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Etude des projets de loi nos 52 et 59
(Douze heures six minutes)
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, madame et
messieurs! Veuillez prendre vos places, s'il vous plaît!
La commission du travail et de la main-d'oeuvre est réunie pour
l'étude article par article du projet de loi 52, Loi modifiant la Loi
sur les relations de travail dans l'industrie de la construction, et du projet
de loi 59, Loi modifiant le Code du travail.
Les membres de cette commission sont: M. Bellemare (Johnson), M.
Bisaillon (Sainte-Marie)...
M. Brochu: M. Bellemare (Johnson) est remplacé par M.
Brochu (Richmond).
Le Président (M. Laplante): M. Bellemare (Johnson)
remplacé par M. Brochu (Richmond), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M.
Forget (Saint-Laurent), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne
(Beauharnois), M. Pagé (Portneuf)...
M. Forget: M. Pagé (Portneuf) est remplacé par Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie).
Le Président (M. Laplante): M. Pagé (Portneuf)
remplacé par Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Roy (Beauce-Sud), M.
Vaillancourt (Jonquière).
Les intervenants sont: M. Blank (Saint-Louis), M. Brochu (Richmond), M.
Gosselin (Sherbrooke)... Je m'excuse, M. Brochu (Richmond) disparaît. M.
Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette
(Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Avez-vous un rapporteur à proposer?
M. Bisaillon: Le député de Limoilou.
Le Président (M. Laplante): M. Gravel (Limoilou) sera le
rapporteur. Par quel projet préférez-vous commencer?
M. Brochu: Par le projet de loi 52, je pense.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, par quel
projet commencez-vous?
M. Johnson: Par le projet de loi no 52.
Projet de loi no 52
Le Président (M. Laplante): J'appelle le projet de loi no
52, Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la
construction. M. le ministre.
Exposé préliminaire du ministre M.
Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: M. le Président, brièvement,
étant donné que nous n'avons pas fait de discours en
deuxième lecture, simplement quelques commentaires brefs sur le contenu
de ce projet. Il y a deux domaines qui sont touchés par le projet de
loi, d'abord la question qui est conséquente à l'adoption du
règlement de placement, c'est-à-dire des mécanismes
d'appel en matière de règlement de placement. Deux sortes de
mécanismes d'appel pour deux sortes de droit finalement qui sont
touchés: D'une part, ce qu'on pourrait appeler des droits collectifs et
d'autre part, des droits reliés aux individus. Les droits collectifs
appellent pour un reproche de discrimination ou une insatisfaction, par
exemple, d'un bureau de placement syndical qui n'obtiendrait pas sa licence.
Pour un recours de cette nature, pour un problème de cette nature, il y
aurait appel au tribunal du travail de la décision de l'office de ne pas
accorder une licence de bureau de placement à un bureau de placement
syndical.
Deuxièmement, pour les recours dits individuels, la personne, par
exemple, qui considère que son certificat ne fait pas état du bon
nombre d'heures qu'elle a travaillé et ça peut signifier la
différence entre être classé A ou B sur un certificat,
donc, plus ou moins de chances d'avoir une priorité au niveau
régional dans l'embauche c'est un droit individuel nous
créons d'abord un droit de révision au niveau de l'office.
Deuxièmement, nous créons un droit d'appel par un arbitre qu'on
va appeler commissaire au placement, qui sera du ministère du Travail et
qui pourra s'adjoindre ceux qui, à toutes fins pratiques, sont, par
exemple, des arbitres dans le domaine des griefs, etc., pour prêter une
plus grande mobilité à ces personnes, pour que les
décisions soient rendues le plus rapidement possible, par des gens qui
ont quand même une connaissance technique de ce que représente la
computation des heures, etc.
Deuxième grand chapitre, c'est toute la question de ce que
j'appellerais des mesures transitoires face à la prochaine
négociation quant à la représentativité des
groupes, etc. A ce sujet, d'ailleurs, les membres de la commission me
permettront de déposer, avant même que nous n'abordions vraiment
l'étude article par article, des projets d'amendements au projet de loi
no 52, et je voudrais simplement, brièvement, en expliquer l'historique.
J'avais déjà mentionné parce que le comité
Hébert, dont le rapport n'est pas encore rendu public, a dû
tarder, pour des raisons qui étaient vraiment hors du contrôle des
commissaires, à remettre son rapport que nous pourrions
peut-être procéder à une refonte de la loi 290 dès
cet été, ou enfin, avant l'ajournement d'été.
Malheureusement, le rapport Hébert a tardé de façon telle
que j'ai dû procéder à la rédaction du projet de loi
no 52, avant même d'avoir entre les mains le rapport Hébert, dans
un but strictement de dispositions transitoires et de clarifier certaines
choses pour la prochaine négociation.
Dans ce contexte, les centrales syndicales et particulièrement le
Conseil des métiers et la CSN ont réagi au projet de loi no 52 et
m'ont, tous deux, fait des représentations qui, je pense, souli-
gnent un minimum d'accord, particulièrement de la part de ces
deux plus importantes centrales en termes de nombre, il ne faut pas se le
cacher. En termes de nombre, ce sont vraiment les deux centrales qui
représentent la très grande majorité des travailleurs de
la construction.
A ce titre, j'ai tenu compte de certaines de leurs revendications et de
leurs représentations, et je déposerais maintenant le texte
d'amendements que j'apporterai et je pourrai, au fur et à mesure,
élucider cette question. On pourrait peut-être distribuer les
textes...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent, il a été entendu que vous aviez des
répliques.
Remarques de l'Opposition M. Claude Forget
M. Forget: Oui, merci M. le Président. De façon
générale, on pourrait dire de ce projet de loi, on pourrait
s'attendre à trouver dans ce projet de loi, l'indication qu'on trouve
à la fin d'un certain roman feuilleton à suivre au prochain
numéro. Il est certain, non seulement à cause du contenu de ce
projet de loi, mais à cause de l'existence d'un comité
d'étude sur l'ensemble des problèmes de la loi relative aux
relations de travail dans l'industrie de la construction, que nous n'avons pas
fini d'en entendre parler. On observait que depuis 1968, ce régime
particulier des relations de travail a fait l'objet d'une législation
presque annuelle, une espèce d'abonnement, et l'abonnement est maintenu
par le ministre actuel; il a payé son écot et on va continuer
à recevoir d'autres numéros d'un récit qui n'a pas
toujours été gai, il y a eu des pages sombres, il y a eu des
chapitres tragiques, il y a eu peu de chapitres comiques ou même
réjouissants, mais malgré tout, dans l'ensemble, on doit noter
une évolution depuis, en particulier, la publication du rapport de la
commission Cliche; il y a eu un certain nombre de mesures qui ont
été prises à la fois par les travailleurs eux-mêmes,
les associations syndicales et par le gouvernement et l'Office de la
construction qui semblent avoir contribué à assainir d'une
façon notable le climat de travail, le climat des relations de travail
dans l'industrie de la construction.
Nous sommes loin, malgré tout, d'une situation où tout
aurait été dit. Le comité Hébert qui n'a pu
présenter son rapport à temps, comme le ministre l'indiquait, va
certainement du moins, nous l'espérons de ce côté-ci
de la table amener des modifications importantes au régime de
négociations qui est beaucoup plus, à l'heure actuelle, le
résultat des événements que d'une véritable
politique défendable, à long terme, dans un domaine aussi
important que celui-là. (12 h 15)
Le fait même que, dans certains articles du projet de loi et des
amendements qui nous sont proposés en dernière heure, on retrouve
la désignation spécifique des parties à mon avis n'est pas
tolerable à long terme, soit du côté syndical, soit du
côté patronal, puisqu'il faut permettre dans ce secteur de notre
activité économique, dans les autres secteurs, un exercice
beaucoup plus libre du droit d'association. Cependant, il ne faut pas, sous
prétexte de favoriser la liberté d'association, permettre
n'importe quelle sorte de comportement et c'est la raison pour laquelle nous
souscrirons, pour l'instant, et dans le contexte justement d'amendements en
quelque sorte provisoires, aux propositions faites par le ministre et
d'ailleurs appuyées par un consensus du côté syndical.
Il y a une autre modification dans ce projet de loi qui est du droit
nouveau relativement parlant, c'est l'inscription d'un droit d'appel des
décisions relatives au placement. Lorsqu'on touche au placement dans
l'industrie de la construction, on touche à une dimension capitale des
règles actuelles dans cette industrie, puisque ce ne sont pas seulement
les relations de travail qui échappent au droit commun, au Code du
travail, ce sont les activités de placement elles-mêmes, puisque,
dans le reste des activités économiques, il n'y a pas de
réglementation, il n'y a pas de loi propre à un secteur
donné sur le placement, il n'y a pas non plus, et à plus forte
raison, d'organisme parapublic ou péripublic ou semi-gouvernemental
comme l'Office de la construction, qui a des responsabilités dans ce
domaine. Je dois dire, M. le Président, que le règlement relatif
au placement des salariés dans l'industrie de la construction, qui a
été publié il y a un certain temps, en septembre 1977, et
qui entrera en vigueur, si je comprends bien, le 1er juillet 1978,
représente la dernière version des efforts gouvernementaux pour
réglementer les activités de placement. Je puis dire que, presque
indépendamment de son contenu, qui, à certains égards
mineurs, présente peut-être certaines améliorations et,
à d'autres égards, une détérioration par rapport
aux règles précédentes, indépendamment de son
contenu, on peut exprimer les doutes les plus sérieux quant au
succès de cette ultime enfin, on espérait qu'elle soit
ultime tentative du gouvernement pour intervenir de façon
prédéterminée dans le placement des travailleurs de la
construction au Québec. Il est assez remarquable que le Québec,
de toutes les juridictions de l'Amérique du Nord, soit le seul endroit,
à ma connaissance, où le gouvernement se mêle d'assumer des
responsabilités relativement au placement des ouvriers de la
construction autrement que par l'accessibilité à des services de
placement généraux que les gouvernements maintiennent un peu
partout.
Ce qui caractérise les efforts que I'on retrouve dans le
règlement relatif au placement, c'est I'adoption de certains
critères, de certaines normes de priorité quant au placement.
C'est ce qui fait de ce règlement, de cette tentative, depuis le
début d'ailleurs, un élément qui caractérise le
Québec et qui le distingue, encore une fois, de toutes les autres
juridictions en Amérique du Nord.
Quand on est si différent des autres, M. le Président,
avec si peu de succès pendant si longtemps, le moment vient où on
doit se poser
des questions fondamentales, non pas sur tel ou tel article du
règlement relatif au placement, mais sur la conception même d'une
responsabilité gouvernementale quant à des priorités,
à des règles de priorité à respecter dans les
activités de placement dans une industrie donnée. Dans le reste
de l'Amérique du Nord, au Canada comme aux Etats-Unis, il est
évident qu'il y a des choses qui sont équivalentes dans un
certain sens aux responsabilités de placement assumées par le
gouvernement du Québec par l'Office de la construction. Mais il est
remarquable que ces équivalents, précisément, ne se
retrouvent pas dans le secteur public. Ils se retrouvent dans des
activités de placement qui sont assumées par les organismes
syndicaux, organismes syndicaux qui, d'un autre côté,
contrairement à ceux qui ont fonctionné au Québec, en
parallèle avec l'Office de la construction et son
prédécesseur, assument également la responsabilité
d'appliquer les règles de priorité.
Il semble qu'en 1968, quand le gouvernement de l'époque a
décidé d'intervenir dans l'industrie de la construction, il ait
décidé, de façon, à mon avis, inexplicable, de ne
pas trancher de façon cohérente le dilemme suivant: II y a, d'une
part, un régime qu'on pourrait imaginer de placement syndical,
c'est-à-dire des bureaux de placement syndicaux que le Québec, de
toute façon, a continué à connaître depuis 1968,
mais qui serait responsable et le seul responsable de l'application de
règles de priorité dans l'emploi. Ces règles, on a
essayé de les vulgariser en disant: Les vrais travailleurs de la
construction devraient avoir la priorité d'embauche dans l'industrie de
la construction, ce à quoi on a su ajouter des règles sur la
possibilité, dans une région donnée, de donner la
priorité aux travailleurs qui vivent dans cette région par
rapport aux travailleurs qui exercent leur métier dans d'autres
régions du Québec.
Toutes ces règles de priorité dans l'emploi peuvent, selon
cette formule, être appliquées tant bien que mal par les
organismes syndicaux eux-mêmes, qui, à ce moment-là, ont
non seulement le pouvoir qui leur est reconnu d'intervenir dans le placement,
mais également la responsabilité face à leurs membres
d'appliquer des règles de priorité régionale en termes
d'ancienneté ou de temps fait dans l'industrie, etc.
L'autre branche du dilemme serait un régime carrément
gouvernemental où seul un organisme gouvernemental aurait le pouvoir
d'intervenir et où, possiblement, des règles analogues quant aux
priorités d'emploi pourraient être appliquées.
Cependant, le Québec, jusqu'à maintenant, n'a jamais
choisi carrément ni l'une ni l'autre de ces alternatives. Ce qui semble
s'être produit, c'est un régime où il y avait une action
simultanée de bureaux de placement syndicaux et de bureaux de placement
gouvernementaux, mais les bureaux de placement syndicaux plus en
évidence, beaucoup plus actifs, beaucoup plus efficaces dans le domaine
que les bureaux de placement gouvernementaux où, malgré tout, par
des pouvoirs de réglementation, le gouvernement devait accepter,
supporter la responsabilité de l'application de règles de
priorité d'emploi.
C'est le mécanisme hybride qu'on voit consacré une autre
fois, mais dans une autre version, par cette réglementation de l'Office
de la construction, entérinée par le Conseil des ministres,
relativement au placement des salariés.
C'est un régime hybride qui ne peut pas fonctionner. Avant
même son entrée en vigueur, je peux faire la prédiction
qu'il n'apportera pas plus de satisfaction que les régimes qui l'ont
précédé, parce qu'il y a un divorce qui n'est pas
tranché entre le pouvoir d'intervention, d'une part, et les
responsabilités vis-à-vis des travailleurs, d'autre part. Ceux
qui ont la responsabilité d'intervenir, qui ont le pouvoir d'intervenir
ne sont pas les premiers responsables de l'application de la priorité et
ceux qui sont les premiers responsables de l'application des priorités
ne sont pas les premiers responsables de l'application du règlement.
Ceci est dû au fait que le gouvernement a accepté, à
mon avis, trop rapidement et trop facilement surtout du
côté de la rapidité, on ne peut pas parler trop longtemps
l'argumentation de l'Office de la construction dans le sens que les
pouvoirs que la loi de 1975 lui donne, suite au rapport de la commission
Cliche, il ne pouvait pas les assumer. Il lui était nécessaire de
disposer d'un délai beaucoup plus long pour le faire. Il se bornerait
donc à édicter des règles d'éthique et à
surveiller le respect des règles d'éthique. Ce sont tous des
raisonnements qui ne sont que superficiellement valides. En fait, ce qui semble
manifeste, c'est l'incapacité et l'absence de volonté de la part
de l'Office de la construction d'assumer les responsabilités que la loi
lui donne et que la commission Cliche voulait lui confier. (12 h 25)
Dès 1976, M. le Président, l'Office de la construction a
présenté au gouvernement de l'époque, vers le 30 juin
1976, la veille du jour où le règlement devait être
promulgué, un projet de règlement qui a été
jugé par le gouvernement de l'époque inacceptable et qui a
été retourné à l'Office de la construction comme
étant inacceptable, parce qu'il ne comportait aucune disposition voulant
faire assumer par l'office la responsabilité que la commission Cliche
voulait lui faire assumer.
Quelle n'a donc pas été notre surprise de constater que le
gouvernement actuel, comportant malgré tout, non pas parmi ses membres,
mais parmi les députés et au nombre des adjoints parlementaires,
à l'époque adjoint parlementaire du ministre du Travail, un
ancien membre de la commission en question, la commission Cliche, s'est rendu
si rapidement aux arguments de l'Office de la construction et a accepté,
à toutes fins pratiques, d'entériner dans ses
éléments essentiels le projet de règlement qui avait
été soumis par l'Office de la construction... Dans la mesure au
moins c'est cela qui est capital où l'office refusait
toujours d'assumer la responsabilité qui était la sienne et
qu'elle aurait eu le temps depuis 1975 de s'organiser pour l'assumer, qui
était de
veiller au placement elle-même plutôt que par personne
interposée, en se prévalant de soi-disant règles
d'éthique, de surveillance et de tout ce qu'on veut, qui ne pourront pas
fonctionner, à toutes fins pratiques. C'est l'expérience que l'on
va vivre au cours de la prochaine année ou de la prochaine année
et demie. C'est un règlement qui ne sera pas appliqué, que
l'Office de la construction est incapable de faire appliquer effectivement, et
on sera de retour ici dans un certain temps pour en faire le constat. Je pense
qu'avant d'en faire le constat et de pleurer sur les pots cassés, on
peut le prédire d'avance, le gouvernement aurait pu l'anticiper
d'avance, ce qu'il n'a pas fait.
Si je mentionne ceci, dans le contexte de l'étude de la loi 52,
c'est que la loi 52 propose l'établissement d'un mécanisme
d'appel. Le mécanisme d'appel, même s'il comporte quelques
failles, va malgré tout aider sous cet aspect. C'est que les
problèmes d'application du règlement vont pouvoir être
soulevés par les individus qui se sentent lésés et par les
associations syndicales qui se sentent lésées et on aura
là une source documentée de l'échec de l'application du
règlement. C'est donc un grand progrès puisqu'on pourra parler
sur la base d'une certitude, plutôt que sur la base d'opinions et de
prédictions. Mais, dans le fond, le but essentiel auquel va servir cette
commission d'appel ou ce comité d'appel, c'est de faire la preuve de
l'impossibilité de la situation actuelle, de son caractère
idéaliste et de la fausseté de la conception de base qui
préside depuis dix ans à l'organisation du placement.
Encore une fois, il y a deux possibilités. A ce moment, je
n'exprime pas de préférence pour l'une ou pour l'autre. Je ne
fais pas un plaidoyer nécessairement pour que l'Office de la
construction du Québec assume nécessairement la
responsabilité du placement, de préférence, et par
exclusion des bureaux de placement syndicaux. Je dis simplement: Voici une des
possibilités qui n'est pas retenue dans la situation actuelle. L'autre
possibilité, c'est de retourner carrément aux organisations
syndicales toutes les responsabilités du placement, pas seulement la
partie de la responsabilité qui peut faire l'affaire et qui peut
être commode et qui donne un bon nom à une association syndicale
vis-à-vis de ses membres, en termes d'efficacité, mais
également la responsabilité de l'application de normes de
priorité d'emploi, ect., ce qui est beaucoup plus difficile, ce qui est
beaucoup plus exigeant, et une tâche vis-à-vis de laquelle les
associations syndicales seraient effectivement en devoir d'assumer envers leurs
membres des décisions qui ne seraient pas toujours agréables. Il
y a un choix nécessaire entre les deux formules, un choix qui n'est pas
fait. Tant qu'on ne l'aura pas fait, on va constater, d'autant plus clairement
qu'il y a une procédure d'appel, que le régime actuel est
invivable. (12 h 30)
On va, présumément, à l'aide de ces constatations
et des recommandations du comité Hébert, si le comité
Hébert fait porter ses remarques sur cet aspect, ce qu'on ne pourra
savoir qu'en voyant son rapport, pouvoir venir à des conclu- sions
différentes. A mon avis, le problème demeure entier. Le bureau
d'appel qui est prévu ne fait qu'offrir une possibilité de
documenter cet échec presque inévitable, de façon plus
sérieuse, et peut-être, je l'espère, bien sûr,
puisque, autrement, ce serait du pur cynisme, de régler à
l'occasion certains problèmes individuels. Mais de ce côté,
il ne faudra pas être trop exigeant, parce que les décisions qui
seront révisées le seront a posteriori.
Il y a bien peu de chantiers de construction où une
décision révisée relative au placement peut effectivement
replacer les parties dans la situation dans laquelle elles auraient
été si la décision initiale avait été
différente. Il y en a, sans aucun doute, quelques-uns, mais il sera
assez difficile de récrire l'histoire, et quand un chantier est
fermé, de toute façon, si on y a placé les mauvaises
personnes, on ne démolira pas la construction pour la recommencer avec
celles qui auraient dû y être placées au départ. Dans
une certaine mesure, c'est un remède qui ne peut pas être
totalement efficace, et, pour cette raison-là, je pense qu'il servira
seulement dans des circonstances véritablement exceptionnelles.
Un autre point que l'on retrouve dans ce projet de loi, c'est celui sur
le caractère de représentativité. Etant donné le
consensus intersyndical qui est intervenu, au moins entre les deux principaux
groupes intéressés, et la décision du ministre
d'introduire un certain nombre d'amendements, je n'ai pas, M. le
Président, d'objection, ni de réserve à formuler, si ce
n'est celle que j'indiquais au départ, à savoir que ce sont des
mesures qui sont, dans une certaine proportion, provisoires et
intérimaires. Il y a des problèmes fondamentaux qui devront
être examinés. Je pense bien qu'il serait douteux de maintenir
l'unité de représentation patronale jusqu'à la fin du
siècle, sans révision et sans possibilité de
révision autre que législative. De la même façon, du
côté syndical, est-ce qu'on peut présumer que les
mêmes associations vont conserver la même importance jusqu'en l'an
2050, ce qu'on présume toujours quand on adopte une loi qui a une valeur
permanente. Je pense que ça aussi, ça mérite d'être
regardé. Mais, encore là, je crois que les amendements sont bien
inspirés.
Un dernier point, M. le Président, vise un article particulier,
mais qui soulève une question d'intérêt plus
général. C'est l'article 55b, et c'est généralement
le caractère un peu odieux du régime des relations de travail
dans l'industrie de la construction où on emploie le mot "quiconque",
dans un article qui édicte des pénalités.
On y reviendra au moment de l'étude article par article, mais ce
"quiconque", dans le fond, recouvre bien du monde. Je ne suis pas sûr
qu'il soit d'intérêt public que "quiconque" soit passible d'amende
pour des vices d'application d'une loi qui n'a pas pour but, dans le fond,
vraiment, l'intérêt public dans son sens le plus
élevé et le plus large, mais simplement l'aménagement de
contrats de travail entre des employeurs et des syndiqués dans une
industrie bien particulière.
Je pense que les parties à cette négociation, même
si elle est sous la tutelle de l'Etat, les employeurs et ce que la loi,
d'ailleurs, qualifie
d'employeurs professionnels, et les syndiqués, ont un
intérêt à la respecter et devraient être punis s'ils
font des infractions. Je crois que de rendre "quiconque" passible de
pénalité, même lorsqu'ils sont de bonne foi, mais qu'ils ne
sont pas des spécialistes de la loi et des règlements sur
l'industrie de la construction, c'est odieux, cela a été odieux
déjà, l'application de cette loi, dans certains cas où des
propriétaires, des particuliers de bonne foi qui engagent du monde pour
la construction se voient placés devant des situations qu'ils n'ont pas
anticipées et qu'ils n'ont pas d'affaire à connaître dans
tous les détails. Je pense qu'on élargit ainsi l'application de
la loi des gens qui devraient être maintenus en dehors de son
application. Je pense que c'est une question assez fondamentale pour le
mentionner au moment de mes remarques préliminaires.
Je n'ai pas d'autres remarques à faire, M. le Président.
Nous allons, de façon générale, concourir à
l'adoption de cette loi. Je voulais simplement souligner que ce n'est pas la
dernière fois qu'on va voir apparaître ce sujet à
l'Assemblée nationale et que c'est largement pour cela qu'on peut
accepter un projet de loi aussi partiel à ce moment-ci, à cause
de l'urgence de la chose et que du côté du placement, étant
donné qu'il n'y a pas eu de débat parlementaire sur la question
du placement, mais qu'on y fait allusion par une procédure d'appel, un
règlement qui va entrer en vigueur dans quelques jours, je m'en serais
voulu de ne pas souligner que nous n'avons aucune confiance dans les
possibilités de succès de ce nouveau règlement. Merci.
M. Chevrette: Appel au règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député
de...
M. Chevrette: Ce n'est que pour rectifier un fait avancé
ou énoncé par le député de Saint-Laurent qui a
affirmé que je m'étais empressé, en tant qu'ex-membre de
la commission Cliche, d'entériner le rapport de l'OCQ. Je voudrais
brièvement relater les faits, parce que je n'ai pas l'intention de me
faire avoir aussi facilement, M. le député de
Saint-Laurent...
Le Président (M. Laplante): Je préférerais,
à ce moment-ci, M. le député de Joliette, parce que je le
vois comme une question de privilège, actuellement...
M. Chevrette: Je m'excuse, mais c'est marqué...
Le Président (M. Laplante): Je verrais votre appel au
règlement... Vous aurez la chance, vous aussi, d'intervenir après
le député de Richmond et de corriger, dans votre...
M. Chevrette: M. le Président, je n'ai pas dit une
question de privilège.
Le Président (M. Laplante): ... pour exposer des faits...
Je le vois comme une question de privilège.
Le Président (M. Laplante): Je n'ai pas dit une question
de privilège, il est écrit dans nos règlements...
Le Président (M. Laplante): Je le vois comme cela... M. le
député de Richmond.
M. Chevrette: Je m'excuse, M. le Président, appel au
règlement.
Le Président (M. Laplante): Sur une question de
règlement.
M. Chevrette: Dans notre règlement, il est écrit
que quand il y a un exposé et qu'on a des faits à rectifier,
qu'on doit le faire immédiatement après l'exposé de la
personne en question. Je n'ai pas interrompu le député de
Saint-Laurent; j'ai attendu qu'il ait terminé pour rectifier. Je pense
que je suis en plein dans l'esprit du règlement.
Le Président (M. Laplante): Vous ne trouveriez pas
préférable, pour la bonne conduite des travaux, M. le
député...
M. Chevrette: Ce n'est pas moi qui vais prolonger...
Le Président (M. Laplante): Vous allez avoir votre droit
de réplique, tout à l'heure...
M. Chevrette: Ce n'est pas un droit de réplique!
Le Président (M. Laplante): ... immédiatement
après le député de Richmond. S'il y a des faits que vous
pensez avoir à corriger, vous aurez la chance de le faire à ce
moment-là. M. le député de Richmond.
M. Forget: M. le Président, je crois que... M. Brochu:
Merci, M. le Président.
M. Forget: C'est parce qu'il y a un article du règlement
qui dit qu'un député qui veut corriger des faits a le droit de le
faire tout de suite après... Je n'ai pas aucune objection, s'il y a
quelque chose dans ce que j'ai dit qui fausse les perspectives dans lesquelles
le député de Joliette-Montcalm s'est exprimé. Je suis tout
à fait d'accord à ce qu'il s'exprime quant à moi et je
pense qu'il a le droit de le faire en vertu du règlement, c'est à
l'article 96.
M. Brochu: M. le Président, je conçois que le
député a le droit de le faire, également. Je lui avais
fait signe que, s'il voulait soulever sa question, il pouvait le faire. Je
comprends que pour la bonne marche des travaux et compte tenu de l'heure,
j'apprécierais pouvoir faire les quelques remarques que j'ai
à faire et on pourra reprendre au début de l'après-midi
avec les remarques du député de Joliette-Montcalm, s'il n'a pas
d'objection.
M. Chevrette: M. le Président, je vais vous demander une
directive. Si je ne perds pas le droit de répliquer, comme vous le dites
si bien, je vais consentir à accéder à vos
préférences personnelles comme président.
Le Président (M. Laplante): Vous aurez le droit de
répliquer, M. le député de Joliette-Montcalm. M. le
député de Richmond.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: M. le Président, je n'attaquerai pas toute la
question de la philosophie générale du ministère du
Travail ni de la question du placement. D'ailleurs, je pense qu'on en a
discuté largement, il n'y a pas tellement longtemps. Il y avait eu une
question avec débat, soulevée par le député de
Beauce-Sud, si ma mémoire est bonne, et je pense qu'il y avait eu
certaines indications données à ce moment-là. Je
n'aborderai pas cette question avec le pessimisme qui était celui du
député de Saint-Laurent ce matin; je ne sais pas si c'est la
pression de fin de session, mais il semble être d'un pessimisme un peu
spécial.
M. le Président, le comité Hébert, ayant pour
mandat de faire rapport sur les modifications globales à apporter
à la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la
construction, mieux connue sous le nom de loi 290, n'a pas encore remis son
rapport, comme l'a indiqué le ministre tout à l'heure. Ce dernier
nous propose de procéder aujourd'hui à l'étude d'un
certain nombre de modifications qui touchent en réalité deux
domaines bien précis, d'abord le prochain vote d'adhésion
syndicale des travailleurs de la construction, ou si on préfère,
la fameuse question de la période de maraudage; deuxièmement, la
mise en application du nouveau règlement de placement dans cette
industrie.
Mis à part le retard de la parution du rapport du comité
Hébert à la suite de l'hospitalisation de son président,
M. Gérard Hébert, et les exigences découlant des nouveaux
règlements de l'Assemblée nationale amenant l'introduction d'un
calendrier à date fixe, le ministre du Travail a justifié la
présentation du projet de loi 52, à ce moment-ci, en nous disant
que les délais déjà établis d'une part,
relativement à l'entrée en vigueur du nouveau règlement de
placement dans l'industrie de la construction fixée au 1er juillet 1978
et d'autre part, relativement à la période de maraudage
prévue pour le mois de novembre 1978 conformément aux
dispositions de la loi sur les relations de travail dans l'industrie de la
construction, ces délais déjà établis ne lui
laissaient d'autre choix que de procéder immédiatement aux
changements qui s'imposaient dans les circonstances actuelles, tel qu'il nous
l'a d'ailleurs indiqué dans ses remarques préliminaires de ce
matin.
Je crois cependant qu'il y a lieu d'examiner chacun de ces points d'un
peu plus près, particulièrement en ce qui concerne les
changements proposés en vue de la prochaine période de maraudage.
Mais avant d'aborder cette question, je voudrais, dans un premier temps,
assurer le ministre de notre appui sur cette partie du projet de loi qui traite
des mécanismes d'appel des décisions prises par l'Office de la
construction dans le cadre du règlement de placement de I'industrie de
la construction. Outre quelques détails qui pourront être l'objet
de notre discussion ce matin ou cet après-midi, nous sommes conscients
de la nécessité de tels mécanismes et de l'urgence d'y
pourvoir concrètement avant la mise en application du règlement
fixé au 1er juillet prochain.
D'ailleurs, M. le Président, l'introduction de ces
mécanismes d'appel au tribunal du travail en ce qui concerne les agences
de placement, et à un commissaire au placement en ce qui concerne les
travailleurs détenant un certificat de classification, aura des effets
pratiques et immédiats sur la procédure de vote d'adhésion
syndicale en novembre 1978. En effet, l'un des amendements proposés par
le ministre et portant sur les nouvelles conditions d'admissibilité au
vote d'adhésion syndicale tenu par l'Office de la construction
réfère spécifiquement aux règlements de placement
et au certificat de classification, d'où l'importance de tout mettre en
oeuvre, dès le départ, en vue d'éviter des accrochages ou
des malentendus qui pourraient compromettre le déroulement normal,
souhaitable et paisible de la période de maraudage.
Les modifications que nous soumet le ministre sur cette question du vote
d'adhésion syndicale sont à notre avis majeures et
méritent qu'on s'y attarde quelque peu. Selon la loi actuelle, est
admissible à voter, toute personne, quelle soit domiciliée ou non
au Québec, qui a travaillé au moins une heure dans l'industrie de
la construction, entre le 1er juillet 1977 et le 30 juin 1978.
Compte tenu du nouveau règlement de placement lequel, dit-on,
vise essentiellement à protéger les véritables
travailleurs de la construction, le ministre modifie les conditions
d'admissibilité au vote d'adhésion syndicale comme suit:
premièrement, détiennent un certificat de classification
délivré par l'Office de la construction; deuxièmement, ont
effectué au moins 300 heures de travail au cours des douze premiers des
quinze mois civils précédant le mois durant lequel doit avoir
lieu le scrutin prévu par la loi; troisièmement, sont
domiciliés au Québec au dernier jour du huitième mois qui
précède l'expiration du décret en question.
Ces nouvelles mesures permettront à environ 100 000 travailleurs
de la construction de voter en novembre 1978. Nos consultations auprès
de certains syndicats représentant l'immense majorité des
travailleurs de la construction nous portent à croire aujourd'hui que
ces nouvelles conditions d'admissibilité ne soulèvent aucune
opposition, à toutes fins pratiques.
Ce sur quoi les associations syndicales ont attiré notre
attention, c'est sur l'application pratique de l'introduction du principe d'un
homme, un vote et de son effet sur la représentativité de
l'association syndicale qui négociera la convention collective. La
procédure actuelle pour établir le degré de
représentativité de l'association syndicale qui négociera
la convention collective comprend deux critères: premièrement, le
pourcentage des salariés qui ont voté par rapport à
l'ensemble des salariés qui ont droit de vote; deuxièmement, une
pondération du vote exprimé selon une formule qui tient compte
des heures travaillées.
Le ministre modifie cette procédure complexe en abandonnant le
critère de la pondération des heures travaillées et en
établissant clairement le principe d'un homme, un vote, de
manière que le choix des représentants des travailleurs à
la table des négociations de la prochaine convention collective soit
l'expression démocratique de la volonté réelle et
exprimée par les travailleurs de la construction.
Le ministre sait fort bien que cette question de
représentativité a été l'objet de très vives
discussions devant le comité Hébert. Entre autres, le Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction,
FTQ-Construction, qui a obtenu la majorité des votes lors de la
dernière période de maraudage, disait ce qui suit, dans son
mémoire soumis au comité Hébert: "Nonobstant les solides
arguments mentionnés précédemment, le CPQMC ne
réclame pas, législativement, le monopole syndical. Nous croyons
que, dans le but de développer une vie syndicale démocratique et
saine, une certaine concurrence syndicale peut être souhaitable. (12 h
45) "Cependant, nous croyons que seules les associations syndicales qui
représentent un nombre considérable de travailleurs de
l'industrie devraient avoir droit de représenter des membres dans
l'industrie de la construction. La liberté syndicale doit être
contrebalancée par la règle de la démocratie."
Plus loin, le CPQMC ajoutait: "De plus, compte tenu des coûts
impliqués, nous suggérons que seuls ceux qui veulent changer
d'allégeance syndicale soient obligés de se présenter au
bureau de l'office à une date fixe. Ainsi, on éviterait des
milliers de déplacements inutiles et des pertes économiques".
Or, il appert, si nos informations sont exactes, qu'un fait un peu
inusité se soit produit auquel le ministre a fait
référence tout à l'heure et que nous soyons en
présence d'un fait nouveau dans l'industrie de la construction. En
effet, pour la première fois depuis l'adoption de la loi 290 en 1968, il
y aurait eu une forme d'entente sur cette question de
représentativité entre les deux principales associations
syndicales représentant les travailleurs de la construction, soit la
CPQMC-FTQ-Construction et la CSN. A eux seuls, ces deux groupements de
syndicats représentent environ 95% de tous les travailleurs de la
construction.
Cette entente de gré à gré porterait sur trois
points bien précis. D'abord, en ce qui concerne le déroulement du
vote, que la loi prévoie expressément que les salariés qui
n'ont pas exercé leur droit de vote soient réputés avoir
choisi l'association à laquelle ils avaient déjà
adhéré antérieurement;
Deuxièmement, que toutes les associations représentatives
à un degré de 15% et plus soient admises à la table de
négociation;
Troisièmement, la nécessité de spécifier
dans la loi les associations reconnues aux fins du vote d'adhésion
syndicale.
Nous insistons sur ce dernier point pour obtenir plus d'éclairage
du ministre. Cependant, il semble, à la lecture des amendements que le
ministre nous a présentés tout à l'heure, qu'il y ait
certaines modifications qui soient déjà apportées dans le
sens du troisième point que j'avais l'intention de soulever au
ministre.
C'est donc que le ministre semble être disposé à
accueillir favorablement ces points, en particulier le troisième, qui
sont l'objet de cette entente entre les parties. Comme ce n'est pas tous les
jours dans l'industrie de la construction, M. le Président, que nous
sommes témoins d'une entente entre des parties qui ont justement la
réputation de ne pas pouvoir s'entendre, il semble donc que ce soit une
heureuse approche et un phénomène intéressant qui se
produise. Je suis content que, de la part du ministre, il y ait une certaine
ouverture de ce côté-là et qu'on soit disposé, sinon
à amender la loi, du moins à en discuter. Il semble même
que les amendements vont dans ce sens.
Et, dans le but d'aider le ministre dans sa réflexion, je
voudrais citer quelques remarques émises par M. Mathias Rioux,
chroniqueur bien connu dans le domaine des relations de travail. Le ministre
semble d'ailleurs avoir répondu favorablement à certaines de ces
suggestions. Ce dernier écrivait ce qui suit relativement à la
procédure préconisée par le ministre sur le vote
d'adhésion syndicale et la question de la représentativité
à la table de négociation, et je cite: "Cette nouvelle
orientation est nettement plus démocratique et respectueuse des vrais
travailleurs de la construction que la loi actuelle. Elle ne règle pas
cependant de façon équitable le sort des groupes qui sortent
minoritaires des votes d'adhésion syndicale. On comprend l'idée
du gouvernement de vouloir placer devant le patronat unifié de la
construction un seul porte-parole syndical. Est-ce nécessaire que la
partie syndicale à la table de négociation soit la centrale qui a
obtenu la majorité des voix lors du vote d'adhésion? Quel
avantage y a-t-il pour les ouvriers d'avoir un porte-parole unique et un front
syndical désuni et divisé contre lui-même? "Pourquoi ne pas
envisager l'idée d'un front commun, CSN-FTQ-CSD-SCN, où le
porte-parole officiel, à la table des négociations, serait celui
qui a obtenu le plus de vote à l'élection syndicale, sans exclure
pour autant les groupes minoritaires qui représentent, on le sait, des
milliers de travailleurs.
"Au-delà des stratégies patronales, toujours possibles en
vue de diviser ce front commun, nous croyons que cette formule serait plus
efficace et plus équitable qu'un porte-parole unique non
représentatif de l'ensemble des travailleurs de cette industrie. "La
dernière ronde de négociation dans la construction est pourtant
pleine de leçons à cet égard".
M. le Président, je pourrais également faire part au
ministre d'un autre point qui a été soumis à notre
attention et qui fait présentement l'objet de désaccord entre les
deux grandes centrales syndicales dans l'industrie de la construction. Je fais
allusion ici à la question très litigieuse de la participation
des associations minoritaires à l'acceptation de clauses devant faire
l'objet d'une convention collective.
J'aimerais, M. le Président, que, dans ses remarques de
réplique, en plus de faire le point sur les quelques autres questions
que j'ai soulevées dans mon intervention, le ministre prenne quelques
minutes pour faire le point et répondre plus spécifiquement
à ce point précis que je soulève, qui semble faire l'objet
de certaines discussions entre les centrales elles-mêmes.
Pour le moment, M. le Président, je limiterai mes remarques
à celles que je viens de faire en demandant au ministre de bien vouloir
me répondre. Il semble qu'il soit dans de très bonnes
dispositions ce matin. On le voit d'ailleurs par les amendements qu'il a
déposés. Je pense que le travail de la commission parlementaire
s'amorce d'une très bonne façon. J'aimerais l'entendre tout
à l'heure sur ces questions et plus spécifiquement sur la
dernière que j'ai portée à son attention.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, seulement
avant de passer la parole à mon collègue, je voudrais faire une
précision. Le comité Hébert m'a remis il y a quelques
jours son rapport, effectivement, mais c'était bien hors délai.
Le texte de loi 52 était déjà déposé et il
n'a pas encore été rendu public. Il le sera au courant de
l'été.
Je dois vous avouer d'ailleurs que jusqu'à maintenant ce que j'ai
eu le temps de faire, c'est de consulter un résumé et de me
rendre compte finalement que le type de suggestions qu'on y fait, si on devait
y donner suite, devrait donner lieu à une refonte beaucoup plus
importante que celle que nous amorçons aujourd'hui. Je ne voudrais pas
qu'on ait l'impression que je n'ai pas reçu le rapport du comité
Hébert, je l'ai reçu il y a quelques jours.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm.
Autre intervention M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais tout d'abord
rectifier certains faits qui ont été avancés par le
député de Saint-Laurent avant de donner mon opinion
générale sur le projet de loi qu'on est appelé à
étudier, article par article, aujourd'hui. Je voudrais dire au
député de Saint-Laurent que nous avons, dès la prise du
pouvoir, étudié ce règlement de placement, la version
originale de l'OCQ, et que plusieurs dimensions qui n'apparaissaient pas dans
le règlement de placement, apparaissent aujourd'hui; par exemple, le
droit d'appel; par exemple, le droit bien identifié à l'OCQ de
faire du placement d'une façon spécifique; par exemple, de bien
déterminer le rôle quant à l'inventaire à conduire
au niveau des travailleurs pour connaître les spécialités
et cela d'une façon beaucoup plus formelle.
On a changé quelques règles d'éthique qui
figuraient dans le rapport de placement. Si vous regardez la version originale
par rapport à la version qui a été entérinée
par le Conseil des ministres il y a un certain temps, vous verrez qu'il y a
énormément de chemin de parcouru par rapport à la version
originale qui avait été déposée sur le bureau du
ministre Harvey avant l'élection du 15 novembre 1976. Donc, ce ne fut
pas un empressement d'entériner toute la réglementation de I'OCQ,
tel que vous l'avez affirmé, et le droit d'appel constitue une des
pierres d'achoppement, un des changements majeurs de ce règlement,
puisque rien ne figurait dans le règlement de placement, en ce qui
regarde le droit d'appel.
M. Forget: Voilà, concernant la loi.
M. Chevrette: Vous avez affirmé, d'une façon
très catégorique, que le règlement de placement n avait
rien de changé et qu'on avait entériné cela tout de suite.
Donc, c'est une affirmation gratuite. Connaissant l'honnêteté
intellectuelle du député de Saint-Laurent, il admettra qu'il a
exagéré un tantinet dans les circonstances.
Mme Lavoie-Roux: M n'a pas le ferme propos. M. Johnson: II
n'a pas l'air parti pour cela.
M. Chevrette: Ne m'obligez pas à retirer mes paroles. Face
au projet de loi no 52, tout comme le député de Richmond, je dois
dire qu'il est heureux que les centrales syndicales en soient arrivées
à un consensus. Le pessimisme du député de Saint-Laurent
m'effraie un peu habituel d'ailleurs, je dois l'admettre
puisqu'en relations de travail, lorsque des parties en viennent à une
entente, on devrait se réjouir, parce que c'est souvent là le
principal atout pour avoir une application efficace. Donc, je suis passablement
surpris de voir que le député de Saint-Laurent qui, lui, a
toujours préconisé l'entente, a toujours favorisé, selon
lui du moins à ce qu'il dit ce type d'entente de
consensus, vient aujourd'hui affirmer devant cette commission, vient même
se permettre des prédictions, je dirais, plutôt pessimistes, des
prédictions d'un type de personnes qui... On dirait, à toutes
fins pratiques, qu'il désire voir échouer l'application d'un tel
règlement. Cela m'apparaît, j'allais dire antiparlementaire, mais
je ne le dirai pas; ce
n'est pas antiparlementaire, c'est plutôt le propre d'un parti
politique déchu qui n'a pas su dans son temps appliquer ou trouver des
formules, ou encore dégager ce consensus qu'on a réussi à
dégager par la présentation de ce projet de loi.
D'autre part, il faut bien l'admettre, il souscrit au projet de loi.
Donc, c'est sans doute uniquement par son rôle de critique de
l'Opposition qu'il se doit de montrer qu'il a des réticences, parce que,
dans le fond, il affirme, dans un deuxième souffle, qu'il est d'accord
avec le projet de loi, à quelques petits détails près.
Donc, on devrait normalement pouvoir adopter ici, article par article,
probablement vers les... Non, on commence à 15 heures, à 16
heures, le projet de loi no 52 devrait être adopté, article par
article.
M. Johnson: Ne les mets pas au défi. M. Forget:
Vous êtes pressé.
M. Chevrette: Je ne vous mets surtout pas au défi, parce
que je sais que vous êtes capables d'être long. Donc, ne prenez pas
ça comme un défi. Je retire ce que j'ai dit si cela avait pour
effet de...
M. le Président, en un mot, moi aussi, j'aurais peut-être
souhaité que le droit d'appel prenne une autre forme, au lieu des
amendes, que ce soit une réinstallation du travailleur. Mais, avec le
rapport Hébert qui sera publié incessamment, on pourra sans doute
se plonger plus sérieusement dans l'étude de la réforme
même de la loi 290 comme telle, en entier et peut-être trouver des
mécanismes plus appropriés encore tant au niveau de la
représentativité dans les comités mixtes, la
représentativité dans le domaine des négociations, que du
droit d'appel avec une procédure très souple au niveau de
l'application du règlement de placement. Mais dans les circonstances, il
faut admettre que c'est un pas majeur que l'on franchit et que les employeurs
ne pourront pas faire ce qu'ils voudront au niveau du placement. Ils auront des
règles à suivre. Les syndicats aussi auront à publier
leurs règles d'éthique quant au mode de fonctionnement dans le
placement. Le travailleur de la base, comme on se plaît si bien à
le dire, saura au moins les critères qui régissent l'industrie de
la construction relativement au placement. (13 heures)
Pour ma part, je trouve que c'est un pas. Il n'est peut-être pas
aussi grand qu'on l'aurait tous souhaité, mais c'est un pas qui
m'apparaît important et c'est à l'usage qu'on pourra le raffiner,
d'autant plus que l'usage nous démontre qu'on est, en tant que parti au
pouvoir, capable de se retourner beaucoup plus rapidement que l'exemple qu'on a
connu dans le passé.
M. le Président, j'espère avoir répondu à
vos préférences et je propose l'ajournement à 15
heures.
M. Forget: Comme il n'est pas 13 heures, et en vertu de l'article
96, il reste que le même article qu'invoquait le député de
Joliette-Montcalm je crois qu'il a largement déformé mes
propos pour avoir plus de plaisir à les commenter il reste que je
me réjouis, comme tous les membres de la commission, qu'il y ait une
entente entre les centrales syndicales sur le processus de votation et le
caractère de représentativité. Je m'en réjouis
tellement que nous indiquons que nous allons voter pour ce projet de loi, ce
que nous avons fait en deuxième lecture, d'ailleurs.
Le député de Joliette-Montcalm, par
rénumération des changements apportés dans le projet de
règlement de l'OCQ, ne m'a pas du tout impressionné. L'esprit
fondamental du projet est demeuré intact. Et c'est l'esprit fondamental
du projet, la conception même de tout ce système de placement, la
confusion des rôles entre les organisations syndicales, l'Office de la
construction et le gouvernement qui font qu'on peut être pessimistes,
malheureusement, sur l'évolution future de cette procédure. Je
voudrais bien être optimiste et applaudir à deux mains cette
initiative, mais l'expérience a dû nous enseigner un certain
nombre de choses, du moins de ce côté-ci de la table. En attendant
que l'expérience se complète de l'autre côté de la
table, on va devoir faire un certain nombre d'erreurs et apprendre avec ces
erreurs.
Je souhaite simplement à nos collègues, en particulier
à celui de Joliette-Montcalm, de faire ses classes rapidement.
Le Président (M. Laplante): N'en déplaise au
député de Joliette-Montcalm, nous suspendons nos travaux à
15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 2)
Reprise de la séance à 15 h 12
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Reprise des travaux sur le projet de loi no 52. Je vais demander la
coopération des membres de cette commission pour bien numéroter
ce projet de loi, parce qu'il y a des articles nouveaux à tous les
articles. Presque tous les articles, ou à peu près tous, moins
deux, je crois, sont des articles nouveaux ou corrigés.
Pour commencer, j'appelle l'article 1, qui est un nouvel article
présenté par le ministre. M. le ministre.
Centrales représentatives
M. Johnson: Pour les fins de clarté au journal des
Débats je pense que les membres de l'Opposition ont reçu
cela aussi, d'accord, pour simplifier les choses nous allons refaire la
numérotation au complet du projet de loi no 52.
L'article 1 se lirait comme suit: "Article 1. L'article 4 de la Loi sur
les relations de travail dans l'industrie de la construction (1968, chapitre
45),
remplacé par l'article 5 du chapitre 28 des lois de 1973 et
l'article 3 du chapitre 51 des lois de 1975, est de nouveau remplacé par
le suivant: 4. "Seule la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), la
Confédération des syndicats nationaux (CSN), le Conseil
provincial du Québec des métiers de la construction (FTQ), et le
syndicat de la construction Côte-Nord de Sept-lles Inc., peuvent faire
constater leur représentativité en présentant à
l'office une demande à cette fin dans le cours du huitième mois
qui précède la date d'expiration du décret".
M. le Président, très brièvement, l'objet de cet
article est de limiter à ces quatre syndicats qui existent en ce moment
dans le domaine de la construction, en vertu du chapitre 45 de la loi de 1968,
la possibilité d'être sur le bulletin de vote ou sur la liste afin
de pouvoir faire l'objet d'une adhésion syndicale par les travailleurs
habilités à voter, comme on le verra plus loin.
Evidemment, on pourra toujours dire qu'il s'agit d'une restriction
à la liberté d'association, ce qui est le principe
général, et je dois dire que, comme disposition, elle me heurte a
priori à cause de cela cependant. D'une part, il s'agit d'une
disposition qui est de nature transitoire.
Deuxièmememt, il faut bien comprendre que, quand on parle de
liberté d'association en vertu du Code du travail, on parle quand
même de la représentation au départ d'au moins 35% des
salariés qui peuvent faire appel au commissaire-enquêteur pour
obtenir qu'un certificat d'accréditation soit éventuellement
émis.
Troisièmement, nous avons affaire, dans la loi 290, à une
seule association d'employeurs, qui est l'Association des entreprises de
construction du Québec.
Quatrièmement, il s'agit d'une négociation sectorielle.
Dans ce cadre, je pense que la prolifération d'unités autres que
des unités qui auraient vraiment une base représentative risque
de mettre en péril même cette notion d'une négociation
sectorielle, qui est un choix fait en 1968 par le législateur.
Dans les circonstances, je pense que ces dispositions sont
adéquates à la lumière de ce que j'ai dit et ne
constituent pas finalement une entorse si profonde au principe de la
liberté d'association, d'autant plus que cela n'est pas coulé
dans le ciment ad vitam aeternam.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Une question pour préfacer mes remarques. Le
huitième mois qui précède la date d'expiration du
décret, c'est quel mois?
M. Johnson: Au mois de septembre.
M. Forget: Or, c'est durant septembre que chacun des organismes
désignés devra faire connaître son intention de voir son
nom sur le bulletin de vote, en quelque sorte. Je n'ai pas tellement de choses
à dire là-dessus, je pense que j'aurais repris les mêmes
exposés de motifs que le minis- tre relativement à cela. Je ne
pense pas que cela représente nécessairement une situation
permanente, comme je l'indiquais ce matin, mais dans le contexte des
difficultés qu'a connues l'industrie de la construction et
particulièrement certains syndicats dans leur fonctionnement interne,
etc., les possibilités de voir surgir des groupes qui cherchent à
obtenir la représentativité, sans être vraiment prêts
à en assumer toutes les implications, il faut accepter cette restriction
temporaire à la liberté d'association. Ce qui ne veut pas dire
que dans un monde idéal, on retrouverait une porte ouverte à cent
pour cent, non plus. Il faudrait exiger, avant d'inscrire sur un bulletin de
vote provincial, le nom d'une association quelconque de salariés, d'un
prétest, en quelque sorte, qu'ils parlent pour autre chose que le
conseil d'administration, qu'il y ait plus de douze membres dans une
association de salariés. Exactement quel mécanisme cela pourrait
être, j'en n'ai pas d'idée précise, mais il faudra
certainement trouver quelque chose qui évite de donner libre cours
à des groupements qui seraient purement irresponsables et qui ne
seraient pas représentatifs du tout et qui ne feraient que diminuer la
force réelle des syndiqués dans le secteur de la
construction.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Lorsque je regarde l'ancienne loi ici, à
l'article 4 que le ministre veut lui-même modifier, on dit: Toute
association qui désire constater sa représentativité doit
en faire la demande à l'office dans le cours du huitième mois qui
précède la date d'expiration du décret. On se rend compte
que tel que cela existait dans la loi à venir jusqu'à
aujourd'hui, jusqu'à ce que l'amendement soit adopté, en fait,
n'importe qui avait accès, pouvait faire une telle demande et entrer
dans ce cadre juridique. On est conscient que l'amendement que propose le
ministre apporte certaines restrictions. Par contre, les motifs qu'il a
invoqués pour le faire nous apparaissent justifiables et dans ce sens,
on souscrit à l'amendement que le ministre propose, d'ailleurs, c'est
une préoccupation de l'ensemble des syndicats de voir leur
dénomination clairement indiquée. En ce qui nous concerne, il
nous apparaît que cela va être de nature évidemment
c'est une mesure provisoire, comme l'a indiqué le ministre
à assurer un déroulement paisible durant la prochaine
période de maraudage. Dans ce sens, on est tout à fait prêt
à en faire l'essai tel que le ministre l'a proposé, les motifs
qu'il a invoqués nous paraissant fort justifiables.
Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté?
M. Forget: Adopté.
M. Brochu: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Adopté. Je fais appel
à un autre nouvel article, l'article 2 présenté par M. le
ministre.
M. Johnson: L'article 2, M. le Président, se lit comme
suit: L'article 5 de ladite loi, remplacé par l'article 5 du chapitre 28
des Lois de 1973 et l'article 3 du chapitre 51 des Lois de 1975, est de nouveau
remplacé par le suivant: "5: L'Office doit, au plus tard le dernier jour
du septième mois qui précède la date d'expiration du
décret, faire publier dans la Gazette officielle du Québec et
dans un quotidien de langue française, le nom des associations
mentionnées à l'article 4 qui ont présenté une
demande à l'Office."
En fait, il s'agit d'une concordance avec l'article que nous venons
d'adopter. D'autre part, on aura peut-être remarqué que nous avons
modifié, pour des fins de langue française, la notion "d'à
travers le Québec " par "un quotidien de langue française".
M. Forget: M. le Président, quant à moi...
Le Président (M. Laplante): Adopté? Nouvel article
2, adopté?
M. Brochu: Adopté.
M. Johnson: Article 3, M. le Président?
Conditions d'éligibilité au vote
d'adhésion syndicale
Le Président (M. Laplante): Maintenant, j'appelle
l'article 1 du projet de loi no 52, qui deviendra l'article 3.
M. Johnson: Voilà, exactement. Alors, l'article 1 du
projet de loi no 52 est modifié et il devient, d'une part, l'article 3
du projet de loi et, d'autre part, je veux vous faire lecture du texte tel
qu'il devrait se lire en entier: L'article 3: Remplacer l'article 1 du projet
de loi par le suivant: "3: L'article 6 de ladite loi, remplacé par
l'article 5 du chapitre 28 des Lois de 1973 et l'article 3 du chapitre 51 des
Lois de 1975, est de nouveau remplacé par le suivant: 6: L'Office doit
dresser une liste de tous les salariés: a) détenteurs d'un
certificat de classification délivré en vertu du règlement
relatif au placement des salariés dans l'industrie de la construction;
b) ayant effectué au moins 300 heures de travail au cours des douze
premiers des quinze mois civils complets précédant le mois durant
lequel a lieu le scrutin prévu à 7a, et c) domiciliés au
Québec au dernier jour du huitième mois qui précède
l'expiration du décret. "Le paragraphe b) du premier alinéa ne
s'applique pas au salarié qui, le dernier jour du septième mois
qui précède l'expiration du décret, est âgé
de 50 ans ou plus. "Cette liste établit, de façon non
contestable, le nom des seuls salariés pouvant se prévaloir de
l'article 7a. "Au cours du septième mois qui précède
l'expiration du décret, l'Office transmet, à chaque
salarié dont le nom apparaît sur la liste établie suivant
le présent article, une carte qui l'identifie comme votant aux fins de
l'article 7a et qui mentionne son nom et son numéro d'assurance sociale.
"Cette liste est transmise aux associations visées à l'article 5,
au plus tard quinze jours avant la tenue du scrutin prévu à
l'article 7a."
En fait, M. le Président, cet article a pour but de fixer les
nouvelles conditions d'éligibilité au vote d'adhésion
syndicale tenu par l'Office de la construction. Actuellement, pour avoir droit
de vote, il suffit qu'un salarié ait son nom sur les rapports mensuels
produits à l'office au cours des douze premiers des quinze mois civils
complets précédant le mois durant lequel a lieu le scrutin. Cela,
indépendamment du nombre d'heures effectuées.
Avec la présente modification, le salarié, à
l'exception de celui qui, le dernier jour du septième mois
précédant l'expiration du décret, est âgé de
50 ans ou plus, devra avoir effectué au moins 300 heures de travail
durant cette période. De plus, le salarié devra être
détenteur d'un certificat de classification délivré en
vertu du règlement de placement et domicilié au Québec.
Quant à cette dernière question de domicile, le dernier jour du
huitième mois qui précède l'expiration du décret
est la date la plus éloignée qui pouvait être retenue pour
déterminer le domicile d'un salarié parce que l'office a
l'obligation, en vertu de l'article 6 de la loi, de lui transmettre, au cours
du septième mois précédant l'expiration du décret,
sa carte qui l'identifie comme votant.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, s'il n'y a pas de
problème avec la substitution des 300 heures, je crois qu'il s'agit
là d'une règle qui permet d'identifier ceux qui ont un
intérêt plus substantiel dans l'industrie de la construction, mais
il y a quand même un phénomène qui est d'ordre technique et
je me rends compte qu'on a adopté le même libellé que dans
l'article 6 actuel, où la liste est dressée à partir des
travailleurs qui ont accompli les 300 heures dans les douze premiers des quinze
derniers mois, ce qui veut dire que la liste s'arrête trois mois avant le
scrutin. Je pense qu'il est normal qu'il y ait certains délais pour
permettre à l'office de compiler la liste et probablement pour les
organisations syndicales, également, d'avoir accès à cette
liste en fonction des exigences du scrutin. Trois mois, c'est peut-être
long cependant, puisque c'est supérieur au délai dont on dispose
lors d'une élection provinciale. Il se peut toujours qu'il y ait des
gens qui n'ont pas 300 heures dans les douze premiers des quinze mois en
question, mais qui les auraient si on comptait le treizième et le
quatorzième. Je me demande jusqu'à quel point il est strictement
nécessaire de disposer d'un délai aussi long. Cela serait ma
première question.
M. Johnson: En fait, si on disait un mois au lieu de trois, on
aurait peut-être le même problème, parce que quelqu'un
n'aurait pas travaillé
suffisamment si on revenait à une période de deux mois,
plus près de nous qu'autrement, d'une part. D'autre part, ce qu'on veut
éviter, entre autres, c'est de compiler ceux qui... par exemple, les
étudiants qui travaillent dans la construction pendant
l'été; or, on sait que le règlement de placement entre en
vigueur le 1er juillet et qu'une disposition transitoire du règlement de
placement prévoit que ceux qui sont sur les chantiers au 1er juillet ont
droit d'y rester. Il peut y avoir au mois de juin, à cause de la fin des
classes, beaucoup d'étudiants sur certains chantiers et à ce
moment-là on se trouve, à toutes fins pratiques, à
éliminer ceux qui n'auraient pas commencé avant cela. Je pense
que c'est plus juste en ce sens. C'est qu'on couvre vraiment des gens qui ont
fait 300 heures en période normale, si on veut, à
l'extérieur de la période estivale actuelle, pour éliminer
ceux qui pourraient être des étudiants qui sont entrés sur
les chantiers avant le 1er juillet, ou en pratique, entre le 1er juin et le 1er
juillet...
M. Forget: ... oui...
M. Johnson: En plus de cela, on nous le souligne, il faut
procéder d'une part à l'identification de ces personnes sur le
plan informatique et ensuite procéder à l'expédition de
tout cela. Cela prend quand même des délais, cela a beau
être informatisé, on a beau avoir des machines Pitney Bowes, il
faut quand même faire parvenir cela.
M. Forget: Cela ne vaut pas nécessairement lors d'un
scrutin provincial, donc, c'est un argument qui n'a qu'une validité
limitée, mais l'argument quant aux étudiants cela peut aussi
valoir, enfin, je pense qu'il y a des éléments d'information qui
sont utiles, mais en soi, cela n'est pas déterminant, c'est probablement
un choix de convenance qui a été fait. Ce n'est peut-être
pas tellement grave à ce bout du délai.
Mon autre question, M. le Président, concerne la durée de
la période de calcul. L'industrie de la construction, on l'a souvent
déploré, encore que d'aucuns disent qu'il s'agit là d'une
caractéristique essentiellement liée à l'industrie de la
construction et dont on ne pourra jamais se départir, est
essentiellement cyclique, c'est-à-dire, qu'il y a des variations
considérables entre les moments d'activité maximale et les
moments d'activité minimale. Il y a, bien sûr,
énormément de gens qui sont des travailleurs de la construction
dans une année donnée, qui ne le sont pas une autre année.
Par contre, le vote se prend dans une année donnée. Cette
année-là peut coïncider, comme cela sera le cas cette
fois-ci, avec un creux dans les activités. Ce qui veut dire, tout
simplement, sur le plan même du contenu qu'il y a le droit de participer
au scrutin et de participer au choix des associations syndicales, mais il y a
également le droit de déterminer par son vote et autrement le
contenu de ces conventions. On se trouve dans la situation probablement cette
année où les mandats seront donnés par des organismes
syndicaux qui parleront principalement au nom des membres relativement
permanents d'une industrie qui ne l'est pas. En vertu de quoi vont-ils... (15 h
30)
II y a quand même des choix qui vont se faire entre des clauses de
la convention collective qui favorisent davantage ceux qui sont permanents par
rapport à ceux qui ne le sont pas et ces choix sont faits par ceux qui
sont permanents. Cela pose tout le problème, bien sûr, de savoir
si on peut identifier autrement qu'on ne le fait les travailleurs de la
construction. Il y a la question des 300 heures et je n'éprouve pas de
désaccord quant aux 300 heures, mais c'est 300 heures sur combien de
temps? Dans le fond, cette formule est assez ambiguë; cela peut être
300 heures en un mois, cela peut être 300 heures en un an.
Je me demande si la formule qui serait la meilleure ne serait pas une
formule qui tient compte à la fois du nombre d'heures travaillées
dans l'industrie de la construction et du nombre de mois pendant lesquels on
compte ce nombre d'heures. Ce qui nous permettrait, semble-t-il, d'allonger la
période de référence, quitte à augmenter le nombre
d'heures de manière à contrer les effets cycliques de
l'industrie. Quelqu'un qui, durant les deux dernières années, a
fait 500 heures ou qui a fait 250 heures par année, si on veut; on
pourrait laisser le même critère mais permettre de l'étaler
sur une plus longue période de manière à permettre une
participation des travailleurs qui ont pu être très
intensément engagés dans l'industrie il y a deux ans ou un an et
demi, que les circonstances économiques ont évincés de
l'industrie, mais qui demeurent, par leur formation, leur intérêt
professionnel, leur intention même, des travailleurs de la construction
même si, temporairement, ils sont chauffeurs de taxi ou laveurs de
vaisselle dans un restaurant, ou Dieu sait quoi, mais qui demeurent avec
l'intention de retourner à l'industrie de la construction, ou
cultivateurs, on en trouve de toutes sortes.
Je trouve qu'il y aurait là, et je n'ai pas de formule à
proposer au ministre... Il me semble que 300 heures sur un an, c'est
très peu; cela peut aussi être 300 heures sur un mois et cela
donne la même ouverture au droit de vote. Cela devrait peut-être
être sur deux ans. A ce moment-là, cela pourrait vouloir dire 600
heures, ce qui serait la même chose, 600 heures sur deux ans ou 300
heures par année. Il me semble qu'il y a deux dimensions qu'on
mélange dans le projet de loi actuel.
M. Johnson: En fait, peut-être que le député
de Saint-Laurent n'aura pas besoin qu'on se creuse les méninges pour
essayer de trouver une formule puisque, en fait, il faut lire l'article, le
paragraphe a) en même temps. Il ne faut pas oublier que, pour avoir
l'équivalent d'un coupon donnant le droit d'aller voter, il vaut
être détenteur d'un certificat. Or, pour être
détenteur d'un certificat... On a un certificat A, B ou C; si on a un
certificat A, cela présuppose, au départ qu'on a travaillé
1000 heures dans les douze mois précé-
dant le 31 mars 1977 ou 1500 heures dans les 24 mois
précédant le 31 mars 1978. Donc, en pratique, le bassin de ceux
qui font de la construction vraiment leur métier, compte tenu de la
question cyclique ou pas... On remonte quand même à mars 1976,
d'une part. On dit, pour le reste, cependant, en d'autres termes, que ceux qui
n'ont pas fait 500 heures dans la dernière année, à toutes
fins pratiques, il y a une place pour ceux qui ont fait 300 heures. En
pratique, ceux qu'on peut viser sont ceux qui auraient un certificat C, qui
seraient sur un chantier au moment où est déclenché le
processus, pour faire en sorte qu'ils puissent y avoir accès, mais ils
ne sont quand même pas si peu présents comme si cela ne faisait
que deux semaines qu'ils étaient là. 300 heures en deux semaines,
sauf à la baie James où cela peut se faire, en
général, 300 heures en deux semaines, c'est assez rare qu'on fait
cela.
En pratique, vraiment, on identifie un bassin important avec les
certificats A et B, en se référant à la période de
référence qui est de 24 mois, 1500 heures, ou de 1000 heures
à l'intérieur des douze mois ayant précédé
le règlement de placement. Alors, je pense, finalement, qu'on vit
ces...
M. Forget: Oui, peut-être que je n'en vois pas toutes les
indications mais il me semble que, superficiellement du moins, vous allez avoir
des gens qui ont un certificat de classification à cause de leur
participation à l'industrie de la construction, disons à partir
du milieu de 1976 au milieu de 1977 et qui, dans les quinze derniers mois,
n'ont pas fait 300 heures. Donc, le règlement du placement va leur dire
qu'ils jouissent, à certains égards, d'une certaine forme de
priorité sur des nouveaux venus, totalement nouveaux, qu'ils ont en
quelque sorte leur passeport pour l'industrie de la construction. D'un autre
côté, on ne leur permettra pas de voter.
M. Johnson: Sauf s'ils ont 50 ans... M. Forget: Bien oui.
M. Johnson: ... en vertu de b. M. Forget: Celui qui a 49 ans...
M. Johnson: Celui qui a fait...
M. Forget: ... qui a son certificat et qui a seulement 275 heures
dans les quinze derniers mois, ne pourra pas voter.
M. Johnson: C'est vrai.
M. Forget: II va dire: Pourquoi? Je pense bien qu il n'y a
personne, dans cette chambre, qui pourrait lui faire comprendre et accepter
pourquoi.
M. Johnson: D'accord.
M. Forget: Ce seront des situations assez curieuses. Dans le
fond, il y a un besoin de corrélation entre les règles du
placement, dans la mesure où on veut les conserver je ne
rouvrirai pas ce volet et les règles de votation, parce que pour
le monde ordinaire, qui n'est pas législateur, cela va être
fatigant.
C'est à peu près tout cela que je voulais dire. Le
ministre a répondu en disant: C'est vrai qu'on va loin dans le
passé; mais si on va loin dans le passé pour une fin, les gens
vont se demander pourquoi on ne va pas loin dans le passé pour donner le
droit de vote.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: M. le Président, est-il exact que l'article tel
que proposé, tel qu'amendé, va nous donner un chiffre
approximatif de 100 000 travailleurs qui seront touchés par cela?
M. Johnson: Excusez-moi...
M. Brochu: Cela va. Est-ce que l'ordre de grandeur de l'article,
tel que proposé, va rejoindre environ 100 000 travailleurs? Est-il exact
de prétendre cela? Cela équivaut à quoi en termes
de...
M. Johnson: Entre 90 000 et 100 000 travailleurs.
M. Brochu: N'était-ce pas un peu plus élevé
que cela lors de la dernière ronde?
M. Johnson: C'était 145 000, si je me souviens bien.
M. Brochu: Environ 145 000.
M. Johnson: Le nombre total de personnes inscrites à IOCQ
est environ 200 000, sauf que là-dedans, il faut faire la part des
étudiants, des chauffeurs de taxi, etc. Le nombre sur lequel a
porté le maraudage ayant précédé le dernier
décret était environ 140 000. Cependant et j'ai
déjà eu l'occasion de l'affirmer les études
extrêmement bien faites qu'on a pu voir récemment,
démontrent qu'au Québec, en période d'activité
moyenne dans la mesure où il existe une telle chose dans un pays
où on s'est fait une expo et un stade olympique à
l'intérieur de dix ans il y a de la place pour à peu
près 90 000 à 110 000 travailleurs de la construction; dans une
période comme celle que nous connaissons en ce moment, c'est
évidemment de beaucoup inférieur.
M. Brochu: Lorsqu'il est question du délai de trois mois
avant le vote, est-il exact de croire aussi que le délai peut être
fixé, compte tenu des problèmes d informatique que cela peut
poser pour programmer ceux qui sont compris dans ce système...
M. Johnson: C'est cela. En fait, d'une part, c est le fait que
l'office, depuis 1968, est habitué à
procéder avec ce délai et d'autre part, c est le fait
qu'il y a des délais réels occasionnés par l'informatique,
le recensement, l'expédition et le fait de régler les
problèmes, éventuellement, des gens qui peuvent se plaindre, etc.
Je pense que c'est raisonnable de prévoir trois mois dans les
circonstances.
M. Brochu: D'accord, merci.
Le Président (M. Laplante): L article 1, devenant I
article 3, adopté?
M. Forget: Adopté.
M. Brochu: Adopté. M. le Président.
Le Président (M. Laplante): J'appelle le nouvel article 4,
proposé par M. le ministre.
M. Johnson: Le nouvel article 4 qui deviendrait I'article 4 du
projet de loi no 52, se lit comme suit: L'article 7a de ladite loi
édicté par l'article 3 du chapitre 51 des Lois de 1975 est
remplacé par le suivant: "7a: Au cours du sixième mois qui
précède I'expiration du décret, tout salarié dont
le nom apparaît sur la liste dressée suivant I'article 6 peut,
conformément au présent article, faire connaître à
l'office le choix qu'il fait d'une association dont le nom a été
publié suivant l'article 5. Ce choix s'exprime en secret par voie de
scrutin tenu sous la surveillance d'un représentant de I'Office, aux
dates et de la façon prévues par règlement de I'Office. Un
salarié qui, ayant droit de faire connaître son choix, ne l'a pas
exprimé suivant le premier alinéa, est réputé pour
l'application des articles 7b, d et g, avoir choisi l'association en faveur de
laquelle il a fait connaître son choix, lors du scrutin
précédent ou à laquelle il a adhéré suivant
l'article 7h depuis ce scrutin, à la condition que le nom de cette
association soit publié suivant I'article 5. Tout litige relatif au vote
ou découlant du scrutin est tranché par le représentant de
I'Office dont la décision est sans appel".
En pratique un salarié actuellement est obligé de voter
lors du scrutin d'allégeance syndicale tenu par l'Office. Aussi, cet
amendement a pour but, d'une part, d'enlever cette obligation de voter et,
d'autre part, d'édicter une présomption de vote en faveur du
salarié qui avait le droit de voter, mais qui ne l'a pas fait. Ce
salarié sera donc réputé avoir choisi l'association en
faveur de laquelle il a fait connaître son choix lors du scrutin
précédent ou à laquelle il a adhéré suivant
l'article 7h, depuis ce scrutin. Le problème que cela peut soulever,
évidemment, est le suivant: on instaure maintenant, à cause du
règlement de placement entre autres et de son effet de contingentement
partiel de la main-d'oeuvre dans le secteur, un mécanisme qui habilite
les travailleurs à choisir entre quatre associations syndicales.
On peut présumer qu'il y a un minimum de participation des
travailleurs dans le secteur de la construction à la vie syndicale, mais
je pense qu'on n'a pas le droit de présumer que cela a à
être supérieur à ce qu'on rencontre ailleurs, comme par
exemple, dans les commissions scolaires ou autrement. Or, une des aberrations
de la loi 290, c'est le fait qu'on disait que la majorité était
obtenue si je laisse tomber la question de la pondération en
fonction des heures travaillées sur une base absolue au sens ou
il fallait qu'une centrale syndicale ait recruté plus de 50%, non pas
des voix exprimées, mais de tous les votes potentiellement exprimables
dans l'industrie, ce qui fait qu'on aurait pu très bien assister cette
année à un vote où aucune association ne serait
représentative, et, où même un groupement des associations
ne serait pas représentatif, s'il y a un taux de participation
relativement bas.
Or, dans les circonstances on dit: le vote n'est pas obligatoire.
Cependant, dans le but, entre autres, comme on l'a mentionné,
d'éviter d'être une incitation au maraudage sauvage dans
l'industrie, et pour la computation des votes allant aux quatre centrales qui
figurent sur le bulletin, on tiendra compte du vote ou de l'allégeance
exprimée par le salarié qui est arrivé dans l'industrie et
qui devait, au moment de son entrée dans l'industrie, faire un choix
d'une des centrales, de toute façon. Et, on présumera que celui
qui n'a pas changé son allégeance, qui n'a pas exprimé son
droit de vote, l'a exprimé tacitement en faveur de
Iassociation à laquelle il appartenait avant le vote. Ceci
permettra de garder la règle du calcul sur la base de l'ensemble des
salariés admissibles au vote, mais en tenant compte aussi du fait qu'il
est possible qu'il n'y ait pas un taux de participation qui tienne compte de
cela.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, ces explications sont
adéquates et, je pense, représentent également le voeu
conjoint des organismes syndicaux.
II faut dire qu'il s'agit là d'une procédure sans
guère de précédents connus. Et, c'est strictement, je
pense, en tenant compte du consensus entre les organismes syndicaux qu'on peut
être à moitié d'accord avec le principe et d'accord en
pratique avec l'article en question, au moins à titre
d'expérience. Parce qu'on se rend compte dans quelle situation, assez
curieuse, on se trouverait si on adoptait cela pour les élections
scolaires, municipales et les élections législatives. De faire
bénéficier, par exemple, le gouvernement en place du vote
implicite de la majorité silencieuse, selon l'expression bien connue,
nous garantirait, probablement, la permanence au pouvoir de n'importe quel
gouvernement, soit-il si odieux qu'on puisse imaginer.
M. Johnson: C'est une excellente chose dans le contexte
actuel.
M. Forget: Oui, ce n'est pas sans sourire, évidemment, que
le ministre l'affirme, mais il y a quelque chose de dérangeant dans
cette notion et c'est seulement en faisant intervenir d'autres con-
sidérations sur la nécessité de se conformer
à la règle de représentativité qui est une
règle arithmétique, assez curieusement, dans cette loi,
plutôt qu'une règle de faits, le législateur se
mêlant de décréter des choses qui, dans le fond, ne
devraient jamais être dans des lois, parce que ce qui est
représentatif, c'est ce qui parle au nom de suffisamment de gens et
à qui on reconnaît la légitimité. Ce n'est pas
déduit d'un exercice arithmétique, la légitimité
d'un organisme syndical, pas plus que d'un gouvernement. (15 h 45)
II reste que, comme le législateur s'est engagé à
définir la légitimité ou la
représentativité, il se voit acculé à des choix
aussi surprenants que ceux-là. Ceci, joint à la description
limitative des organisations syndicales qui peuvent participer au scrutin, fait
qu'on aura, dans le domaine de l'industrie de la construction, du
côté syndical comme du côté patronal, ce qu'on peut
appeler la démocratie guidée par le législateur, dans une
large mesure. Il faudra certainement que le ministre du Travail s'arrange pour
que les syndiqués du milieu de la construction soient bien conscients du
fait que, à défaut de s'exprimer, le ministre, le gouvernement et
l'Assemblée nationale se sont exprimés à leur place, dans
le fond. S'ils ne veulent pas que ce soit là leur dernier mot, il faudra
qu'ils sortent de chez eux et qu'ils aillent exprimer un choix. Je pense que
cela place une responsabilité assez nette sur le gouvernement de faire
connaître la situation au moment du scrutin. A défaut de faire
cela, on se trouvera dans des situations que les syndiqués
eux-mêmes vont juger abracadabrantes, avec des majorités
fantastiques ou certainement, du moins, une participation purement fictive. Et
c'est dangereux, à long terme. Cela pourrait résulter en un taux
de participation de plus en plus faible, d'ailleurs, à des scrutins
successifs, de sorte que, pour assurer la représentativité, on
aboutisse à une situation où on la perde complètement. Ce
qui n'est pas un résultat inouï pour certains efforts
législatifs d'arriver à des résultats absolument
contraires à ceux recherchés. Cela s'est déjà vu et
cela peut se reproduire. Je pense qu'il y a un risque certain qu'on arrive
à une participation nulle, sous prétexte d'assurer la
représentativité.
Il y a un danger que cela soulève et c'est un danger je
sais que le ministre en est conscient, par des remarques qu'il a tenues
privément, mais je me demande si le texte en tient suffisamment compte
d'intimidation. Il est clair que si le seul fait de sortir de chez soi
pour aller exprimer un choix devient la démonstration visible d'une
dissidence, les dissidents sont facilement repérables et deviennent
facilement la cible d'efforts de persuasion. Il n'y a pas d'objection à
ce que ce soit seulement des efforts de persuasion, mais on sait que, dans des
circonstances enflammées d'une rivalité intersyndicale, cela peut
aller un peu plus loin, le zèle de certains représentants
l'emportant et, en contravention avec toutes les directives des centrales
syndicales, il reste que cela peut prendre cette dimension, hélas! le
zèle intempestif, le prosélytisme intempestif. A ce moment, le
ministre ne serait-il pas d'accord qu'au lieu de laisser la question de la
réglementation sur la date et le moment du scrutin complètement
ouverte, le législateur devrait aller un peu plus loin et inviter
l'Office des professions à prévoir un étalement de la
période de scrutin? Dans le moment, ce n'est pas exclu par la
rédaction, mais ce n'est pas compris non plus que ce sera un
étalement des dates. Dans le fond, on dit: Aux dates, mais est-ce que ce
sont des dates différentes dans différentes régions, par
exemple, ou si ce sont les deux mêmes jours partout au Québec?
Il me semble que le législateur devrait aller un peu plus loin et
qu'il devrait donner des balises à l'Office de la construction pour
dire: C'est peut-être la même date partout. Je ne sais pas quelle a
été la pratique là-dedans, mais il semble qu'il y ait
avantage à ce qu'un scrutin se déroule en même temps
partout, à moins de difficultés administratives insurmontables.
Il y aurait intérêt à ce que ce soit étalé
pendant la période la plus longue possible, de manière que les
dissidents ne soient pas trop visibles, et qu'on ne puisse pas les
repérer trop facilement.
On peut s engager dans un cercle vicieux épouvantable. Etant
donné qu'il s'agit d'être peu nombreux pour aller voter pour que
le mécanisme joue, il y a une incitation pour être de moins en
moins nombreux, si ceux qui y vont sont victimes de pressions qu'ils trouvent
désagréables, alors on va arriver avec un statu quo et avec la
perte de la représentativité. Cela peut être un facteur de
perte de représentativité. Alors, il me semble que si on
précisait un peu plus le deuxième paragraphe, cela serait plus
acceptable, encore que tout ce processus est acceptable.
Je le dis encore une fois et je termine là-dessus seulement parce
qu'il représente un consensus. On peut en faire l'expérience avec
toutes sortes de réserves mentales qui nous amèneraient, un jour,
à réviser notre position si on voyait que la première
expérience n'est pas heureuse. Si elle l'est heureuse, bien tant mieux.
On continuera à vivre avec.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond, avez-vous des commentaires?
M. Brochu: Merci, M. le Président. A ce moment-ci,
l'article tel qu'il est présenté nous apparaît logique. De
toute façon, au point de départ, il fait l'objet d'un large
consensus; je pense que la plupart des intéressés pour ne
pas dire la totalité des intéressés se disent
d'accord à ce sujet. Il faut mettre la formule à l'essai, il faut
la vivre et voir en partant d expériences vécues ce que cela va
donner.
Je comprends qu on peut avoir certaines réserves au point de
départ. On est conscient du fait que cela peut, d'une certaine
façon, apporter une certaine passivité du côté de la
participation, mais encore-là, c est difficile de juger d'avance de la
perception qu'auront les travailleurs de ces dispositions. Dans ce sens, cela
sera surtout au niveau
de l'expérience qu'on pourra dire ce qui en sera exactement. De
toute façon, il y a le comité Hébert qui va aussi
reprendre certaines choses, qui va faire certaines recommandations au ministre
lorsque le document sera rendu public. On va vivre l'expérience de
l'automne, on sait que dans ce domaine de la construction on aura des
échos, sûrement, de ce qui va se passer; cela va être
public. On sait que les discussions sont, pour le moins, viriles à
l'occasion, pour employer un terme qui est cher au ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières. On sait que parfois,
même, les arguments sont frappants pour caricaturer un peu et la
discussion qui aura lieu, à ce moment, va nous donner
l'expérience du vécu de ce projet de loi.
Au point de départ, cela nous apparaît logique, cela nous
apparaît une formule, comme je le disais au ministre, qui mérite
d'être mise en application. Partant de l'expérience qu'on fera, il
sera possible à la lumière également du rapport
Hébert, de faire une réflexion en profondeur sur l'ensemble de la
situation pour arriver finalement à la refonte de la loi 290, comme
telle, mais avec une expérience solide, basée, au point de
départ, sur une volonté commune de la part des syndicats dans ce
secteur de faire une telle expérience.
Je pense, qu'en ce cas, toutes les chances sont du côté du
bon sens au point de départ. Quant à nous, on est prêt
à faire l'expérience. Il nous semble que c'est positif et
à l'usage on fera les commentaires et les réserves
nécessaires. S'il le faut, en cours de route, quand viendra le temps de
la refonte du projet de loi 290, à ce moment, on fera les rajustements
qui s'imposent.
Le Président (M. Laplante): Nouvel article...
M. Johnson: M. le Président, brièvement, pour
répondre aux préoccupations du député de Richmond
et du député de Saint-Laurent, deux choses. D'abord quant
à la notion, si on veut, de la passivité capitalisée, au
sens de la représentativité, je suis bien conscient que d'une
certaine façon, on pourrait arriver à la situation absurde
où aucune participation n'assure la représentativité.
C'est bien évident. Ce n'est pas cela l'objet visé et dans le
rapport du comité Hébert ou, enfin, ce que j'ai vu rapidement qui
touchait ce sujet-là, quand le rapport m'est arrivé on me propose
différents mécanismes, y compris, peut-être, une forme
d'accessibilité pour n'importe quelle association, mais l'obligation
pour elle de faire une démonstration qu'elle représente
déjà un certain groupe et peut-être, même, un
ballottage après un premier vote qui pourrait survenir... un ballottage
survenant après un premier vote, dans le cas de celles qui n'auraient
pas recueilli un minimum, en vertu de certains critères qui resteraient
à établir. Je suis bien conscient de cela.
Quant à ce que le député de Saint-Laurent a
appelé avec euphémisme le zèle intempestif qu'on peut
rencontrer dans le cas de ceux qui seraient tentés d'inspirer ceux qui
veulent changer d'allégeance syndicale, je suis très conscient
que c'est un problème qui pourrait exister. Dans les circonstances, je
pense qu'il est de I'intention de l'Office de faire en sorte qu'il y ait un
étalement du vote, dans une période de temps, par
règlement.
Durée du scrutin
II y aurait peut-être une formulation qu'on pourrait mettre dans
la loi, en disant par exemple que ce vote doit s'étendre sur une
période d'au moins six jours consécutifs, ou quelque chose comme
cela. L'inconvénient que je vois à une formulation comme
celle-là, c'est qu'il faut bien se rendre compte que cela a des
implications considérables sur le plan financier, sur le plan de
l'organisation. Nous avons connu cela récemment, alors que le
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre avait la
responsabilité de la surveillance du scrutin pour les élections
du local 791. Cela s'est effectivement étendu dans le temps, mais cela
variait selon les régions, cela dépend quels chantiers sont en
activité, etc.
Il est très clair que notre intention, c'est de faire en sorte
qu'effectivement il y ait un étalement dans le temps pour le
travailleur, pour aller se présenter, afin de minimiser les occasions
d'exclusivité de la présence, dis-je, exclusive de certains
représentants au zèle intempestif.
Dans les circonstances, je serais plutôt tenté de dire que
même si la loi ne me confère pas de pouvoir précis à
l'égard de l'office qui, je présume, est peut-être un peu
plus réceptif qu'il ne l'est à l'égard du gouvernement
depuis quelque temps, pour des raisons qui ne sont pas nécessairement
inspirantes, je pense qu'il est de l'intention de l'office de faire en sorte
qu'il y ait un étalement sur le temps et je suis assuré qu'au
niveau du comité mixte de l'office, la partie patronale et la partie
syndicale, qui agissent comme conseillers de l'office, verront à ce que
cette disposition soit applicable, mais en lui laissant la latitude
nécessaire pour planifier cela sur le plan de l'organisation et sur le
plan des implications financières que cela peut avoir, de la
façon qui soit la plus adéquate possible.
M. Forget: M. le Président, sur ce point, je comprends que
le ministre a de bonnes intentions, mais dans le fond, son argumentation
principale pour dire qu'il n'est pas souhaitable de voir la loi modifiée
pour prévoir que les élections doivent s'écouler sur une
période minimum de six jours, ou des raisons d'implication
financière et administrative... Ces motifs peuvent être
réels. Je comprends que cela peut coûter plus cher, mais d'un
autre côté, on ne peut pas gagner sur tous les plans. On ne peut
pas sauver des principes, s'ajuster à un consensus intersyndical et, en
plus, épargner de l'argent. A un moment donné, il faut ordonner
les priorités et si on veut donner suite à un consensus
intersyndical, bravo. Malgré les réserves de principes qu'on peut
entretenir, je pense que si on veut en faire l'essai loyalement et qu'ils sont
d'accord pour fonctionner dans ce cadre, tant mieux.
Mais il y a, malgré tout, les réserves de principe qui
demeurent et qui sont importantes. Il me semble que si on doit faire un
sacrifice, ce n'est pas au niveau des réserves sur les principes
démocratiques en jeu, de représentativité, c'est au niveau
des coûts administratifs et financiers que peut impliquer une
prescription légale d'un minimum de six jours. Il me semble que c'est
seulement dans ces circonstances à moins qu'on ait un autre
mécanisme à l'esprit qui n'ait pas été
mentionné mais il me semble que c'est seulement en étendant la
période de scrutin qu'on rend plus facile l'exercice du droit de vote
par un syndiqué, dans un contexte où cet exercice n'est
certainement pas facilité par le reste de l'article.
Il me semble que ce serait assez important pour dire à l'office:
Ecoutez, il y a une obligation légale, soumettez-nous les
règlement, mais seulement dans la mesure où vous vous conformez
à une restriction comme celle-là, six jours au moins. Il me
semble que c'est un strict minimum.
M. Johnson: Par contre, je verrais plus cinq jours que six,
puisqu'on implique une semaine ouvrable, au départ, une semaine de
calendrier, en excluant le samedi et le dimanche, si le député de
Saint-Laurent voulait en faire un amendement.
Cependant, je voudrais simplement souligner que le fait d'inscrire cela
au niveau de la loi, est-ce que cela ne coule pas un peu les pieds de l'office
dans le béton qui, peut-être pour un tas de raisons
particulières, voudrait que, dans une région donnée, ce
soit plus long. Et dans une région, il est possible que même trois
jours, ce soit entièrement suffisant pour couvrir le bassin de personnes
et permettre que toutes les personnes aient effectivement exercé leur
droit.
C'est le genre d'implications que je n'ai pas pu analyser. Si nos
juristes n'y voient pas, a priori, d'objection au niveau de
l'interprétation, je verrais peut-être quelque chose comme:
Toutefois, ce scrutin doit se tenir sur une période d'au moins cinq
jours consécutifs. Cela donne au moins une balise à l'office. (16
heures)
M. Forget: On serait bien heureux que l'article soit
amendé dans ce sens.
M. Johnson: Oui.
M. Forget: Cela fige effectivement l'office dans le béton
dans une certaine mesure, mais c'est le but même de la loi de mettre des
balises.
M. Johnson: D'accord. Après le second paragraphe de
l'article 7a, on ajouterait, après le mot "office.", les mots suivants:
Toutefois ce scrutin doit se tenir sur une période d'au moins cinq jours
consécutifs".
M. Brochu: Pour autant que ce soit un minimum, que ce ne soit pas
un maximum.
M. Johnson: Non, au moins.
M. Brochu: Au moins. M. Johnson: C'est cela. M. Brochu:
D'accord.
M. Johnson: Est-ce que cela va pour les fins du greffier?
Une Voix: Cela va.
Le Président (M. Laplante): A la fin du deuxième
paragraphe, n'est-ce pas?
M. Johnson: C'est cela, à la fin du deuxième
paragraphe.
Le Président (M. Laplante): Après l'article 7a.
M. Johnson: Non. Je peux peut-être recommencer. Nous avons
l'article 4 devant nous modifiant l'article 7a de la loi. L'article 7a a quatre
paragraphes avec la nouvelle version que nous en faisons et, à la suite
du second paragraphe, nous introduirions, après le mot "office.", les
mots: "Toutefois ce scrutin doit se tenir sur une période d'au moins
cinq jours consécutifs".
Si je comprends bien, c'est appuyé par le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Oui, M. le Président.
M. Johnson: Ce sous-amendement est-il adopté, M. le
Président?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Adopté. Le nouvel
article 4 qui devient l'article du ministre est adopté avec son
amendement.
J'appelle l'article 2 du projet de loi 52 qui devient l'article 5. M. le
ministre.
Certificat de représentativité
M. Johnson: M. le Président, remplacer l'article 2 du
projet de loi par le suivant: "5. L'article 7c de ladite loi,
édicté par l'article 3 du chapitre 51 des lois de 1975, est
remplacé par le suivant: "7c. L'office constate le degré de
représentativité d'une association conformément aux
critères établis à l'article 7d. "Il délivre
à chaque association dont le nom a été publié
suivant l'article 5 un certificat établissant son degré de
représentativité et la liste des salariés qui ont
adhéré à cette association suivant l'article 7a. "Ce
certificat prend effet le premier jour du deuxième mois
précédant l'expiration du décret sauf pour les fins des
chapitres IV et V pour lesquels il prend effet le premier jour du
quatrième mois précédant l'expiration du décret.
"
Quelques commentaires sur cet article: L'article 7c actuel
prévoit que l'office doit faire parvenir
à chaque association un certificat de
représentativité avant la fin du cinquième mois qui
précède la date d expiration du décret.
Or, le présent article fait disparaître ce délai
tout en prévoyant des dates d'entrée en vigueur d'un certificat
de représentativité. Ainsi les nouveaux certificats émis
à la suite d'un vote d'allégeance syndicale prendront effet en
même temps que les certificats de classification émis en vertu du
règlement de placement et les certificats d enregistrement prévus
à l'article 7e, soit le premier jour du deuxième mois
précédent l'expiration du décret.
Toutefois, pour les fins des chapitres IV et V de la loi, soit les
négociations et l'extension juridique, les nouveaux certificats entrent
en vigueur le premier jour du quatrième mois précédant
l'expiration du décret.
Cet amendement ainsi que celui suggéré à I'article
7e ont pour but d'enlever toute ambiguïté dans le texte actuel de
la loi. En effet, par le jeu de la définition de l'association
représentative qui se réfère au certificat de
représentativité, tous les droits et obligations passaient aux
nouvelles associations représentatives dès l'émission du
certificat et ce, malgré le fait que la carte d'adhésion
délivrée aux salariés semblait prendre effet soit à
une date d'expiration du décret à l'article 7f ou à sa
date d'émission avant la fin du troisième mois
précédant l'expiration du décret à l'article
7e.
Je suis sûr que cela va éclairer tout le monde dans la
salle et particulièrement les conseillers juridiques des partis qui se
référeront au journal des Débats.
M. Brochu: On ne vous demandera pas de résumer.
Le Président (M. Laplante): L'article 5 est-il
adopté?
M. Brochu: Adopté.
M. Forget: Oui, adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 3 du
projet de loi 52 qui devient l'article 6. Il n'y a pas de papillon.
M. Johnson: II reste tel quel, M. le Président,
c'est-à-dire l'article 3 du projet de loi 52, tel qu'il figure en ce
moment et qui devient l'article 6 maintenant de notre projet, qui se lit comme
suit: L'article 7d de ladite loi édictée par l'article 3 du
chapitre 51 des lois de 1975 est remplacé par le suivant: "7d: La
représentativité d'une association de salariés correspond
au pourcentage que représente le nombre de salariés qui ont fait
connaître à l'Office, conformément à l'article 7a,
leur choix en faveur de cette association par rapport au nombre total des
salariés qui ont fait connaître leur choix.
Le Président (M. Laplante): Adopté? M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président...
M. Johnson: Peut-être quelques commentaires. L article, en
fait, prévoit une nouvelle façon d établir la
représentativité de l'association de salariés. La formule
prévue actuellement à I article 7d établit la
représentativité d une association de salariés en fonction
du nombre de votants pondérés par le nombre d'heures de travail
effectuées pour chacun d eux, comme je l'ai expliqué tout
à I'heure. Avec les modifications proposées, la
représentativité d'une association de salariés sera donc
établie en fonction du total des salariés qui auraient
effectivement voté ou qu'on présume avoir voté
dorénavant à cause des modifications que nous avons
apportées aux articles antérieurs. Enfin, on introduit un
principe de base, qui est la notion un homme un vote, ce qui est un changement
à la loi précédente.
M. Forget: Oui. Je n'ai certainement aucune objection à
formuler sur le principe d'un homme un vote: autrement, encore là, il
faudrait voir ce que l'équivalent donnerait dans d'autres situations. Je
crois que c'est un principe qui est le bienvenu dans le cadre de cette loi.
Il me semble qu'il devrait y avoir à ce nouvel article 6,
amendant l'article 7d, une concordance avec l'article 7a dans sa nouvelle
rédaction, parce que cela va soulever une difficulté
d'interprétation. L'article 7a prévoit deux façons pour un
syndiqué de manifester, si c'est le mot approprié, son choix. L
une est d aller voter et l'autre de ne pas y aller.
Or. lorsque I article 7d fait allusion au pourcentage que
représente le nombre de salariés qui ont fait connaître
à l'office leur choix, on ne fait allusion directement qu'à I'un
des deux procédés. Il pourrait y avoir des contestations
basées sur cette divergence au niveau de la formulation.
Ce que je suggérerais, c'est qu on ajoute quelques mots à
I article 7d en disant: Au pourcentage que représente le nombre de
salariés qui ont fait connaître à l'office,
conformément à l'article 7a, leur choix ou qui sont
réputés lavoir fait connaître en vertu de cet article.
Autrement, vous pouvez avoir des contestations qui disent: La seule
référence qui est contenue dans l'article 7d. c est à la
première façon de s'exprimer, soit en allant voter, mais non pas
à la deuxième façon, en restant chez soi.
M. Johnson: Je comprends très bien l'objectif du
député de Saint-Laurent que je partage, qu'il n'y ait pas
d'ambiguïté quant à cela. On a expliqué comment se
fera le calcul tout à l'heure. C'est vrai que ces articles peuvent
sembler... L'article 7d semble a priori incomplet. Cependant, si on va voir
I'article 7a, au troisième paragraphe, on dit bien qu'un salarié
qui, ayant le droit de faire connaître son choix, ne l'a pas
exprimé suivant le premier alinéa, est réputé, pour
l'application de l'article 7b, 7d et 7g, avoir choisi l'association en faveur
de laquelle, etc.
Cependant, j'ai aussi eu le même réflexe que lui en
refaisant la lecture du projet pour la nième fois aujourd'hui. Le
problème qu'il ne pose pas. c'est le risque que l'article 7d soit
interprété
comme référant aux deux premiers paragraphes seulement de
l'article 7a, et non pas également au troisième paragraphe.
J'aurais tendance aussi...
M. Forget: Je pense que oui.
M. Johnson: ... à souhaiter que ce soit plus clair, quitte
à ce que ce soit une redondance.
M. Forget: C'est cela.
M. Johnson: C'est bien connu, le législateur n est pas
censé parler pour ne rien dire. Cela paraît qu'il n'est pas venu
souvent à Québec. On peut peut-être préciser
à l'article 7d, effectivement... Ce serait: La
représentativité d'une association de salariés correspond
au pourcentage que représente le nombre de salariés qui ont fait
connaître à l'office, conformément à l'article 7a,
leur choix en faveur de cette association, ou qui sont réputés
l'avoir fait en vertu...
M. Forget: Tout de suite après fait connaître".
M. Johnson: ... du troisième paragraphe de l'article 7a,
au nombre total des salariés qui ont fait connaître leur
choix...
M. Forget: Encore plus brièvement, il serait possible
d'intercaler...
M. Johnson: ... et qui sont réputés l'avoir fait,
encore une fois.
M. Forget: C'est cela. Il serait possible d'intercaler,
après qui ont fait connaître ou qui sont réputés
avoir fait connaître à l'office"...
M. Johnson: Ah oui!
M. Forget: ... conformément à l'article 7a.
M. Johnson: D'accord. Non, un instant! ... et qui ont fait
connaître...
M. Forget: ... ou qui sont réputés avoir fait
connaître...
M. Johnson: ... à l'office conformément à
l'article 7a ce choix en faveur de cette association, par rapport au nombre
total des salariés qui ont fait connaître leur choix ou sont
réputés l'avoir fait connaître".
M. Forget: C'est ça, exactement.
M. Johnson: Je pense qu'il faut le mettre aux deux endroits.
M. Forget: Oui.
M. Johnson: Je sais que ce genre d'amendement très
technique donne toujours des sueurs froides aux légistes. Vous savez, je
pense que c'est agaçant pour les légistes quand le
législateur se met à faire de la législation.
M. Forget: Oui, c'est à éviter strictement.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous êtes
d'accord pour attendre le texte, M. le ministre?
M. Johnson: Oui, suspendu.
Le Président (M. Laplante): On va suspendre l'article 3,
qui est maintenant l'article 6.
M. Johnson: D'accord. On peut suspendre et revenir avec un
texte.
Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 4 qui
devient l'article 7.
M. Johnson: Tel quel, M. le Président? Le
Président (M. Laplante): Tel quel.
M. Johnson: Donc, l'article 4 du projet de loi no 52 deviendrait
l'article 7 de la version finale qui sortira de la commission en se lisant
comme suit: L'article 7e, de ladite loi, édicté par l'article 3
du chapitre 51 des lois de 1975 est remplacé par le suivant: "7e:
L'Office fait parvenir à chaque salarié dont le nom figure sur la
liste visée à 7b une carte portant mention notamment de son nom,
de son numéro d'assurance-sociale, du nom de l'association
représentative qu'il a choisie suivant l'article 7a. Cette carte prend
effet à compter du premier jour du deuxième mois
précédant l'expiration du décret."
Le Président (M. Laplante): Commentaires, le
député de Richmond?
M. Brochu: Cela va.
Le Président (M. Laplante): Article 4 devenant l'article 7
adopté?
M. Johnson: Article 7. L'article suivant, M. le
Président...
Le Président (M. Laplante): Article 8 du... M. Johnson:
... du projet d'amendement...
Le Président (M. Laplante): ... du... Attendez un peu,
là! Article 5...
M. Johnson: L'article 5...
Le Président (M. Laplante): L'article 5 est
remplacé complètement, n'est-ce pas?
M. Johnson: C'est ça.
Le Président (M. Laplante): II ne revient nulle part.
Carte de l'Office
M. Johnson: L'article 5 du projet de loi no 52...
Le Président (M. Laplante): ... devient l'article 8...
M. Johnson: ... et qui se lit comme suit: Article 8: "Remplacer
l'article 5 du projet de loi par le suivant: 8. L'article 7f de ladite loi,
édicté par l'article 3 du chapitre 51 des lois de 1975 est
remplacé par le suivant, 7f: La carte visée à l'article 7e
fait preuve non contestable de son contenu pour toute période comprise
entre la date où elle prend effet et le dernier jour du troisième
mois précédant l'expiration du décret et elle est la seule
dont l'employeur doit tenir compte pour fins d'emploi d'un salarié et la
seule également pour toutes les fins de l'office. "
Quelques commentaires brièvement: II s'agit d'une modification de
concordance devenue nécessaire suite à la modification
apportée à l'article 7e. Toutefois, dans le but d'éviter
toute ambiguïté, il y a lieu de préciser la période
durant laquelle la carte visée à 7e fait preuve non contestable
de son contenu, soit à compter de son entrée en vigueur
fixée par 7e au premier jour du deuxième mois
précédant l'expiration du décret suivant.
Par exemple, le décret actuel expire le 30 avril 1979 et, dans le
cas où le prochain décret n'expirerait que le 30 avril 1982,
alors la carte ou le certificat d'enregistrement serait valide du 1er mars 1979
au 28 février 1982.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Cela va.
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Laplante): Adopté.
M. Johnson: Adopté.
Le Président (M. Laplante): L'article 8 adopté. Un
moment! L'article 6 du projet de loi no 52 devient l'article 9.
M. Johnson: 9, et se lit comme suit: "L'article 7h de ladite loi,
édicté par l'article 3 du chapitre 51 des lois de 1975 est
remplacé par le suivant, 7h: Aucun employeur ne peut employer un
salarié à moins que ce salarié n'ait, au préalable,
obtenu de l'office la carte visée à l'article 7e, après
que ce salarié ait fait connaître à l'office, suivant la
procédure établie par ce dernier, son adhésion à
une association représentative et que l'office n'ait avisé en
conséquence l'association intéressée."
Mme Lavoie-Roux: C'est simplement de la concordance.
M. Johnson: Essentiellement.
Une Voix: Adopté.
M. Johnson: Adopté, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): Article 9 adopté.
Maintenant...
M. Johnson: Article 10, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): ... l'article 7 du projet de
loi no 52 devient l'article 10.
M. Johnson: Non, ce n'est pas ça, M. le Président.
Il y a un article à intercaler avant, qui est un nouvel article.
Le Président (M. Laplante): Je m'excuse.
(16 h 15)
M. Johnson: On n'est pas rendu à l'article 7, on est entre
les articles 6 et 7 et on introduit l'article 10.
Le Président (M. Laplante): C'est cela, l'article10 sera un nouvel article.
M. Johnson: Voilà!
Le Président (M. Laplante): ... proposé par le
ministre.
M. Johnson: L'article 10: Ladite loi est modifiée par
l'insertion, après l'article 9, du suivant: 9a. "Une association
représentative à un degré de 15% ou plus a le droit
d'être présente lors des séances de négociation et
de soumettre des demandes relatives au contenu de la convention
collective."
Il s'agit évidemment d'une disposition qui est rendue possible,
je ne dirai pas nécessaire, mais possible, parce qu'il y a une entente
entre les deux associations représentatives, ou je devrais dire les deux
associations les plus représentatives du secteur de la construction;
celle qui est majoritaire acceptant que celle qui est minoritaire mais qui
possède quand même des effectifs assez considérables dans
le secteur, soit présente à la table de négociation pour
formuler des demandes.
Je pense que c'est un pas dans la bonne direction par lequel l'ensemble
des agents reconnus par la loi et l'ensemble des membres formant ces agents,
éventuellement sont appelés à une participation à
un stade ou à un autre de la négociation ou peut-être
même, éventuellement, du vote. Je pense que c'est un pas dans
cette direction qui fait en sorte que les conventions collectives s'ap-pliquant
à l'ensemble des salariés de la construction soient
négociées par l'éventail le plus large possible de ceux
qui les représentent.
C'est un départ, c'est un pas, je pense. En pratique, cela veut
dire, pour parler français et québécois, que la CSN sera
assise à la table de négociation lors de la négociation du
prochain décret, si elle obtient 15% du vote, ou encore la FTQ, si elle
obtient 15%, pourra être présente, même si
c'est la CSD qui en a le plus. Enfin, ce sont différentes
hypothèses qu'on peut évoquer, mais au moment où on se
parle, cela voudrait dire que la CSN pourrait être assise à la
table de négociation, ce qui est différent, évidemment, du
dernier décret.
Mme Lavoie-Roux: C'est dans un esprit d'assurer une meilleure
représentativité, dans le fond...
M. Johnson: Essentiellement, oui. D'autre part, je pense que cela
pose une question de fond différente. Il s'agit, en fait, de
négociations sectorielles, comme c'est le cas de l'éducation et
le cas des affaires sociales au Québec. Dans ce contexte, on se rend
compte, dans le cas de l'éducation ou des affaires sociales, que sont
nés des fronts communs ou des tables centralisées où
finalement, l'ensemble des salariés, par ses représentants,
furent-ils d'une diversité importante quant à leur origine ou
à leur étiquette, était présent au cours des
négociations. Dans la construction, je pense qu'on vient de franchir ce
pas par lequel une association, même si elle est minoritaire mais
représentative au point où elle représente quand
même 15 000 personnes, puisqu'on parle d'environ 15 000 personnes sur 100
000, elle serait présente à la table de négociation pour
formuler des demandes.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Oui, merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Excusez, aviez-vous une autre
question, Mme le député de L'Acadie?
Mme Lavoie-Roux: Non.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Sur l'amendement tel que proposé par le
ministre, on ne peut qu'être d'accord; cela fait aussi l'objet d'une
entente entre les parties. Je ne sais pas si cela a été la
préoccupation du ministre, mais cela répond aussi aux demandes
qui avaient été faites par M. Rioux, dans ses édito-riaux.
Je ne sais pas si le ministre s'est basé exclusivement sur les remarques
que M. Rioux a faites dans ses éditoriaux, mais cela rejoint quand
même cette...
M. Johnson: Le moins possible.
M. Brochu: Cela rejoint quand même cette
chose-là.
M. Johnson: Est-ce que c'est le même M. Rioux qui a une
émission avec M. Cournoyer?
M. Brochu: On me dit que oui.
Mme Lavoie-Roux: Ne me dites pas que vous ne connaissez pas
Mathias?
M. Brochu: M. le Président, je reviens sur un point sur
lequel j'ai attiré l'attention du ministre, tout à l'heure avant
qu'on aille dîner. J'avais indiqué au ministre que je pourrais lui
faire part d'un autre point qui a été soumis à notre
attention et qui fait présentement l'objet de certaines discussions
entre les centrales dans l'industrie de la construction. Il s'agit de la
question litigieuse de la participation des associations minoritaires à
l'acceptation de clauses devant faire l'objet de convention collective.
J'avais demandé l'opinion du ministre sur ces questions. Disons
que ce n'est pas directement, dans un premier temps, relié à
cela, mais avec le prolongement du principe qu'on reconnaît dans
l'amendement du ministre, éventuellement, lorsqu'on arrivera à
l'autre étape, on devra faire face à cette situation. J'aimerais
peut-être connaître les couleurs du ministre sur cette question
plus particulière.
M. Johnson: Peut-être que le député de
Sainte-Marie voudrait poser une sous-question sur le même sujet. Il
pourrait peut-être poser sa sous-question et je répondrai à
la question et à la sous-question.
M. Brochu: Le député de Sainte-Marie avait
déjà une sous-question qui s'en venait?
M. Bisaillon: Ce n'est pas une sous-question, M. le
Président. J'avais une vraie question qui découlait, selon moi de
l'article 9a. Autrement dit, ma question n'est valable qu'au moment où
l'article 9a est accepté. Si l'article 9a n'est pas voté, ma
question tombe. Je pense qu'on devrait peut-être voter l'article 9a et
revenir.
M. Brochu: II y a beaucoup de chance que la question ne tombe pas
de la manière que c'est parti. Je ne pense pas.
M. Bisaillon: En fait, M. le Président, si on tient pour
acquis que l'article 9a va être adopté tel quel, on se rend compte
qu'une association représentative à un degré de 15% peut
soumettre des demandes relatives au contenu de la convention collective; elle
est présente à la table et peut soumettre des demandes relatives
au contenu de la convention collective.
Il me semblait normal que l'on puisse étudier et je comprends,
à partir des remarques que le ministre a faites tantôt sur la
législation qui est faite au coin de la table, que ce ne sera pas pour
aujourd'hui, mais j'aurais trouvé normal que l'on se penche aussi sur le
problème du vote au moment de l'acceptation de la convention collective
ou encore du rejet du contenu de la négociation et même un peu
au-delà aussi sur le vote de grève. Est-ce que l'ensemble des
travailleurs de la construction représentés à la table de
négociation
aurait la possibilité de se prononcer sur ces questions?
C est dans le même sens, je pense, que celui du
député de Richmond que mes questions allaient, sauf que je ne
prévoyais pas qu'on pourrait régler ce problème-là
aujourd'hui et je voulais demander au ministre à quel moment on pourrait
se pencher sur ces problèmes-là et les inclure dans la loi.
M. Johnson: En fait, la question peut porter un non et je ne fais
pas d'allusion à ce qui se passe à la chambre 81, mais c'est une
notion, en fait, de référendum, si on veut, dans le secteur de la
construction. Ce référendum pourrait s'exercer selon toute
hypothèse à la fois sur le vote de grève, comme l'a bien
souligné le député de Sainte-Marie, dans un sens positif
ou négatif, pour ou contre la grève, et sur la convention
collective ou le projet de convention collective lui-même.
Je pense qu'au moment où nous aurons à redéfinir ce
qu'est une association représentative et les exigences que
représente le fait d'être une association représentative,
quant au nombre et quant à un tas d'autres critères, au moment
où nous aurons fait notre lit dans une refonte possible de cette loi
où ces associations représentatives ou certaines d'entre elles
seraient automatiquement à la table de négociation avec les
mêmes droits, il est clair que dans le cadre d'une négociation
sectorielle, nous serions peut-être amenés à changer ou
infléchir la notion de monopole de représentation. Cela existe
déjà et c'est cela le grand paradoxe de la négociation
sectorielle dans le cas de la construction.
Si on prend le dernier décret, le conseil des métiers
était majoritaire avec 50,x%. Cependant, la formule Rand ne s'applique
pas. Il y a la CSD, la CSN et la notion de monopole de représentation,
si on regarde notre Code du travail et la façon avec laquelle il a
évolué surtout en décembre dernier avec la formule Rand
obligatoire, cette notion ne s'applique pas au domaine de la construction. Ce
qui fait qu'il ne s'applique pas au domaine de la construction c'est que c est
une négociation sectorielle. Je pense qu'on doit vraiment se poser la
question si dans le cadre d'une refonte de la loi, qui nous amènerait
à consacrer le principe de la négociation sectorielle dans la
construction, on ne devrait pas se dire que tous ceux qui sont présents
à la table de négociation devraient finalement pouvoir aller
devant l'ensemble de leurs membres pour qu'ils se prononcent sur l'ensemble des
sujets.
Effectivement, je pense que cela a besoin de raffinement et de
discussion qu'on aura autour du rapport Hébert bientôt. Je pense
que le gouvernement est bien conscient des implications déjà de
la présence d'une centrale minoritaire à la table de
négociation et l'aboutissement possible de ce principe qui est admis
aujourd'hui.
M. Brochu: Est-ce qu'il se peut, M. le Président, une fois
que le rapport de M. Hébert sera rendu public au cours de
l'été, que ce soit l'intention du ministre de convoquer une
commission parlementaire sur ce sujet précis, d une part?
Deuxièmement, lorsqu'il parle de refonte de la loi 290, est-ce que, dans
le calendrier de travail possible, on peut dire que ça se situe à
lautomne, octobre ou novembre?
M. Johnson: M. le Président, j'ai eu une expérience
récente des délais avec les conditions minimales. Certains de mes
collègues en ont eu avec d'autres projets aussi. Je
préférerais... C'est très clair qu'il y aura une
consultation d'une façon ou d'autre autre qui se fera ou autour du
rapport Hébert ou autour des projets de loi, une fois que le
gouvernement aura décidé ce qu'il fait avec le rapport
Hébert.
Je ne pourrais pas m'engager, ni dans un échéancier, ni
quant à la forme de consultation. Est-ce qu'il y aura une commission
parlementaire sur le rapport plutôt que sur la loi ou sur les deux ou sur
aucun? Pour le moment, je préfère m'abs-tenir de commentaires. Je
pense qu'il va falloir qu'on planifie l'année adéquatement avant
de le faire.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: A propos de ce que le ministre vient de dire, le
maintien du pluralisme syndical dans l'industrie de la construction, par
rapport à la représentativité du membership à la
table de négociation, je me permettrai d'ajouter une nuance fondamentale
qui existe entre les secteurs public et parapublic par rapport au domaine de la
construction, parce que, même s'il existe des fronts communs au niveau
des tables de l'Education et des Affaires sociales, à moins que cela ait
changé dernièrement, dans ma mémoire, chaque groupe
demeurait accrédité et gardait son droit de veto. Ce
n'était que par entente de bonne foi entre les centrales qu'on
réussissait à faire une table unique de négociation dans
le secteur public.
D'autre part, c'est peut-être l'aberration de la loi 290,
là-dessus, j'ai toujours été en faveur du fait que,
lorsque tu reconnais une représentation, tu accordes
éventuellement les pouvoirs normalement dévolus à une
représentation. Je comprends que ça modifierait toute la loi en
profondeur. J'accepte l'étape que le ministre propose, mais, à
mon sens, si on maintient le principe du pluralisme et de la
représentativité, il faudrait logiquement, dans une
réforme, accorder les principes normalement dévolus à une
représentativité reconnue. Sinon, ça devient une
représentativité beaucoup plus pro forma que d'autre chose.
D'ailleurs, là-dessus, le rapport Clicle y faisait allusion, même
si je préfère ne pas en parler régulièrement, parce
qu'on me le remet assez souvent sur le nez, il faut bien que je m'en serve pour
me défendre, je vous dirai que le rapport Cliche, là-dessus,
était cohérent par rapport aux recommandations faites. En effet,
il exigeait une représentativité accrue pour s'assurer que le
minimum qui aurait à se prononcer sur l'acceptation
des offres ou le rejet des offres serait assez élevé, je
crois que c'est 75%, précisément en fonction de s'assurer qu'il y
ait une proportion des travailleurs de la construction qui puissent se
prononcer contre le rejet ou pour l'acceptation des offres, que ça
devienne quelque chose qui s'apparente au moins à 50%.
Théoriquement, je me souviens, quand les premiers chiffres de
dernière ronde de vote d'allégeance ont paru, c'était
arrivé à 51% pour l'association majoritaire, et, par la suite, le
pourcentage a augmenté, mais, immédiatement, le premier comptage
était de 51%. Donc, théoriquement, si ces chiffres étaient
demeurés à 51%, vous auriez pu avoir un vote uniquement d'une
centrale représentative dans les circonstances, puisqu'elle
détient 51%, mais vous ramasser avec 26% des salariés de
l'industrie de la construction qui auraient pu accepter des propositions ou
rejeter des propositions, alors que vous en auriez eu 49% qui, au
départ, n'auraient pas eu la chance de s'exprimer du tout, et 25% qui
auraient pu être contre, dans les circonstances... (16 h 30)
J'ai hâte qu'on fasse la réforme globale pour bien
rediscuter tout cet aspect de représentativité pour arriver
à avoir quelque chose de cohérent. Si on maintient le pluralisme,
on va donner des pouvoirs à chacune des associations. Cela
m'ap-paraît logique. Si on s'en va vers un monopole de
représentations à la table, il faudra peut-être accepter
que ce soit véritablement un vote qui aille vers le monopole
syndical.
Maintenir le pluralisme en accordant le monopole de
représentation à une table, c'est, à toutes fins
pratiques, donner d'une main et enlever de l'autre. Accepter le pluralisme et
donner le monopole de représentativité, c'est nier le pluralisme
lui-même.
M. Johnson: Je ferai un commentaire rapide à ce que vient
de nous dire le commissaire... le député Chevrette.
M. Chevrette: Ne charrie pas. Le ministre a le don de faire de
l'humour. Etant parties d'un même gouvernement, on est obligé de
le prendre.
M. Johnson: C'est parce qu'on aime cela aussi.
En fait, il y a deux choses. L'analogie qu'on fait avec les secteurs
public et parapublic, dans le fond, c'est pour les fins d'une discussion un peu
théorique. On peut peut-être en profiter, il fait chaud.
Le projet de loi 55 actuellement à l'étude, article par
article, prévoit que tout syndicat qui est affilié à une
centrale donnée doit avoir cette centrale comme agent négociateur
et la seule façon pour lui de s'exprimer on sait que le
problème se pose en ce moment pour un groupe important à
Montréal... Le problème pour lui de choisir un agent
négociateur implique qu'il retire son allégeance de la
centrale.
Deuxièmement, il y a une autre analogie qu'on peut faire avec la
Loi des décrets. La Loi des décrets prévoit effectivement
qu'un groupe majoritaire, dans un contexte de pluralité syndicale, peut
quand même obtenir l'imposition des conditions à l'ensemble des
salariés visés, y compris ceux qui ne font pas partie du syndicat
qui a été à la base du premier règlement.
Il y a quand même des analogies. Ceci dit, je suis d'accord avec
ce que dit le député de Joliette-Montcalm, qu'il y a une question
de cohérence également. C'est la multiplicité ou la
pluralité, si on veut, syndicale ou le monopole de
représentation. Est-ce qu'il existe une formule entre les deux? Je ne le
sais pas. Les Européens sont habitués à la
pluralité syndicale, à l'intérieur même des
entreprises, d'ailleurs. A partir du moment où il y a règlement
avec un des syndicats, il y a convention collective, il y a contrat, ce qui
pose cependant d'autres problèmes, comme le droit de grève
permanent dans un contexte de pluralité syndicale par opposition au
droit de grève balisé dans des délais très
précis autour d'une convention.
L'ensemble de cette réflexion peut difficilement se faire en
dehors d'un contexte de réflexion sur la Loi des décrets
elle-même.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que le nouvel article
10 est adopté?
M. Johnson: Adopté, M. le Président. L'article 11,
maintenant.
Le Président (M. Laplante): Auparavant, M. le ministre,
j'appelle l'article 7 du projet de loi 52 qui deviendra l'article 11.
Appel au Tribunal du travail
M. Johnson: C'est cela. L'article 7 du projet de loi 52 devient
donc l'article 11. Cependant, il y a des modifications partielles qui sont
apportées à cet article 7, qui sont essentiellement des
modifications de qualité d'écriture, de langue
française.
L'article 11 se lirait comme suit: L'article 7 du projet de loi devient
l'article 11 et les articles 47 et 48g, introduits par l'article 11 du projet
de loi, sont remplacés par les suivants: 47. Une personne peut en
appeler au Tribunal du travail de toute décision rendue par l'office.
Est-ce que je peux disposer du reste de l'article?
Le Président (M. Laplante): Vous n'êtes pas
obligé de le lire. Chacun a son...
M. Johnson: En fait, on a remplacé l'expression
"émission" par "délivrance" et l'expression "opérée
" par "exploitée ".
M. Brochu: Pendant ce temps-là, est-ce que je peux poser
une question au ministre?
M. Johnson: Oui.
M. Brochu: Qu'est-ce qui arrive de I'article 46 tel qu'il
était libellé dans la première présentation du
projet de loi 52, qui était l'article 7, où on donnait la
définition de certificat et de licence, a et b?
M. Johnson: II reste tel quel. M. Brochu: II reste tel
quel.
M. Johnson: C'est cela. La seule chose qu'on fait, c'est qu'on
prend le nouveau chapitre qu'on retrouve à la page 9 du projet de loi 52
qui s'appelle chapitre IX, Appel en matière de placement, paragraphe 1
ou enfin § 1.- Appel au Tribunal du travail" 46.
Cela se lit tel quel à l'exception cependant du mot
émission" qu'on retrouve à l'article 47, qu on remplace par
"délivrance", et du mot "opérer" qu'on retrouve à
l'article 47 également, par le mot exploiter".
A l'article 48g, page 11, on remplace encore une fois les mêmes
mots, "émission" par délivrance " et le mot "opérer" par
"exploiter".
En fait, c'est l'article tel qu'il se trouve dans le projet de loi 52
initialement, sauf les deux remarques que je viens de faire.
M. Brochu: D'accord, cela va, M. le Président.
M. Chevrette: M. le ministre, j'aurais une question
d'information.
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Cela me tracasse depuis le début. Il y a un
droit d'appel sur la délivrance, d'accord, et il y a un droit d'appel
pour celui qui embauche illégalement, en termes d'esprit, si je relis
les articles 11 et 12 ensemble, dans les amendements fournis.
M. Johnson: Non, il n'y a pas de droit d'appel pour celui qui est
embauché.
M. Chevrette: Pour celui qui embauche.
M. Johnson: Non, il n'y a pas de droit d'appel pour celui qui
embauche.
M. Chevrette: Quiconque embauche un salarié contrairement
au règlement adopté en vertu de l'article 32 ou garde ce
salarié commet une infraction et est passible d'une amende.
C'est-à-dire que ce n'est pas un droit d'appel, c'est une sanction.
M. Johnson: Ce n'est pas un droit d'appel, c'est une
sanction.
M. Chevrette: D'accord. Par contre, il a un droit d'appel sur la
délivrance.
M. Johnson: Sur la délivrance du certificat et de la
licence. En d autres termes, je résume; il y a trois
réalités qui peuvent se produire. Il y en a deux qui donnent lieu
à une procédure d appel et une qui donne lieu à une
sanction. Les trois situations sont les suivantes: Par exemple, un bureau de
placement syndical n'obtient pas une licence ou n obtient pas son
renouvellement ou sa délivrance, etc.; il peut aller en appel de cette
décision de I office de ne pas lui accorder ou lui renouveler un permis,
par exemple devant le Tribunal du travail, première situation et premier
appel.
Deuxième situation, c'est le salarié qui obtient son
certificat, mais qui, par exemple, a un certificat B, parce qu'on
considère qu'il a fait moins de 1000 heures alors que lui prétend
avoir fait plus de 1000 heures et qu'il devrait être détenteur
d'un certificat A. Là, ses recours sont les suivants:
Premièrement, une révision par l'office de l'émission,
parce que cela peut être une erreur purement de copiste qui est
corrigée par une révision et. deuxièmement, un appel
devant celui qu on appelle le commissaire au placement ou les commissaires
adjoints au placement qui sont en quelque sorte des arbitres en matière
de placement dans I interprétation du règlement, des heures,
etc.
M. Chevrette: Ma question...
M. Johnson: La troisième situation, je m excuse, c est I
employeur, par exemple, qui embauche quelqu'un qui n'est pas détenteur
d'un certificat B. qu'il emploie un C alors qu il y a des A et des B dans sa
région. On crée une sanction pénale qui va jusqu'à
S500 d amende par jour d'infraction, à partir du moment où il a
été avisé qu il devait remplacer cette personne par une
autre.
M. Chevrette: Ma question est assez simple, c est que le syndicat
qui agirait illégalement par rapport à la licence qu'on lui a
délivrée se voit possiblement enlever sa licence.
M. Johnson: II peut aller en appel devant les tribunaux.
M. Chevrette: Etant donné que I'OCQ a aussi le droit de
faire du placement, au même titre qu un local ou qu'un syndicat,
qu'est-ce qui arrive s il contrevient à la procédure de
placement?
M. Johnson: II a un problème.
M. Chevrette: II va en appel devant lui.
M. Johnson: Non. L'OCQ, par définition, c'est la
volonté du législateur. Il ne lui interdit pas par le
règlement de placement de faire de la référence. Il peut y
avoir une situation où l'OCQ est obligé de faire de la
référence. Si, dans sa référence, I OCQ envoie
quelqu'un qui n'a pas le certificat adéquat, qu il envoie un B au lieu
d'un A régional, par exemple, à ce moment-là, l'employeur
qui a eu recours aux services de l'OCQ peut se voir pénaliser.
ce qui fait que ce sera une incitation on peut en présumer
pour les employeurs d'avoir recours dans bien des cas aux services de
placement par un bureau de placement syndical. Quiconque embauche, ce n'est pas
l'OCQ qui embauche, c'est l'employeur. Il n'y a pas de sanction
financière contre l'OCQ, ce qui serait finalement punir les parties
elles-mêmes pour une difficulté d'administration. Il y a
c'est très clair une sanction contre l'employeur. J'ai
l'impression que quand cela fera la troisième fois qu'il se fera passer
quel-qu un, il va frapper une pelle.
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie, vous aviez demandé?
Mme Lavoie-Roux: Non.
Le Président (M. Laplante): Le nouvel article 11 est-il
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Je me demande si on pourrait passer paragraphe
par paragraphe, parce qu'il y a certains paragraphes où j'aurais des
questions à poser.
Le Président (M. Laplante): D'accord. On va commencer
à l'article 11, paragraphe par paragraphe. 46?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Adopté. 47?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
M. Brochu: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 48? 47, c'est adopté
tel que modifié.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Laplante): 48?
Mme Lavoie-Roux: C'est tel quel.
Le Président (M. Laplante): Adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
Le Président (M. Laplante): 48a?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Appel au commissaire au placement
Le Président (M. Laplante): 48b?
Mme Lavoie-Roux: II y a une question que je voudrais poser au
ministre. Quelle est la raison pour laquelle on limite le mandat à deux
ans, alors que, d'une façon générale, dans la fonction
publique, il n'y a pas cette limite?
M. Johnson: En fait, essentiellement, c'est parce qu'il s'agit
d'une tâche administrative qu'on confie à un fonctionnaire ou
enfin à quelqu'un qui devient fonctionnaire par la suite. On peut
présumer qu'on va aller le recruter dans un domaine où il a une
connaissance de ces problèmes. La loi ne devrait quand même pas
forcer le gouvernement, puisqu'on crée son poste par la loi, par
opposition à ce qu'on rencontre dans d'autres fonctions dans le secteur
public; je pense qu'on devrait quand même pouvoir mettre une limite quant
à son engagement, parce que, techniquement, il pourrait être
là à demeure. Si jamais cet individu ne faisait pas un travail
satisfaisant, il pourrait toujours dire: Je suis nommé en vertu de la
loi. On fixe un maximum de deux ans, ce qui n'empêche aucunement que ce
soit renouvelable, évidemment.
Mme Lavoie-Roux: Alors, comment se fait-il...
M. Johnson: C'est un acheminateur, comme on dit.
Mme Lavoie-Roux: Comment se fait-il, à ce moment, je
m'excuse d'aller à 48e... Excusez, comment se fait-il que, dans le cas
de 48d, où on nomme des commissaires adjoints, il n'y ait pas de limite
de temps?
M. Johnson: En pratique, si on utilise la procédure que
nous utilisons pour les arbitres de différends ou les arbitres de griefs
dans le cas où les parties nous les réfèrent, parce
qu'elles ne s'entendent pas, ce sont des gens qui sont payés à
l'acte, c'est-à-dire que c'est un arbitrage, c'est tant par jour, ou
c'est tant par jour sur tant d'arbitrages, etc. C'est pour donner le pouvoir au
ministre de faire appel à la liste annotée des arbitres du CCTMO,
mais qu'on ne soit pas obligé d'en engager à temps plein, alors
que cela risque d'être extrêmement variable, cette banque d'appels
en matière de classification. Il est possible que cela se règle
rapidement, que de nombreux cas puissent être réglés, parce
qu'un commissaire adjoint décèle une faille dans le calcul ou
dans l'informatique et qu'on règle en même temps une série
de problèmes, tandis que, si on devait les nommer de façon
permanente ou si on devait avoir recours à d'autres personnes que des
gens nommés à l'acte c'est pour cela qu'on prévoit
que le lieutenant-gouverneur en conseil fixe le type de traitement c'est
qu'on serait obligé littéralement d'ouvrir des postes permanents
là-dessus, de la même façon qu'on n'en a pas pour les
arbitres de différends, mais on a le responsable des arbitrages, qui est
l'équivalent du commissaire au placement, qui achemine cela vers les
commissaires adjoints qui sont les arbitres.
Le Président (M. Laplante): Sur le même paragraphe,
M. le député de Richmond.
M. Brochu: Oui, M. le Président, une petite question au
ministre. Etant donné que la prochai-
ne période de maraudage est quand même relativement proche,
est-ce qu'il y eu un choix d'arrêté en ce qui concerne la personne
du commissaire qui doit éventuellement occuper ce poste?
M. Johnson: Nous avons déjà pressenti quelques
personnes. Cela devrait venir bientôt. Maintenant, ce n'est pas
relié au maraudage, il faut bien se comprendre. Le commissaire au
placement ne s'occupe que des appels de la décision en révision
de l'office, quant à l'émission d'un certificat à un
travailleur, quant au nombre d'heures travaillées. Est-ce qu'il est A, B
ou C? Le travailleur dit: Vous m'avez classé B, alors que j'ai fait plus
que 1000 heures. Il va à l'Office de construction, qui révise sa
décision s'il y a lieu. Si l'office décide de ne pas la
réviser, il peut aller en appel de cette décision de l'office
chez le commissaire. C'est le seul rôle qu'il a à jouer. C'est en
fonction du règlement de placement, ce qui rend la chose d'autant plus
pressée, d'ailleurs, qu'elle entre en vigueur d'ici quelques semaines.
(16 h 45)
M. Brochu: Compte tenu des conditions d'admissibilité,
est-ce que ça ne peut pas, d'une certaine façon, affecter la
question du maraudage?
M. Johnson: Ah oui! Je comprends ce que vous voulez dire,
d'accord. Ah oui! Je comprends parfaitement ce que vous voulez dire.
Oui, c'est vrai, techniquement, ça se pourrait.
M. Brochu: II semble y avoir une incidence; du moins, il y a un
rapport.
M. Johnson: Ah oui! D'accord, je comprends. Je n'avais pas saisi
au début le lien que vous faisiez, mais je le comprends. S'il y avait,
par exemple, 25 000 travailleurs qui prétendaient avoir obtenu des
certificats B au lieu de certificats A, ça ne poserait pas de
problème quant au maraudage, parce que, même s'ils ont des
certificats B, il est prévu dans la loi, aux articles qu'on a
adoptés ce matin, qu'ils vont pouvoir voter.
Par contre, s'il y a des travailleurs qui ne peuvent pas obtenir leur
certificat C, point, et qui, en appel, pourraient obtenir un certificat A, B ou
C, il est très clair que ça pourrait influer sur le nombre de
votants. Maintenant, j'ai l'impression que ça risque d'être assez
marginal, étant donné que les A, les B et les C, dans la mesure
où ils auront fait 300 heures, auront le droit de vote. Au bout du
compte, c'est un impact minime.
M. Brochu: Merci.
Le Président (M. Laplante): 48b?
M. Brochu: Adopté, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 48c?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
M. Brochu: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 48d?
M. Brochu: A 48d, on parle des commissaires adjoints. Combien le
législateur a-t-il l'intention de nommer de commissaires adjoints?
M. Johnson: Le ministre entend-il... Cela va dépendre de
la demande, en fait.
M. Brochu: Est-ce que ça va selon les régions du
Québec?
M. Johnson: En pratique, c'est ça que ça va vouloir
dire dans bien des cas. Dans certains cas, ça peut être des gens,
par exemple, près du siège social de l'office, si ce sont des
problèmes de vérification au niveau des listes elles-mêmes.
Donc, en pratique, ça pourrait être des gens qui sont à
Montréal. Dans d'autres cas, qu'il y ait un problème au niveau de
l'entrée des données à l'office, d'heures vraiment
accomplies en région, on présume que nos commissaires adjoints
vont être itinérants à cette fin. Maintenant, le nombre
n'est pas fixé. Il peut être extrêmement variable. Il se
peut très bien qu'on ait besoin de très peu de commissaires
adjoints au travail, comme il se peut très bien qu'on en ait besoin de
beaucoup à certaines périodes.
M. Brochu: Cela va, quant à moi, M. le Président.
Adopté.
Mme Lavoie-Roux: Cela va.
Le Président (M. Laplante): 48e?
M. Brochu: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 48f?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 48g?
Mme Lavoie-Roux: Avec des modifications.
Le Président (M. Laplante): Avec des modifications.
48h?
M. Brochu: M. le Président, à 48g, si vous me
permettez, on indique, dans le dernier paragraphe, qu'un employeur peut
également en appeler au commissaire au placement d'une telle
décision dans le cas où il a intérêt à ce
qu'une personne détienne un certificat". De son côté,
est-ce que le syndicat peut en appeler? Est-ce que la contrepartie est
prévue?
M. Johnson: Non, c'est le salarié ou encore son employeur
dans la mesure où il peut prouver
qu'il a intérêt. Il n'y a pas d'appel d'associations de
salariés dans cette matière, pas plus, d'ailleurs, qu'il n'y a
d'appel d'associations d'employeurs dans ce cas-là. C'est vraiment dans
le cas particulier de M. Untel ou de l'entreprise Unetelle. Je pense que c'est
bien important qu'on sorte ça du champ de ce que pourraient être
des batailles.
L'autre dimension, ce sont les certificats spéciaux qui
pourraient être émis par l'OCQ pour un tas de raisons. Pour une
main-d'oeuvre très particulière dans un type bien précis
où il y a pénurie soudainement dans ce secteur au Québec,
il va falloir des certificats spéciaux à ces gens-là.
L'employeur, lui, a intérêt, évidemment, à aller en
appel, si on ne veut pas donner de certificat spécial. On va lui
permettre de le faire.
M. Brochu: D'accord. Adopté, M. le Président. Le
Président (M. Laplante): 48h? 48i? 48j? Mme Lavoie-Roux:
Adopté. Le Président (M. Laplante): 48k? 48l? 48m?
Mme Lavoie-Roux: J'aurais une question, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il me semble que 48m
soustrait ou enlève aux justiciables le pouvoir de se prévaloir
de la protection des tribunaux supérieurs, puisqu'on dit qu'en vertu des
articles 834 à 850 du Code de procédure civile ils ne peuvent pas
l'utiliser.
Quel est le fondement d'une...
M. Johnson: Oui, en fait, sans faire une longue histoire, parce
que cela a fait l'objet de traités par Me Dussault et bien d'autres,
c'est tout le problème du tribunal de droit commun qu'est la Cour
supérieure. C'est ce qu'on appelle la clause privative qu'on rencontre
dans beaucoup de lois, qui, dans certains cas, a été
déclarée inconstitutionnelle, dans d'autres cas, n'a pas
été déclarée anticonstitutionnelle. Cependant,
cette clause privative dont on n'aurait pas besoin si on avait
l'équivalent, par exemple, d'un conseil d'Etat qui S'occupe des
problèmes de juridiction entre les différents tribunaux,
n'empêche jamais la Cour supérieure d'intervenir au nom de
certains principes comme, par exemple, la règle audi alteram partem. On
dit: La règle générale, c'est que la décision du
commissaire adjoint est sans appel. Cependant, si le commissaire adjoint n'a
pas suivi les règles normales de "justice naturelle" (entre guillemets),
comme le dit la jurisprudence pour rendre sa décision, il y a
toujours une possibilité pour le salarié d'aller vers la Cour
supérieure, qui déclarera que cette personne, qui est le
commissaire adjoint et qui a des pouvoirs quasi judiciaires, n'a pas
respecté les règles élémentaires de la justice. A
ce moment-là, il y a possibilité de bref d'évocation en
Cour supérieure.
En fait, c'est une formule assez consacrée dans notre droit
administratif, dans ce sens; on sait que, dans certains cas, elle a
été mise en péril, dans d'autre non, mais ce n'est rien
d'anormal. Cela existe depuis des années au Québec qu'on met de
telles clauses privatives; en d'autres termes, le message est envoyé
là avec l'espoir que la jurisprudence change jusqu'en Cour
suprême, et elle a évolué depuis 100 ans,
c'est-à-dire que la Cour supérieure doit conserver, quant
à ses décisions strictement un rôle d'intervention, si
justice ne semble pas avoir été faite ou si justice n'a pas
été faite dans les moyens qu'on a pris pour rendre justice, et
non pas quant au fond du problème.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Vous me permettrez,
pour poser ma question, de revenir à l'article 48h, mais elle s'inscrit
à l'article 48h, 48i et 48j également. On dit à l'article
48h: "Une personne qui désire se prévaloir du recours
prévu par l'article 48g doit, au préalable, adresser par
écrit une plainte à l'office." Pourquoi passer par l'office,
pourquoi faire ce détour plutôt que d'aller directement loger une
plainte au commissaire? Est-ce que c'est seulement pour permettre à
l'office de se ressaisir ou...?
M. Johnson: C'est cela. C'est pour permettre ce qu'on appelle le
droit de révision. Par exemple, disons que l'office a émis un
certificat B à quelqu'un parce que, sur le plan de l'informatique ou au
niveau de la carte d'émission, le chiffre 1 ne sortait pas dans la
colonne ce jour-là, comme cela peut arriver dans toutes les
opérations mécanographiques. On dit: Monsieur a 850 heures, au
lieu d'inscrire 1850 heures sur sa carte. C'est la différence entre
avoir un certificat A et un certificat B. Ce qu'on dit, c'est qu'il doit
d'abord aviser l'office qui va en appel et l'office a donc un délai pour
réviser sa décision et il peut se rendre compte qu'il a fait une
erreur mécanique et la corriger immédiatement sans qu'il y ait
besoin d'une audition au niveau du commissaire adjoint. C'est simplement pour
accélérer le processus si le règlement peut se faire sur
une base de détail.
Le Président (M. Laplante): L'article 48m, adopté.
L'article 48n adopté. Alors, l'article 11 est adopté. J'appelle
l'article 8 du projet de loi 52, qui sera dorénavant l'article 12. M. le
ministre.
M. Johnson: M. le Président, l'article 12 se lirait comme
suit: Remplacer l'article 8 du projet de loi par le suivant: 12. "Ladite loi
est modifiée par l'insertion, après l'article 55a, du suivant:
55b. "Quiconque embauche un salarié contrairement à un
règlement adopté en vertu de l'article 32 ou garde au travail ce
salarié commet une infraction et est passible pour chaque jour ou partie
de jour que dure l'infraction, en outre des frais, des amendes prévues
à l'article 56."
La seule modification qu'on y apporte, c'est pour les fins de la langue
française, où nous
remplaçons l'expression "à son emploi" par "au travail";
"garde à son emploi" par "garde au travail".
Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 13 est
adopté?
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: A l'article 12, à la question du quiconque, il
me semble qu'on jette le filet un peu trop largement dans la question des
pénalités relativement à l'application d'une loi qui est
finalement presque d'ordre privé beaucoup plus que d'ordre public.
Quelqu'un, un particulier, pour ses propres fins, va engager quelqu'un pour
peinturer sa cuisine ou réparer une gouttière du toit, et, dans
certaines circonstances, il va enfreindre les règles relatives au
placement dans l'industrie de la construction. Il peut recevoir sur la
tête des amendes. Je comprends très bien qu'un entrepreneur, celui
qui gagne sa vie à engager des gens dans l'industrie de la construction
soit tenu à respecter des priorités, etc., mais il reste qu'il ne
faut quand même pas bureaucratiser l'existence de tout le monde et
soumettre des gens qui de bonne foi vont engager un bonhomme pour tondn leur
gazon et qui à l'occasion va faire un travail de réparation,
etc., une espèce d'homme à tout faire qui malgré tout
représente une réalité sociale dans les petites
municipalités, dans les petites localités en particulier. On se
met à se poser des questions. Est-ce qu'il n'y a pas une amende de $500
si on fait ceci ou si on fait cela? Cela a déjà causé
l'application de la loi et des règles du décret sur la
construction des situations absolument aberrantes à ce point de
vue-là où des gens de bonne foi, qui construisaient pour leurs
propres fins à eux, ce n'étaient pas des entrepreneurs,
c'étaient les utilisateurs éventuels des services, se sont vus
l'objet de harassement de la part de l'inspecteur de l'Office de la
construction, ae pénalités et d'amendes. Il me semble que ce
n'est pas pour ces fins-là qu'a été faite la loi 290 et
ses amendements successifs, et qu'on dépasse les objectifs originaux
quand on devient aussi tatillon. Alors qu'on sait et tout le monde sait quels
sont les abus de toutes sortes patronaux, syndicaux, gouvernementaux qui ont
été commis dans l'industrie de la construction, il devient odieux
pour le simple citoyen qui engage un bonhomme dans un village pour l'aider
à faire des travaux, etc., tout à coup de se rendre compte qu'il
est en contravention des lois et que non seulement il a une amende, mais il
faut qu'il paie un supplément de salaire à des gens qui n'ont pas
travaillé ou je ne sais quoi. Cela ne correspond pas à une
réalité. Cela dépasse l'objectif voulu il me semble, par
le législateur et cela me fait peur quand on dit: Quiconque... Je
comprends que quiconque est censé connaître la loi; mais je ne
sais pas combien de membres de l'Assemblée nationale ont lu et
comprennent le décret de la construction et le règlement sur le
placement. Je ferais un pari qu'il n'y en a pas un seul, à part le
ministre et l'adjoint parlementaire et peut-être quelques autres, en
espérant me trouver au nombre de ceux-là, M. le Président,
mais encore que je ne proclamerai pas pouvoir expliquer à tout le monde
toutes les dispositions de ce règlement et d'en comprendre
véritablement le sens. Il faut être des spécialistes et il
me semble que les pénalités, les amendes et tout cela ne devrait
pas s'appliquer à ceux qui ne sont pas professionnellement
engagés dans l'industrie soit comme travailleurs soit comme patrons.
Je comprends qu'il y a des risques que des gens "traficottent ' et tout
cela. Je comprends qu'il y a des risques, mais il y a quand même un
principe en cause. Est-ce que des citoyens ordinaires, de bonne foi... et on
doit présumer de la bonne foi de façon générale, il
ne faut pas, chaque fois qu on regarde une loi se dire: Est-ce qu'il n'y a pas
quelqu'un, membre de la mafia, qui va vouloir bénéficier de cela?
Peut-être. Mais j'aime mieux qu'il y en ait dix qui en
bénéficient et qu'il n'y ait pas 10 000 citoyens de bonne foi qui
soient pénalisés. C'est une balance d'avantages et
d'inconvénients. Je pense qu'il y a des gens de bonne foi, j'en connais
et j'en ai rencontré qui se sont fait pincer le doigt entre I arbre et
lécorce alors que la loi ne leur était pas destinée. Il ne
leur était jamais même venu à l'idée de la lire,
évidemment, pensant que quand quelqu'un offre ses services et accepte
les conditions qu'il est légalement autorisé de le faire et qu'on
n'encourt pas des pénalités et des amendes en l'engageant aux
conditions qu'il accepte, et qui n'étaient pas, de toute façon,
des conditions odieuses et susceptibles d'être qualifiées
d'exploitation de qui que ce soit. Cela s'est produit et il me semble que le
plus tôt on pourrait revenir à une situation où les gens
sont professionnellement dans le métier, dans le milieu de la
construction respectent certaines règles et que si les autres ne les
connaissent pas, ils n'ont pas à les respecter. S'ils s'adressent
à un entrepreneur, l'entrepreneur doit le savoir, s'ils s'adressent
à un travailleur, le travailleur doit le savoir, il doit être
responsable quant à lui du respect des lois qui le régissent,
mais personne d'autre. (17 heures)
M. Johnson: M. le Président, je comprends la
préoccupation du député de Saint-Laurent. D'ailleurs cela
a tait l'objet d'une discussion d'à peu près deux heures lors
d'une question avec débat soulevée par le député de
Beauce-Sud, récemment. Je comprends que ce n'est pas une excuse et,
encore une fois, j'ai dit qu'il avait un caractère transitoire aux
dispositions de cette loi, mais la loi, à son origine, en 1968,
remodifiée en 1973 et en 1975, a toujours, pour toutes les infractions,
prévu que quiconque enfreint un règlement de l'office ou d'une
disposition de la loi, et à cet effet, on a répété
la formule, en étant conscient qu'on peut dire que le citoyen de bonne
foi, à Saint-Nazaire-d'Acton, qui décide d'engager quelqu'un pour
réparer son sous-sol, pendant quinze jours, qui engage quelqu'un qui a
un certificat B, techni-
quement s'expose aux pénalités prévues dans le
règlement pour chaque jour d'infraction, même s'il était de
bonne foi. Techniquement d'accord et c'est l'expression, mais on aurait pu
faire le même raisonnement pour chacune des clauses pénales de la
loi 290, depuis 1968.
Chaque fois que quelqu'un engageait une personne chez lui, en la payant
à un taux inférieur au décret, les dispositions
s'appliquaient toujours. En ce sens, je vais être sensible à ce
que me dit le député de Saint-Laurent et je me dis qu'un jour, il
va falloir qu'on ait un débat de fond sur la question des artisans
versus les salariés. L'Ontario pense l'avoir réglée en
partie et c'est ce que nous suggérait le député de
Beauce-Sud, que les dispositions applicables au secteur domiciliaire soient
différentes des dispositions applicables au secteur industriel; c'est le
cas de l'Ontario.
Je pense qu'il faudra qu'on ait des débats de fond
là-dessus. Je ne pense pas qu'à l'occasion de cette loi, on
puisse vider la question. Je suis bien conscient de ça et si l'article
55b était quelque chose de nouveau, je comprendrais très bien et
j'accepterais finalement les objections du député de
Saint-Laurent, et je retirerais la notion de quiconque, et je mettrais
peut-être l'employeur professionnel, etc. Mais c'est la formule
consacrée pour tous les articles 54 et suivants de la loi
elle-même. Donc, les citoyens ont toujours été couverts.
Effectivement, quelqu'un qui employait un ouvrier, de bonne foi, pour faire
refaire son sous-sol et le payait à un taux inférieur au
décret, s'exposait à ce type d'amendes. Ce qu'on dit, c'est la
même chose quant au règlement de placement et quant à
toutes les autres.
M. Forget: Oui, sauf qu'il est encore plus difficile à
comprendre pour un non impliqué que des taux de salaire les taux
de salaire... c'est déjà compliqué, parce qu'il y a
tellement de catégories mais les certificats A et B, ça
commence à être compliqué à comprendre pour ceux qui
ne sont pas dans l'industrie. Mais je suis malgré tout content du fait
que le ministre partage un peu nos préoccupations de ce
côté. Ce qui est arrivé au niveau des artisans, depuis
1968, à mon avis, est une véritable tragédie. C'est
disparu, on est soit salarié ou on est strictement un travailleur ou
alors, il y en a un certain nombre qui sont devenus chômeurs, parce
qu'ils ne peuvent pas fonctionner en dehors d'un certain encadrement que
permettait le fonctionnement de petits groupes.
Il faut être une grosse entreprise ou un individu, il n'y a plus
rien entre les deux. On sait très bien que la réalité
sociale, dans certains coins, peut-être pas dans les grandes villes, fait
que si certains individus n'ont pas l'encadrement pour se trouver des emplois,
de façon très concrète ça ne passe pas par
les bureaux de placement ils sont incapables de se trouver de l'emploi.
Ils n'ont pas de patrons, donc ils n'ont pas d'emplois. C'est aussi ridicule
que ça peut-être, mais c'est la nature humaine qui fonctionne
comme ça.
Le plus tôt on pourra corriger une telle situation, le mieux ce
sera. Il ne faut pas oublier une chose, c'est que la loi 290 est une loi
d'exception par rapport au Code du travail. On dit que pour ces travailleurs,
le Code du travail ne s'applique pas. A mon avis, on ne devrait pas avoir, dans
la Loi régissant les relations de travail dans l'industrie de la
construction, des dispositions d'une nature, je ne dis pas exactement les
mêmes dispositions, mais des dispositions d'une nature différente
de celles qu'on pourrait envisager d'inclure dans un Code du travail.
Or, des dispositions sur des pénalités comme
celles-là, si on voulait les transcrire dans le Code du travail, cela
aurait l'équivalent suivant, qu'on décréterait que
quiconque achète des produits qui ne portent pas l'étiquette
syndicale, est passible des amendes prévues au Code du travail. Parce
que s'il y a une certification, il faut reconnaître ça et il faut
acheter des produits qui portent l'étiquette syndicale. Sinon, on a $500
d'amende, plus deux fois le prix qu'on a payé, enfin le genre de choses
qui se produit dans l'industrie de la construction, non seulement on paye le
produit, on le paye une deuxième fois, $500 d'amende, etc. C'est
vraiment oppressif comme situation. Je pense bien qu'il n'y a personne,
sérieusement, à jeun, qui pourrait proposer qu'on inclue dans le
Code du travail une disposition de cette nature. Si syndicaliste soit-on, je
pense qu'on n'irait pas jusqu'à dire: N'importe qui allant dans un
magasin doit d'abord découvrir l'étiquette syndicale et,
après seulement, s'il y en a une, doit s'en porter acquéreur;
sinon, il commet une infraction.
Je pense que personne n'a jamais fait cette suggestion et pourtant, on
la retrouve dans la loi 290, ou son équivalent. C'est d'autant moins
nécessaire dans ce secteur-là qu'on a donné la
syndicalisation, on l'a décrétée par la loi. On a
donné des instruments extrêmement puissants aux organismes
syndicaux pour défendre les travailleurs. Il ne me semble pas qu'on
doive aller plus loin que cela.
M. Johnson: Cependant, si le député de
Saint-Laurent veut évoquer ce débat de fond, je pourrais lui dire
qu'une étude récente faite en Californie a démontré
que la croissance des entrepreneurs autonomes, des petites entreprises, qui
s'enregistrent auprès de l'équivalent de notre Régie des
entreprises de construction, par exemple, au Québec, est proportionnelle
à une diminution du taux de l'activité dans le secteur de la
construction.
Je m'explique. Si la construction connaît un ralentissement, il y
a une tendance, pour un tas de salariés, à se retirer du statut
de salarié, à former une entreprise, à faire des contrats
à forfait dont l'équivalent est inférieur à ce que
constitueraient les émoluments qu'ils recevraient au taux du
décret, au taux des conventions collectives.
C'est le genre de situation qu'on pourrait vivre. C'est le grand dilemme
face à la question des artisans. D'une certaine façon, ils
peuvent être dans une période de crise économique,
où l'ensemble des travailleurs de la construction subissent une
diminution de l'activité dans la construction, ils peuvent, en plus de
cette situation qui est
déjà difficile dans certains cas, être
carrément des coupe-gorge au niveau des prix et, finalement, susciter
une diminution de l'activité par ceux qui suscitent beaucoup
d'emplois.
C'est toujours de chercher cet équilibre qu'il est difficile
à faire. La solution, est-ce que c'est de faire en sorte que les
artisans... Que ce soit tout I'un ou tout l'autre. Ou on pratique un
métier dans la construction, on s'inscrit à la Régie des
entreprises de construction, mais les heures ne sont jamais comptées
pour que cette personne soit considérée comme un salarié
de la construction, au sens de la loi; ou encore, c'est une situation un peu
comme celle que nous décrit le député de Saint-Laurent,
où on permet effectivement aux artisans de vaquer librement à
leur travail. C'est toujours une décision que de trancher quant aux
effets collectifs d'une telle décision. Je comprends que, pour tel
individu en particulier, cela peut paraître inique, mais il a toujours la
possibilité de se former en entreprise, de payer $250 par année
à la Régie des entreprises de construction et d'être
considéré comme un entrepreneur pour ces fins-là.
Peut-être y a-t-il quelque chose à faire du
côté de la Régie des entreprises de construction pour le
baliser. Il faut être conscient qu'on tranche dans un sens ou dans
l'autre. Si on a le statu quo, c'est une difficulté, c'est vrai, pour
les citoyens d'avoir recours à des artisans et c'est peut-être une
pression inflationniste également sur l'ensemble de l'économie,
quand on connaît les taux au niveau du décret.
Mais le contraire amènerait peut-être une situation injuste
pour l'ensemble des salariés qui ont vraiment un statut de
salariés et qui travaillent vraiment pour des employeurs.
Le Président (M. Laplante): Article 12.
M. Forget: M. le Président, on tranche toujours un
dilemme, de toute façon. On ne le laisse jamais là sur le mur. On
le tranche. Et, dans le moment, on le tranche dans le sens suivant. C'est que,
dans le fond, il y a le dilemme entre des emplois d'artisans et des emplois de
salariés, mais il y a aussi le dilemme entre les emplois de
salariés et le chômage.
Ceci ne fait que contribuer à accentuer les
caractéristiques cycliques de l'industrie. Le mal dont on se plaint
fréquemment et auquel on veut remédier par toutes sortes de
solutions bureaucratiques, la plupart du temps, qui n'ont, à mon avis,
aucune chance de succès, s'exprime de cette façon; un
chômage élevé, dans des périodes de ralentissement
de la demande pour les travailleurs de la construction.
Le choix qu'on fait, c'est entre ceux qui, à cause de leur
ancienneté, à cause d'un tas de facteurs, parfois la chance,
réussissent à demeurer actifs pendant les périodes de
creux par rapport à ceux qui sont complètement
évincés en devenant des chômeurs. Je ne sais pas quel est
le meilleur dilemme, mais, de toute façon, on le tranche
inévitablement. Dans le moment, on le tranche dans le fond en faveur de
ceux qui restent dans l'industrie dans les moments de creux et contre ceux qui
sont projetés dans le chômage à ces moments-là.
Est-ce qu'on fait alors un meilleur choix? Je suis loin d'être convaincu.
De toute façon, j'aimerais bien savoir ce que les chômeurs en
pensent.
Il faut dire que, avec les règles actuelles sur la
représentativité et tout cela, on ne s'assure pas très
bien que les chômeurs aient le droit d'en discuter beaucoup, parce que ce
sont ceux qui ont travaillé qui vont s'exprimer et ce sont
également ceux qui travaillent dans les périodes de creux qui
vont déterminer les mandats de négociation et la forme des
conventions collectives.
Je sais très bien que, dans une industrie où je serais
permanent alors qu'il y en a d'autres qui ne sont pas permanents, je serais
porté à favoriser une augmentation continue des conditions de
travail, même si cela devait rendre un peu moins probable la
réintégration dans la main-d'oeuvre active de ceux qui en sont
temporairement exclus. Le choix serait relativement facile à faire et le
dilemme serait rapidement tranché.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Richmond.
M. Brochu: Oui, M. le Président. Je voudrais savoir du
ministre si, par son amendement, il s'agit de poursuites prises en vertu de la
Loi des poursuites sommaires devant les tribunaux de droit commun?
M. Johnson: Oui.
M. Brochu: On sait un peu les problèmes qui se posent de
ce côté-là, comment les rôles sont chargés et
tout ce que cela amène de délais. N avez-vous pas
déjà pensé à confier ces pouvoirs au Tribunal du
travail?
M. Johnson: Oui. Je ne veux pas donner la réponse des
solutions globales. Les délais, de façon générale,
sont assez longs dans l'ensemble des juridictions, c'est bien connu. Je veux
dire qu'on est un peuple à tribunal.
M. Brochu: On ne pourrait pas inviter à un moment
donné par exemple je ne le sais pas, je ne dis pas que cela se
fait un patron à garder un employé en disant: Je vais
payer l'amende au bout d'un an ou deux ans.
M. Johnson: Oui, voyez-vous, c'est une hypothèse qui a
été posée d'ailleurs par le président de la
Fédération nationale du bâtiment et du bois, M. Bourdon. Je
vois assez mal l'employeur qui voudrait, de mauvaise foi, décider qu'il
engage cinq agriculteurs sur un chantier et qui ne se plie pas à l'avis
qui lui est donné qu'il faudrait qu'il engage quelqu'un d'autre ou de
risquer de payer $500 par tête d'amende par jour d'infraction. C'est
assez "désincitatif". On pourrait évidemment pousser la
caricature au bout et dire qu'une grande entre-
prise engagerait cinquante personnes qui n'ont pas un certificat
adéquat à la baie James sur un chantier pendant un an et,
ultimement, si tu fais le cumul des jours possibles d'infraction, cela donne $6
millions au bout de l'année. A ce moment-là, on dit: Le juge ne
condamnera jamais l'entreprise à payer $6 millions, parce qu'il ne
voudra pas la mettre en faillite. Mais je pense que la loi est
"désincitative" à passer à côté du
règlement, et je ne vois pas vraiment l'alternative qu'il y a à
cela. L'alternative, ce serait effectivement de forcer la réembauche de
quelqu'un. A quel moment intervient cette décision? Qui était
disponible ce jour-là, à cette heure précise sur le
tableau ou sur l'écran cathodique de référence de l'OCQ,
sur le tableau syndical du placement? Il devient bien difficile de trancher
cela dans le temps.
Prenons l'exemple où on a trois personnes qui sont
impliquées, un salarié qui est de catégorie C dans une
région donnée, un autre qui est de catégorie A qui n'est
pas placé et un autre qui est de catégorie A également,
qui n'est pas placé non plus et qui a moins d'heures que le
précédent. On identifie qu'il y a un C sur tel chantier, qu'il ne
devrait pas y être. On avise l'employeur qu'il devrait s'en
débarrasser. La technique c'est qu'on va le remplacer.
Dans les 24 heures qui suivent, peut-être que le premier A dont
j'ai parlé est déjà placé ailleurs. Il travaille ou
il va ailleurs pour trois jours, tandis que le A avec moins d'heures qui, lui,
était le deuxième sur la liste sait que s'il va remplacer C, il
en a pour trois semaines de travail. Ne pensez-vous pas qu'on va avoir à
un moment donné un effet à rebondissement? On va se demander
où cela commence. C'est un peu la poule et l'oeuf quand au nombre
d'heures travaillées. Je vois vraiment beaucoup de difficultés,
en pratique, à imposer ce type d'arbitrage. Je vois plutôt des
sanctions extrêmement sévères à ceux qui
dérogent au règlement. (17 h 15)
M. Brochu: Ma question allait surtout dans le sens d'être
expéditifs. Est-ce qu'il n'y aurait pas plus de chance que ce soit plus
expéditif si c'était spécifiquement au Tribunal du travail
de trancher ou de prendre position plutôt qu'aux tribunaux de droit
commun où il y a déjà un engorgement?
M. Johnson: S'il n'y a pas plus de juges qu'il y en a là
en ce moment, je pense que ce ne serait pas tellement plus expéditif. Le
Tribunal du travail est un des tribunaux québécois qui
fonctionnent très bien; il a conservé sa
crédibilité auprès de l'ensemble des intervenants. En
pratique, c'est le milieu des relations de travail tant patronal que syndical.
C'est un tribunal qui a un effectif relativement limité, qui devrait en
avoir plus. Je sais que le juge en chef aimerait en voir plus. Pour le moment,
il a un effectif limité. Cela m'apparaît difficile.
Eventuellement, dans une réforme du Tribunal du travail, on va
peut-être être appelés à parler un peu plus tard,
d'ici un an ou deux, de choses qui touchent, par exemple, l'injonction dans les
conflits de travail, etc., et d'une extension de la juridiction du Tribunal du
travail. On pourra être appelés à créer de nouvelles
divisions au tribunal ou encore à augmenter son effectif dans un premier
temps, à créer de nouvelles divisions territoriales, etc., mais
avant que cela soit fait, je ne vois vraiment pas l'utilité d'envoyer de
telles sanctions pénales aux juges du Tribunal du travail.
M. Brochu: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 12, adopté?
Maintenant, nous retournons à la page 1...
M. Johnson: II y a les articles 13 et 14 qui reprennent les
articles 9 et 10 du projet.
Le Président (M. Laplante): C'est que je voulais retourner
à l'article qui n'était pas adopté.
M. Johnson: Oui. Est-ce qu'on pourrait faire cela à la
fin?
Le Président (M. Laplante): Oui, je n'ai pas
d'objection.
M. Johnson: Oui. Est-ce qu'on pourrait continuer aux articles 9
et 10?
Le Président (M. Laplante): Dans ce cas, on va appeler
l'article 9 du projet de loi 52, qui devient l'article 13.
M. Johnson: C'est cela. Les sommes requises pour la mise en
application du chapitre IX de ladite loi sont prises, pour l'année
financière 1978/79, à même le fonds consolidé du
revenu et, pour les années financières subséquentes,
à même les deniers accordés annuellement à cette fin
par la Législature.
Des Voix: Adopté.
M. Forget: Quelle dépense additionnelle implique ce projet
de loi? Est-ce seulement des règles de procédures
différentes? Il y a la procédure d'appel?
M. Johnson: Le commissaire au placement. M. Forget: Le
commissaire au placement.
Le Président (M. Laplante): Article 13, adopté?
L'article 10 de la loi 52 devient l'article 14. Adopté?
M. Forget: Adopté.
M. Johnson: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Adopté.
M. Johnson: C'est cela. On retourne...
Le Président (M. Laplante): Nous revenons à la page
7, à l'article 6 renuméroté.
M. Johnson: Est-ce 5 ou 6? L'article 6, c'est cela. Le nouvel
article 6, si on veut, l'ancien article 3... Sur la question de l'article 7a...
Est-ce qu'on a adopté la question de la période de scrutin qui
doit se dérouler au moins sur cinq jours?
Le Président (M. Laplante): Oui, c'est adopté.
M. Johnson: Alors, c'est seulement la question de la redondance
possible ou de l'imprécision. Les juristes m'affirment, après
consultation des officiers légistes du comité de
législation, que si nous allions préciser à l'article 7d,
il faudrait également le faire à trois autres endroits, qu'il
s'agit d'une redondance et que ce qu'on retrouve en ce moment à
l'article 7d... Ce n'est pas limpide, mais on m'assure... Est-ce qu'on peut
suspendre la séance deux minutes?
Le Président (M. Laplante): On va suspendre la
séance deux minutes.
(Suspension de la séance à 17 h 18)
Reprise de la séance à 17 h 20
M. Johnson: Alors, je proposerais peut-être au
député de Saint-Laurent, encore une fois, les législateurs
se mêlent de faire de la législation, qu'on dise, pour que ce soit
plus clair, 7d: "La représentativité d'une association de
salariés correspond au pourcentage que représente le nombre de
salariés qui ont fait, conformément à l'article 7a, leur
choix en faveur de cette association par rapport au nombre total de
salariés qui ont fait ce choix".
M. Forget: Excellent!
M. Johnson: Et, finalement, on ne serait pas limité
à 7a, premier paragraphe, mais la notion de choix se retrouve dans les
trois.
Alors, je répète, l'article se lirait comme suit: 7d: "La
représentativité d'une association de salariés correspond
au pourcentage que représente le nombre de salariés qui ont fait,
conformément à l'article 7a, leur choix en faveur de cette
association par rapport au nombre total des salariés qui ont fait leur
choix". Donc, on supprime les mots "connaître à l'office " et le
mot "connaître" une ligne plus bas. D'accord?
M. Forget: C'est très élégant, M. le
ministre.
Le Président (M. Laplante): Vous faites disparaître
seulement deux mots, vous n'en ajoutez pas?
M. Johnson: Trois, quatre mots.
M. Chevrette: dites donc "adopté" tout de suite.
Le Président (M. Laplante): "Connaître à
l'Office" et "connaître".
M. Johnson: ... et "connaître" à la dernière
ligne, d'accord? M. le Président, est-ce que l'ensemble du projet de loi
no 52 est adopté? Oui?
Le Président (M. Laplante): L'ensemble du projet de loi no
52 est-il adopté avec les amendements?
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): Oui, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: ... c'est parce que le ministre avait dit qu'il
faudrait des amendements semblables dans les autres paragraphes. Est-ce que la
même simplification serait une solution dans les autres paragraphes?
M. Johnson: Non, ce n'est pas le même mot.
M. Forget: Sûrement pas! Le choix "exprimé" dans 7b?
C'est le choix exprimé ou réputé exprimé.
M. Johnson: ...oui...
M. Forget: Le choix fait, au lieu de "exprimé", dans
7b.
M. Chevrette: Pourquoi pas "exprimé"? Cela se dit
très bien.
M. Forget: Oui, mais, dans certains cas, il n'est pas
exprimé, justement. Si le législateur dit "exprimé", ce
n'est pas une expression de choix.
M. Chevrette: Quand il est exprimé, il est fait.
M. Forget: Mais quand il est fait, il n'est pas
nécessairement exprimé, en vertu de 7a. Il est fait en restant
à domicile.
M. Chevrette: Vous avez raison. Il y avait beaucoup
d'électeurs qui avaient fait leur choix mais qui ne l'avaient pas encore
exprimé le 14 novembre 1976. C'est le 15 qu'ils l'ont exprimé,
vous avez raison. Je comprends vite quand on m'explique...
M. Forget: Cela ne veut pas dire qu'ils ne le regrettent pas
après.
M. Johnson: On me dit qu'il n'y a aucune autre
interprétation possible de 7b.
M. Forget: ... M. le Président...
M. Johnson: Alors, à la rigueur, par l'absurde,
d'ailleurs, comme bien des choses dans l'ensemble de la loi 290, on peut
arriver à une réponse.
Le Président (M. Laplante): Le projet de loi 52 est
adopté avec amendements.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. Johnson:
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant le projet
de loi 59, Loi modifiant le Code du travail.
M. Johnson: M. le Président, est-ce que nous pourrions
suspendre pour cinq minutes?
Le Président (M. Laplante): Suspension pour cinq
minutes.
M. Forget: Même pour une demi-heure! (Suspension de la
séance à 17 h 26)
Reprise de la séance à 17 h 41
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs! Reprise
des travaux.
Projet de loi no 59
M. le ministre est prêt? On appelle le projet de loi 59, Loi
modifiant le Code du travail. M. le ministre.
Remarques préliminaires
M. Johnson: M. le Président, je ne sais pas si le
député de Saint-Laurent et le député de Richmond
seraient d'accord pour que je me limite considérablement dans mon
exposé préliminaire ou est-ce qu'ils ont l'intention de faire des
exposés? J'allais me limiter à procéder à
l'étude article par article. J'aurai cependant quelques amendements. Je
sais que du côté de l'Opposition, en tout cas du côté
de l'Opposition libérale il y a des projets d'amendement dont je ne
connais pas la teneur. Du côté de l'Union Nationale...
M. Brochu: Nous avons des questions, nous n'avons pas
d'amendement. Mais en ce qui nous concerne, je pense que les discours de
deuxième lecture ont été faits sur ce projet de loi
à l'Assemblée nationale. On serait prêt à passer
à l'étude article par article.
M. Forget: M. le Président, puisque le ministre me pose
une question, je vais dire que nous avons des amendements à proposer et,
de plus, j'aurais quelques remarques préliminaires qui ne sont qu'un
modeste effort pour compenser le caractère fort discret, presque occulte
même du débat de deuxième lecture qui est intervenu entre
minuit et 1 h 30 du matin, sans doute une chose qui fait honneur à nos
traditions parlementaires sur le plan de l'assiduité et de la
ténacité des membres de l'Assemblée de travailler à
une heure aussi tardive, mais qui ne fait pas honneur à
l'Assemblée nationale pour ce qui est de servir d'instrument
d'éducation du public, d'information politique. C'est à une heure
telle que les journalistes d'ailleurs s'en sont plaints, déclarant avoir
été dans l'impossibilité pratique de suivre les
débats et d'en connaître le déroulement. J'étais
moi-même empêché de participer par un engagement que j'avais
accepté il y a très longtemps de prononcer une conférence
à Montréal le même soir. Alors, je vais devoir compenser
quelque peu l'occultisme de ce débat de deuxième lecture au
moment de mes remarques préliminaires.
Le Président (M. Laplante): On n'y fera pas obstacle, M.
le député de Saint-Laurent. M. le ministre, si vous voulez
procéder à vos remarques.
M. Johnson: Je remercie le député de Saint-Laurent,
pour son cours sur les sciences occultes, c'est une des qualités que je
ne lui connaissais pas. Je pense que je vais lui permettre de faire son
exposé préliminaire assez rapidement. Je ne dis pas que tout a
été dit sur la question, mais beaucoup a été dit;
peut-être qu'en cours de route sur certains des articles j'aurai à
faire dans mes commentaires quelques remarques très précises et
je suis sûr que la foule des journalistes ici présente pourra
prendre bonne note des remarques du député de Saint-Laurent.
M. Forget: C'est de bonne guerre, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Je dois conclure que vous avez
terminé, M. le ministre?
M. Johnson: Oui. En fait, je veux bien laisser le
député de Saint-Laurent peut-être nous...
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Laurent...
M. Forget: C'est une générosité qui fait
honneur au ministre, M. le Président.
Même si les journalistes ne peuvent entendre, on va leur faire au
moins le compliment de supposer qu'ils peuvent lire, M. le Président. En
faisant cette hypothèse qui est peut-être audacieuse, étant
donné la masse de transcriptions de nos débats auxquels ils
doivent s'attaquer, il demeure qu'au moins, en s'adressant à la
postérité... il serait presque indécent de ma part de ne
pas faire de commentaires d'ordre général sur une loi qui cherche
à remplacer, tant bien que mal, une loi dont j'ai assumé la
paternité à un autre moment, pas tellement éloigné
d'ailleurs, en 1975, loi qui a été évidemment
éprouvée par l'expérience de façon fort
pénible, sur laquelle on porte un jugement, qu'on le veuille ou non,
lorsque nous abordons l'étude de ce projet de loi 59 qui vise
essentiellement le même objectif, qui est de garantir la prestation de
services essentiels dans le domaine de la santé et des services sociaux
au moment d'un conflit de travail.
Ce qui me frappe davantage dans ce projet de loi, c'est qu'on juge, du
côté gouvernemental, approprié de l'adopter. J'avais
l'impression le 15 novembre, le 16 novembre et le 17 novembre 1976, que le
Québec était entré dans une période nouvelle de son
histoire. Je peux à peine le dire sans m'étouffer, M. le
Président. Cette période nouvelle de son histoire serait
marquée par la paix sociale la plus sereine, la plus complète et
nous avons eu, cela a été une coïncidence presque
providentielle pour nous ramener les pieds sur terre, le malheur de vouloir
débattre à l'Assemblée nationale ce projet de loi le jour
même où les travaux de l'Assemblée nationale je
parle des débats en deuxième lecture étaient
interrompus et empêchés par une manifestation syndicale protestant
contre un autre projet de loi du gouvernement.
Je pense que si on voulait, de façon graphique, démontrer
que rien n'est changé au Québec, malheureusement...
Le Président (M. L-aplante): Je préférerais,
M. le député de Saint-Laurent, étant donné que le
débat d'ouverture est passé, que vous vous en teniez au projet de
loi 59, s'il y a possibilité, s'il vous plaît!
M. Forget: Si vous soulevez une question de
règlement...
Le Président (M. Laplante): Non, je ne veux pas être
formel là-dessus. C'est pour la bonne compréhension des
débats.
M. Forget: Puisque vous le mentionnez, vous me permettrez de
rappeler que la tradition des commissions parlementaires, au moment de
l'étude, article par article, veut que le débat autour de
l'article 1, le débat préliminaire à l'adoption de
l'article 1, soit très vaste, très large. Je pense que c'est dans
ce contexte que je faisais les remarques que je viens de faire,
puisqu'effectivement si nous avons des démonstrations autour d'un projet
de loi gouvernemental qui vont jusqu'à bloquer le fonctionnement du
Parlement, nous n'avons certainement pas un climat social qui soit
différent de ce qu'il a été dans le passé et c'est
seulement dans ce contexte là qu'on comprend mieux l'empressement qu'ont
démontré l'Assemblée nationale et le gouvernement, en
faisant adopter dès jeudi soir, dans la nuit, le jour même des
événements, un projet de loi qui vise à assurer la
prestation de services essentiels.
J'aurais aimé que cette perspective n'ait pas eu besoin
d'être évoquée, M. le Président, mais je suis
d'accord avec le principe du projet de loi, notant qu'il a été
approuvé en deuxième lecture. Je pense bien qu'il n'est pas
à l'encontre du règlement de dire que c'est absolument
nécessaire d'avoir une intervention législative pour garantir les
services essentiels, d'autant plus que, dans le secteur des services de
santé et des services sociaux auquel ces amendements vont s'appliquer,
les amendements au Code du travail, nous savons d'avance que les objectifs
salariaux du gouvernement sont tels qu'un affrontement est inévitable.
Cela fait presque un an et demi que le premier ministre et le ministre des
Finances nous rappellent, à toutes les occasions, que, dans le secteur
parapublic en particulier, le moment de l'austérité est
arrivé, qu'il est temps que le rythme de progression des salaires
ralentisse, de manière qu'on ne dépasse pas le rythme de
progression observé dans le secteur privé, ce qui, selon
certaines déclarations ministérielles, est déjà un
fait accompli.
Je suis donc tout à fait d'accord pour dire que, si une loi pour
garantir les services essentiels était nécessaire dans le
passé, elle est au moins aussi nécessaire et peut-être
même plus nécessaire pour l'avenir.
Comme on est d'accord sur les principes et comme le principe a
été adopté en deuxième lecture, il faut se tourner
vers les modalités d'application.
Je remarque un deuxième élément, c'est que,
même si on fait mine d'abroger la loi 253, dans le fond, on la conserve
dans la plupart de ses modalités essentielles. C'est d'ailleurs ce que
les représentants syndicaux et patronaux ont dit, en substance,
lorsqu'ils ont paru en commission parlementaire.
M. Johnson: Est-ce que le député de Saint-Laurent
me permet? Je l'ai entendu dire tout à l'heure que sa formation
politique avait voté pour en deuxième lecture. Est-ce exact?
M. Forget: Non, j'ai dit que l'Assemblée nationale avait
adopté le principe du projet de loi.
M. Johnson: J'avais cru comprendre que vous aviez dit que vous
aviez voté pour en deuxième lecture, ce qui n'est pas le cas.
M. Forget: Non. A moins que je n'aie commis un lapsus, M. le
Président. Ce serait vraiment un lapsus et je remercie le ministre de
l'avoir souligné, si c'était le cas. Il faudrait que je me
relise. Il me semble avoir dit que cela avait été approuvé
en principe par l'Assemblée nationale. J'aurais pu ajouter malgré
l'opposition de notre formation politique, entre autres.
Quoiqu'il en soit, il reste que ce projet de loi qui semble viser
à remplacer la loi 253 ne la remplace pas puisque tous les
éléments essentiels de cette loi sont conservés, sauf une
exception. Je devrais dire deux exceptions.
Il y a d'abord, sur le plan du mécanisme d'évaluation des
listes de services essentiels à maintenir, il y a un mécanisme
différent qui est mis sur pied non pas tellement par la façon,
puisqu'il dépend encore du président du Tribunal du travail ou du
juge en chef du Tribunal du travail de prendre l'initiative de sa formation,
mais par la composition, ou la formation professionnelle, ou la qualification
des gens qui seront appelés à porter des jugements au nom de
l'intérêt public sur les services essentiels.
La loi 253 comportait un recours à la liste des arbitres
dressée par le comité consultatif, le Conseil consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre. C'étaient des personnes et elles
continuent d'être des personnes qui sont acceptables à la partie
patronale comme à la partie syndicale dans le règlement des
conflits, dans le règlement des griefs. Ce sont des personnes qui ont,
plusieurs d'entre elles au moins, une assez bonne connaissance des relations de
travail dans le secteur des affaires sociales, dans le secteur des services de
santé et des services sociaux, pour être souvent appelées
à trancher des griefs dans ce secteur et aussi dans d'autres secteurs,
bien sûr.
Ce sont d'abord et avant tout des gens qui ont la capacité de
déceler, entre la position respective du patron et du syndicat, des
positions mitoyennes, raisonnables, applicables, par conséquent, au
moins a priori. S'il en était autrement, les parties
représentées au Conseil consultatif du travail auraient vite fait
d'éliminer leurs noms de la liste des arbitres.
Le mécanisme envisagé par le projet de loi 59, même
s'il est mis en action de la même façon que dans la loi 253 par le
Tribunal du travail, portera sur des individus, impliquera des individus qui ne
sont pas des arbitres, mais qui semblent... Puisque de ce
côté-là, le gouvernement ne s'est pas engagé de
façon très explicite malgré tout, par les réponses
qu'il a fournies en commission parlementaire, le ministres indiqué que
ce serait, par exemple, des médecins, des professionnels de la
santé, des infirmières et autres, des syndiqués,
j'imagine, des représentants du public en général, des
utilisateurs de services de santé et de services sociaux.
Ce qui risque de se produire par un tel choix sur le plan des moyens,
c'est qu'on va remplacer les gens qui avaient le sens du compromis, le sens de
ce qui est possible, de ce qui est réalisable par des gens qui ne voient
dans les services de santé et les services sociaux que l'aspect services
à la population. C'est fort louable. Si on peut donner à cette
intervention une efficacité quelconque, de toute façon, une
efficacité supérieure à celle des commissaires aux
services essentiels, mais c'est justement là où les questions se
posent. Dans quelle mesure ces gens qui sont des médecins, par exemple
il semble acquis qu'il va y avoir au moins quelques médecins dans
un tel conseil pour le maintien des services essentiels peuvent-ils
faire la part entre leur désir et les réalités? Le
désir du maintien le plus intégral possible des services de
santé et des services sociaux et la réalité d'un conflit
patronal-syndical où, malgré tout, ce qui est réalisable
est souvent en-deçà de ce qui est souhaitable.
J'ai l'impression que le gouvernement en quelque sorte, cherche à
rivaliser avec la loi 253 sur le plan des bonnes intentions, mais qu'il ne se
donne pas les moyens pour avoir plus de succès que la loi 253 en a eu,
et qu'en particulier, les avis qu'il recevra et qui seront communiqués
au public, de la part du conseil pour le maintien des services essentiels, ne
seront, s'il y a quelque chose d'encore plus extrême, que ce que le
rodage de la formule qui se trouvait dans la loi 253 aurait permis. Bien
sûr, on nous cite souvent, comme si c'était une objection
définitive, le fait que dans certains cas, certains commissaires ont pu
donner droit à des représentations patronales où on
accordait plus d'employés syndiqués qu'il n'y en a normalement,
par exemple, les fins de semaine.
Il est possible que cela se soit produit dans certains cas, mais il faut
bien se rendre compte du contexte dans lequel ces décisions ont
été rendues. C'était le contexte où on envisageait
d'abord une négociation de bonne foi entre les parties sur une entente
portant sur les services essentiels, où au moins, une intervention
auprès des commissaires sur les services essentiels des deux
côtés. Il est évident que dans un processus d'adversaires
devant un tribunal, il appartient au juge de trancher. On ne demande pas aux
parties d'être raisonnables. Enfin, on leur demande rarement. On s'y
attend encore moins. On s'attend que chacune des parties fasse la
démonstration maximale de sa thèse à elle, et on sait ce
qui arrive dans les procès ex parte, dans les procès où
une des parties refuse de se présenter et de défendre sa cause
devant le tribunal. Il arrive évidemment que la décision du
tribunal est biaisée. Elle est tout entière portée d'un
seul côté, puisque c'est le seul côté qui a fait la
démonstration de ses besoins ou de son point de vue. C'est ce qui s'est
passé devant les commissaires aux services essentiels. La partie
patronale étant souvent la seule à se présenter, il y
avait seulement son point de vue qui était documenté, donc, il y
avait seulement son point de vue sur lequel le commissaire aux services
essentiels pouvait effectivement se baser, s'il voulait une décision
rapide. Il aurait, bien sûr, pu faire des études, etc., mais on se
rend compte du nombre de décisions qui doivent être rendues. Il y
a 615 unités d'accréditation dans l'ensemble des
établissements, et donc, en théorie, jusqu'à 615
décisions devaient être rendues par les commissaires, ce qui
impliquait une grande célérité dans l'action.
M. le Président, je remarque que vos yeux se sont tournés
vers l'horloge et j'observe, moi aussi, qu'il est 18 heures. Je propose donc la
suspension de nos travaux jusqu'à 20 heures.
Le Président (M. Laplante): La commission suspend ses
travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 16
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs! Reprise
des travaux de la commission parlementaire pour l'étude des projets de
loi 52 et 59. Nous en étions au projet de loi 59 et la parole
était au député de Saint-Laurent. M. le
député.
M. Forget: Merci, M. le Président. J'en étais
à exposer notre point de vue qui diverge de celui de nos amis d'en face
quant aux moyens qu'a retenus
le gouvernement pour assurer le maintien des services essentiels. Je me
résume brièvement quant à la première
différence qu'on observe entre le projet de loi 253 et ce projet de loi
59.
Nous avons un mécanisme d'évaluation de la liste des
services qui sont retenus comme étant les services essentiels qui
doivent être maintenus. C'est un processus d'évaluation qui, selon
la loi 253, reposait sur des spécialistes en relation de travail, les
arbitres dont les noms figurent sur la liste agréée par le
Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, mais qui, selon la loi
59, consistera principalement, si on se fie aux informations qu'on a
là-dessus, en des personnes qui ne font pas profession de s'occuper des
relations de travail, mais qui, à divers titres, s'intéressent
aux services fournis à la population, des médecins, des
professionnels de la santé autres que des médecins, des
utilisateurs de services, des syndiqués.
Il me semble bien, pour conclure sur cet aspect, qu'on est loin d'avoir
là un mécanisme susceptible plus que ne l'était l'ancien
de faire une détermination objective et pondérée de ce
qu'il est raisonnable d'attendre comme services essentiels maintenus durant un
conflit de travail. Nous aurons, par la voie de ce comité sur le
maintien des services essentiels, l'expression d'un idéal que partagent
les médecins, les utilisateurs de services, les malades, etc., la
population en général puisqu'il y aura présumément,
suite aux recommandations, par exemple, de la Commission des droits de la
personne, des préoccupations qui seront beaucoup plus larges que celles
qui sont directement pertinentes aux relations de travail. Il y a une
très bonne raison pour laquelle on a un mécanisme qui a une
composition distincte, c'est que ce mécanisme, dans la loi 59 n'est plus
un mécanisme décisionnel. Il est un mécanisme
d'information. Il est clair qu'un mécanisme qui vise simplement à
passer un jugement de caractère plus ou moins théorique à
savoir si oui ou non les services essentiels sont fournis, se sentira plus
libre d'exprimer une conception qui se rapproche de l'idéal lorsqu'il
faut au contraire trancher, imposer une décision, il faut être
beaucoup plus réaliste et se tenir beaucoup plus près de ce qui
est possible dans le contexte d'un conflit de travail.
J'ai expliqué, avant 18 heures, pourquoi je croyais que certaines
décisions des commissaires avaient été, en 1976,
exagérées dans l'absence de l'une des parties, la partie
syndicale. Il était presque inévitable, dans le contexte d'un
grand nombre de décisions à rendre dans un délai
très court, que seule la partie qui s'était effectivement
exprimée, qui avait explicité ses besoins soit la partie
patronale, voie ses dires confirmés en l'absence et dans le silence de
la partie syndicale. Mais c'est un accident de parcours et on peut vraiment
s'interroger sur le mécanisme qui est suggéré dans la loi
59, indépendamment du fait que ces décisions ne sont pas
obligatoires, quel sera l'effet sur l'opinion publique, d'évaluations
faites par des gens qui ne se sentiront pas du tout liés
premièrement par la responsabilité de rendre des décisions
ils n'en rendront pas puis qui ne se sentiront pas du tout
liés non plus par une perception qu'ils pourraient avoir et qu'ils
n'auront pas, parce que ce ne sont pas des spécialistes des relations de
travail, que même si on peut exprimer un idéal théorique
dans ce domaine-là, il y a malgré tout des choses très
concrètes, un contexte dont il faut tenir compte et que ce qui est
possible est beaucoup moins que ce qui est souhaitable malheureusement dans
certains cas. Si dans ce contexte le conseil sur les services essentiels
émet des évaluations qui s'inspirent de sa situation
concrète, de la composition qu'il y a, du contexte qu'il a, de la
non-responsabilité où il se trouve de rendre des
décisions, est-ce qu'il n'est pas susceptible d'émettre des
évaluations et des opinions qui créeront, chez la population, des
attentes très considérables?
C'est le premier élément. Le deuxième
élément, M. le Président, par lequel la loi 59
diffère de la loi 253, c'est l'absence de sanctions. Le rapport
Martin-Bouchard se permettant un jeu de mots d'un goût discutable,
à mon avis, a énoncé l'idée que la loi 253 avait
des dents et que c'est pour ça qu'elle a mordu la poussière.
Peut-être. Une autre raison pour laquelle elle a mordu la
poussière... Cela méritait, de la part de la commission
Martin-Bouchard, si vraiment elle avait prétendu faire une analyse
objective de cette loi et du contexte qui a entouré son application, ce
que je ne pense pas qu'elle ait véritablement cherché à
faire, sous cet aspect au moins, elle aurait évidemment fait la part de
la stratégie syndicale et, parce que ce n'est pas sans pertinence, de la
stratégie politique de l'Opposition de l'époque qui, après
avoir approuvé à l'unanimité la loi 253, l'a
dénoncée moins de deux mois après et s'est
empressée d'ajouter sa voix à tous ceux qui, du côté
syndical, cherchaient désespérément à trouver les
moyens d'éviter leurs responsabilités sociales.
Dans un contexte comme celui-là, il est presque inévitable
que des lois soient traitées avec légèreté. C'est
effectivement ce qui est arrivé, le scrutin populaire ayant eu le
résultat qu'on sait, le gouvernement, après avoir jeté de
l'huile sur le feu, s'est empressé de disculper de façon
générale ceux qui avaient mis le feu. Je ne sais pas
jusqu'à quel point le gouvernement actuel se rend compte de la
responsabilité qu'il a assumée en prenant une attitude, en
premier lieu, aussi ambiguë, aussi fourbe d'ailleurs. Je crois que c'est
le seul terme qui serve dans les circonstances quand après avoir fait
preuve de fourberie, face à l'opinion publique, et étant devenu
gouvernement, on s'est comporté de façon aussi irresponsable.
Voici que le même gouvernement, par un juste retour des choses, se
retrouve devant des responsabilités qui, naguère, le faisaient
rire je ne sais pas si elles le feront rire, cette fois-ci et
qu'il a choisies, un peu forcé par l'attitude qu'il avait d'adopter,
dans un passé aussi récent, et avec autant d'éclat,
d'éliminer toutes les sanctions, cette fois-ci, a priori, plutôt
qu'a posteriori, de son projet de loi.
Le ministre a répondu à ceci d'une façon qui
soulève au moins autant de problèmes que cela en résout,
qu'il y avait une sanction "politique", entre guillemets. Je ne sais absolument
pas à quoi il peut faire allusion par une telle déclaration.
Qu'est-ce qu'une sanction politique, face à la
désobéissance à une loi? Est-ce que l'on doit supposer que
le ministre fait allusion à la possibilité dont il dispose
toujours de légiférer à nouveau et dans une situation de
crise, pour remédier à une désobéissance massive,
ou tout simplement à un non-fonctionnement des mécanismes
prévus par la loi 59? Est-ce qu'il fait allusion plus
profondément à la possibilité que certains ont
évoquée, que toute cette opération de la loi 59 n'est
qu'un vaste piège tendu aux organisations syndicales?
Je n'en sais rien. Nous en sommes quittes pour des conjectures que
chacun peut faire. Mais, malgré tout, c'est assez mystérieux que
cette sanction politique. En tout cas, qu'il y ait sanction politique ou pas,
qu'on s'entende ou non sur la signification à donner à ce terme
assez mystérieux, ce qu'on sait, c'est qu'il n'y a pas d'autres
sanctions. On espère, et cela, contrairement à
l'expérience de dix ans, que tout ira bien dans le meilleur des mondes.
Si vraiment, c'était vrai qu'on pouvait le supposer, pourquoi la loi 59?
Si vraiment on a l'impression que les listes syndicales sont impeccables et si
vraiment on croit qu'une fois promulguées, elles seront
respectées, on n'a pas du tout besoin de légiférer, M. le
Président, on n'a qu'à le dire. Si les organisations syndicales
font preuve d'une responsabilité au-dessus de tout reproche, pourquoi
mettre dans les lois des mécanismes aussi compliqués que ceux
prévus par la loi 59? Jamais personne n'a répondu à cette
question.
Si cette supposition est fausse, comment expliquer les mécanismes
qui s'appliqueront? Comment prévoir la réaction du gouvernement?
Est-ce que c'est seulement un alibi que le gouvernement cherche à se
donner face à un risque qui apparaît assez grave pour la plupart
des gens en disant: Nous avons légiféré sans malgré
tout prévoir les mécanismes d'application de la loi? Ou est-ce un
alibi pour l'avenir que le gouvernement cherche à se ménager en
disant: Nous avons mis un mécanisme en place qui place toute la
responsabilité sur les organismes syndicaux et s'ils ne sont pas assez
"matures" pour les faire fonctionner normalement, nous aurons tous les droits
comme gouvernement de légiférer de la façon qui nous
semble la plus appropriée pour restaurer un ordre qui aurait
été troublé par ailleurs?
Sur le plan des mécanismes, M. le Président, je pense
qu'il y a là un trou béant, un gouffre législatif. Un
gouvernement n'a pas le droit de légiférer, à moins qu'il
puisse dire aux citoyens qui sont confrontés à cette loi ce qui
va se passer dans l'application de la loi. Le gouvernement actuel ne l'a pas
dit et il ne semble pas avoir l'intention de le dire non plus, sauf à
faire allusion sombrement et mystérieusement à un soi-disant
mécanisme politique qui s'enclencherait Dieu sait comment, Dieu sait
avec quelles conséquences. A moins qu'on ait l'intention de ne rien
faire du tout, de toute manière. A ce moment-là, encore une fois,
pourquoi la loi 59? (20 h 30)
Cela m'apparaît un geste gratuit, un geste qui n'est pas
justifié, et doublement. Il n'est pas justifié parce que le
mécanisme essentiel de la loi 253 demeure dans la nouvelle loi, sauf sur
les deux points que j'ai mentionnés. Si on voulait diminuer la force des
amendes ou le poids des amendes imposées par la loi, les
pénalités imposées par la loi, on n'avait qu'à le
faire par un amendement à la loi existante. Si on voulait modifier de
façon mineure tel ou tel mécanisme, on n'avait qu'à
l'amender. Je crois qu'il y a beaucoup plus de symbolisme dans toute cette
opération qu'on ne peut...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent. Je ne voudrais pas créer de précédent. Par
l'article 160 cela fait un peu plus de 30 minutes que vous parlez
j'aimerais, à ce moment, avoir au moins le consentement des membres de
la commission pour que vous puissiez continuer sans qu'on établisse un
précédent ce soir.
M. Johnson: Consentement.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur.
M. Forget: Merci, M. le Président. Comme je l'ai dit, j'ai
fait cette intervention au tout début parce que je pense que l'esprit de
notre position sur la loi 59 n'est pas facile à exprimer par rapport
à tel ou tel article individuel, et que l'heure à laquelle le
débat s'est fait, au moment de la deuxième lecture, nous autorise
j'en remercie le ministre à un peu plus de
libéralité quant à l'interprétation du
règlement.
De toute manière, j'en étais presque à ma
conclusion. Je pense que nous avons une loi qui n'est pas explicable quant
à sa substance. Elle n'est pas nécessaire. Dans la mesure
où elle introduit quelque chose de nouveau, c'est par défaut,
c'est par privation en quelque sorte. L'absence de sanction et l'absence de
justification de la tournure particulière que prend le conseil pour le
maintien des services essentiels par rapport aux commissaires sur les services
essentiels nous fait douter que le gouvernement vise par là un objectif
véritablement substantiel. Il vise, bien sûr, à donner
satisfaction à ceux qui ont demandé le retrait de la loi 253. Sur
un plan formel, ce sera fait, mais dans le fond, les organisations syndicales
et les organisations patronales qui se sont fait entendre au début de la
semaine dernière devant la commission parlementaire n'entretiennent
aucune illusion là-dessus. Elles nous ont dit qu'essentiellement,
c'était la même disposition, le même mécanisme, et
que dans la mesure où il y avait des innovations, cela ne leur
apparaissait pas comme des innovations nécessairement positives.
Je peux dire que, avec l'expérience que j'ai acquise dans ce
secteur qu'à moi non plus, ça ne m'apparaît pas comme des
innovations positives. Au contraire, ça m'apparaît comme une
régression, comme une détérioration, en quelque sorte, de
l'état de notre droit du travail sur ce point-là, pour autant que
le droit du travail peut résoudre ou aider à diminuer
l'acuité d'un problème avec lequel il faut bien vivre, d'une
façon ou d'une autre, tant que notre régime de relations de
travail ceci appartient à un autre débat qui aura lieu
demain dans les secteurs public et parapublic demeure
inchangé.
Alors, M. le Président, nous sommes disposés à
procéder à l'étude article par article du projet de
loi.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, j'appelle
l'article 1. Excusez.
M. Johnson: M. le député de Richmond...
Le Président (M. Laplante): II n'avait pas exprimé
le désir de parler, mais voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Brochu: Brièvement, M. le Président. Ce
n'était pas mon intention, au point de départ, de faire de longs
commentaires là-dessus. J'avais eu l'occasion, d'ailleurs, en
deuxième lecture, pour l'Union Nationale, d'exprimer clairement nos
couleurs là-dessus, de poser un certain nombre de questions au
ministre.
Cependant, j'aimerais peut-être rappeler, dans un premier temps,
un des éléments qui nous apparaît assez important, pour ne
pas dire essentiel dans toute cette question, et c'est l'aspect de la confiance
dans tout ce climat. On sait que toutes les parties, tant du côté
patronal que du côté syndical, ont insisté aussi de leur
côté, sans relâche, sur le fait que le succès des
prochaines négociations dépendra largement, dans le secteur
public comme dans le secteur parapublic, de l'existence de cette condition qui
est sine qua non, celle de la confiance.
D'abord, je dirais confiance mutuelle entre les parties en
présence. Deuxièmement, il y a la confiance dans les
règles du jeu imposées tant par la loi que par le simple bon sens
et, troisièmement, la confiance dans l'application de ces règles
qui, sans être immuables, à notre sens, doivent s'appliquer de la
même façon pour tous.
La question qu'on peut se poser en commençant nos travaux
à la commission parlementaire, c'est: Est-ce qu'on retrouve, dans le
projet de loi no 59 tel qu'il nous est présenté actuellement, les
mécanismes qui seraient susceptibles de susciter ou de créer ce
climat de confiance dans les prochaines négociations? Est-ce que le
cadre de la loi, tel qu'on le veut actuellement, tel qu'on le propose
actuellement, peut mettre en place, justement, les moyens de provoquer ou de
créer cette confiance qui est si nécessaire?
On se rappellera, dans les quelques jours qui ont
précédé notre commission parlementaire, qu'on a entendu
des mémoires, qu'on a aussi reçu différents groupements
touchant ces questions. Ce qu'on nous a rapporté à ce
moment-là ne nous laisse pas croire, au point de départ, que
cette confiance soit quelque chose d'acquis. Bien au contraire, c'est
peut-être quelque chose qu'il va falloir gagner pas à pas, si
c'est possible de le faire, si c'est possible d'y arriver.
Si les associations patronales s'inquiètent de la pertinence et
de l'efficacité des moyens préconisés en vue de
déterminer et d'assurer les services essentiels dans le domaine des
hôpitaux et des services sociaux ainsi que du manque de sanctions
réelles dans les cas d'infraction à la loi, les associations
syndicales, pour leur part, ont carrément dénoncé les
réformes du ministre du Travail et surtout le calendrier pour le
déroulement des négociations, et je cite leurs propos: "comme une
entrave à leur droit à la libre négociation. '
D'un côté comme de l'autre, on laisse subsister la crainte
de l'affrontement, si le projet de loi 59 n'est pas modifié, et je le
souligne, dans le sens souhaité, dans les deux sens. D'un
côté comme de l'autre, on affirme clairement ne pas avoir
confiance en réalité, dans le bien-fondé des
réformes mises de l'avant par le gouvernement. Ce constat de
réprobation m'inquiète, car, à l'instar de tous les
Québécois, je souhaiterais grandement que la prochaine ronde de
négociations dans ce secteur ne soit pas une répétition de
la précédente. C'est un voeu que fait également le
ministre dans son approche, même si on peut en discuter, même si
elle peut être discutable. Je pense que le ministre vise à ce que
la prochaine ronde de négociations se fasse dans le meilleur climat
possible.
Quant au conseil sur le maintien des services de santé et des
services sociaux en cas de conflit de travail, on sait que son rôle
prévu par la loi est d'abord un rôle d'information. Cela veut dire
que sa force repose essentiellement sur toute la question de l'opinion
publique. Encore là, c'est un critère qui est mouvant et dont la
mouvance a une vitesse fort relative. Cela nous place dans un cadre
général où les balises sont difficiles à percevoir
avant que les conflits ne se produisent. Etant donné la vitesse de
réaction, parfois, de l'opinion publique, on risque d'aller ailleurs que
là où on veut aller. Je comprends que ce rôle d'information
soit fort louable; cependant, on peut se poser certaines questions à ce
niveau. Qu'est-ce qui arrive si, au niveau du maintien des services essentiels,
comme la détermination des services essentiels, cette force de
persuasion ne vient pas à bout de régler le problème?
Je comprends que la solution du projet de loi 59, c'est que le
lieutenant-gouverneur en conseil suspende le droit de grève pour trente
jours, mais qu'est-ce qui arrive au-delà de cela, si on refuse de se
soumettre à cette demande du lieutenant-gouverneur? Il reste toujours,
l'injonction; par contre, le gouvernement a clairement exprimé sa
volonté de recourir le moins possible à l'injonction.
Alors, le problème, dans ce sens, reste entier. Cela revient
à ce que je citais comme l'élément
important, le nerf de la guerre dans le cas qui nous préoccupe,
la question de la confiance mutuelle. Qu'est-ce qu'on est prêt à
donner, de part et d'autre, pour en arriver à un terrain d'entente et
à un modus vivendi qui ne se fasse pas sur le dos des citoyens?
Finalement, dans tout cela, au bout du compte, c'est toujours la
population qui est à la merci de ce qui se passe; il ne faudrait pas que
ce qui s'est passé déjà, dans le domaine public, se
reproduise à l'avenir. Il faudrait trouver des mécanismes
je sais que ce n'est pas facile et créer ce climat de confiance
nécessaire pour que les gens du Québec n'aient pas à
souffrir de grèves dans ce secteur.
Cela m'intéresserait de connaître le fond de la
pensée du ministre sur ce problème qui n'est pas une mince
affaire. Je comprends que le ministre ne peut pas non plus intervenir sur
l'attitude des gens, sur leur façon de percevoir les problèmes et
d'agir à l'intérieur des situations. L'humain étant ce
qu'il est, je pense que les règles du jeu qu'on connaît vont
être maintenues. Le ministre n'a pas de pouvoir là-dessus. Il
pourrait cependant nous donner quelques précisions sur sa façon
de voir.
M. le Président, je limiterai pour le moment mes remarques
à ces quelques données. J'aurai l'occasion au cours de
l'étude article par article de revenir sur des points plus
précis.
M. Johnson: M. le Président, avant d'aborder l'article 1,
si vous le permettez, brièvement, si le député de
Saint-Laurent n'avait pas utilisé des mots comme fourberie, je ne serais
peut-être pas intervenu à ce stade-ci de nos discussions.
Le député de Saint-Laurent nous dit que sous la loi 253 on
avait recours à des arbitres de la liste annotée du CCTMO, ce qui
est vrai. Il nous a lui-même donné certains exemples d'aberration
que par inexpérience ou par le fait qu'il s'agissait de
l'opérationalisation pour la première fois d'une nouvelle loi
dans le domaine ont eu lieu. Il nous a parlé des faux espoirs que
peuvent susciter les commentaires d'un groupe d'information sur les services
essentiels, ainsi que l'absence de sanction, ce qui est un problème
également qu'a évoqué le député de
Richmond.
M. le Président, l'expérience nous a
démontré certaines choses et je trouve dommage que le
député de Saint-Laurent n'ait pas insisté, lui qui est un
pragmatique sur le résultat de cette expérience depuis une
dizaine d'années. Il y a une chose très sûre dans le geste
du gouvernement, que le député de Saint-Laurent qualifie
d'irresponsable. Des amendes de l'ordre de celles qui étaient
prévues pour des gens qui gagnent $140 par semaine, c'était de
l'aberration. Et dans ce contexte-là, ceux qui étaient
susceptibles d'être condamnés par des juges exerçant leur
juridiction avec l'entière latitude qu'ils ont dans notre
système, il est très clair qu'on assistait à une
prolifération de poursuites suite à un problème politique
au Québec, et qu'on se le dise. Ce n'était pas seulement un
problème de relations de travail ce qui s'est passé, dans le cas
des hôpitaux, c'est un problème... Et quand je parle de sanctions
politiques, je parle de celle-là. La sanction ultime sur le plan
politique qu'un gouvernement peut connaître dans des circonstances d'une
conflagration sociale comme celle qu'on a eue au Québec, avec cela et
avec d'autres conflits du même ordre, c'est effectivement qu'un
gouvernement se fasse battre et c'est ce qui est arrivé à nos
prédécesseurs. C'est cela la sanction ultime. Je comprends que
cela ne règle pas le problème du patient qui est au
troisième A pendant le conflit de travail, mais ultimement dans une
société, c'est cela la sanction politique, la perception par la
population qu'un gouvernement est capable de prendre en main ses
responsabilités et de ne pas être mou, qu'un gouvernement en
occident ne soit pas sujet à des critiques, à des manifestations,
à des oppositions, je pense que c'est sain et que c'est comme cela que
les démocraties fonctionnent; mais la vraie sanction politique c'est
celle-là, c'est celle dans une démocratie de citoyens qui,
à un moment donné, disent: Assez, c'est assez, pour un tas de
raisons qui sont souvent entremêlées, enchevêtrées,
mais qui correspondent à une espèce de consensus d'une bonne
partie de la population. C'est cela la sanction politique dont je parle. Il n'y
a rien de très mystérieux. C'est la responsabilité que
porte un gouvernement face à une opinion publique qui peut se modifier
à son égard. Cela présuppose qu'on est prêt à
prendre ses responsabilités et de préférence ne pas le
faire de façon démagogique même si la politique, comme
occupation qui nous préoccupe en principe à temps partiel, la
plupart des parlementaires, nous amène parfois à des excès
de langage. (20 h 45)
Très concrètement, cependant, l'expérience de la
loi 253 nous a démontré, je pense, que le tiers intervenant, dans
la définition des services essentiels, par le seul fait de son
existence, a empêché certains règlements. C'est l'analyse
d'ailleurs, qui a été faite par les responsables des commissaires
aux services essentiels. Avant la loi 253, il y avait déjà, sur
une base peut-être pas très formalisée, mais, comme en
1966, la dispensation, dans une bonne partie des hôpitaux, ou la
prévision dans une bonne partie des hôpitaux, qu'il y aurait
prestation des services essentiels ou dispensation de ces services.
Cependant, la loi 253, en introduisant un tiers qui, vraiment,
au-delà des parties, indépendamment de leur volonté,
pouvait décider ce qu'étaient des services essentiels, a fait que
ce fut perçu par les parties et surtout par la partie syndicale, il ne
faut pas se le cacher, comme un des moyens les plus importants de
"désincitation", en même temps, possiblement, qu'une
poignée ou une ganse politique, permettant de faire peut-être un
peu pourrir le conflit avant même qu'il ne s'amorce réellement,
face à la population.
En ce sens, on a assisté à une série de refus de
conclure des ententes sur les services essentiels. Dans certains cas,
c'étaient les administrations hospitalières; on sait, à un
moment donné,
que le mot d'ordre s'est donné dans un des sous-réseaux du
secteur des affaires sociales, qu'il ne fallait pas négocier les
services essentiels et d'attendre que le commissaire vienne les
définir.
En ce sens, c'est un peu ça le coeur du projet de loi sur la
question des services essentiels. Nous verrons tout à l'heure, quand
nous serons rendus à l'étude article par article, quelques
modifications que je vais suggérer et qui ne devraient pas faire l'objet
de grandes complications, mais elles devraient peut-être nous
éclairer sur le sens qu'on veut donner à cette lot. Le coeur du
projet de loi est de mettre les parties dans une situation où elles sont
incitées, effectivement, à conclure ces ententes sur les services
essentiels.
Il faut cependant une alternative à l'absence d'entente.
L'alternative est: ou bien le tiers qui vient la déterminer ou encore,
c'est qu'une des parties la définit unilatéralement. Or, dans le
cas d'un tiers qui vient la déterminer, on a l'expérience de la
loi 253 et de la non-conclusion d'ententes dans une multiplicité
d'établissements, à cause du fait que cette loi venait modifier
les règles du jeu dans l'esprit de plusieurs; deuxièmement, du
fait que cette loi 253 était un tout et ce tout, entre autres,
impliquait des sanctions extrêmement sévères pour des
salariés sur un plan pécuniaire.
La deuxième partie de l'alternative, c'est de dire qu'une des
deux parties, unilatéralement, définirait ces services en
l'absence d'entente. Est-ce que ça peut être la partie patronale?
Parlons avec un vocabulaire plus simple, est-ce que ça doit être
l'administration hospitalière? On ne se fera pas tellement d'illusions
sur la crédibilité qu'en général les institutions
peuvent avoir quant à la définition des services essentiels. En
effet, je connais très peu de directeurs de soins professionnels ou de
directeurs d'hôpitaux qui pensent qu'un hôpital puisse fonctionner
avec des services partiels, et que sa tendance toute naturelle est de faire en
sorte que les services essentiels soient l'ensemble des services. Il y a
cependant des exceptions. L'expérience de dix ans dans le domaine, je
pense, a appris au gouvernement, autant qu'aux administrations
hospitalières, qu'il fallait reconnaître qu'à partir du
moment où le droit de grève existe, et, deuxièmement,
à partir du moment où on constate qu'il est exercé au
Québec, légalement ou illégalement, on a vu ça dans
le cas des fonctionnaires récemment, c'est une situation à
laquelle il faut savoir non pas s'en prendre, mais faire face.
Dans les circonstances, nous avons jugé que la définition
du personnel disponible pour rendre des services essentiels pouvait être
un acte unilatéral du syndicat. La sanction du syndicat, dans une
définition qui serait insuffisante ou dans une définition telle
qu'au niveau de la mise en vigueur ou de l'exercice réel du droit de
grève, est que des services ne sont pas adéquats. C'est d'abord
une sanction que j'appellerais publique, dans la mesure où on sait que
les conflits dans le secteur hospitalier soulèvent l'ire de la
population en général et on peut comprendre pourquoi, et que le
syndicat qui ne fournit pas ce minimum de servi- ces s'expose à une
attitude de réprobation. En général, cette
réprobation coûte plus cher aux centrales syndicales qu'à
qui que ce soit.
La deuxième sanction, c'est évidemment la
possibilité pour le lieutenant-gouverneur en conseil de décider
de suspendre le droit de grève. On me dira: II suspend le droit de
grève et les gens décident quand même de faire la
grève. Je dis que ce sont les règles normales qui s'appliquent.
Ce n'est pas la première fois qu'on a vu cela. C'est l'attitude
habituelle.
Mais ce qu'il faut faire quant aux services essentiels, c'est
d'envisager que, dans l'ensemble des règles que l'Etat se doit
d'adopter, il balise l'exercice civilisé du droit de grève dans
le secteur hospitalier, parce que, comme je l'ai déjà dit lors de
l'étude en commission parlementaire, lors de l'audition des parties, je
pense qu'on ne peut pas faire une équation entre le gouvernement du
Québec, l'Etat québécois et une entreprise privée
qui suscite des profits. L'Etat québécois se finance à
même les ressources des citoyens par la fiscalité, par les
impôts, par les taxes. Et deuxièmement, l'Etat n'est pas
là, par définition, pour faire des profits, sauf dans certaines
sociétés d'Etat qui, d'une façon générale,
ont la remarquable caractéristique d'être déficitaires,
mais surtout pour fournir des services à la population. C'est pour cela
que nous sommes élus. Cela vaut pour les deux côtés de la
Chambre, sauf que ceux qui, parmi nous, appartiennent à la formation
politique qui a le plus de sièges exercent le pouvoir
exécutif.
Dans ces circonstances, le projet de loi 59 m'apparaît justement
une résultante de l'expérience des dix dernières
années. D'une part, on se rend compte que le tiers intervenant, par le
seul fait qu'on le crée avant même qu'il ne soit question de
négocier ou de s'entendre sur des services essentiels, le tiers
intervenant, par sa seule existence, par sa seule présence, est une
"désincitation" au règlement; mais, d'autre part, l'Etat ne peut
pas fermer les yeux sur sa responsabilité dans ce domaine. Et il doit
bien dire quel est le cadre dans lequel les administrations
hospitalières et les groupements syndicaux doivent s'entendre sur la
question de la définition des services essentiels.
Dans ce contexte, de façon additionnelle, le gouvernement
introduit la notion d'un comité formé par le juge en chef du
tribunal, donc un comité qui a toutes les garanties possibles et
humaines, dans un contexte comme le nôtre, d'être neutre, sinon
objectif, et ce comité a une vocation et un rôle d'information de
la population. Il est formé, au niveau québécois, au
niveau de l'ensemble du Québec, de cinq à sept membres. Il peut
se donner des sous-comités régionaux ou locaux qui pourront
diffuser, au niveau local ou régional, l'information sur l'état
de la situation en matière de services essentiels.
Je pense que là, il faut y voir notre préoccupation de
renseigner adéquatement le public, dans un sens comme dans l'autre,
à cause des comportements irresponsables que pourraient avoir certaines
personnes, dans un contexte de conflit
dans les hôpitaux, ou encore à cause de ragots ou de
potins, ou de gens à la recherche de cadavres de fins de semaine, pour
les journaux jaunes.
Dans ce contexte-là, je pense que le groupe d'information a un
rôle extrêmement important. Finalement, la négociation dans
le secteur public et parapublic, comme je le disais au début de mes
propos, implique un engagement politique de la part du gouvernement. Et cela a
toujours été le cas depuis le début des années
soixante.
On a dit que les gouvernements ont mis leur tête sur la
bûche, relativement, dans certains conflits de travail qui touchaient le
secteur public et le secteur parapublic. Cela prouve une chose, de la
même façon que le député de Saint-Laurent nous
disait cet après-midi qu'il voulait quand même procéder
à quelques commentaires, puisqu'il avait été dans
l'impossibilité ce que je comprends très bien de
les faire lors de la deuxième lecture en Chambre, parce que, nous
disait-il, cela vaut peut-être la peine, le Parlement est aussi un
processus d'information du public. Cette loi est aussi un processus
d'éducation du public, en plus d'être très clairement ce
qu'elle est, une loi avec des balises très précises, des
obligations aux parties et des sanctions qui sont les sanctions pénales
que l'on retrouve dans le Code du travail, qui sont les sanctions habituelles
en matière de relations de travail.
Essentiellement, M. le Président, sur la partie qui touche les
services essentiels, je pense que ce projet de loi, même s'il n'est pas
parfait je n'en connais pas qui pourraient être parfaits dans ce
domaine, pour avoir vécu dans le contexte d'une salle d'urgence en plein
milieu d'un conflit de travail à partir du moment où le
droit de grève existe, où on le reconnaît, et à
partir du moment où on sait très bien que même si on
décidait de l'abolir dans un texte de loi, il pourrait être
exercé. Il faut prendre des moyens qui nous permettent de
présumer que, dans un climat où il y a un minimum de confiance
je pense que le député de Richmond a abondamment
détaillé ce sujet il s'agit de faire en sorte que les
dispositions de la loi, en plus de donner une orientation aux parties, nous
permettent d'avoir des actions très précises dans ces cas
où cela ne fonctionnerait pas.
Si, par contre, c'était passez-moi l'expression le
chiard organisé et si, de façon systématique, les
salariés ne respectaient pas des dispositions sur les services
essentiels ou leurs propres ententes ou si leurs listes ne tenaient pas debout,
le problème y serait tout entier et il serait tout entier devant le
Parlement du Québec et le fait d'avoir une loi comme celle-là ou
de ne pas en avoir ne changerait pas grand-chose.
Cependant, on présuppose qu'avec un minimum d'orientation
donnée par cette loi, un minimum de climat de confiance qui ne sera
évidemment pas parfait, il y a quand même une possibilité
d'obtenir un règlement et de donner ces pouvoirs à l'Etat
d'intervenir de façon ponctuelle pour essayer de régler
localement un problème local dans les cas où, souvent, jouent des
circonstances absolument en dehors du contrôle par exemple d'une
association syndicale ou des salariés eux-mêmes, à cause de
facteurs extérieurs ou de facteurs relevant purement des
problèmes et des vices de la nature humaine.
M. le Président, je suis prêt à appeler l'article
premier du projet de loi qui...
Etude du projet de loi
Le Président (M. Laplante): Article 1.
M. Johnson: ... a comme objet de modifier l'article 32 du Code du
travail. Il s'agit essentiellement d'y insérer les mots "et, le cas
échéant, l'article 99c". Il s'agit en fait de la
révocation d'accréditation. C'est une concordance avec les
nouveaux délais que nous créons à l'article 99c.
Le Président (M. Laplante): Dans l'article 1, M. le
ministre, avez-vous des amendements, des corrections?
M. Johnson: Non, il n'y a pas d'amendement à l'article
1.
Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté?
M. Forget: Oui, c'est de la concordance.
M. Brochu: Ah bon! D'accord, c'est de la concordance, cela
va.
M. Johnson: D'accord. Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté.
J'appelle l'article 2. M. le ministre.
M. Johnson: En fait, M. le Président, c'est
également un article de concordance dans la mesure où les
dispositions antibriseurs de grève aux articles 97a et suivants se
rapportaient, on s'en souvient on a eu une longue discussion
là-dessus, un soir, lors de l'adoption du projet de loi 45, le
député de Saint-Laurent s'en souviendra à cette
référence que nous faisions au nouveau Code du travail, le cas
échéant, en vertu d'une loi portant sur les services essentiels.
Il s'agit de modifier l'ensemble du texte de l'article 97 pour qu'on retrouve
cette notion, dans les dispositions antibriseurs de grèves.
Le Président (M. Laplante): Article 2, adopté.
M. Forget: C'est ce qu'on appelle une modification
cosmétique ou esthétique. Oui, adopté.
Le Président (M. Laplante): Adopté.
M. Johnson: L'article 3...
Le Président (M. Laplante): Article 3.
M. Johnson: La même chose, M. le Président, quant
à l'article 97b toujours. C'est dans la foulée de l'article
97a.
M. Brochu: D'accord, adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 3, adopté.
M. Forget: Cela va bien, n'est-ce pas?
Le Président (M. Laplante): Je sens que cela va
arrêter tout à l'heure. Je pense que cela va commencer. Article
4?
M. Johnson: L'article 4 est-il adopté, M. le
Président?
M. Forget: Non
Dispositions particulières applicables aux
secteurs public et parapublic
M. Johnson: L'article 4 est adopté, n'est-ce pas?
Le Président (M. Laplante): Je sens qu'il y a des
modifications.
M. Johnson: A l'article 4, M. le Président, je pourrais
peut-être suggérer, pour les fins d'une discussion qui soit...
Est-ce qu'on pourrait le faire par l'article 99a, b, c, etc.?
M. Forget: C'est une heureuse suggestion, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): J'appelle donc le premier
alinéa de l'article 4. Est-il adopté?
M. Forget: Oui. "Ledit code est modifié, etc." les deux
lignes, d'accord. (21 heures)
Le Président (M. Laplante): Paragraphe 99a?
M. Johnson: En d'autres termes, ce qu'on dit ici, à 99a,
c'est que l'ensemble des dispositions du Code du travail s'applique au chapitre
V pour le secteur défini comme public et parapublic, à
l'exception, cependant, de la section I A du chapitre IV et simplement pour
nous rafraîchir la mémoire, c'est la section prévoyant
l'arbitrage d'une première convention collective qu'on soustrait, en
fait, à ce domaine du public et du parapublic.
Deuxièmement, l'autre restriction, c'est que l'ensemble des
dispositions du Code du travail s'applique dans le secteur public et
parapublic, dans la mesure, cependant, où elles ne sont pas
inconciliables avec les articles qu'on retrouve à 99a et suivants.
Le Président (M. Laplante): 99a?
M. Forget: M. le Président, sur ce paragraphe 99a,
certaines personnes s'interrogent sur la nature de l'exclusion qui est faite de
certains services qui échappent à cette définition,
d'organismes publics ou d'organismes péripublics tels que
l'Hydro-Québec, par exemple, de même que de certains services qui
appartiennent au secteur public dans un certain sens, mais pas dans le sens
étroit où il est utilisé ici. Je m'explique, les
transports en commun, par exemple. C'est le secteur public dans le sens
vulgaire de l'expression, mais pas dans le sens légal.
M. Johnson: C'est juste, pas au sens du code.
M. Forget: C'est juste. On peut s'interroger... Enfin, on peut au
moins demander au ministre pourquoi il a jugé bon de les exclure de
l'application de cette partie de ce qui est désormais le Code du
travail.
M. Johnson: En fait, la conséquence de l'adoption de 99a,
ce serait de dire: Les services publics au sens d'une commission de transport
en commun, par exemple, sont soumis à la section I A du chapitre IV, la
notion d'une première convention collective, mais pas ce qui
relève finalement des réseaux. Les réseaux étant
définis comme tout ce qui tombe sous le ministère des Affaires
sociales et l'ensemble du secteur de l'éducation. La raison de fond,
c'est finalement la même raison qui nous a amenés à ne pas
choisir un arbitrage obligatoire comme solution possible d'un conflit dans le
secteur public et parapublic, pour les mêmes raisons que celles que nous
avons choisi de dire, contrairement, par exemple, à l'Ontario qui
prévoit l'arbitrage obligatoire dans le secteur hospitalier dans les
conventions collectives, la même raison qui nous a amenés à
écarter cette possibilité nous amène donc, de façon
cohérente, à écarter l'application de la section I A du
chapitre IV. En d'autres termes, on dit: Dans le secteur public et parapublic,
il n'y a pas d'arbitrage obligatoire, ni de première convention
collective, ni quoi que ce soit. Ce sont les règles de la
négociation qui s'appliquent, y compris la conciliation volontaire ou la
conciliation désignée par le ministre. Donc, on va soustraire
à l'application du code qu'une première convention collective,
par exemple, une nouvelle unité ou un nouvel hôpital où
aucun salarié n'a jamais été syndiqué, un nouveau
syndicat apparaît, ils seront soumis aux mêmes règles que
tout le secteur public et parapublic, c'est-à-dire pas de
première convention collective obligatoire.
M. Forget: Le sens de mon interrogation était un peu
différent. C'était l'exclusion de l'application des règles
sur les services essentiels de l'Hydro-Québec du transport en commun. On
dit: Tout ce qui appartient au secteur public et parapublic inclut un certain
nombre de choses, mais cela en exclut d'autres également, auxquelles
certaines personnes attribuent un caractère essentiel. C'est une
interprétation de services essentiels qui est relativement
étroite par rapport à d'autres interprétations
possibles.
M. Johnson: D'accord. En fait, c'est l'article 99 du code qui
s'applique dans ce cas tel quel...
M. Forget: Oui.
M. Johnson: ... qui a toujours existé et qui s'est
toujours appliqué, dans le cas de l'Hydro comme ailleurs. D'ailleurs,
dans le cas de l'Hydro, il faudrait peut-être souligner que lors du
dernier conflit à l'Hydro-Québec, je pense que c'était au
mois d'octobre 1976, ou à peu près à cette époque,
il y a eu une demande d'injonction du lieutenant-gouverneur en conseil en vertu
de 99, qui alléguait que les services essentiels n'étaient pas
dispensés par l'Hydro-Québec. A la surprise du ministère
public, le jugement de la Cour supérieure dit que les services
essentiels étaient effectivement suffisants.
M. Forget: Oui.
M. Johnson: ... et il n'a pas accordé l'injonction en
vertu de 99. Donc, le recours, tel qu'il existe en ce moment à 99,
demeure pour le secteur des services publics qui ne sont pas les
hôpitaux, à toutes fins pratiques. C'est ce que ça
signifie.
Ceci dit, ça pose le problème de 99 lui-même, le
recours à l'injonction. J'ai déjà dit et je le
répète que le gouvernement espère bien pouvoir aboutir
à des modifications quant à l'utilisation de l'injonction, y
compris dans le cas de 99. Il faut cependant être bien conscient qu'il
faut que l'Etat, quelque part, se réserve un dernier recours ce
n'est peut-être pas nécessairement l'injonction, le recours
idéal dans le cas des services publics.
L'exemple qu'on pourrait donner de ça, ce sont les aqueducs
où certains techniciens, finalement, dispensent des services essentiels
dans la mesure où l'absence de chloruration de l'eau, dans certains cas,
peut produire des résultats tels qu'on peut avoir une
épidémie, etc. C'est 99 qui s'applique toujours pour eux et le
gouvernement n'a pas cru bon de régler le problème des services
municipaux, entre autres en pratique, c'est surtout là que
ça se pose dans le cadre de la Loi des services essentiels qui
touche les secteurs public et parapublic. Cela fera l'objet, évidemment,
de l'étude que nous entendons faire et à laquelle nous entendons
faire participer au maximum, y compris l'Opposition, les parties
impliquées dans l'utilisation de l'injonction en général
dans les relations de travail.
M. Forget: M. le Président, si j'insiste, c'est que le
ministre a, de façon fort complète, expliqué qu'il y avait
une distinction et en quoi consistait la distinction. Cela aide à
éclairer la commission sur l'existence de la distinction, mais c'est
précisément là la source de ma question. Il y a une
distinction, pourquoi? Parce que la question qui se pose dans le contexte du
projet de loi no 59, comme elle ne s'est jamais posée avant, puisque,
relativement aux services de santé et aux services sociaux, le
gouvernement a dit: Au lieu de prendre la voie indirecte, puisqu'on pourrait la
qualifier de telle, où le Conseil des ministres demande à un
tribunal une injonction, donnons au Conseil des ministres le pouvoir, en somme,
d'émettre l'injonction lui-même. Je caricature la situation, mais
c'est un peu ça.
La décision de suspendre le droit de grève est prise
directement par le Conseil des ministres, ce qui a un effet passablement
analogue ou même identique à l'obtention d'une injonction en vertu
de l'article 99. Ayant franchi ce pas, dans le contexte de discussions qui
durent depuis longtemps, où on dit: On ne devrait pas, du
côté gouvernemental, se servir des tribunaux pour intervenir dans
des conflits de travail, mais où, par ailleurs je pense que c'est
justifiable le gouvernement dit: II est impossible qu'au nom de
l'intérêt public il n'y ait absolument aucun moyen pour le
gouvernement d'intervenir si l'intérêt public est menacé,
la conséquence de ce raisonnement, qui est logique jusqu'à ce
point-ci, c'est de dire: Donnons au Conseil des ministres le pouvoir de
décréter une suspension du droit de grève, lorsque
l'intérêt public est menacé.
Cela me semble soutenu à la fois par les considérations
d'intérêt public et les considérations relatives au
rôle ambigu qu'on fait jouer aux tribunaux dans l'application de
l'article 99. Mais si ce raisonnement est bon pour les services de santé
et les services sociaux, pourquoi n'est-il pas bon pour les opérateurs
d'usines de filtration, par exemple? Pourquoi n'est-il pas bon dans le cas de
l'Hydro-Québec? Pourquoi n'est-il pas bon dans le cas du transport en
commun? Supposant, d'ailleurs, toujours, que ce soit l'article 99 ou les
nouvelles dispositions, que le gouvernement est amené à prendre
une décision, demander ou non une injonction à la cour ou
décréter ou non une suspension du droit de grève
directement... Il le fait toujours au nom de l'intérêt public. Il
peut toujours se tromper, bien sûr, et la cour également, mais la
responsabilité est la sienne. On semble avoir trouvé enfin un
mécanisme direct d'intervention, qui fait porter la
responsabilité là où elle appartient, dans le fond, au
Conseil des ministres. Je me dis: Pourquoi ne pas avoir étendu cette
formule aux autres domaines et ne pas avoir mis fin à l'article 99 de
façon définitive?
M. Johnson: Pour deux raisons. La première, c'est que
cette réforme apportée par la loi 59 est extrêmement bien
circonscrite quant aux personnes ou aux objets qu'elle vise; il s'agit des
personnes, des corporations hospitalières et des associations
syndicales. L'objet, c'est à la fois dans un calendrier de
négociations et dans un effort de baliser l'exercice du droit du
grève pour que les prestations de services essentiels soient
assurées, pour faire en sorte que les parties aient effectivement des
références.
L'article 99 est évidemment beaucoup plus large. Il s'applique,
par exemple, aux municipalités; il s'applique aux hospices, aux
universités, aux entreprises de téléphone, de
télégraphe; c'est toute l'énumération, finalement,
qu'on retrouve à l'article 1n du Code du travail. Je suis d'accord avec
le député de Saint-Laurent qu'il faudra envisager, dans la mesure
où le gouvernement consi-
dère qu'il faut peut-être essayer de substituer à
l'injonction un mécanisme qui soit plus apte dans le cadre des relations
de travail, il faudra peut-être faire une réflexion précise
autour de ces services publics.
La question des services essentiels dans le cadre hospitalier, c'est
très circonscrit dans le temps, également; le droit de
grève s'ouvre pour tout le monde en même temps. La
possibilité de crise ou de difficultés pour la population et,
ultimement, la santé et même la vie des gens peuvent en
dépendre. Tout cela se circoncrit bien quant aux acteurs, quant aux
personnes qui sont bénéficiaires et quant au temps. Pour cette
raison, nous n'avons pas jugé opportun, pour le moment, de
procéder à des modifications de l'article 99 lui-même.
M. Forget: II y a deux points, M. le Président, que
j'aimerais toucher. Il y a, malgré tout, dans la question que j'ai
posée et dans la réponse que m'a formulée le ministre, des
interprétations qui pourraient se glisser et je voudrais être bien
clair lorsqu'il est question d'injonction.
Il y a deux sortes d'injonctions et je pense qu'il serait important,
pour le bénéfice de ceux qui peuvent consulter le journal des
Débats de même que pour la discussion publique, qu'on ne
mêle pas les choux et les raves. Il y a l'injonction en vertu de
l'article 99 du Code du travail, qui est une injonction de nature très
particulière que seul le lieutenant-gouverneur en conseil,
c'est-à-dire le gouvernement, peut invoquer pour des raisons d'ordre
public, lorsque la prestation de services publics est interrompue; qu'il
s'agisse de service de téléphone qui est un service
entièrement privé, mais qui est une utilité publique, qui
serait interrompu et qui pourrait mettre en danger la sécurité,
par exemple, d'une façon ou d'une autre, par hypothèse, et il
faudrait malgré tout que ce soit le gouvernement qui fasse la demande de
l'injonction devant les tribunaux.
C'est ce genre de problèmes que l'article 59 règle pour
les services de santé et les services sociaux seulement. Il reste que,
dans les autres cas, cela demeure des injonctions qu'on peut invoquer seulement
pour des raisons d'ordre public et à l'initiative gouvernementale. Donc,
il y a une grande similitude de situations et l'accusation portée contre
les gouvernements successifs d'utiliser les tribunaux pour des fins qui sont
essentiellement "Politiques', avec un grand "P", porte essentiellement sur
l'utilisation de l'article 99. Là-dessus, je souscris à ce que le
ministre a dit quant au souhait qu'on peut formuler de remplacer le
mécanisme de l'injonction par un mécanisme plus transparent au
regard de la responsabilité qui est toujours celle du gouvernement dans
ce cas. C'est prévu comme tel dans la loi et le recours aux tribunaux
peut embrouiller ou obscurcir.
Cependant, il ne faudrait pas, lorsqu'on parle d'injonction, parler trop
généralement de l'injonction. L'injonction est, malgré
tout, un droit fondamental de tout particulier, de toute personne, de
protéger ses droits par le recours aux tribunaux lorsqu'on croit que
l'action d'un tiers peut endommager ou causer préjudice à
l'exercice ou à la jouissance d'un droit qu'on a ou qu'on prétend
avoir de façon irrémédiable et irréparable. Je
pense qu'il serait absolument irrecevable que cette autre injonction qu'on
invoque en vertu du Code de procédure civile soit modifiée de
quelque façon substantielle que ce soit, ce qui n'exclut pas,
évidemment, comme dans n'importe quelle autre partie du Code civil, des
ajustements à l'occasion, mais il s'agit d'un droit fondamental de tout
citoyen qui prétend avoir le droit de demander l'aide des tribunaux pour
que ses droits soient respectés. L'injonction, c'est donc cela aussi; ce
n'est pas seulement l'injonction selon l'article 99 du Code du travail. (21 h
15)
De ce côté-là, le ministre dit: On l'a circonscrit
de façon très étroite en fonction des personnes, en
fonction des services fournis. Dans le fond, il invoque comme explication la
restriction du champ d'application des nouvelles dispositions de l'article 59
simplement en réitérant que c'est restreint.
M. le Président, c'est ce genre de raisonnement et ce genre
d'explication qui n'en est pas qui nous amène à croire, ce qui
semblerait autrement une simple allégation partisane, que l'ensemble de
cet exercice législatif du projet de loi 59 n'a aucune raison
d'être, si ce n'est de créer une apparence de renouveau. J'irais
même plus loin. Je dirais qu'il devient assez évident, par les
détours de raisonnement auxquels on doit se prêter de l'autre
côté pour justifier les omissions et les inclusions et tout ce
qu'on veut, que le gouvernement actuel n'aurait pas
légiféré du tout sur les services essentiels, n'eût
été le précédent embarrassant que créait la
loi 253.
Il était évidemment assez impossible de
légiférer pour abroger cette loi et de ne rien lui substituer, de
créer en quelque sorte une espèce de vide. Tant qu'il n'y a pas
eu de loi sur les services essentiels, on pouvait en parler sans rien faire.
Depuis qu'elle existe, on doit continuer d'en parler et il faut au moins avoir
l'air de faire quelque chose. C'est effectivement le but que poursuit, à
mon avis, le gouvernement par la loi 59, avoir l'air de faire quelque chose et
continuer de parler des services essentiels. Dans le fond, nous avons tous
perdu notre virginité, en quelque sorte, relativement aux services
essentiels. On ne peut plus retrouver l'état ex ante.
Le débat est ouvert, il n'a pas été
réglé par la loi 253. Hélas! tout le monde le regrette
bien sincèrement, maintenant, du moins, mais il reste qu'on ne peut plus
se contenter de ne rien faire. Cela ne veut pas dire que n'importe quelle
action est justifiable. Cela veut dire que, lorsque nous affirmons qu'il n'y
rien de fondamental de changé, dans la mesure où il y a des
choses de changées qui portent sur les modalités, on se heurtera
nécessairement à des déceptions. On a, à mesure que
le ministre parle, des raisons nouvelles de le dire.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 99a est
adopté?
Une Voix: Adopté.
M. Brochu: Un instant, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Excusez. M. le
député de Richmond. Je m'excuse, M. le député, vous
aviez demandé la parole avant.
M. Brochu: J'ai quelques brèves questions de mon
côté aussi, si le député de Saint-Laurent le permet.
Je suis conscient que les dispositions du projet de loi 55 qui prévoient
que les associations de salariés faisant partie d'un groupement de
salariés négocient et agréent les stipulations à
l'échelle nationale, locale et régionale par l'entremise d'agents
négociateurs... Ce sont des questions que j'ai posées au ministre
en deuxième lecture, mais qu'on s'est réservées pour de
plus amples explications à ce moment-ci.
La question que j'avais posée au ministre à ce
moment-là et sur laquelle je reviens, c'est de savoir si les structures
de négocition mises en place par le projet de loi 55 permettront dans
les faits de respecter l'esprit qui a présidé à la
rédaction de 19b et 19c du Code du travail qui a été
adopté dans la loi 45.
Je reviens aussi sur ce qui avait été indiqué par
le rapport Martin-Bouchard à ce sujet-là. On disait, et je cite:
"Dans les deux cas, le code exige la tenue d'un vote majoritaire des membres de
l'association accréditée qui sont compris dans l'unité de
négociation et qui exercent leur droit de vote. La difficulté qui
se présente a trait aux modalités d'un tel vote au sein des
associations qui se regroupent pour fins de négociation. On peut se
demander comment s'effectuerait la consultation auprès des
employés d'hôpitaux^ membres de diverses associations
affiliées à une même centrale. Faudrait-il reconduire la
pratique suivie jusqu'ici et ne procéder qu'à une seule
consultation provinciale de l'ensemble des membres de l'association
affiliée à une même centrale ou, au contraire, devrait-on
tenir un vote par scrutin secret afin de dégager une majorité
spécifique à chaque association. Dans le premier cas, il ne se
dessinera pas, bon gré, mal gré, qu'une seule majorité au
sein d'un large regroupement ainsi constitué, mais, dans le
deuxième, la multiplicité des groupes ouvre la possibilité
d'options différentes".
Je voudrais demander au ministre s'il pourrait nous assurer qu'il serait
possible de respecter, en quelque sorte dans les faits, les recommandations
émises par Martin-Bouchard ici et la recommandation suivante, où
il disait: "A moins d'élever une fois pour toutes une cloison
étanche entre les secteurs public et privé et de supprimer les
dernières racines locales des associations et des établissements,
la décision de déclencher une grève ou de signer une
convention collective devrait être prise exclusivement par les gens du
milieu directement intéressés. C'est pourquoi, afin
d'écarter tout doute possible et d'aplanir toutes les difficultés
qui pourraient se présenter, la commission recommande que le recours
à la grève et l'autorisation de signer la convention collective
soient sujets à un vote majoritaire des membres de l'association
accréditée qui sont compris dans l'unité de
négociation et qui exercent leur droit de vote conformément aux
articles 19b et 19c du Code du travail."
Vu la structure de négociation que vous mettez en place par le
projet de loi tel que prévu actuellement, est-ce qu'il n'y aurait pas
une difficulté majeure d'application, en réalité, pour les
articles 19b et 19c? En fait, c'est basé sur des unités de
négociation.
M. Johnson: Non. On a fait longuement le tour de ce
problème, très longuement d'ailleurs, on a consulté,
à ce titre, l'ensemble des associations syndicales impliquées, on
l'a retourné de tous bords et de tous côtés. La loi est
très claire. Ce qu'elle dit au sujet du vote de grève, c'est
qu'on doit procéder à un vote de grève par vote secret de
la majorité des gens qui ont exprimé leur vote en faveur de la
grève, qui sont membres de l'unité de négociation et
membres dû syndicat représentant cette unité. Ce qui veut
dire, en pratique, que, malgré la multiplicité il y a
au-delà de 600 accréditations dans le secteur hospitalier
chacun des syndicats, au niveau local, procédera effectivement au vote
de grève ou au vote d'acceptation de la convention collective.
Dans le cas du vote de grève, que les centrales, que les grandes
fédérations ou les grandes associations à multiples
associations locales décident que, dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, par
exemple, ça prend un vote majoritaire de l'ensemble des salariés,
non pas par unité d'accréditation, le vote va se prendre au
niveau de chacune des unités d'accréditation et, si un
hôpital vote majoritairement en faveur de la grève et que
l'ensemble des autres hôpitaux vote majoritairement contre la
grève, légalement, à l'endroit où on a voté
en faveur de la grève, on pourrait la faire. Maintenant, le syndicat
peut très bien donner une consigne à ses membres selon laquelle
on tient compte de l'ensemble du vote. C'est une liberté qu'il conserve
toujours.
Quant à la signature de la convention collective, il faut se
rappeler que le résultat de la négociation ne sera pas une
convention collective, mais bel et bien au-delà de 600 conventions
collectives à travers tout le Québec. Chacune de ces conventions
comprend les clauses dites locales et intègre l'entente nationale qui
est intervenue. Or, en pratique, ce qu'on sait également, c'est que les
syndicats, au niveau central, au niveau québécois, avant de
signer l'entente dite nationale, procèdent à une consultation de
l'ensemble de leurs membres. Cela se fait évidemment unité par
unité.
On pourrait cependant avoir la situation absurde où une
unité locale décide de ne pas approuver l'entente nationale, mais
que la majorité des syndiqués de cette centrale syndicale
décident
de l'accepter et il n'y a pas de convention collective au niveau local.
Parce que c'est l'entente nationale qui est intégrée. Mais on ne
peut pas tout faire en même temps, on ne peut pas prendre et donner en
même temps. Ce qu'on dit, c'est que la règle normale qui
s'applique, c'est au niveau local que ça va se décider,
même si c'est une entente nationale qui est négociée et qui
a des objets locaux dans à peu près 600 unités.
M. Brochu: Je suis content que le ministre apporte cette
précision; c'était d'ailleurs le but de la question. Il nous
semblait que ce n'était pas clairement exprimé que le tout se
jouait au niveau local. On a la confirmation.
M. Johnson: Les dispositions du code s'appli-quant, c'est
l'article 19a et les suivants, 19a prévoit, pour le vote de grève
comme la ratification de la convention collective, un vote au niveau de
l'unité locale.
M. Brochu: D'accord, merci.
M. Johnson: 99a adopté, M. le Président?
M. Brochu: Adopté.
M. Johnson: 99b, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): 99b.
M. Johnson: II s'agit, en fait, de la définition de
secteurs public et parapublic qui réfère, en fait, au projet de
loi 55...
M. Forget: Je suis surpris, M. le Président, que le
ministre des Finances ne se soit pas prévalu, pour faire
considérer comme service essentiel, de la Société des
alcools, de manière à prévenir toute interruption des
recettes parafiscales du gouvernement à cet égard.
M. Johnson: Je ne sais pas. On a peut-être inclus
Loto-Québec, par exemple.
M. Brochu: Le vin dans les épiceries a pallié cela,
M. le député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Laplante): 99b, adopté?
M. Forget: Adopté.
Le Président (M. Laplante): 99c.
M. Johnson: En fait, M. le Président, il s'agit de fixer
la période de maraudage; en pratique, cela signifie pour cette
année que le maraudage s'effectuerait au cours du mois d'octobre.
Le Président (M. Laplante): 99c, adopté?
M. Brochu: C'est simplement la première étape du
calendrier, si je comprends bien? C'est le premier pas dans le calendrier que
vous avez fixé.
M. Johnson: En fait, cela correspond chronologiquement à
la première étape du calendrier, entre le 1er octobre et le 1er
novembre, c'est-à-dire entre le neuvième et le huitième
mois, au cours du neuvième mois précédant l'expiration de
ia convention collective, par opposition... et c'est différent de
l'ensemble du code, le code prévoit trois mois avant l'expiration de la
convention collective.
La raison pour laquelle on fait cela et cela me permet
peut-être maintenant de passer une courbe au député de
Saint-Laurent, compte tenu de son dernier exposé ce projet de loi
ne vise pas seulement les services essentiels, il introduit également
une notion de calendrier. Et pour ne pas arriver à l'aberration
où on a le maraudage en plein milieu de la négociation, on a
fixé que c'était avant.
M. Forget: Je ne comprends pas l'allusion, M. le
Président.
M. Johnson: C'est parce que le député de
Saint-Laurent avait l'air de nous dire, dans le fond, qu'on n'avait pas besoin
du projet de loi 59. Mais il introduit quand même certaines choses assez
importantes.
M. Forget: A ce moment-là, je comprends, M. le
Président. Mais je le référerais à...
M. Johnson: A la question des services essentiels.
M. Forget: Non, à son collègue des Affaires
sociales qui a tellement pris à coeur la question des délais que,
la semaine dernière, quinze jours avant l'expiration des actuelles
conventions collectives avec le COPS et la FIIQ, il n'y a pas eu encore de
début de négociation avec la FIIQ, même pas de rencontre
préliminaire pour le dépôt des demandes syndicales.
M. Johnson: Mais dans le cas du COPS, on pourrait peut-être
tout de suite dire, pour être bien sûr que c'est bien clair au
journal des Débats, pour le député de Saint-Laurent, que
le gouvernement, dans un contexte où il n'y avait aucune obligation qui
était faite aux parties de déposer leurs demandes, a reçu
les demandes du COPS une semaine avant la déclaration du ministre des
Affaires sociales.
M. Forget: Oui, mais est-ce que les mandats gouvernementaux sont
parachevés, pour l'ensemble des infirmières? Si oui, cela ne fait
pas longtemps, M. le Président. Cela ne fait pas longtemps.
M. Johnson: Ils seront parachevés en temps... M.
Forget: En temps utile.
M. Johnson: Oui, tout à fait utile dans la mesure
où on verra que l'esprit de cette loi est respecté.
M. Forget: L'esprit supposerait que cela a été fait
en janvier dernier.
M. Johnson: Non. L'esprit prévoit 60 jours entre le
dépôt des demandes et la réponse.
M. Forget: Cela nous met au moins à la fin d'avril ou au
début de mai. Et nous sommes bien le 20 juin.
M. Johnson: Mais les demandes ont été
déposées tout récemment.
Il y aura une réponse gouvernementale dans moins de 60 jours.
Le Président (M. Laplante): 19d, adopté?
M. Forget: Je suis édifié.
M. Johnson: Adopté, M. le Président?
M. Forget: Je suis édifié, M. le Président.
En fait de courbe, c'est une courbe plate, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): L'article 99d est
adopté. 99e.
M. Johnson: A 99e, M. le Président, j'aurais un amendement
à apporter l'article 99e vise à former le conseil
d'information sur les négociations à 99e, à la
cinquième ligne du paragraphe 2, qui nous dit que le conseil doit faire
rapport au public, au plus tard, le trentième jour qui suit la date de
dépôt des propositions patronales et à la date d'expiration
d'une convention collective ou ce qui en tient lieu. Le conseil doit aussi
faire rapport en tout temps, à la demande de l'une des parties.
L'amendement que je suggère serait de biffer les mots "de l'une",
pour se lire simplement "à la demande des parties". (21 h 30)
Je m'explique. L'article 99e prévoit la formation d'un conseil
d'information où, en fait, on présume que le juge en chef dans
son choix fera appel à des gens qui ont des capacités ou des
talents en communications, une expérience dans le secteur de
l'information, mais également une connaissance de ces grands dossiers
des secteurs public et parapublic et du phénomène de la
négociation.
Il pourrait ainsi faire appel, je présume, par exemple, à
la consultation du Conseil de presse du Québec dans le choix de ses
membres. Il s'agit d'un organisme dont la vocation est d'informer le plus
"neutrement" possible la population. Ce n'est pas un comité qui est au
service des parties, mais bel et bien une source additionnelle* d'information
pour la population à laquelle pourront avoir recours les media, s'ils le
désirent. Il pourra être assisté dans ses tâches d'un
groupe d'analystes pour permettre effectivement de donner des briefings.
J'insiste pour dire que le mot "briefing" est reconnu par l'Académie
depuis quelque temps. Elle est rendue à la lettre "b"
déjà.
M. Forget: "Br" en passant.
M. Johnson: Des briefings qui soient... "Br", oui. Il pourrait
être assisté effectivement de groupes d'analystes. Dans ce
contexte, on verra que le paragraphe 2 oblige le conseil à faire rapport
à deux étapes, à un moment fixé comme étant
trente jours après la réponse gouvernementale aux demandes
syndicales, et à un autre moment qui se situe à l'expiration de
la convention collective. Nous avions introduit une notion "ou à la
demande d'une des parties". Je pense que les arguments que nous avons entendus
tant du côté patronal que syndical nous ont convaincus que pour
que ce groupe joue vraiment un rôle, dans la mesure où, du
côté syndical, on acceptait qu'un tel comité existe, il ne
faudrait pas qu'à la demande d'une seule des parties, il devienne
finalement un instrument pour l'une des parties pour gagner des points sur une
chose très précise, mais que si, d'un commun accord, les parties
demandent à ce conseil d'intervenir sur la place publique, il puisse le
faire.
Ceci dit, cela n'empêche aucunement que le comité, proprio
motu, indépendamment de la demande des parties, puisse diffuser
l'information qu'il juge adéquate.
M. Brochu: Cela répond à ma question, parce que je
me demandais justement si, entre ces deux options, le comité pouvait
d'office dire: On fait rapport.
M. Johnson: Ce que l'on dit, c'est qu'obligatoirement il doit
faire rapport à la population dans trois circonstances, trente jours
après que les offres patronales sont présentées au
syndicat donc, en pratique, 90 jours après le dépôt
des demandes syndicales deuxièmement, à l'expiration de la
convention collective et, troisièmement, si les deux parties lui
demandent de le faire. Dans les autres cas, évidemment, il n'est pas
obligé de le faire, mais, par définition, proprio motu, il pourra
le faire.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Forget: M. le Président, j'ai une motion d'amendement
à présenter à cet article.
M. Johnson: Pourrait-on d'abord discuter de celui que j'ai
présenté?
M. Forget: II est automatiquement reçu, M. le
Président.
M. Johnson: II est reçu, bon!
Le Président (M. Laplante): Cela fait partie du...
M. Forget: M. le Président, sur un point... Je vais faire
la lecture de l'amendement et j'en ferai
l'exposé subséquemment. "Que le sous-paragraphe 2 du
paragraphe 99e de l'article 4 soit modifié en remplaçant, dans la
quatrième ligne, les mots "doit aussi" par le mot "peut" et en
remplaçant dans les quatrième et cinquième lignes, les
mots "en tout temps, à la demande des parties", par les mots "au public,
à tout moment qu'il juge opportun". Le conseil peut également
prendre connaissance des banques de données, des sondages, des
enquêtes, des analyses et de toutes autres sources sur lesquelles
s'appuie chacune des parties pour formuler ses propositions".
M. le Président, sur un point, je dois avouer que nous avions
envisagé également de supprimer la référence
à l'une des parties. Là-dessus, je vois que le ministre a
cheminé de la même façon que nous, lorsqu'en commission
parlementaire on nous a représenté qu'il serait dangereux
d'alimenter la stratégie d'une des parties en lui permettant ce recours
de manière unilatérale. C'est fort bien, mais, en excluant cette
possibilité et en permettant aux deux parties de demander un rapport, ce
à quoi je ne suis pas nécessairement opposé, il reste que
rien, dans le reste de l'article, ne permet de s'assurer non pas sur la
question de ce qu'on appelle le "timing" l'Académie
française n'est pas rendue à "t", on ne sait pas encore si c'est
francisé ou si cela le deviendra mais sur la décision
quant au moment, à l'opportunité d'émettre un avis ou non,
on a donc une mesure par l'amendement que vient d'apporter le ministre qui
empêche chacune des parties de jouer de stratégie quant au moment.
Chacune des parties peut continuer à jouer de stratégie quant au
contenu de l'information. Le reste de l'amendement vise justement à
donner à ce conseil d'information un rôle qui soit autre que celui
d'être l'espèce de porte-voix de l'une des parties ou même
des deux parties en disant: Les patrons offrent telle chose qui a telle et
telle implication. La partie syndicale demande telle chose qui a telle et telle
implication. La seule base sur laquelle le conseil d'information pourrait
s'asseoir ou asseoir ses renseignements, serait les dires, les
allégués de l'une, de l'autre ou des deux parties. Or, on sait
tous que l'information, ce qu'on choisit de dire, comme ce qu'on choisit de
taire...
Le Président (M. Laplante): Est-ce que je dois comprendre,
à ce moment, M. le député de Saint-Laurent que vous parlez
sur la recevabilité, mais en même temps, vous parlez sur le
fond?
M. Forget: Sur le fond. Personne n'a soulevé la question
de recevabilité.
Le Président (M. Laplante): C'est parce que j'aimerais,
pour être correct avec le journal des Débats...
M. Chevrette: C'est trop long de parler sur la
recevabilité, on ne finit plus, on serait mieux de la battre si on n'est
pas d'accord.
Le Président (M. Laplante): Je vais la juger recevable
tout de suite pour enlever toute ambiguïté.
M. Chevrette: Cela va mieux comme cela. M. Forget:
Oui.
Le Président (M. Laplante): Je la juge recevable tout de
suite.
M. Forget: Vous la soulevez et vous la tranchez dans votre for
intérieur.
Le Président (M. Laplante): Je la tranche en même
temps. C'est pour le minutage surtout, au cas où cela
s'éterniserait.
M. Johnson: M. le Président, si l'amendement est
recevable...
Le Président (M. Laplante): Elle est recevable. Vous
savez, on ne sait pas à quoi s'en tenir parfois, si vous commencez
à parler pendant une demi-heure, trois quarts d'heure sur le même
article, je suis obligé de vous arrêter à ce moment, parce
qu'il y en a plusieurs qui voudront faire la même chose.
M. Forget: C'est juste, M. le Président. Vous êtes
d'une sagesse exemplaire.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député de Saint-Laurent. On peut continuer.
M. Forget: Est-ce que dans la foulée de cette sagesse,
vous jugez l'amendement recevable ou dois-je plaider sur la
recevabilité?
Le Président (M. Laplante): II est recevable.
M. Forget: Merci. On sait tous qu'on peut jouer de
stratégie quant au moment où on invoque l'intervention d'un
tiers. L'on peut également jouer de stratégie quant aux
renseigements qu'on choisit de révéler ou aux renseignements
qu'on choisit de taire. C'est essentiellement par rapport à cette
possibilité de manipulation stratégique de l'information, suite
à des représentations entendues en commission parlementaire, et
je crois, des deux côtés, du côté patronal comme du
côté syndical, qu'il nous est apparu que si ce conseil
d'information jouissait d'une certaine autonomie pour avoir accès aux
sources des parties, idéalement... le ministre a fait allusion à
une espèce d'institut de recherches, etc., sur la
rémunération, et tout, les banques de données, mais ce
sont là des mesures administratives. Il reste que le conseil
d'information, s'il doit avoir une véritable crédibilité
auprès de l'information publique, il faut qu'il puisse dire: Voici
l'information que nous ont transmise les patrons. Ils disent que cela va
coûter $145 millions ou $85 millions. On a vérifié leurs
chiffres, leurs hypothèses, leurs banques de données, et nous, on
est d'avis que cela va coûter seulement $38 millions. Si le conseil
d'information est incapable
de dire cela, qu'est-ce qu'il va devoir faire? Il va devoir simplement
reproduire, d'une part, les allégations de la partie patronale, et
d'autre part, les allégations de la partie syndicale. Est-ce que le
public va véritablement être plus avancé?
On peut bien dire qu'il va pouvoir porter un jugement sur la
régularité des rencontres, sur le genre de rhétorique
utilisée par l'une ou l'autre des parties, ce genre de jugement de
caractère impressionniste. C'est très joli tout cela, mais le
public n'est pas tellement intéressé de savoir si les gens sont
venus régulièrement, sont arrivés à l'heure, s'ils
ont parlé pour ne rien dire, etc. Essentiellement, ce qu'ils veulent
savoir, c'est si une évaluation impartiale des réclamations ou
des offres des uns et des autres est raisonnablement justifiée par
l'information qui devrait la sous-tendre de part et d'autre. On a eu des
illustrations de cela durant la dernière négociation, alors que
dans le secteur de l'enseignement, on faisait des propositions quant aux ratios
que la partie patronale alléguait devoir coûter une somme
fabuleuse et que la partie syndicale évaluait à $1 million, $2
millions ou $3 millions au plus. Ce n'était pas un ordre de grandeur du
simple au double. C'était du simple au décuple. Il me semble que
c'est dans cet esprit qu'un conseil d'information est créé. C'est
afin de dégonfler les mythes, les exagérations et de ramener
aussi un certain esprit de réalisme dans les positions respectives des
parties.
Encore une fois, c'est compliqué. Les conventions collectives
elles-mêmes font quelque centaines de pages avec les annexes. Cela prend
tout le petit change de l'équipe de fonctionnaires du Conseil du
trésor pour analyser les mandats et essayer de deviner les implications
en coût sur une période d'années de demandes syndicales et
même d'offres patronales, parce que le problème est aussi
compliqué d'un côté que de l'autre. Je mets au défi
un conseil d'information constitué d'honnêtes personnes, mais pas
équipé, de passer des jugements qui ont quelque vraisemblance sur
les chiffres et leurs implications. Alors, autrement dit, si on veut leur
donner un rôle autre que celui de simplement dire: Ah oui! Il y avait une
convocation d'une réunion à 8 heures. Les gens sont
véritablement arrivés à 8 heures ou à 8 h 5 et ils
ont effectivement parlé pendant douze heures cette journée. Ils
avaient l'air de parler de quelque chose qui avait du bon sens, mais on n'est
pas en mesure de dire si ce qu'ils disaient avait du sens ou non. Bon! C'est
une espèce de rapport-progrès qui est dénué de
toute signification, et je ne suis pas sûr que les services
gouvernementaux, même dans un contexte d'une entente avec la partie
syndicale pour échanger de l'information, ce qui se fait plus ou moins
à des degrés divers lors de chaque négociation, je ne suis
pas sûr, étant donné le silence de la loi sur le rôle
du conseil d'information, que les membres du conseil d'information vont vouloir
prendre sur eux de prendre connaissance de ces autres données et surtout
de les utiliser pour une confrontation, en quelque sorte, avec les
données des parties.
La loi ne leur permet pas explicitement de faire ça. Ils vont
être portés à interpréter leur rôle de
façon restrictive, parce que, malgré tout, ce sont des gens qui
doivent continuer à vivre dans la société, qui vont, d'une
façon ou d'une autre, être vaguement tirés du milieu, soit
des affaires sociales, essentiellement. Ils ne prendront pas plus de risques
avec leur propre crédibilité dans ce milieu-là, qui va
être, plus ou moins, leur cadre de vie, à différents titres
on ne sait pas encore qui ils vont être en pratique, en chair et
en os, mais ce ne sera quand même pas des Martiens ou des gens descendus
de la lune ils vont regarder leur mandat et vont dire: Bon! D'accord, on
va faire cette corvée, puisque le gouvernement nous le demande et
l'intérêt public le commande, mais on ne prendra pas plus de
risques qu'il faut, on ne prendra pas plus de droits qu'on en a, et si la loi
ne leur donne pas le pouvoir de regarder les chiffres des parties, ils ne les
regarderont pas. Je peux vous faire cette prédiction aussi.
J'en fait plusieurs, des prédictions, mais c'est parce que,
forcément, il faut bien en faire si on critique la loi. Autrement, on
dit: On va faire adopter n'importe quelle loi et on verra bien. Mais ce n'est
pas tout à fait satisfaisant. Je pense qu'on peut faire la
prédiction que les gens vont minimiser leurs risques. Pour ma part, il
m'apparaîtrait, M. le Président, qu'il serait opportun qu'ils
puissent prendre connaissance des données. D'ailleurs, cela a
été suggéré.
Pour ce qui est de la question du "timing", entre guillemets...
M. Chevrette: Temps opportun...
M. Johnson: ... une discussion tout à l'heure...
M. Forget: C'est que l'Académie française, c'est
ça, n'est pas rendue athée et on fonctionne sur la
présomption qu'ils vont l'admettre, comme...
M. Chevrette: On n'aurait jamais dû parler, on va vous
donner un élan de deux minutes encore.
M. Forget: ... briefing a été admis,
paraît-il. Pour ce qui est de la question de l'opportunité du
moment...
M. Chevrette: Ah! ça, c'est bien dit. M. Forget:
N'est-ce pas?
M. Chevrette: II parle le français par coeur. (21 h
45)
M. Forget: ... la possibilité d'avoir la
discrétion, quant au choix du moment, peut être importante pour le
conseil d'information. Qu'il le fasse à des délais fixes, pas
d'objection. Je pense que c'est un minimum. Qu'il le fasse à la demande
des parties, à supposer que les parties ne s'entendent jamais pour
ça, il n'y aurait certainement pas d'objection là non plus. Mais
que la commission qui aurait pour mission, en vertu de la loi, d'informer le
public ne puisse pas décider qu'étant
donné l'évolution du conflit, peut-être des
grèves déjà déclenchées, des comportements
et des offres et des contrats, et de l'information des faits nouveaux
révélés à la table des négociations, sa
propre conclusion sur les données auxquelles il aurait accès en
vertu du reste de l'amendement, et tout à coup, il devient
d'intérêt public qu'il se prononce. Pourquoi ne le ferait-il pas?
Qu'est-ce qu'on craint, dans le fond? Ou c'est un conseil d'information neutre,
raisonnablement neutre et crédible, ou il ne l'est pas. S'il l'est et
s'il juge opportun d'intervenir et s'il a accès à l'information,
je trouve difficile d'imaginer ce qui gênerait cela. Bien sûr, une
des parties va peut-être crier au meurtre parce que dans le silence du
conseil d'information, il se peut qu'une des parties se trouve
avantagée; c'est bien clair. D'un autre côté, c'est presque
un argument pour ne pas avoir un conseil d'information, à la limite. Si
l'information objective et neutre d'un organisme qui est crédible
s'il n'a pas cela, il n'a pas de raison d'exister est de nature à
défavoriser une partie et qu'on en fait une raison pour ne pas qu'il se
prononce, on va en faire une raison pour ne pas créer le comité,
au départ. Je ne vois vraiment pas d'objection à ce qu'il prenne
l'initiative d'une déclaration.
M. Johnson: M. le Président, sur l'amendement du
député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond, s'il vous plaît.
M. Johnson: M. le député de Richmond, oui.
M. Brochu: Si le ministre me permet...
M. Chevrette: Vous préférez que M. le ministre
parle le dernier.
M. Brochu: Un bref commentaire... Oui, je pense que c'est le
ministre qui va clore, en principe, la discussion là-dessus.
Le Président (M. Laplante): II reste un poste comme
président de commission parlementaire; si vous voulez poser votre
candidature, c'est le temps.
M. Brochu: M. le Président, au sujet de la motion
d'amendement présentée par le député de
Saint-Laurent, la première partie de sa motion, je me pose une question
sur l'opportunité de cette première partie de la motion où
il dit: "Le conseil peut faire rapport au public à tout moment qu'il
juge opportun. " Tantôt, j'ai posé une question au ministre sur
les différentes possibilités que ce conseil avait de faire
rapport, justement, et le ministre a fait un éventail de trois
possibilités; d'abord, le conseil est tenu par obligation de faire un
rapport public dans les trente jours qui suivent la date du dépôt
des propositions, cela va d'un côté. De l'autre côté,
à la demande des parties, le conseil doit, à ce moment-là,
faire rapport et le ministre m'a indiqué, également, que
d'office, le conseil pouvait, s'il le juge opportun, faire rapport.
Dans la première partie de la proposition du député
de Saint-Laurent, je me demande si ce ne serait pas un peu redondant de vouloir
écrire dans le texte de loi que le conseil peut faire rapport à
tout moment qu'il juge opportun, puisque c'est déjà prévu
par le législateur implicitement dans le texte de loi.
J'ai posé la question tantôt et le ministre nous a
répondu, avant que l'amendement soit déposé, qu'il y avait
ces trois possibilités et que le conseil devait aussi, tel que c'est
dit, faire rapport en tout temps, à la demande des parties, mais que
d'office, il pouvait le faire.
M. Bisaillon: ... compris.
M. Johnson: M. le Président, pour commenter
brièvement, il y a deux choses dans l'amendement du député
de Saint-Laurent; il y a la notion: "Le conseil peut faire rapport au public
à tout moment qu'il juge opportun...
M. Brochu: M. le Président, est-ce que le ministre me
permet de finir? J'avais un autre petit point.
M. Johnson: Je pensais que vous aviez terminé, je
m'excuse.
M. Brochu: Je suis près de terminer, mais il m'en reste
encore un petit bout.
Une Voix: Pour conclure.
M. Brochu: Pour conclure, oui. Dans la deuxième partie, le
député de Saint-Laurent fait état de quelque chose qui
pourrait quand même être utile et qui mérite peut-être
d'être étudié. C'est la question d'une banque de
données, d'avoir accès aux sondages, aux enquêtes, aux
analyses, en fait, d'avoir accès à tous les documents de base qui
peuvent être jugés utiles. Je raccroche cela à un
élément qui a peut-être été mon dada au cours
d'autres discussions autour de ces mêmes problèmes, lorsqu'on a
entendu, en commission parlementaire, les différentes centrales
syndicales s'exprimer sur la fameuse banque de données dont il avait
été question et dont le rapport Martin-Bouchard fait largement
état, aussi, comme d'une condition de base à la bonne entente et
aux bonnes négociations.
De ce côté-là, je pense que si le gouvernement avait
répondu favorablement à la création d'une banque de
données comme Martin-Bouchard le demandait avant même la
déposition de son rapport, je pense que cela répondrait, d'une
part, à ce que les centrales syndicales ont demandé en disant que
ce serait, pour l'ensemble, un outil valable, et deuxièmement, cela
répondrait peut-être à la préoccupation qui est
ramenée sur le tapis actuellement, indirectement, par le
député de Saint-Laurent. C'est ce que je voulais souligner au
ministre.
M. Johnson: M. le Président...
M. Chevrette: ...
M. Johnson: M. le Président, il y a deux
éléments dans l'amendement du député de
Saint-Laurent. Le premier, c'est celui qui veut faire dire à la loi que
le conseil peut faire rapport au public à tout moment qu'il juge
opportun. C'est à notre avis, une redondance dans la mesure où la
loi impose...
M. Forget: C'est du droit statutaire, cela s'interprète
restrictivement.
M. Johnson: Non, je m'excuse...
M. Bisaillon: Le ministre ne vous a pas interrompu.
M. Johnson: Disons qu'à la rigueur, dans la mesure
où les légistes seraient d'accord sur cela, je n'y vois pas
d'objection. Je pense que l'obligation de faire rapport à des moments
précis n'implique pas que l'organisme ne fasse pas rapport au moment
où il le juge opportun. Pour les fins de clarifier la chose, je n'ai
aucune objection à ce que nous incluions cette notion que "le conseil
peut faire rapport public à tout moment qu'il juge opportun". Cela va
pour cela.
Cependant, quant à la deuxième partie, je suis
évidemment totalement opposé à cela pour un tas de
raisons, la première étant que c'est, à toutes fins
pratiques, confier à ce groupe à peu près un rôle de
conseil d'arbitrage sans sentence exécutoire. C'est-à-dire qu'on
présume que ce conseil aura le fin mot, le bout du bout à lire,
"boute du boute", sur la question de la négociation...
M. Forget: Accepté par l'académie.
M. Johnson: ... et sur l'évolution du dossier. Il faut se
rappeler que dans son mandat, il est chargé d'informer le public sur les
enjeux de la négociation, la position respective des parties, les
écarts les séparant, le déroulement de la
négociation. Cependant, je pense qu'on ne veut pas lui donner un
rôle d'arbitrage sans sentence exécutoire, d'une part.
Deuxièmement, les pouvoirs que le député de Saint-Laurent
voudrait voir donner à ce groupe m'apparaissent vraiment exorbitants
dans la mesure où on parle carrément de contrôle
d'information.
Le député de Saint-Laurent a laissé entendre qu'il
faut que le groupe ait accès à toutes ces données des
parties elles-mêmes. Je vois assez mal ce groupe nommé en vertu de
la loi arriver dans un bureau d'une des centrales syndicales et dire:
Maintenant, je veux mettre la main sur les sondages de la
Férération des affaires sociales. Je pense que n'importe qui
trouverait que cela ressemble à un mandat de perquisition sans
autorisation.
En aucune façon, nous avons dit que nous considérions ce
groupe d'information comme la source alternative d'information. C'est une
source additionnelle d'information pour le public, pour les journalistes
spécialisés qui pourront aller les voir.
Je répondrai ici en même temps à la question du
député de Richmond, à une deuxième partie qui est:
Quels sont les instruments de ce groupe-là? Il est vrai que le
gouvernement n'a pas créé la banque de données à
laquelle on référait tout à l'heure pour des raisons qui
feront l'objet probablement de discussions publiques plus tard, mais
après consultation du Conseil consultatif du travail et de la main
d'oeuvre, nous avons choisi de ne pas le faire, il y a quelques mois.
Cependant, dans le cas des secteurs public et parapublic, il est aussi vrai que
le gouvernement s'est engagé à faire cet échange de
données avec ses partenaires patronaux comme syndicaux et que ces
données seront disponibles à l'aide d'un groupe d'analystes
à la fois pour les parties et pour le conseil d'information. Alors, il
aura de quoi se mettre sous la dent.
Pour conclure, M. le Président, j'accepterais cette partie de
l'amendement du député de Saint-Laurent qui vise à dire:
Le conseil peut faire rapport au public à tout moment qu'il juge
opportun.
M. Forget: M. le Président, je prends acte avec
satisfaction que sur la question du moment nous sommes tous d'accord. Je pense
sincèrement qu'il vaut mieux le dire que le taire, parce que, quand on
spécifie dans une loi statutaire les moments et les circonstances qui
doivent déclencher un avis du conseil par interprétation normale
des statuts, tout ce qui n'est pas explicitement prévu dans un statut
est implicitement exclu. Je pense qu'il serait prudent de l'inscrire et
j'applaudis, je suis bien content que le ministre soit du même avis.
Pour ce qui est de l'information, je pense qu'il est important je
comprends que le ministre ne veuille pas considérer cette
possibilité je crois qu'il est important de souligner à ce
moment-ci, et nous aurons certainement l'occasion d'y revenir le moment venu,
que ce conseil d'information n'est en vérité pas du tout un
conseil d'information. C'est à peine une espèce de reflet de ce
que disent les parties. C'est un peu comme un reportage assez superficiel du
déroulement des négociations, mais ça ne pourra, en aucun
moment, prétendre représenter une évaluation impartiale de
la position des parties. Je pense que c'est très important de souligner
ça. On ne veut pas lui faire jouer le rôle d'un arbitre, mais d'un
autre côté, on ne lui donne pas les moyens de faire autre chose
que de dire: Les négociations se déroulent de telle et telle
façon, les parties prétendent qu'il semblerait raisonnable de
couper la poire en deux, ce genre de raisonnement.
Cela, ce n'est pas un conseil d'information, c'est à peine un
effort de relations publiques et il me semble que si tout ce qu'on veut faire
est de jeter la lumière sur le processus de négociation,
permettre à l'opinion publique d'être mieux renseignée sur
le déroulement de la négociation, ce qui, en soi, est un objectif
valable, sans nécessairement faire intervenir un élément
nouveau, une
tierce partie pourrait assumer ou avoir l'air d'assumer le rôle
d'un arbitre. Bon, c'est une vision des choses.
A ce moment-là, on a un moyen beaucoup plus facile et qui
pourrait peut-être être plus efficace, c'est tout simplement de
laisser les journalistes faire leur travail plus complètement
vis-à-vis des négociations en faisant des négociations
publiques, en permettant que les séances de négociation soient
accessibles à la presse. Après tout, on discute de services
publics, d'impôts publics et de privation de services publics.
M. Bisaillon: Vous savez que cela s'est déjà fait
et que ça n'a pas été heureux.
M. Forget: II reste que c'est le but que le gouvernement poursuit
indirectement. Ce serait plus conforme à la vérité des
choses que de dire: Dans le fond, on va envoyer des reporters dont on va
créer les postes par une loi, une espèce d'agence de presse qui
va assister aux délibérations, prendre connaissance des documents
des parties et qui va faire, de temps à autre, des déclarations
sur ce que ça veut dire. Mais ce n'est rien d'autre qu'une espèce
de reflet indirect de ce qui se passe à la table de négociation,
sans prétendre pouvoir exprimer un avis indépendant sur ce qui
s'y passe.
C'est du reportage, ce n'est même pas la rédaction
d'éditoriaux, si vous voulez. C'est le reportage du déroulement
d'une négociation, ce n'est même pas un effort de porter
vis-à-vis des négociations, les jugements que portent les
éditorialistes.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Joliette-Montcalm.
M. Forget: Dans cette mesure, M. le Président, je pense
que ça ne contribuera à rien de neuf, essentiellement. Même
si les parties disent: On est bien intéressé à avoir
ça, c'est parce que dans le fond, chacune des parties, à ce
moment-ci et on est bien tôt dans le débat souhaite,
ordinairement, a tendance à croire qu'elle a raison. Chacune des
parties, syndicale ou patronale, s'imagine qu'un observateur de ce genre va
finalement dire plus de choses qui lui sont favorables que de choses qui lui
seraient défavorables, étant donné qu'elle croit avoir
raison au départ. C'est un travers bien humain, M. le Président.
Mais ça ne veut pas dire que parce que les deux parties sont d'accord
pour y voir quelque chose d'intéressant, ça va effectivement
être intéressant. Encore une fois, si cet organisme n'a pas un
pouvoir indépendant de vérifier et d'évaluer l'information
qu'il va véhiculer, une fois sur deux, il va être pris en flagrant
délit de véhiculer une information qui n'est que de la pure
propagande et, dans le fond, une exagération ou une sous-estimation de
ce sur quoi porte la négociation.
Je ne suis pas sûr que ce soit heureux dans ce sens. Encore une
fois, si on croit que le public n'est pas assez renseigné, si on pense
que c'est ça le problème des négociations, que le public
n'est pas assez renseigné sur les enjeux de la négociation, qu'on
fasse la délibération en public. Je fais la suggestion, M. le
Président, et j'observais avec intérêt les réactions
presque de surprise ou d'indignation de l'autre côté. C'est bien
sûr que ça ne serait pas une solution dans le cadre actuel des
négociations des secteurs public et parapublic. Parce que le public n'y
comprendrait rien, s'il était témoin de ce qui s'y passe,
étant donné leur caractère, étant donné
l'objet très diffus et confus, très technique sur lequel
ça porte.
Mais l'objection vaut de la même manière pour un conseil
d'information. Si le conseil n'est pas capable de s'élever par une
évaluation au-dessus des réclamations et des
contre-réclamations des deux parties, l'information qu'il va transmettre
sera incompréhensible, premièrement, parce qu'il va y avoir des
disparités. Le ministre dit d'avance que ce n'est pas le rôle du
conseil d'information de jouer à l'arbitre.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent, ça fait près de 30 minutes que vous parlez sur le
même paragraphe, le même article... (22 heures)
M. Forget: Trente minutes, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): Oui, lorsque vous l'avez
présenté, après qu'elle ait été
reçue. Alors, s'il y avait possibilité...
M. Forget: Ce n'est pas possible, M. le Président, je l'ai
présentée à 21 h 37, il est 22 heures. Et
là-dessus, le député de...
Le Président (M. Laplante): II a parlé quatre
minutes, le député.
M. Forget: Oui, et le ministre a parlé un peu aussi.
Le Président (M. Laplante): Le ministre a parlé
cinq minutes.
M. Forget: II en reste amplement d'autres, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): C'est simplement pour vous
demander de conclure. Je ne voudrais pas arriver comme un couteau dans un
gâteau.
M. Forget: Je conclus. Cela pourrait être, comme on dit,
contreproductif. Il reste que je ne vois pas, étant donné les
pouvoirs qu'on veut donner à cet organisme, qui va pouvoir donner une
information intelligible. On va reproduire à un autre niveau la
cacophonie, les contradictions, la complexité qu'on a déjà
trouvées dans les négociations des secteurs public et
parapublic.
Ce n'est pas un élément de solution. Ce n'est même
pas un élément de complication. C'est un élément
additionnel qui n'aura pas d'impact majeur, sauf de rendre encore plus confuse
la panoplie des organismes, des institutions, des
conseils et des comités qui sont impliqués dans la
négociation.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Je m'en prendrai à un petit bout de phrase
de l'amendement présenté par le député de
Saint-Laurent, quand il parle de tous les sondages, des enquêtes, des
façons d'analyser qu'ils ont pris pour en arriver à formuler
leurs propositions.
C'est peut-être faire fi de toute connaissance de ce qu'est la
négociation elle-même. Il faut laisser aux parties le soin de
déterminer leur propre stratégie. Il se peut qu'il y ait un
article ou deux ou deux objets de négociation qui soient
délibérément gonflés dans une demande syndicale en
vue d'en arriver à un échange de bon aloi à la fin de la
négociation.
Le conseil d'information dirait au public: Ne vous en faites pas, les
deux ou trois objets de négociation qu'il y a là, le syndicat les
a délibérément mis pour pouvoir faire un échange
final. Aurait-il un rapport de forces, ce syndicat? Serait-ce extraordinaire de
voir comme cela aurait un impact public...
Il n'y a pas seulement cela qui me fatigue. L'esprit de la
résolution vise, en un mot, à dire: Vous avez beau
échanger, nous autres, le conseil des sages, on va vous dire quoi faire.
On va vous dire que vos analyses, vos sondages, vous ne les avez pas
publiés, mais que vous savez bien que, comme gouvernement, le dernier
sondage que vous avez fait vous indique que vous devez donner plus de salaires.
C'est quoi un rapport de forces, si on ne laisse pas les éléments
aux parties?
M. Forget: Je pensais que cela reposait sur la bonne foi, la
négociation.
M. Chevrette: La bonne foi, bien sûr. Même si vous
soutenez la bonne foi...
M. Forget: Je m'excuse, je me suis trompé.
M. Chevrette: On peut avoir de la bonne foi tout en ayant de la
stratégie.
M. Bisaillon: Je peux vous dire que cela fait longtemps qu'on a
remarqué cela.
M. Chevrette: Vous êtes donc bien placés, vous
autres, avec votre passé, pour parler de bonne foi.
M. Forget: On a appris quelque chose, au moins.
M. Chevrette: Pardon?
M. Forget: On a appris quelque chose au moins.
M. Chevrette: Oui, vous avez appris à faire des
gaffes.
Le Président (M. Laplante): Vous parlez toujours sur
l'amendement, M. le député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, c'est parce qu'il m'a
dérangé.
Le Président (M. Laplante): Je vous demande si vous parlez
toujours sur l'amendement. Vous pouvez continuer si vous avez autre chose
à dire.
M. Chevrette: J'y vais. Je vais être calme, et vous aussi,
M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Je suis très calme.
M. Chevrette: C'est bien. Selon moi, le conseil peut
également prendre connaissance de tout. C'est un comité qui
aurait pour but d'enrayer toute forme de marchandage éventuel entre les
parties, ce qui est de bonne guerre à la fin d'un contrat collectif et
même durant un contrat collectif. Je pense qu'un gouvernement a le droit
de s'enquérir de temps à autre des réactions de l'opinion
publique pour savoir comment les gens réagissent à telle et telle
proposition, et qu'il puisse, par la suite, s'aligner sur quelque chose de neuf
ou bien garder le statu quo. Cela correspond à un désir
majoritaire. Tout cela, du jour au lendemain, pourrait venir contrecarrer la
bonne marche d'une négociation. On peut être de bonne foi et
avoir, comme c'est accepté dans le domaine des relations de travail, un
marchandage ou échange de bon aloi dans le contexte de
négociation dans lequel on vit présentement.
J'ai l'impression qu'on voudrait lui faire jouer un rôle d'arbitre
et le rôle qu'on veut pourtant faire jouer, tel que l'a dit le ministre,
c'est le rôle purement et simplement d'un comité qui rapporte des
faits et qui fournit des données précises. Il y a des
comités techniques qui travaillent déjà ou, en tout cas,
ils sont sur le point de travailler, qui vont échanger de l'information,
et c'est à partir de ces données que les gens vont travailler au
cours des futures rondes de négociation.
Pour ma part, je trouve cela inacceptable. Nous allons carrément
nous prononcer contre, à cinq contre deux.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: M. le Président, une question au ministre, si
le ministre me permet. Il est évidemment question de notre fameuse
banque de données dont j'ai parlé tout à l'heure. Le
ministre, à une question que je lui avais posée en commission
parlementaire, m'avait indiqué qu'il y avait une autre forme que la
banque de données qui s'en venait, une espèce de bureau qui
fournirait de l'information. Le ministre peut-il nous dire si cela va
fonctionner à l'automne, pour la prochaine ronde de la
négociation? Jusqu'où cette banque de données va-t-elle
aller? Quelle forme précise est-ce que cela va prendre? Est-ce que cela
va servir aux parties à créer ce climat de confiance? Vont-
elles pouvoir de part et d'autre y puiser de l'information de base dont
elles peuvent avoir besoin pour la suite de leurs travaux?
M. Johnson: Cela fait au moins quatre fois que le
député de Richmond, depuis trois semaines, essaie de me tirer les
vers du nez sur cette question.
M. Brochu: A peu près.
M. Johnson: Tout d'abord, il y aura, comme je l'ai dit, un
échange de données entre le gouvernement et les
représentants patronaux des réseaux ainsi que les syndicats
impliqués dans les réseaux.
Deuxièmement, dans des décisions qu'il reste à
prendre et dans un avenir plus qu'immédiat, le gouvernement fera en
sorte que l'ensemble de ces données qu'il a entre les mains et qu'il est
prêt à partager soient accessibles et, troisièmement, il
tentera de faire en sorte que des recherches continuent sur ces données,
étant donné que les données fluctuent beaucoup dans le
domaine des conditions de travail.
M. Brochu: Vous devez avoir ces échanges.
M. Johnson: Là où le problème... Les
échanges auront lieu durant l'été.
M. Brochu: Est-ce qu'on présume que ce sera terminé
avant le 1er janvier?
M. Johnson: Absolument. Ah oui! absolument. L'échange de
données aura lieu avant l'ouverture du calendrier de l'automne. Ces
échanges de données se feront cette année, il n'y a aucun
doute là-dessus, pour que la négociation qui commence au 1er
janvier soit...
M. Brochu: Ces échanges de données, si je comprends
bien, se font quand même entre les parties. Ce n'est pas un organisme
indépendant qui forme une banque générale à
laquelle l'ensemble des parties ont accès?
M. Johnson: Le problème est de mettre sur pied, si on
devait avoir une banque générale qui touche le secteur
privé, le secteur public, l'ensemble, qui soit un gros institut, ce qui
était le projet que j'avais proposé au CCTMO mais qui n'avait pas
fait l'objet d'une acceptation des parties. Le problème c'est de mettre
cela sur pied.
D'autre part, il y a une chose qui est certaine. Il ne faudrait quand
même pas qu'on s'enfonce dans un carcan absurde où la partie
syndicale, entre autres, dirait: Nous vous reprochons de ne pas avoir fait le
centre de données. On dit: On ne peut pas créer d'institut en
trois mois. Là, vous allez nous reprocher de ne pas le faire. On veut
procéder à l'échange de données. Je m'attends que,
de bonne foi, on ne s'en prenne pas par définition à la
crédibilité de ces groupes de recherche qui les rendront
accessibles. Il ne faut pas jouer sur les deux tableaux et dire que le
gouvernement se garde des as de pique et demander de les jouer en même
temps. Il ne s'agit pas d'as de pique, il s'agit de données qui
existent...
M. Brochu: Par contre, là-dessus, le rapport
Martin-Bouchard...
M. Johnson: ... mais, entre cela et faire fonctionner un
institut, par exemple, il y a une marge.
M. Brochu: Le rapport Martin-Bouchard est quand même venu
longtemps avec cela.
M. Johnson: Je sais que Martin-Bouchard était venu et
c'est pour cela que le ministre du Travail est allé devant le Conseil
consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, qui a déposé un
projet de loi devant les membres. Ils ont dit non, ils n'étaient pas
satisfaits. Le patronat et les syndicats avaient des opinions diverses sur la
composition du conseil, le rôle, l'initiative du ministre du Travail,
etc.
On a dit: On va mettre cela sur la glace pour le moment, mais, ce qui
compte, c'est qu'on sait qu'il y a des données disponibles. Le
gouvernement du Québec est prêt à partager ces
données avec les interlocuteurs syndicaux.
M. Brochu: N'y aurait-il pas moyen que, dans un premier temps,
cela s'applique uniquement au secteur public?
M. Johnson: Dans un premier temps, oui. Je pense que ce serait
souhaitable.
M. Brochu: Cela simplifierait toute l'approche, en
réalité.
M. Johnson: Eventuellement, on pourrait procéder à
la création d'un institut, si on était capable de faire un
minimum de consensus auprès des parties.
M. Bisaillon: L'amendement sera-t-il adopté? Une Voix:
Non, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): L'amendement du
député de Saint-Laurent...
M. Johnson: Rejeté, M. le Président.
M. Forget: Le ministre me permettrait-il une question?
M. Chevrette: C'est le président qui peut vous autoriser
à cela.
M. Johnson: Oui, tout de suite après le vote.
M. Forget: Ce comité d'information, quel droit
d'accès va-t-il avoir à ces réunions d'échanges de
données et aux données elles-mêmes qui sont
échangées aux séances de négociation? Est-ce
qu'il va pouvoir déléguer un membre et regarder les gens
négocier?
M. Johnson: Non.
M. Chevrette: En vertu de 68, avec le juge Simard au bout...
M. Johnson: Ce n'est pas une négociation publique. Je ne
sais pas, d'ailleurs, où le député de Saint-Laurent a pris
la notion que le conseil en question était assis à la table de
négociation.
M. Forget: Non, je pose la question.
M. Johnson: C'est parce qu'il a mentionné cela tout
à l'heure dans son exposé, mais non, il n'est pas
prévu...
M. Forget: Alors, il va prendre les communiqués de presse
des parties et il va exprimer des opinions là-dessus.
M. Johnson: Ce n'est pas cela. Il y a des
téléphones qui existent, des communications qu'on peut
présumer qui vont s'établir; à un moment donné, un
journaliste qui fait la chronique syndicale dans un hebdomadaire ou dans un
quotidien n'est pas nécessairement au fait de ce qui se passe a douze
tables de négociation en même temps. On peut présumer, par
exemple, que, de la même façon que les journalistes peuvent savoir
ce qui se passe à une table, à partir de ce que leur disent les
parties, le groupe d'information aura ce type d'information pour l'ensemble des
tables, puisque c'est sa fonction.
M. Forget: II n'aura aucun droit d'accès. M. Johnson:
II n'a pas de droit...
M. Forget: II apprendra ce qu'on voudra bien lui dire.
M. Johnson: Si les parties voulaient qu'il y siège,
pourquoi pas? Mais si les parties le veulent.
M. Forget: Oui.
M. Brochu: C'est pour cela d'ailleurs que le CPQ disait que c'est
une espèce de boîte à lettres, en réalité. Il
reçoit toutes les demandes, mais il ne participe pas, il n'est pas
à table.
M. Johnson: Non.
M. Brochu: Le CPQ disait cela, c'est une espèce de
boîte à lettres. Il reçoit les recommandations.
M. Johnson: C'est une boîte à lettres qui est
capable d'analyser.
M. Brochu: Oui, d'accord.
Le Président (M. Laplante): L'amendement du
député de Saint-Laurent est-il adopté?
M. Johnson: Rejeté. M. Bisaillon:
Rejeté.
Le Président (M. Laplante): Rejeté sur division.
Maintenant...
M. Johnson: Je vais réintroduire la section... "Le conseil
peut, de plus, faire rapport au public à tout moment qu'il juge opportun
". A la fin du sous-paragraphe 2 de 99e, on dit: 'Le conseil doit aussi faire
rapport en tout temps, à la demande des parties si on tient
compte de l'amendement que j'ai introduit tout à l'heure .Le
conseil peut, de plus, faire rapport au public à tout moment qu'il juge
opportun ".
Le Président (M. Laplante): C'est une addition, M. le
ministre...
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Laplante): ... au paragraphe.
M. Johnson: Au paragraphe. C'est bien cela.
Le Président (M. Laplante): De la phrase: Le conseil peut
faire rapport au public à tout moment qu'il juge opportun.
M. Johnson: C'est cela. Adopté. M. Bisaillon:
Adopté. Le Président (M. Laplante): Adopté?
M. Forget: Adopté.
M. Brochu: Vous avez simplement oublié les mots "de
plus".
M. Johnson: De plus. Peut, de plus, faire rapport au public.
Le Président (M. Laplante): J'appelle l'article 99f.
M. Forget: J'ai un autre amendement.
Le Président (M. Laplante): A 99e?
M. Forget: Oui.
Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur.
M. Forget: Je fais la lecture de l'amendement.
Le Président (M. Laplante): Faites lecture.
M. Forget: "Que le sous-paragraphe 5 du paragraphe 99e de
l'article 4 soit modifié en
ajoutant dans la deuxième ligne, après le mot "tribunal"
les mots "le ministre de la Fonction publique doit déposer à
l'Assemblée nationale dans les trois jours de la décision du
lieutenant-gouverneur en conseil l'avis du juge en chef du tribunal et
l'arrêté en conseil décrétant la distribution dudit
conseil. Si l'Assemblée nationale ne siège pas, ce
dépôt a lieu dans les trois jours de la reprise de ces
travaux".
M. le Président, comme il s'agit d'un pouvoir
discrétionnaire ou presque de mettre fin à l'existence d'un
oganisme qui est censé informer le public, et quelles que soient nos
réserves dans l'absence des pouvoirs d'un tel conseil de s'informer de
sa propre initiative des objets qui font partie de son mandat, il reste qu'il
serait normal que si le juge en chef émet un avis, cet avis soit public
et que les motifs de la décision du Conseil des ministres le deviennent
par le fait même également.
M. Johnson: M. le Président, j'accepterais dans son
ensemble l'amendement, à ceci près, cependant. D'une part, je
pense qu'il faudrait référer au ministre. Ceci par opposition au
ministre de la Fonction publique, étant donné que la loi
relève du ministère du Travail.
M. Forget: Du ministère du Travail, d'accord.
M. Johnson: Question de cohérence. Donc, ce serait: Le
ministre doit déposer à l'Assemblée nationale. Le "trois
jours" m'apparaît un peu bref. La formule habituelle utilisée pour
ce type de décision, c'est plutôt quinze jours; on le retrouve
dans l'ensemble des lois sur les ordonnances.
M. Forget: Quinze jours, oui. M. Johnson: Quinze jours.
M. Forget: C'est toujours cela.
M. Johnson: J'accepterais qu'on introduise un sous-paragraphe
amendé, 5, qui se lirait comme suit: Le conseil est dissous par le
lieutenant-gouverneur en conseil, après avoir pris avis du juge en chef
du tribunal. Le ministre doit déposer à l'Assemblée
nationale dans les quinze jours la décision du lieutenant-gouverneur en
conseil et l'avis du juge en chef du tribunal et l'arrêté en
conseil décrétant la dissolution dudit conseil. Si
l'Assemblée nationale ne siège pas, ce dépôt a lieu
dans les quinze jours à nouveau de la reprise de ses
travaux.
M. le Président, je suis prêt à accepter
l'amendement. (22 h 15)
M. Brochu: Adopté, M. le Président. M. Johnson:
Adopté, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): Amendement adopté. Le
paragraphe complet de l'article 99e adopté?
M. Brochu: Adopté.
M. Forget: Adopté avec amendements.
M. Johnson: 99f?
Le Président (M. Laplante): Avec amendements. 99f?
M. Forget: II y a un amendement, M. le Président. Je ferai
la lecture de l'amendement. "Que le paragraphe 99f de l'article 4 soit
modifié en remplaçant, dans les sixième et septième
lignes, le mot "nationale " par le mot "provinciale".
M. Johnson: Vous êtes sérieux?
M. Forget: Oui. Le paragraphe amendé se lirait comme suit:
"Dans le cas des collèges, des commissions scolaires et des
établissements visés dans les paragraphes b), c) et f) de
l'article 1 de la Loi sur l'organisation des parties patronale et syndicale aux
fins des négociations collectives dans les secteurs de
l'éducation, des affaires sociales et des organismes gouvernementaux, le
partage des matières qui sont négociées et
agréées à l'échelle provinciale ou à
l'échelle autre que provinciale est déterminé
conformément à cette loi entre le 270e et le 180e jour
précédant la date d'expiration d'une convention collective ou de
ce qui en tient lieu."
M. le Président, je pense que cet amendement ne doit pas
surprendre le gouvernement...
Le Président (M. Laplante): Recevable.
M. Forget: ... puisque nous avons, dans le cas de toutes les lois
de l'Assemblée nationale, constamment soulevé cette objection qui
est basée sur des notions bien connues, des pratiques bien connues selon
lesquelles on veut, du côté gouvernemental, de façon
délibérée et même dans les occasions où
ça s'y prête le moins, M. le Président, ajouter sa pierre
à l'édifice référendaire. C'est fort...
M. Godin: C'est épouvantable! M. Chevrette: C'est
effrayant.
M. Godin: C'est du procès d'intention. Il y a une
différence entre "fédérale " et "nationale ".
M. Forget: On va s'indigner...
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous
plaît! Si vous voulez continuer, M. le député.
M. Godin: Le national, c'est la nation.
M. Chevrette: II y a une différence entre être
aveugle et voir clair.
M. Godin: C'est un colonialisme épouvantable!
M. Forget: Alors, on essaie de donner le change, M. le
Président...
M. Godin: Je n'ai pas de mot pour décrire la
situation!
M. Chevrette: Vous êtes chanceux qu'on soit de bonne
humeur.
M. Forget:... en créant par les mots...
Le Président (M. Laplante): Je suis disposé
à prendre vos noms si vous voulez prendre la parole après
l'intervention du député de Saint-Laurent.
M. Chevrette: C'est effrayant! C'est ça la teneur des six
articles importants. C'est épouvantable!
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm, s'il vous plaît!
M. Forget: Merci, M. le Président. Une Voix: M.
Joliette... M. Chevrette: Pardon?
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm, s'il vous plaît! Un peu de coopération!
M. Chevrette: Le député de Joliette-Montcalm, je
vais le reprendre.
M. Forget: M. le Président, on feint de s'indigner de
l'autre côté, mais on a eu suffisamment d'arguments basés
sur cette notion...
M. Chevrette: On aurait faim de bons arguments.
M. Forget: ... que le député de Joliette-Montcalm
devrait reprendre son calme, effectivement, et considérer que cette
façon de vouloir créer, par des mots, une réalité
qui n'existe pas sur le plan juridique...
M. Chevrette: Je m'excuse, M. le Président, mais c'est
trop fort.
M. Forget: ... pas dans le sens assez ambigu dans lequel le
gouvernement veut employer ce terme.
M. Chevrette: C'est épouvantable!
M. Forget: II est clair que nous allons nous y opposer à
chaque occasion et susciter, sur cette question, à chaque occasion, un
débat, n'en déplaise à nos amis d'en face qui voudraient
bien que ça passe comme du beurre dans la poêle ou que cela aille
de soi. D'ailleurs, là-dessus, nos amis de l'Opposition, du parti de
l'Union Nationale, évidemment, ont également
démontré leurs couleurs à plus d'une reprise. Nous voulons
et nous tenons même à ce qu'ils en fassent une nouvelle fois la
démonstration. Ils sont très bien partis, M. le Président,
si bien qu'un jeune député prometteur, du côté de la
majorité, a d'ailleurs déjà tracé les prolongements
qu'il voit dans l'attitude qu'adopte l'Union Nationale face à un certain
nombre d'initiatives gouvernementales. Il a dit entrevoir clairement la
probabilité que le Parti national populaire, l'Union Nationale et le
Parti québécois se regroupent dans une union sacrée,
à moins que ce soit... Non, c'est un jeu de mots trop facile, M. le
Président...
M. Johnson: Une union, n'est-ce pas? Me voilà!
M. Chevrette: C'est un mariage d'affaires, mon cher!
M. Forget: Et, d'ailleurs, on pourrait même supposer, M. le
Président, qu'ils vont aller chercher un chef du côté du
Parti national populaire, parce qu'on sait qu'ils ont...
M. Johnson: Des unions!
M. Forget: ... une surabondance de chefs de ce
côté-là et peut-être pas assez d'indiens, alors que,
de l'autre côté, il y a plus d'indiens que de chefs. On veut
certainement rétablir un certain équilibre.
Plaisanterie mise à part, M. le Président, parce que c'est
une question très sérieuse, malgré tout...
M. Chevrette: ... que vous la traitez.
M. Forget: Les réactions, de l'autre côté,
sont une inspiration directe. Il reste que je veux dénoncer une fois de
plus, les tentatives du côté gouvernemental. M. le
Président, le désordre apparent de la commission m'empêche
d'effectuer mon rôle avec le sérieux qui s'impose.
M. Johnson: J'ai hâte que ce soit à la TV, tout
cela!
M. Forget: Oui, c'est vrai, mais par les soins du leader,
apparemment, on n'aura pas la télévision dans les commissions
parlementaires; nous le déplorons, d'ailleurs, M. le Président.
De toute manière, il reste qu'à chaque fois que cela va se
présenter...
M. Johnson: Prononcez.
M. Forget: ... cela se présente de façon
véritablement très régulière à chaque
deuxième ou troisième projet de loi. Le gouvernement prend excuse
de n'importe quoi pour endosser...
M. Bisaillon: Sur l'amendement!
M. Forget: ... pour endosser ses habits
référendaires et se draper dans le...
M. Bisaillon: Là, vous parlez des autres projets de loi;
M. le Président, règlement!
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Sainte-Marie, je ne voudrais pas être méchant avec vous... A venir
jusqu'à il y a une demi-heure, la commission avait très bien
fonctionné, aucun obstacle de personne et j'aimerais que cela continue
de cette façon. Il me semble qu'il y aurait peut-être la
possibilité de s'entendre.
M. Bisaillon: M. le Président, je vous dirai que cela n'a
rien à voir avec ma question de règlement.
Le Président (M. Laplante): Allez-y avec votre question de
règlement.
M. Bisaillon: M. le Président, le député de
Saint-Laurent présente un amendement qui vise à enlever, dans
l'article 99f, le mot "national" pour le remplacer par le mot "provincial ". Il
me semble que l'argumentation du député de Saint-Laurent, il
pourra jaser pendant vingt minutes dessus, doit se limiter à la
portée du fait qu'on remplace le mot "provincial" par "national" dans
l'article 99f. Mais il me semble abusif que le député de
Saint-Laurent épuise le temps en nous parlant des autres projets de loi
qui n'ont rien à faire avec l'article 99f du présent projet de
loi.
Le Président (M. Laplante) M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Dans un projet de loi, M. le Président, le
remplacement des mots ne changera strictement rien. Je crois que même le
député de Sainte-Marie va l'avouer, cela n'a aucune signification
fonctionnelle. Ce n'est pas qu'on va négocier à un autre palier
qu'avant, à moins qu'on nous annonce des nouvelles, il me semble qu'on a
toujours eu des négociations centralisées.
M. Johnson: C'est M. Munro qui va s'en occuper.
M. Forget: Sous l'égide du gouvernement, il y a toujours
eu, depuis une dizaine d'années, le même genre de
négociation à une table centrale. Jamais on n'a dit que
c'était la table nationale, que c'étaient des négociations
nationales. Je suis sûr que le député de Sainte-Marie et
ses collègues de la majorité l'auraient prétendu, s'ils
l'avaient pu, à l'époque, mais maintenant qu'ils le peuvent,
justement, ils le prétendent; mais cela ne fait que confirmer ce que je
disais tout à l'heure, c'est une modification de pure forme qui n'est
motivée par rien de fonctionnel dans le projet de loi, qui ne vise
qu'à se parer d'un drapeau, comme d'habitude, à endosser les
vêtements référendaires ou
préréférendaires...
M. Chevrette: A l'ordre... M. le Président...
M. Forget: ... et à servir la cause qui est bien connue,
que l'on veut servir à toutes les sauces et à toutes les
occasions.
M. Chevrette: ... la pertinence...
M. Johnson: M. le Président, brièvement, pour
continuer dans l'allégorie...
M. Forget: C'est une interruption, M. le Président,
mais...
M. Johnson: Ah! Vous n'aviez pas terminé? Je m'excuse.
M. Forget: Non, je n'avais pas terminé. Mme
Lavoie-Roux: Ils n'aiment pas cela.
M. Johnson: J'ai senti une chute dans votre propos, et j'avais
cru...
M. Forget: Ce sont les variations du débit, mais si le
ministre a une déclaration à faire, je suis prêt à
l'écouter.
M. Johnson: Non, mais j'en étais simplement à votre
allégorie du survêtement référendaire et je me rends
compte que dans votre cas, vous faites du "jogging" sur place.
M. Chevrette: Elle était bonne!
M. Forget: Je la lirai dans le journal des Débats.
M. Chevrette: Vous la rirez demain matin.
M. Forget: Mon collègue de L'Acadie vient d'arriver et
elle a pris connaissance du résultat des sondages à la
télévision.
Mme Lavoie-Roux: Ils font bien de se mettre des vêtements
sacerdotaux.
M. Forget: Ils auront besoin de toute la protection
requise...
M. Chevrette: Ah Seigneur! Elle arrive, elle !
M. Forget: ... il ne semble pas que cette stratégie soit
tellement populaire, malgré tout. Il y a une bonne côte à
remonter de ce côté. C'est peut-être...
M. Johnson: On se contente de ce qu'on peut.
M. Forget: C'est peut-être une cause qu'on veut servir, M.
le Président, de l'autre côté.
Mme Lavoie-Roux: Vous ne riez pas vous.
M. Forget: Ils ont le droit de servir cette cause, ils ont le
droit de vouloir prendre toutes les
occasions pour édifier des symboles sur papier, c'est leur droit
le plus strict et, de toute façon, ils disposent de la majorité
pour le faire. Mais c'est notre rôle également à
l'Assemblée nationale de le dénoncer quand cela se fait et de
leur dire: Ils ne le font que pour des raisons étrangères aux
relations de travail, étrangères aux services publics et qui
n'ont de sens que dans le contexte préréférendaire. Je
crois que c'est tout à fait légitime de le dire. Je trouve
étonnant et un peu timoré de l'autre côté qu'on ne
veuille même pas l'admettre.
M. Johnson: Si le député de Saint-Laurent...
M. Chevrette: Trouvez-vous qu'on a l'air timoré?
M. Forget: ... qu'on prétende que cela va de soi, que
c'est toujours cela, que cela a toujours été cela. Or, cela n'a
pas toujours été cela, cela ne va pas du tout de soi. Il y a un
tas de gens qui ne sont pas d'accord avec vous, messieurs, et si vous le
faites, au moins avouez-le donc que vous voulez créer une symbolique
référendaire.
M. Johnson: Comme l'Union Nationale en 1966 qui a
créé la Bibliothèque nationale, l'Assemblée
nationale dans laquelle nous siégeons, qui figure sur notre papeterie et
tout cela. C'est vrai que c'est très très nouveau.
M. Forget: Cela leur a très bien réussi. Il reste,
M. le Président, que cela ne réussira pas plus cette fois-ci
parce que c'est faux au départ, c'est complètement faux. C'est
l'ambiguïté. Tout le monde sait très bien qu'il y a
plusieurs sens au mot nation. Tout le monde sait cela maintenant. Il y a eu
assez de controverses on a assez parlé pour ne rien dire sur le sujet
qu'on s'est finalement rendu compte qu'il y a plus d'une signification et quand
on utilise le mot on joue sur l'équivoque et on le fait de propos
délibéré. Il fut un temps où on le faisait
naïvement et peut-être qu'une autre formation politique l'a fait
naïvement. Je ne sais pas si c'est à son honneur ou quoi, mais au
moins c'était naïf et ces gens bénéficiaient du
bénéfice du doute. Aujourd'hui, il n'y a plus de doute, c'est
clair. C'est très clair, ce qu'on fait de l'autre côté et
c'est tout à fait normal qu'on le souligne et c'est tout à fait
prévisible également qu'on va défaire cet amendement et au
moins on aura soulevé le problème, une autre fois. Je peux
avertir d'ailleurs nos amis d'en face qu'on va le soulever chaque fois. S'ils
trouvent que c'est du temps perdu, ils peuvent se préparer d'avance
à perdre du temps chaque fois qu'ils vont le mentionner. D'accord?
M. Chevrette: Et cela vous donne une occasion de parler, à
part cela.
M. Forget: Exactement.
Le Président (M. Laplante): C'est tout, M. le
député de Saint-Laurent? M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président, quelques remarques
également sur la motion qui vient d'être présentée.
Disons pour commencer mes propos, M. le Président, que si la motion
avait été présentée par le Bonhomme Sept Heures, je
comprendrais très bien...
M. Forget: C'est le bonhomme dix heures.
M. Brochu: ... le fondement même de la motion même
qui nous est présentée. Etant donné qu'elle n'est pas
présentée par le Bonhomme Sept Heures mais qu'en apparence elle
est présentée par le député de Saint-Laurent,
là je me pose plus de questions. Parce qu'habituellement le
député de Saint-Laurent quand même fait une approche
très sérieuse et étaie ses choses avec beaucoup
d'arguments, mais dans l'approche qu'il nous fait aujourd'ui, je me pose de
sérieuses questions. Je revis actuellement le même scénario
qu'on a vécu lors de l'étude article par article de la Loi
créant la Société nationale de l'amiante, le projet de loi
70. Le député de Joliette-Montcalm se rappellera que le
même débat avait eu lieu à ce moment-là, le
même débat que l'Opposition officielle, le Parti
libéral...
M. Forget: Si c'est national...
M. Brochu: ... veut amener à ce moment-ci de nos
discussions pour faire tout un charivari autour du mot national a eu lieu
à ce moment-là. Tous les arguments qui peuvent être
amenés à ce moment-ci l'ont été et j'ai
l'impression que chaque fois qu'il va être question désormais du
mot national dans une quelconque législation, le Parti libéral va
se lever en s'offusquant en criant au martyr, en jouant la peur, en jouant les
traumatismes profonds comme s'il était touché...
Mme Lavoie-Roux: Elle est vraiment nationale celle-là.
M. Brochu: Je m'excuse auprès du député de
L'Acadie, je ne voudrais pas vous déranger dans votre réflexion
à haute voix.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le député...
M. Bisaillon: C'est parce qu'elle est euphorique un peu.
M. Chevrette: Elle a pensé aux Canadiens de
Montréal.
M. Brochu: Chaque fois, j'ai l'impression que cela va se
reproduire, cela va être le même scénario encore, on va
recommencer ce grand traumatisme comme si cela faisait appel à
l'intérieur du Parti libéral à une notion tellement
vague que cela fait peur, et je comprends, parce que j'ai
déjà eu l'occasion de l'indiquer également...
M. Forget: On a peur du vague...
M. Brochu: Ce n'est pas un reproche au point de départ,
j'y reviendrai tout à l'heure, c est d'abord une constatation, c'est que
le Parti libéral au Québec n'a jamais eu de racines
réellement nationalistes. C'est la première
réalité. Je pense que fondamentalement... Et c'est pour cela que
dès maintenant, dès qu'on voit apparaître le mot national
quelque part, on voit automatiquement apparaître tout à
côté le traumatisme du Parti libéral. Cette espèce
de phobie... (22 h 30)
M. Johnson: Freak out.
M. Brochu: ... plus ou moins consciente que, lorsqu'on parle de
quelque chose de national, c'est une atteinte à soi au lieu d'être
une affirmation tout à fait normale.
M. Johnson: Voilà.
M. Bisaillon: Très bien dit.
M. Brochu: Cela me fait dire que c'est encore plus illogique dans
la bouche du député de Saint-Laurent et même du Parti
libéral. Je vous rappellerai simplement, M. le Président, que
l'assemblée où on siège, qui est l'Assemblée
nationale, a été appelée ainsi à partir de 1966.
C'était avant l'Assemblée législative; elle est devenue
l'Assemblée nationale sous le gouvernement de l'Union Nationale.
Par la suite, comme on le sait, l'histoire a ses remous, le Parti
libéral a pris le pouvoir de 1970 à 1976. A aucun moment, je n'ai
entendu pleurnicher un quelconque député libéral faisant
état qu'il siégeait à une assemblée qui
n'était pas la sienne, qu'elle n'était pas représentative
de la nation québécoise.
M. Chevrette: II y en avait trop, ils ne se reconnaissaient
pas.
M. Bisaillon: Quel illogisme!
M. Brochu: A ce moment-là, si c'était si
douloureux, si illogique de retrouver dans quelconque endroit, surtout dans
l'appellation de l'Assemblée le mot national, comment se fait-il qu'un
si grand parti, qui a détenu à un moment donné le pouvoir
au Québec, n'ait pas pensé ou n'ait pas jugé bon de
prendre le temps d'un vulgaire amendement pour modifier l'appellation
même de l'Assemblée nationale, si c'est tellement crucial, si
c'est tellement douloureux, si ça l'affecte tellement?
Cela, M. le Président, je ramène un autre point parce que
le député de Saint-Laurent, dans son argumentation tout à
l'heure, a indiqué que le mot national, dès qu'il apparaît
dans un texte de loi, comme ce soir, a une coloration et une connotation
préréférendaire. Je vous rappellerai que lorsque
l'Assemblée législative est devenue l'Assemblée nationale,
il n'y avait pas de référendum. Il n'y avait donc aucune
connotation préréférendaire.
M. Johnson: Voilà. M. Bisaillon: Voilà.
M. Brochu: C'est clair, c'est simple, c'est net, c'est
précis.
M. Chevrette: Au moins 33% de l'Opposition présente a
compris.
M. Brochu: II n'y a donc aucune relation entre les deux. M. le
Président, je n'ai pas honte d'être humain, d'être ce que je
suis. Le député de Joliette-Montcalm non plus. Dans ce
sens-là, je pense que c'est normal que l'on recherche l'affirmation de
soi et sa propre identité. C'est normal. C'est tout à fait
logique.
Lorsque, dans une famille, on est fier des liens familiaux, on s'affirme
en tant qu'entité familiale. On a cet esprit de famille et on n'en a pas
honte non plus. Je pense que ce n'est pas dénier les autres, ni les
voisins, ni qui que ce soit que de s'affirmer soi-même dans le respect
des autres.
Lorsqu'on étend ce concept d'identité familiale à
une dimension beaucoup plus large, celle d'une nation, sur le plan de plusieurs
familles réunies, on ne doit pas avoir peur de s'affirmer, d'affirmer
l'esprit de cette grande famille qui est, en quelque sorte, le nationalisme,
qui ne dénie pas, dans notre esprit non plus, M. le Président,
l'existence des autres, les bonnes relations avec les autres, et ainsi de
suite. C'est un sain nationalisme.
C'est toujours dans ce sens que l'Union Nationale a oeuvré. Moi,
honnêtement, c'est de cette façon que je conçois le
nationalisme. Ce serait nier la réalité que de vouloir
éviter de parler de toute forme de nationalisme en croyant que ça
va aller à l'encontre de quelqu'un ou de soi-même. Il n'y a aucune
relation à quelque chose de mauvais. Au contraire, c'est souhaitable,
pour autant, comme je le disais, que ça reconnaît les autres,
comme une famille ne sera pas contre la famille voisine du fait qu'elle existe,
qu'elle s'affirme. Pour autant qu'il y a un respect mutuel, il n'y a pas de
problème.
C'est pour ça que l'Union Nationale s'inscrit dans un sain
nationalisme, tout en respectant la confédération dans laquelle
nous vivons actuellement. C'est là notre position. C'est pour ça
qu'on n'a jamais voulu se faire les agents de la peur, comme le Parti
libéral l'a malheureusement fait au Québec. Ceux qui font le plus
de travail pour préparer le référendum actuellement, ce
sont les libéraux à cause de la peur qu'ils entretiennent
volontairement. Ils ont encore, dans leur subconscient, les camions de la
Brink's. Ils les font servir actuellement en transportant et en voulant y
enfermer toute idée de nationalisme...
M. Johnson: Le camion antiémeute aussi.
M. Brochu: ... en tentant de se réfugier, du moins dans ce
qui reste d'éléments, derrière cette grande peur en
espérant que les gens fonctionnent encore là-dedans, en voulant
dénier les réalités.
Je ne pense pas qu'il y ait aucun citoyen québécois,
même anglophone j'ai des anglophones dans mon comté, j'ai
des anglophones qui sont nationalistes également qui reconnaisse
la réalité du fait québécois, pour autant que c'est
un sain nationalisme, une saine affirmation de soi. C'est tout à fait
normal et cela va continuer d'être la position de l'Union Nationale, une
position nuancée, ferme, sur la question du nationalisme, dans le
respect des autres.
Le député de Saint-Laurent, dans son amendement... Je
trouve cela malheureux parce que, fondamentalement, l'amendement a une saveur
antinationaliste. Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, cela
dénote que le Parti libéral n'a aucune racine au Québec.
C'est un parti circonstanciel qui est simplement la représentation d'une
configuration beaucoup plus grande qui se trouve à un autre niveau de
gouvernement, à Ottawa. Cela exprime seulement cela. Cela exprime
seulement qu'il est la filiale d'une maison mère et qu'à ce
moment-là, les gens ne regardent pas vers la population du
Québec, mais sont tournés plutôt vers l'autre
côté. C'est simplement dans ce sens-là.
Cela m'apparaît exactement comme cela le fait de vouloir nier la
réalité du nationalisme qui est une réalité qu'on a
devant les yeux, avec laquelle, non seulement on doit s'habituer à
vivre, mais qu'on doit favoriser, d'une façon saine et normale.
Le député de Saint-Laurent a indiqué tout à
l'heure, que ce matin il y avait eu des déclarations d'un
député du Parti québécois qui espérait que
l'Union Nationale appuie le Parti québécois dans certaines
approches...
Mme Lavoie-Roux: ... examiner de votre bord, ils vous
servent.
M. Brochu: J'espère que je ne dérange pas encore
une fois le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Du tout, cela m'amuse beaucoup.
M. Brochu: Est-ce que vous pourriez vous amuser en silence, en
vertu du règlement?
Mme Lavoie-Roux: Certainement.
M. Chevrette: Cela aussi, cela me choquerait.
M. Brochu: Merci. Je m'excuse d'être un peu direct, mais
habituellement, je n'interromps pas le député de L'Acadie
lorsqu'elle prend la parole. Je me fais un devoir de le faire.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, je n'ai pas dû vous
interrompre souvent dans le passé.
M. Brochu: Non, mais une habitude, cela se prend vite,
madame.
Je reviens sur mes propos pour dire que le député de
Saint-Laurent a tenté d'indiquer que, lors d'une déclaration du
député de Vanier ce matin, celui-ci avait indiqué qu'il
espérait que l'Union Nationale se rapproche du Parti
québécois sur certaines positions nationalistes, sur
certains projets, etc.
J'ai lu rapidement l'article en question et il est normal et logique que
des membres du gouvernement, d'un côté ou de l'autre de la
Chambre, fassent des déclarations comme celle-là, en souhaitant
qu'il y ait des rapprochements sur différentes questions, comme je l'ai
également fait lorsque j'ai fait des déclarations sur le projet
de loi concernant la Société nationale de l'amiante, selon
lesquelles j'espérais pouvoir rallier de l'autre côté, sur
les choses qu'on défendait à ce moment-là, d'autres
députés.
Je pense que ce rapprochement, le député de Saint-Laurent
a voulu s'en servir aux fins de sa motion, mais il n'a rien à voir dans
la discussion. Si on voulait argumenter de cette façon, on pourrait dire
également: Où est rendu le rapprochement entre le Parti
libéral et le Parti québécois, étant donné
que le chef du Parti libéral, Claude Ryan, à la veille des
élections, vous a appuyés, Messieurs du Parti
québécois. Il a recommandé à tous les
Québécois de foutre dehors...
M. Johnson: C'est une bonne idée.
M. Bisaillon: II a même donné l'accolade à
votre leader parlementaire.
M. Brochu: Je souligne en même temps les propos de celui
qui allait devenir plus tard le chef du Parti libéral du Québec;
il disait de mettre dehors tous ces pourris libéraux. Ce sont les mots
qu'il a employés dans ses éditoriaux, de mettre dehors tous ces
pourris libéraux qui étaient au Parlement. C'est lui-même
qui a indiqué aux Québécois de voter pour le Parti
québécois pour foutre dehors "cette gang" de mous qu'il y avait
à l'Assemblée nationale. Il est maintenant le chef de "cette gang
" de mous.
M. Johnson: Etes-vous bien sûr que vous ne voulez pas
retirer votre amendement?
M. Brochu: M. le Président, je termine mes remarques
là-dessus, pour dire que cette partie de l'argumentation du
député de Saint-Laurent n'était pas directement
reliée à sa motion. Si elle l'est, il y a cet exemple qu'on peut
rapporter et si elle persiste à l'être, il y a d'autres exemples
également qu'on peut apporter dans le même sens, pour
démontrer que le Parti libéral du Québec n'a pas de racine
au Québec, n'a pas de coeur au Québec, n'a pas réellement
de relations avec la
population pour savoir exactement ce qui se passe, tant et si bien que
la tour d'ivoire s'est vidée en 1976. Indépendamment de tous les
beaux sondages qu'on pourra nous apporter comme arguments dans quelques minutes
parce qu'il y a eu des sondages qui ont été
rapportés dernièrement les vrais sondages qui vont avoir
lieu et qui ont toujours été les seuls vrais sondages, c'est
lorsque les élections se produisent, comme cela a été le
cas en novembre 1976, et comme cela va être le cas bientôt. C'est
le vrai sondage par lequel la population se prononce. Mais en ce qui concerne
le mot national et en ce qui concerne le sain nationalisme, nous en sommes, de
l'Union Nationale; on ne jouera pas au Bonhomme Sept Heures, on va appeler les
choses par leur nom, nous sommes fédéralistes, nous sommes
également nationalistes, et nous voulons garder cette position juste et
précise. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, mes commentaires seront
aussi brefs que ceux du député de Richmond et sûrement
moins percutants. Je voudrais cependant vous rappeler ma question de
règlement et surtout, comme il ne l'a pas retenue, la rappeler au
député de Saint-Laurent en soulignant deux choses. La
première c'est que, de façon claire, le député de
Saint-Laurent a indiqué dans son argumentation que ce n'était pas
la première fois qu'il soulevait au niveau... On est ici pour
étudier article par article un projet de loi qui concerne les relations
de travail. Le député de Saint-Laurent a clairement
indiqué que ce n'était pas la première fois qu'il
présentait ce genre d'amendement. Son argumentation a indiqué
clairement que le fond n'avait rien à voir avec un projet de loi sur les
relations de travail, mais était strictement politique et il a aussi
indiqué peut-être, M. le Président, pourriez-vous
passer le mot aux autres présidents qui pourront un jour siéger
à votre place lors de nos prochaines sessions de la commission du
travail qu'il recommencerait, chaque fois que le mot national serait
utilisé dans un projet de loi.
Il me semble que c'est un peu sectaire de la part du
député de Saint-Laurent qui nous a habitué à une
autre attitude que celle-là. Je regarde d'ailleurs les attitudes du
député de Saint-Laurent depuis les dix dernières minutes.
Vous avez remarqué comme moi que le député de
Saint-Laurent, depuis dix minutes, s'est remis à fumer, ce qu'il avait
perdu comme habitude depuis l'étude du projet de loi 45, qu'il
arbore...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce de la persécution, M. le
Président?
M. Bisaillon: ... une cravate qui laisse au moins percevoir un
certain nationalisme.
M. Forget: Elle est belle, n'est-ce pas? Québec, fleur de
lys.
M. Bisaillon: On pourrait souligner les fleurs de lys qui ornent
la cravate du député de Saint-Laurent. Je suis certain, M. le
Président, que dans le comté de Saint-Laurent comme dans tous les
autres comtés du Québec, il y a des gens qui se
définissent comme fédéralistes, nationalistes, peu importe
le terme qu'on utilisera, mais qui comprennent qu'au Québec, quand on
utilise le terme national, cela n'a rien à voir avec une option
politique plutôt qu'une autre, mais c'est une façon d'identifier
les individus par rapport à eux-mêmes et entre eux.
Le député de Richmond faisait tantôt allusion
à des anglophones qui habitaient son comté. Les anglophones, que
je sache, M. le Président, qui habitent le Québec sont des
Québécois et à titre de Québécois, ils font
partie de la nation québécoise. Quand on utilise le terme
national, c'est pour indiquer une collectivité qui regroupe des
idéologies différentes. Il me semble que c'est une bataille
inutile que le député de Saint-Laurent fait, compte tenu surtout
des orientations qu'on lui connaît à l'intérieur de sa
propre formation politique.
Il ne faudrait peut-être pas que le député de
Saint-Laurent nous amène à faire l'analyse des différences
qu'il peut y avoir à l'intérieur de sa propre formation politique
en termes de provincialisme, de nationalisme et de fédéralisme,
parce qu'il serait peut-être le premier à regretter de
présenter de tels amendements. "National" pour nous, M. le
Président, c'est une façon d'identifier clairement à quel
niveau cela se situe, et cela se situe au niveau d'un peuple, d'une nation qui
est celle du Québec et cela s'oppose à provincialisme; le terme
provincial en France est utilisé un peu comme chez nous est
utilisé le terme régional. Je pense que le terme national, au
plan linguistique uniquement, est le terme qu'il faut vraiment utiliser et, en
conséquence, on devrait immédiatement proposer de battre
l'amendement du député de Saint-Laurent et de passer à des
choses qui concernent davantage les services essentiels dans le projet de loi
qui nous concerne.
M. Forget: Est-ce que le député...
Le Président (M. Laplante): Le député de
L'Acadie.
M. Forget: Seulement une question. Est-ce que le
député de Sainte-Marie, dans son intervention, a voulu soulever
une question de règlement implicitement?
M. Bisaillon: Est-ce que je l'ai fait?
M. Forget: Oui.
M. Bisaillon: Si je ne l'ai pas fait, c'est parce que je n'ai pas
voulu le faire.
M. Forget: Mais il y avait une question de recevabilité,
je pense, qui a été soulevée.
M. Bisaillon: Je vous prierais de croire, M. le
député de Saint-Laurent, qu'effectivement, quand je veux soulever
quelque chose, je le soulève. Je ne l'ai pas fait.
M. Forget: C'est parce qu'on peut... Au cas où son
intervention serait mal comprise, M. le Président, je voudrais...
M. Bisaillon: Je ne l'ai pas fait, M. le Président.
M. Forget: ... souligner que même si j'admets avoir fait
cette argumentation à d'autres reprises et même si j'ai dit
qu'explicitement elle n'avait rien à voir de façon fonctionnelle
avec le sujet...
M. Bisaillon: Je n'ai pas fait cela.
M. Forget: ... du projet de loi et que j'ai même admis que
c'était une...
M. Chevrette: M. le Président, il répond à
une question de règlement qui n'a pas été posée.
Qu'est-ce qu'on fait là?
(22 h 45)
M. Forget: Ce sont des affirmations qui ont été
faites.
M. Chevrette: Qu'est-ce qu'on fait là?
M. Forget: J'ai le droit de corriger après la fin, article
96...
M. Chevrette: M. le Président, appel au
règlement.
Le Président (M. Laplante): Question de
règlement!
M. Chevrette: C'est une directive que je vous demande. Depuis
quand un intervenant en commission parlementaire peut-il répondre
à une question de règlement qui n'en est pas une et qui n'a
jamais été soulevée?
Le Président (M. Laplante): Je vais vous l'expliquer pour
la prochaine fois, M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: C'est une directive que je vous demande.
Le Président (M. Laplante): Lorsque j'ai donné la
parole au député de L'Acadie, elle a préféré
la remettre au député de Saint-Laurent. Son temps court
actuellement. Il lui reste...
M. Chevrette: Pas pour parler d'une question de
règlement?
Le Président (M. Laplante): ... huit minutes.
M. Chevrette: Pour parler sur le fond.
Le Président (M. Laplante): Vous voulez que je vous
l'explique? Il a posé une question au député de
Sainte-Marie. Le député de Sainte-Marie n'a pas répondu,
en somme, à la question qu'il avait posée. Sur ce, le
député de Saint-Laurent a continué, et son temps court. Il
lui reste huit minutes encore d'intervention.
M. Chevrette: M. le Président, me permettez-vous?
Le Président (M. Laplante): Oui.
M. Chevrette: Je voudrais vous dire ceci: II a posé une
question au député de Sainte-Marie qui était la suivante:
Avez-vous soulevé une question de règlement? Le
député de Sainte-Marie a répondu: non. A partir de
là, comment le député de Saint-Laurent peut-il soutenir
que sa question de règlement aurait été
antiréglementaire si, par hasard, il l'avait posée, quand il dit
qu'il ne l'a pas posée? Voyons!
Le Président (M. Laplante): J'ai continué à
considérer, M. le député de Joliette-Montcalm, qu'il
était sur son temps, qu'il lui restait huit minutes.
M. Chevrette: Lui avez-vous demandé de changer
d'idée?
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm, je pense que...
M. Chevrette: Non, mais je vous demande si c'est possible...
Le Président (M. Laplante): ... parfois vous allez un
petit peu plus loin que ce que d'autres peuvent se permettre.
M. Chevrette: C'est possible, mais mosus!
Mme Lavoie-Roux: Respectez donc la présidence!
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît! Je
pense que je ne vous ai pas brimé dans votre droit de parole.
M. Chevrette: Je vais vous respecter pour un autre motif, mais je
vous demanderais de faire pareil. D'accord?
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, indépendamment du fait
que le député de Sainte-Marie ait soulevé, ait voulu
soulever ou ait paru soulever une question de règlement oui ou non, il
demeure qu'il a quand même soulevé un point. J'ai tout à
fait le droit de soulever une question de règlement, même si le
député de Sainte-Marie n'est pas d'accord, pour souligner que,
quels que soient les
arguments que j'aie utilisés, ils étaient pertinents
à l'amendement que je présente et qu'il n'y a pas d'objection qui
puisse être formulée de ce côté de la part des
ministériels. Il est tout à fait loisible à l'Opposition,
d'ailleurs, à tout membre de la commission de soulever un point de
caractère général, pourvu que l'article, l'amendement ou
le paragraphe que nous étudions y donne ouverture. Certainement,
celui-ci y donne ouverture parce qu'il porte spécifiquement sur le
changement, l'introduction du mot "national" dans le projet de loi.
Je ne voudrais pas terminer là-dessus, puisque mon temps court,
j'ai encore quelques minutes, sans relever les propos du député
de Richmond qui a posé une question rhétorique, ce qu'on appelle
une question rhétorique, c'est-à-dire une question qui n'en est
pas une parce qu'il connaît la réponse...
M. Johnson: Belles-lettres.
M. Bisaillon: Ce n'est pas tellement différent pour ceux
qui répondent à des questions de règlement qui n'ont pas
été posées!
M. Forget: ... mais qui, malgré tout, mérite de
recevoir une réponse dans le cadre de nos délibérations.
Il a dit: Pourquoi le Parti libéral qui a été au pouvoir
pendant six ans n'a-t-il pas modifié les lois? Je pense qu'il serait
important qu'il se rende compte d'une chose. C'est peut-être un des
éléments qui distingue sa formation politique de la nôtre.
C'est que nous n'accordons pas une importance suffisante à des questions
de mots et au simple verbalisme pour introduire des amendements dans les lois
simplement pour changer des mots, sans avoir même la prétention ou
l'espoir de changer quelque réalité que ce soit. C'est de cela
qu'on est témoin ce soir: l'utilisation du processus législatif,
pas pour changer quoi que ce soit à la réalité, mais
simplement pour des fins de propagande. Je pense bien que l'Union Nationale se
pose la question en sachant très bien quelle est la réponse
à cette question. Il est clair que cela ne changera rien dans les faits.
On veut se parer d'un manteau préréférendaire. Qu'on le
fasse, si on y tient, mais qu'on s'attende qu'on le souligne de ce
côté-ci.
Pour ce qui est de l'identification ou de la fierté
d'appartenance, ou n'importe quoi, on n'a pas besoin des leçons
ambiguës et pas tellement impressionnantes de l'Union Nationale à
cet égard. On n'a de compte à rendre à personne ici,
autour de la table, relativement à cela. Pour ce qui est d'utiliser
notre Assemblée nationale et nos règlements nationaux de
l'Assemblée nationale, parce qu'on pourrait mettre ce mot à
toutes les sauces... Il s'agirait de le répéter un peu plus
souvent pour sombrer dans le ridicule, mais, cette fois, de façon
absolument définitive. On n'a qu'à l'accoler à peu
près à n'importe quoi de ce qu'on fait et on va voir dans quelle
situation vraiment ridicule et pénible on est acculé. C'est assez
facile. Je pourrais suggérer un tas d'autres applications du mot
national. On le trouverait à toutes les deux phrases et dans les phrases
où il manquerait, on pourrait ajouter deux ou trois
"québécois " ou "québécoises " dans les encoignures
et on aurait un langage qui serait absolument ridicule, un langage de
colonisés, justement, un langage africain du genre de ceux qu'on utilise
justement pour donner et payer de mots...
M. Bisaillon: Ils sont libérés.
M. Forget: ... des populations qu'on ne peut pas payer autrement,
sous forme de réalité.
M. Bisaillon: Vous utilisez le mot... Est-ce que le
député me permet une question? Quand vous utilisez le mot
africain, vous l'utilisez avec une espèce de ton un peu
méprisant. Est-ce que c'est exactement la réalité que vous
voulez dépeindre?
M. Forget: Je songe à des phénomènes sociaux
dont le député de Sainte-Marie pourrait peut-être prendre
connaissance, comme certains généraux africains ou certains
empereurs...
M. Johnson: Je savais qu'il viendrait, lui. Je le voyais entrer
dans la pièce. Idi, cher Idi, va!
M. Forget: Idi ou Bocassa... M. Johnson: Bon! Bocassa!
M. Forget: ... qui se sont intitulés empereurs et qui,
évidemment, par la magie des mots, pensent recréer une
réalité...
M. Johnson: II y a eu Taschereau aussi.
M. Forget: ... et c'est devant ce phénomène qu'on
se retrouve, M. le Président. D'ailleurs, il s'agit de voir la
nervosité, en face, depuis qu'on a commencé à parler de
ça et les habitudes nouvelles contractées de l'autre
côté.
M. Chevrette: C'est plutôt une déception...
M. Johnson: M. le Président, je ne voudrais pas faire
abusivement appel au règlement, mais je pense que le
député de Saint-Laurent a épuisé son droit de
parole et que, malheureusement, il confond nervosité avec une forme
d'exaspération devant ce qui se veut une perpétuation d'une
perception un peu bête de ce qui est recherché par la
normalisation de notre vocabulaire.
Une Voix: La ruse de l'éléphant!
Le Président (M. Laplante): II vous reste une minute
encore, monsieur.
M. Forget: M. le Président, le ministre ayant vidé
son sac, ainsi que le député de Richmond, je pense qu'on a obtenu
exactement le but recherché, qui est de montrer...
M. Bisaillon: Oui, enfin!
M. Forqet: ... premièrement, qu'on n'a aucune
raison valable à invoquer et qu'on est excédé qu'on
souligne une stratégie ou une tactique qui n'a d'autre but que de jeter
de la poudre aux yeux. C'était le but de notre discussion ici, ce soir,
M. le Président. Je suis parfaitement satisfait, quant à moi,
c'est le but habituel de ce genre de discussion...
M. Johnson: L'amendement est rejeté, M. le
Président?
M. Forget: ... et je pense qu'il sert sa fin, malgré tout.
Comme il est permis par nos règlements "national" de notre
Assemblée nationale et québécoise, M. le Président,
j'en suis fort satisfait.
M. Johnson: "Nationaux ", parce qu'il y a un pluriel aussi.
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie.
M. Johnson: Le vote...
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, M. le ministre, mais j'ai 20
minutes de droit de parole.
M. Johnson: Non, je m'excuse, mais je pensais que le
député de Saint-Laurent avait épuisé le droit de
parole du député de L'Acadie.
M. Chevrette: II me semblait que vous lui aviez donné
votre droit de parole.
Mme Lavoie-Roux: Non, il lui restait huit minutes...
M. Johnson: Je comprends, par ailleurs, que le
député de Saint-Laurent soit épuisé, mais...
M. Forget: Ah non! J'ai toutes sortes d'énergies, M. le
Président.
M. Bisaillon: ... vous en avez suffisamment. M. Forget:
Toutes sortes d'énergies.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, M. le Président,
je n'ai pas l'intention d'utiliser 20 minutes. Simplement quelques mots pour
dire qu'il est remarquable de voir qu'à toutes les occasions que le
gouvernement peut trouver, à l'intérieur d'un article, à
l'intérieur de quelque projet de loi que ce soit, c'est devenu presque
une obsession de vouloir toujours indiquer le mot national. Si le
député de Richmond me permettait une question, lui qui, tout
à l'heure, nous a cité le fait qu'ils n'avaient pas eu peur de
nommer l'Assemblée législative l'Assemblée nationale, je
me demande pourquoi ils n'ont pas eu cette même préoccupation et
sollicitude à l'égard de tous les projets de loi qu'ils ont
dû adopter entre 1966 et 1970 et pourquoi finalement, votre mot national
s'est limité à l'Assemblée nationale et à la
Bibliothèque nationale qui elle, je pense, est un centre culturel pour
la francophonie au Canada. A ce titre-là, probablement que son nom
pouvait être justifié.
Je veux simplement appuyer la motion du député de
Saint-Laurent. Je pense qu'il n'est pas inutile de signaler ou de souligner que
le gouvernement, dans cet effort de tenter de "nationaliser" entre guillemets,
tous les projets de loi, les articles contenus dans les projets de loi, n'a
d'autre objectif que de mousser, de la façon qu'il le peut parce que
ça ne sera peut-être pas très long, dès que le
référendum sera appelé, de constater que c'est une vision
qui répond à son propre rêve, mais qui ne correspond pas
à ce que les Québécois attendent et à la
réalité du vécu des Québécois et ce qu'ils
attendent du gouvernement; ce ne sont pas des symboles, mais vraiment un
gouvernement qui puisse passer les législations qui servent vraiment
leurs intérêts. Le gouvernement du Parti québécois
poursuit toujours cet objectif et il se dit: Mettons-en, mettons-en, il en
restera toujours quelque chose. Je pense que c'est le seul espoir qui vous
mène et on ne peut peut-être pas vous en blâmer. Quant
à mon voisin de gauche, j'ai fait un court arrêt à la
commission 92 qui étudie le projet de loi sur le
référendum et je voyais aussi le député de l'Union
Nationale qui siégeait faire des efforts inouïs pour
défendre la place au soleil de son parti.
M. Johnson: C'est la CSN au Soleil.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, comme le disait si bien
le leader du gouvernement, ils finiront par mourir avec "two official
languages" et une langue officielle. C'est tout ce que j'avais à dire et
j'appuie l'amendement du député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: M. le Président, je vais revenir sur quelques
propos, très rapidement. D'abord, sur les propos du député
de Sainte-Marie; j'ai été content de l'entendre dire qu'il
considérait les anglophones comme faisant partie de la nation
québécoise. Je pense que c'est...
Mme Lavoie-Roux: Ils ont découvert cela après que
la Commission des droits de la personne le leur eut signalé.
M. Chevrette: Combien de fois interrompez-vous le
député de Richmond?
M. Brochu: M. le Président, je dois rappeler au
député de L'Acadie ce que je lui disais tout à l'heure,
pour lui prouver que c'est vrai: Qu'une mauvaise habitude, cela se prend
très vite et on a l'exemple parfait devant nous. Je ne parle pas en tant
que psychologue; je parle en tant que compagnon de travail. Je
m'aperçois que c'est, une fois de plus, réel. J'espère que
cela va venir, que vous allez faire des efforts, au moins.
Mme Lavoie-Roux: N'essayez pas de me corriger, quand
même.
M. Brochu: J'espère que vous allez faire des efforts pour
vous corriger.
Mme Lavoie-Roux: Je ne vous promets rien, M. le
député.
M. Brochu: Je rappelais à M. le Président, que
j'étais content d'entendre le député de Sainte-Marie
indiquer que les anglophones faisaient également partie de la nation
québécoise. J'aurais aimé c'était d'ailleurs
là la position de l'Union Nationale sur le projet de loi 101 que
peut-être cette notion de reconnaissance à l'intérieur de
la nation québécoise soit reconnue dans les faits, à ce
moment-là. D'ailleurs, je pense qu'il y a quelques amendements qui se
font du côté du gouvernement dans ce sens, parce que dans le livre
blanc, on commence à donner plus d'importance à la reconnaissance
des anglophones comme faisant partie de la nation québécoise. Je
voulais souligner cela parce que je trouve que c'est tout à fait
important.
Le député de Saint-Laurent est revenu en indiquant que si
le Parti libéral n'avait pas changé le mot "national " dans
l'Assemblée nationale de 1970 à 1976, c'est que, pour eux, les
mots avaient plus ou moins d'importance. A ce moment-là, je me pose de
drôles de questions: Comment se fait-il que le député de
Saint-Laurent propose une motion pour enlever le mot "national" puisqu'ils
disent n'accorder aucune importance aux mots et ne faire aucun débat
rhétorique sur ces questions, et prendre environ une heure du temps de
la commission juste pour prétendre vouloir enlever le mot "national"
parce qu'il apparaît une fois dans le projet de loi, pour ne pas avoir
peur d'avoir peur. A ce moment-là, je me demande où est la
logique?
M. Forget: ...
M. Brochu: Et surtout en passant par l'Afrique, M. le
Président. J'ai trouvé passablement curieux que, dans son
argumentation, le député de Saint-Laurent ait dû faire le
tour jusqu'à l'Afrique en passant par Idi Amin Dada et compagnie, dans
ce coin-là...
M. Johnson: ... Il y a seulement les chemises kaki qui ne sont
pas venues encore, cela va venir.
M. Bisaillon: ... deux minutes, cela va venir.
M. Brochu: J'avais même l'impression, à ce
moment-là, de voir le régime d'apartheid du Parti libéral
en pleine activité et de l'identifier clairement, pour sentir le besoin
de passer par aussi loin.
M. le Président, en terminant, je reprends un des derniers propos
de Mme le député de L'Acadie qui a mentionné que le mot
"national " ne doit pas être un symbole. C'est bien dommage, Mme le
député M. le Président, je m'excuse de m'adresser
à elle, mais vous lui transmettrez pour moi la nation
québécoise n'est pas un symbole, c'est une réalité.
La nation québécoise n'est pas un symbole, c'est une
réalité et je pense que c'est justement toujours là que le
Parti libéral a eu des problèmes et des difficultés
à avoir une conception exacte de la réalité, c'est qu'il
n'a jamais voulu reconnaître cela, reconnaître le fait que la
nation québécoise existe comme telle. C'est pour cela, je pense,
qu'on assiste, dans cette motion, comme dans les autres motions qu'on retrouve
dans les autres projets de loi pour enlever toute connotation au nationalisme,
qu'on retrouve cette forme de démagogie
préréférendaire, pourtant dans la bouche même de
ceux qui avaient osé parler, à l'époque, de la grande
mollesse du Parti libéral, comme le décrivait Claude Ryan,
à l'époque où on parlait de souveraineté
culturelle, qu'on la retrouve dans la bouche de ces mêmes
libéraux. (23 heures)
M. le Président, ce sont les quelques commentaires que je voulais
faire pour apporter un dernier point là-dessus. Je considère que
c'était assez important. Les mêmes qui avaient parlé de
souveraineté culturelle au moment de leur mollesse, avant d'avoir comme
chef Claude Ryan qui disait qu'ils étaient mous, ce sont ces mêmes
qui disent aujourd'hui qu'il ne faut plus en parler, qu'il ne faudrait pas oser
mettre le mot nationaliste. Il ne faudrait pas oser reconnaître non pas
un symbole, mais la réalité québécoise.
M. Johnson: M. le Président, avant de demander si la
motion du député de Saint-Laurent est rejetée, je veux
simplement l'assurer que le gouvernement est conscient que nous vivons sous un
régime démocratique et non pas sous un régime de bananes.
L'amendement est-il rejeté, M. le Président?
Le Président (M. Laplante): ... l'amendement du
député de Saint-Laurent.
M. Chevrette: Vote enregistré.
M. Bisaillon: M. le Président, je demanderais un vote
enregistré.
M. Forget: Excellente idée.
Mme Lavoie-Roux: Ils veulent avoir l'appui officiel de l'Union
Nationale. C'est très très bien.
M. Bisaillon: Je veux que vous enregistriez votre vote tous les
deux.
M. Forget: J'aurais dû y penser.
Le Président (M. Laplante): M. Brochu (Richmond)?
M. Brochu: Contre.
Mme Lavoie-Roux: ... annoncé...
Le Président (M. Laplante): M. Bisaillon
(Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Chevrette
(Joliette-Montcalm)?
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Laplante): M. Gravel (Limoilou)?
M. Gravel: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Johnson (Anjou)?
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Pagé (Portneuf). Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie)?
Mme Lavoie-Roux: Pour.
Le Président (M. Laplante): M. Roy (Beauce-Sud), M.
Vaillancourt (Jonquière).
Contre: 6 Pour: 2. Motion rejetée.
M. Forget: Le député de Richmond n'a pas
voté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Oui. M. Johnson: II a
voté le premier. M. Chevrette: Vous êtes encore en
retard.
M. Johnson: L'article 99f est-il adopté, M. le
Président?
M. Forget: Adopté.
M. Johnson: L'article 99g, M. le Président?
M. Forget: Adopté.
M. Brochu: Adopté.
M. Johnson: A l'article 99h, j'ai un amendement à
proposer.
Le Président (M. Laplante): Un moment. 99g est
adopté.
M. Johnson: Oui. Et à 99h, j'ai un amendement à
proposer, qui est en fait une reformulation de l'article 99h qui se lirait
comme suit: "Une association accréditée des secteurs public et
parapublic faisant partie d'un groupement d'associations de salariés
visées au paragraphe g) de l'article 1 de la Loi sur l'organisation des
parties patronales et syndicales aux fins de négociations collectives
dans le secteur de l'éducation, des affaires sociales et des organismes
gouvernementaux doit, par l'entremise de son agent négociateur,
transmettre par écrit à l'autre partie et au Conseil
d'information sur les négociations, au plus tard le 150e jour
précédant la date d'expiration d'une convention collective ou de
ce qui en tient lieu, ses propositions sur l'ensemble des matières qui
doivent faire l'objet des négociations à l'échelle
nationale".
Au paragraphe 2: "Une association accréditée des secteurs
public et parapublic qui ne fait pas partie d'un groupement d'associations de
salariés mentionnée au premier paragraphe doit, par l'entremise
de son agent négociateur, transmettre par écrit à l'autre
partie et au Conseil d'information sur les négociations, au plus tard le
150e jour précédant la date d'expiration d'une convention
collective ou de ce qui en tient lieu, ses propositions sur l'ensemble des
matières qui doivent faire l'objet des négociations à
l'échelle nationale".
En fait, il s'agirait de remplacer tout le 99h par le texte que je viens
de lire. La notion qu'on introduit... Je m'excuse, il y a la page suivante.
Le Président (M. Laplante): Vous avez encore trois autres
paragaphes.
M. Johnson: Oui, trois et quatre. Est-ce qu'on me dispense de la
lecture et qu'on prend le texte que j'ai déposé?
M. Forget: Est-ce qu'on pourrait, en deux mots, parce que ce ne
sont pas des textes faciles à lire vite, nous dire de quoi il
s'agit?
M. Chevrette: Pour gagner vingt minutes.
M. Johnson: Essentiellement, cela vise à éviter des
entreprôts de propositions. Je m'explique. Des entrepôts pour
accumuler des propositions... En fait, on sait qu'il n'existe qu'une convention
collective locale. Or, le texte était formulé de telle sorte que
les plus de 600 associations accréditées devaient, pour l'entente
au niveau national, remettre le même texte, ce qui est un peu absurde
dans le fond. Alors, on vise la reformulation pour faire en sorte qu'au niveau
local, évidemment, on transmette les données locales, mais non
pas les données qui feront l'objet de la discussion nationale.
M. Brochu: Est-ce que ce n'est pas en même temps une
question de concordance avec l'article 55?
M. Johnson: Oui, également. C'est concordant avec 55.
M. Forget: Nous avions lu cet article-là en supposant que
c'était la loi 55 qui interprétait ce que voulait dire une
partie. Si je comprends bien, on le fait ici.
M. Johnson: Oui, on le fait ici à cause de la notion
d'agent négociateur qui est en fait la charnière pour se
retrouver quant à ceux qui doivent faire ces démarches.
M. Forget: Comme ce sont deux ministres qui parrainent les deux
projets de loi, est-ce que le ministre du Travail peut nous assurer que la
concordance a été examinée avec soin avec la loi 55?
M. Johnson: Absolument.
M. Forget: M. le Président, je n'ai pas d'objection quant
au fond de ces amendements. Il y a seulement la question des délais qui
m'apparaît devoir être discutée brièvement, parce
qu'elle a été soulevée au moment des audiences publiques
la semaine dernière. On a exprimé une notion, du
côté syndical, qui me semblait mériter d'être
sérieusement considérée et peut-être même
retenue. Les porte-parole du front commun ont dit: Pourquoi un délai
différent pour la partie patronale et pour la partie syndicale
respectivement.
Bien sûr, le scénario peut-être traditionnel qui
inspire cette différence, c'est le fait que le patron répond
à des demandes, selon la théorie bien connue que le syndicat est
en demande et que le patron réagit. Cependant, le front commun a
attiré l'attention sur le fait qu'on n'est plus à la
période de rattrapage ce ne sont pas les termes qu'ils ont
utilisés, bien sûr, mais malgré tout, ça
reflète une réalité où les ajustements sont
nécessairement, a priori, à sens unique. Le secteur public a des
ajustements à faire du côté patronal qui va chercher
à traduire dans des amendements aux conventions collectives cela
s'est fait dans le passé et cela a bien des chances de se reproduire
à nouveau à l'avenir ce qui fait que la partie patronale
est aussi en demande.
Comme cette notion est acceptable, semble acceptable, comme question de
fait, aux porte-parole syndicaux, je me serais attendu que ce soit la partie
patronale qui dise une telle chose en commission parlementaire, mais j'ai
été surpris de voir que c'était la partie syndicale. Si on
en est là, il me semble que c'est une perception commune, à ce
moment-là, aux deux parties et qu'il serait plus raisonnable que les
deux parties déposent en même temps leurs propositions.
D'ailleurs, il me semble qu'on sauverait deux mois et on
éviterait peut-être des manoeuvres stratégiques dans le
dépôt des demandes et des offres. Si chacune des parties, dans
l'ignorance de ce que l'autre allait demander ou offrir, y allait de ses
propres propositions, il me semble que les deux parties seraient ainsi
incitées à être un peu plus ouvertes au départ,
à jouer moins de stratégie. A moins que le ministre nous indique,
après mûre réflexion et pour des raisons qu'il a I
intention de nous donner, qu'il ne voit pas de raison de procéder de
cette façon. Peut-être qu'à ce moment-là, on
accepterait le raisonnement, mais notre propre réflexion, suite aux
audiences de la semaine dernière, nous amène à conclure
dans ce sens.
J'aurais un amendement à formuler de cette manière, dans
le même sens. Evidemment, il faut le réécrire parce que le
texte auquel il s'accrochait n'est plus le même. De toute manière,
j'aimerais le faire de façon assez informelle au départ, quitte
à voir la réaction du ministre là-dessus.
M. Johnson: Je pense que le député de Sainte-Marie
aussi, M. le Président, avait une question.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Sainte-Marie.
M. Bisaillon: M. le Président, j'avais des commentaires
qui allaient dans le même sens, quoique depuis la commission
parlementaire, il me semble que je l'avais souligné aussi, la position
du front commun sur le moment où la partie patronale est en demande, me
semblait difficile à définir. A quel moment la partie patronale
est-elle en demande par rapport à l'ancienne convention collective?
Est-ce que c'est quand elle touche des droits acquis? Cela pourrait se
justifier, mais qu'est-ce qui est un droit acquis? Cela pose, quant à
moi, de sérieux problèmes. Il y a aussi une autre question qui
est difficile, en terme de texte législatif, c'est comment on va
formuler le processus de...
Si effectivement, on devait se rendre à la demande syndicale,
dans les circonstances, il faudrait que les propositions patronales arrivent
préalablement au dépôt du projet de convention collective
par la partie syndicale pour qu'à l'avance la partie syndicale soit
informée de ce que la partie patronale a l'intention de changer dans le
contrat déjà existant. On se rend compte de tout ce que ça
change comme mécanisme.
Parce que si c'est en même temps, il faut se dire que, quand on
sait que la partie patronale est en demande, nos demandes syndicales peuvent
être modifiées, on peut être appelé à
augmenter nos demandes dans un secteur si on veut consentir a la demande
patronale et modifier des choses déjà acquises dans la convention
collective. Il y a donc tout un jeu qui se fait au moment de la
négociation; on sait comment ça se passe. Cela se produit,
effectivement, que la partie patronale va chercher des droits de gérance
ou va modifier des droits acquis mais, habituellement, elle offre des choses en
échange de ces droits acquis qu'elle va chercher dans la
négociation.
C'est donc le processus de négociation qui peut régler
ça. Je ne pense pas, quant à moi, qu'un texte législatif
puisse régler le problème de la demande syndicale ou du front
commun.
Par ailleurs, je pense qu'il y a une intention gouvernementale qui
pourrait être indiquée aux parties, une intention
gouvernementale... Etant donné que le gouvernement est partenaire avec
les parties patronales du secteur parapublic, il
pourrait y avoir une volonté gouvernementale qui indiquerait aux
centrales syndicales, préalablement au délai qui leur est
fixé, les intentions de modifier un certain nombre de choses. Mais je ne
pense pas qu'on puisse aller au-delà d'une intention de le faire. Je ne
pense pas qu'on puisse le faire dans un texte législatif.
Le deuxième aspect qui me semble plus important et auquel il
faudrait peut-être accorder de l'importance, on le retrouve dans le
paragraphe 1: "des affaires sociales et des organismes gouvernementaux doit,
par l'entremise de son agent négociateur, transmettre par écrit
à l'autre partie et au conseil l'information..."
Autrement dit, c'est le "doit" qui peut poser éventuellement des
problèmes, l'impératif qui est créé. Ce qu'on veut
apporter comme amélioration dans le projet de loi actuel tout le
monde le comprend, je pense bien c'est de faciliter, de réduire
les délais prolongés de négociation, donc de forcer les
parties à formuler leurs demandes le plus rapidement possible pour que
la négociation commence de bonne foi. Il me semble que cela devrait
être fait dans le même sens que le Code du travail. Une fois que
les propositions sont formulées, la négociation doit commencer.
Par le "doit" impératif, la question que le front commun posait
et c'est une question que, moi aussi, je pose au ministre aujourd'hui
Qu'est-ce qui arrive si, effectivement, ce n'est pas déposé dans
la journée qui est prévue dans la loi? Est-ce que les demandes
sont devenues illégales par le fait même? Je ne pense pas. Mais le
"doit" est quand même impératif et il y aurait peut-être une
façon de modifier le texte pour permettre qu'on sente la volonté
gouvernementale, sans pour autant imposer des délais aux deux parties
qui posent légalement des problèmes.
M. Brochu: M. le député de Sainte-Marie, est-ce que
vous me permettez une petite question sur la même chose? On sait que le
syndicat dépose ses demandes au cinquième mois. Le gouvernement,
pour sa part, doit déposer ses intentions. Est-ce que, dans votre
esprit, cela devrait se faire au même moment? Est-ce que le gouvernement
devrait déposer ses intentions au moment où le syndicat
dépose ses demandes?
M. Bisaillon: Ce que j'ai dit, c'est que je ne voyais pas
comment, dans un texte législatif, on pouvait régler ce
problème. On pourrait par ailleurs, au niveau gouvernemental, annoncer
à l'avance, avant le délai prévu pour le
dépôt des demandes syndicales, le gouvernement pourrait indiquer
aux centrales syndicales ou aux différents syndicats impliqués
dans la négociation des secteurs public et parapublic ses intentions de
modifier tel ou tel secteur de la convention collective déjà
existante. Mais je pense que cela peut se faire de bonne foi. Cela ne peut pas,
de façon pratique, s'inscrire dans un texte législatif.
M. Brochu: C'est un élément incitatif, à ce
moment-là.
M. Bisaillon: II me semble que cela devrait demeurer là
parce que, sans cela, on embarque dans quelque chose qui va demander des
définitions qui vont être difficiles à donner dans un texte
de loi. C'est quoi, une demande syndicale? A quel moment cela doit-il
être fait? Il y a une interprétation du moment où on est en
demande, ou encore du moment où on est en réponse. Cela
dépend un peu de l'évaluation de chacune des parties. Je pense
que cela ne peut pas se régler légalement ou par un texte de loi.
Cela peut se régler par la bonne foi ou la bonne volonté.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, j'ai réfléchi
et j'ai essayé, à partir des discussions qu'on a eues durant la
commission parlementaire avec les représentants du monde syndical, de
penser ou d'imaginer une formule où les deux parties
dénonceraient simultanément une série d'objets de
convention à négocier.
Par contre, j'ai l'impression qu'au bout de la course, les parties en
mettraient plus que moins pour brouiller éventuellement les cartes. Cela
n'atteindrait pas l'objectif qu'on recherche tous, à savoir pouvoir
réaliser des négociations plus rapidement.
Après réflexion, j'ai l'impression nette que les parties
joueraient à cache-cache en disant: Je dénonce tant d'objets.
Mais, rendu à la table, je ferai un peu de marchandage avec le lot que
j'aurai dénoncé et je serai plus "cool" à la table, comme
on dit communément dans le jargon de la négociation.
Je ne crois pas que cela atteigne les objectifs qu'on recherche. La
tradition veut que, avec les consultations qu'on fait... Par exemple, prenons
le domaine de l'éducation. La Fédération des commissions
scolaires consulte l'ensemble de ses commissions scolaires et elle arrive avec
un paquet d'amendements aux clauses. Quand on regarde la brique des
consultations de la Fédération des commissions scolaires et qu'on
regarde la brique suite à la consultation des enseignants ou des
syndicats d'enseignants, on se retrouve avec du neuf à peu près
à tous les articles, à toutes les clauses de la convention
collective. (23 h 15)
L'objectif que viserait le législateur ne serait pas plus atteint
dans les faits et cela pourrait présenter un autre danger. Si on disait:
Quel est le premier qui va dénoncer pour que l'autre se rajuste? C'est
un cul-de-sac, c'est une roue sans fin. Je veux dire que tu vas faire
dénoncer le patron le premier pour que le syndicat ajuste ses demandes,
comme le disait le député de Sainte-Marie. Ce sera la même
chose. Le patron va dire: Dépose tes demandes, par la suite, je vais
ajuster mes offres en fonction de tes demandes. On risque de se retrouver dans
des délais irrationnels au bout de la course.
Je pense que ce qu'il y a encore de mieux, c'est de vivre la situation
où le syndicat dépose
des demandes et où la partie patronale s'ajuste en
conséquence, si elle veut changer ses clauses. Je préfère
le système traditionnel à ce moment-là.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais seulement
poser une question au député de Joliette-Montcalm. Dans le cas
présent, est-ce qu'à ce moment-là aussi vous n'avez pas le
même phénomène qui va se produire, que le syndicat va
dénoncer le plus possible d'articles en disant: Après cela, je me
rapprocherai? Je pense que ce sera à peu près la même chose
qui va se produire.
M. Chevrette: Le danger de la situation actuelle, c'est que les
parties se retrouvent très loin aux premières versions.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Chevrette: J'ai la conviction que ce serait la même
chose si le patron et le syndicat dénonçaient
simultanément. Ils se placeraient loin au niveau de la
dénonciation. On se retrouverait avec le même portrait. Si on y
réfléchit assez sérieusement, on se retrouverait avec un
portrait identique de parties diamétralement opposées, parce que
le patron dirait: II faut que j'en dénonce plus que moins. On a
développé cette mentalité de "bargaining" au niveau des
tables de négociation. On ne négocie plus comme on faisait en
1964 et en 1965 dans les commissions scolaires, où on disait: Cette
année, ce sont deux clauses qu'on veut changer sur les 28 que l'on a.
Les 28 valaient les 700 ou 800 qu'on a présentement. Que voulez-vous? On
a voulu raffiner. On a mis cela entre les mains de technocrates qui ont
rédigé des textes, nonobstant tel article, tel article, tel
article. Il n'y a pas un gars qui est capable de lire sa convention, sans se
référer à un conseiller technique. Vous savez comment cela
fonctionne. C'est la même chose au niveau des directions du personnel
dans les commissions scolaires. Cela prend pratiquement des interprètes
chaque fois qu'on essaie de faire un lien entre une clause et une autre.
Dans les circonstances, je pense qu'on est encore mieux de se contenter
du texte qu'il y a là et de ne pas chercher à se casser la
tête ici pour le raffiner, parce qu'on va vivre des situations
identiques. C'est peut-être à l'usage qu'on va revenir à
l'élaboration de conventions collectives ou à la rédaction
de conventions collectives qui seront à la portée au moins du
salarié moyen pour qu'il puisse comprendre ce qu'il y a dans son
contrat.
Je ne veux pas déblatérer contre certaines professions
dont les gens sont des spécialistes pour rédiger des conventions
collectives. Il n'en demeure pas moins que je trouve aberrant qu'un enseignant
qui n'est quand même pas démuni en termes de scolarité
plusieurs ont 17 ou 18 ans de scolarité et d'autres 20 ans
n'est quand même pas capable d'interpréter son contrat collectif.
Vous lirez l'article des salaires, l'article 601 de la convention collective.
C'est inscrit: "Nonobstant la clause 5.02..." Il y a énumération
d'une douzaine d'articles. Le "gorlot" commence à faire le tour, il a
vite perdu la première concordance vers laquelle il s'en allait. Il ne
suit donc pas. Quand cela remonte à la loi 25 pour venir à bout
de déterminer l'échelle de salaire, il n'y a pas un gars qui
comprend, c'est bien évident. Je me contenterais de cela et je
dirais...
M. Johnson: M. le Président, pour tenter de
répondre aux préoccupations du député de
Saint-Laurent et à celles du député de Sainte-Marie
également, d'abord, sur le "doit", c'est vrai que c'est impératif
que la partie syndicale et la partie patronale, en vertu de la loi, sont
obligées... La sanction du non-respect de cette obligation, c'est
évidemment une infraction au code avec une amende possible de $500.
C'est une sanction, je pense, qui est tout autre, dans un cadre où, un
an vraiment avant que tout cela ne commence, ou enfin neuf mois avant que tout
cela ne commence, on fixe des échéances et les parties doivent
les respecter. Le non-respect de ces échéances, c'est une
sanction encore une fois de nature publique et, avec le groupe d'information,
je pense que c est bien présent.
Quant au délai qui s'écoule entre la partie demande et la
partie offre, je suis entièrement d'accord avec l'interprétation
que vient d'en donner le député de Joliette-Montcalm.
D'autre part, dans un avant-projet, j'avais suggéré aux
parties syndicales la réponse gouvernementale dans les 30 jours qui
suivent le dépôt des demandes syndicales. La réaction
syndicale a été: Ecoutez, on préférerait que le
gouvernement prenne 45 ou 60 jours. Au moins, on aura l'impression que ce n'est
pas une réponse toute faite d'avance, s'il y a deux mois qui
s'écoulent entre le moment du dépôt des offres et le moment
du dépôt des demandes. On pourra présumer qu'il y a une
réaction vraiment au contenu.
Je pense que ce n'est pas faux comme approche. Je pense qu'on a raison.
Si le gouvernement, ou les institutions, ou les réseaux des
fédérations déposent les offres après deux mois, on
peut présumer que ce dépôt fait suite à une analyse
et à une volonté de répondre de façon relativement
précise. C'est la notion des offres globales.
Le député de Joliette-Montcalm a soulevé le fait
que la CEQ, a déjà fait une grève à l'époque
où elle était négociatrice syndicale. L'objet de la
grève était l'absence de dépôt d'offres globales du
gouvernement. Dans la loi, on dit: Le gouvernement devra en 60 jours
répondre à ces offres.
M. Forget: M. le Président...
M. Johnson: Pour cette raison, je considère que l'article
est bien rédigé.
Le Président (M. Laplante): M. le
député...
M. Brochu: M. le Président, une question sur le même
sujet au ministre. Qu'est-ce qui arrive si le gouvernement ne dépose pas
ses offres ou que le syndicat dépasse le délai pour faire ses
demandes?
M. Johnson: D'abord, cela n'invalide en aucune façon les
offres. Cela m'apparaît manifeste, et on a fait le tour de la question
avec les juristes. Cela n'invalide pas les contenus par définition.
Encore une fois, la sanction, c'est $500. Je présume que ce n'est pas
beaucoup pour le gouvernement. Ce n'est pas beaucoup non plus pour les
centrales. La sanction, c'est une sanction de non-respect public. Tout le monde
va être à l'affût de cela. Quand on va être dans le
calendrier de négociations, j'ai l'impression qu'il va y avoir une
surveillance des media de ce qui se passe. On pourra constater que le
gouvernement a retardé à répondre, par exemple.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, la question des délais,
à savoir s'il y a des pénalités, ce n'est pas cela qui
m'inquiète surtout. On pourrait le dire dans une loi, on pourrait le
dire dans un discours, mais il reste que cela a à peu près le
même effet. C'est un voeu que les choses se fassent dans des
délais raisonnables, et tant mieux si cela fonctionne. Si cela ne
fonctionne pas, on verra. C'est à peu près tout ce qu'on peut
dire sur la question des délais.
Ce qui m'inquiète, c'est le genre de raisonnement que, pour une
part, le député de Sainte-Marie a fait relativement à
notre projet ou notre suggestion d'amendement. J'ai cru comprendre qu'il avait
justifié sa position, la position de son parti là-dessus, en
disant: II faut que les parties puissent, dans le fond, se donner de la corde
pour la négociation, si elles pensent qu'elles sont devant des demandes
où elles vont faire des compromis; il faut qu'elles se donnent des
possibilités de négocier en retour des concessions, etc.
Ce genre de raisonnement était de type stratégique,
c'est-à-dire que les parties, sachant quelle est la nature des demandes
ou des offres, peu importe, de la proposition de l'autre partie à la
table des négociations, font un peu la part du feu dans leur propre
position et prétendent vouloir obtenir des avantages dont ils vont faire
le sacrifice apparent à la table des négociations, alors qu'elles
n'ont pas vraiment l'intention de pousser très loin dans ces
directions.
Ce genre de raisonnement stratégique est plausible. Je pense que
c'est effectivement ce à quoi on assiste dans les grandes
négociations. Cependant, le problème qui se pose, ce n'est pas de
savoir si les négociations se déroulent ou pas comme cela,
à mon avis. Il faut se poser la question: Est-ce qu'on doit, dans une
certaine mesure, dans l'intérêt de tout le monde et de
l'intérêt public, encourager ou faire défaut de
décourager un comportement stratégique de cette nature? Est-ce
qu'il ne serait pas souhaitable que les parties le plus rapidement possible
définissent une position globale et que le contexte dans lequel elles la
formulent les oblige à le faire de la façon la plus
réaliste possible? Malgré tout, il ne faut pas oublier
l'importance du rôle du conseil d'information. Dans la mesure où
il peut être effectif, il faut quand même lui donner des chances de
mordre sur quelque chose
Est-ce qu'un conseil d'information qui, justement, verrait le
dépôt simultané d'une proposition globale de nouvelle
convention collective émanant de la partie syndicale et d'une
proposition globale d'une convention collective nouvelle émanant de la
partie patronale n'aurait pas déjà un champ d'application fort
prometteur pour justement dire:
Voici! Vous avez deux parties qui amorcent des négociations.
Bien sûr, au départ, elles doivent se ménager des demandes
qu'elles ne s'attendent pas, en leur for intérieur, de voir
réaliser. Donc, il y a une partie d'exagération.
Mais les deux parties exagèrent de la même façon ou
ont des raisons d'exagérer de la même façon, mais, en fait,
les deux parties n'exagéreront pas nécessairement aux mêmes
endroits et de la même façon. Est-ce que cela n'aiderait pas,
est-ce que ce ne serait pas une pression de l'opinion publique, fort
intéressante, que de créer justement un contexte psychologique,
si on veut, où chacune des parties, ne sachant pas ce que l'autre va
demander ou proposer, peu importe, ne connaissant pas la position de l'autre
partie, se sent une obligation d'être la plus raisonnable et la plus
réaliste possible? Ce que ça permettait de produire, si vous me
permettez, ce sont des positions qui, au lieu d'être le plus
éloignées possible au départ, seraient peut-être le
plus rapprochées possible au départ. Si, évidemment, on
négocie à partir de positions qui au départ sont
rapprochées, il y a des chances que ça dure moins longtemps et
que ce soit moins difficile que de partir des antipodes.
Il me semble que la simultanéité des projets globaux de
règlement placerait les parties devant une pression de ne pas faire les
fous, parce que si on fait les fous, la commission de surveillance ou
d'information va s'en apercevoir et on va avoir l'air des fous. Si on a l'air
des fous en commençant notre négociation, on a une côte
à remonter auprès de l'opinion publique et auprès de tout
le monde.
Pour ma part, c'est l'avantage que je vois dans un dépôt
simultané. Quand le dépôt n'est pas simultané,
évidemment, on se donne la corde. On se dit: On ne sait pas de quel bord
l'autre partie va réagir. L'autre partie va peut-être tomber sur
quelque chose qui va prendre dans l'opinion publique. Il va falloir faire des
concessions. Si on fait des concessions, on va les "bargainer ", on va les
compenser par d'autres concessions au moins apparentes qu'on va faire. Alors,
on en met plus large qu'il faut. On en met plus fort qu'il faut pour se
prémunir contre des manoeuvres subséquentes ou des positions
subséquentes, des offres subséquentes ou des demandes
subséquentes, selon les parties. Il me semble qu'on aurait
intérêt à limiter cette stratégie, parce que les
gens en ont un petit peu marre dans la population de voir, dans les services
publics au moins, les parties patronales et syndicales avec tout leur appareil
d'experts, de conseillers et de juristes, etc., se faire une guerre de
stratégie.
Je comprends qu'il faut un peu de stratégie
dans une négociation, sinon, c'est l'affrontement ou c'est
l'impasse. Je comprends ça, mais c'est une question de mesure. Si on
part trop loin, si on laisse les parties s'enferrer dans des positions
initiales qui sont trop distantes les unes des autres, c'est pénible et
c'est long. Il me semble que la simultanéité aiderait à
faire le pont entre les deux.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais simplement ajouter un point que je
voudrais signaler au député de Joliette-Montcalm, un peu dans le
même sens que le député de Saint-Laurent. Dans
l'expérience qu'on a vécue quand la partie syndicale
dépose d'abord ses offres et qu'elle doit aller très loin, je ne
suis pas sûre qu'on n'a pas désavantagé la partie syndicale
d'une certaine façon. Moi, je me souviens de la dernière
négociation... Ce que je vais vous donner, ce n'est absolument rien de
précis, mais on demandait, par exemple, 20 000 professeurs de plus; ils
voulaient travailler neuf heures par semaine et là, il y avait une
opinion j'exagère, M. le député de Sainte-Marie
mais c'est pour vous dire comment, dans la population, ces demandes
extravagantes qu'ils posaient au départ étaient
évaluées pendant quinze jours, trois semaines, un mois, au moins,
par la population en disant: Ils charrient, les syndicats!
On les met peut-être dans cette position où il faut, parce
qu'ils sont les premiers à déposer leurs demandes, faire montre
de beaucoup d'exagération. Je ne suis pas sûre que, finalement,
déjà, au départ, on ne les pénalise pas un peu en
créant dans la population ce sentiment d'exagération très
grand de la part des syndicats. Si on procédait peut-être
davantage selon la formule du député de Saint-Laurent, ils
seraient moins portés à faire ça et ne se trouveraient
dans une position qui m'apparaît très défavorable au
départ, du point de vue de l'opinion publique. (23 h 30)
M. Johnson: M. le Président, je pense que j'ai
expliqué ma conception... Je vais demander l'article 99h...?
M. Forget: On va présenter formellement la motion parce
que c'est un point qui a une certaine importance "for the record" comme on dit
dans l'autre langue non officielle. "Que le sous-paragraphe 3 du paragraphe 99h
de l'article 4 soit modifié en remplaçant dans les sixième
et septième lignes, les mots "dans les soixante jours qui suivent la
réception de ces propositions" par les mots "au plus tard le cent
cinquantième jour précédant la date d'expiration d'une
convention collective ou de ce qui en tient lieu". C'est une façon de
dire simultanément, et je ne le ferai pas, mais j'avertis la commission
qu'il ne nous a pas échappé qu'il faudrait faire un autre
amendement correspondant au paragraphe 5, que nous ne ferons pas, parce que de
toute manière, nous voulons nous inscrire pour le principe et amener la
commission parlementaire à se prononcer sur le principe de cet
amendement.
Le Président (M. Laplante): L'amendement du
député de Saint-Laurent...
M. Johnson: Rejetée, M. le Président, pour les
raisons que j'ai exposées.
M. Forget: Est-ce qu'on peut demander un vote
enregistré?
Le Président (M. Laplante): Oui, vote enregistré
sur l'amendement du député de Saint-Laurent. M. Brochu
(Richmond)?
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Laplante): Pour. M. Bisaillon
(Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Chevrette
(Joliette-Montcalm)?
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Laplante): M. Gravel (Limoilou)?
M. Gravel: Contre, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. Johnson (Anjou)?
M. Johnson: Contre.
Le Président (M. Laplante): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Laplante): Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie)?
Mme Lavoie-Roux: Pour.
Le Président (M. Laplante): M. Pagé (Portneuf), M.
Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière). Cinq contre; trois pour.
La motion est rejetée.
J'appelle l'article 99h; adopté?
M. Forget: Adopté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Tel qu'amendé.
L'article 99i.
M. Johnson: A l'article 99i, M. le Président, j'ai un
amendement qui consiste essentiellement, après le mot "personnes"
à ajouter "de l'Association des
conseils des médecins et dentistes du Québec Inc.".
Je suis sûr que les députés de Saint-Laurent et de
Richmond reconnaîtront là les suites de la commission, de
l'audition des parties. En fait, l'Association des conseils des médecins
et dentistes du Québec Inc., est une association à but non
lucratif qui regroupe depuis, si je ne m'abuse, à peu près trente
ans, les médecins membres des conseils de médecins et dentistes
qui, à l'époque, s'appelaient les comités médicaux,
les conseils médicaux avant la loi 65 et qui depuis, portent le nom de
médecins et dentistes en vertu de la loi 65. Il s'agit, en fait, de dire
à 99i, que le juge en chef les consulte au même titre qu'il
consulte la Commission des droits de la personne quant au choix des membres du
comité sur les services essentiels.
D'autre part, par trois fois, on voit l'expression "le conflit de
travail", il faut lire, pour le français, me dit-on, "le conflit du
travail", malgré l'expression qui m'apparaissait consacrée de
dire "conflit de travail ", apparemment, il faut dire un "conflit du travail".
Il s'agirait de remplacer le mot "de" par "du" devant le mot "travail" à
la deuxième ligne, à la sixième ligne du premier
paragraphe de l'article 99i, ainsi qu'à la quatrième ligne du
sous-paragraphe 3 de l'article 99i.
M. Forget: M. le Président, nous avons un amendement
à présenter. Je vais en faire la lecture immédiatement:
"Que le sous-paragraphe 2 du paragraphe 99i de l'article 4 soit modifié
en remplaçant, dans les troisième et quatrième lignes, les
mots "et d'autres personnes ou organismes" par les mots "de l'Association des
conseils de médecins et dentistes du Québec cela a
été rédigé préalablement à
l'amendement du ministre de la Corporation professionnelle des
médecins du Québec, de la Corporation professionnelle des
infirmiers et infirmières du Québec, des centrales syndicales
impliquées et du Comité provincial des malades". Etant
donné qu'il s'agit de groupes qui ont manifesté de bien des
façons leur intérêt au problème; dans le cas des
centrales syndicales, cela va de soi, je pense, les nominations étant
faites par la partie patronale, c'est un minimum que de consulter la partie
syndicale. Le Comité provincial des malades a mérité par
son activité dans tous les domaines, sa préoccupation aux
problèmes, la rédaction d'un mémoire sur les relations de
travail dans le secteur des hôpitaux, d'être formellement
consulté dans la désignation de ces personnes, membres du conseil
sur le maintien des services de santé et des services sociaux.
M. Johnson: M. le Président, d'abord, on n'a pas eu une
perception trop différente l'un de l'autre quant à l'Association
des médecins et dentistes. La raison pour laquelle je l'incluais, c'est
que l'association a des membres qui sont vraiment impliqués dans le
milieu hospitalier au niveau local, puisqu'elle regroupe les conseils des
médecins et dentistes de chacun des hôpitaux. C'est à ce
titre-là que je considérais qu'il fallait la consulter par
opposition à consulter, par exemple, la Corporation des médecins
du Québec, l'ancien collège. La Commission des droits de la
personne "s'est déjà cantée" dans le projet et, dans la
mesure où cet organisme a une crédibilité certaine, on a
pu le constater à plusieurs reprises et n'est pas soumise au
gouvernement en aucune façon dans son travail, on considérait
qu'il valait la peine de procéder à de telles consultations.
Le désavantage que je vois à inclure d'autres organismes,
bien que le Comité provincial des malades m'apparaisse
intéressant, on l'a évoqué d'ailleurs, on y pensait... Je
m'attendais qu'il y ait un amendement à cet effet, dans le cas du
comité provincial des malades, et je l'accepterais.
Quant à la notion d'inclure deux corporations professionnelles et
les centrales syndicales, c'est une des avenues qui nous étaient
ouvertes. Si on suivait ce que nous dit le rapport Martin, cela pourrait
impliquer, dans le contexte où lui le voyait, que ce
groupement-là, formé à partir de listes fournies, non
seulement devrait être consulté, mais que ces organismes
fourniraient une liste au juge en chef du Tribunal du travail qui devrait
choisir à même ces listes. Il donne également un rôle
de médiation et même un rôle de recommandation de suspension
du droit de grève qui nous apparaît assez périlleux. On
entretenait de sérieux doutes quant à la consultation, quant aux
résultats que cela donnerait avec les centrales syndicales.
Pour des raisons analogues, je suis quand même hésitant,
à moins vraiment que les discours, fussent-ils très brefs, de
tous les membres de la commission me convainquent du contraire... Est-ce qu'on
ne met pas le juge en chef dans une situation telle qu'il serait amené
dans la formation du comité à y inclure, pas
nécessairement plus de techniciens au sens de médecins, je ne
m'attends pas que ce soit nécessairement cela... mais il sera
peut-être amené à ignoré plus facilement, à
cause des candidatures qu'on lui soumet, les gens émanant des centrales
syndicales. A ce moment-là, on pourrait voir le groupe attaqué
quant à sa crédibilité. On dirait: Vous voyez, nous avons
soumis deux noms et on ne les a pas choisis. Peut-être que les deux
personnes qui auraient été présentées pour un tas
de raisons, compte tenu des qualités qu'on exigera d'elles, ne seraient
pas aptes, dans le jugement du juge en chef, à servir de membres
participants au comité d'information. Il faut se rappeler que ceux qui
pourraient faire partie pourraient l'être à titre permanent. A ce
titre-là, les centrales syndicales, particulièrement la FTQ, ont
souligné au gouvernement qu'elles considéraient qu'un tel
comité, étant une espèce de Protecteur du citoyen ou une
espèce de grand frère regardant la qualité des soins au
Québec, devrait être créé.
A cela, le ministre des Affaires sociales a répondu qu'il voyait
ça d'un oeil plus sympathique qu'autrement et que, concrètement,
on s'est même penché sur la possibilité de
légiférer dans ce sens, à l'occasion de ce projet de loi,
en se rendant compte cependant que ça présentait des
difficultés considérables à cause des CRSSS, à
cause de la Loi des services de santé et des services sociaux et
qu'en termes de temps, c'était peut-être un peu difficile de
mettre sur pied un organisme permanent de ce type.
Il n'est pas impossible qu'éventuellement, cet organisme devienne
permanent ou que le gouvernement décide, après cette
expérience, d'en créer un en amendant la loi des
établissements de santé et de services sociaux.
Si son mandat est un mandat essentiellement de surveillance de la
qualité des soins, je pense qu'il faudrait l'envisager comme permanent.
Quant au type de personnes qui y seront, c'est là que je voie la
difficulté. Si on consulte tant d'organismes plutôt que deux ou
trois, on s'attend qu'il y ait là un mélange de connaissances de
ce que ça représente, des services essentiels, et le
député de Saint-Laurent, à l'époque où il
était ministre des Affaires sociales, avait eu recours à la liste
annotée des arbitres dont plusieurs avaient fait des arbitrages dans le
secteur de la santé, ce qui n'a pas été sans poser de
difficultés, on le sait.
Deuxièmement, on s'attend cependant qu'il y ait là-dedans
des gens qui puissent joindre les deux caractéristiques et qui savent ce
que représente un rapport de forces, même si ça
paraît un peu odieux quand on parle de services essentiels. Mais la
réalité est là. Si on pense exprimer une opinion ou faire
des évaluations sur les services essentiels, ça se fait dans un
contexte bien spécial qui est celui d'un rapport de forces, à un
moment culminant qui est une crise, et qui se manifeste par la
nécessité d'apprécier et de voir comment se
déroulent les choses, dans un contexte où il n'y a que la
prestation des services essentiels et non pas des activités
normales.
Quant aux connaissances techniques en matière de santé,
c'est-à-dire des postes, des catégories de services, du
déroulement, du taux d'occupation, etc., ce sont là des
éléments de connaissance qui seront également utiles au
comité, de la même façon que sa capacité de rendre
publique, de communiquer des choses, une capacité, finalement,
d'organisation, en ce sens qu'il y aura des sous-comités
régionaux ou locaux, l'objectif étant de dédramatiser
l'ensemble de la question des services essentiels, de rassurer la population
là où elle peut être rassurée et de l'informer sur
des questions comme l'accès aux services de santé.
Dans les circonstances, je pense qu'il est possibe... Je
préférerais retenir le comité provincial des malades et
celui que j'avais déjà amené, l'Association des conseils
de médecins et dentistes, en plus de la Commission des droits de la
personne, et éviter de mettre le juge en chef dans la situation
délicate où il pourrait accuser, parce qu'il considère que
telle personne qu'on lui a référé... Cela ne
l'empêche pas de le faire, mais ça ne le met pas dans un carcan
où il pourrait être accusé d'avoir refusé une
personne à la suite d'une consultation qu'on l'a obligé à
faire.
M. Forget: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre?
Est-ce que les remarques qu'il a faites relativement à la position des
syndicats et à leur préférence évidente pour un
organisme permanent impliquent, selon lui, que les centrales syndicales, si
elles étaient consultées dans le contexte prévu par la loi
59, pourraient se récuser et que le ministre, dans une certaine mesure,
craint que ceci soit de mauvais augure pour le succès de la
commission?
M. Johnson: Pas vraiment, mais c est seulement pour éviter
la situation très précise où le juge en chef, à la
suite de la soumission de trois ou quatre noms provenant des centrales
syndicales et de la soumission d'autres noms d'autres organismes qu'il aurait
consultés, ceux mentionnés dans la loi et d'autres, possiblement,
serait dans une situation où il refuserait ces trois ou quatre noms,
n'intégrerait aucune de ces personnes à un comité, pour
des raisons qui n'ont peut-être rien à faire avec ça.
A ce moment-là, je trouverais dommage qu'on s'en prenne à
la crédibilité d'un organisme comme celui-là. D'autre
part, comme on sait que le juge en chef du Tribunal du travail connaît
très bien le milieu, on peut présumer qu'il a la capacité
de consulter, comme la capacité de choisir de ne pas consulter s'il le
désire. Mais, chose certaine, je voudrais lui éviter une
situation délicate comme celle-là, pour la
crédibilité de l'organisme. (23 h 45)
M. Forget: M. le Président, la crédibilité
de l'organisme va certainement reposer sur sa composition et le gouvernement a
fait un choix en mettant de côté et c'est ce que j'ai dit
dans mes remarques d'introduction comme base de
légitimité, en quelque sorte, de l'intervention du conseil,
l'expertise de relations de travail qu'on retrouve par exemple chez les
arbitres communément agréés par les parties, en mettant de
côté I expertise de relations de travail, pour trouver un principe
de légitimité pour le fonctionnement de ce comité, qui
soit différent. A ce moment-là, s'il est différent, ce
n'est pas suffisant de dire qu'il est différent, mais il faut qu'il soit
basé sur un autre principe, que ce soit palpable, que ce soit connu, sur
quoi il est basé.
Il me semblait qu'en faisant ces suggestions de recommandations, on
allait chercher un autre principe de légitimité,
c'est-à-dire un effort de donner une voie au chapitre, à tous les
groupes qui, professionnellement ou autrement, ont énoncé et
possèdent, c'est bien connu, des opinions sur la question. Autrement
dit, au lieu d'avoir une expertise de relations de travail, on a une
espèce d'approche plus consensuelle sur la définition, dans la
mesure où on peut trouver des consensus là-dessus. Mais enfin,
l'effort est fait dans ce sens-là.
Donc, pour qu'une approche soit consensuelle et pour qu'elle soit
perçue comme étant consensuelle, il faut justement aller chercher
chez les gens chez qui le consensus est nécessaire des suggestions pour
former le conseil. Dans le fond, on a eu dans le passé l'histoire
le montre des vociférations émanant des malades, bien
sûr. Le
comité des malades les a exprimées. On en a eu de la part
des médecins, on en a eu de la part des infirmières, dans une
certaine mesure. Ils se sont certainement penchés sur le
problème, avec un résultat assez ambigu, mais il reste qu'il y a
eu une préoccupation de ce côté-là. Pour les autres
groupes, cela va de soi également.
Il me semble que ce serait là démontrer quel est le
principe de légitimité. Ce conseil va avoir une
responsabilité sociale immense. Si on met de côté
l'expertise des relations de travail, je n'ai pas d'objection. On semble avoir
fait une expérience que l'on juge concluante, alors que j'aurais
exprimé d'autres points de vue là-dessus. Je pense que c'est une
expérience. On aurait pu maintenir les arbitres en encadrant cela dans
un processus un peu différent.
On a rejeté cela, d'accord. C'est l'option du gouvernement. Mais
il faut maintenant que vous basiez, à mon avis, la
légitimité d'intervention sur autre chose que la loi. Il faut que
les gens disent: C'est ce conseil où tous ceux qui sont impliqués
délèguent dans le fond le meilleur d'eux-mêmes, ceux qui
croient, qui, tout en leur appartenant, sont capables de s'élever
au-dessus des préoccupations du médecin en tant que
médecin, qui ne veut rien savoir d'autres des syndicats, des fatigants,
etc. et que les infirmières fassent la même chose, que la
Commission des droits de la personne fasse la même chose, que les
syndicats fassent la même chose aussi et qu'ils se disent: Ecoutez, on va
essayer d'envoyer des gens raisonnables qui vont essayer d'en arriver à
une entente entre eux, sur les règles du jeu.
C'est, dans le fond, reprendre la notion de l'entente, mais pas sur des
services individuels à être fournis par des établissements
particuliers. C'est reprendre la notion d'une entente, au moins sur les
critères généraux de détermination des services
essentiels, et des jugements à porter dans ces situations
concrètes.
Il me semble que c'est cela que le gouvernement veut faire. Je ne
voudrais pas placer des paroles dans la bouche du ministre. Il dit que oui, il
pourra le faire, mais sans être obligé. Mais ce qui est important,
dans ce cas-là, n'est-ce pas seulement que le président du
Tribunal du travail le fasse, mais que ce soit visible qu'il ait fait cet
effort de consensus? Je pose la question. L'avenir dira si c'est important ou
pas. Mais il me semble que cela l'est. Il me semble que cela a des grandes
chances de devenir un débat. Où est-ce qu'il a pigé ces
noms? Est-ce que cela lui a été suggéré par le
gouvernement? Est-ce que c'est le ministre du Travail qui lui a fait des
suggestions? Je ne veux pas faire de caricature. Ce serait probablement
injuste, même très certainement injuste. Je veux même donner
tout le bénéfice du doute qu'on laissera le président du
Tribunal du travail entièrement libre.
La question qui se pose à ce moment-là, s'il est trop
libre, le président du Tribunal du travail, est-ce que ce n'est pas lui
donner une responsabilité politique inappropriée pour le
président d'un tribunal?
Le choix des personnes, c'est important.
M. Johnson: D'accord. Je comprends, parce que le raisonnement
vaut dans un sens comme il vaut dans l'autre. On s'est tenu effectivement le
même type de raisonnement que le député de Saint-Laurent en
se disant que dans une approche consensuelle, ce serait peut-être
idéal. Le problème, c'est que c'est l'avenir qui nous le dira,
comme l'a dit le député de Saint-Laurent. Je me dis que si cela
se déroulait bien, si cela se déroulait fort bien lors de la
prochaine négociation, s'il devait y avoir grève, si la question
des services essentiels était une expérience, finalement, qui
enrichissait toute notre collectivité, compte tenu des traumatismes
qu'on a subis depuis dix ans dans ce domaine, je pense qu'on pourrait
peut-être penser qu'il y a l'amorce effective d'un consensus suffisant
pour que la notion de confrontation qui peut exister en cours de route dans un
conflit ne prenne pas le pas sur l'objectif de fond derrière ce
comité qui est d'être là pour les fins d'informer le
public. Ce n'est pas destiné aux parties, c'est destiné au
public. Cela n'empêchera pas, dans certains cas, que de l'information
biaisée, fausse ou exagérée de part et d'autre dans les
centres hospitaliers, de la part des syndicats, comme de la part de certaines
administrations hospitalières, se fasse, mais l'idée c'est
de...
Finalement, au niveau de ce choix, plus on allonge la liste, plus on
rend des personnes insatisfaites, puisqu'elle aurait tendance à
être perçue comme étant restrictive. Je
préférerais qu'on la laisse en dehors, justement, des
parties.
Le Président (M. Laplante): L'amendement du
député de Saint-Laurent est-il adopté?
M. Forget: Rejeté sur division.
M. Johnson: Rejeté, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Rejeté sur
division.
M. Johnson: Rejeté, M. le Président. J'ajouterais
à la liste, après les mots, dans le texte de mon amendement que
vous avez, "de l'Association des conseils des médecins et dentistes du
Québec Inc.," les mots "et du Comité provincial des malades".
Une Voix: Pas de "et".
M. Johnson: Je m'excuse, "du Comité provincial des
malades.", avec un C majuscule pour le comité. M. le Président,
l'article 99i est-il adopté?
Le Président (M. Laplante): Article 99i,
adopté.
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Laplante): Article 99j.
M. Johnson: Article 99j, M. le Président, vous avez le
texte de l'amendement qui est distribué en ce moment.
Mme Lavoie-Roux: Je ne pense pas qu'on ait répondu qu'on
avait accepté ou pas.
M. Johnson: Je vous demande pardon.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais proposer un sous-amendement. Je
m'explique.
Le Président (M. Laplante): Cela devient un
amendement.
M. Johnson: Un amendement, enfin. Une Voix: Peu
importe.
Mme Lavoie-Roux: Peu importe. Je voudrais proposer un amendement
dans le sens que soit inclue la Corporation professionnelle des infirmiers et
infirmières du Québec. Je m'explique. Je comprends mal que quand
même... Je pense que le ministre du Travail qui a eu au moins une
certaine expérience dans les hôpitaux sait fort bien le rôle
extrêmement important que jouent les infirmiers et les infirmières
qui, souvent...
Le Président (M. Laplante): Mme le député de
L'Acadie, je vous dis tout de suite que je ne pourrai pas la juger recevable,
parce que cet organisme était contenu dans l'amendement du
député de Saint-Laurent. Il vient d'être battu. On ne peut
pas y revenir suivant le règlement.
M. Forget: Sur le point de règlement, M. le
Président, on a ajouté un amendement comportant le Comité
provincial des malades et tout de suite après, le ministre...
Mme Lavoie-Roux: C'était inclus dedans.
M. Forget:... a présenté un amendement pour
l'inclure.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Forget: II me semble qu'on aurait pu fort bien apporter
l'argument que le ministre n'avait pas le droit d'introduire un
amendement...
Mme Lavoie-Roux: Oui, puisque c'était contenu dedans.
M. Forget: ... pour le Comité provincial des malades,
puisque cela avait déjà été rejeté
précédemment.
Le Président (M. Laplante): Ce n'est pas dans ce sens. Si
vous avez suivi le débat, le ministre, dans son explication sur
l'amendement du député de Saint-Laurent, a exprimé l'avis
qu'il pourrait retenir seulement le Comité provincial des malades. Cela
a été accepté à l'unanimité que cela puisse
être inclus, après avoir battu votre motion.
Mme Lavoie-Roux: ... l'unanimité à ce
moment-là...
M. Forget: On n'a pas débattu la recevabilité, M.
le Président.
Mme Lavoie-Roux: Bien non.
M. Forget: Cela c'était au niveau de I exposé des
motifs, mais l'exposé des motifs n'a rien à voir avec la
recevabilité d'une motion. Techniquement, nous aurions fort bien pu
plaider la non-recevabilité de l'amendement du ministre, parce qu'il
avait été, quels qu'en soient les motifs, rejeté par le
vote précédent. On ne veut pas faire de procédure. On n'en
a pas fait. Je ne veux pas dire que je vais commencer. On ne le fait pas. Je
trouve que le député de L'Acadie qui n'a pas abusé de son
droit de parole pose au ministre la question: Puisque vous avez fait une
exception pour le Comité provincial des malades, pourquoi ne pas faire
une autre exception pour les infirmiers et infirmières, parce que
contrairement aux médecins...
M. Johnson: ... je pourrais peut-être au fond, M. le
Président...
M. Forget: C'est parce que contrairement aux
médecins...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent, je voudrais que vous compreniez quelque chose de très
clair. C'est très clair dans mon esprit. Si le député de
L'Acadie ne fait pas de motion, je n'ai pas de recevabilité à
juger. Si, à ce moment, elle fait une motion d'amendement, je suis
obligé, par ce qu'il a annoncé auparavant, de la juger
irrecevable, suivant les règlements, mais si c'est une demande de
coopération que le député adresse au ministre, s'il y a
possibilité de...
M. Johnson: Je suis prêt, pour les fins d'accommoder
l'Opposition, à discuter et à dire la raison pour laquelle je
voterais contre son amendement s'il était présenté et
jugé recevable.
Mme Lavoie-Roux: II pourrait quand même donner...
Là, on ne veut pas que je fasse d'amendement. On veut bien que j'en
discute. Au cas où mon amendement serait jugé irrecevable, je ne
vous dis pas que je ne ferai pas la motion. Vous pourrez juger une seconde fois
qu'elle est irrecevable, mais je vais vous faire l'argumentation avant. C'est
quand même mon droit le plus strict. Personne n'abuse de cela ici. Ce que
j'avais commencé à dire, c'est que dans le fonctionnement d'un
hôpital, et particulièrement, dans un hôpital qui traverse
un état de crise, très souvent, ceux qui en temps normal,
auprès des patients ce sont quand même les patients qui
nous préoccupent dans cette question des services essentiels ou
même en période régulière rendent le plus de
services ou sont le plus souvent auprès des patients, sont vraiment les
infirmiers et infirmières, et à plus forte raison, quand un
état de crise survient, ce sont encore eux qui peuvent donner une
évaluation au moins aussi rationnelle et aussi logique que les
médecins peuvent en donner
parce qu'ils sont des services essentiels et tout cela. C'est dans ce
sens que je pense... Je vais faire la motion, à ce moment, compte tenu
que vous avez déjà accepté une motion de la part du
ministre, qui avait été...
M. Johnson: M. le Président, je pense que le consentement
des deux parties est suffisant. J'accepte que l'amendement soit
présenté, si vous n'avez pas d'objection.
Le Président (M. Laplante): Si tous les membres de cette
commission sont d'accord.
M. Johnson: C'est cela. D'accord?
Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez me répondre, je n'ai pas
d'autre chose à ajouter.
M. Johnson: D'accord. Ma réponse à cela, en fait,
en plus des motifs que j'ai exposés pour l'ensemble des autres, du
nombre, etc., c'est qu'il y a de nombreuses corporations professionnelles dans
le domaine de la santé. Il y en a, si je ne m'abuse, au-delà
d'une dizaine. Pourquoi les infirmiers et non pas la Corporation des
techniciens, par exemple, en radiologie? Pourquoi les infirmières et pas
la Corporation des techniciens de laboratoire? Il y a un ensemble comme
celui-là. Pour les mêmes raisons que j'ai exposées quant
à la nécessité de circonscrire cette liste, tout en
reconnaissant que les infirmières ont un rôle majeur dans ce
domaine, je vais être obligé de rejeter la proposition
d'amendement du député de L'Acadie.
Une Voix: L'amendement est rejeté, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Une minute! Je comprends... M. Johnson:
Excusez-moi!
Mme Lavoie-Roux: ... que vous êtes pressé, mais de
toute façon, il vous reste deux minutes. Alors, vous ne pourrez toucher
à rien d'autre. Je veux quand même protester contre le rejet qu'on
fait de cet amendement qui me semblait, compte tenu que déjà on
l'a amendé pour mettre le comité des malades, qu'on pouvait tout
aussi bien y joindre les infirmières et comparer le rôle qu'ont
les infirmières à l'intérieur des institutions
hospitalières à celui des techniciens, non que je veuille nier le
rôle essentiel des techniciens en radiologie ou du département
d'hématologie, et ainsi de suite. Il reste que, néanmoins, le
soin direct aux malades 24 heures par jour est assumé par les
infirmières ou les infirmiers, et qu'à ce titre, ils remplissent
auprès des malades une fonc- tion là-dessus, je ne
voudrais pas porter de jugement de valeur, parce que tout cela est très
difficile au moins aussi importante que les médecins qui, eux,
d'office vont être consultés dans le projet de loi. Je comprends
que le ministre va maintenir sa décision de rejeter cet amendement, mais
je le considère très important, et une question de
réalisme et de respect du rôle qui est joué par les
infirmières à l'intérieur de nos institutions
hospitalières.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que l'article 99i
à l'amendement de Mme le député de L'Acadie est
adopté?
Des Voix: Rejeté.
M. Johnson: Article 99i?
Le Président (M. Laplante): Article 99i,
adopté?
M. Johnson: Adopté, M. le Président. A l'article
99j, M. le Président, j'ai fait distribuer le texte de l'amendement. Il
comprend deux notions. La première, c'est l'obligation qui est faite aux
parties de négocier. Cela fait suite aux demandes exprimées en
commission parlementaire du côté syndical en particulier. Je pense
qu'ils ont bien démontré leur position.
La deuxième notion veut introduire une notion de nombre de
salariés par catégorie de services, par opposition à
comment maintenir les services essentiels. La troisième notion, c'est
une notion du libre accès, dans laquelle nous disons...
Le Président (M. Laplante): Sur l'appel de l'article
99j...
M. Forget: 99i ...
M. Johnson: ... j); i) est adopté.
Le Président (M. Laplante): Le paragraphe i) est
adopté.
M. Johnson: ... est adopté.
M. Forget: Ecoutez, M. le Président! Cela va un peu vite.
On a un amendement à 99i.
Mme Lavoie-Roux: On n'a même pas répondu.
Le Président (M. Laplante): Bon! On va ajourner nos
travaux sine die et on reprendra à l'article 99i.
(Fin de la séance à 0 h 2)