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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 13 juin 1978 - Vol. 20 N° 128

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 59 - Loi modifiant le Code du travail


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 59

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, messieurs.

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre est de nouveau réunie pour entendre les opinions des associations de salariés convoquées pour aujourd'hui qui sont, entre autres, la Centrale des syndicats démocratiques, le Syndicat des employés d'hôpitaux de Montréal Inc., l'Union des Ergothérapeutes du Québec, le Cartel des organismes professionnels de la santé Inc., la Confédération des syndicats nationaux, la Centrale de l'enseignement du Québec, la Fédération des travailleurs du Québec, la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, la Fédération des employés municipaux et scolaires du Québec et le Montreal Council of Hospital Syndicates.

Les membres de la commission sont, pour aujourd'hui, M. Brochu (Richmond) remplace M. Bellemare (Johnson); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont M. Blank (Saint-Louis), M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Ray-nauld (Outremont) remplace M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Le premier groupe... M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, si je comprends bien, la CSN, la FTQ et la CEQ auraient un mémoire conjoint. Je vais peut-être demander à M. Rodrigue si les gens de la FTQ et de la CEQ sont arrivés. Pas encore.

M. Rodrigue (Norbert): Nous attendons actuellement M. Yvon Charbonneau et M. Louis Laber-ge. Ils devraient être ici.

M. Johnson: A ce moment-là, M. le Président, je suggérerais peut-être, si on a l'accord des membres, qu'on procède avec la Fédération des infirmières et le COPS. Est-ce que les représentants du COPS sont arrivés? Non.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, j'avais une remarque préalable à faire. Je ne sais pas si on me permettrait, pendant qu'on...

Le Président (M. Boucher): Allez-y.

M. Bisaillon: ... attend, de la faire. On se souviendra qu'hier, en commission parlementaire, j'avais posé une question aux représentants de l'Association des conseils des médecins et dentis- tes, de même qu'aux représentants de la Corporation des médecins quant à leur attitude sur les services à maintenir pendant une période de grève, en me référant aux périodes où. eux-mêmes avaient été, à un moment ou à un autre, soit en ralentissement de travail, soit en grève. On se souviendra des affirmations très fermes que nous a faites le Dr Roy. Je tiens à souligner que ce matin, à l'hôpital Laval, dans la région de Québec, les médecins sont en journée d'étude.

Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a un groupe qui serait immédiatement disponible pour la commission?

M. Johnson: II y en a. En fait, il y a trois autres groupes, le Syndicat des employés d'hôpitaux de Montréal, le Montreal Council of Hospital Syndicates... Est-ce que ces deux syndicats sont présents? Ce sont les employés d'hôpitaux de Montréal; le Montreal Council est-il présent? Oui?

Le Président (M. Boucher): Alors, on pourrait procéder.

M. Johnson: On pourrait peut-être procéder. En fait, c'est parce qu'il y a trois blocs, si on veut. Il y a ce bloc du Syndicat des employés d'hôpitaux de Montréal; l'autre bloc, évidemment, c'est l'ensemble CSN-FTQ-CEQ, et l'autre bloc pourrait être FIQ et COPS, finalement, où les problèmes sont peut-être analogues à cause des mesures transitoires. Pourriez-vous présenter...

Le Président (M. Boucher): Messieurs, si vous voulez vous présenter.

Employés d'hôpitaux de Montréal

M. Boudreau (Régis): Régis Boudreau, Syndicat des employés d'hôpitaux de Montréal.

M. Harvey (Guy): Guy Harvey, Conseil hospitalier de Montréal.

Le Président (M. Boucher): Vous pouvez y aller avec votre mémoire.

M. Boudreau: MM. les députés, le Syndicat des employés d'hôpitaux de Montréal se réjouit du fait que le gouvernement du Québec continue sa bonne marche dans la bonne direction. Concernant l'échéancier, nous sommes particulièrement d'accord avec l'échéancier des négociations prévu aux articles 99g, 99h et 99k. Cet échéancier est conforme à nos représentations faites devant la Commission Martin-Bouchard le 16 novembre 1977. Nous espérons qu'avec cet échéancier, les syndiqués n'auront plus à attendre — remarquez bien qu'on en doute — 18 mois pour obtenir une convention collective. La formation d'un conseil d'information sur la négociation représente aussi une autre de nos demandes. Nous sommes, toutefois, conscients que cette position va à l'encontre de la tendance syndicale. Selon notre perception, ce conseil aurait pour fonction de confirmer ou

d'infirmer la véracité des renseignements rendus disponibles par les parties en présence. Ce conseil n'aurait pas pour fonction de poser des jugements de valeur quant aux positions de chacune des parties. Ayant vécu plusieurs négociations, nous croyons que ce conseil pourrait réussir à faire cesser le pelletage de boucane qui entoure les négociations et qui résulte en des pertes de temps et d'argent inestimables. Nous croyons, quant à nous, n'avoir rien à cacher.

Les modifications à la période de maraudage 99c et d) ne sont, selon nous, que l'application du bon sens et sont des concordances avec l'échéancier des négociations. Il était impensable, en effet, de se retrouver en période de maraudage en même temps que les négociations.

Toutefois, quelques questions se posent. En effet, pourquoi une période différente pour demander une accréditation et pour qu'un syndicat change d'affiliation? Un syndiqué aurait 30 jours pour changer de syndicat, alors qu'un syndicat aurait 90 jours pour changer de centrale.

Le texte de l'article 99c voudrait-il dire que l'article 21 continue de s'appliquer, à savoir s'il y aurait une période de maraudage au 270e jour et s'il y en aurait une autre en application de l'article 21. C'est une question qu'on se pose.

Droit de grève et services essentiels: Nous sommes très heureux de voir la Loi sur les services essentiels, la loi 253, abrogée, mais nous croyons que vous l'avez remplacée par l'équivalent. En effet, ce que les commissaires évaluaient avant sera dorénavant évalué par un conseil sur le maintien des services de santé. Autrement dit, ça équivaut à la même chose pour ce qui nous concerne.

Notre position quant au droit de grève est sans équivoque et sans possibilité de compromis. Le droit à la grève est un droit fondamental, c'est-à-dire que le travail appartient, de droit et en exclusivité, à celui qui le fournit, soit le travailleur.

Toute tentative de limiter ce droit fondamental sera toujours rejetée sans autre forme de discussion.

Le travail constitue, pour le travailleur, une marchandise qu'il échange pour des conditions de travail qui doivent être acceptables et, dans le cas contraire, les travailleurs doivent pouvoir retirer cette marchandise. Il s'en trouvera beaucoup pour nous opposer les droits de la population. Le jour où les gouvernements réussiront à obliger d'autres marchands comme, par exemple, Steinberg, Dominion et autres à vendre leur marchandise moins cher, parce que des personnes en ont besoin, nous repenserons peut-être cette question.

Quant aux services essentiels lors des conflits, nous croyons que nos membres ne sont pas des sauvages et qu'ils sont parfaitement capables de maintenir des services essentiels adéquats et humains et ceci, sans être sous condition de l'approbation d'un comité quelconque. Je pense qu'il y a eu plusieurs conflits depuis la signature de la dernière convention collective dans certains de nos syndicats, conflits que des personnes diraient illégaux, et, en aucun moment, les hôpitaux en question se sont plaints que les services essentiels n avaient pas été maintenus. Les travailleurs sont capables de faire ça comme du grand monde.

Nous vous demandons donc de retirer tous les aspects de la loi qui conditionnent le droit de grève.

De la protection des travailleurs: Le gouvernement du Parti québécois s'est vanté, à plusieurs reprises, d'être le détenteur d'un préjugé favorable à l'égard des travailleurs. Nous croyons qu'il est temps de vraiment démontrer, d'une façon concrète, ce préjugé. Depuis fort longtemps, les institutions syndicales — nous en sommes — ont réclamé à grands cris toutes sortes de modifications aux lois pour protéger l'institution syndicale elle-même, et il est juste qu'il en soit ainsi.

Le gouvernement a couvert, par l'article 38b et l'article 38c, les syndiqués contre les agissements de mauvaise foi de certains syndicats qui auraient oublié que le rôle premier de tout syndicat est de défendre les intérêts des syndiqués, mais cette protection se veut beaucoup trop partielle puisqu'elle se limite aux cas de congédiement et de suspension.

Quels sont les recours d'un syndiqué face au refus d'un syndicat de faire respecter la convention collective? Les syndiqués, en général, n'ayant pas les moyens financiers d'entreprendre de dispendieuses procédures légales contre un syndicat qui agirait de mauvaise foi pour lui usurper un droit de la convention collective, nous croyons que le gouvernement doit modifier l'article 38c du Code du travail pour que son application couvre aussi les actes de mauvaise foi autres que les congédiements et les mesures disciplinaires.

Pour mieux illustrer la nécessité de cette modification, vous trouverez en annexe copie d'une décision de la Cour supérieure et de la Cour d'appel dans la cause de M. André Guay versus le Syndicat national de l'hôpital général à Pointe-Claire et du Lakeshore General Hospital. Vous allez noter que ce syndiqué, après s'être battu courageusement contre l'employeur et le syndicat pour ses droits, a enregistré des gains à la Cour supérieure et en Cour d'appel. Sauf que ces gains, loin de régler ses problèmes, ne furent que le début.

Le syndicat a pris une entente avec l'employeur pour abolir son poste alors que la même journée son poste était réaffiché pour trouver un autre employé. Il a déposé un grief; il a été avisé par le syndicat en ce sens que le syndicat ne le défendrait pas. Comme vous le savez, la procédure d'arbitrage appartient au syndicat; donc, l'individu doit plaire à son syndicat puisqu'il n'a aucun recours en tant qu'individu. C'est l'essentiel de notre question ici. L'article 38c doit être modifié pour qu'un homme, dans un syndicat, ait au moins une chance, lorsqu'il ne plaît pas à d'autres individus, d'être défendu. Cela presse dans notre esprit beaucoup plus que toute autre modification que vous pourriez faire pour limiter les droits des syndiqués actuellement.

Vous allez sans doute me dire que ce ne sont pas des cas qui arrivent tous les jours. Mais, s'il n y en avait qu'un seul, cela justifierait le droit ou la nécessité de modifier le Code du travail. Vous avez amende le Code du travail dans le sens de la

formule Rand obligatoire et tout cela, mais je pense que vous n'avez pas adapté les obligations à cela et cela presse que vous le fassiez. Il est temps, disions nous, de démontrer si votre préjugé favorable est dirigé vers les organisations syndicales si grosses soient-elles, parce qu on sait qu'il y en a de grosses, ou si votre préjugé est dirigé vers les syndiqués eux-mêmes. Nous espérons, MM. les députés, que vous tiendrez compte de ces humbles remarques, mais cela presse.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Bou-dreau. M. Harvey.

M. Harvey (Guy): J'accorde une entière... Je voudrais dire que j'appuie le mémoire du syndicat hospitalier de Montréal, par le fait que depuis 1970, nous avons aussi été pris avec des problèmes similaires, ce qui a résulté en deux griefs.

M. Johnson: Est-ce que vous pourriez parler près du micro?

M. Harvey: Je m'excuse. J'appuie le mémoire du syndicat de Montréal. Depuis 1970, on fait face à de simples problèmes où les syndicats ont refusé de défendre leurs membres suivant la position syndicaliste et suivant aussi le point de vue démocratique. Cet amendement devrait spécifier que chaque membre d'un syndicat, s'il est, à un certain moment congédié, quelle que soit la forme de congédiement, ait la change, sans nécessairement avoir le syndicat à l'appui, de s'exprimer dans un arbitrage. Ce sont des injustices qu'on rencontre beaucoup au niveau ouvrier. C'est tout mon point de vue pour le moment.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Harvey. M. le ministre.

M. Johnson: D'abord, messieurs, je voudrais vous remercier d'être venus vous exprimer. Je voudrais simplement répondre à une ou deux questions que vous soulevez. La première est à l'article 99c et 99d, la question du maraudage. On se rappellera que la section que nous créons dans le secteur public et parapublic, en fait, établit le principe que le code s'applique à moins, évidemment, que les dispositions du chapitre en question soient incompatibles avec les articles du code. Donc, l'article 21 ne s'applique pas. Il n'y a qu'un moment qui est fixé pour la période dite de maraudage.

J'aurais une remarque à faire, M. Boudreau, non pas au sujet de la deuxième section de votre exposé sur les droits des syndiqués face aux structures syndicales, mais sur la première partie quand vous parlez que toute tentative de limiter ce droit fondamental sera toujours rejetée sans autre forme de discussion, vous semblez nier, en affirmant ça, qu'il y a quelque chose d'un peu particulier dans les services de santé. Ce que vous proposez, finalement, c'est que l'Etat ne s'en mêle pas, point; ce qui est évidemment inconcevable. Je ne sais pas si on se comprend là-dessus. (11 h 45)

De la même façon que je veux bien être compatissant avec des salariés qui ont des difficultés avec certaines de leurs structures syndicales à l'occasion, de la même façon comme homme politique, je pense que je suis aussi représentatif que vous, parce qu'il y a du monde qui m'a élu et que les 110 députés de l'autre côté sont des gens qui sont aussi représentatifs que n'importe quel leader syndical, et qu'à ce titre, parce qu'on est aussi responsable de la santé publique, on doit envisager à la fois notre aspect de ces principes du Code du travail et ce respect fondamental du droit de grève et essayer de réconcilier ça avec une autre chose qui s'appelle la santé publique.

Vouloir assimiler ce type de situation avec ce qu'on peut retrouver, par exemple, dans le secteur privé, ça m'apparaît évidemment inadmissible.

Le Président (M. Boucher): M. Boudreau.

M. Boudreau: Si je peux me permettre... Disons qu'au départ, concernant la représentativité des parlementaires, en ce qui nous concerne cela n'a jamais été mis en doute comme tel. Je ne sais pas où vous avez pris ça; vous avez dû écouter Trudeau dernièrement. Dans notre esprit...

M. Johnson: M. Boudreau, je vais vous interrompre. Je vous dis seulement que. quand vous me dites que dans le secteur hospitalier, comme dans n'importe quel autre secteur, toute forme de tentative d'approche d'essayer de mesurer les conséquences de ce que signifie le droit de grève, c'est une chose qui n'ouvre même pas la porte à la discussion. Vous ne semblez pas considérer que l'Etat, que les membres autour de cette table représentent, faute de structures meilleures dans notre société, a aussi des responsabilités face à l'ensemble de la population. C'est qu'il n'a pas à faire seulement la jonction des intérêts particuliers, y compris ceux d'un groupe syndical.

M. Boudreau: C'est sûr et ce que j'essayais de vous répondre, c'est qu'on ne conteste pas votre représentativité auprès de la population comme telle, pas plus que vous, vous avez le droit de contester la représentativité qu'on a vis-à-vis de nos membres. C'est sûr qu'à partir de ce moment-là, vous tenez une idéologie qui est celle de la population en général, mais que pour nous, la population en général, dont vous êtes les représentants, représente l'employeur, pour nous. Tout ce qu'on dit, dans notre document, c'est que le droit de grève, c'est la conséquence du travail qui appartient à ceux qui donnent le travail, en exclusivité. Il n'y a pas un syndicat au monde qui se respecte qui va venir faire des compromis là-dessus. Si c'est aussi important que cela, le fait que les employés travaillent dans le secteur hospitalier, on devrait peut-être en tenir compte au moment des négociations également.

Mais je vous dis aussi que les syndicats des hôpitaux, donc ceux qu'on représente, ne sont pas des sauvages. On le dit dans le texte. Quant aux services essentiels, ils sont capables de les maintenir. On se pose de franches questions, on ne

s'est pas caché pour le dire, on vient vous le dire en commission parlementaire, on se pose de sérieuses questions quant à ce qui va remplacer le bill 253. Pour nous, cela va être l'équivalent, puisque ce sont des personnes qui vont venir dire, à partir d'aucun critère établi par personne encore, ce que sont les services essentiels.

M. Johnson: Je m'excuse, je vais être obligé de vous corriger, parce que c'est une chose inexacte qui s'est glissée dans votre mémoire. En aucune façon, le comité qui est proposé, ne sanctionne ou n'autorise la liste syndicale ou l'entente. C'est un comité d'information. Il ne dit pas: Oui, c'est une bonne liste, non, ce n'est pas une bonne liste, donc, c'est la suspension du droit de grève. Il n'est là que pour informer le public. C'est très clair dans la loi. C'est peut-être une confusion qui a nagé, parce que, dans le rapport Martin-Bouchard, on y faisait jouer une forme de rôle d'arbitrage ou de médiation sur les services essentiels. On l'a supprimé.

Ce qu'on dit que le comité fait, c'est simplement qu'il informe le public. Il appartient au syndicat, en l'absence d'entente, c'est bien entendu, d'établir cette liste des disponibilités et de voir comment seront fournis les services essentiels. La décision que le gouvernement peut prendre, c'est qu'en admettant que le ministère des Affaires sociales décide, sans être lié par qui que ce soit, ni le comité d'information ni qui que ce soit d'autre, considère que la santé publique est en danger, dans le cadre d'une grève ou d'une grève appréhendée, et compte tenu de la liste syndicale, de l'entente ou de la situation qui prévaut, qu'il peut suspendre le droit de grève.

C'est cela qui est très différent. Il n'y a pas de tiers intervenant. La seule chose qui fait le tiers intervenant, c'est le gouvernement qui peut décider de suspendre le droit de grève. Il n'est pas question qu'un tiers vienne décider ce que sont les services essentiels.

M. Boudreau: Sans pour autant décider de la conception qu'on en a ou qu'on en avait, si vous voulez, il faut admettre quand même qu'on n'a pas eu grand temps pour étudier cela. La conception qu'on avait de ce comité, de par les rapports qu'il fera au public, servira aussi de recommandations au niveau du gouvernement.

M. Johnson: C'est-à-dire qu'il n'est pas impossible que cela serve dans l'évaluation, mais ce n'est pas nécessaire. C'est cela qui est très différent entre le projet de loi et ce que proposait le rapport Martin-Bouchard. Le rapport Martin-Bouchard disait: Ce comité peut recommander au gouvernement de suspendre le droit de grève. Le gouvernement ne peut pas suspendre le droit de grève, si le comité ne le suggère pas. Ce que nous disons, c'est que la décision de la suspension du droit de grève, si cela doit s'appliquer, c'est une décision qui n'a rien à voir avec un tiers. C'est une décision qui est prise au niveau du ministère des Affaires sociales, sur recommandation du ministère des Affaires sociales, par le Conseil des ministres.

En fait, c'est une nuance. J'avoue avec vous que cette question est extrêmement complexe. Le fait qu'on a introduit cette nuance, par rapport au rapport Martin-Bouchard, n'était peut-être pas manifeste. Il n'y aura pas de tiers intervenant en ce sens-là. C'est très différent de la loi 253 sous cet angle-là.

J'aurais, en fait, seulement, brièvement, quelques questions à vous poser sur l'accessibilité à l'hôpital pendant une grève. Considérez-vous qu'un citoyen, quel qu'il soit, doit avoir accès à l'hôpital en temps de grève, qu'il y ait une ligne de piquetage oui ou non?

M. Boudreau: Un citoyen malade ou un scab"?

M. Johnson: Je parle d'un citoyen malade qui veut aller se prévaloir des... Remarquez que décider si c'est un "scab" ou un malade, je ne sais pas qui va aller décider cela dans la rue, mais on peut tenir pour acquis que ce sont des gens qui ont mal au ventre ou ailleurs.

M. Boudreau: On vient de me souffler qu'un scab", c'est un citoyen malade. Vous auriez tendance à être d'accord?

M. Johnson: Cela dépend du service.

M. Boudreau: C'est sûr que, dans notre esprit, l'article 4 de la loi 65 s'applique, à savoir que tout citoyen a droit à des services essentiels, à des services de santé: ce qui n'existe pas actuellement, selon notre évaluation: il y a 1000 lits d'hôpitaux de fermés. Je serais bien curieux de voir la réaction du gouvernement si un syndicat fermait 1000 lits d'hôpitaux demain matin. C'est un autre sujet dont on va discuter ce soir.

Dans notre opinion, il n'est pas question, lors de grèves, d'empêcher des gens d'obtenir des soins médicaux d'urgence.

M. Johnson: Concevez-vous que, sur une ligne de piquetage, il y ait quelqu'un qui décide ou si, par définition, un citoyen a libre accès à l'hôpital?

M. Boudreau: Par définition, selon notre conception, un citoyen a droit à l'accès à l'hôpital.

M. Johnson: L'autre question, c'est lavis de 48 heures qu'on a introduit. Pensez-vous, en tant que syndiqués, que 48 heures, c'est suffisant pour un hôpital pour se retourner de bord et faire face à une grève qui s'en vient?

M. Boudreau: En principe, oui, puisque, habituellement, lorsque cela va mal dans les négociations, parce qu'on parle toujours de la grève dite "légale"... Lorsqu'on est en période de négociation et que le bordel est pris, les hôpitaux autant que les syndicats savent que le bordel est pris, sans compter qu'il y aura une négociation au niveau des services essentiels, puisqu on peut présumer que le projet de loi sera adopté.

A partir de là, je pense que le délai est très suffisant.

M. Johnson: C'est tout ce que j'avais, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Merci, M. le Président. M. Bou-dreau, vous dites, à la page 2 de votre mémoire, que vous êtes heureux de voir la loi 253 abrogée, mais que, ce qui la remplace, c'est l'équivalent.

Hier, au cours des rencontres, des auditions comme celles-ci, qui ont eu lieu avec les organismes patronaux et avec certains organismes médicaux, on a fait beaucoup état de la différence qu'il y avait dans la composition ou la qualification, si vous voulez, des gens qui vont passer des jugements sur la liste des services essentiels. Comme vous le savez, sous la loi 253, il s'agissait, en pratique, d'arbitres qui étaient pris parmi la liste des arbitres désignés par le Conseil consultatif du travail. Il semble qu'on puisse conclure de la discussion d'hier que les membres du conseil pour le maintien des services essentiels vont plutôt être des gens familiers avec les aspects professionnels des services de santé, des médecins, des infirmières, surtout ces deux catégories.

Est-ce que, tenant compte du fait que ce n'est pas le même genre d'orientation, que ce n'est pas le même genre de personnes, que ce n'est pas le même genre d'expertise qui est impliqué, est-ce que, tenant compte de cela, vous maintenez la même affirmation? C'est essentiellement équivalent de toute manière.

M. Boudreau: On dit, en ce qui nous concerne, que ce sera la même chose. Les parlementaires en analysent le fonctionnement et tout cela. Quant à nous, on examine le résultat final. Si, par exemple, dans X% des boîtes on perdait le droit de grève, cela rendrait totalement inefficace une grève générale. J'ai l'impression, personnellement, surtout si vous nommez des médecins là, c'est encore pire que tout, qu'au bout du compte on va se retrouver avec la moitié des hôpitaux qui n'auront pas le droit de grève. Cela va être seulement une bonne affaire pour le gouvernement, puisqu'il va économiser. Je maintiens que cela sera l'équivalent de la perte du droit de grève.

Vous vous rappelez, pour les services essentiels, ce qui est arrivé la dernière fois. Certains hôpitaux, lorsqu'ils ont déclaré la grève, comme une petite boîte sur la rive sud — j'aurais dû apporter le nom — ont obtenu plus de personnel pour les services essentiels qu'il y en avait d'engagés normalement. Quand ils ont déclaré la grève, ils ont été obligés d'engager deux employés. J'ai l'impression que les médecins ont une conception autre que la nôtre des services essentiels, sauf quand ce sont eux qui sont impliqués, comme quelqu'un le disait tout à l'heure. Leur conception n'est pas la nôtre. Vous auriez pu penser de nommer des syndiqués là-dessus. Ceux qui font le travail habituellement sont bien mieux placés pour l'évaluer que n'importe qui d'autre, incluant Vincent Prince, de la Presse.

M. Forget: A votre point de vue, si on regarde seulement la composition, cela risque de mener plus souvent que l'ancienne formule à des suspensions du droit de grève.

M. Boudreau: C'est notre évaluation.

M. Forget: Dans la détermination de la liste, étant donné que le syndicat va avoir le choix de tenter d'en venir à une entente avec la partie patronale localement, une entente locale, ou de laisser de côté la possibilité d'une entente et de voir sa liste devenir prépondérante, quant à vous, du point de vue de votre syndicat, quelle attitude pensez-vous plus probable?

M. Boudreau: Je parle seulement en ce qui concerne notre syndicat. On va effectivement tenter d'en venir à une entente. On va le tenter, sauf que j'ai de sérieux doutes sur ce que cela va donner. Comme je l'ai dit l'autre fois, à la rencontre qu'on a eue, quand il y a une grève, il faut qu'au bout du compte cela prive quelqu'un de quelque chose. Les hôpitaux, si on se fie à la dernière fois, voudraient qu'on aille en grève, mais en donnant les mêmes services. On va quand même tenter d'en arriver à des ententes quant aux services essentiels.

M. Forget: Dans la dernière partie de votre texte, vous faites allusion à des difficultés pour chacun des syndiqués, dans certaines circonstances, pas toujours, dans des circonstances que vous qualifiez d'exceptionnelles, d'être défendus de façon uniforme ou impartiale. Ne pensez-vous pas qu'il y a des dangers certains du côté de la liste des services essentiels qui doivent être continués, qui doivent être fournis, même en cas de grève, que certains membres de syndicats soient mis à contribution pour donner les services essentiels plus fréquemment, à l'exclusion même d'autres syndiqués? Est-ce que ce n'est pas une occasion où, effectivement, la direction d un syndicat ou peut-être même l'employeur a des possibilités de faire preuve de favoritisme vis-à-vis duquel le syndiqué, comme tel, n'a pas de moyens de défense? (12 heures)

M. Boudreau: Au départ, pour les questions de services essentiels, ou les personnes nommées pour les services essentiels, ça ne regarde absolument pas l'employeur quant aux personnes affectées. C est le syndicat qui décide à partir d'un mandat d'assemblée générale, selon les règles de la démocratie applicables, sauf que quand vous regardez la dernière partie ou la partie où l'on parle du droit des syndiqués comme tels, il s'agit là non pas de décisions administratives de syndicats, mais d'application de conventions collectives. La question qu'on se pose: Est-ce qu'un syndicat a le droit, par exemple, de prendre une décision, que ce soit en assemblée générale ou

non, pour décider de priver quelqu'un d'un droit qui lui est accordé par la convention collective? Nous répondons, en tant que syndicat: Non.

Les conventions collectives donnent des droits à des syndiqués. Le syndicat ne devrait pas avoir le droit de les leur enlever pendant cette convention collective. Par exemple, le Code du travail dit, à un moment donné, que le syndicat a tous les droits qu un syndiqué a. Pourquoi I inverse ne serait-il pas vrai? Pourquoi un syndiqué va-t-il déposer un grief et que c'est le syndicat qui décide s'il procède en arbitrage ou non? Ce qui fait que l'employé en question est jugé deux fois. Il doit être jugé par son syndicat, à savoir si son affaire a de l'allure ou non. Après, s'il a gagné son premier procès, parce que, souvent, ce sont des procès, il doit subir un autre procès qui est I'arbitrage. C'est sur quoi nous ne sommes pas d accord.

On m'a toujours enseigné, dans les syndicats, que le grief appartenait au syndiqué et non au syndicat. C'est ce qu'on demande. Il me semble que c'est un droit naturel qui ne devrait pas causer de problème, et je trouve ça effrayant qu'on soit obligé de venir brailler ici pour le demander.

M. Forget: Vous êtes conscient que c est plutôt en décembre dernier qu'il aurait fallu débattre ça, parce que c est en décembre dernier que le ministre a fait modifier le Code du travail pour enlever le droit de grief au syndiqué et le donner exclusivement au syndicat.

Mais ça, c'est un autre débat. Vous avez sûrement raison là-dessus. Mais, il reste que dans le contexte des services essentiels, plus spécifiquement, ma question portait sur le fait que si vous désignez nominativement des employés qui peuvent fournir des services essentiels, ça veut dire que ces gens-là vont recevoir une rémunération normale et peut-être une rémunération plus que normale dans le sens où ils peuvent être appelés peut-être à travailler de plus longues heures que d'habitude, alors que d'autres syndiqués dont les noms ne sont pas fournis par le syndicat pour assurer les services essentiels peuvent être exclus de cette situation.

M. Boudreau: Les syndicats qui...

M. Forget: Est-ce que ça ne pose pas un problème assez aigu?

M. Boudreau: Dans les syndicats qui se respectent, dont nous sommes, pour vous rendre la paix de l'âme, ces nominations se font à tour de rôle. Il n y a pas de problèmes, habituellement, avec ça. Je n'en ai jamais vu. De toute façon, on est obligé de se battre avec nos gars pour qu'ils aillent travailler aux services essentiels. Personne ne veut y aller, habituellement.

M. Forget: Les groupes qui ont comparu hier, particulièrement l'association des hôpitaux a dit que, quant à elle, la liste en question devrait être une liste de postes à combler, liste minimale de postes à combler, qui soit le résultat d une entente ou la liste syndicale, mais non pas comme la loi le formule, la liste des services à être fournis et dont le maintien doit être assuré.

En pratique, ça veut dire que — toujours selon I'association des hôpitaux — je vous pose la question pour savoir quelle est votre attitude vis-à-vis de ça. Ces gens disent: Le syndicat devrait nous donner le nombre de postes et il devrait continuer d'appartenir à ceux qui sont responsables de la gestion de l'hôpital, le soin de décider comment ces postes peuvent être les mieux répartis.

Par exemple, on donne, dans le cas d'un syndicat pour l'entretien... Enfin, les services de soutien, globalement, tenant compte de la façon dont sont découpées les unités de négociation, on donne douze postes sur 45. L'Association des hôpitaux souhaitait que les douze postes puissent être utilisés soit à la cuisine, soit à l'entretien ménager, soit à la buanderie, à la discrétion de I'administration, et non pas d'avoir un nombre de postes spécifiques pour chacune des occupations.

Quel est votre point de vue là-dessus?

M. Boudreau: Bon! Cela ressemble typiquement a IAHPQ. Elle devrait peut-être s'occuper de faire combler les postes vacants présentement. En période de grève, ma conception personnelle — cela n'a pas encore été entériné par mon syndicat — c'est que la négociation devrait se faire au départ au niveau du taux d'occupation d'un hôpital; ce serait bien plus simple. A la suite de cela, on pourrait évaluer le personnel qui ne serait pas en grève comme, par exemple, les infirmières, les infirmières-médecins, les postes de cadres.

Quant a la mobilité dont vous parlez, on s est battu lors de la dernière négociation et on va probablement se battre a la prochaine pour empêcher les hôpitaux, dont l'Association des hôpitaux, de créer la mobilité de personnel. Ce n'est certainement pas, M. Forget, en période de grève qu'on va l'accepter, pour les employés qui vont aller faire des services essentiels.

M. Forget: Je ne voudrais pas vous mettre sur une fausse piste; il ne suggérait pas la mobilité dans les périodes de grève. Il suggérait de pouvoir choisir à même un "pool ", si vous voulez, de postes, d'exprimer seulement en termes de nombre les qualifications, les catégories d'emplois dont il voudrait se prévaloir a l'intérieur de l'enveloppe. Disons douze postes, au lieu d'être obligé d'en prendre neuf à l'entretien ménager, seulement deux à la cuisine, et un à la buanderie, et de pouvoir dire: On va laisser I'entretien ménager pendant une période de grève; on va lui donner moins d'importance, et on veut plutôt utiliser les douze postes a la cuisine, par exemple, mais d'avoir cette flexibilité, pas de prendre des gens de la cuisine et les mettre à I'entretien ménager ou vice versa. Donc, ce n'est pas un argument de mobilité. Il s'agit de savoir si vous êtes d'accord avec la façon d interpréter I'expression "fournir une liste de services" . Est-ce un nombre de postes parmi lesquels l'administration peut choisir en respectant les classifications et la désignation des postes ou si le

syndicat devrait donner une liste très exhaustive et très détaillée en disant: On va vous fournir une personne pour l'entretien ménager au quatrième étage? Ce sont des choses comme celles-là.

M. Boudreau: En ce qui nous concerne, c'est ce que ce sera: un infirmier à telle place et une aide-infirmière à telle autre place et un employé à telle cuisine. La question du "pool" ne fera pas l'objet de négociations; ce qu'on va négocier, c'est le nombre, les services essentiels avec les gens qui s'y rattachent, après avoir tenté de négocier le taux d'occupation de la boîte, ce qui va rendre beaucoup plus facile...

M. Forget: Je n'ai pas d'autre question.

Le Président (M. Boucher): Merci. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, au nom des membres de la commission, je remercie M. Boudreau et M. Harvey...

M. Boudreau: En fait...

Le Président (M. Boucher): Vous avez quelques remarques...

M. Boudreau: II y a une dernière remarque à laquelle j'ai oublié de donner une réponse. J'aimerais vous faire remarquer, M. Forget, que la raison pour laquelle on n'a pas amené cela en décembre, c'est qu'on n'a pas été invités en décembre.

M. Forget: Ce n'était pas un reproche, c'est une observation; ce sont des remarques qui auraient été fort utiles à avoir en décembre, mais qu'on n'a pas pu avoir, étant donné qu'il n'y a pas eu de commission parlementaire ouverte.

M. Boudreau: Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire, par exemple.

M. Forget: Vous avez raison.

M. Boudreau: Pendant que vous avez la main à la pâte, il serait peut-être temps de faire un petit pain de plus.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, pourrais-je souligner à M. Boudreau, avant qu'il ne nous quitte, qu'au mois de décembre la commission concernant la loi 45, ce n'était pas sur invitation, c'était ouvert à n'importe quel citoyen qui voulait venir se présenter devant la commission parlementaire et qui acheminait un mémoire. Il y avait eu des avis publics dans les journaux et tous les syndicats ou tous les individus qui auraient voulu venir se présenter auraient pu le faire.

M. Forget: C'est une interprétation flatteuse du député de Sainte-Marie.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Boudreau.

Une Voix: Merci, M. Boudreau.

Le Président (M. Boucher): Maintenant, j'appellerais les...

M. Johnson: Je suggérerais peut-être, si nos invités sont d'accord, qu'on procède à l'audition de la lecture du rapport des trois centrales pour ensuite passer à la période des questions cet après-midi. J'ai pris connaissance...

Le Président (M. Boucher): Nous devons ajourner à treize heures.

M. Johnson: ... du texte il y a quelques minutes. En gros, il y a une quinzaine de pages. Je pense qu'il y en a pour au moins 30 minutes, quitte à ce que nous ajournions...

Le Président (M. Boucher): Nous suspendons à treize heures.

M. Johnson:... suspendions vers treize heures environ. Est-ce que cela vous irait?

Des Voix: D'accord. M. Johnson: D'accord.

CSN, FTQ et CEQ

Le Président (M. Boucher): Alors, j'inviterais les syndicats de la CSN, de la FTQ et de la CEQ.

Est-ce qu'il y a un porte-parole pour les trois ou si chacun va parler en son nom?

M. Rodrigue (Norbert): Dans un premier temps, M. le Président, je ferai part du texte, si vous me le permettez. Mes camarades, Louis et Yvon, pourront ajouter quelques commentaires.

Le Président (M. Boucher): D'accord.

M. Rodrigue: Si vous me le permettez, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, je voudrais vous présenter les camarades qui m'accompagnent: Louis et Yvon, respectivement de la FTQ et de la CEQ; à ma droite, Normand Frazer et Réal Lafontaine, de la FTQ; Marcel Gilbert, Réal Guilbert et Pierre Bernier, de la CEQ.

M. le Président, M. le ministre...

M. Chevrette: M. le Président, avant la lecture, j'exigerais d'avoir une copie du mémoire.

M. Rodrigue: Vous n'avez pas de copie, je m'en excuse.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Joliette-Montcalm...

M. Rodrigue: C'est une exigence qu'on est prêt à satisfaire tout de suite.

M. Johnson: Le secrétariat des commissions en a, je pense.

Le Président (M. Boucher): Elles s'en viennent, M. le ministre.

M. Rodrigue: François, est-ce qu'on en a suffisamment?

Le Président (M. Boucher): Ceci étant corrigé, vous pouvez y aller, M. Rodrigue.

M. Rodrigue: Merci.

M. le Président, M. le ministre, messieurs les députés, c'est aujourd'hui la quatrième fois depuis l'automne dernier qu'il nous est donné d'exposer publiquement la position des trois centrales, CSN, CEQ et FTQ, qui représentent plus de la moitié des 300 000 employés de l'Etat à l'égard du cadre législatif de négociation dans les secteurs public et parapublic. Dès le début de l'opération révision, enclenchée l'été dernier par le gouvernement, il nous est apparu que cette opération née du mécontentement du patronat, celui du public comme celui du privé, allait surtout servir à satisfaire le patronat.

En effet, depuis la fin de la dernière ronde de négociation dans les secteurs public et parapublic, on assistait au développement d'une importante campagne patronale réclamant la réforme du régime de négociation dans ces secteurs. On faisait état de l'inquiétude d'une population qui aurait été condamnée à assister impuissante et mal informée à des conflits qui pourtant la concernaient au premier chef. On parlait de l'érosion de l'autorité publique qui aurait résulté de ces affrontements. On énumérait enfin les torts qu'auraient subis les étudiants dans le domaine de l'éducation et ceux qu'auraient subis les malades dans le domaine de la santé.

Pourtant, nous l'avons dit alors et nous le répétons maintenant, ce qui se profilait derrière ces discours, c'était l'inquiétude d'un patronat qui voyait sa position de force contestée, sinon franchement menacée, par les retombées des luttes syndicales dans les secteurs publics. C'était l'espoir d'un régime qui rendrait plus difficile encore l'établissement d'un rapport de forces favorable à l'aboutissement des revendications syndicales.

Bien sûr, ces appels à la réforme se donnaient comme la réponse de la raison et de l'humanité aux malaises qu'avait fait naître dans la population le déroulement des négociations dans les secteurs public et parapublic. Ainsi, par exemple, dans son mémoire à la commission Martin, l'Association des hôpitaux parle abondamment des souffrances, de l'anxiété et de l'aggravation de l'état de santé de plusieurs personnes qui n'ont pu avoir accès aux services hospitaliers du fait des grèves dans les hôpitaux.

Pourtant, en 1966, ces mêmes administrations hospitalières refusaient de discuter des services essentiels avec les travailleurs et affirmaient pouvoir se passer d'eux. En 1977/78, ces mêmes gens acceptaient en silence les coupures de postes ramenant dans certains cas leur personnel à un niveau inférieur à celui qu'ils jugeaient essentiel en 1976 au cours des négociations.

De son côté, le Conseil du patronat québécois poursuivait, devant la commission et ailleurs, ses litanies contre l'injustice que constitueraient à l'endroit des salariés du secteur privé de prétendus privilèges octroyés aux travailleurs des secteurs public et parapublic et rabâchait son inquiétude légendaire face aux dangers que faisaient courir à la santé des Québécois les grèves dans le secteur hospitalier.

Quand on sait que ce monde représente une classe qui défend un système économique et social incompatible avec la garantie d'un emploi et d'un salaire décent pour tous et qui a fait preuve jusqu'ici, au Québec, d'un sang froid remarquable à l'égard des dangers incontestables que courent en permanence les travailleurs québécois sur les lieux de travail, ce genre de discours ne saurait faire illusion bien longtemps à beaucoup de monde.

Cependant, ce qu'il importe de remarquer, c'est qu'à tous les problèmes qu'elles cherchaient ainsi à monter en épingle, les associations patronales n'ont été capables de trouver que des solutions qui ont pour effet de rétrécir le domaine des décisions bilatérales et d'élargir celui des décisions unilatérales, de réduire le champ de la négociation et d'étendre celui de la réglementation et de la législation contraignante. (12 h 15)

Les parties syndicales ont-elles mis de trop grands retards, par exemple, à déposer leurs demandes? Il faut donc leur imposer, par voie législative, de le faire désormais à une date fixée d'avance. Les demandes syndicales ont-elles été. à l'occasion, imprécises? Il faut requérir, par voie législative, qu'elles soient claires et précises. L'information de la population a-t-elle été source de confusion, a-t-elle manqué d'objectivité? Il faut donc s'en remettre à la loi pour découvrir et créer les moyens d'une information dirigée, mais objective cependant.

En somme, la voie de solution pour les associations patronales, c'est clairement que le nouveau gouvernement aille plus loin sur la voie de la répression que ne l'a osé le gouvernement Bourassa, même si l'expérience a démontré que le niveau de la répression atteint sous le précédent gouvernement avait déjà largement dépassé les bornes.

De notre côté, nous avons, depuis le début, réaffirmé notre droit à la libre négociation et à l'importance que nous attachons à ce droit qui nous a permis non seulement de réaliser des gains importants pour les syndiqués des secteurs public et parapublic, mais aussi d'ajouter un poids non négligeable en faveur du progrès social de l'ensemble des travailleurs. Nous nous sommes battus pour ce droit à la libre négociation, avons-nous dit et redit au gouvernement. Nous nous battrons

encore. Si le processus de révision que vous avez commencé doit servir à quelque chose, avons-nous ajouté, c'est à faire disparaître les enfarges inacceptables qu'oppose le régime juridique actuel au plein exercice de notre droit à la libre négociation.

Donc, finis les codes du travail parallèles, les calendriers de négociation pleins de dates fixes, l'intervention de tiers prétendument neutres et le recours aux injonctions pour interdire le droit de grève. Car la libre négociation n'est en rien contraire à l'intérêt de la population et c'est notre conviction qu'elle seule offre actuellement la possibilité de règlement rapide des conflits dans les secteurs public et parapublic.

Le gouvernement est placé, par conséquent, devant un choix clair: Ou bien il tente d'avoir l'air de garantir, sur le dos des travailleurs, les services essentiels et par conséquent d'avoir l'air d'assurer la sécurité à une population que les conflits de travail dans les secteurs public et parapublic inquiètent et ainsi, il répond positivement aux pressions patronales et à ses besoins politiques à court terme; ou bien il cherche véritablement l'intérêt de la population et fait confiance à la bonne foi et au sens des responsabilités des travailleurs.

Aujourd'hui, l'analyse détaillée du projet de loi no 59 le démontrera abondamment tantôt, il tente de faire croire qu'il n'a pas choisi. C'est notamment ce à quoi servent l'idée d'amender le Code du travail plutôt que de proposer une loi spécifique pour le secteur parapublic et le truc des listes syndicales qui tente de donner l'illusion que le gouvernement s'est rendu au voeu des syndicats. Dans les faits, cependant, le gouvernement a cédé aux pressions patronales, de telle sorte que, lorsqu'il n'augmente pas les contraintes entourant l'action syndicale, il maintient celles qui existent déjà et que nous avions dénoncées comme abusives.

S'il intègre formellement le régime juridique des négociations dans le secteur public au Code du travail, le gouvernement est en effet très souvent conduit, pour satisfaire les désirs patronaux, à déroger arbitrairement à l'économie générale du Code du travail. C'est notamment le cas pour le calendrier des négociations, des services essentiels et l'information du public pendant les négociations.

Voyons maintenant le calendrier des négociations. Ainsi, en matière de calendrier, notre souhait était et demeure que les travailleurs des secteurs public et parapublic ne subissent pas d'autres contraintes que celles prévues au Code du travail. A nos yeux, cette règle générale ne devrait être aménagée que pour faire place aux harmonisations liées à la nature particulière de l'employeur, l'Etat, et à la taille du groupe des travailleurs appelés à négocier en même temps. Par conséquent, nous aurions pu accepter, compte tenu de la complexité particulière des négociations dans le secteur parapublic, que le projet de loi no 59 prévoit, par amendement à l'article 40 du code, que les négociations puissent débuter six mois avant l'échéance des conventions collectives plutôt que trois mois avant.

D'ailleurs, nous avons déjà exprimé publiquement notre ferme intention d'être prêt à négocier en janvier prochain. Or, que fait le gouvernement dans son projet de loi no 59? Il dénature arbitrairement l'économie générale du Code du travail en décrétant des dates fixes pour le début et la fin des prénégociations, le début des négociations proprement dites, la date de remise des demandes syndicales et des propositions patronales.

Sous des dehors d'efficacité et d'accélération souhaitable du processus des négociations, cette position a trois conséquences néfastes principales aux yeux de quiconque a déjà participé à des négociations collectives. Premièrement, elle entraîne des embêtements et des querelles inutiles sur le sens des modifications que l'une ou l'autre des parties voudra apporter, par la suite, aux propositions et contrepropositions qu'elle a été forcée de déposer à l'échéance décrétée par la loi, même si ces modifications ne font que compléter un point mineur qui demandait des précisions.

Deuxièmement, elle remplace par un décret gouvernemental — il faut ici se référer à l'article 5 du projet de loi no 55 — la négociation sur le partage des matières qu'elle semble souhaiter, à 99f du projet de loi no 59. En effet, quel intérêt la partie patronale aura-t-elle à négocier vraiment si, à l'échéance de la période des prénégociations, elle peut obtenir ce qui lui convient par décret?

Troisièmement, elle tente de faire croire que seuls les syndicats ont des demandes à formuler en introduisant un délai de deux mois entre le moment où la partie syndicale serait obligée de déposer ses propositions et celui où la partie patronale se verrait forcée de faire de même.

Dans les faits, il est très rare que le patronat ne fasse que répondre aux demandes syndicales. La plupart du temps, il est aussi, lui, comme la partie syndicale, en demande. Par conséquent, si les parties négociantes doivent être forcées de déposer leurs propositions à une date fixe, que ce soit au moins la même date pour les deux parties.

Au passage, il faut remarquer ici que la formulation du paragraphe 99c laisse place à l'interprétation voulant que les syndicats des secteur public et parapublic puissent être accrédités ou changer d'allégeance pendant deux périodes légales.

Enfin, dans l'ensemble, la fixation d'un calendrier rigide, suggestion que nous aions déjà dénoncée quand elle est apparue dans le rapport Martin-Bouchard, dissocie ce que le Code du travail et la coutume associent, c'est-à-dire l'obligation de négocier avec diligence et de bonne foi, et la possibilité d'équilibrer le rapport de forces à toutes les étapes du déroulement des négociations.

L'expérience a d'ailleurs abondamment démontré que ce genre de tracasseries administratives visant à enfermer la démarche syndicale dans un corset de dates et d'échéances finit par rendre les lois ridicules. Par exemple, si on appliquait le cadre proposé par le projet de loi no 59, que va-t-il se produire si la partie syndicale n'a pas complété le dépôt de ses propositions le 1er février 1979? Le gouvernement va-t-il rendre illégal tout dépôt

ultérieur? Va-t-il décréter illégale toute négociation qui pourrait suivre et, à cause du seul non-respect de cette date, régler par un décret les conditions de travail et de salaire des syndiqués pris en faute?

L'information est un autre chapitre.

Au départ, quand il s'agit de se gagner l'opinion publique, le gouvernement dispose d'une bonne longueur d'avance sur ses employés, pensons-nous.

Dans notre société, en effet, l'opinion publique est modelée par les media et ceux-ci cultivent habituellement un préjugé favorable envers toute autorité, à plus forte raison envers le gouvernement. Celui-ci n'est-il pas l'arbitre des conflits sociaux, le protecteur de l'intérêt général et du bien commun contre les intérêts particuliers, etc.?

D'où notre constant rappel qu'il suffirait de peu de choses pour qu'en matière d'information du public, lors des négociations dans les secteurs public et parapublic, le gouvernement fasse disparaître même l'apparence d'un accès égal des deux parties négociantes à l'expression de leurs points de vue devant l'opinion publique.

Or, ce que le gouvernement propose ici, c'est de créer de toutes pièces une nouvelle "autorité" qui aurait pour mission d'enterrer le point de vue des parties sous le poids de sa "neutralité", de son "indépendance" et de son "expertise".

C'est ce conseil qui, selon le souhait gouvernemental, deviendrait le dépositaire attitré de la vérité en matière d'enjeux, de positions des parties et d'écarts entre ces positions.

Tout se passe donc comme si le gouvernement, parce qu'il n'a pas réussi à faire croire à sa neutralité quand il négocie avec ses employés, tentait aujourd'hui de décréter qu'une de ses créatures pourra, elle, demeurer neutre.

Déjà, devant la commission Martin, nous avions affirmé l'inutilité de rechercher une solution miracle en matière d'information du public, sous peine de verser, dès le départ, dans la fabrication délibérée d'attentes irréalistes, de la part de l'opinion publique. Il vaut mieux, avions-nous ajouté, se contenter, plus humblement et plus honnêtement, du jeu des mécanismes habituels de l'information dans notre société.

Plus encore, avec la formule proposée par le projet de loi no 59, le but louable de rendre compte au public du déroulement des négociations devient en réalité l'ajout d'un tiers entre les parties, qui pourrait ralentir plutôt que hâter un règlement ou une entente.

En effet, ou bien les observateurs neutres n'auront, pour émettre leurs jugements, que les renseignements fournis par les parties, dates de rencontre, texte de demandes, d'offres, de contre-propositions, etc., et alors, ils vont accomplir une tâche qui pourrait très bien être accomplie par les journalistes eux-mêmes, à moins de frais et sans créer d'illusions, ou bien, ces observateurs vont être présents aux tables de négociation et leur présence va transformer les rapports entre les négociateurs. D'autant plus que ces observateurs-là, contrairement à ce qui se passe quand il s'agit d'un conciliateur du ministère du Travail, auront pour mission de commenter publiquement ce qui se passe à la table.

Voyons maintenant, les services essentiels. L'objectif syndical en matière de services essentiels demeure le retrait de cette question du champ d'affrontement.

Nous savons, en effet, que les syndiqués, même si personne ne leur en faisait la demande, s'organiseraient dans les faits pour assurer un droit minimum de la population à des services de santé. L'expérience de 1966 dans les hôpitaux en témoigne éloquemment. D'ailleurs, dans le secteur privé, il est habituel que les services essentiels soient assurés spontanément par les syndicats, sans que cette initiative ne fasse de problème. Vous compendrez que, quand les filles et les gars, dans le privé, veulent s'assurer d'un service minimal pour protéger les machines, la conscience professionnelle et humaine des travailleurs des secteurs public et parapublic n'est pas moindre.

Dans le secteur de la santé, par contre, depuis dix ans, la question des services essentiels sert de prétexte au monde patronal pour monter des campagnes d'opinion contre le droit de grève dans les services de santé et les services sociaux et, par extension, dans tous les services publics.

L'inflation verbale, la démagogie et l'hystérie qui I entourent font aujourd'hui de cette question l'élément le plus explosif de toute tentative de révision du régime des négociations dans les secteurs public et parapublic, d'autant plus que nous sortons à peine des négociations de 1975-1976 où le gouvernement a systématiquement tenté de faire porter l'affrontement avec ses employés sur cette question-là plutôt que sur les véritables enjeux de la négociation.

Il faudrait donc, de toute évidence aux yeux de celui qui recherche une voie plus sage en la matière, laisser souffler un peu, aussi bien l'opinion que les syndiqués.

C'est la première raison qui nous a incités à exiger que le gouvernement s'abstienne de légiférer sur la question des services essentiels et fasse ainsi confiance au sens des responsabilités des travailleurs.

Nous avons constaté, par ailleurs, que les services essentiels ont fait problème dans le passé, d'abord parce que la partie patronale a trop souvent intérêt à les surévaluer et à monter à ce sujet une campagne d'opinion contre un danger inventé de toutes pièces.

Que répond le gouvernement par son projet de loi no 59 à notre analyse de la situation?

Il proclame faire confiance à la responsabilité des travailleurs et souhaite, comme nous, que la discussion sur les services essentiels ait lieu au niveau local.

Pourtant, l'importance que le projet de loi accorde à cette étape de négociation, malgré les déclarations d'intention du ministre, est très faible.

En effet, l'employeur n est tenu, ni de formuler une demande de services essentiels, ni de rencontrer le syndicat à ce sujet.

Bien plus, le gouvernement situe ces discussions entre le neuvième et le sixième mois qui précèdent l'échéance de la convention, soit près

d'une année avant la grève, s'il doit y avoir grève, et il ne prévoit, ou en tout cas ne cherche nullement à favoriser, la poursuite des discussions.

Ou bien le gouvernement n'a pas reconnu que la définition des services essentiels change au jour le jour pendant l'exercice des moyens de pression, avec le nombre de patients, le comportement des cadres, celui des médecins, celui des autres groupes syndiqués, etc., ou bien, après tout, ces discussions entre les parties lui importent peu.

De fait, ce que le projet de loi soigne particulièrement, ce à quoi le gouvernement a accordé une importance primordiale, ce sont les mécanismes par lesquels le droit de grève sera contraint ou même supprimé et non pas la discussion entre les parties.

Il prévoit, par exemple, à l'article 99 paragraphe i) que "la grève ne peut être déclarée par une association accréditée à moins qu'une entente ne soit intervenue ou qu'une liste n'ait été déposée. " Est-ce à dire que le syndicat qui n'aura pas publié de liste se verra condamné à la grève illégale, qui sera considérée telle, même si ce syndicat, dans les faits, assure les services essentiels?

Il prévoit, de plus, l'envoi d'un avis de grève de 48 heures, perpétuant par là une situation qui a conduit dans le passé à d'innombrables grèves illégales dans le secteur public. Cette mesure introduit en effet une contrainte supplémentaire au déclenchement de la grève alors que le syndicat a acquis la conviction d'en avoir le droit après des mois de négociation de bonne foi et devant une résistance patronale qu'il sait bien ne pas pouvoir affaiblir autrement.

Si, en plus, on entre dans le jeu des avis de 48 heures qui ne peuvent être renouvelés qu'après le jour indiqué dans l'avis précédant, l'absurdité devient délirante, et tout ça pour éviter de prétendues surprises à l'employeur.

D'ailleurs, à cet égard, le texte du projet de loi ne dit même pas clairement si l'avis de 48 heures s'ajoute à l'avis de huit jours prévu à l'article 99 du code.

Il prévoit surtout la suspension du droit de grève par le Conseil des ministres, que la grève menace seulement ou qu'elle soit en cours, que les services essentiels soient assurés ou pas, en vertu d'une entente ou d'une liste syndicale.

Il prévoit enfin, du moins rien ne nous permet de penser le contraire, l'utilisation des injonctions en vertu de l'article 99 du Code du travail. (12 h 30)

On comprend aisément dans ces conditions que le gouvernement n'ait pas osé faire plus que des allusions à la possibilité d'ententes locales sur les services essentiels et qu'il ait "oublié" de faire quelque obligation que ce soit au patron local d'avoir à négocier cette question de bonne foi. En effet, la multiplicité des moyens répressifs qu'il met à sa disposition poussera plus probablement la partie patronale à attendre que le syndicat ait émis une liste de services, ensuite à plaider que cette liste est déraisonnable et aussitôt à prendre l'initiative de la répression. Cette opération lui sera rendue d'autant plus facile que la liste aura été émise au moins six mois à l'avance, ce qui laisse le temps nécessaire pour trouver les moyens de faire croire qu'elle est effectivement déraisonnable. D'ailleurs, le texte de l'article 99i laisse entendre que ce sera précisément là la tâche dévolue au comité neutre sur les services essentiels.

En effet, le gouvernement ne songe même pas à donner comme mission prioritaire à ce comité celle d'informer les utilisateurs potentiels des services de santé et de services sociaux des moyens dont ils disposent pour recevoir les services disponibles au moment du conflit. Il entend clairement, au contraire, l'ériger en juge des propositions et des comportements syndicaux en matière de services essentiels. On a déjà exprimé notre opinion là-dessus. Aussi, comment le gouvernement peut-il s'attendre que les syndiqués considèrent que l'étape de la discussion des services essentiels, tels qu'encadrés par le projet de loi no 59, n'a d'autres fonctions que celle de préparer l'interdiction à la grève?

A l'analyse, on découvre, en somme, que si le gouvernement se rend à notre souhait de voir disparaître la loi 253, c'est pour aussitôt la remplacer par une loi étrangement semblable. Quant à nous, seules les apparences auraient changé.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Rodrigue. M. Charbonneau, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter?

M. Charbonneau (Yvon): On est ici pour répondre aux questions dans l'échange de vues qui va suivre l'exposé.

Le Président (M. Boucher): M. Laberge? M. le ministre.

M. Forget: Est-ce qu'on passe immédiatement à la période des questions?

Le Président (M. Boucher): On doit suspendre la séance à 13 heures. Est-ce que la période des questions...

M. Johnson: Est-ce que vous préférez qu'on suspende avant et qu'on procède aux questions après, en revenant? On pourrait suspendre la séance immédiatement. Est-ce qu'on pourrait reprendre à 14 h 30 plutôt qu'à 15 heures? Est-ce que le règlement nous l'interdit?

Le Président (M. Boucher): L'ordre de la Chambre est pour 15 heures.

M. Forget: Mais de consentement unanime, on peut...

M. Johnson: Si on a le consentement unanime, on pourrait reprendre à 14 h 30. Est-ce qu'on a le consentement unanime de ce côté de la table? A 14 h 30, pour nous permettre, peut-être, d'accélérer les choses jusqu'à 18 heures. On pourrait faire le... Alors, on se revoit à 14 h 30.

Le Président (M. Boucher): Du consentement

unanime, la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 h 30.

M. Johnson: 14 h 30.

M. Rodrigue: On a compris qu'on n'avait pas le...

M. Johnson: ... consentement, cela peut aller. M. Rodrigue. C'est vrai pour tout.

M. Laberge (Louis): Est-ce que le président pourrait nous faire part de la décision?

Le Président (M. Boucher): Pardon? La commission suspend ses travaux jusqu'à 14 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 33)

Reprise de la séance à 14 h 40

Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s il vous plaît!

A la suspension d'à midi, nous avions entendu le mémoire conjoint de la CSN, CEQ et FTQ, et nous en étions à la période des questions. Je donne immédiatement la parole à M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, avant d'aborder les commentaires et les questions au sujet du mémoire du groupe, puis-je suggérer, avant qu'on passe à travers ce mémoire, que nous ayons une période de questions, en principe, à peu près jusqu'à 16 h 30 et qu'ensuite nous puissions entendre la Fédération des infirmières et le COPS, s'il est présent, à 16 h 30, ce qui nous permettrait peut-être de terminer nos travaux pour 18 heures? Est-ce que cela irait, en partageant le temps à peu près comme hier entre les deux côtés?

M. Brochu: D'accord.

Le Président (M. Boucher): D'accord. Très bien, M. le ministre.

M. Johnson: J'ai lu le mémoire conjoint de la CSN, de la CEQ et de la FTQ en même temps que je l'ai entendu. J'aurais quelques remarques préliminaires. Vous touchez, dans le fond, les trois grands secteurs qui sont le calendrier, l'information et les services essentiels. Vous référez aussi, dans un historique d'une page et demie, à ce qui s est passé depuis 1966. Je ferai peut-être une première remarque en disant qu'il ne faut pas oublier qu'en 1966 ces administrations hospitalières ont été mises en tutelle et que la sanction de leur comportement, à l'époque, a été la mise en tutelle générale dans un contexte où la centralisation était déjà amorcée au Québec et où l'Etat commençait à vivre avec les conséquences du financement généralisé du système hospitalier.

Il y a certaines choses qui me frappent comme étant imprécises — j'espère que ce ne sont pas des procès d'intention que le mémoire veut faire — comme étant un peu, pour utiliser lexpres-sion anglaise, one sided". A la page 3, entre autres, on dit: Les parties syndicales ont-elles mis de trop grands retards à déposer leurs demandes? Il faut leur imposer par voie législative de le faire désormais à une date fixée d'avance .

Je ferai remarquer que ces deux paragraphes s appliquent également au secteur gouvernemental, au secteur patronal, qui sera lui aussi soumis publiquement à des délais. La sanction n'est évidemment pas de rendre des offres et des demandes illégales. Je n'ai jamais vu des offres et des demandes illégales. La sanction est évidemment de nature publique.

Je pense d'ailleurs que le député de Joliette aura des commentaires là-dessus un peu plus tard, quand il en viendra à prendre la parole.

Sur la question du calendrier, il ne faut quand même pas oublier que ce à quoi on assiste dans le secteur de I éducation et de la santé au Québec, c est à une négociation sectorielle qui n existe qu à un seul autre endroit, celui de la construction. Compte tenu de cela, il n'y a pas 32 façons de I'envisager, puisqu'il s'agit d'une négociation sectorielle, à moins, évidemment, que les parties syndicales préfèrent qu'on applique la Loi des décrets et qu'on prenne une convention collective quelque part, négociée par le Syndicat des hôpitaux de Montréal, par exemple, et qu'on l'étende à tout le Québec. Se servir de la Loi des décrets serait une solution pour régler le problème secto-riellement, mais je ne le pense pas. Nous avons affaire à une négociation sectorielle; deuxièmement, à une négociation qui touche quand même un nombre considérable de travailleurs et, finalement, à une négociation dans des secteurs qui sont, pour la population, des secteurs névralgiques, sans la dispensation desquels la population aurait plus que droit d'être insatisfaite. Le droit à I'éducation et le droit à la santé, ce sont des choses consacrées dans nos lois.

Dans ce contexte, il est bien évident qu'il y a certaines règles qui vont au-delà de la Loi des décrets ou du Code du travail. On affirme bien, dans le préambule, dans le premier article de ce projet de loi qui touche la section des articles 99 et suivants, que l'ensemble du code s'applique, sauf si des dispositions sont incompatibles. C est comme cela qu'on en arrive, entre autres, à fixer certaines dates. (14 h 45)

Des dates sont prévues dans le Code du travail. Ce he sont pas des dates fixes, mais ce sont des phases. On dit qu'on a affaire à une négociation sectorielle et on fixe certaines dates: celle de la remise de demande et de la réponse de l'Etat par des offres dans des délais minimaux pour essayer un an à l'avance de se dire que six mois avant l'expiration, il y aura déjà un bout de chemin de fait; c'est, je pense, le reproche qui a été fait dans ce secteur.

Je reviens à ce que je disais tout à l'heure; il y

a aussi le fait que la sanction, finalement, du non-respect de ces dispositions, c'est une sanction publique, simplement, une sanction "politique" entre guillemets, pour l'Etat, employeur qui ne répondrait pas dans les délais comme pour le syndicat qui ne serait pas prêt à faire ses demandes.

La question de l'information m'apparaît essentielle, particulièrement pour le quatrième pouvoir que sont les journalistes, ceux que vous avez qualifiés, tout à l'heure, de véhicules de l'autorité établie. Je ne savais pas qu'on dirigeait la presse à ce point. Ce sont peut-être les voyages du conseiller spécial de la CSN en Amérique latine qui lui font voir peut-être des parallèles qu'il ne faudrait pas faire. En fait, le groupe d'information dont on parle se veut, non pas une source alternative d'information, mais strictement une source additionnelle d'information. La loi prend bien la peine de fixer des moments précis où ce groupe d'information fait état du dossier sur la place publique, et d'autre part, rend accessible aux journalistes comme aux autres qui sont intéressés, ces données de la négociation. Il faut voir cela non pas comme une source alternative, encore une fois, mais vraiment comme une source additionnelle d'information.

Finalement, on arrive à la question des services essentiels. Pour d'abord répondre à certaines choses techniques, par exemple l'avis de huit jours, tel que rédigé en ce moment, le projet de loi ne prévoit pas qu'il y ait deux avis, un de huit jours et un de quarante-huit heures. Encore une fois, le préambule de la section des articles 99 et suivants qu'on retrouve à l'article 4 du projet de loi dit bien qu'à l'exception de la section I A qui touche la première convention collective, les dispositions du présent code s'appliquent aux relations de travail dans le secteur public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables avec celles du présent chapitre.

Ce qu'on dit, c'est qu'à cette section, l'ensemble du code s'applique, sauf ce qui est incompatible avec ce qui suit à partir de l'article 4. Or, il y a des dispositions qui prévoient l'avis de quarante-huit heures là-dedans, donc l'avis de huit jours est incompatible avec l'avis de quarante-huit heures, donc ce sont les dispositions de l'article 99a et suivants qui s'appliquent et non pas de l'article 99.

Ceci dit, cela pose un problème de fond qui a été soulevé, hier, par les représentants, particulièrement, de l'AHPQ qui nous ont dit: Vous savez, quarante-huit heures, ce n'est pas très long, et ils ont donné l'exemple suivant: Si l'avis de grève arrivait, par exemple, un vendredi soir à 20 h, cela veut dire que le dimanche soir à 20 h, le droit de grève serait acquis. On sait que les patients qui sont classés B... Il y a trois façons de catégoriser les patients en période de conflit dans les hôpitaux: A pour les patients qui ne peuvent sortir, B pour les patients qui peuvent sortir, mais à condition qu'on ait un certain contrôle sur l'environnement dans lequel ils vont se retrouver, qu'ils soient accompagnés, etc., et C pour les patients qui peuvent être considérés comme des patients ambulants, pour lesquels il n'y a pas de précautions plus particulières à prendre que pour n'importe quel citoyen d'une condition analogue qui n'est pas à l'hôpital.

Quarante-huit heures, nous disent les gens de l'AHPQ... Ils nous ont confirmé, si je me souviens bien, certains des groupes de médecins nous ont dit que ce n'est pas très long pour décider de mettre en branle ce qu'il faut dans l'hôpital, pour qu'on soit dans des conditions... Encore une fois, pas pour permettre à l'administration, par définition, de faire face à cela avec le moins de problèmes possible, mais peut-être pour éviter que les citoyens qui sont des patients concrètement alités dans un hôpital, soient pris dans un "rush"; ce serait quelque chose d'un peu inhumain.

La notion de l'avis de quarante-huit heures pose un problème et j'avoue que les membres de la commission ont été assez sensibles aux arguments apportés hier par l'AHPQ.

Je terminerai mes commentaires en me réservant le droit de revenir avec des questions spécifiques lorsque la balle sera allée du côté de l'Opposition et reviendra chez nous, avec une phrase à la page 4 qui m'a un peu déçu, où on dit: "... Ou bien il tente d'avoir l'air sur le dos des travailleurs de garantir les services essentiels et, par conséquent, d'avoir l'air d'assurer la sécurité à une population que les conflits de travail dans les secteurs public et parapublic inquiètent." Cela ne m'intéresse pas ce que cela a l'air; ce qui m'intéresse, c'est: Est-ce que oui ou non le monde dans les hôpitaux est traité convenablement, compte tenu de la crise qui sévit. Et le fait que notre société accepte que le droit de grève existe dans le secteur hospitalier, ce serait une chose facile pour un gouvernement, démagogiquement, d'aller sur la place publique et dire: On va abolir cela. Mais je ne suis pas sûr que cela correspondrait à une évolution souhaitable dans notre société. Cela s'est fait ailleurs et il s'agit de faire des sondages bien vite pour savoir que ce serait très populaire d'abolir le droit de grève, mais je ne pense pas que ce soit une solution, honnêtement. De toute façon, je pense que ce serait impraticable si cela devait être adopté pour des raisons démagogiques.

Au-delà de cela, l'Etat n'a pas le droit, je pense, d'abdiquer sa responsabilité face à la santé publique. Ce n'est pas une question d'avoir l'air et d'apparence, c'est une affaire d'essayer de trouver les mécanismes qui réconcilient à la fois le droit de grève qu'on reconnaît, et, deuxièmement, la vocation de l'Etat de s'assurer de prendre les moyens qu'il peut prendre pour garantir la santé publique. Le postulat que nous faisons, c'est que les parties sont responsables et, ultimement, la partie syndicale, dans le cas d'une absence d'entente, est responsable et capable de le faire. Ce pari, nous le faisons pour les citoyens. J'espère qu'on ne se trompe pas.

C'est ce que j'avais à faire comme commentaires préliminaires, je reviendrai peut-être à des questions plus spécifiques.

Le Président (M. Boucher): M. Laberge.

M. Laberge (Louis): M. le Président, M. le ministre, membres de la commission, je ne sais pas trop comment commencer mes remarques. Je voudrais faire un petit tour d'horizon, un peu comme le ministre vient de le faire. J'ai peur que le ministre ne se soit peut-être un peu trop attaché aux expressions, à la formulation du mémoire, plutôt qu'au fond. Qu'on aime ou qu'on n'aime pas la formulation, le fond, on n'y échappe pas. Je l'ai déjà dit, et je le répète — je ne suis même pas allé en référendum chez moi pour savoir si tout le monde est d'accord — j'ai pensé que nous étions entrés dans une ère nouvelle et qu'on pouvait quasiment tous se payer le luxe d'essayer. Je dois vous dire que je pense que vous manquez le bateau.

Là, je vais essayer de toucher des points. De commencer les négociations six mois avant, personne n'est contre cela, au contraire, c'était unanime tant en paroles que par la pensée chez nous; si ce n'est pas assez six mois, commençons neuf mois avant. Il n'y a absolument rien là. On est d'accord qu'il y ait une date limite, c'est à l'échéance de la convention collective. Cela crée des chaos, cela crée du mécontentement et ce n est pas une situation normale. Là-dessus, nous sommes entièrement d'accord.

Pourquoi dire: Les demandes syndicales devront être déposées tant de jours après, la réponse patronale tant de jours après? Lorsqu'on vous avait rencontré — pas à la commission parlementaire du travail mais au sein d'un comité formé de plusieurs représentants du gouvernement — on vous avait dit: Pourquoi le monde patronal, dans le secteur public, ne serait-il pas obligé, lui aussi, de déposer, à la même date que nous, ses demandes? Ce n'est pas vrai que le monde patronal ne fait que répondre aux demandes syndicales. D'ailleurs, je ne sais pas si vous vous en souvenez, peut-être que M. Forget s'en souvient — excusez-moi, je ne suis pas, comme vous, habitué à dire M. le député de tel comté, je n'ai pas cela à la mémoire, je connais quasiment tous les membres, chez nous, par leur nom parce qu'ils votent pour moi mais vous autres, bien... — que, dans le temps, cela avait été l'accrochage majeur. On s'est battu pendant des mois, des mois et des mois pour essayer de garder le statu quo sur je ne sais combien de clauses normatives.

Bien sûr qu'on était en demande, mais la partie patronale nous faisait régresser, par exemple, dans le cas des congés de maladie, dans le cas de la banque de congés de maladie, dans le cas de la caisse de retraite, enfin, un tas de choses, et cela a pris des mois. Pourquoi la partie patronale ne devrait-elle pas elle aussi être obligée de déposer ses demandes, en même temps que le syndicat? Pour ne pas dire trente jours, si c'est 29 jours, c'est 29 jours, si c'est 32 jours, il n'y a rien là, pourvu que tout le monde le sache fort bien et qu'au fur et à mesure du déroulement des négociations, le public soit informé.

Là, j'en viens à votre comité d'information. Là aussi, nous vous avions fait une intervention et nous avons dit: Le comité d'information, peut-être que cela pourrait jouer un rôle utile, surtout si le comité a comme mandat et a comme prérogative et comme droit d'aller fouiller, non pas seulement de recevoir les informations de la partie patronale et de la partie syndicale, mais d'aller fouiller, d'aller chercher des choses que l'une ou l'autre ou les deux parties veulent lui cacher. Peut-être qu'à ce moment-là, cela pourrait servir. Mais, apparemment, ce n'est pas ce que vous suggérez dans le projet de loi; c'est tout simplement un comité qui va être là, qui va assister, qui va écouter et qui va émettre son opinion devant l'opinion publique. Ce n'est pas un comité nanti des pouvoirs. A ce moment-là, on vous l'avait dit dans le temps, cela nous fait un peu peur, parce que ce sera peut-être seulement un organisme de propagande. Il est bien évident que le mouvement syndical, tout comme le gouvernement, essaie de convaincre les media d'information de la justesse de nos positions. Cela, c'est sûr. Je pense que cela fait partie du jeu normal d'une démocratie avec une information, une presse libre. Cela est de bonne guerre. Mais, déjà, le gouvernement a des moyens de propagande énormes, à comparer à ceux que nous avons, pour créer un comité d'information qui ne ferait que refléter les informations qu'il peut recevoir du côté gouvernemental, alors que tout est caché. Le secret professionnel, il n'y a que la Gendarmerie royale qui soit au courant de tout tandis que, dans le monde syndical, ce n'est pas pareil. Les assemblées sont toujours publiques, tout le monde est là, enfin, des informateurs il y en a des centaines et des centaines.

Alors, pour le comité d'information, vous semblez toujours vous préoccuper des services essentiels de santé lors de conflits. Je suis bien obligé de vous dire que je déplore énormément que vous ne semblez pas vous soucier, pas plus que l'ancien gouvernement ne s'en souciait, des services essentiels de santé en temps normal. On a parlé d'un comité. Pourquoi n'y aurait-il pas un comité, en temps normal, qui pourrait évaluer la qualité des services qu'on assure au patient? Bien non, c'est juste en cas de conflit que vous aurez un comité qui viendra évaluer la liste des services essentiels du monde syndical. Je reconnais que c'est un pas dans la bonne direction. Il y aura une liste déterminée par le syndicat. Le syndicat sera responsable de sa liste. Si cela n'est pas suffisant... Mais, encore là, il n'y a absolument aucune contrainte vis-à-vis des cadres, vis-à-vis de la direction des hôpitaux. Il n'y a pas un administrateur d'hôpital qui va se sentir obligé de faire un pouce de plus qu'il ne le fait, même s'il y a une crise. Il pourra faire sa partie de golf l'après-midi ou je ne sais quoi, et, les fins de semaine, les salles d'opération continueront d'être vides. S'il y a une crise dans les relations industrielles, dans les hôpitaux, par exemple, dans les services de santé, à l'occasion des prochaines négociations, bien sûr qu'il faut que tout le monde s'attende que ce ne soit pas une situation normale. Si. en temps normal, il se fait dans un certain hôpital cinq ou six interventions chirurgicales dans une journée, il est possible que cela soit plus difficile. Pourquoi

ne ferait-on pas des interventions sept jours au lieu de se limiter à cinq jours? Est-ce que le fait qu'une intervention ne se fait pas le mercredi met la vie d'un patient en danger — je parle évidemment de façon générale — plus que de ne pas faire d'intervention chirurgicale le samedi et le dimanche? Ou d'en faire le soir ou la nuit? (15 heures)

Vous savez qu'on a charrié là-dessus. Tout le monde se préoccupe de la qualité des services de santé, s'il y a danger de conflit. Personne n'en parle. On a parlé de coupure de budget, on a parlé de disparition de postes. Cela, ce sont des décisions politiques. Cela regarde le gouvernement et, moi, je reconnais que le gouvernement se doit de penser à ces choses. Ce sont ses prérogatives. C'est non seulement son droit, mais c'est sa responsabilité première. Je n'ai rien à redire à cela, sauf qu'en temps normal personne ne se préoccupe s'il y a un service d'urgence adéquat à tel endroit ou si le patient blessé est obligé de faire 22 milles avant de trouver un endroit pour être reçu. Personne ne se soucie de ça. Personne ne se soucie du fait qu'en fin de semaine il n'y a pas de médecins adéquats pour donner les services d'urgence ou qu'après 5 heures ça ne lui tente pas de travailler. On a vu ça. C'est arrivé, et ça n'a scandalisé personne. S'il fallait que la même chose arrive durant un conflit de travail, on serait honni par tout le monde. C'est ça que je ne trouve pas correct.

Votre comité qui s'assure des services essentiels, à mon sens à moi, en tout cas, devrait s'assurer de la qualité des services donnés aux patients en tout temps, non seulement en cas de conflit, mais en tout temps. Il faudrait que ce comité aussi s'assure que le climat de panique créé des mois à l'avance par les administrateurs d'hôpitaux en vidant les lits, en laissant allonger les listes d'attente, que ce climat soit banni de nos relations industrielles.

On crée un climat tel qu'on ne peut plus y échapper, même avec la meilleure volonté du monde, et ça, c'est arrivé à chaque négociation. On vide les hôpitaux. On a des hôpitaux occupés à 30%, 40% ou 45%. Tous les autres sont partis, et tout le monde pense que c'est à cause de la négociation, alors que c'est dû à la stratégie patronale. Il n'y a rien dans la loi qui empêche le monde patronal de faire quelque stratégie que ce soit.

Vous avez parlé de la liste des services essentiels. Je l'ai dit tantôt, moi, je pense que c'est un pas dans la bonne direction. Vous n'avez pas osé aller plus loin; ça, c'est une décision politique et, évidemment, je suis un peu mal placé pour vous conseiller là-dessus. C'est vous qui avez la responsabilité politique. Encore là je vous dis que vous manquez le bateau. Toutes les autres méthodes ont été essayées: lois spéciales, lois matraques, injonctions, tout a été essayé et cela n'a pas fonctionné. Il y a même des pays qui ont décidé d'enlever le droit de grève complètement dans les services publics, par exemple en Nouvelle-Zélande, et allez voir; il y a plus de journées de travail perdues à l'occasion de conflits syndicaux qu'il y en a ici au Québec alors qu'on a le droit de grève dans le secteur.

Je n'ai pas vu de policiers condamnés parce qu'ils avaient fait une grève illégale. Je n'ai vu personne condamné parce qu'il avait incité quelqu'un à faire quelque chose d'incorrect, sauf un que je connais bien.

M. Johnson: ...été condamné.

M. Laberge (Louis): Qui n'est pas policier. La différence entre moi et les autres, c'est que je ne suis pas armé. Je ne sais pas si c'est la seule différence.

De toute façon, on sait fort bien que les lois matraques n'ont jamais rien réglé; elles ont été essayées et elles n'ont pas fonctionné. A l'Hydro-Québec, lors des dernières négociations, les travailleurs ont décidé d'assurer les services essentiels et ils ont été tellement bien assurés que le juge a même refusé une injonction. Cela ne s'était jamais vu encore et cela s'est vu à cette occasion.

Je reconnais que c'est difficile pour vous; je reconnais cela. Là, on joue avec quelque chose d'extrêmement sensible et il est bien évident que l'opinion publique, voyant une couple de photos seulement, pourrait s'émouvoir assez facilement. Mais je pense que nous tous en avons vu d'autres. Ce qui est important, c'est non pas de trouver une espèce de machinerie qui va nous faire traverser les périodes de crise les plus longues possible le mieux possible, mais plutôt de tenter des efforts pour éviter les périodes de crise et essayer d'en arriver à des règlements.

C'est dans ce sens-là, M. le ministre, M. le Président, messieurs les membres de la commission, que je trouve que votre projet de loi, tout en ayant des choses qu'on ne peut pas décrier, manque quelque peu le bateau, tout en disant faire confiance aux travailleurs, en n'osant pas aller au bout du rouleau en disant: On vous fait vraiment confiance. Vous n'avez pas besoin de dire dans une loi que le Parlement est souverain; vous n'avez pas besoin de dire cela dans une loi. Le Parlement est toujours souverain.

Si vous faisiez confiance et que cela ne fonctionnait pas, vous auriez toujours le loisir de revenir et de dire: Cela n'a pas fonctionné; il va nous falloir faire autre chose.

Pour le moment, je termine là-dessus maintenant.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Laberge. M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Yvon): M. le Président, messieurs les membres de la commission, M. le ministre, je voulais aussi attirer votre attention sur tout ce qui touche le conseil d'information, tout en souscrivant aux propos que vient de prononcer Louis Laberge. Je voudrais soumettre notre analyse de ce conseil d'information qui aurait le pouvoir d'informer le public sur les enjeux de la négociation et sur les écarts séparant les parties, et le troisième aspect, il est nommé par le juge en chef du tribunal.

Quant au mode de nomination, nous ne voyons pas d'intérêt à ce qu'un tel comité relève d'un pouvoir tel qu'un tribunal, quel qu'il soit, mais, sur le fond, nous avons l'impression que c'est une espèce de renaissance d'une idée que nous avions mise de l'avant il y a plusieurs années même, celle d'un centre d'information ou d'une banque de données, mais cela refait surface sous une autre forme complètement et, à notre avis, ce n'est pas acceptable. Nous avions nous-mêmes été d'accord, lors des précédentes rondes de négociation, pour constater les lacunes du côté de notre capacité d'accumuler des données dignes de confiance et incontestables sur un certain nombre d'aspects, soit dans l'inventaire de nos effectifs, soit dans l'évaluation de nos demandes ou l'évaluation des offres.

Nous savons qu'il y a là une marge d'approximation et on avait mis de l'avant le concept d'une banque de données qui auraient pu être au service des différentes parties. On avait cru comprendre aussi qu'il y avait un intérêt certain, au moins verbal, chez un certain nombre de porte-parole du gouvernement, dans cette idée. C'est ainsi que cela a été mentionné comme possibilité durant la campagne électorale, cela a été mentionné aussi comme possibilité par le ministre de Belleval dès le mois de décembre 1976 et cela a été mentionné aussi à l'occasion du sommet économique. La commission Martin-Bouchard a écrit au gouvernement, au mois de septembre 1977, pour lui dire qu'il y avait un sérieux retard dans la mise en place de cette banque de données. Toujours que les mois passent et, aujourd'hui, ce que vous proposez, c'est un conseil d'information qui est présenté comme étant neutre, mais dont on sait à l'avance à l'avantage de qui il va jouer. On voit mal comment un conseil d'information pourrait, au nom de l'intérêt public, définir les enjeux d'une négociation. Nous avons déjà vu différentes personnes ou différents mécanismes essayer d'interpréter les enjeux d'une négociation. Il y a des approches très différentes à ce sujet, partant des plus catastrophiques jusqu'aux plus ordinaires. Même chose pour la notion d'écart.

De deux choses l'une: Nous, nous disons que ce conseil d'information va être équipé d'une manière très sommaire. Il va faire un peu ce que peuvent faire des journalistes de bonne foi qui assistent à des conférences de presse des deux parties, patronale et syndicale. S'ils s'aperçoivent qu'il y a un écart de $100 millions entre ce que prétendent les uns et les autres, ils disent au public: Voici, il y a un écart de $100 millions ou il y a un écart de 10 000 effectifs. A ce moment-là, quelle est l'utilité d'avoir un conseil équipé d'une manière aussi sommaire?

Ou bien, d'autre part, c'est un conseil qui sera équipé d'un appareil de recherche, d'un appareil des ressources capable d'aller faire la vérification par lui-même des versions des uns et des autres et, à ce moment-là, d'apporter son propre éclairage, mais cela demande un équipement substantiel. C'est là que je vous dis que nous avons l'impression de voir réapparaître tout ce qu'il fallait pour une banque de données au service des parties, mais cette fois-ci au service d'une des parties.

Nous ne pouvons pas être d'accord avec cette formulation, pas plus qu'avec le paragraphe suivant qui dit que le conseil doit faire rapport en tout temps ou à la demande de l'une des parties. Comme ce sont des sources d'information qui nous échappent, qu'on nous avait laissé entrevoir comme accessibles en vertu de certains principes de transparence au niveau des données, c'est une innovation dont on aurait pu se passer que cet article 99e et les articles qui suivent.

Le deuxième point sur lequel je voulais faire quelques commentaires, c'est à propos des délais qui existent aux articles 99g et 99h, les délais imposés ou les étapes pour ce qui est du démarrage ou du lancement de la négociation. Ici, on dit: La phase des négociations commence à compter du 180e jour; il y a un dépôt obligatoire de la part de la partie syndicale à partir du 150e jour et deux mois après, le dépôt patronal obligatoire.

Je souscris aussi à ce que le président de la FTQ a dit, comme inégalité de position de départ entre les deux parties. On impose à l'une de partir plus vite et mieux plutôt qu'à l'autre. L'autre peut toujours se garder le temps d'analyser, d'ajuster les choses, alors qu'elle aussi peut être en demande. Là-dessus, j'y souscris.

Mais nous croyons, d'une manière générale, que vous avez peut-être cherché à transposer l'économie du Code du travail de trois mois à l'avance, à faire démarrer au 1er janvier ce qui pourrait, si on laissait le code tel qu'il était, démarrer à compter du 1er avril. Mais vous y avez ajouté un caractère d'obligation, en même temps, non pas simplement de permettre le début, mais un caractère d'obligation au démarrage de la négociation. A notre avis, cette rigueur ne devrait pas être imposée. Elle pourrait être suggérée, les phases pourraient être suggérées, comme on pourrait le faire en transposant le Code du travail, en le devançant de trois mois.

Mais je voudrais aussi souligner qu'il faut mettre en relation ces articles avec certains articles du projet de loi 55, qui traitent de la négociation ou de la possibilité de négocier à plus d'un palier, notamment au niveau de la négociation locale, pour ce qui est du secteur des enseignants à l'élémentaire et au secondaire, à tout le moins, tel que nous vous l'avons déjà demandé.

En essayant de faire les relations qui s'imposent entre les deux passages des deux projets de loi, je me dois de vous dire que le démarrage de la négociation tel qu'il est pensé aux articles 99g et 99h, crée un carcan qui n'est pas fonctionnel du tout, qui n'est pas acceptable, pour ce qui est de la négociation locale, s'il doit y en avoir.

En effet, ici, vous ne faites aucune distinction entre les demandes syndicales qui doivent être déposées à un palier national, sectoriel, et les demandes syndicales qui devraient être déposées au niveau local.

En pratique, puisque les négociations ou les prénégociations, la phase préalable se sera déroulée d'octobre jusqu'à la fin de décembre, il est

impossible pour nous, en connaissant les résultats qui arriveront en janvier, d'être prêts à déposer des demandes au niveau local, qui soient vraiment fonctionnelles, comme base de négociation.

En somme, on ne peut pas mettre dans les mêmes délais, s'il doit y en avoir de suggérés — d'imposés, on ne croit pas que ce soit opportun — qu'on puisse encarcaner la négociation locale selon un même schéma de départ. Ce n'est pas praticable. Il y en a, parmi votre groupe, qui peuvent certainement savoir de quoi je parle. (15 h 15)

Un dernier point. C'est un passage au bas de la page 7 de notre mémoire. Encore une fois, ici, ce que nous avons voulu souligner, dans le dernier paragraphe, c'est un déplacement des possibilités d'un rapport de forces inhérent aux négociations. Si des négociations doivent se dérouler, comme votre projet de loi le suggère, le propose, ou l'impose, à partir de février, cela fait cinq mois avant la fin des conventions collectives et il y a une dissociation ici entre l'exercice du droit à la négociation et les possibilités d'établir un rapport de forces. Il y a ici un accroissement de cet écart qui existe déjà dans le code actuel. Cette dissociation est devenue plus grande avec ce que vous suggérez, ce que vous proposez dans le projet de loi.

Mon dernier point, ce sera plutôt une question d'information. C'est à propos du projet de loi 55. Vu qu'il y a des relations entre les deux projets de loi, nous aimerions savoir s'il va y avoir une commission parlementaire, à compter des prochains jours, pour qu'on puisse faire les liens qui s'imposent entre les deux projets de loi et si vous comptez adopter ce projet de loi dans les mêmes délais que ceux du projet de loi 59.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. Char-bonneau.

M. Johnson: Pour ce qui a trait à votre dernière question, M. Charbonneau, si on entend adopter le projet de loi avant le 23 juin, effectivement, en principe; s'il y aura commission parlementaire sur invitation, par exemple, comme celle-ci, normalement, la décision sera prise demain. On sera fixé demain. Evidemment, cela pose des problèmes considérables, compte tenu du fait que le 23 juin n'est pas très loin et que cela veut dire peut-être une journée pleine pour une commission parlementaire qui serait celle, sans doute, présidée par le ministre des Finances ou enfin dont le ministre des Finances est responsable, puisque c'est lui qui parraine le projet de loi. Mais la décision sera prise demain.

Le Président (M. Boucher): M. Rodrigue.

M. Rodrigue: M. le Président, M. le ministre, ces quelques commentaires à ajouter à ceux de mes camarades seront très brefs. Je voudrais d'abord souligner au ministre du Travail qu'effectivement, les problèmes de l'Amérique latine nous intéressent, mais les problèmes d'ici nous intéressent aussi au plus haut point.

Comme mon camarade Laberge l'a mentionné, les méthodes qui consistaient à enlever ou à restreindre le droit de grève dans le passé, à l'expérience, nous a démontré, en tout cas, que les diverses tentatives qui ont été faites n'ont pas apporté le résultat attendu par ceux qui les ont faites. Toute position de fond, ou notre position de fond revient à dire, en quelque sorte, notamment sur les services essentiels, qu'il faut trouver le moyen de conduire les parties engagées, de façon effective, vers leurs responsabilités dans ces occasions. Je trouve important de le souligner. C'est pour cela que je le fais, parce qu'il me semble qu'on l'a répété à plusieurs reprises. C'est votre droit d'en tenir compte ou de ne pas en tenir compte totalement ou partiellement, je reconnais cela. C'est aussi légitime de notre part de dire ce que nous avons à dire sur l'état de la situation, tout au moins au niveau des projets de loi.

Je voudrais dire aussi que, quant à nous, on n'a pas mis en doute la légitimité de l'Assemblée nationale et du gouvernement quant à des décisions ultérieures sur les diverses situations. Nous sentons, nous, le besoin de différencier ou de faire la différence entre l'Assemblée nationale, le gouvernement, et le cabinet des ministres, ou encore le président du Conseil du trésor. Il nous semble que s'engager dans une voie qui nous conduise à tout régler par décision du cabinet des ministres, ou par décret émanant du cabinet des ministres, ou encore par décision du président du Conseil du trésor — je pense qu'on ne se trompe pas là-dessus — c'est une pente pour le moins dangereuse. C'est ce qu'on veut souligner.

D'autre part, je voudrais souligner qu'en ce qui concerne l'information, on a bien pris soin de souligner dans notre texte qu'il s'agissait des media d'information. Il ne faudrait pas non plus nous faire dire ce qu'on n'a pas voulu dire et ce qu'on n'a pas dit en ce qui concerne les journalistes. Au contraire, on dit: Les journalistes... on le dit dans le texte même, on pense qu'il serait préférable de s'en remettre aux règles habituelles.

Finalement, sur les services essentiels, je voudrais, après avoir fait une remarque sur l'histoire à mon tour, rappeler qu'en 1966, effectivement, il y a eu tutelle des administrations hospitalières, sauf que la tutelle est venue après un certain nombre de gestes posés par elles, notamment le refus de négocier les services essentiels. Je pense qu'il faut se rappeler cela aussi.

Sur les services essentiels, quand l'Association des hôpitaux vous souligne que 48 heures pour se préparer à l'éventualité d'une grève... Je voudrais vous dire que par expérience dans le secteur hospitalier notamment, on a vécu à quelques reprises des situations difficiles et on a vu, effectivement, les hôpitaux procéder à toutes sortes de mesures préventives, alors même qu'il n'était pas question de grève dans le secteur hospitalier, et on a vu, comme Louis l'a mentionné, d'ailleurs, des services se fermer, des lits se vider, de façon systématique, de façon à pouvoir être en place, ou être organisé si jamais il y avait une grève de déclenchée.

Quand on m'oppose le délai de 48 heures ou

quand l'association oppose le délai de 48 heures, quant à moi, en tout cas, je vous souligne que c'est un motif et que c'est un argument que je ne retiens pas.

Deuxièmement, sur les services essentiels, je voudrais souligner à cette commission que les travailleurs sont autant, sinon plus, civilisés que certaines administrations hospitalières qui, en temps normal, soit par des règles administratives ou autrement, où on retrouve des situations comme on a vues dans certains hôpitaux de Montréal, notamment, où il y a effectivement des gens qui sont morts à la suite de refus, par exemple, de les admettre dans les salles d'urgence, etc.

Je voulais signaler ce fait, parce que ça m'apparaît fondamentalement une question où on veut, chaque fois, renverser le fardeau sur les travailleurs, alors qu'effectivement, sur les lignes de piquetage, quand ça s'est produit et quand il y a eu nécessité d'hospitaliser un citoyen, à ma connaissance, il n'y a pas eu de refus.

Finalement, je voulais le faire très brièvement, sur cette question des services essentiels, il nous apparaît que de conserver dans la loi, par exemple, la possibilité de recours à l'article 99 du Code du travail, et l'intervention stricte pour en arriver à enlever le droit de grève dans des cas spécifiques, ce n'est pas là, encore une fois, une mesure pour faire en sorte qu'on retrouve, dans ces situations, un climat acceptable, parce que, de toute façon, la démonstration a été faite, et nous le maintenons encore une fois, c'est aux parties entre elles, au niveau local, à régler ces questions, même si — on le constate, d'ailleurs, dans le projet de loi — il n'y a pas de règle qui impose à l'employeur l'obligation de négocier, l'obligation de discuter avec le syndicat, etc. On le constate et on le souligne, parce que ça nous apparaît important, parce que les administrations peuvent facilement se défiler devant ça, comme on l'a déjà connu dans l'expérience passée et, pour nous, ça devrait être des mesures qui les amènent et les forcent aussi à faire l'effort qu'il faut pour amener ou conduire à une entente sur cette question au cours des négociations.

M. Johnson: M. le Président?

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Johnson: Si le député de Saint-Laurent me permet, j'ai seulement deux ou trois brèves questions très précises. D'abord, une précision. La notion de suspension du droit de grève, vous le remarquerez, à 99a et suivants, n'entraîne pas le recours à l'injonction. Cela est une des différences importantes. Il s'agit du décret du lieutenant-gouverneur en conseil, ce n'est pas une injonction prise par un juge sanctionnable par mépris de cour, dans ce sens-là, je pense que c'est extrêmement important de faire la distinction.

J'ai deux questions. La première, sur l'accessibilité. Vous avez dit, M. Rodrigue, qu'à votre connaissance, on ne refusait pas aux gens, pendant une grève, l'accès à l'hôpital. Je n'entre pas ici, dans les mérites ou les démérites des adminis- trations hospitalières, mais simplement concrètement pour dire que quand il y a une ligne de piquetage de 125 personnes devant l'entrée d'une salle d'urgence, concevez-vous que n'importe qui, qui veut avoir accès à l'hôpital, devrait avoir accès à l'hôpital?

M. Rodrigue: J'ai mal compris. Voulez-vous répéter, s'il vous plaît!

M. Johnson: Si vous avez une ligne de piquetage considérable qui fait qu'il n'y a qu'une seule entrée dans un hôpital donné, une porte d'urgence...

M. Laberge (Louis): ... M. Johnson: Pardon?

M. Laberge (Louis): C'est contre le Code de sécurité; cela en prend au moins deux.

M. Johnson: Une seule entrée accessible pour le public; il peut y avoir plusieurs sorties. Il n'y a qu une seule entrée, d'accord? Il y a un trottoir de quinze pieds qui la sépare du trottoir principal et, sur le trottoir principal, vous avez 125, 150 personnes qui font du piquetage, comme cela s'est déjà vu, comme je l'ai déjà vu devant une salle d'urgence. Concevez-vous que n'importe quel citoyen qui veut avoir accès à l'hôpital devrait y avoir accès ou pensez-vous que cela devrait être limité?

M. Rodrigue: J'ai mentionné, M. le ministre, qu'à ma connaissance, il n'y avait pas eu d'empêchement, sauf que je trouve qu'il est légitime, cependant, pour des piqueteurs, de vérifier si, effectivement, c'est un citoyen qui est dans l'ambulance et qui nécessite des soins. Ce que je veux souligner, c'est qu'à Sorel, dans le dernier conflit, mes informations m'indiquent qu'on a entré des "scabs " par toutes sortes de moyens, y compris ce moyen-là. Je trouve très légitime que la ligne de piquetage vérifie si. effectivement, c'est un citoyen qui vient pour être traité.

Généralement, dans les services essentiels, dans les hôpitaux, à ma connaissance encore une fois, et pour avoir participé à une grève personnellement, dans les salles d'urgence notamment, c'est un endroit qui nous préoccupe en temps de grève et il faut y assurer les services essentiels.

M. Johnson: Je veux simplement faire une remarque.

M. Laberge (Louis): Me permettriez-vous, M. le ministre, de répondre...

M. Johnson: Si vous me le permettez. Avant, je voudrais préciser une chose pour M. Rodrigue, si vous me le permettez, M. Laberge. J'ai vu des gens souffrant d'hémorragie aiguë à la suite de la rupture d'un ulcère rentrer les deux pieds bien debout dans un hôpital; ils n'étaient pas dans une ambulance. Je ne pense pas qu'il appartienne à qui que ce soit d'autre qu'à un médecin de décider si cette personne a besoin de soins. Est-ce que

vous allez être d'accord avec moi à ce sujet? Ce n'est pas nécessairement apparent, quelqu'un qui a un infarctus. Chez un homme de 60 ans, un infarctus peut passer pour des maux d'estomac.

M. Rodrigue: Je vous ai parlé de vérification, M. le ministre. J'ai vécu l'été dernier une situation où ma femme a fait un infarctus; j'ai dû la sortir de l'hôpital personnellement et l'amener chez son chirurgien qui a décidé de l'opérer d'urgence. Pourtant, c'est un diagnostic du médecin traitant à ce moment-là et l'hôpital me demandait de la sortir. Si on veut entrer dans des détails, on va donner des détails, si vous voulez.

M. Johnson: Oui. Mais, si vous me le permettez, je ne veux pas entrer là-dedans. Je pourrais vous dire que cela m'étonnerait un peu que le chirurgien ait décidé d'opérer votre femme pour un infarctus parce que je n'ai jamais vu cela en médecine.

M. Rodrigue: Elle avait fait un infarctus et elle avait été opérée pour le coeur l'année passée.

M. Johnson: Sûrement pas le même jour. M. Rodrigue: Pas sur-le-champ. M. Johnson: D'accord. M. Rodrigue: Non.

M. Johnson: Parce que, sans cela, j'aurais deux mots à vous dire au sujet de ce chirurgien.

M. Rodrigue: Je ne suis pas ignorant à ce point-là non plus.

M. Johnson: Oui, sans cela j'aurais...

M. Rodrigue: Mais on peut s'en parler, par exemple. Si vous voulez parler des détails dans les hôpitaux, je peux vous en parler un petit peu; je n'ai été là que pendant dix ans.

M. Johnson: Oui, je conçois cela. Je ne l'ai pas été aussi longtemps que vous, mais j'ai vu quelques affaires. Ce que je veux dire simplement, c'est ceci: Vous avez donné le cas de l'ambulance; cela m'apparaît bien important. Qu'un patient entre en ambulance ou qu'il entre sur ses deux pieds dans une salle d'urgence... Quelqu'un peut entrer en ambulance dans une salle d'urgence et avoir un problème qui est relativement mineur. Quelqu'un peut être sur ses deux pattes et faire un infarctus ou une insuffisance cardiaque.

Vous me dites qu'il est légitime pour les travailleurs de faire quelques vérifications à l'ambulance, etc. Qu'allez-vous faire avec le citoyen qui est sur ses deux pattes et qui dit: Moi, j'ai mal à l'estomac?

M. Rodrigue: Ce que j'ai affirmé, c'est que, généralement, à ma connaissance encore une fois — vous pouvez me sortir un cas ou deux peut-être — il n'y avait pas eu d'empêchement pour des citoyens qui avaient besoin de soins d'être traités dans les salles d'urgence en temps de grève.

M. Johnson: Oui, mais la notion de besoin de soins...

M. Rodrigue: Sauf les photos de certains journaux.

M. Johnson: La notion de besoin de soins est bien difficile à évaluer. La notion d'urgence, dans notre pratique médicale, dans une société civilisée, est définie comme étant l'urgence sentie par le patient et ce n'est pas une urgence objective. Dans ce sens-là, quand vous dites: S'il a besoin de soins, à ma connaissance, je veux bien être d'accord avec cela et cela m'étonnerait, de façon générale, qu'on ait empêché des gens d'avoir accès à l'hôpital. Ce que je vous dis, c'est qu'il n'appartient à personne de déterminer si quelqu'un a un besoin de soins urgents, à personne d'autre qu'au patient de sentir que, lui, il veut aller à l'hôpital.

M. Rodrigue: Je n'ai pas soutenu le contraire, M. le ministre.

M. Johnson: Bon! D'accord. Je veux juste être sûr qu'on se comprenne à ce sujet.

M. Rodrigue: Je n'ai pas soutenu le contraire; j'ai dit qu'il était légitime de vérifier si on nous passait deux "scabs" dans l'ambulance ou un patient qui venait pour être traité.

M. Johnson: Mais il y a des dispositions "antiscabs" qui s'appliquent.

M. Laberge (Louis): M. le Président... Le Président (M. Boucher): M. Laberge.

M. Laberge (Louis): ... vos dispositions "antiscabs", pourrait-on en reparler un peu plus tard?

M. Johnson: Oui. (15 h 30)

M. Rodrigue: Est-ce qu'il y en a un qui est sorti d'un conflit actuellement?

M. Laberge (Louis): M. le Président, je trouve la question du ministre malheureusement un peu "loadée" et je regrette de devoir faire cette intervention. Jamais on ne va empêcher quelqu'un qui pense qu'il a besoin de services d'entrer dans un hôpital, même s'il y a une grève. S'il y a des gars ou des filles chez nous qui les empêchent, on ira sur les lignes de piquetage et on arrangera cela.

M. Johnson: Je suis content de vous l'entendre dire.

M. Laberge (Louis): Ceci dit, il ne faut pas jouer les... non plus. Il ne faut pas non plus faire

entrer soi-disant le père ou la mère d'un patient qui veut aller à son chevet l'aider... Il n'y a jamais personne qui va l'empêcher. Une fois entré, qu'on remplace des travailleurs, c'est une autre affaire. On se comprend bien là-dessus. J'ai voulu donner une réponse très claire à votre question pour plus que personne ne vote d'emmerdements législatifs de peur que cela n'arrive. Si cela arrive, on prendra nos responsabilités, M. le ministre.

M. Johnson: Merci, M. Laberge.

Le Président (M. Boucher): Oui, vous aviez quelque chose à ajouter?

M. Guilberg: Dans une très large mesure, Louis Laberge a dit ce que je voulais dire sur cette question. La position syndicale a toujours été claire. Sur la reconnaissance du fait que les utilisateurs des services de santé pourraient le faire, on ne mettra pas en danger leur santé à l'occasion des conflits. C'est ce dont on parle, ce n'est pas du principe qu'on parle, c'est de la meilleure méthode pour y arriver.

Ce qu'on vous dit, c'est que cela doit se faire par discussions au niveau local. On vous dit aussi que faire des lois qui pendent comme une épée de Damoclès au-dessus de ces négociations au niveau local, c'est un empêchement à ces discussions.

Il y avait un autre point. Il a été question à deux reprises de la relation entre l'article 99 du code actuel et l'article 99i). Dans l'article 99, il est question d'injonction; dans 99i), de décisions du lieutenant-gouverneur en conseil de suspension. Nous vous disons: Les deux sont maintenus. Vous nous dites: Non, parce qu'on choisit ce qui est compatible. Mais la décision de la compatibilité d'une chose avec l'autre va être prise par un juge. Si on veut que ce soit clairement l'une ou l'autre, qu'on le dise, mais qu'on ne laisse pas à un juge le soin de décider de la compatibilité de l'affaire.

C'est la même remarque, il me semble, qu'il faut faire sur la relation entre les huit jours et les 48 heures. Dire que les deux choses sont incompatibles, c'est peut-être ce que vous avez à l'esprit, mais ce n'est pas ce qui est écrit. C'est ma remarque là-dessus.

A tout événement, c'était pour répondre à ces deux remarques. A ce problème de la relation entre 99 et 99i), dans l'ensemble, on dit, et c'est ce qui nous apparaît important pour qu'on ait le maximum de garantie possible de services essentiels: Que les deux articles tombent; ils sont tous les deux incompatibles avec l'objetif poursuivi.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre, est-ce que... Cela va? M. Rodrigue.

M. Rodrigue: Je ne voudrais pas m'éterniser là-dessus, mais, puisque le ministre y tient beaucoup, je voudrais tout simplement souligner que j'ai mentionné qu'il était légitime de vérifier et je le maintiens. Il ne nous appartient pas de décider si on a besoin de soin, mais il nous appartient de voir si ce sont des "scabs".

Je voudrais demander au ministre, ou lui dire tout simplement que j'espère que notre sens des responsabilités commun sur ces questions est partagé pour des cas bien particuliers, des situations particulières, si on pense, par exemple, aux 300 cancéreux qui attendent de se faire traiter à Saint-Luc. C'est affirmé quelque part dans une revue médicale par quelqu'un en autorité.

Alors, j'espère qu'on a non seulement les mêmes interrogations, mais les mêmes préoccupations sur ces questions aussi.

M. Johnson: Oui, je pourrai simplement vous dire que dans un contexte de ralentissement des services à l'hôpital Saint-Luc dans le cas d'une crise, la liste va simplement s'allonger. Je n'ai pas de réponse à donner autre que celle-là.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Merci, M. le Président. Messieurs, en lisant votre mémoire et en écoutant la lecture que vous en avez faite, il y a deux choses qui me frappent. Il y a, d'une part, un certain nombre de remarques sur des points un peu techniques, disons, qui sont valables, je pense, les représentations que vous avez faites au sujet du dépôt simultané des positions syndicales et patronales, dans la mesure où vous acceptez que la partie patronale peut être en demande. C'est, je pense, une demande qui est tout à fait légitime. Les remarques que vous avez faites sur le comité qui va veiller à l'information du public me semblent également largement fondées. Cela n'empêche aucune des deux parties de faire ses efforts de relations publiques, et comme c'est un groupe qui n'a pas de pouvoir d'enquête, qui peut intervenir à la demande de l'une ou de l'autre des parties, aonc se prêter, en quelque sorte, à la stratégie de négociation de l'une ou l'autre des parties, ça pose au moins autant de questions que cela en résout.

Mais je pense que, malgré tout, ce sont des questions assez secondaires, dans l'ensemble. La question des délais, dans le fond, avec lesquels les négociations commencent ou ne commencent pas, je pense qu'il faut les prendre avec un grain de sel. S'il était si important qu'elles commencent longtemps avant l'expiration, celles qui sont expirées dans quelques jours, au 30 juin 1978, les nouvelles ententes seraient déjà sur le point d'être signées. Or, on sait, enfin, je ne suis même pas sûr si on sait que les mandats gouvernementaux ont été complétés dans le cas de négociations qui, encore une fois, devraient se terminer d'ici quinze jours.

On peut dire que l'histoire se répète, hélas, mais ça me permet de prendre avec un certain grain de sel les voeux pieux de commencer six mois avant. Enfin, l'avenir le dira de ce côté et c'est plus ou moins important, pour ce qui est de la loi comme telle. Parce que, comme ça n'a pas d'effet pratique, sauf politique, de mettre le pied dans l'étrier pour une future loi, il faudrait imputer des motifs au ministre et je suis le dernier à vouloir faire une chose comme ça. Je pense que,

de toute façon, ça n'a pas d'application pratique. C'est un voeu pieux et j'espère que tout le monde le respectera, mais ça reste ça.

Pour le reste de votre mémoire, le lisant autant que possible comme le monde ordinaire peut le lire, ceux qui ne sont pas impliqués dans la négociation et je devrais dire, entre parenthèses, grâce au ciel, je ne le suis pas cette fois-ci, j'ai un peu l'impression de lire le texte de gens qui ont peur de s'étouffer en avouant, ne serait-ce qu'une seule fois, qu'ils sont d'accord avec le projet gouvernemental. Au-delà des procès d'intention que vous adressez au gouvernement, au-delà de toutes sortes d'interprétations que vous faites sur l'état de notre société, le rôle du gouvernement et sa liaison plus ou moins stable avec les pouvoirs établis et tout ce que vous voulez, finalement, vous ne faites pas de recommandations sensiblement différentes. On a vraiment l'impression que vous êtes bien contents et que vous avez obtenu plus que ce que vous souhaitiez jamais obtenir, c'est-à-dire le fait que, dans une liste que vous allez préparer, vous allez déterminer ce que sont les services essentiels qui doivent être fournis et que cette liste, à moins que le gouvernement veuille prendre l'odieux de la corriger, va devenir l'équivalent d'une loi.

J'ai beau chercher des recommandations précises de modifier quoi que ce soit, ça me donne l'impression, encore une fois, que vous avez obtenu plus que ce que vous auriez jamais souhaité obtenir, que c'est ce que vous avez toujours demandé, que vous allez déterminer les services essentiels, que le gouvernement va devoir s'en contenter, la partie patronale aussi. Dans le fond, tout le reste, ça vous évite d'offrir des félicitations au gouvernement. Cela dédouane un peu le gouvernement vis-à-vis des associations patronales, ça fait l'affaire de tout le monde et nous ici qui assistons, dans les tribunes, à ce beau dialogue, avons l'impression que tout le monde s'en va d'ici très content.

Peut-être que cette interprétation est très injuste envers votre point de vue et, si elle l'est, je vous inviterais à la corriger.

Le Président (M. Boucher): M. Laberge et M. Guilberg ont demandé la parole.

M. Laberge: Notre système de gouvernement prévoit un gouvernement élu majoritairement et représentant la population et une opposition éclairée. J'aurais souhaité que vous le "fussiates".

M. Guilberg: M. le député a commencé son intervention en disant qu'il ne voulait pas prêter d'intention à qui que ce soit. Il en a prêté finalement à tout le monde, mais surtout, il nous a prêté ses voeux et ses espoirs.

Ce qu'on a dit, c'est clair, c'est net, on n'est pas d'accord avec le projet de loi, même si le député souhaitait que l'on ait dit qu'on était d'accord. Ce serait peut-être plus simple pour lui, pour ses stratégies.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, c'est très facile. Je remarque le caractère laconique de la réponse qui contraste fortement avec les autres réponses auxquelles on a eu droit aujourd'hui. Mais il reste qu'à part d'avoir, de la part du gouvernement, la promesse de ne pas intervenir, en aucune façon, et pratiquement de démissionner ou de promettre de démissionner s'il y a quelque chose qui ne va pas, je ne vois pas quelle autre étape précise vous recommandez, étant donné que vous avez, dans cette loi, une possibilité de déterminer ce que sont les services essentiels. Il faudra que le gouvernement prenne l'odieux d'une intervention exceptionnelle, dans un cas précis, pour retirer le droit de grève.

Encore une fois, à moins de vous offrir d'avance sa démission, je ne vois pas ce que vous demandez concrètement au gouvernement de modifier dans ce projet de loi, pour aller davantage dans le sens de vos revendications.

Le Président (M. Boucher): M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Yvon): Suite à ce rappel de propositions qu'on souhaite dans notre mémoire; je crois qu'on peut toujours faire comme on a déjà fait à plusieurs reprises, et passer les trois quarts de notre temps à parler des services essentiels. Cela arrive de temps en temps qu'il y a quelqu'un parmi nous qui soulève d'autres questions aussi, ce que j'ai fait tout à l'heure notamment, sur la question de l'information. Je l'ai fait en référence à des promesses de banques de données. On n'a même pas eu droit à un commentaire de la part du ministre là-dessus.

Deuxièmement, j'ai soulevé les problèmes de délais de démarrage imposés avec les difficultés que cela cause quand on conçoit un système de négociation à deux paliers, ce qui n'a pas valu d'autres commentaires. Je crois qu'il y a des problèmes là-dedans, sur lesquels le ministre devrait nous donner un éclairage et faire les liens qui s'imposent avec le projet de loi 55 également.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aurais une dernière question, M. le Président. Le ministre vous a fait une réponse relativement à la question des injonctions. Peut-être avez-vous regardé le projet de loi sous l'angle suivant. A supposer qu'il y ait un décret ou un arrêté en conseil du gouvernement, suspendant le droit de grève dans un établissement, et à supposer que ce décret, en supposant l'impossible, ne soit pas respecté, est-ce que vous ne croyez pas, à ce moment-là, que la procédure d'injonction n'est absolument pas exclue par le mécanisme prévu par la loi 59, autrement dit, qu'on revient avec une étape supplémentaire, essentiellement au même mécanisme?

Le Président (M. Boucher): Est-ce que quelqu'un peut répondre?

M. Guilberg: Non. On pense effectivement que

s'il y a un décret qui est porté, qui est fait, et qu'il y a un non-respect du décret, il va y avoir des injonctions par-dessus. Je ne pense pas que cela nous ait échappé.

M. Forget: D'accord.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Richmond.

M. Brochu: J'aurais peut-être une question sur la fameuse question du centre de données. J'en avais fait état devant d'autres personnes qui sont venues témoigner devant nous. Lors du sommet économique aussi, il en avait été question. Je pense qu'il y avait eu un consensus assez large et assez fort sur cette question.

Tantôt, M. Charbonneau a accordé une importance assez grande, dans les remarques qu'il a faites, à ce centre. Est-ce que je dois comprendre que c'est la même chose pour les deux autres centrales? Est-ce que vous accordez la même priorité à ce besoin de la création d'un centre de données?

M. Laberge (Louis): Moi, je crois l'avoir mentionné dans mes remarques, en disant: Ce comité n'a aucune prérogative, ne pourra pas aller s'assurer de la véracité des informations qu'il recevra des parties. A ce moment-là, cela devient un autre organisme de propagande.

C'était exactement dans le même sens que Yvon Charbonneau l'a mentionné. (15 h 45)

Le Président (M. Boucher): Oui.

M. Guilberg: M. le Président, d'ici quelques jours, les ministres concernés vont recevoir une lettre de la part des trois centrales invitant le gouvernement à nous rencontrer et à commencer à discuter sur les échanges d'information nécessaires à la poursuite des négociations. Cela va tout à fait dans le même sens de ce qui a été dit par Yvon Charbonneau. Cela nous paraît extrêmement important que le gouvernement puisse nous fournir, et ce le plus rapidement possible, l'ensemble des données pertinentes, utiles ou essentielles à l'amorce et à la poursuite des négociations.

M. Jonhson: M. le Président, si vous me permettez, si le député de Richmond me permet, pour répondre à cette question, je ferai remarquer évidemment aux représentants de la CSN que c'est à l'initiative de celui qui vous parle et de ses collègues, que lors de nos rencontres nous avons effectivement affaire aux centrales et aux parties. Cela a déjà commencé dans le cas du COPS, qui est en négociation cette année, cet échange des données. Il y a un travail préparatoire qui a été fait au niveau du gouvernement qui est considérable. Nous attendons — je l'ai fait vérifier cet après-midi, avant que nous ne recommencions — effectivement cette lettre qui nous avait été promise, après une demande précise quant au type de données que vous désirez, etc., et nous pourrons réagir à cela.

Le Président (M. Boucher): Oui.

M. Guilberg: II ne faut pas qu'on se renvoie trop la balle là-dessus, mais on attend des lettres de part et d'autre depuis un petit bout de temps.

M. Johnson: On s'entend, cela va se faire.

M. Guilberg: En particulier, à la rencontre du 18 mai, il nous avait été dit qu'on aurait une date au ministère des Affaires sociales et au ministère de l'Education et cela ne nous est pas encore arrivé. C'est pour cela qu'on vous envoie une lettre.

Le Président (M. Boucher): M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Yvon): De toute façon, si on veut continuer sur cette question, ce n'est pas parce qu'il va finir par y avoir un échange de certaines données dans les dernières semaines qu'on aura répondu exactement aux attentes soulevées il y a plusieurs mois en arrière par le projet comme tel d'un centre d'information, mais sous la gouverne des parties. Ce n'est plus du tout cela. Il finira par y avoir un échange. Il y en a eu un, en 1971, dans le temps que c'était M. L'Allier qui était ministre de la Fonction publique. Il y en a eu d'autres en 1975 aussi. Cela finira par arriver, j imagine, qu'on s'échangera quelques données, mais c'est loin d'être le projet tel qu'envisagé initialement. Je suis bien conscient qu'à ce stade-ci on va nous répondre qu'il est trop tard pour envisager de telles choses. Je connais déjà la réponse. Depuis six mois qu'elle nous est fournie.

Cependant, on s'aperçoit que, pendant qu'on nous refusait ou qu'on retardait la mise au monde de ce nouvel outil, en même temps, on préparait la mise au monde d'un conseil d'information équipé comme il va l'être. S'il veut être sérieux, je l'ai dit tout à l'heure, il va falloir qu'il ait un gros équipement derrière lui, sinon ce sera simplement de la confrontation superficielle de données. Louis a parlé de propagande. Enfin, c'est cela qui peut arriver. Cela va peser au profit de qui? Je pense que, là-dessus, il y a un trou dans votre gilet, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je m'excuse. M. Charbonneau, ce groupe d'information... Encore une fois, je me fie au jugement des journalistes. Je ne prétends pas que vous êtes paternaliste à leur égard, mais, en tout cas, nous, nous ne le sommes pas, c'est sûr. Je me fie à leur capacité de discriminer l'information qu'ils obtiendront des différentes sources qu'ils ont habituellement. Les sources, jusqu'à maintenant, se sont limitées finalement aux parties elles-mêmes. Ce que nous leur offrons, entre autres, c est ce groupe d'information où ils pourront aller puiser ce qu'ils veulent comme données. Ce groupe d'information, vous parlez d'un appareillage nécessaire, ce sera le même appareillage auquel vous aurez accès comme centrale syndicale, auquel les parties patronales auront accès et le groupe d'information aura accès également à ces données.

M. Laberge (Louis): M. le Président, est-ce que vous me permettez...

Le Président (M. Boucher): M. Laberge.

M. Laberge (Louis): J'applaudis, mais quelle est votre objection à mettre cela dans la loi pour que ce soit très clairement reconnu? Je vous fais confiance, M. le ministre. Je suis convaincu que vos intentions sont bonnes, sauf que ce n'est pas le premier ministre du Travail qu'on rencontre. Il y en a eu d'autres et il y en aura probablement d'autres. Est-ce que les autres auront les mêmes bonnes intentions? Si c'est dans la loi, cela prendra un amendement pour le changer. C'est cela la différence.

Vous parlez d'un comité de propagande.

M. Johnson: Non. M. Laberge, vous savez très bien, puisque vous êtes membre du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, que j'ai soumis au CCTMO, il y a plusieurs mois, un projet de banque de données et que les parties ne se sont pas entendues sur la formation du conseil d'administration.

M. Laberge (Louis): Vous savez pourquoi? M. Johnson: Cela n'empêche pas...

M. Laberge (Louis): Vous savez pourquoi, M. le ministre.

M. Johnson: Oui.

M. Laberge (Louis): Je pense qu'on se doit d'aller un peu plus loin. Nous avons dit un comité, une banque de données, parfait, toutes les données, pas seulement pour savoir s'il y a eu un vote secret pour élire le président de la FTQ, pour savoir quelle est la situation financière véritable d'une entreprise qui dit qu'elle ne peut plus continuer, qu'elle doit... C'est tout cela.

M. Johnson: Oui, mais le désaccord ne portait pas nécessairement là-dessus, M. Laberge.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Richmond, vous pouvez continuer.

M. Brochu: Je sais qu'on peut déplorer les délais. D'ailleurs, j'avais rappelé hier, et je pense que M. Charbonneau en a fait état dans son allocution tout à l'heure, que c'était le 27 septembre 1977 que MM. Martin et Bouchard avaient écrit au premier ministre, en demandant que, même avant le dépôt de leur rapport, on procède immédiatement à la création de cette banque de données pour pouvoir faire face à la musique en temps et lieu et être au bon moment dans le décor. Est-ce que je dois comprendre que ce qui vous chicote le plus, c'est que cela ne soit pas inscrit dans la loi, ou si c'est le fait que la proposition que semble faire le ministre, avec sa réponse d'hier soir et celle qu'il donne aujour- d'hui, n'est pas exactement celle qui avait été proposée dans le rapport Martin-Bouchard.

M. Laberge (Louis): Le projet de loi ne traduit d'aucune façon ce qui avait été avancé lors du sommet économique, il ne traduit d'aucune façon ce dont il avait été question à plusieurs occasions.

M. Brochu: Surtout la même définition de banque de données.

M. Laberge (Louis): Ce n'est pas du tout cela, absolument rien. C'est un comité de propagande. C'est le seul qui sera reconnu de par la loi. L'autre sera là au bon vouloir...

M. Brochu: Le ministre me corrigera, mais, dans la définition qu'on avait donnée hier soir, à la question que j'avais posée, le ministre m'avait dit: On tentera, par cet organisme, de rendre les informations disponibles. Est-ce que c'est le sens de ses paroles?

M. Johnson: II y a deux choses. Il faut parler des données auxquelles veulent avoir accès, entre autres, les centrales syndicales, et, d'autre part, le comité d'information. L'un peut très bien aller sans l'autre, mais peut-être pas l'autre sans l'un. En ce sens, je suis d'accord avec ce que M. Charbonneau dit. Un comité d'information qui est seulement là, pris dans les airs, sans ressources sur lesquelles il peut s'appuyer pour documenter ce qu'il diffuse, risque, c'est évident, de faire du mauvais travail de journaliste. Les journalistes sont plus équipés que cela pour le faire. Ce qu'on dit, c'est qu'il faut que ces données soient disponibles pour les parties, comme pour le comité d'information, qui a un rôle très spécifique qui, lui, est prévu dans la loi. Or, en allant au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, on s'est rendu compte, il y a quelques mois, qu'il y avait un désaccord entre les parties, qu'il y avait un désaccord assez systématique, d'ailleurs, sur la formation et le type d'administration de ce centre de données qui n'a rien à voir avec le groupe d'information et qui pourrait être une des ressources du groupe d'information pour faire ces analyses et diffuser ces données. Ce vers quoi nous nous dirigerons, et on aura l'occasion de le faire, c'est, dans un premier temps, au moins, de faire en sorte que les données soient échangées entre les parties et que les données, de façon très large, le soient. A l'occasion de la lettre à laquelle nous réagirons bientôt, on verra que le gouvernement, effectivement, entend procéder à cet échange de données.

M. Laberge (Louis): M. le Président, en réponse à la question posée, pour nous, c'est d'une importance capitale. Je vais essayer de vous donner un exemple de ce que cela peut vouloir dire. Lors de négociations, il y a des échanges. A un moment donné, en retour d'une demande, il y a une offre qui est faite et une contre proposition qui est faite pour une certaine reclassification. La

loi prévoit un comité d'information. Le gouvernement peut dire: La contre proposition syndicale dépasse la demande originale de $58 millions. Le comité d'information, qui n'est nanti d'aucun pouvoir, ne pourra que reprendre cela. On ne pourra pas, nous, lui donner des chiffres allant à l'encontre de cela, on n'a pas les renseignements. Un comité nanti de pouvoirs et doublé d'une banque de données pourrait fouiller et dire: II y a une erreur, la contreproposition ne va pas $58 millions au-delà de la demande originale. Au contraire, ce n'est que $4 millions, $12 millions, ou c'est $58 millions. A ce moment, le mouvement syndical devra réviser sa position, parce que l'opinion publique vraiment éclairée dira: Ils exagèrent. Ils en ajoutent à leurs demandes. Le comité d'information prévu par la loi ne pourra que reproduire les chiffres que voudra bien lui donner le gouvernement. C'est cela.

M. Brochu: ... rendre l'information disponible.

M. Laberge (Louis): Voilà!

M. Brochu: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je ne sais plus si ça vaut tellement la peine. Je ne suis pas sûr non plus que la dernière prise de position de M. Laberge corresponde aux positions des deux autres centrales sur ce sujet.

Est-ce que je pourrais avoir l'opinion de M. Rodrigue là-dessus?

M. Rodrigue: Sur?

M. Bisaillon: Le comité d'information, tel qu'on vient de l'entendre expliquer par M. Laberge, où il y aurait, dans le fond... Cela reviendrait à une espèce de conseil d'arbitrage, mais sans imposition au bout du compte.

M. Rodrigue: Nous l'avons exprimé... Il faut d'abord différencier le centre des données dont on parle et le comité d'information, même en admettant que ce dernier puisse puiser, comme source d'information, à même la banque des données.

En ce qui nous concerne, on n'est pas d'accord avec la formation d'un comité d'information. On le dit et on l'a exprimé à plusieurs reprises. La position du ministre, jusqu'à maintenant, est de maintenir cette formule de la création d'un comité d'information.

On n'est pas d'accord, nous, parce qu'on pense qu'on doit s'en remettre aux règles habituelles, aux règles qu'on connaît. Notamment, en fonction du mandat qui lui et dévolu, on pense que ce comité d'information ne sera pas nécessairement neutre, parce qu'il aura, à un moment donné, à traduire, à évaluer ou à faire part de son évaluation de l'écart entre les parties, des positions des parties, etc. C'est ça le fond de notre position.

Dans ce sens-là, c'est clair pour nous qu'il ne devrait pas y en avoir.

M. Bisaillon: Bon! M. le Président, j'avais un certain nombre de questions à poser et les interventions des trois représentants des centrales ont, jusqu'à maintenant, répondu à l'ensemble des questions que j'avais.

Je voudrais cependant faire un certain nombre de commentaires que vous pourriez enregistrer et vous pourriez y répondre par la suite.

Je voudrais d'abord vous dire — je pense que si je ne le dis pas maintenant, je vais toujours m'en vouloir un peu — que le ton du texte qui a été présenté ce matin, qui nous a été lu, m'a passablement déçu. Même si c'est un document conjoint, je pourrais même savoir, avec l'expérience que j'ai des trois centrales, qui l'a écrit.

J'ai été déçu, parce que je pense qu'il n'ajoute rien ou qu'il n'apporte rien au débat. En tout cas, il n'a sûrement rien apporté de plus, au moment où on l'a présenté ce matin, que les positions qu'on connaissait déjà. Je pense que la discussion de cet après-midi peut nous montrer les endroits où il peut vraiment y avoir des accrochages. Mais le ton, moi, ne m'invite pas beaucoup à me forcer à comprendre quelle est la position véritable, qu'est-ce qu'il faut améliorer ou bonifier dans la loi.

Quand on parle, à la page 4, du "truc" des listes syndicales, ça, c'est une expression que, personnellement, je ne peux admettre. Je ne peux admettre non plus qu'on me prête des orientations patronales, si jamais j'ai à défendre le maintien de services qui doivent continuer à être dispensés et que vous admettez qui doivent continuer à être dispensés dans une grève dans le secteur hospitalier. Là, je parle uniquement du secteur hospitalier.

Je ne veux pas accepter de me faire prêter une orientation patronale et une démarche patronale dans ce sens-là. J'expliquerai tantôt, un petit peu plus à fond, pourquoi je ne peux accepter ça.

Au niveau du texte même, il me semble qu'il y a un certain nombre d'illogismes aussi. A la page 6, quand vous parlez des... Là, je lis le texte: "... d'efficacité et d'accélération souhaitable du processus de négociation, cette position a trois conséquences néfastes principales aux yeux de quiconque a déjà participé à des négociations". J'ai déjà participé à des négociations et je ne retiens sûrement pas l'élément 1 que vous indiquez comme étant une conséquence néfaste. Même si je reconnais que l'impératif des délais qu'on impose, la négociation qui doit commencer six mois avant, même si je reconnais que ça pourrait être formulé autrement, dans le sens d'une possibilité qu'elle commence six mois avant. Dans le cadre du Code du travail actuel, même si je reconnais cela, le no 1 je ne peux pas l'accepter, même dans le texte actuel. Des embêtements, des querelles inutiles sur le sens des modifications que l'une ou l'autre des parties voudra apporter par la suite aux propositions et contrepropositions. Voyons donc! (16 heures)

La partie patronale dépose un texte, la partie

syndicale dépose un texte et là, il y a de la négociation. On pense, on voudrait nous faire croire qu'à cause de la façon que le texte de loi est rédigé, quand la partie syndicale va apporter une modification, cela va créer un problème ou quand la partie patronale va accepter une recommandation ou une proposition syndicale, cela va créer des problèmes aussi. Il me semble que non. Il me semble que ce n'est pas cela justement qui se passe quand on négocie. Autant la partie patronale que la partie syndicale s'attend qu'il y ait des modifications à la fois dans les demandes initiales syndicales et dans les positions patronales. Sans cela, on ne parle plus de négociations.

L'élément 2. Au niveau de l'élément 2, quant au dépôt des demandes, je reconnaîtrais qu'il se pose un problème quant aux demandes locales. Il est évident et il me semblait que c'était logique et que cela découlait même de l'application de la loi et de la coutume; il est clair que, si on fait un partage de choses à discuter au niveau provincial et d'autres à discuter au niveau local, même les demandes syndicales au niveau local ne peuvent nécessairement arriver au même jour et en même temps que les demandes au niveau provincial puisqu'il y en a qui vont découler de choses entendues ou convenues au niveau provincial. Cela me semblait une évidence. Si on doit le clarifier à ce point-là, on le fera, mais il me semblait que c'était normal qu'on puisse penser que ce n'était pas le même impératif qui s'appliquait au niveau local.

Pour ce qui est des demandes de votre position quant aux propositions patronales qui viennent 60 jours plus tard et où vous voudriez voir les demandes patronales arriver en même temps, je n'ai pas d'objection de principe à ce que cela se passe de cette façon pour que les demandes patronales arrivent en même temps que les demandes syndicales et les réponses patronales dans les 60 jours aux autres articles, sauf que je voudrais simplement vous signaler que cela va créer un paquet d'embêtements et de chicanes inutiles parce qu'il va s'agir de savoir si, dans telle clause, le patron est dans la demande ou s'il ne l'est pas. Il va vous revenir en réponse à vos demandes syndicales et vous allez répondre: C'est un texte qui aurait dû être déposé en même temps parce que, là-dessus, il est dans la demande par rapport à notre ancienne convention collective. On connaît ces discussions qu'on recommence chaque fois qu'on négocie une convention collective.

La différence entre la position patronale et le moment où la partie patronale est en demande me semble bien difficile à établir. Par ailleurs, si, sur certains grands aspects, on pouvait définir que cela arrive en même temps que les demandes syndicales, je n'aurais pas d'objection.

Toujours à la page 7 de votre mémoire, vous posez des questions sur la formulation de l'article 99c. Je vais aller plus loin et je vais parler de l'ensemble de l'article 99. Je vous dis qu'il est normal que vous arriviez ici avec les amendements que vous souhaiteriez voir apporter au projet de loi, mais il ne me semble pas normal, cependant, que vous cachiez un certain nombre de choses dans le projet de loi qui font votre affaire. Personne n'a encore parlé de l'abolition du droit de lockout pour l'employeur. Personne n'a parlé de cela aujourd'hui; pourtant, cela existe dans le projet de loi. Personne n'a parlé de la disparition de l'injonction; pourtant, cela existe dans le projet de loi. Je vais revenir à l'article 99.

A l'article 99, je suis en désaccord avec le monsieur qui est à la gauche de M. Norbert Rodrigue, M. Guilberg. Je suis en désaccord avec son interprétation suivant laquelle, si le Conseil des ministres prenait position dans un conflit et supprimait le droit de grève dans un cas donné, votre prétention, c'est que, techniquement, on peut revenir à l'injonction. Je prétends que c'est tout à fait impensable. C'est un discours de juriste; c'est un discours d'avocat. En pratique, ce n'est pas le cas. On dit: II y a une loi et les gens ne la respectent pas. Tu vas aller demander à un juge qui est en dessous d'aller faire une autre loi que tu ne respecteras pas plus. Il me semble que, dans le recours aux injonctions, on reconnaît au moins là-dedans, au point de départ, qu'il est inutile de continuer à se référer à l'injonction. Cela ne me rentrerait pas dans la tête, après tous les discours qu'on a entendus et qu'on a faits, cela ne me rentrerait pas dans la tête qu'on puisse dire à des syndiqués: II y a une loi et on ne la respecte pas. On ne la respecte pas parce qu'elle n'est pas légitime. Ce sont des discours qu'on a entendus, ce sont des discours qu'on a faits. Il me semblerait un peu inimaginable que par la suite un juge puisse ajouter une injonction à cela, et qu'on pense que cela change la situation de fait. Cela ne changera strictement rien. C'est une discussion inutile.

L'article 99c; la question du délai de huit jours est claire dans l'article 99 et s'il faut le clarifier encore on pourra mettre un texte additionnel; il me semble que le début de l'article 99... A 99a quand on dit: "Les dispositions du présent code s'appliquent aux relations du travail dans les secteurs public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables avec celles du présent chapitre". Le présent chapitre, c'est celui qui est dans le projet de loi qu'il y a là. Pour autant que ce n'est pas inconciliable, tout ce qu'il y a dans le Code du travail s'applique aux secteurs public et parapublic. Dans le présent projet de loi, on a l'avis de 48 heures, donc cela supprime automatiquement l'avis de huit jours.

M. Charbonneau (Yvon): Ce n'est pas 99c.

M. Bisaillon: Non, dans l'ensemble de l'article 99.

M. Charbonneau (Yvon): Le problème soulevé est à propos de 99c. Cela n'a pas de rapport avec les délais de grève.

M. Bisaillon: 99c supprime l'article 21 du code, 99d supprime l'article 61 du code et l'avis de huit jours est supprimé par...

M. Charbonneau (Yvon): ... qu'il s'agit dans 99c. Ce sont des délais pour changer d'accréditation et changer d'affiliation.

M. Bisaillon: On a souligné le fait qu'il y avait deux possibilités de recours, deux délais de recours. Il n'y en a pas puisqu'il y a un article du code qui se trouve à être supprimé par 99c. Et l'avis de huit jours, je ne retrouve pas la numérotation de l'article, mais de toute façon, à notre avis, le fait de mettre le délai de 48 heures supprimait le délai de huit jours. Si ce n'est pas clair, on n'aura qu'à le mettre. Mais il me semble que c'était clair de la façon que c'était formulé. C'est déjà un certain nombre d'arguments qui devraient disparaître.

Pour ce qui est, en page 8 de votre document, de toute la question de l'information, je voudrais d'abord souligner quelque chose que je trouve suave, même si M. Rodrigue a essayé de s'en sortir très habilement tantôt. Clairement, dans le deuxième paragraphe du chapitre qui s'appelle "Information": "Dans notre société, en effet, l'opinion publique est modelée par les media et ceux-ci cultivent habituellement un préjugé favorable envers toute autorité, à plus forte raison envers le gouvernement". Tout de suite après, vous demandez qu'on fasse cela: "II vaut mieux, pensons-nous, qu'on fasse l'information plus humblement et plus honnêtement en suivant les jeux des mécanismes habituels de l'information dans notre société, c'est-à-dire les media d'information". Il ne faudrait pas essayer... Tantôt, vous avez essayé habilement de faire la distinction entre les media et les journalistes. Ce sont quand même les journalistes qui suivent les conflits et qui les ont toujours suivis et ce sont eux qui font l'information et l'analyse aussi de ce qui se passe, pas seulement l'information stricte et pure, mais l'analyse aussi des conflits. Je trouve qu'il y avait une certaine ambiguïté dans votre position quant à cela. C'était peut-être placé là pour nous amener à comprendre que vous étiez contre le conseil d'information, mais il me semble que c'était inutile de se placer dans cette position.

M. Laberge (Louis): ...le droit d'être ambigu.

M. Bisaillon: Oui, tout le monde a le droit d'être ambigu, mais on a le droit de le souligner de temps en temps; cela peut faire plaisir une fois de temps à autre.

Pour le comité d'information comme tel, je pense que je retiendrais les positions de M. Charbonneau sur le danger qu'il pourrait y avoir que le conseil d'information soit, à lui seul, la banque de données ou devienne la banque de données, et ait des renseignements privilégiés qui en fassent un outil de première main pour, entre guillemets, "la partie patronale". Mais je pense qu'il y aurait possibilité de donner l'assurance que le conseil d'information, s'il doit continuer à exister, ait les même sources d'information que l'ensemble des centrales syndicales. Autrement dit que la banque de données soit à la disposition du conseil d'information et que le conseil d'information n'ait pas de sources privilégiées d'information au niveau gouvernemental. Est-ce que cela se met dans une loi? J'en doute. Je pense qu'encore là, la bonne volonté des parties va le déterminer.

A la page 10: "Dans le secteur de la santé, par contre, depuis dix ans, la question des services essentiels sert de prétexte au monde patronal pour monter des campagnes d'opinion contre le droit de grève dans les services de santé et les services sociaux, et par extension, dans tous les services publics". C'est là où je suis assimilé au monde patronal et c'est ça que je refuse. C'est là qu'un bon nombre de syndiqués et de syndicalistes vont se sentir assimilés au monde patronal et j'espère qu'ils vont le refuser aussi violemment que moi. Cela fait dix ans, dans le milieu syndical, qu'on se pose des questions sur l'orientation qu'on doit prendre dans les secteurs public et parapublic au moment des négociations.

Ce n'est pas la première réflexion qui se fait et elle n'est pas faite uniquement par le monde patronal. Face au droit de grève dans le secteur public, on n'a jamais remis en cause le droit de grève comme tel, mais on a tous reconnu, à un moment ou à un autre, qu'il était nécessaire de le contingenter; pas en termes de négociations, mais en fonction d'un service essentiel qu'une population a le droit de recevoir.

Je pense que ce n'est pas seulement dans le milieu patronal que ça se fait, cela s'est fait dans le milieu syndical. On aurait tort de rejeter toute l'attitude et la démarche vers les services à maintenir dans les secteurs hospitaliers seulement au monde patronal et d'une façon déguisée de discréditer tout ce qui peut être sincère et sérieux comme approche, même du côté syndical.

A la page 11... je me rends compte que les centrales syndicales commencent à ménager le papier. D'habitude, elles faisaient ça... maintenant, elles écrivent des deux côtés. A la page 11 : "Nous avons constaté, par ailleurs, que les services essentiels ont fait problème dans le passé d'abord parce que la partie patronale a trop souvent intérêt à les surévaluer et à monter à ce sujet une campagne d'opinion contre un danger inventé de toutes pièces ". Il y a deux aspects vis-à-vis de ça. On pense justement que le mécanisme prévu dans la loi actuelle — en tout cas c'est mon opinion — vise à mettre une pression sur l'employeur pour négocier. Autrement dit, le premier objectif qu'on vise, c'est I'entente au niveau local. L'entente, qui, premièrement, va régler les services qu'il s'agit de continuer à maintenir et, deuxièmement, va supprimer le droit de lock-out. Donc, qui ajoute une pression du côté syndical, il ne faut pas se le cacher.

Deuxièmement, s'il n'y a pas entente, c'est là où l'intérêt de l'employeur est d'avoir l'entente. S'il ne l'a pas, on dit que c'est la liste syndicale, ce que vous appeliez le "truc" des listes syndicales, qui va s'appliquer, liste syndicale qui va être dans le même sens que ce que vous nous avez expliqué tantôt. La pression est là. Sur le syndicat, la pression est éventuelle. Autrement dit, si ce que vous voudriez voir s'appliquer est réaliste et pratique, s'il est vrai de dire que les travailleurs ont le sens des responsabilités et vont faire en sorte qu'il n'y ait pas de danger pour la population au niveau de la santé, vous n'avez rien à craindre,

puisque la liste syndicale que vous allez fournir, parce qu'il n'y aura pas eu d'entente, va correspondre, va servir à maintenir les services qu'il faut pour ne pas qu'il y ait de danger. Donc, jamais le Conseil des ministres ne pourra revenir là-dessus.

L'autre aspect, c'est le conseil sur le maintien des services. On peut bien mettre tous nos oeufs dans le même panier et penser que ce conseil va servir uniquement à la partie patronale, mais, par ailleurs, j'y ai vu un avantage pour la partie syndicale. Je parle à ceux qui ont déjà fait des grèves dans ce secteur. Constamment, dès qu'il y a un hôpital qui a deux ou trois travailleurs qui font du piquetage, dans le secteur avoisinant, ça démarre: il y a eu deux morts... Autrement dit, il y a un climat qui se crée dans le milieu immédiat d'un hôpital qui est en grève et les histoires circulent. Je voyais ce conseil rétablir les faits et dire: II y a eu une liste fournie, cette liste est suffisante pour répondre aux besoins et il n'y a aucun danger. Donc, c'est pour désamorcer un peu l'espèce de crise dans laquelle on plaçait la population autrefois en lui faisant peur continuellement. (16 h 15)

La partie patronale a souvent joué avec l'émo-tivité des gens. Elle les a inquiétés, les a apeurés, jusqu'au moment où ils les avaient de leur côté. Si ce comité fait son travail de façon objective, il va désamorcer cette propagande patronale qui existait dans le milieu du secteur des hôpitaux, où on apeurait la population. Cela pourrait être un aspect positif. Je ne vois pas pourquoi on ne l'aurait pas souligné.

J'achève, M. le Président, il me reste cinq minutes. Pour ce qui est de la page 12, ce sont les délais. J'ai donné mon opinion là-dessus. Je pense qu'effectivement, il pourrait y avoir un aménagement sur les délais.

Finalement, je termine en disant que le projet de loi actuel comporte, selon moi, une amélioration par rapport à la situation qu'on a vécue dans le passé.

Je reviens à la question des injonctions. Il est clair qu'à un moment donné, même si on dit que techniquement, l'injonction pourrait être là encore, elle peut l'être à un moment, seulement si le droit de grève est supprimé, et seulement si cette suppression n'a pas été respectée.

Qu'on admette avec moi qu'en pratique, cette injonction n'a aucune raison d'être utilisée comme moyen, puisque c'est la partie patronale qui l'utiliserait, au moment où le Conseil des ministres a supprimé le droit de grève et que cet ordre du gouvernement n'a pas été respecté. Il me semble que là, le moins est compris dans le plus. Je ne vois pas pourquoi on utiliserait un moyen plus faible que celui qui a déjà été utilisé, si celui qui a déjà été utilisé n'a pas été appliqué dans la façon où il avait été prévu.

J'entendrai ceux qui veulent faire des commentaires.

Le Président (M. Boucher): M. Rodrigue. M. Rodrigue: Je serai très bref. Je voudrais seulement répondre sur la partie des services essentiels. Je reconnais, moi aussi, une habileté très grande de la part du député Bisaillon sur cette question. Il donne son point de vue, il a le droit, mais il essaie de faire dire autre chose au texte que ce qu'il dit. Il l'admet lui-même, d'ailleurs, en terminant, en disant: Dès qu'il y a trois piqueteurs sur une ligne de piquetage, il y a une crise, il y a des morts et on alerte la population.

Ce que nous avons essayé d'exprimer et ce que nous disons, et ce que nous savons, et ce que le député Bisaillon sait aussi, c'est que dans ces temps de crise, effectivement, sans que ce soit le ministre du Travail, ou le ministre de la Fonction publique ou celui des Affaires sociales, il y a effectivement des tentatives du côté patronal et on fait en sorte que cela devienne apeurant, que cela devienne effrayant, c'est ce qu'on dit. Cela sert de prétexte effectivement à la partie patronale, pour essayer de monter des campagnes d'opinion contre le droit de grève. Nous l'affirmons et nous y croyons, parce que nous l'avons vécu à plusieurs reprises.

Quand nous avons constaté... lorsque vous référez à la page 11, où on dit qu'effectivement, trop souvent, pour des questions d'intérêt, on surévalue les besoins en temps de grève, sur les services essentiels, et qu'on s'en sert pour monter une campagne d'opinion, je regrette beaucoup, mais effectivement, c'est une situation qui se produit à chacun des conflits. On l'a vécue aussi.

Je regrette surtout que le député Bisaillon nous tienne ce langage, car je sais très bien qu'il sait, entre autres, que déposer une liste de services essentiels six mois avant une grève, dans le secteur hospitalier, peut vouloir dire qu'au moment de la grève la situation a grandement changé.

M. Bisaillon: Si vous le permettez, j'avais oublié d'apporter ce commentaire. Effectivement, tout le monde est conscient que la situation, quant aux services à maintenir, évolue non seulement d'un mois à l'autre, mais souvent d'une journée à l'autre. Tout dépend de ce qui se passe dans le milieu. Je pourrais admettre que ce délai soit modifié.

Par ailleurs, je dis aussi que la loi prévoit qu'il peut y avoir des ententes ultérieures, que ce premier texte de services à maintenir, qui est entendu entre les parties, peut être modifié aussi par entente quotidiennement par la suite.

M. Rodrigue: Vous permettez qu'on tienne pour acquis qu'il y a quand même un délai indicatif au moins, qui est celui de six mois. Nous ne savons pas lire beaucoup, mais on lit le projet de loi. C'est ce que je voulais dire.

Sur les injonctions, quand on dit que c'est un avis qui supprime le droit de grève pour trente jours qui est donné par le Conseil des ministres, dans les faits, cela rend effectivement la grève illégale et lorsque vous dites qu'une fois que cet ordre n'est pas respecté, vous ne voyez pas pourquoi et comment on utiliserait un moyen moins fort, selon votre expression, pour agir sur

les syndiqués, je vous souligne qu'il y a un certain nombre d'administrations, que ce soit dans les hôpitaux ou ailleurs, qui vont effectivement se servir des injonctions en supplément de l'ordre donné et que cela, pour nous, correspond à la répression dont on a parlé justement, l'utilisation de ce moyen, malgré la situation que vous venez de décrire.

Vous n'êtes pas obligés de nous croire. Vous n'êtes pas obligés de confirmer nos dires. On dit tout simplement ce qu'on pense, à l'analyse de l'expérience et des situations qu'on s'apprêtera à vivre éventuellement. C'est strictement cela qu'on dit.

Quant au ton, il y a parfois des tons, à moi aussi, qui me font moins plaisir qu'à d'autres occasions.

Le Président (M. Boucher): Merci! M. Laber- ge.

M. Laberge (Louis): M. le Président, le député de Sainte-Marie s'est... Oh! excusez-moi. Je prends l'habitude du ministre, de parler à côté du microphone.

M. Johnson: Du moment que ce n'est pas à côté du sujet, M. Laberge.

M. Laberge (Louis): Je parlais du micro. Le député s'est dit déçu du mémoire. Je pense que c'est à la suite des remarques du ministre du Travail que j'ai dit qu'on ne devrait pas tellement s'attacher au ton mais au fond. Il est bien évident que si chacun d'entre nous avait écrit le mémoire, il aurait probablement été écrit de façon différente. Là-dessus, probablement que si on avait demandé au député de Sainte-Marie de collaborer à la préparation du mémoire, il aurait été différent, mais le fond, par exemple! Là, vous êtes déçu du fond alors que le député de Bourget était aussi déçu du fond, mais pour des raisons bien différentes. Il nous disait qu'on avait tellement obtenu du gouvernement, que c'est pour cela qu'on ne réclamait pas plus. Vous, vous dites que...

M. Johnson: Le député de Saint-Laurent, je m'excuse, parce que je pense qu'il y tient beaucoup.

M. Laberge (Louis): Je vous avais dit que je connaissais pas cela tantôt, en voici la preuve. D'accord, le député de Saint-Laurent. Peut-être que l'erreur que nous avons faite, ce sont les nombreuses démarches, les nombreuses représentations que nous avons eu l'occasion de faire auprès des différents ministres concernés. C'est peut-être une lacune que je suis probablement prêt à reconnaître, mais on était allé en détail dans tout le projet, cette fois-ci on a essayé de s'en tenir aux choses essentielles, les trois points majeurs ou les quatre points majeurs parce qu'on savait justement que le temps était quand même limité devant la commission parlementaire permanente du travail et on a voulu s'en tenir aux points principaux.

Vous avez parlé des demandes patronales. Vous avez fait état de votre expérience comme négociateur. Vous savez fort bien que, la plupart du temps, le monde patronal est en demande une fois qu'il a reçu les demandes syndicales et, bien souvent, il devient en demande en répondant aux demandes syndicales. C'est là que vient la surenchère.

Au lieu de partir à 50 et d'essayer de monter à 60 ou à 75, parce qu'il y a une demande syndicale de monter à 75, en contrepartie, le monde patronal va nous descendre à 25 ou à 20 ou à 10 ou à 0 pour essayer de revenir à 50. C'est cela qui retarde infiniment les négociations, surtout dans les secteurs public et parapublic.

M. Bisaillon: Je vous ai dit que j'étais d'accord avec votre position là-dessus, je ne vois pas pourquoi... J'ai dit que j'étais d'accord avec cela. La seule chose que j'ai dite, c'est que je me posais des questions quant au fait qu'on pouvait interpréter que le patron était en demande ou pas. Mais, j'ai dit que j'étais d'accord que les demandes...

M. Laberge (Louis): J'ai bien retenu que vous étiez d'accord, mais j'essayais de répondre à votre question. C'est cela la réponse. Cela va sauver énormément de temps et cela va éviter de la surenchère. Je le sais et cela s'est passé à plusieurs reprises. Les délais différents pour grève, changement d'allégeance, c'était une préoccupation que nous avions. Nous vous l'avons mentionné. Vous nous assurez que ce n'est pas cela. Parfait! il n'y a rien là. Vous êtes les législateurs, vous devez l'interpréter. Si vous croyez que c'est assez clair, parfait. Nous autres, on ne voulait pas être pris avec deux affaires différentes, on vous l'a mentionné. Pour les services essentiels, vous n'avez pas aimé qu'on parle de trucs de la liste. Je pense que je vous comprends. La liste des services essentiels est certainement un pas dans le bon sens. Soit dit en passant, on n'a pas mentionné la feuille du lock-out. On ne charriera pas. Les administrateurs d'hôpitaux, ayant le droit de faire des lock-out, enfin... Est-ce que vous croyez que cela pourrait arriver?

M. Bisaillon: N'est-ce pas déjà arrivé?

M. Laberge (Louis): Si c'était pour arriver, si on leur faisait perdre leur salaire, comme quand les travailleurs vont en grève et qu'ils perdent leur salaire, il n'y en aurait certainement pas. Enfin, on y reviendra. C'est une question que vous avez laissée de côté complètement. Il n'y a aucune imposition aux administrateurs d'hôpitaux et aux cadres. Il n'y a rien qui dit qu'eux aussi ont des responsabilités, non seulement en temps normal, mais en temps de crise. Ils peuvent décider de prendre leurs vacances en temps de crise pour rendre la situation encore pire qu'elle ne l'est. Il n'y a absolument rien dans la loi. Je pense que c'est une erreur. La mise en tutelle, sauf que cela n'est pas arrivé souvent...

Le comité dévaluation, je regrette, je ne l'ai pas mentionné ici devant la commission parlemen-

taire, mais on l'avait mentionné à la dernière rencontre avec les ministres. Le comité d'évaluation, je trouve que c'est une bonne idée, mais là, on lui met l'odieux de devenir arbitre, lors d'un conflit, au lieu de lui faire jouer le rôle sublime de s'assurer de la qualité des services en tout temps, en temps normal et en temps de crise. Vous voyez l'influence extraordinaire que pourra avoir un tel comité qui aurait été en fonction depuis quelques années, qui aurait décrié certaines situations chaotiques à certains endroits, qui aurait suggéré des remèdes, qui aurait mis tout le monde un peu sur le "spot", peut-être le syndicat, peut-être le ministre des Affaires sociales, mais un comité qui, lui, aurait évalué, de façon constante, la qualité des services de santé, non pas en temps de crise, mais en tout temps. La responsabilité du gouvernement sur la santé des citoyens, ce n'est pas en temps de crise, c'est en tout temps, et je l'ai déploré et c'est ce que je disais. Je crois que vous avez manqué le bateau.

M. Bisaillon: Est-ce que vous allez admettre avec moi que le paragraphe 5 de l'article 99i, donc, le conseil dont on parle, ce conseil est institué dans la loi, et il n'est pas dit que cela va servir seulement pour la négociation, puisqu'on dit: Le conseil est dissous par le lieutenant-gouverneur en conseil après avoir pris avis du juge en chef du tribunal? Il pourrait rester en fonction trois, quatre ou cinq ans. Il n'est pas dit que cela va être fini avec la négociation.

M. Laberge (Louis): Ce que j'essaie de vous dire, c'est que ce comité, vous lui donnez déjà deux prises avant même qu'il arrive au bâton, deux prises contre lui. Cela vient dans une loi où il est question de services essentiels en temps de crise. Pourquoi ne dites-vous pas que ce serait un comité qui va s'assurer de la qualité des services en tout temps? Pourquoi ne pas le dire, si c'est vraiment votre intention? Si vous ne le dites pas, on a le droit de vous questionner là-dessus. Vous dites qu'il y a des amendements à des amendements à la loi, des amendements qui vont dans le bon sens. Vous dites que vous êtes déçu qu'on ne les ait pas mentionnés. Je reconnais que vous avez raison. Si on avait un gouvernement ordinaire, on se satisferait probablement d'amendements ordinaires.

Le Président (M. Boucher): Avant de donner la parole à M. Charbonneau, je pourrais vous rappeler qu'au début de la commission, nous avions pris entente pour terminer vers 16 h 30. Alors, je vous prierais de faire des interventions le plus rapidement possible. M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Yvon): C'est pour soulever les relations avec le projet de loi 55. Le ministre a dit qu'il prendrait la décision demain, à savoir s'il y aura des commissions parlementaires. A notre avis, en tout cas, il y a lieu de vous faire remarquer une certaine importance qu'il y aurait à disposer du projet de loi 55 avant l'automne, parce que, si on prend le calendrier long, l'automne, une fois que cela sera discuté de nouveau, je crois qu'il y aura des inconvénients assez importants en termes d'organisation si, ensuite, il devait y avoir des changements substantiels là-dedans. Je vous prierais de prendre cela en considération dans votre prise de décision de demain. (16 h 30)

Sur l'interruption pour laquelle je m'excuse, tout à l'heure, à propos de l'article 99c, la réponse du député de Sainte-Marie portait sur l'article 99k, ce sont les clarifications concernant l'accès au droit de grève. Quant à moi, j'ai apprécié la clarification apportée, mais on aurait dû formuler, dans notre mémoire, 99c et 99d. Si vous lisez les deux paragraphes, je crois qu'il y a des questions qui restent probablement à clarifier.

Je voudrais enfin poser une question au ministre ou bien suggérer à l'Opposition, qui avait l'air, tout à l'heure, de trouver le temps long un peu de la poser quand on sera parti, nous, dans les prochains jours: le coût du conseil d'information et le coût du conseil des services essentiels, si on veut avoir un peu une idée de ce qu'il y a sous la formule; vous avez pris le soin de mettre deux crochets devant 99e et 99i. C'est en voyant un peu le coût au budget de ces appareils qu'on pourrait savoir ce qu'il y a dans la marmite. Peut-être qu'on n'aurait pas la réponse ce soir. Si on peut l'avoir, on va l'apprécier, mais il y a certainement du monde ici qui peut prendre en note la question et essayer d'obtenir une réponse du ministre.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. Rodrigue.

M. Rodrigue: Moi, c'est très bref. Cela va prendre 30 secondes. J'aimerais rappeler au député Bisaillon, quand j'ai mentionné qu'on se référait à notre expérience quand on analysait la situation relativement aux injonctions, aux ordres du Conseil des ministres, que, dernièrement, on a vécu une petite expérience à Alma, où les travailleurs se sont mis en grève, où le ministère a demandé à l'administration de ne pas poursuivre, parce qu'il y a eu des injonctions effectivement. On a été poursuivi; on a été condamné au maximum, à $50 000 d'amende pour le syndicat et à $5000 pour les officiers. Alors, il y a une petite différence à faire, encore une fois, entre les intentions et la réalité.

M. Johnson: M. Rodrigue, pour les fins de clarification, ce n'était pas une injonction en vertu de l'article 99; c'était une injonction en vertu du principe général du fait que la grève n'était pas légale, et ça, c'était l'économie générale du Code qui s'y appliquait...

M. Rodrigue: Oui.

M. Johnson: ... donc, l'employeur pouvait s'en servir.

M. Rodrigue: Mais...

M. Johnson: Ce dont on vous parle, c'est une décision gouvernementale...

M. Rodrigue: Mais...

M. Johnson: ... et on peut réserver au gouvernement le droit de procéder à l'injonction.

M. Rodrigue: Mais vous admettez avec moi qu'il pourrait se servir de l'article 99 quand même. Il pourrait s'en servir.

M. Forget: D'ailleurs, en vertu...

M. Rodrigue: En tout cas, c'est notre interprétation.

M. Forget: ... du Code de procédure civile, n'importe quel citoyen peut invoquer une injonction.

M. Johnson: Sauf dans le cas de l'article 99. M. Forget: Pas seulement l'administration.

M. Johnson: L'article 99 réserve au gouvernement ce recours à l'injonction. Ce n'est pas un citoyen particulier ou même une administration hospitalière qui peut prendre une injonction en vertu de l'article 99. Elle peut le prendre dans le cas d'une grève illégale, je suis d'accord avec vous. C'est ça, le recours, et c'est ça, le problème avec les injonctions, en ce moment.

M. Rodrigue: Nous, on continue d'être convaincus du contraire. On verra à l'expérience.

M. Laberge (Louis): En tout cas, M. le Président, si cela a vraiment pour résultat d'enlever le recours abusif aux injonctions, on viendra vous le dire, que vous avez un bon coup. Il n'y a pas d'hésitation de notre part. Parce que ça, on rend un mauvais service à tout le monde, y compris à la justice.

Le Président (M. Boucher): Alors, M. Guil-berg?

M. Guilberg: Oui, je voudrais revenir sur la question du ton du mémoire.

Le ton du mémoire a certainement déçu M. Bi-saillon, puisqu'il nous l'a dit. Mais ce que le mémoire lui disait, essentiellement, et je pense que c'est ce qui l'a le plus déçu, c'est que nous — les trois centrales — on estime que M. Bisaillon et le gouvernement ont tort sur la question des services essentiels.

Ce qu'ils nous proposent, ce n'est pas la meilleure méthode de les garantir et de les assurer. On lui dit ça fermement et on lui dit ça sans injure. Qu'il soit déçu qu'on pense qu'il a tort, c'est normal émotivement, la première fois qu'on se le fait dire.

M. Bisaillon: II ne faudrait pas me faire dire des choses que je n'ai pas dites.

M. Guilberg: Non. Mais nous aussi, ce qu'on doit dire, c'est que ce mémoire-là, cela a été le résultat d'un travail d'un groupe intercentrales, FTQ, CEQ et CSN, qui lui, au moment où il l'a écrit, était déçu de constater que le gouvernement n'avait pas compris ce que les syndicats tentent de lui dire depuis le mois de septembre.

Le Président (M. Boucher): Merci, monsieur. Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je vais m'abs-tenir de parler du ton.

Voici! Comme il y a eu beaucoup de choses dites, je vais essayer de me limiter à deux points seulement, en partant par un des points qui m'a passablement intéressé et probablement intrigué aussi, parce que je crois que, en ce qui me regarde, en ce qui me concerne, le projet de loi ne répond peut-être pas, comme le dit le président Charbonneau... Il s'agit de la négociation, éventuellement, à deux paliers. Mais, comme c'est lié au projet de loi 55, on aurait sans doute avantage, un moment donné, à voir votre perception, à connaître votre perception, votre vision, de quelle façon vous voyez cela à partir soit d'un texte précis, d'une suggestion que vous pourriez nous faire dans l'éventualité où il y a plusieurs points de négociation locale. Je comprends, par expérience, que c'est difficile d'en arriver à maintenir un seul droit de grève puisqu'il y a des clauses de niveau provincial dont découle directement la négociation locale. Sur ce point-là, je vous avoue que j'aimerais vous entendre si vous avez quelques minutes tantôt.

Il y a un point, cependant, sur lequel je suis en partie en désaccord. Cela va purement et simplement ajouter à ce que le député de Sainte-Marie a dit. C'est la question du calendrier à date fixe. J'ai vécu une négociation comme porte-parole des enseignants et j'ai même vu la Centrale d'enseignement du Québec faire une ou deux journées de grève parce qu'on n'avait pas le dépôt d'offres globales. Cela m'apparaissait drôlement important d'exiger, à l'intérieur du projet de loi, le dépôt d'offres globales pour permettre une négociation véritable, pour avoir une vision globale de toute la négociation, de toutes les offres patronales pour mieux évaluer certains échanges que nous avons à faire en négociation.

Quand on n'a pas de réponse sur deux ou trois chapitres, il est difficile, quand on arrive dans une fin de course, de préparer— ce qu'on appelle dans notre jargon de négociateurs — un "package deal" intéressant. Il m'apparaissait qu'un calendrier fixe, qui est incitatif et qui a une sanction politique, comme le disait le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, a aussi une sanction pour une fois sur l'employeur qui pouvait retarder ou remettre des offres chapitre par chapitre, attendre à la toute fin de la course pour remettre des offres sur deux ou trois chapitres importants; se traîner les pieds, donner des parties d'offres sur tel chapitre et attendre à la fin de tout pour lâcher un morceau, brouiller les cartes à la veille d'un vote syndical, comme on l'a déjà vu.

Je pense que si on analyse le calendrier fixe tel que suggéré, il représente — selon mon

expérience — un avantage marqué par rapport à ce qui existait antérieurement dans les lois régissant les négociations de la fonction publique.

J'aimerais là-dessus aussi entendre vos commentaires à la suite de la remarque que je viens de faire.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député. M. Charbonneau.

M. Charbonneau (Yvon): Sur la question de lier le projet de loi 59 et certains aspects du projet de loi 55, je pense qu'on est d'accord. Il faudrait mettre en discussion le projet de loi 55 également et actuellement ce n'est pas l'objet de cette rencontre. Mais si l'autre ministre ouvre le débat à ce sujet d'ici quelques jours, nous ferons des commentaires et des suggestions, d'autant plus que nous sommes justement en train de mettre au point ces jours-ci le résultat de notre consultation depuis plusieurs mois à ce sujet. Nul doute que, dès que vous ouvrirez le débat sur le projet de loi 55, nous pourrons vous faire part de notre point de vue, mais déjà il est clair qu'il n'est pas possible, il n'est pas fonctionnel d'astreindre au même délai — vous l'avez compris — le dépôt syndical des deux niveaux.

Il me semble que c'est là une suggestion extrêmement précise. C'est votre rôle de trouver les expressions qu'il faut pour assouplir le projet de loi à cet égard. Je crois que c'est très précis, c'est très simple comme suggestion.

Par ailleurs, quant au calendrier à date fixe, on n'a sûrement pas d'objection que vous fassiez obligation à la partie patronale de déposer ses offres complètes à un moment donné. Ce n'est pas ce sur quoi porte notre remarque. Encore le projet de loi indique que ce soit 60 jours après le dépôt complet des demandes syndicales; ce qui nous semble un délai extrêmement long. Il reste toujours l'aspect qu'on a souligné aussi: pourquoi n'y aurait-il pas un dépôt également? Si vous prenez l'optique qu'il faut légiférer pour le démarrage de la négociation, pourquoi n'y a-t-il pas une mise au jeu en même temps sur les questions que les deux parties veulent remettre en débat, en négociation?

Si vous voulez légiférer, je crois qu'il faudrait le faire en toute équité pour les deux parties. Ce qu'on vous suggérait, c'était de transposer l'esprit du Code du travail, le devancer de trois mois, mais en reconnaissant qu'il peut y avoir des négociations valables juridiquement parlant, à partir de janvier, dans notre cas, plutôt qu'à partir d'avril. Cette possibilité d'avoir de vraies négociations, le projet de loi les rend impératives; alors, c'est une optique un peu différente. Nous ne pensons pas qu'il y ait lieu de rendre ce démarrage impératif, d'une manière aussi rigoureuse. Mais si jamais vous retenez cette idée plutôt que notre suggestion, je crois qu'il faudra qu'à ce moment-là, en toute équité, vous envisagiez un même type de départ et un même type d'obligation pour la partie patronale, du moins pour les objets qu'elle peut remettre en négociation. Ma question sur le coût du conseil d'information, peut-être que le ministre était allé aux informations tout à l'heure, je pense que c'est une bonne question. Vous avez étudié les budgets récemment et il me semble que c'est là qu'on pourrait savoir quelle espèce de machine il y a en dessous de ces formules.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Pour ce que vous proposez en fait, M. Charbonneau, quand vous dites: Donnez chance égale de départ, il faudrait qu'il existe, à cette fin, un mécanisme de dénonciation, soit d'articles ou d'objets de négociation, de part et d'autre. Mais vous connaissez très bien la tradition. Surtout à cause des mécanismes de consultation, qui font que tout l'ensemble des textes est soumis à la consultation des membres et, à toutes fins pratiques, du côté syndical, si cela n'a pas changé depuis mon départ, à la CEQ, il est bien évident que, sur la très grande majorité des clauses, quasiment 98%, il y a des changements, si mineurs soient-ils, ceci vous obligerait, à toutes fins pratiques, de votre côté, à dénoncer l'ensemble de la convention de toute façon. Je ne vois pas comment on arriverait... J'adhérerais à une formule qui dit: Si on n'était pas dans une tradition qui fait qu'on remet tout en question à chaque convention collective, mais, par souci démocratique — et je ne nie pas que ce n'est pas bon, au contraire, je pense que c'est valable — on est obligé de consulter nos membres, et c'est normal.

M. Charbonneau (Yvon): J'aurais une autre suggestion, c'est de transposer l'esprit du code à partir de janvier plutôt qu'à partir du 1er avril plutôt que de le rendre impératif. Vous avez deux voies devant vous. Nous préférons suivre le profil général du Code du travail même pour le secteur public.

M. Laberge (Louis): Mais si vous voulez le rendre impératif, au moins les deux en même temps, autrement, ce n'est pas correct.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Johnson: Je voudrais vous remercier de votre participation à cette longue session de mémoires et de questions, en espérant que nous ayons l'occasion de nous revoir, ce qui va se faire d'une façon ou d'une autre, séparément ou pas, et vous dire que je nous souhaite tous, comme je l'ai dit à nos interlocuteurs d'hier, je nous souhaite tous bonne chance. Merci, messieurs.

Le Président (M. Boucher): Au nom des membres de la commission, je remercie tous les participants. M. Rodrigue, vous voulez ajouter quelque chose?

M. Rodrigue: Je voulais vous remercier tout simplement. On espère aussi que, séparés ou non, on le sait, on se reverra. Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre.

M. Johnson: Est-ce que vous voulez suspendre trois minutes?

Le Président (M. Boucher): Est-ce que les membres sont d'accord pour suspendre quelques minutes avant l'audition du prochain organisme?

Fédération des infirmières et infirmiers du Québec

M. Johnson: Non? Pas nécessaire? D'accord. A ce moment-là, M. le Président, je vous demanderais d'appeler les représentants de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Est-ce qu'il y a quelqu'un du COPS qui est présent?

M. le Président, avant que vous ne demandiez à Mme Gosselin et à Mme Rodrigue de nous livrer leurs réflexions abondantes sur le projet, je voudrais simplement soulever, pour les membres de la commission, la situation un peu particulière dans laquelle elles sont, étant donné que, depuis quelques jours, elles sont en négociation, que l'avis de négociation a été envoyé conformément au nouveau Code du travail et que, dans les circonstances, évidemment, je pense que c'est un peu plus délicat pour elles. Je voudrais seulement qu'on ait tout cela bien présent à l'esprit, qu'elles sont en pleine négociation. (16 h 45)

Je voudrais finalement mentionner que l'intérêt de la FIQ est particulier dans la mesure où une disposition transitoire s'applique à la FIQ, on dit que c'est le Code du travail. Comme elles ont envoyé leur avis de négociation après le 1er juin, ce sont donc les nouveaux délais qui s'appliquent, l'acquisition du droit de grève est, en principe, 90 jours après l'expédition de cet avis de négociation.

Deuxièmement, le projet de loi prévoit spécifiquement que le droit à la grève est sous la condition suspensive de la remise de la conclusion des ententes en matière de services essentiels ou de la remise de la liste syndicale.

Le Président (M. Boucher): Merci. Mme Gosselin, si vous voulez débuter.

Mme Gosselin (Ginette): Les remarques faites dans le mémoire concernent surtout la forme du projet de loi 59, mais il ne faut pas voir là une acceptation globale des principes qui y sont contenus. On est toujours en désaccord avec les mécanismes prévus au code en ce qui concerne l'information. On pense que le fait de remettre ça à une tierce partie donne un dur coup à la crédibilité des parties à la négociation. On ne pense pas que, de cette façon, la neutralité ou l'objectivité de l'information soit pour autant atteinte.

Quant à la détermination des services essentiels, il serait préférable d'en établir localement, d'après nous, dans un premier temps, les principes de base, pour ensuite en vérifier l'application au jour le jour, sans l'intervention d'aucune tierce partie. La formule présentée par le projet de loi 59 ne pourrait avoir effet, selon nous, tout comme le chapitre 52 des lois de 1975, que faciliter l'éta- blissement de la stratégie patronale quant a la suspension éventuelle du droit de grève.

Le projet de loi 59 nous apprend que la plupart des dispositions qu'il contient ne seront pas applicables aux associations de salariés des secteurs public et parapublic dont la convention expire avant le 1er juillet 1978 nous visant par là.

Nous demeurons donc soumis au Code du travail en vigueur actuellement, tout en devenant régis par quelques nouveaux articles dudit projet, ce qui n'est pas sans entraîner plusieurs complications, sur lesquelles nos présentes revendications sont centrées.

Elles portent sur l'ensemble du projet comme suit:

En ce qui concerne l'article 2 du projet de loi 59 qui modifie l'article 97a du code, ce dernier vise à interdire à l'employeur l'utilisation de briseurs de grève dans des cas spécifiques, à savoir généralement lorsque la grève de l'association de salariés en cause fut déclarée conformément aux articles 99 du code, 99k et 99I du projet. Or, on sait que, dans chacun desdits articles, un avis de grève, l'un de 8 jours et l'autre de 48 heures, est exigé.

L'avis de 8 jours édicté par l'article 99 s'applique à tous les salariés à l'emploi d'un service public, en l'occurrence, suivant la définition même du code, un hôpital, et ce, en sus des nouveaux articles 99k et 99i du projet de loi 59.

L'article 99a du même projet précise par ailleurs: "A l'exception de la section 1a) du chapitre IV, les dispositions du présent code s'appliquent aux relations de travail dans les secteurs public et parapublic, sauf dans la mesure où elles sont inconciliables avec celles du présent chapitre. "

Cependant, dans quelle mesure ces deux avis seront-ils considérés, probablement après coup, pour déclarer une grève achevée illégale, comme inconciliables?

Quand, dans les notes explicatives du projet de loi sous étude, on retrouve, au paragraphe d), l'objet suivant: "Assujettir le droit à la grève ou au lock-out à l'avis préalable."

Avait-on négligé de considérer l'article 99? Dans quelle mesure? Il y aurait sûrement lieu de le préciser.

La même remarque s'applique en regard de l'ordonnance prévue à l'article 99 et de la décision prévue à l'article 99I du projet. Il n'est pas évident que ces deux articles sont inconciliables au sens de l'article 99a et, pourtant, il est clair qu'ils font double emploi et donc occasionnent une double sanction, alors que, par ailleurs, rien de tel n'est prévu pour le lock-out.

Soulignons enfin que seule la liste de services essentiels déposée suivant l'article 99j du projet de loi est prévue à l'article 97a sous étude, plus particulièrement au paragraphe bii), comme restriction à l'interdiction du recours par l'employeur aux briseurs de grève.

Pourquoi avoir négligé, puisqu'il faut peut-être parler ici de négligence, de prévoir la liste qui devrait être déposée par nous en vertu de l'article 5a des dispositions transitoires?

Au sujet de l'article 4 du projet de loi qui mo-

difie le code actuel par l'insertion, après l'article 99, du chapitre Va intitulé "Dispositions particulières applicables aux secteurs public et parapublic", la remarque que nous faisions valoir ci-haut en ce qui a trait au double avis de grève, 99 d'une part et 99k de l'autre, et, à la double sanction, injonction d'une part et suspension du droit de grève de l'autre, trouvent à nouveau leur raison d'être. Si la justification de cette double législation était que la définition de "services publics" utilisée à 99 et celle des secteurs public et parapublic, au chapitre Va, différait, il y aurait lieu de prévoir dans quelle mesure certaines des dispositions s'appli-quant à l'une et/ou à l'autre, à première vue, sont inconciliables au sens de 99a.

En ce qui a trait à l'article 99a encore, il appert que l'édiction de cet article fait suite à nos recommandations devant la commission Martin. Or, il appert, d'autre part, en vertu de l'article 6 dudit projet de loi, que nous sommes exclus de son application. Nous espérons à nouveau qu'il ne s'agit là que d'un oubli et non d'une intention voilée de répéter les abus que l'absence d'une disposition à cet effet a occasionnés les années précédentes.

Quant à l'article 99e, qui traite du conseil d'information, nous réitérons, par la présente, les remarques que nous faisions valoir devant la commission Martin qui, semble-t-il, se sont révélées infructueuses. Nous demandons donc le retrait de cette disposition, pour les raisons qu'on a mentionnées au début.

L'article 99h, pour sa part, en rapport avec le dépôt des offres syndicales et patronales, se réfère, d'une part, à l'association accréditée et, d'autre part, à l'employeur ou l'autre partie. Faut-il entendre par là que chacune des associations accréditées affiliées à la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec devra déposer, dans chacun de ses établissements, une copie de ses offres et vice versa? Cette disposition ne vient-elle pas en contradiction avec le projet de loi 55 qui tend à regrouper, pour fins de négociation, les parties syndicales d'un côté, les parties patronales de l'autre?

Cette remarque vaut du reste pour l'ensemble du projet de loi 59, au cours duquel on utilise indifféremment les expressions suivantes: "association accréditée ", une "partie", "l'employeur", un "établissement", etc., sans nulle autre précision.

La création, à l'article 99i, d'un conseil sur le maintien des services de santé et des services sociaux vient à nouveau en conflit avec nos précédentes représentations. Nous exigeons donc l'abolition avec d'autant plus de vigueur qu'il n'est à aucun moment précisé quand ce conseil devra ou pourra parler, contrairement à ce qu'on a prévu pour le conseil d'information sur les négociations, si bien qu'il aura tout le loisir, si tel est son objectif, de se prononcer de plein droit, par exemple, chacune des journées que durera un conflit, de manière à créer un genre d'hystérie collective au sein du public usager, autrement dit à avoir l'effet contraire à celui qui est sans doute recherché.

D'autre part, le rôle des comités locaux et régionaux n'est aucunement précisé et l'adoption des règles de régie interne sur lesquelles personne n'a de contrôle, pourrait facilement conduire à des abus de toutes sortes.

Nous nous étonnons également du recours aux experts, puisqu'il ne s'agirait là que d'une appréciation sur le maintien des services essentiels. Encore là, s'agit-il d'une appréciation sur le maintien qualitatif ou quantitatif? Ces experts seraient-ils des médecins ou tout simplement des représentants de l'employeur, par exemple la directrice des soins infirmiers, vis-à-vis desquels nos réticences demeurent, puisqu'ils ne pourront, en aucun cas, être considérés comme partie désintéressée?

Bref, il nous apparaît clairement que ce conseil pourrait aisément, outre le rôle d'information qui lui est expressément dévolu, être utilisé comme source, non seulement de renseignements, mais également d'évaluation quant à l'application du deuxième alinéa de l'article 99i, suspension du droit de grève par le Conseil des ministres.

A première vue, il appert que l'article 99j est édicté de manière à donner une certaine prépondérance à la liste syndicale des services essentiels, au cas de mésentente. Or, une étude plus approfondie nous permet de conclure qu'il n'en est rien. La liste une fois déposée, en effet, ne pourra être modifiée par la suite. Ce principe vaudra également au cas de suspension du droit de grève par le lieutenant-gouverneur en conseil s'il est d'avis qu'une telle grève met en danger la sécurité ou la santé publique.

Pour recouvrer notre droit à l'exercice de la grève, il nous faudra donc modifier cette liste, c'est-à-dire s'entendre avec l'employeur et à ses termes, puisqu'à ce moment-là, on va être en demande.

Pour les raisons précitées, nous demandons donc le retrait de cet article, plus spécifiquement du deuxième alinéa, car, au surplus, l'intérêt de négocier les services essentiels six mois ou davantage avant l'exercice du droit à la grève ne nous apparaît aucunement évident.

On parle enfin, à cet article, de même qu'aux articles 99i et 5a, de services à maintenir en cas de conflit de travail. Cette nouvelle formule signifie-t-elle que les salariés devront maintenir les services essentiels non seulement en cas de grève, mais également en cas de lock-out, ce qui peut sembler, à tout le moins, contradictoire? On va voir plus loin qu'on ne considère pas que le texte du projet de loi est clair quant à l'interdiction du droit au lock-out pour l'employeur.

Il semble que le premier paragraphe de 99k vienne remplacer, dans les secteurs public et parapublic, l'article 46 du présent Code du travail. Quant au deuxième paragraphe, nous faisons valoir à nouveau les remarques susmentionnées, en ce qui concerne la dualité d'avis, soit celui de 99 et celui sous étude.

Une remarque additionnelle s'impose. On utilise à cet article l'expression "une partie peut déclarer la grève ou le lock-out" et non plus l'expression consacrée à l'article 99 et maintes

fois interprétée par la jurisprudence "la grève est interdite".

Nous nous inquiétons de la portée de ce changement. Aura-t-il pour effet de rendre inopérant l'article 47 et, par conséquent, de signifier que la convention n'aura plus d'effet à la date de son expiration, même si aucune grève ou lock-out n'est déclaré?

On ne parle plus ici en effet de l'interdiction d'exercice du droit de grève ou de lock-out, lesquels sont liés à cause de l'article 97 du code, mais d'une simple déclaration de grève ou de lock-out.

Ne vaudrait-il donc pas mieux reprendre ici les termes utilisés à l'article 99 et dont l'interprétation par la Cour d'appel nous confirme le sens de manière à rendre cet article concordant avec l'objet visé par les notes explicatives au paragraphe d) plus particulièrement, celui qui disait: "D'assujettir le droit à la grève ou au lock-out à un avis préalable et d'exiger la conclusion d'une entente pour le dépôt de la liste prévue ci-dessus comme condition préalable à l'exercice du droit de grève."

Quant au troisième paragraphe de cet article, celui qui dit qu'un avis de grève ne pourrait être envoyé avant le jour pour lequel il avait été précédemment envoyé, sa rédaction nous semble à tout le moins confuse et pas tout à fait claire.

Au sujet du deuxième paragraphe de l'article 99 paragraphe I), nous réitérons également nos remarques précédentes dans le sens qu'il y aurait dédoublement de sanction quant à la suspension du droit de grève, à cause de l'article 99. Nous nous étonnons encore de toutes les précautions spécifiées en regard de la grève alors qu'aucune n'est prévue en cas de lock-out.

Quelle disposition prévaudra pour le maintien des services essentiels en cas de lock-out, comme nous le soulignions précédemment, alors que tout comme en cas de grève les effets seront identiques sur la santé et la sécurité publique?

Les dispositions transitoires des articles 5 et 6 du projet de loi nous visent plus particulièrement, puisque le décret qui nous tient lieu de convention prend fin le 30 juin 1978. Il nous faudra, en vertu de ces articles, produire une liste de services essentiels ou une entente à l'autre partie, de même qu'au conseil sur le maintien des services essentiels et des services sociaux, dès sa création, on ne sait pas trop quand! Pourquoi cette dernière obligation, puisqu'en vertu de l'article 6 dudit projet de loi, ce conseil ne saurait avoir aucune juridiction en ce qui nous concerne? Il semble de plus que la date d'exercice de notre droit à la grève serait assujettie à la date de la création de ce même conseil.

Notons enfin qu'il nous apparaît inconcevable d'être exclus — c'est concernant le projet de loi 55 — du projet de loi 55, précision que nous tenons à apporter, même si tel n'est pas l'objet de l'étude de la présente commission, puisqu'une partie des articles qui sont édictés reproduit quelques-unes de nos demandes à la commission Martin.

Nous comprenons mal pourquoi on devrait se soustraire à ces dispositions, puisque, dans les faits, notre situation sera celle prévue audit projet de loi.

C'est pourquoi, en concordance avec cette revendication, nous exigeons que les articles 99b et 99f trouvent application dans notre cas.

Comme dernière remarque, à la lecture du nouveau Code du travail, des projets de loi 59 et 55, même un initié a des problèmes à bien comprendre et à tout saisir. On demanderait que, dans sa rédaction finale, il y ait un peu plus de clarté, étant donné que c'est un code qui s'applique à du monde ordinaire, parce qu'on est déjà allé devant les tribunaux et on s'est toujours fait dire, à ce moment-là, que nul n'était sensé ignorer la loi. Il faudrait qu'elle soit compréhensible.

Le Président (M. Boucher): Merci, Mme Gos-selin. M. le ministre.

M. Johnson: Je voudrais d'abord vous remercier pour un mémoire d'une très grande qualité, je pense, sur le plan technique, il n'y a aucun doute là-dessus. Cependant, je dois vous dire que, comme je viens tout juste d'en prendre connaissance, vous soulevez des questions auxquelles je n'ai pas de réponses. Dans certains cas, je ne pourrais pas vous donner la réponse de façon immédiate. On travaillera là-dessus, à partir de cet après-midi.

Il y a seulement certaines choses sur lesquelles je peux donner une réponse immédiate. C'est vrai qu'il y a eu un ou deux oublis, entre autres de référer à l'article 99 avec une lettre au lieu de l'article 5 de la loi. Dans votre cas, c'est manifeste que c'est plus un problème de concordance et de rédaction qu'autre chose et on le corrigera. (17 heures)

Je voudrais plutôt aborder un point, à moins que vous ayez quelques demandes spécifiques au-delà de cette pratique assez longue et technique que vous avez faite. Vous demandez, entre autres, d'être soumis aux dispositions du projet de loi 55. Cela m'apparaît central dans vos demandes: C'est-à-dire que vous voudriez que la partie patronale, pour vous, soit pour la négociation en cours, la partie patronale qui est prévu à la loi 55, telle que déposée récemment... Vous y ajoutez, d'ailleurs, c'est une phrase qui m'a fait tiquer un peu: "Nous comprenons mal pourquoi la FIQ devrait se soustraire à ces dispositions, puisque dans les faits, notre situation sera celle prévue audit projet de loi." Si je comprends bien, l'organisation de la partie patronale, dans le cas de la FIQ, s'est faite en vertu de l'ancienne loi 95, et non pas en vertu de la loi 55, puisqu'elle n'est pas adoptée.

Mme Gosselin: En vertu des textes, c'est différent, mais dans les faits, dans le projet de loi 55, ce qu'on a fait, c'est à peu près reproduire ce qui s'était passé la dernière fois, sauf qu'on oblige la partie patronale à se regrouper. On met le regroupement dans la loi. Cela va être un organisme reconnu, chose qui n'existait pas auparavant, mais dans les faits, c'est pas mal la même chose. Que le ministre des Finances soit ou non à la négociation, qu'il y soit dans le texte ou qu'il n'y

soit pas, on pense que dans le fond, il y était quand même.

M. Johnson: Je peux vous dire que je vais en parler au ministre des Finances. On verra cela.

Mme Gosselin: Si on parle du projet de loi 55, enfin s'il y a une commission parlementaire... De toute façon, on écrira à M. Parizeau s'il n'y a pas de commission.

M. Johnson: II y a aussi le ministre des Affaires sociales qui est assez directement impliqué, merci. Est-ce qu'on pourrait traiter de quelques questions qui touchent strictement la dimension transitoire des dispositions qui vous affectent avant de parler du reste du projet? Est-ce que vous pourriez revenir sur les questions qui touchent à la dimension des dispositions transitoires, celles qui s'appliquent? Celles qui s'appliquent à vous, en ce moment, c'est le Code du travail tel qu'il existe depuis le mois de décembre. Deuxièmement, le fait que votre droit de grève est sous la condition suspensive de l'entente ou de la liste syndicale. Est-ce que vous avez des choses précises sur lesquelles vous voudriez revenir?

Mme Gosselin: Non, là-dessus, si on avait eu quelque chose, on l'aurait dit, mais on voudrait...

M. Johnson: Celles qui manquent maintenant, d'après vous?

Mme Gosselin: On voudrait l'article 99a. Je pense qu'on l'a dit quand on est passé vis-à-vis de...

M. Johnson: D'accord.

Mme Gosselin: Les autres qui sont mentionnés, dans la mesure où il y aurait des concordances à faire, évidemment. C'est parce que c'est lié au projet de loi 55 aussi. Si on demande d'être assujetti à la loi 55, à ce moment, les points de la loi 59 qui...

M. Johnson: Qui s'ensuivent.

Mme Gosselin: ... se rattachent à cela, devraient aller avec... M. Johnson?

M. Johnson: Oui?

Mme Gosselin: Sur les dispositions transitoires, puisque vous m'avez posé une question là-dessus...

M. Johnson: Oui.

Mme Gosselin: ... évidemment, on vous a dit que le fait de soumettre une liste au conseil sur le maintien des services de santé — je ne sais pas trop son nom — au paragraphe b) de l'article 5 semble faire en sorte qu'on acquerrait le droit à la grève 45 jours peut-être après la formation du conseil sur le maintien, puisqu'il est écrit qu'on devra lui soumettre notre liste dès sa création.

M. Johnson: D'accord. La notion, quitte à la préciser s'il le faut, c'est 45 jours après la tansmission de la liste en question à l'autre partie et au conseil, en présumant qu'il existe, sans cela ce serait une tactique absolument diabolique. J'espère que vous ne me prêtez pas ce genre d'intention, Mme Gosselin.

Mme Gosselin: Non, mais on voulait vous le souligner, il n'y a pas de chance à prendre.

M. Johnson: D'accord. Peut-être que l'imprécision est là, on verra à la corriger. La notion, c'est la transmission de l'avis en question et la possibilité pour l'autre partie de la recevoir; deuxièmement, du côté du ministère des Affaires sociales, de l'évaluer; troisièmement, le groupe d'information, s'il est formé ou s'il n'est pas formé, on va l'oublier. Autre chose?

Mme Gosselin: Est-ce que le texte va être modifié pour...

M. Johnson: Si on doit impliquer une modification au texte, on le fera, mais je ne suis pas sûr, parce qu'on va revoir ça avec les légistes, chacune des propositions, et, dans certains cas, on se rend compte, comme le législateur n'est pas censé parler sans rien dire — ça paraît qu'il n'est pas venu ici souvent — il est possible qu'on ne le modifie pas, parce que, implicitement, ça veut dire que ce n'est pas suspendu si on ne crée pas le conseil. Mais, enfin... On se comprend très bien sur l'intention et on le modifiera si ça doit être explicité. J'en profite, à ce moment-là, pour soulever un commentaire général que vous aviez.

Vous dites: Dans le fond, cette loi, c'est fait pour du monde qui essaie de l'appliquer, des syndiqués, etc., et c'est un langage bien complexe. J'en suis. C'est très compliqué et si j'avais à me fixer un objectif un peu utopiste, je me dirais: J'aimerais bien ça que les lois du Québec soient faites dans un langage simple, de prose du dimanche matin, et le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières serait d'accord entièrement d'accord avec moi.

Le problème, évidemment, c'est que ça fait 3000 ans que ça existe, le langage juridique, voyez-vous; c'est difficile à changer.

D'accord pour les dispositions transitoires. Je pense qu'on a pris bonne note de vos demandes. Comme je vous le dis, je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à toutes aujourd'hui.

Sur d'autres aspects, la question du groupe d'information qui, de toute façon, dans votre cas, ne s'appliquerait pas, à moins, cependant — et je ne vous demande pas de me faire une réponse; vous êtes en négociation — que vous ayez l'intention d'étirer les négociations pour que ça tombe en même temps que toutes les autres en 1979. Mais ça, je ne présumerai pas de ça et je ne vous demanderai même pas de réponse à ça.

Mme Gosselin: Non, mais de toute façon, même si ce n'est pas pour cette année...

M. Johnson: Oui, éventuellement. Mme Gosselin: ... il y en aura d'autres.

M. Johnson: D'accord. Alors, est-ce que vous avez des commentaires sur la notion du groupe d'information?

Mme Gosselin: Oui.

M. Johnson: ... les reprendre?

Mme Gosselin: L'objectif qu'on semble rechercher par ce conseil d'information, c'est de pouvoir en donner plus et de donner, semble-t-il, une information objective et neutre. C'était, enfin, dans un document concernant les principes de ce qui serait contenu dans ce projet de loi. C'était ce qui en ressortait.

On n'y croit pas, comme on vous l'a dit l'autre fois, quand on vous a rencontré; à l'information neutre, on n'y croit pas. L'information qui sera donnée sera toujours interprétée et ça ne fait, selon nous, qu'une troisième partie qui va parler au milieu, avant ou après les deux autres qui sont à la négociation.

M. Johnson: Sur la question du groupe, vous parlez de la possibilité de générer une atmosphère d'hystérie collective au sujet des services essentiels, à la page 6 de votre document, premier paragraphe en haut.

Vous savez, ce n'est pas ça, l'objectif. On peut très bien se comprendre.

Mme Gosselin: Mais on vous dit que ça peut en arriver là, par exemple.

M. Johnson: C'est ça. Ce que vous dites, c'est: On est sûr que ce n'est pas votre objectif. Vous êtes gentille. Vous ne nous prêtez pas d'intentions, ce qui est peut-être reposant pour une partie de la journée, mais vous pensez que ça puisse en arriver là?

Mme Gosselin: Ecoutez!

M. Johnson: Ecoutez! Moi, j'ai plutôt l'impression du contraire, mais enfin...

Mme Gosselin: Tout ce qui s'est fait, sur les services essentiels, cela a toujours servi à ça.

M. Johnson: Grâce à des journaux qui, habituellement, ne sont pas de couleur blanche en fin de semaine.

Mme Rodrigue: ... les journaux qui existent, qui donnent de l'information publique.

M. Johnson: Pardon?

Mme Rodrigue (Thérèse): Ce sont les seuls journaux qui existent qui donnent de l'information publique.

Mme Gosselin: Pas seulement ceux là, M. Johnson, tous les journaux. On parle avec des journalistes, parfois, et je me souviens que lors d'un conflit, les journalistes nous disaient — je ne parle pas des journaux que vous avez mentionnés — ce matin, on a le mandat de chercher des morts. Bon!

M. Johnson: Oui, mais ça, conseil ou pas conseil, vous admettrez avec moi que si ça existe et si cela a toujours existé, cela peut continuer à exister et vous pourriez, théoriquement, dans la situation que vous me décrivez, me dire qu'un journaliste vous dit qu'il a le mandat de trouver des morts, mais ça, qu'il y ait un conseil ou qu'il n'y en ait pas, cela ne l'empêchera pas, à moins qu'on se mette à contrôler l'information, et ça, je pense que c'est la dernière chose qu'on veut, ça.

Mme Gosselin: C'est ça qu'on vous dit. On ne pense pas que le conseil puisse faire en sorte d'atteindre à l'objectivité et à la neutralité des informations. Alors, ce qu'on dit: Laissons faire l'information par les gens qui la font habituellement.

M. Johnson: Oui, mais est-ce que vous ne voyez pas un avantage, par exemple, à la possibilité de rassurer une population dans un coin bien précis. Puisque vous m'avez entendu parler des services essentiels depuis trois mois, vous devez connaître mon exemple de Mégantic. C'est un hôpital qui n'est pas très gros, où il y a une quinzaine de personnes dans le service infirmier, sept ou huit personnes rattachées directement ou indirectement au laboratoire, trois ou quatre médecins et le personnel de soutien — hygiène, cuisine, etc.

L'inconvénient d'être à Mégantic, c'est qu'il n'y a qu'un hôpital 50 milles à la ronde. Si l'hôpital ferme, il peut être difficile de marcher jusqu'à Sherbrooke avec son infarctus ou sa crise d'asthme.

Il y a la tendance, dans un contexte de crise dans le secteur de la santé, effectivement, de dramatiser et dans d'autre cas d'amoindrir des choses qui sont peut-être dramatiques, selon qu'on est d'un côté ou de l'autre. Je vois cet organisme comme... Je ne garantis pas d'information objective; d'ailleurs, c'est un problème philosophique, ce n'est pas un problème politique. L'objectivité a préoccupé bien des philosophes depuis quelques centaines d'années, mais, en tout cas, je vois cet organisme comme n'ayant pas a priori de motivation de partialité. C'est cela qu'on recherche dans cet organisme. On veut faire en sorte qu'il soit composé de gens nommés par l'extérieur et non pas par le gouvernement, par le juge en chef du Tribunal du travail après consultation de différents organismes. On veut également lui donner le mandat de créer des sous-groupes régionaux ou locaux pour pouvoir infor-

mer concrètement et être justement une aide additionnelle pour les journalistes qui cherchent cette information. Il peut aussi carrément dire exactement ce qu'il pense ou infirmer certaines choses véhiculées par la partie patronale ou par la partie syndicale.

En ce sens-là, on peut le voir comme un mécanisme de plus, ce qui n'empêchera pas qu'il y ait du jaunisme — parce que cela peut arriver qu'il y ait du jaunisme — alimenté parfois par la partie patronale dans des déclarations. On peut empêcher aussi que les gens se ferment les yeux quand il y a de vrais problèmes. Ce comportement peut être alimenté parfois par la partie syndicale. Mais il est là et cela peut être une source intéressante d'information. Il faut le prendre pour ce qu'il est et c'est cela.

Enfin, je me rends compte qu'il y a un fossé qui nous sépare; il est non seulement large, mais il est profond.

C'est ce que j'avais à dire. Maintenant, pour le reste de l'argumentation juridique que vous avez développée, je vous assure qu'on va la regarder de très près à partir de huit heures ce soir.

Le Président (M. Boucher): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier les représentants de la FIQ pour le mémoire qu'ils nous ont préparé. Comme le ministre l'a souligné, je pense qu'ils ont quand même tenté d'examiner chacun des articles, même si, dans l'ensemble, il ne semble pas y avoir de mésentente fondamentale avec la position du gouvernement.

Ma question a trait à l'article 99h. D'autres représentations ont été faites voulant que les dépôts des propositions syndicales se fassent en même temps que ceux de la partie patronale. Je me demandais si c'était un problème auquel vous vous étiez arrêtés et quel était votre point de vue sur cette question.

Mme Gosselin: Non. En lisant cela, on s'est dit: Bon! encore une échéance de plus à respecter. Toutes des échéances à ne pas oublier quand on négocie. De toute façon, si la partie patronale est obligée de parler en même temps que nous pour la première fois, si elle veut se garder des choses dans ses poches pour reparler un mois plus tard, elle pourra toujours le faire. Alors, dans le cas présent, cela ne nous pose pas de problème particulier. Ce qu'on a surtout retenu... évidemment, quand cela aura été essayé une fois, il y aura peut-être des améliorations à apporter, mais tout le monde veut que les négociations commencent le plus tôt possible pour que, comme par les années précédentes, les gens du secteur parapublic ne se retrouvent pas pendant un an ou un an et demi sans nouvelle convention, sans augmentation de salaire et ainsi de suite. Alors, sur le fait qu'il y a des délais, surtout si, comme dans le sens des interventions de tout à l'heure, cela pouvait être tout autant indicatif que formel comme délai, là-dessus, on ne voit pas de problème. (17 h 15)

Mme Lavoie-Roux: Vous êtes présentement dans une phase de négociation, si je comprends bien. Est-ce que les délais qui sont suivis par le gouvernement présentement vous satisfont quant à la présentation de propositions formelles de la part de la partie patronale?

Mme Gosselin: II n'y a pas encore eu de première rencontre.

M. Johnson: L'avis de négociation vient tout juste d'être expédié. La négociation commence, en vertu du code.

Mme Lavoie-Roux: Parce que le ministre de la Fonction publique, à qui nous avions posé la question il y a environ trois semaines ou un mois, c'était un vendredi matin, nous avait dit que les mandats complets seraient donnés au cours du moi de juin, dans le cas des parties qui étaient...

M. Johnson: Oui, mais cela ne veut pas nécessairement dire que les parties se sont rencontrées, c'est que le gouvernement est prêt. Ce que le ministre de la Fonction publique a dit, c'est que le gouvernement, au cours du mois de juin, établirait les mandats, ce qui ne veut pas dire que la négociation est amorcée. L'avis de négociation vient d'être expédié par le syndicat, cela veut dire que le gouvernement, à la fin du mois, devrait être prêt avec ses mandats pour répondre à des demandes syndicales.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que les demandes de la partie syndicale sont déposées?

M. Johnson: Pas encore, je ne pense pas.

Mme Gosselin: II n'y a pas eu de première rencontre.

Mme Lavoie-Roux: Alors, vous n'avez pas eu de chance de les déposer?

Mme Gosselin: Non, pas encore.

Mme Lavoie-Roux: Merci.

M. Blank: Ni demande ni offre.

M. Forget: Cela se termine bien le 30 juin?

Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de Joliette-Montcalm? Pas d'intervention? Alors, M. le ministre, pour le mot de la fin.

M. Johnson: Je trouve cela un peu bref.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: On a fait référence souvent, depuis le début de la commission, à l'accessibilité des malades, comment réagissez-vous à cela?

Quelles sont les orientations que vous pouvez avoir là-dessus?

Mme Gosselin: C'est dans le sens des questions qui ont été déposées tout à l'heure. J'interprète, mais on pense que les gens qui se présentent à un hôpital et qui pensent avoir besoin de soins devraient pouvoir y être admis pour être examinés, à condition que les portes soient ouvertes.

M. Bisaillon: Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites: A condition que les portes soient ouvertes?

Mme Gosselin: Lors d'un conflit qu'on a connu dernièrement et de celui de 1976, on ouvrait nos lignes imposantes de deux ou trois personnes pour laisser entrer les visiteurs, mais les portes étaient fermées à clé de l'intérieur.

M. Johnson: Mais vous savez que le projet de loi prévoit l'interdiction du lock-out, si les services essentiels sont assurés, cependant. Donc, cela va dans le sens que vous dites, je pense. Concrètement, j'aurais une question... Je m'excuse.

M. Bisaillon: Je n'avais pas terminé sur ce plan-là. Il est beau de dire: II faut que les services soient assurés, donc l'accessibilité aux gens qui viennent à l'hôpital, qu'ils soient examinés et qu'après cela on décide de leur cas, mais est-ce que vous pensez que cela doit être accompagné d'un mécanisme de surveillance et est-ce que ce mécanisme de surveillance doit être officialisé dans une loi?

Mme Gosselin: Je pense que cela se fait et que cela s'est fait déjà, sans que cela ait été officialisé, comme vous dites, et que cela va continuer de se faire.

M. Johnson: J'aurais une question, en me rappelant les événements de 1976. Considérez-vous que, dans un hôpital universitaire, un interne ou un résident est un "scab"? J'ai déjà eu de la difficulté à aller voir mes patients pendant la grève de 1976.

Mme Gosselin: S'il n'est pas de garde.

M. Johnson: D'accord. S'il n'est pas de garde, c'est un "scab", s'il est de garde... Mais comme ils sont de garde à peu près 100 heures par semaine...

Mme Gosselin: Oui, et pauvres eux autres, ils ne négocient pas.

M. Johnson: Ils viennent de terminer.

Le Président (M. Boucher): II n'y a pas d'autre intervention?

M. Johnson: Je pense que Mme Gosselin voulait ajouter des choses.

Le Président (M. Boucher): Mme Gosselin.

Mme Gosselin: Dans la tête de tout le monde, l'interdiction du lock-out a I'air clair, enfin au plan des intentions. Mais je vous répète que, selon nous, dans le texte, ce n'est pas clair.

M. Johnson: En fait, au niveau de la technique, on va le voir.

Est-ce que vous avez autre chose à ajouter, Mme Gosselin?

Je voudrais vous remercier, encore une fois, de la qualité du mémoire que vous avez présenté. J'ai regretté de ne pas avoir plus de réponses que ça à donner à toutes les interrogations que vous posez. Il va falloir qu'on se retourne de bord et qu'on les regarde. Je pense que vous avez soulevé certaines choses; on peut clarifier nos intentions, ce qu'on a fait sur certains sujets. Si cela exige des traductions législatives, on le fera lors de l'étude article par article. Merci beaucoup.

Mme Gosselin: Merci.

Le Président (M. Boucher): Merci beaucoup. Au nom des membres de la commission, je remercie les représentants de la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec. Comme il n'y a pas d'autres questions, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 23)

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