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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le mardi 21 juin 1977 - Vol. 19 N° 129

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des amendements au décret de la construction


Journal des débats

 

Etude des amendements au décret de la construction

(Dix heures vingt-trois minutes)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour étudier les amendements que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre compte apporter au décret de la construction.

Les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette), M. Couture (Saint-Henri); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplacé par M. Mercier (Berthier); M. Forget (Saint-Laurent), M. Godin (Mercier), M. Gosselin (Sherbrooke); M. Jolivet (Laviolette) remplacé par M. Gagnon (Champlain); M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lefebvre (Viau), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Pagé (Portneuf), M. Roy (Beauce-Sud). M. Lavigne (Beauharnois) est remplacé par M. Brassard (Lac-Saint-Jean).

Je proposerais comme rapporteur le député de Berthier, M. Mercier. Adopté?

M. Fontaine: A l'unanimité.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

Exposé du ministre

M. Jacques Couture

M. Couture: M. le Président, permettez-moi d'abord de souhaiter la bienvenue aux membres de cette commission et à tous les intervenants dans le monde de la construction.

A cette étape de la commission parlementaire, nous entreprenons quand même une étude fort importante, quand on considère le nombre de travailleurs de la construction qui sont régis par le décret. Nous sommes tous conscients que l'objectif que nous recherchons les uns et les autres est, effectivement, de promulguer un décret final qui puisse, autant que possible, satisfaire toutes les parties, protéger les droits des travailleurs et apporter la paix industrielle dans le monde de la construction. Je compte beaucoup sur la collaboration de ceux qui sont venus exposer leur point de vue aux membres de la commission, pour que nous soyons tous disponibles et disposés à écouter ceux qui vivent les problèmes de la construction et à nous éclairer.

M. le Président, avant d'entendre les parties convoquées à la présente commission parlementaire sur les raisons motivant leur impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifica- tions apportées au décret, je désire rappeler brièvement, pour le bénéfice des membres de cette commission, les diverses étapes franchies depuis l'expiration du décret précédent jusqu'à ce jour et ainsi expliquer les motifs pour lesquels nous sommes ici réunis. Ce qui nous réunit avant tout c'est l'article 18 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Conformément aux mécanismes de négociation fixés par la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, l'AEQ, et le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction sont habilités à négocier une convention collective en vue de son extension juridique par voie de décret.

C'est ainsi que, du mois de mars au mois d'octobre 1976, les parties ont entrepris des négociations qui ont conduit à la signature de la convention collective intervenue le 22 décembre 1976.

Par la suite, l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, l'AEQ, a adressé le 5 janvier 1977 une requête au lieutenant-gouverneur en conseil visant à faire décréter que la convention collective intervenue s'applique à l'ensemble de l'industrie de la construction du Québec.

Faisant suite au dépôt de cette requête, ladite convention collective a été publiée dans la Gazette officielle du Québec, le 28 janvier 1977, avec un avis de la réception de la requête en demandant l'extension, lequel avis comportait que toute objection devra être formulée dans les 30 jours de sa publication.

Des objections furent formulées en assez grand nombre et ont fait l'objet d'un examen par les fonctionnaires du ministère qui, en outre, ont procédé à une étude des aspects juridiques de la convention collective dans son ensemble.

Mes fonctionnaires et moi-même rencontrèrent les parties en cause afin de les informer des dispositions susceptibles de comporter des irrégularités au point de vue légal. C'est le privilège du ministre de demander au lieutenant-gouverneur en conseil, quand il recommande l'extension juridique, d'étudier cette convention collective et de recommander les modifications qui s'imposent.

Par la suite, certaines modifications aux dispositions de la convention collective furent agréées par les parties telles que la clause relative aux mesures anti-inflationnistes.

Dans un premier temps, à la suite des objections, nous avons analysé le document, nous avons proposé certaines modifications, nous avons demandé aux parties de se réunir pour s'entendre, si possible, sur ces modifications, et cette étape a été franchie.

Ces modifications ont ensuite été incorporées au décret qui a été adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil le 20 avril 1977 et qui est entré en vigueur le 27 avril dernier, date de cette publication dans la Gazette officielle, puisqu'il y avait un certain nombre de modifications où il y

avait déjà eu acceptation qui pouvaient être intégrées. Il y avait des modifications d'ordre directement discriminatoire qui pouvaient aussi être effectives. C'est ce qu'on a fait pour le décret qui a paru dans la Gazette officielle le 27 avril dernier.

Par la suite, dans une communication en date du 2 juin 1977, je soumettais à l'agrément des parties d'autres modifications au décret en vue de leur adoption par le lieutenant-gouverneur en conseil, c'est-à-dire une série de modifications qui n'avaient pas été acceptées auparavant. Essentiellement, il s'agit de trois ordres de modifications. Premièrement, des modifications de forme; deuxièmement, des modifications de fond concernant la légalité de certaines dispositions du décret; troisièmement, des modifications en vue d'introduire dans le décret des dispositions qui selon l'une ou l'autre des parties auraient été omises dans la convention collective qui a servi de base au décret. Je crois que c'est d'ailleurs une protection qu'on doit qualifier d'excellente que la loi nous donne, étant donné qu'il s'agit d'une convention collective signée dans un domaine qui regroupe tellement de travailleurs, où il y a aussi plusieurs associations d'employeurs et plusieurs syndicats qui, par la loi, sont réunis, c'est-à-dire que pour négocier on donne un mandat strict à deux instances bien précises. Il reste que ce domaine est tellement vaste et complexe que c'est, je dirais, normal qu'éventuellement, avant d'arriver au texte final, on reçoive des représentations et que le ministre responsable juge que quelques omissions importantes devraient être présentées comme telles comme modifications.

Ces trois séries de modifications dont j'ai parlé ont été suggérées non pas dans le but de faire échec à l'esprit de la convention collective intervenue entre les parties, mais plutôt dans le but de corriger les vices de forme et les irrégularités d'ordre légal qui pouvaient exister dans le décret, ainsi que de réparer certaines omissions qui ont été portées à mon attention.

Là-dessus, M. le Président, je voudrais vraiment apporter plus de précisions ou, du moins, avant de commencer cette commission parlementaire, vous présenter l'esprit dans lequel j'aimerais qu'elle se déroule.

Je pense qu'effectivement il y a eu une convention collective négociée et signée. L'économie des relations de travail dans le domaine de la construction et, d'ailleurs, dans l'ensemble des relations de travail au Québec veut et postule qu'avant tout nous respections une convention collective négociée et signée. Je pense que c'est le document de base; c'est le premier respect que nous devons avoir. Je crois qu'il faut dire, dès maintenant, que cette commission parlementaire n'a d'aucune façon comme but, de renégocier la convention collective signée par les parties en présence lors des dernières négociations.

C'est plutôt — je pense qu'il faut insister là-dessus — pour écouter les intervenants, les parties qui, devant ce document de base, peuvent éventuellement signifier que les modifications que nous proposons... En effet, si nous proposons des modifications, c'est avant tout, comme la loi nous le demande, pour permettre une concordance légale entre la convention collective dans le secteur de la construction et les lois générales et aussi, selon l'article 18, éventuellement, pour réparer, si c'est nécessaire dans l'intérêt public, comme le dit la loi, certaines omissions. Je crois que c'est important, M. le Président, d'insister sur le fait que, pour nous, avant tout, il s'agit de respecter une convention collective et que nous ne sommes pas ici pour renégocier cette convention collective.

En effet, si les modifications concernant la légalité de certaines dispositions au décret proposé se trouvent à altérer la libre volonté des parties, de même que l'esprit de la convention collective intervenue entre elles, c'est précisément parce que les parties auront été au-delà du cadre de la loi et, partant, à rencontre de l'idée que le législateur se fait de la paix sur les chantiers de construction.

Eventuellement, vu que le secteur de la construction est tellement complexe, qu'il y a tellement de ramifications, si on avait oublié de prévoir ce qu'il arriverait dans tel cas précis, avec telle formulation dans la convention collective, on s'aperçoit, devant ce document, de fait, qu'il y a un oubli. Je pense que tout le monde comprendra que c'est notre responsabilité d'y porter remède, d'ailleurs en suivant les étapes où les gens réfléchissent sur ces modifications, se font entendre. En dernier lieu, c'est le gouvernement qui a la responsabilité de statuer là-dessus.

Certaines des modifications proposées ont obtenu l'accord des parties alors que celui-ci est absent pour d'autres. Avant de procéder, tout à l'heure, on pourra lire la série de modifications qui sont déjà acceptées. On a un nombre considérable où les parties ont reconnu de fait qu'il fallait corriger des expressions ou préciser telle ou telle formule.

Devant cette situation, il a été décidé de convoquer les parties conformément à l'article 18 de la loi pour leur permettre d'exposer des raisons motivant leur impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications à apporter au décret.

Je me permettrai de lire attentivement cet article, parce que je crois que c'est lui qui justifie notre commission parlementaire et c'est lui qui, au départ, nous indique les règles du jeu et l'esprit dans lequel elles doivent se dérouler. Je lis l'article 18 de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut prolonger ou abroger le décret, avec le consentement de l'association d'employeurs et celui des associations de salariés représentatives à un degré de plus de cinquante pour cent. "Il peut aussi, sur la recommandation du ministre, modifier le décret avec le consentement de l'association d'employeurs et celui des associations de salariés représentatives à un degré de plus de cinquante pour cent et après publication d'un avis à cet effet dans la Gazette officielle du Québec." Jusqu'à maintenant, il faut l'accord évident des parties. "Les dispositions de l'article 17 s'appliquent au décret d'abrogation ou de modification, mais non au décret de prolongation, lequel entre en vi-

gueur à compter de son adoption mais doit être publié sans délai dans la Gazette officielle du Québec". Voici le paragraphe le plus important, c'est la raison pour laquelle je le lisais. "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut aussi, sur la recommandation du ministre, prolonger, abroger ou modifier le décret sans le consentement de l'association d'employeurs ou des associations de salariés quand il est d'avis que dans l'intérêt public cette solution est la seule qui puisse remédier à la situation existante.

Il ne peut toutefois modifier ainsi le décret sans que ces associations ne soient invitées à être entendues devant la commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications à apporter au décret."

Je pense qu'il faut bien insister là-dessus, la phrase doit se lire dans son entier. "Il ne peut toutefois modifier le décret sans que ces associations ne soient invitées à être entendues devant la commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications à apporter au décret." Nous sommes devant ce fait, nous voici devant une convention collective qui a déjà eu une première publication par décret; il y a des modifications surtout d'ordre légal que le gouvernement suggère d'introduire, il y a mésentente des parties quant à ces modifications et le gouvernement ne peut modifier ce décret sans entendre les parties qui viennent nous dire les raisons pour lesquelles elles ne sont pas arrivées à une entente.

Oans le fond — vous me permettrez d'insister encore là-dessus — les parties qui auront à venir dire, au cours de la commission parlementaire, les raisons pour lesquelles elles n'arrivent pas à une entente quant à telle modification ne viennent pas négocier devant nous. L'association des employeurs et le conseil provincial ne seront pas devant nous pour négocier des dispositions, d'aucune façon; ils sont ici pour nous éclairer sur les raisons pour lesquelles ils ne veulent pas telle modification. Pour nous, membres de la commission parlementaire, ce n'est pas indifférent du tout —j 'insiste aussi là-dessus — d'entendre ces représentations. Comme ces parties ont été les responsables de cette convention collective, elles ont, évidemment, fort intérêt à ce que le document de la convention collective soit respecté.

Si, effectivement, tel que la loi le prescrit, le gouvernement croit nécessaire de modifier telle et telle disposition, je pense que c'est leur droit le plus strict de faire valoir toutes les raisons pour lesquelles il ne faudrait pas faire ces modifications. Donc, M. le Président, les parties auront à nous dire pourquoi telle et telle modification proposée, elles ne les acceptent pas, elles ne sont pas arrivées à une entente pour les accepter et, du moins dans cette étape, c'est tout ce que nous pouvons recevoir, c'est-à-dire entendre leurs raisons et leurs représentations face aux modifications proposées.

M. le Président, je crois quand même, et c'est ce qui est important, que ces exposés nous permettent à tous d'avoir une connaissance plus complète du dossier. Entre autres, pour le ministre, c'est un éclairage absolument essentiel qui lui permettra de faire les recommandations appropriées au lieutenant-gouverneur en conseil à qui il revient, en dernier ressort, de décider de donner suite à ce qu'il jugera à propos dans l'intérêt public.

Dans un deuxième temps, étant donné d'ailleurs que la commission parlementaire n'a pas comme mandat de décider quoi que ce soit immédiatement, n'ayant aucun mandat là-dessus, c'est-à-dire qu'on ne peut pas, à travers cette commission parlementaire, décider que telle modification, on la reçoit ou on ne la reçoit pas — on n'a pas de mandat pour cela, on a le mandat de recevoir des représentations — étant donné, dis-je, qu'on est quand même dans une commission parlementaire qui étudie les problèmes de la construction et qu'à travers ce mandat de modifications proposées qui pourraient effectivement être introduites dans le décret, je pense, si les membres de la commission parlementaire sont d'accord avec ma proposition, que nous devrions peut-être sortir de l'esprit purement légaliste et accepter d'entendre des parties ou des syndicats autres que ceux qui sont prévus à cette commission parlementaire, ne serait-ce que pour nous éclairer davantage.

Je crois que c'est dans l'esprit de cette commission parlementaire de nous donner toute l'information nécessaire pour proposer aux travailleurs de la construction un décret qui se tient, qui n'oublie rien.

Sachant que cela ne préjuge en rien, parce qu'il n'y a pas de négociation ici, il n'y a pas de prise de décision, il y a avant tout représentations des parties et demandes d'informations additionnelles, M. le Président, la proposition que je fais à ce stade-ci, c'est qu'en plus d'entendre les parties concernées venir nous dire les raisons pour lesquelles elles ne reçoivent pas telle ou telle modification, on devrait, dans cet esprit ouvert et justement pour favoriser la paix dans le monde de la construction, entendre des parties ou des individus qui, selon la décision, chaque fois, de la commission, aimeraient nous éclairer sur ce décret.

M. le Président, j'arrêterai ici mon intervention, en proposant quand même que nous procédions de la façon suivante. Il y a, de fait, une série de modifications qui avaient été proposées qui ont été acceptées et que je peux énumérer pour qu'on en prenne acte au journal des Débats. A la suite, je pense que, dans un premier temps, vous pourriez, M. le Président, appeler les dispositions du décret où des modifications ont été proposées qui n'ont pas été acceptées, où il n'y a pas eu d'entente entre les parties. A ce moment, dans l'appel de chacune de ces clauses, on pourrait entendre l'une et l'autre des parties.

Dans un deuxième temps, c'est ce que je disais tout à l'heure, avec l'accord des membres de la commission, je proposerais que l'on puisse, éventuellement, entendre d'autres parties qui vou-

draient nous éclairer aussi sur ce décret. Alors, M. le Président, si vous n'y voyez pas d'objection, je vais d'abord lire les modifications qui ont été acceptées des deux parties à la négociation, soit l'association des employeurs et le Conseil provincial des métiers de la construction.

En se référant au document paru le 27 avril 1977, le décret de la construction, les modifications acceptées sont les suivantes: 1 a), 1 b), 1 c), 1 f), 1 h), 2, 5, 6, 7, 8 a), 8 b), 10, 11 b), 13.

M. Bisaillon: Le ministre semble oublier qu'on n'a pas de sténographes.

M. Couture: Cela achève. 14, 15, 16, 17, 18, 19, 21, 22, 23, 24 — c'est passionnant lire cela — 25, 26, 27, 28, 30, 31, 32, 33, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41 et 42.

M. le Président, les modifications proposées qui ont été rejetées parce qu'il n'y a pas eu entente entre les parties sont les suivantes: 1 d), 1 e), 1 g), 3, 4, 8 c), 9, 11 a), 12, 20, 29, 34, 43, 44, 45 et 46.

M. le Président, je n'aurais pas objection à ce que les membres de la commission, s'ils le souhaitent, apportent quelques commentaires à l'introduction avant de procéder à l'appel des articles.

Une Voix: ... c'est notre droit.

M. Couture: Alors, je suis très heureux de vous l'accorder.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

Remarques de l'Opposition, M. Claude Forget

M. Forget: Merci, M. le Président. Je veux d'abord me joindre aux remarques de bienvenue que le ministre a adressées aux deux parties et aux personnes qui composent ces deux parties qui se présentent ce matin devant la commission. C'est évident que nous sommes légalement extrêmement intéressés à entendre leur point de vue sur les points qui demeurent en litige dans ce projet de modification. Nous souhaitons que la commission puisse leur donner toutes les facilités possibles pour exprimer ces points de vue.

Pour ce qui est de l'objectif qui est imparti à la commission par l'article 18, qu'il me soit permis de dire, M. le Président, qu'il faut se situer dans le contexte général des lois du travail, là ou les séances de cette commission parlementaire et, en particulier, le régime des relations de travail dans l'industrie de la construction.

Le ministre l'a d'ailleurs mentionné au début, le régime général qui prévaut dans le domaine des relations de travail dans tous les domaines et tous les secteurs continue d'être et continuera, j'espère, d'être le régime qui se définissent les parties elles-mêmes. Dans la convention collective et la loi des parties et dans tous les autres secteurs, il n'existe pas de possibilités pour l'intervention d'une tierce personne, du moins, pas des possibilités comparables à celles que l'on retrouve dans cette Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction.

Même dans ce régime, on prévoit une convention collective négociée, mais malgré tout il y a une tierce partie que constitue le gouvernement, tierce partie qui est vaguement présente au moment de la négociation et qui peut, et c'est cela qui est le plus important, intervenir alors même que sont acquis les résultats d'une négociation pour venir en modifier le sens ou l'application, les dispositions mêmes qui ont été l'objet d'entente entre les parties.

Le but de la commission parlementaire tel qu'on peut le voir dans l'article 18 et les articles associés dans la Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction, c'est de permettre par une commission parlementaire de placer dans un relief particulier le sens de l'intervention gouvernementale pour modifier une convention collective ainsi négociée.

Comme le ministre l'a souligné, le but de la commission n'est pas d'en arriver à des décisions. De toute façon, on sait, puisque le problème s'est posé à quelques reprises cette année en particulier, que, lorsque le gouvernement dispose d'une solide majorité au Parlement, les actions qui se font au Parlement, de toute manière, engagent pleinement et complètement la responsabilité gouvernementale. Non seulement cela est-il vrai en général pour l'action de toutes les commissions parlementaires, mais ce l'est avec particulièrement plus de vigueur pour ce qui est de l'intervention du ministre du Travail et du Conseil des ministres dans l'approbation de décrets relatifs aux conditions de travail dans l'industrie de la construction. La loi place de façon très spécifique la responsabilité sur les épaules du ministre du Travail et de ses conseillers, et, à partir d'eux, sur le Conseil des ministres, le lieutenant-gouverneur en conseil, pour déterminer les conditions de travail de façon finale et définitive, et ceci, même en l'absence d'une entente entre les parties quant à la nature de ces modifications. Précisément le but qui nous réunit ce matin et qui nous réunira à d'autres occasions cette semaine, c'est d'examiner les raisons qui font que les deux parties en présence n'ont pas pu s'entendre sur un certain nombre de ces modifications.

Le but de l'Opposition officielle, M. le Président, ne sera rien d'autre que de mettre en évidence les raisons des parties pour ne pas donner leur adhésion à ces modifications et de faire ressortir également, et peut-être par contraste, les raisons qu'a pu avoir le gouvernement, le ministre en particulier, pour proposer de telles modifications et les maintenir en dépit de l'absence d'une entente entre les parties. C'est donc dans cet esprit que nous allons poser nos questions aux parties qui sont devant nous en commission parlementaire et au ministre lui-même, de manière à faire bien ressortir les raisons qui motivent l'intervention gouvernementale dans ce cas puisqu encore une fois, et je le répète pour terminer, il s'agit d'un régime d'exception où des conditions de travail sont déterminées par décret et non pas par l'entente des parties. Il est donc important de

connaître les raisons qui font que le gouvernement veut s'éloigner de ce que les parties ont librement convenu entre elles.

Pour ce qui est de la question qui a été posée par le ministre relativement à la présence en commission parlementaire de groupes qui ne sont pas spécifiquement prévus dans l'article 18, dans les circonstances dans lesquelles nous nous trouvons, c'est-à-dire l'absence d'accord, je préfère réserver mon jugement jusqu'à ce que nous ayons pu entendre, sur ce point en particulier, l'opinion des parties que la loi désigne.

La raison pour ce désir d'entendre, d'abord, les parties s'exprimer sur cette question est basée sur le caractère exceptionnel de la procédure dans laquelle nous sommes engagés. Comme je l'ai dit tout à l'heure, puisque la loi des parties est normalement constituée par la seule convention collective qui les régit, comme nous sommes dans un régime d'exception qui permet l'intervention gouvernementale directe pour modifier une convention collective, comme les dispositions de la loi qui permettent un droit de se faire entendre, qui donnent un droit de se faire entendre aux parties sont particulièrement importantes, qu'elles privilégient, à bon droit je pense, au moins dans le texte de loi, les parties qui, autrement, auraient le droit de décider de façon finale des conditions de travail, il m'apparaît normal que si on veut étendre à d'autres groupes la possibilité de se faire entendre l'on sache d'abord quelle est l'opinion qu'entretiennent à cet égard les deux parties qui sont présentes devant nous.

Je demanderais que la commission puisse, préalablement à l'étude des articles en suspens, en quelque sorte, dans le projet de modification, nous permettre d'avoir le point de vue, à la fois de l'Association des entrepreneurs et du Conseil provincial des métiers de la construction. Là-dessus, M. le Président, je n'ai pas, pour le moment du moins, d'autres remarques de caractère général à faire puisqu'il m'apparaît plus approprié et plus urgent d'entendre les parties sur ce point général, de procédure en quelque sorte, et subséquemment sur chacun des points en litige.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: M. le Président, en tant que représentant de la deuxième Opposition, je suis également heureux de voir que toutes les parties autorisées à négocier ce décret sont ici présentes aujourd'hui et voudront bien nous apporter leurs commentaires. Je voudrais également, au début de cette séance de la commission, dire que je suis ici l'humble représentant du député de Johnson qui, sans doute, aurait bien aimé participer à cette commission parce qu'il a déjà été ministre du Travail et que ces problèmes le touchent particulièrement. Je tâcherai d'apporter ma contribution, si minime soit-elle, pour que ces travaux aient de très bons résultats.

Autant nous avons accueilli avec joie la nou- velle, l'automne dernier, que les employeurs et les travailleurs de l'industrie de la construction avaient réussi à s'entendre sur une convention collective, autant, aujourd'hui, nous regrettons que le ministre invoque le quatrième alinéa de l'article 18 de la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction pour modifier unilatéralement certaines parties de cette convention. Lorsque, à l'Assemblée nationale, on a adopté cet article 18, il y a à peine deux ans, à la fin de juin 1975, et le Parti québécois et l'Union Nationale avaient voté contre ce pouvoir exorbitant confié au lieutenant-gouverneur en conseil. On invoquait alors, du côté de l'Opposition, qu'il fallait faire confiance aux parties et laisser aux parties la possibilité d'établir les règles du jeu entre elles. Nous n'avons pas changé d'idée depuis ce temps et nous continuons de dire que l'intervention du lieutenant-gouverneur en conseil n'est pas une solution valable. Ce n'est pas en invoquant l'intérêt public, malgré toute la bonne volonté du ministre, qu'on va réussir à remettre de l'ordre dans la construction. Car il ne faut pas se leurrer, même si c'est relativement tranquille actuellement sur les chantiers de construction, cela ne veut pas dire que tous les problèmes de la construction sont réglés et que nous sommes à l'aube d'un nouveau départ.

Bien au contraire, M. le Président, les problèmes demeurent entiers, que ce soient des problèmes de formation professionnelle quand à l'apprentissage, des problèmes de placement, des problèmes de sécurité d'emploi ou la formule de négociation prévue par la loi. Ces problèmes restent entiers. En somme, nous avons l'impression, comme le député de Joliette-Montcalm et adjoint parlementaire au ministre du Travail l'a déclaré à plusieurs reprises publiquement, que tout est à refaire dans ce domaine des relations de travail.

Bien que nous soyons réunis ici aujourd'hui pour entendre les parties intéressées sur les modifications que le ministre entend apporter au décret, je souhaite qu'après avoir entendu d'abord le ministre, la partie patronale et la partie syndicale, cette commission ait comme résultat non pas de sanctionner une intervention unilatérale du gouvernement, comme le permet l'article 18, mais bien que les délibérations de cette commission soient une source de rapprochement entre les trois parties concernées pour qu'on arrive à une solution négociée dans un avenir relativement rapproché.

Le ministre a eu l'amabilité de nous communiquer à l'avance un certain nombre de documents pour nous permettre de mieux saisir la nature des différents problèmes qui opposent les parties et des solutions que le gouvernement propose pour remédier à la situation. A la lecture de ces textes, je constate qu'il y a vraiment quatre points majeurs sur lesquels nous devrons délibérer au cours de cette session. Premièrement, le problème des artisans, quant à la définition du mot "artisan". Deuxièmement, le problème des mécaniciens d'ascenseur, puisque rien de négocié n'a été prévu quant aux clauses particulières qui s'appliquent à ce groupe de travailleurs. Troisiè-

mement, les définitions d emplois, telles que stipulées à la sous-annexe b) de l'annexe b) du décret. Quatrièmement, les clauses consenties aux électriciens lors des négociations entre l'association syndicale et l'association patronale.

Certes, il s'agit de points techniques d'une grande importance et dont l'enjeu peut avoir un effet marquant sur le climat des relations de travail dans l'industrie de la construction. Je suis prêt à entendre les parties sur ces points qui ont retenu mon attention d'une façon particulière. Je compte apporter mon humble contribution, comme membre de cette commission, pour qu'on en vienne à une solution négociée et non imposée.

En terminant, je voudrais rappeler au ministre que, lors de l'étude des crédits, il avait pris l'engagement, suite aux interventions du député de Johnson, qu'au cours de la présente commission il serait possible d'aborder d'autres sujets qui concernent cette industrie, tels que le placement, la sécurité d'emploi, la sécurité au travail et la formation professionnelle. J'aimerais savoir du ministre, avant que nos travaux ne débutent, si cet engagement tient toujours. Sur ce, M. le Président, je suis prêt, après avoir entendu les commentaires du ministre là-dessus, à entendre les parties. Concernant le problème qu'on a soulevé tout à l'heure d'entendre d'autres parties que celles qui sont directement concernées, je joins ma voix à celle du député de Saint-Laurent pour réserver nos commentaires là-dessus, après avoir entendu, premièrement, les deux parties concernées, soit la partie patronale et la partie syndicale.

Réplique du ministre

M. Couture: M. le Président, puisqu'on me demande un commentaire sur des déclarations précédentes, je vais y revenir. Je voudrais d'abord accepter la proposition du député de Saint-Laurent, à savoir qu'avant d'appeler les articles on entende les deux parties directement et légalement convoquées, si j'ose dire, pour peut-être avoir leur accord — remarquez que dans le fond, c'est pour chercher avec elles une formule de travail qui soit la plus efficace et la plus juste — ou de brefs commentaires de leur part sur notre façon de procéder, pour qu'ils se sentent vraiment participants à part entière à cette commission et qu'ils acquiescent aux étapes et au cheminement que nous voulons suivre. En second lieu, à propos des engagements que j'aurais pris à la commission parlementaire sur l'étude des crédits, je crois qu'à ce moment-là j'ai dit qu'effectivement, aux commissions parlementaires, il y aurait possibilité d'aborder d'autres problèmes.

Je peux même dire, à ce stade-ci, que nous étudions sérieusement la possibilité de convoquer la commission parlementaire pour étudier le placement dans l'industrie de la construction. Sur des problèmes bien précis, je me ferai un devoir, si c'est nécessaire et si c'est d'intérêt public, de convoquer la commission parlementaire pour étudier ce type de problème.

Je peux d'ailleurs vous dire à la fin de cette commission parlementaire j'aurai une déclaration à faire sur la façon dont nous envisageons, au gouvernement, je ne sais pas si on peut dire la réforme, mais la révision des mécanismes possibles dans les relations de travail de la construction, un projet d'étude pour revoir, repenser une série de problèmes dans la construction. Je me réserve, à la fin de cette commission, de vous en faire part plus précisément.

M. le Président, j'acquiescerais à la proposition du député de Saint-Laurent que les parties nous disent, au départ, si elles acceptent notre façon de procéder.

Le Président (M. Marcoux): J'inviterais le représentant de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec à faire quelques commentaires généraux et à répondre à la question qui a été posée par les membres de la commission. Pourriez-vous vous présenter et présenter vos collègues qui vous accompagnent? Pour les fins du journal des Débats, ce serait utile.

Association des entrepreneurs en construction du Québec

M. L'Heureux (Réal): Réal L'Heureux, président. Ceux qui m'accompagnent ici, à la table, sont Me Michel Drouin, directeur général; M. Jean-Pierre Langlois, directeur général adjoint; Me Luc Letellier, conseiller à l'association. On a aussi des administrateurs présents; malheureusement, il n'y avait pas assez de place à la table, mais j'aimerais les nommer. Il y a M. Robert-J. Belleau, administrateur; M. Jos Grimard, M. Jean-Claude Murray, M. Antonio Roméo, M. Julien Demers et M. Hervé Nadeau qui sont parmi les douze administrateurs de l'association.

J'aimerais commencer par des commentaires d'ordre général. Le ministre, tout à l'heure, ainsi que les deux membres de l'Opposition, se sont référés à l'article 18. J'aimerais relire simplement quatre mots de l'article 18 dont "l'intérêt public ". Au nom de quelle gymnastique, au nom de quel charriage peut-on invoquer l'intérêt public, dans le moment, pour convoquer cette commission parlementaire? En fait, c'est la seule possibilité. Pour la première fois, une convention a été signée par les parties, le ministre y a fait référence. Il y a aussi une demande d'extension juridique qui a été faite par les parties afin de prolonger cette convention en décret. Cela a été fait au début de janvier.

On se sert, dans le moment, de l'article 18 qui émane du bill 201, en 1974 ou peut-être 1975. Il a été mentionné ici que les partis d'Opposition, dont le présent gouvernement, s'étaient fortement opposés. Même récemment, l'an dernier, il y a quatorze mois, il y a eu une autre commission parlementaire. A ce moment-là, celui qui représentait le Parti québécois, M. Robert Burns, avait, pendant cinq heures, fait un brillant plaidoyer stipulant que même la tenue des Olympiques — à ce moment-là, c'était en avril — ne justifiait pas, ne cadrait pas dans l'intérêt public.

Je voudrais ici citer un passage des propos de M. Burns tirés du journal des Débats: "Le danger

que je vois, M. le Président, je ne le dis pas pour provoquer qui que ce soit, c'est que s'il y a une intervention gouvernementale, ce n'est pas la paix sociale sur les chantiers qu'on va arriver à faire, cela va être exactement le contraire. Les gens du domaine de la construction, que ce soit du côté syndical ou que ce soit du côté patronal, n'accepteront pas facilement, j'en suis convaincu, qu'on leur impose des conditions de travail qu'ils n'ont pas véritablement négociées".

Si ce n'est pas l'intérêt public, quelle peut être la raison ou le prétexte pour cette présente commission parlementaire? On nous dit que ce sont les modifications légales. Pourtant, la convention collective et le décret qui a été publié contiennent l'article 3202.

Je vais me permettre ici de lire l'article 32.02; l'article 32.02, qui était la loi des parties, dit: "Disposition contraire à la loi: Toute disposition du décret qui pourrait être contraire à la loi ou aux règlements adoptés pour son application est nulle et sans effet. Cependant, la nullité d'une telle disposition du décret n'affecte en rien la validité des autres dispositions du décret." J'aimerais, pour le bénéfice des membres de la commission, mentionner qui a demandé cet article, pourquoi il a été écrit.

Au moment des négociations, plus spécifiquement au début d'octobre, nous avions été convoqués pour une séance de conciliation par M. Pierre Dufresne, conciliateur mandaté par le ministère du Travail, qui était accompagné par Me Michel Robert, qui était apparemment l'éminence au niveau des légalités. On avait lu une déclaration du ministre du Travail d'alors, M. Gérald Harvey, qui avait critiqué le rapport du conciliateur disant que certaines des recommandations du conciliateur étaient contraires à la loi.

A ce moment-là il existait un avis du contentieux du ministère de la Justice qui cadrait dans ce qui était négociable et jusqu'où on pouvait aller. La partie patronale a demandé, à M. Dufresne et à M. Robert, de nous obtenir cette expertise du contentieux pour que nous sachions dans quelle limite on pouvait négocier, quelle était la légalité, parce qu'il a toujours été notre intention de ne pas négocier la loi, mais de négocier à l'intérieur de la loi.

A ce moment-là, M. Robert et M. Dufresne avaient communiqué avec M. Laporte et M. Har-vey, qui se trouvaient à Toronto à ce moment-là; on avait pris un certain temps pour avoir la réponse. La réponse qu'on a obtenue c'est que le gouvernement ne voulait pas mettre à notre disposition ce rapport du contentieux. Il préférait qu'on négocie à la bonne franquette et eux, à ce moment-là, décideraient ce qui était légal ou pas légal, comme le stipulait la loi.

Nous, de la partie patronale, on a insisté pour avoir l'article 32.02. C'est à ce moment-là, qu'il a été écrit, parce qu'on ne voulait pas, comme cela s'est fait auparavant, que le fait qu'on négocie quelque chose qui pouvait être différent de la loi soit interprété comme une volonté de notre part de changer la loi. On voulait, nous, négocier à l'in- térieur de la loi mais, n'ayant pas le bénéfice de cette expertise, on s'exposait à se tromper.

Maintenant, le document du 13 juin qu'on a remis, en réponse à certaines modifications possibles, est assez explicite sur tous les aspects, sur la forme et sur le fond. Je ne vois pas le but de cette commission parlementaire, parce que l'article 32.02, premièrement, donne la possibilité au ministre, c'est-à-dire c'est le voeu des parties qui, lui, enlève ce qui est légal et ce qui n'est pas légal, puis ce qui est légal ne peut pas être négocié ici, c'est légal ou ce n'est pas légal. Or, on l'enlève en vertu de l'article 32.02 ou on le laisse si c'est illégal, si ce n'est pas le but. Alors, pour nous, ici la commission parlementaire n'est qu'un prétexte et puis on pense que la véritable raison se trouve dans ce qui a été ajouté par suite de la convocation de M. Couture.

C'est le voeu du gouvernement d'intervenir dans une convention collective, de jeter son poids en faveur d'une des deux parties. D'après nous c'est la véritable raison, et je m'explique. Je dois dire que ce n'est pas la première fois que le gouvernement intervient dans la convention collective depuis un an, depuis que l'AECQ a été formée. On se souvient que l'an dernier, au mois d'avril, la partie syndicale a demandé la présence d'un conciliateur, alors qu'il n'y avait pas eu de négociation. La partie patronale, le 13 avril, s'est opposée. Le 22 avril on a communiqué directement avec le sous-ministre d'alors pour lui dire qu'on s'opposait non seulement à la présence d'un conciliateur, mais au conciliateur qui a été nommé. Le conciliateur a été nommé quand même la même journée.

En commission parlementaire, l'an dernier, on a demandé au gouvernement d'alors de ne pas intervenir, de laisser les parties établir leur propre force et de laisser le jeu de la convention collective se faire. Le gouvernement, à ce moment-là, a passé outre, est intervenu, a accordé une augmentation de salaire de $0.55 qui excédait, pour un an, les normes de la loi anti-inflation. C'est une deuxième intervention. Au mois de septembre, alors qu'il y avait des élections imminentes, on a vu un article sur les journaux où M. Laberge disait que le gouvernement se préparait à intervenir, plus précisément le 22 septembre.

M. Laberge déclarait que le gouvernement se préparait à intervenir pour sauver les patrons. Le même soir il rencontrait M. Bourassa, lui demandant de mettre quelqu'un au dossier, parce qu'à ce moment-là la partie patronale était structurée d'une façon trop forte. Le lendemain, malgré notre opposition, c'est une opposition qui est publique, le sous-ministre était nommé au dossier comme conciliateur spécial.

C'est une autre intervention gouvernementale qui n'était pas souhaitée et que nous avons eu à subir.

L'hiver dernier, au 5 janvier, comme l'a mentionné M. Couture, on a demandé l'extension juridique de la convention collective. On l'a eue le 20 avril, exactement trois mois et demi après, pour une extension qui, à toutes fins pratiques, est

exactement le texte qu'on avait avec tous ses défauts de forme et ses vices, sauf pour certaines modifications mineures. Cela a pris trois mois et demi.

Plus précisément, encore durant l'hiver, il y a eu la fameuse "grève des ascenseurs". On a demandé au gouvernement de ne pas intervenir. La partie syndicale a demandé la présence d'un conciliateur et il a été nommé.

Finalement, nous avons la présente commission, qui, encore-là, d'après nous, n'est ni utile, ni désirable, ni souhaitée par la partie patronale. Pourquoi ne penserait-on pas ainsi, nous, la partie patronale, si on regarde les agissements du gouvernement et puis certains paradoxes, certaines contradictions?

Nous avons M. Burns, en avril 1976, qui fait un brillant plaidoyer pour nous dire qu'il n'y a aucune utilité pour une commission parlementaire et qu'à ce moment il faut respecter la loi des parties. Nous avons M. Couture aujourd'hui qui la convoque, même si déjà la loi des parties est très spécifique et prévoit les cas d'irrégularité au point de vue légal.

Nous avons M. Couture, au sommet économique, qui déclare publiquement qu'il souhaiterait que les parties prennent leurs responsabilités et que le gouvernement n'est pas un Etat providentiel toujours prêt à intervenir. Pourtant, les parties ont pris leurs responsabilités et n'ont pas demandé au gouvernement d'intervenir, du moins la partie que je représente.

Plus précisément, M. Couture me téléphone en avril pour demander notre accord sur un article qui devait être soustrait de la convention collective, pour en faire un décret. Durant cette conversation il me mentionne qu'il y aura possiblement une commission parlementaire, mais, comme il le dit aujourd'hui, ce ne serait pas pour renégocier la convention. Si vous regardez la convocation d'aujourd'hui, il y a des clauses qui sont des clauses de négociation.

Nous avons aussi l'adjoint parlementaire de M. Couture, M. Chevrette, qui, lorsqu'il était commissaire à la commission Cliche, avait endossé un rapport. Je me permets d'en lire certains extraits ici, qui sont très pertinents. En page 220: "Bref, nous affrontons présentement un système de placement tyrannique qui finalement vise plutôt à combler l'intérêt égoïste de certaines organisations et de certains dirigeants que de répondre aux besoins des travailleurs. Le droit au travail signifie pour le travailleur la protection de ses droits dans l'embauche. La vénalité des emplois ou le sacrifice des droits pour obtenir l'emploi constituent en fait un chantage et non pas la protection des travailleurs".

Dans la page suivante on dit que seulement 10,7% des salariés veulent des bureaux de placement syndicaux. On lit plus loin: "De fait, l'abolition des bureaux de placement syndicaux est devenu un consensus au Québec. Tous les organismes qui ont déposé des rapports auprès de notre commission, à la seule exception de la FTQ, réclament l'abolition de ces bureaux de placement syndicaux".

Plus tard il fait une recommandation qui s'appelle la recommandation 117: Que l'existence d'un bureau de placement dirigé par un syndicat, une union ou une association patronale soit formellement interdite par la loi et que toute violation de cette interdiction soit passible d'amendes sévères pour les contrevenants.

Pourtant, M. Chevrette est maintenant dans le parti ministériel, et le dernier document qu'il nous a déposé sur les bureaux de placement "sanctifie" à toutes fins pratiques les bureaux syndicaux de placement.

D'après nous, où le ridicule frise l'absurde, c'est quand un ministre que se fait soi-disant le champion des opprimés et le champion des petites personnes, dans un même document enlève des emplois comme les journaliers, ceux qui sont les moins bien payés, ceux qui sont le moins bien protégés, ceux qui ont accepté à la dernière négociation de sacrifier des augmentations de salaire et qui, en faisant cela, ont permis à d'autres métiers d'avoir des augmentations de 15% et 16% à cause du jeu de la masse salariale, ceux qui, en retour de ce sacrifice, ont obtenu une certaine définition d'emploi qui leur permet d'avoir une certaine reconnaissance à l'intérieur du décret.

Quand dans le même décret le ministre suggère de leur enlever ces concessions, sans leur remettre l'argent qui a été remis aux autres, pendant ce temps dans la même convocation le ministre nous demande de regarder pourquoi on ne donnerait pas deux primes additionnelles pas à tous les électriciens, mais à une minorité d'électriciens, ceux qui travaillent dans le secteur industriel.

M. Couture: M. le Président, je pense qu'au niveau de l'information, c'est important de coller à la réalité. Dans la convocation dont vous parlez, il n'est aucunement question... Cela ne préjuge pas du tout de la...

M. Pagé: Question de règlement.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Portneuf.

M. Pagé: Le débat s'est engagé ce matin avec sérénité. Chacune des parties a pu faire part de ses représentations respectives.

Le Président (M. Marcoux): La question de règlement.

M. Couture: Question de privilège.

M. Pagé: J'y viens, M. le Président. Je voudrais qu'on soit calme parce qu'on a tout le temps qu'il faut. Il serait opportun dans les circonstances qu'on laisse terminer la partie qui intervient actuellement. Si, par la suite, le ministre a des commentaires à formuler, libre à lui de le faire. On n'est pas pour commencer à engager un débat.

Le Président (M. Marcoux): Concernant la question de règlement, je permettrais au ministre,

non pas un discours, mais, s'il veut rectifier un fait, de le faire immédiatement, comme cela est souvent permis. Si c'est pour faire des commentaires, il les fera plus tard. Le ministre a-t-il des faits à rectifier?

M. Couture: Je veux rectifier le fait important suivant: d'aucune façon, dans la convocation, la formulation n'était faite de telle façon qu'on préjugeait d'avance qu'on accorderait des droits ou des avantages nouveaux à une des parties ou à un des groupes de la construction. C'est simplement une question d'information.

Le Président (M. Marcoux): Je vous arrête parce qu'il me paraît à l'évidence même que c'est une question d'interprétation. Alors, M. L'Heureux, vous pouvez continuer.

M. L'Heureux: Simplement pour répondre à la remarque, je lis la convocation. "De plus, certaines suggestions de modifications qui m'ont été transmises dans les réponses aux modifications que j'ai proposées seront également discutées lors de cette commission parlementaire. Il s'agit, article 2, du remboursement des frais de déplacement aux électriciens, ainsi que du paiement d'une prime aux électriciens pour les travaux sur des structures d'acier ou de béton en cas d'intempérie." C'est cela que je voulais dire.

Je continue, avec votre permission, M. le Président. Comme je le mentionnais, dans le même document, dans les autres articles, on enlève à un syndicat, à un local tout ce qu'il a pu gagner durant la négociation en faisant certains sacrifices d'ordre monétaire, pendant que d'autres métiers plus forts ont obtenu ces gains monétaires. Le paradoxe, c'est que dans la même convocation, à ce moment, on bénéficie... Il y a beaucoup d'autres choses qui ont été refusées. Il y a des primes qui ont été refusées au local 144 et au local 791. Il y a des demandes qui ont été refusées à tout le monde. Pourquoi ne les voit-on pas ici? Pourquoi voir simplement cela? C'est là que je ne comprends pas qu'on puisse privilégier un local en particulier quand ce local, systématiquement, depuis un an, a premièrement bloqué les négociations, le 12 avril dernier, en ne reconnaissant pas la forme de ce qui existait dans la loi. J'ai des copies de télégrammes qui ont été envoyés au gouvernement, à la partie patronale et au Conseil provincial des métiers, comme quoi la Fraternité interprovinciale des ouvriers en électricité ne reconnaissait ni notre association, ni le conseil pour négocier en leur nom. Ils ont tenté de court-circuiter par toutes les manières possibles les mécanismes prévus dans la loi. Ces gens, depuis le début, ont incité les électriciens l'an dernier à ne pas travailler le vendredi, à ne pas faire de temps supplémentaire, à faire des "slow down" aux Olympiques ou dans certains chantiers comme à Coteau-du-Lac, dans des usines industrielles. Ce sont ces gens, aujourd'hui — c'est cela le prétexte de la commission parlementaire — qu'on veut privilégier, bonifier par le poids du ministère du Travail.

La commission Cliche, j'y reviens encore, ne s'est pas penchée seulement sur le côté syndical; elle s'est aussi penchée sur le côté patronal. La commission Cliche a fait les commentaires suivants — encore là, quand je parle de la commission Cliche, je parle en particulier de M. Chevrette — "La commission constate, en effet, que les associations patronales ont cédé à toutes les pressions exercées par la FTQ et qu'elles ont toujours été divisées devant le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre — ceci est important — qui a réagi en leur imposant continuellement des conditions de travail arbitraires puisqu'il était dans l'impossibilité de s'appuyer sur l'accord des patrons." Je me demande si cela tient encore. "Les associations patronales ont accepté des conditions de travail fixés par le décret qui se sont révélées inapplicables". Je me demande si cela tient encore. On en a un décret qui résulte d'une convention collective. Le chapitre qui concerne les délégués de chantier illustre très bien cette situation.

Les associations patronales faibles et divisées, à la CIC — maintenant il faudrait lire l'Office de la construction — en ont complètement abandonné la maîtrise à la FTQ. Elles ont aussi laissé à la FTQ la fonction du placement — c'est M. Chevrette qui écrit cela — sans réfléchir qu'à la longue cet usage jouerait contre leurs propres intérêts et ceux des travailleurs mêmes. Elles ont toléré que les surveillants des chantiers soient membres des mêmes syndicats que les employés — on parlait des contremaîtres — et ainsi soient subordonnés à la dictature de certains chefs syndicaux au détriment de leurs droits de gérance.

Dans d'autres circonstances, les employeurs, à cause de la faiblesse de leur association — c'est peut-être encore le cas — et de leur individualisme, ont préféré acheter la paix à tout prix au lieu de résister à la violence et à la menace dont ils étaient victimes tout autant que leurs employés. Une des recommandations de la Commission Cliche, c'est qu'une association unique qui s'occuperait uniquement des relations de travail, l'AECQ que je représente, soit faite justement pour relever ce défi qui nous était posé. Je dois vous dire, M. le Président, que nous, à l'AECQ, on a l'impression qu'on a relevé de défi.

L'an dernier, trois mois avant que le décret expire, on a été élus, douze administrateurs, plus ou moins démocratiquement. Le fait demeure qu'on a été élus conformément à une loi. A ce moment, on avait omis, dans nos dossiers, de mentionner un mode de financement, une protection par une corporation. De toute façon, à partir du 14 février jusqu'au mois d'avril, on a oeuvré, on a relevé tous les défis, on a réussi, à l'intérieur d'une année, à faire une certaine unité à l'intérieur du monde patronal dans l'industrie de la construction à un point tel que les anciens moyens de pression usuels n'ont pas fonctionné l'an dernier. On pense que l'AECQ représente maintenant les travailleurs, que les entrepreneurs endossent l'AECQ, et c'est la raison pour laquelle on vient ici vous faire ces commentaires.

Je dois vous dire que l'association que je représente n'a jamais rien demandé au gouvernement. L'an dernier, en commission parlementaire,

c'était un autre gouvernement et on leur a tenu exactement les mêmes propos qu'aujourd'hui. On a demandé au gouvernement, l'an dernier, de s'en tenir à son rôle de législateur, c'est-à-dire de faire des lois et de les faire appliquer, comme clients de les respecter, de ne pas rendre, par loi, légal ce qui était illégal, et à partir de là, de ne pas intervenir dans ta loi des parties. Au sommet économique, on a répété, pour le bénéfice de ceux qui y ont assisté, lorsqu'on parlait des amendements possibles au Code du travail, qu'il était très dangereux pour un gouvernement de déséquilibrer les forces en présence. Si un gouvernement veut toujours agir comme pompier et intervenir dans tous les conflits au fur et à mesure, tout ce qu'il fait, c'est de déséquilibrer les forces qui sont en présence. La seule raison pour laquelle les Etats-Unis et la Russie ne s'attaquent pas, dans le moment, c'est que chacun d'eux respecte la force de l'autre.

Il est important pour nous, dans l'industrie de la construction, que les forces en présence soient équilibrées et qu'elles se respectent. A ce moment-là, on n'aura plus de conflits. Mais ce n'est pas par une intervention continuelle en faveur d'une partie que le gouvernement va jouer son rôle de législateur.

J'aimerais terminer ici par une autre constatation de la commission dont M. Chevrette faisait partie, lorsqu'il parlait du gouvernement, et je cite: "II est inutile de demander à un citoyen sans défense de résister au chantage et aux menaces si l'Etat, face à de semblables tactiques, ne donne pas lui-même l'exemple d'une grande fermeté inspirée par la conviction profonde que le respect de la loi est le plus sûr moyen d'assurer la liberté à tous ceux qui veulent vivre en paix dans un régime démocratique". J'aimerais savoir si cela tient toujours.

Pour résumer nos commentaires d'ordre général, d'après nous, cette commission n'est qu'un prétexte pour jeter le poids du gouvernement en faveur d'une minorité de locaux et les plus forts, ceux qui sont déjà en tutelle. C'est notre prétention. Sur les points d'ordre légal, notre réponse du 13 juin peut être expliquée et nous avons ici Me Dion et M. Jean-Pierre Langlois pour le faire. Sur les autres points, ceux qui ne sont pas sur la forme d'ordre légal, si, malgré nos remarques, le ministre juge encore qu'il veut écouter nos commentaires et ainsi peut-être attiser les centres et empêcher une cicatrisation qui doit se faire d'une négociation, le gouvernement ou le ministre du Travail ou la commission parlementaire en portera l'odieux. Nous, on est prêt, on a tout ce qu'il faut pour répondre à nos actions.

Sur votre deuxième question, à savoir: Est-ce que notre association accepte que d'autres parties soient entendues? J'aimerais, pour commencer, savoir quelles parties on veut faire entendre.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que le ministre peut répondre à la question?

M. Couture: II y a des parties qui ont désiré, effectivement, se faire entendre. Je pourrais peut-être vérifier, à l'heure du dîner, si ce désir se pour- suit ou s'il y en a d'autres qui veulent parler à cette commission. Au début de la séance de cet après-midi, je pourrai dire à cette commission les personnes ou les parties qui veulent parler à cette commission.

Le Président (M. Marcoux): J'inviterais, maintenant, le responsable du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction à nous présenter leur point de vue sur les travaux de la commission ainsi que leur opinion sur la possibilité d'entendre d'autres groupes lors des travaux de cette commission. Je vous inviterais également à présenter vos collègues.

Conseil provincial du Québec des métiers de la construction

M. Dumoulin (Guy): Guy Dumoulin, directeur général du Conseil provincial du Québec des métiers de la construction. J'ai à mes côtés Michel Décary, avocat, Jean Lavallée, membre de l'exécutif du Conseil provincial, et Mario DiPesa ainsi que tous les affiliés, ici en arrière, que je ne peux pas tous nommer, étant donné le nombre.

M. le Président, vous avez posé une question tantôt. Je ne pense pas que le débat soit lancé, on a eu une allocution. On a eu un avertissement du ministre du Travail, qu'il n'était pas question de faire de la négociation. Mais, après avoir écouté la partie patronale, je me retrouve en temps de négociation. On nous a dit la même chose qu'on nous a dite tout le temps de la négociation. On nous a lu des passages de la commission Cliche, ce qui vient d'être lu ce matin. Malheureusement, je ne crois pas que ce soit tellement un bon début pour essayer de trouver des solutions à ces problèmes.

Ce qu'on recherche, à mon sens, c'est d'éclaircir des événements d'octobre 1976 lorsqu'il y a eu la fameuse entente intervenue entre les parties après une médiation de cinq jours et, en plus, de régulariser les clauses que le ministère nous a soumis qui, semblerait-il, sont d'aspect illégal. Je veux toucher deux, trois points qui ont été mentionnés. Je n'ai pas l'intention, à moins qu'on débute immédiatement mais on a des documents à présenter. On a mentionné, tantôt, l'article 32.02. On vous laisse croire ou supposer que c'est un nouvel article qui apparaît à l'intérieur du décret de la construction quand l'article a toujours paru. Il est d'aspect légal, il a toujours paru à l'intérieur des décrets que nous avons eus lorsqu'une clause devient illégale par rapport à une modification à une loi, mais certainement le reste du document s'applique et la clause devient nulle et sans effet.

De plus, on a fait mention, du côté de la députation, tantôt, aux mécaniciens d'ascenseurs, dont le problème n'est pas réglé. On n'est pas ici pour un métier en particulier ou un autre métier ou une clause en particulier. On a reçu du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre un document nous présentant des modifications suite aux avis de ses conseillers juridiques. Par-dessus cela, nous avons soumis au ministre du Travail un document

lui formulant la réponse sur ce qui nous a été donné. On dit qu'on s'est entendu sur une multitude de clauses. On sait que chez les mécaniciens d'ascenseurs que j'ai mentionnés tantôt, il n'y a absolument rien de réglé. Quand je dis rien, rien du tout. Lorsqu'on s'est entendu verbalement, il y avait une lettre d'entente concernant les mécaniciens d'ascenseurs que vous retrouvez dans le document. Suite à cette lettre d'entente, qui est du mois d'octobre, j'ai avisé les mécaniciens d'ascenseurs qui ont avisé les employeurs, mais je m'explique: Les employeurs qui emploient les membres des locaux que nous représentons. Ils se sont rencontrés trois jours après que cette entente est intervenue, à l'hôtel Laurentien, qu'ils sont en train de démolir, d'ailleurs, aujourd'hui, et ont commencé à essayer de s'entendre et cela allait relativement bien. Il y avait du monde qui venait de partout. Du fond des Etats-Unis comme du Canada ou de la province de Québec, pour essayer de trouver une solution.

La réponse qu'on a eue de l'AECQ, c'est qu'on a reçu un télégramme nous informant d'arrêter immédiatement ces négociations, étant donné que c'étaient des négociations — ie ne me rappelle pas tellement le télégramme, il faudrait que je vous le sorte — soit illégales ou quoi que ce soit et qu'au moment opportun on les avisera des rencontres futures pour s'entendre. Messieurs, cela a conduit à la grève des mécaniciens d'ascenseurs. On nous accusera après, mais c'est cela qui a conduit à la grève des mécaniciens d'ascenseurs. Cela c'est un problème.

Je crois que c'est un problème majeur. Il existe depuis peut-être cinq ou dix ans. On avait quand même la chance de trouver une solution par rapport à une lettre qu'on avait, disant qu'on était intervenu ce fameux soir.

De plus, il y a une multitude de choses qui sont survenues. J'aimerais, en même temps que ce que je vais dire, poser une question, à savoir si on va procéder clause par clause ou avec l'ensemble. Je veux savoir parce que s'il faut qu'on fasse une allocution générale, on va en faire une, mais s'il faut, à un moment donné, qu'on discute par clause, on va répéter ce qu'on va avoir dit au début. Je n'ai pas l'intention de me répéter. J'ai l'intention d'essayer d'apporter la lumière sur les faits qui sont survenus.

Lorsqu'on parle aussi des problèmes des journaliers, qu'on dit qu'il avait été accordé, semblerait-il, une juridiction exclusive aux journaliers, je peux vous dire que la position du conseil provincial — nous avons ici les résolutions à cet effet — c'est que cela a toujours été maintenu. Ils ont toujours été informés, à la partie patronale, que c'était le statu quo du décret. Parce que, messieurs, on ne négocie pas de la juridiction à l'intérieur de la négociation. C'est le règlement no 1 et on n'a pas le droit de le négocier. A l'intérieur de cela, c'était le maintien du statu quo, concernant le conseil provincial. En plus, si le conseil avait su qu'il y avait un genre de négociations qui se faisaient concernant la juridiction, par en arrière avec certains individus, cela ne se serait peut-être pas passé de la manière que cela s'est passé. Mais pour essayer de trouver une solution, même si c'était un point majeur de la grève, on a été obligé de faire un genre d'arbitrage à l'intérieur du document — vous l'avez à l'intérieur, vous le lirez, vous allez voir — pour, avec cet arbitrage, revenir avec ce qui existait dans le passé. C'était le but recherché. C'était plutôt chercher à établir du "cheap labour" que de la chercher, à un moment donné, à parler de la manière dont on a parlé du côté patronal. Encore une fois, je me répète, la juridiction ne se négocie pas. C'est le règlement no 1 et c'est le genre de places où nous devons aller pour discuter de la juridiction.

A l'intérieur de ce qui a été accordé, cela couvre des métiers qui étaient impliqués, et dangereusement aussi.

En ce qui a trait à la fameuse question qui a été posée au début, j'aimerais aussi avoir une réponse sur ce que j'ai demandé, parce qu'on va continuer, s'il faut qu'on détaille le tout. Quant à entendre d'autres parties, on n'a pas d'objection sur ce que le ministre a mentionné, en autant qu'on connaisse les parties et qu'on sache pourquoi elles veulent se faire entendre, et qui elles représentent. Ce qu'on aimerait savoir, c'est ce que j'ai mentionné, parce que vous avez dit tantôt que vous aviez l'intention d'entendre les parties, mais on aimerait savoir qui. On n'a pas d'objection d'essayer d'éclairer tout le monde et de vraiment trouver une solution là-dedans. Nous, tout ce qu'on recherche, ce n'est pas à négocier du tout. On cherche à vous expliquer ce qui s'est produit, à vous éclairer et, sûrement, il y aura des gens qui auront à se prononcer sur les événements, les événements d'octobre 1976. Vous allez vous apercevoir, à l'intérieur de la journée qu'on va passer ou de la journée de demain, s'il y a lieu, que ce sont vraiment des événements. Parce que c'est incroyable qu'à un moment donné, on s'entende sur quelque chose puis qu'on fasse une belle conférence de presse le lendemain, que nous, nous n'avons pas faite, disant qu'on a trouvé une solution, que tout le monde est d'accord — et c'était vrai — mais par contre on a été rencontrer nos gens, entre autres les électriciens qui ont rencontré leurs gens, fait 58 assemblées, les informant qu'on avait eu telle et telle condition de travail, puis on se les fait ôter. Messieurs, on va vous expliquer clairement ce qui s'est passé. On va vous déposer les documents qui ont été signés, on va vous montrer des documents qui viennent d'un côté ou de l'autre, vous montrer que tout cela était présent, ces clauses que je mentionne. D'ailleurs, on parle de deux, c'est ce que vous entendez dire depuis six mois. Mais ce n'est pas deux qu'il y a eu, c'est trois. On va vous expliquer pourquoi c'était trois.

Il y a cela, il y a les mécanismes d'ascenseur, vous avez les tireurs de joints qui ont un problème pécuniaire, vous avez aussi les ferrailleurs qui ont un problème pécuniaire et toutes ces choses. Lorsqu'on avait discuté en présence du sous-ministre à la dernière médiation, il nous avait été dit: Lorsqu'on écrira le document, on pourra, à un moment donné, ajuster certains salaires de certains métiers, après les explications qui seraient

données. Ce sont ces choses qu'on veut discuter. On va vous éclairer du mieux possible. On vous déposera les documents qu'on a.

J'aimerais quand même avoir une réponse à ma question, de la part du ministre — parce que j'aimerais pouvoir continuer à parler — à savoir s'il faut parler sur le tout ou si nous allons procéder clause par clause.

Le Président (M . Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: A la suite des commentaires des deux parties, j'aurais peut-être une mise au point ou deux à faire. Je crois que c'est assez important pour nous tous — c'est pour cela que j'ai tellement insisté au début — de bien savoir, de bien se convaincre que nous travaillons dans un mandat précis. Cette commission parlementaire n'est pas ouverte sur tous les problèmes de la construction, sur tous les événements qui se sont passés depuis plusieurs années ou depuis plusieurs mois. Ce n'est pas exclu — je pense le préciser à la fin de la commission — qu'éventuellement, à plus ou moins long terme, on aborde cette série de problèmes et qu'on les étudie plus en profondeur en y mettant le temps.

Notre mandat — j'y reviens — est quand même plus limité. Si, comme on l'a souligné, on veut travailler à maintenir ou, sinon, à développer la paix industrielle dans le monde de la construction, je pense qu'on doit éviter, dans cette commission, tout procès d'intention ou toute remise en question de problèmes qui débordent notre mandat. Ceci dit, du fait, justement, de ce mandat, nous devons chercher a nous éclairer, recevoir des représentations, afin de mieux connaître les raisons pour lesquelles le gouvernement, qui est responsable, qui a le droit de le faire et qui prend ses responsabilités, devrait, oui ou non, tenir compte de ces représentations pour proposer des modifications au décret.

Pour rassurer les gens qui ne semblent pas l'être assez, j'ai dit clairement, au début, que nous ne voulons pas renégocier la convention collective. Nous sommes arrivés le 15 novembre. Nous avons pris la négociation où elle était et il y a eu signature le 22 décembre. Nous avons suivi les étapes prévues par la loi. Mais je dois quand même vous dire que, comme gouvernement, nous n'étions pas présents avant le 15 novembre. Il n'est pas possible pour nous de reprendre ou de revivre entièrement tout ce qui s'est vécu avant, sauf que notre responsabilité de gouvernement nous commande, en tenant compte même de la loi, de réparer, s'il y a lieu, des irrégularités, des omissions, tout en respectant l'économie générale des relations de travail et le respect essentiel de la convention collective.

J'aimerais aussi faire une mise au point sur ce qu'a dit M. L'Heureux à propos de la convocation. Il est bien clair que, quand on mentionnait les deux questions et, en particulier, la question des électriciens, ce n'est pas nous qui proposions d'étudier d'une façon nouvelle ce problème. On faisait référence, dans le télégramme, à "certaines suggestions de modifications qui m'ont été trans- mises dans les réponses aux modifications que j'ai proposées." On rappelle simplement des réponses d'une des parties à ces modifications. C'est la raison pour laquelle, d'ailleurs, en vous demandant d'entendre d'autres parties, nous l'avons fait dans l'esprit que ces réponses aux modifications on a abordé à peu près tous les problèmes de plusieurs métiers. Effectivement, s'il y en a qui peuvent nous éclairer, je pense qu'on ne peut pas se priver de leurs représentations.

Quant à la question précise de M. Dumoulin, à savoir comment on fonctionne, je pense l'avoir dit, ce que je propose c'est qu'on procède article par article, dans les articles qui ont été rejetés, en écoutant l'avis des deux parties.

Alors selon l'article qui sera appelé, il y a peut-être un problème plus global où vous aimerez dire des choses, je pense que ce sera l'occasion de le faire.

J'aimerais, avant qu'on commence, vous présenter notre équipe, et d'abord dire que je compte beaucoup sur la contribution de l'adjoint parlementaire qui, comme vous le savez, a eu un mandat spécial, dans les problèmes de la construction. Je crois que nous pourrons bénéficier de sa contribution aussi spéciale. J'ai avec moi une équipe qui, vous l'accepterez sans peine dans cet esprit de nous informer, pourra participer aux travaux, surtout quand il y aura des problèmes plus directement légaux. Alors je demanderais à M. Laporte de présenter cette équipe. Me Fortin, directeur du contentieux. Me Raymond Cantin, membre du contentieux, Marcel Dion, coordonnateur de la construction, et M. Ménard, représentant de la sécurité, à titre d'observateur.

Alors, si les députés sont d'accord, j'inviterais le président à appeler l'article 1.

Le Président (M. Marcoux): Avant de procéder, il y a trois députés qui ont demandé la parole: le député de Joliette-Montcalm, Sainte-Marie et Nicolet-Yamaska.

M. Chevrette: Dans un premier temps, il m'est apparu qu'il y a une question ambiguë qui n'est pas tranchée, et cela a été soulevé en particulier par M. Dumoulin, tantôt. On peut faire l'étude article par article, moi je trouve que c'est valable. Cependant, si on ne clarifie pas, au départ, la question de l'ambiguïté de fin de négociation, qui a été titrée "événement" ou je ne sais pas quoi, il m'apparaît que c'est peut-être là que certains semblent vouloir dire qu'il y a eu des choses qui ont provoqué cette commission parlementaire aujourd'hui. La fin de course ne semble pas suffisamment claire pour permettre d'en arriver à dire: Le contenu comme tel, il a été négocié, mais il y a eu cela, il y a eu cela, il y a eu une intervention d'un médiateur, il y a eu l'intervention spéciale du ministre du temps via le sous-ministre. Il y a toutes sortes de choses qui flottent dans les airs et, à mon sens, si on discute des clauses sans parler du contexte, cela ne me permet pas, en tout cas, de trancher, pour les membres de la commission, la question d'intérêt public que le ministre soulignait au départ dans son affirmation.

Donc, moi je pense qu'au départ les gens peuvent présenter, comme vous le soulignez, la démarche article par article, en prenant soin d'expliquer le contexte dans lequel cela s'est déroulé pour qu'on puisse se faire une idée personnellement, chaque député ici, de la façon dont cela s'est déroulé.

M. Dumoulin: ...

M. Chevrette: Non, c'est la suggestion que je fais. Vous avez dit que vous aviez même des documents, qu'il y avait trois documents en question. C'est donc dire que c'est susceptible d'éclairer la commission, pour prendre une décision, parce qu'on n'était pas là, nous, avant le 15 novembre. Cela s'est réglé dans ces coins-là. Cela pourrait peut-être même éclairer l'Opposition.

Le Président (M. Marcoux): Avant de trancher cette question, de la clarifier, j'entendrai le député de Sainte-Marie et le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président...

M. Bisaillon: Une question de règlement.

M. Fontaine: Non, ma question porte sur l'intérêt public qu'on a soulevé. Est-ce que vous me permettriez de...

Le Président (M. Marcoux): C'est une intervention sur le contenu? Alors c'est le député de Sainte-Marie d'abord.

M. Bisaillon: Je vais céder ma place, M. le Président, je parlerai après le député de Nicolet-Yamaska.

Le Président (M. Marcoux): Alors le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: On fait référence à la notion d'intérêt public et certains participants y ont référé aussi. Le ministre nous a lu l'article 18 de la loi qui fait appel à cette notion d'intérêt public et on semble mettre en doute qu'il y ait intérêt public à ce moment-ci. Le ministre nous a parlé de cette notion, mais il ne nous a pas dit quels sont les arguments qu'il invoque pour soutenir cette notion d'intérêt public.

Il serait peut-être bon, avant de commencer, que le ministre nous dise pourquoi il prétend, lui, que la notion d'intérêt public est assez importante à ce moment-ci pour appeler l'article 18.

M. Bisaillon: Parce qu'ils...

M. Couture: Oui, c'est assez simple à répondre.

Quand il y a des représentations de nombreux travailleurs, de syndicats, qui devant une convention collective nous signalent abondamment qu'il y a un problème à tel ou tel point de la convention collective, je pense qu'au moins on peut dire que c'est de l'intérêt public que de les écouter.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, mon intervention va se rattacher un peu à celle du député de Joliette-Montcalm. Je voudrais cependant repartir de l'article 18 où on dit: Lorsque, selon l'avis du ministre du Travail, il est d'intérêt public d'apporter des amendements. On se doit cependant d'entendre les parties en commission parlementaire. Elles ont comme devoir de nous démontrer pourquoi, à partir des amendements proposés au décret de la construction, il est impossible pour elles d'en arriver à une entente.

Ce que je comprends de l'article 18 c'est que les parties, en essayant de nous démontrer pourquoi il est impossible d'en arriver à une entente, peuvent nous amener à rejeter des amendements présentés par le ministre au décret. Ce travail, lorsqu'on fera l'étude, article par article, nous amènera à poser des questions aux parties pour voir quelle est leur position respective sur chacun des articles.

Ce que je crains cependant c'est qu'il y a d'autres problèmes qui gravitent autour des amendements présentés par le ministre. Il y en a qui sont annoncés dans les mémoires respectifs et je crains qu'en cours de route on oublie ces aspects assez importants. J'ai lu les deux mémoires présentés par l'association des entrepreneurs et le Conseil provincial. Je pense qu'il y a un esprit au-delà du contenu d'un article qui se dégage de cela; il est tout aussi important pour les membres de la commission de prendre connaissance des motivations de chacune des parties et des choses additionnelles qui pourraient être présentées ou corollaires aux amendements présentés par le ministre. Je vois un danger à ce que l'on se limite à l'étude article par article si en même temps les parties n'essayent pas de nous démontrer ce qu'elles voudraient voir ajouté.

Entre autres, quand même que nous voudrions y échapper, la question soulevée par les électriciens devra être clarifiée au niveau de cette commission parlementaire. J'avais plusieurs questions à poser tant à M. L'Heureux qu'à M. Dumoulin sur la question des électriciens. Je crains que, si l'on procède strictement par article, je sois empêché de le faire.

M. Couture: M. le Président, je pourrais peut-être répondre à cette interrogation ou cette inquiétude. Justement, j'ai proposé à la commission qu'il y ait deux temps. D'abord, être bien sûr que l'on répond à la loi en demandant aux parties de dire les raisons, selon l'article 18, motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications apportées au décret, les modifications proposées par le gouvernement. Donc, dans un premier temps nous écoutons les parties là-dessus. Dans un deuxième temps — après avoir passé à travers ces modifications, ces amendements proposés, avoir écouté différentes interventions — une fois passée cette étude des amendements il sera excellent, non seulement d'entendre d'autres parties qui veulent nous éclairer, mais les

parties principales à la convention collective dans une forme de bilan ou d'analyse plus globale où elles pourraient reprendre des choses qui auraient été oubliées. Si les membres de la commission sont d'accord, ce serait peut-être une façon de procéder.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, il est évident que la commission, de consentement ou par un vote sur division, peut accepter de faire n'importe quoi. Elle est libre de sa procédure dans une large mesure. Il reste que l'article 18, que cite le ministre, nous invite à considérer les modifications au décret, celles que le gouvernement prend à son compte. C'est l'objet premier et à mon avis cela devrait être le seul objet de la commission.

Tout à l'heure, le député de Nicolet-Yamaska soulignait une indication, il employait le mot engagement. Si je voulais absolument contredire le ministre là-dessus, je pourrais également employer le même mot qu'il nous avait dit en commission parlementaire relativement à cette séance-ci de la commission parlementaire, qui nous permettrait de regarder les problèmes relatifs au placement. Il nous a répondu à cela que le problème de placement était réservé pour un autre moment.

Quand il en vient à certaines propositions d'amendement au décret qui sont proposées par des parties qu'il a consultées sur les modifications que le gouvernement fait siennes, à ce moment, cela devient un sujet qui peut être discuté. Si je comprends bien, le ministre réclame le privilège de choisir les sujets qui seront étudiés par la commission parlementaire, d'en exclure quelques-uns ou de les reporter à plus tard et d'en retenir d'autres.

C'est évidemment, le droit de la majorité ministérielle à la commission parlementaire, en suivant en cela les indications du ministre, de décider de faire ce qu'elle veut. Il demeure qu'il est important pour la compréhension des travaux de la commission parlementaire que le ministre fasse plus qu'affirmer sa volonté d'exclure un sujet et d'en retenir un autre. Il m'apparaît que ce n'est pas logique de convoquer la commission parlementaire en invoquant l'article 18 et après d'y greffer ou de ne pas y greffer d'autres sujets. Il me semble que plus on s'éloigne de l'esprit et de la lettre de l'article 18, plus on débouche presque inévitablement vers une renégociation. Ce que le ministre se défend de faire, mais malgré tout, il débouche sur une renégociation de l'ensemble du décret ou de la convention collective qui lui sert de base.

M. le Président, je fais cette intervention pour souligner la nécessité dans laquelle se trouve le ministre de dire pourquoi il veut retenir certains sujets — malgré qu'ils ne soient pas prévus à l'article 18 — et veut en exclure d'autres. Si c'est tout le problème de l'industrie de la construction qu'il veut remettre sur le tapis, on en a pour tout l'été. C'est peut-être suffisamment important pour qu'on y passe l'été, mais s'il veut se limiter, au contraire, à examiner les choses qui sont d'ordre public et qui doivent être modifiées dans le décret tel que négocié, alors là c'est beaucoup plus étroit. Pourquoi ne se limite-t-il pas à cela?

M. Couture: Je peux préciser là-dessus. De fait, quand je dis que dans un deuxième temps, on entend les parties, c'est toujours dans le cadre de commentaires sur les modifications. Il y a eu, selon les procédures prévues par la loi, une série d'objections ou de propositions de modifications des parties et de syndicats qui n'étaient pas présents à la convention collective.

Dans mon esprit, il ne s'agit pas de retenir ou de choisir des sujets; c'est simplement, dans le cadre des modifications proposées par le gouvernement, de ne pas exclure la possibilité pour toutes les parties qui ont des choses à dire de le faire. Cela reste quand même le cadre de ces modifications.

M. Forget: Le ministre ajouterait-il à cela les modifications qui n'ont pas été mentionnées dans les lettres qui ont servi de réponses à celles qu'il envoyait lui-même aux parties le 2 juin et qui pourraient être mentionnées au cours des débats de la commission parlementaire ou parallèlement à ses travaux? J'imagine qu'il y a des parties qui ont eu l'occasion ou qui ont eu l'idée, à ce moment, de faire des représentations. D'autres n'ont pas saisi l'occasion, ne l'ont pas eue ou n'ont pas voulu s'en prévaloir à ce moment. Est-ce que tout sujet qui est incident aux modifications suggérées par le gouvernement et qui pourrait être mentionné en cours de débat pourrait également faire l'objet de commentaires? Cela risque d'élargir considérablement le débat.

M. Couture: M. le Président, si les membres sont d'accord sur cette façon de procéder, je ne voudrais pas qu'on se prive ou qu'on s'enferme dans un cadre étroit, c'est-à-dire, toujours face à cet objectif de nous éclairer le plus possible sur les modifications à apporter ou, éventuellement, d'écouter à nouveau des représentations qui nous avaient été faites durant le délai accordé aux parties pour faire des objections ou proposer des modifications, de ne pas nous priver en commission parlementaire d'entendre ces représentations en nous laissant, évidemment — c'est le privilège et la responsabilité du gouvernement — faire éventuellement un choix politique.

Cette commission parlementaire aura beaucoup d'importance si elle nous indique un cadre légal assez précis. Dans ce cadre, elle ne nous empêche pas, face à la convention collective et aux modifications qui ont été proposées — quand je dis modifications proposées cela touche à peu près tous les problèmes possibles qui rejoignent éventuellement des recommandations qui ont été faites, mais qu'on n'a pas retenues — d'accepter de les entendre. C'est peut-être utile.

Ce sera à la commission de juger, peut-être demain, si on s'en va trop loin ou si on est suffisamment informés, quoi.

M. Forget: Une dernière brève intervention sur ce sujet, de ma part, du moins. La loi parle des éléments d'ordre public. On dit: "Quand il est d'avis," c'est-à-dire quand le ministre est d'avis qu'il est d'intérêt public. Je reviens à cette formulation parce qu'elle est importante. Il y a là une disposition qui n'est pas seulement une clause de style. Un député, membre de la commission, a dit tout à l'heure: C'est le ministre qui juge ce qui est d'intérêt public. Je veux bien que ce soit le ministre qui juge ce qui est d'intérêt public; encore faut-il que ce soit lui qui le juge et qu'il dise sur quoi il base son jugement. Quand les parties à une négociation collective conviennent entre elles de certaines conditions, on peut présumer qu'elles ne sont pas entièrement satisfaites du résultat. C'est un compromis comme toute convention.

Est-ce qu'on doit présumer que tout sujet qui est soulevé par l'une des parties à la suite de la conclusion d'une convention collective devient d'ordre public parce qu'elle est mentionnée à l'occasion d'une commission parlementaire n'est-ce pas plutôt le ministre lui-même qui doit juger qu'une modification est d'ordre public? A priori, je croirais que les modifications que le ministre, six mois après la signature du décret, n'a pas jugées être d'ordre public sont réputées ne pas être d'ordre public. Les parties individuelles qui pourraient venir soulever des difficultés qu'elles voient dans l'application du décret soulèvent des dispositions particulières ou d'ordre privé, mais non pas des dispositions d'ordre public, parce qu'encore une fois c'est le ministre qui en est juge. Le ministre, en proposant des modifications, a jugé que ce n'était pas d'ordre public; au moins, c'est la présomption qu'on doit faire.

Il y a un certain intérêt à restreindre le débat dans l'intérêt même des parties. Encore une fois, c'est une disposition relativement nouvelle. C'est probablement une des premières fois qu'elle est appliquée à la suite de la négociation d'une convention qui est globale. Je crois qu'on crée un précédent lors que la commission parlementaire, convoquée à l'occasion de l'étude de l'article 18, se permet d'interpréter si largement la formulation de la loi qu'à peu près n'importe quel sujet est considéré d'ordre public, comme l'a dit le ministre, tout simplement parce que les parties ont pu voir que cela pourrait ne pas marcher ou être difficile. Je comprends, il va toujours y en avoir, mais ce sont des problèmes particuliers ou d'ordre privé, même si cela affecte beaucoup de gens. Ce qui affecte l'ordre public, c'est ce qui affecte non seulement les parties à l'industrie de la construction, mais ce qui affecte, de façon plus générale, le fonctionnement de l'économie, la paix sociale de façon très générale et sur des points de substance, par des sujets de détail ou des sujets d'intérêt strictement particulier qui pourront sans aucun doute être corrigés lors de la prochaine négociation. C'est bien sûr que ces contrats et le décret ne sont pas parfaits.

M. Couture: Là-dessus, j'aimerais, M. le Président, pour ma part, clore un peu le débat. Je crois que l'intérêt public, avant tout, c'est de respecter les conventions collectives négociées et signées. C'est d'intérêt public, comme gouvernement, d'être les premiers à respecter notre économie des relations de travail. La loi qui reconnaît d'abord et avant tout ce mécanisme de négociation — je ne dis pas qu'éventuellement il ne faudra pas la réviser; je pense que la participation des intervenants pourra nous éclairer un jour ou l'autre là-dessus — permet aussi, dans ce domaine de la construction où il y a des formules de négociation nouvelles qui sont essayées — c'est comme si le législateur voulait ajouter une protection supplémentaire et se donner le pouvoir, dans ce que j'appelle ses premiers essais véritables de négociation collective sectorielle dans le secteur de la construction — de se donner cette protection pour éventuellement corriger soit des omissions ou des irrégularités ou des injustices. C'est clair aussi qu'on parle de discrimination.

Une fois qu'on a dit que la base de l'intérêt public, c'est de respecter les conventions collectives — je pense que vous avez employé aussi les mots "paix sociale" — c'est d'intérêt public aussi, pour nous, de nous donner toutes les chances possibles pour assurer cette paix sociale.

Le ministre reçoit une série d'objections, une série de doléances. Je pense que notre responsabilité c'est d'apprécier l'importance, au moins d'écouter les intervenants qui nous affirment que pour telle et telle clause, il y a des choses qui n'ont pas été faites et qui auraient dû être faites, etc. Je pense que la principale préoccupation que nous devons avoir pour rechercher cet intérêt public, c'est au moins d'entendre les parties là-dessus. Ce sera la responsabilité du gouvernement d'équilibrer et de choisir lui-même ce qui, finalement, devrait rejoindre l'intérêt de chacun. J'aimerais quand même, au nom même de la paix sociale, et c'est d'intérêt public cette paix sociale, qu'on écoute les gens qui ont des choses à dire sur ces modifications et les problèmes que ces modifications peuvent soulever dans le milieu de la construction.

M. Chevrette: M. le Président, comme intervenant, je voudrais rectifier un fait.

Le Président (M. Marcoux): II va y en avoir parce qu'il faut procéder à...

M. Chevrette: Je voudrais rectifier un fait. C'est quand même une affirmation qu'on a faite à deux reprises que le ministre du Travail avait pris un engagement formel. A la commission permanente du 12 mai 1977 — je remercie le député de Nicolet-Yamaska de nous avoir donné sa source d'information parce que c'est elle-même qui contredit son affirmation — M. le ministre Couture s'est engagé à discuter de sécurité au travail, autant dans la construction qu'en d'autres choses, peut-être à la commission sur l'amiantose ou encore sur le décret de la construction. Donc, l'engagement formel qui avait été annoncé tantôt peut être aussi bien à la commission qui traitera de la loi pour les amiantosés, comme cela aurait pu être ici. Mais il n'y a pas eu d'engagement ex cathedra,

comme ont semblé vouloir le dire le député de Saint-Laurent et le député de Nicolet-Yamaska.

M. Forget: Ce n'est pas une référence pertinente parce qu'on parle de la sécurité, on en a parlé effectivement dans ce contexte, mais on a parlé aussi du placement ailleurs dans les...

M. Fontaine: M. le Président, j'avais dit, dans mon texte, tout à l'heure, que M. le ministre du Travail avait dit à la commission parlementaire qu'il désirait étudier ces questions. J'ai mentionné la commission présente parce qu'il y faisait référence, à ce moment. Lorsque le ministre m'a donné une explication tout à l'heure, je n'ai pas ajouté autre chose parce qu'il m'a dit: "On l'étu-diera soit à cette commission-ci ou dans une autre commission". Je n'ai pas ajouté autre chose là-dessus. Je pense que c'est clair, on s'est entendu pour que cette question soit étudiée à une des commissions mentionnées dans le texte.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que les membres de la commission seraient maintenant prêts à entendre les parties sur l'article 1-D? M. L'Heureux. Vous pouvez y aller, M. L'Heureux.

M. Dumoulin: M. le Président, on aurait de la documentation à faire distribuer autour de la table. Est-ce qu'on peut remettre des documents?

Le Président (M. Marcoux): Oui, avant que M. L'Heureux prenne la parole, on va prendre deux ou trois minutes, chacun restera à sa place et on va demander aux aides de la commission de distribuer vos documents.

M. Dumoulin: Merci.

Le Président (M. Marcoux): Je pense qu'on peut poursuivre. Avant d'aborder l'article 1 d), M. le ministre aurait une information en réponse à une question qui a été posée tantôt.

M. Couture: M. le Président, j'ai demandé à quelqu'un de s'informer qui voulait, dans cette deuxième partie ou ce deuxième temps dont je parlais de la commission parlementaire, s'exprimer, toujours dans le cadre de nos modifications proposées. Les parties légalement constituées nous ont laissé entendre, je crois, à moins que je fasse erreur, qu'elles ne s'y opposaient pas formellement, sauf que quelqu'un nous a demandé que ceux qui veulent intervenir nous disent pourquoi ils veulent intervenir.

M. le Président, je vous informe que la Fédération nationale des syndicats du bâtiment et du bois (CSN) voudrait s'exprimer. L'intervenant serait M. Michel Bourdon. De plus, des affiliés à la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) voudraient aussi s'exprimer. L'intervenant serait M. Paul-Emile Dalpé.

On pourrait peut-être demander à ces deux intervenants de nous dire brièvement pourquoi ils veulent intervenir à cette commission parlementaire et dans quel cadre, sur quels objectifs.

Centrale des syndicats démocratiques

M. Dalpé (Paul): Paul Dalpé, Centrale des syndicats démocratiques. Notre intérêt à déposer devant vous sur le décret de la construction tient de la représentation de milliers de travailleurs et touche des points très précis qui, pour nous, représentent, au point de vue de l'équité, des omissions très graves. Nous allons nous limiter à toucher la définition du mot "employeur", le cas des mécaniciens d'ascenseurs et les avantages sociaux qui sont attachés à ce groupe et, troisièmement, le fonds spécial d'indemnisation des travailleurs. Ce sont les points sur lesquels nous entendons vous présenter des commentaires.

Le Président (M Marcoux): Est-ce que le représentant de la CSN est ici?

Une Voix: II est au café, présentement. Le Président (M. Marcoux): II est au café.

Une Voix: II est en train de consulter tous ses membres.

Le Président (M. Marcoux): Avant de poursuivre sur le sujet, on va passer à l'article 1d) et on reviendra s'il y a lieu.

M. Dumoulin: M. le Président... Le Président (M. Marcoux): Oui.

M. Dumoulin: ... on aurait peut-être quelqu'un, nous aussi, qui pourrait intervenir au niveau des opérateurs de machinerie lourde, concernant la légalité d'une clause les impliquant à l'intérieur du document, la légalité de l'article 26.13.

M. Couture: Vous les représentez, alors, vous êtes là pour vous exprimer en leur nom.

M. Dumoulin: Merci.

Le Président (M. Marcoux): J'inviterais le représentant de la CSN à répondre à la question suivante: Pourquoi voulez-vous être entendu et sur quel sujet?

Confédération des syndicats nationaux

M. Bourdon (Michel): Nous voudrions être entendus parce que le décret qui est en vigueur, et qui peut être modifié par le ministre, va couvrir tous les travailleurs de la construction y compris les 52 000 qui se sont inscrits à l'office comme membres de la Confédération des syndicats nationaux depuis que l'inscription se fait à l'Office de la construction.

On a soumis, dans le délai prescrit, au ministre du Travail un document précis sur ce qui nous paraissait non conforme à la loi dans l'entente qui est intervenue entre les parties habilitées à négocier. La raison principale pour laquelle on veut être entendu, c'est que nos membres vont être as-

sujettis au décret et qu on va en être reconnu partie signataire au même titre que les autres. C'est pour cette seule raison qu'on veut se faire entendre, parce qu'il y a certains points, dans l'entente, qui nous paraissent non conforme à la loi ou préjudiciables aux intérêts de nos membres.

Le Président (M. Marcoux): Pourriez-vous préciser, parce que la question risque de venir, sur quels points précisément, parmi les articles en litige, vous voulez vous faire entendre?

M. Bourdon: Le document que nous avons fait parvenir au ministère portait sur une quarantaine de points précis. Depuis, le ministre, lors de la publication, a retranché de l'entente certains points qui pouvaient être discriminatoires à l'endroit de certaines parties syndicales. Disons qu'on a une présentation d'à peu près 15 à 20 minutes à faire sur ce qui reste à discuter à l'intérieur, entre autres, du document que le ministre a fait parvenir aux parties sur les amendements que lui, le ministre, suggère au décret.

Le Président (M. Marcoux): Suite à ces informations, est-ce que l'Association des entrepreneurs ainsi que M. Dumoulin, vous pouvez préciser votre attitude face à la question que les membres de la commission vous ont posée, à savoir si vous êtes d'accord ou quelle est votre opinion...

M. Chevrette: M. le Président, avant que vous en donniez la parole à M. Dumoulin, je dois absolument dire ceci. J'ai également eu une demande d'intervention qui m'a été faite personnellement par — j'oublie le nom de la commission scolaire — une commission scolaire qui voudrait présenter une argumentation sur un seul point par rapport au décret. J'en fais part à la commission parce que vous avez posé la question. Ils ne sont sûrement pas ici, mais ils m'ont téléphoné; j'ai un message et il faut que je les rappelle. Donc, j'en fais part à la commission.

Le Président (M. Marcoux): M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Les deux parties qui ont dit vouloir faire une présentation à la commission, étant donné qu'ils sont du côté syndical, que nous, de l'association, on représente le côté patronal et que la FTQ-Construction, pour autant que la loi est concernée, représente le monde syndical, quant à nous, on va se ranger selon l'opinion de la partie syndicale. S'ils veulent être entendus, on va être avec eux pour qu'ils soient entendus et, s'ils refusent d'être entendus, on est d'accord avec eux pour qu'ils ne soient pas entendus.

Le Président (M. Marcoux): Alors, M. Dumoulin.

M. Dumoulin: Je suis entièrement d'accord avec M. L'Heureux et je le remercie en passant. Nous n'avons aucune objection à ce que les parties élaborent le sujet qu'elles veulent discuter.

Le Président (M. Marcoux): Alors, maintenant que ces points préliminaires sont tous clarifiés, on peut passer à l'étude de l'article 1 d).

M. Couture: C'est-à-dire que j'émettrais une réserve quand même sur la proposition. A moins que les membres de la commission n'insistent et qu'ils ne me prouvent que ce serait utile, j'émettrais des réserves sur le fait d'entendre une commission scolaire, ici, sur les problèmes de la construction, parce qu'éventuellement on ouvre la porte à beaucoup d'organismes qui pourraient vouloir aussi se faire entendre. Alors, je crois qu'on devrait limiter cette partie de la commission aux seuls organismes qui sont directement reliés à la construction.

M. Forget: Sur ce point, M. le Président, s'il apparaissait que, dans les définitions d'employeurs, on remette en question certaines pratiques établies, certaines exclusions en particulier — je crois que ce n'est pas possible étant donné le libellé de la loi elle-même, mais la loi s'interprète à la lumière du décret — il faudrait peut-être revoir s'il n'est pas utile d'avoir certains employeurs qui ne sont pas des employeurs professionnels au sens de la loi. Sous cette réserve, je suis d'accord avec le ministre que les parties dans le sens large seraient les seules qui devraient être entendues.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais ajouter un point d'information. Présentement, il y a énormément de poursuites envers les commissions scolaires qui, l'été, emploient soit des étudiants ou des chômeurs pour la réfection des écoles. On sait bien que, si elles font faire le travail par les concierges, les concierges ne sont pas assujettis au décret de la construction. Dès qu'il entre un travailleur pour quelques semaines, il est assujetti au décret de la construction. Je crois que c'est sur cette partie-là qu'elles voulaient être entendues.

Il m'apparaît d'autre part — moi, je n'ai pas pris position pour ou contre; j'ai voulu souligner le fait que j'avais eu une demande — qu'il serait fort probablement plus approprié d'y aller au niveau de la loi elle-même. Cette intervention cadrerait mieux, je pense, à l'intérieur d'une réforme de la loi qu'à l'intérieur du décret.

M. Dumoulin: M. le Président, puisqu'on a donné notre accord tantôt, ce sont forcément ceux qui se sont prononcés sur les différentes clauses qui voulaient parler. On s'oppose au fait que la commission scolaire puisse se prononcer, parce que c'est le champ d'application de la loi. On a passablement de problèmes dans le moment à ce niveau. On cherche à se rencontrer pour discuter justement de la loi, le bill 68, depuis nombre de mois. On n'est pas intéressé à faire entendre cela ici; on va recommercer un débat, comme je vous l'ai dit, et on va passer l'été ici.

Le Président (M. Marcoux): Si les membres

de la commission sont d'accord, on procéderait maintenant à l'étude ou à l'analyse des articles. L'article 1 d). M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Pour l'étude des articles, on a un document qu'on a fait circuler, qui est la position qui a été transmise au ministre du Travail en réponse à son document du 2 juin. Alors, c'est daté du 13 juin et je vais demander à nos conseillers juridiques, au directeur général et à son assistant, de l'expliciter pour les besoins de la commission et aussi on va être prêt à répondre à vos questions.

M. Dion (Michel): M. le Président, selon les suggestions que le ministre nous avait faites dans son document du 2 juin, nous avons traité l'article 1 d) globalement, parce que cela concerne tout le problème de l'artisan dans l'industrie de la construction, c'est-à-dire les articles 1 d), 1 e), 1 g) et l'article 12 qui ne faisaient pas l'objet de représentations par l'AECQ, mais qui ont été soumis par le ministre.

Si vous voulez faire référence au document de l'AECQ, c'est à la page 7, "Item non soumis par l'AECQ, problème de l'artisan".

Je ne lirai pas le texte, je vais simplement vous exposer le point de vue de l'AECQ qui est le suivant: dans l'industrie de la construction, et ce n'est pas nouveau, il y a des salariés, des employeurs qui ont à leur emploi ces salariés. Il existe également un troisième bonhomme qui s'appelle l'artisan, qui est reconnu et identifié dans la Loi des relations du travail, dans la définition du mot salarié. C'est probablement à ce niveau qu'est créé tout le problème parce qu'on assimile, par définition, l'artisan à un salarié alors que l'artisan, selon la position de l'AECQ, est un bonhomme qui est beaucoup plus proche de l'employeur de construction dans le sens suivant: est un entrepreneur, une personne qui entreprend pour autrui des travaux de construction. Il le fait à son compte, mais moyennant une rémunération, et qui a toutes les qualités apparentes d'un employeur, sauf qu'il n'a pas à son emploi des salariés. Il travaille habituellement seul, mais la loi lui permet le travail par équipe ou en société.

Ce n'est pas d'aujourd'hui, dans le décret, qu'on a tenté de cerner le problème de l'artisan. On a tenté de l'assujettir comme si c'était un salarié par la loi. On a tenté de l'assimiler, dans certains cas, à l'employeur, ou de l'assimiler aux obligations de l'employeur. Dans le dernier décret, comme dans toutes autres négociations qui ont précédé, on a tenté de trouver la solution qui fait que l'artisan, qui est un être qui doit exister et qui existe dans l'industrie de la construction, que l'artisan soit un bonhomme assujetti à certaines règles de façon qu'il n'y ait pas dans cette industrie de concurrence déloyale et que chacun ait des responsabilités, tant vis-à-vis du monde de la construction, patronal et syndical que du monde consommateur de produits de construction.

On a essayé d'assujettir l'artisan dans l'industrie de la construction, effort qui est peut-être légèrement différent de ce qu'on avait dans les dé- crets antérieurs, mais qui peut présenter des lacunes. C'est quand même ce que l'on dit dans le document de l'AECQ, ce qu'on a répondu au ministre à la suite de l'objection qu'il nous formulait. On n'a pas, à l'heure actuelle, trouvé la solution idéale pour régler le problème, parce qu'il y a un problème fondamental, et c'est son inclusion au niveau du salarié.

Quelle est la vraie solution qui devrait être adoptée pour l'artisan? Ce qu'on dit dans notre document c'est qu'on est prêt à chercher cette solution. D'un côté, pour illustrer la position difficile, vous avez un bonhomme, en machinerie lourde, qui possède une machine et qui offre son temps en travaillant sur cette machine, de quelle façon doit-on fixer les conditions de travail de cette personne? De quelle façon peut-on assurer l'industrie de la construction que cette personne travaille de façon loyale vis-à-vis de la concurrence?

L'artisan est quand même, au niveau d'une autre loi, un bonhomme assujetti à un système de permis d'entrepreneurs. Tout le monde connaît la Loi de qualification des entrepreneurs en construction qui oblige toute personne qui entreprend des travaux de construction pour autrui à détenir un permis. Or, l'artisan est assujetti à cette loi. Il est considéré comme un entrepreneur en construction, comme, d'ailleurs, l'employeur est un entrepreneur en construction.

D'une part, on lui donne, dans certaines lois, une apparence d'employeur, une apparence de responsabilité de faire des travaux de construction, et d'autre part, la Loi des relations de travail tente, par une description du mot "salarié", de l'assimiler au salarié de la construction. Je parle surtout du côté employeur. On pourra aussi dire que c'est une concurrence qui peut devenir déloyale, pas par elle-même dans son essence, mais par sa pratique qui peut devenir aussi "déloyale" vis-à-vis des salariés de la construction.

Si on laisse tout le monde devenir artisan, sans aucun assujettissement, sans aucune surveillance, c'est évident qu'on se retrouve, dans l'industrie de la construction, avec une troisième classe qui fait des travaux de construction comme un salarié peut le faire, qui enlève, pour certaines prétentions, du travail au salarié, fait une concurrence au niveau de l'employeur. On voit des deux côtés que le bonhomme se trouve à circuler entre le salarié et l'employeur.

Comment régler le problème? Il y a des solutions qui peuvent s'offrir, plus faciles que d'autres. La loi peut être modifiée pour exclure le mot "artisan" dans la définition du salarié.

A ce moment, on peut créer un statut de salariés dans le décret et peut-être réussir à lui donner des obligations, non pas pour le faire disparaître, mais de façon à être capable de s'assurer que ce bonhomme agit régulièrement dans l'industrie comme tous les autres de l'industrie.

On peut aussi reconnaître que, dans la loi, à l'heure actuelle, l'entrepreneur artisan comme tel existe, on sait qu'il y a un article dans la Loi sur les relations du travail, soit l'article 32g, qui reconnaît un statut, par projection, d'entrepreneur artisan. Dans l'article 32g, de la loi, les mots "entrepre-

neurs artisans" sont utilisés. C'est exactement la forme qu'on a voulu mettre dans le présent décret lorsqu'on l'a négocié. On a dit que la loi reconnaît cette existence d'un entrepreneur artisan. Nous on a dit à ce moment: D'accord, on va le définir l'entrepreneur artisan. On va réellement créer cette catégorie de bonhommes qui ont le droit de travailler à leur compte avec leurs outils et de signer des contrats pour faire de la construction. On va lui donner des responsabilités, lesquelles responsabilités il faut lui donner.

A ce moment, évidemment, il a fallu décider s'il est plus proche du salarié ou de l'employeur. La conviction de l'AECQ lorsque la discussion a été faite en négociation a été que l'artisan est un bonhomme proche de l'entrepreneur. C'est un entrepreneur proche de l'employeur. C'est pour cela qu'on a voulu l'assujettir ou l'assimiler aux responsabilités de l'employeur.

Tout le contenu du décret, à l'heure actuelle, vise à donner à l'entrepreneur artisan des responsabilités comme s'il était un employeur en construction, à faciliter à l'office de la construction une surveillance des activités de ce bonhomme de façon qu'on n'ait pas un être complètement libre dans l'industrie qui peut faire des travaux de construction et ne respecter aucune règle. Si vous assimilez l'artisan à l'employeur et à l'employé, c'est la même personne en elle-même qui fait les deux. L'article qui dit que le salarié doit faire cela ou l'employeur doit faire cela pour ses salariés, comment doit-on l'interpréter? La sécurité, par exemple; l'employeur doit voir à ce que ses salariés respectent les normes de sécurité. Pour l'artisan qui se présente sur un chantier sans casque de sécurité, si on lui dit: Tu devrais avoir un casque, c'est l'employeur qui doit voir à ce qu'il ait un casque, c'est la philosophie du code de sécurité. Comment arrive-t-on, par le mélange des deux fonctions dans le même bonhomme, à dire qu'il est employeur et qu'il doit voir à avoir un casque et qu'il est salarié et qu'il doit porter le casque? On peut s'en aller comme cela avec une série d'exemples du texte du décret où on est obligé de confondre les deux fonctions, employeur et salarié, dans le même bonhomme. C'est impossible d'arriver à des solutions logiques.

Nous avons pensé, et cela existait dans le décret antérieur, à créer le bonhomme entrepreneur artisan. Où cela existait-il? Cela existait dans l'ancien décret dans la définition de l'employeur. Cela existait, entre autres, pour les gens de la corporation des électriciens et de la corporation des plombiers. Ces bonhommes qui existent en un nombre assez important dans les deux corporations, c'est peut-être le tiers des membres de la corporation des électriciens, je ne voudrais pas exagérer mes chiffres, et peut-être le tiers des membres de la corporation des électriciens. Ce sont des bonhommes qui sont entrepreneurs électriciens ou entrepreneurs plombiers et qui font des travaux de construction et qui sont ni employeurs et ni salariés. Ils sont entrepreneurs en construction. Le décret antérieur et plusieurs décrets antérieurs ont créé cette notion d'employeurs, c'est-à-dire d'assimiler l'artisan à l'employeur.

Pourquoi aujourd'hui a-t-on voulu l'étendre? C'est assez simple. C'est que depuis la loi de la régie des entrepreneurs en construction, on est arrivé au même statut pour tous les entrepreneurs en construction ou à peu près au même statut qui existait pour les électriciens et les plombiers.

Ce statut vise à détenir une licence pour pouvoir entreprendre des travaux de construction. Maintenant, si tous les entrepreneurs ont un statut quasi semblable à celui des électriciens, tous les entrepreneurs qui détiennent une licence sont plutôt des employeurs que des employés. C'est une race qui existe peut-être, je ne sais pas, à 5 000 ou 6 000 personnes dans l'industrie de la construction et peut-être plus que cela. Au niveau des corporations c'est peut-être 700, 800 ou 1 000 personnes membres des corporations qui sont des entrepreneurs artisans à leur compte et qui n'ont pas d'employé.

Il y a un autre problème qui naît de l'artisan, je ne cherche pas à donner une solution sur la question, mais on expose pourquoi on a fait cela dans le décret.

C'est d'une façon négative une manière d'esquiver des conditions de travail qui sont dans le décret. De s'esquiver de la façon suivante:

N'étant ni employeur ni salariée, la personne peut travailler dans l'industrie de la construction avec un minimum, ou une absence, dans certains cas, de surveillance, mais il y a aussi cette possibilité de la loi par la définition du mot "salarié" que ces bonshommes peuvent travailler en équipe. On retrouve, à un moment donné, une espèce de phénomène pour éviter le décret. C'est que plusieurs gars se disent artisans en société ou artisans en équipe. A ce moment je m'en vais sur un chantier et je dis: Ecoutez, il y a des joints à tirer, M. X est un artisan, je dis, d'accord, je prends un contrat pour tirer les joints. Mon confrère qui, à toutes fins pratiques, est probablement mon employé dit: Moi aussi, je suis artisan et je vais tirer les joints. On retrouve sur une construction, parfois, cinq ou six personnes qui se disent toutes artisans pour faire un contrat et, normalement, ce contrat serait exécuté par un entrepreneur à l'aide de salariés.

Evidemment, on pourrait compliquer énormément la question de l'artisan. Notre but n'est pas de refuser de corriger le problème de l'artisan. C'est ce qu'on a fait savoir à M. Couture. D'ailleurs, cela a été notre position sur plusieurs points qu'on aura à discuter.

Sur les points qui sont difficiles à comprendre au niveau légal, sur des choses qui sont difficiles à régler parce que ce n'est pas simple, l'industrie de la construction, on s'est dit: D'accord, on est prêt à parler de ces choses. Sur les questions de fond, on a dit au ministre: Nous autres, on ne veut pas changer notre négociation, on a quand même signé une convention de bonne foi avec la FTQ, et c'est notre convention. Les points qui touchent le fond, on ne veut pas y toucher, mais sur les points comme l'artisan, on est prêt à chercher une solution. Evidemment, il y a une solution pour corriger la loi: enlever le mot "artisan" et cela réglera le problème, on crée un statut entrepreneur-artisan

et on fait le décret en conséquence; ou encore accepter de reconnaître que la loi reconnaît le principe d'entrepreneur-artisan et, à ce moment-là, il y a peut-être quelques modifications qui pourraient être apportées aux articles. Je dois retenir le point suivant: L'entrepreneur-artisan, c'est un bonhomme qui, depuis des années, au niveau des plombiers et des électriciens, et de plusieurs autres, signe des contrats à forfait. Le texte actuel dit: Le gars ne doit pas signer de contrat à forfait. C'est peut-être un point qu'on devrait approfondir et discuter plus longuement.

Il me paraît, à l'heure actuelle, que fondamentalement, l'artisan, il faut que je le cadre en quelque part parce que c'est un gars qui fait partie de la construction, et il faut, selon l'AECQ, l'assimiler au côté employeur parce que c'est quand même un gars qui entreprend des travaux de construction et qui, étant artisan demain matin, peut avoir deux gars pour l'aider. On a même dit, à un moment donné, au niveau de l'Office de la construction ou peut-être de la CIC, avant, de reconnaître des apprentis artisans. Pour nous, c'est inconcevable qu'il existe des apprentis artisans parce qu'un apprenti travaille avec un compagnon. S'il travaille avec le compagnon, donc il travaille sous le compagnon, pour le compagnon et il se crée une relation employeur-employé. Le compagnon est l'employeur, l'apprenti devient l'employé, mais on ne peut pas avoir un apprenti artisan, cela n'existe pas dans l'industrie de la construction. Des lois disent qu'un artisan c'est un homme qui travaille seul, et d'autres lois disent qu'un apprenti c'est un gars qui doit travailler sous la surveillance d'un autre. On ne peut pas avoir des apprentis artisans. En tout cas, cela nous amène à des situations un peu folichonnes comme cela et nous, on dit que le statut de l'artisan dans l'industrie de la construction n'est pas facile à régler. On est prêt à le régler, on est prêt à le discuter, c'est peut-être ici qu'on doit le discuter mais cela touche quand même plusieurs recommandations de M. le ministre, et je pense que c'est quand même ardu de trouver la solution.

Dans certains cas, il y en a qui disent: Faites disparaître cela, c'est une race qui ne devrait pas être là. Dans d'autres cas, il y en a qui disent: C'est une race qui est normale, c'est peut-être le futur employeur, c'est un gars qui fait un stage entre deux, avant d'être employeur il passe de salarié à entrepreneur, à employeur. L'AECQ n'a pas d'opposition en disant: On les fait disparaître. Au contraire, nous, on a dit: C'est un bonhomme qui peut exister mais il devrait exister dans un cadre. Evidemment, de biffer dans le décret l'assimilation aux obligations de l'employeur, de biffer dans le décret la définition de l'entrepreneur artisan, cela cause un problème énorme dans l'industrie de la construction parce qu'on va avoir un groupe dont on ne saura pas du tout où ils sont dans le décret. Est-ce que le ministère voudrait qu'il y ait des bonshommes qui puissent faire de la construction en dehors du décret de la construction? A ce moment-là, c'est le démembrement assez facile à comprendre de tout le système du décret de la construction.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Dumoulin: M. le Président, Me Décary va répondre à la question.

M. Couture: M. le Président, si vous me le permettez, tout simplement au niveau de la procédure, j'aurais un petit commentaire à faire. Nous entendons les parties qui n'ont pas réussi à arriver à un accord sur les modifications proposées.

Maintenant, je pense qu'on ne voudrait pas, à ce moment-ci, forcer les parties à faire des représentations quand elles sont d'accord. Je veux simplement vous signaler que, si vous êtes d'accord avec la modification du ministère et que vous ne voulez pas intervenir, c'est votre droit le plus strict.

M. Dumoulin: M. le ministre, notre accord a déjà été transmis au ministre du Travail, dans notre document. On est vraiment d'accord avec la modification que vous avez formulée. C'était simplement pour fournir d'autres explications, mais c'est parfait.

Le Président (M. Marcoux): M. Dion. Oui?

M. Bisaillon: M. le Président, quant à moi, je suis d'accord qu'on n'est pas pour faire des discussions sur chacun des articles, mais il me semble que l'AECQ vient de présenter quelque chose qui, pour nous autres, si on n'a pas la contrepartie, peut sembler le seul élément valable. L'argumentation se tenait; alors, j'aimerais bien savoir ce que pense le conseil provincial de cette argumentation.

Le Président (M. Marcoux): Disons que, pour clarifier, en tant que président, le droit de parole, c'est certain que, sur chacun des articles, les deux parties ont pleinement le droit d'expliciter les motifs de leur accord ou de leur désaccord. Elles peuvent le faire plus ou moins longuement, selon leur volonté. Je pense que ce que le ministre veut indiquer, c'est qu'il ne voudrait pas qu'il y ait de débat, qu'on commence des débats entre les parties, mais que chaque partie puisse donner son point de vue.

M. Dumoulin: M. le Président, si les députés ont à se prononcer sur les explications formulées au niveau des gens qui sont présents, peut-être qu'on va changer d'opinion. La question des artisans a été discutée pendant de nombreux jours à l'intérieur de la négociation et disons que, comme solution qu'on retrouvait, nous autres, lors de la négociation, c'est la position qu'il y a là. On avait des explications qui étaient formulées. C'est pour cela que j'ai dit tantôt que Me Décary peut répondre à l'allocution qui a été faite du côté patronal. Au départ, nous sommes d'accord avec la modification proposée. Je pense qu'il y a peut-être lieu qu'on fournisse quelques explications, si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Marcoux): Je crois que les

membres de la commission souhaitent que vous donniez des explications sur les motifs.

M. Décary (Michel): II ne serait peut-être pas inapproprié de rappeler, tout simplement, lorsqu'on dit, nous employeurs, que nous sommes d'accord, nous sommes aussi d'accord avec la définition qu'a donnée le législateur du mot "salarié". Lorsqu'il définit le mot "salarié", il entend inclure l'artisan. Il y a déjà, donc, une solution légale. Cette solution légale n'est pas venue tout d'un coup. La même solution a été donnée dans la Loi des décrets de convention collective. Il y a eu le problème des barbiers entrepreneurs et tout le problème passé de la construction, enfin de tous les artisans qui vivent sous l'empire des différentes conventions collectives.

On a souligné que l'artisan est, à certains égards, un entrepreneur. L'artisan est aussi un travailleur, un travailleur manuel qui doit détenir des certificats de qualification, des permis de travail. Surtout, il bénéficie des avantages d'une convention collective. Il y a un problème réel, celui des artisans. Toutefois, le législateur, au Québec — je me contente de succinctement résumer ma pensée ici — a déjà fourni une solution.

C'est celle qui doit nécessairement, je pense, être retenue par le ministère, à moins que l'on veuille faire une refonte de la loi. Je ne pense pas que l'objet de cette commission soit de discuter de la refonte de la loi. C'est pourquoi nous limitons nos propos à ce que je viens de dire.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, j'aurais une question à poser à Me Dion. Me Dion, dans le paragraphe 2 de votre page 7, vous dites que l'entente permet un contrôle, mais sachant fort bien que la commission parlementaire n'est pas en fonction d'un changement de la loi. Vous connaissez l'article 32 c) paragraphe g) qui, lui, assimile l'artisan au salarié. Vous connaissez aussi l'autre article du décret qui dit — je pense que c'est l'article 32 aussi du décret — que toute clause allant à l'encontre d'une loi est nulle et sans effet. Vous nous demandez de maintenir la définition d'artisan tel que conclue au niveau de l'entente. Comment pourriez-vous concilier cela?

M. Dion: En deux parties, M. le Président, la première partie c'est que, dans la loi actuellement — je demanderais peut-être aux gens de la commission, si vous avez le texte de la loi, vous allez voir que la loi, elle, reconnaît un entrepreneur artisan. La loi reconnaît cela, elle dit à l'article 32 g)...

M. Chevrette: Article 32 c), paragraphe g).

M. Dion: Le texte est le suivant: "Par demande écrite adressée à tout employeur ou entrepreneur artisan, exiger qu'un copie... " Ce sont les choses que l'office peut demander, dans l'industrie de la construction. Alors, on reconnaît un bonhomme qui s'appelle l'entrepreneur artisan. Nous disons que c'est vrai que la définition de salariés inclut une série de bonhommes, c'est un compagnon, c'est un apprenti, c'est un artisan, etc. On ne dit pas: Le bonhomme n'est pas, en théorie, un salarié, on ne change pas la nature du bonhomme. Mais on dit: On va lui donner les obligations, dans le décret, qui s'assimilent à celles de l'employeur, de façon à pouvoir exercer un certain contrôle sur le bonhomme. La solution que propose le ministère, à l'heure actuelle, a cette conséquence, en tout cas, cela peut avoir des conséquences beaucoup plus graves. Par exemple, si je dis que l'artisan est strictement un salarié, il doit, à ce moment, respecter la clause d'adhésion syndicale. Il doit enregistrer, à l'Office de la construction, un vote syndical. Pas besoin d'aller tellement plus loin que vous expliquer ceci, c'est que le tiers des membres de la corporation de X, plombiers ou électriciens, va être obligé d'aller voter pour faire partie soit de la CSN, de la FTQ ou de la CSD. Or, la Corporation des électriciens va être composée de réels entrepreneurs-employeurs — c'est très précis — et d'entrepreneurs salariés. La même corporation va avoir dans ses rangs — cela se produirait — des honhommes qui sont partie du syndicat et des bonhommes qui sont partie de la partie patronale. Il faut quand même voir la situation ridicule qui se présenterait.

La deuxième situation qu'on peut souligner, c'est que si on retient que l'artisan est un salarié, il faut qu'il ait une notion d'employeur, parce que la notion de salarié ne peut pas exister seule. Alors, qui devient l'employeur du salarié? C'est la personne qui lui donne de l'ouvrage. Et la personne qui lui donne de l'ouvrage, c'est madame X ou madame Y, qu'elle s'appelle comme on voudra, qui demande à monsieur Y: viens réparer ma galerie. Alors le bonhomme vient puis il signe, il fait la réparation de la galerie.

C'est un salarié et il travaille au taux du décret de la construction, à l'heure; il n'y a pas de travail à prix forfaitaire, donc il ne peut pas avoir un montant X pour la "job", il fait cela à tant l'heure. La madame, elle, est devenue employeur au sens du décret parce que c'est elle qui fait exécuter les travaux de construction. Elle va être obligée de faire un rapport à l'Office de la construction du Québec pour déclarer les heures que le bonhomme fait dans l'industrie de la construction.

Je n'essaie pas de vous faire une démonstration par l'absurde, mais la solution qui est proposée, de dire, d'accord, il n'y a pas d'entrepreneur artisan et rien de cela, c'est un salarié, point, tel que la loi le dit, je vous dis qu'on s'en va vers une situation où on ne sera pas capable de contrôler ces gens-là. Evidemment — là, sans malice — pour ia partie syndicale, cela fait un peu plus de syndiqués, mais pour la partie patronale, nous autres, on n'a jamais prétendu, à l'AECQ, que l'artisan devait être membre de l'AECQ. Nous groupons des employeurs en construction, l'AECQ n'est composée que d'employeurs en construction; c'est notre loi constitutive et ce sont nos statuts qui le veulent. Il n'y a pas de recherche de "membership" chez nous. Je n'accuse pas l'autre de recherche

de "membership", je ne voudrais pas qu'on commence un dialogue dans ce sens-là.

Pour nous autres, c'est un bonhomme qui existe: qu'il existe dans la partie patronale ou la partie syndicale, on ne se pose pas ce problème. C'est un bonhomme qui fait des travaux de construction et il faudrait que je le cadre. Mais qu'on n'arrive pas avec les consommateurs et tous ceux qui donnent des travaux de construction, qui se verront obligés, demain matin, de faire un rapport à l'office, de payer les vacances, etc. On pourrait continuer avec la CAT, etc. Pour sa part, M. Chevrette, à qui on a déjà parlé du problème, le comprend. J'essaie de vous faire comprendre la situation où on va se retrouver avec un bonhomme; on ne saura plus comment le cadrer dans le décret de la construction, c'est complètement ridicule. C'est la situation.

Ce n'est pas qu'on ne veut pas de la solution du ministre, ce n'est pas qu'on ne veut pas de la solution de la FTQ, on veut une solution quelle qu'elle soit. On dit, dans notre document, et c'est sur cela que je voudrais terminer: "En conclusion, l'AECQ souhaite que le problème de l'artisan soit réglé au plus tôt et de façon définitive. Pour ce faire, une étude plus poussée de ce problème nous paraît nécessaire et l'AECQ est disposée à participer à cette recherche de solution dans le cadre d'un travail intensif, avec des officiers spécialisés du ministère, ou tout autre cadre qui convient". Evidemment, ce n'est pas un argument pour vous dire qu'on n'a peut-être pas besoin d'une commission parce qu'on peut régler nos problèmes, mais cela réglerait ce point.

M. Couture: M. le Président...

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Decary: Si vous me permettez un éclaircissement. Les entrepreneurs électriciens et plombiers sont membres des différentes corporations, mais je tiens à vous rappeler que ces corporations ont pour but la surveillance et l'exercice de ce métier et d'assurer l'intérêt du public. Le public est desservi tant par des entrepreneurs employeurs que par des artisans. Il n'est que normal que les deux groupes de personnes qui offrent leurs services directement au public soient assujettis aux pouvoirs de surveillance et de contrôle de cet organisme qui a pour but, précisément, de contrôler l'exercice de leur métier.

Deuxièmement, c'est vrai que la loi dit que maintenant quiconque fait exécuter un travail par un artisan deviendra un employeur au sens de la loi et donc, devra, comme le souligne Michel — c'est vrai — faire des rapports. Je tiens à vous souligner que c'est une des difficultés. Donc, nous, conseil provincial, sommes conscients qu'avec cette solution légale qui s'impose, parce que la loi l'impose, évidemment, il serait très difficile, dans le contexte actuel, pour l'Office de la construction d'assurer l'administration saine du décret parce que ne connaissant pas toujours qui sont les différents employeurs.

Je termine en faisant la suggestion suivante.

Normalement, dans les municipalités du Québec, quiconque fait exécuter un travail de construction doit détenir un permis et, donc, chaque fois qu'un permis est émis, on doit en informer l'office.

Alors l'office pourrait surveiller, de cette manière, les travaux de construction partout au Québec.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: M. le Président, dans le document de l'AECQ, je retiens que c'est très positif, dans le sens qu'elle sent qu'il faut absolument, dans les plus brefs délais, trouver une solution à ce problème des artisans. A la suite de ce qu'a dit M. Décary, je crois qu'on peut vous garantir rapidement qu'on mettra en place ce groupe de travail pour y chercher une solution. Mais ce qui nous concerne actuellement, c'est simplement de dire: La loi stipule que l'artisan est associé aux salariés et on doit s'y conformer.

Le Président (M. Marcoux): Oui, M. Dion.

M. Dion: M. le Président, quand même ce qu'on fait dans le présent décret, n'est pas quelque chose de nouveau. Il y a un problème, on t'a toujours eu ce problème dans l'industrie de la construction, mais on fait exactement ce qu'il y a eu dans le décret antérieur. Evidemment, on ne dit pas ici que le parti au pouvoir ou le gouvernement au pouvoir peut se permettre d'être illégal, si c'est illégal, etc. Ce n'est pas ce qu'on a dit, mais c'est quand même une situation avec laquelle les gens de la construction ont vécu jusqu'ici. Cela a existé l'entrepreneur artisan dans l'ancien décret, cela a existé au moins trois ans. Le décret actuellement, tel qu'il a été signé, il faut faire souligner ici à la commission que c'est un document qui est signé par les deux parties. Les parties s'entendaient sur la solution qui est là. Plusieurs des choses qu'on discutera sont des choses qui ont été signées par les deux parties. Si, aujourd'hui, je n'aime pas, je ne sais pas, la figure d'un tel parce qu'il s'est coupé les cheveux autrement, cela est un autre problème. Mais aujourd'hui c'est quand même le même document avec lequel les gens sont coiffés. Aujourd'hui qu'on n'aime pas certaines parties c'est quand même drôle. A toutes fins pratiques on a vécu avec cela, avec l'industrie de la construction, avec des entrepreneurs artisans, avec les problèmes d'entrepreneurs artisans en machinerie lourde, l'entrepreneur artisan qui existait au niveau des plombiers et des électriciens.

C'était dans l'ancien décret tel quel; on n'a pratiquement rien changé, on a précisé peut-être des choses. Il y a le travail à forfait qui est peut-être un point un peu spécial à l'heure actuelle qu'il faudrait retenir, mais en dehors de cela c'est la situation qui existe depuis un bon bout de temps. Or qu'on dise qu'on va tout jeter cela à terre, quitte à trouver une solution demain, c'est peut-être une autre façon de voir le problème. Il faudrait laisser ce sur quoi les parties se sont entendues, c'est le voeu des parties, M. le ministre l'a souligné ce matin. C'est le voeu des parties jusqu'à ce que le

problème puisse être réglé autrement et non pas jeter à terre et attendre pour voir si on va trouver une autre solution. Cela peut être long de régler le problème de l'artisan et entre-temps on ne saura pas où on va aller dans la construction avec ces bonhommes.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais savoir si ce que nous a dit le ministre tout à l'heure relativement à sa proposition de modification consiste essentiellement à nous dire que la modification proposée, dans son esprit, en est une de forme seulement. Dans son introduction, il a fait une distinction entre les distinctions de forme, des distinctions basées sur le caractère illégal de certaines dispositions, et des modifications de substance, probablement celles d'ordre public, puisque les modifications de fond peuvent à peine l'être. Les dispositions qui sont basées sur l'illégalité sont caduques automatiquement, donc il n'y a que les dispositions de substance qui peuvent être d'ordre public.

Est-ce que le ministre nous dit essentiellement que c'est simplement une question de forme, que cela ne change rien dans la situation, que tout peut continuer comme avant et que c'est simplement pour une concordance de textes ou si, effectivement, il voit cette modification comme étant de fond et introduisant une modification dans les pratiques suivies, si je comprends bien par l'exposé de Me Dion, jusqu'à maintenant?

M. Couture: C'est effectivement une modification de fond qui a une justification légale.

M. Dion: M. le Président, cette justification légale, M. le ministre l'a bien souligné, notre document est positif, on ne rejette pas cet argument légal du ministère. On est d'accord avec le ministre pour former un comité pour trouver une solution. La seule note qu'on ajoute c'est de laisser ce qui est là actuellement, ce qui était à l'état antérieur, jusqu'à ce qu'on trouve une solution en comité, comme le suggère le ministre. On est d'accord avec cette position.

M. Forget: Est-ce qu'il serait possible de savoir exactement comment, légalement, on base ce raisonnement? Je comprends que, dans la loi, il y a une définition et que dans le projet de décret on propose une définition qui n'est pas contradictoire, qui est plus élaborée. Est-ce qu'il serait possible de connaître l'opinion juridique qui fait que dans un décret on ne peut, sur un plan strictement juridique, aller au-delà d'une définition contenue dans la loi?

M. Couture: Si vous le permettez, je vais laisser la parole à Me Fortin.

Ce qui arrive c'est que, dans le décret, on trouve une définition du mot "employeur" où l'on décrit que ce terme comprend l'entrepreneur artisan et l'entrepreneur artisan en machinerie lourde aux fins d'application des présentes. Vous pouvez également voir que l'article 1 j) et l'article 1 k) du décret définissent l'entrepreneur artisan et l'entrepreneur artisan en machinerie lourde.

La difficulté légale provient du fait que la loi, à l'article 1 paragraphe q), définit le mot salarié, en comprenant spécifiquement l'artisan et en précisant également "qui travaille comme commis ou employé, qui travaille individuellement, en équipe ou en société". Si vous reprenez la définition "d'employeur", au décret, de même que "d'entrepreneur artisan en machinerie lourde", vous constatez que dans le décret on va plus loin, en ce qui concerne l'artisan, que ce que la loi permet de faire, et même on la contredit spécifiquement, à la définition de "salarié" prévue à la loi.

M. Forget: Etant donné l'explication qu'on vient d'entendre à savoir que, pour différents objets, on peut considérer la même personne à la fois comme employeur ou comme entrepreneur ou comme salarié, il n'apparaît pas évident qu'il y a une contradiction dans les textes parce que les définitions sont essentiellement faites en fonction d'articles subséquents où on applique la définition. Quand on parle, dans la loi, d'employeurs et, d'autre part, de salariés, il faudrait nous expliquer en quoi ces deux termes doivent couvrir toute la réalité et ne la couvrir qu'une fois. La loi est muette là-dessus.

M. Couture: Oui, c'est là qu'est le problème, il va falloir trouver une solution.

M. Forget: Je comprends que le problème est là. C'est le problème qu'on nous a exposé, mais il y a bien des façons de le régler. On nous y présente une des solutions possibles comme la solution. A mon avis, c'est une question d'opinion à savoir que la loi nous indique que la définition retenue dans le décret est légale ou pas.

Je reviens à ma question originale. Quand je demande si le ministre fait cette modification parce qu'il croit qu'il est d'ordre public de changer les habitudes, il me répond que ceci a cet effet, mais la cause est légale. Je me dis que la cause est elle-même une question d'opinion.

M. Couture: M. le Président, si je peux me permettre, sur le plan juridique, la loi ne permet pas d'assimiler l'artisan à autre chose qu'à un salarié. Ce que les définitions que l'on trouve au décret actuel fort expressément. Du point de vue juridique, les règles d'interprétation juridique reconnues par les tribunaux ne permettent pas au lieutenant-gouverneur en conseil d'adopter un règlement qui serait éventuellement déclaré ultra vires parce qu'il ne traite pas l'artisan de la même façon que le législateur a bien voulu le traiter.

Les difficultés pratiques qui pourraient résulter ou qui ont pu résulter du défaut de concordance entre le traitement de l'artisan dans le décret ou dans le décret antérieur avec le traitement qui lui est donné par la loi, c'est évidemment une question qui ne ressort pas d'un amendement à un

décret comme tel, mais possiblement d'un amendement législatif.

M. Forget: Les tribunaux ont-ils déjà été saisis de cette question?

C'est une question d'interprétation. Seul un jugement peut donner une assurance définitive que l'interprétation qu'on nous suggère ce matin est la bonne.

M. Couture: A notre connaissance, je ne me souviens pas que cette question ait été traitée spécifiquement en relation avec la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction, mais elle a certainement été traitée dans le cadre de la Loi des décrets de convention collective où la notion d'artisan a également été abordée.

M. Forget: Le mot "artisan" ne figure pas dans la définition de salarié.

M. Couture: Dans la loi, à l'article 1, paragraphe q), à la définition de salarié, on inclut l'artisan.

M. Décary: J'aimerais, si vous me le permettez, d'abord quant à...

Le Président (M. Marcoux): Selon l'expression, un moment donné la tête ne peut plus en supporter davantage. Nous allons ajourner nos travaux sine die. Il y aura reprise, normalement, vers 4 heures ou 4 h 30.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

Reprise de la séance à 16 h 45

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour étudier les amendements que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre compte apporter au décret de la construction.

Les membres de la commission sont: M. Bellemare (Johnson) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond). M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Coutume (Saint-Henri), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplacé par M. Lefebvre (Viau)...

M. Lefebvre: Non, j'étais là.

Le Président (M. Marcoux): ...par M. Mercier (Berthier); M. Forget (Saint-Laurent), M. Godin (Mercier), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lefebvre (Viau), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Pagé (Portneuf) et M. Roy (Beauce-Sud).

Nous en étions à l'article 1 d). Je ne sais pas s'il y avait d'autres questions ou d'autres commentaires. Je crois que c'est le député de Saint-Laurent qui achevait une question ou une intervention.

M. Forget: J'avais terminé sur cette question.

Le Président (M. Marcoux): Y a-t-il d'autres questions ou commentaires? Oui, M. L'Heureux.

M. L'Heureux: M. le Président, avec votre permission, j'aimerais ici faire un commentaire, à la suite de nos propos de ce matin et des consultations faites avec nos conseillers et nos administrateurs. Nous allons participer à la commission parlementaire, nous allons coopérer dans toute la mesure du possible, mais nous ne voudrions pas que notre participation et certains de nos commentaires soient préjudiciables à nos droits, si jamais des actions pouvaient s'ensuivre, par suite de la commission parlementaire. C'est le seul commentaire que j'ai à faire.

J'aimerais maintenant demander à Me Dion de faire quelques autres commentaires sur le terme "artisan".

M. Dion: M. le Président, nous voudrions souligner ici le point suivant: Dans le décret de la construction, ou le projet qui a servi aux fins du décret, ce qu'on fait lorsqu'on définit le salarié de la construction ou l'entrepreneur artisan, ce n'est pas changer les termes de la loi, c'est-à-dire changer la définition du salarié au sens de la loi, c'est simplement donner une façon de pouvoir interpréter le décret, c'est-à-dire qu'à ce moment on donne à l'artisan, aux fins du présent décret, telle et telle obligation qu'il y aura dans la loi. Donc, contrairement à ce que pense mon jeune confrère du Barreau, je ne pense pas qu'on change le

contenu de la loi de l'industrie de la construction, on ne fait qu'utiliser une des parties de la définition, c'est-à-dire "l'artisan" en disant que cette personne, dans le décret, aura telle et telle obligation. On ne change pas du tout la définition du mot "salarié".

Dans notre décret, quand on utilise une définition d'entrepreneur artisan ou lorsqu'on utilise une définition d'entrepreneur artisan en machinerie lourde, on ne vient pas changer la loi de la construction. A notre avis, l'article n'est pas illégal. On est obligé de vous dire, comme plusieurs le pensent, qu'on ne règle pas totalement le problème de l'artisan dans le décret, comme on ne l'a jamais réglé. C'est une situation qui est là depuis deux décrets peut-être. C'est la même situation qui se continue dans le décret. Dire, à l'heure actuelle, que notre clause d'entrepreneur artisan est illégale... Elle n'est absolument pas illégale. Elle est d'autant plus légale que même la loi utilise ces termes. On ne fait rien de contraire à la loi. On ne fait que créer des obligations à cette personne dans notre décret.

C'est le point que je voulais ajouter concernant l'intervention de M. Fortin du contentieux. Somme toute, pour revenir à la forme, ce que le ministre a proposé, soit de réétudier en comité tout le problème de l'artisan, nous sommes d'accord là-dessus.

Le Président (M. Marcoux): Comme il n'y a pas d'autres demandes d'intervention, j'appellerais l'article 1e. M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Comme pour tous les autres articles d'ordre technique, ce sera Me Dion qui sera notre porte-parole.

M. Dion: M. le Président, je voudrais souligner qu'en ce qui nous concerne, quand j'ai traité le problème de l'artisan au nom de l'AECQ, on traitait les articles 1d, 1e, 1g, l'article 12, en partie.

Le Président (M. Marcoux): Alors, M. Dumoulin, avez-vous des choses à ajouter?

M. Dumoulin: Voici, on n'a rien à ajouter. Je crois que, dans notre document, c'était clair à ce niveau. Il y a simplement qu'à la base de l'information concernant le problème de l'artisan, parce qu'on a chevauché un peu l'article 1. Dans l'article 1d, il est question des artisans, mais je comprends que les deux correspondent. Je comprends bien que dans les articles 18-1), 2), 3) et 4), dans le document présenté par le ministre, sont abrogés; 18-1), 2), 3) et 4), si je ne me trompe pas.

Une Voix: L'article 10-1, 10-3 et 10-4.

M. Dumoulin: Cela répond à ma question, merci.

Le Président (M. Marcoux): Alors 1e c'est fait. 1g, si j'ai bien compris vos remarques, c'est la même chose?

M. Julien: La définition du salarié.

Le Président (M. Marcoux): Alors, cela va. L'article 3. Est-ce que, M. Dion...

M. Dion: M. le Président, ce qu'on a voulu par cet article, c'est énumérer une série de gens ou de personnes qui sont habiles à aller devant le conseil d'arbitrage pour soumettre un problème. Evidemment le fait d'émettre une énumération, cela donne une certaine limite aux gens qui peuvent soumettre devant le conseil d'arbitrage. Ne pas en mettre a la conséquence tout à fait contraire, c'est-à-dire que cela rend illimité le nombre de personnes qui pourraient, à l'occasion, soumettre devant le conseil d'arbitrage des problèmes de juridiction. Nous avons l'impression que le fait de ne pas déterminer qui peut aller devant le conseil d'arbitrage pour les fins du décret de la construction pourrait nous amener devant une prolifération des recours devant le conseil d'arbitrage et peut-être des recours, à l'occasion, futiles, simplement pour créer des situations dans l'industrie de la construction.

Evidemment, la modification qui est proposée n'a pas une conséquence de fond dans le décret comme tel, mais a quand même une conséquence d'efficacité devant le conseil d'arbitrage qui, à notre connaissance, a toujours agi à l'heure actuelle d'une façon assez rentable pour les parties. On ne voit pas l'utilité de faire ce changement parce que cela ne corrige pas une situation, cela place les parties dans une situation plus difficile de prolifération de recours, en tout cas de recours folichons tout simplement devant le conseil.

Le Président (M. Marcoux): M. Dumoulin. M. Dumoulin: Me Décary va répondre.

M. Décary: D'abord, nous sommes d'accord avec la position du ministre. D'autre part, un peu pour répondre à ce que disait mon ami M. Dion, s'il faut reprendre le texte de la loi, peut-être qu'on pourrait ajouter "par tout intéressé ou encore par toute personne qui se croit lésée". Et de cette façon on donnerait enfin la portée qui est indiquée à l'article 32, je pense, 32 b)-3 de la loi.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: Je serais porté à dire que, dans un décret, on n'a pas à spécifier qui est habilité ou non. C'est dans la loi ou par le conseil d'arbitrage que cela doit être stipulé, je pense que c'est la raison pour laquelle on n'a pas retenu...

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette.

M. Chevrette: J'ajouterais peut-être que l'objectif de la précision ou, en tout cas, la suggestion qu'a faite le ministre, la recommandation, c'est précisément pour ne pas s'ingérer dans l'interprétation même du décret. C'est à un tribunal d'arbi-

trage d'interpréter dans l'interprétation même du décret. C'est à un tribunal d'arbitrage d'interpréter qui est apte et qui a droit, est en possession du grief, et de définir si la personnalité juridique qui est devant elle correspond aux lois existantes ou non. Cela a été précisé. Les arbitres jugent donc à partir d'un contenu de décret, mais d'une loi-cadre qui régit les relations de travail. Ce n'est pas en vertu d'un décret que l'on fait cela. C'est en vertu de la loi.

Le Président (M. Marcoux): Me Dion.

M. Dion: D'abord, il faut retenir qu'il s'agit là de l'article 6, la procédure du conseil d'arbitrage, et non pas de la procédure de grief comme telle. C'est la procédure du conseil d'arbitrage en cas de conflit. A notre connaissance, on aimerait peut-être connaître les motifs du ministère pour soulever ce point. Ce n'est pas un point qui nous avait été soulevé par les gens du contentieux au moment où on les avait rencontrés. A toutes fins pratiques, si on se réfère à la loi comme telle, le texte de la loi parle de toute personne lésée.

Or, peut-être que l'une des solutions, ce serait d'ajouter les mots "toute personne lésée", après l'énumération. Mais il faut comprendre que nous, on fait un décret pour les gens de la construction, de façon que les gens de la construction puissent comprendre. Or, qui — on se pose la question, en vertu de notre décret, parce que c'est notre instrument de travail, — peut soulever un grief? A ce moment-là, on en vient à la conclusion que ce sont les gens de la partie syndicale, c'est le syndicat, c'est le petit salarié, c'est l'employeur, c'est l'association d'employeurs. On n'a pas à se poser la question à savoir qui, en dehors de cela, peut en soulever, même si la loi, à ce moment-là, pouvait l'ajouter. On ne verrait peut-être pas d'objection à ajouter "toute personne lésée", mais, encore là, on souligne le danger d'une trop grande extension qui ferait tout simplement que la commission scolaire, comme on en a parlé ce matin, ferait une demande devant un conseil d'arbitrage pour telle affaire et, à un moment donné, on verrait le conseil d'arbitrage qui juge des points qui n'ont absolument pas d'intérêt pour les gens de la construction. Ce serait peut-être trop étendre ce recours. A toutes fins pratiques, pour nous, dans le décret, on l'a défini pour les fins de notre décret, pour les gens de notre décret, c'est dans ce sens qu'on l'a fait.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, je veux juste dire un mot sur la question de la formulation; je pense que, dans un règlement, on peut sans doute répéter ce qui est dit par la loi, et on ne peut pas dire plus que ce que la loi dit, mais on peut répéter la même chose, il n'y a pas d'objection à cela. On ne peut pas légiférer par un règlement, et c'est pour cela qu'on pourrait, sans doute, ajouter "toute personne qui se croit lésée par l'application" mais on ne pourrait pas ajouter autre chose que cela, cela irait à l'encontre de la loi même.

M. Chevrette: Cela dépend...

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: Comme je viens de le dire, je pense que ce n'est pas le lieu de légiférer, si déjà la loi définit clairement, on n'a pas dans le décret à le reprendre comme tel.

M. Dion: M. le Président, peut-on en venir à la conclusion suivante? Il n'y a rien qui nous empêche, dans le décret pour permettre qu'un document soit unique, qu'un document soit compréhensible par tous les gens qui aient à l'appliquer, d'aller chercher un article qui est dans la loi qui s'applique dans la construction et le répéter, de façon que les gens, en lisant le document, aient un document qui soit complet, de façon que les gens puissent comprendre le document. D'avoir marqué dans le décret, simplement, "toute personne lésée", pour les fins de l'industrie de la construction et de l'application du décret, cela peut ne pas vouloir dire tellement de choses. C'est qui, toute personne lésée? Or, pour fins de compréhension, nous, on a défini qui c'est les personnes qui peuvent être lésées. On a tenté d'inclure tous ceux qui peuvent être lésés, l'employeur, le salarié, le syndicat qui représente le salarié, l'association qui représente l'employeur. Il est fort possible qu'on ait pu oublier quelqu'un. Cette énumération, pour nous, est une fin pratique, dans le décret. D'ajouter les personnes lésées, comme on le fait dans notre document — d'ailleurs, notre argument est à la page 11 — il n'y a pas de conflit avec la proposition du ministre à ce moment. Nous, on dit que la possibilité pour n'importe qui d'aller devant la commission, cela peut amener une prolifération; sauf que d'ajouter, "toute personne lésée", cela n'a pas de conséquence pour nous, ce serait répéter le texte de la loi, si cela règle la situation, il n'y a rien là.

M. Couture: Je pense que je peux quand même dire ceci, qui vaudra pour la discussion des autres articles. Je prends bonne note — ce n'est pas pour rien que l'on vous a convoqués, c'est pour vous entendre — de votre représentation là-dessus, et on l'étudiera avec le contentieux.

Le Président (M. Marcoux): J'appellerai maintenant l'article 4, qui porte sur l'article 902 du décret. M. Dion.

M. Dion: M. le Président, je ne veux pas tracer une façon de travailler, mais on arrive à chacun des points qui ont été soulevés par le ministère, etc., peut-être que cela pourrait faciliter et peut-être éliminer certains points de nos discussions, tout prolongement inutile, si le ministre nous disait: C'est quoi exactement? Et pourquoi? C'est quoi la modification? Pourquoi est-elle faite? A ce moment, peut-être que cela pourrait arranger les

choses. Par exemple, je viens de voir l'article 6 — on vient de passer dessus — et il me semble qu'il n'y a pas réellement de conflit entre les parties, à ce niveau. Or, si on avait, avant de discuter l'article entre nous l'explication du ministre, peut-être cela aiderait-il.

Le Président (M. Marcoux): Le ministre peut, s'il le désire, acquiescer à votre demande.

M. Couture: M. le Président, j'aimerais mieux, tel que le mandat nous le demande, qu'ils nous disent d'abord pourquoi ils ne sont pas arrivés à une entente, pourquoi ils rejettent la modification et après, éventuellement, on éclaircira notre position.

M. Dion: M. le Président, on est devant une entente des deux parties et un tiers, en tout cas, excusez de comparer le gouvernement à un tiers, mais il y a un tiers qui vient nous dire: Vos deux parties, vous devriez changer votre document de cette façon. Le FTQ a signé le 9.02; nous, on a signé le 9.02; on est au 9.02. Les deux parties se sont entendues et il y a quelqu'un qui vient nous dire qu'il faut changer cela. Si les deux parties se sont entendues, pourquoi demande-t-on de changer cela? C'est sans malice, je veux tout simplement savoir pourquoi on nous demande de changer cela.

M. Couture: M. le Président, il y a un aspect juridique et je vais laisser notre avocat l'exposer. Je peux dire d'abord, au point de vue général, qu'il nous semble que, dans le décret, on cherche à donner au représentant syndical une fonction de délégué de chantier qui est déjà stipulé dans la loi où on voit, par ailleurs, qu'il est bien clair, selon l'article 32n, que toute clause d'une convention collective ou d'un décret relative à la fonction de délégué de chantier est réputée non écrite parce que la loi le stipule et le définit. Donc, globalement, c'est un peu la raison fondamentale, mais je vais demander quand même à notre avocat d'expliciter cela au niveau juridique.

M. le Président, très sommairement, la modification proposée dans le décret de modification traite d'un amendement à apporter notamment à l'article 9.02, paragraphe 1, du décret tel qu'il existe actuellement. Si l'on compare le texte de ce paragraphe 9.02 du paragraphe 1 avec l'article 32n de la loi — pour fins de consultations, c'est à la page 31 de la codification administrative — au bas de cette page, on voit que la fonction de délégué de chantier est déterminée.

Notre interprétation de la loi en regard de l'article 9.02 du décret nous donne à penser que ce que l'on confie comme fonction au représentant syndical à cet article 9.02 est effectivement la même chose que ce que le législateur a confié expressément au délégué de chantier à l'article 32n de la loi.

Au début de l'article 32n, deuxième paragraphe, on dit ce qui suit: La fonction de délégué de chantier est régie par les dispositions suivantes. Je réfère également les membres de la commission parlementaire à l'article 32n à la page 33 de la codification où il est stipulé que toute clause d'une convention collective ou d'un décret relative à la fonction de délégué de chantier est réputée non écrite. Alors, c'est le fondement juridique et c'est pourquoi nous proposons un amendement au décret tel qu'il existe actuellement.

Le Président (M. Marcoux): M. Dion.

M. Dion: Oui, je pense que la commission va comprendre qu'on préférerait laisser la partie syndicale s'expliquer sur cette clause qui la regarde. Effectivement, quant à nous, c'est dans la convention, on l'a signée; alors, on est prêt à entendre la partie syndicale là-dessus.

Le Président (M. Marcoux): Me Décary.

M. Décary: D'abord, c'est en regard de l'article 9.02. Le représentant syndical a libre accès à tous les chantiers durant les heures de travail. Ce que vous nous suggérez d'enlever, ce sont les mots suivants... Vous êtes d'accord sur le libre accès à tous les chantiers, mais ce que vous suggérez qu'on enlève, ce sont les mots: "pour enquêter dans toute affaire ou pour discuter de toute affaire" concernant l'application de la convention collective ou du décret, mais, en aucun cas, sa visite ne doit compromettre l'avancement des travaux. Or, si on enlève les mots que vous suggérez, c'est dire que le représentant syndical a libre accès à tous les chantiers, que ses visites ne doivent pas compromettre l'avancement des travaux, mais qu'il peut y aller pour n'importe quoi.

Lorsque le texte est rédigé, le sens qu'on a voulu lui donner, c'était pour limiter ses visites à des enquêtes dans toute affaire, ou des discussions concernant toute affaire qui relève de l'application du décret. C'était bien limité. Je pense qu'avec la suggestion que vous nous faites, le représentant peut aller pour n'importe quoi. C'est ma première réaction. Mais, plus profondément, si j'accepte ce que Me Fortin dit, je dois vous rappeler que, dans l'industrie de la construction d'abord, il n'y a pas de délégué de chantier partout, mais, premièrement, seulement là où il y a sept salariés et plus. Sur tous les chantiers où il y a moins de sept salariés, il n'y a pas de délégué, on n'a pas le droit d'avoir un délégué. D'autre part, les salariés peuvent avoir des revendications légitimes et il revient à leur agent négociateur d'administrer la convention et d'assurer le cheminement de leurs griefs, ce qui implique, de leur part, enquête, aller sur les chantiers voir si c'est vrai ou pas, discussion concernant cette affaire, et ensuite soumission, le cas échéant, à l'arbitrage ou à d'autres autorités.

Or, si je retiens la suggestion de Me Fortin, cela nous conduit à ceci: si ce que Me Fortin veut dire, c'est que le délégué, le représentant syndical n'a plus le droit d'enquêter et de discuter sur les chantiers de l'administration de la convention collective, j'aimerais lui souligner que, d'abord, la loi ne s'applique qu'aux délégués, et le représentant n'est pas un délégué, que le délégué, il y en a seu-

lement là où il y a sept salariés, et, même là où il y a sept salariés, seulement s'il est élu à la majorité de tous les travailleurs de son métier. Donc, très souvent, il n'y a pas de délégué, parce qu'il y a un vote et que les gens ne veulent pas de la personne qui se présente, ou encore parce qu'on ne tient pas de vote. Finalement, allons plus loin. C'est que, si on se met dans le contexte de la loi, on a réglé à la suite de certains événements, le cas du délégué, et on a aussi réglé le cas des gens qui ont à administrer les syndicats. Mais, d'autre part, les syndicats doivent continuer à administrer la convention collective. Un syndicat agit par des personnes. Le syndicat agit par des représentants syndicaux. Les représentants syndicaux ont existé dans l'ancienne convention collective, ils existent à l'heure actuelle et, nulle part dans la loi, n'a-t-on porté quelque restriction que ce soit à leur droit, si ce n'est qu'ils doivent ne pas avoir de dossier judiciaire ou autre.

Or, on n'a pas, dans le cas du représentant permanent, limité son droit de faire enquête et de discuter des cas concernant l'administration du décret. A mon sens, c'est tout à fait exclu. Ce qu'on veut dire, c'est: Tu n'as plus le droit d'aller sur les chantiers pour discuter de toute affaire concernant le décret. Aussi bien, pourquoi ne pas lui avoir dit de ne jamais aller sur le chantier? Normalement, s'il a affaire sur le chantier, c'est seulement pour cela. Si, d'autre part, on enlève les mots "la première lecture", vous lui consacrez le droit de libre accès, mais, d'autre part, vous enlevez la restriction, donc il peut faire n'importe quoi. Je vous soumets que l'approche qui a été envisagée, qui a été réglée par les parties, je le pense, est conforme à la loi parce que, dans la loi, il n'y a aucune restriction concernant le représentant syndical, mais seulement le délégué, et si on applique le raisonnement de mon ami, Me Fortin, au représentant syndical, qu'on soit logique et qu'on lui dise: N'allez pas sur le chantier. Parce que si on lui donne le droit d'aller sur le chantier pour autre chose que l'administration de la convention, je vous suggère que, vraiment, on peut être amené à une espèce de bordel ou enfin...

Je vous invite à considérer votre position sur l'article 902 et peut-être à revenir ou à retenir ce qui a été agréé par les parties.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je voudrais aller dans le sens de la dernière partie de l'intervention de Me Décary. Je voulais savoir de la part de Me Fortin qui, dans la loi, restreignait l'exercice par seulement le délégué de chantier. Est-ce qu'il y a un texte dans la loi qui empêche d'autres personnes que le délégué de chantier de faire le travail décrit au délégué de chantier? Est-ce que cela repose sur un autre article dans la loi?

M. Couture: En fait, je ne suis pas certain de bien comprendre votre question.

M. Bisaillon: Vous avez fait reposer la base ju- ridique de l'amendement proposé sur la définition qu'on fait du délégué de chantier et du travail qu'on donne au délégué de chantier.

Ma question est: Est-ce que, ailleurs, dans la loi, il y a un texte qui dit que seul le délégué de chantier peut... Autrement dit, est-ce qu'on peut définir le rôle de quelqu'un sans empêcher les autres de le faire aussi?

M. Couture: Non, effectivement, il n'y a pas d'autre endroit que les articles que j'ai mentionnés; maintenant, je pense qu'il est important de mentionner ce qui suit: nous sommes en droit statutaire, il s'agit d'une loi de droit statutaire, qui doit être interprétée restrictivement. Par conséquent, lorsque le législateur prend le soin, avec l'amendement du projet de loi 30, en 1975, d'adopter un article qui dit ce qui suit: La fonction de délégué de chantier est régie par les dispositions suivantes, il s'agit d'une disposition affirmative de l'intention du législateur. Or, il est reconnu en jurisprudence devant les tribunaux que lorsqu'on est en face d'un texte positif comme cela, vous ne pouvez pas déduire que le législateur a voulu permettre à d'autres personnes qu'au délégué de chantier, tel qu'il est décrit là, de faire les fonctions qui lui sont conférées spécifiquement par le législateur.

C'est l'assise légale de notre projet de modification, de même que l'article 32n, qui dit: Toute clause d'une convention collective ou d'un décret relative à la fonction de délégué de chantier est réputée non écrite et ceci est le corollaire de ce que je viens de lire.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Est-ce qu'il n'y a pas eu un lapsus quand on dit que cette clause-là ne veut pas dire qu'on interdit à d'autres de poser les mêmes gestes qui sont décrits comme étant les gestes appropriés à la fonction de délégué de chantier? N'est-ce pas le contraire qu'on voulait dire?

M. Couture: Effectivement, je vais essayer d'être le plus clair possible. Notre interprétation de la loi est la suivante: c'est que seul le délégué de chantier peut exercer les fonctions qui sont décrites notamment à l'article 32n, sous paragraphe 3, et l'objet de la modification que nous proposons à l'article 9.02 du décret est justement pour éviter que d'autres personnes, notamment le représentant syndical, tel qu'il est défini dans le décret, puissent exercer des fonctions qui sont conférées exclusivement et spécifiquement au délégué de chantier par le législateur.

M. Forget: C'est correct, je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): Vu qu'il n'y a pas d'autre question ou commentaires, j'appellerais l'article 8.

M. L'Heureux: C'est la partie patronale.

M. Dion: Pour une partie, c'est sur l'article 9, l'article du délégué syndical, je dois vous dire que c'est un des points qui étaient demeurés en litige parmi 12 points, on va le voir, peut-être un peu plus tard, parmi 12 points majeurs, il y avait le délégué syndical. Il est certain que, pour nous, on a fait des concessions sur la clause de délégué syndical et la position, la modification qu'on propose dans le moment, pour autant qu'il y aura un certain cadre, nous convient parce qu'en fait cela reprend certaines concessions qu'on a faites.

Mais, encore là, on pense que ce n'est pas le jeu d'une négociation. Au moment où on a fait cette concession, c'est parce qu'on a obtenu autre chose comme, un peu plus loin, il y a autre chose qu'on veut changer, qu'on a obtenu, nous, en faveur d'autre chose. C'est tout cela, le processus. C'est qu'en fait on nous pose une question. On dit: Pourquoi les deux parties ne peuvent-elles pas s'entendre quand, en réalité, elles se sont entendues?

Alors, c'est tout cela, c'est que, dans le moment, on cause certains problèmes, ce sont des choses de négociations qu'on a faites dans un contexte de négociations, c'est certain on a abandonné certaines choses, on a obtenu d'autres choses et nous, pour autant qu'on est concernés, la modification fait notre affaire autant qu'un cadre, il va falloir qu'il y ait un cadre, mais on pense que ce n'est pas honnête pour la partie syndicale, qui avait besoin de cela, pour faire son travail.

M. Couture: Bien, c'est parce que, évidemment, vous vous êtes entendus sur un certain nombre de choses et, comme on a dit, c'est notre intention, si on pouvait respecter à 100% tous les aspects de toutes vos dispositions, on en serait trop heureux. Maintenant, comme responsables des lois et du cadre juridique dans lequel doit se situer le décret, c'est aussi notre responsabilité de veiller à ce qu'il y ait concordance entre ce qui est signé comme convention collective, nos décrets, qui sont des règlements, et les lois existantes. C'est notre motivation principale. Ce n'est pas pour le plaisir de le faire.

M. Chevrette: J'ajouterais qu'on pourrait fort bien laisser faire, comme vous avez semblé le souligner ce matin, les textes qui sont non conformes à la loi, donc, nuls et sans effet. A la minute qu'un employeur s'y opposera vous savez qu'il n'y a aucun fondement juridique à l'article, parce que non conforme à la loi.

Cela donne quoi? Conclut-on une entente sur une clause d'un article de convention collective parce que cela va bien au moment de la négociation en dehors d'un cadre juridique légal pour ensuite se tourner de bord et créer des malaises d'autant plus grands parce qu'il sera signé légalement par des parties représentatives, mais non applicable dans les faits? C'est un peu cela le dilemme que l'on nous pose. A partir de là, ce n'est pas l'association représentative qui applique le décret. Un employeur peut se tourner de bord, comme vous le savez, et dire: "Moi, pas question, c'est tel homme, et comme je n'ai pas de délégué de chantier, je ne l'accepte pas". Il pourrait même y avoir des mots d'ordre et, sans faire de procès d'intention auprès de personne, il pourrait y avoir des mots d'ordre de donnés et qu'on dise: Telle clause, telle clause, telle clause et telle clause, c'est illégal, donc, foutez-vous-en. Et comment se ramasse-t-on dans la réalité par après? On a cru bon de vous présenter un document cohérent, sur le plan légal actuel, quitte, plus tard, à réviser la législation avec les normes appropriées.

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse, je dois suspendre les travaux de la commission pour que les membres de la commission puissent aller voter, à moins que ce ne soit une question de quorum. Attendez! Je vais faire vérifier avant si c'est tout simplement une question de quorum ou si c'est un vote.

M. Couture: Si on est pour renverser le gouvernement, on va sûrement aller voter.

M. Laplante: Je crois que c'est un vote important, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): C'est un vote? Vous êtes certain de cela? Alors, la commission suspend ses travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 17)

(Reprise de la séance à 17 h 20)

Le Président (M. Marcoux): Nous allons poursuivre immédiatement. C'était ce qu'on appelle une fausse alerte. Il y avait de la fumée, mais il n'y avait pas de feu. M. L'Heureux. A l'ordre, s'il vous plaît!

M. L'Heureux: M. le Président, au moment où nous avons ajourné, M. Chevrette m'a posé une question. Je pense que c'était une question de fond. C'est quelque chose qu'on veut justement vider à fond et j'aimerais que notre conseiller, Me Dion, réponde.

M. Dion: M. le Président, pour nous, il y a une différence énorme entre le pouvoir qu'a le gouvernement ou la commission, ici, d'étudier le fond d'un décret et de le regarder et dire: Ce décret a-t-il été négocié conformément à la loi? Les parties ont-elles signé conformément à la loi? Est-ce que l'extension est venue conformément à la loi, etc.? Il y a aussi une différence énorme entre le contenu du décret qui, pour nous, relève d'un pouvoir judiciaire à déterminer. Les parties ont-elles dépassé leur droit? Telle chose, qui a été mise dans le décret, devant le tribunal, pourrait-elle tenir comme légale ou illégale?

A ce moment-ci, on se retrouve devant une clause. Nous disons: II n'y a pas de problème à faire une modification à cette clause, sauf que, de bonne foi, on s'est entendu avec la partie syndicale et on a signé cela, après des échanges, des

négociations. Il y a partout de ces échanges dans le décret. Aussitôt qu'on en touche un, on brise le jeu des parties. C'est un échange. A un moment donné, on dit: D'accord, on va vous donner cela. Le gars a le droit de venir sur les chantiers et de faire telle chose. A partir du moment où on a donné cela, on n'a pas cherché à aller contre la loi. On a cherché à se tenir dans le cadre de la loi, mais on s'est dit, à un moment donné: Si un tribunal vient à dire que ce n'est pas légal et qu'on a dépassé les cadres de la loi, il y a un article 32.02 qui dit: Si c'est illégal? c'est comme si ce n'était pas écrit dans le décret et cela décolle.

On vous dit ceci: L'amendement qui est proposé par votre contentieux a une conséquence qui est nettement plus grave que celui qu'on a fait dans notre décret. En ne mettant aucune limite, cela veut dire que le représentant syndical se présente sur le chantier, il fait tout ce que le délégué de chantier veut et peut faire et tout ce qu'on voudra lui faire faire en plus, parce que, à ce moment, il aura aussi le droit d'enquêter sur la convention, il va aussi avoir le droit de fouiller dans les livres pour voir si les cotisations syndicales sont payées. Il aura le droit de faire tout cela. Nous vous disons ceci: Nous nous sommes entendus et nous sommes prêts à maintenir ce que nous avons entendu avec la partie syndicale. Nous ne vous demandons pas de changer notre entente. Nous l'avons signée et nous sommes prêts à la maintenir. Certains demandent de changer l'entente. Nous ne le demandons pas. Nous sommes prêts à la maintenir, mais si vous en venez à la conclusion que vous vous substituez au pouvoir judiciaire de déclarer une chose illégale et de modifier l'article, il faut absolument que vous mettiez un cadre dans l'article. A ce moment, dans nos pages 12 et 13, nous vous suggérons de quelle façon cela pourrait être fait afin de répondre quand même à un état qui serait vivable dans l'industrie de la construction.

Au premier paragraphe, on dit: Le bonhomme a le droit, d'après l'article 9.01, de faire telle ou telle chose. Entre autres, un délégué peut discuter et régler toute question d'intérêt pour les membres d'une union ou d'un syndicat affilié à l'association représentative à l'emploi du dit employeur... Si c'est cela que vous voulez lui donner comme cadre, écrivez-le. Ne rien mettre, cela veut dire que le gars va faire n'importe quoi. Et vous allez réellement empiéter sur le travail d'un délégué de chantier. Il faut absolument mettre un cadre, sinon, on est pire qu'on le serait, si jamais on était illégal. On serait beaucoup plus illégal en donnant toute la fonction du délégué de chantier.

Le Président (M. Marcoux): Avant, M. Décary avait demandé la parole.

M. Décary: Très brièvement, l'article 32n de ia loi dit: "Toute clause d'une convention collective ou d'un décret relative à la fonction de délégué de chantier est réputée non écrite". A l'article 32n, on dit: "La fonction de délégué de chantier est régie par les dispositions suivantes:" Sans vous en faire la lecture, ce que nous notons c'est que: 1) Ce doit être un travailleur à l'emploi de l'employeur, qui 2) Doit être élu, seulement et dès le moment où il y a sept salariés et plus sur le chantier.

Avec l'article 32n, si on applique la règle de Me Fortin, on devrait dire que cela s'applique restrictivement, c'est-à-dire que cela ne vise que la fonction de délégué de chantier.

Au moment où ces amendements ont été passés, les articles 32-m et 32-n, il existait à ce moment-là des représentants syndicaux. Les représentants syndicaux qui oeuvraient n'ont pas été affecté par cet article. On a régi les représentants syndicaux ailleurs, quand on a dit entre autres, qu'ils ne pouvaient pas avoir de dossier judiciaire. Ils sont là, expressément nommés. Or, si on applique la règle de Me Fortin, 32-m ne devrait viser que le cas du délégué et non pas le cas du représentant. Le représentant syndical, et je termine là-dessus, n'est pas un salarié, mais une personne à l'emploi d'un syndicat ou d'une union. Le représentant syndical, tout ce qu'il fait, si on lit l'ensemble de l'article 9, c'est d'assurer l'administration de la convention et, suivant ce que nous enseignent la jurisprudence et la doctrine unanime, c'est de faire enquête et de discuter de toute affaire concernant normalement l'administration d'une convention collective issue d'un décret.

Or, je vous demanderais, humblement, respectueusement, de reconsidérer votre position, surtout si on tient compte de la mention de mon confrère. Toutefois, là-dessus, bien amicalement, je le référerais aux articles 40 et 41 de la Loi de l'interprétation du Québec, chapitre I, 1964, où on dit que les dispositions doivent s'interpréter de façon large et libérale de façon à assurer par l'interprétation que les objectifs de la loi soient remplis et, deuxièmement, de façon à assurer un avantage et, d'autre part, ne pas assurer un mal.

A la lumière de ces réflexions, je vous prierais de reconsidérer votre position.

Le Président (M. Marcoux): Dans l'ordre, le député de Saint-Laurent et le député de Nicolet-Yamaska.

M. Forget: M. le Président, un point général a été établi par les deux parties à savoir qu'il y a une convention collective qui a été signée et qu'il est déplorable et regrettable de voir une tierce partie, en l'occurrence le gouvernement, intervenir pour en modifier les termes. C'est évident qu'on peut être d'accord avec les parties, il reste qu'on a une loi particulière qui s'applique dans leur cas, dans leur secteur industriel, qui est la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction, et qui donne ouverture à cette intervention. Donc, même si on peut le déplorer de façon générale, il reste que la réalité, la raison de la présence de tout le monde ici en commission parlementaire, c'est qu'il peut y avoir des modifications. Je pense que même si on le déplore, encore une fois, il faut se rendre compte que, dans les arguments invoqués par le ministre, à savoir, l'illégalité qu'il croit lire dans les dispositions de l'article 9.02, paragraphe 1, constitue un motif suffisant, si elle est fon-

dée en droit pour une intervention gouvernementale.

Ce qui m'apparaît un peu inquiétant, c'est qu'implicitement les deux parties nous ont un peu avertis, ont averti le ministre, que, quant à elles, elles n'acceptaient pas nécessairement sa version de la légalité de cette partie de la convention et du décret et, dans le fond, c'est ce que j'aimerais voir confirmer à la fois par les parties; j'aimerais voir le ministre prendre position vis-à-vis de cette attitude, car elles nous ont affirmé que comme elles ne reconnaissent pas l'argument basé sur la légalité, à la fois du côté patronal et du côté syndical, on prendrait l'interprétation large des pouvoirs du représentant syndical. C'est-à-dire que l'on présumerait que, puisqu'il n'y a aucune interdiction qui lui est adressée spécifiquement dans la loi, il avait donc le droit de se livrer à toutes les activités, y compris les activités que l'article 32-m attribue spécifiquement au délégué de chantier.

Il est évident que si, dans le champ, les deux parties, patronale et syndicale, faisaient une telle interprétation de la loi et du décret, elles seraient amenées à ignorer même l'amendement que propose le ministre, parce qu'il est évident que si personne ne se plaint, le représentant syndical va pouvoir faire comme si le décret n'était pas amendé.

Je crois qu'il est donc doublement important que le ministre rende très explicite l'interprétation qu'il donne à l'article 32-m de la loi, à l'article 32-n également, de même qu'à l'article 9.02 du décret. Si j'ai bien compris, mais j'aimerais qu'il le confirme, selon lui, la précision que la loi apporte quant aux fonctions du délégué de chantier rend illégal l'exercice de ces fonctions par toute autre personne sous quelque titre que ce soit. Et si c'est vrai, même si les parties sont d'accord pour laisser faire par d'autres les fonctions que la loi attribue au délégué de chantier, je pense que le ministre devrait prendre note du fait qu'en l'absence d'une intervention assez ferme de sa part, que le décret soit amendé ou pas, dans le fond, les parties nous disent un peu qu'elles vont vivre selon la loi qu'elles se sont donnée dans la convention collective. C'est un avertissement qui, à mon avis, est extrêmement sérieux. Je pense qu'on devrait ventiler ce problème suffisamment pour faire bien comprendre à chacun les implications des gestes qui se posent ici. Parce que, dans le fond, si c'était vrai, tout ce travail est fait pour rien. Si les parties interprètent la loi comme il leur convient, on a beau modifier ou ne pas modifier le décret, on va se retrouver devant la même situation.

Or, l'intention du législateur, à mon avis, dans 32m et dans 32n était claire. Il y avait des fonctions qui étaient réservées au délégué de chantier et que personne ne peut exécuter sous un autre titre; autrement, le législateur n'aurait rien dit. On n'a qu'à inventer un troisième titre, un fondé de pouvoir syndical, ou n'importe quoi qui donne la même saveur, et lui donner des fonctions sans restriction, alors que la loi a voulu que ces fonctions soient exercées avec des restrictions. Je pense que l'intention du législateur est claire. Mais encore faut-il qu'elle soit respectée par les parties et que l'intention du ministre de la faire respecter soit clairement indiquée.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, c'était pas mal l'argument de mon confrère. C'est que je vois dans la loi qu'on a prévu la question des fonctions du délégué de chantier et on a inclus une clause à l'article 32n à savoir que toute clause d'une convention collective ou d'un décret relatif à la fonction de délégué de chantier est réputée non écrite. Mais ce qu'on a dans le décret, c'est une clause qui donne les fonctions du représentant syndical. Et, à mon avis, je ne suis peut-être pas tout à fait d'accord avec l'argumentation du conseiller juridique du ministre et je me demande si cette clause ne serait pas déclarée illégale s'il y avait un conflit suite à cette clause. A mon avis, on devrait peut-être laisser les... Les parties se sont entendu sur cette clause. S'il y a un litige suite à cette entente, à ce moment-là il y aura sûrement possibilité de faire trancher la question par les autorités compétentes.

Le Président (M. Marcoux): Me Dion ou L'Heureux.

M. L'Heureux: Simplement une remarque. M. Forget a mentionné que les parties ont indiqué leur intention ou, du moins, je ne sais pas si j'ai bien compris, que le ministre l'amende ou non, elles vont faire selon leur loi. En fait, je ne pense pas qu'on ait indiqué cela, j'ai peut-être mal compris aussi. Ce n'est pas l'intention de la partie patronale. S'il y a une loi, on va la suivre et on va tenter de négocier à l'intérieur de la loi. Le point que Me Dion a fait valoir, et je vais le lui laisser terminer, c'est que nous n'acceptons pas, et nous ne pouvons comprendre que, ni plus ni moins, le ministère du Travail soit à la fois juge et partie, c'est-à-dire que lui décide que notre entente est illégale et que lui s'impose comme étant la légalité, comme étant le tribunal qui va finalement décider ce qui est illégal ou non. J'aimerais que Michel développe cette idée.

M. Dion: Notre position, M. le Président, est la suivante: c'est une question d'opinion, à l'heure actuelle, à savoir si le représentant syndical, tel que nous l'avons défini, s'il s'agit là d'une chose illégale, ce qu'on a défini, ou non, c'est une question d'opinion quand même. Il faut lire la loi. On arrive à la loi et on dit que le délégué de chantier a ces fonctions-là, et ce que vous avez décrit entre dans le même champ. Comme le dit M. Décary, cela entre dans le même champ, mais pas pour tout le monde. Il y a quand même des exclusions. Il s'agit quand même là d'une volonté des parties et, dans notre opinion, c'est légal. Que le contentieux dise à ce moment-là que c'est illégal, je le vois mal, il y a réellement actuellement une entente entre les parties. L'article 18 dit: Vous nous demandez de venir nous faire entendre lorsque les parties démontrent qu'elles ne sont pas capables

de s'entendre. C'est un peu cela le texte de l'article 18. Si on ne peut pas s'entendre et qu'il y a un problème d'ordre public, vous nous demandez de venir dire les motifs pour lesquels on ne s'entend pas. On est en train de vous dire les motifs pour lesquels on s'entend. Bon!

Deuxième partie, il existe dans la loi un article qui s'appelle l'article 16, qui permettait au ministre de ne pas publier le décret, s'il pense que le décret est illégal.

Il pouvait, à ce moment-là, en motivant aux parties son refus de publier le décret, donner suite à la requête. C'est à ce moment, selon nous, que les choses légales ou illégales devaient venir en ligne de compte. Ce n'est pas au moment de l'article 18, c'est lorsqu'il reste des choses en ballant, où les parties ne sont pas capables de se comprendre et de s'entendre. Pas des choses nouvelles qui sont soulevées, pas des choses à portée nouvelle, des choses qui ont fait l'objet d'une convention collective. Il n'y a pas de conflit entre les parties, j'ai signé une convention, il a signé une convention, on est d'accord tous les deux, pourquoi on vous donnerait les motifs pour lesquels on ne s'entend pas? On est obligé de vous donner les motifs pourquoi on s'est entendu dans ce temps-là. Pourquoi 19 ou peut-être 18 locaux de la FTQ sur 21 ont-ils été d'accord avec le contenu de ce qu'ils signaient et que les parties et le président, M. L'Heureux et M. Lamontagne ont signé. On était prêt à vous donner les motifs pour lesquels on a eu de la difficulté à négocier et à s'entendre, on refait une partie de la négociation. Cela a été dur de s'entendre sur le représentant syndical, d'accepter que le gars vienne dans des livres, qu'il voie et enquête sur toute l'affaire. Au début, on ne voulait pas de cette affaire, puis on s'est dit: C'est vrai, il y a les gars qui en ont moins que sept. Peut-être qu'il y a un trou à boucher et que la loi ne bouche pas à ce moment. On fait des échanges avec la partie syndicale et on signe une convention, on s'est entendu.

Vous nous demandez de venir en commission expliquer les motifs pour lesquels on ne s'entend pas. On s'entend, cela est un article — en tout cas, il n'y a pas plus vrai que celui-là et c'est évidemment facile, parce que c'est un article syndical, ou assez syndical en tout cas — il n'y a pas plus vrai que cet article-là pour que les parties s'entendent. Nous avons négocié l'article 9.02 et on est prêt — j'allais dire à le manger — à l'accepter, on l'a négocié comme cela. C'est de bonne foi qu'on l'a fait avec M. Dumoulin et compagnie et on est prêt à continuer avec cela. On va permettre au gars d'enquêter dans toutes les affaires concernant la convention collective.

Il est évident que nous ne permettrons pas qu'il vienne faire la job du délégué de chantier, qui est définie dans la loi, et s'il y a excès de juridiction de la part du bonhomme, on a des recours, on a des procédures de grief, on a d'autres procédures, on va se défendre. Mais, dans la limite de leurs droits, on va les laisser exercer leurs droits, ce sont ceux-là qu'on leur a consentis, comme on voudrait qu'ils continuent à consentir et à respecter ceux qu'on a signés. Quand notre assemblée générale a dit: Telle affaire, vous ne l'aurez pas, la partie syndicale, qu'on ne prenne pas un détour pour essayer de nous l'arracher, soit en commission parlementaire ou autrement. A ce moment-ci, on s'est rendu et on va garder ce sur quoi on s'est entendu. On est prêt à le respecter. Mais, si vous dites que cela ne peut pas être là, vous vous substituez aux tribunaux. Le tribunal pourrait dire: Vous avez mis cela là-dedans, c'est inclus dans la loi, la loi dit que vous ne pouviez pas le faire. C'est une question d'opinion chez vous; comme c'est une question d'opinion, on a des conseillers juridiques qui nous ont dit: Vous avez le droit de faire cela. Comme M. L'Heureux vous l'a dit ce matin, on a dit à ce moment là, au ministère du Travail: Dites-nous ce qu'on ne peut pas faire. On nous a refusé de nous dire ce qu'on ne pouvait pas faire, mais on ne nous a jamais dit que cela on ne pouvait pas le faire, on nous a même dit à certaines occasions: Votre affaire va bien, c'est correct, il n'y a pas de problème. Ce sont des délégués et des gens du ministère qui nous disaient qu'il n'y avait pas de problème. On s'en allait et les parties s'entendaient. Si, à un moment donné, on enlève ce qu'on a donné à la partie syndicale, il est évident que celle-ci va nous dire: J'avais donné cela en échange, et on se retrouve devant un tas de problèmes.

On parle de prime de ferrailleur ou on parle de prime d'acier-structure et on parle d'affaires de ce genre. Nous aussi, on en avait des demandes en négociation, elles n'ont pas toutes été accordées. On ne vient pas à la commission parlementaire pour essayer de les avoir. On vous dit: On a une entente, on va la respecter. Vous nous dites: II y a des choses illégales. S'il y a des choses illégales, l'article 32 est là, elles peuvent être corrigées. Cela est une question d'opinion, on se substitue aux tribunaux, on va après, discuter comme on discuterait devant un tribunal, à l'heure actuelle.

Je suis d'opinion que ce n'est pas illégal. Je suis d'opinion que le gars peut enquêter et je le lui ai donné. A ce moment-là, pourquoi le lui ai-je donné? Parce que je pensais que c'était légal. Aujourd'hui, vous autres, vous décidez que cela ne l'est pas. Vous n'acceptez pas la volonté des parties. Ce n'est plus l'article 18 à ce moment-là, vous refaites notre négociation, vous êtes en train de retravailler notre convention collective et là on peut y aller de A à Z. On peut aller du début de notre convention jusqu'à la fin. Est-ce notre faute si, à un moment donné, par exemple, il n'y a pas de clause de stationnement dans le décret? Vous me dites qu'il y a eu des omissions. Il y aurait pu avoir une clause de stationnement, mais on a fait des échanges, on est arrivé à la fin et on a dit: II n'y a pas de stationnement. Si j'arrive devant la commission et que je vous dis: II n'y a pas de clause de stationnement, c'est une omission. A ce moment-là, vous refaites la négociation des parties, vous remplacez les parties, on recommence au début. C'est cela la position à l'heure actuelle.

Pour nous, c'est une question d'opinion, cela n'est pas couvert par l'article 18, on ne voit pas pourquoi on discute cela. Ils sont d'accord pour l'avoir, nous sommes d'accord pour le leur laisser,

on le leur a donné. Tantôt, on va être en maudit, s'ils veulent avoir des affaires qu'on ne leur a pas données et que l'assemblée générale de nos membres dit: Ils ne les auront pas, parce que notre assemblée générale a le droit de décider et c'est notre droit à nous autres, c'est la loi qui nous donne ce droit.

Les choses que notre assemblée leur a données, on ne voit pas de raison de les leur ôter, alors pourquoi le ministère veut-il nous forcer à leur enlever des choses qu'on leur a données de bonne foi et qui, pour nous, ne sont pas illégales? C'est une question d'interprétation.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre, sur le même... est-ce que je peux avoir votre point de vue?

M. Couture: M. le Président...

Le Président (M. Marcoux): D'accord. M. Dumoulin.

M. Dumoulin: Simplement pour ajouter un mot, M. le Président. A notre avis, le représentant syndical n'est pas le même qu'un délégué de chantier. Je m'explique. Un représentant syndical est à l'emploi d'une association, d'une union de métier, affiliée au conseil provincial, donc, au bout du compte, rémunéré par les unions, et un délégué de chantier, c'est un salarié à l'emploi d'un employeur. A notre avis, un représentant syndical, comme peut-être trop de bonshommes peut, à mon sens, représenter le salarié. D'ailleurs, on est une association reconnue selon la loi et on est là pour cela. On est là pour négocier et représenter les unions et voir à l'application de la convention collective. Donc, à notre sens, ce n'est définitivement pas le même bonhomme ou le même individu qu'on retrouve au niveau du délégué de chantier. Jamais, cela ne peut pas être le même, parce que le représentant syndical est élu au niveau de ces unions, les unions de métier, et le délégué de chantier est élu au niveau du chantier mais, par contre, à l'emploi d'un employeur, tandis que le représentant syndical qu'on mentionne est à l'emploi d'une union. C'est donc un peu une interprétation de titre d'individu qu'on retrouve en arrière de cela.

C'est pourquoi on dit que ce qui apparaît là, il me semble, peut quand même exister à l'intérieur du décret.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre...

M. Couture: M. le Président, je vais simplement faire un commentaire général. Je crois qu'il faut retenir une chose fondamentale, c'est un décret du lieutenant-gouverneur en conseil et le ministre, quand il recommande la promulgation d'un décret au lieutenant-gouverneur en conseil, c'est nécessairement sa responsabilité de tenir compte d'une opinion juridique. Le ministre n'a pas à trancher l'opinion juridique, mais il doit, en toute bonne foi, tenir compte d'une opinion juridique de son ministère qui... c'est une opinion juridique qui relève du ministère de la Justice, et c'est sur cette base que le ministre, si on peut dire, est moralement lié par cette opinion, sauf ceci, et comme je ne voudrais pas le répéter chaque fois, en vous écoutant, je vois quand même qu'il y aura lieu je ne dis pas de reconsidérer ce qu'on a, ce qu'on vous propose comme modification, mais peut-être, enfin, c'est ce que je vais chercher, obtenir vraiment une rigueur je ne dirais pas exclusive, mais une rigueur assez ferme sur cette base juridique. Je veux ajouter ceci aussi, c'est que l'avocat de l'association des entrepreneurs disait que vous auriez pu refuser la convention collective, mais parce qu'on a ce respect de ce que vous avez négocié et qu'on ne veut d'aucune façon modifier cette convention collective à la légère, on a proposé, face à des analyses que nous avons faites, face à des opinions légales, ces modifications et c'est pour cela qu'on vous écoute.

Je pense que cela manifeste entre autres que nous avons ce respect de votre négociation, et que c'est important, en tout cas, pour le ministre, de vous écouter pour arriver à proposer des modifications qui sont fermement fondées et qui respectent quand même ce que vous avez négocié.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, je pense qu'il s'agit d'une question d'interprétation et il y a différentes opinions qui ont été émises ici, par Me Dion, par Me Décary, ainsi que sûrement par Me Michel Robert, qui a négocié ce décret et qui a donné son opinion là-dessus. J'aimerais savoir du ministre si lui, de son côté, a recherché une autre opinion que celle qu'on a devant nous aujourd'hui, s'il a recherché d'autres opinions ailleurs, parce qu'il n'y a pas un monopole de la vérité là-dessus.

Il y a une question d'interprétation et si les parties se sont entendues là-dessus après avoir demandé des opinions juridiques, je pense qu'il serait peut-être bon...

M. Couture: On est quand même assez prudent dans ce domaine-là.

On a quand même un contentieux, on a le ministère de la Justice et il y a une décision qui vient à la suite de cette consultation, qui me paraît, dans les circonstances, assez importante. Mais, je crois que, quand même, on est au gouvernement et qu'on a nos instruments de travail. On doit les utiliser comme tels et leur faire confiance jusqu'à preuve du contraire.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je crois qu'on a établi, ici, dans cette commission parlementaire, des précédents qui sont très importants. J'ai écouté attentivement les représentations des parties et je dois dire que je suis ébranlé par le plaidoyer qu'elles ont fait. Il semble assez évident que, même si d'une part on ne peut pas demander au

ministre de faire des recommandations au lieutenant-gouverneur en conseil, qui sont clairement et sans aucune ambiguïté à l'encontre de la loi, d'un autre côté, il faut interpréter cela avec énormément de rigueur. Si on y va trop largement, ce qu'on fait jouer comme rôle au contentieux du ministère du Travail, c'est le rôle qui appartient en propre à un tribunal. Et quand j'ai posé la question, tantôt, sur la chance qu'on pouvait avoir de voir respecter le décret tel qu'amendé, étant donné la position des parties, la nature de la réponse qu'on a eue, nous montre très bien que, dans le fond — et le silence du ministre sur ce point nous le montre — quel que soit l'amendement qu'on introduise au décret, c'est finalement devant les tribunaux que la question va se régler, si elle doit se régler. De ce côté, si les deux parties sont d'accord pour procéder selon leur convention — et si le Procureur général ne juge pas qu'il est d'ordre public d'intervenir en vertu de l'article qu'on a vu tout à l'heure et qui l'excluait implicitement, mais qui l'inclut maintenant puisqu'on a éliminé la restriction — si le Procureur général ne juge pas approprié d'intervenir, qu'on fasse n'importe quoi avec le décret, il va s'appliquer tel que les parties en ont convenu.

Comme on est devant cette éventualité de toute façon, j'inviterais le ministre à adopter une attitude extrêmement claire. C'est-à-dire que cette partie des amendements qu'il juge essentielle pour que la légalité soit respectée de la façon la plus étroite, soit la plus rigoureuse possible; qu'elle soit appuyée par le dépôt de l'opinion juridique du chef du contentieux civil du ministère de la Justice et que, pour ce qui est des autres amendements que la loi lui permet d'apporter, même quand il y a entente entre les parties, qui sont basés sur des arguments d'ordre public, des arguments politiques dans le sens élevé du mot, que s'il croit que, dans l'intérêt public même, l'entente des parties ne peut pas être retenue, il fasse l'argumentation au mérite.

J'ai un peu l'impression qu'on assiste aujourd'hui à une argumentation de la part du gouvernement, qui est basée en première analyse sur une motion assez large de ce qui est légal ou illégal dans le décret, et que, souvent, une certaine partie de cette argumentation, dans le fond, est beaucoup plus basée sur des arguments de substance que l'on tait parce que c'est assez commode d'avoir recours à l'argumentation juridique, qui est une question d'opinion à moins d'être tranchée par un tribunal. Comme nous avons affaire ici à un précédant dans l'interprétation de cette partie de la loi, il m'apparaît bien nécessaire qu'on fasse la distinction entre les deux. S'il y a vraiment des causes d'illégalité claires, au-delà de tout doute possible, que l'on dépose les opinions juridiques qui serviront de documents sessionnels; si on ne veut pas aller jusque-là, qu'on présente les amendements sous la responsabilité ministérielle, mais qu'on dise quelles sont les raisons de substance plutôt que les raisons purement de forme qui poussent le gouvernement à les apporter.

C'est que, tout à l'heure, nous avons vu dans la question des artisans, une défense basée exclu- sivement sur des aspects juridiques qui sont là aussi des questions d'opinion. Je crois qu'on doit choisir entre les deux.

M. Couture: Me permettez-vous de poser une question?

M. Forget: Je vous en prie.

M. Couture: Est-ce que vous reconnaissez quand même que c'est la responsabilité du ministre de rendre le moins contestables possible les dispositions de la convention collective qu'on doit prolonger en décret?

Il faut quand même bien comprendre que notre attitude ou notre approche n'est pas par plaisir, parce qu'on veut absolument remettre en question ce qui a été négocié. C'est que nous avons un décret que le lieutenant-gouverneur en conseil ratifie et, quant à nous, il faut être très prudent. Il faut vraiment chercher partout où c'est possible de rendre ce décret le plus conforme à la légalité. Ce n'est pas pour rien qu'on entend nombre d'argumentations. C'est possible que dans certains cas cela ne paraisse pas aussi clair, aussi convaincant, mais il reste quand même qu'il y aura une décision politique à prendre par laquelle on doit, à ce point de vue-là, c'est la situation dans laquelle je me place, être prudent; ce qui n'empêchera en aucune façon possible les déclarations d'un tribunal sur telle ou telle disposition plus litigieuse.

Mais, la recherche pour nous, c'est une recherche de la légalité la plus conforme possible à ce qui existe comme document juridique dans le cadre juridique des relations de travail.

M. Forget: M. le Président, comme le ministre me pose une question, je dois réaffirmer qu'il n'est pas question de suggérer que le gouvernement accepte d'entériner des choses qui sont, clairement et au-delà de tout doute possible, illégales. C'est clair. Mais, c'est aussi une question d'appréciation, à savoir ce qui est illégal. Et on sait que si c'était si clair, les tribunaux ne seraient pas aussi occupés qu'ils le sont. Donc, c'est souvent la confusion entre ce qui est légal et ce qui est illégal. On a une démonstration de deux parties qui s'entendent pour déclarer légal, donc de se conformer à ce qui leur paraît légal jusqu'à preuve du contraire, alors que le ministre prétend que ce n'est pas légal. On est dans une impasse. Même si le ministre a introduit sa modification, c'est un coup d'épée dans l'eau parce que les parties nous ont plus ou moins laissé entendre qu'ils vont vivre selon la loi qu'ils se sont donnée par la convention, et non pas selon l'interprétation que le ministre peut en faire. Alors, il y a vraiment là une distinction très claire. Si le ministre n'est pas prêt à jouer le rôle d'un tribunal, à déposer un avis du chef du contentieux civil, je pense qu'il doit défendre au mérite la modification qu'il suggère et avertir les parties qu'il va demander à son collègue, le Procureur général, d'intervenir si les parties ne s'y conforment pas. Autrement, je crois qu'il serait mieux avisé de ne pas faire cette confusion des pouvoirs, de permettre que l'exécu-

tif interprète la loi. C'est un travail que nos constitutions, dans les pays occidentaux, confient aux tribunaux, je comprends qu'il peut y avoir des doutes...

M. Couture: On ne force pas la loi, on veut l'appliquer. Il ne faut tout de même pas mêler les genres. Ce qu'on fait actuellement, c'est qu'on a une loi, on a un contentieux, on a le ministère de la Justice qui lui-même a confirmé cette opinion et c'est dans ce cadre juridique que le décret doit être promulgué.

M. Forget: Le vocabulaire que vous utilisez l'indique. C'est une opinion du ministère de la Justice, ce n'est pas une décision d'un tribunal. Comme cette opinion est...

M. Couture: Tout projet de loi est comme cela.

M. Forget: Elle est contestée, cette opinion. Elle est contestée par les deux parties intéressées. Alors, elle doit au moins être assez incertaine pour mériter d'être référée à un tribunal.

M. Couture: M. le Président, permettez-moi de compléter notre intervention à ce sujet. Il est exact que les tribunaux peuvent toujours être appelés à interpréter la légalité ou non d'un décret ou d'une de ces dispositions vis-à-vis des dispositions de la loi en vertu de laquelle le décret est adopté. L'opinion juridique à laquelle le député, M. Forget, se réfère, est celle que nous avons donnée indiquant que, lorsque l'on lit les dispositions de la loi relative à la fonction de délégué de chantier, et qu'on les compare à celles contenues dans le décret, nous voyons là, dès le départ, un sujet évident de contestation juridique devant les tribunaux. Nous avons demandé au ministre du Travail de recommander à ses collègues du cabinet, éventuellement, une modification au décret, de façon à éviter le plus possible que des contestations juridiques du décret prennent lieu en raison du fait que les dispositions du décret relatives au représentant syndical, pour partie, empiète de façon évidente, lorsqu'on lit les termes de ce qui est confié comme fonctions au représentant syndical, sur les fonctions décrites par le législateur aux articles 32m et 32n de la loi.

Nous recommandons au ministre du Travail d'adopter une mesure de nature à diminuer le plus possible, les chances de contestation. On cherche à rendre plus clair, en d'autres termes, le décret, dans la mesure où il est, de façon évidente, contestable. Le fait qu'il y ait une discussion depuis quelque temps déjà démontre effectivement qu'il y a certainement matière à contestation. Maintenant, je pense, d'autre part, que l'on ne peut exclure, par un décret de modification, les possibilités de contestation devant les tribunaux et je ne pense pas que les modifications à un décret soient de nature judiciaire en soi; c'est simple- ment une mesure que nous recommandons au lieutenant-gouverneur en conseil, dans son rôle exécutif, de faire que le décret soit le plus conforme, à son avis, à la loi. Mais rien n'empêche évidemment que les tribunaux soient appelés à trancher la question. Le reproche que l'on pourrait éventuellement faire à l'exécutif pourrait être de n'avoir pas évité, dans la mesure où c'était possible de le faire, une contestation juridique sur des dispositions tout à fait évidentes vis-à-vis de la loi.

M. Forget: M. le Président, sur ce dernier point je pense qu'on vient d'indiquer...

Le Président (M. Marcoux): M. le député, le député de Sainte-Marie attend depuis longtemps. Serait-il possible de...

M. Forget: Oui, d'accord.

M. Bisaillon: Je peux céder mon tour, encore une fois, M. le Président, pour autant que je reviendrai tout de suite après.

M. Forget: Je remercie le député de Sainte-Marie.

J'admets l'objectif légitime du gouvernement de vouloir diminuer les possibilités de contestation. Admettant même que ce soit l'objectif poursuivi, c'est un objectif légitime, sauf qu'on vient d'avoir la démonstration que cela n'est pas suffisant; le moyen auquel on a recours n'est pas suffisant, parce que, même après l'amendement, on va malgré tout prétendre qu'il n'y a pas de contradiction entre la loi et l'article 32m et les dispositions relatives au représentant syndical. On nous a dit qu'on va continuer à les interpréter dans le sens où on l'entend entre les parties.

Or, si, vraiment, on voulait aller jusqu'au bout de ce raisonnement, le ministre introduirait une modification au décret qui irait plus loin et qui expliciterait de façon détaillée que non seulement le représentant syndical n'a pas ces pouvoirs, en éliminant les mots, mais en disant positivement que toutes les fonctions que la loi attribue au délégué de chantier, ce sont des fonctions qu'il ne peut exécuter. Cela clarifierait certainement l'intention présumée du ministre dans cette affaire. Mais, en éliminant simplement des mots, les parties nous ont dit qu'elles ne sont pas satisfaites de l'interprétation du ministre et qu'elles vont faire comme si les mots étaient toujours là.

M. Couture: II faudrait quand même dire que c'est peut-être la loi qu'il faudrait changer à ce point de vue.

Le Président (M. Marcoux): La commission suspend ses travaux jusqu'à vingt heures et, à vingt heures, je reconnaîtrai, dans l'ordre, le député de Sainte-Marie et le député de Joliette-Montcalm.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

Reprise de la séance à 20 h 10

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration poursuit ses travaux et entend les remarques des parties concernées au décret de la construction.

J'avais dit que je reconnaîtrais le député de Sainte-Marie et ensuite le député de Joliette-Montcalm. Le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, les tins de mon intervention, quant à moi, étaient seulement de rappeler l'orientation qui avait été donnée par le ministre dès le départ, et de dire qu'on était ici pour écouter les parties. Je voulais seulement déclarer qu'après avoir écouté les deux parties, qui sont suffisamment claires et parfois même très convaincantes sur la question qu'on discutait, je me déclare suffisamment informé et s'il n'y a pas d'autres interventions des parties, j'aimerais bien qu'on puisse passer au point 8 c).

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette-Montcalm. Etes-vous suffisamment informé?

M. Chevrette: Je vous ferai remarquer que si j'utilisais mon droit de parole après les remarques de mon confrère, je serais mal pris, mais je voudrais faire remarquer une chose quand même, en guise de conclusion. J'ai bien compris que l'AECQ était d'accord avec le but visé par cette proposition d'amendement. Pour ceux qui voudraient en avoir la preuve, on pourrait retrouver à l'intérieur de son propre document, à la page 12, qu'elle se déclare d'accord avec le but visé. A ce moment, en se déclarant d'accord avec l'esprit de la proposition et avec les explications qu'on a reçues, il s'agit de trouver une formule pour bien dire ce qu'on veut dire et qui cadrerait avec la loi existante.

Etant donné que l'Opposition était absente, je voudrais également appuyer sur le fait qui a été souligné par M. Bisaillon. Nous ne sommes pas dans un cadre de convention collective à ce stade-ci. C'est un cadre de décret et le ministre a les pouvoirs d'apporter les amendements qu'il veut bien apporter. A partir de là, je pense que c'est aux parties à exprimer pourquoi elles ne sont pas d'accord sur tel ou tel amendement, et non pas attendre. Même si les questions venaient de l'Opposition, je pense qu'il faut accepter en principe l'esprit de la loi des décrets qui dit que le ministre a le pouvoir d'amener des amendements. C'est aux parties à justifier pourquoi elles ne sont pas d'accord ou pourquoi elles acceptent tel ou tel amendement. Cela irait probablement plus rapidement.

Le Président (M. Marcoux): Comme je n'ai pas d'autre intervenant sur cet article, je vais appeler l'article 8 c), qui concerne le paragraphe 1 de l'article 14.01 du décret. M. Décary.

M. Décary: M. le Président, dans notre présentation au ministre, nous sommes d'accord avec la modification apportée à ce niveau. C'est assez clair. Nous ne sommes pas pour nous répéter à ce niveau. Si nous écoutons les paroles...

Le Président (M. Marcoux): Me Dion est-il prêt à en dire autant?

M. Dion: Non, nous n'en dirons pas autant, M. le Président, pour la raison que l'amendement que suggère le ministre est un amendement, selon nous, qui est sur deux plans. Ce que le contentieux nous avait dit, lors d'une rencontre préliminaire, était que l'allusion aux antécédents judiciaires, à ce moment, n'avait pas d'intérêt dans le décret, parce qu'il s'agissait d'une clause ou d'une possibilité de discrimination couverte par la Charte des droits et libertés de la personne ou le nom exact de la loi, c'est-à-dire le chapitre VI de 1975. Or, il faudrait, savoir aujourd'hui si c'est bien dans ce sens qu'on fait référence à la correction proposée par le ministre.

Si c'est dans la Charte des droits et libertés de la personne, à ce moment, on se pose la question: Pourquoi veut-on l'inclure dans le décret en lui donnant une extension? Si ce n'est pas inclus dans la Charte des droits de l'homme, je dois faire remarquer, qu'à ce moment-ci, la modification change totalement le voeu des parties, qui était une clause qui s'appliquait aux électriciens, qui était restrictive quand même vis-à-vis des conditions contractuelles et qui pourrait empêcher, dans certains cas, un employeur d'envoyer certaines personnes sur certains chantiers.

C'est une négociation qui a été faite avec la partie syndicale, une négociation faite sur une base générale et mise de côté par la partie syndicale. Quand je dis sur une base générale, c'est que la clause était demandée pour tous les salariés, à un moment donné, elle a été mise de côté. Aujourd'hui, la modification proposée ramène cette clause sur une base générale, cette clause qui a été consentie vers la fin des négociations vis-à-vis du groupe des électriciens qui tenait à avoir cette exclusion de discrimination.

Nous ne savons pas exactement quelle argumentation. Même si ce n'est pas ce que M. Chevrette vient de dire, j'aimerais quand même savoir sur quel plan on demande la modification, à l'heure actuelle. Est-ce illégal ou si cela ne couvre pas assez? Que veut-on? On veut étendre la clause? Que veut-on exactement par cette demande de modification?

Le Président (M. Marcoux): Me Décary, voulez-vous répondre? M. le ministre.

M. Couture: II y a une préoccupation de la partie patronale. Il a commencé un exposé là-dessus. J'aimerais peut-être lui demander, au préalable, pour quelle raison on a visé spécialement les électriciens.

M. Dion: Parce que cela a été la négociation.

Quand nous avons fait la négociation, il y a eu demande d'une telle clause dans les demandes syndicales à la table centrale des négociations; cette clause a été mise de côté, mais elle a été reprise à la fin des négociations par le groupe des électriciens qui ont demandé pour eux cette clause.

Aujourd'hui, dire: A cause des antécédents judiciaires, donc s'appliquant à tous les salariés de la construction — ce que vous ne voulez pas faire, M. le ministre, d'après ce que j'ai compris — c'est étendre le voeu des parties, c'est ajouter une clause nouvelle pour un certain groupe de salariés, clause qui a même été rejetée par eux.

M. Couture: Quel inconvénient voyez-vous à ce qu'on l'étende à tout le monde?

M. Dion: D'abord, nous n'étions pas d'accord qu'une telle clause apparaisse dans le décret. Pour des motifs généraux, est-ce normal de dire, dans un décret, qu'il y a des antécédents judiciaires ou qu'il n'y en a pas? Je pense que ce sont des choses que nous n'avons pas à spécifier. Si la Charte des droits et libertés de la personne protège les gens de ce côté, je pense que nous n'avons pas à le spécifier. J'aimerais savoir, à ce moment-ci, par quelle mesure ou dans quel article, dans la Charte des droits de l'homme, cette clause est couverte: les antécédents judiciaires. Nous n'avons pas réussi à trouver l'article.

M. Couture: Je vous écoute parler et je m'aperçois que vous avez des interrogations même sur le fait qu'il y ait eu cette clause, si je comprends bien. J'aimerais savoir pourquoi il y aurait inconvénient, étant donné que la clause est là, à l'étendre à tout le monde, parce que cela enlèverait ce caractère discriminatoire à première vue.

M. Dion: Mais, M. le ministre, vous nous demandez de négocier devant vous, à l'heure actuelle, pour étendre la clause à tout le monde.

NI. Couture: C'est pour des raisons liées à la Charte des droits et libertés de la personne qu'on ne veut pas viser particulièrement un groupe.

M. L'Heureux: La position que nous prenons, c'est que cette clause n'existait pas jusqu'à la dernière journée, la toute fin des négociations. A ce moment, cette clause a été demandée uniquement par les électriciens et elle a été écrite d'une telle façon que, lié par un lien contractuel, on peut, à un moment donné, comme entrepreneur, faire des travaux pour une banque qui elle, à l'intérieur de son document contractuel avec un entrepreneur, va spécifier, pour des raisons qui lui apartiennent, qu'elle ne veut personne qui aurait des antécédents judiciaires.

A ce moment, on avait inclus la prévision à l'intérieur de cela pour autant qu'il n'y ait pas un lien contractuel qui le défende. Maintenant, ce sont simplement les électriciens et la FIPOE, par- ticulièrement, même pas l'autre local des électriciens, qui avaient demandé cette clause.

A ce moment-ci, vous l'étendez aux autres métiers ou au reste du Conseil provincial des métiers, qui ne l'avaient pas demandé, parce que cela n'existait pas. C'était une clause particulière, une demande particulière des électriciens. C'est cela notre réponse. Pourquoi, ici, l'étendre aux autres, alors qu'elle a été négociée simplement, c'est une demande qui a été faite par les électriciens, c'est une demande qui a été accordée aux électriciens, pourquoi, ici, l'accorder aux autres? C'est cela la convention collective?

M. Couture: Je voudrais vous poser une question. Etes-vous conscient que, par la formulation que nous avons devant nous, nécessairement, en visant directement un groupe par rapport à des antécédents judiciaires possibles, on identifie un groupe et on n'identifie pas les autres groupes? Cela laisse donc supposer qu'en ce qui concerne les autres groupes, et évidemment, je conçois très bien que vous avez négocié, mais pour ce qui concerne les autres groupes, cela peut, à première vue, sembler une mesure discriminatoire.

M. L'Heureux: C'est parce que c'est ce groupe uniquement, qui nous l'a demandé, M. le ministre. Demandez-lui pourquoi il le veut, si c'est discriminatoire pour lui. Ne nous le demandez pas à nous. C'est ce groupe qui nous a demandé cette demande et c'est dans ce sens qu'elle a été accordée.

M. Couture: Non, mais la seule question que je vous posais, est-ce que vous êtes conscient qu'à première vue, dans cette formulation, il y a nécessairement un aspect discriminatoire, parce qu'on vise seulement un groupe?

M. Dion: Mais, M. le ministre, vous prétendez que la clause actuellement est discriminatoire, ce que je ne veux pas discuter avec vous. Si c'est discriminatoire, la loi vous permet, dans les cas discriminatoires, de faire la correction. On n'a pas à la discuter. Vous avez le droit de biffer l'article. La loi vous le permet, sauf que votre contentieux nous a souligné que, à la section 15, discrimination, 15.01, à l'obligation de l'employeur à ce moment-là, il nous ramène à la Charte des droits et libertés de la personne, nous référant au chapitre VI de la loi 75. Donc, l'objection qui est soulevée par votre contentieux à l'heure actuelle est une objection sur l'allusion aux antécédents judiciaires, ce n'est pas sur la quantité de personnes qui peuvent être couvertes par la clause. Or, vous nous faites la proposition, à l'heure actuelle, d'étendre la clause à tout le monde. On nous disait, à ce moment-là: Cela ne peut pas être dans le décret parce que c'est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne.

A moins qu'on se fourvoie, à l'heure actuelle, je pense que votre contentieux a dit: Cela ne devrait pas être là et vous, vous nous demandez réellement que cela soit là et que cela soit étendu à

tout le monde. Là on ne sait pas comment se défendre devant votre demande.

M. Couture: Je prends en note ce que vous nous indiquez, parce que c'est quand même souhaitable qu'on vous informe de certaines dispositions qui nous paraissent discriminatoires et d'avoir votre avis là-dessus, mais je prends en note que vous nous indiquez, quand même, que vous reconnaissez ce pouvoir, si vraiment c'est fondé, de biffer cette formulation si c'est discriminatoire.

M. Dion: M. le ministre, est-ce que...

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: D'abord, on ne leur demande pas de négocier, M. le Président, cela fait deux, trois fois que j'entends cela depuis cet après-midi, on ne vous demande pas de négocier. On vous a soumis des objections ou encore des possibilités d'amendements. Or, sur cet amendement précis, le Conseil provincial des métiers de la construction a répondu qu'il était d'accord avec l'amendement suggéré par le ministre.

C'est votre association, l'AECQ, qui ne se déclare pas d'accord et, dans votre argumentation de réponse, vous nous dites: On ne voit pas pourquoi il fallait donner cela aux électriciens, mais on le leur a donné parce qu'ils le voulaient. Nous vous disons, à ce moment-là: La demande qui vous est faite dans les recommandations du ministre, si c'est vrai que cela ne vous fait rien, et que vous trouvez cela curieux qu'un groupe vous le demande, et que le groupe soit d'accord, comment se fait-il que vous ne soyez pas d'accord?

M. Dion: Un instant! Il faut quand même faire attention, M. le député de Joliette. Nous avons pris la remarque du contentieux qui nous dit: C'est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne. Nous avons vérifié la Charte des droits et libertés de la personne et tout ce qu'on retrouve là-dedans, c'est la clause 10 qui dit: "Toute personne a droit de reconnaissance à l'exercice". On parle de la race, de la couleur, du sexe, de l'état civil, etc.

On va vérifier également si à non-discrimination dans l'embauche, à l'article 16, on ne retrouve pas l'allusion aux antécédents judiciaires. Nous, on a vécu, dans l'industrie de la construction, avec des gens qui pouvaient avoir ce problème et quelle que soit la conséquence, on a négocié une clause en échange et, à ce moment-là, on a quand même eu la précaution de couvrir un problème qui pouvait se présenter pour l'employeur dans l'exercice d'un contrat. C'est-à-dire, que, si je m'en vais travailler dans une banque et que j'ai seulement trois gars qui ont déjà fait des vols de banque, je veux quand même être capable de régler mon problème.

A partir de là, la clause a été consentie aux électriciens pour régler un problème particulier en arrivant à la fin d'une négociation. Comme j'ai pu donner, à un moment donné, telle clause aux tuyauteurs. D'ailleurs, cela a été l'entente des parties: ce n'est pas parce qu'on a donné une clause à un qu'on la donnait à tout le monde. Or, elle n'a jamais été donnée à tout le monde. Là, vous laissez tomber les plans des droits et libertés de la personne et vous nous demandez de les étendre à tout le monde et, en plus de cela, de faire sauter la précaution qu'on avait mise dans la clause pour pouvoir l'exercer dans l'industrie de la construction.

A ce moment-là, vous renégociez totalement la clause, vous l'élargissez et vous la rendez beaucoup plus restrictive au niveau de l'employeur, en faisant sauter la clause contractuelle. Je dis, à ce moment-là, et c'est ce que j'ai dit tantôt: Si c'est une clause discriminatoire au sens de la loi et que le ministre dit que c'est une clause discriminatoire, que le ministre fasse sauter la clause et n'aille pas l'étendre à tout le monde. Qu'il ne corrige pas à ce moment-là le contenu de la clause; elle est discriminatoire, elle saute.

Il n'est pas question de parler d'antécédents judiciaires dans le décret.

M. Couture: Oui, je prends d'ailleurs très bien votre message, et, de ce fait, c'est notre intention d'y arriver, c'est-à-dire que nous allons tout simplement conserver, à cause de leurs antécédents judiciaires, en se référant à la première partie: "Aucun employeur, ni personne agissant pour un employeur ne doit exercer des mesures discriminatoires contre un salarié, à cause de ses antécédents judiciaires". Donc, on se réfère directement à la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Dion: Oui, mais excusez M. le ministre, à ce moment-là, quand vous dites que l'article devient discriminatoire, pour qui est-il discriminatoire? Il n'est pas discriminatoire pour le gars qui a des antécédents judiciaires, au contraire, cela lui permet de travailler. L'employeur dit à ce moment-là: Je ne me priverai pas de cette main-d'oeuvre qui a des antécédents judiciaires, sauf dans un cas particulier.

Ce que vous faites si la modification était faite dans le sens que vous le dites, c'est que vous acceptiez les antécédents judiciaires dans le texte, non-discrimination pour les antécédents judiciaires, et vous enlevez la contrepartie qu'on a négociée avec la partie syndicale, pour laisser la clause là, parce que cela nous permettait à un moment donné d'opérer. A ce moment-là, il n'y a pas de discrimination, contre qui fait-on de la discrimination dans cette clause à l'heure actuelle? On permet aux gars de travailler. C'est cela que la clause fait.

M. Couture: De toute façon, je dois vous dire que là-dessus on discute, on ne veut pas négocier, mais je prends note que vous êtes d'accord pour dire que vous ne voulez pas de discrimination, donc les électriciens vous ont demandé cette clause, mais vous ne refusez pas que cela s'étende à tout le monde. Par ailleurs, vous voulez vous protéger, selon certaines ententes préalables, en

retenant: "Sauf si l'employeur est lié par des clauses contractuelles à l'effet contraire". Je prends note.

M. Dion: M. le ministre, je voudrais que ce soit assez précis entre nous, de façon qu'il n'y ait pas de confusion. Je pense que c'est ce qu'on a dit, c'est que l'article est dans le décret, il a été négocié comme tel. S'il vient à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne, qu'on nous le prouve et, à ce moment-là, on étudiera une modification. Mais, je n'ai jamais dit et je ne dirai jamais que l'AECQ est d'accord pour enlever l'article, que l'AECQ est d'accord pour l'étendre ou que l'AECQ croit que l'article est discriminatoire. Bien plus, si jamais l'article avait été discriminatoire, je pense que vous auriez dû le faire enlever avant de publier le décret, parce que votre pouvoir d'enlever des articles discriminatoires existe avant que vous publiiez le décret. Donc, à ce moment-ci, en tout cas, en principe pour nous, vous ne pouvez plus exercer ce droit.

M. Couture: C'est pour bien faire.

M. Dion: Mais, M. le ministre, vous avez tellement d'autres places où bien faire, je ne sais pas pourquoi celle-là.

M. L'Heureux: La précision qu'il est important de faire ici, c'est que la loi permet au ministre ou au ministère du Travail d'enlever des articles qui seraient discriminatoires pour des tierces parties, c'est-à-dire des parties qui n'ont pas été partie à la négociation. Alors, il faut bien s'entendre.

Si nous avons décidé par exemple que la CSN n'aurait pas de délégué de chantier ou n'aurait pas droit à certaines choses, à ce moment-là, c'est quelque chose de discriminatoire pour une partie qui n'était pas présente aux négociations. C'est là que le ministre a le pouvoir d'enlever des choses discriminatoires pour les tierces parties.

M. Couture: Je crois qu'il faut quand même rappeler que la Charte des droits et libertés de la personne est prioritaire sur toute loi.

M. Dumoulin: Ce n'est pas dans la Charte des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Marcoux): M. Dumoulin.

M. Dumoulin: Dans la section 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, on croit qu'il est fait mention des conditions sociales. Les conditions sociales, à notre sens, couvrent la section qu'on mentionne dans le moment. Lorsqu'on parle de clauses discriminatoires, c'est vrai que la clause a été donnée à la dernière minute, concernant les métiers entre autres, en même temps que certaines clauses concernant différentes primes. C'est vrai que cela a été fait. On aura d'ailleurs l'occasion d'expliquer un peu plus tard. Par contre, si nous avons accepté les modifications qui nous ont été soumises par le ministre, c'est qu'on nous a expliqué, lorsque nous avons ren- contré le contentieux du ministre concernant certaines clauses de base, semblerait-il illégales, que cette clause était discriminatoire parce qu'elle s'appliquait simplement à une partie de l'industrie de la construction et que les autres travailleurs de la construction subissaient de la discrimination, ne pouvant être couverts par cette même clause.

Aujourd'hui, on retrouve justement ce problème à différents chantiers, entre autres à Port Cartier. On est à établir des listes noires dans l'industrie de la construction. On se sert de dossiers judiciaires qu'un travailleur de la construction peut avoir dans ses antécédents. Donc, on croit vraiment qu'une clause semblable doit exister à l'intérieur du décret et des listes noires à l'intérieur de l'industrie de la construction ne peuvent être acceptables. Tout travailleur a le droit de travailler dans l'industrie de la construction et malheureusement dans nos prisons, fédérales ou provinciales, on ne forme pas de cultivateurs, étant donné que les planchers sont en ciment. On forme des travailleurs de la construction. Avec la législation à laquelle on a à faire face, lorsqu'ils sortent de là, ils votent et nous sommes obligés de les accepter. Et si nous les acceptons, ils doivent avoir le droit de travailler et de gagner leur vie. Donc, c'est le problème auquel on a à faire face. On croit que c'est une priorité de voir qu'à l'intérieur du décret cette clause s'applique à tout le monde, étant donné ce que nous vivons en ce moment.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, c'est une question à Me Dion. Votre argumentation avait deux volets. Oublions le volet qui disait c'est ou ce n'est pas dans la Charte des droits de l'homme. Vous avez eu un autre argument, dès le départ. Vous disiez: Si c'est couvert, si ce type de discrimination est couvert par la Charte des droits de l'homme, pourquoi l'inscrire, puisque c'est couvert par la loi de toute façon. Je voudrais vous référer à l'article 14.01 du paragraphe 3. Est-ce que vous pensez que ce qui est couvert dans le paragraphe 3 est couvert par la Charte des droits de l'homme? On y dit qu'à cause d'absence en raison de l'assistance à un office religieux, un jour de fête religieuse, obligation de sa foi... Est-ce que cet aspect est couvert par la Charte des droits de l'homme, selon vous? Et si oui, pourquoi dans un cas acceptez-vous que cela soit dans le décret et dans l'autre cas dites-vous que si c'est couvert, ce n'est pas nécessaire que cela y soit?

M. Dion: Notre argumentation est la suivante, M. le Président. Selon nous, l'exclusion des antécédents judiciaires n'est pas dans la Charte des droits de l'homme. Or, la religion est mentionnée à l'article 10. C'est bien mentionné: "Les droits et libertés de la personne sans distinction de race, de couleur, de sexe, d'état civil et de religion". Alors, il n'est pas question là-dedans d'antécédents judiciaires. C'est pour cela que nous avons accepté de négocier pour les électriciens restrictivement aux

formules contractuelles qu'on a prévues. Il n'a pas été question de négocier pour les autres.

Si cela avait été réellement dans la Charte des droits de l'homme — c'est d'ailleurs cela qui nous empêchait de comprendre l'objection légale du contentieux — si cela avait été réellement dans la Charte des droits et libertés de la personne automatiquement, cela se serait appliqué à tout le monde et je n'aurais pas eu besoin d'en parler, mais si ce n'est pas dans la Charte des droits et libertés de la personne, les électriciens ont demandé d'en parler pour eux. Alors, pourquoi modifier cette volonté des parties? Les électriciens l'ont demandé, ils l'ont voulu et ils l'ont dans le décret. On l'a négocié de cette façon. Vous biffez les électriciens, vous l'étendez à tout le monde et vous enlevez la clause contractuelle. C'est changer le point de vue qui a été émis. Vous nous parlez d'objection légale. C'est ce dont vous nous avez parlé au début de la journée, des objections légales. S'il y a une objection légale, on veut la savoir. On est prêt à discuter avec vous. A notre point de vue, il n'y a pas d'objection légale. Ce n'est pas dans la Charte des droits et libertés de la personne, ce n'est pas défendu.

M. Bisaillon: Vous ne répondez pas à ma question, dans le fond. Un des arguments, et c'est, je pense, le premier que vous avez invoqué, si c'est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne, pourquoi en parler? Si c'est couvert, de toute façon, ce sera appliqué. Cela a été votre premier argument. Votre argumentation était que si des choses étaient couvertes par la Charte des droits et libertés de la personne, il n'était pas utile de les mettre dans le décret. Je vous dis: Le paragraphe 3, d'après moi, c'est quelque chose qui est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne. Comment se fait-il que vous acceptez que ce soit dans le décret et que, dans l'autre cas, vous nous dites que ce ne serait pas nécessaire?

M. L'Heureux: Est-ce que je peux retourner la question, M. Bisaillon? Pourquoi, à ce moment, si l'article no 3 est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne, ne nous demande-t-on pas une modification?

M. Bisaillon: L'argumentation du contentieux, je ne la comprends pas de la même façon que vous. Le contentieux ne dit pas: Comme c'est couvert, vous devez le modifier. Le contentieux dit: Tel que c'est rédigé, c'est discriminatoire, parce que cela s'applique uniquement à une partie de travailleurs, au lieu de s'appliquer à l'ensemble.

M. L'Heureux: Pour qui est-ce discriminatoire? C'est ce que nous essayons de savoir dans le moment. Les seuls arguments de discrimination qu'il peut y avoir...

M. Bisaillon: Pour les plombiers, pour tous les autres.

M. L'Heureux: On peut accorder une prime aux plombiers qu'on n'a pas accordée aux électri- ciens. C'est discriminatoire pour les électriciens de l'avoir accordée seulement aux plombiers, mais, étant donné que ce sont les plombiers qui l'on demandée nous la leur accordons. Dans le moment, ce sont les électriciens qui ont insisté pour avoir cette prime, nous la leur avons accordée. Dans notre document, à la page 13, nous disons: "A ce moment-là, enlevez-là complètement, si c'est discriminatoire, et nous n'aurons pas d'antécédents judiciaires". Vous nous posez une question et, en réalité, ce serait à nous, de vous poser la question, si réellement le paragraphe 3 est couvert par la Charte des droits et libertés de la personne. A ce moment, on nous dit: Enlevez l'autre, parce qu'il est couvert. Pourquoi ne pas nous demander d'enlever celui-là? On répond à vos modifications ici.

M. Bisaillon: D'après moi, vous comprenez mal le sens des amendements. L'amendement suggéré par le ministre ne vise pas à enlever le paragraphe 6. Il vise, au contraire, à étendre la possibilité que ceux qui ont des antécédents judiciaires ne subissent pas de discrimination, mais, dans l'ensemble des métiers de la construction, et au lieu de le restreindre aux électriciens, ce qui est discriminatoire, de l'appliquer à l'ensemble des corps de métier de la construction.

M. Dion: M. le Président, est-ce discriminatoire, à l'heure actuelle, d'avoir une clause dans le décret que vous admettez ne pas être à rencontre de la Charte des droits et libertés de la personne, si j'ai bien compris? Est-ce discriminatoire d'avoir une clause dans le décret qui regarde les électriciens, qui leur donne un droit de travailler sans discrimination lorsqu'ils ont des antécédents judiciaires? Est-ce que cela est plus légal que d'avoir un taux de salaire plus élevé que celui des journaliers? Est-ce plus discriminatoire d'avoir cette clause que de leur donner une prime dans le décret, ou de donner une prime à des gars qui travaillent sur des échafaudages? Ce sont des groupes de salariés qui, à un moment donné, peuvent bénéficier de conditions de travail différentes ou supérieures aux autres salariés. Il n'y a rien de discriminatoire dans cela.

Quand j'ai fait une allusion, au départ, M. Bisaillon, si c'est dans la Charte des droits et libertés de la personne, je pense qu'à ce moment je posais la question, parce que le contentieux nous avait donné comme raison la Charte des droits et libertés de la personne. Je posais la question. Si c'est dans la Charte des droits et libertés de la personne, pourquoi nous demandez-vous ce genre de modification?

Le Président (M. Marcoux): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: M. le Président, j'aimerais entendre les arguments juridiques du contentieux, quant à l'opportunité de modifier ce sous-paragraphe 6. Deuxièmement, si on acceptait de le modifier, tel que proposé, comment considérerait-on la nouvelle proposition avec l'article

2g-1 de la loi qui dit: Toute personne trouvée coupable au Canada ou ailleurs de voies de tait simples ou méfaits, etc., ne peut occuper une fonction de direction dans une association de salariés ni être élue ou nommée comme délégué de chantier, agent d'affaires.

M. Couture: II faut revenir quand même à l'article 14.01-1): Aucun employeur, ni personne agissant pour un employeur ne doit exercer de mesures discriminatoires contre un salarié, dans les cas suivants, c'est-à-dire que la loi spécifie des fonctions, mais dans l'article 14.01-1, on entend, dans la fonction, l'emploi. Je pense que ce n'est pas contradictoire. On peut spécifier dans un cas déterminé, pour l'ensemble des travailleurs qui oeuvrent dans un métier quelconque de la construction. On dit qu'il ne doit pas y avoir de mesures discriminatoires.

M. Couture: C'est exact. Il faut regarder l'objet de l'article 14.01. Le décret établit, en fait, des relations de travail entre les employeurs et leurs salariés, et vous avez une clause visant l'absence ou le défaut de discrimination dans ce cadre. L'article 2g de la loi que vous mentionnez a un tout autre objet.

Il vise à éviter que des personnes qui ont été trouvées coupables de certains actes criminels qui sont mentionnés à cet article occupent une fonction, comme vous l'avez mentionné, de direction dans une association de salariés et empêcher qu'elles soient élues ou nommées comme délégué de chantier, agent d'affaires ou représentant syndical. En fait, l'objet spécifique de l'article 2 g) est quand même restrictif, tandis que l'article 14.01 du décret vise un tout autre objet, je pense.

M. Chevrette: Les relations de travail, c'est dans la Beauce...

M. Fontaine: Pour la première partie de ma question, j'aimerais entendre vos arguments juridiques concernant la Charte des droits et libertés de la personne, en relation avec cet article que vous voulez modifier.

M. Couture: Je pourrais peut-être profiter de cette occasion pour clarifier un point. Lorsque le contentieux a rencontré les parties pour leur exposer une liste de problèmes juridiques que nous suscitions à la réflexion des parties, à ce moment, lorsque nous avons abordé la question de la clause qui était la clause 15, à l'époque, avant l'adoption du décret, qui est maintenant devenue 14, en relation avec l'alinéa 6 de l'article 14.01, nous avons posé le problème de la discrimination vis-à-vis de la rédaction dans l'ensemble de cette clause, c'est-à-dire qu'il faut lire: "Pour les électriciens, à cause de leurs antécédents judiciaires".

Nous n'avons pas parlé de discrimination sur le simple bout de phrase: "A cause de leurs antécédents judiciaires", ce qui semble être l'orientation du débat, à l'heure actuelle. Je tiens à préciser de façon très claire, comme d'ailleurs M. Dumoulin l'a bien mentionné tout à l'heure, que nous avons mentionné qu'il pouvait y avoir discrimination au sens de la Charte des droits et libertés de la personne, lorsqu'on visait à éviter que la discrimination se fasse à cause d'antécédents judiciaires, mais uniquement dans le cas des électriciens. Que fait-on des autres groupes? Les autres groupes ne devaient-ils pas bénéficier de la même protection, en ce qui concernait la possibilité d'antécédents judiciaires? C'est dans ce sens qu'il faut lire le projet de modification que nous proposons actuellement.

Dans le fond, voici le principe qu'on essaie de retenir. Chaque fois qu'on parle de mesures prises à cause d'antécédents judiciaires, on ne peut pas en parler sans couvrir tout le monde, parce que c'est là qu'est le point central de la déclaration des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Marcoux): Oui, Me Dion.

M. Dion: M. le Président, j'essaie encore, peut-être que je pourrais poser une question au conseiller du ministre, M. Fortin. La clause est-elle illégale? Quand nous avons rencontré les gens du contentieux, on nous a soulevé une série de clauses illégales dans le prochain décret de la construction. Si la clause est illégale, sur quel point l'est-elle? Si elle n'est pas illégale, cela veut dire que le seul argument qu'on nous présente actuellement, c'est une clause discriminatoire. C'est ce qu'on dit: C'est une clause discriminatoire. Notre argument se limitera à parler d'une clause qui pourra ou non être discriminatoire, et nous vous donnerons notre point de vue. Mais la clause est-elle illégale? Comment est-elle illégale, à l'heure actuelle?

M. Couture: Je vais être assez bref. Je vais essayer d'être très clair sur cette question. Je pense que Me Dion va admettre avec moi que si la clause est discriminatoire, elle est carrément illégale. C'est la première chose, vis-à-vis de la Charte des droits et libertés de la personne.

Prenant cela comme prémisses, si la clause vise effectivement à protéger, c'est une clause qui vise à éviter des mesures discriminatoires, et visant à éviter des mesures discriminatoires, elle ne vise qu'à protéger un seul groupe de salariés. La clause qui vise à éviter de la discrimination en crée elle-même à sa façon. Dans ce sens, elle devient illégale.

M. Dion: Donc, dans votre esprit, la clause est illégale, à l'heure actuelle, et discriminatoire.

M. Couture: Telle que rédigée actuellement, c'est pourquoi nous proposons une modification.

M. Dion: Si la clause était discriminatoire, je soutiens respectueusement devant la commission que le ministre, avant de faire l'extension du décret, en vertu des pouvoirs qui sont prévus aux articles de la loi 290, avait le droit de la faire sauter.

M. Couture: Je m'excuse, j'aimerais simplement préciser que l'article 16, qui est sans doute la

disposition de la loi que voulez invoquer, au deuxième alinéa, mentionne ce qui suit: "Le ministre peut recommander des modifications non agréées par les associations visées au premier alinéa de l'article 16 pour soustraire une autre association de salariés ou les membres d'un secteur de l'association d'employeurs à une clause discriminatoire ou à une clause qui n'affecte que ses membres et à laquelle elle n'a pas consenti".

Si vous lisez la clause du décret telle qu'elle existe actuellement, peut-on dire qu'il s'agit d'une clause qui vise une association de salariés ou les membres d'un secteur de l'association d'employeurs? Je pense que l'objet de l'article 16, alinéa 2, n'est pas du tout le même que ce que l'on est en train de regarder en fonction du décret à l'heure actuelle.

M. Dion: Si vous me permettez, M. le Président, parce que je ne voudrais pas qu'on fasse des dialogues, mais je pense que M. Fortin a absolument raison dans ce qu'il vient de dire. Il vient de démontrer que cela ne peut pas être une clause discriminatoire au sens de la loi, article 16. Parce que ce n'est pas une clause qui fait de la discrimination pour une association, un groupe d'une association de salariés ou un groupe d'une association d'employeurs. La discrimination, dans l'industrie de la construction, est définie à l'article 16. Donc, on ne peut pas invoquer la discrimination.

M. Couture: Me Dion, selon les cours que j'ai suivis au Barreau, il ne suffit pas de n'invoquer qu'un seul alinéa d'un seul article dans une loi pour prétendre que cet alinéa a réglé toutes les causes de discrimination. Vous avez une loi au complet qui traite de la discrimination et ce n'est pas parce que vous ne trouvez pas le fondement juridique de votre projet de modification à l'article 16, alinéa 2, que vous invoquez, qu'elle n'est pas pour autant discriminatoire, eu égard à d'autres positions législatives qu'on peut trouver dans les statuts.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Moi, je maintiens qu'il y a discrimination. Quand on se réfère à l'article 14.01, alinéa 1, on parle de religion, d'origine, d'âge, de couleur, de statut syndical ou social, et je pense qu'à partir du moment où un employeur va refuser, mettons un plombier, parce qu'il a un dossier judiciaire et, en contrepartie, prétendant que cela a été négocié dans une convention collective, va accepter qu'un électricien puisse travailler avec un dossier judiciaire, c'est dans ce sens que je me dis qu'il y a discrimination. Et je pense que l'article 14.01 fait état de cela. Ou on enlève la clause négociée, ce qui est un peu stupide, des électriciens, ou on donne à tous les salariés le privilège de pouvoir travailler dans quelque métier que ce soit, même s'ils ont un dossier judiciaire. Et...

M. L'Heureux: C'est moins stupide, cela?

M. Lavigne: Ecoutez, je pense que la loi ne vient pas d'une négociation. Ou un privilège, ou une discrimination ne vient pas d'une négociation. Je pense que cela fait état d'un dossier, d'un statut social, d'avoir un dossier judiciaire oui ou non, et l'article 14.01, alinéa 1, parle bien du statut social. Je pense que, si on s'entend bien sur les termes, le statut social d'un individu peut dépendre justement du fait d'avoir, oui ou non, un dossier judiciaire. Dans ce sens-là, je me dis que, si c'est bon pour les électriciens, c'est bon pour les plombiers, les menuisiers ou les autres.

M. Dion: Mais, M. le Président, vous demandez, à l'heure actuelle, vous ne dites pas que cette clause est dans le décret, qu'elle ne devrait pas être là et qu'il faudrait l'enlever. Ce n'est pas cela que vous faites. Vous ajoutez à la négociation. Vous dites: Ceux-là l'ont eu, donnez donc cela à tout le monde. Cela ferait bien à tout le monde. Je vais vous dire. Il y a des primes dans le décret, il y a des clauses dans le décret qui feraient peut-être bien à tout le monde. Mais je suis obligé de vous dire que, lorsqu'on a négocié — et c'est cela qui est drôle de la part de la partie syndicale à ce moment — il a été question de l'avoir pour tout le monde; ces gens n'ont pas voulu l'avoir pour tout le monde. Lorsque le conseil provincial a signé la convention, il savait qu'il n'y avait que les électriciens à l'avoir. Il n'a pas demandé de l'avoir pour tout le monde. Ce sont les électriciens qui ont voulu avoir cette protection supplémentaire. La partie patronale a bien voulu leur accorder cette protection supplémentaire. En plus de la donner à tout le monde, vous la modifiez, à ce moment-là, pour la réduire parce que, quand même, il faut que vous reconnaissiez que dans certaines situations, la partie patronale ne pourrait pas vivre avec une clause telle que stipulée. C'est que je pourrais me retrouver, demain matin, avec des gens qui ont, malheureusement ou non, des antécédents judiciaires, incapable d'aller exécuter un contrat que j'aurais à signer ou pour lequel j'aurais soumissionné. Vous nous placez dans une position absolument impossible.

M. Couture: Est-ce que je peux...

Le Président (M. larcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, c'est avec une certaine hésitation que je m'insère dans cette... On est en train de faire la démonstration que, lorsqu'il s'agit d'interpréter la loi, la commission parlementaire n'est certainement pas l'organisme le plus approprié. Ne serait-ce que si on avait fait cette démonstration, je pense que cela pourrait peut-être au moins servir d'exemple à éviter sur la façon d'aborder le problème. Il y a malgré tout une chose qui m'inquiète.

J'assiste un peu comme spectateur à ce débat depuis une demi-heure et il me semble que, malgré tout, dans les interventions répétées de Me Dion, une question n'a pas reçu une réponse tout

à fait adéquate de la part du ministre, parce que lorsqu'on fait référence à la discrimination, il n'y a pas de doute qu'il y a de la discrimination. Le tout est de savoir si cette discrimination est visée ou interdite par une loi quelconque. Et là-dessus — c'est pour cela que je dis qu'il n'y a pas eu une réponse adéquate — on n'a pas eu une réponse qui, quant à moi, soit absolument limpide. Les références à la Charte des droits et libertés de la personne ne sont pas satisfaisantes, à moins d'aller un peu plus dans les détails. Parce qu'il est évident que, par exemple, dans les conditions d'emploi, il est interdit de faire de la discrimination quant au sexe, mais il n'est pas interdit d'en faire quant à l'âge, si ma mémoire est bonne. Donc, il y a des discriminations interdites et des discriminations tout aussi réelles qui sont permises par la charte, tout simplement parce que la charte ne se veut pas une interdiction absolue de toute forme de discrimination.

Si je comprends certaines interventions qui ont été faites, on veut dire que l'expression "statut social" peut être interprétée comme visant la possession d'un dossier judiciaire. Dès qu'on se met à aller dans les détails, on se rend compte qu'il y a un certain nombre d'interprétations. C'est là-dessus que l'interprétation qu'on nous suggère ne me paraît pas absolument à l'épreuve de tout doute. Je reviens à mon point initial. Est-ce que c'est vraiment approprié de faire de l'interprétation de textes juridiques par un mécanisme de réglementation? Et, même si ce point n'est pas accepté, Me Dion soulève quand même un point qui a une valeur assez générale. Si un article d'une convention est jugé illégal, le récrire nous amène beaucoup plus loin que simplement constater qu'il est illégal. On le récrit, on change les données de la convention. Je ne suis pas sûr que cela soit souhaitable, d'autant plus qu'il y a eu, évidemment, du "bargaining", du "trade-off" qui ont été faits. Mais, le ministre s'insère dans le contenu de la convention, encore une fois, en alléguant l'illégalité et cette allégation d'illégalité, pour autant que je puisse voir après une demi-heure de discussion, ce n'est pas absolument clair que ce soit interdit par la loi. Peut-être qu'un tribunal en jugerait ainsi. Ce n'est pas absolument certain.

M. Couture: M. le député de Saint-Laurent, débordons un peu la loi. Dans l'économie de la Charte des droits et libertés de la personne, où l'on dit à l'article 13: "Nul ne peut dans un" — articles 10 et 13 — à l'article 10, on dit: "Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice en pleine égalité des droits et libertés de la personne sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, l'état civil, la religion, les convictions politiques, l'origine ethnique ou nationale ou la condition sociale. Il y a discrimination lorsqu'une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit." Et à l'article 13, on dit: "Nul ne peut, dans un acte juridique, stipuler une clause comportant discrimination".

Alors, je fais appel, si on peut dire, à l'économie générale de cette loi où on cherche un traite- ment égal pour tout le monde, dans toutes nos lois, dans tous nos décrets, etc. La question que je pose c'est que, lorsqu'on se réfère à 14.01, alinéa 6, on dit ceci — et c'est la question que je poserais à la partie patronale —"Aucun employeur ni personne agissant pour un employeur ne doit exercer des mesures discriminatoires contre un salarié dans les cas suivants": — là vous allez à l'alinéa 6 et vous dites: pour les électriciens. Je pose cette question. Est-ce que cela signifie que, pour les menuisiers, je prends cet exemple, à cause de leurs antécédents judiciaires, il y aurait un traitement différent? Je veux quand même essayer de vous mieux comprendre, on est là pour cela.

Est-ce qu'il n'y a pas dans l'économie générale de la Charte des droits et libertés de la personne ce postulat fondamental que, dans toutes nos lois, dans tous nos décrets, on ne peut pas viser, surtout en ce qui concerne les antécédents judiciaires où là on touche à la moelle des droits de la personne, on ne peut pas viser un seul groupe. C'est la seule interrogation que je laisse en suspens.

M. Forget: M. le Président, je pense que le ministre fait bien de nous rappeler à l'économie générale de la loi, mais de la même façon qu'on doit regarder l'économie générale de la Charte des droits et libertés de la personne, et là-dessus, je suis d'accord avec lui que son esprit est d'éviter la discrimination, je l'inviterais à faire la même chose pour une convention collective.

Toutes ces dispositions doivent être interprétées les unes à la lumière des autres. Or, on peut donner des droits à un groupe et les reconnaître également et lui permettre d'utiliser ces droits pour obtenir en contrepartie d'autres avantages, mais, dans le fond, si je comprends bien, c'est ce que certaines parties nous démontrent et nous disent: Un avait au départ, au début de la négociation, des droits égaux à ne pas être l'objet de discrimination, mais il consent, dans un mécanisme de négociation, à s'imposer à lui-même, des règles plus strictes en contrepartie à d'autres choses. Du moins, c'est ce que j'ai cru saisir qui était intervenu.

M. Couture: Me permettez-vous une seconde question? Est-ce qu'on doit négocier sur la base de ce qui m'apparaît des choses aussi fondamentales que la dignité des personnes, leur intégrité et leur réputation? Quand on vise un groupe à cause des antécédents judiciaires et qu'on ne vise pas tous les autres groupes, on négocie pour un groupe sur des aspects qui m'apparaissent assez fondamentaux du respect de la personne, de cette réputation et de ce droit de toutes les personnes de profiter, même à cause d'antécédents judiciaires, d'un traitement égal.

M. Forget: C'est une question d'opinion jusqu'où on peut aller, mais, effectivement, ,je reviens à ma proposition de départ, c'est que vous avez là une question d'évaluation, d'opinion, du poids relatif qu'il faut accorder au principe de non-discrimination comme disposition d'ordre

public que des parties ne peuvent pas négocier en contrepartie d'avantages particuliers et une discrétion qui crée simplement un droit de départ qui peut faire l'objet de négociations dans son application.

C'est si vrai que, dans le domaine, par exemple, de la clause de discrimination dans les avantages sociaux, il a été jugé impossible d'établir la signification pratique de ces clauses de la Charte des droits et libertés de la personne à moins de créer un comité qui a fait rapport, il y a quelques mois, et dont on n'a pas entendu parler depuis — ce n'est pas un reproche, nécessairement, je pense que cela prend un certain temps pour l'analyser — pour décider ce qu'était la non-discrimination vis-à-vis des femmes, par exemple, dans les avantages sociaux, les programmes, les plans collectifs d'assurance, de pension, etc., parce qu'on se rend compte que la non-discrimination peut vouloir dire un certain nombre de choses divergentes.

Donc, il y a le principe qui peut être affirmé avec beaucoup de conviction, mais son application pratique, c'est une question d'évaluation d'opinion, et si l'on en est sur des questions d'opinions plutôt que de prononciation de principes absolus, cela place dans une lumière différente l'intervention du ministre pour modifier la convention collective.

Alors, si ce sont des principes absolus de droit public, à mon avis, il faudrait peut-être plutôt laisser les tribunaux se prononcer là-dessus. Si ce sont des questions d'opportunité, de convenance, en termes d'objectifs sociaux que le gouvernement veut épouser, il ne faudrait pas faire la défense, à ce moment-là, sur la légalité.

Il faut faire son lit d'une façon ou d'une autre et j'ai un peu l'impression qu'on argumente sur la légalité alors qu'on a à l'esprit des objectifs qui ne sont pas strictement et seulement juridiques. C'est le seul point que je veux faire dans ce débat.

M. Couture: II ne faut pas s'en plaindre.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Je ne voudrais pas traiter ici la question d'une façon légaliste, comme M. le député en a fait état. C'est toujours un peu difficile de trancher une question quand vient le temps de la trancher légalement. Il peut y avoir des divergences d'opinions et ainsi de suite, mais je crois que, dans une société qu'on dit civilisée, on ne peut pas, je pense, tenir pour acquis que, sur un dossier judiciaire, cela doit être négocié en convention collective.

Je pense que cela doit être un droit acquis pour un type qui a un dossier judiciaire de pouvoir facilement obtenir la chance d'être réhabilité dans la société, de se trouver un gagne-pain, indépendamment, du fait qu'il soit électricien, plombier ou autre chose.

Je pense que c'est aussi discriminatoire de donner ce droit aux électriciens et de ne pas le donner aux plombiers ou à d'autres corps de métier que d'engager un Blanc par rapport à un Noir. Je pense que c'est là l'essence même et le noeud du problème. Tant et aussi longtemps qu'on ne tiendra pas pour acquis que c'est là qu'est la discrimination et qu'on va se battre sur des points juridiques, on n'arrivera jamais à un consensus. Mettons nous d'accord sur ce point, que quelqu'un qui a un dossier judiciaire a le droit à un emploi et que cela ne doit pas être négocié en convention collective. Je pense que c'est dans ce sens qu'il faudrait se diriger. Si on faisait un consensus là-dessus, je pense qu'on pourrait presque clore le débat, ici, maintenant.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Par cette définition qu'on donne à l'article 6, je pense que, lorsqu'on vise les électriciens sur une base de groupe, cela pourrait être acceptable, mais sur une base personnelle, moi, si j'étais un électricien, j'aurais de la difficulté à accepter cela, parce que je me demanderais pourquoi on veut me protéger particulièrement, moi, un électricien. Est-ce parce que, dans le groupe des électriciens, il y a plus de personnes qui ont un casier judiciaire que dans d'autres groupes?

Alors, je me pose cette question.

Le Président (M. Marcoux): Voulez-vous une réponse?

M. Chevrette: II n'y a pas de statistiques.

M. Fontaine: II n'y a pas de statistiques. Non, mais, de toute façon, je pense que c'est là la discrimination.

M. Dumoulin: Vous le demanderez à M. MacKinnon; il va vous dire combien il y en a.

M. Fontaine: D'autre part, si on s'en rapporte à la Charte des droits et libertés de la personne, comme le ministre l'a dit en se référant à l'article 10, c'est prévu là-dedans, probablement à l'endroit où on parle des conditions sociales. C'est également prévu à l'article 14.01: "A cause de sa race, de sa nationalité, de sa langue, de sa religion, de son origine, de son âge, de son statut social". A ce moment, pourquoi l'indique-t-on, encore une fois, au paragraphe 6? Je pense qu'on devrait, tout simplement, enlever cet article et ne pas en parler. Si c'est prévu dans la Charte des droits et libertés de la personne et dans l'introduction, au paragraphe 1, je ne vois pas pourquoi on le remettrait encore une fois dans la section 6.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Berthier.

M. Mercier: Sur la base de discussion qu'on a eue antérieurement, je me rallie à cette position. Je ne vois pas tellement de problèmes là-dedans. Je crois bien que, si quelqu'un, soit un plombier

ou un autre, invoquant la Charte des droits et libertés de la personne, allait devant les tribunaux, il aurait probablement de fort bonnes chances d'avoir gain de cause.

Je ne vois pas tellement le problème que cela peut poser si cela demeure là. Je ne crois pas que cela excluait automatiquement tous les recours que d'autres groupes pouvaient avoir afin d'invoquer la discrimination pour antécédents judiciaires. Je ne vois pas tellement de problèmes là.

Le Président (M. Marcoux): N'ayant pas d'autre intervenant sur l'article 8 e), je rappelle...

M. Chevrette: Je pourrais peut-être ajouter un commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: C'est une clause de convention collective. J'ai l'impression que Me Dion a voulu nous faire comprendre aussi, à l'intérieur de son argumentation, qu'une convention collective, cela se négocie dans une situation X. Par exemple, je ne suis pas surpris de voir que la clause concerne les électriciens, parce qu'à l'époque, il y avait un problème majeur au niveau des électriciens.

Je comprends pourquoi un groupe isolé arrive là; c'est une situation de fait. Ceux qui suivaient le moindrement la construction à l'époque savaient qu'il y avait un problème majeur. Que le groupe des électriciens ait demandé cette clause spécifique à l'intérieur d'une négociation, je trouve cela normal; ce n'est pas là-dessus qu'on en est.

Le problème, c'est qu'on n'est plus dans le cadre d'une convention collective normale en vertu du Code du travail. On est dans un décret, présentement, et le ministre a le pouvoir, en vertu de l'article 18, de modifier une clause qui peut lui sembler discriminatoire. C'est dans ce contexte que cela a été apporté et, moi, en tout cas, je trouve qu'on est suffisamment informé pour passer à un autre article.

M. Dion: Si vous me le permettez, M. le Président, juste une allusion à l'article 18.

Le Président (M. Marcoux): Me Dion.

M. Dion: Je ne pense pas que l'article 18 prévoie les corrections qui peuvent être apportées au décret pour des raisons de discrimination, je ne pense pas que ce soit le cas. Je ne pense pas que ce soit cela que la loi dise à l'heure actuelle. Je voudrais ajouter qu'on aurait pu écrire dans le décret, par exemple, que tous les gars qui sont en haut de six pieds et trois n'auront pas le droit de travailler sur la construction. Supposons qu'on écrive cela, que la partie syndicale soit d'accord et qu'elle signe cela. Il n'y a rien de discriminatoire, là-dedans, si les parties, de part et d'autre, consentent à cela. Il n'y a rien d'illégal là-dedans. Je ne peux pas vous dire que ce serait intelligent, parce que des gars de six pieds et trois, ce sont les meilleurs au point de vue de la constitution, ce sont ceux qui font les plafonds sans échafaudage, etc. Mais dans l'industrie de la construction, ce n'est pas une chose illégale que de dire aux électriciens: Vous avez droit à une clause qui dit qu'on ne peut pas exercer contre vous de la discrimination pour vos antécédents judiciaires.

Savez-vous réellement ce que cela fait cette clause, dans le décret? Cela ajoute une protection aux électriciens qui l'ont demandée, les autres ne l'ont pas demandée. Deuxièmement, cela leur donne un droit de grief en vertu de la convention, pas plus que cela. Qu'est-ce qu'il y a de discriminatoire là-dedans? Ce n'est pas discriminatoire, cela leur ajoute des droits. Alors pourquoi dire: On va ôter cela aux électriciens, on va le mettre pour tout le monde, on va enlever des conditions favorables?

Le Président (M. Marcoux): Excusez, il y a une question de règlement, je dois d'abord entendre la question de règlement du député de Joliette.

M. Chevrette: J'ai une demande de directive, je vais convertir cela pour que ce soit légal, d'accord?

Le Président (M. Marcoux): Tant que la question n'est pas entendue, tout est légal.

M. Chevrette: M. le Président, on discute toujours du droit ou du non droit du ministre d'apporter ou non quelque chose, depuis ce matin. On tient pour acquis, en tout cas, moi, je tiens pour acquis, je n'ai pas entendu un membre de la commission ici dire le contraire, que le ministre a des pouvoirs qui lui sont dévolus en vertu de...

Le Président (M. Marcoux): Ce n'est pas une question de règlement mais...

M. Chevrette: C'est une directive que je veux vous demander.

Le Président (M. Marcoux): Justement je vais vous dire que ce n'est pas...

M. Chevrette: Vous ne savez pas quelle directive je vous demande, vous ne pouvez pas la donner.

Le Président (M. Marcoux): Je vous vois venir. M. Dion: C'est de la discrimination.

M. Chevrette: Je voulais vous demander comme directive, chaque fois qu'un intervenant aborde la question de la possibilité pour le ministre d'intervenir ou non, de le rappeler à l'ordre.

Le Président (M. Marcoux): Je vais trancher votre question, je ne rappellerai pas à l'ordre les intervenants qui vont se prononcer sur la possibilité ou non pour le ministre d'intervenir. Ce n'est

pas à la présidence de la commission de décider si telle suggestion qui est faite ou tel commentaire est acceptable ou non. Même si j'ai constaté, comme vous, que nos invités ont répété à plusieurs reprises ce que vous venez d'affirmer, c'est leur droit de le répéter autant de fois qu'ils le veulent.

M. Chevrette: M. le Président, je vais reformuler une demande de directive, c'est que chaque fois qu'un intervenant argumentera quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relative aux modifications apportées au décret qui sortira de cela, vous appliquerez le règlement. Cela, c'est l'objet même de la loi.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous pouvez répéter?

M. Chevrette: Oui, vous lirez l'article 18 sur la fin. En haut, les trois premières lignes en haut, page 20.

Le Président (M. Marcoux): Dans la loi?

M. Chevrette: Autrement, on va sortir d'ici au mois d'août.

M. Forget: M. le Président, sur ce point-là, très brièvement.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent, veut m'éclairer.

M. Forget: M. le Président, je suis d'accord sur un point avec le député de Joliette, c'est que le ministre a tous les droits, cela est clair. C'est ce que j'ai dit au tout début de nos travaux, il a tous les droits.

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse, je ne me suis pas prononcé sur cette question. Les personnes qui viennent témoigner ici peuvent contester ces affirmations et dire que le ministre n'a pas tous les droits, mais le ministre peut continuer ou les membres de la commission peuvent continuer à penser et agir comme s'ils avaient tous les droits.

M. Forget: M. le Président, je vous approuve, vous êtes très magnanime dans votre interprétation et vous faites bien de l'être, mais il reste que, quelle que soit l'opinion qui est exprimée devant la commission, je crois que le ministre dans la loi a tous les droits. Ce à quoi peut servir cette discussion, c'est justement à éclairer les raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente, mais pas une entente entre les parties, on est à une étape ultérieure, une entente des parties avec le ministre sur les raisons qui motivent le changement. Or, à moins de connaître les raisons du ministre, on peut difficilement demander aux parties d'être d'accord ou en désaccord avec le ministre, et c'est le but de la commission d'éclairer les raisons des modifications introduites dans le décret.

M. Couture: M. le Président...

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Couture: M. le Président, je m'oppose à cette interprétation du député de Saint-Laurent. Quand il dit que le ministre a tous les droits, je suis d'accord dans le sens suivant que de fait, selon l'article 18, quand il est d'avis que c'est dans l'intérêt public...

M. Forget: Dont vous êtes l'interprète.

M. Couture: Que les modifications peuvent être apportées pour remédier à une situation existante. Donc, à ce point de vue, cela couvre pas mal de choses. J'ajouterais ceci: Le mandat de la commission c'est pour entendre les parties quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications apportées au décret. La commission n'est pas ici pour entendre le ministre expliquer les raisons pour lesquelles il propose des modifications. Mais, pour collaborer et faire participer tous les membres de cette commission de la réflexion du ministre, je veux bien à l'occasion expliquer les raisons qui nous ont guidés pour suggérer des modifications.

Mais le mandat, c'est pour cela que je m'oppose à l'interprétation du député de Saint-Laurent, est bien clair, et c'est pour entendre les parties qui ont reçu une série de modifications dans le cadre du pouvoir du ministre et qui ne se sont pas entendues. On les entend sur les raisons pour lesquelles elles ne se sont pas entendues.

De fait, le ministre n'est pas ici pour négocier quoi que ce soit. Il est ici pour entendre. Selon le pouvoir qui lui est apporté, qui lui est donné, il a proposé des modifications et il entend les parties sur les raisons qui font qu'elles ne sont pas d'accord.

M. Forget: M. le Président, je ne voudrais pas donner l'impression que j'ai indiqué que le ministre était ici pour négocier. Il demeure que les parties n'ont pas été convoquées à des négociations entre elles sur les modifications qu'il a proposées. Si elles ne réussissent pas à se mettre d'accord c'est essentiellement sur les raisons qui ont fait agir le ministre pour proposer des modifications puisque la période de négociation de la convention collective est dépassée depuis longtemps.

Comment leur demander d'être d'accord ou pas avec des modifications sans pouvoir en connaître les raisons? Elles n'ont pas besoin d'être d'accord pour qu'elles interviennent. De toute façon c'est le pouvoir du ministre de les introduire sans leur accord. Le but de la commission parlementaire c'est de faire ressortir, à mon avis, et je le soumets humblement, M. le Président, les raisons que le ministre a d'apporter les modifications, et les raisons qu'ont les parties de ne pas être d'accord, de ne pas tomber d'accord entre elles pour appuyer les raisons du ministre et les modifications qui en découlent.

M. Couture: M. le Président, je ne veux pas poursuivre un débat de procédure. On n'est pas ici pour passer des heures sur la procédure, mais je veux simplement en terminant rappeler au député de Saint-Laurent le texte même de la loi qui nous concerne et qui nous lie. C'est à l'article 18: II ne peut toutefois modifier ainsi le décret sans que ces associations — donc, je peux modifier le décret, j'ai proposé des modifications — ne soient invitées à être entendues devant la commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux modifications apportées au décret.

Donc, le principal objet de notre commission parlementaire est d'entendre les parties exposer les raisons pour lesquelles elles n'acceptent pas les modifications proposées par le ministre.

M. Forget: Dans le cas où on remet en question une entente entre les parties, elles vont se borner, comme elles l'ont fait depuis le début de la journée, à nous dire qu'elles s'étaient entendues et avaient des raisons pour s'entendre. Il faut leur donner d'autres raisons pour leur montrer la justification et essayer d'obtenir leur adhésion à des propositions de modification. C'est sous-entendu par cet exercice. Autrement, la commission parlementaire n'est qu'une espèce d'organe passif qui demande aux gens de dire pourquoi ils ne sont pas d'accord, mais ils vont nous dire dans tous les cas: On n'est pas d'accord parce qu'on s'était entendus sur autre chose. C'est futile et stérile.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, je ne suis pas un avocat et selon la façon dont se déroule le débat jusqu'à maintenant, je commence à être content de ne pas l'être. Il reste qu'il faut regarder le dossier mais non du point de vue légaliste seulement. Il serait facile de tomber dans le légalisme tout le long de la discussion. On s'est demandé ce qui était discriminatoire. Si je le regarde d'un oeil d'une personne qui veut voir de la discrimination à l'intérieur, je peux le regarder au titre de groupe. Je pense que quelqu'un a fait cette mention tout à l'heure en disant: Pourquoi nommer un groupe et ne pas nommer les autres? A ce moment, cela donne l'impression que ce groupe en contient à l'intérieur de son groupe. Si on a suivi, comme le disait un autre intervenant, ce qui s'est passé dans la construction, il comprend très bien qu'en négociation, cette question soit venue sur la table.

Au niveau du groupe il y a une forme de discrimination pour tous les autres groupes non prévus à cette clause.

Quant aux individus, on peut aussi le regarder à ce niveau individuel et faire en sorte que les électriciens puissent aussi se sentir discriminés par rapport à cette clause, mais les autres groupes, qui d'un autre côté ne sont pas visés par la clause, peuvent aussi se sentir visés. Si on le regarde au niveau du groupe ou de l'individu, on en a une forme de discrimination. Quand on dit:

Qu'est-ce qui est discriminatoire pour les électriciens? la réponse est au niveau des individus. Quand on dit: Qu'est-ce qui est discriminatoire pour les autres groupes qui ne sont pas nommés? c'est que le groupe n'est pas là.

En laissant la clause tel que proposé en amendement, à savoir de laisser "à cause de leur antécédent judiciaire", on touche l'ensemble des groupes et des individus et on fait en sorte qu'à ce moment la discrimination, et pour l'individu et pour les autres groupes, n'ait pas lieu.

Je comprends l'argumentation qui peut être apportée par la partie patronale à savoir que ce n'est pas l'objet de sa négociation à l'époque parce que, dans le "bargaining power" au niveau d'autres clauses, elle a joué. Mais est-ce une raison d'accepter qu'on maintienne une discrimination pour un groupe ou des individus en particulier en laissant actuellement cette clause comme elle est là?

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais relever un point qui a été avancé par le député de Saint-Laurent. Il faut lire l'article 18 dans son entier. Dans un premier temps, le ministre peut, avec l'accord des deux parties, changer des choses. Quand il le leur a soumis, si les deux parties avaient été d'accord, il aurait pu le changer très facilement. Mais le dernier paragraphe dit qu'il peut changer sans consentement, mais il faut qu'il leur donne la chance, non pas de s'expliquer pourquoi ils ne se sont pas entendus, mais qu'ils donnent les motifs pour lesquels ils n'acceptent pas la modification suggérée par le ministre. C'est cela que dit la loi.

Ici, ce qu'ils ont à venir nous dire, à mon sens, c'est qu'ils n'acceptent pas votre suggestion pour tel, tel et tel motif. Ce n'est pas de nous dire que c'est parce que le conseil provincial a suggéré autre chose, et c'est ceci et cela. Non, qu'ils nous disent pourquoi ils refusent la suggestion faite par le ministre. C'est cela que dit l'article 18 de la loi. C'est très clair. Il faut le lire au complet pour voir la démarche.

Dans un premier temps, il pouvait avec le consentement, et sans consentement il a le droit d'exiger les motifs. Pour éclairer le ministre parce que lui-même aura à prendre une décision après. L'objectif est l'intérêt public.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je suis un peu désolé de continuer cette histoire, mais c'est extrêmement important. On est dans un régime d'exception. Ordinairement les conventions collectives, c'est l'accord des parties. On a un régime d'exception qui permet, de façon exorbitante au droit commun dans le domaine des relations de travail, au gouvernement d'intervenir. Je ne m'attache pas au libellé de l'article. Peut-être que l'article est mal rédigé, encore que je serais capable

de raisonner sur la base du libellé actuel en faveur de la façon de concevoir les choses, mais indépendamment de cela, vous avez un régime d'exception qui permet au gouvernement d'intervenir. C'est sûr, à mon avis, qu'on ne conçoit pas un mécanisme d'audience en commission parlementaire simplement pour dire aux parties qui dans le fond s'étaient entendues sur un article et qu'on frustre du fruit de leur entente: Venez nous dire que vous n'êtes pas contentes. C'est bien sûr qu'elles vont nous dire cela.

On le fait dans un régime parlementaire pour donner une occasion à l'opinion publique, aux parties impliquées, à l'Opposition de dire au gouvernement: Comme vous intervenez, au moins dites-nous les régions pour lesquelles vous intervenez. C'est sous-jacent. C'est implicite, si ce ne l'est pas explicite, dans un processus d'audition parlementaire dans le cas d'un pouvoir d'exception.

Quand on demande aux parties si elles sont d'accord avec les modifications du ministre, si elles sont d'accord avec ces raisons pour les modifications, ce n'est pas une excuse valable pour le ministre de dire: Ecoutez, moi regardant cela comme une cour de justice, il y a des choses que je prononce comme étant non conformes à telle ou telle disposition d'une autre loi. Il y a des motifs d'ordre public. Il y a des motifs d'intérêt public, de politique gouvernementale qui doivent être invoqués à l'appui d'une intervention dans un domaine qui a fait l'objet d'une entente privée, parce que c'est un régime d'exception. C'est cela l'esprit qui doit régner dans nos travaux. C'est essentiel au jeu responsable de l'intervention d'une tierce partie. Autrement, le gouvernement ne joue pas son rôle qui est, effectivement, celui prévu dans la loi, de changer quelque chose qui a été entendu entre les parties en disant: Ecoutez, vous avez entendu cela, ce sont des intérêts privés qui ont fait une coalition, mais cela c'est contraire à l'ordre public. Pas parce que tel ou tel article de la loi contrevient à cela — c'est une objection qui pourrait être laissée aux tribunaux à la limite — mais parce que comme gouvernement on prend l'initiative de défendre ou de permettre un certain nombre de choses.

Le seul but des interventions que j'ai faites depuis ce matin, c'est de demander au ministre de dire quels sont ces objectifs sociaux, quelle est sa version de l'intérêt public qu'il veut défendre par les modifications qu'il veut faire introduire.

Je comprends qu'il trouve la modification discriminatoire; c'est parfaitement son droit de dire cela. On ne l'accepte pas, comme gouvernement, cette forme de discrimination. Je trouve que c'est beaucoup plus faible de venir nous dire que c'est contre tel article de la Charte des droits et libertés de la personne, parce que cela, il peut le dire seulement en s'aidant d'une interprétation qui est discutable. Mais ce n'est pas discutable d'entendre le gouvernement dire: Cette forme de discrimination, on est contre. J'aimerais peut-être mieux, cependant, qu'on nous dise: On va amender la Charte des droits et libertés de la personne plutôt que de l'appliquer rétroactivement.

A mon avis, il était tout à fait légitime pour les gens de lire la Charte des droits et libertés de la personne comme n'empêchant pas la discrimination par rapport au casier judiciaire. C'est une question d'opin:on, remarquez, et cela n'affecte pas l'argument de base qui est le suivant. Encore une fois, pour terminer, c'est le devoir du gouvernement de nous dire pourquoi il veut faire des modifications sans se baser sur des argumentations étroitement juridiques.

M. Couture: M. le Président, je pense que je peux répondre d'une façon satisfaisante au député de Saint-Laurent. Je crois que, depuis le début, de fait — c'est pour cela peut-être que la discussion est un peu oiseuse — jamais nous n'avons refusé d'apporter nos raisons et nos motivations pour avoir proposé telle et telle modifications. Je pense qu'on l'a fait de bonne foi et on continuera. Si cela peut rassurer le député de Saint-Laurent, je voulais simplement signaler que, de fait, le mandat était précis dans la loi. Nous comprenons que c'est sous-entendu et nous voulons non seulement entendre les parties et nous éclairer nous-mêmes, mais aussi, dans ce dialogue que nous avons entrepris, permettre aux parties de comprendre mieux notre point de vue et de s'enrichir les uns les autres sur cette question.

Le Président (M. Marcoux): Comme il n'y a pas d'autre intervenant sur ce sujet, j'appellerais l'article 9, qui concerne l'article 15.01 du décret. Me Dion.

M. Dion: Est-ce que la commission a des objections à ce qu'on discute en même temps les articles 9 et 43 des propositions du ministre? L'article 43 est rattaché à l'article 9. L'article 9, c'est l'endroit, dans le texte, où on faisait allusion à la liste des arbitres.

Le Président (M. Marcoux): Cela va, pas de problème.

M. Dion: Dans l'industrie de la construction, c'est une loi particulière et des problèmes particuliers. On veut s'assurer — pour les parties, c'était le consentement — une liste d'arbitres et d'avoir des gens qui sont au courant de l'industrie de la construction, qui sont en mesure d'arbitrer les problèmes en tenant compte des conditions de la loi particulière qui est celle de l'industrie de la construction. L'AECQ — c'est notre commentaire qui paraît à la page 14 — a soumis une liste d'arbitres à la partie syndicale et en a également envoyé copie au ministère du Travail. Nous voyons mal, à ce moment-ci, que ce soit retiré du texte sous prétexte qu'il n'y a pas encore eu entente entre les parties.

On suggère, à ce moment-là, qu'il soit tenu compte, au moins, du geste fait par l'AECQ, c'est-à-dire de transmettre une liste d'arbitres. On suggère que les parties s'entendent sur une liste d'arbitres et qu'elles incluent dans le décret une liste d'arbitres, plutôt que de prendre la position, tout simplement, d'enlever toute référence à une liste

d'arbitres. Pour nous, cela devient important — je ne veux pas présumer de l'argumentation syndicale — que les arbitres soient des gens au courant des problèmes de l'industrie de la construction pour pouvoir arbitrer les problèmes de la construction. On insisterait pour que l'article 9 ne soit pas modifié et que l'article 43 soit complété par une liste d'arbitres, de façon que le décret puisse être appliqué, lorsque ceux-ci sont requis par des arbitres qui connaissent l'industrie de la construction.

Le Président (M. Marcoux): M. Dumoulin.

M. Dumoulin: M. le Président, sur les deux articles concernées, la partie patronale, est d'accord pour faire paraître à l'intérieur du décret une liste d'arbitres.

C'est vrai qu'il y a une liste d'arbitres qui nous a déjà été soumise, que nous avons consultée, mais il est arrivé la publication, la promulgation du décret et, malheureusement, nous n'avons pas répondu. Par contre, d'ici une semaine, on peut, franchement, s'entendre sur une liste d'arbitres et la faire apparaître à l'intérieur du décret.

M. Couture: Nous prenons acte de vos bonnes dispositions là-dessus.

M. Dumoulin: On va, comme je l'ai mentionné, vérifier la liste qui a déjà été remise parce qu'à l'intérieur de la liste il y a certains noms sur lesquels nous ne sommes pas d'accord, forcément. Il n'y en a pas beaucoup. On va les rencontrer pour en discuter et s'il y a moyen de s'entendre, on vous la formulera par après.

Le Président (M. Marcoux): Pas de discrimination.

M. Dumoulin: C'est ce qu'on m'a mentionné tantôt, je n'ai pas osé le dire.

Le Président (M. Marcoux): On ne peut pas vous aider. Les membres de la commission ont le sens de l'humour. Article 10.

M. Chevrette: Je voudrais poser une question...

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: ...soit à Me Décary ou Me Dion. A supposer qu'il y a entente, il n'y a pas de problème. S'il n'y avait pas entente, il faudrait, tout au moins — je ne le sais pas, je lance la question abroger le paragraphe 2 de l'article 15.01, parce que l'office n'a pas d'autre alternative que de choisir parmi la liste annotée du CTMO.

M. Décary: Oui, et d'autre part, si, effectivement, il n'y avait pas entente, à l'article 12.02, intitulé procédures, sous-paragraphe 3, les deux dernières lignes qui commencent par: "Le grief écrit doit être soumis à l'arbitrage dans les 20 jours ci- vils suivants", je vous suggérerais, à ce moment, d'ajouter les mots, comme on l'a fait dans notre texte écrit: en le référant à l'Office de la construction pour qu'il lui nomme un arbitre suivant la procédure prévue à la loi. D'autre part, après discussion, nous sommes assez confiants de pouvoir nous entendre avec la partie patronale. J'aurais suggéré un délai, je ne connais pas les délais de la commission, mais j'aurais pensé à un délai qui nous amènerait jusqu'à vendredi, non pas de cette semaine qui est le 24, mais le vendredi de la semaine suivante.

M. Couture: C'est un délai raisonnable.

M. Décary: Très bien. Nous ferons tout en notre pouvoir pour clarifier cette situation.

M. Couture: Excellent.

M. Dion: Si j'ai bien compris, M. Chevrette a dit: Si les parties s'entendent il n'y a pas de problème. Cela veut dire que les choses sur lesquelles on s'entendrait, il n'y aurait pas de problème.

M. Couture: Non. On accepte d'avance que si vous vous entendez... Ah oui! mais, évidemment — je vois que nous avons affaire à un avocat — sous réserve des pouvoirs du ministre.

M. Dion: Je me suis permis, parce que vous avez souligné que vous entendiez à rire.

Le Président (M. Marcoux): Vous testez notre sens de l'humour. Maintenant, 9 et 43 sont discutés. L'article 11-A, qui concerne l'article 17.01 du décret.

M. Décary: M. le Président, est-ce que je pourrais vous consulter sur l'article 17, ou enfin la modification 11 proposée par le ministre? Quant au Conseil provincial, cet article connote pour nous, d'abord, le problème des ascenseurs.

Je ne sais pas si vous entendez en discuter, à ce moment-ci, d'une part, peut-être pas, je n'ai pas d'objection à ce qu'on le reporte à un autre moment, je m'en remets à vous. D'autre part, l'article 17 affecte lui aussi les annexes concernant les taux de salaire. Est-ce qu'on doit, à ce moment ici, également discuter des annexes? Si oui, on a là encore quelque deux ou trois interventions à faire. Si, vu que les annexes sont à la fin, vous préférez remettre la question à un autre moment de la commission, là encore, je n'ai pas d'objection. Je veux vous consulter autrement dit. Mais cet article, quant à nous, fait référence à deux problèmes: celui des ascenseurs et celui des annexes. Autrement, nous sommes d'accord.

M. Couture: Maintenant, je proposerais que, si on dispose immédiatement, ce soir ou actuellement, de cet article des problèmes auxquels vous nous référez, on en dispose et qu'on n'y revienne pas à la suite des représentations sur les articles concernés. On peut disposer tout de suite de ces problèmes, si vous voulez.

M. Décary: Je suis d'accord. J'attirerais votre attention quant aux ascenseurs, évidemment, cela fait l'objet d'une autre annexe, et, quant aux annexes, nous ferons tour à tour nos interventions. Je m'en remets à vous.

M. Couture: Je souhaiterais qu'au fur et à mesure qu'un article est appelé qui soulève des problèmes particuliers on en dispose.

Le Président (M. Marcoux): Allez-y. Si je comprends bien le ministre, il vous demande de parler sur l'ensemble des problèmes que pose cet article.

M. Décary: D'abord, l'introduction est très brève. Il y a deux problèmes fondamentaux qui sont visés, je les ai évoqués. 1) le problème des mécaniciens d'ascenseur et 2) certains ajustements que nous revendiquons au chapitre des annexes de taux de salaire.

Le problème des mécaniciens d'ascenseur. Pendant les négociations, une entente est intervenue entre le Conseil provincial et l'AECQ qui fait l'objet d'une annexe, qui prévoit que les clauses particulières aux ascenseurs pourront être négociées. A l'article 17 d'alors, on avait indiqué que, dans le cas des mécaniciens d'ascenseur, leur période de référence n'était pas le 31 juillet, mais la date de promulgation du décret, donc ultérieure au 31 juillet, plutôt vers le mois de février ou mars. Dans le texte de l'article 17 actuel on ne trouve pas là le reflet de la volonté des parties qui, d'ailleurs, est exprimée dans le décret actuel. Quant aux problèmes des ascenseurs, maintenant, il y a ce premier volet qui est celui de la période de référence — j'emploie le terme anglais — le "red circle", il y a de plus le problème de la négociation. Quant au problème de la négociation, à proprement parler, des mécaniciens d'ascenseur, c'est un périple en soi et la conclusion c'est qu'à l'heure actuelle il n'y a pas d'entente entre les parties sur les clauses particulières. D'autre part, il y a certains problèmes de fond qui sont posés. Les problèmes de fond — je vais être très bref — sont de deux ordres. Les premiers concernent la loi, à l'heure actuelle. Dans la loi, à l'heure actuelle, il y a certaines particularités, nous le croyons, de ce métier qui ne peuvent pas être satisfaites, traduites, ni à l'avantage de l'association de salariés, ni à l'avantage de l'association d'employeurs en raison de certains obstacles juridiques, que nous pourrons traiter en détail, si vous le voulez.

D'autre part, c'est que pour ce groupe de travailleurs qui a des particularités, dans les négociations, la position de la partie patronale a été de refuser de négocier tout ce qui avait déjà été négocié pour l'ensemble des métiers. Comme politique, on disait: Vu qu'il y a une entente sur l'ensemble des sujets qui peuvent faire l'objet d'une convention collective au niveau de l'ensemble des métiers, comme politique, nous refusons de modifier cette politique de l'ensemble de l'industrie dans le cas des mécaniciens d'ascenseur. Avec le résultat qu'aujourd'hui, nous ne sommes pas plus avancés qu'aux mois de novembre et décembre derniers.

D'autre part, je tiendrais à vous souligner que, lorsque l'association de travailleurs et les employeurs concernés ont entamé les négociations, à cette table, les rapports qui nous ont été transmis par l'association des entrepreneurs eux-mêmes et par nos commettants nous apprenaient que les négociations entre ces groupes allaient bon train. A un certain moment, un vendredi après-midi, les groupes concernés ont reçu un télégramme de l'association des entrepreneurs qui disait: Arrêtez à ce moment-ci les négociations. Il y avait, semble-t-il — peut-être que mes amis pourront le dire plus correctement, c'est quand même leur association, eux savent ce qui s'est passé — un problème de représentation à la table de négociations. C'est-à-dire qu'on nous disait que les employeurs qui étaient là, qui négociaient, n'étaient pas habiletés à négocier parce que n'étant pas mandatés par l'association des employeurs.

Lorsque les représentants dûment mandatés par l'AECQ ont rencontré les employés, il y a eu un revirement complet. C'est-à-dire que maintenant des clauses sur lesquelles on prévoyait avoir une avance ont fait l'objet d'un refus systématique de la part de la partie patronale. Soit pour des motifs légaux — je les respecte — soit pour des motifs de politique.

Sur les motifs légaux, finalement, je termine là-dessus à ce stade-ci, je voudrais seulement vous rappeler que l'objectif des parties n'était pas de conclure une entente qui serait contraire à la loi, mais plutôt d'essayer de trouver une plateforme conjointe qui serait soumise au ministre pour demander que la loi soit modifiée dans ce cas, si bon lui semblait, sur les sujets sur lesquels il y avait consensus ou accord, d'une part. D'autre part, c'est que quant aux autres conditions de travail qui pouvaient bien légitimement être négociées, la partie patronale a dit: Comme c'est ainsi qu'on agit pour l'ensemble des travailleurs de la construction, il n'y aura pas d'exception dans votre cas. Telle est notre politique. Ce qui est bien légitime. Il n'y a rien d'irrégulier, d'illégal, d'illicite. C'est légitime. Mais d'autre part, cela a conduit au fait qu'aucune entente n'est intervenue. Il y a donc, quant à nous, une impasse.

Je veux aussi souligner un petit rappel historique. Avant la loi de 1968, il n'y a jamais eu de grève dans ce secteur. D'autre part, depuis 1968, on a eu grève par-dessus grève et on a également vu des chefs syndicaux qui, à la décharge des mandats qui leur étaient confiés, "bon droit mal droit", se sont vus traduits devant les tribunaux pour avoir évidemment fait opposition à la loi. Donc, depuis 1968, on a vu dans ce secteur un désordre. Le conseil provincial a souligné dans son mémoire que son objectif est de trouver une solution à ce problème. Ce que nous suggérons fondamentalement c'est que dans cette période de calme qui s'annonce, on puisse être autorisé, d'abord, à s'entendre sur la définition du problème. Si on peut d'abord s'entendre sur la définition du problème, peut-être pourrons-nous plus

facilement trouver des solutions. Je ne vous dis pas que la solution c'est de sortir de la loi, etc. Je vous dis: Donnez aux gens la chance de s'entendre sur les définitions des problèmes. Ensuite, voyez quelles sont les solutions qui pourront être acceptées. C'est l'approche que nous avons. Nous voulons une approche la plus constructive possible. Devant vous, ce soir, nous ne sommes pas là pour vous dire: Dans le cas des mécaniciens d'ascenseur, donnez-nous ceci, donnez-nous cela, modifiez la loi.

Ce que nous voulons, c'est qu'un effort sérieux soit fait par le ministère et par les parties qui, ensemble, scruteront le secteur en vue de déterminer les problèmes et de voir quelles sont les solutions les plus appropriées.

Quant aux annexes, mon ami et associé, Robert Laurin, voudrait vous dire quelques mots concernant un problème particulier au métier de tireur de joints. Peut-être que, pour l'avantage de la partie patronale, il y aurait lieu de mettre immédiatement de l'avant notre position là-dessus ou préférez-vous attendre?

M. Couture: Désirez-vous continuer ou si vous aimeriez qu'on puisse discuter davantage sur le problème des mécaniciens d'ascenseur afin d'en arriver à vider, si possible, la question au niveau des représentations des parties?

M. Oécary: Très bien.

M. L'Heureux: Est-ce à notre tour, monsieur?

Le Président (M. Marcoux): Oui, oui.

M. L'Heureux: Je pense que les appréhensions qu'on a indiquées ce matin se matérialisent: en fait, on est ici pour négocier. Puisqu'on est dedans, on va embarquer de plain-pied avec la réserve qu'on a faite cet après-midi.

On a mentionné que, dans le cas des ascenseurs en particulier, la partie patronale, l'AECQ, qui est mandatée par la loi pour négocier au nom de ces gens-là comme des autres, avait interrompu des discussions qui étaient, à toutes fins pratiques, en bonne voie. J'ai ici une copie du télégramme qu'on a envoyé. Il a été envoyé à trois compagnies — pas à tous les employeurs, il y a 30 employeurs — soit à la compagnie Otis, à la compagnie Dover et à la compagnie Westinghouse qui, d'après la partie syndicale, emploient à peu près 30% de leur main-d'oeuvre affiliée à l'union internationale, pas de celle qui est dans la CSD. Ces gens-là, à ce moment-là, étaient en train de négocier une convention pour le reste des gens qui n'étaient pas là.

A ce moment-là, nous avons pensé, à l'AECQ, que ce n'était pas la façon de procéder. On leur a envoyé un télégramme qui se lit comme suit — on est alors le 22 octobre, si vous vous souvenez de cette période — "Compte tenu de la situation globale entourant la présente négociation, nous considérons que les discussions présentement en cours entre certains employeurs et des représentants syndicaux — encore là, M. Dumoulin a men- tionné ce matin que les gens venaient de partout; c'était vrai aussi, c'étaient des gens qui venaient de Washington, de Toronto et d'un peu partout pour négocier notre système de relations de travail ici — relativement aux mécaniciens d'ascenseur sont nettement prématurées. Nous vous demandons de mettre fin immédiatement à ces discussions et nous comptons sur votre collaboration future lors des rencontres officielles." Je ne lis pas le reste du télégramme, mais il est disponible.

Qu'est-ce qui est arrivé par la suite? Effectivement, l'AECQ s'est assise avec ces gens-là à la fin de janvier. On mentionne ici que l'AECQ a refusé, sur la base de la lettre d'entente, de négocier des clauses par le fait que, d'après nous, ce n'était pas particulier, même s'il y avait un protocole d'entente du 10 mars précédent qui stipulait ce qui était particulier ou pas particulier. On a dit: Pour ne pas prolonger le débat, on va oublier cela. Faites-nous vos demandes et on va vous donner une réponse écrite, comme nous l'avait demandé, à ce moment-là, M. Peoples qui les représentait. On leur a dit: On va vous faire une réponse documentée sur chacune de vos demandes. Ils nous ont soumis leurs demandes par écrit le 1er; on a siégé tout l'après-midi et le lendemain, avec les membres de notre sous-comité qui représentait les trois groupes d'employeurs. Le lendemain, effectivement, on leur a donné une réponse à toutes leurs demandes. D'ailleurs, vous l'avez dans votre rapport du conciliateur, M. Réjean Larouche.

Quand on dit qu'on a refusé de négocier, ce n'est pas vrai. On a refusé d'accorder ce qu'ils nous demandaient, c'est vrai. C'est cela, l'idée d'une convention collective. A partir de là, ces gens ont dit: On a le droit de grève. On a répondu: C'est vrai, vous avez le droit de grève. Effectivement, ils ont utilisé leur droit de grève. On a continué avec le conciliateur qui, lui, a émis un rapport. Dans le rapport, il reconnaissait le bien-fondé des arguments de la partie patronale, dans le sens que ce qui nous était demandé c'étaient des choses qui n'étaient pas négociables; c'étaient des choses sur la préfabrication, c'étaient des choses sur des juridictions professionnelles, c'était sur l'apprentissage qui relève du règlement no 1. M. Larouche vous a soumis un rapport disant que c'est vrai. Il vous a aussi soumis un rapport dans lequel il dit que la lettre d'entente pourrait, à ce moment-là, être soumise à un arbitrage.

Là-dessus on vous a écrit, puis on a dit: M. le ministre, que vous soumettiez la lettre d'entente à un arbitrage ou non, on a dépassé ce stade-là, on leur a demandé de nous offrir leurs demandes et on a répondu à toutes leurs demandes. A ce moment-là on est dans un processus de négociation. C'est vrai que dans le moment on ne s'est pas entendu. Il y a eu un conflit économique, les employeurs ont traversé un conflit de deux mois et ces gens-là travaillent maintenant.

Les conditions salariales sont en annexe, ce n'est pas pour rien qu'on a mis des conditions salariales aux mécaniciens d'ascenseur. Encore là le rapport de M. Larouche, le conciliateur qui a été nommé à la demande de la partie syndicale, non pas à la nôtre, le rapport de M. Larouche men-

tionne que l'échelle de salaires des mécaniciens d'ascenseur, à la fin de la présente convention collective, qui est maintenant un décret, va être de 148% du salaire d'un journalier, ce qui était exactement ce qu'ils avaient en 1969, au moment où on dit que les véritables négociations par région avaient lieu, comme on a fait pour tous les autres métiers.

On a rétabli, à l'intérieur d'une masse salariale, ce qui existait à ce moment-là, aussi bien pour les mécaniciens d'ascenseur que pour les autres. Pour eux, ce sont toutes des conditions particulières. Pour nous, à la table centrale, les salaires étaient d'ordre général, n'étaient pas des clauses particulières. Quand on a fait une offre à la FTQ-Construction, le 30 juillet, on l'a fait sur la base d'une offre monétaire globale, cela incluait les mécaniciens d'ascenseur. Alors, si vous voulez qu'on renégocie ici, on est capable de renégocier, si c'est le voeu de la commission. Mais nous, ce qu'on veut vous dire, c'est qu'on l'a fait cette étape-là. On ne peut pas dire que l'AECQ s'est déchargée de ses devoirs, c'est moi-même qui ai pris charge de la table des mécaniciens d'ascenseur l'hiver dernier. On a tout fait le processus y incluant la grève, y incluant le processus de conciliation.

Alors, pour nous, le problème des mécaniciens d'ascenseur demeure celui que le ministre, dans la lettre qu'il a envoyée à M. Dumoulin, expliquait, à savoir qu'il était pour y avoir possibilité pour eux de se faire entendre en commission parlementaire. Mais à ce moment-là, il ne parlait pas en notre nom, certain. Ceia demeure le fait qu'il était pour former un comité pour étudier ce qui n'était pas négociable, parce que même le ministre reconnaissait que la plupart des demandes de la partie syndicale, en fait, ce n'étaient pas des demandes, c'était une non-reconnaissance de notre système de relations de travail. Eux, ils ont un "national agreement" et veulent que leurs salaires soient indexés à Toronto où on n'a, nous, aucun pouvoir de négociation. Nous, dans le Québec, on ne peut pas admettre cela.

Alors, c'était tout le problème des mécaniciens d'ascenseur. Ces gens ne se sont pas privés pour faire une grève, ont fait la grève, on a subi cette grève. Ils sont revenus travailler parce que cela devait faire leur affaire de revenir travailler. Ce ne sont pas les employeurs qui les ont suppliés. Alors, si vous voulez recommencer le débat, on est prêt, on a tout ce qu'il nous faut. On a même le rapport de M. Larouche, avec les annexes, avec les demandes qui nous ont été faites et avec les réponses qu'on a données.

Le Président (M. Marcoux): M. Dumoulin.

M. Dumoulin: M. le Président, je crois que nous revenons aux fameux événements d'octobre 1976, il est temps qu'on les mentionne. Vous avez, à l'intérieur du décret qui est promulgué dans le moment, de l'accord que vous avez devant vous, une lettre d'entente, à la dernière page, relative aux mécaniciens d'ascenseur. Là il faut relater un peu les faits, les discussions qu'il y a eues durant ces fameux cinq jours, donc, nous avons discuté jour et nuit.

Cette fameuse lettre d'entente — donc, les représentants du ministère étaient présents — avait été préparée, lors des discussions, en limitant, et je m'explique clairement, en limitant, à l'intérieur de cette lettre, les discussions au niveau des avantages sociaux, au niveau, je crois, de l'apprentissage. Là, cela m'échappe, parce que je ne l'ai pas devant moi, mais cela limitait à trois, quatre clauses à l'intérieur du décret.

Lettre d'entente que j'ai refusée, personnellement, parce que cela limitait strictement à trois, quatre articles incluant les salaires, je m'excuse les salaires étaient inclus. Donc, un téléphone a été fait à un représentant de la partie patronale à cet effet, et il a été fait mention, très clairement, aux représentants du ministre, qu'on n'avait pas à limiter les discussions pour les mécaniciens d'ascenseur, étant donné que c'est un problème de longue date et qu'il n'a jamais été résolu.

Et c'est la raison pour laquelle vous retrouvez la lettre avec aucune espèce d'exception à l'intérieur, c'est de base générale. On dit: "Les parties conviennent, dans le plus bref délai, d'examiner la situation particulière des mécaniciens d'ascenseur en vue de s'entendre sur les dispositions particulières applicables à ces derniers. Ces dispositions seront incorporées à l'entente, en vue de leur extension par voie de décret". Je crois que c'est assez clair ce que cela mentionne là.

A la suite de cette fameuse lettre d'entente du mois d'octobre — et, remarquez bien, M. L'Heureux a bien dit que c'était véridique ce qui s'était produit — il y a eu la négociation qui s'est faite avec 17 ou 18 compagnies, je ne peux pas mentionner les noms des compagnies qui étaient là, qui étaient représentées, je ne le sais pas. J'ai participé à la première séance, entre autres, de négociations, par la suite, lors de deux ou trois jours de travail. Donc ils semblaient être favorables à trouver des solutions, je ne dirai pas à l'entente, mais à trouver certaines solutions.

Là on a reçu le fameux télégramme qui vient d'être mentionné et qui a brisé ces négociations avec les gens qui étaient là, qui viennent des Etats-Unis ou du fond du Canada ou du fond de la province de Québec, qui représentaient soit l'union, soit les employeurs. Vous avez des employeurs au niveau de l'Amérique du Nord à l'intérieur de cela. Ils étaient présents pour discuter de ces fameuses négociations.

Malheureusement, on a arrêté cette négociation. On n'a pas voulu que les parties, soit celui qui paie et qui emploie, soit celui qui fournit la main-d'oeuvre, s'entendent. On n'a pas voulu' qu'entre eux ils puissent discuter et trouver les solutions. C'est ce qui a brisé les fameuses négociations. C'est ce qui a résumé, entre autres, la grève des mécaniciens d'ascenseur.

Je crois que la lettre est assez claire. Je l'ai mentionné au début et je le répète, concernant les mécaniciens d'ascenseur, il n'y aura absolument rien de solutionné à leur égard. Vous avez connu les problèmes survenus dans le passé concernant les mécaniciens d'ascenseur. Depuis 50 à 60 ans

ces gens vivent avec une négociation et avec les salaires qu'ils ont toujours eus et qui leur ont toujours été accordés en négociation. C'est ce qu'on appelle chez nous des droits acquis et c'est ce qu'ils voulaient discuter et négocier.

Il y aurait peut-être eu des modifications, lors de ces discussions, à ce qui se produisait dans le passé. Forcément, je peux vous dire que les unions des mécaniciens d'ascenseur étaient très ouvertes à la discussion. Elles étaient très conscientes aussi de la loi à laquelle elles avaient à faire face. Malheureusement, on ne leur a pas donné la chance. On les a restreintes à l'intérieur d'un document général et c'est la raison pour laquelle vous trouvez la lettre à l'intérieur du fameux décret.

Cette lettre n'a pas été pondue simplement pour dire: On fait plaisir à quelqu'un et on met une lettre. Elle a été mise là parce qu'à la suite de ces discussions de ces cinq jours on a réalisé qu'il était impossible de trouver dans un si court délai des solutions pour les mécaniciens d'ascenseur. Donc, nous avons dit, pour ne pas arrêter le processus, étant donné que nous sommes sur la voie de nous entendre, on va établir à l'intérieur une lettre d'entente, lorsque le décret sera publié. Vous avez 30 jours de publication et, après, la promulgation; d'ailleurs cela a duré plus longtemps, ils auraient eu le temps de s'asseoir et discuter.

Durant ce temps les gens s'assoiront et essayeront de trouver une solution, ce qui n'a pas été fait car on les a empêchés de le faire. Donc, le problème reste entier concernant les mécaniciens d'ascenseur. Quand on mentionnait tantôt que les travailleurs sont retourné au travail, l'AECQ ne leur a pas demandé. C'est vrai, croyez-moi. Par contre, le ministre m'a quand même écrit une lettre me demandant d'intervenir personnellement auprès des mécaniciens d'ascenseur, en nous informant que nous allions pouvoir en discuter comme nous le faisons ici en ce moment, en avisant les mécaniciens d'ascenseur que les conditions de travail et toutes les conditions qu'ils obtenaient lorsqu'ils ont été en grève étaient pour être maintenues. C'est avec cette lettre et ces informations que les mécaniciens d'ascenseur ont tenu leur assemblée générale et ont pris la position de retourner au travail.

Je peux vous dire en passant qu'à ce jour, les méchants mécaniciens d'ascenseur, si on peut dire, avaient des conditions de travail qu'ils ont perdues, même si on a une lettre du ministre qui confirme qu'elles doivent être maintenues — on a envoyé des télégrammes à cet effet, mais encore là on attend le déroulement de tout ce processus. Comme vous le voyez, ils continuent à travailler et tout va passablement bien. Par contre, le problème, au lieu d'être solutionné, en partie, s'aggrave de jour en jour.

Les employeurs leur payaient des conditions qu'on ne retrouve pas à l'intérieur du décret. Donc, ces gens, même avec ce qu'on a par écrit provenant du ministre, ont des conditions inférieures à ce qu'ils avaient avant de partir en grève.

Alors, imaginez-vous la situation à laquelle nous avons à faire face dans le moment. Donc, le problème est entier, il n'est pas solutionné. Il y a forcément le problème de l'apprentissage, le problème salarial, et le problème de la juridiction à l'intérieur de cela, le problème de la préfabrication, le problème des avantages sociaux, donc, c'est un problème total, ce n'est pas compliqué. Si on avait quand même laissé aux gens la possibilité de discuter, je suis persuadé qu'on aurait quelque chose à vous présenter aujourd'hui pour vous demander de rendre cette entente, de l'intégrer à l'intérieur du décret.

Le médiateur spécial qui avait été nommé, M. Larouche, a mentionné à plusieurs occasions, dans son rapport, qu'il devrait y avoir des rencontres entres les employeurs des salariés concernés et l'union concernée. Chez nous, ce n'est pas un problème. Concernant la négociation pour les mécaniciens d'ascenseur, ce sont les locaux 89 et 101 qui négocient au nom des mécaniciens d'ascenseurs. Mais, dans le rapport de M. Larouche, je voudrais qu'il vous soit lu, au moins ces parties du rapport, c'est très clair qu'on demande qu'il y ait des négociations avec les employeurs des salariés concernés. J'espère que c'est clair, ce que je dis, et que je me fais comprendre. Ce sont ceux qui emploient les mécaniciens d'ascenseurs, ceux qui payent les salaires des mécaniciens d'ascenseurs.

Donc, à l'intérieur du rapport, c'est ce qu'on retrouve à une multitude d'endroits concernant la négociation, les programmes d'apprentissage, les avantages sociaux et ainsi de suite. Ce sont un peu les faits survenus dans le problème des mécaniciens d'ascenseurs et malheureusement, pour le moment, aucune solution ne semble nous être proposée.

Je peux dire quand même que les mécaniciens d'ascenseurs ont présenté une demande très claire et nette au ministère concernant leur problème et ce sera au ministère de décider des positions qu'il pourra prendre à cet effet.

Donc, messieurs... Parfait, donnez-lui la parole, on continuera après.

Le Président (M. Marcoux): M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Etant donné qu'on est ici pour vider la question... on a relevé certains points. On dit, entre autres, que dans le rapport du conciliateur, il est fait mention que des employeurs pourraient se substituer à l'AECQ qui est reconnue par la loi. Ce n'est pas ça du tout. Je l'ai ici le rapport du conciliateur. Cela dit que sur les clauses non négociables — on a mentionné la préfabrication, la juridiction de métier et le règlement no 1 — sur les clauses qui ne sont pas négociables, pas couvertes par le décret, celles qu'on ne voulait pas négocier, il est mentionné: "Que les parties en cause — c'est-à-dire nous autres, plus le conseil — ou le cas échéant que les employeurs des membres de l'union ou de ladite union adressent conjointement ou séparément, à leur discrétion, les représentations qu'ils veulent faire relativement à la loi", c'est ça qui est écrit. Alors, il ne

faut pas charrier. Maintenant, je pense qu'il est important ici pour tout le monde, parce que le problème des mécaniciens d'ascenseurs, c'est quelque chose d'assez complexe...

Vu que, ce matin, on a dit qu'il faudrait avoir tout le cadre, on serait mieux de l'avoir, tout le cadre. Dans le moment, au niveau des...

M. Dumoulin: M. le Président, je me suis fait couper la parole tantôt et j'aimerais mentionner quelque chose. Avant qu'on sorte des textes et qu'on parle simplement d'un paragraphe, je voudrais qu'on soumette le texte ici et qu'on le regarde, parce que vous n'avez qu'une partie du texte et ce n'est certainement pas ça qu'on voit dans tout le texte du rapport du conciliateur ou du médiateur spécial, M. Larouche.

M. L'Heureux: En tout cas, cela a été adressé au ministre Couture et je ne pense pas que ce soit un document secret.

M. Dumoulin: Non, il n'y a rien de secret là-dedans, mais on ne charriera pas non plus.

M. L'Heureux: Dans le domaine des mécaniciens d'ascenseurs, M. le Président, il existe au niveau des employeurs trois groupements. D'abord, celui des manufacturiers qui regroupe cinq compagnies, dont trois principales que j'ai mentionnées tout à l'heure, ensuite celui de ceux qu'on appelle les "installeurs" et enfin celui des gens regroupés dans la CSD, c'est-à-dire les gens employés par la compagnie Labadie et la compagnie Drolet. Il existe trois groupes au niveau des employeurs. Notre sous-comité était formé de membres de ces trois groupes.

Les gens qui négociaient cet automne étaient uniquement les gens du groupe des manufacturiers. A ce moment — encore là, je m'excuse de relever le rapport de la commission Cliche — c'est assez évident ce qu'on dit dans ce rapport à propos de la connivence qui a pu exister entre certains employeurs et certains groupements syndicaux. C'est ce qu'on voulait éviter. Alors, on a empêché justement une minorité d'imposer sa loi à une majorité. C'est ça qu'on a fait.

Maintenant, on nous dit que le document qu'on négociait aurait servi de base à une entente.

Je vous soumets qu'une des compagnies qui était là à ce moment-là, la compagnie Otis, était à notre comité et c'est son document, sa présentation d'octobre dont on s'est servi le 1er février, pour le remettre à la partie syndicale. A la demande de la partie syndicale, c'était strictement le "national agreement". Ce qui existait dans le décret auparavant, ce n'était pas important pour cette compagnie.

Je dois encore vous souligner que les trois groupements d'employeurs ne se comportent pas de la même façon. Les installeurs, c'est-à-dire des compagnies qui ont poussé en 1973, ce qu'on appelle les gens qui ne fabriquent pas mais qui oeuvrent dans le domaine de la construction, à installer et aussi, à faire de l'entretien, ces gens-là payaient des taux supérieurs aux taux du décret et respectaient aussi toutes les clauses du "national agreement", qui était quelque chose d'illégal, qui est maintenant reconnu comme illégal; tout ce qui diffère de notre décret maintenant est un minimum et un maximum. C'est cela, l'histoire de l'article 17.01.

Ces gens étaient dans l'illégalité depuis trois ans. Un groupe, celui qui installait, payait les taux plus élevés, les taux du "national agreement", qui étaient fixés par Ottawa pour Québec et par Toronto pour Montréal, payait ces taux et respectait toutes les autres clauses du "national agreement", qui étaient illégales, sans que personne ne s'en occupe. L'office ne s'en est pas occupé et personne ne s'en est occupé.

Un deuxième groupe, celui des manufacturiers, ne respectait pas les termes du "national agreement", mais payait les salaires et payait aussi, jusqu'à un certain moment, les avantages sociaux qui étaient supérieurs à ceux du décret.

Un troisième groupe, le groupe de la CSD, respectait intégralement notre loi, c'est-à-dire qu'il payait les taux du décret et respectait les termes du décret.

A ce moment-là, nous, à l'AECQ, on nous défiait d'essayer de faire un certain consensus du monde patronal. C'est ce qu'on a fait. Ces gens se sont tous ralliés à l'intérieur d'un comité qu'on a formé à l'AECQ, et on a essayé de mettre de l'ordre là-dedans. Il n'y avait aucun ordre, là-dedans. A certains moments, le gouvernement avait même abandonné l'émission de cartes à un représentant syndical. Il n'y avait rien, c'était le bordel le plus complet.

On a essayé l'hiver dernier de faire une certaine unité à travers le monde patronal et on a réussi. Il s'est fait une unité. A ce moment-là, on s'est servi d'un document de base qui, prétend-on maintenant, aurait pu servir d'entente mais qu'éventuellement, n'a pas servi d'entente; on s'est servi de ce document pour faire notre présentation. On a fait cette présentation. On nous dit maintenant...

On peut la lire, la lettre d'entente, elle est assez explicite: "Les parties conviennent dans les plus brefs délais — on ne dit pas après le décret, ceci était en octobre —-d'examiner la situation particulière des mécaniciens d'ascenseurs, en vue de s'entendre sur les dispositions particulières applicables à ces derniers. Ces dispositions seront incorporées à l'entente en vue de leur extension par voie de décret. "Toutefois — parce qu'on prévoyait qu'on pouvait s'entendre sur une partie avant la publication du décret — s'il y a publication du décret dans la Gazette officielle du Québec avant que les parties n'aient convenu, de façon complète et finale de ces dispositions, cette publication du décret devra comprendre les dispositions particulières à ces salariés et ayant déjà fait l'objet d'une entente reconue par le conseil et l'association."

Je vous soumets, M. le ministre, qu'à l'intérieur de ce décret, il y a au moins sept ou huit clauses qui sont particulières aux mécaniciens d'ascenseurs; que ce décret a été signé par M. Lamontagne; que ce décret a été initialé par M.

Dumoulin; qu'il comprend une foule de clauses, entre autres sur les avantages sociaux. Il est mentionné là-dedans que les parties s'entendent pour former un comité, pour étudier de rapatrier les avantages sociaux à l'intérieur de notre système au Québec, pour que ces gens puissent voter pour un autre syndicat, à un moment donné, s'ils choisissent de le faire, parce que, dans le moment, ils ne peuvent pas, ils perdent leur pension.

C'est tout cela qu'on a là-dedans. Cette lettre, on l'a signée et on l'a signée de bonne foi. On était d'accord qu'il fallait faire un certain ménage dans les taux. Il y avait des gens qui payaient $9.69 et il y en avait d'autres qui payaient $11.82, en passant par $10.05, ceux qui avaient été rabattus, comme la compagnie Montgomery, par la loi anti-inflation.

Ce qu'on a essayé de faire, c'est de faire un ménage là-dedans. C'est cela qui a conduit à la clause de Red Seal, à 18.01, où on gelait les taux aux taux en vigueur au moment de la publication du décret, afin d'essayer d'avoir une certaine concordance des taux pour que les gens, à un certain moment, fassent le même taux.

Ce qu'on nous reproche maintenant, ce n'est pas d'avoir négocié. On a négocié, on les a rencontrés, ces gens-là. Il y a un M. Peoples qui était mandaté, et c'est avec lui qu'on a négocié. Ce qu'on nous reproche, c'est de ne pas avoir accepté la convention nationale, c'est de ne pas avoir accepté de négocier la préfabrication qui est maintenant défendue à cause de l'étiquette syndicale dans notre loi, c'est de ne pas avoir accepté de négocier le système d'apprentissage qui, pour eux, est un système de compagnon, qui peut être apprenti une journée ou aide une autre journée. Ce sont des choses que c'est vrai qu'on a refusé de négocier, parce qu'on a refusé de négocier la loi.

C'est cela qu'on nous reproche. Si c'est le cadre pour essayer d'obtenir des concessions, si le ministre veut substituer la partie patronale, comme il l'a fait dans sa lettre, pourquoi? On nous dit ici que les gens d'ascenseurs sont des gens particuliers. Dans votre lettre, vous reconnaissez que ces gens ont droit à un régime particulier. J'ai certains commentaires que je me permets de vous soumettre.

Lorsque le ministre a demandé aux parties de modifier la convention collective, corriger certains points légaux, l'AECQ a demandé...

Lors de la signature de la convention collective, le conseil provincial et l'AECQ ont accepté, dans une lettre d'entente, que les négociations continuent dans le domaine des ascenseurs afin de ne pas empêcher la conclusion d'une convention pour les autres métiers.

Pendant ces négociations, l'Union internationale a déclenché une grève légale qui a pris fin suite à une lettre du ministre promettant le maintien des anciennes conditions de travail et invitant cette même union à se faire entendre devant la commission. C'est le ministre qui a dit cela, non pas la partie qui négociait avec eux.

Dans sa lettre, le ministre dit ceci: "Je m'empresse d'ajouter que je considère la situation très particulière des mécaniciens d'ascenseur parmi les différents métiers de la construction et qu'elle doit être réévaluée".

Qu'a-t-elle de si particulier la situation des mécaniciens d'ascenseur? La situation de 200 mécaniciens d'ascenseur affiliés à la CSD est-elle particulière, elle aussi? Est-ce la situation de l'Union internationale des mécaniciens d'ascenseur qui est particulière ou la situation des salariés? Il n'y a que 600 compagnons de mécaniciens d'ascenseur, au Québec, c'est vrai. Il y a aussi 350 serruriers de bâtiment, 600 calorifugeurs, 900 mécaniciens de chantier et 11 000 électriciens et 40 000 journaliers.

Il n'y a qu'une trentaine d'employeurs dans le domaine des ascenseurs, c'est vrai. Il y a aussi une trentaine d'employeurs calorifugeurs, une dizaine d'employeurs en pilotis et une quinzaine d'employeurs en transport d'énergie.

Il est important que les ascenseurs fonctionnent correctement, c'est exact et cela donne un outil de chantage fort efficace. L'union internationale rejette le système québécois des relations de travail et veut appliquer le "national agreement" à ses membres du Québec. C'est une particularité importante. Elle consiste à désobéir aux lois du Québec sans être puni, à ridiculiser notre système et tenter ainsi de s'en faire exclure.

Le résultat de l'application du "national agreement".

Les salariés du Québec sont régis par une convention négociée en Ontario; Montai $0.10 de moins que Toronto, Québec $0.10 de moins qu'Ottawa, etc.

L'union internationale utilise la violence pour arriver à ses fins. C'est là une particularité explicitée par la commission Cliche. C'est bien connu que le risque de violence peut rendre une situation bien particulière dans le domaine des relations de travail.

M. Dumoulin: M. le Président...

M. L'Heureux: Est-ce que je peux terminer?

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez une...

M. Dumoulin: Oui, j'ai quelque chose, une question à poser.

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre! Oui.

M. Dumoulin: J'aimerais savoir si on va essayer de citer la commission Cliche, parce qu'on est ici pour discuter des possibilités d'amendement...

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse, je vous interrompis.

M. Dumoulin: ...aux modifications au décret.

Le Président (M. Marcoux): Je pense que M. L'Heureux est dans le sujet et que cela répond aux questions qui ont été soulevées par le ministre.

M. Dumoulin: D'accord, M. le Président, on fera la même chose à notre tour.

M. L'Heureux: Les mécaniciens d'ascenseur sont les plus hauts salariés de la construction avec un salaire rapporté moyen, en 1975, de $17 117. Le compagnon mécanicien d'ascenseur a effectivement une situation particulière. Cela est extrait du rapport de l'office.

Il faut vous dire qu'à la fin de 1975, le salaire de $17 000 était basé sur un salaire horaire de $8.58. A la fin de 1978, il sera de $12.17. La compétence technique du mécanicien d'ascenseur est-elle particulière, vu qu'il est particulier?

Il faudrait le demander, entre autres, aux tuyauteurs d'instrumentation, aux techniciens en réfrigération, aux électriciens spécialisés en panneaux électriques industriels ou aux mécaniciens de machinerie lourde.

Si le travail n'est pas fait sérieusement, il y a danger pour le public. Parlez-en au boutefeu, à l'opérateur de grue à tour ou à l'électricien.

Nous, M. le ministre, ne partageons pas votre idée. Ce n'était pas notre intention de donner un statut particulier aux mécaniciens d'ascenseur, on ne vous reconnaît pas aucun droit pour promettre en notre nom aux mécaniciens d'ascenseur des ententes en commission parlementaire, pas plus qu'aux autres métiers qui n'ont pas obtenu ce qu'ils voulaient après une grève. Ce sont les points. Je pense que c'est important qu'on connaisse le contexte et la situation des mécaniciens d'ascenseur et on est ouvert à toute discussion.

On a envoyé une lettre, le 4 mai, à M. Couture. Elle n'est pas tellement longue. Elle est très explicite, parce que le ministre nous disait dans quelle condition les mécaniciens d'ascenseur retournaient au travail. On a précisé ce qu'on disait à nos employeurs, pour ne pas qu'il n'y ait d'ambiguïté. "M. le ministre, nous avons reçu votre lettre du 20 avril 1977 et nous désirons y apporter les commentaires suivants, quant aux conditions de retour au travail dont il y est fait mention. "Nous avons d'ailleurs rencontré, M. Réjean Larouche, le 21 avril dernier, afin de lui préciser notre pensée sur le sujet. L'AECQ a recommandé à ses membres: "Premièrement, que les taux horaires de salaires payés aux salariés la journée précédant soient maintenus, le tout conformément à l'esprit de l'article 1801 — maintenant 1701 — paragraphe 1, de la convention collective signée le 22 décembre. "La compagnie Montgomery fait exception à cette règle. L'AECQ leur recommande de maintenir les taux qui étaient payés au 1er décembre; à cause du jeu de la loi anti-inflation. "Deuxièmement, que la participation patronale au Canadian Elevator Industry Welfare and Pension Plan soit maintenue par les employeurs qui y participaient la journée précédant la grève, le tout conformément à l'article 29.04 de cette même convention collective. "Troisièmement, en ce qui a trait à toutes les autres conditions de travail, les clauses du décret étant obligatoires, les employeurs et les salariés devront s'y conformer. Nous vous remercions des efforts déployés dans ce dossier. Nous vous prions, monsieur, d'agréer l'expression de nos sentiments."

Alors, c'est la position de l'AECQ, en autant qu'on est concerné. La négociation a eu lieu.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Nicolet-Yamaska.

M. Fontaine: Est-ce qu'on pourrait demander au président de l'AECQ de déposer les deux lettres, celles du 20 avril et du 4 mai pour que les membres de la commission puissent en prendre connaissance?

M. L'Heureux: C'est la seule qu'on a, mais on peut vous en faire faire des photocopies.

M. Fontaine: On a un service ici qui peut en faire.

Une Voix: Le 4 mai et l'autre?

M. Fontaine: Le 20 avril.

Le Président (M. Marcoux): M. Dumoulin.

M. Dumoulin: Si j'ai bien compris M. L'Heureux de la partie patronale, on s'entend sur une chose. Il n'y a vraiment pas eu d'entente au niveau des mécaniciens d'ascenseur. Si j'ai bien compris ce qu'il a dit, c'est ce qu'il a dit. Il n'y a vraiment pas eu d'entente à l'intérieur de cela. On retrouve certaines clauses des mécaniciens d'ascenseur, mais on ne s'est pas entendu sur ces fameuses clauses. Lorsque j'ai mentionné tantôt qu'il y avait des conditions inférieures aux conditions que les mécaniciens d'ascenseur avaient avant la grève, on a omis de parler des vacances des salariés, mécaniciens d'ascenseur qui, eux, ont 12% de vacances au lieu de 10%. On les a baissé à 10%. Je comprends que sa lettre peut peut-être mentionner les questions salariales ou les questions d'avantages sociaux, mais les vacances, ils ont omis de les mentionner. En somme, tout cela pour dire que ce qui a été dit du côté patronal, je pense que cela réflète un peu ce qu'on a dit, que définitivement, il n'y a pas eu d'entente. La négociation qu'il y a eu à l'intérieur de ce métier, n'a vraiment pas été réelle en fait de négociation. On vous a mentionné tantôt qu'il y avait eu une lettre d'entente, qu'il y avait eu une approche au niveau des employeurs des mécaniciens d'ascenseur et qu'il semblait y avoir un débouché favorable pour trouver une solution, mais qui a été brisé là par un genre de dictature de l'association patronale, les informant que c'est moi, "me, myself and I" qui vais négocier et ôtez-vous. Le seul problème que vous avez, c'est de payer. Vous paierez ce qu'on vous dira de payer. Je crois cela complètement anormal d'avoir des situations comme celles-là, surtout lorsqu'on retrouve les gens impliqués, intéressés à discuter. Là, je ne veux pas commencer à relater les positions qu'on peut avoir eues dans

une commission Cliche et de traiter les mécaniciens d'ascenseur un peu de bandits camouflés, comme il a été mentionné tantôt.

On va essayer d'être calmes à ce niveau, mais je tiens à relater cela. On n'est pas ici pour discuter de la commission Cliche. On a été convoqué pour discuter des modifications qui peuvent être apportées au décret. Je comprends qu'il y a peut-être une procédure parlementaire. J'ai posé une question tantôt. Cela fait huit mois qu'on entend parler de cela. On commence à connaître cela par coeur. Pas huit mois, un an et demi, en tout cas, cela fait pas mal longtemps. Tout de même, pour vous dire que définitivement, je pense qu'encore une fois, à ce niveau on se comprend. Il n'y a vraiment pas eu d'entente. Les mécaniciens d'ascenseurs, on les considère simplement comme faisant un métier microscopique à l'intérieur des métiers de la construction, mais qu'on mentionne 500 à 600 salariés, on s'aperçoit, par contre, parce qu'il y a une grève à ce niveau, que c'est quand même quelque chose d'extraordinaire. C'est quelque chose à un moment donné, il y a vraiment des problèmes à l'intérieur de certains édifices. Je pense que cela mérite vraiment de le regarder, au lieu de le lancer du revers de la main et de dire: C'est négocié, messieurs. Ce sont les conditions que vous allez avoir. On peut le faire. On peut le dire. On peut l'écrire. Ce n'est pas vrai, à un moment donné, que ces gens vont accepter de ne pas pouvoir discuter et de trouver une solution. C'est ce qu'on a cherché à faire. On a travaillé jour et nuit. On a rencontré des gens à tout bout de champ. On a été disponible en tout temps. On a eu des appels du ministère, une rencontre ici et une rencontre là, on a rencontré ces gens tout le temps, messieurs. On a expliqué le problème à chaque fois. Je sais que ces gens ont fait des rapports au ministre. Je pense que ces rapports, même si c'était fait par différentes gens, c'étaient des rapports similaires tout le temps.

C'est un problème très particulier, même si on mentionne que, pour les mécaniciens d'ascenseur: je ne vois pas grand-chose de particulier là-dedans. Je tiens à vous mentionner que 85% de ces gens font de la maintenance. Vous devez sans doute le savoir. Des édifices à étages, on n'en bâtit pas tous les jours de ce temps-là. On n'a pas fusillé les mécaniciens d'ascenseur, ils sont encore là. Vous en avez ici, à l'hôtel Hilton. Vous en avez ailleurs. Ces gens font de la maintenance 85% du temps qu'ils travaillent. Donc, au départ, disons qu'il y a quand même une sérieuse lacune au niveau des mécaniciens d'ascenseurs par le biais de la loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction. Ce sont des choses à regarder très sérieusement et moi, je reste convaincu, et j'espère que vous allez nous poser des questions pour vous éclairer, que les mécaniciens d'ascenseur, c'est un cas extrêmement particulier, et très particulier, messieurs. D'ailleurs, on l'a mentionné tantôt, ils sont peut-être microscopiques, mais ils sont peut-être assez efficaces, aussi. C'est un méchant problème, et ce qui a été dit tantôt par notre conseiller juridique, c'est qu'avant la venue du bill 290, les mécaniciens d'ascenseur ne faisaient pas de grève. Depuis la venue du bill 290, on est en grève depuis ce temps. Pour les mécaniciens d'ascenseur, cela a duré plus longtemps à certains moments, et dans tous les autres métiers, c'est une grève par-dessus l'autre. On cherche la solution définitive. On ne cherche pas l'affrontement, et on ne voudrait pas non plus que la partie opposée, l'association patronale, fasse des provocations et que ce soit un affrontement.

Messieurs, on est ici de bonne foi. On est ici pour trouver la solution et essayer de régulariser ça pour qu'il y ait des conditions de travail saines dans l'avenir dans l'industrie de la construction. Donc, il faut se pencher sérieusement sur le cas des mécaniciens d'ascenseur. C'est sûrement un problème particulier. Je le répète souvent parce que c'est vrai, et vous êtes sans doute informés de ça, à cause de tout ce qui s'est passé depuis nombre d'années.

Me Décary aurait quelques mots à dire si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre avant.

M. L'Heureux: Seulement quelques mots. M. le Président, je vais laisser la parole à M. Décary, mais, écoutez! Il y a quatre petits points que M. Dumoulin a mentionnés dans son intervention que j'aimerais soulever. Mais je vais rester simplement dans les limites de cette discussion. Je vais laisser M. Décary répondre.

M. Décary: Brièvement, deux exemples. Il y a une interdiction dans la loi, selon laquelle il ne peut y avoir de clauses dans la convention collective concernant la manutention, l'installation de matériaux. Autrement dit, tous les travailleurs de la construction doivent poser tous les matériaux. Dans le cas des mécaniciens d'ascenseur, cela implique qu'on va pouvoir bêtement incorporer à un édifice toute une installation, toute faite, sans qu'ils puissent rien dire. L'approche des mécaniciens d'ascenseur n'a pas été de dire: On va négocier la manutention ou l'installation, mais plutôt de dire: On va essayer de s'entendre sur les effets causés par les changements technologiques. Est-ce qu'il y a moyen d'avoir une clause qui va nous assurer, certains droits? Si, bêtement, on se met, du jour au lendemain, à installer des élévateurs préfabriqués, ça implique un grand nombre de mises à pied; donc, ayez donc une clause dans la convention collective concernant les changements technologiques. Là-dessus, je veux simplement vous rappeler qu'au code fédéral, c'est un standard. On n'a pas à le négocier. Il y a un minimum imposé par la loi dans le cas de changements technologiques, dans la plupart des provinces canadiennes... Je vois que le ministre du Travail veut, d'ailleurs, dans des conditions minimales, incorporer certains changements. Sans doute y verra-t-on certains articles concernant les effets des changements technologiques. Tout ce qu'on voulait négocier, c'était ça. Cela a été refusé.

Enfin, je ne veux pas abuser de votre temps. Je voulais simplement souligner que j'aurais beaucoup d'exemples à donner. Je ne veux pas abuser.

D'autre part, simplement une réplique. On parle beaucoup du rapport Cliche et de ses effets dans l'industrie de la construction. Je voudrais vous rappeler deux phénomènes. Le premier: la dernière campagne de maraudage. Il n'y a pas eu un incident, pas un assaut, pas une intimidation. Il n'y a eu aucun incident. Les gens sont allés voter en paix. Deuxième remarque: Dans la dernière grève qui a duré extrêmement longtemps, dans certains cas jusqu'au mois de décembre, là encore, à ma connaissance — les journaux sont là pour vous fournir les renseignements — il y a eu très peu de cas, et les quelques cas, le plus grand nombre de cas, ce sont des cas où les employeurs ont utilisé des...

Il y a eu très peu de cas donc de violence. Depuis le rapport Cliche, je voudrais que vous soyez conscients que, sur des phénomènes très particuliers de l'industrie de la construction, il y a eu assainissement et qu'une fois pour toutes, on commence à voir de façon positive ce qui se fait; quant aux autres problèmes qui sont là, qui existent, qu'on essaie donc de trouver des solutions plutôt que de faire l'autruche.

Le Président (M. Marcoux): M. L'Heureux.

M. L'Heureux: Je vais me limiter simplement à certains points. M. Dumoulin a dit qu'à l'intérieur de la convention collective, qui est maintenant le décret, il y avait des clauses particulières aux ascenseurs sur lesquelles on ne s'était pas entendu.

Encore là, je dois vous dire que la lettre d'entente a été signée le ou vers le 15 octobre, que la convention collective a été signée le ou vers le mois de décembre, qu'à ce moment-là, M. Dumoulin a paraphé chacune des clauses des mécaniciens d'ascenseur tandis que M. Lamontagne, le président, les a signées. Alors, jusqu'où peut-on charrier en disant: On ne savait pas ce qu'on faisait? Je ne le sais pas.

Deuxième point. On dit que les mécaniciens d'ascenseur avaient 12% et qu'on a oublié cela. On n'a pas oublié les 12%. Les 12% étaient payés simplement en fonction de la convention qui était illégale. Ils n'étaient pas payés aux gens de la CSD, qui étaient des mécaniciens d'ascenseur. Ils ont eu 10%. On ne les a pas oubliés, mais on a dit: 10%, c'est ce que tout le monde a dans la province de Québec et cela sera 10%. Alors, on ne les a pas oubliés. On le savait, mais c'était une convention qui était illégale dans la province de Québec, comme je l'ai expliqué tout à l'heure.

On a mentionné, encore là, que le comité patronal, que l'AECQ s'est substituée au patron. Encore là, je dois dire que c'est faux. Notre comité patronal regroupait non seulement tous les employeurs qui emploient les gens de l'union internationale, mais aussi les deux employeurs qui emploient les gens de la CSD. C'est pas mal plus que ce qu'on avait vis-à-vis de nous.

On a parlé aussi naturellement de la préfabrication. Monsieur a mentionné que, dans la préfabrication, en fait, ce n'était pas une clause, on a parlé simplement de changements technologiques. C'était cela leur demande. J'ai ici la demande de la partie syndicale et, d'ailleurs, cela se retrouve à l'intérieur du rapport du conciliateur. D'abord, c'est tout écrit en anglais. Vous avez "Work Jurisdiction". Ce ne sont pas des changements technologiques. Vous avez une description de tous les trous qui sont faits dans toutes les "plates". Vous avez aussi le "System modular and Industrial structures". Vous avez encore cela. Ce ne sont pas des changements technologiques. On y dit que s'il faut poser un boulon dans une "plate", même si on n'en avait pas besoin, ces gens ont le droit de le poser. C'est ce qui est écrit là-dedans. Encore là, on peut vous soumettre cela, mais il faut parler anglais pour le savoir.

M. Dumoulin: On va vous le traduire en français.

Une Voix: Ne nous insultez pas.

M. L'Heureux: On peut se comprendre, mais je voulais être bien certain...

Le Président (M. Marcoux): On peut citer tout le texte en anglais. Vous pouvez parler en anglais également.

M. L'Heureux: M. Décary a mentionné en dernier lieu qu'il faut reconnaître et, d'ailleurs il l'a souligné, et je pense qu'on est d'accord, que la période de maraudage a été paisible, toutes proportions gardées, à comparer à ce qui existait auparavant et que, l'an dernier, il y a eu une grève paisible. Maintenant, pour quelle raison était-ce paisible? Je ne le sais pas, mais je dois reconnaître avec lui que c'est vrai, que la grève, l'an dernier, a été paisible, a été civilisée, et qu'on s'en est tenu à des moyens de pression reconnus à l'intérieur de la loi. Alors, comme vous le voyez, quand on a à rendre à César ce qui lui est dû, on le lui rend, mais pour les autres...

Cela termine mes interventions.

Le Président (M. Marcoux): Le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. Couture: Je suis très heureux d'entendre ces dernières paroles. Cela augure bien pour l'esprit qui doit nous animer. Je rappellerais simplement que nous ne négocions pas ce soir, ni aujourd'hui, ni demain, ni après-demain, si on se rend jusqu'à après-demain. Nous entendons les parties et, en écoutant depuis un certain temps les parties sur le problème des mécaniciens d'ascenseurs, le moins qu'on puisse dire est qu'il y a effectivement des problèmes et que c'est la responsabilité du ministre d'en tenir compte, d'autant plus qu'il y a eu une grève qui manifestait clairement une insatisfaction profonde. Il y a eu présence d'un médiateur qui a produit une série de

recommandations. Comme l'expiration du délai, parce qu'il y a eu promulgation du décret, l'extension de la convention collective a, à toutes fins pratiques, mis fin à ce rapport de force, je pense que c'est notre responsabilité.

C'est la promesse que j'avais faite aux mécaniciens d'ascenseur d'entendre leurs représentations pour éclairer le ministre, pour voir si, oui ou non, les problèmes qu'ils soulèvent sont réels et, selon le pouvoir qui est accordé au ministre en vertu de l'intérêt public, si vraiment le ministre doit prendre telle ou telle orientation. Simplement, ce que je voudrais quand même signaler, c'est qu'on s'aperçoit dans ce problème complexe — parce qu'il est complexe — des mécaniciens d'ascenseur, qu'il y a des choses qui reviennent souvent, c'est le principe des droits acquis et cette situation dite particulière. J'admets très bien avec M. L'Heureux qu'à ce point de vue là on pourrait peut-être identifier plusieurs situations particulières dans le secteur de la construction, mais le fait d'identifier un secteur en particulier ne préjuge pas du jugement qu'on pourrait avoir sur les autres secteurs, sauf que la force des récriminations ou l'accumulation des représentations pour tel ou tel problème nous indiquent au moins que c'est plus particulier qu'ailleurs. Je pense qu'il ne faut pas être figé dans le passé. Je dois dire que je n'accepte pas qu'on puisse toujours revenir au passé pour faire des procès d'intention. Je crois que, dans notre société actuelle, dans notre système des relations de travail, ce qu'on doit souhaiter avant tout, c'est que l'analyse d'une situation doit jusqu'à preuve du contraire préjuger en faveur de la bonne foi des parties. A ce point de vue-là, je ne retiens pas les procès d'intention du passé.

Ceci dit, je veux signaler aux membres de la commission que nous ne sommes pas ici pour négocier, mais pour entendre les parties. Si certains membres ont besoin d'éclaircissements sur le problème des mécaniciens d'ascenseur, c'est le lieu de le faire, et c'est simplement dans le but de mieux comprendre leurs problèmes. Il restera quand même au ministre, au gouvernement, d'apprécier la justification de telle ou telle demande.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, dans la thèse développée par M. Dumoulin, par rapport à celle... Si j'ai bien compris les débats, M. L'Heureux a essayé de situer le cadre dans lequel s'est déroulée la négociation. M. Dumoulin soulève d'autre part des problèmes spécifiques qu'a eus le groupe des mécaniciens d'ascenseur et les points de divergence qu'il a par rapport au secteur de la construction. La question que je voudrais lui poser est: Est-ce que ce n'est pas plutôt au niveau de l'amendement à la Loi régissant les conditions de travail dans l'industrie de la construction que l'on pourrait éventuellement régler les problèmes des mécaniciens d'ascenseur, tout comme, par exemple, les monteurs de ligne, qui se sentent plus ou moins heureux à l'intérieur d'un décret, qui sont sous contrat avec l'Hydro-Québec, et qui sont malheureux quand ils arrivent dans le décret? Je vous pose la question bien clairement, parce que votre argumentation a porté sur des spécificités et ils semblent extrêmement malheureux à l'intérieur de cette structure. Il y a toute la question de "Armour Agreement" que vous soulevez, bien sûr, qu'on a appelée "national agreement" qui représente, je pense, $1 ou $1.10 de différence. C'est peut-être moins que cela présentement.

M. L'Heureux: Ce n'est pas seulement le salaire, ce sont toutes les conditions qui sont différentes.

M. Chevrette: Je sais, mais je ne veux pas aller dans le détail de la question. Je voudrais entendre M. Dumoulin. Votre argumentation m'a porté à penser que c'était une question législative plutôt qu'une question de décret. Cela s'est peut-être transposé au niveau des négociations, parce qu'ils n'ont pas pu être à une table centrale comme les autres corps de métier et ils ont écopé de cette anomalie, mais est-ce que ce n'est pas plutôt au niveau de la législation qu'on pourrait régler éventuellement cela?

M. Dumoulin: M. le Président, à ce niveau, on peut répondre certainement que le conseil provincial n'a aucune espèce d'objection à ce que — je vais le dire très clairement — les mécaniciens d'ascenseur ou que les monteurs de ligne, à un moment donné, soient exclus de la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction.

On n'a aucune objection. Lorsque vous parlez du "Armour Agreement" ou des conditions de travail, c'est vrai qu'il devrait y avoir de plus amples explications ou des débats peut-être plus longs, mais, certainement, au niveau des avantages sociaux des mécaniciens d'ascenseur, advenant le fait qu'on intégrerait demain matin, les gens à l'intérieur de ce qu'on retrouve dans le décret, on se trouverait à pénaliser un plan d'avantages sociaux au niveau national qui tomberait sur le dos. Ces gars perdraient ce à quoi ils ont contribué depuis nombre d'années. Ce que vous mentionnez, c'est vrai qu'à un moment donné c'est à l'intérieur de la législation, et on peut se dire d'accord, le conseil provincial, à savoir que ces gens ne soient pas régis par la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction. Ce serait peut-être la seule solution vraiment valable pour retrouver la possibilité de régler leur problème qui dure depuis nombre d'années.

M. Chevrette: Monsieur, pourrais-je aussi connaître l'opinion de la partie patronale?

M. L'Heureux: M. Couture a fait une intervention au niveau des droits acquis en ce sens qu'on ferait perdre des droits acquis. Il ne faut pas charrier. Ce sont des droits qui ont été acquis en vertu d'une convention que vous appelez le "Armour Agreement", et nous le "National Agreement", qui était une convention illégale dans la province de Québec. Si ce sont là des droits acquis, on est pris

avec un paquet de "National Agreements" pour beaucoup d'autres secteurs. Si on veut rentrer là-dedans, on peut ouvrir la canne de verre.

M. Dumoulin: M. le Président, au niveau de l'illégalité des conditions payées, avant ce n'était pas illégal.

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît! Je m'excuse. Vous avez tout le loisir d'intervenir, mais la parole est à M. L'Heureux.

M. Dumoulin: Non, mais ce n'était pas illégal.

Le Président (M. Marcoux): Vous rectifierez une fois que l'intervention sera faite. Vous nuancerez, vous commenterez.

M. Dumoulin: M. le Président...

M. L'Heureux: Un instant, M. le Président. On a une Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction, le bill 290, qui prévoit que toutes les conditions pour tous les salariés travaillant dans le secteur de la construction et, au niveau des ascenseurs, la maintenance et l'installation, comme dans le domaine de la construction, doivent être régies par un décret unique qui s'applique à tous les employeurs et à tous les salariés. C'est cela le bill 290. Qu'on ne vienne pas nous charrier en disant que l'autre entente n'était pas illégale. On l'a ici à l'article 13 du bill 290.

A la question spécifique que M. Chevrette nous a posée, si on veut regarder tout le bill 290, le but du bill 290, c'était de regrouper à l'intérieur d'une unité tout ce qui est construction dans la province de Québec pour éviter certains problèmes. Contre cela on a donné une syndicalisation massive à deux syndicats, et maintenant à trois syndicats. C'était cela. Si on veut maintenant commencer à remorceler les unités à l'intérieur du bill 290, comme d'habitude on va suivre les lois, mais on ne pense pas que ce soit une solution.

M. Chevrette: Me permettez-vous une petite question et je vais vous...

M. L'Heureux: Oui, mais la question que vous m'avez posée, c'est si les employeurs des mécaniciens d'ascenseur seraient d'accord...

M. Chevrette: Ce que vous faites, c'est que vous considérez que c'est vraiment un groupe particulier — c'est cela qui était ma question — parce que j'avais compris dans la discussion que M. Dumoulin avait faite, qu'il considérait que c'était un groupe tellement particulier que, par ricochet, cela n'a pas été discuté tout au cours des négociations régulières. Vous en avez fait une négociation postérieure au groupe régulier. Il doit y avoir des motifs pour que ce ne soit pas négocié en même temps. Je n'ai pas encore réussi à le savoir. Deuxièmement, tant qu'à y être je vais vous poser une autre question. Cela vous fera un seul jet.

M. L'Heureux: Oui, oui, mais je n'ai pas de mémoire.

M. Chevrette: Pardon?

M. L'Heureux: J'ai la mémoire difficile, mais allez-y.

M. Dumoulin: On est au courant de ça. M. Chevrette: Chicanez-vous pas!

M. L'Heureux: C'est quoi, la deuxième question?

M. Chevrette: Le deuxième aspect, c'est quand vous dites que le "Armour Agreement" était illégal, il l'ont depuis juin 1975, si ma mémoire est fidèle, en ce qui regarde les taux qui deviennent un minimum et un maximum. Je voudrais savoir si, depuis 1975, selon ce que vous savez parce que je n'ai pas les chiffres devant moi, les taux négociés dans le décret depuis ce temps avaient au moins rejoint les montants de l'"Armour Agreement".

M. L'Heureux: Non, ils vont les rejoindre à ia fin naturellement mais il y a une nouvelle convention qui arrive dans le "Armour Agreement", parce que je pense qu'il est expiré dans le moment. Là-dessus, je ne peux vous répondre.

Pourriez-vous me répétez votre première question? Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, je ne l'ai pas écrite.

M. Chevrette: Ma première question, c'est: Pourriez-vous me dire pourquoi la négociation n'a pas été simultanée avec tous les autres groupes. Si vous considérez vraiment que c'est un groupe particulier, est-ce qu'éventuellement — je ne demande pas qu'il soit exclu de la loi 290 pour le moment — il ne pourrait pas faire l'objet d'une loi particulière plutôt que de l'intégrer? C'est difficile à suivre, la conversation de cela.

M. L'Heureux: La raison pour laquelle cela n'a pas été négocié dans ce temps, c'est probablement la faute de la partie patronale. Comme je l'ai dit tout à l'heure, pour essayer de saisir tout le contexte patronal dans le domaine des ascenseurs, c'était assez compliqué. A ce moment-là, on a été dans une période intense de négociations et de confrontations, si vous vous en souvenez. On voulait exactement saisir l'ampleur du problème, savoir où le consensus pouvait se faire et à quelle date il pourrait y avoir une concordance. C'est la raison pour laquelle la partie syndicale nous a demandé des rencontres. Il y a eu des rencontres, effectivement, en juillet et en août, mais pas au point où on a pu réellement, de notre côté, être en possession de toutes les données du problème.

La raison principale, je pense que c'est un délai patronal qui fait que cela n'a pas été réglé à ce moment-là. Moi-même, je me suis impliqué dans le dossier cet hiver avec un conseiller spécial. Votre autre question, d'ordre plus général, mais qui est, je pense, très importante, c'est: Est-ce un groupe particulier au point qu'il devrait être exclu du décret? On vous a dit tout à l'heure que, d'après nous, il n'y avait rien de particulier. Chaque métier

a quelque chose de particulier. Les "milwrights", qui sont les mécaniciens qui installent la machinerie dans des usines de production, ont quelque chose de particulier que les autres n'ont pas. Les plombiers, qui font de l'instrumentation et qui font de l'entretien dans les raffineries d'huile, ont quelque chose de spécial que les autres n'ont pas. A ce niveau, chaque métier a quelque chose de spécial. D'après moi, les mécaniciens d'ascenseur n'ont rien de spécial qu'on ne retrouve pas dans d'autres métiers. Si c'est le souhait du gouvernement de revenir sur tout ce qui était l'intention de la loi 290, qui a été adoptée en 1968, il n'y a pas grand-chose qu'on peut vous dire, sauf qu'on pense que ce n'est pas la solution.

Dans le moment, on a justement passé à travers une série de problèmes pour en arriver où on est maintenant avec deux parties en présence qui négocient un contrat de trois ans pour tous les métiers, pour tous les employeurs. On n'a pas de grèves ou de lock-outs qui peuvent se superposer dans différents métiers, comme il y en a ailleurs. Contre cela, on a donné — et on est les seuls en Amérique du Nord — une syndicalisation par loi. On est la seule place, et c'est dans la loi, où un employé dans la construction doit être syndiqué.

On a donné cela. Il ne faudrait pas retourner en arrière et créer les problèmes qu'on avait auparavant, maintenant qu'il n'y a plus d'autre choix pour un employé que celui d'être syndiqué. C'est ce qu'on lui a donné. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Chevrette: La lettre d'entente qui figure à la dernière page du décret, à quelle date a-t-elle été signée précisément?

M. L'heureux: Pardon?

M. Chevrette: A quelle date cette lettre d'entente a-t-elle été signée?

M. L'Heureux: Le 17 octobre.

M. Dumoulin: Dans la période du 15 au 19 octobre.

M. L'Heureux: II y a un autre point qui a été soulevé, le fonds de retraite. On a dit que, dans le cas du fonds de retraite, si naturellement ces gens étaient intégrés tout d'un coup, il y aurait un problème; ils perdraient leur fonds de retraite. C'est faux. On a ici l'article 28.04; il n'a pas été inventé, cet article. "L'application des dispositions de la présente section — sur les avantages sociaux — est suspendue dans le cas d'un mécanicien d'ascenseur assujetti au Canadian Elevator Industry Welfare Plan and Canadian Elevator Industry Pension Plan, le fonds de retraite et le fonds des avantages sociaux. Toutefois, dans les six mois qui suivent la publication du décret, le conseil et l'association d'employeurs s'engagent — et cela a été signé par les deux parties — à former un comité et à étudier avec l'office les moyens pour intégrer au régime d'avantages so- ciaux de l'industrie de la construction, les mécaniciens d'ascenseur assujettis à ces deux plans".

On n'a pas écarté cela du revers de la main. On a dit: On va former un comité et on va étudier. Dans le moment, on a une situation où vous avez une période de maraudage, prévue par la loi, où tout salarié peut signer pour un syndicat ou l'autre, six mois avant l'expiration d'une convention collective, sauf que, dans le cas d'un mécanicien d'ascenseur, s'il signe pour le mauvais syndicat, il perd son fonds de retraite. Est-ce que c'est cela, la liberté? On dit: Nous, il y a quelque chose qui n'est pas correct dans ce métier qui n'existe pas pour d'autres métiers. Dans d'autres métiers, ils peuvent changer de syndicat et leurs avantages sociaux continuent. D'un autre côté, on réalisait qu'on pouvait faire perdre des avantages acquis. C'est pour cela qu'on a formé un comité pour étudier cela. Il ne faut pas faire de la démagogie. Ces choses ont été prévues, sont incluses à l'intérieur de cela, ont été signées par les deux parties. Maintenant, on dit: Ecoutez, il n'y a rien eu de fait là-dedans; les mécaniciens d'ascenseur ont été oubliés durant la parade. Ce n'est pas vrai. Il y a plus de clauses particulières pour les mécaniciens d'ascenseur là-dedans qu'il n'y en a pour n'importe quel autre métier.

M. Chevrette: J'aurais le goût de continuer.

Le Président (M. Marcoux): Rien ne vous interdit de satisfaire votre goût.

M. Décary: Sur l'article...

M. Chevrette: Non, juste une minute M. Décary.

M. L'Heureux, en vertu de la nouvelle loi créant l'AECQ, les entrepreneurs sont-ils obligés de faire partie de l'AECQ?

M. L'heureux: Ecoutez, c'est vous qui l'avez faite la loi, l'arrêté en conseil...

M. Chevrette: Non, ce n'est pas moi qui l'ai faite, je m'excuse, je suis là depuis le 15 novembre.

M. L'Heureux: Quand je dis vous, je dis le gouvernement, alors j'imagine que vous représentez le gouvernement ici, le gouvernement ne change pas à tous les quatre ans, le gouvernement demeure.

M. Chevrette: II peut changer de politique

M. L'heureux: Alors, je veux dire que c'est le gouvernement, par un arrêté en conseil, au mois de janvier de l'an dernier, qui a créé l'AECQ.

M. Chevrette: Non, la question est précise, êtes-vous obligés...

M. L'Heureux: La question est que tous les employeurs de l'industrie de la construction doi-

vent être membres de l'association unique, comme le recommandait votre commission.

M. Chevrette: Je voulais mettre en relief...

M. L'Heureux: C'est cela qui faisait le pendant, que tous les salariés doivent aussi être membres de la partie syndicale.

M. Chevrette: C'est ce que je voulais vous faire souligner, mon cher monsieur, puisque vous aviez souligné, avant, que le syndicalisme était obligatoire; il l'était aussi chez les employeurs. Je voulais vous le faire souligner.

Deuxième question que je voudrais vous poser. Quand vous avez formé vos équipes de négociation, autant du côté patronal que du côté syndical, je suppose, les représentants des mécaniciens d'ascenseur, les compagnies— vous avez dit une quinzaine ou une trentaine — faisaient-ils partie de la table de négociation? Vous avez dit, tantôt, que vous les aviez réunis. Par contre, M. Dumoulin a affirmé, lui, qu'il y avait une négociation qui se faisait entre les employeurs et le local. Légalement, je conçois que vous êtes l'agent négociateur du monde patronal, en vertu de la loi vous créant, mais, à ce moment-là, pourriez-vous nous donner votre point de vue de ce qui a été avancé?

M. L'Heureux: Oui, la partie syndicale a mentionné, tout à l'heure, qu'elle avait entrepris des négociations. On a le télégramme qu'on a envoyé, ici. Cela a été envoyé à trois compagnies, à Otis Elevator, Dover-Turnbull et Westinghouse. Ce sont les trois compagnies qui négocient à ce moment-là. Les employeurs sont au nombre d'une trentaine, y incluant le groupe Labadie-Drolet. Tous ces gens ont été convoqués régulièrement. A l'intérieur de cela, il s'est formé un sous-comité, c'est-à-dire, un employeur qui représentait le groupe des manufacturiers, parce qu'ils ont aussi un groupement particulier, un employeur qui représentait le groupe de ce qu'on appelle des installateurs, et un troisième employeur, M. Labadie, qui représentait le groupe Labadie-Drolet. Ces trois personnes, avec leur conseiller juridique, Me Rochon, nous ont accompagnés à chacune de nos séances avec le conciliateur, à chacune de nos séances avec la partie syndicale et ont préparé le document du 2 février avec nous autres.

Alors, c'est le genre de consultation que l'on a fait, que l'on a pu faire cet hiver, mais qu'on n'aurait pas pu faire l'automne dernier parce que, justement, on était coincé et on avait de la difficulté à saisir qui représentait qui. Alors, ce sont les gens qui étaient là et ce sont les gens qui nous disent qu'ils ne veulent pas, eux, être exclus du décret. Les employeurs doivent avoir quelque chose à dire là-dedans, eux aussi. Ils nous disent qu'ils ne veulent pas être exclus du décret—les employeurs, les trente.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aimerais essayer de clarifier, pour les non-experts de l'ascenseur, le sens qu'il faut donner à la notion de droits acquis et à la façon dont ces droits acquis sont affectés. Ce que j'ai pu comprendre, et je vais le poser sous forme de question, pour qu'on me dise si j'ai raison de croire cela ou pas, c'est que, du côté de la rémunération, du côté salarial, il y a un problème des droits acquis qui a été créé par le fait que le décret prévoit des taux, pour un temps du moins, inférieurs à la convention américaine ou je ne sais quoi, et que pour résoudre le problème des droits acquis, dans ce cas-là on emploie la technique du "red circle", qui est une technique assez largement utilisée dans des cas d'intégration, passage d'un régime à un autre. Cela, comme tel, est-il jugé dérogatoire au maintien des droits acquis? Il ne semble pas, du moins les gens s'en tiennent au même niveau et finalement ils embarquent sur une autre échelle dès le moment où cela se rejoint.

Je comprends que les gens pourraient vouloir maintenir un régime de croisière supérieur, mais cela n'est pas vraiment une question de droits acquis, c'est vraiment une question de savoir s'ils doivent s'intégrer ou pas, parce que cela maintient, il me semble du moins, selon une certaine définition, les droits acquis.

J'aimerais avoir des éclaircissements là-dessus. Si, effectivement, c'est le mécanisme qui est envisagé, est-ce qu'il y a d'autres dimensions de l'entente ou du décret qui impliquent une perte de droits acquis? La seule qui a été mentionnée, mais je voudrais qu'on me fournisse des exemples d'autres cas, s'il y en a, c'est la question des bénéfices marginaux des vacances a 12% contre 10% où il y a une perte, c'est-à-dire une diminution de ces bénéfices marginaux. C'est une perte qui n'est pas récupérée et qui n'est pas récupérable dans le cadre du décret. Est-ce qu'il y a autre chose?

M. Dumoulin: On va répondre en partie sur les droits acquis qu'on mentionnait tantôt. Il y a les mécaniciens d'ascenseur de la région métropolitaine de Montréal et les mécaniciens d'ascenseur de la région de Québec. Ceux de Montréal obtenaient toujours $0.10 l'heure de moins que les salaires payés à Toronto. Ceux de Québec avaient $0.10 de moins que les gens d'Ottawa. C'est le genre de droits acquis sur la base salariale, les salaires. Lorsque j'ai parlé d'avantages sociaux, on a mentionné le fonds de pension, tantôt. Je n'ai pas parlé du fonds de pension, j'ai parlé des avantages sociaux qui incluent le fonds de pension.

Il y a des bénéfices à l'intérieur des avantages sociaux qui donnent aux mécaniciens d'ascenseur un paquet de conditions supérieures à ce qu'on trouve aux avantages sociaux à l'intérieur du décret. Entre autres, disons que les verres sont fournis, la dentition et toutes ces choses. Je ne peux pas vous élaborer tout ce qui en est là-dedans, mais ce sont des choses semblables. C'est payé à même les contributions qu'ils font au niveau horaire, à toutes les semaines. Vous avez l'apprentissage, qui est un des droits acquis à l'intérieur de

cela. C'est ce qui fait que le métier de mécanicien d'ascenseur est si particulier. Vous avez un mécanicien d'ascenseur déteneur d'une carte de mécanicien d'ascenseur et ce même individu, lorsqu'il y a un manque de travail au niveau des mécaniciens d'ascenseur, peut descendre comme "helper", aide, avec le salaire de l'aide et pas le salaire du mécanicien d'ascenseur. Le régime d'apprentissage est complètement différent à l'intérieur de ce métier. C'est dû au fait de la situation particulière du métier.

Les mécaniciens d'ascenseur, vous en avez besoin d'un montant X, à l'intérieur de la province de Québec, et vous n'êtes pas pour en former régulièrement et bâtir des chômeurs. Lorsque vous avez un surplus d'ouvrage, vous avez des gens qui s'intègrent à l'intérieur de cela. Lorsqu'il y a une diminution de travail, les mécaniciens d'ascenseur, au lieu d'être mis à pied et de faire travailler des nouveaux qui entrent avec un carnet d'apprentissage pendant que le gars de quinze ans d'expérience reste chez-lui, eh bien, le gars de quinze ans descend comme aide avec une diminution de salaire qu'il accepte. Ce sont les règles du jeu qu'ils se sont bâties eux-mêmes.

Au moment où on se parle, on a des gens qui, avec quinze ans d'expérience, sont assis chez eux, ils n'ont pas d'ouvrage, pendant qu'on a des gars d'un an et demi avec un carnet d'apprenti qui travaillent à leur place. Ce sont les genres de problèmes auxquels on a à faire face chez les mécaniciens d'ascenseur. On peut parler plus longtemps à ce niveau. Je ne suis pas mécanicien d'ascenseur moi-même et, si on a l'intention d'en discuter plus largement, on va faire venir les gens et on va vous fournir toutes les explications nécessaires. Je peux vous donner les explications que je connais, mais chez nous, lorsqu'on, parle d'un métier, ce sont les gens du métier qui le représentent. C'est ce qui fait l'efficacité, à mon sens, des discussions qu'il peut y avoir. Si vous parlez au niveau des charpentiers menuisiers, vous parlez au niveau des plombiers et des électriciens, en face des électriciens et des charpentiers menuisiers, on parle le même langage.

Je vous donne seulement un petit exemple des négociations en 1970 concernant les mécaniciens d'ascenseur. On avait à faire face à six associations patronales dans le temps. On avait le droit de veto. Six associations patronales et deux associations syndicales. Il y avait une clause des mécaniciens d'ascenseur sur laquelle ils s'étaient entendus entre eux. Il y avait une association patronale qui s'était opposée. Savez-vous laquelle? L'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Je n'ai pas vu tellement d'ascenseurs sur les viaducs! Voyez-vous où le problème se situe? J'essaie de vous sensibiliser, c'est que cela prend des gens du milieu, des deux côtés, pour s'entendre. Sans cela, on ne s'entendra jamais. J'ai monté moi-même, dans la matinée, dans la salle des ascenseurs à l'hôtel Hilton.

Cela vaudrait quasiment la peine que vous alliez voir cela. A un moment donné, on trouve cela très facile cette affaire. Savez-vous ce que j'ai dit au représentant? Prends des photos on va leur apporter cela, on va leur montrer ce que c'est cette affaire. C'est vraiment quelque chose de technique et c'est vraiment quelque chose de particulier. J'ai pris la peine d'aller le voir, toujours. Comme je vous le dis, je ne suis pas un mécanicien d'ascenseur, donc je suis assez mal placé pour défendre les intérêts totaux des mécaniciens d'ascenseur. Si on veut parler sur le sujet plus longtemps, on serait d'accord pour faire venir les gens et ils vont tout vous expliquer. Ils vont l'expliquer de A à Z. Quand vous parlez de droits acquis, je viens de vous en mentionner deux, trois, mais ils vont vous en détailler beaucoup plus.

Vous avez la préfabrication qui a un droit acquis établi au niveau national. Ce n'est pas d'un contrat américain dont on parle, mais national, Vancouver, Halifax, Canada. C'est cela le contrat qui s'applique. Ce qui s'est produit depuis les quelques années où nous avons fait face à des difficultés, c'est qu'il y a eu de la concurrence malhonnête au niveau des employeurs avec l'arrivée d'employeurs, à un moment donné, qui ne donnaient pas les mêmes conditions de travail. Quand on dit que c'étaient des conditions illégales, je tiens à vous dire que le décret—je ne parle pas de celui-là pour le moment, je parle de l'autre décret — prévoyait des taux de salaire à un palier supérieur. C'était payé et il n'y avait rien d'illégal là-dedans, absolument rien d'illégal. Il y a des jugements rendus puis on peut les déposer.

Aujourd'hui, on est ici pour essayer de résoudre le problème. On ne parle par de ce qui existe aujourd'hui, mais on parlait du passé, tantôt. Il n'y avait rien d'illégal là-dedans. Les salaires qui étaient payés c'était $1.50, $2 l'heure de plus. On a le même problème avec d'autres gens, d'autres métiers dans la région de Hull-Ottawa. On aura l'occasion de vous en parler plus tard. On a le même problème'. Ce n'est pas vrai, vous êtes assis ici, que demain matin vous allez avoir une diminution de salaire de 20% à 25% du jour au lendemain. C'est inacceptable, personne ne peut accepter une chose semblable. Je ne peux pas vous en dire plus long concernant les fameux droits acquis, mais si vous voulez plus d'éclaircissement, on veut que vous entendiez les gens si vous n'êtes pas assez éclairés là-dessus.

Lorsqu'on disait tantôt que ce n'est pas plus particulier que la maintenance sur les installations d'huile. Je tiendrais à aviser M. L'Heureux qu'il aille s'informer un peu, parce que la maintenance sur les installations d'huile, c'est accrédité en dehors du décret de la construction et c'est négocié. D'ailleurs, celui qui a eu l'honneur de négocier le premier contrat, c'est moi. C'est en 1970, si je ne me trompe pas. La maintenance, c'est la maintenance. La construction, c'est la construction. D'ailleurs, je l'ai mentionné ce matin, on parle d'avoir des rencontres au niveau du projet de loi no 68, justement pour l'établir, cette affaire, une fois pour toutes, l'éclaircir comme il faut. C'est pour vous répéter que les mécaniciens d'ascenseur, 85% à 90% de leur travail c'est de la maintenance. Donc c'est pour cela que nous, lorsque la

question m'a été posée par M. Chevrette, on a répondu oui immédiatement, puis on est d'accord sur cela. Parce qu'on croit qu'il n'y aurait pas d'autres solutions au niveau des mécaniciens d'ascenseur que de les sortir de la loi sur les relations de travail. Advenant le cas qu'une chose semblable arriverait, ils vont pouvoir s'asseoir avec leurs employeurs, résoudre leurs problèmes et je crois que cela va se faire très rapidement.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: L'explication a été assez complète sur la question des droits acquis; enfin cela me permet de visualiser un peu plus clairement. Je me demande si quelqu'un pourrait nous expliquer en quoi les modifications sont pertinentes à la discussion qui s'est déroulée, jusqu'à maintenant, parce que le langage est un peu obscur et il me semble qu'on bénéficierait — du moins votre humble serviteur — de comprendre un peu mieux en quoi cette modification vient modifier de façon substantielle les dispositions du décret.

Le Président (M. Marcoux): On va essayer d'avoir une réponse à la question du député de Saint-Laurent d'abord.

M. Couture: La modification qu'on propose ne règle pas du tout le problème des mécaniciens d'ascenseur, sauf que, comme l'article en fait mention, je crois que c'est pour nous l'endroit souhaité pour entendre effectivement les parties ou l'une d'entre elles qui nous a tellement souvent, et avec force documents, signalé un problème particulier.

Je crois que c'était, pour nous, une occasion de prendre connaissance de ces problèmes particuliers des mécaniciens d'ascenseur, de nous informer et de nous faire une opinion.

M. Forget: II doit y avoir un peu plus que cela, parce qu'il y a des mots qui ne sont pas les mêmes. On dit dans le décret "sauf les mécaniciens d'ascenseur". Donc, originellement, on les excluait de cela. Maintenant, on les inclut. Le problème dont on vient de nous saisir s'applique désormais avec plus de force, j'imagine. On les soumet, comme n'importe qui d'autre, à toutes les dispositions du décret, sauf, évidemment, les dispositions particulières qui ont déjà été convenues entre les parties, qui sont incorporées.

M. Chevrette: Si on y allait par article, par exemple? Si on regardait l'article 17.01? Je ne me souviens pas à quel article, mais la loi sur la construction précise que "toute convention collective conclue en vertu de la présente loi doit fixer les conditions de travail applicables à tous les métiers et emplois de l'industrie de la construction". De l'autre côté, vous pouvez lire, à la page 18, en haut: "Toute entente fixant des conditions de travail applicables à des métiers et emplois de l'industrie de la construction est nulle si elle n'a pas été convenue, conformément à la présente loi. Si on va à la clause 28: "Le décret doit contenir des dispositions concernant la classification des emplois, la rémunération, le bulletin de paie, la durée du travail, les heures supplémentaires, les jours fériés, etc. Il doit aussi contenir des dispositions concernant la sécurité syndicale".

Autrement dit, la loi nous oblige à être très explicite et à avoir des taux de salaires précis, fixes. En vertu de la loi qui a été adoptée en 1975, en plus, c'est à la fois des minima et des maxima qui sont fixés. C'est une des raisons pour lesquelles le contentieux nous faisait ces remarques.

Sur l'argumentation de M. Dumoulin, il y a un aspect qui est bien évident, la formation professionnelle. Il faudrait peut-être, pour votre bénéfice encore, se rappeler qu'ils avaient obtenu du ministre du Travail — je ne me souviens pas en quelle année, je ne sais pas si c'était en 1972 ou en 1973 — ...

M. Dumoulin: En 1970.

M. Chevrette: ... en 1970, la permission d'assurer eux-mêmes la formation professionnelle. Mais ce n'est pas au niveau du décret que ce bénéfice acquis peut se régler; c'est en vertu de la loi sur la qualification professionnelle, bien sûr.

M. Forget: Autrement dit, ce qu'on nous dit, c'est que la loi impose que, s'il doit y avoir un décret, il couvre absolument tout le monde. Ce que l'adjoint parlementaire du ministre suggère, c'est qu'il n'est pas possible de répondre aux objections qui sont faites du côté syndical sans une modification à la loi.

M. Chevrette: Par le seul moyen légal? Je demanderais plutôt cela aux membres du contentieux, mais je peux vous dire qu'après avoir écouté l'argumentation, strictement sur le plan légal, quand on regarde le cheminement exposé par les parties, l'AECQ était agent négociateur en vertu de la loi, le conseil provincial était agent négociateur en vertu de la loi. Si on lit la deuxième partie de la lettre d'entente, on voit à la fin: "Toutefois, s'il y a publication du décret dans la Gazette officielle du Québec avant que les parties n'aient convenu d'une façon complète et finale de ces dispositions, cette publication du décret devra comprendre les dispositions particulières à ces salariés". On nous a dit, si j'ai bien compris, qu'il y avait sept ou huit clauses insérées à l'intérieur parce qu'il y avait eu entente sur ces sept ou huit clauses.

M. Dumoulin: II n'y a pas eu entente sur ces clauses, absolument pas. Elles ont été insérées par la partie patronale, mais il n'y a pas eu entente.

M. L'Heureux: Ecoutez, un instant! Elles ont été insérées par la partie patronale!

M. Chevrette: En tout cas. Entente ou non, ce que je veux dire, pour qu'on les ait insérées, il fal-

lait sûrement qu'elles soient signées par quelqu'un Elles auraient dû être peut-être pas entérinées par les groupes concernés — c'est une autre affaire — mais signées en bonne et due forme.

M. Dumoulin: Nous avons informé la partie patronale qu'il n'y avait pas eu entente sur ces clauses, mais on les a tout de même intégrées.

Le Président (M. Marcoux): M. L'Heureux, d'abord.

M. L'Heureux: Un dernier point, M. le Président. Encore là, je recommence ce que j'ai dit au début ce matin. Il est évident que nous sommes ici pour essayer d'obtenir des choses que nous n'avions pas obtenues à ce moment-là.

M. Dumoulin dit qu'il nous avait avertis et qu'ils ont été insérés. Ils ont été non seulement insérés, mais ils ont été initiales par M. Dumoulin dans un projet que la cour nous a forcés à soumettre à nos membres. Ils ont été initialés par lui à chaque page de la convention collective et ils ont été, plus tard, réinitialés par M. Lamontagne. Si on nous accuse de ne pas consulter nos membres, il faudrait peut-être regarder ailleurs.

On a mentionné, tout à l'heure, certains points. M. Forget a fait une demande relativement aux salaires. On mentionne ici qu'on diminue les montants de $1 et $2. C'est faux. On a inclus à l'intérieur de cela une clause qui protège les salaires que ces gens-là ont. Ce qu'on ne veut pas perpétuer, c'est un régime où ces gens vont continuer à avoir des salaires qui vont toujours dépasser les salaires de notre décret qui est notre loi ici. C'est dommage, mais la loi des parties au Québec, c'est celle-là. Ceux qui veulent travailler ici, les employeurs qui veulent faire affaires ici, c'est ce qu'il faut qu'ils suivent. Il n'est pas question de baisser leur salaire, il est question, par exemple, de les empêcher de gagner plus que les gens de la CSD, dans le moment, et de fixer tout cela à l'intérieur d'une masse monétaire. Ces gens seront encore les mieux payés du domaine de la construction parce qu'ils étaient les mieux payés avant, en 1969, à la dernière convention collective.

On a aussi mentionné que le système d'apprentissage des mécaniciens d'ascenseur est différent. C'est vrai, il est différent. C'est justement ce qu'on a reproché, qu'il y ait quelque chose de différent qui contingentait, à toutes fins pratiques, la main-d'oeuvre. Dans le moment, on nous dit: II y a beaucoup de compagnons qui sont en chômage. La semaine dernière, il y avait six compagnons à Montréal. Cela nous a été donné par les centres de main-d'oeuvre du Canada en collaboration avec l'assurance-chômage. C'était cela, les compagnons!

Au moment où les gens peuvent revenir, comment va-t-on faire pour avoir des apprentis? Ce n'est pas un système négociable, c'est un système en vertu du règlement no 1 qui est administré par l'office. Comment va-t-on faire pour avoir des apprentis si, à tout moment, au moment où la construction diminue, ces gens-là peuvent revenir au niveau des apprentis et empêcher ces gens de s'intégrer au métier? Comment va-t-on faire pour avoir des apprentis? On a rencontré tous nos employeurs, lundi, et ils nous disent qu'ils veulent conserver le système d'apprentissage du ministère qui existe actuellement dans la loi. Ce sont nos employeurs qui le disent; ce n'est pas l'AECQ qui le dit, ce sont nos employeurs.

M. Dumoulin: M. le Président, j'ai deux mots à dire, s'il vous plaît.

Le Président (M. Marcoux): Oui, une minute au maximum; on va se revoir.

M. Dumoulin: Ce que je veux mentionner, c'est que nos gens ne se rapportent pas aux centres de main-d'oeuvre, au départ. Ne les cherchez pas. S'il y en a six, ce sont des écartés de quelque part.

Une Voix: De la CSD.

M. Dumoulin: Deuxièmement, je tiens à vous mentionner que lorsqu'on dit que les employeurs veulent garder l'apprentissage fourni par le centre de formation professionnel, je tiendrais à faire remarquer à M. L'Heureux que la partie patronale a voté à l'unanimité de faire disparaître l'apprentissage des centres de formation professionnelle et de le remettre entre les mains des parties. Il ferait mieux de regarder les procès-verbaux des assemblées des comités consultatifs régionaux de la construction.

Messieurs, c'est complètement faux, à ce niveau. C'est à l'unanimité que cela a été fait au niveau des employeurs, de la FTQ-Construction, de la CSN, de la CSD et tout le monde. On demande de reprendre en main nos programmes d'apprentissage, ceux qu'on avait avant, les centres d'apprentissage. Ne venez pas me faire croire qu'ils veulent garder l'apprentissage qui est établi au niveau des centres de formation professionnelle parce qu'il n'y en a pas, d'apprentissage, là.

M. L'Heureux: Est-ce que je pourrais avoir une minute, M. le Président, s'il vous plaît.

Le Président (M. Marcoux): Je m'excuse. Demain matin, je donnerai la parole d'abord à M. L'Heureux afin de poursuivre le débat sur l'article 11a.

La commission du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration ajourne ses travaux à demain, dix heures. Nous poursuivrons nos travaux, demain, de dix heures à midi. Je vous demanderais d'être présents le plus tôt possible pour qu'on puisse commencer à dix heures parce qu'il faudra terminer à midi.

(Fin de la séance à 23 h 4)

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