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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 20 février 1979 - Vol. 21 N° 1

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Application du règlement de placement dans l'industrie de la construction


Journal des débats

 

Application du règlement de placement

dans l'industrie de la construction

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre est réunie pour étudier les nouveaux certificats. Je lis la motion: "Que la commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre se réunisse avant la date de la mise en vigueur de nouveaux certificats de certification afin d'analyser les conséquences, pour les travailleurs, de l'application du règlement de placement dans l'industrie de la construction."

C'est une motion qui avait été adoptée le 29 novembre 1978 par l'Assemblée nationale de la façon suivante: Pour: 85 — Contre: 0 — Abstentions: 0

M. Pagé: La motion était présentée par qui? Le Président (M. Jolivet): Par...

M. Chevrette: Par le député de Portneuf, mais amendée par le député de Joliette-Montcalm.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, ne commencez pas tout de suite. Les membres de cette commission sont les suivants: M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Brassard (Lac-Saint-Jean); M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou); M. Lavigne (Beauharnois) remplacé par M. Alfred (Papineau); M. Mailloux (Charlevoix), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud); M. Vaillancourt (Jonquière) remplacé par M. Lefebvre (Viau).

Parmi les intervenants, des membres pourront s'ajouter. Les intervenants sont: M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke); M. Jolivet (Laviolette) remplacé par M. Marcoux (Rimouski); M. Laplante (Bourassa), M. Paquette (Rosemont), M. Springate (Westmount), M. Samson (Rouyn-Noranda).

J'aimerais qu'on me suggère un rapporteur pour cette commission.

M. Alfred: Je suggérerais M. Lefebvre.

Le Président (M. Jolivet): M. Lefebvre (Viau) est accepté comme rapporteur de la commission. M. le ministre, vous avez la parole.

Remarques générales M. Pierre-Marc Johnson

M. Johnson: M. le Président, cette commission est réunie, comme le dit si bien le libellé de la motion, après l'amendement du député de Joliette-Montcalm, pour étudier les conséquences et les implications du règlement de placement de l'industrie de la construction, promulgué l'an dernier, on le sait, au premier juillet, essentiellement pour les travailleurs.

On sait cependant que les entreprises ont également, dans certains cas, à faire des commentaires.

Je voudrais simplement rappeler que le mandat de cette commission n'est pas, contrairement à ce qui aurait pu être dit, d'entendre les parties, mais bel et bien de permettre aux membres de cette commission de discuter des problèmes qu'ils ont eu à vivre, concrètement, dans bien des cas, dans leur comté. Je présume — sachant que la pratique du côté gouvernemental — que le bureau de comté est une chose qui se fait systématiquement. Je vais présumer que cela se fait également du côté de l'Opposition.

M. Roy: Ne soyez pas inquiet là-dessus.

M. Johnson: Je pense que les députés sont en mesure d'établir et de cerner les problèmes qui sont posés par le règlement de placement, tel qu'il existe au moment où nous nous parlons.

Deuxièmement, les parties ont été invitées, à la fin novembre par le président de l'Office de la construction du Québec à fournir leur opinion sur le règlement de placement. La plupart des groupes ont fait parvenir des mémoires qui variaient d'une page à une quinzaine de pages sur l'application du règlement. D'ailleurs, on pourra, en cours de route, déposer copie de ces mémoires auprès des membres de la commission.

Cependant, il faut également ajouter qu'au moment où nous amorçons l'étude en commission du règlement de placement, le gouvernement a déjà adopté la semaine dernière, à la demande de l'Office de la construction du Québec, un arrêté en conseil qui prévoit... Pardon?

M. Pagé: Quel jour?

M. Johnson: Je pense que c'était mercredi de la semaine dernière...

M. Pagé: Excusez-moi.

M. Johnson: ... à la séance régulière du Conseil des ministres. ...un amendement au règlement de placement pour l'année 1979 qui prévoit que tous les travailleurs qui, en 1978, ont obtenu un certificat de classification A le conservent en 1979, quel que soit le nombre d'heures qu'ils ont effectué depuis le 1er juillet 1978. Il en va de même pour tous ceux qui avaient un certificat B, en 1978; ils le conservent pour 1979, à moins évidemment qu'ils n'aient fait assez d'heures pour obtenir un certificat A, ce qui peut être le cas dans certains métiers ou dans certaines régions.

Cet amendement que nous avons décidé d'adopter avant même la tenue de la commission parlementaire est un amendement qui avait un

impératif administratif, étant donné que le renouvellement s'opère au mois de mars. Il fallait donner le temps à l'Office de la construction, puisque cela implique quand même des dizaines de milliers de travailleurs, de savoir à quoi s'en tenir dans l'émission des certificats pour 1979.

Finalement, je pense qu'au cours de cette réunion il faudra qu'on ait à l'esprit certaines choses. La première, c'est que le règlement de placement sera appelé, dans les semaines qui viennent, à être modifié considérablement pour tenir compte de la réalité, entre autres, des régions, de la réalité de l'embauche au niveau des régions ou des sous-régions, qui pourraient être celles du décret, pour tenir compte de la quantité et de la présence des apprentis et pour tenir compte d'une série d'autres considérations qui visent essentiellement à améliorer le fonctionnement ou la qualité de l'administration de ce règlement de placement.

Deuxièmement, il faut être conscient que toute proposition faite par l'Office de la construction du Québec au gouvernement devra, avant d'être adoptée par l'office lui-même, passer par le comité mixte de l'Office de la construction où, on le sait, siègent, de façon paritaire, des représentants du monde syndical et du monde patronal dans la construction.

On pourra toujours nous dire que le comité mixte a récemment laissé savoir aux membres de l'Assemblée nationale qu'il n'entendait pas siéger; je pense cependant que, malgré un certain tollé créé autour de la loi 110, une unanimité un peu étonnante a été faite entre différents syndicats et les entrepreneurs, mais pour des raisons bien différentes, selon les groupes auxquels on avait affaire. Il faut se rappeler que ce gouvernement a choisi et a décidé qu'il ne permettait pas aux parties d'avoir le contrôle paritaire de l'administration de l'office, mais il a décidé quand même d'accorder aux parties un pouvoir de considération de tous les règlements de l'office pour une période de 30 jours.

En ce qui concerne celui qui vous parle — et j'en suis assuré en ce qui concerne la direction de l'office — il ne s'agit pas de faire semblant que ces dispositions existent, mais de les mettre en vigueur. C'est-à-dire que toute modification aux règlements de placement de l'Office de la construction pourra passer, pendant une période de 30 jours, devant le comité mixte où les parties, dans un contexte, disons, un peu moins politisé que celui qu'on a connu récemment, pourront avec sérénité et vigueur — je n'en doute pas — apporter leurs commentaires sur les projets de changements aux règlements de placement.

L'autre dimension dont il faut tenir compte dans nos commentaires ou nos propos de ce matin, c'est la dimension de la complexité du règlement de placement. Je me permettrai de faire appel à une qualité que je sais être latente chez certains des membres de l'Opposition, même si elle n'est pas toujours manifeste. C'est cette capacité de regarder tranquillement, sans démagogie un texte réglementaire et des implications sans essayer de faire des blagues ou sans essayer de mettre en caricature les situations. C'est un texte réglementaire complexe. Je pense que les travailleurs de la construction au Québec méritent la simplification des règles ou du règlement, mais aussi sans doute la simplification, par les hommes publics quels qu'ils soient, des considérations qui entourent la critique de ce qu'est le règlement de placement.

M. le Président, je proposerais, j'ai eu l'occasion d'en discuter pendant quelques minutes tout à l'heure, pour les fins d'accélérer nos travaux que, conformément aux conversations que j'ai eues avec le critique de l'Opposition libérale la semaine dernière, nous puissions pendant peut-être trois séances aujourd'hui, une ou deux séances demain, nous adonner à l'étude du règlement de placement. Après que les représentants de l'Opposition auront fait leurs propos préliminaires, comme je viens de le faire, on pourrait peut-être s'adresser à des catégories de problèmes, par exemple, le nombre d'heures ou les exigences pour obtenir un certificat, selon le nombre d'heures travaillées dans le temps, en fonction de l'âge ou en fonction de certains critères; deuxièmement, tout ce qui a trait aux régions, c'est-à-dire la définition des régions et la notion de l'embauche régionale et des critères au niveau de l'embauche régionale, on pourrait toucher là-dedans des problèmes spécifiques, comme les régions éloignées, comme les villages isolés, par exemple, la Basse-Côte-Nord ou les régions insulaires, comme les Iles-de-la-Madeleine, ou même à la rigueur, l'Ile aux Coudres, dans le comté de Charlevoix. On pourrait aborder aussi les problèmes relatifs au placement lui-même, c'est-à-dire l'exclusivité du placement syndical par rapport à un placement qu'on pourrait appeler mixte ou une capacité ou une possibilité de référence par l'OCQ, ce qui est un problème qui préoccupe, en particulier, le monde syndical.

Finalement, ce qui m'apparaît très important, c'est le fonctionnement au niveau du commissariat au placement, au niveau du ministère, où, on le sait, en vertu de la loi adoptée l'an dernier, il y a un commissaire du placement, qui est M. André Girouard, au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui est assisté d'une série de commissaires adjoints à travers le Québec, qui entendent en appel les causes des travailleurs qui n'ont pas obtenu un certificat dont ils étaient satisfaits. A cette occasion, on pourrait discuter de la qualité du fonctionnement du commissariat au placement. Je dois vous le dire, pour en avoir discuté avec M. Girouard, récemment, et avoir vu les chiffres qu'il a compilés, ainsi que les efforts qu'il a faits pour ramasser la jurisprudence dans le domaine, je pense que ce commissariat fonctionne généralement, de façon beaucoup plus qu'adéquate, pour ne pas dire carrément excellente.

Dans ce cadre-là, qui entendrons-nous? Comment nos travaux pourraient-ils se dérouler? Les représentants de l'Office de la construction, par son président par intérim, M. Lapointe, et deux de ses principaux fonctionnaires au niveau du règlement de placement, MM. Maheux et Després, ainsi

que le directeur du contentieux, M. Ferron, sont avec nous. Ils peuvent être évidemment des ressources intéressantes, d'autant plus qu'ils ont reçu les mémoires des parties et M. Girouard, évidemment, comme commissaire du placement, est également à notre disposition.

Voilà pour les préliminaires, M. le Président. J'espère que l'on pourra passer à travers tout cela en une journée et demie, conformément, d'ailleurs, à ce que m'a laissé entendre le député de Portneuf la semaine dernière.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Michel Pagé

M. Pagé: M. le Président, c'est certainement un jour très important pour la commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre que celui du 20 février, parce qu'il constitue une première étape d'auditions, de dialogues, d'échanges entre les députés, le pouvoir législatif, sur l'application d'un règlement de placement qui est en vigueur depuis le 1er juillet 1978, qui a fait couler beaucoup d'encre, qui a amené des prises de position par les parties concernées, qui a amené plusieurs commentaires ici, à l'Assemblée nationale, par les partis de l'Opposition et aussi par les membres de la majorité ministérielle, en ce que ce règlement de placement touche une centaine de milliers de travailleurs du Québec. Cela a des répercussions dans chacun de nos comtés et on peut présumer que tous les députés sont certainement très intéressés par toute cette question et l'ensemble de ce problème. (10 h 30)

Nous avons déjà eu l'occasion de faire part ici à l'Assemblée de notre position, nos commentaires sur ce règlement de placement et c'est ainsi que, dans un premier temps, au mois d'octobre dernier, nous présentions à l'Assemblée une motion de blâme à l'endroit du gouvernement, qui visait essentiellement à faire en sorte que le gouvernement modifie sa position et qu'il accepte de s'asseoir à la table pour discuter éventuellement de modifications à y apporter. Plus tard, soit à la fin de novembre, nous revenions à la charge, nous de l'Opposition officielle, pour demander à l'Assemblée de convoquer dans les délais les plus brefs la présente commission parlementaire afin qu'on ait l'occasion de se pencher sur cette question. Tout cela, M. le Président, pour vous dire que la commission est importante. Nous, de l'Opposition officielle, nous attendons beaucoup de résultats, en termes de travail, de cette commission.

Je me limiterai, sans vouloir reprendre tout ce que le ministre du Travail vient de nous dire, à lui faire part de deux commentaires. Dans un premier temps, celui-ci tout à l'heure semblait douter du rôle, il s'interrogeait sur le rôle que l'Opposition officielle allait y jouer. M. le Président, il n'a pas à s'interroger sur cette question. Le ministre du Travail a été à même de constater, depuis qu'il est ministre, la contribution fort valable et fort concluan- te de l'Opposition officielle aux travaux ici à cette Assemblée. Qu'il se rappelle le projet de loi 110 entre autres. L'avenir lui montrera que si le ministre du Travail avait davantage écouté l'Opposition officielle dans le projet de loi 110, il aurait peut-être un peu moins de problèmes, parce que les problèmes s'en viennent. Vous ne faites que commencer à les vivre.

M. Chevrette: Dites-le donc sans rire.

M. Pagé: C'est vrai que vous auriez dû nous écouter davantage, parce que vous vous préparez toute une série de problèmes.

Le Président (M. Jolivet): Cela allait bien, continuez.

M. Pagé: De toute façon, mon deuxième commentaire, c'est que le ministre a fait état d'une conversation. C'est le cas, évidemment, qu'on se parle, même si à l'occasion on se "grafigne" un peu, comme dirait mon collègue de Joliette-Montcalm. On a étudié la possibilité que nos travaux soient répartis sur une couple de jours, mais c'était strictement à titre exploratoire, cela peut durer trois jours comme cela peut durer quatre jours. On est prêt à revenir la semaine prochaine selon ce que la commission décidera. La commission parlementaire, ce n'est pas le député de Portneuf et le ministre du Travail qui sont "boss" de cela, c'est nous tous, c'est la commission qui est maîtresse de ses travaux.

M. Johnson: Je suis bien d'accord.

M. Pagé: Or, M. le Président, l'objectif de cette commission est assurément de voir l'expérience de chacun des députés mais, il est tout d'abord de permettre à chacun des députés, et j'espère que les députés de la majorité ministérielle interviendront dans le débat, de soulever les questions, les interrogations qu'ils ont dans leur milieu respectif et les problèmes qu'ils ont affrontés eu égard à ce règlement de placement.

L'objectif de cette commission est aussi d'entendre l'Office de la construction, l'OCQ, qui a été appelé à jouer un rôle, le rôle principal dans l'application de tout ce règlement, qui a été l'objet de plusieurs critiques qui, jusqu'à une certaine mesure, selon mon expérience, étaient justifiées. L'Office de la construction est habilité à administrer le règlement sur lequel il y a plusieurs interrogations; qu'on se réfère à la stricte question de la référence d'embauche ou du placement de la part de l'OCQ. Ce sera une question qu'on devra définitivement vider et le moment le mieux choisi, c'est la présente commission.

J'espère qu'on pourra entendre le commissaire au placement qui nous fera certainement part de son expérience jusqu'à maintenant, parce qu'on me dit qu'il y a des milliers de plaintes qui lui ont été formulées, qu'on pourra voir, là aussi, le genre de plaintes, ce sur quoi le commissaire au placement et ses adjoints se sont guidés pour

rendre leurs décisions, la fréquence de certaines décisions, tout ça.

Nous attendons de l'Opposition officielle que ce débat soit un débat quand même plus large que la stricte question de la classification en A, B ou C. Pour nous, il semble que le problème n'en est pas seulement un de comptabilité d'heures; le problème ne se limite pas à savoir si les règlements devraient être modifiés pour faire en sorte qu'une personne puisse être classée A si elle a effectué 750 heures ou 500 heures. Ce n'est pas là tout le problèVne. Il y a d'autres aspects fort importants qui devront être traités ici à cette commission. Entre autres, un de ces éléments, c'est le champ d'application du décret. Le ministre devra nous dire, le gouvernement devra nous faire part de ses commentaires, de ses considérations, de son opinion sur le champ d'application du décret. Qu'est-ce qui arrive avec les exclusions au champ d'application; qu'est-ce qui arrive de cet état de fait qui dure depuis déjà trop longtemps? Quand est-ce qu'on sort des secteurs d'activités, du champ d'application du décret et que ça ne devient plus régi par les lois de la construction?

Qu'il suffise d'énumérer la question des "shutdown", la question des travaux de ferme, la question des travaux mécanisés, la question des heures; ou est-ce de la construction lorsqu'il est question d'équipement de production? En fait, ce sont des aspects qui devront être traités à leur mérite, attentivement. Le gouvernement doit profiter de cette commission parlementaire pour nous faire part de son opinion et nous dire ce qu'il entend faire avec ces questions qui sont quand même débattues depuis déjà trop longtemps et sur lesquelles il y a des revendications sérieuses qui ont été faites.

On devra aussi vider la question du placement comme tel. On sait qu'il y a une grande interrogation dans le milieu, à savoir si l'Office de la construction du Québec, l'OCQ, fait du placement. Le gouvernement nous dira que ces gens-là ne sont pas habilités à en faire et n'en font pas. Mais ils font de la référence d'embauche. Les entrepreneurs du Québec, les employeurs, sont obligés de se référer à l'Office de la construction du Québec, laquelle leur réfère une série de noms.

Jusqu'à maintenant, quant à moi, d'après l'expérience que j'ai eue dans mon comté, dans ma région, le service ainsi dispensé par l'Office de la construction n'a pas toujours été des plus adéquats et ne reçoit pas toujours l'approbation de ceux qui sont concernés par l'application de ce règlement. Peut-être que le tort n'est pas uniquement imputable à l'Office de la construction lui-même. Je conviens qu'avec un mandat plus ou moins défini comme celui qu'il a, cela doit être quand même assez difficile d'évoluer dans cela. Mais il faudra vider cette fameuse question. Il faudra voir en quoi les parties qui sont intéressées à faire du placement, qui sont intéressées à prendre leurs responsabilités au chapitre du placement, qui sont intéressées à se soumettre à des normes très strictes de fonctionnement et d'administration, qui sont intéressées à se soumettre à la juridiction d'un organisme comme l'OCQ, pour être jugées dans la façon dont elles évoluent, on devrait savoir en quoi ces parties ne devraient pas être mandatées pour faire du placement, et que cette question du placement soit, somme toute, vidée définitivement. La commission devra le faire, selon moi.

On devra aussi vider la question de la formation. C'est encore un problème très épineux. On sait que le gouvernement du Québec s'engage dans des avenues bien spécifiques au niveau de la formation. On sait que des efforts sont déployés par le ministère de l'Education. On sait qu'actuellement, par exemple, on incite plusieurs personnes, au niveau du secondaire, à se diriger vers certains corps de métiers. Ces gens-là se retrouvent, à la fin de leur cours, sans aucune possibilité d'avoir un emploi. Bien souvent, on leur refuse même le carnet d'apprentissage. Ces gens-là sont obligés, dans certains cas, de se faire garantir des heures pour recevoir un permis de travail.

En fait, aussitôt qu'on a regardé cet aspect, on y constate qu'il n'y a pas du tout, mais pas du tout, de collaboration, de coordination entre les efforts, les lois et les approches données par le ministère du Travail et les efforts qui sont déployés par le ministère de l'Education. Comme je le dis souvent, malheureusement, il semble qu'il y a plusieurs couronnes dans ce gouvernement. Malheureusement, le ministère de l'Education ou le ministère du Travail semble ignorer ce que son collègue de l'Education ou du Travail fait, mais il faudra davantage de coordination dans les efforts.

On doit toutefois se poser de sérieuses interrogations sur le fait qu'un gouvernement consacre, par nos impôts à nous tous qui sommes ici ce matin, pour la formation, pour résulter au non-emploi d'une personne qui aurait été formée pendant deux ou trois ans, intéressée à travailler, qui veut travailler et qui, par surcroît, se voit refuser le permis de travail. Il faudra évidemment envisager la question des régions et des sous-régions. Plusieurs représentations ont été formulées dans ce sens-là. C'est une question de fond. Cela implique d'intervenir dans toute cette question de la mobilité. Le gouvernement est-il justifié de modifier son règlement pour le ramener à une base strictement régionale et sous-régionale? Cet aspect devra aussi faire l'objet de nos discussions. Je suis convaincu, entre autres, que les députés de la majorité ministérielle pourront amener, s'ils le jugent opportun et s'ils se décident à parler, une contribution fort utile au débat.

Il y a aussi toute la question des régions frontalières qui est un élément...

M. Johnson: Ils vont parler, ils sont prêts.

M. Pagé: II y en a d'autres aussi, dehors, qui seraient prêts à parler, vous savez.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Cela allait bien, continuez, continuez. Continuez, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Gardez le sourire, vous êtes intéressant.

M. Pagé: Vous savez, il y en a d'autres dehors qui seraient prêts à parler, qui seraient prêts à se faire entendre, ce matin, ici.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre! Continuez.

M. Pagé: II y a toute la question des régions frontalières. Cet aspect devra être vidé. On sait que le ministre du Travail a fait un voyage à Toronto, il n'y a pas longtemps. Il est allé rencontrer le ministre du Travail de l'Ontario. On sait qu'il y a eu des négociations qui ont été amorcées. J'espère que, dans cette optique de transparence, ce pétage de bretelles de démocratie et de transparence saura aboutir à une déclaration du ministre pour nous dire exactement où en sont rendues les négociations et ce qui arrive dans ce dossier des régions frontalières.

Il y a tout cet aspect aussi des Québécois et du nombre de Québécois qui travaillent à l'extérieur. Vous savez qu'on a des milliers de Québécois qui sont susceptibles d'aller occuper des emplois dans d'autres provinces sur des projets d'envergure là-bas dont j'ai la liste ici, à laquelle on pourra se référer tout à l'heure.

On sait que le règlement de placement a eu un premier effet, que plusieurs entreprises d'autres provinces ont signifié aux travailleurs québécois qu'en raison de l'application du règlement de placement du Québec qui était très restrictif pour les gens des autres provinces, dans plusieurs cas, ces gens-là ont été invités à retourner postuler des emplois au Québec strictement, ce qui fait perdre la chance à plusieurs Québécois d'aller gagner des sous là-bas.

Il y a évidemment toute la question qu'on doit se poser: Est-ce que le règlement de placement tient encore? Est-ce que c'est utile qu'on soit ici ce matin? Est-ce que c'est nécessaire qu'on soit ici ce matin? Est-ce que le règlement de placement n'est pas mis sur la glace et n'a pas été mis de côté par la loi 110? C'est évident qu'on pourrait parler de classification, de A, de B, de C, de régions et de sous-régions, pendant des heures et des jours, mais la porte toute grande ouverte qui est là depuis l'adoption de la loi 110, qui permet à tout travailleur classé B ou C de devenir artisan dans le temps de le dire et d'aller travailler pour un employeur professionnel, cela vient fausser tout le débat, cela vient de mettre de côté l'application comme telle du règlement de placement, cela vient mettre de côté les objectifs qui étaient recherchés par le gouvernement, justifiés ou non, mais les objectifs qui étaient recherchés par le gouvernement dans l'adoption de ce règlement de placement. On ne pourra pas aborder ces questions-là sans faire référence, évidemment, à l'application de la loi 110 qui a été adoptée en troisième lecture la semaine dernière, à laquelle loi le gouvernement tenait beaucoup, ce qui ne recevait pas la faveur des parties impliquées, que ce soient les parties patronales et syndicales ou les partis de l'Opposition.

Il faudra se demander aussi si les objectifs recherchés par une classification comme celle-là ne pourraient pas être atteints par la libre négociation des parties. C'est un aspect important qu'il faudra envisager, je pense, la question de la sécurité d'emploi, différentes questions comme celle-là qui pourraient être laissées dans les mains de la libre négociation des parties.

Or, M. le Président, c'était là l'essentiel de mes commentaires, c'est là l'essentiel des objectifs que je considère comme devant être atteints par la présente commission.

Cependant, M. le Président, je dois vous dire, avant de terminer, que je suis, dans un premier temps, surpris qu'une commission parlementaire comme celle-là n'ait pas d'ordre du jour fixe de travail, c'est-à-dire ce qu'on va étudier en premier, quels sont les aspects qu'on va aborder en premier. Je suis surpris de constater aussi qu'on ne sache pas encore à ce moment-ci et qu'il n'y ait eu aucune formulation de la part du ministre pour savoir qui on pourra entendre. On sait que des mémoires ont été déposés tout à l'heure. J'ai devant moi le commentaire de la CSN-Construc-tion concernant le règlement relatif au placement des salariés dans l'industrie de la construction. Je conviens que ces gens-là nous ont soumis un mémoire ce matin. Est-ce qu'il serait opportun tout au moins de le déposer et de le consigner au journal des Débats? (10 h 45)

Ne serait-il pas plus opportun de prendre peut-être une séance pour entendre les parties, d'autant plus que l'inquiétude que le ministre a semblé avoir, c'était l'impossibilité que toutes les parties puissent être entendues. J'ai été à même de constater ce matin, en arrivant à mon pupitre, que l'Association des entrepreneurs en construction du Québec avait elle aussi déposé un mémoire, ce qui indique que non seulement la CSN et le Conseil provincial des métiers de la construction ont déposé des documents, mais aussi l'Association des entrepreneurs en construction du Québec.

Compte tenu du fait que tous ces gens, les deux parties, ont déposé des mémoires, est-ce qu'il ne serait pas opportun de prendre une séance pour les entendre, si c'est possible? Est-ce qu'il ne serait pas opportun aussi que l'Office de la construction du Québec soit entendu comme témoin et non pas comme personne ressource, c'est-à-dire que les gens de l'OCQ soient entendus devant nous pour qu'on puisse discuter bien librement avec eux plutôt que de les voir assis à côté du ministre pour lui "refiler" les réponses.

En fait, ce sont les interrogations que je me pose. Il y a toute la question aussi de savoir si on est ici pour quelque chose d'utile ce matin. Les dés ne sont-ils pas pipés avant qu'on amorce nos travaux? On sait que le ministre du Travail a d'ores et déjà amendé le règlement de placement la semaine dernière. Celui-ci nous indiquait tout à l'heure qu'à la suite d'une résolution adoptée par

l'Office de la construction du Québec, il avait procédé à l'adoption d'un arrêté en conseil la semaine dernière.

Or, je suis quand même assez surpris. Je dois vous dire que je suis très surpris, parce qu'assez curieusement le gouvernement a adopté un arrêté en conseil portant le numéro 454-79 le 14 février. C'était mercredi passé. La résolution a été adoptée par l'OCQ le 15 février. Or, M. le ministre nous disait tout à l'heure qu'à la suite d'une résolution adoptée par l'Office de la construction du Québec, qu'à la suite d'une invitation formulée par l'Office de la construction du Québec, celui-ci s'était vu obligé de soumettre au Conseil des ministres de mercredi l'adoption d'un règlement qui modifiait le règlement de placement, de façon à faire en sorte que toutes les personnes classées A et B actuellement, le seraient, peu importe le nombre d'heures effectuées pendant la période de référence. J'ai devant moi...

M. Johnson: Sur une question de règlement.

M. Pagé: Les procédures qui commencent ce matin. Laissez-moi donc aller!

M. Johson: Avant que le député de Portneuf n'induise cette commission et le public en erreur — je remarque là encore la qualité des fouilles de son travail — la résolution a été adoptée le 9 février par l'office, tel que confirmé dans le procès verbal, certifié par le secrétaire de la commission.

M. Pagé: J'ai ici un document qui vient de l'office. C'est en date du 15 février. C'est le 15 février, cela, M. le Président?

Le Président (M. Jolivet): Oui. Je ne prendrai pas parti sur le contenu.

M. Pagé: Non, mais je voudrais tout simplement que vous soyez témoin. C'est bien le 15 février qui est là-dessus?

M. Chevrette: C'est normal que vous soyez en retard!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Continuez, il vous reste deux minutes pour votre intervention.

M. Pagé: C'est l'office qui est en retard, comme cela! C'est encore plus grave. Il va nous dire pourquoi tantôt. Le gouvernement se veut bien transparent, bien démocrate, bien disposé à entendre les parties et tout cela. Evidemment, ce sont des formules, mais, dans les faits, ce n'est pas cela, c'est autre chose dans les faits. De toute façon, là n'est pas la question. Je voudrais quand même exprimer ma surprise que le gouvernement accepte la convocation d'une commission parlementaire, et qu'avant même que la commission ait commencé à siéger, le ministre commence déjà à amender le règlement. Je ne vois pas pourquoi. Le ministre nous dira que c'était absolument néces- saire pour les renouvellements qui doivent se faire éventuellement. On est aujourd'hui le 20 février.

M. Johnson: Nécessaire pour les travailleurs.

M. Pagé: Tout cela aurait pu se faire à la séance du conseil de demain soir, d'autant plus que vous semblez avoir l'assurance que les travaux se termineront demain après-midi. C'était là l'essentiel de mes commentaires. J'espère que le ministre pourra nous produire un ordre du jour, répondre aux questions que je lui ai formulées, et nous dire, entre autres, pourquoi on ne devrait pas entendre les parties ce matin, pourquoi on ne devrait pas entendre l'OCQ, pourquoi on ne devrait pas entendre le commissaire au placement.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Bertrand Goulet

M. Goulet: Merci, M. le Président. Comme vous l'avez constaté, vous me permettrez de remplacer celui qui s'occupe régulièrement de ce dossier chez nous, soit le député de Johnson. M. Bellemare. Vu son absence, c'est avec plaisir que je le remplace. Vous comprendrez que si je suis ici ce matin, ce sera plutôt en tant que représentant d'un comté rural ou à faible densité de population, où, chaque lundi, comme tous les autres députés, il est question du placement ou du règlement de placement dans l'industrie de la construction. Au bureau de comté chez nous, comme ailleurs, plusieurs personnes ne sont pas tout à fait heureuses de ce règlement.

Il est vrai que, depuis quelque temps, certaines améliorations ont été apportées concernant les conditions d'admissibilité aux chantiers de construction pour des gens qui n'avaient pas les qualifications nécessaires ou les heures minimales requises qui leur donnaient droit d'avoir accès à un chantier de construction.

Le nouveau règlement qu'on a adopté touchant les travailleurs de la construction avait pour but premier de protéger, comme le dit le ministre, les vrais travailleurs de la construction, soit ceux qui gagnent leur vie essentiellement en ne travaillant que sur les chantiers de la construction. De ce fait, on visait à éliminer ceux qui ont une ou plusieurs sources de revenu autres que celle de la construction et qui, de temps en temps, font un passage sur les chantiers de la construction et enlèvent le travail à ceux qui n'ont que cela pour vivre ou qui font une carrière de la construction.

Le principe même des règlements actuels, si on regarde ce que je viens de dire, était acceptable, du moins ce n'était pas mauvais, mais — M. le Président, à chaque projet de loi ou à chaque règlement, il y a un "mais" — comme dans toute loi ou tout règlement, il y a des failles en ce qui regarde les comtés à faible densité ou les régions à faible densité de population; c'est là que les failles, les sous-entendus et les objections sont les plus flagrants.

Je crois, M. le Président, en toute honnêteté, que c'est du devoir d'un représentant de l'Opposition, d'un comté rural également, de faire connaître ou de souligner ces lacunes au ministre. Je pense que l'endroit est bien choisi et je suis extrêmement heureux qu'on ait l'occasion de le faire par le biais de cette commission. Notre but, c'est de le faire voir au ministre responsable et d'essayer de l'aider, en cherchant avec lui des solutions ou une solution qui, sans être parfaite, tendra du moins vers cet objectif que nous recherchons tous, la perfection.

Tout d'abord, il y a les zones ou les régions qui sont un peu, à mon avis — un peu beaucoup, vous me permettrez l'expression — trop grandes, surtout dans les régions rurales. C'est un problème qu'on ne connaît pas dans les grands centres. Par exemple, il y a une région qui s'étend, dans mon cas, des frontières ouest du comté de Lotbinière et qui va jusqu'aux limites est du comté de Kamouraska; je pense que, sauf erreur, c'est la sous-région 12, qui s'étend sur à peu près 100 milles. Vous conviendrez avec moi que c'est un peu long comme région, comparativement à d'autres régions dans les grands centres urbains.

Par contre, en toute justice, il faut admettre qu'un travailleur de la construction n'est pas un travailleur fixe et devrait consentir — ça, c'est mon opinion personnelle — en choisissant ce métier, à se dépalcer quelque peu. En d'autres mots, un travailleur de la construction est un travailleur qu'on pourrait parfois qualifier d'itinérant, mais non pas de voyageur de commerce, et c'est là toute la différence. Entre 15 milles, 20 milles ou 30 milles pour aller sur un chantier de construction et 100 milles, vous conviendrez avec moi qu'il y a une très grande différence. Le problème, c'est qu'on est souvent obligé de payer pension et de quitter la famille, c'est là que le problème commence. Je vois une très grande différence entre une zone de 20 à 30 milles et une zone de 100 à 125 milles; en tout cas, au moins 100 milles dans notre cas.

Une autre chose qu'il est également bon de souligner à cette commission et que je me dois de souligner, c'est qu'il est faux de prétendre que certains pseudo-travailleurs de la construction ont automatiquement droit au chômage dès que les mois d'hiver ou même l'automne arrivent. Il y a des gens qui se servent de ça pour se qualifier à l'assurance-chômage. Je suis d'accord, il y a des gens de bonne foi, il y en a beaucoup qui doivent cesser de travailler par manque de travail, mais plusieurs ne semblent plus disponibles dès que l'automne arrive, du moins c'est ce que personnellement j'ai retenu lors d'une journée que j'ai passée à l'Office de la construction, de façon à pouvoir me renseigner plus objectivement sur ce problème. Je me suis rendu à l'Office de la construction pour voir ce qui s'y passait et, dans mon cas, j'ai été très bien reçu. Ce n'est pas vrai que, sous prétexte qu'on a travaillé dans la construction l'été, on a droit automatiquement aux prestations d'assurance-chômage, en plus de travailler, à temps plein comme on le dit, sous la table. C'est là un problème flagrant qu'il faudra étudier à cette commission, si l'occasion nous en est donnée.

Il faut également comprendre qu'un travailleur ne peut pas retirer les bénéfices ou respecter seulement les règlements qui font son affaire. Les règlements sont là dans le but de protéger les vrais travailleurs. Personnellement, j'ai dit que j'admettais ce principe. Les gens couverts par ce règlement doivent comprendre que, pour retirer des bénéfices à longueur d'année, ils doivent se soumettre à certaines règles. Souvent, on veut bénéficier des avantages d'une convention collective, mais on ne veut pas respecter les règlements qui ont été à la base même du principe de cette entente.

Si vous voulez, M. le Président, on va revenir sur trois cas précis que je voudrais souligner et qui, d'après moi, sont des lacunes et causent des préjudices aux travailleurs de la construction quant à leur classification, en fonction du nombre d'heures travaillées. Ce sont surtout les problèmes que l'on soulève, lorsque les gens viennent à mon bureau. Le règlement actuel ne permet pas la reconnaissance des heures effectuées par un travailleur de la construction, dans une ferme familiale; ce qui est une lacune. De la construction, quant à moi, c'est de la construction, quel que soit l'endroit où sont effectués les travaux, cela devrait compter.

C'est également la même chose pour les travailleurs de machinerie lourde, lorsqu'il s'agit de travaux effectués dans une ferme. Je ne vois pas de différence entre conduire un bélier mécanique sur une route, alors que l'autre côté de la clôture, on conduit un bélier mécanique qui fait des travaux mécanisés pour une ferme, apparemment les heures ne comptent pas toujours.

Les employés occasionnels des métiers de la construction également n'ont pas droit à la reconnaissance des heures qu'ils font pour le bénéfice du gouvernement. Il est tout à fait inconcevable que le gouvernement ne respecte pas les règlements qu'il a lui-même votés. Je ne vois pas de différence entre un travailleur de la construction au service du gouvernement et celui qui est au service d'une entreprise privée. J'entends par là les gens qui, l'été, vont travailler, par exemple, pour le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, pour la construction d'un camp. Alors, leurs heures ne sont pas reconnues. Par contre, s'ils construisent un camp, 500 pieds plus loin, pour une entreprise privée, les heures comptent. C'est le même problème pour les heures travaillées pour une commission scolaire, d'après les règlements.

Il ne faut pas oublier les lois des relations de travail. Dans la construction, il est dit que le gouvernement est considéré comme un employeur. Cela est bien défini dans la loi et le gouvernement contourne cette loi par le biais d'une convention collective ou d'employés occasionnels.

Ce qui se produit souvent, c'est que le travailleur lui-même qui effectue ce travail ne le sait même pas et, lorsqu'il se réveille l'année suivante, les problèmes commencent. On dit souvent que

toute loi est faite pour être contournée, mais il ne faudrait pas que ce soit le gouvernement lui-même qui emboîte le pas et qui ne respecte pas les lois ou qui essaie de contourner les propres lois qu'il a lui-même votées. Quand je parle du gouvernement, ce n'est pas nécessairement le gouvernement en place, mais les gouvernements qui se sont succédé.

Un autre problème qui découle directement de cette situation, c'est qu'un membre de la fonction publique est quasiment empêché de retourner à l'entreprise privée du fait qu'il n'a pas d'heures de reconnues. Personnellement, je ne vois pas pourquoi les heures qu'un employé de la fonction publique effectue pour le gouvernement ne compteraient pas si un jour il veut revenir dans la construction. Ce qui est encore pire, c'est que ce fait empêche une mobilité de la main-d'oeuvre. Quelqu'un qui a travaillé pour le gouvernement pendant deux ou trois ans dans la construction et qui veut revenir pour un entrepreneur privé, ses heures ne sont pas reconnues. C'est tout à fait aberrant. Je ne vois pas pourquoi on n'accepterait pas cela.

Il y a également d'autres points qu'on a soulevés et que j'avais eu l'occasion de soulever auprès du ministre par le biais d'une lettre que je lui adressais l'été dernier.

Dans nos régions, aux entreprises de béton bitumineux, il est assez difficile d'accumuler bien des heures. Les gens ne travaillent à peu près qu'au mois de septembre; surtout que, cette année, le gouvernement a donné des contrats pour le béton bitumineux à peu près pour le mois de septembre seulement. On ne peut pas accumuler des heures indéfiniment. Egalement, les petits entrepreneurs, comme les couvreurs, ceux de la peinture extérieure, des fondations, il y a beaucoup d'entrepreneurs qui se spécialisent seulement dans les fondations. Cela ne va durer peut-être que quelques mois. Souvent, on n'a pas assez d'heures pour se qualifier. Le petit entrepreneur, l'an prochain, s'il veut encore les mêmes hommes, il devra aller chercher les gens à l'extérieur. Et lorsqu'une région compte tout près de 100 milles, cela lui occasionnera des dépenses qu'il n'aurait pas dû avoir.

Personnellement, je suis pour un règlement qui permette à tous les travailleurs qualifiés d'avoir droit au travail. Je suis d'accord que l'on assure que le travailleur est qualifié, quitte à diminuer le nombre d'heures, pour autant que le travailleur est qualifié on devrait plutôt insister sur la qualification comme telle du travailleur.

Voici un exemple concret que vous me permettrez de souligner. J'ai eu l'occasion de travailler cet été au dossier d'un travailleur qui a 5800 heures reconnues dans son livret de l'OCQ. Mais, étant donné qu'il n'a pas travaillé depuis quelque temps à la construction, parce qu'il n'y avait pas de travail dans la région, il devrait normalement être complètement sorti de la construction, parce que depuis deux ou trois ans, il n'y a pas eu de construction dans notre région. Or, cet homme, voulant faire vivre sa femme et ses enfants, est allé travailler dans un atelier de construction mécani- que. Dès qu'il a pu trouver un emploi dans la construction, il aurait aimé y revenir. Il a 5800 heures — il est très qualifié — reconnues par l'Office de la construction. (11 heures)

Cet été, on n'a pas pu l'embaucher parce qu'il n'a pas travaillé les dernières années, mais il a quand même 5800 heures. Apparemment, personne n'a mis en doute sa compétence et ses heures sont reconnues. Il a beaucoup plus que 500 heures, beaucoup plus que 1000 heures, il a dix fois cela. Ce sont des problèmes qu'on devrait essayer de corriger. Je ne dis pas au ministre que, personnellement, j'ai toutes les solutions, mais je pense que c'est en discutant objectivement, tel que l'a souligné l'honorable ministre, qu'on devrait être bon pour trouver quelque chose.

Ce sont à peu près, M. le Président, les propos que je voulais tenir, en demeurant dans le corridor, si vous voulez, de l'objectivité. J'ai essayé de toucher quelques points pertinents à ce débat. Je vous répète que ces remarques ont été soulevées par des gens de mon comté qui, lors de visites à mon bureau, m'ont fait part de leur appréhension à cet égard. Il faut faire du bureau de comté, M. le Président, encore hier soir jusqu'à minuit et demi, pour voir que cela touche beaucoup de personnes. Je ne vous dis pas que toutes les personnes qui viennent au bureau viennent seulement pour des problèmes de construction, mais il y en a beaucoup. Je suis convaincu, M. le Président, que si tous, à cette commission, on y mettait de la bonne foi — et je ne doute pas du tout des membres de cette commission — une solution devrait être apportée dans ce dossier, une solution devrait être trouvée afin d'améliorer ce dossier controversé depuis quelque temps et même depuis quelques années. Je ne veux pas mettre le blâme seulement sur une personne, mais on a toujours eu des problèmes là-dedans.

Personnellement, je me pose également une question: Doit-on abolir tous les permis et revenir au "free for all" d'antan. Quant à moi, je dis non. Il faut essayer d'améliorer le règlement actuel qui, rappelons-nous en, a été mis là dans le but premier de protéger les vrais travailleurs de la construction, c'est-à-dire pas le professeur d'école qui, l'été, va travailler deux mois dans la construction pour enlever la "job" à celui qui normalement ou régulièrement gagne sa vie avec cela. C'est là que je vois la différence. Par contre, il ne faut pas léser non plus celui qui, depuis un an ou deux, parce qu'il n'avait pas de travail dans son comté, dans sa région, au lieu de s'expatrier à Montréal ou dans d'autres régions du Québec, est demeuré dans son comté pour essayer de trouver autre chose en attendant parce qu'il avait du coeur au ventre. Il y a une différence entre ces deux catégories de personnes, entre le professeur qui chaque été, lors de ses vacances, va enlever une "job" à un travailleur de la construction comparativement à celui qui n'en a pas eue depuis deux ou trois ans.

Pour moi, je l'ai dit tout à l'heure, un vrai travailleur de la construction c'est un type qui a la compétence reconnue, qui veut travailler. Il y a

également là-dedans le principe de la libre entreprise, le principe de l'efficacité aussi. Personnellement, pour autant que quelqu'un est reconnu compétent, a ses diplômes, comme on dit, ou ses cartes, si je veux choisir un médecin trois rues plus loin que chez nous plutôt que de choisir mon médecin voisin, c'est mon affaire. Je dis que l'entrepreneur, pour autant qu'un travailleur est reconnu compétent, devrait avoir le choix du travailleur qu'il veut embaucher. Actuellement, je ne suis pas sûr qu'il ait le choix. Il est obligé de prendre ceux qu'on lui envoie. Trop souvent, dans les grandes planifications, on a tendance également — et je le souligne à l'honorable ministre — à donner moins d'importance aux gens qui vivent dans les régions rurales ou aux gens qui vivent dans les régions à faible densité. On fait des lois, on fait des règlements en se basant sur des données qu'on recueille bien trop souvent dans les grands centres et c'est malheureux pour les régions comme celle que je représente. On l'a vu pour le placement étudiant et on le voit également pour le placement dans la construction. La plupart des lacunes viennent des régions à faible densité de population.

Les points soulevés démontrent que même si l'on croit souvent posséder toute la vérité, il arrive parfois que l'on puisse oublier des choses très importantes, ou qui semblent parfois même pas importantes, mais qui, à un moment donné, dans les faits, pour l'individu lui-même, ont une très très grande importance. On oublie des petites choses parce qu'on dit: Ce sont des cas isolés, mais non. Lorsqu'on regroupe ces cas isolés, cela devient important. C'est un peu, M. le Président, les propos que je voulais tenir. Je demande encore à l'honorable ministre de penser, à un moment donné, que dans des régions comme Bellechasse-Dorchester, on a retrouvé, dans certaines paroisses, des taux de chômage allant jusqu'à 30%, 30,5%, 20%, 25%. Ce sont des chiffres donnés par le Centre de la main-d'oeuvre du Canada. Vous allez dire que c'est le Canada, mais j'imagine que ceux du Québec sont à peu près semblables. Imaginez-vous un père de famille qui, l'an passé — là je ne veux prendre personne par les tripes, mais ce sont des cas qu'on vit régulièrement — parce que dans son comté, dans sa régio n, le chômage sévissait à 20% ou 30%, a dû aller travailler dans une industrie, comme une industrie de meubles, une industrie connexe au bois, si vous voulez, ou ailleurs, mais qui ne voulait pas ou qui n'a pas pu s'en aller travailler à Montréal, ce n'est pas la faute du père de famille s'il n'y a pas eu de construction dans son comté depuis deux ou trois ans et qu'ainsi il n'ait pas pu accumuler d'heures.

Cela ne veut pas dire qu'il n'est pas compétent dans la construction. Je dis que la seule chose qui reste pour un père de famille qui a du coeur au ventre, qui veut faire vivre sa famille, il avait trois choix. Le premier, c'était d'aller travailler sur la construction, mais il n'y avait pas de construction; le deuxième choix, c'était d'aller travailler ailleurs pour essayer au pire d'accumuler quelques timbres de chômage pour dire: Cet hiver, on va avoir quelque chose à manger, s'il n'a pas fait ça, le troisième choix, M. le ministre, vous l'avouerez avec moi, c'est le bien-être social.

Ce sont à peu près les trois choix qu'on mettait, les trois possibilités offertes à un travailleur. Je dis que, dans bien des cas, c'est à peu près le seul choix qu'a laissé le règlement actuel. Je ne vous dis pas que c'est généralisé au niveau de la province, mais, je vous l'ai dit au début de mon intervention, dans les cas qui sont venus dans le bureau, les cas auxquels j'ai affaire personnellement, c'est à peu près le seul choix que le règlement actuel laisse à ces gens.

En terminant, j'aimerais, à la suite des propos du député de Portneuf, avoir la possibilité — je ne connais pas l'échéancier de travaux — de poser des questions aux gens de l'Office de la construction, pas dans le but de leur chercher noise, loin de là, mais dans le but de leur poser de vraies questions objectives; je voudrais interroger également le commissaire au placement et d'autres groupes qui sont ici et qui ont déposé des mémoires. J'aimerais avoir des éclaircissements sur certains mémoires. Ces mémoires ont été mis devant nous il y a environ une heure. Après en avoir pris connaissance en diagonale, vous comprendrez qu'on ne peut pas les avoir approfondis. J'aimerais quand même poser certaines questions.

Je ne connais pas l'échéancier des travaux, je ne sais pas si c'est prévu d'entendre tout ce monde, mais je l'espère. Voilà pour ce qui est des propos préliminaires que j'avais sur ce dossier.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président. Quelques mots seulement, je n'ai pas l'intention de prendre les vingt minutes qui me sont allouées sur cette question. Je voudrais simplement rappeler au ministre ce qui lui avait été dit le 25 mai dernier, à l'occasion d'un débat qui avait lieu un vendredi matin, avant même l'entrée en vigueur de la première partie du règlement de placement dans l'industrie de la construction. On se rappellera que ce règlement entrait en vigueur, pour une partie, le 1er juin, l'autre partie, l'ensemble du règlement, entrait en vigueur le 1er juillet.

Nous avions fait un certain nombre de recommandations au ministre, nous l'avions mis en face de grandes difficultés qui s'annonçaient et du fait qu'on avait ignoré une réalité qui prévaut dans le milieu de la construction. Ce matin, nous avons une commission parlementaire qui siège, à la suite de la motion qui a été présentée par notre collègue, le député de Portneuf, et lors de cette commission parlementaire, je me demande bien de quelle façon vont se dérouler nos travaux.

D'abord, il aurait été très important qu'on puisse entendre les groupements syndicaux comme patronaux devant cette commission parlementaire, comme on le fait lorsque nous avons une consultation avec les organismes intéressés, ou

encore que nous ayons un ordre du jour assez précis de nos travaux, comme l'a dit tout à l'heure le député de Portneuf, un ordre du jour assez précis pour qu'on connaisse au moins un certain ordre de travail, plutôt que de tenter de faire nos observations, d'un côté comme de l'autre, pour tâcher d'éclairer le ministre, et, d'un autre côté, des discussions qui trop souvent sont considérées un peu comme du coq-à-l'âne.

M. le Président, je ne voudrais pas que cette commission parlementaire d'aujourd'hui en soit une qui ne soit tenue que pour la forme. Il faudrait que cette commission parlementaire débouche sur des propositions sérieuses. Etant donné qu'il y a déjà huit mois que le règlement de placement est en vigueur, je pense que cela aurait été fondamental qu'on permette à l'OCQ de se faire entendre devant la commission parlementaire, qu'on permette au commissaire au placement de se faire entendre, qu'on permette aux organismes syndicaux de se faire entendre, qu'on permette aux organisations patronales de se faire entendre devant la commission parlementaire, de façon que les parlementaires, des deux côtés de la table, puissent dialoguer, interroger ces gens, pour qu'ils puissent nous apporter l'éclairage nécessaire.

M. le Président, le règlement de placement n'a pas encore tout à fait huit mois d'existence que, déjà, il a été amendé deux fois. Le ministre nous, annonce une troisième série d'amendements. J'aurais aimé, puisque c'est l'intention du ministre d'en venir à une série d'amendements, qu'il nous propose au moins, sur un document, un projet d'amendement, pour qu'on discute sur des documents, qu'on ait l'occasion de se prononcer sur des intentions véritables plutôt que de perdre notre temps dans des discussions qui, trop souvent, sont un peu trop stériles et un peu trop souvent stériles. On n'est même pas écoutés par le ministre, M. le Président. Cela démontre... On pourrait suspendre la séance, M. le Président. Lorsque le ministre pourra revenir à la table de la commission parlementaire, on pourra peut-être discuter.

Le Président (M. Jolivet): Un instant. Vous n'avez pas à le soulever, je sais ce que... S'il vous plaît, messieurs lés membres de l'assistance, vous avez le droit de participer par l'écoute des débats, mais je vous demande de respecter les règlements de cette assemblée qui demandent aux gens dans la salle de ne manifester d'aucune façon.

M. Roy: C'était de l'enthousiasme.

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre.

M. Johnson: M. le Président, j'avais demandé la parole avant le député de Rimouski, si vous le permettez.

M. Roy: Sur le point de règlement que j'ai soulevé, M. le Président, est-ce que les gens ont le droit de sourire? Oui?

M. Johnson: M. le Président, je comprends que le député de Beauce-Sud se cherche ici des applaudissements qu'il n'est pas capable d'obtenir avec les agriculteurs dans son comté.

M. Roy: Elle est forte, celle-là. Ce n'est pas votre meilleure.

Une Voix: Franchement partisan. Pas fort, pas fort.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Cela allait bien jusqu'à maintenant. Je pense que cela peut continuer aussi bien. M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Johnson: M. le Président, je n'ai pas d'autres commentaires sur les satisfactions faciles du député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, si l'honorable ministre avait écouté les propos, je n'aurais pas été obligé — je dis bien obligé — de faire les remarques que j'ai faites, parce que j'estime que, si le ministre a décidé de donner suite à la motion de l'honorable député de Portneuf de convoquer la commission parlementaire, ce n'est pas dans le but de tenir une commission parlementaire strictement pour la forme.

Je n'ai pas l'intention d'abuser de mon droit de parole, M. le Président, mais j'aimerais rappeler à l'honorable ministre certaines choses. Qu'on se rappelle que, le 25 mai dernier, j'avais dit, dans mon intervention, comme on peut le constater à la lecture du règlement, que, tant pour le salarié que pour l'employeur, ce nouveau système de placement occasionnera quantité d'obligations, à un point tel que l'on se demande où se situe l'efficacité. J'ai dit cela au ministre.

En plus de ne rien modifier dans le système de placement, on établit une foule de contraintes qui n'auront comme effet que d'alourdir encore davantage une industrie qui n'en avait pourtant pas besoin, surtout à ce stade-ci. Cela a pris huit mois au ministre pour comprendre.

Ce matin, nous avons également des choses à lui dire. Si le ministre avait été sérieux, M. le Président, on nous aurait présenté ce matin, compte tenu de toutes les remarques qui ont été faites dans le passé, un projet d'amendement du règlement de placement que nous aurions pu examiner, que nous aurions pu étudier. Certes, nous allons lui faire des recommandations aujourd'hui. Mais les recommandations que nous allons lui faire, ce sont des recommandations qui ont déjà été faites dans le passé. Nous allons tout simplement être encore dans l'obligation de lui répéter ce qui a déjà été dit à plusieurs reprises. Et le ministre, s'il est sérieux, devra tenir compte — j'espère qu'il le fera — des recommandations que nous lui faisons ce matin, devra préparer un projet de règlement de placement, le soumettre aux parties intéressées et là, tenir une commission parlementaire, comme on l'a fait dans les autres domaines. A ce moment-là, je pense qu'on pourra avancer vers quelque chose.

Le ministre a parlé de l'agriculture tout à l'heure. C'est une commission parlementaire qui ne permet pas aux intéressés de se faire entendre. Mais le ministre de l'Agriculture, je l'ai averti hier, connaîtra les mêmes difficultés que connaît actuellement l'honorable ministre du Travail. C'est ce que j'ai dit à son collègue, le ministre de l'Agriculture, parce qu'il procède de la même façon, il s'inspire des mêmes exemples et s'en va exactement dans la même direction, c'est-à-dire dans un cul-de-sac.

M. le Président, il y a des principes dont on aurait dû tenir compte dans la loi du contrôle quantitatif et qualitatif de la main-d'oeuvre. On reconnaît évidemment l'émission de certificats de compétence. Le certificat de compétence, le certificat de qualification devrait avoir priorité. Actuellement, on a subordonné le certificat de qualification à un certificat de classification qui fait en sorte qu'un travailleur, après quinze ans, après dix-huit ans, après vingt ans, après vingt-deux ans de métier, se retrouve sans avoir le droit de continuer à exercer son métier, sans avoir le droit d'exercer sa profession.

Justement sur ce point, M. le Président, dans une lettre, dans un document que j'ai ici en main, voici ce qu'on dit. On attire l'attention de certaines autorités sur le fait que le travail a beaucoup diminué en 1977-1978. C'est un entrepreneur qui a écrit cette lettre. Il dit: "Nous étions dans l'impossibilité de garder tout notre personnel, à cause du congédiement de ceux-ci. Les travailleurs les plus âgés ne sont plus de la classe A, quand les plus jeunes ont eu l'occasion d'accumuler des heures à l'extérieur de Montréal." (11 h 15)

C'est un employeur de Montréal qui écrit ces choses. "Il est beaucoup plus difficile pour l'homme marié, père de famille, de quitter la ville pour travailler à des chantiers extérieurs. Le plus jeune n'ayant pas d'attache peut, lui, s'éloigner et ainsi accumuler suffisamment d'heures pour se classer A".

Il y en a de ces lettres, M. le Président, il y en a de ces déclarations. Il y en a. On pourrait en citer toute la journée. Le député de Bellechasse a cité un certain nombre de cas sur lesquels je suis déjà intervenu à deux reprises au cours de commissions parlementaires pour étudier les règlements de placement. Pour quelle raison, dans toutes les régions rurales du Québec — je dis bien dans toutes les régions rurales du Québec — y a-t-il seulement certaines catégories d'heures qui sont comptabilisées? Les entrepreneurs locaux font aussi du travail dans des fermes, font aussi des travaux dans d'autres secteurs, ces heures ne sont pas comptabilisées, ce qui fait en sorte que des travailleurs qualifiés, détenant un certificat de qualification professionnelle se retrouvent avec des certificats C après avoir travaillé pendant 1000 heures, pendant 1100 heures et pendant 1200 heures durant l'année. 600 heures ou 700 heures n'ont pas été comptabilisées par le fait que c'étaient des travaux qui ont été effectués dans des fermes. Cela peut être des travaux mécanisés.

On sait que les petites entreprises des régions rurales qui effectuent des travaux mécanisés ont vécu ces problèmes. Ceux qui travaillent, qui font de la construction et qui non seulement font de la construction industrielle, de la construction résidentielle, mais qui font aussi de la construction des bâtisses de ferme ne sont pas compris, les heures ne sont pas comptabilisées pour des fins de classement. Ces gens qui ont travaillé et qui auraient effectivement accumulé le nombre d'heures requis, soit 1000 heures, ne peuvent pas avoir un certificat de classification de classe A et, par voie de conséquence, ils sont automatiquement exclus du marché, après 20 ans, après 25 ans de profession, après tant d'années de métier.

M. le Président, nous aurions beaucoup d'exemples à donner. Il y a aussi le fait que ces petites entreprises, comme le soulignait encore le député de Bellechasse et comme je l'avais souligné le 25 mai dernier, les entreprises qui sont spécialisées dans les travaux de route, dans la construction de route, les entreprises de pavage, on sait très bien que c'est le gouvernement qui accorde les contrats. Il y a une multitude d'entreprises. Les budgets ne sont jamais suffisants pour répondre aux besoins de la population. Il y a un certain nombre d'entreprises qui réussissent à avoir un ou deux contrats pendant l'année. Elles réussissent à obtenir un certain nombre d'heures, 500 heures, 600 heures voire 700 heures, mais elles ne peuvent pas avoir suffisamment de contrats pour effectuer les 1000 heures. C'est le cas à peu près de toutes les petites entreprises de pavage. Je parle des petites entreprises de pavage qui sont dans cette situation-là. Cette année, l'année qui vient de s'écouler...

M. Johnson: Au début, j'ai très bien compris. M. Roy: Au début.

M. Johnson: M. le Président, si le député de Beauce-Sud se sent lésé par le fait qu'il m'arrive d'écouter ou de parler avec mes collègues de ce qu'il dit, entre autres, cela vaut ses absences prolongées en Chambre.

M. Roy: Cela vaut quoi?

M. Johnson: Cela vaut ses absences prolongées en Chambre.

M. Pagé: Ils ne sont pas 72, il est tout seul, lui. M. Roy: Les absences de qui, M. le Président.

M. Pagé: II est seul, lui, ils ne sont pas 72. M. Johnson: Du député de Beauce-Sud. M. Pagé: ... au ministre, quand je vois cela.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, à l'ordre, à l'ordre!

M. Pagé: II manque toujours quinze minutes en Chambre.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf...

M. Pagé: C'est insultant, c'est effronté.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf, laissez le député de Beauce-Sud se défendre lui-même.

M. Roy: M. le Président, j'invoque une question de règlement. Je m'aperçois que le ministre, ce matin, est pris de panique et va chercher ses arguments là où il peut.

M. Johnson: Voyons donc!

M. Roy: Aller attaquer mon taux de présence à l'Assemblée nationale. Elles s'expliquent mes longues absences à l'Assemblée nationale. Le ministre vient de dire cela?

Le Président (M. Jolivet): M. le député... M. Pagé: II a le droit.

M. Roy: Sur un point de règlement. Le ministre vient de passer son message.

Le Président (M. Jolivet): Je suis d'accord, mais ce que...

M. Roy: Je ne laisserai pas le ministre — j'en fais une question de règlement, M. le Président — aller dans cette direction. J'ai entièrement le droit de le faire. Si le ministre n'a pas d'autres arguments à apporter ce matin à ceux qu'on lui apporte, je dis que le ministre est bien mal pris. Le ministre est bien mal pris. Il essaie d'intimider les députés pour tâcher d'argumenter sur le taux de présence à l'Assemblée nationale.

M. Johnson: Voyons donc!

M. Roy: Je peux le comparer avec celui du ministre et je peux le comparer avec celui de n'importe quel de ses collègues mon taux de présence à l'Assemblée nationale. C'est reconnu et c'est admis par bien des gens qui suivent les débats de l'Assemblée nationale. Je ne peux pas être en Chambre et être en commission parlementaire en même temps.

Cela dit, je veux revenir sur la question du règlement de placement dans l'industrie de la construction. On a discuté, il n'y a pas tellement longtemps, du fameux projet de loi 110, de toute la question des artisans. On a dit qu'il y avait des incidences, qu'il y avait des conséquences, qu'il y avait une relation directe avec le règlement de placement. J'ai écouté le ministre tout à l'heure. Quelles sont les intentions de modifications qu'il veut proposer à la commission parlementaire pour tâcher d'apporter un ajustement, suite à ce qu'il a lui- même déclaré à l'Assemblée nationale, dans le cas des artisans?

Je n'ai rien entendu tantôt. Le ministre a été passablement muet, lui aussi, sur la question des travailleurs qui vont travailler en dehors du Québec, qui vont travailler dans d'autres provinces. Nous avons ici une liste — je pense qu'il y a un de mes collègues qui y a fait allusion — de tous les chantiers qu'on retrouve en Alberta, en Saskatchewan, en Ontario, à Terre-Neuve, qu'on retrouve également au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Ecosse et en Colombie-Britannique. Il y en a un peu partout. Le ministre a été passablement muet là-dessus. On sait très bien que les travailleurs du Québec sont pénalisés à la suite des décisions qui ont été prises. Le ministre nous a dit à l'Assemblée nationale qu'il devait nous donner des renseignements, qu'il avait fait des propositions à son homologue fédéral. Je serais bien intéressé, et je pense que les travailleurs aussi seraient intéressés...

M. Johnson: Pas du fédéral.

M. Roy: Son homologue de l'Ontario. On serait bien intéressés de connaître ses intentions précises, quelles sont les propositions précises qu'il a faites à son homologue de l'Ontario, pour qu'on sache effectivement quels sont les moyens susceptibles d'être appliqués par la suite afin d'être en mesure de prévoir d'avance la réaction de l'Ontario face aux propositions qui ont été faites par le ministre. Tant que nous ignorons les propositions que le ministre a faites, c'est assez difficile de pouvoir faire des commentaires là-dessus et lui faire des recommandations.

M. le Président, je ne serai pas plus long. Je me permettrai de terminer en lisant une citation au ministre, qui a été attribuée à M. Réal Mireault, dans un article de Pierre Vennat, paru dans le quotidien La Presse du 1er février 1977. Avant de le citer, je dirai que dans ce règlement de placement, il va falloir que le ministre prenne conscience de la réalité de l'industrie de la construction. Il va falloir que le ministre prenne conscience de la réalité à laquelle les travailleurs ont à faire face dans le quotidien dans l'exercice de leur métier, la réalité pour les entreprises, la réalité des milieux urbains et aussi de la réalité des milieux ruraux. Cette réalité, le ministre pourra en prendre conscience, pourra en prendre connaissance à l'occasion d'un dialogue ouvert, dans une commission parlementaire ouverte et qui permettra aux deux parties de se faire entendre devant la commission parlementaire et qui permettra également aux membres de la commission parlementaire d'interroger les parties en cause, les parties intéressées. Je termine avec cette citation attribuée à M. Mireault: "S'il faut une volonté de changer les traditions et d'améliorer les choses, et même du courage, cessons de changer le cap selon les rêves de réformateurs perpétuels. Essayons donc de baser nos actions sur la réalité de l'industrie."

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Je voudrais tout d'abord citer quelques chiffres pour montrer l'importance d'avoir un règlement de placement. Entre 1973 et 1978, il y a eu 258185 travailleurs inscrits qui ont voté, qui ont enregistré un vote à l'OCQ. Durant la même période, il y a 81 664 travailleurs qualifiés qui ont oeuvré dans la construction et 56 854 travailleurs non qualifiés qui y ont oeuvré, pour un total de 138 518 travailleurs qui ont effectivement travaillé. Il y a beaucoup de gars qui ont enregistré des votes à l'OCQ pour se donner ni plus ni moins une certaine police d'assurance. Dans l'éventualité d'un ralentissement de travail dans leur milieu, ils pouvaient toujours mettre le pied dans l'industrie de la construction qui se faisaient littéralement voler des "jobs". Il n'était pas rare de voir un policier ou un professeur venir oeuvrer l'été pendant un, deux ou trois mois dans l'industrie de la construction, et de voir des véritables travailleurs de la construction chez eux à ne rien faire.

Donc, ça prenait un règlement. Supposons, avec tous les désagréments que ça comporte, que ce règlement, c'est de la bouillie pour les chats. A écouter le député de Beauce-Sud en particulier, c'est effrayant, il n'y a rien de bon dans ça. Ce qui est proposé, c'est de permettre à tout le monde de revenir à peu près à l'état antérieur. L'anarchie, ni plus ni moins...

M. Roy: M. le Président, je m'excuse. Le député...

M. Chevrette: Je ne l'ai pas interrompu, lui.

M. Roy: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Je n'accepterai pas d'intervention pendant un discours. Vous avez le droit de prendre parole ensuite.

M. Roy: M. le Président, immédiatement après que les paroles ont été prononcées, un député peut intervenir; c'est dans le règlement et ça a toujours été ainsi dans le règlement.

M. le Président, je ne laisserai pas encore une fois passer la petite manigance du député de Joliette-Montcalm, qui s'est permis la même stratégie d'interpréter les propos qu'on a tenus, alors qu'il passait son temps à placoter pendant mon intervention.

M. Chevrette: Je connais la redondance du député.

M. Chevrette: M. le Président...

M. Roy: Celle-là ne passera pas, M. le Président.

M. Chevrette: Vous avez eu votre claque, fermez-vous.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Chevrette: Là, il a eu sa claque. Peut-on se parler?

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre! Je rappellerai encore une fois, pour les besoins normaux de cette assemblée, de ne pas manifester par des applaudissements. Vous avez le droit de penser ce que vous voulez, mais laissez les gens s'exprimer.

M. Chevrette: M. le Président, je vais continuer mon exposé en vous disant que c'est tout à fait utopique, impensable, invraisemblable de permettre à 258 000 travailleurs de venir se déchirer littéralement 85 000 ou 90 000 jobs...

M. Roy: Qui a dit cela?

M. Chevrette: Est-ce que je peux continuer? Je ne vous ai pas interrompu 30 secondes.

M. Roy: Qui a dit ça?

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Chevrette: Avez-vous peur d'avoir un mauvais titre dans le Soleil?

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le député.

M. Roy: Si j'en ai un, j'agirai en conséquence.

M. Chevrette: Oui, vous ferez vos questions de privilège pour chercher vos claques. Laissez-nous parler quand on a quelque chose à dire.

M. Pagé: C'est parce qu'il vous aime qu'il donne des claques.

M. Chevrette: Non, pas de farce!

M. Pagé: Non, c'est vrai, vous voyez comme vous êtes aimé!

M. Chevrette: M. le Président, il reste qu'il fallait absolument, comme dans n'importe quelle industrie, réglementer le travail dans l'industrie de la construction. Quand on disait, tantôt, que des gars n'accumulaient pas d'heures pour des travaux de ferme, c'est exactement la même chose pour un enseignant qui irait travailler chez Woolco, qui voudrait revenir dans l'enseignement et que ses heures comptent. L'ancienneté est relative et rattachée à un contenu de travail bien défini, bien identifié, qui est le décret de la construction, négocié par les parties. Plus on va étendre le champ possible ou l'accessibilité possible à des travailleurs non spécialisés et non qualifiés, pour qui c'est un "sideline", plus on nuit aux véritables travailleurs de la construction. Il faut comprendre ça et l'admettre; c'est admis dans n'importe quelle industrie. On ne dit pas à un gars dans une usine d'aller se chercher de l'ancienneté dans un autre

type d'usine ou dans un autre usine pour conserver son ancienneté. Dans l'industrie de la construction, on ne peut pas parler de chantier, mais on peut parler de travaux bien pécifiques à la construction; l'ancienneté, il faut l'étendre à l'industrie même de la construction. Quand on voit 258 000 inscrits, je veux vous dire qu'il y a de vrais travailleurs de la construction qui n'ont pas travaillé depuis huit ou dix mois; il n'y en a que 138 000 qui ont travaillé et, parmi ces 138 000, il y en a qui n'ont pas travaillé depuis huit mois et il faudrait ouvrir encore plus large le règlement, à écouter certains propos.

Donc, je pense qu'il faut comprendre que le règlement de placement est une sécurité ou une priorité d'embauche que veut se donner le véritable travailleur par rapport aux autres. Cela se comprend; on peut bien rigoler de certaines mesures à l'intérieur du règlement de placement, mais le gars qui est impliqué, le vrai travailleur qui veut se replacer le lendemain matin ne rigole plus des* modalités et il n'applaudit plus non plus à des frivolités, parce que lui-même, qui a travaillé pendant quinze ans et à qui on demande un certain nombre d'heures, n'aimerait pas voir passer devant lui un gars qui a 300 heures. (11 h 30)

Les véritables travailleurs de la construction, quand ils viennent nous voir dans nos bureaux de comté — on est aussi accessibles que les gens de l'Opposition — pour nous expliquer qu'il y a des choses qu'ils n'aiment pas à l'intérieur du règlement de placement, je les comprends. Mais quand on explique au gars qu'il y a quand même une priorité par rapport à celui qui avant s'inscrivait à l'OCQ sans aucune heure et qu'il pouvait passer devant lui, il le comprend. Il le comprend même assez vite. Il se retourne de bord assez vite et il réfléchit. Il dit: C'est vrai, je ne suis peut-être que B, mais je suis encore mieux d'avoir juste un B que de me ramasser avec un prof qui viendrait prendre ma place le lendemain matin pendant les mois de juin, juillet et août. Il comprend cela quand tu lui expliques et que tu ne fais pas de démagogie sur le règlement. C'est un point de vue sur lequel je voulais revenir au départ et je mets personnellement au défi n'importe qui de rencontrer n'importe quel travailleur pris isolément, pour lui demander, s'il avait un choix à faire entre l'ouverture totale à tous ceux qui votent à l'OCQ, par rapport au règlement... Il dirait: Même si je ne l'aime pas, je prends le règlement, parce qu'au moins je suis un vrai travailleur et je peux au moins me donner une petite porte d'entrée, alors que c'était une porte totalement ouverte avant. C'est le cas bien précis des véritables travailleurs de la construction.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vais être obligé de prendre des décisions si cela continue. Je ne veux pas avoir à en prendre et j'espère que vous serez assez intelligents pour comprendre. Je le répète encore une fois; s'il vous plaît!

Pour que les discussions se fassent le mieux possible, c'est en avant que la discussion se passe actuellement. M. le député de Joliette-Montcalm, M. le député de Portneuf demande s'il...

M. Pagé: J'aurais une question. Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Pagé: Je conviens jusqu'ici, M. le Président, que ce que le député de Joliette-Montcalm nous disait a beaucoup de sens, à savoir que c'est le véritable travailleur de la construction qu'on veut protéger par l'adoption d'un règlement de placement.

On veut mettre de côté les gens qui s'introduisent de façon temporaire dans l'industrie, les taxis, les pompiers, etc. Une très brève question au député. Ne croyez-vous pas qu'avec la loi 110 ce sont les artisans qui vont se substituer aux pompiers, aux taxis, etc., parce que tous les artisans qui sont B ou C ou qui n'ont pas de classification, en devenant artisans, pourront aller travailler pour un employeur professionnel en mettant de côté le règlement de placement?

M. Chevrette: Bon! M. le député de Portneuf, vous me le permettrez, j'y arrive à cette réponse-là. Je n'y répondrai pas immédiatement parce que j'ai quelques suggestions formelles à faire, ce que j'ai noté ici; je le ferai lorsque j'arriverai à la question des artisans. Je pourrais quand même vous donner un élément de réponse. Actuellement, n'importe qui peut devenir artisan et entrer n'importe quand sur les chantiers, ce qui est pire qu'avant la loi 110...

M. Pagé: ... confirmé par la loi 110 quand même. En raison de l'application du règlement de placement.

M. Chevrette: Non. Je vais suggérer quelque chose tantôt.

M. Pagé: Le B et le C, c'est tout ce qu'il y a à faire. Vous le savez à part cela.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Chevrette: Je voudrais résumer un peu, M. le Président, en disant que, s'il y a 138 000 travailleurs qui ont réussi à oeuvrer dans l'industrie de la construction, qu'ils soient qualifiés et non qualifiés, qui ont réussi à se tailler une place dans les quelque 80 000 emplois existants alors qu'on avait 258 000 inscrits, vous voyez qu'il y avait là un bassin épouvantable, il n'y avait aucun contingentement. A ce que je sache, sur le contingentement, M. le Président, je me souviens d'avoir écouté, en 1974, 19 mémoires venant autant des employeurs que des syndicats, FTQ, CSN; toutes les centrales syndicales demandaient depuis fort longtemps qu'il y ait un contingentement dans l'industrie de la construction.

On a beau dire, on a beau crier si on veut, je pourrais vous sortir l'ensemble des mémoires

émanant en particulier de la FTQ qui se bat depuis 1973, qui demande un contingentement dans l'industrie de la construction. La FTQ s'est battue là-dessus parce qu'elle disait que cela n'a pas d'allure de laisser entrer autant de gars alors qu'on a si peu d'emplois. Cela se comprend et ce n'est pas charrié, et ce ne sont pas des menteries. C'est quelque chose de très véridique, cela n'avait plus d'allure de laisser entrer autant de gars avec le nombre d'emplois disponibles. On a beau faire ce qu'on voudra, c'était une réalité.

Il est bien évident que le règlement de placement, d'autre part, a créé, dans certains milieux — et je suis d'un milieu où les gens que j'ai rencontrés régulièrement... il y a même un local de la FTQ qui est adjacent à mon bureau. On s'est parlé souvent des régions. On s'est parlé souvent du nombre d'heures dans les petites localités. On s'est parlé d'autres problèmes. Je suis prêt personnellement à faire certaines suggestions au ministre. Il m'apparaît que le nombre de 1000 heures, compte tenu de la conjoncture économique actuelle, dans l'industrie de la construction en particulier ou le ralentissement dans l'industrie de la construction, a créé un problème majeur. Je comprends qu'il y en a une partie de corrigée en ayant dit aux gars: Vous allez conserver vos certificats de classe A et ceux de classe B. Je comprends que cela règle une partie du problème, mais advenant qu'il n'y ait pas de reprise suffisamment intéressante dans le domaine de la construction en 1979, par exemple, on pourrait faire face au même problème l'an prochain, en particulier dans nos petites municipalités dans le domaine domiciliaire où certains groupes de travailleurs construisent une, deux ou trois maisons.

Je disais donc, M. le Président, que dans nos petites localités, comme dans Beauce-Sud, par exemple, ou dans Joliette-Montcalm, dans les régions du nord Chertsey, il est vrai que les gens peuvent avoir de la difficulté à atteindre le cap des 1000 heures. Dans les métiers mécanisés, c'est vrai que les gars ont assez de facilité à obtenir leurs 1000 heures, mais si je me fie, par exemple, au nombre d'électriciens en chômage l'automne dernier et l'hiver dernier, et au nombre de plombiers, il y a des plombiers qui n'ont pas travaillé dans mon milieu depuis au moins onze mois, cela aussi doit être assez difficile dans certains corps de métiers spécialisés, ou bien les gars viennent me mentir à mon bureau. On peut bien crier que je dis des mensonges, mais ce sont des gars qui viennent à mon bureau me le dire. Donc, à ce moment-là, je suggère au ministre de trouver une formule qui permette au gars qui a travaillé dans la construction depuis X années, de ne pas se voir enlevé ou dégradé. Cela doit se penser par une formule, quand on voit que le seul milieu de travail du gars a été la construction, je pense que cela s'analyse. Il y a des formules possibles. Je n'ai pas l'intention de me couler dans le béton sur la formule. Je pense qu'il y a moyen de trouver des solutions là-dessus.

Il y a également le problème des salariés âgés, ceux de 50 ans et plus. De ce temps-ci, je dois vous avouer que ce n'est pas facile pour eux, même si on a mis 2500 heures depuis la fin des Olympiques, cela n'a pas été facile d'accumuler des heures pour certains d'entre eux, mais ce sont des gars qui ont travaillé dans l'industrie de la construction depuis 35 ans ou 40 ans. Personnellement, je préconiserais une formule de souplesse au niveau des salariés de 50 ans et plus qui ont travallé pendant fort longtemps dans l'industrie de la construction. Non, je ne recherche pas cela, monsieur. Il y a aussi, M. le Président, la question des artisans dont faisait état le député de Portneuf. Le député de Portneuf disait: II y a un danger que les artisans viennent prendre la place ou viennent se substituer au nombre qui ne trouvait pas de l'emploi. C'est exactement le cas. N'importe qui pouvait devenir artisan et pouvait aller dans les chantiers. La loi 110 a ouvert une porte à la suite d'un amendement en troisième lecture que le député de Portneuf se rappellera en disant que le règlement de placement pourrait cependant prévoir des modalités quant à la venue des artisans sur les chantiers. La recommendation que je ferais au ministre, c'est que les artisans passent après l'embauche des A et des B. Personnellement, je pense qu'on aurait fermé des portes aux exagérations possibles qui pourraient venir. (11 h 45)

C'est dans ce sens qu'on doit discuter à une commission parlementaire, c'est dans ce sens que le député de Portneuf, ce matin, a sans doute voulu aborder la discussion. C'est dans ce sens que j'ai tâché de négocier avec lui un certain tour de table, pour l'ensemble des députés, pour qu'on puisse donner notre point de vue bien franchement, en alternance, et qu'on puisse en arriver à donner au ministre du Travail un paquet de suggestions positives pour corriger, pour bonifier, comme on se plaît à le dire bien souvent, ce règlement qui a été mis à l'épreuve pendant presque un an, et qui nous permettront probablement de corriger les lacunes qui ont été observées.

Cependant, si on s'en prend au principe même du règlement de placement, je débarquerais, dans le sens suivant. On ne peut pas revenir et permettre à n'importe qui, n'importe quand de s'inscrire à l'OCQ et de prendre des "jobs". Parce que si on fait ça, c'est l'anarchie, exactement comme c'était avant, exactement comme c'était avant. On se doit de rétrécir le corridor d'accessibilité, c'est ça qu'on appelle du contingentement, pour lequel Louis Laberge a crié pendant longtemps, qu'il désirait. Louis Laberge nous disait, à maintes reprises: S'il n'y a pas de contingentement dans l'industrie de la construction, c'est une source de violence, parce que vous permettez à trop de monde de s'arracher le peu de "jobs". Donnez d'abord préférence d'emploi à ceux qui en font une profession dans l'industrie de la construction et non à des travailleurs d'occasion et vous allez avoir beaucoup plus d'ordre.

C'est dans ce sens que je fais les suggestions, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Le député de Charlevoix.

M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: M. le Président, je ne pense pas que ce soit à titre de professionnel des problèmes de la construction que j'intervienne dans ce débat. Je serais même prêt à sympathiser avec le ministre du Travail. Il est pris avec un problème assez difficile, avec lequel ont été pris, je pense, tous les gouvernements qui se sont succédé à la gouverne du Québec. J'entendais tantôt mon collègue de Joliette-Montcalm nous parler des 258 000 personnes inscrites comme travailleurs de la construction, nous décrire les conditions économiques difficiles, où les gens ont extrêmement de difficulté à trouver la possibilité d'oeuvrer dans des métiers pour lesquels ils ont souvent fait un dur apprentissage, et faire quelques suggestions au ministre.

Je terminerai ma courte intervention par une proposition en bonne et due forme, M. le Président, il est vrai qu'il y a probablement trop de monde dans l'industrie de la construction et il est probablement vrai aussi que les conditions économiques ne sont pas faciles pour ceux qui ont à oeuvrer dans ce secteur d'activités. Quand, par contre, la Chambre a adopté, sur division, la loi 110, récemment, je ne sache pas que quand on a permis que dans le champ d'application couvert par le décret, quand on a exclu tous les travaux d'entretien du ministère de l'Education, le ministère de la santé, cela a été de nature à donner plus d'heures de travail aux véritables travailleurs de la construction.

Quand on regarde l'ensemble des travaux de construction qui ne sont pas couverts par les décrets, soit certains travaux de l'Hydro-Québec, soit des travaux d'entretien, on constate également qu'il y a là une lacune profonde sur laquelle devraient se pencher le gouvernement, l'OCQ et les différentes parties qui sont en cause.

M. le Président, dans le projet de loi 110, qui fait quand même référence au placement dans la construction, en créant une nouvelle catégorie d'artisans, ce n'est pas ça qui avait été demandé, à ce que je sache, par l'Opposition. Nous avions formellement insisté sur le fait qu'un travailleur de la construction qui, après avoir fait l'apprentissage requis et avoir reçu une carte de qualification professionnelle, il y avait un principe en jeu: on n'avait pas le droit de lui enlever la qualification pour laquelle il avait fait les heures requises et le temps voulu.

On a créé une classe d'artisans et il est indiscutable que si, comme le disait le député de Joliette, on a voulu éviter le travail des pompiers qui sont en grève, ou n'importe quelle autre grève qui perdure dans le Québec, au lieu d'aider à réduire le volume de 258 000 travailleurs, on a créé de toutes pièces de nouveaux travailleurs de la construction qui, par le biais du règlement artisan, demanderont un certificat de qualification, travailleront pour des consommateurs, travailleront isolément pour des employeurs occasionnels. Et je ne sache pas que, d'aucune façon, une telle catégorie d'artisans vienne réduire le nombre trop grand de ceux qui, actuellement, ont à oeuvrer dans ce domaine.

Tantôt, le député de Joliette-Montcalm a fait référence également aux difficultés qu'affrontaient les travailleurs de la construction dans des endroits périphériques du Québec, où, dans certaines catégories de métiers, il était difficile d'obtenir une classification A, alors que les 1000 heures sont difficiles à obtenir. Je pense que cela a toujours été à l'esprit de tous ceux qui ont fait des plaintes, autant sur le règlement de placement modifié, en août dernier, que lors de l'adoption du projet de loi 110.

M. le Président, j'aurais aimé entendre les parties en cause sur les plaintes déjà constatées depuis l'adoption de ce règlement, sur l'importation de la main-d'oeuvre qui vient travailler. Est-ce qu'on verse toujours les $145? Ou est-ce qu'on contourne cette loi facilement? Comment se fait-il qu'il y ait tant de plaintes à propos des informations qui sont transmises aux employeurs sur les disponibilités de main-d'oeuvre dans chacune des régions du Québec?

J'aurais aimé entendre les syndicats sur le bien-fondé de leur argumentation à savoir qu'ils sont mieux préparés, qu'ils ont une meilleure connaissance de leurs effectifs, principalement dans des métiers très professionnels, pour qu'on leur cède le placement, qu'on cède aux syndicats le placement des métiers de la construction.

Je regardais tantôt le mémoire de la CSN qui, je pense, est assez favorable au règlement de placement mais j'aurais aimé éclairer notre lanterne et entendre son point de vue. Caron se déclare assez favorable, mais quand on en vient, par contre, aux principaux amendements qu'on désire apporter, ce sont quand même des amendements très profonds au règlement actuel.

Je ne sache pas — et je pense que le même phénomène se retrouve dans les mémoires qu'on a étudiés avec la FTQ-Construction — M. le ministre du Travail, malgré ce que vous nous avez déjà dit, que vous avez entendu l'OCQ, l'AECQ, la FTQ-Construction, la CSN, séparément, que vous ayez tout l'éclairage du portrait et que cela ne serait que du réchauffé. Je pense quand même que cela serait faire justice à l'ensemble du public, aux media d'information, à l'ensemble de la députation, que les parties qui nous amènent des mémoires dans lesquels il y a des points assez contradictoires, aient une période de trente minutes chacune par exemple, qu'on permette à l'AECQ, à l'OCQ, à la CSN, à la FTQ, au moins à ces quatre, pour argumenter sur les points chauds de l'ensemble des problèmes des métiers de la construction.

Je pense qu'une telle aération permettrait quand même à l'ensemble des législateurs de vérifier si les positions qu'ils avancent sont réellement en accord avec l'intérêt qu'on doit porter aux travailleurs de la construction.

Demande d'entendre les parties intéressées

M. le Président, je fais une proposition formelle pour que la commission, contrairement à l'ordre du jour que nous a donné le ministre du Travail ce matin, permette, dans un premier temps, après que les parlementaires auront fait un propos préliminaire, que l'OCQ, l'AECQ, la FTQ-Construc-tion, la CSN, peu importe l'ordre d'arrivée, soient entendus pour que, par la suite, la commission ait, je pense, une lanterne mieux éclairée que présentement.

Le Président (M. Jolivet): Vous me suggérez à ce moment-là de finir le tour de table et prendre la résolution ensuite?

M. Mailloux: C'est votre droit.

M. Johnson: M. le Président, pour éviter un long débat, qui serait inutile et qui n'alimenterait que la machine à parole du député de Portneuf...

M. Pagé: Qu'est-ce que j'ai dit?

M. Johnson: Je suis d'accord avec la suggestion que fait le député de Charlevoix...

M. Pagé: Merci, on vous attend.

M. Johnson: ... dans la mesure où, effectivement, on pourrait les entendre, mais pour une période de temps délimitée et stricte. Les mémoires varient quant aux problèmes qu'ils touchent, quant à leur importance. Encore une fois, j'ai dit que ce règlement de placement était d'une extrême complexité sur le plan technique, ce que reconnaît, je pense, le député de Charlevoix.

Il y a des problèmes mieux circonscrits, comme la notion de région, l'embauche régionale, la présence ou l'absence de critères permettant de reconnaître un certain nombre d'heures sur un certain nombre d'années, etc., et, dans les circonstances, à condition cependant que tous les partis autour de cette table s'entendent pour que ce soit une période stricte et qu'on ne s'embarque pas dans un marathon qui dure une semaine et demie, nous n'avons aucune objection à ce que soient entendues les parties, pendant dix minutes, un quart d'heure, et peut-être que le gouvernement et l'Opposition pourraient prendre dix minutes de chaque côté pour poser des questions. Il faudrait s'entendre pour que cela ne dure pas une heure et demie.

Le Président (M. Jolivet): J'ai une suggestion à vous faire. Dans dix minutes, nous allons ajourner la séance sine die. Je vais laisser le droit de parole au député de Rimouski. A l'heure du dîner, si vous êtes capables de...

M. Pagé: Non. on va régler cela avant.

M. Johnson: On vient de dire le contraire, qu'on finissait le tour de table.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. C'est cela.

M. Pagé: Si c'est possible, j'aimerais, avant qu'on termine le tour de table, qu'on s'entende sur l'audition des parties. Qu'on ne reporte pas cela à 15 heures pour qu'on soit obligé d'en faire un autre débat à 15 heures.

Le Président (M. Jolivet): J'ai une suggestion à vous faire. On me dit qu'on accepte qu'il y ait audition.

M. Pagé: Merci.

M. Johnson: A condition...

Le Président (M. Jolivet): L'autre question, c'est de s'entendre sur le temps. Je pense que cela éviterait des discussions si, à l'heure de l'ajournement, vous discutiez entre vous autres de la façon qu'on pourrait entendre les mémoires qu'il y aurait, l'ordre des mémoires, le temps à y accorder. On pourrait discuter de cela en dehors, quitte à ce qu'on revienne, au moment de la reprise des travaux, pour le discuter, si on n'est pas d'accord sur le temps à être accordé. Cela va?

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rimouski.

M. Alain Marcoux

M. Marcoux: Je vais essayer d'être le plus bref possible, compte tenu qu'on ajourne les travaux dans quelques minutes. C'est simplement pour dire, M. le Président, que, moi aussi, je suis un député du milieu rural qui a eu à vivre, je dirais pas très agréablement, avec le règlement de placement qui est entré en vigueur en juillet dernier. J'ai évidemment rencontré un paquet de personnes qui avaient des objections, qui avaient des oppositions à ce règlement de placement, mais, un peu comme dans d'autres circonstances, je m'apercevais que ce n'était pas nécessairement pour les mêmes motifs ou les mêmes raisons. Les travailleurs de la construction pouvaient être ennuyés par ce règlement, par sa complexité. Même s'ils se sentaient protégés d'une certaine façon, ils vivaient la même insécurité, une autre sorte d'insécurité, à savoir s'ils allaient demeurer A ou redevenir B; pourraient-ils passer de B à A; pourraient-ils, s'ils étaient à tel bout de la région, avoir accès à un autre chantier qui est à l'autre bout? En somme, ce règlement a introduit beaucoup d'éléments complexes qui, jusqu'à un certain point, rendent la vie du travailleur de la construction plus difficile.

D'autre part, vous en avez d'autres qui défendent des intérêts différents. Ils se sont présentés à

nos bureaux et nous en avons discuté presque chaque jour, chaque semaine. Lorsqu'on discutait avec eux, finalement, leur motif visait l'abolition du règlement de placement, le retour à une espèce de libre marché. Vous aviez, d'autre part, des petites entreprises qui ont vécu des problèmes parce qu'elles avaient les mêmes travailleurs depuis plusieurs années, qui travaillent 400 heures, 500 heures, 600 heures par année et, à cause de ce règlement, et qui craignaient que, lors de la période de renouvellement, elles ne puissent avoir accès aux mêmes travailleurs permanents qu'elles ont toujours eus, parce qu'elles devraient engager des gens classés A, alors qu'elles l'ont toujours fait avec les mêmes travailleurs depuis souvent plusieurs années.

Vous aviez peut-être la population, en général, ou les municipalités qui, face à tel projet communautaire de telle construction, ne pouvaient pas engager prioritairement des gens de leur village, même s'ils avaient leur carte de compétence, mais qui étaient obligées d'aller chercher du personnel à l'autre bout de la région, ces municipalités se sentaient pénalisées, elles auraient préféré faire travailler des gens de leur milieu.

En somme, un paquet d'intérêts contradictoires, mais au-delà de tout cela, le travail que nous avons à faire aujourd'hui et demain, c'est de démêler l'essentiel de l'accessoire. Pour moi, l'essentiel, c'est la sécurité d'emploi pour les travailleurs en tenant compte, en somme, de leur ancienneté dans ce milieu de travail. L'accessoire, c'est en somme toutes les normes qu'on peut mettre en place visant à répartir le travail ou à déterminer qui va travailler dans telle région et par quel ordre de priorité. En ce sens, je pense que notre travail, c'est de déterminer, une fois l'objectif clair — je pense que tout le monde va s'entendre avec nous sur l'objectif, y compris les partis de l'Opposition — que ce n'est pas possible de revenir au temps où il y avait des milliers de travailleurs qui pouvaient avoir accès au marché de la construction, alors qu'il y a du travail pour tant d'hommes par année. Peut-être, sauf le député de Beauce-Sud qui s'est fait applaudir sur des questions de forme, mais je pense que si nos auditeurs l'avaient entendu sur des questions de contenu, il est l'homme qui défend, que ce soit dans le domaine agricole ou dans le domaine de la construction, le libre marché, l'offre libre...

M. Roy: Un instant! Je regrette...

M. Pagé: Vous ne devriez pas vous embarquer de cette façon, vous!

M. Roy: Non, vous ne devriez pas. Vous êtes dans une pente dangereuse.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! Faites simplement rectifier!

M. Roy: Sur un point de règlement. Le député de Rimouski vient de tenir des propos gratuits. C'est son interprétation, je ne lui permettrai pas d'interpréter faussement ce que j'ai dit et ce que j'ai soutenu depuis bien longtemps pour essayer de tenter d'orienter l'opinion publique pour tâcher de faire croire que je suis celui qui prêche le retour à la loi de la jungle. Cela n'a jamais été ainsi. Je n'ai pas mis en doute l'existence du règlement de placement, ce matin, dans l'industrie de la construction. Si le député veut parler de l'agriculture, on ira en parler à la commission parlementaire de l'agriculture. C'est là qu'on ira en parler, ce n'est pas ici qu'on va parler de l'agriculture ce matin.

M. Marcoux: II me reste...

Une Voix: On va en parler à la commission de l'agriculture, vous allez voir.

M. Marcoux: Je ne veux pas entraîner de débat, il me reste quatre minutes.

M. Roy: Si vous ne voulez pas entraîner de débat, changez de sujet.

M. Marcoux: Ce que je voudrais dire, c'est ceci: Je pense qu'il faut être certain de ne pas ouvrir, en somme, de façon très grande les portes pour que tout le monde ait accès au marché de la construction. Par contre, il faut simplifier un paquet de normes d'application. Dans ce sens, après avoir jeté un bref regard sur certains mémoires, j'ai été frappé, particulièrement, par le mémoire de la CSN, qui a plusieurs de ses membres dans des régions rurales. On semblait reprendre plusieurs suggestions positives qui ont été faites dans ces milieux pour simplifier. L'objectif est clair. Il n'y a pas de syndicats au Québec qui vont vouloir ouvrir les portes. Par contre, je pense qu'il faut arriver à faire en sorte que tout le monde se retrouve, puisse se comprendre.

En ce sens, une des principales suggestions est de faire disparaître les classes A, B et C pour les remplacer par ce qu'on pourrait appeler des travailleurs réguliers ou des travailleurs permanents, par opposition à des travailleurs occasionnels, ou toute autre expression. Ainsi, on ferait en sorte que tous ceux qui sont classés A actuellement, environ 100 000 travailleurs, et tous ceux qui sont classés B, environ 8000 travailleurs, soient automatiquement reconnus comme des travailleurs permanents ou réguliers dans le secteur de la construction, pour éviter cette espèce d'hiérarchisation qui jette une insécurité même chez le travailleur qui a la classe B ou le travailleur qui a la classe A; les deux se sentent insécures. Celui qui a la classe A a peur de devenir de la classe B et celui qui est B, toute sa bataille c'est de faire en sorte de redevenir A. Alors, si on déterminait clairement qu'il y a des travailleurs permanents, comme dans d'autres milieux de travail, des travailleurs réguliers qui ont la sécurité d'emploi et des travailleurs occasionnels qui s'ajoutent selon l'évolution ou la situation de la demande de travail.

Il y a d'autres suggestions qui sont faites sensiblement dans le même sens au niveau des

régions, pour faire en sorte que les régions qui président au règlement de placement ou à travers lesquelles on administre le règlement de placement soient des régions à dimensions humaines et que, si quelqu'un part un chantier de construction à Saint-Fabien, dans ma région, il ne soit pas obligé de prendre quelqu'un de Gaspé. En tout cas, en première instance, je pense qu'il y a des suggestions qui sont faites dans ce mémoire qui rejoignent plusieurs suggestions qui m'ont été faites depuis plusieurs mois pour humaniser ce règlement, tout en ne laissant rien aller des objectifs essentiels qui sont de contingenter; parce que c'est ça la question. Je ne veux pas répéter les propos du député de Joliette-Montcalm que je partage entièrement, mais la question première est: Est-ce que nous contingentons, oui ou non et à quel niveau?

Je ne démordrai pas de l'objectif du contingentement pour faire en sorte que ce soient les travailleurs réguliers de la construction qui aient accès à ce marché de travail, mais par contre je suis prêt à appuyer toute suggestion, qu'elle vienne de qui que ce soit, de n'importe quel député de cette commission parlementaire, pour faire en sorte que les chinoiseries administratives du règlement actuel, qui est administré par l'OCQ, disparaissent dans une large mesure, surtout si elles viennent du député de Beauce-Sud. (12 heures)

M. Roy: Je m'excuse, M. le Président, il ne faudrait quand même pas induire tout le monde en erreur; le député de Beauce-Sud n'a rien à voir dans l'administration du règlement de placement.

M. Marcoux: C'est que vous alliez m'interrom-pre une nouvelle fois, alors je vous donnais mon consentement pour éviter d'être interrompu.

M. Roy: Je ne suis pas encore ministre!

Le Président (M. Jolivet): D'une façon ou d'une autre, c'est moi qui vais devoir vous interrompre, midi étant arrivé...

M. Pagé: II est sur le point d'être midi. M. Chevrette: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Juste une chose, c'est simplement pour les besoins, parce que vous pouvez avoir le droit de parole ensuite. C'est pour l'ensemble des groupes FTQ, CSN, CSD, l'Association des entrepreneurs du Québec, l'Office de la construction du Québec et le commissaire au placement; cela fait six groupes ou six personnes, peu importe, mais il reste une chose, c'est que si la CSD n'est pas présente ou si l'AECQ n'est pas ici — je vois des gens... Mais si jamais, au bout de la course, il y a des gens qui ne sont pas présents, alors...

M. Pagé: M. le Président, vous pourriez, dans un premier temps, demander aux gens qui sont ceux qui sont prêts et disposés à se faire entendre cet après-midi. En partant de là, on verra l'enveloppe de temps dont on dispose, on a de 15 heures à 18 heures, on pourra partager notre temps en fonction du nombre d'intervenants.

Le Président (M. Jolivet): La FTQ veut-elle se faire entendre? Oui. La CSN?

Une Voix: ...

Le Président (M. Jolivet): La CSD est-elle là?

Une Voix: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Oui, d'accord. L'AECQ?

Une Voix: ...

Le Président (M. Jolivet): D'accord! Le commissaire au placement et l'OCQ en dernier. Donc, dans les six groupes, il restera à vérifier pour l'AECQ, je pense qu'il y avait quelqu'un ici tout à l'heure. On pourra donc déterminer lors de l'arrêt le temps à donner à chacun.

Vous aurez pour terminer, M. le député de Rimouski, le droit de parole.

M. Marcoux: Trois minutes.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Ajournement sine die en attendant l'ordre de la Chambre, probablement après la période des questions.

Fin de la séance à 12 h 3

Reprise de la séance à 15 h 58

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre! La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre se réunit à nouveau pour étudier le règlement de placement, tel que demandé par l'Assemblée nationale. Les membres de cette commission sont: M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Gravel (Limoilou), M. Johnson (Anjou), M. Lavigne (Beauharnois) remplacé par M. Alfred (Papineau), M. Mailloux (Charlevoix), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud), M. Vaillancourt (Jonquière) remplacé par M. Lefebvre (Viau).

Les intervenants sont: M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette) remplacé par M. Marcoux (Rimouski); M. Laplante (Bourassa), M. Paquette (Rosemont), M. Springate (Westmount), M. Samson (Rouyn-Noranda). Le rapporteur est toujours M. Lefebvre (Viau).

Nous en étions rendus ce matin à M. le député de Rimouski qui avait encore le droit de parole pour une dizaine de minutes, mais avant, on m'a demandé, de la part du député de Bellechasse, une intervention rapide.

M. Goulet: Certainement, M. le Président. Ce n'est peut-être pas conforme à nos règlements, mais vous me permettrez, au nom de l'Union Nationale, d'offrir mes voeux de remerciement au ministre du Travail qui, tout à l'heure, dans un geste humanitaire, n'a pas hésité à faire tout ce qui était humainement possible pour sauver la vie d'un des membres de l'équipe de l'Union Nationale sur l'étage, M. Guay. Je tenais, au nom de l'équipe de l'Union Nationale, à remercier, non pas le ministre du Travail, mais le Dr Pierre-Marc Johnson.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rimouski.

M. Marcoux: M. le Président, je n'ai pas l'intention de reprendre les propos que je tenais ce matin, mais simplement quelques minutes... Je vais essayer de prendre moins de dix minutes parce que, moi aussi, j'ai hâte d'entendre les quatre groupes que nous avons accepté d'entendre. C'est simplement pour dire d'abord que certains membres de la commission auraient souhaité que le ministre dépose une série de projets d'amendements plutôt que de choisir la procédure qu'il a choisie, c'est-à-dire d'écouter les membres de la commission comme ceux qui vont présenter des mémoires. Je veux dire que pour ce qui me concerne... A votre demande...

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît. (16 heures)

M. Marcoux: ... mais qu'il a acceptée. Je suis d'accord sur la procédure choisie par le ministre pour la raison suivante. Lorsqu'on est député ministériel, c'est sûr qu'il y a des occasions... Il y a un principe qui nous régit normalement, c'est la solidarité des partis, même quand on est député de l'Opposition et, lorsqu'il y a des amendements formels déposés, cela nous prend davantage de bonnes raisons pour nous désolidariser, quoique, dans certaines circonstances, il faille le faire. Mais, comme je pense que nous avons tous connu plusieurs cas, plusieurs dossiers et que nous avons tous des suggestionns intéressantes à faire au ministre ainsi qu'à l'OCQ pour changer le règlement de placement, je pense que la démarche qui a été choisie de dire: Donnons le droit de parole le plus libre possible à tous les membres de la commission, indépendamment des allégeances politiques, est une démarche cohérente et qu'elle va probablement démontrer que sur la très grande majorité des points, ou la plupart des points, il y a consensus sur des changements à apporter à ce règlement de placement.

L'ensemble des amendements qui nous seront proposés, que ce soit par les groupes concernés directement ou les membres de la commission, je les jugerai à partir de deux principes. Le premier, c'est qu'il y a nécessité de contrôler et de contingenter de façon stricte l'intégration de nouveaux travailleurs dans le domaine de la construction. Alors, la nécessité de contrôler, premier principe.

Le deuxième: Nécessité de simplifier les nor- mes d'application du règlement de placement. Tout amendement qui sera proposé, par quelque député que ce soit membre de la commission, conforme à cet esprit de respecter que la construction ne peut pas assimiler plus qu'un certain nombre de travailleurs et qu'on doit pouvoir donner priorité de travail aux vrais travailleurs de la construction et, en même temps, tout amendement qui viserait à faire en sorte, comme je le disais ce matin, qu'on élimine le paquet de chinoiseries, autant pour le travailleur, pour l'entrepreneur, que pour le consommateur, que suppose le règlement actuel, ces amendements vont être bienvenus par tous les membres de la commission.

Spécialement, on a parlé de la délimitation des régions, je pense que la situation actuelle est particulièrement insensée, où il faut aller chercher un A de Gaspé pour travailler à Rimouski, avant de pouvoir prendre quelqu'un classé B à Rimouski. Tout le monde sera d'accord pour dire que c'est une incohérence et que, par quelque méthode que ce soit, il va falloir mettre fin à cette incohérence. Peut-être ne serons-nous pas unanimes, mais je pense qu'une majorité des membres de la commission sera d'accord pour dire que le fait d'avoir trois classes de travailleurs amène une série de complications à l'OCQ, au niveau de la référence de placement, etc., qui ne sont vraiment pas nécessaires pour distinguer les vrais travailleurs de la construction ou les réguliers, les travailleurs à temps partiel dans la construction ou les occasionnels.

Si on simplifie la base au niveau du certificat de classification, toute la procédure administrative, par la suite, sera automatiquement simplifiée. Il y aura des conséquences au niveau de la simplification, au niveau de la priorité d'embauche. J'ai eu accès à un document préparé des employés de l'OCQ, où au lieu de simplifier pour régler les problèmes, on diagnostique très bien les problèmes et au niveau des solutions, on propose d'avoir une zone, un territoire, une région et le Québec.

Au lieu de simplifier, on propose de compliquer davantage. Je pense que cela peut partir d'un bon naturel, parce que le diagnostic est bon. On sait très bien les problèmes que les travailleurs et que l'AECQ ont affrontés. Au niveau des solutions, on propose de compléter encore le château, d'en faire un vrai labyrinthe dans les priorités d'embauche. C'est assez merveilleux de lire cela.

Je pense qu'il va falloir faire en sorte que les priorités d'embauche aussi soient simplifiées, mais la base de cela, c'est au niveau de la question de la classification et de la certification.

Il y a un problème que le ministre n'a pas souligné dans les termes qu'il voudrait qu'on l'aborde, c'est la question du fonctionnement de l'OCQ. Je pense qu'on ne peut pas parler concrètement et valablement de toute la question du règlement de placement sans aborder la question du fonctionnement de l'OCQ, entre autres un aspect particulier, qui fait qu'il y a assez peu de pouvoirs qui sont donnés aux bureaux régionaux de l'OCQ et qu'il faudrait peut-être — c'est une

hypothèse que j'aimerais qu'on discute — faire en sorte que les bureaux de révision soient rattachés d'abord davantage aux bureaux régionaux de l'OCQ plutôt que très centralisés à la structure, au centre de l'OCQ. Je pense que c'est une chose qu'il faudrait examiner, le fonctionnement de l'ensemble de l'OCQ, compte tenu de la complexité du règlement de placement. C'est bien sûr que si on simplifie le règlement de placement, le travail des employés de l'OCQ va être simplifié.

Mais il y a peut-être des niveaux de décision à redéfinir entre le sommet de l'OCQ et la base de l'OCQ.

Je terminerai en posant une question à un député qui est absent, le député de Beauce-Sud. Je sais qu'il est un lecteur du journal des Débats. Je lui poserais la question, sans vouloir en faire un débat interminable.

Ce matin, il a posé beaucoup de questions de forme au ministre, sur la façon dont on allait procéder pour nos travaux, mais je ne l'ai pas entendu se prononcer sur une question de principe.

Est-il favorable ou non, dans le cas de la construction, à un contingentement ou à un règlement, en somme, qui établit des priorités, qui détermine...

M. Pagé: Sans vouloir en faire une question de procédure, est-ce que le député de Rimouski ne croit pas qu'il serait plus "fair play" d'attendre le député de Beauce-Sud avant de lui poser des questions et d'interpréter ses paroles?

M. Marcoux: D'accord.

M. Pagé: Je suis convaincu que vous n'apprécieriez pas que j'interprète vos paroles en votre absence.

M. Marcoux: Je m'excuse. Je ne veux pas en faire de débat. Si vous préférez que j'attende le député, je n'ai rien à cacher dans cela, sauf que j'ai essayé...

M. Pagé: Par gentilhommerie.

M. Marcoux: Par gentilhommerie. De toute façon, je n'aurai aucune hésitation à répéter la question quand le député de Beauce-Sud y sera, sauf que, vous savez une chose, dans le jeu de la commission parlementaire, c'est plutôt rare que les députés ministériels obtiennent leur tour de parole, parce qu'il y a deux partis reconnus représentés, plus le député de Beauce-Sud. Comme il y a alternance, on a moins souvent l'occasion de parler et, à ce moment-là, on a moins l'occasion aussi de poser nos questions. Il reste que, que je pose la question au député de Beauce-Sud ou à un autre député, je pense que ce n'est pas tout le monde qui s'est prononcé ce matin sur la question de principe. Je pense que si on ne s'entend pas sur la question de principe comme telle, le reste risque d'en dépendre passablement. C'était l'essentiel des commentaires que j'avais à faire au tout début des travaux de cette commission. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Jean Alfred

M. Alfred: M. le Président, je ne reprendrai pas l'argumentation de M. le député de Rimouski qui a bien fait le tour de la question, cependant, je vais ramener des points auxquels je tiens mordicus, dans les amendements ou dans le remaniement de ce règlement de placement. Je tiens mordicus à ce qu'on appelle les priorités régionales: A régionale, B régionale et ensuite l'avènement des artisans. J'y tiens mordicus. Les travailleurs avec qui j'ai parlé y tiennent aussi. Quand on parle de la catégorie A régionale, la B régionale, il y a un autre point qui est très important qui me tient à coeur aussi. Il y a eu beaucoup de travaux, dans mon coin. Malheureusement, ce sont des gars de Montréal qui ont travaillé, parce que l'entrepreneur vient avec ses permanents. Je ne voudrais pas, en aucune façon, qu'il y ait des chômeurs chez nous et que ce soient des gars de Montréal qui prennent nos "jobs" chez nous. Si on veut ramener la paix dans la construction, il ne faudrait pas qu'un permanent de Montréal vienne prendre nos "jobs" chez nous et que l'électricien chez nous se croise les bras, chôme, crève de faim et que le gars de Montréal vienne avec l'entrepreneur. Je crois que nous devons trouver un moyen pour que les gens de chez nous travaillent avant les gars d'ailleurs.

Un autre point aussi sur lequel je tiens à attirer l'attention du ministre, c'est sur la négociation qui a lieu maintenant entre l'Ontario et le Québec. Il y a eu, de la part du Parti libéral, beaucoup de chantage là-dessus, de la part surtout du député Michel Gratton, de Gatineau.

M. Pagé: M. le Président, je m'excuse. Me permettez-vous une brève question? Je vous ai mal saisi parce que...

M. Alfred: Excusez-moi.

M. Pagé: ... dans votre référence aux gars de Montréal et aux régions, j'en étais à me demander si vous vouliez proclamer la souveraineté-association ou l'indépendance de Papineau. C'est quoi votre affaire sur le Parti libéral?

M. Alfred: Excusez-moi, je parlais des priorités régionales, M. le député.

M. Pagé: Oui, c'est quoi votre affaire de...

M. Alfred: Deuxièmement, à propos de la négociation, la réciprocité entre l'Ontario et le Québec, me voici dans une zone frontalière.

M. Pagé: Oui.

M. Alfred: ... il faut que le ministre soit très prudent. Les vrais travailleurs de la construction d'ici ne veulent pas qu'on cède un pouce à l'Ontario qui va faire beaucoup de chantage avec nous pour dire que notre règlement de placement n'est pas bon parce qu'ils ne veulent pas en faire. Les travailleurs qui sont ici savent que quand il y a de l'ouvrage dans Hull, 90 à 95% du temps, ce sont des travailleurs de l'Ontario qui viennent travailler chez nous.

M. Pagé: On y va de l'autre côté nous aussi.

M. Alfred: Quand, par exemple...

M. Pagé: ... on va leur demander tantôt.

M. Alfred: Je vous demande de vous taire, M. le député de Portneuf. Je vous ai entendu parler ce matin. Je parle ici devant des gens qui ont vécu des situations.

M. Pagé: ... tantôt.

M. Alfred: Comme, malheureusement... Quand c'est nous qui faisons une chose, nous le disons clairement. Comme nous sommes transparents dans ce que nous faisons, cela fait crier, bien sûr, les autres. Tandis qu'en Ontario, quand ils nous sacrent dehors, ils ne nous le disent pas.

M. Goulet: On a vu cela cet après-midi en plénière.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! M. le député.

M. Goulet: Je m'excuse, M. le Président. C'est parce que ce n'est pas toujours le cas.

M. Alfred: Je demande au ministre de consulter sérieusement tous les intervenants dans cette affaire, de façon à ne pas faire une négociation qui soit néfaste pour les travailleurs québécois.

Il y a aussi un autre point qu'on devrait suivre de très près: lorsqu'on demande, par exemple, un travailleur de la construction à l'OCQ. Il paraîtrait que l'OCQ en envoie cinq à l'entrepreneur et si, par hasard, il y a un travailleur qui est délégué de chantier, qui a forcé l'entrepreneur à respecter les règlements de sécurité, bien sûr, si on envoie cinq travailleurs et que l'entrepreneur voit le nom de ce délégué de chantier qui l'a forcé à respecter la loi de la sécurité, ce gars va être repoussé. Je voudrais savoir dans quelle mesure nous pourrons prendre les moyens pour que quelqu'un qui est délégué de chantier, qui fait très bien son travail, ne soit pas pénalisé, parce qu'il fait très bien son travail; qu'il ne subisse pas les foudres d'un entrepreneur qu'il a obligé à faire respecter la loi de la sécurité au travail. C'est tout.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Comme on s'est entendu sur la limite de temps à être accordée à chacun des groupes, nous donnerons donc quarante minutes à chacun des groupes. Le premier groupe à se faire entendre sera la FTQ. Nous aurons aussi la CSD qui aura à se présenter ce soir, compte tenu de ce qu'on a discuté tout à l'heure. Il y aura la CSN qui suivra et l'AECQ sera en troisième lieu; la CSD étant au début de la soirée, à 20 heures. Oui?

M. Pagé: M. le Président, sur la limite de quarante minutes, est-ce qu'on prévoit un partage du temps entre les formations politiques ou si on doit laisser aller à votre jugement et à votre discrétion?

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je pense que, sur quarante minutes, on pourrait peut-être demander aux parties de se limiter à dix minutes pour faire un sommaire. Il reste quand même près de 30 minutes par la suite.

M. Pagé: Dix ou quinze minutes.

M. Johnson: II y a aussi cinq minutes aléatoires avec les questions.

M. Pagé: On va commencer et on verra.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. Voici le représentant du premier groupe. Veuillez nommer ceux qui sont avec vous. Prenez le micro, pour les fins du journal des Débats.

Audition de témoins

Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, FTQ

M. Pouliot: Maurice Pouliot, secrétaire général du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction, FTQ.

M. le Président, MM. les membres de la commission, je pense qu'il y a eu une sage décision d'entendre les parties; c'est un droit qu'on croyait avoir et on tient à remercier les membres de la commission de vouloir tenter de connaître et de comprendre les réels problèmes des travailleurs de l'industrie de la construction. Il ne faudrait sûrement pas oublier que le Conseil provincial représente plus de 70% des véritables travailleurs de la construction.

Depuis longtemps, nous avons réclamé d'être entendus par une commission parlementaire et c'est sur cette raison qu'il y a une multitude de problèmes qu'on va, dans le court temps qui nous est alloué, essayer de résumer. On vous a remis un mémoire ce matin. On voudrait apporter des solutions pour régler les problèmes des véritables travailleurs qui subissent actuellement des injustices de jour en jour. (16 h 15)

II faudrait sûrement se rappeler que de nombreuses modifications au règlement de placement ont été apportées depuis sa création, soit depuis six mois, depuis juillet. Pas moins de sept modifications au règlement ont été apportées. Nous

sommes ici, aujourd'hui, pour entendre et connaître les revendications de la commission permanente. On sait qu'on va avoir d'autres modifications à vivre concernant le règlement de placement.

L'ambiguïté de ce règlement existe de plus en plus; on pourrait sûrement soulever le problème qui existe actuellement, entre autres, à la baie James où il y a plusieurs travailleurs qui n'ont pas de certificat de classification A ou B et qui sont encore sur le chantier. Il y a eu une décision de l'Office de la construction disant qu'il fallait que tous les travailleurs soient congédiés pour être réembauchés, mais la SEBJ, de connivence avec i'AEBJ, a décidé de donner des congés sans solde aux travailleurs et on se retrouve dans une situation de fait où plusieurs travailleurs qui n'ont pas de certificat sont sur le chantier alors que d'autres sont en chômage actuellement.

Il y a le cas des poursuites de l'OCQ face au fameux règlement de placement. Il y a eu des délais assez longs depuis l'entrée en vigueur du règlement de placement. Avec les commentaires des gens de l'OCQ, on va savoir sûrement quelle est la raison d'un délai si long avant de procéder aux poursuites contre les entrepreneurs et les salariés qui violent, à tous les jours, le règlement de placement.

Il y a sûrement le fait que les salariés sont devant un avenir incertain dans l'industrie de la construction, à cause des modifications qui vont être apportées. Vous êtes sûrement au courant qu'en ce qui a trait au champ d'application, la loi 110 exclut plusieurs travaux de l'industrie de la construction, les commissions scolaires, les hôpitaux, qui étaient régis avant par la Loi des relations de travail dans l'industrie de la construction. Des poursuites de plusieurs millions étaient entreprises par l'Office de la construction contre ces différents organismes. Ces poursuites, ce que l'on fait actuellement, on est à légaliser quelque chose qui était illégal dans le passé. Les conséquences de cet amendement vont sûrement créer un pourcentage de chômage de plus et enlever du travail aux travailleurs de l'industrie de la construction.

Il y a aussi le projet de règlement sur le champ d'application. On se souvient que le 20 septembre 1978, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre porposait de modifier le champ d'application en ce qui a trait à ce que la loi s'applique ou ne s'applique pas. On se pose de sérieuses questions à savoir quelle est la raison pour laquelle les salariés de la construction, qui devraient recevoir un certificat de classification, qui avaient par l'arrêté en conseil no 3297 un permis de travail — je réfère aux travailleurs qui travaillent sur les "shut downs", sur la maintenance, dans l'industrie lourde et une multitude d'autres cas qui sont non régis par la Loi sur les relations de travail ou les exclusions dans la loi 68.

Il y a sûrement des exclusions qui sont dans la loi actuellement lorsqu'on parle des exploitations agricoles. Il y avait déjà eu une entente au Conseil consultatif de la construction, où les parties s'étaient unanimement entendues sur un projet de modification du champ d'application et, encore là, le tout, semblerait-il, est référé au Conseil consultatif du travail et de la main d'oeuvre. On tient encore à souligner le fait que, présentement, des centaines de travailleurs sont privés d'obtenir un certificat de classification face au manque de responsabilité du gouvernement, qui se fait attendre concernant ces amendements.

Le ministre du Travail, lors d'une rencontre au mois d'août, nous avait dit que le cas serait réglé cet automne, l'automne dernier, et encore là, il n'y a absolument rien de réglé en ce qui a trait au champ d'application. Il y a les décisions du commissaire de la construction, M. Evariste Ber-nier, qui a de plus en plus tendance à exclure les travaux de la construction du décret et des lois de relations de travail dans l'industrie de la construction.

On est en train de se demander si le ministre ou la commission va pouvoir nous dire ce qui va rester dans l'industrie de la construction ou ce qui reste actuellement dans l'industrie de la construction pour les fins du certificat de classification. Il y a les artisans qui envahiront le secteur de la construction. La porte est grandement ouverte avec la loi 110.

Il y a déjà eu plusieurs commentaires à ce projet de loi, qui est maintenant une loi. Le règlement ne vaut plus grand-chose en vertu de cette permission qui est accordée aux artisans, ceux qui n'ont pas de certificat A ou B, qui ont simplement à aller travailler comme artisans et devenir membres de la régie des entrepreneurs et cela va aller assez bien. Encore là, cela peut saboter tout le règlement de placement.

Il y a la question de l'OCQ. L'OCQ, nous dit-on, ne fait pas de placement, mais il fait des références. Il réfère des noms aux entrepreneurs. On peut vous dire que les noms qui sont référés dans plusieurs occasions laissent aux entrepreneurs le choix de prendre qui ils veulent. En ce qui concerne le conseil des métiers, on vise la protection des travailleurs d'un certain âge, même si on dit: Le travailleur de 50 ans et plus va obtenir un certificat de classification A. Mais le certificat de classification, messieurs les membres de la commission, cela ne leur donne pas du travail. Cela fait simplement leur donner le droit de travailler. C'est d'une "job" qu'ils ont besoin. Quand on s'aperçoit que le travailleur a 50 ans, 52 ans ou 55 ans, on choisit un autre travailleur et l'exemple qu'un membre de la commission a mentionné, concernant les délégués de chantiers, on peut vous dire que ce sont des choses qui sont plus que véridiques, qui existent de jour en jour.

L'Hydro-Québec vient justement de refuser d'embaucher un travailleur, à cause d'une question d'âge. On ne peut sûrement pas laisser passer l'occasion pour dénoncer le coût d'administration du règlement de placement, dans son budget de $3 700 000, pour créer une ambiguïté semblable. C'est une des raisons pour lesquelles le comité mixte a refusé le budget de l'Office de la construction. Il faudrait sûrement se rappeler aussi que,

pour trouver des sommes d'argent, le 5 juillet 1978, il y a eu un arrêté en conseil qui a modifié les intérêts de vacances des travailleurs de l'industrie de la construction.

C'est une des revendications qu'on avait pu obtenir, qui avait été négociée, c'est-à-dire que les travailleurs recevraient 90% de leurs intérêts de vacances. On a changé ça, on a dit: Pour 1978, les travailleurs vont recevoir simplement 55% de leurs intérêts de vacances, lorsque l'article 2007 du décret relatif à la construction mentionne 90%. On n'a qu'à enlever des millions dans les poches des travailleurs pour les donner à l'Office de la construction. On sait fort bien que la loi mentionne que le gouvernement peut donner des subventions à l'Office de la construction.

Mais je ne pense pas, aujourd'hui encore, que le gouvernement ait donné de subvention à l'Office de la construction. On a vu l'arrêté en conseil qui mentionne que 1/2% doit être prélevé sur la paie des travailleurs. C'est bien clair. Mais les subventions se font toujours attendre, et les intérêts du fonds spécial d'indemnisation servent au financement de l'OCQ. Il y a l'article 12.12 du règlement de placement, en ce qui concerne le conseil des métiers, qui peut peut-être surprendre certains membres de la commission. C'est qu'avant l'entrée en vigueur du règlement de placement, la priorité régionale existait. Depuis l'entrée en vigueur de ce règlement, il n'y a plus de priorité régionale. On a même reçu des lettres de certains députés, de membres du gouvernement actuel, qui disaient que c'étaient les syndicats affiliés au conseil provincial qui donnaient des "jobs" au Lac-Saint-Jean et que les chômeurs de la région, les travailleurs étaient là sans emploi.

Je pense que si on veut arriver à une véritable priorité régionale, le Conseil provincial est entièrement d'accord, ça fait l'objet de notre mémoire concernant la priorité régionale. Il y a sûrement la question des superrégions qu'il faudrait modifier et repenser. On demande que ça redevienne comme les régions étaient dans le décret et non faire de la région de Montréal une superrégion. Ce sont des modifications qui devront sûrement s'imposer. On ne peut pas laisser inaperçu le problème de la mobilité de la main-d'oeuvre, les frontières. Je voudrais souligner qu'il y a d'autres frontières que celles de Hull-Ottawa. Il y a aussi une frontière qui est au Nouveau-Brunswick.

Il y a des travailleurs de locaux affiliés au conseil des métiers qui vont à l'extérieur du Québec et qui font des millions d'heures à l'extérieur. Ce problème n'est pas réglé et on aimerait bien que le ministre nous dise quelle est la solution qu'il envisage, ou les propositions qu'il a apportées lors des discussions concernant la rencontre qui peut avoir lieu. Cela peut être le problème de l'un, mais cela peut être le problème de toutes les autres provinces également. Actuellement, vous êtes sûrement au courant qu'il y a un genre de boycottage qui se fait concernant le règlement de placement, à travers les autres provinces. Le ministre est conscient de cela.

La mobilité de la main-d'oeuvre.

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas vous interrompre. Est-ce qu'il vous reste encore...

M. Pouliot: J'achève, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, allez-y.

M. Pouliot: Lorsqu'on parle de contingentement de la main-d'oeuvre, il est bien assuré que le conseil provincial est d'accord avec un contingentement de la main-d'oeuvre, que les chiffres avancés ce matin de 250 000 ou 300 000 personnes qui ont voté, c'est une chose qui est totalement ridicule. On a, à plusieurs occasions, demandé de faire cesser la votation dans les plus brefs délais. On a des lettres à cet égard. Mais il y a sûrement le fait que le centre de formation professionnelle envoie de la documentation et qu'on fait encore un recensement pour inciter les travailleurs à entrer dans l'industrie de la construction. C'est l'article 5.02 du règlement, où il y a une ambiguïté, où une mésentente peut exister entre les centres de formation professionnelle, le ministère du Travail et le ministère de l'Education. On sait qu'un finissant peut encore entrer dans l'industrie de la construction. Actuellement, il y a des chômeurs dans pratiquement tous les métiers et on conçoit mal qu'on puisse émettre des certificats de qualification.

En conclusion, on voudrait que cela redevienne des comités d'apprentissage de métiers. Il y a des comités qui siègent; je suis un de ceux qui siègent au comité central. Cette affaire marche à pas de tortue.

L'unanimité se fait sur un point qui, par lui seul, remet en cause la logique d'une bonne moitié du règlement. Nous voulons l'exclusivité du placement. En l'absence d'une telle disposition, nos affiliés sont de moins en moins capables de donner des services adéquats aux dizaines de milliers de travailleurs de la construction qui leur font confiance. La situation se dégrade continuellement. (16 h 30)

L'arbitraire et l'injustice occupent un champ de plus en plus vaste. Les prérogatives patronales n'en finissent plus de croître. Le règlement se présente de plus en plus, à l'expérience, comme une tentative de sabotage des organisations ouvrières les plus structurées. Ce sont tous nos affiliés qui font ce constat et le gouvernement doit en être conscient. Seules les agences de placement syndicales peuvent assurer un service répondant aux véritables besoins des salariés de l'industrie de la construction. C'est pourquoi le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction prône l'établissement d'une règle de base, c'est-à-dire que seules les agences de placement syndicales puissent être habilitées à effectuer du placement dans l'industrie de la construction, que ces agences de placement soient assujetties à un code d'éthique, que la surveillance du code d'éthique soit sous la responsabilité d'un organisme indépendant, que les activités relatives à la surveillance du code d'éthique soient défrayées par le

ministère public. Toute autre formule est vouée à l'échec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. le ministre.

M. Johnson: Cela fait beaucoup de choses, n'est-ce pas? Merci, M. Pouliot, du résumé, je pense, assez adéquat que vous avez fait des commentaires du Conseil des métiers, que je connais depuis quelque temps déjà. On a eu l'occasion d'en discuter, dans certains cas, avec des corps de métiers qui appartiennent au conseil. Je pense que vous avez évoqué à peu près l'ensemble des problèmes. J'ai pris note d'à peu près une douzaine de questions dont certaines ne sont pas nécessairement reliées uniquement au règlement de placement. Par exemple, la question de M. Evaris-te Bernier qui est responsable, finalement, de la définition ou du champ d'application, ce n'est pas intrinsèquement relié au règlement de placement, sauf que cela peut avoir des conséquences dessus. On est bien conscients de cela. Les artisans, le budget de l'OCQ, etc., on déborde peut-être un peu le règlement proprement dit, c'est pour cela que je vais me permettre de le faire, mais de façon très limitée.

Si je comprends bien la revendication centrale de votre mémoire, c'est l'exclusivité du placement syndical — vous avez terminé là-dessus — ce qui n'empêche pas que les autres commentaires que vous avez eus aient leur importance, mais ce qui est central, je pense, dans votre document, c'est cela. Le reste, on pourrait qualifier cela d'aménagements que vous trouvez essentiels au règlement de placement. Ces aménagements, dans certains cas, sont mineurs, d'autres sont plus importants, par exemple, les employés réguliers, etc. Je vais vous dire tout de suite que, pour ce qui me concerne, je m'oppose à l'exclusivité de placement syndical pour un tas de raisons.

La première raison, c'est une raison pratique qui est le fait que, dans la réalité, il y avait, il y a deux ans, plus ou moins 15% à 20% du placement dans l'industrie qui se faisait par des bureaux de placement syndicaux. Cependant, on peut dire que dans le cas, par exemple, des électriciens et des plombiers, des métiers mécaniques, en fait, il y avait des situations de quasi-monopole de placement, si on veut. Encore une fois, cela pouvait varier selon certains types de travaux, mais il y avait une très grande puissance de l'appareil de placement syndical dans le cas des métiers mécaniques. L'avènement du règlement de placement, paradoxalement, a mis fin, si on veut, non pas à une situation de droit, mais à une situation de faits de ce type de monopole de placement pour certains métiers, mais cela a donné selon les témoignages qu'on a d'autres corps de métiers, une augmentation de l'utilisation des bureaux de placement. Je pense que c'est assez intéressant de remarquer cela. Il y a des syndicats qui ne faisaient presque pas de placement dans certains métiers et, depuis le règlement de placement, ils en font, parce que c'est plus pratique pour l'em- ployeur, parce que c'est également plus pratique pour le salarié et parce que l'institution syndicale s'avère être un service au-delà d'une obligation imposée par la loi aux travailleurs d'être syndiqués. Je pense que cela est important et cela correspond d'ailleurs à un phénomène nord-américain. Je vous réfère, à ce titre, à un article récent d'un journal de Toronto qui faisait une revue du phénomène du placement et de la syndicalisation dans la construction à travers les provinces canadiennes et les Etats-Unis, où on remarquait qu'il y a maintenant une forte tendance au Canada à des chantiers "nonunion", ce qui pose un gros problème pour les institutions syndicales et même les employeurs.

Les employeurs sont pris — ceux qui ont des syndicats — à être obligés de soumissionner à des prix qui sont plus hauts que ceux qui n'ont pas de syndicat, et, d'autre part, les syndicats eux-mêmes trouvent cela ennuyeux de voir que comme les employeurs qui les emploient, dans bien des cas, n'obtiennent pas les contrats à soumissions, c'est une espèce de cercle vicieux finalement des deux côtés. Au Québec, on est prémuni contre cela. L'importance du monde syndical est confirmée dans nos lois et ce gouvernement entend respecter cela. Il y a des limites aussi à aller contre des tendances qui sont plus ou moins naturelles dans une économie qui connaît des changements et des difficultés.

La deuxième raison pour laquelle je m'oppose de façon assez profonde à l'exclusivité du placement syndical, c'est qu'un travailleur est obligé d'appartenir à une des quatre centrales ou enfin à une des deux ou trois centrales et du groupement qui sont là. Cela ne veut pas nécessairement dire, comme le démontraient les chiffres antérieurs au règlement de placement, qu'ils veulent avoir recours à l'institution syndicale pour les fins de placement. Il peut y avoir de bonnes raisons là-dessus, qui sont des raisons qui relèvent du droit des personnes, qui relèvent de l'intérêt des personnes, qui relèvent aussi du fait que, dans certains cas, on sait que cela peut poser des problèmes. On me dit: Donnez-nous l'exclusivité et assurez-vous du respect d'une espèce de code de déontologie ou de code d'éthique par un organisme indépendant. Je vous ferai remarquer que dans la première version du règlement de placement qu'on a publiée, on avait mentionné la nécessité d'un code d'éthique pour les bureaux de placement syndicaux. On a eu un tollé là-dessus, on a parlé d'ingérence, etc. Aujourd'hui, on dit: Donnez-nous le monopole et contrôlez-nous quand même. Je pense qu'il n'appartient pas à l'Etat d'intervenir dans la vie syndicale. L'Etat peut, par des lois ou, à la rigueur, même par la réglementation, définir des obligations aux syndicats, mais je ne pense pas qu'il lui appartienne de faire la police de ce qu'il y a à l'intérieur du monde syndical, sinon de ce qui relève du Code criminel, comme on le fait dans certains cas en ce moment, et comme on va continuer à le faire.

Finalement, sur un champ d'application, il y a le cas des "shutdowns" essentiellement, plus le

reste du problème du champ d'application qui est devant le conseil consultatif où le monde syndical a sa représentation, ce qui devrait d'ici une couple de mois normalement arriver avec un embryon de solution, et il faut que les parties prennent leurs responsabilités. Ce n'est pas vrai que le ministre dans son bureau va trancher et qu'après cela, il va recevoir le paquet du côté patronal et syndical. Il va falloir que le patronat et le syndicat s'entendent en gros sur le champ d'application et essaient de réduire la zone grise qu'il y a entre ce qui est de la construction et ce qui n'en est pas. Le cas des "shutdowns", il y a deux façons de le régler: ou on inclut cela dans la construction, au niveau du champ d'application, ou encore au niveau du règlement de placement par un amendement. On dit que même si ce n'est pas dans le champ d'application du règlement de placement, les heures pourraient être comptabilisées. L'Office de la construction travaille sur ces hypothèses en ce moment.

Finalement, je vais en profiter, puisqu'on parle du "shutdown", et je vais terminer là-dessus en deux minutes, pour parler du problème que pose, en ce moment, entre autres au local 144, l'absence de monopole de placement syndical. Il y a, je pense, des efforts considérables d'hommes au 144 pour essayer de redonner à ce local, qui remonte au siècle dernier, une vie syndicale qui se tienne. On sait quel genre de difficultés il a connues. On sait de quel genre de crédibilité il a souffert, sauf qu'on sait une chose: en ce moment, s'il y a du placement qui se fait, dans le cas des plombiers, cela se fait par ce qu'on appelle, dans le milieu, le parallèle. Le parallèle ne peut pas fonctionner sans la connivence corrompue de certais employeurs. Ce n'est pas en conférant le monopole de placement syndical au 144 que ces problèmes vont être réglés. Ils pourraient être réglés, c'est vrai, dans le cas du 144, et on pourrait s'attendre qu'il y ait plus de justice pour les travailleurs qui sont des plombiers au Québec, d'être placés correctement, sauf que cela soulèverait d'autres problèmes qui sont des questions de principe et aussi des questions de fonctionnement dans l'ensemble des autres syndicats. Dans le cas de ce qui se passe chez les plombiers, le gouvernement, entre autres avec les services d'un procureur de la couronne qui est à temps plein affecté à ce dossier depuis six mois, va essayer de trouver les moyens de mettre au pas les employeurs et certains farfelus qui continuent à se promener dans ce milieu et à se prendre pour ce qu'ils ne sont pas. Il ne faudrait quand même pas mêler les problèmes.

Ce sont les raisons essentielles pour lesquelles je m'oppose personnellement à l'exclusivité de placement, mais en considérant cependant qu'à l'exception des métiers mécaniques où il y avait une situation de quasi-monopole, il y a quand même, chez les bureaux de placement qui font une bonne "job" une augmentation des services qui leur sont demandés par les employeurs. Je pense que c'est un bon signe et c'est un signe qui met le monde syndical de la construction au

Québec à l'abri du phénomène qu'on retrouve dans le reste du Canada où il y a littéralement une désaffection de ce côté, ce que je ne souhaite pas pour le Québec. On est aussi capable de bâtir quelque chose d'original de ce côté.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président; je n'ai pas l'intention de me laisser aller à un long monologue dans lequel je pourrais faire part aux membres de la commission et à l'auditoire de mes commentaires, à la suite du dépôt du rapport présenté par le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction. Je vais me limiter à vous poser des questions et, en ce qui concerne le volet des commentaires ou le volet des positions, on aura, entre autres, toute la matinée de demain pour faire part au ministre de nos opinions, de nos considérations et aussi de nos recommandations à l'égard des travaux de cette commission pendant la séance d'aujourd'hui et, par le fait même, de l'analyse des mémoires et des requêtes que vous nous formulez.

M. Pouliot, je vous remercie pour le résumé de votre mémoire. Dans celui-ci, vous demandez des modifications assez importantes au règlement de placement. Je pense que tout le monde a été unanime, jusqu'à maintenant, à constater et à vouloir l'obligation, par un règlement ou une mesure législative ou réglementaire, tout le monde souhaite un contingentement. Je pense qu'il n'y a personne ici qui n'est pas d'accord avec le principe voulant que les "jobs" de la construction appartiennent aux véritables travailleurs de la construction.

On a cependant un règlement de placement qui s'applique, mais on a aussi d'autres dispositions législatives qui ont été adoptées récemment, entre autres la loi 110. Je conviens et je comprends vos interrogations quand on rencontre des travailleurs, comme j'ai encore eu l'occasion d'en rencontrer ce midi, qui ont peut-être totalisé 17 000 heures dans le secteur de la construction, qui ont évolué seulement dans ce secteur depuis une quinzaine d'années et qui ne peuvent pas travailler. Je conviens que vous ayez des interrogations et je conviens que vous soyez légitimement placés pour demander des amendements.

Cette sécurité d'emploi, cette garantie que les emplois dans le secteur de la construction puissent être accordés aux véritables travailleurs, ne croyez-vous pas qu'elle pourrait venir avec un règlement de placement, dans un premier temps, même s'il y a beaucoup de brèches, et qu'elle pourrait aussi venir à la suite de la libre négociation des parties, entre autres, en ce qui concerne les personnes âgées ou les travailleurs qui sont un peu plus âgés, qui ont peut-être passé le cap de la cinquantaine? Ne croyez-vous pas qu'à la suite d'une négociation entre les parties patronales et syndicales, on puisse en arriver éventuellement à des ententes selon lesquelles un employeur serait obligé de réembaucher tel employé, à partir de

son expérience, à partir du nombre d'années pendant lesquelles il a travaillé? Enfin, c'est une foule de critères qui pourraient éventuellement être élaborés, ce qui pourrait impliquer, amener autant de sécurité et ce qui pourrait en même temps suppléer, dans un certain sens, aux failles que l'on rencontre dans le règlement de placement.

Le Président (M. Jolivet): M. Pouliot.

M. Pouliot: II y a certainement une possibilité d'entente. Le ministre a mentionné ce matin que, par le biais du comité mixte de l'Office de la construction, il pourrait y avoir des ententes qui modifieraient le règlement de placement. Si on veut faire jouer un rôle véritable aux parties intéressées, il y a une possibilité de s'entendre, parce que, dans bien des cas, on s'est entendu. Je pense que ça pourrait sûrement se régler par le truchement des parties.

M. Pagé: En fait, c'est intervenir à un autre moment dans le débat; par le règlement de placement, on oblige l'employeur ou l'entrepreneur à embaucher telle personne avant telle autre. On pourrait, à la suite d'une libre négociation ou encore par une intervention, faire en sorte que tel entrepreneur ou tel employeur ne puisse remercier tel employé par rapport à tel autre. Tous ces aspects pourraient être laissés à la négociation et je suis heureux de vous entendre dire que c'est possible.

Il reste maintenant, autour de la table ici, à envisager la possibilité que ça puisse se faire et comment ça pourrait se faire éventuellement.

Vous avez touché la question des artisans; ça ne me surprend pas que vous touchiez cette question, parce qu'elle a été longuement débattue ici, à l'Assemblée nationale. Nous demeurons convaincus que les dispositions qui s'appliquent aux artisans, dans la Loi 110, font en sorte qu'on peut contourner le plus facilement du monde le règlement de placement qui s'applique actuellement. (16 h 45)

Je conviens que la loi 110 a été adoptée depuis quelques jours seulement. Etes-vous d'ores et déjà en mesure de nous faire part d'une évaluation sur le nombre de personnes qui, chez vous, éventuellement, pourraient devenir artisans, soit parce qu'elles sont classées B ou C ou autrement?

M. Pouliot: En ce qui concerne les locaux en général, je ne peux pas vous donner un nombre en l'air ou un pourcentage. On sait fort bien qu'il y a une incitation directe auprès de ces membres à devenir artisans. C'est la solution de rechange qu'ils ont quant au règlement de placement. Il y a même des associations d'artisans qui semblent vouloir se former, mais c'est encore au stade de la discussion. La loi 110, comme vous l'avez mentionné, est bien chaude. Je pourrais vous référer à certaines conventions collectives, mais je vais revenir à la première question que vous m'avez posée. Dans les conventions collectives, avant l'entrée en vigueur de la loi 290, il y avait l'exclusivité des bureaux de placement, où les entrepreneurs appelaient dans les différents locaux pour avoir la main-d'oeuvre. C'était une possibilité en 1966, 1967 et 1968 et ce pourrait sûrement être une possibilité en 1979.

M. Pagé: Sur la question du placement syndical — on pourra y revenir demain, on a entendu votre opinion, on a vu les recommandations que vous nous avez formulées — on est à même aussi de constater la position combien définitive du ministre à ce moment-ci, on pourra y revenir demain dans le courant de la séance du matin.

En ce qui concerne les travailleurs du Québec —je vais essayer de me dépêcher pour permettre à mes collègues de l'Union Nationale et de Beauce-Sud d'intervenir — on sait que vous avez dans vos locaux plusieurs travailleurs susceptibles de se rendre travailler dans d'autres provinces. On sait que plusieurs projets actuels impliquent l'embauche de plusieurs centaines de personnes, que ce soit en Alberta, à Terre-Neuve, en Ontario, au projet de Sarnia — on a ici toute la nomenclature des projets qui totalisent l'embauche de plus de 4000 travailleurs. Jusqu'à maintenant, depuis l'application du règlement de placement, est-ce qu'il y a des gars du Québec qui se sont fait dire en Ontario, mettons de côté le cas de la région frontalière ou le cas de l'Ontario est peut-être un peu plus chaud, ou au Nouveau-Brunswick: C'est bien dommage, les gars, vous ne travaillez pas ici. Ce serait, à ce qu'on me dit, le résultat de l'application d'un règlement de placement au Québec, qui interdit aux travailleurs d'autres provinces de venir occuper leurs fonctions ici. Avez-vous été à même de vivre cela? Est-ce que cela s'est étendu a plusieurs travailleurs dans certains corps de métier, entre autres, qui sont susceptibles de vivre cela, j'aimerais savoir ce qui en est là-dessus.

M. Pouliot: En ce qui concerne cela, il y a un problème réel sur un chantier, entre autres, celui du Nouveau-Brunswick sur le plan d'eau lourde, à Lepreaux, où il n'est pas question d'engager des travailleurs québécois. On "bypass" le Québec —si on me permet l'expression — on va chercher de la main-d'oeuvre dans d'autres provinces. La même situation s'est produite en Ontario. On a refusé d'embaucher des travailleurs du Québec, alors qu'on sait que dans un métier entre autres, les monteurs d'acier, dans un chantier de Sarnia en Ontario, on avait du travail pour sept travailleurs et on en a engagé quatre et les trois autres venaient du Québec. Le même problème se produit actuellement en Alberta. On a tous les yeux rivés sur ce règlement de placement. Cela crée définitivement des problèmes de plus en plus concernant la mobilité de la main-d'oeuvre à l'extérieur du Québec.

M. Pagé: Vous n'avez pas d'évaluation. Il y a quand même depuis plusieurs années, des travail-

leurs du Québec qui vont évoluer dans d'autres provinces, qui vont travailler à des gros projets à l'extérieur. Vous n'avez pas de nombre ou de chiffre approximatif sur le nombre d'employés qui seraient actuellement pénalisés, compte tenu de la réaction au règlement de placement au Québec.

M. Pouliot: Non. On sait que cela touche des centaines de travailleurs, mais vous dire exactement le nombre... On sait que pour un, le local de Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, de l'Association unie des plombiers, il n'est pas question d'engager des travailleurs québécois, c'est "Union Shop" et ce sont tous des gars qui viennent de l'extérieur du Québec.

M. Pagé: Une dernière question. Est-ce qu'on a été gagnants avec cela? Même si on a des travailleurs du Québec qui ne peuvent plus aller travailler en Alberta, en Ontario, au Nouveau-Brunswick ou à Terre-Neuve, est-ce qu'on a été gagnants dans le sens qu'on a beaucoup moins de travailleurs de l'extérieur? Où est le ratio? Avant l'application du règlement de placement, est-ce qu'on avait plus de gars du Québec qui allaient dans d'autres provinces ou si on avait plus de gars d'autres provinces qui venaient au Québec?

M. Pouliot: Tout dépend de la construction qu'il y a à l'extérieur. On peut sûrement référer au projet de Syncrude, les sables bitumineux, qui est actuellement terminé. Il y a eu des milliers de travailleurs québécois qui sont allés se chercher un revenu, mais présentement, sur les chantiers de construction, le chômage qui existe, ce n'est pas simplement au Québec, je pense qu'il est général à travers le Canada. On a des preuves à savoir qu'il y a un pourcentage de travailleurs de la construction québécois qui sont pénalisés justement face à ce règlement de placement. On peut peut-être dire que la province du Nouveau-Brunswick est plus séparatiste que la province de Québec ou la province d'Ontario ou ainsi de suite. Mais c'est une situation de fait que nous vivons actuellement au Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Pagé: Merci, M. Pouliot. J'aurais eu des commentaires, entre autres, sur le champ d'application, mais je les réserve pour le ministre demain matin.

M. Goulet: Merci, M. le Président. A la suite de plusieurs points qui ont été soulevés par le ministre et par le député de Portneuf, j'aurais quand même deux ou trois petites questions à poser à M. Pouliot. Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites qu'on doit protéger les vrais travailleurs. Pouvez-vous me dire en quelques mots ce qu'est un vrai travailleur de la construction pour vous? Est-ce qu'un type, par exemple, qui a 6000 heures sur la construction, parce qu'il n'a pu travailler ni dans sa sous-région, ni dans sa région pendant deux ans, est considéré chez vous quand même comme un vrai travailleur de la construction? Quand allez-vous le récupérer pour qu'il devienne un vrai travailleur de la construction?

M. Pouliot: On a des propositions d'amendement à l'article 301. D'ailleurs, le ministre, dans un des amendements au règlement de placement, a pris cinq ans et 5000 heures alors qu'on mentionnait, nous, quatre ans, 4000 heures, trois ans, 3000 heures. Il y a réellement un problème qui existe; on doit trancher, tracer une ligne. Qu'est-ce qu'un véritable travailleur de l'industrie de la construction? Les recommandations d'amendement qu'on faisait à l'article 301 dans le mémoire que vous avez, pour nous c'est ce qui était le véritable travailleur de la construction. Il y a le commissaire au placement qui va se faire entendre, il peut sûrement émettre des certificats de classification spéciaux dans des cas exceptionnels qui ne sont pas prévus dans le règlement de placement, mais c'est en principe ce qu'on demande.

M. Goulet: M. le Président, M. Pouliot a dit tout à l'heure qu'il mettait en doute le choix que l'OCQ... Vous avez dit quelque chose comme: L'OCQ, lorsqu'il réfère des noms, laisse le choix à l'entrepreneur d'embaucher à peu près qui il veut. C'est à peu près les propos que vous avez tenus. Cela m'a surpris. Je ne vous dirai pas peut-être pour la région de Montréal, mais je peux vous dire que pour la région de Québec, de tels propos m'ont surpris parce qu'effectivement, à ma connaissance, ce n'est pas tout à fait cela. On ne laisse pas le choix à l'entrepreneur d'embaucher qui il veut. Je voudrais que vous explicitiez davantage là-dessus ou j'ai mal compris vos propos. Dans la région de Québec, justement, les plaintes sont qu'on ne laisse pas le choix du tout.

M. Pouliot: La question peut avoir deux volets. Lorsqu'un entrepreneur demande à l'Office de la construction de lui faire parvenir la liste des chômeurs d'un certain métier, l'entrepreneur a le choix, parmi ces salariés, d'embaucher un ou deux travailleurs, en autant que c'est conforme au règlement de placement et qu'ils détiennent un certificat de classification A régional ou s'il n'y a plus de A, un B régional. C'est conditionnel.

M. Goulet: Oui, mais en autant qu'ils détiennent une classification.

M. Pouliot: Oui.

M. Goulet: Je suis d'accord avec vous. Ce n'est comme cela que j'avais compris vos propos.

Une dernière question, M. le Président, elle sera très courte. Vous avez également dit à peu près ceci: Personne ne peut faire objectivement du placement dans la construction. Cela a été à peu près la phrase qui a terminé vos propos: Personne ne peut faire objectivement du placement dans la construction sauf les syndicats. Vous

avez dit: Toute autre méthode est vouée à l'échec. Vous soutenez cela! Vous êtes venu en commission pour soutenir ce fait. D'après vous, c'est...

M. Pouliot: C'est une des revendications du conseil des métiers, c'est écrit dans son mémoire, c'est la fin de la conclusion, c'est une des raisons pour laquelle on demande l'exclusivité du placement. On ne demande pas simplement l'exclusivité pour le Conseil des métiers, mais pour les quatre associations représentatives reconnues par la loi et, par là, on viendra sûrement d'économiser plusieurs millions de dollars, même si ça peut directement ou indirectement être relié à l'Office de la construction. Parce que si l'office, avec son système d'informatique, a pu transmettre les noms des travailleurs qui sont disponibles, une supervision qui se fait par le ministère du Travail sur les bureaux de placement, on vient de régler. La preuve est là que pour les bureaux de placement syndicaux, même si, dans le passé, on doit reconnaître qu'il y a eu des abus, il y a une loi, la loi sur les bureaux de placement, c'était au gouvernement du temps de mettre cette loi en application et de corriger les situations qui existaient, en vertu de la loi 147.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Un certain nombre de questions ont déjà été posées, je me limiterai à une couple de questions. Auparavant, je voudrais répondre à mon savant collègue, le député de Rimouski, qui m'a posé une question. Je ne veux pas que vous soyez prétentieux. D'ailleurs, cela pourrait vous causer préjudice. Vous voulez savoir si j'estime qu'un règlement de placement est nécessaire. Je vous dirai que s'il y avait un manque de main-d'oeuvre au Québec, on serait ici aujourd'hui pour discuter de cette question. Il y a une abondance de main-d'oeuvre au Québec, il y a une pénurie de travaux, c'est donc devenu un mal nécessaire.

Lorsque j'ai écrit au ministre au mois de septembre, une longue lettre de trois pages, je lui ai fait un certain nombre de propositions et de suggestions. Je ne lui ai aucunement suggéré de l'abolir, je lui ai fait des suggestions pour l'améliorer. Est-ce que cela répond à votre question?

M. Marcoux: Très bien. En avez-vous d'autres?

M. Roy: Pardon?

Le Président (M. Jolivet): Laissez faire.

M. Marcoux: Si vous voulez que j'ajoute un commentaire...

Le Président (M. Jolivet): Pas de commentaire.

M. Marcoux: ... quelquefois, le député de Beauce-Sud...

Le Président (M. Jolivet): Pas de commentaire.

M. Marcoux: ... quand il est avec...

Le Président (M. Jolivet): Le député de Beauce-Sud, vos questions.

M. Marcoux: C'est parce que le député de Portneuf m'a posé une question.

M. Chevrette: Ne laissez pas passer, il va bien.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud, vos questions, s'il vous plaît.

M. Marcoux: ... quelquefois...

M. Roy: J'aimerais savoir de nos invités de la FTQ s'ils considèrent que le règlement de placement, en tenant compte des critères A, B et C, le nombre d'heures, 1000 heures et plus, 500 heures à 1000 heures pour le certificat B et moins de 500 heures, le certificat C, cela leur paraît un critère qui doit être maintenu, où s'il devrait y avoir des changements à ce niveau?

M. Pouliot: M. le Président, en ce qui concerne les revendications, il doit sûrement y avoir des changements. D'ailleurs, ce sont des amendements qu'on a demandés, c'est la même réponse que j'ai donnée au député de l'Union Nationale. Il y a sûrement un critère qu'on pourrait ajouter concernant les heures qui sont enregistrées dans le fonds de retraite des travailleurs de la construction pour être des travailleurs véritables, pour autant qu'ils ont effectué ces heures dans l'industrie de la construction, ce sont des solutions qu'il faut envisager. Pour nous, le règlement, dans sa forme, c'est de se référer aux heures des années antérieures. La commission doit tenir compte de la baisse des heures effectuées dans l'industrie de la construction pour pénaliser moins de travailleurs de l'industrie.

M. Roy: Si une suggestion était faite de réduire le nombre d'heures, 1000 heures requises pour la carte de classification, disons qu'il y aurait une suggestion qui serait faite, de réduire cela à 800 heures, à 700 heures, quelle serait l'opinion de la FTQ à ce sujet? Quelle serait votre opinion à l'idée de réduire la carte de classification A, compte tenu des remarques qui ont été faites ce matin, compte tenu aussi d'un certain nombre de mémoires que j'ai reçus de différentes régions de la province.

On trouve que le chiffre de 1000 heures, pour certains types d'entreprises, est trop élevé. On suggère qu'on le diminue. J'ai même des propositions qui ont été faites, qui nous viennent de la région de l'amiante, qui proposent que le chiffre de 1000 heures soit réduit à 500 heures. J'aimerais savoir de la FTQ, de votre groupe, de votre organisme, quelles sont vos remarques à ce sujet. Est-ce que cela vous apparaît acceptable? Est-ce que vous auriez des objections? ( 17 heures)

M. Pouliot: M. le Président, on aurait des objections. Ce sur quoi on pense que la commission devrait se pencher, c'est sur le taux de chômage dans une région où le travailleur ne peut pas effectuer des heures normales dans l'industrie de la construction. Ce n'est pas sa faute s'il n'y a pas de construction; il n'y en a pas, il ne peut pas travailler. On pourrait sûrement prendre ces heures en considération et lui émettre un certificat de classification, comme on le fait dans le cas d'une personne qui va en prison. On lui reconnaît ses heures. C'est la même chose pour quelqu'un qui retire des prestations des accidents du travail, qui est malade, etc.

Il y a des exceptions. On pourrait sûrement ajouter le cas de chômage par régions.

M. Roy: En somme, vous réclamez plus de souplesse dans l'application du règlement, si je vous ai bien compris.

Un deuxième point. Je pense que c'est important de le souligner. On a souvent fait état — et je dirais que ce fut le gros des arguments — que le règlement de classification, qui remplace le fameux permis de travail des années antérieures, a pour effet de sécuriser, de garantir une meilleure sécurité d'emploi pour les vrais travailleurs de la construction.

Considérant qu'il y a deux catégories de travailleurs de la construction, en ce sens que je ne veux les placer ni dans la première catégorie ni dans la deuxième; pour moi, il n'y a pas de citoyens de deuxième classe. Il y a ceux qui sont détenteurs d'un certificat de qualification professionnelle et il y a ceux qui sont considérés comme journaliers, qui ne sont détenteurs d'aucun certificat.

Etant donné qu'il y a déjà un contrôle lors de l'émission du certificat de qualification, il y a toute une période prévue pour l'apprentissage, il faut qu'un travailleur ait fait un certain nombre d'heures, qui soient étalées sur un certain nombre d'années, avant de finir par avoir ce qu'on appelle sa carte de compétence... Il y a déjà un règlement qui existe. On ajoute un deuxième règlement qui est le règlement de qualification, qui risque, à un moment donné, de déclassifier le travailleur, un an après avoir franchi toutes les étapes de sa qualification professionnelle, par le fait que, dans une région donnée, il y a moins de travail, ou à cause de la mobilité de ce travailleur, il y a une restriction quant à sa mobilité personnelle.

Est-ce que vous estimez que cela serait un moyen d'envisager une solution, en vue d'améliorer tout cela, c'est-à-dire qu'il y ait un règlement de classification différent pour ceux qui sont détenteurs de cartes de compétence et un autre règlement pour ceux qui sont considérés comme des journaliers?

M. Pouliot: M. le Président, en ce qui concerne la question du député de Beauce-Sud, je ne pense pas que le fait de reconnaître les certificats de qualification réglerait le problème du contingentement de la main-d'oeuvre. Il y a des milliers et des milliers de certificats de compétence qui sont émis et ces travailleurs n'oeuvrent plus dans l'industrie de la construction. Ils sont dans d'autres secteurs. Si on disait: Tous ces travailleurs ont un droit acquis, on viendrait probablement... Ensuite, il y a des attestations d'expérience qui ont été données à la pelle. C'est l'équivalent d'un certificat de qualification ou de compétence, en vertu de la loi 49. Pour cette raison, on ne peut pas être en accord avec une solution semblable concernant le certificat de qualification, mais qu'on ait un contrôle qui soit un peu plus sérieux concernant l'obtention du certificat de classification. Il faut songer à cela très sérieusement et le contingentement se fera par le truchement de la formation et de la qualification professionnelle, dans un premier temps. Il ne faut jamais sortir — comme vous l'avez mentionné — le fait des travailleurs non spécialisés qui ne détiennent pas de certificats de compétence.

M. Roy: En somme, si j'ai bien compris...

M. Johnson: Est-ce que le député de Beauce-Sud me permettrait d'ajouter quelque chose là-dessus pour qu'on se comprenne bien? C'est bien important, ce que M. Pouliot vient de dire. Il y a eu beaucoup de confusion autour de cette question de la qualification et de la classification. Ce que M. Pouliot dit, et c'est fondamentalement vrai, c'est qu'il y a littéralement des centaines de milliers de travailleurs au Québec, probablement de l'ordre d'à peu près 300 000, entre 250 000 et 300 000, qui ont des certificats de qualification.

Je vais vous donner un exemple. A I'lron Ore, qui est une compagnie où il y a une convention collective, où il y a des gars qui ont négocié des conditions, qui ont une forme de sécurité d'emploi au niveau de l'ancienneté — quand cela ferme, c'est le dernier entré qui sort, etc. — à I'lron Ore, les gars qui sont mécaniciens, qui sont opérateurs de machinerie lourde, charpentiers-menuisiers, ce sont tous des gars qualifiés. Ce que dit M. Pouliot, c'est qu'on ne veut pas que ces gens-là viennent dans la construction, parce qu'ils ont déjà leur industrie.

C'est très important de faire cette distinction et elle n'a pas été suffisamment faite depuis le début de ce débat. C'est à cela que réfèrent la FTQ et la CSN quand elles parlent de contingentement. Je suis d'accord avec ce principe.

M. Roy: La raison pour laquelle j'ai posé des questions là-dessus, c'est parce que cela m'apparaît être le centre même du débat et de nos travaux de la commission parlementaire, puisque toute la question est là. Je voulais avoir l'opinion de nos invités à ce sujet-là.

Le Président (M. Jolivet): Maintenant, le temps...

M. Roy: Le temps est terminé?

Le Président (M. Jolivet): C'est parce qu'au niveau...

M. Pagé: Consentement.

Le Président (M. Jolivet): Oui. C'est parce qu'on a déjà dépassé de dix minutes le temps prévu et il y a deux personnes qui avaient des questions.

M. Roy: J'y reviendrai à d'autres occasions.

Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de problème. Il y aura d'autres possibilités de le faire. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: II y a un point, M. Pouliot, qui me marque beaucoup, qui m'intrigue, qui me chicote, en tout cas, qui fait plus que cela, c'est la priorité d'embauche régionale que vous avez soulignée au niveau de votre exposé. Personnellement, je suis très sensible à cela. Je sais même qu'à Joliette, sur un projet où il n'y avait même pas de travailleurs de la région, la FIPOE a dû venir faire une manifestation pour venir à bout de souligner qu'il y avait des chômeurs de luxe dans mon milieu. M. Pouliot, comment verriez-vous l'établissement de priorités régionales, indépendamment que vous ayez ou non l'exclusivité de placement? Auriez-vous des suggestions à faire pour assurer cette priorité régionale?

M. Poulfot: Ah oui! si on biffe l'article 12.12 du règlement de placement, on vient de régler le problème. Peut-être, pour enchaîner sur votre question, on est d'accord que les compagnies amènent leurs "key-men", comme il est mentionné, les contremaîtres et les surintendants, mais, lorsqu'on parle d'un plombier qui travaille à la construction d'une maison unifamiliale, ce n'est plus tout à fait un "key-man" et on pourrait citer une multitude d'exemples. C'est ce qui existe actuellement. On veut empêcher de se faire accuser que tous les gars de Montréal vont voler les jobs à l'extérieur quand c'est le règlement de placement qui encourage cela, par le biais des entrepreneurs.

M. Chevrette: Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, mes questions ne seront pas longues. Je vais revenir sur la classification A, B, C du décret du mois d'août dernier. Il m'a semblé, en regardant les mémoires de deux centrales syndicales, qu'il n'y a pas tellement d'objections pas plus de la CSN que de la FTQ-Construction sur le critère de 1000 heures par lequel on voudrait cataloguer un véritable travailleur de la construction classé A. Il est indiscutable que c'est peut-être un critère assez facile à atteindre dans les régions urbanisées. Mes collègues des milieux ruraux ont mentionné les difficultés que les travailleurs ruraux auraient de l'atteindre. Quand je constate que, dans Charlevoix actuellement, il y a 52% des effectifs ouvriers qui sont en chômage depuis quatre mois, je me demande lequel pourra se classer A dans cette région.

Ce que je voulais vous demander c'est ceci. Cela regarde forcément les exclusions du champ d'application. Dans un secteur particulier où il y a exclusion, les travaux agricoles, ce sont des opérateurs de machineries lourdes qui, dans le même laps de temps, travaillent normalement à la construction des routes également. Je ne suis pas capable de concevoir — cela a pu être adopté au moment où j'étais membre d'un exécutif — parce que ce n'est quand même pas du "cheap labour", que ces gens-là emploient sur les quelque centaines de milliers d'heures qui se font dans le secteur agricole, ce sont des gens qui, travaillant pour des entrepreneurs d'excavation ou de construction de routes, vont faire, pour chaque entrepreneur, quelques milliers d'heures avec les mêmes opérateurs... je n'ai jamais vu ces gens-là payés moins cher que normalement ils sont payés dans le décret, dans le milieu rural, pour un exemple comme celui-ci, à moins qu'on ne réduise, tel que le suggérait le député de Beauce, le champ d'application, c'est indiscutable que la province ne pourra jamais atteindre ces 1000 heures ou ce sera marginal pour ceux qui les atteindront.

Je voudrais savoir de la part de la FTQ-Construction ce qu'elle pense de l'exclusion de tous les travaux agricoles relativement aux opérateurs de machineries lourdes qui sont exclus. Qu'est-ce que cela donne dans le portrait?

M. Pouliot: Pour ce qui nous concerne, on est entièrement d'accord pour que ce soit régi, qu'il n'y ait pas d'exclusion. On veut avoir le champ d'application le plus large possible.

Des exclusions on en apporte à tous les jours à l'industrie de la construction. Qu'on modifie la Loi sur les relations de travail, on va être d'accord sur cela à 100%; que les exploitations agricoles s'appliquent dans le secteur de la construction, la machinerie de production, et on peut continuer comme cela bien longtemps...

M. Mailloux: Ce que j'ai pu comprendre de l'exclusion qu'on fait de certaines catégories de travaux — par exemple, par la loi 110, on a exclu les réparations dans les hôpitaux et les collèges, c'est qu'on voulait que cela coûte moins cher. Ils ne sont pas soumis au décret de la construction, cela coûte moins cher. Là, on n'épargne pas un cent chez l'agriculteur. Il n'y a pas de "cheap labour", on n'épargne pas un cent. On exclut tous ces travaux qui permettraient quand même à plusieurs centaines d'opérateurs de machinerie lourde de se qualifier si le ministre ne change pas la qualification A aux 1000 heures.

M. Johnson: Est-ce que je pourrais vous poser une question? En d'autres termes, est-ce que vous dites que vous seriez d'accord quand M. Pouliot dit qu'il pense que cela devrait être inclus dans le champ d'application de la loi? Parce qu'il y a une différence entre l'inclusion dans le champ d'application de la loi et le fait de comptabiliser les heures. C'est-à-dire que si on considère que la machinerie de production et les travaux agricoles, on les inclut dans le champ d'application de la loi,

cela veut dire que cela devient de la construction. Est-ce que le monde rural serait d'accord avec cela? Cela veut dire que c'est le décret qui s'applique. Cela veut dire, finalement, que c'est l'ensemble des contraintes...

Une Voix: Ils pourraient prendre un artisan.

M. Johnson: Cela dépend. Il y a celui qu'ils se sont négocié dans le décret, dans le cas de l'opérateur de pépine.

M. Mailloux: Je dirais ceci au ministre: Si le monde agricole — où je vis — est capable de m'assurer, étant donné que c'est en dehors du champ d'application, qu'il sauve quelque chose, je dirais: Ils ont un avantage marqué à rester en dehors du champ d'application. Actuellement, quand je vois, chez mes cultivateurs, des gens qui viennent d'un entrepreneur de route, je n'ai jamais entendu dire qu'ils étaient payés moins cher quand ils font des travaux d'amélioration sur une ferme que quand ils construisent une route, si on suit le décret. Il ne faudrait pas s'imaginer que les cultivateurs sont si bêtes que cela, parce qu'un bon opérateur de machinerie lourde, quand il passe avec son "bull", s'il est bon, il passe une fois ou deux sur un terrain, mais s'il est mauvais, il va passer six ou sept fois et cela va coûter pas mal plus cher au bout de la course. Les gars ne sont pas si bêtes que cela. Est-ce qu'on doit comptabiliser les heures qui ne sont pas comptabilisées? En autant qu'il n'y a pas un coût supplémentaire pour les opérations agricoles, je me demande pourquoi on ne les comptabiliserait pas, et permettre à l'ensemble du rural, où se font quand même les travaux agricoles... J'aimerais bien entendre le monde agricole à ce sujet, mais je n'ai jamais eu l'assurance que cela coûtait moins cher de ne pas comptabiliser les heures et que ce ne soit pas dans le champ d'application du décret.

Il y a une deuxième observation sur laquelle vous avez beaucoup insisté, M. Pouliot. Quand vous avez parlé de l'OCQ et du budget de $3 700 000, comme profane, j'ai compris que cet argent, ce n'étaient pas des subventions gouvernementales, mais que cela venait de la retenue de 0,5% sur la paie des travailleurs, premièrement.

M. Pouliot: Oui, de même que les intérêts de vacances.

M. Mailloux: L'intérêt sur les fonds d'indemnisation. Vous avez fait référence à cet argent. Vous prétendez que s'il y avait des bureaux syndicaux qui s'occupaient du placement en exclusivité, contrairement à la pauvreté des renseignements qui sont fournis aux entrepreneurs et autres et aux travailleurs, cela coûterait beaucoup moins cher par vos moyens que les coûts que vous mentionnez. Est-ce que c'est cela que vous avez voulu dire, en fait?

M. Pouliot: C'est exactement cela que je veux dire, que l'office... Lorsqu'on parle de $3 700 000, ce ne sont pas les chiffres véritables. Il faudrait ajouter des montants d'argent à ces chiffres, parce que les inspecteurs vérificateurs de l'OCQ, il n'y a pas de montant qui leur soit attribué dans les $3 700 000. Lorsqu'un travailleur de l'industrie de la construction paie une cotisation syndicale de $15, $20 ou $25 par mois, c'est un service qu'un syndicat doit lui donner. Cela ne coûterait absolument rien à l'Office de la construction; la question de référence, toute l'informatique et tout le contrôle, on ferait cela dans les locaux affiliés au conseil provincial.

M. Mailloux: M. Pouliot, j'ai deux dernières courtes questions. Je pense que — et j'ai cru déceler la même opinion de la part de la CSN — vous sembleriez d'accord pour que, dans des grandes régions métropolitaines, comme Montréal et Québec, il y ait des sous-régions pour la protection de la main-d'oeuvre régionale. Je pense que vous êtes d'accord là-dessus?

M. Pouliot: C'est cela. (17 h 15)

M. Mailloux: Tantôt, vous avez parlé — je pense que c'est sur le 12.12 — des "key-men" qui voyagent d'une région à l'autre pour les entrepreneurs. En dehors des contremaîtres généraux et des assistants, est-ce que je vous ai bien compris lorsque vous avez dit que si un entrepreneur donné emploie, depuis nombre d'années, sept ou huit opérateurs de machinerie lourde — je fais référence ici à un entrepreneur de routes qui demeurerait à Québec et qui prendrait un contrat dans la région voisine du Lac-Saint-Jean — les six ou sept meilleurs opérateurs de machinerie lourde, dont il connaîtrait les possibilités, il n'y aurait aucune possibilité, d'après vos voeux, qu'il les amène dans la région voisine? Est-ce que ça se limiterait simplement aux contremaîtres généraux, parce que c'est là une contrainte qui, j'en ai l'impression, amènerait des embêtements considérables à l'entrepreneur?

M. Pouliot: M. le Président, il est bien assuré que le conseil des métiers n'a pas l'intention que, chaque fois qu'une route va changer de région, on va changer tous les opérateurs et c'est déjà prévu dans le règlement. Mais ce qu'on veut dire, c'est un chantier comme Saint-Félicien, qu'on y prenne la main-d'oeuvre régionale de A à Z et que l'entrepreneur amène ses "key-men", pour ça, les parties, je pense, sont d'accord là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): Merci. M. Mailloux: Merci.

M. Johnson: Merci, M. Pouliot. M. Bourdon, je pense?

Le Président (M. Jolivet): Avant de passer à la CSN, je vais vous dire deux choses. La première, c'est qu'il a été entendu à cette table et pour les besoins d'inscription au journal des Débats, de ne

prendre aucun repos à six heures et de continuer jusqu'à la fin des rapports des groupes.

Deuxièmement, la CSD demande qu'on inscrive au journal des Débats le dépôt qu'elle fera demain de son mémoire. Il n'y aura personne ici pour faire un compte-rendu.

M. Bourdon.

CSN-Construction

M. Bourdon (Michel): M. le Président, j'aimerais d'abord remercier le ministre et la commission d'avoir accepté d'entendre les parties quant à la discussion du règlement sur le placement.

Nous pensons qu'un règlement, comme une loi, a plus de chance d'être accepté et de ne pas soulever de levée de boucliers quand on se donne la peine d'entendre ceux qui vont vivre avec une loi ou avec un règlement.

Cela fait une dizaine d'années que la CSN-Construction réclame le contingentement de la main-d'oeuvre dans l'industrie, qu'on demande la préférence pour les vrais travailleurs, ce qui semble faire l'objet d'un consensus et entre les parties impliquées dans la construction et entre les diverses formations politiques. On est heureux de voir ce consensus.

On le demande, parce qu'on attribue à l'absence de sécurité d'emploi la violence qui a sévi, à l'occasion, dans l'industrie de la construction. Quand il arrivait de la violence, c'était habituellement des batailles pour avoir les jobs. On pense donc que c'est important de contingenter la main-d'oeuvre.

On pense aussi que le fait qu'avec 6% des travailleurs, on a 25% des morts par accident dans la construction, et que c'est attribuable au fait que les gens font des choses qu'ils savent dangereuses parce qu'ils ont peur de perdre leur emploi. Cependant, c'est une chose de s'entendre sur le principe et c'est plus compliqué quand on en vient aux modalités.

Dans le mémoire que nous avons soumis, ce qu'on fait valoir, c'est de simplifier les certificats qui seraient émis uniquement à ceux qui sont des réguliers de l'industrie. Quant à nous, ça part avec le bassin des A et des B actuels.

Je voudrais ajouter que, dans les A, B et C, c'est aux deux extrêmes qu'on retrouve les plus gros bassins; beaucoup de A, très peu de B et beaucoup de C, d'occasionnels. Il y a beaucoup d'occasionnels, on n'a qu'à regarder les chiffres de 1975. Ils datent un peu, mais ils donnent une idée; ils disent que 42% des travailleurs de la construction tiraient moins de $10 000 par année de la construction, de l'assurance-chômage, d'autres emplois et de tout leur revenu. Ce sont des chiffres de l'Office de la construction et du ministère québécois du Revenu. Or, $10 000, incluant tous les gains faits par des personnes, nous apparaissent en bas du seuil de pauvreté. Cela venait de ce qu'il y avait trop de monde pour se partager un nombre insuffisant d'emplois.

La suggestion qu'on fait donc, c'est de fusionner, en pratique, les A et les B, qui deviennent à ce moment des réguliers. Pour renouveler le certificat de classification assez régulièrement, on ne demanderait qu'une heure faite dans la construction, un peu comme ce que le ministre — je pense qu'il avait raison de le faire — a décidé de faire cette année, par un arrêté en conseil qui dit en somme: "Ceux qui le demandent, voient leur certificat A ou B renouvelé, sauf pour les B qui seraient qualifiés pour être A."

Pour notre part, on l'étendrait plus et je vous dis tout de suite que ce n'est pas une solution idéale, mais, syndicalement, on est habitué, quand on négocie, à protéger les droits acquis et on pense que ce groupe-là a des droits acquis. Les autres deviendraient des réservistes et ils auraient besoin de faire 1000 heures pour accéder au statut de réguliers.

A ce moment-là, on ne léserait pas ceux qui sont déjà en place et qui, c'est notoire, craignaient de perdre leurs certificats qui leur ont amené une plus grande sécurité d'emploi.

Je voudrais ajouter qu'on n'a pas encore les statistiques officielles de l'office, mais qu'il est évident qu'après seulement un nombre limité de mois d'application du règlement, le revenu moyen des travailleurs de la construction, malgré le chômage, a augmenté de plusieurs milliers de dollars, parce que les emplois, même si l'application n'est pas toujours parfaite, ont été vraiment réservés aux vrais travailleurs de la construction.

Je pense que cette évolution peut continuer; si on tient compte qu'il y a certains départs, je pense qu'à ce moment-là, ce qu'on met de l'avant, serait juste et efficace. Je voudrais cependant prévenir les députés que, tant qu'il y aura 330 000 chômeurs au Québec, il y aura toujours dans les bureaux des gens qui, même d'après la nouvelle frontière, ne peuvent pas traverser pour venir prendre des emplois dans la construction.

On a déjà mentionné ceux que nous désignons comme des voleurs d'emplois et, comme le ministre le soulignait, il y en a effectivement de deux natures. Il y a des étudiants, des professeurs et d'autres qui venaient, l'été, chercher surtout des emplois de journaliers dans la construction. On pense qu'ils devraient venir uniquement lorsqu'il n'y en a plus de disponibles dans l'industrie.

Au point de vue des métiers, et cela répond un peu au député de Beauce-Sud, ceux qui venaient chercher des emplois, c'étaient tous ceux, dans le monde industriel, qui ont des cartes de compétence. Cela veut dire les grévistes de la Presse, à un endroit; cela peut vouloir dire les grévistes de I'lron Ore sur la Côte-Nord qui n'étaient pas bienvenus car, pendant leur grève, ils venaient prendre des "jobs" dans la construction; pas parce qu'ils n'étaient pas compétents, ils l'étaient... Les mineurs de Thetford sont allés à la Baie James au nombre de 300, parce que, mineurs pour mineurs, il y a des mineurs à la baie James. Ce que nos gens soutiennent, c'est que les gars de la construction ne vont pas prendre l'emploi d'un mineur d'amiante ou d'un mineur de fer, ou de Marine Industrie ou d'un homme de métier dans un hôpital ou dans une commission scolaire. On s'attend que la réciproque soit vraie.

II y a des gens qui sont habitués à voir la construction comme un endroit où on peut aller s'il n'y a pas d'autres recours. On a reçu, à la CSN, des plaintes de gens d'hôpitaux et de Marine Industrie qui se demandaient si leurs heures dans l'hôpital ou chez Marine Industrie ne pourraient pas compter en vertu du règlement, pour pouvoir revenir si jamais il y avait une mise à pied ou une grève dans leur usine.

La réponse qu'on leur a faite, c'est qu'on ne peut pas tout avoir. Si on a soi-même une sécurité d'emploi dans un hôpital ou dans un chantier maritime, il faut concevoir et admettre que le travailleur de la construction en a une semblable au niveau de son industrie et que ceux qui pourraient venir seraient un appoint.

Quant au champ d'application qui fait l'objet de récriminations, je pense qu'il est urgent que certaines choses soient clarifiées. Mon confrère, M. Pouliot, a parlé des "shutdowns" où il y a un projet publié qui doit aller au conseil consultatif. Nous, nous pensons que c'est urgent que ce soit adopté, parce que ces gens-là sont dans l'insécurité actuellement, parce que ce sont des gens de métiers de la construction et ils se disent que leurs heures ne comptent plus pour le règlement de placement.

Il y a également les chauffeurs d'autobus et les mécaniciens de machinerie lourde à la baie James que des décisions d'Evariste Bernier ont exclus de la construction. C'est un peu particulier, la façon dont ils étaient exclus; ils l'ont été parce que certains avaient été congédiés, qu'on avait posé un grief et que l'employeur invoquait qu'ils n'étaient pas de la construction, pour que le travailleur ne puisse pas obtenir le redressement de son grief. Il reste que le projet que le ministre a déjà publié prévoit que les centrales électriques et la machinerie de production-construction sont incluses. On pense qu'il est urgent que ce soit adopté, car, dans le cas des conducteurs d'autobus à la baie James, depuis que le grief est paralysé par la décision, leurs confrères ont le salaire du décret, ont fait les remises à l'office et on leur dit: "Si jamais vous faites un grief, on va dire que vous n'êtes pas de la construction." Cela nous fait dire dans notre mémoire qu'au moins, en attendant une décision d'Evariste Bernier, le travailleur qui a des droits dans la construction devrait les maintenir pour qu'il n'y ait pas de décision rétroactive.

Pour souligner l'urgence, je voudrais ajouter, que si on syndiquait les conducteurs d'autobus de la baie James, cela pourrait donner un bordel comme dans le domaine scolaire quand les autobus ne marchent pas. Il pourrait y avoir une grève de 110 conducteurs d'autobus, une grève légale, et les 11 000 travailleurs ne pourraient plus être amenés dans les chantiers. La même chose vaut pour les mécaniciens de machinerie lourde, parce que l'Hydro-Québec, Desourdy ou d'autres vous diront que quand l'équipement n'est plus entretenu à cause d'une grève de mécaniciens, le chantier ferme assez rapidement.

Quant aux régions et aux sous-régions, notre proposition, c'est d'avoir 30 sous-régions et une dizaine de régions et d'appliquer la préférence aux travailleurs réguliers de la sous-région, puis aux travailleurs réguliers de l'ensemble de la région, et après, sur une base provinciale. Cela permettrait d'éviter qu'une personne de l'Ile aux Coudres qui veut se bâtir une maison, soit obligée de faire venir un Beauceron qui est un peu loin, alors qu'il aurait, dans le régime actuel, un B disponible. On voudrait éviter que le coût des maisons augmente de $5000 parce qu'il y aurait cette disposition qui n'aurait pas d'allure.

Je voudrais, M. le ministre et M. le Président, insister aussi sur la préférence régionale d'emploi et souligner là-dessus que l'attitude du conseil des métiers est très différente de celle qui a prévalu il y a une douzaine d'années dans la construction, quand il y a eu des luttes épiques autour de la préférence régionale d'emploi. A l'époque, à Hau-terive et à Baie-Comeau, il était question d'une lutte des travailleurs de la région représentés surtout par la CSN contre des travailleurs venant d'autres régions qui voulaient construire une usine. Quant à nous, cela nous apparaîtrait normal dans une période de chômage de dire que l'employeur ne peut amener que ses "key-men" comme réguliers, c'est-à-dire le surintendant et les contremaîtres. Parce qu'en fait, ce n'est pas la faute du travailleur du comté de Papineau ou du travailleur de Hauterive si les gros entrepreneurs sont surtout concentrés à Québec et Montréal, de telle sorte que le régulier qui peut voyager est favorisé indûment par rapport aux travailleurs de la région qui disent: II y a peu d'entrepreneurs d'une taille un peu importante dans ma région de telle sorte que nous ne pouvons pas voyager.

L'autre point qui nous intéresse, ce sont les recours en vertu du règlement de placement qui nous apparaissent insuffisants. Le commissaire au placement et ses adjoints ont fait un travail efficace jusqu'ici, mais je voudrais vous dire qu'ils n'ont juridiction que pour entendre la plainte d'un travailleur à qui l'office a refusé un certificat de classification ou à qui l'office n'a pas émis le bon certificat de classification. Il n'est pas clair qui va arbitrer l'interprétation de nos règlements. Dans les faits, l'office est pris pour à la fois l'appliquer et l'interpréter, et cela peut léser des gens. On pense donc que le commissaire au placement et ses adjoints devraient avoir juridiction pour décider de tous les cas, toutes les plaintes qu'un salarié, un syndicat ou un entrepreneur fait quant à l'application ou à l'interprétation du règlement de placement.

Je vais donner un exemple précis à ma table. Il y a un travailleur dont l'employeur a rapporté à l'office la mise à pied. Normalement, il devait être en disponibilité. C'est un travailleur régulier membre de la CSN qui a beaucoup d'heures d'accumulées, donc normalement il est un des premiers à être référé par l'office. L'ordinateur de l'office pour la 2000e fois ne fonctionne pas, de sorte qu'il n'est pas mis en disponibilité. Il s'en aperçoit quelques mois plus tard et il réclame de l'office, non pas mer et monde, mais de lui reconnaître les

heures qu'il a manqué de faire parce que par la faute de l'office il n'avait pas été mis sur la liste de disponibilité. Je ne dis pas que c'est la faute de l'office, mais c'est ainsi. Il aurait eu des chances de travailler et il connaît des confrères qui ont eu des emplois, parce qu'eux étaient inscrits et lui ne l'était pas. Ce n'était pas sa faute et ce n'était pas celle de son entrepreneur.

Il nous semble que dans un cas comme celui-là, il devrait pouvoir aller voir le commissaire adjoint au placement, faire sa plainte, et avoir une décision qui permettrait au moins que toutes ces heures s'accumulent et, au besoin, qu'une réparation soit faite. Si on prouve qu'il s'est placé 20 personnes qui avaient moins d'heures que lui et que par la faute de l'office, par hypothèse, il n'a pas été placé, je trouve que le salaire pourrait être remboursé. Or, sur ce plan-là, on demande donc que le commissaire au placement et ses adjoints aient le pouvoir de prendre toutes les décisions sur toutes les plaintes, sur l'application du règlement et son interprétation, et que cela se fasse d'une façon assez expéditive.

Là-dessus, MM. les députés, je suis prêt à répondre à vos questions.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre. (17 h 30)

M. Johnson: Merci. J'aurais une question pour M. Bourdon qui a, encore une fois, je pense, fort bien résumé le mémoire de la CSN. Je pense que je n'ai pas à demander à M. Bourdon s'il est d'accord avec les principes contenus dans le règlement de placement, il a démontré qu'il était d'accord, que ça devient une question de modalité, une question d'interprétation. Je connais ses réserves sur la question de l'artisan, j'ai eu l'occasion de les lire. Est-ce que vous êtes en faveur, M. Bourdon, de l'exclusivité de placement syndical?

M. Bourdon: Là-dessus, je tiens à rappeler qu'en 1969, nous avions signé, avec la FTQ, une entente quant à des bureaux de placement syndicaux conjoints. Cette position vaut encore. Je voudrais cependant ajouter que si on acceptait une formule de ce genre, il faudrait nécessairement que ce soit conjoint, sinon, s'il n'y a que les agences syndicales de placement qui peuvent placer, chacun séparément, on peut craindre des affrontements, parce qu'il y aurait concurrence pour ne placer que ses propres membres.

Au niveau financier, je ne pense pas que ça permettrait une économie, parce que je ne crois pas que ça coûte moins cher de tenir un registre central par informatique pour deux ou trois centrales ensemble, que ça ne peut en coûter à l'Office de la construction. Je pense qu'il faudrait également des garanties que le placement se fait d'une façon honnête, efficace et non discriminatoire. Si ce n'est pas le cas, je trouve absolument essentiel que l'office fasse de la référence de main-d'oeuvre, parce qu'on ne peut pas, d'une part, dire aux employeurs: Vous n'avez le droit d'engager que des A, après, des B, peu importe. Quand l'employeur a rappelé ceux qu'il connaît qui sont A — c'est un exemple — ou qu'il a appelé au bureau de placement, il faut que quelqu'un lui dise qui est disponible, parce qu'autrement, il ne peut pas respecter le règlement.

Je voudrais ajouter que le ministre dit, avec raison, que dans certains cas, comme celui de la CSN-Construction, nous faisons beaucoup plus de placement auprès des employeurs depuis que le règlement est en vigueur, pour un certain nombre de raisons. La première, c'est que chez les journaliers, les employeurs embauchaient n'importe quel nouveau et maintenant, ils ont tendance à appeler soit à l'office, soit au bureau de placement syndical pour embaucher des gens. Chez les menuisiers, c'est la même réalité. Je voudrais rappeler que les bureaux de placement syndicaux n'ont jamais placé plus de 20% à 25% de tous les travailleurs de la construction, de telle sorte que le travailleur, au niveau du service, est mieux servi, malgré les lacunes, par la référence de l'office, que les centrales pouvaient le servir, parce que cela a toujours été une minorité qui a été placée par les bureaux de placement syndicaux.

M. Johnson: Cela va aller, peut-être qu'on y reviendra tantôt.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. Bourdon, une question à laquelle vous venez de répondre au ministre du Travail. J'ai cru comprendre que vous n'étiez pas d'accord avec le Conseil des métiers de la construction quant à l'exclusivité des bureaux de placement, principalement parce que vous n'avez pas l'assurance que le partage se ferait à l'égalité des forces que vous représentez. Si, par contre, la CSD, vous-même et la FTQ représentez chaque fois 33% des ouvriers de la construction, vous seriez placés dans une autre position que celle que vous connaissez maintenant; c'est à peu près ça qu'est le fond...

M. Bourdon: Non, M. le député. Je pense que le placement est une prérogative syndicale. Les travailleurs peuvent s'attendre que leur organisation syndicale les place, qu'elle connaisse leurs besoins et qu'elle le fasse avec justice. Ce que j'ai dit, c'est que si on parle d'un placement fait exclusivement par les centrales, je pense que ça devrait être fait conjointement. Si c'était possible, on est en principe d'accord pour le faire; il ne faut pas cacher que ça donnerait plus de force aux organisations syndicales. On n'est pas contre le fait d'avoir plus de force pour pouvoir mieux représenter nos membres.

Dans le contexte actuel, cela m'apparaîtrait difficile d'application. Si le législateur ne se rend pas à cette demande, je trouve qu'il est essentiel que l'office fasse de la référence de main-d'oeuvre, parce qu'autrement, on ne peut pas appliquer un règlement de placement.

M. Mailloux: M. Bourdon, je voudrais faire référence à la loi 110. On a beaucoup parlé, dans votre propos tantôt, comme dans celui de M.

Pouliot de la FTQ-Construction, de la sécurité d'emploi que désirent vos membres, ce qui est logique, par le biais de contingentement. Vous vous êtes déclarés d'accord avec la reconnaissance de véritables travailleurs de la construction que vous situez principalement chez les A et les B. En vous écoutant tantôt, vous avez mentionné que les deux groupes les plus importants dans les catégories A, B et C étaient les catégories A et C et que la catégorie B était quand même moindre.

La question que je veux vous poser est la suivante. Je sais que vous êtes un peu en désaccord avec la loi 110 par rapport au problème artisan. Tantôt, quand on nous envoie toujours dans le portrait les 278 000 gens qui seraient dans la construction, vous avez dit vous-même que ces gens, compte tenu dans le passé des cartes de qualification, aujourd'hui, on en retrouve des milliers qui travaillent pour l'industrie privée et que, à un moment donné, veulent revenir, qu'ils apparaissent toujours sur ces listes. J'imagine que ceux-là, par le règlement de placement voté en août, qui les oblige à avoir fait tant d'heures par année, vont disparaître à un moment donné de cette liste de 278 000.

Ce que je veux vous demander, c'est ceci: On va forcément, par le projet de loi 110, pour ce groupe important qu'est la catégorie C, qui ne sont pas des employés de Donohue Brothers, d'une compagnie minière ou autre, en faire quand même un autre groupe de travailleurs de la construction qui vont vouloir sauver leur gagne-pain.

Vous dites que le groupe est extrêmement important. Le ministre pourra peut-être m'éclairer. Il leur faut aller demander une licence aux entrepreneurs en construction, prouver leurs qualifications et ils peuvent obtenir une licence qui leur permettra de travailler pour un consommateur, sans être soumis au décret de la construction, ou, pour un employeur professionnel, soumis au décret.

Dans mon esprit — c'est pour cela que je voudrais avoir votre commentaire — en adoptant la loi 110 et en permettant une telle liberté de manoeuvre aux artisans de la classe C, on n'a pas réglé le problème du contingentement et on n'a pas réglé le problème de la sécurité d'emploi. J'ai l'impression qu'on l'a même amplifié. Je vois mal des gens qui n'ont fait que 400 ou 450 heures et qui ont quand même un certificat de qualification se retrouver demain matin, alors qu'on manque déjà d'ouvrage ailleurs, à tenter d'obtenir un certificat de qualification leur permettant d'agir comme artisans.

Ne croyez-vous pas que si le projet de loi 110 reste tel qu'il est actuellement, avec tous les pouvoirs dont ils vont disposer de se placer, et de se placer même en "cheap labour", le problème, au lieu de s'améliorer, est aggravé et de beaucoup?

M. Bourdon: La loi 110 sur l'artisan traite de deux cas. Il y a d'abord l'artisan, pour simplifier, qui travaille pour un consommateur. On a eu l'occasion de dire qu'on était d'accord pour que celui-là ne soit pas réglementé, le polissage de cela étant, de toute façon, extrêmement difficile.

On était contre l'idée même qu'un entrepreneur puisse embaucher un artisan. On disait: II ne devrait embaucher qu'un salarié. C'était notre objection principale à la loi 110, ce qui nous faisait dire qu'elle pouvait saborder le règlement de placement, puisque cela devenait optionnel, soit un certificat de classification et, si tu ne peux pas l'avoir, une licence d'artisan.

Le député de Joliette-Montcalm a fait savoir que, dans le règlement de placement, il y aurait une disposition à savoir que l'artisan ne pourrait travailler pour un entrepreneur que lorsque les gens classifiés en vertu du règlement de placement, il n'y en aurait plus de disponibles.

A cet égard, on pense, quant à nous, que cela nous enlèverait au moins notre inquiétude que des artisans entrent sur les chantiers, à défaut de ne pas pouvoir y entrer, en vertu du règlement de placement.

Cela ne règle pas la question totalement. Il y aurait des artisans et on a une opposition de principe à ce que quelqu'un ne soit pas salarié sur un chantier. Mais je pense que cela serait de nature à rassurer nos membres, à qui on dirait qu'à ce moment-là, l'artisan ne pourrait pas passer par une petite porte, parce qu'il n'y est pas passé en vertu du règlement de placement.

M. Johnson: Si le député de Charlevoix le permet, je voudrais simplement ajouter ceci. Vous connaissez l'expression "Ce n'est qu'un début, continuons le combat" qui, autour de l'artisan, est devenue rapidement "Ce n'est qu'un confus, continuons le débat". En fait, j'ai eu l'occasion de déposer en Chambre, au moment de l'étude du rapport de la commission, un amendement prévoyant que l'office peut effectivement soumettre les artisans au règlement de placement.

La raison pour laquelle on dit "peut", c'est qu'on verra, dans la réalité, ce qui se passe. Malgré cela, et oublions que cette disposition existe, l'argumentation que j'avais développée et que je pourrais peut-être rendre disponible — j'ai fait un petit syllabus de quatre pages là-dessus, destiné à ceux qui sont intéressés au problème — c'est qu'on pense qu'en pratique, on ne voit pas une quantité considérable d'artisans devoir être créée, à cause d'abord de ce qu'on lui impose comme contrat, ce qui est plus que ce qui existe aujourd'hui et, deuxièmement, à cause du phénomène central, dans le cas de l'artisan, qui était l'incitation pour l'employeur. J'ai eu l'occasion de le vérifier récemment.

Evidemment, on parle de Montréal. A l'Association de la construction de Montréal, les emloyeurs membres de l'ACM ne sont pas particulièrement enchantés de cela, parce qu'ils savent très bien que leur incitation à embaucher des artisans sera moindre; ils seront obligés de les payer au taux de décret. Au départ, je pense que cela va empêcher, a priori, cette marée qu'on prévoyait. On dit: Nonobstant tout cela, malgré tout cela,

même en admettant les balises qu'on met autour de l'artisan, en mettant un poids sur l'employeur qui voudrait les utiliser, parce que son incitation était qu'il coupait les prix en le faisant, on prévoit que, s'il devait y avoir un problème dans X mois, le temps de mettre en vigueur les articles de la loi et de commencer à décerner les licences, on pourrait, à ce moment-là, décider de soumettre l'artisan au règlement de placement. Il pourrait être soumis, en toute logique, dans un cadre de placement sous-régional. L'exemple que je donnerais d'une des hypothèses, c'est que le comté de Charlevoix, par exemple, pourrait être une sous-région de la région de Québec et même l'île aux Coudres, en tant qu'endroit isolé, non relié par la terre comme les Iles-de-la-Madeleine et comme les villes de la Basse-Côte-Nord, pourraient bénéficier d'un régime particulier qui prévoirait, dans l'ordre, les A sous-régionaux ou insulaires, les B sous-régionaux ou insulaires et éventuellement les artisans, si jamais cela devait se poser en ces termes-là.

Or, en pratique, je pense qu'il y a là toutes les balises nécessaires pour empêcher le raz de marée qui était prévu et qui, à mon avis, ne demeure pas prévu; mais, si jamais cela devait arriver, il y a les balises nécessaires pour contrôler cela.

M. Mailloux: M. le Président, pour éclairer ma lanterne, je voudrais, si le ministre le permet, lui poser une question. Je devrais le savoir comme législateur...

M. Johnson: Oui.

M. Mailloux: ... ou cela a passé en dehors de ma compréhension. Quant à la licence que pourra obtenir un artisan, dans les balises qui seront placées, les individus détenant des cartes de qualification, travaillant à l'année aujourd'hui pour une industrie donnée pourraient-ils se présenter et obtenir une carte de qualification leur permettant d'exercer le métier d'artisan?

M. Johnson: Oui, dans la...

M. Mailloux: A ce moment-là, on verrait quantité de gens, par dizaines de milliers à ce que j'ai entendu tantôt, qui pourraient se présenter, demander la licence et continuer d'occuper un secteur du travail déjà trop achalandé.

M. Johnson: C'est cela. Ma réponse à cela, c'est que ce n'est pas différent de la situation actuelle.

M. Mailloux: D'accord.

M. Johnson: On se comprend là-dessus. Deuxièmement, les obligations additionnelles qu'on lui impose, c'est également des choses comme le code de sécurité dans la construction, c'est la capacité de démontrer que l'ensemble des éléments sur le plan administratif lui permet effectivement d'être considéré comme un entrepreneur autonome.

Troisièmement, c'est l'obligation de fournir un cautionnement.

Si on additionne tout cela ensemble, on se demande pourquoi un travailleur de I'lron Ore, qui est un charpentier menuisier qui s'occupe d'entretien dans l'usine, aurait intérêt, à moins vraiment qu'il le fasse à un coût qui soit prohibitif en termes de temps, d'exigences et d'argent, à vouloir se déclarer artisan dans ces circonstances-là. Cela demeure une possibilité théorique, mais, encore une fois, je pense que l'expérience des cinq ou six dernières années démontre qu'il n'y en a pas tant que cela.

M. Mailloux: Le ministre ne croit-il pas que dans les balises à mettre en place, il serait important, malgré ce que cela peut coûter de temps, de cautionnement, etc., qu'une personne dont on pourrait prouver qu'elle a un emploi permanent, ne puisse solliciter un tel permis d'artisan? Est-ce que cela ne serait pas possible qu'une telle balise soit placée, pour un travailleur qui est sorti de la construction? La porte reste large ouverte.

M. Johnson: Je ne pourrais pas répondre. Je ne voudrais pas donner une opinion juridique, mais au niveau réglementaire, je ne pourrais pas dire. Ce n'est peut-être pas impossible, effectivement, de prévoir des critères qui reviendraient à cela au niveau du résultat. Je ne pense pas qu'on puisse l'exprimer en termes de quelqu'un qui travaille ailleurs. Je vois tout de suite la Commission des droits de la personne et tous les autres se mettre à le contester, que je sache, cela n'existe pas dans nos lois, ce type de contrainte qu'on peut imposer aux gens. Il n'y a pas de loi dans notre société qui interdit à quelqu'un de travailler à deux places. On peut arriver au même résultat et viser les mêmes critères. (17 h 45)

M. Mailloux: Je voudrais poser une question supplémentaire au ministre. Quand il dit qu'il n'y a pas trop de danger, je vois quand même des gens qui ont travaillé, dans le passé, dans les métiers de la construction, et quand le secteur est devenu trop chargé, ils sont entrés dans le secteur hospitalier, où ils travaillent 25 ou 27 heures par semaine, ou à peu près. Je pense que les gens les plus aptes à prendre une protection supplémentaire en cas de grève ou n'importe quoi sont ceux-là. Ce ne sont pas tous des gens qui travaillent de 40 à 45 heures par semaine, qui sont surchargés. Souventefois, cela va être un gars qui travaille dans le réseau public ou parapublic, et les heures ne sont pas très longues. Il y a une possibilité d'occuper deux emplois à la fois. S'il n'y a pas de balises qui sont posées, on en verra qui auront deux emplois très souvent. C'était une suggestion que je voulais faire au ministre. Libre à lui de...

M. Bourdon: M. le Président, ce que je voulais ajouter là-dessus, c'est que quant à nous, il s'agit de savoir si les dispositions de 110 sur les artisans

peuvent constituer une échappatoire au règlement sur le placement. Quant à nous, si on n'ajoute pas dans le règlement de placement, que l'artisan passe après ceux qui sont classifiés et de façon absolue, non pas par sous-région ni par région, dans toute l'industrie, on peut permettre à des gens qui ne sont pas de la construction, de venir prendre un emploi à la place d'un vrai travailleur régulier de la construction.

Je pense que le député de Charlevoix a raison. Cela permettrait à un employé d'hôpital qui travaille le soir, de travailler également le jour dans la construction. Je ne fais pas le débat à savoir pourquoi les gens ont deux emplois. Cela pose des problèmes. On est dans une société libre où les gens peuvent décider d'avoir deux emplois. Je trouve qu'il y a un de ces deux emplois qu'il volerait à un travailleur de la construction, et il n'admettrait pas qu'un travailleur de la construction prenne un deuxième emploi dans l'hôpital à sa place. Maintenant, si le ministre a raison et qu'en pratique, cela ne se posait pas, il ne devrait pas y avoir d'objection à le mettre dans le règlement de placement. Si personne ne veut faire cela, on l'a interdit, et, comme personne ne veut le faire, personne ne va protester. Si cela allait par sous-région, cela veut dire qu'on épuise le bassin de Charlevoix, par hypothèse, parce qu'il y a des gros travaux, et qu'il peut entrer des artisans à la poche, à la condition de connaître le code de sécurité, d'avoir la carte de compétence, d'aller chercher le permis. Avec les taux qui sont pratiqués dans la construction et dont ils bénéficieraient, j'imagine que dans une situation comme celle-là, il y a des gens qui se donneraient la peine de faire toutes les démarches pour venir chercher un emploi auquel, d'après nous, ils n'ont pas droit. C'est pour cela que d'après notre thèse, le règlement de placement devrait dire clairement qu'un artisan ne peut pas être embauché s'il y a de la main-d'oeuvre disponible, en vertu du règlement de placement.

J'ajoute que l'autre danger, si ça se multipliait — si on a tort, on a tort pour rien, mettons-le dans le règlement de placement — c'est que, comme les artisans oeuvreraient en dehors du cadre de la loi, sauf pour avoir un permis de la régie et être payés comme un entrepreneur au taux — bien que, qui pourrait l'appliquer, ça n'est pas parfaitement clair — on créerait un monde à part dans la construction. Ce seraient des gens qui auraient naturellement tendance à se regrouper pour défendre leurs intérêts et là, on pourrait voir des situations où toutes les lois de la construction pourraient être violées impunément par des gens qui diraient: Moi, je regroupe des artisans sur une base volontaire, pour défendre leurs intérêts et j'ai bien le droit de les aider à défendre leurs intérêts. Je pense que ça ouvrirait la porte à des abus.

Le ministre a peut-être raison et nous avons peut-être tort; peut-être cela n'arrivera-t-il pas, mais on pense que la loi le permet; alors pourquoi ne pas se servir de la disposition de la loi qui dit que le règlement de placement peut les couvrir et mettre tout de suite que les dispositions sur les artisans ne peuvent pas être un moyen de contre- venir, par la porte d'en arrière, au règlement sur le placement.

M. Mailloux: M. Bourdon.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de... Je m'excuse.

M. Mailloux: Ce ne sera pas long. M. Bourdon, je comprends que la philosophie qui vous anime, c'est que l'artisan doit être limité, dans votre sens, simplement à des travaux pour des consommateurs, point.

M. Bourdon: Je pense que dans la population au sens commun du terme, on perçoit l'artisan comme un menuisier qui travaille seul et qui offre à quelqu'un de finir son sous-sol à certaines conditions. C'est un secteur où, pour être franc, il n'y a jamais eu de contrôle et s'il y en avait, ce seraient des contrôles coûteux à tous les égards, parce que, à la rigueur, il faudrait entrer dans les maisons pour savoir si on y fait de la peinture. Là, on était prêt à concéder que l'artisan pourrait oeuvrer sur un marché libre, pour un consommateur, disons, pour rénover son domicile.

On pense que quand on travaille pour un entrepreneur, on est un salarié et qu'on ne devrait pas pouvoir se faire payer en argent comptant pour ne pas payer d'impôt, seulement faire un rapport à l'office, etc. Sans compter qu'il y a une difficulté supplémentaire, c'est que l'artisan en question profiterait des avantages sociaux de la construction et il y a déjà des abus d'artisans qui ne déclarent que les heures nécessaires pour avoir droit à l'assurance-salaire et qui touchent l'assurance-salaire. Là, ça pourrait se généraliser et même le ministre des Finances pourrait trouver ça inquiétant, parce que, dans notre société, on sait que ce qui assure les rentrées de fonds au ministère des Finances ou du Revenu, c'est quelque chose qui s'appelle le talon de chèque ou le TP-4, c'est ce qui nous force à payer. On pense que l'entrée de l'artisan doit être payée au taux du décret. Je veux bien — bien qu'on ne sache pas qui pourrait appliquer ça et que les bases juridiques de l'application soient fragiles — mais en plus, il pourrait se faire payer au taux du décret en argent comptant et ça serait une incitation supplémentaire à être artisan. On dirait au gars: Prends-toi un permis, je vais te donner $440 par semaine en "cold cash". L'office ne pourrait pas se plaindre de ça, il serait payé au taux du décret. Mais le gars, à côté, qui paie pas mal d'impôt, dirait: Là, c'est plutôt "intéressant".

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Très brièvement, d'abord je dois vous dire que j'ai aimé l'objectivité de l'ensemble du rapport présenté par M. Bourdon.

Maintenant, lorsqu'on dit: 80% des travailleurs sont satisfaits; je me demandais si les 20% d'insatisfaits n'étaient pas tous sur la rive sud.

M. Bourdon: Peut-être craignent-ils de perdre leur certificat, mais on veut leur enlever cette crainte.

M. Goulet: Je voudrais vous demander, au niveau des priorités d'embauche, vous faites des suggestions. Est-ce que vous seriez d'accord qu'on donne la priorité d'abord aux A, sous-régions, aux B, sous-régions, avant les A régionaux? Seriez-vous d'accord avec ça?

M. Bourdon: Evidemment, dans notre système, on met réguliers et réservistes au lieu de A et B. Supposons que c'est A, B et C. On pense que, dans une sous-région, on devrait engager les A, ensuite les B de la sous-région, et, s'il n'y en a plus, les A de la région. C'est un phénomène qui n'est pas massif en termes de nombre, mais qui a frappé des gens parce qu'une personne de Gran-by, par exemple, disait qu'au lieu d'engager un B de Granby, elle est obligée d'engager un A de la région de Montréal et que la région de Montréal allait jusqu'à Mont-Laurier. Est-ce possible? Cela n'a aucun sens, disait-elle.

Je pense que cela n'enlèverait pas de protection aux vrais travailleurs de la construction. On dirait: On épuise le bassin de la sous-région, ensuite de la région et, ensuite, on va n'importe où.

M. Goulet: D'accord! Au niveau des sous-régions, dans votre mémoire... Dans le cas qui touche le comté que je représente, la sous-région 12, vous ne trouvez pas qu'encore là, elle est extrêmement grande et étendue? Je me demande si, dans ces sous-régions, au niveau des comtés ruraux où la population est à faible densité, il n'y aurait pas lieu, comme l'a mentionné le ministre tout à l'heure en parlant de l'île aux Coudres ou des Iles-de-la-Madeleine, encore là, d'avoir des sous-sous-régions. Je ne vous dis pas que j'ai la formule, mais je trouve que les régions chez nous, par exemple la sous-région 12, dans votre cas, ce que vous suggérez, c'est à peu près ce que nous avons actuellement, c'est-à-dire environ 100 milles de distance. Je trouve cela un peu trop étendu. Je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter là-dessus? J'aimerais avoir votre opinion.

M. Bourbon: On a proposé les sous-régions du décret parce qu'au cours des ans, ce sont des territoires qui ont été définis par des parties et qui correspondaient à un milieu naturel. Je pense que si on se restreignait davantage, à un moment donné, on pourrait avoir des ordres de problèmes inverses. Les gens de la sous-région diraient: Elle est tellement petite, la nôtre, qu'on n'a pas tellement de sphère d'activité pour avoir la chance de travailler. Mais on s'est servi des sous-régions du décret parce qu'on les connaît bien et qu'elles ont déjà été définies et négociées par les parties de la construction comme correspondant à un milieu naturel.

M. Goulet: Vous ne croyez pas qu'il y aurait accès quand même... Parce que si la sous-région était plus petite encore, s'il n'y avait plus de A ou de B dans la sous-région, les travailleurs ne seraient pas pénalisés, car, à ce moment-là, on irait à la région. Cela pourrait répondre aux appréhensions que vous avez.

M. Bourbon: Ils seraient pénalisés. Prenons le cas de Portneuf, qui est une sous-région. Le centre économique le plus important est la ville de Québec. On dit qu'il y a d'abord la préférence à la sous-région de Portneuf, mais la ville de Québec aussi est une sous-région. Si on va à encore plus petit que cela comme territoire, les gens du territoire plus petit vont être pénalisés parce que les gens de la ville de Québec vont toujours et constamment avoir la préférence dans leur sous-région.

Il faut retenir que dans la construction, il y a une proportion importante de travailleurs qui oeuvrent dans plus d'une région dans une année. Alors, vous avez raison, sous-régions, régions, comme c'est proposé, cela protège les gens jusqu'à un certain point. Mais je pense que, si on fragmente davantage, il y a des régions périphériques aux gros centres économiques que sont Québec et Montréal qui seraient pénalisées. Pour vous donner un exemple, le menuisier de Portneuf dirait: Mon tour ne vient jamais, c'est toujours la sous-région de la ville de Québec qui est embauchée, les A et les B, et mon tour ne vient jamais. Je pense qu'il faut étudier soigneureusement les mouvements de main-d'oeuvre, mais je pense que le travailleur va toujours beaucoup plus naturellement, ceux d'en dehors viennent travailler chez eux beaucoup plus que ceux de chez eux vont travailler en dehors. Il faut regarder les chiffres avant de se prononcer sur cela.

M. Pagé: M. Bourdon, si vous permettez, si mon collègue...

M. Goulet: Certainement, M. le Président. J'aurai une dernière question.

M. Pagé: Ce que M. Bourdon met en relief, c'est vraiment le cas. Il est possible que, dans certains cas, des députés demandent que l'application de ce règlement soit ramenée à des proportions plus petites au niveau des sous-régions. Cela dépend du volume des travaux à l'intérieur de la sous-région. L'exemple que vous donnez, l'exemple de Portneuf, qui est à côté, qui est mon comté, qui est à côté de Québec, tout près de Québec, reflète très bien le problème. C'est évident que, pour les gens de Portneuf, ce serait peut-être plus intéressant qu'on ait une sous-région au niveau du comté, purement et simplement, mais en autant qu'il y ait des travaux. Le jour qu'il n'y aura plus de travaux, qu'il n'y aura plus d'ouvrage, je ne suis pas convaincu que les gars seront satisfaits de ne pas pouvoir aller travailler à Québec. Cela va se présenter dans plusieurs comtés du Québec. Je conviens que, dans le moment, le rythme de croissance et de développement économique va

assez bien; ce n'est pas à cause du PQ, c'est à cause de l'initiative du député, mais c'est une autre affaire. C'était pour ajouter aux commentaires de mon collègue de Bellechasse. Ils sont encore sous le souffle des projets amorcés par les libéraux, vous savez, en 1974.

M. Bourdon: M. le député, vous avez raison. Les gens ont naturellement tendance, quand il y a un chantier important dans une région, à dire: On devrait avoir tout l'emploi dans cette région-ci et pas la grosse ville d'à côté. Mais, une fois le chantier fini, si c'est à Québec qu'il se fait trois hôtels, ils disent: Ecoutez, on est pénalisé. Cela s'est vécu entre autres à Beauharnois. Dans un premier temps, les gens disaient: La sous-région de Beauharnois d'abord. Il y avait des chantiers industriels importants. Quand il n'y en a plus eu, ils ont dit au député: On va te casser la gueule si tu ne nous mets pas dans la région de Montréal où il y a de l'ouvrage. Je pense qu'on peut mettre les sous-régions pour que ce soit plus proche du milieu naturel des gens, mais il faut retenir que, tant qu'on ne stabilisera pas l'emploi dans la construction, les gens vont avoir tendance à se former des règles et des principes selon qu'on leur donne une "job" à côté. Je voudrais ajouter qu'au Lac-Saint-Jean, j'ai vu des signes très encourageants de l'application du règlement de placement, parce que, cet automne, à cause de l'ALCAN et d'autres travaux, il y avait le plein emploi dans la construction au Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Il y a des employeurs du Saguenay-Lac-Saint-Jean qui ont fait le calcul intelligent que s'ils travaillaient à l'année sur leur chantier et s'ils mettaient leur chantier en force tout le temps, ils n'auraient jamais de pension à payer à des gens de l'extérieur, parce qu'ils ne compteraient que sur la main-d'oeuvre régionale. Je vous mentionnerai le cas de Euclide Perron, et celui de Laval Fortin; ils se sont mis à faire ça. Ils se sont dit: on va avoir la meilleure main-d'oeuvre, parce qu'on va leur offrir de l'emploi 10, 11 mois par année.

Ce genre de calcul, relié au comité interministériel qui est censé planifier les investissements du gouvernement dans la construction, je pense que ça ferait plus pour la paix d'esprit des députés, que d'avoir un contingentement de la main-d'oeuvre, mais des cycles inégaux de développement. Quand on est dans le creux du créneau, il y a toujours des gens qui vont dire: Elargissez que je puisse travailler quand même. Je pense que c'est très important. Par exemple, ça suppose au niveau gouvernemental, qu'actuellement, il ne serait pas indiqué de faire des travaux gouvernementaux d'importance au Lac-Saint-Jean, pour deux raisons, c'est de la main-d'oeuvre d'autres régions qui irait le chercher et la pension, ça coûte assez cher.

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse...

M. Pagé: Vous enverrez une petite note au ministre de la Justice et au ministre des Transports.

M. Chevrette: On va aller voter, mais j'aurais une suggestion...

M. Bourdon: II est très préoccupé par ce sujet, parce qu'un ministre, comme un député, aime toujours mieux que ses électeurs travaillent que ceux des autres.

M. Chevrette: J'aurais une suggestion à faire à l'Opposition, c'est une consultation pour revenir après le vote et passer au moins l'AECQ ce soir. Finir avec la CSN, s'il y a d'autres questions et passer à l'AECQ.

M. Bourdon: Pourquoi nous finir, M. le député?

M. Pagé: II n'a pas dit, vous rachever, il a dit, vous finir.

M. Chevrette: Finir l'interrogatoire.

Le Président (M. Jolivet): Donc, nous reviendrons après le vote.

M. Chevrette: J'aurais utilisé l'expression, vous achever.

Le Président (M. Jolivet): La commission suspend ses travaux jusqu'après le vote.

Suspension de la séance à 18 heures

Reprise de la séance à 18 h 21

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, messieurs!

La parole était au député de Bellechasse. Il a encore...

M. Goulet: J'aurais encore deux courtes dernières questions à M. Bourdon. Dans votre mémoire, vous suggérez, à un moment donné, que tous les apprentis passent avant les finissants. C'est bien cela? J'ai vu cela dans votre mémoire.

M. Bourdon: Ce qu'on dit, c'est que le règlement actuel permet à un finissant d'entrer, d'une façon préférentielle, dans l'industrie. Nous, on représente des journaliers qui, pour avoir plus de sécurité d'emploi et un meilleur salaire, sont intéressés à devenir apprentis. On dit que la priorité, pour devenir apprenti, devrait être donnée d'abord aux travailleurs qui sont déjà dans la construction.

M. Goulet: D'accord. Qu'est-ce que vous pensez d'un vrai travailleur de la construction qui, à un moment donné, pour deux ou trois étés, se trouve un emploi pour un ministère quelconque — je vais prendre un exemple concret — pour aller construire un camp, pour le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Etant

donné sa compétence, on l'embauche. Cela veut dire qu'il ne pourra à peu près jamais revenir à la construction, comme un vrai travailleur de la construction. Je ne parle pas d'un menuisier qui s'en irait travailler, par exemple pour la compagnie X, Y ou Z pendant deux ans, faire de la menuiserie et qui, par la suite, voudrait revenir dans la construction. Je parle d'un employé occasionnel. Qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là?

M. Bourdon: Je pense que cela revient aussi à ce que le député de Charlevoix disait des travaux agricoles qui sont faits, généralement, à des salaires semblables à ceux de la construction, puisque ce sont des gens qui chevauchent, qui sont compétents et que l'employeur sait qu'ils ne travailleraient pas à des conditions moindres.

Il y a le service de la voirie aussi qui fait des travaux de construction avec des gars de la construction. Notre tendance à nous c'est de dire que si on veut avoir les avantages de la loi et du décret de la construction, il faut aussi en prendre les obligations et, donc, c'est le champ d'application que je trouve mis en cause.

Et la tendance historique du gouvernement en tant qu'employeur, parce qu'il paie la note dans la construction, est d'une proportion qui, ces années-ci, est presque majoritaire. Cela a été de dire: Comme je suis à la fois législateur et employeur, je vais imposer des choses à tous les entrepreneurs, gros, moyens ou petits. Mais moi, je ne les paierai pas. On a des exemples de cela: le temps supplémentaire pour les routes et les grands travaux, comme la baie James, c'est après 50 heures. C'est le gouvernement qui paie.

Au niveau du champ d'application, j'ai l'impression qu'il y a la même tendance. Je vous donne raison là-dessus. Le gars dit: Je suis un gars de la construction, je suis menuisier. Je faisais des camps dans un parc cet été. Expliquez-moi pourquoi mes heures ne compteraient pas et que je ne serais pas payé au taux du décret? Faire un camp sur le bord d'un lac pour un entrepreneur ou faire un camp pour le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche...

Notre orientation, c'est de dire: Regardons de près le champ d'application. Et si, dans le cas des travaux agricoles, par exemple, cela ne coûte même pas moins cher de ne pas l'assujettir au décret et à la Loi de la construction, il faudrait l'assujettir. J'aurais le même type de réflexe, parce que, autrement, la réaction des travailleurs dans les assemblées, c'est de dire: Lui, s'il a travaillé et qu'il n'était pas dans le décret, qu'il ne payait pas de cotisation, qu'il n'était pas soumis aux règles, ses heures ne compteraient pas. C'est un peu comme si Marine Industrie avait une filiale non syndiquée et que quelqu'un disait: Est-ce que l'ancienneté de la filiale non syndiquée de Marine Industrie pourrait compter pour son chantier syndiqué de Sorel? Les gens diraient: S'ils veulent être syndiqués, ils vont être syndiqués.

Mais je pense qu'il y a eu historiquement une tendance du gouvernement à imposer à des petits entrepreneurs, par exemple, des règles, et lui, le plus gros entrepreneur, il dit: Moi, je mets la semaine à 50 heures pour les routes. Quand je fais des camps, ce n'est pas de la construction, parce que tel est mon bon plaisir. Il dit à sa régie gouvernementale, l'office: Si tu prends un petit entrepreneur qui le fait, par exemple, poursuis-le, mais la reine ne peut pas être poursuivie. Elle fait les règles pour les autres, mais elle n'y est pas assujettie.

M. Goulet: D'accord. Une dernière question. Que suggérez-vous à un travailleur de classe A qui n'a pas de travail dans sa région, ni dans sa sous-région et qui, à un moment donné, trouve quelque chose dans une autre région, à Montréal, par exemple? Quand revient-il dans sa région? Quand a-t-il priorité dans sa région? A-t-il la priorité n'importe quand quand, à un moment donné, il change de région? S'il est pour deux ans dans une autre région, demeure-t-il toujours à sa première région ou, à un moment donné, appartient-il à une deuxième? Quand a-t-il la priorité dans sa région?

M. Bourdon: Dans l'application, M. le député, il y a déjà un problème de tricherie sur le vrai lieu de résidence des gens. Des gens qui travaillent à Saint-Félicien et qui ont comme adresse le terrain de camping de Saint-Félicien, je ne pense pas qu'ils aient feu et lieu, comme on le dit, avec leur famille à Saint-Félicien. Là-dessus, je pense que l'application n'est pas assez stricte. Vous avez raison, si un travailleur de la construction de votre comté n'a plus de travail dans le comté, il est mis en disponibilité et il travaille à Montréal. Je crois qu'il est possible — ce n'est pas écrit dans le règlement — que, s'il apprend qu'il y a du travail dans sa région d'origine, il demande à l'office de le rendre disponible dans sa région d'origine. Si cela se fait, c'est plutôt un usage administratif qu'un droit qu'il a.

Je peux vous dire qu'à la baie James un gars qui est tanné va s'informer auprès de l'office pour savoir s'il y a de la demande dans son métier dans sa région pour pouvoir, à un moment donné, changer d'endroit.

Par ailleurs, je vous dirais que, s'il est A et qu'il n'y a plus de A dans sa région et qu'il connaît les chantiers qui embauchent, je pense qu'il peut sans risque quitter Montréal et s'en aller dans la région. Il est alors disponible et il sera le prochain appelé. Je peux vous dire qu'à la baie James, cela se pratique. Les gens veulent savoir les chiffres de l'office sur les disponibilités dans leur région et, quand le gars en a assez de ne pas avoir de femme, de ne pas avoir de logement, parce qu'il est simplement simple travailleur, de ne pas pouvoir faire un grief quand il est congédié, de ne pas avoir de repas chauds le midi, de boire seulement de la bière en fût, d'une taverne qui est fermée le dimanche, d'un certain nombre de choses que le changement de gouvernement, malheureusement, n'a pas changées à la baie James...

M. Johnson: On peut boire de la bière en canette maintenant.

M. Bourdon: Mais, dans la taverne, il ne peut pas l'apporter dans sa chambre.

M. Johnson: Oui, mais il peut boire de la bière en canette, elle est meilleure que la bière en fût.

M. Bourdon: C'est vrai. C'est grâce à l'intervention du ministre et à quatre années de revendications syndicales. La bière en canette est maintenant disponible dans la taverne.

M. Pagé: C'est surprenant qu'il ait seulement cela avec lui, vous voyez, n'est-ce pas...

M. Perron: Ne vous en faites pas, ils n'ont rien eu du temps que vous étiez là.

M. Johnson: Cela a pris six mois.

M. Pagé: Quand les libéraux sont là, au moins, les gens travaillent, vous le savez, et les travailleurs du Québec le savent. Quand le Parti libéral est là, les gens travaillent. Les gens travaillent quand on est là.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Bellechasse, avez-vous terminé?

M. Goulet: J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Je m'excuse auprès de nos invités, mon caucus m'avait chargé d'aller à l'Assemblée nationale tout à l'heure à l'occasion du débat sur la loi 116. J'ai manqué une partie importante...

M. Bourdon: Vous n'étiez pas en désaccord avec votre caucus, M. le député?

M. Roy: Je n'étais pas en désaccord, c'était unanime.

M. Goulet: Le ministre de l'Agriculture vient d'arriver.

M. Roy: J'ai quand même pris connaissance de votre mémoire, mais je tiens à souligner quelques points, notamment la création de sous-régions. Inutile de vous dire que je suis d'accord avec cette proposition que vous faites et qui pourrait permettre de bonifier et de faciliter l'application du règlement de placement. Un seul point, une seule question que je vais vous poser, puisque vous ne sembley pas y avoir fait allusion dans votre mémoire, la question des personnes âgées, les travailleurs de quarante ans et plus de la construction, j'aimerais savoir si vous avez des recommandations particulières à nous faire à leur sujet, vous autres, les gens de la CSN, compte tenu que le ministre propose d'apporter d'autres modifications au règlement de placement.

M. Bourdon: Là-dessus, je pense qu'il y a un problème humain qui est vécu. Le règlement de placement pouvait théoriquement le régler en période de haute conjoncture, parce que ces personnes sont privilégiées pour avoir un certificat A et le maintenir. Quand la conjoncture est haute, il est sûr qu'à un moment donné, il ne reste que des gens de cinquante ans et plus classés A dans la sous-région et dans la région. Là, l'employeur serait tenu de les embaucher. J'ajoute que rien n'interdit aux parties de négocier des règles d'ancienneté dans la construction qui feraient que l'employeur devrait rappeler d'abord ceux qui ont été à son emploi le plus longtemps et ce sont habituellement des gens de cinquante ans et plus.

J'ajoute, M. le député, que, dans la mesure où le ministre des Affaires sociales a imposé aux employeurs d'embaucher jusqu'à 3% de handicapés physiques, par exemple... On a dit: Ce n'est pas optionnel. Si vous n'en avez pas 3% et qu'il y en a qui appliquent la norme et qu'ils sont capables de travailler, vous allez les prendre, parce qu'il y a une discrimination à leur endroit. (18 h 30)

Je ne trouverais pas anormal que le même genre d'obligation soit créé aux employeurs, en vertu du règlement de placement, mais il y a la question des modalités: quel nombre, quel pourcentage de sa main-d'oeuvre. Ce serait faisable parce que, quand l'office fait une référence, on pourrait vérifier si c'est quelqu'un de 50 ans et plus et si l'employeur est tenu de l'embaucher.

M. Roy: Je vous remercie de cette opinion et de l'excellence du mémoire, d'ailleurs, que vous avez présenté.

Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous allons vous remercier, puisque c'est terminé avec vous. Nous demandons à l'association AECQ de venir se présenter. Le représentant, si vous voulez vous identifier.

Association des entrepreneurs en construction

M. Dion (Michel): M. le Président, mon nom est Michel Dion, de l'Association des entrepreneurs en construction. M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, on a appris ce midi, à toutes fins utiles, qu'on pouvait s'adresser à la commission et faire connaître verbalement notre point de vue sur le règlement de placement. Je ne sais pas s'il serait possible, à ce moment-ci, de demander à la commission d'être entendus seulement demain, de façon à favoriser la présence des employeurs. On est actuellement en possession du mémoire. On connaît le mémoire, on est capable de vous le présenter, mais, à toutes fins utiles, il n'y a pas d'employeurs qui sont ici. Peut-être que cela pourrait être intéressant pour les membres de la commission d'entendre également des employeurs de l'association.

M. Johnson: M. le Président, on avait dit ce midi qu'en principe, les parties n'étaient pas invitées. La commission a décidé unanimement d'entendre les parties qui étaient présentes. Je pourrais dire la même chose, à certains égards, de certains des métiers de la construction, plus particulièrement dans le cas de ceux qui appartiennent au conseil provincial, qui nous avaient fait parvenir des notes, etc. A moins que M. Dion n'ait carrément objection à témoigner ce soir, mais je pense qu'on pourrait quand même, comme on l'a fait, prendre connaissance du mémoire. Si je comprends bien, M. Dion est accompagné de M. Dage-nais qui est là pour répondre aux questions.

M. Dion: Oui, on est en mesure d'expliquer, du moins de faire connaître notre point de vue et de répondre à vos questions. Peut-être que vous pourriez envisager que, demain, il puisse y avoir des employeurs présents et, si vous voulez les questionner, vous en aurez l'occasion à ce moment. Est-ce que cela pourrait être possible de cette façon?

M. Goulet: C'est qu'à ce moment...

M. Pagé: M. le Président, je n'ai aucune objection à ce que nous entendions demain matin les employeurs ou encore l'Association des entrepreneurs en construction. Je ne vois pas en quoi on pourrait être justifiés de le faire quand on vient, il y a quelques minutes, de dire aux représentants de la CSD, somme toute, qu'ils ne pourraient pas participer à l'audition demain. Je suis convaincu que ceux-ci, s'ils s'étaient fait dire qu'ils pouvaient comparaître demain, auraient dit: D'accord, on va y aller demain, parce qu'aujourd'hui, il y avait de la neige entre Québec et Montréal, ou je ne sais pas ce qu'il y avait. Ecoutez, j'aime autant vous soumettre tout cela. Si vous croyez que les représentations que vous avez à nous formuler peuvent changer ou encore qu'on peut avoir un son de cloche qui peut être plus spécifique, avec des exemples plus concrets, une expérience mieux vécue...

M. Dion: C'était peut-être dans le sens que, si vous aviez des questions un peu plus précises, ou des cas précis, peut-être qu'un employeur aurait été plus en mesure à ce moment de donner la réponse, mais, quant à expliquer le mémoire, M. Dagenais est parfaitement au courant, il peut répondre aux questions.

Le Président (M. Jolivet): Donc, on va procéder dans ce cas.

M. Dagenais (Michel): Alors, on va débuter avec deux questions qui sont d'ordre général. La première, c'est qu'on verrait que le règlement sur le placement s'applique dans le cadre d'une politique générale des services de main-d'oeuvre telle que prévue lorsque cela nous avait été présenté par l'Office de la construction du Québec. En fin de compte, on fonctionne avec un règlement sur le placement, mais on oublie deux éléments qui nous semblent très essentiels et qui devraient fonctionner de pair, c'est-à-dire la qualification professionnelle de la main-d'oeuvre et la planification des travaux. Prenons, par exemple, la planification des travaux. Ce qu'on fait à l'heure actuelle, c'est qu'on donne des certificats de classification à des salariés en fonction des heures qui ont été faites dans une année antérieure, et des fois deux, alors que ces certificats de classification vont servir pour l'année qui suit. On ne sait pas si les niveaux d'activité économique dans l'industrie de la construction vont être élevés, vont être bas. On peut faire des prévisions, mais on n'a pas encore planifié des travaux de construction. Si on planifiait ces travaux de construction, on serait en mesure de savoir...

En tout cas quand on sait que les travaux gouvernementaux et paragouvernementaux représentent environ 50% de l'ensemble des travaux, même peut-être plus, on serait capable de savoir si on va avoir assez de main-d'oeuvre qualifiée pour effectuer des travaux. Cela nous semble une condition essentielle qui devrait être mise en application le plus tôt possible, afin d'aider l'application du règlement sur le placement. Autrement dit, pour une fois on prendrait les devants, on ne serait pas en arrière.

Il en va de même pour la qualification professionnelle des salariés. On trouve que ce dossier n'a pas évolué au même rythme que le règlement sur le placement. C'est un problème qui n'est pas dû au placement et notre objectif n'est pas de dire que si certaines mains-d'oeuvre manquent de qualification, c'est à cause du règlement sur le placement, sauf que maintenant, on contingente la main-d'oeuvre, on dit: Ces travailleurs particuliers vont pouvoir travailler dans l'industrie de la construction et seulement eux. Il faut aussi s'assurer qu'ils sont qualifiés. On demanderait que le dossier sur la qualification professionnelle reparte ou soit poussé un peu plus rapidement, afin d'améliorer cet aspect de la politique de main-d'oeuvre.

La deuxième remarque d'ordre général, c'est qu'on s'oppose en quelque sorte à ce que le règlement sur le placement permette le "bumping" — c'est une expression utilisée en relations de travail — qui veut dire que quand un travailleur est embauché par un employeur pour effectuer des travaux de construction, à l'heure actuelle, si ce travailleur est embauché dans une région comme Montréal et si on veut l'amener travailler dans une autre région comme la Gaspésie, c'est impossible si ce travailleur n'est pas un travailleur régulier de l'employeur. Vous allez dire que ça défavorise l'emploi régional de la main-d'oeuvre, mais il ne faut pas oublier que ça fonctionne des deux côtés. C'est-à-dire que le travailleur de la région de la Gaspésie peut, lui aussi, venir travailler dans la région de Montréal, tout comme le travailleur de la région de Montréal pourra aller travailler dans la région de la Gaspésie.

Cette remarque est d'ordre général, mais c'est plutôt dit en vue d'améliorer le fonctionnement du règlement sur le placement, parce que ce règle-

ment on le trouve, à certains égards, très lourd d'application et, si on veut que les gens le respectent, il faut qu'il soit applicable, il faut que ce soit possible de vivre avec, sans quoi on a beau mettre les plus grosses pénalités que l'on voudra dans la loi, si c'est impossible pour les entrepreneurs de vivre avec, ils vont tout simplement passer à côté.

Alors, lorsqu'on décide des critères de classification des salariés, nous croyons que ces critères de classification, comme les 1000 heures, etc., devraient être alignés sur les niveaux d'activité économique des régions particulières. Par exemple, un vrai travailleur de la construction de la région de Rimouski fait moins d'heures de travail qu'un travailleur de la région de Montréal; les occasions en sont moins grandes. C'est la raison pour laquelle on pense que, pour la région de Chicoutimi, il devrait être possible que les critères de classification soient adaptés à cette région et non pas avoir un critère de classification qui s'applique provincialement. Le même principe pourrait aussi s'appliquer pour les métiers. Par exemple, si, dans la région de Val-d'Or, en Abitibi, il y a une carence d'opérateurs de machinerie lourde, pourquoi ne pas faciliter la classification des opérateurs afin de permettre aux employeurs de la région d'embaucher ces gens? Ainsi, ces gens pourront au moins acquérir des certificats de classification, des B et des A, plus facilement, parce que, à l'heure actuelle, c'est bien dommage, mais si, pendant une période de temps, le niveau d'activité économique ne permet pas à ces travailleurs d'acquérir leur classification — pour la dernière modification qui a été faite au règlement sur le placement — ces gens ne pourraient pas obtenir de certificat de classification.

On pense aussi que le règlement sur le placement, au niveau de l'application fait face à certains problèmes à cause du fait qu'il y a beaucoup de petits entrepreneurs. On sait qu'il y a 85% des entrepreneurs qui embauchent moins de dix salariés. Les frais de déplacement qu'occasionne, dans certains cas, le règlement, ne sont tout simplement pas réalistes pour ces entrepreneurs. Quand le décret de la construction a été négocié, au niveau des frais de déplacement, il n'y avait pas de règlement sur le placement. A ce moment, les entrepreneurs dans une région, plus particulièrement les petits entrepreneurs... quand un gros entrepreneur prend un contrat de $1 million dans la région de Chicoutimi, il pense qu'à un moment donné il va être obligé de payer certains frais de déplacement et il les met dans sa soumission, mais le petit entrepreneur qui a deux gars, qui travaille habituellement avec ces gars et tout à coup, demain matin, ça lui en prend un troisième, il ne peut pas se permettre de payer à ce dernier les frais de déplacement.

Prenez, par exemple, dans la région du Lac-Saint-Jean, ce n'est pas possible pour un entrepreneur de Chicoutimi d'aller chercher un gars à Chibougamau parce que cela va lui coûter, en frais de déplacement, autant que si le gars venait de Québec. Pourtant, c'est la même région. A ce moment-là, il faudrait que le règlement tienne compte de ces aspects pour que les entrepreneurs puissent vivre avec le règlement sur le placement dans le cas plus particulier des petits entrepreneurs et dans les régions surtout éloignées.

Naturellement, favoriser l'emploi régional, c'est un principe qui, je pense, est admis par tous, sauf qu'à un moment donné, lorsque l'entrepreneur a embauché des gens depuis plusieurs années, on pense que le principe qui est reconnu dans le règlement sur le placement, à l'article 12.12, devrait y être maintenu, c'est-à-dire les salariés réguliers d'employeurs. A ce moment-là, l'employeur peut se promener partout dans la province avec ses salariés.

On pense aussi qu'au niveau de certaines spécialités, il devrait y avoir des discussions avec l'office et peut-être que, par résolution, il serait possible que dans certaines spécialités, comme par exemple l'installation de panneaux électroniques, où la main-d'oeuvre est assez rare et connue des employeurs, ces derniers ne soient pas obligés, quand ils vont faire un travail en dehors de leur région, de passer par tout le système qu'impose l'office au niveau de la recherche de main-d'oeuvre pour, éventuellement, en arriver à la situation où l'office leur donne la permission, mais uniquement après deux, trois ou quatre jours, comme on l'a vécu, d'aller chercher le gars à l'extérieur de la région ou leur impose quelqu'un qui, dans le fond, n'est pas qualifié. A ce moment-là, l'employeur est obligé de faire la preuve que cet individu n'est pas qualifié et, évidemment, on ne peut pas — et c'est peut-être actuellement la plus grosse critique qu'on puisse faire envers le règlement — établir la question de disponibilité comme telle. On dit qu'un salarié est disponible et que l'entrepreneur doit l'embaucher. Mais, la disponibilité d'un gars, c'est quoi, dans le fond? Une question de qualité et une question de quantité. Quand on oblige un entrepreneur à faire des recherches, à appeler 25 hommes dans sa région pour savoir s'ils veulent venir travailler sur son chantier, pour le gars, il devient impossible de mettre en application un règlement, puisque lui, il n'a pas le temps de le faire. Je reviens toujours au petit entrepreneur qui a son bureau dans son camion — pour utiliser une expression courante — pour lui, il est impensable de commercer à appeler 25 bonshommes pour savoir s'ils sont disponibles.

On en arrive, finalement, à un autre argument qu'on avait utilisé, il s'agit des fonds de baril. On utilise cette expression pour... On a mis cette expression dans notre mémoire et je pense qu'on devrait insister là-dessus.

Il arrive souvent qu'on cherche de la main-d'oeuvre dans une région et qu'on se rende compte qu'il n'en reste plus. S'il reste 10% de main-d'oeuvre qui est supposée être disponible, on pense que l'entrepreneur devrait avoir l'autorisation de passer immédiatement à un autre bassin, sans être obligé de scruter à fond si le pourcentage donné de salariés reste disponible. La raison évidente, c'est que vous avez toujours — et on le

rencontre en pratique dans les autes domaines, dans les autres industries — des individus qui, pour quelque raison que ce soit, ne sont pas prêts à travailler. Ces individus sont enregistrés à l'office comme étant disponibles, mais, dans le fond, ils ne le sont pas, parce que peut-être, à un certain moment, certains ont eu un accident en dehors du travail. Ils sont toujours disponibles au niveau de l'office, bien que non disponibles pour travailler. Pour un tas d'autres raisons de ce genre-là, on demanderait que l'office reconnaisse, ou que le règlement reconnaisse la possibilité, pour un entrepreneur, de changer de niveau de bassin lorsqu'il ne reste qu'un pourcentage donné d'individus dans le bassin.

On devrait parler aussi des problèmes qu'on a eus avec l'office au niveau de l'application pratique du règlement, au niveau des pannes d'ordinateur, etc. Honnêtement, cela a été, pour un bon nombre d'entrepreneurs, un vrai casse-tête. C'est un souhait que l'on formule, il faudrait absolument que le règlement tienne compte, c'est-à-dire qu'on simplifie le règlement pour éviter les nombreux appels qu'un entrepreneur a à faire à l'office, afin de vérifier les disponibilités des gars. Franchement, si un entrepreneur n'est pas capable d'embaucher à sa porte un salarié qui est reconnu comme un vrai travailleur de la construction, que ce soit un A ou un B, d'une région ou d'une autre, à ce moment-là, le règlement sur le placement risque de ne pas trouver d'application possible et on va peut-être arriver, d'ici à quelques années, à une situation où on va avoir un règlement qui ne sera pas appliqué. C'est pire que de ne pas avoir de règlement. Ce sont en gros les commentaires qu'on voulait faire sur le règlement. (18 h 45)

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Johnson: Merci, M. Dagenais. Quelques questions. La première touche les "key-men". J'aimerais peut-être vous entendre un peu préciser votre pensée de la même façon que, du côté de la CSN et de la FTQ, on l'a fait tout à l'heure. J'ai pris connaissance de votre mémoire. Essentiellement, vous suggérez un élargissement. Pourriez-vous préciser votre pensée un peu là-dessus? De la même façon que le monde syndical perçoit que la clause de mobilité de la main-d'oeuvre permanente devrait être restreinte au surintendant, au gérant, au contremaître, de la même façon, si je comprends bien, vous préféreriez que cela aille exactement dans le sens contraire?

M. Dagenais: A ce chapitre, je vais vous dire qu'on a une certaine divergence avec la partie syndicale. La raison est la suivante. Pardon?

M. Chevrette: Pas une certaine divergence, une divergence certaine.

M. Dagenais: D'accord. C'est certain qu'on a une divergence. J'en conviens. Il y a eu au début, à l'émission des certificats de classification, je pense que c'est quelque 55 000 certificats de salariés réguliers d'émis. Pour nous, cela confirme un fait, c'est que l'entrepreneur, pour autant que possible, garde sa main-d'oeuvre à son emploi le plus souvent possible, de sorte qu'il peut amener cette main-d'oeuvre où il a ses chantiers de construction, peu importe où en province. Il est important qu'un entrepreneur puisse arriver et ouvrir un chantier et même, si possible, le faire au complet avec des salariés qu'il connaît. On donnait tantôt l'exemple du plombier qui fait la plomberie d'une maison. Ce n'est pas compliqué, mais si l'entrepreneur prend un contrat d'envergure au niveau domiciliaire et envoie un certain nombre de ses plombiers, il leur donne naturellement comme travail d'effectuer toute la plomberie. S'il a à son emploi des salariés en qui il a pleine et entière confiance, à ce moment-là, le travail va se faire dans les normes qu'il désire et au coût auquel il a soumissionné. Pour lui, c'est, à notre avis, un droit de gérance. C'est une question de liberté d'entreprise. Quand on embauche quelqu'un, en général, on le sélectionne. Dans l'industrie de la construction, contrairement à ce que certaines personnes ont dit, il y a aussi une sélection. La preuve, c'est qu'il y a un paquet de salariés réguliers. Alors, on veut que cela continue, pour permettre aux employeurs de travailler efficacement. Pour eux, c'est un point important. Ce que j'ai abordé aussi avec ces salariés, la question des spécialistes, c'est une question où les gens, dans certains cas, ne sont pas nécessairement des salariés réguliers de l'employeur, sauf qu'ils sont connus. Il y a tel bonhomme, à un moment donné, il travaille pour un autre employeur, son travail vient de finir, un autre entrepreneur en a besoin dans une autre région. Il sait que ce sont à peu près seulement ces gens-là qui peuvent effectuer le travail dans cette région. A ce moment-là, nous pensons qu'il devrait être capable de les amener. On ne demande pas cela pour tous les emplois et métiers de l'industrie de la construction. Comme on vous dit, on serait prêt à s'asseoir et à discuter avec l'office de ce type d'emploi et établir une résolution ou des mécanismes d'application. Ce n'est pas général. C'est uniquement dans certaines spécialités.

M. Johnson: Sur cette question des spécialistes, M. Dagenais, il y a une question un peu naïve que je vais vous poser. Prenons les spécialistes en boîtes de contrôle chez les électriciens. Qu'est-ce qui vous empêche d'appeler la FIPOE? Elle doit connaître ses gars, la FIPOE? Pourquoi ne l'appelez-vous pas?

M. Dagenais: Votre question n'est pas naïve. Dans le fond, vous voulez un peu faire parler des bureaux de placement syndicaux.

M. Johnson: Oui.

M. Dagenais: On va en parler. Pour les bureaux de placement syndicaux, je pense qu'on pourrait retourner en arrière et on peut vous dire qu'on avait demandé carrément leur abolition. Vous avez jugé bon, dans le règlement, de les

maintenir, sauf que vous avez dit qu'il va y avoir plusieurs sources d'emplois. Pourquoi? Parce qu'on reconnaît la liberté des individus de choisir la façon dont ils veulent embaucher leur monde. Si on a des entrepreneurs qui ne veulent pas passer par les salles d'embauche, les bureaux de placement syndicaux, à ce moment-là, c'est leur liberté qu'on défend et on pense que le système actuel, qui réglemente les agences de placement syndicales, dans le cadre d'un règlement où on avait déjà fait des commentaires, des remarques, mais qui n'ont pas été suivis, doit rester tel, parce qu'on a eu des plaintes qui ont été faites à l'office sur le fonctionnement de certains bureaux de placement syndicaux.

Il y a eu aussi, à un moment donné, des employeurs qui ont eu d'autres problèmes et, par hasard, les plaintes ne se font pas, parce que les salariés ne sont pas intéressés à témoigner et l'employeur non plus, je vais vous le dire bien franchement. Mais ça, il y en a de moins en moins. On trouve que ça va mieux et, si ça va mieux, il faut le dire, parce que c'est nécessaire. De là à dire qu'on va émettre une opinion qui va brimer l'entrepreneur dans sa liberté d'embauche, on n'est certainement pas d'accord. Surtout que, lorsqu'on fait des consultations, on se rend compte que l'utilisation des agences de placement n'est pas tellement importante. On utilise énormément l'Office de la construction pour la référence; en tout cas, on essaie et on le souhaite.

D'ailleurs, les remarques que j'ai faites tantôt, quelquefois, peuvent être choquantes pour l'office. Mais ce qu'on veut, c'est que le système fonctionne, on veut que, lorsque l'office donne des noms de salariés qui sont supposés être disponibles, on veut qu'ils soient vraiment disponibles. Parce que c'est ça, donner un service à l'employeur pour qu'il puisse vivre avec le règlement.

Il en est un peu de même avec les CMC et les CMQ. Les CMC peuvent peut-être poser un problème politique dans lequel je ne voudrais pas embarquer. Par exemple, les CMQ, à l'heure actuelle, fonctionnent, mais sans avoir les données de l'office. Il n'y a pas de communication, il n'y a pas d'écran cathodique au CMQ et ainsi de suite, de sorte qu'un employeur qui veut s'adresser au CMQ, pour que ces gens essaient de faire une certaine sorte de placement, c'est-à-dire le recrutement, la sélection et leur référer des candidats, c'est difficile pour les CMQ d'opérer là-dedans.

Là, ce serait un endroit où on pourrait vraiment améliorer le système, c'est-à-dire en suggérant ou en instaurant une meilleure communication entre l'office et les CMQ, et ça serait simplement donner à l'employeur qui vit avec le système, avec le règlement sur le placement, une source supplémentaire d'approvisionnement de main-d'oeuvre.

Alors, c'est notre opinion sur ça.

M. Johnson: Finalement, sur ce que vous appelez les fonds de bassin ou les fonds de baril, comme principe, je pourrais peut-être l'admettre, mais il faut admettre un autre principe en même temps. Seriez-vous prêts à créer un fonds d'indemnisation pour rémunérer les 10% qui restent? Ce sont des gens qui ont aussi le droit de vivre.

M. Dagenais: Regardez, M. le ministre, de la façon que ça fonctionne à l'heure actuelle, la société économique dans laquelle on vit reconnaît comme principe économique qu'il y a toujours un certain taux de chômage qui va exister. Il y a bien des sortes de chômage, je ne les connais pas toutes, mais je connais le chômage frictionnel qui fait en sorte qu'un individu serait prêt à prendre de l'emploi, mais, étant donné que l'emploi a été offert deux jours avant qu'il soit disponible, il n'a pas pu l'avoir. Cela existe aussi dans l'industrie de la construction. Le bonhomme qui a un accident personnel, ça existe; le bonhomme qui est en vacances... Combien de fois un entrepreneur appelle un gars et dit: Ecoute, j'ai une "job" pour toi. Il répond: Ecoute, je viens de descendre de la baie James, laisse-moi tranquille, je viens de faire six mois là-bas. C'est arrivé, des cas comme ça. C'est arrivé aussi que le salarié a dit: C'est à quel endroit ta "job"? C'est à telle place. Cela ne m'intéresse pas.

A ce moment-là, ce serait créer un fonds pour consacrer le fait que certains individus, à un moment donné, ne sont pas disponibles pour travailler. Je vous dis qu'il y aurait un paquet de gars qui se diraient non disponibles pour travailler parce que ce serait, en fin de compte, un revenu garanti déguisé.

M. Johnson: D'accord.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, parce qu'il y a quelques questions que je voulais poser et qui ont été posées par le ministre. Votre expérience avec l'OCQ. Dans un premier temps, je pensais que vous n'étiez pas d'accord, pas du tout d'accord avec la référence d'embauche de la part de l'OCQ; j'en étais venu à me demander si vous étiez favorable aux agences de placement syndicales, mais, à une question posée par le ministre, vous avez répondu que non et que ce que vous souhaitiez, c'était une amélioration des services dispensés par l'OCQ. Qu'est-ce qu'il faudrait que l'OCQ fasse pour que ça s'améliore? Je conviens que l'AECQ nous dit aujourd'hui que ça devrait être amélioré. Je conviens que, dans chacun de nos comtés respectifs, on était à même de rencontrer les entrepreneurs qui étaient, pour employer un terme pas trop brutal, pas contents et même plus des services dispensés par l'OCQ. C'est évident que, demain, on aura l'occasion d'avoir l'autre côté de la médaille, on aura l'occasion de poser des questions à l'OCQ.

On doit vous dire que, jusqu'à maintenant, il semble qu'il y ait des problèmes dans ça. Qu'est-ce que vous feriez, qu'est-ce que vous recomman-

deriez, si vous étiez à notre place, pour l'amélioration des services de l'OCQ?

M. Dagenais: La recommandation au niveau du règlement est qu'on pourrait toujours s'entendre pour simplifier, au niveau des priorités d'embauche, des choses comme cela. Mais même si on avait un autre système de priorité d'embauche, ce qui est primordial pour nous autres...

M. Pagé: Si vous permettez, je parle en termes de service au niveau de la référence.

M. Dagenais: Ce qui est primordial pour nous autres, c'est la communication et l'information. Par exemple, lorsqu'on communique avec l'office, lorsqu'un employeur communique avec l'office, ça ne peut pas prendre trois jours pour avoir le gars, il en a besoin tout de suite. C'est arrivé, des cas où cela prenait trois jours et plus.

M. Pagé: Mais dans le moment, ça prend combien de temps pour avoir un gars?

M. Dagenais: Cela dépend des cas. Je n'ai pas idée de dire que l'office est totalement inefficace. Ce n'est pas là mon but. L'idée, c'est d'instaurer un système où l'office va être encore plus efficace. Par exemple, au niveau des informations — c'est la communication. Quand on appelle à l'office, les ordinateurs en panne et ainsi de suite, c'est un problème de communication. Cela se règle entre personnes.

Au niveau de l'information, on en arrive au sujet que j'ai touché tantôt, celui de la disponibilité. On pense que les salariés auraient peut-être, eux aussi, un peu leur mot à dire au niveau de la disponibilité, leur part à faire.

Tant qu'on réfère à des employeurs des salariés qui, en fin de compte, ne sont pas disponibles, pas réellement disponibles, c'est là qu'on rend le système inefficace. Si vous avez une liste de dix ou quinze noms à contacter et s'il y en a là-dedans plus de la moitié qui ne sont pas disponibles, vous êtes obligés de rappeler à l'office et de reprendre une autre liste de salariés, tant que vous n'avez pas obtenu le nombre de salariés dont vous aviez besoin.

Nous pensons qu'au niveau de la disponibilité, au niveau des spécialités — c'est-à-dire qu'un salarié qui se dit spécialisé dans tel ou tel domaine — quelquefois, on se rend compte que ce n'est pas le cas. Cela devrait être corrigé, pour que le salarié qui est vraiment spécialisé dans tel domaine, le soit. Et s'il n'est pas disponible pour travailler, qu'il le dise, parce qu'on ne veut pas toujours être au téléphone pour contacter des salariés.

C'est d'autant plus vrai pour des entreprises qui n'ont pas les moyens d'avoir des gars qui font cela à la journée longue. Pensez-y. Quand on dit que 87% des entreprises emploient moins de dix gars, à ce moment-là, tout ce qu'il y a dans cette compagnie, souvent c'est le propriétaire qui, à l'occasion, travaille même à ses chantiers. Ce n'est pas possible pour le gars de faire cela comme cela.

C'est pour cette raison qu'on veut qu'une amélioration soit faite au niveau de la disponibilité. Par exemple, la suggestion que je faisais tantôt au niveau des CMQ et des CMC, ces derniers en font du placement. S'il veut passer par là, il passera. A ce moment-là, cela peut être tout simplement une source d'approvisionnement supplémentaire.

M. Pagé: Le problème, c'est la possibilité pour l'OCQ de déterminer si tel travailleur qui est référé comme étant le troisième sur la liste des cinq référés, je comprends que l'OCQ peut avoir des problèmes à savoir si le gars aime aller dans cette région ou non, s'il est disponible ou s'il ne l'est pas, s'il arrive de la baie James et qu'il ne veut pas y retourner.

Mais ne croyez-vous pas que face à cette situation, où l'OCQ est obligée de fonctionner avec un système mécanique, etc., vous seriez en mesure d'avoir un service qui est beaucoup plus personnalisé et qui tient compte beaucoup plus d'éléments comme ceux-là, à l'intérieur d'une agence de placement syndical, où les responsables sauraient que tel gars ne peut pas travailler à tel endroit, pour tel motif, qu'il ne veut pas travailler à tel autre endroit pour tel autre motif, et qu'il n'est pas disponible pendant telle période?

M. Dagenais: Oui. Comme je le disais tantôt, c'est une question de choix. Il y a des employeurs qui ont décidé qu'ils ne veulent pas faire affaires avec des agences de placement syndicales. Certaines agences de placement et certains employeurs y trouvent un avantage, ils trouvent qu'ils reçoivent un bon service.

Mais pour nous, c'est une question de principe, en fin de compte, c'est une politique que les entrepreneurs ont donnée, c'est une ligne d'action que l'AECQ suit, en ce sens qu'il y a eu tellement d'abus et il y a tellement de dangers à consacrer l'utilisation exclusive des agences de placement syndicales, que c'est impensable, pour nous. On fait des relations de travail. Le placement vient s'imbriquer dans les relations de travail. Et on voudrait, par l'entremise d'un règlement sur le placement, contracter quelque chose qui, dans le fond, mène directement au déséquilibre des forces sur les chantiers de construction. Non. C'est bien dommage, mais on ne marchera pas là-dedans. S'il y a certains employeurs qui veulent s'en servir, qu'ils s'en servent. Mais qu'on permette, par exemple, aux autres employeurs qui ne veulent pas s'en servir d'obtenir un service efficace en dehors des agences de placement syndicales. C'est ce qu'on demande.

M. Pagé: Vous n'êtes pas favorable à l'article 12.12. Vous êtes favorable au maintien de l'article 12.12, à savoir que l'entrepreneur peut amener avec lui ses employés qui sont à son emploi depuis plus de six mois, si ma mémoire est fidèle. Ne croyez-vous pas que c'est peut-être la plus belle façon, abstraction faite des questions comme les artisans et tout cela...

M. Dagenais: Pardon? (19 heures)

M. Pagé: Ne croyez-vous pas que c'est une bonne façon de contourner purement et simplement les dispositions du règlement de placement sur l'obligation de procéder à l'embauche de A au niveau de la région, etc. C'est la plus belle porte ouverte!

M. Dagenais: Oui, mais cela dépend dans quelle perspective vous regardez le règlement sur le placement. Si on veut, avec le règlement sur le placement, faire travailler les vrais travailleurs de l'industrie de la construction, les gars qui sont à l'emploi de cet employeur ne sont-ils pas de vrais travailleurs de l'industrie de la construction? Je pense que ce sont peut-être ceux qui sont les plus vrais. La preuve, c'est qu'ils sont régulièrement à travailler pour les mêmes entreprises et ils vont travailler, en moyenne, toujours au-delà de 1200 heures par année. A ce moment-là, les vrais travailleurs de l'industrie travaillent. D'accord, je comprends que, dans certaines régions, il puisse arriver qu'un entrepreneur amène sa main-d'oeuvre régulière au détriment de la main-d'oeuvre régionale, mais si vous faites un calcul rapide, vous allez vous rendre compte qu'un employeur qui a le choix, à ce moment-là, il va drôlement réfléchir. Quels sont les avantages d'amener sa main-d'oeuvre régulière avec l'obligation de payer des frais de déplacement par rapport à embaucher régionalement? Pourquoi certains entrepreneurs amènent-ils leur main-d'oeuvre régionale avec les coûts qu'impose le décret au niveau des frais de déplacement? Oui, vous dites... Il y a certainement un calcul économique qui est fait par l'entreprise.

M. Pagé: Oui, il y a un calcul, mais je vous dirai, M. Dagenais, qu'on a vu des cas. Si vous voulez qu'on appelle les choses par leur nom, comment expliquer, à ce moment-là, que des travailleurs nous téléphonent à nos bureaux de comté et nous disent: On vient de telle région, on est pris pour travailler à Québec et on reçoit $145 de pension par semaine, mais on est obligé d'endosser le chèque et de le retourner, parce qu'on va perdre notre "job". On va mettre les cartes sur la table.

M. Dagenais: Oui, mais, M. le député, je pense bien...

M. Pagé: Je ne dis pas que c'est comme cela dans tous les cas, mais il y a des gens qui nous contactent pour cela.

M. Dagenais: Mais on parle du règlement sur le placement. A cet égard, je pourrai vous dire — on en discute avec la partie syndicale — qu'au niveau de l'application du décret, c'est vrai qu'à un moment donné, on commence un peu à être en retard et on ne vérifie peut-être pas assez. Nous autres, comme employeurs, comme représentants des employeurs, on n'a pas intérêt à ce que cela se fasse, parce qu'on veut que les employeurs soient sur un pied d'égalité au niveau de la concurrence. On n'est certainement pas pour encourager les gens qui passent à côté du décret et qui économisent de l'argent comme cela en faisant de la fraude. Les cas de fraude, on les condamne autant que n'importe qui et on n'est pas pour cela, mais il ne faudrait pas mêler les cas de mauvaise application du décret avec le règlement sur le placement qui, dans le fond, vient régir la liberté d'entreprise et la façon de fonctionner pour un entrepreneur. C'est drôlement différent!

M. Pagé: De toute façon, pour ce qui est de la question de l'application de l'article 12.12, je dois vous dire, entre autres, qu'ici à Québec, dans le moment, il y a de véritables travailleurs de la construction qui ne travaillent pas, qui sont en chômage alors qu'il y a des compagnies qui font des travaux importants ici, entre autres, dans le bassin Louise, et que leurs employés viennent de Montréal au grand complet. En fait, c'est ce que vous défendez. Ce sera à la commission de formuler les recommandations qu'elle jugera opportunes. Le ministre verra s'il doit maintenir l'article 12.12, oui ou non. Merci.

M. Johnson: M. le Président, le député de Portneuf me permettrait-il... sur l'article 12.12 à M. Dagenais?

M. Pagé: Oui.

M. Johnson: Je comprends que votre rôle à l'AECQ, c'est un rôle de relations de travail. On est tout près de l'amorce des négociations. Je ne veux pas vous demander de lâcher tous vos oeufs dans le panier. Répondez-moi simplement que vous ne désirez ne pas répondre à la question, pour les raisons de négociation, si vous le désirez. D'après vous, serait-il concevable qu'il y ait l'équivalent d'une espèce de ratio, au niveau de l'embauche régionale, qui soit négocié au niveau de la convention collective? Je poserais la même question, d'ailleurs, aux représentants de la FTQ et de la CSN. Est-ce concevable... Encore une fois, il ne s'agit pas de sortir des objets négociables, mais serait-il concevable que la question d'embauche régionale s'analyse en termes approximatifs de quotas, etc.?

M. Dion: Si M. le Président me permet, je vais prendre le micro.

M. Johnson: M. Dion.

M. Dion: De penser de négocier un pourcentage d'embauche régionale pour un employeur, je crois que si on se met dans l'optique d'un règlement de placement qui est réellement un règlement d'embauche, ce qui veut dire qu'un employeur qui a des gens à son emploi, des salariés à son emploi, il continue, il n'est pas obligé de les mettre à pied pour les remplacer par d'autres, si on pense, à ce moment-là, à un employeur qui vient, par exemple, de la région de

Chicoutimi et qui a un contrat à faire, disons ici, tout près de Québec, normalement, il garderait ses salariés qu'il pense rentables pour lui, ceux qui lui donnent un rendement, qui compensent pour les frais de déplacement qu'ils peuvent lui occasionner et, à ce moment-là, il a à embaucher de la main-d'oeuvre. Je pense qu'on n'a pas à négocier un pourcentage d'embauche régionale; automatiquement, l'employeur, parce qu'il est en concurrence par soumissions lorsqu'il soumet son projet, va chercher à avoir le meilleur coût de main-d'oeuvre possible.

C'est évident qu'à ce moment, à main-d'oeuvre compétente pour faire les travaux — je ne toucherai pas les spécialistes dans les contrôles ou des choses comme cela — ils vont engager de la main-d'oeuvre régionale. Peut-être que si j'arrivais et si je disais: 30% de main-d'oeuvre régionale, je serais peut-être complètement dans l'absurde, parce que c'est 99% de la main-d'oeuvre régionale que l'entrepreneur va engager, parce que c'est son profit. Evidemment, l'entrepreneur est en affaires pour faire un profit. Au moment où il veut faire un profit, il soumissionne son meilleur prix pour obtenir le contrat, calcule sa possibilité de main-d'oeuvre à ce moment, et il voit le manque de main-d'oeuvre qu'il va avoir. A ce moment, il la calcule sûrement sur une base régionale. C'est là que le règlement de placement devient difficile pour certains employeurs. Au moment où il donne sa soumission, il prévoit sa main-d'oeuvre partiellement régulière, et l'autre partie, engagée régionalement. Quand il vient pour l'engager régionalement, si cette main-d'oeuvre n'est pas disponible, à cause de certaines contraintes d'absence ou de fond de bassin ou de choses semblables, il est obligé d'aller en chercher en dehors. Il y a des coûts occasionnés par le règlement de placement, parce qu'il ne peut pas passer à des B de la région. Il est obligé d'aller chercher un A de l'extérieur. Là, il endosse des frais de transport, des frais de chambre et pension qu'il n'a probablement pas prévus dans sa soumission. Je dis, comme réponse: Est-ce qu'on envisagerait de négocier une clause? Honnêtement, la première réponse que j'aurais dû vous donner, c'est: Ce n'est pas à moi à décider. Ce sont les employeurs qui le décideront. Je vous dis qu'honnêtement, de par l'expérience que j'ai de 18 ans dans la construction, je suis certain que l'employeur, de préférence, engage la main-d'oeuvre régionale pour la main-d'oeuvre additionnelle dont il a besoin, de préférence, après sa main-d'oeuvre régulière.

Le jeu de tout cela, et ce qui fatigue certaines gens, c'est cette espèce de jeu d'être obligé de mettre un de ses employés... Je suis en train de faire de l'excavation, par exemple, dans Sherbrooke. J'ai un bonhomme sur ma machine qui travaille très bien. C'est une machine qui est dispendieuse. Parce que je prends un contrat à Québec, cette même machinerie, je vais la mettre entre les mains d'un autre individu qui, possiblement, est aussi bon, aussi compétent, mais que je ne connais pas, et c'est une machinerie de peut-être $200 000. Par le fait du règlement, je suis obligé de mettre mon homme de Sherbrooke dehors pour prendre un autre gars de la région et de l'embarquer sur ma machine. Ce sont des choses comme cela que les employeurs ne comprennent pas, que le règlement devienne un règlement de "bumping". Cela s'accepte mal par l'employeur d'être obligé de mettre un gars à pied, alors qu'on veut faire de la sécurité d'emploi. Le règlement devrait se limiter à dire: Quand tu as besoin de main-d'oeuvre, pas quand tu en mets à pied pour en reprendre un autre, mais quand tu as besoin de main-d'oeuvre, tu devrais procéder de telle et telle façon. Que le règlement dise simplement cela, à ce moment, c'est nettement plus viable pour un employeur dans la construction.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: J'ai une courte question. Vous dites qu'à l'Association des entrepreneurs, 80% à 90% des entrepreneurs ont moins de dix employés. Est-ce que vous avez des chiffres qui nous démontrent le pourcentage de contrats dans la région où l'entrepreneur demeure? Je ne sais pas si vous comprenez ma question. Est-ce que ces petits entrepreneurs vont prendre régulièrement des contrats dans d'autres régions ou si, habituellement, ils prennent des contrats dans leur propre région?

M. Dagenais: Voici, ce serait malhonnête de notre part de vous dire qu'on a des chiffres précis. Peut-être que l'office est probablement plus en mesure que nous. Une chose qu'on peut vous dire, c'est que le très petit entrepreneur, et je parle en général, parce qu'il faut distinguer le sous-traitant du général, le sous-traitant, ce n'est pas souvent un gars qui a une grosse main-d'oeuvre. Par exemple, les briqueteurs, avec 150 hommes, c'est assez rare. Vous allez trouver des entrepreneurs briqueteurs avec une quinzaine d'hommes, une dizaine d'hommes, ou cinq ou six hommes. Ces entrepreneurs sont assez mobiles, mais pas nécessairement mobiles complètement en dehors de Québec à Montréal, ou de Montréal jusque dans le Bas-Saint-Laurent. Ils peuvent tout simplement se retrouver.

Par exemple, si je prends une région comme Sherbrooke, le gars peut s'en aller travailler dans la région qui est tout près de chez lui. Il va aller travailler vers Drummondville. Il va peut-être venir travailler vers Saint-Hyacinthe. Celui qui est dans la région de Portneuf, peut, à ce moment, se déplacer vers une région comme Trois-Rivières, ce qui n'est pas une très grande mobilité, mais ce sont des déplacements peut-être naturels pour des employeurs. On ne voit pas beaucoup d'entrepreneurs de la Côte-Nord venir faire des travaux à Québec, mais on voit des gars de Québec ou de Montréal faire des travaux sur la Côte-Nord.

La mobilité est différente, par exemple, chez l'entrepreneur général et chez le sous-traitant. Chez le sous-traitant, ce peut être une entreprise à

peu de main-d'oeuvre. A ce moment, la mobilité de ses dix gars peut exister, mais elle existe peut-être dans un rayon qui n'est peut-être pas aussi répandu qu'on peut avoir l'air de le dire en paroles, mais il y a une mobilité de régions contiguës, adjacentes, à ce moment, qui peut se produire et qui fait que le gars qui est aujourd'hui à Sherbrooke, avec trois hommes, le lendemain matin, il faut qu'il les mette dehors, parce qu'il est rendu à Drummondville. Ce n'est pas un grand et long déplacement; vous travaillez à Trois-Rivières et vous tombez de l'autre côté à Nicolet. Un peu plus loin, vous tombez dans une autre région. Ces choses font qu'à un moment donné, il est obligé de les mettre à la porte et d'en engager d'autres. C'est peut-être ce qui cause l'embêtement, la mobilité dans les statistiques et on n'a pas en main, actuellement, de statistiques.

M. Goulet: Une dernière question, M. le Président. Votre argumentation selon laquelle, par exemple, pour de la machinerie qui vaut de $100 000 à $200 000, on puisse faire suivre le conducteur avec la machine, je l'accepte. Mais, dans nos régions, ce qu'on connaît souvent, c'est qu'on voit des entrepreneurs pour des réseaux d'aqueduc et d'égouts et la municipalité est obligée, dans le contrat qu'elle signe avec l'entrepreneur, de spécifier qu'on doit prendre des manoeuvres de la région, parce que, si la municipalité ne fait pas cette spécification dans le contrat, l'entrepreneur de l'extérieur arrive même avec le type qui travaille au pic et à la pelle. Il y a de l'exagération de ce côté; il y a une différence entre...

M. Dion: II est évident qu'entre un "grader", un bulldozer, ou des choses de la sorte — tous des bons mots canadiens-français...

M. Goulet: Et une pelle avec un manche de bois...

M. Dion:... il y a une différence. Je pense qu'il ne faut pas déprécier et prendre l'occupation de manoeuvre à la légère. A un moment donné, il y a des choses à manoeuvrer, à exécuter ou à faire qui peuvent avoir une certaine importance. C'est drôle à dire, mais un manoeuvre, ce n'est pas n'importe quoi sur un chantier de construction; je ne veux pas prendre la défense des manoeuvres, mais, entre un bon manoeuvre et un mauvais manoeuvre, il y a une maudite différence. Là, ce serait peut-être utile d'avoir des entrepreneurs avec nous; je peux vous dire que ce n'est pas un métier, mais c'est une occupation qui a une valeur réelle. Un bon manoeuvre, ça existe et un moins bon manoeuvre, ça existe; le gars qui est toujours mêlé dans ses piles de bois et qui est toujours mêlé dans ses répartitions de matériaux, qui n'est pas capable de travailler avec les outils qu'il doit utiliser — j'entends par outils les outils qu'il a le droit de manoeuvrer — c'est différent entre un bon et un mauvais, ça peut être nettement différent. C'est évident qu'il y a une maudite différence entre ça et une grue; là, je suis bien d'accord avec vous.

C'est cet aspect de main-d'oeuvre avec laquelle l'employeur est habitué et pas seulement l'employeur; souvent, la construction, c'est une équipe entre un surintendant, un contremaître et ses hommes; c'est souvent ça. A ce moment, on dit: D'accord, amenez le contremaître, amenez le surintendant, mais vous n'avez pas le droit aux hommes. Les hommes sont parfois habitués de travailler ensemble, ils savent comment ils travaillent entre eux et ils sont habitués à faire équipe; c'est productif pour l'employeur. Il est évident qu'il y a une question de dollars et de cents à la fin de tout ça; c'est une équipe de production. Or, briser l'équipe, vous pouvez totalement briser la production et ça peut être important. Le manoeuvre qui est habitué de travailler avec son briqueteur et le manoeuvre qui est habitué de travailler avec son menuisier, brisez cette équipe et ça peut probablement briser une partie du travail et le rendre moins productif.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud. Non, ça va?

M. Pagé: M. le Président, avant que le député de Beauce-Sud intervienne...

M. Roy: Non, j'avais deux questions à poser et elles ont été posées.

M. Pagé: Si vous me le permettez, M. le Président, un très bref commentaire. Est-ce que vous êtes conscient, M. le Président, que si, à ce moment-ci, nous avions à voter sur le fond du règlement de placement, le gouvernement pourrait être défait?

Le Président (M. Jolivet): Oui, cher ami!

M. Johnson: Oui, mais vous n'avez pas à voter.

M. Pagé: II serait défait sur toute mesure que vous pourriez présenter; vous seriez défaits, messieurs, vous êtes minoritaires.

M. Johnson: Ce qui est intéressant, c'est que nous n'avons pas à voter. On écoute.

M. Pagé: Non seulement vous représentez 40% de la population, mais vous êtes minoritaires.

Le Président (M. Jolivet): M. le député...

M. Roy: Au lieu d'avoir une prorogation de la session, nous aurions une dissolution de la Chambre.

M. Pagé: Oui, le Parti libéral du Québec serait élu.

Le Président (M. Jolivet): II y a une chose certaine, c'est qu'en commission, ça n'entraîne pas ces cataclysmes. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je voudrais faire quelques commentaires et je vous demanderai vos observations, à la suite des commentaires. Pour faire un peu changement, je ne vous poserai pas de question, je vais affirmer des choses, quitte à me tromper. Chacun son style, M. le député de Portneuf; j'allais dire le député de Newport.

J'ai l'impression, messieurs, que le fait que l'employeur puisse amener avec lui régulièrement, sa main-d'oeuvre... On sait très bien qu'il y a une facilité de remboursement — comme le disait le député de Portneuf ils sont fréquents les appels qu'on a là-dessus — cela ne crée plus aucune barrière si le gars se fait rembourser et, quand vous parlez de frais, quand vous affirmez qu'il y a des frais dans le taux de soumission, le gars est assuré que sa main-d'oeuvre lui rembourse les frais, parce qu'il y a une conjoncture difficile sur le plan de la construction; donc, les gars, plutôt que de ne pas travailler, préfèrent être capables de payer eux-mêmes leur pension, parce qu'il y avait peut-être la crainte. Je ne comprenais plus rien tantôt, parce que vous affirmiez que ce n'était pas un problème, les gars ne pouvaient pas prendre l'emploi. (19 h 15)

Par contre, le syndicat dit que les gens sont dans l'insécurité et ils courent après les heures pour pouvoir garder leur A ou leur B. Et vous disiez que l'OCQ disait qu'on leur envoyait des gens non disponibles. J'ai l'impression que les gars courent même après les cinq jours de travail, même si cela leur crée des problèmes de chômage, contrairement à ce que c'était avant pour le règlement de placement. Avant, pour une petite job de cinq, six ou sept jours, ils ne se déplaçaient pas parce qu'ils avaient assez de problème avec le chômage après et que les paies ne rentraient pas régulièrement, ils ne sautaient pas sur ce genre de "jobbines", mais, aujourd'hui, pour accumuler le plus d'heures possible, je pensais qu'ils couraient après tous les emplois disponibles, ne serait-ce que trois jours ici, quatre jours là. Je pensais que l'inverse se produisait. Je trouvais que les propos étaient vraiment discordants.

Il y a une autre chose. Quand le député de Bellechasse dit avoir vu des manoeuvres dans les réseaux d'aqueduc, j'en ai vu des gars qui transportaient purement et simplement la brique, venir de l'extérieur. Pas de Montréal, mais de Drummondville ou bien de Québec, à Joliette. Quand on en est rendu à amener les journaliers, qui sont une main-d'oeuvre non spécialisée — je n'ai rien contre les journaliers — de Québec, vous ne me ferez toujours pas croire qu'il ne se passe pas quelque chose. Je l'ai vécu à la Domtar, on l'a vécu à l'école anglaise de Joliette et j'espère qu'on ne le vivra pas, parce que le règlement de placement va sûrement faire quelque chose à ce sujet, je le souhaite de tout coeur, M. le ministre, mais il y a un contrat de quelque $7 800 000 pour un hôpital. Je ne sais pas quel entrepreneur sera choisi, mais je ne voudrais surtout pas, pour un tel contrat, me ramasser avec à peu près pas de monde de Joliette pour travailler là.

Je ne sais pas pourquoi vous tenez tant... Je comprendrais votre raisonnement, si vous parliez de la machinerie spécialisée, quelquefois à cause de contexte particulier, cela pourrait s'expliquer, mais au niveau des métiers généraux et même qui ne nécessitent pas de l'outillage spécialisé, je ne vois pas pourquoi on ne favoriserait pas l'embauche régionale. Je ne comprends pas votre argumentation là-dessus, même si vous élaborez le type d'équipe, etc. Le gars est assez heureux de travailler dans son milieu, mon cher monsieur, que bien souvent il est motivé, alors que celui qui s'ennuie bien souvent, le soir, vous savez ce qu'il fait. Le lendemain matin, il a les cornes longues. On pourrait se parler des chantiers où vous amenez votre main-d'oeuvre. J'ai eu la chance de vivre cela un peu.

Il y a un dernier point sur lequel je voudrais entendre vos commentaires. Ce serait sur le fait que lorsque vous dites que l'OCQ ne vous donne pas de gars disponibles... A vous écouter parler, j'ai comme l'impression que vous êtes à l'encontre — diamétralement opposés — de la FTQ. La FTQ dit vouloir l'exclusivité de placement et vous voudriez avoir l'exclusivité de l'embauche. Engager n'importe qui, n'importe quand et n'importe comment, même si vous vous rabattez pour dire que l'OCQ pourrait... J'ai l'impression à écouter vos propos — peut-être que j'interprète mal, vous allez avoir l'occasion de donner un élément de réponse — que vous aimeriez avoir un contrôle absolu.

Vous parlez d'un contingentement en disant que vous êtes d'accord, mais vous affirmez à peu près dans tous vos communiqués qu'il ne faut pas réduire les bassins de main-d'oeuvre. J'aimerais que vous me conciliez tout cela pour que je puisse vraiment comprendre quelque chose.

M. Dagenais: Je vais prendre la dernière affirmation que vous avez faite. On a dit tantôt qu'on voulait que les critères de classification soient adaptés au niveau ou à la conjoncture économique régionale. Au départ, je pense que cela répond à votre question à savoir si on veut des critères de classification ou si on n'en veut pas. On dit qu'ils doivent être adaptés au niveau de l'activité régionale. Dans les régions où il y a plus d'heures, qu'ils montent, dans les régions où il y a moins de travaux effectués, qu'ils baissent, mais qu'ils soient au moins adaptés.

A ce moment-là, on est certain de fonctionner avec un règlement qui a des critères d'embauche. Deuxièmement, vous partez avec la prémisse qu'un entrepreneur qui amène de la main-d'oeuvre à l'extérieur de sa région lui paie officiellement des frais de déplacement, mais qu'en réalité, le salarié remet tout cela dans ses poches à lui.

Franchement, partir avec l'affirmation ou la prémisse que la majorité des employeurs en construction qui sortent de leur région avec leurs salariés, fonctionne de façon malhonnête, je trouve...

M. Chevrette: Je vous arrête juste pour 30 secondes. Comment conciliez-vous, à ce moment-là, l'argumentation de M. Dion qui dit qu'un employeur n'a pas intérêt à amener la main-d'oeuvre de l'extérieur parce qu'il doit soumissionner au coût le plus bas pour obtenir le contrat? Essayez donc de concilier cela pour moi?

M. Dagenais: Michel va répondre à cela.

M. Dion: Je pense, M. Chevrette, que vous avez assez d'expérience avec les gens de la construction, entre autres à la commission Cliche, pour savoir comment cela se passe. C'est vrai qu'il y en a qui ont peut-être des procédures, qui ont eu des procédures plus ou moins correctes, mais je dois présumer, à l'heure actuelle, que les gens sont maintenant avertis et font les procédures normalement et suivent le décret.

Ceci étant dit, ce que j'ai voulu dire, je pense que si on comprend bien, c'est ceci. Une main-d'oeuvre qui est habituée à travailler ensemble, avec un employeur, un contremaître, son surintendant, est une main-d'oeuvre qui, même si, au point de vue monétaire, cela peut représenter certains coûts additionnels, à cause de son habitude de travailler ensemble, à cause des connaissances inter-travailleurs, à ce moment-là, cela fait que la main-d'oeuvre devient aussi productive, au point de vue coût, qu'une main-d'oeuvre qui coûterait moins cher parce qu'elle n'aurait pas de frais de pension ou autres. Je vais vous donner un exemple. Vous avez eu l'air, tantôt — ce n'est pas à moi à vous prêter une intention, je ne veux pas vous en prêter une — mais vous n'avez pas eu l'air de vouloir accepter l'argument que j'ai donné tantôt concernant le manoeuvre.

Un manoeuvre qui travaille avec un briqueteur sait comment le briqueteur travaille et sait comment le gars aime avoir son ciment. Il va finir par s'habituer à son ouvrier compétent, au briqueteur lui-même, à savoir avec quel genre de ciment il travaille. Cela peut avoir l'air bien niaiseux un argument semblable, mais cela peut vouloir dire que le gars prépare un ciment trop épais et que le briqueteur a de la misère à travailler sa brique avec cela et, à ce moment-là, il est obligé de le faire retourner brasser de nouveau le ciment ou des choses semblables. Cela a l'air peut-être insignifiant ce que je vous dis là, mais cela peut devenir, à un moment donné, une productivité qui fait gagner presque une heure par jour, presque une demi-heure par jour. La demi-heure ou l'heure qui coûte $10 de l'heure, à côté d'un $3.50 de frais de déplacement pour un bonhomme, je vous dis que ce n'est pas énorme. A ce moment-là c'est vite gagné.

Malheureusement, je ne suis pas entrepreneur, et ce serait peut-être intéressant d'avoir un entrepreneur qui vous donnerait des cas, mais on pourrait prendre d'autres gens, d'autres sortes de métier, par exemple, qui sont habitués de travailler ensemble, qui ont une méthode de travailler ensemble. Les gens qui posent des plafonds suspendus sont habitués à travailler de telle façon ensemble. Mettre un autre bonhomme dans l'équipe, cela ne fait pas que les gens deviennent incompétents, mais cela fait peut-être que les gens travaillent un petit peu moins vite ou un petit peu moins ensemble. Celui qui est en train de poser du tire-joint sur les murs ou de poser du gyproc, la façon que l'autre place ses matériaux ou lui apporte ses matériaux, la façon qu'ils travaillent entre eux fait qu'à un moment donné, je peux facilement gagner les $3.50 ou les $4 par jour de frais de déplacement par une rentabilité, une productivité accrue. Cela a l'air de détails, mais sur une échelle d'entrepreneur, cela peut avoir l'air tout simplement rentable d'employer un gars qui coûte $3 de plus par jour qu'un autre gars qui ne les coûte pas.

Ce qu'on cherche, quand on parle du règlement de placement — vous dites: On a peut-être tendance à dire qu'on ne veut pas de placement — c'est évident que l'employeur au départ, sa première pensée, c'est: Laissez-moi donc mon droit de trouver ma main-d'oeuvre comme je le veux, je vais me trouver mes bonshommes et je vais savoir où aller les chercher. Si cela consiste à appeler au local de M. X pour lui demander: Envoie-moi tes bons. En autant que tout soit fait correctement et que cela n'amène pas des petites enquêtes comme on en a déjà eu, que le gars lui en réfère réellement des bons et qu'ils sont compétents là-dedans, ils les connaissent, cela va bien à ce moment-là. C'est vrai que l'employeur voudrait avoir cette liberté.

Vous décidez, le gouvernement décide, à un moment donné, qu'il y a un règlement de placement. Dans le cadre d'un règlement de placement, il y a des choses qu'on va accepter plus et d'autres qu'on va accepter moins. Mais on dit: II y a un règlement de placement. On va vivre avec. Il y a des choses qui nous arrivent des fois et il faut apprendre à vivre avec. On va vivre avec le règlement de placement. A partir de là, pour que le règlement de placement soit viable, il faut faire en sorte que l'employeur ait au moins encore une liberté d'aller chercher ses hommes. S'il veut aller au bureau syndical, il ira. S'il pense que c'est là qu'il va avoir sa main-d'oeuvre, il va aller la chercher là. Mais s'il pense que ce n'est pas là qu'il va avoir sa meilleure main-d'oeuvre, il faut lui laisser le choix, mais laisser un réel choix. Si on lui laisse un choix qui, administrativement, n'est pas rentable, n'est pas faisable, pas parce que l'office est mauvais, mais parce que l'ordinateur est arrêté après-midi et ils ne sont plus capables de me sortir de noms, parce que les dix noms qu'ils m'ont donnés sur la liste, ils ne savent pas si c'est un gars qui fait des portes, qui est capable de pendre des portes ou si c'est seulement un gars qui est capable de faire des formes de béton. Ils ne savent pas, ils n'ont pas cela dans leur information. Vous allez me rétorquer: Va au bureau de placement syndical. Non, au départ, on pose le principe de la liberté du gars d'aller chercher sa main-d'oeuvre. On veut réellement lui donner cela. Le but qui est cherché par le règlement de placement, c'est la sécurité du travailleur. Faire

faire au vrai travailleur de la construction, le plus grand nombre d'heures possible.

Avec le règlement, à un moment donné, je suis obligé de mettre des gars dehors. Je peux aussi bien mettre un gars dehors et lui faire perdre son certificat A, parce que je suis obligé de prendre l'autre gars à côté. Cela peut arriver, des affaires comme ça. C'est évident que, comme employeurs — moi, je ne le suis pas, mais ces choses nous sont dites — le règlement doit nous faciliter l'embauche et doit faciliter la sécurité aux travailleurs de la construction.

Jusqu'à quel point? Dans le fond, c'est un peu le règlement qui décide jusqu'à quel point. Si ça consiste à donner la sécurité à Albert et la faire perdre à Arthur, qu'est-ce que vous voulez, c'est ce que le règlement peut faire à un moment donné.

M. Chevrette: Une dernière question. Vous avez affirmé tout à l'heure, M. Dagenais, que 85% des employeurs embauchaient moins que 10 employés, mais que c'est inversement proportionnel en ce qui regarde la construction comme telle, c'est-à-dire que 15% des employeurs réalisent à peu près 80% ou 85% de la construction. N'est-il pas exact que le déplacement et que les employeurs qui traînent le plus leur monde, ce sont les gros et qu'à ce moment-là, la mobilité, au plan régional, prend d'autant plus d'importance?

M. Dagenais: On sera en mesure de constater, M. le député, que souvent les gros entrepreneurs qui fonctionnent sur les plus gros chantiers ont une très forte tendance à embaucher régionalement. Vous remarquerez ce qui se passe sur les gros chantiers. Pendant qu'il y a de gros chantiers, allez à Chicoutimi et essayez de trouver de la main-d'oeuvre régionale. Vous allez vous rendre compte qu'il n'y en a pas beaucoup. La raison qui m'a fait amener cet argument, c'est que, tout à l'heure, on parlait de difficultés administratives du règlement. C'est vrai ce que vous dites, il y a énormément de salariés qui travaillent pour pas beaucoup d'entrepreneurs. Mais il y a quand même un paquet d'entrepreneurs qui, ayant peu de salariés, sont aux prises avec le règlement et qui doivent le respecter.

Si, administrativement, pour eux, ce n'est pas possible, à ce moment-là, le règlement n'est pas applicable. Par exemple, si ces entrepreneurs ne rapportent pas les embauches et les mises à pied, les salariés disponibles, vous ne les avez pas, vous n'avez pas vraiment la liste des salariés disponibles. Alors, un gros entrepreneur qui veut passer par l'office, qui veut avoir des salariés disponibles, il ne les aura pas. A ce moment-là, est-ce qu'on peut l'accuser de passer à côté du règlement?

Il peut peut-être passer à côté du règlement, parce qu'un autre entrepreneur n'a pas rapporté la mise à pied et l'embauche. C'est pour ça qu'il faut que le règlement soit applicable, autant pour les petits que pour les gros et c'est pour ça que j'ai amené cet argument.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, j'aurais une seule question. Je ne voudrais pas d'abord nier le fait que les entrepreneurs en question, quels qu'ils soient, ont comme but d'avoir un profit d'un contrat donné et qu'ils doivent mettre toutes les chances de leur côté, étant donné qu'ils sont à la soumission, avec une concurrence parfois assez féroce. Par contre, tantôt, en vous écoutant, je pense plutôt que c'était M. Dion, vous avez mentionné un souhait que faisait l'ensemble des entreprises, qu'elles devraient avoir la possibilité de choisir leur main-d'oeuvre en entier, que ce serait souhaitable pour chacune de celles-là. Vous vous êtes rendu, forcément, jusqu'aux manoeuvres, là où il y avait des bénéfices certains.

Je pense que c'est une question que j'avais posée cet après-midi, relativement à l'article 12.12 à M. Bourdon, en ce qui concerne les "key-men". Le ministre a fait un peu la même réflexion tantôt. Dans l'esprit du législateur, un "key-man", c'est quand même quelqu'un qui est assez spécialisé dans une matière donnée. Je voudrais, en passant, faire référence à une expérience que j'ai vécue pendant quelques années, comme titulaire des Transports, étant en contact avec l'ensemble des entrepreneurs, petits, moyens ou gros. C'est indiscutable que je verrais mal les syndicats ou l'OCQ ne pas faire le nécessaire pour permettre à un employeur, prenons le cas d'une nivelleuse en particulier, Dieu sait comment il est difficile de trouver un opérateur de niveleuse très compétent, qui va donner à la route un "grade" ou un nivelage assez valable. Si c'est un débutant, il va reprendre le même travail à quatre ou cinq reprises avec des machines forcément assez dispendieuses.

Je ne suis pas capable de saisir jusqu'où vous voudriez vous rendre, parce que les hommes, les spécialistes dans une matière donnée, c'est un peu logique, une personne qui les a eus à son emploi pendant des années, qui a connu la valeur de ces gens, le rendement qu'ils ont donné, il serait souhaitable qu'elle puisse les amener pour les différents travaux pour lesquels elle soumissionne. (19 h 30)

Mais quand vous vous rendez jusqu'à nous dire que même la main-d'oeuvre journalière, que je ne voudrais pas mésestimer, c'est quand même marginal... D'après l'expérience qu'on a connue sur l'ensemble des chantiers routiers dans la province, par $400 millions, $500 millions par année, pour un entrepreneur petit ou gros, à moins que je n'aie eu une mauvaise perception à ce moment-là, je n'ai jamais vu des difficultés fondamentales et formidables de la part des entrepreneurs à ce qu'ils favorisent la main-d'oeuvre régionale et parfois même chez les opérateurs de certaines machineries moins dispendieuses les unes que les autres, des "payloader" et ces choses-là.

Je ne pense pas que le "key-man", ce soit l'ensemble du personnel donné d'une entreprise. Cela doit se limiter. M. Bourdon n'en a pas fait une affirmation, mais j'ai cru comprendre que les "key-men", c'étaient quand même des gens qui avaient une spécialité donnée, qui pouvaient difficilement être remplacés, sans que la personne connaisse les qualificatifs que pourrait posséder un remplaçant. C'est cela qui est dans mon esprit. Aller plus loin que cela, je pense que ce serait quand même assez charrier et peu protéger la main-d'oeuvre régionale dans le partage des tâches.

C'est une opinion que j'émets.

M. Dagenais: Ce qu'il faudrait réaliser, c'est que le fait d'embaucher régionalement, nous ne sommes pas contre cela. Au contraire, cela se fait comme cela. Cela se fait comme cela dans la majorité des cas, selon nous. Selon les cas qu'on a vécus, on parle avec des entrepreneurs à tous les jours et c'est comme cela que cela se passe, sauf qu'il y a d'autres éléments qui entrent en ligne de compte.

La raison qui motivait notre explication, c'est que, au départ, c'est une question de perspective. Nous autres, le règlement, on le voit comme protégeant les vrais travailleurs de l'industrie de la construction. L'embauche régionale, que ce soit un vrai travailleur d'une région plutôt qu'une autre, pour nous autres, c'est un peu plus secondaire. Je ne dis pas que c'est complètement à dédaigner comme fait, mais cela devient un peu accessoire si on prend l'autre argument ou l'autre explication qui est celle de la confiance de l'employeur dans ses salariés. Cela arrive qu'il y a des gars en qui il a confiance, qu'il ne veut pas briser des équipes de travail et il veut les amener.

Evidemment, quand vous prenez un contrat et que vous soumissionnez, si cela vous amène à changer de région et que vous êtes obligé de payer des frais de déplacement... L'autre entrepreneur, qui a soumissionné dans sa région, avec ses gars, comment cela se fait-il qu'il n'ait pas eu le contrat? On peut peut-être se poser des questions. Et nous autres, nous ne sommes pas d'accord sur le point de vue selon lequel les entrepreneurs reçoivent, par en arrière, l'argent qu'ils ont donné d'une main. Cela peut se faire, mais ce n'est pas la règle.

A ce moment-là, il faut l'expliquer, cela découle de la logique. Dans certains cas, c'est plus rentable pour une entreprise de le faire, mais, dans d'autres cas, c'est plus payant d'embaucher régionalement. Et dans la pratique, on constate que c'est plus souvent payant d'embaucher régionalement, du moins pour de la main-d'oeuvre qui est non qualifiée. Pour la main-d'oeuvre qualifiée, on devrait donner une autre explication à ce niveau. Cela arrive beaucoup plus souvent, comme vous le disiez, pour un opérateur de "grader"; l'entrepreneur, indépendamment des frais de déplacement que cela lui coûte, amène le gars, parce que c'est tellement une question de compétence et d'efficacité que cela va de soi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, j'aurais une courte question, à la suite de ce qui a été dit...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud, un instant. Il y a peut-être un complément de réponse.

M. Dagenais: J'aimerais ajouter une chose. Je pense que le conflit pour se comprendre dans ce que j'ai dit tantôt — c'est peut-être moi qui me suis très mai expliqué... Quand je parle de transport de main-d'oeuvre, de garder de la main-d'oeuvre de l'extérieur d'une région, je ne dis pas, lorsque le gars veut embaucher, qu'il s'en va embaucher en dehors de la région. C'est évident que l'employeur qui a à embaucher de la main-d'oeuvre, pour un contrat qui est fait à Québec, va embaucher de la main-d'oeuvre de Québec.

Le problème ne se pose pas au moment où j'embauche. L'employeur embauche, normalement, régionalement. On peut presque dire, dans tous les cas, qu'on embauche régionalement. Le problème est né du fait que le règlement nous fait mettre des gars à pied et là, je suis obligé d'embaucher plus. Mais, si je pouvais garder ceux que j'ai à mon emploi et de combler là, l'embauche que j'ai à faire serait faite régionalement et cela ne poserait aucune difficulté.

Il faut bien se comprendre. Quand je parle d'embauchage pour les employeurs, l'embauchage se fait, normalement, régionalement. Du moins, il y a très peu de justification d'aller le faire à l'extérieur de la région, de faire de l'embauchage réel, d'engager un nouveau gars. Mais si c'est un gars que j'ai déjà à mon emploi et que je l'amène avec moi, du moment que je ne suis pas obligé de le mettre à pied pour le remplacer, à ce moment-là, je vais transporter la main-d'oeuvre que j'ai et l'embauchage nouveau que je devrais avoir à faire pour le contrat va être fait régionalement. Je pense que, normalement, c'est ce qui se fait chez les employeurs.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci. J'aurais une question à poser. Je parlerais d'un exemple bien simple, pour que tout le monde comprenne, moi le premier disons. Quand on parle à un moment donné d'embauche régionale, les modifications que le ministre parle d'apporter au règlement de placement veulent protéger la main-d'oeuvre régionale. Prenons le cas de la construction d'une école polyvalente. Je pourrais prendre l'exemple de la construction d'un hôpital, d'un centre d'accueil, d'un centre d'hébergement ou d'un HLM, mais prenons le cas de la construction d'une école polyvalente. Selon vous, compte tenu de votre expérience et de ce que vous venez d'exprimer aujourd'hui, quel est le pourcentage de la main-d'oeuvre qui pourrait être

locale, pour la construction d'une école polyvalente?

M. Dagenais: Je dirais que la majorité, la majeure partie de la main-d'oeuvre sur ce chantier sera locale, dans la majorité des cas.

M. Roy: Est-ce cela qui se fait jusqu'à maintenant?

M. Chevrette: Allez voir l'école anglaise de Joliette.

M. Dagenais: Oui, mais M. le député, vous m'amenez des cas précis comme cela.

M. Chevrette: Mais, le contrat de la Domtar de $12 millions, ce n'est pas un petit contrat. Il n'y a pas un gars de Joliette.

M. Dagenais: Oui, mais on a d'autres cas où c'est 100% de la main-d'oeuvre régionale et d'autres cas où c'est 100% de l'extérieur, mais je dis, généralement parlant que, la majeure partie de la main-d'oeuvre est embauchée régionalement.

M. Chevrette: Savez-vous, M. Dagenais, que ce ne sont même pas les leaders syndicaux qui font des pressions, ce sont les députés ruraux, ce sont les gars du milieu qui arrivent dans nos bureaux et disent: Ecoutez donc, Domtar vient de construire pour $12 millions, on n'a rien eu. Le Ciment indépendant vient de construire pour $6 millions, on n'en a presque pas, un ou deux. Ils disent: Là, la construction de l'hôpital s'en vient pour $8 millions, va-t-on avoir quelque chose?

M. Pagé: Est-ce à dire que vous voudriez avoir le contrôle du placement?

M. Chevrette: Non, c'est une vieille tradition, on veut que les gars se donnent des instruments.

M. Mailloux: Votre directive.

M. Pagé: On est en train de s'engager.

M. Chevrette: II ne faudrait pas oublier, M. le député de Portneuf, que la tradition du placement étudiant qui avait été le propre d'un député libéral, c'est disparu.

M. Pagé: Oui, dans ce temps-là, mais dites-vous bien que...

Le Président (M. Jolivet): Une minute! Une minute! D'accord. Cela fait plus d'une heure...

M. Pagé: C'est là qu'il y a des gars d'une autre région qui vont travailler à Joliette.

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Mailloux: ... plus sophistiqué.

Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de tout cela, je vous...

M. Pagé: M. le Président, laissez-nous donc aller, cela commence.

Le Président (M. Jolivet): Cela finissait. Je vous remercie de votre participation.

M. Johnson: M. le Président, en terminant, pour remercier les gens de la FTQ et de la CSN et de l'AECQ, je voudrais simplement dire que ce que je retiens sur ces questions, entre autres, sur l'embauche régionale, c'est qu'on a besoin d'expertise. Je comprends, je sais que c'est le cas du député de Joliette-Montcalm, du député de Beauharnois et de quelques autres qui ont assisté, dans certains coins, à des choses qu'ils considèrent comme inadmissibles dans leur milieu, mais je pense qu'il faut l'évaluer de façon globale avant de prendre des décisions finales dans ce cadre-là.

C'est pour cette raison que, M. le Président, je vous inviterai donc à faire ajourner nos travaux, pour que nous entendions, demain matin, à 10 heures, le commissaire au placement ainsi que l'Office de la construction du Québec et que nous terminions, en principe, si je comprends bien, nos travaux, demain midi...

M. Pagé: 12 h 30. M. Johnson: ... à 13 heures. Une Voix: 12 h 30, 13 heures. M. Johnson: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Je vous remercie...

M. Pagé: M. le Président, je voudrais moi aussi, évidemment...

M. Johnson: Ils déposent leur mémoire. M. Roy: D'accord, 13 heures, cela va.

M. Pagé: ... m'adresser au ministre pour remercier les intervenants d'aujourd'hui. Merci beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): Merci. La commission ajourne ses travaux à demain 10 heures.

Fin de la séance à 19 h 39

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