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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mercredi 4 octobre 1978 - Vol. 20 N° 166

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Conflit de travail à la Commonwealth Plywood


Journal des débats

 

Conflit de travail à la Commonwealth Plywood

(Dix heures treize minutes)

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, messieurs!

Nous commençons une deuxième séance de la commission parlementaire permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre, à l'occasion du conflit de la Commonwealth Plywood. Au début de cette séance, je dois mentionner le nom des membres de la commission. Je souligne que, pour cette journée-ci, c'est une séance que nous ajournerons à 12 h 30, selon la motion qui a été adoptée hier, à l'Assemblée nationale. Contrairement à ce qui s'est produit la semaine dernière, nous sommes maintenant en session et nous obéissons à des règles particulières. Normalement, suivant ce qui se passera à l'Assemblée nationale cet après-midi, nous reprendrions nos travaux, pour une nouvelle séance, après la période des questions.

Les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Forget (Saint-Laurent).

M. Pagé: II est remplacé par le député de Saint-Louis, M. Blank.

Le Président (M. Cardinal): M. Blank (Saint-Louis); M. Gravel (Limoilou) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Roy, (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont: M. Blank (Saint-Louis), vous êtes donc membre; M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par...

M. Pagé: M. Mailloux (Charlevoix).

Le Président (M. Cardinal): Merci. M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M. Mailloux (Charlevoix); M. Samson (Rouyn-Noranda).

Appel des personnes et des organismes invités

L'horaire est connu de tous. La liste des personnes invitées pour cette journée, organismes et individus: Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord qui devrait être représentée par M. Donat Thériault. Présent?

Une voix: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Mme Hélène Grignon?

Une voix: Présente.

Le Président (M. Cardinal): Commonwealth Plywood, par M. William P. Caine.

M. Caine: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Byers, Casgrain et associés, par Me Pierre Fournier.

M. Casgrain (Philippe): Pardon? Je ne comprends pas beaucoup.

M. Johnson: Me Pierre Fournier. F-O-U-R-N-l-E-R.

M. Casgrain: On va commencer doucement, si cela ne vous fait rien, M. Johnson.

M. Johnson: Pardon?

Une voix: Vous n'avez pas d'ordre à donner ici, monsieur.

M. Casgrain: On va commencer doucement. Une voix: Soyez poli toujours. Une voix: Faites cela.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bisaillon: Faites cela vous-même et cela va bien partir.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À l'ordre!

M. Casgrain: À la dernière séance, quand j'ai dit que Me Bazin et moi représentions M. Fournier, on nous a dit qu'on n'avait pas le droit de le faire.

M. Chevrette: On a demandé si M. Fournier était ici.

Le Président (M. Cardinal): Je constate le fait tout simplement. Me Fournier n'est pas présent. C'est tout.

M. Chevrette: Qu'il soit au moins poli!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Quand nous y arriverons, nous verrons ce qu'il y a lieu de faire.

M. Chevrette: Est-ce qu'il se prend pour un autre, lui, "crisse".

Le Président (M. Cardinal): M. Ernest Léves-que.

M. Lévesque (Ernest): Présent.

Le Président (M. Cardinal): Société Intercommunica, par M. Yvon Turcot. Absent. Merci! Je rappelle que la commission s'était entendue pour procéder par bloc, c'est-à-dire qu'à la dernière séance, après les diverses procédures, j'avais obtenu le consentement unanime de la commission pour entendre, par groupe, diverses personnes. M. le ministre, quel est le prochain groupe qui était prévu?

M. Johnson: M. le Président, conformément un peu à la pratique qu'on avait prise la semaine dernière, je suggérerais, pour les fins de facilité, que nous entendions ensemble M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault qui sont de l'Union des rembourreurs unis d'Amérique.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce que M. Lévesque...

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: ... on a passé une journée entière à entendre tous les témoins que voulait faire entendre le ministre. On a assisté à un monologue du ministre qui a duré quasiment deux heures de temps pour essayer d'établir une stratégie pour déprimer la compagnie, pour la mettre au palier, mon cher monsieur, le plus bas, pour baisser son prestige et pour accuser véritablement la compagnie, après avoir entendu tous les autres, de ne pas vouloir collaborer. Je n'ai jamais rencontré la compagnie, je n'ai jamais rencontré personne, mais je suis ici pour faire mon devoir et je dis que la stratégie qu'emploie le ministre de ne pas donner la chance à la compagnie de se faire entendre, c'est justement pour briser ce prestige qu'a la compagnie, pour briser son rayonnement économique pour dire après: Voici, messieurs, voyez-vous tout ce qu'on a dit contre vous. Non, ce n'est pas la bonne stratégie, M. le Président, et je pense que, sans connaître personne, étant déjà moi-même assez exercé dans les relations patronales et ouvrières, il devrait être entendu aujourd'hui que la compagnie puisse faire part de ses sentiments et que nous lui posions des questions.

J'ai essayé l'autre jour de poser des questions. On a dit: Non, ne touchez pas à cela. C'est défendu par le règlement. Il y a une chose qui reste sûre, c'est que cette frime a assez duré. La commission parlementaire est ici pour entendre tout le monde, pas seulement un côté syndical ou pas seulement un côté qui fait l'affaire du ministre pour se justifier, pour se couvrir. Il a fait un monologue pendant deux heures. Vous nous avez empêchés, M. le Président, après un vote pris, d'entendre la compagnie. Je n'ai rien contre ceux qui ont fait le conseil de médiation, mais j'en ai aujourd'hui contre l'accroc à la liberté d'expression, qu'avec beaucoup de pesanteur, le ministre vous impose et que nous autres, on est obligés de subir, parce qu'on est minoritaires. La compagnie a le droit de se faire entendre. On a entendu pendant au moins douze heures tous les témoins qui blanchissaient le ministre, qui essayaient de lui trouver une justification à ce qu'il n'a pas voulu faire. Il est le grand responsable, le ministre. C'est lui, le ministre, qui aurait dû, dans le temps, prendre ce conflit qui était en train de se gâter, parce que ce n'est pas une grève, ce n'est pas un lock-out. C'est entre syndicalistes qu'on se chamaille, c'est intersyndical.

Le Président (M. Cardinal): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît! Je vous ai entendu, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, comme membre de la commission, M. le député de Johnson, comme j'ai entendu tantôt le ministre. Je rappelle, cependant, et vous l'avez dit vous-même, qu'il y avait un vote à cette commission.

M. Bellemare: Qu'il y avait quoi?

Le Président (M. Cardinal): Le président est là, évidemment, pour voir à ce que tout se passe aussi bien que possible, et, s'il y a lieu, protéger l'Opposition.

M. Bellemare: Plus que n'importe quel autre, parce qu'on est minoritaires.

Le Président (M. Cardinal): D'accord.

M. Bellemare: Si vous vous servez de la majorité...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, à l'ordre! Vous savez cependant, avec toute l'expérience que vous avez, que la présidence ne peut pas renverser un vote. Il y avait un vote sur une motion à cette commission, et je vis avec ce vote. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, sur cette question, je ne voudrais pas ce matin qu'on s'embarque dans une bataille de procédure et, encore moins, comme le dirait mon collègue de Johnson, dans des monologues et de grandes diatribes. Il y a une chose qui est certaine, et je voudrais qu'on clarifie la situation dès le départ. Je ne voudrais pas qu'on soit obligé d'en arriver à des motions, mais je voudrais qu'on s'entende, si c'était possible, les membres de la commission, sur le déroulement de nos travaux. Il a été clairement indiqué, lors de la première séance de la commission, le 26 septembre, que nous avions différents groupes à entendre, et que ces groupes avaient été convoqués par le secrétariat des commissions, à la requête et à la demande du ministre du Travail, lui-même en a fait état lors de l'ouverture des travaux.

M. le Président, dans notre règlement, il est clairement indiqué et stipulé que c'est la commission elle-même qui convoque les parties, et non pas un ministre, et encore moins le secrétariat des commissions. Je pense qu'il serait régulier, si on

ne veut vraiment pas avoir de contestations ou de problèmes de quelque nature que ce soit, dès ce matin, qu'une motion soit présentée, possiblement par le gouvernement, possiblement par le ministre, pour entendre les parties qu'il veut entendre aujourd'hui, qu'il voudrait voir comparaître ici, parce qu'il n'y a absolument rien dans le règlement, M. le Président, qui permet au secrétariat des commissions de convoquer quiconque, parce qu'on pourrait soulever le problème. On pourrait dire: En vertu de quoi le secrétariat des commissions a-t-il convoqué M. Jos. Bleau à venir comparaître plutôt que M. Pierre X? Alors, il serait de mise, M. le Président, que, dès ce matin, le ministre présente sa motion ou qu'un membre de l'équipe gouvernementale ou de la majorité la présente avec un libellé bien spécifique sur les groupes qu'on veut faire intervenir ici ce matin. Sur la foi de l'adoption de cette motion, on verra qui entendre, à quel moment. Est-ce qu'il est préférable d'entendre les représentants de la compagnie ce matin? Est-ce qu'il est préférable de continuer et de vider la question du côté syndical pour revenir avec la compagnie cet après-midi? Cela, c'est un autre problème. Mais, ce que je vous demande, M. le Président, c'est de faire en sorte que notre règlement soit respecté intégralement. Ce n'est pas au ministre et ce n'est pas au secrétariat des commissions de faire les convocations, c'est à la commission quand, tout au moins, on a le respect le plus élémentaire et le plus minimal des autres collègues autour de cette table.

M. Johnson: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Cela va. Oui, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, sur la question de règlement, je voudrais tout simplement évoquer deux choses. D'abord, la coutume et l'attitude usuelle que ce Parlement adopte pour entendre des personnes en commission et, deuxièmement, la question du comportement de l'Opposition elle-même la semaine dernière.

Il est de mise et il est habituel que le secrétariat des commissions donne avis... Il ne s'agit pas de requérir au sens d'un subpoena, comme le prévoit l'article 153. Il s'agit simplement de donner avis à des personnes que nous aimerions les entendre et, la semaine dernière, l'ensemble de ces personnes se sont présentées effectivement. Cependant, depuis, un certain avocat, Me Four-nier, a fait savoir, par la voie des journaux, qu'il n'entendait pas se présenter. Quant à M. Yvon Turcot, d'une maison de publicité, il nous a fait savoir, je pense, au secrétariat des commissions, par sa secrétaire, que des engagements antérieurs l'empêcheraient de venir se présenter aujourd'hui devant cette commission.

Je pense que le député de Portneuf, qui l'a bien dit, qui ne veut pas soulever des débats de procédure inutiles, longs et qui font perdre le temps de tout le monde autour de cette table et surtout de nos invités dans la salle, je pense qu'il est bien conscient que, la semaine dernière, cependant, il n'a pas posé cette question de l'opportunité et de la nécessité d'une motion présentée par le gouvernement, le ministre ou un député autour de cette table quant à qui nous devions entendre. Je pense que, compte tenu de la valeur du précédent qu'il a lui-même créé la semaine dernière par son silence, nous devrions, ce matin, entendre les personnes et qu'à la rigueur, l'ordre dans lequel nous devons entendre ces personnes pourrait faire l'objet d'une motion, comme la semaine dernière, pour que soient entendus, dans un certain ordre, les trois blocs de témoins.

M. Pagé: M. le Président, vous savez...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: ... on ne peut, par une coutume, changer le libellé, le texte de notre règlement. Notre règlement stipule que les intervenants et ceux qui ont à comparaître sont convoqués par la commission, d'une part. Voilà, pour répondre au ministre.

D'autre part, la semaine dernière, on nous a informés et, avant que je ne présente ma motion... M. le Président, est-ce que je dérange le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre?

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant. La parole est à M. le député de Portneuf.

M. Pagé: La semaine dernière, la discussion a porté sur le moment où les intervenants auront à comparaître dans le courant de la journée. Je présumais que le gouvernement, dès le début des travaux, présenterait une motion pour ratifier la convocation qui avait été faite par le secrétariat des commissions.

Or, ce n'est certainement pas mon silence que peut invoquer le ministre, parce que ce dernier sait fort bien lui-même qu'il aurait dû présenter une motion. De plus, s'il fallait s'en référer au silence des députés pour créer des précédents, Dieu sait s'il y en aurait, parce qu'on a une majorité ministérielle en Chambre qui ne parle pas trop souvent.

Ce ne sont pas des arguments à invoquer. Qu'on respecte le règlement et c'est ainsi que nos travaux pourront se dérouler régulièrement et on n'aura pas de problème autour de la table.

Alors, présentez la motion. Cela va s'arrêter là. On va commencer et on va entendre les parties, ce matin.

Le Président (M. Cardinal): Un instant. Je veux quand même permettre à tous les membres...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un faux problème.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! Je rappelle qu'il faut demander le droit de parole pour l'obtenir.

M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Si cela prend une proposition formelle, je suis bien prêt à en faire une, mais j'ai la conviction que M. le député de Portneuf a raison de dire: Si on s'entendait pour dire que l'on commence par tel groupe, le ministre a déjà fait la suggestion...

M. Pagé: C'est cela.

M. Chevrette: ... et pour éviter de perdre du temps, le ministre a même dit "en bloc". Il a même précisé que c'était M. Thériault, Mme Hélène Grignon et je ne me souviens plus...

Le Président (M. Cardinal): M. Lévesque.

M. Chevrette: M. Lévesque, je pense, dans un bloc et, après cela, il a mentionné la compagnie. Si on s'entend, si on a le temps cet avant-midi, si on finit après-midi, on peut commencer tout de suite avec monsieur; mais on n'a pas besoin de motion si on s'entend. C'est un consensus.

M. Pagé: Présentez une motion pour ratifier la convocation.

Le Président (M. Cardinal): Un instant. A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf, à l'ordre.

Le prochain qui a demandé la parole est M. le député de Charlevoix et, ensuite, M. le député de Johnson.

M. Mailloux: J'ai assisté à la séance précédente, en partie, et j'ai lu les témoignages de la séance à laquelle j'étais absent. Je constate quand même que sans vouloir entrer dans le légalisme des hommes de loi qui sont à côté de nous, il y a quelque chose qui nous frappe dans les témoignages qu'on veut faire entendre. Il y a, en fait, trois parties qui sont en cause principalement dans ce conflit; d'un côté, les syndicats représentés par l'Union des rembourreurs unis d'Amérique, la CSN et je pense que ces deux-là ont déjà été entendues. La troisième partie, c'est quand même la partie patronale. A ces témoignages, le ministre voudra ajouter des témoignages à l'appui, peut-être, de ceux rendus par les gens de l'Union des rembourreurs unis d'Amérique de même que par la CSN. Il n'y a rien contre cela. Mais si le ministre continue dans la ligne qu'il a avancée, dans notre esprit, il a un préjugé au départ, il est déjà dans une position très inconfortable dans un conflit qui est devant les tribunaux et je me demande dans quelle position il se place s'il ne fait pas entendre, au moins après les deux syndicats, la partie patronale représentée par M. Caine. C'est là qu'est le centre. Qu'on le fasse donc entendre.

M. Johnson: Si vous le permettez, M. le Président, simplement pour clarifier cela. Il est très évident que j'entends proposer et je souhaite que nous entendions M. Caine. Cependant, les représentants de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique, je pense que le député de Charlevoix va le reconnaître, n'ont pas encore témoigné. C'est ce qu'on voudrait faire ce matin, les faire témoigner.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, brièvement, s'il vous plaît, parce que je vais être obligé de prendre position pour que les gens qui sont devant nous ne nous entendent pas pendant la matinée pour savoir qui nous allons entendre. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: C'est sûr et certain, M. le Président, que nos minutes sont précieuses. Je m'en rends compte plus que jamais parce que, dans un conflit où on a vécu pendant des mois et des mois, cette suspicion d'un bord et de l'autre, on a l'avantage ce matin, et on l'a eu le 26 septembre, d'entendre la partie syndicale qui nous a détaillé, dans son style à elle, tout ce qu'elle avait eu à subir, mais j'ai toujours pensé qu'on ne devrait pas, M. le Président, mettre de côté la compagnie elle aussi... Écoutez un instant. Quand on aura entendu tout le monde, la compagnie va poireauter encore toute la journée comme elle l'a fait l'autre jour. Ce n'est pas juste, M. le Président. Je pense que, comme l'a dit le député de Charlevoix...

M. Vaillancourt (Jonquière): Si vous n'arrêtez pas de parler.-.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!

M. Bellemare: Je me conforme au règlement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Bellemare: Je vous ai demandé la parole, mais d'autres ne l'ont pas demandée et font des interventions. Ils sont exactement...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est vous qui faites des monologues ce matin.

M. Bellemare: Non, M. le Président, je plaide contre la discrétion que manifeste le ministre de ne même pas vouloir entendre la compagnie. Il y a une limite, mon cher monsieur.

M. Vaillancourt (Jonquière): Entendez les parties qui sont ici, voyons donc! On veut les entendre, mais taisez-vous et on va les entendre!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, messieurs! Je vais suspendre la séance.

M. Bellemare: M. le Président, le député a-t-il le droit de m'interrompre?

M. Vaillancourt (Jonquière): Taisez-vous et on va les entendre.

M. Bellemare: Ce n'est pas cela qu'on veut. On veut que la justice soit reconnue. Vous avez la majorité...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, c'est fini! La séance est suspendue pendant trois minutes.

(Suspension de la séance à 10 h 31)

(Reprise de la séance à 10 h 34)

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Je suis obligé de demander la collaboration des membres de la commission et c'est un appel que j'espère ne pas avoir à répéter. Je voudrais dire, avant de reprendre ces travaux, que je n'hésiterai pas à suspendre et même aller plus loin, s'il le faut. Je ne permettrai pas qu'une commission se conduise de cette façon. Il faut distinguer entre une invitation qui est faite aux gens qui veulent se faire entendre, c'est-à-dire qui se sont présentés volontairement, ce qui s'est produit à la première séance, et ce qui se produit aussi pour la majorité des gens, à cette deuxième séance, et qui alors peuvent donc être invités — je n'ai jamais employé le mot "convoqués" devant cette commission, sauf pour expliquer des faits — par le secrétariat des commissions, à la suggestion du ministre, ce qui s'est fait dans toutes les commissions parlementaires.

Nous avons eu dans cette salle, pendant trois mois, une commission parlementaire sur le projet de loi 101, je le rappelle comme jurisprudence; la commission y a toujours accepté les invitations que le ministre faisait et la commission elle-même faisait des motions pour demander d'autres invitations ou d'autres convocations. Il y a même eu des décisions qui ont été rendues par la présidence à ce moment-là. Il faut donc distinguer entre cette invitation, ce fait que des gens soient volontairement réunis, soient là, qu'il y ait quorum, et l'assignation non volontaire, évidemment, d'un témoin.

Dans ce cas, évidemment, il faut une motion, si on veut, par la suite, appliquer ce règlement no 153. Nous n'en sommes pas là quand même. Il ne faudrait pas, pour quelque raison que ce soit, que l'on mêle ces deux choses. Au début de cette séance, après avoir mentionné le nom des membres, des intervenants et des invités, que j'ai désignés comme tels, et selon le règlement, à qui j'ai demandé s'ils étaient présents ou non, j'ai proposé, tout simplement, à la suite de la première séance, un ordre du jour.

Je demande tout simplement si cet ordre du jour, qui a été proposé par le ministre à ma demande, est accepté unanimement par la commission.

M. Bellemare: Quel ordre du jour?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, je vous en prie!

M. Bellemare: Celui qu'on a en main?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, je vous en prie! Ce que vous avez en main, ce n'est pas l'ordre du jour, c'est ce que j'ai dit au début de la séance, et qui est au journal des Débats. Si vous voulez que je le répète, j'ai indiqué non pas un ordre du jour, mais une liste des personnes invitées. J'ai ensuite mentionné que nous avions procédé par bloc, à la première séance, que nous en étions au deuxième bloc et que ce deuxième bloc, proposé par le ministre, était pour entendre, comme je l'ai indiqué tantôt, M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault.

C'est aussi simple que cela et il n'y a pas lieu à des questions de règlement sur ce fait. Est-ce que la commission est consentante à accepter ce fait pour que nous commencions?

M. Bellemare: Je maintiens ma dissidence.

M. Blank: Avec l'explication que le président de la commission a donnée — il a cité comme exemple le bill 101 à cette commission — je pense que le président de la commission mêle les choses.

Le Président (M. Cardinal): Pardon! À l'ordre, M. le député de Saint-Louis!

M. Blank: Je vais vous dire pourquoi, j'en ai le droit.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, M. le député de Saint-Louis! Vous n'impliquerez pas la présidence.

M. Blank: Je n'implique pas la présidence du tout. Mais je dis que lorsque nous avons eu la commission sur la loi 101, c'est suivant nos règlements qu'on a une commission après la première lecture, que les invitations ont été imprimées dans tous les journaux et qu'on a invité des gens. C'est suivant nos règlements.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Louis, vous n'étiez pas à la dernière séance. Vous savez que nous sommes réunis aujourd'hui en vertu...

M. Blank: Les règlements n'ont pas changé depuis la dernière séance.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes réunis aujourd'hui en vertu d'une motion adoptée unanimement, et j'ai le droit de dire ce qui s'est passé à l'Assemblée nationale, je présidais à ce moment-là, unanimement, hier...

M. Blank: Je vous ai vu à la télévision hier soir. C'était très beau.

Le Président (M. Cardinal): Par conséquent, je fonctionne, et nous fonctionnons, en vertu d'une motion de l'Assemblée nationale et nous sommes donc régulièrement réunis. Je considère qu'il n'y a pas à revenir sur ce que je viens de mentionner.

M. Blank: Pourtant, suite à cela, la suggestion du député de Portneuf doit suivre. La commission doit décider qui elle va entendre.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, M. le député de Saint-Louis! Je vous en prie. J'ai demandé si la commission était d'accord. C'est tout ce que j'ai demandé.

M. Bellemare: Le bâillon.

M. Chevrette: Qu'on appelle les témoins au plus vite.

Le Président (M. Cardinal): La commission est d'accord, sauf la dissidence du député de Johnson, qui est enregistrée au journal des Débats.

M. Bellemare: Parce que le bloc de la compagnie devrait être entendu.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Saint-Louis, vous êtes membre?

M. Blank: Oui, je suis membre.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. De même que celle du député de Saint-Louis.

M. Blank: On a des règlements, on doit les avoir pour quelque chose.

M. Chevrette: C'est exactement ce qu'on fait. M.Bellemare: C'est la stratégie du ministre.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, bien calmement! Un instant! Je vais inviter tout de suite M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault, à se présenter devant les micros, face à cette assemblée. M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, simplement pour rassurer le député de Johnson et les autres membres de la commission, particulièrement le député de Charlevoix, je dis bien que je suggère à la commission que nous entendions M. Thériault, M. Lévesque et Mme Grignon et que, par la suite, nous entendions les représentants patronaux ou le représentant patronal, M. Caine, de même que d'autres témoins, s'il y a lieu.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le ministre. Si M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault sont là, je vous prierais chacun de bien vouloir donner vos noms, prénoms et titres, s'il vous plaît.

M. Lévesque (Ernest): Ernest Lévesque, président du syndicat des employés à l'intérieur de Commonwealth Plywood.

Une voix: M. le Président, puis-je vous demander de répéter, je n'ai pas entendu?

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! je m'excuse! Veuillez répéter. Approchez-vous de vos micros ou approchez vos micros.

M. Bellemare: Vous représentez M. Lévesque, quoi?

Le Président (M. Cardinal): D'accord, recommencez, s'il vous plaît, M. Lévesque.

M. Lévesque (Ernest): M. Ernest Lévesque, président du syndicat des employés à l'intérieur de la Commonwealth Plywood.

M. Bellemare: Pour la CSN. Vous représentez la CSN...

M. Lévesque (Ernest): Ni l'un, ni l'autre.

M. Bellemare: Ah!

Le Président (M. Cardinal): D'accord, suivant.

Mme Grignon (Hélène): Hélène Grignon...

Le Président (M. Cardinal): Oui, madame.

Mme Grignon: ... secrétaire des employés de l'intérieur de la Commonwealth Plywood.

Le Président (M. Cardinal): Merci, madame.

M. Thériault (Donat): Donat Thériault, vice-président international, directeur canadien de l'Union internationale des rembourreurs et président du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Je vais suivre l'ordre habituel, à savoir le côté ministériel puis les oppositions. M. le ministre.

M. Johnson: M. Lévesque, pour reprendre la question que le député de Johnson vient de vous poser, est-ce que vous êtes un président de la CSN ou un président de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique?

M. Lévesque (Ernest): Avant de passer aux questions, j'aurais aimé produire un exposé de certains faits avant de conclure.

Le Président (M. Cardinal): Un instant! La commission est-elle d'accord?

Des voix: Oui, M. le Président.

M. Johnson: Je n'ai aucune objection...

Le Président {M. Cardinal): Consentement unanime. M. Lévesque.

M. Johnson: ... à la condition cependant, si vous permettez, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Johnson: Je suis sûr que le député de Johnson sera d'accord avec moi, que ce ne soit pas un long monologue.

Le Président (M. Cardinal): Non, s'il vous plaît, à l'ordre! M. Lévesque, vous avez la parole.

Témoignages M. Ernest Lévesque

M. Lévesque (Ernest): Je vais commencer par la date du 15 septembre alors qu'un léger ralentissement de travail a commencé, cette journée-là, à cause de la mise à pied.

M. Bellemare: 1977?

M. Lévesque (Ernest): Oui. Le 16 septembre 1977, ralentissement jusqu'à 8 h 15 environ. Par la suite, arrêt total, le reste de la journée. Durant cette journée, il y avait des groupes qui se promenaient dans l'usine. Certains chantaient, d'autres dansaient sur des airs d'accordéon. On peut même compter un groupe de trente à quarante qui sont allés tour à tour se désaltérer aux deux clubs du coin. J'étais moi-même dans l'un de ces groupes. Pour être honnête, je n'aime pas ce genre de fête. C'est pourquoi je me suis rendu assez souvent, accompagné de différents employés, à ces deux clubs.

Le 19 septembre 1977, à mon arrivée, vers 6 h 15, il y avait déjà une dizaine d'employés à l'entrée principale de l'usine. Je me suis joint à eux par curiosité, afin de voir comment tout cela se déroulerait. Quarante employés sont entrés au travail, malgré les insuites et les menaces que leur prodiguaient les piqueteurs. Ensuite, plusieurs sont retournés chez eux ayant peur et ne sachant pas ce qui leur arriverait s'ils franchissaient cette ligne de piquetage.

Au cours de cette matinée, nous avons été avertis sur les lignes de piquetage qu'il y aurait vers 10 heures une assemblée au sous-sol de l'église du Sacré-Coeur, tout près de l'usine. Je me suis rendu à cette assemblée où il y avait environ 110 personnes dont la grosse majorité était formée de personnes mises à pied. De vingt à trente seulement n'avaient pas été mises à pied. Elles ont formé le comité. Ensuite, elles décidèrent de rencontrer la compagnie pour faire reprendre les 118 mises à pied. (10 h 45)

Également, nous avons été avertis d'une assemblée dans l'après-midi, vers 1 h 30, au même endroit, et ce, sans que les 40 employés qui travaillaient, ainsi que ceux qui avaient préféré retourner chez eux, n'aient été invités à ces deux assemblées. Le 20 septembre 1977, une douzaine d'employés sont entrés au travail, ce matin-là, non pas cependant sans avoir été insultés et avoir reçu des coups. Vu l'attitude prise la veille aux deux assemblées d'ignorer les 40 employés qui travaillaient ce 19 septembre 1977 et ceux qui avaient préféré retourner chez eux, je décidais de retourner au travail. J'ai eu droit à des insultes et à des menaces, même que Serge Royer, directeur de grève, s'est mis à courir derrière moi et m'a dit: Qu'est-ce que tu fais là, toi qui as gueulé si fort hier? Ce qui est faux, car je n'avais pas droit de parole, ni de vote. Je n'étais pas le seul. Plusieurs de mes confrères de travail n'avaient pas adhéré à la CSN. Je me suis arrêté avant d'entrer et je l'ai envoyé promener. À 10 h 30, les patrons nous ont envoyés chez nous, par manque de personnel pour produire. Nous sommes sortis par l'arrière pour ne pas faire face aux menaces qu'ils nous avaient prodiguées.

Le 26 septembre 1977, j'assistais à l'assemblée de l'Union internationale des rembourreurs, ayant été convoqué par un copain de travail, Luigi De Luca. Ce fut impossible de tenir cette assemblée, car il y avait deux permanents de la CSN qui refusaient de sortir. Vu que cette assemblée n'a pu être tenue, nous avons convenu, trois autres employés non mis à pied et moi-même, de rencontrer ces permanents de la CSN, le lendemain matin, sur la ligne de piquetage, afin d'avoir un terrain d'entente pour trouver les parties impliquées.

Ce qui fut convenu la veille fut fait le 27 septembre 1977 au matin. Donc, je me suis rendu dans le stationnement du magasin IGA en face de l'usine de la Commonwealth Plywood. À cet endroit, se trouvaient huit employés non mis à pied qui allaient voir le matin ce qui se passait, en curieux. Je leur ai mentionné notre intention et ils furent d'accord que l'on fasse un essai d'entente. Je me suis dirigé vers la ligne de piquetage accompagné d'un employé non mis à pied, Réjean Huot. D'ailleurs, j'ai invité les permanents de la CSN, seulement eux, à venir discuter de toute l'affaire devant un café, au Central Bar-B-Q, situé boulevard Labelle, à Sainte-Thérèse. Ceux-ci ayant accepté mon invitation, j'ai commencé à discuter en parlant des non-mis à pied qui désiraient retourner au travail et demandé que, en ce faisant, la CSN nous négocie une convention, comme c'était notre droit, et j'ai dit, à l'égard des mises à pied, qu'il y avait des lois qui protégeaient les employés mis à pied vis-à-vis de l'employeur, si celui-ci était en défaut. La réponse fut que le seul moyen à prendre était qu'on se joigne à eux sur la ligne de piquetage, que la compagnie plierait plus vite.

Cette réponse ne fut pas acceptée des employés non mis à pied. Le petit groupe qu'on était, à ce moment, décida de s'organiser pour retourner au traval. Encore une fois, nous sommes retournés prendre un café seuls, sans représen-

tant de la CSN. De là, je suis entré en communication avec M. Benoît Verville, surintendant de l'usine. Il nous garantissait du travail, si le groupe était assez important pour produire. À la suite de cet appel, j'ai communiqué avec Mme Hélène Gri-gnon, qui pouvait entrer en contact avec M. Donat Thériault pour lui demander conseil, étant le dernier espoir pour nous aider sur les mesures à prendre pour retourner au travail.

J'ai été victime d'actes de vandalisme, le 12 octobre 1977, sur ma voiture. Au moment où j'allais travailler, je me suis rendu compte qu'on avait jeté de la peinture sur le toit et le capot. Je pouvais quand même m'en servir jusqu'au 19 octobre 1977, alors que j'ai découvert qu'on était revenu et qu'on avait endommagé en entier la peinture de ma voiture et crevé les quatre pneus. Ce matin-là, j'apprenais que trois de mes confrères de travail non mis à pied avaient subi le même acte de vandalisme que moi, et deux d'entre eux étaient membres du comité représentant les employés intérieurs, comme on nous appelle, le troisième étant chef d'équipe.

À la suite de la conférence de presse que nous avions donnée, il m'a fallu avoir recours à la police pour éloigner une voiture qui surveillait l'entourage de ma demeure. Je n'ai pas pu identifier les trois individus de cette voiture, mais quand j'ai fait appel à la police, en donnant la description de la voiture, j'ai mentionné que je travaillais à la Commonwealth Plywood. Ils m'ont répondu qu'ils allaient venir, qu'ils connaissaient ces gens.

Le 31 août 1978, pour démontrer la bonne foi des grévistes, comme on les appelle, alors que la commission parlementaire est convoquée, un employé portugais et son épouse, Antonio et Marie Aguiar, qui entraient au travail vers 5 h 30 le matin, furent attaqués par un groupe de grévistes qui cassèrent la vitre de côté de l'automobile de ce monsieur, blessant son épouse. Réalisant que les moyens de pression exercés sur les employés de l'intérieur n'avaient pas atteint leur but, ils s'en prirent à nos familles.

Je vous donne l'exemple de mon beau-père, dont le nom est Joe Bonkay, qui travaille depuis huit ans à la compagnie Willis de Sainte-Thérèse, qui est syndiqué CSN depuis le maraudage à cette usine il y a environ deux ans et dont le président est Jules Théoret. Il y eu à subir les insultes de ce même Jules Théoret, se faisant même dire, dans une lettre circulaire distribuée aux employés Willis et en rapport avec le conflit Commonwealth Plywood, le gendre scab, le fils scab et la fille scab de Joe Bonkay.

Un deuxième exemple: Vers la fin du mois d'août 1978, un homme qui se trouvait en attente aux feux de circulation situés sur le boulevard Labelle, face au local CSN, a eu la surprise de voir le toit de vinyle de sa voiture découpé par un groupe d'individus sans scrupules. Cet homme n'avait pas pensé qu'en allant reconduire sa fille au travail, il serait attaqué de cette façon.

Avant de mettre fin à mon exposé, je dois admettre qu'il y a eu d'autres essais d'entente venant de Gilles Pagé, qui aurait favorisé la CSN. Alors qu'un soir, le comité était réuni à ma demeure pour discuter, j'ai reçu un appel téléphonique de Gilles Pagé me demandant une rencontre pour trouver un terrain d'entente. J'ai répondu qu'il n'y avait pas d'entente possible à cause de la résolution que les grévistes ont acceptée et adoptée en assemblée, c'est-à-dire que, dès qu'ils rentreraient au travail, tous les employés à l'intérieur sortiraient, sans exception.

À la suite de cela, il m'a répondu qu'une assemblée pouvait défaire la résolution prise à une assemblée antérieure, en me disant que le seul moyen était d'aller les rejoindre sur la ligne de piquetage pour faire plier la compagnie. Je lui ai répondu que, pour être honnête, j'en parlerais, mais qu'il n'y avait aucune possibilité que les employés sortent, ayant connu toutes les difficultés pour entrer au travail, et ce fut d'ailleurs la réponse.

Parlons des efforts entrepris par le député, M. Élie Fallu, à qui j'avais écrit au début du conflit et qui n'avait pas donné de réponse à la lettre recommandée que je lui avais fait parvenir, sauf en ce qui a trait à mon appel téléphonique, son secrétaire m'ayant répondu que M. Élie Fallu serait prêt à nous recevoir à son bureau, chose que j'ai faite, accompagné d'un membre du comité, Suzanne Labelle et de deux employés, Clarisse Rodrigue et Donat Lauzon.

Après discussion, il nous a demandé ce que nous attendions de lui. Nous lui avons demandé de produire un article en ce qui concerne tous les employés à l'intérieur de la Commonwealth Plywood, de rendre public que nous n'étions pas des scabs. Il nous a répondu qu'il était trop surveillé, qu'il y avait trop de politique dans ce conflit et a même ajouté qu'il avait plus peur du conflit de la Commonwealth Plywood que de celui de la Kenworth. Par la suite, j'ai reçu des appels téléphoniques de M. Élie Fallu. Il me demandait de m'asseoir à une table et de négocier avec la CSN. Ma réponse fut que la CSN était intéressée à s'asseoir et négocier avec les gens de l'intérieur, de mettre sur papier, noir sur blanc, ce que la CSN désirait vraiment négocier. Sur ces mots, il me répondit qu'il ne fallait pas attendre que ça aille aussi mal qu'en Italie et qu'il y ait un enlèvement. Tout ça se discutait dans la période où Aldo Moro fut enlevé. Il n'y a pas eu de suite à ces appels téléphoniques.

Une lettre recommandée fut envoyée au premier ministre, René Lévesque, dont je vous fait lecture. "Honorable René Lévesque, premier ministre, Edifice "J", cité parlementaire, Québec. Honorable premier ministre, depuis des mois, on parle du conflit à la Commonwealth Plywood. La compagnie donne sa version, la CSN donne sa version, les juges donnent leur version, les politiciens donnent leur version, mais personne n'a pensé à demander la version de ceux qui sont le plus directement concernés, c'est-à-dire les hommes et les femmes qui travaillent à la Commonwealth Plywood. "Nous sommes des citoyens qui paient leurs taxes et nous sommes des travailleurs. Nous pensons que nous devrions au moins avoir autant

de droits que ceux qui n'ont pas accepté le vote, que nous avons pris à la majorité dans une assemblée parfaitement régulière, de rentrer au travail et de signer une convention collective. Il y a une limite à se faire traiter de scabs par des gens qui ont mal digéré que nous ayons une assemblée et choisi de retourner au travail au lieu de les appuyer pour faire une grève illégale. "Nous avons négocié point par point une convention collective dans laquelle nous avons obligé l'employeur à nous faire beaucoup de concessions. C'est parce que c'était une meilleure convention que la précédente que nous l'avons adoptée. Une fois la convention adoptée et signée, tout le monde doit la respecter et les vrais scabs sont ceux qui nous attaquent avec des billes d'acier, peinturent nos voitures, crèvent les pneus, brisent les vitres de nos maisons, en plus de menacer nos familles pour nous empêcher de gagner notre vie. "Il est inacceptable que des gens essaient de nous priver de notre droit de travailler dans une usine où plusieurs d'entre nous travaillent depuis 10, 20 et même 30 ans et que certains ont aidé à bâtir. "Vous n'avez qu'à venir à Sainte-Thérèse et à interroger la population. Vous allez savoir qui sont les voyous et les faiseurs de trouble professionnels et qui sont les citoyens honnêtes et respectés qui travaillent à la Commonwealth Plywood. "Nous sommes syndiqués depuis pas mal plus longtemps que les "boss" de la centrale et nous n'avons pas de leçon de syndicalisme à recevoir de ces gens. Nous trouvons que cette situation a assez duré et nous pensons que le gouvernement devrait intervenir pour faire respecter nos droits sans qu'on soit obligés, nous aussi, d'aller occuper les bureaux des ministres et des députés".

Nous avons joint à cette lettre les signatures des travailleurs de Commonwealth Plywood.

M. Bellemare: Avez-vous eu une réponse?

M. Lévesque (Ernest): J'y viens. Une deuxième lettre lui fut envoyée, faute de réponse à la première.

M. Bellemare: Ah!

M. Lévesque (Ernest): Je vous fais la lecture de cette deuxième lettre. "Honorable premier ministre. "Suite à la lettre recommandée que nous vous avons fait parvenir en date du 25 janvier 1978, nous nous permettons d'insister auprès de votre gouvernement afin de recevoir une réponse d'ici peu. "Vu les circonstances, l'intervention que nous vous demandons est essentielle pour nous tous. Vous ne pouvez décevoir et refuser de l'aide que 95 travailleurs légitimes de Commonwealth Plywood désirent recevoir. Nous nous sommes tournés vers vous confiants d'obtenir votre appui, avant de rendre publique le 8 février 1978 notre lettre du 25 janvier 1978. "Nous réitérons notre demande et vous remercions de votre attention."

M. Bellemare: De quelle date, cette lettre?

M. Lévesque (Ernest): Le 1er février 1978. Et à ces deux lettres, seul un appel téléphonique m'est parvenu. Je ne peux assurer si cela venait vraiment du bureau de M. Lévesque. Cet appel fut plutôt surprenant. Vu les actes de violence et les difficultés d'entrer au travail, on m'a demandé ce que j'attendais du premier ministre. Je lui ai répondu que ce n'était pas à moi à prendre les dispositions pour régler ce conflit de travail. Il m'a alors répondu que tout était devant les tribunaux et que cela étant terminé, il ramasserait les pots cassés et verrait ce qu'il pourrait faire.

Je dois mentionner que je ne suis pas sûr du nom de celui qui m'a appelé se disant du bureau du premier ministre. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, cela pourrait être un M. Dubé.

Je dois vous mettre au courant que nous avons fait parvenir des lettres semblables au ministre de la Justice, M. Marc-André Bédard et au ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, Pierre-Marc Johnson et que la réponse ne fut pas meilleure.

Avant que vous me demandiez ce que j'attends de cette commission parlementaire, je vais vous le dire en toute franchise. Si vous trouvez qu'il y a présentement suffisamment de gens au Québec qui reçoivent de l'assurance-chômage et de laide sociale, à vous de prendre les moyens pour qu'une centaine d'autres personnes employées à la Commonwealth Plywood ne s'ajoutent pas à cette liste.

Si vous désirez que la concurrence entre syndicats et représentants syndicaux ne s'exerce pas dans le sens que celui qui est reconnu comme ne respectant aucune loi, encourageant la violence et posant des gestes criminels est le meilleur sans avoir à s'inquiéter d'être mis en prison, que le ministre de la Justice le dise donc publiquement et nous pourrons, nous aussi, faire les efforts nécessaires pour faire face à cette concurrence.

Je vous remercie de m'avoir invité à participer à cette commission parlementaire et j'ose espérer que le grand public de cette province sera renseigné honnêtement de ce qui s'est passé au cours de toutes les séances de cette commission.

Si vous avez des questions à me poser, je suis ici pour vous répondre.

Le Président (M. Cardinal): Je vous remercie M. Lévesque. Justement, vous me précédez. J'avais l'intention de demander aux membres de la commission s'ils avaient des questions à vous poser et si vous étiez prêt à y répondre.

Je commence donc par le côté ministériel et ensuite les oppositions.

M. le ministre.

M. Bisaillon: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, Une question de...

M. Bisaillon: C'est qu'il y a trois personnes qui sont appelées comme témoins. Je voudrais savoir si de la part des deux autres témoins, il y avait aussi des déclarations préliminaires.

M. Johnson: Je n'aurais pas d'objection à ce qu'on les entende tout de suite. Je pense qu'il serait peut-être plus simple tout un bloc.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Est-ce que, soit Mme Grignon, soit M. Thériault ensuite... Mme Grignon, avez-vous quelque chose à déclarer?

Mme Grignon: Oui.

Le Président (M. Cardinal): Bon alors, la commission est d'accord pour vous entendre.

Mme Hélène Grignon

Mme Grignon: Je suis mariée et mère de deux garçons: un de onze ans et l'autre de huit ans. Avant mon mariage, j'ai travaillé une première période d'environ 18 mois pour la compagnie Commonwealth Plywood de Sainte-Thérèse. J'ai travaillé une deuxième période de six mois pour cette compagnie une fois mariée et après avoir eu mon premier enfant, mais ce dernier étant très souvent malade, j'ai dû mettre fin à cet emploi. (11 heures)

Après cinq années sans travailler à l'extérieur et trois ans après avoir eu mon dernier enfant, désirant de nouveau travailler à l'extérieur et puis que mon mari, Gilles, travaillait à la compagnie de pianos Willis de Sainte-Thérèse, depuis le 12 mars 1962, j'ai donc pu obtenir un emploi à cet endroit où j'ai travaillé pour une période d'environ deux ans. Puis, j'ai laissé cet emploi pour travailler comme vendeuse dans un magasin de la région. Le 19 mai 1976, ayant une possibilité de retourner travailler à la Commonwealth Plywood durant des heures de travail qui me permettaient d'avoir plus de temps disponible pour m'occuper de mes enfants, j'ai donc laissé ce travail de vendeuse pour retourner travailler chez Commonwealth Plywood, où je travaille toujours présentement.

Avant que je ne laisse mon emploi à la compagnie Willis, de Sainte-Thérèse, en novembre 1975, j'ai eu le temps de connaître un prêtre du nom de M. Jules Théoret, qui est devenu un employé de cette même compagnie le 22 août 1974, mais ce n'est en fait qu'une année après son entrée au service de cette compagnie qu'il a laissé savoir aux ouvriers de cette entreprise qu'il était prêtre. Au cours de toute cette période où j'ai travaillé pour la compagnie Commonwealth Plywood, j'ai été membre du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord. J'ai aussi été membre de cette union au cours de la période où j'ai travaillé à la compagnie de pianos Willis. Au cours de ma période d'emploi à cette dernière compagnie, durant cette même période, c'est mon mari, Gilles, qui était président du comité pour l'Union internationale des rem- bourreurs de cette usine. Même si je ne travaille plus à cette compagnie, à la compagnie de pianos Willis, à la toute fin de l'année 1975, au début de l'année 1976, parce que mon mari y travaillait et était président du comté de l'union, je fus personnellement au courant que ce prêtre, Jules Théoret, qui était aussi le président de la Société nationale des Québécois pour la région de Saint-Jérôme-Sainte-Thérèse, a fait imprimer, sans aucune autorité et en dehors de la connaissance du comité exécutif de l'union et de mon mari, qui était le président de l'union pour cette usine, par les éditions Étendard qui imprime le journal Choc de la Société nationale des Québécois, un feuillet de propagande. J'ai en ma possession une photocopie du document auquel je viens de faire allusion et j'aimerais vous le remettre, M. le Président, pour que vous le distribuiez à qui de droit.

Le Président (M. Cardinal): Merci, madame. M. Thériault. Est-ce que vous avez terminé, madame?

Mme Grignon: Non.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Je croyais que vous aviez terminé. Continuez.

M. Pagé: M. le Président, est-ce que je pourrais vous demander si ce document portait sur le conflit de la Commonwealth Plywood?

Mme Grignon: Oui.

M. Thériault: Oui, indirectement.

Le Président (M. Cardinal): C'est un document que vous produisez pour le bénéfice de la commission. Merci.

Mme Grignon: Les feuillets de propagande étaient distribués par ses amis non employés de la compagnie de pianos Willis aux portes de cette usine à la sortie des employés du travail. Il a lui-même distribué ce même feuillet de propagande au sous-sol de l'église de la paroisse Sacré-Coeur, de Sainte-Thérèse, quelques semaines plus tard, aux membres du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs qui étaient déjà arrivés dans cette salle avant que ne commence l'assemblée régulière de ce local, et ce, toujours sans aucune permission ou autorisation du président du local, M. Donat Thériault, ou d'aucun autre des six membres du comité exécutif de l'union. Ce fut là le commencement du travail de maraudage CSN par Jules Théoret à la compagnie de pianos Willis qui s'est continué par une campagne de salissage contre mon mari et contre lequel, à la première assemblée spéciale tenue pour les employés de cette usine, ce même Jules Théoret et un groupe de ses amis ont réussi à faire adopter un vote de non-confiance et exiger sa démission comme président du comité de l'union pour cette usine pour le remplacer évidemment par ce même Jules Théoret. Au cours des semaines qui ont suivi la

campagne de maraudage qui s'est soldée par un changement d'allégeance syndicale des employés de cette entreprise du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs au Syndicat des employés de Willis-CSN, mon mari s'est fait écoeurer jusqu'à ce qu'il laisse son emploi qu'il aimait bien et ce, après quinze ans de service à cette même entreprise. Au cours du mois de juillet 1977, une compagne de travail m'informait qu'une assemblée serait tenue samedi matin, à huit heures, dans une salle attenante de l'église de la paroisse mère de Sainte-Thérèse dans le but de remplacer l'Union internationale des rembourreurs à la Commonwealth Plywood par la CSN. Je me suis rendue à cette assemblée où il y avait neuf personnes présentes en plus de moi-même, trois employés de sexe féminin et trois de sexe masculin, tous à l'emploi de la Commonwealth Plywood. Toujours le même Jules Théoret, Ghislain Hallé et un autre individu dont je ne connais pas le nom se sont dits les représentants de la CSN. Le premier qui a pris parole a été Jules Théoret qui a dit que j'étais l'épouse de Gilles Grignon, qui lui avait fait des problèmes à la Compagnie Willis, et que nous étions des amis de Thériault et de l'Union internationale des rembourreurs. Il a demandé aux personnes présentes si elles étaient prêtes à me laisser assister à leur assemblée ou si elles désiraient me mettre dehors. Dès que Jules Théoret eut obtenu la réponse qu'il désirait, il m'a invité à m'en aller. J'ai alors dit que l'invitation à cette assemblée avait été faite aux employés de la Commonwealth Plywood, que j'étais une employée de cette compagnie et que je n'avais pas l'intention du tout de m'en aller, que je resterais pour assister à cette assemblée. C'est alors que Ghislain Hallé m'a demandé, à son tour, de m'en aller. Je lui ai répondu qu'il serait obligé de me sortir par la force. Alors, il a dit: Tu vas sortir. À ce moment-là, Jules Théoret a proposé de remettre l'assemblée et quelques personnes sont sorties de la salle. D'ailleurs, c'est aussi ce que j'ai fait moi-même. Cependant, je dois admettre que je me suis fait prendre comme une poire, car dès que je fus rendue de l'autre côté de la rue, les personnes sorties comme moi de cette salle y sont revenues en vitesse, alors que, lorsque j'ai voulu le faire moi-même, déjà la porte était verrouillée de l'intérieur pour m'empêcher d'y pénétrer.

En aucun temps, avant le mois d'octobre 1977, je n'ai été sollicitée ou m'a-t-on offert de devenir membre du syndicat de la Commonwealth Plywood-CSN, mais, le 16 septembre 1977, mes compagnes et compagnons de travail de l'équipe du soir, comme moi-même, nous n'avons pu travailler comme à l'ordinaire. Le travail que nous terminions normalement et qui était commencé par l'équipe régulière du jour n'était tout simplement pas accompli, ceci faisant suite à une mise à pied remise le 9 septembre 1977 à 118 des 223 employés au service de la compagnie à cette date.

En raison de ce changement draconien, l'équipe du soir était discontinuée, j'avais été avisée que j'étais transférée à l'équipe régulière du jour, commençant à 7 heures le matin du 19 septembre 1978. Ce jour-là, il y avait, à l'entrée de l'usine, une trentaine des employés mis à pied de cette compagnie qui m'ont interpellée lorsque je suis entrée sur le terrain de l'usine en me qualifiant de présidente de l'Union internationale des fourreurs. Ce même soir, à 17 heures, j'ai quitté l'usine en automobile, accompagnée de mon mari venu me chercher dans la cour de cette usine. J'ai constaté alors qu'il ne restait plus devant l'usine que 5 ou 6 personnes du même groupe que celui qui se trouvait là le matin même.

Le mardi matin, je suis entrée au travail à 7 heures, tel que requis. Je n'ai pas semblé attirer l'attention de la dizaine de grévistes tout au plus, à ce moment-là, qui entouraient deux policiers de Sainte-Thérèse et qui semblaient avoir une conversation très animée avec ces derniers. Une fois rendue à l'intérieur, la compagne qui travaillait avec moi le jour précédent, une dame Larocque, est arrivée au travail tout énervée, me disant qu'elle venait de se faire bousculer et de recevoir des coups de pied parce qu'elle n'avait pas accepté d'acquiescer à leur demande de ne pas entrer au travail, ainsi que les autres employés. Nous étions exactement douze, qui avions presque tous reçu des coups ou des menaces pour ce qui leur arriverait le soir à 17 heures lorsqu'ils allaient sortir de l'usine. Ils étaient évidemment nerveux et incapables de travailler normalement, ce qu'ils ont déclaré au contremaître.

À 17 h 30, étant donné qu'il n'y avait pas de grévistes devant l'usine à ce moment-là, nos contremaîtres nous ont conseillé de retourner chez nous et d'y rester jusqu'à nouvel ordre. À la sortie de l'usine, mes compagnes et compagnons de travail, ainsi que moi-même, sommes tous allés ensemble au bureau de l'assurance-chômage où on nous a remis des formules à remplir, mais en nous avisant que nous ne pourrions probablement pas recevoir de prestations d'assurance-chômage, étant donné que nous n'étions pas mis à pied et qu'il y avait conflit ouvrier. Cette réponse nous a été confirmée par écrit quelque temps plus tard.

Deux jours plus tard, soit le 22 septembre 1977, après avoir rencontré et discuté avec un compagnon de travail, Luigi De Luca, de ce problème de la Commonwealth Plywood, ce dernier m'ayant dit qu'il allait téléphoner à M. Thériault pour lui demander de le rencontrer et discuter ensemble de toute cette affaire, j'ai appelé ce dernier pour lui demander s'il avait reçu un appel téléphonique de Luigi De Luca. M. Thériault m'a dit oui, ajoutant que si je l'appelais moi-même pour lui faire la même demande de rencontre, il devait aussi me faire la même réponse, que s'il y avait des employés de la Commonwealth Plywood qui désiraient le rencontrer et lui parler au sujet de cette compagnie, la convention collective de travail avec cette entreprise ne se terminant que le 30 septembre 1977, s'ils n'avaient pas démissionné comme membres de l'Union internationale des rembourreurs, local 388, ils seraient les bienvenus à assister à la prochaine assemblée régulière de l'union qui se tiendrait au sous-sol de l'église de la paroisse Sacré-Coeur de Sainte-Thérèse, le lundi

26 septembre 1977. Alors, ces employés pourraient lui parler en présence des membres de l'exécutif du local 388 et de tous les membres présents, de tous les groupes de la région syndiqués avec l'Union internationale des rembourreurs.

Au cours des quelques jours qui ont suivi, j'ai eu l'occasion de converser avec quelques compagnes et compagnons de travail. Je leur ai fait part de mon appel téléphonique à M. Thériault et de la réponse de ce dernier. Je suppose qu'eux aussi ont fait de même, car, le lundi soir suivant, 30 septembre 1977, nous étions une quarantaine d'employés ou ex-employés de la Commonwealth Plywood dans cette salle d'assemblée sur un total d'au moins 100 personnes présentes.

Avant même que cette dite assemblée ne débute, M. Thériault, président du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord, a été informé qu'il se trouvait dans cette salle deux permanents de !a CSN dont les noms sont M. Loyer et M. Kieffer, entourés d'une dizaine d'ex-employés de la Commonwealth Plywood.

M. Thériault leur a demandé s'ils étaient membres de l'Union internationale des rembourreurs. À cet instant, Serge Loyer a répondu qu'il était permanent de la CSN et qu'il était là pour représenter les employés de la Plywood. M. Thériault lui a alors dit que cette assemblée n'en était pas une pour les employés de la Commonwealth Plywood, mais bien plutôt une assemblée régulière, dont la date avait été fixée une année à l'avance et une assemblée des membres de tous groupes de la région, syndiqués avec l'Union internationale des rembourreurs, local 388, pour traiter de toutes les affaires administratives de l'union.

Après avoir permis audit Serge Loyer de constater par lui-même qu'il y avait dans la salle des membres d'au moins dix usines différentes de la région, M. Thériault leur a demandé une fois de plus de quitter la salle, mais ces derniers ont de nouveau refusé de sortir.

C'est à ce moment-là qu'un ex-employé de la Commonwealth Plywood qui entourait les deux permanents de la CSN — son nom était Marc Blanchette — a pris une patte de chaise en métal qui était brisée, menaçant d'arranger tous ceux qui voudraient essayer de les faire sortir. Voyant cela, M. Thériault a recouru aux services de la police de Sainte-Thérèse.

Les policiers de Sainte-Thérèse sont venus dans la salle et ont parlementé poliment, au moins une heure, sinon plus, avec les permanents de la CSN et leur petit groupe de supporteurs, avant que ceux-ci ne décident enfin de quitter la salle.

Dès le départ des policiers et pas plus de quinze minutes plus tard, ils étaient de retour. Ce que voyant, M. Thériault a avisé les membres présents qui restaient dans la salle — car plusieurs avaient déjà quitté la salle, vu le temps que la police avait mis pour faire sortir les personnes en question — que cette assemblée régulière du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord était remise à une date ultérieure qui leur serait communiquée en temps et lieu et qu'à cette date, il prendrait les mesures nécessaires pour pouvoir tenir cette assemblée en toute tranquillité.

Le 28 septembre 1977, onze de mes compagnes et compagnons de travail s'étaient rendus à mon domicile pour que l'on discute ensemble des moyens à prendre pour retourner au travail. À un certain moment, il a été question, parce que nous n'avions pas pu discuter avec M. Thériault lors de l'assemblée du 28 septembre, qui avait été remise à une date que nous ne connaissions pas, de tenter de le rejoindre par téléphone et de lui demander de venir nous rencontrer chez moi, ce même jour, chose qu'il a faite.

Après avoir informé M. Thériault que 118 employés avaient reçu, le vendredi 9 septembre 1977, un avis de mise à pied se terminant le vendredi 16 septembre 1977, que les représentants de la CSN n'avaient pas jugé bon de convoquer d'assemblée des employés de la Commonwealth Plywood durant cette période, et que, le lundi matin 19 septembre 1977, un nombre très peu considérable — environ 30 — de ces employés mis à pied avaient tenté de nous convaincre de ne pas rentrer au travail, bien que 40 employés non mis à pied, sur un total de 105, fussent quand même entrés... Au cours de la matinée, des permanents de la CSN, avec un comité d'employés mis à pied, étaient venus donner un ultimatum à nos employeurs selon lequel ils devaient reprendre immédiatement au travail tous les employés sans exception, sans quoi il n'y aurait plus un seul employé qui entrerait et il y aurait du trouble.

Au cours de l'après-midi, ces représentants de la CSN avaient tenu une assemblée alors que 40 d'entre nous étions au travail. Un nombre encore plus considérable de 65 autres employés non mis à pied, comme nous, étaient tout simplement retournés chez eux, parce qu'ils avaient peur, ce qui fait plus de 100 des employés concernés qui n'ont pas été convoqués et n'ont pu assister à cette assemblée. C'est en fait au cours de cette assemblée qu'un vote de grève a été pris, alors que la grève était déjà commencée depuis 7 heures le matin.

À la suite des insultes et des injures que nous avons tous reçues, des coups que plusieurs d'entre nous ont reçus, et du fait que nous ne pouvions recevoir de prestations d'assurance-chômage, notre intention ferme était de prendre les grands moyens pour retourner au travail.

De plus, lorsque nous téléphonons au surintendant de l'usine pour nous plaindre et demander de l'aide, il nous répond que l'usine n'est pas fermée par l'employeur et qu'il y a du travail pour 105 personnes. Nous lui avons demandé s'il pouvait nous aider et nous lui avons fait savoir que nous aimerions rester avec l'Union internationale des rembourreurs, que plusieurs employés avaient signé pour la CSN parce qu'ils avaient reçu des menaces s'ils refusaient de signer.

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! (11 h 15)

Mme Grignon: M. Thériault nous a alors dit, après nous avoir posé un grand nombre de questions: Étant donné que ceux qui disent avoir reçu des menaces pour les forcer à signer pour la CSN ne semblent pas vouloir venir déclarer sous serment devant un commissaire-enquêteur du ministre du Travail en présence des représentants de la CSN disant qu'ils ont peur de se faire casser les jambes, par conséquent, il ne peut faire de miracle et nous devons oublier immédiatement toute possibilité que l'Union internationale des rembourreurs puisse continuer à représenter les employés de la Commonwealth Plywood, puisqu'il était évident que le syndicat de la Commonwealth Plywood (CSN) obtiendrait son accréditation tôt ou tard, ajoutant que, de toute façon, un syndicat ou une union n'est jamais meilleur que ses membres, ses officiers et ses représentants ou permanents. Considérant ce que nous lui avons appris, notre problème ne lui semblait pas être le syndicat comme tel, mais bien plutôt ses permanents et ses officiers.

M. Thériault a donc suggéré, à nous de la base, de prendre en main le syndicat qui serait accrédité, car ce serait notre syndicat à nous, et de prendre les moyens par la suite pour nous débarrasser des permanents et des officiers révolutionnaires et dictateurs qui ne feraient pas notre affaire.

Nous avons donc demandé à M. Thériault s'il pouvait au moins personnellement nous conseiller et nous aider à atteindre ce but. Ce dernier nous racontait ce qu'il avait fait à Chambly à la fin de l'année 1974, début de l'année 1975, dans un cas à peu près identique au nôtre pour les employés de la compagnie Gregg Cabinets.

Nous avons tous été tellement intéressés que nous lui avons demandé immédiatement de bien vouloir accepter de faire la même chose pour nous.

M. Thériault nous a alors répondu que si nous étions seulement douze intéressés à son aide, il ne pourrait nous être d'une grande utilité.

Je lui ai alors personnellement répondu que je n'avais pas suffisamment de chaises pour asseoir tous ceux qui pourraient être intéressés et de revenir le lendemain après-midi, chose qu'il accepta de faire.

Donc, le 29 septembre 1977, au cours de l'après-midi, nous avons rencontré de nouveau M. Thériault à ma résidence. Cette fois, nous étions 35 des employés non mis à pied de la Commonwealth Plywood. Les 23 nouveaux présents ont tous, comme nous, le jour précédent, été très intéressés par le récit de M. Thériault se rapportant à ce qu'il avait réussi à accomplir pour les employés de la compagnie Gregg Cabinets. Ils ont été unanimes à lui demander de faire la même chose pour nous, ce dernier, disant qu'il était assuré que beaucoup d'autres employés de notre compagnie seraient eux aussi très intéressés s'ils étaient mis au courant de la chose.

M. Thériault a alors suggéré de tenter de rejoindre le plus grand nombre possible des employés concernés, qu'il serait de nouveau à

Sainte-Thérèse lundi soir prochain, le 3 octobre 1977, pour reprendre l'assemblée du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs, perturbée et ajournée avant d'avoir vraiment débuté le jeudi soir, 28 septembre 1977.

Une fois cette assemblée terminée, il a dit être disponible pour nous rencontrer. Après s'être établi lui-même un programme d'action et avoir rejoint le plus grand nombre possible des employés concernés de la Commonwealth Plywood, nous étions 55, le lundi soir, 3 octobre 1977, au sous-sol de l'église de la paroisse du Sacré-Coeur. Juste avant que ne prenne fin l'assemblée du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs, nous avons demandé la permission de nous servir de leur salle pour tenir une assemblée du groupe d'employés de la Commonwealth Plywood, permission qui a été accordée par résolution unanime des membres de l'union présents à leur assemblée.

Nous avons également demandé à M. Thériault, président, et à Mme Simone Larin, secrétaire-correspondante de l'union, s'ils voulaient bien rester, vu leur expérience dans ce domaine, pour nous aider à tenir notre propre assemblée, chose qu'ils ont accepté de faire et qu'ils ont effectivement faite.

Après avoir remercié tous les membres de l'union pour leur geste généreux de nous prêter leur salle, nous leur avons dit qu'ils étaient les bienvenus, s'ils désiraient eux aussi assister à notre assemblée, mais un très petit nombre sont en fait restés.

Photocopie des procès-verbaux de cette assemblée sont disponibles, si vous le désirez.

Le mardi matin, 4 octobre 1977, suivant le programme que nous avions établi, nous nous sommes rendus — nous étions 55 — dans la cour du poste de police, à Sainte-Thérèse, là où un autobus scolaire devait nous conduire tous ensemble au travail. Nous avons attendu cet autobus assez longtemps pour finalement apprendre de la dame avec laquelle les arrangements pour la location de l'autobus avaient été faits que ces chauffeurs d'autobus étaient membres de la CSN et qu'ils refusaient de nous conduire au travail.

Nous avons donc téléphoné au surintendant de l'usine, M. Benoît Verville, lui disant que nous étions, à ce moment, 55 prêts à entrer au travail, que nous étions dans la cour du poste de police de Sainte-Thérèse, que nous n'avions pas de moyen de transport, lui demandant s'il était possible de nous en procurer. Alors, il nous dit de rester où nous étions, qu'il s'occupait immédiatement de nous procurer un moyen de transport. En effet, vers 10 h 30, un camion nous conduisit au travail. Depuis cette date, nous sommes entrés régulièrement au travail, à l'exception d'un certain nombre de jours où le nombre de permanents, officiers et de personnes en grève en d'autres endroits, membres de la CSN, de même que les membres de toutes les tendances communistes, des jeunesrévolutionnaires du cégep Lionel-Groulx, tous sympathisants et amis de la CSN, étaient à l'avant comme à l'arrière de l'usine, en si grand nombre

que la violence aurait atteint une intensité telle qu'il aurait pu y avoir des blessures très graves ou même des pertes de vie pour certaines personnes.

Cependant, nous ne sommes pas entrés au travail sans difficulté et sans en subir les conséquences. En ce qui me concerne, je n'ai pas cessé de recevoir des appels téléphoniques pour me traiter de scab et me faire dire que je me ferais tuer. En ce qui concerne mon mari et mes enfants, lorsque ce sont eux qui répondent au téléphone, on leur dit que je suis une maudite scab. D'autre part, mon plus jeune fils a été plusieurs fois ennuyé sur la rue et au restaurant avec cette même remarque, que sa mère était une maudite scab et qu'il lui arriverait un accident. Durant une certaine période, j'ai été ennuyée par un nombre considérable de chauffeurs de taxis et de livreurs de poulet et de pizzas qui prétendaient que j'avais téléphoné pour commander ces services ou ces produits.

Par ailleurs, mon mari a été menacé par certains officiers du syndicat de l'automobile, amis de la CSN, qui disaient qu'ils lui feraient perdre son emploi à la compagnie General Motors de Sainte-Thérèse, si je continuais d'entrer au travail, ce qui a eu pour effet que j'ai eu une conférence au sommet avec mon mari et que j'ai perdu deux semaines de salaire suite à ces menaces. Le 19 octobre 1977, à 0 h 50, un cocktail molotov a été lancé dans la grande fenêtre thermos et les glaces de ma résidence. Selon le dire de la police qui est venue faire enquête, ce cocktail molotov était fait d'une bouteille de trente onces remplie d'huile et de gaz, et d'une mèche qui avait été allumée. Il est heureux, selon la police, que cette mèche se soit éteinte dans sa trajectoire, car notre maison aurait été détruite par le feu. Nous aurions pu, mes enfants, mon mari et moi-même rôtir comme des poulets. Tout ceci eut comme conséquence que depuis cette date, mon plus jeune fils est devenu tellement nerveux qu'il est maintenant impossible de le faire coucher dans sa chambre ou de le laisser seul à la maison, même si ce n'est que pour quelques instants.

De plus, chaque fois — et il y en a eu plusieurs — que j'ai reçu un subpoena des procureurs de la CSN et que j'ai dû me présenter à la cour de Saint-Jérôme, j'ai été ennuyée et insultée par des représentants, officiers membres et sympathisants de la CSN. La même chose s'est encore produite la semaine dernière ici même à Québec à l'extérieur comme à l'intérieur du Parlement, et même dans le salon rouge.

Avant même que vous me demandiez ce que j'attends de cette commission parlementaire, je me permets de vous dire avec franchise et sincérité que si vous trouvez qu'il y a assez de personnes sur l'assurance-chômage et le bien-être social, c'est à vous, je crois, de prendre les moyens pour que nous puissions travailler et gagner notre vie en paix. Si vous avez besoin de coupables en rapport avec ce conflit ouvrier, ne cherchez pas parmi les représentants officiers ou membres de l'Union internationale des rembourreurs ou dans les rangs des ouvriers de la Commonwealth Plywood, pré- sentement au travail, mais plutôt parmi les permanents, officiers et membres de la CSN, du Parti communiste, les jeunes révolutionnaires du cégep Lionel-Groulx.

Je crois que si vous vous en donnez la peine, la chose sera assez facile, si vous considérez que la justice est plus importante que de protéger et de favoriser la grande centrale syndicale CSN, dans le but de gagner des votes que vous n'aurez probablement pas, de toute façon, car vous ne réussirez jamais à satisfaire ces gens qui ne sont intéressés qu'à détruire le système actuel et à prendre le pouvoir.

Je vous remercie de m'avoir invitée et écoutée. Maintenant, si vous avez des questions à me poser, je me ferai un plaisir de vous répondre, si j'en connais personnellement les réponses. Si cette commission parlementaire ne donne pas les résultats que j'espère, j'aurai au moins la satisfaction de savoir que par mon exposé et mon témoignage, le public aura eu la chance au moins de connaître une partie de la vérité.

Le Président (M. Laplante): Merci, mademoiselle. M. le député de Sainte-Marie, c'est parce qu'il y a M. Thériault qui veut...

M. Bisaillon: C'est une question de procédure, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Pardon?

M. Bisaillon: C'est une question de procédure.

Le Président (M. Laplante): D'accord, oui.

M. Bisaillon: Merci. J'aurais voulu savoir, avant d'entendre M. Thériault, s'il était possible que le secrétariat des commissions nous fasse des copies des déclarations de M. Lévesque et de Mme Grignon.

Une voix: Le journal des Débats.

M. Bisaillon: On voudrait les avoir tout de suite. Le journal des Débats, on va l'avoir seulement demain, ce n'est pas très utile.

M. Johnson: Quand cela peut-il être prêt, la transcription?

Le Président (M. Laplante): II serait possible, je crois, par le secrétariat des commissions, de prendre des photocopies, si vous voulez bien les déposer au secrétaire, qui vous remettra l'original par la suite.

Oui, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, j'aurais une question de procédure qui fait suite à l'intervention de M. Lévesque et de Mme Grignon.

Mme Grignon, est-ce que vous êtes venue à titre personnel ou si vous êtes secrétaire d'un syndicat ou quoi?

Mme Grignon: Je suis secrétaire du syndicat des gens de l'intérieur.

M. Pagé: Bon! M. le Président, M. Lévesque nous a dit tout à l'heure qu'il ne représentait ni la CSN, ni l'Union des rembourreurs.

Le Président (M. Laplante): M. le député...

M. Pagé: Non, mais c'est simplement une question de procédure. Je me demande en quoi il peut comparaître avec M. Thériault qui représente l'Union des rembourreurs s'il n'est pas avec lui.

Le Président (M. Laplante): C'est une bonne question, je vais vous laisser finir.

M. Johnson: Excellente question. Comme disent les Français: That's what it's all about.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je vous pose la question purement et simplement. Je voudrais savoir... Écoutez! Depuis le début de nos travaux, on nous dit qu'il y a trois groupes ici. Est-ce qu'on est en présence d'un quatrième groupe? Est-ce que M. Lévesque et Mme Grignon acceptent de comparaître et de témoigner avec M. Thériault sous l'égide du bloc de l'Union des rembourreurs ou si c'est séparé et divisé, ça?

Le Président (M. Laplante): La question est importante et je vais vous dire pourquoi. L'ordre a été appelé de la façon suivante: L'Union internationale des rembourreurs d'Amérique et vous trois êtes venus faire appel au nom de l'Union internationale des rembourreurs. Est-ce que vous maintenez encore que vous venez au nom de ce groupe-là?

M. Bisaillon: M. le Président, est-ce que, à partir même du témoignage de Mme Grignon, je pense, qui vient de nous dire que le groupe des employés qui sont à l'intérieur actuellement de l'usine ont fait appel aux services de M. Thériault comme conseiller, il ne serait pas normal, à ce moment-là, qu'on reçoive, en même temps que M. Lévesque et Mme Grignon, M. Thériault, à titre de conseiller du groupe qui est à l'intérieur et aussi, en même temps, il pourra nous faire le portrait de ce qu'était l'Union des rembourreurs comme syndicat à l'intérieur, avant?

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Il est sûr que lorsqu'on a décline les titres de M. Donat Thériault, on a dit qu'il était vice-président international, président du local 388 des rembourreurs dans l'usine de la Commonwealth Plywood. Il est sûr que c'est cette fonction qu'il occupe présentement, président du local 388 des rembourreurs. Si ce n'est pas ça, qu'il le démente.

M. Donat Thériault

M. Thériault: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le Président. J'ai dit que j'étais vice-président international, directeur canadien de l'Union internationale des rembourreurs qui regroupe 10 000 membres pratiquement au Canada. C'est loin de Commonwealth Plywood.

M. Bellemare: M. Thériault, pour la procédure qu'on est en train d'établir, est-ce que vous êtes de la FTQ ou de l'Union internationale des rembourreurs, point?

M. Thériault: Cela me fait plaisir de vous répondre, M. Bellemare. Les structures de la CSN et de la FTQ sont tellement différentes que dans la CSN, un syndicat CSN ne peut pas être indépendant de la grande centrale de ses fédérations et des ses conseils centraux.

M. Bellemare: M. le Président...

M. Thériault: Mais les unions internationales comme telles n'ont pas à être affiliées à la FTQ.

M. Chevrette: II vous demande si vous l'êtes.

M. Thériault: Donc, ici, au Québec — si vous voulez me laisser le temps de répondre — l'Union des rembourreurs a sept locaux. Il y en a six qui ne sont pas affiliés à la FTQ.

M. Bellemare: M. le Président, pour continuer sur ce point qu'a soulevé le député de Sainte-Marie, est-ce que vous contestez la lettre du 17 mars 1978, signée par M. Fernand Daoust, qui dit que vous êtes un trouble-fête? Le bureau de la Fédération des travailleurs du Québec m'a chargé de vous faire savoir que "nous nous désolidarisons totalement de l'Union internationale des rembourreurs et son principal animateur, Donat Thériault, que la CSN affronte actuellement avec la Commonwealth Plywood".

Il continue ceci: "M. Thériault, qui se sert illégitimement du nom de la FTQ quand bon lui semble, pratique une forme de syndicalisme dont la FTQ se dissocie. Aucun des syndicats locaux desservis par Thériault n'est affilié à la FTQ et cela, depuis plusieurs années. Le seul local de l'Union des rembourreurs qui demeure...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson...

M. Bellemare: Un instant, j'ai fini! Le Président (M. Laplante): Excusez!

M. Bellemare: ... "qui demeure affilié à la FTQ est le local 402, qui groupe 1600 travailleurs d'une vingtaine d'usines à Montréal. Le souci...

Le Président (M. Laplante): M. le député deJohnson, je vous rappelle à l'ordre!

M. Bellemare: Je finis, je finis.

Le Président (M. Laplante): Je vous rappelle à l'ordre!

M. Bellemare: J'ai seulement un mot.

Le Président (M. Laplante): Seulement un moment. Je vous rappelle à l'ordre!

M. Bellemare: "Le souci que les responsables du 402...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Johnson, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: ... "démocratie syndicale... ... syndical auront amené d'ailleurs plusieurs problèmes majeurs avec...

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, deux fois!

M. Bellemare: ... "avec Thériault".

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!

M. Thériault, est-ce que vous acceptez de témoigner comme conseiller de l'Union internationale des rembourreurs d'Amérique?

M. Thériault: M. le Président, j'accepte de témoigner au titre que vous voudrez. (11 h 30)

Le Président (M. Laplante): Ce n'est pas une réponse, monsieur. On vous demande une réponse claire, nette. Vous n'êtes pas dans un...

M. Thériault: Je crois que c'est très clair. Je n'ai pas voulu vous insulter en vous disant cela. Je suis prêt à vous répondre à titre de conseiller et je suis prêt à répondre à titre de représentant de l'Union internationale, aux deux titres.

Le Président (M. Laplante): D'accord. La parole est à vous maintenant, M. Thériault, si vous avez quelque chose à dire. Avez-vous un rapport à faire?

M. Thériault: Dois-je répondre à la question du député de Johnson?

M. Johnson: Pas nécessairement.

Le Président (M. Laplante): Non. Quand viendra le temps, vous pourrez répondre à ses questions. Actuellement, si vous avez un rapport à faire comme...

M. Thériault: Merci, M. le Président. Ayant décliné mes titres...

M. Bisaillon: Vous semblez avoir des copies, M. Thériault.

M. Thériault: Je regrette. Ce ne sont pas des copies que j'ai, et je regrette de vous dire aussi que vous ne pourrez pas avoir ce que j'ai à vous dire, parce que...

M. Bellemare: C'est enregistré!!

M. Thériault: Tant mieux. Je l'espère. Parce que, pour répondre à votre question, je n'ai pas eu le temps de préparer quelque chose même autrement qu'une partie dactylographiée et l'autre partie est seulement un brouillon. J'admets que j'ai de la difficulté à me lire, donc, vous auriez certainement un problème pour me lire.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. Thériault, nous comprenons tout cela et je vous donne la parole.

M. Thériault: J'aimerais tout d'abord vous dire, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Seulement un instant pour les questions de procédure.

D'accord, M. Thériault, vous avez la parole.

M. Thériault: J'aimerais tout d'abord vous dire, M. le Président, qu'à l'invitation que j'ai reçue, de même qu'Hélène Grignon et Ernest Lévesque, de nous présenter ici la semaine dernière, nous sommes venus et, à ce moment, je n'avais aucune note, aucun exposé, je n'avais rien de prêt. Je suis venu tout simplement dans le but de répondre à des questions, n'ayant aucune expérience des commissions parlementaires, n'ayant aussi aucune expérience de ce qui peut se produire lorsqu'on vient à une commission parlementaire. Hélène Grignon vous a déjà dit les insultes, les provocations, et les menaces que nous avions reçues, non seulement à la porte, à l'intérieur du parlement, mais même dans le salon rouge.

Si vous voulez m'entendre, j'aimerais que vous puissiez le faire sans que j'entende toutes sortes de discours dans mon dos et sans continuer à se faire écoeurer comme on se fait écoeurer depuis qu'on est arrivé même ce matin.

Le Président (M. Cardinal): Vous avez mon entière protection et vous savez, M. Thériault, que j'ai toujours rappelé, tant les députés que les personnes présentes dans cette salle, à l'ordre. Évidemment, je ne peux retenir chacune des personnes.

M. Thériault: Merci, M. le Président.

M. Pagé: Vous lui avez demandé sa protection, mais il n'est pas fort.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Portneuf.

M. Thériault, vous avez la parole.

M. Thériault: Après avoir décliné mes titres, j'aimerais ajouter, cependant, que ces titres et

fonctions incluaient jusqu'à tout récemment la responsabilité administrative de cette union au Québec.

Cependant, depuis le début de mai 1978, un poste de directeur québécois a été créé et, depuis cette date, je n'ai plus cette responsabilité administrative de l'union au Québec.

Je suis de plus depuis 30 ans président du local 388 de cette union qui regroupe présentement les syndiqués de quinze usines ou groupes différents, soit plus de 1000 membres, pour la région du Nord de Montréal.

Vous m'excuserez, M. le Président. J'ai l'inconvénient d'être sorti de chez le dentiste ou le denturologue il y a très peu de temps et j'ai de la difficulté à garder mes dents dans la bouche.

Le Président (M. Cardinal): Cela va très bien pour le journal des Débats. Continuez.

M. Thériault: Je voudrais tout d'abord vous dire que j'ai été extrêmement surpris de l'invitation faite à l'Union internationale des rembourreurs et à moi-même de venir participer à cette commission parlementaire car, jusqu'à ce jour, nous avons été passablement salis, mais ignorés dans ce conflit de la Commonwealth Plywood et ce, depuis son début, non seulement par le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre lui-même, mais aussi par son sous-ministre adjoint Yvon Blain, aussi bien que tous les autres fonctionnaires qu'il a assignés à ce dossier.

Cependant, mon nom et celui de l'union que je représente ont maintes fois été évoqués dans de nombreuses déclarations publiques qu'ils ont faites depuis le début de ce conflit qui dure, malheureusement, depuis plus d'un an. Ils l'ont été encore des dizaines de fois au cours de cette première journée de séance de cette commission parlementaire le 26 septembre 1978, alors que je n'ai même pas eu un seul instant pour me faire entendre, mais beaucoup de temps pour me faire insulter.

On me dira probablement que c'est faux, car j'ai été entendu par le conseil spécial de médiation nommé par le ministre Pierre-Marc Johnson et présidé par son sous-ministre adjoint Yvan Blain. Laissez-moi vous dire cependant que si j'ai été entendu par ce conseil spécial de médiation, ce n'est pas parce qu'il désirait le faire, mais bien plutôt parce que je leur ai été imposé par les membres du comité du Syndicat de la Commonwealth Plywood, employés de cette compagnie et présentement au travail, car ils avaient été les seuls invités et ils refusaient de se présenter devant ce conseil de médiation à moins d'être accompagnés par un avocat ou par moi-même.

Parlant de ce conseil spécial de médiation, je dois vous dire que je trouve très étrange que, lorsqu'il s'agit d'une séance d'audition devant un commissaire du travail ou devant le Tribunal du travail et même ici en commission parlementaire, l'on juge utile et nécessaire d'enregistrer tout ce qui est dit et qu'à ce si important conseil spécial de médiation on n'ait pas jugé utile et nécessaire d'en faire autant. Est-ce que l'on voulait fabriquer un rapport maison qui pourrait servir à fabriquer des coupables pour que les représentants du ministère du Travail ne soient pas obligés d'admettre leur impuissance et leur incapacité de régler ce conflit?

M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, sur une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: M. Thériault, en ce moment, s'adonne à des allusions à l'égard des fonctionnaires de mon ministère que je ne peux pas faire autrement que défendre. Si M. Thériault a des accusations précises à porter contre les fonctionnaires du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, je lui demanderai de le faire et je lui demanderai de ne pas procéder par allusions. Je ne laisserai pas M. Donat Thériault ternir la réputation d'Yvan Blain et de Raymond Désilets à cette table ou ailleurs.

M. Bellemare: II pourrait écrire de fausses cartes...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! M. Thériault, vous pouvez continuer.

M. Thériault: Je peux continuer, M. le Président?

Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Thériault: Et je n'ai pas à répondre au ministre?

Le Président (M. Cardinal): Non. C'est au président à répondre.

M. Bellemare: Vous en aurez assez tout à l'heure à répondre.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît. M. Thériault.

M. Thériault: Ou pour le régler, de trouver les coupables au sein des officiers et permanents de la grande centrale CSN et ainsi déplaire énormément à grand-papa Pepin et à papa Rodrigue. N'est-ce pas aussi dans ce même but que le sous-ministre adjoint Yvan Blain a exigé que je le rencontre seul avant de le rencontrer de nouveau avec les membres du comité du syndicat de la Commonwealth Plywood?

Parlant maintenant du rapport dudit conseil spécial de médiation, je dois vous dire qu'il renferme des déclarations qui me sont attribuées, qui sont fausses et fabriquées de toutes pièces, que je ne leur ai jamais faites...

M. Bellemare: C'est antiréglementaire.

Le Président (M. Cardinal): Un instant!

M. Thériault: ... ou qu'ils ont modifiées selon leur interprétation des faits de façon à atteindre les fins et les buts désirés.

M. Bellemare: À l'ordre, le ministre. À l'ordre!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Thériault: Laissez-moi vous indiquer au départ qu'en ce jour du 26 septembre 1978, dans ce majestueux salon rouge, alors qu'il donnait, à la demande du ministre du Travail, la chronologie des événements de ce conflit de la Commonwealth...

M. Pagé: J'invoque le règlement.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. Thériault! M. le député de Portneuf, sur une question de règlement.

M. Pagé: M. le Président, je ne voudrais pas qu'on s'embarque dans une procédurite sur cette question de règlement, mais il y a quand même des convenances qu'il faut respecter. M. Thériault fait allusion aux travaux de la commission de la semaine dernière. Je conviens qu'à juste titre ou non, le président de la commission, soit vous-même au début de nos travaux, vous avez donné l'immunité parlementaire — tout cela pourrait être discutable — aux intervenants, mais, M. le Président, je ne crois pas qu'il soit possible ni acceptable qu'un intervenant ce matin, en relevant des événements dans leur chronologie ou autrement, mette en cause les fonctionnaires du ministère du Travail, qu'il porte des accusations comme celles-là. En fait, là-dessus, je dois vous dire que j'abonde dans le même sens que le ministre et que si M. Thériault a des accusations spécifiques à porter ou quoi que ce soit, il y a d'autres endroits pour le faire, et je ne voudrais pas que notre commission... on a déjà assez de problèmes à se comprendre avec le micmac de la procédure, des cartes, des votes et des réunions, sans s'embarquer dans des accusations, M. Thériault. C'est mon commentaire. C'était l'essentiel de ma question de règlement. Qu'on en vienne au conflit et qu'on mette de côté la violence et les ceci les cela, les pneus crevés, etc., et qu'on parle du problème et du fond du problème. Cela fait déjà deux heures ou presque qu'on est ici. C'est le fond du problème qu'on veut discuter et on veut voir pour tenter d'en dégager, si c'est possible, des solutions et des avenues de règlement. C'est l'essentiel de ma question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Merci, M. le député de Portneuf. J'abonde dans votre sens. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, je ne peux pas laisser passer cette accusation formelle que vient de porter M. Thériault contre le conseil de médiation. Il vient de dire qu'il a tronqué les textes, tronqué les déclarations de M. Thériault et cela, M. le Président, est contenu dans un mémoire que tout le monde a pu lire et avoir et personne à cette table n'a eu un mot contre le conseil de médiation de M. Blain ou de M. Désilets. Je pense, M. le Président, que le témoin n'a pas le droit d'accuser un conseil de médiation comme celui-là, qui a siégé avec toute la connaissance du problème, de poser un geste, une accusation formelle contre M. Blain, contre le conseil de médiation. Je n'endurerai pas ça, M. le Président, de la part d'un témoin.

Qu'il dise qu'on a erré, mais une accusation aussi directe que celle qui vient d'être portée contre le conseil de médiation... Je connais assez M. Blain, je connais assez son travail pour dire qu'il n'y a jamais eu, dans le rapport que j'ai lu, que j'ai commenté et que j'ai souligné partout, une seule fois où j'ai pu détecter une lacune quant à la décision, aux recommandations qui ont été prises.

M. le Président, vous ne pouvez pas permettre ça de la part d'un témoin.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le député de Johnson, M. le ministre, M. le député de Portneuf, M. Donat Thériault...

M. Vaillancourt (Jonquière): Le député de Sainte-Marie avait demandé la parole.

M. Bisaillon: Bien avant tout le monde.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Simplement, c'est parce que je ne vous ai pas vu. M. le député de Sainte-Marie. Après, je veux quand même, comme président, me prononcer sur cette question.

M. Bisaillon: Je pense qu'il serait effectivement intéressant que vous écoutiez ce que j'ai à dire, parce que c'est un son de cloche différent que j'ai à apporter. J'aurais été tenté, effectivement, de laisser M. Thériault continuer la lecture de son texte. Je pense que c'est susceptible d'éclairer la commission sur la crédibilité du témoin, de même que sur sa bonne foi.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre! Très calmement et très sérieusement, je dois indiquer à M. Thériault que si j'ai mentionné, à la première séance de cette commission, que les députés et les témoins bénéficiaient de l'immunité parlementaire, c'était quand même à certaines conditions. La première des conditions, c'est de dire exactement la vérité, et je n'accuse personne, qu'on ne lise pas entre les lignes, ce ne sont que les lignes qui comptent. Première condition, c'est qu'un témoin ne bénéficie de l'immunité que si, répondant aux questions ou faisant un exposé, il indique vraiment ce qui s'est produit ou quelle est son opinion.

Deuxièmement, l'immunité parlementaire ne permet pas, en commission — et ce n'est pas la première fois que le fait se produit — à un témoin

d'attaquer l'Assemblée nationale, d'attaquer une commission parlementaire, d'attaquer un député ou d'attaquer des fonctionnaires. Vous remarquerez que ce serait trop facile, bénéficiant d'immunité, de lancer des accusations. Je rappelle donc au témoin, même si je veux le protéger, que je dois le retenir, que je le prierais de cesser de porter des accusations en cette salle de la commission parlementaire. M. Thériault, vous avez la parole à ces conditions.

M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je n'ai malheureusement pas de formation juridique, je comprends mal quand même le point de vue qui a été avancé par mon collègue de Portneuf qui a lui-même cette formation, de même que vous. Depuis le début de la commission, il ressort que, dans les premiers témoignages qui ont été entendus, quoique la cause soit sub judice, il y a eu des affirmations qui ont été faites qui peuvent entraîner des conséquences devant les tribunaux. Je ne mets pas en doute la compétence et l'intégrité des fonctionnaires qui ont consulté les parties. On a ajouté tantôt qu'il n'y avait pas eu de paroles prononcées à ce moment-là.

Que M. Thériault fasse des affirmations à son compte, je pense qu'il appartient aux membres de la commission de juger s'ils doivent y donner crédibilité ou non, mais je comprends mal qu'on permettrait à d'autres de faire des affirmations et qu'on ne permette pas à ce témoin de faire ses affirmations, qu'il porte à son compte, dont on peut peut-être douter ou qu'on peut ne pas partager, mais je vois mal qu'on arrête un témoin dans ce qu'il a à dire...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Charlevoix, attention.

M. Mailloux: On a deux poids et deux mesures.

Le Président (M. Cardinal): Non, M. le député de Charlevoix, attention.

M. Mailloux: Deux poids et deux mesures actuellement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Attention, M. le député de Charlevoix, je dois aussi vous rappeler à l'ordre. Il y a une différence entre des affirmations, un récit et des accusations. (11 h 45)

M. Mailloux: II n'y a pas eu d'autres affirmations faites par les premiers témoins?

Le Président (M. Cardinal): II y a eu d'autres affirmations. C'est la première fois, à ma connaissance, qu'il y a des accusations précises contre des personnes nommées.

M. Mailloux: Je voudrais vous poser une dernière question. Tantôt, vous avez fait la nomenclature des personnes qui sont couvertes, qu'on ne doit pas attaquer, les fonctionnaires, le président, les membres de la commission. À ce moment-là, pourquoi tous les autres ne devraient-ils pas être attaquables non plus? On les attaque depuis le début.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Charlevoix, s'il vous plaît! Vous posez une question hypothétique. J'aurais pu nommer tout le monde de tout l'univers. Je n'ai nommé que ceux qui ont été attaqués. On ne pose pas au président des questions hypothétiques sur des gens qui n'ont pas été attaqués. Je vous en prie.

M. Thériault, vous bénéficiez encore de la même protection de la commission. Je vous prierais cependant de continuer, mais sans attaque contre des personnes, à moins qu'il y ait une preuve qui l'établisse. Nous ne sommes pas devant un tribunal, je le rappelle. Je l'ai rappelé la semaine dernière. M. Thériault, vous pouvez continuer.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: Avant que M. Thériault reprenne et sans vouloir répondre spécifiquement à la préoccupation du député de Charlevoix, je voudrais simplement dire que ce que nous tentons de faire, dans cette commission — je pense que c'est également le cas du député de Portneuf et du député de Johnson, comme de tous les autres membres de cette commission — c'est d'essayer de retrouver des faits. C'est en ce sens-là que peut-être des faits présentés dans une séquence précise, lors de mes propos à la première réunion de la commission, pouvaient, pour certains esprits, signifier qu'il y avait là des accusations, qu'il y avait une conjonction de faits dont, à mon avis, on pourrait tirer des conclusions. Mais, entre cela et se mettre, de façon systématique, à s'en prendre à l'intégrité d'un membre ou d'un fonctionnaire du ministère du Travail, je pense qu'il y a une marge, et celle-là, M. Thériault l'a déjà franchie.

J'espère, M. le Président, que M. Thériault continuera son propos sur un autre ton et d'une façon un peu différente.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le ministre. M. Thériault, ce n'est pas une question de façon de s'exprimer, c'est simplement une question que, je le répète pour tous les députés et tous les membres présents, ayant une longue expérience des commissions parlementaires, je ne puis permettre qu'en commission parlementaire, il y ait d'autres attaques que les attaques politiques que les politiciens se font normalement, mais pas d'attaques qui viennent de témoins, vis-à-vis des personnes qui ne peuvent pas se défendre et qui n'ont pas droit de parole devant cette commission. M. Thériault.

M. Thériault: M. le Président, je dois vous rappeler que mes premières remarques ont été que, lorsque j'ai été convoqué à cette commission spéciale de médiation, contrairement à la procédure habituelle au ministère du Travail ou même ici, il y a enregistrement de ce qui est dit. Un rapport a été remis, on en a fait grand état dans les journaux. On en a fait un plus grand état ici.

Ce que j'ai voulu démontrer et que je voudrais toujours démontrer, c'est que ce rapport qui m'accuse d'avoir dit ou d'avoir fait un paquet de choses est faux, du commencement jusqu'à la fin, et je suis en mesure de vous le prouver.

Le Président (M. Cardinal): C'est une opinion, M. Thériault. Nous acceptons votre opinion. Mais n'accusez pas des personnes d'avoir tronqué le rapport ou des choses semblables. S'il vous plaît!

M. Thériault: Je suis obligé de le faire, M. le Président, parce que c'est faux. On m'accuse d'avoir dit et d'avoir fait des choses que je n'ai pas faites.

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vais vous laisser procéder.

M. Chevrette: On est aussi bien de le laisser aller. C'est lui qui porte l'odieux de ses paroles ou le poids de ses affirmations.

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, vous êtes averti des limites de l'immunité parlementaire. Je vous laisse donc continuer.

M. Thériault: Sur ce que j'ai à dire, oui.

Je vous cite textuellement les paroles de M. Blain, consignées au journal des Débats, alors qu'il s'adressait à vous-même: "À la convocation du 15 mai, ni M. Caine ni M. Casgrain ne se sont présentés. Donc, le représentant pour le groupe que nous, pour les fins du rapport, on appelle les gars de l'intérieur, était représenté par M. Thériault, de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique, et pour le syndicat accrédité et affilié à la Confédération des syndicats nationaux, c'était M. Marcel Pepin".

Commençant avec la page 3 de son rapport, M. Blain dit, et je cite: "Le 18 mai, seuls se présentèrent MM. Donat Thériault et Pierre Tellier, respectivement vice-président du local 388 et secrétaire-trésorier de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique. M. Thériault, qui se décrit comme conseiller syndical des gens de l'intérieur, indiqua alors au conseil que ceux-ci ne se présenteraient pas devant le conseil sans qu'il soit présent".

Je désire corriger cette deuxième partie du rapport de M. Blain en commençant par vous dire que je ne peux certainement pas vous mentir et me mentir à moi-même pour ce qui a trait au nom de l'organisation que je représente et au titre qui se rattache aux fonctions que j'occupe personnellement au sein de cette organisation qui est en fait l'Union internationale des rembourreurs de l'Amé- rique du Nord et non pas l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique.

Mes titres sont vice-président international et directeur canadien de cette organisation et président de la section locale 388 et non pas du tout vice-président du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique, comme le dit M. Blain dans son rapport.

Si je vous fais ces remarques, ce n'est pas parce que ces faits ont de l'importance par eux-mêmes, mais bien plutôt pour vous démontrer que, dès notre première rencontre, M. Blain qui me connaît déjà depuis plusieurs années et qui m'a dit que je n'avais pas à décliner mon nom, puisqu'il le connaissait déjà, mais de bien vouloir décliner le nom de l'organisation et le titre se rattachant aux fonctions que j'occupe au sein de cette organisation...

Après l'avoir fait, s'il n'a pas pu répéter plus fidèlement ce que je lui ai dit, au départ, ceci prouve qu'il a beaucoup plus d'imagination que de mémoire et qu'il y a tout au long de son rapport beaucoup plus de ses propres interprétations que des déclarations textuelles qu'il prétend que je lui ai faites.

De plus, lorsqu'il nous dit tout bonnement et tout simplement: "Le 18 mai, seuls se présentèrent M. Donat Thériault et M. Pierre Tellier, et M. Thériault, qui se décrit comme conseiller syndical des gens de l'intérieur, indiqua alors au conseil que ceux-ci ne se présenteraient pas devant le conseil sans qu'il soit présent."

Je vous demande, M. le Président, comment aurais-je pu m'exprimer ainsi alors que j'étais là, présent devant les membres de ce conseil de médiation?

M. Johnson: Voyons donc.

M. Thériault: L'explication est très simple et réside dans le fait qu'à partir du début de l'exposé de la chronologie des événements dudit conflit de la Commonwealth Plywood, les faits sont tout autres que ceux rapportés dans ce rapport. Pour cette partie, ils sont les suivants: Ce n'est pas en fait le 18 mai, mais bien plutôt plusieurs jours et peut-être même une semaine précédant cette date que j'ai fait un appel téléphonique à M. Blain pour lui dire, à la demande des membres du comité du syndicat des gens de l'intérieur à la Commonwealth Plywood, que ces derniers refusaient de se rendre à l'invitation qu'il leur avait faite de venir le rencontrer au bureau du ministère du Travail à Montréal, à moins que je ne les accompagne à titre de conseiller.

M. Blain, après avoir hésité quelques instants, m'a alors dit qu'il désirait donc me rencontrer sans eux, puisqu'il en était ainsi et que je devrais venir seul, quitte à me rencontrer plus tard avec eux, s'il le jugeait utile et nécessaire.

Si Pierre Tellier, secrétaire-trésorier du local 388 de notre syndicat, était présent au début de cette rencontre avec le comité de médiation le 18 mai, ce n'est pas parce qu'il avait été invité, comme le rapport pourrait le laisser supposer en

douce, mais bien plutôt, parce qu'ayant eu le temps de réfléchir au cours de la nuit, avant cette rencontre — je réalise aujourd'hui que j'ai été clairvoyant, au moins à la dernière minute — je me suis dit: Tu ne dois pas aller là seul, alors qu'ils seront trois.

M. Johnson: Si vous permettez, sur une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: Je voudrais bien, peut-être pour les fins de ce que le député de Sainte-Marie disait, qu'on laisse aller M. Thériault à dire à peu près n'importe quoi.

Cependant, je pense que le député de Portneuf, comme moi, comme tous les membres de cette commission, aimerait qu'il entre dans le sujet qui s'appelle le conflit à la Commonwealth Plywood, son rôle, celui qu'il pense être celui de la CSN, le rôle de l'employeur et celui des gens de l'intérieur et non pas une critique qui, à mon avis, demeure inadmissible à l'égard du sous-ministre adjoint aux relations de travail.

M. le Président, je n'accepterai pas de continuer d'entendre M. Thériault sur ce ton, sur ce sujet. Je pense qu'il faut que M. Thériault nous parle du conflit à la Commonwealth Plywood et non pas de ses problèmes de savoir si oui ou non, c'est l'Amérique du Nord, ou l'Amérique le nom de son syndicat.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le ministre. Pour une fois, comme parlementaire, M. Thériault, je dois faire une mise en garde. Cette commission a pour mandat d'écouter des témoins qui nous renseignent, qui renseignent les parlementaires sur ce qui s'est passé et non pas pour qu'ils fassent une critique des personnes impliquées dans le conflit.

Je vous prierais de porter attention à mes remarques, parce que j'espère que cette commission pourra continuer ses travaux. M. Thériault.

M. Thériault: M. le Président, si M. le ministre craint justement de me laisser continuer...

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, à l'ordre, s'il vous plaît! Non, je ne le permettrai pas.

M. Thériault: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Vous venez de m'entendre, M. Thériault. Je vous prierais d'en venir aux faits. Ce n'est pas une défense que vous apportez devant cette assemblée. Vous n'êtes pas devant un tribunal.

M. Thériault: M. le Président, le rapport en question comporte des affirmations, on me met dans la bouche des paroles que je n'ai jamais dites, on m'impute des gestes que je n'ai jamais posés. Je suis en mesure de les contredire. Si vous ne voulez pas que je le fasse, je n'ai plus rien à faire d'autre que de répondre aux questions qui me seront posées.

M. Pagé: J'ai des questions à lui poser.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Thériault. Un instant.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui.

M. Pagé: Est-ce à dire, M. Thériault, que vous... J'interprétais le début de votre déclaration comme étant un préambule, qui était probablement trop long, mais quand même. Est-ce que vous voulez en arriver aux faits? Est-ce que vous êtes disposé à parler des faits, de ce qui s'est passé, abstraction faite du préambule et de vos commentaires sur le rapport du conseil de...

M. Thériault: Je veux dire que le rapport est faux dans son entier.

M. Pagé: Ce n'est pas ce qu'on vous demande, M. Thériault.

M. Bellemare: II est faux dans son entier, même pour l'impression.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Je n'en permettrai pas plus aux députés qu'aux témoins. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Oui, mais il n'en parle pas... Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. Bellemare: Comment? Je n'ai rien dit.

Le Président (M. Cardinal): Non, j'ai entendu cependant.

M. Bellemare: II va falloir que je mette une camisole de force.

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vous remercie. Nous avons devant nous trois personnes. Est-ce que M. le ministre est disposé à commencer à poser ses questions?

M. Johnson: Je suis prêt à commencer à poser mes questions.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Interrogatoire

M. Johnson: M. le Président, j'aurais pensé qu'on aurait pu nous relater un peu plus précisément certains faits, d'autant plus que la meilleure façon peut-être pour M. Thériault de faire comprendre aux membres de la commission ce qui

s'est passé à ses yeux à la Commonwealth Plywood, ce serait effectivement de s'adresser aux faits. Certains de ces faits ont été évoqués dans la première séance de notre commission.

J'aurais, pour M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault, certaines questions. Je vais commencer avec M. Lévesque, si vous permettez, et Mme Grignon également. Je suis bien conscient qu'au niveau de vos deux préambules, vous avez fait allusion à une interprétation que vous avez de ce qu'est la CSN, la "grande centrale", etc. C'est d'ailleurs un vocabulaire que je reconnais, puisque je l'ai vu dans des échanges de correspondance nombreux que j'ai eus avec différentes parties dans ce conflit. Cependant, je pense que ce n'est pas ce qui est l'objet du litige.

De la même façon, vous avez parlé d'événements que je ne peux, madame, s'ils sont vrais, que trouver déplorables, où il y a eu de la violence, où il y aurait eu de l'intimidation, où des voitures auraient été détruites, où des gens auraient été intimidés jusque dans leur maison. On ne peut pas faire autrement que de trouver cela déplorable. C'est probablement, d'ailleurs, une des raisons de fond pour laquelle nous siégeons en commission parlementaire.

Quand l'Opposition, la semaine dernière, nous disait qu'elle se demandait pourquoi on venait ici, et quand le député de Johnson disait qu'il s'agissait d'un effort de blanchissage de la part du ministre, j'ai dit à ce moment que j'étais bien conscient que certaines de ces choses étaient devant les tribunaux, mais qu'on n'a pas le droit, au nom de l'intérêt public, de nier que ce qui s'est passé et ce qui se passe encore à la Commonwealth Plywood est d'ordre public et doit intéresser les membres du Parlement. Cela inclut, entre autres, dans la réalité et non pas dans l'objet de nos discussions, le fait qu'une population d'hommes et de femmes est déchirée par ce qui se passe, dans certains cas, est victime peut-être d'intimidation, et, chose certaine, que toute une ville et une région sont absolument ébranlées par ce qui se passe dans cette entreprise.

J'aurais donc quelques questions précises à poser d'abord à M. Lévesque. Etiez-vous, M. Lévesque, membre de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique ou d'Amérique du Nord avant que la CSN ne procède à sa campagne de changement d'allégeance?

M. Lévesque (Ernest): Oui, j'étais membre.

M. Johnson: Est-ce que vous étiez membre de l'exécutif ou étiez-vous un membre participant aux instances décisionnelles du syndicat ou étiez-vous membre simplement?

M. Lévesque (Ernest): Je n'ai jamais appartenu à aucun exécutif. (12 heures)

M. Johnson: D'accord! En second lieu, la question des cartes. Vous avez évoqué la question du chômage au Québec. Vous vous êtes permis, comme vous en avez le droit comme citoyen, de porter un jugement sur ce qui se passe. Il y a même des éléments de ça peut-être que je pourrais partager. Mais vous me semblez avoir omis une affaire assez fondamentale quand vous avez parlé de certaines réunions. Parlez-moi donc des cartes que vous avez eu l'occasion de signer, et je m'explique.

Il y avait l'Union internationale des rembourreurs, la CSN est intervenue dans l'usine, a procédé à une campagne, comme on dit, de "maraudage", en faisant signer des cartes de la CSN, et quand je parle de la CSN, je parle de la centrale syndicale présidée par M. Norbert Rodrigue, pour qu'on se comprenne bien.

Par la suite, le 3 ou vers le 3 octobre, il y a eu une assemblée où des travailleurs de Commonwealth Plywood ont été appelés à signer des cartes qui portaient la mention CSN. Etiez-vous présent lors de la signature de ces cartes?

M. Lévesque (Ernest): J'étais présent, mais les cartes ne portaient pas la mention... Elles portaient la mention CSN, le Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN.

M. Johnson: Et qui a distribué ces cartes?

M. Lévesque (Ernest): Nous-mêmes, les employés de la Commonwealth Plywood qui s'y trouvaient.

M. Johnson: Qui a fait imprimer les cartes, M. Lévesque?

M. Lévesque (Ernest): M. Thériault.

M. Johnson: M. Thériault a fait imprimer des cartes, à votre connaissance? Est-ce que c'est M. Thériault qui a distribué des cartes qui portaient la mention CSN?

M. Lévesque (Ernest): Non. Nous lui avons demandé conseil...

M. Johnson: Oui.

M. Lévesque (Ernest): ... il nous a donné conseil et les cartes ont été distribuées par les employés eux-mêmes qui étaient là à l'assemblée.

M. Johnson: Mais qui l'a donné? Qui a donné... À un moment donné, il a fallu qu'elles sortent de l'imprimerie, en quelque part, ces cartes, et que quelqu'un se mette à les distribuer? Qui a eu ces cartes pour les distribuer à des employés? Est-ce que M. Thériault les avait, à votre connaissance?

M. Lévesque (Ernest): À ma connaissance, je ne sais pas qui les avait.

M. Johnson: Quand vous avez assisté à cette réunion du 3 et du 4, il y avait distribution de cartes qui s'appelaient: Syndicat des employés de Commonwealth Plywood CSN, réunion à laquelle assistait M. Donat Thériault, à laquelle vous assistiez.

Est-ce que vous avez signé une telle carte?

M. Lévesque (Ernest): Oui, j'ai signé une carte.

M. Johnson: Est-ce que vous étiez conscient... M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: ... quelles étaient ces cartes? Vous étiez conscient de ça?

M. Lévesque (Ernest): Bien oui.

M. Johnson: Vous étiez conscient quelles étaient ces cartes que vous étiez en train de signer et de distribuer?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Est-ce que c'étaient des cartes qui émanaient de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Mais pourquoi portaient-elles la mention CSN?

M. Lévesque (Ernest): Par rapport qu'on a pris notre syndicat en main. C'est bien simple. Est-ce que la CSN était consciente de nous empêcher de travailler?

M. Johnson: Non, la question n'est pas là, M. Lévesque. Ce que je veux savoir, c'est qu'une carte qui porte la mention CSN, normalement...

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: ... devrait provenir de la CSN.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Est-ce que ça provenait de la CSN, ces cartes?

M. Lévesque (Ernest): Je vais vous répondre par une question.

Le Président (M. Laplante): Non. M. Lévesque (Ernest): Non?

M. Johnson: Vous allez me répondre par une réponse, si c'est possible.

M. Lévesque (Ernest): Bon! D'accord! Si j'étais allé demander à la CSN de me fournir les cartes nécessaires pour que tous ceux qui ne l'ont pas signée puissent la signer et retourner au travail, je ne crois pas qu'ils m'en auraient donné. Il fallait prendre les moyens pour retourner au travail. C'est ce qu'on désirait. On a demandé à la CSN de retourner au travail et de nous négocier une convention et elle n'a pas voulu. On a pris les choses en main.

M. Johnson: En tout cas... Ma question s'adresse maintenant à M. Thériault. Est-ce que c'est vous qui avez fait imprimer les cartes CSN?

M. Thériault: C'est moi qui les ai commandées, M. le ministre.

M. Johnson: Vous les avez commandées.

M. Thériault: Et c'est moi qui ai fourni le texte pour les cartes aussi.

M. Johnson: Pardon?

M. Thériault: Et c'est aussi moi qui ai donné le texte à l'imprimeur, si vous voulez savoir.

M. Johnson: Vous avez également donné le texte à l'imprimeur pour ces cartes.

M. Thériault: C'est exact. M. Johnson: Etiez-vous membre de la CSN? M. Thériault: Non, M. le ministre, surtout pas! M. Johnson: Je m'en doutais.

M. Thériault: II s'agissait de ne pas le demander, si vous vous en doutiez.

M. Johnson: Est-ce que je pourrais savoir, M. Thériault, pourquoi vous avez fait imprimer des cartes au nom de la CSN?

M. Thériault: Pour la raison que M. Lévesque vous a dite, mais je vais vous donner les détails.

C'est que, me basant sur le Code du travail et sans être avocat, c'est mon interprétation, le Code du travail ne dit pas quelle sorte de carte ce doit être et d'où elle doit provenir. Le Code du travail dit que, pour être membre d'une organisation, il faut avoir signé une carte dûment datée et avoir payé un minimum de $2. Je me suis basé sur l'interprétation que je donne du Code du travail, après les explications des ouvriers qui avaient besoin de prendre leur syndicat en main, après leur avoir dit que le syndicat CSN serait accrédité et que moi, je ne faisais pas de miracle et que je ne pouvais pas les aider à demeurer dans l'Union des rembourreurs. Tout ce que je pouvais leur conseiller, c'était de prendre leur syndicat en main. Donc, pour se convoquer une assemblée de la CSN qui serait accréditée, il fallait qu'ils deviennent membres de la CSN et qu'ils signent des cartes. Donc, je leur ai conseillé d'en faire imprimer et d'en signer.

M. Johnson: Donc, d'après vous... M. Bellemare: C'étaient des faux.

M. Thériault: Vous le prouverez que c'étaient des faux.

M. Bellemare: C'est un faux de prendre l'organisation d'un autre.

M. Johnson: M. Thériault, toujours une autre question précise sur la question des cartes. Vous savez comme moi que le Code du travail dit aussi que le syndicat pouvant être habilité à signer une convention collective est celui qui est accrédité.

M. Thériault: Je sais tout cela. Vous changez de sujet. Vous ne parlez plus des cartes.

M. Johnson: Est-ce que vous saviez, au moment où vous avez commandé ces cartes et où vous les avez distribuées... Je devrais d'abord vous demander si vous avez distribué de telles cartes.

M. Thériault: Je n'ai distribué aucune carte. J'ai donné l'ordre de les faire imprimer. Quand je les ai reçues, je les ai remises, le paquet au complet, à Hélène Grignon.

M. Johnson: Vous avez remis les cartes à Mme Grignon.

M. Thériault: C'est exact.

M. Johnson: Les cartes que vous aviez commandées. Saviez-vous à ce moment que la CSN avait fait une demande d'accréditation auprès du ministère du Travail?

M. Thériault: Certainement que je le savais. Je le leur ai dit avant qu'on fasse imprimer ces cartes.

M. Johnson: Vous saviez que la CSN, qui avait maraudé l'Union internationale dans votre usine, qui avait obtenu une majorité — au sens du Code du Travail — des travailleurs qui étaient là, était en instance d'accréditation. Vous saviez cela?

M. Thériault: Je le savais et je le leur avais même dit, si vous avez écouté la déclaration de Mme Grignon, que je leur avais mentionné, lorsque je les avais rencontrés, que la CSN serait accréditée tôt ou tard.

M. Johnson: Et vous avez fait imprimer des cartes. Vous avez dit aux gens: On va dire que vous êtes membres de la CSN, parce que vous avez des cartes de la CSN.

M. Thériault: Ne me mettez pas encore des paroles dans la bouche. Cela fait plusieurs fois, M. le ministre.

Le Président (M. Laplante): M. Thériault, vous avez une réponse à donner, oui ou non.

M. Thériault: Qu'on ne me mette pas des paroles dans la bouche.

Le Président (M. Laplante): Vous avez à répondre oui ou non.

M. Johnson: Je ne vous mettrai pas les paroles dans la bouche.

M. Thériault: Je vous en prie.

M. Johnson: Je vais reprendre ce que vous avez dit de façon précise, M. Thériault. Vous avez dit que la raison pour laquelle vous avez commandé des cartes portant le nom CSN — c'est bien un syndicat que vous connaissez...

M. Thériault: Malheureusement, je le connais trop.

M. Johnson: ... qui venait de vous marauder, vous dites que vous avez fait cela pour que les gens qui étaient dans la salle deviennent membres du syndicat qui allait être accrédité. C'est cela?

M. Thériault: C'est exact. C'était pour les aider à prendre en main leur syndicat parce que c'était celui qui serait accrédité.

M. Johnson: Avez-vous consulté quelqu'un avant de faire cela?

M. Thériault: Non. Et si vous attachez de l'importance à ce que Mme Grignon a dit, je leur ai dit avoir fait la même chose, quelques années plus tôt...

M. Bisaillon: ... à Chambly.

M. Thériault: ... à Chambly, chez Gregg Cabinets Ltd. C'est une autre usine où les ouvriers ont pris en main leur syndicat pour se débarrasser des officiers tout simplement.

M. Bisaillon: De la même façon?

M. Thériault: À peu près de la même façon.

M. Bisaillon: Comment aviez-vous procédé?

M. Thériault: C'est à peu près de la même façon.

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît! Avez-vous d'autres questions, M. le ministre?

M. Johnson: Pour le moment, si on me le permet, je me réserverais le droit de revenir par la suite. Je sais qu'il y a d'autres membres de la commission du côté gouvernemental qui ont des questions pour explorer cela un peu plus en détail.

La dernière chose que j'aurais comme question est adressée cette fois-ci à Mme Grignon. C'est au sujet des cotisations syndicales.

Mme Grignon, on a établi, je pense, clairement, avec ce que nous ont dit MM. Lévesque et Thériault, que les cartes qui ont été passées le ou vers le 3 octobre, c'étaient des cartes qui avaient été commandées à une imprimerie à la demande de M. Donat Thériault, qui est vice-président de

l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique du Nord, et non pas de la CSN. À partir de là, comme secrétaire, étiez-vous trésorière également ûu secrétaire seulement?

Mme Grignon: L'argent venait à moi aussi. M. Johnson: Pardon? L'argent venait à vous. Mme Grignon: Oui.

Mme Johnson: Très bien. Par qui vous était versé l'argent? L'argent des cotisations syndicales, était-ce de l'argent que vous donnaient les travailleurs au moment de l'adhésion et, par la suite, y a-t-il eu d'autre argent qui est entré en cotisations syndicales à partir de leur chèque de paie ou de déductions faites à la source?

Mme Grignon: Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

M. Johnson: D'accord. Je recommence. Quand vous avez fait adhérer les gens, vous les avez fait payer?

Mme Grignon: Oui.

M. Johnson: Pour qu'ils signent la carte CSN que M. Thériault avait fait imprimer?

Mme Grignon: Oui.

M. Johnson: D'autre part, avez-vous reçu d'autre argent des travailleurs?

Mme Grignon: Oui.

M. Johnson: En plus de cela? D'où provenait cet argent?

Mme Grignon: Des cotisations syndicales enlevées sur...

M. Johnson: ... leur bulletin de paie. Mme Grignon: C'est cela.

M. Johnson: Très bien. C'est la compagnie qui versait cela? À qui la compagnie versait-elle cela?

Mme Grignon: La compagnie me donnait le chèque, je l'endossais et je le remettais à M. Thériault.

M. Johnson: Alors, le chèque était fait au nom de...

Mme Grignon: Du Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN.

M. Johnson: Et vous était envoyé par l'entreprise.

Mme Grignon: Oui.

M. Johnson: Ce que vous faisiez, à ce moment-là c'était que vous endossiez un chèque fait au nom de la CSN et vous le remettiez à M. Donat Thériault.

Mme Grignon: Oui.

M. Johnson: M. Thériault, qu'est-ce que vous faisiez avec cet argent-là?

M. Thériault: C'est à moi que vous vous adressez, M. le ministre?

M. Johnson: Oui.

M. Thériault: Lorsque Mme Grignon dit qu'elle me le remettait, c'est arrivé qu'elle me l'a remis parce qu'on s'est rencontré, mais il était remis au secrétaire-trésorier du local 388 de l'Union internationale des rembourreurs qui l'a déposé dans les fonds de l'Union des rembourreurs après qu'une entente de services eut été signée entre le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN et l'Union internationale des rembourreurs.

M. Johnson: D'accord. Je pense que c'est clair. Je m'excuse, est-ce qu'on me permet une dernière question? M. Lévesque, vous avez tenu, à un moment donné, une conférence de presse. Où avez-vous tenu cette conférence de presse?

M. Lévesque (Ernest): L'adresse exacte, je...

M. Johnson: À peu près, dans quelle région? Est-ce que c'est à Montréal?

M. Lévesque (Ernest): Dans Montréal.

M. Johnson: Qui a loué le local? Qui a fait les arrangements pour cette conférence de presse à laquelle vous participiez?

M. Lévesque (Ernest): Je pense que vous pourriez poser cette question à M. Thériault parce que nous nous y sommes rendus sur un appel de M. Thériault.

M. Johnson: D'accord. M. Thériault, où avez-vous tenu cette conférence de presse?

M. Thériault: Je n'étais pas à cette conférence de presse, si vous dites: Où l'avez-vous tenue?

M. Johnson: Oui. Où la conférence de presse, tenue par M. Lévesque, a-t-elle eu lieu?

M. Thériault: À la Canadian Slovak Building à Montréal.

M. Johnson: D'accord. Qui avait loué ou fait les arrangements pour obtenir ces locaux?

M. Thériault: L'Union internationale des rembourreurs.

M. Johnson: Qui a rédigé les communiqués de presse?

M. Thériault: Si je me rappelle bien j'ai aidé M. Lévesque et Mme Grignon. Ils m'ont demandé de l'aide assez souvent. Ils m'ont demandé des conseils assez souvent. Je les ai conseillés dans à peu près tout ce qu'ils ont fait, mais pas dans tout ce qu'ils ont fait. C'est possible que je les aie aidés dans la rédaction des communiqués de presse, comme je les ai aidés dans la préparation de ce qu'ils vous ont dit, si vous voulez le savoir.

M. Johnson: Je présume et il n'y a rien de mal là-dedans, nécessairement.

M. Bellemare: On l'avait senti.

M. Johnson: On l'avait ressenti un peu.

M. Thériault: Pour ne pas laisser de doute que cela vient d'ailleurs, c'est moi qui les ai aidés.

M. Johnson: D'accord. D'ailleurs, vous étiez conseiller de ce groupe de l'intérieur d'après ce que j'ai compris.

M. Thériault: Je le suis toujours, jusqu'à ce qu'ils me mettent dehors.

M. Johnson: Ces communiqués de presse ont-ils été envoyés par Telbec? Est-ce qu'ils ont été diffusés par le canal qui s'appelle Telbec?

M. Thériault: Vous vous adressez toujours à moi, M. le ministre?

M. Johnson: Oui.

M. Thériault: Je ne suis pas au courant.

M. Johnson: M. Lévesque, êtes-vous au courant?

M. Lévesque (Ernest): Moi non plus.

M. Johnson: La convocation a cette conférence de presse a été faite par qui?

M. Lévesque (Ernest): Je vous ai dit que M. Thériault nous avait appelés pour nous rendre à...

M. Johnson: Mais qui a convoqué les journalistes?

M. Lévesque (Ernest): Je ne le sais pas. M. Johnson: M. Thériault?

M. Thériault: Cela a été fait par une agence qui s'occupe de publicité qui m'avait été conseillée par nos avocats.

M. Johnson: Quelle est cette agence?

M. Thériault: Je ne le sais même pas. C'est notre avocat qui m'a mis en communication avec un monsieur dont je ne me rappelle même plus le nom. Il m'a téléphoné, et je lui ai dit que j'en parlerais au comité de Commonwealth Plywood.

M. Johnson: Quel avocat?

M. Thériault: Les avocats de l'étude Cutler, Sheppard et tout le groupe.

M. Johnson: Cutler, Sheppard, Cournoyer et Associés?

M. Thériault: Oui, si vous vous référez à l'ancien ministre du Travail, il est là, oui.

M. Johnson: Non, mais c'est ce bureau-là dont il s'agit.

M. Thériault: C'est exact.

M. Johnson: Alors, vos avocats vous ont référé à une agence de publicité qui s'est occupée de faire cela.

M. Thériault: C'est exact.

M. Johnson: Vous ne vous souvenez pas de quelle agence il s'agit.

M. Thériault: Je ne me rappelle pas du nom. D'ailleurs je n'ai pas porté attention et je n'y ai pas attaché d'importance.

M. Johnson: Si je vous énumérais deux ou trois noms, est-ce que vous pensez que vous pourriez vous en souvenir?

M. Thériault: Cela ne m'aiderait pas du tout, M. le ministre, je regrette.

M. Johnson: Non, cela ne vous aiderait pas.

M. Thériault: Ce n'est pas parce que je veux montrer de la mauvaise volonté. Je n'ai pas attaché d'importance à cette agence, je ne me suis jamais servi d'agence dans le passé et je n'étais pas en faveur, parce que je n'ai jamais été fort sur la publicité dans les journaux. Ce sont nos avocats qui ont insisté, puisque le comité voulait ça, je ne me suis pas mêlé tellement de cette affaire.

M. Johnson: Finalement, la question que je posais, c'est: Qui a organisé cette conférence de presse?

M. Thériault: C'est une agence.

M. Johnson: ... et c'est une agence qui l'a organisée.

M. Thériault: C'est exact. (12 h 15)

M. Johnson: Mais vous, est-ce que vous avez communiqué directement avec cette agence ou si ce sont vos avocats qui ont fait ça?

M. Thériault: Je viens de vous le dire, ce sont les avocats qui m'ont mis en communication; on a même eu une rencontre à laquelle les avocats et le monsieur en question étaient présents.

M. Johnson: Est-ce que ça se pourrait que ce soit M. Yvon Turcot?

M. Thériault: C'est possible, c'est possible, je vous ai dit que je ne me souvenais pas du nom, c'est possible.

M. Johnson: Qui a payé les frais auprès de l'agence?

M. Thériault: Je crois que nos avocats les ont payés, mais je n'en suis pas sûr. Parce que les avocats, comme vous devez le savoir, nous envoient des factures pour soins professionnels, services professionnels, je m'excuse; pour les médecins, c'est "soins professionnels", on paye et il ne faut pas poser trop de questions.

M. Johnson: Merci.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous réitérer ce que je vous formulais tout à l'heure, à savoir que contrairement à ce qu'on aurait pu présumer ou prétendre, on n'a pas beaucoup d'éclairage sur la situation, ça s'en vient tranquillement. Il y a beaucoup de questions qu'on a à se poser et je suis convaincu que le ministre acceptera, une fois que j'aurai fini de poser mes questions, tant lui-même que moi-même, nous pourrons revenir sur certains aspects du dossier par la suite.

Un des aspects importants de ce dossier, selon moi, c'est la représentativité du groupe qu'allèguent représenter ce matin M. Thériault, Mme Grignon et M. Lévesque.

Ma première question s'adresse à M. Thériault: Une convention collective, habituellement, se négocie en vertu d'une accréditation, laquelle est accordée en vertu d'une représentativité à l'intérieur d'un secteur où l'on travaille. Vous avez signé une convention collective le ou vers le 13 octobre 1977, qui a été déposée le 14 octobre 1977 au ministère du Travail, conformément aux dispositions de la loi. Est-ce qu'on a constaté que c'était la CSN qui était accréditée? En vertu de quel principe de représentativité vous croyiez-vous justifié, en octobre 1977, de négocier une convention collective pour et au nom des travailleurs? En vertu des cartes et de leur appartenance à des cartes qu'ils avaient signées, suite aux invitations que vous leur aviez formulées? Sous quel principe de représentativité vous fondiez-vous pour... sur quoi vous fondiez-vous pour vous permettre de signer et de négocier cette convention collective?

M. Thériault: La question s'adresse à moi, M. le Président?

M. Pagé: Oui, c'est à vous.

M. Thériault: Ma réponse est la suivante: Ça revient toujours à la même chose, la question de prendre en main son syndicat. Premièrement, j'aimerais corriger, M. le député, ce n'est peut-être pas ce qu'il a voulu dire, mais il a dit: Avez-vous signé? Je n'ai jamais signé personnellement de convention collective dernièrement.

M. Pagé: On ne se chicanera pas sur les mots.

M. Thériault: J'ai aidé et j'ai participé, j'ai conseillé dans une négociation pour en venir à la signature d'une convention collective.

Pour prendre en main leur syndicat il était évident que les ouvriers concernés, comme cela a déjà été dit comme explication, devaient, premièrement, sachant que tôt ou tard le syndicat CSN serait accrédité, pour la très bonne raison que c'était un fait connu qu'une majorité avait signé. Qu'ils aient signé de la façon que cela voudra, si on ne pouvait pas prouver qu'ils n'avaient pas signé librement, c'était notre problème. Mais le fait reste quand même qu'on savait qu'il y avait une majorité qui avait signé et que, par le fait même, une accréditation serait accordée éventuellement.

Les ouvriers qui voulaient retourner travailler ont dit: Donne-nous des conseils. Je leur ai conseillé de prendre leur syndicat en main. Cela voulait dire que pour prendre leur syndicat en main, il fallait qu'ils soient membres de ce syndicat. Il a fallu premièrement, pour tâcher de convoquer une assemblée du syndicat, ou d'avoir une assemblée du syndicat, qu'ils en soient membres. Donc, ils ont signé des cartes. Ils ont payé le montant requis par le Code du travail. Ils ont tenu une assemblée. Ils ont passé des résolutions. Ils ont élu un comité qu'ils ont chargé d'aller faire les négociations, comité qui devait avoir les conseils d'un avocat ou de moi-même.

C'est en vertu de tout cela, même j'aurais pu ajouter qu'il était évident que cela arriverait, l'Union internationale des rembourreurs, contrairement à ce qui a été dit dans le rapport de médiation, ne s'est jamais opposée. Jamais on ne s'est opposé et, par la suite, avons changé d'idée. J'aimerais qu'on me le prouve. L'Union des rembourreurs ou Donat Thériault ne se sont jamais opposés, en aucun temps, à une demande d'accréditation CSN. On savait très bien que le syndicat CSN serait accrédité. Il n'y avait pas d'objection. Le seul moyen pour les ouvriers d'avoir une convention, c'était basé sur ce principe, c'était qu'une fois membre de la CSN, une fois après avoir été élu par les ouvriers de Commonwealth Plywood qui voulaient avoir toujours un syndicat — s'ils ne pouvaient pas en avoir d'autres, ils prenaient celui qu'ils avaient, qu'ils savaient qui serait reconnu, parce qu'ils ont cru ce que je leur ai dit — ils ont nommé des officiers qui ont négocié une convention. Et je les ai appuyés.

M. Pagé: Vous parlez de non-objection.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bisaillon: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sainte-Marie, sur une question de règlement.

M. Bisaillon: C'est une directive, en fait, que je voudrais vous demander, ce qui n'a jamais été fait à la commission, actuellement. Est-ce qu'on pourrait indiquer au témoin actuel, et éventuellement à tous ceux qui pourraient témoigner par la suite, la valeur d'un témoignage devant une commission parlementaire, et les conséquences de ce témoignage, si la vérité était tronquée, cachée, ou si carrément, un témoin mentait à la commission? Ce n'est en référence à rien, c'est seulement parce que je voudrais qu'on précise cela tout de suite.

Le Président (M. Cardinal): Justement, M. le député de Sainte-Marie, j'en ai parlé déjà. Quand je me suis absenté il y a quelques minutes, c'était justement pour aller entendre la bobine où je m'étais prononcé sur l'immunité parlementaire. J'ai indiqué que l'immunité parlementaire existait, si l'on disait la vérité, si l'on répondait aux questions de bonne foi et si on ne faisait pas d'accusations comme celles que j'ai entendues ce matin. C'est à ces trois conditions que je l'ai déjà indiqué. À votre demande, M. le député de Sainte-Marie, je le rappelle. Est-ce que cela répond à votre question?

M. Bisaillon: Merci.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Portneuf,

M. Pagé: Quand vous dites, M. Thériault, que vous ne vous êtes pas opposé à l'accréditation, c'est que vous interprétez le désistement de l'Union internationale des rembourreurs comme étant une non-objection. C'est cela?

M. Thériault: Non seulement cela. J'ai dit que, dans le rapport de médiation, on disait que l'Union des rembourreurs, après s'être opposée, avait changé d'idée après une conversation avec le commissaire Marcel Evard. On ne s'est jamais opposé en aucun temps. On a signé un désistement...

M. Pagé: Ah! c'est parce que vous vous étiez déjà opposé...

M. Thériault: ... à notre droit de nous faire entendre.

M. Pagé: D'accord. Vous alléguez que vous étiez représentatif... Mme Grignon a fait écho tantôt à des réunions qui auraient été tenues. J'aimerais bien savoir combien il y avait de travailleurs. Est-ce que quelqu'un sait combien il y avait de travailleurs à l'intérieur, parce que...

M. Thériault: II y en a eu 97, à un certain moment.

M. Pagé: Est-ce que vous le savez?

M. Thériault: II y en a eu 55 le premier jour de travail.

M. Pagé: Bon. Madame parlait de 105 et M. Lévesque de 95.

M. Thériault: 105 mis à pied.

M. Pagé: Bon, d'accord, je m'excuse, si je me suis trompé.

M. Thériault: 105 non mis à pied, je corrige, je m'excuse.

M. Pagé: Bon, d'accord, j'avais raison. Merci! La réunion qui a été tenue, où les gens ont décidé de prendre leurs choses en main, avait été convoquée par qui, avait été convoquée comment?

M. Bisaillon: Par affaires...

M. Thériault: Est-ce que j'assiste à une comédie, M. le Président?

Une voix: Leur affaire en main.

M. Pagé: Non, ce n'est pas une comédie, je vous demande sérieusement, à la réunion...

M. Thériault: Je ne peux pas répondre à votre question, il se fait toutes sortes de farces plates et, avec les rires, je ne peux pas...

M. Bisaillon: Attendez et, quand ce sera le temps, vous répondrez. Quand nous autres nous aurons fini de parler, vous, vous parlerez.

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault... À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le député de Sainte-Marie, à l'ordre! M. Thériault...

M. Chevrette: Arrangez-vous pour être cohérent au moins.

Le Président (M. Cardinal): ... depuis 10 h 12 environ que nous sommes tous très sérieux.

M. Thériault: Est-ce que je pourrais arrêter d'avoir des menaces, M. le Président?

M. Chevrette: Ce ne sont pas des menaces de vous demander d'être cohérent.

M. Thériault: Arrangez-vous pour être... Cela ne me fait pas peur, M. le député.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! Ne commencez pas...

M. Chevrette: Ce n'est pas l'élévation des voix qui m'énerve non plus, mon cher.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sainte-Marie... M. le député de...

M. Thériault: Ce n'est pas votre face qui m'énerve non plus.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm... M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Bisaillon: Montcalm.

M. Chevrette: Soyons calmes, vous avez raison, M. le Président.

M. Pagé: Vous portez le nom de votre comté, oui.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Une voix: ... Montcalm non plus.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm, vous n'avez pas la parole.

M. Chevrette: Absolument pas, je ne parle pas. Je demanderais au témoin d'être très poli, par ce que ce cher monsieur peut vouloir mettre de l'ordre ici, mais il serait mieux d'en mettre dans ses idées.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! C'est...

M. Pagé: Je peux, M. le Président, oui?

Le Président (M. Cardinal): Juste une seconde! Il reste justement trois minutes. Juste une seconde! Pour compléter la réponse que j'ai donnée au député de Sainte-Marie, j'ajoute quelque chose, c'est que la différence entre un député et un témoin, c'est qu'un député met son siège en jeu, tandis que le témoin ne le met pas, mais met son immunité parlementaire en jeu. J'espère que cette précision apportera de la lumière à tous ceux qui participent à cette commission. M. le député de Portneuf, est-ce que vous désirez continuer?

M. Pagé: Oui, je désire...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, j'ai une directive à vous demander là-dessus?

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'à votre avis, l'immunité parlementaire ne s'applique qu'à des actions possibles en libelle diffamatoire ou est-ce que cela s'applique également à toutes sortes d'actes criminels ou autres qui auraient pu être commis dans ce conflit?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Jonquière, je ne pourrai pas vous répondre pour la raison suivante: Si vous lisez attentivement le règlement qui nous régit, pas plus le président que le député ne peuvent donner une opinion professionnelle et, encore moins, juridique. Je m'y suis refusé à la première séance, je me retiens encore. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, j'en étais aux premières sous-questions sur la représentativité. J'ai évidemment beaucoup d'autres questions sur la convention collective, sur les cartes, le rapport de médiation et tout cela. Il est 12 h 27. Je demanderais le consentement pour qu'on ajourne nos travaux et qu'on les reprenne cet après-midi. Vous allez me laisser la parole cet après-midi, oui?

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Portneuf, je vous sécurise immédiatement, en vous disant que vous avez bien fait de demander l'ajournement. De toute façon, il aurait été automatique. Les travaux de cette commission sont ajournés sine die.

M. Pagé: Mais devraient reprendre cet après-midi.

Une voix: Normalement, oui. M. Pagé: Normalement, oui. (Suspension de la séance à 12 h 26)

(Reprise de la séance à 16 h 55)

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!

Mesdames et messieurs, nous commençons la troisième séance — c'est une nouvelle séance — de la commission parlementaire permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre réunie pour étudier le conflit de la Commonwealth Plywood de Sainte-Thérèse.

Je dois donc, au début de cette séance, vérifier encore une fois la liste des membres.

M. Bellemare (Johnson)?

M. Bellemare: Présent.

Le Président (M. Cardinal): M. Bisaillon (Sainte-Marie)?

M. Bisaillon: Présent.

Le Président (M. Cardinal): M. Chevrette (Joliette-Montcalm)?

M. Chevrette: Toujours là.

Le Président (M. Cardinal): M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Pagé: Remplacé par M. Blank (Saint-Louis).

Le Président (M. Cardinal): M. Blank (Saint-Louis), remplace M. Forget (Saint-Laurent). M. Gravel (Limoilou), remplacé par M. Fallu (Terrebonne). M. Johnson (Anjou)?

M. Johnson: Présent.

Le Président (M. Cardinal): M. Lavigne (Beauharnois)?

M. Lavigne: Toujours là.

Le Président (M. Cardinal): M. Pagé (Portneuf)? M. Roy (Beauce-Sud)? M. Vaillancourt (Jonquière)?

Les intervenants: M. Blank (Saint-Louis) devient membre.

M. Pagé: Remplacé par M. Mailloux.

Le Président (M. Cardinal): M. Mailloux (Charlevoix).

M. Pagé: M. Springate est là.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, nous y arriverons.

M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), comme intervenant, remplacé par M. Dussault (Châteauguay); M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier)...

M. Pagé: Remplacé par M. Springate.

Le Président (M. Cardinal): Bon! C'est ça. Merci, M. le député de Portneuf. M. Springate...

Des voix: On est d'accord.

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît! M. Samson (Rouyn-Noranda).

Avant de continuer nos travaux, je veux, en vertu de l'article 150 du règlement sessionnel, poser une question aux membres de cette commission pour éviter tout débat de procédure.

À l'Assemblée nationale, il y a quelques minutes, suite à la motion présentée par le leader parlementaire du gouvernement, nous pouvons fonctionner, sauf que le leader parlementaire du gouvernement a laissé à la commission, conformément au règlement — je ne veux pas lire le règlement, mais enfin, s'il le faut, je le ferai — le choix de décider si, à 18 heures, la commission désire continuer à travailler.

M. Pagé: M. le Président, je m'excuse...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Portneuf.

M. Pagé:... j'étais en Chambre, moi-même, il y a quelques minutes. Le leader du gouvernement a voulu explorer cette possibilité avec les leaders des autres formations politiques et, constatant que certains engagements avaient été pris pour ce soir, constatant, de plus, l'offre de siéger demain, ce qui était impossible pour l'équipe gouvernementale, le leader s'en est tenu, si ma mémoire est fidèle, à un ordre bien strict, soit qu'on siège jusqu'à 18 heures, ce soir.

Le Président (M. Cardinal): C'est exact, M. le député de Portneuf. Cependant, je vais lire le paragraphe en vertu de l'article 150: "Toutefois..." — toutefois, malgré ce qui s'est passé — "... une commission peut, du consentement unanime de ses membres, poursuivre ses travaux après l'heure normalement prévue pour sa suspension ou son ajournement. '

Je comprends que je n'ai pas le consentement unanime de la commission.

M. Pagé: Même si on a un ordre de la Chambre.

Le Président (M. Cardinal): Nous n'avons pas d'ordre de la Chambre. C'est pourquoi je voulais le souligner pour que tout soit en ordre.

M. Johnson: M. le Président, pourrais-je...?

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: Cela permettrait peut-être aux membres de la commission ainsi qu'à nos invités, ou nos invités à venir s'il y a lieu, d'être quand même fixés. Avons-nous le consentement de la commission pour procéder après 18 heures.

M. Bellemare: Non.

M. Pagé: Non.

Le Président (M. Cardinal): II n'y a pas le consentement.

M. Pagé: On est prêts à siéger demain matin.

Le Président (M. Cardinal): C'est terminé. Il faut une motion ou un avis.

M. Johnson: Alors, dans les circonstances, j'aurais une motion à présenter dans ce cas...

Le Président (M. Cardinal): ... sur les travaux de la commission?

M. Johnson: ... sur les travaux de la commission, étant donné que nous ajournerons nos travaux à 18 heures et que je ne peux quand même pas introduire cette motion à 17 h 45 parce quelle est sans doute débattable. Cette motion serait à l'effet que, conformément...

Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous avant la motion...?

M. Johnson: Oui.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse de vous interrompre. Il y a un député qui a demandé la parole avant que vous ne fassiez votre motion.

M. Johnson: Ah bon!

M. Lavigne: M. le Président, je vous ai fait signe seulement pour que vous me placiez sur une liste lors des interventions tout à l'heure.

M. Pagé: Si le ministre a une motion aussi...

Le Président (M. Cardinal): S'il y a une motion, nous recommençons tout. Pour la bonne compréhension de tous, nous étions à entendre trois témoins, MM. Thériault, Lévesque et Mme Grignon. Cependant, le ministre a toujours le droit de parole et je lui donne ce droit pour présenter sa motion.

M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Motion requérant la présence de Me Pierre Fournier devant la commission

M. Johnson: Conformément à l'article 153 de notre règlement, qu'on retrouve à la page 81, on dit bien que lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents, et que cette personne refuse de le faire, la commission fait rapport de ce refus au président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit satisfaite.

Le secrétariat des commissions n'a pas requis la présence de Me Fournier ou de M. Turcot. Il les a invités à venir. Cependant, Me Fournier a jugé bon de tenir une conférence de presse au début de la semaine pour annoncer qu'il n'entendait pas se présenter à moins qu'il en soit requis.

Je pense que M. Fournier invoquait à ce moment-là des questions relatives au secret professionnel, mise en garde que j'ai moi-même faite lors de la première réunion de cette commission, où j'ai dit que nous demandions à M. Fournier simplement de comparaître pour qu'il puisse témoigner d'événements s'étant passés et qui nous permettraient d'éclaircir une partie du débat et non pas de lui demander de révéler des confidences sous le sceau du secret professionnel, bien entendu.

Je pense que M. Fournier aurait peut-être pu décider de se présenter et nous faire part de ses réserves. Je trouve regrettable qu'il ait choisi de ne pas répondre à l'invitation. C'est donc pourquoi je ferai motion pour que, dans un premier temps, quitte à ce que nous l'entendions sur les questions du secret professionnel, cette commission requière de Me Fournier qu'il se présente devant la commission, quand elle aura à siéger à nouveau, sans doute la semaine prochaine, de même que dans le cas de M. Yvon Turcot qui, peut-être pour d'excellentes raisons, n'a pu se présenter aujourd'hui, mais simplement pour être sûr qu'on n'a pas à refaire les mêmes choses, que cette commission requière également que M. Turcot se présente devant nous.

M. Pagé: Vous avez fait votre motion?

M. Johnson: Oui. Ma motion est que cette commission requière 1a présence de Me Fournier et de M. Yvon Turcot.

M. Pagé: M. le Président, sur la recevabilité de la motion.

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, juste un instant, s'il vous plaît! Je vais demander, comme toujours, à M. le ministre, même si cela prend quelques minutes, de me remettre un texte écrit de la motion pour que nous puissions en discuter, sur la recevabilité et sur le fond, s'il y a lieu. Est-ce que nous pouvons suspendre les débats?

M. Johnson: Oui, nous pouvons les suspendre deux minutes, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 17 heures.)

(Reprise de la séance à 17 h 5)

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît. Nous pourrons maintenant discuter sur la recevabilité, j'espère, dans un cadre que nous pourrons fixer ensemble. Je veux auparavant lire la motion telle qu'elle m'est remise par M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre: "Que cette commission requière la présence de Me Pierre Fournier, du district judiciaire de Montréal, à la prochaine séance de la commission aux date et lieu fixés par un ordre de l'Assemblée nationale".

M. le député de Portneuf, vous aviez le premier demandé la parole sur la recevabilité; le suivant était M. le député de Jonquière et, ensuite, M. le député de Johnson. Messieurs, j'ai pris l'ordre dans lequel les gens ont demandé la parole. Personne n'a parlé au nom du parti ministériel.

M. Bellemare: La motion... Une voix: Sur la recevabilité.

Le Président (M. Cardinal): Non, non, sur la recevabilité.

M. Bellemare: Oui, mais...

Le Président (M. Cardinal): MM. les députés de Portneuf, Jonquière, Johnson, est-ce que je pourrais demander à cette commission, sur la recevabilité, qu'on soit bref et de n'avoir qu'un représentant par parti, s'il vous plaît? Est-ce que j'ai ce consentement?

Merci. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je dois exprimer ma surprise, que le ministre du Travail, qui est généralement bien conseillé, d'une part, et qui, d'autre part, est avocat, en arrive à nous déposer une motion libellée comme celle-ci cet après-midi, en vertu, par surcroît, de l'article 153.

M. le Président, à plusieurs reprises, les commissions parlementaires et, à quelques reprises, l'Assemblée nationale ont requis la présence de certaines personnes à une commission pour se faire entendre sur un dossier qui intéressait ladite commission. Dans un premier temps, chaque fois que cela s'est fait, ces ordres indiquaient dans le libellé la date exacte et même l'heure pour laquelle la personne était convoquée, obligatoirement. Je me réfère à un cas bien spécifique que j'ai eu à vivre il y a quelque temps où, entre autres, mon bon ami et collègue le député de Jonquière est intervenu. Il aura à intervenir probablement tout à l'heure dans le même sens que moi pour vous faire part de nos doutes sur la question de la recevabilité. C'était donc lors de la commission parlementaire qui a étudié le dossier des pâtes et papiers. À un certain moment, on a demandé, je l'ai fait personnellement, à la compagnie Consolidated Bathurst de déposer ses bilans financiers, la compagnie s'y est refusée.

J'ai, à ce moment-là, demandé à la commission d'accepter que celle-ci émette un ordre obligeant la compagnie à comparaître et l'obligeant à venir déposer ses bilans financiers, ce que la compagnie a été obligée de faire et ce qu'elle a fait effectivement.

M. le Président, je me rappelle qu'à ce moment-là, le président de la commission — et on pourrait se référer au journal des Débats; j'oublie la date, mais c'était la fin de septembre ou le début d'octobre 1977 — tout le monde avait convenu qu'on se devait d'inclure, dans le libellé, dans le texte de la motion, une date précise, bien spécifique, bien exacte, même l'heure exacte de la journée à laquelle la personne était convoquée, ce qu'il n'y a pas dans le libellé.

Cela voudrait donc dire que, si on acceptait la motion telle que déposée par le ministre du Travail, la personne à qui l'ordre est soumis, à qui l'ordre devient exécutoire, serait, somme toute, obligée d'attendre, purement et simplement, le bon gré du leader du gouvernement. C'est le premier élément, en raison de son libellé.

Le deuxième élément, c'est que, telle que rédigée, cela voudrait donc dire que la commission parlementaire peut obliger une personne à comparaître et laisserait le soin au leader du gouvernement en Chambre de fixer une date par un ordre de la Chambre, ce qui remet en cause le principe des travaux de la commission parlementaire qui est souveraine de ses travaux. C'est à la commission à décider de la date et du moment exact pour convoquer la personne et non pas au leader du gouvernement. Je vois que le leader du gouvernement me fait des signes.

J'aurais bien aimé, lorsqu'on formait le gouvernement, qu'on dépose des motions comme celle-là. On aurait été à même de voir l'envolée et les nombreux motifs invoqués par le député de Saint-Jacques qui est présent dans la salle sans être membre de la commission.

M. le Président, c'est complètement irrecevable et, par surcroît, qu'on prenne le texte de l'article 153. Je me permets de le citer: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents et que cette personne refuse de le faire..."

M. le Président, vous vous rappellerez que ce matin, dès le début de nos travaux, j'ai demandé au ministre — je vous en ai fait part — de déposer une motion prévoyant les personnes qu'il entendait appeler et convoquer ici. La personne citée, c'est Me Fournier. La personne qui est citée dans le libellée de la motion du ministre n'a pas été convoquée par la commission, elle a été convoquée par le secrétariat des commissions. En aucun moment, et même si je l'ai demandé pour régulariser la situation, pour que ce soit fait dans un cadre légal, dans l'esprit de notre règlement, vous ne m'avez vu venir ce matin. Et quand je vous ai demandé ce matin de déposer une motion pour convoquer les personnes, c'était pour que cela respecte l'esprit et la lettre du règlement, c'est-à-dire que ces personnes soient convoquées par la commission parlementaire. C'est nous autres — ce n'est pas la Chambre en haut, ce n'est pas le secrétariat des commissions, ce n'est même pas le président de la commission, ce n'est pas le président de l'Assemblée nationale, et c'est encore moins le ministre — c'est la commission qui est maîtresse de ses travaux. C'est, somme toute, nous ici, après des échanges, après des votes à majorité, qui sommes appelés, qui sommes seuls habilités à déterminer qui doit être convoqué, ou non, devant cette commission pour se faire entendre et comparaître.

C'est d'ailleurs dans cet esprit, M. le Président, que le 26 septembre, dès le début des travaux au salon rouge, en haut, je faisais des représentations auprès du ministre par lesquelles je voulais bien objectivement mettre en doute la pratique qu'il avait de demander au secrétariat des commissions... D'ailleurs, je vais le citer. Il a dit: "Vous savez, je suis ministre sectoriel responsable. Il est normal et explicable que je demande au secrétariat des commissions de convoquer certaines personnes."

Je m'excuse, M. le Président, ce n'est pas au ministre à faire cela, c'est à la commission. Ce matin, si je vous ai demandé de déposer une motion, c'était pour régulariser la situation pour que ce soit selon l'esprit de notre règlement. Vous ne l'avez pas fait, vous avez donc à vivre avec la situation que vous avez engendrée par la prise de position de la majorité ministérielle et gouvernementale. Il n'y a aucune motion qui a appelé cette personne encore, sauf le secrétariat des commissions.

Si on acceptait le postulat voulant que le secrétariat des commissions ait le droit de prendre faits et causes, de prendre la place de droit qui revient à la commission, celle de convoquer les

personnes, cela n'aurait pas de bon sens; c'est un mépris de la souveraineté de la commission parlementaire des pouvoirs qui nous appartiennent.

L'article 153 ne peut pas s'appliquer, parce que la personne en question, contrairement à nos interlocuteurs aujourd'hui, n'a pas été convoquée par notre commission; mais ces derniers ont été convoqués par le secrétariat des commissions qui se compose de fonctionnaires qui doivent respecter les décisions de la commission. Mais, en l'occurrence, dans le cas qui nous occupe, il n'y a pas eu de décision de la commission. Tout ce qu'il y a eu, c'est un numéro, un appel téléphonique, une missive, ou une lettre, je ne sais trop, de la part du ministre du Travail demandant qu'un certain nombre de personnes, de groupes, d'associations, d'individus, etc., soient convoqués.

Il est bien dit selon le libellé: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y faire entendre — dans notre cas, il n'y en a pas eu d'appelée; on a eu seulement des invitations qui ont été formulées par le secrétariat des commissions; ce n'est pas la commission élue qui l'a convoquée — ou pour produire des documents et que cette personne refuse de le faire — elle n'a pas pu refuser de le faire à la suite d'un ordre de la commission, parce qu'il n'y a pas eu d'ordre, il n'y a pas eu d'appel de la commission — la commission fait rapport de ce refus..."

M. le Président, tout autre volet de la question de la recevabilité, même si, dans votre décision que vous allez rendre tantôt, vous dites: C'est recevable, parce que je tiens pour acquis que l'ordre du secrétariat des commissions équivaut à un ordre de la commission, même si c'était votre décision, dis-je, lorsque la personne refuse de le faire, la commission n'a pas à émettre un autre ordre pour la convoquer. La commission, tout ce qu'elle a à faire, c'est de faire rapport de ce refus au président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit satisfaite.

Sur deux tableaux, sur deux volets, c'est irrecevable, selon le libellé, pour les motifs que j'ai invoqués tout à l'heure. Si vous n'acceptez pas les motifs que j'ai invoqués. Le deuxième motif vaut encore davantage — trop fort ne casse pas — elle est irrecevable, parce que ce n'est pas à la commission d'émettre un deuxième ordre. C'est au président de l'Assemblée nationale à qui on doit faire rapport. (17 h 15)

Somme toute, Me Fournier ne peut pas être convoqué comme cela. Si vous n'acceptez pas le libellé, il faudra une motion de la commission pour le convoquer. C'est à ce moment seulement, s'il refuse de venir, qu'on pourra émettre un ordre ou encore, si l'ordre n'est pas respecté, le rapporteur de la commission fera rapport au président de l'Assemblée nationale, à savoir qu'il y a eu un ordre d'émis par la commission, chose qui n'a pas été faite encore, et que la personne a refusé de s'y présenter. Je me le rappelle fort bien, parce qu'entre autres... Vous savez, quand tu es député et que tu convoques la Consolidated Bathurst et que tu dis à ces gens de venir déposer leur bilan, ils n'aiment pas toujours cela. Ils ont tout regardé, ils ont étudié la question légale sous différents aspects toute une journée. Ils ont dû se soumettre à l'ordre. C'est un ordre adopté par les membres de la commission, et non pas émis par le secrétariat des commissions.

C'étaient les commentaires que je voulais vous formuler sur la recevabilité.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Portneuf. Vous m'éclairez, je verrai tantôt. M. le député de Jonquière, à votre tour de le faire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le Président. D'abord, je suis très heureux de constater que le député de Portneuf se rappelle cette commission parlementaire des pâtes et papiers où, je pense, il a lui-même présenté une motion en vertu de l'article 153, motion qui avait justement pour but de requérir la présence de la Consolidated Bathurst et de ses représentants, et également la production de documents, et tout cela, en vertu de l'article 153.

Je pense que le député de Portneuf mélange deux choses fondamentales: Tout d'abord, la date de réunion d'une commission parlementaire, c'est-à-dire à savoir si une commission peut se convoquer elle-même, et, d'autre part, l'assignation d'une personne à comparaître. Or, il est manifeste, à la lecture de l'article 140 de notre règlement, qu'une commission élue est convoquée par le secrétaire des commissions à la demande du leader parlementaire du gouvernement. Donc, une commission élue, même si elle a énormément de pouvoirs, n'a pas le pouvoir de se convoquer elle-même. Elle est soumise à plus haut qu'elle, c'est-à-dire à l'Assemblée nationale. L'article 140 nous précise de quelle façon une commission élue comme la nôtre peut siéger. C'est en vertu de l'article 140. Lorsqu'une commission parlementaire siège, c'est parce que le leader du gouvernement a fait appel, a demandé au secrétariat des commissions de remplir les devoirs qui lui sont désignés par l'article 140 de notre règlement de l'Assemblée nationale. Donc, c'est une chose, date de réunion d'une commission parlementaire, et cela, ce n'est pas dans l'attribution de cette commission-ci, sauf le respect que je dois à tous les membres de cette commission, mais c'est du ressort du leader du gouvernement qui fait la demande au secrétariat des commissions.

D'autre part, M. le Président, il y a le deuxième point, celui qui est le plus important aujourd'hui, c'est-à-dire qui a le pouvoir de convoquer un témoin à comparaître? Là, M. le Président, on en arrive à l'une des attributions de cette commission parlementaire qui a, en vertu de l'article 153, le pouvoir de requérir quelqu'un de se présenter. J'allais justement faire allusion, M. le Président, à la motion du député de Portneuf alors que j'étais moi-même président, où il n'y a eu aucune discussion, je pense, sur la recevabilité de la motion, que

j'ai déclarée recevable. La motion a été adoptée. L'assignation a été envoyée, de telle sorte que les assignés ont comparu. Et si, par hasard, les assignés n'avaient pas comparu, encore là, l'article 153 nous dit quoi faire. À ce moment-là, on fait rapport au président, non plus de la commission parlementaire, mais de l'Assemblée nationale.

M. le Président, je pense avoir amélioré l'argumentation du député de Portneuf, qui a quand même, dois-je le dire, plaidé en faveur de la recevabilité, même s'il essayait de plaider son irrecevabilité.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le député de...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! M. le député de Johnson.

M. Johnson: Est-ce que le député de Johnson me permettrait?

M. Bellemare: Est-ce que vous voulez me dire quelque chose? Je voudrais l'entendre. Je suis rendu sourd.

M. Johnson: Oui. Je suis bien conscient du fait qu'on pourrait passer jusqu'à 18 heures finalement sur ce débat de procédure et je pense que tout le monde tente de l'éviter... Oui, mais je demande simplement un privilège pour être sûr que ce n'est pas maintenant ou autrement...

M. Pagé: On va vous en accorder un, pour autant que ce n'est pas coutume.

Retrait de la motion

M. Johnson: Dans les circonstances, on a des invités ici, aujourd'hui. Je présume qu'en 45 minutes, on peut peut-être, puisque c'était fort bien amorcé...

M. Pagé: Oui, mais la motion, ce n'est pas nous qui l'avons présentée...

M. Johnson: Attendez un instant! M. Pagé: ... c'est vous.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Dans les circonstances...

M. Pagé: Vous n'aviez qu'à la présenter comme du monde.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!

M. Johnson: Dans les circonstances, si, pour terminer avec les témoins qui sont ici, nous y allions directement, nous ajournerons sine die à 18 heures et, lors de la prochaine réunion de cette commission, je pourrai procéder, à ce moment-là, à une motion, mais on n'aura pas fait perdre le temps de tout le monde et le temps de la commission.

M. Pagé: Est-ce que vous retirez votre motion?

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

M. Johnson: Dans les circonstances, et, ceci dit, M. le Président, sans préjuger de la valeur des arguments du député de Portneuf, mais plutôt en me référant à l'excellente argumentation...

M. Pagé: Laissez le président rendre sa décision.

M. Johnson: ... du député de Jonquière, aux fins d'accélérer les travaux de cette commission et ne pas nuire à tous nos invités et au reste des membres de la commission, je retirerais ma motion.

Le Président (M. Cardinal): Bon! Alors... M. Pagé: Sauvé par la cloche!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Cela avait été refusé, ça, voyons donc!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous savez bien...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! M. le député de Jonquière et M. le député de Portneuf, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Personne ne le saura...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm!

M. Bellemare: M. le Président, j'avais demandé la parole.

Le Président (M. Cardinal): Écoutez! Le vote, non. Devant le retrait de la motion, il n'est plus question de parler de sa recevabilité.

Il est une...

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît! Oui, sur quel sujet, M. le député de Johnson?

M. Bellemare: Sur l'incident qui vient de se produire d'écrire sur un bout de papier, sur le bout d'une table...

M. Pagé: C'est ça.

M. Bellemare: ... une motion, mon cher monsieur, qui, je pense, est contraire et irrecevable, parce que...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: ... à l'économie...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! À l'ordre!

M. Bellemare: ... même de notre règlement...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre!

M. Bellemare: ... et du droit parlementaire.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

M. Johnson: Vous aurez l'occasion de faire le débat la semaine prochaine...

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: C'est comme ça que vous m'avez enlevé mon droit de parole.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

Bon! Tous sont calmes. Celui qui est proposeur d'une motion, tant qu'elle n'a pas été débattue sur le fond, est toujours maître de sa motion et peut la retirer en tout temps.

M n'y a plus de motion devant cette assemblée, il n'y en a jamais eu.

M. Pagé: Bon! Au travail!

Le Président (M. Cardinal): Nous avons devant nous M. Lévesque, Mme Grignon et M. Thériault, et, au moment de l'ajournement de 12 h 30, la parole était à M. le député de Portneuf.

M. Pagé: On constate quand même qu'à cause de l'improvisation du ministre, on a encore perdu trois quarts d'heure, tout près d'une demi-heure, même trois quarts d'heure et presque...

Interrogatoire (suite)

M. le Président, j'ai des questions à poser. J'avais commencé ce matin à poser des questions à M. Thériault, à M. Lévesque. Je suis un peu comme le député de Johnson...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Portneuf, vous avez la parole...

M. Pagé: Oui, je continue.

Le Président (M. Cardinal): ... et vous êtes le seul.

M. Pagé: Merci. J'en étais à vous dire que je suis un peu comme le député de Johnson, je me demande si ce n'est pas une stratégie du ministre...

Le Président (M. Cardinal): Ne provoquez pas...

M. Pagé: C'est probable.

M. Bellemare: Pour ne pas entendre...

M. Pagé: J'aimerais demander à M. Thériault... Avant qu'on ajourne ce midi, on en était sur la question de la représentativité du groupe que vous représentez...

Je ne vous dérange pas? Non?

Le Président (M. Cardinal): Messieurs, à l'ordre! Pourrais-je compter sur la collaboration de tous et chacun.

M. Pagé: Surtout à ceux de votre droite.

Le Président (M. Cardinal): Retenez, non. Tous et chacun. Retenez tous vos impulsions. Le droit de parole est quelque chose de sacré pour un député et je vous le reconnais, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'en étais à vous demander... Les réunions qu'a tenues le groupe que vous représentez... J'aimerais peut-être avoir plus d'information parce qu'on se doit d'insister beaucoup sur la représentativité.

Vous avez allégué, M. Thériault, ce matin que vous étiez représentatif, que le groupe était représentatif des intentions des travailleurs qui sont à l'intérieur de l'usine. J'aimerais savoir quelle sorte de réunions ont été tenues. Tout le monde a-t-il été convoqué? Combien de travailleurs ont été convoqués? Cela s'est fait comment tout cela?

J'aimerais, somme toute, que vous donniez un peu de chair ou d'information sur le déroulement des différentes réunions qui ont amené les prises de décision dont on a fait état ce matin.

Le Président (M. Cardinal): M. Donat Thériault.

M. Thériault: M. le Président, la réponse à la question du député de Portneuf...

Le Président (M. Cardinal): Approchez votre micro ou parlez plus fort, s'il vous plaît.

M. Thériault: ... est la suivante. Dans son exposé, je croyais que Mme Grignon avait couvert toutes ces choses, mais je vais le répéter parce que c'est, en fait, ce qui a déjà été mentionné.

Il y avait exactement 55 employés sur 105 qui

assistaient à la réunion du 3 octobre qui a fait suite immédiatement à l'ajournement de l'assemblée de l'Union internationale des rembourreurs.

Ces 55 personnes avaient été convoquées par Mme Grignon, M. Lévesque, plusieurs autres, en fait par les 35 que j'avais rencontrés à la résidence de Mme Grignon avant l'assemblée du 3 qui comprenait, à ce moment, les mêmes douze que j'avais rencontrés...

La première fois, au commencement, j'en ai rencontré douze. Le lendemain, j'en rencontre 35 et ce sont eux qui se sont chargés, à la suggestion que je leur ai faite, de faire des appels téléphoniques aux 105 employés — employés, je dis bien, ceux qui n'avaient pas été mis à pied — pour les inviter à venir à cette assemblée.

Je n'ai fait aucune invitation à personne. C'est à leur syndicat. Je leur sers de conseiller. Donc, je leur ai conseillé d'en rejoindre le plus grand nombre possible et, apparemment, ils ont réussi à en rejoindre 55.

Il faut savoir que chez Commonwealth Plywood à Sainte-Thérèse, ce ne sont pas tous des gens de Sainte-Thérèse qui travaillent là. Il y en a de toutes les petites places environnantes. Il y en a même qui viennent de Lachute et même de plus loin. Donc, il y en a beaucoup qui n'ont pu être rejoints parce qu'ils étaient simplement en pension à Sainte-Thérèse et vu qu'ils ne pouvaient plus rentrer au travail depuis le 16 septembre, ils étaient retournés dans leur village. C'est la raison qu'on m'a donnée pour laquelle on avait réussi à en rejoindre 55 et qu'il n'y en avait que 55 de présents.

M. Pagé: Alors, sur 105 personnes, il y en a 55 qui se sont rendues à cette réunion et qui ont signé la fameuse carte dont on a fait état ce matin.

M. Thériault: II y en avait 55 à la réunion; quant à la signature des cartes, je ne les ai pas vérifiées.

M. Pagé: Combien de personnes ont signé ces cartes?

M. Thériault: II y en a 55 qui les ont signées, mais je n'ai pas vérifié à ce moment s'ils ont signé au moment de l'assemblée.

M. Pagé: Mais jusqu'à maintenant, combien y en a-t-il? Il y a combien de...

M. Thériault: Jusqu'à maintenant, il y en a autant qu'il y a d'employés au travail; il y en a 74, il y en a eu jusqu'à 97.

M. Pagé: Pendant la négociation de la convention collective, vous avez dû faire rapport aux membres à quelques reprises, je présume, j'espère.

M. Thériault: Oui, il y a eu une assemblée et, à ce moment-là, le nombre...

M. Pagé: Cela a été convoqué comment?

M. Thériault: À ce moment-là, cela a été convoqué plus facilement parce que les 55 étaient déjà à l'usine; donc, ces 55 étaient faciles à rejoindre.

M. Pagé: Et les autres?

M. Thériault: Lorsque vous parlez d'une deuxième assemblée, à ce moment-là, le nombre avait augmenté de 55 à 62.

M. Pagé: À la deuxième. M. Thériault: Oui.

M. Pagé: Cette deuxième assemblée était pour discuter de la négociation de la convention collective?

M. Thériault: C'est exact.

M. Pagé: Est-ce qu'il y a eu seulement une assemblée où vous avez discuté de la négociation de la convention collective?

M. Thériault: II y a eu une seule assemblée de tout le groupe d'ouvriers.

M. Pagé: D'accord. Il y en a 62 qui étaient présents sur combien?

M. Thériault: Sur 62 au travail. Parce que la première fois, on n'avait pas pu rejoindre les autres; on n'a pas pu les rejoindre non plus parce qu'on avait beaucoup moins de temps, je suppose, pour rejoindre les employés concernés, puisqu'ils étaient au travail.

M. Pagé: Est-ce que je comprends bien en disant qu'il y a des employés qui n'ont pu être rejoints pour assister à la réunion de la négociation de la convention collective?

M. Thériault: Si vous parlez des 105 non mis à pied, c'est exact. Il y en a qui n'ont pu être rejoints.

M. Pagé: Une question à M. Lévesque. Excusez-moi, je ne peux pas vous voir. J'espère que vous me comprenez. La première petite question: La personne qui vous a rappelé du bureau du premier ministre, ce ne serait pas M. Louis-Marie Dubé?

Le Président (M. Cardinal): M. Ernest Lévesque?

M. Lévesque (Ernest): Oui, cela se peut fort bien.

M. Pagé: M. Louis-Marie Dubé?

M. Lévesque (Ernest): Je crois bien que c'était M. Dubé, oui. D'ailleurs, le prénom, je ne peux me le rappeler.

M. Pagé: D'accord. M. Lévesque, j'aimerais avoir vos commentaires sur le rapport de médiation. Vous avez vu ce rapport?

M. Lévesque (Ernest): Oui, j'en ai pris connaissance. Je ne pourrais pas formuler beaucoup de commentaires parce que M. Thériault avait des commentaires à faire et on lui a dit de se taire là-dessus. Parce qu'on a étudié ce rapport-là ensemble.

M. Pagé: Vous m'excuserez, mais ce ne sont pas les commentaires de M. Thériault que je vous demande, ce sont les vôtres. Ce sont ceux des travailleurs en dedans. Est-ce que vous avez eu une assemblée pour prendre connaissance du rapport de médiation?

M. Lévesque (Ernest): Oui. Personne n'était d'accord pour l'accepter réellement. En fait, ce sont les recommandations qui ont été faites dans ce rapport-là.

M. Pagé: Personne n'était d'accord sur les constatations dans le rapport ou sur les recommandations des médiateurs.

M. Lévesque (Ernest): Un peu les deux.

M. Pagé: M. le Président, je m'excuse, mais j'aimerais retrouver mon rapport du conseil de médiation.

Le Président (M. Cardinal): Prenez le temps nécessaire.

M. Pagé: Alors, à la recommandation no 1, vous n'étiez pas d'accord sur cela, c'est-à-dire que le conseil de médiation recommande qu'on procède à l'établissement de la liste de tous les employés couverts par l'accréditation ainsi que leur ancienneté d'usine, le tout en date du 14 septembre, et ainsi de suite. Il y a plusieurs recommandations qui ont été formulées. Vous n'étiez pas d'accord?

M. Lévesque (Ernest): Non. M.Pagé: Pourquoi?

M. Lévesque (Ernest): Je vous l'ai dit tantôt, c'est parce qu'on l'a étudié ensemble et il y a pas mal trop de fausses déclarations.

M. Laplante: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au député de Portneuf de répéter sa question? Il n'a pas compris.

M. Pagé: Oui. Je vous ai demandé, M. Lévesque, si vous étiez d'accord ou non sur les recommandations. Je ne vous ai pas demandé, somme toute, si vous étiez d'accord ou non avec les constatations ou les commentaires du conseil de médiation dans le rapport qui a été soumis. Les recommandations bien spécifiques, un, deux, trois, quatre, cinq, six et sept. Est-ce que ces recommandations ont été discutées à l'assemblée? Vous m'avez dit que oui. Comment a été convoquée l'assemblée et combien y avait-il de personnes présentes à cette assemblée?

M. Lévesque (Ernest): II n'y a pas eu d'assemblée là-dessus.

M. Pagé: C'est tout, M. le Président. Il n'y a pas eu d'assemblée sur le rapport du conseil de médiation?

M. Lévesque (Ernest): Des employés?

M. Pagé: II n'y en a pas eu.

M. Lévesque (Ernest): Des employés, non.

M. Pagé: Bon! Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Portneuf. M. le député de Johnson. (17 h 30)

M. Bellemare: Ma première...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le député de Johnson! Pour éviter tout problème, par la suite, dans l'ordre reconnu à la séance précédente, M. le député de Sainte-Marie désire-t-il encore poser des questions? Il y a aussi M. le député de Beauharnois qui a demandé la parole. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Ma première question, M. le Président, s'adresse à M. Lévesque. Vous êtes président de quoi aujourd'hui, à part d'être président d'un groupe de personnes à l'intérieur de Commonwealth Plywood? Cela s'appelle comment? Vous êtes président de quoi?

M. Lévesque (Ernest): Disons qu'au tout début, j'étais président du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN; par la suite, je me suis posé des questions, étant donné que la CSN avait pris une injonction interdisant qu'on se serve de son nom. Alors, je pourrais mentionner que je suis le président du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood.

M. Bellemare: Est-ce qu'on peut comprendre aujourd'hui que vous représentez les rembour-reurs unis d'Amérique?

M. Lévesque (Ernest): Non, pas encore.

M. Bellemare: Non. Est-ce que vous êtes président à titre de représentant de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Bellemare: Non?

M. Lévesque (Ernest): Auparavant...

M. Bellemare: Alors, vous êtes représentant d'une union de boutique?

M. Lévesque (Ernest): II faudrait...

M. Bellemare: Faudrait, faudrait que le Code du travail s'applique, oui ou non. Vous êtes ou vous n'êtes pas. Vous êtes quoi?

M. Lévesque (Ernest): Je vais recommencer ma réponse. À l'entrée au travail, le 4 octobre, on a pris le syndicat en main et on m'a nommé président du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN. Par la suite, on a pris une injonction contre nous nous interdisant de nous servir de ce nom. Je me suis...

M. Bellemare: Vous représentez quoi, aujourd'hui?

M. Lévesque (Ernest): Les travailleurs intérieurs à la Commonwealth Plywood.

M. Bellemare: Dans aucune convention collective, vous ne pouvez répondre à une question concernant les employés de CSN, parce que vous ne les représentez pas. Vrai ou faux?

M. Lévesque (Ernest): Je ne comprends pas...

Le Président (M. Cardinal): Répétez la question, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je veux savoir si M. Lévesque est représentant, aujourd'hui, du groupe des travailleurs de Commonwealth Plywood à l'intérieur pour la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Aujourd'hui non.

M. Bellemare: Vous n'êtes pas le représentant de la CSN aujourd'hui.

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Bellemare: Êtes-vous le représentant des rembourreurs unis?

M. Lévesque (Ernest): Pas encore, on attend l'accréditation.

M. Bellemare: Vous êtes quoi, président d'une union de boutique?

M. Lévesque (Ernest): En attendant, oui.

M. Bellemare: Oui. Ma seconde question s'adresse à vous, M. Lévesque, ainsi qu'à Mme Grignon, pour savoir s'il y a eu une entente lors d'une assemblée pour faire donner l'ordre à votre conseiller, M. Thériault, d'imprimer des cartes, des fausses cartes avec le sigle de la CSN dessus. Est-ce que vous avez autorisé, est-ce que vous avez demandé conseil pour que les cartes soient imprimées avec le sigle de la CSN?

Le Président (M. Cardinal): La question s'adresse à M. Lévesque et à Mme Grignon?

M. Bellemare: Oui.

M. Lévesque (Ernest): II y a eu erreur sur la question, parce que les cartes ne portent pas le sigle de la CSN.

M. Johnson: Le nom de la CSN. M. Bellemare: Le nom de la CSN. M. Johnson: Le nom de la CSN. M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Bellemare: Le nom est là. Vous avez donné l'ordre à M. Thériault de les faire imprimer?

M. Lévesque (Ernest): Un ordre, c'est vite dit. On l'a demandé...

M. Bellemare: Vous avez suivi un conseil, vous avez demandé conseil ensemble, tous les trois, pour que les cartes soient imprimées comme ça, oui ou non?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Bellemare: D'accord. Mme Grignon, est-ce que vous dites oui vous aussi?

Mme Grignon: Oui.

M. Bellemare: Comment expliquez-vous que, dans le Code du travail, il y ait des sanctions extrêmement sévères pour ceux qui font des faux? Connaissant le problème, sachant que vous étiez pour imprimer des faux, comment se fait-il que, connaissant le Code du travail, sachant qu'il y a des sanctions très sévères, vous vous soyez pliés à cette intrusion? Comment se fait-il que vous vous êtes servis d'un faux, parce que vous ne représentez pas la CSN, vous ne représentez pas les rembourreurs unis, vous savez que c'est un faux? Est-ce que vous avez le droit d'aller à la banque, de faire un faux chèque et de l'encaisser? Non, au point de vue civil, non.

Au point de vue du Code du travail, c'est prévu, il y a des sanctions sévères pour ceux qui font des faux. Est-ce que vous admettez que c'est un faux?

M. Lévesque (Ernest): Non.

Le Président (M. Cardinal): Oui, justement. Attention, encore une fois, je répète ce que j'ai dit à la première séance, il ne faut pas que ça devienne une commission d'enquête.

M. Bellemare: Ce n'est pas une commission d'enquête, on est actuellement à vérifier si, oui ou non, le conseil de médiation dit vrai. C'est simplement cela, parce que le conseil de médiation dit: "Autre fait étrange, c'est que M. Donat Thériault admet avoir demandé de faire imprimer des cartes et ces cartes ont été remises à des employés pour les faire signer par d'autres employés, à l'intérieur de l'usine. "Voici une procédure que le conseil trouve étrange et inusitée. Nous voilà en présence d'un phénomène particulier, un représentant de l'Union internationale des rembourreurs unis d'Amérique fait du recrutement pour la CSN."

C'est le rapport du conseil de médiation. C'est cela que je veux éclairer, pour savoir véritablement où va le débat. M. Lévesque, je vous demande de me dire pourquoi vous avez acquiescé à un faux pour tâcher d'induire les travailleurs en erreur.

M. Lévesque (Ernest): Pour commencer, je dois vous dire que je ne suis pas avocat et je ne peux répondre à cette question tant et aussi longtemps que cette question ne sera pas débattue en cour, parce qu'elle est en cour actuellement.

M. Bellemare: M. Lévesque, je ne suis pas satisfait de votre réponse, parce que cela vous implique personnellement, de même que Mme Grignon, d'avoir participé, avec M. Thériault, à faire des cartes qui sont des faux. Vous savez qu'en vous servant de la CSN pour faire du recrutement ou du maraudage, vous n'étiez pas en loi. Il y a des sanctions très sévères dans le Code du travail qui vous empêchaient de faire cela. Vous l'avez fait quand même. Vous nous l'avez dit tout à l'heure.

M. Lévesque (Ernest): Mais il faudrait attendre que la cour décide elle-même qu'il ne s'agit pas de faux.

Le Président (M. Cardinal): Je dois intervenir. Votre réponse devant une commission parlementaire est parfaitement admissible, même si le député qui pose la question n'est pas satisfait de la réponse.

M. Bellemare: M. le Président, je pense que c'est là qu'est le noeud de la question et la compagnie qui est restée à l'écart depuis ce temps, voici ma troisième question qui la concerne. Est-ce que vous avez communiqué, M. Lévesque, Mme Grignon ou M. Thériault, avec la compagnie qui était au courant que ces cartes avaient été imprimées et portaient le nom de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Je vous répondrai, M. le Président, qu'aucun de nous trois n'était en mesure de dire que la compagnie était au courant, parce qu'on ne l'a pas consultée. On n'a pas communiqué avec elle pour cela. Cela a été décidé par des ouvriers que j'ai rencontrés en assemblée chez Mme Grignon, qui m'ont demandé de faire imprimer ces cartes que nous croyons, suivant notre interprétation du Code du travail qui dit "doit avoir signé une carte dûment datée et avoir payé un montant."

On nous accuse de toutes sortes de choses ici, on parle de sigle de la CSN quand il n'y en a jamais eu, on dit que c'est moi qui ai fait signer cela quand je n'en ai jamais fait signer, on se fait accuser de toutes sortes de choses et on n'a même pas le droit de se défendre, M. le Président.

M. Bellemare: M. le Président, je reviens à la lettre que j'ai lue ce matin, en date du 17 mars 1978, qui était adressée à Jean-Guy Morin, secrétaire général de la Confédération des syndicats nationaux, signée par Fernand Daoust de la FTQ. "Cher confrère, "Le bureau de la Fédération des travailleurs du Québec m'a chargé de vous faire savoir que nous nous désolidarisons totalement de l'Union internationale des rembourreurs et de son principal animateur, Donat Thériault, que la CSN affronte actuellement, à la Commonwealth Plywood. "M. Thériault, qui se sert illégitimement du nom de la FTQ quand bon lui semble, pratique une forme de syndicalisme dont la FTQ se dissocie. Aucun des syndicats locaux desservis par M. Thériault n'est affilié à la FTQ et cela, depuis plusieurs années. Le seul local de l'Union des rembourreurs qui demeure affilié à la FTQ est le local 402 qui groupe quelque 1600 travailleurs d'une vingtaine d'usines de Montréal. "Le souci que les responsables du local 402 portent à la démocratie syndicale et à un syndicalisme militant leur a d'ailleurs amené plusieurs problèmes avec Donat Thériault. "Nous espérons que vous réussirez à faire triompher la cause des vrais travailleurs de la Commonwealth Plywood contre cet employeur antisyndical et le syndicat de boutique qu'il abrite."

M. le Président, cette lettre est très éloquente, même si M. Thériault veut monter le ton et essayer de nous impressionner. Même en cour, M. le Président, il avait dit à un juge qu'il ne le ferait pas niaiser. Je ne pense pas que la commission parlementaire va accepter de telles observations. Nous sommes ici pour essayer de trouver un remède, un moyen, pour régler ce problème qui languit depuis près d'un an.

M. Thériault, est-ce que vous êtes conscient que vous avez conseillé vos adeptes à imprimer des cartes avec les lettres de la CSN?

M. Thériault: M. le Président, qu'on me mette des mots que je n'ai pas dits dans la bouche, j'ai trop de respect de la loi et des juges pour avoir dit à un juge ce que M. Bellemare vient de dire. Je n'ai jamais dit une chose semblable en cour, à aucun juge.

M. Bellemare: On l'a trouvé dans les rapports qui sont faits ici, M. le Président, dans les rapports des jugements de la Commonwealth Plywood.

M. Thériault: Vérifiez donc avec le juge pour voir si j'ai dit cela, il m'aurait fait enfermer tout de suite, si j'avais dit cela. Voyons donc, il faut tout de même être sérieux, M. le Président.

M. Bellemare: On l'a lu, c'est contenu ici dans le rapport des jugements qui ont été entendus et rendus.

M. le Président, je ne vous mets pas les mains dans la bouche, je vous demande si vous êtes conscient... Je ne vous mets pas les mots dans la bouche, mais je voudrais savoir de M. Thériault s'il est conscient qu'il a fait un faux.

M. Thériault: M. le Président, je réponds à cette question que je ne suis pas conscient d'avoir fait un faux et je crois que je ne suis pas dans l'erreur et que c'est M. Bellemare qui est dans l'erreur. Ce n'est pas un faux.

M. Bellemare: Je n'ai pas besoin de vous pour m'accuser. C'est parce que vous avez-vous-même, ce matin, admis une récidive, en disant que vous aviez employé les mêmes moyens dans une autre réunion à Chambly. Là, vous avez voulu récidiver et je pense que c'est un des grands troubles qu'on rencontre à cause justement de ce M. Thériault qui est un indésirable, qui est condamné par la Fédération des travailleurs du Québec, qui est, mon cher monsieur, tout le trouble à la Commonwealth Plywood. C'est à cause de lui qu'on vit présentement la commission parlementaire et c'est à cause de lui aussi que des centaines d'autres ont perdu leur position...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le député de Johnson, je vous rappelle à l'ordre. Nous avons convenu que les députés poseraient des questions. Il ne s'agit pas pour le moment de faire des affirmations entre nous. Nous avons des témoins devant nous qui sont invités. M. le député de Johnson, s'il vous plaît.

M. Bellemare: M. le Président, si j'ai dit ce que je viens de dire, c'est parce qu'après avoir étudié le dossier comme je me le devais, j'ai constaté que l'âme dirigeante de tout ce trouble, le "trouble maker", comme on l'appelle, c'est M. Thériault. C'est là qu'est arrivé...

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Johnson, à l'ordre!

M. Bellemare: J'ai le droit de dire, mon cher monsieur, les conclusions qui me sont données par les rapports que j'ai lus. Si je ne m'adresse pas à vous, à qui vais-je m'adresser?

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, j'ai le devoir aussi de vous rappeler à l'ordre. N'accusez pas les autres de récidiver, si vous le faites vous-même, s'il vous plaît.

M. Bellemare: Je veux poser une question à madame qui a dit, ce matin: "Nous avons demandé à M. Thériault s'il pouvait au moins personnellement nous conseiller et nous aider à atteindre ce but." Quel était le but? "M. Thériault nous a donc suggéré, nous de la base, de prendre en main le syndicat qui serait accrédité, parce que ce sera notre..." Mme Grignon, M. Thériault vous a-t-il dit de prendre n'importe quel moyen, de prendre même ce qui était illégal pour arriver à votre fin?

Mme Grignon (Hélène): Pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

M. Bellemare: Pardon?

Mme Grignon: Pourriez-vous répéter votre question?

M. Bellemare: "Nous avons demandé à M. Thériault s'il pouvait au moins personnellement nous conseiller et nous aider à atteindre ce but." Quel est le but? "Le but que M. Thériault nous a suggéré, c'est que c'est à nous de la base de prendre en main le syndicat qui serait accrédité, parce que ce sera notre syndicat à nous." M. Thériault, à ce moment-là, vous a-t-il parlé, par des moyens déloyaux ou par des moyens illégaux, de faire des faux?

Mme Grignon: II n'a pas encore été prouvé que les cartes étaient fausses et, pour nous, ce ne sont pas des cartes fausses.

Le Président (M. Cardinal): Un instant! Question de règlement par M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je voudrais soulever une question de règlement.

Le Président (M. Cardinal): Plus fort, je ne vous entends pas.

M. Mailloux: Je voudrais soulever une question de règlement. Depuis seize ans que je siège ici en cette Chambre, c'est la première fois qu'il m'est donné de voir des témoins à la barre questionnés de façon aussi directe sans avoir la protection d'un avocat pour les conseiller, de témoignages qui ultérieurement vont servir contre eux. Quand on regarde le mot qu'a employé la commission, "conseil de médiation", elle a été extrêmement prudente. Elle dit qu'elle trouve étrange, elle ne porte pas de jugement, elle trouve étrange...

Une voix: Et inusité.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mailloux: ... et inusité. D'accord, les deux. Elle ne porte pas de jugement, à savoir que c'est un faux, que des gens ont falsifié, que des gens sont directement responsables. Je trouve également étrange moi-même, voyant ainsi des avocats

qui ont l'habitude de défendre des gens qui n'ont pas la formation juridique, qui laissent continuer les parlementaires interroger des personnes qui n'ont pas la protection voulue et qui pourront se retrouver ultérieurement devant les tribunaux avec toutes les conséquences que cela entraîne. On peut avoir, quant à nous, à l'esprit n'importe quelte interprétation du témoignage que M. Thé-riault, que madame, ou que M. Lévesque ont donné, mais de là à porter des accusations formelles qui pourront avoir des conséquences inimaginables par la suite, j'ai l'impression que la commission actuellement ne joue pas son rôle d'éclairer le public. Il appartiendra aux tribunaux de porter des jugements sur les gestes après que la cause aura été entendue. On est devenu un tribunal actuellement. (17 h 45)

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Charlevoix... Un instant. À l'ordre, s'il vous plaît! Une autre question de règlement? Attendez un peu. On va commencer par en régler une.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, M. le Président.

M. Mailloux: Je ne dis pas cela pour blanchir qui que ce soit, mais je trouve cela étrange.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Charlevoix, j'ai suivi depuis le début tous les travaux de cette commission. Ce n'est pas la première fois qu'une question semblable vient devant nous. Vous vous rappellerez que, tantôt, j'ai rappelé à l'ordre à deux reprises, M. le député de Johnson. À la première séance, je l'avais fait aussi en soulignant que ce n'était pas une commission d'enquête. J'ai même indiqué à des témoins invités que leurs réponses étaient admissibles par la commission, même si elles ne satisfaisaient pas le député. Je pense que la commission a fait son devoir, mais il faut bien entendre une question avant de savoir si elle est recevable ou si elle ne l'est pas.

M. le député de Jonquière, sur une nouvelle question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement. Le député de Charlevoix a fait allusion aux différents avocats qui pourraient se trouver autour de cette table. Je tiens à dire tout d'abord qu'on présume que les gens qui sont devant nous connaissent la loi et les lois. Ils sont dans une guérilla judiciaire depuis au moins un an. Ils ont le droit à un avocat et ils le savent. Ils auraient pu être accompagnés, s'ils avaient voulu, d'un avocat. La compagnie est accompagnée d'un avocat. Je tiens à dire que personnellement, ce matin, je vous ai demandé une directive, à savoir: Est-ce que l'immunité parlementaire que vous aviez accordée aux témoins s'appliquait également aux aveux de commission d'actes criminels ou autres qui auraient pu être commis dans le cadre de ce conflit?

M. le Président, je parle en mon nom person- nel, mais je tiens quand même à dire qu'il n'appartient pas à un avocat membre de cette commission parlementaire de voir à suggérer à ceux qui sont censés connaître les lois du travail et les autres lois de se prémunir devant cette situation.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. le député. Je ne veux pas qu'on fasse un débat sur une question de règlement. Je vais répondre ceci: J'ai refusé, ce matin, de donner une opinion juridique exactement pour la même raison. Il m'apparaît interdit à un président ou même à un député qui fonctionne au sein d'une commission de conseiller les témoins qui sont devant lui et de conseiller même ses collègues. C'est à chacun de se prémunir.

M. le député de Charlevoix, je vais être très généreux. Je vous demanderais de ne pas faire un débat sur la question de règlement. Si vous avez un mot à ajouter, faites-le très brièvement.

M. Mailloux: M. le Président, je ne ferai pas de débat. Je voulais simplement ajouter à ce que vient de dire le député de Jonquière, que je n'ai pas tant voulu viser les avocats qui sont à cette table, mais j'ai moi-même constaté que la compagnie, elle, a à ses côtés des avocats, que des personnes moins nanties n'en ont pas et qu'elles n'ont peut-être pas été suffisamment éclairées pour se faire accompagner, ou elles n'ont peut-être pas les moyens d'être accompagnées d'avocats ici, à cette table...

Le Président (M. Cardinal): Bon! D'accord!

M. Mailloux: ... et c'est là que je vois le danger. Je ne voudrais pas me trouver à leur place!

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): La compagnie est accompagnée d'un avocat, la CSN est accompagnée d'un avocat. Je ne vois pas pourquoi l'autre syndicat ou l'autre présumé syndicat ne serait pas accompagné d'un avocat.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Je...

M. Vaillancourt (Jonquière): Toutes les parties ont un avocat, sauf une.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Je l'ai indiqué tantôt. C'est à chacun de se prémunir. Je ne veux pas recommencer ceci.

Est-ce que le député de Johnson a encore d'autres questions?

M. Bellemare: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Bon! M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Si vous ne nous serrez pas trop le carcan, M. le Président, on va faire notre devoir. Ceci dit, je voudrais demander à M. Thériault s'il a signé ou s'il a conseillé à ses adeptes de signer une convention collective?

M. Thériault: Je n'ai pas signé de convention collective et je n'ai pas conseillé d'en signer. Il y a eu une assemblée de 62 ouvriers. Ce sont eux qui ont pris la décision.

M. Bellemare: Comment cela se fait-il que le rapport dit que vous étiez présent à la signature?

M. Thériault: J'ai dit qu'il y avait un lot de faussetés dans le rapport, M. le Président.

M. Bellemare: Le conseil de médiation, M. Blain, dit, mon cher monsieur, dans son rapport, que vous étiez un des signataires.

M. Thériault: C'est encore faux.

M. Johnson: Non, il ne dit pas qu'il est un des signataires dans le rapport. Il ne dit pas ça dans le rapport.

M. Bellemare: Oui.

Le Président (M. Cardinal): II ne faudrait pas que, de part et d'autre, il y ait des affirmations qui...

M. Thériault: Mais, M. le Président, si on n'est pas venu avec un avocat, c'est parce qu'on nous dit, depuis toujours, au ministère du Travail ou au gouvernement et d'après les journaux, qu'il ne faudrait pas en faire une guérilla judiciaire. Là, on nous fait un reproche parce qu'on n'a pas amené un avocat.

Le Président (M. Cardinal): M. Thériault, je vais vous aider tous les trois davantage. Je vais aller jusque là. M. Thériault: Pardon? Je n'ai pas compris.

Le Président (M. Cardinal): Je vais tenter de vous aider davantage. Présentement, vous agissez volontairement, à la suite d'une invitation. Vous n'êtes pas sous serment, et vous bénéficiez d'une immunité, en droit civil, tant que vous vous tenez dans les règles que j'ai indiquées ce matin. Plus clairement, si une question vous embarrasse sur le plan juridique, je ne puis pas être votre conseiller, mais vous pouvez refuser de répondre, et j'aurai une décision à rendre à ce moment-là. D'accord?

M. Thériault: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Je vous en prie! M. le député de Johnson, est-ce que...

M. Bellemare: Je voudrais savoir de M. Thériault s'il a participé, de près ou de loin, à la conception de la convention collective qui a été signée par la compagnie et les représentants de la CSN à l'intérieur?

M. Thériault: Je crois que j'ai déjà répondu à ça. J'ai dit que j'avais agi comme conseiller du comité de négociation, comme porte-parole au moment des négociations.

M. Bellemare: Mais est-ce que c'est M. Léves-que qui a signé ou si c'est vous?

M. Thériault: Ce sont tous les membres du comité qui ont signé la convention, M. le député.

M. Bellemare: Est-ce que la convention collective qui a été signée vous accordait certains avantages au point de vue pécuniaire, au point de vue des griefs, au point de vue des vacances, au point de vue des clauses normatives?

M. Thériault: La convention collective qui a été signée, évidemment, accordait des avantages, et elle est déposée... Je crois bien que, là encore, si je ne veux pas me faire dire de fermer ma boîte, vous l'avez déjà en main, je crois, M. le député.

M. Bellemare: Oui, je l'ai lue.

M. Thériault: II y a eu augmentation des salaires, il y a des avantages aussi dans la phraséologie de la convention, mais, dans des circonstances semblables, c'est évident que cette convention n'a pas été améliorée comme on l'aurait voulu, comme on l'aurait aimé. Mais il y a eu beaucoup d'améliorations mineures et non pas majeures.

Le Président (M. Laplante): Autres questions?

M. Bellemare: Je voudrais savoir de M. Lévesque ou de Mme Grignon s'ils ont rencontré les avocats de la compagnie avant la signature de la convention collective.

M. Lévesque (Ernest): On les a rencontrés à trois séances de négociation.

M. Bellemare: Y a-t-il eu des ententes que vous avez acceptées ou avez-vous laissé tomber certaines prétentions que vous croyiez justes et que la compagnie vous avait demandé de retirer?

M. Lévesque (Ernest): La compagnie ne nous a pas demandé de retirer... Mais il y a eu des ententes sur des clauses que l'on voulait avec la compagnie. Quand on a une séance de négociation, c'est pour conclure des ententes.

Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres questions, M. le député de Johnson?

M. Bellemare: L'assemblée que vous avez tenue était-elle représentative, oui ou non, de tous les employés de l'intérieur? Oui ou non?

M. Lévesque (Ernest): Je voudrais savoir quelle assemblée.

M. Bellemare: L'assemblée du 19 septembre.

M. Lévesque (Ernest): Vous vous trompez d'assemblée et de syndicat.

M. Bellemare: Non. Le 19 septembre, les travailleurs débraient contre ce lock-out déguisé par un vote de 95%. Le 22 septembre, injonction provisoire prohibant le piquetage. Le 3 octobre, le commissaire-enquêteur émet l'accréditation en faveur du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood-CSN. Le 4 octobre, la compagnie porte 42 accusations pour outrage au tribunal. C'est vrai tout cela?

M. Lévesque (Ernest): Le 19 septembre, le comité, M. Thériault comme conseiller, n'a eu aucune assemblée. Ces assemblées ont commencé le 26 septembre. Le 19 septembre, ce furent des assemblées des gens de l'extérieur.

M. Bisaillon: ...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Sainte-Marie, à l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez attendre votre tour.

M. Bisaillon: Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît. M. le député de Johnson, une autre question?

M. Bellemare: Comment se fait-il qu'avec les cartes que vous aviez fait signer, que vous prétendez légales, qui sont des faux parce que vous n'aviez pas le droit, vous, les rembourreurs, de mettre la CSN sur des cartes, comment se fait-il que vous ayez pu dûment convoquer des assemblées régulières?

M. Lévesque (Ernest): À cet égard, je pourrais vous répondre que nous avons toujours pensé qu'en tant que travailleurs depuis plusieurs années à la compagnie, nous étions dans notre droit, les travailleurs non mis à pied, de pouvoir convoquer ces assemblées et de prendre notre syndicat en main.

M. Bellemare: Comment admettez-vous, M. Lévesque, que M. Thériault, que vous savez représenter les Rembourreurs unis, vienne un jour vous dire que vous êtes les représentants de la CSN à l'intérieur? Comment m'expliquez-vous cela? Est-ce que c'est pour avoir plus de chance de vous faire accréditer oui ou non?

M. Lévesque (Ernest): Dans les exposés de ce matin, il a été fait mention de cela, comme quoi nous nous sommes organisés et nous avons demandé à M. Thériault de nous conseiller sur les moyens à prendre pour retourner au travail.

M. Bellemare: Et il vous a conseillé de faire des faux?

M. Vaillancourt (Jonquière): Une question de règlement. Excusez-moi, M. le député de Johnson. M. le Président, le ministre du Travail a employé environ quinze minutes, le député de Portneuf également, environ dix ou quinze minutes, notre règlement prévoit 20 minutes. Le député de Sainte-Marie a des questions à poser. Il est le prochain sur votre liste. Cela fait au-delà de 30 minutes que le député de Johnson pose des questions.

M. Bellemare: Pardon.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Jonquière, je vais trancher cela tout de suite. L'intervention du député de Johnson peut être de 20 minutes comme pour tout membre de cette commission.

M. Vaillancourt (Jonquière): Justement, il a commencé à 17 h 20.

M. Bellemare: Pardon à 17 h 40.

Le Président (M. Laplante): Les 20 minutes ne sont pas écoulées encore. Il lui reste encore six minutes s'il veut les employer.

M. Bellemare: Oui, monsieur. Mais, M. le Président, devant l'autorité reconnue du député de Sainte-Marie, je pense que je vais lui céder la parole pour lui donner la chance, avant 18 heures, de pouvoir faire ses interventions. Votre intervention, M. le député de Jonquière, aura valu au député de Sainte-Marie le privilège de m'arrêter.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'était le but recherché, M. le député de Johnson.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Est-ce que j'en suis rendu à M. le député de Sainte-Marie?

M. Bisaillon: M. le Président, je ne pense pas que j'aurai le temps d'entreprendre un interrogatoire avant l'ajournement de 18 heures. Cependant, comme le fait que je prenne la parole maintenant me permettra d'intervenir le premier la prochaine fois, je serai sûr de prendre tout le temps nécessaire à ce moment-là. Je voudrais cependant profiter de l'occasion...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Sainte-Marie, me permettez-vous cependant...

M. Pagé: Cela va dépendre de la motion du ministre et de l'ordre de la Chambre.

Le Président (M. Cardinal): À l'ordre! Pour ne surprendre personne, vous savez que tantôt j'ai

reçu un refus de consentement unanime de la commission, je devrai donc, à 18 heures précises, d'office...

M. Bisaillon: Voilà, mais si vous me laissez parler, ce ne sera pas long. Cela va se terminer avant 18 heures.

Le Président (M. Cardinal): Vous avez la parole.

M. Bisaillon: Je voudrais profiter de l'occasion pour faire un certain nombre de commentaires à M. Thériault et à M. Lévesque pour leur indiquer dans quel sens je poserai mes questions et j'interviendrai lors d'une prochaine séance, parce que vous serez encore appelés comme témoins à ce moment-là. Je voudrais vous indiquer, premièrement, que c'est le Parlement qui convoque la commission parlementaire et que c'est donc devant le Parlement que vous avez à répondre aux questions qui vous sont posées.

J'ai remarqué ce matin — et on m'a souligné le fait — qu'à un moment donné, à la fin de la séance de la matinée, j'avais haussé le ton et que je m'étais impatienté. Je voudrais, M. Thériault, M. Lévesque, Mme Grignon, m'excuser d'excès de caractère que j'ai pu avoir à la fin de la matinée et vous prier de penser, pendant la période de temps où vous allez être en dehors de cette commission, qu'il serait peut-être utile, dans vos réponses aux questions que je formulerai la semaine prochaine que, de votre côté, vous baissiez le ton dans vos réponses et que vous répondiez le plus honnêtement et le plus sincèrement possible.

Le troisième commentaire, et c'est le dernier. M. Thériault, cela s'adresse à vous particulièrement, je dois vous avouer — c'est pour vous mettre à l'aise pour la prochaine fois — que le type de syndicalisme que vous pratiquez ne m'est pas familier, ne m'est pas sympathique non plus et qu'en conséquence, j'ai de forts préjugés, après avoir lu le dossier, à votre endroit. Il vous appartiendra donc, dans le genre de réponses que vous nous ferez — ça, c'est pour tous les trois — de me convaincre du contraire. Je ne voudrais pas jouer au chat et à la souris et faire croire que je n'ai pas un penchant acquis à l'avance à un groupe de travailleurs qui n'est pas le vôtre.

Si je tiens à vous le dire, c'est pour éviter qu'on assiste à du camouflage, par exemple, comme celui auquel on a pu assister à la dernière commission parlementaire. Je n'ai pas de message de personne à passer, j'ai des questions sérieuses à vous poser et ces questions proviennent du type de syndicalisme que je connais et que j'ai pratiqué, qui n'est sûrement pas le vôtre.

Le Président (M. Cardinal): Cela étant...

M. Bisaillon: Ceci dit, M. le Président, je pense qu'on serait prêt à ajourner.

Le Président (M. Cardinal): Cela étant dit, je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie, les travaux de cette commission... un instant, à l'ordre, s'il vous plaît! Oui, Me Casgrain?

M. Casgrain: Une seule question. Il me semble possible que vous convoquiez cette assemblée pour la semaine prochaine. J'aimerais vous dire en passant que, pour ma part, et peut-être également pour M. Bazin, cela peut être très difficile la semaine prochaine, mais on essaie d'accommoder les gens le mieux qu'on peut — je sais bien que vous passez avant tout le monde — et de faire l'impossible. Si, par hasard, dans votre sagesse, il vous arrivait de penser qu'une semaine autre que la semaine prochaine conviendrait, je suis très respectueux pour le Parlement, je n'ai pas besoin de faire de grands dessins, je vous demanderais de bien vouloir y penser, cela nous accommoderait fort si c'était une autre semaine. (18 heures)

Le Président (M. Cardinal): Oui, Me Bazin.

M. Bazin: M. le Président, simplement pour enchaîner, il y a une cinquantaine de plaintes qui sont entendues devant le commissaire du travail et, après plusieurs ajournements, nous sommes convenus de procéder les 10, 11 et 12. M. Caine est en contre-interrogatoire à l'heure actuelle devant le commissaire du travail. J'ajoute ça au dossier. Il va y avoir une question de disponibilité à un moment donné.

Le Président (M. Cardinal): Merci messieurs. C'est au leader parlementaire qu'il faut transmettre ces renseignements. Ce n'est pas le président qui convoquera.

Oui, M. Norbert Rodrigue.

M. Rodrigue (Norbert): Je voudrais simplement souligner, devant les membres de cette commission, un fait concret que vous connaissez déjà, mais qu'il m'apparaît important de dire. Les travailleurs concernés sont en grève depuis plus d'un an. Dans la fixation de la date, on apprécierait, les travailleurs apprécieraient que cela ne tarde pas trop.

Le Président (M. Cardinal): On prend note de tout cela. M. le ministre, un mot de la fin très bref s'il vous plaît.

M. Johnson: Encore une fois, je voudrais remercier l'ensemble de ceux qui se sont présentés aujourd'hui d'avoir été patients. On fera l'impossible, au moins, indépendamment des formalités, des motions, etc., pour faire savoir aux intéressés quelle est la date ou quelles seront les dates possibles, etc., en essayant d'accommoder tout le monde, dans la mesure du possible, l'Opposition pour commencer, comme d'habitude, et, évidemment, les parties. Je vous assure que de notre côté comme de celui du bureau du leader, on verra à vous donner avis d'une façon ou d'une autre, assez de jours d'avance au moins pour que ce soit raisonnable.

Le Président (M. Cardinal): Malgré tout, merci à tous et j'ajourne sine die.

Fin de la séance à 18 h 3

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