité d'un très bon
réseau routier et d'un meilleur service de transport en commun? Dans
quel pourcentage, actuellement, l'énergie entre-t-elle en
considération? Quand on parle de 40 ans, Dieu sait s'il va y en avoir
des problèmes! Il va sûrement y avoir des inventions d'ici ce
temps, mais les problèmes, on les connaît déjà, on
les vit actuellement et je ne pense pas qu'ils diminuent, ils vont
s'amplifier.
Est-ce que le ministère ou les gens qui s'occupent de la
conservation de l'énergie participent à la fabrication des
rapports ou aux travaux ou aux plans actuels du ministère des
Transports?
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Transports.
M. de Belleval: Oui, il faut considérer l'ensemble des
facteurs et non pas simplement l'efficacité du système de
transport lui-même, en dehors de toute autre considération
d'efficacité ou de niveau de services. Un plan de transport, c'est
essentiellement le résultat d'un certain nombre de compromis, c'est une
espèce d'optimisation de solutions qui, individuellement, ne sont
peut-être pas les meilleures mais qui, prises ensemble, constituent le
meilleur compromis possible. Il ne faut pas simplement s'occuper du niveau de
services ou du système de transport en vase clos.
L'économie d'énergie est un critère. Prenons un
exemple. L'autobus de type urbain constitue un système de transport
relativement peu coûteux à l'installation, à l'achat de
l'équipement, comparativement, par exemple, à un système
de tramways qui coûte assez cher à l'installation. Par contre, au
niveau du service à l'heure de pointe, on sait qu'il faut multiplier les
autobus, il faut donc engager plusieurs chauffeurs pour un même autobus
tandis que le tramway, avec le même chauffeur, peut ajouter plusieurs
voitures, l'une derrière l'autre, et augmenter ainsi la capacité
à l'heure de pointe. Dans le cas du tramway, on utilise une forme
d'énergie produite ici au Québec, l'électricité,
tandis que dans le cas de l'autobus on utilise le pétrole. Les
conséquences de l'utilisation d'un autobus en termes de bruit, en termes
de l'utilisa- tion de l'espace urbain ne sont pas les mêmes que pour
l'utilisation d'un tramway. La capacité non plus, à l'heure de
pointe, n'est pas la même. On peut faire davantage de transport avec un
tramway qu'avec un système d'autobus équivalent.
Si les coûts d'installation, d'immobilisation sont plus
élevés dans le cas d'un tramway que dans le cas d'un autobus, par
contre, les coûts de fonctionnement peuvent être moins
élevés dans un cas que dans l'autre et à long terme, il
faut faire une actualisation de tout cela. Il faut tenir compte de tous ces
facteurs et essayer de les pondérer les uns par rapport aux autres. Je
mentirais au député de Bellechasse si je lui disais qu'on peut
faire une grille d'analyse et fixer un pourcentage dans la prise de
décision à chacun de ces facteurs. On en tient compte, des
experts en matière d'aménagement sont utilisés, les
équipes que nous utilisons sont véritablement
pluridisciplinaires, il y a des économistes, il y a des
aménagistes, il y a des spécialistes des systèmes
techniques de transport comme tel, des experts en circulation, des experts en
économie d'énergie. On prend tous ces facteurs et, à
partir aussi de l'expérience que d'autres pays, d'autres villes ont
accumulée, du jugement pratique, donc, que toutes ces choses nous
apportent, on est en mesure de prendre une décision qui fait quand
même intervenir une part de bon sens, une part de jugement et pas
seulement une décision qui peut être prise à partir de
facteurs purement mathématiques.
C'est ce qui explique également qu'il peut y avoir des
contestations, qu'on peut contester un choix sous tel ou tel aspect, qu'on peut
décider qu'on n'est pas d'accord avec la pondération que
l'organisme de décision a mise dans chacun des facteurs. Cela fait
partie des règles du jeu. Si on pense que le rapport que je vais
déposer va être un document pontifical, qu'il sera infaillible et
qu'il n'y aura pas matière à contestation parce que tous les
facteurs de décision sont tellement bien chiffrés à partir
d'une grille d'analyse objective qu'il n'y aura plus de discussion possible,
non, je ne peux pas promettre cela.
M. Goulet: Mme la Présidente, je ne sais pas si le
député de Saint-Laurent me permettrait de compléter
là-dessus? Il regarde l'heure.
La Présidente (Mme Cuerrier): Vous disposez de très
peu de minutes, M. le député de Bellechasse, sur le temps qui
vous est imparti normalement dans ce débat. Alors, allez-y, trois ou
quatre minutes tout au plus.
M. Goulet: Une minute. Est-ce qu'il y a des décisions ou
des solutions qu'on avait trouvées il y a deux, trois ou quatre ans
quelque chose de concret, des exemples concrets que l'on croyait
bonnes et qui se défendaient avec chiffres à l'appui et qu'on
doit remettre en question avant de les appliquer à cause du
problème de l'énergie? C'est ce que je voulais savoir. Est-ce que
vous avez des exemples?
M. de Belleval: À cause du problème de
l'énergie comme tel?
M. Goulet: Oui.
M. de Belleval: Je dois dire qu'au Québec nous avons pris
conscience de ces problèmes relativement tard par rapport à
d'autres sociétés. Mais il est évident qu'entre autres la
décision du Conseil des ministre de l'ancien gouvernement d'interrompre
temporairement les travaux du métro et d'interrompre également la
construction des grandes autoroutes en milieu urbain provenait, entre autres,
de ces considérations de type aménagement, bien sûr, du
territoire, de type financier également, mais aussi de type
énergétique.
Alors, vous me demandez de citer un exemple particulier sur le plan
purement énergétique. Je dois dire que oui, très
certainement, la décision d'arrêter les autoroutes en milieu
urbain est due à des facteurs énergétiques en particulier
mais aussi à des facteurs d'aménagement du territoire. C'est
rare, autrement dit, qu'on trouve un seul facteur comme facteur
décisionnel. C'est plutôt un ensemble de facteurs et le facteur
énergétique est très important.
M. Forget: Mme la Présidente, j'aimerais parce
qu'on a discuté suffisamment longuement, je pense, de la question des
trains de banlieue revenir à un autre aspect des problèmes
de transport dans la région de Montréal qui a été
soulevé, à l'occasion, lors de nos débats; c'est la
question du métro.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent, est-ce que je pourrais vous proposer comme à M. le
ministre, puisque vous êtes les intervenants privilégiés
aujourd'hui, de déterminer dix minutes à chacun pour vos
conclusions? Il faudrait peut-être restreindre, à ce
moment-là, la prochaine intervention, de manière que, vers 12 h
40, vous puissiez utiliser dix minutes de conclusion et M. le ministre,
ensuite, le même temps.
M. Forget: D'accord. J'ai des questions qui sont brèves et
j'espère que les réponses le seront de la même
façon.
M. de Belleval: J'essaierai d'être bref aussi.
M. Forget: II y a la question du métro. On nous dit: II va
y avoir un grand document et, si je comprends bien les recommandations
relativement à la levée du moratoire, un échéancier
de construction du métro fera partie du document que vous nous annoncez.
Parfaitement. À ce moment, est-ce que le ministre peut nous dire s'il
accepte la proposition qui est contenue dans le rapport du comité
conjoint Québec-municipalités, à savoir que, comme les
autoroutes, en milieu urbain même, sont financées par le
gouvernement du Québec, ce qui en tient lieu, qui est l'alternative pour
le transport des personnes dans le milieu urbain, les infrastructures de
transport en commun, particulièrement le métro, ce soit
également financé, quant à l'infrastructure
elle-même, à 100% par le gouvernement?
C'est une des recommandations qu'on trouve dans ce rapport où le
comité conjoint se distingue de la proposition formulée par le
ministre des Finances dans son discours du budget l'an dernier. Est-ce que,
comme ministre des Transports, il est prêt à admettre le
bien-fondé de cette recommandation?
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Le ministre des Transports est aussi membre d'un
Conseil des ministres et il est assujetti comme tous les autres à la
solidarité ministérielle. Je ne peux pas me permettre d'avoir des
opinions personnelles sur une question qui doit faire l'objet d'une
décision comme telle du Conseil des ministres. Est-ce que le
député de Saint-Laurent veut avoir une opinion personnelle et
est-ce qu'il pense que c'est légitime que je donne une opinion
personnelle?
M. Forget: Rien n'interdit à un ministre de dire ce qu'il
pense, surtout que la décision n'est pas prise, si je comprends bien,
par le Conseil des ministres.
(12 h 30)
M. de Belleval: Donc, le député de Saint-Laurent ne
reprochera pas au ministre des Transports de prendre des positions sans avoir
consulté ses collègues et lui dire plus tard: Le ministre est
irresponsable, il se prononce personnellement, alors que dans notre contexte de
responsabilités ministérielles, tout le monde sait que ce que dit
un ministre engage le reste du Conseil des ministres, etc.
M. Forget: J'aimerais, Mme la Présidente, que le ministre
nous dise dans quel sens il va faire jouer l'influence sans aucun doute
très grande qu'il a sur cette question au sein du Conseil des
ministres.
M. de Belleval: Et ensuite, si cela ne réussit pas, il va
dire: Le ministre des Transports a perdu la confiance de la Chambre et il n'est
même pas capable de faire valoir ses opinions.
M. Forget: Ah! Ce sont les risques du métier.
M. de Belleval: Ce sont les risques du métier. Bon! On se
comprend bien sur les règles du jeu. Autrement dit, on m'invite à
prendre position avant même que le Conseil des ministres ne se prononce
là-dessus, en me disant qu'on ne sera pas trop méchant envers
moi, mais qu'on se réserve le droit de me donner un coup de cuiller
à pot si cela fonctionne mal.
Il est normal, je pense, que le ministre des Transports soit favorable
à toute proposition qui sera de nature à faciliter l'implantation
de moyens de transport modernes et efficaces, et en particu-
lier plus efficaces que notre système d'autoroutes. Dans ce sens,
je dirai oui, le ministre des Transports serait favorable à une position
qui permettrait de financer de telles infrastructures de la façon la
plus facile possible. C'est sûr. C'est certain.
M. Forget: ... %, tel que recommandé.
M. de Belleval: L'idéal, de ce point de vue, ce serait
100%, mais là encore, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a d'autres
considérations qui peuvent entrer en ligne de compte.
M. Forget: Conscients de cela, on va attendre les
décisions, mais il est intéressant d'avoir quand même un
exposé de la position personnelle du ministre et celle qu'il va faire
valoir au Conseil des ministres sur ce point. C'est un sujet de grande
actualité, bien sûr, surtout qu'au moment où il va annoncer
son grand plan de développement, sa réalisation est
conditionnée par les possibilités financières.
M. de Belleval: Ce serait plus facile de ce point de vue de
réaliser un certain nombre de choses.
M. Forget: Toujours relativement au métro, le ministre
pourrait-il être d'accord pour dire que la question de la ligne qui se
termine à du Collège représente cette décision de
ne pas aller pour l'instant au-delà de du Collège? C'est une
décision qui devra nécessairement être
révisée étant donné qu'il y a un besoin pour un
garage au bout de cette ligne et qu'il est impossible, actuellement, à
moins de détruire tout le coeur de la ville de Saint-Laurent pour
aménager un garage, il est impossible qu'il y ait un garage à cet
endroit. Tant qu'il n'y aura pas un garage, des coûts
supplémentaires de fonctionnement sont inévitables pour le
métro de Montréal.
M. de Belleval: Seulement une petite remarque sur la question
précédente. Actuellement, le métro est financé
à 60%. La proposition du comité, effectivement, est de monter
à 100%.
M. Forget: Et la proposition de M. Parizeau était de
monter à 75%.
M. de Belleval: 75%.
M. Forget: C'est cela.
M. de Belleval: Comme on le voit, tout le monde est un peu dans
la même direction.
M. Forget: Oui, la même direction.
M. de Belleval: II s'agit de savoir où on va
arrêter.
M. Forget: C'est plus rassurant que cela augmente plutôt
que de diminuer.
M. de Belleval: C'est cela. En ce qui concerne la station 2 ouest
du métro, je répondrais oui carrément, et il y aura besoin
de réviser cette décision dans le sens que ce n'était pas,
de toute façon, une décision définitive. C'était
une décision temporaire, essentiellement temporaire.
Est-il possible, en longue période, d'envisager que le
métro arrête à du Collège? Je dirais que,
techniquement, oui, c'est possible. Il y aurait même des terrains de
disponibles, je crois, qui ne nécessiteraient pas, comme vous le dites,
la destruction du centre-ville de Saint-Laurent. Je crois que c'est une vision
un peu apocalyptique des choses. De toute façon, on s'y refuserait.
C'est évident. Mais je pense qu'il y a des possibilités
malgré tout d'arrêter définitivement à du
Collège. Est-ce ce que nous proposerons? Là-dessus, j'aimerais
attendre que nous puissions regarder le dossier d'ensemble, ce que je me suis
engagé à produire d'ici quelques jours ou quelques semaines, mais
il y a d'autres possibilités que celles qui avaient été
proposées jusqu'à maintenant par le BTM qui existent aussi en ce
qui concerne le prolongement de cette ligne. Il faudra aussi examiner ces
possibilités avant de prendre une décision définitive.
Je veux seulement mentionner une hypothèse. Vous savez qu'il
reste des terrains importants à développer dans le territoire de
ville Saint-Laurent, notamment du côté ouest. Je pense qu'il faut
examiner un peu ce qu'on veut faire éventuellement, en longue
période, avec ces terrains. Quel genre d'urbanisation veut-on y faire
et, si on veut y faire de l'urbanisation, dans quelle densité, avant de
prendre une décision finale quant au prolongement de la route 2-Ouest?
Tout ce que je veux plaider ce matin et ce que je continuerai d'ailleurs
à plaider dans quelques semaines, c'est que, avant de prendre des
décisions finales dans un secteur donné, il faut s'assurer qu'on
a examiné suffisamment bien les options qui sont ouvertes devant nous.
Il faut accepter d'examiner de nouvelles options.
Lien avec Mirabel
M. Forget: Une autre question précise, Mme la
Présidente, la question de Mirabel. Malheureusement, nous ne pourrons
pas aller dans les détails concernant la question du lien direct avec
Mirabel. Y a-t-il des décisions? J'ai d'ailleurs posé, au tout
début, un certain nombre de questions qui sont demeurées sans
réponse. Il y a, cependant, une chose que j'aimerais obtenir du
ministre. C'est qu'il rende publiques les études d'impact qui ont
été faites relativement aux conséquences qui
découleraient d'un transfert de vols de Dorval vers Mirabel. C'est, bien
sûr, une question qui passionne je pense que le mot n'est pas trop
fort un très grand nombre d'industriels qui sont situés en
pourtour de l'aéroport de Dorval et qui voient là, à tort
ou à raison je pense qu'il faudrait les éclairer
là-dessus les conséquences néfastes et
catastrophiques pour leurs industries d'un déménagement massif
des activités de Dorval à Mirabel.
Si c'est là une considération je pense que cela a
d'ailleurs été mentionné par son
prédécesseur comme une des considérations qui inspiraient
le ministère des Transports du Québec dans la question de savoir
si, oui ou non, on construit un lien ferroviaire avec Mirabel, à savoir
s'il va y avoir plus de vols à Mirabel qu'il n'y en a dans le moment et
ils ne peuvent venir d'ailleurs que de Dorval... On a fait des études
d'impact et je pense le ministre devra en convenir avec moi que
le public affecté, les populations affectées, qui vivent en
pourtour des deux aéroports, mais particulièrement celui de
Dorval, mais aussi la région de Saint-Jérôme, etc., ont le
droit de savoir à quoi s'en tenir, quel effet cela produirait sur elles
de manière à leur laisser le temps de réagir, d'en prendre
connaissance, de les discuter et, au besoin, même de faire des
représentations au ministre si des aspects avaient été
omis.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: La Communauté urbaine de Montréal a
effectué un certain nombre d'études sur l'impact éventuel
d'un déménagement des vols actuels de Dorval vers Mirabel. Le
gouvernement fédéral, que je sache, le ministère des
Transports fédéral a aussi étudié un certain nombre
de scénarios de transfert et les impacts consécutifs sur Dorval.
Quant à nous, sachant que de telles études étaient en
cours à la Communauté urbaine de Montréal et du
côté du gouvernement fédéral, nous n'avons pas
entrepris des études qui auraient tout simplement doublé les
études de ces personnes. Je pense que l'étude de la
Communauté urbaine de Montréal est déjà publique ou
elle pourrait être rendue publique par la Communauté urbaine de
Montréal.
Du côté du gouvernement fédéral, nous sommes
actuellement en conversation avec le ministère des Transports de
façon à connaître ses vues sur l'avenir éventuel du
système aéroportuaire montréalais. Sans vouloir reprendre
tout le dossier constitutionnel et tout le dossier politique de la
souveraineté-association, le député de Saint-Laurent
admettra que dans le contexte constitutionnel actuel, tant du côté
des chemins de fer de banlieue, mais encore plus je l'admets du
côté du système aéroportuaire montréalais, le
gouvernement québécois est presque impuissant à amener une
solution efficace en matière de transport aéroportuaire, de
transport aérien à Montréal tant que le gouvernement
fédéral ne sera pas prêt à prendre ses
responsabilités. Il admettra aussi que justement dans le contexte
politique actuel et depuis de nombreuses années, dans le contexte dans
lequel la décision de construire Mirabel a été prise, dans
le contexte des ambitions des gens de Toronto, des gens de l'Ouest canadien, le
gouvernement québécois, le peuple québécois, dans
son ensemble en tout cas celui de la région de Montréal,
en tout cas est à la merci d'une technocratie et d'un
système politique où il n'a à peu près aucune
influence.
La preuve, c'est que nous avons déjà eu un ministre des
Transports fédéral québécois, avec le "French
power" qu'on a connu jusqu'à récemment à la tête du
gouvernement fédéral, et maintenant c'est encore pire, avec la
situation actuelle. Malgré tout cela, nous sommes ni plus ni moins des
otages entre les mains du gouvernement fédéral en ce qui concerne
l'avenir du développement aéroportuaire à Montréal.
Cela pourra changer assez rapidement, je crois, si les Québécois
disent oui à la souveraineté-association.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, je dois
vous...
M. Forget: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): Vous auriez une dizaine de
minutes pour conclure, M. le député de Saint-Laurent, et le
ministre pourrait disposer de pas tout à fait dix minutes vous
avez un peu empiété, M. le ministre quelques secondes de
moins que dix minutes.
M. de Belleval: Je donne tout mon empiétement au
député de Saint-Laurent.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: Mme la Présidente, nous avons essayé de
faire un tour d'horizon des problèmes de transport dans la région
de Montréal. Pour ceux qui auraient pu s'étonner qu'on consacre
trois heures à un sujet comme celui-là au début de notre
débat, je pense qu'ils seraient éclairés, à la fin
du débat, de constater que nous n'avons même pas
épuisé la liste des sujets auxquels on aurait pu faire allusion.
Nous n'avons pas mentionné un certain nombre de choses qui sont quand
même très importantes pour les citoyens des régions tout
près de Montréal. Je pense par exemple à toute la question
relative au territoire des organismes de transport dans la région de
Montréal. Il y a toutes sortes de rumeurs, fausses ou fondées,
relativement au statut des empiétements de la CTCUM dans la direction de
la rive sud, de Longueuil, et des conditions dans lesquelles cet
empiétement se fait traditionnellement, jusqu'à quel point
ça doit être maintenu, augmenté ou diminué. C'est un
sujet fort intéressant.
Il y a également le problème de la CTRS, la Commission de
transport de la rive sud et de son extension possible jusqu'à Chambly,
etc. Il y a toutes sortes de possibilités, là aussi. Il y a quand
même une zone en expansion démographique qui pose justement le
problème de son organisation sur le plan du transport en commun. Il y a
des problèmes analogues qui se posent du côté de Laval, de
la Commission de transport de Laval. Il y a tout le problème, qui est
fort familier, je n'en doute pas, au ministre des Transports, parce qu'il fait
l'objet des préoccupations du ministre des Finances, de l'organisation
du transport dans la
région de Repentigny, L'Assomption, Joliette, etc. Est-ce qu'il y
aura une commission de transport régionale? Quel sera son lien avec
l'île de Montréal?
Il y a tout le problème, évidemment, du réseau
express métropolitain vers Repentigny, à savoir jusqu'à
quel point tout ceci sera intégré. Cela touche des centaines de
milliers de personnes dans chacun des cas. On n'a pu faire de discussion
là-dessus, ce matin, malheureusement. J'espère que le ministre va
trouver d'autres façons d'éclairer la population et les
élus de ces différentes régions sans attendre les calendes
grecques. Il y a des questions qui se posent. Je pense qu'il devrait s'employer
à clarifier la situation. On entend de différents
côtés des versions fort différentes de ce que l'avenir
pourrait nous réserver. Dans la même veine, il y a les
problèmes du pont Mercier, de l'autoroute 30 dans cette région et
de la possibilité qui se découvre récemment, par le projet
Archipel, d'établir un nouveau lien. Est-ce que cela sera compris dans
le grand schéma d'ensemble ou s'il faudra attendre la version
révisée et corrigée de 1985? C'est, j'espère, ce
qu'on va découvrir au cours des prochains mois.
Il y a également le rôle de ces structures qui sont un peu
entre ciel et terre, des structures de décision, de consultation,
où les élus ne sont pas présents. Le gouvernement a
créé le COTREM, la Commission de transport de la région de
Montréal...
Une voix: Conseil des transports.
M. Forget: Conseil des transports... on ne s'y retrouve plus
là. Mais c'est un organisme nouveau auquel siègent les directeurs
exécutifs des commissions de transport de la rive sud de Montréal
et de Laval et des représentants du ministère des Transports
du moins les représentants élus de la population s'en
plaignent non pas des représentants des conseils municipaux ou
même des communautés urbaines comme telles. Est-ce là une
situation satisfaisante ou non? S'agit-il simplement d'un organisme-conseil du
ministère des Transports du Québec ou s'agit-il de quelque chose
qui peut et qui doit s'intégrer dans la structure des organismes
à vocation urbaine, mais avec une base démocratique, avec une
base élue? Le problème est posé, mais il n'est pas
résolu. Je ne suis pas sûr si le document que le ministre nous a
promis va permettre de trancher ce débat. Il est relié à
toute la réforme de la fiscalité municipale; mais on est à
la veille d'y entrer, le 1er janvier 1980, et pourtant, il semble y avoir
beaucoup d'imprécision là-dessus. (12 h 45)
Mme la Présidente, quant aux points dont nous avons,
malgré tout, réussi à gratter la surface seulement, il y
a, quant à moi, une grande déception que le ministre n'ait pas
jugé bon, lui qui connaît ses dossiers et après trois ans
que ce gouvernement est en fonction, qu'il n'ait pas jugé bon, dis-je,
de nous révéler quoi que ce soit de nouveau. Il n'a pris aucun
engagement. Il n'a fait aucune déclaration, sauf une à titre
personnel, relativement au financement du métro.
Je lui en sais gré. C'est un acte de courage, mais c'est un acte
isolé. On n'est pas plus avancé à 13 heures, ce 2 novembre
1979, sur la conception d'ensemble et les positions, la responsabilité,
les dates, les engagements du gouvernement, qu'on pouvait l'être il y a
un an, il y a deux ans ou il y a trois ans. On est encore à attendre les
papiers. Les papiers vont précéder les décisions. Les
décisions vont précéder les dates. Ce qui veut dire
qu'avant qu'on agisse, il va s'écouler une bonne année encore. On
sera loin dans le mandat d'un gouvernement de quatre ans. On aurait cru que le
Parti québécois était plus sincère que cela quand
il nous parlait de la priorité au transport en commun, de
l'aménagement urbain, etc. On se rend compte que ce dossier, dont il
avait fait un cheval de bataille, jadis, au cours des bonnes années de
l'Opposition, il n'a pas su le traduire dans des gestes concrets et qu'encore
aujourd'hui, après trois ans, il hésite, il tergiverse. Il nous
invoque la difficulté de sa tâche de produire des consensus.
Est-ce qu'il a été élu simplement pour être le
secrétaire des consensus?
On distingue la ville de Montréal et la banlieue. Il y a ceux qui
sont à l'extérieur de la CUM. Ce sont des intérêts
divergents. On ne pourra pas faire plaisir à tout le monde.
L'idéal, c'est au moins de faire plaisir au plus grand nombre de gens
possible, mais si on leur fait un déplaisir, de le faire pour les
meilleures raisons possible. Tout cela, ce sont des décisions qui
doivent venir du gouvernement. Les études ne diminueront pas la
difficulté du problème, au contraire. On l'a signalé. La
crise de l'énergie... les gens sont quand même alertés
à la difficulté qu'il y a de se déplacer, surtout qu'ils
viennent de traverser une grève qui leur a très bien remis en
mémoire les problèmes de se déplacer dans une
région métropolitaine. Ils s'attendent qu'on donne un essor
nouveau aux méthodes et aux mécanismes de transport en
commun.
Cependant, à cet égard, on leur promet encore des
délais. J'aurais voulu que le ministre s'engage davantage aussi à
publier un peu plus les études qui se font. La réponse qu'il m'a
donnée à la toute fin ne me satisfait pas totalement relativement
à l'impact de transferts de vols de Dorval à Mirabel. Il nous
dit: "Le gouvernement du Québec est le prisonnier, l'otage du
gouvernement fédéral". Est-ce que le gouvernement du
Québec ceci étant dit, et sans vouloir entrer dans une
controverse qui n'appartient pas à la Commission des transports a
au moins une opinion? Est-ce qu'il s'est fait une opinion informée sur
le caractère désirable ou non d'un tel transfert de vols? Ou
est-ce qu'il n'est que le témoin passif de ce que le
fédéral peut faire ou que la Communauté urbaine peut faire
là-dessus? Est-ce que vous avez des opinions? Est-ce que vous avez des
choses que vous pourriez dire au moins en public? C'est un facteur, l'opinion
publique, dont un homme politique devrait se souvenir. Est-ce que vous avez
une opinion sur le caractère désirable ou non de ces
transferts? Est-ce que vous avez une idée précise ou
imprécise sur l'impact que cela peut avoir sur la région de
Saint-Jérôme, Saint-Laurent et l'ouest de Montréal? Est-ce
qu'il y a là quelque chose que le gouvernement fait, pense,
étudie, ou si on se borne à se tordre les mains en disant que
cette décision-là appartient à d'autres?
Et seriez-vous prêt à dire que, quant à vous, les
études auxquelles vous avez participé peuvent toutes être
rendues publiques sans hésitation de votre part? Ce serait au moins une
contribution au débat. S'il a des études, qu'on les connaisse,
qu'on les rende publiques, qu'on ne nous dise pas, à la
Communauté urbaine et au gouvernement fédéral:
Écoutez, il y avait des fonctionnaires du Québec
là-dessus, s'ils ne sont pas d'accord. on ne peut pas le rendre public.
Qu'on franchisse au moins cette étape.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre.
M. de Belleval: Mme la Présidente, je pense que,
malgré tout, durant les trois heures, nous avons fait le tour d'un
certain nombre d'aspects de la question. Peut-être pas encore aussi en
profondeur qu'on pourrait le souhaiter, mais c'est justement dû, comme
l'a reconnu le député de Saint-Laurent, à l'ampleur de la
question, sur laquelle, d'ailleurs, il a soulevé d'autres aspects dans
sa conclusion.
Malgré tout, nos avons fait un bout de chemin et on pourra en
faire d'autres dans les semaines qui viendront, particulièrement lorsque
je rendrai public le rapport du COTREM et les recommandations et les
décisions du gouvernement, parce que, de ce point de vue, il ne s'agira
pas simplement de recommandations appelant des décisions, appelant des
réalisations, mais il s'agira aussi de toutes ces choses en même
temps, c'est-à-dire de recommandations, de propositions, de
décisions et, aussi, d'actions à très court terme. On
retrouvera tous ces aspects dans notre rapport.
C'était de bonne guerre de la part de l'Opposition officielle de
poser à ce moment-ci cette question avec débat, parce que le
député de Saint-Laurent n'est pas sans savoir effectivement que
je rendrai bientôt public un rapport et que c'est de bonne guerre pour
l'Opposition de prétendre presser le gouvernement à la
dernière minute, quand on sait que justement il est à la veille
de produire un rapport et qu'on pourra dire ensuite: Grâce à notre
action, vous voyez, le gouvernement s'est grouillé, c'est venu plus
vite. C'est normal, nous aurions fait la même chose, je suppose, dans
l'Opposition. Mais je pense bien aussi que la population connaît ces
petits trucs politiques normaux.
Du côté de l'implication des élus, je voudrais
revenir sur ce point-là en terminant. Je suis d'accord avec ce qui
semble être la position du député de Saint-Laurent que les
investissements, dans le domaine du transport, la gestion des systèmes
de transport en commun, doivent être la responsabilité des
élus et non pas seulement la responsabilité de techniciens, de
fonctionnaires qui ne sont pas directement responsables des élus, en
particulier des élus municipaux.
Je lui rappellerai que déjà, en ce qui concerne la
Communauté urbaine de Québec, le gouvernement a pris une
décision et a placé la Commission de transport de la
Communauté urbaine de Québec sous la responsabilité
directe de la communauté urbaine, des élus municipaux
contrairement à ce qui était le cas auparavant. Pour ma part, je
souhaite qu'éventuellement, le plus tôt possible, nous fassions la
même chose ailleurs et qu'en particulier à Montréal ce soit
la réalité. Quand cela se fera-t-il et comment? Je pense que la
responsabilité de donner réponse à ces questions est
plutôt du ressort du ministre des Affaires municipales que de mon
ressort, mais la direction qu'entend suivre le gouvernement là-dessus a
déjà été prise quand il a pris position sur le cas
de Québec.
Est-ce que nous tenterons de régler tous les problèmes en
même temps? Est-ce que le rapport sera si global que toutes les questions
auxquelles veut une réponse le député de Saint-Laurent
auront des réponses? Sous cet aspect, il faudra éviter deux
écueils: il faudra éviter l'écueil d'une parcellisation
excessive et aussi d'une globalisation excessive. Si on veut une réponse
à toutes les questions, effectivement, il faudra continuer les
études et retarder encore la décision. Si on pense pouvoir agir
seulement sur des petits bouts du problème, on verra, quand je remettrai
le rapport, qu'un certain nombre d'éléments, à tout le
moins, sont interreliés et qu'il faut prendre une position sur un
ensemble valable.
Est-ce qu'on a des opinions sur Mirabel et l'avenir du système
aéroportuaire montréalais? Nous sortons à ce moment-ci du
dossier proprement dit du transport en commun, bien qu'il y soit lié
d'une certaine façon, mais en soi, cela prendrait une autre question
avec débat. J'invite l'Opposition à la soumettre
éventuellement et nous pourrons faire le point sur le dossier de Mirabel
et expliquer effectivement les positions du gouvernement du Québec quant
à l'avenir du système aéroportuaire montréalais.
C'est une autre question que celle que nous abordions ce matin, d'autant plus
que nous n'avons même pas vidé celle de ce matin à cause de
son ampleur.
Est-ce que le gouvernement sera simplement le secrétaire du
consensus local? Le député de Saint-Laurent me reprocherait et
reprocherait au gouvernement, à bon droit, de se contenter de ce
rôle. J'espère cependant que si, effectivement, nous sommes
obligés d'agir au-dessus d'un certain consensus, si ce consensus est
insuffisant, il ne viendra pas nous reprocher à ce moment-là un
paternalisme de mauvais aloi, puisqu'il nous reprocherait de bon droit un
attentisme de mauvais aloi. Nous aurons donc à évoluer entre ce
Charybde et ce Scylla de toute décision politique, à savoir un
paternalisme et un attentisme excessifs.
Je suis certain qu'entre ces deux voies, il y aura amplement
matière non seulement à une décision gouvernementale mais
à une critique,
constructive ou pas on verra, la population en jugera de
l'Opposition.
La Présidente (Mme Cuerrier): Je tiens à remercier
ceux qui sont ici, ce matin, à cette commission, de leur participation,
sous une forme ou sous une autre, et de leur collaboration.
C'était la commission des transports qui se réunissait
pour discuter des problèmes du trans- port dans la région de
Montréal. M. le député de Saint-Laurent avait donné
avis de ce débat et M. le ministre des Transports était l'autre
intervenant privilégié.
La commission ajourne j'ai déjà remercié les
participants ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 56)