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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le jeudi 19 octobre 1978 - Vol. 20 N° 171

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Conflit de travail à la Commonwealth Plywood


Journal des débats

 

Conflit de travail à la Commonwealth Plywood

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! On peut commencer? C'est une troisième séance de la commission permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre. Je donne au début la liste des membres de la commission. Les membres sont: M. Bellemare (Johnson); M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Forget (Saint-Laurent)...

M. Pagé: Remplacé par M. Blank (Saint-Louis).

Le Président (M. Cardinal): M. Forget (Saint-Laurent) est remplacé par M. Blank (Saint-Louis). M. Gravel (Limoilou) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Johnson (Anjou); M. Lavigne (Beauharnois); M. Pagé (Portneuf); M. Roy (Beauce-Sud); M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont: M. Blank (Saint-Louis) n'est plus intervenant, mais membre. M. Brochu...

M. Pagé: ... remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

Le Président (M. Cardinal): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), intervenant. M. Brochu (Richmond); M. Gosselin (Sherbrooke); M. Jolivet (Laviolette); M. Laplante (Bourassa); M. Lefebvre (Viau); M. Paquette (Rosemont); M. Saint-Germain (Jacques-Cartier)...

M. Pagé: Remplacé par M. Mailloux (Charlevoix).

Le Président (M. Cardinal): M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M. Mailloux (Charlevoix); M. Samson (Rouyn-Noranda).

J'appelle maintenant la liste des invités. J'aimerais qu'on m'indique si les personnes sont présentes ou absentes, et si possible, sans autre commentaire ou débat pour le moment. Alors, les organismes ou personnes convoquées: L'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord, représentée par M. Donat Thériault.

M. Thériault: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci.

M. Bellemare: ... la CSN?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous ne sommes pas à la période des questions.

M. Bellemare: Excusez-moi!

Le Président (M. Cardinal): Mme Hélène G ri-gnon?

Mme Grignon: Présente.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Commonwealth Plywood, de Sainte-Thérèse, M. William P. Caine.

M. Caine: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Byers, Casgrain et Associés, Me Pierre Fournier.

M. Casgrain (Philippe): M. le Président, Byers, Casgrain et Associés sont ici. Ils sont représentés par moi-même, Philippe Casgrain, et par M. Jean Bazin. Quant à M. Pierre Fournier, il n'est pas ici. Il n'est pas ici, M. le Président, parce qu'il a été invité à venir personnellement pour témoigner. Il a déclaré publiquement — pour les fins du dossier, je vous le répète — qu'il n'entend pas, volontairement, offrir de violer son secret professionnel. Pour sa part, si vous voulez qu'il soit ici, vous devrez le convoquer par voie de subpoena; il n'entend pas témoigner sur son secret professionnel.

Le Président (M. Cardinal): Merci, Me Casgrain.

M. Ernest Lévesque?

M. Lévesque (Ernest): Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Société Intercommunica, M. Yvon Turcot?

M. Turcot (Yvon): Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Turcot.

Lors de l'ajournement de notre dernière séance, nous avions devant nous trois invités qui étaient à la barre, M. Donat Thériault, M. Ernest Lévesque et Mme Hélène Grignon — vous êtes devant les micros — et une demande d'ajournement avait été faite par un député qui, ce matin, n'est pas présent et je constate que j'ai non seulement vu, mais entendu un député du même parti, M. le député de Joliette-Montcalm.

Interrogatoire des représentants du

syndicat a l'intérieur de Commonwealth

Plywood (suite)

M. Chevrette: Merci, M. le Président. J'aurais quelques questions à poser tout d'abord à M. Lévesque et, ensuite, j'irai à M. Thériault.

M. Bellemare: ... en faveur de M. le député de Sainte-Marie, M. Bisaillon. Il n'y est pas.

Le Président (M. Cardinal): Le député de Sainte-Marie, exactement, qui est absent; je l'ai mentionné.

M. Chevrette: II vient d'appeler...

Le Président (M. Cardinal): Je l'ai mentionné sans le souligner.

M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Un instant! Je pense que Me Cutler veut parler.

M. Cutler (Philip): Mon nom, c'est Philip Cutler. Je suis de l'étude légale Robinson, Cutler, Sheppard et Associés.

Je suis ici comme procureur, malheureusement pour la première fois, pour M. Ernest Léves-que, Mme Hélène Grignon et M. Donat Thériault.

Le Président (M. Cardinal): Merci, Me Cutler.

M. Cutler: Le but, c'était de m'identifier. Je m'excuse...

Le Président (M. Cardinal): Vous avez parfaitement raison, et nous avons d'ailleurs souligné, à la dernière séance, que ces personnes qui sont présentement invitées et non pas convoquées par subpoena avaient le droit de se faire aviser par un procureur.

M. Cutler: Merci.

Le Président (M. Cardinal): Vous êtes le bienvenu, monsieur.

Je redonne la parole au député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais, dans un premier temps, demander à M. Lévesque de me décrire un peu comment ont commencé les négociations avec la compagnie. Pourriez-vous me décrire tout d'abord comment vous avez procédé pour le début des négociations?

M. Lévesque (Ernest): Tout d'abord, ce fut un télégramme envoyé à la compagnie.

Le Président (M. Cardinal): M. Lévesque, pourriez-vous approcher votre micro ou vous rapprocher du micro, parce que vous savez que tout est enregistré et on aime bien vous entendre?

M. Lévesque (Ernest): Tout d'abord, cela a été un télégramme envoyé à la compagnie afin de la rencontrer pour négocier.

M. Chevrette: Vous souvenez-vous de la date du télégramme?

M. Lévesque (Ernest): Je crois que c'est au début d'octobre, mais la date précise, je ne peux la mentionner.

M. Chevrette: Vous serait-il possible de la fournir à la commission...?

M. Lévesque (Ernest): La date précise?

M. Chevrette: Le télégramme, copie du télégramme.

M. Lévesque (Ernest): II faudrait le demander à la secrétaire, Mme Hélène Grignon. C'est elle-même qui a envoyé le télégramme.

M. Chevrette: Si vous pouviez, d'ici la fin de l'après-midi, nous fournir une copie de ce télégramme, cela serait peut-être important qu'on regarde cela.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm, vous venez de parler de la fin de l'après-midi. J'aurais peut-être dû expliquer à cette commission la motion adoptée à l'Assemblée nationale. Nous allons siéger jusqu'à 12 h 30. Nous ajournerons pour des fins techniques sine die jusqu'à ce qu'une motion soit faite en Chambre après 14 heures pour que nous puissions à nouveau nous rencontrer probablement dans cette même salle. On le décidera...

M. Casgrain: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui Me Casgrain.

M. Casgrain: Sur cette question, j'avais cru comprendre que vous alliez recommencer à siéger cet après-midi à 16 heures. Je crois voir que peut-être vous voudrez siéger auparavant. Je vous souligne simplement que Me Bazin et moi-même avons d'autres entrevues cet après-midi. J'ai moi-même une entrevue avec un des collègues de M. Johnson de 15 heures à 16 heures, disons 15 h 45, et nous aimerions bien être présents lorsque vous recommencerez vos travaux. Je vous en parle, parce que je pense qu'il est important que nous soyons présents, à moins que M. Johnson ne veuille pas nous poser de questions.

M. Johnson: Si on reprenait à 16 heures...

Le Président (M. Cardinal): La commission pourrait certainement, cet après-midi, pro forma, se réunir et dire: Nous recommençons à 16 heures tout simplement.

M. Casgrain: Très bien. Merci, M. le Président.

M. Johnson: M. Casgrain, vous pourriez être là à 16 heures?

M. Casgrain: Au plus tard à 16 heures.

Le Président (M. Cardinal): Alors, M. le député de Joliette-Montcalm, je pense qu'il fallait régler cette question au préalable.

M. Chevrette: Je reviens, M. Lévesque. Vous avez dit qu'il y a eu un télégramme envoyé à la compagnie vers le début d'octobre. Vous est-il possible de nous donner la date précise?

M. Lévesque (Ernest): La date précise, non. Personnellement, je ne m'en souviens plus.

M. Chevrette: Avez-vous déjà lu le télégramme en question?

M. Lévesque (Ernest): Oui. Mais, en mots exacts...

M. Chevrette: Vous avez lu vous-même le télégramme? Il existe.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: D'accord. Donc, vous serait-il possible, d'ici la fin de l'après-midi — parce qu'il y aura une autre séance à 16 heures — de nous trouver cette copie et de déposer le contenu du télégramme devant les membres de la commission?

M. Cutler: M. le Président, si vous me le permettez, j'apprends qu'il s'agit d'un télégramme qui a fait l'objet d'un litige devant les tribunaux et qui a été déposé. Alors, je vais sûrement pouvoir en obtenir une copie. Je communiquerai personnellement avec la cour de Saint-Jérôme pour voir à cela.

M. Casgrain: Incidemment, ce télégramme fait partie des exhibits que vous aviez demandé à M. Caine d'apporter et, dans le volume que M. Caine a produit, vous trouvez la copie du télégramme en question que nous avons apportée sur demande de la commission.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce que ceci satisfait la commission?

M. Chevrette: D'accord. En tout cas, cela me satisfait de voir le texte et la date.

Le Président (M. Cardinal): Merci, Me Cutler et Me Casgrain. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: La dernière fois, vous avez parlé, M. Lévesque, de la préparation du projet. Pourriez-vous nous décrire d'une façon un peu plus substantielle comment vous avez préparé le projet de convention collective?

M. Lévesque (Ernest): Tout d'abord, le comité s'est réuni et on a étudié l'ancienne convention.

M. Chevrette: Quel comité?

M. Lévesque (Ernest): Le comité que les employés s'étaient nommé.

M. Chevrette: Vous dites que les employés se sont nommé un comité.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Est-ce que vous pourriez situer approximativement la date de la formation de ce comité?

M. Lévesque (Ernest): Le 3 octobre.

M. Chevrette: Le 3 octobre, les employés se réunissent et préparent un projet de convention.

M. Lévesque (Ernest): Pas directement le 3 octobre, le projet de convention.

M. Chevrette: Non?

M. Lévesque (Ernest): II y a eu une mention de commencer à préparer une convention.

M. Chevrette: Le 3 octobre. M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Là, je suppose que les 4, 5, 6, etc., vous vous réunissez et vous préparez un contrat collectif avec l'aide de M. Donat Thériault, conseiller.

M. Lévesque (Ernest): C'est cela.

M. Chevrette: Vers quelle date, combien de jours après votre projet fut-il préparé?

M. Lévesque (Ernest): Approximativement vers le 8 ou le 9, je crois.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez convoqué vos membres pour leur soumettre le projet de convention collective préparé?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Vers le 9?

M. Lévesque (Ernest): La date est approximative.

M. Chevrette: Votre projet est préparé, le 9, supposons. C'est à ce moment-là que vient le télégramme?

M. Lévesque (Ernest): Non, il a été mentionné, le soir du 3 octobre, d'envoyer le télégramme pour fins de négociations à venir.

M. Chevrette: Mais le soir du 3 octobre, le comité est-il formé?

M. Lévesque (Ernest): Le comité est formé ce soir-là.

M. Chevrette: C'est ce soir-là que vous envoyez le télégramme?

M. Lévesque (Ernest): Pas directement ce soir-là, un instant. C'est dans les jours qui ont suivi.

M. Chevrette: Des journées après, vous avez envoyé le télégramme, soit le 4 ou le 5, bon. Votre projet était préparé vers le 9. Est-ce que les membres se sont prononcés sur le projet?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Combien y avait-il de personnes pour accepter le projet de convention collective?

M. Lévesque (Ernest): 62 à 65 personnes.

M. Chevrette: 62 à 65 personnes. Est-ce que les gens qui faisaient partie de l'accréditation qui avait été demandée durant la période légale ont été convoqués pour se prononcer sur le projet de convention?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Est-ce que votre conseiller syndical, à l'époque, vous a dit que la CSN avait eu une demande d'accréditation et qu'elle s'était désistée?

M. Lévesque (Ernest): Vous voulez dire... Expliquez mieux votre question.

M. Chevrette: Je vais essayer. Vous aviez un conseiller syndical, que vous aviez choisi vous-mêmes, c'est-à-dire les gens de l'intérieur, si j'ai bien compris votre témoignage de l'autre jour. Même M. Thériault, qui a témoigné devant nous, nous a dit: Nous nous sommes désistés de l'Union des rembourreurs d'Amérique parce que nous savions que la CSN détenait la majorité; d'accord? Vous avez témoigné par la suite, M. Lévesque et vous avez dit: Nous autres, on voulait prendre notre syndicat en main, parce que notre désir est de travailler à l'intérieur.

Mais vous saviez que la CSN détiendrait le certificat dans les jours suivants. Vous saviez que le 3 octobre, la CSN obtenait l'accréditation?

M. Lévesque (Ernest): Le 3 octobre même, je ne le savais pas, mais on l'a appris par la suite.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez appris que la CSN avait son accréditation avant de décider de négocier ou après avoir décidé de négocier?

M. Lévesque (Ernest): Après, je pense. Parce qu'on a décidé de négocier le 3 octobre et le 3 octobre, personnellement, on ne savait pas qu'elle était déjà accréditée ce jour-là.

M. Chevrette: Mais vous saviez qu'elle était en instance d'accréditation.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Est-ce que votre conseiller syndical vous a bien dit que c'est le syndicat accrédité qui a le pouvoir de négocier?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: II vous l'avait dit. Est-ce qu'il vous avait dit que vous n'aviez pas le droit, comme tels, de vous prévaloir d'une accréditation qui n'était pas à vous?

M. Lévesque (Ernest): Je crois qu'il a été fait mention que le syndicat, c'était nous et que c'était à nous à le prendre en main. Le syndicat accrédité était pour la CSN.

M. Chevrette: Je vais reprendre ma question. Vous n'étiez pas membres de la CSN au moment où celle-ci a demandé une accréditation?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Le jeu que vous avez fait, que vous avez vous-même raconté, c'est que vous avez signé des cartes de la CSN, pour vous rendre membres de la CSN. C'est bien cela?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Vous avez vous-même dit que les cartes avaient été imprimées sur les ordres de M. Donat Thériault?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Donc, vous saviez que ce n'étaient pas directement des cartes de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: A partir de là, est-ce que c'est M. Thériault qui vous a dit qu'en signant des cartes sur lesquelles il y avait le nom de la CSN, automatiquement, vous étiez membres de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): II nous a dit que, pour négocier et signer une convention, il fallait appartenir au syndicat accrédité.

M. Chevrette: Est-ce que vous avez demandé à votre conseiller syndical à l'époque s'il y avait du danger de vous présenter pour et au nom d'un syndicat que vous aviez combattu vous-même?

M. Lévesque (Ernest): La réponse a été que le syndicat nous appartenait, autant à ceux qui étaient en dedans qu'à ceux qui avaient voulu faire la grève.

M. Chevrette: Est-ce que vous saviez, à l'époque qu'il y en avait plus en dehors qu'en dedans qui avaient signé des cartes de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Selon vos principes ou selon les conseils que vous avez reçus — j'ignore lequel des deux — vous n'avez jamais été de la CSN auparavant?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: M. Thériault vous avait dit qu'il se désistait, que la CSN aurait de toute façon un syndicat? N'avez-vous pas pensé, à l'époque, qu'il aurait été bon de convoquer tous ceux qui avaient signé des cartes de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Oui, si tous les autres avaient fait de même, pour l'assemblée qui a eu lieu le 19 septembre, s'ils avaient convoqué tout le monde.

M. Chevrette: Mais vous, vous n'aviez pas signé une carte de la CSN, n'est-ce pas?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Vous attendiez-vous que la CSN vous convoque, alors que vous n'aviez pas signé une carte de la CSN et que vous combattiez la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Non. Je m'attendais qu'elle convoque les 40 employés qui travaillaient le 19 septembre et les 70 ou 75 employés qui étaient retournés chez eux par crainte de passer la ligne de piquetage. Là-dedans, il y en avait beaucoup qui avaient signé pour la CSN et qui n'ont pas été convoqués.

M. Chevrette: Vous avez vérifié cela personnellement?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Vous saviez que la CSN avait tenu des réunions et qu'elle avait convoqué ses membres qui avaient signé une carte de la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Elle les a convoqués sur la ligne de piquetage, le lundi 18 septembre.

M. Chevrette: Tous ceux qui avaient signé une carte CSN pouvaient aller à la réunion?

M. Lévesque (Ernest): Qui avaient signé, oui.

M. Chevrette: Bon. En faisant signer le nombre de cartes que vous aviez, vous avez dit: Le syndicat nous appartient; le syndicat nous appartient pour ceux qui sont à l'intérieur et non pas pour ceux qui sont à l'extérieur.

M. Lévesque (Ernest): Cela appartient aux deux.

M. Chevrette: Cela appartient aux deux, mais, quand vous vous êtes réunis, que vous avez rédigé un projet de convention collective...

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: ... ceux qui ont signé une carte CSN et qui étaient en conflit ont-ils assisté aux réunions?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Ils n'ont pas assisté à votre réunion. Pourtant, ce sont eux qui avaient demandé l'accréditation.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Vous saviez que l'accréditation appartenait, à ce moment-là, à la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Porter le nom de la CSN, pour vous, c'était uniquement pour les fins de négocier?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Ce n'était pas pour les fins de devenir un militant de la CSN, c'était uniquement pour négocier un contrat collectif.

M. Lévesque (Ernest): II faut s'entendre là-dessus. Si la CSN avait voulu bien faire, on serait tous aujourd'hui militants de la CSN.

M. Chevrette: A ce moment-là, je comprends que c'est peut-être facile à dire, mais comment expliquez-vous que vous l'ayez combattue et que vous n'ayez jamais vous-même signé une carte de la CSN, à part les cartes imprimées par M. Thériault?

M. Lévesque (Ernest): J'ai combattu, comme tous ceux à l'intérieur. On a combattu le fait que la CSN avait convoqué des assemblées, sans convoquer tout le monde. Tout ce monde n'était pas tout à fait de bonne humeur. C'est ainsi que tous ceux qui n'avaient pas été convoqués ont pris le syndicat en main et, par la suite, cela s'est enchaîné.

M. Chevrette: Vous dites que, le 4 ou le 5 octobre, vous avez avisé la compagnie. Dans les jours subséquents, en tout cas, au 3 octobre, vous avisez la compagnie, vous préparez un projet de convention collective. Qui a convoqué la compagnie? Est-ce que c'est M. Lévesque, ou Mme Grignon, ou M. Thériault?

M. Lévesque (Ernest): Par le télégramme, c'est Mme Grignon.

M. Chevrette: C'est Mme Grignon qui a envoyé le télégramme à la compagnie. Merci.

Le 9 ou le 10 octobre, vous rencontrez la compagnie pour négocier. D'accord?

M. Lévesque (Ernest): D'accord. (10 h 30)

M. Chevrette: Vous avez dit tantôt que les employés s'étaient prononcés sur le projet...

M. Lévesque (Ernest): De rencontrer la compagnie pour négocier.

M. Chevrette: Qui étaient les porte-parole patronaux, dans la négociation?

M. Lévesque (Ernest): Présents, il y avait M. Caine, je crois, à la première rencontre, et Me Fournier, je crois, mais ce n'était pas directement une négociation, à l'instant même.

M. Chevrette: Le 9 ou le 10 octobre?

M. Lévesque (Ernest): La date précise, je ne peux pas la mentionner.

M. Chevrette: Qui était le porte-parole syndical?

M. Lévesque (Ernest): M. Thériault, moi-même et...

M. Chevrette: La première journée, comment cela s'est-il passé? Expliquez-moi donc cela.

M. Lévesque (Ernest): Cela a été surtout pour demander une rencontre officielle pour fins de négociation, et ce qui s'enchaîne. Je ne peux pas détailler mot à mot tout ce qui s'est dit, mais...

M. Chevrette: Est-ce que la deuxième rencontre a eu lieu le lendemain ou quelques jours plus tard?

M. Lévesque (Ernest): Quelques jours plus tard, je pense.

M. Chevrette: Cela veut dire vers le 12 ou le 11.

M. Lévesque (Ernest): A peu près.

M. Chevrette: Assistiez-vous à la deuxième rencontre?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Qu'est-ce qui s'est passé à la deuxième rencontre? Est-ce que les porte-parole patronaux étaient les mêmes?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Qui était-ce?

M. Lévesque (Ernest): Me Bazin, je crois.

M. Chevrette: Est-ce qu'il était seul?

M. Lévesque (Ernest): Avec M. Caine.

M. Chevrette: Avec M. Caine. Vous autres, vous étiez M. Thériault, vous-même et Mme Gri-gnon...

M. Lévesque (Ernest): Et Marcellin Pilon et Luigi De Luca.

M. Chevrette: Est-ce que la compagnie vous a demandé si vous étiez accrédités?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas répondre là-dessus.

M. Chevrette: Est-ce que la compagnie vous a demandé si vous aviez une charte de syndicat, une incorporation ou une constitution? Est-ce qu'il y a eu des discussions autour de ces sujets entre le porte-parole patronal et le syndicat?

M. Lévesque (Ernest): Là-dessus, je ne suis pas capable de vous répondre.

M. Chevrette: Comment cela s'est-il passé? Vous vous êtes présentés, vous vous êtes donné la main, je suppose...

M. Lévesque (Ernest): Tout ce que je peux dire, c'est que, durant cette rencontre, on a vraiment commencé à négocier les clauses.

M. Chevrette: Vous avez bien dit tantôt que, vers le 9, vos membres se sont prononcés sur cela. Il y a eu une première rencontre et, quelques jours après, il y a eu une autre rencontre; donc, cela nous amène au 11, 12 ou 13. A cette deuxième séance dont vous parlez, est-ce qu'il s'est conclu une convention collective cette journée-là?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Combien y a-t-il eu de journées de négociations?

M. Lévesque (Ernest): En tout, on s'est rencontré trois fois.

M. Chevrette: Trois jours d'affilée ou bien à intervalle?

M. Lévesque (Ernest): Je crois que c'est arrivé une fois que c'était à intervalle, et les deux autres fois, cela a été d'affilée.

M. Chevrette: Vous n'étiez pas au courant que cela prenait un avis de huit jours pour négocier? Est-ce que votre représentant syndical vous a dit que cela prenait huit jours, un avis de huit jours, selon l'article 40 du Code du travail, pour négocier?

M. Lévesque (Ernest): Je ne me souviens pas de cela.

M. Chevrette: Vous ne le saviez pas. Quand vous avez décidé de signer une convention collective pour et au nom du syndicat CSN, est-ce que vous saviez, à l'époque de la signature, que la CSN avait été accréditée?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Là, vous le saviez. Est-ce que votre porte-parole syndical le savait? M. Thériault?

M. Lévesque (Ernest): A la signature de la convention, oui.

M. Chevrette: Est-ce que l'employeur savait que la CSN était accréditée?

M. Lévesque (Ernest): Cela a dû. Je ne le sais pas.

M. Chevrette: Est-ce que vous aviez discuté avec l'employeur du fait que la CSN avait été accréditée, dans les rencontres que vous aviez?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas répondre là-dessus, je ne m'en souviens pas.

M. Chevrette: Vous ne vous en souvenez pas. Vous avez reçu une mise en demeure le 12 octobre, est-ce que vous vous souvenez de cela?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: De ne pas utiliser le nom de la CSN. Comment se fait-il que, le lendemain, ce qui est le 13, vous ayez signé une convention? Comment m'expliqueriez-vous cela? Il n'est plus question d'un manque de souvenir. Vous avez reçu une mise en demeure avant de signer la convention.

M. Lévesque (Ernest): Oui, d'accord...

M. Chevrette: Pourquoi avez-vous signé une convention collective le lendemain, alors qu'il y avait une mise en demeure de ne pas utiliser le nom de CSN?

M. Lévesque (Ernest): C'est parce que je crois sincèrement qu'un avocat ne peut pas nous donner d'ordres directs, qu'on puisse les mettre en pratique et les écouter tout le temps.

M. Chevrette: Mais la mise en demeure, pour vous... Vous saviez que vous n'étiez pas de la CSN, comme telle, dans votre for intérieur.

M. Lévesque (Ernest): Dans mon for intérieur, je ne peux pas dire...

M. Chevrette: Vous sentiez-vous comme appartenant à la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Par le fait même que j'avais signé des cartes...

M. Chevrette: Pas avec ce que vous nous avez dit.

M. Lévesque (Ernest): Par le fait même que j'avais signé des cartes, je me sentais de la CSN.

M. Chevrette: C'est votre droit, remarquez bien.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Mais le 12, vous le saviez; le 13, vous avez signé. Est-ce qu'on vous a dit, M. Lévesque... Remarquez bien que si je vous pose toutes ces questions, c'est parce que je vous considère un peu victime dans tout cela. Le 13 octobre, vous a-t-on dit qu'il fallait que vous déposiez des règlements du syndicat en même temps que la convention collective que vous veniez de signer? Est-ce qu'on vous avait dit ça?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: On ne vous avait pas dit ça. Vous ne saviez pas que ça prenait les constitutions de l'union pour venir à bout de signer un contrat et de déposer ça?

M. Lévesque (Ernest): Oui, mais je ne serais pas allé en demander.

M. Chevrette: Je comprends. Vous aviez signé des cartes qui n'étaient pas celles de l'union. Vous étiez mal pris pour aller en demander, bien sûr, et vous aviez une mise en demeure en plus. Mais il y a quelqu'un qui faisait du syndicalisme depuis 30 ans, qui aurait pu vous dire ça, puisqu'il était votre conseiller. Il ne vous a pas dit ça?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Est-ce que la compagnie a discuté avec vous autres, en groupe, du fait qu'il y ait eu une mise en demeure? Parce que la mise en demeure a dû avoir été servie à la compagnie aussi. Parce que le matin que vous avez signé votre fameuse convention, le 13, vu qu'il y avait une mise en demeure le 12 et qu'il y avait eu des cartes... Est-ce que la compagnie savait que vous aviez fait signer des cartes CSN?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas vous le dire.

M. Chevrette: Est-ce que la compagnie vous a demandé, le premier matin que vous vous êtes présentés: De quel syndicat êtes-vous? Qui représentez-vous, vous autres?

M. Lévesque (Ernest): Le premier matin?

M. Chevrette: Le premier matin des négociations, vers le 9, ou à la deuxième séance, vous a-t-elle dit: Qui représentez-vous? Etes-vous accrédités? Quelle centrale représentez-vous?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas vous répondre, parce que depuis un an, il s'est dit bien des choses. J'en ai oublié beaucoup.

M. Chevrette: Est-ce que je me trompe, si, dans les faits, M. Lévesque, vous assistiez à ça, vous, dans le fin fond, et ça vous dépassait un petit peu, les événements, parce qu'il y avait beaucoup de juridique dans ça et vous étiez mêlé devant tout ça? Est-ce que je me trompe en interprétant...

M. Lévesque (Ernest): Vous ne vous trompez pas sur un point. Disons que j'ai été... Quand le conflit a commencé à se dérouler ainsi, la séparation qui s'est faite a été un peu surprenante.

M. Chevrette: Vous, la question des avis de négociation, les délais, des constitutions que ça prenait, la question des cartes truquées, ça, vous

ne saviez pas que cela pouvait éventuellement être jugé illégal ou non?

M. Lévesque (Ernest): J'ai trouvé ça un peu surprenant aussi, mais par le fait que je n'ai jamais appartenu à un comité exécutif auparavant et quant au syndicat, j'allais aux assemblées, mais, de temps en temps. Je n'étais pas assez calé là-dedans. Je trouvais ça surprenant, c'est certain.

M. Chevrette: Pourriez-vous me parler un peu du style de la négociation qui se passait là? Exemple: Vous êtes arrivés, vous avez déposé un projet, je suppose?

M. Lévesque (Ernest): Oui. M. Chevrette: A la compagnie? M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Cela, c'est vers le 9 ou le 10, qu'on a dit.

M. Lévesque (Ernest): C'est ça, oui.

M. Chevrette: Trois jours après, c'est signé. Voulez-vous me décrire ces trois jours-là? Vous vous présentez devant l'employeur. Qu'est-ce que vous avez fait?

M. Lévesque (Ernest): Disons qu'on a commencé avec le projet qu'on a présenté afin d'étudier les clauses. On les a présentées; ils les ont étudiées. On est revenu. On a étudié clause par clause. Ensuite, il y a eu des discussions là-dessus. Nous sommes revenus.

M. Chevrette: Les discussions se faisaient toujours entre votre petit comité, M. Bazin et M. Caine?

M. Lévesque (Ernest): Pas nécessairement, parce qu'on a eu une rencontre pour nous présenter et il y a eu une petite affaire de difficulté. Nous sommes revenus négocier. Par la suite, cela a été accepté.

M. Chevrette: Est-ce qu'il y a eu des accrochages majeurs sur des clauses?

M. Lévesque (Ernest): Majeurs, pas tellement, je ne pense pas.

M. Chevrette: Au moment de la signature de la convention collective, aviez-vous discuté...? Pourriez-vous me dire où ces négociations avaient lieu?

M. Lévesque (Ernest): Ce n'était pas tellement une négociation. C'était une présentation. La première a eu lieu à un bureau d'avocats.

M. Chevrette: Pardon?

M. Lévesque (Ernest): A un bureau d'avocats.

M. Chevrette: Lesquels?

M. Lévesque (Ernest): Je crois que c'était Byers, Casgrain, Bazin. Nous nous sommes rendus là rencontrer M. Caine. Par la suite, cela s'est déroulé dans une salle du restaurant Sainte-Rose, à Laval.

M. Chevrette: Cela a-t-il toujours été au bureau des avocats de la compagnie?

M. Lévesque (Ernest): Non. Vous n'avez peut-être pas compris. Les autres rencontres ont eu lieu au restaurant Sainte-Rose, à Laval.

M. Chevrette: Et cela a pris trois jours au maximum pour régler tout cela?

M. Lévesque (Ernest): il y a eu une journée... et, après cela, il y a eu un intervalle. Il y a eu deux autres jours, je crois, on a eu trois séances de négociation.

M. Chevrette: Trois séances de négociation, tout était réglé. Avez-vous discuté avant la signature de la convention, officiellement, comment vous pourriez régler le sort de ceux qui, de bonne foi, parce que vous avez parlé de bonne foi dans votre petit exposé, aidé de M. Thériault, vous aviez préparé des boniments l'autre jour... Dans vos boniments, c'était dit que vous vouliez reprendre en main votre syndicat et vous affirmez ce matin, dans un même souffle, que vous avez du monde qui serait prêt à aller travailler, mais qui était empêché d'entrer par la ligne de piquetage. Avez-vous discuté avec la compagnie comment faire entrer ces gars qui, de bonne foi, étaient bloqués à la porte? C'étaient des vrais travailleurs de Commonwealth Plywood?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Mais c'étaient vos "chums".

M. Lévesque (Ernest): Oui, mais...

M. Chevrette: Ils voulaient entrer au travail, ces gars-là?

M. Lévesque (Ernest): Je n'ai pas discuté de cela toute cette journée-là avec la compagnie.

M. Chevrette: Une fois la convention signée, y avait-il des clauses dans votre convention que vous veniez de signer qui protégeaient les gars qui voulaient entrer et qui ne le pouvaient pas?

M. Lévesque (Ernest): A cause de quoi?

M. Chevrette: Dans votre convention collective. Vous m'avez dit tantôt qu'il y avait du bon monde qui voulait entrer au travail et que la ligne de piquetage de la CSN empêchait d'entrer. Et ils sont toujours grévistes. Avez-vous inclus des clauses dans la convention collective que vous avez signée avec M. Caine pour venir à bout de donner

de l'ouvrage à ceux de l'extérieur qui voulaient entrer, qui voulaient travailler?

M. Lévesque (Ernest): Sur ce fait, j'ai dit tantôt que la journée où les gens avaient été empêchés d'entrer et qu'ils sont retournés chez eux, cela se passait le 19 septembre. C'est loin d'être à la signature de la convention.

M. Chevrette: Oui, mais il y en a toujours dehors du monde.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Dans la convention, aviez-vous une clause disant: Ceux qui sont à l'extérieur, qui ne peuvent entrer pour le moment, auront cependant priorité d'embauche? Avez-vous pris soin de négocier pour et au nom de ceux que vous vouliez protéger? Vous n'avez pas pensé à cela du tout?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Au niveau de la négociation comme telle, soit M. Thériault ou le porte-parole patronal, avez-vous discuté de mesures à prendre pour régler le sort de ceux qui voulaient travailler et qui étaient toujours à l'extérieur? Y a-t-il eu des allusions à cela?

M. Lévesque (Ernest): Non, parce que, tel que dit dans mon exposé, j'avais eu aussi une rencontre avec des employés, avec un employé, avec des permanents de la CSN, et je connaissais leurs intentions. Je n'avais pas d'affaire à leur donner des bonnes intentions de ma part non plus.

M. Chevrette: Avant de signer la convention, avez-vous convoqué tout le monde?

M. Lévesque (Ernest): Ceux qui travaillaient.

M. Chevrette: Vous avez convoqué tous les gens de l'intérieur pour accepter les offres de la compagnie?

M. Lévesque (Ernest): Pour leur offrir le projet de convention, s'ils étaient d'accord, très bien. Mais s'ils n'étaient pas d'accord, là...

M. Chevrette: C'était la veille de la signature? M. Lévesque (Ernest): Je crois que oui.

M. Chevrette: Cela s'est-il fait pendant les heures de travail ou en dehors des heures de travail?

M. Lévesque (Ernest): En dehors des heures de travail.

M. Chevrette: A quel endroit?

M. Lévesque (Ernest): Dans le sous-sol chez Mme Grignon, à sa demeure privée.

M. Chevrette: Combien y avait-il de gens?

M. Lévesque (Ernest): Comme je l'ai dit tantôt, 62, 65.

Une Voix: C'est un grand sous-sol!

M. Chevrette: M. Lévesque, peut-être une couple de petites questions encore avant de poser des questions à M. Thériault. Je voudrais savoir, au moment où vous avez signé la convention collective, qui vous disait comment procéder pour aller la déposer, ce que cela vous prenait pour la déposer. Est-ce vous qui êtes allé déposer la convention collective? (10 h 45)

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Qui est-ce?

M. Lévesque (Ernest): M. Thériault.

M. Chevrette: Est-ce qu'il vous a demandé copie de la constitution?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Est-ce que vous aviez une constitution à votre syndicat?

M. Lévesque (Ernest): J'ai répondu tantôt que nous en aurions eu une si on avait pu rencontrer la CSN, mais je ne pense pas qu'ils nous en auraient donné une.

M. Chevrette: Est-ce que vous aviez envoyé un avis aux membres avant les assemblées? Comment convoquiez-vous vos assemblées?

M. Lévesque (Ernest): Au "break " où à l'heure du dîner. On disait: Telle journée, telle heure, à tel endroit il y aura une assemblée.

M. Chevrette: Quelle a été la réaction des membres quand vous leur avez proposé le résultat de vos négociations? Est-ce que cela est passé avec enthousiasme, à l'unanimité? Pouvez-vous me décrire cela?

M. Lévesque (Ernest): Non. Il y a eu un peu de chiard.

Le Président (M. Cardinal): Un instant. Il y a une partie qui est manquée parce que même au journal des Débats il y a des difficultés. Je vous rappelle qu'il faut parler dans le micro et aussi fort que possible. Il y a beaucoup de monde ici.

M. Lévesque (Ernest): D'accord.

Le Président (M. Cardinal): Justement, je sentais que, dans la salle, on en manquait des bouts. Allez.

M. Chevrette: Voulez-vous reprendre votre

réponse? Vous avez dit qu'il y avait eu un peu de chiard, si j'ai bien compris?

M. Lévesque (Ernest): J'ai dit: II y a eu un chiard. Tout le monde n'est pas d'accord sur un projet de convention.

M. Chevrette: Mais est-ce que l'employeur savait, M. Lévesque, que vous aviez travaillé pour l'Union des rembourreurs d'Amérique durant la période de maraudage? Vous n'étiez pas identifié à la CSN vous?

M. Lévesque (Ernest): Je n'ai pas travaillé pour l'Union des rembourreurs d'Amérique non plus.

M. Chevrette: Mais vous n'aviez pas signé votre carte à la CSN.

M. Lévesque (Ernest): Pas encore, non.

M. Chevrette: Est-ce que l'employeur savait cela?

M. Lévesque (Ernest): Je ne sais pas. Je ne suis pas allé le voir pour lui demander.

M. Chevrette: Mais l'employeur travaillait avec M. Thériault, votre porte-parole? M. Thériault était dans votre union avant que la CSN n'arrive dans le décor, dans le portrait?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: M. Thériault était permanent ou vice-président — il a plusieurs titres — il travaillait pour l'Union des rembourreurs unis d'Amérique.

M. Lévesque (Ernest): ...

M. Chevrette: Quand vous vous êtes présenté avec M. Thériault pour aller négocier, l'employeur vous a-t-il dit: Qu'est-ce que vous faites ici, Thériault, et les gars de l'Union des rembourreurs d'Amérique? Représentez-vous la CSN ce matin? Est-ce qu'il y a eu ce genre de réaction?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Cela a été tout à fait normal ce qui s'est passé là? M. Caine ou monsieur je-ne-sais-qui, qui était là, n'ont pas dit: M. Lévesque, je suis bien prêt à reconnaître que vous faites partie d'un nouveau syndicat, montrez-nous votre accréditation ou encore comment se fait-il que vous vous présentez au nom de la CSN avec Donat Thériault qui est permanent ou vice-président de l'Union des rembourreurs d'Amérique? Il n'y a pas eu de réaction?

M. Lévesque (Ernest): Lui-même s'est présenté, M. Thériault, comme conseiller qu'on avait choisi pour négocier.

M. Chevrette: Mais si vous étiez, vous, M. Lévesque, membre de l'Union des rembourreurs unis d'Amérique, iriez-vous engager Marcel Pépin comme conseiller syndical?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Cela ne provoquerait pas une réaction d'après vous. Une question de bon sens.

M. Lévesque (Ernest): Oui. On avait déjà signé une entente de service avec l'Union des rembourreurs.

M. Chevrette: Oui, mais vous venez de me dire que vous vouliez vivre en petits frères si la CSN avait compris.

M. Lévesque (Ernest): Oui, mais si j'étais allé demander, justement, à Marcel Pépin, qui appartenait à la CSN et nous qui appartenions à la CSN, je ne pense pas qu'il aurait dit qu'il serait venu négocier pour nous, parce que leur opinion était de sortir en grève et la nôtre était de retourner au travail, vu la différence d'opinions.

M. Chevrette: Si la convention a été signée le 13 et que l'avis a été envoyé le 5, l'avis de huit jours... L'avis que vous envoyez, je ne sais pas si c'est la copie conforme du télégramme: "La présente est pour vous aviser de notre intention de vous rencontrer au plus tard vendredi le... " II n'y a pas moyen de savoir si c'est le 15. Il y a une date 1977. Cela a l'air d'être un cinq, en tout cas. Vous l'avez rencontré, alors qu'ils sont accrédités le 3. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui vous a dit qu'il fallait faire cela vite, vite, pour négocier, parce que l'accréditation venait d'être donnée à la CSN?

M. Lévesque (Ernest): Non, c'était décidé le 3 octobre, à l'assemblée, de rencontrer la compagnie et négocier.

M. Chevrette: Etait-ce vous qui communiquiez avec la compagnie quand vous vouliez vous rencontrer?

M. Lévesque (Ernest): Rencontrer comment? On a eu un télégramme.

M. Chevrette: Oui mais, après votre télégramme, il y a quelqu'un qui doit avoir appelé quelqu'un chez vous. Dans le télégramme, il n'est pas dit que c'est Donat Thériault qui est conseiller syndical. A ce moment-là, théoriquement, si on suit les événements, M. Lévesque, on ne se charriera pas ni l'un, ni l'autre, on fait ça bien calmement, le 3 octobre, la compagnie ne sait pas que Donat Thériault est dans le portrait.

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Chevrette: Elle ne sait même pas que vous avez un comité de formé, puisque c'est le 3 octobre que vous formez votre comité? D'accord?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: Le soir du 3 octobre, Mme Grignon envoie un télégramme, la compagnie n'a pas encore vu Donat Thériault. Vous venez de me dire que Donat Thériault s'est présenté à la compagnie comme étant le conseiller de votre syndicat, vers le 9 ou le 10 octobre. Donc, à partir de là, avec qui a communiqué la compagnie pour vous convoquer?

Le Président (M. Cardinal): Est-ce qu'il y a une réponse?

M. Lévesque (Ernest): Ce n'est pas moi personnellement, je ne sais pas lequel...

M. Chevrette: M. Lévesque, je pourrais peut-être poser la question à Mme Grignon. Est-ce que la compagnie a communiqué avec vous pour vous convoquer à la négociation?

Mme Grignon: Oui.

M. Chevrette: A quelle date, Mme Grignon? Le Président (M. Cardinal): Mme Grignon? Mme Grignon: Je ne me rappelle pas la date.

M. Chevrette: Vous ne vous rappelez pas.

M. Lévesque, je reviens à vous; le contrat de services que vous avez signé avec M. Thériault, c'était à quelle date?

Est-il exact que c'est le 2 novembre 1977?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Chevrette: A ce moment-là, comment pou-vez-vous dire à cette commission que M. Donat Thériault puisse s'être présenté devant la compagnie le 4 ou le 5 octobre, le 9 octobre pour dire qu'il était conseiller syndical, alors que vous avez signé ça le 2 novembre 1977?

M. Lévesque (Ernest): Parce que nous l'avions choisi.

M. Chevrette: Dans votre livre de minutes, à quelle date figure l'entente de services avec M. Thériault? Avez-vous engagé M. Thériault par proposition dans votre livre des minutes? Mme Grignon?

Mme Grignon: Je n'étais pas secrétaire à ce moment-là, mais on a convoqué une assemblée et on a voté pour l'entente de services.

M. Chevrette: II y a des minutes là-dessus? Mme Grignon: Oui.

M. Chevrette: Vous avez votre livre de minutes ici, Mme Grignon?

Mme Grignon: Non.

M. Chevrette: Mais vous l'avez engagé le 2 novembre; est-ce que cela veut dire qu'à la réunion du 3 octobre vous avez engagé M. Thériault?

M. Thériault pourrait peut-être nous dire quel jour il a été engagé?

Le Président (M. Cardinal): Un moment, s'il vous plaît. Même s'il n'y a pas de question de règlement soulevée, M. le député de Joliette-Montcalm, il faut quand même, à un moment donné, rappeler qu'il y a un article 160 qui existe, que le premier alinéa de cet article vous donne 20 minutes. Il est très difficile pour la présidence de choisir combien de minutes vous employez par rapport aux réponses que vous avez reçues. Je vous inviterais à terminer dans quelques minutes votre interrogatoire.

M. Fallu: M. le Président, je voudrais demander une directive.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: On sait que chacun d'entre nous, autour de cette table, a effectivement un droit limité de 20 minutes. Toutefois, j'aimerais que vous me disiez un peu dans quel sens nous avons ce droit. Est-ce que c'est un droit de poser des questions pendant 20 minutes à chacun des témoins à tour de rôle, ou par groupe de représentants, à savoir les gens des rembourreurs, d'une part, M. Lévesque et Mme Grignon, et, d'autre part, M. Thériault, donc ça nous ferait 40 minutes de questions par député?

J'aimerais que vous m'éclairiez, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, je vais tenter...

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le leader parlementaire de l'Union Nationale.

M. Bellemare: La tradition parlementaire veut que pour que d'autres députés puissent avoir la chance de poser des questions, à l'article 160, il y ait une limitation pro forma de 20 minutes, questions et réponses. Je pense que la tradition veut que tous ceux qui sont autour de la table puissent poser des questions. Mon droit de parole a été épuisé à la dernière séance, je ne peux pas revenir. On pourrait donner une chance à d'autres députés, comme à vous qui êtes dans le comté, de poser certaines questions. Autrement, on va passer une heure avec le même député et les autres n'auront pas l'occasion de poser d'autres questions.

Quant à moi, mon droit de parole est terminé sur cette partie. Je reviendrai lorsque la compagnie sera en cause.

Le Président (M. Cardinal): Un instant. Je vais laisser chacun s'exprimer sur la question de règlement. M. le député de Portneuf et, ensuite, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Pagé: M. le Président, effectivement, l'article 160 prévoit un temps limite de 20 minutes, non pas pour être rigide ou encore pour empêcher les députés de poser des questions, mais plutôt pour permettre au plus grand nombre de députés de poser des questions.

M. le Président, je vais vous donner un exemple. Si on n'avait pas de limite, par notre règlement, l'Opposition, par exemple, pourrait prendre des heures et des heures du débat. C'est ainsi que la majorité ministérielle qui, soit dit en passant, n'a pas souvent l'occasion de parler, pourrait se voir privée de son droit de parole, parce que les séances seraient accaparées presque essentiellement ou entièrement par les gens de l'Opposition.

C'est dans cet esprit qu'un droit de parole de 20 minutes est accordé. Quant à moi, je serais favorable à une certaine souplesse, parce que ce matin, cela va très bien, on constate que tout le monde est serein, on constate que cela va pas mal mieux que les autres séances. Je serais favorable à une certaine souplesse, mais par contre, toujours dans le respect du règlement, et ce, même si dans mon cas comme dans le cas de mon collègue de Johnson, nos droits de parole sont épuisés.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm, sur la question de règlement.

M. Chevrette: Ce sera bien court, pour moi. Etant donné qu'il y a peut-être des dimensions nouvelles chaque fois qu'on évolue, je n'aurais même pas objection à ce que M. le député de Johnson puisse revenir à la charge. J'irais jusque-là. C'est très important, dans ce type de commission. Après 20 minutes, le député de Johnson, en ne lui donnant pas la possibilité de revenir, peut priver la commission de ses lumières. J'irais jusque-là dans mon raisonnement.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, est-ce que...

M. Bellemare: En vertu du règlement, M. le Président, il ne faudrait pas, non plus, que ce soit un procès.

Le Président (M. Cardinal): Non.

M. Bellemare: On ne peut pas, mon cher monsieur...

M. Pagé: M. le Président, sur le même sujet, si vous voulez me permettre.

Le Président (M. Cardinal): Rapidement.

M. Pagé: Cela peut laisser place à des précédents qui pourraient éventuellement être invoqués dans d'autres commissions. Je vais vous donner un exemple, et M. Vaillancourt, le député de Jonquière, pourra abonder dans le même sens que moi. A la commission parlementaire des pâtes et papiers, l'année dernière, on s'est obligé, on s'est fouetté, pour se limiter à ne pas exercer son droit de parole pendant plus de 20 minutes. Même si nous avions des questions à poser pendant des heures et des heures.

Je voudrais quand même, s'il y a une certaine largesse dans le cadre de cette commission, que ce ne soit pas considéré comme un précédent.

Le Président (M. Cardinal): Dans ce cas-là, si vous permettez, j'ai eu une demande de directive de la part du député de Terrebonne et je désirerais immédiatement lui répondre.

L'article 160 est clair. Il se lit comme suit: "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi ou des crédits, un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne parler plus de 20 minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion ou une même question d'ordre ou de règlement."

Et j'ajoute, pour la bone compréhension de tous, que l'alinéa 2 continue, en indiquant ceci: "La restriction ci-dessus ne s'applique pas au proposeur du projet de loi ni au ministre qui propose l'adoption de ses crédits."

Or, mesdames et messieurs, nous sommes vraiment dans du droit nouveau à cette commission parlementaire. Il ne s'agit ni d'un projet de loi, ni d'étude de crédits. Et ce n'est — je m'excuse de l'expression latine — que mutatis mutandis, c'est-à-dire par analogie, que je puis me permettre de faire observer le règlement.

Si j'ai interrompu le député de Joliette-Montcalm, c'était pour protéger, non pas strictement l'Opposition ou le témoin, mais pour rappeler à chacun des membres de cette commission que la présidence est là justement pour rappeler ce qu'est le règlement et que, comme l'a dit le député de Portneuf, l'on ne crée pas, dans une commission particulière où l'on fait vraiment du droit nouveau, des précédents qui pourraient être invoqués devant toutes les autres commissions.

Si la commission dit: De consentement unanime, nous accordons la parole à M. Untel, au-delà des limites du règlement, et cela sans créer une jurisprudence pour toute autre commission, je n'ai aucune objection, M. le député de Terrebonne.

Cependant, je dois dire que, comme nous avons commencé vers 10 h 10 et qu'il est presque 11 heures, le rappel devait être fait à M. le député de Joliette-Montcalm, même si j'avais une grande souplesse.

Cela étant dit, est-ce que vous êtes satisfait de la réponse?

M. Fallu: Non, M. le Président, mais je l'accepte.

Le Président (M. Cardinal): Pas tout à fait, non. Vous voulez...

M. Pagé: Vous vous devez de l'accepter d'ailleurs, vous devez l'accepter. (11 heures)

Le Président (M. Cardinal): Je ne suis pas pour prendre...

M. Chevrette: C'est parce que, quand le climat est bon, cela passe vite.

M. Pagé: M. le Président, voulez-vous faire part au député de Terrebonne que, s'il était dans l'Opposition, il serait à même de constater souvent qu'on est plus ou moins satisfait des décisions, mais qu'il faut s'y conformer.

M. Chevrette: M. le Président, je vais essayer de faire ça.

Le Président (M. Cardinal): Même si M. le député de Terrebonne n'est pas satisfait, je ne créerai pas, à cette commission, un nouveau règlement pour des commissions particulières sur des sujets aussi importants et aussi délicats que celui-là. C'est pourquoi je laisse le terme...

M. Chevrette: Je conclus.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Joliette-Montcalm, je vous accorde encore la parole, mais en tenant compte de ce qui a été dit.

M. Chevrette: Je vais poser deux petites questions et faire un petit commentaire, M. le Président, quitte à y revenir tantôt.

Le Président (M. Cardinal): La commission est-elle d'accord?

Des Voix: Oui.

Le Président (M. Cardinal): La commission étant d'accord, c'est à ce titre que je vous accorde la parole.

M. Chevrette: Merci. Question à M. Thériault, je m'excuse de ne pas pouvoir vous en poser plus. Ma question serait la suivante: Est-ce que vous avez convoqué une réunion des membres de l'Union de rembourreurs d'Amérique pour vous faire autoriser à vous désister de l'accréditation?

M. Thériault: Non, monsieur.

M. Chevrette: Vous avez pris la décision formelle vous-même?

M. Thériault: A titre de directeur canadien, oui.

M. Chevrette: Vous vous êtes désisté personnellement au nom de l'Union des rembourreurs d'Amérique?

M. Thériault: Oui.

M. Chevrette: Merci. Mme Grignon, une petite question rapide aussi. Pourriez-vous m'expliquer, je dirais, la multiplicité de vos changements d'adresse pour le syndicat dans un court laps de temps? Vous êtes sur la rue Labelle, vous retombez sur une rue privée, je n'en ai pas le nom.

Mme Grignon: Je n'ai jamais eu de changement d'adresse.

M. Chevrette: Pas vous, mais votre réunion.

Mme Grignon: A un moment donné, il y a eu un changement de secrétaire, parce que j'ai laissé l'emploi pour un laps de temps. C'est un autre qui a pris ma place comme secrétaire.

M. Chevrette: Cela explique que vos adresses changeaient de...

Mme Grignon: Je ne pouvais pas donner mon adresse si je n'étais pas secrétaire.

M. Chevrette: Le siège social qui était sur la rue Labelle, c'était l'adresse de qui?

Mme Grignon: Je n'ai jamais donné d'adresse sur la rue Labelle moi-même.

M. Chevrette: On pourra vérifier à nouveau dans les notes, mais, en tout cas, il y a deux ou trois adresses différentes pour le siège social du syndicat.

M. le Président, je m'excuse, je pourrais continuer pendant encore trois quarts d'heure, mais ce que j'ai essayé de démontrer et que je voudrais dire à la commission, à la suite de la dernière commission parlementaire, c'est que j'avais comme l'impression qu'on s'acheminait à vouloir démontrer qu'une seule partie était responsable de cet imbroglio total dans lequel on se retrouve. Personnellement, cela ne peut pas me rentrer dans la tête pour avoir fait des relations ouvrières pendant 18 ans. Une convention collective, cela se signe dans un cadre légal connu des deux parties. Qu'une partie veuille oeuvrer en dehors du cadre juridique ou du cadre légal, il y a une autre partie qui est là aussi pour surveiller de très près le même cadre juridique dans lequel on est supposé oeuvrer.

Par mes questions, j'ai voulu démontrer — il n'y a pas de cachette — qu'il y avait tout au moins une certaine complaisance, parce qu'à ce stade-ci, je ne peux pas dire plus. Si c'est une complaisance ignorante, vous m'en voyez fort déçu, parce que la compagnie était conseillée par des avocats. Si c'est une complaisance délibérée, c'est encore plus grave.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, quelques questions à M. Lévesque.

Le Président (M. Cardinal): Avant que vous ne commenciez, est-ce que je pourrais demander aux députés et à nos témoins invités d'élever un peu plus la voix pour que tous puissent entendre?

M. Vaillancourt (Jonquière): Ah oui! M. le Président, quelques questions à...

M. Casgrain: Je demanderais une chose seulement à la commission. M. Caine est ici et, quant à lui, il n'est pas disposé à se faire accuser sans avoir été entendu et cela fait deux jours et demi qu'il demande à être entendu.

Le Président (M. Cardinal): II le sera.

M. Casgrain: Pour ma part, je dis ceci à mon client: Je ne crois pas que cette présidence permette que des accusations soient lancées contre des gens qui sont ici et à qui on n'a même pas encore donné le droit de parier. Je ne le crois pas, je ne peux pas l'accepter, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. Casgrain. Vous étiez présent à chacune des séances, toujours près de nous, d'ailleurs.

M. Casgrain: Je n'ai pas peur.

Le Président (M. Cardinal): Non, s'il vous plaît! Vous savez que j'ai, à plusieurs reprises, rappelé que nous n'étions pas dans une commission d'enquête.

M. Casgrain: Je me pose de sérieuses questions là-dessus!

Le Président (M. Cardinal): Me Casgrain, s'il vous plaît! Nous ne sommes pas devant une cour non plus.

M. Casgrain: Nous sommes devant une cour et nous aimerions bien que ce soit là que cela se passe.

Le Président (M. Cardinal): Votre client sera entendu, il est présent.

M. Casgrain: Qu'est-ce qu'il y a de mal à aller devant une cour? Qu'on nous reproche d'être allé devant les tribunaux!

M. Chevrette: Non, mais vous vous obstinez tout seul.

Le Président (M. Cardinal): Je vous en prie, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le Président. J'aurais quelques questions à poser à M. Lévesque, et, après, je viendrai à Mme Grignon. M. Lévesque, voulez-vous me donner le nom des personnes qui ont signé la convention collective entre Commonwealth Plywood, la CSN et la compagnie?

M. Lévesque (Ernest): Moi-même, Ernest Lévesque, Mme Hélène Grignon, Mlle Elise Côté, M. Marcellin Pilon et M. Luigi De Luca.

M. Vaillancourt (Jonquière): Voulez-vous me dire comment vous étiez identifiés, vous, les signataires de cette convention collective, face à l'employeur au point de vue de vos opinions syndicales, parce que n'est-il pas exact de dire que le mot CSN apparaissait sur la convention collective de travail qui a été signée, que l'employeur pouvait facilement constater les noms des signataires de la convention collective, pour et au nom de Commonwealth Plywood CSN? Est-ce que c'était écrit sur la convention collective qui a été signée, CSN?

M. Lévesque (Ernest): Entre parenthèses, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, bon. Est-ce que les gens qui ont signé, pour et au nom de Commonwealth Plywood CSN, étaient identifiés au fil des mois et des années comme étant des partisans de la CSN ou plutôt le contraire?

M. Lévesque (Ernest): Ils n'étaient pas identifiés.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ils n'étaient pas identifiés comme étant des partisans de la CSN? C'est cela?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Quelle a été la réaction de l'employeur lorsqu'il a constaté que des personnes identifiées comme n'étant pas des partisans de la CSN signaient une convention collective où les mots CNS apparaissaient sur ladite convention collective de travail?

M. Lévesque (Ernest): S'il y a eu une réaction, je ne l'ai pas remarquée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous-même avez assisté à la signature de la convention collective de travail?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que les quatre autres personnes qui ont signé étaient présentes également?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): A ce moment, qui représentait l'employeur? Qui a signé au nom de l'employeur?

M. Lévesque (Ernest): M. Caine et Me Bazin.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous-même avez été représenté par un procureur au cours des négociations qui ont duré trois jours et

étiez-vous représenté par un procureur lors de la signature de la convention collective de travail?

M. Lévesque (Ernest): Non, par le conseiller syndical qu'on avait choisi, M. Donat Thériault.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous avez cru bon de consulter un procureur dans le cours des négociations ou lors de la signature de la convention collective?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, si je comprends bien, M. Donat Thériault était en quelque sorte non seulement votre conseiller syndical, mais jouait également un peu le rôle de procureur pour votre association, pour votre groupe?

M. Lévesque (Ernest): C'est seulement lui qui a négocié avec nous.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est seulement lui qui a négocié avec vous. Vous nous avez dit tout à l'heure qu'il y avait eu des accrochages sur le contenu de la convention collective lorsque cela a été le temps de la faire ratifier. Sur quel point de la convention collective cet accrochage est-il survenu? Sur quel point de la convention collective les membres avaient-ils des réticences à accepter?

M. Lévesque (Ernest): Au point de vue pécuniaire, c'est le premier.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

M. Lévesque (Ernest): Une ou deux autres clauses dont je ne me souviens pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, lorsque vous leur avez soumis le projet de convention collective qui avait été négocié, certains membres ont montré des réticences sur les clauses ayant trait au domaine pécuniaire?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que, suite à cela, vous avez tenté de renégocier avec l'employeur ces clauses qui ne plaisaient pas à certains de vos membres, au niveau pécuniaire et sur d'autres?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui. Je comprends que la convention a été signée le 13 octobre et que vous avez soumis le projet de convention à vos membres le 12 octobre, et vous me dites que vous avez renégocié par la suite de ces représentations. Quand ont eu lieu les négociations avec l'employeur?

M. Lévesque (Ernest): On avait deux suggestions pour la clause pécuniaire. Avant de signer, on a négocié une des deux suggestions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, le 13 octobre même, journée de la signature de la convention collective, vous avez négocié l'une des deux clauses qui ne faisaient pas l'affaire de certains membres?

M. Lévesque (Ernest): Je crois que ce 13 octobre, il y a eu deux rencontres dans la même journée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bon! Est-ce que ces discussions ont donné des résultats sur la renégociation de certaines clauses?

M. Lévesque (Ernest): Je ne crois pas. Pas tellement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, il n'y a pas eu modification des offres de la compagnie sur ces clauses-là?

M. Lévesque (Ernest): C'est la compagnie qui nous avait fait une suggestion sur les clauses pécuniaires, deux suggestions; on en a choisi une.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous êtes retournés devant vos membres pour aller leur faire part des résultats des renégociations qui avaient eu lieu sur les clauses pécuniaires?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Quand?

M. Lévesque (Ernest): Le 13 octobre, il y a eu deux rencontres.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

M. Lévesque (Ernest): Une pendant laquelle on a terminé le projet. On l'a présenté aux employés. Les employés ont refusé une solution. On l'a présenté à l'employeur qui l'a accepté. On a signé.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'avais compris tout à l'heure que vous aviez soumis, le 12 octobre, à vos membres le projet de convention collective, au sous-sol du domicile de Mme Gri-gnon. Ce n'est pas ça?

M. Lévesque (Ernest): La, je peux vous dire que je ne m'en souviens plus. Je sais qu'il y a eu trois séances, mais les dates et...

Le Président (M. Cardinal): Pouvez-vous parler un peu plus fort? Il y a des gens...

M. Lévesque (Ernest): Ah bon!

Le Président (M. Cardinal): ... qui manquent une partie importante de votre témoignage.

M. Cutler: Est-ce qu'on ne pourrait pas avoir l'aide du monsieur de la console?

Le Président (M. Cardinal): Non, je pense que nous sommes au maximum. M. Lévesque?

M. Cutler: Je me demande, M. le Président, si on ne pouvait pas les avoir de notre côté de la table. C'est tellement loin. Il est rendu à la table.

M. Lévesque (Ernest): Je vais parler plus fort.

M. Cutler: II a la voix faible. Essayez de parler plus fort.

Le Président (M. Cardinal): J'aimerais bien tout changer, mais...

M. Lévesque (Ernest): Non, c'est correct, je vais parler plus fort.

Le Président (M. Cardinal): Est-ce que...

M. Lévesque (Ernest): Je vais parler plus fort.

Le Président (M. Cardinal): On peut suspendre deux ou trois minutes s'il y a des questions techniques qu'on pourrait régler immédiatement. Est-ce que c'est possible?

M. Cutler: Essayons encore une fois.

Le Président (M. Cardinal): Bon! Nous allons tenter et, s'il le faut, je suis prêt à accorder toute cette aide.

M. Cutler: Merci, M. le Président. On va essayer encore une fois.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. Lévesque, moi, j'ai compris que vous avez négocié un projet de convention collective que vous avez soumis, le 12 octobre au soir, à vos membres, que le 12 octobre au soir, certains membres vous ont manifesté des réticences sur certaines clauses de la convention. Je comprends également que la convention a été signée le 13 octobre. Ce que je vous demande, c'est, suite à la rencontre du 12 octobre au soir où certains membres vous ont fait part de leur réticence quant à des clauses de la convention collective, avez-vous tenté de négocier des meilleures clauses dans ces domaines et si oui, quand? Je présume que cela a été avant la signature, il ne reste pas grand temps puisque nous sommes le 12 octobre au soir et que vous avez signé le 13 octobre dans la journée. Donc, quant ont eu lieu les négociations, s'il y en a eu, sur une amélioration des clauses qui donnaient des réticences à certains membres?

M. Lévesque (Ernest): Je ne m'en souviens pas. Sur ces trois séances, je ne me souviens plus laquelle était laquelle et de quoi nous avons discuté, mais tout ce que je peux mentionner, c'est qu'on a eu trois séances, il y a eu réticence et, par la suite, la signature de la convention.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, vous avez essayé de rediscuter ces questions avec la com- pagnie, mais il n'y a pas eu de modifications majeures à la convention collective?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous êtes retournés devant vos membres pour leur faire part qu'il n'y avait aucune modification sur ces clauses? Si oui, quand?

M. Lévesque (Ernest): Je ne me souviens plus de ça.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais les détails ne sont pas tellement grands, si on part du 12 octobre où vous soumettiez à entre 62 et 65 personnes, un projet de convention collective, à quel moment de la journée du 13 avez-vous signé votre convention?

M. Lévesque (Ernest): Le 13?

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

M. Lévesque (Ernest): Je crois qu'il passait minuit...

M. Vaillancourt (Jonquière): Minuit. M. Lévesque (Ernest): ... le soir.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'il y a eu des assemblées avec vos membres dans la journée du 13 octobre?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): II y en a eu. A quel sujet?

M. Lévesque (Ernest): Je pense que c'était sur les clauses, disons, sur lesquelles il y avait un peu de réticence et, par la suite, il a fallu rencontrer la compagnie un peu tard, parce que...

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur quel texte de convention collective vous êtes-vous fondés pour préparer votre projet de contrat collectif de travail? Sur quoi vous êtes-vous fondés pour préparer votre projet de contrat collectif?

M. Lévesque (Ernest): Disons qu'on a pris l'ancienne convention, on l'a étudiée et on a modifié des clauses. Par la suite, la convention étant modifiée, on l'a présentée. (11 h 15)

M. Vaillancourt (Jonquière): Dois-je comprendre que les négociations on été faciles, rapides, non ardues, que la compagnie s'est montrée ouverte à votre projet de contrat collectif de travail?

M. Lévesque (Ernest): Disons que cela a été assez facile.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela a été assez facile. D'après vous, parce que c'est quand même

assez rare que des négociations soient aussi rapides ou aussi faciles, qu'est-ce qui a fait en sorte que ces négociations aillent aussi bien, aillent aussi rapidement, se déroulent de façon aussi sereine?

M. Lévesque (Ernest): Comme je l'ai mentionné tantôt, je ne peux pas donner d'opinion là-dessus, vu que je n'avais jamais appartenu à un comité de négociation, à un comité exécutif. J'étais donc assez ignorant dans cette matière — les syndicats — pour avoir des opinions personnelles.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais vous étiez au courant de la dernière convention collective qui avait été signée?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Quelles sont les différences majeures et profondes qui existent entre le deuxième contrat de travail signé et celui sur lequel vous vous êtes basé pour préparer votre projet de convention collective de travail?

M. Lévesque (Ernest): II n'y en a pas tellement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Quelles clauses de l'ancienne convention ont été changées? La convention collective de travail est-elle bien améliorée, au niveau des vacances, au niveau des congés de maladie, au niveau des salaires? Sur quoi avez-vous insisté?

M. Lévesque (Ernest): On a insisté sur le salaire, d'abord, sur des clauses dont la phraséologie n'était pas très bonne. On n'a pas discuté des vacances.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez pas discuté des vacances, des congés de maladie ou autres?

M. Lévesque (Ernest): Je crois qu'on a discuté de l'Action de grâces, congé que nous n'avions pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais en fait, une convention collective, vous admettrez avec moi que cela a toujours pour but d'essayer d'améliorer la condition des travailleurs par rapport à l'ancienne convention, compte tenu de l'évolution du contexte socio-politique et socio-économique, etc. Je vous demande quels sont les changements majeurs ou le changement majeur de la convention que vous avez signée par rapport à l'autre?

M. Lévesque (Ernest): Pour m'en rappeler formellement, il faudrait que j'aie les deux conventions devant moi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous me dites aujourd'hui que vous-même qui avez négocié cette convention vous n'êtes pas en mesure de ré- pondre à une question qui a trait aux changements majeurs, aux modifications majeures d'une convention par rapport à l'autre. C'est cela que vous me dites?

M. Lévesque (Ernest): Disons que, comme j'ai dit tantôt, j'étais assez ignorant dans ce domaine que, par la suite, je n'ai pas pris la peine de commencer à étudier toute l'ancienne convention.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, vous ne pouvez pas dire que vous avez signé une bonne ou une mauvaise convention? Vous n'êtes pas au courant de cela?

M. Lévesque (Ernest): Elle est meilleure que celle que nous avions signée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur quel point est-elle meilleure?

M. Lévesque (Ernest): Sur les points des clauses de la phraséologie dont on vous a dit qu'elle était mal placée.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. Lévesque, une dernière question à vous. Cela m'intrigue beaucoup. Je dois vous dire que c'est le point central de toute l'affaire — je vous répète une question que j'ai déjà posée — lorsqu'on négocie une convention collective, lorsqu'on procède à la signature d'une convention collective, il est extrêmement important que chacune des parties sache à qui elle a affaire. Vous saviez, de façon évidente, que vous aviez affaire à l'employeur, que l'employeur était le propriétaire de l'entreprise et que vous négociez avec la bonne personne?

Ce que je voudrais savoir de vous, il a dû y avoir des échanges, des attitudes, des réactions, c'est quelle a été la réaction de ceux qui représentaient la partie patronale constatant que certaines personnes identifiées comme n'étant pas des partisans de la CSN signent une convention collective où le mot CSN apparaissait.

M. Lévesque (Ernest): Je n'ai pas remarqué la réaction de l'employeur et de son porte-parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'avez pas remarqué?

M. Lévesque (Ernest): S'il y en a eu, je n'ai pas remarqué.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'a jamais été question de cela dans vos discussions, dans vos négociations?

M. Lévesque (Ernest): Je ne crois pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'employeur, à un moment ou l'autre, vous a-t-il fait part de sa connaissance du fait que la CSN avait obtenu l'accréditation pour les travailleurs de la Commonwealth Plywood?

M. Lévesque (Ernest): Je ne m'en souviens plus.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne vous en souvenez plus. Avez-vous déjà occupé des fonctions syndicales avant de négocier la convention de Commonwealth Plywood?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Jamais. Mme Grignon, quelles sont vos expériences dans le domaine syndical, avant le 1er juillet 1977? Avez-vous de l'expérience syndicale et, si oui, laquelle?

Mme Grignon: J'ai été membre du comité de l'Union internationale des rembourreurs.

M. Vaillancourt (Jonquière): Avez-vous dans vos archives — je pense que vous êtes secrétaire du groupe à l'intérieur...?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Avez-vous dans vos archives les cartes de la CSN qui ont été signées le 3 octobre 1977?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous pourriez déposer ces cartes CSN pour le bénéfice des membres de la commission?

M. Cutler: Pouvez-vous répéter votre demande? Parce que je voudrais bien aider mes clients.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, j'ai demandé à Mme Grignon si elle avait dans ses archives les cartes CSN signées le 3 octobre 1977.

M. Cutler: Le 3 octobre 1977.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais, à la suite d'une réponse affirmative, savoir si Mme Grignon est disposée à déposer...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le député de Jonquière. Vous qui êtes président de commissions parlementaires, vous savez qu'il ne pourrait pas y avoir de dépôt. Elles peuvent être produites, comme le dit textuellement le règlement. Je m'excuse.

M. Vaillancourt (Jonquière): Produire, en fait, pour les membres de la commission, lesdites cartes, ou des photocopies desdites cartes.

M. Cutler: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Oui, Me Cutler.

M. Cutler: J'ai discuté de cette question avec ma cliente. Je dois vous assurer que, s'il est possible, nous allons avoir ces cartes cet après-midi; sinon, nous allons vous dire pourquoi.

Le Président (M. Cardinal): Merci, Me Cutler.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ou des photocopies desdites cartes. Cela peut être des photocopies.

M. Cutler: Merci, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mme Grignon, quand avez-vous appris l'accréditation du Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood par la CSN?

Mme Grignon: Le 5 octobre, je crois.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le 5 octobre. A ce moment-là, les négociations n'étaient pas encore commencées.

Mme Grignon: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous pourriez nous décrire, comme M. Lévesque l'a déjà fait, les étapes qui ont mené à la signature de la convention collective, à partir de la signature des cartes du 3 octobre jusqu'au 13 octobre.

Mme Grignon: Premièrement, j'ai envoyé un télégramme, comme vous le voyez, à la compagnie pour demander une rencontre.

Le Président (M. Cardinal): S'il vous plaît, encore une fois, je ne sais pas s'il faudrait ou bien parler plus fort ou employer d'autres moyens, parce que... Vous pouvez reprendre, Mme Grignon, s'il vous plaît.

Mme Grignon: Premièrement, j'ai envoyé un télégramme à la compagnie demandant une rencontre. Nous avons eu une première rencontre au bureau des avocats de la compagnie. Ce qu'ils nous offraient était absolument inacceptable. Nous nous sommes rencontrés et nous avons fait des changements dans la convention que nous avons présentée de nouveau et il y a eu plusieurs discussions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Votre télégramme a été envoyé le 5 octobre, n'est-ce pas?

Mme Grignon: Je crois que oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): A ce moment-là, vous aviez déjà fait signer les cartes CSN.

Mme Grignon: Le 3 octobre, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Comment se fait-il... Je remarque sur votre télégramme que vous envoyez à la Commonwealth Plywood, alors que les fausses cartes CSN ou les prétendues fausses cartes CSN ont déjà été signées, que vous signez Hélène Grignon, Syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood et, à ce moment-là, vous ne marquez pas CSN. Comment se fait-il que, par la suite, lorsqu'arrive le moment de signer une

convention collective, vous écriviez CSN sur ladite convention?

Mme Grignon: Le 3 octobre, on ne savait pas que la CSN avait été accréditée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais le 5 octobre.

Mme Grignon: Le syndicat...

M. Vaillancourt (Jonquière): Lorsque vous avez envoyé votre télégramme, le 5 octobre, ou le 6 octobre, vous signez Hélène Grignon, Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood. A ce moment-là, les fausses cartes CSN ont déjà été signées en date du 3 octobre.

Mme Grignon: C'est peut-être une erreur de ma part.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une erreur de votre part. Est-ce qu'à ce moment-là, vous saviez que Commonwealth Plywood CSN avait été accrédité?

Mme Grignon: Le 5 octobre, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pourquoi le 6, vous ne marquez pas CSN, vous ne voulez plus prendre votre syndicat en main? C'est le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood. Vous ne sentez pas le besoin de vous identifier à la CSN le 6 octobre.

Mme Grignon: J'ai pu faire l'erreur moi-même comme le bureau des télégrammes a pu faire l'erreur aussi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Là, vous vous êtes rendu compte de votre erreur, de telle sorte que, le 13 octobre, vous n'avez pas récidivé et vous avez signé au nom de la CSN la convention collective de travail.

Mme Grignon: J'étais la représentante des travailleurs de la Commonwealth Plywood CSN.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, s'il vous plaît. Je dois rappeler, M. le député de Jonquière, comme je l'ai rappelé à d'autres députés, qu'il peut poser des questions, mais il ne faudrait pas que les questions soient des affirmations qui placent le témoin dans une situation difficile. Non, mais vous faites des affirmations, par exemple en disant une fausse carte...

M. Vaillancourt (Jonquière): Des prétendues fausses cartes, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Nous n'avons pas à en décider. Vous êtes avocat in caveat, M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mme Grignon, c'est vous qui avez envoyé une lettre au commis- saire-enquêteur en chef pour le dépôt de la convention collective?

Mme Grignon: C'est M. Thériault qui a envoyé la lettre pour le dépôt de la convention collective.

Le Président (M. Cardinal): Parlez plus fort, s'il vous plaît, Mme Grignon.

M. Vaillancourt (Jonquière): Qui a composé la lettre?

Mme Grignon: M. Thériault.

M. Vaillancourt (Jonquière): Effectivement, est-ce que vous êtes en mesure de nous confirmer que le 12 octobre 1977, la veille de la signature de la convention, il y a eu une assemblée syndicale à votre domicile, au sous-sol, où étaient présents de 62 à 65 travailleurs?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui. A ce moment-là, est-il exact de dire qu'on a soumis aux travailleurs présents le projet de contrat collectif de travail qui avait été négocié avec la compagnie?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-il exact de dire qu'il y a eu des accrochages sur certains points de la convention?

Mme Grignon: II y en a eu un peu, oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous êtes en mesure de dire si les négociations ont eu lieu suite à ces représentations des travailleurs, par la suite?

Mme Grignon: Nous avons demandé qu'un vote soit pris pour savoir si la majorité acceptait la convention ou non et la majorité a accepté la convention.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que vous êtes en mesure de dire quelles sont les différences fondamentales et majeures entre cette convention et celle sur laquelle vous vous êtes basés pour préparer votre projet collectif de travail?

Mme Grignon: Est-ce que vous pourriez répéter la question?

M. Vaillancourt (Jonquière): Les différences majeures, les améliorations entre la convention signée et celle à laquelle vous vous êtes fiés pour préparer votre projet de convention collective, c'est-à-dire l'ancienne convention?

Quelles sont les différences majeures, les améliorations?

Mme Grignon: Nous avons obtenu la semaine entre Noël et le jour de l'An, parce qu'avant il y

avait toujours une production et il fallait revenir travailler entre Noël et le jour de l'An. A la dernière convention, nous avons obtenu .que la manufacture ferme ses portes.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'il est exact de dire que les négociations se sont bien passées, que cela a été rapide, que cela a été...

Mme Grignon: Plus ou moins.

M. Vaillancourt (Jonquière): Plus ou moins. Est-ce que vous vous êtes chicanés avec la compagnie, avec l'employeur sur des clauses majeures?

Mme Grignon: II y a des choses sur lesquelles on n'était pas d'accord, dont nous avons discuté. Nous sommes revenus à la compagnie...

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela s'est quand même réglé en trois jours.

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Une question d'opinion simplement, qu'est-ce qui a fait en sorte que cela aille aussi bien, entre vous et l'entreprise, pour les négociations?

Mme Grignon: Je ne sais pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne le savez pas.

Est-ce que tous les employés ont été convoqués à la réunion d'acceptation du projet collectif de travail qui avait été négocié?

Mme Grignon: Tous ceux qui travaillaient ont été convoqués.

M. Vaillancourt (Jonquière): Tous ceux qui travaillaient à l'intérieur?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ceux qui étaient à l'extérieur et qui, semble-t-il, étaient bloqués par une ligne de piquetage, ils n'ont pas été convoqués?

Mme Grignon: Est-ce que vous pourriez répéter votre question?

M. Vaillancourt (Jonquière): Je veux dire qu'il y a seulement les travailleurs de l'intérieur qui ont été invités à participer à la réunion d'acceptation du projet collectif de travail.

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Combien de chèques de la CSN ont été endossés au profit de l'Union des remboureurs, avant l'ordonnance du juge Meyer?

Mme Grignon: Exactement, je ne le sais pas. Peut-être un ou deux, je ne le sais pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pas plus que ça?

Mme Grignon: II y a eu un temps où je n'étais plus secrétaire, je n'avais plus ces choses.

M. Vaillancourt (Jonquière): Qui vous a remplacé?

Mme Grignon: Mademoiselle Suzanne Labelle.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'à votre connaissance, cette demoiselle a également endossé des chèques de la CSN?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Aussi, avant l'ordonnance du juge Meyer toujours?

Mme Grignon: Je ne peux pas vous répondre.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le 5 octobre 1977, vous avez décidé de négocier le 12 octobre 1977, et vous avez fait parvenir une lettre à cet effet à la compagnie. Qui a décidé de tenir la séance de négociation au bureau de Me Pierre Fournier, le 7 octobre 1977?

Mme Grignon: C'est la compagnie qui nous a demandé si on était prêt à avoir cette séance. J'ai communiqué avec les autres et on a dit oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Combien de séances de négociation ont eu lieu au bureau des procureurs de la compagnie?

Mme Grignon: Une.

M. Vaillancourt (Jonquière): Une, la première?

Mme Grignon: Oui. (11 h 30)

M. Vaillancourt (Jonquière): Qui a demandé...

M. Johnson: Un instant, s'il vous plaît. Est-ce que le député de Jonquière me permet? Je vous répète la question, madame. Le 5 octobre, vous avez décidé de négocier le 12 octobre. Vous avez fait parvenir, à 23 heures, une lettre à cet égard à la compagnie. Ma question, c'est: Qui a décidé de la séance de négociation au bureau de Me Pierre Fournier? Est-ce vous qui avez demandé cela ou si c'est la compagnie qui vous a demandé de négocier à ce moment-là?

Mme Grignon: C'est la compagnie qui nous a donné rendez-vous là.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Jonquière, c'est à votre tour, mais en vous rappelant que l'article 160 existe encore.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que votre projet collectif de travail était prêt à ce moment-là? Lors de votre première rencontre de négociation?

Mme Grignon: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Qu'est-ce que vous alliez faire là?

Mme Grignon: C'était premièrement pour nous présenter.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela m'intéresse, par exemple. Comment vous êtes-vous présentés? Comme représentants de qui? Comme qui?

Mme Grignon: Comme représentants du syndicat des travailleurs de la Commonwealth Ply-wood-CSN.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, le 7 octobre, vous vous êtes présentés à l'employeur sans projet de contrat collectif de travail, tout simplement pour vous présenter et vous vous êtes identifiés...

Mme Grignon: II y avait déjà eu une préparation, mais elle n'était pas complètement finie encore.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais vous n'avez pas négocié, le 7 octobre 1977?

Mme Grignon: II y a eu des offres qui ont été faites de la part de la compagnie et que nous avons refusées.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais il n'y avait pas eu de demande encore de la part de votre groupe?

Mme Grignon: Non. Suite à l'offre que la compagnie nous avait faite et qu'on a refusée nous avons préparé autre chose.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, dès le 7 octobre, déjà la compagnie vous fait des offres sur un projet de contrat de travail alors que vous-mêmes, vous n'avez pas encore conçu un projet de contrat collectif de travail?

Mme Grignon: On avait déjà commencé, mais il n'était pas terminé.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'était pas terminé?

Mme Grignon: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Donc, on peut dire que le 7 octobre 1977, vous vous êtes officiellement présentés à l'employeur comme é-tant des représentants de la CSN?

Mme Grignon: Le syndicat des travailleurs.

M. Vaillancourt (Jonquière): Et vous-même, vous le saviez depuis le 5 octobre que la CSN avait été accréditée?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Quelle a été la réaction de l'employeur lorsque vous vous êtes présentés à ce titre?

Mme Grignon: II n'y en a pas eu.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a pas eu de réaction? Aucune réaction de la part de l'employeur?

Mme Grignon: S'il y en a eu, je ne me le rappelle pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous avez assisté aux négociations par la suite?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que, lors de ces autres séances de négociation, il y a eu des réactions de la part de l'employeur sur votre représentation de la CSN?

Mme Grignon: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Jamais? Est-ce que, à votre connaissance, la compagnie savait que la CSN avait été accréditée pour représenter les travailleurs de la Commonwealth Plywood?

Mme Grignon: Elle le savait probablement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Elle le savait probablement?

Mme Grignon: Probablement, je ne le sais pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que la compagnie vous a déjà fait part qu'elle le savait, effectivement? C'est une question très précise.

Mme Grignon: Non.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais vous êtes portée à penser qu'elle le savait, puisque vous-même, vous le saviez? C'est cela?

Mme Grignon: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: Merci, M. le Président. J'aimerais compléter, Mme Grignon, si vous le permettez, une...

Le Président (M. Cardinal): Au micro, s'il vous plaît.

M. Fallu: J'aimerais vous poser une question, une dernière sur ce sujet, à propos de la négociation. Il y a eu une première rencontre le 5 octobre et il y en a eu deux autres par la suite. Combien de temps ont-elles duré environ, au total? Combien d'heures?

Mme Grignon: II y en a une qui a duré la journée complète.

M. Fallu: Oui.

Mme Grignon: Et l'autre, je ne me le rappelle pas.

M. Fallu: On peut dire en tout peut-être dix ou douze heures de négociation?

Mme Grignon: Probablement plus que cela, en tout, pour les trois séances.

M. Fallu: Quant à la partie patronale, est-ce que M. Caine a participé à l'ensemble de la négociation, à toutes les heures de négociation?

Mme Grignon: Oui.

M. Fallu: II était accompagné de représentants, j'imagine bien?

Mme Grignon: Oui.

M. Fallu: Vous avez allégué tantôt qu'à la première rencontre, c'était Me Fournier qui était présent?

Mme Grignon: Ce n'est pas moi qui l'ai dit, mais, oui, c'était lui.

M. Fallu: Oui, d'accord. Aux autres rencontres, Me Fournier était-il également présent?

Mme Grignon: C'était Me Bazin, je crois.

M. Fallu: C'était Me Bazin. A votre grande journée de négociation, entre autres, c'était M. Bazin qui accompagnait M. Caine?

Mme Grignon: Oui.

M. Fallu: D'accord, merci. M. Lévesque, j'imagine que vous n'avez pas l'intention de continuer votre vie comme cela.

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Fallu: D'accord, on part bien. J'ai une série de questions techniques à vous poser sur le rythme de travail dans l'usine. Il y a longtemps que vous travaillez personnellement à la Commonwealth Plywood? Cela fait combien d'années?

M. Lévesque (Ernest): En tout, onze ans.

M. Fallu: Onze ans. Mme Grignon? Mme Grignon: Cela fait deux ans et demi.

M. Fallu: Deux ans et demi. Vous avez travaillé un peu partout dans l'usine?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Sauf évidemment peut-être dehors ou dans la chaufferie?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: D'accord, sur la production, en dedans. Comment est-ce que cela s'est passé, pour vous autres en dedans, au point de vue du travail, du rythme de travail, de l'organisation du travail? Il y a des journées où vous étiez 25, d'autres, 40, d'autres un peu plus, peut-être bien. Chacun faisait quoi à ce temps-là? Ils travaillaient sur des lignes... Ils ne pouvaient plus travailler sur leurs mêmes machines. Comment se répartis-saient-ils le travail?

M. Lévesque (Ernest): Tout cela marche sur une "ligne". Au tout début, cela a été difficile parce qu'il y en a qui ne connaissaient pas le travail que les autres faisaient. Après cela, cela s'est amélioré. On n'est jamais descendu plus bas que 55, à l'usine.

M. Fallu: Ces 55, c'était qui?

M. Lévesque (Ernest): C'étaient les premiers employés qui étaient entrés au travail.

M. Fallu: Oui. Bon, on reviendra là-dessus tantôt. A 55, fallait-il que vous vous déplaciez sur la "ligne" de fabrication?

M. Lévesque (Ernest): Pas nécessairement, parce qu'on a chacun notre machine.

M. Fallu: Oui.

M. Lévesque (Ernest): Dans mon service à moi, il n'y avait aucun déplacement.

M. Fallu: Mais, vous, vous êtes dans la finition, dans la colle...

M. Lévesque (Ernest): Non, je suis au tour.

M. Fallu: D'accord, au déroulage. Les gars, à la finition, il fallait qu'ils fassent du travail par morceaux. Ils laissaient accumuler un coin et, ensuite, ils finissaient?

M. Lévesque (Ernest): C'est arrivé qu'ils faisaient une partie du travail. Par la suite, cela changeait un peu l'organisation du travail, ils allaient travailler un autre côté.

M. Fallu: Cela veut dire qu'il n'y avait pas une production continue, comme dans le temps où vous étiez au moins une centaine?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Fallu: II y avait de la production qui était cassée, qui était accumulée et reprise par une autre équipe?

M. Lévesque (Ernest): Non, ce n'est pas nécessairement comme cela que je veux l'expliquer.

M. Fallu: C'était la même équipe, mais elle pouvait se déplacer?

M. Lévesque (Ernest): Ils en prenaient un d'une place qui savait travailler sur une machine et qui était ailleurs.

M. Fallu: Oui.

M. Lévesque (Ernest): II y avait des échanges d'employés à leur place.

M. Fallu: L'entretien des machines, qui la faisait?

Le Président (M. Lavigne): M. le député de Terrebonne, je m'excuse. C'est vous qui avez la parole. Je tiens à ce que ce soit vous qui l'ayez, mais vous seul avec les intervenants, mais je me rends compte qu'il y a quelques petits caucus autour de la table et je pense que cela va à l'encontre du règlement.

M. Fallu: C'est de bien protéger mon droit de parole, M. le Président.

M. Pagé: ... M. le Président.

M. Fallu: Est-ce que...

Le Président (M. Lavigne): A l'ordre!

M. Fallu: Qui faisait l'entretien de la machinerie à l'intérieur?

M. Lévesque (Ernest): II y a eu des gens de la maintenance, un en particulier qui avait eu un accident du travail et qui est revenu au travail pas longtemps après et un qui faisait partie de la maintenance et qui n'avait pas été mis à pied et...

M. Fallu: Ils étaient combien de la maintenance avant la mise à pied du 16 septembre?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas vous dire combien ils étaient, disons qu'il y en avait un bon groupe.

M. Fallu: Une quinzaine, quatorze ou quinze? M. Lévesque (Ernest): Un bon groupe.

M. Fallu: Un bon groupe. Il en était resté seulement un?

M. Lévesque (Ernest): Non, ils étaient deux ou trois, je crois.

M. Fallu: Avec celui qui est revenu après son accident du travail?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Vous autres mêmes, vous est-il arrivé, à ce moment-là, d'avoir à réparer vos machines?

M. Lévesque (Ernest): Non. Sur de grosses brisures aux machines, la compagnie nous amenait des spécialistes.

M. Fallu: D'après vous, M. Lévesque... Je pose la question également à Mme Grignon, parce qu'elle aussi a travaillé un peu partout, j'imagine bien, à ce moment-là, à l'intérieur de l'usine, à plusieurs endroits, en deux ans et demi, j'imagine que vous avez quand même fait quelques services?

Mme Grignon: Oui.

M. Fallu: D'après vous autres, pour que cela fonctionne bien, une bonne ligne de production, pour que cela n'arrête pas, que ce soit une production continue, à partir de l'entrée de la bille jusque quand le séchage est fait au bout, que le pressage et le séchage sont faits, cela prend combien de gens pour que cela roule bien, pour être à l'aise pour travailler, pour que cela ne bouscule pas et pour qu'il y ait un bon rythme de travail?

M. Lévesque (Ernest): Je ne peux pas répondre à cette question. Je ne suis pas assez au courant de l'administration pour...

M. Fallu: D'accord. A 50, au jugé, quand vous étiez 50, vous manquiez de monde?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Oui, c'est bien net. Les matins où vous étiez à peu près seulement 15 ou 20, ce n'était pas travaillable?

M. Lévesque (Ernest): Cela n'est pas arrivé. M. Fallu: Pardon?

M. Lévesque (Ernest): Cela n'est pas arrivé, ces matins.

M. Fallu: II n'est pas arrivé de matins où vous étiez moins de 20 ou 25?

M. Lévesque (Ernest): II n'est pas arrivé un matin où on était moins de 50.

M. Fallu: Moins de 50? On reviendra là-dessus. Est-ce qu'il existait dans votre ancienne convention une clause d'ancienneté?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Chez vous, c'est bien connu, les listes d'ancienneté. Vous m'avez dit tantôt... Depuis combien d'années travaillez-vous là?

M. Lévesque (Ernest): Onze ans.

M. Fallu: Onze ans. Mme Grignon m'a dit deux ans et demi. M. Lévesque, vous savez depuis combien de temps à peu près tout le monde travaille chez vous?

M. Lévesque (Ernest): Ceux à l'intérieur?

M. Fallu: Oui, partout. Mettons-nous avant le conflit. Tout le monde savait à peu près combien il pouvait avoir d'ancienneté à sa "job".

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Bon. Donc, les gens savent s'ils ont 20 ans, s'ils ont 15 ans, s'ils ont 3 ans, s'ils ont 6 mois. Tout le monde sait cela. Au moment des mises à pied, est-ce qu'il y a des gens qui avaient été mis à pied, à votre connaissance toujours, qui avaient plus d'ancienneté que des gens qui étaient restés à l'intérieur, qui n'avaient pas été mis à pied?

M. Lévesque (Ernest): II a dû peut-être y en avoir quelques-uns.

M. Fallu: Oui. Evidemment, il n'y a pas moyen de faire de griefs, à ce moment, ou quoi que ce soit, alors, passons. Pensez-vous qu'il y aurait moyen de retracer cela, l'ancienneté, mettre cela noir sur blanc, de bonnes listes d'ancienneté, savoir au mois de septembre 1977... Entre vous autres, vous pourriez bien vous entendre et évidemment, avec les registres de la compagnie — j'imagine qu'on posera la question tantôt, cet après-midi — est-ce que vous pensez que vous pourriez établir une bonne liste d'ancienneté, pour savoir quels étaient les plus anciens?

M. Cutler: M. le Président, si vous permettez, si je peux vous suggérer ceci, personnellement, je n'ai pas vu la convention à laquelle vous faites allusion, mais s'il est vrai qu'il y a des droits d'ancienneté, je soumets que la liste fait partie de la convention collective, et plutôt que de vous donner un à peu près, me permettrez-vous de faire enquête, et si cette liste existe, de la produire, et sinon, de nous dire pourquoi la liste n'existe pas, parce que cela fait partie de la convention?

M. Fallu: Justement. Vous nous vérifiez cela pour cet après-midi, si elle fait partie de la convention. Cela m'intéresserait.

M. Cutler: Ce serait peut-être préférable que les témoins n'essaient pas de répondre sans connaître les faits.

M. Fallu: D'accord. Oui, parfait.

M. Bellemare: Prenons la convention collective qu'on a ici, devant nous. On a une convention collective, et, dans le livre qui nous a été donné, il n'apparaît pas de liste d'ancienneté. Elle existe, j'en suis sûr, la compagnie la possède.

M. Casgrain: Dans l'annexe D, vous avez la liste d'ancienneté.

Le Président (M. Lavigne): A l'ordre! M. Bellemare: Dans quel volume?

M. Casgrain: Le volume 2. Le volume 1, pardon! A l'annexe D du volume 1, vous avez la liste d'ancienneté.

M. Bellemare: Cela fait bien des catalogues Eaton.

M. Casgrain: Annexe D du volume 1. M. Bellemare: Ancienneté.

M. Casgrain: Je souligne que les conventions collectives sont là également, si vous voulez les comparer.

M. Bellemare: La liste est là.

Le Président (M. Lavigne): Allez, M. le député de Terrebonne.

M. Fallu: Donc, il y a eu des mises à pied et, par la suite, il y a des gens qui sont retournés travailler. Dans les rappels, entre autres, à votre connaissance, est-ce qu'il y a des gens qui, à un moment ou à un autre, ont travaillé à l'intérieur depuis le 19 septembre 1977 et qui n'avaient pas déjà été à l'emploi de la Commonwealth Plywood? Est-ce qu'il y a des nouveaux, des étudiants, par exemple, l'été passé ou des gens qui venaient de la Coronation ou quelque part ailleurs? (11 h 45)

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Fallu: Aucun. Tout le monde avait déjà travaillé à la Commonwealth Plywood. Maintenant, ces gens-là, est-ce qu'ils étaient à l'emploi de la Commonwealth Plywood le 16 septembre, c'est-à-dire au moment des mises à pied?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Tous?

M. LÉvesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Est-ce que, par exemple, Monique Pouliot — tu connais Monique?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Bon! Est-ce qu'elle était à l'embauche de la Commonwealth, elle, le 16 septembre?

M. Lévesque (Ernest): Un peu avant, parce qu'elle est partie pour raison de grossesse.

M. Fallu: Monique était en congé de grossesse?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: D'accord. Michel Privé...

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: ... le 16, lui, était-il à l'emploi de la Commonwealth?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Ou s'il n'avait pas déjà quitté la Commonwealth une semaine avant?

M. Lévesque (Ernest): Là, s'il a quitté une semaine avant, je ne m'en suis pas aperçu.

M. Fallu: Bon! On vérifiera. A votre dire, il n'y en a pas d'autres qui ont été embauchés le 16 septembre qui n'étaient pas déjà à l'emploi de la Commonwealth.

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Fallu: II y a des gens qui ont été rappelés qui avaient été mis à la porte le 16, mais ils ont été rappelés. Bon!

Actuellement, c'est un peu embêtant comme situation. Il n'y a plus de convention collective. Un syndicat, est-ce qu'il y en a encore un?

M. Lévesque (Ernest): On a tous signé une demande d'accrédiation avec l'Union des rembourreurs et on attend le résultat.

M. Fallu: Avez-vous eu une réponse là-dessus?

M. Lévesque (Ernest): Pas encore. M. Fallu: En aucune façon?

M. Cutler: M. le Président, afin que le député ne soit pas induit en erreur...

Le Président (M. Cardinal): Oui, Me Cutler.

M. Cutler: ... il y a une requête pendante devant Me Devlin, le commissaire, et si ma mémoire est fidèle — parce que je n'ai le dossier que depuis deux jours — je crois que c'est le 30 octobre qui est la date de l'audition.

M. Fallu: Mais, pour qu'il y ait une accrédia-tion nouvelle, il faudrait qu'il y ait période de maraudage.

M. Cutler: Ce serait sans doute une des questions qui feront l'objet de cette audition, n'est-ce pas?

M. Fallu: Oui, et pour qu'il y ait une période de maraudage, il faudrait qu'il y ait eu fin d'une signature d'une convention, mais il semble que ce n'est pas encore démontré devant les tribunaux.

M. Cutler: Vous me permettrez, enfin, de ne pas accepter de dialoguer là-dessus. Je ne suis pas au courant...

M. Fallu: On va laisser ça au commissaire.

M. Cutler: Le commissaire va savoir quoi faire. C'est à lui de décider.

M. Fallu: D'accord.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. M. le député de Terrebonne, je veux vous rappeler de faire attention de ne pas demander des opinions.

M. Pagé: On en a demandé beaucoup ce matin.

Le Président (M. Cardinal): Oui, mais...

M. Pagé: C'est seulement ça qu'on demande.

M. Cutler: Si c'était possible pour moi de vous donner une opinion, je l'aurais fait, mais je n'ai même pas vu les documents dont Me Devlin est saisi dans le moment. Donc, je ne suis pas pour lui demander...

M. Fallu: D'accord! Parfait! Je vous remercie de votre collaboration.

Bon! En tout cas, il n'y a plus de convention; cest fini. Celle que vous aviez signée est épuisée. Le syndicat est en suspens. D'après vous, est-ce que la CSN a toujours son accréditation? Vous n'avez pas la vôtre; la CSN a la sienne. Quel est le syndicat là-dedans?

M. Lévesque (Ernest): Je crois qu'à la fin de la convention, en ayant démissionné de la CSN et en signant pour l'Union des rembourreurs pour une demande d'accréditation, je crois qu'elle n'a plus son accréditation.

M. Fallu: Bon! Un autre point à régler ailleurs, ça. De toute façon, avoir une accréditation pour régler ça et avoir une nouvelle convention, selon la méthode que vous utilisez actuellement, qui vous a suggéré de demander une nouvelle accréditation comme ça?

M. Lévesque (Ernest): Ce sont tous les employés qui l'ont décidé.

M. Fallu: Toujours avec votre conseiller syndical, évidemment?

M. Lévesque (Ernest): Ah oui!

M. Fallu: Ah oui, d'accord! Pensez-vous que vous avez des chances de signer une convention cet automne? Non?

M. Cutler: Voici! M. le Président, encore une fois, si Me Devlin rend une décision et si je suis

encore au dossier, je vais sûrement demander à mes clients de respecter sa décision. Mais, de là à essayer de prédire...

M. Fallu: Oui.

M. Cutler: ... ou d'être assez clairvoyant pour savoir la décision qui serait rendue, il me semble que ce serait dépasser...

M. Fallu: Oui, mais entre-temps — je pose la question à M. Lévesque — en attendant que la décision du commissaire soit rendue, c'est qui le syndicat?

M. Lévesque (Ernest): C'est encore nous, l'Union des rembourreurs. On a fait notre demande.

M. Fallu: Si elle n'est pas accordée?

M. Lévesque (Ernest): Si elle n'est pas accordée, on a démissionné de la CSN.

M. Johnson: Donc, il n'y a pas de syndicat?

M. Fallu: Donc, il n'y a pas de syndicat du tout? Vous avez démissionné de la CSN. Votre syndicat que vous vous étiez fabriqué, les employés de la Commonwealth Plywood CSN, vous avez démissionné de cela?

M. Bellemare: Le syndicat de boutique n'existe plus?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre s'il vous plaît! Nous sommes en train de poser des questions aux invités et non pas de les influencer.

M. Bellemare: On ne les influence pas. On dit ce qu'on sait.

M. Fallu: D'accord. Vous n'êtes pas plus CSN et vous n'êtes pas encore rembourreurs? Donc, il n'y a plus de syndicat?

M. Bellemare: Un syndicat de boutique.

M. Fallu: Pour vous autres, il n'y a plus de syndicat qui vous protège en aucune façon de votre point de vue? Avez-vous eu l'occasion de prendre connaissance un peu du rapport de médiation?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Pensez-vous qu'il est possible d'établir la liste d'ancienneté?

M. Lévesque (Ernest): Me Cutler vous a répondu tantôt que...

M. Fallu: ... que cela se fait. M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Fallu: Avec les recommandations du conseil spécial de médiation, êtes-vous en accord ou en désaccord? Quelle est l'opinion de votre monde chez vous?

M. Lévesque (Ernest): Je n'ai pas vu mon monde depuis lundi, alors que j'ai reçu le rapport de médiation mercredi.

M. Fallu: Mercredi.

M. Lévesque (Ernest): Ils ont peut-être fini de l'étudier, mais personnellement, je n'ai pas encore terminé, parce que je n'ai pas été à l'usine depuis vendredi.

M. Fallu: D'accord. Croyez-vous qu'il y aurait moyen, au moment — on va imaginer quelque chose, si vous permettez, M. le Président, c'est moi qui fais les hypothèses cette fois, supposons qu'on pourrait trouver une façon de s'accorder sur un tas de choses et que, dans un mois, par exemple, vous retourniez au travail avec les gens qui ont fait la grève, ceux qui sont restés en dedans. Y aurait-il moyen de travailler sans se casser la gueule?

M. Lévesque (Ernest): II faudrait aussi le demander à ceux qui sont dehors.

M. Fallu: Oui, d'accord. C'est une bonne question.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. Encore une fois, plus fort. Le dialogue est pour tout le monde.

M. Fallu: M. le Président, M. Lévesque dit que, de son point de vue, c'est oui. Il n'y aurait pas de cassage de gueule, mais il dit qu'il faudrait également poser la même question à ceux de l'extérieur.

A travers tout ce temps — cela fait un an — et je sais qu'entre vous autres, il y a des gens qui sont parents, c'est le beau-frère, la belle-soeur et le beau-père qui est en-dedans et c'est le beau-fils qui est en dehors, etc., et en plus, il y a des copains et des copines — pas besoin de faire de dessin, on connaît notre monde, cela a créé des brisures dans les familles. Y a-t-il une volonté chez vous, chez votre monde, après un an comme cela, de tâcher de trouver un moyen de raccorder tout cela?

M. Lévesque (Ernest): Oui. Il y a eu une décision. On a décidé, par une suggestion, tout un accord, le comité, que cela serait peut-être un vote qui serait bon.

M. Fallu: Un vote de quelle nature?

M. Lévesque (Ernest): Un vote pour régler le conflit, pour déterminer...

M. Fallu: Un vote qui serait pris. Cela est intéressant. Un vote qui serait pris où, avec qui?

M. Lévesque (Ernest): Avec tous ceux qui sont à l'emploi de Commonwealth Plywood.

M. Fallu: Ceux qui restent ou tous ceux qui étaient à l'emploi, qui étaient couverts par l'unité d'accréditation en 1977?

M. Lévesque (Ernest): Là-dessus, je vais laisser répondre Me Cutler, parce que la suggestion vient...

M. Cutler: M. le Président, ma réponse sera assez courte. Le témoin fait allusion à une rencontre, hier soir, à notre salle de conférence, à l'étude...

M. Fallu: Oui, d'accord.

M. Cutler: ... où on a dit... Mais si vous me le permettez, ce n'est pas quelque chose de... Je pense que c'est clair. Je dois même vous dire que cela a été transmis aux gens de la CSN. La suggestion que j'ai faite à mes clients — mes clients de quelques jours, si vous voulez, mais mes clients dans le moment — c'est que Me Devlin devrait ordonner un vote et devrait même décider qui a le droit de vote et les parties devraient respecter sa décision comme finale.

M. Fallu: Est-ce que cela, c'est sur la base du rapport du conseil de médiation?

M. Cutler: M. le député, M. le Président, si vous me le permettez, le Code du travail existait avant ce conflit. On a fait beaucoup de millage depuis la première fois que j'ai eu l'occasion de discuter de cette affaire avec le député de Bagot.

M. Bellemare: De Johnson.

M. Cutler: Je pense qu'on peut vraiment dire — n'est-ce pas, M. Bellemare? — que les autorités compétentes qui ont appliqué et interprété la loi ont déjà eu maintes et maintes fois à décider, dans des cas semblables — d'abord, il n'y a pas eu de cas pareils, mais dans des cas semblables — qui aurait le droit de vote et qui ne l'aurait pas. Ce devrait être les autorités compétentes et non pas les gens en conflit qui décident, et surtout pas le patron qui décide.

M. Fallu: D'accord. Alors, ce que je comprends des suggestions que vous faites à vos clients, c'est-à-dire à ceux qui sont actuellement vos clients, c'est que c'est beaucoup d'ouverture.

M. Cutler: Bien sûr.

M. Fallu: D'accord. Donc, vous allez dans le même sens que M. Lévesque, à savoir qu'il faut trouver un moyen de sortir de l'imbroglio même juridique qu'il y a là. D'accord, parfait.

M. Bellemare: Même si Me Cutler suggère une certaine procédure au juge.

M. Cutler: Je m'excuse, M. le Président, je n'ai pas compris.

M. Bellemare: Même si M. Cutler suggère une certaine forme de procédure au juge.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député.

M. Cutler: Evidemment, M. le Président, je dis que nous avons suggéré à nos clients de dire à Me Devlin, le 30 octobre, ce n'est pas loin, que la meilleure façon de régler ce conflit, qui dure déjà depuis assez longtemps, trop longtemps... Il pourrait probablement se terminer par un vote, dans le sens que c'est lui qui ordonne le vote, parce qu'il en a la compétence et la juridiction, et que c'est lui qui décide qui a le droit de vote, indépendamment du fait que la personne soit en dedans ou ne soit pas en dedans.

Le Président (M. Cardinal): Ce n'est pas un ordre, c'est un voeu.

M. Cutler: C'est une demande que nous allons formuler et présenter le 30.

M. Fallu: Donc, cela encore, nous allons le laisser entre les mains du commissaire.

M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez.

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le ministre.

M. Johnson: Si le député de Terrebonne et le député de Johnson me le permettent, je voudrais simplement...

M. Bellemare: Comment, vous le permettre! Vous avez le droit de parole. Vous avez monologué pendant des heures.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Ne venez donc pas essayer de...

Le Président (M. Cardinal): En vertu de l'article 162, il a toujours le droit de parole. Alors, M. le ministre.

M. Bellemare: Oui, c'est sûr et nous sommes bien limités. On a dit que c'était un monologue et on n'a pas encore entendu la compagnie. J'ai hâte de lui poser des questions.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! M. le ministre.

M. Johnson: Simplement, si je comprends bien, ce qu'évoque Me Cutler, c'est qu'il se réfère finalement à un commissaire-enquêteur, Me Dev-

lin, qui a un statut, comme l'a souligné finalement, par incidence, le député de Johnson, quasi judiciaire et, si j'ai bien compris ce que Me Cutler nous a dit, c'est qu'il suggérait que, si les parties s'entendent, ils acceptent que la décision de Me Devlin soit considérée comme finale.

M. Bellemare: Qu'est-ce qu'on fait ici? Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Johnson: Je n'ai pas compris cependant que, d'une part, Me Cutler voulait dire à un juge quoi faire et, d'autre part, je pense qu'il s'agit là d'un développement qui remonte à hier soir. (12 heures)

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre.

M. Bellemare: Pensez-vous que le compte rendu de la commission parlementaire ne sera pas lu par M. Devlin?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): ... à l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre...

M. Bellemare: Voyons donc, ça va être lu par M. Devlin.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Oui, M. le député de Portneuf, une question de règlement ou...

M. Pagé: C'est strictement une directive et en même temps, je voudrais demander au député de Terrebonne s'il me permettrait de poser au ministre une question très brève, qui pourrait éclairer le débat?

Le Président (M. Cardinal): C'est M. le ministre qui a...

M. Fallu: Très volontiers, c'est ce qu'on cherche, éclairer la situation.

M. Pagé: C'est lui qui a le droit de parole actuellement.

M. Fallu: Oui.

M. Pagé: Vous me donnez la permission?

M. Fallu: Oui.

M. Pagé: C'est gentil. M. le ministre, vous acceptez une question?

M. Johnson: Cela va dépendre.

M. Pagé: Cela va dépendre de la question. Ah, ah!

M. Johnson: M. le Président, contrairement à ce que pense le chef parlementaire de l'Opposition, je pense qu'il n'appartient pas à l'Opposition de déterminer le contenu des réponses.

M. Pagé: M. le Président...

M. Bellemare: ... poser une question directement à un ministre, il faut passer, en commission parlementaire, par le président comme en Chambre.

M. Fallu: Je supplierais tout le monde...

M. Pagé: Ne nous enfargeons pas dans les fleurs du tapis.

M. Fallu: ... de faire ça vite, parce que c'est mon temps de parole qui court.

M. Pagé: M. le Président, je veux demander au ministre s'il convient ou s'il est d'accord qu'une formulation de solution ou une hypothèse de solution, telle que celle énoncée par Me Cutler, constitue, ou peut constituer, pour lui un moyen de régler le conflit?

M. Bellemare: On n'a pas encore entendu la compagnie.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre.

M. Johnson: On m'a posé une question, M. le Président, je peux peut-être y répondre. Je ne pense pas. Je pense qu'il reste encore du boulot à accomplir ici. Cependant, je trouve ça peut-être intéressant de voir qu'hier, il y a eu une réunion et que les gens se parlent un peu. C'est déjà un progrès. Cela ne veut pas dire que ça va régler tous les problèmes, on verra. Je pense qu'on va être amené dans l'heure qui vient et cet après-midi, normalement, j'espère qu'à 16 heures, on pourrait entendre M. Caine. Normalement, si les choses se déroulent bien jusqu'à 12 h 30, on pourrait peut-être entendre M. Caine vers 16 heures. Je pense qu'on aura commencé à accélérer les choses.

M. Pagé: Vous ne croyez pas que c'est un élément de solution?

M. Bellemare: ...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît...

M. Cutler: Voudriez-vous, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): ... non, ne commençons pas de débat sur cette question.

M. Cutler: M. le Président, est-ce que je pourrais simplement compléter en disant que j'ai non seulement suggéré cette solution à mes clients, mais également à la CSN et à la compagnie.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, Me

Cutler. Ecoutez, il est midi, je ne veux pas sans cesse rappeler le règlement 160, alinéa 1. M. le député de Terrebonne, brièvement, si vous voulez continuer.

M. Fallu: Compte tenu du temps, avec le ministre du Travail, on vient de s'entendre pour que M. le ministre continue à poser quelques questions pour qu'on puisse terminer à 12 h 30.

M. Bellemare: Pourquoi ignorez-vous Thé-riault ce matin? C'est lui, la bête noire.

Le Président (M. Cardinal): De toute façon, à 12 h 30, je devrai ajourner. Merci, M. le député de Terrebonne, pour votre collaboration. M. le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président, j'ai quelques questions assez rapides. D'abord, une à M. Thé-riault sur les cartes du 3; je demanderais à M. Thériault à quelle date il a fait imprimer les cartes ou il a donné la commande?

M. Thériault: Je ne peux pas préciser exactement la date, c'est certainement avant le 3 octobre.

M. Johnson: C'est sûrement avant le 3 octobre, donc avant que la CSN n'obtienne son accréditation.

M. Thériault: C'est au moins une semaine avant et peut-être plus.

M. Johnson: Au moins une semaine avant.

Deuxièmement, à Mme Grignon et à M. Lé-vesque, celui ou celle qui veut répondre ou les deux, la conférence de presse que vous avez organisée, était-ce fin avril et début mai et qui a convoqué cette conférence de presse?

M. Lévesque (Ernest): On a reçu un téléphone de M. Thériault de monter à Montréal...

M. Johnson: De vous rendre à un endroit qui s'appelle le restaurant Slovak ou quelque chose comme ça, la salle Slovak, c'est ça?

M. Lévesque (Ernest): Je sais que c'était une salle mais le restaurant...

M. Johnson: Vous n'avez rien eu à faire avec l'organisation de la conférence de presse, M. Lévesque? Est-ce vous qui l'avez organisée, oui ou non?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Mme Grignon?

Mme Grignon: Non.

M. Johnson: Non plus. M. Thériault?

M. Thériault: Sur les conseils de nos avocats, j'ai rencontré un monsieur qui, à ce qu'on m'a dit à la dernière séance de la commission parlementaire, s'appelait M. Turcot. Le nom m'a dit quelque chose au moment où on l'a mentionné.

M. Johnson: C'est un ancien correspondant de Radio-Canada, je pense.

M. Thériault: Je ne le sais même pas. Je ne connais pas son...

M. Johnson: C'est pour ça que ça vous disait quelque chose, peut-être?

M. Thériault: Je ne connais pas son passé du tout. Je ne suis pas dans les couloirs de Radio-Canada, en aucun temps.

Je me suis rendu avec Me Pierre Langlois qui était notre procureur à ce moment-là, rencontrer ce monsieur qui nous a parlé d'une conférence de presse qu'il pouvait nous organiser, vu que Me Langlois savait qu'on avait essayé de passer des articles dans les journaux et qu'on ne réussissait pas à les passer.

Il s'est offert pour le faire et c'est lui qui s'est occupé de la préparation de la conférence de presse pour nous autres.

M. Johnson: Je voudrais seulement être sûr que je ne vous mets pas des paroles dans la bouche que vous n'auriez pas dites. Ce que vous me dites, c'est qu'avec votre procureur, Me Pierre Langlois, après discussion avec lui, il y a quelqu'un, vous ou M. Langlois, qui a dit: II faudrait qu'on fasse une conférence de presse parce que notre message ne passe pas. Me Pierre Langlois vous a suggéré de faire affaires avec M. Turcot. C'est cela? C'est bien cela?

M. Thériault: Cela va un peu plus loin que cela. Les ouvriers auraient bien voulu que la publicité ne vienne pas que d'un côté. Ils m'ont demandé à différentes reprises pourquoi on ne mettait pas des articles dans les journaux, pourquoi on ne convoquerait pas des conférences de presse.

J'en ai discuté avec Me Langlois et, à un moment donné, il m'a appelé pour me dire: Puisque tu me dis que tu ne peux pas le faire, il y a quelqu'un qui pourra le faire pour vous autres. Il m'a mis en contact avec lui.

M. Johnson: D'accord. Il vous a mis en contact avec M. Turcot que vous avez rencontré?

M. Thériault: Avec lui.

M. Johnson: Au moment de la conférence de presse, il y a eu un communiqué de presse qui a été émis?

M. Thériault: Je n'étais pas là. Ce n'est pas moi qui m'en suis occupé à ce moment-là.

M. Johnson: M. Lévesque, vous étiez à la conférence de presse?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: II y a eu un communiqué de presse qui a été émis, un texte écrit d'avance?

M. Lévesque (Ernest): Oui. M. Johnson: Qui l'a rédigé?

M. Lévesque (Ernest): Je ne me souviens même plus qui me l'a remis. Je ne puis donc vous dire qui l'a rédigé.

M. Johnson: Si je comprends bien, ce n'était pas vous? S'il vous plaît, est-ce que c'est possible d'obtenir les réponses des témoins, dans le cadre normal?

M. Lévesque (Ernest): Le communiqué, ce n'était pas moi.

M. Johnson: Ce n'est pas vous qui l'avez écrit, le communiqué?

M. Lévesque (Ernest): Ce sont des idées de tous les employés, mises ensemble. Mais ce n'est pas moi qui l'ai écrit.

M. Johnson: Mme Grignon, est-ce que c'est vous qui l'avez écrit, le communiqué?

Mme Grignon: Non.

M. Johnson: M. Thériault, ce n'est pas vous non plus?

M. Thériault: J'ai participé à la rédaction, j'ai donné mes idées à Me Langlois, en présence de M. Turcot.

M. Johnson: A Me Langlois, en présence de M. Turcot?

M. Thériault: M. Turcot s'était offert et on a accepté ses services pour nous aider à le préparer.

M. Johnson: D'accord.

M. Thériault: Je lui ai même fourni un brouillon qui venait de moi, après discussion avec le comité.

M. Johnson: D'autre part, M. Lévesque, la lettre que vous avez envoyée au premier ministre, qui l'a rédigée?

M. Lévesque (Ernest): Encore là...

M. Johnson: C'est vous qui l'avez signée. Mais qui l'a rédigée?

M. Lévesque (Ernest): Je ne le sais pas.

M. Johnson: Vous ne vous souvenez pas?

M. Lévesque (Ernest): II y a tellement de choses qui se sont passées que ce sont des détails dont je ne me souviens pas.

M. Johnson: Oui. Mais la dernière fois, vous avez lu une lettre en commission parlementaire, quand on s'est vu ici même, dans cette salle?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Vous avez lu deux lettres, si je me souviens bien. Mais il y en a une qui était signée par vous.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Cela ne doit pas arriver tous les jours que vous écrivez au premier ministre du Québec?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Vous souvenez-vous des circonstances dans lesquelles ce texte a été rédigé? Qui a rédigé la lettre? Ce n'est pas vous, c'est cela que vous me dites?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Pouvez-vous m'affirmer catégoriquement que ce n'est pas vous qui avez rédigé la lettre?

M. Lévesque (Ernest): Non, ce n'est pas moi.

M. Johnson: Ce n'est pas vous qui avez rédigé la lettre. Mme Grignon, est-ce que c'est vous?

Mme Grignon: Non.

M. Johnson: M. Thériault?

M. Thériault: Je n'ai pas eu connaissance de cette lettre. Je n'ai su que dernièrement qu'elle avait été envoyée.

M. Johnson: Vous n'avez pas eu connaissance de la lettre non plus. D'accord. Mais vous l'avez signée à un moment donné. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui vous l'a présentée la lettre, pour que vous la signiez?

M. Lévesque (Ernest): C'est là-dessus que je ne m'en souviens pas. Je sais que je l'ai présentée aux employés, qui m'ont appuyé pour l'envoyer.

M. Johnson: D'accord. Et vous ne vous souvenez pas qui vous a remis cela, qui vous a suggéré cela?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Essayez de réfléchir, essayez de

penser. Essayez de vous remémorer comme il faut. Vous avez signé la lettre. On en a des photocopies vous en avez montré vous-même une photocopie il n'y a pas longtemps. Vous avez signé une lettre d'à peu près deux ou trois pages, si je me souviens bien. Vous l'avez lue ici. Essayez de vous souvenir. Si ce n'est pas vous qui avez rédigé la lettre, qui est-ce qui vous a donné le texte pour que vous mettiez votre signature dessus? Je vais vous passer une copie.

M. Lévesque (Ernest): Je sais très bien de quoi vous parlez.

M. Johnson: Est-ce qu'on peut faire circuler la photocopie? Vous ne vous souvenez pas?

M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Vous ne vous souvenez pas quand vous l'avez signée?

M. Lévesque (Ernest): Oui, la date est dessus. Tous les employés l'ont signée.

M. Johnson: A quel endroit étiez-vous quand vous l'avez signée? Vous ne vous souvenez pas des circonstances où vous avez pris un crayon et mis votre signature en bas de ce papier?

M. Lévesque (Ernest): Oui, pendant le "break".

M. Johnson: Pendant le "break". C'était donc à l'usine. Est-ce que c'était à l'usine?

M. Lévesque (Ernest): Je crois que oui.

M. Johnson: D'accord. Qui vous a remis le texte? Vous vous souvenez quand c'était, que c'était pendant un "break" à l'usine et vous avez la date. Qui vous a remis le texte?

M. Lévesque (Ernest): Franchement, je ne suis pas capable de... Il y a eu assez de monde là-dedans que je ne suis pas capable de...

M. Johnson: Bon.

M. Bellemare: Cette lettre recommandée du 1er février...

M. Johnson: Qui est allé la porter au bureau de poste? Parce que cela prend une opération spéciale pour une lettre recommandée. Il faut aller chercher les espèces de... les nouveaux systèmes des postes quand ils fonctionnent. De ce temps-ci... Est-ce que c'est vous qui êtes allé la porter au bureau de poste?

M. Lévesque (Ernest): Non, parce que je n'étais pas capable de quitter le travail...

M. Johnson: Vous aviez seulement un "break" de dix minutes?

M. Lévesque (Ernest): ... deux heures.

M. Johnson: Oui.

M. Lévesque (Ernest): Oui. J'ai donc demandé au surintendant de l'usine, quand le commissionnaire sortirait, s'il serait capable de me faire recommander ces lettres.

M. Johnson: D'accord. Avez-vous remis de l'argent, à ce moment-là, au surintendant pour qu'il paie les frais de...

M. Lévesque (Ernest): Non, je lui ai remis l'argent après.

M. Johnson: Vous le lui avez remis après, quand il est revenu avec le coupon.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: C'est cela. Vous ne vous souvenez toujours pas qui vous a remis ce texte avant que vous ne mettiez votre signature, que vous mettiez cela dans une enveloppe et que vous le redonniez au surintendant?

M. Lévesque (Ernest): Non, le texte n'est pas un texte qui m'a été remis comme cela. C'est un texte qui m'a été remis, mais j'ai travaillé ce texte après. C'étaient des idées ou quoi. De là à vous dire lequel de tous les gens que j'ai rencontrés m'a remis ces idées...

M. Johnson: Oui. Qui a dactylographié ce texte. Est-ce vous?

M. Lévesque (Ernest): Non. M. Johnson: Ce n'est pas vous? M. Lévesque (Ernest): Non.

M. Johnson: Ce n'est pas vous. D'accord. Vous n'avez pas de machine à écrire à votre adresse qui est le local de votre syndicat?

M. Lévesque (Ernest): Celui qui l'a dactylographiée, c'est encore un service que j'ai demandé au surintendant de l'usine.

M. Johnson: Vous avez demandé au surintendant de dactylographier la lettre?

M. Lévesque (Ernest): Pas lui-même, mais un employé.

M. Johnson: Vous lui avez remis la lettre et vous lui avez demandé de s'arranger pour dactylographier la lettre?

M. Lévesque (Ernest): Et de m'en donner une copie, oui.

M. Bellemare: La lettre recommandée, M. Lévesque, était-elle signée par les employés?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Bellemare: Celle du 25 ne l'était pas, mais celle du 1er février était signée par tous les employés?

M. Lévesque (Ernest): La première a été signé par tous les employés.

M. Bellemare: Le 25 janvier 1978. La deuxième était signée par tous les employés qui étaient dans votre pseudo-syndicat.

M. Johnson: Je comprends tout cela. Cela fait quasiment un an que cela s'est passé, cela fait même déjà un an, au moment où on se parle, l'ensemble des circonstances. C'est vrai que cela peut être difficile de se rappeler certaines choses, mais vous comprendrez que je trouve cela un petit peu troublant. Vous envoyez une lettre au premier ministre du Québec. Habituellement, on ne fait pas cela tous les jours. Deuxièmement, vous me dites que vous avez travaillé ce texte et que vous avez parlé avec les employés d'en dedans, etc. Troisièmement, vous me dites que vous avez demandé au surintendant de s'organiser pour la faire dactylographier.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Donc, vous lui avez remis un manuscrit. Est-ce que vous lui avez remis des feuilles de papier écrites à la main pour qu'il fasse cela? Le surintendant, c'était M. Verville?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Bon. Qu'est-ce que vous avez remis à M. Verville pour qu'il le fasse dactylographier?

M. Lévesque (Ernest): Un manuscrit. M. Johnson: Un manuscrit.

M. Lévesque (Ernest): Un manuscrit, plus les signatures des employés. Il a tout photocopié aussi, parce que j'en voulais des copies à remettre aux employés.

M. Johnson: M. Verville est le surintendant de l'usine?

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: C'est un peu l'homme de confiance du propriétaire?

M. Lévesque (Ernest): Cela devrait.

M. Johnson: Vous voyez ce que je veux dire.

M. Bellemare: Syndicat de boutique.

M. Lévesque (Ernest): Oui.

M. Johnson: Pourquoi avez-vous fait appel à l'homme de confiance du propriétaire de l'usine où vous étiez, pour envoyer l'équivalent d'une sorte de pétition ou d'une requête au premier ministre du Québec?

M. Lévesque (Ernest): Je crois qu'il avait toutes les machines nécessaires pour le faire.

M. Johnson: D'accord. Cela va, je n'ai pas d'autre question.

M. Bellemare: ... Syndicat de boutique...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Merci, M. le ministre.

M. Johnson: Je n'ai pas d'autre question, ni pour M. Lévesque, ni pour M. Thériault, ni pour Mme Grignon, à moins que Mme Grignon ait quelque chose à ajouter sur la lettre. Est-ce qu'elle est au courant de tout cela, l'affaire de la lettre? Il y a eu deux lettres envoyées au premier ministre?

Mme Grignon: J'ai lu les lettres, je les ai signées, mais je ne suis pas au courant de la façon dont cela s'est préparé. Je n'étais pas secrétaire dans ce temps.

M. Bellemare: On va le demander au patron...

M. Johnson: Est-ce qu'à aucun moment — je vais vous poser la question très directement, et j'aurai peut-être l'occasion de la poser à M. Caine aussi, qui pourra répondre cet après-midi, mais je vous la pose à vous, cette question — vous n'avez mis au courant votre employeur que vous envoyiez une telle lettre?

M. Lévesque (Ernest): il a dû être mis au courant lorsque le surintendant...

M. Johnson: Vous l'avez remise à M. Verville. Est-ce qu'à aucun moment, antérieurement à cela, et dans la période qui a précédé de façon immédiate l'émission du certificat d'accréditation le 3 octobre en faveur de la CSN, vous avez eu des communications avec votre employeur concernant les problèmes d'accréditation et la question du changement du syndicat, etc.?

M. Lévesque (Ernest): Non, au fait, quand on est entré au travail tout juste avant, le 27 septembre plus précisément, parce que c'est une date que je me rappellerai toujours, car c'est ce jour-là que j'ai rencontré les permanents de la CSN, à la suite de cette rencontre, j'ai demandé à M. Verville si on était un nombre assez important pour retourner au travail, si l'usine ouvrirait ses portes pour nous laisser entrer. Il m'a répondu que si le nombre était assez important pour produire, de rentrer au travail.

M. Johnson: D'accord. Une dernière question. D'après vous, combien est-ce que cela prend de personnes pour faire fonctionner cette usine de façon normale, à un niveau de production habituel ou normal?

M. Lévesque (Ernest): Je ne me suis jamais occupé de cela, l'administration.

M. Johnson: Vous ne vous êtes jamais posé la question? D'accord. Très bien, je n'ai plus de question pour ces témoins. Oui? On pourrait peut-être ravoir nos copies, mais on en a d'autres.

Le Président (M. Cardinal): Oui, d'accord. Merci, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, j'appelle...

Le Président (M. Cardinal): Un instant! M. le député de Portneuf avait demandé la parole.

M. Pagé: M. Lévesque, vous nous avez dit tout à l'heure que le rapport du conseil de médiation avait été livré aux employés jeudi ou vendredi de la semaine dernière. Lors de la précédente séance, vous m'avez répondu qu'effectivement, ce rapport n'avait pas été soumis pour approbation ou désapprobation aux employés. Alors, est-ce que vous prévoyez, est-ce qu'il est dans vos intentions de soumettre ledit rapport pour approbation ou désapprobation et si oui, dans quel délai?

M. Lévesque (Ernest): Dès qu'il sera possible de le faire. On n'a eu aucune rencontre encore avec les employés. Chacun a reçu une copie afin d'étudier...

M. Pagé: Oui.

M. Lévesque (Ernest): ... le rapport et les recommandations. Par la suite, je les ai prévenus qu'on aurait une rencontre pendant laquelle on discuterait de ces recommandations.

M. Pagé: D'accord. On peut présumer que ça pourrait être fait dans quel délai? Ce sera fait éventuellement, tout ça?

M. Lévesque (Ernest): Eventuellement, peut-être avant la fin de la semaine prochaine.

M. Pagé: Avant la fin de la semaine prochaine que les employés pourront se prononcer....

M. Lévesque (Ernest): Sur les recommandations, oui.

M. Pagé: ... pour une première fois, sur le rapport du conseil de médiation. D'accord.

Me Cutler, une dernière question que je me permets de vous poser, parce que vous n'étiez pas ici à la dernière séance.

Au début des travaux de cette commission, j'ai eu l'occasion d'exprimer de sérieuses réserves sur la possibilité qu'une commission parlementaire comme la nôtre puisse régler un problème aussi épineux que celui-là, où on assiste à un dédale de procédures judiciaires de part et d'autre, où on a des appels de logés et des décisions qui devraient normalement être rendues éventuellement, soit par le commissaire-enquêteur, etc.

Dans votre réponse à une question du député de Terrebonne tout à l'heure, vous avez relaté une rencontre qui se serait tenue hier, dans laquelle vous avez dégagé des avenues possibles de solution.

Ma question est la suivante: Croyez-vous, parce que, Me Cutler, vous avez quand même une vaste expérience dans les relations de travail, qu'un conflit comme celui-là peut se régler suite à une commission parlementaire ou si vous privilégiez que ça se réglera ou que ça peut se régler, soit par... M. le Président, que le ministre me laisse compléter ma question, s'il vous plaît!

M. Johnson: Si vous permettez, M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Je pense que si c'est une question de règlement, je vais être obligé de vous interrompre.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je ne veux pas lancer des roches dans la mare du député, mais je pense que ses longs prolégomènes et les questions et ce vers quoi il se dirige, on aura peut-être l'occasion, au cours de la fin, peut-être, de nos séances, d'envisager tout ça. M. Cutler a évoqué une chose tout à l'heure. Cela a été repris par le député de Portneuf. Je pense qu'on allait interroger les gens sur des événements spécifiques. Je pense que c'est terminé. Il me semble qu'on pourrait peut-être passer aux prochains témoins.

M. Pagé: Non, écoutez, ce n'est pas vous qui allez me dicter mes questions.

Le Président (M. Cardinal): Oui, justement... M. Cutler: De toute façon, M. le Président... M. Johnson: Tu n'as pas le droit de parole. M. Pagé: II faut quand même... Un instant!

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Je reconnais le droit de parole au député de Portneuf.

M. Pagé: Je vous remercie, M. le Président. Je comprends que cette commission serve d'immense paravant au ministre, qui n'a pas voulu intervenir plus tôt dans le conflit et ça fait son affaire, ici.

NI. Johnson: Voyons donc! Voyons donc!

M. Pagé: Laissez-nous donc poser les questions.

M. Johnson: M. le Président, c'est...

M. Pagé: La solution n'est pas nécessairement en commission parlementaire. Vous n'avez pas confiance aux mécanismes judiciaires et c'est là-dessus que s'en vient ma question. Laissez donc faire l'Opposition officielle, voulez-vous?

Vous n'avez pas d'affaire à nous dicter nos questions. Bon!

M. Johnson: M. le Président, je pense que le député de Portneuf avait d'ailleurs épuisé son droit de parole lors des premières questions.

M. Pagé: M. le Président, j'avais le consentement de la commission pour poser ma question. Je la complète, M. le Président.

Croyez-vous que le conflit pourra se régler à la lumière des travaux de cette commission ou encore si vous privilégiez l'action des tribunaux ou encore une entente entre les parties, tel que vous l'avez relaté, avec des avenues, en faisant état de la rencontre d'hier?

Le Président (M. Cardinal): Me Cutler.

M. Cutler: D'abord, M. le Président, qu'il me soit permis immédiatement de vous dire que je ne me considère pas expert dans le domaine des relations ouvrières, encore moins dans des commissions parlementaires. J'ai confiance que si vous avez décidé de tenir une commission parlementaire, vous avez vos raisons. J'ai confiance également — j'espère que Me Pepin ne m'en voudra pas, pardon, pour moi vous êtes mon maître, mon client parfois, mon maître aussi.

J'ai eu l'occasion, je dois vous dire, de passer une bonne partie de l'avant-midi et de l'après-midi et n'eût été d'un rendez-vous, que j'avais chez le dentiste, j'aurais passé toute la journée avec Marcel Pepin, non seulement pour essayer de convaincre M. Pepin de la question du vote, mais également pour avoir son opinion. La seule chose que je puisse vous dire, c'est qu'il est vraiment impossible d'accepter — c'est inacceptable — que cette affaire puisse durer plus longtemps que le 30 et que la décision rendue le 30 n'aura pas pour fin d'amener un règlement.

Essayer d'aller plus loin que cela, vraiment, c'est s'aventurer dans une affaire, sachant — et je vous demande de me croire que, bien sûr, je suis au courant qu'il y a eu une multitude de procédures devant les tribunaux dont je ne suis même pas au courant, mais pourquoi ne pas laisser les employés décider eux-mêmes lequel des deux syndicats...

Des Voix: Ah!

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Cutler: C'est la seule réponse que je puisse vous donner. D'aller plus loin, c'est essayer de prédire et vous savez je ne viens pas souvent ici — je suis déjà venu devant la commission ici et j'ai eu un meilleur succès que dans certaines causes devant les tribunaux. J'ai déjà essayé de prédire les causes devant les tribunaux sans succès. Ne me demandez pas de le faire ici.

Le Président (M. Cardinal): Merci Me Cutler. M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le ministre. Dois-je considérer qu'il n'y a plus de questions aux trois témoins qui sont devant nous?

M. Johnson: C'était terminé, oui. J'aurais suggéré que nous entendions M. Turcot. Pour ma part, les questions que j'ai à lui poser seront très brèves. Compte tenu de l'heure, on pourrait peut-être ajourner et reprendre rapidement... En tout cas, en ce qui nous concerne, ce sera très rapide avec M. Turcot à moins que lui ne veuille détailler ou que l'Opposition veuille détailler longuement et ensuite, on pourrait procéder, le plus rapidement possible, immédiatement à entendre M. Caine.

M. Bellemare: Tant mieux.

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre, permettez avant l'ajournement, deux minutes, s'il vous plaît.

Une première chose. Le président n'a pas le droit de participer aux débats, cependant, je veux quand même remercier les trois témoins qui ont été devant nous pendant de nombreuses heures; M. Donat Thériault, Mme Grignon, M. Lévesque, au nom de toute la commission, pour leur patience et ce qu'ils nous ont appris.

Je veux aussi rappeler que nous allons ajourner sine die dans quelques secondes, mais que nous avons convenu que les travaux véritables de la commission reprendraient à seize heures, sur quoi j'ajourne les travaux de cette commission sine die.

Fin de la séance à 12 h 26

Reprise de la séance à 15 h 15

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, à I ordre!

Pour fins du journal des Débats et de la motion qui vient d'être adoptée à l'Assemblée nationale, tel que convenu ce matin, en commission parlementaire, les travaux de cette commission sont suspendus jusqu'à 16 heures.

Suspension de la séance à 15 h 16

Reprise de la séance à 16 h 5

Le Président (M. Cardinal): A l'odre, messieurs!

Nous commençons une nouvelle séance de la commission parlementaire permanente élue du travail et de la main-d'oeuvre. Je dois, à nouveau, mentionner le nom des membres de la commission et ceux des intervenants. M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Forget (Saint-Laurent).

M. Pagé: Remplacé par... vous l'avez sur votre liste.

Le Président (M. Cardinal): Non. M. Pagé: Remplacé par M. Blank.

Le Président (M. Cardinal): M. Forget (Saint-Laurent) remplacé par M. Blank (Saint-Louis); M. Gravel (Limoilou) remplacé...

M. Chevrette: Par M. Fallu (Terrebonne).

Le Président (M. Cardinal): M. Gravel (Limoilou) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière).

Les intervenants sont: M. Blank (Saint-Louis) qui n'est plus intervenant mais membre.

M. Pagé: Remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

Le Président (M. Cardinal): Remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Brochu (Richmond), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) remplacé par M. Mailloux (Charlevoix); M. Samson (Rouyn-Noranda).

Je rappelle que nous avons ajourné sine die, ce matin, et qu'immédiatement après la motion qui a été adoptée à l'Assemblée nationale, je suis venu en cette salle et j'ai suspendu les débats, suivant notre entente, jusqu'à seize heures. Les personnes invitées, je dois le rappeler, sont les suivantes, ne mentionnant pas celles qui, déjà, ont répondu à nos questions: Commonwealth Plywood, M. William P. Caine.

M. Caine: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. Caine. Byers, Casgrain et associés.

M. Bazin (Jean): L'étude est représentée, oui.

Le Président (M. Cardinal): Me Bazin, merci. Société Intercommunica, M. Yvon Turcot.

M. Turcot: Présent.

Le Président (M. Cardinal): Merci. L'horaire des travaux est le suivant: Suivant un ordre de la Chambre adopté unanimement, nous allons travailler jusqu'à 18 heures et nous ajournerons sine die. M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler M. Yvon Turcot. Étant donné qu'il est à la table, est-ce que je peux me permettre de lui demander de s'identifier?

Le Président (M. Cardinal): Me permettez-vous, juste un instant...

M. Johnson: Ah! très bien.

Le Président (M. Cardinal): Justement, je pense que je vais quand même demander à la commission si elle est d'accord.

M. Pagé: Oui, cependant, M. le Président, je crois que M. Pépin, de la CSN, avait manifesté le désir de se faire entendre quelques minutes, parce qu'il avait été cité ce matin. Quant à moi, je n'ai aucun inconvénient et je suis prêt à donner mon consentement.

M. Johnson: Dans les circonstances, vous comprendrez, M. le Président, que je ne peux pas avoir d'objection.

M. Pagé: Ah! je présume, oui. Le contraire nous aurait surpris d'ailleurs.

Le Président (M. Cardinal): Commençons avec le sourire. Est-ce que je comprends que M. le ministre et M. le député de Portneuf ont entendu des voix qui leur ont dit que M. Pépin voulait se faire entendre?

M. Bellemare: Je suis bien heureux d'entendre M. Pépin, parce qu'il va nous dire si c'est vrai ou non que M. Thériault est un fomentateur de troubles.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: II n'est pas de la CSN, M. Thériault fait partie de l'Union des rembourreurs unis.

Le Président (M. Cardinal): Consentement unanime de la commission. M. Marcel Pépin, si vous voulez bien vous identifier?

M. Marcel Pepin

M. Pepin (Marcel): Marcel Pepin, de la Confédération des syndicats nationaux, conseiller spécial à l'exécutif. M. le Président, MM. les membres de la commission, je voudrais vous remercier ainsi que tous les membres de permettre que je m'exprime à ce moment-ci. J'essaierai de le faire le plus rapidement possible, mais, puisque, ce matin, Me Cutler a rapporté ce qu'il a offert hier à la réunion où j'étais personnellement présent, je pense qu'il est bon que j'apporte les compléments et les explications qui s'imposent.

Cette réunion a eu lieu dans les bureaux de Me Cutler, à Montréal, et en présence de Me Bazin, de la compagnie Commonwealth Plywwod, et de Me Jean-François Munn, de la CSN, conseiller juridique, qui est à mes côtés ici, à ma droite.

Je voudrais dire que cette réunion a eu lieu à la suite d'un échange téléphonique entre Me Casgrain et Me Munn, Me Casgrain, de la compagnie, pour savoir s'il y avait moyen de nous rencontrer. Me Munn m'a fait rapport et m'a

demandé d'être présent, ce que j'ai accepté. Donc, hier matin, nous étions présents, vers 10 heures, dans les bureaux de Me Cutler. A ce moment-là, c'est Me Bazin qui représentait la compagnie. Nous voulions savoir pourquoi nous y étions. Inutile d'insister sur cette partie-là, mais je voulais savoir qui Me Cutler représentait à ce moment-là. Je lui ai demandé qui il représentait. Je n'avais pas besoin d'un mandat écrit devant moi. Il est avocat, il a seulement à affirmer qui il représente et je le tiens pour acquis, comme je le fais maintenant d'ailleurs. Il m'a dit qu'il représentait M. Thériault, M. Lévesque, Mme Grignon et l'Union des rembourreurs unis d'Amérique. Je lui ai demandé s'il représentait aussi ce qu'il a été convenu d'appeler ici, dans nos délibérations, les employés dits de l'intérieur. Comme Me Cutler n'est pas au courant ou n'était pas au courant suffisamment de l'ensemble du dossier, puisque, comme il l'a dit ce matin, il n'avait pas vu toutes les données de ce problème, il m'a dit: Je ne sais pas, je vérifierai. Plus tard dans l'après-midi, nous avons eu une rencontre aussi avec les mêmes personnes, en ajoutant Me Pierre Langlois qui est de la même étude que Me Cutler. A la même question, Me Langlois a répondu qu'aussi, il représentait, quant à lui — je ne sais pas pour Me Cutler — les employés dits de l'intérieur, donc ceux qui ont déposé la convention collective que je qualifie de fraude et que les autres qualifieront comme ils l'entendront.

Cela étant, au cours des débats que Me Cutler et moi nous avons échangés, à savoir comment ce problème pourrait être réglé, il est vrai de dire que Me Cutler a fait la proposition que vous avez entendue ce matin. Il est vrai aussi de dire que Me Cutler a dit ce matin et nous a dit hier qu'il n était pas au courant de l'ensemble du dossier. C'est une solution qui, en apparence, apparaît très simple. Je peux vous dire que, dans les circonstances, cette solution, pour nous autres, n'en est pas une. Il ne s'agit pas d'un jeu de dés. Il ne s'agit pas de dire: Maintenant, on va aller devant le commissaire-enquêteur, on va se priver de tous nos droits légaux, alors que nous, nous soutenons que c'est une fausse convention collective qui a été déposée. Si c'est vrai ce que nous soutenons — vous avez entendu des témoignages ici qui peuvent vous permettre de conclure dans un sens ou dans un autre, c'est votre affaire de conclure comme vous l'entendrez; je conclus à ma façon — si j'ai raison dans ma conclusion, il est bien clair que je ne peux pas jouer aux dés alors que 100 employés ou à peu près font une grève depuis à peu près treize mois, sont sur une ligne de piquetage. Je ne peux pas dire, à ce moment: Je m'en irai prendre un vote, et je ne sais vraiment pas quelle sera la liste électorale, je ne sais pas à quoi m'en tenir. Même si je connaissais ma liste électorale, dans les circonstances, je ne pense pas que cela puisse être une solution. J'ai expliqué mon point de vue à Me Cutler qui ne l'a pas retenu, mais je pense que c'est important que les membres de la commission sachent que nous ne sommes pas dans un cas ordinaire.

Deuxièmement. Voilà la proposition que j'ai faite de mon côté à Me Cutler. Je lui ai dit: Dans ce problème, il y a des aspects juridiques, des aspects sociaux importants. Il y a des gens qui sont concernés. Ce que je vous propose, c'est de suggérer à votre client ou à vos clients, puisque les clients sont nombreux, M. Thériault, l'Union des rembourreurs, etc., ce que je vous propose, c'est tout simplement de demander à vos clients, de leur suggérer de retirer leur requête en accréditation. Si cela se faisait, puisque la convention collective est expirée depuis le 30 septembre, tous les problèmes juridiques du passé, je ne parle pas des injonctions, je ne parle pas des mesures d'outrage au tribunal, c'est un autre problème que nous pourrons régler autrement, mais les mesures relatives à la négociation collective tomberaient. (16 h 15)

Or, il est bien clair qu'en faisant cette proposition, certains employés de l'intérieur peuvent se sentir en danger; j'en suis conscient. Voilà ce que j'ai proposé. L'assemblée générale du syndicat a déjà proposé, accepté le rapport du conseil de médiation des trois médiateurs et, dans ce rapport, il est indiqué qu'on respecte le droit d'ancienneté de tout le monde, ceux qui sont à l'intérieur, ceux qui sont à l'extérieur, et ceux qui sont à l'extérieur, ancienneté accumulée. Je l'ai dit à Me Cutler, c'est la décision de l'assemblée, c'est la proposition que nous vous faisons. Je pense que là, nous pourrions voir la fin du tunnel. Non pas la fin de toutes les procédures, il y a plein de questions là-dedans, mais la question d'un vote dans les circonstances, proposée telle qu'elle me fut proposée, je ne suis pas prêt à la recommander aux employés. Mais je suggère fortement à cette union, à ses représentants, j'ai suggéré à Me Cutler qui, d'ailleurs, maintenant doit consulter ses clients — je ne sais s'il l'a fait à ce moment-ci — pour voir s'ils sont prêts à accepter cette formule.

Donc, il est vrai de dire que Me Cutler m'a fait proposition dans le sens qu'il l'a mentionné ce matin, mais il est aussi vrai de dire que j'ai, de mon côté, fait proposition devant Me Bazin d'une autre affaire qui, peut-être, pourrait dénouer le problème. D'ailleurs, je pense que Me Bazin, lui aussi, voulait parler d'un vote sur une liste. Moi, je ne suis pas intéressé personnellement à le recommander aux membres, et je pense que ce n'est pas juste dans les circonstances qu'il en soit ainsi. Je crois que le chemin serait clair si la requête de l'Union des rembourreurs était retirée. Je pense que c'est possible et je peux dire aux employés de l'intérieur que le rapport du conseil de médiation tient compte de leur situation et que l'assemblée générale a déjà accepté les principes de base de ce rapport.

Voilà donc, M. le Président, MM. les membres de la commission, ce que je voulais dire. J'espère que je n'ai pas été trop long dans mes explications.

Le Président (M. Cardinal): Non; merci, M. Pepin. C'est au nom de la commission, qui a

accepté votre déposition, parce que vous aviez été impliqué ce matin, que je vous remercie.

Est-ce que j'ai maintenant l'accord de la commission pour que M. Turcot soit entendu?

M. Johnson: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Alors, entendu.

M. Turcot, je vous invite à décliner vos nom, prénom et qualité.

M. Yvon Turcot

M. Turcot: Yvon Turcot, président-directeur général d'Intercommunica. M. le Président, avec votre autorisation et celle des membres de la commission, j'aimerais d'entrée de jeu, peut-être histoire d'économiser un peu de temps à la commission pour la période des questions, exposer liminairement le rôle qu'a pu jouer ma société, si je le peux.

Le Président (M. Cardinal): Certainement. Je pense que c'est l'intention de toute la commission. Allez, M. Turcot.

M. Turcot: Tout d'abord, je vous prie de bien vouloir m'excuser de n'avoir pu me présenter devant la commission le 4 octobre. Il m'était vraiment absolument impossible, dans un délai de moins de 48 heures, de décommander ou de reporter un engagement qui avait été pris plusieurs semaines auparavant.

J'espère que la commission ne m'en aura pas tenu rigueur et je puis l'assurer qu'il n'y avait lieu de voir dans ce forfait momentané aucune expression de la moindre réserve de ma part à me présenter devant elle.

Je crois comprendre que ma présence ici a été requise pour informer cette commission du rôle que la société que je dirige a été appelée à jouer pour le compte d'une ou l'autre des parties dans cette affaire de Commonwealth Plywood.

J'aimerais tout d'abord préciser qu'lntercommu-nica, contrairement à ce qui a été indiqué au cours des débats de cette commission, n'est pas une agence de publicité. C'est une société de conseil en communications et en relations internationales.

Je n'ai pas l'intention de vous entretenir de nos activités dans le domaine des relations internationales mais il me semble opportun, néanmoins, de préciser en quoi consistent nos interventions et services dans le domaine de la communication et des relations publiques pour mieux situer le périmètre, pour ainsi dire, de notre intervention dans le dossier qu'examine cette commission.

Essentiellement, nous offrons des services de consultation, d'étude, d'analyse qui servent naturellement à l'élaboration de politiques et de stratégies d'information, de relations publiques ou même de promotion et à la mise au point de programmes de communications.

Or, ce ne sont pas des services de cette nature qui nous ont été demandés dans le cas de Commonwealth Plywood. Nous n'aurions d'ailleurs pas pu prétendre à la prestation de tels services dont le secteur, celui des relations ouvrières, où nous n'avons aucune compétence particulière, ne constitue pas non plus un centre d'intérêt pour le développement de nos activités.

Cependant, une société comme la mienne doit, il va de soi, être en mesure, au-delà de la consultation proprement dite, de l'élaboration de politiques et de programmes de communications, d'offrir à sa clientèle des moyens d'exécuter ses politiques et ses programmes. D'où l'existence de services techniques ou logistiques en matière de marketing, de graphisme, de recherche, de documentation, de rédaction, de traduction et de diffusion.

Ces services peuvent être assurés tantôt par du personnel maison, tantôt par des personnes ressources engagées pour exécuter des mandats très ponctuels mais toujours sous l'égide de la société.

C'est précisément à ce type de services techniques ou logistiques qu'a recouru, pour le compte et au nom de sa cliente Commonwealth Plywood, l'étude d'avocats Byers, Casgrain, McNally, Dingle, Benn et Lefebvre, dans les circonstances et aux dates suivantes.

Le 19 octobre 1977, à la demande de Me Jean Bazin, je me suis rendu au bureau de Byers, Casgrain pour y rencontrer Me Casgrain, Me Bazin et M. William Caine, qui m'ont exposé brièvement leur version de la situation à la Commonwealth Plywood et qui m'ont demandé si Intercommunica pouvait les seconder dans la préparation de communiqués de presse et en organiser la diffusion de manière que la version de la compagnie soit mieux connue du public. Dans la mesure où cela fait partie des services qu'offre Intercommunica, j'ai donné mon accord.

Le 21 octobre 1977, Me Bazin nous a demandé de résumer, sous forme de communiqué de presse, une lettre adressée le même jour par M. Caine au ministre de la Justice du Québec et d'en assurer la plus large diffusion possible aux media. C'est ce que nous avons fait le 24 octobre par l'émission d'un communiqué intitulé "Commonwealth Plywood en appelle au ministre de la Justice", qui a été diffusé à la presse par l'agence Telbec à laquelle nous sommes abonnés et par nos services de messagerie pour ce qui concerne un certain nombre de quotidiens.

Le 26 octobre 1977, les procureurs de Commonwealth Plywood nous ont demandé d'émettre un communiqué portant sur l'ordonnance d'injonction provisoire obtenue de la Cour supérieure par la compagnie. Ce communiqué intitulé "Injonction accordée à la Commonwealth Plywood", a été préparé par nous et diffusé le 7 octobre de la même manière que le précédent.

Le 28 octobre, Me Bazin et M. Caine m'ont remis un dossier comportant la liste des employés n'ayant pas fait l'objet d'un licenciement collectif, et qui étaient de retour au travail, ainsi qu'un tableau indiquant le nombre d'années de service

de chaque employé. Ils m'ont demandé de préparer un communiqué tiré de ce dossier, lequel dossier démontrait que 90% des employés non licenciés étaient de retour au travail et que la moyenne d'années de service de ces employés était de près de huit ans. Nous avons rédigé un communiqué en ce sens intitulé "Les employés de Commonwealth Plywood de retour au travail". Il a été diffusé de la même manière que les précédents le 1er novembre 1977.

Le 6 décembre, Me Bazin a communiqué avec nous pour nous demander de résumer, sous forme de communiqué de presse, le texte d'un télégramme adressé le même jour au ministre de la Justice du Québec par M. William Caine et d'organiser la diffusion de ce communiqué. Nous avons préparé le communiqué en question daté du 7 décembre et intitulé "Pressant appel de Commonwealth Plywood au ministre de la Justice", et nous l'avons diffusé de la même manière que les précédents.

Le 14 février 1978, Me Bazin nous a demandé de résumer, sous forme de communiqué de presse, le texte d'un télégramme adressé au ministre de la Justice suite à un attentat à la bombe au domicile du gérant de production de la compagnie. Nous avons préparé ce communiqué daté du 15 février et intitulé d'une citation de M. Caine: "protégez nos employés et leurs familles" et l'avons diffusé de la même manière que les précédents, en plus d'en faire tenir une copie, à la demande du client, aux membres de l'Assemblée nationale.

Le 17 février 1978, l'étude Byers Casgrain nous a demandé de faire savoir à la presse que le juge Greenberg entendrait le lundi, 20 février, une requête présentée par la compagnie pour que soient portées des accusations d'outrage au tribunal. Cette information a été communiquée par l'entremise du réseau Telbec à tous les directeurs d'information.

Le 26 avril 1978, j'ai rencontré M. Caine et Me Bazin au bureau de ce dernier. Ils ont passé en revue les événements des derniers mois et m'ont fait part que les employés avaient le projet de tenir une conférence de presse pour exposer leur version de la situation à Commonwealth Plywood. Ils m'ont demandé si, au besoin, ils pourraient leur recommander Intercommunica. Je n'y ai pas vu d'objection. Dans la mesure où il s'agissait de l'organisation matérielle d'une conférence de presse et pourvu que la demande soit formulée par les employés eux-mêmes, j'ai fait part que je pourrais affecter l'un ou l'autre des pigistes travaillant régulièrement pour nous à cette tâche.

Dans l'après-midi du même jour, soit le 26 avril, Me Pierre Langlois de l'étude d'avocats Cutler, Sheppard, Borenstein, Shapiro, Langlois & Flam m'a téléphoné, s'est présenté comme procureur de l'Union des rembourreurs et m'a demandé de le rencontrer si possible le même jour. Nous sommes convenus de nous retrouver à son bureau en fin de journée. Une fois au bureau de Me Langlois, il m'a présenté à M. Donat Thériault, à M. Ernest Lévesque et à une autre personne dont je ne me rappelle pas le nom et qui n'est d'ailleurs pas intervenue au cours de la réunion qui a suivi.

MM. Langlois et Thériault m'ont assez longuement entretenu de la situation à Commonwealth Plywood telle qu'ils la percevaient et de la nécessité, de leur point de vue, de faire en sorte que les employés de Commonwealth Plywood puissent publiquement faire la démonstration qu'ils ne sont pas des briseurs de grève, qu'ils sont des citoyens honorables, pères et mères de famille dont le seul crime serait d'avoir refusé de se soumettre aux directives d'une centrale syndicale et d'avoir voulu continuer de gagner leur vie.

J'ai confirmé à mes interlocuteurs qu'une conférence de presse serait sans doute le moyen le plus efficace de communiquer ce message et de gagner une certaine sympathie du public. A suivi une longue discussion sur le moment de choisir pour cette conférence de presse, le lieu, la désignation des porte-parole, l'opportunité de la présence de tous les employés, l'organisation matérielle requise et même le type de questions auxquelles les porte-parole devaient se préparer à répondre.

Il fut convenu que je désignerais un pigiste qui s'occuperait de l'organisation matérielle de la conférence de presse et de l'encadrement et qui convoquerait les media. Puis, M. Thériault m'a remis des notes manuscrites contenant les principaux thèmes que lui et M. Lévesque souhaitaient aborder à cette occasion, en me demandant s'il était possible de reformuler le tout de manière à avoir un document à lire et à remettre à la presse.

Le 28 avril, MM. Langlois, Thériault, Lévesque et Mme Hélène Grignon se sont présentés aux bureaux d'Intercommunica pour examiner le projet de texte préparé par un rédacteur de la maison, à partir des notes remises l'avant-veille par M. Thériault.

Mme Grignon, M. Lévesque, M. Thériault et Me Langlois ont révisé ce texte, y ont apporté certaines modifications et des ajouts de leur cru. Une collaboratrice régulière d'Intercommunica, qui avait été affectée à l'organisation de cette conférence de presse, a alors discuté avec les délégués des employés et leurs procureurs des modalités de l'organisation de cette conférence de nouvelles.

A compter de ce moment, je n'ai plus eu personnellement à suivre cette affaire. Je peux vous dire cependant que l'avis de conférence de presse a été émis des bureaux d'Intercommunica, que les arrangements pour la location de la salle et d'autobus pour transporter les employés ont également été faits des bureaux d'Intercommunica et pour le compte et au nom de Cutler, Sheppard & Al. En revanche, la facture d'Intercommunica pour les services rendus relatifs à l'organisation de la conférence de presse a été adressée à l'étude Byers, Casgrain, qui l'a acquittée. Merci.

Voilà donc, M. le Président, en quoi ont consisté les interventions et les services d'Intercommunica relativement à l'affaire Commonwealth Plywood. Je crois avoir livré tous les faits au

meilleur de ma connaissance, mais je suis naturellement à la disposition de la commission si elle a besoin d'éclaircissements additionnels.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Merci, M. Turcot. Est-ce que les membres de la commission ont des questions à poser à notre invité?

M. Johnson: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Je remercie M. Turcot de la clarté de son exposé. J'ai reconnu d'ailleurs l'ancien correspondant de Radio-Canada à Paris.

M. Turcot: Je ne pouvais pas faire de topos aussi longs à Radio-Canada!

M. Johnson: Vous aviez peut-être moins de problèmes aussi!

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Revenons à la pertinence du débat. M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Johnson: J'aurais une question à poser, qui n'a pas été touchée par M. Turcot, concernant la lettre adressée, par les travailleurs syndiqués et légitimes de Commonwealth Plywood Compagnie limitée, au premier ministre le 25 janvier 1978. Est-ce qu'il est au courant de cette lettre?

M. Turcot: Je vous avoue que je m'attendais à cette question, non pas avant de venir, mais depuis ce matin. Je dois vous dire que, lorsque je vous ai entendu poser la question à M. Lévesque, à M. Thériault, à Mme Grignon, je me suis demandé si on avait été là-dedans aussi. J'ai profité de l'heure du lunch pour téléphoner à mon bureau et demander rapidement qu'on fasse le relevé des minutiers ou feuilles de temps des deux dernières semaines de janvier et de la première semaine de février. Et il n'y a pas de trace de cela. S'il n'y a pas de trace de cela, c'est sans doute que nous n'avons pas été mêlés à cette lettre-là, parce que, autrement, il y en aurait trace, puisqu'il fallait quand même que quelqu'un paie pour cela.

Evidemment, c'est la seule façon pour moi de vérifier cela. Contrairement à ce qu'ont pu vous répondre les intervenants de ce matin, nous en écrivons très régulièrement pour nos clients des lettres au premier ministre; nous en écrivons à longueur d'année et la masse de publications, de textes qui sont rédigés et qui partent de chez nous n'est pas toujours sous notre signature; en effet, elle est assez volumineuse. C'est la seule façon pour moi de savoir si, à un moment ou à un autre, nous avons pu être mêlés à cela. Tout ce que je peux vous répondre, c'est qu'il n'y en a pas trace; moi, je n'en ai certainement aucun souvenir. Je dois donc assumer et je dois vous demander d'assumer que non. (16 h 30)

M. Johnson: Pourrais-je savoir pourquoi vous avez envoyé la facturation de l'opération conférence de presse aux soins de l'étude des procureurs de l'employeur plutôt qu'aux soins de l'étude de Me Cutler?

M. Turcot: Parce que, quant à moi, les services d'Intercommunica avaient été retenus par l'étude de Byers, Casgrain. Quand, par la suite, Me Langlois a communiqué avec nous et que mon bureau a rendu ces services, je me suis effectivement inquiété de savoir qui paierait pour cela. J'ai communiqué avec l'étude de Byers, Casgrain qui, à ce moment-là, a convenu que je pouvais lui envoyer la facture. J'ai assumé qu'entre avocats, ils pourraient peut-être s'entendre.

M. Johnson: Très bien, je n'ai pas d'autres questions.

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): Un instant! M. Bellemare, une seconde! M. le député de Johnson, je m'excuse. On ne recommencera pas ce qui s'est produit depuis plusieurs jours, en invoquant l'article 92, etc. En suivant...

M. Bellemare: Je vous avais demandé la parole avant le ministre. Vous me l'aviez presque accordée. J'ai cédé avec beaucoup de grâce, parce que c'était le ministre. Mais, si vous avez une autre décision à rendre encore pour me bâillonner, comme vous l'avez déjà fait, je n'ai pas d'objection, je suis bien prêt à cela. A cause de mon expérience parlementaire, je n'ai qu'à m'incli-ner et à vous donner raison.

M. Pagé: M. le Président, je vais quand même être très bref, parce que, pour ma part, cela m'apparaît...

M. Bellemare: Le Président vous a donné la parole?

Le Président (M. Cardinal): Non.

M. Pagé: Nous sommes suspendus à vos lèvres.

Le Président (M. Cardinal): Oui. M. Pagé: Décidez.

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, mais il faudrait quand même qu'on fasse attention. C'est trop important ce que nous faisons pour jouer avec la procédure et les traditions...

M. Bellemare: Mutatis mutandis.

Le Président (M. Cardinal): ... et l'article 92. Vous avez raison. M. le député de Johnson, leader parlementaire de l'Union Nationale, avec tout le respect que je vous dois, il semble que M. le député de Portneuf insiste pour avoir la parole.

M. Bellemare: Quelle est votre décision?

Le Président (M. Cardinal): Que M. le député de Portneuf a la parole.

M. Bellemare: Deuxième fois.

M. Pagé: M. le Président, je vais être très bref, parce que, pour ma part, votre témoignage me paraît assez clair et assez révélateur. Vous avez fait état d'une facturation que vous avez fait parvenir au bureau d'avocats Byers, Casgrain. Je présume que cela a été payé. J'aimerais seulement savoir par qui cela a été payé.

M. Turcot: Par Byers, Casgrain. M. Pagé: Merci.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Johnson, avec grand plaisir.

M. Bellemare: Ah! vous ajoutez cela; moi aussi, avec très grand plaisir. M. Turcot, étiez-vous au courant qu'il y avait une convention collective qui existait, une pseudo-convention collective qui existait entre le syndicat des travailleurs de la Commonwealth Plywood représenté par M. Thé-riault comme agent négociateur, pour la CSN?

M. Turcot: M. le Président, j'étais au courant de ce qui a été contenu dans les communiqués qui ont été préparés par nous. Je crois me souvenir qu'un de ces communiqués se référait précisément à une telle convention collective conclue entre les travailleurs de la Commonwealth Plywood et la compagnie.

M. Bellemare: Est-ce que, M. Turcot, à cause de votre grande expérience du monde et particulièrement de certaines particularités des gens, vous ne vous êtes pas douté un peu que le syndicat qui s'appelait dans le temps Commonwealth Plywood-CSN était plutôt un syndicat de boutique patronné par le patron...

M. Turcot: M. le Président...

M. Bellemare: Puisque la facture a été acquittée par lui?

M. Turcot: La facture a été acquittée par les procureurs.

M. Bellemare: Par les procureurs qui représentaient en même temps la compagnie.

M. Turcot: M. le Président, je vais répondre, M. le député.

M. Bellemare: Je sais, mais je veux aussi que ma question soit claire.

M. Turcot: Je ne suis pas très familier avec les questions de droit du travail, mais, en effet, je crois avoir une notion de ce que peut être un syndicat de boutique. Ce n'est certainement pas une question que je pouvais ou que je peux trancher dans le cas complexe qui nous occupe et qui, je vous le signale en tout état de cause, ne doit pas être si facile à trancher puisqu'il faut une commission parlementaire pour en débattre.

M. Bellemare: C'est là qu'est tout le problème. C'est de là que vient le problème. M. Thériault a été l'âme infernale de ce tralala et aujourd'hui, la commission parlementaire est obligée de siéger. C'est lui qui a été le "trouble maker" de tout ce qui arrive aujourd'hui.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Fausses cartes, fausses déclarations...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Je n'ai pas fini.

Le Président (M. Cardinal): Justement, avant que vous n'ayez terminé, je vous interromps. Je l'ai déjà maintes fois répété ici, nous ne sommes pas devant une cour, ni devant une commission d'enquête.

M. Bellemare: Je suis d'accord. Est-ce que dans l'argumentation qui est faite présentement, il n'est pas question de trouver véritablement le fauteur, le responsable de tout cet imbroglio. C'est M. Thériault qui porte la responsabilité des millions... des familles qui ont été lésées. C'est lui l'instigateur de ces fausses cartes et de tout le reste. Il y a une limite à s'en faire passer à toutes les minutes. Je le dis et je demande à M. Turcot s'il a été conscient quand il a payé pour la conférence de presse organisée par M. Thériault, que c'était la compagnie qui devrait payer.

Le Président (M. Cardinal): M. Turcot.

M. Turcot: M. le Président, c'est très honnêtement une question que je ne me suis pas posée.

M. Bellemare: Pardon?

M. Turcot: Que je ne me suis pas posée.

M. Bellemare: Ah bon!

M. Turcot: Je vais vous expliquer.

M. Bellemare: L'argent n'a pas de couleur!

M. Turcot: Non. Je vais vous expliquer un peu les circonstances de cela. Vous savez, je vous ai décrit, date par date...

Le Président (M. Cardinal): Un instant...

M. Turcot: ... et jour par jour les interventions

d'lntercommunica. D'abord, vous devez savoir, au cas où je ne l'aurais pas suffisamment dit, que ces interventions n'ont pas toutes été de mon fait. Je ne suis pas président de Bell Canada, néanmoins, la PME que je dirige, a suffisamment de personnel pour que je ne suive pas à la trace chacune de nos opérations, une fois qu'un mandat a été accepté et que les affectations ont été données. Je vous avoue que ce n'est pas une question qui m'a particulièrement intéressé à ce moment. Je ne vous cache pas, néanmoins, qu'après cette conférence de presse, ma foi, il m'a semblé, ainsi qu'à mes collaborateurs, que la présentation faite dans la presse du rôle d'lntercommunica était inutilement préjudiciable, que toute cette affaire prenait une tournure, pour le moins, désagréable et que, dans les circonstances, nous ne voulions plus rien y voir et, j'en ai avisé, à ce moment, l'étude Byers, Casgrain.

M. Bellemare: M. Turcot, est-ce que votre firme a des syndiqués en son sein? Est-ce qu'ils sont syndiqués CSN?

M. Turcot: La CSN ne nous a pas encore visités.

M. Bellemare: Je vous encourage fortement à avoir recours à M. Thériault.

M. Johnson: On pourrait peut-être vous demander de nous déposer votre carte d'affaires.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Ma dernière question.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! N'influencez pas le témoin par vos réactions. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Ni l'opinant.

M. Johnson: Le député de Johnson me permet-il? On pourrait peut-être inviter M. Turcot à laisser des copies de ses cartes d'affaires sur le bout de la table.

M. Bellemare: Oui, au syndicat. Est-ce que la commission, par la dernière déclaration, voulant que la facture ait été envoyée à la compagnie Byers, Casgrain & Associés n'est pas la confirmation la plus véridique et la plus palpable que, véritablement, il y avait un syndicat de boutique? C'est tout ce que j'ai à dire.

Le Président (M. Cardinal): M. le leader parlementaire de l'Union Nationale, vous savez que vous ne pouvez pas demander au président une opinion sur un sujet semblable.

M. Bellemare: Non, je ne vous demande pas une opinion, je vous donne la mienne. C'est clair.

Le Président (M. Cardinal): Merci. Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Johnson: C'est terminé.

Le Président (M. Cardinal): M. Turcot, nous vous remercions d'être venu avec nous et d'avoir répondu à nos questions. Merci.

M. Turcot: Merci.

M. Johnson: M. le Président, je vous inviterais...

Le Président (M. Cardinal): Un instant! M. Johnson: Qui demande la parole?

Le Président (M. Cardinal): Si vous voulez demander la parole, Me Cutler, vous devrez aller de l'autre côté, au micro. A l'ordre, s'il vous plaît!

Me Cutler, si vous permettez, maintenant que vous êtes devant nous, est-ce que la commission est d'accord pour que nous écoutions la question? D'accord?

Me Cutler.

M. Cutler: Je voudrais, M. le Président, par l'intermédiaire du président, que la question soit posée à M. Turcot, que je ne connais pas, que je n'ai jamais vu auparavant, s'il a jamais laissé entendre, directement ou indirectement, soit à M. Thériault, soit à Me Pierre Langlois, qu'il serait payé par la compagnie en question.

Le Président (M. Cardinal): Si la commission est d'accord...

M. Johnson: Oui, d'accord.

Le Président (M. Cardinal):... je n'ai pas d'objection à ce que la question soit posée à M. Turcot et je l'inviterais à se présenter devant nous à nouveau.

M. Turcot, la commission est d'accord pour entendre votre réponse.

M. Turcot: M. le Président, il n'a jamais été question entre Me Langlois et moi du paiement de nos services ou de la rétribution de nos services. Il a été cependant question de savoir à qui devaient être envoyées les factures et à quel nom devaient être loués les autobus et la salle de conférence. Il a été convenu par Me Langlois que ceia allait se faire sous le nom de l'étude de Me Cutler.

Quant à la partie de la rémunération, il n'en a en effet pas été question, et s'il n'en a pas été question, quelqu'un quelque part devait tout de même assumer que quelqu'un quelque part était pour payer.

M. Bellemare: C'est pour ça que la syndica-lisation est à la veille de vous rejoindre.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! M. Turcot, est-ce que vous avez terminé?

M. Turcot: Oui, à moins qu'il n'y ait d'autres questions de Me Cutler.

Le Président (M. Cardinal): Non, écoutez, quand même, il n'y a pas de contre-interrogatoire en commission parlementaire.

M. Cutler: J'ai compris, et c'est pour ça... Je vous remercie, M. le Président, d'avoir posé la question pour moi, parce que, indépendamment de ce que vous allez faire — ça, c'est votre affaire — moi, je considère qu'il s'agit d'un sujet très grave, que, pour ma part, j'ai le devoir d'aller plus loin, parce qu'avec tout le respect que j'ai pour M. Turcot, je ne suis pas satisfait de la réponse.

Le Président (M. Cardinal): D'accord. Me Cutler, je peux vous répondre, comme président de la commission, que la commission semble peut-être satisfaite — ce n'est pas à moi d'en juger — que vous ayez eu la permission de vous exprimer...

M. Cutler: Je suis entièrement satisfait, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): ... c'est enregistré et vous prendrez les autres moyens qui sont...

M. Bellemare: On reconnaît votre sens juridique...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: ... particulièrement dans les relations patronales-ouvrières.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Je n'ai pas dit de bêtises. J'ai dit qu'on reconnaissait son habileté dans les relations patronales-ouvrières. C'est vrai.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Bellemare: Je sais pourquoi il a fait ça.

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Johnson: Oui, M. le Président, j'appellerais maintenant... Je vous demanderais d'appeler, dis-je, M. Caine, le président de Commonwealth Plywood.

Le Président (M. Cardinal): Avec I accord de la commission?

Des Voix: Oui.

Le Président (M. Cardinal): Oui? Alors, M. William P. Caine, s'il vous plaît, si vous voulez, comme tous et chacun, donner vos nom, prénom, qualité et titres?

M. Caine.

M. William P. Caine

M. Caine (William): M. le Président, mon nom est William Caine, président de Commonwealth

Plywood. M. le Président, j'ai un mémoire et je veux demander la permission à la commission de le présenter.

Le Président (M. Cardinal): D'accord, M. Caine, sans même demander la permission à la commission, comme nous l'avons accordée à tous et à chacun jusqu'à présent, c'est sûr que vous pouvez vous exprimer.

M. Bazin (Jean): M. le Président, avec votre permission, avant de commencer la discussion au sujet du mémoire de M. Caine, j'aimerais obtenir certaines précisions au sujet de décisions que vous avez rendues soit le 26 septembre, soit le 4 octobre, relativement à l'immunité parlementaire. (16 h 45)

Le Président (M. Cardinal): Me Bazin, je vous arrête immédiatement. Si vous étiez un député, je me rendrais avec plaisir à votre demande. Vous n'êtes pas un député. Vous n'êtes même pas présentement un témoin devant cette commission et je ne peux accepter, malheureusement, comme président de commission — cela serait un précédent effroyable — à moins qu'un député ne soulève la question en votre nom...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je le demande.

Le Président (M. Cardinal): Alors, si un député veut le faire, je suis d'accord. M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais que vous nous rappeliez les décisions que vous avez rendues relativement à l'immunité parlementaire. Première question: Cette immunité s'applique-t-elle seulement aux députés ou s'applique-t-elle également aux intervenants, et, deuxième question, cette immunité couvre-t-elle tous les domaines ou simplement les actions possibles en libelle diffamatoire, etc?

Le Président (M. Cardinal): D'accord. J'admets que c'est difficile, mais, immédiatement, je vais répondre aux deux questions. Je m'excuse, M. Bazin, si j'ai procédé de cette façon, mais...

M. Bazin: M. le Président, je suis bien conscient de ne pas être un député, même si le ciel est bleu.

Une Voix: L'enfer est rouge.

M. Bellemare: Avez-vous des intentions?

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Johnson: Les partielles sont terminées.

Le Président (M. Cardinal): Je n'ai pas l'intention, même sur une question semblable, de la prendre en délibéré pour que les travaux de cette commission cessent immédiatement. Il y a donc

deux questions. La première est: L'immunité est-elle accordée uniquement aux députés ou aux témoins, je ne dis pas à tous les membres de cette salle, mais aux témoins? Sur ce sujet, je dis simplement qu'à plusieurs reprises, M. le député de Jonquière, on a accordé à cette assemblée l'immunité non seulement aux députés, mais aussi aux témoins.

A la deuxième question, cela s'applique-t-il dans tous les domaines juridiques et judiciaires? Je dirai non. Ma réponse est-elle satisfaisante?

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne peux me contenter de votre réponse, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Si elle n'est pas satisfaisante et s'il y a une autre question...

M. Vaillancourt (Jonquière): Même si je doute quant à la première question... Quant à la deuxième, M. le Président, vous me demandez mon opinion, je pense sincèrement que, sans émettre un jugement définitif, il y aurait lieu de se poser des questions, à savoir si l'immunité est donnée également aux témoins. Même si ce n'est pas dans tous les domaines du droit, je me suis toujours posé la question...

M. Bellemare: A cela, il faudrait ajouter qu'il y a plusieurs questions sub judice.

Le Président (M. Cardinal): Oui. On en a parlé à la première séance.

M. Bellemare: On en a parlé à la première séance et votre décision était que nous devions être très prudents quant aux cours de justice et aux décisions qui sont prises sub judice.

Je pense que le droit de parole existe pour les députés, et l'immunité parlementaire, mutatis mutandis, celle qui nous est donnée par notre règlement de procédure, nous permet en Chambre d'avoir cette immunité et, ici, on peut l'étendre, si la commission le désire, aux témoins. Cela a déjà été décidé.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne pense pas qu'un consentement unanime des membres d'une commission puisse changer les règles du droit.

M. Bellemare: Non, mais l'immunité dans une commission parlementaire.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Jonquière, attention. Vous m'avez demandé... Je donne une réponse à deux questions. Je l'ai donnée avec la responsabilité que j'encours en la donnant. A ma connaissance, il n'y a pas de décision des tribunaux à ce sujet. Je ne connais que des décisions qui ont été prises, soit à l'Assemblée nationale, soit en commission parlementaire. Je rejoins ici M. le député de Johnson sur la deuxième question, pour être plus précis, c'est la troisième fois au moins que nous revenons sur ce sujet, si ce n'est pas plus.

Si on veut que j'aille jusqu'au fond de la question, il est sûr qu'en matière criminelle il n'y a personne qui bénéficie d'une immunité. Est-ce plus clair?

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est plus clair. C'est très clair.

Le Président (M. Cardinal): Bon. M. le député de Portneuf sur la même question.

M. Pagé: Seulement quelques mots pour vous dire que je suis heureux que le député de Jonquière soulève cette question, parce qu'elle est revenue à l'esprit des parlementaires à plusieurs reprises depuis le début de nos séances, et il est même malheureux que toute cette question de l'immunité n'ait pas été débattue plus largement dès le début de nos travaux, parce qu'on constate, après que plusieurs témoins ont déjà été entendus, qu'on est encore plus ou moins certain de la portée de cette immunité.

Je n'ai pas du tout l'intention de remettre en cause votre décision, mais je me permettrai quand même de vous faire part de mon opinion. Quant à moi, l'immunité parlementaire ne peut s'appliquer qu'aux parlementaires et ne peut s'étendre aux témoins parce que...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Pagé: C'est mon opinion, M. le Président. Je vous la soumets respectueusement et je n'ai pas du tout l'intention de contester la décision. J'interprète votre décision comme étant de donner l'immunité au témoin. Quant à moi, ce pouvoir n'est conféré qu'à une commission d'enquête, purement et simplement, et ne peut être attribué à une commission parlementaire comme la nôtre.

M. Bellemare: De tous les Parlements, M. le Président, quand des commissions parlementaires ont été tenues, on avait assuré les témoins qu'ils venaient sous leur responsabilité se vider le coeur et le dire pour qu'on ait une facilité de comprendre mieux notre pouvoir de régler le problème s'il y avait lieu. Cette immunité parlementaire, de toute tradition — depuis avant hier que je suis dans le parlement — s'applique aux témoins qui viennent nous rendre justice en nous aidant par leurs déclarations; ils ne sont pas pris par un certain sub judice ou par une certaine pression de ne pas tout dire parce qu'ils ont peur d'être poursuivis. C'est la logique même d'un Parlement.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Johnson. Je me permettrai... Un instant. Si on veut continuer sur la question de règlement, M. le député de Jonquière et M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Johnson a peut-être raison lorsqu'il dit que la tradition le veut, mais je pense que, dans le passé,

on peut présumer que les témoins ont volontairement témoigné et n'ont peut-être jamais posé le problème avec autant d'acuité et d'attention. Là, le problème nous est soumis, vous est soumis, et je ne nie pas qu'au fil des années, dans l'histoire politique du Québec, de nombreux témoins sont venus témoigner, mais est-ce que le problème s'est posé avec la même acuité qu'aujourd'hui? Je pense que jamais. Si on fait l'analogie avec le domaine criminel, M. le Président, on a quelque chose dans notre droit qui s'appelle la protection de la cour, mais qui n'est valable qu'en autant que l'on dise la vérité. Même la protection de la cour a ses limites en matière de droit criminel et la question qui se pose, par analogie, est: Est-ce que cette immunité parlementaire s'applique à tous les domaines? Je pense que vous avez raison de dire non. Est-ce qu'elle s'applique autant aux autres personnes qu'aux députés? Je suis porté, même si je n'ai pas émis d'opinion tout à l'heure, à partager l'opinion du député de Portneuf et à dire que non.

Le Président (M. Cardinal): Un instant, M. le député de Jonquière. Si vous vous rappelez ce qui a été dit devant cette commission, lorsque la première question de règlement a été soulevée sur ce point, j'ai indiqué que, pourvu que les témoins soient véridiques et donnent les véritables faits et leurs opinions réelles, je considérais qu'ils étaient couverts. J'ai peut-être été imprudent dans un sens et j'en réfère à l'article 168. J'aurais pu tout simplement, lors de la première question, lire l'article 168 et dire ceci: Une question ne doit contenir que les mots nécessaires pour obtenir les renseignements demandés. Est irrecevable une question — je saute par dessus 1 et 2 — 3 et que cette question soit adressée à un député, à un président de commission, à un président de l'Assemblée nationale, le texte les régit tous... et interprète une question dont la réponse serait une opinion professionnelle ou une appréciation personnelle.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, je dis, je prétends avec conviction que le meilleur moyen qui est accordé, dans nos commissions parlementaires, aux témoins pour se protéger, c'est de dire — et ils ont le droit de le faire — je refuse de répondre à cette question parce que cette question peut m'incriminer. Voilà la protection qui est accordée tacitement par nos règlements aux témoins qui viennent nous visiter. Ils ont toujours le droit strict de ne pas répondre à une question, que ce soit pour une raison éventuelle de poursuite ou que ce soit pour toute autre raison. Nous ne pouvons les forcer à répondre et il n'est pas question de politique ici, il est question de la protection des droits individuels.

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Jonquière...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que les personnes peuvent refuser de répondre en commission parlementaire si elles pensent que cela peut les incriminer.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Jonquière, je vous rappellerai qu'envers un des témoins, j'ai dit: Votre réponse — et je me cite textuellement, mais je n'ai pas le journal des Débats devant moi — n'est peut-être pas acceptable pour la commission ou pour le député qui pose la question, mais elle est acceptable pour la commission ou pour la présidence et j'ai même indiqué, à ce moment-là, qu'un témoin pouvait toujours refuser de répondre s'il était incriminé. Je vous rejoins donc entièrement. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas tellement de choses à ajouter depuis les interventions du député de Portneuf et de celui de Jonquière, mais je pense qu'il faut souligner que c'est extrêmement important pour le témoin de savoir d'avance si c'est une opinion que le président exprime ou si c'est une décision de la commission et si c'est une décision de la commission, à ce moment-là, je pense qu'on doit au témoin de motiver, comme d'ailleurs le règlement invite le président d'une commission à motiver ses décisions pour savoir si réellement on peut accorder l'immunité aux témoins. Je ne veux pas participer au débat juridique, je viens juste de commencer à participer à cette discussion. On me dit que cela a déjà été soulevé depuis le début, mais il m'apparaît extrêmement important que la commission et la présidence soient très conscientes en disant qu'on a déjà accordé l'immunité aux témoins, que c'est une opinion et que ça n'engage pas... Autrement je vous demanderais de la motiver. Quelle loi permet à la commission de dire à un témoin, comme un juge au tribunal: Vous avez, on vous accorde la protection de la cour, si vous dites la vérité.

J'aimerais que vous détailliez là-dessus.

Le Président (M. Cardinal): Non...

M. Bellemare: M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Pour une fois, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Merci, vous êtes bien aimable. Je voudrais vous rappeler la jurisprudence qui a été consignée dans nos procès-verbaux, à la commission parlementaire sur la United Aircraft, où la même question a été posée pour protéger un témoin. Le président avait rendu la décision que vous venez de rendre. Seulement, la motivation que demande maintenant le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est bien difficile pour vous de la donner, pour autant, comme vous l'avez dit dans votre première intervention, que le témoin semble dire la vérité. Autrement, si c'est un paquet de menteries comme celles qu'on a déjà entendues par certains témoins, je pense bien...

M. Pagé: M. le Président, si vous permettez...

Le Président (M. Cardinal): M. le député de Portneuf, qui veut aussi m'éclairer.

M. Pagé: M. le Président, vous savez qu'en l'absence de spécification ou de prévision dans le règlement, on doit se référer à l'ancien règlement. L'ancien règlement, à l'article 733, prévoyait ceci, je vais vous le lire très brièvement: "Tout témoin qui comparaît devant la Chambre ou à un de ses comités peut réclamer la protection de la Chambre relativement au témoignage qu'il est appelé à porter et en outre, demander à se faire assister par un conseil."

M. le Président, ça démontre clairement que le témoin doit le réclamer, donc ça ne peut venir unilatéralement de la présidence. "Le témoin qui a comparu devant la Chambre ou à un de ses comités ne peut, sans l'autorisation de la Chambre, être poursuivi en justice pour avoir déposé de certains faits, à moins que sa déposition touchant ces faits ne soit mensongère."

M. le Président, il apparaît, à la lecture de l'ancien règlement...

M. Bellemare: C'est ça qu'il a demandé.

M. Pagé: ... que les témoins doivent réclamer l'immunité et que tant la commission que le président ne peut l'accorder unilatéralement.

M. Bellemare: M. Bazin posait cette question au début.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bellemare: Qu'on donne la parole...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! On vient de faire un tour de table et on arrive au même résultat, savoir que si un témoin demande cette protection de la commission, elle peut lui être accordée pourvu qu'il soit véridique.

M. Pagé: II faut qu'elle soit réclamée. Le président ne peut la donner unilatéralement.

M. Bellemare: M. Bazin l'a fait parce qu'il a enlevé la parole à M. Caine pour demander la protection...

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse. On va régler ça très rapidement.

M. Laplante: On va recommencer, on va reculer la montre.

Le Président (M. Cardinal): M. Caine, est-ce que vous demandez la protection de cette commission parlementaire pour bénéficier de l'immunité parlementaire, en vertu de nos anciens et nouveaux règlements?

M. Caine: Oui.

Le Président (M. Cardinal): La commission, je pense, unanimement, vous l'accorde et vous avez le droit d'être assisté d'un procureur, ce qui est le fait présentement. D'accord?

M. Caine: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Cela étant dit, M. Caine, vous avez maintenant la parole pour présenter votre mémoire.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, avant que M. caine s'exprime, je pense que c'est bien important ce qui vient de se produire sur la question de l'immunité, il ne faudrait pas être injuste envers les autres non plus. Je considère et je pense que la commission peut le considérer aussi, que la question de l'immunité qui ne peut pas s'accorder rétroactivement, évidemment, était accordée par le type de mise en garde que la présidence a donnée à tous les témoins depuis le début. Je considère simplement que la situation de M. Caine est plus formalisée grâce à la citation que nous a donnée le député de Portneuf de l'ancien règlement, mais j'ai l'impression qu'elle a été donnée par la seule intervention du président lors de nos deux autres séances.

M. Bellemare: M. le Président...

Le Président (M. Cardinal): M. le ministre... M. le ministre...

M. Bellemare: ... je vous ferai remarquer qu'à l'article 3 ou 5, il est dit. "L'Assemblée n'a de pouvoirs que pendant la durée des sessions de la législature, mais ses commissions élues peuvent siéger...", ce n'est pas ça.

Un instant; l'article 4: Dans un cas non prévu par les règles de procédure ou dans un cas de divergence d'opinions sur l'interprétation d'une règle de procédure, le président décide en tenant compte des usages de l'Assemblée nationale, qui avait son ancien règlement, qui le prévoyait.

Le Président (M. Cardinal): Permettez-vous que je termine l'affaire, vraiment? A la première séance, dans les cinq premières minutes, j'ai indiqué que tout témoin qui venait devant nous pouvait bénéficier de cette immunité à trois conditions que j'ai alors indiquées et je m'en réfère au journal des Débats. Il n'y a donc pas de rétroactivité. Je remercie vraiment M. le ministre du Travail d'avoir rappelé ce fait, cette simple prudence de nos règles démocratiques. M. Caine. (17 heures)

M. Chevrette: Parfait!

M. Bellemare: Enfin!

M. Caine: Je vous remercie, M. le Président et MM. les membres du comité, de me permettre de

vous expliquer comment je vois la situation actuelle de ma compagnie dans un conflit qui dure déjà depuis le mois de septembre 1977.

La compagnie Commonwealth Plywood Ltée a été incorporée en août 1940 par des intérêts de l'Angleterre pour la manufacture de contre-plaqué pour la fabrication d'avions. En 1946, la production en est devenue une de contre-plaqué commercial alors qu'en même temps, la compagnie organisait des centres de distribution à Montréal et à Toronto.

En 1948, la compagnie a acquis Robert Bury et Cie Canada Ltée, à Toronto, de façon à agrandir son centre de distribution dans l'Est du pays. Vers 1953, mon père, W.G. Caine, alors gérant général de la compagnie, s'est porté acquéreur de cette compagnie. A partir de là, la compagnie a acquis de nouvelles concessions forestières dans le Nord-Ouest québécois et, en 1957, a ouvert une scierie à Tee-Lake, dans la région du Témiscamingue.

En octobre 1976, la compagnie a acheté une scierie appelée Pontiac Lumber à Rapides-des-Joachims et une usine de placage à Saint-Léo-nard-d'Aston.

En tenant compte de sa compagnie affiliée, Robert Bury et Cie, l'organisation de Commonwealth Plywood exploite huit centres de distribution dans l'Est du Canada. Ses ventes se chiffrent approximativement à $30 millions annuellement.

En 1973, un incendie détruisit complètement l'usine de Commonwealth Plywood à Sainte-Thérèse. Malgré les problèmes auxquels commençait déjà à faire face l'industrie du contre-plaqué et du placage au Québec, à cause des difficultés à trouver des matières premières, aussi bien en quantité qu'en qualité, et à cause également d'une concurrence de plus en plus effrénée provenant d'importations de l'Asie et des pays du Tiers-Monde, la compagnie, au lieu de disposer d'intérêts dont la valeur était très grande à l'époque sur un marché du meuble à la hausse ou de continuer ses opérations ailleurs, décida quand même de reconstruire une usine au coût de $6 millions, en s'assurant qu'elle soit la plus moderne dans l'industrie, en Amérique du Nord.

L'usine est entrée en production, tant bien que mal, en octobre 1974, et ce n'est que deux ans plus tard que tous les départements fonctionnaient. En quatre ans d'exploitation avec une production totale de $23 208 000, la compagnie accusait des pertes accumulées de $3 500 000 à Sainte-Thérèse et devait supporter une dette considérable. Les pertes de l'usine de Sainte-Thérèse pour l'année terminée le 30 septembre 1974 ont été de $1 229 000. Pour l'année terminée le 30 septembre 1975, elles sont de $1 411 000. Toujours pour l'usine de Sainte-Thérèse. Le 30 septembre 1976, elles sont de $372 000 pour la même usine et pour l'année terminée le 30 septembre 1977, il y a $493 000 de pertes toujours pour l'usine de Sainte-Thérèse.

Comme on le voit, pour l'année financière 1976, les pertes ont été diminuées à $372 000, de sorte qu'au début de l'année 1976, il semblait que l'usine était à la veille d'atteindre enfin une cer- taine rentabilité en 1977. Malgré les résultats négatifs de 1977, la compagnie a réussi à renégocier un nouveau calendrier de paiements de sa dette à long terme et une augmentation de sa marge de crédit. Ceci est basé sur un budget pour l'usine de Sainte-Thérèse préparé pendant les vacances annuelles de l'été 1977.

La compagnie, au mois de juillet 1977, a demandé au syndicat de renoncer à une augmentation salariale au montant de $0.25 prévue pour le mois de juillet. Le syndicat a refusé. Ce nouveau budget prévoyait des engagements pécuniaires importants au niveau des matières premières aussi bien que des modifications importantes à la machinerie. La mise en vigueur de ce plan dépendait cependant, d'une façon extrêmement critique, du fonds de roulement qui serait généré par un niveau de production très élevé et en présumant d'un marché qui permettrait d'écouler la production à un prix raisonnable.

On garda l'usine fermée une semaine de plus pendant les vacances de 1977 de façon à faire toutes les dernières modifications et les améliorations nécessaires. Malheureusement, à peine un mois après la réouverture, il est apparu que le niveau de production ne s'était pas amélioré et qu'à certains égards, la situation se détériorait encore plus, face à un marché qui semblait à la baisse alors que, normalement, on se trouvait dans une saison où les ventes devaient augmenter.

Devant tenir compte encore d'une autre réduction de 22% par le gouvernement du Québec de la quantité de billes requise pour la production à Sainte-Thérèse, avec, en plus, une augmentation des coûts de transport de 45% sur les billes, il était plus qu'évident qu'il était inutile de continuer sur la voie dans laquelle on venait de s'engager sans faire face à une catastrophe financière dans les plus brefs délais. Il était évident que la compagnie ne pouvait assumer ses obligations financières pendant l'hiver 1977-1978 sans faire quelque chose de dramatique.

Que peut faire une compagnie dont une des usines a perdu plus de $3 millions pendant quatre ans et dont les chances de succès ont disparu et qui se retrouve avec une nouvelle usine qui produit moins par heure de travail qu'une vieille usine construite en 1940 et la moitié moins que ce que produisaient ses concurrents, ce qui risque d'entraîner toute la compagnie en faillite?

Il y a trois solutions: 1) Liquider les opérations immédiatement; 2) continuer à accumuler des pertes mettant en danger toute la structure financière des autres divisions de la compagnie; ou 3) restructurer la rentabilité de l'usine comme chance ultime de sauver l'entreprise, et ceci, en partant du point zéro à tous égards pour édifier une exploitation viable.

En 1977, la compagnie croyait sincèrement que tous ces efforts, de même que le marché qui irait en s'améliorant, lui permettraient de continuer sur l'ancienne base. Les résultats du mois d'août annonçant la catastrophe, la compagnie devait agir rapidement face à ses créanciers, et

surtout face au danger de contaminer toutes les autres opérations de la compagnie.

Les tableaux en annexe dans nos livres sont malheureusement trop éloquents. Les pertes accumulées pour 1976 et 1977 dépassent celles de 1975 et 1976. Le problème n'était pas unique à notre compagnie. Comme exemple, la compagnie Rexfor, une compagnie du gouvernement du Québec, qui s'occupe du bois, a perdu $5 millions en 1977. La compagnie n'avait plus le choix. C'est alors qu'elle a dû prendre d'urgence les mesures nécessaires pour arrêter l'hémorragie. La première mesure, malheureusement, étant celle de la mise à pied de 118 de ses employés, mise à pied effectuée en tenant compte, par département, de l'ancienneté et de la capacité d'occuper ses tâches et en respectant la convention collective.

Je vous réfère à l'annexe D qui contient les clauses de la convention collective alors en vigueur, à ce sujet, et à la liste d'ancienneté.

La restructuration des activités du personnel et de mise en marché a changé les résultats financiers inacceptables et ceci, malgré les efforts de la grande centrale CSN pour fermer notre usine et faire perdre l'emploi à tous nos employés. En très peu de temps, la diminution de la production du contre-plaqué de 33 000 pièces par période à 11 000. La fermeture de dix épissures, c'est-à-dire de "splicers", la diminution de la production au département du placage de dix millions de pieds carrés par période à huit millions, donnent les résultats escomptés. Les finances de la division de Sainte-Thérèse sont rétablies et un petit profit est visé pour l'année 1978.

Au moment où je vous parle, ma compagnie n'a plus de convention collective à Sainte-Thérèse, Dès le mois d'août 1977, la CSN avait entrepris une opération de maraudage parmi les employés de la compagnie. Elle déposait, le 30 août, une requête en accréditation, laquelle n'a été contestée ni par la compagnie, ni par l'ancien agent du syndicat de l'Union des rembourreurs. L'union comprend à peu près 5000 membres.

A cette époque, une convention collective d'une durée de trois ans était encore en vigueur et devait prendre fin le 30 septembre 1977. C'est le 7 septembre 1977 que la compagnie donna avis au ministre que le 16 septembre, elle allait réduire le nombre de ses employés d'environ 228 à 105. Le nouveau syndicat ne devait être accrédité que le 3 octobre 1977. Evidemment, la situation de ce nouveau syndicat qui prétendait — c'était normal — vouloir faire mieux que l'ancien syndicat, n'était pas des plus roses puisqu'elle entrait en cause à un moment où la compagnie connaissait ses moments les plus difficiles et où une mise à pied massive venait d'être faite. (17 h 15)

Au lieu de tenter de rencontrer la compagnie pour discuter de ce problème et trouve;; une solution, le premier mouvement, et d'ailleurs, le seul des dirigeants du nouveau syndicat et de ses agents d'affaires de Saint-Jérôme et ce, avant même d'être accrédité, a été de se présenter au bureau de la compagnie le 19 septembre 1977 et là, de m'interpeller en me disant à peu près ceci: je devais reprendre immédiatement à l'emploi de la compagnie tous les employés mis à pied. Autrement, les activités de la compagnie seraient interrompues immédiatement et j'aurais de graves problèmes.

A 11 h 30, le matin du 19 septembre 1977, un groupe de personnes, incluant André Gravel et Gilles Pagé, s'est présenté à notre bureau. Ils ont rencontré M. Verville, qui est venu me chercher pour leur parler. Ils m'ont demandé de rappeler tous les employés pour le lendemain; autrement, ils fermeraient l'usine et il n'y aurait de travail pour personne, jusqu'au moment où tout le monde entrerait. Ils ont dit qu'ils pouvaient avoir de l'argent du gouvernement pour continuer les activités de l'usine et qu'ils pouvaient obtenir des subventions pour les études. Ils ont dit qu'il n'y avait pas de dommages à ce moment, mais que cela arriverait bientôt. Ils ont dit qu'ils feraient tout leur possible pour accomplir leur objectif et qu'ils iraient jusqu'au bout.

On m'a téléphoné à 14 heures, le 19 septembre, et j'ai expliqué à M. Gravel que la rentabilité de l'usine n'était pas changée et quelle était la meilleure solution. Il est complètement faux qu'il m'ait alors demandé de respecter l'ancienneté dans les mises à pied. Il a parlé des graves problèmes que j'aurais avec eux si je ne reprenais pas tout le monde.

Encore hier, il y a eu du piquetage — hier, le 18 octobre 1978 — illégal à Sainte-Thérèse et de la violence. Ce matin, il y avait du piquetage illégal. J'ai vu Gérard Gagné, celui qui a été entendu ici, avec un "deux par quatre", en voie de s'attaquer à une voiture d'un employé qui entrait au travail. Je l'ai vu personnellement et j'ai pris des photos.

Le refus de la compagnie de se plier à cet ultimatum se traduisait le lendemain, le 20 septembre 1977, par la formation d'une ligne de piquetage et seulement 40 salariés sur 105 se sont rendus à leur travail. Là, vous me permettrez de citer les jugements rendus par l'honorable juge Poitras, de la Cour supérieure, et qui se retrouvent dans le volume des jugements que j'ai déposé avec ce mémoire.

Vous verrez, à la lecture de ces jugements, qu'il n'y a jamais eu, à la Commonwealth Plywood, de grève légale ou de lock-out. Je cite donc le jugement de l'honorable juge Poitras, en date du 14 octobre 1977: "Le lendemain, aucun salarié n'osait traverser la ligne à cause des menaces qu'on leur faisait. Dans la nuit du 14 au 15 septembre 1977, un fil avait été arraché de la boîte de contrôle d'une écorceuse, des pièces de métal, dont certaines furent produites en cour, avaient été insérées dans les billes à être déroulées par les couteaux de la machine à piler. Deux pneus d'un camion avaient été dégonflés. De la peinture avait été éclaboussée sur les murs d'une salle de toilette et un boyau à air alimentant une machine avait été coupé.

Ce jugement confirme également que les mises à pied ont été faites pour des raisons économiques. Ce qui se passa par la suite a fait

l'objet de commentaires par un grand nombre de personnes qui auraient avantage à s'en tenir au jugement rendu par l'honorable juge Perry Meyer le 22 novembre 1977 et qui, lui, a eu l'occasion d'entendre personnellement toutes les parties impliquées dans le conflit.

Je n'ajoute rien à ce que dit l'honorable juge Perry Meyer aux pages 7, 8 et 9 de son jugement que je vous cite au texte: "De l'analyse de la preuve, on peut conclure qu'un grand nombre des employés de la requérante, y compris la plupart des intervenants individuels, ont continué à travailler chez la requérante pendant toute cette période malgré la situation très difficile dans laquelle ils se trouvent. "La violence sporadique est devenue de plus en plus systématique, organisée, avec un piquetage massif et des actes de violence et d'intimidation contre la requérante et les employés membres de l'unité de négociation qui voulaient continuer à travailler, et y compris des menaces contre des employés individuels et leurs familles, des dommages causés à leurs maisons et leurs automobiles et des dommages sérieux, sinon irréparables, à la propriété de la compagnie requérante, y compris la mise à feu d'un entrepôt et son contenu et une ingérence constante dans ses activités commerciales. "Dans tous ces actes illégaux et répréhensi-bles, les intimés, la Confédération des syndicats nationaux, le Conseil central des Laurentides-CSN, la Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois et le mis en cause, le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood-CSN semblent avoir été mêlés directement ou indirectement, par le truchement de leurs officiers, agents ou représentants, et semblent avoir aidé à prouver ou encourager une grande partie des actes illégaux dont se plaint la compagnie requérante. "

Et le juge continue: "II semble aussi que ces intimés ont pris une position très dure vis-à-vis des employés qui n'ont pas été mis à pied et qui ont continué à travailler, les appellent des "scabs" et on a même adopté une résolution à une assemblée du syndicat mis en cause les excluant dudit syndicat comme membres. En même temps, les employés qui continuaient à travailler, peut-être à cause d'un certain désespoir, semblent s'être tournés vers leur ancien syndicat, c'est-à-dire l'Union des rembourreurs et ses représentants, pour un appui. Comme résultat, le 3 octobre, ils se sont constitués en assemblée du syndicat mis en cause à laquelle il semble que ceux qui ont été mis à pied ou qui faisaient la grève illégale n'ont pas été invités.

A cette réunion, ils ont signé des cartes d'adhésion comme membres du syndicat mis en cause, non préparées par ce dernier ou la CSN, mais par les représentants de l'Union des rembourreurs dont l'aide a été requise par ces travailleurs chez la requérante. Ils ont payé leur cotisation, quoiqu'il ne semble pas tout à fait clair qui a la possession de l'argent payé à ces fins et ils ont élu un nouvel exécutif rival du syndicat mis en cause en opposition à l'ancien exécutif déjà en place et élu surtout par ceux mis à pied ou faisant la grève illégale dont il s'agit.

Après quelques jours de négociations, ce nouvel exécutif rival a signé avec la compagnie requérante une nouvelle convention collective produite sous la cote R-4 au nom du syndicat mis en cause. Cette convention collective a été dûment produite au Québec, tel que requis par le Code du travail, avant la signification de la présente requête pour injonction. Vu cette signature, la requérante a refusé de négocier avec l'ancien exécutif du syndicat mis en cause. Même le gouvernement semble avoir, au départ, refusé d'accepter une demande de conciliation venant de cet ancien exécutif. Mais finalement, et récemment, le gouvernement semble avoir accepté la demande de conciliation pour provoquer des négociations entre la compagnie requérante et le syndicat mis en cause représenté, apparemment, par son ancien exécutif.

L'illustration et la suite de ce que dit le juge Meyer, vous le trouverez dans les photographies et les coupures de journaux que j'ai annexées à mon exposé et qui parlent par elles-mêmes.

Dès le début du conflit, la CSN a voulu justifier ses actes en parlant de "scabs". Il n'y a jamais eu un seul "scab" à la Commonwealth Plywood et ceux qui ont été mis à pied l'ont été en respectant leur ancienneté et la convention collective alors en vigueur. Les listes d'ancienneté que je dépose avec ce document vont vous démontrer que l'ancienneté de ceux qui ont été mis à pied était en moyenne de 14 mois alors que l'ancienneté de ceux que nous avons gardés à notre emploi est en moyenne de 7 1/2 ans, malgré l'incendie de 1973, alors que la plupart de nos employés ont été mis à pied pour longtemps. Comme je l'ai déjà dit, il n'y a jamais eu, à la Commonwealth Plywood, de grève légale ou de lock-out.

La convention collective est maintenant terminée entre ma compagnie et le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood (CSN) et dont copie est déposée avec ce document. Elle s'est terminée le 30 septembre 1978. La période de maraudage prévue par l'article 61 du Code du travail a commencé 90 jours avant la fin de la convention, donc le 1er juillet 1978. Le 12 juillet 1978, je recevais, au bureau de la compagnie, une copie d'une requête en accréditation déposée au Tribunal du Travail le 7 juillet 1978 par l'Union internationale des rembourreurs de l'Amérique du Nord, local 388, et qui est actuellement devant un commissaire du travail, M. Charles Devlin. L'enquête sur cette requête, qui avait été fixée pour le 25 septembre 1978, vient d'être remise au 30 octobre 1978 à cause de la convocation de cette commission. (17 h 30)

J'attends évidemment une décision qui sera rendue à la fin de l'enquête qui, déjà, devait prendre certainement pas mal de temps, peut-être un mois. Entre-temps, je vais certainement recevoir une demande de négocier une nouvelle convention collective avec mes employés. Est-ce

que je dois attendre la décision du commissaire du travail avant de négocier le renouvellement de la présente convention collective avec qui que ce soit? Les travailleurs de Commonwealth Plywood Compagnie Ltée (CSN) ou l'Union des rembourreurs. Si je négocie avec des gens qui ne sont pas l'exécutif des employés, qui travaillent actuellement pour la compagnie, je peux m'attendre à de graves problèmes, sinon à une grève. Si je négocie une nouvelle convention collective avec l'exécutif des employés qui travaillent actuellement à la compagnie, est-ce que je négocie avec le Syndicat des employés de Commonwealth Plywood (CSN) ou avec l'Union des rembourreurs qui prétend maintenant, devant le commissaire du travail, représenter la très grande majorité de ces employés.

Tout ce que je peux espérer pour le moment, c'est une décision qui va me dire avec qui je dois négocier; même là, je suis loin d'être sûr que je ne ferai quand même pas face à une grève, à du piquetage, légal ou illégal, ou à la même violence à laquelle j'ai dû faire face jusqu'à maintenant.

La question a été soulevée, à savoir pourquoi je n'ai pas assisté à une rencontre du conseil de médiation. Je l'avais déjà dit au ministre, personnellement, dans son bureau et je l'ai mentionné dans une lettre du 3 mai à son attention. Je cite la lettre en question, au ministre Pierre-Marc Johnson: "M. le ministre, comme vous le savez, depuis le 13 octobre 1977, la compagnie a toujours soutenu qu'elle avait signé une convention collective valide avec un syndicat qu'elle reconnaissait, à savoir le Syndicat des travailleurs de Commonwealth Plywood (CSN). D'ailleurs, cette convention collective a été acceptée pour dépôt par votre ministère, selon les dispositions du Code du travail et plus particulièrement de l'article 60. Depuis ce temps, il y a eu une contestation judiciaire entourant cette convention collective. A ce jour, aucune décision n'a été rendue. "La convention collective signée entre les parties est donc valide à l'heure actuelle. Puisqu'il s'agit d'un conflit entre, d'une part, un syndicat local et d'autre part, la CSN, il semble bien que la compagnie n'ait pas à se mêler d'une telle lutte intersyndicale. Les seuls interlocuteurs que vous pouvez avoir demeurent donc les travailleurs eux-mêmes. Il est bien évident que si les travailleurs ont des suggestions, recommandations ou demandes à formuler, la compagnie va les examiner sérieusement. Je ne vois donc pas comment la compagnie peut être impliquée dans une médiation spéciale au sujet d'un conflit qui oppose ces deux groupements. "Par ailleurs, si votre ministère ou le ministère de la Justice voulait faire une enquête sur la violence entourant ce conflit, y compris un feu qui a détruit notre entrepôt et causé des dommages d'environ $400 000, y compris les nombreux dommages faits aux automobiles de nos employés, y compris les raids par des commandos pour tenter d'occuper l'usine, y compris le bris de toutes les fenêtres de nos bureaux, y compris le fait qu'une bombe ait été déposée chez un cadre de la compagnie et qui aurait pu avoir des résultats néfastes puisqu'elle a été manipulée par deux enfants en bas âge, y compris un nombre incalculable de menaces verbales, d'attaques contre la personne et ainsi de suite, il me fait plaisir de vous offrir toute la collaboration possible. Bien à vous." De plus, j'ai donné mandat à mes procureurs d'assister au conseil de médiation. Voilà, M. le Président, MM. les membres du comité, la situation telle qu'elle est aujourd'hui. J'espère que la décision du commissaire du Travail va être rendue bientôt et qu'elle va solutionner le problème. J'espère aussi que je vais pouvoir exploiter mon entreprise qui fait déjà face à un marché difficile avec un minimum de sécurité et de calme. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. Caine. M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, M. Caine, je vais avoir beaucoup beaucoup de questions à vous poser pour essayer de tirer certaines choses au clair un peu. Je vais me contenter, dans un premier temps, cependant, de passer une ou deux remarques et vous poser une question. Ensuite, je laisserai mes collègues de l'Opposition, s'ils le désirent. Je reviendrai par la suite, une fois que le tour de table sera fait, pour essayer de couvrir le terrain qui n'aura pas été couvert.

Vous posez la question, M. Caine, à la fin de votre mémoire, vous posez une espèce de dilemme où vous dites: Ou bien je négocie alors qu'il y a une requête en accréditation des rembourreurs unis ou bien je négocie avec le syndicat des employés CSN — il semblerait que le syndicat des employés CSN, c'est le syndicat présidé par M. Gagné, par opposition à celui présidé par M. Lévesque — ou bien je négocie avec l'union des rembourreurs et qui, pour les fins de notre loi n'existe pas comme syndicat accrédité.

Dans un cas comme dans l'autre, vous dites que cela va vous apporter des ennuis. Voici une question que je pourrais peut-être vous poser M. Caine: Est-ce que ce n'est pas un peu cela qui est arrivé au mois de septembre 1977, la raison pour laquelle l'Assemblée nationale a été convoquée, au-delà de tous les quolibets dont on voudra affubler qui que ce soit? Est-ce que ce n'est pas le fait que cette question, vous auriez peut-être dû vous la poser, en septembre 1977? Il est très clair que depuis septembre 1977, vous avez des problèmes. Vous êtes obligés de calfeutrer vos portes, de barricader les fenêtres, de prendre des autobus qui ressemblent plus à des chars blindés. Vous exploitez une PME que vous avez décrite en difficulté financière au départ, dans un contexte qui m'apparaît à peu près inconcevable. Et je pense qu'il n'y a personne qui nie cela, ni vous ni moi, ni les membres de cette commission, ni l'opinion publique.

Vous avez évoqué des phénomènes comme la violence. Indépendamment des résultats d'enquêtes policières dont on ne peut pas présumer quand on en arrive à constater effectivement que

toute une région et que toute une ville sont ameutées, quand on en arrive à constater qu'il y a des enfants qui manipulent des engins dangereux, quelle qu'en soit la provenance, il y a un problème à la Commonwealth Plywood. Et ce problème, initialement, je pense que la démonstration en a peut-être été faite ici, lors des témoignages de ceux qui vous ont précédé, vient essentiellement du fait de la confusion et de la qualité de représentativité de ceux avec qui vous avez eu, comme entrepreneur, comme propriétaire, comme employeur au sens du Code du travail, à négocier, aux mois de septembre et octobre 1977.

J'ai remarqué une chose qui m'a frappé dans le ton de votre mémoire, de vos préoccupations en tant qu'employeur d'une entreprise qui a des difficultés, parce que dans le secteur économique, il y a eu des difficultés considérables dans les années auxquelles vous référez, c'est vrai. J'ai remarqué une chose, dis-je c'est que vous nous avez présenté l'intervention du changement d'accréditation syndicale par la CSN, au mois de septembre 1977, ou l'opération qui a précédé l'émission du certificat d'accréditation au nom de la CSN, dan un contexte où vous veniez de faire état des difficultés économiques de votre entreprise.

J'ai eu l'impression, en vous écoutant, M. Caine, que vous avez eu peur quand vous vous êtes rendu compte que la CSN s'en venait chez vous et que la peur est sans doute le plus mauvais des conseillers, je présume, dans les décisions d'affaires. En tout cas, les quelques personnes que je connais qui se sont occupées de commerces ou d'entreprises ont en général pris de bonnes décisions, mais non pas quand elles les prenaient dans un contexte de peur. La peur, vous savez, M. Caine, c'est un phénomène essentiellement subjectif.

Je pense également que le contexte dans lequel tout cela a été fait vous a peut-être amené à chercher une solution rapide, à ce moment-là. Je suis sûr que vous vouliez continuer vos activités, parce que vous nous en faites la démonstration au début. Vous nous dites: On a des difficultés financières et, à un moment donné, en tenant pour acquis que tout ce que vous me dites est parfaitement exact sur le plan comptable, etc., ce que je ne peux pas contester, ce que je n'ai pas l'intention de contester... Vous partiez une entreprise dans un contexte qui n'était pas facile sur le plan économique et, deuxièmement, vous faisiez des pertes considérables, en tout cas, dans un bilan, à la face même de l'entreprise, mais vous vous êtes engagé, à ce moment-là, dans une espèce de processus un peu infernal où vous avez traité, je pense, avec M. Donat Thériault que vous connaissiez, dans une situation, en tout cas, ambiguë pour le moins, tellement qu'elle a dégénéré dans ce qu'on connaît aujourd'hui.

D'une certaine façon, je suis un peu surpris que vous posiez la question, à la page 16: Avec qui est-ce que je vais négocier? Je pense que c'est un an en retard, comme question, d'une certaine façon. Je pense qu'il va falloir, après que les membres de la commission auront posé l'ensem- ble de leurs questions, qu'on aura regardé cela et que vous aurez répondu, si c'est possible, à un nombre considérable de questions que j'ai à vous poser, peut-être regarder l'avenir un peu et apprendre des erreurs du passé. Cela vaut pour tout le monde, j'ai l'impression.

Probablement que c'est tout ce que j'avais à dire, quant à votre exposé, et j'y reviendrai. Cela risque d'être la semaine prochaine, j'ai l'impression.

Le Président (M. Cardinal): M. Caine désire-t-il s'exprimer immédiatement? Oui, M. Caine.

M. Caine: M. le Président, avec la permission de la commission, je vais faire quelques remarques à ce moment-ci pour peut-être mieux clarifier quelques questions soulevées par M. le ministre. Pour commencer à expliquer cela, il faut que je débute avec l'incendie de 1973 qui a détruit toute l'usine à Sainte-Thérèse. A ce moment-là, la compagnie était aux prises avec la décision de reconstruire ou de laisser tomber l'usine et prendre l'argent des assurances et mettre fin à tout cela.

Il y a des rencontres avec les membres des gouvernements provincial et fédéral. Il y a des rencontres avec le maire de Sainte-Thérèse, même avec le maire de Témiscamingue. Le maire de Sainte-Thérèse et même le maire de Témiscamingue ont essayé très fort de convaincre la compagnie de rebâtir une usine d'une façon ou d'une autre. (17 h 45)

En 1973, il y avait plusieurs employés qui travaillaient pour la compagnie depuis déjà 20, 25 et 30 ans. Est-ce que la compagnie allait prendre sous sa responsabilité ceux qui avaient travaillé pour elle depuis plusieurs années, bâtir une nouvelle usine à Sainte-Thérèse ou les laisser tomber aussi? A ce moment, ma mère était propriétaire de la compagnie. Elle ne voulait pas s'attaquer à ce problème financier, parce que, si on allait reconstruire une usine, c'était bien évident que l'argent fourni par les assurances et même les subventions reçues du gouvernement fédéral ne suffiraient pas pour reconstruire l'usine comme il le fallait à Sainte-Thérèse et que la compagnie serait obligée de contracter une dette énorme pour financer toute l'usine. Ma mère ne voulait donc pas, à son âge et à ce moment, prendre cette responsabilité.

Pendant l'été 1973, j'ai donc acheté les actions de ma mère et j'ai pris la décision de reconstruire à Sainte-Thérèse. Je n'avais personnellement pas besoin de faire cela mais je l'ai décidé. Entre 1973, il faut que je m'explique un peu au sujet de l'allocation des billes de bois feuillu. Il y avait un véritable problème dans la province, un problème qui a duré durant des années, une quinzaine d'années ou plus. A ce moment, le ministère des Terres et Forêts nous a dit: On vous donne la permission de reconstruire l'usine de Sainte-Thérèse, à certaines conditions, comme celle-ci: Dans l'ancienne usine, vous aviez trois tours pour dérouler les billes; on va vous permettre de reconstruire avec un tour; deuxième-

ment, on est au courant qu'on va avoir une diminution des allocations de bois de feuillu pendant les prochaines années; partant de ce principe, il faut que la compagnie accepte que l'approvisionnement en billes, que l'allocation de bois feuillu, sera basé sur le principe ou dans l'esprit que c'est encore l'ancienne usine de Sainte-Thérèse et que ce ne sont pas les nouveaux investissements qui vont influencer le ministre des Terres et Forêts pour ajuster le montant de l'allocation ou l'inciter à vous donner une meilleure allocation ou à ne pas diminuer le même montant à cause d'une nouvelle usine.

Malgré ces deux raisons et d'autres problèmes aussi, j'ai personnellement décidé quand même de reconstruire à Sainte-Thérèse. Le ministère des Terres et Forêts nous en a donné la permission au mois d'août 1973 et nous avons fait la reconstruction des bâtisses de l'usine en septembre.

En 1974 et 1975, on a essayé d'ouvrir les départements, de rappeler les gens qui avaient perdu leur emploi à cause de l'incendie. Il faut ajouter aussi un fait très curieux. Entre le 10 avril 1973 et septembre 1973, même si des gens disaient qu'il y avait de mauvaises conditions de travail à la Commonwealth Plywood, je n'en ai rien entendu dire pendant ce temps-là, mais j'ai entendu beaucoup de monde, sinon tout le monde, nous dire: Bon! On est très heureux de savoir que vous allez reconstruire à Sainte-Thérèse. Ces personnes sont difficiles à retrouver aujourd'hui. Mais les gars qui parlent de mauvaises conditions de travail à l'usine de Sainte-Thérèse n'ont pas parlé en 1973 de ces mauvaises conditions de travail.

En 1974 et 1975, on a essayé, avec beaucoup de difficulté, de remettre la machinerie en production. La compagnie était aux prises avec d'autres problèmes aussi avec les gens qui ont installé de la machinerie et avec la commission Cliche — je présume qu'il ne faut pas mentionner ça trop longtemps — mais la compagnie a été impliquée dans cela et la reconstruction de l'usine a été beaucoup retardée à cause des dommages causés à l'intérieur et des problèmes déclenchés par la commission Cliche.

En 1976, il a semblé que, finalement, l'usine de Sainte-Thérèse allait commencer à avoir peut-être une chance de recouvrer sa rentabilité et de donner une compensation aux autres usines, malgré les pertes que nous avions, et on a prévu pour 1977 un profit pour l'usine de Sainte-Thérèse. Pendant trois ans, les autres usines de la compagnie, même au Québec et même en Ontario, avaient financé les pertes à Sainte-Thérèse. Puis, en 1977, jusqu'au printemps, il a semblé encore une fois que l'usine subissait encore des pertes mais, pendant le printemps de 1977, les pertes n'ont pas été aussi élevées que l'année précédente.

Quand sont arrivés juin et juillet, on avait des pertes de plus de $100 000 par période de quatre semaines parce que nos chiffres sont basés sur des périodes de quatre semaines, ces périodes se terminaient le 11 juin. Vous avez des chiffres ici, à la page 1 de l'annexe A, qui démontrent la tendance des pertes de l'usine. Vous pouvez voir que les pertes sont beaucoup plus sérieuses et plus graves que pendant le printemps.

On est arrivé à la période des vacances et il reste encore quelques modifications et améliorations assez importantes à compléter sur la machinerie.

Alors, pendant la deuxième semaine de vacances, M. Verville, le surintendant, m'a dit qu'il ne pouvait pas compléter toutes les améliorations et les modifications prévues pour cette période. Qu'est-ce qu'on peut faire? Alors, après avoir discuté ensemble, nous avons décidé de fermer une troisième semaine pour compléter les dernières modifications, les dernières améliorations importantes dans l'usine, mais non pas pour pouvoir dire: II y a encore des pertes parce qu'on n'a pas complété nos améliorations et nos modifications. J'ai dit: On va fermer une troisième semaine et on va commencer au mois d'août avec une meilleure production tout de suite, pas d'autres problèmes; on ne peut pas encore blâmer la machinerie. On va enlever cette question. Il n'y a pas que la question de la machinerie qui cause des pertes, mais c'est une des questions, un des problèmes.

Alors, il était évident, pendant le mois d'août, avec les chiffres de production, que la production était inférieure à celle d'avant les vacances; la production, c'est-à-dire la production à l'heure du placage qui était déroulé, qui sort du séchoir; que le gaspillage, dans le département de "splicing", était plus élevé, la production dans le service du contre-plaqué était plus élevée. On arrive à la fin du mois d'août et j'ai trouvé que la production, à partir des rapports, était inférieure à celle qui existait avant les dernières modifications et les dernières améliorations.

M. Johnson: Si vous permettez, M. Caine, je vais vous interrompre. Il est six heures moins cinq et la question que j'avais posée me semblait relativement simple. Je comprends que vous voulez nous expliquer tout le contexte économique et tout cela et vous aurez peut-être d'autres occasions de le faire, au moment où les membres de la commission auront à vous poser des questions, y compris moi.

Les questions que je voulais vous poser portaient sur le contexte dans lequel vous aviez vu ce changement d'allégeance syndical, ce que cela signifiait à vos yeux et comment vous aviez perçu cela.

J'ai l'impression qu'on aura à y revenir. Je ne peux malheureusement pas vous dire en ce moment quelle sera la date de la reprise des travaux de la commission. On verra, comme la dernière fois, à vous aviser à temps et vous donner au minimum huit jours, ou probablement un peu plus, d'avis quant à la convocation et vous serez — possiblement Me Fournier, selon la résolution qui est en suspens — appelé à continuer à répondre à nos questions.

M. Bellemare: M. Caine, vous dites qu'il y a eu 22% de moins que le gouvernement vous enlevait en 1977...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Casgrain: J'aurais un mot à dire.

Le Président (M. Cardinal): Oui, un instant. Il faut d'abord s'adresser au président, s'il vous plaît. M. Caine, dans quelques minutes, je devrai d'office ajourner. Si vous avez quelques mots à ajouter, je vous dis tout de suite que je serai obligé de vous interrompre.

M. Caine: Merci, M. le Président. Je m'excuse de prendre beaucoup de temps, mais je pense que c'est très important pour les membres de la commission d'avoir tout le contexte avec lequel j'étais saisi pendant le temps de la mise à pied. Alors, je veux dire deux petites phrases. On a mentionné que la compagnie n'était pas pour la CSN. Je veux souligner que la compagnie n'a jamais contesté l'accréditation de la CSN.

Deuxièmement, même si c'était la grande centrale de la CSN, si c'étaient les rembourreurs, si c'étaient d'autres unions, il y a des unions à Sainte-Thérèse depuis longtemps, ce sont les mêmes employés, ce sont les employés qui font la production. Ce n'est pas la grande centrale ou le bureau de M. Thériault, le bureau de la CSD ou les autres.

Le Président (M. Cardinal): Si vous permettez, messieurs, pour éviter qu'il y ait une motion d'ajournement qui soit débattable, comme nous avons devant nous un ordre de la Chambre, je voudrais d'abord souligner un fait. Vous avez remarqué, c'est un compliment que je fais aux employés du journal des Débats, que nous nous sommes très bien entendus cet après-midi, c'est-à-dire que le son était parfait. Je veux le souligner et en remercier ceux qui en sont responsables. Deuxièmement, je dois ajourner sine die. Je ne sais pas si M. le ministre veut donner une indication quant à une prochaine rencontre, mais il me paraît...

M. Pagé: M. le Président, vous reprendrez avec mes questions, à ce moment-là?

Le Président (M. Cardinal): Oui. J'ai noté, pour les fins des députés, ceux qui ont demandé la parole. Je garde cela dans mon dossier. M. le ministre, est-ce que vous avez un mot de la fin avant que je n'ajourne?

M. Johnson: Je voudrais remercier tous ceux qui ont témoigné aujourd'hui et dire qu'on aura probablement l'occasion de se retrouver bientôt.

Le Président (M. Cardinal): Cette commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 17 h 58

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