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Conflit de travail à la Commonwealth
Plywood
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît. Nous commençons une séance de la commission
parlementaire permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre.
Je dois, au début des travaux de cette commission, donner les
noms des membres de la commission et des intervenants. J'inviterais les partis
concernés, s'il y a des modifications, de m'en informer.
M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), M. Forget (Saint-Laurent); M. Gravel (Limoilou) sera
remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Johnson (Anjou), M. Lavigne
(Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt
(Jonquière).
Les intervenants: M. Blank (Saint-Louis). Est-ce qu'il y a un
remplacement?
M. Pagé: Est-ce que M. Mailloux est... Le
Président (M. Cardinal): Non. M. Pagé: M. Raymond
Mailloux.
Le Président (M. Cardinal): Alors, Mailloux (Charlevoix).
D'accord. M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet
(Laviolette), M. Laplante (Bourassa). Évidemment, il préside
aujourd'hui une autre commission parlementaire. M. Lefebvre (Viau), M. Paquette
(Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Il est nécessaire aussi, au début d'une commission
parlementaire, des travaux d'une première séance, de
désigner un rapporteur pour indiquer à l'Assemblée
nationale les résultats de ses travaux. Est-ce qu'il y a une
proposition? (10 h 15)
M. Johnson: M. Fallu, député de Terrebonne.
Le Président (M. Cardinal): II est proposé que M.
Élie Fallu, député de Terrebonne, soit
désigné rapporteur de la commission. Est-ce que c'est
adopté?
M. Pagé: Adopté.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Cardinal): Adopté. L'horaire des
travaux de cette journée. En vertu d'un règlement sessionnel, la
commission, en dehors des sessions parlementaires, est maîtresse de ses
travaux. Cependant, aujourd'hui, comme il y a un caucus, nous devrons suspendre
la séance de ce matin au plus tard à treize heures pour reprendre
normalement, selon l'usage, à quinze heures.
C'est encore l'usage qui nous guide pour me permettre d'affirmer
qu'à moins que la commission n'en décide autrement, nous
continuerions au moins jusqu'à 18 heures. Nous pouvons également
siéger ce soir, mais nous ne pouvons pas dépasser 24 heures,
jamais une commission ne peut le faire, même si l'Assemblée
nationale était en session.
Est-ce qu'il y aurait sur ce sujet des commentaires?
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.
M. Johnson: ...pour nos travaux ce matin, étant
donné le rythme où les choses vont, après les
déclarations, je ne pense pas que nous puissions commencer vraiment
l'audition des témoins avant 10 h 45; je propose que nous continuions
jusqu'à 12 h 30 et que nous reprenions à 15 heures jusqu'à
18 heures et de 20 heures jusqu'à minuit, s'il le faut.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que c'est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Cardinal): Alors, adopté. Merci,
M. le ministre. Je dois aussi rappeler le mandat de la commission. Une
commission peut étudier soit un projet de loi, soit des crédits
ou toute autre affaire jugée d'intérêt public. Les
convocations qui ont été faites aux témoins indiquent que
nous nous réunissons aujourd'hui relativement au conflit de travail
à la Commonwealth Plywood Inc. de Sainte-Thérèse, dans le
comté de Terrebonne, pour entendre des témoins qui ont
été invités.
Cela étant dit, pour simplifier toute procédure, je
rappelle quand même que les députés et témoins
bénéficient d'une immunité parlementaire,
c'est-à-dire qu'ici nous ne sommes pas devant une question où ce
qui sera dit pourrait être invoqué devant les tribunaux.
Cependant, cette immunité qui protège chacun des membres de
l'Assemblée nationale et chacun des témoins qui sera devant nous
n'existe que dans l'enceinte de ce salon rouge et non pas en d'autres
lieux.
De plus, les commissions parlementaires possèdent certains
pouvoirs. Celui qui en assume la présidence n'intervient pas dans les
débats et possède aussi certains pouvoirs. Je n'ai pas
l'intention d'y revenir. J'ose espérer qu'avec la collaboration de tous,
nous pourrons dès maintenant commencer ces travaux... Oui, M. le
député de Johnson?
M. Bellemare: II y a devant les tribunaux, vous le savez
sûrement, plusieurs causes sub judice. Est-ce que, d'après
l'article 171, nous serons obligés de respecter ce sub judice et de ne
pas
parler des jugements rendus? Les jugements rendus ne sont pas sub
judice, c'est certain, mais il y a d'autres causes devant les tribunaux. Est-ce
que vous nous permettrez de parler des causes pendantes?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, en vertu de cet article, le président vous permettra tout,
parce que, par votre demande de directive, je me place devant une situation
où je suis obligé de vous rappeler que le Président de
l'Assemblée nationale, comme le président d'une commission
parlementaire, comme tout membre de cette assemblée, ne peuvent statuer
sur des questions constitutionnelles, légales, judiciaires vu cette
division des pouvoirs. Et vous ne pouvez non plus exiger, de la part ni d'un
président, ni d'un ministre, un avis juridique ou même toute autre
opinion professionnelle.
J'ai rappelé cette immunité parlementaire, mais ce n'est
pas à moi de décider ce qui est ou n'est pas sub judice.
M. Bellemare: Mais votre réponse, c'est quoi?
Le Président (M. Cardinal): Posez votre question
autrement, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.
M. Bellemare: S'il arrivait que nous soyons obligés de
parler des causes sub judice, vous nous permettriez de le faire?
Le Président (M. Cardinal): Oui. M. Bellemare:
Merci.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, si vous
voulez, selon l'usage, procéder à l'introduction des travaux de
cette commission. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: M. le Président, le problème... M.
Bisaillon: M. le Président... M. Johnson: Oui.
M. Bisaillon: On a, dans nos dossiers, une liste des personnes
qui, normalement, auraient dû être convoquées à la
commission parlementaire. Est-ce qu'on pourrait savoir, à
l'intérieur des personnes mentionnées dans cette liste, quelles
sont celles qui sont présentes actuellement?
Le Président (M. Cardinal): Je puis lire la liste des
convocations et demander si ces personnes sont présentes ou non, ce qui
ne portera pas préjudice à l'ordre des travaux de cette
commission. D'accord.
D'après le rapport que j'ai du secrétariat des commissions
parlementaires, les organismes ou individus convoqués sont les suivants.
Et l'ordre que j'en donne est purement arbitraire. L'usage a toujours voulu que
le ministre ait un pouvoir dans ce domaine.
L'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord. On
m'a indiqué que c'était M. Donat Thériault qui en serait
le représentant. Est-ce que cet organisme est présent? Merci.
À titre personnel, Mme Hélène Grignon. Merci,
madame!
Autre organisme, la Commonwealth Plywood, représentée par
M. William P. Caine. Merci!
La Fédération nationale des syndicats du bâtiment et
du bois CSN, dont le représentant sera M. Ghislain Hallé.
D'accord, c'est accepté. M. Michel Bourdon pour les fins du journal des
Débats.
M. Marcel Pepin, à titre personnel. Merci.
Un bureau d'avocats, Byers, Casgrain et associés; Me Pierre
Fournier en serait le porte-parole. D'accord, merci, monsieur.
À titre personnel, M. Ernest Lévesque. Est-ce que j'ai
entendu M. Lévesque? Ah bon! d'accord. Merci.
Enfin, M. Gérard Gagné.
M. Gagné (Gérard): Présent.
Le Président (M. Cardinal): Merci, on vous entend
bien.
J'espère que je n'oublie personne sur la liste.
M. Johnson: M. le Président, j'aurai immédiatement
sur cette question deux remarques à faire. Dans le cas de la
Fédération nationale du bâtiment CSN, c'est M.
Ghislain Hallé que je désire faire comparaître, parce que
j'ai des questions spécifiques à poser à M. Hallé
en tant que représentant de la CSN quant aux événements
qui se sont produits à la Commonwealth Plywood.
Pour ce qui concerne le bureau de Byers, Casgrain, McNally, Dingle, je
prierais Me Casgrain ou Me Bazin d'entrer en communication avec M. Fournier. Je
ne pense pas, dans l'horaire que je proposerai, que nous entendions les
représentants patronaux avant cet après-midi et je pense que M.
Fournier pourra se dégager de ses travaux. C'est à titre
personnel que M. Fournier a été convoqué et non pas
à titre de procureur de l'employeur.
M. Casgrain (Philippe): Avez-vous pensé, M. le ministre,
que vous voulez faire témoigner les avocats au dossier?
M. Johnson: On verra, à ce moment-là, pourquoi, M.
Casgrain.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que vous me permettez
une remarque pour M. Bourdon? La convocation de fait qui a été
faite par télégramme et par courrier recommandé
était adressée à M. Ghislain Hallé. Enfin! Si vous
voulez vous adresser à la présidence, vous devez venir au micro,
s'il vous plaît, et vous désigner par vos noms, prénoms et
titres.
M. Rodrigue (Norbert): Norbert Rodrigue, président de la
CSN. Je voudrais tout simplement avoir un renseignement. Je constate que dans
la liste que vous avez énumérée, et le
syndicat des employés de la Commonwealth Plywood et la
Confédération des syndicats nationaux n'ont pas été
nommés.
M. Johnson: C'est-à-dire que des lettres ont
également été envoyées à M. Gagné,
président du syndicat local M. Hallé a été
convoqué à titre de représentant et à titre de
participant à des événements au sujet desquels on a des
questions à son égard et à la
Fédération nationale du bâtiment. D'autre part, M. Pepin a
été convoqué à titre personnel, compte tenu de sa
participation et compte tenu du fait que la CSN l'avait
délégué comme participant aux travaux de la commission de
médiation que nous avions nommée. C'est à ce titre que
nous entendons appeler ces personnes.
M. Rodrigue: Qu'est-ce que cela signifie, M. le ministre?
M. Johnson: Cela signifie que les personnes que nous voulons
entendre dans le cas de la CSN sont M. Gagné, M. Hallé et M.
Pepin, étant donné que nous avons des questions
particulières à leur poser.
M. Rodrigue: Oui, je comprends bien cela, mais la
confédération a un point de vue à émettre aussi.
C'est la question que je veux vous poser.
M. Johnson: Oui, mais à ce titre, si vous me permettez, M.
Rodrigue, je pense qu'il y a un tas de gens qui ont un point de vue à
émettre également. On a vu cela par les débats depuis sept
mois autour de la Commonwealth Plywood. Ce qui nous intéresse
essentiellement, ce sont des faits, des choses, des événements
précis qui se sont produits. Les personnes que j'ai nommées sont
les personnes qui sont directement impliquées. Je présume qu'une
partie de ce que la CSN a à déclarer ou a à émettre
comme opinion, sera sans doute reprise avec l'habileté qu'on lui
connaît par son conseiller spécial, M. Pepin, qui serait
appelé.
M. Rodrigue: Je reviendrai si nécessaire, M. le
ministre.
M. Johnson: Si nécessaire.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Puisque le ministre insiste sur la présence de
certaines personnes, contrairement au voeu spontané exprimé par
au moins deux organismes qui sont devant nous, pourrions-nous vous demander, M.
le Président, de préciser en vertu de quel pouvoir le
président prend sur lui de faire de telle demande, de manière que
la situation au moins sur le plan du droit parlementaire soit
clarifiée?
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Le président
ne le prend pas sur lui. C'est l'article 153 du règlement qui dit que
lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter
devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents et que cette
personne refuse de le faire, etc.
En fait, toutes les commissions jusqu'à présent ont
fonctionné à partir d'avis de convocation et, dans le cas
présent, j'ai donné une liste des gens qui avaient
été spécifiquement convoqués. J'ai indiqué
au début le mandat de la commission qui agit hors session.
Je n'ai pas l'intention de mettre en cause les pouvoirs du
président. Ce qui s'est produit, c'est simplement qu'au nom de la
commission, dont on connaissait la convocation pour la date du 26, le
secrétariat des commissions a simplement agi en vertu de l'article
153.
M. Forget: Pour être clair, M. le Président, la
commission n'a strictement rien fait jusqu'à aujourd'hui, puisque nous
n'avons pas commencé nos délibérations. Donc...
Le Président (M. Cardinal): Nous venons de commencer, si
vous permettez. Nous venons à peine de commencer.
M. Forget: Ce qui veut dire que la commission n'a convoqué
personne, le secrétariat des commissions présumant de la
volonté de la commission à convoquer des individus ou des
groupes.. Nous ne sommes donc pas en face de l'application de l'article 153. Il
ne s'agit pas d'un ordre de l'Assemblée, ni d'une commission.
Le Président (M. Cardinal): II s'agit d'une commission et
non pas d'un ordre de l'Assemblée nationale.
M. Bellemare: Mais, en vertu de l'article 158, vous lirez
l'article 158, cela va peut-être confirmer, mon cher, ce que vous venez
de dire.
Le Président (M. Cardinal): C'est ça,
justement.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez.
Le Président (M. Cardinal): Oui, je vous en prie, M. le
ministre.
M. Johnson: Je pense qu'il faut considérer que les
télégrammes et les lettres par courrier recommandé, je
crois, qui ont été adressées aux personnes que j'ai
mentionnées tout à l'heure et quelques autres sont des
invitations, puisqu'on présume, en général, que le
ministre responsable sectoriel dans une commission permanente est celui qui
convoque les personnes, dans un premier temps.
Évidemment, nous n'avons pas procédé par subpoena,
puisque la commission, justement, n'avait pas encore siégé. Il
n'est pas à écarter que, si cette commission doit siéger
plus qu'une journée et qu'elle doive reprendre ses travaux la
semaine prochaine, compte tenu de certaines difficultés qu'on
pourrait peut-être avoir, nous décidions, et je demande à
la commission de procéder par subpoena s'il le faut. Mais, pour le
moment, nous avons simplement invité des personnes à venir
témoigner devant nous.
Je reconnais que, légalement, il ne s'agit pas là d'un
ordre équivalent à un subpoena par cette commission. Cependant,
en général, je pense qu'on est en droit de s'attendre qu'une
convocation devant le Parlement soit respectée par les citoyens et que,
le cas échéant, je n'hésiterais pas à proposer
à la commission que nous émettions des subpoenas. (10 h 30)
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, comme
dernier commentaire, et en tant que président de la commission, j'ai
donné la liste tantôt de toutes les personnes ou tous les
organismes qui ont été convoqués, pardon, qui ont
été invités. J'ai volontairement évité le
mot "convoqués ".
Deuxièmement, en vertu du règlement, article 153, il faut
qu'il y ait défaut devant la commission pour que l'on puisse faire
rapport au président et demander que les moyens soient pris pour que les
gens soient présents.
Comme ils sont tous présents aujourd'hui, il est sûr que la
commission est validement réunie, il y a quorum de la commission; les
invités sont présents, le ministre est là. Vous avez un
représentant de la présidence de l'Assemblée nationale. Je
suggérerais que le ministre fasse son exposé
général et, s'il se présente des difficultés de
procédure, la commission ou le président les réglera au
fur et à mesure qu'elles se présenteront.
Je ne puis présumer ni absence de personnes, ni
irrégularités, ni mauvaise foi. Nous traverserons ces
rivières par les ponts qui nous sont permis par les règlements
lorsque nous y arriverons.
M. Bellemare: M. le Président, vous avez parfaitement
raison, et en vertu de l'article 158: "La commission ne peut modifier... "
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Bellemare: "... dans son principe une proposition qui a
été acceptée par l'Assemblée." C'est exactement le
principe que vous soutenez.
Le Président (M. Cardinal): C'est cela.
M. Bellemare: Dans l'avis de convocation que nous avons
reçu, nous, les membres de la commission, il est dit: "Veuillez prendre
avis que la commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre se
réunira le mardi 26 septembre, à 10 heures, au salon rouge,
à l'Assemblée nationale et le sujet en discussion sera le conflit
de la Commonwealth Plywood." Ceci est le principe général de
l'avis et comme vous l'avez si bien dit, il n'est pas question, actuellement,
de subpoena, ni d'autres choses que les interventions qui nous sont permises
à ce moment-ci.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, je vous remercie
tous et j'invite maintenant M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre
à faire son exposé.
M. Johnson: Bon. Sommes-nous sûrs cette fois-ci?
Le Président (M. Cardinal): Je vous ai accordé le
droit de parole, M. le ministre.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président.
Le conflit de Commonwealth Plywood qui est maintenant devant le
Parlement, devant l'opinion publique d'une façon, qui a un
caractère presque solennel est un conflit qui a non seulement fait
couler beaucoup d'encre, mais un conflit qui a pris une dimension sociale pour
une ville, une région à un niveau qui devient insupportable sur
le plan social.
Nous assistons là à un conflit qui oppose un groupe de
travailleurs et peut-être deux à un employeur. Nous assistons
là, également, à l'utilisation de procédures
judiciaires abondantes. Nous constatons qu'il y a dans ce conflit
au-delà de huit actions judiciaires dont l'ensemble est en ce moment
devant la Cour d'appel ou en appel de décision de première
instance. Nous remarquons donc que c'est un conflit où l'imbroglio
juridique et où notre système juridique ne sont pas parvenus
à amener la résolution d'un problème de nature
sociale.
De son côté, le ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre a fait son travail, compte tenu des lois existantes, compte tenu
des usages et même compte tenu du recours à des mesures
exceptionnelles. Il a nommé dans ce dossier un conciliateur dans des
conditions qui n'étaient pas faciles. Il a, par la suite, compte tenu de
la guérilla judiciaire qui se poursuivait et des difficultés
ressenties, encore une fois, sur le plan social dans cette région,
décidé de nommer un conseil spécial de médiation
qui était présidé par M. Yvan Blain, sous-ministre adjoint
aux relations de travail au ministère, et auquel participaient M.
Désilets, directeur du service de conciliation, et M. Vanier,
conciliateur au dossier. D'autre part, le sous-ministre a tenté,
à plusieurs reprises, d'entrer en communication avec entre autres le
président de la compagnie Commonwealth Plywood. Celui-ci n'a pas
jugé utile de rencontrer le sous-ministre du Travail. C'était
évidemment son droit. Quant à moi, j'ai eu l'occasion, au cours
de ces sept mois, de rencontrer la plupart des personnes impliquées dans
ce dossier, au moins au niveau des structures syndicales ou des producteurs
patronaux.
Cette commission, M. le Président, a pour but, dans l'esprit de
celui qui vous parle, et, j'espère, pour l'ensemble des parlementaires
qui y siègent, de jeter un peu de lumière sur des coins
plutôt obscurs de ce conflit. L'espoir que je formulerai,
c'est qu'après avoir entendu les parties, après que nous
aurons obtenu, j'espère, des réponses qui soient claires à
certaines des questions que nous avons à poser, le Parlement sera mieux
éclairé sur la situation qui prévaut à
Sainte-Thérèse, à la Commonwealth Plywood.
Deuxièmement, je souhaite évidemment que cet effort que nous
ferons, de bonne foi en ce qui concerne les parlementaires, permette au moins
l'amorce d'une reprise et l'amorce d'une solution possible en dehors d'un
contexte qui soit purement judiciaire.
Dans les circonstances, M. le Président, je vous avise et j'avise
les membres de la commission que je demanderai à M. Yvan Blain,
sous-ministre adjoint au ministère, accompagné de M.
Désilets, le directeur du service de conciliation, de venir
témoigner devant cette commission pour nous résumer le conflit,
nous donner les bases factuelles de ce qui est devant nous et également
nous parler de l'effort de médiation qu'ils ont accompli. Par la suite,
je demanderai à M. Gérard Gagné, président du
syndicat local, de venir témoigner devant nous, car j'aurai pour lui
certaines questions, de même que pour M. Ghislain Hallé, et
possiblement à l'égard de M. Marcel Pepin. Je demanderai
également à M. Ernest Lévesque, Mme Hélène
Grignon et M. Donat Thériault de venir déposer devant cette
commission et de répondre aux questions que nous avons pour eux.
Finalement, nous nous adresserons à M. Caine et à M. Fournier
pour obtenir des éclaircissements additionnels sur certains des faits
qui ont entouré ce conflit.
M. Casgrain: ... une question, s'il vous plaît.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que le ministre permet
que vous l'interrompiez?
M. Johnson: Je vous en prie.
M. Casgrain: Est-ce que vous permettez, M. le ministre, que je
vous interrompe? Je m'adressais à la présidence, je m'en
excuse.
Le Président (M. Cardinal): Je vous en prie.
M. Casgrain: La question que je veux poser est la suivante, je la
pose uniquement à titre d'information à ce stade. Vous avez
nommé des témoins et on a exprimé l'avis que les personnes
qui seraient entendues le seraient comme témoins et que des questions
leur seraient posées. Le ministre a même dit qu'il espérait
avoir des réponses claires. Compte tenu de cela et du fait qu'il semble
y avoir un ordre de témoins établi, la question que je me pose et
que je vous pose, M. le Président ou M. le ministre, en tout respect,
c'est la suivante. S'il s'agit effectivement je ne veux pas bloquer les
travaux d'aucune façon, ni faire de juridisme d'une commission
qui siège pour entendre des témoins, pour moi qui suis avocat
vous m'en excuserez cela m'apparaît être quand
même un forum qui appelle la règle normale de l'interrogatoire des
témoins, à savoir, pou- vons-nous à l'occasion intervenir,
pour interroger un témoin sur une question qui, selon nous, pourrait
être clarifiée, à son avantage ou autrement?
Deuxièmement, cela me touche plus profondément, à
partir du moment où, M. le ministre, vous voulez interroger sous serment
ou autrement, en espérant avoir les réponses honnêtes, vous
les aurez certainement, vous voulez interroger un de mes associés qui
est dans ce dossier, je vous souligne que ça constitue une situation
quand même assez délicate et que, pour ma part, j'aurai à
assumer la double tâche, avec Me Bazin, de représenter notre
client. Si je ne peux pas poser des questions, je ne sais pas très bien
ce que je fais ici et certainement au niveau de Me Fournier, de le
représenter tout au moins...
Parce qu'à partir du moment, dans mon esprit, où quelqu'un
doit comparaître devant un organisme quelconque, fut-il une commission de
la Chambre, je pense qu'il a droit d'être représenté et
obtenir la protection dont il a besoin.
Le Président (M. Cardinal): Je vais tenter de
répondre à chacune de ces questions. La première, c'est
que vous pouvez certainement suggérer ce que nous appellerons "des
témoins". Ce sont les membres de la commission qui interrogent. Le droit
parlementaire a des analogies avec la procédure civile, mais une
commission parlementaire, telle qu'elle est constituée ce matin, n'est
pas une commission d'enquête. Il pourrait y avoir une commission
d'enquête. C'est une commission, d'accord, qui veut savoir ce qui s'est
produit, mais ce n'est pas une commission d'enquête au sens où on
l'entend, ni dans les lois du Québec, ni dans la Loi de la
Législature, ni dans nos règlements.
Le ministre a exprimé un voeu, nous n'avons pas encore entendu
les autres parties. Je réserve donc mon jugement sur ce qui se produira.
Le ministre a simplement mentionné ce matin qu'il pourrait demander au
président, en vertu de l'article 91 de la Loi de la Législature,
de demander à certains témoins de répondre sous serment,
ce qui est prévu textuellement dans ce texte de loi. Mais je ne puis
permettre que la salle intervienne avec les membres de la commission. Vous
pouvez cependant suggérer à des membres de cette commission, en
temps et lieu, de nouveaux témoins ou des questions pertinentes.
Mais il n'y a pas, à ma connaissance, de contre-interrogatoire
qui provienne des témoins ou de leurs représentants. Nous ne
sommes pas devant un tribunal. C'est l'Assemblée nationale qui veut
s'informer sur tout ce qui s'est produit dans le conflit à la
Commonwealth Plywood. Je ne sais pas si ma réponse est suffisante, M. le
procureur.
M. Casgrain: Je ne veux pas user de mes...
M. Bellemare: Lorsque le ministre interrogera les personnes qu'il
vient de mentionner, est-ce que cela sera possible que nous posions des
questions aux représentants de la partie patronale,
pour savoir si c'est conforme à ce qui vient d'être
dit?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Johnson, et vous savez, c'est la façon de
procéder devant une commission parlementaire. C'est exactement la
réponse. Vous vous adressez à un député et lui se
charge de faire la question et de la prononcer.
M. Bellemare: S'il y a lieu de le faire...
Le Président (M. Cardinal): Si la commission le juge
à propos.
Dans ce cas-là, M. le ministre, est-ce que vous aviez
terminé?
M. Johnson: J'ai terminé, M. le Président.
M. Forget: Le point découlant de ce que vous venez
d'affirmer...
Le Président (M. Cardinal): Vous ne le faites pas en
réplique au ministre?
M. Forget: Non, pas du tout.
Vous venez de donner une indication à l'effet que la commission
parlementaire veut s'informer de tous les faits pertinents aux
difficultés entourant ce conflit de travail. Il demeure qu'il y a un
certain nombre de litiges devant les tribunaux, qui ne sont pas
décidés, par lesquels les enquêtes judiciaires ne sont pas
complétées.
Est-ce qu'il serait possible que le président indique clairement
quelle est la situation des personnes qui viendront s'exprimer ici, en
commission parlementaire, et qui exprimeront des opinions sur des
événements qui se sont produits, sur leur participation dans ces
événements, relativement aux poursuites qui sont pendantes devant
les tribunaux?
Est-ce que la présidence, est-ce que l'Assemblée nationale
est en mesure d'accorder quelque protection que ce soit aux déclarations
qui sont faites par ces témoins, eu égard aux procédures
judiciaires qui sont en cours?
Le Président (M. Cardinal): C'est la réponse que
j'ai déjà donnée à M. le député de
Johnson au tout début de la séance. Vous me posez la même
question. J'ai déjà indiqué que les membres de la
commission, ainsi que les témoins, bénéficiaient de
l'immunité parlementaire. J'ai indiqué que je ne pouvais pas me
permettre, comme président, de donner une opinion juridique sur la
portée de l'immunité parlementaire. Et j'ai de plus
indiqué que je ne m'opposerais personnellement à aucune question,
ni à aucune réponse. Nous ne sommes pas devant une commission
d'enquête ici. Nous sommes devant une commission parlementaire permanente
élue. Je ne peux pas aller plus loin dans une expression d'opinion.
M. Forget: Mais vous affirmez que l'immunité vaut pour les
témoins également?
Le Président (M. Cardinal): Je l'ai déjà
affirmé dans plusieurs décisions précédentes. Oui,
pourvu et je le répète que le tout se fasse dans le
cadre de la commission, dans cette enceinte, et suivant les règlements
de cette commission. Si cela se faisait dans les corridors, ou au Parlementaire
vous ne bénéficieriez plus certainement de cette protection.
Au nom du Parti libéral, M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, merci.
M. Bellemare: C'est l'article 171 qui s'applique, au paragraphe
e.
Le Président (M. Cardinal): Je pense que ce n'est pas
nécessaire d'y revenir.
M. Pagé: C'est tout réglé, M. le
Président, ces questions préliminaires?
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le
député de Portneuf. (10 h 45)
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Nous voici de
nouveau en commission parlementaire pour entendre les parties d'un conflit de
travail que le ministre du Travail n'aura pas pu solutionner. Après
Radio-Québec, le Soleil, voici Commonwealth Plywood.
J'ai encore en mémoire les discours emportés de certains
membres du présent gouvernement, du temps où ils étaient
dans l'Opposition. J'ai encore en mémoire leurs discours emportés
par lesquels ils fustigeaient l'inertie, l'incapacité et
l'irresponsabilité du gouvernement d'alors de n'avoir pu régler
à la manière prévue par nos lois, les conflits de travail
et être ainsi forcés de s'en remettre aux mécanismes d'une
commission parlementaire.
C'était alors pratique courante de tout mettre la faute sur le
dos du gouvernement dès lors qu'un conflit de travail durait pendant des
mois, qu'il donnait lieu à la panoplie des injonctions et qu'il
était l'occasion d'actes de violence et d'intimidation qui
compromettaient gravement le climat social. Tout devait miraculeusement changer
et le soi-disant préjugé favorable aux travailleurs allait faire
fonction d'une quelconque potion magique, en vertu de laquelle les relations de
travail au Québec deviendraient un univers de parfaite
félicité.
M. le Président, le conflit à la Commonwealth Plywood dure
depuis le mois de septembre 1977.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: Oui.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf, votre micro est un peu éloigné.
M. Pagé: Oui.
Le Président (M. Cardinal): Pour les fins du journal des
Débats, est-ce que...
Une voix: ... vous comprenez bien les... M. Pagé:
On va rapprocher le micro, etc. Le Président (M. Cardinal):
Bon!
M. Pagé: On va essayer de bien se comprendre et de bien
s'entendre.
Une voix: Comme à l'école.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. le député de Portneuf, vous aviez la parole.
M. Pagé: Bon! Merci, M. le Président! M. le
Président, j'en étais à dire que le conflit à la
Commonwealth Plywood dure depuis le mois de septembre 1977. Nous sommes en
septembre 1978, douze mois déjà... Ce conflit à la
Commonwealth Plywood a, jusqu'à maintenant, donné lieu à
combien d'injonctions provisoires, interlocutoires et permanentes, à
combien de requêtes, de jugements, d'inscriptions en appel! Il y a
même eu une procédure judiciaire contre le ministre
lui-même.
Ce conflit à la Commonwealth Plywood a été de plus
le théâtre de très nombreux actes de violence, de menaces
et d'intimidation et même donné lieu à une intervention des
forces policières au sujet de laquelle une enquête a dû
être ordonnée par le ministre de la Justice.
À l'égard de ce conflit particulier de la Commonwealth
Plywood, n'est-ce pas le devoir premier de l'Opposition de demander aujourd'hui
aux membres du gouvernement les raisons pour lesquelles l'opinion publique ne
serait pas justifiée de porter contre le gouvernement du Parti
québécois les mêmes jugements aussi sévères
que ces gens adressaient allègrement du temps où ils
étaient du côté de l'Opposition. L'opinion publique est,
à mon avis, d'autant plus justifiée de faire porter au
gouvernement actuel sa part de responsabilités dans ce dossier que les
membres de la présente équipe ministérielle
s'étaient formellement engagés à prendre les mesures
nécessaires pour éviter au Québec des conflits de travail
aussi longs, aussi marqués par le recours abusif aux tribunaux et aussi
préjudiciables au maintien d'un sain climat social.
Sur ce plan, le conflit à la Commonwealth Plywood constitue un
échec cuisant pour le gouvernement et le ministre, d'autant plus cuisant
que ces porte-parole péquistes, du temps où ils étaient de
ce côté-ci, ne s'étaient pas privés de dire et de
proclamer solennellement: Avec le Parti québécois, plus jamais de
conflits de l'ampleur et de la gravité de celui de la United Aircraft de
Longueuil.
Or, M. le Président, il y a maintenant depuis un an certainement
le cas du conflit de la Com- monwealth Plywood. Ce conflit constitue une
illustration additionnelle de la difficulté chronique que ce
gouvernement a de se tenir à la hauteur de ses promesses et de ses
engagements électoraux. Prenons par exemple le rôle joué
par les tribunaux de droit commun dans le domaine des relations de travail.
Essentiellement, une grande partie du problème, disaient dans le
passé les gens du gouvernement, c'était parce que le dernier
gouvernement ne prenait pas au niveau du ministère ses
responsabilités. Je me demande à qui peut bien être la
faute aujourd'hui quand on voit les sommets atteints par l'imbroglio judiciaire
sans précédent qui caractérise ce conflit.
Cette fois, assez curieusement, figurez-vous que, comme par hasard, ce
n'est plus du tout la faute du gouvernement en place ou du ministre du Travail
en titre. En fait, le 20 avril 1978, le ministre du Travail a
déclaré à l'Assemblée nationale, à la page
1957 du journal des Débats: Je me permets de le citer. C'est le ministre
du Travail qui parle. "Je tiens à affirmer qu'à mon avis les
procureurs de l'employeur dans les circonstances, par les gestes qu'ils posent,
par une attitude qui est ou issue de l'ignorance ou peut-être de la
mauvaise foi, laissent traîner une cause par des procédures qui
m'apparaissent souvent dilatoires, ce qui entraîne une
détérioration considérable du climat social." Fin de la
citation du ministre. Et d'une, M. le Président!
Le ministre poursuit: "Je ne prétends pas que la CSN c'est
toujours le ministre qui parle comme centrale syndicale dans le
présent conflit, ait à blanchir d'attitude ou de tout
comportement, étant donné qu'à mon avis la CSN comme
l'employeur, dans les circonstances, s'est servie de ce conflit pour finalement
jeter de l'huile sur le feu. Il est très clair que la CSN n'a pas
respecté les premières injonctions." C'est toujours le ministre
qui parle. Et de deux, M. le Président. "D'autre part, le type de
manifestation qu'on a vu hier, qui était caractérisé par
la présence de personnes brandissant des idéologies dites de
gauche, se conduisant également comme des voyous et des dangereux". Et
de trois. Dans l'imbroglio de la Commonwealth Plywood, nulle part le
gouvernement n'est impliqué ou ne semble être impliqué.
L'ancien gouvernement l'était. Aujourd'hui, c'est la faute de
l'employeur, c'est la faute de la CSN, c'est la faute des voyous et des
dangereux. Ce n'est pas tout. Il n'y a pas que les employeurs, les syndicats et
les manifestations qui en soient les responsables. Il y a aussi les juges. Un
juge en particulier, d'après le ministre, a rendu un jugement un peu
étonnant, un jugement qui a surpris le ministre et, s'érigeant
alors lui-même en tribunal d'appel, un jugement, ajoute le ministre, qui
lui paraît exorbitant au droit commun. Le tout, bravement
déclaré sous le couvert heureux de l'immunité
parlementaire.
M. le Président, il importe, à ce moment-ci des travaux de
cette commission parlementaire, de dire bien clairement au gouvernement que,
dans toute cette affaire de la Commonwealth Plywood,
le ministre du Travail encourt lui aussi une très grande
responsabilité, et cela, à un double titre. Il est le ministre du
Travail, il a la responsabilité de prendre toutes les mesures
nécessaires pour assurer la bonne marche des relations de travail au
Québec. Or, dans le dossier de la Commonwealth Plywood, le ministre du
Travail a failli à la tâche. Il n'a pas su remplir
adéquatement son devoir. Il n'a absolument pas à chercher
à en jeter le blâme sur les autres aujourd'hui.
L'affaire de la Commonwealth Plywood, c'est un échec cuisant pour
le ministre du Travail et son gouvernement. Le ministre, en tant que membre du
Conseil exécutif, n'a certainement pas le droit de s'immiscer ainsi
qu'il l'a fait dans l'exercice du pouvoir judiciaire, en commentant
publiquement une décision d'une cour de justice. Que le ministre se soit
ainsi permis de tels commentaires sous le couvert de l'immunité
parlementaire, loin de le disculper, cela ne fait qu'ajouter à la
responsabilité très grande que ses propos lui ont fait encourir.
Dans cette perspective, la nécessité qu'il y a pour le ministre
d'assumer ses responsabilités personnelles et gouvernementales dans ce
dossier, il est impératif de se référer ici aux propos
extrêmement sévères que le juge concerné a servis au
ministre.
Je cite maintenant le juge: "II n'est pas suffisant de dire que l'on
respecte la séparation du judiciaire et de l'exécutif. Il faut
plus que le dire, il faut le faire. Le public doit savoir que c'est ce principe
de la séparation des pouvoirs et de l'indépendance de la
magistrature qui constitue la meilleure, sinon la seule véritable
garantie des droits et des libertés des citoyens et que les cours de
justice ne céderaient pas à quelque pression que voudrait leur
imposer le pouvoir politique. De plus, a ajouté le magistrat
c'est, à mon avis, très important celui qui a
commencé à l'Assemblée nationale l'injonction du 18 avril
1978 peut difficilement être objectif, car il est lui-même
l'intimé dans une demande d'injonction dans un des quatre dossiers
devant la cour qui sont reliés au conflit de travail en question".
M. le Président, il s'est trouvé récemment, dans
une autre juridiction que celle-ci, un ministre qui avait tenu, au sujet d'un
jugement, des propos analogues à ceux qu'a eus le ministre du Travail
à l'égard d'un jugement de la cour. On sait ce qui est
arrivé au ministre en question, qui a dû démissionner. La
nature du comportement des deux ministres est fondamentalement identique et
tout aussi inacceptable, tant pour l'un que pour l'autre. La seule
différence, c'est que, dans le cas qui concerne le ministre du Travail,
ce dernier a eu la précaution combien courageuse de se camoufler
derrière l'immunité parlementaire.
Dans tout ce dossier de la Commonwealth Plywood, l'Opposition officielle
se doit donc de dénoncer sévèrement l'action du ministre
du Travail au titre de sa tentative de chercher à faire porter sur les
autres la responsabilité qu'il a à titre de ministre du Travail
et de condamner tout aussi sévèrement l'intrusion inacceptable du
ministre dans l'exercice du pouvoir judiciaire.
M. le Président, l'Opposition doit, de la même
façon, s'interroger sérieusement sur la conception même que
le ministre du Travail s'est faite de la nature du conflit à la
Commonwealth Plywood. Le ministre a toujours semblé considérer
que le fond du litige était essentiellement un simple problème
entre un employeur et ses employés. Il a toujours feint d'ignorer qu'au
moins l'une des parties en cause soutenait le contraire, à tort ou
à raison, et qu'il ne s'agissait, en fait, que d'une lutte
intersyndicale. Cette attitude du ministre est particulièrement bien
illustrée par l'embarras réel et évident dans lequel il
s'est toujours trouvé, dès lors qu'il s'agissait pour lui
d'aborder la question de la convention collective déposée au
ministère du Travail le 14 octobre 1977. Alors, le ministre a toujours
fait état du fait que la question de la légalité de cette
convention était mise en doute et que, dans ces cas, au moins, il
fallait s'en remettre aux tribunaux, tout en ajoutant,
généralement et de même souffle, qu'il comprenait
très bien que la CSN puisse contester la validité de cette
convention collective.
Il y a certainement lieu de se demander, dans le même ordre
d'idées, si la constitution elle-même du conseil de
médiation ne traduisait pas chez le ministre une quelconque
volonté de contester la prétention de l'une des parties selon
laquelle il s'agissait strictement d'un simple conflit intersyndical. Alors, le
ministre ne doit pas s'étonner outre mesure de l'échec de cette
médiation. Maintenant, voilà qu'une commission parlementaire, ce
matin, va entendre les parties intéressées à tout ce
conflit. Les membres de la commission parlementaire sont en quelque sorte
conviés à reprendre le dossier là où il
était le 21 avril 1978, c'est-à-dire au moment où le
ministre annonçait la formation d'un conseil de médiation. Avril,
mai, juin, juillet, août et septembre, cinq mois se seront passés
au cours desquels les seules choses à signaler auront été
la prolifération des procédures judiciaires, évidemment,
les actes de violence au début de juin et finalement, l'échec du
conseil de médiation, échec qui, en dépit de la
qualité des membres du conseil et de leurs efforts tout à fait
louables, était pour ainsi dire presque inévitable.
Alors, nous revenons cinq mois en arrière. La trouvaille du
conseil de médiation n'ayant pas pu sauver le ministre du Travail, il
demande maintenant aux membres de cette commission parlementaire de la faire en
étudiant les différents aspects du conflit de la Commonwealth
Plywood.
Or, cette commission parlementaire, incidemment, M. le Président,
laquelle avait été demandée par le conseil national du
Parti québécois dès le 1er mai et évoquée
comme possibilité le lendemain par le premier ministre, cette
commission, dis-je, a été effectivement convoquée le 15
août 1978 et la date que le ministre a, par la suite, choisie, est le 26
septembre, soit très exactement quatre jours avant l'expiration de la
fameuse convention collective d'un an qui a été
déposée au ministère le 14 octobre.
Cette coïncidence appelle certainement des explications de la part
du ministre, surtout si l'on
considère que, dès le 7 juillet, le ministre savait que le
rapport de médiation demeurait sans effet du fait de son rejet par la
compagnie. Il nous faut, en outre, demander au ministre en quoi les travaux de
cette commission parlementaire pourront être plus concluants que ceux du
conseil de médiation. Nous allons entendre les parties
intéressées, comme le conseil l'a fait, et nous faire
décrire de nouveau toutes et chacune des péripéties qui
ont mené à l'imbroglio qu'on connaît aujourd'hui, la seule
différence étant peut-être que la compagnie a
accepté de participer aux travaux de la commission parlementaire.
M. le Président, qu'est-ce que cette commission va faire?
Va-t-elle simplement emprunter la même démarche que le conseil de
médiation? De toute façon, que les résultats auxquels
aboutissent ses travaux soient les mêmes que ceux du conseil de
médiation ou qu'ils soient différents, est-ce qu'il est
réaliste de penser que la commission parlementaire pourra, d'une
façon claire, dire à la compagnie le nom du syndicat avec lequel
elle doit négocier le renouvellement de la convention collective
déposée au ministère du Travail le 14 octobre 1977 et dont
la légalité est, par ailleurs, contestée?
Je pense donc, M. le Président, et je termine là-dessus,
que le nouvel épisode que nous nous apprêtons à vivre au
sujet du conflit soulève, dès le départ, des
interrogations nombreuses. C'est donc avec énormément de
réserve que l'Opposition officielle s'engage dans cette nouvelle phase
du dossier. Nous sommes, en tout cas, certainement justifiés de demander
au ministre d'expliquer aux membres de la commission et aux parties
impliquées les objectifs précis qui le poussent en convoquant
cette commission parlementaire. Je considère que c'est toujours trop
facile, pour un ministre, de demander, de souhaiter, de formuler le voeu qu'une
commission parlementaire jette de la lumière sur des faits. Je pourrais
citer le ministre dans sa déclaration d'ouverture alors qu'il disait:
"J'espère que cette commission pourra jeter de la lumière sur des
points obscurs dans le dossier, mieux éclairer le Parlement, que ce soit
un effort pour permettre l'amorce d'une reprise d'une solution possible et
éventuelle." Que c'est beau, que c'est hypothétique, de beaux
voeux très bien formulés! On est habitué à ces
voeux-là.
Nous lui demandons de dire en quoi notre commission peut être plus
utile que le conseil de médiation, purement et simplement, en quoi notre
commission va être plus utile. Nous lui demandons s'il sera possible
à cette commission d'entendre d'autres personnes ou autorités
même au dossier de la Commonwealth Plywood. En particulier, M. le
Président, est-ce qu'on pourra entendre le ministre de la Justice
c'est une question que je formule au ministre qui a été
à même d'enquêter, de commander et ordonner une
enquête sur les problèmes, sur ce qui s'était passé
là-bas? Est-ce qu'on pourra entendre le ministre de l'Industrie et du
Commerce? J'ose croire, parce qu'il y a peut-être eu l'imbroglio du
départ des travaux de la commission ce matin, lorsqu'on se demandait qui
avait convoqué qui et en vertu de quel ordre.
Le ministre, en tant que ministre sectoriel ou responsable de ce
dossier, a jugé opportun de demander au secrétariat des
commissions de convoquer certaines personnes ou certains groupes à venir
comparaître ici. Est-ce que vous avez demandé ou requis la
présence du ministre de l'Industrie et du Commerce? Parce qu'il y a un
élément important dans ce dossier, qui est toute la question de
la rentabilité de l'entreprise. Est-ce que vous avez cru opportun de lui
demander de venir comparaître? Est-ce que le ministre de l'Industrie et
du Commerce... Tout à l'heure, nous aurons probablement des questions
à poser dans ce sens-là. Je suis convaincu que les parties ont
étudié toute cette question de la rentabilité et la
situation économique de l'entreprise au moment des congédiements.
Je présume que le ministre de l'Industrie et du Commerce, membre d'un
gouvernement qui se dit responsable, a étudié cet aspect, qu'il
sera en mesure de venir comparaître et de nous donner des
éléments d'information qui ajouteront de la lumière au
dossier.
M. le Président, on termine là-dessus. J'ose
espérer que le ministre sera en mesure de prendre ses
responsabilités et non pas s'en remettre à toutes les parties en
présence, sauf à lui-même, évidemment. J'ose croire
que le gouvernement, dans ce geste, dans ce qui s'inscrit dans cette politique
de clairvoyance, de transparence, etc., sera en mesure de faire
comparaître, avant la fin des travaux de cette commission quant
à nous, on serait disposé à revenir demain matin si la
commission le juge opportun particulièrement le ministre de
l'Industrie et du Commerce.
Le Président (M. Cardinal): Suivant l'ordre des choses
normales, mais avec une petite remarque auparavant, la commission ne pourra pas
siéger demain. Nous n'avons pas d'ordre à cet effet. Nous
devrons, à la fin des travaux, à la fin de la journée,
ajourner sine die. Je le dis immédiatement. C'est la règle.
M. Pagé: La commission est maîtresse de ses travaux,
M. le Président. On ne se chicanera pas là-dessus tout de suite.
On va attendre à 23 h 30 ce soir.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: Mais je pense qu'on est maître de nos
travaux. (11 heures)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission, je l'ai dit, est maîtresse de ses travaux.
Cependant, s'il faut aussi en arriver à ce point de procédure,
nous le réglerons ce soir.
M. Pagé: On réglera cela à 11 h 30.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson.
M. Maurice Bellemare
M. Bellemare: M. le Président, drôle de
coïncidence, le 26 septembre 1968, décédait un premier
ministre de la province, un grand premier ministre, l'honorable Daniel Johnson.
Cela fait dix ans aujourd'hui qu'est mort ce grand homme d'État
québécois et je voudrais lui payer, en cette circonstance toute
particulière, le témoignage bien senti d'une vive reconnaissance
pour ce qu'il a fait pour les Québécois.
Ceci étant dit, je passe au débat. Actuellement, devant la
commission parlementaire, on ne discute pas d'une grève. On ne discutera
pas d'un lock-out, mais on parlera pendant toute la journée d'un conflit
intersyndical.
Je n'ai pas besoin de vous dire que les déclarations que
l'honorable ministre a faites au début m'ont vivement
intéressé. Le conflit est devant le Parlement, chose
inusitée qui s'est répétée quelquefois dans le
passé, qui a peut-être apporté certaines solutions, mais
à long terme.
Je pense que le grand responsable aujourd'hui de ce conflit, qui a pris
des proportions, comme le disait l'honorable ministre, anormales dans un climat
social perturbé par des jugements qui ont été rendus et
d'autres causes qui sont sub judice, prouve que les tribunaux n'ont pu,
même à la remarque qu'a faite le ministre, apporter rien de
nouveau, de concret pour régler le problème.
Donc, les huit actions judiciaires qui sont devant la Cour d'appel,
l'imbroglio juridique devant lequel nous, les parlementaires, sommes
présentement, font que même s'il y a eu un conciliateur en vertu
de la loi que le ministre a respectée c'est bien sûr
même s'il y a eu un conseil de médiation formé d'un homme
que je connais et que je respecte énormément, Yvon Blain,
accompagné de M. Désilets Vianney, même si le sous-ministre
est intervenu, le ministre qui a la responsabilité de voir à ce
que l'économie sociale, industrielle et manufacturière comme la
responsabilité des syndicats soient protégées, n'a rien
fait lui-même. Il nous a déjà traités de pompiers
parce que nous sommes intervenus dans certains conflits et je peux dire au
ministre que dans tous les cas où je suis intervenu personnellement, je
pense que j'ai rendu service à la province, aux syndicats et aux
patrons.
Se faire traiter de pompiers parce qu'on se mêle de ses affaires
et comme ministre on intervient, par son autorité, à mettre de
l'ordre dans les relations patronales-ouvrières, on établit un
certain climat.
Le ministre qui connaît parfaitement son Code du travail, le
ministre que j'ai eu l'occasion de féliciter pour certains gestes qu'il
a posés, ce matin, je dois lui dire que je ne suis pas satisfait de
l'attitude qu'il a prise véritablement dans ce conflit.
Il a pris certains détours. Il dira: Ce n'est pas mon affaire
d'être ministre-pompier, mais est-ce que M. Munro, dans le conflit d'Air
Canada, comme ministre, n'est pas intervenu? A-t-il perdu son influence
lorsqu'il l'a réglé?
M. Johnson: ...son ministère.
M. Bellemare: À l'ordre! À l'ordre, M. le
Président! Je pense que c'est moi qui ai le crachoir et je vais m'en
servir.
M. Pagé: Vous avez peur de perdre votre
ministère?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: Le ministre se sert-il de M. Bisaillon, le
député de Sainte-Marie et le député de
Joliette-Montcalm, M. Chevrette, pour régler le problème au
Soleil? Est-ce que c'est normal que M. le député de Sainte-Marie
soit encore envoyé dans le conflit de Radio-Québec, que le
ministre ne veuille pas se mouiller les pieds, mais qu'il se serve de
députés qui n'ont pas le mandat en vertu de la loi de
régler certains problèmes comme celui-là? Est-ce qu'il
n'est pas aujourd'hui condamnable, n'est-il pas le principal responsable? Il
aura beau dire: J'ai fait mon possible, j'ai envoyé un conciliateur,
j'ai nommé un conseil de médiation, j'ai fait tout cela.
J'ai fait des déclarations sensationnelles le 20 avril au journal
des Débats, qu'a citées presque textuellement l'honorable
député de Portneuf, mais il dit ceci, qu'il faudrait noter,
à la page 1057, le jeudi 20 avril 1978: "II n'appartient pas aux
tribunaux de régler un problème du ministère du Travail."
C'est vrai. Vous avez parfaitement raison, mais cela vous appartenait, par
exemple, à vous comme ministre. Si un député peut avoir de
l'influence dans un conflit qui brime les intérêts publics,
sociaux, économiques, que vous le déléguez
vous-même, mais qu'il n'a pas de mandat de faire ce que vous lui avez
demandé, je me demande pourquoi le ministre ne s'est pas lui-même
impliqué dans le conflit. Il y avait des dates spécifiques
où il aurait pu empêcher le conflit de se propager. Il ne l'a pas
fait. Il a dit: Le Code du travail me protège, je prends les moyens qui
me. sont dictés par la loi. Très bien. Qu'est-ce que cela a
donné?
Aujourd'hui, vous êtes devant la foule, devant cette
assemblée, devant les parlementaires pour vous expliquer. Comment,
devant tout ce dommage qui a été fait au syndicat, au patron,
pouvez-vous donner une réponse satisfaisante aujourd'hui aux
parlementaires? Pourquoi vous, comme ministre, n'êtes-vous pas intervenu
vous-même, demandant aux parties de vous rencontrer? Quand on est
ministre, on a une certaine autorité. Pour la Commonwealth Plywood, M.
Caine a refusé d'aller devant le conseil de médiation, mais il
n'aurait pas refusé d'aller devant vous, comme le syndicat n'aurait pas
refusé d'aller devant vous, conjointement, pour essayer de trouver la
vraie solution, la solution que vous auriez certainement, à cause de
votre expérience, trouvée. Mais non, vous n'avez pas voulu vous
mêler de cela. Vous n'avez pas voulu vous mouiller les pieds. Vous avez
voulu rester un grand ministre protocolaire avec tous les
coups d'encensoir que vous avez pu recevoir, mais faites attention
à cela. Il y a des gens qui, dans les nuages, mon cher monsieur,
à un moment donné, touchent les fils électriques sans le
savoir. Un verre de lait renversé, M. le ministre, cela ne peut pas se
remettre dans une chopine ou dans une pinte. On ne jette pas son "char" parce
qu'on a un "flat". On répare le "flat" et la machine continue.
Je pense, M. le Président, que cette commission parlementaire
n'aura aucun succès. Je ne veux pas être pessimiste, mais je me
mets en face des réalités. Seul le ministre le pouvait, comme au
Soleil. Il a délégué le député de
Sainte-Marie et le député de Joliette-Montcalm pour régler
le problème. Pourquoi pas lui avec son autorité? Si un
député peut avoir véritablement un prestige, que vaut le
prestige du ministre dans un cas pareil?
M. Bisaillon: Quand cela? Ce n'est pas vrai.
M. Bellemare: Je vous dis, parce que j'ai été
ministre, que j'ai rencontré des gens qui sont ici dans cette salle dans
des conflits extraordinairement difficiles.
M. Chevrette: Ce n'est pas vrai, cela.
M. Bellemare: Non? Demandez cela à M. Marcel Pepin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Je fais appel au règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! M. le député de Joliette-Montcalm, sur une question de
règlement.
M. Chevrette: Je voudrais rectifier immédiatement des
paroles qui sont fausses.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Joliette-Montcalm, en vertu de l'article 96, vous devez
nécessairement attendre la fin de l'intervention du député
de Johnson, à moins que celui-ci n'y consente.
M. Bellemare: Je n'y consens pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
parole est au député de Johnson.
M. Bellemare: Alors, je pense que...
M. Chevrette: Je demande d'être inscrit en
priorité.
M. Bellemare: À l'ordre!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Bellemare: C'est une décision du prési- dent,
vous n'avez pas le droit de la critiquer. J'ai vécu des conflits
extraordinairement difficiles, où la FTQ et la CSN étaient en
cause, dans le textile, par exemple, et j'ai négocié avec M.
Marcel Pepin dans le temps et je peux vous dire aujourd'hui, il est ici dans
cette salle, combien cela a pris de temps pour le régler. Il a fallu 33
heures, mais nous avons fini par trouver un règlement satisfaisant pour
les parties et qui a empêché tous les recours judiciaires et le
reste. M. le Président, je pense que cette commission parlementaire ne
donnera pas grand-chose, sauf d'étayer ce qu'on sait déjà
par de volumineux rapports qui nous ont été transmis, que j'ai eu
le temps de parcourir.
M. le Président, je dis et je répète que ma seule
intervention ce matin, c'est pour dire que le ministre n'a pas fait son devoir,
véritablement celui d'être un homme qui soit malléable et
qui soit prêt à rendre service aux parties. Quand on est ministre,
on assume une certaine responsabilité. Devant les faits qui auraient
été démontrés par la Commonwealth Plywood et par le
syndicat, la CSN ou les Rembourreurs unis d'Amérique, on aurait
trouvé là véritablement un plancher d'entente et des
millions auraient pu être épargnés, des actes de violence
auraient sûrement été évités, des
dégâts auraient été évités.
Nous avons des exemples extraordinaires selon lesquels, dans d'autres
conflits dont je ne parlerai pas ce matin, Kenwood par exemple, le ministre de
la Justice a envoyé la police provinciale pour sortir les camions; le
ministre du Travail savait ça. Qu'est-ce qu'il a fait pour
réprimer ça? Rien. Il a beau être un bon garçon, il
va me répondre avec un ton que je connais bien, qui venait de la
famille: Écoutez, je pense que nous avons fait notre possible, il faut
avoir de la tolérance, il ne faut pas se mêler des choses qui ne
nous regardent pas.
Mais qu'est-ce que c'est, le ministre lui-même? Qu'est-ce qu'il
représente dans la province? Est-ce qu'on peut reprocher à M.
Carter, dans les questions mondiales, d'être intervenu? Est-ce qu'il n'a
pas aussi risqué son prestige? Non, M. le Président, ce matin, ma
seule intervention, c'est pour dire que, si le ministre, au point de vue social
comme il l'a déclaré tout à l'heure a dit
que cela avait pris des dimensions anormales, le premier responsable, c'est
lui. Et c'est lui qui va essayer aujourd'hui de racheter sa faute, de racheter
son erreur comme ministre.
Je lui dis ce matin que toutes les questions qu'il va poser vont essayer
de l'abrier, et non pas d'éclairer la situation. Le verre de lait
renversé, vous ne le remettrez pas dans la pinte, jamais. Le tort que
vos avez causé aujourd'hui, au syndicat comme à la compagnie, est
irréparable. Vous avez pleine conscience, parce que vous êtes un
homme plus préparé que bien d'autres, de connaître ce que
sont les exigences du Code du travail, surtout d'y donner suite.
C'est le chemin de la faillite dans les relations industrielles et
patronales-syndicales que nous sommes en train de voir s'élaborer. Un
ministre fort dans la province de Québec, on a besoin de ça. On a
besoin d'un homme conciliant, d'accord;
ça, il y en a de son côté, énormément.
Oui, bonjour, très bien, on va étudier ça, on va vous
donner les hommes pour réussir. Mais qu'est-ce que cela a donné?
Vous l'avez, l'expérience vécue. J'espère que cette
expérience va vous servir pour d'autres cas qui sont lamentables dans la
province de Québec. La grève de René Thibault qui
traîne depuis des années. La liste est longue des conflits qui
durent.
M. le Président, je ne voudrais pas m'emporter parce que j'ai
d'autres sorties à faire, qui sauront, en temps et lieu, je pense,
éclairer le débat, particulièrement le ministre. Je lui
rappellerai à tous les instants de cette commission parlementaire son
manque à s'occuper du conflit pour régler le problème. Un
ministre du Travail, pour des syndicats comme pour le patron, ça veut
dire quelque chose. Je pense que le ministre doit porter la
responsabilité totale, ce matin, de cette faillite monumentale, parce
que ce n'est pas une grève, parce que ce n'est pas un lock-out, c'est un
conflit intersyndical qui veut que, lorsque la convention a été
déposée le 13 octobre, elle a été contestée,
c'est devant les tribunaux, c'est sub judice.
Maintenant, M. le Président, ma dernière remarque sera
celle-ci: Pourquoi la compagnie n'a-t-elle pas répondu à l'appel
du conseil de médiation? Pourquoi? Le ministre avait établi, je
pense, en vertu du Code du travail, ce conseil particulier de la
médiation, mais, dans le rapport qui nous a été fait, que
j'ai lu, M. Caine a refusé, et ses avocats de même, de donner la
version de la compagnie devant le conseil de médiation. La compagnie
n'avait pas le droit, devant la bouée de sauvetage qu'on lui jetait
d'aller exposer le pour et le contre, même si c'était une
répétition, même si c'étaient des faits connus, de
refuser d'aller devant le conseil de médiation. La compagnie n'est pas
justifiée de le faire, comme le ministre l'a si bien dit. (11 h 15)
Comme l'a cité mon collègue de Portneuf, la CSN...
m'apparaît une autre attitude douteuse de l'employeur et de ses
procureurs, et d'autre part, c'est une facilité de démagogie de
la part de certains membres du syndicat de la CSN, surtout au niveau de la
centrale, et la présence de personnes qui sont des troubleurs de la
société et des joueurs en eau trouble, je fais un appel aux deux.
Cela n'a pas été écouté.
Mais le ministre avait le droit de convoquer les parties à son
bureau, dès le début, avant que le conflit ne s'aggrave et prenne
les dimensions actuelles. Est-ce que le ministre s'est refusé à
le faire parce qu'il prétendait que ce n'était pas dans ses
obligations et dans ses devoirs de le faire?
Selon la longue tradition de tous les ministres du Travail dans la
province de Québec, à quelque parti qu'ils appartiennent, au
gouvernement fédéral comme au gouvernement provincial, nous avons
vu des ministres du Travail intervenir personnellement. Cela n'a pas
été une perte de prestige, au contraire. Cela a été
pour établir un climat de meilleure relation entre les individus, au
point de vue commercial, industriel et des affaires.
M. le Président, je termine. J'espère que ces quelques
mots que j'ai prononcés à l'endroit du ministre seront bien
compris de sa part, pour l'avenir et qu'il ne répétera pas, je
l'espère, cette erreur monumentale qu'il a faite, d'obliger la
commission parlementaire à siéger ce matin relativement à
un conflit intersyndical. Ce n'est pas une grève, ce n'est pas un
lock-out. C'est simplement un conflit intersyndical. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Johnson.
M. le député de Joliette-Montcalm, je vous reconnais,
pourvu que votre exposé ne soit pas une question de
privilège.
M. Chevrette: Ce n'est pas une question de privilège, M.
le Président. Je voudrais d'abord rectifier un fait, puis exprimer une
courte opinion. Je voudrais dire que je n'ai jamais été
délégué, en aucune façon, par le ministre du
Travail, dans le cas du règlement du conflit au journal Le Soleil.
M. Bellemare: Qu'est-ce que vous êtes allé faire
là?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, M. le député de Johnson! À
l'ordre, messieurs!
M. Chevrette: J'ai l'impression qu'il...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! C'est une
commission parlementaire trop sérieuse pour que nous commencions cela.
M. le député de Johnson, j'en appelle à votre sens de la
procédure pour savoir...
M. Bellemare: Je ne le laisserai pas mentir devant moi, certain.
Jamais dans cent ans.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: C'est correct, je vous ai compris. Je vous ai
entendu.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais dire que c'est
à la sortie de la commission parlementaire, où il y a eu un
paquet de suggestions, que j'ai eu la chance de parler avec M. Francoeur et M.
Garon, que nous avons accepté de jouer le rôle, conjointement, M.
Bisaillon et moi-même, sans aucun mandat de l'État...
M. Bellemare: C'est encore pire. C'est encore bien pire pour le
ministre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: Est-ce que je pourrais continuer et avoir la paix
deux minutes? On vous a laissé japper pendant plusieurs minutes.
M. Bellemare: Comment dites-vous cela?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: Le député n'a pas le droit de dire
que j'ai jappé.
M. Chevrette: Vous avez bien raison.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: J'ai mordu, très bien. Mais je n'ai pas
jappé.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, j'en ferais un débat linguistique, mais pas un débat de
procédure. La parole est toujours reconnue...
M. Bellemare: Qu'il respecte les mots.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre s'il vous
plaît! Respectez tous la présidence.
M. Bellemare: Oui, je la respecte.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Bellemare: Qu'il dise mordu, c'est correct, mais pas
jappé.
M. Chevrette: La correction étant apportée, je dis
que j'étais là, à titre personnel, parce qu'on avait
devant nous deux parties désireuses d'en finir avec un conflit qui
durait depuis plusieurs mois. C'est peut-être l'élément
essentiel pour n'importe quel homme public qui sent qu'il peut jouer un
rôle au moment où deux parties, cependant, veulent un
règlement. Cela m'apparaît très important dans toute
solution. De toute façon, M. le Président...
M. Bellemare: J'ai le droit de rire, M. le Président?
M. Chevrette: Vous avez le droit d'être poli et de montrer
l'exemple aux jeunes parlementaires également.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: Oui, je ris.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais aussi dire que
je croyais que la commission parlementaire était ici pour tâcher
de comprendre le problème que vivent les employeurs et le syndicat
à la Commonwealth Plywood. Ce n'est pas par des discours dictés
par la main de Dieu qu'on va faire la lumière. Ce n'est pas en faisant
de la basse démagogie et en taxant qui que ce soit qu'on va
réussir à s'en tirer avec des solutions d'ordre pratique.
M. Bellemare: Je soulève "un point d'ordre".
Le Président (M. Cardinal): Vous voulez dire une question
de règlement?
M. Bellemare: Une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Bellemare: Est-ce qu'on a le droit de dire qu'un
député a fait de la démagogie?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Johnson.
M. Chevrette: Surtout quand ça sent à plein
nez.
M. Bellemare: Quand ça quoi?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: Surtout quand ça sent à plein
nez.
M. Bellemare: Vous avez le nez fin, monsieur. Vous auriez pu
sentir cela avant aujourd'hui.
M. Chevrette: II faudrait être grippé pour ne pas
sentir cela de votre part.
M. Bisaillon: Peut-on commencer à travailler
sérieusement? C'est à vous aussi que je parle.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, messieurs...
M. Bellemare: Dites cela à votre député. Je
comprends, mais j'entends mal.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs les
députés, je vous prierais tout d'abord de vous adresser à
la présidence et de ne pas créer de dialogue ou de quatuor entre
vous autres. M. le député de Joliette-Montcalm, si vous voulez
bien brièvement continuer.
M. Chevrette: Je m'aperçois que je servirais davantage
d'appât à la bouffonnerie.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, sur mon
droit de réplique, brièvement, je vais simplement répondre
à la question du député de Johnson concernant ce que tout
cela a donné de façon générale, l'attitude du
ministère du Travail depuis un an. Cela a donné 50% moins de
grèves et de lock-out au Québec, entre autres.
M. Bellemare: Ah! ah! ah!
M. Johnson: Deuxièmement, il faudrait peut-être
ramener à leur dimension les problèmes. Camp David et les
problèmes du Moyen-Orient...
M. Bellemare: Vous regarderez la liste des grèves.
M. Johnson: ... et les problèmes de relations de travail
au Québec, il faut...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. Johnson: Est-ce que c'est possible, M. le Président,
d'avoir un minimum de respect de la part du député de Johnson et
des procédures à cette commission?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Johnson: Le député de Johnson sait que je ne
l'interromps pas, je lui demanderais de me faire bénéficier de la
même politesse.
M. Bisaillon: Nul n'est...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: C'est aux alentours.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! M. le
député de Joliette-Montcalm. Je regrette de ne pas avoir à
cette assemblée la même technique qu'à l'Assemblée
nationale qui me permettrait de faire taire tous les micros, sinon ceux qui les
emploient, pour qu'il n'y ait qu'une seule personne qui puisse à la fois
s'exprimer. M. le ministre, vous exercez votre droit de parole et
j'espère qu'on le respectera.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: Le plus brièvement possible, M. le
Président. D'abord, je pense qu'il faut quand même mettre les
choses en perspective. Vous savez, la guerre au Moyen-Orient et le conflit
à la Commonwealth Plywood, il faudrait peut-être remettre les
choses dans l'ordre des proportions et de leurs dimensions. Le conflit de la
Commonwealth Plywood, c'est un conflit qui est important sur le plan social,
c'est un conflit qui est en même temps la constatation d'une bonne partie
de l'échec de nos lois, de leur utilisation et de leur
interprétation, finalement, de l'utilisation qu'on en fait pour obtenir
des interprétations des tribunaux. C'est un exemple concret que nos lois
pas seulement les nôtres, mais celles du Canada, dans le sens
où le problème de la juridiction des tribunaux s'y pose
peuvent créer, à l'occasion, des situations impossibles, comme
celle qu'on voit à la Commonwealth Plywood. C'est le premier aspect.
Le deuxième aspect, c'est le rôle du ministère et de
celui qui vous parle dans tout cela. D'abord, un conseil de médiation,
je le rappellerai au député de Johnson, ce n'est pas prévu
en vertu du Code du travail. Cela n'existe pas, la médiation, dans le
Code du travail. La médiation, c'est une technique qu'utilisent certains
ministres à l'occasion. C'est une technique qui est extraordinaire. Elle
sort de l'ordinaire. Nous avons jugé bon, au mois d'avril, de faire en
sorte que les parties se sentent moralement engagées à respecter
une procédure que le ministre du Travail a établie et dans
laquelle il a délégué deux des hommes les plus
compétents dans le ministère du Travail pour aider les parties
à en arriver à un règlement.
Il y a une des parties qui n'a pas jugé bon de collaborer
sérieusement au conseil de médiation. Je parle ici de M. Caine.
Le ministre du Travail ne pourra jamais prendre la place de qui que ce soit
dans des conflits d'ordre privé. Il ne pourra pas remplacer la bonne foi
de ceux qui n'en ont pas. C'est clair. On a beau faire les pétitions de
principe qu'on veut devant cette commission ou ailleurs, ou au Parlement, ou
faire des gorges chaudes, ou revenir à un niveau de politisation des
échanges la reprise de la session s'annonce, cela paraît;
il n'y a pas encore ici de caméras qui sont fixes et permanentes, mais
on sent qu'il y a des députés qui pratiquent mais,
à un moment donné, il faut également se rendre compte
qu'il y a des limites à ce qu'un gouvernement, quel qu'il soit, puisse
faire dans le contexte d'un conflit précis. Tant et aussi longtemps que
des parties ne veulent pas un règlement, ce ne sera pas l'État
qui va se substituer à qui que ce soit là-dedans. L'État
peut faire ce qu'il peut; il peut donner des moyens à des parties, mais
cela présuppose un minimum de bonne foi et de collaboration des
gens.
Je pense que cette commission parlementaire, non seulement après
l'intervention normale et mécanique de la conciliation, non seulement
après l'intervention extraordinaire d'un conseil de médiation
spécial et non seulement après une rencontre que celui qui vous
parle a eue avec le président de la compagnie, le président de la
CSN, Marcel Pepin, et des autres, et des communications
téléphoniques nombreuses qu'il a eues avec eux, je pense que
cette commission parlementaire devait être saisie du fond du
problème, et de ce qui fait qu'au moment où on se parle, un an
après, on voit encore le pourrissement qu'on constate à la
Commonwealth Plywood. On voit encore des gens dont on se demande parfois si
cela ne fait pas leur affaire qu'il y ait des choses qui pourrissent. Je pense
que le Parlement a le droit d'être renseigné. Je pense que la
population a le droit de savoir ce qui se passe et a le droit de
connaître et de savoir quelles sont les limites de ce qu'on peut faire
avec des lois, parce que les lois, c'est fait pour régir, en principe,
des hommes, et les lois ne changeront pas les hommes.
C'est en ce sens que cette commission parlementaire a été
convoquée. Son objectif, c'est d'essayer de mettre à jour devant
les parlementaires des faits qui vont non seulement nous clarifier un peu le
portrait et nous permettre d'avoir des déclarations un peu mieux
étayées de la part de
l'Opposition et une connaissance un peu plus précise du dossier,
mais également d'essayer d'étaler ici même, à la
face du Parlement et au vu et au su de l'opinion publique, quels sont les
éléments essentiels de la dynamique infernale qui s'est
installée à la Commonwealth Plywood. Je pense que si ce conflit
donne quelque chose, cela aura été de démontrer aux gens
qu'on ne peut pas régler les problèmes de relations de travail au
Québec ou ailleurs sans qu'il y ait un minimum de bonne foi et de
collaboration de la part des gens. C'est cela l'objet de cette commission.
M. le Président, j'appellerais comme témoin...
Le Président (M. Cardinal): Vous demanderiez au
président qu'il appelle...
M. Johnson: Oui, M. le Président, je vous demanderais
d'appeler M. Blain, qui est le sous-ministre adjoint aux relations de travail,
et M. Désilets, qui est le directeur du service de conciliation, qui ont
été tous les deux, avec M. Vanier, responsables du conseil de
médiation et ont participé au conseil spécial de
médiation du mois d'avril. Je voudrais simplement tout d'abord excuser
de son absence M. Vanier, qui était conciliateur au dossier. Je pense
que MM. Blain et Désilets seront à même de répondre
à l'ensemble des questions. M. Vanier est retenu en ce moment dans le
Nord-Ouest québécois par des dossiers extrêmement urgents
et extrêmement importants et qui requéraient sa présence
comme conciliateur.
Le Président (M. Cardinal): Avant de le faire, une demande
de M. le député de Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, vous nous avez remis au
début de cette commission parlementaire un ordre du jour. On m'a
remis...
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, mais je reviens
sur ce que j'ai déjà dit.
M. Bellemare: Est-ce que la liste qui est devant nous doit
être suivie par ordre ou est-ce qu'on doit interpréter que
n'importe qui peut venir déposer avant que la commission parlementaire
ait entendu d'abord les principaux intéressés? Après le
conseil de médiation pourra venir ajouter son point de vue.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, s'il vous plaît! Vous savez qu'en vertu du règlement l'on
ne répond pas deux fois à la même question. J'ai
déjà répondu à cette question en indiquant que le
secrétariat des commissions avait remis à chacun des membres de
cette commission une liste qui ne préjugeait d'aucun ordre quant
à l'appel des témoins. C'était purement une indication ou
un procès-verbal des invitations qui avaient été
faites.
M. Bellemare: Est-ce que le ministre a le droit de diriger les
débats à votre place?
Le Président (M. Cardinal): Un instant! À l'ordre,
s'il vous plaît!
M. Bellemare: Et dire: Je veux entendre tel témoin!
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson!
M. Bellemare: Oui, merci. Faites respecter votre
présidence!
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, vous admettrez que, comme je l'ai indiqué aussi, tout le monde
est présent, que tous ceux qui ont été appelés
comme députés ou comme témoins sont présents. Je
voudrais tout simplement indiquer ceci: II y a devant nous, c'est-à-dire
devant la commission, une demande de M. le ministre du Travail, que MM. Blain
et Désilets, qui sont deux hauts fonctionnaires, puissent être
entendus par la commission. Vous m'invitez à faire respecter la
présidence. J'invite tous les députés à la
respecter tout au long de cette commission, mais je me dois de dire à M.
le ministre justement que j'aimerais avoir non pas un débat de
procédure, mais l'accord de la commission pour que nous entendions
immédiatement MM. Blain et Désilets.
M. Bellemare: M. le Président, si on vote contre le fait
de les entendre immédiatement, on ne vote pas pour qu'ils ne soient pas
entendus pendant l'audition de la commission. La seule différence, c'est
qu'à la commission le ministre a dit que l'Opposition se renseignerait
plus avant de porter un jugement. La voilà, la seule solution. D'abord,
entendre les parties en cause, et après, le conseil de médiation
qui lui, viendra ajouter à ce que les autres auront dit qui ne serait
pas véridique. (11 h 30)
La présidence doit, elle, je pense, suivre un certain ordre pour
justifier l'Opposition nous sommes minoritaires d'entendre au
moins les parties. Si le conseil de médiation vient nous dire qu'il n'a
pas réussi pour telle raison et telle raison, on l'a dans son rapport
final. Mais si on n'a pas encore entendu la CSN et on n'a pas encore entendu la
Commonwealth Plywood, je pense que la commission parlementaire est ici pour les
entendre, d'abord.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, s'il vous plaît! À l'ordre! Un instant! Il n'y a pas,
devant la commission présentement, une motion formelle. Je n'accepte
donc pas de débat. Je dis: Est-ce que la commission est d'accord? S'il y
a unanimité, nous allons procéder. S'il n'y a pas
unanimité...
M. Forget: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf...
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, j'avais
demandé la parole.
Le Président (M. Cardinal): Oui, vous avez raison. M. le
ministre.
M. Johnson: Si le député de Saint-Laurent le
permet.
Écoutez! Je pense que ce serait bien prétentieux de la
part de qui que ce soit, y compris celui qui vous parle, de s'imaginer que ce
problème est d'une simplicité telle qu'en l'espace de trois
heures d'interrogatoire on va être capable d'avoir le portrait au
complet.
Une voix: Certainement pas!
M. Johnson: La raison fondamentale pour laquelle je demande et je
suggère à la présidence et à la commission,
à toutes fins utiles, d'entendre d'abord le rapport de M. Blain et de M.
Désilets, qui peuvent nous fournir une chronologie précise des
événements, c'est parce que moi, j'ai vu des avocats de notre
contentieux y perdre leur latin par bouts tellement c'était
compliqué.
M. Blain et M. Désilets ont travaillé dans ce
dossier-là pendant des mois. Je pense qu'essayer de synthétiser
pour les membres de la commission les étapes principales de ce qu'on a
vu à la Commonwealth Plywood depuis un an, je pense que ça,
ça devrait être fait par des gens qui connaissent à peu
près le plus parfaitement possible le dossier et, dans ce
sens-là, je pense que l'intervention de M. Blain et de M.
Désilets est susceptible d'éclairer et de donner la toile de
fond. Il ne s'agit pas d'amorcer le débat par la fin, il s'agit d'avoir
essentiellement une chronologie des événements.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, ordinairement, lorsque des
fonctionnaires sont convoqués devant les commissions parlementaires, on
sait qu'il existe une tradition selon laquelle ils parlent essentiellement au
nom du ministre et que leurs propos, dans le journal des Débats, sont
reproduits sous le nom du ministre. Cela indique clairement le caractère
qu'on attache aux témoignages fournis par des fonctionnaires en
commissions parlementaires.
Dans les circonstances, si le ministre a, quant à lui, atteint
des conclusions quant à ce qui fait l'objet de ce litige à la
Commonwealth Plywood, s'il a atteint des conclusions, comme il semble l'avoir
fait, relativement à la responsabilité des uns et des autres dans
la prolongation de ces difficultés, il serait plus honnête de sa
part de nous dire clairement quelles sont ses conclusions, plutôt que de
le faire à mots couverts, comme il le fait depuis le début de la
commission parlementaire, ou plutôt que d'inviter des fonctionnaires de
son ministère à venir nous le dire à sa place...
M. Bellemare: C'est ça.
M. Forget: ... et en son nom. À ce titre-là, je
serais d'accord qu'on entende les personnes privées directement
impliquées dans le conflit. Nous en arriverons à nos propres
conclusions nous-mêmes. Nous n'avons pas besoin, ni du ministre, ni de
ses fonctionnaires pour le faire.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous indique immédiatement que la présidence va
résoudre le problème, s'il en est un, après.
M. le député de Johnson.
M. Bellemare: Je pense, M. le Président, que notre
convocation, l'avis qui nous a été donné, n'a pas
été d'entendre autre chose que les gens de la Commonwealth
Plywood et les syndicats.
Les conclusions que le ministre veut se donner par le rapport du conseil
de médiation, c'est pour le couvrir. Je l'ai dit tout à l'heure.
Il veut se couvrir, lui, de ne pas être intervenu, d'avoir laissé
pourrir ce conflit, et c'est pourquoi, M. le Président, nous voulons, de
l'Opposition, entendre les parties d'abord et, ensuite, nous aurons l'avantage
de questionner le conseil de médiation.
Le Président (M. Cardinal): Bon, d'accord... Oui, M. le
ministre.
M. Johnson: Je ne sais pas si vous entendez prendre une
décision ou si vous attendez une motion que je ferais.
Le Président (M. Cardinal): Vous n'avez pas le droit de
suggérer des choses semblables.
M. Johnson: Non, parce que, M. le Président, moi, je
n'hésiterais pas 30 secondes à faire une motion si c'est pour
simplifier les choses. Écoutez! D'abord, je voudrais simplement relever
ce que soulignait le député de Saint-Laurent. C'est vrai que la
tradition veut que, quand un fonctionnaire parle, son intervention soit
portée au titre et au nom du ministre dans le journal des Débats.
Quant aux affirmations et aux pétitions habituelles du
député de Johnson, je vais essayer de ne pas les relever, sur les
couvertures et ses histoires. Il a le don des complots...
M. Bellemare: ...
M. Johnson: Mais il y a une chose bien précise, cependant.
C'est qu'il y a une chronologie un peu complexe. M. Blain et M. Désilets
ne sont pas ici pour fournir les conclusions du ministère. Ils sont
là simplement pour nous donner une chronologie. Je pourrais reprendre le
rapport de médiation et le lire devant cette commission parlementaire,
mais je pense qu'il serait peut-être plus utile de l'avoir de M. Blain et
de M. Désilets.
D'autre part, c'est très mal connaître M. Blain et M.
Désilets que de s'imaginer que ce sont des
fonctionnaires qui se laisseraient manipuler et je pense que le
député de Johnson en sait quelque chose.
D'autre part, je n'aurais pas d'objection et je suis sûr que M.
Blain et M. Désilets n'auraient pas d'objection à ce que leurs
interventions figurent en leur nom au journal des Débats.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, messieurs les
membres de la commission, je suis obligé d'intervenir et de rendre une
décision. Sauf dans le cas d'un règlement sessionnel, l'article
15 du règlement sessionnel, qui ajoute à notre règlement
l'article 162 et ce cas, je l'explique très brièvement, la
question avec débat du vendredi où des fonctionnaires ont le
droit de s'exprimer en leur nom, sauf ce cas, il me semble qu'à moins de
cette exception que l'on pourrait s'en tirer fort simplement, sans motion et
sans procédure, en disant que le ministre a la parole. Il invite
à répondre en son nom deux de ses hauts fonctionnaires qui
s'assoiront non pas à la barre, mais à cette table devant des
micros et à qui vous pourrez poser des questions.
Ceci convient-il à tous?
M. Johnson: Tout ce qui m'intéresse, c'est qu'on se mette
à discuter.
Le Président (M. Cardinal): Alors, j'invite MM. Blain et
Désilets à se présenter à cette table-ci.
M. Bellemare: M. le Président, vous avez demandé
s'il y avait unanimité d'abord.
Le Président (M. Cardinal): Oui, mais seulement... Alors,
êtes-vous d'accord sur cette solution?
M. Bellemare: Je ne suis pas d'accord.
Le Président (M. Cardinal): Alors, vous voulez que
j'enlève le droit de parole au ministre?
M. Bellemare: Non. Je veux qu'on respecte...
Le Président (M. Cardinal): Si le ministre demande...
M. Bellemare: ... l'ordre établi de tout temps d'entendre
les fonctionnaires après les...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je m'excuse, ce n'est pas le sens de mon intervention. J'ai dit que je
reconnaissais M. le ministre et que celui-ci demandait à deux de ses
fonctionnaires de répondre en son nom, et cette fois-là, je n'ai
pas besoin d'unanimité.
M. Bellemare: Je demande le vote, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas de vote sur une
décision du président, M. le député de Johnson.
M. Bellemare: Mais il y a une chose certaine, c'est que votre
motion que vous avez faite...
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas eu de motion, M.
le député de Johnson.
M. Bellemare: ... l'intervention que vous avez faite, c'est pour
donner la parole à des gens qui sont des fonctionnaires. Nous autres,
nous voulons entendre...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous rappelle à l'ordre!
M. Bellemare: ... les vrais responsables du conflit.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous rappelle à l'ordre!
M. Bellemare: ... la Commonwealth Plywood et les syndicats.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous rappelle à l'ordre!
M. Bellemare: Merci, M. le Président. La première
fois.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous rappelle à l'ordre parce que j'ai reconnu le ministre
et mon intervention n'était ni une motion, ni une opinion, ni une
décision sur le fond. C'est simplement M. le ministre qui avait la
parole et qui suggère que deux personnes continuent en son nom et cela
sera enregistré en son seul nom au journal des Débats.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: II est quand même 11 h 40. Même si
cela n'était que par respect pour les gens qui comparaissent ce matin,
nous n'avons pas encore amorcé nos travaux. Je dois, cependant, vous
dire que la décision que vous venez de rendre est tout à fait
justifiée de faire en sorte que les deux fonctionnaires parlent pour et
au nom du ministre.
Cependant, je suis convaincu que ce qu'a allégué mon
collègue de Johnson, c'est surtout relatif à l'ordre de nos
travaux.
Or, M. le Président, on va en faire une histoire très
brève, on va faire cela très vite pour permettre aux gens de
comparaître. En vertu de l'article 135, quatrièmement, de notre
règlement, la commission peut-elle: c) Déterminer le contenu de
son ordre du jour. C'est à la commission qu'il appartient de
déterminer ce qu'on doit entendre et qui on doit entendre en premier. Je
n'en ferai pas un débat de procédure. Je suis convaincu que le
ministre va accepter. Mon collègue de Johnson a donné les motifs
pour lesquels il était souhaitable selon lui, et c'est ce à quoi
je souscris, d'entendre
les parties avant d'entendre le rapport du conseil de
médiation.
Le Président (M. Cardinal): Je dois vous rappeler à
l'ordre, M. le député de Portneuf. Je dois vous rappeler à
l'ordre...
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf, s'il vous plaît! On ne commencera pas à revenir sur ce
que le président a dit.
M. Pagé: Oui, mais M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: Je fais une motion. J'ai le droit d'en faire
une.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez le droit d'en faire
une, mais cependant, vous avez demandé le droit de parole alors que
d'autres avaient le droit de parole...
M. Pagé: Oui, vous n'avez pas le droit...
Le Président (M. Cardinal): Oui, vous avez le droit. Mais
seulement, je vous en prie, invoquez des faits qui ne concernent en rien la
pertinence, qui n'attaquent en rien la présidence.
Vous venez de souligner que la commission détermine
elle-même l'ordre de ses travaux.
M. Pagé: C'est cela.
Le Président (M. Cardinal): Je suis entièrement
d'accord. Ce n'est pas ce qui s'est produit. J'ai simplement dit que le
ministre parlant, il se faisait représenter par deux de ses
fonctionnaires.
M. Pagé: C'est une autre affaire.
Le Président (M. Cardinal): Par conséquent...
M. Pagé: Cela ne regarde pas l'ordre des travaux cela.
Le Président (M. Cardinal): Exactement. Alors, M. le
député de Portneuf, si vous avez une motion à faire, je
vous prierais d'être bref.
M. Pagé: Je fais motion pour qu'on entende tout d'abord
l'Union internationale des rembourreurs d'Amérique du Nord avec M.
Thériault, suivant l'ordre du programme qui vous avait été
donné par le secrétariat des commissions. J'arrête
là mes commentaires et je réclame le vote.
Le Président (M. Cardinal): Alors, est-ce que cette motion
serait adoptée?
M. Johnson: Non, rejetée, M. le Président.
M. Pagé: Un vote enregistré, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Vote enregistré,
d'accord. Vous me direz tout simplement pour ou contre. D'accord? Sur la motion
de M. le député de Portneuf, si vous voulez bien la
répéter, s'il vous plaît.
M. Pagé: Qu'on entende les parties, suivant le rapport du
secrétariat des commissions d'entendre tout d'abord l'Union
internationale des rembourreurs, puis après Mme Hélène
Grignon, etc.
Le Président (M. Cardinal): J'aime mieux ce
libellé, qui est plus précis que la motion du début.
M. Pagé: D'accord. Votons et passons. Travaillons un
peu.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson?
M. Bellemare: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sainte-Marie?
M. Bisaillon: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm;
M. Chevrette: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne?
M. Fallu: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson?
M. Bellemare: Deux fois? Cela va bien.
Le Président (M. Cardinal): Non, M. le
député d'Anjou. Il y a confusion entre...
M. Johnson: À ne pas confondre trop souvent, M. le
Président. Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Beauharnois?
M. Lavigne: Contre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf?
M. Pagé: Pour.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Beauce-Sud n'est pas là, M. le député de
Jonquière?
M. Vaillancourt (Jonquière): Contre.
Le Président (M. Cardinal): Les intervenants n'ont pas
droit de vote. J'ai présentement trois votes pour et six votes contre.
La motion est donc rejetée. Je donne donc la parole à celui qui
l'avait avant que la motion ne soit proposée. M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, j'inviterais donc, en mon
nom, pour les fins du journal des Débats, et les fins du culte de la
procédurite, M. Blain et M. Désilets à nous donner la
chronologie des événements, telle qu'ils peuvent l'établir
à partir de leur méditation.
Le Président (M. Cardinal): MM. Blain et Désilets,
vous n'avez pas à vous identifier, parce que vous parlez au nom du
ministre. Tout ce que vous direz sera au nom du ministre.
M. Johnson: Yvan Blain, sous-ministre adjoint aux relations de
travail. Raymond Désilets, directeur du service de conciliation au
ministère du Travail.
M. le Président, je tenterai d'être le plus bref possible
afin de dégager les grandes lignes des événements qui ont
marqué le conflit de la Commonwealth Plywood. Le conseil de
médiation tirant son existence du mandat qui lui a été
confié par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et ne
s'inscrivant pas dans les mécanismes de règlement des conflits
prévus au Code du travail, celui-ci ne disposait donc pas de pouvoirs
légaux pour contraindre les parties à se présenter devant
lui, à témoigner ou à produire des documents. La
réussite ou l'insuccès de son mandat reposait donc pour une large
part sur la collaboration et la bonne foi des parties en présence ainsi
que sur la volonté bien arrêtée de ces dernières
d'en arriver à une solution. Cependant, dès avant la constitution
officielle du conseil, le président de Commonwealth Plywood, M. Caine, a
signalé au ministre du Travail, lors d'une rencontre, qu'il ne voyait
pas comment la compagnie pourrait être impliquée dans une
médiation spéciale au sujet d'un conflit opposant deux groupes de
travailleurs, ce qui a été d'ailleurs la philosophie de M. Caine
tout au long du conseil de médiation. Néanmoins, le conseil a
jugé bon de convoquer M. Caine et son procureur, Me Casgrain, à
le rencontrer le 15 mai. Me Casgrain a accusé réception en disant
qu'il avait déjà fait connaître ses vues, que M. Caine
avait déjà fait connaître ses vues. Cependant, M. Caine
terminait, dans une lettre, sa réponse en ajoutant qu'il
présumait que le conseil communiquerait de nouveau avec lui lorsque ces
rencontres avec les deux syndicats rivaux auraient abouti à une solution
acceptable. Donc, à la convocation du 15 mai, ni M. Caine, ni M.
Casgrain ne se sont présentés. Donc, les représentants
pour le groupe que nous, pour les fins du rapport, on appelle les gens de
l'intérieur, étaient M. Donat Thériault, de l'Union
internationale des rembourreurs unis d'Amérique, et, pour le syndicat
accrédité et affilié à la
Confédération des syndicats nationaux, M. Marcel Pepin.
Après avoir entendu les parties, nous avons reconvoqué M.
Caine et, cette fois-ci, alors que nous avions pratiquement terminé les
travaux au conseil, nous avons eu la présence de Me Jean Bazin ainsi que
de Me Philippe Casgrain. Dans cette optique, la rencontre a été
assez brève, étant donné que, pour eux, tout avait
déjà été dit par M. Caine, dans des lettres
adressées au ministre du Travail, et que, dans le jugement de
l'honorable juge Perry Meyer, on nous disait que tout était écrit
là, tout était consigné là, l'historique du conflit
était bien détaillé dans ce dossier.
En fait, nous avons pris connaissance de ce jugement et, dans une
certaine mesure, le conseil de médiation s'en est inspiré. Vous
avez pu lire au dernier chapitre, alors qu'on parle des recommandations, et que
nous citons le juge Meyer, qui correspondait, à cette optique, les vues
du conseil de médiation. Voici pour la structure du conseil, voici pour
les participants qui ont collaboré au conseil de médiation.
Je pense devoir bien détailler, parce que le conflit est d'une
complexité telle qu'on ne peut pas le prendre et
l'énumérer par des détails qu'on pourrait oublier. Pour le
bénéfice de la commission, ainsi que pour les gens qui sont
impliqués et qui seront appelés à comparaître devant
la commission, je pense qu'il est bon de rappeler, le plus brièvement
possible, les divers faits qui ont présidé au conflit. Il faut
d'abord penser que le conseil de médiation avait des objectifs
précis pour tenter de rapprocher les parties. Premièrement, la
procédure ou la chronologie des événements, comme vous
allez le constater, n'a pas été établie avec l'aide de la
partie patronale sous réserve de ce que j'ai dit, tout à l'heure,
à la toute fin, quand j'ai parlé de la présence de MM.
Casgrain et Bazin. Deuxièmement, elle ne tient compte que des faits
relatés devant le conseil et fait abstraction, notamment, de la longue
et complexe lutte juridique qui s'est engagée entre les parties.
J'ouvre une parenthèse brève là-dessus, c'est que
le conseil de médiation s'est placé dans un contexte hors
légal ou "alégal", si on peut employer l'expression, elle n'est
pas encore dans le dictionnaire, elle va certainement y être.
Troisièmement, le conseil de médiation n'étant pas
un tribunal et n'en ayant pas les pouvoirs, il ne lui appartenait pas de
vérifier la véracité des faits rapportés. En
conséquence, cette chronologie est donc une mise en ordre des faits
rapportés et contient parfois des versions contradictoires des
mêmes faits. Pour pallier cet inconvénient, la source de chaque
information est précisée dans le rapport en indiquant qu'elle
provient, soit de M. Marcel Pepin, soit de M. Donat Thériault,
respectivement porte-parole des travailleurs en grève et des gens
d'intérieur, comme nous avons qualifié, si vous voulez, les
intervenants ou les groupes qui sont parties au conflit.
II faut dire, au début, que le nombre d'employés à
la Commonwealth Plywood, au début du conflit, était d'environ 232
employés. Au début d'août, un groupe d'employés de
la Commonwealth Plywood rencontre la Confédération des syndicats
nationaux et la Fédération nationale des syndicats du
bâtiment du bois. Le 13 août 1977, début de la campagne
d'organisation CSN, au bout de quelques jours, il y a déjà 140
adhésions. Toujours au début d'août, M. Paul Lacroix,
représentant de l'Union internationale des rembourreurs, est
informé par la compagnie des mises à pied à venir et il ne
s'informe pas du nombre de personnes visées, ni de leur
ancienneté. Ceci nous est déclaré par M. Thériault
lui-même.
Le 20 août, 131 démissions de l'Union internationale sont
signifiées à M. Donat Thériault par huissier, sur un total
de 220 à 230 personnes. Le 30 août, dépôt de la
requête en accréditation de la CSN, MM. Thériault et Pepin
sont d'accord là-dessus. Pendant cette période, la compagnie
engage 20 personnes, dont trois qui travaillent toujours à
l'intérieur en ce moment. La compagnie ne s'oppose pas à la
demande en accréditation. Quant à l'Union internationale des
rembourreurs, après s'être opposé, dans un premier temps,
M. Thériault se désiste, suite à un entretien qu'il a avec
l'enquêteur, M. Rivard, du ministère du Travail.
Le 7 septembre, fait important aussi, la compagnie avise le
ministère que 115 employés environ seront mis à pied vers
le 20 septembre. Cet avis, selon M. Pepin, n'est pas donné
conformément à l'article 45 de la Loi sur la formation et la
qualification professionnelle de la main-d'oeuvre.
Le 9 septembre, les travailleurs de la Commonwealth Plywood sont
avisés des mises à pied.
Les 15 et 16 septembre, selon M. Thériault, des lignes de
piquetage sont dressées par la CSN. Il y a occupation d'usine et
présence de fiers-à-bras de la CSN.
Le 16 septembre, 118 mises à pied. 105 travailleurs ne sont pas
mis à pied. Sur les 105 non mis à pied, l'ancienneté n'est
pas respectée à 100%, selon M. Thériault.
Entre le 9 et le 19 septembre, il n'y a jamais eu de convocation de la
part de la CSN pour tenir une assemblée générale des
travailleurs de la Commonwealth Plywood, selon M. Thériault.
Le matin du 19 septembre 1977, une assemblée des travailleurs CSN
est convoquée. J'insiste sur cette date, parce que c'est alors que prend
toute la tournure de l'événement.
M. Bellemare: Combien de personnes? M. Johnson: Pardon?
M. Bellemare: Dans votre rapport, vous dites 30 personnes ont
été convoquées.
M. Johnson: À quel endroit du rapport?
M. Bellemare: La ligne de piquetage CSN se compose d'environ 30
personnes.
M. Johnson: Mais ce n'est pas la convocation.
M. Bellemare: Néanmoins les 105 personnes sont...
M. Johnson: Je ne suis pas rendu là encore. Je vais y
arriver.
Le 19 septembre parce qu'il y a deux événements
importants le 19 septembre le matin, du 19 septembre 1977, une
assemblée des travailleurs CSN est convoquée et le comité
rencontre la compagnie. La CSN offre à la compagnie, si celle-ci
rencontre des difficultés économiques, que les mises à
pied soient effectuées selon l'ancienneté, pour autant que les
travailleurs soient capables d'exécuter les tâches. La compagnie
refuse cette offre.
L'après-midi, rapport de la rencontre du matin à
rassemblée des travailleurs de la CSN et prise d'un vote de
grève, en raison du lock-out partiel et des nouveaux engagements
effectués avant les mises à pied, selon M. Pepin.
Le 19 septembre, ligne de piquetage CSN qui se compose d'environ 30
personnes. Néanmoins, sur les 105 personnes non mises à pied, 40
entrent travailler. Et c'est alors que débute le conflit,
véritablement.
Le 20 septembre 1977, seulement douze personnes entrent travailler et
arrêt de travail de l'usine jusqu'au 4 octobre, à la demande de la
compagnie.
Le 22 septembre, injonction demandée par la compagnie ordonnant
notamment le retour au travail.
Le 26 septembre, l'assemblée régulière du local 388
de l'Union internationale des rembourreurs ne peut être tenue, parce que
deux permanents de la CSN y assistaient.
Le 30 septembre, feu à la Commonwealth Plywood.
Le 30 septembre également, date de la fin de la convention
collective de l'Union internationale. C'était la date
d'échéance, l'expiration de la convention.
Du 30 septembre au 3 octobre, il y a eu deux rencontres chez Mme
Hélène Grignon, sympathisante de M. Thériault.
Le 3 octobre, accréditation du Syndicat des employés de la
Commonwealth Plywood CSN.
Le 3 octobre également, l'assemblée
régulière de l'Union internationale, qui n'avait pu être
tenue le 26 septembre, comme on l'a mentionné, a été tenue
et on a fait signer des employés qui étaient non mis à
pied et qui y assistaient, dont certains avaient déjà
signé des cartes CSN. Toutefois, toutes les 105 personnes ne sont pas
averties de la tenue de la réunion.
Après cette assemblée régulière, une
réunion du Syndicat des employés de la Commonwealth Plywood CSN
est tenue dans la même salle, prêtée par M.
Thériault. Des cartes CSN sont alors signées, confirmées
par les membres du comité des travailleurs en dedans, selon M.
Thériault.
Il y a une remarque que nous faisons, c'est que M. Thériault
avait lui-même demandé de faire
imprimer ces cartes CSN qui ont été remises à Mme
Hélène Grignon. Celle-ci les a fait signer par les
employés. Cela a été fait suivant le conseil de M.
Thériault, bien que la période de maraudage soit
passée.
Les motifs de M. Thériault étaient les suivants. On
s'attendait que l'accréditation CSN soit accordée. Il
était alors nécessaire et logique que ces travailleurs soient
membres de la CSN pour assister à une assemblée du syndicat de la
CSN.
À cette assemblée, il y a une série de
procédures qui sont entamées et M. Thériault accepte
d'agir comme conseiller de ces travailleurs. Des résolutions sont
passées pour se désaffilier de la CSN, élire un
comité formé de différentes personnes, MM. Bastos, Paulin
et Lévesque, Mmes Côté et Grignon, et prévoir des
moyens pour le retour au travail.
Le 4 octobre, retour au travail de 55 employés sur les 105 qui
étaient non mis à pied. Entre le 30 septembre et le 6 octobre, la
CSN dépose 106 plaintes pour congédiement pour activités
syndicales. Le 7 octobre, rencontre de négociations de la compagnie et
des membres du comité élu le 3 octobre en compagnie de Donat
Thériault. Il y a donc eu, vous vous en souvenez, l'assemblée du
3 octobre où on avait procédé à la signature et
à l'élection d'un nouveau comité. Le 13 octobre, signature
d'une convention collective à laquelle auraient assisté Me Bazin,
procureur patronal et M. Thériault, à titre de conseiller
syndical. M. Pepin nous affirme ceci. Le 14 octobre, dépôt de la
convention collective au ministère du Travail. Le 14 octobre
également, le dépôt a été fait par M.
Thériault lui-même. L'expiration de la convention est fixée
au 30 septembre 1978. Depuis le début de cette convention, aucun grief
n'a été soulevé par les employés, selon M.
Thériault. Le 2 novembre, signature par les gens de l'intérieur
d'une entente de service avec l'Union internationale des rembourreurs avec
effet rétroactif au 1er octobre 1977 en vertu de laquelle l'union
s'engage à fournir à ses salariés tous les services
qu'elle procure à ses autres membres au Québec, en échange
d'une cotisation hebdomadaire de $1.50. Nomination d'un conciliateur le 7
novembre. Le 12 novembre, conférence de presse des 82 employés en
dedans, tous anciens employés de la Commonwealth Plywood, selon M.
Thériault.
Les procédures judiciaires sont toutes actuellement devant la
Cour d'appel, y compris la demande d'injonction de la CSN sur la
validité de la convention et ne pourront être entendues au moment
où on fera le rapport. Quand on a fait le rapport, on a dit: Elles ne
pourront être entendues au fond avant l'automne. À l'expiration de
la convention qu'il a déposée, M. Thériault a l'intention
de marauder la CSN.
Au 31 mai 1978, il y a 73 personnes qui travaillaient à
l'intérieur et le maximum a atteint 97 employés. Selon M.
Lévesque, le président actuel des gens à
l'intérieur, il est possible que l'ancienneté moyenne des gens de
l'intérieur soit inférieure à celle des gens de
l'extérieur. Selon M. Thériault, il n'y a pas eu plus de quarante
em- ployés de la Commonwealth Plywood qui ont fait du piquetage.
Les 45 fausses cartes CSN signées sont des répliques de
celles de l'Union internationale et portent la même étiquette
syndicale. De même, les fiches de fonds de retraite de la convention
collective actuelle sont les mêmes que celles de l'ancienne
convention.
Selon M. Thériault, l'avocat des gens de l'intérieur est
le même que celui de l'Union internationale. Les cotisations
payées au syndicat CSN sont endossées par la secrétaire et
remises à l'Union des rembourreurs.
Depuis le jugement du juge Greenberg sur l'utilisation du sigle CSN, ces
chèques ne sont plus encaissés.
Relativement à l'existence d'une constitution, une constitution
CSN a été déposée lors de la demande
d'accréditation. Quant aux gens à l'intérieur, ils n'ont
pas de constitution et l'exécutif a été nommé par
l'assemblée, selon M. Thériault.
Cette chronologie étant faite, je vous fais grâce de la
perception par les parties du conflit pour plutôt m'attarder
brièvement cependant aux commentaires du conseil de médiation.
Après avoir lu le rapport, vous avez dû constater qu'il
était construit sous une forme d'interrogations que nous nous sommes
posées. Ces séries d'interrogations que nous avons là, je
ne voudrais pas les citer et les répéter devant vous, je pense
que tout le monde a pu en prendre connaissance. Cela pourra faire l'objet, je
pense, de la part des membres de la commission, de questions qui pourront
être posées aux gens qui seront appelés à
témoigner devant cette commission.
Cependant, il y a une chose très importante, c'est la brochette
de recommandations que nous avons déposées, que nous avons
soumises aux parties et dont une série portait sur l'ancienneté
des gens en place, tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur, pour ne pouvoir léser personne, d'autant plus que de
provoquer le retour au travail avec un arbitre qui aurait pu avoir le pouvoir
de bien voir au respect, si vous voulez, de l'ancienneté quant au retour
au travail des employés. (12 heures)
Seulement, la recommandation no 7 qui, à votre avis, est la plus
importante, est une recommandation qui est le coeur, en fait, du conseil, c'est
de ramener les parties, de demander aux parties d'avoir la volonté de
vouloir régler le problème en acceptant qu'on constitue un
conseil d'arbitrage exceptionnel formé de trois personnes, dont un
président et deux assesseurs, l'un patronal, l'autre syndical, qui aura
le mandat suivant: Procéder, dans un premier temps, à une
médiation sur le contenu des conditions de travail à la
Commonwealth Plywood. Deuxièmement, si la médiation devait ne pas
aboutir à une entente sur de telles conditions, le conseil aurait le
pouvoir de déterminer des conditions de travail qui auraient une
durée minimale d'un an et maximale de deux ans.
Suite à ce dépôt de notre rapport de conseil de
médiation, nous avons reçu...
M. Bellemare: Ce quoi?
M. Johnson: Le dépôt, le 26 juin, M. Belle-mare.
M. Bellemare: 1978? M. Johnson: Pardon? M. Bellemare:
1978?
M. Johnson: Oui. Nous avons donc reçu des réponses
suite à la remise des rapports qui ont été remis aux
parties, d'une part, à la CSN, d'autre part, aux gens de
l'intérieur et à la compagnie surtout. Voici la réponse du
vice-président de la CSN, M. André L'Heureux: "Lors d'une
assemblée spéciale tenue hier soir, les grévistes de la
Commonwealth Plywood ont accepté le rapport du conseil de
médiation formé par le ministère du Travail le 21 avril.
Ils considèrent que les recommandations du rapport constituent une base
valable pour commencer les négociations. Les grévistes ont, de
plus, donné mandat à leurs dirigeants syndicaux de vous
rencontrer dans les meilleurs délais pour donner suite aux
recommandations du rapport. Nous espérons qu'une telle rencontre
permettra enfin d'enclencher le processus du règlement du conflit."
Quant à la compagnie, nous recevions en date du 7 juillet
le rapport avait été déposé le 26 juin un
télégramme de Me Jean Bazin, procureur de la compagnie: "J'accuse
réception de votre télex en date du... je ne vois pas la
date là, probablement du 1er juillet, je ne sais pas . La teneur
en a été transmise à notre cliente et une réponse
de sa part devrait vous parvenir sans délai." Le 7 juillet, Me Bazin
nous envoyait ce télégramme. C'est en date du 5 juillet.
La réponse est venue de M. Caine, en date du 7 juillet, et on l'a
reçue, au ministère, le 13 juillet. Apparemment, la lettre s'est
perdue, on l'a cherchée longtemps, il n'y avait pas de grève des
postes, à ce moment, imaginez-vous ce que cela va être
aujourd'hui. Il reste donc que la lettre nous est arrivée au bureau le
13 juillet. J'avais communiqué, d'ailleurs, avec Me Bazin et il m'a dit
qu'il ne comprenait pas, parce que la lettre avait été bel et
bien envoyée chez nous. Cependant, M. Caine nous dit ceci: "Monsieur,
comme je l'ai mentionné à plusieurs reprises, il reste encore un
conflit entre, d'une part, un syndicat de la base, et d'autre part, la grande
centrale CSN. Tant et aussi longtemps que ce conflit continuera, il sera
difficile pour la compagnie de faire des commentaires ou de s'impliquer dans
des affaires intersyndicales. Je souhaite moi aussi la fin des
hostilités entre ces deux groupes pour qu'ils puissent recommencer
à vivre normalement. Après étude de votre rapport, il
semble malheureux que vous n'ayez pas abordé de front le
véritable problème qui est celui de cette lutte intersyndicale.
Il n'y a également pas de critique sur l'utilisation systématique
de la violence dans ce conflit, ni du non-respect des ordres de la cour,
incluant le piqueta- ge illégal, rien non plus sur ces activités
illégales, ni sur le rôle de groupements comme la Ligue
communiste, marxiste-léniniste du Canada et le Groupe
marxiste-léniniste canadien et autres organismes. Pour ma part, je pense
qu'il est préférable de ne pas faire d'autres déclarations
qui risqueraient d'être mal interprétées ou qui pourraient
porter à confusion en attendant que le conflit intersyndical se
règle."
Je vous ferai remarquer aussi qu'au début, quand on a
parlé des parties qui pourraient rencontrer le conseil, on nous avait
dit, de la part de la compagnie: Écoutez, nous attendons que le conseil
fasse des suggestions, des recommandations, et nous, pour autant que les deux
groupes seraient d'accord, on est prêts à regarder la
possibilité d'entériner cela. Évidemment, pour eux, ce
n'était pas le genre... Les propositions faites par le conseil ne
répondaient pas à ce voeu, apparemment, parce qu'ils ont
refusé le rapport.
Cependant, je dois vous dire, M. le Président, qu'à la
lettre de M. Caine, à laquelle, évidemment, comme
président du conseil, je ne pouvais souscrire, j'ai répondu par
une lettre, d'ailleurs, qui a été publiée dans les
journaux. C'est parce que, pour nous, au conseil, il y avait un syndicat qui
était accrédité, qui était le Syndicat des
employés de la Commonwealth Plywood-CSN, accrédité le 3
octobre. Évidemment, quand vous regardez au chapitre de nos
commentaires, on se pose une série de questions. Quand on parle de
grève le 19 septembre, alors que le syndicat CSN accrédité
ne l'a été véritablement que le 3 octobre, on se demande
comment il se fait qu'il peut avoir des assemblées. On se pose aussi des
questions quant aux cartes signées par M. Thériault... Sur toutes
ces questions, je ne reviendrai pas.
Cependant, M. le Président, je dois vous dire que ceci termine,
en gros, parce que c'est sûr que je n'ai pu lire tout le rapport. Je
pense que vous avez pu le faire en tant que membre de la commission. Si,
parfois, il y avait des détails importants qu'on aurait omis, M.
Désilets et moi-même, nous nous ferons un plaisir de
répondre à vos questions.
M. le Président, si vous permettez...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.
M. Johnson: ... M. Blain a jugé d'épargner à
la commission la série de questions qu'il pose à titre de
commentaires et qu'on retrouve au bas de la page 22 du rapport de
médiation. Je pense qu'il vaudrait peut-être la peine d'en faire
lecture, parce que ça nous permet peut-être d'identifier certains
des problèmes qui sont à la source de l'imbroglio quant à
la représentativité et aux moyens qui ont été pris
par les personnes et aux façons d'agir, de part et d'autre, des trois
groupes impliqués, le groupe patronal, le groupe des gens d'en dedans et
le groupe CSN.
La compagnie fait des mises à pied sans se soumettre aux
dispositions de l'article 45a de la loi, à toutes fins utiles, des
licenciements collec-
tifs, la Loi de la qualification et de la formation professionnelle de
la main-d'oeuvre. D'ailleurs, l'honorable juge Perry Meyer, de la Cour
supérieure, en a fait mention, dans son jugement, le 22 novembre 1977.
Comment expliquer que, le 7 septembre, la compagnie avise officiellement le
ministère d'une mise à pied de 115 employés et, neuf jours
plus tard, procède au licenciement collectif, alors qu'on sait que les
délais prévus dans la loi doivent être plus longs que
ça.
Deuxièmement, une assemblée de travailleurs de la CSN fut
convoquée le 19 septembre 1977 au matin. Une ligne de piquetage est
dressée également cette même journée, alors que les
représentants de la CSN rencontraient la compagnie pour négocier
la façon de procéder aux mises à pied.
L'après-midi du 19 septembre, la CSN fait rapport aux membres
réunis en assemblée. Ensuite, on procède à un vote
de grève et, le 19 septembre, officiellement, c'est la grève
à la Commonwealth Plywood, à la suite du vote qui a
été tenu ce même après-midi du 19.
Selon M. Thériault, les lignes de piquetage sont dressées
les 15 et 16 septembre par la CSN. M. Thériault prétend qu'il y a
une occupation de l'usine et que la CSN y a délégué des
fiers-à-bras.
La question que le conseil se pose, c'est comment il se fait que la CSN
rencontre la compagnie pour négocier, fait une assemblée
générale de ses membres, vote une grève, alors que la CSN
est en instance d'accréditation et qu'elle ne recevra son certificat
d'accréditation que le 3 octobre?
C'est donc l'impasse la plus totale et le conseil de médiation
n'a certes pas agi dans le cadre traditionnel d'une médiation et a donc
été forcé de prendre des mesures exceptionnelles pour
tenter de remplir son mandat adéquatement.
Nous faisons face, continue le conseil de médiation, beaucoup
plus à un problème d'ordre social que de relations de travail et
il nous faut donc, dans l'élaboration des solutions possibles, tenir
compte de ce fait. Actuellement tout le monde croit avoir raison sur le plan
légal et tout le monde croit en sortir gagnant.
Cependant, la vérité est tout autre et elle est implacable
vis-à-vis de chacun des travailleurs qui a déjà perdu ou
est en passe de perdre non seulement des gains matériels, mais, pire
encore, sa dignité.
Troisièmement, M. Thériault, représentant de
l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique, accepte d'agir
comme conseiller des travailleurs à l'intérieur de la
Commonwealth Plywood. Il préside à une assemblée pour la
désaffiliation du syndicat de la CSN, ainsi qu'à
l'élection d'un nouvel exécutif, et tout cela pendant une
assemblée régulière de l'Union internationale des
rembourreurs unis d'Amérique.
La question est à savoir comment M. Thériault peut agir de
la sorte. C'est-à-dire que toutes ces résolutions adoptées
et ces élections tenues semblent avoir été respectivement
adoptées et tenues sans être régies par une constitution,
à moins que le tout ait été fait par le biais de la
constitution des
Rembourreurs unis d'Amérique. Cependant, le 3 octobre, c'est bel
et bien la CSN qui obtient un certificat d'accréditation.
Un autre fait étrange est que M. Donat Thériault admet
avoir demandé de faire imprimer des cartes CSN et ces cartes ont
été remises à des employés pour les faire signer
par d'autres employés à l'intérieur de l'usine.
Voilà une procédure que le conseil trouve assez étrange et
inusitée.
Nous voilà donc en présence d'un phénomène
particulier. Un représentant de l'Union internationale des rembourreurs
unis d'Amérique fait du recrutement pour la CSN.
Cinquièmement, le 7 octobre, une rencontre de négociation
a lieu avec la compagnie et c'est le nouvel exécutif élu qui est
présent. Cette rencontre a lieu en présence de M. Donat
Thériault qui agit à titre de conseiller syndical d'un syndicat,
probablement la CSN. Six jours plus tard, le 13, le comité
susmentionné signe une convention collective avec la compagnie et
à la signature de la convention assistaient Me Bazin, procureur de la
compagnie, et M. Donat Thériault, à titre de conseiller
syndical.
Le lendemain, le 14 octobre, le document est déposé au
ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Toutes les
procédures judiciaires sont actuellement devant la Cour d'appel et,
évidemment, la demande d'injonction de la CSN sur la validité de
la convention collective ne pourra être entendue au fond avant l'automne,
ce qui, à notre avis, est la clé du problème.
C'est donc dans un esprit désintéressé que le
conseil a été créé et il propose des solutions qui
font abstraction de tous les aspects légaux. Nous ne pouvons donner
suite à toutes les hypothèses qui ont été
formulées devant le conseil. Cela serait là élargir un
fossé qui, tel quel, n'est déjà pas facile à
franchir.
Il faut donc que ce rapport soit examiné avec la plus grande
objectivité, car il serait utopique de croire que chacun puisse recevoir
ce qu'il convoite. Le conseil de médiation fait donc appel à la
bonne foi, à la bonne volonté des parties, etc., et on
procède ensuite à la section des recommandations.
M. Blain me fait signe. On rencontre aussi, au bas de la page 25, le
paragraphe suivant: "Comme vous avez pu le constater à la lecture des
chapitres II et III..." ce dont M. Blain nous a fait lecture tout
à l'heure "... c'est-à-dire la perception du conflit par
les parties en présence et les hypothèses soumises par les
parties au conseil de médiation, nous sommes devant des vues
irréconciliables à prime abord. "Cependant, nous croyons que, par
des voies qui sont ouvertes dans le chapitre traitant des recommandations avec
un dialogue qui soit d'un minimum de qualité, au-dessus des
intérêts particuliers, il serait peut-être possible d'en
arriver à une entente qui serait satisfaisante pour tous".
Si vous permettez, M. le Président, je voudrais seulement, cette
fois-ci, sans les dates qu'on peut vous fournir et dont vous avez finalement
des tableaux synoptiques ou l'équivalent...
En somme, ce à quoi on assiste, c'est le Syndicat des
rembourreurs unis d'Amérique dont M. Thériault est le responsable
qui a l'accréditation à la Commonwealth Plywood. La CSN fait un
maraudage. La CSN, c'est la centrale dont Norbert Rodrigue est le
président. C'est seulement pour qu'il n'y ait pas de confusion, c'est
celle-là, la CSN. Il n'y en a pas d'autres.
La CSN fait un maraudage par le biais de la FNBB c'est M.
Hallé qui s'en occupe et elle obtient une majorité absolue
des gens qui sont aux environs de 200 qui signent des cartes CSN, celles de la
FNBB. Elle fait donc une demande d'accréditation auprès du
commissaire général du travail chez nous. En cours de route, M.
Thériault, dont le syndicat vient de se faire marauder, avise le
ministère et un peu tout le monde qu'il n'a pas l'intention de contester
la demande d'accréditation de la CSN.
Avant même que le certificat d'accréditation de la CSN
n'arrive, le 3 octobre, après les procédures normales
d'évaluation au ministère, etc., il y a ces mises à pied
déclarées par l'entreprise, ces mises à pied qui sont
signifiées, entre autres, au syndicat qui, avant le 3 octobre, est
là, les Rembourreurs unis d'Amérique. Il y a réaction de
fait du monde en vie, indépendamment des structures et des
étiquettes que ces gens peuvent avoir; il y a une réaction de
groupes de travailleurs à l'intérieur de la Commonwealth Plywood
qui décident de sortir, de cesser le travail, de manifester de
façons diverses. Il y a également, à cette
époque-là, des troubles qui semblent être, qui seraient,
selon certaines allégations, d'origine criminelle, incendies, sabotage,
etc. (12 h 15)
La CSN, en d'autres termes, le 19 septembre 1977, est de fait,
même si elle n'a pas le certificat d'accréditation, probablement
le groupe qui représente la majorité des employés. Tout
cela sera confirmé dans le certificat d'accréditation du 3
octobre. Cependant, elle n'est pas une association accréditée au
sens du Code du travail, elle ne possède pas encore son syndicat. Elle
agit cependant comme si elle était le syndicat et cela, de deux
façons: d'une part, en déclarant sur le tas, semble-t-il, sans
avis préalable des travailleurs, une grève et des manifestations
diverses, qu'elle fait par la suite confirmer le 19 septembre par une
assemblée générale et, d'autre part, la CSN parle avec des
représentants de l'employeur en ce qui a trait aux mises à pied
qui doivent survenir dans l'entreprise et qui sont de l'ordre d'à peu
près 50% des effectifs de l'entreprise au moment où cela se
produit, c'est-à-dire que l'entreprise met à pied à peu
près 100 personnes alors qu'elle a à peu près 200
employés.
C'est à ce moment-là que surviennent des
événements sur lesquels le conseil de médiation et celui
qui vous parle se sont interrogés longuement. C'est là qu'on
voit, par exemple, M. Thériault faire signer des cartes CSN, qu'il a
lui-même fait imprimer, ce qu'il a reconnu devant le conseil de
médiation, cartes qui portent le sigle de la CSN, c'est-à-dire
les trois maillons d'une chaîne, mais qui, également, dans
l'écriture fine, comportent, à toutes fins utiles, les
dispositions de l'Union des rembourreurs unis d'Amérique. Je pense qu'il
ne fait pas de doute, parce qu'on n'est pas devant un tribunal, qu'on n'est pas
soumis au même type de règle de preuve, que ce dont il s'agit, ce
sont des faux. C'est de là que viennent la confusion et l'imbroglio
juridique quant au dépôt d'une convention collective au
ministère du Travail. La convention collective qui est intervenue ou
qu'on dit être intervenue a été signée par les gens
qui avaient été recrutés avec les cartes CSN faites
imprimées par M. Thériault, entre ces représentants du
groupe qui avait signé ces espèces de cartes un peu
étranges et les représentants de l'employeur. Ce document a
été déposé au ministère et, j'ai eu
l'occasion de l'expliquer à quelques reprises, à sa face
même il était une convention collective, et le ministère ne
jugeait pas et ne juge pas qu'il est de son devoir ou de sa
responsabilité ou que la loi l'oblige à vérifier si, oui
ou non, il s'agit bel et bien de la convention collective des gens qui ont
obtenu un certificat d'accréditation le 3 octobre. Ce n'est pas le
rôle du dépôt des ministères, c'est une
opération de nature purement mécanique. En gros, ce sont les
éléments du conflit.
Quelle a été la part d'interventions ou d'intentions de
l'Union des rembourreurs unis d'Amérique dans ce qui semblait
être, a priori, un maraudage accompli en vertu des normes du Code du
travail, par la CSN? Je pense que les questions qui viendront cet
après-midi et ce soir nous permettront de clarifier la situation un peu.
Quelle a été la part de responsabilité de l'employeur dans
cette intervention, face à des personnes qui, pourtant, il aurait
dû le savoir, représentaient le Syndicat des rembourreurs unis
d'Amérique. Je ne pense pas que les représentants de l'employeur
aient souvent vu M. Donat Thériault avec M. Norbert Rodrigue.
M. Casgrain: Je demande la parole, M. le Président, si
vous permettez.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je vais
simplement conclure...
M. Casgrain: C'est un tribunal populaire.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre!
M. Johnson: M. le Président...
M. Bellemare: ... c'est un monologue pour se disculper. C'est un
monologue, ce n'est pas un dialogue.
M. Casgrain: C'est une condamnation publique.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: C'est un monologue.
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: Un maudit monologue.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je m'excuse d'interrompre tout le monde, mais je veux rappeler
certaines règles essentielles d'une commission parlementaire. Les gens
qui sont devant nous ne peuvent jamais intervenir sans la permission de la
présidence et ne peuvent pas intervenir dans le débat au moment
où nous en sommes.
Deuxièmement, je demanderais au ministre d'être bref, parce
que nous allons suspendre à 12 h 30, presque à sa propre demande.
Troisièmement, je le dis tout de suite, comme il s'agit d'une commission
parlementaire de l'Assemblée nationale et que l'exécutif est
responsable devant les parlementaires, je voudrais que nous puissions,
dès la reprise de la séance cet après-midi, tenter
d'établir ensemble c'est le rôle de la commission, M. le
député de Portneuf l'a rappelé un modus Vivendi ou
un ordre des travaux de la séance.
Je prie M. le ministre d'y aller brièvement. Je regrette,
Maître, de ne pouvoir...
M. Pagé: II est en train de donner les conclusions de la
commission, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! ... de ne pouvoir... vous donner actuellement la parole...
M. Forget: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, question de
règlement, M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, comme vous avez sagement
décidé que MM. Blain et Désilets parlaient au nom et
à la place du ministre, ce qu'ils ont fait d'ailleurs fort
éloquemment, comme le ministre a cru bon d'ajouter ses propres remarques
aux propos de ses fonctionnaires, il ne s'agit pas à ce moment-ci, dans
les travaux de la commission, d'entendre des parties convoquées devant
la commission, mais bien d'écouter le ministre. Il le fait donc en vertu
de son droit de parole.
Le Président (M. Cardinal): C'est exact.
M. Forget: S'il le fait en vertu de son droit de parole, qu'il a
utilisé fort abondamment jusqu'à maintenant, est-ce que le
président de cette commission verra à ce que les autres
formations politiques représentées à la commission
parlementaire jouissent d'un droit de parole équivalent et qui semble
sans limites.
Le Président (M. Cardinal): Non, pas sans limites.
Écoutez, si on suit les règlements, vous savez que, par analogie,
le proposeur d'une loi ou celui qui défend ses crédits ou celui
qui présente un problème, n'est pas limité. Les autres
sont dans les limites prévues au règlement.
M. Pagé: ...
Le Président (M. Cardinal): Regardez le règlement.
Il est sûr que vous avez le droit de le questionner et c'est pourquoi je
dis, dès maintenant, avant que je dise que c'est suspendu, que c'est une
commission parlementaire de l'Assemblée nationale, et j'insiste.
M. Bellemare: ... Commonwealth Plywood et les syndicats.
Le Président (M. Cardinal): ... que vous puissiez
aussi...
M. Bellemare: Pas seulement le ministre pour se défendre,
s'abrier.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît, M. le
député de Johnson!
M. Bellemare: Là, vous me donnez raison, mon cher, une
fois de plus, que le ministre essaie de s'abrier avec les couvertures de Blain
et de Désilets.
Non, monsieur, ce n'est pas ça une commission parlementaire.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: La commission parlementaire, c'est pour entendre
des parties. Eux autres, ils sont dans le feu brûlant. C'est ça la
commission parlementaire, ce n'est pas le ministre qui prend tout l'avantage,
toute la matinée pour justifier...
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît... M.
Bellemare: ... son attitude.
Le Président (M. Cardinal): ... je suspends
immédiatement si ça continue.
M. Bellemare: Ouais, ce n'est pas logique, certainement pas. On
aurait pu entendre les parties, on ne les a pas entendues. On n'a entendu que
celles qui veulent justifier le ministre.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, à l'ordre!
M. Chevrette: Vous faites une crise d'hystérie.
M. Bellemare: Ce n'est pas de l'hystérie, mon cher
monsieur, c'est de la logique. Quand on entend le ministre se couvrir...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson...
M. Lavigne: Ce n'est pas respectueux pour la
présidence.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, tous! Il y a
une motion qui a été battue. Nous avons donc vécu avec. Je
vous invite, avant l'heure de la suspension, chacun de vous, à
méditer sur la façon dont nous pourrions faire une commission
parlementaire qui ait un ordre du jour. D'accord?
M. Bellemare: Un monologue.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, je vous
prierais de conclure.
M. Johnson: M. le Président, je vais abréger..
Peut-être que le député de Saint-Laurent devrait
reconnaître que je ne suis pas allé au-delà,
essentiellement, de ce qu'on retrouve dans le rapport de conciliation.
J'essaie simplement de résumer. M. Blain et M. Désilets
nous ont défilé une vingtaine de dates, une vingtaine
d'événements différents. Je suis bien conscient que ce
n'est pas nécessairement facile à suivre, parce que c'est
très complexe sur le plan du temps.
Ce que j'essaie de résumer, ce sont les interventions de trois
groupes, finalement, dans un processus chronologique et, deuxièmement,
je dis que les interrogations que je me pose à l'égard, par
exemple, de la légitimité des actes posés par la CSN,
alors qu'elle n'était pas accréditée, et
l'étonnement que j'ai à voir M. Donat Thériault, qui a
toujours été identifié, depuis 1944, à l'Union des
rembourreurs unis, assimilé à la CSN, sont des interrogations
auxquelles nous méritons d'avoir certaines réponses.
C'est dans cette perspective, je pense, que, cet après-midi, nous
pourrons interroger les différentes parties, à la fois la CSN, le
groupe de M. Thériault et l'employeur, quant à leur perception de
ce qui s'est passé là et de leur rôle dans tout cela, pour
qu'on essaie de tirer cela au clair.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, je
reconnaîtrai cependant à chacun des autres partis, à chacun
des autres députés, le droit soit de vous interroger, soit
d'apporter leurs commentaires, en vue d'en arriver à l'audition des
témoins par la suite.
M. Pagé: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Je voudrais tout d'abord vous exprimer ma
surprise de voir le ministre du Travail, somme toute, tirer presque des
conclusions, rendre jugement, avant même qu'on ait entendu les parties,
avant même qu'on ait pu les interroger. C'est non seulement faire fi de
la collaboration éventuelle des parties, aujourd'hui, mais c'est aussi
faire fi du droit, pour les parlementaires, à cette table, de se forger
une opinion, d'en arriver à différentes conclusions, après
avoir entendu les parties en cause.
La réserve que je voudrais vous faire part au départ vise
essentiellement à rappeler au ministre et à le lui demander,
d'une part, de ne pas tirer de conclusions tout de suite c'est le moins
qu'il puisse faire, s'il respecte le mécanisme de la commission
parlementaire et s'il respecte les parties et, d'autre part, d'attendre
l'audition des groupes.
M. le Président, pour ce qui concerne les questions à
poser ou à formuler aux représentants du ministre, son
sous-ministre adjoint et le directeur général, je demanderais
à mon collègue de Saint-Laurent de les poser en mon nom. Quant
à moi, je les poserai aux autres intervenants. Étant donné
qu'il est déjà 12 h 25, qu'il ne nous reste que quelques minutes
seulement, je demanderais, s'il était possible, de suspendre la
séance. Dès la reprise de nos travaux à 15 heures, mon
collègue de Saint-Laurent pourra adresser les questions au nom de
l'Opposition officielle aux intervenants de ce matin qui répondront au
nom du ministre.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Si vous permettez,
avant de suspendre... Un instant, s'il vous plaît! Je reconnaîtrai
M. le député de Saint-Laurent, cet après-midi. Je rappelle
cette invitation que je fais à tous et chacun des membres de la
commission de tenter de s'entendre ou de songer à un moyen pour
établir l'ordre des travaux pour que nous puissions entendre ceux qui
ont été invités.
Suspension jusqu'à 15 heures, au même endroit.
(Suspension de la séance à 12 h 26)
(Reprise de la séance à 15 h 15)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre,
messieurs!
Je constate que nous avons quorum. Je reconnais que M. le
député de Saint-Laurent avait la parole au moment de la
suspension. M. le député de Saint-Laurent.
M. Bellemare: Qu'est-ce qu'on fait ici, nous autres? 15 heures,
c'est 15 heures... Le train part et vous le manquez.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plait!
J'ai appris très jeune qu'une personne parle à la fois, et j'en
entends plusieurs. Y avait-il une question?
M. Casgrain: Avant la question du député de
Saint-Laurent, je vais faire une intervention très courte d'ordre assez
spécial, si vous permettez.
Le Président (M. Cardinal): Si la commission le
permet.
M. Casgrain: Si la commission le permet.
M. Bellemare: Pour autant qu'on entende les parties, je n'ai
certainement pas d'objection, pas seulement pour un instant, les deux
aussi...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. le
député de Johnson, veuillez collaborer. J'ai demandé
poliment la permission de la commission. Permission accordée.
M. Casgrain: M. le ministre du Travail, en faisant le sommaire de
ce qui s'est passé, a sans doute laissé ses paroles
dépasser sa pensée, quand il a dit de façon assez
catégorique, à mon sens, que la Commonwealth Plywood avait
sciemment participé à la fabrication de faux. Sans aller plus
loin, je veux dire ceci: Pour autant que nous sommes concernés,
l'accusation est maintenant lancée. Ce que nos clients demandent
simplement...
M. Johnson: M. le Président, si vous me permettez, comme
membre de la commission, je voudrais interrompre...
M. Forget: ... sa propre parole. Est-ce qu'il aurait la
décence de respecter sa propre parole, ayant donné la parole
à quelqu'un, de lui laisser terminer sa phrase?
M. Bellemare: II a eu la parole pendant une heure ce matin.
Laissez au moins...
M. Johnson: Pas pour qu'il dise n'importe quoi, parce que c'est
cela qu'il est en train de faire, M. Casgrain. D'accord?
M. Bellemare: Ah! Ah! Vous avez fait un monologue pendant une
heure ce matin.
M. Forget: Le ministre a donné un très bon
exemple...
M. Bellemare: Oui...
M. Forget: ... de dire n'importe quoi.
M. Bellemare: C'en est un parmi plusieurs autres.
M. Johnson: II est en train de dire n'importe quoi en ce
moment.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: Donnez-leur la chance de se faire entendre, et la
CSN aussi. Après cela, on pourra poser des questions.
M. Johnson: Vous pouvez peut-être laisser M. Casgrain
continuer à défiler ces incorrections et ces
faussetés.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant, s'il vous plaît! À l'ordre! Le
début de votre intervention ressemble singulièrement à ce
que nous appelons, en procédure parlementaire, une question de
privilège. Or, les questions de privilège sont strictement
interdites en commission parlementaire. Elles ne sont permises qu'à
l'Assemblée nationale. Je voudrais quand même vous donner le
bénéfice du doute. Je vais vous laisser continuer, mais je devrai
peut-être vous interrompre. Me Casgrain.
M. Casgrain: C'est très simple. Tout ce que nous
demandons, à ce stade, pour éviter justement qu'il y ait quelque
malentendu que ce soit au sujet de ces fameuses fausses cartes... Nous
demandons instamment que notre client, M. Caine, soit entendu dès
maintenant par la commission pour donner sa version à lui des
faits...
Le Président (M. Cardinal): ...
M. Casgrain: ... avant que l'accusation ne soit colportée
par tous les media d'information.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Un instant, s'il
vous plaît! Que l'on laisse à la présidence l'initiative de
la commission dans les limites qui lui sont imparties. Je ne puis
accéder à cette demande.
J'avais accordé la parole à M. le député de
Saint-Laurent. Je l'accorderai ensuite, selon les usages, la tradition, la loi
et les règlements qui nous régissent en cette Assemblée,
à un représentant de l'Union Nationale. Ensuite, quand la
commission aura décidé de sa façon de procéder, M.
Caine sera certainement entendu, et qu'il soit entendu le premier, le
cinquième ou le dernier, son intervention aura la même valeur et
le même effet, tout ce qui se dit en cette assemblée étant
au journal des Débats et obéissant à toutes les
mêmes règles.
Je reconnais donc une fois de plus...
M. Johnson: M. le Président... Le Président (M.
Cardinal): Oui.
M. Johnson: ... si vous permettez, je m'excuse, c'est sur une
question de règlement, qu'on appelle ça comme on veut. M.
Casgrain a affirmé que j'avais dit une chose...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Non...
M. Johnson: M. le Président, je regrette! Le
Président (M. Cardinal): Non, à l'ordre! M. Johnson:
M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Johnson: Oui, mais il a dit une fausseté, voyons
donc!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
question de règlement, s'il vous plaît!
M. Forget: Que le ministre relise...
Le Président (M. Cardinal): Oui, monsieur...
M. Johnson: Voyons donc!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
l'article 96 de notre règlement permet à un député
de rectifier les faits si un autre député tient des propos qui
sont faux ou qu'il prétend faux. Or, je pense, M. le Président,
que par interprétation, l'article 96 s'applique également au
député qui veut rectifier des faits suite à des paroles
provenant de la salle ou d'un témoin.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je
pense que la question de règlement du ministre est bien
fondée.
Le Président (M. Cardinal): Bon! D'accord! Un instant,
s'il vous plaît!
M. Johnson: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant! M. Johnson:
Très bien!
Le Président (M. Cardinal): Bon! M. le
député de Jonquière est un de nos députés
qui est aussi rompu aux procédures parlementaires et qui vient de me
suggérer que l'article 96 pouvait s'appliquer mutatis mutandis à
des intervenants. Ce serait une grave décision jurisprudentielle dans
les circonstances que d'affirmer oui, comme ça, tout d'un coup. Le
témoin a eu la parole simplement parce que la présidence la lui a
accordée et avec cet avertissement qu'il ne devait pas en faire une
question de privilège. Devant cette situation, je ne rendrai pas de
décision.
J'espère que la commission me suivra pour éviter qu'on ne
passe l'après-midi dans des faits semblables. Je vais permettre,
très brièvement, au ministre, non pas une réponse en vertu
de l'article 96 je m'y refuse d'une façon formelle mais
simplement parce que, ayant permis à Me Cas-grain de faire son
intervention, je permettrai au ministre de donner sa réponse. Mais je
vous rappelle que je reviens immédiatement à M. le
député de Saint-Laurent, devant, en cette assemblée,
protéger d'abord l'Opposition et les droits stricts de l'Opposition.
Une voix: Continuez comme cela.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.
M. Johnson: M. Casgrain a affirmé, il y a environ trois ou
quatre minutes, que j'avais dit ce matin que la Commonwealth Plywood
était partie à un faux. Je ne sais pas où M. Casgrain a
pris cette affirmation. Ce que j'ai dit clairement ce matin et ce que le
député de Johnson sera en mesure de lire dans le journal des
Débats...
M. Bellemare: Oui, certainement.
M. Johnson: ... c'est qu'à mon avis M. Thériault de
l'Union des rembourreurs unis d'Amérique avait procédé
à la confection et avait amené des gens à signer des
cartes portant le logo CSN, mais comprenant un texte qui était celui des
Rembourreurs unis d'Amérique, document, d'ailleurs, que je pourrai
produire devant cette commission.
D'autre part, j'ai exprimé ce matin mon étonnement de voir
la compagnie décider avec M. Thériault et signer une convention
collective avec M. Thériault alors que M. Thériault se
présentait comme étant quelqu'un de la CSN. Pourtant, M. Caine
savait depuis 1944 que M. Thériault n'était pas de la CSN, au
sens où la CSN, c'est cette centrale présidée par M.
Norbert Rodrigue. Point à la ligne. Final.
Le Président (M. Cardinal): Point s'il vous plaît,
point. Je considère et très strictement parce que, comme l'a dit
M. le député de Johnson ce matin, et je ne me tromperai pas entre
le nom de mon voisin et le nom d'un comté, je désire que, pour le
reste de cette assemblée, l'on respecte particulièrement non pas
le président, mais la présidence de cette commission.
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. J'ai environ cinq
questions à poser au ministre à l'occasion des conclusions dont
il a fait état par la voix de M. Blain ce matin, du conseil de
médiation, et j'aurai également quelques commentaires d'ordre
général à faire à la suite de ces cinq
questions.
Il y a, dans l'exposé des conclusions qui a été
fait ce matin, une référence au fait que, dans les avis de
licenciement qui ont été faits par la Commonwealth Plywood, les
délais prévus à la Loi sur la formation professionnelle
n'ont pas été respectés.
J'aimerais que le ministre nous explique quelles sont les
conséquences que la loi en question attache au non-respect de ces
délais et ce qui se serait passé de différent si les
délais avaient effectivement été respectés.
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre.
M. Johnson: Brièvement, au niveau de la loi
elle-même, on prévoit que, dans le cas d'un licenciement collectif
de plus de 100 personnes, l'avis est de l'ordre de trois mois. L'avis
donné par la compagnie était, si je me souviens bien, de
l'ordre
de quelques jours, 20 jours ou même moins que cela. La
première sanction, c'est que la loi est là en principe pour
être respectée et on s'attend qu'en général les gens
la respectent; deuxièmement, la sanction, ce sont évidemment des
poursuites judiciaires qui peuvent être intentées par le ministre
du Travail. Concrètement, dans le cas de la Commonwealth Plywood, cette
décision de l'entreprise d'envoyer un avis de licenciement collectif est
survenue à peu près au même moment qu'un jugement de la
Cour supérieure, en première instance, déclarait ultra
vires les règlements découlant de la Loi de la qualification
professionnelle. C'est la raison pour laquelle, à ce moment-là,
nous avons choisi de ne pas poursuivre, d'autant plus que, dans ce
contexte-là, d'une part, la constitutionnalité des
règlements était mise en doute et, d'autre part, on avait
peut-être l'impression qu'à ce moment-là il pouvait y avoir
un règlement. Et comme la prescription était quand même
longue à venir, on ne jugeait pas utile de procéder aux
poursuites à ce moment-là. Ceci dit, malgré la dimension
constitutionnelle qui est impliquée et malgré le fait que le
conflit ait persisté, j'ai signé les demandes de poursuites en
vertu de la Loi de la qualification professionnelle il y a déjà
quelques semaines et je présume que les causes devraient être
déposées en Cour supérieure éventuellement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Dans des cas comme ceux-ci, lorsque les délais
sont respectés, ce que le ministère fait avec cette information,
c'est qu'il veille à la formation d'un comité de
reclassement.
M. Johnson: C'est cela.
M. Forget: C'est donc la seule conséquence pratique autre
que les poursuites du non-respect des délais...
M. Johnson: C'est cela.
M. Forget: C'est l'impossibilité, en temps utile, de
mettre sur pied des comités de reclassement.
M. Johnson: Exactement.
M. Forget: II y a eu également, dans les
allégations des différentes parties, devant le conseil de
médiation, des affirmations contradictoires sur l'ancienneté des
employés mis à pied qui, selon certains, aurait été
respectée, mises à part quelques exceptions d'ailleurs
prévues par la convention collective, mais qui, selon d'autres
allégations, n'aurait pas été respectée.
Est-ce que le conseil de médiation a fait porter son examen sur
ces affirmations contradictoires et est-ce qu'il en est venu à des
conclusions, si oui ou non, les congédiements intervenus en septembre
1977 ont respecté la convention collective alors en vigueur?
M. Johnson: M. le Président, je passerais la parole
à MM. Blain et ou Désilets.
Le Président (M. Cardinal): En votre nom.
M. Johnson: Selon les affirmations qui ont été
faites devant nous, suite aux mises à pied, des gens nous disent: Cela a
été respecté, en grande partie. Par contre, il
était difficile pour nous, parce que nous avons demandé aux deux
parties, tant aux gens de l'intérieur, tant aux syndicats
représentés par M. Pepin, tant à Me Casgrain et Me Bazin,
de nous fournir les listes d'ancienneté des employés. Ce que nous
n'avons pas vérifié, cependant, c'est énumérer, si
vous voulez, chacun des employés, ce n'était pas là notre
rôle. De l'aveu même des parties, certains disaient, en moyenne...
M. Lévesque, président du groupe à l'intérieur,
nous dit: Cela n'a pas été respecté tout à fait,
mais presque. La CSN nous dit que non, ça n'a pas été
respecté, mais de là à définir de façon
précise les gens à l'intérieur par rapport à
l'ancienneté, nous n'avons pas fait d'enquête
là-dessus.
M. Forget: Est-ce qu'il n'est pas surprenant qu'un fait aussi
central, aux préoccupations de toutes les parties et qui joue un
rôle pivot dans l'évaluation qu'on peut faire de ce qui s'est
passé, n'ait pas fait l'objet d'un examen serré de la part d'un
conseil de médiation qui a, par ailleurs, reproduit en annexe à
son rapport, les listes qui lui étaient fournies, officielles ou
officieuses, par les différentes parties, énumérant le nom
de chacun des employés mis à pied, de même que la
durée de service à la Commonwealth Plywood.
M. Johnson: C'est très juste, M. Forget. Cependant, voyant
le problème qui pouvait surgir, suite à une de nos
recommandations quant à l'application de l'ancienneté, nous avons
tenu compte de cette remarque que vous avez faite et qui est à propos,
en prenant des dispositions et en créant un mécanisme pour que
l'ancienneté soit vraiment respectée. Mais il fallait d'abord
qu'il y ait entente sur le rapport du conseil de médiation avant de
mettre en pratique le mécanisme, pour qu'il donne justice à tous
et à chacun des employés de la Commonwealth Plywood.
Si le conseil de médiation avait décidé que tel
employé devrait être en dedans, tel employé devrait
être en dehors, ce n'était pas notre rôle comme tel; mais on
a dit: On va y pourvoir dans la série de recommandations que nous avons
faites en annexe au rapport. (15 h 30)
Donc, pour nous, c'était là quelque chose d'essentiel pour
le respect de l'ancienneté des individus, des travailleurs de la
Commonwealth Plywood. Mais au moment où on a écrit le rapport,
nous ne voyions pas la nécessité d'établir la liste
d'ancienneté alors qu'on ne savait même pas s'il pouvait y avoir
une entente et acceptation du rapport par les deux parties. Cependant, nous
l'avons prévu dans un mécanisme.
M. Forget: Avant de distribuer les blâmes de part et
d'autre, il y a quand même quelque chose qui est logiquement
préalable, c'est de savoir si les faits du litige sont connus et peuvent
être vérifiés. Quand il s'agit de vérifier si oui ou
non il y a apparence que la séniorité n'a pas été
respectée ce sont des choses qui se vérifient c'est
quand même un élément important du dossier et je ne peux
pas faire autrement, à ce moment-ci et je ne poursuivrai pas,
puisqu'on me dit qu'on ne l'a pas fait que de m'étonner qu'on
n'ait pas jugé bon de vider cette question quant aux faits. Reste
à savoir ce qu'on en aurait fait et quel genre de recommandations en
aurait découlé.
Mais il reste que cela demeure un point d'interrogation et un
mystère, quant à moi, dans le rapport de médiation, qu'on
n'ait pas vidé cette question.
M. Johnson: M. le Président, si je peux répondre ou
tenter de répondre aux points d'interrogation du député de
Saint-Laurent, il ne faut pas oublier une chose, c'est que tout le monde n'a
pas collaboré de façon égale dans ce conseil de
médiation et comme M. Blain l'a bien expliqué, il n'avait pas le
pouvoir de convoquer des gens, il n'avait pas le pouvoir d'obliger les gens
à remettre des documents, etc.
D'autre part, cela s'inscrivait dans un effort. On essayait de faire en
sorte que les parties s'assoient et discutent vraiment. La partie patronale,
dans les circonstances, a décidé d'avoir une attitude... Ils se
sont présentés, Me Casgrain et Me Bazin, je crois, se sont
présentés au nom de la compagnie. M. Caine a choisi de ne pas y
aller. C'était son droit.
La participation a été formelle, ils ont répondu
d'une façon immédiate aux questions du conseil de
médiation, d'après ce que je comprends. Le conseil n'avait pas
les instruments pour vérifier l'ensemble de ces affirmations, de ces
données. Il pouvait se fier sur une chose, par exemple. M.
Thériault, de l'Union internationale des rembourreurs unis, disait que
c'est vrai que l'ancienneté n'avait pas été
respectée à 100%. Quant à savoir si elle avait
été respectée à 80%, à 85%, ce qu'on sait
c'est que M. Thériault reconnaissait que cela n'avait pas
été entièrement respecté.
D'autre part, la CSN, semble-t-il, alléguait que cela n'avait pas
été respecté, point. Mais le conseil de médiation
n'avait pas les instruments nécessaires pour juger de cela. Cependant,
c'est pour cela qu'il conclut, dans son dernier chapitre, à la
création d'un mécanisme d'arbitrage en matière de mise
à pied, pour la compagnie. Il dit: À toutes fins utiles, ce que
je suggère aux parties, c'est de mettre sur pied un mécanisme
où un arbitre va décider des mises à pied et de qui est
affecté par les mises à pied, quant à
l'interprétation de la convention collective, l'ancienneté,
etc.
M. Forget: Je comprends que le conseil de médiation
n'avait pas les pouvoirs d'exiger des témoignages sur quelque
élément que ce soit, qu'il devait se fier à la bonne
volonté de tout le monde. Est-ce qu'il a au moins demandé cette
information-là ou s'est-il limité à discuter d'une
philosophie générale de règlement? A-t-il demandé
de connaître les faits plutôt que des interprétations des
faits?
M. Johnson: C'est-à-dire que si vous parlez de faits par
remise de listes d'ancienneté, nous avons dit ceci: Les listes
d'ancienneté qui sont là, c'est parce qu'il y a un
problème purement technique qui se rattache à ceci: C'est que les
gens de l'extérieur pour la compagnie, n'accumulaient plus
d'ancienneté au moment de la grève, alors que ceux à
l'intérieur continuaient d'accumuler de l'ancienneté et c'est
pour...
M. Forget: Ils en accumulaient au moment du congédiement,
on ne parle pas de l'ancienneté aujourd'hui.
M. Johnson: Oui. C'est parce que, comme on ne pouvait pas prouver
et arriver de façon claire et hors de tout doute que les employés
à l'intérieur étaient entrés à telle date,
les listes qui étaient fournies nous donnaient un document de travail
que nous avons confié à un mécanisme d'arbitrage pour voir
si ces listes étaient conformes à la réalité par
rapport aux recommandations qui étaient là, c'est-à-dire
que nous ne voulions pas que les employés qui avaient été
à l'extérieur pendant le conflit ne soient
pénalisés pour la perte de temps. C'est pour tout cela...
M. Forget: Si vous me permettez, on saute une étape. On va
revenir à cela. D'ailleurs, c'est ma prochaine question. Avant de
décider si les employés à l'extérieur doivent
être engagés à nouveau ou non, il faut d'abord disposer
d'une décision qui normalement vient du Tribunal du travail indiquant si
nous sommes ou non en face de congédiements antisyndicaux.
Le Président (M. Cardinal): M. Désilets, au nom du
ministre.
M. Johnson: Oui. Ce que je voulais ajouter, M. Forget, c'est que,
dans le contexte où on était placé, dans le cadre habituel
d'une conciliation ou d'une médiation, il y a une convention collective
qui est échue et il y en a une qui est à se renouveler. Dans le
contexte où on était placé, on ne voulait pas, compte tenu
qu'on était dans un contexte "alégal, ajuridique", tenir compte
de la présumée convention collective qui avait été
déposée.
Or, pour établir des listes d'ancienneté, habituellement,
on se réfère à un texte de convention collective et, en
l'absence de ce texte, il devenait difficile pour les membres du conseil de
médiation, ne voulant pas préjuger du document qui avait
été déposé, de faire le travail auquel vous avez
fait allusion tantôt. C'est pour cette raison qu'on a
référé le tout à un arbitre.
M. Forget: M. le Président, cette réserve n'est pas
pertinente à ma question. J'ai posé la question: Au moment du
congédiement, il y avait une
convention collective dont la validité n'est pas contestée
par personne, parce qu'elle est venue à échéance à
la fin de septembre 1977. Elle existait. Quelle que soit la valeur de cette
convention, quel que soit le désir de certaines personnes de
l'"améliorer", il reste qu'il y avait une convention collective et c'est
en vertu et sous l'empire de cette convention collective que les
congédiements ont eu lieu. Il s'agit d'une question de faits, de savoir
si les dispositions de cette convention collective, en septembre 1977, ont
été faites, oui ou non, en conformité avec les
dispositions de la convention collective. La réponse que le conseil de
médiation nous fait, c'est qu'on ne s'est pas intéressé
à trouver la réponse à cette question.
M. Johnson: Au moment où nous avons siégé,
non, parce qu'il n'y avait pas de texte de convention sur laquelle...
M. Forget: II y avait un texte de convention. Il avait
échu le 30 septembre 1977. C'est un fait historique que vous ne pouvez
pas nier.
M. Johnson: Non, mais est-ce que les gens qui étaient
restés à l'intérieur continuaient d'accumuler de
l'ancienneté?
M. Forget: Peu importe. On ne parle pas de l'ancienneté
après le 15 septembre 1977. On parle de l'ancienneté avant, au
moment de la décision. Ce qui est arrivé après ne nous
intéresse pas pour l'instant. Cela ne fait pas partie de votre
réponse.
M. Johnson: La réponse, pour essayer de clore cette
partie, quant à moi en tout cas, c'est qu'au moment où le conseil
de médiation a agi, ce fut dans des circonstances qu'on a
déjà décrites comme étant particulièrement
difficiles; deuxièmement, ce fut avec une collaboration qui était
peut-être limitée, parce qu'il n'avait pas la collaboration
entière de toutes les parties,- troisièmement, ce fut compte tenu
des difficultés que représentait pour lui d'obtenir ces
données de façon précise et de façon incontestable.
Le conseil de médiation a donc choisi de s'en remettre à un
arbitre et considérait que lui, il n'était pas habilité
à le faire, parce qu'il n'avait pas les moyens de faire ces
vérifications. C'est pour cela, entre autres, que la loi 45, la Loi de
la qualification professionnelle, prévoit qu'il y a effectivement un
comité de reclassement qui est mis sur pied, que les délais sont
respectés, etc. C'est une opération très complexe. Dans un
contexte normal, c'est une opération très complexe.
Imaginez-vous, dans un contexte comme celui-là!
M. Forget: Bon! J'ai une autre question, c'est la
troisième.
Le Président (M. Cardinal): Sur cinq?
M. Forget: Sur cinq.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci.
M. Forget: Normalement, la question de déterminer si, oui
ou non, les congédiements qui sont survenus peuvent être
imputables à un désir de l'employeur de combattre le syndicat, de
s'opposer à son accréditation, de miner sa
crédibilité, etc., pour des raisons antisyndicales, est
déterminée par des mécanismes reconnus dans le Code du
travail. Normalement, on peut supposer que ce type de congédiement,
quand il a lieu, peut être sanctionné, peut être
corrigé dans ses effets par des mécanismes normaux du Code du
travail. Comment se fait-il que, dans ce cas, ces mécanismes n'ont pas
joué? Pourquoi le ministre en vient-il à la conclusion qu'il faut
absolument une commission parlementaire plutôt que de laisser les
mécanismes normaux du Code du travail jouer leur rôle
habituel?
M. Johnson: Je suis un peu étonné d'entendre le
député de Saint-Laurent me parler comme cela, parler des
mécanismes normaux du Code du travail dans le contexte de la
Commonwealth Plywood. Il faut le faire. Il faut voir ce qui se passe depuis un
an à cet endroit. Chose certaine, il y a un mécanisme, qui
s'appelle le congédiement, la plainte auprès du commissaire
général du travail pour congédiement, pour
activités syndicales, en vertu de dispositions très
précises du Code du travail. Il y a eu, si je me souviens, 106 ou 105
plaintes de congédiement pour activités syndicales. Il y a eu des
demandes de suspension à des auditions en cours de route. Ce sont des
plaintes qui peuvent parfois prendre beaucoup de temps. Le ministère le
reconnaît. Je pense que le député de Johnson pourrait
reconnaître que cela existe depuis longtemps, les délais, dans ce
domaine, parce que ce sont des preuves complexes, parce qu'on n'a
peut-être pas toutes les ressources idéales.
M. Bellemare: C'est moi qui l'avais fait écrire dans la
loi.
M. Johnson: Bon! Il y a eu ces plaintes qui n'ont pas
été entendues dans la mesure où il y a eu une suspension
qui a été demandée par les parties en cours de route et
que ça, dans le contexte je devrais dire par la CSN
où, également, au mois d'avril, j'avais demandé aux
parties un moratoire judiciaire qu'elles n'ont pas respecté. Je dois
reconnaître, à cet effet, que pendant quelque temps, à la
fois du côté de la Commonwealth Plywood et de la CSN, il y a eu un
respect de ce moratoire, et c'était dans l'optique où,
effectivement, il y avait un moratoire de l'ensemble des procédures
qu'on essayait de trouver un règlement, entre autres, à travers
un conseil de médiation, que ce mécanisme "normal", n'a pas
joué. Maintenant, il n'y a rien qui empêche que les plaintes qui
ont été portées pour congédiement pour
activités syndicales soient éventuellement entendues, avec ce que
ça implique, évidemment, au niveau des conséquences d'un
jugement du commissaire général du travail, qui peut ordonner la
réintégration d'une personne.
M. Forget: Dans la mesure où ceci est central dans
l'évaluation de la situation, il y a un mécanisme régulier
qui va éventuellement rendre une décision; on n'a pas besoin de
la commission parlementaire pour le faire. Est-ce que le ministre pourrait nous
dire à partir de quel moment, dans une procédure comme
celle-là, il va juger, à l'avenir, que cela a duré trop
longtemps et que ça ne fait pas son affaire?
M. Johnson: Ce n'est pas le ministre qui décide, c'est le
commissaire général du travail. Cela ne relève pas de
l'autorité ministérielle...
M. Forget: Ce n'est pas le commissaire général du
travail qui a convoqué la commission parlementaire. Le ministre a
décidé, à un moment donné...
M. Johnson: Ah non...
M. Forget: ... que le processus ne pouvait pas suivre son cours
régulier.
M. Johnson: Oui.
M. Forget: Qu'il nous indique, à l'avenir, à quel
moment il va prendre cette décision dans d'autres causes
analogues...
M. Johnson: Ah! Écoutez! Si...
M. Forget: ... puisque les procédures, il ne les a pas
amendées, il ne propose pas d'amender le Code du travail.
M. Johnson: Écoutez! Si le ministre pouvait anticiper
d'avance de tout ça, d'abord, on n'aurait pas besoin de ministre du
Travail, ce serait parfait. Ce serait peut-être quelqu'un qui est
inspiré par la main de Dieu et qui a une cognition parfaite de toute
chose...
M. Bellemare: C'est bien plate, ça.
M. Johnson: Je ne suis pas sûr que c'est aussi plate que
ça.
M. Bellemare: Ah oui!
M. Johnson: On ne peut pas anticiper de la nature...
M. Bellemare: Non, mais votre allusion à la main de
Dieu...
M. Johnson: ... et du type de conflit... M. Bellemare: ...
c'est plate. M. Johnson: Ah, bien oui!
M. Bellemare: Restez donc sur le sujet au lieu d'attaquer les
autres.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: Oui, mais c'est insignifiant.
M. Johnson: II est bien évident que je ne peux pas
présumer de... Ce que je peux vous dire, cependant, c'est que le
ministère et celui qui vous parle sont allés jusqu'au bout de la
corde possible et imaginable dans ce domaine-là.
M. Bellemare: Ah!
M. Johnson: II y a eu la conciliation. Il y a eu la demande de
moratoire. Il y a eu des conversations avec les parties, entre les
hauts-fonctionnaires de mon ministère et les parties. Il y a eu le
conseil de médiation. Il y a eu l'entrevue que j'ai eue avec M. Caine et
avec les représentants de la CSN. Il y a eu, finalement, cette
convocation de commission parlementaire, parce que, à un moment
donné, on se rend compte que c'est un cul-de-sac au niveau du
débat juridique qui est en train de se faire devant les tribunaux et que
si ça doit se rendre jusqu'en Cour suprême, ça va prendre
sept ans. Je pense qu'on a épuisé tous les mécanismes
normaux, possibles et imaginables dans ce domaine-là, y compris
l'intervention de celui qui vous parle. Je pense que le Parlement est en droit
de savoir ce qui se passe là et la population aussi d'être
éclairée sur les circonstances. On devrait peut-être tirer
des leçons de ce qui se passe ici aujourd'hui.
M. Forget: Le ministre a indiqué que la suspension des
procédures devant le commissaire du travail, quant aux plaintes, a
été demandée par la CSN, c'est bien ça?
M. Johnson: Je m'excuse. C'était vrai pour une partie. Je
vais essayer de vous donner le nombre. Le commissaire général a
vérifié au téléphone, sans doute, avec ses
services. C'est M. Lecavalier, qui est le commissaire général
adjoint, qui s'occupait du dossier. Alors, M. Plourde aura la réponse
pour nous tout à l'heure.
M. Forget: Une autre question, M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: ... dans le rapport du conseil de médiation, on
indique, reprenant le témoignage de M. Thériault... Enfin, on dit
M. Thériault, entre parenthèses. C'est présumément
sous la foi de son témoignage qu'on fait cette affirmation, qu'il y a eu
une convocation pour une assemblée régulière de l'union
internationale le 3 octobre et que 55 des 105 employés de la
Commonwealth Plywood non mis à pied y assistent. Toutefois, les 105
personnes ne sont pas toutes averties de la tenue de la réunion. Est-ce
qu'on pourrait nous indiquer la
signification qu'on attache à cette remarque-là,
puisqu'elle n'est pas située dans un contexte?
M. Johnson: Vous parlez du 3 octobre 1977 où on dit:
L'assemblée...
M. Forget: C'est la réunion où ce syndicat s'est
désaffilié de la CSN...
M. Johnson: C'est-à-dire que...
M. Forget: ... et a nommé M. Thériault comme son
représentant, je crois.
M. Johnson: L'assemblée régulière de l'union
internationale, qui n'avait pas été tenue le 26 septembre, a eu
lieu. Elle n'a pas été tenue le 26 septembre, vous vous souvenez,
c'est qu'il y avait eu des représentants de la CSN qui étaient
là, donc, ça n'a pas eu lieu, et 55 des 105 des employés
non mis à pied y assistent, dont certains avaient déjà
signé des cartes de la CSN. Cela présume qu'il y en avait qui
n'avaient pas signé de cartes de la CSN parmi, si on se souvient, les
140 adhésions qui avaient eu lieu au tout début. Donc, vous me
demandez d'interpréter ça? Je peux bien vous l'interpréter
à ma façon; c'est purement personnel. (15 h 45)
Si je tiens pour acquis que M. Thériault avait réuni une
assemblée de ses sympathisants ou d'anciens membres de l'Union des
rembourreurs qui n'avaient pas adhéré... Cependant, il ajoute
aussi qu'il y avait des gens, quelques personnes, qui avaient
déjà signé leur carte CSN et qui assistaient à
l'assemblée et le reste des 105 personnes qui n'avaient pas
été convoquées; peut-être que ces gens... Je ne le
sais pas, il faudrait demander à M. Thériault, mais tirez vos
conclusions. Je ne peux présumer des raisons qui ont motivé
d'autres employés à ne pas participer à cette
réunion. Apparemment, ils n'auraient pas été
convoqués. Ils n'ont pas été avertis. C'est M.
Thériault qui le dit: Toutes les 105 personnes ne sont pas averties de
la tenue de la réunion. Vous demanderez cela à M.
Thériault.
M. Forget: Cela laisse-t-il planer sur cette réunion le
doute qu'elle n'était pas régulièrement convoquée
et que les actes étaient irréguliers et sans valeur?
M. Johnson: Encore là, M. Forget, vous me demandez
d'interpréter toute la question de M. Thériault qui
représente un groupe de gens à l'intérieur. Cela a-t-il
été fait légalement? On pose la question. Moi aussi, je me
pose la question et je n'ai pas la réponse. Vous aurez probablement la
chance et le loisir de l'avoir des intéressés.
Il n'y a pas de constitution. Il avoue lui-même qu'ils n'ont pas
été convoqués en vertu d'une constitution. Ce groupe n'a
pas de constitution et on se pose la question: L'assemblée a-t-elle
été tenue en vertu de la constitution des Rembourreurs unis
d'Amérique? Je ne le sais pas.
M. Forget: Mais quand un syndicat est nouvellement
accrédité, j'imagine qu'à sa première
réunion, il n'y a pas nécessairement de constitution.
M. Johnson: M. Donat Thériault n'est pas
accrédité. C'est cela le problème.
M. Forget: II y avait un syndicat d'accrédité
à cette date-là.
M. Johnson: Le 3 octobre... Cela dépend si c'est le
matin.
Le 3 octobre, la CSN reçoit son accréditation. M.
Thériault sait que la CSN va être accréditée. Il
s'était opposé au début; par la suite, il s'est
rallié. La compagnie ne s'est jamais opposée. Elle n'a jamais
contesté. Donc, le groupe sait que la CSN va recevoir son
accréditation. À partir de ce moment, il fait une
assemblée et c'est là qu'arrive tout le processus des signatures
de cartes, etc.
Puis-je reprendre simplement dans le détail? C'est qu'au moment
où le syndicat fait sa demande d'accréditation et on est
sous l'empire du Code du travail avant les récentes modifications
il doit déposer les statuts et règlements de son syndicat. Or,
tout cela avait été fait par la CSN. La CSN il faut
s'entendre encore une fois c'est l'affaire de Bourdon et de Norbert
Rodrigue, la FNBB. C'est un peu différent de l'autre parce que, pour les
autres cartes dont on parle, je me rends compte qu'indistinctement on a
parlé des cartes deux ou trois fois et on ne parlait pas toujours de la
même chose.
Or, la CSN, la FNBB fait son maraudage, obtient des cartes, signifie
également à M. Thériault des démissions de membres
de l'union internationale, c'est-à-dire des gens qui ont
décidé d'adhérer à la CSN et ils
démissionnent du Syndicat des rembourreurs, et le Commissaire
général du travail est saisi du dossier.
Il est également saisi d'un avis de M. Thériault qui n'a
pas l'intention de contester la nouvelle accréditation que demande la
FNBB. D'autre part, M. Thériault, le 3 octobre, qui est également
le jour où le commissaire général va émettre le
certificat d'accréditation en faveur de la CSN, fait une
assemblée destinée aux 105 employés qui ne sont pas mis
à pied, mais il semble, selon le rapport de médiation, que tout
le monde n'est pas averti qu'il y a cette assemblée.
Or, ce groupe qui se réunit, qui est-il? Ce n'est sûrement
pas le syndicat en voie d'accréditation, pour deux raisons: la
première étant que le nouveau syndicat n'était pas encore
accrédité et que, deuxièmement, je pense qu'on peut
présumer raisonnablement, sans faire de procès d'intention
à qui que ce soit, que M. Donat Thériault n'est pas quelqu'un de
la CSN. Donc, ces gens se réunissent. Ils se réunissent en vertu
de quelle constitution, en vertu de quel document, etc.? Ils n'ont pas de
constitution, ni de règlement.
Je voudrais seulement, M. Forget, ajouter quelque chose sur le plan des
chiffres. On a dit qu'il y avait, au début du conflit, avant que le
conflit ne débute, environ 240 employés à la Common-
wealth Plywood. Quand je fais un petit décompte et que je dis
qu'il y a 140 adhésions CSN, qu'il y a 105 employés mis à
pied qui ne sont pas tous convoqués, j'arrive à 245
employés, c'est-à-dire que M. Thériault a raison quand il
dit qu'il y a quelques personnes qui sont membres de la CSN. C'est vrai si je
fais le décompte.
Or, on peut conclure ce que je vous disais tout à l'heure,
c'est-à-dire qu'on fait une assemblée pour essayer de rallier les
forces et c'est là qu'est arrivé le processus de la tenue de
l'assemblée soi-disant de la CSN pour faire signer des cartes et, comme
le dit M. Thériault plus loin dans le rapport: Je ne peux pas tenir
d'assemblée parce que le syndicat est accrédité CSN. Il
faut donc que mes gens soient de la CSN pour que je tienne une
assemblée.
M. Forget: Sans vouloir empiéter tout de suite sur la
discussion à savoir qui représente qui dans tout ceci, à
supposer qu'on réussisse jamais à l'établir avec
clarté, il demeure que l'allégation, dans le rapport de
médiation, que tout le monde n'a pas nécessairement
été convoqué est une remarque qui n'a pas
nécessairement de pertinence puisque j'imagine qu'on ne demande à
aucun syndicat, comme condition de la validité des actes qu'il pose, si
oui ou non il a vraiment convoqué tout le monde, si tout le monde a
été informé. Je pense qu'on présume
généralement...
M. Johnson: Non, mais c'est une affirmation de M.
Thériault.
M. Forget: ... que la plupart des membres ont été
convoqués et qu'il y avait là un quorum satisfaisant pour en
arriver à des décisions. Donc, la véritable question n'est
pas une question de procédure, je pense que c'est important.
M. Johnson: C'est M. Thériault qui a senti le besoin de le
dire lui-même au conseil de médiation. C'est ce que dit le
rapport.
M. Forget: Cela, c'est son problème. Quant à
l'information de la commission, c'est une information qui n'est pas directement
pertinente.
M. Johnson: II faudrait peut-être aussi demander en vertu
de quelle procédure, de quelle constitution la convocation de
l'assemblée qui a été faite par M. Thériault, l'a
été.
M. Forget: Le ministre a répondu à cette question
tout à l'heure puisqu'il a dit que la demande d'accréditation
avait été faite à partir des statuts de la CSN et qu'on
doit présumer que toute assemblée syndicale qui se faisait
à ce moment-là se faisait en vertu de ces statuts.
M. Johnson: Là, on est dans la haute voltige et
l'interprétation juridique. Encore une fois, il faut se rappeler que
celui qui a convoqué l'assemblée, c'est M. Donat
Thériault, et je sais pertinemment que M. Donat Thériault n'est
pas vraiment de la CSN.
M. Forget: C'est un autre problème, M. le ministre.
M. Johnson: Cela en est tout un.
M. Forget: Vous devez, en tant que ministre, présumer que
les documents qui sont déposés sont les documents qui
s'appliquent.
M. Johnson: Oui, mais, maintenant, je sais. Je peux bien le
présumer jusqu'à preuve du contraire. Je pense que la preuve du
contraire, je l'ai, elle est manifeste. Voyons donc!
M. Forget: C'est qu'on parlait de voltige tout à l'heure.
Il ne faudrait pas trop voltiger, parce que, dans le cas du ministre, il a
quand même la responsabilité de tenir pour acquis que les
procédures qui sont faites devant lui...
M. Johnson: Sont régulières.
M. Forget: ... en sa capacité officielle sont
régulières. Et à moins qu'il n'ait une preuve formelle du
contraire, il doit les accepter à leur face même.
M. Johnson: Mais, M. le Président, pour clore
là-dessus, et pour être bien précis, c'est inscrit et c'est
consigné au rapport. L'assemblée du 3 octobre, c'est M.
Thériault qui le dit, c'est l'assemblée régulière
de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique.
M. Forget: Une autre question, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Je ne les compte plus.
M. Forget: C'est la cinquième.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Je vais la prendre
prima facie comme étant entièrement régulière.
M. Forget: À la page 24 du rapport du conseil de
médiation, il y a une affirmation tout à fait en bas de la page
où on dit: À notre avis, c'est la clef du problème. La
clef du problème dont on parle, c'est la demande d'injonction de la CSN
sur la validité de la convention qui ne pourra être entendue avant
l'automne. Donc, le conseil de médiation dit: La clef du
problème, c'est la validité de la convention. C'est une
affirmation qui mériterait d'être un petit peu appuyée par
une argumentation parce que, dans la mesure où c'est la clef du
problème, est-il besoin de rappeler que cette clef est en train de
perdre son intérêt puisque, dans quatre jours, elle deviendra
caduque, et si c'est la clef du problème, on n'a qu'à laisser
s'écouler quatre jours pour restaurer aux parties leur initiative et
l'application des lois du travail va automatiquement régler le
problème. Je pense personnellement que la clef du problème se
trouve
bien ailleurs et je serais intéressé de savoir pourquoi on
dit que c'est la clef du problème.
M. Johnson: Si vous le permettez, M. le Président c'est
moi-même qui parle pour les fins du journal des Débats, ce n'est
pas M. Blain, il y a d'abord certaines affirmations que vient de faire le
député de Saint-Laurent, sur le plan juridique, qui ne sont pas
nécessairement exactes en ce sens que, de façon
générale, il a raison...
M. Forget: La convention se termine bien le 30 septembre.
M. Johnson: Oui, la convention, mais est-ce qu'il y a une
convention? On présume...
M. Forget: Valide ou non... Si elle n'est pas valide, il n'y en a
pas.
M. Johnson: Voilà. Donc, c'est cela.
M. Forget: À plus forte raison, elle n'est pas la clef du
problème.
M. Johnson: Voilà. Alors, la clef, c'est de savoir si elle
est bonne ou pas, cette convention.
M. Forget: Ou si elle existe ou pas.
M. Johnson: Ou si elle existe ou pas finalement, pour les fins de
l'application du code.
M. Forget: Mais peu importe puisque, dans quatre jours, c'est un
problème historique qui n'a plus d'importance.
M. Johnson: Absolument pas. Parce que, dans quatre jours, au
moment de l'expiration de ce document qu'on dit être une convention
collective et sur lequel les tribunaux ne se sont pas encore prononcés
quant à la légalité du document et du processus et en
vertu d'un tas d'analyses qu'on peut faire de certains articles du Code du
travail pour des circonstances qui ont entouré cela, il y a
peut-être une cause à démontrer que c'est une convention
collective qui n'est pas valide, entre autres si on pense à l'avis de
dénonciation et à l'avis de négociation, etc. Si jamais un
tribunal décidait que cette convention collective est nulle et non
avenue, ce qui se passe à la Commonwealth Plywood en ce moment, c'est
qu'il y a des salariés en grève légalement et que ceux qui
sont à l'intérieur sont considérés des "scabs" pour
les fins de l'application du Code du travail tel que rédigé.
Si, cependant, il y a une convention collective et qu'elle est valable,
M. Thériault a annoncé, je pense que tout le monde est au courant
de ça, du côté de la CSN comme du côté de la
Commonwealth Plywood, que le syndicat de M. Thériault on va se
comprendre l'Union internationale des rembourreurs, a l'intention de
procéder à un maraudage, dans les délais prévus par
le code. Les délais prévus par le code sont en fonction d'une
convention collective. Le commissaire général du travail devra se
poser des questions, il se les posera comme il voudra. Je n'ai pas l'intention
de lui donner de directive.
Mais dans un premier temps, le commissaire général du
travail devra se demander s'il y a ou non une convention collective afin de
savoir si la demande d'accréditation de M. Donat Thériault, qui
est déjà déposée au ministère, est dans les
délais, puisque les délais sont computés à partir
de l'existence d'une convention collective. Le commissaire
général du travail peut bien décider que oui, il y a une
convention collective, dont les délais sont ouverts, mais le commissaire
général du travail peut également décider qu'il
considère qu'il ne peut pas porter un jugement là-dessus et qu'il
attend la décision d'un tribunal pour savoir s'il y a une convention
collective.
À ce moment-là, ce n'est pas exact de dire qu'à
l'expiration du texte en question, du document qui est présumé
par certains être une convention collective, il y a effectivement
règlement du problème.
M. Forget: M. le Président, il me semble que les
dispositions du Code du travail sur le maraudage prévoient qu'en
l'absence de convention collective, il y a possibilité de maraudage six
mois après l'expiration de celle qui précédait, s'il y en
avait une, s'il n'y a pas à ce moment-là grève ou si on
n'est pas en négociation pour une convention collective. Dans le cas de
l'invalidité, il y aurait eu...
M. Johnson: ... convention.
M. Forget: ... une période de maraudage six mois
après le 30 septembre 1977.
M. Johnson: Oui, mais il y aurait également grève.
À ce moment-là, l'expression anglaise, c'est "foreclosure", il
n'y a pas d'ouverture au maraudage si ce qui se passe à ce
moment-là, c'est une grève.
M. Forget: M. le Président, je vais terminer sur quelques
brefs commentaires, parce que les paroles du ministre donnent ouverture
à ces commentaires immédiatement. Je crois que ce qu'il vient de
souligner illustre bien une perception fondamentalement différente entre
ce qu'il voit être l'objet principal du litige et la perception que nous
avons de ce côté-ci de ce qui est effectivement l'objet du
litige.
À notre avis, il ne s'agit pas de savoir si un document est
légal ou non, valide ou non, de toute manière, il sera caduc dans
quatre jours. Ce qui est essentiellement en jeu dans cette question, c'est de
savoir, premièrement si, en septembre 1977, l'employeur, Commonwealth
Plywood, avait le droit d'effectuer des licenciements collectifs pour les fins,
tel qu'il l'allègue, de sauver l'entreprise, lui permettre de conserver
au moins le minimum d'emplois qui sont demeurés ou s'il a agi de
mauvaise foi pour des fins antisyndicales.
C'est central au litige. Parce que selon la réponse que l'on
trouvera à cette question, toute la question de savoir si les gens qui
sont à l'extérieur sont en grève ou simplement,
légalement, congédiés, va en dépendre. Peu importe
la question de savoir si la convention qui a suivi, à partir du 30
septembre, donc postérieurement à la date du congédiement,
était une convention valide ou non valide.
Si leur congédiement était légal au 15 septembre,
ils n'étaient plus des employés au 30 septembre, au 1er octobre
1977, ils ne sont plus partie à la convention collective, ils ne peuvent
pas être en grève puisqu'ils ne sont pas des employés, des
salariés au sens du Code du travail.
Il y a donc là une première détermination qui est
extrêmement importante. Le ministre l'a dit, il y a des mécanismes
normaux pour découvrir la réponse à cette question, mais
j'y reviendrai dans quelques minutes.
Il y a également une deuxième question qui est centrale et
sur laquelle le ministre n'a pas du tout élaboré, c'est la
question de savoir à qui appartient une association de salariés.
Les paroles du ministre donnent à croire que dans son esprit, le
syndicat, l'association de salariés, qu'il s'agisse de quelque
entreprise que ce soit, aussi petite ou aussi grande qu'on peut imaginer,
appartient à la centrale syndicale, qu'elle porte sa marque de commerce,
son logo et qu'elle appartient, en quelque sorte, au leadership syndical.
Si on croit, au contraire, que l'association de salariés, le
syndicat, appartient aux syndiqués, ces syndiqués ont le droit de
décider de quoi que ce soit, même de prendre des décisions
qui, de prime abord et vues de l'extérieur, apparaissent les plus
controversées, les plus critiquables, même les plus folles
possible. (16 heures)
Si on croit à la démocratie dans le milieu industriel, je
crois qu'on doit accepter, sans aucune restriction, sans aucune réserve,
le droit des employés de la Commonwealth Plywood de décider quoi
que ce soit quant à l'identité de celui qui agira comme
représentant syndical, de décider de leur affiliation à un
syndicat, quels qu'aient été les antécédents,
même récents, de leur nouvelle accréditation. Une fois
qu'on a reconnu ce droit, je pense qu'on peut faire la lumière
passablement rapidement dans tout le fatras de procédures, tout le
fatras de procédés plus ou moins justifiables, plus ou moins
acceptables, dans les circonstances, mais auxquels les gens ont eu recours,
probablement faute de mieux et probablement avec une information sur les
implications juridiques de ce qu'elle faisait, passablement affaiblie.
Mais quoi qu'il en soit, le principe demeure et c'est cela que la
commission parlementaire doit éclairer. À qui appartient le
syndicat? Aux membres ou aux centrales syndicales? Et d'autre part, est-ce que
ces congédiements qui sont survenus à la mi-septembre
étaient faits pour des raisons antisyndicales ou étaient
légitimées par la situation économique de l'entreprise?
Une fois qu'on a tranché ces deux débats, toute la question de
Commonwealth Plywood s'éclaircit.
Dans cette commission parlementaire, M. le Président, je me rends
compte, malheureusement, que l'objectif du ministre, loin de faire la
lumière, semble créer une confusion additionnelle. Il introduit
toutes sortes de considérations qui sont, le plus souvent, non
pertinentes. Je regrette d'avoir à le constater, mais il fait le
procès des parties avant même qu'on les ait entendues et se
substituant aux tribunaux d'une façon inqualifiable et sans
précédent dans nos annales législatives au Québec.
Je pense que c'est un précédent extrêmement regrettable et
auquel l'Opposition officielle participe, avec la plus grande réticence,
parce que, si on n'était pas là, cela irait quand même,
apparemment. Le ministre a donné des indications de vouloir
procéder, envers et contre tous. Nous voulons quand même
participer, dans la mesure du possible, à limiter les
dégâts que fait une telle intervention politique, strictement
politique, du ministre dans un conflit de travail, alors que les tribunaux sont
saisis de toute la cause et que les lois du travail, n'en déplaise au
ministre il doit être d'accord, puisqu'il ne propose aucune
modification sont suffisantes pour régler tous les litiges qui
sont actuellement devant les tribunaux.
Il semble donc qu'on a un désir de mystifier l'opinion publique,
de faire, devant une espèce de tribunal de l'opinion publique, un
procès qu'on ne pourrait pas réussir ailleurs. C'est un
procédé qui me semble indigne de l'Assemblée nationale.
D'ailleurs, ce n'est que la dernière phase d'une stratégie que le
ministre a utilisée depuis des mois. Il a parlé tout à
coup d'une demande de moratoire judiciaire, alors que maintenant il se plaint
des délais excessifs, de la lenteur de tout ceci. Il dit, comme raison
de convoquer une commission parlementaire, que le processus judiciaire est trop
lent. Pourtant, il y a quelques mois, il demandait aux parties de freiner ce
processus qui permettrait de le régler.
Il entérine, approuve et prête sa voix au rapport d'une
commission, d'un conseil de médiation qui s'est volontairement abstenu
de faire l'examen des faits qui sont à la base même du litige et
qui, seuls, peuvent permettre de l'éclairer, en prenant prétexte
de tous les arguments plus ou moins spéciaux qu'avancent l'une et
l'autre parties sur le plan juridique, pour argumenter de la validité ou
de l'invalidité d'une convention qui sera désuète dans
quatre jours, et tout cela se fait, de façon encore sans
précédent, en face et avec la présence physique, me
dit-on, dans cette enceinte, du Commissaire du travail, de façon
à téléguider d'avance le jugement qu'il sera appelé
à rendre, dans des jugements très importants qu'il doit rendre
relativement aux congédiements survenus en 1977 et sur les votes qui
devraient avoir lieu ou non.
C'est un processus indigne, M. le Président, et je ne peux que
déplorer la façon dont on se sert de l'Assemblée
nationale, encore une fois, pour passer à côté des
mécanismes normaux de règlement et contribuer à jeter de
l'huile sur le feu.
On n'a qu'à regarder l'auditoire, on n'a qu'à regarder le
ministre agir là-dessus sous l'oeil
sévère mais bienveillant de papa Rodrigue et même de
grand-papa Pepin, et voir de quelle façon il veut faire servir la
commission parlementaire pour gagner, pour la CSN, une chose qu'elle n'a pas su
gagner sur le terrain.
M. le Président, nous allons continuer à participer
à cette commission parlementaire, encore une fois, avec les plus grandes
réserves. Nous réservons notre jugement quant aux conclusions
qu'il faudra en tirer.
Une Voix: ...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Johnson: Je vais laisser parler le député de
Johnson, M. le Président, je prendrai mon droit de réplique
à la fin.
Le Président (M. Cardinal): Revenons au débat. J'ai
un commentaire à faire. Je permets à chacun des partis de
s'exprimer selon les règles ordinaires de ces assemblées. M. le
député de Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, merci de cette grande
courtoisie! J'essaierai de vous en être reconnaissant en ne
dépassant pas la limite permise par le règlement, mais en vous
disant, par exemple, que nous assistons, depuis deux heures et demie de
commission parlementaire, à une stricte défense des
résultats qu'a produit le conseil de médiation. Est-ce que nous
sommes ici pour entendre la justification du conseil de médiation ou
est-ce que nous sommes ici pour entendre les parties qui ont été
muettes jusqu'à cette heure?
Je voudrais m'élever avec véhémence contre cette
stratégie dans laquelle vous êtes tombé inconsciemment, M.
le Président, stratégie qu'a voulu prendre le ministre à
cause de sa majorité et qui vous a entraîné, comme
président, à lui donner raison, à justifier le conseil de
médiation par tout ce qui a été lu et écrit.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: Est-ce que c'est cela, la commission
parlementaire?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!
M. Bellemare: On n'a pas entendu...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. le
député de Johnson, à l'ordre! Je ne permettrai à
aucun membre de cette commission de m'impliquer dans le débat. Je ne
l'ai pas fait. Que chacun des partis ait sa stratégie et l'utilise, vous
êtes le premier à le savoir, de longue date, étant le doyen
de cette Assemblée nationale... Je suis peut-être aussi le second
à le savoir à cette commission parlementaire et je vous prierais
d'agir comme vous l'avez toujours fait et d'impliquer les représentants
de chacun des partis, mais certainement pas la présidence dans le
débat.
M. Bellemare: M. le Président, je n'ai jamais voulu vous
impliquer directement ou indirectement dans le débat, mais je dis que,
depuis deux heures et demie, nous assistons, par la volonté et par la
stratégie du ministre, à un déploiement d'arguments pour
justifier le conseil de médiation. C'est cela que je dis. Nous n'avons
pas encore entendu un mot de la CSN, du Syndicat des rembourreurs unis et de M.
Caine, par exemple, ou des avocats de la Commonwealth Plywood.
Est-ce que nous sommes ici pour entendre la justification d'un rapport
que nous avons lu en maintes circonstances, que nous avons noté et que
nous avons pris en délibéré avec des gens qui sont de
bonne foi, pour essayer d'en trouver le meilleur consensus?
M. le Président, je dis que toute cette stratégie qui
s'est jouée depuis deux heures et demie de commission parlementaire n'a
rien donné aux parties, n'a pas ouvert une porte, n'a pas donné
une incidence quelconque d'un rapprochement pour régler le
problème s'il y avait lieu. Qu'est-ce qu'on fait ici, nous autres, les
parlementaires? Qu'est-ce qu'on est? Lire les textes? On les a lus avant de
venir. Se les faire répéter par des gens comme le sous-ministre,
M. Blain, que j'estime énormément... C'est de mon temps. M. Blain
était là. Je suis très heureux du rapport qu'il a fait.
Mais remarquez que, dans le rapport Blain, il y a une phrase
catégorique: "Ce n'est pas par des moyens ordinaires, ni légaux
qu'on est capable de régler... " On est obligé de procéder
par des... Nous faisons... "C'est dans une impasse la plus totale que le
conseil de médiation n'a certes pas agi dans les cadres traditionnels
d'une médiation et est forcé de prendre des mesures
exceptionnelles pour tenter de remplir son mandat adéquatement." Est-ce
que ce n'est pas avouer son incapacité totale et est-ce que c'est pour
cela qu'on est ce matin réuni en commission parlementaire pour justifier
le rapport? Il ajoute ceci: "Nous faisons face beaucoup plus à un
problème d'ordre social que de relations de travail." Il a parfaitement
raison.
Si le ministre avait lu le rapport tel qu'il est écrit... "Il
nous faut donc, dans l'élaboration des solutions possibles, tenir compte
de ce fait..." que ce n'est pas au point de vue d'un problème de
relations de travail, mais que c'est simplement un problème d'ordre
social. C'est écrit dans le rapport. Est-ce qu'on est ici pour justifier
ce rapport?
M. le Président, je vais essayer de rester calme, sans m'aigrir
contre personne. J'ai assez eu à m'aigrir sur moi-même dans le
temps sans m'aigrir contre les autres. Une question que je voudrais poser,
puisqu'on est encore à cela, puisqu'on est encore, depuis deux heures et
demie ou trois heures de temps, sur le rapport du conseil de médiation,
parmi les sept recommandations que vous avez faites, M. le sous-ministre,
croyez-vous qu'il y
en a quelques-unes qui ont reçu, de la part de l'autorité
patronale, une certaine reconnaissance?
M. Johnson: Est-ce que c'est une question?
M. Bellemare: Non, c'est parce que vous avez des lettres, ce
matin, de la partie patronale...
M. Johnson: Oui, oui.
M. Bellemare: ... comme vous en avez lu de la CSN dans lesquelles
elles se disaient prêtes à collaborer sur les sept recommandations
que vous aviez faites. J'ai cru comprendre qu'il y avait beaucoup de bonne foi,
contrairement à ce qu'a affirmé le ministre, à savoir
qu'il n'y avait pas de bonne foi de la part de la compagnie, ni de la part du
syndicat pour en venir à une entente et que c'est pour cela que la
commission parlementaire siégeait. Je pense que le sous-ministre, M.
Blain, pourrait nous dire si la première recommandation qui est de
procéder à l'établissement de la liste de tous les
employés couverts par l'accréditation a été
faite.
M. Johnson: Je vous ai lu ce matin, M. Bellemare, la lettre que
me faisait parvenir M. Caine, le président...
M. Bellemare: C'est bien mon nom, M. le sous-ministre, mais en
commission parlementaire, on m'appelle M. le député de
Johnson.
M. Johnson: M. le député de Johnson. M.
Bellemare: J'aime mieux cela. M. Johnson: M. le député
de Johnson... M.Bellemare: Merci, monsieur.
M. Johnson: J'ai lu ce matin une lettre je ne suis pas
habitué à être en commission parlementaire, vous
m'excuserez de M. Caine, faisant suite au dépôt de notre
rapport. Je pense que, quand on lit la lettre, je peux la relire, si vous
voulez.
M. Bellemare: Non, je l'ai notée. D'ailleurs, j'en ai une
copie.
M. Johnson: Je pense qu'à toutes fins utiles il ne
mentionne aucune recommandation du rapport.
M. Bellemare: D'après vous, qui êtes
président du conseil de médiation, est-ce que vous pouvez
admettre, à partir de cet instant, qu'il a manqué de bonne foi
pour négocier?
M. Johnson: Je ne porte pas de jugement.
M. Bellemare: Vous ne portez pas de jugement, mais vous avez
devant vous des faits.
M. Johnson: Oui.
M. Bellemare: On n'a pas entendu un mot encore de la compagnie,
ni un mot de la CSN.
M. Johnson: Cela va venir.
M. Bellemare: Cela va venir quand? Quand le temps va être
expiré?
M. Johnson: On n'attend que vous...
M. Bellemare: Oui, on n'attend que vous... Vous avez
monologué pendant une heure ce matin pour ne rien dire, pour essayer de
vous abrier. Arrêtez votre singerie. Loin de moi de vouloir critiquer le
rapport, mais, l'ayant lu plusieurs fois, l'ayant noté à maintes
reprises et considérant que vos recommandations étaient
dictées par l'expérience d'un homme qui connaissait
véritablement les problèmes majeurs qui sont en cause, j'ai
trouvé que, dans la recommandation no 1, la liste était
déposée. Deuxième recommandation, sur la base de
l'ancienneté de l'usine, cela aussi. Troisièmement, le rappel au
travail, cela pourrait durer une année. Jamais personne ne s'est
opposé à cela. Quatrièmement, il y a votre suggestion d'un
arbitre qui serait nommé, mais vous ne dites pas qui
représenterait qui. Est-ce qu'il serait nommé par la CSN ou par
les Rembourreurs unis d'Amérique?
M. Johnson: Les parties s'entendront pour choisir un arbitre.
Sinon, en cas de mésentente, le ministre nommera.
M. Bellemare: Qui aura le mandat de statuer... Pardon?
M. Johnson: En cas de mésentente, le ministre nommera un
arbitre. D'accord?
M. Bellemare: Oui, mais vous dites dans votre rapport qu'il y
aura deux assesseurs. Est-ce qu'un assesseur sera...
M. Johnson: Non, au conseil de médiation, la
recommandation 7 pour l'espèce de comité de médiation
d'abord, dans un premier temps, et s'il n'y avait pas entente, l'arbitrage par
la suite, c'est avec un assesseur patronal et syndical. Au niveau de
l'application du mécanisme de l'ancienneté, comme je l'ai
expliqué tout à l'heure, c'est un arbitre seul qui doit
être choisi par les parties. À défaut d'entente, le
ministre nomme.
M. Bellemare: D'accord. La recommandation 5, l'ancienneté
continue de s'accumuler. Jamais la compagnie, ni la CSN ne s'est opposée
à cela. D'ailleurs, dans la lettre de la CSN que vous nous avez lue,
elle acceptait presque toutes vos recommandations. La recommandation 6, en
probation le 14 septembre 1977 concernant l'ancienneté acquise à
cette date, la compagnie n'a jamais dit, mon cher monsieur, qu'elle
n'accepterait pas cela.
Au contraire, c'est pour venir à dire, M. le sous-ministre...
M. Johnson: La compagnie n'a pas accepté le rapport. Elle
a refusé le rapport.
M. Bellemare: Un instant, monsieur! Seulement un instant! M. le
juge Perry Meyer avait dit cette phrase: "Par contre, au lieu d'agir
brutalement, une période de transition pourrait avoir lieu, s'il y
avait, par exemple, des négociations amenant une nouvelle convention
entre le syndicat et l'employeur. " C'est le juge qui avait dit cela dans son
jugement. C'est pour dire que, ce matin, le ministre, dans son monologue qui a
duré une heure, nous a dit: Je ne peux pas concevoir, dans un
problème aussi crucial, qu'il y ait manque de bonne toi, qu'il y ait
manque de collaboration et que, pour régler un problème, il
faille que les parties soient désintéressées pour agir de
bonne foi. Quand et où a-t-on pointé du doigt la mauvaise foi et
de la CSN et de la compagnie? Je voudrais le savoir.
M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, je
pense que c'est moi qui répondrai à cela plutôt que M.
Blain. S'il désire y répondre, il est parfaitement libre. (16 h
15)
Ce que j'ai évoqué ce matin, c'est qu'il y a 702
inscriptions en Cour supérieure, 702 inscriptions différentes
dans différents dossiers, procédures, comparutions. Il y a, si je
me souviens bien, quelque chose comme à peu près huit actions
principales, plus tous les interlocutoires, les intérimaires et les
appels, les avis de motions préliminaires. C'est un fouillis, sur le
plan juridique. Il y a peut-être une solution, un jour, qui va sortir de
la Cour suprême, mais c'est clair qu'il n'y a pas de solution au niveau
des tribunaux, en ce moment. Je ne nie pas le rôle important des
tribunaux, mais ce que je suis capable de constater, par exemple, c'est que
quand les gens se mettent à se servir du Code du travail, tant du
côté patronal que syndical, pour aller en Cour supérieure
de façon systématique pour judiciariser les conflits, ça
donne des situations comme celle qu'on vit en ce moment à la
Commonwealth Plywood, et ça, à mon avis, c'est peut-être
significatif d'un comportement et ce comportement-là, ce n'est
sûrement pas un exemple de bonne foi et de diligence. L'effort qu'on a
fait avec le conseil de médiation c'est vrai qu'on essaie de
justifier cet effort pas le justifier au sens où je me sens
coupable, où j'essaie d'abrier, par une commission, l'impuissance du
ministère. Je savais très bien qu'on se mettait au blanc en
venant ici, ce matin, voyons donc! Il ne faut pas prendre les gens pour des
naïfs. Mais ce qu'on dit, par exemple, c'est que tous les
mécanismes possibles et imaginables, y compris ceux qui ne sont
même pas prévus dans le code, ont été pris et, pour
le moment, on est devant un cul-de-sac et on n'a pas accepté le rapport
de médiation.
M. Bellemare: Je continue, M. le Président. Encore un
monologue qui s'établit.
Il a dit, le ministre: On ne peut pas régler sans que les gens
soient de bonne foi. J'ai vu des cas, moi, au ministère du Travail,
où il manquait réellement... des gens qui n'étaient pas
toujours animés d'un vouloir décisif de régler un
problème. J'en ai vu en plusieurs circonstances. Mais comme ministre,
par exemple, je suis intervenu et Dieu sait dans combien de cas où j'ai
connu un certain résultat appréciable, mais quand il dit, par
exemple, que les résultats prouveront qu'il y aura eu moins de
grèves à cause de l'attitude qu'a prise le ministre,
écoutez! Un instant! Un instant! On a cinq pages de grèves ici,
monsieur, qui ne sont pas réglées et qui sont données par
le ministère à tous les matins. J'en ai huit pages, a part de
ça, d'autres en vertu de l'article 99 et, M. le Président, quand
on regarde les statistiques officielles et qu'on voit qu'en Ontario, il y a 782
jours de perdus pendant les six premiers mois, janvier, février, mars et
avril, les cinq premiers mois, et que chez nous, dans la province de
Québec, avec un ministre qui se dit extraordinaire, on a, en Ontario,
365 000 jours de perdus et dans la province de Québec, 782 jours de
travail de perdus...
Une voix: 782 000.
M. Bellemare: 782 000, merci. Cela, par exemple, c'est
prouvé par les statistiques officielles.
M. le Président, ma question suivante est celle-ci... Vous avez
sûrement hâte de l'entendre, je l'espère.
Comment cela se fait-il, M. Caine, que vous ayez pris la
décision...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Monsieur le...
M. Johnson: ... n'a pas encore...
M. Bellemare: Je n'ai pas le droit de poser une question?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Johnson, c'est qu'actuellement je pense que c'est le
conseil de la médiation qui est ici présent...
M. Bellemare: Et on n'a pas le droit de poser de questions
à qui que ce soit?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pas
actuellement. L'ordre du jour, tel que suggéré par...
M. Bellemare: Ah! Ah!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... le
député de Portneuf...
M. Bellemare: Vous ne voulez pas qu'on ait de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... sera
établi par après.
M. Pagé: ... a été battue.
M. Bellemare:... au moins que, par questions, que parce qu'ils
n'ont pas eu la chance de se faire entendre...
M. Pagé: C'est battu, ça.
M. Bellemare: ... ni la CSN, ni la compagnie Commonwealth
Plywood, qu'ils nous donnent des renseignements, après ce qu'ils
viennent de nous dire. On n'a pas le droit, nous, de s'éclairer...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Johnson...
M. Bellemare: ... et de poser des questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Johnson, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: On va être obligé de suivre encore le
dicta du ministre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Johnson, s'il vous plaît!
M. Johnson: Vous allez savoir, ça s'en vient.
M. Bellemare: Ah! Ah! Cela s'en vient, on vous connaît,
vous!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Johnson: Les prochains.
M. Bellemare: Oui, oui. Tiens, vous êtes revenu,
vous...
M. Chevrette: ...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!
M. Bellemare: Où étiez-vous allé? Vous
êtes arrivé bien tard!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! M. le député de Joliette-Montcalm, s'il vous
plaît!
M. Chevrette: ... reposer les oreilles, j'étais
fatigué de vous entendre.
M. Bellemare: Oui, vous avez besoin de vous éclairer
d'autres choses pour comprendre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Johnson, s'il vous plaît, la pertinence du
débat!
M. Bellemare: La pertinence du débat? On reste donc
seulement vis-à-vis du conseil de la médiation.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pour le moment, oui.
M. Bellemare: Rien que ça?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pour le moment, oui.
M. Bellemare: Hum! Et on finit à quelle heure?
M. Johnson: On verra.
M. Bellemare: Quelle chance va-t-on avoir d'entendre les
parties?
Une voix: Cela s'en vient.
M. Bellemare: M. le Président, il est dit, dans le rapport
de médiation: Comment se fait-il que la CSN rencontre la compagnie pour
négocier, fait une assemblée générale de ses
membres et vote la grève alors que la CSN est en instance
d'accréditation, reçoit son certificat d'accréditation du
ministère le 3 octobre 1977? C'est vous qui dites cela.
Répondez-moi. Est-ce logique, raisonnable et selon les us et coutumes de
la tradition parlementaire ou de la tradition syndicale?
M. Johnson: C'est un fait qu'on nous a relaté et qu'on
nous a donné. On l'a colligé et on l'a consigné au rapport
et on a constaté cela. C'est une constatation. On n'avait pas de pouvoir
de les poursuivre ou de faire quoi que ce soit. On a tout simplement dit: On a
constaté que le 19 il y a eu une assemblée et qu'à un
certain moment, il y a eu une grève et on a constaté que,
seulement le 3 octobre, ils avaient été
accrédités.
M. Bellemare: Vous qui avez une grande expérience, M. le
sous-ministre, admettez-vous que c'est selon les conditions exigées par
le Code du travail?
M. Johnson: Si cela avait été probablement
très normal, on ne l'aurait peut-être pas mentionné!
M. Bellemare: Non. C'est justement pour cela que vous dites que
vous êtes incapable de le régler au point de vue des relations de
travail, parce que c'est un conflit plutôt social.
M. Johnson: Ce fait et d'autres faits aussi.
M. Bellemare: Oui, celui, par exemple, de Thériault qui
fait imprimer des cartes et vous vous rendez compte vous-même et vous
faites rapport au ministre dans ce temps-là. C'est sûr qu'avant
d'écrire votre rapport, il s'est passé des choses
illégales. Ce sont des faux et vous les rapportez dans votre
rapport, mais vous les saviez, vous les aviez dites avant le rapport au
ministre et le ministre n'a rien fait. Il a laissé couler le temps.
M. Johnson: Voyons donc! Voyons donc! Ne dites pas n'importe
quoi!
M. Bellemare: Vous avez admis tout à l'heure que
c'étaient des faux. Vous avez admis que c'étaient des faux et
vous n'avez rien fait pour empêcher cela, et que l'assemblée a
été tenue et que parmi les 105, il y en avait quelques-uns qui
n'avaient pas été invités.
Le rapport du conseil de médiation est cousu de fil blanc, parce
que rapport qui veut sauver le ministre de son incapacité d'intervenir
lui-même dans le conflit. Oui, Seigneur, priez pour nous!
Délivrez-nous du "PQuiou".
Une chose qui reste sûre, M. le ministre, c'est que vous allez
porter longtemps la responsabilité de cette non-participation comme
ministre dans ce conflit.
Une autre question, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): ... s'il vous plaît!
M. Johnson: Si j'avais dit cela, j'aurais été
rappelé à l'ordre.
Le Président (M. Cardinal): Je viens de le faire. Je vous
prie de continuer.
M. Bellemare: Merci, M. le Président. Non, je vous dis que
ce n'est pas drôle après avoir été commissaire comme
vous l'avez été de la CECO, de vous voir dans cette Chambre, mon
cher, vous moquer des unions, vous qui avez prêché une doctrine,
qui en avez prêché une maudite...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: ... et vous en pratiquez un autre. Vous êtes
un visage à deux faces, mon cher collègue, parce que ce que vous
avez été comme commissaire et ce que vous êtes comme
député, c'est bien différent.
M. Chevrette: S'il fallait qu'on prenne votre exemple, vous
auriez l'air fin.
M. Bellemare: Votre attitude, aujourd'hui, est bien contraire
à ce que vous avez prêché. Vous avez prêché la
paix dans la société et qu'est-ce que vous prêchez
aujourd'hui? Qu'est-ce que vous apportez comme résultat? Vous aviez des
solutions merveilleuses à offrir à tout le monde. Que nous
avez-vous offert depuis que vous êtes là, depuis deux ans que le
"PQiou" est là, sauf répéter les mêmes erreurs que
vos prédécesseurs?
Il y a eu une rencontre, dit le rapport du conseil de médiation:
"... le 7 octobre, une rencontre de négociation a lieu avec la
compagnie, nouvel exécutif élu..." Le sous-ministre pourrait-il
nous dire ce qu'on a discuté à l'occasion de cette rencontre?
A-t-on discuté des droits de ceux qui avaient été mis
à pied? A-t-on discuté de l'ancienneté? A-t-on
discuté de l'à-propos de soumettre certaines questions aux
tribunaux? Vous n'avez sûrement pas écrit cela dans votre rapport,
sans avoir des indications spéciales.
M. Johnson: C'est la déclaration de M.
Thériault.
Le Président (M. Cardinal): Un instant. La question est
posée au ministre. Le fonctionnaire peut répondre au nom du
ministre.
M. Bellemare: La question est posée au sous-ministre...
Cela fait trois heures qu'on ne discute que du conseil de la médiation,
et on n'a pas encore entendu un mot des parties.
Le Président (M. Cardinal): La question est posée
au ministre.
M. Johnson: Je pense qu'il y avait une question à...
Allez, M. le sous-ministre. Le sous-ministre va répondre? Vous
désirez que cela soit le sous-ministre M. Blain qui vous réponde?
J'avoue que j'ai été distrait un quart de seconde et même
si je m'étais concentré, j'aurais peut-être de la
difficulté à comprendre.
M. Bellemare: II y a eu une rencontre de négociation entre
le syndicat CSN et la compagnie. De quoi a-t-il été question
à ce moment-là?
M. Johnson: Le 19.
M. Bellemare: On a dû le dire à ce moment-là
au conseil. On a plaidé en faveur de l'ancienneté, en faveur de
ceux qui avaient été mis à pied. On a plaidé...
M. Johnson: Vous parlez du 7 octobre? M. Bellemare: Le 7
octobre.
M. Johnson: La rencontre de négociation de la compagnie
avec les membres du comité élu, là on parle du groupe de
M. Thériault, même si c'est après le certificat
d'accréditation qui a été décerné le 3
octobre.
M. Bellemare: On sait cela. Ne nous répétez pas des
choses qu'on sait.
M. Johnson: Ce dont il s'agit et ce qui est évoqué
là, selon ce qu'on peut en savoir, dans la mesure où on
n'était pas présent...
M. Bellemare: Qu'est-ce qui a été
discuté?
M. Johnson:... on n'était pas assis avec eux le 7
octobre...
M. Bellemare: Dans la mesure où ils n'ont rien dit
encore.
M. Johnson: C'est cela. Alors, si vous leur permettez...
M. Bellemare: C'est cela. Quand vous avez parlé pendant
une heure et demie, dans un monologue, on n'a rien pu savoir d'eux et vous
voulez régler le problème, vous voulez que les parlementaires
soient en position de savoir qui a raison ou tort. La commission a dit que
personne ne sortirait grandi du rapport.
M. Johnson: Alors, est-ce que le député de Johnson
veut une réponse ou est-ce qu'il veut continuer?
M. Bellemare: Je veux continuer. M. Johnson: Alors,
allez-y.
M. Bellemare: Je n'ai pas de leçon à recevoir de
vous, Fanfan.
M. Johnson: Allez-y.
M. Bellemare: Certain. M. le Président, il y a une chose
qui reste sûre, c'est que la commission parlementaire, ce matin, a
erré en donnant dans la stratégie du ministre qui voulait faire
entendre d'abord le conseil de médiation pour essayer de se couvrir.
C'est cela, tout le débat, M. le Président. C'est pour cela qu'on
se lève avec véhémence contre l'attitude que prend la
commission parlementaire de ne pas entendre les parties. On saurait,
aujourd'hui, à l'heure qu'il est, des parties, de quoi cela retourne. On
le saurait aujourd'hui parce que cela a été écrit par
elles on a voulu prendre le rapport de la médiation et se justifier en
lisant des pages et des pages. Mais qu'est-ce qu'on a su des parties? Qu'est-ce
qu'on va savoir demain matin? Comment?
M. Vaillancourt (Jonquière): Taisez-vous et on va le
savoir, on les attend.
M. Bellemare: On veut m'enlever mon droit de parole quand le
ministre en a abusé.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est vous qui ne voulez pas
les entendre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: Quand le ministre en a abusé en...
M. Vaillancourt (Jonquière): Petit politicien!
M. Bellemare: Cela vous fait mal de vous faire reprocher certains
actes que votre ministre n'a pas faits. Cela vous fait mal.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Continuez votre "show", tout
le monde est là et vous écoute.
M. Bellemare: Oui, je vais continuer, je ne fais que
commencer.
M. Vaillancourt (Jonquière): Donnez votre "show".
M. Bellemare: Vous allez voir, vous allez voir autre chose,
monsieur, pendant la session. C'est certain.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: Je vous en réserve de pas bonnes et de
belles.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! La pertinence du débat, s'il vous plaît!
M. Bellemare: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Johnson.
M. Bellemare: Je voudrais avoir de vous une directive. Quand
pourrons-nous entendre les parties?
Le Président (M. Cardinal): Quand la commission, comme je
l'ai suggéré à la suspension de 12 h 26, voudra bien en
venir à une proposition concernant l'ordre du jour de cette commission.
Ce matin, à l'ajournement, ce n'est pas une justification, on m'a
demandé le droit strict pour l'Opposition de répondre au discours
inaugural du ministre et des fonctionnaires en son nom, ce que j'ai permis.
C'est dans ce sens que je l'ai permis, pour donner l'égalité des
chances à tous les parlementaires à cette commission. J'ai
cependant suggéré, et je réitère mon invitation,
que l'on en vienne à une proposition concernant l'écoute
j'aurais pu dire l'audition, mais l'écoute des témoins
qui, depuis ce matin, sont à votre écoute.
M. Pagé: Voyons donc!
M. Johnson: M. le Président, si le député de
Johnson a terminé, vous me permettrez, avant que je ne suggère
à la commission de commencer à entendre les témoins...
M. Bellemare: Je me tais tout de suite, M. le
Président.
M. Johnson: D'accord.
M. Bellemare: Je suis tellement pressé d'entendre les deux
parties...
M. Johnson: Oui, mais est-ce que vous vous taisez?
M. Bellemare: ... Oui, mais cela, M. le Président, parce
qu'on exerce notre droit de parole comme parlementaire, on se fait accuser de
faire des "shows". Pensez-vous que c'est raisonnable pour un
député qui va aller prendre votre prési-
dence après? Vous pensez que c'est de l'égalité
dans la poursuite de notre débat?
M. Johnson: Ce n'est sûrement pas raisonnable de faire des
"shows".
M. Vaillancourt (Jonquière): Je n'irai pas.
M. Bellemare: Vous n'irez pas? Vous venez de vous...
Le Président (M. Cardinal): Je vous le demanderai, M. le
député de Johnson. M. le ministre.
M. Johnson: Bon! Alors, cinq minutes au maximum.
M. Bellemare: M. le Président, cinq minutes, c'est aussi
bien de vous dire qu'on ferme les portes. Quand il a pris une heure et quart
pour faire un monologue, cinq minutes, non M. le Président, cela n'a pas
de bon sens. On ne peut pas mettre une limite.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît!
M. Bellemare: II y a des choses trop graves à dire de part
et d'autre pour qu'on limite à cinq minutes. Ce n'est pas vrai. Ce n'est
pas parlementaire et je m'oppose à cela, M. le Président. Cela
n'a pas de bon sens. Le ministre est en train de commettre encore une turpitude
de vouloir empêcher la vérité de sortir. (16 h 30)
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît,
à l'ordre! M. le député de Johnson, à l'ordre, s'il
vous plaît! M. le député de Johnson, si j'ai bien compris
le ministre, il ne demande pas que la commission prenne cinq minutes, il
demande de prendre cinq minutes pour lui avant que nous ne procédions
à l'audition des témoins.
M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Johnson: M. le Président, j'ai bien dit que j'allais me
limiter à cinq minutes au maximum et après, je ferai la
suggestion que nous commencions à entendre les parties, j'ai
dressé une liste que je vais vous soumettre. Mais avant de
procéder à ça, je ne peux pas ne pas relever certaines
affirmations qui ont été faites par l'Opposition.
D'abord, à l'adresse du député de Saint-Laurent qui
semble avoir trouvé, dans sa grande sagesse, la solution simple au
conflit de Commonwealth Plywood je peux lui dire que ça me fera plaisir
de lui donner un mandat de médiation s'il pense qu'il a la solution. Il
nous a dit tout à l'heure que c'était très simple, il
s'agissait seulement de savoir si au mois de septembre la compagnie avait
congédié du monde pour activités syndicales ou pas et
deuxièmement, si c'était pour des raisons économiques;
troisièmement, on va attendre que la convention collective expire.
Parfois, je pense que le député de Saint-Laurent n'a pas
lu le dossier, il ne s'est pas rendu compte qu'il y a un problème
à la Commonwealth
Plywood. Deuxièmement, le député de Saint-Laurent
s'est outré, comme un ex-universitaire qu'il est, de l'intervention de
celui qui vous parle et de l'intervention du pouvoir législatif, donc
des hommes politiques, dans le conflit de Commonwealth Plywood. Je ferai
remarquer d'abord à l'Opposition que cette intervention se situe dans le
cadre d'une commission parlementaire et non pas dans des communiqués de
presse et dans l'émission de demi-vérités par la voie des
journaux ou par la voie de déclarations à la radio ou à la
télévision. Ce qu'on fait, c'est qu'on vient à la
commission parlementaire et on est prêt à entendre les parties et
au bout de deux heures et demie, j'ai bien hâte qu'on le fasse. D'autre
part celui qui vous parle n'entend pas abdiquer de sa responsabilité
comme membre d'un gouvernement, pour faire en sorte que quand l'ordre social
est en jeu, ce Parlement et cette Chambre soient saisis de la nature des
problèmes dont il s'agit, et que c'est une solution, à mon avis,
d'irresponsabilité et de lâcheté de la part du
député de Saint-Laurent de laisser entendre qu'il faudrait
simplement laisser tout ça à une interprétation juridique
qui viendra peut-être un jour...
M. Pagé: ... cette commission-là aujourd'hui,
ça va régler quoi?
M. Johnson: S'il vous plaît, s'il vous plaît! M.
Pagé: Voyons donc!
M. Johnson: Je ne vous ai pas interrompu, jeune homme? Je ne vous
ai pas interrompu, M. le député de Portneuf? Voilà.
M. Pagé: Soyez quand même poli.
M. Johnson: Le gouvernement n'entend pas abdiquer de sa
responsabilité et celui qui vous parle non plus. Je ne reviendrai pas
sur les étapes nombreuses qui ont amené le ministère et
celui qui vous parle à faire des efforts dans ce conflit pour essayer
d'obtenir un règlement, cela a été impossible et je pense
que cette Chambre a le droit d'en être saisi et a le droit, au grand
jour, au su et au vu de tout le monde, de faire en sorte qu'à nu, la
vérité sorte ici, dans la mesure où on a effectivement la
possibilité d'obtenir certains éclaircissements sur le conflit de
Commonwealth Plywood.
Ce n'est pas parce que les tribunaux sont saisis d'une cause que
ça veut dire que le pouvoir législatif va abdiquer de ses
responsabilités. En ce sens, je n'y vois pas une usurpation du pouvoir
exécutif, bien au contraire j'y vois la prise de responsabilité
par un gouvernement qui n'a pas peur d'étaler, sur la place publique,
quelle est la situation dans un conflit qui pourrit et qui est en train de
mettre en jeu dans toute une région, dans toute une ville, l'ordre
social, le climat, la sérénité et finalement la justice et
la dignité des personnes.
Quant aux remarques du député de Saint-Laurent
également et au procès d'intention qu'il
m'a fait sur la présence du commissaire général du
travail parmi nous, je lui ferai remarquer que je n'entends pas et que je n'ai
jamais téléguidé quelque intervention que ce soit du
commissaire général du travail. Si le député de
Saint-Laurent a des accusations à faire, je l'inviterais à les
faire de façon précise dans le salon bleu, à l'ouverture
de la session. Je suis prêt à mettre mon siège en jeu sur
des affirmations comme celles qu'il a faites n'importe quand. J'aimerais qu'il
mette son siège en jeu là-dessus. Si le commissaire
général du travail est ici aujourd'hui, c'est qu'on
présumait qu'il y aurait peut-être des questions posées par
l'Opposition sur la notion du dépôt de convention collective et,
d'autre part, sur la question des licenciements collectifs et des plaintes
dites de congédiement pour activités syndicales, c'est sa
juridiction et non pas celle de celui qui vous parle.
Finalement, quant au discours que j'ai un peu de difficulté
à saisir, du député de Johnson, je me rends compte
qu'essentiellement, il s'agit d'une série de répétitions,
d'affirmations vagues, de recours, à mon avis, qui démontrent une
absence de concentration sur nos travaux c'est le moins qu'on puisse en
dire et qu'il fait flèche de n'importe quel bois, pour ne pas
dire de tout bois.
En ce sens-là, je pense que la plupart de ses affirmations ne
méritent même pas d'être relevées.
M. le Président, je vous demanderais, s'il vous plaît,
d'appeler M. Gérard Gagné.
Le Président (M. Cardinal): Si la commission est
d'accord.
M. Pagé: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
fixer un ordre des travaux? Je conviens que la motion que j'ai faite ce
matin...
M. Johnson: Je pourrais peut-être faire une motion dans ce
sens-là.
M. Pagé: Oui.
M. Johnson: La motion serait pour entendre respectivement, dans
l'ordre suivant: M. Gérard Gagné, qui est président du
syndicat, local CSN, le président du syndicat qui a obtenu
l'accréditation le 3 octobre; M. Ghislain Hallé de la
Fédération nationale du bâtiment et du bois; M. Marcel
Pepin de la CSN, suivi de M. Ernest Lévesque, qui est président
du groupe de l'intérieur, élu par l'assemblée du 3, je
pense; Mlle Hélène Grignon, je pense, qui agit comme
secrétaire du groupe; M. Donat Thériault, de l'Union
internationale des rembourreurs unis d'Amérique; M. W.P. Caine,
président de la Commonwealth Plywood, et Me Pierre Fournier, avocat chez
Byers, Casgrain.
M. Bellemare: Je pense, M. le Président, qu'il y a une
discrimination visible que l'on veut exercer contre la Commonwealth Plywood. On
devrait entendre le syndicat d'abord, très bien, qui que ce soit, M.
Rodrigue, M. Hallé ou M. Gagné, mais on devrait donner une chance
à la compagnie de répondre immédiatement à
certaines allusions qui vont être faites, pour qu'on puisse entrer en
cause par une série de questions.
Mon intervention est bien frivole, M. le Président. Après
ce qu'il m'a dit, je m'en fous comme de l'an quarante. J'ai déjà
entendu cela bien des fois, au sujet de plusieurs autres.
Le Président (M. Cardinal): Laissez faire le surplus. M.
le député de Johnson, je vous pose une question précise.
Je n'ai pas encore de motion devant moi et je ne cours pas après une
motion, parce que je sais qu'il y aurait un débat sur la motion. Je vous
dis simplement que, si la commission désire entendre Commonwealth
Plywood au deuxième rang, vous savez qu'à ce moment-là,
elle serait entendue.
M. Bellemare: Mais elle a ses procureurs.
Le Président (M. Cardinal): Attention. Vous savez qu'une
fois qu'un témoin aura été entendu, il ne pourra plus
revenir. Vous êtes d'accord? Il faudrait que la commission...
M. Pagé: M. le Président, il n'y a rien qui
interdit cela s'est déjà fait dans le passé
lorsque la CSN, M. Gagné, M. Lévesque ou autres
comparaîtront, et qu'ils nous feront part de commentaires ou
d'informations quelconques, de poser des questions à la Commonwealth
Plywood. C'est le sens de la requête du député de
Johnson.
Le Président (M. Cardinal): C'est autre chose. Pour ce qui
est de poser des questions, je suis entièrement d'accord. Dans ce
sens-là, je n'ai aucun...
M. Pagé: Tout le monde est d'accord. Vous l'acceptez?
Le Président (M. Cardinal): Je l'accepte, sauf que je
demande si l'ordre prévu par le ministre est accepté.
M. Forget: M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Une question sur la procédure. Il est coutumier
que, lorsqu'on invite un organisme, on s'adresse à un
représentant de l'organisme en question qui expose le point de vue
officiel, soit par la présentation d'un mémoire ou en
répondant à des questions.
Le ministre, ici, adopte une attitude nouvelle où il fait
comparaître, pour la même partie, le même groupe, plusieurs
personnes et ce, à titre séparé. Chacun apparaît
comme une rubrique distincte dans l'ordre de nos travaux.
Est-ce qu'on doit comprendre qu'il veut aller au-delà de
l'expression officielle des points de vue des parties, pour essayer de faire
une enquête, les mettre en contradiction les uns avec les autres? Je ne
vois pas le sens de faire entendre quatre
personnes de la CSN, trois ou quatre personnes de l'Union des
rembourreurs d'Amérique et même deux personnes du
côté de l'employeur, si on distingue M. Caine du bureau d'avocats
qu'il représente. Je trouve que c'est là une procédure qui
n'est pas usuelle et je me demande le sens qu'il faut lui attacher.
Le Président (M. Cardinal): Vous me posez une question qui
est d'opinion. Vous savez bien que je n'y répondrai jamais. Vous
connaissez suffisamment le règlement, M. le député de
Saint-Laurent, de même que nos procédés.
Je ne reviens pas sur le passé de cette commission. Je
désire, comme président, être en dehors de ces questions
d'opinion, de choix. Je vous ai simplement mentionné ce matin qui avait
été invité. Je demande à la commission, une autre
fois, comment elle veut procéder et j'oserais penser qu'à nouveau
nous ne tomberons pas dans la procédure.
Je suis d'accord avec le député de Portneuf qu'on peut
toujours poser des questions à toutes les personnes qui sont ici et qui
pourront se présenter devant vous, mais je ne puis pas...
M. Pagé: Au moment de leur comparution.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, mais je ne puis pas
dire pourquoi il y a trois personnes de tel groupe, deux de tel groupe, une de
tel groupe.
M. Johnson: La question m'était adressée.
M. Forget: Est-ce que cela va à l'encontre du
règlement que le ministre réponde à ces questions?
Le Président (M. Cardinal): Je n'y ai aucune objection
s'il le désire.
M. Pagé: Que le ministre nous le dise.
M. Johnson: Je pense que la question du député de
Saint-Laurent m'était adressée. Il y a effectivement trois
personnes de la CSN dans la mesure où M. Gagné était
président du groupe de l'intérieur, M. Hallé, de la FNBB
et M. Pepin, de la centrale. Ces personnes, de même que dans le cas de M.
Lévesque, de Mlle Grignon et de M. Thériault pour le groupe dit
de l'intérieur, je demande qu'elles soient convoquées à
titre individuel, à cause de leur participation très
précise aux événements qui ont été
relatés lors du résumé fait du rapport de
médiation.
M. Forget: C'est donc une enquête, dans l'esprit d'une
enquête sur les faits.
M. Johnson: Ce sont des éclaircissements. Oui, je pense
qu'il y a quelques questions très précises sur lesquelles on
pourrait obtenir des réponses. Quant à M. Caine,
évidemment, il est appelé à titre de représentant
de la compagnie, de président de la compagnie Commonwealth
Plywood. Me Fournier, pour sa part, comme on a pu le voir dans le
rapport de médiation, a participé à titre de procureur, je
présume, à la séance de négociation ou aux
séances de négociation, en tout cas, à la séance de
la signature de la convention collective. J'aurais quelques questions
précises à lui poser sur ce qui s'est passé à ce
moment-là, en étant bien conscient que ce qui relève du
secret professionnel sera respecté. Il s'agit de questions de faits et
non pas de confidences de clients à avocat.
Je suggérerais, si le député de Saint-Laurent et le
député de Portneuf étaient d'accord, qu'on entende un
premier témoin pour voir comment cela se déroule. Je pense que ce
serait tellement plus simple.
M. Forget: Je n'ai pas d'objection.
M. Bellemare: M. le Président, on dit que les lignes ont
été tracées. On va avoir l'air drôlement...
Le Président (M. Cardinal): Attention! Comme vous le
savez, nous avons connu d'autres commissions parlementaires. Nous n'avons pas
pour une seule journée établie que telle personne parlera pendant
tant de minutes, etc. Nous ne l'avons pas fait, c'est à la commission de
le faire et non pas au président. Si la commission est d'accord pour que
nous commencions par un invité et que, selon le déroulement de ce
qui se produira, nous révisions nos positions, c'est sûr que je
serai votre serviteur. Est-ce que j'invite M. Gérard Gagné?
Oui.
M. Rodrigue (Norbert): J'aurais une précision à
faire. À titre de président de la CSN, je voudrais dire que la
proposition ou le consensus auquel en arrive la commission, nous allons quant
à nous le suivre, mais s'il y avait des privilèges
d'accordés en cours de route à qui que ce soit ou à
quelque autre partie que ce soit, nous entendons nous en prévaloir.
Une voix: Vous pourrez intervenir.
Le Président (M. Cardinal): Vous pourrez intervenir dans
le cadre de nos façons de procéder. Je m'excuse. M. Gérard
Gagné, s'il vous plaît!
M. Gagné (Gérard): Oui. Premièrement...
Le Président (M. Cardinal): Si vous voulez... S'il vous
plaît! Nous connaissons déjà votre nom, vos titres...
Une voix: Vous identifier.
Le Président (M. Cardinal): C'est pour les fins du journal
des Débats.
Confédération des syndicats
nationaux
M. Gagné: Gérard Gagné, président de
la CSN à la Commonwealth Plywood.
Premièrement, M. le Président, j'aurais deux questions
à répondre. M. le député les a posées tout
à l'heure. Il disait que c'était la centrale... Lorsque nous
avons fait une assemblée, il n'était pas là. Ce sont les
travailleurs qui ont décidé, démocratiquement, de la
façon où cela allait se dérouler, c'est-à-dire que,
lorsqu'ils ont décidé d'aller voir M. Caine, un matin, nous y
sommes allés avec deux représentants de la CSN. Là-dessus,
on avait demandé à M. Caine... La CSN lui avait même
offert, pour cette chose économique, comme il le disait, des gars
spécialisés là-dedans. On lui avait aussi parlé de
l'ancienneté. On lui avait même dit que, vu les 105 mises à
pied, il était censé y avoir une loi qui demandait, je pense,
trois mois d'avis. On lui avait demandé de reprendre les 105
employés et dit que, s'il voulait faire des mises à pied, il
devait les faire dans les trois mois. Donc, sa réponse a
été non. (16 h 45)
Pour une autre question, si c'était pour se débarrasser du
syndicat, de notre côté, c'était clair et net que M. Caine
voulait se débarrasser du syndicat, parce que M. Caine, jusqu'au 30
août, a engagé du nouveau personnel, une trentaine, et au 5
septembre, il y a 105 mises à pied. Parmi les 105 employés mis
à pied, il y en a trois qui n'ont pas la carte de la CSN. Donc, j'ai
répondu aux deux premières questions de M. le
député.
De notre côté, lorsqu'on a fait une assemblée,
c'était uniquement parce qu'il était censé y avoir des
droits, et c'est un droit fondamental, d'après nous, de choisir notre
union, de ne pas nous la faire imposer par M. Caine et aussi d'avoir le droit
de négocier. Si nous sommes tombés en grève avant d'avoir
notre accréditation, c'est parce que nous avons jugé, nous, les
travailleurs, pas Norbert Rodrigue, nous avons pensé que c'était
M. Caine qui partait illégalement, vu qu'il allait contre une loi qui
supposément existe.
Pour l'ancienneté, je crois que, dans la convention collective
qu'il y avait avant avec M. Thériault, M. Caine était capable de
l'organiser comme il le voulait, parce que, lorsqu'il y avait des mises
à pied, on n'avait pas le droit au grief. Il y a une chose curieuse,
c'est qu'avant le 5 septembre 1977 il n'y a pas eu de mise à pied
massive, et, d'un coup sec, floc! C'est par cela qu'il nous est apparu qu'il
voulait écraser le syndicat.
Pourquoi a-t-on changé de syndicat? Je vais vous expliquer cela
en quelques mots. Premièrement, parce que, dans la convention collective
qu'on avait de M. Thériault, les rembourreurs, local 388, il n'y avait
absolument rien de bon pour nous, c'est-à-dire que c'était un
petit livre de comiques. Premièrement, la sécurité. Vous
devez être au courant comment on procédait avec les accidents de
travail, parce que vous devez certainement avoir entendu parler des accidents
de travail, car il y en a eu. Quand un gars se coupe deux doigts et que le
"foreman" va lui dire que ce n'est pas grave, qu'il lui en reste huit, c'est
grave.
Un autre gars, qui se prend un pied dans une courroie et il demande au
mécanicien combien de temps ça lui prendra pour démonter
la machine, ça lui prend une heure, il dit: Démonte la machine,
et le gars a coupé la courroie pour le déprendre, et il a eu des
bêtises.
Du côté de l'ancienneté, c'était encore la
même patente, parce que s'il le voulait, M. Caine mettait dehors une
personne de 22 ans. Et moi, il m'engageait le midi et le lendemain je prenais
la place de ce gars-là. C'était comme ça. C'est
écrit dans la convention collective.
Il y avait aussi, côté des fêtes payées, si on
arrivait plus tard que trois minutes, la veille ou le lendemain de la
fête, ta fête n'était pas payée. Lors d'un
décès, lorsque tes parents proches mouraient, il fallait que tu
avertisses 24 heures avant qu'ils meurent ça, c'est dans la
convention collective mais une chose que je ne comprends pas, c'est que
ça nous a pris beaucoup de temps à se réveiller.
Je tiens à vous dire un peu pourquoi on s'est
réveillé, c'est parce qu'en juillet, on avait changé tout
l'exécutif, et je crois que c'était la première fois qu'on
changeait l'exécutif de Thériault; depuis que M. Thériault
était là avec son union, c'est alors qu'on s'est aperçu
qu'il se passait des petites patentes. C'est pour ça qu'on a
décidé, le 13 août... C'est nous qui avons
décidé d'aller à la CSN, ce n'est pas la CSN qui est venue
à nous. Pourquoi? Parce qu'il y avait une autre "shop", proche de la
nôtre, qui avait M. Thériault à l'intérieur et la
CSN venait de rentrer là, et on sait quel ouvrage la CSN a fait dans
cette "shop".
Aucune "shop" de meubles avait une convention collective comme la CSN.
Tout ça ensemble, ça nous a fait réfléchir, et
c'est alors qu'on a décidé de changer de syndicat. Mais on s'est
aperçu, en cours de route je parle d'un petit peu plus loin
que le rapport de médiation rapporte que M. Thériault a
dit qu'il y avait une ligne de piquetage, les 15 et 16; et moi, je vais vous
dire, ici, que les 15 et 16, vous n'avez qu'à aller voir M. Caine et
regarder notre carte de "punch", on était au travail.
Le 19, on a tenu une assemblée générale et tout le
monde était invité. Dans cette assemblée, on avait
parlé de bien des choses, premièrement, d'aller le rencontrer et
d'essayer de s'organiser pour qu'il reprenne les 105 mis à pied, en
attendant que les trois mois s'écoulent; après, il aurait pu
faire des mises à pied par l'ancienneté, mais vu que le patron,
M. Caine, n'a rien voulu savoir, c'est alors qu'on a décidé de
faire une grève.
On le savait mauditement bien, qu'on n'avait pas notre
accréditation, mais on savait aussi que c'était le seul moyen de
se battre, parce que nous autres, notre seul moyen, c'était nous. Quand
je dis nous, nous, les travailleurs. On sait aussi, vous le savez, vous en avez
parlé dans le rapport de médiation, que le 3 octobre, on a eu
notre accréditation, mais, encore là, comment cela se fait-il que
M. Thériault n'accorde aucune importance au fait que la CSN entre
là? Comment cela se fait-il que, le 3 octobre, c'est-à-dire la
journée qu'on a eu notre accréditation, il fait des
assemblées et qu'il fait signer des cartes au nom de la CSN?
Comment cela se fait-il que ces gens ont le droit et nous, qui avons
notre accréditation, on se fait passer pour des bandits? Comment cela se
fait-il que les autres ont le droit de tout faire et que nous n'avons
même pas le droit de faire du piquetage en avant de la Commonwealth
Plywood? J'espère, M. le Président, que vous allez
m'éclairer aujourd'hui là-dessus.
On sait qu'on a eu des injonctions, qu'on a eu des outrages au tribunal.
On sait aussi qu'on a eu, avant les injonctions, la police locale parce que
là, la première journée, les "scabs" pour moi, ce
sont des "scabs" sont entrés dans la "shop" de M. Caine. Ils
avaient laissé leur auto au poste de police et les camions loués
par M. Caine, avec l'aide de la police, leur faisaient franchir la ligne de
piquetage.
Maintenant, je suis prêt à répondre aux questions
qui seront posées.
Le Président (M. Cardinal): On vous remercie, monsieur. M.
le ministre d'abord et vous suivrez l'ordre des partis.
M. Johnson: M. Gagné, vous avez évoqué, tout
à l'heure, que vous considériez, comme travailleur de la
Commonwealth Plywood, que les conditions que vous aviez dans la convention
collective qui précédait le maraudage par la CSN auquel vous avez
participé on sait que vous avez été un des
animateurs, dans la mesure où vous avez été
président du syndicat vous avez évoqué le fait que
vous aviez des conditions, comme, par exemple, absence du droit de grief, etc.
J'ai également lu les textes. Je peux également avoir une opinion
sur la valeur de cette convention collective en termes de conditions. Je ne
peux cependant pas porter de jugement quant aux circonstances dans lesquelles
cela a été fait dans le passé, mais je voudrais qu'on se
comprenne bien, ce n'est pas là-dessus que je m'adresse à
vous.
Ce qu'on essaie de savoir à cette commission, c'est ceci: Quels
sont les événements qui se sont passés et dont vous avez
été un des acteurs, à un certain moment, qui nous ont
amenés dans la situation qu'on connaît aujourd'hui? C'est pourquoi
j'aurais besoin de connaître certaines choses, comme, par exemple, le
nombre de membres que vous aviez au 30 août 1977.
Quel est le nombre de membres que vous aviez à peu près
à la fin du mois d'août 1977?
M. Gagné: Aux alentours de 140 à 145.
M. Johnson: Très bien. Au moment où on se parle,
vous en avez combien?
M. Gagné: Au moment où on se parle, le 19, le 20,
il y en a qui sont entrés. Il y en a qui sont venus signer leur carte
CSN.
M. Johnson: Combien? (17 heures)
M. Gagné: Je crois qu'on a atteint 185 ou quelque chose
comme cela.
M. Johnson: Combien de membres à peu près en ce
moment?
M. Gagné: On a atteint 185 à peu près,
à un moment donné.
M. Johnson: Mais je vous dis: Au moment où on se parle,
vous avez plus de membres qu'au mois d'août 1977? Au moment où on
se parle. Je vous parle de septembre 1978. Vous avez combien de membres de la
CSN à la Commonwealth Plywood?
M. Gagné: Là, on reste 100.
M. Johnson: Combien sont à l'emploi de la compagnie en ce
moment, en ce sens, pour éviter les chinoiseries sur le plan de
l'interprétation du mot emploi, il y en a combien qui travaillent dans
la compagnie, sur les 100 que vous avez comme membres, qui sont dans votre
fichier?
M. Gagné: Pour vous le dire précisément, je
ne peux pas les compter, parce qu'ils entrent, on ne peut pas aller dans la
"shop" pour les compter, mais d'après moi, en dedans, ils doivent
être environ 65 jusqu'à maintenant.
M. Johnson: Et d'après vous est-ce que ce sont des membres
de la CSN, qui est le syndicat dont vous êtes le président?
M. Gagné: II y en a.
M. Johnson: Pas tous.
M. Gagné: Pas tous, mais il y en a.
M. Johnson: Combien à peu près? M. Gagné:
Une trentaine à peu près.
M. Johnson: Alors, ce que vous me dites c'est qu'au moment
où on se parle vous avez 70 membres à peu près de la CSN
qui ne sont pas dans l'usine. Est-ce que c'est exact de dire cela, M.
Gagné?
M. Gagné: On en a plus que 70. Les 100 que je comptais, ce
n'était pas exactement avec ceux qui étaient en dedans.
M. Johnson: D'accord. C'est cela. À l'origine, vous en
aviez 130 à 140 en 1977 et là vous me dites une centaine. Vous
m'avez dit que parmi ceux qui sont en dedans, il y en a peut-être une
trentaine qui sont membres de la CSN. C'est pour cela que je vous demandais,
à toutes fins utiles, ce qui vous reste, c'est 70 membres et vous
n'êtes pas sûr.
M. Gagné: Ce qui nous reste à l'heure actuelle
c'est, avec le fonds de la CSN... Il y en a encore 85 sur le fonds de la CSN,
qui sont en grève.
M. Johnson: Qui sont des gens qui ont déjà
été des employés de la Commonwealth Plywood avant les
licenciements.
M. Gagné: Oui.
M. Johnson: D'accord.
M. Gagné: Oui, ils sont en grève.
M. Johnson: Le 15 septembre, est-ce que vous avez un souvenir du
15 septembre, qui est la date à laquelle M. Thériault
allègue qu'il y a eu du piquetage? Vous, vous venez nous dire que non.
Finalement on est pris entre vos deux paroles. Le 15 septembre, est-ce qu'il y
a eu des événements à la Commonwealth Plywood, un incendie
ou du sabotage allégués, des cassures de vitres, quelque chose
comme cela? Est-ce qu'il y a eu cela le 15 septembre?
M. Gagné: Le 15 septembre, c'était une
journée normale, comme le 7, le 9. Le monde travaillait.
M. Johnson: D'accord.
M. Gagné: II n'y avait pas eu de casse parce que
c'était une journée normale, comme d'habitude, comme toutes les
autres journées. Le monde travaillait.
M. Johnson: Entre le 15 et le 19, le 16, le 17 ou le 18, avant le
19, avant l'assemblée générale que vous avez tenue, est-ce
qu'il s'est passé quelque chose de spécial à la
Commonwealth Plywood? Est-ce qu'il y a du monde qui est sorti? Est-ce qu'il y a
du monde qui a occupé l'usine? Est-ce qu'il y a du monde qui a
cassé des vitres?
M. Gagné: Pas à ma connaissance.
M. Johnson: Pas à votre connaissance. Donc, pour vous, les
activités du "conflit" ont commencé à partir du 19.
C'était la situation normale à la Commonwealth Plywood avant le
19 septembre, je veux dire normale au sens où le monde travaillait, il y
avait un gros problème quant à qui négocierait et il y
avait un problème quant au licenciement qui s'en venait, mais le monde
travaillait. Cela marchait comme d'habitude dans l'usine.
M. Gagné: Cela marchait comme d'habitude, excepté
qu'il y avait des bonnes soeurs d'engagées depuis le 9 septembre. Il y a
seulement une chose qu'on avait remarquée dans la semaine du 16. Un
matin on est arrivé et les toilettes étaient
peinturées.
M. Johnson: Le 19, avant de sortir en grève, alors que
vous n'aviez pas encore de certificat d'accréditation, vous êtes
conscient de ça, M. Gagné, le 19, vous avez
déclenché une grève alors que vous n'étiez pas un
syndicat au sens du Code du travail? Vous êtes devenu un syndicat au sens
du Code du travail, c'est-à-dire une association
accréditée, seulement le 3 octobre. Le 19, vous avez fait
grève, vous avez fait ça avant ou après la convocation de
l'assemblée générale?
M. Gagné: Après. On est allé en
assemblée générale, ça s'est décidé
là, le droit de grève, avec un vote de 95%.
M. Johnson: Donc, jusqu'à l'assemblée
générale, ce que vous m'affirmez, c'est que, jusqu'à
l'assemblée générale du 19, c'étaient des
activités normales qui se déroulaient dans la compagnie et il n'y
avait pas de piquetage, il n'y avait pas de grève sur le tas, il n'y
avait pas de ralentissement de travail, il n'y avait pas de manifestation
devant l'usine, il n'y avait pas de "casseux".
M. Gagné: II y a eu un ralentissement de travail en
dedans, le 16, mais ça travaillait.
M. Johnson: II y a eu un ralentissement en dedans le 16.
M. Gagné: II y en avait 118 qui étaient mis
à pied, ils travaillaient moins vite que s'ils n'avaient pas
été mis à pied.
M. Johnson: Ouais, ça, j'ai compris ça, M.
Gagné, au début. Je parle des gens qui étaient parmi les
105 non mis à pied, est-ce qu'ils travaillaient normalement ou est-ce
qu'ils se sont adonnés à des activités de ralentissement
volontaire de travail sur place?
M. Gagné: C'est-à-dire qu'on suivait les
autres.
M. Johnson: Les autres étaient partis, vous n'avez donc
pas travaillé fort ce jour-là. C'est ça?
M. Gagné: Ils n'étaient pas partis, ils
étaient dans la "shop".
M. Johnson: D'accord. Est-ce que vous avez participé
à une négociation vous-même, le 19 septembre, avec le
président de la Commonwealth, M. Caine?
M. Gagné: Oui, je suis allé avec eux autres.
M. Johnson: Oui. De quoi s'est-il agi à ce
moment-là, de quoi avez-vous parlé?
M. Gagné: Je l'ai mentionné tout à l'heure,
on avait demandé si les 105 personnes avaient été mises
à pied pour des raisons économiques. La CSN était
prête à fournir deux "spare", pour essayer d'arranger ça.
En même temps, on avait parlé de reprendre les employés,
parce que pour nous, selon la loi, comme je le disais tout à l'heure, on
a parlé de ça, les mises à pied devaient se faire en
tenant compte de l'ancienneté.
M. Johnson: D'accord. Je vais vous poser une dernière
question, M. Gagné, qui est une question strictement d'opinion. Pourquoi
pensez-vous que les gars en dedans, à un moment donné, se sont
réunis autour de Donat Thériault, parce qu'il y avait parmi ces
gens ceux qui avaient signé des cartes de la CSN, le syndicat dont vous
êtes le président, pourquoi pensez-vous qu'à un moment
donné, il y a des gars dans la place qui ont décidé de
faire ça? Quelle est votre opinion là-dessus?
M. Gagné: Vous voulez dire qui ont fait entrer les
"scabs"?
M. Johnson: Vous n'avez pas encore le certificat
d'accréditation, il n'y a pas de grève, vous venez de me dire
qu'il n'y a rien qui se passe.
M. Gagné: Jusqu'au 19.
M. Johnson: Oui, à partir du 19, est-ce que ce à
quoi on assiste, ce n'est pas un syndicat qui, indépendamment du
bien-fondé des réclamations qu'il peut y avoir au niveau du fond
de la convention collective, de la question des licenciements collectifs,
est-ce que ce n'est pas une organisation syndicale en devenir qui va avoir son
certificat dans quelques jours et qui est incapable de sortir tout le monde de
la place? Pourquoi est-ce que tout le monde n'est pas sorti? Quelle est votre
opinion à vous là-dessus? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui les a
forcés à rentrer?
M. Gagné: Non. Lorsqu'on a décidé de faire
une assemblée dans la matinée, on avait laissé le choix au
monde, ceux qui voulaient venir et ceux qui ne voulaient pas venir. Donc, ceux
qui sont venus à l'assemblée ont travaillé le 19 et le 20.
Du 20 jusqu'à la journée où ils sont entrés, le 4
octobre, il n'y avait pas eu en dedans de "scabs".
M. Johnson: Vous me dites que la ligne de piquetage a
commencé le 19. Vous m'avez affirmé ici, il y a quelques minutes,
que cela avait eu lieu après l'assemblée générale.
Il n'y a pas eu de ligne de piquetage avant l'assemblée.
M. Gagné: Pas à ma connaissance. M. Johnson:
Mais étiez-vous là? M. Gagné: J'étais
là, mais...
M. Johnson: Vous êtes rentré et vous êtes
sorti de l'usine. Est-ce qu'il y avait des piqueteurs?
M. Gagné: Non.
M. Johnson: II n'y en avait pas, le 19.
M. Gagné: Je suis entré dans l'usine, le 19 au
matin. Quand j'ai vu qu'il n'y avait pas beaucoup de monde, je n'ai pas
poinçonné ma carte, je me suis tourné de bord et je suis
allé à l'assemblée. À ce moment-là, je
n'étais pas président.
M. Johnson: Et c'est à ce moment-là que vous avez
été élu président, ou plus tard?
M. Gagné: Quinze jours ou trois semaines plus tard. Je
n'ai pas marqué les dates. Cela fait un an de cela.
M. Johnson: Je reviens à la question que je vous posais.
Vous étiez un syndicat qui allait obtenir son certificat
d'accréditation et c'était manifeste, compte tenu du fait que
vous déteniez la majorité des cartes. C'était clair.
Est-ce que cela vous faisait peur de ne pas avoir votre syndicat? Aviez-vous
peur de ne pas avoir votre accréditation à ce
moment-là?
M. Gagné: Je n'ai même pas pensé à
cela.
M. Johnson: C'était pas mal clair pour vous que vous
l'auriez?
M. Gagné: Oui.
M. Johnson: Oui. Avec 140 sur 235, il y a des chances, à
priori. Qu'est-ce qui vous a incité, le 19, à ne pas attendre
d'avoir votre certificat d'accréditation et respecter les délais
du code, avant de déclencher la grève, et vous exposer
automatiquement, comme vous le savez sans doute, à la prise possible
d'une injonction pour grève illégale? Qu'est-ce qui vous a
incité à faire cela, plutôt qu'attendre dix jours?
M. Gagné: Ce qui m'a incité à faire cela,
c'est que les 105 mises à pied, c'étaient mes copains. Pourquoi
étaient-ils mis à pied et moi non?
M. Johnson: Pensiez-vous être capable de régler le
problème en faisant cela?
M. Gagné: Mon idée personnelle était de les
appuyer, pour qu'ils reviennent au travail, et en même temps, se
défendre, pour avoir une convention collective, comme ailleurs. Je vais
être obligé de revenir là-dessus, M. Caine venait de nous
en passer une, en passant par-dessus la loi. C'est une autre raison de plus
pour que j'appuie les 105 employés qui avaient été mis
à pied.
M. Johnson: Donc, à ce moment-là, vous avez choisi,
le 19, en assemblée générale, même si vous n'aviez
pas votre certificat, de sortir, par solidarité envers les 105 qui
avaient reçu l'avis qu'ils seraient mis à pied, vous exposant,
à ce moment-là, vous deviez le savoir... Est-ce que vous le
saviez, à ce moment-là, M. Gagné? Ou est-ce que les gens
du syndicat le savaient? Est-ce qu'il y avait des gens de la centrale, à
l'assemblée générale? Est-ce qu'il y avait des gens de la
CSN, de la centrale, qui étaient à cette assemblée, le
19?
M. Gagné: De la centrale de Montréal, non.
M. Johnson: Est-ce qu'il y en avait, du conseil des Laurentides,
ou des gens de Montréal?
M. Gagné: Du conseil des Laurentides, il y en avait.
M. Johnson: Est-ce qu'ils vous ont dit, à ce
moment-là, que ce que vous faisiez, c'était une grève
illégale? Est-ce qu'ils vous ont avisé de cela?
M. Gagné: Oui. Mais pour nous autres, les travailleurs, ce
n'était pas nous autres qui partaient illégalement.
M. Johnson: C'était l'employeur, parce qu'il n'avait pas
respecté la loi.
M. Gagné: C'était l'employeur, parce qu'il n'avait
pas respecté la loi.
M. Johnson: D'accord. C'est tout ce que j'avais comme questions,
M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, M. Gagné, quelques
brèves questions. Une première, c'est que dans votre
exposé initial, vous avez fait état qu'en août il y aurait
eu une trentaine d'employés de plus qui auraient été
engagés.
Ma première question serait la suivante: D'une part, vous
travaillez à l'usine depuis combien de temps? Et est-ce qu'il y avait
des fluctuations de personnel qui étaient régulières comme
cela? Est-ce que c'était cyclique? Est-ce que, à cette
période de l'année, il y avait des engagements ou des
congédiements, ordinairement, selon les saisons ou selon les besoins de
la production? Comment expliquez-vous que ces personnes aient été
engagées pendant le mois d'août? Combien étaient-elles?
Est-ce que vous avez pu le vérifier?
M. Gagné: Lorsque j'étais employé de cette
compagnie, pour sortir de la compagnie, il fallait s'en aller de
nous-mêmes. À ma connaissance, il n'y a jamais eu de mise à
pied aussi massive. (17 h 15)
M. Pagé: À votre connaissance, mais concernant le
nombre d'employés additionnels qui ont été engagés
ou qui auraient été engagés, selon ce que vous nous avez
affirmé tantôt, il y a une trentaine d'employés de plus qui
ont été engagés au mois d'août? Etait-ce pour les
besoins de la production ou quoi? Avez-vous eu l'occasion de vous
enquérir de cela?
M. Gagné: Sur ceux-là, il y en a plusieurs qui ont
travaillé avec moi, parce que je faisais plusieurs "jobs". J'ai eu
l'occasion de travailler avec plusieurs, mais pour dire que c'était un
besoin, la compagnie les avait probablement employés parce qu'elle en
avait besoin, mais, à ce moment-là, lorsqu'elle les a
employés, on ne s'est pas posé la question, parce qu'on n'avait
pas été avisé qu'il y avait des mises à pied. On en
a été avisé seulement après. C'est après
qu'on s'est posé une réelle question. Pourquoi en engager trente
et en congédier cinq après?
M. Pagé: Les trente derniers entrés devaient
être les trente premiers sortis.
M. Gagné: Oui.
M. Johnson: C'est cela qui est arrivé.
M. Gagné: Ils sont sortis, oui.
M. Bellemare: ...
M. Gagné: Ah! tous, je ne le sais pas.
M. Bellemare: Les avez-vous vus de près?
M. Gagné: Je travaillais dans le service où on
finissait le bois, la colleuse, où on mettait la petite chose sur le
"press wood", je ne faisais pas tous les services. Je sais que lorsqu'ils ont
donné des lettres, ceux qui étaient avec moi ont
été congédiés, mais s'ils ont tous
été congédiés...
M. Pagé: Si je comprends bien, les trente employés
qui ont été engagés au mois d'août ont
été les premiers à être congédiés
à l'intérieur du groupe des 105?
M. Gagné: Ils ont été avisés en
même temps que les 105.
M. Pagé: D'accord, ils faisaient partie du groupe des
105.
M. Gagné: Oui.
M. Pagé: D'accord. Vous savez que, comme vous avez
assisté au débat depuis ce matin, pour nous de l'Opposition
officielle, un des éléments importants du problème, c'est
de savoir si les 105 personnes qui ont été mises à pied
ont eu un congédiement pour activités syndicales ou si c'est un
congédiement qui a été justifié par la
rentabilité ou les opérations de l'entreprise.
D'ailleurs, à ce titre-là, dans votre déclaration,
vous avez dit: M. Caine voulait se débarrasser du syndicat, pour nous,
c'était clair et net. Il y a donc eu des requêtes, des poursuites
qui ont été intentées, des représentations qui ont
été faites dans le cadre des mécanismes de la loi, du Code
du travail afin de déterminer auprès du commissaire si ces
congédiements étaient pour activités syndicales ou
autres.
Il semble que la décision sur ces congédiements est
retardée. On aura probablement l'occasion d'ici la fin de la
séance ou encore à une prochaine séance d'entendre le
commissaire sur cette question. Est-ce que, parce qu'à un moment
donné, ce matin, lorsqu'on a entendu les membres du conseil de
médiation, le ministre a fait état d'un moratoire pour cesser les
procédures et particulièrement ces procédures,
c'est le sens de ma première question votre syndicat a fait
des
démarches particulières qui visaient à
accélérer l'audition et les décisions pour ce qui concerne
les congédiements comme tels, à savoir si c'était pour
activités syndicales ou encore si c'était des
congédiements justifiés?
M. Gagné: Lorsque les procédures ont
commencé, premièrement, encore selon moi, le juge a
commencé à l'envers au lieu de commencer à l'endroit.
M. Pagé: Oui.
M. Gagné: Au lieu de procéder sur le fond tout de
suite, il a adopté une procédure pour qu'on plaide tous les
outrages avant d'embarquer sur le fond des injonctions.
M. Pagé: Je ne vous parle pas des injonctions, je vous
demande s'il y a eu des démarches ou si vous avez sensibilisé
votre syndicat, la CSN, à des démarches visant à
accélérer l'audition de ces causes-là, parce que, pour
nous, le noeud du problème est là.
M. Gagné: Nous autres, nous avons envoyé des
plaintes de congédiement au gouvernement. Ils ont plaidé trois
jours là-dessus. Cela a été remis au mois d'octobre.
M. Pagé:... cela a été remis? Est-ce que
vous vous rappelez?
Pour vous dire au juste si on a fait des pressions pour aller plus vite
sur ce point... On n'était pas tellement organisé pour en faire
parce que notre conflit était un conflit en cours. On était trop
occupé par les outrages, parce qu'à un moment donné,
durant six semaines, on est allé cinq jours par semaine en cour.
Après cela, il y en a eu d'autres. Si cela a été remis
à l'enquêteur, notre confrère peut en dire plus long que
moi, c'est parce que, vu la situation des cours, je ne sais pas si on aurait pu
procéder autrement pour cela, avec le commissaire.
M. Pagé: De toute façon, j'aurai l'occasion de
revenir avec les gens de la CSN, parce que, pour moi, il m'apparaît que,
si c'était clair et net, on aurait dû mettre l'accent pour
accélérer l'audition de ces causes. Sur le nombre de membres,
j'aurais besoin d'éclaircissements additionnels; combien avez-vous de
membres exactement au moment où on se parle? Je reprends la question du
ministre, parce que vous avez cité plusieurs chiffres, et tout cela.
Combien avez-vous de membres qui sont parmi le groupe de ceux qui ont
été congédiés? Combien en avez-vous parmi le groupe
qui travaille à l'intérieur de l'entreprise? Est-ce que, depuis
le 3 octobre, il y a eu des expulsions dans votre syndicat? Est-ce qu'il y a
des membres qui ont été expulsés?
M. Gagné: Naturellement, à un moment donné,
il y a des membres qui sont allés travailler en dehors pour gagner leur
pain, parce que, quand tu as des enfants et que tu as un loyer à payer,
il faut que tu t'organises pour le payer. Donc, il y en a environ une vingtaine
qui sont allés travailler en dehors, mais ils sont prêts à
revenir lorsque ce sera réglé. Comme je l'ai dit tout à
l'heure, il y en a environ trente qui sont actuellement dans la "shop". Il y en
a 85 qui sont en grève, des grévistes.
M. Pagé: II y en a qui sont partis travailler ailleurs,
d'accord. Est-ce qu'il y en a qui ont été expulsés, soit
parce qu'ils travaillaient à l'intérieur ou encore parce qu'ils
auraient signé deux cartes ou des choses comme cela?
M. Gagné: Signer deux cartes, chez les grévistes
qui ont été mis à pied à l'heure actuelle, je pense
qu'il n'y en a pas eu beaucoup. À ma connaissance, encore une fois, on
n'a expulsé personne.
M. Pagé: Vous avez 85 membres qui sont à
l'extérieur, en grève, en excluant ceux qui sont allés
travailler ailleurs pour gagner leur pain, c'est ça?
Une dernière question, qui est peut-être un peu
générale, mais qui va dans le sens de ce que vous nous avez dit
au début, à savoir...
M. Gagné: Une minute! Ce n'est pas trop clair, là.
Quand j'ai dit qu'il restait 85 grévistes, à part ceux qui sont
allés en dehors.
M. Pagé: C'est ça. À part ceux qui sont
allés travailler à l'extérieur, à d'autres endroits
pour gagner leur pain.
M. Gagné: Oui, ceux-là sont plus que 85.
M. Pagé: D'accord, ça fait 105. Parfait! Parce que
si ce n'est pas clair pour vous, ne vous demandez pas si ça l'est pour
moi, vous savez.
Au début, vous avez évoqué toute cette question de
principe du droit du travailleur à la formation de son syndicat, du
droit à la sécurité, du droit au travail. Vous avez, somme
toute, reproché, considéré et interprété,
tout au moins, comme pénible la situation qu'on vit aujourd'hui et tout
ça. J'aurais une question, moi. Qu'est-ce que vous attendez de cette
commission aujourd'hui? Qu'est-ce que vous attendez...
M. Gagné: Pour ma part... M. Pagé: Oui.
M. Gagné: ... je pense que M. le ministre va être
assez éclairé pour appliquer ses lois, la loi 45, article 97. On
ne s'attend pas à des miracles, mais on s'attend que les lois soient
appliquées. À l'heure actuelle, ça n'a pas encore
été fait.
M. Pagé: Vous, vous mettez de côté ce qui a
été énoncé par le ministre ce matin, la
sensibilisation de l'opinion publique, la pression de l'opi-
nion publique, d'éclairer le Parlement et tout ça, ce que
vous attendez, c'est une solution à ce problème de la part du
gouvernement et vous croyez que la commission parlementaire d'aujourd'hui en
sera un élément, c'est bien ça? Vous croyez que la
commission parlementaire d'aujourd'hui sera un élément de
solution qui sera suffisant pour donner des informations au gouvernement pour
régler le problème. C'est la perception que vous avez des travaux
de notre commission?
M. Gagné: Oui. M. Pagé: Merci.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez...
Le Président (M. Cardinal): Un instant!
M. Johnson: Est-ce que le député de Johnson me
permettrait?
Le Président (M. Cardinal): II faudrait...
Écoutez!
M. Johnson: Est-ce que le député de Johnson me
permet une seconde...
Le Président (M. Cardinal): Un instant! Auparavant, j'ai
pris l'ordre de demande du droit de parole et je vais m'en tenir, à
cela, à moins qu'il y ait permission des intéressés. Dans
l'ordre, je le dis tout de suite, pour éviter les incidents, M. le
député de Johnson, M. le député de Terrebonne, M.
le député de Saint-Laurent. Si, cependant, un
député, sans céder son droit de parole, permet une
question ou une priorité, c'est son droit strict.
M. Bellemare: M. le Président, le nombre de questions
qu'on a à poser est limité quant à M. Gagné. Pour
ma part, je n'en ai que deux. Si le ministre veut intervenir après, je
n'ai aucune objection.
M. Johnson: C'est très bref. Ah bon! D'accord!
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: M. Gagné, quand avez-vous été
élu président du nouvel exécutif, c'est à quelle
date à peu près?
M. Gagné: ...
Le Président (M. Cardinal): Votre micro, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: Pardon?
Le Président (M. Cardinal): Votre micro.
M. Bellemare: Ah oui, merci!
M. Gagné: Au début d'octobre, parce que c'est
à peu près quinze jours après qu'on est sorti.
M. Bellemare: Avant la certification par le ministère de
votre reconnaissance syndicale? Avant ou après?
M. Gagné: Je n'ai pas compris votre question.
M. Bellemare: Quand avez-vous été nommé
à la présidence du nouvel exécutif? Est-ce que c'est avant
ou après le 3 octobre?
M. Gagné: C'est avant, parce qu'on n'avait pas eu notre
accréditation, pas longtemps, je pense que c'est vers le 1er ou le
2.
M. Bellemare: Bon! Vous avez donc été aidé
par M. Donat Thériault pour devenir le nouveau président. Vous
avez participé avec lui... Non?
M. Gagné: Bien non! Moi, j'étais pour l'autre
côté, dans la CSN. C'est Norbert Rodrigue qui est le
représentant de la centrale.
M. Bellemare: Bien oui, mais, un instant! On a dit, dans le
rapport du conseil de médiation, que M. Thériault avait fait
signer des cartes de la CSN, des faux. Est-ce que c'est ça qui vous a
permis d'être élu, vous?
M. Gagné: Bien non! Moi, je n'ai pas assisté
à cette assemblée, je n'étais pas invité.
M. Bellemare: Non, mais est-ce que M. Thériault vous a
aidé à former le nouvel exécutif?
M. Gagné: M. Thériault n'était pas
présent, vu que ce n'était pas la même centrale que
moi.
M. Bellemare: Est-ce que vous avez eu des relations d'amis avec
M. Thériault avant votre présidence? (17 h 30)
M. Gagné: Là, si je peux vous éclaircir un
peu là-dessus, vous!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il
vous plaît! À l'ordre! Je ne permettrai aucune intervention du
genre je le dis tout de suite en aucun moment.
Tout s'est bien passé jusqu'à présent. Je demande,
très sérieusement, que l'on continue ainsi, que personne
n'exprime son approbation ou sa désapprobation. M. le
député, monsieur.
M. Bellemare: Alors, pour revenir à ma question...
M. Gagné: Ouais.
M. Bellemare:... que vous voulez m'instruire...
M. Gagné: Ouais.
M. Bellemare: ... je suis bien d'accord que vous me disiez si M.
Thériault, de près ou de loin, vous aurait aidé à
créer un nouvel exécutif, comme vous l'avez dit tout à
l'heure. Vous avez décidé de changer votre union à ce
moment et de vouloir former, par la CSN, une nouvelle convention collective qui
serait présidée par vous et par le nouvel exécutif et que
cela serait probablement c'est ma question fait avec le
consentement de M. Thériault qui, à ce moment-là,
représentait une autre union qui avait adhéré à
votre mouvement. Je voudrais connaître les relations que vous avez eues
avec M. Thériault.
M. Gagné: Les relations que j'ai eues avec M.
Thériault... Au mois de juillet, lorsqu'il a fait une assemblée
lorsqu'on avait changé d'exécutif... dans ce temps-là, on
faisait encore partie des rembourreurs.
M. Bellemare: Bon.
M. Gagné: Mais après cette assemblée, je
n'ai pas eu d'autres relations avec M. Thériault.
M. Bellemare: Vous ne l'avez pas rencontré non plus pour
discuter du projet?
M. Gagné: Pourquoi? Parce qu'il n'était pas dans la
même union que moi.
M. Bellemare: Alors, vous étiez des adversaires. Et
comment expliquez-vous que M. Thériault a pu faire signer des cartes
avec le sigle de la CSN et que vous avez laissé faire cela? Il
représentait les rembourreurs unis et, dans le rapport de la
médiation, ce matin, on dit que M. Thériault aurait fait imprimer
des cartes et les aurait fait signer au nom et pour la CSN. Pouvez-vous
m'expliquer cela? Pourquoi M. Thériault aurait-il fait cela?
M. Gagné: Premièrement, lorsque M. Thériault
a fait signer ces cartes, je n'étais pas là. Même les
travailleurs qui sont ici n'étaient pas là, parce qu'on ne savait
seulement pas que M. Thériault voulait adhérer à la CSN.
Je n'étais pas au courant. Il n'avait pas
téléphoné.
M. Bellemare: M. Thériault avait-il signé sa carte
de la CSN?
M. Gagné: M. Thériault?
M. Bellemare: Oui.
M. Gagné: Cela ne doit pas parce que...
M. Bellemare: Comment cela se fait-il qu'il en faisait
signer?
M. Gagné:... d'après moi, c'est un rembourreur. Il
était chef des rembourreurs.
M. Bellemare: Mais comment expliquez-vous l'attitude de
Thériault pour faire signer des cartes de la CSN? Je voudrais savoir
cela de vous autres qui êtes dans le milieu. Vous allez m'expliquer cela.
Pourquoi M. Thériault aurait-il pris l'avantage de faire imprimer des
cartes et de les faire signer par les employés à votre insu, sans
que vous le sachiez?
M. Gagné: On a su à un certain moment qu'il
circulait des fausses cartes dans la "shop " parce qu'on en avait un des
nôtres là-dedans et qu'il nous est arrivé un midi avec une
fausse carte des autres. Et depuis cette fausse carte, la centrale, je crois,
avait fait parvenir un mot, au ministre M. Johnson de se "watcher"
quelque chose de même qu'il s'en venait une fausse convention.
Pour quel motif M. Thériault a-t-il fait cela? Je ne le sais pas. Il est
ici. Il va peut-être pouvoir vous répondre mieux que moi. Encore
là, je ne suis pas en mesure de vous dire pourquoi il l'a fait. S'il l'a
fait en collaboration avec M. Caine, je ne suis pas placé non plus pour
vous le dire, parce qu'on n'était pas au courant de l'assemblée
lorsqu'il l'a faite.
M. Bellemare: Au moment où on se parle, M. Gagné,
quand va se terminer le 30 septembre la convention qui vous a
accrédités la CSN croyez-vous sincèrement
qu'il pourrait y avoir, parmi les membres de la CSN, des gens qui vous
lâchent pour aller aux Rembourreurs unis?
M. Gagné: Cette convention qui finit le 30 septembre, dans
mon esprit, n'a jamais existé parce que selon moi, encore, elle a
toujours été fausse. Premièrement, fausse parce que ceux
qui avaient été nommés par notre assemblée pour
aller négocier n'étaient pas là. Deuxièmement,
fausse parce que ceux qui ont signé la fausse convention que
j'appelle toujours fausse parce que dans mon esprit elle va rester fausse
ce sont les mêmes, presque tous les mêmes d'ailleurs, qui
avaient signé celle de 1974. C'est pour cela que dans mon esprit elle
n'a jamais été bonne. Donc, celle qui va finir le 30 septembre,
dans mon esprit, elle n'a jamais existé. Elle a existé seulement
pour M. Caine et M. Thériault. Pour nous, elle n'existait pas. Ce n'est
pas nous qui l'avions signée.
M. Bellemare: M. Gagné, qu'est-ce qui va se produire le 30
si cette convention collective est fausse, prétendue fausse
d'après vous, à l'échéance de l'autre, à la
réorganisation de l'autre? Avez-vous assez de membres à la CSN
pour tâcher de demander une nouvelle accréditation?
M. Gagné: Pourquoi est-ce qu'on demanderait une nouvelle
accréditation lorsqu'on en a une en branle et lorsque d'après moi
je ne suis pas un avocat, je ne connais pas toutes les mises en justice
là-dessus tant que la fausse convention est en cours devant les
tribunaux, je crois qu'il n'y a pas de maraudage à faire là et il
n'y a pas de nouvelle accréditation à demander de notre part
parce qu'on en a demandé une le 3 octobre et ce
n'est pas nous qui avons signé la convention collective avec M.
Caine, se sont ses "scabs".
M. Bellemare: Ce n'est pas la CSN. Ce sont les scabs de la CSN
qui l'ont signée?
M. Gagné: Ce n'est pas la CSN certainement. Ce n'est pas
nous.
M. Bellemare: Mais qui a signé cette convention collective
qui finit le 30 septembre?
M. Gagné: Je vais vous le répéter
encore.
M. Bellemare: Les mêmes qui avaient signé celle de
1974?
M. Gagné: Oui, presque tous. Même, il y avait plus
de noms qu'en 1974.
M. Bellemare: Est-ce qu'il y avait des membres de la CSN dans
cela?
M. Gagné: Non.
M. Bellemare: Aucun.
M. Gagné: II y avait Mme Grignon, M. Ernest
Lévesque, M. Marcellin Pilon, Mme Lise Côté, il m'en manque
un, M. Luigi Daluca, et Donat Thériault était là comme
conseiller, apparemment, avec Me Bazin pour la partie patronale. C'est tout ce
que je sais. Parce que dans nos assemblées, les grévistes, comme
ils nous appellent, il n'a jamais été question, en
assemblée, qu'on avait signé une convention collective avec M.
Caine.
M. Bellemare: Mais vous reconnaissez que le 3 octobre vous avez
eu une accréditation en bonne et due forme.
M. Gagné: Oui.
M. Bellemare: Qui est bonne aujourd'hui, qui va rester en vigueur
après le 30 septembre 1978.
M. Gagné: Oui, parce qu'on n'a jamais eu de convention
collective signée avec ce monsieur-là.
M. Bellemare: Mais ma question est que le nombre de membres que
vous avez présentement est de 100... 85 plus les 20, que vous nous avez
dit tout à l'heure, qui sont prêts à revenir, qui sont
partis.
M. Gagné: Oui, et on en a 30 en dedans, environ.
M. Bellemare: Alors, cela fait 115 à peu près, 125
avec les 20 qui sont partis. Est-ce que c'est le nombre de membres actifs de la
CSN actuellement?
M. Gagné: Si l'on prend ceux qui sont rentrés comme
"scabs" et ceux qui sont allés travailler, d'après moi, on n'en a
pas encore perdu. On a le même nombre qu'on avait. On en a perdu parce
qu'ils venaient d'entrer comme "scabs", il y en a 20 qui sont partis en dehors,
mais ils ne sont pas perdus comme membres, parce qu'ils nous ont bien
avisés qu'aussitôt qu'il y aurait des négociations, ils
reviendraient à la Commonwealth Plywood.
M. Bellemare: Dans le rapport du conseil de médiation,
présidé par le sous-ministre, M. Blain, il est dit qu'il y a eu
des feux, des actes de violence commis après le dépôt de
l'accréditation. Est-ce que vous avez eu connaissance de ces actes de
violence? Le feu, par exemple, les vitres cassées, d'autres sujets de
violence accomplis par les employés de la Commonwealth Plywood qui
appartenaient à la CSN? Est-ce que vous avez eu connaissance de
ça?
M. Gagné: Vu que vous m'embarquez dans la violence...
M. Bellemare: Je ne vous embarque pas dans la violence, je vous
demande de me dire ce qui s'est passé au juste.
M. Gagné: Je vais essayer de vous résumer
ça. Concernant le feu, M. le ministre doit être
éclairé là-dessus plus que moi parce qu'il a mis des
enquêteurs là-dessus, il doit avoir eu son rapport de
l'enquêteur, quelque chose comme ça.
M. Bellemare: C'est peut-être le ministre de la Justice qui
a donné des ordres de faire une enquête, par la police
provinciale.
M. Gagné: La violence dont j'ai eu connaissance sur la
ligne de piquetage, ça a été lorsque les policiers
traînaient des Portugaises par les cheveux dans la rue et lorsqu'ils leur
criaient de s'en aller dans leur pays. Pour ce qui est de casser les vitres,
ça se peut qu'il y en aient qui se soient échappés;
après la violence que M. Caine nous mettait sur les épaules,
à un moment donné, ça se peut qu'il y en ait qui aient
perdu le contrôle de leurs nerfs. Personnellement, je ne les ai pas vus,
parce que...
M. Bellemare: Vous aviez commencé à nous
détailler le feu; qu'est-ce qui est arrivé au feu?
M. Gagné: II y a eu une enquête là-dessus,
comme je l'ai dit. Lorsque je suis arrivé là, le feu était
déjà avancé, la seule chose que j'ai remarquée, qui
m'a frappé, c'est lorsque M. Caine est allé en avant du feu avec
une pancarte de la CSN; il l'a plantée en avant du feu, je l'ai
remarqué. Mais je n'ai pas vu le feu prendre. Quand je suis allé,
le feu était commencé.
M. Bellemare: Vous avez dû avoir certaines versions de
certaines personnes que vous connaissez bien, qui vous ont peut-être
relaté l'incident.
M. Gagné: Je n'ai jamais entendu parler du feu.
M. Bellemare: Non. Vous l'avez vu...
M. Gagné: On a vu qu'il y avait des enquêteurs
là, mais...
M. Bellemare: Vous n'avez jamais su d'où ça
provenait.
M. Gagné: Non, je ne suis pas policier.
M. Bellemare: Sans être policier, vous êtes
président.
M. Gagné: Je suis président, mais ce n'est pas
parce que tu es président que tu sais tout.
M. Bellemare: Non, mais vous êtes en lieu de vous informer,
quand la violence éclate comme cela.
M. Gagné: Même si tu t'informes, le gars va venir se
vendre.
M. Bellemare: II va venir se vendre?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Gagné: Je ne comprends pas votre patente.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Gagné: Si vous voulez me faire dire que c'est moi qui
ai mis le feu, je vais dire non.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! J'ai dit, ce matin, que je permettrais toute question même
sur ce qui pouvait être ou paraître sub judice. Mais j'ai aussi
mentionné que nous n'étions pas une commission d'enquête.
Je l'ai même mentionné à deux reprises. Sans faire un
rappel à l'ordre, je demanderais au député de Johnson de
ne pas retourner le mandat de cette commission, qui est d'entendre les
invités, à une commission qui a convoqué des
témoins pour enquêter sur une situation.
M. Bellemare: Ma dernière question, M. le
Président, serait pour demander si M. Gagné a été
reconnu officiellement comme président par la centrale de la CSN.
M. Gagné: Avant que je devienne président, ce sont
les membres, à l'assemblée, qui m'ont élu. Ce sont eux qui
ont voté pour moi.
M. Bellemare: D'accord. Après cela, la centrale vous a
reconnu officiellement?
M. Gagné: La centrale n'a rien à dire
là-des- sus et elle n'a rien dit là-dessus non plus. J'ai
toujours entendu dire qu'un syndicat, c'était nous, les membres, qui te
faisions bouger. Lorsque vous mentionnez la centrale ici et la centrale
là, si la centrale bouge, c'est pour nous appuyer nous autres, à
mieux bouger.
M. Bellemare: D'accord.
Le Président (M. Cardinal): Le prochain membre serait
normalement... À l'ordre, même le journal des Débats! Le
prochain membre de la commission, normalement, serait le député
de Terrebonne. Mais le ministre avait demandé si quelqu'un lui accordait
une permission.
M. Johnson: Oui, brièvement.
M. Fallu: Consentement accordé, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Conservant votre droit de
parole.
M. Fallu: Mais conservant mon droit de parole.
Le Président (M. Cardinal): À ce moment-là,
votre tour va être reporté à un peu plus tard.
M. Johnson: En fait, une seconde. Je pensais que c'était
clair. J'aurais deux choses, pour mettre un peu les choses en perspective.
Quand M. Gagné parle des dispositions de la loi 45, au sujet des
dispositions "antiscabs", il est bien conscient, évidemment, qu'on
définit un "scab" en fonction du fait qu'il y a une convention
collective ou pas. Comme c'est la question, la première chose qui
arriverait et je vais vous le dire, je serais curieux de voir la
réaction des procureurs de M. Caine à cela.
Si je nomme un enquêteur "antiscabs" pour aller à la
Commonwealth Plywood, la première chose qui pourrait être faite
par quelqu'un qui ne veut pas qu'il entre là, c'est de prendre un bref
d'évocation contre lui pour dire qu'il n'a pas été
nommé légalement. C'est aussi simple que cela.
Et cela, j'ai eu l'occasion de l'expliquer à maintes reprises au
président de la CSN. Autre chose, M. Gagné, je vous pose une
question à vous. Est-ce qu'il y a un règlement? Où
voyez-vous le règlement à la Commonwealth Plywood, vous?
M. Gagné: II n'a pas de convention collective, parce que
la CSN n'a pas signé de convention collective avec lui et que c'est nous
autres qui avons été accrédités. C'est pour cela
que, selon moi, on en a parlé à l'assemblée et il a
été adopté. On est prêt pour ce rapport. Si M. Caine
veut venir en attente, comme il ne s'est même pas rendu a la
médiation, c'est assez malaisé de s'attendre en attente. Ce
serait plutôt une question à poser. Est-ce que le ministre du
Travail est capable d'annuler cette convention même si elle est en cours?
D'après moi, encore personnellement, je crois que
si vous voulez, vous serez capable, après cette journée,
de prendre une décision de l'annuler, parce qu'en fait, s'il n'y avait
pas eu cette convention, peut-être que le conflit serait
réglé.
Nous autres, on demande simplement les recommandations faites par vos
hommes. C'est la seule chose pour la médiation. On demande aussi
d'appliquer cette loi 45, article 97, parce que, selon moi, il n'y a jamais eu
de convention collective de signée avec Caine et, selon moi, il n'y en
aura pas, parce que, selon moi, il n'y en aura pas, parce que, selon moi, ce
sont des fraudeurs qui l'ont signée à notre place. Cela va rester
tel quel.
Le Président (M. Cardinal): J'en viens donc... Je suis la
règle.
M. Forget: Bien.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent, oui. Je sais que, de toute façon, la présidence
est... enfin je suis blâmé ou loué, que je le désire
ou pas.
M. Pagé: Vous faites bien cela. Continuez à
regarder de ce côté-ci.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Portneuf. M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. M. Gagné, dans
les documents qu'on vous a remis je ne sais pas si vous les avez vus
annexés au rapport du conseil de médiation, il y a un
document qui porte l'empreinte de la CSN qui est une liste d'employés
avec la date de leur entrée et la date de leur départ comme
employés de la Commonwealth Plywood.
Je ne sais pas si vous avez vu ce document, si vous pouvez
témoigner de sa valeur. Je pense que cela n'a probablement pas
été produit par votre syndicat, mais par la centrale. On y est?
C'est seulement une liste de noms. Il y a à peu près cinq
pages.
M. Gagné: Oui, je l'ai devant moi.
M. Forget: Dans cette liste, M. Gagné, on a d'abord
l'énumération des employés qui ont été mis
à pied, parce que la date de départ pour tous, c'est le 16
septembre 1977. Il y a cinq pages de noms de personnes mise à pied en
septembre 1977. J'aimerais que vous puissiez confirmer l'observation qu'on peut
faire quand on regarde cette liste. On se rend compte que de toutes les
personnes mises à pied, il y en a seulement trois c'est le
document de la CSN qui étaient à l'emploi de la
Commonwealth Plywood avant 1975. Donc, tous ces gens qui ont été
mis à pied ont été engagés à partir de
janvier 1975 jusqu'aussi tard que le 29 août 1977. Cela est, d'une part,
trois qui ont plus que deux ans d'ancienneté. Toujours du
côté de la même liste de la CSN, il y a une liste, qui n'est
probablement pas complète, de gens qui travaillent à
l'intérieur. Dans cette liste qui com- prend beaucoup moins de noms, il
y a une page par rapport à cinq. Donc, elle n'est pas complète.
On remarque malgré tout un grand nombre de cas où l'entrée
de l'employé remonte aussi longtemps que 1942; il y a plusieurs gars qui
ont été employés à partir de 1965, un autre de
1951, un autre de 1944, et presque aucun n'a été engagé
après 1975; quelques-uns, mais la grande majorité, c'est avant
1975. Devant ce fait, à moins que vous ne niiez que ce soient des
informations correctes, parce que cela peut venir de la centrale, ils n'ont
peut-être pas tous les renseignements, peut-être que vous nous
direz que ce renseignement n'est pas correct, mais si c'est vrai, ce que la CSN
a déposé devant le conseil de médiation, comment peut-on
expliquer l'affirmation que vous faites souvent, que les "scabs", pour employer
l'expression, peu importe si c'est la définition de la loi, mais c'est
le sens ordinaire qu'on donne à ce mot, comment se fait-il que les
"scabs ", ce sont ceux qui ont la plus grande ancienneté, des gens qui
travaillent là depuis trente ans, depuis dix ans, depuis dix-sept ans,
et ceux qui sont sortis et qui blâment les autres d'être des
"scabs", ceux qui ne travaillent plus, ceux qui ont été mis
à pied, ce sont des gens qui, dans tous les cas, sauf trois, ont
été engagés après le 1er janvier 1975?
C'est quand même assez curieux, ça. Est-ce que c'est
conciliable avec votre affirmation du début qui veut que, quant à
vous, c'était clair que c'était un geste antisyndical? Il me
semble qu'à première vue, comme on n'a pas d'autres affirmations,
cela a l'air d'être des congédiements qui ont été
faits en fonction de l'ancienneté.
Le Président (M. Cardinal): M. Gagné,
brièvement, parce qu'il y a une suspension à 18 heures. Nous
recommencerons...
M. Gagné: Après?
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Gagné: Vous voulez que je réponde tout de
suite?
Le Président (M. Cardinal): Non, mais commencez à
répondre tout de suite et on continuera après.
M. Gagné: C'est parce que nous, sur notre liste, comme
vous dites, des 75 qui sont sortis, il n'y a pas seulement des 65. Ils ont mis
à pied des 67; ils en ont mis à pied des plus vieux que
ça.
M. Forget: Alors, vous dites que la liste que la CSN a fournie au
conseil de médiation est incorrecte?
M. Gagné: Ce n'est pas ça que je dis. Je dis que la
liste qu'on a émise, nous, parce que, vu que c'était impossible
d'entrer en dedans et de demander aux scabs leurs années, c'est naturel
qu'elle joue, parce qu'on n'a pas pu leur demander depuis combien
d'années ils travaillaient là. Vu
que M. Caine ne voulait pas nous aider sur ce point, on a mis ça
à peu près, pour les scabs en dedans.
M. Forget: Mais, même en admettant ça, M.
Gagné...
M. Gagné: Mais...
M. Forget: ...est-ce que les chiffres, à peu près,
pour ceux de l'intérieur, ça démontre, malgré tout,
que ces gens-là ont beaucoup plus d'ancienneté que ceux qui ont
été mis à pied? Ce sont les chiffres de la CSN, les
documents de la CSN. Ceux qui ont été mis à pied, les 105,
ce sont des gens qui étaient là depuis moins de deux ans.
M. Gagné: Ah non!
M. Forget: Moins de trois ans, c'est-à-dire, depuis
janvier 1975. Ils ont été engagés postérieurement
au 1er janvier 1975. D'après la CSN, il y en a seulement trois
là-dessus qui étaient à l'emploi de la compagnie au 31
décembre 1974, alors que, parmi ceux qui restent en dedans, il y en a
qui travaillent pour la compagnie depuis 30 ans. Ce sont vos chiffres, à
vous autres. Peut-être qu'ils ne sont pas corrects, c'est pour ça
que je pose la question.
M. Gagné: II se peut, quand tu es mis à pied, que
tu deviennes "scab" après. Nous autres, on ne peut pas tous les
photographier comme M. Caine. On n'est pas placé pour cela parce qu'on
ne les voit pas entrer. C'est assez difficile pour nous de confirmer tout ce
qui se passe en dedans. On n'est pas là.
M. Forget: Je ne parle pas de ce qui se passe en dedans, mais au
moins on peut s'entendre... D'après votre liste, la liste de la CSN,
ceux qui ont été mis à pied, sur les 105 mis à
pied, il y en avait seulement trois qui travaillaient à la Commonwealth
Plywood avant 1975. C'est l'affirmation que la CSN a faite à la
commission de médiation. C'étaient des employés
relativement récents qui ont été mis à pied.
M. le Président, étant donné l'heure et pour donner
à nos invités le temps de consulter leurs notes, je
suggérerais que nous suspendions nos travaux, mais enfin, je n'ai pas
d'objection s'il y a une réponse toute prête.
Le Président (M. Cardinal): Écoutez, M.
Gagné. Je m'excuse. Si vous voulez répondre très
brièvement, je ne voudrais pas vous couper dans votre réponse.
Que préférez-vous? Vous avez le choix de répondre tout de
suite ou à 20 heures.
M. Gagné: Je peux revenir.
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas, je déclare
que la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures au même
endroit.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise de la séance à 20 h 12)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, messieurs!
Au moment de la suspension de 17 h 59, M. Gagné avait la parole en
réponse à une question de M. le député de
Saint-Laurent. M. Gagné.
M. Gagné: Je demanderais à M. le
député de me poser de nouveau sa question.
M. Forget: Volontiers, M. le Président. Dans les documents
qui accompagnent le rapport du conseil de médiation, il y a un document
en particulier qui, à sa face même, est un document de la CSN et
qui donne une liste de noms. À côté de chaque nom, il y a
deux dates. Il y a la date d'entrée, présumément le moment
où il a occupé pour la première fois un emploi à
Commonwealth Plywood, si je comprends bien le sens de ce document-là, et
son départ, c'est-à-dire le moment où il a quitté
la Commonwealth Plywood, où il a été
congédié. On ne parle pas ici des gens qui sont entrés ou
pas entrés, etc. On parle tout simplement des gens qui sont
congédiés, d'une part, et ceux qui n'ont pas été
congédiés, d'autre part. Dans ce document de la CSN, on
énumère au long, je pense, les 105 personnes qui ont reçu
un avis de congédiement le 16 septembre 1977 et, lorsque l'on consulte
cette liste et qu'on regarde vis-à-vis de chaque nom la date où
l'employé est entré pour la première fois comme
salarié à la Commonwealth Plywood, on se rend compte de la chose
suivante: parmi ces 105 personnes, il y en a seulement trois qui étaient
à l'emploi de la Commonwealth Plywood le 31 décembre 1974. Tous
les autres employés ont été engagés par cette
compagnie après le 1er janvier 1975, parfois aussi tard que la fin
d'août 1977, donc quelques jours avant leur licenciement. Tous sont donc
des employés relativement récents ou, si l'on veut, des
employés dont l'ancienneté, à l'exception de trois, est
inférieure à trois ans. Sur le même document de la CSN, il
y a une autre partie, qui est beaucoup moins complète, celle-là,
parce qu'il n'y a qu'une quarantaine de noms et, pour ces quarante noms, il n'y
a pas de date de départ parce qu'ils n'ont pas reçu d'avis de
licenciement. Il y a une date d'entrée en fonction et, parmi cette
quarantaine de noms, il y a des employés qui sont là depuis 30
ans, depuis 15 ans, depuis 10 ans, depuis 17 ans, un nombre appréciable.
(20 h 15)
La question que je vous posais, M. Gagné... parce qu'à la
face même des documents remis par la CSN, on serait porté à
généraliser, peut-être indûment, peut-être
injustement, de la façon suivante: ceux; qui ont été
congédiés étaient des employés de fraîche
date et ceux qui ont été gardés, qui ont conservé
leur emploi étaient, de façon générale, des
employés beaucoup plus anciens.
Si c'était vrai et si le document de la CSN donnait un tableau
correct de la situation, on est porté à se demander: À
partir de quel moment le sens commun, une question de simple
bon sens peut-on ajouter foi à des gens qui sont des
employés relativement de fraîche date, qui ont perdu leur emploi
et qui disent: Ceux qui étaient là depuis trente ans, ce sont
maintenant des "scabs"? Trente ans, c'est un chiffre limite, bien sûr;
ils n'ont pas tous trente ans de service, mais ceux qui sont là depuis
dix ans, depuis quinze ans, depuis dix-sept ans, depuis huit ans, ce sont des
"scabs". Nous qui étions engagés à partir du 1er janvier
1975, on est les vrais employés qui auraient dû être
gardés.
C'est paradoxal et je voudrais savoir, dans notre information produite
par la CSN, ce qui manque, parce que, si on regarde simplement les chiffres
produits par la CSN sur l'ancienneté, c'est la conclusion qu'on est
porté à tirer. Est-ce que j'ai été clair?
Le Président (M. Cardinal): M. Gagné.
M. Gagné: Ceux, selon ce que vous dites, qui ont
été congédiés, les nouveaux, à vous entendre
parler, en 1974, 1975, lorsqu'on a fait ça... Si vous vous souvenez, il
y a eu un feu en 1973; lorsqu'on a fait ces listes, on les a faites avec nos
employés, avec les travailleurs, la majorité a été
engagée à l'époque du feu. Donc, on ne savait pas s'ils
avaient perdu leur ancienneté pendant le temps où ils n'ont pas
travaillé, à l'époque du feu. Parmi ceux qui sont "scabs",
les vieux employés, à notre connaissance, il y en a qui ont
continué, à l'époque du feu, à travailler quand
même. C'est pour ça que vous trouvez des dates plus vieilles chez
les "scabs" que chez les autres. Mais, si vous voulez la vraie liste, je crois
qu'il y en a un parmi nous qui peut vous la donner; c'est celui qu'on n'a pas
pu rencontrer à la médiation. M. Caine.
M. Forget: On va lui poser, bien sûr, la même
question. Ce que vous nous dites, donc, c'est qu'il ne faut pas prendre trop au
sérieux ce document qui porte la signature de la CSN. Écoutez, ce
sont les vraies dates ou ce ne sont pas les vraies dates. On ne peut pas dire
que ce sont les vraies dates et que ce ne sont pas les vraies dates. On veut
savoir qui croire. Vous nous dites: Cela est fait à partir de
renseignements incomplets. À ce moment-là, on va attendre d'avoir
des renseignements complets.
M. Gagné: Nous autres, mon ami, c'est à la demande
du médiateur qu'on a fait cela. On a essayé de faire cela du
mieux qu'on a pu, avec nos renseignements. On ne pouvait pas aller en dedans
pour obtenir des renseignements. Donc, on a essayé de faire cela du
mieux possible.
M. Forget: Mais parmi ceux qui sont sortis, j'imagine qu'ils
savaient quand ils ont commencé à travailler pour la Commonwealth
Plywood. Ce n'est pas bien compliqué à demander. Ce sont vos
membres. Vous parlez en leur nom. Et vous produisez une liste de dates
auxquelles ils seraient censés avoir commencé à
travailler. Et là, vous venez de nous dire que vous ne le savez pas, que
vous ne leur avez pas demandé. Cela ne m'apparaît pas bien
sérieux, votre affaire.
M. Gagné: Si la commission désire avoir une autre
liste d'ancienneté que nous pourrions lui faire, puisque nous n'avons
pas eu beaucoup de temps pour la préparer, on peut lui en fournir une
autre qui serait plus formelle que celle-ci.
M. Bellemare: Quand vous avez porté vos plaintes au
commissaire-enquêteur en chef pour ceux qui avaient été
renvoyés, les 105 plaintes qui ont été
déposées, à ce moment-là, vous avez pris
connaissance de la liste d'ancienneté qui établissait, dans
chacun des cas, ceux qui avaient été remerciés de leurs
services.
M. Johnson: M. Gagné, pourriez-vous parler plus loin de
votre micro?
M. Gagné: Plus loin?
M. Johnson: Non, parlez plus loin de votre micro, je
m'excuse.
M. Gagné: Les plaintes de congédiement ont
été faites individuellement. Il n'y a pas eu de vote
là-dessus en assemblée générale. Les gens qui
désiraient en porter une la faisaient.
M. Forget: M. Gagné... Est-ce que j'ai la parole?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: On va laisser de côté cette
question-là; on tirera nos propres conclusions. Vous vous
présentez comme le président du syndicat accrédité
CSN. Vous avez dit durant l'après-midi que vous avez été
nommé dans les semaines qui ont suivi l'accréditation, mais que
vous ne vous souveniez pas trop de la date.
D'autre part, vous contestez la légitimité de M.
Thériault qui lui aussi prétend être agent d'affaires de la
CSN pour les gens de l'intérieur et, présumément, la
légitimité de l'exécutif que les gens de
l'intérieur se sont donné.
Il y a, dans le rapport de médiation, certaines remarques sur la
façon dont cette réunion où M. Thériault a
été désigné comme agent d'affaires et où
l'exécutif des gens de l'intérieur a été
nommé dans le sens qu'on ne sait pas si tout le monde a
été convoqué, etc.
J'aimerais que vous nous disiez quelles raisons vous avez de croire que
la réunion qui a été tenue et où vous avez
été nommé est plus régulière, plus
légale que l'autre que vous contestez?
M. Gagné: Je la trouvais plus régulière
parce qu'on avait fait un dépôt d'accréditation pour la
CSN. Pour ma part, elle était plus régulière parce que le
30 août, la CSN déposait une accréditation. Le 19
août, on avait fait le vote de grève avec elle. C'est pour cela
que je la trouvais plus régulière pour ma part.
M. Forget: L'accréditation que vous avez obtenue...
M. Bellemare: ... après.
M. Forget: ... ne vous faisait pas automatiquement
président du syndicat.
M. Gagné: Bien non...
M. Forget: II a fallu une réunion pour convoquer les
membres. Est-ce que tout le monde a été convoqué à
la réunion qui vous a élu, ceux de l'intérieur comme ceux
de l'extérieur?
M. Gagné: Ceux qui étaient membres ont toujours eu
une lettre attestant qu'il y avait une assemblée...
M. Forget: Et vous n'avez exclu en aucun temps les membres de
l'intérieur? Vous n'avez pas, à un moment donné,
adopté une résolution décrétant que ceux qui
étaient à l'intérieur n'étaient plus des membres en
règle de votre syndicat?
M. Gagné: Ceux qui avaient signé pour la CSN de
petites cartes jaunes n'ont pas été exclus.
M. Bellemare: Ils n'ont pas été exclus? M.
Gagné: Non...
M. Forget: Ce sont les autres qui ont été
exclus?
M. Gagné: Eux n'ont jamais été membres de la
CSN, ils n'ont donc pas été exclus...
M. Forget: Alors, vous avez invité tous ceux qui avaient
signé une carte de membre à toutes les réunions tenues
depuis ce temps-là, y compris celle qui vous a élu.
Pouvez-vous me dire à qui les gens qui sont à
l'intérieur et qui ont signé une carte de la CSN paient leur
cotisation dans le moment?
M. Gagné: Je ne sais pas cela...
M. Johnson: Je puis peut-être répondre au
député de Saint-Laurent, s'il le permet. Si je comprends bien,
c'est fait au nom du Syndicat des employés de la Commonwealth Plywood
CSN, c'est endossé, et cela a été endossé
jusqu'à ce qu'une injonction interdise l'utilisation du nom CSN,
c'était endossé, je pense, par Madame Grignon, qui le remettait
à l'Union des rembourreurs unis d'Amérique.
M. Forget: Alors, effectivement...
M. Gagné: II y en a un qui a été exclu du
syndicat, Yves Côté, après avoir signé...
M. Forget: Maintenant, depuis le mois d'octobre 1977, vous ne
recevez donc pas de cotisation de vos membres, du moins des gens qui ont
signé une carte de membre de la CSN et qui sont à
l'intérieur. Est-ce que ces gens-là viennent à vos
réunions?
M. Gagné: Ceux qui sont en dedans, à l'heure
actuelle, les "scabs comme on dit, ne viennent naturellement pas aux
assemblées.
M. Forget: Alors, vous êtes président d'un syndicat
qui a des membres à l'intérieur, qui prétend avoir des
membres à l'intérieur, et ces gens-là ne viennent pas
à vos réunions et vous ne recevez pas de cotisations syndicales
d'eux.
À ce moment-là, M. Gagné, supposons que le
commissaire du travail décide que les congédiements qui ont
été effectués à la mi-septembre 1977
n'étaient pas à l'encontre de la loi; ce n'étaient pas des
congédiements antisyndicaux, pour des motifs antisyndicaux. Cette
décision, si elle était rendue demain matin par le commissaire du
travail, ferait qu'effectivement tous les gens qui sont actifs dans votre
syndicat, qui se trouvent à être tous à l'extérieur
de l'entreprise et les seuls, si je comprends bien, qui paient des cotisations
et qui sont présents à votre réunion ne seraient plus des
salariés de la Commonwealth Plywood. Vous seriez donc président
d'un syndicat qui n'existe pas.
M. Gagné: Là, d'après moi, vous êtes
en train de faire une enquête.
M. Forget: C'est pour ça qu'on est ici.
M. Gagné: Ce n'est pas ça que les gens ont dit ce
matin.
M. Bisaillon: Si vous permettez, M. le député de
Saint-Laurent, je voudrais poser une question en termes de procédure.
Est-ce qu'il serait possible moi, je suis d'accord pour qu'on pose
toutes les questions étant donné que les questions du
député de Saint-Laurent sont précises, qu'on permette au
témoin de se faire assister ou de prendre le temps, avant de
répondre à une question, de discuter avec ses conseillers? Il me
semble que c'est normal et, après ça, on le laissera
répondre tranquillement, calmement, sans le bousculer.
M. Forget: M. le Président, je ne pense pas que j'aie
bousculé qui que ce soit. On a même ajourné les travaux
pendant deux heures...
M. Bisaillon: Je n'ai pas dit ça.
M. Forget: ... pour donner tout le temps nécessaire pour
trouver la réponse à une question.
M. Bisaillon: Je n'ai pas dit que le député de
Saint-Laurent bousculait le témoin. J'ai simplement demandé qu'on
lui laisse le temps de consulter autour de lui avant de fournir sa
réponse.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sainte-Marie, tout témoin a certainement la possi-
bilité de prendre le temps nécessaire pour consulter si
nécessaire, en se faisant assister, mais sans se faire
représenter. Nous réglons une première question.
C'est-à-dire que M. Gagné peut laisser un temps sans que nous
suspendions la séance et peut demander conseil. Oui, M.
Gagné.
M. Gagné: L'hypothèse de M. le
député, c'est une hypothèse. Comme il parle, lui, comme il
dit, il faut que je devine l'avenir; pour pouvoir lui répondre, quand on
entrera là, savoir comment ça va marcher et... Je ne sais pas
l'avenir. Pour répondre à son hypothèse, il faudrait que
je sache l'avenir. (20 h 30)
M. Forget: M. Gagné, de deux choses l'une: Ou le
congédiement était antisyndical et donc illégal ou il ne
l'était pas. Il était légal et valable et ces gens ont
été valablement congédiés.
Examinons les deux possibilités, si vous voulez bien. Si ce
congédiement était pour des motifs... était antisyndical,
était jugé inacceptable, contraire au Code du travail
éventuellement, j'imagine, cette décision, on va la prendre
si c'était le cas, les gens que vous représentez et qui
sont à l'extérieur font partie du syndicat, vous êtes
valablement président de ce syndicat, mais vous êtes aussi
représentant des gens de l'intérieur. On pourra revenir sur cette
situation si vous voulez.
Si d'un autre côté, parce que cela pose certains
problèmes, il faut que vous représentiez tout le monde à
ce moment et ce n'est pas évident que vous représentez tout le
monde dans le moment parce que vous avez un paquet de membres qui ne viennent
plus à vos assemblées depuis des mois et qui ne paient pas de
cotisation syndicale. Il y a quand même un point d'interrogation.
Peut-être que cela n'est pas fatal, mais c'est au moins un
problème qu'il faudra examiner.
Si, d'un autre côté, c'étaient des
congédiements qui sont reconnus valables et légaux par le
commissaire du travail dans son éventuelle décision, vos membres,
les seuls qui sont actifs, qui vont à vos réunions et qui paient
des cotisations à votre syndicat, ce ne sont plus des salariés au
sens du Code du travail depuis un an et vous êtes président d'un
groupe de personnes qui ont déjà été des
employés de la Commonwealth Plywood, mais qui valablement et
légalement ne le sont plus.
C'est ou l'un ou l'autre. Ou vous avez un problème de
représenter tout le monde, si le congédiement était
illégal, ce que vous ne semblez pas être en mesure de faire dans
le moment, ou vous avez le problème de représenter un syndicat
qui n'existe plus et je pense qu'il faudra, à un certain moment, savoir
dans quelle situation on se trouve.
Vous êtes d'accord sur cela?
M. Gagné: Ceux que je représente, ce sont ceux qui
m'ont nommé, à l'heure actuelle, c'est-à-dire les
grévistes, non les "scabs ". Selon l'hypothèse que vous
m'apportez, être organisé comme d'autres le sont avec trois ou
quatre avocats à côté de moi, c'est une hypothèse
pour un avocat. Parce qu'avec l'instruction que j'ai, je ne peux pas
m'embarquer dans une patente à n'en plus finir. Notre but a toujours
été d'avoir une convention collective et c'est encore notre but,
et que le gouvernement actuel applique ses lois. Quant à moi, je vais
revenir là-dessus, si nous sommes allés en grève, c'est
parce que M. Caine n'avait pas respecté la loi. Ceux qui ont
continué, comme vous dites, les "scabs" qui ont continué à
entrer, je n'étais pas responsable d'eux. Je ne pouvais pas les attacher
à leur galerie pour qu'ils n'entrent pas.
M. Bellemare: À ce moment-là c'était une
grève illégale.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Chacun son tour. Comme président, je vais dire autre chose.
Il faut quand même protéger les témoins. Les mêmes
questions reviennent. M. le député de Johnson a eu l'occasion
longuement d'interroger le témoin.
M. Bellemare: Pas longtemps.
Le Président (M. Cardinal): À votre point de vue,
pas longtemps. Enfin, il a eu l'occasion de l'interroger.
M. Bellemare: Je ne l'ai pas torturé.
Le Président (M. Cardinal): C'est au tour de M. le
député de Saint-Laurent, ensuite ce sera le tour de M. le
député de Terrebonne. Je voudrais que ce soit chacun son tour et
un à la fois. C'est déjà suffisant. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Je n'en ai plus pour
longtemps. Je pense que M. Gagné vient d'exprimer quelque chose qui est
important. Il dit: Ceux pour qui je parle, ce sont ceux qui ne sont pas des
"scabs", ceux qui ont été mis à pied et qui sont sortis.
Je pense que c'est une affirmation bien importante. En somme, ce que vous dites
à la commission, c'est que vous ne prétendez pas parler au nom de
tous les employés à l'intérieur ou à
l'extérieur de la Commonwealth Plywood qui ont déjà
signé une carte de membre de la CSN, vous parlez au nom de ceux qui sont
à l'extérieur. C'est bien cela que vous avez dit.
M. Gagné: Ceux qui ont signé des cartes CSN, je
vais encore le dire, ils ont toujours été invités à
nos assemblées, ceux qui étaient en dedans aussi. Sur cette
liste, il manque des personnes; on ne connaissait pas tous les "scabs", parce
qu'on ne pouvait pas les compter, on n'était pas organisé pour
les compter, à bord d'un camion.
Parmi ceux dont vous avez les noms, ici, il n'y en a pas beaucoup qui
ont leur carte de la CSN. C'est de ceux-là que vous avez parlé
tout à l'heure?
M. Forget: Ceux qui sont à l'intérieur. Il y a deux
listes là-dedans.
M. Gagné: Prenez la liste où il n'y a pas de
sorties. Parmi ceux-là, il n'y en a pas beaucoup qui ont leur carte de
la CSN. Donc, je n'ai pas à les défendre, ils ne sont pas
associés avec moi; il y a un président en dedans qui s'appelle
Ernest Lévesque.
M. Forget: II y en a malgré tout en dedans qui sont vos
membres, que vous revendiquez comme vos membres et au nom de qui vous parlez
ici ce soir.
M. Gagné: Oui, et on les invite à nos
assemblées. S'ils ne viennent pas, on n'est pas pour aller les chercher
chez eux avec des gants blancs.
M. Forget: Est-ce que vous ne pensez pas que, lorsqu'un syndicat
décide d'une action, comme de faire une grève, surtout quand elle
dure un an, et qui ne réussit pas à faire suffisamment
d'unanimité dans ses rangs pour que ce soit accepté par tout le
monde à l'intérieur du syndicat, il est un peu mal placé
pour venir ensuite en commission parlementaire pour essayer de régler le
problème? C'est clair que, si ce sont vos membres ou s'il y a de vos
membres qui sont à l'intérieur... Vous n'en avez pas non plus des
milliers à l'extérieur, même s'il y en a seulement 10, 20
ou 30 à l'intérieur, c'est quand même un nombre
important.
Si, depuis un an, ils ont une ligne complètement
différente de celle que, comme syndicat, vous recommandez, ce peut
être légitime qu'on se pose des questions, à savoir si vous
parlez bien en leur nom. Cela commence à faire long comme dissidence
à l'intérieur du syndicat.
M. Gagné: À l'heure actuelle, à mon sens, je
représente la majorité de mes membres, du syndicat
CSNCommonwealth Plywood.
M. Forget: Je n'ai pas compris, je pensais que la fin m'aiderait
à comprendre. Qu'est-ce qui représente la majorité de vos
membres?
M. Gagné: J'ai dit... M. Forget: Je m'excuse.
M. Gagné: ... dans mon esprit, je représente la
majorité des membres du syndicat CSN-Commonwealth Plywood.
M. Forget: Bon. Sur quoi vous appuyez-vous pour faire une telle
affirmation, particulièrement vis-à-vis de ceux de vos membres
qui sont restés à l'intérieur depuis un an?
M. Gagné: C'est parce que je suis accrédité,
monsieur.
M. Forget: C'est la loi. Il n'y a rien qui, dans les faits, vous
permette de croire qu'ils sont encore vos membres. Ils ne viennent pas à
vos réunions et ils ne payent pas vos cotisations.
M. Gagné: On a eu une injonction contre les autres en
dedans, ceux qui ont signé la convention collective "scab".
M. Forget: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Merci, M. le Président. Vous me permettrez un
court préambule, en mon nom personnel. Il ne s'agit pas d'un
préambule comme on en fait un au début d'une commission, mais
strictement, avant d'interroger le premier témoin, j'aimerais
énoncer ma position, la position que je tiendrai ici, à cette
commission parlementaire.
Il est connu dans le milieu chez nous que je n'ai pas été
verbeux pendant ce conflit, que pour moi ce n'étaient pas les
déclarations qui comptaient, c'était de tâcher d'aider des
gens à se concilier, à se réconcilier de quelque
façon. Je n'ai pas ménagé les rencontres entre les
parties, toutes les parties, d'ailleurs. J'ai même eu le plaisir d'avoir
des rencontres un peu plus prolongées lors d'une occupation de mes
propres bureaux, occupation qui fut d'ailleurs très
civilisée.
M. le Président, je vous dis au départ que, pour ma part,
je n'aurai vraisemblablement aucune question à poser sur le passé
puisque le conflit, je crois le connaître relativement bien.
Peut-être, à la limite, poserai-je des questions, notamment pour
éclairer mes collègues de la commission parlementaire, mais
guère davantage.
Pour moi, la commission vise deux buts, le premier, celui
d'éclairer le Parlement, l'Assemblée nationale et le public en
général, sur la nature du conflit; il en vise également un
second, celui de tenter d'amorcer les éléments de solution. Pour
moi, c'est ce deuxième but qui importe avant toute chose.
C'est donc vers des éléments de solution que j'orienterai
continuellement mes questions à toutes les parties, d'ailleurs. Dans ce
sens, M. le Président, j'aimerais rappeler très brièvement
la situation et poser des questions très précises à notre
invité, M. Gagné.
On sait que le conflit qui dure a connu des péripéties
multiples, notamment des tentatives de solution, que ce soit au moment de
l'accréditation qui est l'une des accréditations les plus rapides
qu'on ait vue au ministère du Travail, que ce soit la nomination d'un
conciliateur à l'époque, qui n'a pas eu grand effet,
malheureusement, que ce soit, par la suite, la demande de moratoire judiciaire,
que ce soit la nomination d'un conseil spécial de médiation
"alégal", comme l'appelait son président ce matin, ou que ce soit
maintenant la commission parlementaire, mécanisme nouveau,
inusité, je crois que tous ces efforts que je résume bien
brièvement tendent vers un seul but, c'est de sortir du bourbier dans
lequel le conflit s'est engagé.
La commission parlementaire demeurant verra à établir
peut-être des éléments de solution en dehors de tous les
jugements, les appels, les plain-
tes relatives ou les sentiments collectifs, relatifs également au
Code du travail. (20 h 45)
Ma première question à M. Gagné est celle-ci: Le
syndicat Commonwealth-CSN a, pour sa part, déjà posé des
gestes devant les tribunaux, a engagé des procédures, soit devant
les tribunaux, soit auprès du ministère du Travail. Est-ce que,
en vue de résoudre rapidement le conflit, vous seriez prêts
à abandonner toute procédure pour régler rapidement le
conflit?
M. Gagné: C'est notre but. Quand on a accepté la
médiation, on le disait clairement. Quand il a présenté
son rapport de médiation, on l'a accepté, parce qu'on veut en
finir. On est prêt à négocier demain matin, nous autres,
avec M. Caine.
M. Fallu: Deuxième question. Vous avez déjà
accepté le rapport de conciliation. Est-ce que, ce soir, au nom de vos
membres CSN, vous êtes prêts à affirmer devant la commission
que vous acceptez toujours le rapport spécial de médiation?
M. Gagné: Je suis certain que si je fais une
assemblée ce soir, ils accepteront qu'on demande au gouvernement de
l'appliquer.
M. Fallu: Par conséquent, vos membres seraient prêts
à se soumettre à une liste de rappels basés
essentiellement sur l'ancienneté et la capacité de travail?
M. Gagné: Oui.
M. Fallu: Dans les conditions de travail, vous seriez
également prêts, comme l'indiquait l'une des recommandations du
conseil de médiation, à soumettre, pour ainsi dire, ce qu'on
appellerait la convention potentielle de travail possible qui pourrait
être signée, à un mécanisme quelconque, par exemple,
une médiation spéciale, trois médiateurs ou quelque chose
de la sorte, inspirée peut-être de la loi 45 pour la
première convention collective, sans être nécessairement un
décret, une procédure extrêmement expéditive sur le
fond?
M. Gagné: S'il n'y a pas d'autres solutions, on serait
prêts.
M. Fallu: Seriez-vous même prêts à partir
comme base avec peut-être, à la limite, je dirais, un minimum,
mais vraiment minime, de négociation sur la vraie ou fausse, qu'importe
pour le moment, convention qui a été signée entre le vrai
ou faux syndicat de l'intérieur et le patron?
M. Gagné: Aller signer une convention qui a
déjà été signée et qui n'est pas la
nôtre, je ne pense pas que... Elle est signée cette
convention.
M. Fallu: Non, mais je dis bien comme base. Une voix:
À partir de là.
M. Fallu: À partir de cela.
Une voix: Pour négocier d'autres choses.
M. Fallu: De toute façon, comme elle finit dans quatre
jours, elle n'est plus bien utile. Elle pourrait servir de base, dirais-je, de
négociation. De toute façon, cette convention...
M. Gagné: Nous serions prêts à
négocier sur la base de la médiation, y compris l'arbitrage et
toute la patente.
M. Fallu: Oui. C'est que le rapport du conseil de
médiation établissait certains critères mais non pas des
contenus. En posant ma question, je pense non seulement à vous autres,
c'est-à-dire au contenu d'une convention collective, mais aussi aux
habitudes qu'il y avait, jusqu'à maintenant, à la Commonwealth
Plywood de signer des conventions qui étaient beaucoup plus que
moyennes. Seriez-vous prêts à négocier sur la base de la
convention qui était, disons, en vigueur il y a un an, quitte à
l'aménager au niveau des salaires, au niveau des griefs, au niveau de la
sécurité de travail, etc.?
Une voix: Celle de 1974.
M. Fallu: Celle de 1974.
Une voix: Cela fait une grosse côte à monter.
M. Gagné: Sur la base de l'autre convention, cela se
pourrait qu'on accepte...
M. Fallu: En l'améliorant, néanmoins.
M. Gagné: Oui, il faudrait l'améliorer et
beaucoup.
M. Fallu: D'accord, non, mais...
M. Gagné: Mais on a déjà
déposé une convention collective à la
médiation...
M. Fallu: Un projet?
M. Gagné: Un projet, oui. Pas une convention, parce que
nous n'en avons pas.
M. Fallu: D'accord. Il est connu quand même qu'à la
Commonwealth Plywood les rembourreurs n'ont jamais eu une convention tellement
avancée, devrais-je dire, par rapport aux conventions habituelles.
C'étaient des conventions relativement simples, qui étaient des
conventions telles qu'on en trouvait il y a quinze ans dans les relations de
travail, mais qu'on ne trouve à peu près plus maintenant...
M. Gagné: C'était une convention... d'après
moi, c'étaient deux patrons qui signaient une convention
collective...
M. Fallu: J'aurais une question précise. Je m'excuse de
revenir sur le sujet. Peut-être que M. le président va vouloir
m'interrompre, mais j'ai l'impression que, tout à l'heure, il y a une
série de questions qui ont été formulées et le type
de réponses que vous avez données ne rend peut-être pas
justice aux faits, à la réalité. Et si vous le permettez,
M. le président, je voudrais revenir sur un sujet sur lequel on a
déjà posé des questions pour tenter de l'éclairer
de façon plus précise.
Le Président (M. Cardinal): Je vous écoute et je ne
préjuge de rien.
M. Fallu: Merci, M. le Président! À un moment
donné, le syndicat CSN-Commonwealth a compris quelque 180 ou 185
signatures. Cela a été le moment le plus fort.
M. Gagné: Oui.
M. Fallu: C'est 180 ou 185 signatures sur 223 possibles, au 14
septembre. D'accord, c'est à peu près cela?
M. Gagné: Oui, à peu près cela.
M. Fallu: Au moment de l'accréditation, il y avait 140
cartes signées. Il en est arrivé quelques-unes
après...
M. Gagné: Oui...
M. Fallu: ...dans les journées qui ont suivi, entre
autres, au début d'octobre, ou même avant cela, après le
dépôt de la demande d'accréditation.
M. Gagné: II s'en est signé le 19 septembre et le
20.
M. Fallu: D'accord. À ce moment-là, la demande
d'accréditation était donc déjà
déposée.
M. Gagné: Oui.
M. Fallu: Bon! Maintenant, mes questions vont tenter
d'éclairer un peu ce que le député de Saint-Laurent
voulait savoir. Le syndicat a donc dans son accréditation 144 demandes,
auxquelles se sont ajoutées 40 ou 45 autres par la suite, et
l'unité d'accréditation couvre l'ensemble des 223 membres de
l'unité qui étaient en poste avant le 16 septembre, avant les
mises à pied. On en convient bien?
M. Gagné: C'est cela.
M. Fallu: D'accord! J'aimerais, pour autant que vous pouvez me le
dire, pour autant que votre mémoire ne flanchera pas trop, faire de
petites analyses de cela.
Sur 223 membres, il y en a 118, et non 105, comme on l'a dit souvent,
qui ont été mis à pied, et 105 qui n'ont pas
été mis à pied. Sur les 105 non mis à pied, il y en
avait combien approximativement qui avaient signé une carte de membre?
Est-ce que c'étaient la moitié, les deux tiers, le tiers, le
quart? D'un point de vue légal, ils sont tous...
M. Gagné: Dans les 105, on a plus que la moitié des
cartes...
M. Fallu: D'accord! Cela veut dire que, dans les 118, il y a
également plus de la moitié, peut-être même les deux
tiers?
M. Gagné: Sur les 118 congédiés, il y en
avait trois qui n'avaient pas leur carte de la CSN.
M. Fallu: D'accord!
M. Johnson: En dedans?
M. Fallu: Non pas en dedans, mais 70 qui n'ont pas
été mis à pied. La différence doit toujours
être faite entre la mise à pied et en dedans.
Une autre question précise pour moi, ça
éclaire le sujet si vous permettez, Lorsqu'il y a eu ces fausses
cartes CSN signées à l'intérieur, dès que vous avez
eu vent de ça, vous avez demandé une injonction pour qu'ils
n'utilisent pas le nom CSN. Avez-vous songé, entre autres, à
entamer une procédure relativement à un faux, par exemple,
fabrication de faux, usage de faux, parce que c'était quand même
le nom d'une centrale syndicale qui aurait été utilisé
peut-être d'une façon abusive?
M. Gagné: Pour une chose criminelle à amener devant
un juge et tout ça, on pensait qu'on avait assez de poursuites sans en
créer de nouvelles. Donc, on avait des injonctions et...
Premièrement, on a toujours eu l'idée que le conflit ne se
réglerait pas en cour. Donc, le moins de poursuites possible.
C'était un avantage pour nous, naturellement, dans le but de
négocier une convention, mais dans le temps que nous faisons attention
pour ne pas trop en amener devant la cour, M. Caine y allait, lui, avec
joie.
M. Fallu: Bon! Moi, j'arrive à ma question-clé. On
a dit, on a répété à plusieurs reprises alentour de
la table, entre autres, ce matin, qu'il s'agissait d'un conflit intersyndical.
Donc, que les syndicats règlent leur conflit intersyndical et,
après ça, le patron se dit prêt à négocier,
se dit prêt à faire la grande réconciliation. Mais,
d'abord, que le conflit intersyndical se règle. Bon! S'il en
était ainsi on va prendre ça comme hypothèse
après tous les garrochages de roches qui sont arrivés,
après tous les mots que les gens se sont dits entre eux, traités
de scabs ou cochons de CSN ou ce qu'on veut, maintenant qu'on est prêt
à dire qu'on veut régler, vous, comme président du
syndicat CSN, par rapport aux gars d'en dedans, êtes-vous prêts
à faire la paix et dire: Sur la base d'ancienneté, demain matin,
on entre, on signe une convention, tous ensemble, selon le syndicat
accrédité, c'est-à-dire CSN, et il arrive des
élections, et tout s'ensuit?
M. Gagné: On l'avait déjà accepté
sous le projet de M. Blain, la médiation.
M. Fallu: Donc, vous êtes prêts à travailler,
tout le monde ensemble, rentrer dans l'usine...
M. Gagné: On est prêt sur...
M. Fallu: ..."scabs", non-"scabs", comme vous les appelez...
M. Gagné: ...sur la clause de l'ancienneté, selon
l'ancienneté.
M. Fallu: Bon! D'après vous, qu'est-ce que les gens de
l'intérieur, comme on les appelle harmonieusement ici, en pensent,
pensez-vous? Avez-vous eu des contacts avec eux?
M. Gagné: Non.
M. Fallu: Avez-vous tenté, entre-temps, en ligne directe
ou de quelque façon, de voir s'il n'y a pas moyen de régler
ça entre vous autres? (21 heures)
M. Gagné: Premièrement, M. le député,
on avait une injonction selon laquelle, si on parlait à un "scab", il le
rapportait à la compagnie et on avait droit à l'outrage au
tribunal. C'était le type d'injonction et je m'en souviens très
bien.
M. Fallu: En vertu de quelle injonction?
M. Gagné: Celle du mois de novembre. C'est l'injonction du
22 novembre. C'est le juge Meyer qui l'a émise. Ce n'était pas
écrit carré comme cela, mais c'était marqué en
voulant dire que, si on les approchait, si on les intimidait, toute
intimidation pouvait nous valoir un outrage. On avait assez à en poigner
quand on allait sur la ligne sans en poigner pour aller leur parler sur le
trottoir.
M. Fallu: D'après vous, M. Gagné on va se
rencontrer fatalement la semaine prochaine parce qu'à l'heure qu'il est,
il est évident qu'on risque de se revoir la semaine prochaine si,
autour de la table ici, dans ce salon rouge, sous la présidence de
l'Assemblée nationale, on en arrivait à établir, non pas
tous les torts ou toutes les raisons ou quoi que ce soit, parce qu'on voit bien
que, si on veut laisser aller cela devant les tribunaux pour régler tout
cela à l'automne, et le printemps prochain et dans six ans ou dans sept
ans, on n'en sortira pas...
Chez vous, les gens tiennent-ils à leur job?
M. Gagné: C'est clair. Cela fait un an et on est encore
là. C'est parce qu'on tient à notre job.
M. Fallu: Cela veut dire qu'il n'y a qu'une seule chose que vous
désirez et c'est de régler.
M. Gagné: C'est de régler, d'avoir une convention
collective qui se tienne debout, de pouvoir travailler et de garder nos droits
à un certain moment, et de garder nos membres.
M. Fallu: Merci. Pour moi, c'est terminé.
Le Président (M. Cardinal): Y a-t-il d'autres questions
à M. Gagné?
M. Johnson: Ce n'est pas une question que j'aurais à poser
à M. Gagné. Si personne d'autre n'en a, je voudrais simplement
faire une mise au point et corriger une affirmation que j'ai faite ce matin
à partir d'une confusion dans les termes. J'ai utilisé
l'expression "logo" en parlant des fausses cartes. Il ne s'agit pas du logo,
mais bien d'une étiquette syndicale qui est reproduite sur les cartes
auxquelles je me suis référé et qu'aurait fait signer M.
Thériault, cartes, cependant, qui portent la mention Syndicat des
travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN, mais ce n'est pas le logo de la CSN
qu'on y retrouve. C'est simplement au bas de la feuille. La confusion est venue
de cela. Au bas de la carte, il y a simplement l'étiquette syndicale de
la compagnie qui a imprimé les cartes. C'était simplement pour
clarifier cela pour les fins du journal des Débats.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Dans ce cas,
puis-je... M. Gagné.
M. Bazin (Jean): Avec votre permission, M. le Président,
Jean Bazin.
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Bazin: Simple question d'information, parce qu'il a
été question, cet après-midi, de la possibilité de
poser des questions aux différentes personnes qui sont invitées
et cette procédure n'avait pas été arrêtée.
Peut-être que c'est le moment de la préciser. Non pas que j'ai
l'intention de poser des questions à M. Gagné, pas du tout, mais
de la façon que la commission parlementaire procède, il se peut
qu'il y ait des parties ici qui aient des questions à poser aux
différents invités. Alors, cela serait peut-être bon de
préciser immédiatement les règles du jeu à ce
niveau.
Le Président (M. Cardinal): Je pensais, M. Bazin, que je
les avais précisées en répondant à Me Casgrain.
Personne dans l'auditoire, si je puis ainsi l'appeler de façon
générale, ne peut interroger ou contre-interroger les
invités ou les témoins. Tout se fait à partir de la
commission, et uniquement à partir de la commission.
S'il y a des questions suggérées ou autrement, vous vous
adressez, comme cela se fait toujours, aux membres de la députation. Je
n'accepte pas que la salle je n'aime pas l'expression puisse
intervenir dans le débat. C'est une affaire de la commission
parlementaire. Évidemment, j'admets que... Je n'ai pas l'intention de
commencer un cours de procédure parlementaire. Déjà, on me
trouve trop long dans mes interventions, mais il est certain que nous ne sommes
pas devant un tribunal, même si plusieurs de nos règles sont par
analogie assimilables à un tribunal, mais lequel? Alors, je pense que
j'ai répondu à la question.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, j'en ai
glissé un mot à nos collègues de
l'Opposition. Dans le cas du témoignage de M. Gagné, on
aurait peut-être eu avantage à faire témoigner en
même temps M. Hallé et M. Pepin, parce que finalement l'ensemble
des questions aurait peut-être trouvé des réponses plus
rapidement. Je suggérerais que dans le cas des deux prochains
témoins, M. Hallé et M. Pepin, ils prennent simplement place avec
M. Gagné et quand on arrivera à M. Lévesque, Mlle Grignon
et M. Thériault, on procède de cette façon où les
trois sont là et on pourra adresser les questions...
M. Bellemare: Vers quelle heure, M. le Président? Je
voudrais savoir...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! C'est déjà presque une autre réponse à
Me Bazin. À l'ordre! La commission étant maîtresse de ses
travaux, si on accepte cette façon de procéder, j'en suis
très heureux, mais je voudrais auparavant remercier M. Gagné
d'avoir subi toutes ces questions, d'y avoir répondu et d'avoir
été à la disposition de la commission de
l'Assemblée nationale, et j'insiste, et non pas de tel ou tel parti ou
de l'exécutif ou de l'Opposition. Au nom de l'Assemblée
nationale, je le remercie vraiment. Je suis obligé de lui demander,
comme les travaux ne sont pas terminés, de demeurer à notre
disposition tout en étant assuré qu'il n'aura pas à
revenir ce soir, je pense, si la commission veut bien le libérer.
M. Johnson: M. le Président, dans ce contexte,
j'appellerais peut-être, si vous êtes d'accord, M. Hallé et
M. Pepin. Ce qui n'empêche pas que M. Gagné puisse rester
là, pour des questions additionnelles, peut-être, et qu'on termine
le bloc CSN, si on veut.
M. Bellemare: M. le Président, je vous demanderais une
directive.
Le Président (M. Cardinal): Oui, certainement.
M. Bellemare: Depuis quand le ministre va-t-il donner sa
stratégie indirectement sous des couverts obscurs pour empêcher
d'entendre la compagnie maintenant? Pourquoi est-ce qu'on n'entendrait pas
aussi la compagnie maintenant qui est ici depuis ce matin, qui n'a pas dit un
seul mot dans le conflit.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Cette question a été posée ce matin, cet
après-midi...
M. Bellemare: Oui, mais la majorité nous a battus.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, mais...
M. Bellemare: Vous devez être le représentant, le
défenseur des "oppositionnistes".
Le Président (M. Cardinal): Je ne suis pas le
défenseur des "oppositionnistes"...
M. Bellemare: Le défenseur, d'après la loi.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je ne peux quand même pas renverser le gouvernement parce
que je suis président.
M. Bellemare: ... d'équité.
M. Pagé: Est-ce que vous le feriez?
Une voix: Non.
M. Pagé: Est-ce que vous le feriez?
Le Président (M. Cardinal): Avec la majorité qui
existe, ne me posez pas de questions hypothétiques.
Une voix: À l'ordre!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Johnson, je comprends votre
indignation toute parlementaire, mais je fais mon possible et vous avez assez
d'expérience pour le reconnaître.
M. Bellemare: On arrête à minuit toujours, n'est-ce
pas?
Le Président (M. Cardinal): Si vous reposez la question,
je vous dis que le règlement sessionnel m'oblige à 24 heures
précises à lever la séance sine die.
M. Bellemare: Alors, j'espère qu'on va avoir quelques
minutes.
Le Président (M. Cardinal): Alors, M. Ghislain
Hallé et M. Marcel Pepin, si vous voulez chacun vous identifier, donner
vos titres et qualités, s'il vous plaît.
M. Hallé (Ghislain): Ghislain Hallé, je suis
conseiller syndical à la Fédération nationale des
syndicats du bâtiment et du bois CSN.
M. Pepin (Marcel): Marcel Pepin, conseiller à la
Confédération des syndicats nationaux.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre, et nous
suivons le même ordre.
M. Johnson: M. le Président, j'ai une série de
questions et je vais me contenter de relire des notes que j'ai
préparées. En votre qualité d'organisateur, M.
Hallé, est-ce que c'est vous qui vous êtes occupé de
l'organisation du syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN?
M. Hallé: Une première chose, je ne suis pas, comme
tel, organisateur. Je suis ce qu'on appelle un conseiller, dans l'ancien terme,
technique, soit pour les arbitrages et la négociation des conventions
collectives. Par hasard, il s'est adonné quand même, pour
compléter votre question, qu'effectivement le 13 août 1977
j'étais présent à l'assem-
blée d'organisation et de fondation du syndicat des
employés de la Commonwealth Plywood-CSN.
M. Johnson: Est-ce qu'il est exact que, le 29 août, vous
avez fait signifier à M. Donat Thériault 131 démissions de
l'Union des rembourreurs?
M. Hallé: Comme je ne suis pas organisateur, je dois vous
dire que c'est par ouï-dire que je sais que cela s'est fait cette
journée-là...
M. Johnson: Ce n'est pas vous qui l'avez fait. M.
Hallé: Ce n'est pas moi qui l'ai fait.
M. Johnson: Combien de membres, à votre connaissance, y
avait-il en date du 30 août 1977?
M. Hallé: À ma connaissance, c'était entre
140 et 150 membres, mais il y avait des démissions; comme je vous ai
dit, ce n'est pas moi qui ai fait le dépôt.
M. Johnson: D'accord. Vous avez participé à titre
de conseiller technique, comme on disait dans l'ancien vocabulaire, pour la
CSN, aux négociations.
M. Hallé: Oui. Enfin, si on peut appeler ça des
négociations.
M. Johnson: Est-ce que vous pourriez me décrire ces
tentatives ou ces négociations?
M. Hallé: Première des choses, effectivement, la
journée de la grève, le 19 septembre, je n'étais pas
là parce que j'ai été appelé à
l'extérieur, à Cowansville, au syndicat de Vilas Furniture. J'ai
téléphoné au bureau et c'est un de mes camarades qui m'a
remplacé cette journée-là. Je pense que cela
apparaît dans les notes. De toute façon, le commissaire
général, M. Blain, était au courant de cette question, je
n'étais pas là cette journée-là. Je suis
entré dans le dossier, parce qu'on me l'avait confié et, en plus
de ça, j'y étais lors de la journée de fondation, dans les
jours qui ont suivi ou à peu près. On a commencé à
mettre en place des structures pour préparer la convention collective et
étudier comment on réglerait le conflit qui, à
l'époque, avait l'air d'un conflit temporaire causé par des mises
à pied qu'on qualifiait d'illégales en vertu de l'article 45 de
la Loi de la qualification de ta main-d'oeuvre. C'est ça qu'on a fait
les premiers jours.
Je ne peux pas vous parler de la grève, du moment de
l'assemblée, ainsi de suite; je pourrais vous en parler, mais c'est par
autrui, parce que je n'étais pas là ce jour-là et les
jours qui ont suivi.
La première journée où, officiellement, selon le
Code du travail, nous avons eu des rencontres, c'était après
avoir reçu l'accréditation du ministère prouvant que nous
représentions effectivement le syndicat. Nous avons eu
différentes assemblées, presque deux ou trois par semaine. Il
faut que je vous explique, et là, je pense que je peux répondre
à une question du député de Saint-Laurent, qu'ef-
fectivement, si je suis nommé dans tel ou tel dossier par le
président de la fédération, M. Bourdon, ou le directeur
coordonnateur, M. Gravel, je dois être accepté, par
l'assemblée du syndicat où je vais, comme étant son
représentant de négociation. Je ne me rappelle pas la date
exacte, parce que je n'étais pas nécessairement à
l'assemblée, même si j'avais rencontré les membres, car
j'étais ailleurs à ce moment-là. J'ai été
accepté.
Le 6 octobre, même si on n'avait pas fini, on était en
train de produire le projet de convention collective. Devant l'urgence de la
situation, devant le fait qu'on avait reçu uniquement, par écrit,
le 4 ou 5 octobre, l'accréditation... Effectivement, c'était
très rapide, le 4 ou le 5 octobre, probablement le 5 octobre. On savait
auparavant, parce qu'on avait eu des communications avec le ministère,
ainsi de suite, qu'on serait probablement accrédité parce qu'on
savait que M. Thériault s'était désisté, on savait
que la compagnie s'était désistée aussi. Il n'y avait pas
d'objection de part et d'autre.
Le 6 octobre, même si la convention collective n'était pas
prête, je suis allé, avec le comité exécutif du
temps il y a eu certains changements de personnes entre-temps, ainsi de
suite, mais, quand même, le comité exécutif du syndicat du
temps rencontré M. Verville qui était gérant de la
compagnie. En fait, ce n'était pas M. Verville qu'on voulait rencontrer,
mais on est allé à la porte de la compagnie, à la porte
centrale, sur le boulevard Labelle, et nous avons demandé à
rencontrer M. Caine. On a eu de la difficulté à entrer, parce
qu'il y avait beaucoup de gardes du corps, ainsi de suite; il y avait trois
hommes et deux femmes avec moi. Tous des gens de ma grosseur ou de celle de M.
Gagné et on a eu affaire à quatre ou cinq gardes du corps assez
imposants. On est demeuré dans l'antichambre, entre les deux portes en
avant, et M. Verville est venu nous rencontrer.
J'avais été mandaté, dans une assemblée
précédente, de rencontrer la compagnie pour régler le
problème et ensuite d'entreprendre des négociations de
façon normale. Effectivement, ce n'est pas normal d'entreprendre des
négociations alors qu'on n'a même pas de projet, avec une
grève. Il y avait énormément de justification
là-dessus et on se pensait nettement très justifié, on le
pense toujours. (21 h 15)
Cependant, ce n'est quand même pas une situation normale et on
voulait essayer de régler le problème et, une fois
rentrés, négocier la convention collective de façon
habituelle, selon le Code du travail, avec tous les mécanismes
ordinaires, etc.
À ce moment-là, j'ai mentionné qu'on était
prêt à les rencontrer à n'importe quel temps. Je sais que
c'était la fin de semaine de l'Action de grâces. Le 6 octobre;
pour autant que je me souvienne, c'était un jeudi et les samedi,
dimanche et lundi, c'était congé. J'ai laissé une feuille
avec mon nom à M. Verville, qui l'a reçue, de même que mon
adresse, mon numéro de téléphone à mon bureau et
à la maison, chez moi, en
disant que j'étais disponible 24 heures par jour, ce que j'ai
été effectivement à ce moment-là. J'ai
été pratiquement 24 heures par jour à la maison. Je leur
disais: Étant donné l'acuité du problème, on est
prêt à vous rencontrer à n'importe quel temps, on a le
mandat, que ce soit en fin de semaine, à n'importe quelle heure, on vous
rencontre.
Nous n'avons pas reçu de réponse. Comme vous demandiez
lés étapes qu'on a produites, face à cela, le 11, comme
j'avais eu le mandat de l'assemblée du 6 ou c'est le 11 au matin,
vous me comprendrez, après un an, j'ai quand même une vingtaine
d'autres dossiers dont plusieurs ont marché en même temps, cette
année, je ne me souviens pas exactement des dates mais je sais
que, le 11, j'ai demandé la conciliation, sauf que je ne me souviens
pas... la décision pour demander la conciliation, ce n'est pas moi qui
l'ai prise, c'est l'assemblée générale du syndicat, compte
tenu des résultats. Cela s'est fait le 11 ou vers le 6, sous condition
d'être reçus ou pas par l'employeur, là-dessus.
Notre but était très simple, c'était de dire:
Merde! S'ils ne veulent pas négocier, nous sommes prêts à
tout faire et on va se faire aider quelque part et le ministère est
là pour nous aider à la conciliation.
Le 11 et les journées suivantes, je n'ai pas eu de
réponse, ni de la part du ministère, c'est compréhensible,
ni de la compagnie. Cela pouvait être un peu prématuré. De
toute façon, je n'ai pas reçu de réponse, j'ai alors fait
parvenir un télégramme à M. Caine et à Me Bazin,
parce que je savais qu'il avait été dans le dossier et parce que
le désistement de la compagnie, lors de l'accréditation,
c'était Me Bazin qui l'avait signé. Or, sauf erreur, il arrive
très fréquemment, en relations de travail, que l'avocat qui
s'occupe de l'accréditation et d'autres choses du genre, s'occupe aussi
des négociations, par la suite.
J'ai reçu, dans la semaine qui a suivi, une réponse de Me
Bazin disant que cela ne le regardait pas, que son client ne lui avait pas
donné de mandat, même si je savais pertinemment par d'autres
sources, que, dans ce temps-là, il y avait une convention collective qui
était en train de se signer avec M. Thériault et son groupe de
"scabs", à l'intérieur. De toute façon, c'est la
réponse que j'ai eue.
De la part de M. Caine, cela a pris plus de temps. Il me dit finalement
qu'il avait attendu que la convention collective soit acceptée par le
ministère du Travail, ou plutôt le dépôt de la
convention collective, et, à ce moment-là, il m'a dit que ce
n'était pas son problème, qu'il avait déjà un
syndicat et qu'il avait déjà une convention collective. Pour
autant que je me souvienne, ce sont les télégrammes qui avaient
été déposés à ce moment-là. Moi, je
sais que je les ai fait parvenir le 13. Les autres, les dates, je m'en souviens
plus ou moins.
Le 18 octobre, j'ai reçu une réponse, mais informelle, de
la part de Mlle ou Mme Maheux, du ministère du Travail, me signifiant
qu'effectivement notre demande de conciliation serait refusée. La
réponse formelle, je ne me rappelle pas la date, les conseillers
juridiques de la CSN en ont pris connaissance par la suite et ce sont eux qui
ont conservé les pièces là-dessus, d'autant plus que tous
mes papiers officiels sont disparus avec les procédures judiciaires, ils
sont tous passés par là, ils sont tous en dépôt
quelque part.
Effectivement, le 18 octobre, je sais que j'ai parlé avec Mme
Maheux, qui m'a dit que ce serait refusé. Pendant tout ce temps, comme
je vous l'ai dit, nous étions en train de préparer notre projet
de convention collective. La préparation se faisait de la façon
suivante: tout d'abord, nous avons rencontré les gens par
départements. Vous allez me dire effectivement que c'étaient des
grévistes, oui. Je me souviens très bien qu'à ce
moment-là les demandes et les affichages ont été
envoyés par lettre, par la poste, parce qu'on était en
grève, qu'il y en avait peut-être qui étaient en dedans,
d'autres qui étaient allés travailler à
l'extérieur. Cela a donc été envoyé par la poste,
par le Conseil central des Laurentides.
On a eu des rencontres, par départements, pour étudier les
problèmes de chacun des départements. Cela a duré à
peu près une semaine et demie. Il y a une assemblée où je
n'ai pu me rendre à la dernière minute et il y en avait trois ou
quatre, comme cela. Le 23 ou le 24 octobre, nous avons eu la dernière
rencontre de l'exécutif. Nous avons fait le résumé de cela
et nous avons fait le projet de convention collective définitif.
Je me suis présenté, à ce moment-là, avec
l'exécutif du syndicat, MM. Gagné et autres, pour faire accepter
ou refuser les clauses, par l'Assemblée générale, le matin
du 25 octobre à l'église du Sacré-Coeur, je crois,
à Sainte-Thrérèse, du projet de convention collective que
nous avions préparé. Certaines clauses ont été
modifiées, d'autres ont été conservées comme
telles. La majorité a été conservée comme telle.
À cause des réunions de différents services,
effectivement, nous savions où les gens voulaient aller.
L'après-midi du 25, nous nous présentions et déposions
chez l'employeur le projet de convention collective tel qu'amendé
à l'assemblée. Tel qu'amendé à l'assemblée,
cela veut dire qu'effectivement nous n'avions pas eu le temps de faire faire
les corrections sur l'original que nous avions fait préparer par ma
secrétaire, au bureau. Beaucoup de documents ont l'air d'être
officiels. Cela peut être moi à un moment donné qui prends
les notes à une assemblée et le secrétaire me donne par la
suite les résolutions officielles. Je les fais corriger par ma
secrétaire, parce qu'effectivement nous ne sommes pas un syndicat
d'employés de bureau où se trouvent des femmes ou des hommes qui
tapent facilement à la machine. C'est soit le conseil central des
Laurentides ou soit moi pour la fédération qui s'occupe de faire
taper cela.
Comme nous n'avions pas eu le temps, nous avons fait les corrections
à la main. L'après-midi, nous nous sommes présentés
à l'avant, tout était barricadé ou à peu
près chez la Commonwealth Plywood, par l'entrée
principale, ce qu'on appelle la cour à côté, tout
près des bâtisses qui avaient, semble-t-il, brûlé
à un moment donné, qui ont effectivement brûlé, et
nous avons demandé
aux gardes du corps je me le rappelle très bien, parce
qu'ils avaient des chiens, tout l'arsenal complet ou à peu près
de rencontrer M. Caine. M. Caine n'était toujours pas
là.
Nous croyions qu'il était là, parce que nous l'avions vu
entrer à un moment donné dans la journée. En tout cas, je
ne peux pas vous dire qu'il était là, nous n'étions pas en
dedans. Les autos, à ce moment-là, étaient
stationnées à l'intérieur de l'usine pour la
majorité des fois. Nous ne savions pas s'il était là, sauf
que M. Verville, toujours gérant, est venu nous rencontrer.
Nous lui avons déposé le projet. C'est moi qui ai
parlé. J'étais, à ce moment-là, au comité de
négociation qui avait été élu à
l'assemblée. Nous lui avons déposé le projet et nous lui
avons expliqué que ce n'était pas final, etc., que c'était
ce qu'on appelle en négociation un projet de convention collective que
nous étions prêts à négocier, parce qu'on trouvait
que cela faisait longtemps que la grève durait à ce
moment-là et qu'on avait envie de la régler.
Il m'a dit: Moi, je ne peux pas prendre de décisions, je suis un
petit poisson selon son expression vous allez en avoir des
nouvelles.
J'ai dit: De toute façon, vous avez mon numéro de
téléphone chez moi, à la maison, n'importe où, je
suis disponible n'importe quand. Donnez-moi des nouvelles.
Nous n'avons pas eu de nouvelles. Ce qui fait que le 28 octobre
des fois on attend un employeur qui est très au courant un peu
longtemps, mais pas lorsqu'il y a une grève qui dure déjà
depuis un mois et demi et dont la tension est très aiguisée par
le conflit qui existe nous avons fait une demande de conciliation.
J'ai appris le 31 octobre, par téléphone, par le
ministère du Travail, que celle-ci serait reçue. Par la suite,
vers le 3 novembre, elle a été acceptée.
Ce sont là effectivement les démarches des
négociations. Pour le reste, il n'y en a pas eu. Comme conseiller
technique, je n'ai pas eu à négocier plus qu'il ne faut, plus que
cela.
M. Johnson: M. Hallé, vous dites qu'en tant que
représentant de la FNBB vous vous occupez de plusieurs dossiers, que
cela a été une époque particulièrement active pour
vous. Évidemment, je ne vous ferai pas rigueur de ne pas vous rappeler
nécessairement avec précision l'ensemble des dates. Il demeure
quand même qu'il y a une couple de choses un peu agaçantes quand
je revois le dossier du ministère là-dessus. Vous avez dit,
à un moment donné: On fait une demande de conciliation, le
ministère refuse.
Bon, avant que quelqu'un saute à pieds joints là-dedans
pour dire qu'on ne fait pas notre travail, je voudrais simplement vous
souligner qu'à votre première demande de conciliation, le 11
octobre, sur la mention et vous faites au moment d'une demande de
conciliation une mention, et le service vous demande de le faire, comme vous le
savez vous étiez à ce moment-là régis par
l'ancien Code du travail, qui prévoit...
M. Hallé: Oui, effectivement...
M. Johnson: ... qu'il doit y avoir une période de
négociations qui doit se prolonger durant 30 jours. Vous savez donc
qu'il est bien normal qu'à l'époque le ministère,
automatiquement, refuse d'accorder un conciliateur, s'il n'y a pas eu cette
période de 30 jours. Mais je vous parle de l'époque où le
code précisait 30 jours, ce qui n'est plus le cas maintenant.
M. Hallé: Je comprends très bien les règles,
sauf qu'à ma connaissance et je puis me tromper, M. le ministre
c'est plutôt une tradition qu'une règle, et dans ce cas
précis, effectivement, il y avait quelque chose de très pressant.
L'employeur refusait de négocier et on était en grève
depuis bientôt un mois. C'était le 11 et la grève a
commencé le 19. Alors, c'est évident, et je vous l'ai dit tout
à l'heure, que ce n'était pas un cas régulier. C'est pour
cela qu'on a fait la demande plus tôt parce qu'effectivement on avait
besoin du ministère comme conciliateur à ce moment-là.
M. Johnson: Je veux bien, sauf que la seule mention que vous
faites sur votre formulaire, c'est "aucune rencontre". Deuxièmement,
vous avez fait une seconde demande de conciliation le 20 octobre, vous avez
écrit sur le document: Demande formelle de négocier fut faite aux
locaux de la compagnie le 6 octobre 1977 et réitérée le 19
par télégramme. Et sur la formule, aucune rencontre,
malgré les demandes répétées du syndicat. C'est
votre seconde demande de conciliation.
Là se sont déroulés les événements
que vous décrivez. Vous êtes, à ce moment-là, dans
une situation de crise manifeste; il y a, de fait, un débrayage, il y a
des gens à l'extérieur, il y a du piquetage, il y a une partie
des employés qui semblent être entrés et votre
troisième demande de conciliation, le 28 octobre, celle, finalement,
à laquelle le ministère a donné cours, mentionne ceci:
Nous avons rencontré le gérant de la compagnie je
présume que c'est M. Verville...
M. Hallé: C'est cela, oui.
M. Johnson: ... les 6 et 25 octobre, et nous avons envoyé
un télégramme le 13 octobre. À la dernière
rencontre, le gérant s'est contenté de commentaires sur
l'épaisseur de notre projet de convention et il a refusé de
négocier.
Évidemment, la mention que vous aviez rencontré le
gérant le 6 octobre, vous auriez pu nous la faire dans votre
première demande de conciliation du 11, de même que vous auriez pu
également vous référer à cela dans votre seconde
demande de conciliation. On ne peut pas présumer que l'appareil, qu'est
le ministère, sait exactement ce qui se passe dans les 2000 conventions
collectives qui sont négociées tous les ans. Nous avons besoin de
renseignements et on ne les avait pas à ce moment-là.
M. Hallé: Non...
M. Johnson: Maintenant, encore une fois, je ne vous en tiens pas
rigueur, M. Hallé. J'essaie
seulement de voir comment tout cela a pu se dérouler.
Quand avez-vous été mis au courant que les employés
de l'intérieur avaient déposé une convention collective au
ministère?
M. Hallé: Trois jours après qu'ils l'eurent
déposée, je ne me rappelle pas la date du
dépôt...
M. Johnson: Donc, le 17...
M. Hallé: C'est cela, sauf que je m'en doutais, parce que
le service juridique de la CSN me l'a appris trois ou quatre jours
après, d'ailleurs, c'est eux qui avaient envoyé la lettre
à ce moment-là. Comme je vous l'ai expliqué tout à
l'heure, j'avais d'autres dossiers.
Maintenant, si vous me permettez de répondre sur une ou deux
choses. Effectivement, le 6 octobre, je pense que le conflit était
déjà connu et un peu plus précisé mais, de toute
façon, je ne suis pas avocat et pour moi, comme il y avait conflit, je
croyais que le ministère surtout que le conflit était
rendu public répondrait là-dessus.
C'est pour cela que je vous dis que les règles sont plutôt
des règles internes, probablement à la Fonction publique, qui
n'apparaissent pas dans tous les règlements. Lesdites règles ne
sont pas claires du tout et c'est peut-être un problème du Code du
travail qui ne soit pas dû uniquement à vous, mais...
M. Johnson: Maintenant elles sont différentes.
M. Hallé: ... avec les anciens gouvernements. Mais ce
n'est pas très clair, que c'était la façon -je parle
de l'ancien code d'obtenir la conciliation.
Or, effectivement, nous, on avait un problème, donc on l'a
demandé à ce moment-là. La mention a été
faite. Maintenant, que ce soit le 13 ou le 19, je dois vous avouer que j'ai un
problème même de mémoire, parce qu'à un moment
donné moi, je crois que c'était effectivement le 13, mais
sur la copie du télégramme qu'on a, parce que j'ai regardé
en cour au mois de janvier, par la suite, quand on l'a reçu et la copie
du télégramme du CN est très peu claire, on ne sait pas si
c'est un 3 ou un 9 ou un 6, il se pourrait que ce soit le 19 comme il se
pourrait que ce soit le 13, mais je ne pourrais jurer de rien là-dessus.
(21 h 30)
M. Johnson: D'accord. Qu'avez-vous fait pour vous-mêmes ou
pour la CSN j'adresse ma question peut-être également
à M. Pepin, M. Gagné ou à des personnes-ressources que
vous avez avec vous qu'est-ce que vous avez fait pour essayer de contrer
la signature de la convention collective ou du document par M. Thériault
ou encore pour contrer le dépôt de la convention?
M. Pepin: Si vous permettez, au meilleur de la connaissance et ce
qu'on m'a rapporté, dès que le service et les services chez nous
ont appris qu'il y avait une telle chose, il y a eu communication
téléphonique de la part de notre service avec M.
Laviolette. Il y a eu télégramme envoyé aussi, je
pense, au commissaire général du travail qui, à ce
moment-là, portait le nom de commissaire-enquêteur en chef, pour
l'aviser qu'une telle chose s'en venait. Est-ce qu'il l'a eu avant de
l'approuver ou après? Je n'en sais absolument rien, mais ce qu'on m'a
rapporté, c'est que les choses, tel que je vous l'ai dit, ont
été faites.
M. Johnson: D'accord. Alors, pour resituer encore ces
événements dans la chronologie précise de leur
déroulement, vous avez effectivement communiqué avec le bureau du
commissaire-enquêteur en chef par téléphone
ça, ça nous a été confirmé par M. Plourde
et vous avez signifié, par lettre recommandée, si je me
souviens bien, signée par un avocat du contentieux chez vous, votre
opposition, dans une lettre assez longue qui exprimait votre conviction qu'il
s'agissait d'une "fausse convention collective", etc.
Maintenant, les oblitérations au ministère sont
très claires. La convention a été déposée le
14, quelque part dans la matinée, et la lettre en question a
été oblitérée au ministère pour
réception l'après-midi. Je voudrais simplement que ce soit
très clair, ça, parce que ça fait trop longtemps que
j'entends charrier dans la nature depuis dix mois que le
commissaire-enquêteur avait quelque chose entre ses mains au moment du
dépôt, il l'a eu après.
D'autre part, l'autre problème qui se pose, évidemment, et
je sais que, du côté...
M. Pepin: Me permettez-vous, M. le ministre, là-dessus,
Mme Doyon, qui est avocate...
M. Johnson: Ou Mme Doyon, oui.
M. Pepin: ... de notre bureau est ici, je pense qu'elle
mérite de répondre pour clarifier, s'il y a moyen, ces
choses-là. Est-ce que le président permet que Mme Doyon, avocate,
réponde, puisque c'est une question, je pense...
Le Président (M. Cardinal): La commission est-elle
d'accord?
Des voix: Oui, pas de problème.
M. Bellemare: Même si on s'opposait, ça ou
rien...
Le Président (M. Cardinal): C'est aussi bien. Avec
l'autorisation de la commission, Mme Doyon.
Mme Doyon (Louise): Effectivement...
M. Pepin: Prends le micro, par exemple, tu vas être
mieux.
Le Président (M. Cardinal): Oui, s'il vous
plaît!
Mme Doyon: Merci. Effectivement, M. le ministre, c'est
moi-même qui ai communiqué avec M. Lecavelier, à
Montréal, commissaire-enquêteur en chef adjoint à
l'époque, et il était environ 10
heures dans la matinée. Je lui ai signifié que j'avais
été informée par les personnes concernées à
Saint-Jérôme qu'on avait tout lieu de croire qu'il y aurait eu une
convention collective signée entre certaines personnes que nous
considérions non mandatées et l'employeur, Commonwealth Plywood,
et qu'on s'apprêtait à déposer cette convention
collective.
Sur ce, M. Lecavelier m'a dit: Bon! Très bien! Je vais
vérifier si, effectivement, nous avons déjà au
ministère copie de ce document. Il m'a rappelée environ une heure
après pour me dire: Ce document est arrivé ce matin. Je lui ai
donc signifié verbalement notre opposition, opposition que j'ai fait
suivre par écrit d'un télégramme qui a sans doute
été reçu, soit sur l'heure du dîner ou en
début d'après-midi au ministère, à Montréal,
et copie du télégramme en question a été
envoyée à M. Adrien Plourde à Québec.
M. Johnson: D'accord! Vous êtes bien consciente, Mme Doyon,
puisque vous êtes avocate et que vous avez travaillé, je pense,
longuement à ce dossier, que le fait du dépôt et le
récépissé qui en est fait équivaut finalement au
dépôt en question, que c'est une opération mécanique
et, qu'en aucune façon, même si vous étiez intervenue avant
le dépôt dudit document, le commissaire général
n'était en position de dire qu'il acceptait ou pas que le document soit
déposé. Est-ce que vous êtes consciente de ça?
Mme Doyon: Je ne pense pas, en tout cas, que je puisse tenter de
vous donner mon opinion juridique sur cette question. D'autre part, ce que je
peux vous dire, c'est que à la suite de la conversation
téléphonique que j'ai eue avec M. Lecavelier, M. Lecavelier,
lorsque je lui ai parlé au téléphone, ne m'a pas dit que
le dépôt avait été effectué, enfin une
estampille quelconque du ministère et qui, habituellement, est suivie
pour l'information en partie, d'un certificat de dépôt.
D'autre part, je lui ai donc verbalement demandé ce que je
précisais tout à l'heure et, enfin, dans une lettre datée
du 17 octobre, M. Plourde, le commissaire-enquêteur en chef, m'adressait
son opinion sur la façon de procéder. Effectivement, j'ai
reçu à mon bureau copie du certificat du dépôt
postérieurement, je pense que c'est le 20 octobre que j'ai reçu
copie du certificat de dépôt.
M. Johnson: D'accord. La dernière question que j'ai
finalement pour le groupe à ce sujet. Au-delà de l'intervention
au niveau du ministère on a vu ce que cela pouvait être
au bureau du commissaire-enquêteur chef et du
commissaire-enquêteur chef adjoint, au-delà de la lettre que vous
avez envoyée, de l'accusé de réception automatique qui a
été émis, est-ce qu'au niveau de la CSN vous avez
tenté des interventions auprès des parties signataires de ce
document pour empêcher que la chose ne se fasse?
Mme Doyon: Effectivement, M. le ministre, si je peux
répondre à cette question. C'est un collègue de mon bureau
qui a fait, en date du 13 octobre, les mises en demeure sont datées du
12 octobre, les mises en demeure qui étaient adressées
respectivement à M. Caine, à M. Lévesque, à Mme
Grignon et, si ma mémoire est exacte, à M. Donat Thériault
aussi et possiblement à Mme Côté, mais je n'en suis pas
certaine.
Ces mises en demeure comportaient deux volets, si je peux dire. Quant
à M. Caine, nous l'avisions qu'effectivement le syndicat
accrédité depuis le 3 octobre avait, lors d'assemblées
tenues, mandaté certaines personnes qui étaient des personnes
autorisées à se présenter et à négocier au
nom du syndicat qui était accrédité depuis le 3 octobre et
nous donnions les noms de ces personnes et, l'une de ces personnes, entre
autres, outre M. Hallé, il y avait également M. Gilles
Pagé, conseiller syndical au conseil central des Laurentides-CSN, lequel
M. Pagé était le destinataire comme représentant syndical
sur la décision accréditant le syndicat.
Donc, ce n'était pas un nom inconnu, je pense, pour M. Caine.
Donc, ces mises en demeure datées du 12 octobre ont été
signifiées, par huissier, le matin du 13 octobre...
M. Johnson: Le matin du 13 octobre...
Mme Doyon: ...le matin du 13 octobre à M. Caine
personnellement à la Commonwealth Plywood à 9 heures ou à
9 h 10. Dans le cas de M. Thériault, cela lui a été
signifié à son bureau à Montréal, sur la rue
Chateaubriand. Dans le cas de M. Lévesque et de Mme Grignon, cela leur a
été respectivement signifié chez eux entre 9 heures et 9 h
30 le matin du 13 octobre. Nous avons déjà, dans de longues
procédures judiciaires, fait toutes ces preuves, dans lesquelles mises
en demeure à l'égard de M. Donat Thériault, Mme Grignon et
M. Lévesque, nous les avisions qu'effectivement, nous étions
informés qu'ils avaient, semble-t-il, en main, de fausses cartes CSN et
qu'ils les faisaient ou qu'ils tentaient de les faire signer par les gens qui
étaient représentés par Je certificat
d'accréditation détenu par un syndicat affilié à la
CSN et nous les informions également qu'ils n'avaient pas de mandat pour
négocier une convention collective.
Alors, dès 9 heures le 13 octobre, M. Caine avait personnellement
copie de cette mise en demeure.
M. Johnson: D'accord. Dernière sous-question quant
à cela. Je m'excuse, mais c'est vraiment la dernière. Au lieu
d'envoyer une mise en demeure dont on connaît l'effet, en
général, avez-vous pensé à envoyer une injonction
à M. Caine et aux autres personnes que vous mentionniez, M.
Lévesque, Mme Grignon, peut-être M. Thériault, avez-vous
pensé d'utiliser une injonction plutôt qu'une mise en demeure?
M. Pepin: On n'est pas des juges. On ne peut envoyer des
injonctions nous-mêmes.
M. Johnson: Une demande d'injonction devant le juge en chambre.
On se comprend, M.
Pepin? Peut-être que pour les fins du journal des Débats et
de la salle, c'est plus précis. Plutôt que de procéder par
lettres signifiées par huissier, oui, le 13 octobre au matin, oui, on a
les procès-verbaux de signification des huissiers à ces
personnes, avez-vous écarté, pour une raison ou pour une autre,
la possibilité d'aller demander l'émission d'une injonction
devant un juge en chambre?
Mme Doyon: Je répondrai qu'on n'a pas écarté
la possibilité de prendre une injonction, mais étant donné
la rapidité avec laquelle, semblait-il, la situation se
déroulait, il nous apparaissait qu'une des premières choses que
nous pouvions faire, c'était d'abord de nous prémunir en avisant
formellement les gens concernés que, quant à nous, ils n'avaient
pas de mandat et, en toute bonne foi, un employeur informé du nom des
mandataires du syndicat laissait la discrétion de plusieurs personnes
concernées par le problème...
D'autre part, ultérieurement il est vrai, mais pour parer au plus
pressant, nous avons envoyé les mises en demeure et nous avons
engagé des procédures en injonction contre les signataires de la
convention du 13 octobre 1977. Cette ordonnance d'injonction a
été émise provisoirement par le jugement Meyer, le 11
novembre, interdisant aux signataires de la convention, à savoir M.
Lévesque, Mme Grignon, Mme Côté, M. Pilon et une autre
personne, je pense, d'utiliser le nom du syndicat, le Syndicat des travailleurs
de la Commonwealth Plywood-CSN. Je dois préciser ici pour plus de
clarté que ladite ordonnance d'injonction provisoire faisait une
réserve par le juge Meyer, concernant l'application de la convention
collective R-4, suite à une longue preuve qui avait été
déjà entamée depuis le 7 novembre devant le juge Meyer.
D'ailleurs, le jugement du juge Meyer fait longuement état de ces
questions. Cette injonction provisoire a été renouvelée
par la suite de dix jours en dix jours jusqu'au 21 décembre 1977.
Évidemment, l'injonction s'adressait également à M.
Thériault et à l'Union des rembourreurs. Le 21 décembre de
consentement, pour valoir jusqu'à jugement final, une injonction
interlocutoire a été émise aux personnes intimées
et elle est toujours en vigueur.
M. Johnson: D'accord. Ce sont les seules questions que
j'avais.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'adresserai ma
question soit à M. Hallé ou à M. Pepin. Cet
après-midi, lorsque M. Gagné a comparu, il nous a fait part que
la CSN avait offert à la compagnie les services de spécialistes
pour étudier toute cette question de rentabilité de l'entreprise.
Je sais que vous avez à la CSN des spécialistes dans des dossiers
comme cela et qui, dans plusieurs cas au Québec, ont eu à faire
part d'études ou de commentaires ou autres. J'aimerais savoir, dans un
premier temps, si vous avez étudié le cas de la
Commonwealth Plywood à la CSN dans son aspect économique.
Je présume que vous l'avez fait, parce que vous avez contesté le
congédiement de 105 travailleurs, sur la base que ce congédiement
n'est pas justifié pour vous économiquement et que, somme toute,
ce serait un congédiement qui aurait été fait pour des
motifs syndicaux. Dans les circonstances, je voudrais savoir s'il y a une
étude qui a été faite. Si oui, par qui a-t-elle
été faite et quelle a été la teneur de
l'étude? Est-ce que vous vous êtes penchés sur la situation
spécifique de l'entreprise, c'est-à-dire son évolution
depuis peut-être une dizaine d'années ou encore depuis cinq ans,
ses marchés, ses clients, ses concurrents, ses coûts de
production, les améliorations techniques qui ont été
faites à l'intérieur de l'entreprise depuis quelques
années ou après l'incendie de 1973, l'impact de ces
améliorations techniques, en fait tout le portrait de l'entreprise dans
son aspect économique, est-ce que cela a été fait par la
CSN?
M. Pepin: M. le Président, si vous me permettez de
répondre au député de Portneuf, nous avons offert, le 19
septembre, Ghislain Hallé et moi n'étions pas là, mais je
sais que nous avons offert notre collaboration. Il y a des difficultés
économiques, dites-vous? Nous sommes prêts à travailler
avec vous. Gardez tout votre monde au travail, en vertu de la loi, je pense que
c'est le chapitre 51, sur la qualification professionnelle, gardez-le tout le
temps jusqu'à l'expiration du délai prévu par la loi.
Pendant ce temps-là, nous allons former un comité d'étude
pour examiner ces choses. Cela a été refusé par
l'employeur. Je ne pense pas que vous puissiez demander à une personne
de l'extérieur de l'entreprise de faire l'examen de rentabilité
si vous n'avez pas les données de l'intérieur. Je pense que
personne, ni le Parti libéral, ni le Parti québécois, ne
peut venir nous dire: Telle entreprise est rentable ou n'est pas rentable, si
vous n'avez pas les données que l'usine elle-même a ou que
l'entreprise a. Alors, nous n'avons eu aucune donnée. De plus, M. le
député, je dois vous dire que, dans les divers forums où
l'employeur se présente, il soutient des thèses
différentes.
M. Pagé: Cela j'en conviens, mais...
M. Pepin: Laissez-moi finir au moins. Je vous ai laissé
finir votre question.
M. Pagé: D'accord, pas de problème.
M. Pepin: Si vous voulez m'interrompre, je vais vous laisser
aller.
M. Pagé: Non, allez-y, je m'excuse. Continuez, on ne se
chicanera pas là-dessus. Il ne faudrait pas.
M. Pepin: Merci beaucoup. Non, je pense qu'on a peut-être
d'autres sujets ensemble. Dans un forum, il nous dit: Je ne fais plus d'argent.
J'ai congédié du monde. Je fais plus d'argent maintenant, cela va
mieux, c'est plus rentable, plus productif. (21 h 45)
Voilà qu'on reçoit une procédure récemment,
chez nous, nous demandant $2 millions en dommages pour perte de production.
Comment voulez-vous, avec toutes ces données, qui nous apparaissent,
à l'oeil je ne sais pas comment les tribunaux finalement
décideront, c'est leur problème que nous puissions croire
une chose alors que des choses contradictoires, quant à nous, sont dites
devant le commissaire du travail, parce que là, on soutient qu'on les a
congédiés pour des raisons économiques, parce qu'on
gagnait de l'argent à les congédier, que maintenant, c'est plus
payant et que, plus tard, on nous dit: Non, ce n'est pas plus payant, parce que
je vous accuse de nous avoir fait perdre $2 millions?
Comment voulez-vous que nous puissions faire un examen de
rentabilité de l'entreprise si on n'a pas les données, les
chiffres de l'entreprise, si on ne peut pas voir à l'intérieur,
si on ne peut pas voir la transparence des données? Je ne pense pas que
nous ayons pu réaliser une telle étude; c'était impossible
pour nous sans connaître l'intérieur, sans connaître les
chiffres. À ma connaissance, l'étude n'a pas pu être
réalisée, pour les raisons que je vous donne.
Je pense que, dans les circonstances actuelles, vous ne pouvez demander
à personne de faire une telle étude, à moins d'avoir les
données. Si vous ne les avez pas, je ne pense pas que vous puissiez la
réaliser. J'ai terminé ma réponse.
M. Pagé: D'accord, merci. Je conviens qu'il est difficile,
pour un groupe de spécialistes qui représentent une formation
syndicale, de dresser un tableau fidèle de l'aspect économique
d'une entreprise quand on n'a pas toutes les données. Mais cela s'est
déjà fait dans d'autres dossiers.
M. Pepin: Lesquels?
M. Pagé: Vous aviez le dossier de la Wayagamack, qui
était représentée, où vous avez pu dégager
un portrait de la situation économique de l'entreprise...
M. Pepin: Est-ce que c'était une compagnie publique ou
privée, la Wayagamack?
M. Pagé: La Wayagamack était une compagnie
publique. Dans ce cas-là, c'est une compagnie privée.
M. Pepin: Commonwealth Plywood, est-ce que c'est
privé?
M. Pagé: C'est privé.
M. Pepin: Comment voulez-vous le faire quand c'est
privé?
M. Pagé: J'en conviens, on ne se chicanera pas
là-dessus, mais cela s'est déjà fait.
M. Pepin: II ne s'agit pas de se chicaner, mais il s'agit de voir
les faits.
M. Pagé: Cartonnerie Standard, ici à Québec,
où vous avez été placés... D'ailleurs,
c'était votre syndicat qui était confronté aux mêmes
problèmes; à ce moment-là était intervenu le
ministère de l'Industrie et du Commerce. On se rappellera qu'il y a
à peu près un an, 125 travailleurs de la CSN ont
été congédiés, l'entreprise a été
fermée. À l'époque, nous avions posé des questions
à l'Assemblée nationale sur les motifs et sur la participation du
ministre de l'Industrie et du Commerce; celui-ci nous avait répondu que
la fermeture était justifiée. On peut présumer ou on
espère, tout au moins, qu'il avait fait une étude.
Dans votre dossier, est-ce que vous avez formulé une
requête ou est-ce que vous avez fait des représentations
auprès du ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Tremblay, pour voir
si les motifs allégués par l'entreprise étaient
fondés? Est-ce que cela a été fait?
M. Pepin: Voyez-vous, si l'employeur avait respecté la
première loi, le chapitre 51 de la Loi de la qualification
professionnelle, il est possible que les questions auxquelles vous vous
référez auraient pu recevoir des réponses et
peut-être que le ministre aurait pu intervenir. Il nous avise le 6 ou le
8 septembre peu importe si je me trompe d'un jour ou deux qu'il y
aura mise à pied de 118 personnes plus tard et, deux semaines
après, il effectue la mise à pied, sans respecter aucunement la
loi.
M. Pagé: Oui. M. Pepin: Non?
M. Pagé: Quoique ce délai eût impliqué
la création d'un comité de classement, tout ça, cela
n'aurait pas impliqué nécessairement...
M. Pepin: Vous savez aussi que le comité de
classement..-
M. Pagé: ...l'entrée dans le dossier du ministre de
l'Industrie et du Commerce.
M. Pepin: Vous savez, je pense bien, M. le député,
que le comité de classement y voit aussi généralement ce
genre d'aspect de rentabilité ou de non-rentabilité, etc. Je peux
vous dire que, dans ce cas, nous n'avons pas demandé au ministre de
l'Industrie et du Commerce de faire une enquête sur la
rentabilité; peut-être que nous avons eu tort, peut-être
qu'il aurait pu le faire lui-même, peut-être que le Parti
libéral aurait pu le faire aussi, voyant l'ampleur du
problème.
M. Pagé: On n'a pas les services du ministre de
l'Industrie et du Commerce.
M. Pepin: Non, nous autres non plus.
M. Pagé: On est dans l'Opposition. C'est temporaire, mais
on est ici.
M. Pepin: Nous non plus, on n'a pas les services du ministre.
M. Pagé: J'en conviens, mais raison de plus de le demander
au ministre.
M. Pepin: Alors, là, on le demande au ministre.
M. Pagé: Bon, parfait.
M. Johnson: Êtes-vous en train de dire que tout ça,
c'est la faute du ministre de l'Industrie et du Commerce?
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, le ministre
du Travail interviendra tantôt.
M. Pepin: Cela a l'air que c'est le grand problème.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! à
l'ordre!
M. Johnson: Je comprends qu'on a des responsabilités, mais
quand même.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Pagé: Le ministre du Travail interviendra
tantôt.
Le Président (M. Cardinal): Non, à l'ordre!
J'attends que la chose se calme et nous allons reprendre le débat entre
vous et M. Pepin.
M. Pepin: Nous sommes bien calmes, l'un et l'autre.
M. Pagé: Si le ministre de l'Industrie et du Commerce, M.
Tremblay, est justifié de dire ici, à l'Assemblée
nationale: Telle entreprise a eu raison de fermer ses portes, parce que c'est
un motif économique de congédier 125 travailleurs, comme il m'a
répondu, je ne vois pas en quoi celui-ci ne serait pas justifié
d'étudier un dossier comme celui-là.
Que le ministre dise et en pense ce qu'il voudra, cela m'importe peu. Je
vous ai posé la question, parce qu'il m'apparaît que le ministre
aurait pu le faire. Ou encore, vous auriez pu le lui demander. On pourra le lui
demander éventuellement. C'est ce d'ailleurs pourquoi, dans mes
conclusions ce matin, j'ai fait référence au ministre de
l'Industrie et du Commerce, parce qu'il serait possible qu'il vienne
comparaître ici, comme d'autres ont le loisir de venir comparaître
et on pourra l'entendre sur cet aspect de la question et du
problème.
M. Pepin: Si vous me permettez là-dessus, sur le
problème du ministre de l'Industrie et du Commerce. Voilà un cas
où nous déposons une requête en accréditation, le 30
août. Je présume bien que l'employeur, avant le 30 août,
était au courant qu'il y avait de l'organisation syndicale qui se
faisait du côté de la CSN. Nous ne sommes pas naïfs ni l'un
ni l'autre, on peut s'imaginer cela.
Voilà un employeur qui embauche du monde avant le 30 août
et un peu après le 30 août, jusqu'au 7 septembre, à peu
près. D'après les données qu'on a, cela peut être
20, 25, 30. J'espère qu'on ne se chicanera pas sur le chiffre
précis. Nous, on ne pense pas, à ce moment-là, qu'il y ait
des difficultés économiques lorsqu'il y a embauchage de nouveaux
employés. Peut-être qu'on fait une erreur grossière, mais
on ne peut pas penser qu'il y ait des difficultés
économiques.
Avant que l'accréditation arrive, personne ne s'oppose. L'union
de Donat Thériault s'est opposée; dans un premier temps, elle
retire son opposition. L'employeur ne s'oppose pas. Donc, ils savent bien, tous
les deux, que ce qui s'en vient, c'est l'accréditation à la CSN.
Nous, nous savons qu'il y a eu des embauchages d'un certain nombre de
salariés. Je ne nomme pas le chiffre précis, parce que cela
pourrait être aléatoire pour les fins de mon propos.
On ne croit pas qu'il y ait des problèmes économiques qui
se posent. Et voilà que, vers le 7 ou 8 septembre, il nous annonce la
mise à pied de 118 personnes. Vous pouvez comprendre facilement que,
pour nous, du côté syndical, qui n'avons pas toutes les
données du problème, c'est bien clair, nous ne pouvons pas croire
que l'employeur a raison; en alléguant que c'est pour des raisons
économiques, il vient d'en embaucher. Nous venons de déposer une
requête en accréditation. Cela ne fait pas son affaire. Et les
événements ultérieurs démontrent qu'il ne veut
absolument pas négocier avec le syndicat CSN. Mais au moment où
l'événement se produit, on ne peut pas conclure qu'il y a des
difficultés économiques. D'ailleurs, les recommandations,
même s'il y en avait eu, du ministre ou du ministère, vous le
savez aussi bien que moi, je pense, il n'y a rien d'impératif dans ces
conclusions. Que ce soit dans Standard, que ce soit dans Wayagamack ou dans
d'autres cas. Je ne veux pas commencer de débat ailleurs, mais seulement
vous mentionner qu'avec notre perception, notre connaissance des choses, nous
ne pouvions pas concevoir que c'étaient vraiment des difficultés
économiques qui conduisaient à la mise à pied de 118
personnes.
M. Pagé: C'est d'ailleurs pourquoi vous avez inscrit des
causes devant le commissaire, pour la question des congédiements.
M. Pepin: Pour activités syndicales.
M. Pagé: Comment expliquez-vous que ces causes n'aient pas
été entendues? On a parlé de moratoire et tout cela.
Qu'est-ce qui a fait, somme toute, que cela n'a pas été
vidé, cette question-là, devant le commissaire?
M. Pepin: Peut-être que je ne pourrai pas vous donner une
réponse absolument exhaustive, donc, complète. Je peux vous dire
que, lorsqu'on m'a
demandé de m'occuper de ce dossier, je connaissais l'existence
des 106 plaintes et j'avais eu l'occasion de rencontrer à deux reprises
un avocat au dossier du côté patronal, Me Bazin, non pas pour
faire de la négociation, parce que là il faudrait bien
s'entendre, Me Bazin et moi, on ne voulait pas négocier, on explorait
pour voir s'il y avait des chances et des possibilités.
M. Bazin: Des meetings secrets, M. Pepin.
M. Pepin: Des meetings secrets et c'est pour cela que je ne
dévoile pas le contenu, comme c'était tellement secret que vous
voulez le mentionner, je le mentionne à nouveau ici. J'ai eu des
meetings secrets avec l'honorable M. Jean Bazin.
M. Bazin: Honorable.
Le Président (M. Cardinal): C'était in camera, ce
n'était pas secret.
M. Pagé: Ne nous chicanons pas, vous avez eu des meetings.
D'accord.
M. Pepin: Le contenu, je ne vous en parlerai pas. On peut
continuer, M. Chevrette?
Le Président (M. Cardinal): Oui, je vous en prie.
M. Pepin: Merci. M. le Président, merci. Après
cela, il y a eu une demande du ministre de faire un moratoire et je pense qu'il
y avait une clause de fixée pour les 106 congédiés
à la même période. Moi-même, j'ai pris sur mon
autorité de dire: Si on veut avoir une chance de régler une
affaire, demandez des remises pour le cas des 106.
Je ne pense pas que ce soit déraisonnable, le ministre
lui-même nous demande un moratoire. Moi, j'ai demandé aux avocats
au dossier d'essayer de retarder... Ils ont réussi. Je pense que c'est
au mois de mars ou avril dernier, peut-être autour du mois d'avril.
Après cela, ils ont procédé. Je ne sais pas où cela
en est rendu, je ne suis pas au dossier, mais, de toute façon, il n'est
pas rare je ne sais pas si M. le député de Portneuf est au
courant que, pour des cas de congédiement pour activités
syndicales, cela prenne quelques mois, parfois un an et plus avant d'avoir une
décision.
M. Pagé: Oui, c'est souvent plus que six mois, j'en
conviens.
M. Pepin: Merci!
M. Pagé: Ce qui m'a surpris en tout cas, pour nous
de l'Opposition, c'est un des éléments importants de tout le
problème, cette question c'est que...
M. Pepin: À mon avis, ce n'est pas là
l'élément le plus important.
M. Pagé: ... tout le monde acquiesce ou accepte, à
raison d'un pseudo-moratoire ou d'un consensus sur un moratoire, de
procéder à des remises dans les auditions des causes. De toute
façon, on a vu ce que le moratoire a donné, on est rendu ici
aujourd'hui.
M. Pepin, une dernière question. Vous avez une expérience
syndicale assez vaste, plusieurs années derrière vous. Ce n'est
pas la première fois que vous venez ici. Qu'est-ce que vous attendez
d'une commission comme celle-là aujourd'hui?
M. Pepin: J'attends beaucoup de choses. Si on peut se parler
très ouvertement, je pense que j'attends beaucoup plus qu'une
publicité du cas de la Commonwealth Plywood. Quand j'ai accepté
d'intervenir dans le dossier, je me suis dis: II faut essayer de trouver un
règlement, mais essayer par le truchement du conseil de
médiation. Je pense que le rapport du conseil nous indique que, du
côté de la CSN, nous avons été complètement
ouverts. Peut-être que le député de Saint-Laurent, mon
petit gars, puisque je suis son grand-papa...
M. Pagé: Pardon?
M. Pepin: Peut-être que le député de
Saint-Laurent, mon petit gars, puisque je suis son grand-papa, pourra...
M. Forget: ... celui du ministre.
M. Pagé: Ce n'est pas ce qu'il alléguait.
M. Johnson: Est-ce que vous parlez pour vous?
M. Forget: Je parlais du ministre.
M. Pagé: Non, il parlait pour le ministre.
M. Johnson: Ah bon!
M. Pagé: Mais oui!
M. Forget: ... de l'oeil sur vous.
M. Pagé: Mais oui!
M. Pepin: Peut-être qu'il pourra de nouveau intervenir sur
les listes que nous avons déposées, etc.
M. Forget: Fin de naïveté du ministre, M. le
Président.
M. Pepin: On pourra peut-être en parler, mais nous avons
vraiment essayé de mettre tout l'effort pour dire: On a un conseil de
médiation. On va essayer ce truchement et on l'a vraiment essaye. Le
rapport du conseil de médiation, puis-je me permettre de vous dire que
cela n'a pas été un cadeau à l'assemblée
générale de dire: II faut accepter ce rapport, parce qu'il ne
règle pas la convention collective. Il permet de la régler
éventuellement et on ne sait pas comment.
Je comprends les membres du conseil de
médiation d'avoir rédigé un tel rapport. Ils ne
pouvaient peut-être pas faire mieux, dans les circonstances, mais ce
n'était pas commode, à l'assemblée générale,
d'essayer de leur expliquer que, même si ce n'était pas
réglé, il fallait accepter le rapport tel qu'il était et
qu'éventuellement, cela se réglerait. Nous l'avons donc fait.
Nous l'avons recommandé. Il y a eu discussion à
l'assemblée. Il y a eu un vote au scrutin secret. Cela a
été accepté non pas à l'unanimité, mais
presque à l'unanimité, après discussion.
Le ministre décide de convoquer une commission parlementaire. Je
pense qu'il l'a convoquée tardivement, le 26 septembre. Le rapport du
conseil de médiation, c'est du 26 juin. Si cela avait été
son chemin, il aurait pu nous convoquer avant, mais, en tout cas, nous sommes
ici aujourd'hui devant la commission. Il a sans doute fait ce qu'il a pu tout
simplement. À votre question, qu'est-ce que nous attendons de vous? Si
nous devons uniquement attendre qu'on fasse connaître le conflit, j'ai la
certitude que les travailleurs qui sont grévistes dans ce conflit vont
vraiment être absolument déçus, parce que, pour eux, il y a
un Code du travail. On peut en violer parfois une partie ou une autre ou
essayer d'étendre une interprétation mais là, c'est le
fondement même du Code du travail qui a été violé.
Là, il arrive je le dis sans aucune gêne qu'il y a
eu des fraudeurs, des gens qui ont fait signer des cartes sous
l'étiquette CSN, des gens qui ont signé une convention
collective, dont la compagnie, et qui savaient fort bien... S'ils ne le
savaient pas, ce sont des naïfs et je ne les prends pas pour des
naïfs. Je connais Casgrain depuis déjà assez longtemps et il
me connaît depuis encore plus longtemps sans doute, Bazin, depuis un peu
moins longtemps. Caine, je ne le connais pas. Mais ces gens ne sont pas
naïfs. Ils négocient avec Thériault, alors qu'ils savaient
que c'était la CSN qui était là. (22 heures)
Donc, c'est un viol dans la racine même du Code du travail. Ce
n'est pas uniquement de dire: Je ne respecte pas l'article 39 ou 38 ou 31,
c'est de dire: Je ne veux pas négocier avec ceux qui sont là.
Alors, qu'est-ce qu'on se dit, nous autres, devant une fraude comme
celle-là? Je pense que c'est pour cela que vous êtes ici. La
clé du problème, à mon avis, les membres du conseil de
médiation l'ont identifiée, c'est le dépôt de la
fausse convention collective. C'est cela qui est la clé du
problème, la validité bien sûr, et vous savez, maintenant
que le rapport du conseil de médiation est devant vous, devant nous et
devant le ministre, si on prenait l'article 23 du code.
L'article 23 dit: Le commissaire général du travail peut
exiger de l'association requérante ou accréditée, le
dépôt de ses statuts et règlements.
Lorsque le commissaire général accepte le
dépôt d'une convention collective, moi je reconnais qu'il n'a pas
à aller fouiller. Est-ce que nous avons bien tenu l'assemblée?
Est-ce qu'il y a eu un bon vote, etc?
Je pense qu'il n'a pas affaire là-dedans. Mais nous avons
déposé un document lorsque nous avons fait notre enquête en
accréditation. Notre constitution.
Si le commissaire demandait, en vertu de l'article 23: M.
Thériault, fournissez-nous votre constitution! D'après le rapport
des médiateurs, il n'y a pas de constitution. Et s'il y en avait une, ce
serait celle de l'Union des rembourreurs, dit le rapport, et s'il y en avait
une troisième, cela ne pourrait pas être celle de la CSN, parce
qu'il n'a pas le droit de se servir de notre nom en vertu d'une ordonnance de
la Cour supérieure.
Cela pourrait être un chemin à examiner. Dans la Loi 45,
que vous, les législateurs, avez adoptée, vous avez fait
l'article 81a, qui dit que dans le cas d'une première convention
collective, pour le groupe de salariés concernés il peut y
avoir une imposition, vous vous souvenez des autres articles qui suivent cela
nous, ce que nous demandions à l'époque, au lieu de dire:
Pour le groupe de salariés visés par l'accréditation,
c'était: Dans le cas d'une première convention collective par les
parties, cela pourrait être un autre chemin que vous pourriez suivre.
L'article 97d dont il a été question aujourd'hui, et sur
lequel le ministre dit: J'en ai parlé au président, qui m'en a
parlé, qui en a parlé à d'autres. Très bien! Il
peut quand même appliquer l'article, lui, comme ministre et je
pense bien qu'il va le reconnaître avec moi, il est ministre, il n'est
pas juge s'il applique sa Loi, elle peut être contestée
devant les tribunaux. Ce n'est pas à lui de décider que sa loi
est mal faite et que le juge va le condamner temporairement ou
définitivement. Mais il peut essayer, au moins, d'appliquer sa loi, s'il
pense que sa loi 45 n'est pas trop mal faite, puisqu'il l'a défendue
devant l'Assemblée nationale et un peu partout dans la province.
Je sais que c'est un cas un peu spécial. Il a été
longuement question aussi, M. le député, de l'affaire des "4
jours". Dans quatre jours, la convention collective n'existe plus, la fausse
convention, la frauduleuse convention collective, signée à mon
avis par des fraudeurs. Il a été question de cela. Mais,
savez-vous je pense que cela n'a pas été dit encore
qu'au mois de juillet dernier, il y a eu le dépôt d'une
requête en accréditation par, je présume bien, l'Union des
rembourreurs, un autre local, je ne sais pas si c'est le même local, que
cela a été déposé vers le 11 juillet, si ma
mémoire est bonne, qu'il y avait une audition de fixée enfin pour
examiner cette affaire-là, le 18 septembre. Et le 18 septembre, nous
avons été informés que c'était remis, sans que nous
soyons consultés, mais ils ont dit: Ce sera le 25. Le 25 pour nous,
vraiment, on savait qu'on comparaissait ici aujourd'hui, il fallait au moins se
voir un peu entre nous.
Vous comprenez bien que même si la présumée, la
frauduleuse convention collective expire le 30, le fait qu'il y a des
procédures d'engagées, alors, là, nous sommes dans tout le
problème de l'article 47 du Code du travail, qui veut qu'on doit
maintenir les conditions de travail pendant ce temps-là, et je pense que
tout le monde va
reconnaître que c'est un bon article, sauf dans une circonstance
donnée. Le fait que ça se termine le 30 septembre, donc à
quatre jours de maintenant, ne règle pas notre problème.
En tout cas, une possibilité je n'ai pas exploré,
je n'ai consulté personne mais je pense que c'est là un
chemin à regarder. S'il n'y a pas de statut de ce syndicat qui a
déposé une convention collective, comment peut-on croire que
c'est une convention collective? Ce n'est pas la compagnie qui est en cause.
Elle est en cause ailleurs, mais pas là-dessus. Il y aurait pu se faire
une constitution, et il me semble que ce serait important, aussi, que vous
sachiez pourquoi les événements arrivent, le fondement de la
situation. Moi, j'ai pu comprendre...
M. Pagé: Non, mais si vous permettez...
M. Pepin: Non, mais je pense que si vous me permettez, maintenant
que vous m'avez ouvert un peu la porte...
M. Pagé: Non.
M. Pepin: ... moi, j'ai cru comprendre, M. le
député...
M. Pagé: Oui.
M. Pepin: ... que vous tentiez plutôt, vous autres, du
Parti libéral, je vous le dis carrément, de la façon dont
je l'ai vu dans la salle, de protéger l'employeur, protéger
l'objectivité, mais surtout l'objectivité de l'employeur.
M. Pagé: C'est l'interprétation que vous y donnez,
ça.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît! Un à la fois, à l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Pagé: C'est l'interprétation que vous y
donnez.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. Pepin.
M. Pagé: On en parlera tantôt.
M. Pepin: Merci. Moi, je peux vous dire, si vous regardez les
documents qui sont dans vos dossiers, regardez les conventions collectives qui
sont là, la convention collective signée en 1974, expirant en
1977, celle la frauduleuse signée en 1977. Regardez, par
exemple, l'article 201 de cette convention, où on parle de la
reconnaissance syndicale. C'est tellement archaïque qu'on se
réfère à la Commission des relations ouvrières, qui
n'existe plus depuis 1969, on parle de la Loi des relations ouvrières,
qui n'existe plus depuis 1964. On en parle en 1974 et en 1977. Regardez
l'article 301 sur les droits de la gérance. On dit: Les droits de la
gérance, le gars a le droit d'administrer son entreprise, mais s'il y a
une clause de la convention collective qui me nuit, je ne suis pas
obligé de suivre la convention collective.
Regardez la clause de l'ancienneté dont il a été
abondamment question par le député de Saint-Laurent. Regardez
ça. C'est marqué, d'abord, compétence, etc., longueur de
service, le troisième point, et on dit: Lorsque, dans l'opinion de la
compagnie, on fait ceci, on fait cela, on n'a pas à prouver si je suis
compétent ou non. Il faudrait que je démontre que ce n'est pas
leur opinion. C'est ça, une convention collective qui ne veut absolument
rien dire.
Dans la convention en 1974, même pas de procédure
d'arbitrage. Évidemment, le Code du travail pourrait y pourvoir, parce
qu'il n'y a pas d'arbitrage de prévu. Même dans le cas de
décès, si on voulait s'amuser, il faudrait planifier nos
décès, parce qu'il faut prévenir les patrons 24 heures
à l'avance, si on veut prendre un congé à cause de
décès.
Quand on se demande pourquoi il y a eu changement d'allégeance
syndicale, je n'aime pas l'expression "maraudage", comme le ministre l'a
utilisée et d'autres membres de cette commission, ce n'est pas du
maraudage, qui est un terme un peu péjoratif, lorsque des travailleurs,
avec des conditions semblables, veulent changer d'allégeance syndicale.
Mais pourquoi le problème existe-t-il présentement? Parce que cet
employeur, M. Caine, veut protéger ses droits, ses privilèges.
Avec un tel syndicat, il a tout entre les mains. Il a vraiment besoin d'avoir
une telle convention collective, ça lui permet de faire n'importe
quoi.
Quand on voit le problème, on se dit: Vraiment, ce n'est pas une
idéologie qu'il défend. Lui, il défend un peu sa peau,
parce qu'il pense qu'avec nous autres, ça va être un peu plus
raide, il n'aura pas ces clauses. Ce n'est pas une idéologie de droite
qu'il défend. C'est vraiment le pouvoir de continuer à exploiter
son usine comme il l'entend.
Notre conclusion à nous, c'est que le gouvernement et votre
commission prennent les moyens pour appliquer le rapport du conseil de
médiation. Que vous l'aimiez ou non, qu'il soit critiquable sur une
partie ou l'autre, il y a des conclusions, des recommandations. Nous les avons
acceptées de bonne foi, même s'il y a, à notre avis, des
faiblesses là-dedans. Voilà pourquoi je pense que la commission
peut intervenir et faire en sorte que le rapport du conseil de médiation
soit appliqué. Il me semble je n'ai pas tellement
d'expérience là-dedans que si le gouvernement
décidait de faire l'opération, il a une série, une
panoplie de moyens entre les mains.
Je ne veux pas nécessairement me référer au
ministère de M. Bérubé, mais il me semble que c'est un
moyen qui est regardable. Si, d'un côté, on pense qu'ils sont de
mauvaise foi comme moi je le crois, si c'est partagé par une partie du
gouvernement, elle pourrait convaincre l'autre partie du gouvernement. Si,
d'autre part, on surveille bien les opérations, s'il n'y a plus de
subvention, s'il n'y a rien, il me semble qu'il y a des moyens qui ne
sont peut-être pas coercitifs au point de départ qui pourraient
inciter M. Caine à s'asseoir et à négocier.
Si cela n'est pas suffisant, je vous indique l'article 81a de la loi, de
portée universelle. Cela pourrait être modifié. Je vous
indique l'article 23, qui pourrait être regardé par le commissaire
général du travail et il pourrait dire; On va leur demander leur
statut, et s'ils n'ont pas de statut, comment cela pourrait-il être une
convention collective?
J'ai sûrement été beaucoup trop long, M. le
député je m'excuse mais je pensais que je devais au
moins vous donner ma pensée là-dessus.
M. Pagé: D'ailleurs, vous en avez abondamment
profité, comme vous avez dit. Alors, somme toute, ce que vous
attendez...
M. Pepin: J'ai du moins essayé d'ouvrir une autre
porte.
M. Pagé: Ce que vous attendez, somme toute, des travaux de
cette commission, c'est que cela ne se termine pas comme trop souvent cela se
termine, par un voeu formulé par la commission.
M. Pepin: Vous m'avez tellement bien compris. J'ai bien fait de
parler longtemps.
M. Pagé: Bon! Sur certains points, on se rejoint, vous
voyez.
M. Pepin: Ah oui!
M. Pagé: Merci, M. le Président.
M. Pepin: Sur d'autres points aussi, sans doute.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. J'ai
écouté moi aussi avec fascination l'ex-président de la
CSN, M. Pepin, nous expliquer avec des exemples tirés des conventions
collectives en quoi l'affiliation à la CSN est la voie, la
vérité et la vie.
M. Pepin: Je n'ai pas dit cela par exemple.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. Pepin,
n'interrompez pas le député.
M. Pepin: Je respecte la présidence. Je n'interromps
pas.
M. Forget: II y a un grand degré de conviction dans ses
paroles, mais je suis sûr qu'il n'invite pas la commission de
l'Assemblée nationale ou cette commission de l'Assemblée
nationale ou encore moins les différentes formations politiques à
dé- cerner des étoiles rouges, des étoiles dorées
et des étoiles vertes aux conventions collectives en examinant clause
par clause leur contenu.
Je pense bien que ce n'est pas de cela qu'il est question ici. Il n'est
pas question de savoir si la convention collective vraie ou fausse du syndicat
qui prétend être le syndicat et dont d'autres disent qu'il n'est
pas le syndicat est bonne ou mauvaise, il ne s'agit pas de cela, puisque, si on
était appelé à prononcer des jugements sur le contenu des
conventions collectives, je pense bien qu'il y aurait des surprises pour tout
le monde dans les jugements qui seraient émis.
Ce qu'il est important de savoir, c'est quels sont les droits des
parties, qui parle avec légitimité et qui ne parle pas avec
légitimité. Je pense que c'est là-dessus qu'on devrait
restreindre le débat pour ne pas ajouter à la confusion.
Il y a une remarque que M. Pepin a faite qui, je pense, prête
à confusion lorsqu'au tout début, il a exposé l'attitude'
que la CSN a prise face à la question des congédiements. Il a
dit: Notre préoccupation, à l'origine, a été de
voir à ce que la loi soit respectée, la Loi sur la formation
professionnelle, et que l'employeur maintienne les employés
congédiés dans leur emploi pour le délai prévu dans
la loi.
Je pense, mais j'aimerais être corrigé si mon impression
est fausse, que le délai prévu dans la loi n'est pas un
délai pour le congédiement, c'est un délai pour l'avis qui
doit être donné au ministre et que la Loi sur la formation
professionnelle ne prévoit pas qu'avant de congédier quelqu'un,
il faut avertir cet employé et lui donner un avis de trois mois ou le
payer pendant trois mois, mais il faut donner un avis au ministre du Travail
d'une durée de trois mois. C'est bien différent. Cette loi,
qu'elle soit bonne ou mauvaise, ne prévoit pas un préavis de
congédiement de trois mois pour les employés. (22 h 15)
Elle prévoit un préavis au ministre du Travail, ce qui
veut dire que la demande de maintenir les employés dans leur emploi,
quels qu'aient été les blâmes qu'on puisse adresser
à la compagnie de ne pas avoir respecté l'avis, un blâme,
de toute façon, qui est bien nuancé par le fait qu'un jugement de
la Cour supérieure, le ministre lui-même l'a indiqué, a
créé des doutes sérieux, à savoir si cet avis
était légal lui-même, si les exigences de la loi
n'étaient pas dans le fond ultra vires, si les exigences du
règlement n'étaient pas ultra vires. Donc, il y avait au moins un
début de vraisemblance à mettre de côté cette
exigence ou cette prétendue exigence du règlement. Mais il reste
que, de toute manière, cela ne visait qu'un avis au ministre. Cela
n'aidait en rien, le respect intégral de la loi n'aurait aidé en
rien les employés qui ont été mis à pied, sauf dans
la mesure où on croit qu'un comité de reclassement professionnel,
avec 300 000 chômeurs au Québec, aurait pu trouver des solutions
de rechange rapidement pour tous ces gens-là. Il est permis d'en douter;
puisqu'on est entre gens qui ne sont pas naïfs, il est permis d'en douter.
De toute façon, je pense que
c'est un point qui mérite d'être corrigé. Il y a une
autre affirmation... Oui, si vous voulez.
M. Pepin: Seulement sur ce point-là, si le
Président le permet, M. Forget aussi. Vous me permettez, oui?
Le Président (M. Lavigne): Je vous le permets.
M. Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Ce n'est pas,
M. Forget, mon interprétation de la loi. La loi dit qu'on doit donner un
avis de X mois, selon le nombre de salariés concernés, au
ministre du Travail, mais on ne peut pas effectuer le licenciement; il ne
s'agit pas de congédiement. Un congédiement, si on s'entend bien,
c'est un congédiement pour cause, raison disciplinaire, etc. On ne peut
licencier les gens avant la fin de l'avis, à moins, et l'article le dit
je ne l'ai pas devant moi qu'il y ait des raisons
spéciales, extraordinaires, peu importent les termes; en tout cas, il y
a une échappatoire, mais la règle générale, c'est
qu'on donne l'avis au ministre et qu'on fait le licenciement dans un mois, deux
mois, trois mois ou quatre mois, selon le nombre. Dans le cas qui nous occupe
c'est mon interprétation, peut-être que j'ai tort il
arrive que l'avis a été donné, le licenciement a
été fait deux ou trois semaines plus tard et c'est
là-dessus que nous croyons que l'employeur n'a pas respecté cette
loi.
Puisque vous avez commenté une partie de ma réponse au
point de départ, je voudrais vous dire ceci. Quand j'ai donné des
exemples de la convention collective que j'ai critiquée, ce n'est pas
pour dire: II y a des conventions collectives qui sont meilleures ou moins
bonnes, c'est tout simplement pour vous rappeler que, s'il y a eu changement
d'allégeance syndicale, c'est parce qu'il y avait des conditions de
travail ou des conditions écrites qui, vraiment, aux yeux mêmes
d'un profane, ne peuvent pas tenir. Ce n'est pas pour décerner des
étoiles rouges ou noires à ceux qui signent d'autres conventions
collectives. Je sais ce que c'est que de négocier une convention
collective. Parfois, on obtient des résultats très bas, cela
dépend du rapport de forces qu'on a. C'est la seule précision que
je voulais faire quant à la question de l'interprétation de la
loi. Je pense qu'on ne peut pas faire les licenciements avant le délai,
à moins qu'il y ait des raisons qui s'y appliquent. Il me semble que le
jugement du juge Meyer dit que ces raisons n'avaient pas l'air d'être
évidentes. Il me semble que j'ai lu cela ces jours derniers. Alors,
c'est tout.
M. Forget: On reviendra sur la question de l'évidence,
mais, puisqu'on vient d'aborder la question de savoir s'il y avait des raisons
suffisantes pour justifier le changement d'allégeance, c'est fort
possible, c'est même évident puisqu'il a eu lieu, il a
été reconnu. Ce que j'aimerais savoir de M. Pepin, c'est s'il
reconnaît cependant que les employés, les salariés de la
Commonwealth Plywood, ayant une fois changé d'idée, demeuraient,
malgré l'accréditation CSN obtenue, absolument libres de changer
d'idée encore une fois et même aussi souvent que cela leur
plaisait. Or, on a souligné que cette situation est une situation assez
exceptionnelle. Ce n'est pas tous les jours, bien sûr, que la
moitié des effectifs d'une entreprise se voit l'objet d'un licenciement.
C'est une circonstance qui, en soi, étant donné que cela a
été entouré de toutes sortes d'événements
sur lesquels je ne reviendrai pas on a appelé cela des
ralentissements, d'autres appellent cela de la violence, peu importe il
y a eu quand même énormément d'événements
très particuliers qui, autant que la convention collective
déficiente ou prétendument déficiente qui était
là auparavant, pouvaient amplement justifier les salariés de
modifier leur attitude. Ils n'ont d'ailleurs pas besoin de justification
externe, ils n'ont qu'à changer d'idée, à le faire
ensemble et collectivement le lendemain d'une accréditation CSN. Ils
peuvent légalement se réunir et décider qu'ils en ont
déjà assez de cette affiliation CSN. Ils peuvent très
valablement changer d'idée et il n'y a rien que les lois peuvent faire
pour ça, il n'y a rien que la CSN peut faire pour empêcher
ça, il n'y a rien que le ministre peut faire pour empêcher
ça.
À moins qu'on reconnaisse que c'est aux syndiqués
qu'appartient le syndicat, ils sont libres en tout temps de prendre les
décisions qu'ils veulent bien prendre, même si de
l'extérieur on peut juger qu'ils ont tort, ce n'est pas notre
problème, ce n'est pas notre juridiction, ce n'est pas celle de la CSN
non plus, ce syndicat n'appartient pas à la CSN, même si la CSN
lui a donné son étiquette, son nom ou Dieu sait quoi, il reste
que ça demeure la propriété des membres. Les membres
peuvent, en tout temps, changer d'avis. Je pense qu'on doit reconnaître
ça.
M. Pepin: Est-ce que je peux commenter?
Le Président (M. Lavigne): Certainement, M. Pepin.
M. Pepin: Merci. Je pense bien que les syndicats appartiennent
à leurs membres, nous sommes les tenants peut-être les plus
farouches de cette thèse au Québec. Je pense que
là-dessus, nous ne ferons pas de chicanes. Sauf que nous avons certaines
règles internes et vous avez, dans un dossier ou l'autre si vous
ne l'avez pas, je vous le fournirai la constitution du syndicat, qui est
déposée au ministère du Travail. La constitution
prévoit que si le syndicat veut se désaffilier de la CSN, comme
c'est son droit, il doit donner des avis en conséquence, de 90 jours, au
meilleur de mon souvenir. Il doit écrire à la CSN pour que nous
puissions, comme CSN, aller leur expliquer notre point de vue. Après
ça, ils sont libres de décider comme ils l'entendent.
Donc, sur le premier point, même si les gens ont le droit de
changer d'avis à tout moment, il est bien clair que nous vivons dans une
société où la liberté doit s'exercer dans un
certain cadre. Une fois, j'ai voté pour vous comme député
de Saint-
Laurent, le lendemain, je peux le regretter, mais vous êtes
à l'Assemblée nationale pour la durée de quatre ou cinq
ans, selon le temps que vous ferez, où la Législature sera
là.
M. Pagé: Vous n'avez pas dû le regretter.
M. Pepin: Non, ce que je veux...
M. Forget: C'est une hypothèse.
M. Pagé: D'accord, c'est une hypothèse.
M. Pepin: C'est une hypothèse, merci. Ce que je veux vous
rappeler, c'est que dans ce domaine parlementaire et au plan syndical, en vertu
des lois et en vertu du Code du travail, lorsque je suis
accrédité, l'association accréditée doit
représenter tous les employés, tous les salariés
concernés en vertu du Code du travail et cela, pour un certain temps. Ce
temps-là dure peut être un an, deux ans, trois ans et même
plus s'il y a des conflits, comme dans le cas de Commonwealth Plywood. Mais
dans l'hypothèse où il n'y a pas de conflit, les gens qui
changent d'idée peuvent manifester leur changement d'idée dans
les périodes prévues au Code du travail. Peut-être que
ça pourrait exister autrement, mais disons que c'est ça, à
l'heure actuelle, la procédure.
M. Forget: ... les règlements internes de la CSN pour
condamner un comportement, alors que les règlements et les délais
prévus au Code du travail n'ont pas été respectés
et pourquoi, nous a-t-on dit? On nous a dit: La situation évoluait
tellement vite, c'est M. Gagné lui-même qui l'a dit, qu'on ne
pouvait pas se soucier de ces détails de délais. Si elles
évoluaient vite, les circonstances et les données du
problème, pour une considération, elles évoluaient vite
pour toutes les considérations. On peut admettre ça?
M. Pepin: Est-ce que vous admettez au moins, M. le
député de Saint-Laurent, que j'ai le droit de vous dire les
règlements internes que le syndicat s'est lui-même donnés
lorsqu'il s'est constitué et que les membres, le lendemain, ont le droit
de changer d'idée, mais de suivre la procédure interne? Est-ce
que vous allez admettre avec moi, avec le dossier que vous avez, à moins
qu'on n'ait pas le même dossier, que le syndicat fantôme qui a
signé la convention pirate, c'est un syndicat qui n'a donné aucun
avis à la CSN. Il n'a rien fait.
Vous allez peut-être me dire: Ce n'était pas important, il
n'avait pas à le faire, mais vous êtes avocat. Je sais, quand vous
étiez ministre, que vous étiez assez attaché à
certains principes de base que vous vouliez suivre cela à tout prix;
d'ailleurs, on s'est déjà parlé assez fréquemment
quand vous étiez ministre, maintenant, vous allez me dire:
N'allègue pas ça, les règlements internes,
n'allègue pas le Code du travail. Écoutez, il y a à peu
près une centaine de grévistes qui sont là, depuis
à peu près un an. Ont-ils tort, ont-ils raison? Peut-être
conclurez-vous qu'ils ont tort.
Je pense qu'ils ont raison, à l'heure actuelle. C'est
peut-être notre chicane entre nous.
Pour moi, je vous rappelle que c'est toute la frauduleuse convention
collective, M. le député, qui est en cause. L'affaire des
congédiements pour activités syndicales, c'est un
élément. Mais s'il n'y avait pas eu cette fausse convention
collective, le carcan dans lequel s'est placé M. Caine, il aurait
peut-être pu y avoir un déroulement, une convention collective.
J'arrête là.
M. Forget: J'aimerais savoir de M. Hallé, M. le
Président, si, pendant toute la période où il a agi de la
façon dont il l'a décrit d'ailleurs fort clairement tout à
l'heure, au nom du syndicat qui détenait l'accréditation, il peut
indiquer des faits concrets qui nous permettraient de croire que ce syndicat,
ce groupe au nom duquel il parlait, à ce moment-là, après
les 5, 6 octobre, représentait effectivement d'autres personnes que
celles qui avaient été mises à pied ou licenciées.
Est-ce qu'il peut invoquer des faits précis qui permettraient de croire
qu'il parlait au nom de ceux qui étaient restés à
l'intérieur aussi, et pas seulement au nom de ceux qui avaient
été licenciés?
M. Hallé: M. le député de Saint-Laurent,
là-dessus, je pourrais vous souligner uniquement que M. Gagné,
président du syndicat, et l'ancien président, dont je ne me
rappelle plus le nom c'est parce qu'il y a eu un changement à un
moment donné, c'est une question de disponibilité des personnes
à l'intérieur de l'assemblée générale
étaient des gens qui n'avaient pas été
licenciés.
Il y a eu au moins une cinquantaine de personnes, à ce
moment-là, il y avait cinquante personnes, soit plus du tiers des
grévistes, qui étaient des gens qui n'avaient pas
été licenciés.
Autre chose, il s'est produit des faits curieux que je pourrais
peut-être vous mentionner. Comme je n'étais pas le directeur de
grève, je ne suis pas au courant de tous les événements au
jour le jour; je passais, parce que je suis appelé à
négocier un peu partout. Je peux vous citer, par exemple, le cas de
Maria Chavez, une Portugaise, qui était immigrante reçue, mais
qui n'était pas encore citoyenne canadienne. Effectivement, c'est
l'immigrante dont on a parlé, la gréviste qui a été
tirée par les cheveux, etc. Il y a eu d'autres cas de pressions, et je
sais que cela s'est produit mais je vous cite celui-là parce que je suis
personnellement au courant de ce qui s'est passé pour elle et son mari,
parce qu'elle a été obligée de retourner au Portugal,
parce que le permis d'immigration était très serré.
Il y a donc eu des cas de pressions là-dessus, mais, outre les
cas de pressions sur les gens de l'intérieur, qui pourraient expliquer
la présence de certains de nos militants à l'intérieur, il
y avait aussi des gens qui n'ont jamais été mis à pied,
sauf plus tard, lorsqu'ils ont été congédiés par la
compagnie, avec les outrages. Mais ils n'ont jamais été
congédiés. Ils étaient cependant avec nous dès le
début. Je ne peux pas vous dire la
journée du début de la grève. Mais je peux vous
dire que ce fut à peu près vers le 25 ou 28 septembre, au moment
où j'ai repris le dossier après avoir mis un peu de
côté mes autres dossiers. Je le sais.
La journée exacte, le 19, je l'ai dit tout à l'heure, je
n'étais pas là. Je ne peux pas vous répondre
directement.
M. Forget: Pour être bien précis sur ce point,
est-ce que ce que vous nous dites, c'est qu'il y a des gens qui n'ont pas
été l'objet du licenciement, qui non seulement ont signé
la carte de la CSN au mois de juillet ou au mois d'août, mais qui ont
continué d'être actifs, et d'assister aux réunions et
d'appuyer l'action du syndicat de l'extérieur, pour être bien
clair, pendant tous les mois qui ont suivi?
M. Hallé: II y en a encore, monsieur.
M. Forget: II y en a encore. Combien y en a-t-il?
M. Hallé: Je ne pourrais pas vous dire le nombre, parce
que, effectivement, depuis que le dossier est rendu un peu spécial, je
me suis un peu éloigné du dossier. Je ne pourrais pas vous dire
personnellement leur nombre mais je sais qu'il y en a. Je vous ai donné
entre autres l'exemple du président du syndicat, parce que je le connais
très bien. Vous avez d'autres gens qui sont dans ce cas-là.
M. Forget: Dans l'attitude qu'a prise la CSN relativement aux
congédiements, on nous a dit tout à l'heure que rien ne pouvait
laisser croire aux gens qui travaillaient à la Commonwealth Plywood que
cette entreprise avait des difficultés économiques, que c'est
arrivé comme une chose venue du ciel, un cas absolument inattendu.
Est-ce que cette affirmation vaut pour les permanents de la CSN, les
conseillers techniques, etc., ou est-ce qu'elle vaut véritablement,
à votre avis, pour les gens qui étaient des salariés, qui
étaient membres du syndicat local? (22 h 30)
Ce que vous nous dites, c'est qu'on ne pourrait pas obtenir de la part
de ces gens un témoignage contraire dans le sens qu'ils avaient eu vent
de difficultés, qu'il y avait eu des réaménagements dans
la distribution du travail, dans l'organisation du travail qui
reflétaient, tout le monde le sait, à l'époque où
à peu près tout le monde en était conscient, des
difficultés, une difficulté de rodage considérable de la
nouvelle usine et qu'on savait qu'il y avait quelque chose dans l'air. Vous
trouvez qu'on ne pourrait pas trouver de témoignages de ce genre?
M. Hallé: Je vais vous dire carrément, sur cette
question-là, que ce n'est pas nous qui avons inventé une
situation économique défavorable ou favorable à la
Commonwealth Plywood et, lorsqu'on prend un nouveau dossier, parce que pour
moi, c'était un nouveau dossier, le premier portrait qu'on nous fait de
l'entreprise, ce sont les travailleurs eux-mêmes qui le font en
assemblée.
Première question qu'on pose lorsqu'on a un nouveau dossier:
Comment est-ce que cela va avec l'employeur, etc.? Les premières
questions, je les ai posées dès le 13 août. Comme je vous
ai dit, j'étais présent lors de l'assemblée de fondation
du syndicat, ce qui est particulier, mais j'y étais. À partir de
ce moment-là, la majorité des choses, ce sont les travailleurs
qui nous les ont dites, ils les vivaient et ils avaient des engagements. Ce
sont eux qui nous l'ont dit. Cela n'a pas été démenti dans
les procédures judiciaires auxquelles j'ai assisté, etc.,
jamais.
Je vous dis que ce n'est par une analyse comme telle de nous... Par la
suite, on aurait voulu en faire une, mais on n'a pas été capable
d'avoir les données; mais la première analyse, ce sont
effectivement les travailleurs qui voyaient qu'on engageait et, le lendemain,
on commence à désengager à pleine porte et en même
temps qu'on avait une demande d'accréditation qui tombait sur la table.
Cela avait l'air un peu curieux. C'est une coïncidence réellement
"coïncidente", très rare.
M. Forget: Vous vous basez donc essentiellement sur les
engagements qui ont été faits en août pour dire que, sur
cette base, vous ne pouvez pas ajouter foi à l'existence de
problème économique, que vous n'avez pas poussé plus loin,
cela étant une preuve, une indication qui vous paraissait parler par
elle-même?
M. Hallé: II y en avait une qu'on avait vécue lors
de la période de nouvelle allégeance syndicale. Je vous l'ai dit,
j'étais présent lors de la fondation du syndicat J'ai quand
même suivi, même si je n'ai pas été directement
organisateur, le dossier. On avait le problème de rejoindre les gens, en
faisant l'organisation avec nos militants, parce qu'ils travaillaient en temps
supplémentaire sans arrêt durant le mois d'août, les samedis
et tous les soirs de la semaine. Les gens même chialaient, ne voulaient
pas travailler et, comme l'ancienne convention collective ne leur permettait
pas le temps supplémentaire libre et volontaire, ils étaient
obligés d'y aller. On avait réellement des problèmes
à rejoindre les gens pour leur faire signer la carte. Cela a
été un des problèmes qu'on a eus durant la période
d'adhésion syndicale à ce moment-là.
Peut-être ont-ils eu des difficultés au mois de septembre,
c'est parce qu'ils se sont tellement préparés contre la CSN
pendant le mois d'août qu'ils étaient très bien
préparés, après cela, pour essayer de casser le syndicat
CSN. Cela se peut. C'est une réalité qu'on a vécue
à ce moment-là.
M. Forget: Je n'ai pas d'autres questions, M. le
Président. Merci!
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le ministre.
M. Johnson: S'il n'y a pas d'autres questions, M. le
Président, il y a deux possibilités, il est 22 h 30. Nous avons
entendu jusqu'à maintenant à toutes fins utiles le conseil de
médiation, après de trop longs préliminaires ce matin de
la part de tout le monde, y compris ceux de ce côté-ci, je devrais
dire, de celui qui vous parle. Nous avons entendu le conseil de
médiation et la partie CSN, le syndicat local, la centrale, le
conseiller juridique et le permanent de la Fédération nationale
du bois et du bâtiment. II y a deux possibilités qui s'offrent
devant nous. J'apprends, contrairement à ce que je disais à midi
que, demain matin, il n'y a pas deux commissions qui siègent, mais bien
une et qu'il serait possible, techniquement, de faire siéger alors la
commission, au sens où physiquement on aurait un emplacement.
Le député de Portneuf m'a dit qu'il avait pris des mesures
différentes, compte tenu de ce que j'avais annoncé à midi.
L'Opposition n'est donc pas prête à siéger demain. Je sais
que cela prend l'unanimité, en vertu du règlement, pour
siéger à nouveau demain matin, étant donné qu'on
est en dehors de la période de session.
L'alternative à cela, ce serait de remettre, cette fois-ci sans
préliminaires, en principe, simplement l'audition des deux autres
groupes, celui de M. Thériault, M. Lévesque et Mme Grignon et
celui de M. Caine et M. Fournier, au mercredi 4 octobre, ou encore au mardi 10
octobre.
On regarde en ce moment les différentes possibilités,
quelqu'un va me le confirmer. L'avantage du 10, évidemment, c'est que
c'est un mardi; donc, on peut siéger toute la journée et toute la
soirée. L'inconvénient du mercredi, même s'il est
très rapproché... Remarquez que je ne peux pas faire motion pour
qu'on siège le 4, ce serait simplement un avis qu'on donnerait, par
égard, par courtoisie envers nos invités, étant
donné que cela prendra un ordre de la Chambre de toute façon
à partir du 3. Les possibilités seraient pour le mercredi 4 ou le
mardi 10. J'aurais personnellement une préférence pour le
mardi.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce qu'on pourrait entendre
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, je suis momentanément
seul de ce côté de la table...
M. Johnson: ... siéger demain matin.
M. Forget: ... je ne peux certainement pas m'exprimer pour notre
collègue de Johnson qui a quitté la salle. Pour ce qui est de mon
collègue de Portneuf, il va être de retour bientôt. Je ne
peux certainement pas siéger demain, mais...
Le Président (M. Cardinal): Voici votre collègue de
Portneuf.
M. Pepin: Je me suis bien entendu avec lui tantôt et je
pense qu'il serait libre demain.
Le Président (M. Cardinal): C'est cela, mais je veux
démocratiquement...
M. Pepin: Lui demander.
Le Président (M. Cardinal): II est à votre service.
M. le député de Portneuf, votre collègue va vous expliquer
la situation.
M. Pagé: Ce matin, il a été clairement
indiqué qu'on ne siégerait pas demain et que l'ordre était
pour aujourd'hui seulement. J'avais offert ma disponibilité ce matin au
ministre. Celui-ci a dit qu'on ne siégeait pas demain. Mon
collègue du comté de Saint-Laurent et moi avons pris des
dispositions pour être ailleurs demain. C'est confirmé, des
engagements ont été pris sur la foi de la parole du ministre.
Alors, si le ministre change d'idée à tout bout de champ, ce
n'est pas mon problème, mais qu'il reporte cela à la semaine
prochaine-
M. Johnson: Mon Dieu! Vous employez un langage dramatique pour
dire des choses pas compliquées.
M. Pagé: Non.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! Sans
relire le journal des Débats et sans attaquer personne...
M. Johnson: Je n'ai pas prêté serment
là-dessus.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que je peux
demander...
M. Pagé: M. le Président, dites donc au
député de Sainte-Marie que c'est toujours comme cela avec le
ministre du Travail. On ne sait pas quand on siège, on ne le sait pas,
on le sait, on siège demain, on siège la semaine prochaine, on ne
le sait jamais.
M. Bisaillon: Trois mots.
M. Pagé: II le saura pour la prochaine fois.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! J'ai
compris une première chose, c'est que nous ne siégerions pas
demain.
M. Pagé: Le ministre l'a dit ce matin.
Le Président (M. Cardinal): C'est l'opinion de la
commission. Deuxièmement, il y a une alternative, c'est la semaine
prochaine ou l'autre semaine.
M. Johnson: M. le Président, en fait, je viens de
consulter M. Filion, de mon cabinet, qui essayait de voir le leader. La date
où ce serait le plus facilement possible, c'est bel et bien le 4, et non
pas le 10, avec l'inconvénient, cependant, qu'en principe on ne
siège pas le mercredi soir, mais on pourrait peut-être avoir le
consentement, au départ, de l'Opposition pour que, si on ne termine pas
durant la fin d'après-midi, compte tenu des travaux de la Chambre, on
puisse continuer le
soir, si c'était mercredi, le 4. Encore une fois, ce n'est pas
une décision que nous prenons, mais c'est pour aviser les partis qu'on
siégerait le 4.
Le Président (M. Cardinal): Oui, parce que, si vous
permettez, M. le ministre l'a dit, tout le monde sait que nous avons besoin
soit d'un avis, soit d'une motion, soit d'un ordre de la Chambre. Avec entente
des partis, je parle des partis à l'Assemblée nationale, c'est
une probabilité très grande.
M. Pagé: Ce serait après le 3.
M. Johnson: Le 3, c'est impossible. Ce serait, en principe, le 4,
et le leader m'a assuré qu'il serait prêt à donner un ordre
de la Chambre le 3 pour que nous puissions siéger le 4.
M. Pagé: Oui, mais si vous émettez un avis ce soir,
on peut siéger le 3 à 10 heures.
M. Johnson: Non, impossible. On ne peut pas émettre un
avis, je ne pense pas.
M. Forget: Oui, si on peut siéger demain, on peut
siéger mardi.
M. Pagé: Voyons!
M. Johnson: De consentement, oui, je m'excuse.
Le Président (M. Cardinal): Cela prend le consentement
unanime.
M. Johnson: Est-ce qu'on connaît le calendrier des
commissions pour le 3 au matin?
M. Pagé: II n'y en a pas jusqu'à
maintenant.
M. Johnson: il n'y a pas de commission. Le mardi 3, qu'est-ce
qu'on a à l'horaire? Le mardi 3, cela fait une drôle de
façon de commencer la session, mais enfin!
M. Pagé: Ce n'est pas grave, on est prêt. M.
Johnson: Écoutez! M. Pagé: Bon.
M. Johnson: Ce que le leader nous a dit avant de partir ce soir,
c'est que, quant a lui, c'est le 4. Il peut y avoir un tas d'excellentes
raisons que pourraient partager nos collègues de l'Opposition, je ne
sais pas. Je ne voudrais pas m'aventurer à dire le 3, dans les
circonstances.
M. Pagé: On vous offrait cela pour être plus
diligents.
M. Johnson: C'est bien gentil, mais nous aussi, on vous offrait
demain matin pour l'être encore plus.
M. Pagé: Oui, mais vous nous aviez dit non ce matin.
À l'avenir, vous vous brancherez plus tôt.
M. Johnson: Oui.
M. Bisaillon: II ne peut pas demain.
M. Johnson: II ne peut pas demain.
M. Pagé: Non, mais il nous a dit non ce matin.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît,
messieurs, je vous laisse quelques moments...
M. Pagé: On ne se chicanera pas pour ça, il est
toujours comme ça.
M. Johnson: Bon! Alors, M. le Président, ce que je
suggérerais, c'est que nous attendions un ordre de la Chambre qui pourra
survenir le 3. Je peux dire qu'il y a de fortes présomptions et
même donner la parole du leader, que nous pourrions siéger le 4,
mercredi, à 10 heures le matin, et après la période de
questions, c'est-à-dire vers à peu près 16 heures, 16 h
30, le mercredi après-midi et, avec le consentement de l'Opposition, le
mercredi soir si nous n'avions pas terminé, le tout étant un avis
par courtoisie aux parties et à être confirmé par une
motion du leader le 3.
Le Président (M. Cardinal): D'accord! Est-ce que je peux
terminer cela? Mais, cependant, je ne voudrais pas oublier des choses. Deux
minutes, s'il vous plaît!
Comme je l'ai fait pour d'autres, je veux remercier M. Hallé et
M. Pepin, qui se sont pliés aux désirs et aux questions de la
commission parlementaire. Je veux remercier tous les membres de la commission
parlementaire qui ont fait leur travail dans ce salon qui est très beau,
mais très difficile comme climatisation, et inviter à nouveau,
d'une façon non formelle, selon un avis ou une motion de
l'Assemblée nationale, probablement le 4, à moins que... Bon!
D'accord?
M. Johnson: D'accord! M. le Président, avant de terminer,
avant la clôture, je voudrais remercier évidemment tous ceux qui
ont répondu aux invitations qu'on leur a fait parvenir, m'excuser
auprès des cinq personnes que nous avions convoquées pour
témoigner aujourd'hui, qui n'ont pu le faire.
Je sais qu'il y en a parmi ceux-là, dont Me Casgrain, qui ont une
certaine expérience des commissions parlementaires. Je me souviens de
celle sur l'amiante, il y a eu certaines longueurs, là comme ailleurs.
Pour ceux qui ne sont pas habitués à ces commissions
parlementaires, nos excuses de vous avoir fait venir aujourd'hui.
J'espère que cela aura été enrichissant pour vous. Cela
l'aura été, sans doute, en tout cas, pour les officiers de mon
ministère, qui continueront leur travail avec ou sans commission
parlementaire. Je vous remercie d'être venus et je souhaite vous voir la
semaine prochaine. C'est d'accord jusqu'à minuit?
M. Pagé: On est disponible. Personne ne l'a
demandé?
M. Johnson: Vous venez de me dire non, c'est fini.
M. Pagé: Bien non! J'interprétais les commentaires
du président comme voulant mettre fin aux travaux de la commission et le
Président...
M. Johnson: On recommence.
M. Pagé: Nous autres, on est prêt jusqu'à
minuit, si vous voulez. Demain, il n'en est pas question.
M. Johnson: Pas de problème, quant à moi. M.
Pagé: Continuons! M. Johnson: Bon!
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, je m'excuse...
M. Johnson: On va effacer tous les remerciements et les
gentillesses civiles...
M. Pagé: C'est ça, on fera ça
tantôt.
Le Président (M. Cardinal): Je n'efface pas les
remerciements. Je les conserve.
M. Johnson: II s'agit de savoir ce qu'on est capable de faire
aussi en l'espace d'une heure et quart.
Le Président (M. Cardinal): Écoutez! Si vous voulez
qu'on se branche sur les règlements, aussi bêtement que ça,
il est passé 22 heures, nous pourrions tout simplement ajourner. Mais,
du consentement unanime de cette commission, nous pouvons aller jusqu'à
minuit, ce que j'en ai dit ce matin, on ne doit pas dépasser minuit.
Oui, M. le député?
M. Bisaillon: M. le Président, si la commission me permet,
j'aimerais donner mon avis sur cette question.
Le Président (M. Cardinal): Certainement!
M. Bisaillon: II est 22 h 45. Personnellement, je ne verrais pas
l'intérêt qu'on pourrait avoir à commencer avec les
témoins suivants, compte tenu du fait que ça couperait, dans le
fond, une partie des témoignages qui pourraient être amenés
devant nous. Cela nous ferait perdre le fil du portrait qu'ils peuvent nous
tracer et il me semble qu'on y gagnerait en prenant ça en bloc et en
attendant à la prochaine fois. Personnellement, je serais favorable,
plutôt, à ce qu'on ajourne ce soir et qu'on recommence le 4, parce
que je pense que le travail qu'on pourrait faire jusqu'à minuit ne
serait pas efficace dans le sens qu'il va couper les témoignages, ce que
je ne tiendrais pas qu'il se produise.
Personnellement, M. le Président, je tiens à dire
immédiatement que pour les témoins qui suivent, j'ai quand
même beaucoup de questions à poser et que je prévois
prendre un certain temps à le faire.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, sans qu'on entre
dans des questions politiques, est-ce que je comprends que je n'ai pas le
consentement unanime au sens d'un consensus profond de chacun des membres de
l'assemblée, sans nommer personne?
M. Johnson: II faut comprendre ça, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas, en vous
remerciant tous, j'ajourne ces travaux sine die.
Fin de la séance à 22 h 45