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Conflit de travail à la Commonwealth
Plywood
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre,
messieurs!
Nous commençons une deuxième séance de la
commission parlementaire permanente élue du travail et de la
main-d'oeuvre, à l'occasion du conflit de la Commonwealth Plywood. Au
début de cette séance, je dois mentionner le nom des membres de
la commission. Je souligne que, pour cette journée-ci, c'est une
séance que nous ajournerons à 12 h 30, selon la motion qui a
été adoptée hier, à l'Assemblée nationale.
Contrairement à ce qui s'est produit la semaine dernière, nous
sommes maintenant en session et nous obéissons à des
règles particulières. Normalement, suivant ce qui se passera
à l'Assemblée nationale cet après-midi, nous reprendrions
nos travaux, pour une nouvelle séance, après la période
des questions.
Les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon
(Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Forget
(Saint-Laurent).
M. Pagé: II est remplacé par le
député de Saint-Louis, M. Blank.
Le Président (M. Cardinal): M. Blank (Saint-Louis); M.
Gravel (Limoilou) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Johnson
(Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Roy,
(Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière).
Les intervenants sont: M. Blank (Saint-Louis), vous êtes donc
membre; M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet
(Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette
(Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par...
M. Pagé: M. Mailloux (Charlevoix).
Le Président (M. Cardinal): Merci. M. Saint-Germain
(Jacques-Cartier) remplacé par M. Mailloux (Charlevoix); M. Samson
(Rouyn-Noranda).
Appel des personnes et des organismes
invités
L'horaire est connu de tous. La liste des personnes invitées pour
cette journée, organismes et individus: Union internationale des
rembourreurs de l'Amérique du Nord qui devrait être
représentée par M. Donat Thériault. Présent?
Une voix: Présent.
Le Président (M. Cardinal): Mme Hélène
Grignon?
Une voix: Présente.
Le Président (M. Cardinal): Commonwealth Plywood, par M.
William P. Caine.
M. Caine: Présent.
Le Président (M. Cardinal): Merci. Byers, Casgrain et
associés, par Me Pierre Fournier.
M. Casgrain (Philippe): Pardon? Je ne comprends pas beaucoup.
M. Johnson: Me Pierre Fournier. F-O-U-R-N-l-E-R.
M. Casgrain: On va commencer doucement, si cela ne vous fait
rien, M. Johnson.
M. Johnson: Pardon?
Une voix: Vous n'avez pas d'ordre à donner ici,
monsieur.
M. Casgrain: On va commencer doucement. Une voix: Soyez
poli toujours. Une voix: Faites cela.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bisaillon: Faites cela vous-même et cela va bien
partir.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Casgrain: À la dernière séance, quand
j'ai dit que Me Bazin et moi représentions M. Fournier, on nous a dit
qu'on n'avait pas le droit de le faire.
M. Chevrette: On a demandé si M. Fournier était
ici.
Le Président (M. Cardinal): Je constate le fait tout
simplement. Me Fournier n'est pas présent. C'est tout.
M. Chevrette: Qu'il soit au moins poli!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Quand nous y arriverons, nous verrons ce qu'il y a lieu de
faire.
M. Chevrette: Est-ce qu'il se prend pour un autre, lui,
"crisse".
Le Président (M. Cardinal): M. Ernest
Léves-que.
M. Lévesque (Ernest): Présent.
Le Président (M. Cardinal): Société
Intercommunica, par M. Yvon Turcot. Absent. Merci! Je rappelle que la
commission s'était entendue pour procéder par bloc,
c'est-à-dire qu'à la dernière séance, après
les diverses procédures, j'avais obtenu le consentement unanime de la
commission pour entendre, par groupe, diverses personnes. M. le ministre, quel
est le prochain groupe qui était prévu?
M. Johnson: M. le Président, conformément un peu
à la pratique qu'on avait prise la semaine dernière, je
suggérerais, pour les fins de facilité, que nous entendions
ensemble M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault qui sont de
l'Union des rembourreurs unis d'Amérique.
Le Président (M. Cardinal): Est-ce que M.
Lévesque...
M. Bellemare: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le leader
parlementaire de l'Union Nationale.
M. Bellemare: ... on a passé une journée
entière à entendre tous les témoins que voulait faire
entendre le ministre. On a assisté à un monologue du ministre qui
a duré quasiment deux heures de temps pour essayer d'établir une
stratégie pour déprimer la compagnie, pour la mettre au palier,
mon cher monsieur, le plus bas, pour baisser son prestige et pour accuser
véritablement la compagnie, après avoir entendu tous les autres,
de ne pas vouloir collaborer. Je n'ai jamais rencontré la compagnie, je
n'ai jamais rencontré personne, mais je suis ici pour faire mon devoir
et je dis que la stratégie qu'emploie le ministre de ne pas donner la
chance à la compagnie de se faire entendre, c'est justement pour briser
ce prestige qu'a la compagnie, pour briser son rayonnement économique
pour dire après: Voici, messieurs, voyez-vous tout ce qu'on a dit contre
vous. Non, ce n'est pas la bonne stratégie, M. le Président, et
je pense que, sans connaître personne, étant déjà
moi-même assez exercé dans les relations patronales et
ouvrières, il devrait être entendu aujourd'hui que la compagnie
puisse faire part de ses sentiments et que nous lui posions des questions.
J'ai essayé l'autre jour de poser des questions. On a dit: Non,
ne touchez pas à cela. C'est défendu par le règlement. Il
y a une chose qui reste sûre, c'est que cette frime a assez duré.
La commission parlementaire est ici pour entendre tout le monde, pas seulement
un côté syndical ou pas seulement un côté qui fait
l'affaire du ministre pour se justifier, pour se couvrir. Il a fait un
monologue pendant deux heures. Vous nous avez empêchés, M. le
Président, après un vote pris, d'entendre la compagnie. Je n'ai
rien contre ceux qui ont fait le conseil de médiation, mais j'en ai
aujourd'hui contre l'accroc à la liberté d'expression, qu'avec
beaucoup de pesanteur, le ministre vous impose et que nous autres, on est
obligés de subir, parce qu'on est minoritaires. La compagnie a le droit
de se faire entendre. On a entendu pendant au moins douze heures tous les
témoins qui blanchissaient le ministre, qui essayaient de lui trouver
une justification à ce qu'il n'a pas voulu faire. Il est le grand
responsable, le ministre. C'est lui, le ministre, qui aurait dû, dans le
temps, prendre ce conflit qui était en train de se gâter, parce
que ce n'est pas une grève, ce n'est pas un lock-out. C'est entre
syndicalistes qu'on se chamaille, c'est intersyndical.
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, à l'ordre,
s'il vous plaît! Je vous ai entendu, M. le leader parlementaire de
l'Union Nationale, comme membre de la commission, M. le député de
Johnson, comme j'ai entendu tantôt le ministre. Je rappelle, cependant,
et vous l'avez dit vous-même, qu'il y avait un vote à cette
commission.
M. Bellemare: Qu'il y avait quoi?
Le Président (M. Cardinal): Le président est
là, évidemment, pour voir à ce que tout se passe aussi
bien que possible, et, s'il y a lieu, protéger l'Opposition.
M. Bellemare: Plus que n'importe quel autre, parce qu'on est
minoritaires.
Le Président (M. Cardinal): D'accord.
M. Bellemare: Si vous vous servez de la majorité...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, à l'ordre! Vous savez cependant, avec toute l'expérience
que vous avez, que la présidence ne peut pas renverser un vote. Il y
avait un vote sur une motion à cette commission, et je vis avec ce vote.
M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, sur cette question, je ne
voudrais pas ce matin qu'on s'embarque dans une bataille de procédure
et, encore moins, comme le dirait mon collègue de Johnson, dans des
monologues et de grandes diatribes. Il y a une chose qui est certaine, et je
voudrais qu'on clarifie la situation dès le départ. Je ne
voudrais pas qu'on soit obligé d'en arriver à des motions, mais
je voudrais qu'on s'entende, si c'était possible, les membres de la
commission, sur le déroulement de nos travaux. Il a été
clairement indiqué, lors de la première séance de la
commission, le 26 septembre, que nous avions différents groupes à
entendre, et que ces groupes avaient été convoqués par le
secrétariat des commissions, à la requête et à la
demande du ministre du Travail, lui-même en a fait état lors de
l'ouverture des travaux.
M. le Président, dans notre règlement, il est clairement
indiqué et stipulé que c'est la commission elle-même qui
convoque les parties, et non pas un ministre, et encore moins le
secrétariat des commissions. Je pense qu'il serait régulier, si
on
ne veut vraiment pas avoir de contestations ou de problèmes de
quelque nature que ce soit, dès ce matin, qu'une motion soit
présentée, possiblement par le gouvernement, possiblement par le
ministre, pour entendre les parties qu'il veut entendre aujourd'hui, qu'il
voudrait voir comparaître ici, parce qu'il n'y a absolument rien dans le
règlement, M. le Président, qui permet au secrétariat des
commissions de convoquer quiconque, parce qu'on pourrait soulever le
problème. On pourrait dire: En vertu de quoi le secrétariat des
commissions a-t-il convoqué M. Jos. Bleau à venir
comparaître plutôt que M. Pierre X? Alors, il serait de mise, M. le
Président, que, dès ce matin, le ministre présente sa
motion ou qu'un membre de l'équipe gouvernementale ou de la
majorité la présente avec un libellé bien
spécifique sur les groupes qu'on veut faire intervenir ici ce matin. Sur
la foi de l'adoption de cette motion, on verra qui entendre, à quel
moment. Est-ce qu'il est préférable d'entendre les
représentants de la compagnie ce matin? Est-ce qu'il est
préférable de continuer et de vider la question du
côté syndical pour revenir avec la compagnie cet
après-midi? Cela, c'est un autre problème. Mais, ce que je vous
demande, M. le Président, c'est de faire en sorte que notre
règlement soit respecté intégralement. Ce n'est pas au
ministre et ce n'est pas au secrétariat des commissions de faire les
convocations, c'est à la commission quand, tout au moins, on a le
respect le plus élémentaire et le plus minimal des autres
collègues autour de cette table.
M. Johnson: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Cela va. Oui, M. le
ministre.
M. Johnson: M. le Président, sur la question de
règlement, je voudrais tout simplement évoquer deux choses.
D'abord, la coutume et l'attitude usuelle que ce Parlement adopte pour entendre
des personnes en commission et, deuxièmement, la question du
comportement de l'Opposition elle-même la semaine dernière.
Il est de mise et il est habituel que le secrétariat des
commissions donne avis... Il ne s'agit pas de requérir au sens d'un
subpoena, comme le prévoit l'article 153. Il s'agit simplement de donner
avis à des personnes que nous aimerions les entendre et, la semaine
dernière, l'ensemble de ces personnes se sont présentées
effectivement. Cependant, depuis, un certain avocat, Me Four-nier, a fait
savoir, par la voie des journaux, qu'il n'entendait pas se présenter.
Quant à M. Yvon Turcot, d'une maison de publicité, il nous a fait
savoir, je pense, au secrétariat des commissions, par sa
secrétaire, que des engagements antérieurs l'empêcheraient
de venir se présenter aujourd'hui devant cette commission.
Je pense que le député de Portneuf, qui l'a bien dit, qui
ne veut pas soulever des débats de procédure inutiles, longs et
qui font perdre le temps de tout le monde autour de cette table et surtout de
nos invités dans la salle, je pense qu'il est bien conscient que, la
semaine dernière, cependant, il n'a pas posé cette question de
l'opportunité et de la nécessité d'une motion
présentée par le gouvernement, le ministre ou un
député autour de cette table quant à qui nous devions
entendre. Je pense que, compte tenu de la valeur du précédent
qu'il a lui-même créé la semaine dernière par son
silence, nous devrions, ce matin, entendre les personnes et qu'à la
rigueur, l'ordre dans lequel nous devons entendre ces personnes pourrait faire
l'objet d'une motion, comme la semaine dernière, pour que soient
entendus, dans un certain ordre, les trois blocs de témoins.
M. Pagé: M. le Président, vous savez...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: ... on ne peut, par une coutume, changer le
libellé, le texte de notre règlement. Notre règlement
stipule que les intervenants et ceux qui ont à comparaître sont
convoqués par la commission, d'une part. Voilà, pour
répondre au ministre.
D'autre part, la semaine dernière, on nous a informés et,
avant que je ne présente ma motion... M. le Président, est-ce que
je dérange le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Un instant. La parole est à M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: La semaine dernière, la discussion a
porté sur le moment où les intervenants auront à
comparaître dans le courant de la journée. Je présumais que
le gouvernement, dès le début des travaux, présenterait
une motion pour ratifier la convocation qui avait été faite par
le secrétariat des commissions.
Or, ce n'est certainement pas mon silence que peut invoquer le ministre,
parce que ce dernier sait fort bien lui-même qu'il aurait dû
présenter une motion. De plus, s'il fallait s'en référer
au silence des députés pour créer des
précédents, Dieu sait s'il y en aurait, parce qu'on a une
majorité ministérielle en Chambre qui ne parle pas trop
souvent.
Ce ne sont pas des arguments à invoquer. Qu'on respecte le
règlement et c'est ainsi que nos travaux pourront se dérouler
régulièrement et on n'aura pas de problème autour de la
table.
Alors, présentez la motion. Cela va s'arrêter là. On
va commencer et on va entendre les parties, ce matin.
Le Président (M. Cardinal): Un instant. Je veux quand
même permettre à tous les membres...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un faux
problème.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît! Je rappelle qu'il faut demander le droit de
parole pour l'obtenir.
M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Si cela prend une proposition formelle, je suis
bien prêt à en faire une, mais j'ai la conviction que M. le
député de Portneuf a raison de dire: Si on s'entendait pour dire
que l'on commence par tel groupe, le ministre a déjà fait la
suggestion...
M. Pagé: C'est cela.
M. Chevrette: ... et pour éviter de perdre du temps, le
ministre a même dit "en bloc". Il a même précisé que
c'était M. Thériault, Mme Hélène Grignon et je ne
me souviens plus...
Le Président (M. Cardinal): M. Lévesque.
M. Chevrette: M. Lévesque, je pense, dans un bloc et,
après cela, il a mentionné la compagnie. Si on s'entend, si on a
le temps cet avant-midi, si on finit après-midi, on peut commencer tout
de suite avec monsieur; mais on n'a pas besoin de motion si on s'entend. C'est
un consensus.
M. Pagé: Présentez une motion pour ratifier la
convocation.
Le Président (M. Cardinal): Un instant. A l'ordre, s'il
vous plaît! M. le député de Portneuf, à l'ordre.
Le prochain qui a demandé la parole est M. le
député de Charlevoix et, ensuite, M. le député de
Johnson.
M. Mailloux: J'ai assisté à la séance
précédente, en partie, et j'ai lu les témoignages de la
séance à laquelle j'étais absent. Je constate quand
même que sans vouloir entrer dans le légalisme des hommes de loi
qui sont à côté de nous, il y a quelque chose qui nous
frappe dans les témoignages qu'on veut faire entendre. Il y a, en fait,
trois parties qui sont en cause principalement dans ce conflit; d'un
côté, les syndicats représentés par l'Union des
rembourreurs unis d'Amérique, la CSN et je pense que ces deux-là
ont déjà été entendues. La troisième partie,
c'est quand même la partie patronale. A ces témoignages, le
ministre voudra ajouter des témoignages à l'appui,
peut-être, de ceux rendus par les gens de l'Union des rembourreurs unis
d'Amérique de même que par la CSN. Il n'y a rien contre cela. Mais
si le ministre continue dans la ligne qu'il a avancée, dans notre
esprit, il a un préjugé au départ, il est
déjà dans une position très inconfortable dans un conflit
qui est devant les tribunaux et je me demande dans quelle position il se place
s'il ne fait pas entendre, au moins après les deux syndicats, la partie
patronale représentée par M. Caine. C'est là qu'est le
centre. Qu'on le fasse donc entendre.
M. Johnson: Si vous le permettez, M. le Président,
simplement pour clarifier cela. Il est très évident que j'entends
proposer et je souhaite que nous entendions M. Caine. Cependant, les
représentants de l'Union internationale des rembourreurs unis
d'Amérique, je pense que le député de Charlevoix va le
reconnaître, n'ont pas encore témoigné. C'est ce qu'on
voudrait faire ce matin, les faire témoigner.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, brièvement, s'il vous plaît, parce que je vais être
obligé de prendre position pour que les gens qui sont devant nous ne
nous entendent pas pendant la matinée pour savoir qui nous allons
entendre. M. le député de Johnson.
M. Bellemare: C'est sûr et certain, M. le Président,
que nos minutes sont précieuses. Je m'en rends compte plus que jamais
parce que, dans un conflit où on a vécu pendant des mois et des
mois, cette suspicion d'un bord et de l'autre, on a l'avantage ce matin, et on
l'a eu le 26 septembre, d'entendre la partie syndicale qui nous a
détaillé, dans son style à elle, tout ce qu'elle avait eu
à subir, mais j'ai toujours pensé qu'on ne devrait pas, M. le
Président, mettre de côté la compagnie elle aussi...
Écoutez un instant. Quand on aura entendu tout le monde, la compagnie va
poireauter encore toute la journée comme elle l'a fait l'autre jour. Ce
n'est pas juste, M. le Président. Je pense que, comme l'a dit le
député de Charlevoix...
M. Vaillancourt (Jonquière): Si vous n'arrêtez pas
de parler.-.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: Je me conforme au règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Bellemare: Je vous ai demandé la parole, mais d'autres
ne l'ont pas demandée et font des interventions. Ils sont
exactement...
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est vous qui faites des
monologues ce matin.
M. Bellemare: Non, M. le Président, je plaide contre la
discrétion que manifeste le ministre de ne même pas vouloir
entendre la compagnie. Il y a une limite, mon cher monsieur.
M. Vaillancourt (Jonquière): Entendez les parties qui sont
ici, voyons donc! On veut les entendre, mais taisez-vous et on va les
entendre!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, messieurs!
Je vais suspendre la séance.
M. Bellemare: M. le Président, le député
a-t-il le droit de m'interrompre?
M. Vaillancourt (Jonquière): Taisez-vous et on va les
entendre.
M. Bellemare: Ce n'est pas cela qu'on veut. On veut que la
justice soit reconnue. Vous avez la majorité...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, c'est fini!
La séance est suspendue pendant trois minutes.
(Suspension de la séance à 10 h 31)
(Reprise de la séance à 10 h 34)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je suis obligé de demander la collaboration des membres de
la commission et c'est un appel que j'espère ne pas avoir à
répéter. Je voudrais dire, avant de reprendre ces travaux, que je
n'hésiterai pas à suspendre et même aller plus loin, s'il
le faut. Je ne permettrai pas qu'une commission se conduise de cette
façon. Il faut distinguer entre une invitation qui est faite aux gens
qui veulent se faire entendre, c'est-à-dire qui se sont
présentés volontairement, ce qui s'est produit à la
première séance, et ce qui se produit aussi pour la
majorité des gens, à cette deuxième séance, et qui
alors peuvent donc être invités je n'ai jamais
employé le mot "convoqués" devant cette commission, sauf pour
expliquer des faits par le secrétariat des commissions, à
la suggestion du ministre, ce qui s'est fait dans toutes les commissions
parlementaires.
Nous avons eu dans cette salle, pendant trois mois, une commission
parlementaire sur le projet de loi 101, je le rappelle comme jurisprudence; la
commission y a toujours accepté les invitations que le ministre faisait
et la commission elle-même faisait des motions pour demander d'autres
invitations ou d'autres convocations. Il y a même eu des décisions
qui ont été rendues par la présidence à ce
moment-là. Il faut donc distinguer entre cette invitation, ce fait que
des gens soient volontairement réunis, soient là, qu'il y ait
quorum, et l'assignation non volontaire, évidemment, d'un
témoin.
Dans ce cas, évidemment, il faut une motion, si on veut, par la
suite, appliquer ce règlement no 153. Nous n'en sommes pas là
quand même. Il ne faudrait pas, pour quelque raison que ce soit, que l'on
mêle ces deux choses. Au début de cette séance,
après avoir mentionné le nom des membres, des intervenants et des
invités, que j'ai désignés comme tels, et selon le
règlement, à qui j'ai demandé s'ils étaient
présents ou non, j'ai proposé, tout simplement, à la suite
de la première séance, un ordre du jour.
Je demande tout simplement si cet ordre du jour, qui a été
proposé par le ministre à ma demande, est accepté
unanimement par la commission.
M. Bellemare: Quel ordre du jour?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous en prie!
M. Bellemare: Celui qu'on a en main?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, je vous en prie! Ce que vous avez en main, ce n'est pas l'ordre du
jour, c'est ce que j'ai dit au début de la séance, et qui est au
journal des Débats. Si vous voulez que je le répète, j'ai
indiqué non pas un ordre du jour, mais une liste des personnes
invitées. J'ai ensuite mentionné que nous avions
procédé par bloc, à la première séance, que
nous en étions au deuxième bloc et que ce deuxième bloc,
proposé par le ministre, était pour entendre, comme je l'ai
indiqué tantôt, M. Lévesque, Mme Grignon et M.
Thériault.
C'est aussi simple que cela et il n'y a pas lieu à des questions
de règlement sur ce fait. Est-ce que la commission est consentante
à accepter ce fait pour que nous commencions?
M. Bellemare: Je maintiens ma dissidence.
M. Blank: Avec l'explication que le président de la
commission a donnée il a cité comme exemple le bill 101
à cette commission je pense que le président de la
commission mêle les choses.
Le Président (M. Cardinal): Pardon! À l'ordre, M.
le député de Saint-Louis!
M. Blank: Je vais vous dire pourquoi, j'en ai le droit.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, M. le
député de Saint-Louis! Vous n'impliquerez pas la
présidence.
M. Blank: Je n'implique pas la présidence du tout. Mais je
dis que lorsque nous avons eu la commission sur la loi 101, c'est suivant nos
règlements qu'on a une commission après la première
lecture, que les invitations ont été imprimées dans tous
les journaux et qu'on a invité des gens. C'est suivant nos
règlements.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Saint-Louis, vous n'étiez pas
à la dernière séance. Vous savez que nous sommes
réunis aujourd'hui en vertu...
M. Blank: Les règlements n'ont pas changé depuis la
dernière séance.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous sommes réunis aujourd'hui en vertu d'une motion
adoptée unanimement, et j'ai le droit de dire ce qui s'est passé
à l'Assemblée nationale, je présidais à ce
moment-là, unanimement, hier...
M. Blank: Je vous ai vu à la télévision hier
soir. C'était très beau.
Le Président (M. Cardinal): Par conséquent, je
fonctionne, et nous fonctionnons, en vertu d'une motion de l'Assemblée
nationale et nous sommes donc régulièrement réunis. Je
considère qu'il n'y a pas à revenir sur ce que je viens de
mentionner.
M. Blank: Pourtant, suite à cela, la suggestion du
député de Portneuf doit suivre. La commission doit décider
qui elle va entendre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, M. le
député de Saint-Louis! Je vous en prie. J'ai demandé si la
commission était d'accord. C'est tout ce que j'ai demandé.
M. Bellemare: Le bâillon.
M. Chevrette: Qu'on appelle les témoins au plus vite.
Le Président (M. Cardinal): La commission est d'accord,
sauf la dissidence du député de Johnson, qui est
enregistrée au journal des Débats.
M. Bellemare: Parce que le bloc de la compagnie devrait
être entendu.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Saint-Louis, vous êtes membre?
M. Blank: Oui, je suis membre.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. De même que
celle du député de Saint-Louis.
M. Blank: On a des règlements, on doit les avoir pour
quelque chose.
M. Chevrette: C'est exactement ce qu'on fait. M.Bellemare: C'est la stratégie du ministre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, bien
calmement! Un instant! Je vais inviter tout de suite M. Lévesque, Mme
Grignon et M. Thériault, à se présenter devant les micros,
face à cette assemblée. M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, simplement pour rassurer le
député de Johnson et les autres membres de la commission,
particulièrement le député de Charlevoix, je dis bien que
je suggère à la commission que nous entendions M.
Thériault, M. Lévesque et Mme Grignon et que, par la suite, nous
entendions les représentants patronaux ou le représentant
patronal, M. Caine, de même que d'autres témoins, s'il y a
lieu.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le ministre. Si
M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault sont là, je vous
prierais chacun de bien vouloir donner vos noms, prénoms et titres, s'il
vous plaît.
M. Lévesque (Ernest): Ernest Lévesque,
président du syndicat des employés à l'intérieur de
Commonwealth Plywood.
Une voix: M. le Président, puis-je vous demander de
répéter, je n'ai pas entendu?
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! je
m'excuse! Veuillez répéter. Approchez-vous de vos micros ou
approchez vos micros.
M. Bellemare: Vous représentez M. Lévesque,
quoi?
Le Président (M. Cardinal): D'accord, recommencez, s'il
vous plaît, M. Lévesque.
M. Lévesque (Ernest): M. Ernest Lévesque,
président du syndicat des employés à l'intérieur de
la Commonwealth Plywood.
M. Bellemare: Pour la CSN. Vous représentez la CSN...
M. Lévesque (Ernest): Ni l'un, ni l'autre.
M. Bellemare: Ah!
Le Président (M. Cardinal): D'accord, suivant.
Mme Grignon (Hélène): Hélène
Grignon...
Le Président (M. Cardinal): Oui, madame.
Mme Grignon: ... secrétaire des employés de
l'intérieur de la Commonwealth Plywood.
Le Président (M. Cardinal): Merci, madame.
M. Thériault (Donat): Donat Thériault,
vice-président international, directeur canadien de l'Union
internationale des rembourreurs et président du local 388 de l'Union
internationale des rembourreurs.
Le Président (M. Cardinal): Merci. Je vais suivre l'ordre
habituel, à savoir le côté ministériel puis les
oppositions. M. le ministre.
M. Johnson: M. Lévesque, pour reprendre la question que le
député de Johnson vient de vous poser, est-ce que vous êtes
un président de la CSN ou un président de l'Union internationale
des rembourreurs unis d'Amérique?
M. Lévesque (Ernest): Avant de passer aux questions,
j'aurais aimé produire un exposé de certains faits avant de
conclure.
Le Président (M. Cardinal): Un instant! La commission
est-elle d'accord?
Des voix: Oui, M. le Président.
M. Johnson: Je n'ai aucune objection...
Le Président {M. Cardinal): Consentement unanime. M.
Lévesque.
M. Johnson: ... à la condition cependant, si vous
permettez, M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Johnson: Je suis sûr que le député de
Johnson sera d'accord avec moi, que ce ne soit pas un long monologue.
Le Président (M. Cardinal): Non, s'il vous plaît,
à l'ordre! M. Lévesque, vous avez la parole.
Témoignages M. Ernest Lévesque
M. Lévesque (Ernest): Je vais commencer par la date du 15
septembre alors qu'un léger ralentissement de travail a commencé,
cette journée-là, à cause de la mise à pied.
M. Bellemare: 1977?
M. Lévesque (Ernest): Oui. Le 16 septembre 1977,
ralentissement jusqu'à 8 h 15 environ. Par la suite, arrêt total,
le reste de la journée. Durant cette journée, il y avait des
groupes qui se promenaient dans l'usine. Certains chantaient, d'autres
dansaient sur des airs d'accordéon. On peut même compter un groupe
de trente à quarante qui sont allés tour à tour se
désaltérer aux deux clubs du coin. J'étais moi-même
dans l'un de ces groupes. Pour être honnête, je n'aime pas ce genre
de fête. C'est pourquoi je me suis rendu assez souvent, accompagné
de différents employés, à ces deux clubs.
Le 19 septembre 1977, à mon arrivée, vers 6 h 15, il y
avait déjà une dizaine d'employés à l'entrée
principale de l'usine. Je me suis joint à eux par curiosité, afin
de voir comment tout cela se déroulerait. Quarante employés sont
entrés au travail, malgré les insuites et les menaces que leur
prodiguaient les piqueteurs. Ensuite, plusieurs sont retournés chez eux
ayant peur et ne sachant pas ce qui leur arriverait s'ils franchissaient cette
ligne de piquetage.
Au cours de cette matinée, nous avons été avertis
sur les lignes de piquetage qu'il y aurait vers 10 heures une assemblée
au sous-sol de l'église du Sacré-Coeur, tout près de
l'usine. Je me suis rendu à cette assemblée où il y avait
environ 110 personnes dont la grosse majorité était formée
de personnes mises à pied. De vingt à trente seulement n'avaient
pas été mises à pied. Elles ont formé le
comité. Ensuite, elles décidèrent de rencontrer la
compagnie pour faire reprendre les 118 mises à pied. (10 h 45)
Également, nous avons été avertis d'une
assemblée dans l'après-midi, vers 1 h 30, au même endroit,
et ce, sans que les 40 employés qui travaillaient, ainsi que ceux qui
avaient préféré retourner chez eux, n'aient
été invités à ces deux assemblées. Le 20
septembre 1977, une douzaine d'employés sont entrés au travail,
ce matin-là, non pas cependant sans avoir été
insultés et avoir reçu des coups. Vu l'attitude prise la veille
aux deux assemblées d'ignorer les 40 employés qui travaillaient
ce 19 septembre 1977 et ceux qui avaient préféré retourner
chez eux, je décidais de retourner au travail. J'ai eu droit à
des insultes et à des menaces, même que Serge Royer, directeur de
grève, s'est mis à courir derrière moi et m'a dit:
Qu'est-ce que tu fais là, toi qui as gueulé si fort hier? Ce qui
est faux, car je n'avais pas droit de parole, ni de vote. Je n'étais pas
le seul. Plusieurs de mes confrères de travail n'avaient pas
adhéré à la CSN. Je me suis arrêté avant
d'entrer et je l'ai envoyé promener. À 10 h 30, les patrons nous
ont envoyés chez nous, par manque de personnel pour produire. Nous
sommes sortis par l'arrière pour ne pas faire face aux menaces qu'ils
nous avaient prodiguées.
Le 26 septembre 1977, j'assistais à l'assemblée de l'Union
internationale des rembourreurs, ayant été convoqué par un
copain de travail, Luigi De Luca. Ce fut impossible de tenir cette
assemblée, car il y avait deux permanents de la CSN qui refusaient de
sortir. Vu que cette assemblée n'a pu être tenue, nous avons
convenu, trois autres employés non mis à pied et moi-même,
de rencontrer ces permanents de la CSN, le lendemain matin, sur la ligne de
piquetage, afin d'avoir un terrain d'entente pour trouver les parties
impliquées.
Ce qui fut convenu la veille fut fait le 27 septembre 1977 au matin.
Donc, je me suis rendu dans le stationnement du magasin IGA en face de l'usine
de la Commonwealth Plywood. À cet endroit, se trouvaient huit
employés non mis à pied qui allaient voir le matin ce qui se
passait, en curieux. Je leur ai mentionné notre intention et ils furent
d'accord que l'on fasse un essai d'entente. Je me suis dirigé vers la
ligne de piquetage accompagné d'un employé non mis à pied,
Réjean Huot. D'ailleurs, j'ai invité les permanents de la CSN,
seulement eux, à venir discuter de toute l'affaire devant un
café, au Central Bar-B-Q, situé boulevard Labelle, à
Sainte-Thérèse. Ceux-ci ayant accepté mon invitation, j'ai
commencé à discuter en parlant des non-mis à pied qui
désiraient retourner au travail et demandé que, en ce faisant, la
CSN nous négocie une convention, comme c'était notre droit, et
j'ai dit, à l'égard des mises à pied, qu'il y avait des
lois qui protégeaient les employés mis à pied
vis-à-vis de l'employeur, si celui-ci était en défaut. La
réponse fut que le seul moyen à prendre était qu'on se
joigne à eux sur la ligne de piquetage, que la compagnie plierait plus
vite.
Cette réponse ne fut pas acceptée des employés non
mis à pied. Le petit groupe qu'on était, à ce moment,
décida de s'organiser pour retourner au traval. Encore une fois, nous
sommes retournés prendre un café seuls, sans représen-
tant de la CSN. De là, je suis entré en communication avec
M. Benoît Verville, surintendant de l'usine. Il nous garantissait du
travail, si le groupe était assez important pour produire. À la
suite de cet appel, j'ai communiqué avec Mme Hélène
Gri-gnon, qui pouvait entrer en contact avec M. Donat Thériault pour lui
demander conseil, étant le dernier espoir pour nous aider sur les
mesures à prendre pour retourner au travail.
J'ai été victime d'actes de vandalisme, le 12 octobre
1977, sur ma voiture. Au moment où j'allais travailler, je me suis rendu
compte qu'on avait jeté de la peinture sur le toit et le capot. Je
pouvais quand même m'en servir jusqu'au 19 octobre 1977, alors que j'ai
découvert qu'on était revenu et qu'on avait endommagé en
entier la peinture de ma voiture et crevé les quatre pneus. Ce
matin-là, j'apprenais que trois de mes confrères de travail non
mis à pied avaient subi le même acte de vandalisme que moi, et
deux d'entre eux étaient membres du comité représentant
les employés intérieurs, comme on nous appelle, le
troisième étant chef d'équipe.
À la suite de la conférence de presse que nous avions
donnée, il m'a fallu avoir recours à la police pour
éloigner une voiture qui surveillait l'entourage de ma demeure. Je n'ai
pas pu identifier les trois individus de cette voiture, mais quand j'ai fait
appel à la police, en donnant la description de la voiture, j'ai
mentionné que je travaillais à la Commonwealth Plywood. Ils m'ont
répondu qu'ils allaient venir, qu'ils connaissaient ces gens.
Le 31 août 1978, pour démontrer la bonne foi des
grévistes, comme on les appelle, alors que la commission parlementaire
est convoquée, un employé portugais et son épouse, Antonio
et Marie Aguiar, qui entraient au travail vers 5 h 30 le matin, furent
attaqués par un groupe de grévistes qui cassèrent la vitre
de côté de l'automobile de ce monsieur, blessant son
épouse. Réalisant que les moyens de pression exercés sur
les employés de l'intérieur n'avaient pas atteint leur but, ils
s'en prirent à nos familles.
Je vous donne l'exemple de mon beau-père, dont le nom est Joe
Bonkay, qui travaille depuis huit ans à la compagnie Willis de
Sainte-Thérèse, qui est syndiqué CSN depuis le maraudage
à cette usine il y a environ deux ans et dont le président est
Jules Théoret. Il y eu à subir les insultes de ce même
Jules Théoret, se faisant même dire, dans une lettre circulaire
distribuée aux employés Willis et en rapport avec le conflit
Commonwealth Plywood, le gendre scab, le fils scab et la fille scab de Joe
Bonkay.
Un deuxième exemple: Vers la fin du mois d'août 1978, un
homme qui se trouvait en attente aux feux de circulation situés sur le
boulevard Labelle, face au local CSN, a eu la surprise de voir le toit de
vinyle de sa voiture découpé par un groupe d'individus sans
scrupules. Cet homme n'avait pas pensé qu'en allant reconduire sa fille
au travail, il serait attaqué de cette façon.
Avant de mettre fin à mon exposé, je dois admettre qu'il y
a eu d'autres essais d'entente venant de Gilles Pagé, qui aurait
favorisé la CSN. Alors qu'un soir, le comité était
réuni à ma demeure pour discuter, j'ai reçu un appel
téléphonique de Gilles Pagé me demandant une rencontre
pour trouver un terrain d'entente. J'ai répondu qu'il n'y avait pas
d'entente possible à cause de la résolution que les
grévistes ont acceptée et adoptée en assemblée,
c'est-à-dire que, dès qu'ils rentreraient au travail, tous les
employés à l'intérieur sortiraient, sans exception.
À la suite de cela, il m'a répondu qu'une assemblée
pouvait défaire la résolution prise à une assemblée
antérieure, en me disant que le seul moyen était d'aller les
rejoindre sur la ligne de piquetage pour faire plier la compagnie. Je lui ai
répondu que, pour être honnête, j'en parlerais, mais qu'il
n'y avait aucune possibilité que les employés sortent, ayant
connu toutes les difficultés pour entrer au travail, et ce fut
d'ailleurs la réponse.
Parlons des efforts entrepris par le député, M.
Élie Fallu, à qui j'avais écrit au début du conflit
et qui n'avait pas donné de réponse à la lettre
recommandée que je lui avais fait parvenir, sauf en ce qui a trait
à mon appel téléphonique, son secrétaire m'ayant
répondu que M. Élie Fallu serait prêt à nous
recevoir à son bureau, chose que j'ai faite, accompagné d'un
membre du comité, Suzanne Labelle et de deux employés, Clarisse
Rodrigue et Donat Lauzon.
Après discussion, il nous a demandé ce que nous attendions
de lui. Nous lui avons demandé de produire un article en ce qui concerne
tous les employés à l'intérieur de la Commonwealth
Plywood, de rendre public que nous n'étions pas des scabs. Il nous a
répondu qu'il était trop surveillé, qu'il y avait trop de
politique dans ce conflit et a même ajouté qu'il avait plus peur
du conflit de la Commonwealth Plywood que de celui de la Kenworth. Par la
suite, j'ai reçu des appels téléphoniques de M.
Élie Fallu. Il me demandait de m'asseoir à une table et de
négocier avec la CSN. Ma réponse fut que la CSN était
intéressée à s'asseoir et négocier avec les gens de
l'intérieur, de mettre sur papier, noir sur blanc, ce que la CSN
désirait vraiment négocier. Sur ces mots, il me répondit
qu'il ne fallait pas attendre que ça aille aussi mal qu'en Italie et
qu'il y ait un enlèvement. Tout ça se discutait dans la
période où Aldo Moro fut enlevé. Il n'y a pas eu de suite
à ces appels téléphoniques.
Une lettre recommandée fut envoyée au premier ministre,
René Lévesque, dont je vous fait lecture. "Honorable René
Lévesque, premier ministre, Edifice "J", cité parlementaire,
Québec. Honorable premier ministre, depuis des mois, on parle du conflit
à la Commonwealth Plywood. La compagnie donne sa version, la CSN donne
sa version, les juges donnent leur version, les politiciens donnent leur
version, mais personne n'a pensé à demander la version de ceux
qui sont le plus directement concernés, c'est-à-dire les hommes
et les femmes qui travaillent à la Commonwealth Plywood. "Nous sommes
des citoyens qui paient leurs taxes et nous sommes des travailleurs. Nous
pensons que nous devrions au moins avoir autant
de droits que ceux qui n'ont pas accepté le vote, que nous avons
pris à la majorité dans une assemblée parfaitement
régulière, de rentrer au travail et de signer une convention
collective. Il y a une limite à se faire traiter de scabs par des gens
qui ont mal digéré que nous ayons une assemblée et choisi
de retourner au travail au lieu de les appuyer pour faire une grève
illégale. "Nous avons négocié point par point une
convention collective dans laquelle nous avons obligé l'employeur
à nous faire beaucoup de concessions. C'est parce que c'était une
meilleure convention que la précédente que nous l'avons
adoptée. Une fois la convention adoptée et signée, tout le
monde doit la respecter et les vrais scabs sont ceux qui nous attaquent avec
des billes d'acier, peinturent nos voitures, crèvent les pneus, brisent
les vitres de nos maisons, en plus de menacer nos familles pour nous
empêcher de gagner notre vie. "Il est inacceptable que des gens essaient
de nous priver de notre droit de travailler dans une usine où plusieurs
d'entre nous travaillent depuis 10, 20 et même 30 ans et que certains ont
aidé à bâtir. "Vous n'avez qu'à venir à
Sainte-Thérèse et à interroger la population. Vous allez
savoir qui sont les voyous et les faiseurs de trouble professionnels et qui
sont les citoyens honnêtes et respectés qui travaillent à
la Commonwealth Plywood. "Nous sommes syndiqués depuis pas mal plus
longtemps que les "boss" de la centrale et nous n'avons pas de leçon de
syndicalisme à recevoir de ces gens. Nous trouvons que cette situation a
assez duré et nous pensons que le gouvernement devrait intervenir pour
faire respecter nos droits sans qu'on soit obligés, nous aussi, d'aller
occuper les bureaux des ministres et des députés".
Nous avons joint à cette lettre les signatures des travailleurs
de Commonwealth Plywood.
M. Bellemare: Avez-vous eu une réponse?
M. Lévesque (Ernest): J'y viens. Une deuxième
lettre lui fut envoyée, faute de réponse à la
première.
M. Bellemare: Ah!
M. Lévesque (Ernest): Je vous fais la lecture de cette
deuxième lettre. "Honorable premier ministre. "Suite à la lettre
recommandée que nous vous avons fait parvenir en date du 25 janvier
1978, nous nous permettons d'insister auprès de votre gouvernement afin
de recevoir une réponse d'ici peu. "Vu les circonstances, l'intervention
que nous vous demandons est essentielle pour nous tous. Vous ne pouvez
décevoir et refuser de l'aide que 95 travailleurs légitimes de
Commonwealth Plywood désirent recevoir. Nous nous sommes tournés
vers vous confiants d'obtenir votre appui, avant de rendre publique le 8
février 1978 notre lettre du 25 janvier 1978. "Nous
réitérons notre demande et vous remercions de votre
attention."
M. Bellemare: De quelle date, cette lettre?
M. Lévesque (Ernest): Le 1er février 1978. Et
à ces deux lettres, seul un appel téléphonique m'est
parvenu. Je ne peux assurer si cela venait vraiment du bureau de M.
Lévesque. Cet appel fut plutôt surprenant. Vu les actes de
violence et les difficultés d'entrer au travail, on m'a demandé
ce que j'attendais du premier ministre. Je lui ai répondu que ce
n'était pas à moi à prendre les dispositions pour
régler ce conflit de travail. Il m'a alors répondu que tout
était devant les tribunaux et que cela étant terminé, il
ramasserait les pots cassés et verrait ce qu'il pourrait faire.
Je dois mentionner que je ne suis pas sûr du nom de celui qui m'a
appelé se disant du bureau du premier ministre. Si ma mémoire ne
me fait pas défaut, cela pourrait être un M. Dubé.
Je dois vous mettre au courant que nous avons fait parvenir des lettres
semblables au ministre de la Justice, M. Marc-André Bédard et au
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, Pierre-Marc Johnson et que la
réponse ne fut pas meilleure.
Avant que vous me demandiez ce que j'attends de cette commission
parlementaire, je vais vous le dire en toute franchise. Si vous trouvez qu'il y
a présentement suffisamment de gens au Québec qui
reçoivent de l'assurance-chômage et de laide sociale, à
vous de prendre les moyens pour qu'une centaine d'autres personnes
employées à la Commonwealth Plywood ne s'ajoutent pas à
cette liste.
Si vous désirez que la concurrence entre syndicats et
représentants syndicaux ne s'exerce pas dans le sens que celui qui est
reconnu comme ne respectant aucune loi, encourageant la violence et posant des
gestes criminels est le meilleur sans avoir à s'inquiéter
d'être mis en prison, que le ministre de la Justice le dise donc
publiquement et nous pourrons, nous aussi, faire les efforts nécessaires
pour faire face à cette concurrence.
Je vous remercie de m'avoir invité à participer à
cette commission parlementaire et j'ose espérer que le grand public de
cette province sera renseigné honnêtement de ce qui s'est
passé au cours de toutes les séances de cette commission.
Si vous avez des questions à me poser, je suis ici pour vous
répondre.
Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie M.
Lévesque. Justement, vous me précédez. J'avais l'intention
de demander aux membres de la commission s'ils avaient des questions à
vous poser et si vous étiez prêt à y répondre.
Je commence donc par le côté ministériel et ensuite
les oppositions.
M. le ministre.
M. Bisaillon: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui, Une question de...
M. Bisaillon: C'est qu'il y a trois personnes qui sont
appelées comme témoins. Je voudrais savoir si de la part des deux
autres témoins, il y avait aussi des déclarations
préliminaires.
M. Johnson: Je n'aurais pas d'objection à ce qu'on les
entende tout de suite. Je pense qu'il serait peut-être plus simple tout
un bloc.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Est-ce que, soit Mme
Grignon, soit M. Thériault ensuite... Mme Grignon, avez-vous quelque
chose à déclarer?
Mme Grignon: Oui.
Le Président (M. Cardinal): Bon alors, la commission est
d'accord pour vous entendre.
Mme Hélène Grignon
Mme Grignon: Je suis mariée et mère de deux
garçons: un de onze ans et l'autre de huit ans. Avant mon mariage, j'ai
travaillé une première période d'environ 18 mois pour la
compagnie Commonwealth Plywood de Sainte-Thérèse. J'ai
travaillé une deuxième période de six mois pour cette
compagnie une fois mariée et après avoir eu mon premier enfant,
mais ce dernier étant très souvent malade, j'ai dû mettre
fin à cet emploi. (11 heures)
Après cinq années sans travailler à
l'extérieur et trois ans après avoir eu mon dernier enfant,
désirant de nouveau travailler à l'extérieur et puis que
mon mari, Gilles, travaillait à la compagnie de pianos Willis de
Sainte-Thérèse, depuis le 12 mars 1962, j'ai donc pu obtenir un
emploi à cet endroit où j'ai travaillé pour une
période d'environ deux ans. Puis, j'ai laissé cet emploi pour
travailler comme vendeuse dans un magasin de la région. Le 19 mai 1976,
ayant une possibilité de retourner travailler à la Commonwealth
Plywood durant des heures de travail qui me permettaient d'avoir plus de temps
disponible pour m'occuper de mes enfants, j'ai donc laissé ce travail de
vendeuse pour retourner travailler chez Commonwealth Plywood, où je
travaille toujours présentement.
Avant que je ne laisse mon emploi à la compagnie Willis, de
Sainte-Thérèse, en novembre 1975, j'ai eu le temps de
connaître un prêtre du nom de M. Jules Théoret, qui est
devenu un employé de cette même compagnie le 22 août 1974,
mais ce n'est en fait qu'une année après son entrée au
service de cette compagnie qu'il a laissé savoir aux ouvriers de cette
entreprise qu'il était prêtre. Au cours de toute cette
période où j'ai travaillé pour la compagnie Commonwealth
Plywood, j'ai été membre du local 388 de l'Union internationale
des rembourreurs de l'Amérique du Nord. J'ai aussi été
membre de cette union au cours de la période où j'ai
travaillé à la compagnie de pianos Willis. Au cours de ma
période d'emploi à cette dernière compagnie, durant cette
même période, c'est mon mari, Gilles, qui était
président du comité pour l'Union internationale des rem-
bourreurs de cette usine. Même si je ne travaille plus à cette
compagnie, à la compagnie de pianos Willis, à la toute fin de
l'année 1975, au début de l'année 1976, parce que mon mari
y travaillait et était président du comté de l'union, je
fus personnellement au courant que ce prêtre, Jules Théoret, qui
était aussi le président de la Société nationale
des Québécois pour la région de
Saint-Jérôme-Sainte-Thérèse, a fait imprimer, sans
aucune autorité et en dehors de la connaissance du comité
exécutif de l'union et de mon mari, qui était le président
de l'union pour cette usine, par les éditions Étendard qui
imprime le journal Choc de la Société nationale des
Québécois, un feuillet de propagande. J'ai en ma possession une
photocopie du document auquel je viens de faire allusion et j'aimerais vous le
remettre, M. le Président, pour que vous le distribuiez à qui de
droit.
Le Président (M. Cardinal): Merci, madame. M.
Thériault. Est-ce que vous avez terminé, madame?
Mme Grignon: Non.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Je croyais que
vous aviez terminé. Continuez.
M. Pagé: M. le Président, est-ce que je pourrais
vous demander si ce document portait sur le conflit de la Commonwealth
Plywood?
Mme Grignon: Oui.
M. Thériault: Oui, indirectement.
Le Président (M. Cardinal): C'est un document que vous
produisez pour le bénéfice de la commission. Merci.
Mme Grignon: Les feuillets de propagande étaient
distribués par ses amis non employés de la compagnie de pianos
Willis aux portes de cette usine à la sortie des employés du
travail. Il a lui-même distribué ce même feuillet de
propagande au sous-sol de l'église de la paroisse Sacré-Coeur, de
Sainte-Thérèse, quelques semaines plus tard, aux membres du local
388 de l'Union internationale des rembourreurs qui étaient
déjà arrivés dans cette salle avant que ne commence
l'assemblée régulière de ce local, et ce, toujours sans
aucune permission ou autorisation du président du local, M. Donat
Thériault, ou d'aucun autre des six membres du comité
exécutif de l'union. Ce fut là le commencement du travail de
maraudage CSN par Jules Théoret à la compagnie de pianos Willis
qui s'est continué par une campagne de salissage contre mon mari et
contre lequel, à la première assemblée spéciale
tenue pour les employés de cette usine, ce même Jules
Théoret et un groupe de ses amis ont réussi à faire
adopter un vote de non-confiance et exiger sa démission comme
président du comité de l'union pour cette usine pour le remplacer
évidemment par ce même Jules Théoret. Au cours des semaines
qui ont suivi la
campagne de maraudage qui s'est soldée par un changement
d'allégeance syndicale des employés de cette entreprise du local
388 de l'Union internationale des rembourreurs au Syndicat des employés
de Willis-CSN, mon mari s'est fait écoeurer jusqu'à ce qu'il
laisse son emploi qu'il aimait bien et ce, après quinze ans de service
à cette même entreprise. Au cours du mois de juillet 1977, une
compagne de travail m'informait qu'une assemblée serait tenue samedi
matin, à huit heures, dans une salle attenante de l'église de la
paroisse mère de Sainte-Thérèse dans le but de remplacer
l'Union internationale des rembourreurs à la Commonwealth Plywood par la
CSN. Je me suis rendue à cette assemblée où il y avait
neuf personnes présentes en plus de moi-même, trois
employés de sexe féminin et trois de sexe masculin, tous à
l'emploi de la Commonwealth Plywood. Toujours le même Jules
Théoret, Ghislain Hallé et un autre individu dont je ne connais
pas le nom se sont dits les représentants de la CSN. Le premier qui a
pris parole a été Jules Théoret qui a dit que
j'étais l'épouse de Gilles Grignon, qui lui avait fait des
problèmes à la Compagnie Willis, et que nous étions des
amis de Thériault et de l'Union internationale des rembourreurs. Il a
demandé aux personnes présentes si elles étaient
prêtes à me laisser assister à leur assemblée ou si
elles désiraient me mettre dehors. Dès que Jules Théoret
eut obtenu la réponse qu'il désirait, il m'a invité
à m'en aller. J'ai alors dit que l'invitation à cette
assemblée avait été faite aux employés de la
Commonwealth Plywood, que j'étais une employée de cette compagnie
et que je n'avais pas l'intention du tout de m'en aller, que je resterais pour
assister à cette assemblée. C'est alors que Ghislain Hallé
m'a demandé, à son tour, de m'en aller. Je lui ai répondu
qu'il serait obligé de me sortir par la force. Alors, il a dit: Tu vas
sortir. À ce moment-là, Jules Théoret a proposé de
remettre l'assemblée et quelques personnes sont sorties de la salle.
D'ailleurs, c'est aussi ce que j'ai fait moi-même. Cependant, je dois
admettre que je me suis fait prendre comme une poire, car dès que je fus
rendue de l'autre côté de la rue, les personnes sorties comme moi
de cette salle y sont revenues en vitesse, alors que, lorsque j'ai voulu le
faire moi-même, déjà la porte était
verrouillée de l'intérieur pour m'empêcher d'y
pénétrer.
En aucun temps, avant le mois d'octobre 1977, je n'ai été
sollicitée ou m'a-t-on offert de devenir membre du syndicat de la
Commonwealth Plywood-CSN, mais, le 16 septembre 1977, mes compagnes et
compagnons de travail de l'équipe du soir, comme moi-même, nous
n'avons pu travailler comme à l'ordinaire. Le travail que nous
terminions normalement et qui était commencé par l'équipe
régulière du jour n'était tout simplement pas accompli,
ceci faisant suite à une mise à pied remise le 9 septembre 1977
à 118 des 223 employés au service de la compagnie à cette
date.
En raison de ce changement draconien, l'équipe du soir
était discontinuée, j'avais été avisée que
j'étais transférée à l'équipe
régulière du jour, commençant à 7 heures le matin
du 19 septembre 1978. Ce jour-là, il y avait, à l'entrée
de l'usine, une trentaine des employés mis à pied de cette
compagnie qui m'ont interpellée lorsque je suis entrée sur le
terrain de l'usine en me qualifiant de présidente de l'Union
internationale des fourreurs. Ce même soir, à 17 heures, j'ai
quitté l'usine en automobile, accompagnée de mon mari venu me
chercher dans la cour de cette usine. J'ai constaté alors qu'il ne
restait plus devant l'usine que 5 ou 6 personnes du même groupe que celui
qui se trouvait là le matin même.
Le mardi matin, je suis entrée au travail à 7 heures, tel
que requis. Je n'ai pas semblé attirer l'attention de la dizaine de
grévistes tout au plus, à ce moment-là, qui entouraient
deux policiers de Sainte-Thérèse et qui semblaient avoir une
conversation très animée avec ces derniers. Une fois rendue
à l'intérieur, la compagne qui travaillait avec moi le jour
précédent, une dame Larocque, est arrivée au travail tout
énervée, me disant qu'elle venait de se faire bousculer et de
recevoir des coups de pied parce qu'elle n'avait pas accepté
d'acquiescer à leur demande de ne pas entrer au travail, ainsi que les
autres employés. Nous étions exactement douze, qui avions presque
tous reçu des coups ou des menaces pour ce qui leur arriverait le soir
à 17 heures lorsqu'ils allaient sortir de l'usine. Ils étaient
évidemment nerveux et incapables de travailler normalement, ce qu'ils
ont déclaré au contremaître.
À 17 h 30, étant donné qu'il n'y avait pas de
grévistes devant l'usine à ce moment-là, nos
contremaîtres nous ont conseillé de retourner chez nous et d'y
rester jusqu'à nouvel ordre. À la sortie de l'usine, mes
compagnes et compagnons de travail, ainsi que moi-même, sommes tous
allés ensemble au bureau de l'assurance-chômage où on nous
a remis des formules à remplir, mais en nous avisant que nous ne
pourrions probablement pas recevoir de prestations d'assurance-chômage,
étant donné que nous n'étions pas mis à pied et
qu'il y avait conflit ouvrier. Cette réponse nous a été
confirmée par écrit quelque temps plus tard.
Deux jours plus tard, soit le 22 septembre 1977, après avoir
rencontré et discuté avec un compagnon de travail, Luigi De Luca,
de ce problème de la Commonwealth Plywood, ce dernier m'ayant dit qu'il
allait téléphoner à M. Thériault pour lui demander
de le rencontrer et discuter ensemble de toute cette affaire, j'ai
appelé ce dernier pour lui demander s'il avait reçu un appel
téléphonique de Luigi De Luca. M. Thériault m'a dit oui,
ajoutant que si je l'appelais moi-même pour lui faire la même
demande de rencontre, il devait aussi me faire la même réponse,
que s'il y avait des employés de la Commonwealth Plywood qui
désiraient le rencontrer et lui parler au sujet de cette compagnie, la
convention collective de travail avec cette entreprise ne se terminant que le
30 septembre 1977, s'ils n'avaient pas démissionné comme membres
de l'Union internationale des rembourreurs, local 388, ils seraient les
bienvenus à assister à la prochaine assemblée
régulière de l'union qui se tiendrait au sous-sol de
l'église de la paroisse Sacré-Coeur de
Sainte-Thérèse, le lundi
26 septembre 1977. Alors, ces employés pourraient lui parler en
présence des membres de l'exécutif du local 388 et de tous les
membres présents, de tous les groupes de la région
syndiqués avec l'Union internationale des rembourreurs.
Au cours des quelques jours qui ont suivi, j'ai eu l'occasion de
converser avec quelques compagnes et compagnons de travail. Je leur ai fait
part de mon appel téléphonique à M. Thériault et de
la réponse de ce dernier. Je suppose qu'eux aussi ont fait de
même, car, le lundi soir suivant, 30 septembre 1977, nous étions
une quarantaine d'employés ou ex-employés de la Commonwealth
Plywood dans cette salle d'assemblée sur un total d'au moins 100
personnes présentes.
Avant même que cette dite assemblée ne débute, M.
Thériault, président du local 388 de l'Union internationale des
rembourreurs de l'Amérique du Nord, a été informé
qu'il se trouvait dans cette salle deux permanents de !a CSN dont les noms sont
M. Loyer et M. Kieffer, entourés d'une dizaine d'ex-employés de
la Commonwealth Plywood.
M. Thériault leur a demandé s'ils étaient membres
de l'Union internationale des rembourreurs. À cet instant, Serge Loyer a
répondu qu'il était permanent de la CSN et qu'il était
là pour représenter les employés de la Plywood. M.
Thériault lui a alors dit que cette assemblée n'en était
pas une pour les employés de la Commonwealth Plywood, mais bien
plutôt une assemblée régulière, dont la date avait
été fixée une année à l'avance et une
assemblée des membres de tous groupes de la région,
syndiqués avec l'Union internationale des rembourreurs, local 388, pour
traiter de toutes les affaires administratives de l'union.
Après avoir permis audit Serge Loyer de constater par
lui-même qu'il y avait dans la salle des membres d'au moins dix usines
différentes de la région, M. Thériault leur a
demandé une fois de plus de quitter la salle, mais ces derniers ont de
nouveau refusé de sortir.
C'est à ce moment-là qu'un ex-employé de la
Commonwealth Plywood qui entourait les deux permanents de la CSN son nom
était Marc Blanchette a pris une patte de chaise en métal
qui était brisée, menaçant d'arranger tous ceux qui
voudraient essayer de les faire sortir. Voyant cela, M. Thériault a
recouru aux services de la police de Sainte-Thérèse.
Les policiers de Sainte-Thérèse sont venus dans la salle
et ont parlementé poliment, au moins une heure, sinon plus, avec les
permanents de la CSN et leur petit groupe de supporteurs, avant que ceux-ci ne
décident enfin de quitter la salle.
Dès le départ des policiers et pas plus de quinze minutes
plus tard, ils étaient de retour. Ce que voyant, M. Thériault a
avisé les membres présents qui restaient dans la salle car
plusieurs avaient déjà quitté la salle, vu le temps que la
police avait mis pour faire sortir les personnes en question que cette
assemblée régulière du local 388 de l'Union internationale
des rembourreurs de l'Amérique du Nord était remise à une
date ultérieure qui leur serait communiquée en temps et lieu et
qu'à cette date, il prendrait les mesures nécessaires pour
pouvoir tenir cette assemblée en toute tranquillité.
Le 28 septembre 1977, onze de mes compagnes et compagnons de travail
s'étaient rendus à mon domicile pour que l'on discute ensemble
des moyens à prendre pour retourner au travail. À un certain
moment, il a été question, parce que nous n'avions pas pu
discuter avec M. Thériault lors de l'assemblée du 28 septembre,
qui avait été remise à une date que nous ne connaissions
pas, de tenter de le rejoindre par téléphone et de lui demander
de venir nous rencontrer chez moi, ce même jour, chose qu'il a faite.
Après avoir informé M. Thériault que 118
employés avaient reçu, le vendredi 9 septembre 1977, un avis de
mise à pied se terminant le vendredi 16 septembre 1977, que les
représentants de la CSN n'avaient pas jugé bon de convoquer
d'assemblée des employés de la Commonwealth Plywood durant cette
période, et que, le lundi matin 19 septembre 1977, un nombre très
peu considérable environ 30 de ces employés mis
à pied avaient tenté de nous convaincre de ne pas rentrer au
travail, bien que 40 employés non mis à pied, sur un total de
105, fussent quand même entrés... Au cours de la matinée,
des permanents de la CSN, avec un comité d'employés mis à
pied, étaient venus donner un ultimatum à nos employeurs selon
lequel ils devaient reprendre immédiatement au travail tous les
employés sans exception, sans quoi il n'y aurait plus un seul
employé qui entrerait et il y aurait du trouble.
Au cours de l'après-midi, ces représentants de la CSN
avaient tenu une assemblée alors que 40 d'entre nous étions au
travail. Un nombre encore plus considérable de 65 autres employés
non mis à pied, comme nous, étaient tout simplement
retournés chez eux, parce qu'ils avaient peur, ce qui fait plus de 100
des employés concernés qui n'ont pas été
convoqués et n'ont pu assister à cette assemblée. C'est en
fait au cours de cette assemblée qu'un vote de grève a
été pris, alors que la grève était
déjà commencée depuis 7 heures le matin.
À la suite des insultes et des injures que nous avons tous
reçues, des coups que plusieurs d'entre nous ont reçus, et du
fait que nous ne pouvions recevoir de prestations d'assurance-chômage,
notre intention ferme était de prendre les grands moyens pour retourner
au travail.
De plus, lorsque nous téléphonons au surintendant de
l'usine pour nous plaindre et demander de l'aide, il nous répond que
l'usine n'est pas fermée par l'employeur et qu'il y a du travail pour
105 personnes. Nous lui avons demandé s'il pouvait nous aider et nous
lui avons fait savoir que nous aimerions rester avec l'Union internationale des
rembourreurs, que plusieurs employés avaient signé pour la CSN
parce qu'ils avaient reçu des menaces s'ils refusaient de signer.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! (11 h
15)
Mme Grignon: M. Thériault nous a alors dit, après
nous avoir posé un grand nombre de questions: Étant donné
que ceux qui disent avoir reçu des menaces pour les forcer à
signer pour la CSN ne semblent pas vouloir venir déclarer sous serment
devant un commissaire-enquêteur du ministre du Travail en présence
des représentants de la CSN disant qu'ils ont peur de se faire casser
les jambes, par conséquent, il ne peut faire de miracle et nous devons
oublier immédiatement toute possibilité que l'Union
internationale des rembourreurs puisse continuer à représenter
les employés de la Commonwealth Plywood, puisqu'il était
évident que le syndicat de la Commonwealth Plywood (CSN) obtiendrait son
accréditation tôt ou tard, ajoutant que, de toute façon, un
syndicat ou une union n'est jamais meilleur que ses membres, ses officiers et
ses représentants ou permanents. Considérant ce que nous lui
avons appris, notre problème ne lui semblait pas être le syndicat
comme tel, mais bien plutôt ses permanents et ses officiers.
M. Thériault a donc suggéré, à nous de la
base, de prendre en main le syndicat qui serait accrédité, car ce
serait notre syndicat à nous, et de prendre les moyens par la suite pour
nous débarrasser des permanents et des officiers révolutionnaires
et dictateurs qui ne feraient pas notre affaire.
Nous avons donc demandé à M. Thériault s'il pouvait
au moins personnellement nous conseiller et nous aider à atteindre ce
but. Ce dernier nous racontait ce qu'il avait fait à Chambly à la
fin de l'année 1974, début de l'année 1975, dans un cas
à peu près identique au nôtre pour les employés de
la compagnie Gregg Cabinets.
Nous avons tous été tellement intéressés que
nous lui avons demandé immédiatement de bien vouloir accepter de
faire la même chose pour nous.
M. Thériault nous a alors répondu que si nous
étions seulement douze intéressés à son aide, il ne
pourrait nous être d'une grande utilité.
Je lui ai alors personnellement répondu que je n'avais pas
suffisamment de chaises pour asseoir tous ceux qui pourraient être
intéressés et de revenir le lendemain après-midi, chose
qu'il accepta de faire.
Donc, le 29 septembre 1977, au cours de l'après-midi, nous avons
rencontré de nouveau M. Thériault à ma résidence.
Cette fois, nous étions 35 des employés non mis à pied de
la Commonwealth Plywood. Les 23 nouveaux présents ont tous, comme nous,
le jour précédent, été très
intéressés par le récit de M. Thériault se
rapportant à ce qu'il avait réussi à accomplir pour les
employés de la compagnie Gregg Cabinets. Ils ont été
unanimes à lui demander de faire la même chose pour nous, ce
dernier, disant qu'il était assuré que beaucoup d'autres
employés de notre compagnie seraient eux aussi très
intéressés s'ils étaient mis au courant de la chose.
M. Thériault a alors suggéré de tenter de rejoindre
le plus grand nombre possible des employés concernés, qu'il
serait de nouveau à
Sainte-Thérèse lundi soir prochain, le 3 octobre 1977,
pour reprendre l'assemblée du local 388 de l'Union internationale des
rembourreurs, perturbée et ajournée avant d'avoir vraiment
débuté le jeudi soir, 28 septembre 1977.
Une fois cette assemblée terminée, il a dit être
disponible pour nous rencontrer. Après s'être établi
lui-même un programme d'action et avoir rejoint le plus grand nombre
possible des employés concernés de la Commonwealth Plywood, nous
étions 55, le lundi soir, 3 octobre 1977, au sous-sol de l'église
de la paroisse du Sacré-Coeur. Juste avant que ne prenne fin
l'assemblée du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs,
nous avons demandé la permission de nous servir de leur salle pour tenir
une assemblée du groupe d'employés de la Commonwealth Plywood,
permission qui a été accordée par résolution
unanime des membres de l'union présents à leur
assemblée.
Nous avons également demandé à M. Thériault,
président, et à Mme Simone Larin,
secrétaire-correspondante de l'union, s'ils voulaient bien rester, vu
leur expérience dans ce domaine, pour nous aider à tenir notre
propre assemblée, chose qu'ils ont accepté de faire et qu'ils ont
effectivement faite.
Après avoir remercié tous les membres de l'union pour leur
geste généreux de nous prêter leur salle, nous leur avons
dit qu'ils étaient les bienvenus, s'ils désiraient eux aussi
assister à notre assemblée, mais un très petit nombre sont
en fait restés.
Photocopie des procès-verbaux de cette assemblée sont
disponibles, si vous le désirez.
Le mardi matin, 4 octobre 1977, suivant le programme que nous avions
établi, nous nous sommes rendus nous étions 55 dans
la cour du poste de police, à Sainte-Thérèse, là
où un autobus scolaire devait nous conduire tous ensemble au travail.
Nous avons attendu cet autobus assez longtemps pour finalement apprendre de la
dame avec laquelle les arrangements pour la location de l'autobus avaient
été faits que ces chauffeurs d'autobus étaient membres de
la CSN et qu'ils refusaient de nous conduire au travail.
Nous avons donc téléphoné au surintendant de
l'usine, M. Benoît Verville, lui disant que nous étions, à
ce moment, 55 prêts à entrer au travail, que nous étions
dans la cour du poste de police de Sainte-Thérèse, que nous
n'avions pas de moyen de transport, lui demandant s'il était possible de
nous en procurer. Alors, il nous dit de rester où nous étions,
qu'il s'occupait immédiatement de nous procurer un moyen de transport.
En effet, vers 10 h 30, un camion nous conduisit au travail. Depuis cette date,
nous sommes entrés régulièrement au travail, à
l'exception d'un certain nombre de jours où le nombre de permanents,
officiers et de personnes en grève en d'autres endroits, membres de la
CSN, de même que les membres de toutes les tendances communistes, des
jeunesrévolutionnaires du cégep Lionel-Groulx, tous
sympathisants et amis de la CSN, étaient à l'avant comme à
l'arrière de l'usine, en si grand nombre
que la violence aurait atteint une intensité telle qu'il aurait
pu y avoir des blessures très graves ou même des pertes de vie
pour certaines personnes.
Cependant, nous ne sommes pas entrés au travail sans
difficulté et sans en subir les conséquences. En ce qui me
concerne, je n'ai pas cessé de recevoir des appels
téléphoniques pour me traiter de scab et me faire dire que je me
ferais tuer. En ce qui concerne mon mari et mes enfants, lorsque ce sont eux
qui répondent au téléphone, on leur dit que je suis une
maudite scab. D'autre part, mon plus jeune fils a été plusieurs
fois ennuyé sur la rue et au restaurant avec cette même remarque,
que sa mère était une maudite scab et qu'il lui arriverait un
accident. Durant une certaine période, j'ai été
ennuyée par un nombre considérable de chauffeurs de taxis et de
livreurs de poulet et de pizzas qui prétendaient que j'avais
téléphoné pour commander ces services ou ces produits.
Par ailleurs, mon mari a été menacé par certains
officiers du syndicat de l'automobile, amis de la CSN, qui disaient qu'ils lui
feraient perdre son emploi à la compagnie General Motors de
Sainte-Thérèse, si je continuais d'entrer au travail, ce qui a eu
pour effet que j'ai eu une conférence au sommet avec mon mari et que
j'ai perdu deux semaines de salaire suite à ces menaces. Le 19 octobre
1977, à 0 h 50, un cocktail molotov a été lancé
dans la grande fenêtre thermos et les glaces de ma résidence.
Selon le dire de la police qui est venue faire enquête, ce cocktail
molotov était fait d'une bouteille de trente onces remplie d'huile et de
gaz, et d'une mèche qui avait été allumée. Il est
heureux, selon la police, que cette mèche se soit éteinte dans sa
trajectoire, car notre maison aurait été détruite par le
feu. Nous aurions pu, mes enfants, mon mari et moi-même rôtir comme
des poulets. Tout ceci eut comme conséquence que depuis cette date, mon
plus jeune fils est devenu tellement nerveux qu'il est maintenant impossible de
le faire coucher dans sa chambre ou de le laisser seul à la maison,
même si ce n'est que pour quelques instants.
De plus, chaque fois et il y en a eu plusieurs que j'ai
reçu un subpoena des procureurs de la CSN et que j'ai dû me
présenter à la cour de Saint-Jérôme, j'ai
été ennuyée et insultée par des
représentants, officiers membres et sympathisants de la CSN. La
même chose s'est encore produite la semaine dernière ici
même à Québec à l'extérieur comme à
l'intérieur du Parlement, et même dans le salon rouge.
Avant même que vous me demandiez ce que j'attends de cette
commission parlementaire, je me permets de vous dire avec franchise et
sincérité que si vous trouvez qu'il y a assez de personnes sur
l'assurance-chômage et le bien-être social, c'est à vous, je
crois, de prendre les moyens pour que nous puissions travailler et gagner notre
vie en paix. Si vous avez besoin de coupables en rapport avec ce conflit
ouvrier, ne cherchez pas parmi les représentants officiers ou membres de
l'Union internationale des rembourreurs ou dans les rangs des ouvriers de la
Commonwealth Plywood, pré- sentement au travail, mais plutôt parmi
les permanents, officiers et membres de la CSN, du Parti communiste, les jeunes
révolutionnaires du cégep Lionel-Groulx.
Je crois que si vous vous en donnez la peine, la chose sera assez
facile, si vous considérez que la justice est plus importante que de
protéger et de favoriser la grande centrale syndicale CSN, dans le but
de gagner des votes que vous n'aurez probablement pas, de toute façon,
car vous ne réussirez jamais à satisfaire ces gens qui ne sont
intéressés qu'à détruire le système actuel
et à prendre le pouvoir.
Je vous remercie de m'avoir invitée et écoutée.
Maintenant, si vous avez des questions à me poser, je me ferai un
plaisir de vous répondre, si j'en connais personnellement les
réponses. Si cette commission parlementaire ne donne pas les
résultats que j'espère, j'aurai au moins la satisfaction de
savoir que par mon exposé et mon témoignage, le public aura eu la
chance au moins de connaître une partie de la vérité.
Le Président (M. Laplante): Merci, mademoiselle. M. le
député de Sainte-Marie, c'est parce qu'il y a M. Thériault
qui veut...
M. Bisaillon: C'est une question de procédure, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Pardon?
M. Bisaillon: C'est une question de procédure.
Le Président (M. Laplante): D'accord, oui.
M. Bisaillon: Merci. J'aurais voulu savoir, avant d'entendre M.
Thériault, s'il était possible que le secrétariat des
commissions nous fasse des copies des déclarations de M. Lévesque
et de Mme Grignon.
Une voix: Le journal des Débats.
M. Bisaillon: On voudrait les avoir tout de suite. Le journal des
Débats, on va l'avoir seulement demain, ce n'est pas très
utile.
M. Johnson: Quand cela peut-il être prêt, la
transcription?
Le Président (M. Laplante): II serait possible, je crois,
par le secrétariat des commissions, de prendre des photocopies, si vous
voulez bien les déposer au secrétaire, qui vous remettra
l'original par la suite.
Oui, M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, j'aurais une question de
procédure qui fait suite à l'intervention de M. Lévesque
et de Mme Grignon.
Mme Grignon, est-ce que vous êtes venue à titre personnel
ou si vous êtes secrétaire d'un syndicat ou quoi?
Mme Grignon: Je suis secrétaire du syndicat des gens de
l'intérieur.
M. Pagé: Bon! M. le Président, M. Lévesque
nous a dit tout à l'heure qu'il ne représentait ni la CSN, ni
l'Union des rembourreurs.
Le Président (M. Laplante): M. le
député...
M. Pagé: Non, mais c'est simplement une question de
procédure. Je me demande en quoi il peut comparaître avec M.
Thériault qui représente l'Union des rembourreurs s'il n'est pas
avec lui.
Le Président (M. Laplante): C'est une bonne question, je
vais vous laisser finir.
M. Johnson: Excellente question. Comme disent les
Français: That's what it's all about.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, je vous pose la question
purement et simplement. Je voudrais savoir... Écoutez! Depuis le
début de nos travaux, on nous dit qu'il y a trois groupes ici. Est-ce
qu'on est en présence d'un quatrième groupe? Est-ce que M.
Lévesque et Mme Grignon acceptent de comparaître et de
témoigner avec M. Thériault sous l'égide du bloc de
l'Union des rembourreurs ou si c'est séparé et divisé,
ça?
Le Président (M. Laplante): La question est importante et
je vais vous dire pourquoi. L'ordre a été appelé de la
façon suivante: L'Union internationale des rembourreurs
d'Amérique et vous trois êtes venus faire appel au nom de l'Union
internationale des rembourreurs. Est-ce que vous maintenez encore que vous
venez au nom de ce groupe-là?
M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que, à partir
même du témoignage de Mme Grignon, je pense, qui vient de nous
dire que le groupe des employés qui sont à l'intérieur
actuellement de l'usine ont fait appel aux services de M. Thériault
comme conseiller, il ne serait pas normal, à ce moment-là, qu'on
reçoive, en même temps que M. Lévesque et Mme Grignon, M.
Thériault, à titre de conseiller du groupe qui est à
l'intérieur et aussi, en même temps, il pourra nous faire le
portrait de ce qu'était l'Union des rembourreurs comme syndicat à
l'intérieur, avant?
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Johnson.
M. Bellemare: Il est sûr que lorsqu'on a décline les
titres de M. Donat Thériault, on a dit qu'il était
vice-président international, président du local 388 des
rembourreurs dans l'usine de la Commonwealth Plywood. Il est sûr que
c'est cette fonction qu'il occupe présentement, président du
local 388 des rembourreurs. Si ce n'est pas ça, qu'il le
démente.
M. Donat Thériault
M. Thériault: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le
Président. J'ai dit que j'étais vice-président
international, directeur canadien de l'Union internationale des rembourreurs
qui regroupe 10 000 membres pratiquement au Canada. C'est loin de Commonwealth
Plywood.
M. Bellemare: M. Thériault, pour la procédure qu'on
est en train d'établir, est-ce que vous êtes de la FTQ ou de
l'Union internationale des rembourreurs, point?
M. Thériault: Cela me fait plaisir de vous
répondre, M. Bellemare. Les structures de la CSN et de la FTQ sont
tellement différentes que dans la CSN, un syndicat CSN ne peut pas
être indépendant de la grande centrale de ses
fédérations et des ses conseils centraux.
M. Bellemare: M. le Président...
M. Thériault: Mais les unions internationales comme telles
n'ont pas à être affiliées à la FTQ.
M. Chevrette: II vous demande si vous l'êtes.
M. Thériault: Donc, ici, au Québec si vous
voulez me laisser le temps de répondre l'Union des rembourreurs a
sept locaux. Il y en a six qui ne sont pas affiliés à la FTQ.
M. Bellemare: M. le Président, pour continuer sur ce point
qu'a soulevé le député de Sainte-Marie, est-ce que vous
contestez la lettre du 17 mars 1978, signée par M. Fernand Daoust, qui
dit que vous êtes un trouble-fête? Le bureau de la
Fédération des travailleurs du Québec m'a chargé de
vous faire savoir que "nous nous désolidarisons totalement de l'Union
internationale des rembourreurs et son principal animateur, Donat
Thériault, que la CSN affronte actuellement avec la Commonwealth
Plywood".
Il continue ceci: "M. Thériault, qui se sert
illégitimement du nom de la FTQ quand bon lui semble, pratique une forme
de syndicalisme dont la FTQ se dissocie. Aucun des syndicats locaux desservis
par Thériault n'est affilié à la FTQ et cela, depuis
plusieurs années. Le seul local de l'Union des rembourreurs qui
demeure...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Johnson...
M. Bellemare: Un instant, j'ai fini! Le Président (M.
Laplante): Excusez!
M. Bellemare: ... "qui demeure affilié à la FTQ est
le local 402, qui groupe 1600 travailleurs d'une vingtaine d'usines à
Montréal. Le souci...
Le Président (M. Laplante): M. le député
deJohnson, je vous rappelle à l'ordre!
M. Bellemare: Je finis, je finis.
Le Président (M. Laplante): Je vous rappelle à
l'ordre!
M. Bellemare: J'ai seulement un mot.
Le Président (M. Laplante): Seulement un moment. Je vous
rappelle à l'ordre!
M. Bellemare: "Le souci que les responsables du 402...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Johnson, à l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: ... "démocratie syndicale... ... syndical
auront amené d'ailleurs plusieurs problèmes majeurs avec...
Le Président (M. Laplante): À l'ordre, deux
fois!
M. Bellemare: ... "avec Thériault".
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!
M. Thériault, est-ce que vous acceptez de témoigner comme
conseiller de l'Union internationale des rembourreurs d'Amérique?
M. Thériault: M. le Président, j'accepte de
témoigner au titre que vous voudrez. (11 h 30)
Le Président (M. Laplante): Ce n'est pas une
réponse, monsieur. On vous demande une réponse claire, nette.
Vous n'êtes pas dans un...
M. Thériault: Je crois que c'est très clair. Je
n'ai pas voulu vous insulter en vous disant cela. Je suis prêt à
vous répondre à titre de conseiller et je suis prêt
à répondre à titre de représentant de l'Union
internationale, aux deux titres.
Le Président (M. Laplante): D'accord. La parole est
à vous maintenant, M. Thériault, si vous avez quelque chose
à dire. Avez-vous un rapport à faire?
M. Thériault: Dois-je répondre à la question
du député de Johnson?
M. Johnson: Pas nécessairement.
Le Président (M. Laplante): Non. Quand viendra le temps,
vous pourrez répondre à ses questions. Actuellement, si vous avez
un rapport à faire comme...
M. Thériault: Merci, M. le Président. Ayant
décliné mes titres...
M. Bisaillon: Vous semblez avoir des copies, M.
Thériault.
M. Thériault: Je regrette. Ce ne sont pas des copies que
j'ai, et je regrette de vous dire aussi que vous ne pourrez pas avoir ce que
j'ai à vous dire, parce que...
M. Bellemare: C'est enregistré!!
M. Thériault: Tant mieux. Je l'espère. Parce que,
pour répondre à votre question, je n'ai pas eu le temps de
préparer quelque chose même autrement qu'une partie
dactylographiée et l'autre partie est seulement un brouillon. J'admets
que j'ai de la difficulté à me lire, donc, vous auriez
certainement un problème pour me lire.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. Thériault,
nous comprenons tout cela et je vous donne la parole.
M. Thériault: J'aimerais tout d'abord vous dire, M. le
Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! Seulement un instant pour les questions de procédure.
D'accord, M. Thériault, vous avez la parole.
M. Thériault: J'aimerais tout d'abord vous dire, M. le
Président, qu'à l'invitation que j'ai reçue, de même
qu'Hélène Grignon et Ernest Lévesque, de nous
présenter ici la semaine dernière, nous sommes venus et, à
ce moment, je n'avais aucune note, aucun exposé, je n'avais rien de
prêt. Je suis venu tout simplement dans le but de répondre
à des questions, n'ayant aucune expérience des commissions
parlementaires, n'ayant aussi aucune expérience de ce qui peut se
produire lorsqu'on vient à une commission parlementaire.
Hélène Grignon vous a déjà dit les insultes, les
provocations, et les menaces que nous avions reçues, non seulement
à la porte, à l'intérieur du parlement, mais même
dans le salon rouge.
Si vous voulez m'entendre, j'aimerais que vous puissiez le faire sans
que j'entende toutes sortes de discours dans mon dos et sans continuer à
se faire écoeurer comme on se fait écoeurer depuis qu'on est
arrivé même ce matin.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez mon entière
protection et vous savez, M. Thériault, que j'ai toujours
rappelé, tant les députés que les personnes
présentes dans cette salle, à l'ordre. Évidemment, je ne
peux retenir chacune des personnes.
M. Thériault: Merci, M. le Président.
M. Pagé: Vous lui avez demandé sa protection, mais
il n'est pas fort.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Portneuf.
M. Thériault, vous avez la parole.
M. Thériault: Après avoir décliné mes
titres, j'aimerais ajouter, cependant, que ces titres et
fonctions incluaient jusqu'à tout récemment la
responsabilité administrative de cette union au Québec.
Cependant, depuis le début de mai 1978, un poste de directeur
québécois a été créé et, depuis cette
date, je n'ai plus cette responsabilité administrative de l'union au
Québec.
Je suis de plus depuis 30 ans président du local 388 de cette
union qui regroupe présentement les syndiqués de quinze usines ou
groupes différents, soit plus de 1000 membres, pour la région du
Nord de Montréal.
Vous m'excuserez, M. le Président. J'ai l'inconvénient
d'être sorti de chez le dentiste ou le denturologue il y a très
peu de temps et j'ai de la difficulté à garder mes dents dans la
bouche.
Le Président (M. Cardinal): Cela va très bien pour
le journal des Débats. Continuez.
M. Thériault: Je voudrais tout d'abord vous dire que j'ai
été extrêmement surpris de l'invitation faite à
l'Union internationale des rembourreurs et à moi-même de venir
participer à cette commission parlementaire car, jusqu'à ce jour,
nous avons été passablement salis, mais ignorés dans ce
conflit de la Commonwealth Plywood et ce, depuis son début, non
seulement par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre lui-même,
mais aussi par son sous-ministre adjoint Yvon Blain, aussi bien que tous les
autres fonctionnaires qu'il a assignés à ce dossier.
Cependant, mon nom et celui de l'union que je représente ont
maintes fois été évoqués dans de nombreuses
déclarations publiques qu'ils ont faites depuis le début de ce
conflit qui dure, malheureusement, depuis plus d'un an. Ils l'ont
été encore des dizaines de fois au cours de cette première
journée de séance de cette commission parlementaire le 26
septembre 1978, alors que je n'ai même pas eu un seul instant pour me
faire entendre, mais beaucoup de temps pour me faire insulter.
On me dira probablement que c'est faux, car j'ai été
entendu par le conseil spécial de médiation nommé par le
ministre Pierre-Marc Johnson et présidé par son sous-ministre
adjoint Yvan Blain. Laissez-moi vous dire cependant que si j'ai
été entendu par ce conseil spécial de médiation, ce
n'est pas parce qu'il désirait le faire, mais bien plutôt parce
que je leur ai été imposé par les membres du comité
du Syndicat de la Commonwealth Plywood, employés de cette compagnie et
présentement au travail, car ils avaient été les seuls
invités et ils refusaient de se présenter devant ce conseil de
médiation à moins d'être accompagnés par un avocat
ou par moi-même.
Parlant de ce conseil spécial de médiation, je dois vous
dire que je trouve très étrange que, lorsqu'il s'agit d'une
séance d'audition devant un commissaire du travail ou devant le Tribunal
du travail et même ici en commission parlementaire, l'on juge utile et
nécessaire d'enregistrer tout ce qui est dit et qu'à ce si
important conseil spécial de médiation on n'ait pas jugé
utile et nécessaire d'en faire autant. Est-ce que l'on voulait fabriquer
un rapport maison qui pourrait servir à fabriquer des coupables pour que
les représentants du ministère du Travail ne soient pas
obligés d'admettre leur impuissance et leur incapacité de
régler ce conflit?
M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, sur une
question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.
M. Johnson: M. Thériault, en ce moment, s'adonne à
des allusions à l'égard des fonctionnaires de mon
ministère que je ne peux pas faire autrement que défendre. Si M.
Thériault a des accusations précises à porter contre les
fonctionnaires du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, je lui
demanderai de le faire et je lui demanderai de ne pas procéder par
allusions. Je ne laisserai pas M. Donat Thériault ternir la
réputation d'Yvan Blain et de Raymond Désilets à cette
table ou ailleurs.
M. Bellemare: II pourrait écrire de fausses cartes...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. Thériault, vous pouvez continuer.
M. Thériault: Je peux continuer, M. le
Président?
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Thériault: Et je n'ai pas à répondre au
ministre?
Le Président (M. Cardinal): Non. C'est au président
à répondre.
M. Bellemare: Vous en aurez assez tout à l'heure à
répondre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît. M. Thériault.
M. Thériault: Ou pour le régler, de trouver les
coupables au sein des officiers et permanents de la grande centrale CSN et
ainsi déplaire énormément à grand-papa Pepin et
à papa Rodrigue. N'est-ce pas aussi dans ce même but que le
sous-ministre adjoint Yvan Blain a exigé que je le rencontre seul avant
de le rencontrer de nouveau avec les membres du comité du syndicat de la
Commonwealth Plywood?
Parlant maintenant du rapport dudit conseil spécial de
médiation, je dois vous dire qu'il renferme des déclarations qui
me sont attribuées, qui sont fausses et fabriquées de toutes
pièces, que je ne leur ai jamais faites...
M. Bellemare: C'est antiréglementaire.
Le Président (M. Cardinal): Un instant!
M. Thériault: ... ou qu'ils ont modifiées selon
leur interprétation des faits de façon à atteindre les
fins et les buts désirés.
M. Bellemare: À l'ordre, le ministre. À
l'ordre!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Thériault: Laissez-moi vous indiquer au départ
qu'en ce jour du 26 septembre 1978, dans ce majestueux salon rouge, alors qu'il
donnait, à la demande du ministre du Travail, la chronologie des
événements de ce conflit de la Commonwealth...
M. Pagé: J'invoque le règlement.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, M.
Thériault! M. le député de Portneuf, sur une question de
règlement.
M. Pagé: M. le Président, je ne voudrais pas qu'on
s'embarque dans une procédurite sur cette question de règlement,
mais il y a quand même des convenances qu'il faut respecter. M.
Thériault fait allusion aux travaux de la commission de la semaine
dernière. Je conviens qu'à juste titre ou non, le
président de la commission, soit vous-même au début de nos
travaux, vous avez donné l'immunité parlementaire tout
cela pourrait être discutable aux intervenants, mais, M. le
Président, je ne crois pas qu'il soit possible ni acceptable qu'un
intervenant ce matin, en relevant des événements dans leur
chronologie ou autrement, mette en cause les fonctionnaires du ministère
du Travail, qu'il porte des accusations comme celles-là. En fait,
là-dessus, je dois vous dire que j'abonde dans le même sens que le
ministre et que si M. Thériault a des accusations spécifiques
à porter ou quoi que ce soit, il y a d'autres endroits pour le faire, et
je ne voudrais pas que notre commission... on a déjà assez de
problèmes à se comprendre avec le micmac de la procédure,
des cartes, des votes et des réunions, sans s'embarquer dans des
accusations, M. Thériault. C'est mon commentaire. C'était
l'essentiel de ma question de règlement. Qu'on en vienne au conflit et
qu'on mette de côté la violence et les ceci les cela, les pneus
crevés, etc., et qu'on parle du problème et du fond du
problème. Cela fait déjà deux heures ou presque qu'on est
ici. C'est le fond du problème qu'on veut discuter et on veut voir pour
tenter d'en dégager, si c'est possible, des solutions et des avenues de
règlement. C'est l'essentiel de ma question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci, M. le
député de Portneuf. J'abonde dans votre sens. M. le
député de Johnson.
M. Bellemare: M. le Président, je ne peux pas laisser
passer cette accusation formelle que vient de porter M. Thériault contre
le conseil de médiation. Il vient de dire qu'il a tronqué les
textes, tronqué les déclarations de M. Thériault et cela,
M. le Président, est contenu dans un mémoire que tout le monde a
pu lire et avoir et personne à cette table n'a eu un mot contre le
conseil de médiation de M. Blain ou de M. Désilets. Je pense, M.
le Président, que le témoin n'a pas le droit d'accuser un conseil
de médiation comme celui-là, qui a siégé avec toute
la connaissance du problème, de poser un geste, une accusation formelle
contre M. Blain, contre le conseil de médiation. Je n'endurerai pas
ça, M. le Président, de la part d'un témoin.
Qu'il dise qu'on a erré, mais une accusation aussi directe que
celle qui vient d'être portée contre le conseil de
médiation... Je connais assez M. Blain, je connais assez son travail
pour dire qu'il n'y a jamais eu, dans le rapport que j'ai lu, que j'ai
commenté et que j'ai souligné partout, une seule fois où
j'ai pu détecter une lacune quant à la décision, aux
recommandations qui ont été prises.
M. le Président, vous ne pouvez pas permettre ça de la
part d'un témoin.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le
député de Johnson, M. le ministre, M. le député de
Portneuf, M. Donat Thériault...
M. Vaillancourt (Jonquière): Le député de
Sainte-Marie avait demandé la parole.
M. Bisaillon: Bien avant tout le monde.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. Simplement, c'est
parce que je ne vous ai pas vu. M. le député de Sainte-Marie.
Après, je veux quand même, comme président, me prononcer
sur cette question.
M. Bisaillon: Je pense qu'il serait effectivement
intéressant que vous écoutiez ce que j'ai à dire, parce
que c'est un son de cloche différent que j'ai à apporter.
J'aurais été tenté, effectivement, de laisser M.
Thériault continuer la lecture de son texte. Je pense que c'est
susceptible d'éclairer la commission sur la crédibilité du
témoin, de même que sur sa bonne foi.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre! Très calmement et très
sérieusement, je dois indiquer à M. Thériault que si j'ai
mentionné, à la première séance de cette
commission, que les députés et les témoins
bénéficiaient de l'immunité parlementaire, c'était
quand même à certaines conditions. La première des
conditions, c'est de dire exactement la vérité, et je n'accuse
personne, qu'on ne lise pas entre les lignes, ce ne sont que les lignes qui
comptent. Première condition, c'est qu'un témoin ne
bénéficie de l'immunité que si, répondant aux
questions ou faisant un exposé, il indique vraiment ce qui s'est produit
ou quelle est son opinion.
Deuxièmement, l'immunité parlementaire ne permet pas, en
commission et ce n'est pas la première fois que le fait se
produit à un témoin
d'attaquer l'Assemblée nationale, d'attaquer une commission
parlementaire, d'attaquer un député ou d'attaquer des
fonctionnaires. Vous remarquerez que ce serait trop facile,
bénéficiant d'immunité, de lancer des accusations. Je
rappelle donc au témoin, même si je veux le protéger, que
je dois le retenir, que je le prierais de cesser de porter des accusations en
cette salle de la commission parlementaire. M. Thériault, vous avez la
parole à ces conditions.
M. le député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je n'ai malheureusement pas
de formation juridique, je comprends mal quand même le point de vue qui a
été avancé par mon collègue de Portneuf qui a
lui-même cette formation, de même que vous. Depuis le début
de la commission, il ressort que, dans les premiers témoignages qui ont
été entendus, quoique la cause soit sub judice, il y a eu des
affirmations qui ont été faites qui peuvent entraîner des
conséquences devant les tribunaux. Je ne mets pas en doute la
compétence et l'intégrité des fonctionnaires qui ont
consulté les parties. On a ajouté tantôt qu'il n'y avait
pas eu de paroles prononcées à ce moment-là.
Que M. Thériault fasse des affirmations à son compte, je
pense qu'il appartient aux membres de la commission de juger s'ils doivent y
donner crédibilité ou non, mais je comprends mal qu'on
permettrait à d'autres de faire des affirmations et qu'on ne permette
pas à ce témoin de faire ses affirmations, qu'il porte à
son compte, dont on peut peut-être douter ou qu'on peut ne pas partager,
mais je vois mal qu'on arrête un témoin dans ce qu'il a à
dire...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Charlevoix, attention.
M. Mailloux: On a deux poids et deux mesures.
Le Président (M. Cardinal): Non, M. le
député de Charlevoix, attention.
M. Mailloux: Deux poids et deux mesures actuellement, M. le
Président.
Le Président (M. Cardinal): Attention, M. le
député de Charlevoix, je dois aussi vous rappeler à
l'ordre. Il y a une différence entre des affirmations, un récit
et des accusations. (11 h 45)
M. Mailloux: II n'y a pas eu d'autres affirmations faites par les
premiers témoins?
Le Président (M. Cardinal): II y a eu d'autres
affirmations. C'est la première fois, à ma connaissance, qu'il y
a des accusations précises contre des personnes nommées.
M. Mailloux: Je voudrais vous poser une dernière question.
Tantôt, vous avez fait la nomenclature des personnes qui sont couvertes,
qu'on ne doit pas attaquer, les fonctionnaires, le président, les
membres de la commission. À ce moment-là, pourquoi tous les
autres ne devraient-ils pas être attaquables non plus? On les attaque
depuis le début.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Charlevoix, s'il vous plaît! Vous posez une question hypothétique.
J'aurais pu nommer tout le monde de tout l'univers. Je n'ai nommé que
ceux qui ont été attaqués. On ne pose pas au
président des questions hypothétiques sur des gens qui n'ont pas
été attaqués. Je vous en prie.
M. Thériault, vous bénéficiez encore de la
même protection de la commission. Je vous prierais cependant de
continuer, mais sans attaque contre des personnes, à moins qu'il y ait
une preuve qui l'établisse. Nous ne sommes pas devant un tribunal, je le
rappelle. Je l'ai rappelé la semaine dernière. M.
Thériault, vous pouvez continuer.
M. Johnson: M. le Président, si vous permettez.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.
M. Johnson: Avant que M. Thériault reprenne et sans
vouloir répondre spécifiquement à la préoccupation
du député de Charlevoix, je voudrais simplement dire que ce que
nous tentons de faire, dans cette commission je pense que c'est
également le cas du député de Portneuf et du
député de Johnson, comme de tous les autres membres de cette
commission c'est d'essayer de retrouver des faits. C'est en ce
sens-là que peut-être des faits présentés dans une
séquence précise, lors de mes propos à la première
réunion de la commission, pouvaient, pour certains esprits, signifier
qu'il y avait là des accusations, qu'il y avait une conjonction de faits
dont, à mon avis, on pourrait tirer des conclusions. Mais, entre cela et
se mettre, de façon systématique, à s'en prendre à
l'intégrité d'un membre ou d'un fonctionnaire du ministère
du Travail, je pense qu'il y a une marge, et celle-là, M.
Thériault l'a déjà franchie.
J'espère, M. le Président, que M. Thériault
continuera son propos sur un autre ton et d'une façon un peu
différente.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le ministre. M.
Thériault, ce n'est pas une question de façon de s'exprimer,
c'est simplement une question que, je le répète pour tous les
députés et tous les membres présents, ayant une longue
expérience des commissions parlementaires, je ne puis permettre qu'en
commission parlementaire, il y ait d'autres attaques que les attaques
politiques que les politiciens se font normalement, mais pas d'attaques qui
viennent de témoins, vis-à-vis des personnes qui ne peuvent pas
se défendre et qui n'ont pas droit de parole devant cette commission. M.
Thériault.
M. Thériault: M. le Président, je dois vous
rappeler que mes premières remarques ont été que, lorsque
j'ai été convoqué à cette commission
spéciale de médiation, contrairement à la procédure
habituelle au ministère du Travail ou même ici, il y a
enregistrement de ce qui est dit. Un rapport a été remis, on en a
fait grand état dans les journaux. On en a fait un plus grand
état ici.
Ce que j'ai voulu démontrer et que je voudrais toujours
démontrer, c'est que ce rapport qui m'accuse d'avoir dit ou d'avoir fait
un paquet de choses est faux, du commencement jusqu'à la fin, et je suis
en mesure de vous le prouver.
Le Président (M. Cardinal): C'est une opinion, M.
Thériault. Nous acceptons votre opinion. Mais n'accusez pas des
personnes d'avoir tronqué le rapport ou des choses semblables. S'il vous
plaît!
M. Thériault: Je suis obligé de le faire, M. le
Président, parce que c'est faux. On m'accuse d'avoir dit et d'avoir fait
des choses que je n'ai pas faites.
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vais
vous laisser procéder.
M. Chevrette: On est aussi bien de le laisser aller. C'est lui
qui porte l'odieux de ses paroles ou le poids de ses affirmations.
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, vous
êtes averti des limites de l'immunité parlementaire. Je vous
laisse donc continuer.
M. Thériault: Sur ce que j'ai à dire, oui.
Je vous cite textuellement les paroles de M. Blain, consignées au
journal des Débats, alors qu'il s'adressait à vous-même:
"À la convocation du 15 mai, ni M. Caine ni M. Casgrain ne se sont
présentés. Donc, le représentant pour le groupe que nous,
pour les fins du rapport, on appelle les gars de l'intérieur,
était représenté par M. Thériault, de l'Union
internationale des rembourreurs unis d'Amérique, et pour le syndicat
accrédité et affilié à la
Confédération des syndicats nationaux, c'était M. Marcel
Pepin".
Commençant avec la page 3 de son rapport, M. Blain dit, et je
cite: "Le 18 mai, seuls se présentèrent MM. Donat
Thériault et Pierre Tellier, respectivement vice-président du
local 388 et secrétaire-trésorier de l'Union internationale des
rembourreurs unis d'Amérique. M. Thériault, qui se décrit
comme conseiller syndical des gens de l'intérieur, indiqua alors au
conseil que ceux-ci ne se présenteraient pas devant le conseil sans
qu'il soit présent".
Je désire corriger cette deuxième partie du rapport de M.
Blain en commençant par vous dire que je ne peux certainement pas vous
mentir et me mentir à moi-même pour ce qui a trait au nom de
l'organisation que je représente et au titre qui se rattache aux
fonctions que j'occupe personnellement au sein de cette organisation qui est en
fait l'Union internationale des rembourreurs de l'Amé- rique du Nord et
non pas l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique.
Mes titres sont vice-président international et directeur
canadien de cette organisation et président de la section locale 388 et
non pas du tout vice-président du local 388 de l'Union internationale
des rembourreurs unis d'Amérique, comme le dit M. Blain dans son
rapport.
Si je vous fais ces remarques, ce n'est pas parce que ces faits ont de
l'importance par eux-mêmes, mais bien plutôt pour vous
démontrer que, dès notre première rencontre, M. Blain qui
me connaît déjà depuis plusieurs années et qui m'a
dit que je n'avais pas à décliner mon nom, puisqu'il le
connaissait déjà, mais de bien vouloir décliner le nom de
l'organisation et le titre se rattachant aux fonctions que j'occupe au sein de
cette organisation...
Après l'avoir fait, s'il n'a pas pu répéter plus
fidèlement ce que je lui ai dit, au départ, ceci prouve qu'il a
beaucoup plus d'imagination que de mémoire et qu'il y a tout au long de
son rapport beaucoup plus de ses propres interprétations que des
déclarations textuelles qu'il prétend que je lui ai faites.
De plus, lorsqu'il nous dit tout bonnement et tout simplement: "Le 18
mai, seuls se présentèrent M. Donat Thériault et M. Pierre
Tellier, et M. Thériault, qui se décrit comme conseiller syndical
des gens de l'intérieur, indiqua alors au conseil que ceux-ci ne se
présenteraient pas devant le conseil sans qu'il soit
présent."
Je vous demande, M. le Président, comment aurais-je pu m'exprimer
ainsi alors que j'étais là, présent devant les membres de
ce conseil de médiation?
M. Johnson: Voyons donc.
M. Thériault: L'explication est très simple et
réside dans le fait qu'à partir du début de
l'exposé de la chronologie des événements dudit conflit de
la Commonwealth Plywood, les faits sont tout autres que ceux rapportés
dans ce rapport. Pour cette partie, ils sont les suivants: Ce n'est pas en fait
le 18 mai, mais bien plutôt plusieurs jours et peut-être même
une semaine précédant cette date que j'ai fait un appel
téléphonique à M. Blain pour lui dire, à la demande
des membres du comité du syndicat des gens de l'intérieur
à la Commonwealth Plywood, que ces derniers refusaient de se rendre
à l'invitation qu'il leur avait faite de venir le rencontrer au bureau
du ministère du Travail à Montréal, à moins que je
ne les accompagne à titre de conseiller.
M. Blain, après avoir hésité quelques instants, m'a
alors dit qu'il désirait donc me rencontrer sans eux, puisqu'il en
était ainsi et que je devrais venir seul, quitte à me rencontrer
plus tard avec eux, s'il le jugeait utile et nécessaire.
Si Pierre Tellier, secrétaire-trésorier du local 388 de
notre syndicat, était présent au début de cette rencontre
avec le comité de médiation le 18 mai, ce n'est pas parce qu'il
avait été invité, comme le rapport pourrait le laisser
supposer en
douce, mais bien plutôt, parce qu'ayant eu le temps de
réfléchir au cours de la nuit, avant cette rencontre je
réalise aujourd'hui que j'ai été clairvoyant, au moins
à la dernière minute je me suis dit: Tu ne dois pas aller
là seul, alors qu'ils seront trois.
M. Johnson: Si vous permettez, sur une question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.
M. Johnson: Je voudrais bien, peut-être pour les fins de ce
que le député de Sainte-Marie disait, qu'on laisse aller M.
Thériault à dire à peu près n'importe quoi.
Cependant, je pense que le député de Portneuf, comme moi,
comme tous les membres de cette commission, aimerait qu'il entre dans le sujet
qui s'appelle le conflit à la Commonwealth Plywood, son rôle,
celui qu'il pense être celui de la CSN, le rôle de l'employeur et
celui des gens de l'intérieur et non pas une critique qui, à mon
avis, demeure inadmissible à l'égard du sous-ministre adjoint aux
relations de travail.
M. le Président, je n'accepterai pas de continuer d'entendre M.
Thériault sur ce ton, sur ce sujet. Je pense qu'il faut que M.
Thériault nous parle du conflit à la Commonwealth Plywood et non
pas de ses problèmes de savoir si oui ou non, c'est l'Amérique du
Nord, ou l'Amérique le nom de son syndicat.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Pour
une fois, comme parlementaire, M. Thériault, je dois faire une mise en
garde. Cette commission a pour mandat d'écouter des témoins qui
nous renseignent, qui renseignent les parlementaires sur ce qui s'est
passé et non pas pour qu'ils fassent une critique des personnes
impliquées dans le conflit.
Je vous prierais de porter attention à mes remarques, parce que
j'espère que cette commission pourra continuer ses travaux. M.
Thériault.
M. Thériault: M. le Président, si M. le ministre
craint justement de me laisser continuer...
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, à
l'ordre, s'il vous plaît! Non, je ne le permettrai pas.
M. Thériault: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Vous venez de m'entendre, M. Thériault. Je vous prierais
d'en venir aux faits. Ce n'est pas une défense que vous apportez devant
cette assemblée. Vous n'êtes pas devant un tribunal.
M. Thériault: M. le Président, le rapport en
question comporte des affirmations, on me met dans la bouche des paroles que je
n'ai jamais dites, on m'impute des gestes que je n'ai jamais posés. Je
suis en mesure de les contredire. Si vous ne voulez pas que je le fasse, je
n'ai plus rien à faire d'autre que de répondre aux questions qui
me seront posées.
M. Pagé: J'ai des questions à lui poser.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Thériault. Un
instant.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Oui.
M. Pagé: Est-ce à dire, M. Thériault, que
vous... J'interprétais le début de votre déclaration comme
étant un préambule, qui était probablement trop long, mais
quand même. Est-ce que vous voulez en arriver aux faits? Est-ce que vous
êtes disposé à parler des faits, de ce qui s'est
passé, abstraction faite du préambule et de vos commentaires sur
le rapport du conseil de...
M. Thériault: Je veux dire que le rapport est faux dans
son entier.
M. Pagé: Ce n'est pas ce qu'on vous demande, M.
Thériault.
M. Bellemare: II est faux dans son entier, même pour
l'impression.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Je n'en permettrai pas plus aux députés qu'aux
témoins. À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: Oui, mais il n'en parle pas... Le
Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. Bellemare:
Comment? Je n'ai rien dit.
Le Président (M. Cardinal): Non, j'ai entendu
cependant.
M. Bellemare: II va falloir que je mette une camisole de
force.
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vous
remercie. Nous avons devant nous trois personnes. Est-ce que M. le ministre est
disposé à commencer à poser ses questions?
M. Johnson: Je suis prêt à commencer à poser
mes questions.
Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre.
Interrogatoire
M. Johnson: M. le Président, j'aurais pensé qu'on
aurait pu nous relater un peu plus précisément certains faits,
d'autant plus que la meilleure façon peut-être pour M.
Thériault de faire comprendre aux membres de la commission ce qui
s'est passé à ses yeux à la Commonwealth Plywood,
ce serait effectivement de s'adresser aux faits. Certains de ces faits ont
été évoqués dans la première séance
de notre commission.
J'aurais, pour M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault,
certaines questions. Je vais commencer avec M. Lévesque, si vous
permettez, et Mme Grignon également. Je suis bien conscient qu'au niveau
de vos deux préambules, vous avez fait allusion à une
interprétation que vous avez de ce qu'est la CSN, la "grande centrale",
etc. C'est d'ailleurs un vocabulaire que je reconnais, puisque je l'ai vu dans
des échanges de correspondance nombreux que j'ai eus avec
différentes parties dans ce conflit. Cependant, je pense que ce n'est
pas ce qui est l'objet du litige.
De la même façon, vous avez parlé
d'événements que je ne peux, madame, s'ils sont vrais, que
trouver déplorables, où il y a eu de la violence, où il y
aurait eu de l'intimidation, où des voitures auraient été
détruites, où des gens auraient été
intimidés jusque dans leur maison. On ne peut pas faire autrement que de
trouver cela déplorable. C'est probablement, d'ailleurs, une des raisons
de fond pour laquelle nous siégeons en commission parlementaire.
Quand l'Opposition, la semaine dernière, nous disait qu'elle se
demandait pourquoi on venait ici, et quand le député de Johnson
disait qu'il s'agissait d'un effort de blanchissage de la part du ministre,
j'ai dit à ce moment que j'étais bien conscient que certaines de
ces choses étaient devant les tribunaux, mais qu'on n'a pas le droit, au
nom de l'intérêt public, de nier que ce qui s'est passé et
ce qui se passe encore à la Commonwealth Plywood est d'ordre public et
doit intéresser les membres du Parlement. Cela inclut, entre autres,
dans la réalité et non pas dans l'objet de nos discussions, le
fait qu'une population d'hommes et de femmes est déchirée par ce
qui se passe, dans certains cas, est victime peut-être d'intimidation,
et, chose certaine, que toute une ville et une région sont absolument
ébranlées par ce qui se passe dans cette entreprise.
J'aurais donc quelques questions précises à poser d'abord
à M. Lévesque. Etiez-vous, M. Lévesque, membre de l'Union
internationale des rembourreurs unis d'Amérique ou d'Amérique du
Nord avant que la CSN ne procède à sa campagne de changement
d'allégeance?
M. Lévesque (Ernest): Oui, j'étais membre.
M. Johnson: Est-ce que vous étiez membre de
l'exécutif ou étiez-vous un membre participant aux instances
décisionnelles du syndicat ou étiez-vous membre simplement?
M. Lévesque (Ernest): Je n'ai jamais appartenu à
aucun exécutif. (12 heures)
M. Johnson: D'accord! En second lieu, la question des cartes.
Vous avez évoqué la question du chômage au Québec.
Vous vous êtes permis, comme vous en avez le droit comme citoyen, de
porter un jugement sur ce qui se passe. Il y a même des
éléments de ça peut-être que je pourrais partager.
Mais vous me semblez avoir omis une affaire assez fondamentale quand vous avez
parlé de certaines réunions. Parlez-moi donc des cartes que vous
avez eu l'occasion de signer, et je m'explique.
Il y avait l'Union internationale des rembourreurs, la CSN est
intervenue dans l'usine, a procédé à une campagne, comme
on dit, de "maraudage", en faisant signer des cartes de la CSN, et quand je
parle de la CSN, je parle de la centrale syndicale présidée par
M. Norbert Rodrigue, pour qu'on se comprenne bien.
Par la suite, le 3 ou vers le 3 octobre, il y a eu une assemblée
où des travailleurs de Commonwealth Plywood ont été
appelés à signer des cartes qui portaient la mention CSN.
Etiez-vous présent lors de la signature de ces cartes?
M. Lévesque (Ernest): J'étais présent, mais
les cartes ne portaient pas la mention... Elles portaient la mention CSN, le
Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN.
M. Johnson: Et qui a distribué ces cartes?
M. Lévesque (Ernest): Nous-mêmes, les
employés de la Commonwealth Plywood qui s'y trouvaient.
M. Johnson: Qui a fait imprimer les cartes, M.
Lévesque?
M. Lévesque (Ernest): M. Thériault.
M. Johnson: M. Thériault a fait imprimer des cartes,
à votre connaissance? Est-ce que c'est M. Thériault qui a
distribué des cartes qui portaient la mention CSN?
M. Lévesque (Ernest): Non. Nous lui avons demandé
conseil...
M. Johnson: Oui.
M. Lévesque (Ernest): ... il nous a donné conseil
et les cartes ont été distribuées par les employés
eux-mêmes qui étaient là à l'assemblée.
M. Johnson: Mais qui l'a donné? Qui a donné...
À un moment donné, il a fallu qu'elles sortent de l'imprimerie,
en quelque part, ces cartes, et que quelqu'un se mette à les distribuer?
Qui a eu ces cartes pour les distribuer à des employés? Est-ce
que M. Thériault les avait, à votre connaissance?
M. Lévesque (Ernest): À ma connaissance, je ne sais
pas qui les avait.
M. Johnson: Quand vous avez assisté à cette
réunion du 3 et du 4, il y avait distribution de cartes qui
s'appelaient: Syndicat des employés de Commonwealth Plywood CSN,
réunion à laquelle assistait M. Donat Thériault, à
laquelle vous assistiez.
Est-ce que vous avez signé une telle carte?
M. Lévesque (Ernest): Oui, j'ai signé une
carte.
M. Johnson: Est-ce que vous étiez conscient... M.
Lévesque (Ernest): Oui.
M. Johnson: ... quelles étaient ces cartes? Vous
étiez conscient de ça?
M. Lévesque (Ernest): Bien oui.
M. Johnson: Vous étiez conscient quelles étaient
ces cartes que vous étiez en train de signer et de distribuer?
M. Lévesque (Ernest): Oui.
M. Johnson: Est-ce que c'étaient des cartes qui
émanaient de la CSN?
M. Lévesque (Ernest): Non.
M. Johnson: Mais pourquoi portaient-elles la mention CSN?
M. Lévesque (Ernest): Par rapport qu'on a pris notre
syndicat en main. C'est bien simple. Est-ce que la CSN était consciente
de nous empêcher de travailler?
M. Johnson: Non, la question n'est pas là, M.
Lévesque. Ce que je veux savoir, c'est qu'une carte qui porte la mention
CSN, normalement...
M. Lévesque (Ernest): Oui.
M. Johnson: ... devrait provenir de la CSN.
M. Lévesque (Ernest): Oui.
M. Johnson: Est-ce que ça provenait de la CSN, ces
cartes?
M. Lévesque (Ernest): Je vais vous répondre par une
question.
Le Président (M. Laplante): Non. M. Lévesque
(Ernest): Non?
M. Johnson: Vous allez me répondre par une réponse,
si c'est possible.
M. Lévesque (Ernest): Bon! D'accord! Si j'étais
allé demander à la CSN de me fournir les cartes
nécessaires pour que tous ceux qui ne l'ont pas signée puissent
la signer et retourner au travail, je ne crois pas qu'ils m'en auraient
donné. Il fallait prendre les moyens pour retourner au travail. C'est ce
qu'on désirait. On a demandé à la CSN de retourner au
travail et de nous négocier une convention et elle n'a pas voulu. On a
pris les choses en main.
M. Johnson: En tout cas... Ma question s'adresse maintenant
à M. Thériault. Est-ce que c'est vous qui avez fait imprimer les
cartes CSN?
M. Thériault: C'est moi qui les ai commandées, M.
le ministre.
M. Johnson: Vous les avez commandées.
M. Thériault: Et c'est moi qui ai fourni le texte pour les
cartes aussi.
M. Johnson: Pardon?
M. Thériault: Et c'est aussi moi qui ai donné le
texte à l'imprimeur, si vous voulez savoir.
M. Johnson: Vous avez également donné le texte
à l'imprimeur pour ces cartes.
M. Thériault: C'est exact. M. Johnson: Etiez-vous
membre de la CSN? M. Thériault: Non, M. le ministre, surtout pas!
M. Johnson: Je m'en doutais.
M. Thériault: II s'agissait de ne pas le demander, si vous
vous en doutiez.
M. Johnson: Est-ce que je pourrais savoir, M. Thériault,
pourquoi vous avez fait imprimer des cartes au nom de la CSN?
M. Thériault: Pour la raison que M. Lévesque vous a
dite, mais je vais vous donner les détails.
C'est que, me basant sur le Code du travail et sans être avocat,
c'est mon interprétation, le Code du travail ne dit pas quelle sorte de
carte ce doit être et d'où elle doit provenir. Le Code du travail
dit que, pour être membre d'une organisation, il faut avoir signé
une carte dûment datée et avoir payé un minimum de $2. Je
me suis basé sur l'interprétation que je donne du Code du
travail, après les explications des ouvriers qui avaient besoin de
prendre leur syndicat en main, après leur avoir dit que le syndicat CSN
serait accrédité et que moi, je ne faisais pas de miracle et que
je ne pouvais pas les aider à demeurer dans l'Union des rembourreurs.
Tout ce que je pouvais leur conseiller, c'était de prendre leur syndicat
en main. Donc, pour se convoquer une assemblée de la CSN qui serait
accréditée, il fallait qu'ils deviennent membres de la CSN et
qu'ils signent des cartes. Donc, je leur ai conseillé d'en faire
imprimer et d'en signer.
M. Johnson: Donc, d'après vous... M. Bellemare:
C'étaient des faux.
M. Thériault: Vous le prouverez que c'étaient des
faux.
M. Bellemare: C'est un faux de prendre l'organisation d'un
autre.
M. Johnson: M. Thériault, toujours une autre question
précise sur la question des cartes. Vous savez comme moi que le Code du
travail dit aussi que le syndicat pouvant être habilité à
signer une convention collective est celui qui est accrédité.
M. Thériault: Je sais tout cela. Vous changez de sujet.
Vous ne parlez plus des cartes.
M. Johnson: Est-ce que vous saviez, au moment où vous avez
commandé ces cartes et où vous les avez distribuées... Je
devrais d'abord vous demander si vous avez distribué de telles
cartes.
M. Thériault: Je n'ai distribué aucune carte. J'ai
donné l'ordre de les faire imprimer. Quand je les ai reçues, je
les ai remises, le paquet au complet, à Hélène
Grignon.
M. Johnson: Vous avez remis les cartes à Mme Grignon.
M. Thériault: C'est exact.
M. Johnson: Les cartes que vous aviez commandées.
Saviez-vous à ce moment que la CSN avait fait une demande
d'accréditation auprès du ministère du Travail?
M. Thériault: Certainement que je le savais. Je le leur ai
dit avant qu'on fasse imprimer ces cartes.
M. Johnson: Vous saviez que la CSN, qui avait maraudé
l'Union internationale dans votre usine, qui avait obtenu une majorité
au sens du Code du Travail des travailleurs qui étaient
là, était en instance d'accréditation. Vous saviez
cela?
M. Thériault: Je le savais et je le leur avais même
dit, si vous avez écouté la déclaration de Mme Grignon,
que je leur avais mentionné, lorsque je les avais rencontrés, que
la CSN serait accréditée tôt ou tard.
M. Johnson: Et vous avez fait imprimer des cartes. Vous avez dit
aux gens: On va dire que vous êtes membres de la CSN, parce que vous avez
des cartes de la CSN.
M. Thériault: Ne me mettez pas encore des paroles dans la
bouche. Cela fait plusieurs fois, M. le ministre.
Le Président (M. Laplante): M. Thériault, vous avez
une réponse à donner, oui ou non.
M. Thériault: Qu'on ne me mette pas des paroles dans la
bouche.
Le Président (M. Laplante): Vous avez à
répondre oui ou non.
M. Johnson: Je ne vous mettrai pas les paroles dans la
bouche.
M. Thériault: Je vous en prie.
M. Johnson: Je vais reprendre ce que vous avez dit de
façon précise, M. Thériault. Vous avez dit que la raison
pour laquelle vous avez commandé des cartes portant le nom CSN
c'est bien un syndicat que vous connaissez...
M. Thériault: Malheureusement, je le connais trop.
M. Johnson: ... qui venait de vous marauder, vous dites que vous
avez fait cela pour que les gens qui étaient dans la salle deviennent
membres du syndicat qui allait être accrédité. C'est
cela?
M. Thériault: C'est exact. C'était pour les aider
à prendre en main leur syndicat parce que c'était celui qui
serait accrédité.
M. Johnson: Avez-vous consulté quelqu'un avant de faire
cela?
M. Thériault: Non. Et si vous attachez de l'importance
à ce que Mme Grignon a dit, je leur ai dit avoir fait la même
chose, quelques années plus tôt...
M. Bisaillon: ... à Chambly.
M. Thériault: ... à Chambly, chez Gregg Cabinets
Ltd. C'est une autre usine où les ouvriers ont pris en main leur
syndicat pour se débarrasser des officiers tout simplement.
M. Bisaillon: De la même façon?
M. Thériault: À peu près de la même
façon.
M. Bisaillon: Comment aviez-vous procédé?
M. Thériault: C'est à peu près de la
même façon.
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!
Avez-vous d'autres questions, M. le ministre?
M. Johnson: Pour le moment, si on me le permet, je me
réserverais le droit de revenir par la suite. Je sais qu'il y a d'autres
membres de la commission du côté gouvernemental qui ont des
questions pour explorer cela un peu plus en détail.
La dernière chose que j'aurais comme question est adressée
cette fois-ci à Mme Grignon. C'est au sujet des cotisations
syndicales.
Mme Grignon, on a établi, je pense, clairement, avec ce que nous
ont dit MM. Lévesque et Thériault, que les cartes qui ont
été passées le ou vers le 3 octobre, c'étaient des
cartes qui avaient été commandées à une imprimerie
à la demande de M. Donat Thériault, qui est vice-président
de
l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique du Nord,
et non pas de la CSN. À partir de là, comme secrétaire,
étiez-vous trésorière également ûu
secrétaire seulement?
Mme Grignon: L'argent venait à moi aussi. M. Johnson:
Pardon? L'argent venait à vous. Mme Grignon: Oui.
Mme Johnson: Très bien. Par qui vous était
versé l'argent? L'argent des cotisations syndicales, était-ce de
l'argent que vous donnaient les travailleurs au moment de l'adhésion et,
par la suite, y a-t-il eu d'autre argent qui est entré en cotisations
syndicales à partir de leur chèque de paie ou de
déductions faites à la source?
Mme Grignon: Pourriez-vous répéter votre question,
s'il vous plaît?
M. Johnson: D'accord. Je recommence. Quand vous avez fait
adhérer les gens, vous les avez fait payer?
Mme Grignon: Oui.
M. Johnson: Pour qu'ils signent la carte CSN que M.
Thériault avait fait imprimer?
Mme Grignon: Oui.
M. Johnson: D'autre part, avez-vous reçu d'autre argent
des travailleurs?
Mme Grignon: Oui.
M. Johnson: En plus de cela? D'où provenait cet
argent?
Mme Grignon: Des cotisations syndicales enlevées
sur...
M. Johnson: ... leur bulletin de paie. Mme Grignon: C'est
cela.
M. Johnson: Très bien. C'est la compagnie qui versait
cela? À qui la compagnie versait-elle cela?
Mme Grignon: La compagnie me donnait le chèque, je
l'endossais et je le remettais à M. Thériault.
M. Johnson: Alors, le chèque était fait au nom
de...
Mme Grignon: Du Syndicat des travailleurs de Commonwealth
Plywood-CSN.
M. Johnson: Et vous était envoyé par
l'entreprise.
Mme Grignon: Oui.
M. Johnson: Ce que vous faisiez, à ce moment-là
c'était que vous endossiez un chèque fait au nom de la CSN et
vous le remettiez à M. Donat Thériault.
Mme Grignon: Oui.
M. Johnson: M. Thériault, qu'est-ce que vous faisiez avec
cet argent-là?
M. Thériault: C'est à moi que vous vous adressez,
M. le ministre?
M. Johnson: Oui.
M. Thériault: Lorsque Mme Grignon dit qu'elle me le
remettait, c'est arrivé qu'elle me l'a remis parce qu'on s'est
rencontré, mais il était remis au
secrétaire-trésorier du local 388 de l'Union internationale des
rembourreurs qui l'a déposé dans les fonds de l'Union des
rembourreurs après qu'une entente de services eut été
signée entre le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN et
l'Union internationale des rembourreurs.
M. Johnson: D'accord. Je pense que c'est clair. Je m'excuse,
est-ce qu'on me permet une dernière question? M. Lévesque, vous
avez tenu, à un moment donné, une conférence de presse.
Où avez-vous tenu cette conférence de presse?
M. Lévesque (Ernest): L'adresse exacte, je...
M. Johnson: À peu près, dans quelle région?
Est-ce que c'est à Montréal?
M. Lévesque (Ernest): Dans Montréal.
M. Johnson: Qui a loué le local? Qui a fait les
arrangements pour cette conférence de presse à laquelle vous
participiez?
M. Lévesque (Ernest): Je pense que vous pourriez poser
cette question à M. Thériault parce que nous nous y sommes rendus
sur un appel de M. Thériault.
M. Johnson: D'accord. M. Thériault, où avez-vous
tenu cette conférence de presse?
M. Thériault: Je n'étais pas à cette
conférence de presse, si vous dites: Où l'avez-vous tenue?
M. Johnson: Oui. Où la conférence de presse, tenue
par M. Lévesque, a-t-elle eu lieu?
M. Thériault: À la Canadian Slovak Building
à Montréal.
M. Johnson: D'accord. Qui avait loué ou fait les
arrangements pour obtenir ces locaux?
M. Thériault: L'Union internationale des rembourreurs.
M. Johnson: Qui a rédigé les communiqués de
presse?
M. Thériault: Si je me rappelle bien j'ai aidé M.
Lévesque et Mme Grignon. Ils m'ont demandé de l'aide assez
souvent. Ils m'ont demandé des conseils assez souvent. Je les ai
conseillés dans à peu près tout ce qu'ils ont fait, mais
pas dans tout ce qu'ils ont fait. C'est possible que je les aie aidés
dans la rédaction des communiqués de presse, comme je les ai
aidés dans la préparation de ce qu'ils vous ont dit, si vous
voulez le savoir.
M. Johnson: Je présume et il n'y a rien de mal
là-dedans, nécessairement.
M. Bellemare: On l'avait senti.
M. Johnson: On l'avait ressenti un peu.
M. Thériault: Pour ne pas laisser de doute que cela vient
d'ailleurs, c'est moi qui les ai aidés.
M. Johnson: D'accord. D'ailleurs, vous étiez conseiller de
ce groupe de l'intérieur d'après ce que j'ai compris.
M. Thériault: Je le suis toujours, jusqu'à ce
qu'ils me mettent dehors.
M. Johnson: Ces communiqués de presse ont-ils
été envoyés par Telbec? Est-ce qu'ils ont
été diffusés par le canal qui s'appelle Telbec?
M. Thériault: Vous vous adressez toujours à moi, M.
le ministre?
M. Johnson: Oui.
M. Thériault: Je ne suis pas au courant.
M. Johnson: M. Lévesque, êtes-vous au courant?
M. Lévesque (Ernest): Moi non plus.
M. Johnson: La convocation a cette conférence de presse a
été faite par qui?
M. Lévesque (Ernest): Je vous ai dit que M.
Thériault nous avait appelés pour nous rendre à...
M. Johnson: Mais qui a convoqué les journalistes?
M. Lévesque (Ernest): Je ne le sais pas. M. Johnson:
M. Thériault?
M. Thériault: Cela a été fait par une agence
qui s'occupe de publicité qui m'avait été
conseillée par nos avocats.
M. Johnson: Quelle est cette agence?
M. Thériault: Je ne le sais même pas. C'est notre
avocat qui m'a mis en communication avec un monsieur dont je ne me rappelle
même plus le nom. Il m'a téléphoné, et je lui ai dit
que j'en parlerais au comité de Commonwealth Plywood.
M. Johnson: Quel avocat?
M. Thériault: Les avocats de l'étude Cutler,
Sheppard et tout le groupe.
M. Johnson: Cutler, Sheppard, Cournoyer et Associés?
M. Thériault: Oui, si vous vous référez
à l'ancien ministre du Travail, il est là, oui.
M. Johnson: Non, mais c'est ce bureau-là dont il
s'agit.
M. Thériault: C'est exact.
M. Johnson: Alors, vos avocats vous ont
référé à une agence de publicité qui s'est
occupée de faire cela.
M. Thériault: C'est exact.
M. Johnson: Vous ne vous souvenez pas de quelle agence il
s'agit.
M. Thériault: Je ne me rappelle pas du nom. D'ailleurs je
n'ai pas porté attention et je n'y ai pas attaché
d'importance.
M. Johnson: Si je vous énumérais deux ou trois
noms, est-ce que vous pensez que vous pourriez vous en souvenir?
M. Thériault: Cela ne m'aiderait pas du tout, M. le
ministre, je regrette.
M. Johnson: Non, cela ne vous aiderait pas.
M. Thériault: Ce n'est pas parce que je veux montrer de la
mauvaise volonté. Je n'ai pas attaché d'importance à cette
agence, je ne me suis jamais servi d'agence dans le passé et je
n'étais pas en faveur, parce que je n'ai jamais été fort
sur la publicité dans les journaux. Ce sont nos avocats qui ont
insisté, puisque le comité voulait ça, je ne me suis pas
mêlé tellement de cette affaire.
M. Johnson: Finalement, la question que je posais, c'est: Qui a
organisé cette conférence de presse?
M. Thériault: C'est une agence.
M. Johnson: ... et c'est une agence qui l'a organisée.
M. Thériault: C'est exact. (12 h 15)
M. Johnson: Mais vous, est-ce que vous avez communiqué
directement avec cette agence ou si ce sont vos avocats qui ont fait
ça?
M. Thériault: Je viens de vous le dire, ce sont les
avocats qui m'ont mis en communication; on a même eu une rencontre
à laquelle les avocats et le monsieur en question étaient
présents.
M. Johnson: Est-ce que ça se pourrait que ce soit M. Yvon
Turcot?
M. Thériault: C'est possible, c'est possible, je vous ai
dit que je ne me souvenais pas du nom, c'est possible.
M. Johnson: Qui a payé les frais auprès de
l'agence?
M. Thériault: Je crois que nos avocats les ont
payés, mais je n'en suis pas sûr. Parce que les avocats, comme
vous devez le savoir, nous envoient des factures pour soins professionnels,
services professionnels, je m'excuse; pour les médecins, c'est "soins
professionnels", on paye et il ne faut pas poser trop de questions.
M. Johnson: Merci.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord vous réitérer ce que je vous formulais tout à
l'heure, à savoir que contrairement à ce qu'on aurait pu
présumer ou prétendre, on n'a pas beaucoup d'éclairage sur
la situation, ça s'en vient tranquillement. Il y a beaucoup de questions
qu'on a à se poser et je suis convaincu que le ministre acceptera, une
fois que j'aurai fini de poser mes questions, tant lui-même que
moi-même, nous pourrons revenir sur certains aspects du dossier par la
suite.
Un des aspects importants de ce dossier, selon moi, c'est la
représentativité du groupe qu'allèguent représenter
ce matin M. Thériault, Mme Grignon et M. Lévesque.
Ma première question s'adresse à M. Thériault: Une
convention collective, habituellement, se négocie en vertu d'une
accréditation, laquelle est accordée en vertu d'une
représentativité à l'intérieur d'un secteur
où l'on travaille. Vous avez signé une convention collective le
ou vers le 13 octobre 1977, qui a été déposée le 14
octobre 1977 au ministère du Travail, conformément aux
dispositions de la loi. Est-ce qu'on a constaté que c'était la
CSN qui était accréditée? En vertu de quel principe de
représentativité vous croyiez-vous justifié, en octobre
1977, de négocier une convention collective pour et au nom des
travailleurs? En vertu des cartes et de leur appartenance à des cartes
qu'ils avaient signées, suite aux invitations que vous leur aviez
formulées? Sous quel principe de représentativité vous
fondiez-vous pour... sur quoi vous fondiez-vous pour vous permettre de signer
et de négocier cette convention collective?
M. Thériault: La question s'adresse à moi, M. le
Président?
M. Pagé: Oui, c'est à vous.
M. Thériault: Ma réponse est la suivante: Ça
revient toujours à la même chose, la question de prendre en main
son syndicat. Premièrement, j'aimerais corriger, M. le
député, ce n'est peut-être pas ce qu'il a voulu dire, mais
il a dit: Avez-vous signé? Je n'ai jamais signé personnellement
de convention collective dernièrement.
M. Pagé: On ne se chicanera pas sur les mots.
M. Thériault: J'ai aidé et j'ai participé,
j'ai conseillé dans une négociation pour en venir à la
signature d'une convention collective.
Pour prendre en main leur syndicat il était évident que
les ouvriers concernés, comme cela a déjà
été dit comme explication, devaient, premièrement, sachant
que tôt ou tard le syndicat CSN serait accrédité, pour la
très bonne raison que c'était un fait connu qu'une
majorité avait signé. Qu'ils aient signé de la
façon que cela voudra, si on ne pouvait pas prouver qu'ils n'avaient pas
signé librement, c'était notre problème. Mais le fait
reste quand même qu'on savait qu'il y avait une majorité qui avait
signé et que, par le fait même, une accréditation serait
accordée éventuellement.
Les ouvriers qui voulaient retourner travailler ont dit: Donne-nous des
conseils. Je leur ai conseillé de prendre leur syndicat en main. Cela
voulait dire que pour prendre leur syndicat en main, il fallait qu'ils soient
membres de ce syndicat. Il a fallu premièrement, pour tâcher de
convoquer une assemblée du syndicat, ou d'avoir une assemblée du
syndicat, qu'ils en soient membres. Donc, ils ont signé des cartes. Ils
ont payé le montant requis par le Code du travail. Ils ont tenu une
assemblée. Ils ont passé des résolutions. Ils ont
élu un comité qu'ils ont chargé d'aller faire les
négociations, comité qui devait avoir les conseils d'un avocat ou
de moi-même.
C'est en vertu de tout cela, même j'aurais pu ajouter qu'il
était évident que cela arriverait, l'Union internationale des
rembourreurs, contrairement à ce qui a été dit dans le
rapport de médiation, ne s'est jamais opposée. Jamais on ne s'est
opposé et, par la suite, avons changé d'idée. J'aimerais
qu'on me le prouve. L'Union des rembourreurs ou Donat Thériault ne se
sont jamais opposés, en aucun temps, à une demande
d'accréditation CSN. On savait très bien que le syndicat CSN
serait accrédité. Il n'y avait pas d'objection. Le seul moyen
pour les ouvriers d'avoir une convention, c'était basé sur ce
principe, c'était qu'une fois membre de la CSN, une fois après
avoir été élu par les ouvriers de Commonwealth Plywood qui
voulaient avoir toujours un syndicat s'ils ne pouvaient pas en avoir
d'autres, ils prenaient celui qu'ils avaient, qu'ils savaient qui serait
reconnu, parce qu'ils ont cru ce que je leur ai dit ils ont nommé
des officiers qui ont négocié une convention. Et je les ai
appuyés.
M. Pagé: Vous parlez de non-objection.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bisaillon: M. le Président, question de
règlement.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sainte-Marie, sur une question de règlement.
M. Bisaillon: C'est une directive, en fait, que je voudrais vous
demander, ce qui n'a jamais été fait à la commission,
actuellement. Est-ce qu'on pourrait indiquer au témoin actuel, et
éventuellement à tous ceux qui pourraient témoigner par la
suite, la valeur d'un témoignage devant une commission parlementaire, et
les conséquences de ce témoignage, si la vérité
était tronquée, cachée, ou si carrément, un
témoin mentait à la commission? Ce n'est en
référence à rien, c'est seulement parce que je voudrais
qu'on précise cela tout de suite.
Le Président (M. Cardinal): Justement, M. le
député de Sainte-Marie, j'en ai parlé déjà.
Quand je me suis absenté il y a quelques minutes, c'était
justement pour aller entendre la bobine où je m'étais
prononcé sur l'immunité parlementaire. J'ai indiqué que
l'immunité parlementaire existait, si l'on disait la
vérité, si l'on répondait aux questions de bonne foi et si
on ne faisait pas d'accusations comme celles que j'ai entendues ce matin. C'est
à ces trois conditions que je l'ai déjà indiqué.
À votre demande, M. le député de Sainte-Marie, je le
rappelle. Est-ce que cela répond à votre question?
M. Bisaillon: Merci.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf,
M. Pagé: Quand vous dites, M. Thériault, que vous
ne vous êtes pas opposé à l'accréditation, c'est que
vous interprétez le désistement de l'Union internationale des
rembourreurs comme étant une non-objection. C'est cela?
M. Thériault: Non seulement cela. J'ai dit que, dans le
rapport de médiation, on disait que l'Union des rembourreurs,
après s'être opposée, avait changé d'idée
après une conversation avec le commissaire Marcel Evard. On ne s'est
jamais opposé en aucun temps. On a signé un
désistement...
M. Pagé: Ah! c'est parce que vous vous étiez
déjà opposé...
M. Thériault: ... à notre droit de nous faire
entendre.
M. Pagé: D'accord. Vous alléguez que vous
étiez représentatif... Mme Grignon a fait écho
tantôt à des réunions qui auraient été
tenues. J'aimerais bien savoir combien il y avait de travailleurs. Est-ce que
quelqu'un sait combien il y avait de travailleurs à l'intérieur,
parce que...
M. Thériault: II y en a eu 97, à un certain
moment.
M. Pagé: Est-ce que vous le savez?
M. Thériault: II y en a eu 55 le premier jour de
travail.
M. Pagé: Bon. Madame parlait de 105 et M. Lévesque
de 95.
M. Thériault: 105 mis à pied.
M. Pagé: Bon, d'accord, je m'excuse, si je me suis
trompé.
M. Thériault: 105 non mis à pied, je corrige, je
m'excuse.
M. Pagé: Bon, d'accord, j'avais raison. Merci! La
réunion qui a été tenue, où les gens ont
décidé de prendre leurs choses en main, avait été
convoquée par qui, avait été convoquée comment?
M. Bisaillon: Par affaires...
M. Thériault: Est-ce que j'assiste à une
comédie, M. le Président?
Une voix: Leur affaire en main.
M. Pagé: Non, ce n'est pas une comédie, je vous
demande sérieusement, à la réunion...
M. Thériault: Je ne peux pas répondre à
votre question, il se fait toutes sortes de farces plates et, avec les rires,
je ne peux pas...
M. Bisaillon: Attendez et, quand ce sera le temps, vous
répondrez. Quand nous autres nous aurons fini de parler, vous, vous
parlerez.
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault...
À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le
député de Sainte-Marie, à l'ordre! M.
Thériault...
M. Chevrette: Arrangez-vous pour être cohérent au
moins.
Le Président (M. Cardinal): ... depuis 10 h 12 environ que
nous sommes tous très sérieux.
M. Thériault: Est-ce que je pourrais arrêter d'avoir
des menaces, M. le Président?
M. Chevrette: Ce ne sont pas des menaces de vous demander
d'être cohérent.
M. Thériault: Arrangez-vous pour être... Cela ne me
fait pas peur, M. le député.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! Ne commencez pas...
M. Chevrette: Ce n'est pas l'élévation des voix qui
m'énerve non plus, mon cher.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sainte-Marie... M. le député de...
M. Thériault: Ce n'est pas votre face qui m'énerve
non plus.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm... M. le député de Joliette-Montcalm.
M. Bisaillon: Montcalm.
M. Chevrette: Soyons calmes, vous avez raison, M. le
Président.
M. Pagé: Vous portez le nom de votre comté,
oui.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Une voix:
... Montcalm non plus.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm, vous n'avez pas la parole.
M. Chevrette: Absolument pas, je ne parle pas. Je demanderais au
témoin d'être très poli, par ce que ce cher monsieur peut
vouloir mettre de l'ordre ici, mais il serait mieux d'en mettre dans ses
idées.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre! C'est...
M. Pagé: Je peux, M. le Président, oui?
Le Président (M. Cardinal): Juste une seconde! Il reste
justement trois minutes. Juste une seconde! Pour compléter la
réponse que j'ai donnée au député de Sainte-Marie,
j'ajoute quelque chose, c'est que la différence entre un
député et un témoin, c'est qu'un député met
son siège en jeu, tandis que le témoin ne le met pas, mais met
son immunité parlementaire en jeu. J'espère que cette
précision apportera de la lumière à tous ceux qui
participent à cette commission. M. le député de Portneuf,
est-ce que vous désirez continuer?
M. Pagé: Oui, je désire...
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, j'ai
une directive à vous demander là-dessus?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'à votre
avis, l'immunité parlementaire ne s'applique qu'à des actions
possibles en libelle diffamatoire ou est-ce que cela s'applique
également à toutes sortes d'actes criminels ou autres qui
auraient pu être commis dans ce conflit?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Jonquière, je ne pourrai pas vous répondre pour la raison
suivante: Si vous lisez attentivement le règlement qui nous
régit, pas plus le président que le député ne
peuvent donner une opinion professionnelle et, encore moins, juridique. Je m'y
suis refusé à la première séance, je me retiens
encore. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: M. le Président, j'en étais aux
premières sous-questions sur la représentativité. J'ai
évidemment beaucoup d'autres questions sur la convention collective, sur
les cartes, le rapport de médiation et tout cela. Il est 12 h 27. Je
demanderais le consentement pour qu'on ajourne nos travaux et qu'on les
reprenne cet après-midi. Vous allez me laisser la parole cet
après-midi, oui?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf, je vous sécurise immédiatement,
en vous disant que vous avez bien fait de demander l'ajournement. De toute
façon, il aurait été automatique. Les travaux de cette
commission sont ajournés sine die.
M. Pagé: Mais devraient reprendre cet
après-midi.
Une voix: Normalement, oui. M. Pagé: Normalement,
oui. (Suspension de la séance à 12 h 26)
(Reprise de la séance à 16 h 55)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
Mesdames et messieurs, nous commençons la troisième
séance c'est une nouvelle séance de la commission
parlementaire permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre
réunie pour étudier le conflit de la Commonwealth Plywood de
Sainte-Thérèse.
Je dois donc, au début de cette séance, vérifier
encore une fois la liste des membres.
M. Bellemare (Johnson)?
M. Bellemare: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Bisaillon
(Sainte-Marie)?
M. Bisaillon: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Chevrette
(Joliette-Montcalm)?
M. Chevrette: Toujours là.
Le Président (M. Cardinal): M. Forget (Saint-Laurent)?
M. Pagé: Remplacé par M. Blank (Saint-Louis).
Le Président (M. Cardinal): M. Blank (Saint-Louis),
remplace M. Forget (Saint-Laurent). M. Gravel (Limoilou), remplacé par
M. Fallu (Terrebonne). M. Johnson (Anjou)?
M. Johnson: Présent.
Le Président (M. Cardinal): M. Lavigne (Beauharnois)?
M. Lavigne: Toujours là.
Le Président (M. Cardinal): M. Pagé (Portneuf)? M.
Roy (Beauce-Sud)? M. Vaillancourt (Jonquière)?
Les intervenants: M. Blank (Saint-Louis) devient membre.
M. Pagé: Remplacé par M. Mailloux.
Le Président (M. Cardinal): M. Mailloux (Charlevoix).
M. Pagé: M. Springate est là.
Le Président (M. Cardinal): Un instant, nous y
arriverons.
M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), comme intervenant,
remplacé par M. Dussault (Châteauguay); M. Jolivet (Laviolette),
M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M.
Saint-Germain (Jacques-Cartier)...
M. Pagé: Remplacé par M. Springate.
Le Président (M. Cardinal): Bon! C'est ça. Merci,
M. le député de Portneuf. M. Springate...
Des voix: On est d'accord.
Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! M.
Samson (Rouyn-Noranda).
Avant de continuer nos travaux, je veux, en vertu de l'article 150 du
règlement sessionnel, poser une question aux membres de cette commission
pour éviter tout débat de procédure.
À l'Assemblée nationale, il y a quelques minutes, suite
à la motion présentée par le leader parlementaire du
gouvernement, nous pouvons fonctionner, sauf que le leader parlementaire du
gouvernement a laissé à la commission, conformément au
règlement je ne veux pas lire le règlement, mais enfin,
s'il le faut, je le ferai le choix de décider si, à 18
heures, la commission désire continuer à travailler.
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse...
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé:... j'étais en Chambre, moi-même, il
y a quelques minutes. Le leader du gouvernement a voulu explorer cette
possibilité avec les leaders des autres formations politiques et,
constatant que certains engagements avaient été pris pour ce
soir, constatant, de plus, l'offre de siéger demain, ce qui était
impossible pour l'équipe gouvernementale, le leader s'en est tenu, si ma
mémoire est fidèle, à un ordre bien strict, soit qu'on
siège jusqu'à 18 heures, ce soir.
Le Président (M. Cardinal): C'est exact, M. le
député de Portneuf. Cependant, je vais lire le paragraphe en
vertu de l'article 150: "Toutefois..." toutefois, malgré ce qui
s'est passé "... une commission peut, du consentement unanime de
ses membres, poursuivre ses travaux après l'heure normalement
prévue pour sa suspension ou son ajournement. '
Je comprends que je n'ai pas le consentement unanime de la
commission.
M. Pagé: Même si on a un ordre de la Chambre.
Le Président (M. Cardinal): Nous n'avons pas d'ordre de la
Chambre. C'est pourquoi je voulais le souligner pour que tout soit en
ordre.
M. Johnson: M. le Président, pourrais-je...?
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.
M. Johnson: Cela permettrait peut-être aux membres de la
commission ainsi qu'à nos invités, ou nos invités à
venir s'il y a lieu, d'être quand même fixés. Avons-nous le
consentement de la commission pour procéder après 18 heures.
M. Bellemare: Non.
M. Pagé: Non.
Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas le
consentement.
M. Pagé: On est prêts à siéger demain
matin.
Le Président (M. Cardinal): C'est terminé. Il faut
une motion ou un avis.
M. Johnson: Alors, dans les circonstances, j'aurais une motion
à présenter dans ce cas...
Le Président (M. Cardinal): ... sur les travaux de la
commission?
M. Johnson: ... sur les travaux de la commission, étant
donné que nous ajournerons nos travaux à 18 heures et que je ne
peux quand même pas introduire cette motion à 17 h 45 parce quelle
est sans doute débattable. Cette motion serait à l'effet que,
conformément...
Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous avant la
motion...?
M. Johnson: Oui.
Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse de vous
interrompre. Il y a un député qui a demandé la parole
avant que vous ne fassiez votre motion.
M. Johnson: Ah bon!
M. Lavigne: M. le Président, je vous ai fait signe
seulement pour que vous me placiez sur une liste lors des interventions tout
à l'heure.
M. Pagé: Si le ministre a une motion aussi...
Le Président (M. Cardinal): S'il y a une motion, nous
recommençons tout. Pour la bonne compréhension de tous, nous
étions à entendre trois témoins, MM. Thériault,
Lévesque et Mme Grignon. Cependant, le ministre a toujours le droit de
parole et je lui donne ce droit pour présenter sa motion.
M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
Motion requérant la présence de Me
Pierre Fournier devant la commission
M. Johnson: Conformément à l'article 153 de notre
règlement, qu'on retrouve à la page 81, on dit bien que
lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter
devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents, et que
cette personne refuse de le faire, la commission fait rapport de ce refus au
président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la
demande de la commission soit satisfaite.
Le secrétariat des commissions n'a pas requis la présence
de Me Fournier ou de M. Turcot. Il les a invités à venir.
Cependant, Me Fournier a jugé bon de tenir une conférence de
presse au début de la semaine pour annoncer qu'il n'entendait pas se
présenter à moins qu'il en soit requis.
Je pense que M. Fournier invoquait à ce moment-là des
questions relatives au secret professionnel, mise en garde que j'ai
moi-même faite lors de la première réunion de cette
commission, où j'ai dit que nous demandions à M. Fournier
simplement de comparaître pour qu'il puisse témoigner
d'événements s'étant passés et qui nous
permettraient d'éclaircir une partie du débat et non pas de lui
demander de révéler des confidences sous le sceau du secret
professionnel, bien entendu.
Je pense que M. Fournier aurait peut-être pu décider de se
présenter et nous faire part de ses réserves. Je trouve
regrettable qu'il ait choisi de ne pas répondre à l'invitation.
C'est donc pourquoi je ferai motion pour que, dans un premier temps, quitte
à ce que nous l'entendions sur les questions du secret professionnel,
cette commission requière de Me Fournier qu'il se présente devant
la commission, quand elle aura à siéger à nouveau, sans
doute la semaine prochaine, de même que dans le cas de M. Yvon Turcot
qui, peut-être pour d'excellentes raisons, n'a pu se présenter
aujourd'hui, mais simplement pour être sûr qu'on n'a pas à
refaire les mêmes choses, que cette commission requière
également que M. Turcot se présente devant nous.
M. Pagé: Vous avez fait votre motion?
M. Johnson: Oui. Ma motion est que cette commission
requière 1a présence de Me Fournier et de M. Yvon Turcot.
M. Pagé: M. le Président, sur la
recevabilité de la motion.
Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, juste un
instant, s'il vous plaît! Je vais demander, comme toujours, à M.
le ministre, même si cela prend quelques minutes, de me remettre un texte
écrit de la motion pour que nous puissions en discuter, sur la
recevabilité et sur le fond, s'il y a lieu. Est-ce que nous pouvons
suspendre les débats?
M. Johnson: Oui, nous pouvons les suspendre deux minutes, s'il
vous plaît.
(Suspension de la séance à 17 heures.)
(Reprise de la séance à 17 h 5)
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît. Nous pourrons maintenant discuter sur la recevabilité,
j'espère, dans un cadre que nous pourrons fixer ensemble. Je veux
auparavant lire la motion telle qu'elle m'est remise par M. le ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre: "Que cette commission requière la
présence de Me Pierre Fournier, du district judiciaire de
Montréal, à la prochaine séance de la commission aux date
et lieu fixés par un ordre de l'Assemblée nationale".
M. le député de Portneuf, vous aviez le premier
demandé la parole sur la recevabilité; le suivant était M.
le député de Jonquière et, ensuite, M. le
député de Johnson. Messieurs, j'ai pris l'ordre dans lequel les
gens ont demandé la parole. Personne n'a parlé au nom du parti
ministériel.
M. Bellemare: La motion... Une voix: Sur la
recevabilité.
Le Président (M. Cardinal): Non, non, sur la
recevabilité.
M. Bellemare: Oui, mais...
Le Président (M. Cardinal): MM. les députés
de Portneuf, Jonquière, Johnson, est-ce que je pourrais demander
à cette commission, sur la recevabilité, qu'on soit bref et de
n'avoir qu'un représentant par parti, s'il vous plaît? Est-ce que
j'ai ce consentement?
Merci. M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je dois exprimer
ma surprise, que le ministre du Travail, qui est généralement
bien conseillé, d'une part, et qui, d'autre part, est avocat, en arrive
à nous déposer une motion libellée comme celle-ci cet
après-midi, en vertu, par surcroît, de l'article 153.
M. le Président, à plusieurs reprises, les commissions
parlementaires et, à quelques reprises, l'Assemblée nationale ont
requis la présence de certaines personnes à une commission pour
se faire entendre sur un dossier qui intéressait ladite commission. Dans
un premier temps, chaque fois que cela s'est fait, ces ordres indiquaient dans
le libellé la date exacte et même l'heure pour laquelle la
personne était convoquée, obligatoirement. Je me
réfère à un cas bien spécifique que j'ai eu
à vivre il y a quelque temps où, entre autres, mon bon ami et
collègue le député de Jonquière est intervenu. Il
aura à intervenir probablement tout à l'heure dans le même
sens que moi pour vous faire part de nos doutes sur la question de la
recevabilité. C'était donc lors de la commission parlementaire
qui a étudié le dossier des pâtes et papiers. À un
certain moment, on a demandé, je l'ai fait personnellement, à la
compagnie Consolidated Bathurst de déposer ses bilans financiers, la
compagnie s'y est refusée.
J'ai, à ce moment-là, demandé à la
commission d'accepter que celle-ci émette un ordre obligeant la
compagnie à comparaître et l'obligeant à venir
déposer ses bilans financiers, ce que la compagnie a été
obligée de faire et ce qu'elle a fait effectivement.
M. le Président, je me rappelle qu'à ce moment-là,
le président de la commission et on pourrait se
référer au journal des Débats; j'oublie la date, mais
c'était la fin de septembre ou le début d'octobre 1977
tout le monde avait convenu qu'on se devait d'inclure, dans le libellé,
dans le texte de la motion, une date précise, bien spécifique,
bien exacte, même l'heure exacte de la journée à laquelle
la personne était convoquée, ce qu'il n'y a pas dans le
libellé.
Cela voudrait donc dire que, si on acceptait la motion telle que
déposée par le ministre du Travail, la personne à qui
l'ordre est soumis, à qui l'ordre devient exécutoire, serait,
somme toute, obligée d'attendre, purement et simplement, le bon
gré du leader du gouvernement. C'est le premier élément,
en raison de son libellé.
Le deuxième élément, c'est que, telle que
rédigée, cela voudrait donc dire que la commission parlementaire
peut obliger une personne à comparaître et laisserait le soin au
leader du gouvernement en Chambre de fixer une date par un ordre de la Chambre,
ce qui remet en cause le principe des travaux de la commission parlementaire
qui est souveraine de ses travaux. C'est à la commission à
décider de la date et du moment exact pour convoquer la personne et non
pas au leader du gouvernement. Je vois que le leader du gouvernement me fait
des signes.
J'aurais bien aimé, lorsqu'on formait le gouvernement, qu'on
dépose des motions comme celle-là. On aurait été
à même de voir l'envolée et les nombreux motifs
invoqués par le député de Saint-Jacques qui est
présent dans la salle sans être membre de la commission.
M. le Président, c'est complètement irrecevable et, par
surcroît, qu'on prenne le texte de l'article 153. Je me permets de le
citer: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se
présenter devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des
documents et que cette personne refuse de le faire..."
M. le Président, vous vous rappellerez que ce matin, dès
le début de nos travaux, j'ai demandé au ministre je vous
en ai fait part de déposer une motion prévoyant les
personnes qu'il entendait appeler et convoquer ici. La personne citée,
c'est Me Fournier. La personne qui est citée dans le libellée de
la motion du ministre n'a pas été convoquée par la
commission, elle a été convoquée par le secrétariat
des commissions. En aucun moment, et même si je l'ai demandé pour
régulariser la situation, pour que ce soit fait dans un cadre
légal, dans l'esprit de notre règlement, vous ne m'avez vu venir
ce matin. Et quand je vous ai demandé ce matin de déposer une
motion pour convoquer les personnes, c'était pour que cela respecte
l'esprit et la lettre du règlement, c'est-à-dire que ces
personnes soient convoquées par la commission parlementaire. C'est nous
autres ce n'est pas la Chambre en haut, ce n'est pas le
secrétariat des commissions, ce n'est même pas le président
de la commission, ce n'est pas le président de l'Assemblée
nationale, et c'est encore moins le ministre c'est la commission qui est
maîtresse de ses travaux. C'est, somme toute, nous ici, après des
échanges, après des votes à majorité, qui sommes
appelés, qui sommes seuls habilités à déterminer
qui doit être convoqué, ou non, devant cette commission pour se
faire entendre et comparaître.
C'est d'ailleurs dans cet esprit, M. le Président, que le 26
septembre, dès le début des travaux au salon rouge, en haut, je
faisais des représentations auprès du ministre par lesquelles je
voulais bien objectivement mettre en doute la pratique qu'il avait de demander
au secrétariat des commissions... D'ailleurs, je vais le citer. Il a
dit: "Vous savez, je suis ministre sectoriel responsable. Il est normal et
explicable que je demande au secrétariat des commissions de convoquer
certaines personnes."
Je m'excuse, M. le Président, ce n'est pas au ministre à
faire cela, c'est à la commission. Ce matin, si je vous ai
demandé de déposer une motion, c'était pour
régulariser la situation pour que ce soit selon l'esprit de notre
règlement. Vous ne l'avez pas fait, vous avez donc à vivre avec
la situation que vous avez engendrée par la prise de position de la
majorité ministérielle et gouvernementale. Il n'y a aucune motion
qui a appelé cette personne encore, sauf le secrétariat des
commissions.
Si on acceptait le postulat voulant que le secrétariat des
commissions ait le droit de prendre faits et causes, de prendre la place de
droit qui revient à la commission, celle de convoquer les
personnes, cela n'aurait pas de bon sens; c'est un mépris de la
souveraineté de la commission parlementaire des pouvoirs qui nous
appartiennent.
L'article 153 ne peut pas s'appliquer, parce que la personne en
question, contrairement à nos interlocuteurs aujourd'hui, n'a pas
été convoquée par notre commission; mais ces derniers ont
été convoqués par le secrétariat des commissions
qui se compose de fonctionnaires qui doivent respecter les décisions de
la commission. Mais, en l'occurrence, dans le cas qui nous occupe, il n'y a pas
eu de décision de la commission. Tout ce qu'il y a eu, c'est un
numéro, un appel téléphonique, une missive, ou une lettre,
je ne sais trop, de la part du ministre du Travail demandant qu'un certain
nombre de personnes, de groupes, d'associations, d'individus, etc., soient
convoqués.
Il est bien dit selon le libellé: "Lorsqu'une commission
élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y
faire entendre dans notre cas, il n'y en a pas eu d'appelée; on a
eu seulement des invitations qui ont été formulées par le
secrétariat des commissions; ce n'est pas la commission élue qui
l'a convoquée ou pour produire des documents et que cette
personne refuse de le faire elle n'a pas pu refuser de le faire à
la suite d'un ordre de la commission, parce qu'il n'y a pas eu d'ordre, il n'y
a pas eu d'appel de la commission la commission fait rapport de ce
refus..."
M. le Président, tout autre volet de la question de la
recevabilité, même si, dans votre décision que vous allez
rendre tantôt, vous dites: C'est recevable, parce que je tiens pour
acquis que l'ordre du secrétariat des commissions équivaut
à un ordre de la commission, même si c'était votre
décision, dis-je, lorsque la personne refuse de le faire, la commission
n'a pas à émettre un autre ordre pour la convoquer. La
commission, tout ce qu'elle a à faire, c'est de faire rapport de ce
refus au président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour
que la demande de la commission soit satisfaite.
Sur deux tableaux, sur deux volets, c'est irrecevable, selon le
libellé, pour les motifs que j'ai invoqués tout à l'heure.
Si vous n'acceptez pas les motifs que j'ai invoqués. Le deuxième
motif vaut encore davantage trop fort ne casse pas elle est
irrecevable, parce que ce n'est pas à la commission d'émettre un
deuxième ordre. C'est au président de l'Assemblée
nationale à qui on doit faire rapport. (17 h 15)
Somme toute, Me Fournier ne peut pas être convoqué comme
cela. Si vous n'acceptez pas le libellé, il faudra une motion de la
commission pour le convoquer. C'est à ce moment seulement, s'il refuse
de venir, qu'on pourra émettre un ordre ou encore, si l'ordre n'est pas
respecté, le rapporteur de la commission fera rapport au
président de l'Assemblée nationale, à savoir qu'il y a eu
un ordre d'émis par la commission, chose qui n'a pas été
faite encore, et que la personne a refusé de s'y présenter. Je me
le rappelle fort bien, parce qu'entre autres... Vous savez, quand tu es
député et que tu convoques la Consolidated Bathurst et que tu dis
à ces gens de venir déposer leur bilan, ils n'aiment pas toujours
cela. Ils ont tout regardé, ils ont étudié la question
légale sous différents aspects toute une journée. Ils ont
dû se soumettre à l'ordre. C'est un ordre adopté par les
membres de la commission, et non pas émis par le secrétariat des
commissions.
C'étaient les commentaires que je voulais vous formuler sur la
recevabilité.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Portneuf. Vous m'éclairez, je verrai
tantôt. M. le député de Jonquière, à votre
tour de le faire.
M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le
Président. D'abord, je suis très heureux de constater que le
député de Portneuf se rappelle cette commission parlementaire des
pâtes et papiers où, je pense, il a lui-même
présenté une motion en vertu de l'article 153, motion qui avait
justement pour but de requérir la présence de la Consolidated
Bathurst et de ses représentants, et également la production de
documents, et tout cela, en vertu de l'article 153.
Je pense que le député de Portneuf mélange deux
choses fondamentales: Tout d'abord, la date de réunion d'une commission
parlementaire, c'est-à-dire à savoir si une commission peut se
convoquer elle-même, et, d'autre part, l'assignation d'une personne
à comparaître. Or, il est manifeste, à la lecture de
l'article 140 de notre règlement, qu'une commission élue est
convoquée par le secrétaire des commissions à la demande
du leader parlementaire du gouvernement. Donc, une commission élue,
même si elle a énormément de pouvoirs, n'a pas le pouvoir
de se convoquer elle-même. Elle est soumise à plus haut qu'elle,
c'est-à-dire à l'Assemblée nationale. L'article 140 nous
précise de quelle façon une commission élue comme la
nôtre peut siéger. C'est en vertu de l'article 140. Lorsqu'une
commission parlementaire siège, c'est parce que le leader du
gouvernement a fait appel, a demandé au secrétariat des
commissions de remplir les devoirs qui lui sont désignés par
l'article 140 de notre règlement de l'Assemblée nationale. Donc,
c'est une chose, date de réunion d'une commission parlementaire, et
cela, ce n'est pas dans l'attribution de cette commission-ci, sauf le respect
que je dois à tous les membres de cette commission, mais c'est du
ressort du leader du gouvernement qui fait la demande au secrétariat des
commissions.
D'autre part, M. le Président, il y a le deuxième point,
celui qui est le plus important aujourd'hui, c'est-à-dire qui a le
pouvoir de convoquer un témoin à comparaître? Là, M.
le Président, on en arrive à l'une des attributions de cette
commission parlementaire qui a, en vertu de l'article 153, le pouvoir de
requérir quelqu'un de se présenter. J'allais justement faire
allusion, M. le Président, à la motion du député de
Portneuf alors que j'étais moi-même président, où il
n'y a eu aucune discussion, je pense, sur la recevabilité de la motion,
que
j'ai déclarée recevable. La motion a été
adoptée. L'assignation a été envoyée, de telle
sorte que les assignés ont comparu. Et si, par hasard, les
assignés n'avaient pas comparu, encore là, l'article 153 nous dit
quoi faire. À ce moment-là, on fait rapport au président,
non plus de la commission parlementaire, mais de l'Assemblée
nationale.
M. le Président, je pense avoir amélioré
l'argumentation du député de Portneuf, qui a quand même,
dois-je le dire, plaidé en faveur de la recevabilité, même
s'il essayait de plaider son irrecevabilité.
M. Johnson: M. le Président, est-ce que le
député de...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! M. le député de Johnson.
M. Johnson: Est-ce que le député de Johnson me
permettrait?
M. Bellemare: Est-ce que vous voulez me dire quelque chose? Je
voudrais l'entendre. Je suis rendu sourd.
M. Johnson: Oui. Je suis bien conscient du fait qu'on pourrait
passer jusqu'à 18 heures finalement sur ce débat de
procédure et je pense que tout le monde tente de l'éviter... Oui,
mais je demande simplement un privilège pour être sûr que ce
n'est pas maintenant ou autrement...
M. Pagé: On va vous en accorder un, pour autant que ce
n'est pas coutume.
Retrait de la motion
M. Johnson: Dans les circonstances, on a des invités ici,
aujourd'hui. Je présume qu'en 45 minutes, on peut peut-être,
puisque c'était fort bien amorcé...
M. Pagé: Oui, mais la motion, ce n'est pas nous qui
l'avons présentée...
M. Johnson: Attendez un instant! M. Pagé: ... c'est
vous.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Johnson: Dans les circonstances...
M. Pagé: Vous n'aviez qu'à la présenter
comme du monde.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Johnson: Dans les circonstances, si, pour terminer avec les
témoins qui sont ici, nous y allions directement, nous ajournerons sine
die à 18 heures et, lors de la prochaine réunion de cette
commission, je pourrai procéder, à ce moment-là, à
une motion, mais on n'aura pas fait perdre le temps de tout le monde et le
temps de la commission.
M. Pagé: Est-ce que vous retirez votre motion?
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. Johnson: Dans les circonstances, et, ceci dit, M. le
Président, sans préjuger de la valeur des arguments du
député de Portneuf, mais plutôt en me
référant à l'excellente argumentation...
M. Pagé: Laissez le président rendre sa
décision.
M. Johnson: ... du député de Jonquière, aux
fins d'accélérer les travaux de cette commission et ne pas nuire
à tous nos invités et au reste des membres de la commission, je
retirerais ma motion.
Le Président (M. Cardinal): Bon! Alors... M.
Pagé: Sauvé par la cloche!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Pagé: Cela avait été refusé,
ça, voyons donc!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Vous savez bien...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. le
député de Jonquière et M. le député de
Portneuf, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Personne ne le saura...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Joliette-Montcalm!
M. Bellemare: M. le Président, j'avais demandé la
parole.
Le Président (M. Cardinal): Écoutez! Le vote, non.
Devant le retrait de la motion, il n'est plus question de parler de sa
recevabilité.
Il est une...
M. Bellemare: M. le Président...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous
plaît! Oui, sur quel sujet, M. le député de Johnson?
M. Bellemare: Sur l'incident qui vient de se produire
d'écrire sur un bout de papier, sur le bout d'une table...
M. Pagé: C'est ça.
M. Bellemare: ... une motion, mon cher monsieur, qui, je pense,
est contraire et irrecevable, parce que...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bellemare: ... à l'économie...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Bellemare: ... même de notre règlement...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!
M. Bellemare: ... et du droit parlementaire.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre!
M. Johnson: Vous aurez l'occasion de faire le débat la
semaine prochaine...
Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, s'il vous
plaît!
M. Bellemare: C'est comme ça que vous m'avez enlevé
mon droit de parole.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Messieurs,
à l'ordre, s'il vous plaît!
Bon! Tous sont calmes. Celui qui est proposeur d'une motion, tant
qu'elle n'a pas été débattue sur le fond, est toujours
maître de sa motion et peut la retirer en tout temps.
M n'y a plus de motion devant cette assemblée, il n'y en a jamais
eu.
M. Pagé: Bon! Au travail!
Le Président (M. Cardinal): Nous avons devant nous M.
Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault, et, au moment de
l'ajournement de 12 h 30, la parole était à M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: On constate quand même qu'à cause de
l'improvisation du ministre, on a encore perdu trois quarts d'heure, tout
près d'une demi-heure, même trois quarts d'heure et presque...
Interrogatoire (suite)
M. le Président, j'ai des questions à poser. J'avais
commencé ce matin à poser des questions à M.
Thériault, à M. Lévesque. Je suis un peu comme le
député de Johnson...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Portneuf, vous avez la parole...
M. Pagé: Oui, je continue.
Le Président (M. Cardinal): ... et vous êtes le
seul.
M. Pagé: Merci. J'en étais à vous dire que
je suis un peu comme le député de Johnson, je me demande si ce
n'est pas une stratégie du ministre...
Le Président (M. Cardinal): Ne provoquez pas...
M. Pagé: C'est probable.
M. Bellemare: Pour ne pas entendre...
M. Pagé: J'aimerais demander à M.
Thériault... Avant qu'on ajourne ce midi, on en était sur la
question de la représentativité du groupe que vous
représentez...
Je ne vous dérange pas? Non?
Le Président (M. Cardinal): Messieurs, à l'ordre!
Pourrais-je compter sur la collaboration de tous et chacun.
M. Pagé: Surtout à ceux de votre droite.
Le Président (M. Cardinal): Retenez, non. Tous et chacun.
Retenez tous vos impulsions. Le droit de parole est quelque chose de
sacré pour un député et je vous le reconnais, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'en étais
à vous demander... Les réunions qu'a tenues le groupe que vous
représentez... J'aimerais peut-être avoir plus d'information parce
qu'on se doit d'insister beaucoup sur la représentativité.
Vous avez allégué, M. Thériault, ce matin que vous
étiez représentatif, que le groupe était
représentatif des intentions des travailleurs qui sont à
l'intérieur de l'usine. J'aimerais savoir quelle sorte de
réunions ont été tenues. Tout le monde a-t-il
été convoqué? Combien de travailleurs ont
été convoqués? Cela s'est fait comment tout cela?
J'aimerais, somme toute, que vous donniez un peu de chair ou
d'information sur le déroulement des différentes réunions
qui ont amené les prises de décision dont on a fait état
ce matin.
Le Président (M. Cardinal): M. Donat Thériault.
M. Thériault: M. le Président, la réponse
à la question du député de Portneuf...
Le Président (M. Cardinal): Approchez votre micro ou
parlez plus fort, s'il vous plaît.
M. Thériault: ... est la suivante. Dans son exposé,
je croyais que Mme Grignon avait couvert toutes ces choses, mais je vais le
répéter parce que c'est, en fait, ce qui a déjà
été mentionné.
Il y avait exactement 55 employés sur 105 qui
assistaient à la réunion du 3 octobre qui a fait suite
immédiatement à l'ajournement de l'assemblée de l'Union
internationale des rembourreurs.
Ces 55 personnes avaient été convoquées par Mme
Grignon, M. Lévesque, plusieurs autres, en fait par les 35 que j'avais
rencontrés à la résidence de Mme Grignon avant
l'assemblée du 3 qui comprenait, à ce moment, les mêmes
douze que j'avais rencontrés...
La première fois, au commencement, j'en ai rencontré
douze. Le lendemain, j'en rencontre 35 et ce sont eux qui se sont
chargés, à la suggestion que je leur ai faite, de faire des
appels téléphoniques aux 105 employés
employés, je dis bien, ceux qui n'avaient pas été mis
à pied pour les inviter à venir à cette
assemblée.
Je n'ai fait aucune invitation à personne. C'est à leur
syndicat. Je leur sers de conseiller. Donc, je leur ai conseillé d'en
rejoindre le plus grand nombre possible et, apparemment, ils ont réussi
à en rejoindre 55.
Il faut savoir que chez Commonwealth Plywood à
Sainte-Thérèse, ce ne sont pas tous des gens de
Sainte-Thérèse qui travaillent là. Il y en a de toutes les
petites places environnantes. Il y en a même qui viennent de Lachute et
même de plus loin. Donc, il y en a beaucoup qui n'ont pu être
rejoints parce qu'ils étaient simplement en pension à
Sainte-Thérèse et vu qu'ils ne pouvaient plus rentrer au travail
depuis le 16 septembre, ils étaient retournés dans leur village.
C'est la raison qu'on m'a donnée pour laquelle on avait réussi
à en rejoindre 55 et qu'il n'y en avait que 55 de présents.
M. Pagé: Alors, sur 105 personnes, il y en a 55 qui se
sont rendues à cette réunion et qui ont signé la fameuse
carte dont on a fait état ce matin.
M. Thériault: II y en avait 55 à la réunion;
quant à la signature des cartes, je ne les ai pas
vérifiées.
M. Pagé: Combien de personnes ont signé ces
cartes?
M. Thériault: II y en a 55 qui les ont signées,
mais je n'ai pas vérifié à ce moment s'ils ont
signé au moment de l'assemblée.
M. Pagé: Mais jusqu'à maintenant, combien y en
a-t-il? Il y a combien de...
M. Thériault: Jusqu'à maintenant, il y en a autant
qu'il y a d'employés au travail; il y en a 74, il y en a eu
jusqu'à 97.
M. Pagé: Pendant la négociation de la convention
collective, vous avez dû faire rapport aux membres à quelques
reprises, je présume, j'espère.
M. Thériault: Oui, il y a eu une assemblée et,
à ce moment-là, le nombre...
M. Pagé: Cela a été convoqué
comment?
M. Thériault: À ce moment-là, cela a
été convoqué plus facilement parce que les 55
étaient déjà à l'usine; donc, ces 55 étaient
faciles à rejoindre.
M. Pagé: Et les autres?
M. Thériault: Lorsque vous parlez d'une deuxième
assemblée, à ce moment-là, le nombre avait augmenté
de 55 à 62.
M. Pagé: À la deuxième. M.
Thériault: Oui.
M. Pagé: Cette deuxième assemblée
était pour discuter de la négociation de la convention
collective?
M. Thériault: C'est exact.
M. Pagé: Est-ce qu'il y a eu seulement une
assemblée où vous avez discuté de la négociation de
la convention collective?
M. Thériault: II y a eu une seule assemblée de tout
le groupe d'ouvriers.
M. Pagé: D'accord. Il y en a 62 qui étaient
présents sur combien?
M. Thériault: Sur 62 au travail. Parce que la
première fois, on n'avait pas pu rejoindre les autres; on n'a pas pu les
rejoindre non plus parce qu'on avait beaucoup moins de temps, je suppose, pour
rejoindre les employés concernés, puisqu'ils étaient au
travail.
M. Pagé: Est-ce que je comprends bien en disant qu'il y a
des employés qui n'ont pu être rejoints pour assister à la
réunion de la négociation de la convention collective?
M. Thériault: Si vous parlez des 105 non mis à
pied, c'est exact. Il y en a qui n'ont pu être rejoints.
M. Pagé: Une question à M. Lévesque.
Excusez-moi, je ne peux pas vous voir. J'espère que vous me comprenez.
La première petite question: La personne qui vous a rappelé du
bureau du premier ministre, ce ne serait pas M. Louis-Marie Dubé?
Le Président (M. Cardinal): M. Ernest Lévesque?
M. Lévesque (Ernest): Oui, cela se peut fort bien.
M. Pagé: M. Louis-Marie Dubé?
M. Lévesque (Ernest): Je crois bien que c'était M.
Dubé, oui. D'ailleurs, le prénom, je ne peux me le rappeler.
M. Pagé: D'accord. M. Lévesque, j'aimerais avoir
vos commentaires sur le rapport de médiation. Vous avez vu ce
rapport?
M. Lévesque (Ernest): Oui, j'en ai pris connaissance. Je
ne pourrais pas formuler beaucoup de commentaires parce que M. Thériault
avait des commentaires à faire et on lui a dit de se taire
là-dessus. Parce qu'on a étudié ce rapport-là
ensemble.
M. Pagé: Vous m'excuserez, mais ce ne sont pas les
commentaires de M. Thériault que je vous demande, ce sont les
vôtres. Ce sont ceux des travailleurs en dedans. Est-ce que vous avez eu
une assemblée pour prendre connaissance du rapport de
médiation?
M. Lévesque (Ernest): Oui. Personne n'était
d'accord pour l'accepter réellement. En fait, ce sont les
recommandations qui ont été faites dans ce rapport-là.
M. Pagé: Personne n'était d'accord sur les
constatations dans le rapport ou sur les recommandations des
médiateurs.
M. Lévesque (Ernest): Un peu les deux.
M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, mais
j'aimerais retrouver mon rapport du conseil de médiation.
Le Président (M. Cardinal): Prenez le temps
nécessaire.
M. Pagé: Alors, à la recommandation no 1, vous
n'étiez pas d'accord sur cela, c'est-à-dire que le conseil de
médiation recommande qu'on procède à
l'établissement de la liste de tous les employés couverts par
l'accréditation ainsi que leur ancienneté d'usine, le tout en
date du 14 septembre, et ainsi de suite. Il y a plusieurs recommandations qui
ont été formulées. Vous n'étiez pas d'accord?
M. Lévesque (Ernest): Non. M.Pagé:
Pourquoi?
M. Lévesque (Ernest): Je vous l'ai dit tantôt, c'est
parce qu'on l'a étudié ensemble et il y a pas mal trop de fausses
déclarations.
M. Laplante: M. le Président, est-ce que je pourrais
demander au député de Portneuf de répéter sa
question? Il n'a pas compris.
M. Pagé: Oui. Je vous ai demandé, M.
Lévesque, si vous étiez d'accord ou non sur les recommandations.
Je ne vous ai pas demandé, somme toute, si vous étiez d'accord ou
non avec les constatations ou les commentaires du conseil de médiation
dans le rapport qui a été soumis. Les recommandations bien
spécifiques, un, deux, trois, quatre, cinq, six et sept. Est-ce que ces
recommandations ont été discutées à
l'assemblée? Vous m'avez dit que oui. Comment a été
convoquée l'assemblée et combien y avait-il de personnes
présentes à cette assemblée?
M. Lévesque (Ernest): II n'y a pas eu d'assemblée
là-dessus.
M. Pagé: C'est tout, M. le Président. Il n'y a pas
eu d'assemblée sur le rapport du conseil de médiation?
M. Lévesque (Ernest): Des employés?
M. Pagé: II n'y en a pas eu.
M. Lévesque (Ernest): Des employés, non.
M. Pagé: Bon! Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le
député de Portneuf. M. le député de Johnson. (17 h
30)
M. Bellemare: Ma première...
Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le
député de Johnson! Pour éviter tout problème, par
la suite, dans l'ordre reconnu à la séance
précédente, M. le député de Sainte-Marie
désire-t-il encore poser des questions? Il y a aussi M. le
député de Beauharnois qui a demandé la parole. M. le
député de Johnson.
M. Bellemare: Ma première question, M. le
Président, s'adresse à M. Lévesque. Vous êtes
président de quoi aujourd'hui, à part d'être
président d'un groupe de personnes à l'intérieur de
Commonwealth Plywood? Cela s'appelle comment? Vous êtes président
de quoi?
M. Lévesque (Ernest): Disons qu'au tout début,
j'étais président du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth
Plywood CSN; par la suite, je me suis posé des questions, étant
donné que la CSN avait pris une injonction interdisant qu'on se serve de
son nom. Alors, je pourrais mentionner que je suis le président du
Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood.
M. Bellemare: Est-ce qu'on peut comprendre aujourd'hui que vous
représentez les rembour-reurs unis d'Amérique?
M. Lévesque (Ernest): Non, pas encore.
M. Bellemare: Non. Est-ce que vous êtes président
à titre de représentant de la CSN?
M. Lévesque (Ernest): Non.
M. Bellemare: Non?
M. Lévesque (Ernest): Auparavant...
M. Bellemare: Alors, vous êtes représentant d'une
union de boutique?
M. Lévesque (Ernest): II faudrait...
M. Bellemare: Faudrait, faudrait que le Code du travail
s'applique, oui ou non. Vous êtes ou vous n'êtes pas. Vous
êtes quoi?
M. Lévesque (Ernest): Je vais recommencer ma
réponse. À l'entrée au travail, le 4 octobre, on a pris le
syndicat en main et on m'a nommé président du Syndicat des
travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN. Par la suite, on a pris une
injonction contre nous nous interdisant de nous servir de ce nom. Je me
suis...
M. Bellemare: Vous représentez quoi, aujourd'hui?
M. Lévesque (Ernest): Les travailleurs intérieurs
à la Commonwealth Plywood.
M. Bellemare: Dans aucune convention collective, vous ne pouvez
répondre à une question concernant les employés de CSN,
parce que vous ne les représentez pas. Vrai ou faux?
M. Lévesque (Ernest): Je ne comprends pas...
Le Président (M. Cardinal): Répétez la
question, M. le député de Johnson.
M. Bellemare: Je veux savoir si M. Lévesque est
représentant, aujourd'hui, du groupe des travailleurs de Commonwealth
Plywood à l'intérieur pour la CSN?
M. Lévesque (Ernest): Aujourd'hui non.
M. Bellemare: Vous n'êtes pas le représentant de la
CSN aujourd'hui.
M. Lévesque (Ernest): Non.
M. Bellemare: Êtes-vous le représentant des
rembourreurs unis?
M. Lévesque (Ernest): Pas encore, on attend
l'accréditation.
M. Bellemare: Vous êtes quoi, président d'une union
de boutique?
M. Lévesque (Ernest): En attendant, oui.
M. Bellemare: Oui. Ma seconde question s'adresse à vous,
M. Lévesque, ainsi qu'à Mme Grignon, pour savoir s'il y a eu une
entente lors d'une assemblée pour faire donner l'ordre à votre
conseiller, M. Thériault, d'imprimer des cartes, des fausses cartes avec
le sigle de la CSN dessus. Est-ce que vous avez autorisé, est-ce que
vous avez demandé conseil pour que les cartes soient imprimées
avec le sigle de la CSN?
Le Président (M. Cardinal): La question s'adresse à
M. Lévesque et à Mme Grignon?
M. Bellemare: Oui.
M. Lévesque (Ernest): II y a eu erreur sur la question,
parce que les cartes ne portent pas le sigle de la CSN.
M. Johnson: Le nom de la CSN. M. Bellemare: Le nom de la
CSN. M. Johnson: Le nom de la CSN. M. Lévesque (Ernest):
Oui.
M. Bellemare: Le nom est là. Vous avez donné
l'ordre à M. Thériault de les faire imprimer?
M. Lévesque (Ernest): Un ordre, c'est vite dit. On l'a
demandé...
M. Bellemare: Vous avez suivi un conseil, vous avez
demandé conseil ensemble, tous les trois, pour que les cartes soient
imprimées comme ça, oui ou non?
M. Lévesque (Ernest): Oui.
M. Bellemare: D'accord. Mme Grignon, est-ce que vous dites oui
vous aussi?
Mme Grignon: Oui.
M. Bellemare: Comment expliquez-vous que, dans le Code du
travail, il y ait des sanctions extrêmement sévères pour
ceux qui font des faux? Connaissant le problème, sachant que vous
étiez pour imprimer des faux, comment se fait-il que, connaissant le
Code du travail, sachant qu'il y a des sanctions très
sévères, vous vous soyez pliés à cette intrusion?
Comment se fait-il que vous vous êtes servis d'un faux, parce que vous ne
représentez pas la CSN, vous ne représentez pas les rembourreurs
unis, vous savez que c'est un faux? Est-ce que vous avez le droit d'aller
à la banque, de faire un faux chèque et de l'encaisser? Non, au
point de vue civil, non.
Au point de vue du Code du travail, c'est prévu, il y a des
sanctions sévères pour ceux qui font des faux. Est-ce que vous
admettez que c'est un faux?
M. Lévesque (Ernest): Non.
Le Président (M. Cardinal): Oui, justement. Attention,
encore une fois, je répète ce que j'ai dit à la
première séance, il ne faut pas que ça devienne une
commission d'enquête.
M. Bellemare: Ce n'est pas une commission d'enquête, on est
actuellement à vérifier si, oui ou non, le conseil de
médiation dit vrai. C'est simplement cela, parce que le conseil de
médiation dit: "Autre fait étrange, c'est que M. Donat
Thériault admet avoir demandé de faire imprimer des cartes et ces
cartes ont été remises à des employés pour les
faire signer par d'autres employés, à l'intérieur de
l'usine. "Voici une procédure que le conseil trouve étrange et
inusitée. Nous voilà en présence d'un
phénomène particulier, un représentant de l'Union
internationale des rembourreurs unis d'Amérique fait du recrutement pour
la CSN."
C'est le rapport du conseil de médiation. C'est cela que je veux
éclairer, pour savoir véritablement où va le débat.
M. Lévesque, je vous demande de me dire pourquoi vous avez
acquiescé à un faux pour tâcher d'induire les travailleurs
en erreur.
M. Lévesque (Ernest): Pour commencer, je dois vous dire
que je ne suis pas avocat et je ne peux répondre à cette question
tant et aussi longtemps que cette question ne sera pas débattue en cour,
parce qu'elle est en cour actuellement.
M. Bellemare: M. Lévesque, je ne suis pas satisfait de
votre réponse, parce que cela vous implique personnellement, de
même que Mme Grignon, d'avoir participé, avec M. Thériault,
à faire des cartes qui sont des faux. Vous savez qu'en vous servant de
la CSN pour faire du recrutement ou du maraudage, vous n'étiez pas en
loi. Il y a des sanctions très sévères dans le Code du
travail qui vous empêchaient de faire cela. Vous l'avez fait quand
même. Vous nous l'avez dit tout à l'heure.
M. Lévesque (Ernest): Mais il faudrait attendre que la
cour décide elle-même qu'il ne s'agit pas de faux.
Le Président (M. Cardinal): Je dois intervenir. Votre
réponse devant une commission parlementaire est parfaitement admissible,
même si le député qui pose la question n'est pas satisfait
de la réponse.
M. Bellemare: M. le Président, je pense que c'est
là qu'est le noeud de la question et la compagnie qui est restée
à l'écart depuis ce temps, voici ma troisième question qui
la concerne. Est-ce que vous avez communiqué, M. Lévesque, Mme
Grignon ou M. Thériault, avec la compagnie qui était au courant
que ces cartes avaient été imprimées et portaient le nom
de la CSN?
M. Lévesque (Ernest): Je vous répondrai, M. le
Président, qu'aucun de nous trois n'était en mesure de dire que
la compagnie était au courant, parce qu'on ne l'a pas consultée.
On n'a pas communiqué avec elle pour cela. Cela a été
décidé par des ouvriers que j'ai rencontrés en
assemblée chez Mme Grignon, qui m'ont demandé de faire imprimer
ces cartes que nous croyons, suivant notre interprétation du Code du
travail qui dit "doit avoir signé une carte dûment datée et
avoir payé un montant."
On nous accuse de toutes sortes de choses ici, on parle de sigle de la
CSN quand il n'y en a jamais eu, on dit que c'est moi qui ai fait signer cela
quand je n'en ai jamais fait signer, on se fait accuser de toutes sortes de
choses et on n'a même pas le droit de se défendre, M. le
Président.
M. Bellemare: M. le Président, je reviens à la
lettre que j'ai lue ce matin, en date du 17 mars 1978, qui était
adressée à Jean-Guy Morin, secrétaire
général de la Confédération des syndicats
nationaux, signée par Fernand Daoust de la FTQ. "Cher confrère,
"Le bureau de la Fédération des travailleurs du Québec m'a
chargé de vous faire savoir que nous nous désolidarisons
totalement de l'Union internationale des rembourreurs et de son principal
animateur, Donat Thériault, que la CSN affronte actuellement, à
la Commonwealth Plywood. "M. Thériault, qui se sert
illégitimement du nom de la FTQ quand bon lui semble, pratique une forme
de syndicalisme dont la FTQ se dissocie. Aucun des syndicats locaux desservis
par M. Thériault n'est affilié à la FTQ et cela, depuis
plusieurs années. Le seul local de l'Union des rembourreurs qui demeure
affilié à la FTQ est le local 402 qui groupe quelque 1600
travailleurs d'une vingtaine d'usines de Montréal. "Le souci que les
responsables du local 402 portent à la démocratie syndicale et
à un syndicalisme militant leur a d'ailleurs amené plusieurs
problèmes avec Donat Thériault. "Nous espérons que vous
réussirez à faire triompher la cause des vrais travailleurs de la
Commonwealth Plywood contre cet employeur antisyndical et le syndicat de
boutique qu'il abrite."
M. le Président, cette lettre est très éloquente,
même si M. Thériault veut monter le ton et essayer de nous
impressionner. Même en cour, M. le Président, il avait dit
à un juge qu'il ne le ferait pas niaiser. Je ne pense pas que la
commission parlementaire va accepter de telles observations. Nous sommes ici
pour essayer de trouver un remède, un moyen, pour régler ce
problème qui languit depuis près d'un an.
M. Thériault, est-ce que vous êtes conscient que vous avez
conseillé vos adeptes à imprimer des cartes avec les lettres de
la CSN?
M. Thériault: M. le Président, qu'on me mette des
mots que je n'ai pas dits dans la bouche, j'ai trop de respect de la loi et des
juges pour avoir dit à un juge ce que M. Bellemare vient de dire. Je
n'ai jamais dit une chose semblable en cour, à aucun juge.
M. Bellemare: On l'a trouvé dans les rapports qui sont
faits ici, M. le Président, dans les rapports des jugements de la
Commonwealth Plywood.
M. Thériault: Vérifiez donc avec le juge pour voir
si j'ai dit cela, il m'aurait fait enfermer tout de suite, si j'avais dit cela.
Voyons donc, il faut tout de même être sérieux, M. le
Président.
M. Bellemare: On l'a lu, c'est contenu ici dans le rapport des
jugements qui ont été entendus et rendus.
M. le Président, je ne vous mets pas les mains dans la bouche, je
vous demande si vous êtes conscient... Je ne vous mets pas les mots dans
la bouche, mais je voudrais savoir de M. Thériault s'il est conscient
qu'il a fait un faux.
M. Thériault: M. le Président, je réponds
à cette question que je ne suis pas conscient d'avoir fait un faux et je
crois que je ne suis pas dans l'erreur et que c'est M. Bellemare qui est dans
l'erreur. Ce n'est pas un faux.
M. Bellemare: Je n'ai pas besoin de vous pour m'accuser. C'est
parce que vous avez-vous-même, ce matin, admis une récidive, en
disant que vous aviez employé les mêmes moyens dans une autre
réunion à Chambly. Là, vous avez voulu récidiver et
je pense que c'est un des grands troubles qu'on rencontre à cause
justement de ce M. Thériault qui est un indésirable, qui est
condamné par la Fédération des travailleurs du
Québec, qui est, mon cher monsieur, tout le trouble à la
Commonwealth Plywood. C'est à cause de lui qu'on vit présentement
la commission parlementaire et c'est à cause de lui aussi que des
centaines d'autres ont perdu leur position...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le
député de Johnson, je vous rappelle à l'ordre. Nous avons
convenu que les députés poseraient des questions. Il ne s'agit
pas pour le moment de faire des affirmations entre nous. Nous avons des
témoins devant nous qui sont invités. M. le député
de Johnson, s'il vous plaît.
M. Bellemare: M. le Président, si j'ai dit ce que je viens
de dire, c'est parce qu'après avoir étudié le dossier
comme je me le devais, j'ai constaté que l'âme dirigeante de tout
ce trouble, le "trouble maker", comme on l'appelle, c'est M. Thériault.
C'est là qu'est arrivé...
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Johnson, à l'ordre!
M. Bellemare: J'ai le droit de dire, mon cher monsieur, les
conclusions qui me sont données par les rapports que j'ai lus. Si je ne
m'adresse pas à vous, à qui vais-je m'adresser?
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Johnson, j'ai le devoir aussi de vous rappeler à l'ordre. N'accusez pas
les autres de récidiver, si vous le faites vous-même, s'il vous
plaît.
M. Bellemare: Je veux poser une question à madame qui a
dit, ce matin: "Nous avons demandé à M. Thériault s'il
pouvait au moins personnellement nous conseiller et nous aider à
atteindre ce but." Quel était le but? "M. Thériault nous a donc
suggéré, nous de la base, de prendre en main le syndicat qui
serait accrédité, parce que ce sera notre..." Mme Grignon, M.
Thériault vous a-t-il dit de prendre n'importe quel moyen, de prendre
même ce qui était illégal pour arriver à votre
fin?
Mme Grignon (Hélène): Pourriez-vous
répéter votre question, s'il vous plaît?
M. Bellemare: Pardon?
Mme Grignon: Pourriez-vous répéter votre
question?
M. Bellemare: "Nous avons demandé à M.
Thériault s'il pouvait au moins personnellement nous conseiller et nous
aider à atteindre ce but." Quel est le but? "Le but que M.
Thériault nous a suggéré, c'est que c'est à nous de
la base de prendre en main le syndicat qui serait accrédité,
parce que ce sera notre syndicat à nous." M. Thériault, à
ce moment-là, vous a-t-il parlé, par des moyens déloyaux
ou par des moyens illégaux, de faire des faux?
Mme Grignon: II n'a pas encore été prouvé
que les cartes étaient fausses et, pour nous, ce ne sont pas des cartes
fausses.
Le Président (M. Cardinal): Un instant! Question de
règlement par M. le député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je voudrais soulever une
question de règlement.
Le Président (M. Cardinal): Plus fort, je ne vous entends
pas.
M. Mailloux: Je voudrais soulever une question de
règlement. Depuis seize ans que je siège ici en cette Chambre,
c'est la première fois qu'il m'est donné de voir des
témoins à la barre questionnés de façon aussi
directe sans avoir la protection d'un avocat pour les conseiller, de
témoignages qui ultérieurement vont servir contre eux. Quand on
regarde le mot qu'a employé la commission, "conseil de
médiation", elle a été extrêmement prudente. Elle
dit qu'elle trouve étrange, elle ne porte pas de jugement, elle trouve
étrange...
Une voix: Et inusité.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Mailloux: ... et inusité. D'accord, les deux. Elle ne
porte pas de jugement, à savoir que c'est un faux, que des gens ont
falsifié, que des gens sont directement responsables. Je trouve
également étrange moi-même, voyant ainsi des avocats
qui ont l'habitude de défendre des gens qui n'ont pas la
formation juridique, qui laissent continuer les parlementaires interroger des
personnes qui n'ont pas la protection voulue et qui pourront se retrouver
ultérieurement devant les tribunaux avec toutes les conséquences
que cela entraîne. On peut avoir, quant à nous, à l'esprit
n'importe quelte interprétation du témoignage que M.
Thé-riault, que madame, ou que M. Lévesque ont donné, mais
de là à porter des accusations formelles qui pourront avoir des
conséquences inimaginables par la suite, j'ai l'impression que la
commission actuellement ne joue pas son rôle d'éclairer le public.
Il appartiendra aux tribunaux de porter des jugements sur les gestes
après que la cause aura été entendue. On est devenu un
tribunal actuellement. (17 h 45)
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Charlevoix... Un instant. À l'ordre, s'il vous plaît! Une autre
question de règlement? Attendez un peu. On va commencer par en
régler une.
M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, M. le
Président.
M. Mailloux: Je ne dis pas cela pour blanchir qui que ce soit,
mais je trouve cela étrange.
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Charlevoix, j'ai suivi depuis le début tous les travaux de cette
commission. Ce n'est pas la première fois qu'une question semblable
vient devant nous. Vous vous rappellerez que, tantôt, j'ai rappelé
à l'ordre à deux reprises, M. le député de Johnson.
À la première séance, je l'avais fait aussi en soulignant
que ce n'était pas une commission d'enquête. J'ai même
indiqué à des témoins invités que leurs
réponses étaient admissibles par la commission, même si
elles ne satisfaisaient pas le député. Je pense que la commission
a fait son devoir, mais il faut bien entendre une question avant de savoir si
elle est recevable ou si elle ne l'est pas.
M. le député de Jonquière, sur une nouvelle
question de règlement.
M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président,
très brièvement. Le député de Charlevoix a fait
allusion aux différents avocats qui pourraient se trouver autour de
cette table. Je tiens à dire tout d'abord qu'on présume que les
gens qui sont devant nous connaissent la loi et les lois. Ils sont dans une
guérilla judiciaire depuis au moins un an. Ils ont le droit à un
avocat et ils le savent. Ils auraient pu être accompagnés, s'ils
avaient voulu, d'un avocat. La compagnie est accompagnée d'un avocat. Je
tiens à dire que personnellement, ce matin, je vous ai demandé
une directive, à savoir: Est-ce que l'immunité parlementaire que
vous aviez accordée aux témoins s'appliquait également aux
aveux de commission d'actes criminels ou autres qui auraient pu être
commis dans le cadre de ce conflit?
M. le Président, je parle en mon nom person- nel, mais je tiens
quand même à dire qu'il n'appartient pas à un avocat membre
de cette commission parlementaire de voir à suggérer à
ceux qui sont censés connaître les lois du travail et les autres
lois de se prémunir devant cette situation.
Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le
député. Je ne veux pas qu'on fasse un débat sur une
question de règlement. Je vais répondre ceci: J'ai refusé,
ce matin, de donner une opinion juridique exactement pour la même raison.
Il m'apparaît interdit à un président ou même
à un député qui fonctionne au sein d'une commission de
conseiller les témoins qui sont devant lui et de conseiller même
ses collègues. C'est à chacun de se prémunir.
M. le député de Charlevoix, je vais être très
généreux. Je vous demanderais de ne pas faire un débat sur
la question de règlement. Si vous avez un mot à ajouter,
faites-le très brièvement.
M. Mailloux: M. le Président, je ne ferai pas de
débat. Je voulais simplement ajouter à ce que vient de dire le
député de Jonquière, que je n'ai pas tant voulu viser les
avocats qui sont à cette table, mais j'ai moi-même constaté
que la compagnie, elle, a à ses côtés des avocats, que des
personnes moins nanties n'en ont pas et qu'elles n'ont peut-être pas
été suffisamment éclairées pour se faire
accompagner, ou elles n'ont peut-être pas les moyens d'être
accompagnées d'avocats ici, à cette table...
Le Président (M. Cardinal): Bon! D'accord!
M. Mailloux: ... et c'est là que je vois le danger. Je ne
voudrais pas me trouver à leur place!
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement,
M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le
député de Jonquière.
M. Vaillancourt (Jonquière): La compagnie est
accompagnée d'un avocat, la CSN est accompagnée d'un avocat. Je
ne vois pas pourquoi l'autre syndicat ou l'autre présumé syndicat
ne serait pas accompagné d'un avocat.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Je...
M. Vaillancourt (Jonquière): Toutes les parties ont un
avocat, sauf une.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Je l'ai
indiqué tantôt. C'est à chacun de se prémunir. Je ne
veux pas recommencer ceci.
Est-ce que le député de Johnson a encore d'autres
questions?
M. Bellemare: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Bon! M. le
député de Johnson.
M. Bellemare: Si vous ne nous serrez pas trop le carcan, M. le
Président, on va faire notre devoir. Ceci dit, je voudrais demander
à M. Thériault s'il a signé ou s'il a conseillé
à ses adeptes de signer une convention collective?
M. Thériault: Je n'ai pas signé de convention
collective et je n'ai pas conseillé d'en signer. Il y a eu une
assemblée de 62 ouvriers. Ce sont eux qui ont pris la
décision.
M. Bellemare: Comment cela se fait-il que le rapport dit que vous
étiez présent à la signature?
M. Thériault: J'ai dit qu'il y avait un lot de
faussetés dans le rapport, M. le Président.
M. Bellemare: Le conseil de médiation, M. Blain, dit, mon
cher monsieur, dans son rapport, que vous étiez un des signataires.
M. Thériault: C'est encore faux.
M. Johnson: Non, il ne dit pas qu'il est un des signataires dans
le rapport. Il ne dit pas ça dans le rapport.
M. Bellemare: Oui.
Le Président (M. Cardinal): II ne faudrait pas que, de
part et d'autre, il y ait des affirmations qui...
M. Thériault: Mais, M. le Président, si on n'est
pas venu avec un avocat, c'est parce qu'on nous dit, depuis toujours, au
ministère du Travail ou au gouvernement et d'après les journaux,
qu'il ne faudrait pas en faire une guérilla judiciaire. Là, on
nous fait un reproche parce qu'on n'a pas amené un avocat.
Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vais
vous aider tous les trois davantage. Je vais aller jusque là. M.
Thériault: Pardon? Je n'ai pas compris.
Le Président (M. Cardinal): Je vais tenter de vous aider
davantage. Présentement, vous agissez volontairement, à la suite
d'une invitation. Vous n'êtes pas sous serment, et vous
bénéficiez d'une immunité, en droit civil, tant que vous
vous tenez dans les règles que j'ai indiquées ce matin. Plus
clairement, si une question vous embarrasse sur le plan juridique, je ne puis
pas être votre conseiller, mais vous pouvez refuser de répondre,
et j'aurai une décision à rendre à ce moment-là.
D'accord?
M. Thériault: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Cardinal): Je vous en prie! M. le
député de Johnson, est-ce que...
M. Bellemare: Je voudrais savoir de M. Thériault s'il a
participé, de près ou de loin, à la conception de la
convention collective qui a été signée par la compagnie et
les représentants de la CSN à l'intérieur?
M. Thériault: Je crois que j'ai déjà
répondu à ça. J'ai dit que j'avais agi comme conseiller du
comité de négociation, comme porte-parole au moment des
négociations.
M. Bellemare: Mais est-ce que c'est M. Léves-que qui a
signé ou si c'est vous?
M. Thériault: Ce sont tous les membres du comité
qui ont signé la convention, M. le député.
M. Bellemare: Est-ce que la convention collective qui a
été signée vous accordait certains avantages au point de
vue pécuniaire, au point de vue des griefs, au point de vue des
vacances, au point de vue des clauses normatives?
M. Thériault: La convention collective qui a
été signée, évidemment, accordait des avantages, et
elle est déposée... Je crois bien que, là encore, si je ne
veux pas me faire dire de fermer ma boîte, vous l'avez déjà
en main, je crois, M. le député.
M. Bellemare: Oui, je l'ai lue.
M. Thériault: II y a eu augmentation des salaires, il y a
des avantages aussi dans la phraséologie de la convention, mais, dans
des circonstances semblables, c'est évident que cette convention n'a pas
été améliorée comme on l'aurait voulu, comme on
l'aurait aimé. Mais il y a eu beaucoup d'améliorations mineures
et non pas majeures.
Le Président (M. Laplante): Autres questions?
M. Bellemare: Je voudrais savoir de M. Lévesque ou de Mme
Grignon s'ils ont rencontré les avocats de la compagnie avant la
signature de la convention collective.
M. Lévesque (Ernest): On les a rencontrés à
trois séances de négociation.
M. Bellemare: Y a-t-il eu des ententes que vous avez
acceptées ou avez-vous laissé tomber certaines prétentions
que vous croyiez justes et que la compagnie vous avait demandé de
retirer?
M. Lévesque (Ernest): La compagnie ne nous a pas
demandé de retirer... Mais il y a eu des ententes sur des clauses que
l'on voulait avec la compagnie. Quand on a une séance de
négociation, c'est pour conclure des ententes.
Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres questions,
M. le député de Johnson?
M. Bellemare: L'assemblée que vous avez tenue
était-elle représentative, oui ou non, de tous les
employés de l'intérieur? Oui ou non?
M. Lévesque (Ernest): Je voudrais savoir quelle
assemblée.
M. Bellemare: L'assemblée du 19 septembre.
M. Lévesque (Ernest): Vous vous trompez d'assemblée
et de syndicat.
M. Bellemare: Non. Le 19 septembre, les travailleurs
débraient contre ce lock-out déguisé par un vote de 95%.
Le 22 septembre, injonction provisoire prohibant le piquetage. Le 3 octobre, le
commissaire-enquêteur émet l'accréditation en faveur du
Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood-CSN. Le 4 octobre, la
compagnie porte 42 accusations pour outrage au tribunal. C'est vrai tout
cela?
M. Lévesque (Ernest): Le 19 septembre, le comité,
M. Thériault comme conseiller, n'a eu aucune assemblée. Ces
assemblées ont commencé le 26 septembre. Le 19 septembre, ce
furent des assemblées des gens de l'extérieur.
M. Bisaillon: ...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Sainte-Marie, à l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez attendre votre
tour.
M. Bisaillon: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît. M. le
député de Johnson, une autre question?
M. Bellemare: Comment se fait-il qu'avec les cartes que vous
aviez fait signer, que vous prétendez légales, qui sont des faux
parce que vous n'aviez pas le droit, vous, les rembourreurs, de mettre la CSN
sur des cartes, comment se fait-il que vous ayez pu dûment convoquer des
assemblées régulières?
M. Lévesque (Ernest): À cet égard, je
pourrais vous répondre que nous avons toujours pensé qu'en tant
que travailleurs depuis plusieurs années à la compagnie, nous
étions dans notre droit, les travailleurs non mis à pied, de
pouvoir convoquer ces assemblées et de prendre notre syndicat en
main.
M. Bellemare: Comment admettez-vous, M. Lévesque, que M.
Thériault, que vous savez représenter les Rembourreurs unis,
vienne un jour vous dire que vous êtes les représentants de la CSN
à l'intérieur? Comment m'expliquez-vous cela? Est-ce que c'est
pour avoir plus de chance de vous faire accréditer oui ou non?
M. Lévesque (Ernest): Dans les exposés de ce matin,
il a été fait mention de cela, comme quoi nous nous sommes
organisés et nous avons demandé à M. Thériault de
nous conseiller sur les moyens à prendre pour retourner au travail.
M. Bellemare: Et il vous a conseillé de faire des
faux?
M. Vaillancourt (Jonquière): Une question de
règlement. Excusez-moi, M. le député de Johnson. M. le
Président, le ministre du Travail a employé environ quinze
minutes, le député de Portneuf également, environ dix ou
quinze minutes, notre règlement prévoit 20 minutes. Le
député de Sainte-Marie a des questions à poser. Il est le
prochain sur votre liste. Cela fait au-delà de 30 minutes que le
député de Johnson pose des questions.
M. Bellemare: Pardon.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Jonquière, je vais trancher cela tout de suite. L'intervention du
député de Johnson peut être de 20 minutes comme pour tout
membre de cette commission.
M. Vaillancourt (Jonquière): Justement, il a
commencé à 17 h 20.
M. Bellemare: Pardon à 17 h 40.
Le Président (M. Laplante): Les 20 minutes ne sont pas
écoulées encore. Il lui reste encore six minutes s'il veut les
employer.
M. Bellemare: Oui, monsieur. Mais, M. le Président, devant
l'autorité reconnue du député de Sainte-Marie, je pense
que je vais lui céder la parole pour lui donner la chance, avant 18
heures, de pouvoir faire ses interventions. Votre intervention, M. le
député de Jonquière, aura valu au député de
Sainte-Marie le privilège de m'arrêter.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'était le but
recherché, M. le député de Johnson.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Est-ce que
j'en suis rendu à M. le député de Sainte-Marie?
M. Bisaillon: M. le Président, je ne pense pas que j'aurai
le temps d'entreprendre un interrogatoire avant l'ajournement de 18 heures.
Cependant, comme le fait que je prenne la parole maintenant me permettra
d'intervenir le premier la prochaine fois, je serai sûr de prendre tout
le temps nécessaire à ce moment-là. Je voudrais cependant
profiter de l'occasion...
Le Président (M. Cardinal): M. le député de
Sainte-Marie, me permettez-vous cependant...
M. Pagé: Cela va dépendre de la motion du ministre
et de l'ordre de la Chambre.
Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Pour ne
surprendre personne, vous savez que tantôt j'ai
reçu un refus de consentement unanime de la commission, je devrai
donc, à 18 heures précises, d'office...
M. Bisaillon: Voilà, mais si vous me laissez parler, ce ne
sera pas long. Cela va se terminer avant 18 heures.
Le Président (M. Cardinal): Vous avez la parole.
M. Bisaillon: Je voudrais profiter de l'occasion pour faire un
certain nombre de commentaires à M. Thériault et à M.
Lévesque pour leur indiquer dans quel sens je poserai mes questions et
j'interviendrai lors d'une prochaine séance, parce que vous serez encore
appelés comme témoins à ce moment-là. Je voudrais
vous indiquer, premièrement, que c'est le Parlement qui convoque la
commission parlementaire et que c'est donc devant le Parlement que vous avez
à répondre aux questions qui vous sont posées.
J'ai remarqué ce matin et on m'a souligné le fait
qu'à un moment donné, à la fin de la séance
de la matinée, j'avais haussé le ton et que je m'étais
impatienté. Je voudrais, M. Thériault, M. Lévesque, Mme
Grignon, m'excuser d'excès de caractère que j'ai pu avoir
à la fin de la matinée et vous prier de penser, pendant la
période de temps où vous allez être en dehors de cette
commission, qu'il serait peut-être utile, dans vos réponses aux
questions que je formulerai la semaine prochaine que, de votre
côté, vous baissiez le ton dans vos réponses et que vous
répondiez le plus honnêtement et le plus sincèrement
possible.
Le troisième commentaire, et c'est le dernier. M.
Thériault, cela s'adresse à vous particulièrement, je dois
vous avouer c'est pour vous mettre à l'aise pour la prochaine
fois que le type de syndicalisme que vous pratiquez ne m'est pas
familier, ne m'est pas sympathique non plus et qu'en conséquence, j'ai
de forts préjugés, après avoir lu le dossier, à
votre endroit. Il vous appartiendra donc, dans le genre de réponses que
vous nous ferez ça, c'est pour tous les trois de me
convaincre du contraire. Je ne voudrais pas jouer au chat et à la souris
et faire croire que je n'ai pas un penchant acquis à l'avance à
un groupe de travailleurs qui n'est pas le vôtre.
Si je tiens à vous le dire, c'est pour éviter qu'on
assiste à du camouflage, par exemple, comme celui auquel on a pu
assister à la dernière commission parlementaire. Je n'ai pas de
message de personne à passer, j'ai des questions sérieuses
à vous poser et ces questions proviennent du type de syndicalisme que je
connais et que j'ai pratiqué, qui n'est sûrement pas le
vôtre.
Le Président (M. Cardinal): Cela étant...
M. Bisaillon: Ceci dit, M. le Président, je pense qu'on
serait prêt à ajourner.
Le Président (M. Cardinal): Cela étant dit, je vous
remercie, M. le député de Sainte-Marie, les travaux de cette
commission... un instant, à l'ordre, s'il vous plaît! Oui, Me
Casgrain?
M. Casgrain: Une seule question. Il me semble possible que vous
convoquiez cette assemblée pour la semaine prochaine. J'aimerais vous
dire en passant que, pour ma part, et peut-être également pour M.
Bazin, cela peut être très difficile la semaine prochaine, mais on
essaie d'accommoder les gens le mieux qu'on peut je sais bien que vous
passez avant tout le monde et de faire l'impossible. Si, par hasard,
dans votre sagesse, il vous arrivait de penser qu'une semaine autre que la
semaine prochaine conviendrait, je suis très respectueux pour le
Parlement, je n'ai pas besoin de faire de grands dessins, je vous demanderais
de bien vouloir y penser, cela nous accommoderait fort si c'était une
autre semaine. (18 heures)
Le Président (M. Cardinal): Oui, Me Bazin.
M. Bazin: M. le Président, simplement pour
enchaîner, il y a une cinquantaine de plaintes qui sont entendues devant
le commissaire du travail et, après plusieurs ajournements, nous sommes
convenus de procéder les 10, 11 et 12. M. Caine est en
contre-interrogatoire à l'heure actuelle devant le commissaire du
travail. J'ajoute ça au dossier. Il va y avoir une question de
disponibilité à un moment donné.
Le Président (M. Cardinal): Merci messieurs. C'est au
leader parlementaire qu'il faut transmettre ces renseignements. Ce n'est pas le
président qui convoquera.
Oui, M. Norbert Rodrigue.
M. Rodrigue (Norbert): Je voudrais simplement souligner, devant
les membres de cette commission, un fait concret que vous connaissez
déjà, mais qu'il m'apparaît important de dire. Les
travailleurs concernés sont en grève depuis plus d'un an. Dans la
fixation de la date, on apprécierait, les travailleurs
apprécieraient que cela ne tarde pas trop.
Le Président (M. Cardinal): On prend note de tout cela. M.
le ministre, un mot de la fin très bref s'il vous plaît.
M. Johnson: Encore une fois, je voudrais remercier l'ensemble de
ceux qui se sont présentés aujourd'hui d'avoir été
patients. On fera l'impossible, au moins, indépendamment des
formalités, des motions, etc., pour faire savoir aux
intéressés quelle est la date ou quelles seront les dates
possibles, etc., en essayant d'accommoder tout le monde, dans la mesure du
possible, l'Opposition pour commencer, comme d'habitude, et, évidemment,
les parties. Je vous assure que de notre côté comme de celui du
bureau du leader, on verra à vous donner avis d'une façon ou
d'une autre, assez de jours d'avance au moins pour que ce soit raisonnable.
Le Président (M. Cardinal): Malgré tout, merci
à tous et j'ajourne sine die.
Fin de la séance à 18 h 3