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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le jeudi 21 décembre 1978 - Vol. 20 N° 250

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 110 - Loi modifiant la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction et d'autres dispositions législatives


Journal des débats

 

Étude du projet de loi no 110

(Quatorze heures quarante-sept minutes)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre est réunie pour procéder à l'étude article par article du projet de loi no 110, Loi modifiant la Loi sur la qualification professionnelle des entrepreneurs de construction et d'autres dispositions législatives.

Les membres de cette commission sont les suivants: M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mailloux (Charlevoix).

M. Pagé: Oui, M. Mailloux (Charlevoix) comme membre.

Le Président (M. Clair): M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière) remplacé par M. Laberge (Jeanne-Mance).

Les intervenants sont les suivants: M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent)...

M. Pagé: Remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal).

Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Gosselin (Sherbrooke) remplacé par M. Gagnon (Champlain), M. Jolivet (Laviolette), M. Laplante (Bourassa), M. Lefebvre (Viau), M. Paquette (Rosemont), M. Springate (Westmount)...

M. Pagé: M. Springate remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

Le Président (M. Clair): M. Springate remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), comme intervenant. Et enfin, M. Samson (Rouyn-Noranda).

Avant d'entreprendre les travaux de cette commission, je pense que, en tenant compte des avis qui ont été donnés en Chambre, il y a quand même lieu de désigner un rapporteur.

M. le député de Limoilou, qui est un membre permanent, accepterait-il d'agir comme rapporteur?

M. Gravel: Oui, M. le Président. M. Pagé: Un parfait rapporteur.

Le Président (M. Clair): Le député de Limoilou agira comme rapporteur des travaux de cette commission. Je cède immédiatement la parole au ministre du Travail.

M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, dans mon exposé préliminaire, je vais être extrêmement bref. Je pense que beaucoup de choses ont été dites depuis que ce projet de loi a été déposé, depuis la publication du rapport Hébert et les commentaires qu'il a suscités. Je pense également qu'il faut avoir à l'esprit que le monde de la construction, dans le domaine des relations de travail, n'est pas intrinsèquement différent des autres; qu'il pourrait exister des cas particuliers dans d'autres industries, mais il a cette caractéristique d'être important et de bénéficier d'une perception dans l'opinion publique, et, malheureusement, par beaucoup d'hommes politiques, d'être un monde trop à part et très à part, sa caractéristique essentielle étant peut-être que les lois qui le touchent soulèvent habituellement plus de passion que dans d'autres secteurs.

Je serai prêt à répondre article par article aux questions que l'Opposition aura à nous poser. Je voudrais mentionner que j'ai remis au député de Portneuf, ainsi qu'au député de Johnson et au député de Beauce-Sud, il y a maintenant trois jours, les textes qui sont des projets d'amendements à ce projet de loi en espérant qu'à partir de cela ils pourraient tous exprimer de façon claire et concise, au niveau de la deuxième lecture, leur orientation, leur perception ou leurs opinions. J'espère que le débat que nous aurons dans l'étude article par article nous permettra de constater que l'Opposition a tenu compte de ce geste gratuit qui était de lui remettre les amendements pour ne pas la prendre par surprise aujourd'hui. C'est tout ce que j'avais à dire pour commencer, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Messieurs, si vous le permettez, je voudrais simplement, auprès du député de Johnson, m'excuser d'avoir commencé les travaux de cette commission avant son arrivée. J'avais eu des indications qu'il ne pouvait être présent immédiatement.

M. Bellemare: Je vais être présent presque tout le temps, mais seulement j'ai une autre tâche ici d'être leader.

Le Président (M. Clair): Oui, je comprends, mais, étant donné, M. le leader de l'Union Nationale, que lundi dernier vous avez eu la gentillesse vous-même de demander la suspension pour attendre une autre opposition, je voulais simplement m'excuser auprès de vous.

M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. Mes commentaires vont certainement être un peu plus

longs que ceux que s'est permis de faire le ministre au début des travaux de notre commission. Effectivement, M. le Président, nous avons comme mandat, comme tâche aujourd'hui d'étudier article par article ce projet de loi 110 qui a certainement fait couler beaucoup d'encre depuis le moment de son dépôt, soit le 29 novembre dernier. Ce projet de loi modifie plusieurs dispositions législatives existantes, cinq lois qui s'appliquent. Il vient modifier de façon non seulement importante, mais qui touche même à l'essentiel dans certains cas la vie de plusieurs groupes ou organismes. Il vient modifier la conjoncture dans le domaine des relations de travail dans l'industrie de la construction.

Le ministre du Travail a eu l'occasion de faire son discours en deuxième lecture ici, à l'Assemblée nationale, très tard dans la soirée de vendredi dernier. Moi-même ainsi que mes collègues de l'Opposition, soit l'honorable député de Johnson et le député de Beauce-Sud, nous avons eu l'occasion de faire part de nos commentaires. Quant à moi, je l'ai fait vendredi dernier, dans un premier épisode et, deuxième épisode, dans la nuit de lundi à mardi dernier. L'Opposition, M. le Président, s'est prononcé unanimement contre l'adoption de ce projet de loi. Cette position adoptée par nous témoignait d'inquiétudes, d'une part, et d'interrogations, d'autre part, interrogations qu'on a eu l'occasion de formuler, auxquelles on a eu l'occasion de sensibiliser le ministre; interrogations qu'on a d'ailleurs soulevées, et ce à plusieurs chapitres. Cela pourrait, quand même, être assez bref, M. le Président. On aura l'occasion de revenir sur tous ces sujets lors de l'étude du projet article par article. Interrogations sur toute cette question que contient le projet de loi dont le gouvernement s'apprête à demander l'adoption.

Le gouvernement crée, par ce projet de loi, un monde complètement à part dans le secteur de la construction, une entité, un groupe qui ne sera pas syndiqué, groupe dont les membres ne seront pas considérés comme des salariés au sens de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, ce qui aura, évidemment, beaucoup d'impact. On crée, avec tout ce que cela peut impliquer dans le cadre législatif qui nous est présenté, le statut d'artisan, statut qui permettra à des travailleurs, au lendemain de l'adoption de cette loi, de demander à la Régie des entreprises de construction du Québec d'être classés artisans. Cela leur permettra, une fois que les normes, c'est-à-dire cautionnement et tout cela, seront remplies, de se soustraire à l'application du décret, de faire affaires et de travailler seuls pour autrui sans être soumis à ce décret, à des taux de salaire négociables, traitables, discutables selon les besoins et selon les conditions du marché, marché dans lequel, entre parenthèses, l'Office de la construction nous disait dans son dernier rapport qu'on pouvait présumer une diminution de 17% en 1978 par rapport à 1977.

Cela, M. le Président, selon moi, venait perturber le monde du travail. Cela venait officialiser, légaliser une compétition indue. En bon français, cela venait privilégié des situations de coupe de salaires et de négociation de prix à rabais dans le secteur de la construction. J'étais en droit de formuler non seulement des inquiétudes, mais des interrogations au ministre. Cet aspect, on en discutera pendant nos travaux. Il y a aussi tout cet aspect qui permet par la loi aux artisans de travailler pour des employeurs professionnels sans pour autant, M. le Président, être soumis au décret, sauf pour la condition des taux de salaire payés.

Ces deux premiers éléments impliquent toute une série de questions, qu'on se doit de poser à juste titre, quoi qu'en dise le ministre et auxquelles celui-ci devra répondre. Dans ce projet de loi aussi, M. le Président, il y a deux aspects qui peuvent être interprétés comme étant mineurs, mais que je considère comme étant très importants quand même, deux aspects que le ministre du Travail a peut-être voulu passer en douce à l'intérieur de ce projet de loi catalogue, de ce projet de loi fourre-tout qui contient des modifications, des amendements à gauche et à droite, qui a été présenté dans le cadre d'une période propice à l'Assemblée nationale, soit la période des Fêtes où on sait pertinemment que la très grande majorité des Québécois — il faut le constater — est pas mal plus préoccupée le 21 décembre 1978, à 3 heures de l'après-midi par l'emballage, l'achat de ses cadeaux de Noël que par les travaux qui se déroulent à l'Assemblée nationale. C'est toujours facile pour un gouvernement... Particulièrement, quand on connaît le ministre du Travail, M. le Président, on n'a pas à se surprendre que celui-ci ait non seulement présenté son projet de loi le 29 novembre, mais que lui et le leader aient fait en sorte qu'il soit amené pour étude en deuxième lecture en pleine nuit, d'une part, et qu'il soit amené pour étude article par article le 21 décembre, date limite pour la terminaison des travaux de cette Assemblée.

Je reviens donc, M. le Président, aux deux éléments qui peuvent paraître bénins. Le premier élément constitue dans la loi une limitation du champ d'application du décret en ce qui regarde les commissions scolaires et les établissements du réseau de santé du gouvernement. Cela peut paraître bien anodin, mais cela a beaucoup d'impact, M. le Président. Cela implique, dans un premier temps, que le gouvernement ne veut pas s'obliger — ce que M. le Président, les lois, les réglementations et la situation sous-tendent —à respecter le décret dans ces secteurs des réseaux de la santé et de l'éducation. Cette mesure, même si le ministre nous apportera des amendements, vient limiter, et ce de beaucoup, le champ d'application du décret.

Une interrogation que j'ai formulée au ministre, cela a été de lui demander, M. le Président, jusqu'où cette démarche pouvait s'inscrire dans le cadre d'une approche globale. Je ne voudrais pas en faire ici une question de débat parce que vous pourriez me reprocher de ne pas être pertinent. Le ministre du Travail, on se le rappellera, le 20 septembre dernier, faisait paraître un avis dans la Gazette officielle par lequel il procédait à l'exten-

sion du champ d'application du décret pour couvrir quatre secteurs bien spécifiques, le secteur des "shut-down" dans l'industrie pétrolière, le secteur des pâtes et papiers, la métallurgie et les entreprises hydroélectriques.

Il y a un autre aspect, M. le Président, c'est que le ministre, en vertu de cette loi, se donne le pouvoir de changer le droit du jour de grève ou du jour auquel les parties patronales ont le droit au lock-out en vertu du décret dans l'industrie de la construction. (15 heures)

M. Johnson: En vertu de la loi pour le décret.

M. Pagé: Le ministre pourra, par cet article purement et simplement, en catimini, de son propre chef, lui-même, sans consultation — comme d'habitude, notamment — décider de la date d'expiration du décret d'où, M. le Président, la possibilité et le privilège pour lui de décider du droit à la grève ou au lock-out. Je crains que tout cela sous-tende une stratégie orchestrée, bien planifiée, pour s'épargner la possibilité qu'en pleine période de négociation, soit en septembre ou octobre prochain, parce qu'on se rappellera qu'en 1976...

M. Johnson: Pendant le référendum.

M. Pagé: Pendant le référendum. En 1976, on se rappellera, M. le Président, que les négociations étaient des plus vives en septembre et octobre et cela s'est conclu en octobre dernier. On se rappellera la déclaration du ministre et du vice premier ministre, ministre de l'Éducation, M. Morin qui, je ne sais trop pour quel motif, a laissé échapper, il y a quelques semaines, devant les étudiants — c'était peut-être pour racheter un peu sa position sur les prêts et bourses aux étudiants, mais, en tout cas — qu'éventuellement, le référendum pourrait être tenu en septembre ou octobre prochain. Ce n'est pas compliqué. Cela ne prend pas 25 ans d'expérience politique pour voir ce qu'il y a en dessous de la roche. Le gouvernement veut se donner le droit, le privilège, l'attribut qu'en pleine période référendaire — cela fait mal des grèves en période référendaire ou en période électorale et Dieu sait si moi, au nom du Parti libéral du Québec, j'en sais quelque chose — le gouvernement a vu tout cela et il se réserve le privilège de modifier l'expiration du décret, évitant ainsi toute possibilité de grève ou de lock-out dans la période — combien importante pour lui — référendaire.

Il y a d'autres aspects, M. le Président, dans ce projet de loi. Il y a deux autres éléments auxquels je voudrais faire état qui témoignent d'une même intention. C'est cette intention bien ferme, bien arrêtée — pas trop manifestée jusqu'à maintenant parce que pas trop perçue par les milieux concernés — du gouvernement de vouloir contrôler — peu importe à quel prix et ce, même si c'est au prix de la démocratie — les organismes en présence. Qu'on regarde le traitement qui est fait par ce projet de loi à l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, un organisme qui a vu naissance par voie de législation à la fois privée et publique en 1975-1976, un organisme qui n'a pas été facile à créer, qui n'a pas été facile à ajuster une fois sa création, mais qui en est arrivé non pas à certaines conclusions, mais à des conclusions certaines et à une situation qui a prévalu en 1976, c'est-à-dire l'existence, dans le secteur de la construction, d'un groupe bien organisé, d'un groupe qui était fort — et je pense que cela a été respecté par les milieux syndicaux d'avoir en face d'eux un groupe qui se tenait — un groupe qui a négocié le décret, un groupe qui, depuis, a appliqué le décret, un groupe qui est en droit aujourd'hui et ce, compte tenu de la loi adoptée en 1975, de se pencher sur son avenir, sur ses règlements, sur sa composition, sur son mode d'élection, sur sa représentativité au conseil d'administration et tout cela, mais un groupe qui était bien organisé, organisme qui a présenté en février 1978 — pas en novembre, M. le Président — un projet de règlement pour adoption au ministre du Travail. Ce projet de règlement, c'est un peu comme la loi 116 d'aujourd'hui, quand le ministre de l'Agriculture nous disait qu'il y avait un jugement rendu par la Cour suprême et qu'il fallait absolument légiférer, jugement qui a été rendu — notamment pour la gouverne du député de Champlain, mon bon ami qui s'occupe particulièrement de l'agriculture — le 18 janvier dernier. Le ministre avait donc les règlements, la position de l'Association des entrepreneurs en construction depuis février dernier. Cela a impliqué, évidemment, un débat — il faut appeler les choses par ce qu'elles sont — entre l'AECQ et différentes associations dont les membres sont aussi membres de l'AECQ. Le ministre a profité, selon moi — et c'est ce que je soutiens, libre au ministre de me démontrer le contraire tantôt — de ce débat peut-être viril, mais qui était là, entre les associations et l'Association des entrepreneurs en construction, pour en arriver à une clause dans la loi 110 lui permettant d'adopter des règlements et lui permettant de les modifier et d'aller jouer dans les structures, dans la composition et les modes d'information du Conseil d'administration de l'AECQ.

Les dispositions du projet de loi 110, je vais vous les résumer bien brièvement, à l'égard de l'AECQ, pour moi, c'est purement et simplement la mise en tutelle de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec. Aujourd'hui, c'est l'association des entrepreneurs et demain ce seront les syndicats. Il y a un autre élément qui se recoupe encore sur ce principe et qui s'applique maintenant à l'Office de la construction du Québec, cet organisme qui a toujours été défini, d'après le législateur, comme un organisme résultant des groupes en présence, soit le milieu patronal, d'une part, et le milieu syndical, d'autre part.

On se rappellera combien et comment l'ancienne Commission de l'industrie de la construction pouvait représenter peut-être plus fidèlement que l'OCQ actuellement ce principe de parité. L'OCQ a eu des problèmes aigus depuis quelques

années, depuis sa création. Ces problèmes se sont davantage polarisés depuis un an, d'une part avec le règlement de placement et d'autre part avec différentes enquêtes sur tout ce qui s'est passé. On aurait été en droit de s'attendre à un débat plus démocratique, un débat plus large, sur cette question, qui aurait permis au législateur et non pas au lieutenant-gouverneur en conseil — parce qu'il faut savoir ce que c'est que le lieutenant-gouverneur en conseil, le lieutenant-gouverneur en conseil, pour moi, c'est le ministre du Travail! — débat qui aurait permis aux députés à l'Assemblée nationale, à moi-même personnellement, au député de Beauce-Sud, qui est finement au fait des impacts et de tout le dossier de l'OCQ notamment, qui nous aurait permis, dis-je, de participer à ce débat sur son avenir, sur ce qu'est l'OCQ, les failles de l'OCQ et ce qu'on devrait faire de l'Office de la construction du Québec. Mais non. Il faut — et cela s'inscrit bien dans l'esprit du gouvernement du Parti québécois — il faut légiférer, et cela presse.

M. le Président, qu'on regarde très brièvement les mesures que contient le projet de loi 110 à l'égard de l'OCQ. L'OCQ sera maintenant l'affaire du gouvernement, purement et simplement, quand, selon moi, cela devrait être l'affaire des parties en présence, avec une voix au chapitre pour le gouvernement sur certains aspects et dans certains cas très limités. M. le Président, vous comprendrez qu'avec tous ces motifs il va de soi qu'on s'est prononcé contre le projet de loi. On n'a d'ailleurs pas été les seuls à se prononcer contre. Pour une fois, toutes les parties en présence sont contre le projet de loi 110. Je conviens que le ministre du Travail puisse peut-être se satisfaire, et ce temporairement, du fait que toutes les parties soient contre. J'entendais, il n'y a pas longtemps, ses collaborateurs — je ne sais pas si c'était dans un communiqué — je les lisais, dis-je, faire part au public et au monde de la construction que plus les gens étaient contre, plus cela renforçait la conviction au ministre d'être contre. Cela témoigne fidèlement de la suffisance...

M. Johnson: Si vous me permettez, M. le Président...

M. Pagé: ... de l'arrogance du ministre du Travail. On y reviendra.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Si vous me le permettez, M. le Président, puisqu'ils ne sont pas là pour se défendre, les gens de mon bureau, de mon cabinet, c'est un journaliste, que je sache, qui a écrit cela et ce n'est pas un communiqué émanant de mon bureau. Mais cela ne m'étonne pas du député de Portneuf, c'est la confusion dans les sources, comme d'habitude!

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Ce commentaire témoigne encore de la suffisance du ministre. En tout cas! C'est une autre affaire. C'est le monde qui va juger.

M. le Président, tout le monde est contre ce projet de loi. J'aurais aimé... Si vous voulez intervenir, vous interviendrez tantôt. J'aimerais que vous interveniez. J'aurais préféré que le député de Sainte-Marie intervienne. Vous le remplacez aujourd'hui, mais j'aurais préféré que le député de Sainte-Marie...

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, il ne vous reste que quelques minutes, alors, je vous prierais...

M. Pagé: ... de conclure?

Le Président (M. Clair): ... de revenir à la pertinence du débat.

M. Pagé: J'aurais bien aimé parler du député de Sainte-Marie, qui était contre ce projet de loi lui aussi, mais qui est pour maintenant et n'est pas ici aujourd'hui, évidemment.

M. le Président, je vous dirai en terminant, parce que le temps fuit, que tous les groupes se sont prononcés contre le projet de loi, mais tous les groupes n'ont pas eu le privilège d'être entendus, et ce même si on a un gouvernement qui se pète les bretelles au niveau de la transparence et qui se définit comme étant transparent et démocrate.

Motion de report

M. le Président, je ferai motion immédiatement et ce, dans ce souci que le gouvernement se rende à ce à quoi il s'est obligé au chapitre de la transparence et de la démocratie; je fais donc motion pour que l'étude article par article du projet de loi 110 soit suspendue jusqu'à ce que la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre ait entendu les représentations de l'Association des entrepreneurs en construction, de la Fédération des travailleurs du Québec, du Conseil provincial des métiers de la construction, de la CSN, la CSD, l'OCQ et la Régie des entreprises en construction.

M. Johnson: Sur la motion, M. le Président, est-ce que...

Le Président (M. Clair): J'aimerais d'abord, si vous me permettez, être légèrement éclairé, si quelqu'un pouvait le faire, sur la recevabilité de cette motion, en particulier sur le point de l'article 99.1 qui dit qu'on ne peut revenir sur une question sur laquelle une décision a déjà été prise au cours de la session. Comme je ne suis pas suffisamment éclairé sur la question à savoir si oui ou non cette question a déjà été réglée à l'Assemblée nationale, si quelqu'un voulait m'éclairer là-dessus.

M. Pagé: M. le Président, je suis disposé à vous éclairer immédiatement.

Le Président (M. Clair): Je vous écoute, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, cette question n'a évidemment été ni débattue ni réglée à l'Assemblée nationale jusqu'à maintenant parce que le projet de loi a été présenté le 29 novembre dernier. Toute cette question des modifications aux cinq lois en présence des parties en cause n'a pas été abordée et ce, même si les parties en cause ont fait des représentations en ce sens. Des demandes ont été formulées par des groupes.

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité.

M. Pagé: Sur la recevabilité. Des demandes ont été formulées et en aucun temps depuis l'ouverture de la session le 3 octobre dernier les groupes dont je fais mention dans la motion n'ont eu l'occasion d'être entendus ici à l'Assemblée nationale. Que ce soit sur les objets bien spécifiques du projet de loi 110, que ce soit...

M. Johnson: ... recevabilité. M. Pagé: J'en arrive à cela. M. Johnson: II faut être large.

M. Pagé: J'en arrive à la question de la recevabilité.

M. Johnson: Vous êtes sur le fond de la motion, en ce moment.

M. Pagé: Je ne suis pas sur le fond de la motion.

Le Président (M. Clair): Je m'excuse, M. le ministre, la première question que je voulais poser, pour disposer de la recevabilité de cette motion, c'était celle de savoir si oui ou non la question d'auditions publiques avait été décidée à l'Assemblée nationale et le député de Portneuf est en train de dire que ni sur le projet de loi 110, ni sur autre chose il y aurait eu une telle motion.

M. Chevrette: II y a eu des questions... M. Pagé: Je vous dirai bien brièvement...

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): Sur une question de règlement, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Oui. Effectivement, il y a eu en Chambre une question, en vertu de l'article 34, pour demander au leader, par l'entremise d'un représentant de l'Opposition, s'il y avait des auditions ou non en marge de la loi 110 très spécifiquement. Il y a eu une réponse à savoir qu'il n'y avait pas d'auditions et c'est à ce moment-là que la Chambre...

M. Pagé: M. le Président...

M. Chevrette: Encore 30 secondes, je termine.

M. Pagé: Merci.

M. Chevrette: ... c'est à ce moment-là que la Chambre a donné un ordre de siéger pour l'étude article par article.

Le Président (M. Clair): Sur ce point, je suis déjà suffisamment éclairé pour en disposer. Il me semblait qu'il en avait été question.

M. Pagé: Non...

Le Président (M. Clair): Sur le petit point de la question qui aurait été posée, effectivement, cela me revient à la mémoire. Une question a été posée, mais je voudrais dire au député de Joliette-Montcalm qu'une question posée à l'Assemblée nationale avec une réponse du ministre, ce n'est pas une décision de l'Assemblée.

M. Pagé: Non, ce n'est pas un ordre de la Chambre.

M. Chevrette: Je sais. L'ordre de la Chambre, c'est l'étude article par article.

M. Pagé: Je reviens, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Si vous me permettez, sous cet angle de la recevabilité, j'en ai disposé comme vous venez de l'entendre. Maintenant, l'autre point sur lequel j'aimerais être éclairé, M. le député de Portneuf et messieurs les membres de cette commission — je comprends que le but du député de Portneuf, c'est que la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre entende les représentations de divers groupes. La formulation de la motion est que cette commission suspende ses travaux et j'aimerais être éclairé à savoir si un député peut présenter une telle motion, soit celle de suspendre les travaux de cette commission, alors que l'Assemblée nationale a donné ordre d'étudier le projet de loi article par article.

L'article 154.1 de notre règlement dit bien qu'en commission plénière ou élue, après la deuxième lecture, on ne peut discuter que les détails d'un projet de loi et qu'il ne peut y avoir d'auditions publiques que devant une commission élue pourvu que celle-ci y consente. Dans les circonstances, la motion ne m'apparaît pas, à première vue, basée sur l'article 152; c'est une motion de suspension du débat et je me demande sérieusement si vous êtes autorisé à présenter une telle motion.

M. Johnson: Sur la recevabilité, M. le Président.

M. Pagé: C'est moi qui avais la parole.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, d'abord, et le ministre du Travail par la suite. (15 h 15)

M. Pagé: Le ministre aura tout le temps. Nous allons faire cela calmement, de façon sereine. On a non seulement toute la journée, mais on a plusieurs journées...

M. Johnson: On ne perd pas les pédales.

M. Pagé: ... de travaux en cette commission. Si vous voulez, on va partir cela fair play...

Le Président (M. Clair): J'aimerais vous entendre sur la question que je vous ai posée.

M. Pagé: ... je vais terminer et, ensuite, le ministre interviendra. Je conviens que le ministre est peut-être un peu anxieux, mais ce n'est pas mon problème.

M. le Président, j'aurais presque envie de faire motion pour remercier le député de Joliette-Montcalm...

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, sur la question...

Une voix: Sur la recevabilité.

Le Président (M. Clair):... c'est toujours sur la recevabilité.

À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! C'est toujours sur la recevabilité de la motion, mais je vous ai dit que, sur l'aspect de la question, j'en ai déjà disposé. C'est sur l'autre point que je désire être éclairé. Je suis convaincu que vous avez bien compris, M. le député.

M. Pagé: Oui, j'ai très bien compris et vous aussi probablement, et c'est ce dont je veux m'assurer. Le député de Joliette-Montcalm vient de démontrer et ce, hors de tout doute, que l'Assemblée nationale n'a jamais été saisie de cette question-là, sauf par une question posée au leader, même pas au ministre du Travail.

M. le Président, la motion est définitivement recevable sur cet aspect, parce qu'il n'y a jamais eu de motion déposée, débattue, votée à l'Assemblée nationale pour voir si les parties devaient être entendues. Alors, il m'apparaît que, sous cet aspect, l'Assemblée nationale n'a jamais été saisie de cette question autrement que par l'article 34, qui n'est pas une motion comme telle, ni une intention, parce que la question posée en vertu de l'article 34, dans sa réponse, représente strictement une réponse sur l'ordre des travaux et la démarche des travaux, et non pas la volonté des travaux comme tels, à savoir qui entendre et qui ne pas entendre.

Le Président (M. Clair): Je vous rappelle que vous m'avez convaincu, M. le député.

M. Pagé: Bon, tant mieux! Passons à d'autre chose.

Vous mettez en relief, vous invoquez l'article 152. La grande interrogation qu'on doit se poser est: Si la motion était acceptée, est-ce que les travaux de la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre pour étudier article par article le projet de loi seraient suspendus?

Je vous dirai bien humblement — c'est peut-être une culbute juridique, mais, en tout cas, c'est cela et, Dieu merci, vous êtes avocat, vous allez probablement comprendre — légalement les travaux ne seraient peut-être pas suspendus, mais, dans les faits, les travaux seraient suspendus, M. le Président, parce que je ne vois pas, à moins que le ministre du Travail nous l'explique, comment on pourrait en même temps écouter les parties, les entendre, discuter avec elles et procéder à l'adoption des articles 1, 2 et 3. Il faudrait nécessairement, dans les faits, suspendre ou encore mettre de côté, de façon temporaire, si on ne veut pas utiliser le terme "suspendre", les travaux de cette commission, c'est-à-dire l'étude du projet de loi article par article, cela s'est déjà fait, ou encore, comme dit mon collègue de Joliette, on pourrait peut-être, sans suspendre, arrêter momentanément, vous savez.

Selon moi, la question n'est pas là, la motion de suspension à laquelle vous vous référez vise uniquement à ce qu'un député puisse, par une motion, demander que les travaux se terminent purement et simplement. La motion que j'ai formulée aujourd'hui, ne vise pas à ce que les travaux se terminent, au contraire, cela fait quatre jours que j'attends que les travaux débutent. La motion vise essentiellement à ce que la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre continue ses travaux, qu'on entende les parties et ce, régulièrement, à la suite du mandat qui nous a été conféré par l'Assemblée nationale.

Si le ministre du Travail et de la Main-d'Oeu-vre croit qu'on peut en même temps entendre les parties et procéder à l'étude des articles un par un, eh bien, tant mieux pour lui. Il le proposera et il essaiera de le faire tantôt. Pour ma part, je vous dirai bien humblement que nous ne sommes non seulement pas disposés, mais pas capables, d'une part, de procéder à l'étude du projet de loi article par article, tout en permettant qu'en même temps dans le débat, les parties se fassent entendre. Pour moi, ce n'est pas une suspension des travaux de la commission, c'est strictement une affectation nouvelle et temporaire des travaux de cette commission et il m'apparaît hors de tout doute dans mon esprit que c'est recevable.

Le Président (M. Clair): Dans l'ordre, s'il vous plaît, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, le député de Beauce-Sud, le député de Rivière-du-Loup, le député de Mont-Royal, et je vous prierais de faire rapidement.

M. Johnson: Brièvement, M. le Président...

M. Roy: Sur un point de règlement, avant que le ministre ne prenne la parole, j'aimerais avoir une copie. C'est notre droit de nous faire distribuer une copie de la motion.

Le Président (M. Clair): Oui, vous avez tout à fait raison, M. le député. J'entends la cloche sonner, est-ce que quelqu'un pourrait vérifier s'il s'agit d'une demande de vote? M. le député de Portneuf, est-ce que vous aviez plusieurs exemplaires de votre motion?

M. Pagé: J'en avais un exemplaire. M. Johnson: Vous n'étiez pas préparé?

M. Pagé: Le ministre, encore une fois, va se permettre de vouloir...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: ... être suffisant. M. Johnson: D'accord.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Bon, d'accord.

M. Pagé: M. le Président, je n'ai pas les moyens du cabinet; je vais les avoir avant longtemps, ne soyez pas inquiet. Je n'ai pas les moyens du cabinet, je n'ai qu'une feuille, servez-vous de vos photocopies, servez-vous de vos documents, faites-les photocopier.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, M. le député de Portneuf, à l'ordre!

M. Roy: Sur un point de règlement...

Le Président (M. Clair): Celui dont vous mettez la conduite en cause est le président; c'est à moi à faire faire les photocopies...

M. Pagé: Je vous y invite.

Le Président (M. Clair): ... alors, je fais faire des photocopies immédiatement.

M. Pagé: Parfait!

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on doit suspendre les travaux?

M. Pagé: On peut suspendre les travaux. Une voix: Ce n'est pas nécessaire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud, vous allez avoir dans les minutes qui vont suivre une copie de la motion d'amendement.

M. Roy: Je voudrais émettre une rectification, M. le Président, parce que l'aspirant ministre...

Le Président (M. Clair): Est-ce toujours sur une nouvelle question de règlement?

M. Roy: Oui, c'est une question de règlement. Je veux seulement préciser une chose: II s'en est pris au ministre du Travail; non pas que le ministre du Travail ne soit pas capable de se défendre, ce n'est pas cela, mais c'est moi qui avais demandé une copie de la motion.

M. Pagé: J'ai les moyens du bord; je n'ai pas les moyens du gouvernement.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, s'il vous plaît, l'incident est clos. Le ministre du Travail, sur la recevabilité de la motion.

M. Johnson: Brièvement, M. le Président, sur la recevabilité de la motion. Je pense que cette motion n'est pas recevable pour deux raisons: la première, c'est que l'Assemblée a déjà disposé, dans la mesure où je reprends les propos du critique libéral qui reprenait en quelque sorte les propos du député de Joliette, de l'équivalent de remettre à plus tard en disposant d'une motion du député de Pointe-Claire pour remettre à trois mois l'étude au niveau de la deuxième lecture; deuxièmement, je pense que le mandat que cette commission a de la Chambre est de faire l'étude, article par article, et je considère qu'une motion demandant d'entendre les parties devrait être une motion émanant de la Chambre et non pas de la commission. Pour ces raisons, M. le Président, je considère que la motion est irrecevable.

Le Président (M. Clair): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, je n'aime pas beaucoup jouer à la procédure mais, dans des circonstances comme celles-là, il n'y a pas tellement de moyens à notre disposition si nous voulons, et en cela j'appuie le principe — bien que je pourrai y revenir tout à l'heure — de la motion déposée et présentée par l'honorable député de Portneuf... Mais, M. le Président, j'aimerais bien dire ceci sur la recevabilité: il n'y a pas eu de motion en Chambre et la motion de trois mois n'est pas une motion spécifique en vue de permettre la convocation de la commission parlementaire afin d'y tenir des audiences publiques.

Cependant, j'aimerais bien dire en vertu de l'article 161, paragraphe 2, que "la commission peut en tout temps faire à l'Assemblée des rapports spéciaux ou intérimaires, sur une motion qui ne peut être faite qu'une seule fois au cours d'une séance ".

Or, si la motion est amendée dans le sens qu'on fait rapport à l'Assemblée nationale disant que les membres de la commission ne se jugent pas suffisamment informés puisqu'on n'a pas permis aux organismes intéressés de pouvoir s'exprimer et qu'on ne permet pas aux membres de la commission de pouvoir les interroger pour avoir un meilleur éclairage, cela devient une motion recevable. C'est peut-être tout simplement une question de formulation, une question de forme, mais

sur le fond, M. le Président, je pense que la motion peut être reçue.

Le Président (M. Clair): Le député de Rivière-du-Loup.

M. Boucher: M. le Président, je pense que la motion du député de Portneuf est prématurée parce qu'elle convoque des témoins qui n'ont pas encore été convoqués. Je comprends que la commission est maîtresse de ses travaux, mais elle doit respecter l'ordre du jour pour lequel elle a été convoquée, c'est-à-dire l'étude article par article de la loi 110. Je vous référerais à une décision qui a été rendue le 3 juillet 1975 relativement à une motion semblable. Merci.

Le Président (M. Clair): Je m'excuse, M. le député de Johnson, j'avais déjà indiqué au député de Mont-Royal, au député de Joliette-Montcalm et à vous-même que vous auriez la parole.

M. Ciaccia: M. le Président, sur la recevabilité de la motion, c'est une motion préliminaire; ce n'est pas la première fois que dans une commission parlementaire une motion d'un tel genre est faite. Si vous trouvez que le libellé de la motion est inacceptable, je vous suggérerai tantôt certains mots que l'on pourrait changer, mais sur le fond de la motion, ce n'est pas la première fois... À plusieurs reprises, quand on a voulu entendre les parties, quand un député a jugé à propos que certaines parties soient entendues, une telle motion a été présentée et, si vous regardez dans vos précédents, elle a toujours été déclarée recevable. Je peux vous référer à l'article 154, par exemple, M. le Président, où on dit "qu'en commission plénière ou élue, après la deuxième lecture, on ne peut discuter que les détails d'un projet de loi et il ne peut y avoir audition publique que devant la commission élue pourvu que celle-ci y consente."

La seule manière d'obtenir le consentement de la commission — à moins que le gouvernement veuille y consentir avant la présentation de la motion, auquel cas, je crois bien que le député de Portneuf va la retirer — mais si le gouvernement ne veut pas y consentir, ce qui semble être le cas, franchement, je me pose des questions sur les raisons pour lesquelles le gouvernement refuse d'entendre les parties.

S'il refuse, le seul moyen de se conformer à l'article 154, c'est une motion présentée par un député. Après la présentation d'une telle motion, là, on peut débattre le fond, à savoir si on doit entendre les parties ou non. L'objection que le député de Rivière-du-Loup a apportée, à savoir que les parties ne sont pas ici, va venir après — qu'elles n'ont pas été convoquées — durant la discussion de la motion, mais la motion elle-même est certainement recevable, d'après les règlements, à l'article 154. Je pourrais aussi référer le Président aux articles des pages 27 à 32 sur la présentation des motions.

Alors, M. le Président, je crois que clairement, d'après les précédents que vous avez et je sais bien que vous avez assez d'expérience, M. le Président... J'ai assisté à d'autres commissions où vous étiez le président et vous savez fort bien que ce n'est pas la première fois qu'on nous présente des motions préliminaires. Le seul temps où un président a refusé certaines motions préliminaires, c'est quand on en faisait abus. Par exemple, si on faisait motion de convoquer certaines parties et que c'était refusé, on faisait alors d'autres motions préliminaires. À la troisième ou à la quatrième, le président exerçait une certaine discrétion, se référait au règlement et disait: Écoutez, on va procéder à l'étude article par article. On ne demande pas la suspension des travaux, on demande seulement d'entendre certaines parties avant le début de l'étude de l'article 1.

Le Président (M. Clair): Si le député de Johnson et le député de Joliette-Montcalm insistent, je serais prêt à prendre ma décision sur la recevabilité de la motion.

M. Chevrette: Je voudrais juste dire un petit mot. La seule motion recevable, à mon sens, c'est d'ajourner la commission et d'aller se chercher un ordre de la Chambre pour entendre les parties. C'est un ordre de la Chambre qui nous dit qu'on doit étudier le projet de loi article par article. Donc, il faudrait aller se chercher un ordre de la Chambre. Cette motion est complètement irrecevable et je la juge personnellement dilatoire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Premièrement, il y a eu une entente en Chambre avec le leader, M. le député de Saint-Jacques, soit que, lorsque nous serions rendus ici en commission parlementaire du travail, il serait décidé par nous si, oui ou non, il serait loisible d'entendre des témoins. C'est au feuillet R je ne sais pas quoi, mais je l'ai gardé sur mon bureau. C'est nous qui déciderions si, oui ou non, il serait convenable d'appeler les parties. C'est le leader qui nous a dit cela en pleine Chambre.

Deuxième chose, quand on parle des parties en présence, on les a actuellement. On n'a pas besoin de courir après, elles sont toutes ici. On pourrait rester ici pendant trois ou quatre jours, elles sont sûrement capables de nous entendre encore pendant une journée. Je pense qu'en commission, en principe, une proposition qui a été acceptée par l'Assemblée... On a eu le mandat d'étudier le projet de loi article par article, mais avant il y a eu une entente "gentlemen's agreement", à savoir que si notre commission décidait d'entendre les parties, on pouvait le faire. Vous allez retrouver cela au feuilleton de la Chambre.

Je dis donc que cela nous éviterait un placard désagréable, ce soir, que d'avoir à refuser notre consentement même si à minuit cela n'est pas terminé, parce qu'on n'a pas le droit, en vertu de l'article 115, aujourd'hui d'accepter et la commission, et le rapport, et la troisième lecture. Il faut

que vous ayez des consentements et, en vertu de l'article 115, vous vous exposez largement à les avoir.

N'oubliez pas une chose, vous êtes en retard. Vous êtes rendus aux dernières journées de la session et vous apportez un projet comme celui-là qui est fortement contesté. Je n'ai pas pu donner mon opinion au début, mais il est fort contesté. C'est la première fois que je vois un projet de loi qui est contesté unanimement par tous les partis qui vont avoir à s'en servir. (15 h 30)

Alors, j'aurai peut-être tout à l'heure à me prononcer dans les quelques mots qu'on dit avant de commencer les travaux, mais je dis que les étapes de la discussion d'un projet de loi ont lieu à des séances différentes. Aujourd'hui, c'est la commission parlementaire. Le projet de loi va retourner en Chambre ensuite pour l'acceptation du rapport et la troisième lecture et, après cela...

Le Président (M. Clair): Cette motion, je la déclare irrecevable pour le motif suivant: c'est que, telle qu'elle est libellée actuellement, elle m'apparaît contredire l'ordre de la Chambre de la façon suivante. J'interprète cette motion-là comme étant une motion pour suspendre les travaux de cette commission, ce qui serait contraire au mandat qu'on a de la Chambre d'étudier le projet de loi. Alors, j'insiste bien pour dire que c'est à cause du libellé de la motion. L'article 154, alinéa 1 existe toujours. Je la déclare irrecevable.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: ... je suis non seulement peiné, mais je trouve malheureux qu'on soit obligé de batailler, de prendre du temps pour que la démocratie puisse s'exercer.

M. Chevrette: À l'ordre, M. le Président!

M. Pagé: Non, je ne conteste pas la décision, M. le Président.

M. Chevrette: Le respect de la présidence

M. Pagé: Je conviens que le député de Joliette-Montcalm est peut-être fatigué, mais soyez donc patient.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Soyez donc calme, serein, par surcroît au cours de cette période des Fêtes.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je dois vous dire que je n'ai pas entendu ce que le député de Joliette-

Montcalm a dit. Il ne devrait pas dire des choses comme celles-là.

M. Chevrette: Je me parlais.

M. Pagé: Continuez à vous parler, vous êtes bien parti et, d'ailleurs, ce n'est pas la première fois que vous vous parlez.

Le Président (M. Clair): S'il vous plaît, messieurs, je vous en prie.

Motion invitant les parties intéressées à venir témoigner

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre invite les représentants de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, de la Fédération des travailleurs du Québec, de la CSN, de la CSD, de l'Office de la construction du Québec et de la Régie des entreprises de construction du Québec à se faire entendre le 21 décembre 1978, à 20 heures, devant cette commission afin de renseigner les membres et intervenants de cette commission sur le projet de loi 110.

M. le Président, je vous dirai qu'une motion analogue a déjà été présentée le 16 mars 1978, à la page B-482 du journal des Débats, par mon collègue de l'Opposition officielle et député de Marguerite-Bourgeoys, demandant que les parties soient entendues avant le début des travaux.

M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, simplement pour couper court à l'exposé que s'apprête à faire le député de Portneuf sur la recevabilité, je ne mets pas en question la recevabilité de ce qu'il propose en ce moment et je suggérerais qu'on passe à la discussion de fond, puisqu'il a l'intention d'aller rapidement.

Le Président (M. Clair): Alors, je déclare cette... Oui, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Si vous le permettez, je ne veux pas contredire votre décision, mais, comme vous le savez, chaque fois qu'un président rend une décision, cela crée un certain précédent pour l'avenir. Je voudrais seulement porter à votre attention, M. le Président, avec tout le respect, avec toute la déférence que je dois à la décision que vous avez rendue, que le 20 novembre 1975 le parti ministériel qui était dans l'Opposition avait fait une motion qui a été jugée recevable et je voudrais vous lire...

Le Président (M. Clair): J'ai l'impression, M. le député de Mont-Royal, que vous revenez sur ma décision. Je comprends, avec tout le respect que je sais que vous avez pour moi et le poste que j'occupe...

M. Ciaccia: Je comprends, mais je ne voudrais pas qu'à l'avenir, parce que cette décision n'a pas

été portée à l'attention de la commission, on cite un tel précédent. Ce serait malheureux.

Le Président (M. Clair): M. le député, j'ai l'impression que vous revenez sur ma décision. La motion que vient de présenter le député de Portneuf est recevable. À compter de maintenant, je donnerai la parole à un intervenant sur le fond de cette motion-là.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le député de Portneuf commence par présenter sa motion?

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, brièvement, si j'ai présenté cette motion, comme je l'ai dit au début, ceci vise essentiellement et uniquement à faire en sorte que les parties qui sont concernées, qui sont affectées par ce projet de loi puissent se faire entendre. M. le Président, je ne vois pas en quoi le gouvernement du Québec, le ministre du Travail, ces grands démocrates, ces gens qui avaient et qui n'ont plus un préjugé favorable à l'égard des travailleurs, ces gens qui parlaient de transparence... On se rappellera, M. le Président, qu'on a déjà entendu que ce n'était plus le Parlement; c'était la maison du peuple.

Les portes étaient ouvertes, les barrières étaient disparues, même si les barrières sont réapparues quelques semaines après et que, cette semaine, les portes étaient barrées pour ne pas laisser entrer les producteurs agricoles qui étaient mécontents, mais c'était ce que le gouvernement a énoncé, non seulement avant son élection, mais dans les semaines et les mois qui ont suivi son élection ici, comme gouvernement, à l'Assemblée nationale. Tout cela sous-tendait un principe démocratique. Ce principe démocratique, c'est de faire en sorte que les parties soient consultées, qu'il y ait un dialogue, qu'il y ait des échanges avec les parties, que les parties aient l'occasion de venir ici, dans cette maison du peuple, et de dire au législateur qu'on est pour ou qu'on est contre et pourquoi.

M. le Président, le projet de loi 110 a été déposé le 29 novembre. Quelques jours après, les télégrammes ont commencé à entrer ici à l'Assemblée nationale. "Nous comptons sur la vigilance des membres de l'Assemblée nationale afin d'empêcher un ministre du Travail aux allures angéliques de faire voter — aux allures angéliques, c'est vrai, seulement les allures — une loi dictatoriale pour la construction, soit la loi 110." Cela est un exemple des témoignages qu'on recevait.

M. le Président, le ministre du Travail pourra prendre connaissance des documents, tantôt, c'était un directeur du conseil d'administration de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

M. Johnson: Qui? De qui? Quel est le nom?

M. Pagé: M. le Président, si le ministre veut m'interroger, il le fera tantôt.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Johnson: Est-ce qu'il pourrait déposer le document?

M. Pagé: C'était M. Nepveu. Non, M. le Président, il n'y a pas de dépôt de documents. Pour l'information du ministre du Travail, qui vient de demander de déposer le document, qui, par surcroît, est avocat, il doit savoir qu'il n'y a pas de dépôt de documents en commission parlementaire.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, messieurs!

M. Pagé: Apprenez votre métier. M. le Président, j'en ai un pouce de documents que je pourrais déposer et vous lire. Je vais m'en exempter, parce que tout le monde est conscient, tout le monde est informé, tout le monde est concerné, toutes les personnes intéressées par les questions de la construction, par les questions du décret des associations et de l'OCQ ont eu l'occasion de prendre connaissance, soit par les articles de journaux, dans le Devoir, la Presse, le Soleil, par les conférences de presse qui ont été données de part et d'autre, soit de la part de la CSN, de la part de la Fédération des travailleurs du Québec et du Conseil provincial des métiers de la construction, les parties se sont prononcées contre ce projet de loi. Cela a été indiqué clairement. C'est établi.

Cependant, M. le Président, les législateurs à la table ici, le député de Johnson, le député de Beauce-Sud, moi-même, le député de Rivière-du-Loup, qui a remplacé le député de Sainte-Marie, qui s'est sauvé ce matin pour ne pas être ici, tous ces gens-là, les législateurs, n'ont pas eu l'occasion de discuter avec les personnes intéressées pour voir en quoi elles étaient contre, pourquoi elles étaient contre, pourquoi on devrait être pour ou contre, quels sont les éléments de ce projet de loi qui sont contentieux pour les parties, qu'on pourrait faire dans un forum collectif que constitue une commission parlementaire au chapitre des échanges, des amendements possibles, ce qu'on pourrait faire pour bonifier ce projet de loi pour qu'il soit meilleur, pour qu'il représente davantage les intérêts, ce qui est soutenu, ce qui est défendu par les groupes intéressés qui auront à vivre avec le projet de loi. Le gouvernement avait promis d'être un bon gouvernement, soyez-le donc! Je vous invite à l'être. Pour l'être, je vous invite à entendre les parties. Peut-être qu'en entendant ces groupes, on saura ce qui n'est pas bon, on pourra le corriger, on s'assoira, on présentera des amendements soit à l'instigation du ministre ou de l'Opposition, on les analysera, on les étudiera, on regardera les impacts. Sur la foi de cet échange avec les groupes, on verra s'il y a lieu de voter

pour le projet de loi tel que déposé ou de le bonifier. C'est strictement cela que je demande. C'est un appel.

M. le Président, je voudrais que le ministre soit bien conscient que ce geste est posé non pas dans une démarche partisane, c'est un appel à la démocratie et au vrai sens démocratique de cette équipe du PQ qui forme le gouvernement, s'il y a un sens démocratique dans cet équipe.

M. le Président, je termine là-dessus. J'espère que les motifs que j'ai allégués sont suffisamment importants pour que le ministre révise sa position et qu'il accepte d'entendre les parties.

On le pourrait, ce soir, entre 20 heures et 22 heures, M. le Président, dans un délai de deux heures, deux heures suffiraient, selon moi, pour échanger vraiment, en toute cordialité, de façon bien sereine, je l'espère, avec les parties pour voir avec elles ce qui est bien et ce qui n'est pas bien dans ce projet de loi. On pourrait le bonifier, on pourrait le voter et le gouvernement aurait sa loi, les parties seraient satisfaites des amendements proposés. Tout le monde serait heureux et on s'en irait fêter Noël tranquille. Je n'aime pas cela voir le ministre du Travail venir nous dire: Plus les gens sont contre, plus je suis fort.

Cela, M. le Président, témoigne de l'arrogance, de l'inexpérience, c'est se battre contre des moulins à vent, purement et simplement. J'invite le ministre à être plus démocratique, plus sage, plus sérieux. Entendez les parties, ce ne sera pas long, cela va prendre deux heures, on va adopter ce projet de loi, tout le monde va être heureux; c'est ce que je demande. À ce moment-là, vous aurez respecté vos engagements d'être un bon, un vrai gouvernement et d'être animé par le sens démocratique.

Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.

M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, sur le fond de la motion, j'ai dit dans mon exposé préliminaire à cette loi que le monde de la construction, à mes yeux comme ministre du Travail, n'est pas intrinsèquement différent des autres, sinon qu'il se caractérise par le degré d'émotivité de ceux qui y sont actifs; je parle ici tant des structures patronales que syndicales.

Je pourrais vous donner une excellente raison pour laquelle l'AECQ, par exemple, s'oppose au projet de loi 110. Elle s'oppose fondamentalement au projet de loi 110 parce qu'elle devient une structure qui implique les autres associations dont elle ne veut pas entendre parler. Je pourrais vous dire que les syndicats, de façon générale, s'opposent à ce projet pour deux raisons. Je pense que, puisque le député de Portneuf disait tout à l'heure... Qu'est-ce qu'on pourrait faire ici, ensemble, dans un forum? D'abord, il faudrait commencer par faire ses devoirs, lire les mémoires et lire ce qui a été inscrit sur cette question depuis un an.

En faisant cela, on se rendrait compte que la raison pour laquelle les syndicats en ont contre ce projet de loi, c'est la question de l'artisan. C'est une question qui est "pérenniale", si je peux m'exprimer ainsi. Deuxièmement, les syndicats en ont contre le projet de loi parce qu'on ouvre l'OCQ parce que j'y apporte certains changements de structure et on profite de cette ouverture pour exiger la parité, la représentativité patronale, syndicale et, finalement, de refaire de l'OCQ ce que la CIC a déjà été et on sait ce qui est arrivé avec la CIC.

On pourrait savoir pourquoi certaines municipalités s'y opposent. Elles s'y opposent parce qu'elles veulent que les municipalités soient soustraites de l'application du décret quand elles construisent. Cela ne prend pas une commission parlementaire, cela prend un effort normal que n'importe quel critique en matière de relations de travail ou un ministre du Travail est obligé de faire dans ses fonctions. Je me rends compte que le député de Portneuf a peut-être eu de la difficulté à saisir le contenu des mémoires. Il a pourtant reçu, comme tous les membres de l'Assemblée nationale, le rapport Hébert il y a quelque temps déjà.

Deuxièmement, il y a eu une vaste consultation qui a été faite sur les grands contenus à l'exception, j'en conviens, de ce qui a trait à l'OCQ proprement dit, mais ce sont deux amendements sur lesquels j'aurai à revenir en cours de route. En février 1978, l'AECQ me présentait un projet de modification de ses règlements. J'ai refusé d'agir sur la base de ce que l'AECQ me fournissait, non pas parce que le travail était mal fait, au contraire, il était fort bien fait; c'était un dossier présenté avec compétence et sérieux. J'ai cependant dit à l'AECQ, à ce moment-là, que je n'entendais pas me prononcer avant que le rapport Hébert m'ait donné des orientations à partir desquelles je jugerais et je prendrais des décisions.

Le rapport Hébert a été publié le 14 juillet, il a été remis à tous ceux qui étaient intéressés, on a eu l'occasion dans les semaines et je dirais dans les deux mois qui ont suivi de recevoir des commentaires écrits de différents groupements intéressés sur toute cette question de la construction. Le 5 octobre, je demandais à des entrepreneurs, tant des six associations patronales que de l'AECQ, au niveau non pas des permanents, mais des élus de ces associations, dans une salle d'un hôtel du centre-ville de Montréal, d'essayer de s'entendre entre eux pour définir une structure qui tiendrait compte, non pas à la lettre, non pas à la virgule près, au niveau de la représentativité du conseil d'administration de l'AECQ, de ce qu'en avait dit le rapport Hébert.

Or, le rapport Hébert — l'Opposition libérale le sait ou, enfin, devrait le savoir — prévoyait une confédération absolue, c'est-à-dire une appartenance des employeurs aux différentes associations et un regroupement sans "membership" direct auprès des employeurs qui serait l'ARTEC, l'Association des relations de travail plutôt que l'AECQ. (15 h 45)

Je pense que cette consultation, dans le cas

de l'AECQ, n'a malheureusement pas permis que les associations s'entendent. Je le regrette, il peut y avoir d'excellentes raisons. Historiquement, on peut comprendre que ce n'était peut-être pas facile pour ces associations et l'AECQ de s'entendre. Comme elles ne se sont pas entendues, je leur ai dit à ce moment que le gouvernement serait obligé de trancher par voie législative. Je parle du 5 octobre, je ne parle pas du 29 novembre. J'ai tenu ma parole et j'ai déposé un projet de loi et, jusqu'à la dernière minute, je dois vous dire que des représentants de ces associations ou de l'AECQ sont intervenus auprès des officiers de mon ministère, auprès de mes collaborateurs ou auprès de moi-même. Donc, la commission Hébert a fait le tour des contenus. La consultation s'est faite non pas nécessairement sur la base du projet de loi qui est devant nous, mais sur la base des orientations qu'on y retrouve. Le conseil consultatif a été consulté sur la question, à l'exception, cependant, des questions touchant la structure de l'OCQ qui, elles, ont donné lieu à une séance spéciale du CCTMO qui a eu lieu la semaine dernière.

Finalement, je pense que, dans la motion du député de Portneuf et dans son discours qui a suivi, il y a deux problèmes sérieux qui se posent et qui, malheureusement, me semblent démontrer une certaine méconnaissance ou peut-être un oubli, sans doute un oubli, de l'existence de ces associations patronales dans la construction, qu'il ne mentionne même pas dans son avis de convocation. Je verrais mal qu'on règle le problème des structures de l'AECQ qui impliquent dans mon esprit et dans l'esprit du comité Hébert la présence de ces associations, sans que nous les entendions ici. Il est vrai que l'AECQ, comme c'est le cas de la CSN et de la FTQ, a délégué, dans les couloirs du Parlement, depuis maintenant quelques jours, des représentants qui ont réussi à faire valoir leurs points de vue auprès de différents députés et à être entendus, en tout cas, par les députés, ceux de l'Opposition comme ceux de ce côté-ci.

Pour ma part, j'ai eu l'occasion de rencontrer les gens... Non, pas tout de suite... J'ai eu l'occasion également de rencontrer, entre autres, au niveau du CCTMO, pour le côté syndical, le président de la FTQ, M. Louis Laberge. J'y ai rencontré également M. Michel Bourdon, de la Fédération nationale du bois et du bâtiment de la CSN. J'ai rencontré également M. Lefebvre du Conseil provincial des métiers de la construction. J'ai rencontré M. Leclerc et plusieurs autres depuis quelques jours et c'est pour cela, d'ailleurs, que j'ai remis entre les mains du député de Portneuf des projets d'amendements que j'ai à cette loi, amendements dont il ne semble pas tenir compte dans ses exposés.

Le deuxième problème qui se pose à partir de la motion du député de Portneuf, c'est que, d'abord, ce serait profondément injuste, ce soir, à 20 heures, d'entendre l'AECQ et de ne pas entendre les autres associations patronales. Deuxièmement, le député de Portneuf parle d'un petit débat de deux heures et il s'imagine qu'on va faire le tour de toutes ces questions en deux heures, alors que les officiers de mon ministère, mes collaborateurs, moi-même et le rapport Hébert y avons mis des mois. Je pense qu'on peut parler ici des contenus des orientations. L'ensemble des implications exigerait, si on voulait refaire le débat, de le refaire dans un autre contexte plus général. Mon option, c'est qu'il n'est pas nécessaire de refaire tout le débat.

D'autre part, le député de Portneuf nous dit qu'en deux heures, on pourrait régler cela. Si le député de Portneuf me donnait sa parole qu'à dix heures ce serait terminé et qu'à minuit, l'Assemblée nationale l'approuvera en troisième lecture, je pourrais peut-être la prendre. Il ne me donne pas sa parole. Même s'il me la donnait, j'aurais tendance à être un peu inquiet, compte tenu de son comportement depuis le début de cette séance, d'être un peu inquiet quant à la possibilité, pour l'Opposition officielle, de respecter la nécessité de procéder, avec diligence, avec compétence, avec les questions, avec les réponses que je suis en train de donner, à l'étude sérieuse, par exemple, du projet de loi 110.

Pour ces raisons, M. le Président, je voterai contre la motion du député de Portneuf.

Le Président (M. Clair): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Après.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Je pense que, dans le raisonnement du ministre, M. le Président, il y a deux raisons fondamentales, très fatales, qui vont à l'encontre de son raisonnement. Premièrement, quand il parle de consultations, il dit: J'ai consulté tel groupe, j'ai posé des questions à tel autre groupe.

Premièrement, ce sont des consultations privées qu'il a faites, pas devant la commission, pas en public. C'est une erreur que le ministre vient de faire. Deuxièmement, sa consultation ne pouvait pas être sur le projet de loi. Sa consultation était surtout une série de questions, de problèmes. Ce n'était pas sur les articles de ce projet de loi. C'est sur cela que la motion du député de Portneuf porte. Elle porte sur les représentations sur le projet de loi tel qu'il est rédigé. Nous voulons savoir — et je crois que c'est une mesure élémentaire en démocratie — la réaction de ceux qui sont affectés par le projet de loi. Est-ce trop demander? Je ne crois pas que ce soit trop demander au ministre que de soumettre les articles qu'il vient de rédiger à un examen public, pas à un examen privé qu'il aurait fait sur certains problèmes, sur certains rapports, sur certaines consultations faites par des personnes de son ministère, mais de le faire en toute ouverture sur ce que nous avons devant nous. Le projet de loi, on ne l'avait pas. Vous savez, ce n'est pas mon habitude de parler

contre un ministre de manière personnelle. Je ne le fais pas. Je parle sur le fond.

Des voix: Oh! Oh!

M. Ciaccia: Mais il nous dit qu'il a daigné nous donner les amendements, comme si c'était un privilège pour les parlementaires de recevoir des amendements à un projet de loi! C'est un privilège. Il aurait pu nous les donner à la dernière minute, à 14 heures, et il se vante de cela. Si vous traitez les parlementaires de cette façon, comment allez-vous traiter le peuple qui sera affecté par ce projet de loi bien plus que nous le serons?

M. le Président, les autres raisons que le ministre a apportées pour justifier son refus d'entendre les parties, c'est de dire: On n'aura pas assez de temps pour les entendre. Si on n'a pas assez de temps pour les entendre, on ne les entendra pas. Savez-vous, je ne comprends pas ce genre de logique. C'est nécessaire de les entendre. Si on n'a pas assez de temps, qu'on prenne le temps nécessaire. Ce n'est pas la fin du monde, le 21 ! Il y aura les mois de janvier et de février. On peut continuer. C'est important. Cela va affecter la vie quotidienne, les salaires, les conditions de travail d'une industrie qui est une des plus importantes au Québec. C'est une industrie indicatrice. Lorsque cette industrie marche, il y a une série d'autres industries qui marchent. Quand cette industrie ne marche pas, il y a une foule d'autres industries qui arrêtent de fonctionner. Le ministre sait cela. On ne dit pas ces choses pour donner plus d'importance ou moins d'importance. Ce sont les faits. On sait à Montréal ce qui arrive, les conditions à Montréal quand l'industrie de la construction ne fonctionne pas. On sait les répercussions, non seulement sur les membres de cette industrie, mais sur tous ceux qui dépendent de l'industrie.

On dit: On n'aura pas le temps de les entendre, de 20 à 22 heures. Cela veut dire qu'il doit savoir qu'il y a des problèmes dans son projet de loi. Il sait que cela peut peut-être prendre plus de deux heures. Je ne suis pas capable de suivre ce genre de logique. On n'est pas obligé d'être d'accord sur tout ce que vous allez dire. Nécessairement, on n'a pas besoin de vous dire cela. Vous allez dire certaines choses sur lesquelles je ne serai pas d'accord, peut-être le ministre ou le député de Portneuf. Sur certaines choses, vous serez d'accord. Mais il y a une chose élémentaire sur laquelle nous devrions tous être d'accord. Nous devrions vous accorder le droit de dire ce que vous pensez devant nous. C'est un droit fondamental. C'est un droit auquel on ne peut pas renoncer. Ce n'est pas par des méthodes de procédure qu'on devrait vous empêcher de parler, de nous donner votre point de vue sur les articles du projet de loi. Vous avez tous des lois qui seront affectées. Je ne comprends pas pourquoi le ministre ne veut pas faire la lumière sur les articles du projet de loi. Vous dites: On sait pourquoi les municipalités veulent être soustraites. On sait pourquoi les associations... Moi, je ne le sais pas. Si je le sais par l'entremise d'un document, par l'entremise de ce que le ministre dit, ce n'est pas assez pour moi de le savoir. Je voudrais savoir de la bouche de ces gens-là non pas pourquoi une municipalité veut être soustraite, mais pour quelle raison une association est contre un aspect particulier. Vous avez peut-être introduit des notions, des articles dans ce projet de loi que ces gens-là n'ont pas vus avant.

Les conséquences n'étaient pas apparentes jusqu'à maintenant. Je crois qu'on a le droit, et c'est cela, une consultation, ce n'est pas une chose faite en privé par le ministre ou par ses fonctionnaires. Une consultation, c'est une chose faite en public où les gens vont avoir le droit de s'exprimer devant la population. Quand on fait une consultation devant une commission parlementaire, c'est une consultation devant toute la population du Québec pour faire la lumière entière sur ce projet de loi, pour en voir les répercussions, pour en voir les conséquences. C'est certainement une décision "morite" que le gouvernement sera à un moment donné obligé de prendre. On ne conteste pas cela. Et peut-être que sa décision, une fois prise finalement, quand le projet de loi sera adopté en troisième lecture, ne fera pas l'affaire de tout le monde.

Personne ne conteste cela. C'est certain que cela ne fera pas l'affaire de tout le monde. Il va y avoir ceux qui vont avoir certaines objections plus que d'autres. Mais, ce qui est important, et le ministre ne semble pas le comprendre, c'est qu'avant que le gouvernement prenne cette décision, que les parties qui seront directement affectées aient l'occasion de s'exprimer, de dire pourquoi elles sont pour ou contre certains aspects de la loi; une fois que vous aurez eu ce droit, le gouvernement aura rempli sa responsabilité envers vous. Mais si le gouvernement ne veut pas le faire, il y a seulement une chose à conclure, c'est que le gouvernement a des choses à cacher, parce que ce n'est pas le seul projet de loi. La première fois qu'on a demandé des consultations, on en a demandé à d'autres, et quand le gouvernement, c'est mon expérience, avait des groupes qu'il voulait entendre, le gouvernement répondait à certains groupes et il les entendait.

Quand il a moins de choses à cacher, son degré d'entendre les gens est proportionnel à ce que le gouvernement a à cacher dans un projet de loi. S'il ne veut rien cacher, il va entendre tout le monde. Mais dans la mesure où il a des choses à cacher, il n'entend personne. Je ne vois pas d'urgence. Il a parlé de la troisième lecture. La troisième lecture ne se fera pas ce soir. Comprenez-vous qu'elle ne se fera pas ce soir, la troisième lecture?

M. Pagé: On pourrait revenir là-dessus, peut-être.

M. Ciaccia: Voulez-vous soulever la question?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs!

M. Pagé: Voulez-vous la soulever tout de suite? On va en faire un débat d'une demi-heure, si vous voulez.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs! M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole.

M. Ciaccia: La troisième lecture ne peut pas se faire — je voudrais clarifier les choses pour le bénéfice de ceux qui ne sont pas au courant de nos règlements — avant que nous complétions l'étude du projet de loi article par article. Une fois cette étude complétée, le rapport est fait à l'Assemblée nationale et on peut procéder à la troisième lecture. Mais le règlement sessionnel, notre règlement, dit qu'à minuit, ce soir, c'est fermé, l'Assemblée nationale. Sur notre projet de loi à nous, on n'a pas encore commencé l'article 1 et il y a beaucoup à dire sur ces articles. On a des amendements à apporter. Il est 4 heures. En somme, vous ne voulez pas que ces gens sachent la procédure de cette Assemblée et les conséquences.

M. Johnson: Arrêtez de parler et on va travailler.

Une voix: On est des communistes. C'est bien.

M. Ciaccia: Si on ne finit pas l'étude complètement pour minuit, ce soir, le projet de loi ne pourra pas être adopté en troisième lecture ce soir. Je pense que c'est important qu'on sache cela. Je pense que c'est important qu'on essaie... Arrêtons de jouer avec le monde. Pourquoi ne pas entendre les parties? On ne conteste pas le droit du ministre de prendre des décisions. Il les prendra, mais pas avant d'avoir entendu les parties.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on est prêt à disposer? M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: II est évident qu'une des premières responsabilités des membres de cette commission, c'est d'avoir le maximum d'information et je tiens bien à dire ici que nous ne siégeons pas ici pour nous représenter nous-mêmes. Nous siégeons ici pour représenter la population, pour représenter surtout ceux qui sont concernés dans des projets de loi comme ceux-là. Il y a toujours deux côtés à une médaille et je pense qu'il n'y a rien de sorcier, d'illégitime ou de criminel à demander de connaître les deux côtés de la médaille. (16 heures)

Le ministre nous a parlé du rapport Hébert, de la consultation qu'il a faite. Mais la consultation qu'il a faite n'était pas en rapport avec le projet de loi qui est devant nous. Ce projet de loi n'était pas déposé à l'époque.

Dans l'industrie de la construction, M. le Président, combien de fois avons-nous légiféré, vite et très vite, une moyenne de deux lois par année? Les circonstances ont voulu que ce soit toujours en fin de session, avec toujours cette impression que l'île de Montréal était pour disparaître le lendemain si on n'acceptait pas la loi ou encore que le cap Diamant s'écroulerait. Je ne crois pas que les météorologues, même si c'est de juridiction fédérale, aient fait de telles prédictions. Où est l'urgence?

J'ai écouté tout à l'heure le ministre pour essayer de comprendre — qu'il nous le démontre clairement — où est l'urgence de procéder. On nous dit qu'il y a de la mésentente au niveau d'associations patronales. Je dis bien: On nous dit... Il y a des problèmes, on le sait, ce n'est pas d'aujourd'hui, ce n'est pas nouveau. En adoptant une loi comme celle-là, est-ce qu'il y aura de l'entente le lendemain? C'est là la question. Il ne faudrait quand même pas que le ministre croie aux miracles. Il y a toutes sortes de miracles.

Je pense qu'il ne faut pas se faire d'illusion. La loi ne peut pas franchir l'étape de la troisième lecture ce soir. Cela est évident. On n'a qu'à regarder le règlement de la Chambre et faire un compte à rebours pour constater que les trois partis politiques reconnus en Chambre ont un droit de parole d'une heure pour le représentant du parti en troisième lecture. Il est évident que les formations politiques, ceux qui ont la responsabilité de représenter leur formation dans l'étude de ce projet de loi, étant donné la complexité de tous les domaines qu'il touche, ne peuvent quand même pas se limiter à une intervention de cinq minutes. Je ne parle pas des autres députés, tels que les députés de Joliette-Montcalm, de Charlevoix et moi-même qui serions intéressés à intervenir sur ce projet de loi. Cela veut dire qu'on peut s'attendre à un débat de quatre heures seulement en troisième lecture. C'est-à-dire qu'il faudra avoir passé les étapes d'adoption de tous les articles du projet de loi d'ici 6 heures et que le rapport puisse être déposé devant l'Assemblée nationale à 8 heures pour qu'on procède à l'étude et à l'adoption du rapport en Chambre que tout le monde donne son consentement et que, par la suite, on donne notre consentement aussi pour procéder à la troisième lecture.

En supposant que cela pourrait se faire, il y a quand même un fait qu'on ne peut pas ignorer à ce moment-ci. C'est qu'il est impossible d'adopter un projet de loi aussi complexe que celui-là, avec autant d'implications, avec des amendements que les différentes formations politiques ont à proposer, avant 6 heures. L'impossible c'est l'impossible!

De grâce, qu'on ne nous demande pas de nous fermer les yeux et dire: Écoutez, les députés, ne parlez pas, faites-nous confiance, le projet de loi va arranger tout cela. Ne posez pas trop de questions, car cela pourrait retarder l'adoption de la loi.

Je pense que ce serait manquer à nos responsabilités et les gens que nous représentons n'accepteraient pas qu'on adopte une attitude semblable, pas plus pour d'autres projets de loi que pour celui-ci. Il n'y a aucune loi qui a véritablement réglé les problèmes dans l'industrie de la construction et je serais fortement enclin à penser qu'un seul projet de loi ne pourra pas régler le problème. Il y a de sérieux problèmes dans l'industrie de la construction. Toute la question des arti-

sans n'a pas été touchée tantôt. On sait très bien que la question des artisans est conditionnée par le règlement de placement dans l'industrie de la construction. Qu'on ne dise pas que c'est un sujet qu'on n'abordera pas ici à cette commission parlementaire. Il faudra l'aborder. Je ne pense pas qu'on puisse disposer de cette question dans cinq minutes. Quelles sont les implications pour les petits entrepreneurs dans les régions du Québec? On ne le sait pas non plus. On ne peut pas non plus trancher la question dans cinq minutes ici en trouvant un article de loi qui serait susceptible de répondre aux inquiétudes, aux aspirations et aux intérêts de la population.

Il ne faut quand même pas jouer au miracle et jouer à l'urgence, quand il n'y en a pas. Le ministre ne m'a pas convaincu qu'il y avait à ce point urgence que ce projet de loi devrait franchir toutes les étapes d'ici 22 heures ce soir et c'est pourquoi, étant donné que les gens sont ici, on devrait leur permettre, étant donné qu'ils se sont déplacés et qu'ils sont concernés par le projet de loi, de nous dire ce qu'ils en pensent.

C'est pourquoi j'appuierai la motion du député de Portneuf de faire entendre les parties devant cette commission.

Le Président (M. Clair): M. le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: M. le Président, j'ai toujours pensé que, quand on arrive à la période des Fêtes, l'esprit de Noël doit donner un peu plus de clarté aux décisions qu'on doit s'apprêter à prendre. J'écoutais tantôt le ministre du Travail nous dire comment c'était complexe, devant toutes les associations qui s'affrontent, qu'elles soient patronales, qu'elles soient syndicales, l'ensemble des milieux qui sont compris dans le domaine difficile de la construction. Il a dit que, à tour de rôle, il les avait rencontrés, il avait dialogué avec eux et que, plus il les rencontrait, plus il s'apercevait des positions différentes devant lesquelles chacun a à affronter l'autre.

À un moment donné, le ministre en est venu à la conclusion que, devant la diversité des opinions qui étaient émises, il fallait que quelqu'un juge. Le juge, à ce moment-là, c'est le législateur, mais principalement celui qui a la fonction d'administrer la province et de poser les gestes qui s'imposent.

M. le Président, mes collègues qui viennent de me précéder viennent de dire que quels que soient les espoirs que peut manifester le ministre dans les heures qui vont suivre jusqu'à minuit que son projet de loi puisse franchir l'étape de l'étude article par article sans qu'on entende les parties, tel que le suggère mon collègue de Portneuf, et je peux dire au ministre que s'il voulait être un peu plus réaliste, il s'apercevrait, devant ce qui lui a été dit depuis quelques minutes, pour que son projet de loi passe l'étape de l'étude article par article à 18 heures, et pour qu'il se retrouve en

Chambre en demandant un consentement unanime, il doit savoir maintenant que ce consentement va lui être refusé. Étant refusé, son projet de loi, à minuit, devient caduc de toute façon. Tout le travail qu'on aura fait aujourd'hui sera absolument perdu, il faudra recommencer à neuf au moment où, le 6 ou le 8 mars, vous rappellerez la session. Vous devrez recommencer votre projet de loi au stade où il est rendu, si la Chambre le permet, sinon recommencer à zéro.

M. le Président, je pensais que, devant ce fait qui est bien connu du ministre aujourd'hui, qu'il ne peut pas voir la troisième lecture acceptée avant le délai qui a été prévu, soit minuit, le ministre du Travail allait se dire que, dans les deux mois qui vont suivre, à tête reposée, il pourrait peut-être lui-même revoir les parties lors d'une commission parlementaire, et qu'il pourrait peut-être permettre également à ceux qui ne sont pas sensibilisés à l'ensemble du problème de la construction, dans les deux mois au cours desquels nous serons dans nos milieux, de revoir tous ceux qui seront touchés par cette législation. Je ne sache pas que ce soit tellement dramatique pour les parties en cause puisque, jusqu'au 6 mars, ce n'est pas la période la plus importante en ce qui regarde les travaux dans l'ensemble du Québec, que ce soit dans de grands chantiers ou ailleurs.

Je pense que cela permettrait, entre-temps, que les députés puissent se rendre compte s'ils représentent bien ce que pensent leurs commettants qui sont dans les métiers de la construction. Il m'est arrivé à quelques reprises d'intervenir en Chambre sur une des facettes du problème qui est mineur dans l'esprit de plusieurs personnes qui sont ici à la barre, le problème de l'artisan qu'on a à vivre dans Beauce-Sud, Beauce-Nord, dans Charlevoix ou ailleurs. Je me suis fait un portrait de ce qu'on m'a rapporté dans mon comté de la position dans laquelle ces gens se retrouvent devant le règlement qui a été adopté l'été dernier et je m'aperçois que l'éclairage que je devrais posséder exigerait que je les rencontre tous dans mon comté, tous ceux qui sont touchés, qu'ils soient dans les métiers de la construction ou qu'ils soient entrepreneurs. Cela me prendrait quelques semaines, surtout en période hivernale, pour avoir un portrait le plus fidèle possible.

Je réalise quand même que certaines paroles qu'il a prononcées en Chambre quand le ministre nous a parlé de "cheap labor" qu'on veut mettre de côté, dans l'esprit du député de Charlevoix, dans l'esprit du député de Portneuf ou dans celui du député de Beauce-Sud, ce n'est pas cette main-d'oeuvre qu'on veut protéger parce que, quand on en emploie des gens chez nous et que cela coûte $17 l'heure, ce n'est pas du "cheap labor", c'est faux.

On constate quand même qu'il y a des gens qui appartiennent à la FTQ, à la CSN, qui reviennent dans nos comtés actuellement. Ils arrivent de la baie James, qui n'est pas un chantier rural. Ils se ramassent avec 900 heures de faites. On les renvoie à Noël et le 15 janvier, quand bien même l'entrepreneur voudrait les voir revenir sur le chan-

tier parce que ce sont de bons hommes, ils n'ont pas le droit, ils ont 900 heures et non pas 1000 heures. Que fera-t-on de ces gens par le règlement que la Chambre sera appelée à voter, s'il était voté d'ici minuit? On en fera des artisans. Ils auront le droit d'être artisans. C'est ce que je comprends de la possibilité qui leur sera accordée.

M. Johnson: Non. Ils ont déjà du travail.

M. Mailloux: C'est la seule possibilité qui leur sera accordée, parce qu'ils sont toujours assujettis à ces 1000 heures qu'ils n'ont pas faites pendant l'année. Ils n'ont pas le droit de retourner là-bas, quoi qu'en dise le ministre, à moins que je ne comprenne absolument rien du règlement qui est devant nous.

Ce que je voulais dire en deux mots, c'est qu'il y a d'autres domaines d'activités, ou s'il faut faire des artisans... Tantôt, dans les métiers de la construction, ce seront tous des artisans à 75%, d'ici trois ou quatre ans, de la manière que nous allons. Il y a des gens aujourd'hui qui peuvent faire facilement 1000 heures; tantôt il y en aura, quand il y aura moins de chantiers, qui ne feront pas 1000 heures non plus. Dans les usines d'asphalte, il n'y en a pas un qui fera 1000 heures tantôt, je suis catégorique. Ce ne sont pourtant pas des gens qui font partie du "cheap labour", mais ils ne sont pas capables de faire 1000 heures.

Pour aérer tout ce problème, j'ai rencontré deux centrales syndicales. Ils sont rares, les gens de la centrale que j'ai rencontrés qui m'ont dit: Ce n'est pas selon cette facette que nous avions compris le problème. Nous avons mal analysé les répercussions dans le milieu rural. Nous n'en voulons pas plus à nos syndiqués qui sont dans ces milieux qu'à ceux qui sont dans le milieu urbain.

Mais maudit! il faudrait au moins avoir une commission pour entendre ces gens, pour savoir où nous sommes dans l'erreur, et ce que chacune des parties, qui est peut-être en contradiction, a à dire devant l'ensemble des oppositions.

Je pense que c'est la logique des choses qu'on demande d'être éclairés valablement par les parties qui sont à la table, et ceux qui manquent, et par nos commettants qui sont vos syndiqués d'une centrale ou de l'autre.

Je conviens qu'il y a des corps qui sont moins pris que les autres. Chez nous, dans la plomberie et dans l'électricité, on n'a pas de problème. Ce sont des métiers assez fermés. Ils ont les 1000 heures et cela va bien. Mais quand je regarde, par exemple, ceux qui sont dans la machinerie lourde, ceux qui sont dans la menuiserie, ils sont pris avec un problème difficile. Ce n'est qu'une des facettes du problème et une facette mineure. Cela ne comprend pas les problèmes de l'OCQ ni tous les autres problèmes.

Je pense qu'il faudrait que le ministre soit au moins assez sérieux pour constater, devant ce qui lui a été dit depuis environ une heure, qu'on perd absolument notre temps à vouloir espérer que la Chambre accepte d'ici minuit ce projet en troisième lecture, quelle que soit l'heure à laquelle nous terminions. Si vous ne voulez pas entendre les parties et cela ne donnerait pas grand-chose aujourd'hui parce que je pense que les parties devront être entendues en janvier ou février, avant la reprise de la session, où tout le monde aura un meilleur éclairage. Il n'y aura pas de drame nulle part, ce sera final et catégorique.

Si le ministre veut continuer à nous faire travailler jusqu'à minuit, que ceux qui sont à la barre, ici, s'attendent qu'il y ait motion sur motion et que les discussions tournent en rond. Nous allons jaser simplement, et à minuit tout deviendra caduc et ce sera à recommencer. C'est là qu'est le problème.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on est prêt à disposer de cette motion? M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je me permettrai une très brève réplique.

M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez...

Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.

M. Johnson: Je ne sais pas si je peux, en vertu du règlement, comme je n'ai pas pris mes 20 minutes, revenir sur certaines choses qui ont été dites.

Le Président (M. Clair): Oui, vous avez le droit.

M. Johnson: Je pense qu'il faut quand même se comprendre.

Le Président (M. Clair): Je devine cependant que le député de Portneuf y consent. Une chose est certaine, en tout cas, c'est qu'on peut parler plusieurs fois sur la motion, à la condition de ne pas parler en tout plus de 20 minutes. De toute façon, je pense que cela ne s'applique même pas au ministre, qui pourrait parler indéfiniment.

Cependant, au niveau de la priorité du droit de parole, le député de Portneuf avait demandé la parole avant.

M. Johnson: D'accord, mais sans reprendre tout le débat. En fait, je pourrai revenir, au moment de l'étude article par article, sur ces questions.

M. Pagé: Allez, vous avez notre consentement, il n'y a pas de problème. Cela témoigne de notre collaboration.

M. Ciaccia: On ne veut pas empêcher les gens de parler, de ce côté-ci de la table.

M. Johnson: Que le gouvernement refuse de consulter, je pense qu'on n'en a pas fait la démonstration, parce que c'est ce qu'il a fait dans ce domaine, en créant la commission Hébert qui a entendu les parties pendant six mois. D'accord, elles n'ont pas été consultées sur le projet de loi

no 110. On parle de problèmes de fond. Je vois le député de Mont-Royal prendre un air démuni. Je serais démuni à sa place aussi, si je n'avais pas fait mes devoirs comme il ne les a pas faits. Il n'a pas lu les textes, il n'a pas lu le rapport Hébert. Il ne sait pas ce dont on parle.

M. Ciaccia: M. le Président, sur l'article 99.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Regardez l'article 99. (16 h 15)

M. Johnson: Oui, cela peut aller. Consentement.

M. Ciaccia: Un député n'a pas le droit — que ce soit un ministre ou non — de commencer à en insulter un autre. Chaque fois qu'on soulève une question de fond, on nous insulte en nous disant qu'on n'a pas fait nos devoirs, au lieu de répondre sur le fond de ce qu'on a dit. On va le lire d'avance. Premièrement, je ne suis pas membre de cette commission. La raison pour laquelle je siège à cette commission, c'est parce que le gouvernement a introduit un paquet de lois le 30 novembre et on se promène d'une salle à l'autre. Celui qui devait être ici à ma place, M. Forget, le député de Saint-Laurent, est obligé de défendre d'autres projets de loi. C'est pour cela que je suis ici. Le député de Charlevoix est obligé de s'en aller à la commission sur le tourisme, la chasse et la pêche. Après cela, on nous critique en disant qu'on n'a pas fait nos devoirs. C'est vrai que je ne suis pas autant au courant de ce projet de loi que d'autres membres de mon parti, tels le député de Portneuf et le député de Charlevoix. Mais je ne resterai pas ici pour me faire insulter par le ministre ou par d'autres membres.

M. Johnson: M. le Président...

M. Ciaccia: On a le droit de parole et qu'il réponde sur le fond des problèmes que j'ai soulevés.

M. Johnson: ... pour m'excuser.

Le Président (M. Clair): M. le député, simplement pour disposer de la question de règlement. Mes oreilles ont entendu des mots à l'égard d'autres membres disant qu'ils étaient arrogants, incompétents, qu'ils n'avaient pas fait leurs devoirs. Cela ne m'apparaît pas antiparlementaire. Je ne dis pas que c'est gentil ni aimable, mais au point de vue du règlement, cela ne m'apparaît pas antiparlementaire, de sorte que je me contenterai, à ce stade-ci, de faire appel à la modération de tous et chacun des membres de cette commission. On ne gagne rien à se... l'esprit de Noël...

M. Pagé: Imaginez-vous ce que cela serait s'il n'y avait pas l'esprit de Noël.

M. Johnson: On va célébrer la Nativité, M. le Président. Pour revenir sur l'argumentation du député de Beauce-Sud sur la notion de l'urgence, l'urgence est double. J'ai eu l'occasion de m'entretenir longuement avec le député de Beauce-Sud de tout ce problème, il n'y a pas longtemps. D'abord, au niveau de la structure patronale, il est bien évident que ce n'est pas au mois de mars qu'on va régler le problème de la structure patronale, alors qu'on sera en plein milieu de la négociation du décret. Ce serait absolument irresponsable que de faire cela et dangereux, finalement, pour le sain déroulement de cette négociation. Deuxièmement, la question des artisans. Évidemment, je comprends que le député de Beauce-Sud peut maintenant décider — comme peut-être le député de Charlevoix — que c'est plus important, le problème des artisans qui, aujourd'hui, soit dit en passant, ont une liberté totale, justement, de devenir des artisans s'ils... Me permettez-vous? Aujourd'hui, si on regarde la loi et la pratique, l'artisan, c'est à peu près n'importe qui. L'homme qui a des heures ou qui n'en a pas avec l'OCQ, au moment où on se parle, peut se déclarer artisan. Je trouve ambiguë la position du député de Beauce-Sud là-dessus. Finalement, je sais qu'il veut aider les gars qui font des perrons, qui peuvent...

M. Roy: Un instant! Ne charriez pas, parce que je vais vous faire un perron pour Noël! Je vais vous faire un perron pour Noël.

M. Johnson: M. le Président, je ne m'en prends pas au député de Beauce-Sud...

M. Roy: Oui, un instant! Ne charriez pas.

M. Johnson: Je dis juste que je comprends — je ne charrie pas — la position du député de Beauce-Sud — qui veut qu'on permette à ceux qui font du travail dans le secteur domiciliaire, qui font de la réparation, les charpentiers-menuisiers qui peuvent faire des perrons, qui peuvent aider un consommateur directement... Il se plaint lui-même depuis des années devant ce Parlement du fait que ces gens, à cause des lois de la construction, n'ont pas leur place au soleil. Il m'a cité en Chambre des cas de personnes qui ont été emprisonnées, disait-il, à cause de l'OCQ, parce qu'elles étaient des artisans.

M. Roy: Pas nécessairement des artisans.

M. Johnson: Cette loi, entre autres, veut permettre à ces gens de se faire une place au soleil parce qu'ils y ont droit, nonobstant ce que peuvent en penser les structures syndicales au Québec dans le secteur de la construction. C'est une décision que les hommes politiques, à un moment donné, ont le droit de prendre et ils seront obligés de vivre avec, d'une part. D'autre part, au moment où on se parle, on sait qu'une série de travailleurs artisans — qu'ils portent le nom ou

pas, qu'ils soient enregistrés à l'OCQ ou pas, qu'ils soient enregistrés à la RECQ comme entrepreneurs ou pas — sont là et ils travaillent. Ils travaillent à côté de la loi. L'objet des modifications ne sera pas de permettre une accélération de tous ceux qui ont des certificats B à se transformer en artisans. Ce droit existe déjà. Est-ce qu'on a lu la loi, pour l'amour du saint ciel? Ce droit existe déjà! Ce qu'on fait, cependant, c'est qu'on le balise. On le balise, cette fois-ci, le plus clairement possible. On sait que dans des pays comme l'Angleterre, une commission royale d'enquête a étudié la question pendant dix ans et elle n'a pas encore fait son rapport.

On sait qu'en Allemagne il y a une commission qui étudie le problème depuis 25 ans. Au Québec, c'est un problème qui existe depuis à peu près l'existence du décret; il y a une jurisprudence qui s'est créée; il y a des usages qui sont survenus; il y a des amendes qui ont été imposées; il y a même des gens, selon le député de Beauce-Sud, qui auraient été emprisonnés parce qu'ils ne payaient pas les amendes. On pense qu'à un moment donné il faut régler, à cause du règlement de placement, entre autres, le problème de ces personnes.

La dernière chose que je veux dire, c'est qu'il va y avoir une commission parlementaire qui va traiter spécifiquement du règlement de placement et nous allons être là pour en discuter ouvertement et longuement avec le député de Charlevoix qui s'y intéresse, autant que les deux autres porte-parole qui sont ici, le député de Beauce-Sud et le porte-parole officiel de l'Opposition officielle. On va en discuter, et avant la mise en vigueur de la deuxième année du règlement de placement, le 1er mars. Les possibilités sont infinies d'augmenter le nombre à 2500 heures ou d'abolir le règlement de placement; on va être là pour l'étudier et le regarder; on verra que le gouvernement a déjà entrepris certaines choses.

Cette loi veut, entre autres, régler, quant à l'artisan, une partie du problème. C'est essentiellement ce qu'elle veut faire et, à toutes fins utiles, cela balise ce qu'est le statu quo aujourd'hui au Québec. C'est à peu près l'anarchie la plus totale au niveau des artisans qui, tantôt, dans certaines régions, peuvent littéralement contrôler le marché de l'emploi même dans des secteurs industriels — qu'on pense à ceux qu'on appelle les "dry walls", les gars qui font les finitions de murs — ou qui, dans d'autres régions, au contraire, sont littéralement poursuivis et harcelés par les inspecteurs de l'OCQ, quand ce n'est pas par les centrales syndicales. Je pense qu'une fois pour toutes il faudrait commencer à régler le problème. Ce n'est pas parfait comme solution mais il commence à être temps de le faire, et c'est pour cela que c'est urgent.

Si on ne le fait pas, très bien. Qu'on attende au mois de mars, qu'on attende en plein milieu de la négociation du décret... Les parties qui ont des intérêts de structure, au niveau des employeurs comme des syndicats, cela va être le dernier de leurs problèmes ces hommes qui travaillent com- me artisans. S'ils sont capables, dans le décret, de s'arranger pour leur rendre la vie encore plus difficile, ils pourront peut-être le faire. C'est urgent de le faire immédiatement, je pense, comme c'est urgent de régler le problème de la structure patronale. C'est pour ces raisons, M. le Président, que le gouvernement juge qu'il fallait effectivement présenter cette loi et la faire adopter avant le 21 décembre.

M. Roy: M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: J'aimerais relever deux points que le ministre a soulevés dans sa réplique. D'abord, il a voulu m'imputer des intentions selon lesquelles je me désintéresserais du sort des artisans. Je tiens à lui dire que c'est totalement faux.

M. Johnson: Non, non, j'ai dit le contraire.

M. Roy: Ce n'est pas cela du tout. La question que j'ai posée était la suivante: Si le règlement de placement demeure tel qu'il est — le député de Charlevoix nous en a fait une démonstration très claire tout à l'heure — il y a des gens qui sont actuellement des travailleurs salariés dans l'industrie de la construction et, du fait qu'il leur manque quelques heures pour avoir la carte de classification A et reprendre le travail et leur poste en 1979, à cause de cette impossibilité d'avoir une carte de classe A, on les force à devenir malgré eux des artisans. S'il y a une multiplication des artisans parce que le règlement de placement les y oblige, il faudrait mesurer l'impact que cela pourrait avoir sur les petites entreprises de construction au Québec, quelles qu'elles soient. On ne sait pas en ce moment, parce qu'il faudra qu'il y ait des amendements aux règlements de placement dans l'industrie de la construction, comment on pourra s'y prendre pour comptabiliser les heures que l'artisan fera à l'Office de la construction. Je pense que c'est un domaine très important pour lequel nous n'avons pas de réponse dans les amendements.

M. Johnson: Vous l'avez.

M. Roy: Or, le ministre nous donne raison aujourd'hui en disant qu'il va falloir étudier cela. Il va falloir examiner les intentions manifestes du ministre d'amender le règlement de placement de la construction, de façon qu'on soit informé de l'impact que sa loi 110 pourra créer dans le milieu des travailleurs de la construction et dans les milieux de l'industrie et du développement économique du Québec. Le ministre vient de faire la preuve que son règlement de placement a énormément d'importance, mais il n'est pas prêt aujourd'hui à déposer son projet d'amendement pour qu'on puisse l'examiner...

M. Johnson: Vous l'avez depuis deux jours...

M. Roy: L'amendement au règlement de placement dans l'industrie de la construction, pas l'amendement à la loi 110! Je l'ai même depuis plus que deux jours. On est au courant. Je tiens à le dire. Mais c'est du règlement de placement que je parle. Il y a des gens qui sont ici et qui ne le savent pas non plus. J'ai eu des conversations avec quelques-uns d'entre eux et ils se posent des questions aussi. On ne le sait pas. M. le Président — je terminerai là-dessus — c'est une raison de plus pour appuyer la motion du député de Portneuf, pour faire en sorte qu'on puisse entendre les parties.

Le Président (M. Clair): M. le député, je suis heureux que vous ayez souligné que c'était en rapport avec la motion du député de Portneuf — je ne veux pas vous blâmer —...

M. Pagé: C'était sur le fond. Le Président (M. Clair): ... non. M. Pagé: Parfait. Excusez.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, vous avez la parole.

M. Pagé: Je serai très bref, M. le Président, parce que je sens déjà le sort qui arrivera à ma motion. Je peux présumer qu'elle sera battue par la majorité ministérielle. Je voudrais tout simplement reprendre un élément que le ministre du Travail a souligné et, selon moi, à juste titre, quand il m'a dit, indirectement, par vous, que j'avais omis d'inclure dans ma motion les six associations patronales dont les membres sont membres de l'AECQ. Je dois vous dire que ce n'était pas du tout mon intention de les omettre, de les oublier, loin de là. Je vous dirai, M. le Président, que cela a été fait volontairement espérant qu'un membre de la majorité ministérielle présente un amendement pour les inclure. Cela aurait impliqué à ce moment-là qu'il se serait vu dans l'obligation de voter pour la motion. De toute façon, un gars a le droit de s'essayer. Je suis prêt. C'est une tentative qui était quand même très légitime d'omettre un groupe, espérant que vous présenteriez un amendement. Vous vous seriez vus dans l'obligation de voter pour la motion et les groupes auraient été entendus. De toute façon, on a le droit de s'essayer.

M. le Président, j'ai terminé ce que je voulais vous dire sur la question de la motion. Je présume qu'elle sera défaite. Le ministre a parlé — et quand le ministre parle, les membres de la majorité ministérielle viennent de parler ou presque — alors, je suis quand même peiné si elle est battue, que le gouvernement refuse d'entendre les parties concernées.

Le Président (M. Clair): La motion du député de Portneuf à l'effet d'entendre un certain nombre de groupes intéressés par le projet de loi 110, ce soir, de 20 heures à 22 heures, est-elle adoptée?

M. Johnson: Rejetée. Sur division? Vote enregistré.

Le Président (M. Clair): Alors, veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre l'adoption de cette motion. M. Bellemare (Johnson). M. Boucher (Rivière-du-Loup).

M. Boucher: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Chevrette (Joliette-Montcalm).

M. Chevrette: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Gravel (Limoilou).

M. Gravel: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Johnson (Anjou).

M. Johnson: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavigne (Beauharnois).

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Mailloux (Charlevoix).

M. Pagé: II a dû s'absenter pour aller à la commission sur le tourisme; il aurait été pour...

Le Président (M. Clair): M. Pagé (Portneuf). M. Pagé: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Roy (Beauce-Sud). M. Laberge (Jeanne-Mance).

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): La motion est rejetée.

M. Johnson: M. le Président, l'article 1.

Le Président (M. Clair): J'appelle l'article 1 du projet de loi 110.

Définitions

M. Johnson: M. le Président, l'article 1 veut simplement, en fait, clarifier... Il faut le concevoir beaucoup plus comme une espèce de modification de concordance qu'autre chose dans la loi; c'est simplement pour être sûr que la loi ne dise pas le contraire de ce que dit un autre article. Il s'agit en fait de l'interprétation de l'expression "lieutenant-gouverneur" au règlement. En gros, on sait que, à la Régie des entreprises de construction, le gouvernement, en vertu de la loi constitutive de la régie, a le droit de modifier ou d'adopter des règlements pour l'office et c'est ce qu'on retrouve plus loin à l'article 64 de la loi et on le précise à l'article premier.

M. Pagé: Je conviens, M. le Président, que l'article 1 a pour but de permettre au Conseil des ministres d'adopter des règlements et ceci en concordance avec d'autres articles de la loi. Étant donné qu'on aborde dans cet article tout le secteur de la Régie des entreprises en construction, le ministre pourrait-il — et cela pourrait peut-être contribuer à accélérer les travaux — nous dire ce qu'il y a dans la loi 110, pourquoi on devrait l'adopter telle qu'elle est actuellement, eu égard à la Régie des entreprises en construction, et ce qu'on veut pallier? Je sais qu'il y a toute la question des contrôles, du consommateur, la protection et les licences, etc. (16 h 30)

M. Johnson: D'abord, il y a quelques modifications qui sont purement de la clarification de texte, comme la première. Deuxièmement, il y a des modifications au niveau de la formation du groupe que sont les régisseurs, la régie où on inclut un représentant de l'Association des tuyauteurs qui, pour une raison ou pour une autre, ne figurait pas dans la loi constitutive et c'est un groupe qui, compte tenu de son expérience dans le domaine, devrait pouvoir y siéger.

Troisièmement, on introduit des dispositions pour fermer une porte à ceux qui étaient en faillite et qui se voyaient privés d'un permis, mais qui, à cause de la loi, pouvaient l'obtenir sur une base individuelle; même si la corporation dont ils étaient, en gros, l'actionnaire principal avait fait faillite, ils étaient soustraits à l'application de cette disposition qui leur interdisait d'obtenir leur permis; on clarifie cela également dans un but de protection du consommateur.

Quatrièmement, des dispositions en ce qui a trait au régime de garantie, toujours pour les consommateurs. En fait, on va formaliser dans la loi et on autorise la régie à exiger des plans de garantie pour le consommateur dans la construction d'une maison neuve. Cela fait suite, d'une part, à quelque chose qui en valait la peine...

M. Pagé: Cela vaudrait peut-être la peine de savoir ce qui se passe de l'autre côté.

M. Johnson: Ce sont les chants de Noël. Cela fait suite à quelque chose qui, d'une part, en vaut la peine intrinsèquement et déjà des associations, dans le secteur du bâtiment, ont commencé à donner de tels plans de garantie sur une base volontaire. Elles seront maintenant tenues de le faire et c'est d'autant plus urgent. La Société centrale d'hypothèques et de logement du Canada a décidé, dorénavant, en vertu d'une décision qui remonte à juillet dernier, de faire en sorte qu'elle ne consent les prêts à ceux qui seront propriétaires d'une maison que dans la mesure où ils ont fait affaires avec un entrepreneur offrant un tel plan de garantie.

C'est presque une modification de concordance, mais c'est quand même un peu plus que cela parce que c'est un pas de plus dans la protection du consommateur. Les autres dispositions sont pour améliorer, sur le plan administratif, la question des appels au Tribunal du travail et, finalement, il y a des dispositions précises sur le pouvoir de réglementation.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, j'aimerais que le ministre me dise comment cela va à la régie actuellement, particulièrement en ce qui a trait au contrôle exercé par la régie en vertu de la loi et des règlements. Un reproche qu'on m'a fait à certaines occasions, c'était la faiblesse au niveau du contrôle, qu'il n'y avait pas beaucoup d'inspecteurs et j'aimerais que le ministre nous dise si le projet de loi, en plus de contenir des modifications sur l'objet de la régie, permettra aussi, en tant que sujet, qu'il y ait des améliorations au niveau des services; s'il y a un problème au niveau des budgets. C'est à toutes ces questions que j'aimerais avoir une réponse.

M. Johnson: Au niveau de la régie, c'est vrai que ses effectifs, même s'ils ont été augmentés, demeurent peu élevés. Il y a eu dix inspecteurs, il y en a maintenant douze et il risque d'y en avoir plus; le tout est en discussion devant le Conseil du trésor depuis quelques semaines. D'autre part, 95% des entrepreneurs ont leur permis; il s'agit d'aller chercher les 5% marginaux et, finalement, la régie a reçu, en trois ans, environ 2500 plaintes, ce qui est un chiffre qui pourrait possiblement être plus élevé, d'autant plus que certaines...

M. Pagé: ... ont été retirés.

M. Johnson: Le total des permis est de 14 000.

M. Pagé: D'accord, mais qui ont été retirés.

M. Johnson: M. Gagnon qui est président de la régie me dit qu'on en retire très peu; cependant, on en refuse beaucoup. C'est de l'ordre de 50 par semaine.

M. Pagé: Qui sont refusés?

M. Johnson: Qui sont refusés pour des raisons de non-conformité avec la loi.

M. Pagé: D'accord, au niveau de l'inspectorat?

M. Johnson: L'inspectorat, encore une fois, dix inspecteurs, douze au moment où on se parle, dix pendant un bon bout de temps, quelques-uns de plus, sans doute, bientôt. Je ne sais pas si le député de Portneuf veut relier cela, entre autres, à la question des artisans, qui éventuellement...

M. Pagé: J'y arrivais.

M. Johnson: Alors, si on veut le relier à la question des artisans, il faudrait bien comprendre que dans les textes d'amendements que je lui ai

fait parvenir il y a trois jours, on précise bien — ce n'est même pas dans les textes d'amendements, c'est dans le projet lui-même — que, pour les fins de l'intérêt du "contrôle" des artisans quand ils travaillent pour un employeur professionnel — en d'autres termes, ils travaillent sur un chantier commercial ou industriel — le rapport des heures, du taux payé, etc., ne sera pas fait à la régie, il va être fait à l'office. On sait que l'office est doté d'un inspectorat extrêmement large comparé à celui de la Régie des entreprises de construction.

M. Pagé: Oui, mais, M. le Président, entre autres une question à laquelle le ministre n'a pas eu l'occasion de répondre, c'est concernant l'artisan qui choisira de ne pas travailler pour un employeur professionnel. Celui-ci aura le droit, j'en conviens, de participer au programme; il sera assujetti à l'Office de la construction du Québec pour les programmes de bénéfices sociaux jusqu'à concurrence...

M. Johnson: Sur une base volontaire.

M. Pagé: ... sur une base volontaire, et ce jusqu'à concurrence de 40 heures par semaine. Une fois établi, l'artisan devant détenir tout le temps son certificat de qualification.

M. Johnson: C'est cela.

M. Pagé: Par qui le fait pour l'artisan de détenir ou non ce certificat de qualification sera-t-il contrôlé? Pas par l'OCQ. Est-ce que la Régie des entreprises de construction est habilitée à intervenir à ce chapitre pour le contrôle de la qualification de l'artisan?

M. Johnson: II y a trois choses. Il y a deux choses dont une qui en contient deux. Il faut d'abord faire la distinction entre un certificat de qualification et un certificat qui est une licence.

M. Pagé: Oui, j'en fais la distinction.

M. Johnson: Or, le certificat de qualification ne découle pas de la Régie des entreprises de construction. Il découle de la Loi de la qualification professionnelle qui est mise en vigueur par les services de main-d'oeuvre du ministère du Travail et de Main-d'Oeuvre.

Quant à la licence d'artisan, en tant que licence, au niveau de son émission, comme du contrôle, il y aura une implication de trois groupements, et de façons diverses. Il y a déjà une entente qui est en voie d'être réalisée, par anticipation de l'adoption de la loi, entre les bureaux de main-d'oeuvre du Québec et la Régie des entreprises de construction, pour l'obtention de la licence. On ne peut quand même pas obliger l'artisan qui est à Povungnituk ou même moins loin que cela, sur la Côte-Nord, à venir à Montréal chercher son certificat. Il pourra le faire à tous les bureaux de main-d'oeuvre du Québec où un programme de présence des représentants de la

Régie des entreprises de construction permettra de mettre dans la "machine" la demande, l'étude, l'examen nécessaire, le contrôle de la qualification, les exigences, en termes de sécurité, par exemple, parce qu'il faut qu'il passe par règlement, d'ailleurs. Il va falloir qu'il connaisse les règlements en matière de sécurité. Au niveau du contrôle pour l'émission, c'est la Régie des entreprises de construction.

M. Pagé: Je reviendrai avec une autre question tantôt. Continuez, vous étiez bien parti.

M. Johnson: C'est cela pour l'émission. Le contrôle effectif de ce qui se passe après, c'est le recours qu'aurait un consommateur qui n'est pas satisfait d'un artisan et la mise en application des dispositions prévoyant un cautionnement, comme c'est le cas, en principe, pour l'ensemble des entrepreneurs.

M. Pagé: Votre réponse me satisfait dans le sens que, si je l'interprète bien, la condition d'obtention de la licence de la part de la régie pour un entrepreneur est qu'il possède son certificat de qualification...

M. Johnson: Je m'excuse... oui.

M. Pagé: ... pour l'artisan de la part de la régie, c'est qu'il possède son certificat de qualification.

M. Johnson: C'est cela. Mais il faut qu'il remplisse d'autres conditions aussi.

M. Pagé: Oui, en plus des conditions propres à la licence comme telle. D'accord. Une fois que l'artisan aura sa licence, abstraction faite des éléments qui découlent de la licence comme telle, cautionnement, etc. — mettons cela de côté — quelles seront les relations entre la régie et le travailleur artisan en question?

Vous avez cité tout à l'heure le cas de la sécurité. La sécurité, qui va s'en occuper? L'OCQ?

M. Johnson: C'est cela. Il y a l'émission de la licence; je dirais que la licence n'est pas à vie, elle est renouvelable. C'est une licence qui, en vertu du règlement, peut être annuelle. Il y a donc, par définition, une forme de contrôle annuel sur cela; deuxièmement, le consommateur lésé pourra se plaindre, encore une fois, à la Régie des entreprises de la construction. Troisièmement, l'entrepreneur qui voudrait utiliser les services d'un artisan, qui serait, d'ailleurs, obligé — en vertu des amendements que je vais déposer au projet de loi — de le payer au taux du décret, devra faire cette déclaration à l'office des artisans qui sont chez lui. Finalement, l'entrepreneur va être obligé, d'une certaine façon, partiellement, de policer lui-même la loi dans la mesure où l'artisan qu'il va engager, il faut que cela soit un artisan tel que reconnu par la loi. Cela veut dire, quelqu'un qui détient la licence et — encore une fois, on le précise bien —

l'artisan ne peut pas travailler avec d'autres sous lui, il ne peut pas avoir de salariés à ses frais. L'artisan travaille uniquement seul. Il n'a même pas de "helper" comme on le dit en anglais. Son "helper", s'il en veut un, il faut aussi que cela soit un artisan, il faut donc qu'il remplisse les mêmes critères. L'artisan travaille seul.

M. Pagé: II n'a pas d'apprenti artisan. M. Johnson: II n'a pas d'apprenti artisan. M. Pagé: Même si l'OCQ en a déjà reconnu.

M. Johnson: Mais, même dans la réalité, au moment où on se parle, les "apprentis artisans" cela existe, c'est le "helper" du gars, par exemple, du charpentier menuisier. À ce titre, je pense qu'il y a là-dedans des formes, finalement, par l'ensemble de l'application de la présence des organismes, même sans leur intervention autrement qu'au niveau, à l'initiation du processus de la licence. Il y a un ensemble de facteurs qui vont faire qu'il y a une espèce d'autopolissage, si on veut, des dispositions sur l'artisan.

M. Pagé: Cela veut donc dire, pour revenir à ma question bien spécifique, que la régie des entreprises n'aura aucune juridiction, par exemple, au chapitre de la sécurité.

M. Johnson: Pardon, je m'excuse.

M. Pagé: Aucune juridiction au chapitre de la sécurité de la part de la régie des entreprises, la sécurité sur le chantier.

M. Johnson: C'est-à-dire que le contrôle de la sécurité sur les chantiers, c'est l'OCQ qui a cela.

M. Pagé: Pour les artisans aussi?

M. Johnson: C'est-à-dire pour tout le monde. De toute façon, tout cela va être revu au mois de mars au moment de l'étude de la santé-sécurité.

M. Pagé: Raison de plus pour reporter ce débat au mois de mars, mais c'est une autre affaire.

M. Johnson: Cela n'a rien à voir avec les artisans. Il ne faut pas mêler les deux choses. L'OCQ, qui fait de la vérification sur la sécurité dans les chantiers, a un mandat pour faire la vérification de la sécurité dans les chantiers.

M. Pagé: J'en conviens. Je ne veux pas lui enlever ce pouvoir que l'OCQ a de contrôler la sécurité dans les chantiers, que cela soit Pierre, Jean, Jacques ou Jos. Bleau, A, B, ou artisan, mais là ou je veux en venir c'est pour savoir si l'artisan va participer financièrement aux frais inhérents de la part de l'OCQ découlant de la sécurité.

M. Johnson: Non, pas intrinsèquement, mais, de toute façon, c'est à se demander comme cela va là...

M. Pagé: Alors, ce sont des "A" qui vont payer?

M. Johnson: Non, que l'on se comprenne bien. L'OCQ a demandé une subvention au gouvernement et l'affectation budgétaire de cette subvention, c'est pour financer la sécurité. Il faut aussi voir en pratique ce que c'est. En pratique, ce vers quoi on se dirige, en termes de financement de la sécurité dans la construction, compte tenu du fait que l'OCQ est dans le rouge ou est sur le point d'être dans le rouge, cela va être des subventions et les subventions, ce sont les taxes de l'ensemble des citoyens.

M. Pagé: C'est acquis. Eventuellement, vous annoncerez le programme dans le cadre de la réforme du mois de mars, programme...

M. Johnson: Même avant cela, c'est déjà annoncé dans le budget supplémentaire du ministre des Finances, dans la mesure où l'on verse une subvention de quelque $1 700 000 pour l'exercice financier que cela couvre à l'OCQ et l'imputation de ce montant représente plus, d'ailleurs, que ce qui a été évoqué à bien des égards par les gens de l'Office de la construction, que ce que coûte la partie du temps des inspecteurs consacrée à l'inspection de la sécurité.

M. Pagé: Est-ce que la Régie des entreprises de construction aura juridiction sur les prélèvements de la part de l'employeur professionnel à l'artisan? (16 h 45)

M. Johnson: C'est-à-dire qu'il n'y a pas de prélèvement puisqu'il n'est pas un salarié...

M. Pagé: C'est cela, le problème.

M. Johnson: ... mais qu'il est soumis au taux du décret, ce qui est différent. Il n'y a pas de prélèvement proprement dit qui est versé à l'OCQ.

M. Pagé: Cela, c'est s'il le veut.

M. Johnson: Vous voulez dire le prélèvement pour les fins du fonds de retraite...

M. Pagé: C'est cela.

M. Johnson:... des avantages sociaux.

M. Pagé: C'est l'OCQ qui va le vérifier?

M. Johnson: II paie cela directement lui-même. Il a droit jusqu'à concurrence de 40 heures par semaine. Évidemment, cela peut être assez onéreux pour celui qui ne travaillerait pas ces 40 heures et qui n'aurait pas l'équivalent comme revenu d'un gars qui travaille au taux du décret, 40 heures. L'artisan qui en pratique fait 10, 12 ou 15

heures par semaine en temps creux dans telle région rurale parce qu'il y a peu de construction, je ne vois pas vraiment l'avantage qu'il a ou les moyens qu'il a d'aller contribuer pour un niveau de 40 heures par semaine.

M. Pagé: De toute façon, on aura l'occasion de revenir sur ce sujet lorsqu'on sera aux articles ou aux amendements relatifs aux artisans et aux contrôles. Si on revient à l'article 1, dans les municipalités, les officiers municipaux qui seront affectés à la vérification devront vérifier si les requérants de permis de construire et ceux qui exécutent des travaux de construction détiennent une licence. L'article 1.

M. Johnson: L'article actuel de la loi.

M. Pagé: Oui.

M. Johnson: Une seconde. L'article 18?

M. Pagé: Cela commence à l'article 19.

M. Johnson: L'article 19. Et votre question?

M. Pagé: Je voudrais savoir comment cela va jusqu'à maintenant. Cela fait combien de temps que la régie existe? Deux ans. On a le privilège d'avoir avec nous M. le Président auquel je souhaite la plus cordiale des bienvenues. Comment cela va-t-il dans vos relations avec les municipalités? Est-ce qu'il y a des éléments nouveaux là-dessus?

M. Johnson: L'article 19, comme tel, n'a jamais été mis en application. Il n'y a jamais eu d'arrêté en conseil pour mettre l'article 19 en application. Cependant, on a des relations très fréquentes avec les municipalités et on les incite à exiger les licences de tous les gens qui soumissionnent pour leurs propres travaux ou qui demandent des permis de construction. Cela a été seulement par incitation jusqu'à présent.

M. Pagé: Si l'article a été adopté par le législateur, je présume que le législateur voulait qu'éventuellement il s'applique. Croyez-vous que dans des délais raisonnables ou assez brefs cela va se faire?

M. Johnson: À ce chapitre, je peux peut-être dire que je vais attendre les propositions concrètes que nous fera la régie là-dessus. Comme vous le savez, M. Gagnon a été nommé, quand même, relativement récemment à la tête de la Régie des entreprises de construction. Il a déjà eu, d'abord, à procéder à un réaménagement administratif important à l'intérieur de la régie. On sait que ces choses prennent passablement de temps en général parce que c'est soumis, comme vous le savez, à l'approbation du Conseil du trésor. Il y a des délais qui sont normaux pour des études, des contre-études, des propositions et des contrepropositions. Jusqu'à maintenant, je pense qu'une large partie du travail a été faite au niveau de la régie. On a réussi en si peu de temps à formuler un projet de loi qui leur permettra non seulement d'être plus efficaces, plus expéditifs, mais également de commencer à s'atteler à l'application très concrète de la loi dans certains secteurs où cela a été plus faible comme application dans le passé, entre autres, à cause du peu d'effectifs, des difficultés de départ de cette régie, etc.

Le Président (M. Clair): Est-ce que l'article 1 sera adopté?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): L'article 1 est adopté. J'appelle l'article 2.

Composition de la régie

M. Johnson: L'article 2, M. le Président, a pour objet de modifier la composition de la régie — je l'ai évoqué tout à l'heure — introduisant là un représentant de la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec et également de préciser le processus de nomination par voie de consultation. C'est une nomination qui est faite par le gouvernement, par le lieutenant-gouverneur en conseil, mais cela exige un processus de consultation auprès des associations.

M. Pagé: Quel est le motif d'augmenter le nombre de un?

M. Johnson: Parce que la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie n'était pas représentée pour une raison que j'ignore. Elle devrait peut-être y être maintenant.

Le Président (M. Clair): Est-ce que l'article 2 sera adopté?

M. Pagé: Oui, M. le Président à moins que mon collègue de l'Union Nationale n'ait des commentaires.

Le Président (M. Clair): Adopté. J'appelle l'article 3.

M. Johnson: C'est une modification de concordance de 5 à 6 en vertu de l'article précédent.

M. Pagé: II y a six membres. Ils vont siéger sans droit de vote sauf pour l'adoption des statuts de la régie et des règlements.

M. Johnson: C'est cela. C'est, d'ailleurs, la règle au moment où on se parle. Cela a toujours fonctionné comme cela.

M. Pagé: Oui, mais l'article 3 amende quoi?

M. Johnson: C'est simplement le chiffre qu'on change.

M. Pagé: D'accord, De 8 à 9.

Le Président (M. Clair): L'article 3 est-il adopté?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Adopté. J'appelle l'article 4.

Obtention d'une licence

M. Johnson: On y ajoute ici la notion de connaissances à celle de l'expérience comme condition de l'obtention d'une licence. La personne qui désire obtenir une licence doit également avoir subi avec succès les examens de la régie, évidemment, rénovant le candidat à une licence d'entrepreneur de construction. Il doit donc démontrer à la régie qu'il possède l'expérience dans le milieu de la construction ou encore qu'il a acquis les connaissances pertinentes. En fait, le problème concret qui se posait, c'est que vous pouviez avoir des gens de formation dans ce secteur, mais qui n'avaient pas nécessairement, en vertu des critères qui étaient impliqués, le critère de l'expérience parce qu'ils arrivaient sur le marché du travail, il est bien évident que le nouvel entrepreneur, il faut bien présumer quelque part qu'on ne recommence pas à Adam chaque fois. Il faut donc avoir également un critère de connaissances.

M. Ciaccia: Reconnaissez-vous ces connaissances dans l'industrie ou interprétez-vous cela comme s'il faut qu'ils soient... L'expérience...

M. Johnson: Cela va se faire par règlement, d'une part. Cela va se faire par règlement de la régie. Deuxièmement, c'est au niveau — si je ne me trompe pas — du cas par cas finalement, en conformité avec le règlement.

M. Ciaccia: Mais quelle sorte de critères...

M. Johnson: II y a certains critères qui sont explicités dans le règlement. On a d'ailleurs le projet de règlement.

M. Pagé: Vous pourriez le déposer. Le Président (M. Clair): ... distribué.

M. Johnson: Oui, déjà. C'est une autre loi où la réglementation est déjà prête. Elle n'est pas finale.

M. Ciaccia: Je comprends que c'est pour la protection...

M. Pagé: ... du public.

M. Ciaccia: ... du public, mais il ne faudrait pas que ce soit...

M. Johnson: Parmi ces critères, on pourrait en énumérer quelques-uns.

M. Ciaccia: ... tellement restrictif que cela empêche les gens de commencer. Il faut toujours donner la possibilité d'avoir de nouvelles entreprises.

M. Johnson: Pour répondre à la question du député de Mont-Royal, par exemple: Détenir un diplôme d'université reconnue en architecture ou en ingénierie dans une spécialité connexe à celle qu'entend exercer l'entreprise qu'il désire qualifier; détenir un diplôme d'études collégiales en technologie de bâtiments ou des travaux publics ou un diplôme de technicien des bâtiments ou de travaux publics octroyé par une école technique reconnue, etc. Il y en a six comme cela. C'est un critère de connaissances et non pas d'expérience. C'est bien évident.

M. Ciaccia: Si je comprends bien — je vais essayer de comprendre ce que vous voulez nous dire — est-ce que vous dites que ces critères de connaissances vont faciliter l'obtention d'un permis?

M. Johnson: C'est cela. La régie était dans la position un peu étrange où elle ne pouvait accorder de licence qu'à ceux qui avaient une expérience dans le domaine. Or, cela veut dire qu'un architecte ou un ingénieur qui voulait se partir une entreprise... Prenons un exemple: Un individu en génie technique qui veut se partir une entreprise en construction, mais où ses connaissances en génie technique sont, à toutes fins utiles, essentielles dans sa décision comme entrepreneur de se lancer en affaires, il ne pouvait pas, en pratique, à cause de la loi, obtenir un permis parce qu'il sortait de l'université et n'avait pas d'expérience.

M. Ciaccia: Ces nouveaux règlements sont-ils pour élargir le champ d'activité ou...

M. Johnson: C'est pour permettre, effectivement, la formation de nouvelles entreprises à partir de celles pour lesquelles notre société dépense des milliards tous les ans pour les former. C'est cela, le principe.

M. Ciaccia: Ce n'est pas pour restreindre... M. Johnson: Non, au contraire.

M. Pagé: J'aurais une question là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Quand on me parle de contrôle de connaissances, je vous dis, M. le Président, que les oreilles commencent à me chatouiller. Entre autres, je m'en réfère, par analogie, au contrôle de connaissances pour l'émission de certificats de qualification. Peut-être que l'expérience un peu négative à laquelle j'ai eu à être confronté comme

député dans mon bureau de comté, comme la très grande majorité de mes collègues notamment, m'amène à me poser des questions. Tous et chacun qui sont un peu au fait de ces questions savent pertinemment que l'émission de certificats de qualification ou une reconnaissance de connaissances, c'est quand même aléatoire. Qu'on prenne le cas de l'émission d'un certificat de qualification à titre de charpentier-menuisier où, aux examens, on va poser des questions sur la structure, on va poser des questions qui sont — pour employer un terme qui nous est bien propre — mauditement embêtantes. Les gens, même s'ils ont, dans certains cas, les connaissances, échouent. Les gens sont obligés de porter plainte au conseil d'arbitrage, on en a eu des exemples en ce qui concerne les véhicules lourds.

M. Johnson: Ce qu'on me dit au niveau...

M. Pagé: Je pourrais multiplier les exemples comme ceux-là, mais au niveau du contrôle de la connaissance, j'aimerais savoir comment cela va se faire.

M. Johnson: Tout cela se fait au moment où on se parle, sauf la connaissance...

M. Pagé: C'est là l'aspect de ma question. M.Johnson: D'accord.

M. Pagé: Comment se fera le contrôle de la connaissance? Quels sont les mécanismes qui seront' établis?

M. Johnson: D'abord, il y a deux niveaux, il y a le contrôle de la connaissance à sa face même. On peut présumer qu'un diplômé en ingénierie connaît le génie, si une université lui a donné un diplôme. Deuxièmement, en vertu de...

M. Pagé: À ce moment-là, vous ne faites pas de contrôle de connaissance.

M. Johnson: C'est-à-dire que c'est une reconnaissance de la connaissance.

M. Pagé: D'accord. Pas d'examens...

M. Johnson: Cependant, cela n'empêche pas qu'il y ait des examens comme cela existe depuis la création de la régie en 1975. On me dit que, d'après les statistiques, en gros, le taux d'échecs aux examens, si on prend l'ensemble des critères qui sont appliqués, c'est-à-dire la connaissance technique, la connaissance administrative et l'habilité, c'est à peu près de l'ordre de 30%. Cependant, quand on arrive au niveau technique, ou plutôt à l'habilité, c'est à peu près de l'ordre de 10%, ce qui correspond finalement...

Évidemment, on pourra toujours invoquer... Le député de Beauce-Sud a déjà cité quelques cas particulièrement douloureux qui ne touchaient pas la régie des entreprises, mais le service de la qua- lification de la main-d'oeuvre chez nous, le cas typique d'un briqueteur qui fait des maisons en pierres des champs rondes, mais qui n'est pas capable de poser de la brique carrée. Théoriquement, en vertu des règlements de qualification, il n'est pas qualificable. C'est une chose qui arrive à l'occasion.

Dans le cas de la Régie des entreprises de la construction, encore une fois de façon générale, il faut bien se rappeler, hormis la question des artisans dont on va rediscuter en cours de route, que les entreprises, les entrepreneurs qui sont au nombre d'à peu près 14 000 ont, en principe, des salariés. Il y a une dimension de connaissance administrative qui est impliquée. La dimension technique, même si la qualification au niveau de la main-d'oeuvre au ministère produit des situations un peu aberrantes comme celle que vient d'invoquer le député de Beauce-Sud...

Une voix: II y en a des pires.

M. Johnson: ... ne s'applique pas nécessairement telle quelle dans le cas de la Régie des entreprises en construction.

Une autre chose, c'est qu'il ne faut pas oublier que dans certains de ces secteurs il y a déjà des corporations: la Corporation des maîtres électriciens, la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie. Il y a une tradition qui existe depuis la création de ces corporations, dont l'une remonte à 1941 ou 1950. Il y a déjà une tradition de formation continue, de qualification et même un côté genre office des professions qui a été tenté depuis une couple d'années, entre autres parce qu'on voyait l'intégration de 1980 venir. Il y a quand même une certaine tradition au niveau du contrôle de la qualité de ceux qui sont dans ces corporations, indépendamment des structures juridiques; c'est une chose à laquelle on est habitué, ce qui n'est pas nécessairement le cas dans les autres secteurs. Mais on peut présumer que si quelqu'un veut être entrepreneur dans les grands travaux routiers, ce n'est pas un pompier qui va essayer de faire cela en fin de semaine. On parle d'une entreprise qui exige des connaissances et on présume que ceux qui tentent d'obtenir de telles connaissances ont l'expérience et/ou les connaissances pour le faire.

M. Pagé: On n'aura non seulement les véritables travailleurs de la construction, mais les véritables entrepreneurs de la construction.

M. Johnson: Cela existe depuis 1975. Ce n'est pas nouveau dans la loi.

M. Pagé: J'en conviens. Est-ce qu'il y aura des mécanismes d'appel?

M. Johnson: Oui, au Tribunal du travail.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais intervenir un peu sur la question de la connaissance ou de l'expérience pertinente dans la gestion d'une entreprise de construction. Je comprends, d'un certain point de vue, qu'on veuille éviter certains abus du passé. N'importe qui voulant se lancer dans la construction, qu'il soit connaisseur dans ce domaine ou non, pouvait fonder une compagnie de construction dans le domaine résidentiel ou autre, et cela a causé certains problèmes pour les consommateurs et les acheteurs du produit construit. C'est un côté de la médaille, et on veut éviter cet abus. ( 17 heures)

L'autre abus, c'est de rendre la possibilité de commencer de nouvelles entreprises trop restrictive. On décourage et on rend très difficile la création de nouvelles entreprises. Si on n'a pas de nouvelles entreprises, on n'aura pas d'emplois.

Quels sont les critères que vous avez pour établir cela? Est-ce que vous allez dans la direction d'avoir tellement de restrictions et de contraintes que ce sera, premièrement, non seulement difficile, mais très difficile de commencer une nouvelle entreprise? Deuxièmement, est-ce que la discrétion peut opérer en faveur d'un qui peut avoir moins d'expérience que l'autre? Pourriez-vous nous donner un peu plus de détails?

M. Johnson: II faudrait peut-être rappeler qu'historiquement cette loi remonte à 1975. Je me permets ici, sans faire un procès d'intention au député de Mont-Royal, de dire que, si j'avais présenté le projet original de 1975 cette année, il m'aurait probablement dit que c'est une loi extrêmement interventionniste de l'État qui se mêle de la vie du monde, etc.

M. Ciaccia: Vous ne savez pas si je n'ai pas dit cela en 1975.

M. Johnson : Vous l'avez peut-être dit au caucus, mais...

M. Ciaccia: Peut-être.

M. Johnson: Vous étiez pas mal occupé à négocier avec les Inuit.

M. Pagé: Mais on était là en 1975.

M. Johnson: Donc, ce n'est pas nouveau comme phénomène.

M. Ciaccia: Non, mais j'ai accepté le principe.

M. Johnson: C'est cela et, de façon générale, c'est tout le problème de l'intervention du gouvernement dans ce domaine-là. Quelles sont les deux balises à cela?

C'est, d'une part... Et c'est l'intérêt d'avoir des "régisseurs" entre guillemets. Les régisseurs sont issus du milieu au niveau des entrepreneurs. Il y en aura de toutes les associations. Ces associations sont dans un drôle de dilemme. D'une part, elles sont régisseurs et c'est pour cela qu'elles n'ont pas droit de vote sur n'importe quoi. Elles sont "presque", entre guillemets, en conflit d'intérêts, d'une certaine façon, parce que la tendance naturelle va vers les monopoles et il faut s'arranger pour qu'il y en ait le moins possible.

On remarquera que c'est la régie et non pas les régisseurs qui peut décerner cela. Ils ont évidemment droit de vote au niveau des règlements, etc. Donc, c'est une affaire de jugement, d'une certaine façon, à partir du milieu, très concrètement. Qu'est-ce que ce milieu? C'est l'entreprise, c'est l'expertise technique et c'est au centre de cela, un président qui a la responsabilité de la direction de cette règle, qui, lui, essaie d'y insuffler des notions qui sont celles qu'on retrouve généralement de respect ou de "justice", entre guillemets.

Ce n'est pas seulement de la philosophie. Concrètement, il y a un pouvoir de révision, c'est-à-dire que, si la régie décide de ne pas octroyer une licence, il y a un pouvoir de révision. On peut aller en révision devant la régie. Deuxièmement, il y a un appel au Tribunal du travail. Or, le Tribunal du travail, comme on le sait, qui est un tribunal spécialisé dans ce domaine-là, mais qui est également un tribunal formé de juges et pas d'assesseurs seulement, voit à ce qu'on respecte les principes généraux du droit. Les principes généraux du droit, c'est la non-discrimination, c'est audi alteram partem, ce sont tous les principes généraux sur lesquels le pouvoir judiciaire est fondé dans notre société. Finalement, une application souple, d'une part, et, d'autre part, une possibilité d'appel au niveau: 1- de la révision et 2- de l'appel devant le Tribunal du travail.

M. Ciaccia : Quand vous vous êtes référé tantôt à un diplômé, ce n'est pas une garantie, le fait d'avoir un diplôme, qu'il peut gérer une entreprise. J'avais fait allusion à des abus tantôt. Il y a eu peut-être autant d'abus dans ce domaine-là d'entrepreneurs qui sont solvables et qui peuvent répondre financièrement à des réclamations, mais qui ont rendu très difficile la vie de l'acheteur. Sans citer des cas, parce que je ne pense pas qu'il serait juste en commission parlementai re de citer des cas précis, je me demande si vous avez des normes minimums pour les questions financières. Y a-t-il des bases?

M. Johnson: Oui, sur la solvabilité. D'abord, parmi les examens que doivent passer ceux qui veulent obtenir une licence.

En vertu du règlement no 13 qui concerne la solvabilité des entrepreneurs en construction... ce sont là des critères sur la solvabilité, il y en a deux pages. Ces critères sont des choses comme "le requérant qui fait affaires avec la société doit démontrer à la régie que la société est une personne solvable, que chacun des membres de la société est une personne solvable, que son actif excède son passif d'au moins $5000 sans tenir compte de la valeur de l'achalandage. Le requérant qui fait affaires avec la régie doit également démontrer que la corporation est une personne solvable, que son actif excède le passif. Dans le cas du requérant qui fait affaires sous forme de

corporation, il doit faire la même chose. Il y a une série de critères qui sont les critères généraux de la solvabilité et il y a, d'autre part, des examens sur un plan administratif.

M. Ciaccia: Oui, mais ces critères, s'il y correspond, est-ce qu'il obtient automatiquement sa licence ou y a-t-il un autre pouvoir discrétionnaire en plus des critères que vous venez de mentionner?

M. Johnson: S'il passe les examens et satisfait aux exigences, il a sa licence.

M. Ciaccia: Vous l'avez souligné vous-même...

M. Johnson: Ce n'est pas un jugement parfaitement arbitraire.

M. Ciaccia: ... si ceux qui vont prendre la décision sur de nouvelles licences sont entrepreneurs, il y a un petit conflit. C'est vrai que c'est la régie, mais si ce sont des entrepreneurs, il peut y avoir un conflit et le moins d'entreprises il va y avoir... ce n'est pas nécessairement le salarié ou le consommateur qui va en bénéficier.

M. Johnson: Mais, comme je le disais tout à l'heure, ils ne sont que consultés sur l'émission des licences; ils ne décident pas sur la question des licences, ce qui est différent.

Le Président (M. Clair): L'article 4 est-il adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Adopté. J'appelle l'article 5.

M. Johnson: À l'article 5, M. le Président, il s'agit d'assujettir la personne physique qui désire obtenir une licence aux mêmes conditions que la personne physique qui habilite une société ou une corporation. De plus, il interdit à une personne physique de détenir plus d'une licence sous réserve toutefois d'un pouvoir de réglementation que la régie peut avoir à cet effet.

À toutes fins utiles, il s'agit ici de combler un oubli du législateur en 1975. Alors que la loi défend actuellement à une personne physique d'habiliter plus d'une société ou corporation, ou d'habiliter une société ou une corporation tout en étant titulaire d'une licence, elle est silencieuse quant à la possibilité pour une même personne physique de détenir plus d'une licence.

M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président. Le dernier élément que le ministre a...

M. Johnson: Une personne physique peut détenir... On interdit à une personne physique de détenir plus d'une licence. D'accord? À toutes fins utiles, on essaie de combler un vide laissé en 1975 parce que la loi défend en ce moment à une même

Le personne physique d'habiliter plus d'une société ou corporation.

M. Pagé: Par analogie.

M. Johnson: Une même personne physique ne peut habiliter deux entreprises ou habiliter une société ou une corporation tout en étant titulaire d'une licence. D'accord?

M. Roy: D'accord.

M. Johnson: Cependant, la loi est silencieuse quant à la possibilité pour une même personne physique de détenir plus d'une licence.

M. Pagé: D'accord.

Le Président (M. Clair): Adopté?

M. Pagé: Non, il y a un autre élément, M. le Président. Je m'excuse, mais le ministre me permettra de revenir à l'article 4 sur un aspect, le contrôle de la connaissance pour l'artisan. Il est là de facto de par le certificat de qualification ou y a-t-il un contrôle de connaissances additionnel?

M. Johnson: D'abord, c'est clair qu'il y aura par règlement une série de dispositions sur d'autres critères que la connaissance. La régie étudie depuis plusieurs mois maintenant cette question et fera ses recommandations brièvement au gouvernement.

M. Pagé: Ce sera éventuellement régi par règlement?

M. Johnson: Oui.

M. Pagé: On peut présumer que l'artisan, en plus de détenir son certificat de qualifications pour lequel il aura été obligé de passer des examens — chose qui n'est d'ailleurs pas toujours facile — devra passer des examens additionnels à la régie.

M. Johnson: C'est-à-dire pas nécessairement quant à sa qualification.

M. Pagé: Mais en ce qui a trait aux connaissances? Le contrôle des connaissances pourra éventuellement se faire par un examen?

M. Johnson: Oui.

M. Pagé: Est-ce que l'intention de la régie est arrêtée, est-ce qu'elle est définitive?

M. Johnson: Pas encore parce qu'elle est dans le processus de l'élaboration finale du règlement.

Le Président (M. Clair): Adopté? M. Pagé: L'article 5...

M. Laberge: Une minute!

Le Président (M. Clair): Je m'excuse, M. le député de Jeanne-Mance.

M. Laberge: C'est une question de phraséologie, de concordance avec l'article 4. À la deuxième ligne de l'article 5, dans 32, on dit "ou habiliter" et dans l'article 4, à la deuxième ligne, on dit "ou pour habiliter". Est-ce qu'on devrait répéter le mot "pour"? Je me pose la question. C'est seulement une question de...

M. Pagé: II faudrait que le législateur parle bien, j'en conviens.

M. Laberge: II semble y avoir un "pour" qui ait été oublié.

M. Johnson: Les légistes me font signe que cela n'a pas d'importance, dans un sens ou dans l'autre. C'est peut-être pour les écritures ou pour la concordance.

M. Laberge: C'est seulement pour le français.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'il y a lieu de l'amender?

M. Johnson: II faudrait peut-être répéter le texte de loi tel qu'il était initialement. Or, le texte original disait "pour habiliter"... Puisque le texte original dit "ou pour habiliter", il faudrait peut-être répéter la même formule.

Le Président (M. Clair): Alors, l'amendement est-il adopté concernant le "pour"?

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Clair): Le "pour" est adopté.

M. Pagé: On ne se chicanera pas sur les virgules.

M. Johnson: L'article 5?

M. Pagé: Attendez un peu, M. le Président. Est-ce que vous permettez...

M. Johnson: C'est celui-là?

M. Pagé: Est-ce que vous permettez à mon collègue, le député de Mont-Royal, de poser une question qu'il juge importante sur les connaissances et la régie qui est prévue à l'article 4, ce qu'il a omis de faire avant?

M. Ciaccia: Si vous permettez. C'est sur les alinéas e) et f). Dans l'alinéa e), comment avez-vous fixé le délai de trois ans? Comment en êtes-vous arrivés à ce délai de trois ans?

M. Johnson: Comme dans toutes ces choses-là, il faut mettre la ligne quelque part. On juge que quelqu'un qui a fait faillite il y a trois ans, est-ce qu'il va traîner cela toute sa vie? On aurait pu mettre quatre ans, on aurait pu mettre deux ans et demi. On a mis trois ans.

M. Ciaccia: Ce n'est pas la question de la personne qui a fait faillite. Cette question est abordée à l'alinéa d). À l'alinéa e), vous parlez d'une personne qui a été membre d'une société, qui aurait pu être membre d'une société qui a fait faillite, ce n'est pas nécessairement un membre majoritaire, mais un membre de la société... Ce n'est pas la corporation...

M. Johnson: Une société, ce n'est pas une corporation. Ce sont des personnes qui sont en société au sens où ils engagent tous leurs responsabilités dedans.

M. Pagé: Le vrai terme légal de société.

M. Johnson: On fait la distinction, tout au long de la loi, entre la corporation et la société. C'est la société du Code civil dont on parle.

M. Ciaccia: Mais dans f) vous parlez d'une corporation et vous dites: S'il a détenu 20% ou plus des actions...

M. Johnson: C'est cela.

M. Ciaccia: II est assujetti à cette règle de trois ans.

M. Johnson: C'est cela.

M. Ciaccia: Vous ne trouvez pas...

M. Johnson: Dans le cas de la société, on n'est pas obligé de le faire...

M. Ciaccia: ... que cela va peut-être un peu loin? Parce que 20%, ce n'est pas le contrôle.

M. Johnson: C'est comme Paribas, dans la loi 124, avec 20%. 20% dans une corporation, dans le secteur de la construction comme dans n'importe quel autre secteur, dans certains cas cela ne signifie pas nécessairement un contrôle. Prenez une société où il y a cinq personnes, elles ont toutes 20%. Que de façon systématique il y en ait une avec 20% qui fasse "bande à part" — entre guillemets — et que les quatre autres votent tout le temps contre elle, je pourrais répondre en anglais "tough luck!" Cependant, on présume que quelqu'un qui a 20% dans une entreprise essaie de veiller au grain. Si son entreprise fait faillite...

M. Ciaccia: 20%, c'est assez minoritaire. Le seul but de ma question est d'essayer d'avoir les règles où on n'essaie pas de limiter trop les gens qui peuvent avoir un capital à apporter dans la construction, dans ces entreprises. 20% me sembleraient... On ne peut pas prendre les décisions en détenant seulement 20% des actions d'une société.

M. Johnson: On présume que quelqu'un qui détient 20% des actions d'une entreprise de construction doit être influent, merci!

M. Ciaccia: Non. Cela peut être un investisseur avec 20%, qui n'a rien à voir avec les décisions. Il se trouve un matin que la compagnie, parce qu'il y avait un administrateur, les autres personnes...

M. Johnson: II y a très peu de compagnies de construction qui sont des compagnies publiques... (17 h 15)

M. Ciaccia: Pas publiques, il n'y a pas de General Motors dans la construction au Québec, mais la plupart des compagnies de construction, dans la région chez moi, ce sont des corporations. Ce ne sont pas des corporations publiques qui vont vendre des parts au public, mais il y a des investisseurs minoritaires qui sont strictement des investisseurs, qui veulent limiter leur...

M. Johnson: On parle aussi d'administrateurs. On ne parle pas seulement d'actionnaires, on parle d'administrateurs.

M. Ciaccia: Administrateurs ou actionnaires. Je comprends que, si celui qui avait 20% est aussi administrateur, peut-être qu'il engage plus sa responsabilité, mais seulement pénaliser l'actionnaire qui a 20% et dire: Vous avez été actionnaire à 20% dans une compagnie, on va vous empêcher d'investir d'autre argent dans une autre compagnie, je ne crois pas que c'est dans l'intérêt de l'industrie de placer de telles limites, surtout si vous avez tous les autres critères et les autres pouvoirs de la régie.

M. Johnson: Je ne sais pas si le député de Mont-Royal a une suggestion concrète à faire et, après cela, on pourrait peut-être faire la même démonstration en sens inverse. Parce que, si on mettait, par exemple, 50%, juste par hypothèse, on dit: S'il est actionnaire à 50% et que la compagnie a fait faillite, que pensez-vous qu'il va arriver? Le "loophole" parfait, si vous me permettez l'expression, c'est que, quand les gars fondent une compagnie de construction, il y a madame qui va avoir 2% et messieurs qui vont avoir chacun 48%, 49%...

M. Ciaccia: Vous pouvez le couvrir par Beneficial Ownership, autrement dit, même si un autre le détient pour lui. Si lui a la majorité, s'il a le contrôle, que ce soit à son nom, au nom de ses enfants, de sa mère ou de sa secrétaire...

M. Johnson: C'est toute la théorie du "at arm's length" dans la jurisprudence. Indépendamment de cela, on présume que quelqu'un qui a 20% du contrôle dans une compagnie veille au grain. Ceci dit, quelle est la conséquence? La compagnie fait faillite, le gars était de bonne foi, il avait 20% dedans, il travaillait, il faisait son boulot comme il faut; ce qu'on dit, c'est: Monsieur, vous ne pouvez pas détenir une licence, ce qui ne vous empêche pas de continuer à travailler, mais vous ne pourrez pas détenir une licence, vous ne pourrez pas être celui qui habilite une nouvelle corporation pour trois ans.

M. Ciaccia: Pour trois ans. M. Johnson: C'est cela.

Le Président (M. Clair): On revient à l'article 5 puisque l'article 4, je le souligne pour tous les membres, tant du côté de l'Opposition que du côté ministériel, était déjà adopté. L'article 5 est-il adopté?

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Clair): II me semblait qu'on avait terminé la discussion.

Des voix: Adopté.

M. Pagé: En fait, c'est un peu par concordance et à la suite des autres articles précédents visant à assujettir la personne physique aux mêmes conditions que celles de la corporation. J'aurais une petite question entre parenthèses: La connaissance de la langue française appropriée, c'est contrôlé comment? D'une part, cela m'intéresse, cela intéresserait...

M. Johnson: Quand les examens sont en français, cela aide.

M. Pagé: Cela intéressera particulièrement mon collègue...

M. Johnson: Les examens sont en français; alors, cela aide.

M. Pagé: C'est la seule façon dont c'est contrôlé?

M. Johnson: Pour le moment, oui. C'est ce qu'on me dit. Il n'est pas impossible qu'il y en ait d'autres à un moment donné. Vous soulevez peut-être ce qui est un problème et peut-être ce qui n'en est pas un du tout. Je ne suis pas en mesure en ce moment de l'apprécier. Je peux vous assurer que le ministère d'État au développement culturel me fera sans doute savoir s'il y a un problème dans ce domaine.

M. Pagé: II y a un avis qui a été demandé? M. Johnson: Non.

M. Pagé: Comme cela, il n'y a pas de problème pour vous.

M. Johnson: Quand il y aura des problèmes, on verra. Les examens sont en français, cela aide de connaître le français pour les réussir.

M. Pagé: Je présume.

M. Ciaccia: Si vous m'assurez que ce n'est pas le ministre des Affaires culturelles qui est chargé de la mise en application de l'article, je ne vous poserai pas de question.

Le Président (M. Clair): L'article 5 est-il adopté?

M. Pagé: Avez-vous eu des plaintes à ce chapitre, M. le Président?

M. Ciaccia: Je vais vous surprendre. Je ne vous poserai pas de question.

Le Président (M. Clair): L'article 5 tel qu'amendé est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 6. M. le ministre.

M. Johnson: C'est la même règle, mais applicable aux corporations tout simplement. C'est très long, cela a l'air très complexe, c'est exactement la même règle que celle dont on a discuté à l'égard des individus, mais ici, c'est étendu aux corporations.

M. Pagé: En fait, ce sont tous les mécanismes de contrôle, toute la question de divulgation du nom des actionnaires, leur adresse et tout cela.

M. Johnson: C'est cela.

Le Président (M. Clair): Adopté?

M. Ciaccia: II n'y a pas d'autres pouvoirs de la régie? Quand vous parlez du droit d'avoir une licence et que vous réglementez cela, n'y a-t-il pas d'autres règlements qui, directement, affectent le fonctionnement de la société et qui pourraient, je ne dirais pas venir en contradiction mais pourraient limiter le fonctionnement d'une société même si elle a une licence? Vous avez fait référence tantôt à certains programmes de certification dans le domaine domiciliaire.

M. Johnson: II y a un cautionnement de fidélité de $5000 qui est exigé.

M. Ciaccia: Non. C'est pour obtenir la licence. Je ne me réfère pas à cela.

M. Johnson: Cela existe déjà.

M. Ciaccia: Une fois que la licence est obtenue, que l'examen a été passé par le postulant et qu'il a sa licence et qu'il fait des affaires, il y a d'autres programmes, comme le programme de la certification des nouveaux bâtiments.

M. Johnson: II n'a pas existé jusqu'à présent parce que la loi n'était pas adéquate, mais avec l'amendement proposé, on va le mettre en vigueur.

M. Ciaccia: Est-ce que c'est une autre limitation au fonctionnement d'une telle compagnie, que ce soit une société ou un individu?

M. Johnson: Je comprends ce que vous voulez dire. C'est-à-dire que dans la mesure où... C'est toujours le même problème chaque fois qu'on adopte une loi. Il est clair que c'est une forme de limitation. De la même façon qu'on interdit aux gens de se donner des coups de poing dans le visage sur la rue, on exige un plan de fonctionnement. Encore une fois, c'est une affaire de tirer la ligne sur l'intervention de l'État.

M. Ciaccia: Le plan de cautionnement, vous l'avez...

M. Johnson: Le plan de garantie, je m'excuse. Le plan de garantie domiciliaire. Un exemple de cela. Il y a des consommateurs, au Québec, je ne dis pas que c'est la majorité, il y a des consommateurs au Québec — on se souviendra des ruches d'abeilles de je ne sais où — qui ont été aux prises à un moment donné avec des logements qui n'avaient aucun sens, qui avaient des défauts majeurs, dont le seul recours, en fin de compte, était un recours civil, long, difficile et pénible. Il n'y avait aucune forme d'incitation pour ce type d'entreprise, qui fonctionnait peut-être un peu vite, à respecter les droits éventuels des consommateurs à leur égard et ce plan de garantie qui existe ailleurs aussi et qui est même exigé par la Société centrale d'hypothèques maintenant pour qu'elle consente un prêt, on en a besoin. Il est évident que c'est partiellement limitatif comme n'importe quelle loi, mais cela ne va pas au-delà de cela.

M. Ciaccia: Mais la situation à laquelle vous faisiez référence, qu'il y avait des ruches d'abeilles qui avaient été construites. Dans plusieurs cas, le problème n'était pas que l'entrepreneur n'était pas solvable. L'entrepreneur était très solvable, mais il a utilisé toutes les règles, toutes les procédures à sa disposition pour éviter certaines responsabilités. Il était non seulement très solvable, il était extrêmement solvable. Ce n'était pas la certification d'une régie qui aurait pu dire: Je vais vous donner, pour avoir un certificat pour construire ces maisons, le certificat de garantie, cela ne répondait pas à ce problème. Parce que ce n'est pas la solvabilité de cet entrepreneur, c'est vraiment la façon de fonctionner. Dans d'autres cas, cela se peut que quelqu'un n'ait pas autant de garanties financières, mais il y a la...

M. Johnson: On ne parle pas d'une garantie de solvabilité. C'est une garantie que la maison est bien faite, que cela va être réparé, mis en état, ce qui est très différent d'une garantie de solvabilité.

M. Ciaccia: Je comprends. Mais le contracteur doit obtenir de la régie ou de l'association ce certificat, l'association va émettre le certificat. Quels sont les critères que l'association va utiliser pour émettre un tel certificat?

M. Johnson: Je ne veux pas entrer là-dedans parce que je pense qu'on pourrait le faire à la

commission des consommateurs, coopératives et institutions financières. Ce sont des plans de garantie qui existent avec une série de compagnies d'assurance qui sont spécialistes là-dedans.

Ce n'est pas à la régie de le fixer dans les nuages, à faire du cas par cas. C'est basé sur des études actuarielles, des choses qui existent ailleurs. Des fois, c'est sous forme de mutuelles. Je ne vois pas vraiment le rapport direct que cela a avec...

M. Ciaccia: Mais cela a un rapport dans le sens que cela va limiter l'activité de ces compagnies, parce que c'est une autre forme de restriction.

M. Johnson:; Mais oui. Mais si on ne limite pas, il va y avoir des ruches d'abeilles.

M. Ciaccia: Mais vous l'avez déjà limité. Mon seul point c'est que vous ajoutez de plus en plus de restrictions. Je me demande sur quelle base... Quels sont vos...

M. Johnson: Je veux bien. Mais cela existe dans cet État qu'on sait être d'inspiration socialiste, les États-Unis, dans à peu près tous Ies États américains. Cela existe en Alberta, cela existe en Ontario.

M. Ciaccia : Parce qu'effectivement, si vous mettez trop de restrictions dans l'application de ces plans, c'est une autre façon vraiment de réduire l'activité...

M. Johnson : C'est évident si on agace le monde, il va être agacé. Cela, c'est officiel.

M. Ciaccia: Vous pouvez avoir une licence, mais la licence ici sera vraiment inutile, parce que vous n'aurez pas obtenu l'essentiel qui est le certificat de cette association. Parce que, sans certificat, l'association, la compagnie de prêt ne vous donnera pas le prêt. La compagnie prête, jusqu'à ce jour, les institutions financières, les compagnies hypothécaires ont accordé des prêts sans la nécessité d'un tel certificat. Maintenant, vous ajoutez cela, vous rendez encore beaucoup plus difficiles les activités dans ce domaine. Je me demande, s'il y a des restrictions, des limites - parce qu'au pire, si le certificat n'est pas donné, c'est vraiment pour un entrepreneur, même s'il a respecté vos exigences de solvabilité, etc., le mettre hors... "put him out of business" - l'effet, c'est qu'il ne travaillera pas et...

M. Johnson: C'est théoriquement possible.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il a...

M. Johnson: C'est théoriquement possible.

M. Ciaccia: Théoriquement oui, mais il faut essayer de rédiger nos lois pour avoir certaines protections dans la pratique, parce qu'on est dans un domaine très très compétitif.

M. Johnson: Oui, bien, M. le Président, brièvement, là-dessus...

M. Ciaccia: Et vous allez donner un pouvoir à celui qui est déjà établi et qui va prendre les décisions de dire: Je ne veux pas plus de compétition, je vais restreindre la façon dont je vais émettre ces certificats, complètement indépendamment des articles que vous avez ici, le contrôle...

M. Johnson: C'est pour cela que la loi prévoit que la régie peut créer un fonds d'indemnisation si jamais les associations décident d'imposer des contraintes telles que cela empêche le monde de les avoir. C'est pour cette raison qu'il y a un article dans la loi qui prévoit cela, d'une part. On ne peut pas présumer, a priori...

M. Ciaccia: S'il ne l'obtient pas, je ne pense pas. Le fonds d'indemnisation, ce n'est pas si le type n'obtient pas le certificat. S'il n'obtient pas le certificat, le fonds d'indemnisation ne l'aidera pas, parce qu'il ne pourra pas construire. Le prêt hypothécaire, il ne l'aura pas.

M. Johnson: Oui, mais au moment ou on se parle, si on ne bouge pas c'est officiel qu'il ne pourra pas travailler, parce que la Société centrale d'hypothèques, qui consent des hypothèques sur une bonne partie des maisons neuves fabriquées au Québec, a décidé de ne plus accorder de prêt hypothécaire aux consommateurs qui font affaires avec des entrepreneurs qui ne sont pas couverts par un plan comme cela. On n'a pas le choix. C'est officiel, s'il y a quelqu'un à qui il faut dire qu'ils sont restrictifs avec ces pratiques du commerce, c'est la Société centrale d'hypothèques.

M. Ciaccia: Oui, mais il y a des solutions de rechange à la Société centrale d'hypothèques. Vous pouvez aller...

M. Johnson: Bien, je veux dire, elle est là.

M. Ciaccia: Écoutez, un instant, ce n'est pas la même chose. La Société centrale veut avoir certaines normes. Si vous respectez ces normes, vous obtenez un prêt de la Société centrale. Si vous ne voulez pas respecter les normes de la Société centrale, vous allez aux compagnies financières indépendantes.

M. Johnson: Oui, mais si on permet, pour 80% des prêts hypothécaires, au Québec on exige ce type de plan-là, que ce soit au niveau de la Société centrale ou de la Compagnie d'assurance hypothécaire du Canada qui est la plus grosse.

M. Ciaccia: Oui, mais on l'exige maintenant parce qu'il a été introduit. Avant qu'il soit introduit, on ne l'exigeait pas. C'est bien beau, vous dites: On introduit le plan, toutes les compagnies l'exigent. Mais si le plan n'avait pas été introduit, les compagnies ne l'auraient pas exigé.

M. Johnson: Ce n'est pas nous qui l'avons introduit.

M. Ciaccia: Ce sont vos lois qui permettent l'introduction de ces plans, d'après...

M. Johnson: Non, cette contrainte existe déjà. Je pense que c'est tout un problème d'explication... Je me suis peut-être mal expliqué depuis le début, mais en ce moment, 80% des prêts hypothécaires au Québec font que le consommateur est pris pour faire affaires avec quelqu'un qui a un plan de garantie sur la maison. Ce n'est pas le Québec, qui a inventé cela, c'est la Société centrale d'hypothèques et ce sont les compagnies d'assurance qui s'occupent d'assurances hypothécaires. Il faut vivre avec cette réalité-là. On ne peut pas réinventer l'allumette, dans le domaine, parce qu'elle a été inventée, et puis on a même des briquets, en ce moment. (17 h 30)

II s'agit de voir ce qui se fait avec les briquets. On tient compte de cela. En plus de cela, on ouvre une porte avec le fonds d'indemnisation au cas où quelqu'un serait sujet à ce type de discrimination. C'est en conformité avec ce qui se déroule et ce qui nous est littéralement imposé par une situation économique. Ces mêmes entrepreneurs intéressés aux "investissements", entre guillemets, qui sont des...

M. Ciaccia: Tout en protégeant le consommateur, vous avez certaines restrictions contre les constructeurs. Avez-vous certaines protections pour les entrepreneurs qui, peut-être, seraient soumis à certains abus de ces plans de garantie?

M. Johnson: C'est le fonds d'indemnisation qui fait cela.

M. Ciaccia: Dans quel sens fait-il cela, le fonds d'indemnisation? Supposons qu'il obtient un certificat qui n'est pas adéquat, le fonds d'indemnisation ne l'aide pas.

M. Johnson: Je l'ai déjà dit, c'est une alternative, le fonds d'indemnisation; je ne peux pas dire plus au député de Mont-Royal.

Le Président (M. Clair): L'article 6?

M. Ciaccia: Juste une autre question, je ne veux pas abuser de mon temps... Si l'entrepreneur n'obtient pas ce certificat de garantie, comment le fonds d'indemnisation va-t-il l'aider? Le fonds d'indemnisation aide dans le cas où la garantie ne joue pas pour le consommateur; le fonds d'indemnisation ne joue pas pour l'entrepreneur. Est-ce que le fonds d'indemnisation...

M. Johnson: Tant qu'on ne créera pas le fonds d'indemnisation, celui qui est dans la situation dont on parle, qui est, entre autres, tout entrepreneur au Québec qui fait partie d'une association qui n'a pas de plan de garantie, ce n'est pas compliqué, il n'a plus de client parce que la société centrale et les compagnies d'assurance ne prêtent pas à des gens qui font affaires avec des entrepreneurs qui n'ont pas de plan de garantie. Au moment où on se parle, la situation est possiblement dramatique; il aurait fallu que le député de Mont-Royal nous dise cela quand la société centrale l'a annoncé en juillet.

Ce qu'on fait, c'est qu'on entérine, à toutes fins pratiques, ce genre de processus parce que c'est dans notre économie; deuxièmement, on veut protéger les consommateurs et, troisièmement, l'entrepreneur qui se verrait discriminé pourra aller faire appel à l'indemnisation, à la RECQ. Ce sera une porte ouverte pour lui.

Le Président (M. Clair): Adopté?

M. Ciaccia: Je ne veux pas... Si l'association a un plan et l'entrepreneur se voit, d'une façon ou d'une autre, discriminé par ce plan...

M. Johnson: II peut faire appel au fonds de la régie.

M. Ciaccia: II peut aller au fonds de la régie...

M. Johnson: II peut être couvert par la régie. La régie peut peut-être décider de ne pas le couvrir, non plus. Il faut que ce jugement puisse s'exercer quelque part.

M. Ciaccia: Même ces garanties sont limitées.

M. Johnson: Le dépôt initial est de $20 000. Adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 6 est adopté. J'appelle l'article 7.

M. Johnson: L'article 7, M. le Président, reprend, pour fins de concordance, les dispositions de l'article 51 de la loi. L'existence de cet article était en fonction de l'article 50 de la loi. Les dispositions de cet article ont été intégrées aux articles 31 et 33 de la loi par suite des modifications proposées par les articles 4 et 6 du présent projet de loi.

Ainsi, pour une meilleure cohérence, il est préférable d'ajouter cet article 33a comprenant entre autres les dispositions de l'article 51. Je suis sûr que tout cela est bien clair.

M. Pagé: Oui. En fait, c'est le pouvoir pour la régie, quand c'est un cas d'incapacité d'obtenir un permis ou une habilitation à cet effet, de surseoir aux articles précédents et de les inclure quand même. Le libellé de l'article 33a dit ceci, et vous me permettrez de reprendre le deuxième paragraphe pour le bénéfice des membres et de tous les gens qui sont ici: "Lorsque l'incapacité d'obtenir une licence ou d'habiliter à cet effet une société ou corporation découle des dispositions prévues au paragraphe c) des articles 31 à 33 pour une infraction prévue au sous-paragraphe V du paragraphe b de l'article 43, la régie peut permettre la délivrance d'une licence plus tôt à une personne qui en fait la demande. Afin de rendre sa décision, la régie prend en considération, notamment, la nature de l'infraction commise, sa gravité ainsi que son incidence sur les activités qu'entend exercer dans l'industrie de la construction la personne qui demande la délivrance d'une licence."

M. le Président, cela m'amène à dire qu'on est conscient, d'une part, des sévérités des règles imposées par les articles précédents, c'est-à-dire les articles 4 et 6 du projet de loi. J'interprète les dispositions de l'article 33a comme étant une façon ou un mode pour la régie d'y passer outre dans certains cas.

Or, la décision va appartenir à la régie qui devra prendre en considération, c'est-à-dire qu'elle devra étudier et analyser le dossier et prendre les renseignements sur la nature de l'infraction, la gravité de l'infraction et c'est très subjectif. Vous aurez à juger...

M. Johnson: II faut bien se comprendre cependant...

M. Pagé: C'est un pouvoir discrétionnaire.

M. Johnson: L'article 43b, sous-paragraphe V prévoit, c'est vrai, que la régie peut passer outre, mais on peut s'attendre à ce que cela puisse y permettre, par exemple, d'accorder quand même une licence à celui qui aurait été trouvé coupable d'avoir causé des lésions corporelles à un voisin à l'occasion d'une soirée qui n'a rien à voir avec l'entreprise. Cependant, aujourd'hui, une personne qui commet des voies de fait en dehors du secteur de la construction, comme cela peut arriver à n'importe qui, et qui pourrait être condamnée pour cela avec sentence suspendue de deux jours pourrait faire appel à la régie pour obtenir sa licence. C'est ce que cela permettrait. Théoriquement, cela permettrait aussi à quelqu'un qui a commis un meurtre de le faire. Il y a un appel qui est prévu, c'est évident.

M. Pagé: Est-ce que l'objectif de l'article est de permettre à la régie d'exercer sa discrétion et son pouvoir décisionnel dans des cas particuliers?

M. Johnson: Oui. C'est du cas par cas.

M. Pagé: Qui sont autres? Je conviens que c'est du cas par cas nécessairement, mais qui sont autres que l'objet de la régie? Vous avez fait référence à des vols, des claques sur la gueule et des meurtres.

M. Johnson: Effectivement, mais si cela arrive dans le cadre du travail, par exemple, quelqu'un qui commet un meurtre sur un chantier de construction, un contremaître qui assassine un salarié; il n'est pas couvert par ces dispositions, il n'aurait plus de licence s'il essayait de se dire entrepreneur. Le contremaître qui, cependant, chez lui, un soir, à l'occasion d'un party de Noël, assène un coup de poing au visage de son voisin parce qu'il n'endure plus que le chien vienne sur son terrain, est couvert par cette disposition. Cela veut dire que cela ne l'empêche pas de devenir entrepreneur en construction. Cela m'apparaît correct à part cela.

M. Pagé: De très bons exemples. Normale- ment quand on est tanné du chien du voisin, on ne l'invite pas au party de Noël.

Le Président (M. Clair): L'article 7 est-il adopté?

M. Pagé: Je trouve que c'est un pouvoir qui est général, c'est un pouvoir qui est large, qui a beaucoup d'impact. La régie deviendra, somme toute, un tribunal, comme il faut l'appeler, ou presque: pouvoir décisionnel, discrétion de juger de la gravité de l'offense, les incidences sur les activités qu'entend exercer dans l'industrie de la construction l'offense en question. Or, je dois vous exprimer, M. le Président, d'une part ma surprise et d'autre part mes réserves.

M. Ciaccia: Au lieu de donner ce pouvoir discrétionnaire à la régie, pourquoi n'avez-vous pas amendé ou prévu, dans les articles 31 et 33, le genre d'exception qui n'a rien à voir avec les activités dans le domaine de la construction?

M. Johnson: C'est ce qu'on fait.

M. Ciaccia: Mais non, parce que là vous donnez un pouvoir discrétionnaire sur tout.

M. Johnson: Ah non! Il ne faut pas que cela soit automatique non plus! C'est cela.

M. Ciaccia: Comment cela ne peut-il être automatique?

M. Johnson: Ce que vous dites, c'est d'abolir l'article 43b, sous-paragraphe V).

M. Ciaccia: Non, je n'ai pas dit d'abolir, mais de prévoir dans ces articles, de les modifier pour prévoir que si c'est une infraction qui n'a vraiment rien à voir avec le pouvoir de fonctionner dans l'industrie de la construction, cela ne soit pas une raison pour ne pas obtenir la licence. Mais ce que vous faites dans votre article 7, c'est que vous donnez un pouvoir discrétionnaire que, même si l'infraction se réfère à l'industrie de la construction ou à une activité reliée à cela, la régie peut quand même donner; elle a le pouvoir discrétionnaire...

M. Johnson: Sauf, qu'il y a des cas où il faut que la régie ait ce pouvoir discrétionnaire. Prenons l'exemple d'un individu qui est trouvé coupable de fraude parce que son beau-frère était dans une banque et qu'il a découvert un "scheme" fantastique avec l'informatique; je pense qu'il faudrait permettre à la régie de lui refuser une licence d'entrepreneur en construction. Cependant, il est clair qu'il faut qu'il y ait un jugement subjectif qui s'applique et il ne faut pas oublier, encore une fois, qu'il y a un appel au Tribunal du travail qui est un tribunal où les principes du droit commun s'appliquent quand on raisonne autour de choses comme celles-là. Toutes les grandes règles du droit s'appliquent.

M. Ciaccia: Qui fera appel, si vous donnez un pouvoir discrétionnaire et que la régie en accorde à n'importe qui qui en fait la demande?

M. Johnson: Non. Dans le sens contraire, d'accord. Vous voulez présumer que la régie pourrait décider d'en accorder — prenons un exemple théorique — à un individu qui est un fraudeur professionnel, reconnu huit fois pour fraude, mais pas dans le domaine de la construction, qui postule pour devenir entrepreneur, qui obtient son permis. Vous allez me dire: Qui va se plaindre? Je pense qu'il y a un gouvernement qui peut se plaindre à l'égard du président de la régie si à un moment donné cela pose des problèmes. Il n'y a aucune de nos lois... Vous le savez comme moi, le Parlement peut décider de changer un homme en femme, s'il le veut. Même, c'est le Conseil exécutif maintenant qui peut le faire en vertu de nos lois, le changement de sexe. C'est évident que ce n'est pas parfait. Je pense que la discrétion doit être là et qu'on doit permettre, finalement, à la régie de ne pas en émettre dans certains cas plutôt que de permettre à la régie d'en émettre. C'est bien plus restrictif sur le plan de la formulation juridique.

M. Ciaccia: Vous avez les deux ici. Vous avez la discrétion que, même si quelqu'un se conforme, la régie peut dire non. Et vous avez l'autre cas où la personne ne pourra pas obtenir son permis selon l'article 33 et où la régie peut le lui accorder.

M. Johnson: C'est vrai.

M. Pagé: M. le ministre, vous allez me permettre de souligner un cas bien spécifique qui est plus particulier au monde de la construction. Un contremaître qui, évoluant pour une compagnie X, est poursuivi pour négligence criminelle suite au décès d'un travailleur pour des motifs de sécurité, suite à une enquête du coroner et tout cela. Le contremaître, l'entreprise, tout ce beau monde-là est poursuivi. Le contremaître en question présente une requête à la régie dans un délai très bref, suite à la poursuite — prenons le cas où il y a une sentence suspendue d'un an — et il fait une demande à la régie pour devenir lui-même entrepreneur. Est-il couvert pour cela? Qu'est-ce qui arrive dans ces cas-là?

M. Johnson: Normalement, on le lui refuse.

M. Pagé: Vous le lui refusez. Est-ce qu'il y a une question de délai ou si c'est sans délai, à vie, ad vitam aeternam?

M. Johnson: II y a un délai de trente jours pour répondre à la demande de licence, en vertu de la loi.

M. Pagé: II y a trente jours pour en appeler.

M. Johnson: Après cela, il y a les appels possibles.

M. Pagé: La révision et l'appel.

Le Président (M. Clair): L'article 7 est-il adopté?

M. Pagé: Cela veut donc dire que, suite à la décision du tribunal qui refuserait à cette personne ou qui octroierait à cette personne une licence d'entrepreneur, aucun mécanisme n'est possible, sauf au moment du renouvellement dans le cas de l'octroi?

M. Johnson: C'est cela.

M. Pagé: Et dans le cas du refus? Aucun autre moyen, le gars ne sera jamais entrepreneur de sa vie?

M. Johnson: Non, il peut aller en appel. M. Pagé: S'il est allé en appel.

M. Johnson: II n'y a rien qui empêcherait théoriquement, au niveau du renouvellement, la régie de décider de changer d'idée. Cela n'empêcherait rien.

M. Pagé: Alors, même après la décision du tribunal, suite à l'appel, la régie pourrait changer d'idée?

M. Johnson: Oui. Théoriquement.

M. Pagé: De son propre chef, suite à une nouvelle demande.

M. Johnson: C'est cela, c'est au niveau du cas par cas. Il fait une nouvelle demande trois ans après et, en attendant, de toute façon, il peut travailler pour une autre entreprise.

M. Pagé: Vous allez consigner les décisions rendues par la régie, je présume, là-dessus?

M. Johnson: Oui, c'est tout écrit parce que c'est susceptible d'appel.

M. Pagé: J'en conviens. Mais est-ce que ce serait consigné un peu comme les cas, par analogie, qui sont soumis au Protecteur du citoyen qui nous fournit un rapport et qui nous donne une description des cas et tout cela? Est-ce qu'il y aura moyen pour les parties en cause, les parties patronale, syndicale et le Parlement, de prendre connaissance des fondements sur lesquels se guide en général la régie pour décider?

M. Johnson: Chaque cas est motivé. Cependant, dans son rapport annuel, la régie ne fait pas comme le Protecteur du citoyen. Elle ne peut pas se mettre à identifier les personnes, etc., mais elle fournit des données sur ces questions.

M. Pagé: Bonne chance avec votre pouvoir discrétionnaire!

Le Président (M. Clair): L'article 7 est-il adopté? Adopté. J'appelle l'article 8.

Cautionnement

M. Johnson: Modification qui a pour but, notamment, de remplacer le genre de cautionnement actuellement prévu à la loi et de permettre à la régie d'exiger, par règlement, un cautionnement des entrepreneurs de construction qui exécutent ou font exécuter des travaux de construction relatifs aux bâtiments résidentiels. Elle donne également à la régie le pouvoir de constituer par règlement un fonds d'indemnisation en remplacement de cette exigence de cautionnement. Enfin, elle maintient le pouvoir actuel de la régie d'exiger de toute personne physique, société ou corporation qui demande une licence un cautionnement qui soit payable au nom du ministre des Finances dans le but d'indemniser ses clients dans l'éventualité d'une fraude, d'une malversation ou d'un détournement de fonds. La dernière partie existe déjà. (17 h 45)

M. Pagé: En fait, c'est pour couvrir les constructions résidentielles. Est-ce cela?

M. Johnson: Pardon?

M. Pagé: Est-ce que c'est pour couvrir spécifiquement les constructions résidentielles?

M. Johnson: C'est pour permettre d'avoir un régime particulier. Le cautionnement peut être un régime particulier...

M. Pagé: Oui.

M. Johnson: ... dans le secteur résidentiel par opposition au secteur commercial ou au secteur industriel. Évidemment, les exigences du marché sont différentes.

M. Ciaccia: Pourquoi avez-vous vu la nécessité d'amender la loi dans ce sens? Depuis 1975, il faut une licence. Il faut démontrer une certaine solvabilité. Pourquoi ajouter...

M. Johnson: Parce que la régie croyait avoir ce pouvoir et cela a été déclaré ultra vires par la Cour supérieure. C'est aussi simple que cela.

M. Pagé: Pour les résidences.

M. Johnson: Ce qui nous a amenés à vouloir, entre autres, faire adopter cela le plus rapidement possible à cet égard, c'est qu'il y a un jugement de la Cour supérieure qui date... Je m'excuse. C'est une opinion du contentieux du ministère de la Justice. C'est une erreur.

M. Pagé: C'est un peu différent.

M. Ciaccia: Oui, c'est un peu différent.

M. Johnson: Je m'excuse. C'est une opinion du contentieux du ministère de la Justice et c'est également dans le cadre de la décision de la Société centrale d'hypothèques.

M. Ciaccia: Mais pourquoi — je reviens à la même question, le fait que le contentieux croit que vous avez besoin d'amender la loi pour donner ce pouvoir — voulez-vous donner ce pouvoir? Les règles n'opèrent-elles pas maintenant? Ne sont-elles pas adéquates?

M. Johnson: C'est cela. L'ancienne loi parlait d'un cautionnement d'exécution. La notion qu'on recouvre maintenant n'est pas seulement l'exécution. C'est la façon de la maison. C'est une garantie sur la maison et non pas une garantie d'exécution, ce qui est différent.

M. Ciaccia: Vous commencez à multiplier tellement de restrictions que vous allez vous réveiller un matin et vous n'aurez plus d'entrepreneurs qui pourront fonctionner. Savez-vous cela?

M. Johnson: Vous charriez. Voyons donc! M. Ciaccia: Non. Vous avez...

M. Johnson: II y en a déjà 800 qui ont un cautionnement de ce type de l'Association provinciale de constructeurs d'habitations du Québec.

M. Ciaccia: S'ils l'ont, pourquoi alors ajouter à cela? Si les lois opèrent maintenant avec la concurrence et tout cela — c'est la raison de ma question originelle — pourquoi avez-vous maintenant besoin d'ajouter cela?

M. Johnson: J'aime autant dire tout de suite au député de Mont-Royal que, s'il veut continuer là-dessus, je n'ai pas d'objection. Quant à moi, je pense que, pendant un quart d'heure tout à l'heure, j'ai déballé tout ce que j'avais à déballer sur la question. Je peux difficilement ajouter plus que cela.

M. Ciaccia: Ce n'est pas la même question. Je vous questionnais tantôt, M. le ministre, non pas sur l'article 34 et le pouvoir de demander un cautionnement pour la construction dans le domaine résidentiel. Je vous posais des questions sur les garanties.

M. Pagé: Avez-vous eu beaucoup de demandes, entre autres, concernant des cautionnements?

M. Ciaccia: Ce n'est pas la même chose.

M. Pagé: Y a-t-il eu des demandes qui vous ont été communiquées? Vous êtes-vous vu dans l'obligation de répondre non à des personnes qui ont communiqué avec la régie?

M. Johnson: On n'a pas eu de demandes

parce qu'on n'a pas fourni un tel plan jusqu'à présent. Les associations qui en fournissent ont eu beaucoup de demandes.

Le Président (M. Clair): L'article 8.

M. Ciaccia: Ce n'est pas la même chose que le plan de garantie.

M. Johnson: Oui. C'est à cela qu'on se référait tout à l'heure. C'est par l'article 34 qu'on valide l'article 5 ou l'article 6 sur lequel on a eu cette longue discussion.

M. Ciaccia: Ce sont les associations qui accordent les plans de garantie.

M. Johnson: La même chose. On permet à la régie, en l'absence... Il y a deux choses qui vont se produire. Ou les associations en font ou elles n'en font pas. Si elles en font, la régie peut décider, par ailleurs, au cas où elles exerceraient un pouvoir discrétionnaire et discriminatoire, de permettre à ceux qui ne peuvent pas l'obtenir de l'association de se prévaloir de celui de la régie. Ou encore elles n'en font pas et, à ce moment-là, la régie peut l'imposer.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je regarde l'article 8, M. le Président. "La régie peut, par règlement..." On donne à la régie l'autorisation de le faire si elle juge bon de le faire. C'est cela. C'est à sa discrétion.

M. Johnson: Non, pas tout à fait.

M. Roy: Écoutez! Je lis la loi.

M. Johnson: Non. Je m'excuse. C'est "peut" et il y a eu une longue discussion impliquant l'opinion du juge Pigeon de la Cour suprême sur toute cette notion en droit statutaire quant au mot "peut". Dans le cas, par exemple, de l'émission d'un permis, etc., le mot "peut" signifie "doit" et cela donne ouverture à un mandamus. Il faut bien se comprendre.

M. Pagé: Quand les conditions sont remplies, le "peut" devient "doit".

M. Johnson: C'est cela.

M. Pagé: Bon! On a fait le même cours. On s'entend.

M. Johnson: L'objectif, c'est de faire en sorte, dans le secteur des cautionnements domiciliaires, ce ne soit pas un pouvoir discrétionnaire qui sort des nuages, c'est la formulation juridique, de dire que la régie peut, si les associations ne le font pas, décider de le faire, l'objectif étant de couvrir les consommateurs, d'y inclure les constructeurs, cela peut être fait par les associations, et si ce n'est pas fait par elles, ce sera fait par la régie. C'est tout. Ce n'est pas "peut" dans les airs, peut-être... L'objectif du gouvernement, en votant cette loi, c'est de protéger les consommateurs pour le faire. C'est un pouvoir habilitant tout simplement.

M. Roy: J'aimerais aller peut-être un peu plus loin, M. le Président, parce qu'il y a différentes catégories d'entrepreneurs. Il y a aussi les sous-entrepreneurs. Il y a les gros et les petits entrepreneurs. J'aimerais savoir si, dans l'esprit du ministre, au moment où nous nous parlons, les règlements — le ministre doit certainement avoir à l'esprit les règlements qui seront en quelque sorte présentés au Conseil des ministres par arrêté en conseil, ces règlements seront approuvés par arrêté en conseil et si, d'abord, les règlements sont passablement établis à ce jour ou s'ils sont à établir et, ensuite, si on tient compte, dans les exigences, des petites entreprises.

Je suis bien d'accord, au niveau de la protection du consommateur — je ne veux pas remettre cela en cause, ni mettre cela en doute — mais pour les petites entreprises...

M. Johnson: Bon! La première chose, au niveau des règlements, il y en a 21 à la régie, au moment où l'on se parle, il en reste 2, dont celui-là. C'est qu'on va avoir enfin les assises juridiques précises pour le faire, l'opinion du contentieux de la justice. Deuxièmement, c'est l'entrepreneur général qui est couvert par cela et non pas les sous-entrepreneurs. Il demeure quand même que l'entrepreneur général, dans les circonstances, si jamais il voulait imputer cela à la faute ou à la malfaçon d'un de ses sous-entrepreneurs, a toujours son recours civil normal. Mais c'est évidemment une forme d'incitation aux entrepreneurs pour faire attention avec qui ils font affaires comme sous-entrepreneurs, ce qui est normal.

M. Roy: Est-ce que le ministre peut nous dire... On veut prendre les dispositions pour que les consommateurs soient protégés, parce qu'au niveau des cautionnements, au niveau des garanties, à ce niveau-là, il est évident que le niveau de protection que le ministre pourra aller chercher, le problème ne se pose pas pour les grosses entreprises. Le problème est plus difficile pour les petites entreprises, mais, si je soulève ce point, c'est parce qu'au niveau de la Régie des entreprises de construction — je comprends que la loi sera amendée — il y a des personnes qui ont été obligées de détenir une licence de la régie des entreprises de la construction qui ne prennent aucun contrat et qui ne travaillent même pas à forfait, qui ont été obligées d'avoir des cautionnements et de donner des garanties.

M. Johnson: Oui, mais, d'une certaine façon, je pourrais dire — et sans faire la comparaison, en se gardant bien de s'imaginer que c'est parfait — que n'importe quelle profession — prenons les professions couvertes par l'Office des professions — prévoit que, pour conserver son titre, par

exemple dans les cas de professions à titre exclusif et exercice exclusif, prenons les médecins, les avocats, les infirmières, etc., elle est obligée de payer une cotisation annuelle si elle veut garder ses droits. Si une infirmière décide de travailler une journée par semaine tous les six mois ou six mois par année, je veux bien, mais elle sera obligée de payer sa cotisation quand même, d'une certaine façon. D'autre part, en pratique, les montants dont on parle, dans le cas du régime dont on parle, c'est en moyenne $125 pour l'assurance par maison..

M. Roy: Pour l'assurance...

M. Johnson: Oui.

M. Roy: L'assurance pour cette protection.

M. Johnson: C'est cela, $125 par maison.

M. Roy: Mais, ce que je veux savoir, c'est si une distinction sera faite, parce qu'on va parler des artisans tantôt. Il y a des artisans qui vont travailler et qui vont avoir un statut spécial. Est-ce qu'ils seront tenus d'avoir les mêmes garanties, les mêmes obligations à ce niveau, au même niveau?

M. Johnson: On y viendra tout à l'heure. Cela vaudra peut-être la peine de revenir tout à l'heure. Il reste exactement quatre minutes...

M. Roy: En tout cas, la question est posée, je n'aimerais pas avoir à la reformuler, étant donné qu'on veut épargner du temps.

M. Johnson: D'accord.

Le Président (M. Clair): L'article 8 est-il adopté?

M. Roy: II faudra peut-être voir cela tout ensemble. On pourrait peut-être suspendre.

M. Johnson: Oui, suspendre l'article 8, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Alors, on passe à l'article 9.

Cas d'exemption

M. Johnson: II s'agit, en fait, de permettre à la régie, dans le cas de renouvellement de la licence, de prévoir par règlement les cas d'exception aux examens, comme c'est déjà prévu au niveau de l'obtention initiale de sa licence.

M. Pagé: Des cas d'exemption.

M. Johnson: Par exemple, celui qui aurait passé, dans le cas du renouvellement annuel, quatre examens successifs en quatre ans, pourquoi lui en faire passer un cinquième au bout de cinq ans et même, à cet effet, pourquoi lui en faire passer un la deuxième année? Il peut y avoir un renouvellement automatique à toutes fins utiles; il faut cependant que la régie conserve son pouvoir d'obliger...

M. Pagé: Cela veut donc dire que la régie, au chapitre de la connaissance qu'on a adopté tantôt, peut exiger un contrôle de la connaissance annuel de l'entrepreneur.

M. Johnson: Seulement dans les cas d'exception.

M. Pagé: Les cas d'exemption seront que l'entrepreneur n'aura pas suffisamment pratiqué son art et son métier pendant l'année?

M. Johnson: La plupart du temps — il ne faut pas oublier que l'objectif de la régie, c'est de protéger le consommateur — c'est quand ils ont reçu trop de plaintes. S'ils reçoivent beaucoup de plaintes au sujet d'un entrepreneur, ils peuvent se sentir...

M. Pagé: II passe les examens, mais il est incompétent.

M. Johnson: Je pourrais donner l'exemple au député de Portneuf qui est à l'Assemblée nationale depuis 1973; je ne sais pas s'il a pratiqué le droit depuis 1973.

M. Pagé: Je le pratique encore, d'ailleurs. M. Johnson: Ah bon!

M. Pagé: Je n'ai pas le choix. Avec la famille que j'ai, je pratique.

M. Johnson: C'est vrai pour la plupart des professions. Il peut arriver, à l'occasion, qu'on se sente justifié d'exiger de quelqu'un qu'il repasse des examens. Ce n'est pas nécessairement bon pour la vie. Il y a des changements technologiques, il peut arriver des événements dans la vie d'une personne qui font qu'elle n'est plus apte à faire certaines choses. On peut penser, par exemple, à un cas de maladie mentale qui survient chez un entrepreneur.

M. Pagé: Vous allez loin!

M. Johnson: On parle d'un cas concret.

M. Pagé: S'il est malade mental, je présume qu'il va avoir de la difficulté à signer des contrats pour construire quelque chose.

M. Ciaccia: S'il est malade mental, il n'opérera pas de l'asile.

M. Johnson: Vous connaissez comme j'en connais des gens de professions dites libérales que vous êtes parfois étonné de voir à certains endroits comme dans des palais de justice ou dans des salles d'urgence. La moyenne de la maladie mentale au Québec, comme dans le reste de l'Amérique du Nord,

est de 10%. L'incidence est à 10% et il y a des chances qu'il y ait un médecin sur 10, un avocat sur 10, un entrepreneur en construction sur 10 qui puisse avoir des problèmes.

M. Pagé: Un ministre sur 10.

M. Johnson: Cela prend de moyennes statistiques valables. Dans le cas des députés de Portneuf, cela ne pose pas de problème depuis 10 ans.

M. Pagé: II n'y en a pas, il n'y a aucun danger.

M. Johnson: Cela prend des moyennes statistiques valables; pas à 26, ne faites pas de statistiques là-dessus, sauf que vous êtes dans l'Opposition. En pratique, ce sont des événements qui peuvent se produire, c'est tout. Cela existe n'importe où, dans les corporations professionnelles comme partout ailleurs. Ce n'est rien de nouveau, ce n'est pas du droit nouveau et révolutionnaire.

M. Pagé: À ce moment-là, pourquoi la régie ne s'est-elle pas donné le pouvoir de retirer la licence?

M. Johnson: Elle a le pouvoir.

M. Pagé: Trop fort ne casse pas. Il y a deux possibilités: soit retirer la licence ou la convocation à un nouvel examen.

M. Johnson: Est-ce qu'on va faire parader les 14 000 entrepreneurs en construction du Québec à tous les ans? Est-ce que c'est ce qu'on veut? Si on parle de restrictions comme le député de Mont-Royal en parlait, c'est ce que cela impliquerait, décider de ne pas leur donner le pouvoir; ils vont les faire parader à tous les ans. On dit non. Il y a des cas où, exceptionnellement, ils peuvent décider de recommencer les examens, etc. C'est tout simplement cela.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est 18 heures, est-ce qu'on peut adopter l'article 9?

M. Roy: Non, M. le Président. M. Pagé: Non, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Nous suspendons les travaux de cette commission jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise de la séance à 20 h 15)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre reprend ses travaux. Au moment où nous avons suspendu la séance, à 18 heures, nous avions suspendu l'étude de l'article 8, et nous en étions à l'article 9.

M. Ciaccia: Nous ne l'avons pas suspendu, nous n'avions pas fini.

Le Président (M. Clair): Nous avions suspendu l'étude de l'article 8.

M. Pagé: Nous avions suspendu l'étude de l'article 8, c'est cela.

Le Président (M. Clair): Et nous en étions à discuter de l'article 9. C'est même le député de Beauce-Sud qui avait manifesté le plus intense désir d'intervenir, à l'article 9.

M. Johnson: Nous pourrions peut-être reprendre l'article 8, à ce moment.

M. Pagé: Lorsqu'il reviendra.

M. Johnson: Nous étions sur le point de l'adoption possible de l'article 9. Oui, c'est cela. Nous avions décidé de suspendre l'article 8 et de commencer l'article 9, ce que nous avons fait. Nous n'avons cependant pas adopté l'article 9.

Le Président (M. Clair): Ni l'article 8.

M. Johnson: Donc, par définition, ni l'article 8, dans la mesure où nous l'avons suspendu. Puis-je suggérer, M. le Président, que nous terminions l'article 9, dont nous avions, à toutes fins utiles terminé la discussion, que nous passions à son adoption et que nous revenions ensuite aux articles 8 et 10?

M. Pagé: M. le Président, mon collègue a des questions à poser.

M. Johnson: Sur l'article 9?

M. Pagé: Sur l'article 8. Je crois qu'il serait de mise d'attendre le député de Beauce-Sud.

M. Johnson: Qui est en Chambre en ce moment et qui participe à un débat.

M. Pagé: II sera ici dans quelques minutes. M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: ... profitant de l'absence du député de Beauce-Sud, est-ce qu'on me permettra de dire ceci? J'ai dû m'absenter une demi-heure avant le souper, pour des raisons fort simples, c'est que je n'en pouvais plus. Il y a eu un article adopté, je n'ai pas l'intention de le reconsidérer ou d'argumenter.

M. Johnson: Consentement.

M. Chevrette: Je veux seulement faire un commentaire et une suggestion au ministre.

Considérant l'article 7 qui a été adopté avant le souper par la commission, au niveau de l'étude article par article, cela peut être interprété comme ayant deux poids deux mesures, si on considère le statut de l'employeur par rapport à la loi 30 existant pour les salariés de la construction, ce qui a été adopté sous le régime Bourassa, en fonction de la présomption de culpabilité.

M. Pagé: C'est cela. Nous étions pour y revenir. C'est très bien.

M. Chevrette: Personnellement, M. le ministre, compte tenu que cela peut être interprété de cette façon, je vous demanderais une chose. Est-il possible, à court ou à moyen terme — je comprends que, même si on voulait que ce soit ce soir, on ne peut pas — qu'on puisse réviser la loi 30 pour placer les gens sur un pied d'égalité pour qu'il n'y ait pas de traitement divergent entre les salariés et les employeurs? Si on est capable de tenir compte de la nature de l'infraction au niveau des employeurs dans l'octroi d'une licence, on doit être capable de tenir compte de la nature de l'infraction dans l'octroi d'un poste ou la possibilité d'occuper un poste pour un leader syndical.

M. Johnson: M. le Président, sur cet article, je comprends la préoccupation que cela pose. Cela semble effectivement être deux poids deux mesures. Je pense que la normalité, c'est ce qu'on voit dans le cas de la régie des entreprises, dans le cadre de la loi 110. La normalité, non pas nécessairement, mais en principe, c'est d'être trouvé coupable d'une infraction criminelle qui n'est pas reliée au domaine où il pourrait y avoir le refus de l'obtention d'une licence. C'est ce qui est normal, bien qu'à mon avis, comme l'a fort bien exprimé le président de la régie tout à l'heure, il ne faille pas considérer par définition que, si quelqu'un fait n'importe quoi en dehors de la construction, on ne doive pas en tenir compte au moment de l'obtention du permis. L'exemple qu'on donnait du fraudeur à l'extérieur de la construction, qui veut devenir un employeur, je pense qu'il serait normal de permettre à la régie d'exercer sa discrétion. Cependant, dans le cas du délégué syndical, le problème de fond que cela pose... Si on repense à la loi 30, je serais curieux de voir quel genre de formule on pourrait trouver par laquelle on permettrait à un organisme, quel qu'il soit, l'OCQ ou autre chose, de décider que le crime commis à l'extérieur de la construction par une personne fait qu'il devrait être ou ne pas être un délégué syndical; je vois mal le monde syndical accepter que quelqu'un de l'extérieur prenne une telle décision.

Cependant, je comprends la préoccupation du député de Joliette-Montcalm qui connaît fort bien ce problème. Le gouvernement est prêt à le regarder au cours de l'année qui vient. Je peux m'engager à cela sans problème.

M. Chevrette: Je vous remercie, parce que les gens sont sans nuance, quand on fait référence à certaines lois ou à certains rapports. Je sais qu'il est facile de sortir le rapport Cliche et probablement de le citer; je rencontrais mon ami de Portneuf tantôt avec le rapport entre les mains.

M. Pagé: Tantôt, nous allons le citer.

M. Chevrette: II se fera sans doute un plaisir de le citer. Je voudrais tout de suite dire que le tout se situe dans un contexte bien identifié, bien défini, dans le cadre d'une preuve bien authentique et bien définie. Chaque chose en son temps, on verra à répondre à chaque argument.

M. Pagé: Ne vous défilez pas tout de suite! Attendez l'offensive!

M. Chevrette: Ne vous en faites pas, je ne suis pas nerveux!

M. Johnson: L'article 9 est-il adopté?

Le Président (M. Clair): L'article 9 est-il adopté?

M. Pagé: Adopté.

M. Johnson: L'article 8, M. le Président, sur lequel on...

Le Président (M. Clair): J'appelle l'article 8. Le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 10.

M. Johnson: Non, l'article 8. L'étude en a été suspendue, on revient à l'article 8.

M. Pagé: Oui, mais elle n'a pas été suspendue jusqu'à l'application de l'article 9. Elle a été suspendue jusqu'à ce que la commission décide...

M. Johnson: Bien, elle a été suspendue, M. le Président, et je vous demande d'appeler l'article 8.

Le Président (M. Clair): Alors, il faudrait procéder par motion...

M. Pagé: M. le Président, je fais motion...

Le Président (M. Clair): M. le député, un instant, s'il vous plaît! Simplement pour interpréter les faits, habituellement, on se promène d'un article à l'autre sur simple consentement, sans problème, sauf que, si on veut être formel, j'interprète les faits qui se sont déroulés jusqu'à maintenant comme ayant eu une motion pour suspendre l'étude de l'article 8. On est rendu à l'article 9. On doit normalement procéder à l'article suivant. Il suffit de faire une motion pour dire qu'on revient à l'article 8.

M. Johnson: M. le Président, plutôt que de faire une motion pour savoir si on revient à l'arti-

de 8 et nous exposer à ce que vous savez... D'abord, je me permets de considérer que, comme un membre du conseil exécutif a l'initiative législative en commission de demander la suspension d'un article, ce n'est pas une motion. Cependant, je veux bien qu'on continue parce qu'on rattachait cela dans la discussion, je pense, à la question de l'artisan. Au moment où on arrivera aux dispositions qui touchent l'artisan, on pourra, en bloc, considérer les articles sur l'artisan et l'article 8. Alors, l'article 10, M. le Président.

Le Président (M. Clair): L'article 10. Y a-t-il des interventions sur l'article 10?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

M. Johnson: En fait, c'est le droit d'appel, M. le Président. C'est simplement ce qui permet à la régie d'être avisée qu'il y a effectivement un appel en cour. La loi ne prévoyait pas que la régie elle-même pouvait être avisée que quelqu'un avait logé un appel au Tribunal du travail. C'est tout simplement une question de procédure. L'article 10 est-il adopté, M. le Président?

M. Pagé: M. le Président, à l'article 10, on stipule que l'appel doit être logé dans les 30 jours de la date à laquelle la décision a été rendue. Lorsque le requérant veut en appeler au tribunal, il doit faire parvenir un avis à la régie. Comment la régie avise-t-elle le requérant, si la requête est refusée? Est-ce qu'il y a des...

M. Johnson: La régie est tenue, dans les 30 jours, elle-même, d'émettre la licence. L'absence d'émission de la licence est un avis de non-réception. Je suppose qu'il y a une lettre qui est envoyée pour... 30 jours après la demande d'obtention de la licence de la part de l'entrepreneur, il reçoit un avis disant qu'il a obtenu ou non sa licence. S'il ne l'a pas obtenue à partir de ce jour, cet avis, l'avise qu'il a 30 jours pour aller en appel.

Est-ce que l'article 10 est adopté, M. le Président?

M. Pagé: Pas trop vite.

M. Ciaccia: Y a-t-il des délais pour rendre la décision sur un tel appel?

M. Johnson: Ce sont les délais du Tribunal du travail.

M. Ciaccia: II n'y a pas d'appel? Il n'y a pas de délais pour...

M. Johnson: II n'y a jamais de délais pour rendre jugement devant les tribunaux.

M. Ciaccia: Mais est-ce que cela comprend le cas où un entrepreneur ne se voit pas renouveler sa licence? Il peut avoir des travaux en cours...

M. Johnson: Si c'est un non-renouvellement, oui. C'est théoriquement possible.

M. Ciaccia: C'est possible. Vous ne spécifiez pas dans les articles 9 ou 10 la façon d'enlever cette licence.

M. Johnson: Non.

M. Ciaccia: Alors, s'il y a des travaux en cours, on fixe un délai pour faire l'appel, mais on ne fixe pas de délai pour rendre une décision. Qu'est-ce qui arrive?

M. Johnson: Que je sache, il n'y a aucune de nos lois qui impartit à un tribunal un délai pour rendre une sentence.

M. Ciaccia: Mais il n'y a aucune loi non plus qui enlève le droit à quelqu'un qui est en cours d'opération de ses affaires... C'est un peu une loi d'exception.

M. Johnson: Absolument pas! M. Ciaccia: Mais oui.

M. Johnson: II y a des précédents dans ce domaine et dans l'ensemble du droit administratif chaque fois qu'il est question du renouvellement d'un permis, d'une licence, d'une autorisation, d'un permis spécial. Dans l'ensemble de notre droit administratif — je ne peux pas en citer de précis pour le moment mais j'en ai déjà eus à l'esprit et je suis sûr qu'on pourrait faire une longue nomenclature de dispositions qui prévoient qu'un permis... Toute la réglementation, ne serait-ce que dans le secteur municipal, dans le secteur...

M. Ciaccia: Je comprends mais les conditions ici sont peut-être un peu différentes. Supposons que quelqu'un a un chantier où il y a des travaux en cours, des hypothèques financières, vous ne dites pas dans votre loi que si dans tel cas de telles conditions existent, vous devez au moins renouveler la licence pour un certain délai; vous vous gardez le droit arbitraire, discrétionnaire de renouveler ou de ne pas renouveler.

M. Johnson: Comme quelqu'un qui aurait...

M. Ciaccia: Alors, il y a des conséquences qui sont peut-être beaucoup plus différentes. Je ne conteste pas ce que vous dites à savoir que dans d'autres tribunaux administratifs, dans le droit municipal, on peut enlever des licences. Certainement, on peut en enlever — on a enlevé une licence à Roncarelli; cela lui a pris quinze ans avant d'aller en cour et obtenir un jugement de la Cour suprême qui était inutile pour lui.

M. Pagé: II était dans la rue.

M. Ciaccia: II était dans la rue à ce moment-là. Peut-être que des erreurs du passé on pourrait apprendre un peu et essayer de rédiger nos lois d'une façon un peu plus raisonnable et qui protège la population et les gens concernés; ce

n'est pas toujours à coups de matraque qu'il faut y aller.

M. Chevrette: ... d'exemples...

M. Ciaccia: Je vous donne des exemples; montrez-moi comment ces erreurs ne pourraient pas se produire avec la présente loi et peut-être allez-vous répondre à mes objections.

M. Johnson: M. le Président, je pense que c'est une façon de voir les choses. Quelqu'un qui est chauffeur de taxi, qui perd son permis de conduire parce qu'il a écrasé des gens, je veux dire que c'est clair, il perd son permis de conduire et, en même temps, il perd son taxi. C'est exactement cela.

M. Pagé: Ce ne sont pas les mêmes comparaisons.

M. Johnson: C'est exactement la même chose.

M. Ciaccia: Je ne pense pas, avec tout le...

M. Johnson: C'est une façon de voir les choses; c'est celle du député de Mont-Royal mais je ne les vois pas comme cela.

M. Ciaccia: C'est une façon mais elle ne répond pas aux objections que j'ai soulevées. Vous nous donnez comme réponse: Cela ne fait rien, il peut avoir $1 million ou $2 millions en jeu, il peut avoir 50, 60 ou 100 employés, il peut avoir des obligations financières...

M. Johnson: Le permis de conduire d'un chauffeur de taxi, ce n'est pas des millions mais c'est important.

M. Ciaccia: Si vous avez... On n'étudie pas la loi du taxi. Peut-être que si on étudiait la loi du taxi, j'apporterais d'autres objections parce qu'il y a des erreurs dans d'autres lois mais ce n'est pas une raison pour répéter ces erreurs dans cette loi-ci. Je n'accepte pas ce genre de discussion, de comparaison.

M. Johnson: En fait, c'est la loi que le gouvernement libéral a adoptée en 1975 mot pour mot; il n'y a pas un iota de changé à l'égard de cela.

M. Ciaccia: J'avais un peu plus confiance au gouvernement libéral en 1975 que je n'en ai au vôtre et j'aurais peut-être besoin d'un peu plus de protection à votre égard.

M. Johnson: Ce sont les mêmes lois.

M. Ciaccia: Mais ce ne sont pas les mêmes gens qui les appliquent.

M. Johnson: Ah bon!

M. Ciaccia: C'était la première fois que de telles lois étaient rédigées et peut-être n'a-t-on pas prévu certaines lacunes, comprenez-vous?

M. Chevrette: Y compris la loi 22.

M. Ciaccia: Maintenant, on peut les améliorer.

M. Johnson: M. le Président...

M. Ciaccia: Peut-être qu'en 1975, on aurait dû prévoir de telles circonstances; on ne l'a pas fait; ce n'est pas une raison pour ne pas le faire aujourd'hui.

M. Johnson: M. le Président, si vous me permettez. Je dois dire ici, à la défense des officiers et du personnel de la Régie des entreprises de construction qui ne sont pas ici encore une fois pour pouvoir se justifier, que ce que vient de dire le député de Mont-Royal m'apparaît inadmissible. Les gens qui appliquent cette loi sont les fonctionnaires de la Régie des entreprises de construction et dire que cela varie d'un gouvernement à l'autre, je pense que cela relève du type de conception politique qui se fait le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je vais invoquer l'article...

M. Pagé: Oui, défends-toi.

M. Ciaccia: Je vais me défendre, je vais invoquer le règlement mais je vais prendre mon droit de parole. Vous m'avez imputé des paroles que je n'ai pas dites. Ce n'est pas contre la régie, comprenez-vous? Ce n'est pas la régie...

M. Johnson: Qui applique?

M. Ciaccia: Un instant, je vous ai laissé parler.

Le Président (M. Clair): À l'ordre s'il vous plaît, un à la fois!

M. Ciaccia: Ce n'est pas la régie qui nous a présenté ce projet de loi, c'est le gouvernement du Parti québécois et le gouvernement du Parti québécois peut amender et changer la loi. Je n'ai imputé aucun motif à l'administration de la régie mais j'ai mis en doute l'administration du gouvernement et c'est tout en mon droit de le faire; ce n'est pas la première fois et ce n'est pas la dernière fois que je vais le faire. Je mets en doute la façon dont certains pouvoirs que vous vous donnez, certains pouvoirs de réglementation... C'est le lieutenant-gouverneur en conseil qui a certains pouvoirs, ce n'est pas la régie dans cette loi; c'est le Conseil des ministres. Je voudrais m'assurer qu'il y ait une certaine protection contre l'arbitraire des règlements et en plus de cela, sans imputer de motifs à la régie, on a le droit d'essayer d'améliorer la loi pour ne pas que certains abus se fassent involontairement ou autrement. C'était là

le but de mes remarques. C'est l'esprit dans lequel je les ai faites. (20 h 30)

M. Johnson: L'article est-il adopté, M. le Président?

M. Ciaccia: Non, il n'est pas adopté.

M. Pagé: J'aimerais demander au président de la régie combien de licences, soit en nombre exact ou en pourcentage, sont retirées par année à la lumière de l'expérience que vous avez? Comment cela évolue-t-il? On parle de quoi dans le moment?

M. Johnson: II y a une cinquantaine de licences qui sont refusées à toutes les semaines. Cela peut être de nouvelles demandes comme cela peut être des demandes de renouvellement.

M. Pagé: Qui sont révisées?

M. Johnson: Qui sont refusées. Par semaine.

M. Pagé: Par semaine.

M. Ciaccia: Combien de renouvellements. Combien y en a-t-il?

Une voix: ... la différence.

M. Johnson: II y en a peut-être un tiers qui seraient des renouvellements.

M. Ciaccia: Jusqu'à maintenant, est-ce qu'il y a eu des renouvellements refusés pendant qu'il y avait des travaux en cours?

M. Johnson: C'est bien possible. Je peux cependant rassurer le député de Mont-Royal. Même si je maintiens que la responsabilité de l'application de la loi, et c'est très clair, appartient à la régie — le rôle du gouvernement, c'est de définir cette loi et c'est également le rôle du législateur, quoi qu'il ait dit tout à l'heure — je n'ai jamais reçu, sauf peut-être une fois, depuis un an et demi, de lettres, de télégrammes, de demandes, d'exigences de personnes qui s'étaient vu refuser des licences au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. C'est peut-être arrivé une fois. Je pense qu'on peut dire que cela n'a pas d'impact significatif.

M. Pagé: D'ailleurs, ce n'est pas là que cela doit être adressé.

M. Johnson: Effectivement, je pourrais vous donner des exemples. J'ai déjà reçu des lettres, des télégrammes et des appels téléphoniques sur le règlement de placement. C'est l'OCQ qui l'applique, mais le ministre du Travail est responsable de la loi. De la même façon, à la Régie des entreprises de construction, on peut recevoir des lettres, des appels téléphoniques, des plaintes ou des commentaires.

M. Pagé: On ne peut pas employer cette comparaison. Le règlement de placement, d'une part, c'était vous autres qui l'aviez préparé, qui l'aviez adopté au Conseil des ministres. Probablement que ces appels téléphoniques et ces télégrammes étaient pour vous dire que ces gens étaient contre l'application du règlement de placement ou qu'ils se sentaient lésés.

M. Johnson: Les règlements de la régie également, c'est le gouvernement qui les a adoptés.

M. Pagé: Oui, quoiqu'il soit plus explicable que la personne qui se voit refuser une licence par la régie s'en réfère directement à la régie. De toute façon, M. le Président, j'aimerais demander au président de la régie s'il a fait une évaluation du nombre d'entrepreneurs qui évoluent ou qui font affaires actuellement chez vous sans licence de la régie.

M. Johnson: À peu près 5%, dit-on. Mais de très petits entrepreneurs, à ce qu'on me dit.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'il y a d'autres intervenants à l'article 10?

M. Pagé: Vous prenez votre évaluation de 5% à partir d'inspection? C'est à partir de quoi?

M. Johnson: À partir des données fournies par l'inspection de la régie et de l'Office de la construction du Québec parce que les inspecteurs de l'office peuvent être à même de constater cela dans le cadre normal de leur travail.

M. Pagé: Une information que j'ai reçue veut qu'il y ait, et cela aurait été — je le mets bien au conditionnel — confirmé par l'Office de la construction du Québec, une information veut qu'il y ait, à certaines périodes de l'année, plus de 2000 entrepreneurs qui évoluent sans licence. Est-ce possible?

M. Johnson: Compte tenu de l'espèce d'entre-deux-chaises dans lequel sont situés les artisans en ce moment, c'est probable, si on parle d'artisans à ce titre-là.

M. Pagé: D'accord! Alors, c'est probable qu'actuellement, même avec la loi qu'on a, même avec les règlements qu'on a, même avec les inspecteurs qu'on a, il est probable qu'on a 2000 entrepreneurs qui, dans le courant d'une année, selon la période, peuvent évoluer sans licence.

M. Johnson: Oui, mais dont la majorité, de l'avis de la régie, sont des artisans et on a expliqué, je pense, jusqu'à maintenant, que l'encadrement juridique des artisans est réglementaire, je veux dire que c'est entre deux chaises. C'est ce que la loi vise à pallier.

M. Pagé: Vous allez régler ça comment avec vos douze inspecteurs et l'obligation pour l'artisan

de détenir une licence? Cela ne changera pas beaucoup à ce chapitre.

M. Johnson: Au niveau de l'émission des licences, avec les ententes avec l'Office de la construction, les Centres de main-d'oeuvre du Québec, ça ne devrait pas poser de problèmes énormes. Deuxièmement, douze inspecteurs, ça peut vouloir dire, à toutes fins pratiques, un inspecteur qui couvre à temps plein deux régions du Québec, si on prend les régions administratives. Il n'est évidemment pas question d'avoir des gens qui font ça à temps plein; ce n'est pas nécessaire, à mon avis.

L'évaluation concrète qui est faite de ça, c'est qu'il est possible de le faire. D'autre part, au niveau du suivi et du contrôle, compte tenu du fait que l'OCQ a également un rôle au niveau de la compilation des données, il y a une espèce d'autopoliçage qui peut se faire.

M. Pagé: Je ne comprends pas, M. le Président. Le gouvernement a, d'une part, à intervenir dans une loi sur la Régie des entreprises de construction, par des règlements. Le gouvernement, il y a quelques minutes, invoquait que la très grande majorité de ces dispositions est dans un but de protection du consommateur. Je ne vois pas en quoi le gouvernement peut être justifié de laisser aller. Jusqu'à maintenant, dans le débat, il ne me paraît pas que le gouvernement veuille ou puisse nous donner la garantie qu'il a le contrôle, au niveau de la licence, sur les 2000 entrepreneurs qui, à certaines périodes de l'année, évolueraient sans licence. Ce n'est pas garanti que cela va être changé avec le projet de loi. Tout ça dans l'esprit de la protection du consommateur que vous défendez.

M. Johnson: Disons qu'on exclut le secteur industriel et commercial; on parle du secteur résidentiel, en pratique, une personne qui fait venir quelqu'un chez elle pour faire des travaux assimilables, en vertu de la jurisprudence dans la construction, à des travaux dits de construction. Il y a un moyen, entre autres, comme c'est le cas des lois de protection du consommateur, etc., c'est d'informer adéquatement le monde et de dire: Quand il y a quelqu'un qui vient faire des travaux chez vous, demandez-lui sa licence, au départ.

M. Chevrette: Est-ce qu'il y aurait possibilité — je ne le sais pas, je pose la question — que les municipalités délivrent un permis de construction en fonction de la connaissance du fait que l'entrepreneur artisan soit un licencié?

M. Johnson: C'est ça. Il y a un règlement qui est en préparation...

M. Chevrette: Qui tiendrait compte de ça.

M. Pagé: II y en avait déjà un, mais il n'a jamais été appliqué. La question avec les municipalités.

M. Johnson: II n'y a jamais eu de règlements dans ce domaine. C'est ça, la distinction. Il y en a un qui est en préparation, mais il n'y en a jamais eu dans ce domaine.

M. Pagé: Ce qu'on a vu tout à l'heure à propos des municipalités, M. le Président m'a dit que ce n'était pas appliqué. C'était quoi? L'obligation pour la municipalité de divulguer...

M. Johnson: II n'y avait pas de règlement.

M. Pagé: Bien oui, mais vous n'aviez qu'à en adopter un, vous aviez ça dans la loi. C'était dans la loi.

M. Johnson: Cela aurait été théoriquement possible, c'est vrai.

M. Pagé: C'était dans la loi. Vous aviez le pouvoir, depuis deux ans, d'intervenir par voie de règlement et Dieu sait si vous avez le règlement facile. Vous aviez le pouvoir d'intervenir.

M. Johnson: C'est ça. Il y a une nouvelle direction à la Régie des entreprises de construction depuis à peu près six mois et ils sont en train de souffler sur la poussière de certains dossiers. C'est en préparation, effectivement.

M. Pagé: Le ministre se défend avec des soufflements sur la poussière; ce n'est pas ce que je veux avoir comme réponse. Je constate que la Régie des entreprises de construction, en vertu de la loi qui la guide, avait une disposition qui lui permettait de pallier au fait qu'on a peut-être, à certaines périodes de l'année, 2000 entrepreneurs qui évoluent sans licence, ce qui remet en cause le principe de la protection du consommateur. Il aurait suffi pour le gouvernement d'adopter un règlement pour appliquer un article de la loi pour pallier à ça. Le gouvernement ne l'a pas fait, purement et simplement. C'est ce que je suis obligé de constater.

M. Johnson: La seule réponse que je peux donner au député de Portneuf, c'est que cela n'a pas été fait antérieurement par ceux qui étaient à la régie avant, c'est tout. Il y a un règlement qui est en préparation.

M. Pagé: Oui, mais ce n'est pas à eux d'adopter le règlement; c'est à vous autres.

M. Johnson: On présume qu'en général, même si le gouvernement a le pouvoir d'adopter de la réglementation, compte tenu des priorités qui peuvent exister dans les décisions administratives dans un gouvernement où il y a 30 000 fonctionnaires, tout ne prend pas le même rang. La régie n'avait pas pris, jusqu'alors, l'initiative de faire ce règlement.

M. Pagé: Bon, c'est la faute de la régie. C'est ça que ça veut dire.

M. Johnson: Antérieurement à la nomination de M. Gagnon, je dirai que la régie, à cette époque, avait peut-être d'autres priorités. Cela peut se comprendre, dans une régie d'État, qu'il y ait d'autres priorités à un moment donné. C'en est une en ce moment, ils sont en train de l'élaborer.

M. Pagé: Ce n'est jamais votre faute.

M. Johnson: Parfois, parfois. Est-ce que l'article est adopté, M. le Président? L'article 10.

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Article 10, adopté. Article 11.

M. Pagé: L'article 11, M. le Président, est une modification de concordance devenue nécessaire avec les modifications proposées aux articles 4, 6 et 7, un article de concordance, simplement. C'est l'abrogation des articles 50 et 51, à cause de l'intégration des articles 31 et 33.

Le Président (M. Clair): Adopté.

M. Johnson: Adopté, M. le Président?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Adopté. L'article 11 est adopté. Article 12.

M. Johnson: L'article 12 a pour but d'exempter le constructeur propriétaire qui exécute lui-même, en partie, les travaux de construction visés aux paragraphes a) et b) de l'article 55 de la loi de l'obligation de détenir une licence.

Actuellement, seul le constructeur propriétaire qui exécute lui-même ses travaux de construction bénéficie d'une telle exemption.

En d'autres termes, cela permet à quelqu'un qui fait rénover sa propre maison, un constructeur propriétaire, de donner des sous-contrats, mais il n'a pas besoin, pour donner un sous-contrat à quelqu'un, d'une licence. C'est aussi simple que ça.

M. Pagé: Oui. J'aimerais demander au président...

M. Johnson: À l'exception cependant... oui, c'est bien évident qu'il s'agit du propriétaire lui-même, qui n'a pas besoin d'une licence. Le propriétaire de la maison n'a pas besoin d'une licence pour donner un contrat et un sous-contrat à quelqu'un chez lui.

M. Pagé: Je suis convaincu, M. le Président, que vous avez pris connaissance de cas où des individus qui désiraient se construire une maison, pour eux-mêmes et leur famille, ont demandé des licences à la Régie des entreprises de construction. Entre autres, on a vu plusieurs de ces cas qui sont présentement pendants devant la Cour fédé- rale, où c'était un moyen pour que le travailleur artisan puisse recevoir de l'assurance-chômage. Je sais que c'est pendant devant la cour fédérale actuellement, parce que c'est un litige.

M. Johnson: Jusqu'à maintenant, une personne qui s'occupait de sa propre maison, qui construisait sa propre maison et qui demandait une licence, on la lui refusait en lui disant qu'elle n'en avait pas besoin.

M. Pagé: Mais la régie en a déjà émis.

M. Johnson: Au constructeur propriétaire, possiblement, mais pas à des individus.

M. Pagé: À des individus, en tout cas, cela, c'est une autre affaire, mais elle en a déjà émis, à des individus, c'est certain.

Le Président (M. Clair): L'article 12...

M. Pagé: Non, attendez un peu. Vous semblez pressé, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Absolument pas. C'est simplement qu'à compter du moment où le silence se fait, je pose la question.

M. Pagé: Ah! vous savez... "Soit à l'égard d'une maison destinée à être habitée exclusivement par lui et sa famille."

M. le Président, je demanderais à mon bon ami, collègue et honorable député de Joliette...

M. Chevrette: Je vous assure de mon entière collaboration.

M. Pagé: On a veillé nous aussi jusqu'à 6 heures du matin...

M. Ciaccia: La meilleure manière de faire ça, vous savez comment c'est.

M. Pagé: ... cette semaine.

M. Ciaccia: C'est de ne rien dire. M. Johnson: Nous, on est en forme.

M. Pagé: Je comprends. Vous avez combien de personnes qui vous entourent, M. le ministre, vous, pour vous aider à préparer vos dossiers?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, nous en sommes à l'étude de l'article 12.

M. Pagé: Le ministre était interrogateur dans le commentaire qu'il formulait.

Le Président (M. Clair): Article 12. Son commentaire ne se rapportait pas à l'article 12.

M. Pagé: Bon. "Exclusivement par lui et sa famille." Est-ce à dire que le type qui construit un

duplex, disons qu'il envisage d'en habiter la partie de droite et qu'il envisage de louer la partie gauche, est-ce qu'il devra alors détenir une licence?

M. Johnson: Cela lui prend, théoriquement, sa licence.

M. Pagé: Cela lui prend sa licence. En ce qui concerne le paragraphe b), "pour tout ouvrage autre qu'une maison d'habitation, à l'usage exclusif de lui et de sa famille, il devra se prendre une licence." (20 h 15)

M. Johnson: C'est une autre exclusion; "n'est pas exigible", dit le texte au début.

M. Pagé: En fait, ça couvre la résidence, le garage, s'il décide de s'en construire un, deux ans après, tout ça.

M. Johnson: Son garage, c'est ça. Sa "shed".

Une voix: Sa boîte à lettres?

M. Johnson: "Shed", ça s'écrit, s-h-e-d.

M. Pagé: J'aimerais que le ministre me dise comment sera contrôlé le cas du professionnel de la construction résidentielle pour fins personnelles. Je m'explique. Il en construit une et il la vend, il en construit une autre et il la vend, il en construit une autre et il la vend. Qu'est-ce que vous allez faire avec ça?

M. Johnson: Si la vente est effectuée dans les deux ans, il est présumé avoir agi en tant qu'entrepreneur professionnel et l'avoir fait pour les fins de son commerce. Donc, on peut le poursuivre s'il la vend dans les deux ans. Je m'excuse, c'est un an; ce n'est pas deux ans. S'il la vend dans l'année qui suit, il est présumé en faire le commerce, à toutes fins utiles.

M. Pagé: M. le Président, j'aurais un amendement ici.

M. Johnson: À l'article 12?

M. Pagé: Oui. Changer le délai d'un an pour deux ans.

M. Johnson: Changer le délai d'un an pour deux ans.

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Clair): Où est-ce? À l'article 12, je ne trouve pas ça.

M. Pagé: Ajouter à...

M. Johnson: À quel article?

M. Pagé: ... l'article 55a, après...

M. Johnson: De la loi.

M. Pagé: Oui. Après les mots "sa famille", les mots "durant les deux années qui suivent la fin des travaux."

Le Président (M. Clair): Est-ce que je peux avoir le texte?

M.Johnson: M. le Président, je neveux pas faire un long débat sur la recevabilité, mais c'est seulement que le projet de loi ne vise pas à modifier l'article. La question d'un an existe au moment où on parle...

M. Pagé: Oui.

M. Johnson:... à l'article 55. Je ne voudrais pas créer un précédent. Par exemple, chaque fois que le ministre des Transports modifie le Code de la route — disons qu'il y a trois articles dans un projet de loi pour amender le Code de la route — est-ce que ça veut dire qu'en commission parlementaire on peut décider d'ajouter un nouvel article? Je ne le pense pas au plan de la procédure. Je ne voudrais pas créer de précédent, M. le Président.

M. Pagé: Voulez-vous dire par là que le projet d'amendement est irrecevable, M. le ministre? On pourra plaider sur la recevabilité.

M. Johnson: M. le Président, on va peut-être couper court à tout ça. Je m'excuse, c'est peut-être parce qu'on travaille trop vite. La formule était ironique, incidemment. C'est dans le règlement, un an.

M. Pagé: C'est dans le règlement.

M. Johnson : Ce n'est pas dans la loi ; donc, on ne peut pas l'amender. C'est aussi simple que ça, sauf que je tiendrai compte des revendications et ça me fera plaisir de recevoir des commentaires là-dessus. Je suis sûr que le président de la régie va en prendre connaissance.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde:... sur la question de la recevabilité, je pense que c'est ce qui a été soulevé par le ministre. Le fait que ce soit dans le règlement ne change pas du tout l'opportunité de le mettre dans la loi.

M. Johnson: C'est un nouvel article.

M. Lalonde: Oui. On a le droit d'ajouter. Le ministre se posait la question: Est-ce que par malheur, par grand malheur, lorsque le gouvernement décide d'ouvrir un débat sur un projet de loi, la méchante Opposition aurait la mauvaise inspiration d'ajouter quelque chose? Je pense que c'est réellement connaître peu...

Le Président (M. Clair): Je m'excuse de vous interrompre, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, mais, puisque vous voulez parler sur la recevabilité de la motion, j'aimerais d'abord en être saisi officiellement, puisque je n'ai...

M. Pagé: D'accord. Bon, on va tout vous dire.

Le Président (M. Clair):... qu'une vague idée du texte et de l'endroit où l'amendement se situerait.

M. Pagé: M. le Président, l'article 12 du projet de loi 110 fait référence à l'article 55a et b de la loi. L'amendement vise à ajouter à l'article 55a, après les mots "sa famille", les mots "durant les deux années qui suivent la fin des travaux." Cela permettra d'inclure dans la loi une disposition qui est peut-être actuellement prévue dans le règlement adopté en vertu de la loi.

Rien n'enlève la possibilité, pour la commission parlementaire, d'inclure ces dispositions dans le projet de loi 110, amendant ainsi l'article 55, de façon à rendre inopérant, l'article du règlement qui touche à cette question.

M. Johnson: M. le Président, sur l'amendement...

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité ou sur l'amendement?...

M. Johnson: Je pense qu'on ne discutera pas de la recevabilité.

Le Président (M. Clair): Je le déclare recevable.

M. Johnson: Bon. Alors, sur l'amendement, M. le Président, j'ai... pardon?

M. Lalonde: Je me posais la question, celui qui présente l'amendement, normalement, a le droit de représentation.

M. Johnson: Très bien, si le député de Portneuf veut prendre la parole.

Le Président (M. Clair): Si c'est lui qui requiert le droit de parole.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, cet amendement vise, comme j'ai eu l'occasion d'en faire part au début de mes commentaires sur l'application de l'article 55, à pallier à certains faits auxquels on a à faire face dans tout ce secteur de la construction d'habitations résidentielles. La Loi de la Régie des entreprises de construction a comme objectif ultime deux volets qui se rejoignent. Le premier volet est d'obliger tout entrepreneur à détenir une licence avec tout ce que ça peut impliquer comme normes, comme règlements et comme conditions. Le deuxième volet, qui est complémentaire, est d'assurer, de garantir au consommateur, à celui qui fait construire, à celui qui commande des travaux, à celui qui transige, sous contrat, etc., d'avoir une protection.

Or, il est un fait qui est indéniable, c'est que, de plus en plus, on voit — je pense que le parlementaire qui a le moindrement d'expérience dans ce secteur le constate — qu'il y a des professionnels de la construction résidentielle, non pas pour fins d'occupation familiale, mais pour fins de vente, une fois la maison déjà construite.

M. le Président, cet élément pouvait ou peut constituer un moyen, pour des personnes qui ne détiennent pas de licence, dans plusieurs cas, de passer outre à ce qui s'appliquait comme règlement, à ce qui s'applique comme loi. L'amendement vise donc essentiellement à rendre peut-être plus incitatives, plus coercitives les dispositions du règlement. L'article 55a peut être amendé, c'est ce qu'on fait par la motion d'amendement que je viens de déposer.

M. Johnson: M. le Président, ça vaudrait peut-être la peine d'y réfléchir. Je ne suis pas sûr que c'est comme ça, d'un coup sec, que ça peut se régler. Concrètement, en fait, le député de Portneuf, je suis sûr, doit penser au cas d'un artisan, par exemple, qui se construit un, deux ou trois bungalows par année et qui les revend. En pratique, on voit mal cette personne, il ne s'agit pas d'un entrepreneur, à toutes fins utiles, le faire pour elle-même. Il s'agit vraiment de celui qui essaierait de passer à côté de la loi pour en faire le commerce. En pratique, je pense qu'on peut difficilement le voir garder sur ses bras ses bungalows plus qu'un an.

Par contre, en mettant deux ans, on peut pénaliser quelqu'un qui, absolument de bonne foi, se construit sans licence pour des fins domiciliaires. On peut présumer que 24 mois, dans la vie d'une personne, ça peut l'amener à déménager. Cela peut aussi arriver à l'intérieur de douze mois, mais les probabilités... si on voulait pousser ça, on dirait: Pourquoi ne pas mettre cinq ans? Mais si on mettait cinq ans, on empêcherait le monde de déménager sans être dans l'illégalité.

M. Pagé: Cela n'empêche pas de déménager, voyons donc!

M. Johnson: II ne s'agit pas de dire que ça empêche les déménagements.

M. Pagé: C'est ça que vous dites.

M. Johnson: Je pense que, dans le fond, c'est ce que ça veut dire. Je suis sûr que le député de Mont-Royal ne sera pas d'accord avec ça. Ceci dit, nous sommes prêts à considérer, M. Gagnon, de la régie, qui est ici, est bien prêt à regarder ça, à consulter, à voir si ce ne serait pas opportun, au niveau du règlement, de mettre deux ans. Quant à moi, c'est une discussion qui devrait rester ouverte. C'est pour ces raisons, M. le Président, que je voterai contre l'amendement.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... c'est difficile de trouver la logique et la cohérence dans les propos du ministre qui vient de dire que l'amendement a une certaine valeur, qu'il est prêt à le considérer, sauf qu'il va voter contre. Je m'attendais qu'il conclurait, très honnêtement, intellectuellement honnêtement, en disant: Écoutez, on va le regarder, on va suspendre l'article et on va l'étudier.

On ne suspendra pas pendant deux jours. On peut suspendre pendant une heure ou quinze minutes. On va le regarder. On le suspendra et, après cela, on y reviendra. Comme il n'est pas sûr, il va voter contre. Je comprends qu'au bridge, on dit en anglais: "When in doubt, play trumps." Mais ici, on ne joue pas au bridge. Ce n'est pas un jeu. Bon! Il me semble que, si le ministre voit une certaine possibilité de valeur dans l'amendement, au lieu de voter aveuglément contre, il devrait consulter ses conseillers et suspendre l'article. En attendant, on pourrait passer à d'autres articles pour terminer le plus rapidement possible cette loi et revenir, à la fin, lorsque le ministre aurait eu les conseils qu'il désire.

M. Johnson: M. le Président, si vous me le permettez, pour répondre au député de Marguerite-Bourgeoys, ce n'est pas une affaire d'être certain ou pas. Je ne serai pas plus certain dans une heure. Je pense que c'est le genre de choses qu'on ne fait pas à la sauvette sur un coin de table. C'est le genre de choses qui méritent d'être regardées et, de toute façon, il y a un pouvoir réglementaire qui peut permettre de le regarder. Il ne s'agit pas de le faire à la sauvette.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal et, ensuite, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Ciaccia: M. le Président, je n'avais pas l'intention d'intervenir sur la motion d'amendement du député de Portneuf. Je ne voulais pas prendre tout le temps de la commission inutilement parce qu'il nous reste seulement trois heures. Mais, puisque le ministre a mentionné que je voterais contre, que je ne serais pas d'accord avec la motion d'amendement de mon collègue, le député de Portneuf, je me sens obligé d'affirmer que je suis en faveur de la motion du député de Portneuf et que je vais voter... Ah non! je suis intervenant et je n'ai pas le droit de vote, mais je l'appuie, même si c'est seulement pour qu'on sache au moins dans la loi quelles sont les règles du jeu, parce que maintenant on ne le sait pas. C'est un pouvoir de réglementation. Cela peut changer. Cela peut varier. Contrairement à ce que le ministre dit, je ne pense pas que l'amendement empêcherait la vente ou forcerait le déménagement. Pour ces raisons, je crois qu'on devrait appuyer la motion d'amendement du député de Portneuf.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Boucher: Je voudrais éclairer un peu ma lanterne, M. le ministre, au sujet de l'exemple que le député de Portneuf a donné, soit qu'un constructeur propriétaire pouvait construire une maison, la revendre, en construire une autre et la revendre. Y a-t-il des statistiques à l'intérieur du ministère démontrant que cet exemple s'est reproduit ou a été vécu par plusieurs constructeurs propriétaires?

M. Johnson: Je n'ai malheureusement pas de statistiques là-dessus, mais cela s'est produit dans certains cas. C'est quand même très rare.

M. Boucher: II est évident qu'il y a là un abus. Si cela se produit, il y a quand même un abus.

M. Pagé: D'une part, oui. Mais, d'autre part, pour ajouter à ce que vous dites...

M. Boucher: D'autre part, si cela peut se faire par règlement, au moment où le ministère constate l'abus, je pense qu'il peut y remédier par règlement. On n'a pas besoin d'amender une loi si un règlement peut tout simplement venir corriger cela au moment où on constate des abus. S'il n'y a jamais eu d'abus constaté à l'intérieur du ministère, je crois qu'il n'y a pas un danger imminent que des constructeurs propriétaires puissent abuser de la situation. À partir de ce moment-là, s'il n'y a jamais un abus, comme le ministre l'a laissé entendre — le député de Marguerite-Bourgeoys a semblé voir une certaine incompatibilité parce que le ministre disait qu'il allait voter contre la motion — c'est peut-être parce que, justement, cela peut s'amender facilement par règlement. On n'a pas besoin d'amender la loi pour cela. S'il s'agit de prolonger le délai pour éviter les abus, je pense qu'il s'agit d'un arrêté en conseil ou de la publication d'un règlement dans la Gazette officielle pour que cela puisse entrer en vigueur. S'il n'y a pas d'abus flagrant et une multiplication d'abus de ce genre, je ne vois pas l'importance de la motion à ce moment-ci.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde:... est-ce que le député de Rivière-du-Loup pourrait me dire le numéro de l'article qui permet de faire un règlement qui va satisfaire à l'amendement du député de Portneuf?

M. Boucher: On peut amender un règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, de la même façon...

M. Lalonde: Quel est l'article de la loi? M. Boucher: ... qu'on en produit un.

M. Lalonde: Quel est l'article de la loi actuelle qui va le permettre?

M. Johnson: En fait, c'est l'article 26, pour répondre au député de Marguerite-Bourgeoys, et

le pouvoir réglementaire qui découle de la loi qui revient à la régie. (21 heures)

M. Lalonde: L'article 26 permettrait, d'après le ministre, de déterminer la période...

M. Johnson: L'article 26 avec l'article 58k.

M. Pagé: M. le Président, est-ce que j'ai d'autres intervenants sur...

Le Président (M. Clair): Le député de Portneuf, pour sa réplique.

M. Pagé: Le ministre allègue que la régie, ses aviseurs et lui-même vont penser à cela. Il allègue de plus qu'il a le pouvoir d'intervenir par voie réglementaire. Le ministre soutient sur le fond de la question que cela pourrait affecter, être préjudiciable à des propriétaires, que cela pourrait éventuellement limiter des déménagements. À ce chapitre, je dirai au ministre que ces cas seront assurément traités au mérite de chacun. Ce que l'article et l'amendement visent, ce n'est pas d'embêter le type qui vient de se construire une maison lui-même, sans licence, pour fins d'habitation, et qui, parce qu'il est muté dans ses fonctions ou à son travail dans une autre région du Québec, vend sa maison. Ce n'est pas ce gars-là qu'on veut contrôler. C'est, au mérite de l'analyse de chacun des cas, la personne qui en fait une industrie. C'est sa principale fonction. M. le Président de la régie soutenait tout à l'heure, en réponse au député de Rivière-du-Loup, que cela ne représentait pas, à sa connaissance, beaucoup de cas. C'est probable et c'est explicable aussi, dans un sens. C'est que la régie tire ses statistiques et ses opinions des données qu'elle possède. La régie elle-même affirmait et confirmait tout à l'heure la possibilité qu'il y ait plus de 2000 entrepreneurs, 2000 personnes qui font du travail d'entrepreneur au Québec, sans détenir de licence. Ce sont ces personnes-là qui ne détiennent pas de licence, qui font de tels ouvrages et travaux régulièrement. Ce n'est pas le gros entrepreneur qui construit des maisons d'appartements et qui s'amuse le samedi matin à se construire des résidences et à les revendre. Cet aspect du règlement, cet aspect de la possibilité que certaines gens passent à côté de la loi ou du règlement, c'est beaucoup plus chez les 2000 qui, eux, ne prennent pas de licence et qui ne sont pas du tout contrôlés. On ne peut pas vraiment en arriver à un chiffre précis. On ne peut pas dire et conclure qu'il n'y en a probablement pas beaucoup; on n'a pas toutes les données en main.

Je suis surpris de constater que le gouvernement refuse mon amendement. C'est un amendement qui allait dans le sens d'une meilleure protection du consommateur, qui aurait obligé la régie à exercer un meilleur contrôle — et c'est ce que je souhaite — auprès des 2000 entrepreneurs qui travaillent sans licence. J'hésite à croire qu'avec une douzaine d'inspecteurs, par surcroît si ces données sont confirmées par l'OCQ, cela puisse être fait et contrôlé. Si mes collègues...

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Réellement, j'ai tenté de réfléchir un peu à la suggestion du ministre de confier à la législation déléguée le soin de dire combien de temps le constructeur propriétaire pourrait habiter cette maison qu'il a construite pour lui-même, cette maison destinée à être habitée exclusivement par lui et sa famille.

Vous savez que dans notre régime de législation, on a tendance à trop confier à la législation déléguée. On invoque à ce moment-là que c'est pour des motifs de souplesse, pour pouvoir changer plus facilement, sans recourir à l'Assemblée nationale. Mais, de plus en plus, vous savez qu'il y a une tendance contraire. On sent que dans la population on n'aime pas, justement, cette législation par décret, cette loi du prince, qui, souvent, sans consultation, décide du sort des gens. Alors, là, on parle d'un constructeur propriétaire. Ce n'est pas nécessairement le gros constructeur. Ce n'est pas nécessairement non plus un constructeur moyen. Il s'agit simplement du constructeur propriétaire qui veut construire une maison destinée à être habitée par lui et sa famille, de façon exclusive.

Pourquoi assujettir par règlement le temps qui sera déterminé, d'après le ministre, par le gouvernement? Il me semble qu'on devrait, dans un gouvernement qui a prêché depuis deux ans, un Parti québécois qui a prêché depuis dix ans la cohérence, qui a prêché la façon la plus claire possible, la plus facile à comprendre pour la population, la plus transparente, qui a prêché la limpidité... Comment se fait-il que ce gouvernement, que le ministre actuel du Travail, parce qu'on ne sait pas si on doit parler de ce projet de loi une autre année, à qui on va avoir affaire... Mais on a celui-ci, on va lui parler, le ministre du Travail actuel, député d'Anjou, pour deux ans ou à peu près...

M. Pagé: II y a le remaniement en janvier.

M. Lalonde: II y aurait un remaniement en janvier? Je voudrais quand même savoir si je parle au bon ministre.

Le Président (M. Clair): Adressez-vous au président, c'est peut-être préférable.

M. Lalonde : Est-ce que le président va être nommé ministre?

Le Président (M. Clair): Absolument pas, mais cela vous éviterait des écueils.

M. Pagé: Au gouvernement surtout.

M. Lalonde: Vous avez raison. Quand même, il faut prendre les choses telles qu'elles sont, aussi malheureuses qu'elles puissent nous paraître. Je ne parle pas de vous, M. le Président, vous êtes un excellent président, je ne sais pas comment vous seriez comme ministre. D'ailleurs, si je prétendais que vous serez ministre du Travail un jour, peut-être que le député de Joliette-Montcalm pourrait commencer à faire un peu de jalousie; je ne lui en veux pas à ce point. Il reste qu'on doit actuellement tenter de réduire le pouvoir du gouvernement. C'est à cela, au fond, que les populations tendent dans les démocraties de l'Ouest.

M. Johnson: Profondément. En général, de l'Ouest; il y a quelques exceptions au Moyen-Orient.

M. Lalonde: Disons. On peut se restreindre à l'Amérique du Nord, pourvu qu'elle inclue la Californie, qui nous a donné des leçons récemment.

M. Johnson: Au sud du 55e parallèle.

M. Lalonde: Est-ce qu'on doit rappeler au ministre ce qui s'est passé en Californie récemment?

M. Johnson: II y a eu des tremblements de terre.

M. Lalonde: Peut-être qu'il ne le sait pas, parce que c'est loin d'Anjou, mais quand même, je pense que c'est sérieux. J'ai entendu le ministre rire de ce que je vais dire; il devrait au moins attendre que je l'aie dit. Il va le regretter lorsque je l'aurai dit, parce que lui-même, j'en suis convaincu, dans son for intérieur, est en faveur du fait qu'on confie à la loi le plus grand nombre possible de critères lorsque cela affecte des populations et des clientèles.

M. Johnson: Je suis un démocrate.

M. Lalonde: Je viens de l'entendre dire — je ne sais pas si c'est enregistré — qu'il est démocrate.

M. Johnson: Pas avec M. Samson.

M. Lalonde: II faudrait consulter M. le député de Rouyn-Noranda à savoir s'il a eu un nouvel adhérent.

Le Président (M. Clair): On parle toujours des deux années qui suivent la fin des travaux?

M. Chevrette: Samson-Sévigny.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Johnson, Samson et Sévigny.

M. Lalonde: M. le Président, je suis constamment interrompu et je ne sais pas pourquoi.

M. Chevrette: C'est inquiétant.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député, vous étiez en train de parler sur la motion d'amendement du député de Portneuf, "durant les deux années qui suivent la fin des tra- vaux" à ajouter à la fin du paragraphe a) de l'article 55.

M. Lalonde: Une motion d'amendement très heureuse qui tend à réduire le pouvoir de décret du gouvernement. On nous a répondu d'une façon un peu arrogante, presque pas. J'en ai vu de l'arrogance, M. le Président, de ce gouvernement d'une façon épouvantable, et pas encore ce soir beaucoup. Il reste encore quand même deux heures et quelques minutes...

M. Ciaccia: Tu n'étais pas ici cet après-midi.

M. Lalonde: Apparemment, cet après-midi, il y en a eu plus, mais je ne sais pas pourquoi, je n'ai pas eu l'occasion de voir cela. Il n'y avait presque pas d'arrogance lorsqu'on nous a dit: Écoutez, il y a des règlements qui vont régler cela. Je suis prêt à donner un congé d'arrogance au ministre actuellement parce que lui-même, quand il est arrivé au ministère, il a vu les lois qu'il serait appelé à faire appliquer, à administrer, qui devaient être, je ne sais pas, à peu près d'un pouce d'épais et il a vu les règlements. Les règlements, cela faisait peut-être une étagère complète.

Lui-même, le ministre, devrait savoir que c'est son devoir actuellement de réduire justement l'épaisseur, pas du gouvernement, ce n'est pas facile, mais des règlements.

M. Johnson: C'est vous, n'est-ce pas, qui avez approuvé le budget des Olympiques?

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Lalonde: Alors, M. le Président...

M. Pagé: On pourrait prendre une demi-heure pour en discuter, si vous le vouliez.

M. Lalonde: II faudrait que le ministre sache que l'intention du député de Portneuf, c'est de confier à l'Assemblée nationale ce qui doit être confié à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire de déterminer ici la durée de l'habitation exclusive par le constructeur propriétaire d'une maison destinée à être habitée par lui-même et sa famille. Ce n'est pas bien difficile. Il y a des conseillers, on en voit là partout à ses côtés, on peut suspendre l'étude de l'article s'il le veut. Cela ne prendra quand même pas, j'en suis sûr... le ministre est relativement rapide, je dis relativement. Il peut sûrement en un quart d'heure, une demi-heure, avoir les avis nécessaires pour lui permettre de dire s'il est absolument contre l'idée, non pas l'idée de donner cela à un règlement, mais l'idée même de donner une limite de temps pour l'habitation.

Cela me surprend, M. le Président, parce que depuis quelques années il y a eu...

M. Boucher: M. le Président, je constate que c'est un réflexe. On veut se geler dans le ciment en amendant la loi.

Le Président (M. Clair): Vous avez la parole, M. le député.

M. Lalonde: M. le Président, la brillante intervention du député de Rivière-du-Loup...

M. Boucher: Vous êtes habitué à cela le ciment?

M. Lalonde: C'est Rivière-du-Loup, votre comté?

M. Boucher: Oui, Rivière-du-Loup.

M. Lalonde: Bon, encore pour un temps.

M. Pagé: Pas pour longtemps.

M. Lalonde: Le député de Rivière-du-Loup vient de faire une brillante intervention et il pense que ce qu'on confie à l'Assemblée nationale c'est gelé dans le ciment. C'est penser bien peu...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rivière-du-Loup, s'il vous plaît, je vous en prie!

M. Boucher: Amender une loi et un règlement, c'est deux. Amender une loi et un règlement, c'est...

M. Lalonde: C'est avoir une opinion bien pauvre de cette institution démocratique par excellence qu'est l'Assemblée nationale dont il fait partie par accident, M. le Président, mais c'est un accident qui va être corrigé, j'en suis sûr, et on pourra discuter de façon intelligente un peu plus tard lorsque la population aura corrigé cet accident.

M. le Président, lorsqu'on confie à l'Assemblée nationale le soin de déterminer le sort des gens, il me semble que c'est choisir la façon la plus démocratique et c'est ce que le député de Portneuf fait d'une façon très modeste. Vous savez, il n'a pas pris ses 20 minutes...

M. Pagé: Très sobre.

M. Lalonde: Très sobre aussi. On ne peut pas dire la même chose de tous les membres de cette commission. Il l'a fait d'une façon, on pourrait même l'en accuser, très sobre. Je suis sûr qu'il y a des arguments dans sa tête qu'il aurait aimé nous offrir. Je pense qu'il savait que j'allais le faire, M. le Président.

Lorsqu'on confie à l'Assemblée nationale le soin de déterminer le sort des gens, je pense qu'on a un réflexe démocratique et cela me surprend que le ministre actuel du Travail, pour quelque temps encore, ne se joigne pas à nous dans ce geste, au fond, qui n'est que rechercher la meilleure façon de déterminer le sort des gens. Oui, cela prendra au ministre — d'accord, c'est entendu et après? — un certain effort pour changer de deux ans à un an et demi, s'il le faut, ou à trois ans lorsqu'il lui semblera important ou indiqué de le faire. (21 h 15)

II faudra, à ce moment-là, qu'il s'adresse non pas à un Conseil de ministres, mais à des élus du peuple, à tout le monde. Pas en catimini dans le "bunker". Cela va être à l'Assemblée nationale qui est le salon bleu de l'autre côté. Et pourquoi pas? Je m'explique mal ce ministre qui ne se dit pas tout à fait décidé à savoir si l'amendement est bon ou non, mais qui vote contre parce qu'il ne sait pas s'il est mauvais. J'ai rarement vu un ministre aussi peu décidé que cela. Il ne sait pas si l'amendement est mauvais; donc, il vote contre. Mais il ne sait pas si c'est bon non plus. Dans ce gouvernement, M. le Président, quand on n'est pas sûr, on est contre. C'est pour cela qu'on est pour l'indépendance, parce que...

M. Johnson: M. le Président...

M. Lavigne: M. le Président, la pertinence du débat, s'il vous plaît!

M. Lalonde: ... on n'est pas sûrs, on est poignés, on est frustrés, on ne sait pas. Donc, dans ce temps-là, on se ferme les yeux.

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavigne: La pertinence.

M. Chevrette: Mais on ne se donne pas comme vous vous êtes donnés.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm, messieurs! C'est le député de Marguerite-Bourgeoys qui a la parole et je prierais le député, encore une fois, de s'adresser à moi...

M. Lalonde: Je m'adresse à vous tout le temps, M. le Président.

Le Président (M. Clair): ... et de respecter la pertinence du débat.

M. Lalonde: Oui, je vais respecter la pertinence. Mais le député de Joliette-Montcalm a quand même posé une question. Il nous a reproché de ne jamais avoir rien donné, pourtant on lui a donné une "job"...

M. Chevrette: Vous en avez du regret en maudit!

M. Lalonde:... qui lui a permis de se faire élire à part cela, au grand dam des électeurs de Joliette-Montcalm qui m'appellent régulièrement.

Je ne vois pas pourquoi le ministre qui ne sait pas si c'est bon vote contre. Je vois qu'il est entouré de conseillers — c'est la seule assurance qu'on a actuellement — est-ce qu'il aurait changé d'idée? Je lui pose la question.

M. Johnson: Non. Est-ce que la motion du député de Portneuf est mise aux voix, M. le Président?

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement à l'article 12 du député de Portneuf afin d'ajouter, à l'article 55a, après les mots "sa famille", les mots "durant les deux années qui suivent la fin des travaux", est-elle adoptée?

M. Lalonde: Adopté.

M. Johnson: Vote, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre. Je pense que le vote a été appelé, M. le député de Mont-Royal.

M. Lalonde: Pas par vous, simplement par les... Cela ne veut rien dire.

M. Johnson: C'est le président qui a appelé le vote.

M. Lalonde: C'est le ministre qui a demandé le vote, mais le président ne l'avait pas...

M. Johnson: Je l'ai appelé et ensuite le président a répété.

Le Président (M. Clair): Je l'ai refait, j'ai répété par la suite. De toute façon, je suis convaincu qu'on aura d'autres occasions. Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre la motion d'amendement.

M. Bellemare? M. Boucher?

M. Boucher: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Chevrette?

M. Chevrette: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Gravel? M. Johnson?

M. Johnson: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavigne?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Mailloux? M. Pagé?

M. Pagé: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Roy?

M. Roy: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Laberge (Jeanne-Mance)?

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): Cette motion d'amendement est rejetée.

M. Pagé: M. le Président...

M. Boucher: ... les votes du député de Gatineau et de... Non?

Le Président (M. Clair): Non. Je n'ai enregistré que les votes des membres présents.

M. Ciaccia: Vous n'avez pas beaucoup confiance en votre président.

M. Gratton: Est-ce qu'il y aurait consentement de la commission pour enregistrer mon vote?

M. Chevrette: Pour que vous puissiez voter? Non. Vous ne sauriez pourquoi voter, vous n'étiez pas ici!

Le Président (M. Clair): Le vote est terminé et le résultat est connu. Je comprends que vous désiriez manifester que vous auriez été favorable à l'amendement.

Maintenant, M. le député de Gatineau, je vous indique que, selon la liste que j'ai, vous n'êtes ni membre, ni intervenant au niveau de cette commission.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'on pourrait faire une motion pour permettre au député de Gatineau d'intervenir?

M. Pagé: Consentement. M. Lalonde: Consentement?

M. Chevrette: On ne se prive jamais de lumières. On peut permettre le consentement. On a toujours pris pour habitude de ne jamais barrer un député comme intervenant.

Le Président (M. Clair): Alors, est-ce que...

M. Chevrette: D'ailleurs, cela lui arrive d'avoir des éclairs de génie; tout à coup qu'il nous arrive avec une adoption globale!

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'il faudrait qu'il remplace un autre intervenant du même parti politique?

M. Pagé: Non. Ce n'est pas nécessaire, d'après les usages et coutumes. Je suis convaincu que, comme distingué, honorable et compétent président de nos commissions, vous avez été à même de faire face à d'autres cas analogues dans le passé.

Le Président (M. Clair): Je constate qu'il y a consentement pour que le député de Gatineau agisse comme intervenant.

M. Pagé: M. le Président, je ne ferai pas de motion, mais je tiendrais à remercier le député de

Gatineau de l'intérêt qu'il manifeste pour la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre.

Le Président (M. Clair): L'article 12 est-il adopté?

M. Pagé: Sur division.

Le Président (M. Clair): Adopté sur division.

M. Johnson: L'article 13, M. le Président.

M. Pagé: Avant de procéder à l'étude de l'article 13, nous pourrions revenir à l'étude de l'article 8. J'ai plaidé tout à l'heure pour qu'on attende la venue et l'arrivée de mon distingué collègue de Beauce-Sud. Je vois qu'il s'est joint à nous. Je pense que le moment serait peut-être le mieux choisi pour qu'on aborde toute cette question de l'article 8.

M. Johnson: L'article 8. On peut peut-être le prendre en même temps que les autres sur les artisans, comme je l'avais suggéré, puisque c'est cela qu'on a évoqué.

Le Président (M. Clair): C'est ce qui a été évoqué. Maintenant...

M. Johnson: Est-ce que le député de Portneuf veut reconsidérer sa demande? Je suppose que le député de Beauce-Sud est assez grand et assez expérimenté en cette Chambre pour savoir s'il veut le voir tout de suite. Je suis sûr que le député de Beauce-Sud ne tient pas particulièrement à ce que ce soit une critique officielle de l'Opposition en matière de relations de travail, qui décide quel article le député de Beauce-Sud veut envisager.

M. Roy: M. le Président, à cette heure-ci et après le nombre d'heures de travail qu'on a faites depuis un certain temps, je pense que tous ceux qui veulent travailler en étroite collaboration, travailler à bonifier le projet de loi, je ne fais pas de distinction de couleur, de race, de religion...

Le Président (M. Clair): Messieurs, est-ce que...

M. Johnson: Moi, je n'ai aucune objection, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on revient à l'article 8?

M. Johnson: Si c'est pour rendre service au député de Beauce-Sud, cela me fait plaisir.

Le Président (M. Clair): On revient à l'article 8, pour en discuter, sur l'article 8.

M. Roy: L'article 8, la suspension avait été demandée pour qu'on l'aborde en même temps que les artisans.

M. Johnson: C'est exactement ce que je viens de demander au député de Beauce-Sud. J'ai cru que sa réplique était... C'est ce que je suggérais...

M. Roy: Oui, c'est cela.

M. Johnson: Je suggérais qu'on voie à l'article 8, en même temps que les artisans.

M. Roy: Oui, c'est cela.

M. Johnson: Je suggérais qu'on voie à l'article 8, en même temps que les artisans.

M. Roy: C'est cela.

M. Johnson: Le député de Portneuf est intervenu pour dire: Non, c'est le député de Beauce-Sud qui veut regarder l'article 8. J'ai demandé au député de Beauce-Sud, s'il voulait voir l'article 8. Là, il m'a parlé de collaboration. Est-ce que le député de Beauce-Sud préférerait qu'on voie cela avec les artisans?

M. Roy: Avec les artisans, c'est ce que j'avais demandé.

M. Johnson: Je suis entièrement d'accord, est-ce que le député de Portneuf est d'accord?

M. Pagé: Aucun problème, M. le Président, je m'en remets à mon bon ami le député de Beauce-Sud.

Le Président (M. Clair): Donc l'article 13 est appelé.

Droits et honoraires

M. Johnson: L'article 13, M. le Président. D'abord, il y a certains amendements de nature purement formelle, remplacer le mot honoraires par droits, qui est plus français. Préciser que les frais d'enquête font partie des droits. Le pouvoir de déterminer par... On va essayer de faire de la lumière. "Cet article a pour but de remplacer l'expression "honoraires" par l'expression "droits" et de préciser que les frais d'enquête font partie des droits. Ceci a notamment pour but d'éviter toute confusion considérant que le mot "droits" est utilisé à plusieurs reprises dans la loi, soit aux articles 9, 28, 42 et 54". D'ailleurs le terme "droits" se justifie davantage juridiquement dans ces articles, car il se réfère aux frais d'administration de la loi.

D'autre part, l'article accorde à la régie le pouvoir de déterminer par règlements les conditions que doivent remplir les personnes physiques qui habilitent une société ou corporation ainsi que les renseignements qu'elles doivent fournir à cet effet.

La régie possède déjà semblables pouvoirs à l'égard des personnes physiques désirant obtenir une licence pour elles-mêmes, en vertu du paragraphe d) de l'article 58. Donc, ce n'est pas du droit nouveau.

D'autre part, le nouveau paragraphe 1 à q) introduit par cet article a pour but de "refléter la réalité des modifications apportées à l'article 34, de la loi, par l'article 8 du présent projet de loi, quant au cautionnement et au fonds d'indemnisation."

Le paragraphe r), pour sa part, a pour effet de clarifier le pouvoir de la régie, de faire subir des examens à tout candidat à une licence d'entrepreneur ou, dans le cas d'une société ou d'une corporation, à toute personne habilitable.

Enfin, le paragraphe s) a pour effet de refléter les modifications apportées à l'article 32 de la loi, par l'article 5 du présent projet de loi, quant à la possibilité pour une personne physique de détenir plus d'une licence.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, une première interrogation, c'est sur l'application de l'article 13s, où il est dit que la régie peut déterminer les cas où une personne physique peut détenir plus d'une licence. Cela ne va pas en contradiction avec ce à quoi on s'est référé cet après-midi?

M. Johnson: Je m'excuse, je n'ai pas entendu.

M. Pagé: L'article 13s ne va-t-il pas en contradiction avec ce dont on a discuté cet après-midi, c'est-à-dire le droit pour une personne physique de détenir plus d'une licence émise par la régie?

M. Johnson: Non, c'est seulement pour préciser, à l'article 13s, dans quel cas une personne peut détenir plus d'une licence. Dans le premier article, on prévoit que cela peut arriver et, à l'article 13s, on prévoit à qui cela peut arriver et dans quelles conditions.

M. Pagé: Cela, c'est toujours par règlement. M. Johnson: Oui.

M. Pagé: Vous avez un projet de règlement dans le moment?

M. Johnson: C'est un projet qui est presque prêt à être soumis à la législation déléguée.

M. Pagé: Cela veut donc dire, M. le Président, que l'article 13a jusqu'à s) qui implique dans son libellé que différentes mesures permettant l'application éventuelle de a) jusqu'à s) sera confirmé par règlement, règlement sur lequel la Régie des entreprises de construction a déjà eu l'occasion de rédiger et de soumettre un document au ministre; le tout est actuellement au département de la législation.

M. Johnson: Ce n'est pas encore soumis, ce sera voté par les régisseurs, toutes conditions le permettant, le 3 janvier, lors de la réunion de la régie.

M. Pagé: C'est un projet de règlement qui est rédigé par certains régisseurs?

M. Johnson: Non, par les fonctionnaires de la régie, qui le soumettent aux régisseurs en vertu de la loi.

M. Pagé: Est-ce qu'on pourrait prendre connaissance de ce projet de règlement qui sera éventuellement déposé?

M. Johnson: C'est un avant-projet de règlement, parce qu'une fois que ce sera le projet de règlement approuvé par les régisseurs, cela devient un authentique projet de règlement avant son adoption. Pour le moment, ce n'est pas à ce stade-là. De toute façon, ce sera publié dans la Gazette officielle avec un avis de 30 jours.

M. Pagé: M. le Président, il y a quand même eu des occasions où des projets ou des avant-projets de règlement ont été déposés à des commissions de l'Assemblée nationale. Il n'y a rien...

M. Johnson: Celui-là n'est pas au stade...

M. Pagé: II n'y a rien qui nous empêcherait, à ce stade-ci de nos travaux, de prendre connaissance...

M. Johnson: II n'y a rien qui vous empêche de le demander, vous ne pourrez pas l'avoir.

M. Pagé: Bon!

M. Lalonde: C'est de l'arrogance.

M. Johnson: Non, ce n'est pas cela, il n'est pas approuvé par les régisseurs. Je comprends que le député de Marguerite-Bourgeoys a le mot "arrogance" facile à la bouche, comme dans son comportement, mais le projet de règlement n'est pas prêt, la régie ne l'a pas encore soumis, il n'a pas été publié dans la Gazette officielle.

M. Lalonde: Vous avez un texte? M.Johnson: II n'est pas complété.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, n'entrez pas dans cette discussion. La parole est au député de Portneuf.

M. Pagé: À défaut de pouvoir prendre connaissance du projet de règlement, on se voit dans l'obligation de contre-interroger, de poser des questions au président de la régie. À l'article 58 de la loi, à l'alinéa 1), il est mentionné que le règlement pourra déterminer les catégories de travaux de construction et de bâtiments résidentiels aux fins de l'article 34, quelles seront les catégories qu'on peut prévoir? Comment cela sera-t-il fait? Quelles seront les critères? Quelles

seront les conditions? Qu'est-ce qui découlera de la fixation et de l'établissement de ces différentes catégories?

M. Johnson: Les catégories sont: bâtiments résidentiels, maisons unifamiliales simples ou rangées ou jumelées, bâtiments utilisés à des fins strictement résidentielles qui comprennent au plus quatre logements, l'appartement dans un logement en copropriété d'au plus deux étages au-dessus du sol.

M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président, j'étais occupé moi aussi; cela arrive à l'occasion. Est-ce que le ministre pourrait...

Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'on peut répéter?

M. Pagé: Je m'excuse, cela m'arrive aussi à l'occasion.

M. Johnson: On pourrait peut-être faire venir le ruban?

M. Pagé: On peut suspendre, si vous voulez.

M. Johnson: Cela nous arrive à tous. Bâtiments résidentiels à l'exclusion de tout autre bâtiment, la maison unifamiliale simple en rangées ou jumelée, le bâtiment utilisé à des fins strictement résidentielles qui comprend au plus quatre logements et l'appartement dans un immeuble en copropriété d'au plus deux étages au-dessus du sol. C'est le règlement no 17 concernant le cautionnement exigible des entrepreneurs en construction de bâtiments résidentiels.

M. Pagé: Est-ce que c'est le règlement ou le projet de règlement?

M. Johnson: C'est l'ancien règlement. (21 h 30)

M. Pagé: M. le Président, on navigue dans l'ancien et dans le nouveau dans le projet. Tous les éléments de a) à s) qu'on retrouve à l'article 13 qui vient modifier l'article 58 de la loi actuelle, c'est strictement l'ossature; la chair de tout cela, c'est dans le règlement ou dans le projet de règlement.

M. le Président, je ferais motion — et ce que je vise, c'est que le ministre dépose son projet de règlement, le projet de règlement de la régie — pour que l'étude de l'article 13 soit suspendue jusqu'à ce que le ministre distribue — parce qu'il ne peut les déposer — aux membres de la commission parlementaire les règlements prévus audit article.

M. Chevrette: M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: En commission parlementaire, on ne dépose jamais de documents. Donc, elle est irrecevable dans sa forme même.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Un instant, s'il vous plaît!

M. Pagé: Le libellé, le texte exact, c'est "distribué".

M. Chevrette: Non, c'est parce que vous avez dit "déposé ". D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, d'ailleurs, on ne demande pas le dépôt. Le député de Portneuf, dans sa motion, parle de distribution. Mais le cadre, le fond de sa motion, c'est la suspension de l'étude de l'article. Je pense que c'est une motion tout à fait normale, pour employer un terme qui est cher aux péquistes; c'est une motion usuelle qu'on retrouve dans l'étude article par article qui se veut cohérente.

M. Lavigne: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous parler de la recevabilité? Je pense que je ne vous laisserai pas la chance d'en parler, je la reçois.

M. Lavigne: Une motion de distribution, cela existe?

Le Président (M. Jolivet): Oui, je m'excuse, je la reçois pour la discuter.

M. Pagé: Bon, merci, M. le Président. Mon collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, a mis en relief tantôt tout cet aspect de l'érosion du pouvoir législatif aux mains du pouvoir exécutif, qui est un problème de fond auquel est confronté le parlementarisme d'aujourd'hui, et je m'explique, M. le Président. De plus en plus, nos lois sont des lois générales qui tracent de grandes avenues, qui établissent des principes. De plus en plus, ces mêmes lois permettent, généralement par un petit article, au lieutenant-gouverneur en conseil, soit le Conseil des ministres, de faire des règlements. Celui qu'on identifie dans le lieutenant-gouverneur en conseil, c'est évidemment le ministre concerné par la loi, soit, en l'occurrence, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. À ce lieutenant-gouverneur, à cette couronne, à cette majesté, on donne un pouvoir réglementaire.

Je conviens, M. le Président, que ce pouvoir réglementaire est généralement accompagné de l'obligation pour le lieutenant-gouverneur en conseil, le ministre, de faire paraître ces règlements sous forme d'avis dans la Gazette officielle avec des délais minimums de 30 jours. Je conviens que

les parties concernées par l'application de ce règlement ont généralement l'occasion de prendre connaissance de ces projets de règlements dans le délai qui leur est accordé. Cependant, M. le Président, cet aspect vient remettre en cause un principe de base. C'est le fait que le législateur se voit de plus en plus, et particulièrement depuis 1976, confronté avec la situation suivante: Le législateur est pris, pour ne pas dire "est poigné" pour adopter, voter ou se prononcer sur des lois qui contiennent des éléments généraux, de grands principes, qui confèrent au lieutenant-gouverneur en conseil un pouvoir réglementaire, sans que ce même législateur ait la possibilité de prendre connaissance, d'intervenir, de faire part de ses considérations, de ses objections ou de ses propositions sur ces règlements.

Un exemple, M. le Président, des plus patents de cela — je suis convaincu que vous y avez été confronté, vous aussi — c'est le fameux règlement de placement dans l'industrie de la construction qui a été déposé. Il y a eu un avis et le législateur, M. le Président, ici à l'Assemblée nationale, les députés n'ont pas eu l'opportunité de discuter du fond de ce règlement. C'est peut-être un des exemples les plus vivants de cette confrontation qui va toujours en s'accentuant entre le législateur et l'exécutif.

À plusieurs reprises, mes collègues ont formulé des représentations dans ce sens. Non seulement le gouvernement veut-il conserver ce pouvoir qu'il a, en vertu de nos lois et en vertu de cette loi, d'intervenir par voie réglementaire, mais on peut même présumer par ce que le ministre a dit tout à l'heure que le règlement vous ne l'aurez pas. Non seulement ils veulent le conserver mais ils ne veulent même pas que le législateur en prenne connaissance. C'est inquiétant, M. le Président.

Je me dis: Si le gouvernement accepte que cet état de fait non seulement se continue mais se développe, cela remet en cause les beaux discours — je vais utiliser un terme cher aux leaders du gouvernement — les parlottes, les placotages des membres de la majorité ministérielle lorsque ceux-ci viennent nous parler du rôle du député. Vous savez que c'est une interrogation que plusieurs députés se posent notamment du côté ministériel, du côté de la majorité, le rôle du député "participer davantage" je les entends encore, M. le Président, vous les avez probablement entendus vous aussi: Participer davantage à l'élaboration des lois et des règlements, être consultés, qu'on crée un ou des comités pour analyser et pour scruter les règlements.

M. le Président, à quoi bon tout cela si le gouvernement, le ministre du Travail ce soir, ne veut même pas qu'une commission parlementaire comme la nôtre qui est habilitée à prendre connaissance des règlements traîne tout le long de A à S — pas de A à Z, mais presque — cela, c'est l'ossature, et la chair autour de cela sera un règlement qui sera éventuellement déposé. Même si le ministre nous a confirmé tout à l'heure que l'avant-projet était prêt à être soumis aux commissaires de la régie, ce projet de règlement est entre les mains des officiers de la régie actuellement, ce projet de règlement est déjà rédigé; il est prêt pour consultation. En quoi l'Assemblée nationale — parce qu'une commission parlementaire est quand même la prolongation de l'Assemblée nationale — n'est-elle pas habilitée, ne se croit-elle pas justifiée de prendre connaissance de ce règlement?

C'est là essentiellement le sens de la motion que j'ai présentée: Que soit distribué à chacun des membres de la commission parlementaire cet avant-projet. On va en prendre connaissance et on sera plus en mesure de juger du bien-fondé ou non et des impacts, parce qu'il y aura des impacts, M. le Président. Regardez au paragraphe n): Le règlement établira les exigences concernant les cautionnements aux fins du deuxième alinéa de l'article 34— qu'on a vu précédemment — et prévoir que l'indemnisation se fera au choix de la caution, soit par le versement d'une somme d'argent, soit par l'exécution des travaux. Des éléments importants qui ont été abordés à juste titre et avec combien de fondement de la part de mon collègue de Mont-Royal cet après-midi. Que le ministre les dépose ou les distribue; on va en prendre connaissance et on sera mieux équipé pour se prononcer sur le bien-fondé de l'article 13, qui amende l'article 58. C'était là l'essentiel de mes commentaires, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): J'ai remarqué que M. le député de Saint-Hyacinthe est venu se joindre à nos rangs; est-ce à titre de remplaçant du...

M. Cordeau: Actuellement, il y en a qui sont pris de l'autre côté à la Chambre.

Le Président (M. Jolivet): Donc, vous agissez comme intervenant?

M. Cordeau: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): La parole est au député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je ne sais pas si le ministre est au courant d'un mémoire qui a été soumis au gouvernement par le Barreau du Québec? Le Barreau du Québec a porté à l'attention du gouvernement les difficultés, les abus et les dangers de légiférer toujours par le pouvoir de réglementation. Sans doute que, dans certains cas, c'est nécessaire de donner des pouvoirs de réglementation au lieutenant-gouverneur en conseil ou à certains organismes mais il semble qu'on légifère de plus en plus dans le sens que tout va se faire par règlement. On n'inclut pas de protection minime; on n'inclut pas les droits qui doivent être protégés ou les droits qu'une personne doit avoir par le projet de loi. Une personne qui va lire ce projet de loi va se demander quels sont les droits qu'elle a dans tel ou tel domaine, et elle ne pourra jamais le savoir de la façon dont ce projet de loi est rédigé présentement en donnant tout le pouvoir de réglementation, tel que spécifié dans l'article 13.

Premièrement, le principe de ce pouvoir de réglementation est tellement étendu qu'on doit le contester, s'y opposer. Autrement, le gouvernement

serait aussi bien, au lieu d'avoir un projet de loi de 50 articles, d'avoir un projet de loi d'un article disant que le lieutenant-gouverneur en conseil ou un organisme peut, par règlement, faire ce qu'il veut, quand il le veut et comment il le veut. C'est vraiment là l'effet. On essaie de nous faire croire que c'est un projet de loi qui va donner certains droits à quelqu'un mais, si vous l'examinez, c'est entièrement par règlement. Alors, pourquoi avoir un projet de loi avec tellement d'articles quand, à la fin, c'est le gouvernement qui va décider?

Il ne vous informera pas. Il ne donnera pas l'occasion de débattre le problème. Il ne donnera pas l'occasion de savoir d'avance les conséquences, les effets d'un tel règlement. C'est le même esprit qui motive le gouvernement à déposer ce projet de loi et à ne pas entendre les parties. Si vraiment le gouvernement était de bonne foi, après avoir déposé le projet de loi en première lecture ou même en deuxième lecture, il entendrait les parties pour connaître leur réaction face aux articles du projet de loi, pour voir ce qu'elles en pensent, quel sera l'effet sur leurs conditions de travail, sur leurs opérations, sur toutes les conditions qui entourent ce projet de loi. Mais non, le gouvernement ne le fait pas.

En plus de ne pas le faire, il dit: Je vais procéder par voie de règlement, il va donner les pouvoirs de réglementation. Je ne veux pas qu'on en débatte. Je ne veux pas que la population, celle concernée, débatte les règlements. Je ne veux pas qu'elle les conteste. Je ne veux pas que l'Opposition officielle en prenne connaissance pour porter à l'attention de la population qu'il y a certains règlements abusifs, volontairement ou non.

M. le Président, c'est absolument... À un moment donné, il faut freiner cette tendance du gouvernement de prendre tous les pouvoirs de réglementation sans rien dire, sans en discuter avec les gens qui sont concernés, qui en sont affectés. M. le Président, on doit appuyer la motion du député de Portneuf.

Il y a une autre raison aussi pour laquelle on devrait appuyer cette motion et réduire le pouvoir de réglementation. C'est vraiment pour protéger le gouvernement même. Voyez les règlements que vous avez faits dans le placement et regardez les répercussions maintenant. Avant d'en être arrivé à cette décision, si vous aviez consulté, si vous en aviez débattu en Chambre, vous auriez peut-être su les conséquences et vous ne seriez pas obligés aujourd'hui de prendre cette mauvaise décision. Un gouvernement n'aime pas reculer; une fois qu'il a pris une décision, il veut démontrer qu'il a toute la sagesse, qu'il connaît tout et que personne ne peut lui dire qu'il s'est trompé. Aucun gouvernement ne veut faire cela. Alors, il arrive avec un autre projet de loi. Il sait que le premier règlement de placement n'est pas bon. Il veut contourner cela lui-même. C'est une sorte de "loophole" qu'il essaie de créer contre son propre règlement de placement. Il arrive avec un autre et il ne veut pas encore en discuter parce que, naturellement, il faudrait le discuter à ce temps-ci et on verrait les difficultés qu'a entraînées le premier règlement. Cela s'enchaîne. Plus il agit ainsi, plus il faut qu'il procède par réglementation jusqu'à ce qu'on ne sache rien en Chambre. Il va venir en Chambre pour dire: La loi, c'est moi. Au XVIIIe siècle, ou au XVIe siècle, c'est cela. Le roi disait: L'État, c'est moi. On semble retourner à cette condition. Il y avait des lettres de cachet dans ce temps et personne ne savait... seulement celui qui voulait la lettre de cachet faisait des pressions. C'est cela qu'on veut. C'est la même chose, c'est le même esprit. Naturellement, on a différents moyens de communications. Cela ne peut pas être aussi flagrant. On ne peut pas dire ouvertement: L'État, c'est moi, alors on fait un projet de loi. On semble vouloir consulter et on semble vouloir créer certains droits, mais quand on analyse les articles, on voit qu'ils sont vides, qu'ils donnent tous les pouvoirs de réglementation, tous les droits au gouvernement sans que personne ne puisse les discuter, sans qu'on puisse savoir d'avance ce qu'on peut faire ou ne pas faire.

M. le Président, je crois que la population a droit à l'information. Elle a le droit de savoir avant qu'une décision arbitraire ne soit prise. Le ministre peut rire tant qu'il veut, il peut prendre cela à la légère, il peut essayer de les ridiculiser, mais ce sont des propos sérieux. Même si vous ne voulez pas les prendre au sérieux, on y croit à ces propos. On n'a pas intérêt, vous savez, trois heures avant minuit, à continuer de parler sur ce projet de loi. Vous savez que si on le veut vraiment, vous ne pouvez pas passer à la troisième lecture, même si on avait tout étudié. Même si on faisait rapport à 22 heures, même si on l'avait fait à 18 heures, vous ne pourriez pas passer à la troisième lecture sans notre consentement. On pourrait donc éviter beaucoup de problèmes de paroles... C'est le temps de Noël, on pourrait dire non, se lever et s'en aller non pas essayer de porter à l'attention du ministre certains problèmes qui existent dans le projet de loi. (21 h 45)

M. Pagé: Bonification.

M. Ciaccia: Ne pas essayer de trouver les failles dans cela. Ce serait bien plus facile pour nous parce que cela fait certainement deux ou trois semaines qu'on travaille à peu près 18 heures, 20 heures, 22 heures par jour. La chose la plus facile serait d'aller dans les "parties" de Noël — il y en a partout — et dire au ministre ce qu'il peut faire avec sa loi.

M. Pagé: Mais ne le dites pas.

M. Ciaccia: Je ne le dirai pas parce que ce n'est pas parlementaire.

M. Pagé: Mais ce serait une bonne idée.

M. Ciaccia: On a le sens des responsabilités. On fait des farces parfois. Il faut bien rire un peu. Si on n'avait pas un peu le sens de l'humour, après ce que le gouvernement essaie de nous

faire, ce serait parfaitement intolérable. Alors, on rit un peu mais, parmi toutes les farces et certaines choses drôles qu'on dit, c'est notre sens des responsabilités qui nous garde ici, qui nous amène à faire ces amendements et qui nous amène à dire ce que nous constatons quant aux pouvoirs abusifs dans le projet de loi, quant aux lacunes du projet de loi, quant aux failles dans le projet de loi. Les amendements que nous faisons ne sont pas faits sur le coin de la table. Ce sont des amendements sérieux qui ont leur raison d'être et qui ont une substance. Si vous prenez l'article 13...

M. Johnson: Sur la motion...

M. Ciaccia: Oui, c'est sur la motion que je parle. Sur quoi pensez-vous que je parle? Voulez-vous me dire sur quoi je parle?

M. Johnson: Non, je...

Le Président (M. Jolivet): Non, continuez. Il m'a demandé de parler sur la motion.

M. Johnson: J'indiquais simplement au président que je voulais parler sur la motion.

Le Président (M. Jolivet): Continuez, sachant que vous avez le droit de parole.

M. Ciaccia: D'accord. Excusez-moi. J'avais pensé que... Je vais continuer. Si vous prenez les sous-paragraphes I) à s), c'est tout nouveau en substance. Ce n'était pas inclus dans la loi actuelle. Ce sont des pouvoirs de réglementation assez larges qui sont donnés. Vous élargissez le domaine où les règlements peuvent être faits par cet organisme, sans aucune protection pour qui que ce soit, sans aucune restriction. On a le droit de se poser des questions. On a le droit de montrer les difficultés, les problèmes que cela peut soulever.

C'est vous qui avez ajouté les sous-paragraphes I) à s). Ce n'est pas nous. La loi actuelle ne les contient pas. Vous avez des pouvoirs de réglementation sans limite. Je veux bien croire que le Parlement peut tout faire, mais je n'y crois pas. Il peut le faire après avoir pris les procédures qui s'imposent. Le Parlement peut adopter toutes les lois qu'il veut mais, pas en secret, pas en cachette, sans consulter les gens, pas par règlement.

Si vous voulez avoir tous les pouvoirs de I) à s) que vous avez ici, c'est votre droit, mais vous allez venir à l'Assemblée nationale et vous allez dire: C'est ceci que nous voulons faire. Nous voulons réglementer de telle façon. Voici ce que nous demandons. Cela sera débattu. Vous allez — vous avez la majorité — gagner. Vous n'avez pas peur de ne pas pouvoir faire adopter votre règlement. Cela n'existe pas pour vous. Mais, au moins, la population le saura et peut-être — comme c'est arrivé dans les derniers deux ou trois jours, vous avez fait des changements à des lois — allez-vous retirer certaines lois. Vous reculerez dans d'autres. Vous amenderez d'autres lois. Pourquoi? Parce que c'est venu à l'Assemblée nationale. Autre- ment, la population n'aurait pu avoir le bénéfice de ces changements. Vous avez dû vous-mêmes réaliser que c'était des choses acceptables. Vous les avez acceptées.

Je vous donnerai un exemple très concret: le changement à la Loi sur la protection du consommateur qui a été soumis à l'Assemblée nationale. Une motion d'amendement a été faite quant au contrat de locataire et locateur d'automobile. Le but de cet amendement était de permettre aux locataires d'automobiles d'avoir d'autres options. Autrement, tel que la loi était rédigée, ces contrats n'auraient pu être donnés par ceux qui louent les automobiles.

Mais si ce n'était pas venu devant l'Assemblée nationale, on n'aurait pas pu faire une motion d'amendement, on n'aurait pas pu porter cela à l'attention de la population, à l'attention du gouvernement et ce changement n'aurait pas été fait. C'est quelque chose dont le consommateur a bénéficié, quelque chose que le gouvernement a accepté, mais il a été obligé, même si c'était involontaire et que personne n'y avait pensé originellement dans la loi... Ces choses sont faites quelquefois involontairement, mais au moins le processus existe pour les changer. Ici le processus n'existe pas, vous pouvez faire ce que vous voulez, quand vous le voulez. Il y a une multitude de lois, une multiplicité de règlements, je pense que c'est un peu trop. Il va falloir mettre fin à cela et porter les dangers à l'attention de la population qui ne peut pas se protéger contre des lois comme celles-là, contre des pouvoirs de réglementation de ce genre.

Pour toutes ces raisons, j'appuie la motion d'amendement du député de Portneuf et j'espère que, de bonne foi, le gouvernement va reconsidérer sa position.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le ministre voulait dire quelques mots, je parlerai après lui, je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, brièvement, sur la motion dilatoire de l'Opposition...

M. Pagé: M. le Président...

M. Johnson: M. le Président, est-ce que j'ai le droit de parole?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, il n'y a personne qui a dérangé parmi vous tout à l'heure pendant qu'on parlait.

M. Pagé: II ne faut pas nous prêter d'intentions.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez amplement les droits de parole et d'opinion.

M. Johnson: M. le Président, sur la motion dilatoire de l'Opposition. À 21 h 55, pas tout à fait, on a

posé toute la grande question philosophique du droit réglementaire dans notre société. Je trouve cela admirable, et par analogie je dirais qu'il faut respecter les lois de la même façon qu'un leader doit respecter un engagement. Des règlements sont bons quand ils sont conformes à une loi, de la même façon qu'un parti est bon si la parole d'un leader est bonne. C'est tout ce que j'avais à dire sur cette motion dilatoire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, je voudrais dire quelques mots sur la motion qui a été présentée par le député de Portneuf concernant la réglementation de ce projet de loi. Je dois dire qu'en ce qui me concerne tout projet de loi devrait être accompagné de la réglementation, quel qu'il soit. Pas seulement celui-là, tous les projets de loi. Surtout depuis la télédiffusion des débats, à l'Assemblée nationale, on demande cette réglementation et on ne l'a pas. Quelquefois on nous répond que le ministre la déposera quelque temps plus tard. Cela va bien. Mais les gens qui regardent la télédiffusion des débats se demandent comment on peut accepter des projets de loi sans avoir la réglementation. Ils trouvent cela tout à fait illogique. Souventefois, la réglementation impose aux citoyens beaucoup plus de restrictions que le projet de loi lui-même. Nous, les législateurs, on nous demande d'adopter des projets de loi sans en connaître toutes les implications qui vont survenir lors de la publication des règlements.

Il y a un autre point. Lors de l'étude d'un projet de loi, il y a toujours une diffusion assez importante par les différents media d'information, mais lorsque la réglementation paraît dans la Gazette officielle, il y a peu de publicité et maintes fois les citoyens ou les personnes concernées n'en sont pas informées.

Bien sûr que cela paraît dans la Gazette officielle, mais si je demandais à l'assistance présente, aux personnes autour de la table, quelles sont les personnes qui ont le temps — probablement les députés — de parcourir la Gazette officielle — nous, qui sommes quasiment payés pour...

M. Lalonde: Personne.

M. Chevrette: Je lis cela en fin de semaine.

M. Cordeau: ... légiférer, notre devoir est de nous informer des réglementations qui sont publiées dans la Gazette officielle — les pauvres citoyens, il n'y en a pas beaucoup qui pourraient lever la main dans cette salle pour dire qu'ils reçoivent la Gazette officielle et qu'ils la lisent aussi.

M. Chevrette: Ce serait une violation du règlement.

M. Cordeau: Mais je ne l'ai pas posée.

M. Chevrette: Vous avez bien fait.

M. Cordeau: J'ai bien fait. Je vous voyais, M. le député de Joliette-Montcalm, et je savais que si je la posais, il y aurait une intervention, alors je ne l'ai pas posée.

M. Chevrette: Bien sûr, vous avez bien fait.

M. Cordeau: Alors, quel que soit le gouvernement, il devrait être en mesure de nous présenter une réglementation, peut-être un projet sommaire, mais au moins une réglementation, afin de connaître l'esprit de la réglementation. Cette information étant en possession des législateurs, on serait plus en mesure d'apprécier ou de discuter les différents articles d'un projet de loi. C'est tout à fait incompréhensible, et c'est cela qui me dépasse depuis que je suis ici — cela fait seulement deux ans — de ne pas connaître les réglementations avec les projets de loi. Le simple citoyen trouve que c'est anormal et presque indécent parce qu'on oblige les législateurs à adopter des lois qui, par des règlements subséquents, viendront demander à certains groupes de citoyens d'observer la loi et souvent ils ne sont pas au courant de la réglementation.

Sans hésitation, M. le Président, j'appuie la motion du député de Portneuf, parce que...

Le Président (M. Jolivet): Allez, allez. M. Cordeau: Est-ce qu'il va parler tantôt?

M. Chevrette: Probablement, après vous avoir écouté.

Le Président (M. Jolivet): Allez... Non, je ne le laisserai même pas commencer. Continuez votre intervention, il n'a pas le droit de vous interrompre.

M. Cordeau: Je me réserve le droit de l'interrompre.

Une voix: Un trou, une cheville, M. le député.

Une voix: On a un bon président.

Le Président (M. Jolivet): Continuez, M. le député. N'ouvrez pas la porte qui était ouverte.

M. Cordeau: C'est ce que j'ai à dire présentement, mais pour déplorer encore une fois que ce n'est pas la première fois que je fais connaître aux membres des commissions auxquelles j'ai participé que je trouve indécent qu'on nous demande d'adopter des projets de lois sans en connaître la réglementation, même une réglementation préliminaire afin d'en connaître l'esprit.

Le Président (M. Jolivet): La motion d'amendement est-elle adoptée?

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je ne reprendrai pas les arguments du député de Portneuf ni du député de Mont-Royal sur l'importance de connaître la réglementation, la législation déléguée. Je voudrais simplement faire appel aux députés, pas au ministre, il doit connaître la réglementation, c'est lui qui va la faire. Je vois devant moi les députés qui ne la connaissent pas. Ils ne la connaîtront pas non plus avant qu'elle soit adoptée.

Ils ont l'esprit de parti. On leur a dit: S'il vous plaît, venez ici ce soir et assoyez-vous, écoutez et votez pour le gouvernement, mais surtout ne demandez pas le règlement, vous ne l'aurez pas. Alors, les députés sont là, mais je pense que je fais plus confiance à l'intelligence des députés que le gouvernement lui-même et j'ai des questions à leur poser.

Ne sont-ils pas intéressés à savoir ce qui va être contenu dans ces règlements? Naturellement, je pense qu'on doit s'entendre sur les principes suivants. La loi doit contenir les principes, les critères, et la réglementation contient les modalités d'application. Je pense que là-dessus, personne ne peut faire de chicanes. Je n'entends pas faire une interruption, M. le Président, on s'entend. Tout le monde est d'accord là-dessus, y compris les députés ministériels. (22 heures)

Le Président (M. Jolivet): Ils n'ont pas le droit de vous interrompre, c'est pour cela qu'il n'y a pas eu d'interruption. Non, je ne fais...

M. Pagé: On consent.

M. Lalonde: Vous faites de l'interprétation.

M. Ciaccia: Ils auraient pu demander le droit de parole.

Le Président (M. Jolivet): Allez, continuez.

M. Pagé: Vous pouvez le demander, le droit de parole.

M. Ciaccia: Vous en avez le droit.

M. Cordeau: M. le Président, question de directive.

M. Ciaccia: On va le protéger, votre droit.

M. Cordeau: M. le Président, s'il n'y a pas d'interruption par les députés ministériels, est-ce que le Président peut s'autoriser à en faire, des interruptions?

Le Président (M. Jolivet): La seule chose que j'ai faite, M. le député, c'est de dire ce que le règlement veut bien dire.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Donc, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est à vous la parole.

M. Lalonde: M. le Président, j'avais dit tantôt qu'on avait un excellent président et je le pense encore, mais ne me tentez pas.

M. Lavigne: M. le Président, j'aurais une question à poser...

M. Pagé: II y en a un...

M. Lalonde: II y en a qui s'est réveillé, M. le Président, apparemment il veut m'interrompre, alors je lui donne la parole.

M. Lavigne: Celui qui tend un piège n'a-t-il pas plus l'air fou, finalement, quand il s'aperçoit que sa proie ne tombe pas dans le piège?

M. Pagé: Je pense que vous venez de tomber.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît. À l'ordre!

M. Lavigne: Je pose la question...

Le Président (M. Jolivet): Continuez, c'est à vous la parole.

M. Lalonde: Donc, on s'entend là-dessus, les députés ministériels aussi. La loi doit contenir les principes et les critères, la réglementation et les modalités d'application. Si on regarde l'article 13, on voit, par exemple, au paragraphe a) qui remplace le paragraphe a) de l'article 58 qui existe actuellement que cela détermine des droits exigibles. Là-dessus, pas de chicane, je pense que cela appartient au règlement. Cela détermine des droits; il n'y a aucun problème. On va y aller dans tout ce qui ne soulève pas de problème. On arrive à la page 15 de votre projet de loi. Au sous-paragraphe m), on exige un cautionnement aux fins du premier alinéa etc., pas de problème non plus. C'est entendu qu'il faut avoir les cautionnements et que cela peut changer et qu'on va demander à notre excellent gouvernement, excellent entre parenthèses et à l'envers, M. le Président... Il faut quand même que le gouvernement fasse des règlements à un moment donné. Il ne sait pas quoi faire des fois. Il va faire ce règlement. On va arriver au paragraphe n): là, le député de Portneuf a posé une question fort pertinente. Je pense qu'on commence à toucher le point sensible, à savoir: Est-ce que cela doit appartenir au règlement ou non? Quant au paragraphe o), déterminer les modalités, les montants et la forme des cautionnements visés à l'article 34: Parfait. Faisons confiance au gouvernement actuel pour encore deux ans là-dessus. Après cela on verra. Quant au paragraphe p), constituer un fonds d'indemnisation, là, je pense qu'on empiète sur le pouvoir législatif de l'Assemblée nationale. Je vois que les députés ministériels m'approuvent par leur silence, M. le Président, je pense qu'ils sont d'accord.

Un fonds d'indemnisation, pourquoi cela fait-il partie de la loi? C'est parce que le fonds d'indem-

nisation va quand même contenir des principes, des critères d'application, des critères d'indemnisation. Les modalités d'application du fonds pourraient appartenir au règlement, d'accord. Quant au paragraphe q), exiger un cautionnement, d'accord. Encore-là, cela appartient au gouvernement aussi mauvais qu'il soit, M. le Président, il faut quand même... Il est là jusqu'à preuve du contraire, jusqu'à nouvel ordre, on va lui donner cette chance. À r), obliger tout candidat à une licence d'entrepreneur ou, dans le cas d'une société ou corporation, toute personne habilitante, à subir des examens: c'est pas si mal. Quand on arrive à déterminer le contenu des examens, même là, j'irais avec le règlement, parce qu'à un moment donné on peut être un peu plus large ou un peu plus sévère pour les examens et il faut avoir de la souplesse. Cela appartient au règlement, mais quand on arrive aux conditions d'admissibilité et d'exemption desdits examens, là, on touche des principes. Au paragraphe s), on détermine les cas où une personne physique peut détenir plus d'une licence; on touche encore là des critères. Ce sont des cas. On appelle cela des cas. On est rendu qu'on légifère des cas, on fait presque de la casuistique, cela appartient aux critères. Comment pouvons-nous ou comment le gouvernement peut-il nous reprocher actuellement de demander des règlements quand, au fond, tout ce qu'il demande à l'Assemblée nationale, c'est un blanc-seing, c'est un chèque en blanc pour légiférer à notre place?

Je vois que les députés ministériels continuent, M. le Président, à m'approuver par leur silence. Eux autres non plus ne savent pas les cas où une personne physique peut détenir plus d'une licence. Ils ne le savent pas. Non seulement ils ne le savent pas, mais ils n'ont même pas le droit de le savoir parce que le ministre, qui est le seul ici, n'en déplaise au député de Joliette-Montcalm, qui est habilité à savoir ce que les projets de règlements contiennent actuellement et ce qu'ils vont contenir, le ministre sait très bien qu'il n'a même pas le droit de les soumettre aux députés parce que cela appartient à l'Exécutif.

Il ferait un impair épouvantable s'il communiquait aux députés ou à la presse ou à quelqu'un d'autre à l'extérieur de cette Assemblée le contenu des règlements. Alors, comment pouvons-nous actuellement être contre cette motion du député de Portneuf qui ne fait que rendre service aux députés autour de la table, y compris les députés ministériels qui semblent tout à fait d'accord pour leur sourire avec les propos que je tiens? J'ai hâte de voir, par exemple, comment ils vont exprimer cet accord dans le vote qui va être pris tantôt. Naturellement, l'incohérence n'est pas une faute mortelle du côté ministériel. Ce n'est pas la première fois qu'on verrait cela, mais il reste, M. le Président...

Une voix: Cela fait longtemps que vous seriez mort.

M. Lalonde: M. le Président, je pense que je viens d'entendre deux députés qui viennent de s'éveiller. C'est la première fois qu'ils ne sont pas d'accord avec ce que je viens de dire, mais c'est seulement quand j'ai parlé de faute mortelle, M. le Président. Est-ce qu'ils seraient en désaccord avec le désir d'un député, qui représente quand même une population, de connaître le contenu des règlements qui touchent aux principes et aux critères? Est-ce qu'il y a un député ministériel qui peut, non pas se lever, naturellement, on ne se lève pas ici, mais qui peut prendre la parole avec un peu de courage? C'est déjà arrivé à des députés ministériels d'avoir un peu de courage. Est-ce qu'il y en a un ici parmi les quatre que je vois devant moi qui va avoir le courage de dire: Moi, je voudrais savoir ce que les règlements vont contenir au niveau des principes dans les cas que j'ai mentionnés, y compris le paragraphe b) qui remplace le paragraphe c) et qui parle encore des conditions que les personnes physiques doivent remplir dans le cadre de ce paragraphe?

Est-ce qu'il y a un député ministériel qui réellement va avoir le courage de se lever et de dire: Moi, je ne veux rien savoir? Moi, je suis un bon député, mais je ne veux rien savoir des principes d'une loi, ni des critères. Je suis un bon député et ces principes, cela ne m'intéresse pas. Lequel de ces députés va réellement avoir le courage de se lever et de dire cela?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Pour rendre service au député de Marguerite-Bourgeoys, c'est parce que, quand il relira l'histoire, il s'apercevra qu'il a fait une faute magistrale, lui, avocat; il a affirmé tantôt que, par la loi, on établissait les modalités et que, par les règlements, on établissait les droits. Je suis convaincu que c'est un lapsus...

M. Lalonde: L'article 96, M. le Président.

M. Chevrette: Non, pour vrai, c'est ce que vous avez dit.

M. Lalonde: Non, par la loi, on établit les principes et les critères. Par les règlements, on établit les modalités.

M. Chevrette: J'espère que c'est cela pour vous...

M. Lalonde: Cela fait à peu près quatorze fois que je le répète...

M. Chevrette: C'était pour vous rendre...

M. Lalonde: Naturellement, le député... Non, non, je ne veux pas l'accuser.

M. Chevrette: Je ne vous envoie pas dire que vous "filibustez".

M. Ciaccia: Qu'est-ce que vous cachez dans votre "coke", vous?

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Chevrette: M. le député de Joliette-Montcalm était sûrement retenu par d'autres devoirs à l'Assemblée nationale lorsque j'ai commencé mon intervention et je ne veux pas lui en tenir rigueur. Je l'ai répété à plusieurs reprises. Je pense, à part cela, que c'est l'enfance de l'art. N'importe qui ici sait ce qui doit être dans une loi; la loi doit contenir les principes et les critères et les règlements, c'est ce que j'ai dit, doivent contenir les modalités.

Le Président (M. Jolivet): C'est la deuxième fois que vous le dites. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je serai très bref en vous disant que la réglementation... Peut-être que cela a existé dans le passé, c'est-à-dire que les ministres ne consultaient pas les membres des commissions parlementaires du côté ministériel avant de rédiger des réglementations. En ce qui nous concerne, il serait peut-être bon que ce soit dit. C'est que les ministres soumettent les règlements aux députés intéressés des commissions parlementaires. Ils consultent les députés; ceux-ci peuvent dire ce qu'ils veulent. Donc, ce qui était fait chez vous n'est pas nécessairement fait dans les autres partis, dans les autres formations politiques. Nous ne nous sentons pas frustrés. Nous connaissons les règlements. Je peux vous dire que nous participons à l'élaboration des livres blancs. Nous participons aussi à l'élaboration des politiques.

M. Lalonde: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président (M. Jolivet): Juste un instant! M. le député de Mont-Royal m'a demandé la parole.

M. Ciaccia: M. le Président... Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Ciaccia: ... mes paroles ont peut-être dépassé ma pensée. Pour les fins du journal des Débats, je pense que j'ai fait une farce en disant: Qu'avez-vous dans votre coke? Je ne voulais pas insinuer que vous aviez autre chose qu'un Coca-Cola devant vous. Ce n'était pas une insulte que je voulais faire au député de Joliette-Montcalm. J'espère qu'il ne l'a pas pris dans ce sens-là.

M. Chevrette: Mais non! Voyons!

M. Ciaccia: Pour les fins du journal des Débats, d'accord?

M. Chevrette: D'accord. Il n'y a pas de problème. Pas besoin de l'ivressomètre à la porte.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de règlement.

M. Lalonde: Le député de Joliette-Montcalm vient de nous dire qu'il connaissait le contenu des règlements avant qu'ils soient adoptés. N'est-ce pas un accroc à la Loi de l'exécutif, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Quant à moi, je n'ai pas entendu cette chose-là. Ce qu'il a dit, c'est qu'il verrait que, dans le futur, ce serait cela. Mais il n'a pas dit qu'il le connaissait, à moins qu'il ne l'ait dit dans ce sens-là.

M. Chevrette: J'ai dit que les ministres ne craignaient pas de consulter les députés intéressés dans l'établissement des politiques et des réglementations à venir.

Le Président (M. Jolivet): Ah bon!

M. Lalonde: II ne connaît pas le contenu du règlement au moment où il est adopté.

Des voix: C'est cela.

Le Président (M. Jolivet): Donc, l'amendement...

Une voix: Vote enregistré.

Le Président (M. Jolivet): Vote enregistré. M. Chevrette-Montcalm?

M. Chevrette: Je suis contre. Une voix: Chevrette-Montcalm!

Le Président (M. Jolivet): Le député de Joliette-Montcalm.

Une voix: Ils ont changé le nom du comté.

M. Chevrette: Ce ne serait pas si mal, Chevrette-Montcalm, à cette heure-ci.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. Gravel (Limoilou)?

M. Gravel: Contre.

M. Chevrette: J'étais contre. En avez-vous pris note?

Le Président (M. Jolivet): Oui. M. Johnson (Anjou)?

M. Johnson: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lavigne (Beauharnois)?

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Jolivet): M. Pagé (Portneuf)?

M. Pagé: Pour.

Le Président (M. Jolivet): Donc, le vote est clair. C'est contre.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): La proposition est toujours l'article 13.

M. Johnson: L'article 13 est-il adopté, M. le Président?

M. Pagé: Sur division.

Le Président (M. Jolivet): Adopté sur division. M. Johnson: Article 14, M. le Président.

Substitution de personne

Le Président (M. Jolivet): II y a un amendement. Je vais le lire pour les besoins du journal des Débats.

M. Johnson: Un instant, M. le Président. Il faudrait peut-être expliciter que l'amendement vise à ajouter — c'est moi qui vous le fournis — un paragraphe en dessous de 14 qui serait 14a.

Le Président (M. Jolivet): Donc, je vous le lis: 14a "L'article 78 de ladite loi est modifié par l'addition de l'alinéa suivant: Toutefois, une licence obtenue en vertu du premier alinéa ne peut être renouvelée qu'aux conditions prescrites par la présente loi pour le renouvellement d'une licence."

M. Johnson: M. le Président, c'est ce que je disais. C'est un article additionnel à 14. Pourrait-on considérer 14? Ensuite, j'introduirai 14a.

Le Président (M. Jolivet): Cela va.

M. Pagé: La motion d'amendement est acceptée, M. le Président.

M. Johnson: Quant à 14, M. le Président, c'est une modification à l'article 66 de la loi qui est entièrement du droit nouveau dans la mesure où elle crée une infraction à l'égard de la personne. C'est du droit nouveau dans le cadre de cette législation, mais pas intrinsèquement, évidemment. C'est simplement la création d'une infraction pour ceux qui utilisent le nom d'une autre personne qui possède une licence ou pour une personne qui utiliserait le numéro de licence de cette personne afin d'exécuter ou de faire exécuter des travaux de construction. C'est une infraction, évidemment, contre ceux qui sont tentés de faire des fraudes.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, adopté.

Le Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Pagé: Vous ne pouvez pas dire qu'on ne collabore pas!

Le Président (M. Jolivet): Donc, l'article 14.

On a dit, M. le ministre, que l'article 14a était adopté puisque le député de Portneuf a dit qu'il l'adoptait. Vous avez peut-être des choses à ajouter?

M. Johnson: Non. 14a, d'accord.

Le Président (M. Jolivet): Article 15?

Salarié et artisan

M. Johnson: M. le Président, je pourrais peut-être, afin de faciliter le travail de tous nos collègues, distribuer...

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Johnson:... en vrac l'ensemble des amendements...

Le Président (M. Jolivet): Cela va.

M. Johnson: ... que le député de Portneuf a déjà, d'ailleurs, depuis quelques jours. (22 h 15)

Le Président (M. Jolivet): L'article 15, M. le ministre. Avez-vous quelque chose...

M. Pagé: Non, on va laisser le ministre... Vous pouvez y aller.

M. Johnson: À cet article, M. le Président, évidemment, on entend modifier la définition du terme "salarié", de façon à en exclure "l'artisan". D'autre part, on donne une définition de l'artisan, ce terme qui n'est pas actuellement défini dans la loi, et, comme nous le verrons plus loin, au paragraphe b) de l'article 17 de ce projet, l'artisan ne sera plus assujetti à la Loi des relations de travail de l'industrie de la construction, sauf dans deux cas spécifiques. On remarquera que, dans cette définition de l'artisan, finalement, on décrit bien qu'il s'agit d'une personne qui n'emploie personne d'autre. C'est une distinction extrêmement importante qu'il faut faire, si on veut comprendre l'ensemble de la portée de l'article. C'est une espèce de "puzzle". Finalement, ces lois de la construction sont une espèce de château de cartes, et, à partir du moment où on retire ou remet une carte, cela peut remettre en jeu tout l'équilibre, sur le plan strictement de la qualité de la législation. Donc, on exclut l'artisan des salariés et on définit l'artisan comme étant cependant une personne physique, faisant affaire pour son propre compte, qui exécute elle-même, pour autrui, et sans l'aide de salariés, des travaux de construction. C'est tout ce que j'avais à dire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, nous abordons maintenant cet article 15, qui est le premier d'une série d'articles dont les modifications et les amendements sont destinés à fixer le statut juridique de l'artisan.

Nous abordons maintenant, M. le Président, un des aspects contentieux du projet de loi en ce que les représentations formulées par les groupes intéressés, les groupes visés, ont eu cette occasion, dis-je, de faire part de leurs opinions sur toute cette question des articles 15 et suivants du projet de loi 110, eu égard au nouveau statut de l'article.

J'aurai certainement quelques commentaires à faire, lesquels, entre autres, permettront de voir arriver d'ici quelques minutes mon bon ami et collègue, le député de Beauce-Sud... Il va finir bientôt, dans cinq minutes. Mon ami et collègue de Charlevoix aura définitivement l'occasion de faire part de ses représentations sur le sujet et aussi mon collègue, le député de Gatineau, qui a eu à être confronté depuis le début de toute cette question des artisans, du règlement de placement, ou autres, aux impacts pour les régions frontalières, à l'impact des lois qui sont présentées ou qui pourront l'être éventuellement dans d'autres provinces, de façon à rendre la pareille aux travailleurs du Québec oeuvrant à l'extérieur.

M. le Président, cette modification, qui peut paraître à prime abord assez bénigne, vient créer un groupe particulier, une entité bien spécifique de nouveaux travailleurs qui auront à évoluer dans le secteur de la construction, un groupe parallèle qui sera non syndiqué, un groupe qui constituera lui-même une entité. C'est tellement vrai que cette entité s'en vient, M. le Président, que même le ministre du TravaiI et de la Main-d'Oeuvre convenait avec moi, iI y a quelques jours, lors de l'étude du projet de loi en deuxième lecture, qu'éventuellement cela devrait déboucher sur la création d'une association d'artisans au Québec.

M. Johnson: Je n'ai pas dit cela.

M. Pagé: En tout cas, c'est l'impression que j'en avais eue. Remarquez que je ne peux pas vous citer au texte, mais je vous poserai la question tantôt.

M. le Président, l'introduction de cette nouvelle notion dans ce projet de loi 110 à la loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction, témoigne et résulte d'une constatation de la part du gouvernement et du ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et le gouvernement viennent de constater que leur règlement de placement dans l'industrie de la construction devait être mis au rancart, mais de façon non officielle. Le gouvernement, constatant ce fait, suite à des représentations de l'Opposition, et probablement de députés de la majorité ministérielle qui ont certainement fait valoir leurs points de vue, pour avoir, eux aussi, rencontré des contribuables, des électeurs dans leur bureau de comté...

Vous savez, M. le Président, vous êtes député d'un comté au nord du mien, le comté de Laviolette, très beau comté d'ailleurs. Je pourrais prendre cinq minutes pour en parler, mais de toute façon, on va parler des artisans.

Le Président (M. Jolivet): Cela enfreindrait le règlement.

M. Pagé: D'accord. M. le Président, on a voulu sensibiliser le gouvernement à toute cette question de l'application du règlement de placement. On a eu une commission parlementaire, en mai si ma mémoire est fidèle, sur l'avant-projet, sur le projet qui devait s'appliquer le 1er juillet à la suite d'une question avec débat du vendredi matin présentée par le député de Beauce-Sud. On a eu l'application du règlement. On a eu des questions soulevées à l'Assemblée nationale, on a eu une motion de blâme que j'ai eu l'occasion de déposer contre le gouvernement le 5 octobre.

Le projet de loi 110 et les dispositions relatives à l'artisan impliquent que le ministre vient de reconnaître son échec au chapitre du placement. Celui-ci crée une entité complètement séparée. Vous savez, M. le ministre pourra dire: Écoutez, ce n'est pas le règlement de placement qui est amendé, mais cette disposition aura des effets sur le règlement de placement. Mon collègue de Charlevoix, qui a une longue expérience, qui a de l'autorité et qui a une maturité politique, nous disait cet après-midi que dès l'adoption de la loi 110, dès l'adoption de ces dispositions sur l'artisan, il y a des travailleurs qui sont actuellement classés "B" ou "C" qui vont s'en aller comme artisans. Si on tient pour acquis, et c'est bien le cas, c'était dans le rapport de l'Office de la construction du Québec il y a quelques semaines, que la construction, au Québec, a baissé de 17% par rapport à l'année dernière, cela implique qu'il y a une main-d'oeuvre disponible, qu'il y a moins de travaux, moins d'ouvrage. J'ai rencontré nombre de personnes qui, cette année, sont classées A, compte tenu de la période de référence qui est 1977, et qui savent pertinemment qu'au moment du renouvellement du certificat de classification elles seront classées "B" parce qu'elles n'ont pas suffisamment d'heures effectuées en 1978. Ces gens-là, qu'est-ce qu'ils feront? Ce n'est pas compliqué, la porte sera toute grande ouverte pour qu'ils s'en aillent comme artisans. Et là, ils auront deux choix. Celui de travailler seul, pour autrui, sans être régi — et c'est là que j'ai beaucoup d'interrogations — sans être un salarié. Sans être soumis à des conditions minimales, parce que c'est populaire, le ministre vient de présenter le projet de loi 126, si ma mémoire est fidèle, sur les conditions minimales de travail, auquel on souscrira probablement. De toute façon, on aura des échanges là-dessus. J'en étais à dire que les artisans qui travailleront pour autrui pourront négocier eux-mêmes le taux de salaire payé. Qu'est-ce qui arrivera? On est en droit de s'inquiéter. On est en droit de se poser des questions. Qu'est-ce qui arrivera, purement et simplement, quand on tient pour acquis qu'on a une main-d'oeuvre disponible, quand on tient pour acquis que le travailleur pourra lui-même négocier, à rabais, le taux de salaire payé? Qu'on prenne le cas des petites villes. Je serais curieux de savoir le nombre d'immeubles d'habitation ou

de résidences qui seront construits à Joliette ou à Donnacona au mois de janvier ou de février 1979. Je serais curieux de constater aussi le nombre de travailleurs artisans qui seront disponibles à cette période de l'année. Celui qui voudra faire construire sa maison, son immeuble, négociera à rabais. Si de telles mesures sont favorables à la paix sociale vous savez, les grandes diatribes qu'on entend ici sur la paix sociale, et Dieu sait si on en entend — j'aimerais bien savoir en quoi. Il y a plusieurs interrogations sur cet aspect du travail pour autrui. Cette personne, qui n'est pas salariée, ne sera plus soumise aux règlements édictés, en vertu de la loi 290, par le lieutenant-gouverneur. Elle ne sera plus régie par l'Office de la construction du Québec, sauf pour les avantages sociaux auxquels elle peut contribuer, et c'est strictement facultatif, jusqu'à concurrence de 40 heures par semaine. Il y a beaucoup de questions. J'en ai posé quelques-unes à l'égard de la Régie des entreprises de construction qui n'aura comme attribut que d'émettre une licence purement et simplement. Elle ne s'occupera pas de sécurité. Elle devra aussi évidemment vérifier les connaissances et le certificat de qualification. On peut donc présumer que ceux qui sont classés "B" ou "C" s'en iront comme artisans. Le salaire sera négociable.

Cela peut être interprété comme étant un bon service à rendre aux travailleurs qualifiés qui actuellement sont sans travail avec un certificat de classification "B" et "C", mais je ne suis pas convaincu que c'est un service qu'on leur rend. Qui va s'occuper de la sécurité? Sur quelle base de salaire contribueront-ils à la Commission des accidents du travail si, une semaine, l'artisan peut travailler à un taux de $5.50, la semaine suivante à $4.25 et l'autre semaine à $9.80?

Il peut participer aux bénéfices sociaux jusqu'à concurrence de 40 heures seulement. La participation aux bénéfices sociaux sera déterminée par l'OCQ, mais ce travailleur n'étant pas constitué en une entité, comment participera-t-il à toute cette question des bénéfices sociaux? Est-ce que ceux-ci seront représentés par les associations patronales, les associations syndicales ou s'ils se formeront en propre association? Ils seront régis par la Régie des entreprises de construction du Québec.

On se rappellera qu'à plusieurs reprises, c'est arrivé depuis quelques années, on disait que c'était difficile de cerner et de suivre les artisans pour voir si tout est conforme en termes de loi et de réglementation. Comment la Régie des entreprises de construction du Québec pourra-t-elle vérifier tout cela avec seulement 8 ou 12 inspecteurs, selon le cas?

La question de la qualification des artisans. On se rappellera que, lorsque le travailleur est un salarié, cette question que j'ai soulevée cet après-midi est régie par l'Office de la construction du Québec. Maintenant que l'artisan ne sera plus régi par l'OCQ, ni par la Régie des entreprises de construction, par qui sera-t-il régi au chapitre de sa qualification? Celui-ci pourra aussi travailler pour un employeur professionnel et le nombre d'heures n'interviendra pas du tout. Cela veut donc dire que l'employeur professionnel pourra, au lendemain de l'adoption de cette loi, embaucher soit un travailleur qui a, en plus de son certificat de qualification, un certificat de classification "A" ou "B", si les "A" travaillent tous dans la région, ou engager un artisan.

Cela voudra donc dire — il faut appeler les choses par leur nom — qu'il va y avoir de la concurrence, surtout si on tient compte de la baisse de la construction. Je donnais l'exemple en Chambre il y a quelques jours et je voudrais le réitérer au ministre. Je m'imagine l'employeur professionnel qui, pour un motif ou pour un autre, que ce soit justifié ou non, ne veut pas avoir sur son chantier, autant que faire se pourra, un travailleur appartenant à tel groupe syndical; cela peut arriver. Le gars aura des "A" disponibles. Par l'affiliation syndicale, il pourra dire: Tu fais partie du groupe que je ne veux pas et il aura toujours la possibilité de se retourner vers des artisans et d'embaucher des artisans. Il va y avoir de la concurrence, il y aura des affrontements et ce n'est pas de nature, selon moi, à favoriser un climat social qui se veut serein.

Sous cet aspect, l'employeur professionnel devra le payer au taux du décret, c'est normal. Cependant, il est soumis au décret seulement pour la question du taux horaire payé. L'artisan — et le ministre pourra me corriger; je l'invite à le faire si je me trompe — n'étant pas soumis au décret, cela peut aller aussi loin que ceci: s'il arrive une grève ou un lock-out, l'artisan n'est pas tenu de laisser son travail parce qu'il est régi par le décret seulement comme étant un salarié. Cela va dans le sens d'un projet de loi qui a été adopté l'année dernière à peu près à la même date; d'ailleurs, on avait siégé un samedi soir jusqu'à minuit sur le projet de loi 45.

Le ministre pourra demander à ses conseillers juridiques si c'est bien le cas, entre autres, que les pénalités de l'Office de la construction du Québec ne s'appliqueront pas à l'artisan en cas de poursuites compte tenu de cette disposition selon laquelle il n'est pas un salarié au sens du décret. Qu'arrivera-t-il si les artisans peuvent s'en aller demain matin pour les employeurs professionnels? Qu'arrivera-t-il du ratio apprenti/compagnon? (22 h 30)

Ce sont différentes questions qu'on est en droit de se poser, de se formuler actuellement. Ce sont des questions que j'ai posées; le ministre n'y a pas répondu lors de sa réplique en deuxième lecture; le ministre a indiqué à ce moment-là qu'il voulait privilégier le débat à la commission parlementaire qui devait commencer lundi dernier, soit dit en passant. Sur cela, on pourra y revenir; on pourra parler une demi-heure là-dessus tantôt si vous le voulez.

M. le Président, je me pose de sérieuses questions sur le fait que l'artisan soit complètement exclu du champ d'application de la loi 290. Je m'en pose sur le fait que celui-ci puisse négocier à rabais les taux de salaires payés. J'en ai formulé d'autres; j'aimerais

bien, M. le Président, dès l'amorce de l'étude de l'article 15, qu'on puisse, dans un premier temps, vider toutes ces questions et, par la suite, cela ira peut-être plus vite pour l'adoption des articles subséquents.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: J'ai moi aussi plusieurs points d'interrogation, M. le Président, en lisant cet article, sur la définition même du mot artisan. On y lit: "Une personne physique faisant affaires pour son propre compte, qui exécute elle-même, pour autrui et sans l'aide de salariés, des travaux de construction." J'en suis à me demander si l'artisan, selon cette définition, pourra travailler en compagnie d'autres syndiqués. À première vue, en lisant le texte du paragraphe t), je me demande ce que cela veut dire exactement, parce qu'au niveau du projet de loi 110, on avait constaté que le statut d'artisan pourrait peut-être porter préjudice aux petites et moyennes entreprises et également aux travailleurs de la construction si l'artisan peut aller travailler avec d'autres à la réalisation de constructions. Également, la modification dit que s'ils travaillent sur un chantier de construction, ils seront payés au taux du décret, je crois. Or, si l'artisan peut remplir de telles tâches, cela va certainement créer sur les chantiers de construction deux groupes distincts et vous n'êtes pas sans savoir que lorsqu'il y a deux groupes distincts exécutant peut-être les mêmes travaux, il peut y avoir différents conflits très difficiles à évaluer actuellement.

Également, lorsqu'il y aura grève, si les autres sont syndiqués et que les artisans ne le sont pas, cela est encore un point d'interrogation. J'aimerais que le ministre clarifie tantôt ou explique clairement le sens de ce paragraphe.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, ce ne sera peut-être pas brillant, parce que d'abord, je m'excuse, comme mes autres collègues qui sont ici, d'avoir été dépouillé de ma cravate. J'imagine que les gens seront plus prudents tantôt en sortant de la salle.

M. Cordeau: Consolez-vous, j'y ai aussi passé.

M. Mailloux: Je m'excuse si mes propos semblent décousus après quelques nuits passées ici à l'Assemblée nationale; tout le monde est à peu près dans le même cas, j'imagine.

M. Johnson: Décousus ou coupés.

M. Mailloux: Plus j'écoute expliquer le projet de loi qu'apporte le ministre, moins je suis convaincu qu'on va régler certains des problèmes que veut régler le ministre. Ces problèmes, à plusieurs occasions, mes collègues de Portneuf, de Beauce-Sud et moi-même avons présenté des motions et avons posé des questions au ministre du Travail. En déposant ce projet de loi, on ramène une catégorie d'arti- sans, et je pense que, du milieu rural que tous trois nous représentons, dans mon esprit, des artisans oeuvrant dans ces comtés, il y en avait peut-être cinq ou dix pour cent qui ont toujours été, en fait, des artisans.

Pour autant que ces artisans seraient confinés essentiellement à travailler dans le secteur d'activités dans lequel ils étaient auparavant, je pense qu'il n'y aurait pas de problème majeur. Mais l'interrogation qu'on a eue à l'esprit, cela ne visait pas le "cheap labour". D'abord, je l'ai dit cet après-midi. Cela visait principalement, quand même, des gens qui, à travers le milieu rural, et j'ai avancé, je peux l'avancer également devant des gens qui sont plus familiers avec les métiers de la construction... Je pense que, dans les 50 comtés ruraux, on a une moyenne d'environ 100 ou 125 personnes qui travaillent dans les métiers de la construction. Le député de Beauce-Sud dit même que son estimation, c'est à peu près 200; suivant qu'un comté rural a plusieurs entrepreneurs et qu'un autre fait exécuter ses travaux par les entrepreneurs d'un autre comté, c'est une moyenne de 100 ou 150 dans ces comtés.

On constate également que la plupart de ces gens, n'étant pas du "cheap labour", puisque j'ai mentionné les salaires qu'on leur verse ou qu'on leur versait dans les années précédentes, sont des gens qui, en raison du climat que connaît le Québec, en raison du fait qu'ils demeurent et qu'ils rendent des services dans un milieu où la construction est moins importante que celle qu'on a connue dans la région de Montréal, que celle qu'on connaît actuellement à la baie James, que celle qu'un comté comme Saguenay a connue lors des constructions des barrages, doivent être confinés à des travaux qui sont dans un comté donné. Je mentionnais en Chambre récemment que c'est cette industrie qui, quand même, a construit ce qui est le milieu domiciliaire un peu partout dans le Québec et on en a encore besoin. On retrouve également, et je le mentionnais cet après-midi, des cas qui nous sont soumis venant des grosses centrales syndicales comme la FTQ, la CSN ou la CSD, des gens qui reviennent de la baie James, étant donné qu'en période de printemps, il n'y a pas de travail dans la région où ils demeuraient, à Saint-Urbain, Saint-Hilarion ou ailleurs, des jeunes qui ont de 27 à 30 ans, bons opérateurs de machinerie lourde, menuisiers ou autres, qui viennent d'être libérés en décembre et nous avertissent à tour de bras que, quoique l'employeur soit satisfait de leur compétence et du rendement qu'ils ont donné, il n'est pas en mesure de les rappeler en janvier à moins d'un changement profond à la loi.

Est-ce que le ministre a voulu régler le problème des gens qui ne pourraient atteindre les mille heures obligatoires pour obtenir une classe "A" en disant: II y a quand même le terme "artisan" qui vous permettra de vous engager pour un employeur qui peut être un entrepreneur de la baie James? Je pense que ce n'est pas là que mes collègues et moi-même avons voulu diriger le règlement que nous espérions. Je vous l'avouerai

bien franchement au départ. Des problèmes que je ressens chez moi ou qu'on ressent un peu partout dans nos comtés, j'aurais cru que le ministère du Travail allait peut-être, pour des travaux donnés... Je ne dirais pas, s'il arrivait une centrale à réserve pompée à Portneuf qui entraîne des travaux de $600 millions à $700 millions, probablement que cela aurait appartenu, comme d'habitude, à de véritables travailleurs de la construction qui sont sur des grands chantiers. Cela peut arriver, $1 milliard. On annonce un projet de $700 millions à $800 millions sur les hauteurs, une station à pomper à Saint-Tite-des-Caps. Dans mon esprit, ce sont des travaux qui auraient appartenu à des gens qui viennent des métiers de la construction et qui ont l'habitude d'aller sur ces chantiers.

Je croyais que le ministre du Travail, pour tâcher de conserver à des gens qui ont quand même fait l'apprentissage requis, qui ont obtenu les cartes de qualifications requises, qui ont exécuté, bon an mal an, pendant 5 ans, 10 ans, 15 ans, 20 ans, un travail dans lequel ils se sont spécialisés, dans lequel ils se sont améliorés, qu'on aurait peut-être laissé cette construction ou cette réparation au milieu rural et qu'on leur aurait permis, par la carte de compétence dont ils disposaient, de continuer à pouvoir oeuvrer dans ces milieux, étant par contre exclus des grands chantiers qui, à mon sens, reviennent aux travailleurs de la construction, d'où qu'ils viennent dans la province de Québec. Je pense que c'est assez clair dans mon esprit et j'ai mentionné aujourd'hui le phénomène que j'avais au ministère des Transports où on avait 135 usines d'asphalte éparpillées partout dans le Québec et ces usines sont éparpillées pour des raisons bien précises; c'est que les usines d'asphalte qui sont à Matane, à Mont-Joli ou dans le fond de la Gaspésie, ne peuvent oeuvrer pendant sept mois par année.

Le temps leur permet d'oeuvrer à peu près trois ou quatre mois si elles obtiennent des contrats du ministère. Je pense que rares sont les usines qui seraient en mesure de donner 1000 heures de travail; à mon sens, je n'en vois pas qui seraient capables de donner 1000 heures à ceux qui, comme hommes de métier, travaillent comme opérateurs de machine à des usines d'asphalte en raison du climat que l'on connaît. On sait que nous ne sommes pas à Miami.

Qu'arrivera-t-il des gens qui, dans tout le milieu rural, devaient exécuter des contrats d'amélioration de fermes, pour lesquels les heures ne comptent pas? Encore là, on a un problème majeur. Il n'y a plus personne — je ne voudrais blesser personne, mais à part les véritables branleux que personne ne veut engager, qui voudra faire de l'amélioration de fermes tantôt. Cela va simplement être véritablement les déclassés, ceux qui voudront aller opérer ces machines, et je pense que les cultivateurs auront à en souffrir.

Tel que le disait mon collègue de Portneuf, tantôt — je n'en veux pas aux véritables travailleurs de la construction — en amenant la notion d'artisans et en élargissant leur pouvoir de travailler de la façon qu'on le fait, j'ai bien l'impression qu'ils n'ont pas le salaire de "cheap labour" mais le véritable salaire qu'on leur versait et, dans un avenir prochain, cela va être un fouillis indescriptible, dans la province de Québec. Ce sera un fouillis indescriptible, ils ne seront presque pas régis par quoi que ce soit ou, s'ils sont régis, au fur et à mesure qu'ils voudront occuper le marché du travail, ils vont prendre les moyens en se faisant classer artisans, en obtenant une licence pour être engagés à des conditions que personne ne souhaite.

Je me suis même demandé si, actuellement, en adoptant un tel règlement, et je ne voudrais pas accuser le ministre, devant le fait que les ouvriers de la construction, ici dans le Québec, sont rendus à des salaires beaucoup plus élevés que dans des régions comme la Floride, où l'on sait que les salaires sont beaucoup plus bas, on n'espère pas que cela va amener un peu partout une baisse de ces coûts. Ce n'est pas une accusation que je porte, mais je dis que c'est quand même une réflexion qu'on est en droit de se faire parce qu'il demeure que les gens, quand ils vont travailler à $16 ou $17 l'heure, trouvent qu'une réparation coûte cher. Quand ils savent qu'ailleurs, dans des endroits privilégiés, cela coûte moins cher, ils en sont peut-être à se demander s'il ne faudrait pas revenir à des conditions meilleures.

C'est là la réflexion que j'ai à l'esprit, au moment où on amène un tel amendement. Nous aurions plutôt espéré qu'on distraie le milieu rural de l'obligation de faire 1000 heures pour ceux qui, ayant prouvé leur compétence, sont en mesure de nous rendre des services. Je conviens qu'on n'aura pas l'obligation de payer les $145 par semaine, si l'artisan n'est plus en mesure de travailler. J'ai l'impression que cela va amener une perturbation telle, dans les métiers de la construction, que le ministre du Travail, en voulant régler un problème, va en créer de multiples.

C'étaient les quelques observations que je voulais faire, mais ce n'est pas dans ce sens-là que j'espérais que le ministre du Travail allait permettre à nos gens de continuer à gagner leur vie, de continuer à rendre les services qu'ils rendaient. Je veux bien que le ministre comprenne que, dans toutes les interrogations qu'on a eues à l'esprit et qu'on a formulées en Chambre, on n'a jamais voulu protéger le "cheap labour" dont, un moment donné, il nous a parlé.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, beaucoup de choses ont été dites. Je vais essayer de faire un exercice vocal. Je vais essayer de me restreindre à 7 ou 8 minutes tout en faisant le tour de l'ensemble de cette question, en suivant certaines des choses précises qui ont été évoquées. Je voudrais d'abord rassurer le député de Charlevoix, dont je connais l'expérience et, je pense, l'implication profonde qu'il a, face à ces problèmes. Je pense qu'il les a à peu près tout le temps — je dis bien à peu près tout le temps — évoqués avec beaucoup de sérénité. Je voudrais simplement le rassurer. Il

n'est pas question, comme je l'ai dit et redit à l'Assemblée nationale, à plusieurs reprises, de geler le règlement de placement dans la forme où il est. J'ai bien dit qu'avant le mois de mars, avant l'émission des nouveaux certificats, la réévaluation des régions, le critère d'embauche régionale, les heures, les distinctions à faire, oui ou non, entre les villes et le milieu rural, dans la mesure où c'est possible de le faire. (22 h 45)

Tout cela serait envisagé avant le mois de mars. D'autre part, on dit qu'à cause du règlement de placement, l'artisan, celui, par exemple, qui aurait 800 heures, aurait tendance à vouloir se convertir en artisan. Je voudrais simplement faire remarquer, qu'en vertu de la loi actuelle, il peut le faire. Au moment où on se parle, il peut le faire.

D'autre part, celui qui n'a pas de certificat du tout, même pas un "C", a priori, je pense qu'on ne peut pas présumer que c'est un salarié et que c'est probablement un artisan, pour le vrai, depuis longtemps. Ceci dit, encore une fois, il faut le lire avec le règlement de placement, il faudra le relire avec le nu, les modifications qu'il y aura aux règlements de placement. Donc, je ne pense pas que cela soit l'occasion d'un déversoir systématique. Si j'avais cette conviction, je n'aurais pas présenté des amendements à la loi dans le sens où je les présente. Je ne pense pas que ce soit un entonnoir ou un déversoir systématique, bien au contraire. Quant à la question du "cheap labour", je voudrais qu'on se rassure là-dessus. Quand l'artisan traite directement avec un consommateur, l'exemple que j'ai donné était: que ce soit pour réparer des perrons, pour faire, finalement, de petits travaux ou des travaux, des fois, moyens, participer à faire en partie une cuisine, etc., ce qu'on dit, c'est: On ne le soumet pas aux taux du décret.

Il ne faut pas oublier qu'on a affaire à quelqu'un 1 ) qui a une licence; 2) qui est qualifié — il faut qu'il soit qualifié, en vertu de la Loi de la main-d'oeuvre, donc, ce n'est pas n'importe qui qui peut le faire; 3) qu'il va y avoir des exigences au niveau de la sécurité; 4) qu'il va y avoir des exigences en termes de cautionnement et de garantie.

Quand on met tout cela ensemble, ce n'est pas vrai que c'est nécessairement simple pour un salarié classé "B" de passer à un statut d'artisan. Cela ne nous rend pas la chose facile. D'autre part, quand on tient compte du fait que les amendements que je propose à la loi vont faire que l'artisan sera payé aux taux du décret, quand il va travailler pour un employeur professionnel et qu'en plus de cela, on met la restriction que l'artisan n'a pas le droit de travailler avec quelqu'un d'autre, quand ce sera tout cela ensemble, je ne suis pas sûr que ce soit un déversoir au règlement de placement.

Revenons spécifiquement maintenant sur certains problèmes évoqués entre autres, par le député de Portneuf et le député de Saint-Hyacinthe...

M. Mailloux: Avant que l'honorable ministre passe aux observations de mon collègue, je pourrais poser une question au ministre, s'il le permet.

M. Johnson: Oui, cela va.

M. Mailloux: Le ministre a dit principalement que l'artisan, c'est quelqu'un qui réparait des perrons, des cuisines, n'importe quoi. Il m'a dit tantôt: En mars, il faudra peut-être revoir le phénomène du milieu rural où il y a un problème particulier. Si le ministre, à ce moment, revoit le milieu rural, j'attendrai. Je voudrais simplement faire la réflexion suivante: Un artisan ne serait pas capable de construire sa propre maison dans le contexte actuel. Il doit travailler seul, sans l'aide de personne. Le ministre sait pertinemment...

M. Johnson: Pas dans le contexte actuel, mais en vertu de la loi que je propose.

M. Mailloux: En vertu de la loi?

M. Johnson: Oui, parce que, dans le contexte actuel, il peut le faire. C'est-à-dire que, en pratique, il le fait. Comprenons-nous bien.

M. Mailloux: Mais, dans la loi actuelle, malgré sa bonne volonté, normalement, cela prend au moins deux ou trois ouvriers pour monter une charpente de maison. Sinon, cela va prendre des journaliers de la construction au moins pour l'aider à monter n'importe quoi. D'où l'obligation, si jamais on veut que ceux qui ont moins de 1000 heures puissent continuer à en construire, de ne pas être confinés à ce règlement.

M. Johnson: Je ne suis pas sûr que j'aie compris la dernière phrase... d'où?

M. Mailloux: Si les ouvriers sont confinés à ce règlement, les artisans ne seront plus en mesure de construire une maison; ils devront travailler seuls.

M. Johnson: C'est cela. Ils pourront travailler avec un non-artisan.

M. Mailloux: Pour un consommateur.

M. Johnson: C'est cela, mais ils ne peuvent pas travailler avec quelqu'un qu'ils paient. Ils peuvent travailler avec un non-artisan.

M. Mailloux: C'est payé par le même...

M. Johnson: C'est cela, la distinction; elle est importante quand on pense au déversoir qui est évoqué entre autres par les centrales syndicales. ll y a des drôles de balises dans ce déversoir quand on le regarde comme il faut. Maintenant, pour revenir sur des questions spécifiques comme la question de la grève, au moment où l'on se parle, en cas de grève dans la construction, on sait qu'en général, à moins

de débrayages illégaux qui ne sont pas légion, d'ailleurs, qui sont assez rares depuis un bout de temps, pour l'artisan, c'est la même chose; il n'est pas plus couvert. Aussi, il faut regarder la réalité de ce que c'est, une grève dans la construction. Je me souviens de ce que j'ai vu à Saint-Pie de Bagot pendant la grève de 1973 ou autour de cela, ou même un peu avant cela, et dans le bout de Farnham, Saint-Hyacinthe où il y a des gens qui se sont fait sortir des chantiers un peu raide. Il n'y a personne qui souhaite cela. On sait que, lorsqu'il y a un mouvement de cette ampleur, cela donne lieu habituellement à, disons, des raidissements de positions, y compris des raidissements de colonne vertébrale. Les pénalités. C'est vrai que l'artisan ne sera pas soumis aux pénalités de l'OCQ, sauf qu'il va être soumis aux pénalités s'il ne respecte pas le règlement de qualification de la loi de la main-d'oeuvre et aux pénalités de la Régie des entreprises de construction.

Je pense qu'ici j'ai évoqué l'ensemble des questions spécifiques qui avaient été posées. Alors, la question générale, encore une fois, de dire qu'il y a là un déversoir, je pense que, compte tenu des six éléments que j'ai énumérés tout à l'heure quant aux contraintes pour être un artisan, la facilité pour un employeur professionnel d'utiliser ses services, mais, bon Dieu, il est obligé de le payer au taux du décret et, finalement, iI est obligé de passer des contrats individuels, ce qui est complexe. Aujourd'hui, on sait qu'en l'absence de ces dispositions il y a des artisans — l'exemple qu'on donne, ce sont les "dry walls" — qui ont fini, entre autres, la Place Desjardins à Montréal. Ce sont des artisans qui ont fait cela à forfait, malgré la loi qui existait, malgré la loi de l'OCQ, malgré la définition de salarié qu'on y retrouvait et la non-exclusion de l'artisan, etc. Je pense que cela va devenir beaucoup plus balisé. C'est l'espoir que l'on met dans cela, en même temps qu'on peut agir sur le règlement de placement lui-même pour tenir compte, entre autres, de la réalité rurale, de façon beaucoup plus concrète, en tenant compte évidemment aussi de taux d'activité générale dans la construction.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Évidemment, je m'excuse de ne pas reprendre les débats qui ont eu lieu et les discussions. Quand même, je vais être assez bref. J'avais d'autres interventions à faire à l'Assemblée nationale tout à l'heure. À la fin de nos travaux, il faut parfois changer assez vite de salle. Sur la question du règlement de placement, puisque le ministre nous a dit, cet après-midi, son intention de tenir, peut-être, une commission parlementaire... Est-ce que j'ai bien compris le ministre?

M. Johnson: Je m'excuse.

M. Roy: Est-ce que le ministre songe à tenir une commission parlementaire pour discuter du règlement de placement dans l'industrie de la construction éventuellement?

M. Johnson: Oui, c'est entendu. Il y a une motion de la Chambre à cet effet, et on est d'accord. Cela va se faire, en tout cas, avant le 1er mars. Cela peut être en janvier, en février, possiblement à la mi-février. Vous serez avisés dix jours avant.

M. Roy: J'aurais tout simplement deux questions à poser au ministre. Est-ce que le ministre a l'intention de nous faire parvenir un avant-projet — j'ai posé la question en Chambre aujourd'hui — avant le début de la tenue de cette commission parlementaire de façon qu'on puisse l'examiner?

M. Johnson: Je pourrai, sans doute, faire parvenir, si la chose est décidée, déjà, les documents qui sont pertinents à cela, y compris les modifications au règlement de placement, si elles sont décidées.

M. Roy: Si on pouvait avoir une idée des modifications que le ministre entend apporter, évidemment, cela nous donnerait beaucoup plus d'éclairage pour aborder toute cette question de l'artisan. La grande crainte que nous avons, que j'ai pour ma part —et je pense que mes collègues ont certainement dû parler dans le même sens, parce que c'est le problème que l'on retrouve un peu partout — c'est que les personnes qui ne réussiront pas à accumuler le nombre d'heures pour avoir une carte de classification "A" dans le règlement n'auront pas d'autre choix — c'est bien important — que de se déclarer artisans si elles veulent travailler pendant l'année. Non pas que cela va être un choix libre; cela va être, en quelque sorte, un choix obligatoire à cause des conditions du marché. Les artisans, évidemment, seront de plus en plus nombreux. N'étant pas protégés par le décret de la construction comme tels, ils pourront évidemment travailler à des salaires inférieurs.

M. Pagé: C'est cela, à rabais.

M. Roy: Travailler à rabais. Jusqu'où cela peut-il aller? Je ne le sais pas et je pense qu'il n'y a personne qui soit en mesure de dire jusqu'où cela peut aller. Ce qui arrive, c'est que les petits entrepreneurs dans nos régions qui embauchent de la main-d'oeuvre et qui doivent respecter le décret, pour eux, il y a un problème qui va se poser. Qu'est-ce qui va arriver aux petits entrepreneurs et qu'est-ce qui va arriver par la suite à ces artisans qui demeurent quand même des travailleurs de la construction comme telle, qui ont contribué à un fonds de pension pendant un certain nombre d'années et qui ont acquis quand même certains privilèges. Cette obligation de devenir artisan est faite non pas à cause d'une décision librement consentie, mais à cause de l'exigence même du règlement de placement qui les place devant une situation, ils n'ont pas d'autre choix.

C'est: Prends cette route si tu veux gagner ta vie, sinon tu es un chômeur. Là, il y a un problème. Quand on veut discuter du cas de l'artisan dans ce secteur, il est évident qu'il y a des

problèmes qu'on peut retrouver dans les milieux ruraux, II y aura également des problèmes dans les milieux urbains parce qu'on me disait, il n'y a pas tellement longtemps, que dans la région métropolitaine de Montréal, même sur l'île de Montréal, le même problème peut se poser.

Le Président (M. Jolivet): Vous avez terminé, M. le député?

M. Roy: Ce sont des questions que j'ai posées au ministre.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Joliette-Montcalm. M. le ministre.

M. Johnson: Encore une fois, le salarié qui, au moment où on se parle, a un certificat "B" plutôt qu'un certificat "A" a la possibilité d'être un artisan. Le problème que pose le député de Beauce-Sud, ce n'est pas un problème qui est soulevé par la loi. C'est un problème qui existait antérieurement. À la rigueur, il peut être soulevé par le règlement de placement. Cela, je veux bien. Il n'est pas soulevé par la loi qu'on présente. On va avoir l'occasion de discuter de tout cela à fond, quant aux implications du règlement de placement, en commission parlementaire au mois de février. Encore une fois, les balises concrètes qui existent pour devenir, pour passer d'un état de salarié, qui comporte des avantages et qui comporte également, dans le cas des centrales, des exigences, à celui d'artisan avec les limites que cela peut impliquer pour lui quant à sa capacité de travailler sur des gros chantiers — et l'exemple, je l'obtenais du président de la régie des entreprises de construction — c'est le suivant, je pense que c'est dans le cas des électriciens actuellement, de la Corporation des électriciens, on posait la question bien concrètement: Est-ce que, dans le cas des électriciens, il y a des chantiers industriels ou commerciaux qui sont bâtis par une série d'artisans électriciens? Il n'y en a pas. Cela obligerait l'entrepreneur professionnel à passer une série de contrats individuels complexes. L'employeur n'est pas intéressé à faire cela a priori.

Il y a des avantages souvent pour un employeur à avoir un syndicat chez lui. C'est rare que l'AECQ l'admette, mais je veux dire, ils ont avantage souvent à avoir un syndicat. En ce sens, ce n'est pas nécessairement une incitation pour eux à avoir recours systématiquement à des artisans sur des chantiers industriels ou commerciaux. Maintenant, là où le bât blesse — et il faut peut-être se dire les choses franchement — dans le cas des structures syndicales...

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Je comprends que M. Leclerc qui est très intéressé à ces questions et qui est présent depuis quelques jours ait des choses à dire. Il a eu l'occasion d'ailleurs de m'en parler beaucoup. Il n'y a rien de méprisant...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, à l'ordre!

Une voix: II ne faudrait pas qu'il nous prête des intentions. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas le droit de parler ici qu'il peut nous prêter cette intention.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous en prie.

M. Johnson: M. le Président...

Une voix: Encore moins un ministre d'un parti... (23 heures)

M. Johnson: Un des problèmes qui est soulevé par cela, en particulier dans les milieux ruraux... Il n'y a rien de méprisant dans l'expression "là où le bât blesse". C'est très clair que dans le cas des salariés syndiqués qui ont recours à une structure syndicale qui leur est utile, comme c'est normal qu'une structure syndicale le soit... Dans le cas de l'artisan charpentier-menuisier de l'Île-aux-Coudres, qui est le cas que le député de Charlevoix m'a souvent cité, c'est peut-être dans ce cas précis une incitation à devenir essentiellement et carrément un artisan. En ce sens, cela peut effectivement affecter, d'une certaine façon, dans des endroits localisés, dans des circonstances précises... Mais dans le cas de gens qui ont un métier qualifié, qui remplissent tous les critères que j'ai énumérés tout à l'heure, c'est peut-être les inciter un peu à devenir des artisans. De façon générale je persiste à croire que ce n'est pas là un entonnoir ou un déversoir.

Le Président (M. Clair): Y a-t-il d'autres interventions sur l'article 15?

M. Pagé: Quand M. le député de Beauce-Sud aura terminé, j'interviendrai, M. le Président.

M. Roy: J'ai terminé pour le moment.

M. Pagé: Terminé pour le moment? D'accord.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf.

M. Chevrette: J'avais déjà demandé la parole.

M. Pagé: C'est vrai. Je m'excuse.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. La question du mot "artisan" tel que défini dans la loi 290... c'est-à-dire que dans le terme "salarié" de la loi 290 le mot artisan était compris. Je pense que c'est à la suite d'un amendement au décret qu'il a été possible de considérer l'artisan entrepreneur comme un salarié au sens du décret. C'est à cause

de l'ouverture faite dans la définition du mot "salarié", dans la loi 290, si j'ai bien compris, qu'on a pu par la suite, apporter un amendement au décret. Là n'est pas l'objet fondamental de mes propos.

Ce que je veux dire sur l'artisan, c'est que l'argument fondamental du député de Beauce-Sud était de dire qu'il y a des gars qui seront forcés de devenir entrepreneurs artisans.

D'autre part, je ne sais pas comment clarifier cela. Il n'y a peut-être pas de formule magique, mais tout le monde se plaint du fait que l'artisan coupe le cou au travailleur syndiqué. Tout le monde se plaint que l'artisan se fait payer en-dessous de la table. Tout le monde admet que dans les petits milieux ruraux il est difficile d'aller chercher 1000 heures pour se classer comme travailleur. Un bon nombre de personnes reconnaissent également qu'il y a des salariés qui, indépendamment du fait qu'ils sont des salariés non-artisans reconnus, font aussi des travaux le soir dans des sous-sols à $4 ou $5 l'heure.

Un choix doit se poser à un moment donné. On légalise une situation ou on la laisse continuer telle quelle. Il est bien évident que...

M. le Président, je voudrais quand même intervenir en toute quiétude et ne pas avoir à entendre...

Le Président (M. Clair): Je suis là pour cela.

M. Chevrette: J'ai accepté des insultes en dehors de la Chambre, mais je n'en accepterai pas en Chambre.

Je reviens donc à ce que je disais. On a le choix de légaliser une situation ou non. D'après moi, tant qu'à jouer en cachette, il ne faut pas avoir peur de jouer franc jeu et de dire que c'est un phénomène dans le milieu rural — l'artisan — qu'il faut maintenir. À partir du moment où on accepte qu'il faut maintenir le terme "artisan" et conclure de facto que le règlement de placement vient interférer et qu'il n'y aura probablement plus d'artisans... du même souffle le député de Beauce-Sud dit que le gars risque d'être pénalisé en devenant artisan. Il semble y avoir — à mes yeux, en tout cas — une certaine contradiction. Je ne dis pas que vous vous contredisez. À mes yeux, en tout cas, votre intervention ne semble pas claire. Dans un même souffle...

M. Roy: Voulez-vous que je la clarifie tout de suite pour éviter trop de discussions là-dessus?

M. Chevrette: Je n'ai pas l'intention de vous charrier, c'est ce que j'ai compris tantôt.

M. Roy: La situation n'est pas claire non plus pour l'artisan. Ce sont des hypothèses qui se retrouvent. L'artisan qui aimerait garder son statut de travailleur, qui n'est pas intéressé à s'inscrire comme artisan, à cause du règlement de placement, est obligé de le faire, sinon il ne peut pas travailler.

La situation qui prévaut à ce moment-là est que la personne perd son statut de travailleur parce qu'en choisissant le statut d'artisan, elle ne peut pas avoir les bénéfices des deux statuts; il faut qu'elle prenne un ou l'autre. En changeant de statut, elle perd les avantages de l'autre mais si elle change malgré elle, à cause d'une restriction...? C'est le point que j'ai voulu soulever. Je sais que ce n'est pas facile à résoudre mais le problème existe.

M. Chevrette: Mais pour moi, M. le député de Beauce-Sud, chez le salarié qui se déclare artisan à l'office actuellement, quelle différence y a-t-il entre ce qui est présenté et la situation qui existe? Il y a ce point-là. Deuxièmement, est-ce qu'on va aussi maintenir l'ambiguïté du fait que l'individu va garder son statut de salarié, qu'il va continuer à faire de l'ouvrage en dessous de la table sans avoir un statut d'entrepreneur, sans aucune garantie pour le consommateur?

Personnellement, il va falloir qu'on fasse son lit. Même si le bât blesse et que cela choque, ce n'est pas une question de bât blessé, de blessure... Arrangez cela comme vous voudrez, je trouve cela personnellement incohérent de soutenir le fait qu'on déplore qu'il y ait des enseignants, des pompiers et des policiers qui viennent faire une saucette dans la construction pour voler du travail aux véritables travailleurs de la construction et que du même souffle on donne au salarié qui, lui, paye une cotisation syndicale cependant, le privilège de faire des travaux en dessous de la table à des coûts dérisoires et coupe-cou. Il va falloir faire son lit.

M. Roy: Si le député déplore le fait qu'il y a des travailleurs qui vont couper le cou, travailler sous la table, la question des professeurs, des pompiers, des chauffeurs de taxi, on n'a pas à en discuter; on est entièrement d'accord là-dessus. Il n'y a aucun problème, je pense, au niveau des membres de la commission.

M. Chevrette: On ferait un bon bout.

M. Johnson: Ce que dit le député de Joliette, c'est qu'il faut être cohérent et accepter l'autre aspect aussi.

M. Roy: Je comprends cela mais si on force le travailleur de la construction, si on le force, c'est là que je dis... par le fait qu'il ne peut pas garder son statut de travailleur. On a des représentations à chaque jour à cause du règlement de placement.

M. Chevrette: À ce moment-là, M. le député de...

Le Président (M. Clair): On s'adresse toujours au Président.

M. Pagé: Parlez-lui.

M. Chevrette: Je m'excuse, M. le Président. M. Pagé: Vous aimez qu'on vous parle. Le Président (M. Clair): Oui, absolument.

M. Chevrette: À ce moment-là, il vaudrait mieux, carrément, laisser le choix à l'individu salarié de choisir le statut de salarié-artisan-entrepreneur — je ne sais pas comment vous arrangez cela — mais vous battre sur d'autres choses si vous voulez que le gars conserve son statut de salarié parce que quand le député de Beauce-Sud, M. le Président, dit: On sera forcé d'être entrepreneur, on dit: Le règlement de placement va forcer le salarié à aller vers le statut d'entrepreneur. Au lieu de se battre contre le statut d'entrepreneur qui assure une protection du consommateur, il serait mieux de se battre sur le règlement de placement pour qu'il devienne alléchant pour ne pas qu'il devienne entrepreneur. Je veux dire: Tu te fais un lit et tu te bats avec le lit que tu as choisi.

M. Mailloux: Sur le même sujet...

Le Président (M. Clair): Je pense honnêtement, M. le député de Charlevoix, que le député de Saint-Hyacinthe avait manifesté la volonté d'intervenir avant vous. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Pour ma propre compréhension du problème — parce que je pense que ce n'est pas simple, je ne veux pas dire comme le ministre de l'Agriculture: C'est bien simple — est-ce qu'un travailleur qui a un certificat "B" et qui ne peut travailler parce que seuls les travailleurs avec un certificat "A" doivent être employés avant ceux du "B", lorsqu'il n'a pas d'ouvrage, peut-il demander d'avoir un statut d'artisan? Par contre, lorsqu'il a son statut d'artisan pendant une période de deux ou trois mois et qu'il constate qu'il peut avoir du travail avec sa qualification "B", peut-il revenir sur le marché du travail avec son certificat "B"?

M. Johnson: S'il a déjà été un salarié et s'il a eu un certificat, oui.

M. Cordeau: II peut aller d'un à l'autre. M. Lavigne: ... d'un à l'autre.

M. Johnson: II ne peut pas compter ses heures indistinctement, mais s'il a déjà été un salarié, il demeure un salarié.

M. Lavigne: Pas de problème.

Le Président (M. Clair): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: À la suite des interrogations que posait tantôt le député de Beauce-Sud à l'intention du député de Joliette-Montcalm quand il disait que les gens de son milieu vont être invités à sortir du statut de salariés qu'ils ont maintenant pour aller vers la classification d'artisans, comme il est 23 h 20, il est fort possible que cette loi ait des problèmes à compter de minuit. Le ministre dit qu'en mars il fera faire une étude peut-être de certaines régions et verra si l'obligation de faire 1000 heures sera modifiée pour certains travaux — je dis bien là — à ce moment-là, si cela était arrivé en même temps, cela aurait peut-être répondu aux interrogations du député de Beauce-Sud. Cela a peut-être été le joint nécessaire. C'est en fait ce qui va nous arriver tantôt, il va probablement falloir revenir lors d'une autre session.

M. Johnson: Est-ce que le député de Charlevoix me permet? Effectivement, idéalement, il aurait fallu que tout cela se fasse en conjonction, les deux mois et demi qui vont se passer de maintenant à l'émission des nouveaux certificats en vertu des nouvelles dispositions du règlement.

M. Mailloux: II n'est pas sûr qu'on ne revienne pas en Chambre avant deux mois d'après ce qui se passe de l'autre bord!

M. Johnson: Cela va dépendre! M. Mailloux: Oui.

M. Johnson: Évidemment, idéalement, il aurait fallu pouvoir les harmoniser en même temps, sauf que, pour des raisons que j'ai déjà évoquées en Chambre, ce n'était pas possible. Je présume que le député de Charlevoix n'en est pas responsable, cependant, quand il a évoqué qu'à minuit il est possible qu'il arrive des problèmes à ce projet-là...

M. Mailloux: Je constate!

M. Johnson: Oui, c'est cela. Mais, encore une fois, je reviens sur ce que j'ai dit un peu précédemment, un parti vaut ce que vaut la parole de son leader.

M. Pagé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf invoque le règlement.

M. Pagé: Oui. Je n'en ferai pas une longue conversation de débat ni de procédure, mais je vais mettre les cartes sur la table et on va les mettre sur la table une fois pour toutes, avec ces insinuations que je considère comme étant non fondées. M. le Président, le mardi 12 décembre 1978...

Le Président (M. Clair): M. le député de...

M. Pagé: M. le Président, on ne se laissera pas charrier...

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf!

M. Pagé: M. le Président, ce n'est pas vrai, je m'excuse. J'ai invoqué le règlement pour soutenir...

Le Président (M. Clair): J'invoque moi-même le règlement — à titre de président, j'ai le droit de le faire — simplement pour inviter les membres de cette commission à la modération. C'est un secret de polichinelle que des problèmes semblables à ceux qui sont en train de naître ici ont eu lieu de l'autre côté.

M. Pagé: Oui, le bordel vient de prendre de l'autre côté, là! Et si le ministre continue, cela va prendre ici.

Le Président (M. Clair): S'il vous plaît, M. le député de Portneuf!

M. Pagé: II va s'apercevoir que cela va se prendre à deux, le tout dit très sereinement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, c'est simplement pour vous dire que, de l'autre côté, finalement, je pense que cela n'a pas avancé le débat!

M. Pagé: Non.

Le Président (M. Clair): Je constate que vous désirez intervenir sur une question de règlement pour faire allusion à des faits qui se seraient déroulés en dehors de cette commission.

M. Pagé: Oui, auxquels fait référence le ministre.

Le Président (M. Clair): ... auxquels fait référence le ministre, et si...

M. Pagé: Le ministre ne remettra en cause ni en doute la parole des libéraux, ce n'est pas vrai! Parce que je vais me défendre. Certainement! On va voir qui a brisé sa parole depuis une semaine!

Le Président (M. Clair): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, sur la question de règlement...

M. Pagé: Est-ce que vous me donnez la permission de rétablir les faits?

Le Président (M. Clair): C'est le député de Charlevoix qui désire intervenir...

M. Mailloux: ... je pense bien qu'il faudrait quand même être assez honnêtes dans nos déclarations. C'est quand même le ministre du Travail qui vient de dire que c'est la parole du leader de l'Opposition officielle qui n'a pas été tenue. J'étais en Chambre, comme l'honorable ministre du Travail, au moment où le leader de l'Opposition officielle a demandé au premier ministre et au leader du gouvernement de faire leur lit et de choisir dans les quatre heures qui demeuraient à la session, de faire avancer les projets qu'ils voulaient faire avancer. C'est l'offre qui a été faite par l'Opposition officielle. Le gouvernement a choisi d'amener des projets d'agriculture. Tantôt, on les a retirés! Je pense que ce n'est pas mettre en doute la parole du...

M. Pagé: II y a un autre élément, M. le Président. Je vous demanderais, si c'est possible, de rétablir les faits ou encore si le ministre... Non. Vous allez arrêter de lancer des flèches! Cela se lance à deux, je m'excuse.

M. Johnson: Vous vous sentez comme une pelote d'épingles!

M. Pagé: Si vous me permettez de rétablir les faits, cela va me prendre trois minutes! On va "clairer" ce dossier-là et on va passer à autre chose.

Le Président (M. Clair): Si vous me dites que c'est en trois minutes, je le souhaite. (23 h 15)

M. Pagé: Oui, M. le Président. Le 12 décembre dernier, la loi 110 était déposée; il était question de l'étudier le 13 ou le 14. Les deux leaders se sont rencontrés, comme cela est normal que ça se fasse dans le système parlementaire.

Les deux leaders ont discuté du menu législatif qui restait entre cette date et la fin de la session prévue pour dans 36 minutes. Le leader m'a évidemment demandé mon opinion. Il va de soi qu'un gouvernement qui a une majorité, s'il veut adopter un projet de loi, il l'adopte.

M. Johnson: II y a un règlement sessionnel...

M. Pagé: Attendez un peu, ne m'interrompez pas...

M. Johnson: ... il y a des maîtres-chanteurs...

M. Pagé: ... vous allez briser mes trois minutes.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: C'est votre règlement.

M. Pagé: M. le Président, le 12 décembre, j'étais informé d'amendements qui allaient être déposés par le ministre. D'ailleurs, il y en aura aux articles 16 et 17, si ma mémoire est fidèle. J'ai demandé au ministre de me faire part de ces amendements le lendemain, donc de ne pas amener sa deuxième lecture tout de suite. Je lui ai dit ceci par la voix de mon leader, lequel en a convenu avec le leader du gouvernement. Le vendredi, 16 décembre — c'était la condition, c'est toujours le leader de l'Opposition qui parle — si vous amenez, dès le début des affaires du jour, le

projet de loi 110 pour étude et qu'on termine la deuxième lecture du projet de loi 110, le vendredi 16 décembre à minuit, donnez-nous une commission parlementaire à compter de lundi matin, 18 décembre, où on aura trois jours d'audition pour permettre de présenter des motions, pour entendre les parties, pour permettre de discuter du fond du projet de loi, pour présenter nos amendements dans ce délai de trois jours, ce qui nous aurait permis de siéger à partir de 11 heures ou 11 h 15 le matin jusqu'à 13 h, de 15 h à 18 h et de 20 h à 24 heures.

À ces conditions, ou on aura terminé la deuxième lecture le vendredi 16 décembre, parce que vous l'aurez amenée le matin, ou les partis d'Opposition pourront se faire entendre pendant ce délai de trois jours de commission parlementaire. Votre loi, vous l'aurez le 21 décembre, c'est ce qu'on vous a dit. Mais ce n'est pas ce que vous avez fait, ce n'est pas ce qui s'est passé — c'est la dernière minute qui me reste — le gouvernement a amené la loi 110 en deuxième lecture à 23 h 15, vendredi soir dernier, sachant pertinemment qu'elle ne serait pas adoptée en deuxième lecture avant vendredi soir.

La deuxième lecture ne s'est même pas continuée lundi, à 17 heures, après la motion de blâme de l'Union Nationale, mais, encore une fois, dans la nuit de lundi à mardi. Je m'attendais, comme député de l'Opposition, critique de ce dossier, qu'au moins la commission parlementaire soit amorcée mardi matin. Même pas! Même pas mercredi matin. Cela a été jeudi matin, la dernière journée, pour nous permettre d'étudier une loi qui a peut-être seulement 28 articles mais qui en amende 5 et qui a des implications dans tout le secteur de la construction. Vous allez venir nous dire qu'on a renié notre parole. Voulez-vous que je vous dise pourquoi vous avez refusé...

M. Johnson: Oui.

M. Pagé: ... de la faire siéger mardi ou mercredi? D'une part, pour faire en sorte de limiter le débat sur le projet de loi 110, sachant pertinemment que tous les groupes étaient contre, limiter la présence des travailleurs qui étaient mauditement fatigués de passer trois ou quatre jours à Québec, à $35 par jour pour la chambre, pour qu'il en ait le moins possible dans la salle, que ça passe en douce à la veille de Noël.

M. Johnson: Ce sont des permanents syndicaux.

M. Pagé: II y a un autre élément que je pourrais peut-être vous mentionner.

M. Johnson: Attention au doigt!

M. Pagé: Je serais pas mal curieux de connaître l'appui qu'a le ministre du Travail au Conseil des ministres. Cela, c'est un élément que j'aimerais savoir. On pourrait peut-être prendre quinze ou vingt minutes pour discuter de ça.

M. Johnson: M. le Président, si le député de Portneuf permet...

M. Pagé: M. le Président, j'ai rétabli les faits et le ministre du Travail ne se permettra jamais de mettre en doute la parole des libéraux. Quand nous, on signe un contrat et qu'une partie ne...

M. Johnson: Regardez-moi bien aller.

M. Pagé:... le respecte pas, on est en droit de l'annuler. M. le Président, je suis disposé... Le Président (M. Clair): À l'ordre!

M. Pagé: Les faits sont rétablis, je suis disposé à revenir à l'étude de l'article 15, parce que j'ai des amendements et je vais faire mon travail.

M. Johnson: M. le Président, sur cette même question...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Johnson: ... vous permettez, brièvement que je répète ce que j'ai dit, qu'un parti vaut la parole donnée par son leader.

M. Pagé: Vous ne l'avez pas tenue.

M. Johnson: Je maintiens ce que j'ai dit.

M. Pagé: Vous ne l'avez pas tenue, vous valez ce que vous valez.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Je maintiens ce que j'ai dit et je pense que les semaines et les mois à venir nous permettront de le démontrer.

M. le Président, je suis prêt à continuer, si on s'imagine qu'on a peut-être la collaboration de l'Opposition encore pour quelques minutes.

M. Pagé: Vous l'avez la collaboration, vous l'auriez eue lundi ou mardi...

Le Président (M. Clair): Le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Johnson: Si vous aviez un critique financier, puisqu'on m'a fait un procès d'intention tout à l'heure, M. le Président, on m'a dit...

Le Président (M. Clair): À l'ordre...

M. Pagé: II n'y a pas de procès d'intention, ce sont les faits.

M. Johnson: Oui, on m'a dit que les raisons pour lesquelles ce projet avait été amené aujourd'hui était des espèces de sinistres raisons. Le député de Portneuf devrait savoir que l'habileté du député d'Outremont, comme critique en matière financière, a paralysé une commission parlementaire pendant une journée et plus...

M. Pagé: C'est notre faute!

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

M. Pagé: C'est encore de notre faute, ce n'est jamais la faute de ce gouvernement-là.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Quand ce n'est pas de la faute d'Ottawa, c'est la faute des libéraux.

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs! J'ai l'impression de ne plus présider...

M. Pagé: Question de règlement.

Le Président (M. Clair): ... cette commission, mais d'y assister. Je suspends les travaux.

(Suspension de la séance à 23 h 21)

(Reprise de la séance à 23 h 30)

Le Président (M. Clair): À l'ordre, messieurs, s'il vous plaît.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre reprend ses travaux pour continuer l'étude, article par article, du projet de loi no 110.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... question de règlement. En vertu d'un article du règlement que vous connaissez sûrement, on n'a le droit d'imputer des motifs indignes à aucun des parlementaires. Les derniers propos irresponsables du ministre du Travail avaient pour but d'imputer au député d'Outremont, qui n'est pas ici actuellement, des motifs indignes, à savoir de retarder les travaux de cette commission.

Je ne sais pas à quelle enseigne le ministre a trouvé ces motifs, je ne sais pas où son imagination lui a permis de chercher, dans la noirceur de son imagination, justement, ces motifs, mais je vais vous dire une chose. Le député d'Outremont est critique de l'Opposition officielle dans le domaine financier, dans le domaine du ministère des Finances et du Revenu. Il a assisté, il a participé aux travaux de la commission concernant huit ou neuf lois du ministère du Revenu ou du ministère des Finances et je pense que c'est tout à fait irresponsable, indigne de la part du ministre du Travail, de tenter de camoufler l'incompétence du gouvernement — laissez-moi finir — de camoufler l'incompétence du gouvernement, y compris celle du leader du gouvernement à faire des travaux de cette Chambre quelque chose qui a un peu d'ordre, sous le couvert du fait que la commission du revenu a pris peut-être un peu plus de temps que prévu pour terminer ses travaux, sur huit ou neuf lois très importantes, y compris le fait qu'il n'y a pas tellement longtemps, cette commission a été retardée simplement par le fait que le ministre des Finances était malade. Ce qui a d'ailleurs été dit publiquement.

Je pense que c'est tout à fait indigne de la part du ministre du Travail.

Le Président (M. Clair): Messieurs, nous en revenons à la question du député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, je voudrais revenir à la question que je posais tout à l'heure à M. le ministre, concernant le droit qu'a l'ouvrier qualifié possédant un certificat "B" de passer du statut d'ouvrier salarié au statut d'artisan. Vous m'avez dit que c'était possible et vice versa, le type pouvait passer du statut d'artisan à celui d'ouvrier salarié.

Est-ce que le projet de loi que nous avons présentement devant nous va continuer à accorder ce droit à l'ouvrier?

M. Johnson: Dans la mesure seulement où il a déjà été salarié.

M. Cordeau: Oui, oui. Parce que, possédant un certificat...

M. Johnson: Mais seulement dans la mesure où il a été salarié.

M. Cordeau: Oui...

M. Johnson: Oui, dans la mesure où il a été salarié seulement.

M. Cordeau : Dans le passé, iI n'a été que salarié. M. Johnson: C'est ça. C'est ça.

M. Cordeau: Dès que le type a un certificat, soit A, B ou C, il peut...

M. Johnson: II y a un problème de sémantique, dans la mesure où il a été et non pas ou dans la mesure qu'il n'a été. Dans la mesure où il a été salarié, oui.

M. Cordeau: Oui, mais s'il a un certificat A, B et C...

M. Johnson: C'est ça, salarié, par définition. M. Cordeau: D'accord.

M. Johnson: Ce ne sont que les salariés qui ont ça.

M. Cordeau: D'accord.

Le Président (M. Clair): Sur l'article 15?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Portneuf.

M. Pagé: Le plus calmement du monde, les faits sont rétablis, M. le Président, j'ai un amendement à proposer à l'article 15. Je dirai au ministre que je conviens que toute cette question est fort délicate. Ce n'est pas facile de trouver des solutions bien arrêtées, bien définitives qui vont non seulement faire le tour du problème, mais qui vont le régler. M. le Président, entre autres, c'est un premier amendement que j'ai à déposer. Je tiens à vous faire part que, peut-être, si on avait eu trois jours de commission, on aurait pu faire ce qu'on vient de faire depuis une heure, c'est-à-dire discuter sur les voies, les avenues possibles de solutions.

M. le Président, je présente l'amendement suivant à l'article 15, qui se lit comme suit: article 15b-t) artisan; le libellé de l'article, tel qu'on peut le lire actuellement: "t) "artisan": une personne physique faisant affaires pour son propre compte, qui exécute elle-même pour autrui et sans l'aide de salariés des travaux de construction."

M. le Président, l'amendement vise à remplacer les mots "pour autrui", par les mots "pour un consommateur".

Le Président (M. Clair): Je déclare cet amendement recevable.

M. Pagé: D'accord. M. le Président, je peux, pour l'information de mes collègues députés, me référer tout de suite à la définition que le législateur fait d'un consommateur, et ce dans la loi 72 qui vient d'être adoptée ou qui est sur le point d'être adoptée au salon bleu. "Un consommateur est une personne physique, sauf un commerçant qui se procure un bien ou un service pour les fins de son commerce." Commerce est précis ici non pas dans le sens de commercial, mais de sa propriété.

M. le Président, je conviendrai, dès le départ, que ce premier amendement n'est peut-être pas la solution à tous les maux, à tous les aspects du problème qu'on a eu l'occasion de mettre en relief. Cet amendement témoigne, tout au moins, de mon opinion, de l'opinion de l'Opposition officielle, à savoir qu'on tient pour acquis que les artisans ont existé, que ça existe, ce statut. Je n'y inclurai pas tout de suite toute la question de savoir s'il doit être un salarié ou non, à quel moment il devient un salarié, par qui doit-il être régi, les questions de sécurité et tout ça. On abordera ça par la suite, une fois que l'amendement sera débattu ou encore, si mes collègues veulent élargir le débat, on pourra en discuter tout de suite.

On convient qu'il y a des personnes, des travailleurs dans le secteur de la construction qui ont un statut d'artisans. Le député de Joliette-Montcalm a mis en relief des faits qui sont vrais, à savoir que le législateur est peut-être justifié de se demander ce qui arrive avec ce statut, tout ça. M. le Président, je conviens qu'un travailleur qui se définit ou qui choisit d'être artisan puisse continuer à travailler pour autrui, dans une relation, dans un contrat, si on peut appeler ça ainsi, avec un individu pour la construction de sa maison, pour les travaux dont le consommateur a souvent besoin, que ce soit la finition d'un sous-sol, la réparation d'un toit, des modifications à l'intérieur d'une résidence ou autre.

Cependant, je ne vois pas en quoi le gouvernement peut être justifié, actuellement, en plus de donner un statut, de créer une entité avec les personnes qui ont déjà ce statut, en plus de leur permettre de travailler pour un individu, pour un consommateur dans la construction de sa résidence ou autre, de leur permettre de travailler pour un employeur professionnel.

M. le Président, l'amendement vise à limiter pour l'artisan le droit de travailler pour un employeur professionnel. Je n'ai pas d'objection, comme député...

M. Johnson: Consommateur ou employeur professionnel?

M. Pagé: Employeur professionnel. J'ai objection à ce qu'il travaille pour un employeur professionnel; je veux qu'il travaille pour un consommateur, c'est mon opinion. C'est peut-être un lapsus. Avec l'horaire qu'on a, c'est peut-être explicable qu'on fasse des lapsus. Que l'artisan choisisse, qu'on lui donne le privilège de choisir le secteur dans lequel il évoluera. S'il veut conserver ou avoir le statut d'artisan — c'est bien, c'est à lui de le décider — qu'il s'en aille dans le secteur des transactions avec un consommateur, qu'il aille construire des résidences, qu'il aille monter des charpentes, qu'il aille faire tous les travaux inhérents à sa relation possible avec un consommateur, une personne physique, j'en conviens.

À la commission parlementaire convoquée par mon collègue, le député de Beauce-Sud, sur la question du règlement de placement — parce qu'à ce moment-là, on étudiait différents choix — j'avais évoqué la possibilité de scinder en deux le secteur de la construction. C'est peut-être vulgariser, mais je qualifiais ça de petite et de grosse construction. La construction d'un centre commercial par un employeur professionnel, la construction d'un centre militaire à Saint-Jean, actuellement, d'après moi, M. le Président — le ministre me dira en quoi je peux me tromper ou en quoi ce

n'est pas justifié, l'opinion que j'ai — devrait appartenir à des salariés d'abord. Le ministre nous a souventefois dit cet été, lors de la présentation ou des discussions entourant le règlement de placement dans l'industrie de la construction, que ce secteur — je reprends son terme que je ne fais pas nécessairement mien — appartienne aux véritables travailleurs de la construction.

M. le Président, c'est l'amendement que je présente. J'espère que mes collègues pourront participer et qu'on pourra échanger des questions là-dessus, qu'on ne rejettera pas ça du revers de la main, ça ne mérite pas d'être rejeté du revers de la main. On pourra, par la suite, si le ministre le juge opportun et si on en a le temps, ça pourra se faire à une prochaine séance, je suis prêt à revenir le 27 décembre, vider la question de savoir si l'artisan doit être un salarié ou non. On pourrait aborder la question, parce qu'on doit présumer que, dans des délais assez brefs, les artisans, en vertu du projet de loi 110, seront regroupés dans une association.

Si le gouvernement considère qu'il doit, pour le consommateur, pour le public québécois, permettre à des artisans de travailler dans leur résidence, sur leur perron de galerie, pour utiliser un terme cher au ministre, si son objectif est de diminuer le coût de la main-d'oeuvre, qu'il accepte de former une association d'artisans, qu'il accepte de négocier avec eux des bases salariales qui s'appliqueraient à tout le monde, et non pas de laisser libre cours aux conditions du marché, où il y aura une rivalité terrible, où il y aura des problèmes gigantesques qui seront définitivement engendrés par cet état de fait et par cet état de la loi.

M. le Président, j'en fais motion et j'espère qu'elle sera retenue par les membres de la commission.

M. Johnson: M. le Président, sur la motion d'amendement du député de Portneuf, il y a un premier problème qui se pose en technique législative, c'est celui de la définition de ce qu'est un consommateur. Je comprends qu'on peut toujours se référer à une autre loi, mais, en droit statutaire, le député de Portneuf...

M. Pagé: M. le Président, si le ministre me permet un commentaire, ça impliquera mon amendement, j'ai peut-être omis de le faire, pour revenir à l'article 1 pour les définitions, et on pourra se servir...

M. Johnson: Ah bien oui, encore. Ah bon! M. Pagé: Écoutez, ce sont des mécanismes. M. Johnson: D'accord, mais ce n'est pas...

M. Pagé: On pourra discuter du fond plutôt que des mécanismes.

M. Johnson:... M. le Président.

M. Pagé: La définition du mot "consommateur" que j'ai prise, c'est celle du gouvernement, dans la loi 72. J'arrête là-dessus.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, évidemment, il faut dire qu'être un législateur, c'est faire beaucoup de mécanique, par définition. Même là, même avec une définition qui pourrait être extraite de la loi 72, encore une fois, il faut voir les implications concrètes. Celui qui est propriétaire d'un triplex, sur la rue Aylmer, à Montréal, qui fait venir un artisan pour réparer ses portes, si c'est dans sa maison, en vertu de ça, ça peut être un artisan, mais si c'est en haut, il faudrait que ce soit un employeur professionnel, parce qu'il loue ses logements, ça pose des problèmes très concrets qu'il faut analyser comme ça. C'est la raison, l'unique raison pour laquelle je préférerais considérer que cet amendement, nous aurons lieu de le revoir plus tard, lors des études subséquentes qui précéderont la reprise de ce projet de loi, mais il n'est pas question de l'accepter ce soir.

M. Pagé: Parce que vous voulez suspendre l'article 15, ou quoi?

M. Johnson: On pourrait passer à l'article 16.

M. Pagé: M. le Président, j'apprécierais peut-être avoir les commentaires de mon collègue de Beauce-Sud sur mon amendement.

Le Président (M. Clair): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Disons que c'est un amendement qui répond aux inquiétudes et aux suggestions que nous avions manifestées lors d'une commission parlementaire à laquelle le député de Portneuf avait fait allusion.

Ce que j'ai tenté d'illustrer tout à l'heure, c'est que, dans la loi, on veut faire en sorte de contrôler, en quelque sorte l'artisan, lui donner un statut et le contrôler en même temps. J'ai voulu attirer l'attention du ministre sur le fait — je ne peux pas reprendre ça — qu'à cause du règlement de placement, on risquait de provoquer l'augmentation du nombre. On limite l'activité, dans un certain sens, qui va dans le sens des recommandations que j'ai déjà faites, parce que j'ai toujours compris que le secteur domiciliaire, comme tel, devait faire l'objet d'un statut un peu particulier et que cela a été une des grandes complications dans le secteur de la construction.

Sans plus d'argumentation, M. le Président, je souscris à l'amendement du député de Portneuf.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: La définition que vous avez donnée, je ne l'ai pas à portée de vue, pourriez-vous me la relire, j'aurais une question à poser?

M. Pagé: La définition du mot "consommateur"?

M. Chevrette: Oui.

M. Pagé: Une personne physique, donc ce n'est pas une corporation, ça ne peut pas être un employeur professionnel incorporé, une société, sauf un commerçant qui se procure un bien ou un service pour les fins de son commerce. C'est un commerce précis, pas dans le sens de commercial, mais dans le sens de son bien. (23 h 45)

M. Chevrette: À Saint-Éphrem de Beauce, le marchand général, qui est un commerçant, ne pourrait pas employer un artisan pour faire des tablettes dans son entrepôt.

M. Pagé: Je conviens que cela met ce problème en relief. C'est d'ailleurs ce à quoi je me référais bien humblement par des exemples que je donnais au début.

M. Chevrette: C'est cela, cette loi.

M. Roy: N'oubliez pas que, si on permet de faire des tablettes, on va permettre la construction du magasin.

M. Pagé: Je conviens que cela met en relief des problèmes comme ceux-là, mais il faudra trancher à un moment donné.

M. Chevrette: Voici le problème...

M. Pagé: Je préfère qu'on tranche que de laisser cela...

M. Chevrette: Je vais fournir une petite argumentation. Le problème, c'est que, dans le milieu rural — j'en reviens toujours au milieu rural — quand il n'y a pas de grande ville à proximité... Il y a des comtés... Dans mon comté, il y a Joliette, avec 30 milles de rayon, c'est plausible, mais prenez le comté de Kamouraska-Témiscouata, ou prenons Saint-Michel-des-Saints, où il n'y a pas nécessairement d'entrepreneurs généraux. Ce sont des artisans qui font le genre de "jobbine" dont on parle. J'avoue franchement... Je vais voter contre l'amendement et, comme il semble bien qu'on aura passablement de temps, j'apprécierais plutôt qu'on suspende l'article. Plutôt que de l'abattre, seriez-vous d'accord avec la suspension?

M. Pagé: Oui.

M. Johnson: Je pense qu'on a peut-être mis le doigt — si le député de Portneuf me le permet, je vais demander la suspension de l'article — sur le genre de difficultés que cela pose. La réponse du député de Beauce-Sud met effectivement le doigt sur le type de problème qu'on retrouve dans une industrie qui est hyperréglementée et qui conduit à des choses qui relèvent plus de l'aberration collective que du déroulement normal des activités économiques et de la possibilité pour des individus, qu'ils soient salariés ou artisans, de gagner leur vie calmement.

Le député de Beauce-Sud dit: Si on permet les tablettes, on va être obligé de permettre qu'ils construisent tout. C'est tout cela, le problème de la loi de la construction, il est là. Un amendement comme celui, par exemple, qui se réfère aux consommateurs — je comprends ce que vise le député de Portneuf, je suis sûr qu'il est sincère; il n'y a pas de problème dans ce cas-là — c'est effectivement le genre de choses qui nous ont été soulevées il y a plusieurs mois. À mon ministère, on a étudié cela pendant des mois, à la suite de revendications syndicales, patronales ou des milieux intéressés, des municipalités ou autrement. C'est cela, la complexité de cette loi qui, quel que soit le temps qu'on y passera, ne se réglera pas, par définition. Peut-être que les membres de cette commission feront partie de cette élite d'à peu près 52 personnes au Québec qui comprennent toutes les lois et les règlements de la construction, si on y passe de nombreuses heures. Je le souhaite à tous les membres de la commission.

D'autre part, je voudrais dire, en demandant évidemment la suspension de cet article, que nous devrons nous réunir en commission parlementaire, probablement au cours du mois de février, pour étudier la question du règlement de placement. Compte tenu du fait que cette loi n'a pas été adoptée et qu'elle ne donne pas au ministre le pouvoir de modifier les règlements de l'OCQ, nous pourrons tous espérer, comme députés, que, si nous parvenons à dégager des règles ou des choses intéressantes au sujet du règlement de placement, nous prierons le ciel pour que l'OCQ veuille bien modifier son règlement de placement, de même que, pour les statuts de l'AECQ, étant donné que nous n'avons pas le pouvoir de les modifier, il faudra espérer que ces problèmes se règlent d'eux-mêmes.

Finalement, je dois vous dire, M. le Président, que l'effort que nous avons fait avec ce projet de loi, c'était, c'est vrai, dans un projet de loi omnibus de la construction, comme cela, à peu près, a toujours été le cas depuis sept ans au Québec, de normaliser certaines situations, d'apporter des amorces de correctif. Je regrette évidemment les circonstances que j'ai évoquées et qui me donnaient, peut-être dans une certaine candeur de membre de l'Assemblée nationale depuis seulement deux ans, à croire que nous pourrions peut-être procéder normalement à l'adoption de ce projet de loi.

Je regrette les circonstances qui nous y ont amenés, d'autant plus que je regrette finalement — et je voudrais terminer là-dessus — que le député de Portneuf m'ait imputé des motifs aussi sordides que celui de vouloir écoeurer les représentants des salariés qui étaient ici et qui payaient des chambres à $35 par jour. C'est un niveau de débat auquel je ne tiens pas à toucher, M. le Président.

M. le Président, je demanderais la suspension des travaux de cette commission.

M. Pagé: M. le Président, sur cette motion...

M. Johnson: C'est-à-dire que je quitte, alors la commission ne siège plus.

M. Pagé: C'est débattable, il n'est pas minuit. M. Johnson: C'est-à-dire que je quitte.

M. Pagé: Ah! vous quittez?

M. Johnson: On termine avec cela.

M. Pagé: M. le Président, j'espère que nous reviendrons bientôt pour continuer ces travaux. Joyeux Noël, M. le Président!

Le Président (M. Clair): La commission du travail et de la main-d'oeuvre ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 51)

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