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(Dix heures trente-huit minutes)
M. LAVOIE (Laval) (président): Qu'on ouvre les portes. A l'ordre,
messieurs !
Affaires courantes.
Présentation de pétitions.
Lecture et réception de pétitions.
Présentation de rapports de commissions élues.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de bills privés.
Présentation de bills publics.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'avais demandé au
député de Rouville, le président de la commission
parlementaire des Richesses' naturelles, de faire rapport. Je m'aperçois
qu'il n'est pas arrivé, mais je voulais assurer le député
de Bourget, qui n'est pas arrivé lui non plus, que le message avait
été fait.
M. LEGER: Nous sommes tous unanimes.
M. LE PRESIDENT: Vous êtes unanimes pour accepter le rapport?
M. LEVESQUE: Unanimes à l'effet qu'ils ne sont ici ni l'un ni
l'autre.
M. LE PRESIDENT: Déclarations ministérielles.
M. LEGER: Je veux demander au ministre si, quand le député
de Rouville sera présent, il va refaire...
M. LEVESQUE: Je vais essayer de nouveau. Cela fait deux jours que
j'essaie.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives.
Montréal, marché international de
capitaux
M. TETLEY: M. le Président, la semaine dernière, lors de
l'étude du bill 63, amendant la Loi des valeurs mobilières, j'ai
fait une déclaration qui a été appuyée par tous les
partis politiques représentés dans cette Chambre, à savoir
que nous voulions que la place de Montréal devienne un centre important
du marché international des capitaux, que nous voulions
développer notre industrie de valeurs mobilières et donner une
dimension internationale à nos bourses.
L'an dernier, nos bourses ont eu 75 nouvelles inscriptions, ce qui
dépassait de beaucoup le nombre d'inscriptions nouvelles sur toutes les
autres bourses canadiennes. Cette tendance s'accroît cette année
encore et nos bourses de nouveau ont une forte avance quant au nombre de
nouvelles compagnies cotées.
Un exemple parfait est Pan American Mines
Ltd, dont le président est M. Howard Eckersley, chef des cadres
personnels de l'industriel américain bien connu Howard Hughes. M.
Eckersley a déclaré que la raison pour laquelle lui et ses
associés sont venus au Québec était, pour employer ses
propres termes, basée sur le fait que nous considérons
Montréal comme une bourse à caractère international dont
les politiques encouragent les besoins présents et futurs d'entreprises
qui se développent comme la nôtre et qui recherchent une
participation internationale étendue.
M. Eckersley a de plus ajouté que Pan American Mines
étudiait activement des possibilités de placements dans le
Québec. Il est intéressant de noter que le géologue
consultant de la compagnie est M. Marcel Morin, un docteur en sciences,
diplômé de l'université Laval.
Pan American Mines a maintenant ouvert ses bureaux à
Montréal et je leur souhaite la bienvenue dans notre province et dans
nos marchés de capitaux.
M. LE PRESIDENT: (Hardy): L'honorable député de Bagot.
M. CARDINAL: Je sais que l'entente à l'effet de se remettre
à l'avance les déclarations ministérielles ne tient plus.
Je n'en fais pas le reproche au ministre, puisque c'est une question assez
technique. J'aurais aimé quand même voir le texte auparavant.
Trois remarques seulement. La première, c'est que c'est une bonne
nouvelle que le ministre nous annonce, qui est la conséquence de ce
qu'il avait déjà annoncé lors de l'étude du projet
de loi no 63. La deuxième c'est que malgré cette nouvelle
concernant la Bourse de Montréal, qui est bonne en soi, la
deuxième partie de la déclaration me paraît être du
genre des petites annonces qu'on a souvent entendues lors des
déclarations ministérielles. La dernière, c'est qu'il faut
quand même noter M. le Président, ici c'est un souhait que
je formule, d'accord avec le ministre que la très grande
majorité des compagnies minières sont enregistrées
à la Bourse de Toronto et que les agents de transfert sont
également de Toronto, si on prend tout le marché dans ce
domaine.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, un mot seulement pour dire que
le ministre nous avait justement fait part de certaines dispositions qu'il
entendait prendre au niveau de son ministère, de façon à
assurer à la Bourse de Montréal une plus grande part
d'activités, de façon à permettre à de nouvelles
entreprises de venir s'installer chez nous. M. le Président, ce sont
d'excellentes nouvelles et nous osons espérer, en ce qui nous concerne,
que le gouvernement fera en sorte de prendre toutes les dispositions
nécessaires pour que la Bourse de Montréal
puisse prendre sa place dans le monde de la finance, pour qu'au
Québec, une fois pour toutes, nous puissions figurer sur la scène
du monde des affaires, aussi avantageusement que Toronto peut le faire.
M. LE PRESIDENT: Dépôt de documents. Questions des
députés.
Le chef de l'Opposition officielle.
Questions et réponses
M. LOUBIER: M. le Président, j'avaisprévenu le ministre de
l'Agriculture de la question que je devais lui poser aujourd'hui. Je pense que
le premier ministre en l'absence du ministre de l'Agriculture...
M. BOURASSA: Je dois le voir dans quelques instants. Nous devons nous
rencontrer vers midi et demi.
M. LOUBIER: Est-ce que M. le Président me permettra quand
même de poser ma question?
M. BOURASSA: Oui.
Cartes de travail
M. BERTRAND: Au ministre du Travail, juste un mot de
préliminaire. A l'heure actuelle, des employés du domaine de la
construction se présentent aux centres de la main-d'oeuvre dans
différentes régions au Québec et en particulier ceux qui
ont le droit d'avoir une carte. Par exemple, un conducteur de bélier
mécanique se présente à un centre et on exige qu'il ait
2,000 heures de travail au Québec.
Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer le mécanisme de
cette procédure qui est appliquée dans les centres de
main-d'oeuvre où un travailleur se présente pour obtenir de
l'emploi? Quelles sont les règles qui s'appliquent?
M. COURNOYER: Les règles qui s'appliquent ne me semblent pas du
tout contenir cette exigence de 2,000 heures pour quelque raison que ce soit.
Vous avez trois catégories de travailleurs en vertu de
l'arrêté en conseil 4119: les employés permanents de la
construction, les employés réguliers de la construction et ce
qu'il est convenu d'appeler, dans ce même arrêté en conseil,
les réservistes.
Pour être réserviste, il suffit d'avoir travaillé
moins de 800 heures durant l'année qui précède. Moins de
800 heures, pour moi, inclut zéro, donc n'importe qui peut avoir une
carte de réserviste.
Pour avoir une carte d'employé régulier, il faut se
conformer à certaines exigences dans une région et avoir un
certain nombre d'heures de travail qui est plus élevé que 800
dans la région donnée.
Et pour avoir une carte de permanent, il faut avoir travaillé
pour le même employeur pendant un certain nombre d'heures qui va
jusqu'à 1,400.
Quant aux 2,000 heures, je ne suis pas au courant. Il s'agit à
mon avis plutôt de l'obtention d'une carte qui permette d'être
employé sur un chantier de construction. N'importe laquelle des cartes
permet d'être employé sur les chantiers de construction.
Après avoir épuisé le champ des employés
réguliers, la carte de réserviste sert. Un employé
régulier de la construction aura préférence sur un
employé réserviste.
M. BERTRAND: Est-il exact que, pour compter ce nombre d'heures, il faut
absolument que le travailleur ait accompli ces 800 heures ou les 1400 au
Québec? Je prends un exemple: celui qui est allé travailler
à ChurGhill Falls.
On me rapporte est-ce exact? Je le demande au ministre que
les heures où il aurait travaillé à Churchill Falls ne
sont pas comptées dans les 800 heures ou les 1,400 heures. Il aurait pu
aller travailler pour un entrepreneur québécois en Ontario.
Est-ce que les heures qu'il a accomplies en Ontario ou à Terre-Neuve
comptent?
M. COURNOYER: J'énonce un avis et j'imagine que l'ancien chef de
l'Opposition, le député de Missisquoi sait fort bien que je ne
peux pas donner d'avis sur l'interprétation qui peut être
donnée par les tribunaux. Je peux par exemple donner un avis personnel.
Cet avis personnel veut que dans ce que nous recherchons, il y ait deux
problèmes particuliers: les qualifications des employés et les
qualifications des employés conformément aux lois
québécoises et non pas aux lois des autres provinces de quelque
province que ce soit qu'il s'agisse de l'Ontario ou de la partie de ce
territoire qui est situé au delà d'un point X à
l'intérieur du Canada. Ce que nous recherchons en matière de
sécurité d'emploi puisqu'il s'agit du règlement 4119 qui
réfère à la sécurité d'emploi, c'est tout
simplement de faire travailler les travailleurs de la construction. Mon
opinion, c'est qu'il n'a jamais été écrit dans
l'arrêté 4119 que ces heures de travail pour les fins de l'article
4119 devaient être faites à l'intérieur de la province.
Je dois cependant avouer que dans des régions limitrophes comme
Hull, on m'a dit que les travailleurs prétendent que l'application
intégrale d'un arrêté en conseil voudrait que les heures de
tout ouvrier qui a travaillé à Ottawa ne soient pas
comptées chez nous comme étant celles des travailleurs de la
construction du Québec. C'est une interprétation. Cette
interprétation est donnée de bonne foi mais elle peut-être
contestée devant les tribunaux.
M. BERTRAND: Je me permets, étant donné que j'ai eu la
visite de plusieurs de ces travailleurs, d'attirer l'attention du ministre en
l'invitant à obtenir des rapports de certains
bureaux. Je vais lui donner l'exemple du bureau de
Saint-Jérôme où l'on m'a rapporté que la semaine
dernière, il y avait grognement de la part des travailleurs dont
certains sont membres de la FTQ. Il y a là et j'attire
l'attention du ministre et du gouvernement un malaise dangereux à
l'heure actuelle. Une des personnes qui est venue me voir me disait: "M.
Bertrand, on veut travailler, on ne veut pas de bien-être social. Je peux
vous dire que nous étions 50 à un bureau la semaine
dernière et cela commence à grogner". Je crois qu'il est de mon
devoir d'attirer l'attention du ministre et du gouvernement sur cette situation
qui est faite à des gens qui veulent travailler et non pas recevoir les
allocations du bien-être.
M. COURNOYER: M. le Président, sur le même sujet et en
réponse au chef de l'Opposition et pour éviter qu'on tire des
conclusions dans les mouvements syndicaux, c'est nettement l'intention du
ministre d'amender l'arrêté en conseil 4119 pour permettre aux
ouvriers de travailler lorsqu'ils le veulent.
M. BERTRAND: Très bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce. Question
supplémentaire.
M. ROY (Beauce): Sur le même sujet, est-ce que le ministre
pourrait confirmer ou nier le fait qu'on exigerait également des cartes
et le même nombre d'heures pour des personnes qui sont
propriétaires de leur machinerie?
M. COURNOYER: Propriétaire de leur machinerie?
M. ROY (Beauce): De leur propre machinerie. Je vais prendre un exemple:
une personne est propriétaire d'un tracteur, d'un bulldozer et on
exigerait, pour qu'elle conduise son propre bulldozer, une carte comme vient de
l'expliquer le député de Missisquoi. Est-ce que le ministre
pourrait confirmer ou nier ce fait?
M COURNOYER: Je ne peux ni le confirmer ni le nier tel que
présenté. Mais je peux vous dire que, pour conduire un bulldozer
ou un bélier mécanique ou une grue mécanique qu'on
en soit propriétaire ou non sur un chantier de construction
assujetti aux termes du décret de la construction, il faut avoir une
carte de compétence.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Dorchester.
Question additionnelle.
M. GUAY: Une question supplémentaire, M. le Président.
Comme vient d'expliquer le ministre et ce d'après ce qu'a
souligné également le député de Missisquoi, ces
lois dans le domaine de la construction semblent interprétées de
différentes façons dans certains bureaux de la province.
J'aimerais demander au ministre s'il serait possible qu'il donne des directives
bien sévères en ce qui concerne les renseignements que donnent
certains agents dans certains bureaux.
M. COURNOYER: Le ministre donnera des directives extrêmement
sévères aussitôt qu'il aura amendé
l'arrêté en conseil 4119 qui est un épouvantable nid
à confusion.
M. GUAY: Une question supplémentaire, M. le Président.
Quand le ministre entend-il amender l'arrêté en conseil 4119?
M. COURNOYER: Le plus tôt possible, aussitôt que le premier
ministre et moi-même nous nous serons entendus sur le fait de l'amender,
et c'est déjà fait.
M. BERTRAND: Et s'il a dit non, c'est non.
M. VINCENT: M. le Président, dans le même domaine de la
construction cette question s'adresse au ministre du Travail cela
touche également la construction. Je reçois ce matin un
télégramme de l'Office des producteurs de tabac jaune de
Saint-Thomas de Joliette. En vertu du décret de la construction, il est
interdit de construire des séchoirs à tabac de la fin juillet
à la quatrième semaine d'août. Ce décret serait
préjudiciable aux producteurs ou aux planteurs de tabac jaune.
Est-ce que le ministre pourrait dire à cette Chambre ainsi qu'aux
producteurs de tabac jaune s'il est possible d'avoir une exemption de ce
décret pour l'Office des producteurs de tabac jaune ou tous ceux qui
sont dans la même situation?
M. COURNOYER: M. le Président, le ministre ne peut pas donner
d'avis pour le moment mais, demain matin, je pourrai vous donner la
façon de procéder. Je ne suis pas sûr du tout qu'il soit
possible d'y arriver. Cette partie du décret a été
négociée par les sept parties et le ministre l'a retenue
lorsqu'il a adopté le décret parce qu'effectivement
c'était le consentement unanime des parties impliquées. Je prends
note de la question et je pourrai indiquer à l'ancien ministre de
l'Agriculture et député de Nicolet jusqu'à quel point on
peut sortir du marasme créé par certaines dispositions de
certains décrets.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
Transfert net des ressources fiscales
M. LAURIN: M. le Président, ma question s'adresse au premier
ministre. Il y a actuellement une conférence des ministres des Finances
à Ottawa et notre ministre des Finances, de même que tous ses
précécesseurs.a réclamé un transfert net des
ressources fiscales pour le Québec. Ma question est la suivante: Est-ce
que
le ministre des Finances avait un texte écrit et, si oui, est-ce
que ce texte pourrait être déposé à
l'Assemblée nationale?
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai préparé avec le
ministre des Finances il y a quelques jours, le texte qu'il a lu hier à
la conférence sur les principales positions prises par le gouvernement
sur cette question du partage fiscal. Je devrai en discuter avec lui à
savoir s'il doit être déposé à l'Assemblée
nationale.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: Ma question s'adressera au ministre de l'Agriculture. Comme
on attend l'échéance...
M. LE PRESIDENT: II devrait arriver d'ici quelques minutes, si le
député peut faire preuve de patience...
M. DEMERS: Je vais patienter. Vous pourriez peut-être la
transmettre, comme vous êtes bon en commissions... Je vais attendre le
ministre de l'Agriculture.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Société Price à Alma
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais
poser une question au premier ministre. Est-ce qu'il aurait un rapport à
nous faire sur la situation de la société Price à
Alma?
M. BOURASSA: Non, M. le Président. L'ancien ministre a dû
prendre connaissance de la déclaration du ministre des Finances qui a
fait hier des représentations au nom du gouvernement du Québec
auprès des autorités fédérales pour que la
situation de toutes ces entreprises de pâtes et papier soit
améliorée par certaines mesures. Il y a déjà eu des
mesures proposées dans le budget de M. Benson et nous allons continuer
à insister auprès du gouvernement fédéral pour
améliorer le sort de ces entreprises.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, la réponse du
premier ministre fait état de négociations en vue d'un
règlement à long terme.
Mais, étant donné la situation qui prévaut à
Alma, à l'heure actuelle, est-ce que le premier ministre et le ministre
du Travail ont fait enquête et pris des dispositions afin d'en arriver au
règlement d'une situation assez étrange, alors que l'usine veut
fermer ses portes et que les employés occupent l'usine en vue de garder
leur gagne-pain pendant quelques semaines ou quelques mois?
M. BOURASSA: M. le Président, le ministre de l'Industrie et du
Commerce m'informe que des rencontres sont prévues ou sont sur le point
d'avoir lieu entre les différentes entreprises du Québec, y
compris celle dont parle le député de Chicoutimi, et les
autorités du ministère de l'Industrie et du Commerce et du
ministère des Terres et Forêts pour essayer de trouver une
solution à un problème qui est général au
Canada.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député d'Abitibi-Ouest.
Allocations sociales
M. AUDET: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Affaires sociales.
Il semble qu'il y ait de nombreuses plaintes vis-à-vis des cas de
diminution d'allocation sociale se situant au niveau de couples de personnes
âgées, surtout lorsqu'un des conjoints devient admissible à
la pension de vieillesse. Est-ce que le ministre pourrait étudier de
près cet état de choses et faire en sorte de l'améliorer
afin d'apporter un peu plus de réconfort et de sécurité
à ces personnes âgées?
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai déjà fait une
déclaration ici à la suite de l'augmentation des limites du
supplément du revenu garanti. Je ferai parvenir une copie de cette
déclaration au député. Je crois qu'il y trouvera tous les
renseignements pertinents quant à la politique du gouvernement à
ce sujet pour le moment.
M. ROY (Beauce): M. le Président, une question
supplémentaire sur le même sujet.
Est-ce qu'on pourrait demander au ministre s'il a l'intention, au cours
de la période d'été, d'amender la réglementation
concernant l'application du projet de loi no 26 justement pour corriger les
lacunes de la loi et les injustices dont vient de faire mention le
député d'Abitibi-Ouest, et ce, même à la suite de la
déclaration ministérielle qu'aurait fait le ministre? Est-ce que
le ministre aurait repensé son attitude suite à la
déclaration ministérielle qu'il avait faite?
M. CASTONGUAY: M. le Président, je n'accepte pas que la situation
qu'on vient de décrire soit considérée comme une situation
d'injustice. Les personnes âgées ont vu leur pension de vieillesse
et leur supplément du revenu garanti augmentés. Nous avons
uniquement, quant à nous, en ce qui a trait à la Loi de l'aide
sociale, tenu compte de cette situation.
En ce qui a trait, par contre, à cette situation
générale des personnes âgées, des autres personnes,
j'ai déjà dit que nous étudions la possibilité de
modifier à nouveau comme nous l'avons fait, les règlements de la
Loi d'aide sociale. Nous étudions la question présentement. J'ai
reçu déjà certains rapports d'analyses, et lorsque nous
aurons fait de nouveau le tour de la
question, selon les coûts prévisibles, des modifications
qui pourraient être apportées, etc., je ferai rapport au Conseil
exécutif et je ferai les recommandations qui m'apparaissent
appropriées. Vous pouvez être assuré que dans
l'étude de cette question les travaux se poursuivent avec diligence.
M. ROY (Beauce): M. le Président, est-ce que je pourrais me
permettre de souligner au ministre le fait que des personnes
âgées, dont toutes les deux sont éligibles à la
sécurité de la vieillesse, peuvent bénéficier de
$255 par mois au maximum alors que des couples je pourrais fournir au
ministre des quantités de dossiers sont limités à
$135 alors qu'ils n'ont pas 65 ans? C'est pourquoi je demande au ministre ce
matin s'il n'aurait pas l'intention de se pencher sur ce problème. Je ne
peux pas concevoir que ce soit juste dans le Québec actuellement
d'obliger deux personnes âgées à vivre avec $135 par mois
alors que l'allocation fédérale, qui a été
basée selon le coût de la vie à l'heure actuelle, a tout de
même permis qu'elles aient $255 par mois, ce qui n'est pas trop.
M. CASTONGUAY: M. le Président, j'ai éjà
répondu à plusieurs reprises à cette question. Je suis au
courant de la situation décrite par le député. Il y a une
question de coûts. Lors de l'étude des crédits du
ministère, nous avons vu l'augmentation des coûts de la Loi d'aide
sociale, nous avons vu aussi l'augmentation des prestations parce qu'il est
faux de prétendre qu'il n'y a eu que diminution ou de donner cette
impression lors de l'adoption de cette loi. Je crois que la réponse que
j'ai donnée précédemment constitue pour le moment une
réponse adéquate à la question du
député.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
Grève des transports en commun
M. PAUL: M. le Président, en cette veille du 14 juillet, vous me
permettrez d'avoir une pensée toute particulière à
l'endroit du premier ministre. Pourrais-je lui demander s'il a effectivement
discuté avec ses collègues du cabinet du problème de la
grève des transports dans la capitale du Québec? Nous allons
probablement ajourner d'ici quelques jours et il faudrait, à mon humble
point de vue, régler ce problème dans cette période
intense de touristes qui fréquentent et qui visitent la capitale. Je
n'ai aucun doute que le ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre a une
excellente nouvelle à nous communiquer ce matin, mais surtout à
communiquer à la population de la ville de Québec et à
tout le Québec métropolitain.
M. COURNOYER: M. le Président, je n'ai pas d'excellente nouvelle
à communiquer à la Chambre ce matin.
M. PAUL: Qu'est-ce que vous faites?
M. COURNOYER: Pardon?
M. PAUL: Qu'est-ce que vous faites?
M. COURNOYER: Nous faisons ce que la loi actuelle nous oblige de faire.
Samedi dans le courant de la journée pendant que nous discutions ici, le
conciliateur et M. Pepin... Pardon?
M. PAUL: Pendant que l'on discutait ici, est-ce qu'ils se battaient
là-bas?
M. COURNOYER: Cela se battait là-bas. A part cela, les
rôles étaient inversés. Franchement, pour le moment, je
pense, que le rapport que j'ai de mon conciliateur m'invite à demander
à mes sous-ministres ce que j'ai fait d'ailleurs de
regarder plus profondément la cause du refus de la CTCUQ du projet
d'entente proposé par le conciliateur avant de prendre quelque attitude
que ce soit. D'après ce que je sais, et des rapports que j'ai eus, le
syndicat aurait accepté les recommandations du conciliateur. Quant
à la CTCUQ, elle n'a pas encore manifesté son intention
d'accepter ou de rejeter.
Alors, je préfère attendre à demain matin. Ce n'est
pas encore mon intention de demander au gouvernement du Québec de passer
une loi spéciale dans le cas des transports de Québec. Mais c'est
nettement mon intention de demander au gouvernement du Québec, d'amender
les lois générales et non pas de faire un cas spécial de
Québec, mais d'en faire un cas général. Si on est pour
enlever le droit de grève et le droit de "lock out" aux personnes dans
un secteur particulier, on l'enlèvera partout et non pas d'une
façon particulière à Québec.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Richesses naturelles va
répondre à une question.
Gîte minier de Saint-Honoré
M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, en réponse
à une question du député de Chicoutimi, concernant un
accord de la société Soquem et Keevil pour le gîte de
columbium de Saint-Honoré. Des sondages, comme on le sait, ont
révélé un important gîte de columbium. Les
estimations confirmées par les faits et les sondages, indiquaient qu'il
faudrait des dépenses préliminaires de près de $2
millions, pour savoir s'il est économique de mettre le gîte en
production. Pour Soquem qui recevait alors $1 million et demi par année,
investir ce montant, même sur une période de 18 mois, aurait
signifié l'arrêt total de toutes ses autres activités et la
dispersion de l'équipe de spécialistes polyvalents, formée
à grande peine. Répartir l'investissement sur plusieurs
années, aurait retardé la mise en valeur des gîtes de
Saint-
Honoré, à un point tel que d'autres gîtes de
columbium auraient pu être mis en production entre-temps et accaparer le
marché.
A la suite d'un appel d'offres, le groupe Keevil offrit de risquer
$1,400,000 dans le projet, conjointement avec un apport de $500 millions de
Soquem et cela pour obtenir 50 p.c. des bénéfices possibles, si
la mine démarrait. L'offre de ce groupe donnant, de loin, les meilleures
garanties financières de succès du projet, un accord fut
signé. D'ailleurs, on pourra trouver dans le dernier rapport de Soquem,
un état de la question.
La possibilité d'implantation d'une industrie secondaire de
columbium au Québec, sera augmentée du fait de la présence
de deux producteurs de columbium, comme on le sait, et des possibilités
de collaboration qui leur seraient ainsi offertes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, lorsque j'ai
posé la question au ministre des Richesses naturelles je le
remercie de ce qu'il vient de nous dire je lui ai demandé quelles
avaient été les conditions pour la cession à la
Copperfield's Mining d'un territoire dans la région de
Saint-Honoré aux fins d'exploitation du gisement de columbium.
M. MASSE (Arthabaska): M. le Président, je m'excuse, mais je
voudrais rappeler au député de Chicoutimi que j'ai le texte de sa
question dans lequel on me demande: "Est-il exact que cette
société deviendrait propriétaire de 50 p.c. du terrain
où se trouve le gisement? " J'ai donc tenté de répondre
à cette question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je n'ai pas saisi et
je ne crois pas que le ministre ait répondu exactement à la
question. Est-ce qu'il s'agit d'une cession, en bonne et due forme, du terrain,
et auquel cas, à quelles conditions? Alors, si le ministre me dit non,
je vais prendre sa parole et attendre les développements. Est-ce que
c'est non?
M. MASSE (Arthabaska): Il n'y a aucune cession de terrain.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): II n'y a aucune cession de terrain.
M. LE PRESIDENT: Affaires du jour. M. LEVESQUE: Article 4.
Projet de loi no 50
Comité plénier
M. HARDY (président du comité plénier): A l'ordre!
Projet de loi no 50, article 16. L'honorable député de Gouin.
M. JORON: Nous avons un amendement à apporter à l'article
16, avant...
M. LE PRESIDENT: Dois-je conclure que le nouvel article 16
proposé par le premier ministre est adopté?
M. JORON: Vous voulez dire que l'amendement du premier ministre est
adopté?
M. LE PRESIDENT: L'amendement du premier ministre qui change l'article
16. Vous voulez y faire des amendements par la suite?
M. JORON : Cela devient des sous-amendements.
M. BOURASSA: Le député n'est pas satisfait de l'amendement
que j'ai apporté, même si tous les éditorialistes de ce
matin disent que c'est raisonnable?
M. JORON: Disons que ça améliore un peu. Il y aurait moyen
de bonifier davantage. Avant de livrer le texte exact du sous-amendement que
nous aimerions apporter, j'aimerais au début vous en livrer la substance
et vous expliquer ce qui nous amène à proposer ce
sous-amendement. La substance viserait à remplacer la filiale
hydro-électrique en question, simplement par l'Hydro-Québec
elle-même, et voici pourquoi. Nous croyons qu'étant donné
l'expérience qu'a déjà acquise l'Hydro-Québec en la
matière, étant donné les problèmes
considérables de coordination et de planification que pose toute forme
de développement hydroélectrique, il est impensable ou du moins
il serait infiniment plus difficile de pouvoir faire ce développement de
la façon la plus cohérente et la plus économique possible,
si nous devions aboutir à avoir deux entités
intéressées dans le même domaine.
S'il est un domaine où les erreurs, les pertes de temps ou les
délais à cause d'un manque de planification peuvent coûter
très cher, c'est bien celui-là. En raison même de
l'importance du programme que l'on envisage, s'il est complété
nous aurons investi près d'un total de $7 milliards.
Précisément pour sauver le maximum d'argent, pour le rendre le
plus économique possible, tout l'exercice consiste à
étaler les investissements sur la plus longue période possible,
mais toujours en prenant soin de répondre à tout moment à
la demande d'électricité, mais simplement au moment où
elle se fait sentir.
En conséquence, cela devient un exercice de planification fort
compliqué. Il s'agit par exemple de construire de nouvelles
unités, une nouvelle centrale, mais aussi de s'assurer que
l'électricité qui en sortira arrivera sur le réseau au
moment même et en quantité à peu près suffisante,
mais pas plus, pour répondre à la demande cette
année-là. Cela demande la composition d'une cédule
considérablement compliquée.
C'est pourquoi et sans évoquer les mêmes arguments qui
à toutes fins utiles, avaient été défendus par un
autre gouvernement libéral en 1962, au moment où on nationalisait
les com-
pagnies privées d'électricité, l'argument de la
nécessité de n'avoir qu'un seul maître d'oeuvre dans le
domaine nous apparaît tout aussi fondé aujourd'hui qu'il
l'était à l'époque, sinon davantage, parce que ce sont des
travaux encore plus considérables que nous entreprenons et la
nécessité d'être très rigoureux en est d'autant
accrue.
Il y aurait moyen de concevoir toute cette affaire de
développement de la baie James comme étant centrée autour
de l'Hydro-Québec. Car après tout, remettons les choses à
leur place, qu'est-ce qui a commencé toute l'affaire? Qu'est-ce qui a
lancé le projet? Qu'est-ce qui a fait qu'on a mis de l'avant le projet
de développement de la baie James? Ce ne sont pas les richesses
minières en soi. Ce n'est pas pour y faire principalement un
développement minier que le gouvernement a décidé de
développer la baie James. Ce n'est pas non plus pour y
récupérer du bois que le gouvernement a décidé de
lancer ce projet et la motivation principale du projet n'est certainement pas
non plus le développement touristique.
Ce sont tous des accessoires. La chose centrale, la vraie raison pour
laquelle le gouvernement nous amène à la baie James, c'est tout
simplement la production hydro-électrique. Qu'est-ce qui amène le
gouvernement là? Est-ce que c'est un effort d'imagination? Est-ce une
décision, une volonté du gouvernement, une façon de
répondre, une invention dans le but d'un développement
économique? Non, ce n'est rien autre chose et rien de plus
compliqué que tout simplement la nécessité de
répondre à partir de 1977 aux déficits
d'électricité qui sont alors prévus. Qu'on le veuille ou
non, le gouvernement, quel qu'il soit d'ailleurs, est placé devant
l'obligation, tous les gouvernements ont été placés devant
le même dilemme et placés devant l'obligation de répondre
à ce déficit d'électricité. Ce sont les besoins
accrus, la demande accrue par les consommateurs d'électricité
eux-mêmes qui fait que le gouvernement soit obligé d'envisager une
façon quelconque de répondre à ces besoins.
Il a donc choisi d'aller à la baie James d'abord et avant tout et
principalement à cause du développement de production
électrique qui s'impose au Québec. C'est le départ de
l'affaire. De quelle manière irons-nous à la baie James?
Comment allons-nous greffer les accessoires que le développement
d'une région vierge va provoquer ou peut susciter dans le domaine des
mines, dans le domaine des forêts, etc? Le gouvernement a choisi
bien que nous ne partagions pas son avis de créer une
société de développement multidisciplinaire, si vous me
permettez l'expression. Nous avons prétendu, et nous continuons de
prétendre, que des mécanismes suffisants existaient
déjà, étaient déjà en place qui auraient
permis d'atteindre le même but, la même coordination, la même
planification sans nécessairement passer par la néces-
sité de créer une société nouvelle qui vient
compliquer les choses, etc.
Nous n'avons pas à refaire ce débat. Le principe ayant
déjà été accepté, il n'est plus permis
à ce stade-ci d'y revenir.
Il s'agit de savoir comment on va la concevoir, cette
société. Il serait donc possible, à notre avis, de
concevoir la société... Je vois que le premier ministre semble
faire mine de s'endormir, mais non, écoutez, cela va vous
intéresser... Pourquoi ne concevez-vous pas le développement de
cette région axé non pas sur la société de
développement en question le principe de cette
société a été accepté en deuxième
lecture, on ne peut donc plus la mettre de côté mais,
puisque la principale chose qu'on s'en va faire là c'est de
l'électricité...
M. BOURASSA: Avez-vous votre amendement qu'on le regarde un petit
peu?
M. JORON: Cela va venir. Mais vous me permettez de le justifier,
j'espère.
M. BOURASSA: J'ai hâte de voir...
M. JORON: Ne vous inquiétez pas, je n'abuserai pas.
M. BOURASSA: C'est toujours dans un même but
d'accélérer les débats.
M. JORON: Je vous le lirai en terminant mes propos, pour susciter un
certain suspense et vous inciter à écouter.
M.,BOURASSA: II n'y en a plus de suspense. Il est fait, le suspense.
Est-ce que je pourrais avoir l'amendement? J'ai l'impression qu'il peut
être illégal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Hier le député de Mercier nous a
donné les siens. On pourrait échanger ça.
M. JORON: En considération du fait que vous nous avez
envoyé les vôtres hier.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avec beaucoup de lenteur, d'ailleurs.
M. JORON: II y aurait moyen de concevoir, M. le Président, tout
ce développement axé autour non pas de la société,
mais de l'Hydro-Québec. Un maître d'oeuvre, l'Hydro-Québec,
s'en va à la baie James mettre sur pied, construire le
développement d'un nouvel aménagement électrique pour
répondre à nos besoins à partir des années 1977. On
n'a pas besoin d'un deuxième maître d'oeuvre. L'expertise et la
réputation acquise de l'Hydro-Québec à elles seules,
à sa face même, comme dirait le député de
Saint-Louis, devraient suffire pour écarter derechef l'idée d'une
nouvelle société
hydro-électrique au Québec. Nous prétendons
et nous ne sommes pas les seuls, vous le savez qu'il est inutile de
construire à côté une hydro parallèle, quels que
soient les liens qui les unissent, qu'on veuille prétendre ou non, on y
reviendra plus tard, que l'une est la filiale de l'autre, ne serait-ce que par
le fait que cela nécessite la création d'une entité
juridique nouvelle, d'une nouvelle corporation. Si elle est inutile en soi,
pourquoi ajouter uniquement ces frais additionnels? Déjà,
ça, on pourrait le sauver. L'Hydro existe, qu'elle aille faire le
développement de la baie James. Autour de ça, cependant, puisque
le premier ministre a choisi et puisque le principe en deuxième lecture
est accepté, puisque le premier ministre veut à tout prix une
société de développement pour la région pour se
donner des airs de modernisme dont le gouvernement a fort besoin, j'en
conviens, une société de développement qui se veut
à l'allure un peu nouvelle prétendant qu'il s'agit de mettre sur
pied une nouvelle forme d'intégration verticale, une nouvelle
méthode de faire la planification. Fort bien! Laissons au gouvernement
le droit à ses illusions. Cependant, autour de cette hydro pourrait
exister cette société qui, dans le domaine des mines, dans le
domaine du pétrole, dans le domaine des forêts, dans le domaine
d'un développement touristique et dans quelque autre domaine auquel on
ne peut peut-être pas penser à l'heure actuelle, viendrait
encercler l'Hydro pour s'occuper des retombées accessoires que
provoquera, que facilitera le développement hydro-électrique de
cette région.
Nous ne suggérons pas, M. le Président, et nous ne
pourrions pas le faire à ce stade-ci, d'écarter
complètement la société. L'ayant votée en
deuxième lecture, on est pris avec elle.
Maintenant, essayons de l'utiliser aux meilleures fins possibles et ne
venons surtout pas, parce qu'on est maintenant pris avec cette
société-là, compliquer la vie de l'Hydro, compliquer le
développement hydro-électrique au Québec. Servons-nous de
la société en question pour les fins accessoires, pour les
retombées que va provoquer le développement
hydro-électrique de cette région-là.
D est un argument sur lequel je voudrais insister un peu plus, dans le
domaine du financement, et c'est là je pense la raison peut-être
la plus fondamentale au niveau pratique en tous cas. Si le premier ministre
n'est pas sensible aux arguments d'ordre théorique ou au niveau des
principes, je pense bien qu'il sera sensible aux arguments d'ordre
financier.
Le premier ministre n'est pas sans savoir que pour le financement de
l'ensemble de ce projet-là, et même que s'il ne devait s'en
réaliser uniquement que certaines étapes, nous aurons
emprunté des sommes considérables et que nous aurons à
taxer au maximum aussi bien les marchés locaux que les marchés
étrangers, et principalement et surtout les marchés
étrangers.
On sait que c'est à New York qu'on ira parce que c'est là
que les capitaux sont les plus nombreux, c'est là que, depuis longtemps,
nous nous sommes établi une certaine réputation, c'est là
que nous sommes connus. L'Hydro a mis passablement de temps à faire sa
réputation sur les marchés new-yorkais, c'est acquis aujourd'hui,
c'est fait. Ce n'est pas une oeuvre facile, ça prend un certain temps,
ça prend dix, quinze, vingt ans avant de se bâtir une
réputation, avant que les titres, les obligations, les papiers de
l'Hydro-Québec soient connus sur ces marchés-là.
M. BOURASSA: Vous avez deux bases de financement, vous avez la filiale
avec ses actifs, vous avez l'Hydro-Québec, la société
mère. C'est un avantage considérable sur le plan du
financement.
M. JORON: Un instant, les actifs de l'Hydro sont
déjà...
M. BOURASSA: Je voudrais que le député tienne compte de
cet argument-là dans son objectivité temporaire.
M. JORON : Je tiens compte de cet argument mais quand 75 p.c. du capital
de l'Hydro est du capital emprunté, les actifs qui garantissent, si vous
voulez, moralement ou directement, quand il y a des garanties de
première hypothèque, ces actifs-à sont déjà
employés, vous ne pouvez pas donner trois fois la même chose en
garantie à une banque.
M. BOURASSA: Oui, mais le capital-actions de la
société?
M. JORON: Vous n'empruntez pas trois fois sur la même
garantie.
M.BOURASSA: Non, mais le capital-actions?
M. JORON: Les actifs actuels de l'Hydro servent
déjà...
M.BOURASSA: Le député ne comprend pas.
M. JORON: ... à garantir une dette de $2.6 milliards.
M. BOURASSA: II ne comprend pas.
M. JORON: Ne pensez pas que vous allez vous en servir une
deuxième fois...
M. BOURASSA: Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. JORON: ... parce que si vous voulez donner une garantie à une
banque, vous n'allez pas le donner à une deuxième banque.
M. BOURASSA: Oui, mais le capital-actions, le député ne
comprend pas.
M. JORON: Les garanties nouvelles que vous pourrez donner sont
basées sur les actifs nouveaux que vous allez construire.
M. BOURASSA: Pas nécessairement...
M. JORON: Et ne pouvant emprunter 100 p.c. de ces
investissements-là, vous allez être obligés d'y pomper, si
vous permettez l'expression, passablement d'équité.
M. BOURASSA: Ce n'est pas clair.
M. JORON: II va falloir au moins faire une base de $1.5 milliard ou
presque $2 milliards dans cette affaire-là. Je reprends mon argument, M.
le Président, j'étais à dire que l'Hydro sur une longue
période, s'était assuré une réputation enviable sur
les marchés financiers. Le premier ministre sait fort bien, s'il est
familier avec les marchés financiers, que ça prend du temps
à acquérir une réputation semblable.
M. BOURASSA: Cela n'a pas pris grand temps avec notre gouvernement, M.
le Président.
M. JORON: Vous n'y étiez pas pour grand-chose et la
réputation de l'Hydro a été construite bien avant. Mais
vous allez tant mieux pour vous bénéficier du
crédit que l'Hydro a mérité depuis bien des années,
avant même que vous soyez en politique d'ailleurs. Ces
crédits-là, pour arriver à ce que le crédit d'une
entreprise semblable soit bon, tel que le crédit de l'Hydro l'est
à l'heure actuelle, il ne suffit pas d'avoir de bons actifs à
donner en garantie, il ne suffit pas d'avoir de bons états financiers
à fournir.
Il faut aussi construire, et c'est ça qui est très long
à travers tout un tissu de relations personnelles pendant de nombreuses
années. Il faut construire son nom, sa réputation, devenir un
familier avec les prêteurs. La familiarité qui, avec le temps,
s'installe entre l'emprunteur d'une part et les prêteurs de l'autre,
facilite considérablement les choses. Il se bâtit, en d'autres
mots, une crédibilité. Cette crédibilité est
acquise maintenant pour l'Hydro, sauf qu'elle ne l'est pas du tout dans le cas
de l'Hydro-James. Si le gouvernement insiste pour que le développement
hydro-électrique à la baie James se fasse non pas directement par
l'Hydro-Québec mais par une nouvelle entité, on l'appellera
Hydro-James, par exemple, si vous voulez pour les fins de la discussion.
A Hydro-James, personne ne connaît ça.
M. BOURASSA: Hydro de James.
M. JORON: Si vous voulez. Le premier ministre veut faire une
argumentation linguistique maintenant?
M. BOURASSA: Non, c'est parce que c'est vous qui avez commencé
avec ça.
M. JORON: Heureusement, d'ailleurs, ç'a permis de vider...
M. BOURASSA: Cela a permis de démasquer votre manque de
sérieux dans le débat.
M. JORON: Cela a permis, M. le Président, de prolonger les
débats, soit. C'est vrai que ç'a prolongé les
débats. Mais pourquoi est-ce qu'il est souhaitable de prolonger les
débats sur un projet de loi aussi important? C'est pour, M. le
Président...
M. BOURASSA: C'est pour vous faire battre aux prochaines
élections.
M. JORON: ... éveiller l'opinion publique. C'est bon, ça
sert même le premier ministre et il ne s'en rend même pas compte.
C'est pour embarquer le monde dans ce que vous, vous avez appelé un
projet collectif et dans lequel personne n'est embarqué à ce
jour. Si vous voulez que le monde s'embarque, parlez-en et parlez-en longtemps
de la baie James. Parce qu'à l'heure actuelle, ça reste encore
dans les nuages et dans l'incertitude. C'est pour ça qu'on en parle, M.
le Président.
En tous cas, je reviens à mon propos.
M. BOURASSA: Rencontrez donc vos électeurs dans le comté
de Gouin. Vous allez voir ce qu'ils pensent de votre attitude.
M. JORON: En m'y rendant, justement, je traversais le comté de
Mercier, puisque c'est le comté voisin. Vous seriez surpris de savoir ce
qu'on en pense, dans Mercier également.
Le propos que je tenais, M. le Président, était à
l'effet que l'apparition d'un nouveau nom, d'une nouvelle entité, d'une
Hydro-James qui arrive sur le marché, inconnue sans passé
derrière elle, sans réputation, va forcément impliquer des
coûts de financement additionnels. Cela veut dire qu'on est
obligé, dans un certain sens, de partir à zéro, de
reconstruire une image, de se faire connaître, de rebâtir. Cela
prend du temps, parce que c'est quelque chose qui implique un tas de relations
interpersonnelles. C'est quelque chose qui prend du temps, c'est un effort
qu'on va être obligé de faire, qui va impliquer des coûts.
Ce qu'il y a de plus bête dans le fond, ce qui est le plus dommage, c'est
que, cet effort, on n'aurait pas besoin de le faire. Cette oeuvre est
déjà faite.
Si on voulait se servir de l'Hydro-Québec qui, elle,
bénéficie déjà de toute la
crédibilité qu'on va être obligé de construire
à nouveau pour l'Hydro-James. Pourquoi ce dédoublement? Pourquoi
être obligé de recommencer une deuxième fois ce qui est
déjà fait? Pour toutes ces raisons, M. le Président, et
bien d'autres que nous aurons sans doute l'occasion d'évoquer lors de la
discussion de ce sous-amendement, nous croyons que, d'une part, le premier
ministre n'a pas fait la preuve de la
nécessité de cette société de
développement. Mais je ne reviens pas là-dessus.
La société de développement, ayant franchi
l'étape de la deuxième lecture, on l'a maintenant. Alors, on va
tenter de l'utiliser à meilleur escient, aux meilleures fins. Mais ce
qui n'a pas du tout été démontré et encore beaucoup
moins par l'argumentation du premier ministre quant à la
nécessité de coordonner les mines, les forêts et la
nécessité, donc, de créer cette société pour
tout coordonner, c'est pourquoi, et c'est ça principalement qu'on
s'en va faire à la baie James dans le domaine de
l'hydroélectricité, a-t-on besoin là d'une nouvelle
entité? Cela n'a pas été démontré du tout,
M. le Président. Nous aimerions bien que le premier ministre nous
persuade que les coûts additionnels de financement, les embarras, les
ennuis supplémentaires que cette double structure, que cette nouvelle
hydro inconnue va nous faire...
Tous ces coûts additionnels que ce dédoublement va nous
faire subir, nous aimerions bien savoir pourquoi on sera obligé de les
payer. Qu'est-ce qui fait que nous avons absolument besoin d'une nouvelle
entité quand nous croyons que d'une part elle rend le financement plus
difficile, qu'au point de vue technique, elle n'apporte sûrement rien de
neuf parce que c'est une société qui n'existe pas encore, alors
que l'expérience et toute l'expertise tous les techniciens sont à
l'Hydro-Québec? Mais si tous les avantages, M. le Président, que
ce soit l'avantage de n'avoir qu'un seul emprunteur l'Hydro-Québec dont
la réputation est déjà établie, que ce soit
l'avantage d'avoir une Hydro-Québec qui a déjà fait la
preuve et des preuves éclatantes d'ailleurs depuis une dizaine
d'années surtout de son génie et de sa capacité de
réaliser des travaux de cette envergure... a ce moment-là
qu'est-ce qui reste comme argumentation? Où sont les arguments qui
justifient la nécessité de reconstruire une deuxième
Hydro. On n'en a pas entendu un jusqu'à présent. On a entendu des
arguments au sujet de la nécessité d'avoir une
société de développement. Bon! Cela c'est autre chose. La
nécessité de coordonner les différentes activités
que le développement de la baie James va susciter. D'accord! Remarquez
que ces arguments ne nous avaient d'ailleurs pas beaucoup impressionnés.
Mais, sur le sujet précis de la nécessité de créer
une deuxième Hydro, là-dessus on n'a rien entendu encore. Nous
aimerions bien savoir pourquoi il faut créer une deuxième hydro.
Il nous apparaît clairement qu'il serait beaucoup plus économique,
beaucoup plus simple et surtout beaucoup plus rationnel, beaucoup plus logique
de se servir au maximum, de se servir à plein d'un instrument
extraordinaire que nous avons déjà devant nous, qui est
là, si on veut tout simplement s'en servir.
Qu'on donne mandat à l'Hydro-Québec de faire le
développement hydro-électrique de la baie James, c'est tout. Ce
n'est pas plus compliqué que cela. Cela n'enlève rien à la
société de développement en question. La
société de développement pourra agir comme son principe
même le veut comme un organisme de coordination et de planification dans
le territoire devant tenir compte des différents aspects que ce
développement-là va provoquer dans le domaine des forêts,
des mines, etc. La société de développement continue
d'exister, bien entendu. Elle fait oeuvre de planification, mais ce n'est pas
elle qui s'occupe du développement hydro-électrique. Sa mission
serait principalement la coordination des activités, des
retombées ou des activités accessoires au développement
électrique.
C'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que,
appuyé par le député de Bourget, je proposerais le
sous-amendement suivant; remplacer à la quatrième ligne je
lis les trois premières:"... le développement des ressources
hydro-électriques". Les articles sont remplacés par... l'article
16 est devenu: "... le développement des ressources
hydro-électriques, la production, la distribution de
l'électricité dans le territoire ainsi que sa transmission seront
effectués par". A ce moment-là remplacer le reste du paragraphe
simplement par les mots: "... l'Hydro-Québec."
M. BERTRAND: M. le Président, nous avons là, je pense,
l'article clé du projet de loi. Tous admettent que s'il n'y avait pas de
développement hydro-électrique à la baie James, je crois
qu'on n'aurait pas eu tout ce branle-bas publicitaire, etc. au sujet du projet
de loi. C'est d'abord et avant tout le développement
hydroélectrique qui nous tient en état d'alerte de ce temps-ci et
il y a un conflit entre les oppositions et le gouvernement sur la
manière de réaliser ce développement.
Je crois que tous s'entendent à peu près et l'opinion
publique et les Oppositions sur la proposition à l'effet que
l'Hydo-Québec aurait pu développer les richesses hydrauliques
à la baie James suivant des étapes, en tenant compte des
recherches effectuées dans le domaine de l'énergie
nucléaire.
J'entends encore les propos du président de l'Hydro-Québec
qui disait qu'il était sage et prudent de procéder par
étapes, étant donné que l'énergie nucléaire
pouvait se développer très rapidement et que,
deuxièmement, cela pouvait devenir très rentable et probablement
plus rentable que l'énergie hydraulique.
Nous avons, dans toutes nos interventions et la presse
également, au Québec posé des questions au chef du
gouvernement. Le député de Gouin vient de reprendre la plupart
des arguments qui sont invoqués afin de conserver à
l'Hydro-Québec l'exclusivité du développement hydraulique
à la baie James. Ce qui veut dire le contrôle non pas à 51
p. c. mais à 100 p. c. Entité juridique, l'Hydro-Québec
s'occuperait, comme on l'a fait à la Bersimis, à la Manic, de
tout cet immense chantier, et à tous les points de vue. Je n'ai pas
l'intention d'entrer dans les
détails et de reprendre les arguments que vient d'apporter le
député de Gouin.
J'ai personnellement souvenir d'un débat à la commission
des Richesses naturelles, quand, il y a deux ans, mon collègue, le
ministre des Richesses naturelles, avait fait une déclaration qui
pouvait prêter à une certaine interprétation, même si
l'interprétation qu'on lui en a donnée n'était pas juste,
n'était pas vraie, n'était pas fondée. Mais quand
même! A la suite de cette déclaration, on nous a invités
à convoquer la commission parlementaire des Richesses naturelles. Il
s'agissait des travaux à la Manicouagan, travaux qui ont
débuté. Voici le problème précis qui s'est
posé à l'époque devant la commission parlementaire et
devant l'opinion publique québécoise. La question était la
suivante: A la Manic, qui va être le maître d'oeuvre? Qui va
réaliser ce chantier? Qui va le contrôler et le diriger? Qui va le
mener? J'entends encore les propos du chef de l'Opposition, à
l'époque le député de Louis-Hébert, M. Jean Lesage,
qui nous priait, avec une insistance forcenée, de maintenir
l'Hydro-Québec comme maître d'oeuvre à la Manic et de ne
confier qu'accessoirement, comme on l'avait fait d'ailleurs pour les autres
projets de la Manic, à des compagnies privées certains travaux,
je le répète, accessoires. Disons que, sur un chantier, où
il y avait une dépense d'environ $300 millions, on confierait pour $25
millions, $40 millions de travaux à l'entreprise libre. C'était
le problème.
Je me souviens j'étais premier ministre à
l'époque que dès le début de la séance, j'ai
invité les représentants de l'Hydro-Québec à nous
faire connaître leurs vues. Le président, de la manière
qu'on lui connaît, très objective, a exposé le
problème. Premièrement, il a dit qu'aucune décision
n'avait été prise jusqu'à ce moment, dans son esprit et
dans l'esprit des commissaires à l'effet que le maître d'oeuvre
devait être l'Hydro.
On avait, par contre, certains chiffres, certains examens qui avaient
été faits par des experts à l'effet qu'en certains cas des
projets qui devaient coûter je vais prendre des exemples
$100 millions auraient coûté plusieurs millions de plus, qu'il y
avait eu des écarts et que ça avait été
examiné de confier à l'entreprise privée, et non plus
à l'Hydro, la responsabilité pleine et entière. Aucune
décision n'avait été prise et, de plus en plus, on
s'acheminait vers une décision définitive, une recommandation
définitive au gouvernement pour que l'Hydro, à Manic, demeure le
maître d'oeuvre, et que l'Hydro ait la responsabilité
complète.
A ce moment-là, j'ai dit au président de l'Hydro que,
quant à moi, on n'avait pas fait preuve même si on avait
des éléments de dossiers qu'il en coûterait plus
cher, que ce serait plus économique de réaliser ce projet par
l'entreprise privée, que ce ne pouvait l'être par l'hydro, ses
ingénieurs, son équipe, celle qui s'est acquis le prestige et la
renommée que tous admettent non seulement au Québec, mais
ailleurs.
Cela c'était un problème précis. J'ai donc des
questions précises à poser moi aussi au premier ministre. Celles
qui nous ont été posées à l'époque. Est-ce
que le choix que l'on fait de ne plus confier à l'Hydro comme telle, qui
existe, qui est équipée, qui est dotée d'un conseil
d'administration aguerri, d'une équipe également qui a du nom, du
prestige je ne reprends pas les propos du député de Gouin,
excepté pour les résumer ...
Est-ce qu'une des raisons pour lesquelles on veuille à l'heure
actuelle créer cette filiale, ce n'est pas un moyen
détourné j'aimerais qu'on nous le dise franchement,
honnêtement, la vérité ça délivre
qu'on le dise? Est-ce que l'on veut par cette filiale adopter de nouveaux
modes, nous éloignant dans ce domaine-là des voies classiques,
suivant l'expression utilisée par le premier ministre?
Est-ce que l'on veut que la filiale HydroQuébec-baie de James ait
la liberté de confier la responsabilité de la construction des
barrages du développement hydro-électrique à des firmes
privées? Au génie privé? Est-ce que l'on veut mettre de
côté les ingénieurs de l'Hydro? Ce sont des questions
honnêtes de la part du député de Gouin, de ma part, et de
la part des autres collègues.
Nous voulons des réponses. J'espère bien qu'on ne nous
arrivera pas avec des réponses enfantines: "la Saint Glin-Glin"; "c'est
non". On dirait que le premier ministre sent le besoin, pour affirmer son
autorité, de s'autosuggestion-ner et de se dire: II faut que je dise
non, ainsi j'affirme mon autorité. On dirait qu'il a besoin, un peu
comme quelqu'un qui traverse un cimetière de se dire: Je n'ai pas peur,
moi. C'est un peu enfantin.
Qu'on ne soit pas surpris, si la discussion, et en deuxième
lecture et ailleurs, soit un peu longue. Nous n'avons pas de réponses.
Sans doute, et je le reconnais, il y a des amendements qui sont
apportés.
Le chef de notre parti, mes collègues en ont
suggérés qui ont été acceptés.
J'espère que le premier ministre en acceptera de la part de toutes les
oppositions. Cela crée tout un autre climat, la position de celui qui se
retranche, qui s'entête et qui dit non. Quand il a dit non, il est
content. Là, je suis quelqu'un, là j'ai montré que j'ai de
l'écorce. Je deviens le Trudeau québécois. Autrement dit:
II a son voyage!
Donc, à toutes ces questions, à celles que j'ajoute, on
doit fournir des réponses. Qu'on ne vienne pas ensuite dire: Moi, j'ai
nommé le président de l'Hydro à la société
mère. Qu'on ne leur fasse pas porter des responsabilités qui ne
relèvent pas d'eux. Lorsqu'il s'agit de décisions politiques,
qu'on ne les fasse pas porter par ceux qui acceptent de porter un fardeau
déjà lourd et qui le font, par contre, très
allègrement, très objectivement et avec beaucoup
d'intégrité. ... Si à l'époque, lorsque le
problème s'est
présenté devant la commission des Richesses naturelles, on
nous avait apporté un dossier qui, de l'aveu d'ailleurs des
autorités de l'Hydro n'était pas complet éloquent,
etc. c'est le gouvernement qui aurait pris la décision et qui aurait dit
à l'Hydro: Procédez de telle manière, cela n'a plus de
sens. Si c'est ça que s'apprête à faire le premier
ministre, qu'il ait l'honnêteté et la franchise de le dire devant
les représentants et de fournir les raisons, pas des raisons de saint
Glin-Glin et abracadabrantes, des raisons raisonnables. Nous sommes des hommes
raisonnables, nous l'écouterons.
Donc, premièrement, pour répondre et reprendre la question
du député de Gouin, pourquoi n'est-ce pas l'Hydro à 100
p.c? Le député de Gouin a parlé du financement. On en a
parlé à la commission des Richesses naturelles l'autre jour. Le
président de l'Hydro nous a dit que l'Hydro-Québec était
capable de procéder au financement de cela, comme l'Hydro-Québec
a procédé au financement de Manic, de Bersimis, comme
l'Hydro-Québec a procédé au financement dans son
association avec Churchill Falls, financement pour la construction de sa ligne
hydro-électrique et tout ça. Ils n'ont pas eu de
problème.
Cela deviendrait fastidieux si je continuais à reprendre les
propos que nous avons déjà échangés en
deuxième lecture. Nous l'avons fait à plusieurs reprises depuis.
Ce que nous voulons ce sont des réponses. Y a-t-il quelqu'un du
côté du gouvernement, le ministre des Richesses naturelles en
particulier, qui a la responsabilité devant le Parlement, de
l'Hydro-Québec? Même si c'est une société de la
couronne, le ministre des Richesses naturelles doit répondre devant
nous. C'est lui qui a prêté serment, c'est dans l'exercice de ses
fonctions et c'est son devoir d'éclairer la Chambre. Cette
décision de créer une filiale est-elle venue à la suite de
recommandations du ministre? Si oui, sur quoi s'est-il basé pour
recommander au premier ministre et à ses collègues de permettre
la création d'une filiale Hydro-Québec? A toutes ces questions,
j'invite le ministre des Richesses naturelles à répondre d'une
manière intelligente et complète.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, avant la réponse de mon
collègue, on me permettra une participation dans ce débat. Je
vais tenter, le plus brièvement possible, de répondre aux
questions précises, directes que le député de Missisquoi a
soulevées ainsi que tenter non pas d'engager un dialogue mais de
répondre le plus particulièrement possible aux questions
soulevées par le député de Gouin.
Je pense que de la part du député de Gouin il y a encore
aujourd'hui une certaine incompréhension de l'approche du gouvernement
à ce projet. Je n'ai pas l'intention de reprendre le débat de
deuxième lecture. Mais qu'il me soit permis d'insister sur au moins un
point. C'est qu'il nous a toujours paru essentiel que, dans le
développement de cette région, particulièrement dans ce
développement hydro-électrique, contrairement à ce qui est
survenu pour l'aménagement des rivières Manicouagan et Outardes,
il était nécessaire, dans le type de gestion, le type
d'organisation responsable, de faire entrer deux composantes.
Avant de détailler ces deux composantes, je rappelle toujours que
le premier principe du gouvernement était de confier exclusivement
à des institutions complètement québécoises cette
responsabilité de gestion. Mais je pense que ce principe est bien connu
à la fois à l'Hydro-Québec et à la
société. Cela demeure quand même des institutions d'Etat,
des institutions typiquement québécoises.
Mais une fois ce principe accepté, nous avons tenté
d'ajouter deux composantes responsables de ce développement. Une
première composante qu'on retrouve dans chacune des filiales et qui
tente d'amener, de mobiliser les énergies de spécialisation, les
ressources de spécialisation que pouvait posséder le
Québec dans les différentes disciplines, dans les
différentes ressources impliquées. C'est ainsi qu'à la
filiale hydro-électrique on a un moyen direct de mobiliser les
énergies de l'Hydro-Québec dans la filiale qui est responsable de
ce projet hydroélectrique.
Mais également, et c'est là que je trouve qu'il y a une
certaine incompréhension du député de Gouin, en dehors de
ces compétences sur le plan de la spécialisation dans un domaine
donné, nous voulons également introduire des
préoccupations d'ordre de l'intégration des ressources multiples,
c'est-à-dire d'ordre de développement régional
intégré, d'ordre d'approche multidisciplinaire aux
problèmes. Cette composante implique qu'en dehors de la composante
spécialisation représentée par l'Hydro-Québec
viendra un autre apport qui, lui, ne dédaignera pas cette
spécialisation de l'hydroélectrique mais aura une ouverture plus
grande, sera préoccupé par des problèmes qui ne seraient
pas les problèmes uniques de l'Hydro-Québec.
Je prends un exemple pour illustrer mon argumentation. Il est
évident que lorsque nous avons eu l'aménagement des
rivières Manic et Outardes et que le maître d'oeuvre était
l'Hydro-Québec, la conception et la planification étaient la
responsabilité de l'Hydro-Québec. La solution technique qui a
été retenue, le financement qui a été retenu,
l'échéancier qui a été retenu n'avaient qu'un seul
but, dans l'intérêt du Québec: satisfaire les
préoccupations de l'Hydro-Québec. Sans porter de blâme, je
pense qu'on peut dire qu'il est possible, dans tous les cas de
développement intégré de régions, que la solution
optimum pour l'ensemble de la région ne soit pas nécessairement
la solution optimum du point de vue hydroélectrique. Il est possible
peut-être qu'aux rivières Manic et Outardes on ait
retrouvé un tel cas que dans un cas donné ce qui est
la
meilleure solution sur le plan hydro-électrique,
c'est-à-dire de pouvoir produire de l'énergie au moindre
coût, ne soit pas nécessairement la meilleure solution si on tient
compte de critères additionnels autres que des critères de
production d'énergie, si on tient compte de critères
d'écologie, si on tient compte de ressources minières, de
ressources forestières et qu'il soit préférable d'utiliser
la deuxième solution.
Je m'explique pour ce qui est du projet donné de la baie James.
C'est là une discussion théorique pour illustrer mon point de
vue. Il est bien connu que, sur le plan de la répartition des richesses
autre qu'hydro-électriques, le territoire n'est pas partagé d'une
façon égale. Il est bien connu que la partie sud, à cause
des conditions climatiques et géologiques sur le plan minéral et
sur le plan forestier, possède beaucoup plus de richesses qui
mériteraient d'être développées que la partie nord
où le climat ne s'y prête pas et où la
végétation, le développement des forêts n'est pas
tellement poussé.
Il est donc possible que, du point de vue strictement
hydro-électrique cela ne veut pas indiquer un rapport
préliminaire d'étude, c'est simplement théorique de ma
part la meilleure solution soit un développement axé
surtout sur les rivières du sud mais que si on tient compte d'autres
richesses il soit alors préférable de prendre plutôt une
deuxième solution du point de vue hydro-électrique qui serait
celle des rivières du nord.
C'est une illustration très brève, M. le Président,
simplement pour voir que, dans chacune de nos filiales, nous avons tenté
d'amener deux composantes. Une première composante qui, je le
répète, est de mobiliser les ressources, la
spécialisation, les connaissances spécialisées que
possédait l'Hydro-Québec.
La deuxième composante nous vient par le biais de la
société, qui va donner au conseil d'administration de la filiale
cet élément d'approche multidisciplinaire au développement
des ressources.
Je pense que si nous acceptions l'amendement du député de
Gouin, nous nous retrouverions dans la même condition qu'à
Manic-Outardes où, parmi ceux qui avaient à prendre des
décisions, je ne pense pas qu'on avait des préoccupations autres
qu'hydro-électriques. Je ne les en blâme pas parce que leur mandat
n'était pas de se préoccuper d'un développement
régional. C'était de produire de l'électricité au
coût le plus bas et suivant des exigences qui relevaient d'eux
uniquement.
M. le Président, il faut également se rappeler, bien que
le texte du projet de loi soit très précis là-dessus, que
cette nouvelle filiale sur le plan de la production hydro-électrique a
également, en matière d'énergie, des préoccupations
qui débordent le cadre de l'Hydro-Québec. Le mandat de
l'Hydro-Québec, par son acte constitutif, par la législation qui
a créé cette société d'Etat, est strictement, il
faut lire le texte pour s'en rendre compte, de satisfaire aux besoins
énergétiques du Québec.
Or, nous avons évoqué dans les débats de
deuxième lecture cette problématique qui se développe en
Amérique du Nord, c'est-à-dire cette demande accrue
d'énergie et une évolution sensible des prix aux consommateurs,
particulièrement dans les Etats de la Nouvelle-Angleterre, nos voisins.
Nous y avons vu là je ne voudrais pas en faire la charpente, la
pièce clé de notre législation un aspect secondaire
qui mérite d'être étudié. Il se peut qu'en vendant
de l'électricité dans un contexte donné, le Québec,
sur le plan économique, retire des avantages.
Nous avons évoqué à la commission parlementaire
le député de Gouin lui-même l'a évoqué
une possibilité d'un différentiel de 2 mills entre le
coûts de production et les coûts de vente. Je pense que les
articles qu'on publie actuellement dans la plupart des journaux technique et
financiers de la Nouvelle-Angleterre nous indiquent clairement qu'il se
pourrait fort bien que le différentiel soit beaucoup plus substantiel.
La pénurie d'électricité et les difficultés que
connaît présentement la région de New York sont telles que
nous avons ici au Québec la possibilité de produire quelque chose
qui est très en demande, qui a un marché assuré et qu'on
veut absolument acheter, peu importe le coût. On comprend bien que pour
l'économie des Etats de la Nouvelle-Angleterre, même si on double
ou triple le coût, cela ne change pas beaucoup le coût
général de production, particulièrement dans l'industrie
manufacturière, si on excepte des industries comme une aluminerie pour
l'Alcan ou d'autres industries très particulières.
C'est donc dire que le schème du passé ne peut
peut-être pas se continuer dans l'avenir. C'est donc dire qu'il est
possible que nous soyons dans une situation donnée où le
Québec peut dire : Très bien, nous pouvons vous vendre de
l'électricité, peu importent nos coûts, on sait que vous
êtes intéressés à 15 mills, 17 mills, 18 mills ou 20
mills, même si cela ne nous coûte que 10 mills.
M. JORON: Est-ce que le ministre me permet une question?
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. JORON: Je ne conteste pas le fait qu'il puisse exister une demande
pour de l'électricité en dehors, ni même que cette demande
puisse exister à un prix relativement élevé qui ferait une
marge bénéficiaire peut-être plus substantielle que les 2
mills dont il avait été question à la commission
parlementaire. Mais vous allez probablement admettre avec moi que tout le sens
de la discussion est de mettre en relation les profits qu'on peut en tirer avec
les investissements qui sont requis pour produire ce profit.
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. JORON: C'est une question de rapport de capital à profits. Si
on s'aperçoit que ce sont des investissements trop coûteux pour ce
qu'on peut en tirer, cela ne vaut pas la peine de les faire.
M. SAINT-PIERRE: C'est un jugement qui, je pense bien, reviendra aux
administrateurs compétents qui auront à prendre cette
décision et qui, périodiquement, devant une commission
parlementaire, devront expliquer que face à un marché
d'exportation, on a décidé d'avoir un programme
accéléré. Là, on devra donner les avantages et
prouver aux parlementaires qu'effectivement la décision a
été juste, que c'est une bonne décision. Ce n'est pas dans
un projet de loi qu'on peut le faire.
Je dis ceci non pas pour souligner qu'il serait pertinent ou
approprié pour la société de s'engager dans l'exportation
d'énergie, mais simplement pour souligner que cet aspect d'exportation
d'énergie je m'excuse, je finis ma phrase, M. le Président
déborde le cadre constitutif de l'Hydro-Québec qui
le président nous l'a déclaré dans des discussions
privées jusqu'ici a toujours considéré que son
rôle, peu importent les possibilités à l'extérieur
du Québec, conformément à la législation
créant l'Hydro-Québec, a toujours considéré son
rôle comme devant satisfaire les besoins du Québec.
Et nous disons qu'il y a une problématique, qu'il y a un
développement fort intéressant qui permettrait peut-être,
qui déborde ce cadre de l'Hydro-Québec, et qui justifie d'avoir,
dans la société responsable sur le plan hydro-électrique,
un élément de l'extérieur, un élément
nouveau de la société.
M. BERTRAND: Est-ce que le député de Verchères sait
que, lors des séances de la commission parlementaire, M. Giroux a bien
répondu à ces problèmes, que s'il s'agissait d'exporter de
l'électricité, il ne recommanderait pas le projet? C'est d'abord
et avant tout pour répondre aux besoins domestiques et,
deuxièmement, ça ne pourra être que pour une
quantité très minime c'est ce que M. Giroux a
déclaré alors que l'argumentation du député
de Verchères porte sur une possibilité d'exportation immense.
Je pense que son argumentation n'est pas fondée du tout sur les
faits.
M. SAINT-PIERRE: Mais on se rappelle, qu'à la commission
parlementaire et il y a encore eu des conférences
récemment les dirigeants de l'Hydro-Québec nous ont
clairement laissé entendre cependant que les possibilités
d'exportation à un marché attrayant étaient
illimitées.
On nous a dit que si on pouvait vendre, demain matin, à
l'Hydro-Ontario, un bloc d'énergie sur une période de dix ans, on
trouve acheteur. Les tendances sont à l'effet que la chose
s'accentue.
Je retiens cependant du député de Missisquoi qu'il a
raison de dire que l'exportation n'est pas le but premier. On va surtout tenter
de satisfaire les besoins de l'Hydro-Québec. La proportion cependant
et là j'insiste pourra être reliée à
d'autres développements entrepris par l'Hydro-Québec. C'est
évident que l'Hydro-Québec représentée dans la
société, que l'Hydro-Québec majoritaire dans la filiale
pourra alors considérer son rôle accru et que, dans des
circonstances favorables, elle pourra dire qu'il est avantageux
même compte tenu du financement requis de tenter d'exporter le
plus possible d'électricité puisqu'il y a un profit net fort
intéressant à réaliser. Et que, dans cette perspective, on
développe davantage d'autres rivières, on prenne d'autres sites
possibles ou bien des sites thermiques ou des sites nucléaires
là on parle de la période de 1970 à 1982 permettant
une vente plus substantielle d'électricité à
l'extérieur.
M. le Président, ça m'apparaît un point important
ça. Parce que souvent, et c'est le reproche dans l'analyse des projets
hydro-électriques à travers le monde, on a reproché
à ceux qui en étaient responsables d'être uniquement
préoccupés par des considérations d'ordre
énergétiques, uniquement préoccupés de trouver la
solution pour tenter d'avoir le plus d'électricité à
moindre compte, peu importent les conséquences sur le plan
écologique, peu importent les conséquences sur des richesses
forestières et des richesses minières.
Je pense que, par l'article 16, on tente justement de pallier ceci en
ayant deux composantes laissant majoritairement l'Hydro-Québec avoir une
voix déterminante et l'obligeant d'être sensible à d'autres
arguments sur le plan écologique, sur le plan d'autres recherches
disponibles.
On reproche, dans bien des cas, d'avoir construit des barrages qui ont
créé d'immenses lacs sans s'être préoccupé de
tenter de favoriser un développement touristique. Dieu sait le nombre
d'endroits qui auraient pu, à un moindre coût, être
aménagés pour permettre à la population un accès
à des endroits récréatifs, offrant des nappes d'eaux
intéressantes, offrant, enfin, de la verdure, de la nature.
On tente justement d'avoir par le biais de cette filiale, où
l'Hydro-Québec est majoritaire, cette préoccupation, cette
approche multidis-ciplinaire du problème. On a soulevé le plan du
financement. Le premier ministre a esquissé un chiffre, dans ce domaine,
pour un investissement de $7 milliards. Le financement il faut bien s'en
rendre compte ce n'est pas comme un prêt hypothécaire d'un
particulier sur une maison. Ce n'est pas nécessairement grever l'actif
que peut représenter un développement immobilier, enfin
même la maison par rapport au prêt obtenu. Ce sont plusieurs
considérations, et là je suis certain que le député
de Gouin en connaît autant que moi.
C'est, d'une part, le sérieux des gens qui sont derrière
le projet et, d'autre part, l'analyse
poussée des études qui ont déterminé la
rentabilité, qui ont déterminé jusqu'à quel point
on peut avoir confiance que, dans un rapport préliminaire, le
contrôle des coûts, le contrôle de l'échéancier
seront respectés. C'est un peu un ensemble de facteurs ainsi qui
déterminent les possibilités de financement.
Qu'on se rappelle que, pour le projet des chutes Churchill, une
capitalisation de $83 millions a permis quand même un financement de $990
millions.
L'analyse des différents projets au monde indique clairement que,
pour une compagnie d'utilités publiques impliquée dans un projet
de cet ordre, suivant les conditions du marché financier, bien
sûr, mais suivant d'autres facteurs de solidité, le rapport entre
la capitalisation et l'investissement total a pu aller de 10 à 20,
c'est-à-dire un rapport de 10 à 20, c'est-à-dire que, pour
une capitalisation de $100 millions, on a pu obtenir 20 fois plus.
Nous y voyons un apport, du fait que nous allons avoir deux sources
quand même de solidité. Il y aura d'une part
l'Hydro-Québec, par le biais de sa filiale, qui elle aussi aura ses
actifs et qui apporte quand même une solidité voulue. On a fait
voir qu'une nouvelle compagnie pourrait peut-être freiner l'enthousiasme
des marchés financiers. Je pense que l'argument est faux. Avec une
nouvelle compagnie, il s'agit toujours de savoir qui est derrière la
compagnie. C'est évident que si, demain matin, trois individus
créent une nouvelle société et se rendent à
New-York avec un plan fantastique comme on l'a peut-être un peu vu
déverser de l'eau douce dans le lac Supérieur, on peut
avoir certaines hésitations. Je pense qu'une nouvelle compagnie qui a le
support du gouvernement de la province, dont l'Hydro-Québec
détient la majorité des actions, représente quand
même un facteur de solidité et pourra escompter recevoir un
accueil très favorable dans les milieux financiers. Les discussions
préalables dans ce secteur l'indiquent très clairement.
On indique, et la déclaration récente du président
de la Prudential l'indique aussi d'une façon assez éloquente, la
législation n'est pas adoptée, la compagnie n'est pas
formée et déjà on a assez foi dans le projet et assez foi
à la lumière des expériences pour déclarer les $183
millions. Les $183 millions, il ne faut pas les relier au projet de Churchill
Falls et dire qu'on était prêt à financer un
cinquième et que demain on ne sera pas prêt.
M. JORON: II a dit $125 millions et pas plus.
M. SAINT-PIERRE: C'est peut-être justement la nature même
des placements que la compagnie peut envisager, ce n'est pas un
témoignage de manque de confiance.
M. JORON: C'est le plus gros prêteur au monde.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je voudrais apporter un autre
argument à savoir pourquoi nous n'avons pas donné le contrat
uniquement à l'Hydro-Québec et pourquoi une filiale a
été créée. C'est que, par le biais de la
société, on a quand même ouvert la porte à un
financement impliquant l'ensemble des Québécois, un financement
qui ne serait pas obligatoire, mais une possibilité pour l'ensemble des
Québécois de participer au capital-actions de la
société. Si nous laissions, du plan de la plus grande des
compagnies à l'ensemble de l'Hydro-Québec, c'est l'ensemble des
Québécois qui se trouvent privés de pouvoir participer
ce n'est pas une obligation de la possibilité pour eux
d'être impliqués dans le développement, d'y participer
financièrement. Les résultats que le ministre des Finances a
obtenus dans sa campagne d'obligations de l'automne dernier laisse quand
même prévoir que si on sollicitait des Québécois une
participation financière volontaire à ce projet, on peut
s'attendre à récolter sûrernent plusieurs millions de
dollars.
On a soulevé un autre point et je veux simplement le
mentionner non pas que je veuille m'en faire un défenseur
acharné comme certains ont voulu le prétendre, et je prends pour
moi les propos qu'on retrouve dans un éditorial de ce matin lorsqu'on
parle de l'entreprise privée et de l'entreprise d'Etat. C'est M. Ryan
qui disait: "Au nom de quel principe sacré eût-il fallu
réserver à de seules entreprises d'Etat toute activité
dans ce territoire? " Je voudrais en quelques mots répondre aux propos
tenus par le député de Missisquoi. Il n'y a théoriquement
au départ aucun principe qui nous dit qu'une formule est
préférable à l'autre. Chaque fois, comme ce fut le cas
pour Manic-Outardes, c'est une question de jugement où on doit demander
des comptes à ceux qui ont pris la décision. Il me semble
qu'à l'avance on ne puisse pas dire qu'un secteur semble
préférable à l'autre secteur, c'est toujours une question
de jugement.
Ce qu'il faut se rappeler, c'est que dans la condition actuelle
où sont les choses, ce sera quand même comme pour Manic-Outardes
les dirigeants de l'Hydro-Québec qui auront une part majoritaire et qui
devront décider un peu quel est le rôle de la filiale. Le
rôle de la filiale ne se mesure pas uniquement en fonction du projet, il
devra et il ne faut pas l'oublier se mesurer aussi en fonction
des autres projets que l'Hydro-Québec pourrait avoir en matière
d'immobilisations.
On sait qu'au cours des dernières années, à cause
de l'apport de l'énergie des chutes Churchill où
l'Hydro-Québec n'a pas été tellement impliquée dans
la phase de la conception ou de l'exécution des contrats, cela a pu
donner l'impression d'un certain ralentissement. Cet apport d'énergie
devant être terminé bientôt, il faudra que
l'Hydro-Québec se lance, à l'extérieur même des
programmes de la baie James, dans un programme d'immobilisations important qui
nécessitera de mobiliser une partie
même de ses effectifs. La décision se prendra pour quel
titre, quel rôle on donnera à cette filiale. Est-ce que cette
filiale doit avoir, compte tenu de l'analyse de tous les facteurs, le
rôle plutôt d'un client averti, c'est-à-dire qu'on prend
à l'intérieur de l'Hydro quelques personnes clés dans les
domaines donnés, qu'on va peut-être chercher à
l'extérieur, non pas dans l'entreprise privée, à base de
contrat, mais par recrutement, des Québécois qui ont une
compétence à offrir dans une ou l'autre des matières et
qu'on forme une société qui agisse alors comme client averti
vis-à-vis de quelqu'un d'autre, confiant à l'entreprise
privée le soin de gestion, les soins d'exécution ou même
partager.
Ou peut-être que ces mêmes gens et là
j'insiste, ce n'est pas le gouvernement qui dicte cela, mais les
administrateurs de la filiale où l'Hydro-Québec a un
intérêt majoritaire choisiront à la suite de
l'analyse de tous les facteurs, une autre formule dans laquelle on dira que la
société sera responsable de la conception et de la gestion du
projet. Comme elle aura peut-être trop d'ouvrage, elle pourra donner des
sous-contrats au secteur privé, mais des sous-contrats très
délimités, plutôt petits, et qui ne seront pas
reliés à la gestion, au contrôle des coûts, au
contrôle des cédules, ou à la planification globale du
projet.
Encore une fois, lorsque la société on l'a vu et le
gouvernement est très ouvert devra comparaître devant une
commission parlementaire, on pourra lui poser des questions, comme on en a
posé à l'Hydro-Québec, au sujet de Manic 3, sur le choix
fait par l'Hydro-Québec dans cette hypothèse.
Il faudra aussi mentionner, M. le Président c'est un
dernier point que j'aimerais souligner le fait que ce projet je
pense que même les plus ardents défenseurs de l'hydraulique
doivent le reconnaître m'apparaît quand même
très très rentable. C'est évident que sur le plan
hydro-électrique, ce sera un des derniers grands projets il
s'étend quand même sur une période de douze ans
entrepris par l'Hydro-Québec. Lorsque nous serons en 1980 ou 1982,
peut-être même avant, mais en 1980 ou 1982, nous
seronssûrement devant le dilemme, contre toutes les autres provinces,
d'avoir uniquement devant nous des possibilités pour le thermique ou des
possibilités pour le nucléaire.
Je vois un certain avantage, dans cette phase terminale de
l'Hydro-Québec en matière d'hydro-électricité,
à confier à cette filiale la nécessité de mener le
projet à terme et de bénéficier de l'expérience de
l'Hydro-Québec, en même temps permettre à
l'Hydro-Québec de se préparer à la deuxième
étape, c'est-à-dire le recyclage de son personnel, en fonction de
données techniques complètement différentes,
c'est-à-dire recycler son personnel en vue de la réalisation de
projets complètement différents des 95 p.c. des projets
réalisés à ce jour par l'Hydro-Québec,
c'est-à-dire des projets thermiques et des projets
nucléaires.
J'y vois donc l'avantage de tenter de mobiliser les ressources de
l'Hydro-Québec dans l'électricité, dans ce projet terminal
et de recycler son personnel de la maison mère de l'Hydro-Québec,
dans des projets thermiques et nucléaires, en fonction de ce qui vient.
Evidemment, il y aura toujours des projets hydrauliques entre temps je
pense au projet de Saint-Joachim, de réserve pompée, qui quand
même n'est pas exactement du domaine hydraulique et qui commence à
s'apparenter à d'autres formes de types d'énergie.
Je ne sais pas si cela peut calmer les appréhensions du
député de Missisquoi ou si cela répond à certaines
des questions. S'il y en a d'autres, cela me fera plsisir d'y répondre.
Peut-être, mon collègue des Richesses naturelles, a-t-il d'autres
points à soulever?
M. MASSE (Arthabaska): Je pense que le ministre de l'Education a
cerné suffisamment le problème, en ce qui concerne le projet
hydroélectrique et le développement de la baie James. Je pense,
comme je le déclarais en deuxième lecture, qu'on oublie trop
facilement que cette société a une fonction qui est autre
qu'uniquement le développement hydro-électrique, qui est en terme
de développement intégré ou de développement
global. Si l'Hydro-Québec devait effectuer seule l'aménagement
hydroélectrique, où serait le lien pour la coordination
nécessaire? Quelle coordination pourrait exister? On oublie trop souvent
cet aspect global. On a dit au député de Gouin...
M. BERTRAND: Le ministre me permet-il de lui faire une remarque?
Supposons que la société-mère demeure, le premier ministre
a annoncé qu'un représentant de l'Hydro sera dans la
société-mère, parce que la filiale on ne joue pas
sur les mots c'est le développement hydro-électrique,
selon le texte actuel et les amendements.
La coordination qu'a en vue le premier ministre, que nous recherchons
d'une autre manière et qu'il recherche par la société,
s'effectue au sein de la société-mère où l'Hydro
sera représentée. Dès le départ, je pense que
l'argumentation, autant du député de Verchères que du
ministre porte à faux, sur ce point-là.
M. BOURASSA: La filiale aussi, il faut que ça se retrouve.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. le député de Missisquoi.
Je ne suis pas capable de partager ce point de vue-là, c'est la
même chose que le lien entre une compagnie de portefeuille et une
filiale. Il faut quand même que la compagnie de portefeuille ait une
certaine participation dans les délibérations de la filiale, sans
ça elle ignore tout ce qui se passe.
M. BERTRAND: Cela ne dérange absolument rien. Je ne veux pas
intervenir dans le discours du ministre des Richesses naturelles,
mais nous pourrons tantôt aller d'une manière plus
précise.
M. BOURASSA: C'est un principe de gestion qui me parait assez
fondamental.
M. MASSE (Arthabaska): Le député de Gouin ce matin a
parlé de réseau de 1'Hydro, que le réseau soit
intégré avec celui de l'Hydro, qu'il faut lorsqu'il y aura
livraison à tel point, que ce soit selon les mêmes méthodes
de transmission. Je pense que cela, comme les problèmes de
télécommunication qui ont été soulevés hier,
ne pose pas de problème, même actuellement, en ce qui concerne,
par exemple, les différents réseaux et les réseaux de
télécommunication qui pourront exister à
l'intérieur du territoire.
L'Hydro est dans la filiale par un de ses commissaires siégeant
au conseil de la société d'ailleurs le premier ministre
l'a dit hier, mais ce n'est pas inclus dans le texte. A mon avis, ces questions
qui ont été soulevées, sont des questions très
mineures qui ne posent pas de problème.
Le député de Gouin a parlé des coûts
additionnels à cause du dédoublement, de création de
filiales. Au contraire, c'est justement à cause de l'existence des
filiales, que nous n'augmenterons pas les coûts. Nous augmentons la
rentabilité du projet davantage par le développement minier, par
le développement des forêts, par les préoccupations
écologiques, le développement touristique etc, et on pourrait en
ajouter. Au contraire, cela peut réduire les coûts plutôt
que les additionner.
En somme, le ministre de l'Education a fait un tour assez
général mais aussi précis de la question que le
député de l'Opposition pose et je ne voudrais pas ajouter
davantage. Je m'excuse auprès du député de Bourget.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.
M. JORON: Si vous me permettez en vertu de l'article 270, j'aimerais
rétablir des faits pour la bonne compréhension. Je pense que le
ministre m'a mal compris.
Quand je parlais du fait qu'il y ait deux entités et que
ça posait des problèmes de coordination, ce ne sont pas des
problèmes d'ordre technique, de la livraison
d'électricité...
M. MASSE (Arthabaska): Vous avez mentionné des coûts
additionnels.
M. JORON: Le problème que je visais, ce n'était pas le
problème précis et technique de la livraison même de
l'électricité et de la coordination des réseaux.
C'est le problème suivant: Si l'Hydro a, dans le reste du
territoire, à répondre à une demande X, il ne faudra pas
que la filiale à ce moment-là ait généré une
capacité de production plus grande que ce que l'Hydro va être
capable d'acheter de façon à être prise avec des surplus.
En d'autres mots, il faut que la filiale construise sa puissance additionnelle
au même rythme que l'augmentation de la demande de l'Hydro, de
façon qu'on ne se réveille pas avec une capacité
excédentaire qui corresponde à du capital inutilisé. Ce
n'était pas le point d'ordre technique.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bourget.
M. LAURIN: Depuis la reprise du débat ce matin, nous entendons
des interventions sérieuses, étoffées qui font, je crois,
avancer le débat. J'en profite pour dire à quel point cela nous
change des interventions du ministre responsable...
M. BOURASSA: Allez-vous accepter l'amendement?
M. LAURIN: ... qui jusqu'ici a répondu d'une façon...
M. BOURASSA: Ou si vous allez continuer votre obstruction.
M. LAURIN: ... plutôt électoraliste, plutôt
partisane, plutôt superficielle à nos interventions. Même je
le voyais partir un peu tout à l'heure comme si le débat ne
l'intéressait pas. En réalité, je n'ai jamais vu un
ministre défendre de cette façon son projet de loi. Je pense que
cela dénote le manque de sérieux du ministre ou le mépris
qu'il a pour les institutions parlementaires. Je préfère, pour ma
part, la façon dont le ministre de l'Education a essayé de
répondre aux interventions du député de Gouin et du
député de Missisquoi.
M. BOURASSA: L'amendement est dopté?
M. LAURIN: A ce stade du débat, je pense que nous en sommes
rendus à la considération des filiales. Hier, nous avons surtout
tenté d'étudier les mécanismes de la société
mère, c'est-à-dire de la Société de
développement de la baie James. Nous avons passé plusieurs heures
à parler des mécanismes de coordination au sein de la
société mère, afin de s'assurer que le
développement des secteurs miniers, forestiers, touristiques, soit
intégré, soit coordonné. Les amendements que nous avons
présentés n'ont pas été retenus mais nous retenons
les assurances morales qui nous ont été données à
savoir que la société mère était parfaitement
capable d'assurer ce développement intégré,
coordonné de toutes les ressources de la région.
Ce matin, c'est aux filiales que nous en sommes rendus. A chacune des
filiales, nous devons en examiner le mandat, l'objectif, la
spécialité, la spécificité. Nous sommes en train de
considérer le mandat de la filiale hydroélectrique. C'est donc du
développement hydroélectrique que nous devons parler.
Je pense que c'est au gouvernement de faire le fardeau de la preuve.
C'est à lui de nous prouver qu'il est absolument nécessaire,
essentiel de créer une filiale où l'Hydro-Québec aura un
rôle majoritaire ou minoritaire mais, de toute façon, une filiale
chargée du développement électrique. C'est à lui de
nous donner les raisons pour lesquelles il en est venu à cette
conclusion et de nous prouver hors de tout doute, pour éclairer les
députés de l'Opposition qui représentent ici la
population, les raisons absolument probantes qui l'ont fait éliminer
tous les autres choix et qui l'ont amené à choisir, entre toutes
les solutions possibles, cette solution d'une filiale.
C'est la raison pour laquelle j'ai écouté, avec la plus
extrême attention, les plaidoyers du député de Gouin et du
député de Missisquoi et surtout la réponse du ministre de
la baie James parce que c'est lui qui répond toujours à nos
questions. J'ai écouté avec énormément
d'intérêt ces réponses et je dois admettre très
sincèrement que ces réponses ne m'ont pas convaincu.
M. BOURASSA: Comme d'habitude!
M. LAURIN: Les deux grandes raisons qu'il apporte... encore une fois, M.
le Président, j'aimerais qu'on dépouille de toute partisanerie
politique ce débat technique et scientifique extrêmement
important.
M. BOURASSA: M. le Président, le député se plaint
de l'impatience...
M. LAURIN: M. le Président, voulez-vous rappeler le premier
ministre à l'ordre? Pendant qu'il n'y était pas...
M. BOURASSA : Le député se plaint de notre impatience, il
n'est jamais satisfait.
M. BURNS: Même si c'est le premier ministre, je pense qu'il faut
le rappeler à l'ordre, M. le Président.
M. BOURASSA: II n'est jamais satisfait.
M. LAURIN: En un sens, quand il n'y est pas, c'est un grand avantage,
parce que l'allure des débats se tient à un niveau beaucoup plus
élevé. Malheureusement, quand il y est, il nous répond par
des arguments encore une fois pseudo-humoristiques ou superficiels ou encore
des arguments d'autorité qui sont enfantins et niaiseux.
M. BOURASSA: C'est ce que vous méritez.
M. LAURIN: Il semble que vous devriez reconnaître les droits des
députés des deux côtés de la Chambre. Ce n'est pas
parce que quelqu'un est premier ministre qu'il peut s'élever au-dessus
des institutions parlementaires.
M. BOURASSA: II n'est jamais satisfait... UNE VOIX: A l'ordre!
M. LAURIN: Je reviens à la réponse du ministre de
l'Education, et j'avoue très sincèrement que ses réponses
ne m'ont pas convaincu et ne constituent pas cette preuve absolue dont nous
avons besoin.
Par exemple, dans sa première réponse, il dit que la
formule de la filiale apporte un élément d'intégration,
une nouvelle façon d'aborder le problème, une approche
multidisciplinaire. Je pense, M. te Président, que cette approche
multidisciplinaire, cette approche intégratrice, c'est la
société mère qui doit s'en charger. Elle doit s'en charger
d'autant plus qu'elle chapeaute toutes les filiales et que, logiquement, comme
on l'a dit tout à l'heure, il aurait dû y avoir un
représentant de chacune des filiales au conseil d'administration de
cette société mère. C'était là la raison
pour laquelle nous insistions hier, cet amendement n'a pas été
retenu mais on nous a quand même dit hier que cette intégration,
cette approche multidisciplinaire existerait au niveau de la
société mère. Si elle existe déjà au niveau
de la société mère, pourquoi est-il tellement
nécessaire de l'assurer au niveau des filiales, qui ont une vocation
spécifique, que ce soit le développement hydro-électrique,
que ce soit le développement minier, que ce soit le développement
forestier et même plus tard que ce soit le développement
touristique?
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'on me permet une question?
M. LAURIN: Oui, bien sûr, M. le Président.
M. SAINT-PIERRE: C'est le même problème que nous avons dans
la coopération interministérielle. C'est évident qu'au
conseil des ministres il y a plusieurs ministres, tous les 22 ministres, qui se
rencontrent à chaque semaine et qu'on peut faire de grands plaidoyers en
faveur d'une coopération, d'une concertation dans certains domaines. On
retrouve pourtant constamment l'obligation à un niveau beaucoup plus bas
de s'assurer que des fonctionnaires d'un ministère et d'un autre
ministère se parlent.
On parle des comités interministériels. C'est le
même genre de problème lorsque le député dit que
parce qu'on a cette intégration à la tête, ce n'est pas
nécessaire de l'avoir en bas, je trouve que c'est l'inverse.
Au contraire, c'est en bas, c'est ceux qui sont responsables des
opérations souvent très détaillées dans
l'orientation des études, c'est là qu'on doit être
sensibilisé au fait qu'il y a d'autres critères que ceux de la
filiale uniquement, c'est-à-dire la production d'énergie. Et
c'est là qu'on doit s'assurer, dans les décisions qui sont
prises, dans les échéanciers qui sont approuvés, qu'on
tient compte d'autres critères.
Si M. Giroux pouvait parler ici, on pourrait demander objectivement
comment à Manic et à Outardes on a tenu compte des
problèmes écologiques. Je suis certain que les commissaires
voulaient tenir compte des problèmes écologiques mais
l'ingénieur qui était sur le chantier n'avait qu'une
préoccupation: terminer le barrage, produire de
l'électricité. Je ne sais pas quel argument je peux
prendre...
M. BOURASSA: Cela ne donne rien, ils ne comprennent rien! C'est de
l'obstruction, il n'y a rien à faire.
M. LAURIN: Si on poursuivait votre raisonnement jusqu'à la
limite, il faudrait dire, M. le ministre, que n'importe quel projet
hydroélectrique demanderait la constitution d'une filiale,
puisqu'à chaque fois qu'on construit un barrage, il faut quand
même abattre des arbres, il faut quand même peut-être
détourner des rivières, construire des digues...
M. BOURASSA : Arrêtez donc de faire des sophismes, c'est un
développement pour tout un territoire.
M. LAURIN: ...pour chacun des projets hydro-électriques.
M. VEILLEUX: Ce n'est pas de l'énergie nucléaire, c'est
hydro-électrique.
M. LAURIN: M. le Président, il me semble que si on regarde les
exemples du passé, que ce soit Bersimis ou Manic, je ne crois pas quand
même qu'il y ait eu de tels dommages au point de vue forestier, minier,
de tels inconvénients au point de vue minier, forestier et même
touristique du fait que l'Hydro-Québec a été le
maître d'oeuvre qui a mené le projet jusqu'à son terme. Je
pense en tout cas, que les inconvénients résultant de cette
subordination, ou de cette association, ou de ce manque de liberté, sont
plus grands dans le domaine financier aussi bien que dans les autres domaines
de structure ou de fonctionnement que les avantages que votre formule
d'intégration prétend proposer.
Encore une fois, par ailleurs, nous avons cette société
mère qui chapeautera tous les travaux, qui aura un droit de regard, qui
aura un droit de surveillance. Il me semble que ceci pourrait être
parfaitement assuré par la société mère.
Deuxièmement, le ministre de l'Education nous dit que même en
électricité, le mandat de la filiale va dépasser le mandat
de l'Hydro.
Par exemple, en ce qui concerne l'exportation de courant
électrique. A ce que je sache, M. le Président,
l'Hydro-Québec actuellement a passé plusieurs contrats avec
d'autres provinces pour l'exportation de l'énergie
électrique.
Sa loi constitutive lui en donne les pouvoirs et les moyens. En plus,
l'Hydro-Québec possède des équipes qui prospectent les
besoins des autres états américains et des autres provinces. Et
jusqu'ici, c'est précisément ça qui l'a conduite à
passer des ententes avec ces provinces pour l'exportation d'énergie
excédentaire.
Je ne vois pas pourquoi il serait nécessaire de créer une
nouvelle société pour ces fins puisque déjà
l'Hydro-Québec, aussi bien dans ses structures de par sa loi
constitutive qu'en pratique dans les faits, est parfaitement capable
d'accomplir ce deuxième mandat dont parle le ministre de l'Education.
Donc, je ne vois pas la raison pour laquelle il faudrait créer, encore
une fois, une nouvelle filiale pour exécuter ce deuxième mandat
dont parle le ministre de l'Education.
Il est midi et demi, M. le Président, je demanderais la
suspension de la séance.
M. LE PRESIDENT: La séance du comité est suspendue
jusqu'à 2 h 30.
Reprise de la séance à 14 h 30
M. LAVOIE (Laval) (président): A l'ordre, messieurs!
M. HARDY (président du comité plénier): Article 16,
adopté sur division.
M. LAURIN: M. le Président...
M. BOURASSA: Une minute de retard et cela y était!
M. LAURIN: Nous n'avons pas quorum, M. le Président. Je vais
commencer quand même. M. le Président, lors de mon dialogue avec
le ministre de l'Education le premier vrai dialogue que nous ayons eu
je tentais de prouver...
M. BOURASSA: Ce n'est pas tout à fait vrai!
M. LAURIN: ... que la preuve n'avait pas été donnée
qu'il fallait remplacer l'Hydro-Québec aux fins de la réalisation
du projet du gouvernement par une filiale où l'Hydro-Québec
aurait une participation. J'avais parlé ce matin, avant l'interruption,
de l'élément d'intégration qui selon moi me paraissait
plutôt être assuré par la société mère
que par la filiale. Nous en étions rendus au mandat qui avait
été donné à la filiale et qui, selon le ministre de
l'Education, dépasse celui que possède actuellement l'Hydro en
vertu de sa loi constitutive et qui lui permettrait de faire plus et mieux que
ce qu'a pu faire 1'Hydro dans le passé dans les centrales qu'elle a
construites. Le ministre de l'Education apportait l'argument de l'exportation
de l'énergie électrique.
J'avais commencé à dire qu'il n'était pas
nécessaire de créer une filiale pour assumer cette tâche de
l'exportation, étant donné qu'en théorie la loi
constitutive de l'Hydro lui donne ce droit et que dans les faits elle l'a
très souvent exercé. J'en prends à témoin le
rapport annuel de l'Hydro-Québec où le président de
l'Hydro nous fait part de plusieurs ententes quant à l'exportation de
l'énergie excédentaire, ententes qui ont été
conclues avec certaines provinces canadiennes et, par le biais, avec certains
Etats américains. C'est donc déjà une réponse
à l'argumentation du ministre, mais la véritable réponse,
je crois, se situe dans le témoignage qui nous a été
donné par le président de l'Hydro lui-même lors des
réunions de la commission des Richesses naturelles...
M. BOURASSA: M. le Président, puis-je interrompre poliment le
député de Bourget? Je le réfère à la
déclaration du président de l'Hydro. J'écoutais le
député de Bourget dans mon bureau ce matin, qui disait que le
président de l'Hydro avait dit qu'il n'était pas question
d'exporter l'énergie. Je ne me souviens pas qu'il ait dit une telle
chose.
Si nous nous référons à la déclaration
initiale, il y est bien dit que cela peut être une possibilité,
non une probabilité, mais une possibilité qui peut faciliter le
financement. C'est pourquoi je suis obligé de dire bien poliment, au
député de Bourget, que ce n'est pas exact ce qu'il vient de dire
sur l'exportation.
M. LAURIN : En réponse à ce que vous dites, M. le Premier
ministre, je dois dire que ce que je disais tout à l'heure
rien dans la loi constitutive de l'Hydro-Québec ne lui interdit de
conclure des ententes quant à l'exportation de l'énergie
électrique, d'abord. Deuxièmement, même si j'admets la
possibilité d'une exportation, comme celle que vous avez
mentionnée, il reste que d'autres commissaires à qui nous avions
posé des questions, et en particulier M. Boyd, nous ont dit que
l'énergie électrique produite à la baie James, suffirait
à peine aux besoins croissants du Québec. Par exemple, en 1981,
toute l'énergie produite à la baie James, c'est-à-dire les
5,400,000 kilowatts des trois rivières inférieures, suffiraient
à peine aux besoins du Québec. C'est la raison d'ailleurs pour
laquelle il fallait peut-être penser à d'autres projets de
centrales ou à développer d'autres rivières.
M. BOURASSA: En 1984, il y aura un déficit de 12 millions de
kilowatts.
M. LAURIN: Oui, admettons en 1984. Mais, de toute façon, il
n'était pas exagéré de penser que ce que nous produirions
comme électricité à la baie James serait à peine
suffisant pour nos besoins dans les dix prochaines années, à
partir du moment où on en aura besoin. Cette affirmation n'a quand
même jamais été démentie, lors des discours de
deuxième lecture. C'est une autre des raisons pour lesquelles il nous
paraît extrêmement difficile de financer le projet de la baie
James, par l'exportation d'énergie électrique, d'autant plus que
mon collègue, le député de Gouin, a montré que les
profits que l'on peut faire, par rapport aux investissements initiaux, sur la
vente d'énergie électrique, sont minimes, par rapport au
rendement d'autres investissements. Encore une fois, l'important, c'est surtout
que rien dans la loi constitutive de l'Hydro-Québec, n'empêche
actuellement l'Hydro de conclure des ententes avec les autres provinces
canadiennes et même avec les Etats-Unis pour l'exportation
d'énergie électrique. La seule barrière qui existe
actuellement, c'est la loi sur l'exportation d'énergie électrique
qui, maintenant qu'on a adopté l'amendement à l'article 4,
lierait quand même la nouvelle société, comme elle a
lié l'Hydro-Québec. Par ailleurs, même si cela était
vrai, cela serait loin de compenser pour les inconvénients qu'implique
la création d'une nouvelle filiale. Tous les problèmes
d'articulation qui vont se poser, entre l'Hydro-Québec et la nouvelle
Hydro-James, toutes les tensions, tous
les conflits qui peuvent naître du fait que les
responsabilités sont encore mal partagées, qu'il reste enore du
flou, de l'incertitude, du vague, dans les réponses qui nous ont
été données, du fait qu'il s'agit d'un organisme qui
n'existe même pas, qui n'existe actuellement que sur le papier, il va
falloir l'installer, l'établir, roder les activités de ces deux
sociétés.
On sait à quel point ça peut être difficile lorsque
ces deux sociétés sont l'une une société qui existe
depuis longtemps, avec son personnel, ses traditions, son règlement, et
une autre pour laquelle tout cela n'existe pas encore.
Enfin, mon collègue de Gouin faisait remarquer ce matin à
quel point l'insertion, l'existence, la création d'une nouvelle
société pouvait rendre plus difficile les problèmes de
financement. Voilà précisément le troisième
argument que nous apportait le ministre de l'Education ce matin disant qu'au
point de vue du financement, il pouvait s'avérer avantageux de
créer cette nouvelle société. Il disait au fond, essayant
de réfuter les arguments du député de Gouin, que le
financement c'est le sérieux des personnes.
Je veux bien croire que le conseil d'administration de cette nouvelle
filiale sera composé de personnes sérieuses. Non seulement je
veux le croire, mais il le faudrait absolument. Mais il reste que, même
si le conseil d'administration de cette nouvelle filiale est composé de
personnes très sérieuses, en quoi le caractère
sérieux du conseil d'administration de cette nouvelle filiale serait-il
supérieur au caractère sérieux du conseil d'administration
de l'Hydro-Québec que nous possédons déjà? A
sérieux, sérieux et demi, serais-je tenté de
répondre!
Si on est obligé de faire confiance au gouvernement, en pensant
qu'il nommera des gens sérieux, nous connaissons les administrateurs
actuels de l'Hydro, les commissaires actuels et nous savons que ce sont des
personnes sérieuses, nous savons que c'est à cause
peut-être de ces personnes-là que la crédibilité de
l'Hydro sur les marchés financiers est actuellement excellente. Je me
demande donc ce que la nouvelle société, même sur cet
argument du sérieux du conseil d'administration, peut apporter de
nouveau et peut même apporter quelque chose de supérieur à
ce qui existe déjà.
Donc, c'est un argument du ministre de l'Education qui ne me
paraît pas devoir être retenu. Un autre argument du ministre de
l'Education ce matin disait qu'au fond ce qui facilite le financement, c'est le
sérieux, non seulement du conseil d'administration, mais le
sérieux des études de rentabilité.
Précisément, les études de rentabilité
effectuées jusqu'ici sont peut-être sérieuses, mais
justement elles ne sont pas complètes et ça aux dires même
du ministre des Richesses naturelles, aux dires même du ministre de
l'Education, aux dires même des commissaires de l'Hydro-Québec.
C'est tellement vrai qu'elles ne sont pas complétées que le
ministre nous dit qu'elles se poursuivent actuellement aussi bien au nord qu'au
sud et que ce n'est qu'à l'automne qu'on pourra prendre une
décision sur la possibilité de commencer le harnachement par les
rivières du nord ou par la rivière du sud.
Comment voulez-vous que des investisseurs, des financiers puissent
s'engager alors même que les études de rentabilité ne sont
pas terminées? Pour terminer, M. le ministre de l'Education, nous savons
également que, pour que ces études de rentabilité soient
véritablement assez avancées pour permettre de prendre une
décision, il faut qu'elles soient faites non pas comme elles ont
été faites jusqu'ici seulement sur une distance de dix pieds mais
aux douze pouces. Ceci peut changer beaucoup la rentabilité du projet,
parce qu'il s'agit d'un très vaste territoire et que la moindre erreur
peut amener des coûts de production beaucoup plus élevés
que ceux que nous avons prévus jusqu'ici. Etant donné que ces
études de rentabilité ne sont pas encore
complétées, il est bien difficile pour des investisseurs de se
faire une idée.
Par ailleurs, même si elles étaient
complétées, en quoi cela changerait-il la nécessité
ou non de créer une nouvelle société? Une fois les
études de rentabilité complétées, les commissaires
de PHydro-Québec peuvent en tirer les conclusions qui s'imposent aussi
bien que le conseil d'administration de la nouvelle société. Je
ne vois pas comment on peut tirer partie de cet argument pour la
nécessité de créer une nouvelle filiale, puisque les
commissaires de PHydro-Québec sont aussi bien habilités à
tirer les conclusions de ces études de rentabilité qu'un nouveau
conseil d'administration qu'on ne connaît pas encore, qui sera
peut-être constitué de personnes sérieuses, mais qui ne
seront peut-être pas habituées à étudier des
rapports de rentabilité sur des projets hydroélectrique autant
que les commissaires actuels de l'Hydro-Québec.
Cela ne semble donc pas un argument, encore une fois, duquel on doit
conclure nécessairement à la création d'une nouvelle
société. Enfin, le ministre de l'Education a apporté un
argument ce matin. Il dit: "Avec $83 millions...
M. BOURASSA: Est-ce qu'il y en a un de bon dans ces arguments?
M. LAURIN: C'est simplement pour finir le financement, et après
ça il pourra me répondre.
M. BOURASSA: Est-ce qu'il y en a un de bon dans ces arguments? Est-ce
que parmi les arguments apportés par le ministre de l'Education, le
ministre des Richesses naturelles, le chef du gouvernement, il y en a un qui
est bon?
M. LAURIN: Pour la création d'une nouvelle société
vous verrez je n'ai pas fini mon argumentation.
Enfin, un dernier argument qu'apportait le ministre de l'Education ce
matin, c'est l'exemple de Brinco. Il nous disait qu'avec $83 millions de
capitalisation, on avait été capable d'aller chercher un capital
d'investissement de $900 millions.
Mais, il faut bien se rappeler, M. le Président, des
circonstances dans lesquelles cet investissement a été possible.
C'est précisément parce que l'Hydro-Québec a pu participer
de très près aux travaux et a donné sa garantie
autant comme client que comme garant de la dette que le capital a pu
être trouvé.
Et on sait à quel point il a pris du temps pour le trouver,
à quel point le syndicat de courtiers qui a négocié cet
accord a dû faire de démarches, a éprouvé des
difficultés dans le financement du projet. Cela a pris un an et demi ou
deux ans, alors qu'on avait un projet très bien assis
financièrement, techniquement, dont les études avaient
été complétées par comparaison avec ce projet qui
est devant nous dont les études ne sont même pas terminées,
dont on ne sait pas par où on va commencer et dont l'investissement est
de très loin supérieur.
Je ne vois pas comment l'argument de Brinco peut nous faire conclure
d'une façon absolument absolue et nécessaire à la
nécessité de créer une nouvelle filiale.
Le ministre de l'Education a également utilisé un autre
argument. Il a dit: Nous voulons intéresser le grand public
québécois au financement de cette nouvelle société
en faisant une société par capital-actions et afin de pouvoir
intéresser l'ensemble des Québécois. Je rappelle au
ministre de l'Education, au sujet de l'exemple qu'il nous a apporté ce
matin lorsqu'il disait que les campagnes d'obligations que le gouvernement a
lancées sur le marché ont rapporté un succès
inespéré, que je suis bien d'accord avec lui et je m'en
réjouis également mais qu'il y y a une très grande
différence entre l'achat par les Québécois d'une
obligation qui rapporte 8 p.c. d'intérêt d'une façon
sûre, d'une façon garantie...
M. JORON: Et qui est encaissable en tout temps.
M. LAURIN: ... et qui est encaissable en tout temps, et l'achat d'une
action garantissant les progrès d'une compagnie que nous ne connaissons
pas encore, qui n'a pas encore commencé ses travaux et où le
risque corres-pond/ équivaut, à un véritable
pari. Nous savons à quel point le capital-actions de diverses
sociétés minières a été difficilement
souscrit, à quel point il comportait une très grande part de
risques, à quel point les pertes encourues par des citoyens
québécois ont été énormes, certains y ont
englouti leur fortune. Il y a une grande différence à acheter du
capital-actions d'une compagnie qui n'existe pas encore et des obligations
garanties par le gouvernement du Québec. Je ne pense pas du tout qu'on
puisse faire un parallèle, il s'agit de deux choses absolument
différentes. A cause de cela, on ne saurait donc conclure, parce que
l'on veut intéresser des Québécois au capital-actions de
la société, que cet avantage soit tel qu'il faille pour cela
créer une nouvelle société. Ceci est d'autant plus vrai
que, comme le projet de loi nous le dit, on n'a laissé que 10 p.c. du
capital-actions pour l'ensemble des citoyens québécois, par le
gouvernement ayant souscrit l'essentiel, la plus grande partie par
l'intermédiaire de la nouvelle société et
l'Hydro-Québec le reste. C'est un avantage très minime qui ne
nous paraît pas compenser les inconvénients que nous avons
signalés. Le ministre de l'Education appelle M. Ryan à sa
rescousse.
Enfin, il dit qu'il faut pouvoir intéresser l'entreprise
privée à ce gigantesque développement de la baie James. Je
suis peut-être d'accord avec M. Ryan autant qu'avec le ministre de
l'Education, surtout lorsqu'il y a lieu de penser au développement des
mines, des forêts, du pétrole et surtout au développement
du tourisme.
Mais en ce qui concerne l'électricité, M. le
Président, j'ai l'impression que c'est faire un retour en
arrière. Depuis 1960, l'électricité est
développée au Québec par une société d'Etat,
qui a fait des projets gigantesques, qui a acquis une grande expertise dans ce
domaine, qui a acquis une grande expérience. Ce serait un retour en
arrière, par le biais de cette filiale, que d'intéresser à
nouveau l'entreprise privée au développement de
l'hydro-électricité.
C'est une période qui est maintenant dépassée.
Peut-être qu'un peu plus tard, d'autres solutions pourront être
envisagées, mais pour le moment, on ne saurait défaire
après dix ans à peine, les impératifs qui ont conduit au
regroupement de toutes nos petites compagnies d'électricité.
Personnellement, je ne pense pas, M. le Président, que le temps soit
venu de mettre la hache dans cette concentration de harnachement des pouvoirs
hydro-électriques au sein d'une seule société.
Je crois même que ce serait aller contre le progrès et je
pense que ce serait aller contre l'intérêt économique bien
compris du Québec. Enfin, le ministre de l'Education disait que
peut-être la création de cette nouvelle filiale aura pour
mérite de libérer la commission hydro-électrique du
Québec, l'Hydro-Québec, pour d'autres tâches, par exemple
la préparation de projets d'autres centrales, pour ce qui reste de
rivières, par exemple la Rivière Moisie, la rivière
Chamouchouane peut-être Lower Churchill Falls, la réserve
pompée de Saint-Joachim, peut-être la rivière Mimiscouona
et aussi...
M. BOURASSA: Saint-Maurice.
M. LAURIN: ... Saint-Maurice, le bas Saint-Maurice, le haut
Saint-Maurice, la Péribonka. Le ministre de l'Education ajoutait aussi
pour permettre à l'Hydro-Québec de se recycler, de
préparer de nouveaux projets d'ordre thermique ou d'ordre
nucléaire. Mais il me semble, M. le Président, qu'il ressort
très clairement des témoignages entendus lors de la commission
parlementaire que l'Hydro-Québec a atteint un tel stade de
développement, surtout depuis dix ans, qu'elle est parfaitement capable
de mener de front toutes ces activités. Elle est aussi bien capable
d'entreprendre de grands travaux comme ceux de Manic 5 ou même ceux de la
baie James, et en même temps, continuer la prospection des autres
rivières, les études de rentabilité de ces autres
rivières et troisièmement, de se préparer à
entreprendre des projets d'ordre thermique et nucléaire.
C'est tellement vrai, M. le Président, que déjà
l'Hydro-Québec a construit une première centrale thermique
à Tracy et qu'elle serait prête à en construire d'autres.
Ce n'est pas le "know-how" qui manque. La question qui se pose est simplement
celle de l'opportunité de mener cette construction actuellement.
Déjà, l'Hydro-Québec a construit, avec la collaboration de
l'Energie atomique du Canada, une centrale nucléaire à Gentilly.
Ce qui montre déjà qu'elle est parfaitement en mesure de mener de
front les études sur toutes les modalités de production
d'énergie électrique et, deuxièmement, de mener de front
tous les projets de centrales aussi bien hydro-électriques que
thermiques ou nucléaires.
Je ne vois pas qu'il soit nécessaire de créer une autre
société pour permettre au personnel actuel de
l'Hydro-Québec, à son personnel scientifique, de se recycler.
Déjà, il a les connaissances; déjà, il a
prouvé qu'il peut mener à bien des entreprises qui peuvent
actualiser ses connaissances. Je ne vois pas pourquoi on utiliserait cela comme
un argument pour conclure à la nécessité de créer
une autre société pour permettre, pour ainsi dire, à
l'Hydro de se reposer, pour permettre à l'Hydro de s'orienter dans une
nouvelle direction.
Je vois le danger, au contraire, que si on crée cette nouvelle
société on va être obligé de mettre sur les
tablettes du personnel de l'Hydro, des études déjà faites
par l'Hydro et qu'on va assister plutôt à une hémorragie de
ce personnel, à une dégradation du moral des employés
actuels de la compagnie, de son personnel scientifique, à une sorte
d'hémorragie, donc, de personnel aussi bien qu'à une
déperdition de moral. Et je pense que ce serait rendre un très
mauvais service à l'Hydro, en créant cette filiale, que de
l'amener dans cette direction qui est régressive, qui est
négative par rapport à l'élan dynamique qui a
été le sien depuis une dizaine d'années.
Donc, loin d'être un argument, cette représentation du
ministre de l'Education m'apparaît plutôt devoir être
retournée contre le projet qu'il veut bien proposer et être
plutôt une des raisons pour lesquelles il ne faudrait pas créer
cette nouvelle filiale.
Enfin, le ministre de l'Education invoque un dernier argument. Selon
lui, la création de cette nouvelle filiale permettrait plus facilement
de donner des contrats de sous-traitance à l'entreprise privée
pour des travaux qui pourraient dépasser, par leur ampleur, les
exigences du personnel actuel.
Je suis bien d'accord avec lui que le projet de la baie James sera
très ample, étant donné qu'il s'agit de créer 5
millions de kilowatts dans une première tranche et peut-être 10
millions dans une deuxième. Je suis bien d'accord avec lui qu'il faudra
peut-être donner des contrats de sous-traitance à plusieurs
compagnies privées. D'ailleurs, il en avait déjà
été question lorsque l'Hydro-Québec a entrepris Manic 3.
Justement, je ne crois pas que cet argument soit une raison pour créer
une nouvelle filiale.
Qu'est-ce qui, dans la loi constitutive actuelle de l'Hydro,
empêche l'Hydro-Québec de donner des contrats de sous-traitance si
elle estime qu'elle n'a pas le personnel voulu ou qu'elle n'a pas le temps
voulu pour mener à bien dans les délais prévus les
tâches qu'elle s'est imposée? Absolument rien.
L'Hydro-Québec possède actuellement tous les droits et
l'intelligence aussi pour faire exactement ce que le ministre de l'Education
préconise. L'Hydro-Québec possède actuellement tous les
droits pour donner le nombre qu'elle voudra de contrats de sous-traitance au
cas où la nécessité s'en ferait sentir. Donc, ce n'est pas
un argument, M. le Président.
Il faut dire en conclusion que la preuve que devait fournir le
gouvernement de la nécessité de la création de cette
nouvelle filiale n'a pas été donnée. Le gouvernement n'a
pas encore justifié à nos yeux la nécessité de la
création de cette filiale. L'Hydro-Québec, nous l'avons
prouvé, avec tous les moyens qu'elle possède actuellement, son
expérience, sa crédibilité, possède tous les moyens
qu'il faut pour créer ce grand complexe hydro-électrique qui est
inclus dans le projet de la société de la baie James.
Pour nous, M. le Président, c'est un facteur de
sécurité que ce soit l'Hydro qui construise à tous les
stades ce grand projet électrique, c'est-à-dire que ce soit
l'Hydro qui en fasse la conception, que ce soit l'Hydro qui prenne les
décisions nécessaires quant au rythme des travaux, que ce soit
l'Hydro qui soit l'agent décisionnel en toutes circonstances, que ce
soit l'Hydro, qui avec son personnel ou avec ses sous-traitants, exécute
les travaux, que ce soit l'Hydro enfin qui surveille les travaux. Ceci est pour
nous une garantie de sécurité.
Le ministre de l'Education a dit ce matin que l'Hydro serait un client,
simplement un client, c'est sûrement cela qui nous inquiète.
L'Hydro serait un client, mais nous voudrions que même de
préférence...
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse. Est-ce que le député...
M. LAURIN: J'ai presque terminé.
M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas cela que
j'ai dit. J'ai dit qu'on avait une alternative, ou bien la
société est un client averti ou bien la société est
à la fois responsable de la gestion et de la planification.
M. LAURIN: Bon, d'accord! Mais j'aime mieux dans ce nouveau complexe,
dans cette nouvelle société de la baie James, que l'Hydro ne
fonctionne pas comme client, mais qu'elle fonctionne comme agent
décisionnel, comme agent concepteur, comme exécutant des travaux.
Ceci pour le Québec constituera une garantie bien plus sûre, bien
plus forte que cette nouvelle filiale qui va surgir du sol et à laquelle
on nous demande de faire confiance de façon absolue avant même
qu'elle n'ait donné justement les garanties de son bon fonctionnement.
Cette garantie, pour nous, nous apparaît absolument nécessaire
surtout quand on pense que le projet aura une telle ampleur.
Ces arguments, M. le Président, nous les répétons
depuis longtemps. Peut-être que le gouvernement en est
excédé. Je connais une femme de la mythologie qui a
répété comme cela constamment les mêmes
vérités. Elle habitait une certaine ville qu'on nommait Troie et
elle avertissait les Troyens de la puissance grandissante des Grecs, du danger
que les Grecs constituaient pour les Troyens. Elle a perdu
énormément d'heures à inciter les Troyens à
préparer leur défense, mais les Troyens n'ont pas voulu
écouter Cassandre et un jour les Grecs sont arrivés et se sont
emparés de Troie. Si le gouvernement ne veut pas écouter les
conseils que nous lui donnons, les vérités auxquelles il n'a pas
apporté de réponse, si le gouvernement ne veut pas écouter
cette voix que nous estimons être celle du bon sens, il s'en mordra les
pouces et toute la population du Québec avec lui.
Ceci est pour nous bien plus important que tous ces arguments
démagogiques que nous apportait le premier ministre ce matin, quand il
disait que nous perdrions nos élections, si nous osions nous opposer
à son grand projet collectif. Pour nous, M. le Président, quand
nous sommes ici, ce ne sont pas les prochaines luttes électorales qui
nous préoccupent. Ce qui nous préoccupe, c'est
l'intérêt bien senti de la population québécoise.
Rien de ce que le premier ministre pourra nous dire ne nous empêchera de
dire ce que nous croyons être la vérité, même
dût-on pour cela perdre nos comtés. M. le Président.
M. BOURASSA: M. le Président, le député de Bourget
vient d'admettre lui-même qu'il répétait et
répétait et répétait toujours les mêmes
arguments. C'est son droit. Ce que je lui dis, c'est que nous, nous ne
répéterons pas ce que nous avons dit, ce que j'ai dit à
plusieurs reprises, ce qui a été dit à la commission des
Richesses naturelles, ce que le ministre des Richesses naturelles a dit, ce que
le ministre de l'Education a dit de nouveau, ce matin. Nous n'avons pas
l'intention de répéter toujours les mêmes arguments, comme
le fait le Parti québécois...
M. LAURIN: Essayez donc plutôt de répondre à nos
arguments.
M. BOURASSA: ... mais je demanderais au ministre des Affaires
culturelles d'ajouter quelques mots.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La majorité silencieuse !
M. CLOUTIER (Ahuntsic): M. le Président, je n'ai pas voulu
intervenir dans ce débat jusqu'ici. Ce n'est pas que j'entretienne le
moindre doute à propos de ce projet de loi. C'est que je n'ai pas voulu
alourdir des discussions qui trop souvent m'ont paru larmoyantes et oiseuses. A
plusieurs reprises, pour ne rien vous cacher, j'ai eu la tentation de me lever,
en particulier lorsque j'ai assisté à la première
tentative d'obstruction je dis la première, parce qu'il y en a eu
plusieurs du Parti québécois. Le coup de la
révocation de l'ordre du jour n'est pas près de me sortir de
l'esprit. Je dois dire que j'ai assisté en spectateur qui n'avait
guère d'illusions, mais qui aurait perdu les dernières qui lui
restaient, s'il en avait eu, à des procédés qui visent
indiscutablement à dégrader le parlementarisme.
Je comprends parfaitement bien que l'on puisse invoquer
l'intérêt public et faire une obstruction basée sur des
arguments je dis même une obstruction dans la mesure
où il s'agit d'une opposition positive. Mais je comprends mal que cette
obstruction soit utilisée à des fins purement électorales.
Je sais, M. le Président, que l'esprit de nos règlements,
règlements fort sages, que j'apprécie chaque jour, en particulier
lorsque le député de Maskinongé nous a fait de brillantes
démonstrations je sais, dis-je, que l'esprit de nos
règlements m'interdit de revenir sur les débats de
deuxième lecture. Je le déplore, car j'aurais pu, à ce
moment-là, citer certains propos du député de Lafontaine,
qui essayait de nous faire prendre pour des sardines les saumons de la baie
James. J'aurais pu également citer le député de
Saint-Jacques, alors qu'il nous parlait du projet Apollo,
précisément pour nous démontrer que le projet de loi de la
baie James manquait de préparation, alors que, par définition
même, le projet Apollo était caractérisé par un
objectif et que c'est en cours de route, comme il arrive toujours pour des
projets de cette envergure, que l'on a pu en définir les
modalités.
M. le Président, puisque mon intervention se situe dans le cadre
de l'article 16, je voudrais revenir sur certains des propos du
député de Bourget. En effet, lorsque celui-ci essaie de
définir le rôle de l'Hydro-Québec, il semble oublier deux
choses. La première chose, c'est qu'il est tout à fait normal, en
saine gestion, de
diversifier les structures et les organismes. Dans l'industrie
privée, il n'est pas rare de voir une entreprise qui, sous forme de
"holding", contrôle un bon nombre d'autres entreprises qui ont à
oeuvrer dans des secteurs différents. Il n'y a par conséquent
rien d'immoral et de maladroit dans cette façon de faire. Je voudrais
aller plus loin, M. le Président, en essayant justement d'élargir
le débat à un niveau que je qualifierais de philosophique. Il y a
dans ce projet de loi une véritable structure basée sur une
approche globale d'un problème. Il me paraît impensable, compte
tenu de la lourdeur administrative des gouvernements modernes, que l'on puisse
réaliser un projet aussi important que celui de la baie James si on ne
fait pas appel à une structure d'entreprise publique.
Et, c'est de cela précisément qu'il s'agit.
Puis-je me permettre, M. le Président, de vous donner un exemple
qui implique mon ministère, parce qu'en effet le ministère des
Affaires culturelles n'est pas, quoi qu'on puisse croire, un ministère
marginal. C'est un ministère qui touche à tous les secteurs du
gouvernement. Ce n'est pas par hasard d'ailleurs que son ministre actuel tente
d'intervenir dans tous les débats.
Vous n'ignorez pas que les projets d'aménagement
hydro-électrique détruisent très souvent les vestiges
archéologiques qui sont nombreux dans notre pays. La raison en est que
la plupart des peuplements humains se sont faits le long des cours d'eau et que
tous les projets au Canada je ne pense pas seulement aux projets du
Québec dans ce secteur se sont faits sans étude
préalable, sans étude préliminaire.
Or, nous avons toutes les raisons de croire que la région de la
baie James a été une région de peuplement, et il est
nécessaire, non seulement pour des raisons historiques, mais
également pour des raisons qui ont trait à la conservation du
patrimoine québécois, que l'on soit fixé, dans la limite
du raisonnable, sur les vestiges qui pourraient être
récupérés. Le ministère des Affaires culturelles a
déjà entrepris certains travaux préliminaires, mais il lui
serait impossible d'aller plus avant, compte tenu du grand nombre de
juridictions impliquées, s'il n'y avait pas un organisme de gestion
basé sur cette approche globale à laquelle je faisais allusion et
qui pourrait justement coordonner les très nombreuses et très
complexes opérations qu'un tel projet suppose.
Il en va de même dans le domaine ethnologique. On n'a
peut-être pas suffisamment parlé je sais que le
député de Montcalm y a fait allusion des populations
amérindiennes qui seront impliquées par ce projet. Et à ce
propos, s'il m'était donné de revenir sur le débat de
deuxième lecture et je ne me permettrais pas de le faire à
cause de l'esprit de nos règlements je reviendrais sur les propos
curieux du député de Lafontaine, qui puisait son information dans
la revue L'Express. Je dois dire, d'ailleurs, que je m'inquiète de plus
en plus de voir les recherchistes du PQ faire appel aux magazines pour se
documenter. L'Express est un magazine qui ne présente peut-être
pas tellement d'intérêt, mais qui de toute façon est
extrêmement discutable sur le plan scientifique. Le député
de Lafontaine parlait du barrage d'Assouan et il faisait allusion aux
bouleversements et c'est là qu'il a introduit le coup de la
sardine à laquelle je faisais allusion aux grands bouleversements
qu'apporte un tel pro-jet.
C'est justement à cause de l'existence de ces bouleversements
qu'il convient d'adopter cette approche globale qui ne peut être assise
que sur une structure de l'ordre de celle que nous préconisons.
D'ailleurs, il se trouve, alors que j'étais fonctionnaire international,
que j'ai eu l'occasion d'être consulté en rapport avec le barrage
d'Assouan.
J'ai visité à cette époque le Haut-Soudan qui
connaissait des problèmes considérables de déplacement de
population. Il s'agissait de déplacer plusieurs centaines de milliers
d'autochtones, leur territoire devant être inondé. Et c'est
là que j'ai pu prendre conscience de la complexité des
problèmes sous-jacents à tout projet de cette envergure.
C'est là que j'ai pu me convaincre si j'avais eu besoin de
le faire de la nécessité de faire appel à une
structure de gestion. Je m'interromps. Je vous ai simplement proposé
quelques réflexions en vrac dans l'espoir d'apporter un
élément positif à ce débat qui s'éternise et
qui, je l'espère, se terminera bientôt.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président,...
M. BOURASSA: Adopté?
M. ROY (Beauce): Quelques mots seulement. Nous ne voulons pas prolonger
le débat, mais je pense que nous devons faire connaître notre
point de vue concernant cet article.
Si on veut continuer dans le sens de l'amendement qui a
été présenté par le Parti québécois
qui stipule que tous les travaux et la transmission seront effectués par
l'Hydro, je dirai que cet amendement va à l'encontre de nos exigences.
Pourquoi? Nous l'avons dit lors de l'étude de ce projet de loi en
deuxième lecture. Nous voulons que cet organisme et que toutes les
structures administratives du développement de la baie James soient
responsables devant le Parlement. Il n'y a pas seulement les
députés de notre groupement politique qui en ont fait part. J'ai
entendu des représentations faites par les députés de
l'Union Nationale. Ils ont exigé que les structures administratives du
développement de la baie James soient responsables devant le
Parlement.
A l'article 16, on parle de constituer la filiale qui verrait à
la production de l'énergie hydroélectrique. Il est entendu que
lorsque l'article 16 a été rédigé et
présenté tel quel dans le
projet de loi, nous ne pouvions l'accepter. Suite à l'amendement
qui nous a été présenté par le premier ministre qui
stipule que l'Hydro-Québec devra détenir au moins la
majorité des actions comportant un droit de vote en toute circonstance
et que cette majorité soit détenue par l'Hydro-Québec, en
plus que 40 p.c. seront détenues par la société, cela veut
dire, si nous avons bien compris, que l'Hydro-Québec a en quelque sorte
la responsabilité, à l'intérieur de cette structure
administrative, de prendre les décisions mais à
l'intérieur de cette structure, cette filiale qui elle est responsable
à la grande société de développement de la baie
James qui elle est responsable devant le Parlement.
Je m'explique difficilement ce long débat qui ne fait qu'accorder
ce que les membres de la Chambre avaient demandé, à savoir que ce
soit l'Hydro qui soit responsable d'assurer le développement des
richesses hydro-électriques même si, du fait qu'elle est
majoritaire dans une filiale, cela nous donne une garantie. Cette filiale nous
permet d'être assurés que celle-ci sera responsable devant le
Parlement.
Assurer, accorder à l'Hydro-Québec l'exclusivité
à l'intérieur des structures actuelles de l'aménagement et
du développement de ces ressources hydro-électriques
équivaut en quelque sorte à lui donner une puissance telle
qu'elle pourrait devenir un Etat dans l'Etat. Dieu sait si, à l'heure
actuelle et nous avons pu nous en rendre compte l'Hydro n'est pas
responsable devant le Parlement mais responsable devant la commission
parlementaire.
Devant des projets d'aussi grande envergure, devant des projets d'aussi
grande importance pour l'avenir économique du Québec, je pense
que les amendements proposés par le premier ministre nous semblent tout
à fait acceptables parce qu'ils rencontrent les deux exigences que nous
avions demandées.
Sur ce point, nous disons que nous ne pouvons pas accepter l'amendement
proposé par le Parti québécois parce qu'il va à
l'encontre d'une première exigence qu'ils ont, eux aussi,
formulée selon laquelle la société serait responsable
devant le Parlement du Québec. On demande aussi que les filiales ne
soient pas responsables devant le Parlement.
C'est à n'y rien comprendre. Je ne voudrais pas
interpréter les paroles de mes collègues. En ce qui nous
concerne, nous ne prolongerons pas le débat. Je veux que notre position
sur ce point soit très bien comprise. Il ne s'agit pas pour nous
d'appuyer le gouvernement. Il s'agit d'appuyer des dispositions dans le projet
de loi qui nous donnent satisfaction en ce qui a trait aux exigences que nous
avons faites.
Je voudrais également dire quelques mots à propos du
financement...
M. CHARRON: M. le Président, est-ce que le député
de Beauce me permet une question?
M. ROY (Beauce): Oui.
M. CHARRON: Dans l'argumentation qu'il vient de faire valoir pour
réfuter l'argument du député de Gouin, est-ce que, selon
lui, je dois comprendre que l'Hydro-Québec n'est pas responsable devant
le Parlement du Québec?
M. ROY (Beauce): L'Hydro-Québec n'est pas responsable directement
devant le Parlement du Québec. L'Hydro-Québec est responsable
devant la commission parlementaire seulement. Si je n'ai pas raison, qu'on me
le dise.
M. CHARRON: Comment pensez-vous que la société est
responsable?
M. ROY (Beauce): La filiale va être responsable à la
société de développement de la baie James. Les articles 33
et 34 tels que proposés dans les amendements qu'on nous a fournis, nous
donnent cette garantie que la société de développement de
la baie James va être responsable devant le Parlement.
M. CHARRON: Où est la différence dans notre argumentation
quand on demandait qu'elle soit responsable?
M. ROY (Beauce): M. le Président... M. JORON: C'est y assez
fort!
M. CHARRON: Faites-moi un dessin parce que je ne comprends pas!
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, justement pour conclure ce
premier point, on nous dit à l'article 33 et je ne serais pas
censé le citer, les règlements ne le permettent pas dans
les amendements que le premier ministre nous a fait parvenir: Ajouter à
la fin de l'alinéa suivant l'article 33 pour éclairer le
député de Saint-Jacques : La société doit
fournir au premier ministre ou à tout autre ministre
désigné par lui tout renseignement qu'il requiert pour ses
opérations, Or, ceci nous permettra de questionner le premier ministre
en Chambre; ceci nous permettra aussi de questionner le ministre qui pourra
être désigné par lui sur les opérations et sur le
fonctionnement de cette société de développement.
M. CHARRON: L'Hydro-Québec aussi? Pensez-vous qu'on n'a pas le
droit de le faire pour l'Hydro-Québec actuellement?
M. ROY (Beauce): M. le Président, est-ce que je pourrais avoir la
parole, s'il vous plaît?
M. CHARRON: Mais oui, mais, bon Dieu; vous ne comprenez même pas
l'esprit de l'Hydro-Québec.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. SAMSON: J'invoque le règlement. Le député de
Saint-Jacques vient de prononcer une parole antiparlementaire.
M. LE PRESIDENT: Laquelle?
M. SAMSON: M. le Président, demandez-lui de vous la
répéter. Je n'oserai même pas le faire.
M. CHARRON: J'ai dit textuellement, M. le Président: "Bon Dieu!
vous ne comprenez pas l'esprit de l'Hydro-Québec."
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! UNE VOIX: II a appelé le Bon
Dieu...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable député de
Beauce.
M. ROY(Beauce): M. le Président, je n'ai pas compris les paroles
que vient de prononcer le député de Saint-Jacques mais disons que
je n'y attache aucune importance.
Il y a aussi le financement de cette société. Nous avons
fait certaines remarques, nous avons formulé certaines exigences lors de
l'étude de ce projet de loi et j'aimerais y revenir, étant
donné que l'article 16 s'y prête parce que la constitution de
cette filiale devra tout de même avoir des sources de financement. Or,
dans le contexte actuel, dans le système actuel, il y a trois sources de
financement possibles pour cette filiale. Il y a d'abord le marché
d'épargne le marché québécois. Cette filiale pourra
émettre des obligations sur le marché du Québec pour
être en mesure d'avoir les capitaux nécessaires pour effectuer la
construction des barrages et des lignes de transmission, mais comme nous savons
que le marché de l'épargne au Québec est actuellement
limité, nous savons aussi que cette société devra aller
également sur le marché canadien, et comme le marché
canadien est actuellement limité, je pense qu'on peut se poser une
question: Est-ce que le fait d'aller emprunter les épargnes, d'aller
emprunter des capitaux dans nos institutions financières du
Québec va justement...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL : M. le Président, sur un point de règlement, je
ne voudrais en aucune façon être désagréable
à mon honorable et bon ami le député de Beauce, mais je me
demande si ces remarques ne devraient pas être réservées
à l'occasion de l'étude des articles 24 et 25, alors que nous
parlerons du financement.
M. LE PRESIDENT: En effet, je pense que les remarques de l'honorable
député de Maskinongé sont fondées; je pense aussi
que les propos très intéressants que tient présentement le
député de Beauce devraient être tenus au moment où
nous étudierons les articles 24 et suivants.
M. ROY (Beauce): Je vous remercie, M. le Président. Si j'avais
abordé cet article, c'est parce que j'avais entendu tout à
l'heure l'honorable député de Bourget parler pendant au moins
quinze minutes du financement de cette société. C'est la raison
pour laquelle je voulais apporter quelques précisions pour faire valoir
notre point de vue à ce sujet.
Je reviendrai sur ces articles, mais je demanderai tout de même,
au gouvernement, du fait que justement ça touche cette
société qui sera constituée, de bien analyser les
conséquences de sa politique financière concernant le financement
de cette société, parce que ceci va avoir certainement beaucoup
d'implications sur tout le développement du Québec.
Je termine là-dessus mes observations. Pour ce qui a trait au
financement, j'y reviendrai tout à l'heure, mais je tiens à
assurer le gouvernement et à l'avertir, le mettre en garde que, sur ce
côté nous aurons l'oeil ouvert. Je puis l'assurer à
l'avance que nous ne lâcherons pas, parce que nous voulons que cette
société joue son rôle mais que cette société,
tout en jouant son rôle, ne vienne pas en quelque sorte canaliser tout ce
dont nous avons besoin de capitaux au Québec et paralyser
l'économie du Québec dans d'autres secteurs.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, juste une brève
observation à la suite de l'intervention du ministre des Affaires
culturelles. En l'entendant tout à l'heure, j'avais envie de lui dire,
reprenant une phrase célèbre: François, je vous ai
compris!
J'étais très heureux de l'entendre nous dire qu'il avait
pris toute précaution afin que soient préservées les
richesses archéologiques et qu'il soit tenu compte des implications
ethnologiques et anthropologiques que comporte ce projet de loi.
Je me suis toutefois posé la question, M. le Président,
à la suite de toutes les interventions que nous avons entendues,
à savoir si l'intervention du ministre des Richesses naturelles
était pertinente à ce stade-ci du débat, du fait
qu'à l'article 4 le premier ministre a accepté l'amendement que
j'avais proposé hier à l'effet que la société
devait être soumise à toutes les lois du Québec.
C'est un amendement que j'ai fait moi-même, et j'ai
été surpris hier soir d'entendre le chef du Parti
québécois déclarer à la radio que son parti avait
présenté cet amendement. Je profite de cette occasion pour
indiquer que c'est moi qui en avais pris l'initiative et qu'à l'article
5 le député de Bourget, devant l'hésita-
tion du gouvernement, avait suggéré le même
amendement.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre des Finances ou au premier ministre. Peut-être
que d'autres pourront me répondre...
UNE VOIX: Posez-la au ministre des Richesses naturelles.
M. CLOUTIER (Montmagny): J'ai relu l'article 16 amendé par le
gouvernement. A la fin du premier paragraphe, on dit ceci: Dont au moins la
majorité des actions comportant un droit de vote en toute circonstance
seront détenues par l'Hydro-Québec et dont au plus 40 p.c. seront
détenues par la société. Ma question est celle-ci: Est-ce
que j'interprète bien cet article 16 en disant qu'il se pourrait que
l'Hydro-Québec détienne 99 p.c. des actions comportant un droit
de vote en toute circonstance et que l'autre partenaire ne pourrait
détenir que 1 p.c. des actions de la société, étant
de cette façon actionnaire dans la filiale?
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai répondu hier à
cette question j'ai entendu le début de l'exposé à
mon bureau disant qu'il était possible qu'en raison de la
souscription d'actions nécessaires pour certains projets le gouvernement
décide, d'accord avec la société, que celle-ci aurait un
pourcentage d'actions inférieur à 40 p.c. alors que l'Hydro en
aurait un pourcentage supérieur à 51 p.c. C'est pourquoi nous
avons mis un minimum de 51 p.c. et un maximum de 40 p.c.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je pose de nouveau ma question.
Théoriquement, est-ce qu'il se pourrait que l'Hydro ait 99 p.c. et que
l'autre partenaire n'ait que 1 p.c. des actions?
M. BOURASSA: Peut-être que l'article est rédigé pour
que ce soit théoriquement possible, mais en pratique, c'est...
M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne pose pas la question sur ce qui se passe
en pratique, on verra par la suite, suivant les explications données par
le premier ministre. Cela voudrait donc dire que théoriquement,
l'Hydro-Québec pourrait être actionnaire presque à 100
p.c?
M. BOURASSA: Cela dépend du financement.
M. CLOUTIER (Montmagny): Cela dépend du financement.
M. BOURASSA: Cela dépend du financement, de la souscription des
actions et de ce que les règlements vont décider, qui seront
approuvés par le conseil des ministres.
M. CLOUTIER (Montmagny): Une autre question, M. le Président, qui
pourra jeter un nouvel éclairage sur le débat. Est-ce qu'il se
pourrait que les deux représentants, les deux membres au conseil
d'administration de cette filiale soient également des membres de la
société mère? La question vaut pour les autres filiales
aussi.
M. BOURASSA: La loi le permet, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Article 16, adopté? M. JORON: Pardon?
M. LE PRESIDENT: Article 16, adopté sur division?
M. JORON: Je vous rappelle, M. le Président, en faisant un point
d'ordre, que nous discutons actuellement le sous-amendement que j'ai
présenté ce matin.
M. LE PRESIDENT: Oui, j'avais compris qu'il était
rejeté.
M. JORON: Non, le comité n'en a toujours pas disposé et
nous avons d'autres interventions à faire sur ce sujet.
M. BOURASSA: Le comité est prêt à disposer des
amendements que vous avez à proposer.
M. CHARRON: Non.
M. BOURASSA: Le député de Saint-Jacques n'est pas...
M. CHARRON: Non, je veux exercer mon droit de parole, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Cela va prendre combien de temps?
M. CHARRON: Cela va dépendre de moi; cela va surtout
dépendre du nombre de fois que vous allez m'interrompre. Si vous ne
m'interrompez pas, vous avez des chances que cela dure simplement vingt
minutes. M. le Président, le premier ministre est un homme ouvert, mais
je ne sais plus par quel argument aller le chercher. Il a accusé mes
collègues, le député de Bourget et le député
de Gouin, de répéter constamment les mêmes arguments. C'est
bien simple, c'est parce que nous nous heurtons constamment au même mur
d'incompréhension.
Nous ne connaissons, nous que les seuls arguments pour convaincre un
homme d'Etat, soit ceux de la raison. Ce sont ceux que nous avons
utilisés, depuis le début de ce débat, pour
essayer de convaincre le mur partisan et stérile qui bouche les
oreilles du premier ministre. Nous n'avons pas réussi.
Je vais essayer, M. le Président, dans la demi-heure qui m'est
réservée je ne sais pas si je vais l'utiliser
complètement d'utiliser les arguments mêmes du premier
ministre. Connaissant le culte que le premier ministre a de lui-même, ce
sont peut-être les arguments qui vont le plus le frapper.
Le premier ministre, à plusieurs reprises, lorsqu'il était
simple député de Mercier en cette Chambre, M. le
Président, et qu'il était membre de la commission des Richesses
naturelles, lorsqu'il était en campagne pour devenir chef de son parti
alors qu'il était en campagne pour devenir le premier ministre que le
hasard électoral a fait de lui aujourd'hui, et, depuis qu'il est dans
cette Chambre, a toujours défendu verbalement, pas toujours dans ses
décisions, par exemple, mais verbalement l'Hydro-Québec.
Il a répété à plusieurs reprises, devant les
arguments de l'Opposition en deuxième lecture et depuis le début
du travail en comité plénier, qu'il voulait réserver
à l'Hydro-Québec le rôle-clé, le rôle magique,
enfin tout le vocabulaire que son attaché de presse a pu lui fournir.
Mais, M. le Président, ça ne se retrouve pas toujours dans les
amendements que le premier ministre nous apporte. Ou alors, si ce rôle
apparaît dans les amendements que le premier ministre apporte, c'est
à n'y rien comprendre. On se demande alors pourquoi il n'est pas
allé plus loin. Qu'est-ce qui l'a arrêté?
Et c'est le cas de l'amendement que nous avons adopté
actuellement à l'article 16. Nous nous demandons pourquoi le premier
ministre ne consacre pas, s'il était fidèle aux opinions qu'il a
émises depuis son entrée en Chambre en 1966, d'une façon
plus concrète que ne le fait son amendement comme vient de le
souligner le député de Montmagny qui peut laisser des
doutes, la primauté et l'exclusivité de l'Hydro-Québec
dans l'exploitation des ressources hydro-électriques.
M. BOURASSA: II y a une différence entre primauté et
exclusivité.
M. CHARRON: Cela va, d'accord, j'admets votre différence. Pour
une fois, vous m'avez interrompu contrairement à la disposition de
l'article 270 mais avec raison. Pour une fois, une intervention de "back
bencher" a porté fruit. J'admets que vous avez raison là-dessus.
Je reprends donc mon vocabulaire.
Pourquoi ne consacrez-vous pas l'exclusivité qui a toujours
été reconnue, du moins depuis 1962, depuis que ce Parlement et
votre parti ont décidé de faire la nationalisation de
l'hydro-électricité? M. le Président, si nous
étions à nous livrer à un "filibuster" ce qui n'est
pas le cas si nous faisions un "filibuster" nous aurions
été chercher les débats qui ont prévalu lors de la
nationalisation de l'électricité en 1962, débats où
le brillant et compétent ministre des Richesses naturelles de
l'époque ce qui nous aurait changé de l'actuel...
M. BOURASSA: II n'y avait pas de journal des Débats à ce
moment-là.
M. CHARRON: ... le brillant et compétent ministre des Richesses
naturelles de l'époque et tous les membres du cabinet libéral
à cette époque ont consacré dans les faits, pas simplement
verbalement, l'exclusivité du rôle de l'Hydro-Québec dans
le développement hydroélectrique dans cette province.
Et là, tout à coup, le même parti et un
gouvernement, qui reviennent quelques années plus tard, semblent avoir
changé leur philosophie. On lui accorde une primauté qui...
Primauté, qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président?
Cela veut dire, dans le cas actuel, querelle. Cela va vouloir dire pour
d'Hydro-Québec, actionnaire majoritaire de cette filiale, combat
constant avec les autres actionnaires pour faire valoir... Si le premier
ministre me dit non, que ça ne veut pas dire combat constant, pourquoi
alors ne pas consacrer, comme le stipule le sous-amendement du
député de Gouin, cette exclusivité du développement
hydro-électrique là-bas.
Vous avez fait vous-même, M. le premier ministre...
M. BOURASSA: II faut un lien de coordination. Je l'ai dit 50 fois, je
suis prêt à le répéter une 51e fois, patiemment,
calmement, qu'il faut un lien de coordination entre le développement
hydro-électrique et les autres développements. C'est pourquoi, il
faut une représentation de la société mère sur la
filiale où l'Hydro-Québec sera largement majoritaire.
M. CHARRON: Vous savez très bien que cet argument de
coordination, lorsque nous l'avons abordé à l'article 8 hier,
n'est pas votre argument le plus fort. Vous savez très bien que
l'intervention du député de Bourget faisant suite à celle
du ministre de l'Education a répondu à ces arguments-là.
Nous attendons de la part d'un député ministériel ou d'un
ministre du cabinet une réponse au contre-argument qu'a
développé le député de Bourget. Ce que je voulais
vous dire sans les reprendre parce qu'ils ont été
suffisamment étoffés pour qu'une nouvelle intervention soit
justifiée c'est que ce sont vos propres arguments que vous avez
développés quand vous étiez dans l'Opposition, ou quand
vous étiez en quête du poste que vous occupez actuellement, que
nous utilisons tout simplement en Chambre depuis le début de ce que vous
appelez l'obstruction du Parti québécois. Nous ne faisons ici que
reprendre les arguments qui ont été jadis la force de votre parti
du temps que René Lévesque y était. Nous ne faisons que
reprendre ici la force ce que
vous avez vous-même décrit comme le rôle prioritaire
dans le développement économique du Québec que
devra avoir cet instrument qu'est l'Hydro-Québec.
Nous n'inventons rien. Nous pourrions même si nous nous livrions
à ce plaisir de bénédictin aller chercher à la
bibliothèque chacune des interventions que vous avez faites à la
commission parlementaire des Richesses naturelles lorsque vous n'étiez
à ce moment-là et la population n'en était que
mieux, M. le Président député de Mercier. Nous
pourrions à ce moment-là refaire exactement et cela vous
ferait rougir deux fois plus que vous l'êtes présentement
parce que le premier ministre verrait...
M. BOURASSA: M. le Président, dimanche je n'étais pas sur
les plages, je n'étais pas au golf, j'étais avec les
ouvriers...
M. CHARRON: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
premier ministre devrait savoir qu'il n'a pas le droit de m'interrompre. M. le
Président, nous pourrions à ce moment-là prouver au
ministre des Affaires culturelles que nos services de recherche ne font pas que
consulter l'Express ou le Time Magazine, mais qu'ils peuvent retrouver aussi de
fort savantes...
M. VEILLEUX: Point de Mire!
M. CHARRON: ... interventions comme celles du député de
Mercier lorsqu'il était dans l'Opposition et qu'il se battait face au
féroce gouvernement de l'Union Nationale qui maltraitait selon lui
l'Hydro-Québec. Mon collègue, le député de
Maskinongé, apprécie le qualificatif que j'ai donné
à son ancien gouvernement! M. le Président, nous pourrions si
nous nous livrions à un "filibuster" faire exactement ce genre
d'intervention-là. Nous ne le faisons pas, M. le Président, parce
que notre opposition est constructive comme l'est exactement le sous-amendement
du député de Gouin depuis le début de ce débat.
M. JORON: M. le Président, quelques mots pour résumer
avant qu'on prenne le vote sur le sous-amendement.
M. BOURASSA: Dernière intervention. M. JORON: Oui, M. le Premier
ministre.
M. CHARRON: Ce n'est pas sûr. S'il était interrompu,
j'interviendrai à nouveau.
M. JORON: M. le Président...
UNE VOIX: A moins que vous vouliez que j'intervienne.
M. JORON: Je pense que les interventions que nous avons entendues du
côté ministériel depuis le début de la discussion au
cours de la matinée sur le sous-amendement que je proposais et qui, je
le rappelle, visait à remplacer la compagnie filiale tout simplement par
les mots l'Hydro-Québec, les arguments dis-je, invoqués par les
députés ministériels nous ont en fait convaincus davantage
de l'à-propos de notre sous-amendement. En effet, j'entendais il y a
quelques instants à peine le parti gouvernemental réduit aux
arguments qu'invoquait, par exemple et qui n'en sont même pas
finalement le ministre des Affaires culturelles, selon lesquels cela
pouvait causer des problèmes d'inondation et que l'on irait
peut-être détruire des vestiges d'une civilisation que l'on
soupçonne peut-être d'avoir existé. Quand on en est rendu,
M. le Président, à ce genre d'argument pour répondre
à la question essentielle que nous posions et à laquelle on n'a
toujours pas donné de réponse: Pourquoi la
nécessité d'une deuxième Hydro? Si, d'autre part, le
premier ministre nous dit et cela on y reviendra un peu plus tard, M. le
Président, à l'article 17, entre autres qu'il ne s'agit
pas d'une deuxième Hydro, mais tout simplement d'une filiale sur
laquelle l'Hydro-Québec a plein contrôle, un contrôle total
et absolu, si le contrôle est à ce point total et absolu, raison
de plus pour ne pas la créer cette filiale-là, elle est
inutile.
Si le premier ministre admet la même argumentation que nous
finalement, disant qu'il est essentiel que le contrôle exclusif du
développement hydro-électrique au Québec reste dans les
mains de l'Hydro-Québec, pourquoi à ce moment s'embarrasser d'une
filiale? Nous n'avons toujours pas entendu non plus de réponse aux
arguments que je faisais valoir quant au financement et au problème
considérable que l'apparition d'un nouvel emprunteur, inconnu des
marchés financiers, allait apporter au financement de cette gigantesque
entreprise. M. le Président, nous répétons, en terminant,
que le gouvernement...
M. BOURASSA: ... non, non, il reste trente secondes au
député, en vertu des règlements sessionnels. On
était prêt à lui donner dix secondes de plus.
M. JORON: Je parle actuellement du sous-amendement. Il reste trente
secondes sur le sous-amendement? Bon. Je résume en terminant, en disant
ceci: La preuve n'est toujours pas faite. Il faudra bien qu'un jour le
gouvernement la fasse à savoir s'il est nécessaire de
créer aujourd'hui une deuxième Hydro-Québec, alors qu'il
en existe déjà une, qui avait dans le passé largement fait
la preuve de sa compétence. M. le Président, je demande le vote
debout et assis sur le sous-amendement.
M. LE PRESIDENT: Alors, debout, ceux qui sont en faveur du
sous-amendement du député de Gouin.
M. JORON: II n'y a pas grand monde pour défendre
l'Hydro-Québec!
UNE VOIX: D y a du monde pour l'obstruction.
M. LE PRESIDENT: Le sous-amendement du député de Gouin est
rejeté. Article 16 adopté sur division.
M. LAURIN: M. le Président...
M. BOURASSA: L'isolement...
UNE VOIX: Nous le supportons très bien.
UNE VOIX: Nous savons tout cela.
M. LAURIN : M. le Président, nous regrettons que cet amendement
qui avait pour lui le bon sens nous continuons de le croire ait
été rejeté. Eh bien ! nous allons reculer pied à
pied et puisque le gouvernement ne veut pas accepter de faire cet acte de
confiance à l'Hydro-Québec, qui s'imposerait dans les
circonstances, nous allons vous présenter une nouvelle proposition, sous
la forme d'un nouveau sous-amendement, que je vais lire immédiatement. A
l'article 16, nous proposons de remplacer, le mot "par" à la 4e ligne,
par ce qui suit: "une filiale de l'Hydro-Québec, dans laquelle la
société pourrait détenir jusqu'à 40 p. c. des
actions. L'article 21 s'applique, mutatis mutandis, à la création
de cette filiale en y substituant l'Hydro-Québec à la
société. Cette filiale a les droits, pouvoirs, obligations de
l'Hydro-Québec, en vertu de sa loi constitutive."
M. BOURASSA: M. le Président, j'invoque le règlement. Si
le député ne tient pas à prolonger le débat
indûment, est-ce que la loi de l'Hydro-Québec permet d'avoir des
filiales? On me dit que non.
M. LAURIN: M. le Président, nous avons consulté la loi et
il n'y absolument rien dans la loi constitutive de l'Hydro-Québec qui
l'empêche d'avoir une loi constitutive. Par ailleurs, si ce
sous-amendement était adopté, cette loi 50 donnerait le droit
à l'Hydro-Québec, d'avoir cette filiale. La raison pour laquelle
nous présentons ce sous-amendement M. le Président, est la
suivante.
UNE VOIX: Les journalistes s'en vont, ils sont
écoeurés.
M. LAURIN: Puisque le gouvernement ne veut pas accepter que ce soit
l'Hydro-Québec qui soit ipso facto le maître d'oeuvre, nous allons
nous rabattre sur certains arguments du ministre de l'Education. Il disait tout
à l'heure qu'il fallait à tout prix, dans la filiale actuelle,
prévoir un certain processus d'intégration. Puis- qu'il faut,
selon le ministre de l'Education et le premier ministre, prévoir un
élément d'intégration, il faudra le mettre dans une
filiale, mais une filiale de l'Hydro-Québec... une filiale de la baie
James.
M. BOURASSA: M. le Président, je demande au président de
statuer sur la recevabilité de la motion, parce que d'après
l'article 22 de la Loi de l'Hydro-québec, article 86, il n'y a rien qui
permet à l'Hydro-Québec d'avoir une filiale.
M. LAURIN: Ce n'est pas sûr du tout, M. le Président, c'est
votre opinion.
M. BOURASSA : On a chacun nos conseillers juridiques. La deuxième
raison, M. le Président, c'est que cet amendement implique une
dépense de deniers publics. Donc, il est irrégulier, irrecevable,
en vertu de l'article 55 de la Loi de l'Hydro-Québec.
M. LAURIN: M. le Président, ce qu'a dit le premier ministre n'est
qu'une affirmation. Il ne nous a pas prouvé du tout que, dans la loi de
l'Hydro-Québec...
M. JORON: Lisez-la.
M. LAURIN: ... il y avait des articles...
DES VOIX: Assis.
M. BOURASSA: Est-ce que le député pourrait laisser parler
les autres, quelques minutes...
M. LAURIN: Oui, bien sûr.
M. BOURASSA: ... parce qu'il parle depuis des heures et des heures? S'il
pouvait se reposer quelques minutes, nous reposer en même temps, le
président pourrait...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Evidemment, je n'ai pas fait une
étude exhaustive de la Loi de l'Hydro-Québec, mais avant de
permettre à l'honorable député de Bourget de poursuivre
son amendement, il devra me prouver qu'en vertu de la Loi de
l'Hydro-Québec, cette corporation peut avoir des filiales.
M. BURNS: Jusqu'à preuve du contraire... D'abord, ce n'est pas
nous qui avons soulevé le point de règlement, c'est le premier
ministre qui l'a soulevé. Il prétend que l'Hydro-Québec ne
peut pas avoir de filiale, je pense qu'il est donc normal que ce soit le
premier ministre qui vous démontre en vertu de quelles dispositions de
la loi... Bien non, c'est lui qui allègue que l'Hydro-Québec ne
peut pas avoir de filiale...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je prends comme présomption...
M. BURNS: Vous ne pouvez pas en avoir.
M. LE PRESIDENT: ... à moins que ce ne soit spécifiquement
dit dans la loi que l'Hydro-Québec ne peut pas avoir de filiale,
à moins que l'on ne prouve qu'en vertu de la loi elle peut avoir des
filiales...
M. CHARRON: C'est à celui qui accuse de faire la preuve.
M. LE PRESIDENT: ... de même que, dans le projet de loi no 50, on
démontre bien spécifiquement que la société pourra
avoir des filiales, à moins que l'on ne me démontre que
l'Hydro-Québec peut avoir des filiales à sa face
même...
M. CHARRON: A moins qu'on vous démontre qu'elle ne peut pas en
avoir aussi...
M. LE PRESIDENT: Le principe, c'est que...
M. VEILLEUX: Le premier ministre a dit non.
M. CHARRON: Ah bon!
M. JORON: Ah! le premier ministre a dit non, c'est non!
M. BURNS: Sa Majesté a dit non!
M. CHARRON: Si nous vous embarrassons, nous pouvons nous en aller.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si nous vous dérangeons, nous pouvons
nous en aller.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ne peux pas permettre au
député de Bourget de continuer à démontrer le
sous-amendement à l'article 16 à moins qu'il n'indique dans la
Loi de l'Hydro-Québec l'article permettant à
l'Hydro-Québec d'avoir une filiale.
M. JORON: M. le Président, puis-je vous soumettre les faits
suivants? L'Hydro-Québec détient des actions dans Churchill
Falls, a détenu, si elle ne les détient pas encore des actions
dans Shawinigan Water and Power...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je demanderais au
député de Gouin de reprendre son siège.
Il est évident qu'en tant que président du comité,
je n'ai pas la preuve des affirmations que le député de Gouin
vient de soumettre, je ne peux pas prendre...
M. JORON: Vous n'avez pas plus de preuve de celles que le premier
ministre a soumises.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je ne peux pas prendre comme une preuve des
affirmations que le député de Gouin peut faire et je n'ai
évidemment aucun moyen de vérifier la véracité de
ses affirmations. Encore une fois, à moins qu'on ne m'indique l'article
de la Loi de l'Hydro-Québec en vertu duquel l'Hydro-Québec peut
avoir des filiales, je dois déclarer l'amendement du
député de Bourget irrecevable.
M. LAURIN: M. le Président...
M. BOURASSA: Si le député veut discuter sur l'aspect
juridique, disons qu'il y a l'autre argument que c'est irrégulier pour
la dépense des deniers publics. Celui-là me semble assez clair,
selon l'article 155. Admettons que l'autre moi je suis d'accord
entièrement avec le président du comité, le
député de Terrebonne mais si ce n'est pas absolument clair
pour les membres du Parti québécois, on va prendre l'autre
argument de l'article 155, que c'est une dépense de deniers publics.
M. JORON: Sur cet argument-là...
M. CARDINAL: M. le Président, je m'excuse, j'avais demandé
la parole.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.
M. CARDINAL: Si on regarde les comptes publics, si on regarde le budget
de l'Hydro-Québec, on s'aperçoit comme le dit avec
vérité le député de Gouin, que
l'Hydro-Québec possède des actions non seulement dans la Brinco,
mais dans Labrador, Churchill Falls, etc. Ce n'est pas avoir des filiales,
c'est avoir un portefeuille.
C'est toute la différence du monde et beaucoup de
sociétés de toutes sortes ont des portefeuilles où elles
investissent leur surplus. Ce n'est pas du tout avoir des filiales. Je
m'excuse.
M. LE PRESIDENT: Comme le député de Bourget ne m'a pas
mentionné, ne m'a pas fait voir l'article en vertu... Je ne permets pas
que vous discutiez de l'amendement à moins de me soumettre l'article de
la loi de l'Hydro-Québec.
M. LAURIN: Vous me demandez de fournir des arguments selon
lesquels...
M. VEILLEUX: L'article.
M. LAURIN: ...un article de la loi constitutive de l'Hydro-Québec
permettrait la constitution d'une filiale. Il me semble qu'il y a une autre
façon d'aborder le problème. Si l'on réussit à
prouver qu'il n'y a aucun article...
M. VEILLEUX: L'article.
M. LAURIN: ...de la loi constitutive de l'Hydro-Québec qui
empêche la formation d'une filiale.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. LE PRESIDENT: II n'y a aucun article qui l'empêche, mais il n'y
a aucun article qui le permet.
M. LAURIN: S'il n'y a aucun article qui l'empêche...
M. LE PRESIDENT: Une compagnie, c'est un principe fondamental. Je n'ai
pas l'intention de faire un cours de droit sur les corporations au
député de Bourget. Il est évident qu'une corporation n'a
que les droits qui sont spécifiquement établis dans sa loi ou
dans les lettres patentes. Si ces droits ne sont pas prévus dans les
lettres patentes ou dans la loi qui donne naissance à la compagnie, la
compagnie n'a pas ces droits. C'est pourquoi j'ai demandé au
député de m'indiquer l'article qui donnait la possibilité
à l'Hydro-Québec d'avoir une filiale. Le député de
Bourget semble incapable de le faire. Donc, je déclare irrecevable son
sous-amendement. Article 16.
M. LAURIN: Dans les articles de la loi de l'Hydro-Québec, il
reste que la commission hydro-électrique a le droit d'exproprier, a le
droit d'offrir, a le droit d'obtenir...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! La décision est rendue, l'amendement
du député de Bourget est déclaré irrecevable.
M. JORON: Sur une question de règlement. Me permettez-vous de
vous lire l'article 40 de la loi constituant l'Hydro-Québec?
M. LE PRESIDENT: Tout dépend de l'article.
M. JORON: Qui dit ceci? "La commission peut, avec l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil acheter la totalité ou partie des
actions ou autre valeur de toute compagnie détenant des forces
hydrauliques."
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JORON: II y a toujours bien un bout!
M. LE PRESIDENT: A plusieurs reprises depuis quelques minutes on a
tenté par toutes sortes de moyens et les arguments du
député de Bagot confirment ma décision... Il est
évident que...
M. BOURASSA: II le sait, à part ça, il l'enseigne.
M. LE PRESIDENT: ...l'article 40 de la loi de l'Hydro-Québec ne
lui permet pas d'avoir des filiales. Alors, ma décision est maintenue.
Article 16, adopté?
M. JORON: M. le Président, si vous voulez jouer ce jeu-là,
vous allez avoir du "fun", je vous le promets!
M. LACROIX: Au lieu de travailler pour le peuple, faire de l'obstruction
de la façon que vous en faites. Si vous voulez jouer ce jeu-là on
va le jouer, nous autres aussi.
M. JORON: Reculez...
M. LACROIX: On va vous apprendre la démocratie. Ce ne sont pas
les sept plaies d'Egypte qui vont conduire la province de Québec.
M. LAURIN: M. le Président, une question de règlement. Il
y a plusieurs fois que le député des Iles-de-la-Madeleine nous
lance des injures à la tête. J'aimerais vous demander de le
rappeler à l'ordre, et si vous ne le rappelez pas à l'ordre,
j'aimerais lui rappeler à tout le moins qu'il n'y a pas que les sept
plaies d'Egypte, il y a aussi les sept merveilles du monde.
M. LACROIX: Ce ne sont certainement pas les vôtres, parce que
René Lévesque s'il les avait eues, il les aurait fait
élire en Chambre et il a fait élire les sept plaies d'Egypte,
dont la peste, le député de Saint-Jacques.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. JORON: On voit que l'humour n'est pas le propre des banquettes
ministérielles.
M. LE PRESIDENT: Article 16, sous-amendement.
M. JORON: Nous aimerions apporter un autre sous-amendement à
l'article 16 qui se lirait comme suit, en ajoutant à la fin de l'article
16 les phrases suivantes: "Cette compagnie devra confier la conception
générale, l'élaboration des plans et devis des travaux de
développement à l'Hydro-Québec." Je motive
immédiatement la raison de cet amendement. Le premier ministre nous dit
qu'il est pour.
UNE VOIX: La "pool-room" s'énerve là-bas.
M. JORON: L'une des inquiétudes partagée d'ailleurs par un
grand nombre de personnes à travers le Québec et en premier lieu
par les employés de l'Hydro eux-mêmes tel qu'en faisait foi en fin
de semaine les déclarations des trois syndicats concernés est la
suivante :
Toute cette opération en fait ne cache qu'une chose, à
savoir trouver un moyen détourné pour pouvoir accorder et
je ne les qualifie pas d'amis tout de suite des contrats substantiels
à des firmes d'ingénieurs privés, à des
entrepreneurs en travaux publics, etc. Principalement, M. le Président,
vous...
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le
règlement.
M. BOURASSA: Ce sont des vicieuses calomnies.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, en vertu de l'article 285, 19e,
je demande au député de prouver ces affirmations ou, sans cela,
de les retirer. On attribue des motifs peu louables aux membres de cette
Chambre et au gouvernement responsable. Qu'on les prouve ou qu'on les
retire.
M. BURNS: Je me réfère à une décision que
vous-même, M. le Président, avez rendue il y a quelques jours
lorsque nous avions reproché à un député
ministériel de prêter des intentions à des
députés de ce côté-ci de la Chambre. Je me souviens
de la nuance très ténue que vous aviez faite alors que vous
disiez : Le député a le droit non pas de prêter des
intentions mais d'évaluer la position ou les paroles qu'un autre
député prononce en cette Chambre. Je pense justement que ce que
le député de Gouin est en train de faire, c'est d'évaluer
et de donner son jugement des attitudes du premier ministre ou des
députés ministériels. Je pense que selon votre propre
décision...
M. BOURASSA: II cite les trois syndicats.
M. BURNS: Laissez-moi donc finir! Soit dit en passant, M. le
Président, est-ce qu'il y a deux règles en cette Chambre, une
pour le premier ministre et une pour les autres?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. BURNS: En vertu de l'article 667, je vous demanderai peut-être
une directive là-dessus bientôt. Mais, tout simplement, je pense
que, pour revenir au point d'ordre, le député de Gouin n'a fait
qu'évaluer des paroles qui ont été prononcées. Il
ne prête pas d'intentions.
M. LE PRESIDENT: Voici, c'est évident que je n'ai pas
changé d'opinion. Mon opinion est constante. Maintenant, je n'avais pas
bien saisi les propos du député de Gouin. Je vais faire attention
pour bien...
M. CHARRON: Vous avez manqué quelque chose, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: ... écouter ce qu'il dit et je déciderai
s'ils sont conformes ou non au règlement.
M. JORON: Merci, M. le Président. D'ailleurs, je ne prêtais
pas d'intentions à personne. Je faisais part, je témoignais
d'inquiétudes qui ont été soulevées non pas par moi
mais par d'autres à l'extérieur de ce Parlement et je me
demandais si nous avions raison de nous inquiéter à ce sujet. Je
dis, M. le Président, que la loi 50 ouvre la porte à ces
inquiétudes. Nous aimerions, pour protéger le gouvernement contre
lui-même, refermer cette porte ouverte aux pires allégations.
Comment cette porte est-elle ouverte à l'heure actuelle?
M. BOURASSA: La société va être convoquée. Il
y a un amendement qui a été proposé par le
député de Chicoutimi. C'était déjà dans la
loi, j'ai dit au député que j'appuierais sa...
M. JORON: Vous répondrez après, quand j'aurais
terminé.
M. BOURASSA: Mais pourquoi parler pour rien? Cela va être
convoqué. Si les chefs syndicaux se donnaient la peine de lire le texte
de loi avant de faire des commentaires irresponsables comme ceux qu'ils
font.
M. BURNS: M. le Président, je rappelle le premier ministre
à l'ordre. Je viens de le rappeller...
M. JORON: M. le Président, à l'heure actuelle, telle que
la loi est rédigée c'est la raison pour laquelle nous
apportons à l'article 16 un sous-amendement la porte ne
reste-t-elle pas ouverte à ces inquiétudes sombres qui peuvent
planer dans la tête de bon nombre de personnes? C'est que cette filiale
sera appelée soit à exécuter elle-même ou à
faire exécuter par d'autres ce qui peut être au total des travaux
pour $7 milliards, soit le projet de développement le plus
considérable qui ne se soit jamais fait au Québec. Vous
comprendrez avec moi qu'il est normal que des gens s'interrogent et soient
inquiets. La création de cette société c'est
l'inquiétude de ces gens que je rapporte à cette Chambre
serait un moyen détourné de contourner l'Hydro-Québec.
L'Hydro-Québec ne pourrait pas être sujette aux mêmes
accusations. Parce que d'une part depuis longtemps il y a une politique
d'achats établie à l'Hydro-Québec, une politique de
soumissions publiques établies à l'Hydro-Québec.
Il y a aussi une politique qui est devenue un précédent
sinon une politique ou un règlement, un précédent
qui a fait que, dans le passé, l'Hydro a exécuté
elle-même, comme son propre entrepreneur, les principaux travaux
d'aménagement hydro-électrique. L'Hydro a été son
propre maître d'oeuvre.
H est donc difficile de penser, M. le Président, que l'Hydro
serait amenée à changer d'avis à ce sujet-là. Nous
croyons et nous sommes pleinement d'accord également que l'Hydro devrait
poursuivre cette politique et qu'effectivement elle va la poursuivre. D'autre
part, c'est un fait que l'Hydro n'est pas une chose nouvelle, c'est une chose
en existence depuis passablement longtemps.
Il y a 12,012 employés, nous dit-on, des syndicats, des
conventions collectives, etc. Cela fait une grosse affaire à bouger, on
ne peut pas manier et charrier l'Hydro aussi facilement que l'on pourrait
manier une société nouvelle.
Est-ce que ce serait là la raison, M. le Président
et voilà l'inquiétude qui plane dans la tête de tant de
gens est-ce que ce serait là une façon
détournée de créer une nouvelle entité juridique,
sans précédent, sans règlement, sans contrôle, sans,
derrière, le poids des gens à l'intérieur même de la
société, sans traditions établies en d'autres mots?
Là, il serait évidemment fort facile d'établir des
règlements nouveaux, d'établir des précédents, de
bâtir une tradition qui pourrait déroger aux traditions de
l'Hydro-Québec dans ce domaine-là. C'est la seule façon,
si le gouvernement en avait l'intention, et ce n'est pas moi qui prête
toujours les intentions, M. le Président, je ne fais que vous rapporter
ce qu'on entend un peu partout dans le Québec aujourd'hui, ce serait
là la seule façon dont il serait possible de déroger
à cette tradition et à cette politique.
Je n'ai pas besoin de jouer longtemps avec les chiffres, M. le
Président. La seule mention même des chiffres vous donne une
idée, vous indique tout de suite leur ordre de grandeur, et il n'est pas
interdit d'en parler, si patronage, il devait y avoir, sur quelle
échelle est-ce que ça pourrait se faire? Cela dépasse
toute imagination, M. le Président.
En raison de ces faits-là et en raison, deuxièmement, des
faits suivants, en raison du fait que l'Hydro a déjà mené
à bien et à terme des travaux d'aménagement gigantesques
considérables et l'a bien fait, et qu'elle possède aujourd'hui
des équipes prêtes à continuer de préparer des
plans, de faire des devis et de gérer de grands travaux, M. le
Président, nous nous disons: Pourquoi ne pas utiliser, s'assurer
et c'est ça que notre sous-amendement propose que ces
équipes-là seront utilisées?
Autrement, qu'est-ce qui pourrait se passer encore statutairement si,
dans la loi, on ne s'assure pas que ces gens de l'Hydro, cette
compétence que nous avons formée d'ailleurs à un
coût social considerable, si...
M. BOURASSA: Cela va être les mêmes.
M. JORON: ... il y avait un moyen de nous assurer que la nouvelle
société en question emploiera ces gens-là, parce que ce
qui pourrait arriver...
M. BOURASSA: Pourquoi en prendraient-ils d'autres? M. le
Président, est-ce qu'on pourrait discuter du projet de la réforme
électorale, parce que je vois que ça ne donne rien de continuer
le débat sur la baie James?
M. JORON: Ah! non, s'il vous plaît!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. BOURASSA: M. le Président, je demande l'ajournement du
débat.
M. CHARRON: M. le Président, il n'a pas le droit de parole...
M. BOURASSA: Je demande l'ajournement du débat, M. le
Président, on va discuter du projet de la réforme
électorale.
M. JORON: II n'y a pas consentement unanime, et on va continuer de
parler de la baie James. Je m'aperçois que vous avez besoin d'en
entendre parler encore un peu plus longtemps. Je disais, M. le
Président, que toute cette compétence que nous avons
formée à grands frais et à un coût social
passablement élevé, dans l'Hydro-Québec même, il
faudrait s'assurer...
M. LE PRESIDENT (Blank): A l'ordre! L'article 332 dit que je dois faire
rapport au président. Quand le député demande
l'ajournement du débat, le président du comité
plénier doit faire rapport au président.
M. CHARRON: II faut qu'il fasse une motion.
M. LE PRESIDENT: C'est l'article 332. UNE VOIX: Apprenez vos
règlements!
M. CHARRON: La motion est débattable. M. le Président,
est-ce que la motion du premier ministre est débattable?
DES VOIX: Oui.
M. CHARRON: Elle est débattable!
Alors, M. le Président, sur la motion du premier ministre, je ne
suis pas d'accord du tout à ce que vous quittiez maintenant le fauteuil.
Par notre opposition depuis le début et le fait que le premier
ministre présente maintenant sa motion en est un aveu nous avons
démasqué du mieux que nous avons pu le projet, M. le
Président...
M. LACROIX: Bande d'hypocrites!
M. CHARRON: ... nous nous sommes appliqués...
M. LACROIX: Obstructeurs!
M. CHARRON: ... à chacun des articles du projet de loi, M. le
Président...
M. LACROIX: Des gens qui ne veulent pas la prospérité du
Québec!
M. CHARRON: ... à démontrer ce que le projet cachait,
contrairement à tout ce qui avait été énoncé
comme ballon, le 30 avril dernier, ce qui avait été
apporté comme argument en Chambre...
M. LACROIX: Ce ne sont pas ces balounes qu'on va crever, par
exemple!
M. CHARRON: ... nous nous appliquons systématiquement non pas
à apporter de l'opposition mais à demander des
éclaircissements que le premier ministre s'est refusé, dès
le début du comité plénier, à nous apporter.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est faux!
M. CHARRON: Je ne vois pas pourquoi, M. le Président...
M. BOURASSA: C'est faux.
M. CHARRON: ... vous quitteriez maintenant le fauteuil alors que le
débat sur les articles 16, 17 et 18 porte véritablement sur le
fond du projet et que nous nous appliquons, comme l'ont fait le
député de Gouin et le député de Bourget depuis le
matin, et chacun d'entre nous, à essayer de trouver...
M. BOURASSA: On reprendra ça ce soir.
M. CHARRON: ... ce que cache ce projet collectif, la loi du
siècle présentée par le premier ministre.
M. BOURASSA: On reprendra ça ce soir.
M. CHARRON: Ce que vient de faire le premier ministre, M. le
Président, en vous demandant de quitter le fauteuil, c'est simplement
avouer devant la Chambre et devant la population que, face à son projet,
que nous avons accusé d'être non préparé,
d'être une baloune publicitaire, d'être un détournement de
population, il vient de nous donner raison.
Chaque fois que nous posons des questions, à chaque amendement
que nous avons apporté, si la procédure ne lui permettait pas de
nous dire irrecevable, alors il s'appliquait par des manifestations absolument
de "back-bencher" et électoraliste, à détruire
l'argumentation que nous essayons d'apporter. Il évitait
systématiquement depuis le début de notre travail en
comité plénier à répondre à nos questions.
Et là, M. le Président, parce qu'il voyait...
M. LACROIX: Casse-tête pour les enfants! Casse-tête pour les
enfants!
M. CHARRON: ... qu'en aucun temps, les sept députés du
Parti québécois n'allaient cesser leur opposition comme ils sont
mandatés pour le faire en Chambre et il voyait que face à notre
position, même si on était rendu au 15 août, M. le
Président, il ne nous aurait pas arrêtés. Et nous allons
procéder article par article, nous allons dire chaque argument que nous
avons, nous allons poser toutes les questions que nous voulons. Si ça
ennuie le premier ministre, alors il ne lui reste qu'un recours et c'est celui
qu'il utilise par la motion qu'il vous a présentée, M. le
Président, à savoir que vous quittiez le fauteuil et que nous
discutions d'autre chose.
Parce que le premier ministre, trop soucienx de son image, sait
très bien que s'il est soumis jusqu'à 11 heures ce soir aux
questions et aux arguments des sept députés du Parti
québécois, son image, la sienne, celle qui est très
importante, et celle de son projet mangeront une sérieuse claque dans
les media d'information demain matin...
M. LACROIX: Vous êtes un menteur public et un...
M. CHARRON: C'est un des arguments que nous avons soumis, M. le
Président, à savoir qu'il n'y a pas eu une seule réponse
valable d'apportée. Il y a bien eu le ministre de l'Education ce matin
qui nous a apporté des arguments que je qualifierais de raisonnables, M.
le Président, mais que l'argumentation du député de
Bourget...
M. BOURASSA: Cela a changé beaucoup votre attitude!
M. CHARRON: Voulez-vous rappeler à l'ordre le premier ministre,
M. le Président?
M. LACROIX: Bande de démagogues!
M. CHARRON: Je dis que, par la motion que nous débattons
actuellement, c'est l'aveu de faiblesse, l'aveu de non-préparation et
l'aveu d'incompétence que vient de faire le premier ministre devant la
Chambre, M. le Président.
M. LACROIX: Allez chercher Reggie Char-trand maintenant.
M. BOURASSA: Si le député peut se calmer... Hier, nous
avons adopté une quinzaine d'articles. Nous avons discuté hier le
programme de la journée. Est-ce que nous étions pour discuter de
la Loi sur les consommateurs, de la réforme électorale ou
continuer sur la baie James? Or, nous discutons depuis ce matin, depuis 10 h 30
sur la baie James, sans avoir adopté un seul article, alors qu'hier,
nous en avions adopté une quinzaine. Alors, ma réaction, c'est
que, pour une heure ou deux, quitte à reprendre le débat ce soir,
puisqu'il paraît impossible d'avancer cet après-midi, comme cela
était impossible d'avancer ce matin. Ma réaction normale,
très calme, c'est qu'on discute de la réforme électorale
ou de la loi sur les consommateurs et qu'on reprenne le débat ce soir,
sur la baie James. Peut-être que les membres du Parti
québécois, qui sont complètement isolés maintenant,
seront dans de meilleures dispositions pour faire avancer le débat.
M. BUNRS: Parlant de démagogie!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, parlant sur la
proposition aux fins d'ajourner le débat, je ne puis quand même
pas souscrire aux propos du premier ministre, non plus qu'à ses
intentions. Il est bien évident que le débat que nous avons
engagé peut paraître long. Il a été effectivement
assez long et ponctué de toutes sortes d'incidents,
Mais, eu égard à l'importance du projet, le gouvernement
devait s'y attendre, surtout que le projet a été
présenté à un moment qui, à notre avis,
n'était certainement pas le mieux choisi. Je ne ferai pas de
procès d'intentions au gouvernement, mais le gouvernement
présentant ce projet à ce stade-ci de nos travaux parlementaires,
au moment où nous nous apprêtons à ajourner les travaux de
la Chambre pour les vacances de l'été, il est bien évident
qu'il pouvait se produire des incidents puisque tout le monde est
fatigué. Il y a une certaine irritation qui s'empare des
députés et le gouvernement, sans lui prêter d'intentions, a
peut-être pensé que la hâte que nous avions tous de prendre
quelque repos l'aiderait à adopter plus vite ce projet de loi
éminemment contentieux.
Le premier ministre vient de dire que nous avons hier adopté
quinze articles. C'est le cas. Il est vrai que depuis le matin, pas depuis dix
heures et demi mais depuis onze heures un quart environ, nous discutons de
l'article 16. Le parti que je représente n'a pas fait de débat
sur cet article 16. Le Parti québécois pour sa part en fait un.
L'on apporte des amendements, des sous-amendements à la proposition
d'amendement du premier ministre. Le premier ministre n'aurait quand même
pas raison de tirer parti du fait qu'actuellement ce sont les
députés du Parti québécois qui ont fait opposition
aux volontés du gouvernement. Le premier ministre, dis-je, n'aurait pas
raison d'essayer de tirer parti de cette situation de fait pour déclarer
qu'il y a unanimité de la Chambre en ce qui concerne le reste du projet
de loi. Sur cet article 16, d'accord, l'opposition est venue d'un
côté de la Chambre, soit des collègues du Parti
québécois. Mais il y a tous les autres articles que nous aurons
à discuter et au sujet desquels nous proposerons des amendements, que le
premier ministre connaît d'ailleurs, et qu'il a déjà
virtuellement acceptés, puisqu'il m'a donné l'assurance que sur
un article particulièrement contentieux, l'article 33, il accepterait en
fait, quand cela se produira, l'amendement que j'ai proposé. Il y a
d'autres articles qui sont également contentieux et l'Union Nationale
discutera à ce moment-là les articles que je viens
d'évoquer.
Je ne vois pas les raisons pour lesquelles le premier ministre nous
demanderait de suspendre momentanément. Il s'agit de vider une question,
vidons-la. Je sens naître chez des députés une certaine
nervosité, une certaine irritation. C'est normal et
compréhensible. Mais il ne faudrait pas que les débats soient
contaminés aussi par des interpellations qui viendraient de droite ou de
gauche et qui empêcheraient ceux qui ont à s'exprimer de
s'exprimer comme ils le veulent, conformément aux règlements.
Pour ma part, je ne vois pas le bien-fondé de la proposition du
premier ministre puisque de toute façon le débat qui est
actuellement engagé va reprendre, va devoir se poursuivre jusqu'à
ce que des députés légitimement élus se soient fait
entendre selon leur gré et leur volonté. Surtout, que le premier
ministre ne tienne pas pour acquis que déjà le reste du projet
est accepté par l'ensemble des députés de l'Opposition
puisque, comme je viens de le dire, nous avons des propositions d'amendements.
Nous attendons que cette partie du débat soit terminée pour les
proposer à l'agrément du gouvernement.
Pour ces raisons, M. le Président, je ne comprends pas que le
premier ministre veuille tout à coup ajourner le débat en cours
et nous demander de nous attaquer à un autre projet de loi. Je pense que
sur la lancée actuelle nous pourrions poursuivre, épuiser les
arguments que servent les députés et procéder normalement
à l'étude d'un projet de loi au lieu de fragmenter cette
étude et de faire une sorte de chassé-croisé.
La présentation de projets de loi, l'étude de projets de
loi, nous distrairait de l'objectif fondamental que nous avons, soit de rendre
meilleure une loi dont nous avons contesté le principe et qui nous
apparaîtra de toute façon, à la fin, comme un moindre
mal.
M. LAURIN: M. le Président...
M. BERTRAND: M. le Président, je demande la parole, non pas pour
corriger mon collègue, mais on pourrait reprendre ses propos à
savoir que nous ne sommes pas intervenus dans la discussion. Ce matin, j'ai
participé au débat sur les articles 16 et 17, en disant que
c'étaient les articles-clés du projet de loi. De cela, il n'y a
aucun doute. Je ne veux pas reprendre les arguments qui ont été
apportés. Je crois que toutes les Oppositions ont le droit de se faire
entendre et peuvent formuler des amendements, des propositions qui sont
acceptées ou non. Je dirai au premier ministre comme expérience
c'est bon parfois de se rappeler certaines expériences que
j'ai déjà été celui qui a présenté en
Chambre, peut-être le projet de loi le plus périlleux. A ce
moment, je n'ai pas attendu à la fin d'une session. Je l'ai
présenté en octobre. J'ai été durant un mois, assis
à ce pupitre, pendant qu'il y avait des gens qui manifestaient
ailleurs.
M. BOURASSA: Qu'est-ce que cela a donné le 29 avril?
M. BERTRAND: A ce moment, M. le Président, j'en avais, moi aussi,
des mouvements
d'impatience que j'essayais de garder bien renfermés et bien
enclos. Je comprends le premier ministre d'être fatigué, c'est
normal. Je comprends le premier ministre. Il peut être morose à
certains moments. Je lui demande de reprendre son sourire. S'il a besoin d'un
verre de lait...
M. DEMERS: On en a... $0.04 de plus la pinte...
M. BERTRAND: ... il va le payer $0.04 moins cher parce que l'ordonnance
n'est pas encore entrée en vigueur. M. le Président, badinage
à part, je pense que pour le bien de nos travaux, le premier ministre
ferait un bon geste de retirer sa motion, car autrement, je dois dire que,
quant à moi, je serai obligé de voter contre sa motion, pour que
l'on continue l'examen du présent projet de loi.
UNE VOIX: Votez contre...
M. BURNS: M. le Président, comme vous l'avez si bien dit...
M. DEMERS: Deux jours...
M. BURNS: ... il s'agit d'une motion débat-table. Plutôt
que de parler immédiatement des raisons qui nous feront militer en
faveur d'une opposition à cette motion, j'aimerais faire un appel au
sens de la démocratie même si le premier ministre est
fatigué et nerveux. On sait qu'il n'aime pas cela venir en Chambre... On
comprend tout ça. Je fais un appel au premier ministre à faire
peut-être lui-même son propre examen de conscience. Dans ce
débat c'est vrai que cela dure depuis onze heures ce matin
environ sur l'article 16 peut-être que si le premier ministre
avait été un petit peu moins intransigeant, il aurait
facilité la tâche aux deux députés, parce que je
fais remarquer qu'il y a deux députés du Parti
québécois qui, seulement ou à peu près, sont
intervenus. On ne peut pas parler d'obstruction systématique. Par
contre, comme le disait le député de Missisquoi, il s'agit d'un
article central, un article important. Il est normal qu'on passe plus de temps
sur cela. D'autre part, sur le fait de la motion elle-même, sans vouloir
prêter d'intentions au premier ministre, je sais ce qui va arriver si
nous passons à un autre projet de loi. Le premier ministre espère
peut-être qu'après avoir débattu d'autres projets de loi,
nous nous trouvions à des heures tardives pour discuter d'un projet de
loi qui, déjà, a causé des scènes plus ou moins
gracieuses. Je pense qu'en plein coeur de l'après-midi comme ça,
cela favorise davantage la discussion de problèmes trop importants. Pour
cette raison, M. le Président, je demande au premier ministre,
très sincèrement, de retirer sa motion, de continuer à
discuter des articles 16, 17 et 18 qui sont des articles importants. On est au
coeur de cette société.
Pourquoi n'en discuterait-on pas? Tout le monde est de bonne humeur. Si
le premier ministre se retient, garde son impétuosité et reste
assis bien tranquillement, peut-être que les deux députés
du Parti québécois qui argumentent sur ces articles vont pouvoir
le faire beaucoup plus brièvement s'ils ne sont pas interrompus à
gauche, à droite et au centre par le premier ministre.
S'il retire son amendement, on va continuer à étudier
ça et on va voir le progrès quand on sera rendu à l'heure
du souper.
M. BOURASSA: Pourquoi ne peut-on pas discuter du projet de loi de la
réforme électorale ou du bill de la protection des consommateurs?
On pourrait me donner les amendements...
M. LAURIN: Une fois que le premier ministre a parlé sur la
motion, j'aimerais exercer mon droit de parole sur cette motion.
M. BOURASSA : Sur les amendements que j'ai donnés, est-ce que je
peux poser une question?
M. LAURIN: M. le député de Mercier a déjà
exercé son droit de parole sur la motion, et je demande d'exercer mon
droit de parole à mon tour.
M. BOURASSA: Juste une question.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget a raison.
M. CHARRON: On a fini par en avoir une.
M. LAURIN: En présentant sa motion d'une façon soudaine,
imprévue, impulsive et irréfléchie, le premier ministre a
manifestement obéi à un mouvement d'impatience et d'irritation
qui a été noté par tous les députés de cette
Chambre...
M. BRISSON: Voyons donc, ce n'est pas vrai!
UNE VOIX: C'est vous qui êtes impatients.
M. LAURIN: Je pense que les raisons profondes qui ont
motivé...
M. BOURASSA: On me prête des motifs, c'est faux.
DES VOIX: C'est faux!
M. LAURIN: ...la présentation de cette motion, c'est que nous
étions en train de discuter d'un article qui traitait du rôle de
l'Hydro-Québec et que nous étions en train, par notre
argumentation, par nos questions, de démolir les prétentions
qu'il avait eues de
respecter le rôle de l'Hydro dans la conception, dans
l'exécution des projets.
M. LE PRESIDENT: Vous ne devez parler que sur la motion ou j'ajourne le
débat.
M. LEVESQUE: Il est maintenant sur le même disque, il faudrait
qu'il change.
M. LAURIN: Admettons que nous nous contenterons de dire que c'est un
aveu d'impuissance.
M. MARCHAND: ...ce ne sont que des gramophones.
M. LAURIN : Lorsqu'on ne peut plus répondre par des arguments
rationnels, on emploie les arguments de force, et c'est ça que le
premier ministre a fait. Mais nous estimons qu'il faut continuer à
discuter de cet article 16, car ce serait un précédent que
pour ma part je n'ai jamais vu qu'on interrompe sans aucun avis, sans
aucune raison, une discussion qui se déroulait quand même selon
les canons de la logique et de la cohérence.
Et je le prétends encore, car les arguments que nous avons
apportés se tenaient très bien, se déroulaient selon la
démarche naturelle de l'esprit humain et les réponses qu'on nous
a données justement n'étaient pas des réponses. Et c'est
précisément parce qu'on ne pouvait pas nous
répondre...
M. BRISSON: ...des richesses naturelles.
M. LAURIN: ...sur le même plan, sur le même niveau, par les
mêmes arguments rationnels que, l'impatience et l'irritation croissant,
on décide d'interrompre soudainement les débats. Le premier
ministre a essayé par la suite de retraiter en désordre, voyant
qu'il avait fait une gaffe et une bévue, en disant que nous pourrions
reprendre le débat ce soir après que nous aurions discuté
d'autres projets de loi.
Mais cette rationalisation ne donnera le change à personne car
tout le monde sait bien les raisons qui amenaient le premier ministre à
proposer cette motion.
M.BOURASSA: Est-ce que je peux poser une question au
député?
M. LAURIN: Je ne le permets pas, M. le Président.
M. BOURASSA: Ah! il ne le permet pas, ça fait mal.
M. BURNS: II ne répond pas depuis le début du
débat.
M. BOURASSA: Je permets toujours les questions.
M. MARCHAND: ...au premier ministre, c'est pour ça qu'il ne
permet pas de questions.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAURIN: Je pense que lorsque nous avons pu discuter
sérieusement des articles du projet, la discussion a progressé.
Lorsqu'on nous présentait de bonnes raisons, nous nous rendions aux
arguments. Malgré tout, le projet jusqu'à ce jour, étant
donné qu'il s'agit d'un projet aussi important, a progressé
favorablement. La raison pour laquelle nous tenons à continuer cette
discussion, c'est que les articles 16, 17 et 18 constituent
véritablement le coeur du projet de la société de la baie
James, puisque, depuis le début de ce projet, nous discutons, aussi bien
en commission parlementaire qu'en deuxième lecture, du rôle
majeur, capital que doit y jouer l'Hydro-Québec.
Justement les interprétations varient quant à l'extension,
quant aux modalités de ce rôle. Nous voulons nous assurer que
l'Hydro-Québec joue un rôle véritablement majeur. Le
premier ministre a une opinion contraire, mais c'est précisément
là-dessus que gît l'essentiel du débat. Nous ne voyons pas
pourquoi nous l'interromprions soudainement, alors que, justement, nous avons
progressé d'une façon très avantageuse dans l'étude
de ce problème et que, de toute façon comme le disait le
député de Chicoutimi il faudra bien vider un jour ce
débat qui concerne l'Hydro-Québec.
UNE VOIX: Cela viendra.
M. LAURIN: Maintenant que nous l'avons commencé, pourquoi ne pas
le vider tout de suite? Nous sommes préparés. Le premier
ministre, en maintenant sa motion, va vouloir persuader la population qu'il
était moins préparé que le Parti
québécois...
M. BOURASSA: Cela va vous faire mal.
M. LAURIN: ... retraite en désordre justement parce qu'il n'a
plus d'argument à nous proposer. C'est la raison pour laquelle nous
tenons à...
M. BOURASSA: Cela va vous faire mal, cette motion.
M. LAURIN: ... continuer à présenter nos arguments...
DES VOIX: Motion.
M. LAURIN: ... quitte à la population, une fois la
poussière retombée, à juger qui du gouvernement ou des
Oppositions avait raison dans les arguments que les députés
présentaient.
M. BRISSON: C'est justement ce que la population va voir.
M. LAURIN: Nous ne craignons pas du tout d'amener tous nos arguments en
même temps dans un même séance jusqu'à ce que nous
les ayons épuisés. Nous sommes sûrs des arguments que nous
apportons; ils sont soutenus par notre conviction, ils sont soutenus par les
études que nous avons faites et ils sont soutenus par notre
détermination à faire triompher en cette Chambre la
vérité et non la démagogie.
M. BOURASSA: Le député de Maisonneuve m'a posée une
question tantôt. Le député de Bourget appelle ça une
retraite en désordre. Il essaie de camoufler la situation où il
se trouve. Nous avons soumis hier tous les amendements pour tous les articles.
Pourquoi le Parti québécois, qui avait trois amendements
seulement pour l'article 16, ne pourrait-il pas nous soumettre les amendements
pour les articles suivants et ce soir nous pourrions procéder plus
rapidement? En attendant, nous pourrions régler un ou deux projets de
loi. Qu'est-ce qu'il y a d'anormal là-dedans? C'est de la collaboration
constructive. Cela fait six heures que nous débattons l'article 16.
M. LAURIN: Je vais répondre.
M. BOURASSA: Nous demandons les amendements pour les articles 17 et 18
les autres pour pouvoir peut-être y répondre plus
brièvement.
M. LAURIN: Nous donnons au gouvernement la même médecine
qu'il nous a servie durant quatre jours. Nous lui avons demandé les
amendements qu'il voulait présenter en cette Chambre et il nous a dit
qu'il n'était pas prêt, qu'il fallait encore des avis juridiques.
Il nous a fallu attendre quatre jours durant lesquels nous avons poursuivi le
débat, avant que, hier matin seulement, le gouvernement dépose
ses amendements. S'il nous avait communiqué à nous comme au
Ralliement créditiste les amendements peut-être que le
débat aurait été écourté.
M. BOURASSA: Du calme!
M. LEVESQUE: On commence à manifester des signes de fatigue et
d'impatience.
M. PAUL: Personnellement, je n'ai pas une longue expérience
parlementaire puisque je ne suis député que depuis quatorze ans.
Jamais je n'ai vu une telle motion de la part du gouvernement. Nous avons vu
des motions présentées par l'Opposition. On se rappelle les
nombreuses motions analogues qui nous furent présentées lorsque
nous avons eu l'occasion d'étudier le projet de loi no 63.
Il est possible que le premier ministre ait des raisons qu'il ne veuille
pas nous donner. Nous allons lui donner le bénéfice du doute.
Peut-être qu'il est tellement ébranlé par les arguments
présentés au soutien des motions d'amendement des
députés du Parti québécois qu'il n'ose pas pour le
moment les recevoir à moins d'avoir le temps d'analyser toutes les
implications possibles de ces amendements.
J'aurais peut-être une suggestion de compromis à l'endroit
du premier ministre. Je comprends que nous sommes au coeur même de la
difficulté que nous devons traverser dans l'étude de ce projet de
loi en comité plénier.
Est-ce que l'honorable premier ministre, si, de consentement, nous
suspendions l'étude des articles 16 à 23, consentirait à
ce que nous prenions l'étude de l'article 24 parce que nous tomberions
dans un autre domaine où les arguments serrés seraient
sûrement moins nombreux et nous pourrions rapporter effectivement
progrès. Je crois que le premier ministre serait du même coup
dégagé de cette tension normale à laquelle il doit faire
face à l'occasion de l'étude de ces articles très
discutables et discutés, les articles 16 et suivants de son projet de
loi.
Peut-être que le premier ministre accepterait ce compromis parce
que nous changerions de tête de chapitre, nous analyserions une
série d'articles qui n'ont pas la même portée.
Là, nous allons tomber dans un domaine où le premier
ministre est excessivement familier. Il est habile. Il est
expérimenté puisque nous parlerons de financement. Je me demande
si l'honorable premier ministre consentirait à ce compromis du
même coup. Il ne nous donne pas de raisons. Nous doutons qu'il soit tout
à fait justifiable de présenter sa motion, peut-être dans
des termes un peu imprécis qui ne nous ont pas permis de comprendre la
justification d'une telle motion. D'un autre côté, nous de
l'Opposition, nous y verrons de la part du premier ministre un désir
sincère de ne pas causer lui-même, ou créer lui-même
un certain "filibuster" à son propre projet de loi.
M. BOURASSA: M. le Président, je ne comprends pas la surprise du
député de Maskinongé. On a discuté hier les travaux
de la Chambre. Il était possible que ce matin nous discutions la Loi des
consommateurs. Cela a été discuté hier matin. Nous avons
décidé ce matin, après hésitation, d'aborder
immédiatement l'étude du projet de loi no 50. Or, on
s'aperçoit, pour différentes raisons... On dit que le ministre de
l'Education a donné des raisons. Nous en avions donné auparavant,
le ministre des Richesses naturelles aussi. Malgré cela, rien n'avance,
il y a amendement sur amendement. Alors je dis... Je ne vois pas pourquoi la
suggestion faite de bonne foi par le leader parlementaire d'avoir les
amendements comme je les ai donnés hier matin afin de pouvoir les
examiner et entretemps, d'ici six heures, de pouvoir avancer sur un autre
projet de loi est préférable à la mienne. Qu'est-ce qu'il
y a d'extraordinaire dans une procédure comme celle-là? C'est
simplement pour accélérer les travaux de la Chambre et avoir une
meilleure discussion par la suite, en connaissance de cause.
M. SAMSON: M. le Président...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de Rouyn-Noranda a
demandé la proie avant vous.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II a demandé la parole avant moi?
M. SAMSON: M. le Président, quant à nous, bien
objectivement, nous ne voyons pas de quelle façon on pourrait avancer
les travaux en ajournant ce débat présentement. Nous ne voyons
pas non plus, en suspendant les articles jusqu'à 24 de quelle
façon il nous serait loisible d'avancer étant donné
qu'à compter de l'article 24 on doit discuter le financement et que nous
sommes présentement sur une discussion des structures. Avant de discuter
le financement il faut raisonnablement connaître les structures que nous
allons accepter. M. le Président, je pense que nous devrions et
je demande au premier ministre de retirer sa motion continuer le
débat sur le bill 50. Advienne que pourra! Si certains membres ont
décidé de retarder le débat, c'est leur droit. Même
si on le reporte à ce soir ce seront les mêmes travaux, les
mêmes discussions, les mêmes débats que nous aurons à
affronter et nous aurons quand même à les supporter.
Je dis au premier ministre que le cul-de-sac devant lequel nous nous
trouvons présentement nous devrons le surmonter à un moment ou
à un autre. Si on ajourne le débat j'ai la drôle
d'impression que c'est tout simplement permettre à des membres qui
veulent faire de l'obstruction d'aller préparer d'autres discours. C'est
leur permettre de consulter les cadres du syndicat de l'Hydro-Québec
comme l'indique un papier qu'on vient de recevoir pour leur
préparer des discours. C'est leur donner du temps. Je pense que nous ne
devons pas donner de temps à ce moment-ci. Nous sommes en pleine
discussion et quoique ce soit difficile il faut que ça passe. Cela va
passer, j'en ai l'impression. Armons-nous d'un peu de patience. Nous commes
prêts, quant à nous, à fournir toute cette patience. Mais
armons-nous de patience, M. le Président, et que le débat
continue.
D'ailleurs, je me base, en demandant au premier ministre de retirer
cette motion, sur le fait qu'on pourrait mettre en doute sa
recevabilité. En vertu de l'article 192 une motion portant ajournement
du débat peut toujours être faite lorsque la Chambre est saisie
d'une motion susceptible de débat autre qu'une motion portant
ajournement de la Chambre. Et, à l'article 192 2): "Elle doit être
formulée en ces termes: "Que le débat soit maintenant
ajourné." En vertu de l'article 192, note 2-1, la motion d'ajournement
du débat...
M. BIENVENUE: ... l'article.
M. SAMSON: M. le Président, j'ai le droit de parole. "La motion
d'ajournement du débat ne doit contenir aucun exposé de motifs.
De fait, elle ne doit contenir d'autres mots que ceux de la formule."
Le premier ministre a formulé beaucoup d'autres mots que ceux de
la formule en expliquant pourquoi il voulait ajourner. En vertu de la note 2:
"II est irrégulier de proposer d'ajourner le débat à une
date déterminée." En vertu de la note 192, 3-1; "II est
irrégulier de proposer l'ajournement du débat quand on a
interrompu un opinant." Or, quand la proposition est arrivée il y avait
un député du Parti québécois qui avait la parole.
En vertu de la note, 192, 3-2: "On ne peut interrompre un opinant pour proposer
l'ajournement du débat."
Article 286. M. le Président, nous pourrions sérieusement
mettre en doute la recevabilité de cette motion. Même si on est en
comité, les comités sont régis par les règlements
de la Chambre.
M. LE PRESIDENT: Mais la motion a été faite en vertu de
l'article 332.
M. SAMSON: De toute façon, M. le Président, même si
elle a été faite en vertu d'un autre article, j'ai le droit
d'invoquer un autre article qui peut contredire le premier article, c'est ce
qui se fait régulièrement et c'est justement pourquoi, M. le
Président, on veut refondre ces règlements qui n'ont aucun sens
et qui ne mènent à rien.
M. le Président, ces règlements nous permettent en vertu
d'un article de faire une chose et en vertu de l'article suivant ou
antérieur, de faire le contraire. C'est de l'interprétation mais
je ne veux pas, M. le Président, discuter de la recevabilité, je
n'ai qu'invoqué ce fait où je me disais qu'il serait possible de
faire un long débat de procédure sur ça.
J'invoque ceci pour demander au premier ministre de retirer tout
simplement sa motion et de permettre que nous continuions le débat. M.
le Président, j'ai l'impression que les honorables députés
du Parti québécois vont, à un moment ou à un autre
et je pense que c'est peut-être à ce moment-ci
offrir un peu plus de collaboration, sachant... Je pense qu'on peut, M. le
Président, faire appel à leur compréhension.
Eux aussi, sont des députés responsables, autant que nous
le sommes et autant que le parti ministériel. On peut faire appel
à leur compréhension et permettre de continuer le débat.
De toute façon, je ne vois aucune utilité de le reporter à
plus tard, de passer à autre chose. Sous le prétexte que
ça apporterait peut-être un débat plus court, ça
n'apportera rien de nouveau. Nous devons faire le débat, nous devons
supporter ce qu'ils ont à dire, et que ça nous plaise ou non, ils
ont droit de le dire.
M. BURNS: M. le Président, sur un point, je veux simplement dire
ceci au premier ministre.
Ce sera très bref. La suggestion qu'a faite le
député de Maskinongé est une suggestion très
constructive. Si le problème du premier ministre est que ça
n'avance pas sur les articles 16, 17 et 18 qui sont des articles tout le
monde le sait, tout le monde s'y attendait un peu plus contentieux que
les autres, si c'est ça et si le premier ministre veut s'encourager et
voir du progrès, passons à la suggestion du député
de Maskinongé, passons à autre chose et vous verrez d'ici six
heures si ça avance ou si ça n'avance pas. Vous serez
peut-être plus à même de juger à ce
moment-là.
Vous avez trois partis d'opposition, M. le Président, et je pense
que le premier ministre, malgré sa majorité ministérielle,
est obligé d'en tenir compte. Il y a trois partis d'opposition qui
disent qu'il n'y a pas lieu d'ajourner le débat. Continuons et essayons
de progresser. Je souscris personnellement et mon groupe souscrit à la
suggestion du député de Maskinongé. Sautons ces
articles-là, continuons et on verra le progrès à ce
moment-là.
Je demande encore une fois au premier ministre de retirer...
M. LEVESQUE: On a fait une demi-heure de travaux dans l'autre loi.
M. BURNS: C'est la faute de qui?
M. LEVESQUE: C'est votre faute, obstruction systématique,
"filibuster".
M. BURNS: Arrêtez donc votre cinéma! C'est rendu que...
M. BERTRAND: Vous avez indiqué le chef du Ralliement
créditiste, j'avais demandé la parole à ce
moment-là.
M. LE PRESIDENT: Vous aviez déjà parlé...
M. BERTRAND: Oui, je comprends, mais au même moment, je vous l'ai
demandé.
M. LE PRESIDENT: Vous avez déjà parlé sur cette
motion.
M. BURNS: En vertu de l'article 346, il a le droit de parler à
nouveau.
M. BERTRAND: M. le Président, si le premier ministre avait
présenté sa motion à 12 h 30, à l'ajournement,
ça aurait eu du bon sens.
M. LEVESQUE: Est-ce que les règlements ne comptent pas?
M. BRISSON: Cela n'a plus de bon sens quand il s'est aperçu que
les autres...
M. BERTRAND: A ce moment-ci, ça n'en a pas. Il devrait lire son
horoscope du jour qui lui dit de se fier à quelqu'un qui peut lui donner
un conseil. Le leader de l'Opposition lui en a donné un excellent.
M. LE PRESIDENT: Je pense que le député avait le droit de
parler seulement une fois sur la motion.
M. PAUL: M. le Président, je vous signale que nous sommes en
comité.
M. BERTRAND: En comité.
M. PAUL: Ce ne sont pas les règles de la Chambre qui
régissent nos travaux et je vous signalerai, M. le
Président...
M. CARDINAL: Que M. Bourassa a parlé trois fois.
M. PAUL: Je crois, M. le Président, que c'est l'article 341 et
les suivants...
M. BURNS: 346.
M.PAUL: 346, M. le Président, je regrette mais je crois que vous
avez été mal conseillé par le leader du gouvernement quant
à invoquer le droit de parole qu'aurait déjà exercé
le député de Missisquoi.
Nous ne sommes pas en Chambre, nous sommes en comité
plénier.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, avec 72 députés,
on doit être capable de placer son grain de sel dans cette
discussion.
M. PAUL: A ce compte-là...
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, après une
journée...
M. PAUL: ... vous avez moins d'intelligence qu'un grain de sel!
M. BURNS: Pauvre petit garçon!
M. SAINT-PIERRE: On pensait, après au moins un dimanche de repos,
que les membres de l'Opposition seraient capables d'aborder l'étude de
ce projet de loi avec peut-être plus de sérénité
qu'ils ont pu le faire samedi.
Je ne voudrais pas répéter les sentiments que j'ai
exprimés samedi, mais j'ai trouvé samedi que la conduite des
débats dans cette Chambre était scandaleuse.
M. PAUL: M. le Président, j'invoque le règlement.
J'inviterai le ministre instituteur à respecter le règlement qui
l'empêche de juger de la conduite des députés dans cette
Chambre.
M. SAINT-PIERRE: Votre intervention me permet de vous juger.
M. LEGER: Est-ce que le ministre me permet une question?
DES VOIX: Non.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, sur la motion qui
favorise...
M. LEGER: Est-ce que le ministre me permet une question?
M. SAINT-PIERRE: Non. Sur la motion, M. le Président, je voudrais
parler favorablement. Il me semble que, depuis le matin, nous avons
essayé de répondre à des questions mais on a bien
l'impression je ne passe pas de jugement à qui en revient la
responsabilité mais c'est évident qu'on tourne en rond,
qu'il n'y a absolument rien qui se soit fait au point de vue du débat.
Chaque partie peut avoir et particulièrement le Parti
québécois ses idées sur le projet de loi et en
particulier sur l'article 16. Nous avons répondu et mon intervention de
ce matin a tenté de donner le plus de réponses possible,
tenté d'éclairer la Chambre sur ce que pouvaient être les
intentions du gouvernement.
Or, j'en conclus, par la réponse que m'a donnée le chef
parlementaire du Parti québécois, qu'aucun de ces arguments n'a
pu entrer en profondeur et que même le flot de nos arguments a
pénétré l'esprit de ces gens un peu comme l'eau qui
descend sur le dos d'un canard.
Il y a des caractéristiques, M. le Président, d'une
opposition systématique, d'une opposition systématique pour
retarder nos débats...
M. PAUL: J'en appelle au règlement. Je vous signale qu'en vertu
de l'article 332, les règles de la pertinence du débat doivent
s'appliquer.
UNE VOIX: C'est une motion d'amendement. On est en comité.
M. PAUL: Pardon! C'est une règle spéciale d'exception.
Nous ne sommes pas à l'hôtel de ville de Pointe-Claire. J'ai dit,
M. le Président, qu'il y a des règles qui s'appliquent sur cette
motion.
M. SAINT-PIERRE: Le bien-fondé de la motion
présentée par le chef du gouvernement, M. le Président,
s'explique par le fait que nos débats n'ont aucunement avancé
dans le sens et qu'il semblait à propos d'aborder peut-être
d'autres sujets pour nous permettre à une autre occasion de faire
certain progrès.
Il y a quand même des caractéristiques d'une opposition
systématique, nous l'avons vu. Cette opposition systématique, ce
ne sont pas des questions pertinentes posées au gouvernement, ce n'est
pas un cheminement dans lequel les membres de l'Opposition tentent de percevoir
ou de suggérer des améliorations constructives, mais c'est
plutôt une répétition de motions qui déjà ont
été défendues et débattues quant à leur
fond.
M. PAUL: J'en appelle au règlement. Je dis que l'honorable
ministre instituteur ne peut parler que sur la pertinence au soutien du rejet
ou de la recevabilité de cette motion. Il n'a pas droit de... et en
vertu, M. le Président, des dispositions de l'article 332,
5ièmement, j'inviterais le ministre instituteur il aime ça
regarder dans son livre de règlements à lire l'article
332, 5ièmement. Je soumets respectueusement, M. le Président,
qu'en vertu de l'article 67 où la règle mutatis mutandis
s'applique, vous devez, de proprio motu, intervenir si un opinant ne respecte
pas la règle de la pertinence du débat comme le veut le
5ième-ment de l'article 332.
M. SAINT-PIERRE: Après avoir eu, M. le Président, pendant
plus de trois heures une opposition systématique qui a
empêché tout progrès dans le débat, je trouve que la
motion du premier ministre était fort pertinente et je l'approuve. - M.
JORON: M. le Président, le ministre de l'Education vient d'invoquer
à l'appui de l'ajournement du débat que nous perdons notre temps
parce que nous répétons la même chose. Vous me permettrez
d'être d'avis contraire. Je vais vous montrer exactement comment le
ministre de l'Education vient de faire la preuve qu'au contraire cette
discussion a été grandement utile, mais pas à lui
cependant. H a dit essentiellement ceci: Vous avez représenté
plusieurs fois essentiellement le même amendement. M. le
Président, je vous rappelle que le premier amendement que nous avons
déposé était à l'effet de remplacer la filiale par
l'Hydro-Québec, et qu'il y avait un changement dans nos travaux puisque,
une fois ce sous-amendement rejeté, nous sommes donc avec une
filiale.
Il y a donc progression dans les travaux. Le deuxième
sous-amendement visait à faire de la filiale, une filiale de plein droit
de l'Hydro-Québec plutôt que de la société. Cela a
été jugé irrecevable. Troisième étape, M. le
ministre de l'Education, l'amendement, qui était en discussion quand le
premier ministre a proposé sa motion d'ajournement, visait à
imposer une restriction à cette filiale de la société de
développement. H est absolument faux de prétendre qu'il y a eu
tournage en rond. Au contraire, la discussion a avancé et c'est point
par 'point que nous allons la vider.
M. SAINT-PIERRE: Le Parti québécois, M. le
Président, pourrait soulever quatorze amendements semblables. On
répéterait les mêmes discours de part et d'autre de la
Chambre, les opinions sont faites, tous les gens sont éclairés.
On n'a qu'à voter. Si on est contre, on est contre, au moins on va
progresser.
M. LEGER: M. le Président, je veux simple-
ment dire pour appuyer ce que le leader parlementaire du parti de
l'Union Nationale disait que si actuellement on vit dans un climat de tension
à l'Assemblée nationale, ce climat de tension n'aurait pas
existé si on avait présenté ce projet de loi, au sujet
duquel nous parlons aujourd'hui, au milieu du mois de mai ou du mois de juin.
Alors, en fin de session on n'aurait pas connu...
UNE VOIX: Sur la motion s'il vous plait. M. LEGER: ... actuellement...
UNE VOIX: Hypocrite! Vicieux!
M. LE PRESIDENT: ... contre la motion de l'ajournement.
M. LEGER: M. le Président, contre cette motion-là je veux
prouver que tout aurait été normal ce que nous faisons
actuellement, la longueur des discours, la longueur des débats si
cela avait été à une autre période qu'aujourd'hui.
Il faut accepter que nous sommes à la fin de la session. Ce n'est pas
parce que c'est la fin qu'on va arrêter les travaux ou qu'on va nous
empêcher de parler. On va aller au bout, mais ça aurait paru plus
normal pour le parti au pouvoir si cela avait eu lieu au milieu de la session
aux mois de mai et juin. Il est logique que tout le monde veuille terminer et
qu'on trouve anormal qu'on veuille jouer notre rôle et défendre
les points de vue que nous voulons présenter.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CARDINAL: M. le Président, je serai très bref. Il y a
déjà vingt-cinq minutes que l'on perd du temps à cause du
filibuster qui vient du gouvernement même. Deux ministres se sont...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Allez-y, je vais y retourner après.
M. CARDINAL: ... deux ministres se sont levés: le premier
ministre s'est levé quatre fois, le ministre de l'Education deux fois,
pour ne pas dire davantage. Il faudrait qu'en cette Chambre, on soit assez
objectif pour se rendre compte, de part et d'autre, quand et qui cause à
certains moments le ralentissement des débats.
M. LE PRESIDENT (Blank): Tous ceux qui sont en faveur de...
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, je ne pense pas qu'on
puisse avec preuve à l'appui m'accuser d'obstruction dans cette Chambre
depuis quelques semaines. M. le Président, il n'est pas possible de
laisser passer une motion semblable du premier ministre sans se servir de notre
droit de parlementaire et d'expliquer pourquoi nous ne pouvons nous prononcer
en faveur de cette motion-là. C'est le gouver- nement qui a situé
le débat en fin de session. C'est le gouvernement qui a situé le
débat à l'intérieur d'un certain nombre de projets de loi
importants. C'est le gouvernement qui a décidé de répondre
par le silence aux objections qui sont présentées par les
Oppositions de cette Chambre. C'est le gouvernement, M. le Président,
qui a décidé de politiser un débat en lançant le
projet à l'occasion d'une réunion politique plutôt que lors
d'une conférence de presse ou à l'intérieur de cette
Assemblée. C'est le gouvernement qui a décidé par son
action d'obstruction en Chambre, comme cette motion-là. C'est le
gouvernement qui a tout décidé cela, M. le Président. Nous
ne pouvons pas, comme parlementaires, laisser passer un bâillon
semblable. Il peut arriver que le premier ministre soit épuisé.
Il peut arriver que les forces ministérielles soient surprises du manque
de raison à l'appui de ce projet de loi, du manque de raisons
présentées par le gouvernement. Il peut arriver, M. le
Président, que les députés dans cette Chambre depuis
quelques mois n'aient appris qu'un seul discours et qu'un seul mot celui de
"vote! vote! " tout simplement parce qu'ils sont une majorité en Chambre
et une minorité à l'extérieur.
UNE VOIX: Vous n'avez pas peur du vote, vous aimez cela des votes...
UNE VOIX: La démocratie.
UNE VOIX: Quand vous parliez, les mains en l'air...
UNE VOIX: Ecoutez, ça va vous enrichir.
M. MASSE (Montcalm): II peut arriver, M. le Président, que
certains députés de la majorité ministérielle
n'aient pas d'autres arguments que de crier. Cela ne doit pas obliger pour
autant les parlementaires qui croient à la liberté de parole en
Chambre, qui croient que ce n'est pas une journée de plus ou de moins
qui va changer les travaux de la baie James...
M. LACROIX: Vous n'avez pas l'air d'y croire, car vous ne venez pas
souvent.
M. MASSE (Montcalm): ...depuis quinze jours, le gouvernement...
M. LACROIX: Est-ce que c'était le jour de la paye
aujourd'hui?
M. MASSE (Montcalm): ...n'a pas été capable de donner
à l'appui de ce projet de loi une seule raison sensée, M. le
Président. Il peut arriver que ces parlementaires croient qu'il est dans
la logique même du débat de ne pas arriver avec une motion
semblable, qui est un dangereux précédent entre les mains du
gouvernement, qui peut faire changer le cours d'une discussion logique sur un
projet de loi ou sur un
article. Je crois, M. le Président, que pour l'ensemble de ces
raisons nous devons nous prononcer contre cette motion. J'espère que les
députés de la majorité ministérielle qui ont
compris que le gouvernement n'a pas de raison et que cette motion est
présentée à cause de l'irritation du premier ministre, que
ces députés seront les premiers à se prononcer contre
cette motion, qui est une motion pour le moins surprenante et dangereuse.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai eu l'occasion
tout à l'heure de prendre très calmement la parole, au moment
où le premier ministre a fait sa proposition d'ajournement. J'y reviens
parce qu'il m'apparaît absolument inusité, anormal, inconcevable
que le gouvernement procède de telle façon, alors que nous en
sommes précisément au noeud du problème. Nous sommes
à étudier les articles que certains considèrent comme les
plus contentieux et le député de Missisquoi l'a expliqué
tout à l'heure. On prétend que l'on doit ajourner le débat
à ce stade-ci parce que l'on dit que les députés auront le
temps d'y penser, auront le temps de se reposer, etc. La question n'est pas
là du tout. Le débat dure depuis des heures et des heures en
Chambre, depuis des jours et des jours. Il a connu des moments assez
disgracieux. Or, voici que, par une proposition d'ajournement, le premier
ministre, qui a déploré ce qu'il a qualifié d'obstruction
de la part de certains parlementaires, se fait lui-même l'agent de
l'obstruction en nous empêchant de poursuivre dans un ordre logique
l'examen d'un projet de loi,...
M. BOURASSA: Ce soir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...l'examen d'un problème qu'il va nous
falloir vider de toute façon. Quel que soit le moment où on
reprendra l'étude de ce projet de loi, le premier ministre doit se
mettre dans la tête que tous les arguments que se proposent de lui servir
les membres de l'Opposition, à quelque formation politique qu'ils
appartiennent, vont revenir. Le premier ministre prend le risque suivant: c'est
que ces arguments lui soient servis encore plus longuement, avec plus de force,
avec plus d'opiniâtreté et peut-être aussi en un climat qui
ne sera pas du tout favorable à un examen lucide du problème.
Que le premier ministre se souvienne de ce qui s'est passé samedi
dernier. Nous avons connu des moments qui n'avaient rien de glorieux pour le
parlementarisme. Alors que l'on poursuit une discussion, qu'on la poursuit dans
l'ordre, malgré des interpellations continues du côté
ministériel, alors qu'on poursuit cette discussion dans l'ordre,
longuement peut-être, cela devient irritant. J'ai été
membre d'un gouvernement et nous avons déjà eu à subir de
la part de ceux qui sont devant nous pas tous ceux qui sont là,
parce qu'ils n'y étaient pas tous de la part d'un certain nombre
de députés qui sont devant nous, nous avons eu à subir un
"filibuster" d'un mois sur un projet de loi. Voilà que le gouvernement,
au moment où nous étudions ce projet dans l'ordre, longuement,
comme je viens de le dire, décide d'ajourner...
M. BOURASSA: Pour deux heures.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et nous demande de faire une sorte de
trêve. Mais pourquoi, M. le Président?
M. BRISSON: Présentez-les, ces amendements, qu'on en finisse!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pourquoi faire une trêve? Cela nous
paraît absolument inutile. C'est inusité, c'est inconcevable, et
cela peut, M. le Président, donner à l'opinion publique
l'impression que le gouvernement a peur de l'opposition qui lui est faite et
qu'il se réserve...
M. FOURNIER: ...responsabilité...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...des arguments pour justifier une faiblesse
qui nous est apparue évidente et qui sera encore plus évidente si
le premier ministre maintient sa position.
M. PAUL: Je demande le vote sur la motion. M. LEVESQUE: Merci.
M. LE PRESIDENT (Hardy): ... Quels sont ceux qui sont en faveur de la
motion du premier ministre? Quels sont ceux qui sont contre la motion?
M. PAUL: M. le Président, nous avons voté sur la motion
faite par le premier ministre en vertu de l'article, 332 et j'attire votre
attention sur la note...
M. LEVESQUE: Un instant, j'ai bien posé la question avant:..
M. PAUL: Un instant, j'ai la parole.
M. LEVESQUE: Est-ce qu'on vote en vertu de l'article 331? Le
président a dit: Oui.
M. PAUL: Ce n'est pas suffisant.
M. LEVESQUE : Autrement je n'aurais pas voté.
M. PAUL: Je dis qu'en vertu de la note 3, de l'article 332-6, "l'affaire
écartée disparaît du feuilleton, mais elle peut y
être rétablie", selon les règles établies.
M. LEVESQUE: M. le Président, c'est
justement pour ça que j'ai posé la question au
président. J'ai posé clairement la question.
Le député de Maskinongé vient de dire que la motion
a été faite en vertu de l'article 332. Or, avant de me lever, je
vous ai posé clairement la question et j'ai dit: Nous votons sur la
motion présentée par le premier ministre en vertu de l'article
331. Je connaissais les tactiques dilatoires, le filibuster
systématique, je connaissais les tactiques...
M. CARDINAL: A l'ordre, M. le Président! M. LE PRESIDENT: A
l'ordre!
M. LEVESQUE: ... de l'honorable député de
Maskinongé.
M. PAUL: On a des petites nouvelles pour vous.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
Les derniers propos du député de Maskinongé ont
sûrement dépassé sa pensée. Les derniers propos du
député de Maskinongé sont totalement
déplacés, je les reconnais comme tels en vertu de
président du comité.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne le faites pas comme un petit caporal mais
comme un président de la Chambre.
M. LE PRESIDENT: Pour le moment, l'honorable leader parlementaire du
gouvernement avait la parole et je la lui laisse.
M. LEVESQUE : Si le premier ministre avait utilisé l'article 332,
tel que l'article le prévoit, il aurait utilisé la formule
sacramentelle, 332, paragraphe 2, "Cette motion doit être formulée
en ces termes: "Que le président quitte maintenant le fauteuil." Or, le
premier ministre qu'on retourne aux Débats n'a pas
prononcé ces paroles, mais pour être plus sûr, connaissant
les tactiques dilatoires, connaissant le "filibuster", connaissant
l'obstruction systématique et tous les moyens sont bons pour ces
gens j'ai pris la précaution, avant de me lever et avant de voter
et avant que le premier ministre recommence le vote, de forcer M. le
Président à prendre ses précautions, en disant: M. le
Président et on le lira aux Débats j'ai dit: M. le
Président, nous votons sur l'article 331, sur la motion du premier
ministre faite en vertu de l'article 331, qui se lit comme suit: "Un
député peut toujours, au cours des opérations d'un
comité plénier, proposer de rapporter à la Chambre que le
comité n'a pas fini de délibérer et qu'il demande la
permission de siéger de nouveau." C'est en vertu justement de cet
article que le premier ministre a demandé de faire rapport et il n'y a
rien dans la proposition du premier ministre qu'on peut relier à
l'article 332.
Et justement, parce qu'il aurait pu y avoir un doute et prévoyant
la tactique qu'a effectivement utilisée le député de
Maskinongé j'ai posé cette question préalable avant
même le vote. Nous votons en vertu de l'article 331. Le président
a dit oui. C'est parce qu'il a dit oui que nous avons voté autrement
nous n'aurions pas voté parce que nous connaissions aussi bien que
l'Opposition les dispositions de notre règlement.
M. PAUL: Lorsque le premier ministre s'est levé pour faire sa
motion, le député de Gouin a demandé au premier ministre
en vertu de quel article sa motion était faite. Il a répondu: En
vertu de l'article 332. Par conséquent, nous avons voté en vertu
de l'article 332. De toute façon, nous allons avoir la transcription du
Journal des Débats et en temps et lieu nous ferons la procédure
qui s'impose.
M. HARDY (président du comité plénier): J'ai
l'honneur de vous faire rapport que le comité n'a pas fini de
délibérer et qu'il demande la permission de siéger
à nouveau.
M. LAVOIE (président): Quand siégera-t-il? A la même
séance.
M. LEVESQUE: A la même séance ou à la séance
subséquente. On verra. Article 6?
M. PAUL: M. le Président, je voudrais qu'on inscrive au
feuilleton immédiatement, sous réserve.
M. BERTRAND: Sans préjudice. DES VOIX: On vote.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LEVESQUE : Il n'y a rien dans les règlements qui permet sous
réserve ou sans réserve. L'article 6?
Projet de loi no 80 Deuxième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Jean-Noël Tremblay
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, comme vous le savez mon
temps de parole, puisque je parle au nom du chef de l'Opposition officielle,
est illimité. Situons ça dès le départ. Il y a du
bruit.
DES VOIX: Parlez plus fort.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je disais donc et je m'apprête à
dire quand le bruit aura
cessé... Je m'apprêtais à dire quand le bruit a
cessé grâce à vous M. le Président, et je vous en
remercie, que sur la seconde lecture de ce projet de loi mon temps de parole
est illimité. Ce n'est pas mon intention et les gens qui me
connaissent le savent bien de faire de l'obstruction, de mener ce qu'on
appelle à Ottawa un "filibuster". Vu l'importance de ce projet de loi et
les répercussions qu'il aura sur l'avenir du Québec, sur
l'institution politique du Québec, je désire dans la mesure du
possible faire un examen exhaustif de la question ayant été
autorisé par le premier ministre lui-même dans le texte de
présentation de son projet de loi à étudier les
différents problèmes que pose le projet de loi no 80 qu'il soumet
à notre approbation.
Le projet de loi no 80 a pour objet de créer la commission
permanente de la réforme des districts électoraux.
Cette démarche du gouvernement s'inscrit dans un ensemble
d'intentions, de volonté et de gestes qui ont été
manifestés ou posés par divers gouvernements depuis un certain
nombre d'années afin d'améliorer les institutions politiques
québécoises.
Au soir de l'élection d'avril 1970, le premier ministre faisait
à la population une promesse formelle. Il l'a rappelée dans son
discours de seconde lecture. Il s'engageait à procéder dans des
délais raisonnables à une refonte de la carte électorale.
Nous avons pris note à ce moment-là de son intention, de sa
volonté. Nous interrogeant toutefois sur le caractère
précipité d'une déclaration faite par un homme qui
n'était pas encore investi des pouvoirs suprêmes de chef d'Etat,
qui n'avait pas encore eu le temps d'examiner toute la situation, de voir
toutes les conséquences qu'impliquait sa promesse, nous nous sommes, par
conséquent, tout de suite interrogés sur ses intentions, sur les
gestes qu'il pourrait éventuellement poser et sur leur portée sur
l'avenir politique du Québec.
Depuis lors, le chef du gouvernement a posé d'autres gestes, motu
proprio ou encore à la demande des différentes formations
politiques qui sont représentées ici dans cette Chambre. C'est
ainsi que nous avons vu naître la commission de l'Assemblée
nationale, qui s'est penchée spécialement en un nombre assez
important de séances sur le problème complexe de la
réforme électorale, du mode de scrutin, de la carte
électorale, de la Loi électorale et de tout ce qui peut s'y
greffer.
Au début des séances de cette commission de
l'Assemblée nationale, j'avais fait une intervention en indiquant au
premier ministre que sa volonté manifestée dans un acte, soit la
convocation de la commission de l'Assemblée nationale aux fins
d'étudier les divers problèmes que j'ai évoqués
tout à l'heure, j'avais dit que ce geste, s'il ne me paraissait pas
nécessairement prématuré, ne me paraissait toutefois pas
tenir compte d'une réalité beaucoup plus complexe, beaucoup plus
importante, soit celle de l'ensem- ble de la réforme de l'institution
politique québécoise. J'avais notamment fait part au premier
ministre, à l'appui de mes avancés, de cette intention à
maintes reprises manifestée par les hommes politiques, cette intention
de voir le gouvernement du Québec, des citoyens du Québec, se
donner une constitution québécoise. Et m'appuyant
là-dessus, j'avais indiqué que les séances de la
commission parlementaire de l'Assemblée nationale destinées
à permettre l'étude de la réforme électorale
n'était qu'une pièce dans un ensemble beaucoup plus grand,
beaucoup plus complexe et beaucoup plus important.
On m'avait rétorqué alors - je crois, M. le
Président, que c'est vous qui m'aviez rappelé à l'ordre
que le problème tel que je le posais relevait davantage de la
commission parlementaire de la constitution que de celle de l'Assemblée
nationale constituée pour l'étude de la réforme
électorale.
Je m'étais rendu à votre décision,
appréciant comme à l'accoutumée votre jugement. Mais si je
reviens, M. le Président, sur ce argument, cet après-midi au
début de l'examen de ce projet de loi, c'est que je suis encore d'avis
que tout le problème de la réforme électorale ne peut
être vraiment compris, entendu, saisi ou perçu dans sa dimension
réelle, qu'on ne peut vraiment saisir toute la portée de ce
problème, tout le poids de ce problème que si on l'examine dans
l'optique d'une réforme beaucoup plus grande de l'institution politique,
réforme qui devra nécessairement se traduire un jour par la
rédaction d'une constitution véritablement
québécoise, constitution à l'intérieur de laquelle
on retrouvera les mécanismes qui régissent, qui doivent ou
devront régir l'institution et les institutions politiques
québécoises.
Je ne condamne pas, M. le Président, le geste que pose
aujourd'hui le premier ministre en nous soumettant ce projet de loi, mais
j'attire encore une fois l'attention du premier ministre et des parlementaires
sur l'aspect fragmentaire de la réforme qu'il nous propose. Certes,
l'intention du premier ministre est non seulement louable, mais elle est
nettement, catégoriquement valable.
Il se propose de corriger, dans le domaine de la représentation
des citoyens par le truchement des députés élus, certaines
inégalités, ce qu'il a qualifié d'injustices et
d'iniquités. Je retiens le mot injustice en rejetant le iniquité
parce que je pense que le premier ministre, dans sa démarche
intellectuelle, a utilisé le terme iniquité comme l'antonyme du
mot équité, ce qui n'a pas du tout le même sens en
français.
Par conséquent, M. le Président, je dis que l'intention du
premier ministre est non seulement louable, mais qu'elle est éminemment
valable. M. le Président, cela ne m'empêche pas de maintenir ce
que j'ai dit, savoir que l'on procède, dans ce domaine comme dans bien
d'autres, de façon fragmentaire. L'on s'attaque à un
problème, à une pièce d'un grand ensem-
ble, d'une grande machine qui est l'institution politique
québécoise, laquelle institution ne peut véritablement
être manifestée dans toute sa dimension que le jour où l'on
aura une véritable constitution québécoise, écrite
au Québec, par des Québécois et pour des
Québécois.
Je tenais, M. le Président, à faire au départ cette
mise au point afin de situer le problème et de faire comprendre au
premier ministre que la précipitation qui lui a inspiré sa
déclaration le soir des élections ne tenait pas compte de
l'entier du problème du problème dans ce qu'on appellerait
d'un mot savant et qui est en fait un néologisme de
l'intégralité du problème.
Néanmoins, M. le Président, je n'ai pas l'intention de
m'opposer à la présentation de ce projet de loi. Il vient
à son heure? Non, j'ai des doutes. J'ai certains doutes et même
des doutes assez sérieux. Mais je premier ministre a politiquement,
comme dans le cas des 100,000 emplois, fait son lit le soir de
l'élection du 29 avril. Il est lié par une promesse à
caractère électoral. Je ne donne pas ici au mot un sens
péjoratif. Mais sur la lancée d'une campagne électorale,
encore dans l'esprit d'une campagne électorale, ennivré d'un
succès un peu facile et peut-être accidentel, le premier ministre
s'est empressé de répondre à l'avance à une
critique que l'on pourrait formuler sur la représentativité de
ceux qui venaient d'être élus ce soir-là.
Le geste du premier ministre, pour toutes ces raisons, me parait donc
prématuré. Je ne conteste pas cependant le droit, qu'il a en sa
qualité de chef d'Etat le droit qui est le sien de
proposer des réformes même si, à nos yeux, elles paraissent
prématurées et fragmentaires.
Ainsi donc, il nous propose par le projet de loi no 80, la
création d'une commission permanente de la réforme des districts
électoraux. Ce problème, M. le Président, de la
réforme des districts électoraux, du réaménagement
de la carte électorale, nous l'avons examiné, on peut dire, sous
toutes ses faces, sous tous ses angles, sous toutes ses facettes en commission
parlementaire à l'aide des experts et à l'aide des
députés qui, tour à tour, se sont exprimés.
Il est apparu assez nettement et je pourrais même dire
catégoriquement que les opinions et M. le
Président, vous qui présidiez cette commission sur
l'ensemble du problème de la réforme électorale,
étaient partagées, à certains égards,
contradictoires et, à tout le moins, fort nuancées. Il est apparu
également, M. le Président, au cours des auditions, qu'il serait
difficile de s'attaquer au problème du réaménagement de la
carte électorale sans, en même temps, toucher à toutes les
autres questions qui s'y greffent, particulièrement le mode de scrutin,
la loi électorale, les dépenses électorales, etc.
Nous avons en effet fait valoir et j'étais de
ceux-là que l'on pouvait fort bien procéder à un
réaménagement de la carte électorale en vue d'assurer une
meilleure représentativité des élus du peuple. Mais cette
réforme de la carte électorale, cette nouvelle assignation, cette
nouvelle délimitation de districts électoraux comporterait ou la
diminution ou l'accroissement desdits districts. Nous avons, à ce
moment-là, fait observer que ces nouveaux députés en plus
grand ou en plus petit nombre seraient encore élus de la même
façon qu'ils l'ont été lors des dernières
élections et de la même façon qu'ils semblent devoir
être élus lors des prochaines élections.
Il y a, à mon avis, une sorte d'hiatus dans la pensée du
gouvernement dans ce domaine parce qu'à mon sens si l'on veut axer la
réforme électorale sur une première phase, soit celle de
la représentativité, on ne peut pas se
désintéresser de l'autre aspect, soit celui du mode de scrutin.
En effet, si on décidait, par hypothèse, qu'il y aura, en vertu
du projet de loi qui est devant nous, d'ici un an, deux ans ou trois ans, 125
députés au lieu de 108, qu'il y aura 90 députés au
lieu de 108, il faut comprendre que ces députés seront encore
élus de la même façon.
Donc, les deux problèmes: réforme de la carte, mode de
scrutin, me paraissent être liés. Mais le gouvernement a choisi, a
fait son lit, je l'ai dit tout à l'heure, il nous propose un projet de
loi aux fins de réaménager la carte électorale, de
redessiner les frontières des districts électoraux. Nous devons
donc nous en tenir à ce geste précis que veut poser le
gouvernement pour amorcer la réforme électorale.
Je n'ai aucune sorte de réserve en disant que j'accepte le geste
du gouvernement. J'ajouterais même que je pourrais le féliciter de
poser ce geste. C'est un pas, c'est une étape qu'il fallait franchir, ce
qui ne détruit pas les arguments dont je me suis servi tout à
l'heure, soit que le gouvernement ne me parait pas procéder dans un
ordre strictement logique et ne me paraît pas avoir une conception
globale de toute la réforme de l'institution parlementaire et de
l'institution politique québécoise.
Au cours des auditions, des séances de la commission
parlementaire, nous avons examiné avec les experts le problème du
mode de scrutin. Le premier ministre en a parlé ce matin.
Il a mis l'accent, avec raison, sur la difficulté qu'il y a
à procéder rapidement dans ce domaine. D'ailleurs, il s'appuyait,
en cela, sur l'avis des experts que nous avons entendus et sur l'avis des
praticiens de la politique, qui dans mon esprit et cela sans
préjudice au mérite des experts ils s'appuyaient sur
l'avis des praticiens de la politique, qui dans mon esprit, a autant de poids
et de valeur que celui des experts que nous avons entendus, fussent-ils, M. le
Président et vous en avez été témoin
les plus brillants et les plus compétents.
On nous a dit et nous l'avons exprimé
nous-mêmes qu'il serait périlleux de
précéder immédiatement à un changement du mode de
scrutin. Bien des arguments ont été invoqués à
l'appui de cette sorte de consentement qui s'est manifesté. On a
parlé notamment, des habitudes électorales des citoyens,
habitudes que le professeur Meynaud qualifiait de culture politique, terme que
pour ma part, je n'aime pas, sinon, lorsqu'on le prend dans son sens
réel, dans le sens que lui donne l'anthropologie culturelle.
On nous a dit que compte tenu des habitudes électorales des
citoyens et nous l'avons dit peut-être encore avec plus
d'insistance que les habitudes électorales des citoyens du
Québec, nous incitaient et devaient nous inciter à
procéder avec une extrême prudence dans le domaine de la
réforme des modes de scrutin. Cela est normal, M. le Président,
même si et là je respecte l'avis de tout le monde
bien des gens nous ont présenté à ce sujet des sortes de
formules miracles, même si des gens, partant de certaines circonstances
de fait, de certaines réalités qu'on a pu observer dans le
Québec depuis un certain nombre d'années même si bien des
gens ont réclamé que l'on change en même temps que la carte
électorale, le mode de scrutin. Le gouvernement ne veut pas
procéder tout de suite dans ce domaine et je suis d'accord avec lui.
Nous avons, au cours des séances de cette commission de
l'Assemblée nationale, examiné le problème des modes de
scrutin. Avec les conséquences que je viens de décrire. Nous
avons examiné le problème de la refonte, du
réaménagement de la carte électorale. Ici, M. le
Président, il m'apparaît important de faire certaines
considérations d'ordre général. D'où est venu, tout
à coup, cette sorte de volonté de procéder dans des
délais extrêmement brefs, à une refonte de la carte
électorale? Certes, de certaines réalités observables, de
certaines réalités contrôlables, si je puis utiliser ce
terme.
Elle est venue de certaines réalités vérifiables,
savoir, par exemple, qu'il y a des inégalités ce que le
premier ministre appelait des injustices et des iniquités dans la
représentativité des députés qui sont élus
dans ce qui constitue ce Parlement.
C'est une situation de fait, c'est une réalité que nous ne
pouvons pas écarter. Il nous appartient à nous, très
froidement, d'étudier cette réalité et d'y apporter
prudemment les correctifs nécessaires. Mais il n'y a pas que cette
considération de fait vérifiable qui a provoqué cette
sorte de mouvement, cette sorte d'enthousiasme, cette sorte de
frénésie pour une refonte de la carte électorale.
Il y a eu à un moment donné une sorte de cristallisation
de l'opinion publique autour d'un schème de pensée qu'on
présentait comme la vérité absolue, savoir que
l'émergence de certains partis politiques nouveaux imposait de toute
urgence la nécessité d'une refonte de la carte électorale.
Ce n'est pas un phénomène qu'il faut écarter. C'est un
phénomène dont il faut tenir compte; ce n'est pas un
phénomène qu'il faille ignorer. C'est une réalité
qu'il y a eu émergence de partis nouveaux.
Ce qui fait qu'actuellement, en Chambre, au lieu de trouver deux partis
politiques, on en trouve quatre. C'est une réalité, c'est un
fait. Mais s'appuyant sur ce phénomène qui n'est en
réalité qu'un épiphénomène greffé sur
une conjoncture sociologique et politique pas nécessairement permanente,
probablement temporaire, l'émergence de ces partis politiques constitue
à mon avis un épiphénomène qui ne doit pas inciter
les parlementaires, les législateurs à statuer à partir de
bases qui ne se sont pas encore avérées permanentes, à
partir de réalités qui n'ont pas encore ce caractère
permanent, mais qui ont, à mon avis l'on pourra différer
d'avis avec moi un caractère transitoire.
Je pense que les députés du Ralliement créditiste
se rendront compte, en écoutant ce que je dis, que je n'ai pas du tout
l'intention de nier l'existence de leur formation politique.
M. DROLET: Merci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tout simplement, j'examine une conjoncture
politique et socio-politique. D'autre part, je les mets en garde contre les
conjectures de ceux qui voudraient considérer cette conjoncture comme
définitive et permanente. C'est ce que j'appelle
l'épiphénomène.
M. BOIS: C'est surnaturel.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je comprends que les termes que j'utilise ne
sont peut-être pas ce n'est pas une façon de
mépriser qui que ce soit familiers à tous les
parlementaires, mais il faut quand même appeler les choses par leur nom
et utiliser les termes, puissent-ils être considérés comme
pédants, qui décrivent exactement les réalités.
Je disais qu'il y a eu après les élections, à cause
de partis politiques nouveaux, à cause d'une conjoncture socio-politique
que je considère personnellement comme transitoire, que je
considérerai comme transitoire tant et aussi longtemps que d'autres
faits ne seront pas venus la vérifier et lui donner ce caractère
permanent, ce mouvement, cet enthousiasme, cette frénésie qui se
sont manifestés et qui ont suscité dans la presse et ailleurs
toutes sortes de commentaires sur la nécessité de procéder
à une réforme de la carte électorale. Mais tout cela ne
doit pas être pour les parlementaires le critère de base mais
simplement une indication de la nécessité qu'il y a d'examiner le
problème sans toutefois asseoir l'examen critique de ce problème
sur ce qui me paraît encore être des assises extrêmement
fragiles sinon ruineuses.
Ainsi donc, au cours de l'étude du projet de loi que nous avons
devant nous, il ne faudra jamais perdre de vue que notre démarche
doit
être marquée au coin d'une prudence normale, non pas d'un
conservatisme rétrograde, mais d'une prudence qui s'inspire d'une
connaissance des véritables réalités, de celles que
l'histoire a consacrées, de celles que la tradition a réellement
édifiées, de celles qui constituent le quotidien de tous les
jours.
Le gouvernement et le premier ministre l'a exprimé ce
matin désire créer une commission permanente de la carte
électorale qui complète selon lui le commencement de
réforme amorcé par la loi 65 qui a fait disparaître ce
qu'on appelait traditionnellement les comtés protégés.
Cette réforme de la carte électorale je l'ai dit
est nécessaire, parce qu'il existe un fait, c'est qu'il y a des
comtés qui contiennent un nombre très grand d'électeurs
à côté de circonscriptions qui comptent un nombre beaucoup
plus restreint d'électeurs, d'où les inégalités,
les injustices que déplorait ce matin le premier ministre. Cela est un
fait. C'est un fait dont les parlementaires doivent tenir compte et c'est un
fait dont la commission que l'on va créer par la loi 80 doit tenir
compte.
Mais, cette commission et nous avons insisté
énormément là-dessus en commission parlementaire de
l'Assemblée nationale ne devra pas travailler de n'importe quelle
façon. Elle va certes avoir une autonomie puisqu'elle sera
composée de trois personnes qui pourront éventuellement
s'adjoindre des assistants, des auxiliaires.
Ces trois personnes auront un travail technique à faire. Elles
auront une tâche d'ordre technique à accomplir. Et cette
tâche technique, elles ne peuvent l'accomplir, comme l'entendent les
parlementaires et selon la volonté des parlementaires, que si on a
déterminé pour elle ou pour leur gouverne des normes et des
critères. Et vous savez, M. le Président, pour avoir
participé à toutes les séances de cette commission,
combien de fois nous avons interrogé les experts, combien de fois nous
nous sommes interrogés les uns les autres sur la définition de
ces critères, sur l'importance d'un critère par rapport à
un autre. Il faut donc, et je m'étonne de ne pas trouver, dans le projet
de loi que présente le premier ministre, de mention de ces
critères. Certes, en toute rigueur de la technique législative,
il était peut-être difficile d'inscrire dans le texte de loi une
prescription qui définisse les critères devant servir au travail
de la commission. Mais il faut bien comprendre aussi que la commission de
l'Assemblée nationale a ajourné ses travaux sine die et qu'elle
n'a pas formulé, en ce qui concerne le cas des critères, de
propositions ou de recommandations.
Je puis donc en conclure encore une fois, M. le Président, que le
geste que pose le premier ministre en nous présentant ce projet de loi,
est aussi à cet égard, prématuré. Il me parait que
le premier ministre eut dû, avant de déposer ce projet de loi,
convoquer à nouveau la commission de l'Assemblée nationale afin
de réexami- ner le problème de la refonte de la carte
électorale en demandant aux membres de cette commission parlementaire de
proposer des recommandations, d'indiquer quels étaient les
critères qui, selon eux, auraient dû être retenus et qui
allaient servir au travail de ceux qui constitueront la commission que nous
allons créer.
Il y a donc là, M. le Président, à mon sens, une
faille sérieuse dans le projet de loi du premier ministre. On
crée une commission permanente de la réforme des districts
électoraux. On lui donne un mandat: celui de procéder à un
découpage de la carte électorale. Pourquoi? Comment? Rien n'est
dit dans la loi, sauf une indication d'un certain nombre d'électeurs
avec une variable de 25 p.c. plus ou moins selon les circonstances.
Je crois que, dans sa démarche, le gouvernement n'a pas, à
mon avis respecté complètement l'engagement que le premier
ministre avait pris lui-même à ma demande, à la demande du
député de Montmagny et d'autres collègues. A mon avis, on
n'a pas respecté complètement la demande qu'avaient faite les
parlementaires d'être associés le plus près possible
à tous les travaux que pourraient effectuer les commissions qui
émaneraient de la commission parlementaire de l'Assemblée
nationale.
Je reprends, à l'intention du premier ministre, ce que je disais
tout à l'heure, à savoir que l'on ne voit pas dans ce projet de
loi, sauf les indications que j'ai mentionnées tout à l'heure,
que le premier ministre se soit vraiment préoccupé des multiples
opinions qui ont été exprimées par les membres de la
commission, par les experts sur le problème des critères qui
doivent servir à ceux qui seront les commissaires de cette nouvelles
commission, pour procéder au découpage de la carte.
On mentionne un nombre d'électeurs et une variable de 25 p.c.
plus ou moins, c'est tout. Mais si le premier ministre était venu
à la commission parlementaire, s'il avait assisté à toutes
les séances, il y est apparu quelques fois, si le premier ministre avait
suivi tous les travaux, il se serait rendu compte que nous avions
insisté sur un certain nombre de critères. On trouve ici, je lis
les notes explicatives parlant de la commission, on dit qu'il lui sera aussi
possible mais à titre exceptionnel de déroger à ces
principes pour des raisons d'ordre démographique et
géographique.
Cela est bien peu, M. le Président, et cela ne retient même
pas l'essentiel des propositions que nous avons faites à la commission
parlementaire. Je vais en donner la preuve au gouvernement en lui rappelant
que, dans l'examen que nous avons fait du problème de la refonte de la
carte électorale, les experts et les députés ont
examiné l'un après l'autre un certain nombre de critères
et je mentionne les principaux, critères démographiques les notes
explicatives en parlent; critères géographiques, les notes
explicatives en parlent.
Mais la loi et les notes explicatives sont
muettes sur les critères socio-économiques, sur les
critères politiques, sur les critères socioculturels. Cela est
extrêmement important et je tenais à le souligner, non pas pour
attaquer le gouvernement mais pour faire une critique objective et positive du
projet de loi qui est devant nous. Le premier ministre, j'y reviens, nous avait
donné l'assurance que nous serions associés aux travaux que
pourraient entreprendre les organismes émanant de la commission
parlementaire de l'Assemblée nationale.
Nous avons pris sa parole, il l'a tenue jusqu'à un certain point.
Dans le cas qui nous occupe, il n'a pas cru devoir tenir compte de tout le
poids, de toute l'insistance que nous avions mise sur la définition des
critères qui doivent servir aux futurs commissaires à
réaménager ou à découper la nouvelle carte
électorale.
Les commissaires qui seront chargés de ce travail les
notes explicatives de la loi le disent doivent tenir compte d'un certain
chiffre qui établit le nombre de citoyens qu'on doit retrouver dans
chacune des circonscriptions. On dit en effet: "la commission devra en
appréciant le nombre des districts électoraux au Québec et
l'étendue de chacun d'eux, voir à assurer à tous les
électeurs une représentation juste et équitable à
l'Assemblée nationale et s'assurer également que chaque district
électoral comprendra 32,000 électeurs. Elle pourra
s'écarter de cette règle en raison de la densité de la
population mais l'écart ne devra pas excéder 25 p.c. Il lui sera
ainsi possible, mais à titre exceptionnel, de déroger à
ses principes pour des raisons d'ordre démographique et
géographique".
Je dis tout de suite, M. le Président, que lorsqu'on lit dans les
notes explicatives "à titre exceptionnel" on devrait lire ceci: "la
commission devra, normalement et nécessairement, tenir compte des
raisons d'ordre démographique et géographique". Donc, de ce qui
me parait essentiel, on fait l'exception. C'est donc, à mon avis, une
sorte d'accroc à l'engagement moral et là, ce n'est pas
une accusation qu'avait pris le premier ministre à notre
endroit.
On parle ensuite d'un nombre de 32,000 électeurs. Je dis tout de
suite que cela est en principe acceptable. Cela peut être en principe
raisonnable et, compte tenu des réalités démographiques
que l'on examinera, cela peut s'avérer absolument valable, raisonnable,
normal. Mais, il faut quand même le souligner, M. le Président, ce
chiffre de 32,000 n'est pas, à mes yeux, un chiffre magique. Ce n'est
qu'une indication. Je crois d'ailleurs que les notes explicatives n'en font pas
un impératif catégorique mais confère à ce chiffre
de 32,000 électeurs un caractère d'indication.
Parce que si l'on devait absolument retenir ce chiffre de 32,000
électeurs, et là, je mets de côté toutes les
exceptions que l'on devra faire, toutes les réalités dont on
devra tenir compte et qui peuvent modifier ce chiffre de 32,000 n'est
pas un chiffre magique, on peut le retenir comme une indication. Il ne tient
pas compte des autres facteurs que j'évoquais tout à l'heure en
parlant des critères.
Sur le plan socio-économique, par exemple, on peut concevoir un
découpage de la carte électorale qui tiendrait compte des
régions économiques, des sous-régions économiques,
mais on peut aussi concevoir un découpage qui tiendrait compte d'une
autre façon de la réalité socio-économique. La
réalité régionale, par exemple, qui n'est pas simplement
une réalité géographique. Mais lorsque je parle de
réalité régionale, j'en parle comme d'une
réalité sous-tendue par un ensemble d'autres
réalités qui tiennent à autre chose qu'à des
proportions rigoureusement mathématiques.
Je prends, par exemple, la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il
y a là une grande réalité socio-économique,
socio-culturelle, pourrais-je même dire qui ne peut pas être
et ce sera le cas pour toutes les régions si on les prend l'une
après l'autre considérée de la même
façon que toutes les autres réalités par point de
comparaison. C'est que chaque région, la nôtre en particulier, une
autre en particulier on peut faire des cas particuliers de chacune des
régions a des problèmes économiques d'une
importance particulière. Elle éprouve des difficultés
économiques particulières. Sa population a un caractère
particulier. Elle est à un stade de son évolution qui en fait une
région économique à caractère particulier. Au
moment où cette région est à prendre son essor, au moment
où elle essaie de prendre son essor, au moment où le gouvernement
s'est efforcé le nôtre comme celui qui est devant nous
d'analyser l'entier du problème économique et social de la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, au moment où le gouvernement
s'efforce de mettre en application les recommandations de la mission de
planification économique qui a travaillé chez nous, il devient
extrêmement important d'examiner le problème de cette
région dans une optique particulière et d'examiner le
problème de sa représentation au Parlement non pas simplement
à partir de bases démographiques. Si je parle en termes de
député, de représentant élu, je dis au premier
ministre que toutes les régions qui en sont à ce stade d'un
développement économique qui s'amorce ou d'un
développement économique qui retarde, qui en fait dans certains
cas des régions défavorisées, il est extrêmement
important de donner à ces régions une représentation
très forte à l'Assemblée nationale.
Ceci ferait le contrepoids avec des régions économiques
beaucoup plus favorisées. Ainsi donc, le critère purement
démographique que l'on pourrait appliquer par exemple dans la
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans la région de la
Gaspésie ou dans la région du Nord-Ouest du Québec, ce
critère ne me parait pas être le meilleur pour découper la
partie de la carte électorale qui recouvre cette entité
socio-économique qu'est la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Le problème ne se pose pas nécessairement
de la même façon quand on prend l'île de
Montréal. Prenons l'entier de l'île de Montréal et
même la périphérie de l'île. Il y a là une
grande concentration de population. Cette population on peut dire en
quelque sorte les zones grises, et elles sont assez apparentes cette
grande région métropolitaine de Montréal, si on la compare
à d'autres régions du Québec, n'est pas
défavorisée, en ce sens qu'elle a quand même un potentiel
économique, industriel, commercial qui constitue le stimulus
nécessaire à l'alimentation de sa population, à son
développement, à son accroissement, à son bien-être,
à son mieux-être et à son expansion.
Le cas n'est pas du tout le même lorsqu'on parle des
régions comme celle du Saguenay-Lac-Saint-Jean, celle du Nord-Ouest,
celle de la Gaspésie, celle de la Côte-Nord et celle du Saguenay.
C'est pourquoi je dis au premier ministre que ce critère rigoureusement
démographique qui est indiqué ici dans le projet de loi, qui est
retenu par le projet de loi n'est pas le seul, loin de là, qui doive
être retenu. Mais il faut, si l'on entend procéder à un
découpage de la carte électorale dans une région
économique donnée qui a les caractères que j'ai
décrits tout à l'heure, tenir compte de l'entier de la
réalité socio-économique et ne pas se rabattre uniquement
sur le réservoir de population qui s'y trouve.
Il y a là, M. le Président, une question
d'équilibre, il y a une question de poids.
Il y a une question de rapport de forces entre des régions qui
ont suffisamment de facteurs pour se développer, croître
normalement et maintenir un rythme de croissance normal et des régions
qui, elles, n'en sont qu'au stade où elles amorcent soit une relance
économique, soit un virage dans l'ordre économique ou soit
qu'elles s'en trouvent rigoureusement au stade de la naissance d'une
économie régionale.
Je ne veux pas plaider trop longuement la cause de la
représentation socio-économique, mais je crois que la commission,
qui s'occupera du découpage de la carte électorale, devra tenir
compte rigoureusement, à peine de déposséder de leurs
droits à être représentés des gens qui en sont
précisément au point où ils ont davantage besoin d'une
représentation plus forte et numériquement accrue. J'ai
défendu ce point de vue devant la commission et je le défends ici
en Chambre parce que cela me paraît non seulement essentiel, mais vital,
capital et crucial dans le cas de certaines régions en particulier.
Dans l'examen des critères que nous avons fait, nous nous sommes
interrogés assez longuement sur le critère socio-culturel.
Lorsqu'on a parlé de ce critère socio-culturel, on a
évidemment fait immédiatement référence au
caractère hétérogène de la population du
Québec dans certains milieux et dans certaines régions,
référant en cela au problème de la langue et de la
culture.
C'est un aspect extrêmement important du problème et
j'imagine que les députés, qui représentent les
régions où se pose ce problème de l'existence de deux
langues ou de deux cultures de façon bien manifeste, se feront entendre
sur le sujet et nous donneront leur point de vue aux fins d'éclairer les
commissaires qui vont s'occuper de découper la carte
électorale.
Ils donneront leur point de vue aux fins de les éclairer pour
qu'ils tiennent compte de ce phénomène langue et culture qui
existe dans certaines circonscriptions de l'île de Montréal, dans
la région des Cantons de l'Est et d'ailleurs.
Si on pense à la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean
je prends cet exemple parce que c'est celui quand même qui m'est le plus
familier ce critère socio-culturel, je ne dirais pas qu'on ne
doive pas en tenir compte mais il a une importance relative du fait de
l'homogénéité socio-culturelle de la région qui
est, à toutes fins utiles, à 99.9 p.c. de langue et de culture
française. Si on prend les circonscriptions de Montréal, les
circonscriptions des Cantons de l'Est, la situation est très
différente.
Même si là, je réfère aux observations
que nous faisait le professeur Meynaud dans une région comme
celle du Saguenay-Lac-Saint-Jean où il n'y a pas ce caractère
hétérogène de la population du point de vue
socio-culturel, il n'empêche qu'on retrouve là une population qui
a vraiment, au sens de l'anthropologie culturelle, sa culture, qui a sa
personnalité, qui a son identité et qui est jalouse des
caractères qui lui sont propres, une population qui ne voudrait pas en
être dépossédé, qui ne voudrait pas que ses
caractères soient altérés par une représentation
parlementaire qui ne correspondrait pas à tout ce que cette population
représente de force, de dynamisme et d'originalité. Ce que je dis
là pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean vaut pour d'autres
régions. Le professeur Meynaud insistait là-dessus parlant des
provinces françaises où il y a quand même
homogénéité du point de vue linguistique et culturel.
Il nous disait que dans un découpage de la carte
électorale dans un pays unitairement français ou unilingue ou
uniculturel, on devait quand même tenir compte de la
réalité socioculturelle qui se manifeste dans chacune des
régions d'un pays qui peut être de même langue, qui peut
n'avoir qu'une langue et qu'une culture.
M. le Président, il est six heures et je demande la suspension de
nos travaux.
M. LEVESQUE: M. le Président, est-ce que le député
peut nous dire s'il en a pour longtemps?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'en sais rien, M. le Président.
M. LEVESQUE: S'il n'en sait rien disons que nous continuerons et nous
reviendrons au cours de la soirée au bill 50. D'accord. Merci.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je faisais une blague.
Ce n'est pas gentil de la part du leader parlementaire. Je me permets, M. le
Président, de vous signaler que mes relations avec le leader
parlementaire sont toujours très agréables...
M. LEVESQUE: Oui, oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et très compréhensives.
M. LEVESQUE: C'est pour cela que j'ai été surpris de la
réponse du député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je lui ai fait une blague.
M. LEVESQUE: Ah bon!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et je pensais qu'il l'entendrait comme une
blague. Mais puisqu'il veut que nous étudiions le projet de loi no 50,
je suis d'accord.
M. CHARRON: Allons à l'article 332. M. BURNS: Ce n'est plus au
feuilleton.
M. LEVESQUE: Cela ne tient pas debout, cette affaire-là.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va revenir au bill 80.
M. LEVESQUE: M. le Président, qu'est-ce que le
député de Saint-Jacques a à dire?
M, BURNS: C'est moi qui ai dit que ce n'est plus au feuilleton.
M, LEVESQUE: Qu'est-ce qui n'est plus au feuilleton?
M. BURNS: Le bill 50.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: Ne rêvez pas en couleurs.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Jusqu'à quelle heure devons-nous
suspendre?
M. LEVESQUE: Huit heures.
M. LE PRESIDENT: La Chambre suspend ses travaux jusqu'à vingt
heures.
Reprise de la séance à 20 h 8
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: M. le Président...
M.PAUL: M. le Président, je vous ai fait part...
M. LEVESQUE : Un instant, M. le Président! J'étais debout
avant l'honorable député de Maskinongé.
M. PAUL : Sur une question de règlement, M. le
Président.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai une directive à
demander.. J'ai dit: "M. le Président", avant que l'honorable
député de Maskinongé se lève et j'étais
debout avant lui. M. le Président, j'ai une directive à vous
demander.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable leader parlementaire.
M. PAUL: M. le Président, un point de règlement a toujours
priorité sur une directive.
M. LEVESQUE: M. le Président, vous m'avez donné la
parole.
M. PAUL : Un point de règlement a toujours priorité sur
une directive.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement afin
de vous demander une directive.
M. PAUL: Après moi! Je l'ai invoqué avant vous.
M. LEVESQUE: Et je l'ai fait avant que l'honorable député
de Maskinongé soit levé.
M . PAUL: Non, M. le Président. DES VOIX: Non. DES VOIX: Oui.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement.
Projet de loi no 50 (suite)
Demande de directive
M. LEVESQUE: M. le Président, encore une fois, j'invoque le
règlement pour vous demander une directive. La Chambre a suspendu ses
travaux à six heures pour les reprendre maintenant. Avant que nous nous
quittions, nous avions disposé d'une motion de l'honorable premier
ministre faite, de toute évidence, en vertu de l'article 331 de nos
règlements.
UNE VOIX: Non. UNE VOIX: Oui.
M. LEVESQUE : Nous reviendrons à cela après.
D'après cet article 331 de notre règlement, "un
député peut toujours, au cours des opérations d'un
comité plénier, proposer de rapporter à la Chambre que le
comité n'a pas fin de délibérer et qu'il demande la
permission de siéger de nouveau".
L'honorable premier ministre, qui ne souffre pas de la maladie bien
connue de la "procé-durite", n'a pas, évidemment,
nommément fait appel à l'article 331. A ce moment-là, il
était bien compris par tous les honorables membres de cette Chambre que
l'honorable premier ministre avait décidé, devant l'attitude
négative et persistante de certains membres de cette Chambre, de leur
donner l'occasion de faire un peu de médiation. Nous voyons bien
l'intention de l'honorable premier ministre lorsqu'on lit, dans le journal des
Débats, qu'il a, à ce moment-là, dit que l'on pourrait
reprendre l'étude du projet de loi 50 en comité plénier
à 8 heures, après ces deux heures de réflexion qu'il
accordait généreusement à une certaine oppo-siton qui
pense gagner des points. Je ne parlerai pas. Je resterai sur la demande...
DES VOIX: M. le Président...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai soulevé le point
d'ordre moi-même contre moi-même. Je ne voudrais pas qu'on
renchérisse. Alors, M. le Président, il a, à un moment
donné, été question, et le journal des Débats le
rapporte, de l'article 332. Je crois que c'est le président du
comité ou quelqu'un ou une voix, je ne sais pas, qui a mentionné
l'article 332.
M. PAUL: On a tout cela.
M. LEVESQUE: D'ailleurs le journal des Débats est là pour
l'indiquer.
M. DEMERS: Et cela ne peut pas mentir.
M. LEVESQUE: Que dit l'article 332? "Un député peut
toujours, au cours des opérations d'un comité plénier,
proposer que le président quitte le fauteuil. Cette motion dit
l'article 332, deuxièmement doit être formulée en
ces termes", et l'article est bien clair et impératif. Quels sont ces
termes? "Que le président quitte maintenant le fauteuil". Or, M. le
Président, l'honorable premier ministre n'a jamais prononcé cette
formule sacramentelle. Sacramentelle, pas pour lui ni pour moi, mais pour ceux
qui souffrent de "procédurite".
Je dis, M. le Président, que l'article 332, paragraphe 2, est
clair. Or, jamais le premier ministre n'a fait cette motion: "Que le
président quitte maintenant le fauteuil". M. le Président,
l'article 332, sixièmement, mention- ne ceci: "Si elle la motion
est adoptée, elle met fin aux délibérations du
comité et écarte l'affaire dont il est saisi". Or, M. le
Président, dans toutes nos lois d'interprétation, il faut bien
comprendre quelle est l'intention de celui qui fait la motion. Or, l'intention
de l'honorable premier ministre a été clairement établie,
lorsqu'il a dit, à peu près dans ces termes: Cessons pour deux
heures, nous reprendrons à huit heures. Je suis convaincu...
M. BURNS: Citez-les les termes.
M. LEVESQUE: M. le Président, qu'on m'apporte les feuilles de
transcription.
M. PAUL: On va vous aider, si vous permettez.
M. LEVESQUE: Oui, certainement.
M.PAUL: Feuillet R/5005, page 2. "M. Bourassa: M. le Président,
je demande l'ajournement du débat."
M. DEMERS: Cela, ce n'est pas sacramentel.
M. LEVESQUE: M. le Président, voici ce que dit l'honorable
premier ministre. R/5006. "M. Bourassa: Si le député peut se
calmer."
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est mon matricule, ça.
M. LEVESQUE: Le député de Chicoutimi pense que c'est
à lui que s'adresse "Si le député peut se calmer." Mais
d'après ce que je vois, c'était à l'adresse du
député de Saint-Jacques. Il n'y a rien à se
surprendre.
M. PAUL: Est-ce que l'honorable leader me permettrait une question?
M. LEVESQUE: Je vais continuer...
M. PAUL: C'est une question de référence. Est-ce le
feuillet 1, 2 ou 3?
M. LEVESQUE: Page 2. M. PAUL: Très bien, merci.
M. LEVESQUE: "Hier dit le premier ministre nous avons
adopté une quinzaine d'articles. Nous avons discuté hier le
programme de la journée. Est-ce que nous étions pour discuter de
la Loi sur les consommateurs, de la réforme électorale ou
continuer sur la baie James? Or, nous discutons depuis ce matin, depuis 10 h
30, sur la baie James sans avoir adopté un seul article, alors qu'hier,
nous en avions adopté une quinzaine. Alors, ma réaction M.
le Président, j'attire votre attention, je ne peux pas attirer
l'attention des honorables membres d'une façon particulière et de
la galerie, de l'honorable
tribune. Voici ce que disait le premier ministre c'est que pour
une heure ou deux, quitte à reprendre le débat ce soir, c'est
clair, M. le Président, puisqu'il paraît impossible d'avancer cet
après-midi, comme cela était impossible d'avancer ce matin. Ma
réaction normale, très calme, c'est qu'on discute de la
réforme électorale ou de la Loi sur les consommateurs et qu'on
reprenne le débat ce soir sur la baie James."
M. le Président, l'intention de celui qui a fait la motion est
parfaitement claire et, si je réfère aux propos de l'honorable
député de Maskinongé, propos qu'il a tenus non pas dans
cette Chambre, mais devant les caméras de la télévision,
il a dit...
M. PAUL: Ah! Cela vous fatigue.
M. LEVESQUE: ... que son interprétation de l'article 332,
sixième paragraphe, voulait dire de reprendre les travaux dans 48 heures
seulement.
M. PAUL: C'est ça.
M. LEVESQUE: Or, M. le Président, nous voyons l'intention du
proposeur de la motion qui veut reprendre le débat dans deux heures, et
qui n'a jamais parlé de l'article 332, et qui n'a jamais utilisé
la formule sacramentelle chère aux procéduriers. Mais,
connaissant les grands talents de procédurier de mon honorable ami, le
député de Maskinongé,...
M. PAUL: Je vais vous le prouver.
M. LEVESQUE: ... et voyant le sourire qu'il avait également,
c'est cela qui a été provocant à un moment donné,
lorsqu'il a souri. Alors que tout le monde demandait de parler sur la motion,
il s'est levé. Il s'est levé à la façon de
quelqu'un qui avait trouvé, qui avait vu la lumière. Il s'est
levé et a dit: M. le Président, je propose que l'on vote sur la
motion.
M. PAUL: Vous m'avez dit merci.
M. LEVESQUE: Et j'ai dit merci parce qu'à ce moment-là
j'avais décelé, Dieu merci, cette habitude qu'avait ce grand
président d'autrefois, lorsqu'il avait affaire à ses
règlements, d'essayer de trouver la note la plus cachée, je ne
dirai pas la plus sournoise, mais la plus insidieuse, si je voulais être
malin. J'ai vu non, je n'ai pas le droit, je ne le dis pas dans
le sourire vainqueur... Avant, s'il n'avait pas eu ce sourire, s'il avait
été calme, s'il avait eu l'air un peu fatigué et avait
dit: Ah mon Dieu, votons donc...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Comme le premier ministre.
M. LEVESQUE: ... sur cette motion. M. le Président, je n'aurais
peut-être pas été aussi alerte et vigilant. Mais lorsque
j'ai vu ce sourire, que je commence à connaître, sur les
lèvres du député de Maskinongé, j'ai dit: II est en
train de nous jouer un tour.
M. BERTRAND: Le tour était joué.
M. LEVESQUE : Alors, M. le Président,...
M. BERTRAND : Le tour était joué.
M. LEVESQUE: ... je me suis levé, à ce moment-là,
afin qu'il n'y ait aucune ambiguïté et parce que le numéro
332 était, à un moment donné, perdu dans les
débats, non pas utilisé par l'honorable premier ministre, non pas
utilisé par celui qui avait proposé la motion, non pas parce que
dans le contenu même, dans l'intention même du premier ministre, il
se trouvait quoi que ce soit qui ait eu affaire à l'article 332, mais
connaissant cet esprit procédurier du député de
Maskinongé, je me suis dit: Ce sourire veut dire quelque chose. Il y a,
chez lui, beaucoup d'interrogations, beaucoup d'ambiguïté dont il
utilisera certainement le moindre des détails, ou le moindre des
facteurs ou le moindre des éléments pour essayer, après le
vote, de dire qu'on doit utiliser l'article 332, sixièmement, pour
écarter du feuilleton et encore consacrer, d'une façon claire,
l'obstruction systématique d'une certaine opposition à laquelle
il ne croit pas, j'en suis convaincu, le connaissant depuis toujours.
Mais il s'associe à cette obstruction et il voudrait bien,
aujourd'hui, essayer de s'extirper d'une façon élégante
par une procédure de diversion en attirant, autant que possible, les
media d'information sur ce petit point de règlement pour essayer,
à ce moment-là, de retarder les travaux de la Chambre. Je ne
crois pas qu'il ait intérêt à le faire présentement
mais cela aurait eu le même effet.
Mais, à ce moment-là, je me suis levé, avant que le
vote ne soit pris, et j'ai dit à l'honorable président des
comités, le député de Terrebonne, avant que je vote, avant
que je me prononce... Je parlais au moins pour moi-même, si je ne parlais
pas pour cette Chambre.
UNE VOIX: Vous parliez pour nous!
M. LEVESQUE: Evidemment, M. le Président, je parlais pour mes
collègues. Merci. Le député de Terrebonne est
présent et il est témoin. J'ai dit: "Nous votons bien...
M. PAUL: Mais le journal est silencieux.
M. LEVESQUE: ... sur l'article 331? " Le député de
Terrebonne a dit: "Oui".
UNE VOIX: Le journal des Débats.
M. LEVESQUE: M. le Président, lorsque j'ai rappelé cela
à l'honorable député de Maski-
nongé il l'avait bien entendu, le député de
Maskinongé; d'ailleurs, il le dit lui-même après le
vote il a dit: "Ce n'est pas suffisant". Ah non! Un instant, un instant!
M. PAUL: C'est cela. Ce n'est pas suffisant. M. LEVESQUE: Ah! Ce n'est
pas suffisant. M. BOURASSA: Donc, il l'a dit!
M. LEVESQUE: Donc, je l'avais dit, si ce n'est pas suffisant, de l'aveu
même du député de Maskinongé. M. le
Président, nous ne voulons pas faire de ceci un débat qui
prendrait beaucoup de temps. Je n'ai parlé que dix minutes. Je n'ai pas
l'intention de parler davantage. Je veux une directive, M. le Président,
tout simplement, afin de cesser cette information qui ne tient pas debout, qui
n'est fondée sur absolument rien, qui est un jeu de l'imagination
très fertile d'un homme qui est attaché à la
procédure, qui a réellement beaucoup de qualités quant
à l'interprétation des règlements, mais qui, d'un autre
côté, s'en sert, à ce moment-ci, d'une façon qui
n'est pas fondée, qui ne tient pas compte du contenu et de l'essence de
la motion du premier ministre.
J'ai dit, il y a quelques instants, à ceux qui m'ont
interrogé à ce sujet: Nous ne voulons pas attacher de
l'importance au contenant. Nous n'avons jamais voulu attacher de l'importance
au contenant. Nous avons toujours voulu le faire sur le contenu. Nous sommes
intéressés, cependant, au développement de la baie James.
Cela, c'est le contenu. Ceux qui font du "filibuster", ceux qui font de
l'obstruction systématique, c'est le contenant. Vous vous arrangerez
devant le peuple avec le contenant !
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maskinongé
a-t-il l'intention de parler sur la même demande de directives?
M. PAUL: Sur la demande de directives, et mon bon ami le leader
parlementaire m'a fait penser de conclure ma demande de directives par une
motion, après que j'aurai répondu...
M. LE PRESIDENT: Par une motion?
M. PAUL: Oui, ça va être bon, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Etant donné
que l'honorable député de Maskinongé me donne
préavis qu'il présentera une motion, je ne peux pas
déterminer immédiatement si elle est recevable ou non;
j'attendrai qu'il la fasse, nécessairement. Mais, si nous voulons
respecter le règlement, est-ce que ça veut dire qu'actuellement
nous sommes toujours dans le débat de deuxième lecture sur le
projet de loi numéro 80?
DES VOIX: Non, non.
M. LE PRESIDENT: II y a eu suspension des travaux alors que l'honorable
député de Chicoutimi avait le droit de parole. Je n'ai pas
d'objection, mais il serait peut-être préférable que, du
consentement unanime de la Chambre, nous ajournions le débat sur le
projet de loi numéro 80.
M. CROISETIERE: ...retourner à 50.
M. LE PRESIDENT: Où sommes-nous actuellement?
M. PAUL: M. le Président.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'avais demandé une
directive, j'attends votre réponse. Si l'honorable député
de Maskinongé veut demander une directive après, il aura sans
doute les mêmes droits que moi. Je connais tellement bien, M. le
Président, votre sens de la justice et de l'équité que je
sais que vous allez lui donner l'occasion de vous poser une question et
l'éclairer s'il y a encore quelque chose qu'il ne connaît pas du
règlement. Mais, M. le Président, quant à une motion, je
m'y opposerais parce que nous n'avons fait que suspendre l'étude du
projet de loi sur la carte électorale; nous n'avons rien devant nous
sauf cela. Une demande de directive est toujours permise et tout ce que je vous
demande est de me dire si j'ai raison de prétendre que l'honorable
premier ministre n'est pas lié dans sa demande par un article qui
s'appelle 332 alors qu'il ne l'a jamais invoqué et que tout ce qu'il a
dit nous indique bien qu'il s'agit de l'article 331.
M. PAUL: M. le Président, pour vous aider dans votre
directive,...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Je
préférerais personnellement qu'on ajourne le débat sur le
projet de loi 80.
UNE VOIX: Ah non!
M. PAUL: Temporairement, oui.
M. DEMERS: Cela, c'est le premier ministre.
M.BOURASSA: M. le Président, pour répondre à votre
demande, j'ai dit cet après-midi que je ne voyais aucun
inconvénient à ce qu'on reprenne le débat sur le bill 50
à huit heures ce soir. J'espérais que le Parti
québécois m'aurait fait parvenir les amendements pour les
articles 16, 17 et 18.
M. CHARRON: Ne gâtez pas la sauce.
M. BOURASSA: ... je n'ai pas su, M. le Président, je dois dire en
toute franchise, que le gouvernement a soumis ces amendements avant que l'Union
Nationale m'ait soumis des amendements...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je demanderais à l'honorable premier
ministre d'attendre, pour présenter cette argumentation, après la
décision de la Chambre, s'il y a lieu d'ajourner le débat en
deuxième lecture sur le projet de loi no 80.
M. LEVESQUE: Non, non, il n'y a pas de consentement unanime.
M. BURNS: M. le Président...
M. LEVESQUE: II n'y a pas de consentement unanime. J'ai demandé
une directive, je demande simplement une réponse et puis qu'on s'en
tienne aux règlements. Tout le monde veut parler des règlements,
aujourd'hui, tout le monde se pique de connaître les règlements.
On va à la télévision puis on dit que le gouvernement ne
connaît pas ses règlements. Bien, le gouvernement va demander que
les règlements soient appliqués.
M. LE PRESIDENT: Avant de juger l'à-propos, je suis bien
prêt à considérer la demande de directive du ministre de
l'Industrie et du Commerce. Par contre, je me demande comment je pourrai
accorder le droit de parole, que je suis bien prêt à lui accorder,
au député de Maskinongé, mais je me demande comment. C'est
pour ça que je souhaiterais...
M. PAUL: En vertu d'un rappel au règlement sur une question de
privilège.
M. LE PRESIDENT: Une question de privilège.
M. PAUL: ...D'ailleurs, je vous ai prévenu, M. le
Président, durant l'heure du dîner.
M. LE PRESIDENT: Vous m'avez prévenu d'une question de
règlement, mais vous ne m'avez pas prévenu d'une question de
privilège.
M. PAUL: Je veux également coiffer ma question de rappel au
règlement d'une question de privilège.
M. LE PRESIDENT: Allez-y.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
député de Maskinongé peut-il ou quelque opinant que ce
soit, peut-il, à ce moment-ci...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le leader parlementaire du gouvernement a
parfaitement le droit d'invoquer le règlement sur une question de
privilège, pour savoir si la question de privilège est recevable
ou non.
M. LEVESQUE: Certainement. C'est ça, c'est ça. M. le
Président, il faut bien comprendre que le député de
Maskinongé a dit qu'il prendrait une question de règlement, qu'il
la coifferait d'une question de privilège, et on sait qu'une question de
privilège peut se terminer par une motion, et il a même
lui-même annoncé sa motion. Or, M. le Président, je vous
demande, alors que la Chambre est saisie d'un autre débat, celui qui a
été suspendu par le député de Chicoutimi sur le
bill relatif à la carte électorale, est-ce qu'on a le droit
à ce moment-là si c'est relié à quelque
propos tenu par le député de Chicoutimi, je m'incline, mais si
ça n'a aucune affaire avec le débat en cours, je comprends fort
bien qu'on puisse demander une directive de soulever une question de
règlement, la coiffer d'une question de privilège et terminer par
une motion.
A ce moment-là, c'est l'anarchie, M. le Président, on ne
se comprendra absolument pas. Si le député de Maskinongé,
lorsqu'il a parlé tout à l'heure à la
télévision, n'est pas trop sûr de ce qu'il a dit, je le
comprendrais après l'avoir écouté et après l'avoir
vu. Il avait lui-même ce sourire...
M. PAUL: Assoyez-vous et je vais vous le prouver.
M. LEVESQUE: ... inquiétant et inquiet.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je comprends la question de règlement
soulevée par l'honorable leader parlementaire sur la question de
privilège de l'honorable député. Je serais disposé
à accorder le droit de parole au député de
Maskinongé comme au leader parlementaire du Parti
québécois, mais actuellement je ne peux pas, le règlement
me le défend, parce qu'on est toujours au projet de loi no 80, exception
faite d'une demande de directive qui m'a été adressée.
Je suis prêt à donner ma directive mais je ne peux pas
permettre à d'autres députés de parler à moins
qu'on ajourne le débat sur le projet de loi no 80. C'est l'ajournement
du débat.
M. BURNS: M. le Président, vous n'aurez pas mon consentement pour
suspendre le débat sur le bill 80.
M. PAUL: M. le Président, j'ai une directive à vous
demander.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Avant de donner une
deuxième directive, je vais donner ma réponse sur la
première qui m'a été demandée parce que je ne peux
pas avoir deux demandes de directive de front.
UNE VOIX: Une à la fois. M. PAUL: Sur le même sujet.
M. LE PRESIDENT: Je suis prêt à rendre ma
décision.
UNE VOIX: Sur le même sujet, il a le droit.
M. PAUL: Sur le même sujet.
M. BERTRAND: C'est exactement sur le même sujet.
M. LEVESQUE: ... ma réponse, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. PAUL: Si vous voulez en faire de la procédure, on va vous en
faire.
M. LEVESQUE: C'est vous qui avez commencé.
M. PAUL: Cela fait vingt minutes que vous en faites.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEyESQUE: C'est le député de Maskinongé qui a
commencé. Nous n'avons jamais parlé de procédure, nous
autres.
M. BERTRAND: Voyons donc!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Vous n'êtes pas
sans ignorer que j'ai été mis au courant de ce qui s'est
passé vers cinq heures ce soir, avant qu'on reprenne le débat sur
le projet de loi no 80. Je me suis permis de lire la transcription du journal
des Débats; je me suis informé auprès des officiers de
cette Chambre et auprès du vice-président du déroulement
du débat lorsque la Chambre siégeait en comité
plénier sur le projet de loi no 50.
Je n'ai pas eu le temps de lire les quinze ou vingt pages de
transcription entre trois heures et demie et cinq heures. Je m'en excuse,
j'aurais dû le faire, mais je n'ai eu que le temps de les parcourir en
diagonale. J'ai remarqué, au tout début, que l'honorable premier
ministre faisait une motion d'ajournement du débat; il avait l'intention
de proposer l'ajournement du débat. Il est revenu par la suite, se
rendant compte qu'on ne peut pas ajourner le débat en comité
plénier.
M. PAUL: Article 330.
M. LE PRESIDENT: Article 331, note 2. Par contre, il est bien dit que la
motion...
M. PAUL: M. le Président, c'est l'article 330, ce n'est par
l'article 331.
M. LE PRESIDENT: C'est moi qui donne la directive ici, pour le
moment.
M. PAUL: Apprenez vos règlements, c'est l'article 330.
M. LE PRESIDENT: Je dis que l'article 331, note 2, me concerne pour le
moment. S'il y a lieu d'aller à l'article 330, j'irai après.
Lorsque le premier ministre a voulu ajour-d'hui ajourner le débat
ce qui lui est défendu puisqu'à la note 2 de l'article
331, il est dit qu'il s'agit d'une motion analogue à celle qu'on peut
faire en vertu de l'article 331 à l'effet que le président
rapporte que le comité n'a pas fini de délibérer et qu'il
demande la permission de siéger de nouveau si le premier
ministre, lorsqu'il a voulu ajourner le débat, en somme, pour être
dans la légalité, aurait dû se servir de l'article 331 et
faire motion que le président rapporte que le comité n'a pas fini
de délibérer et qu'il demande la permission de siéger de
nouveau.
Dans une note, sous l'article 332, on dit que la motion à l'effet
que le président quitte le fauteuil équivaut ou est analogue
à la motion d'ajournement de la Chambre et qu'elle fait
disparaître du feuilleton la question en discussion. En somme, le
comité plénier saute ou disparaît du feuilleton et on doit
recommencer au tout début.
En somme, l'esprit qui a animé le premier ministre en demandant
l'ajournement du débat, c'est qu'il voulait, s'il avait connu son
règlement, se référer à l'article...
DES VOIX: Ah! Ah!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je n'ai pas terminé. Il
aurait voulu se référer à l'article 331...
M. PAUL: Vos directives sont bien suivies, M. le premier ministre.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. Bourassa a mentionné, selon la
transcription de la feuille R/5006,page 2 en bas: "Alors, ma réaction,
c'est que pour une heure ou deux, quitte à reprendre le débat ce
soir, puisqu'il paraît impossible d'avancer cet après-midi, comme
cela a été impossible d'avancer ce matin, ma réaction
normale, très calme, c'est qu'on discute de la réforme
électorale ou de la loi sur les consommateurs et qu'on reprenne le
débat, ce soir, sur la baie James." Encore, son intention d'ajourner le
débat.
Un peu plus loin, d'après la transcription de la feuille R/5007,
page 1, je cite le député de Chicoutimi: "Je ne vois pas les
raisons pour lesquelles le premier ministre nous demanderait de suspendre
momentanément." Momentanément, je comprends que c'est pour y
revenir. Un peu plus loin, le député de Chicoutimi: "Pour ma
part, je ne vois pas le bien-fondé de la proposition du premier ministre
puisque, de toute façon, le débat qui est actuellement
engagé va reprendre, va devoir se poursuivre jusqu'à ce que les
députés légitimement élus se soient fait entendre
selon leur gré et leur volonté."
Un peu plus loin encore, page 2, le député de Chicoutimi
également: "Pour ces raisons, M. le Président, je ne comprends
pas que le premier ministre veuille tout à coup ajourner le débat
en
cours et nous demander de nous attaquer à un autre projet de loi.
Je pense que, sur la lancée actuelle, nous pourrions poursuivre,
épuiser les arguments que servent les députés et
procéder normalement à l'étude d'un projet de loi au lieu
de fragmenter cette étude et de faire une sorte de
chassé-croisé."
Un peu plus loin, feuille R/5008, page 2, le député de
Maisonneuve: "D'autre part, sur le fait de la motion elle-même, sans
vouloir prêter d'intention au premier ministre, je sais ce qui va arriver
si nous passons à un autre projet de loi. Le premier ministre
espère peut-être qu'après avoir débattu d'autres
projets de loi nous nous trouvions à des heures tardives pour discuter
d'un projet de loi qui, déjà, a causé des scènes
plus ou moins gracieuses." Encore, l'intention de revenir à
l'étude du projet de la baie James.
L'honorable député de Montcalm, feuillet 5015, page 1. "Je
crois, M. le Président, que, pour l'ensemble de ces raisons, nous devons
nous prononcer contre cette motion." L'honorable député de
Chicoutimi: "L'examen d'un problème qu'il va nous falloir vider de toute
façon."
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas dit à quel moment, par
exemple. ... et momentanément...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je me permets...
M. LE PRESIDENT: Je retire les dernières paroles du
député.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, mais simplement je voudrais vous indiquer
ceci, que momentanément, ça peut vouloir dire une période
de temps assez longue.
M. LE PRESIDENT: Feuillet 5015, page 2. L'honorable premier ministre:
"Pour deux heures." M. Tremblay (Chicoutimi, encore mentionne: "et nous demande
de faire une sorte de grève."
Ecoutez, je pense qu'ici la première argumentation que je
voudrais apporter dans ma directive, c'est que l'esprit général,
l'esprit du premier ministre, des différents députés que
j'ai mentionnés, c'était de suspendre le débat quitte
à revenir plus tard. En somme, l'intention du premier ministre
n'était pas d'invoquer l'article 332 pour que la question en discussion,
le comité plénier saute et qu'on recommence toutes les
procédures de la formation du comité avec les motions qui peuvent
s'ensuivre.
Raison de plus, depuis le début du débat sur le bill 50,
les membres de l'Opposition officielle, l'Union Nationale, et le Parti
québécois ont demandé en deuxième lecture que le
projet de loi soit remis à l'automne, sur une motion de l'honorable chef
de l'Opposition officielle. Les argumentations de ceux qui s'opposent à
l'adoption de ce projet de loi ont toujours été qu'ils ne sont
pas prêts, que le projet de loi devrait être remis à
l'automne, plus tard. C'est l'esprit que je peux dégager des
débats depuis que nous étudions le bill no 50. Comment se fait-il
et là je ne veux prêter aucune intention que les
honorables députés de l'Opposition, s'ils avaient cru vraiment
que l'honorable premier ministre invoquait l'article 332 indiquant que le
comité tombait, qu'il aurait fallu recommencer toutes les
procédures, aient voté contre la motion du premier ministre?
M. BURNS: En vertu de l'article 332, c'est juste remis de 48 heures.
M. LE PRESIDENT: Maintenant, troisième... A l'ordre, s'il vous
plaît! Je pourrais demander également aux officiers de cette
Chambre, et je le demande d'ailleurs, comment, au procès-verbal, la
motion a-t-elle été rédigée? Son président
rapporte que le comité plénier n'a pas fini de
délibérer et demande la permission de siéger de nouveau
même séance ou séance subséquente. En somme,
d'après le procès-verbal qui fait preuve prima facie, la formule
de la motion d'amendement...
M. BURNS: Mais il l'a dit au début, M. le Président.
Qu'est-ce que ça donne, quand il a dit: Nous autres, il nous a
trompés, on est parti sur l'article 332.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! En ce qui me concerne, le
procès-verbal de la Chambre fait preuve prima facie comme document
officiel et c'est l'article 331 qui est inscrit là.
Pour terminer... A l'ordre! Je comprends très bien la tentation
que peut avoir, c'est normal, l'honorable député de
Maskinongé de profiter, sans aucun doute, des articles 331 et 332 pour
faire une bonne blague.
M. PAUL: Cela l'a peut-être été mais ce ne le sera
plus.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! D'ailleurs, j'ai déjà entendu
en cette Chambre, il y a quelques années: "La lettre tue, l'esprit
vivifie."
M.PAUL: Saint Paul, épître aux Corinthiens.
M. LE PRESIDENT: Je sais que cela a été cité, tout
à fait à point, d'ailleurs, il y a quelques années par
l'honorable député de Maskinongé alors qu'il occupait ma
place.
En ce qui me concerne également, disciple de saint Paul et
disciple du député de Maskinongé, je m'en tiens à
dire que la lettre tue et que l'esprit vivifie. Dans mon opinion, l'esprit qui
a enrobé ce débat était que le premier ministre entendait
invoquer l'article 331. En ce qui me concerne, au feuilleton, actuellement,
l'ordre du jour est à l'effet que, lorsqu'il sera
appelé par l'honorable leader parlementaire, ce sera de nouveau
en comité plénier.
M. PAUL: M. le Président, comme vous venez de rendre une
directive basée sur l'article 285, dix-neuvièmement, en
prêtant des intentions au premier ministre, je vous inviterais à
regarder le règlement. Je vais maintenant vous demander une directive
sur...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. PAUL: ... des faits.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je suis bien prêt à lire, avec
l'honorable député de Maskinongé, l'article 285.
M. PAUL: Dix-neuvièmement.
M. LE PRESIDENT: On va lire l'article au complet. "Il n'est pas permis
d'imputer, directement ou indirectement, des motifs il ne faudrait pas
oublier le qualificatif des motifs indignes ou des intentions mauvaises
à un député, ou de lui attribuer des motifs, des
intentions ou des propos inavoués." Je n'ai jamais voulu prêter ni
au premier ministre, ni au leader parlementaire de l'Opposition aucun motif
inavoué ou de mauvaises intentions.
M. PAUL: M. le Président, si vous me permettez, je vais vous
demander une directive sur des faits. Cet après-midi, le premier
ministre je me réfère au feuillet numéro R/5005
a fait une motion dans les termes suivants: "M. le Président, je
demande l'ajournement du débat." Je vous ai rappelé qu'en vertu
de l'article 330 le premier ministre ne pouvait pas faire une telle motion
parce qu'on y lit ceci: "En comité plénier, ni la question
préalable, ni l'ajournement de la Chambre, ni l'ajournement du
débat ne peuvent être proposés." M. le Président,
c'est l'honorable député de Saint-Louis qui présidait les
délibérations à ce moment-là. Je dis que
l'honorable député de Saint-Louis pouvait, immédiatement,
dire au premier ministre: Votre motion est irrecevable parce qu'une telle
motion ne peut être présentée devant cette Chambre.
Mais le président de la Chambre, avec beaucoup de respect
à l'endroit du premier ministre, commeson postele commande, d'ailleurs,
s'est prévalu des dispositions de l'article 167 du règlement.
Nous allons le lire.
UNE VOIX: II le saura, son règlement, la prochaine fois!
M. PAUL: Note 2, M. le Président. M. LE PRESIDENT: Quel
article?
M. PAUL: Article 167, note 2: "Toutefois, quand la forme d'une motion
est irrégulière, l'orateur peut corriger cette motion on
sait que le président du comité remplit également
adéquatement ces fonctions et les règles s'appliquent mutatis
mutandis, il a les mêmes pouvoirs et la lire ou l'énoncer
dans les formes voulues".
M. le Président, je me réfère au feuillet R/5005
où l'honorable député de Saint-Louis dit: "L'article 332
dit que je dois faire rapport..."
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
Je sais fort bien que, si le député de Maskinongé
était à ma place et si j'occupais son siège, il ne me
donnerait pas du tout le droit de parole sur cette question.
M. PAUL: Pourquoi?
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre!
M. PAUL: Je vous ai dit que c'était sur des faits, M. le
Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. PAUL: ... pas sur des intentions.
M. LE PRESIDENT: J'ai rendu ma directive à la demande de
l'honorable leader parlementaire autant sur les faits que sur l'esprit et les
intentions que, prétendument, l'honorable député de
Maskinongé me prête. Mais je ne peux pas permettre, d'aucune
façon, ce qu'il demande. L'honorable député de
Maskinongé trouvera sans aucun doute une autre occasion pour demander
ces directives. Mais les directives, actuellement, sont exactement sur le
même sujet. Lorsqu'il s'est levé pour me demander des directives,
je croyais que c'était sur un autre sujet. Mais c'est exactement sur le
même sujet.
M. PAUL: C'est sur des faits, non pas sur des intentions.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! Je ne peux pas et c'est
bien malheureux. Ce n'est pas mon habitude d'empêcher qui que ce soit de
parler mais j'ai donné mes directives. Je pense que je les ai
données d'une manière assez élaborée. J'en prends
toute la responsabilité.
L'honorable député de Chicoutimi.
M. PAUL: M. le Président, je veux continuer la
présentation de ma demande de directives.
M. LEVESQUE: II faut toujours bien, M. le Président, avoir
du...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! Je ne sais pas si le
député de Maskinongé court après quoi que ce
soit.
M. PAUL: Je cours après les interprétations logiques du
règlement...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre! M. PAUL: ... et non pas
partisanes. DES VOIX: Ah! Ah!
M. LE PRESIDENT: Je devrai rappeler à l'ordre le
député de Maskinongé. Cela n'a jamais été
dans mes habitudes de rendre une décision partisane. Je n'ai pas
l'intention de rendre de décisions partisanes.
M. PAUL: Nous avons le droit de nous expliquer.
M. LE PRESIDENT: L'incident, en ce qui me concerne, est clos. J'accorde
la parole au député de Chicoutimi.
M. PAUL: M. le Président, je vous demande une autre
directive.
UNE VOIX: Le député de Chicoutimi.
M. PAUL: Quand, M. le Président, aurons-nous le droit de
présenter une motion aux fins d'annuler le rapport qui a
été reçu illégalement en vertu des débats
qui se sont déroulés cet après-midi, conformément
à l'article 360?
M. BERTRAND: C'est cela. C'est important.
M. LEVESQUE: La question ne tient même pas compte de la directive
rendue.
M. PAUL: Non, non. Ecoutez, mêlez-vous de vos oignons!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LEVESQUE: Je m'en mêlerai quand je voudrai, M. le
Président. Ce n'est pas le député de
Maskinongé...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: ... qui m'arrêtera d'exercer mon droit de parole.
M. LE PRESIDENT: ... de prendre sa place.
M. PAUL: Je m'excuse. C'est l'article 361, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je sais bien que je suis peut-être
très mal placé pour donner des directives ou des conseils au
député de Maskinongé, qui connaît très bien
son règlement. Je sais pertinemment il le sait autant que moi
qu'il y a des recours qu'il peut exercer en vertu du
règlement.
M. PAUL: Je vous le demande, M. le Président. J'en ai le droit en
vertu de l'article 667. Le député de Bourget vous a
demandé une directive, l'autre soir, au sujet de la présentation
d'une motion. Vous la lui avez donnée.
M. LE PRESIDENT: Un des moyens qui me vient à la mémoire,
si l'honorable leader parlementaire de l'Opposition officielle a à se
plaindre du déroulement des débats en comité
plénier, alors que ce comité plénier était
dirigé par le vice-président ou le vice-président adjoint
de la Chambre, c'est une procédure qu'il peut engager et qu'il peut
annoncer au feuilleton pour critiquer les agissements du président.
M. PAUL: M. le Président, vous n'avez pas le droit de me
prêter des intentions, en vertu de l'article 285,
dix-neuvièmement. Je n'ai pas l'intention de critiquer la conduite de
l'un ou l'autre des officiers de cette Chambre. Je vous demande une directive
en vertu de l'article 361.
M. BURNS: Comme le député de Maskinongé l'a dit,
vous me l'avez donné l'autre soir, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: J'ignore pour le moment quels sont les recours des
députés de cette Chambre. Lorsque l'ordre du jour inscrit au
feuilleton, lorsque le leader parlementaire du gouvernement appellera cette
motion, il sera peut-être loisible, à ce moment-là,
à des députés, le député de
Maskinongé ou autres, de contester cet appel de l'ordre du jour.
M. LEVESQUE: En vertu de quel article? M. PAUL: Merci, M. le
Président.
M. LEVESQUE: M. le Président, je demande une directive plus
précise, même si vous avez c'est mon droit dit: "Aura
peut-être" c'est-à-dire...
M. PAUL: Si je n'en fais pas.
M. LEVESQUE: Mon interprétation du dire du président
indique qu'il se réservait le droit de décider, parce que
j'imagine qu'il veut consulter.
M. LE PRESIDENT: Je ne demande pas au leader parlementaire
d'interpréter mes réponses. Je ne lui accorde pas ce droit.
L'honorable député de Chicoutimi.
Projet de loi no 80 (suite)
2e lecture M. Jean-Noël Tremblay
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je prends la parole au
moment où j'étais en train de me corriger, non pas de m'amender,
et je poursuivrai le débat que nous avons engagé.
J'en étais au problème des critères et j'avais
indiqué, m'adressant au premier ministre, que le projet de loi qu'il
nous soumet ne me semble pas avoir tenu compte des représentations que
nous avions faites en commission parlementaire, notamment en ce qui concerne
les divers critères que j'ai évoqués cet
après-midi, soit des critères démographiques,
socio-économiques, géographiques, politiques, socio-culturels,
régionaux, etc.
J'ai indiqué cependant que le projet de loi tient compte de
certains de ces critères lorsqu'on retrouve dans les notes explicatives
ceci: II lui sera aussi possible il s'agit de la commission mais
à titre exceptionnel, de déroger à ces principes pour des
raisons d'ordre démographique et géographique. Donc on ne tient
compte de certains critères démographiques et
géographiques qu'à titre exceptionnel quand, au fait, on devrait
en tenir compte d'une façon essentielle. Il y a une différence
ici à faire entre ce qui peut être l'exception et ce qui devrait
être la règle normale.
Ainsi donc, le projet de loi tel que libellé comporte une
faiblesse et peut-être plus qu'une faiblesse mais une dérogation
aux instructions qui avaient été virtuellement données par
les membres de la commission parlementaire à cette éventuelle
commission de la réforme des districts électoraux que veut
créer la loi 80.
M. le Président, on me dira peut-être que tous les
critères que j'ai évoqués et que j'ai examinés
assez longuement cet après-midi en me servant de certains exemples
particulièrement en ce qui concerne des régions
déterminées du Québec, il est difficile d'en tenir compte,
et je crois que cela est exact. Mais cela ne signifie pas pour autant qu'on
doive les écarter péremptoirement et ne retenir que les
critères démographiques et géographiques. Il y a
évidemment dans diverses régions et dans l'ensemble du territoire
du Québec des conditions sociales, politiques, économiques,
géographiques, démographiques qui peuvent faire que l'on
adapte...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. Pourrais-je demander
aux honorables députés de cette Chambre, de quelque
côté qu'ils soient, ainsi qu'à nos spectateurs dans les
galeries de faire un effort pour que nous ayons le moins de bruit possible pour
permettre à l'honorable député de Chicoutimi de continuer
son intervention.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je vous remercie. Je
disais donc qu'il est évident qu'on ne veut pas tenir compte, dans tous
les détails, de chacun des critères que j'ai
évoqués. Cela ne signifie pas, pour autant, qu'on doive les
écarter et que les commissaires doivent les écarter lorsqu'ils
s'attelleront à la tâche de redéfinir les frontières
des districts électoraux.
Si j'insiste là-dessus, c'est qu'à la commis- sion, encore
une fois, nous avons constamment fait référence à ces
critères afin d'en arriver à faire des recommandations qui
normalement auraient dû inspirer si elles avaient
été faites comme il avait été convenu de les faire
le premier ministre dans la rédaction du projet de loi qui est
devant nous.
Ainsi, M. le Président, j'estime j'y reviendrai lors de
l'étude en comité qu'il devrait être
précisé que les commissaires doivent tenir compte de tous les
critères que j'ai indiqués tout à l'heure et non
seulement, à titre exceptionnel, du critère démographique
et du critère géographique. Au cours de l'étude en
commission parlementaire de l'Assemblée nationale, nous avons
parlé de cette nécessité de redéfinir les
frontières des circonscriptions. Cela nous a amenés à nous
interroger sur le problème de la représentativité, sur le
problème de l'équité dans la représentation et, du
même coup, sur le rôle du député.
Ce n'est pas tout, M. le Président, de diviser
mathématiquement le territoire du Québec, d'établir que,
pour chaque circonscription, il y aura un nombre de 32,000 électeurs
plus ou moins. Cela n'est pas suffisant. En même temps que de
l'étendue du territoire d'une circonscription et du nombre
d'électeurs qu'elle contient, il faut tenir compte de la tâche qui
est assignée à celui qui est appelé à devenir
député.
Le rôle du député, M. le Président, on en a
parlé à maintes et maintes reprises. On a insisté
tantôt sur sa fonction de législateur, tantôt sur sa
fonction de lien entre l'administration et le peuple, tantôt sur sa
fonction de service. Ce sont là trois fonctions extrêmement
importantes. Admettons que le premier rôle du député, c'est
d'être un législateur; c'est son rôle officiel, c'est son
rôle juridique, c'est celui que consacrent nos lois.
Mais le député qui veut être un législateur
ne peut pas se contenter de venir ici à la Chambre et d'examiner les
projets de loi. Il doit encore savoir si ces projets de loi correspondent
vraiment aux besoins et aux exigences d'une population donnée. Pour
cela, il lui faut connaître cette population. Il lui faut prendre contact
avec cette population. Le moyen qui lui est fourni et qui, en fait cela
est de tradition lui est imposé par la population elle-même
qui l'exige de lui, c'est qu'il doit être constamment le lien entre le
gouvernement et les citoyens.
Par conséquent, M. le Président, dans le travail
qu'effectuera la commission de refonte des districts électoraux, les
commissaires devront s'interroger non seulement sur des questions
mathématiques ou géographiques, mais également sur des
problèmes humains et se dire que les divisions territoriales qu'ils
dessineront et qu'ils découperont à même le territoire du
Québec devront convenir à un homme qui a une tâche
spécifique, celle d'être un législateur, d'être,
d'autre part, le lien entre l'administration et les citoyens et d'être,
en même
temps, celui qui s'occupe de vois si les services du gouvernement sont
réellement adéquats et permettent aux citoyens d'en tirer le
maximum.
Ainsi, tout le problème de la refonte de la carte
électorale, comme tout le problème de la réforme
parlementaire, de la réforme de l'institution politique, doit se faire
dans une optique humaine, dans une optique de service. Il est essentiel que les
commissaires aient toujours présente à l'esprit cette idée
qu'ils travaillent en vue de créer, en quelque façon, une sorte
de très grande maison pour un homme qui aura à y vivre avec des
citoyens dont il deviendra non seulement le porte-parole, mais en même
temps l'agent de service, l'agent d'information, l'agent de service social,
etc.
Tous les députés ont insisté là-dessus et
cela m'amène à faire une autre considération c'est que,
justement, dans l'établissement d'un nombre de 32,000 électeurs
par circonscription électorale, il faut tenir compte de la lourdeur de
la fonction qui sera celle d'un député donné dans une
circonscription électorale donnée. Ce député peut
être un député d'une circonscription de ville, ce que l'on
appelle un député de circonscription rigoureusement urbaine. Il
peut être député d'une circonscription semi-urbaine,
c'est-à-dire une circonscription qui comporte une grande, une moyenne ou
une petite ville en même temps qu'un ensemble de villages, de paroisses
ou de municipalités à caractère rural. Il peut fort bien
également être député d'une circonscription à
caractère proprement rural.
Lorsque nous avons évoqué ces réalités de
circonscriptions rurales par rapport à des circonscriptions urbaines,
l'on nous a dit ceci: II n'y a vraiment plus de circonscription rurale, il n'y
a vraiment plus de mentalité rurale puisque l'évolution fait que
les ruraux sont de plus en plus urbanisés. Cela est vrai dans un certain
sens, mais il ne faut quand même pas se boucher les yeux et ne pas voir
que toutes les parties du territoire du Québec, toutes les
régions du Québec sont différentes les unes des autres.
Qu'on appelle cela mentalité rurale ou mentalité urbaine, il
reste qu'il y a, dans ces diverses régions, des habitudes
électorales, des habitudes de contact avec les députés qui
ne sont pas exactement les mêmes dans toutes les circonscriptions.
Pour quiconque a eu l'expérience de la vie de
député dans une circonscription rurale je donnerai ici un
exemple il apparaît très clair que la tâche des
députés qui ont à servir, à représenter,
à légiférer, pour une population disons de
caractère rural, est beaucoup plus lourde à certains
égards que celle des députés qui représentent des
circonscriptions rigoureusement urbaines. Je n'ai pas besoin de faire de
démonstration; beaucoup de députés l'ont dit alors que
nous en discutions en commission parlementaire, beaucoup de
députés nous ont dit qu'ils n'avaient pas, avec leurs
électeurs, le même genre de contact que certains autres peuvent
avoir avec les leurs.
J'ai été député, au Parlement central, de la
circonscription de Roberval. J'avais à représenter une population
qui était dispersée sur un territoire d'environ 110 milles de
parcours, d'étendue, et j'avais, en plus, à m'occuper de citoyens
qui vivaient dans 32 municipalités différentes. Il y avait donc,
dans cette circonscription, des problèmes extrêmement
diversifiés et qui m'obligeaient à faire appel à tous les
ministères du gouvernement.
Si on reprend cet exemple et qu'on l'applique au Parlement du
Québec, à l'administration gouvernementale
québécoise, on comprendra par exemple que l'actuel
député de Roberval est exactement dans la situation dans laquelle
je me trouvais, parce que, en plus de représenter le même nombre
de personnes, il représente le même nombre de personnes
disséminées sur un territoire encore plus grand que celui de la
circonscription fédérale que je représentais et qu'il a un
plus grand nombre de municipalités.
Ainsi, ses problèmes, je parle ici du député de
Roberval, parlons-en in abstracto, ne me référant pas
spécifiquement à notre collègue que nous connaissons bien,
mais ce député, en particulier, a justement à
représenter des citoyens qui, tous les jours, doivent faire appel
constamment à tous les ministères du gouvernement. Si je prends
la circonscription de Chicoutimi, que je représente à l'heure
actuelle, j'ai une circonscription qui peut être dite urbaine, mais elle
comporte quand même une enclave rurale assez importante pour que les
problèmes dont j'ai à m'occuper soient diversifiés et me
forcent à faire appel à la presque totalité des
ministères du gouvernement, excepté peut-être pour ce qui
concerne la colonisation.
D'autre part, M. le Président, prenons une circonscription de
ville, la circonscription spécifiquement urbaine, située par
exemple à l'intérieur de Montréal. Disons la
circonscription de Saint-Louis. Bien, je ne sache point que le
député de Saint-Louis ait des problèmes de colonisation.
Il n'a pas de problèmes de voirie. H n'a quand même pas de
problèmes qui l'obligent, par exemple, à communiquer avec les
ministères de la Voirie, des transports, des Terres et Forêts,
etc. L'ensemble des problèmes qui lui sont apportés, c'est le cas
de le dire, qui sont soumis à sa bienveillance et à son attention
par ses électeurs ne sont pas de même nature que ceux qui me sont
soumis à moi par mes électeurs.
Je ne connais pas précisément les habitudes des
«lecteurs du comté de Saint-Louis je prends ce
comté-là mais je pourrais prendre d'autres comtés de
l'île de Montréal mais je présume que les
électeurs de ces comtés n'ont pas les mêmes habitudes
électorales. En raison d'une décentralisation administrative qui
existe à Montréal, ils n'ont pas à requérir aussi
souvent que cela se produit dans mon cas aux services immédiats,
à l'intervention personnelle du député de Saint-Louis ou
du député de quelque circonscription vraiment urbaine de
l'île de Montréal ou d'une autre grande ville.
On nous a dit à quelques moments, souvent
sous forme de plaisanterie, alors que nous parlions de la tâche du
député, dans certaines circonscriptions, et j'oserais dire dans
la majorité des circonscriptions électorales du Québec:
Evidemment, s'il y en a qui veulent continuer à faire du patronage. Ce
n'est pas là le problème. Lorsque les électeurs viennent
à nous, il faut, une fois pour toutes, s'enlever ceci de l'esprit et
surtout faire disparaître ce mythe que les gens viennent
nécessairement nous demander des faveurs.
Je ne fais pas profession d'angélisme. Je sais très bien
que le patronage, cela existe toujours et qu'il y a toujours des gens,
où que ce soit, qui vont essayer d'engager les députés
dans un processus qui les amènera à faire du patronage. Mais
lorsque les gens viennent nous voir il faut, une fois pour toutes,
démythifier cette question-là ils viennent nous demander
des services. On va me dire: Mais pourquoi ne s'adressent-ils pas aux
fonctionnaires, là où le gouvernement a procédé
à une décentralisation administrative, a installé, a
implanté des bureaux? Pourquoi ne vont-ils pas là? M. le
Président, les gens y vont, mais immanquablement, après avoir
pris contact avec les fonctionnaires, ils reviennent nous trouver, soit qu'ils
n'aient pas eu gain de cause, soit qu'ils aient l'impression qu'on ne les a pas
compris, soit que, même avant d'y aller, ils aient besoin de conseils, de
renseignements, qu'ils aient besoin qu'on leur indique à quelle porte
frapper, à qui s'adresser, de quelle façon le faire pour
présenter leur requête.
Ainsi, même dans les régions où se trouvent les
bureaux d'administration du gouvernement, il y a constamment un va-et-vient du
bureau du député aux bureaux du gouvernement pour justement
établir ce lien et ce contact. C'est une réalité que nous
ne pouvons pas ignorer et j'oserais même dire que nous n'avons pas le
droit d'ignorer. Même si nous sommes des législateurs, lorsque
nous sommes dans nos comtés, dans nos circonscriptions, nous sommes en
état de services et les gens ne manquent d'y recourir. Ils ne manquent
pas de se prévaloir de ce droit qu'ils ont acquis par habitude, par
tradition et qui est consacré par nos agissements quotidiens de demander
nos services, parce qu'ils nous considèrent, en fait, comme l'instance
finale lorsqu'ils n'ont pas eu gain de cause ou comme l'homme qui est capable
de plaider pour eux, le premier, la cause qu'ils ont à soumettre.
C'est pourquoi je dis que la délimitation d'un nombre de 32,000
personnes par circonscription électorale peut causer un préjudice
considérable. M. le Président, le fait de fixer 32,000
électeurs par circonscription électorale, mathématiquement
sans autre considération, le fait de procéder à
l'établissement de ce nombre avec la variable dont nous avons
parlé me paraît, dès l'abord, préjudiciable aux
intérêts des citoyens. A supposer que l'on établisse un
certain nombre de circonscriptions et que la majorité de ces
circonscriptions ait 27,000, 28,000, 30,000 ou 32,000 habitants, il arrivera
ceci: dans la plupart des régions du Québec les
députés auront sur les épaules des tâches
très lourdes. Les citoyens, qui sont dispersés sur de grands
territoires et qui seront dispersés sur un territoire encore plus grand
si l'on réunit des circonscriptions actuellement existantes en une
seule, auront à se déplacer sur de longues distances pour voir
leur député. Le contact avec cette population sera de plus en
plus difficile et les services en seront diminués d'autant.
J'ai, pour ma part, au-delà de 25,000 électeurs. Je
reçois régulièrement à mon bureau de Chicoutimi
entre 95, 100, 110 appels par jour et environ 150 à 175 lettres par
semaine. Cela à part les visites que l'on fait, en mon absence, à
mon bureau, et celles que l'on fait alors que je suis dans ma circonscription,
en fin de semaine. Cela représente, quand même, des contacts
énormes, un nombre de contacts extrêmement imposant. C'est pour le
député une tâche très lourde, jointe aux
tâches de représentation qu'il doit faire forcément, et
avec plaisir d'ailleurs, dans son comté aux fins de rencontrer les
citoyens, les corps intermédiaires, et de participer à la vie des
citoyens dans la circonscription qu'il représente.
C'est pourquoi je disais, au tout début, que ce chiffre de 32,000
personnes par circonscription ne doit pas être un chiffre magique. C'est
un idéal. Je ne condamne pas le fait que l'on ait dit: Partons de 32,000
électeurs, plus ou moins, avec la variable qui est indiquée dans
le projet de loi, mais je dis qu'il ne faut pas en faire un chiffre
magique.
Je vois par exemple devant moi le ministre adjoint aux Finances, le
député de Matane. Je connais très bien le comté de
Matane comme je connais bien le comté de Rimouski, comme je connais bien
plusieurs comtés du Bas-du-Fleuve et de la Gaspésie. Ce sont
quand même des comtés énormes qui sont, du point de vue
géographique, monstrueux parce qu'ils s'étendent sur un
territoire considérable. La population, peut être moins nombreuse
qu'en d'autres circonscriptions, s'y trouve dispersée et pour rejoindre
les députés, ces gens doivent parcourir des distances
considérables, ou le député lui-même, s'il en a la
possibilité physique, doit aller rejoindre les citoyens là
où ils se trouvent. Il ne faut donc pas rendre encore plus lourde la
tâche des députés qui savent, d'expérience, ce que
cela représente de servir une population disséminée sur un
immense territoire et particulièrement les populations
défavorisées.
Je parlais, cet après-midi, des régions
défavorisées en insistant sur le critère
socio-économique. Je pense, par exemple, à des populations comme
celles de la Gaspésie. Je pense aux populations du Nord-Ouest du
Québec où il y a là aussi d'immenses territoires.
Population peut-être pas nombreuse si on la compare à celle qui se
trouve dans d'autres réservoirs de population au Québec, mais une
population qui a droit exactement aux mêmes services et qui a
droit aux mêmes égards de la part de son
député.
Ainsi donc, pour résumer ce point, le chiffre de 32,000 est une
indication. Ce ne doit pas être un chiffre magique et surtout on ne doit
pas hésiter à l'écarter,
délibérément, si ce chiffre doit empêcher les
commissaires qui prépareront cette refonte de la carte
électorale, de tenir compte de ces critères
socio-économiques dont j'ai parlé cet après-midi afin
qu'il n'y ait pas de disproportions dans les rapports de force entre les
régions dites favorisées et les régions qui, à
l'heure actuelle, sont considérées comme des régions
défavorisées.
M. le Président, c'est donc là une considération
importante et le projet de loi n'en a pas tenu compte de la façon dont
nous aurions voulu qu'on le fit, selon les expressions qui avaient
été formulées devant la commission parlementaire de
l'Assemblée nationale. On me dira peut-être parlant, des
inégalités de représentation de la carte électorale
actuelle, qu'il existe ceci: que dans certains comtés, 60,000
électeurs, par exemple, je crois que c'est le chiffre plus ou moins
exact du comté de Terrebonne...
M. HARDY: Quatre-vingt mille.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quatre-vingt mille, vous voyez que c'est
encore plus considérable que je ne le pensais. Alors, on me dira
peut-être que le chiffre de 80,000 électeurs est quelque chose
d'énorme, que du point de vue de la représentation, il est
anormal que 80,000 électeurs n'aient qu'un porte-parole...
M. HARDY: Mais s'il est bon...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'en conviens, M. le Président. Mais il
faut quand même tenir compte de ceci. Mettons de côté, pour
l'instant, les problèmes pratiques que j'ai évoqués tout
à l'heure à propos des circonscriptions rurales. Il est certes
important que les gens, enfin que l'ensemble de la population du Québec
soit mathématiquement redistribué dans des districts
électoraux, de sorte qu'il y ait un porte-parole pour un nombre
raisonnable d'électeurs. Mais le problème peut se poser d'une
autre façon. Je l'ai dit tout à l'heure. Il y a le
problème du député porte-parole, il y a cet aspect du
député porte-parole, celui qui exprime les desiderata de ceux qui
l'ont élu, de ses commettants. Alors, à ce moment-là, il
est quand même important de voir à ce qu'un député
puisse être le porte-parole d'un nombre normal de citoyens.
Mais il est plus important, à mon sens, de s'attacher à la
question de services. Je suis persuadé qu'un député qui
représente 80,000 électeurs qui ont des besoins
diversifiés, qui doivent faire appel à un grand nombre de
ministères, ne sont pas, en dépit de la meilleure volonté
du député, en dépit du plus grand dévouement qu'il
puisse manifester, justement représentés.
Alors il y a cette question de représentation en termes de
service, il y a cette représentation aussi en termes que j'appellerai
idéologiques. C'était là un des points de notre recherche,
de nos examens, de notre étude ou de notre réflexion. Nous
voulons que la carte électorale permette à un nombre raisonnable
de citoyens d'être représentés par un député
qui soit le porte-parole d'un groupe de gens qui, enfin, aient l'occasion de
s'exprimer par sa voix, d'exprimer leurs idées, de faire connaître
leur opinion sur des idéologiques politiques, sur une philosophie
politique, sur des problèmes politiques. Mais il ne faut jamais
dégager cet aspect de l'aspect service sur lequel j'ai insisté
longuement tout à l'heure.
M. le Président, on pourrait, vous savez, parler très
longuement sur ce problème de la refonte de la carte électorale.
Mais je veux rapidement essayer d'attacher ma réflexion à
quelques autres aspects qui me paraissent importants. Nous aurons l'occasion
d'y revenir en comité et d'autres collègues pourront
compléter ce que j'ai dit. Il y a le choix des commissaires. Certains
auraient peut-être souhaité que le choix des commissaires soit
fait au moyen d'un système qui permettrait aux différentes
formations politiques de participer à ce choix. En théorie, dans
l'idéal, cela pourrait être souhaitable. Mais les renseignements
que j'ai m'indiquent que le choix que l'on s'apprête à faire sera
judicieux en ce sens que l'on prendra des personnes qui ne se sont pas commises
encore sur le problème de la refonte de la carte électorale ou de
tout problème s'y rattachant, des gens qui n'ont pas publié
d'articles, n'ont pas comparu devant nous comme experts en nous donnant des
indications précises sur leurs idées et sur ce que nous devrions
faire.
Alors pour ma part, il se peut que je fasse des observations au moment
où nous étudierons cet article qui parle de la nomination des
commissaires, mais je crois que, dans l'idéal, il serait bon que toutes
les formations politiques soient associées à la nomination de ces
commissaires. Mais en pratique, est-ce que cela produira les résultats
qu'on en attend? Et le soupçon de partisanerie politique que l'on
pourrait concevoir à ce propos, je me demande s'il est fondé et
si l'autre formule, qui consisterait à y associer des membres des
diverses formations politiques ne rendrait pas aussi présent le
soupçon de partisanerie politique. È y a là question
d'opinion. Pour ma part, je ne suis pas prêt à faire un
débat là-dessus pour demander que tous les partis politiques
soient associés à la nomination de ces commissaires.
Il y a trois commissaires. On nous dira que ce n'est peut-être pas
assez. Mais il reste que c'est une commission d'experts. Ce sont trois
personnages qui seront vraisemblablement des experts et qui auront quand
même, en vertu de la loi, la possibilité de s'adjoindre un
personnel
auxiliaire, y compris des experts, des techniciens, des
spécialistes. Par conséquent, au sujet de la nomination, au sujet
du nombre des commissaires, je ne vois pas de raison de m'opposer à
cette volonté du gouvernement exprimée dans le projet de loi.
Le mandat qui est confié à cette commission d'experts est
quand même assez explicite.
Ils devront nous soumettre un rapport d'ici le 1er mars 1972.
Personnellement, je suis porté à croire que le délai qui
leur est imparti est peut-être un peu court, mais je n'en fais pas encore
un grief. De toute façon, si d'aventure le rapport n'était pas
prêt, les commissaires pourront, quand même, demander un
prolongement de leur mandat. Il y a surtout cette soupape, qui est très
précieuse et que nous avions demandée afin d'être vraiment
associés à cette refonte de la carte électorale, c'est
qu'ils doivent produire un rapport qui, lui, est soumis aux
députés, lesquels auront l'occasion de se prononcer et de
redonner d'autres avis, enfin, de formuler à l'intention des
commissaires des recommandations aux fins de modifier leur point de vue. Cela
pourra se produire chaque fois que la commission puisque ce sera une
commission permanente aura à statuer sur la refonte de la carte
électorale.
Ainsi, en ce qui concerne la nomination des commissaires, leur nombre,
leur mandat, le délai qui leur est imparti, je ne crois pas qu'il y ait
là matière à dispute. Je reviens brièvement sur les
instructions qui sont données aux commissaires, particulièrement
en ce qui concerne le chiffre de 32,000, avec la variable de 25 p.c. J'en
causais avec des personnes qui sont étrangères à cette
Chambre et on me disait qu'on devrait imposer aux commissaires le mandat
suivant: soit de fixer de façon catégorique, à titre
d'essai, à 80 le nombre des circonscriptions et de distribuer les
électeurs à l'intérieur de ces 80 circonscriptions
électorales en vue d'en arriver à une proportionnalité,
à ce système de représentation proportionnelle que
connaissent bien mes collègues, le ministre de la Fonction publique et
le député de Terrebonne.
J'estime, pour ma part, qu'il serait imprudent de demander aux
commissaires de fixer arbitrairement à 80 le nombre des circonscriptions
en vue d'atteindre un objectif que l'on n'a pas eu encore le temps d'examiner.
Ce geste, à toutes fins utiles, nous mettrait déjà devant
la situation suivante que les électeurs seraient forcément
bousculés, promenés d'une frontière à l'autre, un
peu comme l'ont été certains peuples d'Europe centrale à
des périodes de l'histoire que je n'ai pas besoin de rappeler.
Donc, ce chiffre de 80, que l'on aurait peut-être l'intention de
suggérer aux commissaires, ne me parait pas devoir être retenu,
parce que ce serait faire litière des principes qui doivent inspirer les
commissaires et des critères dont j'ai longuement parlé et dont
tous les experts qui ont comparu devant nous nous ont parlé.
Il y a dans le projet de loi du premier ministre un aspect que
j'aimerais souligner. C'est que je m'interroge sur l'intention du gouvernement
en ce qui concerne la consultation avec la population. J'ai souvenir des
représentations et des suggestions qui ont été faites par
certains de nos collègues, demandant que la commission de
l'Assemblée nationale devienne itinérante afin de consulter la
population en vue de connaître ses réactions au sujet de ce
réaménagement qui fatalement bousculera, à un degré
plus ou moins grand, tous les citoyens qui en subiront les conséquences
ou qui bénéficieront de ses effets.
Lorsque cette proposition nous a été faite, nous avons
essayé de la juger à son mérite. Nous en avons pris bonne
note et il serait important que le gouvernement nous dise de quelle
façon il pourra mener une consultation auprès de la population
à partir du moment où les commissaires auront produit leur
rapport dans les délais prescrits. J'insiste là-dessus et c'est
après y avoir bien réfléchi. Une suggestion avait
été faite qui avait peut-être paru étonnante
à certains moments; cette suggestion qui nous avait été
faite m'est apparue valable à l'analyse et après discussion avec
beaucoup de gens de ma circonscription et des circonscriptions
environnantes.
A quel moment, toutefois, cette consultation doit-elle se situer? De
quelle façon doit-elle se faire? Je suis pour ma part d'avis que cette
consultation pourra se faire à partir du moment où les
commissaires auront déposé leur rapport. H appartiendra alors aux
députés, qui auront examiné le rapport, de se poser la
question suivante: Qu'est-ce que les gens de ma circonscription ou des
circonscriptions de la région dans laquelle se trouve la mienne en
pensent? De quelle façon réagissent-ils? De quelle façon
les recommandations de la commission répondent-elles aux habitudes
électorales des citoyens, à leurs exigences et à
l'organisation administrative du gouvernement? C'est-à-dire, est-ce
qu'il y a suffisamment de services administratifs gouvernementaux pour que, si
l'on acceptait les propositions des commissaires, les citoyens en retirent les
mêmes services?
C'est donc encore là un aspect du problème qu'il nous
faudra examiner et au sujet duquel nous interrogerons le premier ministre. M.
le Président, je m'excuse d'avoir parlé aussi longuement, ce
n'est pas mon habitude. D'ailleurs...
M. BIENVENUE: C'est très intéressant. M. BOURASSA: C'est
intéressant.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... je suis toujours réduit à
des limites de temps réglementaires, ce qui ne me donne pas
nécessairement le loisir d'élaborer. Mais je voudrais, avant de
terminer, rappeler d'abord que la refonte de la
carte électorale me parait à certains égards, et je
précise, nécessaire, mais peut-être
prématurée si on replace tout le problème dans l'optique
d'une refonte générale de notre système parlementaire et
de l'institution politique du Québec. J'aurais
préféré que tout le problème fût
examiné, que l'on procédât à la rédaction
d'une constitution québécoise avant que d'intégrer les
mécanismes qui exprimeront ensuite les prescriptions qui se trouveraient
dans le texte de cette constitution québécoise. C'est donc une
première observation.
Deuxièmement, je reprends ceci, savoir que le premier ministre,
en présentant son projet de loi, n'a pas tenu compte en tout point des
volontés exprimées par les députés à la
commission parlementaire, puisqu'il n'y a pas eu rapport de cette commission
parlementaire. Ainsi, cette commission n'ayant pas siégé à
nouveau, nous n'avons pas pu déterminer de façon précise
tous les critères qui devront servir ou qui auraient dû servir aux
commissaires dans leur travail.
C'est un aspect du problème que je souligne au premier ministre.
Je demande ensuite au premier ministre de réexaminer la question du
chiffre magique de 32,000, avec la variable, dans l'optique des critères
non pas seulement démographiques et géographiques, mais des
critères socio-économiques, socio-politiques, socio-culturels et
de cette réalité de la régionalisation. Je demande
également au premier ministre de se pencher sur cette
réalité que l'on ne peut écarter, soit l'existence de
milieux urbains ou de milieux ruraux, de milieux semi-urbains, semi-ruraux,
urbanisés, moins urbanisés, appelons cela comme on le voudra,
mais il y a quand même cette réalité.
Le premier ministre je n'ai pas besoin d'insister, c'est
d'ailleurs dans la loi mais c'est dit à titre exceptionnel et c'est cela
qui m'agace sait très bien qu'il faut tenir compte des
critères géographiques et démographiques; si l'on pense
aux comtés de Saguenay, de Duplessis, etc., il faut tenir compte des
critères géographiques et démographiques dans des
régions comme celles-là. Il dit: A titre exceptionnel... Non,
l'exception devrait être la règle générale et l'on
devrait tenir compte de tous les critères. Le premier ministre a-t-il
pensé et sera-t-il en mesure de nous dire exactement quels sont les
mécanismes de consultation avec la population qu'il devra prévoir
lorsque la commission nous aura présenté son rapport? Il est
important de consulter la population.
Le premier ministre a, à mon sens, posé un geste sage; il
a respecté, en tout point, sa promesse en ne rendant pas
exécutoires, comme certains l'avaient demandé et comme on l'a
écrit en certains milieux, les décisions de la commission. Je
crois que c'est un geste extrêmement sage qui montre, qui manifeste la
volonté du premier ministre d'associer, comme nous le souhaitons et
comme c'est notre droit de l'être, les parlementaires, les
législateurs à toute la réforme électorale et
particulièrement, dans le cas qui nous occupe, à la refonte de la
carte électorale. Je crois que le premier ministre a posé un
geste sage en agissant de cette façon.
Ainsi donc, dans son principe, nous allons donner notre agrément
à ce projet de loi. Nous nous réservons de faire d'autres
observations, mais ce sur quoi je veux insister et c'est ma
conclusion c'est qu'une réforme électorale, une refonte de
la carte électorale, les modifications ou le changement d'un mode de
scrutin doivent être pensés, non pas en fonction
d'idéologies, de théories abstraites, mais en fonction des
réalités. Les gens qui sont les mieux placés pour saisir
ces réalités, ce ne sont pas les experts, avec tout le respect
que j'ai pour eux. Nous avons besoin des experts, nous allons faire appel
à eux mais les gens qui sont les mieux placés sont les praticiens
de la politique, ceux qui la vivent quotidiennement et souvent douloureusement.
Seuls ces gens-là peuvent dire au premier ministre si le travail de la
commission, que nous allons créer par la loi 80, tient compte de tous
les facteurs que j'ai essayé d'analyser, certains ayant
été analysés un peu plus longuement, de tous ces facteurs
et de toutes ces réalités géographiques, politiques,
démographiques, socio-politiques, socio-économiques,
socio-culturels, régionaux, etc.
C'est seulement si les propositions qui nous seront faites par cette
commission répondent à ces besoins que nous pourrons dire que la
refonte de la carte électorale corrige les injustices, les
inégalités dont on a parlé et que personne ne conteste, et
que, d'autre part, elle permet aux citoyens de pouvoir jouir de tous les
services que le gouvernement met à leur disposition et auxquels ils ont
un droit strict. La refonte de la carte sera bonne, valable, si elle consacre
le principe de la démocratie et prenons le mot dans son sens le plus
fort et le plus noble. La refonte de la carte électorale ne sera valable
que si elle permet aux députés un exercice normal, si elle permet
aux députés de pratiquer normalement, de façon plus
aisée et surtout, plus humainement et plus efficacement, ce que Platon
appelait "l'Art royal de la Politique".
DES VOIX: Très bien!
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député de
Mégantic.
M. Bernard Dumont
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous le bill
80, intitulé Loi de la commission permanente de la réforme des
districts électoraux. Ce projet a pour but de former une commission
permanente de la réforme des districts électoraux.
M. le Président, j'avise immédiatement cette Chambre que
je n'ai pas l'intention de parler pendant deux heures, car si nous
voulons...
M. LOUBIER: Pas le droit...
M. DUMONT: ... instituer une commission, il est nécessaire de lui
laisser du travail. Il est nécessaire, pour le président et les
directeurs, de ne pas faire leur travail mais bien de leur donner quelques
réflexions que nous avons pu recueillir lors des quinze séances
qui se sont déroulées avec des experts qui nous ont fait leurs
recommandations.
Comme plusieurs d'entre les députés ici présents,
nous avons assisté à ces séances avec beaucoup
d'intérêt, car ces spécialistes qui se sont
succédé, entre autres MM. Jean-Charles Bonenfant, Vincent
Lemieux, Meynaud, professeur à l'université McGill et le
président des élections que nous verrons, comme le premier
ministre l'a dit, président de cette commission, sont tous des experts
qui nous ont donné de très bonnes informations.
A ces informations, il y avait aussi le désir du premier ministre
qui, le 19 janvier 1971, nous disait, à la page 2 de sa
déclaration: "En effet, il semble que ce soit le consensus de cette
commission de la réforme électorale, nous sommes d'accord pour
dire qu'une réforme en profondeur de notre système
électoral devra porter sur les questions suivantes: le mode de scrutin,
la carte électorale, la Loi électorale dans certains de ses
aspects, à savoir la liste permanente des électeurs, les
dépenses électorales et la question des sondages
préélectoraux."
Or, M. le Président, pour ce qui est de la réforme
électorale, les experts n'ont pas manqué... A la commission,
à plusieurs reprises, j'ai formulé, en tant que
représentant, une demande expresse afin qu'on ait des experts qui
viennent surtout discuter du mode de financement des partis politiques et
suggéré, pour les experts que nous aurons nommés par cette
commission, de bonnes idées qui permettraient dans le futur de bannir
à tout jamais les caisses électorales, responsables, la plupart
du temps, de permettre à des personnes d'être élues, sans
que, légalement, nous ayons le droit de dire qu'elles sont élues
légalement. Car si la caisse électorale place parfois des
députés élus, grâce à des montants d'argent
qui permettent, par la propagande qu'on en fait, de placer ces personnes que la
population ne désire pas, eh bien, il y a certainement, à ce
moment-là, une attitude à adopter qui est ce que nous avons
toujours réclamée, soit que le gouvernement prenne le financement
des partis politiques à sa charge ou que nous soyons élus par des
membres actifs, comme nous le faisons dans notre parti.
A la suite de ces longues études que nous avons eues au cours de
ces nombreuses séances et à la lumière de ce que chaque
expert nous a déclaré, il y a eu certaines déclarations
à l'effet qu'on ait à l'Assemblée nationale 120
députés dont 90 seraient élus au scrutin et 30 seraient
nommés par région. Cela permettrait à certains partis
politiques d'avoir des députés qui siégeraient à
l'Assemblée nationale même si, à la dernière
élection, ils n'ont pas été favorisés par le sort,
les électeurs ne voulant ou ne pouvant pas les remplacer par des
méthodes autres que celles qui ont été
utilisées.
Je dis tout de suite que cette façon de procéder
là-dessus, nous avons eu des déclarations de plusieurs experts
n'est pas acceptable. Les experts déclaraient toujours qu'il faut
que le député ait un bain de foule, au moins, tous les cinq ans,
un bain de peuple, comme on le disait, pour être capable de
connaître les problèmes et être aiguillonné par cette
population qui exige une amélioration constante des législateurs
afin qu'ils puissent bien servir les intérêts de la province de
Québec.
Tenant compte de la déclaration de ces experts, j'affirme
c'est notre point de vue après en avoir discuté avec les
membres de mon parti que nous devrions avoir en cette Assemblée
nationale environ 110 députés élus au scrutin que nous
connaissons à l'heure actuelle. Même s'il y a quelque temps
beaucoup de gens ont vanté la méthode qui existe en Allemagne, du
scrutin à deux tours, on a eu aussi un expert, le professeur Meynaud,
qui est venu nous dire que l'Allemagne devait, d'ici peu de temps, changer
cette méthode d'agir et qu'elle semblait plutôt regretter d'avoir
adopté ce système.
D'ailleurs, plusieurs experts nous ont avertis aussi d'être
très prudents dans toute réforme que nous aurions l'intention
d'apporter. Dans une province grande comme la nôtre avec si peu de
population, nous devons y aller prudemment, car il ne faudrait pas regretter
les gestes que nous aurions posés. A la suite d'une expérience
qui vient d'être vécue, le 29 avril dernier, et qui a permis
à deux autres partis d'être présents en cette Chambre, nous
nous rendons tous compte, et nous nous en sommes encore rendu compte ce soir,
que des réformes tant de l'Assemblée nationale que de la carte
électorale sont sans doute nécessaires, mais qu'il faut toujours
y aller avec prudence afin de ne pas faire comme un certain pays pour le
nommer, la France qui a été obligé de changer tant
de fois ses règlements.
D'ailleurs, cet expert que j'ai nommé tout à l'heure, le
professeur Meynaud, dans une étude très approfondie qu'il a faite
dans la revue Forces, nous démontrait hors de tout doute que, même
si nous avons des dossiers importants concernant les principaux modes de
scrutin ou de réforme électorale, il faut aussi analyser
l'expérience qui a existé dans d'autres pays. Le professeur
Meynaud, selon l'analyse qu'il a faite du scrutin et du comportement des
électeurs, annonçait que les nouveaux partis qui arrivaient
à cette Assemblée nationale y étaient pour bien longtemps
encore. Nous avons des racines profondes et nous sommes convaincus que le
peuple y a pensé sérieusement avant de nous
déléguer les pouvoirs que nous avons et cela pour les quatres
partis politiques.
Même une suggestion a été faite de voir s'il n'y
aurait pas possibilité d'imiter ce qui s'est
fait en Allemagne, par exemple là, ils ont vécu des
périodes plus difficiles ou en Hollande, entre autres, où
un gouvernement de coalition est formé régulièrement. Cela
nous permettrait d'établir à l'avance ce que comporterait ce
gouvernement de coalition.
On va tellement loin que le professeur nous disait qu'on a même
déterminé à l'avance, je citerai, à la page B-786
du rapport de la commission, sa déclaration textuelle: "Les Hollandais
ont l'habitude de ce gouvernement de coalition. C'est-à-dire
qu'après chaque élection on désigne ce qu'on appelle un
formateur. Le formateur est un homme qui va travailler pendant un mois ou deux
mois pour mettre sur pied une espèce de cahier dans lequel seront
prévues toutes les conditions de la coalition, y compris de savoir qui
on mettra à la place de M. Untel lorsqu'il prendra sa retraite, quels
programmes législatifs on fera. Et, une fois que le cahier a
été fait, les partis se réunissent, on choisit un premier
ministre, on applique le cahier et on ne le change plus jusqu'à la
prochaine élection."
Or, quand je regarde les représentants des quatre partis qui sont
ici et qui apportent un travail très sérieux à
l'Assemblée nationale nous espérons être
jugés comme tels je dis qu'il va falloir penser à cette
possibilité, ici, dans le Québec, afin d'éviter de sombrer
dans le désarroi politique.
Enfin, je crois que, lorsque les députés des partis de
l'Opposition, comme on nous appelle, ont des suggestions à faire, ils
devraient être écoutés puisque nous sommes parmi les
108 représentants comme n'importe quel autre membre du parti au
pouvoir et les districts électoraux devraient être au nombre de
110, comme je l'ai réclamé tout à l'heure. Nous pourrions,
à ce moment-là, même dans un gouvernement de coalition,
avoir de très bonnes informations.
J'invite tout le temps à la prudence car, si nous allions faire
une réforme en profondeur, soit en changeant la méthode
d'élection des députés ou en faisant disparaître
certains districts électoraux en milieu rural ou semi-rural pour faire
augmenter le nombre de ceux de certaines villes, je dis que nous ferions le
contraire de ce qui existe. Je dis que nous avons le droit de regarder un peu
ce qui se fait aux Nations Unies. Je pose la question, et les experts iront
sans doute regarder de ce côté-là: Est-ce qu'un pays est
représenté par la population qu'il a ou si ce n'est pas un pays,
un vote? Alors, comme je le disais tout à l'heure, la province de
Québec est très grande avec peu de population. Il y a, dans des
comtés, même si la population n'est pas très forte,
tellement de problèmes qu'un député ne suffit pas,
parfois, à faire tout le travail. C'est pourquoi, il n'y a pas si
longtemps, on a réclamé que des secrétaires de
comtés viennent collaborer. C'est une preuve évidente que le
travail qui existe dans les comtés ruraux ou semi-ruraux apporte des
problèmes d'administration très grave. Quand nous analysons une
réforme des districts électoraux, il faut de toute
évidence prendre en considération que, dans les milieux ruraux ou
semi-ruraux, il y a des problèmes que les gens n'ont pas en ville.
Enfin, quand nous constatons, quelqu'un l'a mentionné tout
à l'heure, que certains comtés ont 80,000 électeurs,
j'admets, moi aussi, qu'il faut, peut-être, diviser ces comtés,
mais peut-être immédiatement à côté. Dans mon
comté, j'ai 35,000 électeurs. Je connais un comté voisin
qui n'en a que 8,000. Peut-être que nous pourrions faire une division
à ce moment-là et cela permettrait à deux comtés de
pouvoir continuer à être représentés par deux
députés au lieu de faire disparaître un comté sous
prétexte qu'il n'a que 8,000 ou 10,000 électeurs qui se rendent
aux élections à tous les quatre ans.
M. le Président, si les experts envisagent ces
possibilités, nous verrons à ce moment-là le nombre de
comtés ruraux ou semi-ruraux demeurer le même, quitte à
ajouter quelques comtés additionnels, jusqu'à 110, là
où il y a une population un peu plus forte et où c'est
nécessaire. Encore là, c'est toujours la prudence qu'il est
nécessaire de mettre de l'avant. Je veux citer une autre
déclaration du professeur Meynaud; je pense que c'est en regard de ses
déclarations que nous devons regarder le danger qu'il y a à faire
disparaître certains comtés qui, depuis nombre d'années,
ont apporté tant de valeurs à nos villes, ont été
les bassins de pensées pour alimenter ces grands comtés
où, parfois, on ne devient que des numéros. Dans les milieux
ruraux ou semi-ruraux, nous nous identifions encore par nos noms. Dans les
grandes villes, les gens sont devenus des numéros.
C'est dans ce sens-là que le professeur Meynaud disait, comme on
peut le lire à la page B-790: "On peut peut-être commettre des
injustices en ne considérant pas qu'il y a peut-être des
possibilités de revaloriser tout cela. Je crois qu'il faut tenir compte
de toutes les richesses d'un pays et que nous sommes en train, à l'heure
actuelle, d'en saccager un certain nombre sur tous les plans, parce qu'en
définitive nous courons après l'évolution technique. Nous
n'avons jamais été capables de la maîtriser. Elle est en
train de nous dominer et de nous appauvrir, sans aucun doute".
Il faisait justement allusion au fait que parfois, en France comme
ailleurs, on a fait disparaître des comtés ruraux. On a
peut-être eu tendance, comme il le disait, à vouloir tout
centraliser dans les grandes villes. La France, aujourd'hui,
décentralise. L'expérience du passé doit nous servir.
L'historien, en même temps que le professeur, M. Meynaud, avec son
expérience de la vie, nous invite à réfléchir
sérieusement. Il est un de ceux qui m'ont fait sérieusement
réfléchir aux dangers qu'il y aurait d'aller trop rapide-
ment dans une réforme des districts électoraux qui,
surtout, ferait disparaître des régions qui apportent à ce
Parlement des idées qui lui permettent de continuer dans l'esprit de
créativité nécessaire pour la bonne administration d'une
province.
M. le Président, il y a déjà, dans les remarques
qui nous sont données, les noms qui nous sont avancés, des noms
qui, nous n'en doutons pas, sont des compétences mêmes. Nous
n'avons, par exemple, aucun doute, quant au nom du président qui a
été avancé, que c'est l'homme tout désigné,
ayant fait tant d'élections, pour apporter une note juste aux
recommandations qui seront faites et pour apporter justice à tous les
nôtres, car la province de Québec, il la connaît bien.
Je voudrais aussi, avant de terminer, apporter une précision sur
ce que le député de Chicoutimi a déclaré tout
à l'heure, savoir que l'Assemblée nationale a fait
disparaître l'article 80 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, au mois de décembre dernier. Je suis d'accord avec lui que
c'est l'Assemblée nationale qui l'a fait, mais ce que le
député de Chicoutimi a oublié de dire, c'est que ce sont
les membres du Ralliement créditiste qui l'ont rendu constitutionnel.
Sans l'appui de trois représentants, soit les députés de
Richmond, de Frontenac et moi-même, en tant que représentant du
comté de Mégantic, avec l'appui de nos collègues, la loi
n'aurait pas été constitutionnelle car il manquait des votes pour
la rendre constitutionnelle.
Nous n'avons pas eu peur de prendre notre responsabilité. Si,
aujourd'hui, nous pouvons discuter de la loi, de la possibilité de
former une commission pour que les districts électoraux soient
réformés, c'est parce que, quand vient le temps de prendre nos
responsabilités, nous, du Ralliement créditiste, n'avons pas peur
de le faire. Nous l'avons fait pour le bien de la population mais nous ne
l'avons pas fait dans le but de permettre de faire disparaître nos
comtés ruraux ou semi-ruraux.
M. le Président, je voudrais, en terminant, citer une
dernière déclaration du professeur Meynaud, qui disait: "Je crois
que la richesse ethno-culturelle est certainement un des grands actifs de
l'homme. On peut toujours essayer de reconstituer une usine, mais lorsqu'une
population, lorsqu'une langue, lorsque les coutumes disparaissent, c'est
terminé. On a fait le compte, en Europe, d'un certain nombre de langues
ou d'endroits qui étaient réellement des endroits magnifiques et
qui sont disparus. Par conséquent, c'est toute une littérature
qui n'est plus accessible. Il est toute une série de richesses qu'on a
sacrifiées dans le feu de l'industrialisation". C'est cela que la
centralisation donne. Quand on veut trop industrialiser, quand on veut trop
centraliser, quand on veut oublier certains comtés ruraux pour que cette
population émigre dans les villes, il y a danger d'une centralisation
trop vaste. De là naissent toutes sortes d'autres dangers qu'il faut
corriger.
D'ailleurs, il ajoutait: "Maintenant qu'on est industrialisé,
maintenant qu'on a gagné le pain, on voudrait revenir aux roses mais les
roses ne poussent plus". Notre professeur n'était pas seulement un
historien mais, en plus, un poète. Il disait: "C'est pour cela que tout
en étant très sensible aux arguments d'uniformisation
indispensable dans certains domaines, je pense qu'il faut garder certaines
valeurs".
Je dis que, si nous conservons nos comtés ruraux et semi-ruraux,
nous conserverons ces valeurs dont le professeur a fait allusion car, je le
répète, je le dis, quand on réussit dans nos milieux
à s'identifier par nos noms, quand on se reconnaît en se saluant
dans la rue, nous sommes aussi des individus qui par le fait même nous
penchons sur le problème de ces mêmes individus et nous devenons
de ce fait justement le type de sociétés qu'il faut à la
société québécoise pour continuer à
respecter l'ordre que nous lui commandons.
Il nous faut aussi conserver ces points, car de ce bill 50 que nous
étudions même à l'heure actuelle, nous verrons
peut-être demain des provinces entières créées dans
ces coins, nous aurons l'obligation de créer des districts
électoraux en ces endroits où la population aura besoin
d'être représentée. Et c'est alors qu'il nous faut inviter
les gens à la prudence.
Nous avons dernièrement accepté l'entente
fédérale-provinciale pour le parc Forillon. Si on faisait
disparaître un comté de cette région, ce serait
réellement regrettable car demain il faudrait peut-être
recréer à cause de la population qui sera peut-être aussi
dense qu'à Banff, à Jasper ou au lac Louise, ce comté,
parce que les touristes y viendront et que l'été nous aurons une
population tellement forte qu'il y faudra un député à part
entière. C'est pourquoi nous invitons à la prudence. Je suis
convaincu que cette commission, ayant déjà un président
compétent que nous connaissons et des membres qui seront en mesure
d'être choisis avec le consentement ou du moins la consultation de tous
les partis politiques de cette Assemblée nationale, parce qu'ils sont
véritablement compétents, nous consultera pour que nous ayons
notre mot à dire et que nous puissions avoir par la prudence une des
meilleures réformes, celle qui permettra aussi à nos fils d'avoir
encore leur liberté demain.
M. LE PRESIDENT (Picard): L'honorable député de
Bourget.
M. Camille Laurin
M. LAURIN: M. le Président, la nécessité d'une
réforme de la carte électorale saute aux yeux. Si nous regardons
en effet une carte des comtés de la province de Québec, nous
voyons que quelques-uns sont minuscules alors que d'autres mangent par leur
couleur une grande partie de la carte. Nous voyons également que
certains comtés comptent moins de 7,000 électeurs alors que
d'autres en comptent près de
75,000. Avec cette conséquence que certains
députés, ici en cette Chambre, représentent cinq, six ou
sept fois plus d'électeurs que celui qui représente la plus
petite circonscription actuelle du Québec.
Il est donc évident qu'il fallait faire quelque chose et il y a
longtemps que des voix parmi les plus autorisées se sont
élevées pour réclamer une refonte radicale de la carte
électorale. Par exemple, dès 1961, une commission gouvernementale
était saisie du problème, la commission Grenier, et en venait
à la conclusion non seulement que la carte devait être
fondamentalement révisée mais énonçait
également certains critères qui devaient présider au
travail des commissaires.
C'est à cette époque que l'on a mis de l'avant le
critère principal que l'on retrouve dans la loi actuelle,
c'est-à-dire une norme de [tant de milliers d'électeurs avec un
écart de 25 p.c. en deça ou au-delà de ce chiffre qui
était énoncé.
C'est en 1962, également, qu'on énonçait la
nécessité de la formation d'une commission indépendante,
c'est-à-dire formée de spécialistes choisis pour leur
spécialisation en ce domaine et qui s'étaient tenus loin de
l'arène politique. Ces deux principes depuis ce temps ont
été repris par un très grand nombre de
spécialistes.
Malheureusement, probablement à cause de ce changement dans les
moeurs qui est moins rapide que le changement dans les idées, il a fallu
plusieurs années avant que la nécessité de ce changement
soit preçue par une majorité de la population.
Déjà, à la suite de la défaite
libérale de 1966 et, bien antérieurement, lorsque le Parti
libéral était représenté par huit
députés en cette Chambre, alors qu'il avait plus de 40 p.c. des
voix, la nécessité s'était fait sentir de cette
révision, mais on dirait que l'exemple n'avait pas encore assez
porté. Il a fallu l'élection du 29 avril pour achever de
convaincre aussi bien la population que la majorité des
spécialistes en ce domaine.
Et, depuis le 29 avril, nous avons entendu une sorte de concert de
protestations contre la carte électorale que nous avons actuellement et
nous avons senti monter de tous les coins de l'opinion non seulement des
souhaits, mais une sorte d'ordre, d'injonction à l'endroit du
gouvernement pour qu'il réforme au plus tôt et en profondeur,
cette fois, d'une façon définitive, la carte électorale
qui avait donné lieu dans le passé à de telles
injustices.
Nous nous réjouissons donc, M. le Président, que le
gouvernement ait cédé à cette pression populaire.
Déjà, le premier ministre nous avait fait part de son intention,
le soir de son élection, le 29 avril. Pour ma part, j'ai accueilli avec
beaucoup de plaisir et de joie la promesse qu'il nous faisait, ce
soir-là, de modifier d'une façon fondamentale le régime
électoral, la loi électorale et surtout la carte
électorale.
Après plus de quatorze mois, le premier ministre donne enfin du
corps à sa promesse et l'actualise dans les faits. Je suis très
heureux de pouvoir lui accorder les félicitations, bien que tardives,
que ce geste appelle nécessairement. Nous sommes donc très
heureux, M. le Président, que cette commission de la réforme de
la carte électorale soit enfin créée. Nous sommes
très heureux également du critère principal qu'elle a
retenu. Il nous a semblé, en effet nous l'avons défendu
à plusieurs reprises, lors des séances de la commission
parlementaire, en invoquant l'appui des spécialistes en la
matière que le principal critère qui devait guider le
travail des commissaires était celui de l'égalité
mathématique de l'électeur devant son bulletin de vote, à
quelque endroit qu'il se trouve, à quelque comté qu'il
appartienne.
Cela nous apparaît, aujourd'hui comme hier, l'assise même
des institutions démocratiques. Nous voulons, en effet, M. le
Président, que le vote que le citoyen donne à chaque
élection, vote qui donne droit au choix des collèges
électoraux, reflète de la façon la plus exacte la
volonté populaire. De tous les critères que nous avons
étudiés en commission et qui ont été
étudiés par les spécialistes, aucun ne nous semble plus
décisif, aucun ne nous semble plus fondamental, aucun ne nous semble
plus fidèle à l'idéal démocratique que celui de ce
principe: un électeur, un vote.
Nous sommes donc, encore une fois, tout à fait d'accord avec le
gouvernement qu'il ait retenu ce principe et qu'il lui donne la place
principale dans la réforme qu'il nous soumet aujourd'hui. Nous savons
que ceci est la deuxième étape de la réforme. Nous avons
franchi la première, en décembre 1970, lorsque nous avons enfin
aboli cette antiquité, cet héritage séculaire des
comtés protégés.
Bien sûr, l'abolition des comtés protégés
permet maintenant que nous puissions aborder en toute liberté d'esprit,
sans aucune barrière préhistorique, le véritable travail
de la réforme électorale. En ce sens, nous sommes tout à
fait d'accord, comme je le disais tout à l'heure, avec une commission
permanente. Nous accueillons avec toute la faveur qui se doit ce principe de la
commission permanente. Le projet de loi nous dit qu'il y aura trois
commissaires. Nous ne connaissons pas encore ces commissaires qui seront
choisis, sauf le président des élections, ce qui va de soi
évidemment, mais nous aimerions suggérer au gouvernement qu'un de
ces trois commissaires soit un spécialiste des sciences humaines.
Les sciences humaines, M. le Président, constituent actuellement
un champ très vaste. Dans le champ des sciences humaines, par exemple,
nous retrouvons certaines disciplines, telles que la démographie, telles
que la géographie et particulièrement la géographie
humaine, telle que la sociologie.
Nous ne voudrions pas porter notre choix sur l'une ou l'autre de ces
disciplines, malgré que nous aurions peut-être une
préférence pour, en l'occurrence, la discipline qui s'appelle
la
démographie. Il nous semblerait, en effet, sinon essentiel du
moins très utile qu'un démographe participe, à titre de
commissaire, aux travaux de la commission puisque le principal critère
qui a été retenu est celui précisément du chiffre
de la population, de la densité de la population, de l'évolution
de la population aussi bien dans le sens progressif que régressif.
S'il y a un spécialiste en sciences humaines qui est
habilité, par sa formation, à étudier d'une façon
scientifique cette densité de la population, son évolution dans
un sens ou dans l'autre, c'est bien le démographe. Cependant, il faut
dire que le géographe, et particulièrement celui qui se
spécialise en géographie humaine, et aussi le sociologue sont,
par leur formation, amenés à se pencher également sur ces
problèmes. Nous croyons que, si le gouvernement ne pouvait pas retenir,
à titre de commissaire, les services d'un démographe, il serait
quand même utile, à défaut, de retenir les services de l'un
ou de l'autre de ces spécialistes en sciences humaines.
Encore une fois, je crois que cela aidera le président des
élections et l'autre commissaire qui sera choisi à se pencher
avec plus d'attention sur les divers critères qui ont été
proposés en commission, sur les constantes aussi bien
socio-économiques que socio-culturelles et socio-politiques ainsi que
sur les caractéristiques proprement démographiques d'une
population qui est en perpétuel devenir. Il me semble que ce serait
là donner une garantie additionnelle de sérieux au travail de la
commission. A part cette suggestion, nous aimerions cependant faire état
d'une certaine critique à l'endroit du projet de loi.
On voit, en effet dans ce projet, que l'on prévoit établir
le chiffre de 32,000 électeurs par collège électoral. Si
nous considérons que la population actuelle ou la population qui a
voté lors des dernières élections était d'à
peu près 3,200,000 électeurs, cela devrait nous donner, grosso
modo, même si l'on tient compte d'un écart de 25 p.c. en
deça ou en delà, cela devrait nous donner en moyenne un nombre de
110 députés. 110. députés, c'est deux
députés de plus que ce que nous avons déjà...
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, est-ce que le
député de Bourget me permettrait juste une correction?
M. LAURIN: Oui.
M. CLOUTIER (Montmagny): Là, il fait des calculs, et dans le
rapport du président des élections de 1970, il y a eu 3,478,000
électeurs d'inscrits, ce qui donne la moyenne, pour 108 comtés,
de 32,000. C'est là-dessus que l'on s'est basé pour mettre le
chiffre de 32,000.
M. LAURIN: D'accord, je remercie le député de Montmagny de
sa correction. Donc, cela nous donnerait, avec le chiffre qui a
été retenu, à peu près le nombre de
députés que nous possédons déjà. Ceci
m'apparaît un peu dangereux, M. le Président, surtout que ceci ne
m'apparaît pas cadrer avec une partie de la déclaration du premier
ministre lorsqu'il a présenté son projet de loi.
Si vous vous rappelez bien, lors de son discours de deuxième
lecture, le premier ministre nous a dit que les études sur le mode de
scrutin n'étaient pas terminées, qu'un consensus s'était
dégagé, lors des travaux de la commission parlementaire, sur le
maintien du système actuel, mais sur la nécessité d'y
ajouter un additif ou un correctif afin que le nombre de députés
et le mode de scrutin fassent droit, d'une façon plus fidèle,
à la volonté des électeurs. H me semble que, si l'on prend
au sérieux cette affirmation du premier ministre suivant laquelle les
études ne sont pas terminées, qu'il faut les continuer, si l'on
prend au sérieux la suggestion qu'a faite lui-même le premier
ministre de recommander à la commission de l'Assemblée nationale,
qui continuera ses travaux, la formation d'un groupe de travail qui devrait
continuer les études sur le mode de scrutin et faire ses recommandations
au gouvernement qui s'est dit disposé à les recevoir et à
modifier la carte électorale, le nombre des collèges
életoraux en fonction des conclusions de ce groupe de travail.
Il m'apparaît bien difficile de concevoir que l'on puisse, avec ce
chiffre de 108 députés que nous donne la division que nous venons
d'opérer, ajouter à ce nombre de députés, en vertu
des conclusions que pourrait nous apporter ce groupe de travail. Car, il faut
comprendre que ce dernier, s'il propose un correctif ou un additif, proposerait
nécessairement, en vertu de ce correctif ou de cet additif, un certain
nombre de députés que nous ne comptons pas actuellement et qui
seraient élus par la proportionnelle. Il faudrait donc ajouter ce nombre
de députés aux 108 que nous donnerait déjà la
méthode de calcul qui est entérinée par le présent
projet de loi.
Cela risquerait peut-être de nous donner un nombre de
députés de 120 ou de 130. On ne le sait pas encore.
Peut-être, étant donné la difficulté, non pas
insurmontable, bien sûr, mais quand même réelle qu'il y
aurait à augmenter, surtout d'une façon sensible, le nombre des
députés, il est possible, M. le Président, que la
méthode de calcul qui a été choisie laisse préjuger
qu'il sera très difficile de modifier par la suite la carte
électorale en fonction des conclusions à venir du groupe de
travail qui doit se pencher sur la question.
C'est un peu comme si le gouvernement, sans le vouloir, j'en suis
sûr, avait déjà choisi un certain mode de scrutin qui
serait le système actuel, sans changement, puisqu'il apparaîtrait
assez difficile de le modifier dans les circonstances. Ceci irait contre les
intentions qu'a exprimées lui-même le premier ministre, dans son
discours de deuxième lecture, quand il disait qu'il donnait la chance au
groupe de travail d'étudier et de déposer ses conclusions.
Je ne vois pas une antinomie logique entre ce que nous dit le projet de
loi et la déclaration d'intention du premier ministre, mais je vois une
antinomie pratique qui pourrait très bien s'inscrire dans les faits. Je
déplore donc cette apparence ou peut-être cette
réalité de contradiction entre la loi et le discours du parrain
de la loi, c'est-à-dire le premier ministre. Car, je crois que si l'on
garde les chiffres, la méthode de calcul que propose le projet de loi,
on peut en arriver à la possibilité d'une élimination d'un
changement de mode de scrutin.
J'espère que le député de Terrebonne ou le premier
ministre corrigera mes appréhensions dans son intervention ou apportera
des amendements qui permettront à cette appréhension de
disparaître d'une façon plus définitive et plus
complète. D'ailleurs, nous-mêmes, en comité plénier,
nous aurons l'occasion d'apporter un amendement qui ne change rien au principe
de la loi mais qui serait destiné précisément à
laisser ouverte une porte qui rendrait possible cet additif ou ce correctif,
qui rendrait notre carte électorale plus juste dans l'avenir qu'elle ne
se trouve avec le projet actuel.
Il y a peut-être une autre critique que nous ferions, qui est
reliée à la précédente, en ce sens que, elle aussi,
si on en tenait compte, pourrait contribuer à maintenir ouverte la porte
à une réforme additionnelle. C'est celle qui porte sur le
critère qui a été choisi. On a voulu baser le nombre des
députés sur le nombre des électeurs. On a choisi le
chiffre de 32,000, qui, comme le disait le député de Montmagny,
correspond à peu près au nombre de députés actuels.
Il nous semble qu'il serait peut-être plus juste de prendre, comme
critère de base, le nombre réel des habitants,
c'est-à-dire le chiffre de la population tel qu'il nous est fourni par
les divers recensements qui s'effectuent...
M. CHARRON: C'est d'ailleurs le président qui l'avait
suggéré.
M. LAURIN: ... dans cette province et dans ce pays.
D'ailleurs, je me rappelle, M. le Président, que c'est
vous-même qui nous avez dit, lors des travaux de la commission de
l'Assemblée nationale, dans une intervention brillante et bien
documentée...
M. CHARRON: C'est ça.
M. LAURIN: ...qu'il était possible...
M. CHARRON: Vous voyez, on vous rend hommage.
M. LAURIN: ...d'avoir dès septembre ou dès octobre les
chiffres préliminaires du recensement fédéral, et que la
commission permanente pourrait parfaitement les utiliser dans ses calculs
d'établissement des circonscriptions électorales.
Il nous semble que cela serait plus juste car on sait que le nombre
d'électeurs constitue une donnée quand même, une
donnée à un deuxième degré, une donnée
démographique à un deuxième degré, alors que le
chiffre actuel de la population constitue véritablement la donnée
de base.
Il y a aussi un autre argument. Si nous gardions simplement le chiffre
de 32,000 électeurs, qu'est-ce qui pourrait arriver? A la prochaine
consultation électorale en 1974, il est bien possible qu'avec
l'augmentation de la population, si on faisait la division que faisait tout
à l'heure le député de Montmagny, on arriverait à
un chiffre moyen de la population par comté de 36,000 ou de 37,000. Et
à ce moment-là, étant donné que le critère
de 32,000 est déjà écrit dans la loi, il faudra augmenter
le nombre des députés, forcément. Si l'on garde ce chiffre
de 32,000, même avec l'écart dont je parlais tout à
l'heure, dans trois ans, dans quatre ans et encore plus dans dix ans, il faudra
augmenter d'une façon régulière le nombre des
députés, alors qu'il nous paraît beaucoup plus important de
prendre comme critère, une norme, c'est-à-dire une proportion qui
resterait toujours la même et qui nous permettrait de fixer à
l'avance ou du moins pour une période assez longue le nombre de
députés qu'il convient d'avoir à la Législature du
Québec.
Si, par exemple, nous fixions, nous établissions ce nombre
à 110 ou à 120, alors il serait très facile de prendre la
population telle qu'elle augmente au fil des années et de diviser le
chiffre total de cette population par le nombre des comtés que nous
entendons garder dans le Québec, que ce soit 110, que ce soit 120, un
chiffre sur lequel toute la Législature pourrait se mettre d'accord, et
ensuite diviser le chiffre total de la population par ce nombre de
comtés pour découvrir le nombre d'habitants par comté qui
constituerait la variable.
En somme, c'est une autre méthode de calcul que nous proposons et
nous aimerions beaucoup que le député de Terrebonne ou que le
député de Mercier discutent cette proposition que nous faisons,
pensant, en tout cas à première vue, qu'ils y verraient
peut-être plus de mérite et sûrement moins
d'inconvénients que la méthode qu'ils nous proposent.
De toute façon, nous laissons ces considérations à
leur réflexion et nous espérons qu'il sera possible d'en arriver
à un critère qui nous permettra de garder le nombre de
députés que l'Assemblée nationale établirait, et
que la variable serait précisément le nombre d'électeurs
et non plus le nombre de comtés tel que cela se présente dans
l'actuel projet de loi.
C'est à peu près une façon de relier les deux
critiques que nous faisons et qui pourraient se transformer en deux
suggestions, ce serait peut-être, à l'aide de cette nouvelle
méthode de calcul, de préparer plus d'un modèle de carte
électorale, ce qui permettrait ensuite aux
membres de la commission de l'Assemblée nationale de discuter sur
deux projets au lieu d'un puisque la commission parlementaire n'est pas
liée par le travail de la commission indépendante, que ce travail
pourrait être scruté par les membres de l'Assemblée
nationale et même par des spécialistes que nous pourrons inviter
à la barre de la commission.
Il semble qu'en adoptant ces suggestions, nous nous fermerions moins de
portes et qu'il serait possible de procéder à ce travail avec
plus de souplesse, ce qui nous donnerait peut-être une carte
électorale meilleure que celle que nous possédons actuellement et
en même temps laisserait la porte ouverte à la réforme d'un
mode de scrutin que nous continuerons d'examiner. En laissant des portes
ouvertes, en prenant des méthodes de calcul qui restent flexibles, on
garde les yeux ouverts sur l'avenir dans un esprit de réformisme qui, je
le sais, caractérise aussi bien le premier ministre que le
député de Terrebonne.
Nous en avons eu plusieurs preuves lors des séances de la
commission.
Maintenant, nous nous rendons bien compte que ces deux premiers pas ne
constituent que l'amorce d'une réforme que nous avons appelée,
tout à l'heure, radicale et fondamentale et qui devra se poursuivre.
D'ailleurs, le premier ministre nous en a donné lui-même
l'assurance dans son discours de deuxième lecture, lorsqu'il a dit que
la commission de l'Assemblée nationale continuerait ses travaux et
qu'elle serait appelée à étudier, successivement, la
réforme de la Loi électorale, comprenant, par exemple, l'examen
de problèmes tels que celui d'une liste permanente; la réforme
des modes d'enumeration et de révision et la réforme des articles
qui régissent les dépenses électorales. Le premier
ministre nous a dit que nous pourrions continuer à étudier le
grave problème des contestations d'élections, ainsi que le
problème épineux des sondages électoraux. Nous
félicitons le premier ministre d'avoir maintenu ouverte la voie que nous
avions déjà commencé à parcourir dans cette
direction. Nous apporterons aux travaux de cette commission comme chacun le
sait, toute la collaboration nécessaire. Nous l'avons déjà
démontré, d'ailleurs, depuis les débuts de cette
commission.
Il est, cependant, un aspect que le premier ministre a oublié
dans son intervention de deuxième lecture. J'espère que c'est
simplement un oubli, que ce n'était pas un rejet. Mais nous avions
toujours estimé nous l'avons dit dès les débuts des
travaux de la commission parlementaire que, pour être
complète, la réforme des institutions électorales devait
comporter une étude du financement des partis politiques. D'ailleurs, un
des projets de loi présentés par l'ancien chef du gouvernement
prévoyait une méthode de financement des partis politiques. Ce
projet de loi est mort de sa belle mort, pour les raisons que l'on sait. Mais,
il nous semble avoir entendu, dans la déclaration liminaire du premier
ministre, au mois d'octobre, à la commission de l'Assemblée
nationale chargée de l'étude de la réforme
électorale, que la commission devrait également étudier ce
problème du financement des partis politiques. Je voulais simplement
profiter de cette intervention en deuxième lecture pour rappeler cet
aspect de la déclaration du premier ministre et l'inciter, lui ainsi que
ses collègues, à mettre ce problème à l'ordre du
jour de la commission.
Donc, pour résumer notre intervention ceci montrera que,
lorsque nous sommes en faveur d'un projet de loi, nous savons être brefs
nous sommes en faveur du principe du projet de loi et nous
espérons qu'il sera adopté avec toute la
célérité qui se doit.
M. LE PRESIDENT (Picard): L'honorable député de
Montcalm.
M. Marcel Masse
M. MASSE (Montcalm): M. le Président, afin
d'accélérer le rythme des débats en cette Chambre et avec
le consentement des membres de cette Assemblée, qu'il me soit permis de
déposer comme étant lu le texte de mon intervention en assurant
les députés qu'il n'y a rien d'antiparlementaire dans ces
notes.
Monsieur le président,
La notion de démocratie sur laquelle est fondée
l'organisation politique de notre société est issue de
l'idée d'une participation active et continue de tous les citoyens aux
décisions du gouvernement. Ce système de démocratie
directe, tel que le connaissaient les cités antiques, a
évolué à travers les temps pour faire place à une
conception plus complexe et plus étendue des principes qui fondent
l'exercice du pouvoir par le peuple: Le régime démocratique est
devenu synonyme à l'heure actuelle, dans le monde occidental, de
l'existence de libertés publiques fondamentales et de
l'égalité de tous devant la loi.
Mais c'est avant tout la tenue régulière
d'élections libres qui constituent le fondement et la garantie d'une vie
démocratique active et authentique. Aussi, convient-il de faire preuve
d'une vigilance toute particulière à l'égard de
l'aménagement et du fonctionnement des mécanismes
électoraux qui assurent à l'ensemble des citoyens la
possibilité de choisir les représentants qui exercent le pouvoir
en leur nom.
Référer à la version PDF page 3715
Que modifier dans la loi électorale du Québec?
L'exposé des modifications structurelles profondes qu'a subies la
société québécoise démontre que la loi
électorale actuelle ne correspond plus aux conditions socio-politiques
du Québec de 1970 et qu'il est urgent d'effectuer les réformes
nécessaires en vue d'instaurer un système qui satisfait aux
conditions de base d'un régime vraiment démocratique.
Les secteurs à réviser sont : a) la carte
électorale; b) le mode de scrutin; c) le financement des partis
politiques; d) d'autres aspects spécifiques de la loi
électorale.
Le problème étant défini, les divers points
à traiter sont si intimement reliés qu'il n'est pas possible de
modifier l'un d'eux sans engendrer, par le fait même, des
répercussions sur les autres aspects. La définition de l'approche
à prendre constitue donc une étape capitale dans l'analyse et la
solution de ce difficile problème.
Comment modifier la loi électorale du Québec?
Trois éléments fondamentaux doivent être
définis avant de commencer la recherche des modifications à
apporter à la loi électorale: a) la variable qu'il faut
optimiser; b)les contraintes dont il faut tenir compte; c) les interactions
entre les paramètres et les effets en chaîne de façon
à définir l'ordre dans lequel on aborde les questions.
Quelle est la variable à optimiser?
La démocratie implique que chaque individu soit égal
devant la loi. Il y a donc lieu de veiller à ce que la carte
électorale et le mode de scrutin permettent l'expression de la
volonté politique de tous les citoyens responsables et que les
résultats des élections soient le reflet aussi fidèle que
possible de ce choix exprimé par la population.
Sauf contraintes justifiables, le principe "Un citoyen, une voix"
devrait être respecté à l'échelle de tout le
territoire national. En second lieu, il faut veiller à ce que le
parlement élu soit, le plus possible, le reflet fidèle des choix
et aspirations des citoyens, autrement dit, la répartition des
députés à l'Assemblée Nationale doit se rapprocher
du pourcentage du vote accordé à chacun des partis reconnus.
On optimise donc des techniques de sorte qu'elles permettent un
fonctionnement efficace de la démocratie.
Quelles sont les hypothèses de base de l'étude?
Parmi les hypothèses posées au départ, certaines
ont trait à des principes fondamentaux ou options socio-politiques qui
définissent le cadre philosophique à l'intérieur duquel on
évolue, d'autres concernent les modalités d'application de ces
principes.
Hypothèses socio-politiques : Le Québec veut vivre
en régime démocratique, mais le respect de ce principe ne doit,
en aucun cas, conduire à une paralysie de l'action gouvernementale. A
cet effet, le système à mettre en place devrait, tout en
respectant la condition formulée précédemment, favoriser
l'élection de gouvernements majoritaires, pourvus d'une opposition
forte, représentative et de qualité. Il faut se rappeler que
c'est une opposition dynamique qui stimule le mieux l'équipe au pouvoir.
Quant aux gouvernements minoritaires, ils n'ont pas, pour leur part, la force
nécessaire pour assurer le leadership qu'une collectivité attend
de ses élus. Dans un même esprit démocratique, la
réforme à apporter doit rendre impossible l'installation
permanente d'un parti au pouvoir, par un découpage des comtés,
favorisant l'une des formations politiques.
Référer à la version PDF page 3717
Divers autres systèmes peuvent être envisagés:
vote majoritaire à deux tours; vote alternatif ou
préférentiel (utilisé autrefois au Canada); la
représentation proportionnelle: intégrale;
approchée: attribution des sièges au plus fort reste;
attribution des sièges restants à la plus forte moyenne;
quotient rectifié; les systèmes mixtes:
à dominante majoritaire; à dominante proportionnelle.
Ces divers types de scrutin sont bien définis et ont fait l'objet
de nombreuses études (1), de sorte qu'on se bornera ici à passer
en revue les principaux avantages et inconvénients de chaque
approche.
Le vote majoritaire
Le principal avantage de ce mode de scrutin est sa simplicité, du
moins dans sa formule de base. De plus, en raison des divisions
géographiques du territoire que ce système requiert, et pourvu
qu'elles soient suffisamment nombreuses, il y a des liens assez étroits
entre les électeurs et leur député.
Les inconvénients paraissent cependant supérieurs aux
avantages: les dispersions entre pourcentage de vote et représentation
à l'Assemblée sont assez fortes. Ainsi ce mode de scrutin
donne-t-il lieu à des injustices plus ou moins importantes.
Le système majoritaire à deux tours qui corrige
très peu les injustices inhérentes au premier tour et qui,
quelquefois, peut les accentuer (phénomène identique à
celui des élections partielles), est en plus la source de marchandages
et tractations entre partis qui ne se font pas toujours pour le plus grand bien
des électeurs.
La représentation proportionnelle
Ce mode de scrutin a pour principal avantage l'équité de
la représentation, de sorte que l'Assemblée est un reflet
fidèle de la population dont tous les secteurs ont ainsi la
possibilité de se faire entendre démocratiquement. Les
représentants étant élus sur une base géographique
plus vaste que le comté (la région), le choix des
électeurs porte plus sur des idées que sur des hommes comme c'est
le cas dans le scrutin majoritaire.
Cette dimension des circonscriptions électorales rend les
irrégularités plus difficiles. Les marchandages entre partis qui
prévalaient dans les scrutins majoritaires à deux tours sont
évités tout en préservant, et même en
améliorant, le principe de l'équilibre entre les votes et les
députés élus.
Les inconvénients de cette formule sont cependant réels,
car si elle permet à chacun de s'exprimer et d'être
représenté, elle entrafne la multiplicité des partis et
des candidats indépendants. Ce mode de scrutin favorise la fragmentation
de l'opinion publique de sorte que la division des sièges entre de
multiples partis rend difficile la constitution de gouvernements majoritaires.
Seules des directions pluralitaires soumises à une opposition
fragmentée, mais forte si elle s'unit ont des chances
d'émerger.
Les risques du système sont importants. Si un parti tente de
former un gouvernement minoritaire, il risque d'être constamment soumis
au veto de l'opposition; si au contraire, une coalition gouvernementale se
forme entre plusieurs partis, ceux-ci doivent en général accepter
de modifier leurs programmes de manière à ce qu'ils soient
acceptables pour toutes les parties concernées. Dans les deux cas, il
est difficile de prendre et de faire accepter par le pouvoir législatif
des grandes décisions engageant l'avenir de l'Etat. H est
particulièrement malaisé d'effectuer une planification
économique à moyen terme, car celle-ci implique souvent des
prises de position fondamentales quant aux objectifs économiques et
sociaux du gouvernement.
(1) "les systèmes électoraux", J.M. Cotteret C. Emeri,
P.U.F., Paris, 1970, pp. 45-82.
Notons, enfin, que les tractations entre électeurs et candidats,
qui peuvent exister dans le cas d'un scrutin majoritaire, risquent d'être
reportées à l'intérieur du parti. L'établissement
de la liste des candidats officiels fera souvent l'objet de pressions et
tiraillements internes basés trop souvent sur l'ancienneté,
l'obéissance passive aux directives du parti, le dévouement aux
doctrines et activités partisanes, bien plus que sur la
compétence, la largeur de vue et le sens civique des
candidats-députés.
Les systèmes électoraux mixtes
L'émergence des systèmes mixtes vise à palier les
inconvénients de chacun des modes homogènes de scrutin en
procédant à une combinaison de deux formules qui compense leurs
désavantages respectifs pour faire ressortir les avantages.
Choix du système le mieux adapté aux conditions du
Québec
La recherche débouche rapidement sur un système mixte,
puisqu'on a déjà constaté que les inconvénients
inhérents au système majoritaire ou proportionnel utilisé
isolément sont nettement supérieurs aux avantages qu'ils peuvent
offrir. Les formules de systèmes mixtes sont cependant nombreuses,
puisqu'on peut faire varier le nombre absolu de députés dans
chaque mode, la proportion de l'Assemblée élue au majoritaire, le
nombre de députés élus par circonscription, le jeu de
compensation entre les votes obtenus et chaque mode de scrutin, etc.. Chacun
des arrangements aura des impacts différents sur les variables à
optimiser.
Le système en vigueur dans la République
Fédérale Allemande (1) est une bonne illustration de ce type de
scrutin mixte. En prenant ce système comme base de
référence, nous y apporterons divers aménagements.
Rappelons que dans ce système, la moitié (248) des
députés au Bundestag sont élus à la majorité
simple dans des circonscriptions (système actuel au Québec)
tandis que l'autre moitié (248) est élue dans chaque "Land"
(province) d'après une liste et en proportion du vote obtenu par chaque
parti. L'électeur, sur un premier bulletin, choisit son candidat
préféré puis, sur un deuxième, vote en faveur du
parti de son choix.
Les sièges sont attribués de telle façon que chaque
parti dispose, sièges de circonscription et sièges de "Land"
étant additionnés, du nombre de députés qui lui
reviendrait d'après une répartition proportionnelle des votes des
"Land" au deuxième vote.
Ainsi, si le nombre de sièges obtenus par les
députés d'un parti élus au scrutin majoritaire est
égal au nombre de sièges total auquel il a droit en fonction des
résultats du deuxième vote, rien n'est changé. Si les
députés élus au vote majoritaire sont moins nombreux que
la proportion du second vote (vote de parti) le permet, des
députés sont choisis sur la liste du parti jusqu'à
concurrence d'une représentation proportionnelle au vote populaire.
Si, par contre, un parti remporte, grâce au vote majoritaire dans
les circonscriptions, un nombre de sièges supérieur à
celui auquel il aurait droit en vertu de la représentation
proportionnelle, il conserve ses élus, quitte à ce que le nombre
total des sièges au "Bundestag" soit augmenté d'autant.
Pour éviter la proléfération des petits partis,
seules les formations politiques ayant obtenu au moins 5 p.c. du vote
proportionnel et qui ont remporté au moins un siège au scrutin
majoritaire ont droit au recours à la liste.
La liste des candidats est définie en fonction des
résultats d'élections primaires semblables à celles qui
existent aux Etats-Unis et ce, afin que l'ordre des candidats soit
préparé démocratiquement et ne soit pas laissé au
bon vouloir des partis.
(7) Lois de juin 1949 et de juillet 1953
Les avantages du système sont les suivants:
l'intégration des deux systèmes permet de conserver les
principaux avantages de chacun d'eux tout en éliminant certains de leurs
inconvénients; l'électeur n'a plus à
préférer "l'homme au "parti" ou le "parti" à "l'homme"
puisqu'il lui est permis d'effectuer deux choix indépendants;
l'élection de députés sur base régionale permet de
donner une signification et une application efficace de l'esprit
régional; l'établissement d'une liste de candidats
régionaux (dont les premiers sont presque certains d'être
élus) permet au parti d'avoir recours à des hommes de valeur qui,
en raison de leur caractère, ne sont pas enclins à faire des
campagnes électorales locales où les idées fondamentales
sont souvent négligées au profit de problèmes locaux.
Cependant, les désavantages du système sont les suivants:
le système n'est pas propice à l'élection de partis
ayant la majorité absolue surtout lorsque plus de deux partis sont en
lice. Le pays doit donc être dirigé par des coalitions
gouvernementales ou par un gouvernement minoritaire. les calculs
à effectuer pour établir les résultats finals des
élections sont longs et, dans l'esprit de certains électeurs, ces
délais peuvent être assimilés à des "tractations" ou
leur faire perdre de l'intérêt au processus électoral.
Le système recommandé pour le Québec
Tenant compte de ces aspects positifs et négatifs, il y a lieu de
proposer d'éventuels amendements au système de manière
à l'adapter au mieux aux exigences du Québec.
Dans les conditions socio-économiques actuelles, le premier
inconvénient (difficulté de dégager une majorité
absolue) ne nous paraît pas admissible au Québec. Il nous semble
évident que si le gouvernement en place se doit d'agir en tenant compte
des avis de l'opposition, il ne doit pas pour autant être à sa
merci. Le mode de scrutin à instaurer doit donc favoriser la
constitution de gouvernements majoritaires. Le système proposé
devrait aboutir à une probabilité acceptable qu'un parti soit
porté au pouvoir lorsque l'électorat en a clairement
manifesté la volonté tout en permettant l'élection d'une
opposition suffisamment nombreuse.
Dans un pays où plusieurs partis briguent les suffrages et
où les écarts entre le nombre d'électeurs des
différentes circonscriptions électorales sont réduits au
minimum, il paraît très peu probable qu'une formation politique
puisse obtenir plus de 50 p.c. des votes exprimés. Le scrutin
proportionnel est défavorable à l'élection d'un parti
ayant la majorité absolue des sièges.
Le système mixte allemand ne paraît pas plus satisfaisant
de ce point de vue. Nous avons vu en effet précédemment que la
méthode de compensation qu'il utilise conduit à rétablir
un rapport proportionnel entre le nombre de sièges obtenus au scrutin
majoritaire (dans les circonscriptions) et le nombre de voix recueillies par
chaque parti dans l'ensemble du territoire, (à l'exception des cas
où un parti remporte par le vote majoritaire, un nombre de sièges
supérieur à ce qui lui est adjugé en vertu de la
représentation proportionnelle: dans ce cas la péréquation
ne s'applique pas).
D faudrait donc que contrairement au système allemand, le
système mixte québécois n'adopte pas le principe de
compensation.
Une partie des députés serait élue au scrutin
majoritaire et une autre partie au scrutin proportionnel. Les deux phases (qui
peuvent matériellement avoir lieu en une seule opération)
seraient tout à fait indépendantes. L'adoption d'un tel
système permettrait de dégager plus facilement une
majorité absolue.
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Référer à la version PDF page 3722
Référer à la version PDF page 3723
Les deux cas de figure étudiés ici sont : 1 ) une
répartition égale entre les sièges (50 p.c. au majoritaire
- 50 p.c. au proportionnel); 2) Une répartition 2/3 - 1/3 entre le
majoritaire et le proportionnel.
La possibilité d'avoir une majorité absolue apparaît
lorsque le pourcentage des voix du premier parti est supérieur ou
égal à 40 p.c. et l'écart avec le second parti au moins
égal à 5 p.c.
Cependant, la possibilité de dégager une majorité
absolue est plus forte dans le cas où la répartition est 2/3
-1/3. Compte tenu des hypothèses que nous avons fait pour étendre
la loi des cubes au système quadripartite, il apparaît
préférable de prendre la plus grande marge de
sécurité possible.
Nous retiendrons donc le système 2/3 -1/3. Cette proportion nous
paraît en outre préférable à une répartition
de 50/50 qui entraînerait soit un doublement du nombre des
députés vu l'état actuel de la carte électorale,
soit un doublement de la superficie des comtés si le nombre des
députés restait constant. Il semble donc que la bonne mesure soit
à trouver entre ces deux extrêmes ce que permet la
répartition 2/3 -1/3.
Le principe du système de scrutin mixte sans compensation
étant posé, il s'ensuit que l'électeur disposera de deux
bulletins de vote. Le premier sur lequel figureront les noms des candidats se
présentant dans la circonscription et qui seront élus suivant le
type du vote majoritaire. Sur un second bulletin figureront uniquement les noms
des partis qui ont déposé une liste de candidats.
L'électeur vote pour un homme sur le premier bulletin et pour un
parti sur le second bulletin. Il aura eu connaissance des noms des candidats
choisis par chaque parti par la publicité que ceux-ci auront faite
durant la campagne. Les listes pourraient d'ailleurs être
affichées dans les bureaux de scrutin afin que tous les électeurs
soient bien informés.
Avant d'étudier l'affectation géographique des
députés élus du scrutin proportionnel, il faudrait
expliquer brièvement la méthode du choix de ces candidats et du
rang auquel ils figureront dans la liste de leur parti respectif. Le
système des primaires (candidature à la candidature) est le plus
démocratique en théorie mais il présente plusieurs
inconvénients, tels le coût, les longs délais et
l'impression donnée aux citoyens d'être toujours en campagne
politique. La méthode des primaires est de plus impossible à
appliquer dans le régime actuel où le premier ministre peut
déclencher des élections à n'importe quel moment.
Nous favorisons plutôt le système de grandes conventions
à l'intérieur de chaque parti où les candidats seraient
choisis démocratiquement au cours d'assemblées
régionales.
En cas de décès d'un député de
circonscription, son remplaçant sera élu lors d'élections
partielles comme cela s'effectue actuellement. Le remplaçant d'un
député élu au vote proportionnel sera le candidat qui
figurait à la suite de l'élu sur la liste déposée
par le parti du décédé (ou du démissionnaire) lors
de la dernière élection générale. Affectation
géographique des députés élus au scrutin
proportionnel
Après avoir établi qu'un mode de scrutin mixte dans lequel
2/3 des députés sont élus au vote majoritaire et 1/3 au
scrutin proportionnel, constitue la formule qui satisfait le mieux aux
exigences posées comme contraintes, il reste à déterminer
l'affectation géographique des députés élus au
scrutin proportionnel.
Plusieurs formules peuvent être envisagées dont les deux
extrêmes sont les suivants: Chaque parti dépose une liste globale
comptant autant de candidats qu'il y a de postes disponibles au proportionnel
dans l'ensemble du Québec. Lorsque les résultats du scrutin sont
connus, chaque parti obtient un nombre de députés proportionnel
au pourcentage du vote qu'il a reçu de l'ensemble des électeurs.
Les députés élus sont nécessairement choisis dans
l'ordre dans lequel ils figuraient sur la liste déposée par le
parti avant les élections. L'autre possibilité est le
dépôt de listes régionales sur lesquelles le choix
s'effectue en fonction des résultats du vote partisan dans la
région.
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Référer à la version PDF page 3726
Référer à la version PDF page 3727
Référer à la version PDF page 3728
Afin de mettre l'accent sur les priorités régionales sans
toutefois compromettre le bénéfice du scrutin proportionnel, une
répartition proportionnelle pondérée du type de celle que
nous avons calculée nous semble préférable à une
répartition proportionnelle pure.
Modalités d'application:
Chaque parti ayant présenté des candidats pour fin de
scrutin majoritaire dans au moins 20 p.c. des circonscriptions du Québec
peut déposer des listes régionales comprenant autant de noms que
de sièges "proportionnels" disponibles. Les candidats qui se
présentent au scrutin majoritaire dans les circonscriptions ne peuvent
pas toutefois être inscrits sur ces listes. Pour faire élire un
député au vote proportionnel dans la province, un parti doit
avoir soit: a) déjà un député élu dans une
circonscription et obtenir plus de 2 p.c. des votes valides au scrutin
proportionnel et ce pour l'ensemble du Québec, soit b)obtenir plus de 4
p.c. des votes valides au scrutin proportionnel et ce pour l'ensemble du
Québec.
Si un parti ne remplit pas l'une de ces deux conditions, il n'a droit
à aucun député "proportionnel". (N.B. Il est
évident que la région Côte Nord pose un problème
particulier, mais ne fausse pas les règles d'ensemble). LE NOMBRE DE
DEPUTES
Dans tout le débat relatif à la révision de la loi
électorale, peu d'attention a été apportée
jusqu'ici au nombre souhaitable de députés. Cependant pour
réaliser l'objectif de fonctionnement de la démocratie, cet
élément doit aussi être optimisé. Il ne peut
l'être qu'en procédant à une analyse poussée de la
fonction de député et, sur la base de cette étude,
à déterminer d'une part le nombre minimum de circonscriptions
électorales et ensuite le nombre minimum de députés. Ces
deux nombres ne sont pas nécessairement égaux car l'un est
déterminé par les relations du député avec ses
électeurs et l'autre par la participation du représentant du
peuple aux travaux de l'Assemblée Nationale. Puisque nous avons
proposé qu'un tiers des députés soient élus sans
attache directe à un comté, il n'y a pas d'inconvénient
pratique à une telle inégalité entre le nombre de
circonscriptions et le nombre de députés. La fonction de
député
Un système parlementaire moderne accorde normalement trois
fonctions principales au député: a) fonction législative;
b) fonction de contrôle de l'action de Gouvernement et, en particulier,
la ratification du budget; c) fonction de représentation d'une
collectivité - de ses électeurs - d'un groupe géographique
ou d'une entité sociologique - de son parti.
En milieu rural, où l'action de l'Etat est plus globale et par
conséquent, mieux ressentie par les citoyens qu'en milieu urbain, le
député se voit imposer un rôle particulier: il est
constamment appelé à servir de lien entre ses électeurs et
l'administration gouvernementale.
Voyons successivement les activités inhérentes et chacune
de ces fonctions. Fonction législative
Le fonctionnement de la démocratie par voie indirecte exige
l'élection de représentants du peuple qui, à sa place,
légifèrent et contrôlent les actions du gouvernement. La
fonction législative qui est fondamentale et constitue
théoriquement la justification et l'activité principale des
députés est, au Québec comme ailleurs, sans cesse
diminuée par une concentration croissante des initiatives et des
pouvoirs entre les mains de l'exécutif, que ce soit au niveau du
Québec ou au niveau régional (communautés urbaines).
Le gouvernement étant doté de services de recherche
nombreux et bien documentés dans tous les domaines de la
législation, il possède en pratique le monopole de l'information
administrative et tend à devenir l'unique promoteur des lois qu'il
soumet ensuite pour approbation à l'Assemblée.
La faiblesse des moyens que les députés et plus
particulièrement ceux de l'opposition ont à leur
disposition pour effectuer des recherches sur les sujets sur lesquels ils
doivent légiférer ne permet pas toujours aux représentants
de la population d'exprimer leur vote en connaissant tous les aspects de la loi
discutée. Plus le sujet est technique, moins forte est la connaissance
de la majorité des députés.
Pour concilier l'objectif d'efficacité qui tend à donner
l'initiative des projets de lois au gouvernement et de démocratie qui
veut que les représentants se prononcent avec une connaissance
suffisante du sujet traité, il semble que les travaux en commission
soient la meilleure formule.
Chaque commission parlementaire est spécialisée dans
l'étude de matières bien définies et composée de
représentants des différents partis politiques.
En vue d'obtenir un travail efficace au sein de ces commissions, il est
nécessaire de leur fournir des moyens de documentation et d'analyse
adéquats, et pour ce faire, doter les partis politiques d'équipes
de recherchistes qui préparent le travail suivant les orientations du
parti. Dans ces conditions, un travail démocratique et documenté
pourra se faire en commission, avant que le débat ne soit porté
devant l'Assemblée Nationale.
Comme il devrait y avoir au moins autant de commissions qu'il y a de
ministères, plus certaines autres consacrées à des sujets
tels que la planification et le contrôle, nous en supposons le nombre
à environ 25. En système quadripartite, il serait difficile
d'avoir moins de 10 à 20 députés par commission selon les
circonstances, étant donné qu'il est souhaitable qu'un
député ne fasse pas partie de trop de commissions, nous arrivons
à un nombre total de députés variant de 100 à 125
pour respecter ces critères. Contrôle de
l'exécutif
Cette fonction de contrôle de l'action administrative s'exerce
essentiellement par deux moyens: l'étude et le vote des
législations à incidence administrative proposées par
l'exécutif; le vote du budget.
La première partie de ce rôle a de nombreux aspects communs
avec la fonction législative puisqu'il s'agit surtout de proposer
d'éventuels amendements aux lois déposées par les
ministres et d'exprimer ensuite par un vote, l'appui ou l'opposition aux
projets de lois soumis à la ratification de l'Assemblée
Nationale.
Quant à l'étude du budget, elle nécessite pour
toute personne qui veut la mener à fond, un certain nombre de
renseignements, d'analyses et de calculs. Certes les parlementaires peuvent
difficilement proposer des amendements à la loi des finances, mais la
qualité de leurs critiques est souvent proportionnelle à la
valeur des recherches qu'ils peuvent mener sur ce sujet.
Il convient de mentionner ici que pour les deux premiers rôles que
nous venons d'étudier, la qualité et la compétence des
parlementaires (qu'ils soient ministériels ou de l'opposition) sont
aussi importantes sinon plus, que leur nombre. On peut supposer que le niveau
des débats s'élèverait considérablement si
l'opposition, notamment, avait les moyens de faire en plus d'une critique
d'orientation politique, une analyse technique des projets et actions
gouvernementales sans devoir se contenter, comme trop souvent, d'arguments
fondés sur l'intuition ou quelques recherches rapides. Faute de pouvoir
s'exprimer de manière positive et durable à l'intérieur du
système démocratique, l'opposition glissera à d'autres
niveaux et se fera par d'autres moyens dont on peut, pour le moins, douter du
caractère démocratique.
Représentant d'une collectivité
Les deux premiers rôles du parlementaire sont formels et
l'ensemble de la population peut assez aisément juger des
qualités des parlementaires dans l'exercice de ces fonctions.
Lorsque le député agit en tant que représentant de
ses électeurs, de groupes sociologiques ou d'un parti, son
efficacité peut être évaluée surtout par ses
mandants. Parmi ceux-ci, les principaux sont naturellement les électeurs
de sa circonscription. Pour qu'un député puisse garder un contact
assez étroit avec ses commettants, il est nécessaire que le
territoire couvert par sa circonscription ne soit pas trop étendu et que
le nombre d'électeurs ne soit pas trop élevé.
S'il veut être un reflet assez fidèle des opinions de ses
électeurs, les députés doivent être élus dans
des circonscriptions électorales homogènes. Or, pour satisfaire
ce critère d'homogénéité, le nombre de
députés doit être assez élevé afin de tenir
compte des disparités linguistiques,
économiques et sociologiques qui caractérisent la
population. Lorsque l'on respecte la nécessité d'avoir des
circonscriptions géographiquement et sociologiquement homogènes,
même en milieu urbain, on aboutit rapidement à un nombre de
circonscriptions dépassant la centaine.
Rôle de protecteur et de défenseur des citoyens
Ce rôle s'exerce surtout en dehors des grands centres urbains car
dans les villes, la population peut exercer son action politique par le canal
des corps intermédiaires (syndicats, chambres de commerce, etc.), et des
gouvernements municipaux ou régionaux (communauté urbaine),
auxquels de nombreux pouvoirs ont d'ailleurs été
délégués par le législateur (par exemple, à
Montréal).
S'il constitue en fait le représentant de la population dans les
actions législatives, le député est également
perçu par plusieurs comme le lien naturel entre la population et la
machine administrative. On peut concevoir que les parlementaires, en tant
qu'informateurs privilégiés du gouvernement, cherchent à
défendre les intérêts des collectivités qu'ils
représentent, que ce soient leurs électeurs, des groupes de
pression ou leur parti, et qu'à ce titre, ils tentent de promouvoir des
intérêts communs mais, en aucun cas, ils ne devraient être
les défenseurs d'intérêts injustifiés. En tant que
représentants de la population, ils doivent refléter les
aspirations de celle-ci lors des votes et susciter les législations et
politiques gouvernementales qui correspondent aux options de leurs commettants.
A cet égard, leur nombre peut être optimisé par la
même approche que celle envisagée précédemment.
Le nombre de circonscriptions électorales
Partant de l'hypothèse que 2/3 des députés sont
élus au scrutin majoritaire dans des circonscriptions et 1/3 sont
élus sur base de scrutin proportionnel, on devra limiter le nombre de
circonscriptions à un minimum acceptable si l'on ne veut pas obtenir un
nombre total de députés beaucoup trop élevé.
Le nombre de circonscriptions dépend en partie de la
nécessité des contacts directs que le député doit
avoir avec ses électeurs. Les éléments principaux à
prendre en compte sont donc la superficie de la circonscription, sa population
et l'homogénéité de celle-ci. En fonction de ces
paramètres, et nous référant au nombre actuel de
comtés qu'il ne nous paraît pas sage de diminuer, nous
recommandons que le Québec soit découpé à l'avenir
en 120 circonscriptions électorales. Avec ce nombre, puisque le corps
électoral s'élevait à 3,500,000 personnes en 1970, il y
aurait environ 30,000 électeurs en moyenne par circonscription.
Le nombre de députés
Nous avons posé plus haut que 120 circonscriptions
électorales est le nombre optimum à considérer dans le
futur découpage de la carte électorale pour les
députés élus au scrutin majoritaire.
D'autre part, nous avons démontré auparavant que le mode
de scrutin à retenir dans les circonscriptions actuelles implique la
nomination de 2/3 des députés par vote majoritaire et 1/3 sur
base proportionnelle.
La combinaison de ces deux approches aboutirait à la constitution
d'une Assemblée de 180 députés: 120 élus dans des
circonscriptions et 60 sur liste régionale. Ce nombre total est
acceptable non seulement du point de vue travail en commissions, mais en outre
il permet aux partis d'avoir un nombre suffisant de députés de
liste pour bien représenter les différentes régions du
Québec. LA CARTE ELECTORALE
Quel que soit le mode de scrutin retenu, la refonte de la carte
électorale est une condition de base pour un bon fonctionnement de la
démocratie au Québec. Tous les partis se sont d'ailleurs
prononcés en faveur de ce changement depuis avril 1970.
Un premier pas a été accompli par la suppression des
comtés protégés ce qui enlève toute contrainte
légale aux travaux futurs dans ce domaine. Toutefois, certains
éléments, tels que la nature différente du travail du
député rural par rapport à un représentant
élu en ville, devront être retenus.
Le découpage du territoire en circonscriptions peut favoriser
certains partis suivant les tracés retenus. La pratique est d'ailleurs
consacrée par une appellation désormais classique, mais peu
française, le "gerrymandering". Afin d'éviter toute tentation
semblable, il apparaît nettement préférable que ce travail
soit confié à un comité d'experts formé de
politicologues, de sociologues, de géographes, et d'autres
spécialistes en ce domaine. Il nous semble également
nécessaire et utile d'y faire participer les représentants des
différents partis politiques afin que ceux-ci puissent apporter aux
recherches du comité, le fruit de leur expérience ainsi que la
pensée de leur groupe. De toute façon, les conclusions devront
être présentées à l'Assemblée Nationale pour
fins de ratification.
Le Gouvernement par son projet de loi no. 80 en a décidé
autrement. Il forme une Commission composée du président
général des Elections et de deux autres membres nommés par
l'Assemblée Nationale. Reste que cette Commission permanente devra
être formée d'hommes possédant au plus haut point deux
qualités essentielles: soit l'objectivité nécessaire
à la bonne marche de ses travaux, soit la connaissance du dossier;
rôle du député, responsabilités du gouvernement,
assiette géographique, entité sociologique et autres
données nécessaires à la réalisation d'un projet de
carte électorale démocratique et efficace.
Dans le but d'éviter autant que possible que d'autres
élections aient lieu sur base de la carte actuelle, il est
nécessaire de fixer à ce comité un délai
raisonnable mais assez court.
Les hypothèses fondamentales du travail du comité
devraient être les suivantes: a) le territoire du Québec doit
être découpé en 120 circonscriptions électorales; b)
le découpage doit constituer dans la mesure du possible des
entités sociologiques homogènes tant du point de vue
géographique, qu'économique, linguistique, culturel et social; c)
la population moyenne de chaque circonscription sera d'1/120 de la population
du Québec; d) en aucun cas une circonscription ne pourra compter plus ou
moins de 25 p.c. de cette population moyenne; e) dans les régions
rurales, le découpage devra tenir compte des facilités de
transport jusqu'à la ville la plus importante qui serait
l'éventuel chef-lieu de circonscription; f) quoique le souci
d'homogénéité doit être constamment pris en compte,
il ne pourrait être l'excuse à un découpage "en dentelle"
des limites d'une région. Il faut veiller à constituer des blocs
spatiaux ; g) les écarts par rapport aux limites inférieures et
supérieures seront tels, dans chaque circonscription, qu'étant
donné la croissance démographique prévisible, il soit peu
probable que les limites soient dépassées dans les 5
années à venir; h) une circonscription ne devrait pas chevaucher
sur deux régions administratives afin que chaque circonscription puisse
s'identifier à une région; i) les régions où
s'effectuera le dépôt des listes des partis et l'élection
de députés élus au scrutin proportionnel devront
être déterminées; j) les moyennes retenues pour
l'élection des candidats dans les régions devront être
calculées en fonction du nombre de députés
"régionaux" accordé à chaque région.
D'autres aspects devront être touchés par la réforme
du système électoral: soit le financement des partis politiques
et l'établissement de listes permanentes d'électeurs.
Voilà beaucoup de sujets de discussion et la Commission
responsable devant cette Chambre aura, je l'espère, l'occasion
d'étudier en profondeur tous ces points.
M. LE PRESIDENT: J'aimerais souligner aux honorables membres que le
député de Terrebonne donnera la réplique.
M. HARDY: En comité. M. LEVESQUE: En comité.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cette motion est adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. BLANK (président du comité plénier): Bill 80,
article 1?
M. LEVESQUE: La motion de deuxième lecture est bien
adoptée?
M. PAUL: Bien adopté.
M. LEVESQUE: Bon.
UNE VOIX: Il n'y a pas eu de "filibuster".
M. PAUL: Et la motion de formation du comité est
adoptée.
Comité plénier
M. HARDY: Article 1, adopté, M. le Président?
UNE VOIX: Adopté.
M. HARDY: Adopté?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Adopté.
M. LE PRESIDENT (Blank): Article 2.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Adopté.
M. PAUL: M. le Président, à l'article 2, il n'y a pas de
doute que ce seront de grandes compétences.
M. HARDY: M. le Président, tantôt, je pense, je ne sais
plus quel honorable député a mentionné je pense que
c'est le député de Chicoutimi, dans sa très brillante et
très complète intervention, nous ayant brossé un...
M. LEVESQUE: Je retiens le mot "complète".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je l'avoue, M. le Président.
M. HARDY: Tellement complète, d'ailleurs, que ceci nous a
amenés à ne pas prononcer nos discours. Le député
de Chicoutimi a mentionné ce problème de la possibilité de
nommer des membres directement par les partis ou des membres partisans. Je
pense qu'il est dans l'intention du premier ministre de proposer, si la loi 80
est adoptée, tel que la loi l'autorisera, des personnes qui sont
apolitiques, des personnes qui viendront siéger à cette
commission indépendante en fonction de leur compétence acquise
dans différents domaines et qui, surtout, pourront assurer un
caractère de totale indépendance au travail qu'ils auront
à accomplir.
Je ne suis pas en mesure peut-être que si le premier
ministre est ici, tantôt, il pourra en dire davantage de
dévoiler le nom des personnes que le premier ministre aurait l'intention
de proposer à la Chambre mais je sais, par ailleurs, qu'il s'agira de
personnes qui sont en dehors des partis politiques, qui ne militent pas dans
des partis politiques, afin d'assurer ce caractère d'objectivité
et d'indépendance à la commission.
M. PAUL: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. PAUL: Ah! Excusez-moi.
M. CHARRON: M. le Président, le député de Bourget
a, dans son intervention, suggéré au premier ministre, parrain de
la loi, un type particulier de personnes pour être membres de cette
commission, c'est-à-dire des gens dont la profession les rapproche
encore plus sensiblement de la matière, soit des gens issus des
départements de sciences humaines, démographes, sociologues, etc.
Est-il aussi dans l'intention du gouvernement de se lancer dans cette
catégorie de personnes?
M. HARDY: Je ne sais pas. Encore une fois, je ne parle qu'en mon nom
personnel. Mais je pense que ce qui est le plus important, relativement
à la nomination de personnes dans ce domaine, ce n'est pas tellement
à cause de leur compétence technique dans tel ou tel domaine
parce que ces commissaires pourront s'adjoindre des techniciens soit en
sociologie, en géographie humaine, en économique, en
démographie. Mais je pense que ce qui est surtout important, le
critère de base qui doit être retenu pour la nomination de ces
personnes, c'est leur indépendance, leur statut et leur
crédibilité dans l'opinion publique, encore plus que leur
compétence technique. Parce que la compétence technique, ils
pourront l'avoir grâce au personnel que la loi les autorise à
s'adjoindre.
Encore une fois, je pense, quant à moi, que le critère de
base devrait être leur crédibilité dans l'opinion publique,
afin que le commission ait vraiment ce statut d'indépendance et
d'objectivité.
M. CHARRON: Une double question au député de Terrebonne.
J'admets la qualité de sa réponse. Peut-il assurer la Chambre
que, par exemple, la nomination des trois personnages
en question, en fait des deux puisqu'un l'est d'office, tout le monde le
connaît, M. Drouin, sera faite avec une manière de consultation
des parties de l'Opposition, d'une part? Deuxièmement, il m'assure, ce
qui est bien normal également, qu'une équipe d'experts
travaillera avec ces trois personnes. Peut-il, à ce stade-ci de nos
travaux, avant même l'adoption de la loi 80, nous décrire un peu
le bureau qui entourera la commission permanente?
M. HARDY: C'est assez difficile. Je pense que la loi, là-dessus,
laisse une latitude, comme il se doit, à la commission. Je pense que ce
sont les commissaires eux-mêmes qui, une fois qu'ils auront fait un
premier inventaire du travail qu'ils auront à accomplir, seront en
mesure de déterminer quel est le personnel, quel est le nombre et la
qualité des personnes aux services desquelles ils auront recours.
Quant à la consultation dont a parlé le
député de Saint-Jacques, je pense que ça s'infère
de la loi, puisque, bien sûr, les commissaires seront proposés par
le premier ministre, mais qu'ils devront recueillir l'approbation des deux
tiers des membres de cette Chambre.
Alors, ça infère la consultation des autres partis.
M. LE PRESIDENT: Article 2, adopté?
M. PAUL: M. le Président, j'aurais une question à poser
à l'honorable leader du gouvernement. Je vous demanderais, M. le
Président, de suspendre l'étude de l'article 2 jusqu'au retour,
probablement d'ici quelques minutes, du leader du gouvernement, parce que je
veux lui poser une question au sujet du mécanisme à
prévoir vu que nous arrivons au terme de notre session, entre la
sanction et la nomination.
M. HARDY: Je pense que je peux répondre à la place du
leader gouvernemental. Dès que la sanction sera donnée, il y aura
consultation pour proposer une résolution...
M. PAUL: Quand la loi sera-t-elle sanctionnée? C'est bien
important; c'est une question fort pertinente, parce qu'il faut que la
loi...
M. HARDY: ... soit sanctionnée avant de proposer la
résolution.
M. PAUL: ... soit sanctionnée avant de proposer la
résolution et la résolution devra être proposée
avant l'ajournement.
M. HARDY: Oui.
M. PAUL: Alors, je me demande s'il n'y aurait pas lieu d'inviter Son
Excellence à présider une sanction de loi demain matin ou demain
midi, pour que, demain après-midi, demain soir, jeudi, vendredi ou
samedi, nous puissions discuter la proposition que pourra faire le premier
ministre.
M. HARDY: Je comprends le problème pratique, mais, connaissant la
très grande disponibilité de Son Excellence...
M. PAUL: II nous a prévenu, d'ailleurs, qu'il serait
disponible.
M. HARDY: _je pense qu'il pourra y avoir sanction et,
immédiatement après, nous pourrions revenir en Chambre pour
présenter des résolutions.
M. CHARRON: II n'a que ça à faire, des sanctions, le
lieutenant-gouverneur.
M. LE PRESIDENT: Article 2, adopté. Article 3, adopté.
Article 4, adopté. Article 5, adopté. Article 6, adopté.
Article 7, adopté. Article 8, adopté. Article 9?
M. LAURIN: M. le Président, à l'article 9, j'aimerais
soumettre un projet d'amendement qui...
M. HARDY: M. le Président, si le député de Bourget
le permet, j'ai un amendement à proposer. Après les mots: "32,000
électeurs", on ajouterait les mots suivants: "et, à cette fin,
elle devra tenir compte de facteurs de variation de la population".
Le député de Bourget a parlé tantôt du
problème de la population et du problème d'électeurs. J'ai
écouté avec beaucoup d'attention les propos du
député de Bourget à cet effet. Toutefois, je dois lui dire
que, si l'on étudie des chiffres et si l'on met en comparaison le nombre
d'électeurs et la population dans différents territoires, on
arrive à cette constatation que le quotient entre population et
électeurs est à peu près égal partout,
c'est-à-dire que, lorsque, dans un territoire donné, il y a
25,000 électeurs, il y a à peu près 50,000 de population.
Alors, il y a une relation presque exacte. Cela ne fait pas tellement de
différence que nous disions électeurs ou population, car l'on
arrive, à toutes fins utiles, au même résultat.
Toutefois, en ajoutant l'amendement dont je viens de faire lecture, les
commissaires pourraient lorsqu'ils arrivent sur un territoire où, par
exception, il y a une large divergence entre population et électeurs
en ce moment, je pense, en particulier, au comté du
président, le comté de Saint-Louis, où, à cause
d'une population de Néo-Canadiens assez importante, par exception, il y
a une certaine divergence entre le quotient population et électeurs; ce
n'est pas le même qu'ailleurs dans la province tenir compte de ce
facteur de la population. Lorsque la population est beaucoup plus grande, le
nombre d'électeurs, toujours en appli-
quant la marge de 25 p.c. en plus ou en moins, pourrait varier, de
façon à toujours garder cet équilibre entre le nombre
d'électeurs d'une circonscription et la population totale.
M. LAURIN: Je comprends bien, M. le Président, mais il reste que
le député de Terrebonne ne répond pas à l'autre
objection que j'avais soulevée. Je peux la transformer en question: Ne
croyez-vous pas qu'en gardant comme facteur invariable le chiffre de 32,000
électeurs vous soyez condamnés à augmenter
indéfiniment le nombre des députés?
M. HARDY: Ah oui! On pourrait peut-être en discuter
immédiatement.
M. LAURIN: Oui.
M. HARDY: C'est relié à votre crainte, à vos
appréhensions. Je dois dire immédiatement que je ne partage pas
du tout les craintes du député de Bourget, quand il nous dit que
le fait de fixer 32,000 électeurs comme moyenne serait une indication
à l'effet qu'une décision est déjà prise quant au
mode de scrutin.
M. LAURIN: M. le Président, je m'excuse, pas sur le mode de
scrutin mais sur l'augmentation indifinie du nombre des
députés,
M. HARDY: Oui, tout ça est relié. M. LAURIN: D'accord.
M. HARDY: Lorsqu'on se remémore les discussions que nous avons
eues à la commission de l'Assemblée nationale et le
témoignage de certains experts, on se rappelle que l'on a, bien
sûr, insisté sur ce facteur auquel je crois très
profondément, ce grand principe qui est à la base de notre
système démocratique, un électeur un vote. Tout le monde
est d'accord, en tout cas personnellement je souscris entièrement
à ce principe. Toutefois, on a également insisté, à
partir de l'expérience concrète, sur le rôle
d'intermédiaire du député, en plus d'être
législateur, d'ailleurs le député de Chicoutimi en
a parlé cet après-midi sur le rôle
d'intermédiaire que doit jouer le député et aussi,
même là, sur son rôle de porte-parole de la population. Si
le député veut vraiment être le porte-parole d'une
population, si le député veut vraiment associer la population
à son rôle de législateur, il faut faire disparaître
certaines barrières, qui sont par exemple les trop grandes
distances.
Si un député a un comté tellement vaste à
parcourir, il lui sera impossible d'être vraiment en relation
étroite avec ses électeurs et par conséquent de bien les
représenter. On sait très bien qu'un député sur un
territoire où la population est dense, comme à Montréal ou
dans d'autres villes, peut plus facilement atteindre ses électeurs. D
peut faire le tour de son comté parfois en quelques minutes, tandis que,
sur un territoire où la population est dispersée, il faut au
député parcourir des dizaines et des dizaines de milles avant
d'atteindre certains de ses électeurs.
Alors, compte tenu de ce facteur, il est évident qu'il y a une
dimension maximum que l'on ne peut pas dépasser dans une circonscription
si l'on veut que le député joue ce rôle. Lorsqu'on a
fixé 32,000 électeurs, c'est en ayant cette idée en
tête qu'il fallait avoir des circonscriptions qui permettent aux
députés de vraiment accomplir et leur rôle de
législateur et leur rôle d'intermédiaire et leur rôle
d'animateur.
C'est évident que, si la population du Québec augmente, si
on est toujours d'accord sur ces principes le nombre de députés
devrait également augmenter, pour répondre aux besoins. Si,
aujourd'hui, on considère que, pour être bien
représenté, un comté doit avoir 32,000 électeurs,
ça pourrait être encore aussi vrai dans dix ans. Alors le nombre
de députés devra s'accroître proportionnellement à
la population.
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais poser une question au
vice-président de la Chambre. Est-ce qu'il a envisagé la
possibilité d'augmenter ce pourcentage de 25 p.c. d'écart qui est
prévu dans le bill, ceci pour répondre aux craintes qui ont
été formulées par différents opinants? Un
comté de ville et un comté rural ou semi-rural ou
éloigné des grands centres sont différents pour des
questions géographiques. Je comprends que, dans le bill, il est reconnu
que pour certains cas particuliers les commissaires auront des pouvoirs
spéciaux, mais est-ce qu'on ne pourrait pas, en guise de chiffre, de
pourcentage prévu, au lieu des 25 p.c, parler de 40 p.c?
Je vois que le vice-président fait un saut, mais il l'avait
sûrement prévu puisque les différents opinants qui ont
parlé ont manifesté, si j'ai bien compris, le désir que
cet écart puisse être plus de 25 p.c. Je pense que c'est normal
que ça soit 40 p.c. II y a justement un député
ministériel qui nous approuve et je crois qu'il a raison de le
faire.
Il y a, en plus des différents facteurs géographiques, un
facteur très intéressant et c'est lors des sessions de la
commission parlementaire qu'on nous a mentionné ces faits. Dans les
comtés urbains, comme Montréal, par exemple, en moyenne, suivant
les chiffres qu'on nous a fournis, 15 p.c. d'électeurs de moins vont
voter que dans les secteurs ruraux ou semi-ruraux; cela veut dire que
déjà entre les deux secteurs il y a 15 p.c. de population de
différence qui sont moins intéressés, qui ne se rendent
pas voter. C'est un facteur important. Quant à l'autre facteur, qui est
des plus importants, je pense que le vice-président va comprendre ce que
je veux dire à ce moment-ci, par un exemple.
Nous parlons, de ce temps-là, d'une région
qui s'appelle la baie James. Ce territoire est vaste et immense, il
forme un sixième de la province de Québec, et il faudra penser un
jour à en faire un comté. Pour un certain nombre d'années,
ce comté-là ne sera sûrement pas très populeux, mais
le député qui devra le représenter aura des centaines de
milles à parcourir pour cette circonscription donnée, par
exemple. Je pense qu'il serait raisonnable que vous entrevoyiez la
possibilité d'augmenter au moins, si vous ne vous rendez pas à 40
p.c, cette marge prévue.
M. HARDY: Je suis bien d'accord avec les préoccupations que vient
d'exposer le député de Rouyn-Noranda. D'ailleurs, j'en avais fait
mention tantôt dans mes remarques. Toutefois, il ne faut pas oublier que
le principe de base doit toujours demeurer: un électeur, un vote. Si on
ne part pas de ce principe-là, on fausse totalement tout le
régime démocratique. Ceci, comme tous les grands principes, si
l'on veut reconnaître les impératifs de la réalité,
il faut évidemment apporter certains correctifs. Je pense,
personnellement, que la marge de 25 p.c. c'est d'ailleurs la norme
adoptée par le gouvernement fédéral, c'est la norme qui
existe, je pense, en Angleterre à l'heure présente est un
quart et ceci nous amène à des comtés qui pourront avoir
un nombre d'électeurs de 40,000 et de 24,000.
Vous avez déjà, entre 40,000 et 24,000 électeurs,
une marge très considérable ; si on ne veut pas revenir dans la
même situation où l'on est présentement, il faudrait
être très prudent quant à l'augmentation de la marge en
plus ou en moins.
Je pense que les inquiétudes formulées par le
député de Rouyn-Noranda... Il donnait un exemple très
typique, le cas de la baie James, mais il y a d'autres comtés aussi; je
pense au comté de Duplessis, au comté de Saguenay, au
comté des Iles-de-la-Madeleine qui forment des cas bien
spécifiques. Le dernier paragraphe de l'article 9 donne aux commissaires
toute la latitude pour respecter ces cas spéciaux lorsqu'on parle de
"considérations exceptionnelles d'ordre démographique et
géographique telles que la très faible densité de la
population, le taux relatif de croissance de la population d'une région,
son accessibilité, sa superficie ou sa configuration". Je pense que si
les commissaires appliquent d'une façon raisonnable je n'ai pas
de raison de croire qu'ils ne le feront pas les règlements, les
inquiétudes formulées par le député de
Rouyn-Noranda pourront trouver une solution satisfaisante par l'application de
ce dernier paragraphe.
Personnellement, je ne favoriserais pas l'augmentation de la marge de 25
p.c. d'une façon générale, s'appliquant à tout le
territoire du Québec parce qu'à ce moment-là, nous
risquerions de nous retrouver avec une carte électorale qui contiendrait
des lacunes presque aussi grandes que celles que nous avons
présentement.
M. SAMSON: Je maintiens encore quelques inquiétudes, le
vice-président n'ayant pas réussi à me convaincre encore
du bien-fondé de cet article tel qu'il nous apparaît. Voici
pourquoi je crois que ce doit être pris en considération: Parce
que le bill 80 dit bien: "La Loi de la commission permanente de la
réforme des districts électoraux".
Il n'est pas question, dans le bill 80, de mode de scrutin. Je suis
aussi d'accord avec le vice-président de la Chambre qu'il nous faut
prendre en considération les densités de population et essayer,
autant que possible, d'avoir une moyenne raisonnable. Mais nous avons vu, par
la commission perlementaire, que d'autres moyens nous ont été
suggérés pour faire en sorte que les districts électoraux
soient le plus équilibrés possible et, pour venir compenser la
question de densité de population ou d'électeurs, si vous voulez,
d'autres moyens nous ont été suggérés. Je ne veux
pas dire qu'ils seront retenus, mais ils ont été
suggérés.
En vertu de ce bill, la commission n'aura pas comme but ou comme
fonction de discuter autre chose que les districts électoraux. Si cette
commission ne doit pas fournir autre chose qu'un rapport visant à nous
proposer quels seront les futurs districts électoraux, à ce
moment-là, la densité de population a un effet moindre que si
nous avions demandé, par le même bill, de discuter de la question
du mode de scrutin.
Or, si l'effet est différent, cela veut dire que nous devons,
à ce moment-ci, prendre en grande considération la question
géographique. Dans un district électoral sur l'île de
Montréal, vous pouvez retrouver actuellement environ 50,000, 60,000 ou
80,000 électeurs, dans certains cas, dans un pâté de
maisons dont le député peut faire le tour en voiture dans une
demi-heure au maximum. Tandis que, si vous avez à couvrir un
comté comme la Gaspésie, le Lac-Saint-Jean, le Saguenay...
M. DUMONT: Charlevoix.
M. SAMSON: ... ou les autres comtés des régions
éloignées, par exemple, l'Abitibi-Est... Pardon?
M. PICARD: Quand vous parlez d'un maximum d'une demi-heure, vous oubliez
les feux de circulation et les arrêts.
M. SAMSON: Bien, à ce moment-là, il peut le faire à
pied dans une demi-heure. M. le Président, c'est quand même cela
qu'il faut prendre en considération, si on discute de districts
électoraux. Si on a à discuter du mode de scrutin, c'est une
autre chose. Je pense que je serais hors d'ordre d'en discuter à ce
moment-ci, mais on aurait peut-être dû faire en sorte que les deux
apparaissent dans le même bill, à ce moment-là, pour
respecter les idées qui sont préconisées par le parrain du
bill.
Quant à nous, nous croyons raisonnable que
la marge soit augmentée à 40 p.c. de différence.
Nous accepterions ces 32,000 comme moyenne, mais nous préférons
40 p.c. à 25 p.c. Je comprends qu'à la fin de l'article il est
dit que "la commission peut s'écarter des règles
énoncées au premier alinéa pour des considérations
exceptionnelles d'ordre démographique et géographique, telles que
la très faible densité de population, le taux relatif de
croissance de la population d'une région, son accessibilité, sa
superficie ou sa configuration".
Nous comprenons que la fin de l'article pourrait servir, mais est-ce
qu'on fera de cette fin d'article un principe qui devra servir souvent ou s'il
doit servir par exception? Si le principe devra servir souvent, pourquoi ne pas
immédiatement changer le barème? S'il doit servir par exception,
à ce moment-là, changeons la proportion de 25 p.c. à 40
p.c. Si on doit se servir de la fin de l'article quisi
régulièrement, je ne vois pas la nécessité,
à ce moment-là, de mettre un barème. Je ne vois pas la
nécessité de mettre ni les 32,000 ni les 25 p.c. Je ne sais pas
si vous voyez ça comme ça mais si on prévoit que les
commissaires devront se servir du deuxième alinéa de l'article 9
aussi souvent qu'il leur est loisible de le faire, à ce
moment-là, le premier alinéa est inutile. Si, par contre, le
deuxième alinéa doit être exceptionnel, bien, le premier
devrait être corrigé de façon que, pour les districts
électoraux, on considère la géographie, les distances et
aussi les besoins des populations des différents districts
électoraux. Dans un district électoral, comme l'Abitibi-Est, par
exemple, les besoins et les demandes des électeurs, leurs recours
à leur député est différent de ce qui existe dans
un district de Montréal, par exemple.
M. MAILLOUX: C'est ça.
M. SAMSON: Tellement différent, M. le Président, que je
peux vous dire, comme exemple, et je pense que vous pouvez aussi m'en citer
plusieurs vous-même, que dans des régions plus
éloignées où les comtés ne sont peut-être pas
aussi denses en population, nous recevons, les députés, en
moyenne, une vingtaine de lettres par jour, alors que dans un district
électoral comme ceux de Montréal, dans certains cas...
M. MAILLOUX: Une par mois.
M. SAMSON: ... un député libéral m'a dit un jour
qu'il en avait reçu quatre dans un an. C'est peut-être les deux
extrêmes.
M. HARDY: C'est parce qu'il ne fait pas de patronage.
M. SAMSON: Je pourrais donner le nom du député, mais je ne
voudrais quand même pas, en donnant son nom, qu'on lui retire sa
secrétaire. Mais quand même il y a autant de différence que
cela. Il y a des députés à Montréal qui n'ont
même pas besoin d'un bureau parce que les gens ne se dérangent pas
pour aller voir le député, ils n'ont pas besoin de le faire, ils
ont les services de bien-être social, ils ont les services de
santé, ils ont tous les services très bien structurés sur
l'île de Montréal parce qu'il y a déjà un
gouvernement municipal, qui est quasi un demi-gouvernement provincial tellement
il y a densité de population. C'est au moins un gros gourvernement
régional, ce que nous n'avons pas dans les régions
éloignées.
M. MAILLOUX: La seule chose, c'est de s'occuper des sports.
M. SAMSON: Voyez-vous, M. le Président, un de vos
députés ministériels me dit que, dans certaines
régions de Montréal, le député n'a qu'à
s'occuper des sports.
M. MAILLOUX: C'est ça.
M. SAMSON: C'est vrai ça, ce qui nous est rapporté. Dans
nos comtés, dans les comtés plus éloignés, le
député doit devenir un ombudsman local, un gars à qui on
confie tout, un gars qui doit s'occuper de bien-être social, qui doit
s'occuper des questions de santé, qui doit s'occuper des foyers pour les
personnes âgées, qui doit s'occuper de voirie, d'agriculture, de
colonisation, qui doit s'occuper de tout.
Il est impossible à ces députés de pouvoir
s'occuper de tout en ayant 50,000 ou 40,000 de population ou d'électeurs
dans son comté; il doit nécessairement avoir moins
d'électeurs, considérant tous ces faits et la géographie.
En ville, c'est possible d'avoir plus d'électeurs et d'avoir moins de
territoire. Evidemment, je ne crois pas que l'écart existant entre la
densité de population d'un comté de ville et d'un comté
rural soit un accroc à la démocratie.
Dans plusieurs autres domaines, et je peux donner un exemple des
syndicats qui ont des syndicats locaux, régionaux et tout ça est
affilié aux centrales syndicales.
Or, M. le Président, la démocratie joue son jeu par voie
de délégation de pouvoirs en partant du bas jusqu'en haut.
Maintenant, les locales n'ont pas toutes le même nombre de membres. Vous
avez des locales qui peuvent avoir 200 membres et d'autres qui en ont 500 et
elles ont un vote à la centrale. L'honorable député de
Mégantic disait tantôt qu'à l'ONU vous avez des pays qui
ont peut-être 6 ou 7 millions de population, vous avez des pays qui ont
20 millions, vous avez des pays qui ont 200 millions et ils ont un vote. A ce
moment-là...
M. CHARRON: II ne se passe rien, non plus, à l'ONU!
M. SAMSON: M. le Président, pourriez-vous rappeler à
l'ordre l'honorable député de Saint-
Jacques qui ne semble pas vouloir prendre part au débat...
M. CHARRON: Très bien. Continuez, c'est tellement
intéressant.
M. SAMSON: ... sauf pour dire des choses inutiles.
M. BACON: Pour une fois que c'est intéressant, laissez-le
parler.
M. SAMSON: Ah bon! J'ai un excellent conseil du député de
Maskinongé, il me demande de ne pas le dire et de ne pas le mentionner.
Je pense que le député de Maskinongé a compris ce que le
député de Saint-Jacques...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. SAMSON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Je pense, à ma connaissance, que le seul qui a
le droit de parole actuellement est le député de Rouyn-Noranda.
J'ai l'impression que je vais avoir la collaboration des députés
des deux côtés de cette Chambre.
L'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, je ne connais pas de meilleur moyen
d'arrêter quelqu'un que de lui dire qu'il a encore le droit de parole.
J'avais fini, M. le Président.
M. HARDY: Pour répondre à l'honorable député
de Rouyn-Noranda sur cette question, je voudrais lui dire que le dernier
paragraphe de l'article 9 s'appliquera par exception, c'est évident.
Si l'on examine l'ensemble du territoire du Québec, des
comtés qui auront dans les parties semi-rurales, semi-urbaines des
comtés de 24,000 électeurs, je pense qu'un député
est capable de bien les représenter, même en tenant compte des
problèmes différents qui peuvent se poser à un
député à Montréal ou dans une grande ville et en
campagne. Je pense qu'un député, ce n'est pas trop. En tout cas
si on me dit que c'est trop, je vais vraiment me demander si je fais un bon
député actuellement parce que je représente un
comté semi-rural...
M. SAMSON: Ce n'est pas rural chez vous.
M. HARDY: De Saint-Jérôme à Saint-Jovite, c'est
semi-rural.
M. SAMSON: Non, non, voyons donc!
M. HARDY: Dans mon comté, il y a 80,000 électeurs et 55
municipalités. Par ailleurs, je pense que des comtés de 24,000
électeurs, en général, je dis bien,...
M. CHARRON: Combien y a-t-il de commissions scolaires dans votre
comté?
M. HARDY: Cela diminue de jour en jour parce qu'il y a eu pas mal de
fusions chez moi.
M. CHARRON: Très bien.
M. HARDY: Je pense qu'un député, d'une façon
générale, peut bien servir un comté qui comprend 24,000
électeurs. Mais lorsqu'il y a des cas particuliers où
l'étendue ou l'acessibilité du territoire est difficile, eh bien,
ce sont des cas exceptionnels à mon avis et ils trouveront une solution
par l'application des critères qui se trouvent au dernier paragraphe.
Encore une fois, je ne peux vraiment pas souscrire à cette demande du
député de Rouyn-Noranda d'élargir la marge au-delà
de 25 p.c. Je trouve déjà que 25 p.c, c'est beaucoup comme marge
en plus ou en moins.
M. CHARRON: M. le Président,...
M. DUMONT: Sur le même sujet, M. le Président,...
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député de
Saint-Jacques, est-ce sur le même sujet?
M. DUMONT: Sur le même sujet.
M. CHARRON : Sur le même sujet également.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques a la
parole.
M. CHARRON: Est-ce que le député de Rouyn-Noranda en a
fait formellement une proposition d'amendement?
M.SAMSON: Non, M. le Président, j'ai demandé à
l'honorable...
M. CHARRON: Ou bien si vous avez simplement...
M. SAMSON: ... vice-président de la Chambre d'accepter cet
amendement.
M. CHARRON: Vous n'en avez pas fait un amendement formel?
M. SAMSON: Je n'ai pas voulu le proposer formellement mais j'ai
l'impression que nous allons être obligés de le faire.
M. CHARRON: Disons que vous le faites là, parce que cela me
donnerait le droit de parler.
M. SAMSON: Cela vous donnerait le droit de parler pour satisfaire les
désirs du député de...
M. CHARRON: C'est parce que moi je peux arriver avec un autre
amendement.
M. HARDY: Vous proposez de changer 25 p.c. par 40 p.c, en plus ou en
moins?
M.SAMSON: Je propose, M. le Président, étant donné
que j'ai actuellement la parole, appuyé par le député de
Mégantic, qu'à la huitième ligne le mot "vingt-cinq" soit
remplacé par le mot "quarante".
M. CHARRON: Très bien.
Alors, M. le Président, sur l'amendement que je viens de
suggérer au député de Rouyn-Noranda...
M. DUMONT: Suggéré par nous-mêmes.
M. CHARRON: ... mais auquel j'ai donné une consistance juridique,
pour notre part, nous ne pouvons pas accepter un amendement du genre. Les
raisons qu'a fait valoir le député de Terrebonne, en
réponse à la suggestion du député de Rouyn-Noranda,
sont parfaitement valables. Je faisais tout à l'heure le calcul avec le
chef de l'Union Nationale. Si nous acceptions cet écart, en dehors
même des exceptions qui sont prévues au deuxième
alinéa du même article 9, nous pourrions avoir, avec notre norme
de 32,000 électeurs, des comtés qui iraient jusqu'à 19,400
et d'autres qui iraient si je rajoute la même chose à
l'autre bout à 44,000.
M. HARDY: Plus que le double.
M. CHARRON: Plus que le double. Cela veut dire que, dès le
départ, la nouvelle carte électorale, que tout le monde a
réclamée, que tous les partis de la Chambre sont prêts
à accepter, porterait déjà, avant même qu'elle ait
fonctionné, des comtés qui compteraient plus du double de la
population de certains autres comtés. Si on se fie, après cela,
à l'évolution démographique au Québec, je veux bien
croire qu'il y a une baisse de natalité mais il y a aussi un autre
phénomène aussi important, une concentration de plus en plus
forte dans la zone métropolitaine de Montréal. Cela veut dire
que, là-bas, nous arriverions très tôt à 44,000
électeurs. Nous serions très tôt obligés de jouer
l'écart jusqu'au maximum, c'est-à-dire 44,000 électeurs,
parce que cela est un fait qui peut s'inscrire dans les cinq ou six prochaines
années. Je ne suis pas démographe, mais tout le monde a
déjà lu des articles qui portent là-dessus.
A l'autre excès, également, très tôt des
comtés qui, aujourd'hui, auraient 24,000 ou 25,000 personnes, se
trouveraient à l'autre extrême et devraient jouer jusqu'aux
19,400. Alors pour nous, cet amendement est inacceptable. Même, le
député de Terrebonne se rappellera que nos interventions, lors de
la commission de l'Assemblée nationale, là-dessus, visaient
à accepter les 25 p.c. actuels, mais si le député de
Terrebonne nous était arrivé, toujours basé sur le
même principe de "un homme, un vote", en disant que l'écart permis
n'aurait pas été plus grand que de 20 p.c, il aurait eu notre
accord également à ce sujet.
Mais nous admettons, après avoir entendu un certain nombre de
représentations, en particulier de députés de
comtés ruraux, qu'effectivement 25 p.c. c'est la norme. Mais en aucun
temps, toute forme d'amendement devant augmenter le chiffre des 25 p.c. permis
à l'écart des 32,000 n'est pour nous acceptable. C'est pourquoi
nous nous opposerons à l'adoption de l'amendement du
député de Rouyn-Noranda.
M. PICARD: M. le Président, je pense que je devrai faire appel au
règlement et attirer votre attention sur le fait que cet amendement est
irrecevable pour la bonne raison qu'il va à l'encontre du principe
même du projet de loi.
Le projet de loi lui-même est censé être
présenté en vue d'assurer à tous les électeurs une
représentation juste et équitable à l'Assemblée
nationale. Comme vient de le mentionner le député de
Saint-Jacques, on revient pratiquement aux mêmes écarts dans le
nombre d'électeurs que ceux que nous avons présentement. Vous
partez de 19,200 électeurs dans un comté et vous pouvez avoir le
comté voisin avec 44,800 électeurs. Alors on revient encore
à la même situation. Retirons tout simplement le projet de loi si
nous acceptons un amendement comme celui-là.
M. CHARRON: D'ailleurs, avec la réforme qui s'en vient, si nous
acceptions cette norme, je sais très bien que le président
actuel, le député de Saint-Louis, serait très
intéressé à refiler dans le comté de Saint-Jacques,
qui est juste à côté, un nombre considérable de
Néo-Québécois!
M. LE PRESIDENT: J'ai déjà donné...
M. LEGER: M. le Président, je voulais simplement, pour donner
suite à la proposition d'amendement du député de
Rouyn-Noranda, dire que l'une des raisons majeures pour laquelle il proposait
cet amendement provenait du fait que, selon lui, il y a beaucoup plus de
travail à faire dans un comté rural qu'il pourrait y en avoir
auprès des électeurs dans un comté urbain. Il tenait pour
acquis que les distances font voyager le député davantage, que,
selon leur habitude les citoyens des comtés ruraux viennent voir leur
député pour régler des problèmes la plupart du
temps personnels, alors que je pense que, de plus en plus, si on ne veut pas
rester dans un autre siècle, on s'en va vers un député qui
aura surtout un rôle non seulement de législateur à
l'Assemblée nationale mais aussi un rôle d'animateur de
comté, animateur de groupes, animateur de personnes et non pas
uniquement une rencontre toujours individuelle, personnelle, avec les
gens de son comté.
M. le Président, je dirais que les gens de comtés ruraux,
comme les gens de comtés urbains, ont le droit de faire des demandes
à leur député, d'exiger qu'on s'occupe
précisément de leur cas particulier. Mais est-ce que, dans
l'avenir, ces demandes qui sont justifiées la plupart du temps par les
citoyens ou les électeurs d'un comté, devront être faites
directement au député? Est-ce que, bientôt, on n'arrivera
pas à un service de secrétariat d'un député avec
des personnes bien instruites des problèmes locaux, qui pourraient
être des assistants du député, qui pourraient recevoir des
personnes qui ont des problèmes personnels et qui pourraient
résoudre beaucoup de problèmes que le député
lui-même, car ce dernier n'a peut-être souvent pas le temps,
surtout quand il a des sessions qui durent huit à neuf mois par
année?
M. le Président, le député de Rouyn-Noranda disait
qu'il y a des députés dans des comtés urbains qui ne font
absolument pas de bureau. Je tiens à lui dire que s'il y en a il
se peut qu'il y ait des comtés urbains dans lesquels les
députés font peu de bureau ce n'est pas
nécessairement parce qu'il n'y a pas de besoins dans les villes.
Il y a autant de besoins, mais ils sont différents. Justement, si
on veut qu'un député s'occupe de son comté, il faut lui
fournir les outils dont il a besoin pour le faire. Et les outils pour un
comté urbain peuvent être différents que dans un
comté rural.
Je n'aurais aucune objection, plus tard, à ce qu'on donne des
allocations de dépenses supplémentaires à un
député qui est dans un comté rural, parce qu'il aura
à parcourir de plus longues distances, peut-être à faire
plus de voyages. Qu'on lui accorde aussi, peut-être, des dépenses
de secrétariat plus élevées pour lui permettre d'avoir non
pas un seul secrétaire, qui s'occupe de rencontrer souvent des membres
du comté parce que le député est absent, est à
Québec, mais du personnel plus nombreux pour les comtés ruraux.
Cela permettrait de régler les problèmes de comtés ruraux
de la même façon qu'on peut le faire dans la ville de
Montréal.
M. le Président, je pense qu'il faut tout simplement repenser
cette situation en fonction du rôle futur du député. Est-ce
qu'actuellement la façon dont agit un député dans une
circonscription rurale est exactement celle qui doit continuer dans l'avenir?
Je pense qu'il faut se poser la question et donner plutôt des services,
des moyens de secrétariat et entraîner du personnel payé
par le gouvernement pour régler, dans le comté d'un
député rural, des problèmes qui sont spécialement
ruraux. Dans le comté urbain, ce seront peut-être d'autres outils
dont aura besoin le député, mais il faut regarder vers l'avenir
et avoir une vision différente du rôle qu'un député
pourra jouer. Pour terminer, je demanderais au député de
Rouyn-Noranda de lire l'éditorial de la Presse de ce soir
où il verra que le rôle d'un député s'en va dans une
direction différente de celle qu'il voudrait bien lui conserver.
DES VOIX: Vote.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Mégantic.
M. DUMONT: M. le Président, pour répondre au
préopinant, je lui dirai d'abord que ce sont les électeurs qui
décident des services qu'on doit leur accorder en venant ou non nous
rencontrer, selon qu'ils aiment ou non l'idéologie politique que nous
représentons. Alors, des électeurs, nous en avons dans nos
bureaux. Je ne sais pas si c'est la même chose à Montréal
pour les députés péquistes, mais dans les comtés
créditistes, du moins, nous en avons.
Quand nous réclamons ces 40 p.c, je vois déjà, si
nous laissons 25 p.c. c'est pourquoi je dis que cette motion est
recevable que les comtés de Gaspé-Sud et de
Gaspé-Nord disparaîtraient immédiatement. Si vous
êtes déjà allés en Gaspésie, si vous avez
déjà visité la Maison du pêcheur, vous savez qu'on
va fusionner ces comtés-là. Je pense à votre comté,
M. le Président où vous avez envoyé le gars que l'on
appelle "Peau de chien". C'était beau, le comté de
Matapédia! Il va disparaître lui aussi. Alors, ce gars de
Montréal ne pourra pas venir essayer de se faire élire dans la
Vallée de la Matapédia ou dans ces comtés que nous voulons
protéger. Il me semble que c'est très précis dans
l'article: "Toutefois, elle peut admettre des districts électoraux dont
le nombre des électeurs est supérieur ou inférieur
à ce nombre d'au plus 25 p.c. nous demandons 40 p.c.
chaque fois qu'elle l'estime nécessaire." Alors, M. le Président,
ça n'oblige pas que l'on applique chaque fois. Prenons l'exemple du
comté de Terrebonne. On ne sera pas obligé, si les membres de la
commission ne le jugent pas nécessaire, d'appliquer le 40 p.c. de
différence, mais, selon la consistance du projet de loi et de l'article
9, surtout de la motion que nous présentons, c'est laissé au bon
plaisir de la commission.
A ce moment-là, je ne vois pas pourquoi on ne peut pas ajouter 40
p.c. et lui laisser cette possibilité. Je le dis et je le
répète, pour ne pas retarder les travaux de cette Cahmbre: Quand
le député de Terrebonne a fait allusion, tout à l'heure,
à cette marge de 25 p.c. en disant: Au fédéral, c'est ce
qu'ils ont accepté, eh bien, j'ai aussi connu le fédéral
qui est evnu englober les comtés de Dorchester, Bellechasse et Montmagny
dans un seul comté et, lors de la réforme électorale
je ne veux pas entamer une bataille juridique sur cette question
on a fait diminuer d'un comté la représentation
canadienne-française à Ottawa.
Nous venons d'avoir l'avis, que cette année encore, nous
diminuerons d'un comté. Nous
allons maintenant avoir dans la province de Québec, au
fédéral, 73 comtés.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. DUMONT: Si nous étudions sérieusement le cas pour
donner plus de latitude à cette commission, les 40 p.c. ne seraient pas
une obligation, mais permettraient à loisir à cette commission de
les appliquer là où c'est nécessaire, selon les
représentations que nous pourrions faire. Là je prends encore en
exemple les comtés qui environnent le comté de Wolfe, comme
dirait le député de Bonaventure, où il n'y a qu'à
peu près 10,000 électeurs. C'est un autre comté qui va
disparaître et pourtant il y a un député qui fait son
possible, le comté de Wolfe va disparaître...
M. LEVESQUE: Quel comté?
M. DUMONT: ...et il semble y avoir un bon représentant...
M. LEVESQUE: J'ai compris Bonaventure.
M. DUMONT: Comme dirait le député-ministre...
M. LEVESQUE: Ah! J'ai peur pour mon comté.
M. DUMONT: J'ai parlé du comté de Wolfe...
M. LEVESQUE: Ah! Très bien.
M. DUMONT: ...et à ce moment-là on dit que...
M. LEVESQUE: Mégantic.
M. DUMONT: Oh! A 35,000 électeurs, je ne parle pas pour mon
comté, mais je voudrais que des représentants de chaque
comté puissent faire à la commission des représentations
véritables. Si on donnait cette marge de 40 p.c, ça n'engagerait
pas la commission, mais ça permettrait à loisir de l'appliquer
là où il pourrait y avoir une injustice, par exemple, pour le
député des Iles-de-la-Madeleine. Tout le monde sait en cette
Chambre, y compris les journalistes, que le député des
Iles-de-la-Madeleine, nous voulons le garder avec nous. Il fait rire
l'Assemblée nationale, c'est plaisant. Nous voulons le garder...
M. LACROIX: C'est votre meilleure.
M. DUMONT: Nous ne le savions pas, mais il était rendu avec nous
autres. Voyez-vous, M. le Président, que les 40 p.c. ont de
l'influence?
Or, M. le Président...
M. LACROIX: ...parler en mon nom.
M. DUMONT: Comme le député de Terrebonne l'a
mentionné tout à l'heure, sur le territoire de la baie James il
n'y aura pas une grande population. Si on laisse les 25 p.c, on va être
loin de cette marge qu'on accorde dans une loi et qu'on ne pourra pas
appliquer. Si on attend qu'il y ait une marge de 25 p.c. on n'est pas
prêt d'avoir un comté dans cette région. Et c'est la
même chose pour le parc Forillon. C'est la même chose à
travers la province de Québec, et pas seulement à cause des
comtés ruraux ou semi-ruraux. On voudrait donner plus de latitude
à cette commission, qui, avec ces 40 p.c, empêcherait au moins
certains comtés d'être bannis immédiatement ce soir par ce
projet de loi.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aimerais apporter un autre
point de vue pour renforcer la position et l'amendement de l'honorable
député de Rouyn-Noranda. M. le Président, le rôle du
député a été très bien décrit par le
député de Rouyn-Noranda, le député de
Mégantic. Le député de Chicoutimi, ce soir, en a fait un
tour d'horizon et je n'ai pas à revenir sur le sujet, parce qu'il a
été entièrement et très bien couvert.
M. le Président, il y a aussi le cas où un
député accède à un ministère. On n'en a pas
parlé en cette Chambre mais, si un député d'un
comté rural accède à un ministère, comparativement
à un député d'un comté urbain, il y a une
énorme différence. Il y a des comtés ruraux de 36,000 ou
38,000 électeurs. Je le sais, je représente un comté de
37,000 électeurs à l'heure actuelle, et le comté
était représenté dans l'ancien gouvernement par un
ministre. Posons-nous une question: Est-ce qu'un ministre qui est
député d'un comté rural et qui a un ministère
important peut s'occuper adéquatement de son ministère et
efficacement de son comté? Je pense que les membres de l'ancien
gouvernement, dont les représentants sont assis à notre droite,
en savent quelque chose.
Il y a peut-être bien des facteurs à l'heure actuelle qui
ont fait qu'à la dernière élection il y a eu un changement
aussi radical dans le Québec. Or, M. le Président, nous savons
que la division des circonscriptions électorales mérite
d'être amendée. Des comtés, à l'heure actuelle, ont
à peine 6,000 électeurs alors que d'autres en ont 80,000. Mais
tout de même il ne faudrait pas partir d'une exagération pour
aller vers une autre.
Je pense que le député d'un comté rural, qui veut
s'occuper de son comté et le mener à bien un comté
rural qui a 36,000 à 40,000 électeurs, c'est déjà
l'équivalent d'un ministère la personne qui a un
comté de cette dimension et de cette population à
représenter ne peut accéder à aucun ministère et
être capable de mener son ministère à bien. Voyez-vous le
problème que cela peut poser? Il y aurait à peu près
uniquement les représentants des comtés urbains qui pourraient
être ministra-
bles, M. le Président.
Lorsque nous avons, comme dans le comté de Beauce, 46
municipalités: Lorsque nous avons, comme dans la ville de
Montréal...
M. VEILLEUX: On va les fusionner bientôt.
M. ROY (Beauce): Quand bien même vous les fusionneriez, cela ne
changera pas les problèmes. La population demeurera avec les mêmes
problèmes, M. le Président. Cela ne change absolument rien. Ces
n'est pas avec les fusions que l'on va régler les problèmes.
C'est une question qui est discutable dans un autre ordre d'idées.
Prenons, par exemple, la ville de Montréal ou la ville de
Québec où il y a une chambre de commerce pour le Montréal
métropolitain et une chambre de commerce pour le Québec
métropolitain. Quand vous arrivez dans les comtés ruraux, vous
pouvez avoir 15 ou 20 chambres de commerce. Il en est de même pour toutes
les autres associations, les dirigeants d'entreprises et tous les autres
mouvements qui, à un moment donné, ont leur mot à dire
dans l'administration et la gestion des affaires publiques.
Si on ne veut pas écraser les députés ruraux, si on
veut permettre que toute la population du Québec soit
représentée équitablement, je ne crois pas à la
démocratie uniquement par le nombre. La démocratie doit exister
selon les besoins et selon les possibilités des personnes aptes à
les représenter. Le Québec est un grand territoire où il y
a des régions qui sont très peu peuplées. Il y en a qui
sont plus peuplées et il y en a, comme la région
métropolitaine de Montréal, où, évidemment, il y a
une grande population. H ne faudrait pas que, dans les régions rurales
où la population est faible, où la population est
éloignée, le député ne puisse pas rencontrer ses
électeurs à cause des distances. Ses électeurs sont des
contribuables qui ont les mêmes droits et qui doivent avoir les
mêmes privilèges que les citoyens résidant dans les grands
comtés urbains, M. le Président. Je pense que c'est une question
de justice.
Ce n'est pas de la faute du Parti québécois, ce n'est pas
la faute de l'Union Nationale ni du Parti libéral, ni la nôtre si
le Québec est grand et s'il y a des régions qui sont peu
peuplées. D reste que c'est une question de fait. Vous allez prendre des
exemples en France et en Angleterre, vous allez prendre des exemples ailleurs,
mais cela ne s'applique pas dans la province de Québec. Je pense qu'on
devrait être assez logique pour arrêter de copier sur les autres,
pour essayer de trouver des solutions à nos problèmes, tels
qu'ils se présentent et pour faire face à la
réalité telle qu'elle est. C'est cela, je pense, que nous
devrions faire.
En France, il y a 520 députés et il y en a 575 en
Angleterre, alors que les territoires sont beaucoup plus petits qu'au
Québec. Dans sa partie peuplée, le Québec, à
l'heure actuelle, couvre déjà plusieurs fois la superficie de la
France. On devrait être conscient de ce fait. Si on veut
réellement donner justice et si on veut justement que la
démocratie survive dans la province de Québec, il nous
appartient...
M. HARVEY (Chauveau): On devrait être 50.
M. ROY (Beauce): Si vous voulez parler, vous le député de
Chauveau vous vous lèverez tout à l'heure, vous demanderez la
parole et vous ferez un discours.
M. HARVEY (Chauveau): Certainement.
M. ROY (Beauce): Actuellement, c'est moi qui ait le droit de parole.
M. HARVEY (Chauveau): Au prorata de la France, on devrait être 50
députés. Votre intervention ne tient pas de la logique
même.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. HARVEY (Chauveau): N'allez pas chercher vos exemples en France;
restez sur la gravelle... de grâce!
M. ROY (Beauce): Si le député de Chauveau s'ouvrait les
oreilles de temps en temps...
M. HARVEY (Chauveau): Je vais revenir tout à l'heure.
M. ROY (Beauce): ... il se serait rendu compte que j'ai parlé de
la France par rapport à l'étendue territoriale. Je n'ai pas fait
de comparaison avec la population de la France; j'ai fait une comparaison avec
l'étendue territoriale. Comme d'habitude, le député de
Chauveau ne comprend jamais rien...
M. HARVEY (Chauveau): Vous allez très bien. Continuez...
M ROY (Beauce): ... et ne fait que nous interrompre, M. le
Président.
M. HARVEY (Chauveau): Je vais revenir tout à l'heure.
M. ROY (Beauce): Je termine mes observations là-dessus.
M. HARVEY (Chauveau): Je vais vous parler, moi. Vous venez!
M. ROY (Beauce): Je termine mes observations là-dessus. Je pense,
M. le Président, qu'il est de notre responsabilité, ici ce soir,
étant donné que nous avons un mandat à donner à
cette commission qui sera formée, de lui donner un cadre suffisamment
grand pour être capable de tenir compte des observations que j'ai
mentionnées tout à l'heure et que le député
de Rouyn-Noranda et le député de Mégantic ont
mentionnées. Si nous voulons, comme je le disais tout à l'heure,
que notre démocratie au Québec on se gargarise beaucoup de
démocratie au Québec, à l'heure actuelle ne soit
pas seulement des mots, mais que ça existe également dans les
faits, je pense que l'amendement présenté par le
député de Rouyn-Noranda devrait être adopté.
Si cet amendement est adopté, je pense qu'il pourrait permettre
de corriger les lacunes qu'il y a, à l'heure actuelle, dans la
représentation entre les différents territoires, mais de
façon que chaque électeur du Québec puisse rencontrer son
député sans avoir à faire 200, 300, 400 milles, et sans
être obligé de prendre une entrevue, parfois quinze jours ou trois
semaines d'avance, pour être capable de le rencontrer.
Or, sur ce point j'aurais une autre demande à faire. Je pense,
étant donné que cela concerne tout le Québec, que le
gouvernement, qui se veut démocratique, devrait permettre même
à ses députés, lors du vote qui sera pris tout à
l'heure, un vote libre de façon à permettre aux
députés ministériels comme à ceux de tous les
autres partis...
M. HARVEY (Chauveau): On est toujours libre.
M. HARDY: Toujours libre.
M. ROY (Beauce): ... de voter librement sur ce projet de loi. J'aimerais
pouvoir croire l'honorable député de Terrebonne...
M. HARDY: M. le Président, une question de règlement. Le
président n'a pas le droit de supposer que les députés de
cette Chambre ne sont pas libres de donner leur vote.
M. LE PRESIDENT: Sur un point de règlement, ce n'est pas le
président, c'est l'opinant...
M. ROY (Beauce): Je n'ai pas compris, M. le Président...
M. SAMSON: Est-ce que cela veut dire que vous allez donner
entière liberté à tous vos députés de voter
selon leur conscience, comme l'honorable chef de l'Opposition...
M. HARDY: M. le Président, je n'ai aucun pouvoir de donner la
liberté aux députés de cette Chambre. Tous les
députés possèdent la liberté de voter comme ils
l'entendent et il n'appartient pas à un autre député de le
déclarer...
M. PAUL: ... demain...
M. ROY (Beauce): Alors, je vais demander au député de
Terrebonne, tout à l'heure, de bien vouloir faire cette
déclaration solennelle, juste avant le vote, pour tâcher de
permettre aux députés d'être bien informés de leur
privilège.
Alors, M. le Président, je termine là-dessus, mais encore
une fois, je sollicite la collaboration et la compréhension du
gouvernement qui a la responsabilité, à l'heure actuelle, de la
rédaction et de la présentation de ces projets de loi, qui a la
majorité en Chambre, de bien peser la décision qui sera prise
tout à l'heure, parce que cette décision sera lourde de
conséquences dans l'avenir politique, économique et social du
Québec, j'irai même jusque-là, afin de permettre aux
populations éloignées de se faire représenter
adéquatement, afin de permettre aux populations éloignées
de rencontrer leur représentant élu, pour qu'il puisse, lui
aussi, les consulter à l'occasion.
On a parlé d'animation, tout à l'heure. Cela va bien faire
de l'animation quand les députés veulent parler à leur
population, qui est groupée, par exemple, dans un territoire de deux ou
trois milles carrés ou même cinq milles carrés, mais un
autre député qui a les mêmes obligations devant ses
électeurs et qui a un territoire de 200 à 300 milles, comment
voulez-vous qu'il fasse de l'animation? C'est un tout autre
problème.
Encore une fois, je demande au gouvernement de bien penser à ce
à quoi il s'engage et de bien vouloir adopter l'amendement qui a
été présenté par le député de
Rouyn-Noranda.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Nicolet.
M. VINCENT: M. le Président, très brièvement, je
voudrais participer à ce débat sur l'article 9 et vous dire que
j'ai eu l'occasion, comme député siégeant dans une autre
Chambre, de participer à des débats justement sur un article qui
se lisait à peu près comme celui-ci. Tout en admettant qu'il y a
une énorme différence dans le travail de représentation
d'un député qui représente un milieu rural ou un
comté rural et un comté urbain, je voudrais demander à la
commission qui sera chargée de faire ces délimitations
électorales d'agir en conséquence lorsqu'il s'agira
d'établir les districts électoraux.
Je voudrais également vous dire qu'à l'occasion des
discussions dans une autre Chambre, nous avons discouru pendant des heures et
des heures sur la possibilité d'augmenter ce pourcentage, qui
était de 25 p.c, à 33 1/3 p.c. Mais laissez-moi vous dire que ce
pourcentage, même si nous avions obtenu, à la Chambre des communes
du Canada, de l'inscrire dans la législation à 33 1/3 p.c, ceci
serait devenu simplement un chiffre placé là sur le plan
théorique.
Mais en ce qui me concerne, je suis satisfait de ce pourcentage de 25
p.c. pour autant que, dans la pratique, la commission l'utilise à bon
escient pour faire cette distinction qui existe entre les comtés ruraux
et les comtés urbains. Inutile de faire inscrire dans l'article 9,
un
pourcentage de 40 p.c. si ça devient seulement un pourcentage
théorique qui ne serait à peu près jamais utilisé
par la commission. Qu'on leur donne un pourcentage comme celui qui est
suggéré dans la législation, un pourcentage de 25 p.c. et
à l'intérieur de ce pourcentage de 25 p.c, la commission peut
prendre des décisions qui correspondront à l'argumentation des
députés qui siègent en cette Chambre et aux désirs
des électeurs de nos comtés respectifs.
Donc, en ce qui me concerne, je ne puis accepter qu'on place
théoriquement un chiffre de 40 p.c. Je suis satisfait de ce chiffre de
25 p.c. et, encore une fois, je demande à la commission, sur le plan
pratique, de l'utiliser à la lumière de l'expérience
vécue lors du remaniement de la carte électorale au
fédéral où les 25 p.c. ont été trop souvent
malheureusement seulement un chiffre qui était là dans la
législation, dont on ne s'est pas servi, mais je suis convaincu à
l'avance qu'ici, pour la carte électorale du Québec, on se
servira de ce pourcentage de 25 p.c.
M. PICARD: M. le Président, je serai très bref. Quant
à l'amendement proposé par le député de
Mégantic je crois plutôt que c'est le député
de Rouyn-Noranda qui l'a présenté au cours de la
discussion, on a fait mention tout à l'heure, je crois que c'est le
député de Beauce, de petits pays comme l'Angleterre, par exemple,
qui avait 500 ou 600 députés. Alors, moi, à entendre tous
les députés des comtés ruraux se plaindre d'avoir un trop
grand territoire à couvrir, trop de problèmes à
résoudre, trop de personnes qui viennent les voir, trop de lettres qu'on
leur écrit, alors je pense qu'il n'y a qu'une solution et c'est
celle-ci...
M. DUMONT: M. le Président, sur une question de
privilège.
M. PICARD: ... elle est conditionnée ma solution, par
exemple.
M. DUMONT: Sur une question de règlement. On est en train
d'affirmer que nous avons dit que nous recevions trop d'électeurs. Mais,
nous n'en recevons jamais trop, tous les gens sont bienvenus.
M. SAMSON: Vous ne les recevez pas tous, par exemple.
M. DUMONT: Nous en recevons beaucoup.
M. SAMSON: Nous les recevons tous, nous autres.
M. PICARD: Bien, si vous faites de la publicité pour en avoir
plus, arrêtez de vous plaindre. La seule solution possible, M. le
Président, pour avoir une représentation équitable
à l'Assemblée nationale elle est conditionnée, ma
suggestion c'est qu'on augmente le nombre de députés
à 600, mais qu'on réduise les salaires à $3,000 par
année et probablement qu'on aura des sessions qui dureront moins
longtemps.
M. LOUBIER: M. le Président, juste deux mots. Je me
préoccupe assez peu des 25 p.c. ou des 40 p.c. Je suis satisfait du
deuxième paragraphe de l'article 9. D'ailleurs, le député
de Terrebonne l'a souligné à bon escient tout à l'heure,
c'est que ceux qui m'ont précédé ont vanté la
compétence et les mérites du président de la commission et
des autres commissaires. Alors justement, en vertu du deuxième
paragraphe de l'article 9, nous donnons au président et aux commissaires
la latitude voulue pour juger d'une façon spécifique des besoins
de tel ou tel comté sur le plan socio-économique, ou sur le plan
socio-culturel, ou sur le plan des caractéristiques de chacun des
comtés.
Partant de là, M. le Président, j'accepte des remarques
qui ont été faites par le député de Beauce plus
spécifiquement et par ceux qui ont parlé pour le Parti
québécois. Et il y a, dans toutes ces remarques,
évidemment matière à réflexion. Je pense que le
président et les commissaires pourront, à même ces
remarques, marcher à l'intérieur de balises sociologiques ou
économiques qui vont permettre à cette commission de traiter au
mérite des cas exceptionnels et particuliers. D'ailleurs, c'est
tellement bien dit dans le deuxième paragraphe de l'article 9. Je me
permets de le citer très rapidement: "La commission peut
s'écarter des règles énoncées au premier
alinéa."
Or, M. le Président, il ne sert à rien, avec des
trémolos dans la voix, de s'apitoyer sur un comté en particulier.
Ce n'est pas préjuger de la disparition d'un comté plus qu'un
autre ce soir puisque tout est dirigé au deuxième paragraphe
où on laisse la pleine latitude à la commission d'évaluer
les caractéristiques ou les éléments qui feraient,
peut-être, je cite un exemple, que le comté de Wolfe pourrait
demeurer le comté de Wolfe à cause de certaines
caractéristiques qui sont mentionnées dans le deuxième
paragraphe de l'article 9. Ce serait le même phénomène pour
le comté des Iles-de-la-Madeleine ou d'autres comtés.
M. le Président, je pense que nous devons féliciter
d'abord le député de Terrebonne d'avoir signalé, tout
à l'heure, lorsqu'il répondait à un opinant de
l'Opposition, que le deuxième paragraphe de l'article 9 donne cette
sécurité et, en même temps, permet à la commission
d'exercer une certaine discrétion dans les cas d'exception. Pour ma
part, je ne me sens pas prisonnier de ces 25 p.c., en plus ou en moins. Je m'en
remets à 100 p.c, au deuxième paragraphe, à la
compétence, comme on l'a signalé, du président de la
commission, au bon jugement des membres de la commission. De toute
façon, le rapport reviendra devant les députés de cette
Chambre et nous pourrons, à ce moment-là, discuter du projet qui
nous aura
été remis et le faire d'une façon beaucoup plus
sereine, beaucoup plus intelligente puisque nous aurons au moins devant nous un
instrument de travail qui nous aura été soumis après
réflexion, analyse par des experts.
M. HARDY: Dans le même sens que l'a souligné le
député de Bellechasse, je pense qu'il faut que la loi laisse une
certaine latitude je pense qu'elle a été
rédigée dans ce sens-là aux commissaires. Comme
vient de le dire le chef de l'Opposition officielle, lorsque la commission
remettra son rapport, si les députés ou certains
députés considèrent que les commissaires n'ont pas
appliqué les critères d'une façon valable, si, par
exemple, ils ne se sont pas servis du dernier paragraphe d'une façon
judicieuse dans certains cas, si, par exemple, on a fait un trop grand
comté, une population trop dispersée en n'utilisant pas le
mécanisme du deuxième paragraphe, les députés
auront toujours le loisir de proposer autres choses, de proposer des
amendements. Alors, je pense que l'article 9, tel que rédigé,
correspond à toutes les inquiétudes que l'on peut formuler.
D'abord, il respecte le critère d'un électeur, un vote; il fait
des comtés à dimension raisonnable puisque nous pouvons avoir,
dans les milieux ruraux, des comtés de 24,000 électeurs et,
enfin, il prévoit que nous pourrons avoir des comtés plus
restreints que 24,000 électeurs, des plus petits comtés lorsque
la population est vraiment dispersée. Je pense que l'article 9
répond vraiment à toutes ces inquiétudes, à tous
ces problèmes. C'est pourquoi je demande le vote sur l'amendement de
l'honorable député de Rouyn-Noranda.
M. LE PRESIDENT: Adopté sur division. Vous voulez un vote.
M. SAMSON: Le ministre de l'Education vient voter avec nous! Je voulais
vous le faire remarquer.
M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent
bien se lever.
M. DUMONT: Le député de Matapédia a voté
avec nous !
M. LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre veuillent bien se lever.
La motion d'amendement est rejetée.
M. PAUL: M. le Président, après avoir entendu les
remarques qui ont été faites par beaucoup de préopinants,
je me demande si, pour répondre aux objectifs ou aux buts visés
par chacun des participants à ce débat sur l'article 9, il n'y
aurait pas avantage à élargir la liberté d'action,
d'interprétation, d'orientation, d'analyse et d'objectivité de
MM. les membres de la commission. Nous retrouvons au paragraphe 2, à la
troisième ligne, le mot "exceptionnelles". Alors, je suis sûr que
le député de Charlevoix se trouve un peu traumatisé par
l'interprétation pratico-pratique que MM. les membres feront de ce
terme. C'est pourquoi, dans le but de réunir à peu près
toutes les idées qui ont été exprimées ce soir, je
voudrais proposer qu'à la troisième ligne du deuxième
paragraphe de l'article 9 le mot "exceptionnelles" soit rayé pour
être remplacé par les suivants: "socio-culturelles,
socio-économiques".
Et nous continuons le texte tel que nous le retrouvons à
l'article 9.
Je souhaite, M. le Président, que cet amendement soit jugé
recevable par celui qui, ce soir, est le porte-parole du gouvernement. La
participation du député de Terrebonne comme je ne dirai
pas parrain défenseur d'un projet de loi constitue un
précédent heureux dans notre Assemblée nationale. C'est la
première fois que cela se produit. J'espère que le gouvernement,
occasionnellement et assez souvent, fera appel à certains
secrétaires parlementaires qui pourront présenter des projets de
loi avec beaucoup plus de compétence que peuvent le faire certains
ministres.
M. le Président, je vous donne le texte de mon amendement. Est-ce
que tous les pages sont partis? Je vais faire le page, M. le Président.
J'aimerais que le député de Terrebonne me fasse connaître
ses commentaires sur cet amendement.
M. HARDY: M. le Président, je serais peut-être prêt
à faire...
M. PAUL: Au sens du code civil.
M. HARDY: Oui, justement.
M. PAUL: D'accord: 1,918 et suivants.
M. HARDY: Je n'aime pas plus qu'il le faut l'introduction des mots
"socio-culturelles et socio-économiques". Maintenant, si c'était
la volonté des députés... Mais il y a une chose à
laquelle je tiens absolument, par exemple, c'est que le mot "exceptionnelles"
demeure. Parce qu'encore là c'est toute l'économie de l'article 9
qui se trouve changée si on enlève le mot "exceptionnelles". Je
reviens toujours au principe de base. Le principe de base demeure que l'on doit
avoir un électeur, un vote. C'est le principe de base. Après
cela, on fait des exceptions. On dit que, suivant la densité de la
population, il peut y avoir un écart de 25 p.c. Une troisième
exception, qui vient préciser davantage la deuxième exception,
c'est que, pour des raisons exceptionnelles d'ordre démographique,
d'accessibilité, de faible densité on peut aller au-delà
de 25 p.c. L'écart pourrait être de plus de 25 p.c. en fait. Mais
il faut vraiment que ce soit pour des considérations exceptionnelles. Si
le mot "exceptionnelles" ne demeure pas là, pourquoi 25 p.c? Il y aurait
une certaine contradiction à l'intérieur même de l'article
9 si on enlevait le mot "exceptionnelles".
Quant à la question socio-culturelle et
socio-économique, j'aimerais peut-être que d'autres
députés se prononcent. Moi, j'avoue franchement que je n'y vois
pas une raison absolue de m'y opposer mais je n'aime pas tellement cela.
M. PAUL: Les termes sont trop savants!
M. HARDY: Non, pas tellement. Je pense que je réussis quand
même à comprendre un peu la substance de ces vocables.
M.PAUL: Vous? Ah oui! Mais beaucoup ne les comprennent pas!
M. HARDY: Je me demande s'il est sain d'introduire dans
l'élaboration d'une carte électorale ces éléments
de culture, de sociologie, d'économie. Si on se rend à
l'extrême logique de ce principe, ça voudrait dire qu'à un
moment donné, si on retrouve des gens d'un certain niveau
économique sur le territoire, on essayerait de les circonscrire pour
former un comté de gens qui sont des assistés sociaux, par
exemple, ou si dans un autre coin, on peut simplement mettre des Italiens
ensemble, on ferait un comté d'Italiens. Je pense qu'à ce
moment-là on crée, en quelque sorte, peut-être des ghettos;
je ne pense pas que ce soit sain pour la démocratie.
Maintenant, je suis bien disponible à me laisser convaincre, mais
ma première réaction, c'est que je ne suis pas tellement
favorable à cette introduction.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai
écouté l'argumentation du député de Terrebonne. Je
vous avoue qu'elle ne m'a pas convaincu, mais je ne vais pas reprendre tout ce
que j'ai dit ce soir en deux courtes heures. Je veux attirer simplement
l'attention du député et peut-être lui proposer une autre
formulation.
Le député prétend que le fait de radier le mot
"exceptionnelles" changerait l'économie de l'article. Je ne pense pas
que cela soit le cas, mais, pour enlever tout soupçon, toute
inquiétude au député de Terrebonne, je lui proposerais
ceci: "La commission peut, le cas échéant, s'écarter des
règles énoncées au premier alinéa pour des
considérations d'ordre démographique, géographique,
socio-culturel et socio-économique." Je crois que le mot
"exceptionnelles je l'ai dit lors de mon intervention en seconde lecture
risque de cristalliser l'opinion des commissaires eux-mêmes qui
vont voir ce mot un peu comme une sorte de barrière, comme une sorte
d'interdit. Cela peut, si vous voulez, paralyser ou, si je puis m'exprimer
ainsi, limiter le champ de leur enquête et de leurs
réflexions.
Si l'on mettait, par exemple: "La commission peut, le cas
échéant..." cela respecterait l'économie de l'article,
sans pour autant fixer dans l'esprit des futurs commissaires cette idée
que l'on ne peut tenir compte des facteurs qui sont énoncés
après que "dans des cas exceptionnels". Le mot "exceptionnelles" a
déjà une signification très forte et il comporte
déjà en soi l'idée d'exception, au sens d'écarter
et de n'examiner que dans des cas extrêmement particuliers.
J'ai l'impression qu'en acceptant l'expression "le cas
échéant" cela respecte l'économie de l'article: cela
enlève au mot "exceptionnelles" son caractère trop restrictif
à mon sens.
Quant aux autres termes que je voudrais voir introduire et qui
réfèrent aux critères précis que nous avons
examinés à la commission de l'Assemblée nationale, j'y
tiens, parce que quand nous en avons parlé, on s'est toujours
référé à un ensemble de critères.
J'ai dit tout à l'heure, en seconde lecture, que le premier
ministre nous avait présenté sa législation avant que la
commission n'eût l'avantage de siéger à nouveau et de
déterminer les critères qui allaient servir aux futurs
commissaires. Et je ne pense pas que ce serait introduire un
élément très nouveau dans cette législation, que
d'insérer les mots "socio-culturelles" et "socio-économiques", ne
serait-ce que pour faire penser aux commissaires qu'ils ont à tenir
compte de ces réalités qui dépassent de loin celles de la
démographie et de la géographie.
Alors je ne sais pas si mon plaidoyer que je ne veux pas prolonger a
convaincu le premier ministre. Je propose cette formulation: La commission
peut, le cas échéant, s'écarter des règles
énoncées au premier alinéa, pour des considérations
d'ordre démographique, géographique, socio-culturel,
socio-économique telles que la très faible densité de la
population, le taux relatif de la croissance, la population, autres choses,
etc.
M. BOURASSA: Je pourrais tenir compte de toutes les opinions qui sont
assez diverses: "pour des considérations spéciales", si
"exceptionnelles" paraît peu conforme.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, est-ce que le premier
ministre serait d'accord pour qu'au mot "exceptionnelles" on substitue
l'expression "le cas échéant"?
M. BOURASSA: Particulières. "Pour des considérations
particulières".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, "s'écarter des règles
pour des considérations particulières".
M. BOURASSA: Est-ce que ça fait l'unanimité?
M. LAURIN: A cette décision, il me semble qu'il conviendrait que
tous les autres députés s'expriment également.
M. HARDY: IL n'y a pas de décision de prise, ce sont des
échanges.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Quitte à me soumettre à l'examen
une fois adopté, je négocie actuellement avec le premier
ministre.
M. LAURIN: II faudrait que ce soit une négociation
quadripartite.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous vous associez mal à ces
négociations.
Alors, M. le Président, je dirai ceci: La commission peut, le cas
échéant, s'écarter des règles
énoncées au premier alinéa, pour des considérations
particulières d'ordre et le reste, en y ajoutant "socio-culturelles" et
"socio-économiques". Alors je soumets ça au premier ministre
quitte à y revenir après avoir connu l'avis de nos
partenaires.
M.LAURIN: M. le Président, le député de Terrebonne
invite d'autres députés à se faire entendre sur une
question qu'il dit ne pas vouloir décider lui-même tout de suite.
Il me fait grand plaisir de répondre à cet appel.
En fait, je ne puis y résister et je lui réponds: Adsum.
En réalité, je suis tout à fait d'accord avec l'esprit qui
a animé les propos du député de Terrebonne en voulant
garder le mot "exceptionnelles". Autrement, si l'on ajoutait d'autres
critères, ce serait courir le grave danger de diluer le principe qu'il a
qualifié lui-même de premier, de fondamental, d'essentiel, qui est
celui d'un homme, un vote et qui constitue l'assise même des principes
démocratiques.
Il me semble qu'en ajoutant autre chose, surtout ces adjectifs qui sont
moins forts que "exceptionnelles", comme, par exemple, "spéciales" ou
"particulières", on ouvre la voie à des interprétations
qui, justement, présentent un grave danger.
M. HARDY: Le député de Bourget me permet-il une
question?
M. LAURIN: Oui.
M. HARDY: Sans être linguiste, je me demande vraiment si, dans le
contexte, le mot "spéciales" n'aurait pas, à toutes fins
pratiques, le même effet que le mot "exceptionnelles".
M. LAURIN: J'aimerais mieux le mot "spéciales", que le mot
"particulières" mais je préfère encore le mot
"exceptionnelles".
M. BOURASSA: On va rassembler tout le monde avec "spéciales".
M. LAURIN : Ceci indique bien que c'est dans des circonstances
véritablement majeures, qui tomberaient sous le sens des trois
commissaires, auxquelles le sain entendement ne pourrait échapper. Ce
n'est qu'à ces conditions-là qu'on consentirait des exceptions.
Par ailleurs, M. le Président, j'appelle l'attention du
député de Terrebonne et du premier ministre sur un autre
aspect.
Si nous voulons ajouter "critères socioculturels ou
socio-économiques", il s'agit de critères qu'il est
extrêmement difficile d'évaluer pour ne pas dire quantifier alors
que le critère qu'a retenu le gouvernement, et qui est à la base
de son projet de loi, est mathématique. En plus, il a l'immense avantage
de rallier, autour de lui, l'opinion de tous les spécialistes en la
matière. Pour ces deux raisons, pour éviter ces deux dangers, le
risque de dilution et, deuxièmement, le risque d'avoir beaucoup de
difficultés à quantifier, à évaluer d'autres
critères que ce critère mathématique, il me semble que le
gouvernement devrait garder sa formulation première et garder
"exceptionnelles".
En réalité, nous avions même l'intention de proposer
un amendement afin de limiter d'une façon plus stricte, d'une
façon plus précise le nombre éventuel de ces exceptions.
Après une étude quand même assez fouillée de la
carte du Québec, il nous a semblé, d'après les divers
comtés que nous avons pu examiner, que le nombre de ces exceptions ne
devrait en aucune façon dépasser cinq.
Car, si l'on dépassait trop ce chiffre, on mettrait en danger le
principe même qui préside à la révision que le
gouvernement tente d'effectuer avec le présent projet de loi. Nous ne
proposerons pas notre amendement afin de limiter à cinq le nombre des
exceptions, mais, en retour, il nous semble que le gouvernement devrait en
rester à sa formulation première.
M. BOURASSA: Je ne sais pas si on ne pourrait pas faire
l'unanimité avec un terme. Le député a dit que
"spéciales" lui paraissait plus acceptable que "particulières" Je
pense que cela ne change pas l'esprit de l'article, quand même.
M. LAURIN : En espérant que les commissaires lui donnent le
même sens qu'à "exceptionnelles"
M. HARDY: Peut-être qu'avec ce qui a été dit on
pourrait arriver à un consensus en acceptant le mot "spéciales"
dans l'amendement du député de Maskinongé et en laissant
tomber les vocables "socio-économiques et socio-culturelles".
UNE VOIX: D'accord.
M. HARDY: "Spéciales" au lieu de "exceptionnelles".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Remarquez, M. le Président, on ne va
pas s'instituer à nouveau en filibustier, mais je tenais
énormément à mes expressions "socio-culturelles" et
"socio-économiques" en raison de la démonstration fort brillante
et fort savante que j'ai faite et fort longue, dira le ministre des Affaires
culturelles. Mais, s'il n'y a pas moyen de convaincre le gouvernement, on va
laisser cela à l'intelligence des commissaires qui, j'en suis
sûr,
vont lire avec énormément d'attention mon long et brillant
discours.
M. PAUL: C'est ça. Adopté, M. le Président.
M. LEGER: M. le Président, concernant cette motion, je dois me
prononcer contre, parce que le mot "spéciales" veut tout simplement dire
qu'il y aura une différence avec les autres, mais ce n'est pas une
exception. Il peut y avoir la moitié des comtés qui auraient un
traitement spécial. Tandis que le mot "exceptionnelles", cela veut dire
que c'est une chose qui peut arriver très rarement, en ayant soin de
dire: C'est par exception seulement qu'on peut le permettre. Je pense qu'il y a
une différence fondamentale entre le mot "spéciales" et le mot
"exceptionnelles". Pour une fois qu'on est tellement d'accord sur le projet
présenté par le gouvernement, je pense qu'il devrait s'en tenir
à sa formulation de "exceptionnelles", si on veut réellement
atteindre le but qu'on poursuit avec cette réforme.
M. LOUBIER: M. le Président, si l'on évite les
discussions, parce que vous savez, Quillet, Larousse, je n'ai pas encore tout
feuilleté ça. Si l'on veut discuter, je trouve que la motion
d'amendement proposée par le député de Maskinongé
était bien fondée et très bien rédigée, sauf
que, dans les circonstances, je me rallierais à l'opinion émise
par celui qui m'a précédé et pour régler ça
rapidement, liassons ça tel quel "exceptionnelles," ça va
convenir.
M. PAUL: M. le Président, je retire ma motion avec le
consentement...
M. HARDY: L'article 9 est adopté tel quel?
M. CHARRON: M. le Président, oui, je vais garder mon amendement
pour après le...
M. LEVESQUE: Qu'on fasse rapport.
M. BLANK (président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité n'a pas
fini de délibérer et qu'il demande la permission de siéger
à nouveau.
M. LAVOIE (président): Quand siègera-t-il? Même
séance?
UNE VOIX: En vertu de quel article? M. LE PRESIDENT: Article 331. M.
BLANK: Article 331.
Anniversaire du premier ministre
M. LEVESQUE: M. le Président, j'ai l'honneur de présenter
une motion de félicitations à l'endroit de l'honorable premier
ministre qui célèbre à cet instant son
trente-huitième devrais-je le dire anniversaire de
naissance. Comme dans toutes les occasions, même où il pourrait se
reposer, on le retrouve toujours au travail, et encore maintenant il aimerait
probablement célébrer son anniversaire dans des circonstances un
peu plus reposantes.
Bien détendu, cependant avec ce même esprit de travail qui
le caractérise, avec tout le dynamisme qu'il possède, il continue
allègre, avec cette jeunesse de 38 ans, à servir sa province. Il
me fait plaisir, au nom de l'équipe ministérielle je suis
convaincu qu'on se joindra à moi tout de suite de l'autre
côté de lui souhaiter une excellente carrière, de
lui formuler nos meilleurs voeux de bonne santé, de lui formuler tous
les voeux appropriés particulièrement en cette fin de session. Il
peut être assuré que les services immenses qu'il rend à la
province sont appréciés, non seulement par ceux qui sont ici ce
soir, mais par la population du Québec dans son ensemble.
Nous voulons donc, M. le Président, dire à notre premier
ministre, sans flagornerie, combien nous l'estimons, parce qu'il est estimable.
C'est un homme qui est connu maintenant plus que jamais, non seulement pour cet
esprit de travail dont j'ai parlé, mais pour cette grande
compréhension des problèmes humains et sa tolérance si
remarquable.
Alors, je suis particulièrement fier du rôle que j'ai
à jouer ce soir. Le vocabulaire que j'utilise n'est pas celui du
député de Chicoutimi. Mais, tout de même, je suis convaincu
qu'il essaie de traduire, le mieux possible, les sentiments qui nous animent
tous, particulièrement de ce côté-ci de la Chambre
où nous avons apprécié de travailler avec le premier
ministre chaque jour, de suivre la direction qu'il imprime à son parti
et en même temps à sa province.
Encore une fois, M. le premier ministre, tous les meilleurs voeux de
l'équipe ministérielle, tous les meilleurs voeux de vos
collaborateurs. Au nom du Conseil exécutif, au nom de nos
collègues de l'Assemblée nationale, enfin et je suis
convaincu que nos bons amis de la tribune de la presse en seront heureux,
même s'ils sont silencieux, s'ils ne peuvent s'exprimer comme ils
aimeraient le faire, en cette occasion comme dans d'autres nous tous
ici, ce soir, nous nous associons pour rendre hommage au premier ministre et
lui souhaiter un joyeux anniversaire de naissance.
M. LOUBIER: M. le Président, les caprices du destin sont
absolument insondables mais parfois combien révélateurs. Le
destin se charge de me donner toujours un peu d'avance sur le premier ministre.
J'ai quelques mois de plus que lui. Deuxièmement, il est né sous
le signe du Cancer alors que je suis né sous le signe de la Balance,
Balance qui "balance" le Cancer, M. le Président.
Je voudrais m'associer d'une façon très spontanée
et très sincère, en mon nom personnel et au nom de mon
équipe, aux voeux qui
ont été formulés par le leader parlementaire du
gouvernement.
M. le Président, je pense que vous me permettrez bien de faire
une référence à l'horoscope de ce jour du premier
ministre. Je lirai ceci: "Bonnes dispositions intellectuelles. Faites le point
et prenez des résolutions constructives. Mais redoublez de prudence face
à l'adversité on s'est trompé, il fallait dire
à l'adversaire de même, si von sentiments sont en jeu.
Suivez votre emploi du temps et ne brusquez rien. Tenez compte des critiques
justifiées".
M. LEVESQUE: Est-ce authentique?
M. LOUBIER: C'est à la page 27 du Soleil, au bas de la page,
évidemment.
M. le Président, pour nos frères les Français, le
14 juillet, c'est la prise de la Bastille. Pour le premier ministre ou pour les
Québécois, pour plusieurs générations, le 14
juillet, ce sera la prise de la baie James.
Mais, pour tous les Québécois contemporains et plus
particulièrement pour tous les membres de cette Chambre, le 14 juillet,
c'est l'anniversaire du premier ministre actuel. Je redis ma
sincérité dans les sentiments et les voeux de bonheur, de
santé et de succès que j'exprime au premier ministre. Tout le
monde sait quelle est la complexité, la difficulté de sa lourde
tâche, surtout dans un Québec qui est assailli de défis sur
le plan social, sur le plan économique et sur le plan constitutionnel.
Notre considération et notre respect sont acquis au premier
ministre.
Je voudrais que mes voeux rejoignent très délicatement
madame Bourassa et les enfants qui auront, évidemment, à se
priver, peut-être demain, de la présence d'un mari et d'un
père. A ce moment-ci, vous me permettrez, avec une pointe d'ironie, de
dire à madame Bourassa, à travers les débats ou les
épreuves de la Chambre, épreuves dans tous les sens du mot, que
ce sera la faute de l'aumônier du premier ministre s'il est retenu en
Chambre, "l'abbé James".
M. SAMSON: M. le Président, nous nous associons également
à tous ces bons voeux qu'a reçus le premier ministre en ce jour
de son 38e anniversaire de naissance.
Je n'oserai pas lui demander: Comment vous sentez-vous en ce jour de
votre 38e anniversaire de naissance? J'aurais peur qu'il me réponde
50/50.
M. BERTRAND: Des bonnes mesures.
M. SAMSON: Le premier ministre fête ses 38 ans en un jour
mémorable qui est celui de la prise de la Bastille. C'est
peut-être à coups de 38 que nous avons assisté, ce soir,
à une tentative moderne de la prise de la Bastille. Cette tentative n'a
pas réussi grâce à l'arrivée de renforts et de
canonniers d'expérience.
Croyant qu'il pourrait être utile au premier ministre d'être
mieux armé afin de faire face à de futurs assauts contre sa
Bastille, nous souhaitons qu'il reçoive en cadeau un canon de
circonstance qu'il voudra sûrement utiliser à l'avenir.
Ceci dit, M. le Président, nous offrons nos meilleurs voeux de
bon anniversaire à notre premier ministre actuel, et qu'il conserve sa
santé, afin d'être bien certain de pouvoir dans l'avenir occuper
le plus efficacement possible, son futur poste de chef d'Opposition.
M. LAURIN: M. le Président, c'est toujours...
M. CHARRON: On ne fera pas de "filibuster".
M. LAURIN: ... le meilleur moment, que celui où les armes
parlementaires se taisent, où le silence s'établit, où le
coeur reprend ses droits que souvent la raison ignore. Nous avons bien failli
ne pas avoir avec nous le premier ministre lors de ce 14 juillet. Si mes
informations sont exactes, il devrait être en ce moment à la baie
James, alors qu'aujourd'hui, (on l'a comparé à Moïse) il est
réduit à considérer ce Parlement comme le mont Nébo
d'où il ne fait qu'entrevoir sa terre promise.
Mais nous espérons qu'il s'y plongera bientôt avec
délices. Cette année, évidemment, le premier ministre a
peiné sous le harnais. Même si nous faisons mine de ne pas nous en
apercevoir, nous en sommes toujours très conscients. Si nous combattons
parfois rudement le chef de parti, nous assurons toutefois le chef du
gouvernement qu'il peut compter sur notre amitié et notre affection
profonde.
M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais remercier très
sincèrement le chef de l'Opposition, le chef du Ralliement
créditiste, le chef du Parti québécois, de même que
le leader parlementaire, pour les paroles extrêmement élogieu-ses
et réconfortantes qu'ils ont eues à mon endroit.
On s'aperçoit que, même au milieu des débats les
plus rudes, ou du moins sans être rudes, les plus serrés, nous
pouvons trouver ensemble des moments de détente. J'ai donc fort
apprécié toutes les remarques, de même que les souhaits qui
ont été exprimés, particulièrement celui du chef de
l'Opposition, sur la prise de la baie James au cours du 14 juillet,
c'est-à-dire au cours de la prochaine journée.
M. LEVESQUE: De la présente journée. M. BOURASSA: De la
présente journée.
M. LOUBIER: Je suis encore en avance sur vous.
M. BOURASSA: J'ai donc retenu ce souhait du chef de l'Opposition. Pour
mettre fin rapidement à ce débat, je me permets de demander
l'ajournement selon l'article 331.
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire de l'Opposition
officielle m'avait donné un préavis à l'effet qu'il
désirait remettre, d'une manière particulière et
personnelle à l'honorable premier ministre, à l'occasion de son
anniversaire, un présent qu'il m'a dit tout à fait
approprié. Je serais enclin à lui demander de lui remettre
immédiatement...
M. PAUL : M. le premier ministre, je vous demanderais d'ouvrir ce cadeau
et de me le remettre pour que j'y lise une note fort intéressante
à l'intérieur.
Je dis à Votre Majesté que la procédure est un art
qui consiste à ne contester que pour reconnaître ses torts, mais
si l'on veut s'en prévaloir aux fins de régner sur les hommes
encore faut-il très bien savoir les règles qui ne sont point
bonnes. Boileau à Louis XIV, le 14 juillet 1971. Poème de
Jean-Noël Tremblay, député de Chicoutimi. Signé:
Gabriel Loubier, Jean-Jacques Bertrand, Rémi Paul, Gérard
Lé-vesque, Bernard Dumont, Camille Samson, Camille Laurin, Robert Burns,
Jean-Noël Lavoie, président.
M. LACROIX: Article 331...
M. BOURASSA: M. le Président, le leader parlementaire peut
être assuré que j'apprécie hautement ce cadeau,
aujourd'hui.
M. LEVESQUE: Suspension de dix minutes.
M. LE PRESIDENT: Suspension de quinze minutes.
M. LEVESQUE : Oui, quinze minutes.
M. CHARRON: Est-ce qu'on peut le débattre?
M. LE PRESIDENT: Consentement unanime.
Motion pour inscription au journal des
Débats
M. LAVOIE (président): Avant de retourner en comité,
pendant que la Chambre siégeait en comité plénier, tout
à l'heure, l'honorable député de Montcalm s'est
levé pour intervenir dans le débat et il a demandé la
permission de la Chambre pour déposer son texte afin qu'il soit inscrit
au journal des Débats in extenso. Cela a été
agréé, à ce moment-là, mais, pour le journal des
Débats, je préférerais qu'il y ait consentement unanime de
la Chambre, que ce soit ratifié par la Chambre.
M. SAMSON: Nous sommes toujours unanimes, presque.
Projet de loi no 80 (suite) Comité
plénier
M. BLANK (président du comité plénier): A l'ordre,
messieurs!
M. HARDY: Article 9, adopté?
M. CHARRON: Le député de Terrebonne ne peut pas faire
semblant qu'il ne sait pas qu'on a un amendement à présenter
à l'article 9.
M. HARDY: Un amendement à l'article 9? Hum!
M. CHARRON: Oui.
M. SAMSON: Vous avez notre consentement unanime pour que ce soit inscrit
au journal des Débats.
M. CHARRON: Elle est bonne, celle-là! M. le Président,
vous qui avez suivi les travaux de la commission, vous savez très bien
que la réforme électorale est un sujet qui nous a
préoccupés au plus haut point depuis les résultats de 1966
qui avaient fait que le gouvernement majoritaire dans la population
était effectivement dans l'Opposition. Les résultats de 1970, je
n'ai pas besoin de vous le rappeler, n'ont fait que confirmer notre intention
de réforme électorale.
Mais ça nous préoccupe tellement qu'on en rêve.
Comme le premier ministre probablement il faut être gentil avec
lui aujourd'hui, pour 24 heures quand on se couche le soir et qu'on est
préoccupé par le sort du Québec, il y a toujours un sujet
particulier auquel on pense soit la baie James, soit autre chose.
Or, il est arrivé dernièrement que c'était à
la réforme électorale. Si vous me le permettez, pour expliquer
l'amendement que je vais vous proposer et qui découle de ce
rêve-là, je vais vous en faire part. J'ai rêvé,
à un moment, qu'il y avait une réunion du cabinet et que le
premier ministre, responsable de cette matière, comme il est d'ailleurs
le parrain de la loi, suggérait à ses collègues qu'il
fallait véritablement faire quelque chose, parce que l'Opposition
commençait à mettre en doute la réforme électorale
qui avait été annoncée le soir même du 29 avril.
Comme plusieurs se plaignaient des lenteurs des travaux de la commission, il
disait au cabinet: II faut véritablement se brancher le plus rapidement
possible.
Or, il est arrivé qu'on en discutât et qu'on s'entendit sur
une réforme de la carte. Selon des sondages ou, enfin, des études
faites, on disait que même le Parti libéral pouvait y gagner.
Donc, cela a fait très rapidement l'accord du cabinet. Mais, sur le mode
de scrutin, on ne voulait rien savoir. Comme nous l'a dit à la
commission le président de la commission politique du Parti
libéral, on avait une peur terrible du mode de scrutin proportionnel,
mais on savait, quand même, avec le flair qu'a le premier ministre de
l'opinion publique, que cette idée avait fait du chemin, qu'au moins 24
p.c. de la population étaient d'accord sur cette idée-là
et que ça s'étendait graduellement.
Le nouveau chef de l'Union Nationale, à une émission sur
les ondes de Télémedia, à Montréal, avait
déclaré qu'il regardait d'un oeil
favorable le scrutin proportionnel. Il fallait donc que le cabinet
prenne une décision et c'est alors qu'intervint ce truc qui s'appelle
aujourd'hui le projet de loi 80. On fait la réforme des districts
électoraux, mais sans dire qu'on ne fait pas ou qu'on fait la
réforme du mode de scrutin.
M. le Président, Machiavel n'aurait pas pensé mieux, et
j'en rends hommage au premier ministre. Je suis convaincu que ça vient
de lui, cette brillante idée. A ceux qui disent: Vous ne faites pas la
réforme du mode de scrutin, il dit : Mais non, la loi 80 dit simplement
que la première étape, ce sont les districts électoraux.
Le mode de scrutin, ça peut intervenir dans quelques mois. Ainsi, il
désamorce très habilement une bombe qui aurait pu intervenir
à ce moment-ci, lorsqu'il nous aurait annoncé abruptement que le
cabinet avait décidé de ne pas changer le mode de scrutin.
Le suspense sur la réforme électorale persiste et lorsque,
dans six mois, il nous annoncera que le cabinet a décidé de ne
pas changer le mode de scrutin, décision qui, dans mon rêve,
était déjà prise...
M. HARDY: C'est toujours un rêve.
M. CHARRON: ...alors, à ceux qui se soulèveront et
il y aura vraisemblablement sept députés qui se
soulèveront là-dessus il pourra dire: Oui, mais la
réforme électorale est engagée depuis un bon bout de
temps, depuis que le projet de loi 80 existe. C'était politiquement
très habile. Je me permets de croire que nous n'assisterons pas à
un changement du mode de scrutin et je me permets de penser, à la suite
de mon rêve, que la décision est déjà prise. Mais il
faut être bon prince, le 14 juillet, et se fier aux annonces
répétées du premier ministre, dans son discours de
deuxième lecture, que la décision est encore à venir.
Capitalisant là-dessus, à la fin de mon rêve, j'ai
pensé à un amendement, et c'est pourquoi je propose,
appuyé par le député de Lafontaine, de remplacer le
premier alinéa de l'article 9 par le suivant: La commission doit
préparer son rapport en partant de l'hypothèse qu'il y aura soit
80, soit 110 districts électoraux sous réserve de l'addition,
s'il y a lieu, d'au plus cinq districts électoraux pour donner suite aux
dispositions du troisième alinéa de ce même article. Chacun
des districts électoraux devra comprendre sensiblement le même
nombre de personnes. Toutefois, chaque fois qu'elle l'estime nécessaire
en raison de la densité de la population, la commission peut admettre
des districts électoraux dont le nombre de personnes est
supérieur ou inférieur d'au plus 25 p.c. du nombre moyen de
personnes obtenues en divisant par 80 ou 110, selon le cas, la population du
Québec lors du dernier recensement disponible.
Cet amendement a pour conséquence que cela entre pleinement dans
la stratégie préparée par le premier ministre. Cela laisse
le suspense ouvert. Là où il y a faille actuellement, là
où on peut douter du suspense et croire que mon rêve est
réalisé, M. le Président, c'est quand on confirme un seul
mandat à la commission et que, donc, cette commission-là pourrait
travailler pendant huit mois, six mois et, en décembre, le gouvernement
interviendrait, le cabinet, si la décision n'est pas encore prise,
pourrait dire: C'est le mode scrutin proportionnel allemand que nous appliquons
au Québec, donc le nombre de comtés est porté à 80
et il y aura 30 députés élus selon un mode à
déterminer. Alors, la commission dont nous avons accepté la
création, en principe, aurait travaillé pour rien. Ses membres se
seraient "désâmés", sur le quotient qui leur est
proposé de 32,000 électeurs, à bâtir une carte dans
le système actuel, et on leur demanderait, tout à coup, cela avec
remise du mandat le 1er mars, ce qui ne leur donnerait que quelques mois, de
chambarder complètement leurs travaux parce que désormais il faut
baisser à 80.
Alors, si on veut garder le suspense que le cabinet a
décidé d'entretenir et de ne pas révéler tout de
suite sa décision, il faut que la commission soit, d'une certaine
façon, complice du suspense. C'est pourquoi il faut demander à la
commission de préparer celle qui sera vraisemblablement
appliquée, la carte de 110 députés, tout le monde le sait,
la décision est déjà prise. Mais pour laisser croire
à la population que la décision n'est pas déjà
prise, il faut lui permettre de développer une carte de 80 comtés
avec un nouveau quotient, toujours en respectant le troisième
alinéa de l'article 9. C'est pourquoi nous proposons cet amendement pour
être sûrs que la décision, quant au mode de scrutin,
n'interférera pas, de façon grave, dans les travaux de la
commission et que, de part et d'autre, la liberté de choix... Cela
pourrait même aider le cabinet à prendre sa décision si
elle n'est pas prise, parce que là on saura de quoi cela a l'air
à 80, et à quoi cela répond quand on a 110
comtés.
C'est pourquoi en toute déférence, puisque le mode de
scrutin n'est pas encore choisi, nous sommes tout à fait logiques de
demander à la commission de préparer deux cartes, donc notre
amendement devrait être accepté.
M. HARDY: M. le Président, j'ai l'impression que le rêve
qu'a fait le député de Saint-Jacques a été fait au
cours d'une nuit après qu'il eut lu un chapitre ou deux du Prince de
Machiavel.
M. CHARRON: J'ai lu "Bourassa - Québec".
M. HARDY: Je suis convaincu que son rêve n'a aucune relation avec
la réalité puisque, contrairement à ce que vient
d'affirmer le' député de Saint-Jacques, il n'y a, de notre
côté, aucune décision de prise, en tout cas en ce qui me
concerne, quant à la possibilité de modifier le mode de
scrutin.
C'est justement parce qu'il n'y a aucune décision de prise qu'il
ne faut pas, dans la loi que nous adoptons à l'heure actuelle, le bill
80, poser quelque geste que ce soit qui pourrait laisser croire que nous sommes
ou en faveur du mode actuel ou en faveur d'un autre mode ou contre. H ne faut
pas, en d'autres termes, que la loi 80 ou les travaux qui seront
effectués par la commission indépendante préjugent de la
décision qui pourrait être prise par le comité dont a
parlé le premier ministre, comité qui aura pour mandat
d'étudier en profondeur la possibilité d'introduire des
modifications au mode de scrutin actuel.
D'ailleurs, le député lui-même démontre, en
nous donnant cette alternative de 80 ou 110, qu'eux aussi ne sont pas tout
à fait fixés. Quand il nous parle de 110, il nous laisse entendre
qu'il y aurait possibilité qu'il n'y ait pas de modification.
De toute façon, M. le Président, je pense, encore une fois
ici je reviens à ce que j'ai déjà dit au cours du
débat que, même dans l'hypothèse où on
introduirait un élément de proportionnelle, par exemple, pour un
certain nombre de sièges, il y a quand même des impératifs
qui demeurent, à savoir une certaine grandeur pour un comté, si
on veut qu'un député puisse bien représenter son
comté. Cela demeure. Quand on arrive à 32,000 électeurs,
c'est qu'encore une fois nous considérons que c'est la grandeur moyenne
pour un comté. Même si nous avions un élément de
proportionnelle, cette exigence demeurerait.
Je pense, quant à moi, que la solution, si on devait modifier le
mode de scrutin, serait d'augmenter d'un certain nombre de sièges la
députation.
M. CHARRON: Le député de Terrebonne me permet-il une
question? Se rend-il compte des conséquences? L'article 9 créera,
comme le disait le député de Bourget, à peu près
110 comtés.
M. HARDY: Oui.
M. CHARRON: Si jamais le cabinet se branchait pour la proportionnelle
allemande où un tiers des députés seraient élus,
à la proportionnelle un tiers de 110, c'est 35 cela
porterait le nombre de députés, donc, à 145.
M. HARDY: II y a cette possibilité d'augmenter le nombre. Il y a
aussi une autre possibilité, puisque la commission remettra son rapport
à la Chambre, au moment où la Chambre adoptera la loi de la
division territoriale. A ce moment-là, le mode de scrutin sera
changé, on pourra quand même réduire; à partir du
rapport présenté par la commission, il y aura possibilité
de faire certains recoupages et de diminuer le nombre de comtés qui aura
été fixé par le rapport. Alors, en augmentant le nombre de
sièges et en diminuant le nombre de circonscriptions à partir du
rapport de la commission, on pourra, à ce moment-là, faire une
synthèse des deux. Mais je ne pense pas qu'il serait souhaitable de
demander à la commission indépendante de faire deux cartes. Ce
serait peut-être un travail inutile. D'autant plus qu'encore une fois le
rapport, c'est la Chambre, c'est le Parlement qui en demeure le maître
absolu, celui qui aura le dernier mot. Quand le Parlement étudiera le
rapport, quand le Parlement ou l'Exécutif préparera la loi, si le
comité spécial mandaté pour étudier la question des
modes de scrutin recommande que l'on introduise une modification au mode de
scrutin, on pourra tenir compte de cet élément dans la
préparation de la loi de la division territoriale.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne crois pas
nécessaire, pour ma part, qu'on retienne l'amendement proposé par
le député de Saint-Jacques. Les préoccupations qu'il a
exprimées au sujet du mode de scrutin, nous les partageons tous et nous
nous sommes déjà penchés sur ce problème. Nous
n'avons toutefois pas le droit de préjuger de l'avis de la commission
parlementaire de l'Assemblée nationale qui aura à examiner de
façon précise ce sujet avec les experts et, pour l'instant, nous
confions un mandat à une commission qui est nommée à des
fins spécifiques, soit préparer le réaménagement de
la carte électorale.
Déjà on lui a quand même dicté, si je puis
m'exprimer ainsi, une ligne de conduite. On lui a imposé certains
critères auxquels elle doit s'en tenir et il ne faut pas oublier une
chose, c'est que le mandat de la commission est de préparer le
réaménagement de la carte électorale.
Par ailleurs, cette commission doit déposer un rapport. Ce
rapport sera examiné par les parlementaires en temps utile et la
commission est permanente de sorte qu'au moment où le gouvernement
prendra une décision en ce qui concerne le mode de scrutin, la
commission qui est permanente pourra très rapidement réajuster la
carte électorale, pourra revoir le réaménagement et, en
somme, rétablir ses délimitations en fonction des exigences d'un
mode de scrutin qui pourra être le mode de scrutin proportionnel ou tout
autre mode de scrutin.
Mais, il ne faut pas demander à la commission de faire deux
choses en même temps, de penser à une redistribution des districts
électoraux selon les normes qui sont indiquées dans le projet de
loi et de se préoccuper du mode de scrutin. La commission qui va faire
la carte électorale va la faire en fonction des critères qu'on
lui a déterminés, critères qui, selon moi, ne sont pas
suffisants, mais enfin! Quand elle aura présenté son rapport,
nous allons l'examiner; elle pourra présenter d'autres rapports si
entre-temps le gouvernement exprime son intention de changer de mode de
scrutin, comme cette commission est permanente, il n'y aura aucun délai
en l'occurence, elle n'aura aucune difficulté à réajuster
son tir, si je puis dire, et à
réaménager à nouveau la carte électorale en
fonction des principes qui sous-tendront le mode de scrutin que
l'Assemblée nationale aura décidé d'accepter.
Par conséquent, je ne vois pas, à ce moment-ci, la
nécessité d'accepter l'amendement proposé par le
député de Saint-Jacques.
M. LEGER: M. le Président, j'appuie la motion du
député de Saint-Jacques pour plusieurs raisons, dont la suivante:
c'est que le chiffre magique dont faisait mention le député de
Terrebonne, 32,000 électeurs comme moyenne, comment est-il survenu? Il
est survenu tout simplement en divisant le nombre d'électeurs actuels
par à peu près le nombre de comtés que nous avons
actuellement. Pour établir que la moyenne de 32,000 était la base
avec un surplus de 25 p.c, en plus ou en moins, on s'est basé sur les
chiffres que nous avons actuellement. Ces chiffres-là sont assez bien si
l'on considère que c'est à peu près la moyenne au Canada.
Je pense qu'il y a environ 10 millions à 11 millions d'électeurs
au Canada pour 265 députés. C'est à peu près la
même moyenne. Maintenant, si on veut garder à peu près le
nombre de députés...
M. HARDY: Le député me permet-il une question?
M. LEGER: Oui.
M. HARDY: Ne reconnaît-il pas que le propre document
déposé par son parti à la commission parlementaire
suggérait justement cette moyenne de 32,000 électeurs par
comté?
M. LEGER: Si le député a bien écouté, je
n'ai pas dit que le chiffre n'était pas bon, j'ai dit... une
augmentation sur les 32,000...
M. HARDY: Alors, vous êtes d'accord avec le chiffre magique.
M. LEGER: ... pour dire qu'il ne pouvait pas se permettre de
changement.
Alors, moi, je veux dire que le nombre de députés devrait
suivre la moyenne de députés à travers le Canada pour que,
sur tant d'électeurs dans une province ou dans un pays, la proportion
soit la même; 108 ou 110, c'est à peu près la même
proportion de députés qui conviendrait d'après les normes
du reste du pays.
C'est donc dire que, si on a, plus tard, à déterminer
qu'il faut accepter un mode de scrutin proportionnel, on ne peut pas, par la
suite, dire: On va rajouter des députés aux 108 ou aux 110, parce
qu'on dépasserait la norme de 108, 110 pour le nombre d'électeurs
qu'on a au Québec.
M. HARDY: Ce n'est pas logique, ça.
M. LEGER: Si on a à adopter plus tard, par hypothèse, la
proportionnelle, il faut, je crois, y penser tout de suite, et pour plusieurs
raisons. Entre autres, nous nommons une commission indépendante qui va
s'occuper de faire un travail de recherche technique, de recherche
scientifique, sans aucune préoccupation partisane, sans aucune influence
politique, pour les meilleurs intérêts du Québec.
En partant de l'argumentation qu'on veut rester autour de 108 ou 110
députés dans la province de Québec, pour quelles raisons
ne pas préparer immédiatement une deuxième
hypothèse qui amènerait 80 députés dans 80
circonscriptions, avec une possibilité de correction ou de
proportionnelle d'environ 30 députés qui nous ramènerait
encore à la norme de 110 députés dans la province?
M. le Président, cette commission, ça ne lui coûtera
pas un sou de plus quelle fasse deux présentations: une de 80
députés et une de 110, parce qu'elle aura en main les mêmes
données socio-économiques, socio-culturelles,
géographiques et ethniques.
M. HARDY: Est-ce que vous me permettez une question? Même dans
l'hypothèse où vous ajoutez la proportionnelle, est-ce que vous
avez songé à la sorte de comté que vous auriez si vous
réduisiez ça à 80 circonscriptions? Si le territoire du
Québec est divisé en 80 circonscriptions, les
députés de certains comtés vont avoir une partie de
province comme comté.
M. LEGER: M. le Président, le député doit, quand
même, admettre que les circonscriptions fédérales du
Québec sont au nombre de 74.
M. HARDY: Les problèmes ne sont pas les mêmes.
M. LEGER: Les problèmes ne sont pas les mêmes, mais les
façons de les résoudre au Québec peuvent peut-être
trouver des solutions différentes. Autrement dit, le rôle d'un
député au provincial n'est certainement pas le même que le
rôle d'un député au fédéral, mais, si on suit
la logique de ce que j'ai dit tantôt en répondant à la
proposition d'amendement du député de Rouyn-Noranda, il faut de
plus en plus définir quel devra être dans l'avenir le rôle
d'un député, et à ce moment-là, donner au
député d'une circonscription peut-être plus vaste
parce qu'il y en aurait 74 ou 80 des services et des outils pour remplir
son rôle d'une façon efficace, mais peut-être
différente de ce qu'elle est actuellement.
Le député de Rouyn-Noranda donnait comme argument premier
qu'il était obligé de faire du bureau parce qu'il avait un grand
comté urbain et que la population allait le voir
régulièrement. Il faut admettre une chose, c'est que, de la
façon qu'on siège actuellement, huit à neuf mois par
année à Québec, les députés ne me feront pas
croire qu'ils sont dans leur comté
pour faire ce travail-là, sauf durant trois mois ou durant les
fins de semaine, parce que, depuis quelque temps, on siège presque cinq
jours et six jours par semaine.
Si un député désire rencontrer personnellement
chacun de ses électeurs, est-ce que ça n'est pas, dans le fond,
beaucoup plus dans le but de se faire connaître personnellement de ses
citoyens, pour dire: Regardez, je m'occupe de vous autres, votez pour moi?
Est-ce que c'est la conception qu'on devrait avoir, plus tard, de
l'électoralisme au point de vue de son comté? On devrait voir
bien plus un député se faire élire parce qu'il aura
résolu les problèmes de son comté, les problèmes
collectifs et qu'il aura probablement résolu des problèmes
individuels, parce qu'il aura à son service des secrétariats et
du personnel qui s'occuperont de rencontrer les gens de son comté
pendant que, lui, est neuf mois par année à Québec.
Alors, on ne me fera pas croire que, pendant qu'un député
est neuf mois à Québec, il peut voir les gens de son comté
tous les jours de la semaine. Moi, personnellement, M. le Président,
tant qu'on n'a pas siégé le lundi, je les voyais le lundi. J'en
voyais, dans un comté de Montréal, une cinquantaine par jour le
lundi et j'étais à mon bureau de neuf heures du matin à
minuit.
C'est donc dire que je ne pouvais rien faire d'autre le reste de la
semaine. On ne me fera pas croire que les députés ruraux n'ont
pas à être à Québec au moins huit à neuf mois
par année, comme le font les députés urbains. C'est
sûr que les problèmes ne sont pas les mêmes, mais il faut
donner des outils différents au comté urbain et au comté
rural.
Pour revenir à mon argumentation, je pense que cette commission
qui étudie présentement ou qui va étudier
aura devant elle les données qu'il faut pour faire les deux choix. Elle
n'aura pas à reprendre ce travail-là par la suite, ce sera un
travail tout prêt. Il faut se rappeler aussi ce que le président
des élections disait: Si on n'a pas un projet précis de
réforme avant décembre 1972, on ne pourra rien corriger avant la
prochaine élection. C'est donc dire qu'en mars 1972, quand le
comité va présenter à l'Assemblée nationale son
rapport, il faudra, à ce moment précis, des choix facilement
identifiables pour nous permettre d'établir, devant ces choix, des
décisions qui ne pourront pas être limitatives parce que l'on
n'aurait, selon le plan actuel du projet de loi, qu'une possibilité.
C'est la raison pour laquelle je dis que ça ne coûte pas
plus cher; les commissaires vont faire le même travail, ils vont
travailler sur les mêmes données. Ils peuvent arriver à
deux conclusions différentes, 80 ou 110 comtés. La commission
parlementaire pourra déterminer, ayant ces deux projets devant elle, si
l'on prend un projet correctionnel ou un projet de proportionnelle. Nous aurons
devant nous un document de travail immédiatement identifiable et nous
pourrons, à ce moment-là, sans perte de temps, faire un choix.
D'ici ce temps-là, rien n'empê- che que la commission
parlementaire qui s'occupe de la réforme électorale continue
à siéger pour discuter des modes de scrutin, proportionnel ou
autre, afin d'en arriver, en mars 1972, à des commencements de solution
que nous pourrons comparer avec le résultat des deux rapports qui nous
seront soumis par des personnes qui ne perdront pas de temps puisque, si elles
ont à rencontrer des personnes dans les comtés de la province, si
elles ont à travailler à des documents, elles auront devant elles
les données pour présenter ces deux documents.
De toute façon, je pense que cette proposition est
réaliste et qu'elle ne préjuge en rien des décisions qui
seront prises en mars 1972. Cela ne fait que nous donner les outils, les
éléments nécessaires afin de prendre une décision
précise en mars parce que nous aurons devant nous ce qu'il faut pour
décider dans les deux cas.
M. SAMSON: M. le Président, quant à nous, nous ne
souscrirons pas à cet amendement pour la bonne et simple raison, que
j'ai mentionnée dans mon allocution précédente, que je me
croirais hors d'ordre de discuter de questions autres que celle des districts
électoraux.
Cet amendement nous amène à discuter de la question du
mode de scrutin et nous amène beaucoup plus loin que la question des
districts électoraux. Si nous l'acceptions, ce serait changer le
principe même du bill, chose que nous ne pouvons faire à ce
stade-ci de nos discussions, étant donné que le débat de
deuxième lecture est terminé et que nous avons eu l'occasion de
voter sur le principe inscrit dans le bill 80.
Je voudrais aussi rassurer l'honorable député qui vient de
parler au sujet du travail des députés ruraux ou ceux des
comtés mixtes, parce qu'il y a, dans certains comtés, des villes
et des sections rurales. Ces députés, pour rassurer le
député d'une région urbaine, sont au service des
électeurs. Nous n'avons pas besoin d'offrir de services, on nous en
demande. Nous nous devons d'être à la disposition de nos
électeurs. Si nous sommes à leur disposition comme on le fait,
c'est parce que nous croyons que c'est le rôle du
député.
Nous ne sommes pas là pour imposer à la population le
rôle du député. La population qui vote pour un
député sait parfaitement ce qu'elle s'attend d'avoir. Ce qu'on
nous demande, nous sommes là pour y répondre.
Quant au fait de dire que nous donnons peut-être ces services pour
nous attirer les faveurs des électeurs lors des prochaines
élections, dans mon cas, je suis parfaitement à l'aise pour en
parler, je n'ai jamais eu besoin de faire cela pour me faire élire,
d'autant plus que, dans mon comté, tous mes adversaires ont perdu leur
dépôt et celui du Parti québécois inclusivement. Et
ils vont le perdre encore dans l'avenir beaucoup plus que la dernière
fois. Je n'ai même pas besoin de faire de bureau pour leur faire perdre
leur dépôt. Ils n'auront même pas besoin de présenter
un homme, ils n'en trouve-
ront même pas aux prochaines élections. Alors qu'ils ne se
cassent pas la tête, on va continuer à faire notre devoir, quoi
qu'en pensent les honorables députés du Parti
québécois qui ne représentent pas des sections comme les
nôtres. Ils sont confinés à l'est de la ville de
Montréal pour un maximum d'encore trois ans.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement. Je veux
rétablir les faits. Je n'ai jamais dit que je trouvais que les
députés du Ralliement créditiste ne faisaient pas leur
devoir dans leur comté. Je suis convaincu qu'ils le font et je les
admire pour cela. Mais je veux simplement rappeler que j'ai dit que l'argument
qu'il essayait de faire valoir semblait déterminer que les
députés urbains ne pouvaient pas faire la même chose chez
eux. Alors c'est la seule nuance que j'ai faite et je suis tout simplement
convaincu qu'ils travaillent très fort dans leur comté et je les
approuve pour ça.
M. SAMSON: M. le Président, j'invoque le règlement pour le
remercier d'avoir accepté de rétablir les faits.
M. LE PRESIDENT: L'amendement rejeté sur division.
M. HARDY: Alors l'amendement du député de Saint-Jacques
est rejeté sur division.
M. LE PRESIDENT: L'amendement du député de Saint-Jacques
est accepté sur division...
M. LEGER: Notre amendement est accepté sur division?
M. HARDY: Non, votre amendement est rejeté sur division.
M. LEGER: Ah bon! Merci. Attention parce que ce qui est écrit
là, ça compte.
M. LE PRESIDENT: L'amendement est rejeté sur division et
l'article 9 est adopté tel qu'amendé. Article 10?
M. PICARD: M. le Président, excusez-moi, mais avant d'adopter
l'article 9, je voudrais dire que je ne peux pas comprendre qu'on ait
utilisé, à l'article 9, le critère électeur au lieu
du critère population. Je vais vous dire pourquoi. Lorsqu'on utilise le
critère...
M. HARDY : Est-ce que le député me permet une question?
Est-ce qu'il est au courant de l'amendement que nous avons
présenté?
M. PICARD: Absolument, j'ai entendu l'amendement. Cela n'affecte en rien
le fait qu'on utilise...
M. PAUL : Limité dans le parti. Limité dans le parti.
M. PICARD: J'aimerais attirer l'attention du député de
Maskinongé sur le fait que je suis aussi un député de la
ville de Montréal, qui est la municipalité du Québec qui a
eu le plus à souffrir des injustices de la division des circonscriptions
électorales de la province de Québec depuis les derniers cent
ans.
M. PAUL: Je vous offre mes sympathies.
M. PICARD: On entend toujours parler des comtés ruraux, mais des
comtés urbains, on n'en entend pas parler. Alors, voici ce qui arrive,
M. le Président, si on utilise le critère électeur. La loi
ne le dit pas. Ce n'est pas mentionné ici, mais transposons ce texte de
loi sur le plan pratique, cela veut dire qu'aux prochaines élections, en
1974, c'est une hypothèse, parce que cela peut être 1975...
M. PAUL: Non, 1973.
M. PICARD: ... on devra utiliser les listes électorales
établies en 1970. Nous n'avons pas d'autres méthodes que nous
pourrions utiliser. Nous sommes tenus d'utiliser, lors d'une élection
générale, des listes électorales qui datent
déjà de quatre ans. Présentement, c'est la seule
façon de procéder. On ne peut pas utiliser une liste
électorale, sinon en passant par l'énuméra-tion et la
révision de la liste électorale, et on utilise toujours des
chiffres vieux de quatre ans. Alors si on utilisait le critère
population, on pourrait utiliser des chiffres beaucoup plus récents
à l'occasion d'une élection générale. Et la raison
pour laquelle je m'oppose au critère électeur, je veux juste
donner une petite idée de l'évolution qu'il peut y avoir dans
certains comtés de la province et plus particulièrement dans
l'île de Montréal.
Prenez, par exemple, le comté de Marguerite-Bourgeoys qui a vu le
nombre d'électeurs dans ce comté augmenter, entre 1966 et 1970,
de 30.52 p.c. Ce n'est pas une augmentation de 2 p.c. ou 3 p.c. C'est 30.52
p.c. d'augmentation du nombre d'électeurs dans quatre ans. On a vu, dans
le comté de Bourassa, le nombre d'électeurs augmenter de 29.87
p.c. C'est donc dire que, si on utilise sciemment, tel que rédigé
ici dans le texte de loi, le critère électeur, on aura, en 1974,
des listes électorales complètement faussées.
Alors, M. le Président, à moins qu'on n'arrive, au cours
de l'étude de la Loi électorale plus tard, avec les listes
électorales permanentes, je pense qu'on devrait songer
sérieusement à changer le critère électeur pour
utiliser le critère population. Si, toutefois, M. le Président
j'en profite pendant que je suis debout on décidait de le
maintenir, il faudrait, il me semble, au moins mentionner ce qui arrivera dans
l'éventualité d'une élection partielle dans un
comté donné.
Je transpose un texte de loi sur le plan pratique. Disons qu'il y a une
élection partielle
en 1972, dans un comté de la province, est-ce qu'on va utiliser
les listes électorales de 1970, qui était la dernière
élection générale, ou si on va étudier les listes
électorales compilées à la suite de
l'énumération à l'occasion d'élections partielles?
On ne dit absolument rien de ça, M. le Président.
Maintenant, au même article no 9, j'aimerais attirer l'attention
des membres du comité sur une suggestion que j'avais faite lors de
l'étude de la réforme électorale en commission. Cette
suggestion avait semblé faire le consensus parmi les membres de la
commission, à savoir qu'on devrait, lorsqu'on découpera la carte
électorale, respecter les limites des régions administratives du
Québec.
Il y a, au Québec, dix régions administratives qui ont
été établies, en 1965, sur une base scientifique par le
ministère de l'Industrie et du Commerce. Je pense qu'on devrait
respecter ces limites des régions administratives de façon
qu'aucun comté ne voit ses frontières chevaucher les limites des
régions administratives. Et cela, c'est tout à l'avantage des
comtés ruraux, eux qui préconisent la décentralisation
administrative. Cette décentralisation administrative est
pratiquée maintenant par le ministère de l'Industrie et du
Commerce et par le ministère des Affaires municipales. J'ai eu
l'affirmation, l'autre jour, du ministre des Affaires municipales à
l'effet que les nouvelles limites des communautés régionales
respecteraient les régions administratives établies par le
ministère de l'Industrie et du Commerce. Le ministère des
Affaires sociales respecte ces régions administratives. Si on veut
réellement avoir la décentralisation administrative dans le
gouvernement de la province de Québec, il faudrait, il me semble, avoir
des comtés qui ne chevauchent pas sur deux ou trois régions
administratives différentes.
Alors, voici les trois points que je voulais soulever: la question du
critère électeur au lieu de population; la question de
définir dans le texte de loi quelle liste d'électeurs on
utilisera à l'occasion d'une élection partielle il n'y a
rien de prévu ici; on aura un petit problème, tout à
l'heure, s'il y a une élection partielle quelque part dans la province
avant les élections générales et,
troisièmement, la question de respecter les limites des régions
administratives. Je pense qu'on devrait y songer sérieusement avant de
rejeter cette suggestion.
M. HARDY: M. le Président, le dernier point évoqué
par le député d'Olier, la question des élections
partielles, je ne pense pas que ça pose de difficultés majeures
puisque, si une élection partielle est déclenchée alors
qu'il n'y a pas eu de modification à la Loi de la division territoriale,
c'est la loi antérieure qui s'applique. Il n'y a pas de
problème.
M. VINCENT: En aucun temps d'ici les prochaines élections
générales, pour toute élection partielle, même si
elle avait lieu seulement en 1974?
M. HARDY: Aussi longtemps que la Loi de la division territoriale est ce
qu'elle est, on fonctionne avec celle qui est en vigueur.
M. VINCENT: Mais, M. le Président, advenant que la loi soit
votée?
M. HARDY: La Loi de la division territoriale? Cela dépendra de la
loi. Si la loi ne prend effet qu'à compter d'élections
générales.
M. VINCENT: Je pense que c'est un point qu'on devrait surveiller...
M. HARDY: Lorsqu'on étudiera la Loi de la division
territoriale.
M. VINCENT: ... qu'elle prenne effet seulement à une
élection générale.
M. HARDY: C'est ça. C'est cette loi-là qui
déterminera le mécanisme. Quant aux régions
administratives, je dois dire à mon collègue, le
député d'Olier, qui nous a, à maintes reprises,
parlé de cette question en commission parlementaire, que, pour ma part,
j'ai été jusqu'à un certain point fasciné par cette
idée et que je l'ai considérée.
Maintenant, il y a le problème suivant: Si on ajoute, ou si on
met trop de critères sur lesquels devront se baser les commissaires, on
peut arriver avec le résultat suivant, c'est que les commissaires ne
pourront plus faire de carte électorale. Je pense qu'ils auront
déjà assez de problèmes avec les critères que l'on
a fixés. Si, en plus, on leur parle de divisions administratives, bien
j'ai peur qu'à ce moment-là, il soit bien difficile de faire
concorder les critères que nous avons dans la loi plus la question des
divisions administratives. Ils ne sauront plus trop comment tailler les
comtés.
Enfin, pour la question de population et d'électeurs, je ne
voudrais pas revenir sur ce que j'ai dit auparavant. Mais je pense que cela ne
pose pas véritablement un problème puisque électeurs ou
population, on arrive aux mêmes résultats à la fin du
compte. De toute façon, le retard qui pourra exister entre les derniers
chiffres que nous avons, c'est-à-dire la dernière carte
électorale, si on appliquait le principe du député
d'Olier, il faudrait refaire beaucoup d'autres articles de la loi puisque la
loi dit, un peu plus loin ou auparavant, qu'après chaque
élection, dès qu'une élection est terminée,
immédiatement la commission permanente fait une étude et
prépare un rapport pour dire à l'Assemblée nationale s'il
y a lieu ou non de modifier les comtés. Tandis que si l'on se base sur
la population, sur le recensement fédéral qui ne vient
qu'à tous les dix ans, tandis que notre commission...
M. PICARD: Cinq ans.
M. HARDY: Le recensement fédéral?
M. PICARD: Cinq ans. Je vous l'assure. Le recensement
démographique.
M. HARDY: Tous les dix ans. La loi fédérale...
M. PICARD: Cinq ans.
M. VINCENT: Le vrai recensement, tous les dix ans.
M. HARDY: Le vrai recensement n'a lieu que tous les dix ans. D'ailleurs,
c'est comme cela qu'il y a une révision de la carte électorale
fédérale, tous les dix ans, se basant sur le recensement de tous
les dix ans. Tandis que nous, nous aurons des chiffres officiels après
chaque élection. Alors, je pense qu'à ce moment-là, nous
pouvons tenir la carte électorale encore plus à jour que si l'on
se basait sur le recensement.
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 9, adopté. Article 10?
MR. BROWN: Mr. Chairman, I would like to say a few words on this
article.
M. LE PRESIDENT: Quel article?
MR. BROWN: Article 10.
MR. THE PRESIDENT: Article 10?
MR. BROWN: Yes. ... dealing with "in the performance of its duties" dans
l'exercice de ses fonctions.
Our rural people are hoping that if there is a commission and if the
commission carries out its job, that they will see some of these performances
of its duties. There are too many things that are dependent on pins stuck on a
map, here in Quebec. Things that happened in a rural county with houses being
knocked down and trees being cut that a few yards would have avoided. The rural
people have had the experience during the last ten years of our very
enlightened engineering, that nobody shows up on the ground, they sit and put
pins on a map, they send the map down and that is it.
Now, there has been a minimum of representation asked for by this
committee since its inception. The rural people of the Province of Quebec have
not been consulted. Can you imagine a territory as large as the New England
States of the United States and altogether, for witnesses to carry the ideas of
the rural people, we have had two... Now, I feel this and I feel it strongly
and I know that my rural people feel the same way, the passing of this law is a
bitter pill for them to take. It will be an even more bitter pill if, all of a
sudden, there is a map put in a paper locally, showing all of the lines and all
of the new counties and how they are divided up and no consultation,
whatsoever, with the people in these areas. Now, I cannot stress to you too
strongly in the performance of its duties, I hope that in this number 10 item,
that the duties are spelled out so that we can say to the rural people: "We
know you are going to be consulted because you have never been consulted
before." This is the key to the situation.
This business of dismemberment of the county may mean nothing to you
people that are in the city, because a street or another street does not matter
very much anyway, but the ground that a person has lived on and his family has
lived on for a hundred years is something that is very very dear to their
hearts. And this redistribution, whether it is to benefit or not, is going to
be a very bitter pill for the rural people of the Province of Quebec.
And, in talking about these rural people, they are the people that get
up in the morning at five o'clock, they go to bed at nine o'clock, they work
seven days a week and nobody ever hears them screaming about their lot being
bad or anything else. So, the least we can do in this law is to see that these
people are consulted in their areas and that the commissioners that work for
this committee will see them.
To the average rural person, this is an Act of vengeance on the part of
the urban counties of the Province of Quebec. Now, I hope when these people are
going around and we are talking about one vote, one voter, that they will
remember that there is $1 that equals the same as the voters. If we are talking
of this modern set up of where everybody participates on an equal basis, then
Joe Smith who lives out by Owl's Head Mountain should now not have to eat dust
for a period of ten years when somebody in the city is sitting on an asphalt
road.
A VOICE: Very good.
MR. BROWN: If a book is available in the city of Montreal to a citizen,
il should be available as easily to a citizen in Clarke City. And, if you are
talking of equality, you have to consider these equalities as well as the
equality of saying you want a vote for a vote.
There are those that say, among my city friends: well, it is more
convenient for this little piece of land to be transferred from one county to
the other. I wonder what their reaction would be if we took a small part of
James Bay and transferred it to Ontario? It would be much easier to look after
it because it is closer to the city of Toronto. When you move things around in
a rural area, it is a very serious thing. And again, I would like to stress
that we consult these people, that we see them, that we take their advice as to
what should be done in these counties, and that they start participating in
democracy a dollar bill for a dollar bill in the city.
M. HARDY: M. le Président, je pense que les problèmes dont
vient de parler le député de Brome sont exacts. Je suis
persuadé que les membres de la commission, avec la latitude que leur
donne la loi, tiendront sûrement compte, d'une part, des problèmes
particuliers qui se posent dans les régions rurales comme celle que
représente le député de Brome et surtout qu'ils prendront
en considération, puisque les pouvoirs qui leur sont accordés en
vertu de l'article 10 leur permettent de consulter, leur permettent même
d'assigner des témoins, de les faire entendre s'ils ont besoin, à
un moment donné, de connaître quels sont les problèmes
particuliers qui se posent dans une région, que la commission
composée pourra aller sur place et pourra interroger des témoins.
C'est dans la première partie. Enfin, lorsque le rapport sera
déposé devant l'Assemblée nationale, la commission de
l'Assemblée nationale elle-même pourra aller consulter sur place,
comme on en a déjà parlé, non seulement les
députés, mais aussi les différentes personnes
intéressées, afin que la carte électorale qui sera
définitivement adoptée par ce Parlement réponde vraiment
aux besoins, aux exigences particulières qui peuvent se poser dans les
différents secteurs de la province.
DES VOIX: Adopté.
MR. BROWN: Mr. Chairman, I would like a commitment, on the part of the
Vice-President, that every county that is going to be changed is consulted in
that county.
M. HARDY: Dans la mesure du possible; rien ne s'y oppose, au contraire
l'ensemble de la loi permet cette consultation.
M. LE PRESIDENT: Article 10, adopté, article 11.
M. LAURIN: M. le Président, je n'aurais qu'une question à
poser au député de Terrebonne. Cet article permettra-t-il
d'appliquer la suggestion que je faisais lors de mon intervention de
deuxième lecture d'avoir les services d'un spécialiste en
sciences humaines, comme un démographe, un géographe ou un
sociologue, et est-ce l'intention du député de Terrebonne
d'inciter les membres de la commission à se doter des services de
pareils spécialistes?
M. HARDY: Oui. D'abord, il est sûr que, précisément,
cet article a été prévu pour permettre à la
commission de faire appel aux personnes de différentes disciplines qui
pourront les aider. Et j'imagine que les commissaires évidemment,
en principe, ni le député de Terrebonne ni les autres
députés de cette Chambre n'auront de pouvoirs sur les
décisions des membres de la commission que ces personnes que nous
allons nommer seront suffisamment ouvertes, seront suffisamment
perméables aux différentes préoccupations dont a
parlé le député de Bourget pour faire appel à ces
personnes des différentes disciplines. Quant à moi, si je peux,
je profite de l'étude de ce projet de loi en comité pour inviter
avec beaucoup d'insistance les futurs membres de la commission à
s'adjoindre toutes ces personnes qui pourront les aider à vraiment
préparer un projet de carte qui réponde aux différents
besoins qui peuvent exister dans ce domaine.
M. LAURIN: Je vous remercie, M. le Président.
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 11, adopté, article 12, adopté,
article 13, adopté, article 14, adopté. Le bill est adopté
avec un amendement.
M. BLANK (Président du comité plénier): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté avec un amendement le bill 80 et demande qu'il soit
agréé.
M. LE PRESIDENT: Cet amendement est-il adopté?
M. PAUL: Agréé. M. LE PRESIDENT: Adopté. M.
LEVESQUE : Troisième lecture. Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire, pour l'honorable
premier ministre, propose la troisième lecture du projet de loi 80.
Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, juste un mot
très bref. Nous avons donné notre agrément à ce
projet de loi considérant que c'est une première étape. Il
est évident que nous aurions préféré que le
problème fût examiné dans son ensemble et que la
réforme électorale tfnt compte de toute l'institution
parlementaire, de l'ensemble des institutions politiques en regard de la
nouvelle constitution que devra se donner le Québec.
L'on aura noté que le parti que je représente ici n'a pas
formulé d'opinion absolument définie sur le sujet de la
réforme électorale, parce qu'il nous apparaît
nécessaire de s'accorder encore, en raison de la conjoncture
socio-politique, un temps de réflextion et de recherche à l'aide
des experts pour définir une ligne de pensée, une orientation qui
soient conformes aux réalités qui se manifestent dans le
Québec et qui se préciseront.
Par conséquent, le projet de loi est, dans notre esprit, une
tentative de réforme. Elle est bonne dans la mesure où les
parlementaire s'y trouvent associés et dans la mesure où
l'Assemblée nationale aura le dernier mot lorsqu'il s'agira de statuer
sur les décisions, les recommandations qui seront proposées par
les commissaires...
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. LOUBIER: Oui.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. BOURASSA: Je remercie tous les députés pour leur
collaboration dans cette nouvelle étape de la réforme
électorale. C'est mon discours.
M. LEVESQUE : Article 1.
M. LE PRESIDENT: Le leader parlementaire, pour le ministre des Finances,
propose que je quitte maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en
comité des subsides.
Comité des subsides Grief du
député de Nicolet
M. VINCENT: M. le Président, avant que vous ne quittiez votre
fauteuil, j'avais bien l'intention de parler d'un problème qui concerne
les producteurs d'oeufs de la province de Québec, de Fedco, mais
j'aurais l'intention à cette occasion de présenter une motion qui
se lirait comme ceci: La Chambre, tout en étant disposée à
voter à Sa Majesté les subsides qu'elle a demandés, est
d'avis que le lieutenant-gouverneur en conseil ou la régie, en vertu des
pouvoirs que lui confère la loi, article 40, chapitre 45, statuts de
1969, suspende ou abroge l'ordonnance no L-23 publiée dans la Gazette
officielle du Québec, le 10 juillet, et qui entre en vigueur le 19
juillet, décrétant une hausse du prix du lait au consommateur,
sans tenir compte du prix de revient au producteur.
M. le Président, je ne...
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. VINCENT: Si elle était adoptée, M. le Président,
je la présenterais immédiatement et je laisserais se poursuivre
les travaux mais je n'ai pas l'intention de présenter cette motion. J'ai
simplement l'intention de faire un grief sur cette question, parce que vous
savez, M. le Président, qu'aux dernières heures avant
l'ajournement il serait laborieux pour le gouvernement d'expliquer les raisons
pour lesquelles la Régie des marchés agricoles est obligée
de prendre cette décision.
M. le Président, la dernière ordonnance de la Régie
des marchés agricoles du Québec datait du 26 octobre 1968. On se
souvient qu'à ce moment il avait été
décrété une augmentation du prix minimum pour toute
catégorie de lait vendu nature, c'est-à-dire la revente du lait
naturel; il avait été décrété une
augmentation pour le prix minimum de $0.02 la pinte et également une
augmentation pour le prix maximum de $0.02 la pinte.
Cela représentait environ $8 millions de plus payés par le
consommateur québécois et, sur ce montant de $8 millions, $5
millions, en vertu de la même ordonnance, s'en allaient aux producteurs
laitiers du Québec. On se souvient également qu'à ce
moment-là nous avons eu une motion pour ajourner les débats de la
Chambre, afin de discuter ce problème fantastique qui voulait que le
consommateur paie $8 millions de plus et que seulement $5 millions s'en aillent
aux producteurs laitiers du Québec.
Cette motion d'ajournement avait été
présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys,
appuyé par le député d'Outremont, maintenant ministre de
la Justice et qui s'était fait le défenseur des producteurs
laitiers et des consommateurs. Par la suite, nous avions eu l'occasion
d'entendre le député de Louis-Hébert et d'autres
députés qui ont parlé pendant pres-qu'une journée
sur la question. Ce débat s'est poursuivi pendant des jours, des
semaines, dans nos antichambres de bureaux, à la salle du Conseil
exécutif, avec des délégations de consommateurs, de
producteurs laitiers.
M. le Président, c'était au mois d'octobre 1968 et, comme
je l'ai dit à ce moment-là, il s'agissait d'une hausse de $0.02
la pinte de lait de toute catégorie, que ce soient les contenants de
deux pintes, de trois pintes ou le gallon, que ce soit livré au
consommateur ou vendu au comptoir. Ce qui est quand même remarquable, M.
le Président, c'est qu'à ce moment-là, sur l'augmentation
de $0.02 qui représentait environ $0.80 les 100 livres de lait du
producteur, une proportion assez considérable s'en allait au producteur,
soit $5 millions sur $8 millions.
Voici le but de mon grief aujourd'hui. L'ordonnance de la Régie
des marchés datée du 6 juillet dernier, qui a paru dans la
Gazette officielle du Québec qui a été publiée le
10 juillet et dont nous avons pris connaissance seulement lundi, va beaucoup
plus loin.
Je comprends que le gouvernement n'a pas encore eu le temps, comme l'a
affirmé le premier ministre, vendredi, à l'honorable chef de
l'Opposition, d'étudier toute la question au conseil des ministres, de
regarder toutes les implications. Je sais qu'ils ont pris connaissance
officiellement de cette ordonnance seulement lundi. Je sais également
que les travaux mouvementés, les débats orageux de
l'Assemblée nationale n'ont pas permis au premier ministre ou au cabinet
de se pencher sur la question, mais je voudrais quand même, aujourd'hui,
souligner l'importance que nous, de l'Opposi-
tion, et que le public en général attache à cette
question afin que, le plus tôt possible, le gouvernement actuel se penche
sur ce problème et apporte les mesures ou les correctifs
nécessaires.
La nouvelle ordonnance de la Régie des marchés augmente le
prix minimum du lait livré et vendu au consommateur, pour les contenants
d'une pinte, de $0.28 qu'il était à $0.32 et le prix maximum de
$0.33 qu'il était à $0.37. Pour le demi-gallon ou le contenant de
deux pintes, le prix minimum était de $0.55 et il devient $0.63. Le prix
maximum pour le contenant de deux pintes était $0.65 et ce prix devient,
avec la nouvelle ordonnance, $0.73. Le contenant de trois pintes, pour le lait
vendu et livré au consommateur, était au prix de $0.80. Ce prix
minimum devient $0.92, alors que le prix maximum, qui était de $0.95,
devient $1.07.
En ce qui concerne le gallon, le prix minimum était, avant la
nouvelle ordonnance qui entrera en vigueur le 19 juillet, $1.04 et il
deviendra, le 19 juillet, $1.21. Le prix maximum de cette catégorie, qui
était $1.24, deviendra $1.41. En ce qui concerne maintenant le lait
vendu au comptoir, que ce soit par Perrette ou par d'autres vendeurs, le prix
pour la catégorie d'une pinte était d'un minimum de $0.27 et d'un
maximum de $0.32 avant l'ordonnance; ce minimum deviendra $0.31 et le maximum
$0.36. Vous avez remarqué, M. le Président, que, depuis le
début, tous les minimums et tous les maximums ont été
augmentés de $0.04.
Pour le lait vendu au comptoir en contenant de deux pintes, le prix
minimum était $0.53 avant l'ordonnance et le prix maximum était
$0.63. Avec la nouvelle ordonnance, le prix minimum passe de $0.53 à
$0.61 et le prix maximum passe de $0.63 à $0.71. Ce qui est remarquable
là, cela devient encore plus difficile à comprendre
c'est que, pour le contenant de trois pintes, c'est-à-dire le lait que
les familles nombreuses vont acheter au comptoir, le prix minimum était
de $0.77 et le prix maximum de $0.92, avant l'ordonnance. Avec la nouvelle
ordonnance, le prix minimum devient $0.90 et le maximum $1.05, ce qui veut dire
que, dans cette catégorie, il y a une augmentation plus substantielle
que pour les autres où c'était $0.04 la pinte. Si nous faisons la
différence entre $0.77 et $0.90, cela signifie $0.13 d'augmentation pour
le contenant de trois pintes.
Encore davantage, M. le Président, quand on touche le prix du
lait au gallon, livré au comptoir. Avant l'ordonnance, le prix minimum
du lait au gallon, vendu au comptoir aux consommateurs, était de $1
à $1.20 au maximum. Avec la nouvelle ordonnance, le prix devient $1.19
minimum à $1.39 maximum. Ce qui signifie qu'il y a là une
augmentation de presque $0.05 la pinte. Sur quatre pintes, il y a une
augmentation de $0.19; ce qui veut dire presque $0.05 la pinte
d'augmentation.
M. le Président, quand nous regardons le contexte actuel, est-ce
que, premièrement, il était juste, équitable, que, dans le
contexte actuel, la Régie des marchés ordonne une hausse du prix
du lait aux consommateurs de $0.04 à l'intérieur des ordonnances?
Il est bien possible que le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation ou
le premier ministre me répondent qu'effectivement ce n'est pas
obligatoire que ce soit une augmentation de $0.04. Là-dessus, je pense
que nous sommes tous d'accord. Mais, sur le plan pratique, les minimums
étant augmentés de $0.04, eh bien, il est plausible, même
possible, qu'à l'intérieur des cadres fixés dans
l'ordonnance les prix du lait soient augmentés de $0.04 la pinte.
En ce qui concerne les contenants de trois pintes et d'un gallon,
effectivement, le prix sera augmenté de plus de $0.04 la pinte. On sait
qu'à l'heure actuelle il y a des organisations, telles Perrette, qui
vendent toujours au prix minimum le contenant de trois pintes et le contenant
d'un gallon. Or, Perrette ou une autre organisation, qui vendaient le contenant
de trois pintes au prix minimum de $0.77 et le contenant de quatre pintes au
prix minimum de $1, seront dans l'obligation, le 19 juillet prochain,
d'augmenter leur prix minimum à $0.90 pour le contenant de trois pintes
et à $1.19 pour le contenant de quatre pintes. Ce qui signifie
qu'effectivement les organisations de ce genre feront subir aux consommateurs
une hausse, dans le cas du contenant de quatre pintes, de tout près de
$0.05 la pinte et, pour le contenant de trois pintes, d'un peu plus de $0.04 la
pinte.
M. le Président, mon grief est le suivant. J'ai demandé
tantôt si, à l'heure actuelle, il était plausible,
justifié ou justifiable de demander aux consommateurs
québécois de payer entre cela peut varier $6
millions et $15 millions, cette augmentation consentie par la Régie des
marchés agricoles. Cela peut varier entre $6 millions et $15 millions de
plus que le consommateur aura à payer.
Deuxième question : Est-ce que ce précédent est
acceptable parce que je calcule que c'est un précédent
qu'en même temps qu'une ordonnance haussant le prix du lait aux
consommateurs on n'ait pas pensé à donner une hausse quelconque
aux producteurs laitiers du Québec? Parce que la dernière
augmentation que le producteur laitier du Québec a reçue date de
1968 et on sait que le coût de production a augmenté
considérablement depuis.
Je sais, M. le Président, en terminant ce grief que je place
devant le gouvernement, devant le premier ministre, qu'il a été
assez difficile pour eux de se pencher concrètement et posément
ou d'analyser d'une façon très vaste sur ce problème. Je
sais que les heures des derniers jours ont été très
brèves pour que le premier ministre puisse relire cette ordonnance de la
Régie des marchés.
Je sais que le ministre de l'Agriculture a eu
l'occasion d'aller rencontrer les représentants du Manitoba, de
l'Ontario pour essayer de trouver un semblant de solution au problème
des oeufs. Ce que je demande ce soir au nom de l'Opposition officielle, en
voulant appuyer encore davantage les propos tenus par l'honorable chef de
l'Opposition vendredi dernier, alors qu'il en a fait une demande formelle au
premier ministre, c'est que celui-ci nous donne l'assurance que, dès le
prochain conseil des ministres, toutes les implications de cette question
seront analysées. Qu'on regarde la capacité de payer du
consommateur, mais qu'on tienne compte également du producteur laitier,
qui, nous le savons, a fait une demande devant la régie des
marchés pour une augmentation du prix de revient du lait qu'il vend aux
usines de transformation. M. le Président, je ne puis appuyer plus
fortement cette demande en mentionnant au premier ministre que ça semble
un voeu unanime de la population. Je ne demande pas au premier ministre ou au
cabinet de se prononcer avant d'avoir devant eux tous les faits, mais, s'il y
avait possiblité de suspendre temporairement cette décision afin
d'en connaître toutes les implications, je crois que le premier ministre
rendrait service aux consommateurs et aux producteurs laitiers du
Québec.
M. BOURASSA: M. le Président, le fait que je sois ici à
cette heure et avec les autres problèmes qu'on a, c'est que...
M. VINCENT: Même le jour de votre fête.
M. BOURASSA: Je sais l'importance du problème soulevé par
le député de Nicolet et je puis l'assurer qu'à la
première occasion, dans les tout prochains jours, le conseil des
ministres va examiner très sérieusement ce problème pour
essayer d'y apporter les solutions les plus appropriées possible.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, pour appuyer le
grief du député de Nicolet, quelques mots seulement; pour avertir
les gens d'en face, ça ne durera pas une demi-heure, mais quelques
minutes.
Il y a quelques jours le ministre de l'Agriculture, dans cette Chambre,
nous avait fait part d'une ordonnance de la Régie des marchés
agricoles qui accordait aux distributeurs de lait une hausse de $0.02 la pinte.
Or, si nous lisons l'ordonnance, nous constatons que cette hausse du lait n'est
pas de $0.02 mais de $0.04. A ce moment-là, j'avais essayé de
soulever un débat d'urgence dans cette Chambre. Je considérais
que c'était une question très importante puisqu'elle occasionnait
des dépenses de $8 millions aux consommateurs de lait.
M. TOUPIN: M. le Président, est-ce que je pourrais soulever une
question de privilège? Très rapidement, je ne veux pas, remarquez
bien, soulever un débat sur la question, si le député me
le permet aussi.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
M. TOUPIN: C'est simplement pour rétablir les faits quelque peu.
J'ai déclaré que l'augmentation pratique pourrait être de
$0.02, mais néanmoins j'avais dit auparavant que l'ordonnance
prévoyait effectivement une augmentation de $0.04.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): J'accepte votre explication. Tout
simplement, je voulais faire remarquer qu'à ce moment-là nous
parlions d'une dépense additionnelle de $8 millions; alors si c'est
$0.04, c'est une dépense de $16 millions que doit absorber le
consommateur. Cette dépense touche les pauvres comme les riches, tout le
monde. Nous apprenions aussi que les producteurs de lait du Québec
avaient fait eux aussi une demande devant la Régie des marchés
agricoles.
Je comprends que l'augmentation du coût de la vie existe pour les
distributeurs comme dans tous les secteurs, mais ce qui est assez formidable,
à mon sens, c'est de constater que cette hausse du prix du lait
n'apporte absolument rien aux producteurs du Québec. Déjà
il y a quelques mois, lors d'une motion du député de Nicolet,
nous avions discuté de tout le problème de l'industrie
laitière au Québec.
Nous avions même demandé, à ce moment-là, la
convocation d'une commission parlementaire pour essayer de trouver des
solutions à ces problèmes.
Je pense que les producteurs de lait du Québec sont
déjà pénalisés. Ils ont déjà beaucoup
de difficultés à faire survivre leur industrie et il est normal
qu'eux aussi demandent une augmentation. D'ailleurs, le ministre nous avait
fait part qu'eux aussi avaient fait une demande d'augmentation à la
Régie des marchés agricoles.
Or, quand il s'agit d'un produit de consommation comme le lait, qui est
essentiel sur toutes les tables des citoyens québécois, je pense
qu'une augmentation de $16 millions est une chose assez grave. Je comprends
que, pour quelques-uns, $0.04 la pinte de plus cela ne crée pas de
problème. Mais si vous considérez qu'une forte proportion de la
population du Québec n'a pas de salaires très
élevés, que d'autres sont chômeurs, d'autres des
assistés sociaux, quand il s'agit d'acheter trois, quatre ou cinq pintes
de lait par jour, cela représente un montant assez considérable
à la fin du mois ou à la fin de l'année. Alors, je pense
que c'est une question urgente.
Je comprends que, ce soir, on ne peut pas parler de tout le
problème de l'industrie laitière. Je vous fais grâce de
cela. Il s'agit tout simplement de mentionner, devant cette Cham-
bre, la gravité de la situation parce que cela crée une
dépense additionnelle et cela ne règle pas les problèmes
des producteurs. C'est là qu'est le point fondamental de mon
intervention. Les producteurs de lait se plaignent actuellement de ne pas
être capables de joindre les deux bouts. Même plusieurs sont
obligés de vendre leur ferme, d'abandonner la production de lait parce
que, semble-t-il, ils n'ont pas les revenus nécessaires pour survivre.
Alors, je demanderais au ministre de l'Agriculture, au premier ministre aussi,
pour appuyer la suggestion qu'a faite tantôt le député de
Nicolet, l'ancien ministre de l'Agriculture, que le conseil des ministres
prenne ce cas en considération. Je ne sais pas par quelle
procédure on peut intervenir. Ce n'est pas mon problème, c'est le
problème du gouvernement. Je pense qu'on devrait y voir le plus
tôt possible.
Je sais que nous sommes limités dans la politique laitière
au Québec parce que, brièvement, si vous lisez l'article 95 de la
constitution, on dit: "Les pouvoirs décisionnels prioritaires en
agriculture sont confiés au pouvoir central." Il y a la Commission
canadienne du lait comme la Commission canadienne du blé. Il y a des
décisions qui se prennent au fédéral. Il y a des
décisions qui se prennent au provincial. Le marasme, je ne dirais pas
agricole mais celui qui existe chez les producteurs laitiers, est dû
surtout à la politique fédérale. Je sais qu'on ne peut pas
régler tous les problèmes, étant donné que nous
avons deux gouvernements qui ont juridiction dans ce domaine.
J'espère que le ministre de l'Agriculture et le premier ministre
ainsi que tout le cabinet du gouvernement actuel prendront ce problème
en considération et essaieront de régler cette question à
l'avantage du consommateur, à l'avantage du producteur et aussi du
distributeur. Il faut donner justice à tout le monde. Mais il reste
à savoir, si ces $0.04 d'augmentation sont raisonnables pour le
distributeur, s'il serait raisonnable qu'il y en ait une partie qui aille au
producteur. En définitive, c'est toujours le consommateur qui absorbe le
coût de revient d'un produit. Alors, je demande au gouvernement d'essayer
de régler cette situation le plus tôt possible.
M. ROY (Beauce): M. le Président,... M. BURNS: M. le
Président,...
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. ROY (Beauce): ...vous me permettrez quelques mots seulement pour dire
que nous appuyons le grief qui a été fait par l'honorable
député de Nicolet, bien que nous soyons convaincus que tout ceci
ne réglera rien. Les producteurs laitiers doivent faire face à
des hausses constantes de coût de production.
Les industriels laitiers sont en face du même problème.
Vous avez, d'un autre côté, les consommateurs du Québec
qui, eux, à cause de leur pouvoir d'achat toujours limité, sont
obligés de faire face également au coût de la vie.
Lorsqu'il y a une augmentation du coût des denrées, il est
évident qu'ils doivent s'en priver d'autant.
M. le Président, ceci pour vous dire que nous touchons, je pense,
un problème extrêmement profond. C'est tout le système dans
lequel nous avons à nous débattre qui est en cause. Il est
évident que cette hausse du prix du lait, si elle se maintient,
entraînera, en quelque sorte, une diminution de la consommation du lait
et que les familles nombreuses seront les plus affectées. S'il y a une
diminution de la consommation du lait, le gouvernement fédéral,
par les politiques laitières, sera en quelque sorte obligé de
faire face à des surplus de lait. Il sera obligé de venir encore
pénaliser les producteurs parce qu'ils auront trop produit.
M. le Président, nous nous débattons dans un
système qui est complètement illogique, qui est
complètement dépassé et qui ne répond plus aux
besoins de notre époque, aux besoins modernes.
M. le Président, le problème de nos consommateurs,
à l'heure actuelle, ne réside pas dans le fait qu'ils ne peuvent
pas s'approvisionner. H réside dans le fait qu'ils manquent de pouvoir
d'achat. Ils manquent de pouvoir d'achat parce qu'ils sont en chômage,
dans la plupart des cas. Ils sont en chômage parce qu'il y a trop de
produits sur le marché.
M. le Président, je pourrais, à ce stade-ci, faire un
débat qui serait assez long, mais je terminerai là-dessus. Tout
simplement...
UNE VOIX: Bravo!
M. ROY (Beauce): ... je demande au gouvernement de se pencher
réellement sur ce problème qui est un problème
économique de fond. Tant et aussi longtemps que le gouvernement du
Québec ne se mettra pas à la table pour bien penser au
problème, pour bien penser à la situation telle qu'elle se
présente, on tournera tout simplement dans le vide. On s'attaquera aux
conséquences des problèmes et on changera les problèmes de
place.
M. le Président, bien que nous admettons que les producteurs
laitiers ont des problèmes à envisager à cause des hausses
du coût de production et qu'ils doivent faire face à des
obligations, nous devons également admettre que les consommateurs
à l'heure actuelle, ne sont pas capables de faire face à
l'augmentation qu'on vient de leur annoncer. C'est pourquoi, M. le
Président, je maintiens que cela ne règle rien, ni dans un sens,
ni dans l'autre, parce que c'est le système qu'il faudrait tout
simplement changer. Je pense que, dans les circonstances, M. le
Président, nous n'avons pas d'autre choix,
de façon que nos familles québécoises, nos familles
nombreuses surtout, ne soient pas, en quelque sorte, privées dans un
certain pourcentage d'une denrée essentielle pour leurs enfants, que
celui d'appuyer le grief du député de Nicolet.
M. BOURASSA: M. le Président, pour résumer en terminant,
je signalerais au député qu'à l'occasion de ce
débat j'ai l'occasion de boire du lait que m'ont fait parvenir les
membres de la Tribune de la presse, à l'occasion de mon anniversaire. Il
n'y a pas le moindre doute sur l'importance et l'intérêt
qu'apporte le gouvernement à la question. Le ministre de l'Agriculture
ajoutera quelques mots. Mais, à la première occasion, demain ou
après-demain, dès l'ajournement de la session, nous examinerons
le problème soulevé.
M. PAUL: M, le Président, c'est sans malice. J'aurais
peut-être voulu le faire à un moment plus opportun; je sais que le
premier ministre n'a pas encore eu le temps d'examiner son nouveau livre de
règlements. Mais, dès maintenant, je voudrais lui signaler
l'article 266 qui dit qu'on ne peut pas parler deux fois sur la même
motion. Vu que c'est sa fête, M. le Président, je n'en dis pas
plus.
M. CADIEUX: Voici l'avantage de ne pas connaître les
règlements.
Grief du député de Maisonneuve
M. BURNS: M. le Président, à ce moment-ci, vu l'heure
tardive, je prends l'engagement auprès de tous les députés
de cette Chambre de ne pas parler longtemps sur un sujet qui...
M. CADIEUX: C'est vachement bon, ce que vous venez de dire.
M. BURNS: II ne m'arrive pas souvent d'être applaudi du
côté ministériel... je pense, mériterait sans doute,
M. le Président, une plus longue intervention que celle que je ferai.
C'est le problème de l'autoroute est-ouest dans Montréal, mais vu
dans une optique toute nouvelle, toute récente et toute fraîche
qui remonte à peine à avant-hier soir, étant donné
que nous sommes rendus au 14 juillet.
Lundi soir, le ministère de la Voirie inaugurait à
Montréal, officiellement, dans le beau comté de Maisonneuve, un
bureau d'information relativement au prolongement de l'autoroute est-ouest dans
Montréal. C'était l'occasion aussi de mentionner le tracé
définitif de l'autoroute est-ouest, le tracé étant celui
de la rue Notre-Dame plutôt que celui de la rue Rouen, qui avait
été aussi une des options dans l'alternative Rouen-Notre-Dame, au
départ.
Personnellement j'ai un grief à formuler, et il est malheureux
que le ministre de la Voirie ne soit pas ici pour y répondre, mais je
pense que le premier ministre éventuellement, s'il m'écoute,
saura répondre.
M. PAUL: Il a des problèmes.
M. BURNS: Premièrement, je vais essayer de synthétiser le
plus possible, toujours relativement à cette ouverture officielle du
bureau d'information ainsi qu'à l'annonce du tracé
définitif, j'ai personnellement été très
étonné de voir que, lors de cette inauguration officielle qui
était l'initiative du ministère de la Voirie, les invitations
et quelque 60 invitations ont été envoyées
ont été envoyées par l'Association des hommes d'affaires
de l'est de Montréal, sous la signature de son président, M.
Georges Paré. Je m'étonne personnellement, je me pose la question
et j'aimerais que le ministre de la Voirie puisse y répondre,
peut-être pas au cours de cette session-ci parce qu'elle tire à sa
fin et il semble que le ministre de la Voirie ait décidé
de prendre ses vacances mais peut-être que l'occasion lui sera
fournie au cours de conférences de presse qu'il fera à nouveau
sans doute sur l'autoroute est-ouest. Je m'étonne que, lors de
l'inauguration du bureau d'un ministère, lors de l'annonce d'une
décision gouvernementale concernant le tracé, ce soit une
association d'hommes d'affaires qui, soit dit en passant, ouvertement et
depuis le début de l'affaire fait campagne en faveur de l'autoroute
contre l'attitude de la majorité des résidants du sud-est
montréalais qui adresse les invitations.
Or, il arrive que les invitations qui ont été
adressées l'ont été évidemment, dans une proportion
très importante, à des membres de cette société des
hommes d'affaires de l'est de Montréal et non pas à des personnes
qui comme telles sont visées, c'est-à-dire des résidants
qui sont sur le tracé de l'autoroute, et je reviendrai tantôt au
problème de ces résidants.
C'est mon premier grief relativement à cette affaire. Chose qui
m'a étonnée aussi, c'est qu'à cette réunion on n'a
pas vu le ministre de la Voirie; il est en vacances, d'accord, je comprends
ça, on a le droit de prendre des vacances. Mais malheureusement le
premier ministre n'y était pas non plus; il avait prévu prendre
des vacances ou prévu faire un voyage à la baie James, ce qui
pouvait être des vacances, pour voir et s'imaginer ce qui arriverait
éventuellement à ce beau projet...
M. BOURASSA: Le ministre de la Voirie n'est pas en vacances.
M. BURNS: Je ne sais pas s'il est en vacances mais on m'a dit qu'il
n'était pas là hier soir. Or, ça m'étonne,
ça me surprend de lui, le ministre, qui, tout au cours des
crédits, nous a dit: Nous sommes prêts à rencontrer la
population. Evidemment, les sept députés du Parti
québécois faisaient objection au fait qu'on avait
décidé par voie tout simplement publicitaire d'annoncer à
un certain moment ce projet de prolonge-
ment de l'autoroute est-ouest et qu'on nous ait dit après
ça qu'on tentait vainement de faire échec à un projet qui
avait été décidé, qui avait été
pensé, comme le projet de la baie James d'ailleurs.
Mais j'ai été étonné d'entendre ce
même ministre de la Voirie nous dire tout au long de l'étude des
crédits: Je vous donnerai les réponses, je rencontrerai la
population. C'est vrai, et là j'admire le ministre de la Voirie qui a
dit à ce moment-là: Je n'ai peut-être pas fait toutes les
consultations nécessaires auprès de la population, mais je pense
qu'à l'avenir, nous tenterons de communiquer avec la population.
Or, hier soir, nous avions, à cette réunion, le ministre
du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, pour remplacer le ministre de
la Voirie. Je pense que c'était une occasion, c'était sur les
lieux, c'était à l'endroit où le bureau d'information
s'ouvrait et c'était normal que le ministre soit là. Son
sous-ministre était là, soit, d'accord. Mais, vu les engagements
antérieurs, vu la contestation qui naît dans l'est de
Montréal, et qui est même rendue à maturité,
en ce qui me concerne qui se manifeste relativement au prolongement de
l'autoroute est-ouest, que le ministre n'ait pas été là,
je ne le comprends pas.
Qu'un autre ministre, si charmante soit-elle, ait été
là, et qu'elle n'ait pu dire qu'un seul discours sur le tourisme,
ça n'a pas réglé le problème, M. le
Président, des citoyens de l'est de Montréal, qui, eux, disent:
On a l'impression que le ministère de la Voirie, que le gouvernement ne
nous écoute pas, ne tient pas compte de notre opinion. Une fois le
reproche fait, le ministre de la Voirie nous avait dit: A l'avenir, on y verra.
On tentera de se rapprocher des citoyens. Alors c'est, M. le Président,
une chose que je ne comprends pas, de la part du ministère de la Voirie
et, de ce fait, de la part du gouvernement.
Il y a eu également, lors de cette réunion, une annonce
qu'une banque de logements se ferait relativement aux personnes qui seraient
déplacées, c'est-à-dire que, dans un certain secteur
montréalais, on prévoyait de bonnes choses à de bonnes
conditions, d'accord, c'est-à-dire relogement des personnes
déplacées, autant que possible au même loyer et dans les
mêmes conditions, et on a ajouté une condition à ça:
dans le même quartier. Or quand on connaît le quartier sud-est de
Montréal et surtout si on connaît le quartier Maisonneuve, qui me
préoccupe plus, peut-être, que les autres,quand on vient nous
dire: le même quartier, et que le quadrilatère soit le suivant,
c'est-à-dire de la rue Bleury, à l'ouest, à la
Montée Saint-Léonard, à l'est, et au sud, du fleuve
jusqu'à la rue Jean-Talon, celui qui a dit que c'était dans le
même quartier, il ne faut pas connaître Montréal.
On englobe je ne sais pas combien non seulement de quartiers mais de
types de quartiers. Que vous veniez dire aux gens de Maisonneuve: Ne vous
inquiétez pas on vous reloge, puis, ce qui est encore plus gentil, on
vous reloge dans un même type de quartier, bien moi, je ne comprends pas.
C'est malheureux que le député de Jeanne-Mance ne soit pas ici
parce qu'il comprendrait ce que je veux dire. Quand on parle de la rue
Jean-Talon et, par exemple, de la Ire avenue, et de Jean-Talon qui se trouve
dans son comté, il va s'apercevoir que ça n'a rien à faire
avec le coin, par exemple, Sicard et Notre-Dame, dans Maisonneuve. Je pourrais
vous citer un tas d'autres exemples, mais je me demande pourquoi on tente de
faire croire, ou de faire, selon l'expression consacrée, prendre des
vessies pour des lanternes.
C'est une autre chose que je ne comprends pas de cette fameuse
réunion de lundi soir. Autre annonce qui a été faite
à ce moment-là, c'est que tout ce relogement prévu va
être confié à des trusts. Il est malheureux, encore une
fois je le déplore, que le ministre de la Voirie, futur membre du
conseil de la baie James, ne soit pas ici, c'est parce qu'il est en plein
examen de son avenir qu'il n'est pas ici.
Je ne sais pas et je ne veux pas lui prêter d'intention; c'est
peut-être une chose possible. Il est malheureux que le ministre ne soit
pas ici pour nous dire combien cela va coûter de confier ce relogement
à des trusts, pourquoi on ne s'occupe pas de cela par l'entremise des
voies normales. Pendant que je suis sur ce sujet-là, je ne comprends pas
que ce soit le ministère de la Voirie lui-même qui s'occupe du
relogement alors que c'est une fonction municipale.
Je me souviens également qu'au niveau de l'étude des
crédits, le ministre de la Voirie nous avait dit que la
municipalité de Montréal serait celle qui serait chargée
de voir à ce relogement, c'est sa fonction. Y a-t-il une raison
particulière pour laquelle le ministère de la Voirie devrait
s'occuper de cela? Moi, je ne comprends pas.
Comme je ne veux pas prendre inutilement le temps de la Chambre et vu
l'heure tardive, je n'ai qu'une seule et dernière récrimination
à faire à ce sujet. Encore une fois, me référant
à l'étude des crédits de la Voirie, où nous avons
manifesté notre opposition au projet de l'autoroute est-ouest sans citer
des choses, je sais que le ministre nous a dit: Quand nous ferons ce qui
a été fait lundi l'ouverture officielle du bureau
d'information, on vous invitera, messieurs les députés du Parti
québécois qui faites cette opposition à l'autoroute
est-ouest.
Sauf erreur, et j'ai vérifié auprès de mes trois
autres collègues visés par l'autoroute est-ouest, nous n'y avons
pas été invités. Pourquoi? Parce qu'on nous a
oubliés, tout simplement. Est-ce qu'on va continuer à nous faire
de ces promesses? On nous blâme de ne pas être aux réunions
convoquées; nous ne sommes pas invités, que voulez-vous qu'on
dise à ce moment-là? J'aurais bien aimé, personnellement,
n'eussent été les travaux assidus de la Chambre hier soir,
être là et entendre...
M. CADIEUX: A la dernière pelletée de terre.
M. BURNS: ...la brillante allocution du mi-
nistre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Malheureusement,
comme je n'ai pas été invité... Je termine
là-dessus. Je vois que le premier ministre s'apprête à
répondre brillamment aux questions que je me pose. Je veux simplement
vous rappeler qu'à Toronto, M. le premier ministre, il y a un grand
premier ministre, semble-t-il, parce que je le trouve grand par une citation
que je vous livre et que je vous demanderais d'examiner à fond.
Peut-être qu'il y aurait possibilité de faire un
parallèle avec l'autoroute est-ouest, même si le sous-ministre de
la Voirie, même si le publicitaire officiel, M. Vastel, de la Voirie,
tente de nous dire que ce n'est pas le même problème à
Montréal qu'à Toronto, je pense qu'il y a matière à
réfléchir dans cette citation de M. Davis qui a dit, lorsqu'il a
arrêté, par décision gouvernementale, l'autoroute Spadina,
à Toronto: "Si nous voulons répondre convenablement et
intelligemment aux besoins de transports de la région de Toronto
(Montréal) je lis Montréal parce qu'il y a un net
parallèle à faire entre Toronto et Montréal nous
devons accorder notre confiance aux moyens et aux méthodes autres que
ceux qui encourageront l'usage des automobiles et le pullulement des voitures
comme mode fondamental de transport."
Je laisse tout simplement cette citation-là au premier ministre,
je lui demande d'y réfléchir. Je lui demande aussi s'il est
entré en communication entre le gouvernement du Québec et le
gouvernement d'Ontario relativement à ce problème. S'il n'en a
pas eu, est-ce qu'il a l'intention d'en avoir? Est-ce que l'expérience
de Toronto va servir, jusqu'à un certain point, de guide? Je
l'espère, en ce qui me concerne. Si jamais il y avait
véritablement des distinctions telles qu'on ne doive pas tenir compte de
cette attitude du gouvernement ontarien, attitude, à mon avis,
très courageuse.
Même si c'est un parti conservateur en Ontario, même si
c'est un parti qui a aussi tous ses défauts, comme le parti
libéral, je suis obligé d'admettre que c'est une attitude
courageuse. Quand le gouvernement actuel prend des attitudes courageuses, nous
le lui disons également. Ce sont les remarques que j'avais à
faire sur l'autoroute est-ouest.
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai écouté avec la
plus grande attention les propos du député de Maisonneuve. Je ne
peux malheureusement pas répondre à toutes et chacune des
questions qu'il a posées. Je vais communiquer avec le ministre de la
Voirie et je vais discuter avec son brillant adjoint et nous essaierons
d'apporter des réponses aux questions du député.
Je dois lui dire que, comme député de Mercier,
comté de l'est de Montréal, et comme homme politique provenant de
l'est de Montréal, j'ai le plus grand intérêt pour le
développement et le progrès équilibrés de l'est de
Montréal. Je ne crois pas qu'il y ait un homme politique dans l'histoire
du Québec qui soit plus intéressé au développement
de l'est de Montréal. Dans mes moments de loisirs, durant l'ajournement
de la session, j'ai l'intention de me rendre dans les comtés de l'est de
Montréal, dans mon comté, dans le comté du
député de Maisonneuve, dans le comté de Saint-Jacques,
dans le comté du député de Bourget, dans le comté
du député de Sainte-Marie et de discuter avec les
électeurs de ces différents comtés pour connaître
leurs problèmes et essayer d'apporter les meilleures solutions.
M. BURNS: Vous nous inviterez, je l'espère, contrairement aux
promesses non suivies du ministre de la Voirie.
M. BOURASSA: Oui.
M. CHARRON: Si le premier ministre annonçait, ce soir,
l'arrêt des travaux de l'autoroute est-ouest à la rue Saint-Denis,
peut-être que la session se terminerait avant la fin de la semaine.
Peut-être.
M. LE PRESIDENT (Hardy): La motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. PAUL: Les entrées, M. le Président.
Adoption des crédits
M. LEVESQUE: Alors, M. le Président, pour les entrées, je
pense qu'il faudrait compléter ces entrées comme suit.
M. PAUL: Ah oui! Préalablement, il faut les appeler.
Excusez-moi.
M. LEVESQUE: Les crédits du ministère de l'Industrie et du
Commerce?
M. PAUL: Adopté.
M. LEVESQUE: Travaux publics?
M. PAUL: Adopté.
M. LEVESQUE: Agriculture et Colonisation?
M. PAUL: Adopté.
M. LEVESQUE: Terres et Forêts?
UNE VOIX: Adopté.
M. PAUL : Ah! Au sujet du ministère des Terres et Forêts,
M. le Président, il y avait une question qui était restée
en suspens.
M. LEVESQUE : Comme pour les ministères que je viens
d'énumérer.
M. PAUL: Ah! Mais c'était beaucoup plus grave. Je sais que le
député de Rouyn-Noranda a voyagé avec le ministre des
Terres et Forêts. Alors, dans les circonstances, je présume que la
solution a été trouvée à ce problème.
M. SAMSON: Oui, M. le Président, c'était l'article
6-4.
M. LEVESQUE: C'était l'article 4-6.
M. SAMSON: Article 4 - 6, oui. Cela a peu d'importance à 2 h 15
du matin.
M. LEVESQUE: Adopté. Alors, les crédits suivants ont
été adoptés en commission; c'est pour qu'ils soient
également adoptés ici, au comité des subsides: Voirie,
Finances, Institutions financières, Compagnies et Coopératives,
Affaires culturelles, l'Immigration, Travail et Main-d'Oeuvre, Conseil du
trésor.
M. PAUL: C'est vrai, M. le Président, que trop fort ne casse pas,
mais la plupart de ces crédits ont été adoptés.
M. LEVESQUE: Oui, oui, mais pour être sur, pour faire les
entrées.
M. PAUL: Ah! J'admire la prudence qui caractérise le leader du
gouvernement.
M. LEVESQUE: Je demanderais au président de la commission
permanente des Affaires sociales de faire rapport.
M. SHANKS: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
à la Chambre que la commission des Affaires sociales a
siégé et a adopté tous les postes des crédits
budgétaires pour l'année financière 71/72.
M. LEVESQUE: Adopté? M. PAUL: Adopté.
M. LEVESQUE: Je demanderais maintenant au président de la
commission permanente de l'Education de faire rapport.
M. PILOTE: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport
à la Chambre que la commission de l'Education a siégé et a
adopté tous les postes des crédits budgétaires pour
l'année 71/72.
M.PAUL: M. le Président, je n'ai rien compris.
M. CARDINAL: Sauf l'article 1, qui a été suspendu. M. le
Président, adopté.
M. CHARRON: M. le Président, à l'article 1, je viens de
faire un compromis avec le premier ministre et il faut que j'en fasse mention
à la
Chambre; plutôt que de faire un grief à l'article 1, j'ai
décidé de poser une question tout à l'heure, lorsque nous
reprendrons nos travaux, au premier ministre sur le site de l'Université
du Québec à Montréal.
Article 1, adopté, M. le Président.
M. BOURASSA: Merci.
M. LEVESQUE: Alors, merci. Rapport.
UNE VOIX: Une autre victoire.
M. BOURASSA: Je vous remercie de votre collaboration.
M. CHARRON: Bien, je vous en prie, cela nous a fait plaisir.
M. HARDY (président du comité des subsides): M. le
Président, j'ai l'honneur de faire rapport que le comité a
adopté des résolutions qu'il vous prie d'agréer.
M. LAVOIE (président): Ces résolutions sont-elles
adoptées? Adopté.
M. LEVESQUE: M. le Président, je voudrais proposer la
première, la deuxième et la troisième lecture du projet de
loi no 79, Loi octroyant à Sa Majesté des deniers requis pour les
dépenses du gouvernement pour l'année financière se
terminant le 31 mars 1972 et pour d'autres fins du service public.
M. LE PRESIDENT: Cette motion sera-t-elle adoptée?
M. CHARRON: Avant de l'adopter, M. le Président, est-ce qu'on
peut demander au leader du gouvernement...
DES VOIX: A votre siège.
M. CHARRON: ... si on ne sera pas pris, je viens d'entendre la mention
31 mars 1972, à voter un budget supplémentaire le 31 mars 1972 au
soir jusqu'à minuit moins cinq sur des projets antipopulaires comme ceux
de l'autoroute est-ouest qui ont prévalu lors de tous nos débats
le 31 mars 1971?
M. BOURASSA: Nous allons tirer toutes les leçons de
l'expérience passée, celle-là comme celle que j'ai connue
aujourd'hui.
M. CHARRON: Bravo!
M. BURNS: Ce qui nous inquiète, c'est que vous n'avez pas l'air
d'apprendre parce que ce qui est arrivé le 31 mars arrive actuellement
concernant la baie James. J'y vois un parallèle extraordinaire, sauf que
l'un des deux projets, choississez lequel, est beaucoup plus important que
l'autre.
M. LEVESQUE : Alors, les trois lectures sont adoptées?
M. PAUL: Plus le comité plénier.
M. LEVESQUE: Plus le comité plénier et en plus de cela les
voies et moyens pour les entrées également.
M. BOURASSA: Bien, là, je ne comprends plus. Qu'est-ce que
ça veut dire ça, M. le Président, plus les voies et
moyens, moins les subsides?
M. CHARRON: Servez-vous de votre cadeau.
M.PAUL: M. le Président, ça prouve qu'on lui a
donné un cadeau utile.
M. LEVESQUE: II l'a perdu.
M, BURNS: Vous ne l'avez pas déjà donné à
quelqu'un d'autre?
M. LEVESQUE: Alors, pour les articles 1 et 2, c'est-à-dire pour
les subsides, il y avait eu rapport, adoption. Ensuite, 2, voies et moyens.
Après cela, le bill en trois lectures, incluant le comité
plénier.
M. ROY (Beauce): En quoi consiste le bill que le leader du gouvernement
vient de nous expliquer?
M. LEVESQUE: Bien, je l'avais montré aux divers leaders de
l'Opposition.
M. SAMSON: On a pris le numéro. M. LEVESQUE: Le 79, en effet. M.
SAMSON: Cela, on l'a vu.
M. LEVESQUE: Ce projet reproduit tous les crédits qui ont
été adoptés pour chacun des ministères.
M. ROY (Beauce): Très bien, adopté.
M. CARDINAL: Tout le monde qui a travaillé un peu au Parlement
sait ça.
M. BOURASSA: Alors, tout est adopté, M. le Président?
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on fait les écritures concernant le
comité des voies et moyens?
M. CARDINAL: Oui, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Rapport et résolutions, adoptés?
M. PAUL: C'est ça.
M. BOURASSA: Avec les écritures?
M. CHARRON: Est-ce que cela vous tente d'en passer un autre?
M. BOURASSA: Tout est correct, là! M. LEVESQUE: Alors, M. le
Président... M. CHARRON: Article 16?
M. LEVESQUE: Article 5. Est-ce que l'article 16 est...
M. CHARRON: Non, je veux dire l'article 16 du bill 50.
M. LEVESQUE: Ah! Article 5, en effet.
M. LEGER: M. le Président, sur l'article 5, je n'ai pas choisi
l'heure d'étudier ce bill-là. On l'a subie. Je dois faire
remarquer que j'en ai, quand même, pour à peu près une
heure et demie sur ce bill-là. H est deux heures vingt minutes. Je dis
au gouvernement que ce n'est pas parce qu'il est cette heure-là que nous
allons limiter ce que nous avons à dire, sans faire de débat
inutile. Je vous le dis, j'en ai pour une heure et demie. Je me demande si le
gouvernement persiste à le faire adopter ce soir.
M. LEVESQUE: Est-ce que nous ne pourrions pas commencer, toujours?
M. LEGER: Je n'ai pas d'objection. Quant à moi, je ne voudrais
pas qu'on veuille limiter le débat à cause de l'heure.
M. LEVESQUE: Non, non. Au contraire. UNE VOIX: Jusqu'à
l'aube.
M. CARDINAL: M. le Président, j'aurais attendu que le ministre
des Institutions financières, Compagnies et Coopératives
s'exprimât d'abord, pour ensuite...
M. BURNS: Bien, nous le savions.
M. CARDINAL: D'accord, je sais bien que c'est ça. Mais il y a eu
une interruption qui s'est faite. Je ne sais pas si elle a été
faite selon les règlements. Nous avons toute la patience requise pour
étudier ce projet de loi et notre collaboration est accordée
d'avance au gouvernement s'il est raisonnable, comme il semble
l'être.
M. LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Institutions
financières Compagnies et Coopératives propose que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en comité
plénier.
M. BURNS: Avant que vous ne quittiez le
fauteuil, je veux vous dire également que notre collaboration
aussi est acquise au gouvernement.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. LOUBIER: M. le Président, je dois, au nom de mon
collègue, le député de Chicoutimi, corriger. Je pense
qu'on aurait dû dire: Avant que vous ne "quitassiez" le fauteuil, au nom
de sa majesté la langue française !
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. LEVESQUE: Alors, bonne nuit.
Projet de loi no 45 Comité
plénier
M. TETLEY: ...M. le Président, qu'il me soit permis de noter que
j'ai distribué en Chambre un petit dossier avec le rapport de la
commission, avec tous les amendements, quelques amendements en effet, cinq, que
nous allons suggérer ce soir et des documents, soit les appendices a) et
c), qui donnent des explications. Je n'ai pas d'autres remarques pour le
moment.
M. CARDINAL: M. le Président, pour faire suite à ce qu'a
dit le ministre, ce projet de loi qui porte le no 45 et qui s'intitule Loi de
la protection du consommateur a déjà une assez longue histoire. H
est né sous l'ancien gouvernement. Il a été revu par le
gouvernement actuel. Il a été étudié durant toute
une pleine journée, en commission parlementaire, où plusieurs
amendements ont été apportés, venant des Oppositions et
tout particulièrement, je me permettrai de le souligner, de l'Opposition
officielle. Grâce à la grande compréhension du ministre, la
plupart de ces amendements ont été acceptés.
Je veux souligner un point que je crois important. C'est que nous avions
donné, à ce moment-là, au ministre une certaine latitude
pour apporter, après étude, avec ses légistes et ses
fonctionnaires, ce que j'appellerais des amendements de concordance. Depuis, je
sais que nous avons reçu, presque tous, un très long
télégramme qui nous proposait peut-être 120 amendements.
Mais quant à nous, de l'Opposition officielle, tout en respectant ce que
pourraient proposer les membres d'autres Oppositions, je dirai tout de suite,
M. le Président, à l'égard du ministre, que, sujet
à ces amendements qu'il a eu la délicatesse de me remettre comme
il les a remis, d'ailleurs, aux deux autres Oppositions, j'accepte d'avance. Je
serais prêt, au nom de l'Opposition officielle, sans empêcher la
liberté de parole des deux autres
Oppositions je le souligne à nouveau à
adopter les articles 1 à 129 en bloc.
M. TETLEY: Je remercie le député de Bagot.
M. ROY (Beauce): M. le Président, en ce qui nous concerne, nous
avons également participé à l'étude de ce projet de
loi article par article à la commission parlementaire, la semaine
dernière. Nous avons pu remarquer, en étudiant tous ces articles,
que le projet de loi no 45, nouvelle forme, présenté par le
ministre actuel des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives, avait subi des amendements assez importants
comparativement à l'ancien projet de loi présenté par le
ministre de la Justice l'automne dernier.
M. le Président, nous avons également remarqué que,
dans la nouvelle rédaction le ministre avait tenu compte de certaines de
nos recommandations.
Dans la rédaction de ce nouveau projet de loi, on en avait tenu
compte et les articles avaient été amendés en
conséquence.
Lors de l'étude en commission parlementaire, nous avons
proposé des amendements qui ont été acceptés, alors
que d'autres ne l'ont pas été.
Maintenant, le ministre nous a remis, ce soir, une série d'autres
amendements. Tout à l'heure, j'ai pris la peine de regarder quelle
serait l'implication de ces amendements dans ce projet de loi et, d'avance, je
peux lui dire que nous les acceptons tous. Nous n'avons aucune réserve
concernant les amendements proposés. Nous sommes prêts, en ce qui
nous concerne, à adopter en bloc, nous aussi, les articles 1 à
126 sans autre discussion. Non pas que nous ne nous intéressons pas
à ce projet de loi; au contraire, nous nous y intéressons au plus
haut point. Nous avons eu l'occasion de faire part de nos remarques au ministre
lors de l'étude de la commission parlementaire, la semaine
dernière, ainsi que de souligner certains points dont nous voulons que
le gouvernement tienne compte lors de la rédaction des
règlements. En effet, je pense que la loi vaudra ce que vaudront les
règlements en quelque sorte. Il y a certains articles dans le projet de
loi qui donnent énormément de pouvoirs au gouvernement, mais nous
sommes assurés de la collaboration du ministre et de sa
compréhension pour que le gouvernement n'abuse pas de ces pouvoirs et
qu'il n'en fasse pas une loi un peu dictatoriale qui pourrait même aller
jusqu'à contrôler l'industrie et le commerce.
Ce projet de loi de la protection du consommateur est le premier que
nous avons au Québec; il n'y a jamais eu de loi de la protection du
consommateur. Nous sommes conscients que cette loi est imparfaite, mais nous la
jugeons satisfaisante dans le moment et dans les circonstances.
Nous regrettons, cependant ceci m'évitera
de faire une nouvelle intervention lors de l'adoption en
troisième lecture que certaines dispositions de ce projet de loi
n'aient pas pu couvrir la publicité qui s'adresse aux enfants. Je tiens
à le souligner parce que c'est extrêmement important.
Nous comprenons les difficultés que le gouvernement aurait de
faire une législation qui se tiendrait du fait que cette
publicité peut venir de toutes parts: de la radio, de la
télévision, d'ailleurs, d'autres provinces Radio-Canada
est de juridiction fédérale il y a, tout de même,
les postes de télévision des Etats-Unis qui entrent dans la
province de Québec et nous avons une quantité de revues,
publications ou autres journaux qui viennent des autres pays.
M. LEGER: M. le Président, le député de Beauce
a-t-il l'intention de ne plus reparler quand nous ferons l'étude du
projet article par article, parce qu'il est à parler d'articles qui
seront vus dans peut-être une demi-heure? Alors, s'il a l'intention de ne
plus reparler, je n'ai pas d'objection.
M. ROY (Beauce): M. le Président, je veux tout simplement faire
un résumé pour ne pas avoir à y revenir, sauf s'il y avait
de nouveaux amendements proposés à certains articles ou des
articles susceptibles d'être amendés par le gouvernement.
Il est possible que nous acceptions les nouveaux amendements, mais je
parle en regard des amendements que nous avons étudiés et de ceux
que le ministre nous a soumis, ce soir dans la nouvelle rédaction du
bill. Je voulais faire une résumé pour ne pas alourdir le
débat. Je voulais faire une espèce de synthèse pour ne pas
avoir à reprendre la parole à tous les articles de ce projet de
loi.
Je termine sur ce point concernant, par exemple, un article par le
député de Lafontaine, par l'intervention qu'il a faite, je me
demande si je n'aurais peut-être pas dû garder mon droit de parole
pour revenir sur certains articles.
M. CARDINAL: On a tout le temps.
M. ROY (Beauce): On a tout le temps, en comité. Alors, M. le
Président, pour ne pas engager le débat...
M. BURNS: 346.
M. ROY (Beauce): ... justement, le député de Lafontaine va
peut-être le regretter, mais, je termine mes observations
là-dessus. Tout de même je tiens à répéter
qu'en ce qui concerne actuellement, tel que les amendements ont
été proposés, nous sommes prêts à l'adoption
globale des articles de 1 à 126 pour ne pas prolonger le
débat.
M. CARDINAL: M. le Président, à cause d'une intervention
justement du député de
Lafontaine, tantôt j'ai été très bref et je
n'ai pas voulu profiter de l'occasion pour vanter les louanges du gouvernement
précédent qui avait démarré ce projet. Mais si, en
cours de route, on vient nous proposer de part et d'autre, de nouveaux
amendements, qui viennent détruire l'économie de ce projet de
loi, qui sans être parfait et on l'a dit en commission parlementaire, est
une première étape très importante au Québec et
dont nous nous réjouissons, il est évident qu'à ce
moment-là, l'Opposition officielle se réserve son droit de
discussion en espérant la collaboration de tous les partis dans cette
Assemblée nationale.
M. BURNS: M. le Président, alors simplement comme
déclaration préliminaire, je veux également expliquer
pourquoi malheureusement nous avons insisté pour que la commission
parlementaire, c'est-à-dire pour que le comité plénier
siège ce soir. Cela n'a pas du tout été dans le but de
rallonger ce débat.
Et j'en profite, j'ouvre une parenthèse pour remercier le
ministre des Institutions financières pour la collaboration qu'il nous a
donnée, en tout cas, il nous a mis au courant de toutes les
étapes de son projet, même si nous ne sommes pas d'accord avec
tous les amendements qu'il a apportés, je sais que l'attitude qu'il a
tenue tout au long de ce débat-là a été
motivée par une sincérité profonde, par un désir
d'améliorer le problème du consommateur et là-dessus je
l'en félicite simplement.
Surtout, ce n'est sûrement pas à cause de ces
raisons-là, sûrement pas sur un bill du ministère des
Institutions financières que nous aurions voulu faire obstruction, c'est
à cause du fait que malheureusement, coïncidait avec l'étude
en commission le problème de la baie James, le député de
Lafontaine qui est le représentant officiel du parti en cette
matière en commission se devait, d'une minute à l'autre,
d'être appelé en Chambre, pour participer au débat sur la
baie James et ce n'est que pour cette raison que nous avons refusé de
participer à la commission parlementaire. Ce n'est que pour cette raison
que nous devons malheureusement forcer la tenue de ce comité
plénier.
M. LEGER: M. le Président, le bill de la protection du
consommateur est trop important pour que nous passions sous silence certains
aspects que nous verrons à mesure que les articles vont passer devant
nous, pour nous apporter les amendements ou les interpréations ou les
appréciations que nous jugeons bon de donner.
Au départ, avant de passer à l'article 1, M. le
Président, je veux simplement faire une petite mise au point concernant
le député de Beauce.
Je ne voulais absolument pas lui couper la parole tantôt, mais
comme je voyais qu'il exprimait des idées sur différents articles
qui sont très loin dans le bill, je me demandais si c'était tout
simplement pour résumer tout ce
qu'il avait à dire, et à ce moment-là, il n'aurait
plus eu le droit de parole, ou si, tout simplement, il voulait continuer
à parler. Je n'ai pas d'objection pourvu qu'on étudie article par
article. D avait parfaitement raison de parler sur le bill, mais je voyais
qu'il aurait pu l'allonger du fait qu'il expliquait immédiatement des
articles précis alors qu'on n'était pas encore rendu là.
C'est juste pour cette raison que j'avais fait cette mise au point.
Quand nous avons commencé c'est à peu près
la seule chose que j'ai pu dire à la commission parlementaire
avant d'adopter l'article 1, il avait été question d'un
préambule. Je voudrais résumer aujourd'hui un peu la raison pour
laquelle nous proposons, encore en comité plénier, que le
ministre repense sa décision concernant la possibilité d'inclure
un préambule dans cette loi. D'ailleurs, contrairement à ce qu'il
m'avait dit la dernière fois, c'est une chose normale puisque, dans le
livre de procédure, à l'article 564, il est bien dit que le
préambule fait partie possible d'un projet de loi, lequel on
étudie souvent à la fin d'un projet de loi puisqu'il exprime le
principe même de cette loi.
Je voudrais, pour les fins du journal des Débats, lire le
préambule. Après cela, j'expliquerai pourquoi. Je vais en donner
une copie immédiatement aux partis présents. La présente
loi devrait comprendre le préambule suivant: "La présente loi
doit être mise en application et interprétée à la
lumière des principes suivants: Premièrement, le consommateur a
droit à l'information nécessaire pour connaître la
qualité de ce qu'il achète, sa composition, son mode d'emploi, la
façon d'en assurer l'entretien, la garantie qui s'y rattache, son prix
total et les modalités du contrat. Toute publicité doit avoir
pour fin exclusive l'information du consommateur. Elle doit être exacte
et complète. "Deuxième point, le consommateur a le droit de
s'organiser pour protéger ses intérêts et faire valoir ses
droits. Il doit, de plus, participer à l'élaboration et à
la mise en oeuvre des lois et des règlements qui le concernent.
"Troisième principe, il est du devoir de l'Etat de protéger le
consommateur contre les produits nocifs ou dangereux, contre les fraudes et les
pratiques déloyales, contre l'usure ou l'exploitation.
"Quatrièmement, le consommateur doit pouvoir choisir librement les biens
ou les services disponibles et se les procurer au prix le plus bas
possible."
Quelles sont les raisons profondes pour lesquelles nous proposons que
soit inscrit, au début de ce projet de loi, ce préambule? Il y a
trois raisons majeures. Premièrement, en vertu...
M. PICARD: Est-ce que le député me permettrait une
question?
M. LEGER: Oui, M. le Président.
M. PICARD: C'est lui-même qui a mention- né tantôt
que le préambule était admis et qu'il était
étudié à la fin de tous les articles du projet de loi.
Est-ce qu'on ne pourrait pas commencer à l'article 1 et discuter du
préambule qu'il le dépose à la fin du projet
de loi? Il l'a suggéré lui-même.
M. LEGER: De toute façon, j'en ai pour deux minutes. Vous pourrez
juger par la suite. Premièrement, en vertu de l'article 40 de la Loi
d'interprétation, un préambule fait partie de la loi et sert
à en expliquer l'objet et la portée.
Deuxième raison, c'est d'éclairer le législateur,
le consommateur et les officiers qui auront à administrer et à
interpréter la loi et les règlements de manière à
ce que ce soit clair que le projet de loi ne nuise pas au bon commerce en
permettant à des individus de faire des plaintes futiles, parce que tel
ou tel article interprété strictement leur permettrait de le
faire, ou en permettant à un commerçant de s'en tirer parce que
le législateur aurait oublié ou mal formulé un autre
article.
Je voudrais souligner qu'à l'occasion de l'étude en
commission parlementaire, où j'ai assisté au débat
provenant des arguments présentés par différents
députés de cette Chambre, combien ce préambule aurait
été nécessaire et pourrait être nécessaire
pour conclure justement à ce que ces députés disaient. Je
me réfère au député de Laurier, au
député de Chauveau, aux députés de Beauce et de
Dorchester, qui, au cours de la commission parlementaire, se sont
demandé, à différents articles et à juste titre, si
une interprétation stricte de la loi, pour tel ou tel article sur
lesquels ils étaient en train de discuter, ne pourrait pas nuire
à ce qu'on pourrait appeler, et je cite les mots précis qu'ils
ont dits, "le bon commerce."
Si un tel préambule était adopté, il permettrait
d'éviter ce que semblaient craindre ces membres de la commission.
M. le Président, la troisième raison, c'est qu'un tel
préambule éviterait aux législateurs l'obligation de faire
des textes qui, pour tenir compte de ceux qui, d'une façon responsable,
exercent un commerce, permettraient à des fraudeurs de contourner la loi
en obligeant à le formuler plus souplement et plus simplement.
La raison du préambule, c'est clair, c'est pour permettre
à ceux qui auront à légiférer, à ceux qui
auront à l'interpréter de savoir réellement le principe
que cette loi voulait atteindre.
M. CARDINAL: M. le Président, sur la question du
préambule, deux remarques. Je commencerai, comme mon excellent ami et
quand même membre d'un autre parti, le député de
Lafontaine, par rappeler les objectifs du projet de loi no 45. Son titre est
déjà un préambule et, pour une fois, c'est un titre clair,
contrairement à d'autres lois dont je n'ai pas le droit de parler,
d'après les règlements. Comme son titre l'indique, ce projet de
loi vise à protéger le consommateur lors des ventes à
crédit et des ventes faites par les vendeurs itinérants.
Le projet comporte également certaines dispositions concernant
les prêts d'argent dans les limites de la juridiction du Québec:
la garantie, la publicité. Le projet prévoit également
l'établissement d'un Office de la protection du consommateur ainsi qu'un
organisme de consultation qui, dans certains cas, grâce aux amendements
que nous avons proposés, doit nécessairement être
consulté. On le verra en temps et lieu. C'est intitulé le Conseil
de la protection du consommateur. Une section de ce projet de loi régit
l'émission de permis aux vendeurs itinérants, de même
qu'aux vendeurs d'automobiles usagées, si je ne me trompe pas.
Le but visé par cette loi est certainement louable et personne en
cette Chambre n'en doute ni ne veut l'attaquer. Il nous apparaît,
cependant, que certains amendements devaient être suggérés
et l'ont été, d'ailleurs, en commission parlementaire de
façon à rendre la loi plus claire dans certains cas et plus
efficace dans d'autres cas. Dans certains cas, nous avons suggéré
un adoucissement à la loi et, dans d'autres cas, nous avons
suggéré des dispositions plus sévères.
Avant de clôturer, je veux souligner cette espèce de
manichéisme que nous avons où les autres sont toujours les
méchants et nous, les bons. Ce qui nous parait le plus évident,
c'est que cette loi, si on n'y fait pas attention, peut laisser croire ou
présupposer qu'il n'y a que des marchands malhonnêtes et aucun
acheteur inconséquent ou irresponsable.
Le plus drôle quelqu'un l'a souligné tantôt
c'est que celui qui est aujourd'hui acheteur est demain consommateur et
celui qui est aujourd'hui consommateur est demain acheteur. Le
préambule, nous paraît inacceptable pour deux raisons. Tout
d'abord, parce qu'il n'indique que des voeux pieux. S'il a un aspect juridique,
ceci devient fort embarrassant à cause des règles
d'interprétation de nos statuts et de nos lois du Québec qui
disent, premièrement, que les notes explicatives d'un projet de loi ne
peuvent jamais servir ni devant un tribunal, ni pour un conseiller juridique
à interpréter une loi, puisque ce n'est qu'un projet qui vient du
gouvernement et non pas de l'Assemblée nationale qui est maîtresse
de sa décision pour l'adoption de la loi. Deuxièmement, parce que
ces mêmes règles d'interprétation, consacrées par
une jurisprudence constante, nous disent qu'un préambule ne peut pas
servir à interpréter les articles d'un projet de loi.
Or, ou bien le préambule devient lui-même un article et,
à ce moment-là, il est de la législation alors, le
préambule, tel que rédigé, n'est pas de la
législation; c'est ce que j'ai appelé des voeux ou bien il
n'est qu'un préambule et, à ce moment-là, il n'apporte
rien d'autre. Les gens qui veulent savoir quelles ont été, un
jour, les intentions d'un gouvernement au sujet d'un projet de loi n'ont
qu'à se référer au journal des Débats et aux
procès-verbaux et tant le journal des Débats que les
procès-ver- baux et un préambule n'engagent en rien ni la
judicature, ni le Barreau, ni tout homme qui a à procéder en
matière juridique. Merci, M. le Président.
M. GUAY: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, une personne qui voudrait
interpréter la loi se retrouverait clairement dans les discussions du
journal des Débats.
M. CARDINAL: Pardon, M. le Président, je n'ai jamais dit
ça.
M. LEGER: Les intentions seraient vues clairement.
M. CARDINAL: J'ai dit si on voulait voir les intentions, non pas
l'interprétation de la loi, parce que, pour l'interprétation de
la loi, le juge, d'après l'économie de notre droit, n'est tenu
qu'au texte de la loi sans son préambule, sans ses notes explicatives,
sans le journal des Débats, sans les procès-verbaux.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, avant l'adoption de l'article 1, je ne
voudrais pas, évidemment, changer l'esprit serein des discussions sur ce
projet de loi.
Mais je trouve tout de même un peu curieux, un peu étrange
que des députés d'un certain parti politique, par
stratégie parlementaire, et le député de Lafontaine a
même mentionné qu'il a assisté aux discussions sans y
participer...
M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. Il
n'est pas du tout question de la stratégie parlementaire et je demande,
tout simplement, au président de rappeler à l'ordre le
député de Dorchester. Il n'est pas question de décider.
J'ai fait une déclaration justement pour cela, au début, pour
expliquer à la Chambre pourquoi nous avons insisté sur le
comité plénier. M. le Président, je vous demanderais de
rappeler le député à l'ordre. S'il voulait faire une
intervention là-dessus, il aurait dû la faire l'autre jour
à la commission parlementaire ou en Chambre quand nous avons
déclaré notre intention.
M. GUAY: M. le Président, c'est justement à la suite des
précisions qu'a apportées tantôt le député de
Lafontaine ou l'autre député. Justement...
M. BURNS: We would not be here...
M. GUAY: ... le député l'a mentionné, c'est
pour préciser notre position, parce que lorsque nous relirons le
journal des Débats, peut-être qu'à ce moment-là on
dira que les députés du Ralliement créditiste n'ont pas
participé à l'étude de ce projet de loi, chose qui sera
absolument fausse. Je pense que certaines discussions, y compris le
préambule que nous discutons, sont la reprise de certaines discussions
qui ont déjà eu lieu. C'est une répétition de mots
et un dédoublement de travail.
M. ROY (Beauce): M. le Président, sur le principe que vient de
proposer le représentant du Parti québécois, le
préambule j'ai lu, avec attention, le préambule dont il
nous a fait parvenir une copie je remarque qu'à l'article 1, les
deux dernières lignes, on dit ceci: "Toute publicité doit avoir
pour fin exclusive l'information du consommateur. Elle doit être exacte
et complète." M. le Président, sur ce point, je me permettrais de
souligner qu'on exigera, en quelque sorte, par le préambule, que la
publicité soit complète alors que, dans certains cas, on s'est
plaint qu'il y avait justement trop de publicité. Si on obligeait, par
un préambule de la loi, la publicité à être
complète, on obligerait même la publicité, dans un certain
sens. Comme le préambule qu'on vient de nous soumettre ne change rien
à la loi, je ne voudrais pas répéter ce qu'a dit le
représentant de l'Union Nationale, le député de Bagot,
avant moi. Disons que je n'ai pas sa compétence en matière
d'interprétation...
M. CARDINAL: Fort savamment.
M. ROY (Beauce): Fort savamment, c'est vrai. Je n'ai pas sa
compétence pour discuter de ces choses. Il me semble que ce que le
député de Bagot a dit tout à l'heure est tout simplement
logique et mérite d'être retenu.
Toutefois...
M. CARDINAL: Je remercie le député.
M. ROY (Beauce): ... nous ne nous opposerions pas à un certain
préambule, mais très court. Nous ne nous opposons pas au principe
qu'il y ait un préambule dans un projet de loi. Mais il est dangereux,
à notre avis, d'avoir un préambule trop élaboré
parce qu'à ce moment-là, il y a danger d'avoir une contradiction
entre le préambule et l'interprétation de la loi, comme on l'a
souligné tout à l'heure.
M. TETLEY: M. le Président, il y a quatre raisons pour lesquelles
je soumets respectueusement que le préambule ne peut pas être
accepté. Tout d'abord aucune loi, c'est la tradition au Québec,
depuis longtemps, n'a de préambule. Deuxièmement, je note le
livre de rédaction et d'interprétation des lois, de Me
Louis-Philippe Pigeon qui, à l'heure actuelle, est à la cour
Suprême, livre dans lequel il parlait de la rédaction des
lois.
Le préambule ne se trouve pas dans cette loi.
Troisièmement, en effet, le préambule modifie
complètement le bill. Je vous donne un exemple. Le mot "usure", au
troisième paragraphe. Si nous adoptons le troisième paragraphe du
préambule, nous sommes contre l'usure. C'est une stiuplation claire et
nette. Le premier paragraphe: "Toute l'information nécessaire".
Peut-être que le commerçant ne veut pas faire de la
publicité. Peut-être veut-il couper les prix. Il y a des commerces
qui ont toutes sortes de publicités et il y en a d'autres qui n'en ont
pas. Allons-nous accepter ce principe qu'il faut toujours faire de la
publicité?
Regardez le quatrième paragraphe. C'est en effet une modification
énorme de notre économie: "Le consommateur doit pouvoir choisir
librement les biens, etc., et se les procurer au prix les plus bas possible".
Mais est-ce que cela veut dire "price control"? Peut-être que le prix
sera plus élevé à cause des livraisons ou d'un autre
problème.
En effet, c'est une modification de la loi. Cela affectera aussi
l'interprétation par le juge, comme le député de Bagot l'a
déjà noté, de tout article. M. le Président, c'est
un point que je ne veux pas soulever. Je suis absolument certain que cet
amendement en troisième lecture qui modifie complètement les
principes du bill, est irrecevable. Mais je ne soulève pas ce
cinquième argument parce que je crois qu'en effet, nous devons tous
repousser l'amendement.
M. PAUL: M. le Président, pourrions-nous faire une suggestion?
Que l'avion décolle un peu. Il est encore à terre.
M. LEGER: M. le Président, à l'article 1, j'ai quelques
définitions à proposer. Je peux en distribuer.
Premièrement, article 1, c): "Bien". La définition qui est
donnée est la suivante: "Tout bien mobilier ou service faisant l'objet
d'un contrat". Quand on fait une définition, il est dangereux de
définir par deux notions dans un même définition. Si vous
remarquez, le mot "service" qui est inclus dans la définition de "bien"
n'est même pas lui-même défini. Il faut remarquer
qu'à m) et à s), le mot "service" revient deux fois. A m) "Prix
comptant": le prix auquel est offert un bien ou un service". A s) la même
chose, à s) ou à r). A deux autres endroits, le mot "service"
revient. Alors pourquoi ne pas avoir distingué le mot "service" du mot
"bien". Est-ce que le bien vendu avec un service, c'est la même chose? Je
remarque que dans la loi du Manitoba, on inscrit: "Goods or services" ou "Goods
and services", la dernière partie ayant été ajoutée
par amendement.
M. le Président, je me demande pourquoi on ne pourrait pas
définir le mot "service". Voici la suggestion que je fais. Je la remets
à un page. Les pages sont fatigués! "Bien" ce serait: "Tout bien
mobilier, sauf une valeur mobilière au sens de la Loi des
valeurs mobilières, Statuts refondus 1964, et comprend toute
chose rattachée à ou faisant partie d'un bien immobilier que les
parties ont voulu détacher avant la vente ou selon le contrat de vente
et tout bien mobilier devant être rattaché à tout bien
immobilier au moment de ou après la livraison". Je donne un exemple:
Est-ce qu'un bien meuble, comme une fenêtre, un revêtement, des
portes, une fois posé, devient un bien immeuble?
M. CARDINAL: M. le Président, je m'excuse, nous ne sommes pas
pour commencer une leçon de droit civil sur les biens meubles par
destination, par nature ou par exception. Nous pourrions en discuter longtemps.
Je donnais au moins 200 heures là-dessus.
M. LEGER: II faut raccourcir ça.
M. CARDINAL: Bien raccourcir ça! C'est que cette loi-ci vient
compléter le code civil ou y faire exception. Par conséquent,
toutes les règles du code civil continuent à s'appliquer. Ce qui
est fixé à fers et à clous demeure bien par accession; ce
qui est fixé par un propriétaire, et du bien meuble et du bien
immeuble, pour y demeurer à demeure devient immeuble par destination, et
j'en passe. Je ne reprendrai pas tous les articles qui se rapportent à
la définition des biens meubles et immeubles. L'amendement part d'un bon
naturel, mais il ne fait que répéter ce qui est
déjà dans le code civil, avec le danger que ce ne soit pas tout
à fait concordant.
M. LE PRESIDENT: Rejeté?
M. TETLEY: Je suid d'accord avec le député de Bagot.
L'honorable juge Pigeon, dans son livre, parle des dangers de la
définition par énumération; c'est, en effet, l'argument du
député de Bagot. De plus, vous retirez de notre définition
toute la jurisprudence.
M. CARDINAL: Si vous le permettez, M. le Président, il y a autre
chose. C'est une philosophie que je dirais du droit québécois,
par rapport au droit statutaire anglais ou à celui qu'on retrouve
à Ottawa. A Ottawa ou en Angleterre, lorsqu'on veut décrire un
train, on prend dix pages pour dire que ça comprend la locomotive, les
roues d'une locomotive, le "tender", les wagons, ce qui réunit les
wagons et, enfin, jusqu'au bout. Au Québec, on se contente de dire que
c'est un immeuble parce que ça se déplace sur une voie
ferrée et, par conséquent, dans une limite définie. Alors,
il ne faudrait pas faire du droit statutaire à la façon anglaise.
Je pense que le Parti québécois devrait, le premier, faire du
droit à la façon française, c'est-à-dire à
base de principes et non pas à base de définitions.
M. BURNS: M. le Président, je m'inscris en faux contre les
dernières remarques du député de Bagot. D'ailleurs, le
député de Bagot devrait se souvenir que c'est lui qui m'a
enseigné mon droit au tout début.
M. CARDINAL: Un autre!
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous l'avez mal appris.
M. BURNS: Moi, je trouve que ses remarques comme professeur
étaient beaucoup plus appréciées que ses remarques comme
député.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais on a de bons et de mauvais
élèves.
M. VEILLEUX: Amendement rejeté.
M. CARDINAL: Mais je ne peux pas laisser passer ça comme
ça. Comme je l'ai déjà dit à quelqu'un d'autre: Si
j'avais des réponses claires quand j'étais professeur, c'est
parce qu'il y avait souvent des questions claires et intelligentes.
M. LEGER: M. le Président, dans ce cas-là, je voudrais
soumettre un autre amendement qui permettrait, au moins, de définir le
mot "services". Le mot "services" n'est pas du tout inclus dans les
définitions. Je ne sais pas si le ministre va accepter la
définition de services.
Je la lis ici: "Services: tout ouvrage, main-d'oeuvre et autres services
personnels, tout le service relatif au transport, à l'accommodation pour
hôtel, restaurant, à l'éducation, aux divertissements, aux
loisirs, aux funérailles et ses services connexes et tout contrat
d'assurance fourni par une personne autre que l'assureur." Ni plus ni moins,
c'est pour définir le mot "services" dont on se sert plusieurs fois et
qui n'est absolument pas défini.
M. TETLEY: M. le Président, respectueusement, je crois que c'est
un autre cas de définition par énumération. Toute
énumération est restrictive et nous avons grand peur
d'accommodation pour hôtel, restaurant avez-vous oublié
motel? éducation, divertissements, cours, sport. Est-ce qu'un bar
est un divertissement? Lorsque je vois une telle rédaction ça me
fait peur et je préfère un mot large; services, ça veut
tout dire.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que le ministre va
définir service d'une autre façon?
M. BURNS: M. le Président, la dernière argumentation du
ministre ne me satisfait pas en ce sens que pour rejeter l'existence d'une
définition du mot "services" il nous dit que la définition que
nous proposons est trop restrictive. Je pense que, plutôt de ne pas en
avoir, nous serions peut-être encore mieux, étant donné que
le mot est utilisé dans la loi, d'en avoir une, même restrictive.
Et si on peut
arriver à trouver une définition qui est beaucoup plus
large et moins restrictive, moi je veux bien. Au fond, je pense que ce qui
anime la proposition du député de Lafontaine c'est qu'il voit une
lacune dans l'absence de définitions qu'on pourrait retrouver au tout
début de ce texte à l'article 1. Alors, si le ministre a une
proposition à nous faire qui serait moins restrictive, nous n'avons pas
d'objection. C'est une lacune qu'on trouve au projet de loi en ce sens que la
définition de "services" n'existe pas.
M. TETLEY: Mais, M. le Président, un des documents les plus
importants au Québec et qui a duré 105 ans, plus que la
confédération, c'est le code civil. Il n'y a presque pas de
définitions. On laisse ça au juge et au bon sens; "services" veut
dire ce que c'est. Autrement, le code civil aurait un dictionnaire pour les
définitions, parce que le code civil touche tout droit. Donc je
m'inscris complètement en faux contre cette pensée malgré
que j'admire l'intention de protéger le consommateur. Je crois que
définir "services" causerait des lacunes claires et nettes dans la
loi.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEGER: M. le Président, on définit, à l'article
f), crédit: "Le droit consenti par un commerçant à un
consommateur d'exécuter à terme une obligation, moyennant un
coût". L'amendement que je proposerais ce serait d'ajouter: Ou une
majoration du prix de vente. C'est le même texte mais en ajoutant,
après "moyennant un coût" ou une majoration du prix de vente.
M. TETLEY: M. le Président, j'ai eu la coopération
étroite du député de Lafontaine et mes légistes ont
étudié une telle proposition.
Nous croyons que c'est inutile et dangereux parce que si un
crédit est accordé moyennant une majoration du prix de vente, il
y a là, d'après nous, un droit consenti moyennant un coût.
Donc, nous avons peur que cela ajoute quelque chose dont nous n'avons pas
besoin et nous croyons qu'encore une fois la définition telle
qu'elle.est la meilleure.
M. LEGER: Sur division, M. le Président. Ce devrait être la
définition que l'on devrait obtenir sur division.
M. TETLEY: ... quelques-unes de vos définitions.
M. LEGER: Je suis bien d'accord sur la façon dont travaille le
ministre, c'est très bien et très intéressant. A l'article
1, M. le Président, prix comptant.
M. TETLEY: Pardon, vous me permettrez de présenter un amendement,
à l'article 1, entre i) et j). Nous avons noté, après des
remarques faites par les trois partis d'Opposition, qu'une définition...
l'obligation principale et nous croyons qu'il faut ajouter: suivant les
observations de... j'oublie quel parti où il faut ajouter cet
amendement.
Je suggère qu'on inscrive, tel que rédigé:
obligation principale, la livraison d'un bien ou la prestation d'un
service.
M. LEGER: M. le Président, je voulais vous le proposer, c'est un
amendement que je vous avais soumis. Je vous remercie de l'avoir
accepté, mais je ne pensais pas qu'il arrivait à i), je voulais
vous le présenter à la fin. Je suis heureux que vous ayez
accepté la proposition du Parti québécois.
M. TETLEY: Très bien.
M. LEGER: II faut bien en adopter une de temps en temps.
M. LE PRESIDENT: L'amendement ii) est accepté.
M. LEGER: M. le Président, je ne sais pas si on en arrive
à m), prix comptant. Voici la façon dont je le
présenterais. La définition du prix comptant : Le prix auquel est
offert un bien ou un service à un consommateur qui ne
bénéficie pas de crédit lors de la formation du contrat,
prix apparaissant aux annonces, liste de prix, catalogue, étiquettes ou
autres indices, compte tenu de tout rabais accordé.
M. TETLEY: M. le Président, je partage l'opinion du
député de Lafontaine. Nous avons étudié votre
définition, plusieurs juristes l'ont étudiée et nous
trouvons que c'est plutôt un amendement dangereux qui peut nuire au
consommateur.
M. LEGER: Sur division, M. le Président. M. LE PRESIDENT:
Adopté sur division. M. LEGER: Maintenant à l'article q).
M. CARDINAL: q). D s'est produit un incident en commission parlementaire
quand j'ai dit: J'ai soulevé un q), il y a des gens qui se sont sentis
visés.
M. TETLEY: C'est un q) dans la version anglaise, en tout cas. Je propose
que la version anglaise de l'alinéa q) soit changée en
remplaçant, dans la troisième ligne, les mots "a contract" par
les mots "the signing of a contract" afin de poursuivre...
M. LEGER: D'accord.
M. TETLEY: Oui, très bien.
M. LEGER: La définition de vendeur itiné-
rant, celle qui était présentée, je l'amenderais
pour celle-ci: Vendeur itinérant, tout vendeur qui, ailleurs qu'à
son adresse, sollicite, négocie ou conclut avec un consommateur un
contrat de vente.
M. TETLEY: M. le Président, c'était en effet, la
définition qui existait dans l'ancien bill. Et après étude
de tous les mémoires, après les renseignements donnés par
nos légistes, nous avons conclu que c'était trop dangereux pour
la raison suivante. La loi s'occupe des personnes qui téléphonent
au consommateur ou arrivent à la porte du consommateur et "sollicitent";
c'est un mot très fort. Mais nous ne voulons pas nécessairement
viser le cas d'un vendeur d'automobiles qui est chez lui, au magasin ou
à son lieu de travail, lorsque l'acheteur arrive et veut acheter une
voiture. Après que l'acheteur a examiné attentivement la voiture,
il fait, avec elle, le tour du pâté de maisons ou peut-être
quelques milles. C'est possible dans ce cas-là que ce soit
négocié. C'est aussi le cas de quelqu'un qui nous invite à
déjeuner après que nous ayons, nous les consommateurs,
sollicité une entrevue avec le vendeur. Donc, nous voyons que les deux
mots, sollicitations et négociations, étaient beaucoup trop forts
et beaucoup trop dangereux parce qu'il faut une balance entre la protection du
consommateur et l'épanouissement de notre économie. Nos
légistes avaient aussi une grande peur du mot négocie.
M. LEGER: Sur division? M. PAUL: Sur division. M. TETLEY: Sur
division.
M. LEGER: M. le Président, il y a un mot qui n'a pas
été défini, je pense, à moins que je ne me trompe,
c'est le mot commerçant. Voici l'amendement qui est proposé: La
personne qui, exerçant un commerce, en semblables matières ou
non, contracte avec un consommateur: sont réputés exercer un
commerce, le vendeur itinérant et le prêteur.
M. TETLEY: Mais encore je suggère que cet amendement soit
rejeté parce que, même dans l'amendement, je vois que c'est
répétitif. La personne qui exerce un commerce est un
commerçant. Nos légistes ont trouvé cela très
dangereux et même un peu contradictoire. Cela n'aide en rien. Aussi,
c'est une définition énu-mérative qui est dangereuse et
nous voulons laisser à la jurisprudence la définition de ce
qu'est un commerçant, parce que nous avons bien défini le
consommateur, d'une façon très large.
M. LE PRESIDENT: Adopté?
M. LEGER: Sur division, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Il y a un amendement au paragraphe
s)?
M. TETLEY: Oui, je voudrais suggérer qu'on remplace
l'alinéa s) par le suivant: "versement comptant" voici une
énumération acceptable parce que c'est une
énumération d'effets ou d'objets 1) le montant d'argent;
2) la valeur d'un effet de commerce payable à demande; ou 3) la valeur
convenue d'un bien donné en acompte lors du contrat."
M. CARDINAL: Cela éclaircit la situation et je suis d'accord.
M. LE PRESIDENT: Adopté. L'article 1, adopté. Article
2?
M. CARDINAL: Adopté.
M. LEGER: M. le Président, à l'article 2, je voudrais
présenter l'amendement suivant: "Nulle offre, promesse ou entente
préalable à un contrat n'engage le consommateur." Autrement dit,
c'est une définition formaliste qui permet, en deux lignes,
d'éviter une répétition qui n'est absolument pas
nécessaire.
M. TETLEY: Je crois, M. le Président, que l'amendement
protège moins le consommateur et c'est l'avis encore de nos
légistes. Voici le problème: une personne ne peut pas, en effet,
faire une offre ou une promesse. Elle peut retirer une offre ou une promesse.
Si vous dites que nulle offre ou promesse n'engage le consommateur, le
commerçant peut dire: Bon, vous avez soixante jours pour accepter, vous
l'avez accepté, mais ça ne vous engage pas. Donc, vous avez perdu
votre droit.
M. CARDINAL: M. le Président, je m'excuse, je
réfère encore à cette bible du Québec qui n'est pas
le code Napoléon, mais le code civil, adopté un an avant la
confédération, et qui dit qu'une offre, une promesse ou une
entente au préalable est une pollitication et que, par
conséquent, elle engage déjà. Il y a eu des causes,
à ce sujet-là, à tous les niveaux de chacune des
cours.
M. LEGER: Qu'est-ce qui arrive?
M. LE PRESIDENT: L'amendement est rejeté? Article 2,
adopté.
M. LEGER: L'article 3, quant à moi, est adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 3, adopté. Article 4?
M. LEGER: A l'article 4, M. le Président, je voudrais, quand
même, féliciter le ministre pour l'amendement que nous lui avions
proposé et
qu'il a accepté. C'est, je pense, une belle amélioration
pour le projet de loi. C'est celui qui dit, justement, que le contrat doit
être lisiblement rédigé en français, mais que le
consommateur peut demander qu'il soit rédigé aussi en
anglais.
M. CARDINAL: M. le Président, je ne peux résister à
la tentation d'indiquer que c'était dans le texte préparé
par l'Union Nationale.
M. LE PRESIDENT: Article 4, adopté?
M. ROY (Beauce): M. le Président, sur ce même point, je
tiens à souligner que nous avions fait les mêmes remarques.
M. TETLEY: M. le Président, évidemment, je veux amender le
bill 45 pour remplacer, à la troisième ligne du premier
paragraphe de l'article 4, le mot "demander" par le mot "exiger" et, en
anglais, le mot "ask" par "require".
M. CARDINAL: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Article 5, adopté?
M. LEGER: M. le Président, je voudrais faire un amendement
à l'article 5, qui se lit comme suit: "Le commerçant doit signer
et remettre au consommateur l'écrit dûment rempli et lui permettre
de prendre connaissance de ses termes et de sa portée avant d'y apposer
sa signature." L'amendement se lirait comme suit: Le commerçant doit
remettre au consommateur l'écrit dûment signé et lui
accorder un délai suffisant que je rajoute pour lui
permettre de prendre connaissance de ses termes et de sa portée avant
d'y apposer sa signature. La raison c'est que, concernant la preuve à
faire, il y a une différence entre la mention "un délai
suffisant" et son absence. Le juge va déterminer si cela a
été un délai suffisant alors que, si cela n'est pas inclus
dans le texte actuel, c'est le commerçant qui juge de ce délai.
C'est la raison pour laquelle je soumets respectueusement cet amendement,
c'est-à-dire d'ajouter les mots "délai suffisant".
M. TETLEY: Encore une fois, après étude profonde, les
légistes et moi-même sommes d'accord que cela n'ajoute rien.
Déjà le commerçant doit signer et remettre au consommateur
l'écrit dûment rempli et lui permettre d'en prendre connaissance.
Le juge va décider, pas du délai, mais de quelque chose de
beaucoup plus fort. En effet, si le commerçant a permis de prendre
connaissance, cela, à mon avis est beaucoup plus fort. Nous avons le
même but mais pas les mêmes moyens.
M. LE PRESIDENT: Article 5, adopté. Article 6?
UNE VOIX: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Article 7? M. TETLEY: Un instant.
M. LEGER: J'ai un amendement à proposer à l'article 7.
L'article 7 dit: "Le contrat est formé lorsque toutes les parties l'ont
signé." Le reste, c'est la même chose. Je voudrais proposer
l'amendement suivant: Le contrat est formé à l'adresse du
consommateur si elle est située au Québec et au moment où
chaque partie est en possession d'un double de l'écrit où est
consigné le contrat.
M. TETLEY: Cette fois-ci, j'invoque le code de procédure civile
qui est aussi assez âgé mais pas autant que le code civil. Si par
cet amendement vous commencez à amender notre code de procédure
civile, vous allez tomber dans des pièges que nous avons vus
aujourd'hui. Pardon?
M. PAUL: ...je ne vous ai pas appelé.
M. TETLEY: Nous avons vraiment peur que, par cet amendement-là,
vous modifiiez toute la jurisprudence ou vous vous mêliez dans toute la
jurisprudence qui existe à l'heure actuelle et qui est assez bien
définie.
M. PAUL: M. le Président, cela ne m'arrive pas souvent
d'être de la même opinion que l'honorable ministre. Mais il vient
de nous donner une interprétation juridique qui est une marque de
progrès sensible chez lui dans l'interprétation de nos textes de
loi.
C'est avec plaisir, M. le Président, que j'ai bu les paroles du
ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives.
M. CARDINAL: D'ailleurs, M. le Président, comme nous en avons
discuté en commission parlementaire, dans la grande majorité de
ces contrats, une élection de domicile est faite.
M. LE PRESIDENT: L'amendement est rejeté sur division et
l'article 7 est adopté. Article 8?
M. CARDINAL: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 9?
M. CARDINAL: Adopté.
M. LEGER: Un instant, M. le Président. A l'article 9, je voudrais
ajouter un article 9 a). En ce sens que l'article 9 tel quel serait
adopté, mais je voudrais ajouter un autre article entre l'article 9 et
l'article 10. Alors voulez-vous adopter l'article 9 ou s'il faut que je vous le
donne tout de suite.
M. LE PRESIDENT: Article 9, adopté.
M. CARDINAL: Oui, article 9, adopté.
M. LEGER: Alors à l'article 9 a), M. le Président,
j'aimerais présenter l'amendement suivant: "Tout contrat assorti d'un
crédit envisagé par la section 3 et tout contrat pour un prix
comptant peut être "dissolu" par le consommateur au plus tard le
troisième jour après exécution totale ou partielle de
l'obligation principale du vendeur." C'est "dissous".
UNE VOIX: J'aimerais mieux "dissous".
M. LEGER: Cela vient de dissolution mais c'est dissous.
M. CARDINAL: Ou résolu. M. LAURIN: C'est une erreur de "frappe".
M. LEGER: Cela m'a frappé en pleine face! UNE VOIX: Ne le frappez
pas!
M. LEGER: "Cet article ne s'applique pas au contrat envisagé par
la section 4". M. le Président, l'argumentation que je veux donner
là-dessus, c'est que jusqu'à maintenant, on n'a touché que
le vendeur itinérant alors qu'ici, on veut toucher les problèmes
de vente générale de produits non périssables qui
permettrait, justement, aux personnes qui achètent à
crédit d'avoir une période de résolution du contrat.
D'ailleurs, M. le Président, il y a déjà plusieurs
magasins, de grosses maisons qui donnent, même dans leur vente, 30 jours
et si vous n'êtes pas satisfait, argent remis, etc. C'est une pratique
qui se fait assez couramment. Même, cela permettrait souvent d'aider des
consommateurs qui achètent un produit chez des marchands, qui vont
plutôt remettre à la personne qui n'est pas satisfaite, non pas
l'argent, mais un crédit pour acheter autre chose. Cela pourrait quand
même être une occasion qu'une personne achète à
crédit en dedans de trois jours à l'occasion d'y repenser et, au
lieu qu'on lui remette simplement un crédit sur un autre objet, elle
peut ravoir son argent.
D'ailleurs, M. le Président, cela pourrait aussi éviter
les ventes sous pression, comme on voit des vendeurs d'appareils
électriques dans des régions éloignées ou dans des
régions où des personnes ont des revenus plutôt modiques,
cela permettrait justement de donner aux gens l'occasion de pouvoir repenser et
les protéger.
C'est un amendement pour donner au moins trois jours au consommateur
pour des produits non périssables.
M. TETLEY: M. le Président, nous touchons à la question de
principe, ici, plutôt de procédure ou d'interprétation. Je
ne partage pas et le gouvernement ne partage pas l'opinion du
député de Lafontaine. Il veut donner à tout consommateur
le droit de résoudre un contrat dans les trois jours, même un
achat, n'importe lequel achat au magasin. Il n'y a pas de juridiction en
Amérique du Nord, peut-être au monde, qui donne ce droit.
J'ai peur qu'un tel amendement affecte complètement notre
commerce. Je crois qu'il faut procéder par étape mais, à
mon avis, c'est la vingtième ou la trentième étape.
Je trouve que c'est beaucoup trop avancé. Vous êtes en
avance, mais, là, vous êtes peut-être revenus en
arrière.
M. LE PRESIDENT: Amendement rejeté sur division?
M. PAUL: Sur division.
M. LEGER: Sur division.
M. LE PRESIDENT: Article 10?
M. LEGER: A l'article 10, je voudrais demander une clarification au
ministre. On dit, à l'article 10: "La présente section ne vise
pas le contrat où le montant pour lequel un crédit est
accordé n'excède pas $50."
Etant donné que les vendeurs itinérants, à
l'article 48, peuvent vendre jusqu'à $25 sans signer de contrat, je me
demande s'il pourrait y avoir, à l'article 10 des multiples de $49 qui
ne seraient pas soumis à la loi et des multiples de $15, $18 ou $25 pour
les vendeurs itinérants. Ne serait-il pas préférable,
à l'article 10, au lieu de $50, de proposer $25 pour être conforme
un peu avec la loi qui régira le vendeur itinérant? Ma motion
d'amendement serait d'enlever $50 pour mettre $25.
M. PAUL: M. le Président, je regrette de différer
d'opinion avec mon honorable ami, le député de Lafontaine, mais
on sait qu'il y a des règles de preuve qui régissent nos
procédures devant les tribunaux. Je fais appel à vos
connaissances, M. le Président, de l'article 1233 du code civil qui dit
que la preuve testimoniale ne peut être admise que dans des cas où
la valeur réclamée est inférieure à la somme de
$50.
UNE VOIX: C'est amendé.
M. PAUL: Oui, mais 1234 dit que la preuve écrite ne peut
être changée par témoin. Alors, je dis que c'est en quelque
sorte déséquilibrer un peu toute la jurisprudence reconnue, que
nos tribunaux ont arrêtée et fixée, tant au niveau de la
cour Provinciale que de la cour Supérieure, de la cour d'Appel et de la
cour Suprême. Dans les circonstances, je regrette de ne pas être
capable, en tant que bâtonnier, d'appuyer l'honorable
député de Lafontaine.
M. LE PRESIDENT: Article 10, adopté sur division?
M. LEGER: Article 10, sur division. M. LE PRESIDENT: Article 11? M.
LEGER: Adopté. M. LE PRESIDENT: Article 12?
M. LEGER: A l'article 12, M. le Président, je voudrais poser une
question au ministre. Pourquoi les mots "au moins" dans: "Le contrat doit
prévoir au moins un paiement différé par période".
Etant donné qu'on a fixé le mois, je pense, à cinq
semaines, quand on dit doit prévoir "au moins" un paiement
différé, ça veut dire qu'il peut y en avoir plus.
Cela voudrait dire d'après moi, ce n'est pas clair
qu'un commerçant pourrait demander plus qu'un paiement par
période, si on dit: "Au moins". Alors, je me demande pour quelle raison
on ne met pas, tout simplement: "Le contrat doit prévoir un paiement
différé par période".
M. GIASSON: Ce n'est pas au moins cinq semaines; c'est au plus cinq
semaines. Cela peut être moins.
M. LEGER: Oui, mais c'est la quantité de paiements. Alors
"prévoir au moins un paiement", ça peut vouloir dire qu'il peut y
en avoir plus qu'un. Il peut y avoir des contrats...
M. VEILLEUX: II faut qu'il y en ait au moins un. S'il n'y a pas
ça, il peut ne pas y avoir de paiement. Or, il faut qu'il y en ait un;
ça prend au moins un paiement.
M. LEGER: Oui, doit prévoir un paiement.
M. VEILLEUX: Arrêtez de vous casser la tête.
M. LEGER: Si le député de Saint-Jean relit l'article 12,
en enlevant le mot "au moins" ce serait: "Le contrat doit prévoir un
paiement différé par période"
M. CARDINAL: C'est parce qu'en droit, les premiers articles du code
civil disent que un signifie un et quand c'est plus qu'un ça signifie
plusieurs.
M. TETLEY: C'est ça, en effet, et c'est la raison pour laquelle
nous voulons que chaque consommateur paye au moins une fois par période.
Autrement il va acheter aujourd'hui et payer d'ici deux ans. Nous avons
défini, comme vous le savez, une période comme cinq semaines au
plus, donc il faut un paiement par cinq semaines.
M. LEGER: Oui, mais la définition que vous donnez actuellement ne
donne pas l'impression qu'il pourrait y en avoir plus qu'un dans la même
période.
M. TETLEY: Ah oui, mais...
M. LEGER: Cela veut dire qu'une personne peut, au lieu de 12 versements
de $25 par mois, en faire 15 ou 17, c'est-à-dire que dans un même
mois il pourrait y avoir deux ou trois versements. Cela veut dire qu'il
pourrait y en avoir plus dans une période.
M. TETLEY: Ah! c'est ça il peut y en avoir quatre dans un mois,
parce que c'est par semaine, d'accord, il y a tant de paiements par semaine,
nous ne voulons pas empêcher les gens de faire des paiements. Il y a des
gens qui payent toujours le vendredi soir.
UNE VOIX: Nous on paye le premier jour du mois.
M. LEGER: A l'article 12, je vais ajouter 12 a). Article 12
adopté. A l'article 12 a), M. le Président, je voudrais
représenter au ministre un amendement qui était dans le projet de
loi anciennement. Je veux qu'il m'explique pourquoi il l'a enlevé, et
c'est le suivant: Le consommateur bénéficie de toute
ambiguïté dans le calcul et l'énonciation du coût de
crédit. Alors personnellement j'aimerais le proposer comme amendement et
qu'il me dise pourquoi il l'a enlevé.
M. TETLEY: La raison pour laquelle nous avons enlevé, en effet,
l'article 14, je crois, c'est parce que nous avons amendé ou
modifié l'article 117, et par cet article nous avons inclu l'article 14,
et en lisant l'article 117, vous verrez pourquoi: "Si un contrat ne respecte
pas les exigences prescrites par la présente loi ou les
règlements, le consommateur peut en demander la nullité."
Donc et aussi,...
M. LEGER: C'est moins fort quand même.
M. TETLEY: Non, toute ambiguïté, c'est parce que la loi
n'est pas claire.
M. CARDINAL: De toute façon, il y a une règle
d'interprétation du code civil qui dit qu'un contrat s'interprète
toujours contre le créancier et en faveur du débiteur.
M. PAUL: Article 1,013 et suivant. Prenez votre code civil.
M. LE PRESIDENT: Article 12 a) adopté. Article 13.
M. LEGER: M. le Président, à l'article 13, j'aurais
quelque chose à ajouter à 13 a). En ce qui me concerne 13 est
adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 13 a).
M. LEGER: A l'article 13 a), M. le Président, je voudrais ajouter
ceci: Toute catégorie de
consommateur qui, de part la nature de ses occupations, a des revenus
saisonniers ou cycliques peut être exemptée des dispositions de
l'article 14 de la manière prescrite par les règlements. Je
m'explique, M. le Président, c'est que plusieurs personnes peuvent
tomber en chômage passager ou peuvent avoir des occupations comme les
débardeurs ou ceux qui ne travaillent que l'été, etc.
Ils seraient, par l'article 14, obligés de payer d'une
façon régulière. S'il y avait un manque à payer
leurs versements échus, surtout s'il y a un article de
déchéance de dette, si on leur réclame le solde complet,
ils pourraient même perdre le produit qu'ils ont en main; alors que,
s'ils n'étaient pas obligés, à cause de leurs occupations,
s'il y avait un amendement qui tiendrait compte de ces personnes qui ont des
revenus saisonniers, ils seraient protégés davantage puisque
c'est un bill pour la protection des consommateurs.
M. CARDINAL: Par exemple, les députés.
M. TETLEY: Exactement. Ce serait plutôt les cultivateurs ou les
pêcheurs. Vous avez suggéré "en la manière prescrite
par règlement", dans votre amendement. Je crois que nous avons
déjà pensé à cela à l'article 102s); il y a
un moyen "d'exempter, en totalité ou en partie, de l'application de la
présente loi toute catégorie de personnes, de biens ou de
contrats qu'il indique". C'est notre intention de faire des règlements
exactement dans ce sens.
M. LEGER: Vous acceptez le principe... M. TETLEY: Mais oui.
M. LEGER: ...vous ne voulez pas le mettre dans la loi, vous le mettez
dans les règlements.
M. TETLEY: En effet, nous sommes d'accord sur le principe. Nous avons
déjà mis cela dans...
M. LE PRESIDENT: Article 13, adopté sur division.
M. LEGER: Merci, M. le Président. M. LE PRESIDENT: Article
14.
M. LEGER: En ce qui me concerne, l'article 14 est adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 15? M. LEGER: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 16? M. LEGER: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 17? Il y a un amendement.
M. LEGER: A l'article 17, j'ai un amendement à proposer au
ministre. Je pense que c'est probablement celui qu'il va accepter.
M. TETLEY: Oui, nous avons accepté votre amendement.
M. LEGER: Voulez-vous me permettre au moins d'avoir eu le plaisir de le
suggérer? A l'article 17, le ministre me disait justement qu'il
acceptait cet article que je lui avais soumis. L'article 17 se lirait ainsi:
"Si l'obligation principale du commerçant est exécutée
plus de sept jours après la formation du contrat, le coût de
crédit et le début de la période ne courent qu'à
compter de la date de cette exécution."
M. CARDINAL: Adopté...
M. TETLEY: Adopté.
M. CARDINAL: ...tel qu'amendé.
M. TETLEY: Tel qu'amendé. C'est exactement notre amendement
aussi. Très bien.
M. LE PRESIDENT: Article 18? UNE VOIX: Adopté. M. LEGER:
Adopté.
M. CARDINAL: M. le Président, à ce stade-ci du
débat, si le député de Lafontaine pouvait nous dire
à quels articles il a un amendement, on pourrait adopter tous les
articles jusque là sans arrêter.
M. TETLEY: Pardon, M. le Président. A l'article 17, le
député de Lafontaine n'a pas lu le deuxième
paragraphe.
M. LEGER: C'est parce que le président a dit "adopté" tout
de suite. Je termine l'article, M. le Président. "Dans le cas d'un
contrat à exécution successive...
M. LE PRESIDENT: D'accord.
M. LEGER: ...le commerçant est réputé
exécuter son contrat aux fins du présent article...
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEGER: ...lorsqu'il commence à accomplir sa prestation
conformément au contrat."
M. CARDINAL: Adopté.
M. TETLEY: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEGER: Le prochain amendement est à l'article 20, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Articles 18 et 19, adoptés.
M. LEGER: A l'article 20, M. le Président, je voulais simplement
faire remarquer qu'il se lit comme suit: "Si les parties à un contrat
visé à la présente section désirent modifier
certaines dispositions du contrat, en retrancher ou en ajouter de nouvelles et
si le coût de crédit s'en trouve augmenté, elles doivent
passer un nouveau contrat conformément aux règles
édictées par la présente loi". M. le Président,
pourquoi la disparition du paragraphe sur le rabais? Si un commerçant
décide d'augmenter le rythme des paiements différés,
a-t-il le droit de le faire sans nouveau contrat? D'après nous, il peut
le faire.
M. CARDINAL: M. le Président, en droit commun, il ne peut pas
augmenter le rythme alors que les consentements ont déjà eu
lieu.
M. TETLEY: C'est Ça, il faut le consentement des deux, mais
presque tous les contrats donnent ce droit, mais il faut le consentement.
Autrement, nous changeons presque la totalité de notre droit civil et la
création d'une obligation qui est le "meeting of the minds".
M. CARDINAL: C'est ça. Pourvu que les gens aient "their
mind".
M. LE PRESIDENT: Article 20, adopté tel qu'amendé.
M. LEGER: C'est l'article 28...
M. LE PRESIDENT: Article 21, adopté?
M. CARDINAL: Jusqu'à l'article 28.
M. LEDUC: Adoptés, articles 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27...
M. LE PRESIDENT: Articles 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,
adoptés.
M. LEDUC: Adoptés.
M. LEGER: Alors, M. le Président, à l'article 28, c'est
plutôt l'article 28a)...
M. LE PRESIDENT: Alors article 28, adopté.
M. CARDINAL: Article 28 adopté.
M. LEGER: Article 28 adopté. L'amendement, c'est le suivant:
Lorsque le commerçant qui accorde le crédit accessoire n'est pas
celui qui est partie au contrat principal, une troisième personne. Le
contrat en vertu duquel le crédit est consenti doit énoncer,
outre les mentions requises à l'article 28, premièrement, la date
et le lieu du contrat accessoire; deuxièmement, le nom et l'adresse du
commerçant qui accorde le crédit acessoire, la description de
tout objet ou document donné au commerçant qui accorde le
crédit accessoire en reconnaissance ou en garantie de l'obligation du
consommateur. C'est la première partie de l'article 28a). La
deuxième partie concerne le tout d'un crédit accessoire qui ne
doit pas exéder 12 p.c. et le terme du contrat de crédit
accessoire ne peut excéder 36 mois. A la raison, je sais que la
première partie sourit au ministre, mais la deuxième lui sourit
moins. Il me l'a déjà dit. Mais il faut penser une chose, c'est
que le ministre ne met pas au moyen de réglementation cette
possibilité de limiter ou du moins de fixer le taux et s'il n'est ni
inscrit dans la loi. Il ne pourra pas plus le faire dans les
règlements.
Je me dis une chose. Si le ministre n'inscrit pas quelque part la
possibilité de fixer un taux maximum, même s'il ne le fixe pas
précisément, s'il ne se permet pas, s'il ne se donne pas le
pouvoir de le fixer quand il le voudra, eh bien, il se trouve à sortir
d'un champ important où il ne pourra plus par la suite se
réintégrer.
Alors il faudrait penser que dans l'avenir les situations peuvent
changer et qu'il serait peut-être très heureux d'avoir une
possibilité parce qu'il l'aura prévue dans le projet de loi, de
pouvoir fixer un taux, même s'il ne veut pas mettre de limite
immédiatement.
M. TETLEY: Le député a tout d'abord soulevé une
question importante, une question de principe. Le taux d'intérêt
est, en effet, le contrôle du crédit. Le rapport Parizeau qui est
le rapport par excellence du ministère, préparé par une
commission dont M. Jacques Parizeau était président, MM. Michel
Bélanger, Robert Després, Douglas Fullerton, Yves Pratte et
Jacques Prémont, membres, a fait rapport exactement dans le sens
contraire du député. Je réfère la Chambre à
la...
M. LEDUC: ... le contraire de ce qu'il avait dit.
M. TETLEY: ... je réfère le député, quand
même c'est un rapport important ou intéressant, c'est la bible du
ministère, n'est-ce pas? Cela a été fait avant la
création du ministère. Et je réfère le
député aux pages 174 à 177. Contrôler le taux est
dangereux, contrôler la quantité de crédit par l'amendement
ne peut excéder 36 mois. Il y a eu une étude importante en
Angleterre, intitulée "Consumer Credit", faite par une commission assez
importante dont le président était un nommé lord Crowther.
J'ai les deux volumes du rapport ici, et je vous en ai envoyé, je crois,
des copies. En effet Lord Crowther et ses compagnons aussi sont fermement
contre le contrôle d'un tel crédit. Et je cite à la page
360: "From this long argument we have no difficulty in drawing a definite
conclusion: Term control should find no place among the weapons of economic
policy." C'est un gouvernement socialiste qui a
écrit ce rapport. "Its value is far outweighted by the iniquities
it creates and by the difficult practical problems to which its gives rise. We
hold this view so strongly that we are unwilling to make any recommandations
about what amendments in addition should be made to the orders to render them
more equitable and workable."
Alors, M. le Président, je dois rejeter l'amendement.
M. LE PRESIDENT: Sur division.
M. LEGER: M. le Président, le prochain est à l'article
32.
M. LE PRESIDENT: Article 30, adopté. Article 31, adopté.
Article 32.
M. ROY (Beauce): M. le Président, si on me permet de faire une
intervention sur l'amendement qui a été proposé
relativement au contrôle du taux d'intérêt, ce n'est pas
pour répéter ce que nous avons déjà dit. Concernant
le contrôle du taux d'intérêt pour que les consommateurs
québécois puissent emprunter à des taux moindres, disons
que nous sommes entièrement d'accord de ce côté-là.
Je ne voudrais pas du fait que nous ne participons pas actuellement
à ce débat, à ces amendements parce que justement nous
avons eu l'occasion de le faire à la commission parlementaire, ce que
les membres du Parti québécois n'ont pas eu l'occasion de faire
qu'il serait dit demain matin que nous avons assisté passivement
à cet amendement du Parti québécois ou que nous consentons
ou encore que nous serions d'accord pour que le taux d'intérêt
soit très élevé ou encore que nous serions contre un
abaissement du taux d'intérêt vis-à-vis des
consommateurs.
Alors, M. le Président, il y a tout un problème de ce
côté-là que nous pourrions aborder et il serait, je crois,
extrêmement long d'en discuter. Tout de même, actuellement, il y a
les caisses d'épargne et de crédit et, je tiens à le
souligner, les caisses d'épargne et de crédit ont fait une
éducation dans ce sens-là, ont fait un énorme travail et
ont mis à la disposition de leurs membres des capitaux pour leur
permettre d'être capables d'emprunter à des taux avantageux. Mais
les caisses d'épargne et de crédit ont été
obligées de subir la hausse du taux d'intérêt, comme les
autres ont dû le faire.
Pour être capables d'avoir des épargnes à leur
disposition, des épargnes déposées par des personnes qui
ont des capitaux, autrement dit, qui accumulent des épargnes, bien elles
ont été obligées de payer un taux d'intérêt
assez élevé. Si les caisses d'épargne et de crédit
n'avaient pas payé un taux d'intérêt concurrentiel, les
gens seraient allés tout simplement, déposer ailleurs. Cela a eu
pour effet d'obliger toutes nos sortes de caisses d'épargne et de
crédit à exiger des taux plus élevés aux
consommateurs, à leurs membres qui voulaient emprunter des capitaux chez
elles.
M. le Président, je tiens à dire que, si tout le
système financier canadien était repensé de façon
à éviter qu'il n'y ait trop d'emprunts sur le marché de
l'épargne, parce que la loi de l'offre et de la demande joue, il est
évident que nos consommateurs pourraient bénéficier d'un
taux d'intérêt moins élevé.
Je suis entièrement d'accord sur le fait que le taux
d'intérêt, actuellement, est trop élevé pour les
consommateurs québécois. Je me plais à le dire, mais je
pense que ce n'est pas en mettant un amendement dans la Loi de la protection du
consommateur que nous réglerons le problème. Je tiens à le
dire, tout simplement, de façon qu'il ne soit pas dit que nous assistons
passivement à l'adoption de cet amendement et que, justement, nous
n'avions pas d'intervention à faire.
M. LE PRESIDENT (Leduc): D'accord, Article 32?
M. LEGER: A l'article 32, M. le Président, je voulais, tout
simplement, redire la même chose. Alors, je vais tout simplement
éviter un long débat. Je voulais proposer le même
amendement parce que, là, il est question du taux de crédit d'une
vente à tempérament. Le ministre va probablement me donner la
même réponse. Alors, je ne soumets pas mon amendement à
l'article 32.
M. LE PRESIDENT: Alors, j'imagine qu'il est adopté sur
division.
M. TETLEY: Pardon, refusé.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Refusé. Pardon, je veux dire que
l'article 32 est adopté.
M. CARDINAL: C'est ça.
M. TETLEY: Oui.
M. LE PRESIDENT: Sur division?
M. TETLEY: Non.
M. LE PRESIDENT: Donc, adopté.
M. CARDINAL: Oui.
M. LEGER: M. le Président, je ne suis pas d'accord. Je voulais
qu'il adopte mon amendement.
M. CARDINAL: Alors, sur division, d'accord.
M. LEGER: M. le Président, à l'article 34, maintenant.
M. CARDINAL: Article 33, adopté.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on pourrait adopter l'article 33 avant?
M. LEGER: Oui.
M. LE PRESIDENT: Merci. Article 34?
M. LEGER: A l'article 34, je pense que c'est une chose très
importante que le ministre devrait repenser deux fois. A l'article 34, il y a
a), b) et c). Je crois que les sous-paragraphes a) et c) sont, à cause
de la jurisprudence actuelle, les deux façons normales et habituelles
que les juges utilisaient pour donner gain de cause aux commerçants
lorsqu'un consommateur est pris en défaut de paiement. Lorsqu'un
consommateur, qui avait acheté un produit et qui payait d'une
façon régulière, manquait deux ou trois paiements, le
commerçant l'amenait devant le juge pour lui dire: Voici, il a trois
paiements en retard. Le juge lui disait: Vous allez payer les paiements
échus c'est le sous-paragraphe a) ou c) si vous ne le
faites pas, le commerçant doit reprendre son produit. En ajoutant le b),
on permet d'exiger le paiement immédiat du solde de la dette. Cela veut
dire que si une personne avait payé, peut-être, le tiers du
montant, le commerçant aurait le droit d'exiger immédiatement le
solde des deux tiers du montant, sinon elle pourrait perdre l'objet.
Si le ministre met une clause de déchéance de terme dans
son bill il ne faut pas s'imaginer que tous les commerçants vont dire:
On ne s'en servira pas de cela. Toute personne qui a droit d'aller
jusque-là va inclure une clause de déchéance de terme dans
ses contrats.
A ce moment-là, c'est une protection additionnelle inutile pour
le commerçant. Dans un bill sur la protection du consommateur, je pense
que ce n'est pas l'occasion de le faire. Si on veut réellement
protéger le consommateur, il ne faut pas donner une ouverture comme
celle-là au commerçant qui, même s'il est bien
intentionné, pourrait dire: Je suis aussi bien d'inclure cela dans mon
contrat. Cela me donne des protections supplémentaires.
M. le Président, je pense qu'il faudrait rayer, dans l'article
34, le paragraphe b) au complet. C'est l'amendement que je fais.
M. TETLEY: M. le Président, respectueusement, je ne partage pas
l'opinion du député de Lafontaine. Pourquoi? En effet, c'est
l'article qu'on appelle "seize or sue". C'est un article très important.
Le même article existe au Manitoba et la même idée existe
dans notre code civil à l'article 1,561 f).
M. CARDINAL: Article a).
M. TETLEY: C'est a) et f), etc. L'ancien doyen est au courant.
M. PAUL: On ne dit pas l'ancien, on dit l'ex-doyen.
M. TETLEY: L'est-il encore? Ah! L'ex, pardon.
M. PAUL: Ancien! Il est encore tout jeune. C'est un jeune homme
d'avenir.
M. TETLEY: Bon! Je retire ces paroles antiparlementaires.
M. CARDINAL: Quand nous parlerons de vous, plus tard, nous dirons
l'ex-ministre.
M. TETLEY: II y en a aussi ici, en Chambre, je crois, des "ex". Mais
cela ne fait rien.
M. le Président, nous voulons protéger le commerce aussi
bien que les consommateurs. Autrefois, le moyen d'aider l'économie
était de mettre de l'argent dans la construction. C'était le
moyen favori de Franklin D. Roosevelt et de tous les économistes
keynésiens, etc. Aujourd'hui je crois qu'une des méthodes les
plus importantes ou les plus populaires, suivant les économistes, c'est
de mettre de l'argent dans les mains des consommateurs. Mais, pour les
mêmes raisons, nous voulons aider les commerçants à donner
du crédit. Il faut donner ce droit, ce choix au commerçant, soit
d'exiger le paiement, soit d'exiger le solde ou soit de reprendre
possession.
L'article 34 b) donne un certain droit, c'est vrai, mais après un
avis de trente jours. S'il y a des pressions ou des suggestions du
député de Lafontaine, j'ai aussi reçu des pressions et des
demandes des compagnies de finance qui croient que cela tel que
rédigé, peut affecter, même aujourd'hui, leurs droits. Les
compagnies de finance veulent plus de pouvoirs.
M. LEGER: Nous ne sommes pas obligés de les leur donner.
M. TETLEY: Non. C'est le même article, en effet, que...
M. LEGER: Ce n'est pas le bill de la protection des finances, mais le
bill de la protection du consommateur.
M. TETLEY: Non, ce n'est pas la protection des finances, mais c'est
peut-être la protection de l'économie. Donc, j'ai dit non aux
compagnies de finance parce que c'est le même article que dans l'ancien
bill et je dois dire non au député de Lafontaine.
M. BURNS: M. le Président, très brièvement, je veux
tout simplement ajouter mon petit grain de sel à cette discussion. La
chose la plus désagréable et la plus inacceptable, à mon
avis, c'est lorsque vous avez un consommateur qui vous allez me dire
dans certains cas, à cause de négligence, dans d'autres
cas, à cause de mauvaise foi de sa part c'est, vous allez
l'admettre, M. le ministre, quand même la minorité mais
très souvent, pour des raisons d'impossibilité vous avez une
personne qui déjà est placée dans une situation impossible
au point de vue financier. Il s'agit d'une personne à qui il
arrive des malheurs inattendus, que ce soit la maladie, qui
l'empêche de travailler avec une sécurité d'emploi
insuffisante ou une assurance-maladie insuffisante vue du point de vue de
l'emploi.
Cette personne non seulement est placée dans la position
désavantageuse de ne pas pouvoir faire face à ses obligations,
mais encore elle se voit aux prises avec une disposition législative qui
donne, à toutes fins utiles, trois choix au vendeur. Je considère
que, lorsqu'un vendeur ou un commerçant, au sens large du mot, vend
quelque chose à crédit, il le vend à crédit, mais
il en prend le risque. C'est un risque qu'il doit prendre, et c'est un risque
calculé. C'est un risque qui apparaît, d'ailleurs, au niveau de
son bilan, pour les mauvaises créances. Je me dis tout simplement : Un
bien a été vendu. Donnons à ce commerçant le choix,
en cas de non paiement, soit de le reprendre, ou soit, comme le dit le
paragraphe a), d'exiger le paiement.
A ce moment-là, le choix, il l'a, mais, selon la pratique
actuelle, comme cela a toujours été dans le temps des
saisies-revendications et en matière d'automobile, tout le monde sait
jusqu'à quel point il y a eu des abus dans ce domaine-là. Si non
seulement le commerçant, utilisant le choix prévu au paragraphe
c), reprend l'automobile et, de par son contrat, a le droit d'aller chercher le
profit qu'il perd, à ce moment-là, peut-être qu'il sera un
peu plus judicieux dans le choix de ses débiteurs éventuels.
Au fond, ce qu'une loi du consommateur doit faire, c'est non seulement
protéger le consommateur dans ces conditions, mais c'est aussi le
protéger contre lui-même. Je pense qu'à plusieurs reprises
nous avons soulevé ce problème-là. Un commerçant
qui veut vendre à tout prix, et dont le débit vis-à-vis du
grossiste a un élément d'importance quant au coût, à
la longue, va devenir peu scrupuleux. Si, lorsqu'il reprend un bien, il peut
aller reconquérir le manque à gagner sur ce bien-là, ce
commerçant va rendre un crédit beaucoup plus facile. Je pense, M.
le ministre disons que j'insiste très sérieusement sur ce
point-là que c'est notre devoir, comme législateurs, de
rendre le crédit facile, accessible, d'accord, mais dans des normes qui
font que le commerçant sera obligé d'y penser deux fois avant
d'accorder le crédit.
Et si vous enlevez le 2e paragraphe, c'est une norme qui n'existe plus
qui va faire dire aux commerçants: Je vais y penser avant d'accorder le
crédit...
M. CARDINAL: II augmentera le taux d'intérêt.
M. BURNS: Bien, il augmentera le taux d'intérêt. A ce
moment-là, on s'occupera de ça. On réglementera le taux
d'intérêt, peu importent les problèmes constitutionnels que
ça peut sembler poser à l'heure actuelle. Il reste quand
même que je ne trouve pas que dans une société dite de
consommation, on doive donner des conditions telles que le commerçant se
dise: Je me fous de la qualité de mon débiteur. Et c'est
là qu'il inscrit ses pertes sur ceux chez qui il ne pourra pas aller
chercher ce manque à gagner. Et je trouve que c'est notre devoir de
tenter de régler ce problème-là en enlevant cette
troisième option. Une fois que vous avez une possibilité de
reposséder le bien ou d'exiger le paiement immédiat, je ne vois
pas pourquoi, dans une loi dite de protection du consommateur, vous auriez la
possibilité, en plus, d'aller chercher le manque à gagner, parce
qu'à toutes fins pratiques c'est ce que le paragraphe b) dit.
M. TETLEY: M. le Président, l'article 34 est très
important et c'est une modification assez importante de notre loi. Autrefois,
le commerçant avait le droit de saisir l'automobile et de demander,
après la vente de l'automobile, la somme due, les deux droits.
Aujourd'hui, le commerçant n'a qu'un droit, une alternative, "seize or
sue" mais pas les deux. Donc, nous protégeons énormément
le consommateur, ce qu'on ne fait pas en Ontario. Deuxièmement il faut
noter à l'article 34 b), que le commerçant peut exiger le solde
dû suivant certaines procédures. Un avis de trente jours, en vertu
de l'article 68 et suivant; et à l'article 70, le consommateur a trente
jours pour payer en un seul paiement le solde dû et revient dans le
contrat avec tous ses droits.
Et s'il n'est pas capable de le faire, il a même un autre droit,
c'est d'aller devant la cour et plaider que les modalités de paiement
soient modifiées. Donc c'est incroyable ces droits, il a même des
droits en vertu de l'article 38, lorsque les deux tiers sont payés. Donc
nous avons, à mon avis, en modifiant la loi, changé
complètement, pas complètement mais en grande partie les droits
du consommateur. A l'avenir, parce que IAC et GMC etc. n'ont pas autant de
droits qu'autrefois, ils vont penser avant de donner du crédit. Et les
fameux 15 p.c. vont devenir, sans être obligatoires, peut-être 20
p.c. et 25 p.c, parce que là où le crédit serait
donné à ceux qui ont vraiment le droit au crédit, ou au
moins qui ne sont pas de très grands risques.
Ceux qui ne peuvent pas payer, qui ont trop de crédit, n'auront
pas crédit. Si nous acceptions l'amendement de l'honorable
député de Lafontaine, le paiement initial serait d'à peu
près 50 p.c. parce que le commerçant n'aurait pas de pouvoir du
tout et vous affecteriez énormément le crédit.
M. LEGER: M. le Président, c'est tout simplement à cause
de l'heure que je ne discute pas davantage cet article, parce qu'il y a
d'autres articles à venir, mais j'aurais beaucoup d'autres arguments
à apporter au ministre là-dessus. Comme je vois que son
idée est déjà faite sur cet article, c'est inutile de
prolonger le débat. C'est sur une division très soulignée
que nous acceptons l'article 34.
M. LE PRESIDENT: Article 34, adopté sur division. Article 35?
M. LEGER: Le prochain amendement est à l'article 38.
M. LE PRESIDENT: Article 35, adopté; article 36, adopté;
article 37, adopté; article 38?
M. LEGER: A l'article 38, très rapidement, je voulais soumettre
au ministre que, plutôt que ce soit le tiers du prix de vente, ce soit la
moitié. Je sais que le ministre pense que ce n'est qu'un jeu de mots,
mais je pense que la moitié de l'objet cela veut dire que l'on a
dépassé 51 p.c. de l'objet et c'est la raison pour laquelle on
demande la moitié du prix de vente.
Voici l'amendement: Si lors du défaut du consommateur celui-ci a
payé au moins la moitié du prix de vente au lieu des deux
tiers le commerçant ne peut exercer son droit de reprise à
moins d'obtenir la permission du tribunal.
M. TETLEY: Nous croyons que deux tiers est le pourcentage
approprié.
M. LEGER: Adopté sur division, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Article 38, adopté.
M. LEGER: Le prochain amendement, M. le Président, pour votre
gouverne, est à l'article 43.
M. LE PRESIDENT: Articles 39, 40, 41, 42, adopté. Article 43?
M. LEGER: M. le Président, on peut adopter l'article 43, quant
à moi; c'est à 43 a).
M. CARDINAL: Article 43, adopté. M. LE PRESIDENT: Article 43,
adopté.
M. LEGER: A l'article 43 a), je voudrais soumettre l'amendement suivant:
Un agent d'information ne peut fournir ses dossiers de crédit
qu'à un commerçant. Ce commerçant ne peut se servir de ces
dossiers de crédit que pour les fins de son commerce. C'est tout
simplement pour permettre qu'il y ait quand même une certaine
discrétion.
En plus, que le consommateur puisse avoir accès à ces
dossiers, il faudrait que ce soit simplement le commerçant qui ait le
droit de le savoir et qu'il y ait une certaine discrétion
là-dessus. C'est la raison pour laquelle nous soumettons l'amendement 43
a).
M. CARDINAL: M. le Président, ceci a été
discuté en commission. Je ne sais pas je n'en doute pas
quelles sont les connaissances de mon collègue dans cette question. Ce
qu'on appelle les agents d'information dans le milieu du commerce, dans
la finance et dans l'industrie ils portent d'autres noms sont des
maisons dont certaines sont extrêmement sérieuses, lesquelles
possèdent des dossiers confidentiels en ce sens que ce n'est que sur
enquête de crédit qu'elles donnent leur résultat.
J'ai moi-même fait les remarques du député de
Lafontaine lors de la commission parlementaire, ainsi que les a d'ailleurs
faites le député de Beauce, je pense.
Mais, après mûres réflexions, me rendant compte que,
de toute façon, toute personne qui a un intérêt peut
requérir à ces agents d'information, j'ai laissé tomber ma
suggestion, convaincu qu'elle viendrait complètement désorganiser
ce genre de services, parce que c'en est un. Il peut même arriver qu'un
individu, même s'il n'est pas commerçant, ait besoin de ce
service.
M. TETLEY: M. le Président, le député de Lafontaine
suggère un privilège à l'agent d'information. C'est
beaucoup trop. Les députés ont certains droits en Chambre. Les
journalistes demandent un privilège devant une certaine commission de la
Chambre. Les prêtres ont un privilège. Nous trouvons très
intéressante la suggestion, mais créer par cette loi un
privilège aujourd'hui, je trouve cela très très
dangereux.
M. LEGER: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 44?
M. LEGER: Le prochain est à l'article 53.
M. CARDINAL: Articles 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
adoptés.
M. LE PRESIDENT: Articles 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51, 52,
adoptés?
M. TETLEY: Pardon, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: A l'article 48, je crois que nous avons un
amendement.
M. TETLEY: Oui, puis-je suggérer que les amendements aux articles
48, 49, 50 et 51 soient adoptés tels que notés dans le rapport de
la commission des Institutions financières?
M. LEGER: Quels articles?
M. TETLEY: Les articles 48, 49, 50, 51.
M. LEGER: Si vous voulez me permettre, j'ai fait une petite erreur;
j'avais quelque chose à l'article 46.
M. CARDINAL: Pour clarifier une situation, quand j'ai dit
adoptés, je voulais dire adoptés tel qu'amendés à
la commission parlementaire.
M. TETLEY: Très bien.
M. LEGER: Est-ce que le ministre me le permet ou si j'y reviendrai plus
tard?
M. TETLEY: Plus tard, d'accord. Que ces amendements tel que
rédigés dans le rapport de la commission soient
adoptés.
M. CARDINAL: Dans tous les cas, cela satisfait l'Opposition.
M. TETLEY: Articles 48, 49, 50, 51 et je peux ajouter les articles 54,
57, 58, 59.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que le ministre me permettrait, pour la bonne
marche du comité plénier...
M. PAUL: C'est-à-dire pour la marche lente.
M. LE PRESIDENT: ... qui est très éveillé, afin
d'éviter toute erreur? Nous étions, je pense, rendus à
l'article 51 et il y avait un changement. A l'article 52, il n'y avait pas de
changement. Est-ce qu'on pourrait revenir à l'article 46...
M. TETLEY: Mais avec plaisir!
M. LE PRESIDENT: ... pour satisfaire le désir du
député de Lafontaine?
M. LEGER: Ce sera très court, M. le Président. On
proposait de biffer l'article 46 complètement.
M. PAUL: Vous proposiez de le biffer complètement! Mais, M. le
Président, c'est contraire au règlement !
M. BURNS: M. le Président, avec tout le respect que j'ai pour le
député de Lafontaine et pour le député de
Maskinongé, je pense que le député de Maskinongé
n'a pas compris le sens de ce que le député de Lafontaine vient
de dire. Ce que le député de Lafontaine voulait dire, c'est que
nous voterons contre cet article et que nous ne voulons pas que cet article
apparaisse.
M. PAUL: Notre règlement d'intention. M. LEGER: Vive l'intention!
M. BURNS: C'est ça. M. PAUL: Très bien.
M. BURNS: Connaissant très bien le député de
Lafontaine qui, véritablement, est un de mes amis je ne le dis
pas à la légère dans son cas, parce que cela se dit
souvent à la légère dans cette Chambre je sais que
ce contre quoi nous en avons, c'est l'existence même de ces agents
d'information.
Nous sommes contre le fait surtout qu'on les voit dans la partie la plus
désagréable de l'exercice de leur emploi et c'est malheureux,
mais le texte...
M. CARDINAL: Est-ce que les avocats ne s'en servent pas?
M. BURNS: Je m'excuse, mais l'avocat qui vous parle actuellement ne s'en
sert jamais.
M. CARDINAL: Ah bon! C'est très bien. M. BURNS: Et ça, je
le dis...
M. CARDINAL: Je crois le député, il est à son
siège.
M. BURNS: ... avec le...
M. PAUL: Et ceux qui voudraient parler, c'est la même chose.
M. BURNS: ... je mentionne à mon siège.
Mais qu'on commence à dire qu'il n'a pas le droit de divulguer
ceci et cela, au fond ça pose le problème des agents
d'information tout court. Et si nous votons contre, nous voulons tout
simplement manifester notre position sur l'existence même de ce genre de
services qui, soit dit en passant, rendent des services à l'occasion,
mais qui, dans la majorité des cas sont un objet de harassement de la
population. Et on n'a qu'à voir surtout les agents d'information qui
servent aussi d'agents de perception et très souvent les deux
fonctionnent dans une même optique. Et c'est surtout l'utilisation de
l'information par rapport à la perception que je trouve absolument
inacceptable. Je le mentionne et nous voterons contre simplement pour le
signaler peut-être de façon symbolique mais quand
même très réelle au gouvernement, même si le
député de Brome n'est pas content et qu'il tape sur son bureau.
Je trouve que c'est un point important. Alors, s'il veut taper, qu'il aille
taper ailleurs, c'est son problème.
Je le signale parce que je voudrais qu'éventuellement le
gouvernement repense l'existence même de ces agents d'information qui
sont aussi des agents de perception à toutes fins pratiques et qui se
servent de leurs informations pour harasser et opprimer une certaine
population, qui, très souvent, est absolument ahurie devant l'action de
ces gens-là.
M. CARDINAL: M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Blank): Sur division.
M. CARDINAL: Un instant, je vous prie. Je pense que j'ai assez
collaboré pour qu'on ne doute pas que je me lève inutilement. Je
suis d'accord, non pas pour rayer l'article mais pour souligner certains des
aspects de ce qu'a dit le député de Maisonneuve. Moi-même
dans des expériences que j'ai eues dans le milieu des affaires, j'ai vu
souvent de ces agents de
perception faire le tour de tous les voisins d'une famille donnée
pour avoir des renseignements sur ses habitudes de vie, sur la voiture ou les
voitures qu'elle possède; ils vérifient au bureau
d'enregistrement les hypothèques qui peuvent y être
enregistrées, appellent les agents d'assurance pour savoir quelles sont
les assurances sur la vie. En fin de compte, ils possèdent sur vous un
dossier parfois plus développé que vous n'en avez
vous-même, hors de votre connaissance et donné par des gens qui
parfois ne connaissent même pas la valeur des renseignements qu'ils
donnent et qui souvent sont inexacts.
Je n'ai pas le temps à cette heure du matin de donner des
exemples ni de développer ce point. J'accepte ce projet de loi tel qui
est et dont nous avons dit à plusieurs reprises à la commission
parlementaire que c'était une première étape. Il y aura
d'autres étapes et on espère qu'en ce gouvernement ou en celui
qui le suivra on en viendra à toucher à ce point qui concerne la
vie privée des gens, sujet sur lequel d'ailleurs le
fédéral veut légiférer et le Québec pourra
le faire en matière de droits de l'homme.
DES VOIX: Adopté.
M. TETLEY: Je suis contre votre amendement à l'effet de biffer
l'article 46, mais je vois, pour l'avenir, des changements. Comme l'a dit le
député de Bagot, c'est une première étape. Mais le
raisonnement, je peux le donner. Si vous procédez contre l'agent
d'information, il est responsable, en droit pénal et en droit civil, de
la diffamation. Personnellement, s'il ne veut pas se protéger...
M. BURNS: M. le ministre, sans vouloir vous interrompre, vous savez que
la preuve de ces choses-là est très difficile à faire. Ce
sont des choses qui arrivent et, habituellement, on apprend cela par
l'entremise de voisins. Quand vient le temps de poser des gestes concrets, les
gens disent: Ecoutez, je ne veux pas me mêler de cela. Ce sont des choses
que j'ai apprises et ne me tramez pas en cours, etc. Vous savez que la preuve
est très difficile à faire dans ces cas-là.
M. TETLEY: Sur division, je ne partage pas...
M. PAUL: Ce n'est pas plus difficile à faire que dans les cas de
conspiration.
M. LE PRESIDENT: Article 46, adopté sur division.
M. BURNS: Surtout quand la conspiration est réelle, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Nous arrivons maintenant, messieurs, à l'article
52.
M. LEGER: Quant à moi, adopté. M. LE PRESIDENT: Article
53?
M. LEGER: A l'article 53, M. le Président, j'ai un amendement
à faire. Voici comment il se lirait: Dans le cas d'une vente faite par
un vendeur itinérant, le consommateur peut exercer sa faculté de
résolution dans un délai de dix jours après
l'exécution totale ou partielle par le vendeur de son obligation
principale.
M. le Président, je serai bref. Il ne sert à rien de
sortir toutes les raisons; nous les avons déjà sorties. Il faut,
quand même, réaliser qu'une grande partie de la population est
incluse dans celle qui est absente de son domicile plus longtemps que cinq
jours. Vous avez toutes les occupations comme les bûcherons, les
navigateurs, les pêcheurs, les voyageurs de commerce et on peut
même dire les députés. Il y a une quantité
énorme de personnes qui sont dans la catégorie de travailleurs
qui sont absents de chez eux pendant plus de cinq jours. Même si le
ministre me dit que cela ne comprend pas le samedi et le dimanche, je ne vois
pas pourquoi on ne mettrait pas 10 jours, surtout pour les vendeurs
itinérants qui sont la sorte de commerçants qui peuvent à
cause de leur façon de travailler, exercer le plus de pressions sur une
personne à domicile, alors que la personne responsable du foyer, le
mari, ne sera de retour que pas mal plus tard. Je pense qu'il n'y a aucun
danger de prolonger cette période de résolution à dix
jours pour justement protéger cette partie de la population qui est
susceptible d'être jouée par des vendeurs malhonnêtes. C'est
sûr que cette loi-là ne s'appliquerait pas à des vendeurs
itinérants honnêtes. Je demande au ministre de reconsidérer
sa décision sur l'article 53.
M. TETLEY: M. le Président, avec l'article 105, c'est presque
toujours sept jours. C'est assez long. Je note qu'en Ontario, dans "The
Consumer Protection Act", article 18, ce n'est que deux jours. Je crois que
nous sommes allés assez loin avec cinq jours.
M. LEGER: M. le Président, ce n'est pas parce qu'on prend
l'exemple de l'Ontario que c'est parfait. Cela ne veut pas dire qu'on ne peut
pas être en avant de l'Ontario de temps en temps. De toute façon,
je vois que votre décision est prise. Il est quatre heures et quart.
Donc, sur division et soulignez-le deux fois cette fois-ci.
M. PICARD: M. le Président, à titre de renseignement,
pourrais-je savoir, lorsque vous parlez de cinq jours j'ai cru entendre
quelqu'un le mentionner si cela comprend le samedi et le dimanche?
M. TETLEY: Oui. J'ai référé l'honorable
député à l'article 105.
M. PICARD: Dans ce cas, M. le Président, étant
donné que la majorité des consommateurs, comme moi-même,
d'ailleurs, n'avons pas de formation juridique, il serait si simple, si
cela
ne comprend pas le samedi et le dimanche, de dire: Sept jours complets
de calendrier. Seven calendar days. Tout le monde comprendrait cela. Mais
autrement, si vous ne l'inscrivez pas de cette façon, nous sommes
là à nous demander: Est-ce que les dimanches ou les fêtes
légales sont exclus? Dites donc: Sept jours complets de calendrier.
N'importe qui, même celui qui a fait une deuxième année, le
comprendra.
M. CARDINAL: C'est du "filibuster" du côté
ministériel.
M. TETLEY: Avec le plus grand respect que j'ai pour le
député d'Olier, vous allez mêler les cartes avec vos
congés. Parce que l'article 105 parle aussi des délais pour les
autres avis. Si le délai se termine un samedi ou un dimanche, cela
revient au lundi suivant.
M. CARDINAL: C'est écrit.
M. TETLEY: II y a Noël, le Jour de l'An, etc. Egalement, la
période de cinq jours est assez longue. Je ne partage pas l'opinion du
député d'Olier.
UNE VOIX: Adopté sur division.
M. LE PRESIDENT: Article 53, adopté sur division.
M. LEGER: Le prochain, M. le Président, est à l'article
62.
M. CARDINAL: Alors les articles 54, 55, 56, 57, 58, 59, 60 et 61, sont
adoptés.
M. LE PRESIDENT: Tous ces articles sont adoptés.
M. LEGER: M. le Président, on peut adopter l'article 62 en ce qui
me concerne.
M. LE PRESIDENT: Articles 60, 61 et 62, adoptés.
M. LEGER: M. le Président, je propose, à l'article 62a)
je pense peut-être avoir l'appui des membres du Ralliement
créditiste c'est qu'en aucun endroit, on ne parle de la
publicité faite pour les enfants. Je propose l'amendement suivant,
à l'article 62a) qui se lirait comme suit: "Aucune publicité d'un
bien par un commerçant ne doit s'adresser principalement aux
enfants".
M. le Président, le ministre me répondra probablement
qu'il avait l'intention, à l'article 102, de réglementer sur
cette publicité. Mais il faut quand même admettre qu'on ne peut
pas mettre dans des règlements quelque chose qui n'a pas
été au moins énoncé dans la loi. Alors il faut
parler au moins de l'objet dans la loi. Je me demande si le ministre ne
pourrait pas, tout simplement, ajouter à l'article 62a) que concernant
la publicité pour les enfants, l'inscrire là, quitte à
réglementer par la suite.
M. CARDINAL: M. le Président, nous avons fait un débat
assez long. Mon collègue le député créditiste
était d'accord avec moi, sauf que nous nous sommes rendu compte d'une
chose tous les deux il me corrigera si je me trompe c'est
qu'à ce moment-là, les revues qui arriveront des autres
provinces, des autres pays, des postes de radio canadiens ou américains,
toute publicité qui viendra de l'extérieur ne serait pas soumise
à ces règles et que nos propres moyens d'information le
seront.
Il y a là la même discrimination qu'on a voulu faire pour
les cigarettes; il suffit de lire une revue française, il y a des
annonces à pleines pages. On a même aujourd'hui mentionné
dans un journal que, depuis qu'aux Etats-Unis et au Canada on a adopté
ces règles qui viennent diminuer la publicité de la cigarette, la
consommation a augmenté de 3 p.c. Alors, comme je l'ai
déjà dit, les lois ne sont pas faites pour être vertueuses
et je me demande qui décidera ce qu'est la publicité qui
s'adresse principalement à des enfants. Qu'est-ce qu'un enfant, à
quel âge cesse-t-on d'être un enfant? J'aurais mille questions mais
je ne veux pas allonger le débat, l'idée part d'un excellent
naturel. Le ministre nous a donné l'assurance, en commission, que son
ministère se pencherait profondément sur la question,
espérons pas trop longuement, et qu'il nous suggérerait des
règles sur la publicité. Mais on se rappelle que le gouvernement
fédéral a déjà tenté des expériences
semblables qui se sont avérées en fin de compte plutôt
malheureuses qu'heureuses pour nos propres moyens d'information.
M. TETLEY: II faut que je réponde... pardon?
M. LEDUC: Je crois que l'esprit qui anime le député de
Lafontaine dans l'amendement qu'il propose est bienvenu, si l'on s'attarde
à regarder ou à se remémorer certaine publicité
destinée aux enfants, spécialement durant la période des
Fêtes. Je me souviens qu'on disait aux enfants à un certain
moment: Si vos parents vous aiment, ils vous achèteront le cadeau X, ce
qui, à mon sens, est à peu près le pire geste qu'un
commerçant ou qu'un publicitaire puisse poser. D'un autre
côté, il faut aussi penser à l'autre aspect de la
publicité qui s'adresse aux enfants et qui, celle-là, peut
être constructive. Je crois que le ministre, dans sa sagesse, devra,
à un moment donné, trouver un moyen, sinon pour
légiférer, du moins essayer d'exercer des mesures de pression sur
ces publicitaires qui laissent passer des annonces semblables. Mais il ne
faudrait sûrement pas le faire au détriment de ceux qui font une
publicité honnête et qui s'adressent aux plus jeunes ou aux
adolescents.
M. CARDINAL: M. le Président, un dernier
mot. Ne pourrions-nous pas justement, comme on l'a dit à la
commission parlementaire, commencer aux niveaux élémentaire,
secondaire dans les écoles, en collaboration avec le ministère de
l'éducation, à éduquer les enfants vis-à-vis de la
publicité? Ce qu'on dit des enfants, il faut le dire des adultes. Il y a
combien de mesdames et messieurs qui...
M. LEDUC: ... qui sont de grands enfants.
M. CARDINAL: ... sont de grands enfants? C'est pourquoi je posais la
question tantôt: C'est quoi un enfant? Je pense que le meilleur et plus
direct moyen serait que l'on commence à l'école. On n'a pas
besoin d'augmenter les budgets, on les a déjà vu au
ministère de l'Education, nous les avons votés ce soir. Et qu'on
leur apprenne que tout ça n'est pas nécessairement vrai.
M. BURNS: M. le Président...
M. ROY (Beauce): M. le Président...
M. LE PRESIDENT (Blank): L'honorable député de Beauce.
M. TETLEY: Pensez un peu à la publicité des livres.
M. BURNS: Par ordre d'importance, je laisse parler le
député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Ce n'est pas que je me pense plus important, M. le
Président, mais ça fait exactement trois fois que je demande la
parole.
Alors, tout à l'heure, au début de l'étude de ce
projet de loi, j'avais justement souligné le problème de la
publicité faite aux enfants et j'ai eu l'occasion de le souligner
également lors de l'étude du projet de loi en commission
parlementaire.
Je pense, M. le Président, que ce problème est
réel, très important, mais pas facile à résoudre.
Je pense que, pour le résoudre d'une façon réelle, d'une
façon pratique, il faudrait que le Québec soit situé sur
une île dans le sud du Pacifique, complètement isolé du
monde extérieur, parce que je pense que même si on essayait
actuellement de contrôler notre télévision à
l'intérieur du Québec, il reste que nous ne pouvons pas
contrôler la télévision qui vient de
l'extérieur.
Il y a, de plus, le député de Bagot l'a souligné
tout à l'heure, le problème des revues. Nous avons des revues qui
rentrent de l'extérieur. Nous avons vu, sur le plan pratique,
l'interdiction que le fédéral a donnée à la
publicité sur le tabac. Or, M. le Président, je pense que,
inclure un article dans le projet de loi remarquez bien que je n'y ai
aucune objection, au contraire, s'il y avait possibilité d'inclure un
article dans le projet de loi avant qu'il soit adopté, de façon
à pouvoir, en quelque sorte, permettre au gouvernement d'exercer un
certain contrôle de ce côté-là je pense que ce
serait une excellente chose. Je me demande, en réalité, sur le
plan pratique ce que ça pourrait donner. Je me demande si ça ne
serait pas tout simplement une petite formule hypocrite qui dirait ceci: On va
faire notre possible pour essayer d'éviter la publicité qui
s'adresse aux enfants, essayer de légiférer dans ce
domaine-là, mais en réalité sur le plan pratique ça
ne donne absolument rien.
Alors, M. le Président, je tiens à dire que nous serions
heureux que le gouvernement puisse faire quelque chose dans ce
domaine-là, mais nous aimerions réellement que si le gouvernement
parle de faire quelque chose qu'il ait au moins des formules qui nous
permettent d'espérer un réel résultat, ce dont nous
doutons.
Or, M. le Président, je suis bien d'accord avec mon
collègue du Parti québécois, avec mon collègue le
député de Bagot, mais seulement je me demande encore une fois
qu'est-ce que ça pourra donner puis jusqu'où on pourra aller dans
ce domaine-là.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, je ne voudrais pas insister sur ce
point, mais je considère que c'est un point très important. Je
pense que le ministre en est convaincu également. Il nous a
mentionné à quelques reprises, lors des représentations
faites par des personnes concernées par la publicité faite aux
enfants, que c'était un problème. J'ai remarqué que le
député de Bagot aussi semble bien d'accord que c'est un
problème, sauf que j'ai l'impression que nous démissionnons
beaucoup trop facilement devant ce problème. Nous nous disons; c'est
quelque chose qu'on ne peut pas arrêter si ça vient de
l'extérieur de la province. C'est quelque chose qui nous bloque, si
c'est de la publicité télévisée.
Bien je vous dis d'abord, en ce qui concerne ce qui vient de
l'extérieur de la province, si je regarde et je
précède le projet de loi l'article 102, paragraphe o) vous
êtes en mesure par voie de réglementation, de faire de la
réglementation relativement à l'établissement de normes
concernant la publicité. Arrêtez de crier dans le fond, ceux qui
ne comprennent pas, ce n'est pas grave, on parle entre adultes pour
établir des normes concernant la publicité au sujet de tout bien
de crédit.
Vous avez déjà un élément d'inscrit dans la
possibilité de réglementation, pourquoi on n'en inscrirait pas un
autre? On régit des normes de publicité. C'est évident que
si on inscrit des normes de publicité concernant le crédit,
tôt ou tard on va empiéter sur d'autre chose. Pourquoi ne pas le
dire carrément? Si le problème de la télévision est
un problème constitutionnel qui nous empêche de
légiférer
carrément, bien à ce moment-là ça nous
fixera peut-être, à nous du Québec, comme objectif, d'aller
négocier auprès d'Ottawa, c'est peut-être quelque chose qui
est négociable, des normes applicables à la
télévision.
Je pense qu'il ne faut pas démissionner devant ce
problème-là parce que, prétend-on; il y a de la
publicité qui vient de l'extérieur. S'il vient de la
publicité de l'extérieur et qu'on a décidé qu'au
Québec elle est illégale, on la saisira et on l'enlèvera,
cette publicité-là, en autant qu'elle soit de notre
juridiction.
Quoi qu'on ait un sourire à l'égard de ce que je dis, je
pense que c'est possible à partir du moment où on est vigilant,
à partir du moment où l'on dit: II faut faire quelque chose dans
ce domaine. Autrement, si on s'était dit la même chose en
matière d'oeufs et de poulets, on n'aurait même pas adopté
la loi que vous savez, qui a été adoptée par la
présente Législature. J'incite le ministre à ne pas
prendre à la légère ce problème-là. Je n'ai
pas besoin et je me suis restreint sur ce point-là de
revenir sur tous les arguments que tout le monde ici, je pense, comprend
relativement à la publicité à l'égard des
enfants.
Ce serait à peu près aussi fallacieux que de dire: On ne
fait pas de publicité dans les asiles, chez les gens qui comprennent les
choses, mais qui ont une compréhension moindre que l'homme moyen. C'est
à peu près exactement le même argument que je n'ai pas
besoin de développer, j'ai l'impression que tout le monde le comprend.
De grâce ne cédons pas devant cela parce que cela pose des
difficultés.
M. ROY(Beauce): M. le Président, est-ce que je pourrais me
permettre de poser une question à l'honorable leader du Parti
québécois? Pourriez-vous suggérer une formule ou un moyen
quelconque qui pourrait donner des résultats pratiques? Remarquez bien
que je suis entièrement d'accord pour dire qu'il y a eu tellement d'abus
de ce côté-là, du fait de la publicité aux enfants,
que je pense que le gouvernement se doit de prendre ses
responsabilités.
La question que j'ai posée tout à l'heure est la suivante:
Comment, sur le plan pratique, le gouvernement peut-il procéder de
façon à avoir au moins un minimum de résultats? Si le
député de Maisonneuve avait quelque chose à dire, je
serais, en ce qui me concerne, très intéressé à
l'entendre.
M. BURNS: J'ai quelque chose de très simple à
suggérer. D'une part, l'adoption de l'amendement proposé par le
député de Lafontaine, en ce sens que toute publicité
destinée aux enfants doit être considérée comme
illégale et ensuite, il y aurait peut-être quelque chose à
faire au niveau strictement opérationnel de la loi en disant: Quelqu'un
qui contreviendra à cela pourra... Je ne sais pas d'ailleurs, si les
pouvoirs de la loi je n'ai pas scruté cet aspect-là
y sont déjà, mais il est fort possible que déjà
dans la loi nous ayons les éléments pour dire que la
publicité qui sera faite en contravention de cette
disposition-là, sera quelque chose qui peut être
confisquée, c'est tout.
Le problème de la télévision, à mon avis
peut-être que le premier ministre ne sera pas heureux je
crois que ce serait un problème à ajouter aux autres
problèmes qui devaient être discutés à Victoria
parce que c'est un problème constitunionnel de juridiction
fédérale. Je pense que le gouvernement fédéral a
autant intérêt que le gouvernement du Québec de voir
à ce que les citoyens, que l'on considère comme des citoyens qui
ne sont pas encore aptes à recevoir de la publicité, à en
juger et à l'apprécier, que ces citoyens-là puissent
être protégés peut-être plus que d'autres. Le
citoyens moyen, lui, peut recevoir de la publicité, peut en juger, peut
trancher dans la publicité qui lui est donnée alors que ce
citoyen-là en particulier, à qui l'on s'adresse,
c'est-à-dire l'enfant, n'est absolument pas dans une position pour
trancher ce problème.
Ce qu'il y a de pire, c'est qu'il y a des liens sentimentaux qui
viennent s'inscrire dans le portrait. Je veux bien qu'on reste dans un cadre
capitaliste de loi d'offre et de demande, mais, là, vous avez une autre
dimension qui vient s'installer, c'est-à-dire le lien sentimental entre
les enfants et les parents. En tout cas, qu'on s'y penche, qu'on ne laisse pas
ce problème de côté, en disant tout simplement: II n'y a
plus rien à faire relativement à cela, parce qu'on va mettre le
commerçant québécois en désavantage par rapport au
commerçant de l'extérieur. Bien, s'il le faut, mettons des
pouvoirs de saisie et de confiscation même de documents qui viennent de
l'extérieur, parce que ce qui se passe au Québec, c'est quand
même de notre juridiction.
M. VEILLEUX: Oui, mais je vais vous poser la question: Qu'est-ce que
vous faites, par exemple, des endroits situés près de la
frontière américaine? Je prends Saint-Jean où on capte les
ondes de la télévision de Burlington et de Plattsburg.
M. BURNS: Mais le député de Saint-Jean sait fort bien que,
dans tout règlement, dans toute loi, il y a toujours un
élément limite. Qu'est-ce que vous voulez? On ne doit pas
dépasser 70 milles à l'heure sur une autoroute. Vous pouvez
toujours me dire: Bien oui, mais le gars qui fait 71 milles à l'heure?
Qu'est-ce que vous voulez? H fait 71 milles à l'heure! Il y a une
frontière. Cela existe. On n'a pas le choix; elle est là.
M. VEILLEUX: Moi, je crois que la meilleure manière de pallier ce
problème-là, c'est encore ce que disait le député
de Bagot tout à l'heure, soit d'organiser des cours à partir de
l'élémentaire jusqu'au secondaire.
M. BURNS: L'un n'empêche pas l'autre.
M. LEGER: Tout en précisant que vous deviez adopter des
règlements.
M. BURNS: Je suis bien d'accord avec le député de
Saint-Jean. Cela n'empêche pas la suggestion du député de
Bagot. Qu'on organise des cours, qu'on éduque les enfants dès le
bas âge, relativement à la publicité; je suis bien
d'accord. Mais l'un n'empêche pas l'autre. Je veux dire que ce ne sont
pas des arguments qui empêchent l'adoption d'un texte formel, d'un texte
vraiment prohibitif, comme celui qui est proposé par le
député de Lafontaine. A moins qu'on ne dise: C'est bon la
publicité à l'égard des enfants. Si c'est ça qu'on
dit, bien, je vais dire: D'accord, on va voter tout simplement contre votre
attitude. Mais je pense que personne dans cette Chambre ne dit que c'est bon,
la publicité à l'égard des enfants.
M. LEDUC: M. le Président...
M. LEGER: Vous avez une solution?
M. LEDUC: M. le Président, je ne veux pas passer pour un de ceux
qui veulent encourager un "filibuster", mais c'est un des domaines que je crois
assez bien connaître.
M. BURNS: Je m'excuse, M. le député, ce n'est pas un
"filibuster"!
M. LEDUC: Non, non, si on nous accusait, nous de ce
côté-ci...
M. BURNS: Non, non, pas du tout.
M. LEDUC: ...cela n'a rien à voir avec le député de
Maisonneuve.
M. BURNS: Très bien, continuez, continuez.
M. LEDUC: Loin de là. Non, c'est un problème
extrêmement complexe. Pour ma part, je sais que l'Association canadienne
des annonceurs, qui est un organisme national, fait actuellement une
étude à ce point de vue là, pour essayer d'arriver si ce
n'est pas de la législation, du moins, à un semblant de code
d'éthique. Il y a, quand même, du côté de la
clientèle enfantine, une publicité excellente. Il s'agira de
déterminer où finit le bien pour arriver au mal.
Nous ne sommes pas les seuls actuellement au Canada à nous
intéresser à ce problème-là. Au contraire, il y a,
l'Association canadienne des annonceurs, il y a au moins trois provinces en
plus de la nôtre qui s'interrogent là-dessus. J'espère
qu'on aura l'occasion bientôt de discuter plus à fond de ce
problème dans cette Chambre-ci.
M. BURNS: M. le Président, juste un dernier point. Moi, dans tout
ça, c'est que je réfléchis tout haut et puis je me dis
ceci:
Quand la Loi des jurés a été amendée,
qu'est-ce qui a précédé ça? Vous avez vu des jeunes
femmes obligées de faire un mois, deux mois de prison je
procède par analogie pour mépris de cour. Qu'est-ce qui
arrive maintenant? Quelques mois plus tard, on nous arrive en Chambre avec une
loi permettant aux femmes d'accéder aux jurys. Vous avez actuellement
une contestation concernant l'avortement. Evidemment, ce n'est pas de notre
juridiction. Vous avez des femmes qui se promènent de temps à
autre, en guise de manifestation et qui enlèvent leurs vêtements.
Tôt ou tard, elles vont se faire incarcérer pour des choses comme
ça, malgré que ce soit réjouissant pour l'oeil à
l'occasion, selon les sujets.
UNE VOIX: Cela s'en vient intéressant, votre affaire.
M. BURNS: Qu'est-ce qu'il va falloir faire pour faire comprendre aux
gens que la publicité à l'égard des enfants c'est de la
foutaise et qu'il faut que ça disparaisse? Va-t-il falloir qu'on se
mette je ne sais pas à promener des enfants dans des
bebelles automatiques, dans des projectiles, à les envoyer à bord
de fusées et dire: C'est un enfant perdu pour le Québec? Je ne
sais pas, moi.
Mais, tôt ou tard, il me semble que c'est le genre de
législation avec lequel on doit commencer parce que tout le monde est
conscient du problème. S'il y a unanimité autour d'un
problème, c'est bien quant à la publicité en tout cas.
Cela va peut-être déplaire à bien des agences de
publicité, à des compagnies comme Mattel, etc. Mais il
reste...
M. LEDUC: Cela ne déplaira à aucune agence de
publicité sérieuse.
M. BURNS: Je ne visais pas le député de Taillon.
M. LEDUC: Non, non, vos commentaires ne déplairont à
aucune agence de publicité sérieuse.
M. LAURIN: M. le Président, j'en appellerais également aux
lois de la psychologie. Depuis très longtemps, il m'arrive peu souvent
de parler ici en tant que psychologue, mais il faut quand même que je me
rappelle la discipline que j'ai exercée que j'exerce encore
d'ailleurs depuis tellement d'années. Nous savons que la
mentalité enfantine est comme une cire molle, qu'elle est très
susceptible à toutes les influences qui peuvent s'exercer sur elle. Nous
savons également la psychologie nous l'enseigne que c'est
précisément à cet âge que les influences nocives
peuvent se démarquer de la façon la plus dangereuse et qu'elles
peuvent influencer de la façon la plus décisive le cours
ultérieur de la vie. Je puis vous assurer, en tant qu'homme de l'art
cette fois et non pas en tant que député,
que les influences qu'exercent actuellement les protagonistes de la
publicité enfantine sont extrêmement nocives pour le
développement individuel du jeune enfant, du futur adulte.
C'est là un argument très sérieux, même si
nous en parlons à quatre heures et trente-huit du matin. Il ne faudrait
pas sous-estimer l'importance de cet aspect, l'importance de cette facette et
je dois vous avouer que je n'ai pas compris jusqu'ici la répugnance du
ministère des Institutions financières à
légiférer dans le domaine. Bien sûr, on nous dit toujours:
Nous réglementerons la publicité aux enfants. Mais depuis combien
d'années nous promet-on cette réglementation? On nous l'a promise
au fédéral, on nous l'a promise au provincial.
Mais jamais cette réglementation n'arrive, à cause de
pressions, je ne dirai pas indues, mais à cause de pressions qui se
manifestent en coulisse, de pressions qui sont dues à des
intérêts financiers puissants. Il me semble que le facteur humain
devrait prédominer, devrait avoir préséance sur les
facteurs purement financiers, parce que cette société est faite
pour l'homme et que l'homme n'est pas fait pour la société. Si
vraiment cette société est faite pour l'homme, il nous semble que
le législateur devrait prendre enfin ses responsabilités et
mettre dans les lois en fait, c'est la première qui régit
la consommation il devrait, dis-je, mettre dans cette loi originelle les
réglementations, les articles plutôt, qui devraient interdire une
sorte de viol de la mentalité infantile ou enfantine.
Je sais bien que le mot que je viens d'employer, M. le Président,
est très fort, mais, en réalité, lorsque nous
considérons ce qui se fait actuellement à la radio et à la
télévision, en ce qui concerne la publicité faite aux
enfants, je ne peux m'empêcher de qualifier ces procédés de
viol de la mentalité enfantine. Ou, si vous n'aimez pas ce mot, M. le
Président, j'emploierai le mot assaut, un assaut nocif qui a
été dénoncé à moult reprises, non seulement
par les spécialistes de ma discipline, mais également par tous
ceux qui, éclairés par cette discipline, sans en être des
protagonistes, ont quand même vu que cela correspondait aux canons du bon
sens, aux canons d'une mentalité d'honnête homme au sens où
le XVIIIe siècle l'entendait. C'est la raison pour laquelle je joindrais
mon appel à celui qu'a fait le député de Lafontaine,
à celui qu'a fait le député de Maisonneuve, pour qu'enfin
le gouvernement se décide à assumer une fois pour toutes ses
responsabilités en ce domaine et non pas, encore une fois, par voie de
réglementation mais par voie d'un article de la loi qui montrerait que
le législateur s'est enfin décidé à intervenir dans
ce domaine où les droits de l'homme sont directement menacés.
C'est un appel pressant que je fais à quatre heures et quarante minutes,
ce 14 juillet, parce que ceci nous semble extrêmement important. On dit
que la nuit porte conseil. Etant donné que nos
délibérations se prolongent au cours de cette nuit, alors que
tous les citoyens sont couchés, il me semble, M. le Président,
que le ministre devrait profiter de cette occasion pour rejeter du revers de la
main toutes les demandes qui lui ont été faites, toutes les
pressions qu'il a dû subir à l'effet de ne pas
légiférer en ce sens, afin qu'à cette heure de la nuit, le
droit de l'enfant ait préséance sur la finance, que le droit de
l'homme ait préséance sur toutes les pressions qui ont pu
être exercées au nom de vils intérêts
commerciaux.
Je fais cet appel avec toute la conviction qui me caractérise
afin que le ministre prenne enfin ses responsabilités et
légifère en ce sens au lieu de réglementer.
M. TETLEY: Je ne peux que dire amen. Je regrette que personne ne m'ait
donné le droit de le dire avant que vous ne parliez tous. Je suis 100
p.c. d'accord, et nous allons légiférer ou
réglementer...
M. LAURIN: Légiférer, M. le Président, pas
réglementer.
M. TETLEY: Bon. Nous allons réglementer la publicité
dirigée vers les enfants. Mais prenez, par exemple, votre article 62a):
"Aucune publicité d'un bien par un commerçant ne doit s'adresser
principalement aux enfants". Je vous donne un seul exemple d'une bonne
publicité, d'un vrai bien. Je parle de la Bible pour les enfants ou des
livres d'enfants. Moi, je veux de la publicité au sujet des livres,
c'est très important. Ou peut-être la "gomme balloune". Il faut
que les enfants s'amusent. Votre article n'est donc pas acceptable tel que
rédigé.
D'autre part, vous m'avez fait penser surtout le
député de Maisonneuve lorsqu'il parlait à une
lacune peut-être dans la loi. Voici un "silver lining in the cloud". Je
crois que nous allons proposer une modification à l'article 102o). Mais
aucune publicité, c'est absolument inacceptable, parce qu'il y a de la
publicité d'une grande valeur. Prenez les petites encyclopédies
pour les enfants ou peut-être les jouets de construction.
M. BURNS: Puis-je poser une question au ministre?
M. TETLEY: Oui.
M. BURNS: Le ministre accepterait-il que nous modifions notre amendement
en disant: "Aucune publicité, outre celle d'ordre culturel" ou quelque
chose du genre?
M. TETLEY: Si vous êtes capables...
M. BURNS: Tiens, il est revenu. Il est revenu, le ministre du
Revenu!
M. HARVEY (Jonquière): II a été
étudié, ce projet!
M. TETLEY: Essayez de trouver un amendement qui vous plaise.
M. BURNS: Je conçois très bien, M. le ministre, votre
objection. Je sais qu'il y a des choses qui sont attitrées, si vous
voulez, pour les parents, qui sont dirigées à l'endroit des
parents conscients du besoin de développement culturel, du besoin de
développement physique, etc. Mais au fond, l'approche de la
publicité dans ce cas, ce n'est sûrement pas le fait que l'enfant
dira: J'ai besoin de me cultiver dans tel et tel domaine. C'est de la
publicité dirigée vers les parents. Mais si vous craignez que
cela empêche la publicité dans certains domaines particuliers, je
suis bien d'accord pour modifier notre amendement.
M. TETLEY: Nous allons réglementer. Je vous soumettrai à
la commission parlementaire les règlements proposés. Je les
soumettrai également au conseil. Mais quelles dispositions doivent
être modifiées chaque année?
Si vous êtes quand même capable de trouver un article ce
matin, avant de partir, je vous en serais très reconnaissant mais je
trouve votre amendement inacceptable tel que rédigé.
M. BURNS: Parce que...
M. TETLEY : Parce que vous dites: Aucune publicité. Il y a de la
bonne publicité, l'équipement des scouts, par exemple, peut
être d'une très grande valeur. J'ai parlé de livres, mes
enfants achètent des livres, c'est dirigé directement vers les
enfants. Prenez "Boy's Home" ou "Canadian Boy", voilà des revues pour
les scouts et les louveteaux. Dans le "Canadian Boy" se trouve de la
publicité pour toutes sortes d'objets de grand mérite et de
grande valeur. Sans cette publicité, il n'y aurait pas de "Candadian
Boy", qui a un tirage d'un demi-million. Cette revue est d'une grande valeur.
J'ai parlé de la Bible pour des enfants, rédigée en termes
acceptables aux enfants, c'est dangereux votre argument pour éliminer
toute publicité.
M. BURNS: Sauf que cette publicité ne s'adresse habituellement
pas aux enfants, elle s'adresse aux parents. Prenons par exemple
l'Encyclopédie de la jeunesse. Je me souviens de mon jeune âge,
où l'Encyclopédie de la jeunesse était le fin des fins de
la culture pour les jeunes de milieux moins favorisés,
c'est-à-dire dont les parents n'avaient pas une bibliothèque de
$15,000. Le fin des fins, c'était l'Encyclopédie Grolier et
l'Encyclopédie de la jeunesse. A ce moment-là, ce n'était
sûrement pas l'enfant qui décidait: Je veux une
Encyclopédie de la jeunesse. Sûrement, ça n'arrivait pas
à cause du fait qu'ils avaient pris connaissance de la publicité
à la radio, dans les journaux ou à la télévision,
c'était parce que le petit ami, le voisin ou la petite cousine avait
cette encyclopédie. M. le Président, je comprends très
bien la position du ministre, je ne veux pas aller plus loin là-dessus,
je veux simplement que notre voix soit entendue, et je connais la
sincérité du ministre. Quand il nous dit: Présentez-moi un
texte acceptable, je vais le discuter et nous allons y penser, pour moi, ce que
vient de dire le ministre a de la valeur et je dis tout simplement: Nous ne
vous présenterons pas un texte ce matin, nous allons y penser.
Connaissant la sincérité du ministre à l'égard
d'une déclaration comme celle-là, je prends note de ce qu'il nous
dit, nous allons y penser et je suis certain que même si c'est à
la prochaine session, nous aurons peut-être une suggestion à lui
faire. Peut-être que le ministre la fera sienne, s'il la trouve
justifiée, mais en ce qui me concerne, je n'oublie pas ce
problème et nous tenterons d'apporter quelque chose de constructif dans
l'intersession qui s'en vient.
J'apprécie d'autre part l'engagement du ministre à
examiner et à ne pas mettre de côté définitivement
ce problème-là.
M. TETLEY: Nous allons modifier l'article 102 o).
Suivant les remarques de tous les députés des deux
côtés de la Chambre, à la suggestion des légistes
nous avons ajouté les mots '"spécialement toute publicitée
destinée aux enfants". Pour moi ce n'est pas assez votre amendement. Je
ne veux pas lire dans les journaux demain que j'ai refusé un certain
article. Principalement ça veut dire quoi, enfant, ça veut dire
quoi? D y a peut-être des enfants d'un certain âge!
M. GUAY: M. le Président, j'aimerais peut-être ajouter
quelques mots sur ça. Evidemment on a parlé de la
publicité qui s'adresse directement aux enfants. IL y a également
cette publicité qui s'adresse spécialement ou directement aux
parents, mais qui nous dit que cette publicité-là ne sera pas
perçue par les enfants? Alors c'est entendu que c'est bien difficile de
déterminer si telle ou telle publicité s'adresse directement aux
parents ou directement aux enfants. Peut-on dire aux enfants que cette
publicité-là, ce commercial-là qui passe à la
télévision, s'adresse spécialement aux parents et d'autres
spécialement aux enfants?
Alors c'est assez difficile de faire la ligne de partage entre la
publicité qui s'adresse aux parents parce qu'elle est bien souvent
perçue par les enfants comme la publicité qui s'adresse aux
enfants est facilement perçue par les parents.
M. CARDINAL: Alors, M. le Président, on pourrait quand
même... je pense qu'on en a tous assez parlé pour que les
journalistes se rendent compte de ce qu'on pense, s'ils sont encore
éveillés! Bon! Je ne voudrais pas bâillonner personne, mais
il faut quand même être raisonnable. On est...
M. BURNS: De toute façon vous ne pouvez bâillonner
personne.
M. CARDINAL: Bien, je pourrais toujours faire de l'opposition comme le
premier ministre en a fait hier. Cela nous conduirait...
M. BURNS: On va vous acheter un livre de règlement vous
aussi.
M. LE PRESIDENT (Leduc): Si je comprends bien, la proposition du
député de Lafontaine est retirée.
M. BURNS: Pour montrer notre bonne foi je vais aller même plus
loin que ça. Je pense qu'avec le consentement de la Chambre et celui du
député de Lafontaine nous serions même prêts à
retirer notre amendement devant la bonne foi du ministre. Nous le retirons cet
amendement. Ce que nous voulions surtout et principalement c'était de
discuter ce problème-là puis obtenir des déclarations et
des garanties de la part du ministre.
M. LEGER: Le ministre nous garantit qu'il va trouver une formule
pour...
M. BURNS: Ou qu'il va accepter les nôtres.
M. LEGER: Ou qu'il acceptera les nôtres. M. le Président,
pour aller plus vite, moi en ce qui me concerne, le prochain article c'est
à 75.
M. LE PRESIDENT: Articles 68, 69, 70, adoptés. Articles 71, 72,
73, 74, adoptés. Article 75?
M. LEGER: A l'article 75, je vous ferai grâce du texte, mais quand
même c'est un article qui a trait au système pyramidal qu'on veut
condamner. Alors, M. le Président, à l'article 75, il est clair
que ça rend nul et illégal toute pratique de vente qui
s'apparente disons aux ventes pyramidales. Cependant, dans le code criminel, il
était indiqué aussi une chose à peu près semblable.
Cela a permis à la ville de Montréal d'obtenir à peu
près dix condamnations contre de telles pratiques sans changer le fond
du problème.
En effet, M. le Président, ces compagnies utilisent toutes les
façons de retarder le jugement. Pendant ce temps elles continuent
d'opérer à cause des possibilités d'appel etc.
d'arrêter l'injonction, etc. Elles font suffisamment d'argent pour
défrayer les frais judiciaires et les amendes. Les consommateurs sont
ainsi roulés pour des millions de dollars par des individus, toujours
les mêmes, qui au lendemain de la condamnation forment une nouvelle
compagnie sous un autre nom, avec un nouveau produit, sous une nouvelle raison
sociale, et le petit jeu devra recommencer.
M. le Président, je vous ferai remarquer que l'article 75 n'est
pas suffisant pour régler le problème. J'en ai parlé au
ministre et je propose un amendement précis, qui serait le suivant,
à l'article 80. Je veux dire qu'à l'article 80 je veux un
amendement, parce que l'article 75 ne règle pas le problème dans
son entier. Je vais seulement donner l'esprit de l'amendement: Le directeur de
l'office, selon l'amendement que je proposerai à l'article 80, peut
ordonner à une personne, visée par l'article 75, de cesser ses
activités, opérations ou pratiques et la personne doit se
conformer à cet ordre. C'est un amendement que je proposerai à
l'article 80 du fait que l'article 75 ne règle pas le problème en
profondeur.
En ce qui me concerne, l'article 75 ce n'est pas là que je
fais l'amendement, c'est à l'article 80 peut être
adopté.
M. LE PRESIDENT (Giasson): Article 76, adopté. Article 77,
adopté.
M. LEGER: Le prochain amendement serait à l'article 79. Je l'ai
soumis au ministre.
M. LE PRESIDENT: Article 78, adopté. Article 79?
M. TETLEY: Adopté.
M. LEGER: Merci. Je peux vous lire l'article 79 parce qu'il est
adopté. A l'article 79 d), il était dit que parmi les charges ou
responsabilités de l'Office du consommateur, on disait de promouvoir la
création de services. L'amendement que je propose et que le ministre
accepte gracieusement est celui-ci: Non seulement de promouvoir, mais aussi de
subventionner la création et le développement de services ou
d'organismes destinés à protéger le consommateur et
à coopérer avec ces services. Le ministre accepte l'article 79
d)?
M. LE PRESIDENT: Article 79 d) adopté.
M. LEGER: Cela me console pour les autres qui ne sont pas
adoptés.
M. TETLEY: Adopté.
M. LE PRESIDENT: Adopté tel qu'amendé.
M. TETLEY: C'est cela.
M. LE PRESIDENT: Article 80?
M. LEGER: A l'article 80, j'avais un amendement. Je pense cependant que
le ministre a quelque chose dans ce sens-là. A l'article 80, vous avez
un amendement.
M. TETLEY: Le député de Lafontaine a suggéré
quelque chose et après étude, nous avons cru bon de faire un
amendement dans le sens qu'il a proposé. H avait suggéré
que si un commerçant enfreint la loi au sujet des ventes pyramidales, le
directeur devait agir d'une certaine manière. Nous avons
décidé, en vertu de sa suggestion, qu'il fallait faire
l'amendement
qui suit: "Si un commerçant enfreint la présente loi ou un
règlement cela veut dire toute la loi ou tout règlement
le directeur peut lui ordonner de s'y conformer et le commerçant
doit obéir à cet ordre." Je préfère, si vous
permettez, notre amendement au vôtre.
M. LEGER: En ce qui me concerne, M. le Président, je remercie le
ministre d'aller plus loin que l'amendement que je lui avais proposé
parce que cela va concerner justement toutes les autres situations, en plus des
ventes pyramidales.
M. CARDINAL: ... de la publicité pour les enfants.
M. LE PRESIDENT: Adopté tel qu'amendé.
M. LEGER: M. le Président, j'aurais un amendement à
l'article 80 a), c'est-à-dire un alinéa de plus qui se lirait
comme suit: Lorsque l'office reçoit une plainte d'un consommateur, il
doit faire enquête pour déterminer si la présente loi et si
les règlements ont été respectés et doit en
communiquer les résultats au consommateur. L'office peut
également faire enquête de son propre chef.
M. TETLEY: Nous croyons que c'est couvert par l'article 81 et pour le
moment, nous croyons que cela va trop loin. D'autre part, pour l'avenir nous
serons peut-être prêts à adopter quelque chose dans ce
genre-là. Mais pour le moment, nous croyons que c'est couvert et
ça va trop loin, enfin, plus loin que notre pensée.
M. LEGER: M. le Président, je ne veux pas argumenter à
cause de l'heure, mais quand même je proposerais peut-être, si le
ministre n'acceptait pas l'article 80 a) que j'ai proposé, de remplacer
celui-ci. Est-ce que le ministre accepterait cet amendement-ci? L'office peut
exercer, au nom d'un consommateur qui lui en fait la demande, les recours
civils qui naissent de la loi, de ses règlements ou d'un contrat qui est
assujetti. Il est vrai que souvent les consommateurs n'ont pas les moyens et
sont soumis à la longueur des procédures. C'est la raison pour
laquelle je propose cet amendement.
M. TETLEY: Mais vous allez modifier toute la loi du ministère de
la Justice. C'est que même nos légistes sont fonctionnaires du
ministère de la Justice. Le ministère de la Justice va prendre
action pour la province, pour le gouvernement et un tel amendement va tout
modifier. Malgré le fait que peut-être je partage votre opinion,
je ne peux pas accepter cet amendement.
M. LEGER: M. le Président, il y a quand même le
problème de la longueur de la justice qui n'est pas résolu, et le
fait que le consommateur n'est pas armé, n'a pas les moyens, n'a pas les
connaissances. J'aurais préféré que le ministre permette
aussi des bureaux juridiques régionaux pour permettre de renseigner la
population sur ses droits. Je pense que le ministre est au courant des
problèmes, de la situation. Je ne fais que regretter de ne pouvoir
trouver dans la loi qui s'en vient des solutions aux problèmes que
lui-même a reconnus et qu'il a certainement touché.
M. LE PRESIDENT: Article 80? UNE VOIX: Adopté.
M. LEGER: M. le Président, le prochain article est l'article
85.
M. LE PRESIDENT: Donc, les articles 81, 82, 83, 84 adoptés.
M. LEGER: C'est ça. A l'article 85, le conseil, selon nous,
était obligé d'attendre que le ministre lui demande son avis et
c'était un conseil consultatif sur la tablette. C'est la raison pour
laquelle à l'article 85 a), je propose ceci: Le conseil a pour fonction
de donner son avis et de faire les suggestions au ministre sur toute question
relative à la protection du consommateur. Alors, je pense que cela
donnerait réellement un rôle précis, important au conseil
de la protection du consommateur qui pourrait réellement ne pas attendre
que le ministre le lui suggère. Il pourrait réellement être
efficace et très utile dans son rôle.
M. TETLEY: Pour l'instant, je crois que cette suggestion va trop loin.
Je ne veux pas...
M. LEGER: Trop en avant.
M. TETLEY: Je ne veux pas remplacer l'Opposition. Le conseil a toutes
sortes de pouvoirs, mais le pouvoir de tout faire, je crois que c'est trop.
C'est un conseil consultatif, pas un conseil qui va remplacer le gouvernement
ou l'Opposition.
M. LEGER: M. le Président, cet article-là ne demande pas
au ministre l'obligation de suivre les directives, mais ça permet
à ce comité, si on veut réellement qu'il joue un
rôle, de pouvoir soumettre des directives. Cela ne veut pas dire que le
ministre est obligé ipso facto de les accepter. Mais si le ministre
semble ne pas vouloir ajouter cet article, cela veut tout simplement dire qu'il
ne veut les avoir que sur demande quelques fois dans l'année, juste pour
dire qu'elles existent. Là, si on relit l'article, c'est simplement le
fait que ce comité peut faire quelque chose comme suggestions. Je ne
vois pas pourquoi le ministère pourrait reculer, pourrait hésiter
devant le fait qu'un comité peut lui donner des avis.
M. TETLEY: Moi, je dois dire que je ne
partage pas votre opinion. Le conseil va fixer presque toutes ses
propres règles, mais il faut que le conseil qui peut siéger jour
et nuit, comme nous, ait au moins un certain but dirigé par le
ministère et ce, tout simplement sur des sujets qui sont du ressort du
bill 45.
Pour l'instant, je ne partage pas votre opinion du tout.
M. LEGER: M. le Président, au plaisir de certains, c'est le
dernier amendement que j'avais à proposer au projet de loi de la
protection du consommateur.
UNE VOIX: Tous les autres articles sont adoptés.
M. CARDINAL: Un instant.
M. TETLEY: A l'article 86, un amendement de la commission. Je vous ai
présenté un autre amendement, y compris le président.
M. LEGER: D'accord, M. le Président. M. CARDINAL: D'accord.
M. TETLEY: L'article 102 est modifié suivant le rapport de la
commission.
M. CARDINAL: M. le Président, pour fins d'inscription, est-ce
qu'on peut dire tout simplement en bloc que les articles 85 à 101
inclusivement sont adoptés tels qu'ils ont pu être amendés
par la commission parlementaire?
M. TETLEY: Très bien. Sauf...
M. CARDINAL: Sauf...
M. TETLEY: ...l'article 102, m), n)...
M. CARDINAL: D'accord.
M. TETLEY: ...pour établir des normes concernant les instructions
écrites et les manuels concernant l'usage et l'entretien d'un bien ainsi
que la langue dans laquelle ils doivent être rédigés, cela
ce sont les manuels.
M. CARDINAL: D'accord.
M. TETLEY: Aussi à l'article 102...
M. LEGER: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre? Dans
l'amendement qu'il propose, est-ce qu'il veut dire par là qu'il ne
détermine pas quelle langue précise? IL pourra réglementer
là-dessus. On ne dit pas que le manuel devra être en
français. Je prends comme exemple la compagnie Datsun qui
présente des automobiles et qui n'a pas de manuel d'instructions et
d'entretien en français.
M. TETLEY: II faut que le manuel et le règlement soient conformes
à la loi, tel qu'exprimé à l'article 4.
M. LEGER: II faut qu'ils soient conformes à l'article 4.
M. TETLEY: Oui, c'est certain que ça va être conforme
à la loi.
M. LEGER: Alors, nous sommes bien d'accord.
M. TETLEY: A l'article 102, o), ajouter à la fin les mots,
"spécialement toute publicité destinée aux enfants."
M. LEGER: Nous sommes très heureux que vous vous soyez rendu
à nos désirs.
M. TETLEY: Bon.
M. LEGER: M. le Président, jusqu'à la fin, nous n'avons
rien d'autre à ajouter.
M. CARDINAL: M. le Président, est-ce qu'il n'y a pas un
amendement proposé par vous à l'article 114?
M. TETLEY: Oui.
M. CARDINAL: Ah bon!
M. TETLEY: Je reviens.
M. VEILLEUX: M. le Président, avant de passer à l'article
114 il y a l'article 102 duquel nous avons enlevé le paragraphe g. J'ai
à dire qu'après avoir fait une réunion avec les personnes
intéressées à la consommation dans mon comté, elles
m'ont demandé de demander au ministre qu'il y ait un minimum dans un
contrat. Disons que je suis déçu que le paragraphe g) ait
été abrogé. Tout simplement, je voulais le souligner parce
que j'avais dit à mes électeurs que je le ferais et je le
fais.
Disons que j'ai ici un rapport du comité d'étude sur les
institutions financières, le rapport Parizeau, qui m'explique pourquoi
cela aurait pu être enlevé. Pour moi, même si M. Parizeau
l'explique, cela ne me satisfait pas.
M. CARDINAL: Disons que le député de Saint-Jacques et
moi-même, nous avons longuement hésité, tant le ministre
que l'Opposition, avant de l'enlever. Il faut se rappeler qu'il était
d'abord dans la loi. Il a été enlevé de la loi et
porté aux règlements et ensuite on a laissé une
liberté. La garantie est la suivante: C'est que le comité
consultatif va peut-être exiger plus que le paragraphe g).
M. TETLEY: Comme en Angleterre, c'était 20 p. c. Lord Crowther
vous pouvez citer l'anglophone Lord Crowther au lieu de Jacques Parizeau
dans votre comté voulait...
M. VEILLEUX: Je vais le faire avec plaisir, M. le Ministre.
M. TETLEY: Lord Crowther voulait enlever 20 p. c. en Angleterre.
Les articles 103 à 113 et l'article 114, tel
qu'amendé...
M. ROY (Beauce): M. le Président, je m'excuse. Si l'honorable
député de Bagot se souvient, les articles 107 et 108 avaient
été adoptés sur division. Alors, il y aurait
peut-être...
M. CARDINAL: Ah oui!
M. ROY (Beauce): ... lieu, je pense, de réinscrire "sur division"
sur le présent projet de loi.
M. CARDINAL: D'accord.
M. TETLEY: L'article 114 est amendé en ajoutant à la
sixième ligne du premier alinéa, après le mot "sommaire",
la mention suivante "Statuts refondus de 1964, chapitre 35".
M. CARDINAL: D'accord, adopté. M. LEGER: D'accord, M. le
Président.
M. CARDINAL: Jusqu'à la fin, M. le Président,
adopté.
M. TETLEY: Les articles 115 à 126 sont adoptés.
M. CARDINAL: Adopté.
M. le Président, qu'on fasse rapport.
M. BROWN (président du comité plénier): M. le
Président, le comité a adopté le bill 45 avec des
amendements.
M. LAVOIE (président): Ces amendements sont-ils
agréés?
M. PAUL: Agréé.
M. CARDINAL: Beaucoup d'amendements agréés et
agréables.
Troisième lecture
M. LE PRESIDENT: Troisième lecture.
L'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives propose la troisième lecture du projet de loi no
45.
Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: M. le Président, à la troisième lecture,
je demanderais le consentement unanime de la Chambre. Le député
de Lafontaine a un discours de troisième lecture. Pour éviter une
autre demi-heure...
M. PAUL: Ce serait bon.
UNE VOIX: Nous allons l'écouter.
M. BURNS: ... je demanderais le consentement unanime de la Chambre pour
que son discours soit versé au journal des Débats. Je l'ai
montré au leader du gouvernement et je pense qu'il n'y a rien
d'antiparlementaire, selon ce que le leader a pu voir. Cela éviterait
peut-être une autre demi-heure de session. Si nous avons le consentement
unanime, que ce discours soit versé au journal des Débats.
M. LEVESQUE: M. le Président, il est difficile pour moi de dire
s'il y a quelque chose d'antiparlementaire dans ce discours. Mais, prenant la
parole du député de Maisonneuve...
M. LEGER: Et, connaissant le député de Lafontaine...
M. LEVESQUE: Cela, c'est plus inquiétant!
M. LAURIN: Et les corrections effectuées par le
député de Bourget...
M. LEVESQUE: J'ai bien confiance au député de Bourget
quant à la forme, mais quant au fond, je ne lui donnerais pas un
certificat.
M. BURNS: Faites confiance au député de Maisonneuve quant
au fond.
M. LEVESQUE : Disons que oui. Quant à la forme, le
député de Bourget, d'accord. Quant au fond, le
député de Maisonneuve.
M. BURNS: Les deux, cela fait un maudit bon "team"!
M. LEVESQUE : Mais il ne faudrait pas qu'on me joue des tours!
UNE VOIX: Non, non!
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, justement, au cours de cette
longue journée de session, nous en sommes à notre deuxième
dépôt d'un discours sans l'avoir entendu.
M. le Président, je comprends je partais pour dire qu'il
est tard, mais je devrai plutôt dire qu'il est tôt, parce qu'il est
exactement cinq heures douze minutes mais je pense qu'on est en train de
créer des précédents qui peuvent justement...
M. HARVEY (Jonquière): C'est arrivé déjà. Ce
n'est pas un précédent.
M. ROY (Beauce): ... nous jouer des tours. M. le Président, pour
la bonne marche des travaux de la Chambre et pour le bien de tous les membres
de cette Chambre, prenons une
demi-heure de plus s'il le faut. Si un député a un
discours à prononcer, qu'il le prononce de façon que, s'il y a
quelque chose, à un moment donné, qui peut nous concerner, qui
peut concerner d'autres membres de cette Chambre, nous puissions le rappeler
à l'ordre et que nous puissions faire les interventions qui
s'imposent.
M. LEVESQUE: Allons-y!
M. ROY (Beauce): M. le Président, je ne sais pas si d'autres
membres auraient une intervention.
M. LEVESQUE : Allons-y ! Allons-y !
M. ROY (Beauce): J'avais cette brève intervention à faire
sur le projet de loi...
M. LEVESQUE: Très bien, très bien.
M. ROY (Beauce): ... pour permettre au député du Parti
québécois de faire son intervention.
M. LEVESQUE: Très bien.
M. ROY (Beauce): Alors qu'il fasse son intervention.
M. BURNS: M. le Président, qu'il soit enregistré que nous
étions prêts à sauver peut-être cette demi-heure ou
ces vingt minutes à la Chambre mais que les députés du
Ralliement créditiste, qui nous accusent depuis un certain temps de
retarder les travaux de la Chambre, nous disent ce soir qu'il aiment mieux que
le député de Lafontaine fasse son discours de troisième
lecture.
Je n'ai pas le choix dans les circonstances et je pense que le
gouvernement n'a pas le choix et l'Union Nationale n'a pas le choix non
plus comme il n'y a pas unanimité, à ce moment-là,
le député de Lafontaine va faire son discours de troisième
lecture.
M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais faire une
rectification, je ne voudrais pas...
M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement, son
droit de parole a été utilisé.
M. ROY (Beauce): ... que le député de Maisonneuve
m'accuse...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! J'ai surtout écouté un verbe
de l'intervention du député de Beauce à savoir qu'il
voulait rectifier.
UNE VOIX: Rectifier quoi?
M. LE PRESIDENT: Rectifier peut-être l'interprétation que
l'honorable député de Maisonneuve a... Je ne sais pas,
très brièvement, sans apporter de nouveaux arguments.
M. ROY (Beauce): Ceci pour dire, M. le Président, que je veux
faire une distinction très nette entre le projet de loi no 50 et le
projet de loi no 45. Je pense que, sur le projet de loi no 45, nous n'avons pas
accusé les membres du Parti québécois, et je n'ai pas
l'intention de le faire non plus, ni d'attenter à leur droit de parole
et de les accuser par le fait qu'ils utiliseraient leur droit de parole en
troisième lecture. C'est tout simplement la distinction que je voulais
faire.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il consentement unanime à ce que le
discours de l'honorable député...
M. ROY (Beauce): Qu'il fasse son discours. Quant à le
déposer, je ne suis pas d'accord.
M. BURNS: M. le Président, puis-je, pour le député
de Beauce et les membres du Ralliement créditiste, répéter
ma suggestion? Le député de Lafontaine a un discours à
faire en troisième lecture. Il serait prêt, avec le consentement
unanime de la Chambre, à le déposer au journal des Débats.
Vous savez que, si jamais il y avait quelque chose d'anti-parlementaire dans ce
discours-là, il y a toujours la possibilité d'une motion de
correction et il y a même une possibilité de retrait de ce
discours, si nécessaire.
Il y a donc une sécurité. En ce qui me concerne, je prends
entièrement la responsabilité de ce discours que j'ai lu et que
je trouve très parlementaire. Evidemment, je n'ai pas les
qualités du président ou quoi que ce soit, mais je suis
prêt à dire que je prends l'engagement que ce discours là
n'ait rien d'antiparlementaire et qu'il est simplement un discours normal de
troisième lecture.
M. LEVESQUE: Quant à nous, M. le Président, nous n'avons
aucune objection. J'ai bien confiance en la parole du député de
Maisonneuve qui nous dit qu'il n'y a rien d'antiparlementaire. Le
député de Bourget me dit qu'au point de vue de la forme, il n'y a
pas à s'inquiéter. Le fond et la forme étant
protégés, nous aurons l'occasion de juger les honorables membres.
Ces deux honorables membres de cette Chambre prennent un risque parce
qu'à ce moment-là, ils nous demandent de leur donner un vote de
confiance et de faire un acte de foi. Nous, nous sommes prêts à le
faire. Et je suis convaincu que le député de Beauce aurait
avantage, à ce moment-ci, à nous accompagner dans cet acte de foi
et demain, si, après avoir pris connaissance du texte qui sera
déposé, le député de Beauce a la moindre objection,
nous lui fournirons l'occasion de faire l'intervention qu'il juge à
propos.
M. CARDINAL: M. le Président,...
M. ROY (Beauce): M. le Président j'accepte
la suggestion de l'honorable leader de la Chambre.
Je demanderais par exemple aux représentants du Parti
québécois de nous remettre une copie de leurs discours.
M. BURNS: C'est entendu. D'ailleurs, c'est une suggestion que j'allais
vous faire. Dès que les copies seront faites, vous en aurez une. Les
membres de tous les partis de la Chambre auront une copie, (voir annexe).
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. CARDINAL: J'allais demander une directive au président, mais
ce n'est plus nécessaire, vu...
M. LE PRESIDENT: Pas à cette heure-ci, je vous en prie.
M. CARDINAL: J'ai dit que ce n'était plus nécessaire.
M. LEVESQUE: Réglé, adopté.
M. CARDINAL: Un instant, voilà assez longtemps qu'on travaille
qu'on peut prendre ça calmement. Bon.
M. HARVEY (Jonquière): Allez-y.
M. CARDINAL: II fait jour. M. le Président, je veux simplement
dire que je suis parfaitement conscient, malgré cette heure, qu'en me
levant ainsi en troisième lecture, ce n'est non plus pour vous demander
une directive, mais pour dire que j'épuise mon droit de parole en
troisième lecture. Par conséquent, je m'assois.
M. LEGER: M. le Président, je veux remercier cette Chambre de
m'éviter de parler à cinq heures vingt ce matin.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. PAUL: Sur un rappel au règlement... M. BIENVENUE:
L'éminence grise. M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. PAUL: M. le Président, nous assistons à des
procédures qui me scandalisent.
M. LEVESQUE: Est-ce pour le journal des Débats?
M. PAUL: C'est plus sérieux que vous pensez.
M. LEVESQUE: Alors, on peut demander au journal des Débats de
suspendre.
M. PAUL: Ah! vous pouvez couper ça.
M. LEVESQUE: Très bien.
M. PAUL: Le leader du gouvernement a tout à l'heure parlé
d'un acte de foi. Vous permettrez que dans mon rappel au règlement je
fasse un acte d'espérance.
M. BRISSON: Faites donc un acte de charité.
M. PAUL: J'en ai un beau à faire, ce ne sera pas long, vos
désirs vont être comblés.
M. LACROIX: Un acte de contrition.
M. PAUL: Je vais faire une motion d'espérance. J'espère
que le gouvernement, qui dans quelques minutes va proposer l'ajournement
à l'automne, va nous promettre qu'à l'automne nous aurons une
meilleure planification que celle qui nous est imposée depuis trois
semaines. Considérant cependant, M. le Président, que c'est un
grand jour, et que nos amis les libéraux communient dans cette
allégresse qui les caractérise à l'occasion de la
fête du premier ministre du Québec, pour une fois et la
dernière, je ne m'opposerai pas à ce qu'on dépose les
discours plutôt que de les dire en cette Chambre.
M. LEVESQUE: M. le Président, je ferai remarquer au
député de Maskinongé que quant à nous nous n'avons
pas déposé de discours. Nous avons accepté un discours
déposé par l'honorable député de Montcalm, un ami
du député de Maskinongé...
M. PAUL: Tous les députés sont mes amis.
M. LEVESQUE: ...et nous avons accepté également le
dépôt d'un discours du député de Lafontaine.
M. PAUL: C'est encore l'un de mes amis.
M. LEVESQUE: Nous l'avons fait dans un grand esprit de collaboration,
pour employer une expression bien utilisée par mon honorable ami et
leader parlementaire de l'Opposition officielle. Je ne voudrais pas que dans
les paroles de l'honorable député de Maskinongé il y ait
quoi que ce soit qui puisse être considéré comme une
insinuation malveillante à l'égard d'un gouvernement
extrêmement ouvert, extrêmement patient, extrêmement
tolérant, extrêmement désireux de respecter les principes
démocratiques, même jusqu'à cinq heures vingt du matin.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Lafontaine me
donne sa parole d'honneur qu'il a respecté totalement l'article 572?
M. LEGER: Me permettez-vous de lire l'article 572?
M. LE PRESIDENT: Je vais vous le dire: "Le
débat sur toute motion de troisième lecture d'un bill
public peut porter sur l'ensemble et les détails du bill, mais il doit
être restreint au contenu de celui-ci."
M. LEGER: Oui, d'accord.
M. LE PRESIDENT: J'ai l'endossement du député de
Maisonneuve et du député de Bourget. De consentement unanime,
troisième lecture.
M. LEVESQUE: En tenant compte, évidemment, des remarques
très sages et très prudentes de la présidence.
M. TETLEY: M. le Président, avant l'adoption, mes légistes
ont suggéré un seul mot au fameux article 102o) au sujet des
enfants. Au lieu de "tout bien ou crédit", pour être certain que
tout objet est couvert et non pas tout simplement les biens tels que
définis dans l'article, "tout bien (faisant ou non l'objet d'un contrat)
ou crédit" afin de couvrir tous les cas suggérés par les
trois partis. Donc "(faisant ou non l'objet d'un contrat) ou
crédit".
M. LEGER: D'accord, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on peut considérer que cet amendement
a été effectué en comité?
M. TETLEY: Oui. M. PAUL: Oui.
M. LE PRESIDENT: Autrement, il faudrait recommencer.
M. TETLEY: Oui, très bien.
M. LE PRESIDENT: Consentement unanime que cet amendement a
été apporté en comité.
L'honorable ministre propose la troisième lecture.
Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
M. Fabien Roy
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une courte
intervention, si on me le permet. Je ne voudrais pas prolonger les
débats, mais au tout début j'avais commencé et je vais
terminer. J'en ai pour au maximum trois minutes. Je voulais parler un peu du
Conseil de la protection du consommateur. Je demanderais au ministre, qui a
accepté d'amender cet article pour qu'il y ait un minimum de dix membres
et un maximum de quinze membres, de faire en sorte que les nominations soient
faites le plus tôt possible. Je pense que ce Conseil de la protection du
consommateur aura également un grand rôle à jouer et je
demanderais que le gouvernement, dans ces nominations, aille choisir des
membres dans tous les secteurs de l'économie, plus
particulièrement chez les consommateurs. Je voudrais demander au
ministre de regarder dans le mouvement coopératif. Dans ce mouvement, il
y a le secteur de l'alimentation où les associations coopératives
d'alimentation ont fait un excellent travail d'éducation. Je pense
qu'elles pourraient aider le gouvernement dans ce sens.
Il y a le domaine des caisses d'épargne et de crédit
également, ainsi que le domaine des mouvements d'éducation
populaire. Je songe par exemple à l'Association coopérative
d'éducation féminine. Le gouvernement pourrait également
aller chercher des membres dans cette commission ainsi que dans le monde
syndical et dans le monde des représentants.
En guise de conclusion, Je voudrais dire au gouvernement que la
meilleure protection du consommateur, bien que la loi, en somme ait
été bonifiée passablement, c'est l'éducation du
consommateur. Je demande au gouvernement, en guise de conclusion et je termine
là-dessus, de mettre l'accent sur l'éducation des consommateurs
et de négocier avec le ministère de l'Education pour que des
programmes soient faits dans les maisons d'enseignement au niveau primaire, au
niveau secondaire et au niveau supérieur, pour qu'on commence à
éduquer les gens à partir de l'école pour en faire des
consommateurs avertis lorsqu'ils seront entrés sur le marché de
la consommation...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! De consentement unanime, adopté?
DES VOIX: Adopté.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Est-ce que je pourrais faire une suggestion
au leader parlementaire? Si le gouvernement veut bien retirer son bill 50, nous
sommes prêts à ajourner pour les vacances d'été.
M. LEVESQUE: II serait peut-être préférable de vous
retirer, avec une telle recommandation, alors que le public
québécois attend avec tellement d'impatience que le projet de loi
no 50 soit adopté.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Moi, j'ai mon voyage.
M. LEVESQUE: M. le Président, avant de proposer l'ajournement, je
tiens à vous remercier...
M. VINCENT: L'ajournement? La suspension.
M. LEVESQUE: Non, non, c'est une autre séance. L'ajournement.
M. CARDINAL: C'est une question débat-table.
M. LEVESQUE: Est-ce qu'on veut la débattre?
M. le Président, avant de proposer l'ajournement, je tiens
à vous remercier, à remercier les honorables
députés qui sont ici à cette heure... est-ce tardive ou
matinale? Enfin...
M. BIENVENUE: Hâtive.
M. LEVESQUE: ...à remercier les honorables membres de cette
Chambre et les honorables membres de la presse, mes amis, pour avoir ainsi
coopéré dans les...
M. VINCENT: N'oubliez pas le personnel.
M. BURNS: Vous avez des remords?
M. LACROIX: Je me souviens.
M. BURNS: Rappelez donc ça à votre leader.
M. LEVESQUE: Je demanderais au député des
Iles-de-la-Madeleine de ne pas m'appuyer à ce moment-ci.
Je remercie encore une fois la présidence, les membres de cette
Chambre, les membres de la tribune de la presse, les huissiers, les pages, les
membres du journal des Débats, enfin tout le personnel d'avoir
accepté ce soir de prolonger encore une fois leurs heures de travail
afin de permettre à cette Chambre de poursuivre ses travaux.
Nous avions ce soir un projet de loi très important, celui de la
protection du consommateur. Nous aurions pu le laisser pour l'automne. Il
aurait été facile de convaincre, je le pense bien, tout le monde.
Mais d'un autre côté lorsqu'on songe au bien que cela peut faire
à tous les consommateurs de la province, particulièrement aux
petites gens, à ceux qui ont besoin de ce projet de loi...
M. PAUL: M. le Président, est-ce que la troisième lecture
du bill a été adoptée?
M. LEVESQUE: Oui. Je comprends que l'honorable député de
Maskinongé serait très heureux de se joindre à moi. Je
sais qu'il ne veut pas répéter exactement les mêmes propos
que je tiens présentement, mais je sais par contre qu'il concourt
à cela.
M.PAUL: Ah! oui.
M. LEVESQUE: Je crois, M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Dois-je comprendre que nous sommes en quatrième
lecture?
M. LEVESQUE: ...qu'il était important d'adopter ce projet de loi
avant la fin de la session.
C'est pourquoi je réitère mes remerciements à tous
ceux qui ont permis que ce projet de loi très important puise être
accepté et adopté avant l'ajournement.
M. LAURIN: M. le Président, nous remercions le leader
parlementaire de nous avoir remerciés.
M. LEVESQUE: Je l'avais fait. M. le Président, je propose
l'ajournement de la Chambre à tout à l'heure, à onze
heures.
M. LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
Adopté.
La Chambre ajourne ses travaux jusqu'à onze heures ce matin.
M. LEVESQUE: II y a un rapport que nous avions promis à
l'honorable député de Bourget. Pour tenir notre parole,
j'aimerais bien que le député de Rouville puisse faire rapport
avec le consentement unanime.
M. LE PRESIDENT: Ques les honorables députés se
rassoient.
M. OSTIGUY: M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que
la commission parlementaire des Richesses naturelles a siégé les
19 et 20 mai derniers. Le but de ces séances a été
d'examiner le projet de développement de la baie James en compagnie du
président de l'Hydro-Québec et de ses commissaires.
M. LE PRESIDENT: Pas besoin d'agrément. UNE VOIX: Le PQ est
d'accord. M. BURNS: M. le Président... M. PAUL: Le whip en chef...
UNE VOIX: Je demanderais au whip en chef de confirmer votre
présence en Chambre à cette heure tardive.
M. LE PRESIDENT: La Chambre est ajournée.
(Fin de la séance: 5 h 32)
Annexe
Discours de M. Marcel Léger sur la 3e lecture du projet de loi no
45
La loi de la jungle ne disparaît pas complètement
malgré les bienfaits de la loi du consommateur.
Qui est le consommateur québécois? Le projet de loi 45
touche, contrairement à tout autre projet de loi, tous les
québécois, et, par surcroit, dans des gestes posés
quotidiennement. Le consommateur québécois, c'est le travailleur,
québécois, syndiqué ou non, dont le revenu disponible est
anémique; il s'agit, au même titre que les chômeurs et les
défavorisés, de certains citoyens humiliés, (comme les
assistés sociaux), de jeunes et de personnes âgées.
Selon nous, le premier instrument pour civiliser la jungle actuelle de
l'exploitation des consommateurs serait un code des lois du consommateur.
Malheureusement, le projet de loi actuel ne semble pas avoir tenu compte de
cette possibilité. Une société de consommation
Le concept même de consommation s'inscrit dans la
définition de la société dans laquelle nous vivons.
Mais cette société de consommation avec la
variété innombrable des biens et des services qu'elle offre sous
les formes les plus attrayantes et sous la pression de publicité
à laquelle nul ne peut échapper, engendre des malaises. Ces
malaises se manifestent face à l'impuissance où se trouvent les
consommateurs isolés, de dominer la situation, d'effectuer des choix
judicieux en fonction de leur besoin et de leurs moyens, de se protéger
contre eux-mêmes aussi bien que contre les exploiteurs de tout acabit.
C'est un problème qui exige une action collective, d'une part, mais
aussi qui exige une intervention de la part de l'Etat.
On se rend compte de l'inégalité des forces en
présence, soit les consommateurs désunis, d'un côté,
et de l'autre côté les puissances d'intérêt des
producteurs et commerçants unis de l'autre. Entre le fort et le
faible c'est la liberté qui opprime, mais c'est la loi qui
affranchit.Appréciation du bill 45
A la lumière des constatations générales que je
viens d'énumérer, quelles sont les appréciations qu'il
faut donner au bill 45? En face d'un problème dont l'ampleur est
considérable et dont les implications sont aussi nombreuses que
diversifiées, il faut se réjouir et exprimer sa satisfaction de
ce que le gouvernement du Québec ait pris ses responsabilités et
décidé de légiférer dans ce domaine. Il a
légiféré sur les ventes pyramidales qui sont maintenant
contrôlées.
Le projet de loi empêchera les formes de publicité, bannies
par règlement, de continuer d'opérer même après
appel de la décision du directeur de l'office par le contravenant et
jusqu'à ce que les jugements soient rendus. En d'autres mots, la
possibilité d'appel ne suspend pas l'interdiction d'opérer.
L'accès aussi à son dossier du crédit est un
avantage de plus pour le consommateur.
Le contrôle des nouvelles cartes de crédit est aussi une
amélioration. Amendements proposés par le Parti
québécois
Sur tous les amendements que le Parti québécois a
préparés et présentés au ministre, ce dernier a
accepté quelques-uns de nos amendements que nous lui avons
proposés et nous le félicitons. Premièrement, plusieurs
définitions nouvelles ont été acceptées.
En second lieu, le coût du crédit et le début de la
période des versements ne courent qu'à compter de la date de
l'exécution du contrat.
Troisièmement, concernant toute infraction à la loi ou
règlement par un commerçant, le directeur de l'office peut
arrêter toute pratique illégale et sa décision ne peut
être suspendue pendant qu'il y a appel.
Quatrièmement, une des responsabilités d'office, entre
autres, sera maintenant de pouvoir subventionner la création et le
développement de services ou d'organisations destinés à
protéger le consommateur et coopérer avec ce service. 1) Aussi
nous concluons que le sens et la portée du projet de loi devraient
être élargis, de manière à lui donner une
authentique dimension sociale. 2) La loi ne prévoit pas ni
n'encourage les dialogues et la participation. Si nous nous
réjouissons de ce que le projet de loi 45 prévoie l'institution
d'un organisme de consultation, "le conseil de la protection du consommateur",
nous regrettons que le mode de désignation de ces membres ne
soit pas explicité et que ces fonctions ne se limitent
qu'à donner son avis ou à faire des suggestions à
l'égard des seules questions que peuvent lui soumettre le ministre ou le
lieutenant-gouverneur en conseil. C'est là une grave lacune qui devrait
absolument être corrigée. 3) La loi confine trop l'office de
protection du consommateur dans une fonction de policier.
Il serait éminemment souhaitable que cet Office apporte sa
collaboration aux organismes privés en leur fournissant le
matériel d'information requis aux fins de leur travail
d'éducation. QUELQUES RECOMMANDATIONS
II serait normal que le directeur de l'Office de protection du
consommateur ou son délégué soit d'office membre du
conseil mais sans droit de vote.
Il serait souhaitable aussi que le conseil ait un président et un
secrétaire à plein temps ainsi qu'un service de recherches avec
budget adéquat, sans quoi son travail risquerait d'être plus ou
moins valable et efficace.
De plus, nous croyons que le conseil devrait, en plus d'exercer son
rôle consultatif, étudier tous problèmes relatifs à
l'application des règlements adoptés post hoc, agir comme
organisme de consultation auprès des institutions vouées à
la protection et à l'éducation des consommateurs, agir comme
organisme de recherche des besoins des consommateurs, et également,
comme organisme de représentation des intérêts des
consommateurs auprès du ministre.
Nous croyons aussi que le ministre devrait rendre publiques les
études du conseil et déposer à l'Assemblée
nationale les rapports annuels de ses activités. CHARTE DU
CONSOMMATEUR
Parmi les sujets prioritaires qui devraient faire l'objet des
études du conseil, l'élaboration d'une charte du consommateur
devrait figurer en tête de liste.
Au niveau régional, nous croyons que l'Office de la protection du
consommateur devrait être habilité à prendre les
dispositions voulues pour que soient établis dans le plus bref
délai, des bureaux de consultation juridique, facilement accessibles aux
consommateurs qui ont besoin de renseignements et de conseils et veulent
formuler au besoin leurs doléances. Ce service devrait être sous
le contrôle de l'Etat ou tout au moins subventionné et
coordonné par lui.
Il serait souhaitable aussi que l'Office soit habilité à
subventionner, en totalité ou en partie, des services d'enseignement aux
ménagères avec le concours de conseillères en
économie domestique. LES DEFICIENCES DU BILL 45
On peut classer les déficiences du bill 45 sous 4 chapitres: 1 )
CERTAINS DROITS FONDAMENTAUX DU CONSOMMATEUR NE SONT PAS PROTEGES. 2)
LES OUBLIS ET LACUNES DE LA LEGISLATION PRESENTEE PEUVENT AVOIR DE GRAVES
CONSEQUENCES. 3) CERTAINS ARTICLES PARAISSENT PROTEGER LE CONSOMMATEUR,
ALORS QU'EN FAIT ILS NE LUI ASSURENT AUCUNE PROTECTION. 4) ON N'A PAS
VOULU REDIGER UN PREAMBULE QUI EXPLICITERAIT LES INTENTIONS DU LEGISLATEUR ET
LE SENS DE LA LEGISLATION PROPOSEE. 1) Les droits fondamentaux
sont oubliés.
A) Un code du consommateur: le premier instrument pour civiliser la
jungle actuelle de l'exploitation des consommateurs aurait pu être un
code du consommateur, car dans cette jungle l'exploiteur est roi.
B) Une législation provinciale concernant le taux
d'intérêt des ventes à tempérament. Sous
prétexte de laisser au gouvernement fédéral la
législation sur les taux d'intérêts, on laisse sans
protection les consommateurs qui signeront des contrats de vente à
tempérament alors que le taux d'intérêt ne sera absolument
pas contrôlé. En effet, le code civil prévoyait des lois
pour la vente à tempérament. Mais ces articles du code civil sont
abolis et remplacés par cette loi du consommateur. Or en aucun endroit
de cette loi, on ne fixe les taux maximun d'intérêts de vente
à tempérament, alors que le mode d'exécution d'un contrat,
donc le contrôle du taux d'intérêts à
tempérament, est réellement de juridiction provinciale par le
code civil. Ce manque
de législation dans ce domaine peut permettre à tous les
commerçants de charger les taux d'intérêts qu'ils
désirent sans que la législature provinciale n'y puisse rien.
C'est un droit fondamental du consommateur qui est complètement
négligé. Il laisse le consommateur à la merci de marchands
malhonnêtes.
C)Paiement initial.
On enlève l'obligation d'un paiement initial pour un achat
à tempérament. Cette obligation du paiement initial permettait
dans l'ancien projet de loi de limiter les appétits de certains
consommateurs, qui n'avaient pas conscience de s'embarquer littéralement
dans des achats dont ils n'ont pas les moyens d'assumer les frais. Cette
absence de barrière que nous présente le nouveau projet de loi
n'aidera certainement pas les consommateurs à limiter leurs achats selon
leurs moyens. C'est un autre droit fondamental qui n'est pas
protégé dans cette législation.
D)Clauses de déchéance de termes.
En permettant aux commerçants de réclamer le solde d'un
achat, à défaut de paiements échus, on ajoute une
protection supplémentaire aux commerçants dans une loi qui doit
protéger le consommateur. Auparavant le commerçant qui voyait un
de ses clients ne pas effectuer un paiement à date avait le droit
d'exiger les paiements échus. Il pouvait, plus tard réclamer
l'objet vendu. Maintenant, s'il y a une clause de déchéance de
termes, il peut réclamer en plus, le solde complet de la dette ainsi que
l'intérêt, même si la date des autres paiements n'est pas
encore échue. Ce pouvoir accordé aux commerçants est
absolument impensable puisque ce ne seront pas nécessairement les bons
commerçants qui pourront l'utiliser mais plutôt les mauvais
commerçants, les personnes malhonnêtes, qui se serviront de cette
clause.
E)Le consommateur ne bénéficie plus comme dans le 1er
projet de loi des erreurs de calcul du coût du crédit. Les
pressions faites par les groupes de commerçants ont eu gain de cause.
2)Les conséquences nocives des lacunes de la loi.
A)Cette loi oublie les transactions immobilières concernant les
terrains. Elle oublie aussi les transactions concernant les portes et
fenêtres.
B)Cette loi ne prévoit aucune restriction ni contrôle sur
les ventes de feu, les ventes anniversaires, les ventes de clôture. Ceci
laisse la porte ouverte à tous les abus possibles.
C)Cette loi ne prévoit aucune législation pour
contrôler les agissements des agences de collection.
D)Les voitures neuves ne sont pas aussi sous la surveillance de cette
législation. On voit immédiatement tous les abus qui peuvent en
résulter.
E)On ignore dans ce projet de loi tout contrôle sur la
publicité faite aux jeunes. Ceci est un point très important qui
aurait pu être inclus dans cette loi.
F)On omet aussi de légiférer sur les manuels d'entretien,
en français, pour tout objet acheté par le consommateur.
G)On ne se préoccupe pas de renseigner le consommateur sur la
possibilité de publicité massive dans les grands media. 3)
Certains articles paraissent protéger le consommateur alors qu'en
fait ils ne lui assurent aucune protection.
En effet cette loi permet aux consommateurs un droit de
résiliation de contrat en dedans de 5 jours. A première vue, ceci
peut paraître une amélioration. Mais si on va au fond du
problème, on s'aperçoit qu'une bonne quantité de
consommateurs ne pourront pas se servir de cette clause de résiliation
de 5 jours. En effet, les pêcheurs qui sont partis pour une
période plus longue que 5 jours ne pourront pas utiliser cette clause.
Les voyageurs de commerce régulièrement en voyage ne pourront pas
se servir de cette clause. Nous croyons que le gouvernement devrait accepter
plutôt de mettre un droit de résiliation de 10 jours pour les
biens mobiliers, un droit de résiliation de 30 jours pour les biens
immobiliers et un droit de résiliation de 15 jours pour les ventes de
colportage. Sinon cet article devient un leurre, puisqu'il ne règle
absolument pas le problème, tout en laissant croire que c'est une
amélioration.
4) Un préambule à cette importante loi,
énonçant les principes qui guident cette loi, aurait pu
éclairer le législateur, le consommateur et les officiers qui
auront à administrer et interpréter la loi et les
règlements, de manière à ce que ce soit clair et que
ça ne nuise pas au commerce de bon aloi. Ceci aurait pu éviter
des plaintes futiles, du fait que tel ou tel article aurait pu être
interprété strictement, et aussi permettre à certains
commerçants de s'en tirer parce que le législateur aurait
oublié un autre article. Le projet de loi 45, malgré nos
demandes, n'en fait pas mention.
(Signé) Marcel Léger Député de
Lafontaine