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(Quatorze heures dix minutes)
Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Présence de MM. Rethoré et
Soisson
Je voudrais signaler la présence aujourd'hui dans les galeries du
ministre de la Jeunesse, des Sports et des Loisirs de France, accompagné
du nouveau consul général de France à Québec, M.
Henri Rethoré et du conseil d'administration de l'Office
franco-québécois pour la jeunesse qui se réunit
présentement à Québec. J'ai donc l'honneur de saluer en
votre nom à tous, M. Jean-Pierre Soisson.
Nouveau diagramme de l'Assemblée
nationale
Compte tenu de l'arrivée parmi nous aujourd'hui de nouveaux
membres de l'Assemblée nationale, j'ai assigné à la
formation de l'Opposition officielle de même qu'à la formation de
l'Union Nationale de nouveaux sièges qu'ils occupent déjà.
Je voudrais simplement produire le nouveau diagramme de l'Assemblée
nationale.
Certificats d'élection dans trois
comtés
J'ai maintenant l'honneur d'informer l'Assemblée que le
secrétaire général de l'Assemblée nationale a
reçu du directeur général des élections les
certificats d'élection suivants:
Québec, le 22 novembre 1979.
M. le secrétaire général de l'Assemblée
nationale, Cité parlementaire, Québec.
Cher monsieur, je certifie que, conformément à un bref
d'élection émis le dix-septième jour d'octobre 1979 et
adressé à M. Jacques Drouin, marchand, président
d'élection dans le district électoral de Beauce-Sud et
domicilié à Saint-Georges-Est, M. Hermann Mathieu, notaire, a
été, ainsi qu'il appert du rapport en date du 22 novembre 1979
qui se trouve dans les archives de mon bureau, élu député
du collège électoral de Beauce-Sud à l'Assemblée
nationale du Québec, en remplacement de M. Fabien Roy,
directeur-gérant, démissionnaire." Et c'est signé du
directeur général des élections, Pierre-F.
Côté.
M. le chef de l'Opposition, je vous invite à aller accueillir le
nouveau membre, le nouveau député de Beauce-Sud. "Québec,
le 22 novembre 1979.
M. le secrétaire général de l'Assemblée
nationale, Cité parlementaire, Québec.
Cher monsieur, je certifie que, conformément à un bref
d'élection émis le dix-septième jour d'octobre 1979 et
adressé à M. Jacques Marleau, superviseur, président
d'élections dans le district électoral de Maisonneuve et
domicilié à Montréal, M. Georges Lalande, avocat, a
été, ainsi qu'il appert du rapport en date du 22 novembre 1979
qui se trouve dans les archives de mon bureau, élu député
du collège électoral de Maisonneuve à l'Assemblée
nationale du Québec, en remplacement de M. Robert Burns, avocat,
démissionnaire." C'est signé du directeur général
des élections, Pierre-F Côté.
M. le chef de l'Opposition, allez accueillir votre nouveau membre.
"Québec, le 22 novembre 1979.
M. le secrétaire général de l'Assemblée
nationale, Cité parlementaire, Québec.
Cher monsieur, je certifie que, conformément à un bref
d'élection émis le dix-septième jour d'octobre 1979 et
adressé à M. Pierre Boivin, avocat, président
d'élection dans le district électoral de Prévost et
domicilié à Saint-Sauveur-des-Monts, Mme Solange Chaput-Rolland,
journaliste, a été, ainsi qu'il appert du rapport en date du 22
novembre 1979 qui se trouve dans les archives de mon bureau, élue
députée du collège électoral de Prévost
à l'Assemblée nationale du Québec en remplacement de M.
Jean-Guy Cardinal, notaire, décédé. Le directeur
général des élections, Pierre-F. Côté".
M. le chef de l'Opposition, allez accueillir votre nouveau membre.
A l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais indiquer aux gens qui
assistent aux affaires du jour dans les galeries que, les circonstances s'y
prêtant et de manière tout à fait exceptionnelle, on a
toléré qu'on puisse manifester, mais, maintenant que nous en
sommes vraiment aux affaires du jour, je vous demande de respecter la
règle et de ne plus manifester.
Aux affaires du jour. Oh! Je m'excuse.
M. le chef de l'Opposition. (14 h 20)
Accueil des nouveaux députés
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, vous comprendrez facilement la
joie qui anime le groupe des députés de notre parti aujourd'hui,
en cette circonstance où nous accueillons dans nos rangs trois nouveaux
députés qui viennent d'être l'objet de la faveur populaire
d'une manière absolument éloquente et dont la signification ne
devrait laisser aucun doute dans l'esprit de personne. Le 14 novembre dernier,
les trois candidats de notre parti aux élections complémentaires
de Beauce-Sud, de Maisonneuve et de Prévost ont remporté des
victoires dont je voudrais très brièvement signaler l'ampleur,
afin qu'on en comprenne mieux la signification. Dans ces trois
circonscriptions, aux élections générales de 1976, le
parti ministériel, qui présentait évidemment des candidats
dans chacune cette fois-ci, avait remporté 38 000 voix environ sur 91
000 tandis que notre parti en avait
remporté seulement 25 000. Cette fois-ci, dans les trois
mêmes circonscriptions, le pourcentage du parti ministériel est
tombé à 38,6%, d'après mes calculs, tandis que celui du
Parti libéral est passé à 60,5%.
Des Voix: Oh!
M. Ryan: Le nombre de voix accordées aux
ministériels a connu une chute de 5000, tandis que le nombre de voix
accordées au Parti libéral a connu une progression de 27 000. Ces
chiffres se situent exactement dans la même perspective que les
résultats des trois élections complémentaires qui avaient
précédé, au cours des derniers mois, dans les
comtés de Notre-Dame-de-Grâce, d'Argenteuil et de Jean-Talon.
Si l'on fait le total des voix exprimées à l'occasion de
ces six élections complémentaires, on constate que le Parti
libéral a remporté 61% des voix dans les six circonscriptions
soumises au jugement de la population tandis que le parti gouvernemental devait
se contenter de 32,90%. Alors que la fois précédente, en 1976,
notre parti avait obtenu 35% des voix seulement et il a vu grimper son total,
comme je viens de le dire, à 61% cette fois-ci, le parti
ministériel est passé de 34,9% à 32,8%. Evidemment, les
décimales sont sujettes à ajustement, parce que j'ai
calculé rapidement à l'aide d'une calculatrice qui n'est pas
aussi perfectionnée que celle dont on dispose sans doute de l'autre
côté de la Chambre.
M. le Président, cette faveur populaire non équivoque
accordée à notre parti tient, j'en suis convaincu, d'abord
à l'acceptation dans la population du mouvement de renouveau en
profondeur qui se poursuit au sein de notre formation depuis au-delà
d'un an et demi. Chaque fois que ce message a été
présenté à la population, un message de rapprochement du
peuple, de service aussi désintéressé qu'il est
humainement possible de le concevoir, la réponse de la population est
formidable. D'ailleurs, ceci ne vaut pas seulement pour notre parti; je pense
que c'est la règle profonde de la démocratie.
Deuxièmement, je crois que les électeurs ont voulu
signifier qu'ils font davantage confiance en notre parti, en ce qui touche
l'avenir constitutionnel du Québec, qu'au parti d'en face dont l'option
a fait l'objet d'une présentation éclatante, à l'aide de
fonds publics considérables, quinze jours avant la journée du
scrutin et j'ai l'impression que cet événement a aidé
notre cause au lieu d'aider celle du gouvernement.
Les électeurs nous signifient également qu'ils sont
beaucoup plus enclins à favoriser des politiques d'équilibre en
matière de culture et de langue, en particulier. Malgré certaines
impressions superficielles qu'on a pu tirer de sondages qui ne tenaient pas
compte de toute la réalité, les constatations que nous faisons,
nous, sur le terrain, nous indiquent que nos concitoyens veulent favoriser des
politiques d'équilibre dans ce domaine et il en va de même
d'ailleurs dans le domaine économique où l'on veut avoir à
la tète des affaires une équipe qui manifeste un souci de tenir
compte de tous les aspects de la réalité et non pas seulement de
certains objectifs doctrinaux que l'on a pu inscrire dans un programme.
Je suis témoin, une nouvelle fois, M. le Président,
à l'occasion de l'événement d'aujourd'hui, de la
qualité du processus démocratique dans notre
société. Les élections je pense qu'on peut le dire
de part et d'autre se sont déroulées sans que des facteurs
de violence n'interviennent, sans que des irrégularités graves ne
viennent troubler le libre fonctionnement du processus démocratique. Je
pense que nous devons tous nous en réjouir et, personnellement, je le
souligne avec beaucoup de satisfaction. On constate également que
l'acceptation du verdict populaire se fait, sous notre régime de
gouvernement, d'une manière harmonieuse, paisible et efficace. Une fois
que les électeurs ont parlé, les événements suivent
leur cours et ceux qui ont reçu le mandat de les représenter
viennent occuper leur place légitime au sein du Parlement. Je pense que
c'est un spectacle d'une grande beauté dont il y a lieu de souligner la
grandeur en une occasion comme celle-ci.
Autant je veux féliciter les nouveaux députés et
les accueillir dans notre formation avec toute la chaleur possible, je tiens
à remercier les électeurs qui leur ont accordé leur
confiance et qui, du même coup, ont accordé leur confiance au
parti que je dirige. Ils sont représentés aujourd'hui dans les
galeries et dans d'autres parties de cet édifice parlementaire par de
nombreux citoyens qui ont tenu à venir célébrer
l'événement avec les nouveaux élus. Je regrette seulement
qu'il n'ait été impossible, pour des raisons physiques, d'en
accueillir un plus grand nombre dans cette enceinte. Encore une fois, j'exprime
à tous les citoyens ceci vaut également pour ceux qui sont
d'une autre allégeance politique les remerciements de ceux qui
les représentent ici pour l'engagement dont ils ont fait preuve pendant
les campagnes électorales très animées dont nous sortons.
Je pense que c'est cela qui est le plus grand de tout. Il y a peut-être
à l'heure actuelle, dans notre démocratie
québécoise, un plus haut taux de participation spontanée,
libre, gratuite et enthousiaste qu'à beaucoup d'autres époques de
notre histoire et je suis content de voir que dans la mesure où ce
phénomène s'accroît, dans la même mesure il semble
vouloir favoriser notre formation politique.
La circonscription de Beauce-Sud est reconnue, M. le Président,
pour son esprit d'initiative, pour le dynamisme de ses entreprises, pour son
indépendance et sa liberté d'esprit. Le député qui
aura l'honneur de représenter la circonscription de Beauce-Sud dans
notre Parlement est à l'image de cette population qui l'a élu.
Taillé dans le bois franc, incarnation vivante de la
débrouillardise et de la vigueur beauceronne, le nouveau
député de Beauce-Sud a le langage direct, simple et vrai des gens
de sa région.
Il apporte en même temps à cette Chambre un actif
très important, celui d'une carrière profes-
sionnelle bien remplie, d'une vie très largement
consacrée, depuis de nombreuses années, au service
bénévole de ses concitoyens et d'une précieuse
expérience dans la chose publique, expérience acquise à la
fois dans l'exercice exemplaire d'une profession aussi ancienne que nos valeurs
les plus chères, le notariat, et aussi d'une fonction publique
délicate entre toutes, celle de coroner, dont il s'est acquitté
pendant de nombreuses années avec un courage et une liberté
d'esprit au-dessus de tout reproche.
Dans Maisonneuve, les électeurs ont choisi, en la personne de
leur nouveau député, un représentant qui était,
avant de se lancer en politique, un administrateur public de grande
qualité, dont le gouvernement précédent et le gouvernement
actuel avaient, d'ailleurs, reconnu la compétence exceptionnelle en lui
confiant des fonctions qui sont parmi les plus difficiles et les plus
exigeantes de toutes, soit tour à tour celle de directeur des greffes au
palais de justice de Québec et, ensuite, au palais de justice de
Montréal où régnait, on s'en souvient tous, une situation
qui demandait l'intervention d'une main vigoureuse. Le nouveau
député de Maisonneuve a laissé de côté une
carrière déjà très brillante dans la fonction
publique pour se lancer dans la politique active. Malgré certaines
garanties dont il disposait en raison de son statut de fonctionnaire, il
courait des risques certains en acceptant l'engagement dans un parti politique
comme il l'a fait. Je le félicite des sacrifices auxquels il a consenti.
Je veux assurer cette Chambre qu'il a gagné son élection durement
en usant plusieurs paires de semelles pendant les semaines où il a fait
campagne. Les électeurs ont vraiment choisi, je pense, dans cette
circonscription, celui des candidats qu'ils ont eu l'occasion de
connaître de plus près et qui s'est manifesté à eux
avec un souci très prononcé de comprendre leurs problèmes,
de se mettre à leur écoute et de leur faire voir qu'il serait
entièrement disponible pour les servir, si on lui accordait la confiance
populaire. (14 h 30)
De la nouvelle députée de Prévost, il n'est rien,
M. le Président, qu'on ne connaisse déjà ou qu'on n'ait
déjà dit. Je soulignerai, néanmoins, qu'après
s'être taillé une place exceptionnelle dans les grands
débats relatifs à la vie et à l'avenir de ce pays et dans
la vie journalistique, la nouvelle députée de Prévost,
à un stade de sa carrière où on commence d'ordinaire
à songer aux joies du repos, a accepté un défi
exceptionnel et l'a, d'ailleurs, vaincu d'une manière qui a
dépassé toutes les attentes de ses concitoyens.
Toute la vie politique de la nouvelle députée de
Prévost s'est définie, jusqu'à maintenant, sous le signe
de deux grands amours: celui de sa terre, Québec, qu'elle
célèbre et aime avant toute autre chose et celui du Canada dont
elle n'a cessé, pendant sa campagne, de faire voir, avec une noblesse
exceptionnelle, les grandeurs et les aspects positifs, tout en soulignant les
problèmes qui affectent actuellement notre système
fédéral de gouvernement et qui exigeront, au cours des prochaines
années, une action résolue en vue de mieux ajuster ses
institutions, nos institutions politiques, aux besoins d'aujourd'hui.
La nouvelle députée de Prévost introduit dans notre
débat politique une note d'élévation, de sentiments bien
compris, authentiques, de noblesse, de franchise, de respect de l'adversaire
dans la discussion qui contribuera sûrement à la promotion de
certains objectifs qui vous sont chers dans cette Chambre, M. le
Président, et que vous nous rappelez à l'occasion avec
l'autorité que nous vous reconnaissons tous. Alliée à sa
grande connaissance du Québec et du Canada tout entier, la nouvelle
députée de Prévost apporte des qualités
d'expression, une vivacité d'esprit, un éveil intellectuel qui
sera sûrement un sujet de fierté, non seulement pour son groupe
parlementaire, mais pour toute la Chambre.
Aux trois nouveaux députés que nous accueillons
aujourd'hui, j'offre, au nom de mes collègues du groupe parlementaire
libéral, mes félicitations chaleureuses et les sentiments de
bienvenue les plus cordiaux. Je leur souhaite une longue et fructueuse
carrière parlementaire.
M. le Président: M. le premier ministre. M. René
Lévesque
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, vous
comprendrez et je suis sûr que nos amis d'en face comprendront
aussi que nous n'ayons pas tout à fait déliré
d'enthousiasme tout à l'heure. Personnellement, je me souviens de 14
novembre qui étaient plus réconfortants que le dernier, des
souvenirs que je partage avec le député de Bonaventure, mais,
quoi qu'il en soit, je me joins très volontiers au chef de l'Opposition
pour saluer l'arrivée en Chambre des trois recrues que la
démocratie électorale vient d'ajouter aux effectifs
parlementaires libéraux. Au nom de mes collègues, de ce
côté-ci, à l'unanimité, j'en suis sûr, je veux
leur souhaiter la bienvenue. Je n'ajouterai pas grand-chose, il n'y aurait plus
grand-chose à ajouter au panégyrique que vient de faire à
leur sujet le député d'Argenteuil, sauf pour souligner tout de
même en passant l'excellente formation politique qu'a reçue, dans
un autre parti, jusqu'à la veille même du scrutin, le nouveau
député de Maisonneuve.
Evidemment, je ne peux rien ajouter non plus à l'éditorial
très légèrement partisan qu'a également fait le
député d'Argenteuil sur les élections, sauf pour noter
tout de même qu'il ne faut cela on l'apprend en politique,
après un certain nombre d'années jamais prendre trop vite
ses désirs pour des réalités. On voit, par exemple, sur le
plan fédéral, que tout gouvernement, le long de la route et
parfois même au tout début de la route, peut perdre des
élections, il faut s'attendre à de telles épreuves. Dans
notre cas, je ne répéterai pas à quel point ça nous
a déçus, mais à quel point ça nous a
peut-être aussi très utilement secoués.
D'ailleurs, comme le montre le départ, hier, de M. Trudeau, les
victoires en partielles ne sont pas
toujours garantes d'un avenir aussi sûr que le
député d'Argenteuil voudrait s'en convaincre.
Cela dit, on me permettra, très brièvement, M. le
Président, de remercier, pour notre part, tous les électeurs qui
ont voté pour nos candidats, le 14 novembre, et, en même temps que
les militants, dans des circonstances très difficiles, de
féliciter de tout coeur ces trois candidats, M. Desmarais, M. Harvey et
M. Boisvert, qui ont fait une lutte que plusieurs facteurs, qui n'avaient rien
à voir avec eux personnellement, rendaient extraordinairement
malaisée.
Cela dit, encore une fois, bienvenue à nos trois nouveaux
collègues de la Chambre.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. M.
Rodrigue Biron
M. Biron: M. le Président, je voudrais, moi aussi, avec le
chef de l'Opposition officielle, avec le premier ministre, féliciter les
trois élus du 14 novembre, dans Beauce-Sud, dans Maisonneuve et dans
Prévost. Je voudrais leur souhaiter la bienvenue dans cette Chambre et
les assurer, au nom de notre formation politique, de notre amitié, de
notre respect. J'ai connu un peu plus la nouvelle députée de
Prévost, je voudrais vous assurer, M. le Président, que je suis
heureux de voir sa présence ici. Je pense qu'elle peut nous aider
à élever le ton du débat, au cours des prochains mois,
peut-être apporter des solutions aux problèmes des
Québécois, pour qu'on puisse, après, passer à
d'autres préoccupations quotidiennes de nos concitoyens.
Alors, en particulier à la députée de
Prévost, de même qu'aux deux autres députés, je les
assure de notre aide, de notre amitié. Je leur souhaite la bienvenue
encore une fois dans cette Chambre.
Le Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: M. le Président, je voudrais également
m'associer à mes collègues pour souhaiter la bienvenue à
ces trois nouveaux députés très représentatifs de
la population. Je vous avoue que cela me fait presque plaisir de voir que
même si ces députés ne représentent pas mon parti,
à l'occasion de ces élections, je n'ai encore une fois rien
perdu, moi, en tout cas. J'étais presque jaloux quand j'ai vu passer le
chef de l'Opposition officielle près de mon pupitre, faire trois
voyages; je me demandais pourquoi il ne m'en aurait pas laissé au moins
un.
Toutefois, M. le Président, je voudrais souligner que la bonne
chance qu'on souhaite à ces trois nouveaux députés, c'est
en fonction du fait qu'on sait, nous qui sommes déjà en cette
Chambre, que cela prend un peu de bonne chance pour pouvoir travailler selon ce
que nos électeurs attendent de nous. Je suis persuadé que ces
trois députés tenteront l'impossible pour bien remplir leur
mandat. Je n'ai pas la chance de les connaître intimement tous les trois,
mais j'ai eu la chance, cependant, de rencontrer à quelques reprises Mme
la députée de Prévost. J'ai eu l'occasion d'être
interviewé par elle et également de la rencontrer lors du passage
à Québec de la Commission Pépin-Robarts.
Je vous avoue que j'ai toujours été impressionné
par la façon positive dont elle posait ses questions, autant comme
journaliste que comme membre de la commission Pépin-Robarts. Je suis
persuadé que ceci se réflétera dans notre Assemblée
pour le plus grand bien de l'ensemble de nos travaux. Bonne chance aux trois
nouveaux députés.
Le Président: Merci.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Hermann Mathieu
M. Mathieu: Merci, M. le Président. Merci à tous
mes nouveaux collègues pour l'accueil chaleureux. Hommage à M. le
premier ministre ainsi qu'à tous les membres de cette Assemblée.
Veuillez croire, M. le Président, en mon entière collaboration et
à ma soumission au règlement.
Franchir le seuil de cette auguste enceinte, vous le savez,
représente un honneur et un défi considérable, surtout
lorsque l'on représente le plus beau comté de la province. Je
veux remercier les électeurs de Beauce-Sud pour la confiance mise en mon
humble personne. Je désire être le député de tous
les électeurs sans égard à la partisanerie politique. (14
h 40)
Je veux remercier mes organisateurs, mes collaborateurs supporteurs, en
particulier mon épouse, Hélène, qui fut d'un constant
support. Egalement, hommages et salutations à M. Raymond Boisvert, mon
adversaire, pour sa courtoisie.
M. le Président, je veux profiter de l'occasion pour rendre
hommage à mes parents, père et mère, tous deux
décédés, mon père, Napoléon, ma mère,
Joséphine. Mon père était un brave cultivateur et
organisateur de l'UCC. La famille comptait treize enfants et je suis le
onzième. Nous avons été élevés très
modestement. Je veux les remercier pour l'héritage reçu,
héritage que la rouille ni la vermine ne peuvent attaquer. J'ai dû
quitter l'école de rang à l'âge de douze ans pour occuper
diverses fonctions, comme apprenti fermier, bûcheron, commis au Syndicat
coopératif l'Alliance de Saint-Ephrem et premier gérant de la
Caisse d'établissement de La Chaudière, pour ensuite reprendre le
chemin de l'école à l'âge de 25 ans, après une
interruption de treize ans. J'ai dû faire mon cours classique au
séminaire de Saint-Victor, ainsi qu'au séminaire Saint-Augustin
de Cap-Rouge. Je veux en profiter pour remercier mes valeureux professeurs.
Une fois assermenté notaire, vous comprendrez que je me suis
installé dans ma paroisse nata-
le, Saint-Ephrem, localité dont je suis fier à plusieurs
titres. Je veux remercier cette population valeureuse, travailleuse,
débrouillarde et inventive où règne un esprit
d'unité extraordinaire, modèle de population qui a pris en main
sa destinée. De 1973 à 1979, cette population a appris à
cerner ses besoins et à les régler. En effet, la population de
Saint-Ephrem a réalisé un phénomène qui devrait
être crié à la grandeur du Québec. En sept ans,
près de trois quarts de million furent recueillis par voie de
souscriptions publiques servant à la réalisation de
réseaux de loisirs, de santé et d'industries. La population croit
que le salut spirituel vient d'en haut, mais elle a appris, M. le
Président, que le salut matériel vient d'en bas. Je veux donc
dire merci à mes chers concitoyens de Saint-Ephrem pour l'appui presque
unanime reçu le 14 novembre.
Je veux saluer le curé de la place, M. l'abbé
François Germain, se remettant d'un malheureux accident. Merci
également à la population de Saint-Victor qui m'a accueilli en
son séminaire érigé à coups de sacrifices par les
plus âgés. M. le Président, comme notaire, je veux adresser
mes hommages à la Chambre des notaires du Québec, vous le
comprendrez. Existe-t-il une réalité plus authentiquement
québécoise que le notariat? Il s'agit de la profession la plus
présente aux quatre coins du Québec, héritière du
droit civil français. C'est avec fierté que je me proclame
inscrit au tableau de l'Ordre des notaires.
M. le Président, à titre d'ancien coroner, je veux
adresser des hommages aux corps policiers présents en Beauce, les
remercier de leur inlassable collaboration, féliciter l'honorable
ministre de la Justice d'avoir, sous ses ordres, un corps policier d'aussi
haute qualité, entièrement dévoué à la
protection du public et au service des citoyens, agissant avec grand
professionnalisme et discipline.
Je dois, M. le Président, mon engagement politique à une
délégation nombreuse de 700 personnes réunies à
Saint-Ephrem le 18 juin dernier sous l'initiative des maires locaux, MM.
Hervé Bernard et Marc Plante. Aussi, évidemment, mon engagement
fut motivé par la présence de M. Claude Ryan à la
tête d'un Parti libéral renouvelé. Je proclame que je suis
fier de mon chef, homme honnête, intègre, franc, compétent,
supérieurement intelligent, respectant les traditions et les valeurs
morales du Québec, entièrement dévoué au service du
peuple. Merci, M. le député d'Argenteuil, d'avoir su renouveler
le Parti libéral et de le conduire vers un soleil levant plein de
promesses.
De plus, l'option constitutionnelle de mon parti a également
fortement motivé mon engagement. M. le Président, il y a à
peine quelques mois, Beauce-Sud était le dernier comté sur lequel
le Parti libéral pouvait former des espoirs. Je crois sincèrement
que le phénomène qui s'est passé dans le comté de
Beauce-Sud existe en puissance partout au Québec.
En acceptant de servir en cette Chambre, je veux avoir en vue les
problèmes des gagne-petit, des assistés sociaux, des
chômeurs, des étudiants, l'accès des jeunes au travail,
être présent aux problèmes des agriculteurs, des artisans,
des hommes d'affaires, des promoteurs de petites et moyennes entreprises. Je
désire que l'appareil de l'Etat soit ramené à des
proportions plus humaines afin que les normes soient au service du citoyen et
non pas le citoyen au service des normes.
M. le Président, en conclusion, c'est sous le signe du service et
de l'amour que je veux entreprendre mon mandat. Comme disait une maxime latine:
Ubi amatur non laboratur, c'est-à-dire, où il y a de l'amour, il
n'y a pas de travail. Si, en cours de route, mes espoirs venaient à
s'éteindre, je me rappellerai ce court texte de Paul Claudel: "Ce que la
politique ne peut faire, c'est à l'amour de l'achever".
Je tâcherai de compléter et féconder Claudel pour ce
beau texte que je me permets de citer de saint Paul je termine
là-dessus "Quand j'aurais la connaissance de tous les
mystères et de toute la science, s'il me manque l'amour, je ne suis
rien. Quand je distribuerais mes biens aux affamés, s'il me manque
l'amour, je ne gagne rien". Je mets en doute un peu l'Etat Providence dans le
moment.
M. le Président, que ces paroles guident mes actions de
parlementaire en cette Chambre et mes états de service au profit de mes
chers électeurs de Beauce-Sud. Toujours fier d'être Beauceron,
Québécois et Canadien.
Le Président: M. le député de Maisonneuve.
M. Georges Lalande
M. Lalande: M. le Président, c'est avec un sentiment de
fierté mais aussi de profond respect que j'entre aujourd'hui au sein de
cette Assemblée. Notre tradition parlementaire qui prend sa source dans
la théorie moderne de la séparation des pouvoirs politiques a
toujours conservé et confirmé au Parlement, c'est-à-dire
à l'Assemblée nationale, sa pleine suprématie.
Je suis de ceux qui croient fondamentalement à cette
suprématie parlementaire dans l'organisation de notre
société. Je suis également de ceux qui croient, en
corollaire, que les deux autres pouvoirs doivent se soumettre au pouvoir
législatif, c'est-à-dire à la volonté directe du
peuple. Cette perspective est d'autant plus claire pour celui qui, pendant de
nombreuses années, a servi l'Etat tant au niveau de l'exécutif
qu'au niveau du judiciaire. En effet, autant comme officier de justice que
comme fonctionnaire de l'Etat, j'ai été à même de
développer cette dimension nécessaire pour ceux qui oeuvrent au
sein et au niveau du public, c'est-à-dire développer le sens de
l'Etat et le respect de l'organisation étatique. (14 h 50)
Les pouvoirs de cette Assemblée sont très étendus.
Pour paraphraser ce grand juriste de chez nous qu'était Me Jean-Charies
Bonenfant, je pense comme lui que cette Assemblée aurait le pouvoir
même de changer un homme en femme si elle le désirait, au point de
vue juridique, évidem-
ment. Cela pour démontrer l'importance et le pouvoir de la
décision parlementaire dans notre société.
Je remercie les gens de Maisonneuve de me permettre d'accéder
sans la moindre ambiguïté à cette Assemblée. Bon
nombre d'entre eux se sont d'ailleurs déplacés pour assister du
haut des galeries à la session d'aujourd'hui. Cette confiance que les
gens de Maisonneuve viennent de placer en moi à un moment difficile de
notre histoire nationale n'aura pas été vaine, je l'affirme sans
restrictions. Comme j'ai eu l'occasion de le répéter très
souvent au cours des dernières semaines, mon rôle de
député à l'égard de mes concitoyens de Maisonneuve
sera d'être autant que possible la courroie de transmission
privilégiée de leur communication vers ceux qui gouvernent le
Québec.
Les problèmes sociaux et économiques sont nombreux dans
notre comté de Maisonneuve. Dans bien des cas, ils sont causés
uniquement par la lourdeur de l'appareil bureaucratique gouvernemental trop
écrasant pour le simple citoyen. Je compte bien travailler à fond
auprès des divers agents économiques et sociaux pour essayer
autant que possible de réchauffer ce monstre froid, ce léviathan
qu'est devenu l'Etat moderne.
Je remercie mes amis du Parti libéral du Québec et, de
façon privilégiée, le chef du parti de m'avoir permis
d'oeuvrer au sein d'une formation politique qui a, tout au cours de son
histoire, toujours été présente et active dans
l'émancipation extraordinaire du peuple québécois au sein
du Canada.
Le Président: Merci, M. le député de
Maisonneuve.
Mme la députée de Prévost.
Mme Solange Chaput-Rolland
Mme Chaput-Rolland: M. le Président, avant d'exprimer ma
gratitude aux citoyens de Prévost, je vous prie de m'accorder un peu
d'indulgence pour les bévues que je ne manquerai pas de commettre face
au style parlementaire, puisque je ne le connais pas. Mais je l'apprendrai
très vite et je me soumettrai à vos directives.
Je me dois de dire aux gens de Prévost qui sont là le plus
vibrant merci pour m'avoir conduite à cette Assemblée nationale.
Je n'ose pas dire que je suis émue, j'ai peur qu'on me taquine un peu,
mais je le suis. Ils se sont mis à plus de 25 000 pour me donner leur
appui et me faire part de leur accord avec les opinions exprimées tout
le long de cette campagne. Et que veulent-ils donc, ces électeurs de
Prévost? D'abord, que je rappelle avec respect la mémoire de I
ex-député de Prévost qui occupait votre chaise à la
vice-présidence et qui est mort au devoir. Il a besogné ferme
pour ses idées. J'entends besogner ferme pour les miennes.
Les gens de Prévost veulent également que je
défende d'abord leurs intérêts locaux et régionaux.
Ce comté a une triple vocation, touristique, économique et
agricole, et les besoins sont pressants. Ils veulent également que je
témoigne de mon respect pour les responsabilités du premier
ministre, de ses collègues et de ses députés. Ils m'ont
fait savoir qu'ils espéraient que je continue dans cette
Assemblée historique et nationale à faire valoir des convictions
politiques qui répondent à leurs aspirations, tout en respectant
les vues de ceux qui ne les partagent pas. Ils m'ont prié de dire
clairement, sans équivoque et sans insistance, ma loyauté au chef
de l'Opposition officielle, à ses directives, comme à mes
collègues que je rejoins aujourd'hui avec beaucoup de fierté. Les
citoyens de Prévost savent que je suis venue à la politique avec
un peu d'appréhension et beaucoup d'hésitation. Mais ils n'ont
pas été scandalisés par mes années errantes en
quête d'un pays; ils n'ont pas été étonnés
parce que, souventefois, j'ai ébranlé mes certitudes dans les
visées politiques et constitutionnelles; ils ont compris et
approuvé une démarche de plus de 20 ans d'accointance avec les
milieux canadiens et québécois et ils se souviennent qu'en 1970,
j'écrivais, ce que toute ma carrière confirme: "Je sens ce soir
je devrais dire cet après-midi, M. le Président que
jamais je ne parviendrai à détester la terre canadienne pour
mieux aimer la terre québécoise."
J'entre donc à l'Assemblée nationale portée par
l'estime des gens de Prévost et désireuse de partager pleinement
et humblement les travaux de cette Chambre.
M. le Président, un dernier mot. Je suis désormais en
politique active, à ce moment de ma vie, parce que c'était aussi
l'année référendaire. L'Assemblée nationale
deviendra, si elle ne l'est déjà, le creuset dans lequel se
fondront bientôt les deux courants d'idées qui inspirent ceux qui
croient au Canada et ceux qui y croient moins; mais les gens de Prévost
y croient, M. le Président, la plupart d'entre eux me l'ont
signifié, mais ils ne croient pas, et moi non plus, qu'il soit
nécessaire de mépriser ceux qui ne partagent pas leurs opinions.
M. le Président, à la minute où l'Assemblée
nationale avalisait la tenue d'un référendum dans tout le
Québec, tous les citoyens comprenaient que les tenants du oui ou du non
avaient la même dignité, la même qualité
d'être, le même souci de démocratie. Au nom de tous les
citoyens de Prévost, M. le Président, je défendrai leur
foi dans un Canada renouvelé, dans une fédération rajeunie
et restructurée au nom de ce Québec qui devient de plus en plus
conscient de la richesse de son héritage et de la grandeur des
traditions qui ont germé, au cours des âges, dans la terre de nos
aïeux. Je vous remercie.
Le Président: Aux affaires courantes.
Déclarations ministérielles. M. le ministre des
Finances.
Etat des négociations dans les secteurs public
et parapublic
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je crois qu'il est temps que
je mette l'Assemblée nationale au
courant de l'état des négociations collectives dans les
secteurs public et parapublic.
La première phase prévue par la loi 62 s'est en effet
terminée à minuit, hier soir. Cela exige que l'on fasse le point.
La loi stipule en effet qu'à minuit, hier soir, au plus tard, le
gouvernement présente des dépôts à la fois normatifs
et salariaux à l'Assemblée nationale ou auprès de son
secrétariat qui serviraient de base aux votes des unités
syndicales impliquées. On sait que ces votes doivent être pris
dans la semaine qui vient. Ces dépôts, le gouvernement pouvait
fort bien les préparer de façon unilatérale à
partir des offres qu'il avait, avec ses partenaires, déjà
déposées aux diverses tables de négociation.
Il était évidemment bien préférable d'en
négocier le contenu avec les parties syndicales et de présenter
des dépôts dont l'essentiel aurait donné lieu à un
accord de principe. C'est à cette tâche que se sont attelés
les négociateurs patronaux et syndicaux depuis une semaine. Le travail
d'exploration et de négociation s'est fait, d'une part, par le
truchement d'un groupe constitué des trois coordonnateurs des centrales
syndicales et de représentants du gouvernement et, d'autre part, aux
tables sectorielles de l'éducation et des affaires sociales.
Hier, au début de la soirée, la situation était
là suivante. Pour la FTQ, les clauses normatives aussi bien pour les
affaires sociales que pour le soutien dans le secteur de l'éducation
avaient été acceptées et le coordonnateur de la FTQ
acceptait les offres salariales et s'engageait à en recommander
l'adoption aux instances syndicales qu'il représente. Pour la CSN, la
Fédération des affaires sociales, par le truchement de son
conseil fédéral, commençait à accepter toutes les
clauses normatives du projet de convention collective, ce qui s'est
terminé ce matin. Le coordonnateur de la CSN s'engageait à
recommander à ces instances syndicales les propositions salariales qui
avaient été faites par le gouvernement au front commun. La
même situation prévalait pour ce qui a trait au soutien scolaire
qui relève de la CSN. (15 heures)
Je dois ajouter en sortant de mon texte qu'on vient de
m'indiquer que le Conseil fédéral de la Fédération
des affaires sociales de la CSN, qui regroupe comme on le sait quelques
centaines de délégués syndicaux, vient d'accepter les
propositions salariales du gouvernement.
Pour ce qui a trait aux enseignants de la CEQ et des collèges, la
situation était plus complexe. Le coordonnateur de la CEQ s'est
engagé à recommander à ses instances les offres salariales
du gouvernement, non pas pour toute la période prévue pour la
convention, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre 1982, mais pour la
période de trois ans pour laquelle il détenait un mandat à
l'égard des enseignants. Pour ce qui a trait aux clauses normatives
applicables aux enseignants, il reste quelques points où l'accord n'est
pas fait. C'est le cas, par exemple, de la tâche et de la
sécurité d'emploi pour les enseignants des commissions scolaires
et pour le mode d'opération des dépar- tements dans le cas des
collèges. Compte tenu des accords existants, le gouvernement a donc
procédé hier soir à des dépôts qui traduisent
les accords intervenus et dans le cas des clauses que je viens de mentionner et
où il n'y a pas eu accord, les offres de la partie patronale.
Dans lé cas des fonctionnaires, des professionnels du
gouvernement, du Cartel des organismes professionnels de la santé et de
la Fédération québécoise des infirmières et
infirmiers, les dépôts ont été ajustés en
fonction des négociations avec le front commun, de façon à
étendre à ces groupes les clauses pour lesquelles l'exploration
avec les coordonnateurs avait abouti. Je signale, en passant, M. le
Président, que nous venons d'être avertis que sur les clauses
normatives, tout est maintenant réglé avec le COPS et la FIIQ. Il
faut maintenant que les instances syndicales se prononcent sur le contenu de
ces dépôts. On comprendra que pendant que ce processus est en
cours, il ne serait pas approprié que je commente longuement le contenu
des offres et que je porte à leur sujet des jugements de valeur trop
accusés. Je pense, néanmoins, que plusieurs objectifs ont pu
être combinés. Les syndicats obtiennent un niveau de revenu
amélioré pour les bas salariés, ce qui était pour
eux un objectif majeur. La protection du revenu contre l'inflation a
donné lieu à la mise au point d'une formule acceptable. Le
gouvernement, de son côté, pourra maintenant fonctionner avec une
marge de manoeuvre un peu plus grande pour satisfaire à la fois la
croissance des besoins de l'ensemble de la population sans avoir à
accroître le fardeau fiscal des contribuables. Tout cela, bien sûr,
suppose que les formules mises au point seront acceptées, ce que l'on
doit souhaiter au nom de tous les citoyens du Québec.
Il me reste à souligner le travail surhumain
déployé par les négociateurs de toutes les parties
impliquées. Pour tous ceux qui ont déploré, dans un
passé récent, la lourdeur des mécanismes de
négociation, les jours que nous venons de traverser sont la preuve que
des négociations peuvent être rapides et, espérons-le,
concluantes.
Des Voix: Bravo!
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, nous avons suivi avec beaucoup
d'intérêt le déroulement de la dernière phase des
négociations, surtout depuis l'adoption de la loi no 62 par cette
Chambre. Je voudrais adresser au ministre des Finances des félicitations
pour la manière extrêmement consciencieuse dont il s'est
acquitté de sa tâche, du moins dans la mesure que nous avons cru
percevoir parce que nous comprenons tous que beaucoup d'aspects de ce travail
doivent demeurer discrets et même secrets jusqu'au moment où on
peut en dévoiler les résultats. Alors,
j'accueille avec beaucoup de satisfaction, au nom de l'Opposition
officielle, les nouvelles que l'on nous communique aujourd'hui au sujet du
progrès des négociations et de la possibilité que l'on
s'achemine maintenant vers un règlement dans tous les secteurs qui
étaient impliqués.
J'ai écouté avec attention ce que le ministre des Finances
a déclaré. Tout à l'heure, à la période des
questions, nous aurons des précisions à lui demander en ce qui
touche plusieurs aspects des clauses normatives dont il a parlé surtout
dans la déclaration d'aujourd'hui. Je voudrais, pour l'instant,
émettre quelques commentaires au sujet de la partie salariale, des
arrangements que l'on nous communique et ceci comprend, évidemment, le
dépôt qui a été fait en soirée hier, alors
que plusieurs d'entre nous étaient absents de la Chambre.
Je note que ce que l'on nous communique aujourd'hui demeure
exploratoire, demeure à l'état de projet, dans une certaine
mesure plutôt dans une mesure très réelle, au contraire, vu
qu'il reste encore l'approbation de la partie syndicale à obtenir
à l'endroit des propositions qui ont fait l'objet d'accords aux tables
de négociations. Je note aussi qu'il s'agit d'arrangements qui demeurent
partiels parce que certains secteurs embrassés par l'ensemble de la
négociation dans le domaine public et parapublic n'ont pas
été mentionnés dans la déclaration que nous venons
d'entendre. Là-dessus, nous pourrons obtenir je l'espère
les précisions dont nous avons besoin pour nous former une
opinion au cours de la période qui va suivre.
Au sujet de la partie salariale de l'arrangement, je voudrais souligner
une couple de points qui m'apparaissent importants. D'abord, le ministre des
Finances a entrepris la négociation de cette année en fondant la
stratégie patronale sur le principe suivant lequel les
rémunérations dans le secteur public devraient être de plus
en plus comparables à celles qui ont cours dans le secteur
privé.
Je voudrais rappeler à ce sujet que la base dont on s'est servi
en cours de route pour étayer des positions patronales demeure
très imparfaite. Nous souhaitons qu'au cours des mois qui suivront, le
gouvernement trouve le moyen de recueillir des données encore plus
précises que celles sur lesquelles on s'est fondé pour soutenir,
par exemple, que dans le secteur public, la moyenne des
rémunérations serait de 16% supérieures à celles
qui ont cours dans le secteur privé. Nous estimons quant à nous
que la preuve ferme, précise, incontestable de cette affirmation n'a
jamais été fournie en cours de route, parce que certaines
distinctions essentielles n'ont pas été faites dans les
plaidoiries qui ont été présentées au nom du
gouvernement par le ministre des Finances. Je pense en particulier à la
nécessité de tenir compte du caractère syndiqué ou
non syndiqué des entreprises privées avant de les comparer au
gouvernement, la nécessité également de tenir compte de la
taille des entreprises. C'est évident, si l'on compare des entreprises
qui embauchent cinq, dix ou quinze salariés au gouvernement, qu'il se
produira des écarts comme ceux qui ont été
mentionnés. Je ne mets pas en doute la véracité des
pourcentages qui ont été mentionnés à divers stades
des négociations, mais je dis que la preuve suivant laquelle on pourrait
les accepter d'une manière raisonnablement certaine n'a pas
été faite et que ceci est sûrement l'un des progrès
que l'on doit souhaiter en vue de la ronde des négociations qui suivra,
ou même, en cas de complication, pour terminer la ronde actuelle.
Il sera bon, je crois, que le ministre nous fournisse des
précisions. Le dernier souvenir que nous conservons des propositions
patronales déposées aux tables de négociation en
matière salariale remonte au 11 novembre 1979. Le ministre avait alors
souligné que les nouvelles offres patronales représentaient
globalement des sommes de l'ordre de $680 millions si mes souvenirs sont
exacts. Je voudrais que le ministre précise aujourd'hui, s'il peut le
faire, dans sa réplique tout à l'heure, si cette masse salariale
a fait l'objet de changements importants depuis le 11 novembre, pour arriver,
en particulier, aux arrangements qui semblent avoir fait l'objet d'accords en
ce qui touche le taux de base vers la fin du contrat ou pour la première
partie de la première année d'un nouveau contrat à
intervenir. (15 h 10)
Deuxièmement, je voudrais que le ministre précise
également si, pour donner satisfaction à la partie syndicale en
ce qui touche le taux de base, lequel se situait autour de $200 à la fin
du contrat qui a expiré à la fin de juin 1979, donc pour donner
satisfaction aux revendications syndicales autour du taux de base, il a fallu
amputer de manière sensible les rémunérations
déjà offertes ou offertes en vertu des dernières
propositions aux échelons intermédiaires et aux échelons
supérieurs à l'échelle des salaires. Nous croyons
comprendre, en lisant les journaux, que dans le secteur de l'enseignement en
particulier il y aurait aujourd'hui des grincements de dents.
Je voudrais souligner, quand on parle de taux de salaire, qu'il est
très important d'éviter des comparaisons trop absolues. Le taux
de base s'applique en général à une main-d'oeuvre qui n'a
pas de qualifications très développées, qui n'a pas le
même taux de stabilité, qui n'a pas le même taux de
progression dans le cheminement de carrière que les taux plus
élevés. Si l'on était allé imposer des sacrifices
déraisonnables à des catégories de salariés de
l'Etat ou des secteurs publics et parapublic qui se situent aux échelons
intermédiaires ou supérieurs afin de satisfaire à un
besoin de popularité ou de règlement à tout prix, je pense
qu'il faudrait s'interroger sérieusement sur le prix que l'on invite
notre société à payer. Je pense qu'on n'a pas de jugement
de valeur à émettre a priori sur le fait que telle
catégorie touche telle rémunération et telle autre
catégorie telle autre rémunération. Toute une série
de facteurs doivent être considérés. En tout cas,
j'aimerais qu'on nous fournisse des précisions là-dessus et que
nous obtenions surtout l'assurance que les règlements
intervenus en matière salariale n'ont pas été
achetés sur le dos de catégories d'employés des secteurs
public et parapublic qui ont droit à une juste progression de leur
rémunération.
Je voudrais également obtenir des explications sur l'accord qui a
été fait en ce qui touche le taux de base de $265 par semaine.
J'ai cru comprendre qu'il s'agissait d'un accord qui embrasse six mois,
au-delà de la troisième année du contrat, j'aimerais avoir
des explications là-dessus. Est-ce que cela veut dire qu'il faudra
j'achève, M. le Président, mais je crois... Nous n'avons
pas eu l'occasion de discuter de ces choses depuis qu'on en parle de l'autre
côté 24 heures par jour. Je pense que c'est normal. Non, ce n'est
pas la période des questions, c'est une période au cours de
laquelle j'ai le droit d'émettre mes opinions.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef
de l'Opposition, un moment. Il y a une déclaration ministérielle
qui a été faite selon les dispositions de notre règlement.
Cette déclaration ministérielle doit être brève.
On ne fait pas, généralement, d'histoire avec cela. Il
faut également, normalement, que la réplique soit proportionnelle
à la déclaration ministérielle. En ce sens, je vous invite
à conclure assez rapidement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, une courte
question de règlement. On se rappellera qu'au cours de discussions et au
cours des périodes de questions en particulier, relativement au
même sujet qui est abordé aujourd'hui, la présidence, et
cela, je pense bien, avec le consentement de tous, a permis une grande latitude
aux ministres qui, tout à tour, sont venus ajouter des
compléments de réponse, et cela a duré bien plus longtemps
que des réponses en temps ordinaire. C'est pourquoi, je pense bien
qu'à ce moment-ci, on devrait faire preuve de la même latitude de
l'autre côté de la Chambre.
Le Président: C'est pour cela que nous avons
toléré, M. le leader parlementaire de l'Opposition. M. le chef de
l'Opposition.
M. Ryan: Je vous remercie, M. le Président. Comme on le
disait ici, je pense que c'est une des opérations des plus importantes
du gouvernement pendant, non seulement une année budgétaire, mais
une période de trois mois. Si nous pouvons trouver quelques minutes pour
exprimer des opinions ou des préoccupations sérieuses, il me
semble que c'est le lieu pour le faire. C'est beaucoup mieux qu'on le fasse ici
qu'à l'extérieur.
Je termine mon intervention en soulignant que la politique salariale, la
politique de rémunération est l'un des aspects les plus
fondamentaux de toute l'action du gouvernement. Je souhaite que nous nous
acheminions, avec les accords qui semblent être en vue maintenant, vers
un régime où les travailleurs de l'Etat et du secteur parapublic
jouiront de conditions qui leur permettront de donner le meilleur rendement
possible à leurs concitoyens.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. M.
Rodrigue Biron
M. Biron: Je suis heureux, moi aussi, qu'on en soit venu à
une entente presque complète, finalement, sur ces négociations
dans les secteurs public et parapublic. J'ai l'impression que c'est à
cause des négociateurs des deux parties, c'est à cause de
l'action du gouvernement, d'une part, peut-être aussi des questions que
l'Opposition a posées, d'autre part. Mais je pense bien que c'est
à cause aussi du gros bon sens des travailleurs des secteurs public et
parapublic qui, en quelque sorte, ont forcé leurs négociateurs
à négocier beaucoup plus sérieusement avec le gouvernement
employeur. Devant la déclaration du ministre des Finances aujourd'hui,
je dois dire que c'est une déclaration qui se borne strictement à
faire le point sur l'état des négociations, sans nous en dire
beaucoup plus, en fait, que ce qu'on a pu lire dans les journaux aujourd'hui ou
au cours des dernières journées sur la nature et la portée
des offres patronales et les ententes conclues dans certains cas.
Ceci est particulièrement vrai sur la question névralgique
de la politique salariale. Sur ce point crucial, le ministre des Finances, dans
sa déclaration, se borne à nous dire, comme si de rien
n'était, que la protection du revenu contre l'inflation a donné
lieu à la mise au point d'une formule acceptable. Peut-être que le
ministre, sans prendre trop du temps de cette Chambre, pourrait nous parler un
peu plus de ce qu'est cette formule acceptable. Est-ce acceptable tout
simplement pour les travailleurs? Est-ce acceptable pour les deux parties?
Est-ce acceptable aussi pour ceux et celles qui auront à en payer la
note, c'est-à-dire les contribuables du Québec? Sur ce point, le
ministre nous a dit qu'il n'accroîtra pas le fardeau fiscal des
contribuables. Je voudrais bien le croire, mais je voudrais aussi qu'il puisse
nous garantir aujourd'hui qu'en particulier au cours de cet exercice financier
qui se terminera le 31 mars, aucun emprunt additionnel ne surviendra à
la suite des dernières offres que le ministre a déposées
par rapport à ce qui avait été prévu
initialement.
Bien sûr, il y a le budget supplémentaire qui a
été déposé et dont on discutera ce soir, qui fait
qu'on fera des emprunts supplémentaires. Il sera bon de savoir si
réellement il y aura d'autres emprunts qu'on sera obligé de faire
au cours des derniers mois de l'exercice financier pour payer justement ces
offres finales ou ces dernières offres qu'on a faites aux travailleurs
des secteurs public et parapublic. Comme le chef de l'Opposition officielle, je
trouve décevant que nous soyons en présence d'un règlement
qui est partiel. Il semble que, dans le secteur de l'éducation, la CEQ,
les enseignants sortent insatisfaits et un peu frustrés de cette ronde
effrénée de négociations qui vient de prendre fin. Il est
vrai que la CEQ accepte de sou-
mettre les offres du gouvernement à ses membres, mais il faudra
peut-être attendre quelques jours pour voir ce qui va arriver.
Il y a un point précis sur lequel je voudrais demander au
ministre de nous répondre concernant justement ces changements
importants. Y a-t-il eu des changements importants dans ces offres
monétaires ou dans la masse salariale complète qu'il a
déposée au cours des dix derniers jours, depuis qu'on entrevoit
la fin de cette ronde effrénée de négociations? Si oui, de
quel ordre sont ces changements importants à l'intérieur des
dernières offres qu'on a mises sur la table et qui n'avaient pas
été prévus il y a une dizaine de jours?
Il y a aussi un autre point. Le ministre des Finances nous a dit
à plusieurs reprises, d'ailleurs le premier ministre aussi, qu'on
essayait de diminuer l'écart entre le secteur public et le secteur
privé. De ce côté en particulier, je voudrais comprendre
davantage ce qui se passe, parce qu'il semble que le salaire minimum en
particulier qu'on propose aux employés des secteurs public et
parapublic, qui est d'un peu plus de $200 maintenant par semaine, va augmenter
jusqu'à $265 par semaine. Je pense que le député de
Portneuf a posé des questions la semaine dernière ou cette
semaine au premier ministre justement à propos de cet écart du
salaire minimum.
Est-ce que cela veut dire que le gouvernement a prévu que, dans
le secteur privé, on augmenterait le salaire minimum en proportion de ce
qu'on donne au secteur public? Quand même, ce sont les travailleurs du
secteur privé qui ont à payer les taxes, donc les salaires pour
les travailleurs du secteur public. Je voudrais que le ministre des Finances
nous en dise davantage. Est-ce qu'on va faire aussi suivre le secteur
privé par des lois ou des décisions du gouvernement? (15 h
20)
En passant, je note que l'augmentation du salaire minimum au secteur
public va représenter, à la fin des 42 mois, à peu
près $2 l'heure d'augmentation avec ce qui est aujourd'hui, autour de
$200 ou un peu plus par semaine, jusqu'à $265 par semaine. Il s'agit de
savoir ce qui va arriver à ceux et celles qui auront à en payer
le coût. Je serais intéressé, dans la réplique du
ministre des Finances, à savoir ce qui arrivera dans le secteur
privé, maintenant, quant au salaire minimum, puisqu'on a accepté
de porter le salaire minimum du secteur public à $265 après 42
mois. Qu'est-ce qui va arriver dans le secteur privé, quelle est la
décision du gouvernement dans ce secteur et est-ce qu'on va
élargir l'écart entre le secteur privé et le secteur
public ou si on va agir de quelque façon pour le rétrécir
et permettre aux contribuables de souffler davantage et de payer un peu moins
de taxes avec leur salaire?
Le Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: M. le Président, je voudrais, comme mes
collègues, me réjouir du fait qu'on nous annonce un
règlement, sinon total, au moins partiel. Cependant, je voudrais
m'accrocher au dernier paragraphe de la déclaration ministérielle
où le ministre nous dit: "Les jours que nous venons de traverser sont la
preuve que des négociations peuvent être rapides." Je pense qu'il
serait bon qu'on se rappelle que, si cela a été rapide dans les
derniers jours, il y a sûrement des raisons qui font que cela a
été rapide alors que, pendant des mois, cela a été
très très lent. Il y a sûrement quelque chose et ce quelque
chose, à mon avis, c'est la loi spéciale no 62. Si les offres ont
été acceptées par les syndicats jusqu'à
présent et qu'elles le seront peut-être par les syndiqués,
je soutiens respectueusement que cela ne règle que partiellement le
problème.
Le grand problème qu'on a connu au cours des négociations
et qu'on a connu au cours des années précédentes, c'est un
problème qui n'est présentement que reporté à plus
tard. On le connaîtra probablement à nouveau. Il ne faut pas
oublier que les syndicats, quand on parle surtout de négociations
rapides, ont dû avoir recours quand même à la grève
et voire à la menace de grève générale
illimitée pour que, finalement, cela fasse bouger quelque chose.
Quand, finalement, le gouvernement a bougé, cela a
été pour faire voter la loi 62 dans le but de suspendre le droit
de grève temporairement dans les secteurs public et parapublic et ce, au
nom de l'intérêt public, au nom du droit à la santé
et au nom du droit à la sécurité de chaque citoyen. Je
n'en fais pas grief au gouvernement, M. le Président. Je pense
qu'à ce moment le gouvernement n'avait plus le choix. Il fallait qu'il
agisse de cette façon. Mais ce n'est quand même qu'avec la
suspension temporaire du droit de grève, voire même à la
possibilité d'en arriver à le perdre totalement, que les
négociations ont pu être rapides et déboucher sur des
ententes plus ou moins satisfaisantes pour les travailleurs. Je prétends
que, dans ce domaine comme ailleurs, quand on n'a pas les bonheurs qu'on veut,
on tente d'éviter les malheurs qu'on peut. C'est probablement dans ce
sens qu'il y a eu des ententes qui se sont déroulées au cours des
derniers jours.
Or, je dis que c'est partiellement réglé pour le moment.
Ce n'est que partie remise. A moins que le gouvernement n'accepte de profiter
de l'actuel sursis pour élaborer un nouveau mécanisme de
relations de travail dans les secteurs public et parapublic, mécanisme
qui devra être à la fois satisfaisant pour les travailleurs et qui
devra on n'évitera pas cela exclure le recours à la
grève. Sinon, M. le Président, les lois spéciales se
multiplieront et, finalement, le spécial deviendra l'ordinaire.
Le Président: M. le ministre des Finances. M. Jacques
Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, nos amis de l'Opposition ont
soulevé tellement de points distincts qu'on me permettra, à
l'occasion de cette réplique, de prendre plus de deux ou trois minu-
tes, car j'aurais de la difficulté à répondre
à tout ce qui a été soulevé.
Je voudrais commencer d'abord par une question de méthode ou
d'approche soulevée par le chef de l'Opposition officielle quant
à la façon dont le gouvernement a établi ses comparaisons
entre le secteur public et le secteur privé. Là, je pourrai
simplement dire ceci, M. le Président. Je souhaiterais vivement que le
chef de l'Opposition officielle regarde, non pas le mois dernier ou il y a deux
mois, mais toute la masse de documents qui a été mise en
circulation par le gouvernement il y a déjà un an. Lorsqu'il
souligne, par exemple, qu'il n'y a pas, dans les comparaisons faites par le
gouvernement, de différence établie avec les syndiqués du
secteur privé par opposition aux non-syndiqués du secteur
privé, je lui rappellerai une brochure, dont le nom m'échappe,
d'une petite couleur orangée qui doit se trouver quelque part sur sa
table, où on établit clairement la distinction. En tout cas, M.
le Président, je lui remettrai si vous me permettez de le lui
faire penser un petit résumé de cette comparaison que nous
établissons entre le secteur public et le secteur privé
syndiqué et non syndiqué le plus volontiers du monde, si un page
peut le porter au chef de l'Opposition de l'autre côté de cette
Chambre. C'est un document qui circule et que bien des gens ont eu entre les
mains depuis un certain temps.
Je crois qu'au contraire, ce que nous avons fait, à l'occasion de
ces négociations, cela a été pour la première fois
de faire en sorte que ceux qui étaient directement impliqués dans
ces négociations sachent exactement à quoi s'en tenir par rapport
au secteur privé et obtiennent de nous une masse de renseignements et de
comparaisons qui faisaient qu'ils pouvaient non seulement consulter ce que nous
faisions au Conseil du trésor, mais le discuter en y mettant tout le
temps nécessaire.
D'ailleurs, il faut dire que nos partenaires syndicaux dans cette
opération ont discuté certains chiffres, ils nous ont
amenés à modifier certaines comparaisons. Il est clair, par
exemple, que j'ai eu l'occasion de constater, comme président du Conseil
du trésor, qu'une comparaison que nous avions établie pour des
gardiens de nuit n'était pas correcte par rapport au marché
privé et ce sont les syndicats qui nous l'ont signalé et,
à la suite de cela, on a apporté l'amendement et la correction,
ce qui était une erreur patente. On me dira: Cela n'est pas partait. Je
dirais, M. le Président: Cela n'est manifestement pas partait, mais
c'était la première fois que cela se faisait. Si on veut
maintenant me dire: Essayez de faire mieux la prochaine fois, on peut toujours
faire mieux, M. le Président, c'est sûr.
Ceci étant dit, passons à des questions qui m'ont
été posées. Par exemple, quelle est l'augmentation de la
masse depuis le 11 novembre? Il faut considérer que sur le plan de la
masse salariale depuis les offres du 11 novembre, mais à l'exclusion des
derniers six mois, si on veut comparer au 11 novembre, il faut comparer les
trois premières années; on s'entend bien, le 11 novembre ne
portait que sur trois ans. Sur une comparaison identique, il y a à peu
près, dans les dépôts, une différence de $70
millions à $80 millions, par rapport à trois ans, on s'entend
bien, en laissant le P-4 de côté. Pour offrir $265 en fin de
contrat à la main-d'oeuvre non spécialisée, travaillant au
taux de base, nous avons non pas fait unilatéralement une sorte de
récupération chez les salaires les plus élevés,
mais nous avons utilisé une formule de redistribution qui, à
l'origine, avait été proposée par le front commun
lui-même au mois de mars dernier. Nous nous sommes donc servis d'une
formule, d'une structure, en somme, de rémunération qui nous
avait été proposée en mars dernier et que nous avons
adaptée, d'ailleurs, non pas en la rendant plus dure, mais en la rendant
un peu moins dure sur le plan de la redistribution. C'est essentiellement
à partir d'une formule proposée par le front commun que nous
avons procédé. Quant à la formule d'indexation, me disait
le chef de l'Union Nationale, j'ai dit qu'elle était acceptable. Je dois
dire ici, M. le Président, que j'ai reculé un peu devant ce que
nous appelons entre nous et au niveau des techniciens le monstre sur ce plan.
Le monstre, c'est une formule de protection contre le revenu qui remplit
certains des objectifs que nous avions en tête, mais que, là
encore, nous avons tiré de la méthodologie syndicale. C'est pas
plus cher, bien sûr, mais c'est bougrement plus compliqué. Dans la
mesure, cependant, où cela leur faisait plaisir d'utiliser des moyennes
mensuelles, on a dit: Bien sûr, pourquoi pas?
Alors, encore une fois, si le chef de l'Union Nationale est
intéressé à avoir une explication de ce qu'on appelle,
entre nous, le monstre, je la lui enverrai volontiers, mais je lui souhaite
beaucoup de plaisir. Tout ce dont je peux l'assurer, cependant, c'est que cette
formule-là n'est pas plus chère que celle que nous avions en
tête, sauf que, là encore, cela nous permettait de dire: Puisque
la partie syndicale propose une certaine méthodologie, pourquoi pas? (15
h 30)
La réduction des écarts entre le secteur public et le
secteur privé. Je vous rappellerai ici, M. le Président, que nous
avons établi, aussi bien à l'égard du secteur non
syndiqué que du secteur syndiqué, que les
rémunérations globales pas seulement les salaires
chez beaucoup d'employés du secteur public étaient
supérieures à ce qu'on trouve dans le secteur privé. Nous
nous sommes entendus pour ne pas faire de corrections à cet égard
pour les taux de base, les moins bien payés. C'est ainsi que les moins
bien payés, en fin de convention, arrivent à $265. Mais, pour
beaucoup d'autres groupes, cependant, qui sont beaucoup mieux payés et
très en avance sur le marché privé, il est évident
qu'une certaine correction a été discutée et finalement a
pris place. Dans ce sens, je pense qu'un des objectifs que nous avions en
tête à cet égard est réalisé, de même
qu'est réalisé un des objectifs que les syndicats avaient en
tête, c'est-à-dire l'amélioration de la situation des gens
les moins bien payés. Je pense qu'ici on
est arrivé à un compromis qui est acceptable et qui permet
aux deux parties d'atteindre certains des objectifs qu'elles avaient. D'autre
part, cela va éviter au secteur privé, je pense, d'avoir à
se considérer comme la vache à lait de tout le
système.
Le chef de l'Union Nationale me demandait: Est-ce qu'on prévoit
des emprunts additionnels cette année à cause de cette partie du
règlement qui porte sur 1979/80? Je lui répondrai: Non, il n'y
aura pas d'emprunts additionnels dus spécifiquement à cela.
Qu'est-ce qui va arriver aux taxes compte tenu de ce règlement
sur les trois ans, trois ans et demi? Il est évident que c'est un peu
difficile pour un ministre des Finances de commencer à parler de ces
choses avant un discours du budget, même s'il y a quand même
plusieurs mois avant que le discours du budget vienne. Mais une chose est
claire, comme j'ai eu l'occasion de le dire dans ma déclaration
ministérielle; ce règlement ne va pas imposer de fardeau fiscal
additionnel sur l'ensemble de la population. C'était un objectif majeur
du gouvernement et je pense qu'il est atteint.
Finalement, le député de Rouyn-Noranda posait une question
que bien des gens se posent à l'heure actuelle et à laquelle je
réponds volontiers parce que cela me paraît effectivement une
question de bon sens. J'espère que ma réponse sera une
réponse de bon sens aussi. Effectivement, les négociations se
sont poursuivies à un rythme très rapide depuis quelques jours.
Est-ce qu'il faut vraiment des grèves ou des menaces de grève
pour que les négociations avancent vite? Il est clair qu'en soi, d'une
façon générale, quand des gens agitent la menace de
grève, à plus forte raison s'ils se mettent en grève, cela
met une pression sur tout le monde pour chercher une entente, pas seulement sur
la partie patronale d'ailleurs, mais sur la partie syndicale parce qu'une
grève coûte cher aux syndiqués, cela va de soi, c'est
général.
Mais, dans le cas qui nous préoccupe ici et dans les
négociations du secteur public, j'aurais quand même un certain
nombre de choses à dire. Jamais dans le passé ces
négociations dans le secteur public n'ont été aussi
rapides, jamais. Il faut être de bon compte ici. A côté des
quatorze mois de 1976, de certaines conventions qui en 1972 ont pris 20 mois,
soyons de bon compte. On me dit de l'autre côté de la Chambre: Les
fonctionnaires et le COPS et des groupes comme ceux-là? Ces
groupes-là nous ont fait comprendre très tôt qu'ils
voulaient s'aligner sur le front commun, qu'ils se laissaient déporter
sur le front commun. Voilà, quand on est arrivé au front commun,
cela a pris quelques mois. Les conventions collectives du front commun sont
venues à échéance le 1er juillet dernier. Dans ce sens,
reconnaissons simplement et de bon compte, en comptant les mois, que ça
été quand même assez rapide.
Il y a eu une accélération, je le reconnais, au cours des
derniers jours, en ce sens que, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer au
début du mois de septembre, nous envisagions de mettre sur la table, au
fur et à mesure des négociations, tout, de façon qu'on
soit prêt vous vous en souviendrez autour du 1er
décembre. En décidant d'aller en grève le 13 novembre, il
est clair que les centrales syndicales nous ont amenés à
débouler plus rapidement. Ce qui se serait fait sur un mois s'est fait
sur quinze jours. Si on veut parler de ce type d'accélération,
oui, bien sûr, j'en conviens. Au fond, cela a amené un processus
qui aurait dû prendre à peu près un mois à se faire
sur une quinzaine de jours.
Il me reste, M. le Président, en m'excusant d'avoir
été un peu long, d'annoncer à cette Chambre une nouvelle
qui vient de me parvenir et qui entre, je pense, dans l'esprit
général qui est en train de s'amorcer aujourd'hui: Le Syndicat
d'Hydro-Québec vient d'annuler son avis de grève pour demain.
Le Président: Merci, M. le ministre des Finances.
Dépôt de documents.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Liste des dépôts relatifs à la loi
no 62
Je voudrais faire le dépôt de la liste des
dépôts justement faits hier soir auprès du
secrétaire général de l'Assemblée nationale
conformément à la loi 62. Je pense bien que vous me ferez
grâce d'avoir à faire l'énumération aride des
quelque 45 organismes qui sont mentionnés.
M. le ministre de l'Education.
Rapport de la Corporation des évaluateurs
agréés
M. Morin (Sauvé): M. le Président, permettez-moi,
à titre de ministre responsable de l'application des lois
professionnelles, de déposer le rapport d'activités de la
Corporation professionnelle des évaluateurs agréés du
Québec pour l'année 1978-1979.
Le Président: Rapport déposé.
Rapport de l'Ordre des chiropraticiens
M. Morin (Sauvé): Permettez-moi de déposer
également le rapport de l'Ordre des chiropraticiens du Québec
pour l'année 1978-1979.
Le Président: Merci, rapport déposé. M. le
ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions
financières.
Rapport du ministère des Consommateurs
M. Joron: M. le Président, j'ai le plaisir de
déposer le rapport annuel du ministère pour l'année
1978/79.
Le Président: Merci, rapport déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues. M. le
député de Laprairie.
Etude du projet de loi no 54
M. Michaud: M. le Président, vous me permettrez, suivant
les dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la
commission élue permanente des consommateurs, coopératives et
institutions financières qui a étudié, les 13 et 20
novembre 1979, le projet de loi no 54, Loi sur le recouvrement de certaines
créances, article par article, et elle l'a adopté avec des
amendements.
Le Président: Rapport déposé. Merci, M. le
député de Laprairie.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement. M. le
leader parlementaire du gouvernement.
Réimpression du projet de loi no 9
M. Charron: M. le Président, le gouvernement a l'intention
de déposer deux projets de loi aujourd'hui dont un, c'est le premier que
je vous demanderais d'appeler, est un projet de loi réimprimé
à la suite de nombreux amendements que le travail en commission
parlementaire a permis d'ajouter au texte original du projet de loi. En vertu
de l'article 124 du rèplement, je vous demanderais de permettre au
ministre d'Etat à la Réforme électorale de déposer
une copie réimprimée du projet de loi sur la Loi
électorale du Québec.
Le Président: M. le ministre d'Etat à la
Réforme électorale propose la réimpression du projet de
loi no 9, Loi électorale du Québec, conformément aux
dispositions de l'article 124 de notre règlement.
M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, nous avons fait cette
réimpression à la demande de l'ensemble des membres de la
commission parlementaire.
Le Président: Est-ce que cette motion sera adoptée?
Adopté.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je vous prierais d'appeler le
projet de loi qui apparaît à l'article d) du feuilleton
d'aujourd'hui.
Projet de loi no 61
Première lecture
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre propose la première lecture du projet de loi sur les
appareils sous pression et d'autres dispositions législatives. Il s'agit
du projet de loi no 61.
M. le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: M. le Président, il est très
significatif qu'en ce jour nous déposions un projet de loi sur les
appareils sous pression et d'autres dispositions législatives qui, comme
on le verra, peuvent de temps en temps toucher au climat. Ce projet de loi
refond et remplace la Loi concernant les appareils sous pression et abroge la
Loi sur les paratonnerres. On a les orages qu'on peut! Il intègre les
dispositions à la Loi sur les électriciens et les installations
électriques. La Loi sur les appareils sous pression a pour objet
d'assurer la sécurité de ces appareils par la surveillance de
leur construction, de leur installation, de leur utilisation et de leur remise
dans le commerce. A cette fin, elle permet notamment à un inspecteur
d'ordonner l'arrêt du fonctionnement d'un appareil sous pression et d'y
apposer les scellés lorsque cet appareil présente un danger
imminent. Les modifications apportées à la Loi sur les
électriciens et les installations électriques ont pour objet de
soumettre les installations de protection contre la foudre au régime
général des installations électriques à l'exception
de celui des licences exigées. Merci, M. le Président. (15 h
40)
Le Président: Est-ce que cette motion de première
lecture sera adoptée?
Des Voix: Adopté. Le Président: Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Président: Deuxième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Période de questions orales.
M. le député de Portneuf.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
Négociations dans les secteurs public et
parapublic
M. Pagé: Merci, M. le Président. J'aurais une
question à l'endroit du ministre des Finances. Sans trop de
préambule évidemment et sans débat, j'aimerais le
remercier des informations fournies dans la déclaration
ministérielle qu'il a faite aujourd'hui. Cependant nous aurions d'autres
questions. Une première, le ministre nous a annoncé hier, vers 18
heures, qu'il ajoutait une quatrième période à la
convention qui s'étendait
sur six mois, soit jusqu'au 31 décembre 1982. On sait que plus
une convention collective est longue, plus les syndiqués demandent des
clauses de protection du revenu. C'est d'ailleurs à ce moment
qu'interviennent différents mécanismes d'indexation et de
protection du revenu. Quant aux offres qui ont été
déposées ici à l'Assemblée nationale hier, au
bureau du secrétaire, et qu'on a analysées ce matin, vous
comprendrez et le ministre des Finances comprendra qu'on n'a pas pu
physiquement passer à travers cette quarantaine de documents dans
l'espace de trois ou quatre heures.
J'aimerais demander au ministre des Finances quel est le
mécanisme de protection du revenu qui a été prévu,
tel que déposé hier. Est-ce que le mécanisme est le
même pour l'ensemble des syndicats du front commun et des autres
syndicats qui sont actuellement à négocier avec le gouvernement
du Québec pour le renouvellement de leur convention collective? S'il y a
des distinctions entre ces mécanismes d'indexation, sur quels motifs les
négociateurs patronaux et le gouvernement se sont basés pour en
arriver à de telles distinctions?
Par la suite, M. le Président, je donne tout de suite avis au
ministre des Finances que j'aurai une question additionnelle à deux
volets très spécifiques, premièrement à
l'égard du Syndicat des fonctionnaires provinciaux et aussi concernant
Hydro-Québec.
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Le mécanisme d'indexation ou de protection du
revenu plutôt, en P-4, a été offert ou étendu,
d'après ce que je sais, à tous les groupes. Il y avait encore un
groupe, je pense, hier, où cela n'était pas clair. Mais dans
l'ensemble, l'idée est d'étendre la chose sur la même base
et sur la même formule. Cette formule de protection de revenu est
appuyée sur un taux d'inflation de 7% en P-4, donc pour la
dernière période de six mois, et comporte en outre un arrêt
des phénomènes de stabilisation dont je parlais plus tôt
pour certains groupes et une augmentation du revenu réel de 0,8% de la
masse salariale de l'année.
Le Président: M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Merci, M. le Président. De toute
façon, on aura l'occasion ce soir et demain matin, en fin de semaine
tout au moins de prendre connaissance des différents documents qui nous
ont été déposés et nous poserons certainement
d'autres questions mardi prochain.
Le ministre des Finances nous a dit tout à l'heure que ce qui
avait été offert au front commun s'appliquait presque mutatis
mutandis aux autres groupes et, entre autres, au Syndicat des fonctionnaires
provinciaux du Québec. Est-ce que le ministre des Finances, à ce
moment-ci, peut nous donner l'assurance que par rapport à ce qui avait
été préalablement offert au début au Syndicat des
fonctionnaires provinciaux, aucun groupe n'aura à subir de baisse dans
l'offre déposée hier? Je vais donner deux exemples bien
particuliers sur la foi d'information que je reçois. On m'informe que
dans la catégorie "ouvriers" notamment, ce qui aurait été
offert hier c'est 1,7% de moins que la masse qui avait été
offerte au début. On se rappellera d'ailleurs qu'au début, le
ministre des Finances et les négociateurs patronaux avaient
confirmé que pour ce qui est de la classe "ouvriers" ceux-ci
étaient déjà à 1% de moins que dans le secteur
privé? Est-ce qu'il pourrait me confirmer ces faits, ou les infirmer, ou
s'il préfère plutôt attendre et vérifier.
Deuxième volet de la question additionnelle en ce qui concerne la
négociation à Hydro-Québec. Le ministre des Finances nous
a annoncé tout à l'heure que le syndicat avait mis de
côté son avis de grève pour demain. On en est fort heureux
du côté de l'Opposition officielle cela va de soi. Cependant,
est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire quel a été
le résultat de la demande syndicale à l'égard des
employés des anciennes compagnies, le groupe qu'on appelle le groupe des
nationalisés à l'égard de leur fonds de retraite? On sait
que c'est un problème qui se posait avec beaucoup d'acuité.
On sait que c'est un problème qui se posait avec beaucoup
d'acuité, on sait que c'est un problème qui a fait l'objet de
représentations dans le courant de la présente
négociation. Est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire ce
qui a été réglé au sujet du fonds de retraite des
employés qui étaient dans d'autres compagnies qui ont
été nationalisées lors de la création
d'Hydro-Québec et de la loi de 1962?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Pour ce qui a trait à l'extension des offres
ou des dépôts d'hier soir aux groupes qui ne font pas partie du
front commun, j'ai demandé qu'effectivement on s'assure bien que ces
dépôts ne représenteraient pas une réduction par
rapport à des offres qui auraient pu être faites officiellement
antérieurement à ces groupes. Je n'ai pas de raison de croire que
cela n'a pas été appliqué dans tous les cas. Pour ce qui a
trait au cas spécifiquement soulevé par le député
de Portneuf, je veux bien procéder à une vérification,
mais j'en serais, à première vue, tout à fait
étonné. En tout cas, tout de suite, si le député me
le permet, je corrigerai un chiffre qu'il vient de donner. L'enrichissement
offert aux ouvriers, parce qu'ils sont légèrement au-dessous du
marché privé, est de 0,6%. Je procéderai à une
vérification; j'ai toute raison de croire que cela a été
fait selon les instructions données, mais je pourrai procéder
à la vérification qu'il me demande dans ce cas.
Pour ce qui a trait à Hydro-Québec, il y a un certain
nombre de propositions qui ont été examinées pour ce qui a
trait au fonds de pension de ce qu'on appelle les anciens nationalisés.
Leur cas a déjà été étudié au Conseil
du trésor et il y a déjà fort longtemps d'ailleurs et
certaines propositions avait été retenues. Hydro-Québec a
annoncé des modifications à son programme à l'égard
des
fonds de pension de ce qu'on appelle les anciens nationalisés; il
est tout à fait évident que le syndicat voudrait pouvoir
incorporer cette question dans la convention collective alors que pour ce qui a
trait aux pensionnés des anciennes compagnies nationalisées, le
problème se pose sérieusement à savoir si cela doit entrer
dans une convention collective. Je sais que la question est posée par
les syndicats, je sais qu'ils ont un certain nombre d'exigences à cet
égard. Le ministre du Travail me fait signe qu'il a des
précisions à apporter sur cette clause spécifique et il
est possible qu'il ait eu de son conciliateur un rapport; je peux, si on me le
permet, M. le Président, lui passer la parole.
Le Président: M. le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: Essentiellement, c'est pour rappeler le contexte dans
lequel le ministre des Finances a fait part à la Chambre tout à
l'heure du retrait de l'avis de grève dans le cas d'Hydro-Québec.
Les syndicats d'Hydro-Québec nous avaient envoyé un avis de
grève dans les délais prescrits par le code pour une grève
qui devait durer 24 heures et devant avoir lieu demain. Compte tenu de
développements importants dans ce dossier, au niveau du syndicat comme
au niveau des mandats de l'employeur, nous pouvons considérer qu'il y
aura, au plus tard à compter de samedi, si ce n'est demain, des
réunions de conciliation au cours desquelles l'ensemble de ces questions
seront sans doute discutées.
M. Pagé: On n'a pas répondu à la question
spécifique du problème du fonds de retraite. Où en est
rendue cette requête, cette représentation formulée par des
centaines de travailleurs d'Hy-dro-Québec?
M. Johnson: Je prends bonne note de la question du
député de Portneuf qui se fait possiblement le porte-parole de
certains employés qui ont ce problème et il me fera plaisir de
lui faire parvenir par écrit la réponse dès que la
question sera conclue.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Si vous me permettez, j'aurais une question
additionnelle dans le domaine de l'Education, étant donné que
c'est la large situation du front commun, au ministre de l'Education. Etant
donné que la déclaration ministérielle indique que c'est
dans ce domaine que l'écueil reste aux négociations, le ministre
de l'Education pourrait-il nous expliquer ce qui accroche compte tenu de
l'optimisme qu'il exprimait le 12 novembre, juste avant d'étudier la loi
62? Il pourra relire sa réponse aux pages 3463 et 3464 du journal des
Débats. Qu'est-ce qui accroche au niveau de la tâche?
Naturellement, je ne veux pas l'enquiquiner avec des détails, mais il
pourrait quand même considérer que c'est assez important.
Une Voix: Kiki! Wouf! Wouf!
Le Président: M. le ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): II est bien difficile de donner une
réponse précise au député puisque les nouvelles
offres sont maintenant devant l'Assemblée et que nous ne connaissons pas
exactement la réponse des enseignants ni les votes qui seront pris
éventuellement pour accepter ou refuser nos offres. Mais je demeure
profondément optimiste, surtout depuis le dépôt d'hier
soir.
En effet, nous avons, vous le savez, fortement amélioré la
sécurité d'emploi des enseignants puisque ceux-ci jouiront
désormais de la sécurité totale à
l'intérieur d'un rayon de 50 kilomètres autour de leur ancien
lieu de travail, pour le cas où ils seraient mis en
disponibilité. De plus, dans le dépôt que nous avons
effectué hier soir, un peu avant minuit, nous avons tenté
d'améliorer considérablement la tâche de l'enseignant. Par
exemple, nous avons diminué le nombre d'élèves par classe,
ou par enseignant, à tous les niveaux: préscolaire, primaire,
secondaire. Nous avons allégé la tâche globale de
l'enseignement en P-3 pour ceux du préscolaire et du primaire, comme
nous le demandait, d'ailleurs, la CEQ. Enfin, nous avons également
amélioré le temps maximum d'enseignement, lequel a
été diminué au primaire en P-3, dernière
année de la convention.
De même, nous avons voulu donner une garantie aux enseignants.
Plusieurs, en effet, étaient inquiets des changements qui pourraient
être apportés éventuellement au régime
pédagogique et à la grille-matière. Nous leur avons
donné la garantie, par une clause qui porte le numéro 8.1-03, que
les modifications aux règlements ou aux directives du ministère
de l'Education qui porteraient sur le régime pédagogique, les
grilles-matières tout ce qui découle du plan d'action
ne peuvent avoir pour effet de modifier les dispositions du chapitre 8,
lequel définit la tâche de chaque enseignant, C'est une garantie
extrêmement importante et je souhaite qu'elle ait pour effet de rassurer
profondément les enseignants.
En outre je termine là-dessus comme 3465
enseignants de plus seront nécessaires pour remplir les divers postes
qui vont être créés à la suite de cos offres, j'ose
espérer que ce sera de nature à rassurer pleinement et de
façon définitive les enseignants quant à la portée
des offres et du plan d'action que le gouvernement a rendu public il y a
déjà quelques mois.
M. Brassard: Une question additionnelle, M. le
Président.
Le Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Une question additionnelle au ministre des Affaires
sociales. Je pense qu'il serait dans l'ordre que le ministre des Affaires
sociales dresse le bilan, comme il l'a fait les jours précédents,
de la situation actuelle dans le réseau des affaires sociales.
Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.
M. Lazure: M. le Président, brièvement, la
situation aujourd'hui est sensiblement la même qu'hier, mais,
évidemment, on s'attend que, dans les heures qui viennent, elle change
de façon assez spectaculaire. A tout événement, au cours
de la journée, un total de 74 hôpitaux connaissaient un
débrayage illégal et il y avait certaines difficultés dans
trois hôpitaux: Saint-Sacrement à Québec, Saint-Joseph
à Trois-Rivières et l'Hôtel-Dieu de Montréal. Quant
aux centres d'accueil, une cinquantaine étaient partiellement
paralysés par le débrayage illégal, quinze CLSC sur un
total de 81 et, finalement, deux centres de services sociaux sur quatorze.
Comme le président du Conseil du trésor l'a indiqué
tout à l'heure, les syndiqués de la Fédération des
affaires sociales, qui avaient entamé ou entrepris un débrayage
illégal depuis quelques jours, ont accepté, par le vote
majoritaire, de recommander à leurs syndicats locaux dans l'ensemble du
réseau des affaires sociales l'acceptation autant des offres
monétaires que des offres au plan normatif.
Nous avons donc toutes les raisons de croire, nous fiant aux
échanges que nous avons eus depuis quelques jours avec les
représentants syndicaux, que, dans les heures qui viennent, nous
devrions assister à un retour massif au travail. Et je veux simplement,
en terminant, rendre hommage à tout le personnel des
établissements, tout ce personnel qui a dû prendre les
bouchées doubles qui a dû travailler, dans certains cas, quinze
heures, parfois vingt heures, à cause du débrayage illégal
des confrères. Je veux leur rendre hommage et je veux aussi
espérer, comme mon collègue, le président du Conseil du
trésor, que ces offres recevront l'acceptation des membres dans chaque
établissement. Merci.
Le Président: Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si vous me le permettez,
j'aimerais poser une question supplémentaire au ministre de l'Education.
Je l'ai entendu dire tout à l'heure qu'il y avait une clause de
proposée aux enseignants afin que leur tâche ne soit pas
modifiée advenant un changement au régime pédagogique. Le
ministre de l'Education peut-il nous assurer si le nombre d'heures n'est
pas changé et que la tâche dans ce sens n'est pas modifiée
qu'il se pourrait quand même, à la suite de l'application
du plan d'action du ministre, que les enseignants se retrouvent, non pas avec
un plus grand nombre d'étudiants dans chaque cours, mais avec un plus
grand nombre d'étudiants dans l'ensemble des périodes qu'ils
devront assumer puisque, maintenant, on passe à des blocs de trois
périodes plutôt qu'à des blocs de quatre ou cinq
périodes; tel qu'on les a actuellement. C'est ce qui inquiète les
enseignants.
Le Président: M. le ministre de l'Education.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il faut
comprendre que, d'après l'actuelle convention celle qui est en
vigueur tant qu'elle n'aura pas été remplacée par celle-ci
il est possible à un enseignant d'accepter, contre
rémunération, de donner une vingt et unième heure
d'enseignement. Il y en a même vous le savez qui en donnent
davantage, toujours avec compensation en argent. La chose demeure possible dans
la convention qui, je l'espère, sera approuvée par les
enseignants; ceux-ci peuvent être appelés, s'ils le
désirent, mais on ne peut pas leur imposer la chose. Ils peuvent
accepter une vingt et unième heure d'enseignement, mais contre paiement
en espèces trébuchantes et sonnantes. C'est la règle de
l'ancienne convention que nous prolongeons. D'ailleurs, sur ce point, je pense
qu'il y a accord avec la CEQ. C'est elle-même qui nous a proposé
la clause que nous avons insérée dans la convention pour
résoudre ce problème.
Donc, M. le Président, il y aura sûrement des enseignants
qui pourront donner une heure de plus d'enseignement, mais, d'autre part, nous
voulons aussi assurer un meilleur encadrement des enfants du niveau primaire et
des adolescents du niveau secondaire, de sorte que certains pourront être
titulaires, non pas toutefois titulaires à plein temps puisque nous ne
favorisons pas un tel partage des tâches. Certains pourront avoir, par
exemple, deux heures de moins d'enseignement pour occuper ces postes de
titulaires. Vous savez que c'est un des objectifs du livre vert et cela a
été l'une des grandes conclusions de la tournée qui a
suivi la publication de ce livre vert, c'est-à-dire que les enfants ont
besoin d'un peu plus d'encadrement. C'est la raison pour laquelle nous avons
voulu obtenir une certaine souplesse dans la convention collective en vue de
permettre aux uns de faire de l'enseignement et aux autres de faire de
l'encadrement.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Biron: Question principale, M. le Président, au
ministre des Finances.
Le Président: Bon! Je reviendrai à vous dans
quelques minutes. Je vais permettre une autre question...
Une Voix: Le ministre des Finances arrive, M. le
Président.
Le Président: S'agit-il d'une question principale?
M. Forget: Oui.
Le Président: M. le député de Saint-Laurent,
que ce soit très bref, pour revenir à vous, M. le chef de l'Union
Nationale.
M. le député de Saint-Laurent.
Travaux de la commission Keable
M. Forget: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse
au ministre de la Justice et elle fait suite
à la question que je lui posais hier, en lui demandant de
répondre à l'accusation qui circule, c'est-à-dire que le
ministre a fait preuve de parti-sanerie dans la formation de la commission
Keable, une commission qui a un caractère politique et qui est
présidée par un ex-candidat du Parti québécois. (16
heures)
Le ministre de la Justice a-t-il pris connaissance de la
déclaration d'un dénommé Comeau qui a été
faite hier devant la commission Keable qui a convoqué cet individu
à titre de témoin? Il s'agit d'un ex-felquiste qui a
refusé de témoigner en alléguant précisément
les mêmes motifs. Je pense que le ministre conviendra avec nous qu'il
s'agit du même point de vue exprimé aux deux
extrémités du spectre politique, si vous voulez. Non seulement il
a abondé dans le même sens des accusations portées
relativement au caractère partisan et politique de cette enquête
Keable, mais il a même ajouté d'autres motifs de même
nature, cependant, pour refuser de répondre, y compris, en particulier,
le désir qu'aurait, selon lui, le Parti québécois de se
blanchir de toute connivence, dans la période
préélectorale et préréférendaire qui
s'annonce, avec les éléments terroristes de 1970.
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je ne relèverai
pas les faussetés habituelles contenues dans les préambules du
député de Saint-Laurent concernant les accusations auxquelles il
fait allusion, dont feraient état les journaux. Je voudrais quand
même le lui rappeler, parce qu'il oublie que ces accusations sont le fait
du député de Saint-Laurent. On se rappelle que ces accusations
étaient sans aucun fondement; il l'a d'ailleurs avoué
lui-même.
M. le Président, concernant la commission Keable, j'ai
toujours...
M. Forget: M. le Président, question de privilège.
Le ministre dit que j'ai avoué que les accusations étaient sans
aucun fondement.
M. Bédard: Oui, M. le Président.
M. Forget: Je n'ai fait aucun aveu de ce genre-là...
M. Bédard: M. le Président.
M. Forget: ... et les accusations dont je parle sont celles
contenues dans une déclaration d'un témoin.
M. Bédard: M. le Président. Une Voix: A
l'ordre!
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
ministre de la Justice.
M. Bédard: Les journaux auxquels se réfère
le député de Saint-Laurent évoquent que le
député de Saint-Laurent n'avait absolument aucun argument pour
étayer les accusations auxquelles il fait allusion.
Alors, M. le Président, je tiens à rappeler au
député de Saint-Laurent que la commission Keable est une
commission indépendante qui a un mandat très précis
à remplir, mandat qui a été défini par le
gouvernement, par arrêté ministériel, qui a
été déposé en cette Chambre et qui est à la
connaissance de tous les membres de l'Assemblée nationale. Ce mandat n'a
pas pour but de faire une enquête sur la crise d'octobre, mais porte
plutôt sur l'évaluation de certaines méthodes
policières qui auraient pu prévaloir au niveau de certaines
enquêtes et de certains faits très précis.
M. le Président, je continuerai, parce que je crois que c'est
l'attitude que doit avoir un ministre de la Justice par rapport à une
commission indépendante, comme je l'ai fait dans le passé, de
m'abstenir de tout commentaire relatif aux travaux de la commission Keable.
Encore une fois, la commission Keable effectue ses travaux selon un mandat
précis qu'elle doit respecter. Si la commission Keable ne respectait pas
son mandat, n'importe quel citoyen est capable de poser les gestes
nécessaires pour demander ce respect du mandat qui lui a
été imparti.
M. le Président, c'est pourquoi je ne suis pas en mesure de
répondre au député de Saint-Laurent concernant certains
témoignages qui auraient pu être rendus devant la commission
Keable pour la bonne et simple raison que la commission Keable est un organisme
indépendant il devrait se le rappeler et qu'il serait
très peu opportun je dirais même inadmissible que le
ministre de la Justice commente continuellement, au jour le jour, les
témoignages ou les faits qui peuvent être relatés à
l'occasion des auditions publiques de la commission Keable.
M. Forget: Question supplémentaire, M. le
Président.
Le Président: M. le député de Saint-Laurent,
une dernière question.
M. Forget: Est-ce que le ministre ne se rend pas compte, par son
attitude de soi-disant détachement, que cette commission qu'il dit
indépendante...
M. Bédard: M. le Président, question de
privilège.
M. Forget:... n'existe que par l'autorisation du gouvernement
à...
M. Bédard: Question de privilège, M. le
Président.
M. Forget: ... son bon plaisir en...
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
ministre de la Justice.
M. Bédard: Ma question de privilège sera
très courte, mais elle fait suite à une insinuation habituelle du
député de Saint-Laurent qui mentionne que l'attitude du ministre
de la Justice en est une de détachement. Au contraire, l'attitude du
ministre de la Justice en est une de respect envers une commission
indépendante qui a des travaux à effectuer dans le respect de la
loi, dans le respect du mandat qui lui a été imparti par le
gouvernement. Les tribunaux sont là pour juger si ce mandat est
respecté.
M. Forget: M. le Président, je n'avais pas
terminé...
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: ... ma question supplémentaire. Est-ce que le
ministre accepterait de déposer ce témoignage, ce mémoire
lu à la Commission Keable et où il est personnellement mis en
cause de même que l'ensemble du gouvernement? C'est une question à
laquelle il ne peut pas refuser de répondre. Ce n'est pas une commission
indépendante, premièrement, puisqu'elle existe selon le bon
plaisir du gouvernement et, deuxièmement, le gouvernement, le ministre
de la Justice en particulier est personnellement mis en cause dans cette
question. Est-ce qu'il accepterait au moins de déposer ce document de
façon à ce que tous les membres de l'Assemblée nationale
puissent en prendre connaissance?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, je garderai exactement
la même attitude de respect envers une commission indépendante et,
je le répète, une commission indépendante telle que celle
que représente la Commission Keable. Ce n'est pas parce que la
présidence est assumée par quelqu'un qui a pu avoir une
activité politique qu'on doit conclure, je pense, qu'une commission est
indépendante. S'il fallait en arriver à ce résultat, je
pense que je serais dans l'obligation de mettre en cause toutes les nominations
à des postes très importants qui ont été faites par
la députation, par le gouvernement libéral qui est l'Opposition
officielle à l'heure actuelle.
Au contraire, comme ministre de la Justice, j'ai toujours et je
continuerai à avoir le respect des structures qui ont été
nommées et mises en place d'une façon normale et
autorisées par nos lois, par nos règlements et c'est dans ce sens
que je n'accepterai d'aucune façon les insinuations qui sont faites
continuellement par le député de Saint-Laurent qui, d'une
façon très claire, semble vouloir contribuer je ne sais
pas quel est son dessein, quelles sont ses arrière-pensées
seulement à un objectif, à savoir d'essayer de diminuer la
crédibilité de la Commission Keable qui fait ses travaux à
l'heure actuelle.
En ce qui regarde le ministre de la Justice, il n'a à
protéger personne et n'a pas à se protéger. La Commission
Keable peut faire toutes les enquê- tes qui lui sont permises par son
mandat. Elle aura à faire rapport à cette Chambre et, à ce
moment-là, sachez que sans aucune hésitation, le ministre de la
Justice prendra les décisions qui s'imposent.
M. Forget: Dernière question, M. le Président.
Le Président: Dernière question, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre de
la Justice se rend compte...
M. Brochu: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale.
M. Brochu: A deux occasions, vous avez signifié au
député de Saint-Laurent qu'il s'agissait d'une dernière
question additionnelle. Je vous rappelle quand même, M. le
Président, que c'est simplement dans l'attente du ministre des Finances
qui est maintenant présent que vous avez sauté le tour du chef de
l'Union Nationale de façon particulière en permettant au
député de poser certaines questions. Je vous demanderais, s'il
vous plaît, étant donné qu'il reste seulement huit à
dix minutes de la période des questions, de permettre au chef de l'Union
Nationale de poser sa question.
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale, il reste plus de temps que vous ne le croyez. Il reste 17 bonnes
minutes. C'est pourquoi je vais permettre une dernière question
très brève à M. le député de Saint-Laurent
en lui demandant de s'abstenir de préambules et tout de suite
après, je vous rejoins.
M. Forget: Merci, M. le Président. Mardi prochain seront
convoqués à nouveau les trois témoins qui ont
refusé de témoigner pour les raisons que j'indiquais lors de ma
première question. Est-ce que le ministre de la Justice se rend compte
qu'à cette occasion-là, des gens à qui la commission n'a
rien à reprocher, puisqu'ils sont là comme témoins et non
pas comme prévenus, risquent d'être condamnés à un
outrage au tribunal, même à la prison, pour la seule raison qu'ils
refusent de se prêter à ce qu'ils considèrent et à
ce que d'autres personnes également considèrent comme un
maquillage de la justice et comme une mascarade dans ce cas avec des buts
strictement partisans? Est-ce que le ministre de la Justice est prêt
à assumer cette responsabilité?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Bédard: M. le Président, encore une fois, le
député de Saint-Laurent est complètement dans l'erreur en
ce qui a trait à sa manière de voir l'administration de la
Justice. Il y a une commission Keable, une commission indépendante qui,
à l'heure actuelle, a à faire des travaux, qui est
soumise aux pouvoirs de regard et de surveillance de la Cour
supérieure du Québec il sait cela et si la
Commission Keable pose des gestes qui ne seraient pas selon la ligne qui doit
être respectée en termes de justice, ce n'est pas le ministre de
la Justice, mais également les tribunaux qui seraient en mesure de faire
les interventions nécessaires. (16 h 10)
Le député de Saint-Laurent ne se rend pas compte, à
l'heure actuelle, de ce qu'il demande au ministre de la Justice qui, s'il
intervenait dans un cas particulier parce que c'est la commission Keable par
rapport à d'autres commissions, pourrait ensuite se permettre
d'intervenir dans les travaux de toutes les commissions qui peuvent avoir
à effectuer des travaux en vertu d'un mandat précis parce qu'il y
aurait des gestes posés qui ne seraient pas selon son opinion à
lui, comme ministre de la Justice.
Le député de Saint-Laurent ne réalise vraiment pas
jusqu'à quel point est incongrue et contraire, justement, à une
bonne administration de la justice la demande qu'il fait à l'heure
actuelle au ministre de la Justice. Si je devais me permettre un geste comme
celui-là, à ce moment-là, le député de
Saint-Laurent est en train de vouloir justifier par un précédent
la possibilité pour n'importe quel ministre de la Justice d'agir de son
chef par rapport à des travaux qui sont faits par des commissions
indépendantes, des commissions d'enquête. Même, si vous
voulez aller plus loin, le ministre de la Justice pourrait, à un moment
donné, si je suis la ligne de pensée du député de
Saint-Laurent, son argumentation complètement fantaisiste et
irresponsable, se permettre d'intervenir dans des procès parce qu'il
croit personnellement que des témoins ne seront pas traités
équitable-ment.
M. Forget: M. le Président, question de
privilège.
M. Bédard: J'ai rarement vu une attitude aussi
irresponsable et...
M. Forget: Question de privilège, M. le
Président.
M. Bédard: Je me demande ce qu'il fait des libertés
individuelles.
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, loin de moi la suggestion que
le ministre de la Justice intervienne dans le déroulement des
procès.
M. Bédard: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre de la Justice, je m'excuse,
un à la fois, s'il vous plaît! Je vous reconnaîtrai tout de
suite après M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, contrairement aux indications
ou aux suggestions faites par le ministre de la Justice, je n'ai jamais
invité le ministre de la Justice, directement ou indirectement, à
intervenir dans des procès devant des tribunaux judiciaires. Mais il y a
une distinction essentielle entre des tribunaux judiciaires qui existent en
vertu des lois adoptées par l'Assemblée nationale et une
commission d'enquête politique qui existe en vertu d'un
arrêté en conseil.
M. Bédard: M. le Président, cette attitude ne fait
qu'illustrer l'ignorance du député de Saint-Laurent concernant le
statut d'une commission d'enquête. Je pense qu'en termes de
responsabilités il devrait savoir qu'une commission d'enquête a
également des pouvoirs judiciaires qui sont très bien
définis.
M. Forget: M. le Président...
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef
de l'Union Nationale.
Administration de la Caisse de
dépôt
M. Biron: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre des Finances et a trait à l'administration interne de la caisse
de dépôt. On sait que la caisse de dépôt est un
organisme para-gouvernemental qui aura sous gestion, bientôt, une somme
de $10 milliards, 10 000 millions. On sait aussi que le gouvernement ne peut
pas intervenir directement dans la gestion quotidienne de la caisse. Bien
sûr, le gouvernement peut intervenir moralement, faire pression sur la
direction de la caisse, mais il ne peut pas intervenir directement
actuellement.
Or, dans l'hebdo Finance que je recevais hier matin, on laisse planer
des doutes quant à la gestion interne de la caisse. On dit, en
particulier: "Le millionnaire de la caisse, M. Pierre Arbour en fut le
directeur-conseil en investissements corporatifs. Il était alors
fonctionnaire au service de l'Etat et du fonds de pension collectif des
Québécois jusqu'à deux années, environ, avant son
départ. En avril 1979, il a pris le contrôle de Pétroles
Laduboro dont la caisse était le second actionnaire en importance par un
investissement personnel de $102 000." On laisse entendre non pas qu'il y a eu
malhonnêteté, mais qu'un ex-employé de la caisse aurait pu
se servir de son poste pour retirer des bénéfices personnels.
Est-ce que le ministre des Finances est au courant de ce fait? S'il a
été informé, a-t-il fait enquête sur ce qui s'est
passé ou s'il y a eu un mécanisme quelconque par lequel le
ministre des Finances a pu faire enquête? S'il a fait enquête, quel
est le résultat de l'enquête?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Non, je n'ai pas fait d'enquête dans ce cas,
parce qu'on n'a pas porté à mon
attention qu'il y avait une raison particulière de faire une
enquête. Je suis effectivement au courant de la transaction dont il
s'agit, mais je voudrais simplement faire remarquer au chef de l'Union
Nationale ceci. C'est que M. Arbour n'est pas à la Caisse de
dépôt depuis déjà un certain temps; que, sauf
erreur, il était directeur du portefeuille d'actions pendant plusieurs
années; que, dans ces conditions, il a été en contact par
les analyses de la situation de centaines d'entreprises littéralement,
et qu'il serait difficile d'imaginer que, quand quelqu'un sort de la Caisse de
dépôt qui, encore une fois, est maintenant le plus gros
portefeuille d'actions qu'il y a au Canada, et qu'il a, à la Caisse de
dépôt, été au service des actions pendant plusieurs
années, il a manifestement des connaissances sur toute une série
d'entreprises, sur, encore une fois, des centaines d'entreprises, des
connaissances qui n'ont été accumulées de façon ni
illégale, ni cachée, ni couverte, habituellement à partir
de documents qui sont disponibles justement. Le fait que M. Arbour,
après être sorti de la caisse, après être
associé à un bureau je parle de mémoire ait
fait un investissement dans une des compagnies où la caisse a des
placements depuis un certain nombre d'années, je vous avouerai
franchement que je ne peux pas trouver là-dedans quoi que ce soit de
répréhensible à première vue, à moins
vraiment d'interdire aux anciens employés de la Caisse de
dépôt de s'occuper de quelque compagnie que ce soit.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Biron: M. le Président, on sait qu'à l'heure
actuelle, dans les milieux financiers, il y a certains bruits qui courent
relativement à des pratiques qui pourraient être contestables
d'administration de la Caisse de dépôt. Je demande au ministre des
Finances: Est-ce que lui, personnellement, est satisfait, à l'heure
actuelle, du genre d'administration ou des garanties de saine administration
qu'on a à la Caisse de dépôt, en fonction quand même
des propriétaires qui sont les citoyens du Québec, ou si le
ministre des Finances songe qu'on pourrait avoir un mécanisme quelconque
qui donnerait quand même un peu plus de droit de regard au gouvernement,
non pas sur les placements quotidiens de la Caisse de dépôt, mais
au moins sur la grande administration générale de la Caisse de
dépôt? En d'autres termes, on a fondé la Caisse de
dépôt il y a déjà une douzaine d'années ou
quatorze ans, quelque chose comme cela, et, à l'époque, on a
voulu que le gouvernement n'intervienne pas en tant que gouvernement, mais
est-ce qu'aujourd'hui, alors qu'on administre 10 milliards, on peut continuer
avec les mêmes pratiques ou si ce ne serait pas mieux d'avoir un
mécanisme de commission parlementaire ou autrement pour avoir un certain
droit de regard sur l'administration quand même quotidienne de la Caisse
de dépôt. Je demande au ministre des Finances s'il est pleinement
satisfait du genre de gestion qu'on a aujourd'hui à la caisse?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Oui, je dois dire que je suis non seulement
satisfait du fonctionnement de la Caisse de dépôt, mais comme, je
l'espère, tous les Québécois, nous sommes très
fiers de la façon que cet organisme a été
géré jusqu'à maintenant. Je n'ai pas de raison de croire
que nous ayons à modifier quoi que ce soit dans le mode de gestion de la
caisse, qui est très autonome. Je vous rappellerai qu'au moment
où la caisse a été crée, au milieu des
années soixante, on a donné à la direction de la caisse
des garanties d'autonomie qu'aucun président de société
d'Etat n'a et qui ressemblent à bien des égards aux protections
dont dispose le gouverneur de la Banque du Canada, par exemple. On a garanti
l'autonomie de la Caisse de dépôt, au fond, pour les mêmes
raisons qu'on a garanti l'autonomie de la Banque du Canada. C'est qu'il y a
là un pool d'argent tellement grand qu'il est fondamental qu'on
n'utilise pas à des fins, j'allais dire politiques, dans le sens
péjoratif du terme, les sommes qui s'y trouvent. Je pense qu'on aura
toujours un avantage considérable à ne pas tâter le pouvoir
en lui donnant, à l'égard de ces grands organismes financiers,
une solution facile pour régler des problèmes financiers que tout
gouvernement, à un moment donné, peut avoir. Je ne souhaiterais
qu'une chose à cet égard, c'est que le type d'autonomie qu'on a
donné à la Caisse de dépôt en vertu de la loi soit
maintenu et qu'on reconnaisse, peut-être plus souvent qu'on le fait, que
nous sommes en face d'un des organismes collectifs des Québécois
dont nous avons, je pense, droit d'être fiers à juste titre.
M. Biron: M. le Président.
Le Vice-Président: M. le chef de l'Union Nationale. (16 h
20)
M. Biron: Je sais que le ministre des Finances était au
tout début de la fondation de la Caisse de dépôt et
placement, mais aujourd'hui, si le gouvernement décidait de s'en servir
davantage pour le développement économique du Québec,
est-ce que le ministre des Finances continuerait à dire qu'on ne doit
rien changer à la Caisse de dépôt et placement ou si on
devrait revoir son mécanisme d'administration ou d'interférence,
même d'ingérence de la part de l'Etat et jusqu'à un certain
point s'il faut limiter? Je demande au ministre des Finances, s'il fallait s'en
servir pour le développement économique du Québec, quelle
serait sa position. Est-ce qu'elle serait encore la même qu'au
début, à la fondation de la Caisse de dépôt et
placement?
Le Vice-Président: M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: La Caisse de dépôt et placement est un
des leviers les plus importants dont nous
disposions pour le développement économique du
Québec. Il faut bien comprendre dans quoi les ressources de la caisse
sont investies. Elles sont investies dans des obligations gouvernementales, du
gouvernement de Québec. Elles sont investies dans des obligations
d'Hydro-Québec. Elles sont investies dans des obligations municipales,
de commissions scolaires, d'hôpitaux, de CEGEP. Elles sont investies en
outre dans des hypothèques au Québec, dans des constructions, des
immeubles au Québec. Par ailleurs, sur le plan des actions, là,
on ne peut pas établir une distinction aussi nette, parce qu'il y a des
compagnies qui fonctionnent dans plusieurs provinces dont le Québec,
mais la Caisse de dépôt et placement achète des actions de
sociétés canadiennes, la caisse de dépôt n'a jamais
fonctionné sur le marché de New-York.
D'autre part, justement sur le plan des actions, la caisse de
dépôt est très connue dans les milieux de petites et
moyennes entreprises pour avoir donné, sur le plan de placements
privés au niveau du capital d'équité, un coup de main
solide à des vingtaines de sociétés
québécoises. Dans ce sens, on ne peut pas dire: Si le
gouvernement de Québec, un jour, voulait s'en servir pour du
développement économique... Depuis quinze ans, la Caisse de
dépôt et placement ne fait que cela!
Le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse, une dernière question principale, très
brièvement.
M. Goulet: Avant la dernière question principale, M. le
Président, j'aimerais que vous constatiez avec moi que sur 26 ministres
il n'en reste que sept en Chambre. J'aurais une question à poser soit au
ministre d'Etat au développement économique, au ministre de
l'Industrie et du Commerce ou au premier ministre; or, ni l'un ni l'autre n'y
sont, M. le Président. Est-ce que vous pourriez, dès mardi
à moins qu'on ne sonne les cloches pour appeler les ministres
nous donner une troisième question?
Le Vice-Président: M. le député de
Bellechasse, vous pouvez poser votre question. Peut-être que la personne
à qui elle s'adresse arrivera incessamment. Je vous donne l'occasion de
poser votre question principale.
M. Goulet: M. le Président...
Le Vice-Président: Fin de la période des
questions.
M. Grenier: Avant que le dernier ministre s'en aille, j'aimerais
poser une question, si vous me le permettez.
Le Vice-Président: Fin de la période des
questions.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je voudrais indiquer à
la Chambre... Est-ce qu'on en est aux avis à la Chambre, M. le
Président?
Le Vice-Président: Motions non annoncées. M.
Charron: Je n'en ai pas.
Le Vice-Président: Enregistrement des noms sur les votes
en suspens.
Avis à la Chambre
M. Charron: Voilà. Tout le monde comprendra que l'horaire
annoncé a été forcément un peu changé pour
la journée d'aujourd'hui. L'horaire est modifié de cette
façon. Le débat sur le budget supplémentaire ne
s'entreprendra qu'à 20 heures, ce soir. Entre-temps, j'inviterai la
Chambre à prendre en considération trois rapports qui ont
déjà été déposés devant elle, soit
celui sur le projet de loi no 56 au nom du ministre des Affaires sociales,
celui sur le projet de loi no 53 au nom du ministre des Consommateurs,
Coopératives et Institutions financières et celui sur le projet
de loi no 51 au nom du ministre des Affaires culturelles. J'indique tout de
suite qu'aucun amendement n'a été annoncé jusqu'ici et il
me semble que ces débats ne sauraient accaparer tout
l'après-midi. Par la suite et jusqu'à 18 heures, nous entamerons
s'il est possible de le finir, tant mieux la deuxième
lecture du projet de loi no 60 au nom du ministre de l'Energie et des
Ressources.
Il n'y aura aucune commission parlementaire, mardi. C'est exceptionnel,
mais prenons-le pendant que ça passe. Toutefois, demain, il y aura
réunion de la commission parlementaire du travail et de la
rnain-d'oeuvre à la demande du député de Portneuf ici
même, au salon bleu, la question avec débat est adressée au
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
Pour le moment, je fais motion pour que, jusqu'à 18 heures et ce
soir, pour sa dernière séance, la commission de la
présidence du conseil se réunisse au salon rouge afin de terminer
l'étude article par article du projet de loi no 10.
M. Lavoie: M. le Président, avant de décider de
cette motion...
Le Vice-Président: M. le député de
Laval.
M. Lavoie: ... je voulais voir le ministre de la Justice,
ministre responsable de la réforme électorale. Nous avions une
entente et cette entente demeure toujours à l'effet de terminer
aujourd'hui l'étude en commission parlementaire du projet de loi no 10
sur la représentation. Maintenant, je me demande s'il n'y aurait pas
lieu, si cela ne dérangeait pas les travaux du gouvernement, qu'au lieu
que la commission siège cet après-midi et ce soir je ne
sais pas, je n'ai pas consulté le représentant de l'Union
Nationale je pense que cela ne retarderait d'aucune façon si la
commis-
sion siégeait peut-être mardi après-midi et mardi
soir, si cela ne dérangeait pas le programme du ministre. M faut prendre
en considération, M. le Président et M. le leader du
gouvernement, qu'hier après-midi, la commission n'a siégé
qu'une demi-heure à peine; on a commencé à siéger
à 17 h 30, au lieu de siéger normalement vers 16 heures, à
cause d'un débat qu'il y a eu à l'Assemblée. Cet
après-midi, à cause de certaines circonstances, la commission au
lieu de siéger vers 15 heures ne commencera ses travaux que vers 16 h
45, dans quelques minutes. Il reste quelques articles en suspens, très
peu, mais il y a une couple d'articles de fond. Je me demande s'il n'y aurait
pas moyen de faire un arrangement quelconque.
Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, j'imagine que cette question
devrait recevoir une réponse favorable, sauf que la séance de
mardi que suggère le député serait, de notre
côté, impossible du fait que le ministre de la Justice ne sera pas
présent à l'Assemblée. Il sera présent pour la
période des questions, mais il a d'autres engagements au cours de la
journée; évidemment, il a préparé son calendrier en
fonction d'une entente que nous avions établie ensemble et qui lui
assurait cette disponibilité à ce moment-ci.
Je laisserai plutôt les députés membres de la
commission, si celle-ci peut se réunir, évaluer tout à
l'heure la possibilité que, demain matin, s'il y avait entente, la
commission siège quelques heures supplémentaires je
conviens avec le député de Laval que l'horaire a
été grignoté au cours de la semaine mais je ne peux
offrir la journée de mardi. Je laisserai donc la commission en
déterminer d'elle-même et je ferai rapport à la Chambre
lorsque celle-ci aura convenu d'une entente.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion du leader du
gouvernement sera adoptée?
M. Pagé: Brièvement, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
Portneuf.
M. Pagé: II y aurait peut-être lieu, pour le leader
du gouvernement, d'indiquer que demain, suite aux discussions que j'ai eues
avec le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et à l'arrangement
qu'on a pris, qui s'inscrit dans la collaboration habituelle de l'Opposition,
la commission siégera à 9 heures, exceptionnellement.
M. Charron: Bien.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion du leader du
gouvernement sera adoptée à l'effet de faire siéger la
commission de la présidence du conseil et de la constitution?
M. Brochu: M. le Président, peut-être pour assister
à la courte présence que les ministres pourraient faire en cette
Chambre après la période des questions, nous demanderons un vote
enregistré.
Le Vice-Président: Qu'on appelle les
députés. Suspension à 16 h 29
Reprise à 16 h 35
Le Vice-Président: Je mets donc aux voix la motion du
leader du gouvernement qui a pour but de faire siéger la commission de
la présidence du conseil et de la constitution cet après-midi
jusqu'à 18 heures et, ce soir, de 20 heures à 22 heures pour
étudier article par article le projet de loi no 10. Que celles et ceux
qui sont pour cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Bédard, Laurin, Morin (Sauvé), Léonard, Couture,
Vaugeois, Clair, Gendron, Joron, de Belleval, Johnson, Chevrette, Lazure,
O'Neill, Martel, Gagnon, Marcoux, Bertrand, Fallu, Michaud, Proulx, Laberge,
Grégoire, Guay, Lefebvre, La-plante, Mme Leblanc-Bantey, MM. Bisaillon,
de Bellefeuille, Dussault, Alfred, Marquis, Ouellette, Gosselin, Brassard,
Lavigne, Mercier, Boucher, Beauséjour, Desbiens, Baril, Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), Lacoste, Ryan, Levesque (Bonaventure), Caron,
Vaillancourt (Orford), Lavoie, Lalonde, O'Gallagher, Ciaccia, Mme Lavoie-Roux,
MM. Raynauld, Lamontagne, Giasson, Rivest...
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Une Voix: II est parti au Canada.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: ... Lalonde, Mathieu, Marchand,
Gratton, Pagé, Verreault, Biron, Brochu, Grenier, Goulet, Fontaine,
Cordeau, Le Moignan, Samson.
Le Vice-Président: Ceux qui sont contre? Abstentions?
Le Secrétaire: Pour: 72 Contre: 0
Abstentions: 0
Le Vice-Président: La motion est adoptée et la
commission peut siéger.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président je m'excuse de ne pas
l'avoir donné tout à l'heure, cela peut être important pour
les députés, surtout ceux qui doivent retourner dans leur
circonscription en fin de semaine le député de Johnson
s'est informé de l'endroit exact où on peut faire des
représentations sur le projet de loi no 57 qui touche toutes
ou à peu près toutes, je crois bien, les
municipalités du Québec. Je crois que les députés
le lundi, par exemple, à leur bureau de comté
peuvent avoir des représentations en ce sens.
Le bureau que j'ai annoncé, j'en donne l'adresse exacte pour tout
le monde. Il s'agit de faire des représentations autant que possible
auprès du directeur général de l'évaluation
foncière, comme il se doit, au ministère des Affaires
municipales, M. Robert Fournier, édifice G, 27e étage,
gouvernement du Québec. Le numéro de téléphone,
puisque cela peut être utile également pour les
députés qui auront des représentations, c'est
643-8099.
Une Voix: ...
M. Charron: Non, c'est le numéro de
téléphone au bureau. Je n'ai pas son numéro de
téléphone à sa résidence, M. le Président.
Je crois que c'est un outil qui peut être important pour les
députés.
Je vous prierais d'appeler l'article 19 du feuilleton d'aujourd'hui.
M. Brochu: En vertu de l'article 34.
Le Vice-Président: Auparavant, j'aimerais demander au
leader de l'Opposition officielle quelle sera la question avec débat de
vendredi en huit.
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je me rends
avec plaisir à votre invitation en vous faisant part que la commission
permanente de l'énergie et des ressources pourrait se réunir
vendredi prochain, c'est-à-dire dans huit jours, pour la question avec
débat du député de Mont-Royal au ministre de l'Energie et
des Ressources sur le sujet suivant: la politique relative au
pétrole.
Le Vice-Président: Que tous en prennent avis. M. le leader
du gouvernement.
M. Brochu: M. le Président, en vertu de l'article 34.
Le Vice-Président: M. le leader de l'Union Nationale, en
vertu de l'article 34.
M. Brochu: Justement pour enchaîner sur l'avis que vient de
faire le leader du gouvernement concernant l'ouvertude des bureaux pour
recevoir les plaintes ou les demandes concernant le projet de loi no 57 sur la
fiscalité municipale, le gouvernement a peut-être reçu,
comme on commence à en recevoir à nos bureaux, des demandes de
plus en plus nombreuses de la part de différents groupements, entre
autres, de commissions scolaires qui demandent à être entendues
avant l'étude du projet de loi article par article. (16 h 40)
Est-ce l'intention, face à cette demande de plus en plus
répétée de la part des groupes intéressés,
du gouvernement de convoquer cette commission parlementaire pour entendre les
groupes, en particulier les commissions scolaires sur le projet de loi 57 avant
son étude article par article?
M. Charron: Non, M. le Président. Pour le moment, je m'en
tiens à la décision annoncée en début de semaine
lors du dépôt du projet de loi.
M. Brochu: En vertu de l'article 34.
Le Vice-Président: M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Le leader du gouvernement me corrigera si ce n'est pas
exact, mais je pense que c'est mardi prochain, le 27, que doit être
déposé à l'Assemblée nationale le rapport de la
Commission qui a siégé sur l'étude du projet de loi no 9,
qui traite des districts électoraux. Ce projet de loi comprenait 217
articles qui ont été à peu près tous
amendés. On est rendu maintenant à 300 articles. En vertu de
notre règlement, on aurait jusqu'à mardi soir, 22 heures, pour
déposer les amendements à ce projet de loi. Je demande ceci au
leader du gouvernement. Compte tenu du grand nombre d'amendements
apportés et des modifications presque à l'ensemble des articles,
est-ce que ce serait possible d'obtenir un délai pour les
dépôts des amendements que nous pourrions avoir à
déposer devant l'Assemblée nationale et le greffier? Est-ce qu'on
pourrait avoir un délai additionnel, quitte à ce que ce soit
jusqu'au lendemain matin, dix heures, ou quelque chose du genre, pour nous
permettre une étude intelligible de l'ensemble des amendements du
gouvernement?
M. Charron: M. le Président, je suis sensible à la
représentation que fait le leader de l'Union Nationale. Sur-le-champ, je
ne peux donner une réponse précise, mais je suis prêt
à en discuter avec lui et mon collègue de Bonaventure. Si on
trouve une entente à l'amiable, j'y conviendrai.
Le Vice-Président: Merci.
M. le leader du gouvernement.
M. Charron: L'article 19 du feuilleton, M. le
Président.
Prise en considération de rapports de
commissions élues
Projet de loi no 56
Le Vice-Président: J'appelle donc la prise en
considération du rapport de la commission permanente des affaires
sociales qui a étudié le projet de loi no 56, Loi modifiant la
Loi sur le Régime de rentes du Québec. Est-ce que ce rapport sera
adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Rapport adopté.
M. Charron: L'article 17 du feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi no 53
Le Vice-Président: J'appelle maintenant la prise en
considération du rapport de la commission permanente des consommateurs,
coopératives et institutions financières qui a
étudié le projet de loi no 53, Loi sur les corporations de fonds
de sécurité. Est-ce que ce rapport sera adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Rapport adopté.
M. Charron: L'article 18, M. le Président.
Projet de loi no 51
Le Vice-Président: J'appelle la prise en
considération du rapport de la commission permanente des affaires
cultuelles qui a étudié le projet de loi no 51, Loi sur le
développement des entreprises québécoises dans le domaine
du livre. Est-ce que ce rapport sera adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Rapport adopté. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Aussi rapidement, M. le Président, l'article
8, s'il vous plaît.
Projet de loi no 60 Deuxième lecture
Le Vice-Président: J'appelle maintenant la deuxième
lecture du projet de loi no 60, Loi modifiant la Loi concernant les droits sur
les mines et je cède la parole au ministre de l'Energie et des
Ressources.
M. le ministre.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: M. le Président, le
présent projet de loi est dans la continuité d'un ensemble de
mesures que le gouvernement du Québec a prises depuis 1977 pour tenter
de redresser la situation un peu désastreuse de notre industrie
minière au Québec. Je pense plus particulièrement à
celle du cuivre et du zinc parce que, dans le domaine du fer, la situation
s'est notablement améliorée. Elle est même très
saine présentement. Dans le secteur de l'amiante, tout le monde sait que
ces compagnies font des profits que l'on peut peut-être qualifier
d'exagérés mais, à tout le moins, qu'on peut certainement
qualifier de généreux.
Donc, c'est dans ce secteur du cuivre et du zinc que le Québec
rencontre un certain nombre de difficultés. De là cette
proposition qui est présentée ici dans le projet de loi 60 et qui
a essentiellement comme objectif d'obtenir trois résultats. Le premier
résultat est de s'arrêter et de regarder comment est
structurée notre industrie minière du cuivre et du zinc, quel
genre de mines nous avons et quelles mesures peut-on prendre pour faire en
sorte qu'elle trouve de nouvelles réserves de minerai et donc, puisse se
développer ou, au moins, continuer à produire. Tout le monde sait
qu'on est très content de découvrir une mine, mais il faut quand
même reconnaître qu'une mine, pour vivre, doit s'épuiser. Il
n'y a pas d'autres façons, on doit donc extraire continuellement le
minerai et, après un certain nombre d'années, cette mine doit
forcément fermer. Donc, première réflexion: Comment
peut-on encourager les petites mines à découvrir du nouveau
minerai? C'est le point sur lequel j'insisterai au cours de mon
exposé.
Avant d'aborder ce point de vue, j'aimerais prendre au moins le temps
pour voir la situation de notre industrie, particulièrement dans le
Nord-Ouest. En fait, on a parfois l'impression que le Québec est un pays
riche en ressources naturelles et que grâce à ces richesses
naturelles, nous serons en mesure de vivre éternellement
prospères. On oublie malheureusement que l'importance de notre industrie
minière au Québec n'a fait que décroître depuis 1965
et que, en pratique, cette industrie minière supporte une industrie
secondaire de moins en moins intéressante. Je m'explique.
Présentement, 10% du cuivre produit au Canada viennent du
Québec; c'est intéressant. Lorsqu'on regarde quel est le
pourcentage des réserves que nous avons sous terre, identifiées,
pour soutenir l'activité minière, on s'aperçoit que c'est
à peine 5,3%. Donc, nous exploitons nos mines plus rapidement que nous
ne trouvons du minerai pour remplacer celui que nous avons exploité, et
on voit immédiatement le danger poindre à l'horizon. Cela veut
dire des mines qui vont fermer, cela veut dire qu'il n'y aura pas de nouvelles
mines pour prendre la relève, donc une diminution de la production
minière québécoise et, évidemment, une
réduction des approvisionnements dans notre industrie de transformation.
C'est dangereux de continuer dans cette voie parce que nous avons, au
Québec, près de 65% ou 70% de toute l'industrie de transformation
métallurgique du cuivre au Canada, deux "smelters", nous avons les
affineries électrolytiques de Montréal, dans le cuivre et dans le
zinc. En d'autres termes, nous avons une industrie de transformation
très sophistiquée au Québec qui aurait besoin d'environ
440 000 tonnes de cuivre par année alors que nous n'en produisons
à peu près que 150 000 tonnes. Donc, nous,
Québécois, ne produisons pas suffisamment de matières
premières pour approvisionner ces usines et on se rend bien compte que
c'est toute notre industrie manufacturière associée à la
métallurgie qui est menacée par la fermeture de nos mines.
Premier phénomène, le niveau d'exploitation de nos mines
est trop élevé par rapport à notre effort d'exploration,
nous ne trouvons pas assez de gisements. Deuxièmement, pour le zinc, le
problème est le même. Il faut maintenant examiner la situation
d'une ville comme celle de Rouyn-Noran-
da qui est au centre de nos préoccupations. En fait, le "smelter"
de Noranda reçoit en approvisionnements environ 980 000 tonnes. Mais
comme je l'expliquais tantôt, il ne le reçoit pas de mines
québécoises. En fait, il reçoit en particulier tout
près de 400 000 tonnes d'une mine située en Ontario qui s'appelle
la société Texasgulf & Sulphur. Donc, il y a 400 000 des 980
000 tonnes qui vont à Noranda qui viennent de la société
Texasgulf. Quelle est cette société Texasgulf? C'est une
société minière à l'origine américaine et
dont le gouvernement canadien a repris le contrôle par le biais de la
Canadian Development Corporation qui en contrôle environ 33%. C'est une
immense société qui possède tout près de $1 400 000
000 d'actifs.
Cette société nous expédiait du concentré de
cuivre, ce qui nous permettait de faire fonctionner l'usine de Rouyn-Noranda,
en bonne partie. Cependant, l'Ontario qui, comme vous le savez, a toujours eu
à coeur l'intérêt du Canada, le partage des richesses
naturelles, devait trouver que ces concentrés qui quittaient l'Ontario,
finalement, appauvrissaient l'Ontario et qu'il aurait été
intéressant de le transformer en Ontario, sauf que la
société Texasgulf disait: Ce volume de 400 000 tonnes est
insuffisant pour justifier la construction d'un "smelter" chez nous. Donc, nous
n'en construisons pas. Le gouvernement ontarien devait se préoccuper
sérieusement des moyens pour amener cette compagnie à comprendre
le bon sens. Ils ont trouvé un moyen. (16 h 50)
Le moyen trouvé par l'Ontario est très simple. Toute
compagnie minière paie une taxe spéciale qui s'appelle les droits
miniers sur ses profits. On devrait donc augmenter cette taxe à 40%, le
taux marginal de taxation lorsque les profits sont de $20 millions et plus.
C'est une taxe très élevée parce que, notons-le,
l'entreprise paie déjà 45% de taxation au point de vue de
l'impôt corporatif. Cela veut donc dire que l'impôt payé
monte à 85%. Pour chaque dollar de profit d'une compagnie minière
géante en Ontario, $0.85 vont dans les coffres des gouvernements. C'est
très élevé. C'est tellement élevé même
que l'entreprise cesse totalement d'être rentable. Mais on ne veut quand
même pas faire faire faillite aux compagnies minières
on-tariennes. Il y en a deux dans cette situation; essentiellement, la
société Inco et la société Texasgulf qui sont
toutes deux situées au nord de l'Ontario.
Or, on sait que les provinces n'ont pas le droit de taxer ailleurs
qu'aux puits. En d'autres termes, les droits miniers que nous percevons, parce
que nous sommes propriétaires des richesses naturelles, nous avons droit
de les prélever lorsque le minerai sort de la mine. Nous n'avons pas le
droit de taxer de façon particulière les profits d'une autre
façon que par l'impôt corporatif. Donc, si l'on veut taxer le
profit aux puits, il nous faut donc soustraire la part de profit qui est
associée au raffinage, à la concentration, opération
simple pratiquée par tous les gouvernements provinciaux.
Pour compenser pour le fardeau fiscal très élevé
que l'Ontario impose à ses grandes compa- gnies minières, on
introduit une allocation de traitement qui, en fait, s'élève
à tout près de 30% pour le nord de l'Ontario, ce qui se compare
avec 15% au Québec. Le raisonnement que fait l'Ontario est le suivant:
le coût de la vie est tellement élevé dans le nord de
l'Ontario que, en pratique, il faut investir davantage pour produire du minerai
dans le nord de l'Ontario. Il faut donc donner une allocation de traitement
plus élevée.
Evidemment, si vous taxez très fortement les profits, mais que
vous donnez une allocation très élevée de traitement, vous
ramenez la compagnie sur la même base qu'antérieurement. Elle ne
paie donc pas plus d'impôt qu'avant. Oh, mais attention! Si vous
réalisez cette opération et que cette compagnie persiste à
vouloir son minerai au Québec, elle n'a plus droit à
l'allocation. N'ayant plus droit à l'allocation, c'est
littéralement la faillite. On crée donc des conditions
financières telles que l'entreprise a dû s'engager dans la
construction d'un "smelter".
Voilà comment ce partage généreux des richesses de
l'Ontario s'est fait, évidemment, au détriment de Rouyn-Noranda.
Quand il s'agit de partager le pétrole de l'Alberta, soyons
généreux mes frères, achetons-le à moitié
prix et pensons au développement économique du Canada. Je parle
au nom de l'Ontario. Mais, lorsqu'il s'agit de partager nos concentrés
de cuivre, il est préférable de les transformer en Ontario,
quitte même à imposer une surcharge fiscale qui pourrait
être anticonstitutionnelle. On pourrait se demander pourquoi la
société Noranda n'a pas protesté. La société
Noranda a déjà des mines en Ontario. Elle était dans une
situation un peu délicate. Elle n'a donc pas jugé bon de
poursuivre le gouvernement ontarien.
La société Texasgulf aurait pu poursuivre; elle aussi se
voyait lésée. Mais, cependant, elle est contrôlée
par le gouvernement fédéral et, pour des raisons que nous
ignorons, elle choisit de ne pas le faire.
Quant au gouvernement Bourassa, motus. Les analyses des fonctionnaires
à l'époque sont très explicites; on peut les retrouver en
grand nombre dans tous les classeurs du gouvernement: cette décision de
l'Ontario et du gouvernement fédéral va entraîner à
plus ou moins brève échéance la fermeture du concentrateur
de Noranda, pas avant les années 1982 ou 1983, parce que d'ici là
il faudra construire le "smelter", mais après.
Donc, premier problème, nous voyons Noranda privée d'un
approvisionnement en concentré de cuivre qui, lui, vient de Texasgulf et
cela avec l'appui tacite du gouvernement fédéral, avec, non
seulement la bénédiction, mais l'intervention fort active du
gouvernement de l'Ontario et avec, évidemment, l'appui, au moins par son
silence, du gouvernement Bourassa. Cela se comprend, le gouvernement Bourassa
voulant faire la preuve que le fédéralisme est rentable n'est
certainement pas pour faire la démonstration que nous nous faisons
avoir. C'est bien évident que non.
Alors, on camoufle absolument toutes les études. Avez-vous vu,
sous le régime Bourassa, des chiffres concernant les dépenses
créatrices d'emploi au Québec? Non, pas du tout. On n'est
certai-
nement pas pour les rendre publics. A-t-on vu, par exemple, des analyses
sur les subventions du MEER au Québec? Evidemment non, parce qu'on sait
à nouveau qu'on est défavorisé. Toutes ces études,
on les cache. D'ailleurs, l'ancien gouvernement libéral a fait faire des
études à la hâte je parle du gouvernement d'Ottawa
à l'arrivée au pouvoir du Parti québécois au
Québec, en se disant: On va faire la preuve que le
fédéralisme est rentable. Nous apprenions récemment, par
le biais du ministre Jarvis, que le gouvernement a préféré
enterrer ces études, les mettre sur les tablettes. Il a
préféré les enterrer parce que, malheureusement, cela
confirmait tout ce que nous disions depuis des siècles.
C'est le problème lorsqu'on se retrouve avec des gouvernements
dits fédéralistes au Québec, qui n'ont d'autre objectif
que de faire la démonstration que le système est bon, même
si nous nous faisons rouler au cours de l'opération. La
conséquence de ça... C'est assez amusant parce que j'entends
souvent le député de Rouyn-Noranda manifester chaleureusement son
fédéralisme; il n'a jamais expliqué à ses
électeurs de Rouyn-Noranda que c'est grâce à son action
fédéraliste qu'il est en train de se faire "fourrer".
Je vais vous donner quelques chiffres, M. le Président, je suis
convaincu que cela va vous intéresser. Voici quelques chiffres sur
l'importance, pour la région de Noranda, de l'exploitation de la
minière Noranda. Sur une population totale de 38 000 habitants, à
Rouyn-Noranda, il y a 15 600 travailleurs, 2800 chômeurs, 18% de taux de
chômage. La fonderie de Rouyn-Noranda emploie à elle seule 1200
travailleurs. Si on ajoute les emplois indirects, on retrouve un chiffre entre
3000 et 4000. Si le "smelter" de Noranda ferme, c'est un taux de chômage
de 40% qu'on aura directement à Rouyn-Noranda, mais ce n'est pas tout
parce que nos compagnies minières, qui présentement ont
l'avantage d'avoir un "smelter" à proximité, doivent maintenant
exporter leurs concentrés; devant faire cela, la conséquence
inévitable est que les coûts de production montent. Comme nos
gisements sont plus petits et marginalement rentables, un bon nombre de nos
mines deviennent non rentables. C'est un impact catastrophique sur
l'économie de tout le Nord-Ouest québécois. Et notre
distingué collègue du Parti présidentiel, qui siège
à nos côtés à l'Assemblée...
Une Voix: Démocrate.
M. Bérubé: Démocrate? Je m'excuse, mais on
n'arrive pas à suivre les noms de ces partis. Ce distingué
collègue du Parti démocrate de Rouyn-Noranda, qui fait face
à une décision désastreuse pour l'économie de sa
région, n'en parle jamais à ses concitoyens. Il n'en parle jamais
parce qu'il faut bien qu'il démontre que, pour lui, le
fédéralisme est rentable. A ce moment-là, on
préfère taire cela. Les gens de Rouyn-Noranda vont
tranquillement, la paix dans l'âme, sans se douter que l'action
fédérale, l'action ontarienne va provoquer un effondrement chez
eux.
Le gouvernement du Québec, lui, n'a pas d'autre choix que de
tenter de corriger la situation. Comment pouvait-on tenter de corriger la
situation dans ce territoire, là-bas? D'abord, il fallait augmenter le
niveau d'exploration. Nous avons demandé à nos
sociétés d'Etat de faire un effort particulier. Par exemple, en
1975, le gouvernement a dû investir environ $7 millions en exploration au
Québec. En 1978, c'était $22 747 000. C'est
énormément plus. Compte tenu des contraintes budgétaires
qu'on connaît à Québec, on se rend compte de l'effort
considérable que nous avons consenti. C'est la seule solution. (17
heures)
Nous avons demandé à nos sociétés d'Etat de
faire un effort. Peut-être que la société Texasgulf, qui a
des actifs de $1 400 000 000, aurait pu faire un effort. On me dit qu'elle
investit beaucoup au Québec: $30 000, essentiellement. C'est l'effort
magistral de la société Texasgulf pour corriger l'impact
négatif de ses politiques.
Cela se compare avec SOQUEM qui investit environ $7 millions. SOQUEM,
une petite société à nous autres, Québécois,
qui vaut à peu près $100 millions d'actifs, investit $7 millions
en exploration chez nous. Texasgulf and Sulphur, qui nous appartient puisque
nous sommes Canadiens, investit $30 000 au Québec, $1 400 000 000
d'actifs. C'est cela, deux poids, deux mesures. C'est le
fédéralisme rentable. Mais ce n'est évidemment pas le
député de Rouyn-Noranda qui va le souligner. C'est le genre
d'information dont ses électeurs auraient besoin pour prendre une
position au moment du référendum, mais il n'en parlera pas, c'est
bien évident.
Donc, il fallait augmenter l'effort d'exploration de l'Etat. Egalement,
il fallait tenter de stimuler l'émergence de nouvelles entreprises
d'exploration au Québec. Pour cela, il fallait réduire le risque.
C'est pour cette raison que, comme gouvernement, on a investi
énormément dans l'exploration géophysique,
géochimique, les cartes de synthèse, pour faire en sorte que le
Québec soit tellement bien connu sur le plan géologique que le
risque de faire de l'exploitation diminue et, par conséquent, qu'il y
ait plus d'investissements en exploration.
Donc, réduire le risque en augmentant la quantité
d'information disponible. Parce que moins on connaît le territoire, plus
on prend des chances lorsqu'on investit de l'argent pour de l'exploration. Si,
au contraire, la géologie est parfaitement bien connue, on saura
à l'avance qu'il y a des endroits où cela ne vaut pas la peine
d'aller; on se concentrera là où cela vaut la peine et il y a
beaucoup plus de chance de découvrir. Pour la même quantité
d'argent investi, on trouve proportionnellement plus de minerai. Si on trouve
plus de minerai, c'est plus intéressant d'explorer, il y a donc plus de
chances d'avoir des investisseurs. Voilà le raisonnement que nous avons
fait. C'est donc une réduction du risque.
Egalement, un partage du risque en mettant sur pied un fonds de
développement minier, ce qui nous permet de défrayer à peu
près la moitié des
dépenses d'exploration et des compagnies et des prospecteurs qui
s'offrent à nous.
Egalement, on s'est aperçu que beaucoup de notre argent, au
Québec, s'en allait en Alberta, s'en allait dans la mer de Beaufort,
cette magnifique mer de l'Arctique, au bout du delta du Mackenzie, parce qu'il
existe, en Alberta, ce que nous appelons des sociétés en
commandite. Ce sont des prospecteurs qui ont des propriétés
intéressantes, qui les mettent dans une société; ils
convainquent une dizaine d'hommes d'affaires, médecins ou autres, de
mettre un peu d'argent là-dedans. On crée une
société, on effectue des travaux d'exploration et, si on trouve,
tant mieux, si on ne trouve pas, on défait la société et
on recommence.
Pour encourager l'exploration, le gouvernement consent des avantages
fiscaux importants. C'est important de le souligner à l'intention des
Québécois. Tout citoyen qui prend $1 sur son salaire et qui
l'investit dans une société en commandite, peut déduire ce
$1 de son revenu. Par conséquent, le gouvernement lui rembourse,
littéralement parlant, l'impôt qu'il aurait payé dessus.
Alors, un citoyen qui paie 50% d'impôt sur $1 pourra dire que sur chaque
dollar d'exploration qu'il aura investi, le gouvernement lui en remboursera la
moitié. C'est une façon de stimuler l'investissement et d'amener
les citoyens à risquer dans le domaine de l'exploration
minière.
Or, beaucoup de Québécois investissent présentement
en Alberta, parce que les règles de formation des sociétés
en commandite sont beaucoup plus souples, beaucoup plus flexibles, et
permettent la constitution rapide de ces sociétés, la
désagrégation, l'addition de propriétés. C'est ce
qui explique pourquoi nous avons présenté un projet de loi, pour
modifier le Code civil et favoriser la création de telles
sociétés au Québec. C'est donc possible depuis maintenant
quelques mois puisque nous avons adopté cette loi lors de la
dernière session.
Cependant, d'après notre analyse, c'est encore insuffisant. Il
faut aller plus loin et nous irons plus loin. En fait, nous avons
constaté qu'au Québec, notre richesse dans le domaine du cuivre
et du zinc reposait dans de petites mines qui, parfois, ont une
longévité surprenante. Prenez une mine comme Sigma que l'on a
développée en pensant qu'elle aurait une vie de cinq ans; trente
ans plus tard, elle fonctionne toujours, à profit.
Notre géologie est à ce point compliquée que, d'une
façon générale, on trouve une petite mine, on fore une
galerie, on commence à exploiter et là, pour voir simplement, on
fore un trou pour sonder dans une direction et surprise! on
trouve une nouvelle veine. Nos mines se développent petit à petit
à partir des galeries existantes. C'est donc important pour nous, ces
petites mines. Il faut trouver un moyen de les rendre peut-être un peu
plus rentables de manière qu'il s'en développe davantage et en
développant davantage, on a des chances de développer de beaux
gisements au Québec.
Nous constatons également et c'est ce que je viens de dire
que 65% de tout le nouveau minerai découvert au Québec ne
vient pas de nouvelles mines découvertes à partir de sondages en
surface, mais bien de nouveaux minerais découverts en faisant des
forages à partir des mines existantes. Donc, si on veut augmenter nos
réserves de minerai de manière que la société
Noranda n'ait pas à fermer son "smelter" de Rouyn-Noranda, il ne faut
pas se contenter de placoter comme l'a fait le député de
Rouyn-Noranda. Il faut prendre les moyens. On cherche ce qu'on pourrait faire.
Une des façons d'y arriver, c'est de se dire: Nous avons des avantages
particuliers pour toute entreprise qui fait de l'exploration au Québec.
Je m'explique. Si vous êtes une compagnie et que vous faites de
l'exploitation minière, vous déduisez de vos dépenses
chaque dollar que vous dépensez en exploration. Le gouvernement vous en
rembourse environ 50%, mais ce n'est pas tout. On peut, pour chaque dollar
d'exploration, ajouter $0.33 de déduction. Evidemment, cette
déduction amène une réduction de l'impôt qui est
plus intéressante encore. C'est une incitation à l'exploration
que nous appelons hors chantier, c'est-à-dire que toute entreprise qui
fait un trou de forage qui lui coûte $1, si elle payait un taux marginal
de taxation de 65% ce qui est tout à fait possible au
Québec le gouvernement, normalement, lui rembourserait $0.65.
Elle paierait $0.35. Chaque dollar d'exploration lui coûterait $0.35.
C'est intéressant mais normal.
Nous ajoutons maintenant pour l'exploration hors chantier je dois
dire qu'elle existe déjà une allocation supérieure
de 33%, ce qui veut dire que pour chaque dollar d'exploration, il en
coûtera maintenant $0.29 à l'entreprise pour faire ce dollar
d'exploration. Donc, c'est une déduction supplémentaire que la
compagnie peut effectuer. Cependant, cette allocation d'exploration qui existe
depuis un bon nombre d'années depuis au moins une quinzaine
d'années à ma connaissance au Québec, qui existe
dans l'ensemble des provinces canadiennes, qui vise à
accélérer les recherches en exploration et à inciter les
compagnies, au lieu de garder les profits qu'elles ont faits, à les
réinvestir dans le développement du potentiel minéral,
cette politique existe depuis longtemps. Mais comme nous constatons, au
Québec, que c'est à l'intérieur des mines que l'on trouve
le plus de nouvelles réserves, nous nous disons: Pourquoi ne pas donner
la même incitation à l'industrie pour faire de l'exploration,
mais, cette fois-ci, en chantier, c'est-à-dire sous terre. Donc, le
premier élément du projet de loi a comme objectif de permettre
aux compagnies minières non seulement de pouvoir déduire leurs
dépenses d'exploration en surface, mais également leurs
dépenses d'exploration en profondeur en jouissant exactement des
mêmes avantages fiscaux que pour la fin des explorations en chantier. La
conséquence, évidemment, ce sera de stimuler le genre
d'exploration qui pour nous au Québec est excessivement important,
c'est-à-dire le développement de réserves là
où nous avons plus de chances d'en trouver.
Le deuxième élément de ce projet de loi, M. le
Président, est un élément d'aide à la très
petite
industrie. En effet, nous avons un grand nombre de tout petits
gisements. Ces petits gisements sont évidemment plus coûteux
d'exploitation parce que, forcément, vous avez peu de volume, vous
n'avez pas d'économie d'échelle, il vous faut encore beaucoup de
main-d'oeuvre pour faire les mêmes opérations, sauf que les
opérations se font sur un petit volume de minerai. (17 h 10)
C'est pour cette raison que, pour faciliter le développement de
ces mines, nous proposons, en fait, d'augmenter l'exemption qui n'avait pas
bougé depuis un certain nombre d'années. En effet, les premiers
$150 000 de profits d'une toute petite mine ne sont pas taxés. Comme ce
montant n'avait pas été modifié depuis quelques
années depuis quatre ans, je crois nous avons pensé
que nous pourrions l'accroître à $250 000, donc de maintenir cet
avantage que nos petites mines avaient dans le passé.
Le troisième élément de ce projet de loi, c'est un
élément d'étalement des pertes. En effet, on sait
on l'a connu il y a maintenant trois ans que le prix du cuivre est
cyclique, qu'il est tantôt très élevé comme
présentement ou à la baisse, complètement effondré
comme il y a deux ans et demi. La conséquence, c'est qu'il faut faire en
sorte que les profits que l'on réalise durant les bonnes années
servent à éponger les déficits des années
mauvaises. Cependant, nous avons constaté que les mauvaises
périodes étaient souvent assez longues, de plus de deux ans, et
qu'il se trouvait des pertes subies trois années antérieurement
que l'on ne pouvait plus éponger à l'aide des profits puisque la
loi ne permettait que de prendre la moyenne de deux ans. Nous avons donc
pensé, à la lumière des cycles économiques
observables, de permettre à l'industrie de regrouper ensemble quatre
années budgétaires, de manière à faire la moyenne
des profits et pertes et à ne payer de l'impôt que sur le profit
net moyen de la période en question. Ceci va permettre à
l'entreprise d'éponger plus facilement ses pertes à partir des
profits qu'elle pourrait générer dans les périodes de
bonne conjoncture.
C'est donc le sens du présent projet de loi, M. le
Président, et je termine là-dessus. C'est un projet de loi qui a
comme objectif essentiellement de stimuler le développement de petites
mines au Québec par le biais de l'exploration souterraine, en favorisant
la rentabilité des plus petites entreprises, donc en leur donnant une
exemption d'impôt pour les premiers $250 000 de profits, et
également en reconnaissant que ce type d'industries, ces petites mines
de cuivre et de zinc, sont soumises à des variations continuelles des
prix et qu'il serait plus juste, plus équitable de faire en sorte
qu'elles puissent étaler les profits et les pertes sur une plus longue
période de manière à calculer l'impôt.
C'est le sens du présent projet de loi. C'est un projet de loi
qui va dans le sens de la petite entreprise québécoise, dans le
sens du développement d'un entrepreneurship québécois,
dans le sens d'un rétablissement de la situation minière dans le
Nord-Ouest québécois.
Je dois dire, M. le Président, cependant, que je ne suis pas
certain que cela soit suffisant. Nous surveillons continuellement la situation
dans le domaine minier au Québec. Evidemment, je pourrais toujours
procéder à une séance de péta-ge de bretelles et
dire: Alors que le Québec était dans une position dramatique en
1974, 1975 et 1976 en ce qui a trait à l'exploration minière,
depuis l'arrivée du gouvernement actuel et l'implantation de nos
politiques, aujourd'hui le Québec a le championnat, par exemple, pour
l'importance du forage pour la recherche de nouveaux gisements dans les
métaux de toutes les provinces canadiennes. Je pourrais souligner que,
au Québec, l'effort de l'entreprise privée en exploration s'est
non seulement maintenu, mais accentué. Mais je devrai vous dire,
malheureusement, M. le Président, que c'est encore largement
insuffisant. En effet, nous estimons que, pour maintenir simplement le niveau
d'activités minières actuel, il nous faudrait au moins $70
millions d'investissement en recherches minières. L'industrie en
dépense à peu près $32 millions à $35 millions.
Nous croyons que cette part doit doubler. Nous sommes prêts comme
gouvernement nous l'avons montré en portant notre part de $7
millions à $22 millions à tendre vers une autosuffisance
dans le domaine de nos minerais au Québec.
Vous vous rendrez compte qu'en ajoutant les $35 millions de l'entreprise
privée aux $22 millions du gouvernement, nous nous approchons
très rapidement de ces $60 millions à $70 millions qu'il nous
faut générer. Mais nous entendons parfois les
représentants de l'entreprise privée se plaindre que le
gouvernement intervient trop, que le gouvernement est en train de saper toute
l'initiative de l'entreprise privée en intervenant trop massivement. M.
le Président, je suis prêt à leur laisser la place.
Je suis prêt à les inciter à faire leur part et si,
d'ici un an, l'entreprise privée investit non plus $35 millions mais $70
millions en exploration au Québec, nous pourrons, à ce
moment-là, dire: Le gouvernement avait raison de faire confiance
à l'entreprise privée. Mais, si l'entreprise privée
continue à ne même pas fournir la moitié de l'effort qui
est nécessaire pour maintenir ses mines en existence, à ce
moment-là, il sera temps, très sérieusement, d'envisager
des mesures beaucoup plus radicales. Cela pourra signifier une intervention
gouvernementale beaucoup plus massive, l'élimination de tous les
avantages fiscaux consentis à l'industrie minière et la reprise
en main par les Québécois en investissant directement
eux-mêmes. C'est à l'entreprise privée de relever le
défi. J'espère qu'avec ces différentes mesures que nous
avons adoptées, nous verrons graduellement une expansion majeure de
l'exploration de l'entreprise privée au Québec et, dans ces
conditions, nous serons au moins en mesure de dire: L'entreprise privée
prend les moyens pour maintenir son rythme d'activités actuel au
Québec. C'est l'objectif du gouvernement. Merci, M. le
Président.
Le Président suppléant (M. Lacoste): M. le
député de Mont-Royal.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le projet de loi que
nous étudions maintenant s'imposait. Il était absolument
nécessaire d'apporter des mesures fiscales pour inciter et pour aider
les petites mines dans le Nord-Ouest du Québec. Jusqu'à
maintenant, ces petites mines étaient défavorisées par les
lois fiscales existantes et le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui,
nous allons l'appuyer parce qu'il va venir aider l'exploration, le
développement, la mise en oeuvre de ces petites mines.
Comme on l'a mentionné tantôt, il y a des cycles dans
l'industrie minière, il y a des hauts et des bas. Alors, il faut
prévoir qu'au moment où on est au creux de la vague, ces
sociétés puissent se créer des réserves pour
pouvoir continuer leur exploration. C'est pour cette raison que nous appuyons
ce projet de loi, parce qu'il permettra la déduction de certains frais
d'exploration et de mise en oeuvre, l'exemption d'être augmenté de
$150 000 à $250 000 qui est un montant assez considérable pour
ces petites mines et il étalera sur une période de quatre ans la
possibilité de pouvoir récupérer les pertes.
M. le Président, il faut réaliser que cela fait quelques
années qu'il y a des représentations qui sont faites
auprès du gouvernement actuel pour mettre en oeuvre non seulement ce
projet de loi-ci, mais pour prendre les mesures nécessaires pour venir
en aide à ces petites mines. Je ne comprends pas parfois les
contradictions du ministre. C'est bien beau d'essayer de mettre tout sur le dos
du fédéral. "Tout est la faute du fédéral." On
blâme l'Ontario, on blâme le gouvernement fédéral
pour la situation qui existe ou la possibilité d'une pénurie de
cuivre à Rouyn-Noranda. Mais, c'est cette même politique... Il
critique le gouvernement de l'Ontario de vouloir manufacturer les produits en
Ontario plutôt que de les exporter dans d'autres provinces. C'est la
même politique que le gouvernement du Québec et il critique. Par
exemple, dans l'industrie de l'amiante, il dit: II n'y a pas assez
d'utilisation de ce produit primaire au Québec, alors nous allons vous
exproprier. (17 h 20)
Je ne crois pas que le ministre soit vraiment en mesure de critiquer
cette politique quand lui-même en vient à en mettre en oeuvre. Je
pourrais dire que ce n'est pas en poursuivant ces objectifs
d'indépendance qu'on va réduire cette possibilité ou qu'on
va enlever à l'Ontario sa politique de vouloir manufacturer, de vouloir
utiliser des produits primaires en Ontario, même que ça va
empirer. Maintenant, il y a des mesures que nous pouvons prendre pour nous
assurer, dans certains endroits, qu'on pourra faire des représentations,
créer des pressions pour que cette politique soit
équilibrée. Je crois, premièrement, qu'on ne peut pas
critiquer un autre gouvernement pour les politiques que nous-mêmes
poursuivons.
Deuxièmement peut-être que c'est une critique qu'on
peut faire à d'autres on pense trop strictement à nos
intérêts sans penser à l'ensemble de la population et
peut-être qu'avec une opti- que différente, on pourrait en venir
à d'autres mesures. Pour cette raison, nous appuyons une mesure telle
que le projet de loi no 60, parce que c'est une mesure concrète qui
vient à l'aide de ces petites mines pour leur permettre de faire de
l'exploration plutôt que de fermer. C'est le risque qu'elles courent,
plusieurs de ces mines pourraient fermer. Avec ces mesures incitatrices, elles
pourront continuer leur développement.
Une autre critique que le ministre a faite. Il reproche aux
Québécois d'envoyer leur argent en Alberta, dans l'île de
Beaufort. Quand on a suggéré au ministre d'adopter une politique
sur le pétrole, de ne pas aller au prix mondial, le ministre s'est
contredit encore une fois, il veut envoyer encore plus d'argent
québécois en Alberta. Alors, qu'il se branche, soit qu'il soit
consistant dans son approche et qu'il dise: Voici la situation, ou qu'il ne
fasse pas le reproche à d'autres provinces, au Parti libéral ou
à ceux qui suggèrent que ce n'est peut-être pas
nécessaire d'aller au prix mondial, parce que c'est un prix qui est
contrôlé artificiellement par un cartel et il devrait
peut-être penser à l'ensemble des intérêts des
Québécois. Nous l'avons signalé, nous avons
déjà reçu, en bénéfices, $5 200 000 000, on
ne peut pas faire fi de ce montant, et on recevra encore d'autres
bénéfices de ce produit qui sera utilisé au profit de tous
les Canadiens.
Je crois, M. le Président, que quand le ministre vient dans cette
Chambre déposer des projets de loi comme le projet de loi no 60, il
crée une situation qui peut inciter l'industrie à
réinvestir dans le développement économique, la recherche,
l'exploration, la mise en matière de produits; alors, nous pouvons
l'appuyer. Mais quand il cherche à mettre sur le dos du
fédéral ou sur le dos d'autres provinces tous les maux qui
existent au Québec, je crois qu'il va un peu loin, et même sa
solution n'est pas une solution, parce que s'il poursuit son objectif
d'indépendance, ça ne changera pas le fait que le pétrole
se trouve en Alberta, qu'il faudra l'acheter... mieux se fier aux politiques
fédérales, essayer de travailler dans le cadre de ces politiques,
essayer de les modifier au bénéfice du Québec. Nous avons
réussi jusqu'à maintenant dans certaines mesures et
peut-être que, avec une bonne volonté, nous pourrons encore
réussir pour d'autres.
Nous appuyons le projet de loi, M. le Président, mais il y a
certainement quelques questions que nous pouvons poser au ministre quant aux
modalités, et peut-être y apporterons-nous certaines modifications
pour essayer de bonifier le projet de loi en commission parlementaire. Je
pourrais demander au ministre qui pourrait répondre dans sa
réplique pourquoi, dans son projet de loi, nous n'avons pas une
définition de frais d'exploration et de mise en valeur. Dans le projet
de loi original qui est modifié par ce projet de loi-ci, une
définition de frais d'exploration est incluse. La façon dont le
présent projet de loi est rédigé laisse une
ambiguïté, cela laisse tout à la décision du
gouvernement, parce qu'il n'y a pas de définition de frais d'exploration
minier et de mise en valeur.
Dès que cela devient frais d'exploration, l'exemption ne
s'appliquerait pas. Il devient important pour une société de
savoir quel montant elle pourrait déduire, quel montant pourrait lui
être exempté pour être en mesure d'être plus certaine
dans ses opérations, plutôt que de la laisser dans
l'ambiguïté et de laisser cela encore à la discrétion
du gouvernement. Le ministre pourrait peut-être aussi nous
répondre, nous dire les montants qui sont impliqués en allant de
$150 000 à $250 000 d'exemption, ce que cela va impliquer pour le
Trésor québécois, quels sont les montants et est-ce qu'il
a les chiffres. Il pourrait nous soumettre ce qu'il s'attend d'avoir de cet
investissement. Evidemment, il va y avoir moins de revenu, et je pense que ce
serait bon d'informer-la Chambre du coût exact de ce projet de loi et des
mesures qui y sont incluses.
Le ministre a fait état des sommes qui sont investies dans ce
domaine par l'Etat et des sommes qui sont investies par l'entreprise
privée. Il nous a dit que les sommes de l'entreprise privée
n'étaient pas suffisantes pour rencontrer les besoins de l'industrie
dans l'exploration. Il nous a dit qu'on aurait besoin de $70 millions par
année et jusqu'à maintenant, presque ou un peu moins de la
moitié de ce montant est investi. Nous aurions certaines recommandations
à faire et l'approche que nous prendrions serait peut-être un peu
différente de cette du ministre. Effectivement, il y a eu des
suggestions qui ont été faites, des représentations qui
ont été faites au gouvernement pour suggérer au
gouvernement quelles mesures pourraient être prises pour encourager
l'entreprise privée et les petits investisseurs à investir dans
ces entreprises, dans le domaine minier, dans l'exploration. Par exemple, une
des recommandations qui ont déjà été faites, c'est
de permettre à ces sociétés de pouvoir bâtir une
réserve non imposable dont les montants devraient être
utilisés strictement pour l'exploration dans un certain nombre
d'années. Cela répondrait aux exigences de ces compagnies, cela
répondrait à la question du cycle, quand on est dans le creux du
cycle, il y aurait des sommes qui seraient disponibles pour réinvestir
et faire de l'exploration. C'est une mesure qui va au-delà des mesures
prévues dans le projet de loi actuel.
L'autre mesure et c'est peut-être cela qui nous distingue
de l'approche du gouvernement c'est que nous prendrions plus de mesures
pour inciter l'entreprise privée et les petits investisseurs à
investir dans ces entreprises, dans des entreprises québécoises,
par exemple, en accordant des stimulants, des incitatifs aux investisseurs, aux
individus. Par exemple s'ils investissaient dans l'exploration, ce serait
déductible de leur impôt, cela serait déductible des
profits qu'ils font dans d'autres entreprises. Ce serait un moyen d'inciter des
sommes de l'industrie privée, parce que ce n'est pas en faisant des
menaces, en disant: Si vous ne le faites pas, nous allons investir... Parce que
l'argent, tout de même, il va falloir le trouver en quelque part.
Plutôt que de prendre l'approche que c'est l'Etat qui va le faire, c'est
l'Etat qui va s'en occuper, vous pourriez faire ce qu'ils font dans d'autres
endroits, prévoir des mesures incitatives pour permettre aux individus
et aux sociétés d'avoir des avantages d'investir, d'avoir des
avantages plus qu'ils n'en ont maintenant. S'ils investissent, ils pourront
déduire cela de leurs autres impôts.
C'est vrai que dans certains cas, l'assiette fiscale dans certains
endroits pourrait être réduite, mais ce serait compensé par
l'activité économique additionnelle que vous pourriez trouver par
l'investissement de ces sommes. (17 h 30)
Plutôt que d'envisager plus d'investissements de l'Etat dans ce
domaine, on devrait prendre des mesures fiscales pour aider l'entreprise
privée à réinvestir au Québec. Comme exemple, M. le
Président, je pourrais dire que tant que les impôts seront plus
élevés ici, naturellement, ce sera plus facile pour ceux qui
prennent les décisions d'aller investir ailleurs, parce que les taux de
taxes, les taux d'impôt sont plus élevés que dans d'autres
juridictions. C'est un autre point qui ne sera pas amélioré si on
poursuit les objectifs indépendantistes du ministre. C'est un fait de la
vie économique. Ces choses-là n'ont pas de frontières. Si
vous avez des conditions économiques convenables, si vous inspirez la
confiance et si vous permettez à l'industrie privée de
bénéficier de certains avantages, l'industrie privée va
venir ici, va investir et va créer des emplois.
Le ministre a dit ici, je dois avouer qu'il a raison qu'il
ne faut pas exagérer les richesses naturelles que nous avons. C'est vrai
que nous en avons, mais il faut les exploiter. Il faut que les politiques du
gouvernement permettent l'exploitation spécialement dans le secteur
privé, parce que le gouvernement ne peut pas tout faire. Malgré
les prétentions, les réclamations de certains, le gouvernement ne
peut pas tout faire. Il faut permettre à l'entreprise privée
d'oeuvrer dans ce domaine pour le bénéfice de toute la
population. Par exemple, quand on parle de la production minérale du
Canada, si on prend toute la production des provinces, on voit qu'au
Québec on produit 9,3% de toute cette production et cela inclut
naturellement la production pétrolière en Alberta. Si on
enlève la production pétrolière, le pourcentage que nous
produisons au Québec va augmenter. Tout ceci pour dire qu'il ne faut pas
se dire: Nous avons des richesses naturelles, on peut se fier sur cela. Il faut
que ces richesses soient développées, il faut que les
gouvernements aient des mesures incitatrices, des politiques pour permettre
à l'entreprise privée, selon certains règlements,
d'investir. Le ministre a fait état de certaines sociétés
en commandite où les gens allaient investir en dehors du Québec.
Naturellement, on doit faire de même. On a commencé mieux
vaut tard que jamais mais peut-être que ce n'est pas assez.
Nous appuierons le projet de loi. Comme je le disais, c'est une mesure
qui s'imposait parce que cela fait des années, au moins depuis 1975, que
ces compagnies font des représentations auprès du gouvernement.
Finalement, après trois ans au
pouvoir, le gouvernement nous présente ce projet de loi faisant
suite au discours du budget du ministre des Finances. Le gouvernement doit
faire plus pour encourager le développement économique, soit par
des mesures fiscales, soit par d'autres programmes. J'en ai mentionné
seulement deux, mais il pourrait instituer d'autres programmes pour aider
à l'industrie privée, et créer des mesures afin que
l'industrie trouve cela plus avantageux de se développer ici
qu'ailleurs.
Le principe du projet de loi no 60 est excellent; on voudrait que ce
soit répandu dans d'autres domaines. Le principe du projet de loi no 60,
quel est-il? Même si le ministre nous l'a dit, peut-être n'est-ce
pas tout à fait accepté dans d'autres ministères. Le
principe est le suivant: afin de permettre le développement
économique, il faut avoir les mesures fiscales appropriées qui
sont plus avantageuses ici qu'ailleurs. Ce principe va s'appliquer que le
Québec fasse partie de la confédération ou qu'il n'en
fasse pas partie. C'est un principe économique universel.
Alors, les questions des désavantages onta-riens, des
désavantages du fédéral, ce n'est pas pertinent à
ce débat, cela n'a rien à faire, c'est l'économique qui
compte. Comment pouvons-nous attirer les industries ici et comment allons-nous
le faire? Allons-nous avoir des mesures fiscales qui peuvent répondre
aux besoins de l'industrie privée? Si nous avons ces mesures fiscales
qui répondront aux besoins, les compagnies viendront ici. Si nous ne
pouvons pas leur répondre, malgré les objectifs politiques,
malgré tout le reste, les compagnies ne viendront pas. C'est aussi
simple que cela.
Alors, dans le domaine économique, ne mêlons pas les
cartes. Quand on est dans le domaine économique, cela ne sert à
rien de commencer à essayer de faire de la politique par les politiques
de l'Ontario, à cause des fuites d'argent, des investissements dans
d'autres provinces. Regardons les politiques qu'on peut appuyer. Ce n'est pas
parce qu'on est indépendantiste qu'on doit dire: On va aller aux prix
mondiaux, on va envoyer tout l'argent du Québec en dehors du
Québec. Ce n'est pas le principe du contrôle des richesses
naturelles. On accepte que le contrôle des richesses naturelles et le
développement appartiennent aux provinces, mais, quand cela
dépasse une limite, quand cela dépend de la survie
économique d'un pays, quand cela dépend de la possibilité
du consommateur de pouvoir changer son standard de vie, on dit: Ecoutez, il y a
certaines mesures. C'est cela, le bénéfice du
fédéralisme. C'est quand, dans certains cas, on peut faire des
politiques pour l'ensemble de tous les Canadiens; même si cela
représente un peu moins pour une certaine province, on le fait.
M. le Président, il y a eu un temps où l'huile de
I'Alberta a été subventionnée par les montants que
l'Ontario payait de plus. Alors, la raison pour laquelle j'ai parlé de
cela, je n'avais pas l'intention d'en parler, mais c'est le ministre qui l'a
mentionné pour démontrer, pour essayer de mettre tout le
blâme sur les autres. C'est trop facile, c'est bien facile de dire: Si on
n'a pas de développement ici, c'est la faute des autres. Si on n'a pas
de développement ici, peut-être que c'est notre propre faute,
à cause des mesures fiscales qu'on n'a pas. Le Conseil du patronat vous
a fait des représentations, vous a expliqué pourquoi beaucoup de
sociétés s'en vont, pourquoi beaucoup de cadres, les gens qui
prennent les décisions, s'en vont; c'est à cause de vos mesures
fiscales. Cela n'a rien à voir avec les objectifs politiques.
J'aurais préféré que le ministre se restreigne,
parle strictement de l'aspect économique de ce projet de loi, sans
essayer de blâmer les autres juridictions. Mais, même en le
faisant, je pense qu'il s'est contredit. Je ne pense pas que cela ait
ajouté beaucoup au débat. Alors, M. le Président,
malgré les prétentions du ministre, malgré les raisons
qu'il apporte à l'appui de son projet de loi, nous l'appuierons, mais
pour d'autres raisons et, principalement, parce que c'est une bonne mesure qui
est demandée par ces compagnies, par ces sociétés, qui est
nécessaire pour maintenir ces petites mines en activité, qui va
permettre l'exploration, le développement économique. C'est une
bonne mesure dans ce sens et, pour ces raisons, nous allons appuyer le projet
de loi. Merci.
Le Vice-Président: Merci beaucoup. M. le
député de Richmond.
M. Yvon Brochu
M. Brochu: Merci, M. le Président. J'aimerais prendre la
parole, au nom de l'Union Nationale, sur ce projet de loi no 60 qui nous est
présenté par le ministre responsable des Richesses naturelles. Ce
n'est pas souvent, depuis un bon bout de temps, qu'on a l'occasion d'avoir un
projet de loi qui concerne l'industrie minière. Les derniers sont de
mémoire vénérable, je pense, à la dernière
session, et ç'a été un projet de loi qui a donné
lieu à beaucoup plus de discussions, je pense, que celui qui nous est
présenté aujourd'hui, parce qu'on avait eu, à ce
moment-là, en termes de discussions au niveau de la commission
parlementaire, quelque chose comme 70 heures de débat. Je pense que ce
sera un petit peu différent pour le projet de loi no 60 qui est devant
nous, étant donné qu'il s'agit essentiellement, au départ,
d'un projet de loi technique qui vise à stimuler le développement
des petites mines en favorisant l'exploration souterraine. Je pense qu'on ne
peut d'aucune façon aller à l'encontre de cette ouverture
nouvelle que fait le ministre par le projet de loi qu'il nous présente
aujourd'hui. (17 h 40)
M. le Président, l'industrie minière au Québec se
trouve, depuis quelques années, aux prises avec certaines
difficultés. Le ministre a eu l'occasion d'y faire allusion tout
à l'heure dans son discours. Il y a également une
rentabilité assez intéressante dans certains secteurs. On sait
que c'est quand même une industrie fluctuante qui est soumise aux
aléas du marché. Malgré cette situation plutôt
favorable dans l'ensemble pour l'année
1979, il n'en reste pas moins, à mon sens, que l'industrie
minière a quand même certains problèmes majeurs à
surmonter. En particulier, au point de départ, j'aimerais souligner la
récession économique qui touche actuellement les Etats-Unis. On
sait que les Etats-Unis constituent, en quelque sorte, le principal
débouché de notre industrie minière. Lorsque des
difficultés se produisent dans le secteur économique en termes de
récession surtout ce qui est envisagé aux Etats-Unis
on sait que cela ne peut pas avoir d'autres effets chez nous que d'avoir
des impacts négatifs et de réduire, en quelque sorte, les marges
de manoeuvre qui, à quelques occasions, ne sont pas suffisamment grandes
pour nous permettre de faire face à cette situation, ou même de
continuer à fonctionner de façon satisfaisante. On sait que cela
vaut également pour d'autres secteurs. On aura l'occasion d'y revenir.
Je pense qu'il y a une question avec débat qui a été
soumise pour la semaine prochaine concernant la question des hydrocarbures ou
le domaine pétrolier, si j'ai bien compris la proposition qui a
été faite par le député de Mont-Royal à cet
égard. Je pense que c'est la question avec débat qui aura lieu
dans deux semaines. Cela, pour vous dire qu'également dans le domaine
des hydrocarbures, dans le domaine pétrolier, ce qui se passe aux
Etats-Unis, la situation financière du dollar, ce qui se passe aussi au
plan mondial, la crise iranienne actuelle et la crise qui semble prendre
naissance en Arabie Saoudite qui est un pays producteur de pétrole
à un niveau assez élevé, tout cela a des incidences assez
importantes sur la valeur du dollar américain et sur la santé de
l'économie américaine à laquelle qu'on le veuille
ou non on est associé de très près, de sorte que
lorsqu'ils subissent certaines difficultés dans ce secteur, pas
longtemps après ou au même moment, ici, au Canada, on a
également à absorber les contrecoups de ce qui se produit
là-bas. Donc, l'industrie minière, comme d'autres secteurs, est
soumise et sera soumise au cours des prochains mois à cette
récession économique que l'on pressent de plus en plus
ouvertement aux Etats-Unis.
Il y a également, comme deuxième problème dans
l'industrie minière, la concurrence de plus en plus forte de nouveaux
pays producteurs de minéraux, par exemple, l'Australie et le
Brésil. On va même jusqu'à dire que les dirigeants des
entreprises minières... Comme nous le rapporte la Presse du 23 avril
dernier, et je cite: "Les taxes sans cesse élevées au pays ont
obligé certaines compagnies canadiennes à explorer et à
investir dans d'autres pays." J'aimerais que, sur cet aspect, le ministre, dans
sa réplique, puisse nous apporter certains éclaircissements.
Le ministre a soulevé la question de l'exploration qui
était faite davantage en Ontario par Texasgulf en particulier, compte
tenu de la situation particulière que cette entreprise a vécue et
continue de vivre par rapport au Québec, mettant ainsi en péril
la région de Rouyn-Noranda par rapport à son "smelter" puisqu'il
y avait un flot assez large de minerai qui était acheminé de
l'Ontario vers le "smelter" de la région du Nord-Ouest
québécois.
Etant donné qu'on a coupé cet approvisionnement, cela
crée certains problèmes. Je pense que le ministre a bien
décrit, à juste titre, la situation qui prévaut
là-bas. Cependant, comme cet article nous l'indique, M. le
Président, il y aurait également une autre forme de concurrence
au niveau de l'exploration. Les grandes entreprises seraient peut-être
davantage intéressées dans le contexte actuel, du moins dans
certains cas, à effectuer de l'exploration dans d'autres pays.
J'aimerais que le ministre situe cette remarque dans son contexte.
On parle de cette concurrence étrangère. Cela n'est pas
nouveau et je pense que le ministre a été mis au courant
puisqu'il a assisté, si je ne me trompe, au 81e congrès de
l'industrie minière qui a eu lieu tout récemment. C'est justement
à partir de ces réunions qui ont eu lieu que ces propos ont
été tirés indiquant cette concurrence
étrangère et je cite: "Deuxièmement, le Canada doit subir
la concurrence de plus en plus forte comme je l'indiquais tout à
l'heure de nouveaux pays producteurs de minéraux, tels
l'Australie et le Brésil. Les dirigeants canadiens de cette Association,
l'Institut canadien des mines et de la métallurgie, estiment que les
taxes, sans cesse élevées au pays, ont obligé les
compagnies canadiennes à explorer et à investir dans d'autres
pays".
J'aimerais que le ministre, dans sa réplique, s'il est possible
qu'il le fasse à ce moment-là, nous indique dans quelle mesure
cette exploration dans les pays étrangers comme l'Australie pourrait
avoir un effet de concurrence sérieuse sur la situation actuelle du
Québec. Est-ce que c'est une quantité négligeable ou si
c'est quelque chose qui peut affecter grandement l'entreprise d'ici? Le
ministre est peut-être en mesure de prendre les informations et de nous
les communiquer en conséquence puisque ces gens-là, à leur
81e réunion annuelle, ont cru bon de l'indiquer comme étant un
des facteurs majeurs des problèmes qu'ils rencontrent
présentement, soit celui de la concurrence étrangère.
A cette réunion, on a également souligné je
cite l'article de journal que, premièrement, il y a la
possibilité d'une croissance au ralenti dans le secteur minier canadien.
Les Etats-Unis qui importent plus de 56% de la production minière
canadienne demeurent le plus grand débouché du Canada et les
perspectives de récession comme je l'ai indiqué tout
à l'heure là-bas donnent lieu à certaines
inquiétudes du côté de ceux qui exploitent dans le domaine
de l'industrie minière canadienne.
Enfin, troisièmement, l'industrie minière canadienne se
dit victime de la méfiance de la population envers elle et lors de son
prochain congrès, l'industrie tentera de convaincre les gouvernements et
le public en général que l'exploitation minière peut
être bénéfique à tous. Cela ouvre le volet,
évidemment, à ce que le ministre disait il y a quelques minutes,
en lançant un peu un défi à l'industrie minière en
disant: Ecoutez! Si l'industrie minière est en si excellente
santé et si son dynamisme est aussi grand qu'elle le
prétend, on pourra peut-être assister, dans les prochains mois ou
dans les prochaines années, à une manifestation tangible de cela
par les millions de dollars qui pourront être investis justement au
niveau de l'exploration au Québec. A ce moment-là, si l'industrie
minière devait d'elle-même faire cette démarche, le
gouvernement du Québec si on atteint ce seuil des $70 millions
auxquels le ministre a fait référence serait prêt
à se retirer de ce champ s'il y a un dynamisme réel qui se
manifeste de ce côté-là.
C'étaient donc là les problèmes majeurs auxquels
ont fait allusion les responsables d'industries minières et dont on doit
tenir compte dans la situation présente.
On pourrait également mentionner, M. le Président, un
exemple qui nous touche plus particulièrement. On dit ici qu'en 1974,
les mines du Nord-Ouest produisaient pour $321 millions et, en 1978, ce chiffre
était tombé à $202 millions. Je pense que c'est
peut-être dans la foulée des explications que le ministre a
données tout à l'heure, par rapport aux "smelters" du Nord-Ouest
québécois. En 1968, on comptait 8700 travailleurs miniers dans le
Nord-Ouest et, dix ans plus tard, on ne trouvait plus que 4600 employés
travaillant directement dans le domaine de l'industrie minière.
En plus, il n'est certes pas superflu de mentionner un
élément là-dedans qui a quand même une certaine
importance, même s'il ne touche pas l'ensemble des citoyens du
Québec. On assiste le ministre qui est spécialisé
dans le domaine pourra nous l'indiquer dans sa réplique
malheureusement à l'exode de plus en plus important, nous dit-on, de
certaines de nos compétences professionnelles sur le plan minier, en
particulier nos géologues qui doivent, dans le contexte actuel, aller
à l'extérieur pour trouver de l'emploi.
En effet, quelques fois par année, des géologues et des
techniciens miniers doivent s'exiler quelques mois dans le nord de la
Saskatchewan, nous indique-t-on, parce qu'il n'y a pas de travail pour eux dans
le Nord-Ouest québécois, région qui pourtant a des
richesses naturelles enviables dans son sous-sol. M. le Président, en
fait, ce sont là quelques exemples des problèmes que
connaît l'industrie minière actuellement, une de nos principales
richesses naturelles chez nous.
Quant à nous, de l'Union Nationale, comme je l'ai indiqué
tout à l'heure, nous avons l'intention d'appuyer ce projet de loi
puisqu'il se situe dans la logique et dans la foulée des autres
décisions qui ont été prises pour favoriser et stimuler le
développement de la petite entreprise au niveau de l'exploitation
minière en favorisant une plus grande exploitation et des
allégements fiscaux dans ce domaine. Cependant, malgré ces
efforts marqués depuis quelques années pour alléger le
fardeau fiscal afin de faciliter le développement de l'industrie
minière, il reste encore je pense que le ministre l'a reconnu
beaucoup à faire. Au fil des années, les gouvernements en
place, tant du côté fédéral que du côté
du Québec, devront, je pense, unir leurs efforts pour le plus grand bien
de l'industrie minière au Québec. Justement à ce sujet, le
président-directeur général de Noranda dans le Nord-Ouest,
M. Fowler, soulignait que la seule chance de l'industrie minière dans le
domaine des métaux, sauf le fer, réside dans une exploration
massive. Son intervention était tout à fait claire. Il a
donné certaines indications supplémentaires en disant, par
exemple je cite ici le Devoir "L'association demande
d'étaler ses revenus sur cinq ans au lieu de trois ans".
Déjà, on assiste à une amélioration dans le projet
de loi puisque le ministre a indiqué une ouverture dans ce sens en
disant qu'ils pourront déjà étaler au moins sur quatre ans
leurs opérations financières. On demandait ici une période
de cinq années. (17 h 50)
Donc, M. le Président, nous encourageons le ministre à
collaborer davantage avec l'industrie minière québécoise
afin de la stimuler et qu'elle puisse prendre un second souffle dont
l'économie québécoise a grandement besoin actuellement. En
terminant, j'aimerais simplement attirer l'attention du ministre sur un dernier
point qui n'est pas majeur dans la discussion actuelle, mais on ne fait pas
mention de la réglementation comme telle qui doit, je pense, venir plus
tard. On a eu d'autres discussions dans d'autres forums concernant la
réglementation qui n'est pas soumise en même temps que les projets
de loi. Pour d'autres projets de loi, cela avait une importance plus grande que
pour celui-ci. J'ose espérer que, pour l'élaboration de la
réglementation, le ministre prendra soin de consulter les entreprises
directement visées, si ce n'est pas déjà fait.
Peut-être que, dans sa réplique, le ministre pourra nous donner
quelques renseignements là-dessus. Je ne fais pas une question de
principe, à ce moment-ci, de toute cette réglementation qui est
absente des projets de loi. Je le soumets simplement au ministre sous forme de
question.
Je termine mes propos en espérant que les résultats
escomptés par ces changements de nature technique apportés par le
projet de loi no 60 puissent vraiment être réalisés. En ce
qui concerne l'Union Nationale, nous allons donner notre appui à ce
projet de loi no 60 présenté par le ministre des Ressources et de
l'Energie.
Le Vice-Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camil Samson
M. Samson: M. le Président, je n'ai que quelques minutes
à ma disposition, je voudrais quand même faire connaître mon
point de vue sur le projet de loi no 60. J'ai cru comprendre que le ministre
avait attaché beaucoup plus d'importance au député de
Rouyn-Noranda qu'à son projet de loi; alors, j'en profiterai pour vous
donner quelques explications qu'il aurait peut-être dû vous donner
au lieu de parler du député de Rouyn-Noranda.
Je voudrais faire comprendre ceci au ministre. Le projet de loi no 60
est un projet de loi qui est bon; je pense que, là-dessus, on va
très bien s'entendre. Nous n'avons rien contre ce projet de loi; au
contraire, à mon sens, c'est attendu depuis longtemps. Je vais
peut-être faire plaisir malgré tout au ministre je ne sais
pas s'il le mérite en lui disant que ce genre de choses, ce genre
d'allocations ou ce genre d'exemptions était demandé depuis
longtemps, même sous l'ancien gouvernement. Autrement dit, mon propos
n'est pas de blâmer l'actuel gouvernement de ne pas avoir agi avant, mon
propos est de dire que ça fait longtemps qu'on réclame ce genre
de choses et que les gouvernements, quels qu'ils soient parce qu'il y en
a eu des bleus, des rouges et des péquistes ont attendu et c'est
aujourd'hui que nous retrouvons quelque chose dans le sens de ce que nous
demandons. Si on doit donner le crédit à quelqu'un, je veux bien
le donner à celui qui a présenté le projet de loi, parce
que c'est lui qui a décidé de faire écho aux justes
revendications qui nous proviennent du monde minier depuis longtemps.
Cependant, je déplore les propos du ministre lorsqu'il mentionne
que c'est une question d'indépendance ou de fédéralisme.
Je vous dis franchement et honnêtement que ça n'a rien à
voir, ni avec le fédéralisme, ni avec l'indépendance, ni
avec la onzième province non plus. Dans mon coin de province, on parle
du fédéralisme, on parle de l'indépendance, et on parle
autant, sinon plus, dans certains cas, d'une onzième province possible.
Donc, on est au-dessus de ces petites chicanes de l'indépendance par
rapport au fédéralisme.
Cela n'a rien à voir avec cela dans n'importe laquelle des
administrations possibles, si les gouvernements permettent des exemptions
fiscales, des mesures fiscales pour encourager l'industrie, cela donne des
résultats. Quand on ne le permet pas, cela ne donne pas de
résultat. Cela ne donne rien de faire des discours techniques, jouer sur
les chiffres, sur les virgules et sur les calculatrices, le simple gros bon
sens nous fait comprendre que quand il y a des encouragements fiscaux, il y a
aussi des résultats qui y sont accrochés. Les encouragements
fiscaux en matière minière, aujourd'hui, je suis fier de voir
qu'il y en a, mais je peux vous dire que ce n'est pas un fait nouveau, je peux
vous dire que cela n'a pas été inventé la semaine
passée, cette affaire. La région du Nord-Ouest
québécois, que je représente, la comté de
Rouyn-Noranda, a eu des mines d'or longtemps subventionnées et
c'était là la seule façon de permettre que ces mines
puissent continuer. Si ma mémoire m'est fidèle, elles
n'étaient pas subventionnées par le gouvernement provincial,
elles étaient subventionnées par le gouvernement
fédéral.
Je pense que quand on veut jouer sur l'indépendance et
fédéralisme, c'est le genre de patinoire à deux coups,
comme on pourrait dire, qui ne pourrait faire autre chose que risquer de faire
"s'éjarrer" le ministre. Je lui conseille de ne pas trop en parler, plus
il va en parler, plus il va "s'éjarrer".
Ce qu'on nous apporte aujourd'hui, comme mesures fiscales incitatives,
ce n'est pas non plus un cadeau. Il ne faut pas penser qu'on vient de donner
à l'industrie minière le cadeau du siècle, non plus. Parce
que ce n'est pas non plus la trouvaille du siècle. Ce qui sera
exempté, si cela permet et je pense que cela peut permettre
par l'exploration d'avoir des gisements nouveaux en exploitation ou des
gisements en exploitation accrue, cela permet des emplois nouveaux... Dans le
secteur minier, chaque emploi a un effet multiplicateur d'environ six. Ce qui
veut dire, pour chaque emploi dans le secteur minier, environ six emplois
ailleurs, dans le secondaire, dans le tertiaire, dans le secteur des services,
ce qui fait que ces emplois, un multiplié par six, cela fait un
multiplié par six fois les impôts des particuliers que le
gouvernement va aller chercher. Cela fait multiplier par six fois les taxes de
vente que le gouvernement peut aller chercher dans le domaine de la vente
où il y a taxe de vente. Autrement dit, ce n'est qu'une roue qui
tourne.
Comme il y a, dans ce secteur, un effet multiplicateur qu'on ne retrouve
pas dans tous les secteurs de l'économie, parce que c'est une richesse
naturelle de base, quand le gouvernement nous fait croire qu'on vient de faire
un gros cadeau, je peux vous dire que si cela réussit, si cette loi
permet l'expansion, cela va permettre en même temps une rentrée de
fonds accrue au Trésor québécois, ce qui fait qu'on aura
probablement perdu de la main gauche quelques dollars qu'on va
récupérer facilement et même un peu plus de la main droite
dans le Trésor québécois.
Donc, ce n'est pas un cadeau que le gouvernement du Québec vient
faire ni aux mines du Nord-Ouest quécécois non plus qu'à
la population du Nord-Ouest québécois, ce n'est que justice, ce
n'est qu'une mesure je le reconnais, par exemple
économique incitatrice qui est susceptible de permettre de
réduire le taux de chômage et de permettre, bien sûr, une
industrialisation accrue. Cela fait longtemps que je le réclame. En
1970, parmi mes premiers discours en cette Chambre, je réclamais
ceux qui étaient là s'en rappelleront des mesures qui
ressemblent un peu à celles-là. On peut, bien sûr, se
chicaner sur quelques virgules, mais le principe est le même. Ce
principe, le gouvernement ne l'a pas accepté à ce
moment-là. Quand Texasgulf a décidé, pour une raison ou
pour une autre, de cesser d'exporter son produit vers la fonderie de Noranda,
bien sûr, cela a créé un déséquilibre, mais
il faut se rappeler qu'il n'y a rien qui empêchait la province de
Québec de prendre des mesures incitatrices, comme d'autres gouvernements
l'ont fait, pour tenter de conserver ce marché. Je rappellerai que le
minerai qui est venu à Noranda depuis un certain nombre d'années
parce qu'à la mine Horn, comme telle, il n'y a plus de minerai
là venait de la région même de Rouyn-Noranda, de la
région de Chibougamau et aussi du Manitoba, dans certains cas, ainsi que
de l'Ontario.
Bien sûr, si on nous permettait de continuer à traiter le
minerai qui nous vient de l'Ontario, cela donnerait plus d'emplois, mais il
faut aussi qu'on
considère et c'est le genre de choses qu'on ne sait
peut-être pas suffisamment ailleurs au Québec, mais on le sait
chez nous, dans la région de Rouyn-Noranda combien de nos
travailleurs mineurs de Rouyn-Noranda travaillent dans les mines à
Timmins, à Sudbury, à Kirkland Lake ou ailleurs en Ontario. (18
heures)
Ils vont gagner de l'argent en Ontario pour venir payer de l'impôt
dans la province de Québec. Sur les piastres gagnées en Ontario,
on paie l'impôt fédéral là comme au Québec,
mais le mineur dont la résidence est située au Québec le
31 décembre de l'année, mais qui gagne son argent en Ontario
vient payer son impôt provincial dans la province de Québec, M. le
Président. Il y en a plusieurs comme cela; je connais des familles et
plusieurs de mes anciens concitoyens, plusieurs de mes actuels concitoyens vont
gagner leur argent en Ontario.
Je vois, comme vous, qu'il est 18 heures, mais je pense qu'avec le
consentement de la Chambre je pourrais peut-être terminer dans une minute
environ.
Le Vice-Président: Consentement?
Des Voix: Consentement.
Le Vice-Président: Consentement.
M. Samson: Je dis, M. le Président, que, dans une
région comme la nôtre, on ne peut pas couper la frontière
au couteau parce que notre main-d'oeuvre peut tout aussi bien aller travailler
de l'autre côté. Pendant de nombreuses années, des
résidents de Rouyn-Noranda voyageaient à la mine Kerr-Addison,
à Virginia Town, à quelque 30 milles de Rouyn-Noranda. Ils
allaient gagner de l'argent là et revenaient chez eux tous les jours,
dépenser à Rouyn-Noranda l'argent qu'ils gagnaient en
Ontario.
Le ministre n'a pas besoin de se demander pourquoi, dans ma
région, on n'est pas particulièrement séparatiste. C'est
parce que nous avons appris que cette ligne qui sépare les deux
provinces est imaginaire et qu'on peut gagner notre vie des deux
côtés, en harmonie. On a appris cela. D'ailleurs, la région
minière que je représente a été ouverte, en ce qui
concerne le domaine minier, par l'Ontario. Ce n'est pas le gouvernement du
Québec qui a ouvert la région; c'est l'Ontario. Les premiers
chemins réels carrossables qui ont permis de venir à
Rouyn-Noranda et de sortir de Rouyn-Noranda pour aller à Ottawa,
Toronto, Montréal ou Québec, c'est par l'Ontario. Le gouvernement
du Québec n'avait pas daigné, jusque dans les années 1947
ou 1948, nous donner même un chemin qui nous permettait de sortir de
cette région. Qu'on ne vienne pas aujourd'hui nous chanter la chanson de
la séparation. Cela ne fonctionne pas chez nous, M. le
Président.
J'aurais bien mieux aimé que le ministre s'en tienne à son
projet de loi. Le projet de loi no 60 est un beau projet. Le premier ministre,
il n'y a pas tellement longtemps, quand il parlait de l'indépendance,
disait: L'indépendance, c'est un beau mot, mais il a tellement
été galvaudé. Moi, je dis: Votre projet de loi, M. le
ministre, c'est un beau projet de loi, mais tâchez donc de ne pas trop le
galvauder.
Le Vice-Président: Merci. Qui demande l'ajournement du
débat?
M. Bertrand: M. le Président, avant de demander
l'ajournement du débat...
Le Vice-Président: Oui, M. le leader du gouvernement.
M. Bertrand: ... si j'avais le consentement de la Chambre, le
ministre pourrait terminer dans les prochaines minutes son discours de
réplique sur le projet de loi et, plutôt que de suspendre nos
travaux jusqu'à 20 heures, je les suspendrais jusqu'à 20 h
15.
Le Vice-Président: Consentement? Des Voix:
Consentement.
Le Vice-Président: Consentement. M. le ministre.
M. Yves Bérubé
M. Bérubé: Merci beaucoup. C'est cela. Cela me
permettra de répondre. Merci, M. le Président. J'ai noté
un certain nombre de remarques de la part de l'Opposition. Je vais les
reprendre rapidement. D'une part, lorsqu'on demande le dépôt des
règlements, je suis entièrement d'accord. En fait, au moment de
l'étude article par article, j'aurai avec moi les règlements qui
me permettront à ce moment-là de répondre en même
temps à la question de la définition des dépenses, des
travaux d'exploration, des travaux de mise en valeur, de sorte que nous aurons
la définition. Nous saurons également comment on peut les
distinguer des travaux d'exploitation, parce que la principale
difficulté de cette loi je réponds là au
député de Rouyn-Noranda la principale raison pour laquelle
de nombreux gouvernements ont refusé de s'engager dans cette loi, c'est
que, en général, au niveau du ministère des Finances, on
arrivait mal à imaginer des façons de distinguer entre ce qui
seraient des travaux d'exploitation et des travaux de mise en valeur et
d'exploration et, par conséquent, cela aurait pu donner lieu à
des abus.
C'est simplement en imaginant des règlements que nous avons
été capables de présenter un tel projet de loi et toute la
substance du projet de loi est dans ces règlements et non pas dans la
loi comme telle. Donc, je déposerai les règlements. Il
m'apparaît absolument essentiel, d'ailleurs, que nous les ayons pour
orienter le débat. Quant au montant de déduction qu'implique
cette loi, le coût que pourraient représenter, pour la
fiscalité du Québec, les termes de cette loi, malheureusement, je
ne les ai pas avec moi. Il y a quand
même eu des simulations de faites et cela me fera plaisir,
peut-être en commission, d'amener avec moi les analyses qui ont
été faites, de sorte que je pourrais répondre de
façon plus précise.
Il y a eu plusieurs recommandations intéressantes de la part du
député de Mont-Royal concernant des mesures qui, je pense, sont
valables. L'idée, par exemple, d'une mise de côté des
profits durant les bonnes années pour les réinvestir dans les
mauvaises années. Je dois souligner, cependant, que l'étalement
des profits sur quatre ans a justement cette conséquence. Le fait de
pouvoir étaler profits et pertes sur quatre ans permet de prendre des
profits et de les reporter en des périodes plus difficiles, de
manière, justement, à justifier des dépenses
d'exploration. C'est essentiellement le but. On rejoint l'objectif visé
par le député de Mont-Royal d'une façon peut-être un
peu différente mais qui, fondamentalement, donne le même
résultat.
Quant aux incitations aux individus, je suis bien d'accord pour donner
des incitations, mais je voudrais simplement donner quelques chiffres aux
membres de cette Chambre, chiffres qui sont extrêmement
intéressants. Je ne sais pas si vous savez d'ailleurs, cela
pourrait être intéressant puisque vous pourrez le faire par
exemple, pour les médecins ou les professionnels
québécois, avec un salaire de l'ordre de $60 000 par
année.
Je ne sais pas si vous savez quelles sont les incitations que le
gouvernement fédéral accorde aux Québécois pour
aller investir dans l'exploration pétrolière en Alberta,
particulièrement dans la mer de Beaufort. Pour chaque dollar investi
dans la mer de Beaufort par un individu qui gagne $60 000, savez-vous combien
le gouvernement lui rembourse?
Une Voix: Non.
M. Bérubé: $1.09. En d'autres termes, tout individu
qui dépense $1 dans la mer de Beaufort reçoit automatiquement des
gouvernements, $1.09. Ce n'est plus une incitation à l'exploration. M.
le Président, on est tout aussi bien de le faire nous-mêmes. Si
c'est rendu que pour chaque dollar d'investissement qu'un individu met dans
l'exploration, le gouvernement est obligé de mettre $1.09 et le
rembourser, cela n'a plus de bons sens. En d'autres termes, il y a incitation
et incitation. Je pense qu'il ne faut pas exagérer le niveau des
incitations, mais néanmoins on serait prêt à en envisager
certaines.
Je termine sur quelques petites réflexions. Tout d'abord, le
député de Rouyn-Noranda a tenu des propos que j'ai trouvés
difficilement acceptables de la part d'un député qui doit
défendre ses concitoyens. En effet, même un parti, comme il le
dit, indépendantiste, tel que le nôtre, propose pour le Canada une
union économique avec libre circulation des personnes et des biens.
Donc, aucune entrave à cette libre circulation. Or, qu'est-ce que
l'Ontario a fait pour empêcher le concentré de cuivre de venir
à Noranda? Ces gens ont imposé une taxe sur l'expédition
de concentré chez vous et c'est parce que cette taxe existe que vous
êtes privés de l'approvisionnement. C'est là la seule et
unique raison pour laquelle, en fait, la compagnie Taxasgulf, qui est une
filiale du gouvernement canadien, a préféré construire son
"smelter". C'est tout simplement par le biais d'une taxation à
l'exportation très bien camouflée je le reconnais
mais vous admettrez que j'ai pris le temps, même si c'est un peu
compliqué, de révéler le fonctionnement de cette taxe qui,
par le biais d'un jeu d'une taxe très élevée marginale et
d'une allocation de traitement, rend totalement non économique la
transformation à Rouyn-Noranda. Même le gouvernement actuel, le
gouvernement du Québec, dans sa proposition de
souveraineté-association, refuse des mesures gouvernementales qui
bloqueraient la libre circulation des biens et des personnes.
Ce dont vous souffrez, M. le député de Rouyn-Noranda,
finalement, c'est d'une politique à caractère protectionniste,
gouvernemental, basée sur la taxation qui va mettre en chômage 20%
des travailleurs de votre comté. Que vous défendiez une telle
politique me surprend au plus haut point. La raison pour laquelle nous voulons
une libre circulation est très simple...
Le Vice-Président: Vos cinq minutes achèvent.
M. Bérubé: Certainement, dans quelques instants. La
seule raison pour laquelle nous voulons une libre circulation, c'est que chaque
fois qu'au nom d'un prétendu intérêt national le
gouvernement fédéral a instauré ses politiques nationales,
nous avons été les dindons de la farce. Par exemple, on a mis les
tarifs ferroviaires pour faire en sorte que le blé de l'Ouest soit
livré au Québec à bon marché. Comment voulez-vous
développer une industrie céréalière au
Québec à ce moment-là? On a mis des tarifs ferroviaires
qui nous apportent des pommes de terre des Maritimes au Québec de telle
sorte qu'on fait venir des pommes de terre de la Nouvelle-Ecosse à
meilleur prix que quand on les fait venir de Rimouski. Comment voulez-vous
qu'on soit d'accord avec une politique tarifaire de ce type-là? On a mis
une ligne Borden... (18 h 10)
M. O'Gallagher: Question de règlement.
Le Vice-Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
député de Robert-Baldwin sur une question de
règlement.
M. O'Gallagher: Je pense que le ministre est rendu dans les
pommes de terre. Ce n'est plus pertinent, il est pas mal dans les "patates". Je
pense qu'on lui a accordé cinq minutes après 18 heures pour
autant qu'il s'en tienne à la pertinence du débat.
M. Bérubé: 30 secondes.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement pour une
minute supplémentaire?
Une Voix: Laissez-le finir.
M. Bérubé: On a mis une politique nationale du
pétrole, la ligne Borden; toutes nos raffineries n'avaient plus le droit
d'expédier en Ontario. Le pipe-line qui autrefois circulait de
Montréal à Toronto est allé dans le sens contraire,
c'est-à-dire qu'on a interdit l'exportation en Ontario. La
conséquence est que nos raffineries n'ont pu prendre de l'expansion, on
a bloqué le développement de notre industrie pétrochimique
au Québec et, finalement, on a payé le prix. Cela est une
politique nationale du pétrole. Finalement, c'est cela qu'on
prétend. Quand il y a trop de blé, on subventionne les gens de
l'Alberta pour ne pas qu'ils ensemencent leurs terrains. Quand on produit trop
de lait, on nous pénalise en nous imposant des amendes pour ne pas qu'on
produise du lait. Ce qu'on dit c'est qu'à chaque fois qu'i y a eu des
politiques dites nationales, c'est nous qui avons été les dindons
de la farce et on a payé pour. On n'en veut plus. Ce qu'on veut, c'est
la libre circulation des biens et des personnes. On va tirer notre
épingle du jeu, M. le Président.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion de deuxième
lecture du projet de loi no 60 sera adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de
l'énergie
M. Bertrand: Je fais maintenant motion pour que ce projet de loi
soit déféré à la commission parlementaire
permanente de l'énergie et des ressources.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des Voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
Vu le consentement unanime accordé, les travaux de
l'Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 h 15.
Suspension de la séance à 18 h 12
Reprise de la séance à 20 h 18
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. le
leader adjoint du gouvernement, vous avez la parole.
Budget supplémentaire
M. Bertrand: Monsieur mon Président, conformément
à l'article 129 et à l'article 128 de nos règlements, nous
devons maintenant entamer l'étude du budget supplémentaire. Je
crois que, comme le stipule l'article 129, le ministre des Finances est
autorisé, ainsi que les représentants des partis politiques,
à un exposé préliminaire. Je crois que nous devrions
appeler cet article, M. le Président.
Le Président: Oui, mais je vous suggère d'abord de
faire une motion, au préalable.
M. Bertrand: Est-ce que nous allons immédiatement en
commission plénière, M. le Président?
Le Président: Immédiatement, M. le leader adjoint
du gouvernement.
M. Bertrand: Très bien. M. le Président, je fais
motion pour que cette Assemblée se transforme en commission
plénière et que nous puissions ainsi entreprendre l'étude
du budget supplémentaire présenté par le ministre des
Finances.
Le Président: En d'autres termes, vous faites motion pour
que je quitte mon fauteuil.
M. Bertrand: Pas tout à fait, M. le Président, mais
pour que quelqu'un vous remplace au fauteuil qui est devant vous.
Le Président: Je dois quitter le fauteuil, M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Bertrand: Comme vous voudrez.
Le Président: Est-ce que la motion sera
adoptée?
Des Voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
Commission plénière
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, avant de vous donner la parole, M. le ministre des Finances,
j'aimerais, pour le bénéfice des députés, vous lire
l'article 129 de notre règlement; cela peut nous aider dans nos
débats: "Lorsqu'un budget supplémentaire est déposé
à l'Assemblée ce qui est le cas avant que ne
commence l'étude des crédits, un représentant de chaque
parti reconnu a droit à un commentaire général de quinze
minutes et le ministre des Finances a un droit de réplique de même
durée. La durée de ce débat fait partie du temps
prévu à l'article 128." Ceci étant dit, je cède la
parole au ministre des Finances.
M. le ministre. (20 h 20)
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, je ne suis pas certain que
j'utiliserai les quinze minutes qui me sont dévolues en vertu du
règlement, parce qu'en raison de certaines activités
parascolaires depuis
une quinzaine de jours, ma voix est disparue. Je vais néanmoins
chercher à présenter au moins les grandes lignes de ce budget
supplémentaire et en indiquer ce qui m'apparaît en être le
sens.
En fait, je pense que cela vaut peut-être la peine de le rappeler,
les budgets supplémentaires de l'automne n'ont rien à voir
vraiment avec les budgets que l'on présente au printemps. Au printemps,
la politique fiscale, les grandes orientations de dépenses du
gouvernement sont présentées. A l'automne, on rectifie le tir
dans la mesure où on se rend compte que certains crédits pour des
dépenses étaient peut-être insuffisants, dans la mesure
où on se rend compte que certaines dépenses que l'on avait
calculées de façon un peu mécanique comme le nombre de
patients dans les hôpitaux, le nombre d'enfants dans les écoles
doit être corrigé, on fait des ajustements aussi. D'autre part,
dans l'espace de six ou sept mois, il va de soi que les ministères, le
Conseil du trésor et le Conseil des ministres ne sont pas immobiles et
peuvent décider ou bien de nouvelles lois qui entraînent de
nouvelles dépenses, ou bien des changements dans l'orientation de
certains programmes de dépenses. Et cela, bien sûr, doit se
refléter à l'automne, lorsqu'on aborde le budget
supplémentaire qui est, en somme, simplement une liste de corrections
que l'on apporte dans les crédits qu'on avait présentés au
printemps.
Ce troisième budget supplémentaire que je présente
est tout à fait dans la lignée des deux premiers et, en fait, au
montant de $401 millions, il représente pour l'essentiel soit des
ajustements dans certains calculs qui avaient été faits sur la
base d'un budget, on s'en souviendra, de $14 600 000 000 ou bien de nouveaux
engagements que le gouvernement a pris, ou bien le paiement de factures pour
l'essentiel.
En fait, sur ces $400 millions, il n'y a que $38 millions de ce qu'on
pourrait appeler de nouvelles activités ou de nouveaux programmes. Sont
inclus dans ce budget supplémentaire les ajustements nécessaires
pour les conventions collectives dont, nous l'espérons tous, nous
achevons à l'heure actuelle la négociation. Sont inclus aussi
dans ce budget supplémentaire, des ajustements faits au ministère
de l'Education pour tenir compte d'un nombre d'élèves un peu plus
élevé dans le réseau que l'on ne l'avait envisagé
à l'origine. Sont incluses dans ce budget supplémentaire aussi
les modifications dans le service de la dette publique.
En fait, en plaçant à $401 millions le budget
supplémentaire, j'évalue aussi mes crédits
périmés pour le moment cette évaluation change de
mois en mois à $353 millions. Qu'est-ce que des budgets
périmés? En fait, il s'agit essentiellement de dépenses
qui ont été acceptées dans les crédits au printemps
mais dont on sait maintenant que, pour toute espèce de raisons, elles
n'auront pas lieu, elles ne se produiront pas. J'envisage donc $401 millions de
budget supplémentaire et, d'autre part, $353 millions de crédits
périmés. C'est vraiment la différence entre ces deux
montants qui représente l'augmentation des besoins de financement du
gouvernement, un accroissement, en somme, net de dépenses.
On me dira: Cette quarantaine de millions d'augmentation nette des
dépenses la différence entre le budget
supplémentaire de ce soir et les crédits périmés
que j'envisage est-ce que cela va accroître le déficit
budgétaire du gouvernement? Pour le moment, non, parce que les revenus
budgétaires du gouvernement sont, dans la dernière estimation que
nous avons présentée dans la synthèse des transactions
financières pour le deuxième trimestre, en hausse d'une
cinquantaine de millions aussi, si bien que, l'un dans l'autre, le
déficit budgétaire pour cette année n'est pas
modifié par le budget supplémentaire que je présente.
Je voudrais ajouter quelques éléments de ce budget
supplémentaire qui sont de nouvelles activités et non pas des
ajustements dans le sens de ce que je disais tout à l'heure, et qui
peuvent peut-être présenter un certain intérêt dans
la mesure où un très grand nombre de ces nouvelles
activités ont une influence directe sur la vie économique ou
l'activité économique elle-même. C'est ainsi, par exemple,
que nous allons accélérer certains travaux d'infrastructure
à la Place Royale pour le compte du ministère des Affaires
culturelles pour un montant d'environ $1 million. Une
accélération des travaux de restauration de logements dans la
région de Montréal va représenter environ $2 millions de
budget ou de crédits additionnels.
Pour les Affaires sociales, l'amélioration de la
sécurité des immeubles et de l'accessibilité aux
handicapés va représenter une dépense d'environ $8
millions additionnels d'ici la fin de l'année. Au ministère de
l'Energie et des Ressources, la voirie forestière va demander $3 400 000
de plus que ce qu'on avait prévu et la voirie minière, dans le
Nord-Ouest québécois, $1 300 000. Au ministère des
Loisirs, de la Chasse et de la Pêche, on a ajouté environ $1
million à l'implantation d'équipement de tourisme, de loisir et
de services. Aux Services de la protection de l'environnement, bientôt le
ministère de l'Environnement, les études de réhabilitation
des réseaux d'égout des municipalités inscrites au
programme d'assainissement vont impliquer des déboursés
additionnels d'environ $2 300 000. Il s'agit là d'ailleurs d'un
mécanisme d'accélération pour la mise en place du
programme d'assainissement des eaux dont nous aurons peut-être l'occasion
de discuter en abordant les crédits de ce ministère. Il s'agit
là, je pense, d'un petit montant tel qu'inscrit ici, mais d'un levier
pour accélérer les programmes d'assainissement un peu partout au
Québec.
Dans le domaine du transport, sur la conservation du réseau
routier, nous avons ajouté $6 500 000, et, pour le ministère des
Travaux publics et de l'Approvisionnement, on a accéléré
certains travaux de construction et d'aménagement pour un montant
d'environ $5 millions.
Il y a donc, dans ce budget supplémentaire, des ajustements
techniques pour la majeure partie des sommes, bien sûr, tel que je l'ai
indiqué tout à l'heure, mais aussi une trentaine de millions de
nouvelles activités qui ont un impact direct sur l'économie. On
me dira évidemment que ce n'est
pas considérable. Bien sûr que ce n'est pas
considérable, parce que les gestes majeurs, sur le plan de
l'économie, se prennent à l'occasion du discours du budget.
Encore une fois, ces budgets de l'automne sont des ajustements, des ajustements
habituellement marginaux. Nous en sommes au troisième depuis que nous
sommes au pouvoir et c'est la raison pour laquelle j'indiquais qu'il s'agit
d'un budget supplémentaire dont l'originalité principale consiste
à ressembler aux deux autres qui l'ont précédé.
Merci.
Le Vice-Président: M. le député d'Outremont.
M. André Raynauld
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Le ministre des
Finances soumet cette semaine, pour approbation par cette Assemblée, un
budget supplémentaire de $401 millions et, contrairement aux deux
dernières années, alors que le ministre s'en était tenu
à une réaffectation des crédits périmés, ce
budget augmente les dépenses et le déficit d'une somme de $75
millions pour l'année en cours. (20 h 30)
Le ministre vient de nous dire que ce déficit et cette
augmentation nette de dépenses ne dépasseraient pas une
cinquantaine de millions de dollars, peut-être une quarantaine de
millions de dollars. Je me fonde, pour dire $75 millions, tout simplement sur
le communiqué de presse qui a été émis mardi et qui
nous dit que le ministre aurait déclaré cette
journée-là que les crédits périmés
s'élevaient à environ $325 millions. Par conséquent, il y
avait une augmentation nette des dépenses de $75 millions.
M. le Président, mes collègues examineront les demandes
additionnelles, ministère par ministère. De mon
côté, avec votre permission, je me limiterai à une analyse
générale de la situation financière du gouvernement telle
qu'elle se présente après le dépôt de ce budget
supplémentaire.
L'année dernière, j'ai fait état devant cette
Assemblée des écarts considérables qui se sont
manifestés entre les prévisions initiales du ministre des
Finances dans son discours du budget et les résultats finals. Je
m'étais livré à ce petit exercice pour l'année
fiscale se terminant le 31 mars 1978. Or, le même phénomène
s'est reproduit pour l'année fiscale qui a pris fin en mars 1979. En
effet, qui se souviendra qu'en 1978, le discours du budget prévoyait un
déficit d'un peu plus de $1 milliard? En fait, le déficit a
été de près de $1 500 000 000; la différence
s'élève plus précisément à $400 millions,
soit une augmentation du déficit de 42% par rapport aux
prévisions initiales. Si ce déficit enregistré s'est
considérablement accru, c'est dire que les emprunts de la province ont
également suivi la même voie. Le ministre avait annoncé des
emprunts de $1 163 000 000. En réalité, ils ont atteint $1 575
000 000, soit un accroissement de $412 millions sur les déclarations
contenues dans le discours sur le budget. L'année
précédente, les emprunts avaient excédé de $450
millions les premières prévisions du ministre.
Je ne doute pas que le ministre des Finances cherche à
établir ses prévisions de la façon la plus raisonnable et
la plus honnête. Il reste que ces écarts sont très
commodes. Le discours du budget recevant une très large
publicité, le ministre donne l'impression à l'opinion publique
que sa gestion financière est très rigoureuse, alors
qu'après coup, l'on découvre qu'elle a été beaucoup
plus relâchée. La rigueur est dans le discours, mais la
réalité ne suit pas.
Si je mentionne ces différences importantes entre les
déficits annoncés et les déficits réels, c'est que
nous avons déjà plusieurs raisons de croire qu'il en sera de
même cette année, tant pour le déficit que pour les
emprunts de la province.
Une première raison tient à l'évolution des
recettes budgétaires. Au 30 septembre dernier, le ministre a
corrigé ses prévisions de recettes à la hausse pour une
somme de $50 millions et notons-le au passage, c'est à cause d'une
augmentation imprévue des paiements que le Québec reçoit
du gouvernement fédéral. Mais en revanche, nous apprenons que les
recettes au titre de l'impôt sur le revenu des particuliers ont dû
être amputées de $66 millions sur les prévisions, ce qui
confirme l'impression que j'avais laissée à l'Assemblée
à l'occasion d'une question posée au ministre des Finances
récemment. Ce qui me surprend davantage cependant, c'est que pour les
six premiers mois de l'année, l'impôt sur le revenu n'a
augmenté que de 1,1% sur l'année dernière alors qu'on
espère obtenir une augmentation de 13% sur douze mois. Les explications
qu'on me donnera sans doute tout à l'heure à propos des
remboursements ne me convaincront pas. Je crains plutôt que, comme les
années précédentes, on se soit montrés
indûment optimistes sur les revenus des gens.
Du côté des dépenses, je l'ai déjà
dit, le budget supplémentaire prévoit une augmentation de $75
millions. Dans quelle mesure ce budget suffira-t-il à honorer l'ensemble
des concessions que le gouvernement aura jugé nécessaire de faire
au cours des derniers feux d'artifice nocturnes que le ministre
dénonçait en ces termes, il n'y a pas six mois, et qui
s'appliquaient, bien entendu, au Parti libéral: "En temps et lieu, nous
en reparlerons des feux d'artifice." Donc, le déficit budgétaire
qui frise déjà $1 500 000 000 risque fort d'augmenter de nouveau
au cours des prochains mois.
Enfin, les emprunts de la province qui étaient outrageants et
révoltants naguère, alors qu'ils avaient atteints $1 350 000 000,
sont passés de $1 400 000 000 au dernier discours du budget, en avril,
à $1 735 000 000. L'expérience des deux dernières
années indiquerait que ces emprunts devraient facilement atteindre $1
800 000 000 cette année, sinon davantage. Je note, à cet
égard, qu'on a porté à $160 millions les prévisions
de remboursements que le gouvernement aurait à effectuer sur les
obligations d'épargne du Québec. Un tel volume de remboursements
est sans précédent et je ne peux m'empêcher de m'interroger
sur sa signification et sa portée. Est-il vrai, par exem-
ple, que le ministre aurait annoncé trop tard les changements
qu'il a apportés au taux de rendement sur ces obligations? Sinon,
comment se fait-il qu'avec un rendement supérieur à celui des
obligations fédérales, le Québec vendra moins
d'obligations cette année qu'il n'en remboursera? La question est
évidemment importante, compte tenu que ces obligations en circulation
s'élevaient à $678 millions au 31 mars 1979.
Pour pouvoir apprécier à sa juste mesure le budget
supplémentaire qui nous est proposé, je voudrais maintenant
procéder à une brève appréciation de la situation
budgétaire et financière du gouvernement du Québec. En
d'autres termes, où en sommes-nous? Pour ce faire, je recourrai à
quelques reprises à une comparaison du Québec et de l'Ontario. Je
voudrais donc faire observer dès le départ que l'économie
du Québec a une importance égale à 60% de celle de
l'Ontario. La masse des revenus produits dans une année est en effet
d'environ $60 milliards au Québec alors qu'elle est d'environ $100
milliards en Ontario. Telle est la taille respective des deux provinces au
point de vue économique.
Voyons donc d'abord le niveau et l'évolution récente des
dépenses publiques au Québec. On se souviendra que le ministre
des Finances s'est engagé à plusieurs reprises à ralentir
le rythme de progression des dépenses publiques. Il se dit même
très fier de ce qu'il a accompli jusqu'à maintenant. Où en
sommes-nous? Depuis 1977, les dépenses budgétaires augmentent de
12% par année, ce qui représente une vitesse supérieure
à celle de l'économie québécoise dans son ensemble,
légèrement supérieure, mais supérieure tout de
même. Ces dépenses sont donc passées de 23% à 24% du
produit intérieur brut de 1977 à 1980. A notre avis, le
gouvernement n'a pas fait les efforts suffisants sur ce terrain. Le ministre
des Finances s'est contenté de trop peu, car la situation exigeait bien
davantage. Alors que les dépenses publiques avançaient de 12% par
an au Québec, elles croissaient de 9% par an en Ontario. Pour
l'année 1979/80, qui est l'année courante, c'est de nouveau un
bond de 12% au Québec et un bond de 8% en Ontario. L'effet cumulatif de
ces hausses successives des dépenses publiques est maintenant de nature
à frapper l'imagination, je pense.
En effet, en 1979/80, les dépenses au Québec atteindront
$15 milliards. Or, les membres de cette Assemblée apprendront sans doute
avec une certaine surprise qu'au cours de cette même année, les
dépenses budgétaires de l'Ontario seront de $15 100 000 000, soit
une somme à peu près identique. Le Québec consacre autant
d'argent que l'Ontario aux services de son gouvernement, alors que le
Québec ne dispose que de 60% des revenus réels de l'Ontario.
C'est comme si deux voisins avaient le même train de vie, mais
qu'un des deux ne faisait qu'un peu plus de la moitié du revenu de
l'autre. Je ne demanderai pas ici où nous en sommes, je demanderai
où nous allons avec un tel train de vie. Le ministre des Finances peut
bien déplorer cet état de choses, il peut encore en accuser les
gouverne- ments précédents, le gouvernement
fédéral, mais c'est sa responsabilité de corriger une
situation qui ne peut plus durer.
Or, le ministre ne s'est pas acquitté de cette
responsabilité jusqu'ici. Les dépenses budgétaires seront
donc de $15 milliards, cette année. Si nous voulions vivre selon nos
moyens, comme nos voisins de l'Ontario, il faudrait effectuer une coupure
radicale dans les dépenses publiques, une coupure tellement radicale
que, j'hésite à le dire, ces dépenses devraient être
ramenées à $9 milliards. Je l'ai dit tout à l'heure, elles
sont de $15 milliards, cette année, et elles devraient être
ramenées à $9 milliards si on suivait la structure de
dépenses de l'Ontario.
Par comparaison avec l'Ontario, voilà donc notre véritable
capacité de payer, voilà la mesure de nos moyens et de nos
ressources. Le ministre, je pense, n'a vraiment pas de quoi se montrer
satisfait.
Je pourrais interrompre mon discours dès maintenant, car
l'essentiel y est. En effet, si on ne met pas fin à ces extravagances du
côté des dépenses, nous aurons beau nous dire et dire
à l'opinion publique que nous payons trop d'impôt, le ministre
aura beau répondre que les maisons coûtent moins cher au
Québec, il restera que ce train de vie de "jet-setter" nous laisse dans
les nuages et qu'un jour, il faudra bien revenir sur terre.
Il est donc incontestable que, comme collectivité, nous faisons
face à un fardeau fiscal qui est hors de proportion avec nos revenus.
Cette disproportion est moins forte que celle des dépenses, et ceci pour
deux raisons. Une partie de nos folies est payée par l'ensemble des
Canadiens sous forme de paiements de péréquation. Ces derniers
s'élèveront en effet à $1 700 000 000 cette année.
En outre, nous hypothéquons l'avenir de nos enfants en empruntant toutes
les sommes que nous pouvons trouver sur les marchés, nous retardons
ainsi les échéances et reportons à plus tard la cure
d'assainissement qui devra venir. Il suffit d'examiner l'évolution de
l'endettement nouveau auquel on s'adonne chaque année pour s'en
convaincre.
Cette année, en 1979/80, cet endettement nouveau
s'élèvera, au Québec, à $1 270 000 000, soit un
montant supérieur à celui de l'Ontario d'une centaine de millions
de dollars. Nous retrouvons donc, du côté des emprunts nets, le
même phénomène que pour les dépenses. Avec 60% des
revenus, le Québec emprunte autant, sinon plus, que l'Ontario. Si on
avait voulu se placer sur un pied d'égalité avec l'Ontario cette
année, nous aurions dû limiter notre endettement nouveau à
$700 millions, soit près de $600 millions de moins que ce que nous nous
permettons de faire.
Le ministre devrait donc, en toute honnêteté, comparer ces
emprunts non pas aux recettes fiscales, qui sont de toute manière trop
élevées pour être viables, mais à la capacité
de l'économie québécoise de les rembourser. Or, nous
savons une chose: en proportion du produit intérieur brut, l'endettement
nouveau du gouvernement québécois est deux fois plus
élevé cette année qu'il ne l'est en Ontario.
J'irai plus loin. S'il est exact que cet endettement a diminué
par rapport à l'année 1976/77, il faut aussi ajouter qu'à
chaque année depuis l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois cet endettement a été deux fois plus
élevé, en proportion du produit intérieur brut,
qu'à toutes les années antérieures. Il apparaît donc
clairement que l'année 1976/77 a été une exception fort
commode pour le ministre des Finances actuel, mais qui cache une
réalité plus importante, à savoir que les emprunts nets
ont atteint un plateau deux fois plus élevé qu'auparavant.
Si l'endettement nouveau a suivi une telle évolution, il s'ensuit
que la dette du Québec augmente et qu'elle devrait excéder de
beaucoup la dette de l'Ontario, compte tenu de l'importance respective des deux
économies. Et, en fait, il est bien exact que la dette du Québec
augmente considérablement depuis 1976, que nous prenions la dette
directe du gouvernement, la dette garantie ou celle de l'ensemble du secteur
public. En fait, la dette globale du secteur public représentait 42,2%
du produit intérieur brut en 1975/76 alors qu'elle s'élevait
à 48% du produit intérieur brut en 1978/79. Donc, la dette est
passée de 42% à 48% du produit intérieur brut depuis
1975/76.
En ce qui concerne la comparaison Québec-Ontario, il suffira de
dire que déjà, en 1976/77, la dette totale du secteur public
représentait 54% du revenu personnel au Québec, et seulement 37%
en Ontario. Qu'il s'agisse donc des dépenses publiques courantes ou des
emprunts, le Québec se trouve sur une voie sans issue à moyen
terme, et le ministre des Finances actuel n'a pas réussi à
alléger le fardeau présent et futur de ces dépenses
publiques, au contraire.
On peut ramener à trois causes principales le niveau excessif des
dépenses publiques au Québec. Il y a d'abord les effectifs de la
fonction publique qui sont démesurés, compte tenu de notre
capacité économique de payer. En dépit des
déclarations optimistes du ministre des Finances à cet effet, les
effectifs au Québec s'élèvent à 90% des effectifs
en Ontario.
Le Vice-Président: M. le député d'Outremont,
excusez-moi. A moins d'avoir un consentement unanime, j'ai dit que chaque
représentant de parti avait quinze minutes. Les quinze minutes du
député d'Outremont sont maintenant expirées. Est-ce qu'il
y aurait consentement? Est-ce que vous en avez encore pour longtemps, M. le
député d'Outremont?
M. Raynauld: J'en ai pour deux minutes environ, peut-être
trois au maximum.
Le Vice-Président: Excusez-moi de vous avoir interrompu;
avoir su cela je ne l'aurais pas fait. Allez-y.
M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je remercie les
membres de l'Assemblée pour le consentement.
J'en étais aux effectifs de la fonction publique que je compare
entre le Québec et l'Ontario. Je disais que les effectifs au
Québec représentaient à l'heure actuelle 90% des effectifs
en Ontario alors qu'on devrait en compter environ 60% si on tient compte,
encore une fois, de l'importance relative des deux économies. En fait,
à la fin de 1978, le nombre des fonctionnaires était de 72 600 au
Québec. Il faudrait réduire ce nombre à 50 000 si l'on
voulait devenir concurrentiel avec l'Ontario. Donc, là encore, une marge
considérable entre ce qui serait acceptable en faisant une telle
comparaison et la réalité d'aujourd'hui. Il y a une
différence tellement considérable qu'il est difficile d'imaginer
d'ailleurs que le ministre pourrait procéder à des
réductions aussi radicales dans un temps relativement court.
Une deuxième raison de la hausse excessive des dépenses
publiques tient évidemment à l'imagination furibonde du
gouvernement pour inventer et mettre en oeuvre de nouveaux programmes de
dépenses ou de soi-disant investissements. Les justifications sont
toujours innombrables, le mérite de chaque initiative ne fait jamais
aucun doute; il s'agit de santé, de pauvreté, de
développement régional, d'infrastructures, d'environnement, de
culture. On le sait, les besoins sont insatiables, mais on devrait savoir aussi
que les ressources sont limitées et la volonté de produire et de
travailler pour satisfaire ses besoins est erratique et souvent oublieuse.
Enfin, les dépenses publiques se ressentent à
l'évidence du niveau des salaires qui sont versés, mais sur ce
point, comme je l'ai dit, je réserverai mes commentaires jusqu'à
ce que les informations nécessaires aient été recueillies.
Certains voudront mettre en doute la pertinence des comparaisons que j'ai
effectuées avec l'Ontario. Le problème qui est posé n'est
pas seulement ni surtout celui des impôts que les Québécois
doivent payer en plus de ce que paient les Ontariens ni non plus celui des
impôts que nos successeurs et nos enfants devront débourser pour
rembourser les emprunts que nous contractons aujourd'hui. Ces
difficultés sont et seront cruellement réelles, mais le
problème est plus profond encore. Si l'administration publique
coûte près de deux fois plus cher qu'en Ontario, c'est dire que
globalement parlant les travailleurs, les cadres, les professionnels, les
scientifiques et l'ensemble des entreprises ne sont plus concurrentiels avec
leur contrepartie de l'Ontario. Par conséquent, l'activité
économique au Québec est promise tôt ou tard à un
ralentissement qui devra s'accompagner d'une diminution des emplois au
Québec et d'un déplacement des entreprises et de la population
à l'extérieur du Québec.
C'est ce dépérissement, lent mais inéluctable, qui
est le plus à craindre si le gouvernement ne s'attaque pas
résolument au laisser-aller dans la gestion des affaires publiques et
aux comportements et attitudes de Don Quichotte qu'il encourage et nourrit tant
sur le front économique et social que sur celui de l'avenir politique du
Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
chef de l'Union Nationale.
M. Rodrigue Biron
M. Biron: Je me souviens, lorsque nous avons étudié
le budget présenté par le ministre des Finances, à la fin
mars ou au début d'avril cette année, que j'avais dit à
l'époque que nous étions en face d'un gouvernement qui vivait
au-delà de ses moyens, un gouvernement qui empruntait pour vivre
quotidiennement, un gouvernement qui empruntait à long terme pour payer
son panier de provisions, ni plus ni moins. Avec ce qu'on voit aujourd'hui, on
continue dans la même direction en se foutant royalement de ce qui va
arriver à ceux et à celles qui devront payer des taxes cette
année, l'an prochain, dans cinq ans, dans dix ans et dans vingt ans. (20
h 50)
On hypothèque l'avenir des Québécois et des
Québécoises. On hypothèque l'avenir du Québec,
à l'heure actuelle, avec un gouvernement irresponsable vis-à-vis
de la gestion des fonds publics. Le ministre des Finances dépose
aujourd'hui un budget supplémentaire de $400 millions et il nous dit: II
y aura des crédits périmés. Le chiffre a changé un
peu, mais si on se fie au communiqué de presse que nous avons
reçu il y a deux jours, les crédits périmés sont de
$325 millions qu'on pourra placer quelque part ailleurs, mais c'est finalement
$75 millions de plus de dépenses que ce qui avait été
prévu à l'occasion du discours du budget. Cela veut dire que
finalement on dépensera cette année $15 035 000 000; c'est pas
mal d'argent qu'on va dépenser et on va s'endetter avec tout cela.
Besoins financiers bruts, besoins financiers nouveaux. On avait
prévu $1 400 000 000 dont on avait besoin en endettement nouveau pour
les Québécois; on est rendu à $1 660 000 000 dans les
opérations financières qui ont été publiées
il y a quelques jours et, avec l'annonce qu'on nous fait aujourd'hui de $75
millions additionnels, on aurait besoin maintenant de $1 735 000 000
d'endettement des Québécois pour pouvoir payer les
dépenses quotidiennes, que nous et nos enfants n'aurons pas fini de
payer.
Ce n'est pas fini. Si, au moins, c'était fini, on pourrait se
dire: Bien, c'est mauvais, mais... Ce n'est pas encore fini! On entendait ce
soir, aux nouvelles à la radio, qu'on exproprierait la
société Asbestos au début de janvier 1980. Encore $150
millions dont on aura au moins besoin pour endetter les
Québécois, $150 millions à $200 millions de plus.
Ce sont des "peanuts" probablement pour les gens du Parti
québécois, mais c'est important pour les Québécois
et les Québécoises qui ont à payer des taxes constamment
et les intérêts des dettes qu'on est obligé de faire chaque
jour. On est rendu qu'on travaille non pas pour faire vivre nos familles mais
pour faire vivre les gens du Parti québécois et le gouvernement
péquiste au Québec; au-delà de 50% de nos revenus s'en
vont dans les mains des péquistes pour administrer ce qu'il nous reste,
et il ne nous en reste pas beaucoup.
Si, encore, au-dessus de ces $1 735 000 000 et des $150 millions ou $200
millions dont on aura besoin pour Asbestos Corporation, c'était fini, ce
ne serait pas encore si mal, mais ce n'est pas encore fini, parce que le
ministre d'Etat au développement économique nous a annoncé
que SIDBEC viendrait nous demander de l'argent d'ici la fin de l'année;
il y aura peut-être $100 millions, $200 millions, $300 millions. On nous
a parlé en tout cas de plusieurs centaines de millions de dollars.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Biron: Finalement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît!
M. Biron: ... bien allègrement, nous allons faire en sorte
d'endetter pour un montant qui va dépasser les $2 milliards les
Québécois et les Québécoises d'aujourd'hui et de
demain. C'est juste cette année, et attendez-vous que cela continue de
plus bel l'an prochain: Envoie donc, Mme la marquise, danse et dépense,
les Québécois et les Québécoises sont en
arrière et vont payer. Jean-Baptiste va continuer à payer
fréquemment pour des idéaux de grandeur qu'on a en face de nous.
C'est ce qui est mauvais.
Nous prévoyions et je l'ai d'ailleurs dit au ministe des
Finances au début de l'année qu'on aurait dû couper
les dépenses du gouvernement à 5% au maximum d'augmentation de
dépenses et qu'il fallait vivre avec cela. Le gouvernement disait
qu'autrefois on gaspillait de l'argent. C'est vrai qu'on a gaspillé
autrefois, c'est pour cela que l'ancien gouvernement a été battu.
Cela ne veut pas dire qu'il faut continuer à gaspiller autant que cela,
cela ne veut pas dire qu'il faut continuer à gaspiller au même
rythme et vous empirez même, vous allez encore plus loin; 5%, cela aurait
dû être le maximum, cela aurait peut-être fait $700 millions
additionnels, quelque chose comme cela, $650 millions. Là, ce n'est pas
cela; on a besoin de $1 500 000 000, tout près de $2 milliards, avec des
folies comme de nationaliser l'Asbestos Corporation, et on va nous en demander
tout à l'heure pour SIDBEC.
Où est l'engagement du ministre des Finances de compresser les
dépenses, de réduire les dépenses publiques? Il me semble
que je l'entends encore nous dire cela, cette année, l'année
passée, il y a deux ans. Nous nous attendons de réduire les
dépenses publiques. Je l'entends encore nous dire cela. Pourtant, chaque
fois qu'on nous présente un budget, on présente un budget avec
des dépenses additionnelles. C'est ce qui est mauvais et il faudrait
savoir exactement où on va s'arrêter avec toute cette folie de
dépenses à l'heure actuelle.
Les prix augmentent, les taxes augmentent, mais nos revenus n'augmentent
pas tellement vite, surtout quand on songe au petit travailleur quelque part au
Québec, qui va gagner $200 par semaine environ, à part ceux de la
fonction publique, qui vont en gagner $265. Mais les autres vont devoir payer
des taxes justement pour le gaspillage qu'on fait présentement.
Or, M. le Président, je pense qu'il faut se poser des questions
sérieuses sur le genre d'administration qu'on nous sert à l'heure
actuelle, surtout qu'il y a des Québécois de plus en plus
nombreux qui sont en chômage à l'heure actuelle ou qui doivent
quitter le Québec. Ils s'organisent, en tout cas, pour s'en aller
ailleurs ou pour ne pas travailler, afin de ne pas payer des taxes au
gouvernement du Parti québécois. On avait prévu, au
début de l'année, $4 840 000 000 d'impôt .des particuliers.
On a baissé cela à $4 774 000 000, mais on sait qu'avec ce qu'on
a fait au cours du premier semestre, seulement $2 123 000 000, on ne se rendra
même pas aux $4 774 000 000. Finalement, on va avoir au moins $200
millions de moins de revenus directs, d'impôt sur le revenu des citoyens
québécois et québécoises.
Cela veut dire qu'il y a des gens qui ont dû quitter le
Québec parce qu'ils étaient littéralement exploités
par le gouvernement du Parti québécois, par les péquistes.
Ces gens ont quitté le Québec parce qu'ils étaient
fatigués de payer des taxes au Parti québécois. Je pense
qu'il faut se poser de sérieuses questions.
Il faut aussi se poser de sérieuses questions quant aux revenus
sur la vente au détail. Si cela allait si bien au Québec, il me
semble qu'on percevrait des taxes de vente de 8%. Pourtant, on nous annonce
qu'il y aura une baisse sur les prévisions budgétaires de taxes
perçues sur la vente au détail. C'est qu'il y a moins de gens qui
habitent au Québec ou qui dépensent au Québec. Ils s'en
vont à l'extérieur. Ils sont fatigués de se faire
exploiter par les péquistes et ils s'en vont.
Heureusement, ce qui a sauvé le Parti québécois au
cours du premier semestre, c'est tout simplement les $108 000 000 de plus qu'on
a eus de transferts du gouvernement du Canada. Pourtant, cela a sauvé
les péquistes. Cela a aidé à intervenir de ce
côté-là. Il faut véritablement se poser de
sérieuses questions sur le genre d'administration que nous sert
maintenant le gouvernement du Parti québécois.
M. le Président, je voudrais que le ministre des Finances
réponde honnêtement aux questions suivantes: Que va-t-il arriver
avec Asbestos Corporation? Que va-t-il arriver avec SIDBEC? Quand nous
présentera-t-on des besoins financiers nouveaux avec tout cela? Je pense
qu'il est important de le savoir afin que nous le sachions et que la population
du Québec sache ce qu'elle aura à payer pour toutes sortes
d'idées de grandeur qu'on peut avoir de l'autre côté, en
disant qu'on veut posséder des entreprises manufacturières dans
le domaine de l'amiante.
En plus, M. le Président, lorsqu'on est pris à payer trop
cher de taxes et qu'on ne sait pas quoi faire pour couper les dépenses,
on les coupe à des endroits qui ne sont pas nécessaires. Je vois
qu'on nous demande des crédits nouveaux, en particulier aux Affaires
intergouvernementales et aux Communications. Il faut se poser des questions
pour savoir ce qu'on fait véritablement. Si on avait des crédits
périmés à ces ministères, on n'avait tout
simplement qu'à couper les dépenses et à dire: Vous allez
arrêter de dépenser et de gaspiller en Europe, en France, à
Paris et à toutes sortes de places comme celles-là. Vous allez
couper vos dépenses quelque part.
Au ministère des Communications, on a déjà
réussi, à force de critiquer l'ancien ministre des
Communications, à faire couper des programmes de
télévision où on gaspillait l'argent des citoyens du
Québec pour faire la propagande du Parti québécois, la
publicité du Parti québécois. On a réussi à
en faire couper, mais on nous demande quand même un autre montant
additionnel de $6 millions. Je voudrais savoir si, véritablement, tout
le long de cette étude des crédits supplémentaires, on va
regarder si c'est encore pour faire de la propagande et de la publicité
pour le Parti québécois.
Ce sont des questions qu'il faudrait se poser sérieusement, de
même qu'au sujet des Services de protection de l'environnement. C'est
beau, avoir de l'environnement à protéger et tout cela, mais,
quand il ne nous restera plus d'industries, quand il ne restera plus personne
au Québec, c'est difficile de dire ce qu'on va faire. Je me souviens du
maire de la ville de Roberval ou de Saint-Félicien qui me disait
l'année dernière que la pire des pollutions, c'était le
chômage. Le chômage, à l'heure actuelle, on en a
passablement au Québec. On a des gens qui ne travaillent pas. Ils vivent
de l'assistance sociale. Tous les autres sont pourtant obligés de payer
des taxes parce que le gouvernement, à l'heure actuelle,
décourage les investisseurs. Il décourage ceux et celles qui
veulent investir au Québec et créer des emplois au Québec.
Il décourage ceux qui veulent travailler au Québec en les
surtaxant à l'heure actuelle et en laissant faire un gaspillage
éhonté de fonds publics tel qu'on le fait
présentement.
M. le Président, nous ne sommes pas du tout satisfaits du genre
d'administration financière que nous sert ce gouvernement. C'est le
temps qu'on arrête de gaspiller, une fois pour toutes, du
côté des péquistes.
Le Vice-Président: M. le ministre des Finances.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, puisqu'il est question ce
soir de se lancer dans la démagogie, allons-y! Je vais d'abord me
limiter à un certain nombre de renseignements ou de réponses
d'ordre technique, pour ceux qui sont intéressés aux choses
sérieuses et, après cela, on rentrera dans le grand romantisme
financier. (21 heures)
Je voudrais, dans un premier temps, dire qu'effectivement les
dépenses sont accrues, les prévisions de dépenses sont
accrues de $75 millions, comme l'ont relevé mes deux critiques en
disant: II vient de dire que cela augmente seulement d'une quarantaine de
millions de dollars les besoins financiers. Je vais expliquer la
différence, M. le Président. C'est qu'il y a environ $35 millions
de dépenses qui ne provoquent aucune sortie de fonds.
Une Voix: Ah!
M. Parizeau: Ah! Non, il y a toujours, chaque année, des
dépenses qui n'entraînent aucune sortie de fonds comme, par
exemple, les ajustements sur les régimes de retraite. Est-ce qu'on paie
cela à l'extérieur?
Une Voix: Non.
M. Parizeau: Non, comme disent mes camarades de l'Opposition.
Des Voix: Plus tard.
M. Parizeau: En effet, oui, lorsqu'ils prendront leur retraite,
mais cette année, cela ne fait pas des déboursés. Il faut,
dans ces conditions, quand on veut avoir l'effet sur les emprunts, tenir compte
des dépenses qui, seules, provoquent des sorties de fonds. C'est de
cette façon que cela se réconcilie, M. le Président.
Cela étant dit, passons maintenant aux grandes charges de
cavalerie provoquées par nos amis d'en face. Le député
d'Outremont revenait sur les augmentations de recettes d'impôt sur le
revenu. Le chef de l'Opposition nationale déplorait la baisse des
prévisions de recettes sur la taxe de vente au détail. Alors,
regardons ce portrait dans son ensemble. Effectivement, les recettes
d'impôt ont baissé ou, tout au moins, se sont stabilisées,
comme j'ai eu l'occasion de le dire à l'Assemblée nationale,
parce que dans le courant du premier trimestre de cette année nous avons
remboursé, au titre de la réforme fiscale municipale, beaucoup
plus d'argent que l'an dernier. Forcément, les recettes s'accroissent
moins puisqu'on rembourse davantage aux contribuables, ce qui ne fait, comme
j'ai déjà eu l'occasion de le dire en cette Chambre, que
confirmer je suis heureux de voir que le député
d'Outremont, en regardant les chiffres, enfin, croit le discours du budget
que nous avons remboursé $500 millions aux particuliers à
la suite de la réforme fiscale municipale de l'an dernier.
Le chef de l'Union Nationale dit: Les recettes de taxe de vente au
détail, les prévisions de recettes pour l'année sont en
baisse. C'est exact, M. le Président. Nos prévisions pour le
deuxième semestre sont en baisse de $36 millions, pour $1 690 000 000.
Il y a donc une légère modification dans nos prévisions.
Comme je fais des prévisions à peu près à chaque
trimestre, parfois cela monte un peu, parfois cela baisse un peu.
Une Voix: Le yo-yo.
M. Parizeau: Bien sûr, à partir du principe
célèbre du yo-yo. Comment se fait-il que ni le
député d'Outremont ni le chef de l'Union Nationale ne mentionnent
le troisième grand impôt? Quel est le troisième grand
impôt, M. le Président? Les corporations. Si vraiment
l'économie du Québec va à ce point mal, il faudrait que
cela baisse. Eh bien, non! les prévisions sont à la hausse. C'est
pour cette raison que nos amis d'en face n'en parlent pas. Les
prévisions d'impôt sur les corporations sont en hausse de $59
millions.
Des Voix: Ah!
M. Parizeau: Ah! Ne parlons jamais de ce qui fait mal à la
thèse qu'on veut défendre. Bien.
Une Voix: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Parizeau: Je continue, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît! A l'ordre, s'il vous plaît!
M. Rivest: C'est vraiment de la haute finance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, M. le député de Jean-Talon, s'il vous plaît!
M. Parizeau: Le député d'Outremont disait:
L'augmentation des dépenses au Québec, c'est affreux, cela
augmente de 12% par an. Bien sûr, il rejoint là une thèse
que j'ai retrouvée dans un mémoire, il n'y a pas tellement
longtemps, du Conseil du patronat, formé, comme chacun le sait, de nos
amis intimes, et qui nous reprochait la même chose: 12% d'augmentation,
quelle horreur! Bien. Sauf que dans les 12%, il y a une augmentation absolument
sensationnelle de l'argent que nous affectons chaque année et pour la
première fois au déficit actuariel des fonds de pension,
déficit que les gouvernements qui nous ont précédés
à cet égard, je les mets tous dans le même bateau
nous auront laissé. N'est-ce pas, pendant très
longtemps...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Parizeau: J'aurais utilisé parfois, M. le
Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, s'il vous plaît, à l'ordre!
M. Parizeau: ... un certain nombre de nos amis d'en face
peut-être comme conseillers, mais s'ils avaient été
conseillers, je ne leur demandais pas de porter la responsabilité de ce
qui s'est fait, n'est-ce pas? Il y en a un en particulier que je
désigne en toute amitié. Je pourrais en désigner un
autre qui l'a été au niveau du gouvernement
fédéral. Il n'en reste pas moins que ce sont les patrons qu'on
vise à la fois pour les mauvais coups et les bons coups.
Ceci étant dit, ce que les gouvernements nous ont laissé
autrefois, cela a été essentiellement ceci: une situation
où le gouvernement ramassait comme revenus les contributions d'un fonds
de retraite et passait comme dépenses les prestations de pension
à payer chaque année. Aucune provision, rien pour les
déficits actuariels. Je me suis retrouvé avec un déficit
des fonds de retraite du gouvernement de $5 milliards par année doublant
à tous les cinq ans. Cette année, bien sûr, comme l'an
dernier, nous avons commencé à rembourser le déficit
actuariel des fonds de retraite. Alors qu'on mettait dans le budget, lorsque
nous sommes arrivés au pouvoir, une centaine de millions de dollars
seulement au titre des fonds de retraite, c'est $750 millions cette
année qu'on met là-dedans, $1 milliard l'an prochain, simplement
pour être capable de boucher graduellement le déficit actuariel
des fonds de retraite. On dira que c'est de l'argent mal dépensé?
L'essentiel de l'augmentation un peu rapide, par rapport au produit national
brut, comme disait le député d'Outremont, au-delà de
l'activité économique dans nos dépenses vient
essentiellement de l'argent que nous mettons de côté pour les
fonds de retraite que nos enfants justement se seraient ruinés à
payer si les mesures que nous prenons maintenant n'avaient pas
été prises.
Continuons les charges de la cavalerie! En 1976/77, les emprunts de
cette dernière année du gouvernement au pouvoir qui nous a
précédés représentaient 17,6% des revenus
budgétaires. L'année suivante, en 1977/78, on a réduit ce
pourcentage à 12,1% des revenus budgétaires. En 1978/79, cela a
remonté à 13,6% et c'est là un des écarts que me
reprochait le député d'Outremont. Examinons-le cet écart,
M. le Président. Effectivement, en 1978/79, les besoins financiers nets
du gouvernement avaient été prévus à près de
$1 milliard, ils ont été en fait de près de $1 300 000
000. Il y a $291 millions mettons $300 millions de
différence entre les deux estimations. A quoi est-ce dû? D'abord
au fait que $185 millions qui étaient dûs au gouvernement de
Québec par le gouvernement fédéral n'ont jamais
été payés et ont été distribués
on s'en souvient, dans l'affaire de la taxe de vente à
chacun des particuliers au Québec. Cela a créé $185
millions du trou. Nos amis d'en face disent: Très bien, bravo! Est-ce
qu'ils diront bravo aussi au fait que le ministre fédéral des
Finances qui devait payer au gouvernement de Québec, en vertu des
ententes établies, $70 millions avant le 31 mars a attendu au
début d'avril pour arranger sa caisse pour ne pas nous le payer. On dit
bravo, j'écoute les bravo. Je n'entends rien? Bien.
L'essentiel de l'écart entre ce qui avait été
prévu au discours du budget et ce que nous avons dû
réaliser comme emprunts est attribuable essentiellement à ces
deux gestes du gouvernement fédéral. Il n'y a rien d'autre.
Je continue. Pour 1979/80, nous avions calculé que nos emprunts
représentaient 10,3% de nos revenus budgétaires. Ils seront
supérieurs à cela parce que nous n'allons pas emprunter $1 400
000 000, nous allons beaucoup plus emprunter environ $1 650 000 000. Pourquoi
va-t-on emprunter cela? On va emprunter cela essentiellement parce que nous
réduisons nos comptes à payer à l'égard des
commissions scolaires et des municipalités. (21 h 10)
Est-ce que ces messieurs d'en face considèrent que le fait pour
le gouvernement de Québec d'emprunter davantage pour liquider les
comptes à payer est une mauvaise chose? Puis-je rappeler, M. le
Président, que quand nous sommes arrivés au pouvoir, le
gouvernement dont les représentants sont en face devait aux commissions
scolaires au-delà de $500 millions qui n'avaient pas été
payés. On a retrouvé des comptes de 1972 et de 1973 qui n'avaient
jamais été payés.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Parizeau: M. le Président, cette année, on les
paie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre des Finances, auriez-vous l'obligeance, s'il vous plaît, de
m'excuser? A l'ordre, s'il vous plaît!
Pendant que le ministre des Finances va terminer son discours, je
conseillerais aux députés de tous les coins de la salle de lire
les articles 26 et 100 de notre règlement, parce que je constate que
vous en êtes complètement ignorants.
M. le ministre des Finances.
M. Parizeau: Je terminerai rapidement, M. le Président,
sur deux comparaisons que le député d'Outremont a faites avec
l'Ontario. Il nous dit: Les effectifs du secteur public sont trop
élevés. Il a raison, M. le Président. C'est la raison pour
laquelle, l'année dernière, une coupure de 2 1/2% a
été décrétée dans les effectifs de la
fonction publique et a été réalisée. Bien
sûr, de nouveaux programmes ont fait que la fonction publique se
stabilise, à peu près, en termes d'effectifs. Les instructions
ont été envoyées, pour l'année prochaine, de
réaliser exactement la même chose.
Les syndicats nous reprochent copieusement de réduire, dans
certains hôpitaux, les effectifs quand vraiment ils dépassent les
normes généralement acceptées en Amérique du Nord.
Pourquoi est-on tellement attaqué par d'autres si, justement, on ne
réalise pas, raisonnablement, graduellement, avec énergie
cependant, et avec efficacité, cet objectif de stabilisation et, dans
certains cas, de réduction des effectifs? Je n'ai jamais promis une
coupure de 50 000 emplois dans le secteur public comme d'autres l'ont fait
à d'autres niveaux de gouvernement, on ne fait pas de telles promesses,
mais on réalise, cependant, dans certains cas, une stabilisation et,
dans d'autres cas, une réduction graduelle des effectifs. J'aime mieux
procéder
comme cela, M. le Président, que de lancer des chiffres qui, de
toute façon, à un moment donné, sont
irréalisables.
Quant aux comparaisons des budgets avec l'Ontario, je rappellerai
simplement une chose au député d'Outremont, c'est que le partage
des tâches entre le gouvernement d'une province, les
municipalités, les commissions scolaires, varie énormément
d'un gouvernement provincial à un autre, et il le sait. Dans ces
conditions, essayer de comparer la part du budget d'un gouvernement de province
sans tenir compte du partage des fonctions entre commissions scolaires et
municipalités ne veut rigoureusement rien dire.
D'autre part, comme il le sait aussi, une partie des dépenses, en
Ontario, est assumée par le gouvernement fédéral, alors
qu'une partie des mêmes dépenses, au Québec, se trouve
à être remboursée par des points d'impôt. Dans ces
conditions, une partie de la comparaison n'est pas très valable. Ce que
je suggérerais simplement au député d'Outremont, c'est
d'abord d'établir la comptabilité des deux provinces sur la
même base avant d'établir le genre de comparaison qu'il avait
faite. S'il cherche à me persuader que les dépenses publiques au
Québec sont trop élevées, j'en conviendrai avec lui en lui
disant que, depuis trois ans, c'est exactement cela que je cherche à
réduire, et que j'ai des taux d'augmentation de dépenses
largement inférieurs à ceux qu'on a connus avant sauf, et en
tenant compte de l'argent qu'on place, encore une fois, dans le déficit
actuariel des fonds de retraite que ses prédécesseurs nous ont
agréablement légué.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie tous pour les quelques dernières minutes; je constate que vous
avez tous lu l'article 26 du règlement. Il n'y a que le
député du Lac-Saint-Jean, probablement, qui a oublié de le
lire.
Affaires culturelles
A l'ordre, s'il vous plaît! J'appelle maintenant le programme 1
intitulé "Affaires culturelles". M. le ministre des Finances, est-ce que
vous avez quelque chose de particulier à dire?
M. Parizeau: Rien de particulier, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non?
M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Une question. Au programme annoncé par le
ministre des Affaires culturelles dont je regrette l'absence au
sujet des bibliothèques publiques, quand le ministre estime-t-il
être en mesure de rendre effectives les propositions qui ont
été soumises par son collègue des Affaires culturelles
lors du récent congrès de l'Union des municipalités au
titre des bibliothèques publiques? Il n'y a rien de prévu
évidemment dans ce budget supplémentaire au titre des
bibliothèques publiques?
M. Parizeau: Ce sera à l'occasion de la revue des
programmes et de l'affectation des fonds par le comité de
priorité, qui se produit normalement aux mois de décembre et de
janvier. Nous aurons à mettre en oeuvre un certain nombre de ces
dispositions.
M. Rivest: Mais, présentement, il n'y a rien de
décidé au niveau du Conseil du trésor?
M. Parizeau: Ce n'est pas le Conseil du trésor qui affecte
les enveloppes budgétaires, c'est le comité des
priorités.
M. Rivest: Jusqu'à maintenant, il n'y a rien de
décidé, de ferme?
M. Parizeau: Sauf une sympathie profonde de l'ensemble du
gouvernement pour les intentions du ministre des Affaires culturelles dans ce
domaine.
M. Rivest: Cela ne donne pas beaucoup de livres à la
population.
M. Parizeau: Non, mais ne cherchons pas à anticiper sur le
prochain budget.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond.
M. Brochu: A l'élément 2, il apparaît, aux
travaux de restauration de la Place Royale, un montant de $1 087 000 et on dit
que c'est pour couvrir le reste de certains travaux. Là-dessus, quel
montant a été dépensé jusqu'à maintenant?
Quel montant a déjà été engagé sur cette
somme? C'est une somme bipartite dont une partie a déjà
été dépensée.
M. Parizeau: C'est en voie d'engagement, c'est relativement
récent comme décision. Il s'agit, pour l'essentiel, de deux
choses: d'une part, de l'enfouissement de certains travaux d'infrastructure et
en particulier l'enfouissement de câbles, la disparition de divers
appareils aériens, câbles, fils, etc., et poteaux, en
collaboration d'ailleurs avec Bell Canada et Hydro-Québec, et puis,
d'autre part, de certaines sommes pour payer des expropriations.
M. Brochu: II y a donc très peu de ce montant qui est
dépensé jusqu'à maintenant.
M. Parizeau: II est engagé, les autorisations sont
données. Mais, comme les autorisations ont été
données il y a quelques semaines seulement, je ne penserais pas que
l'essentiel de la somme soit encore dépensé.
M. Brochu: Merci. Une dernière question maintenant, au
programme 5, où on dit: aide
financière aux organismes, $520 000. De quel genre d'organismes
s'agit-il?
M. Parizeau: II s'agit d'organismes de toutes sortes, de troupes
de théâtre, d'orchestres, etc., dont on doit dire que vraiment,
depuis quelque temps, ils n'avaient pas été
particulièrement gâtés. La décision a
été prise de leur donner un petit peu plus d'oxygène.
M. Rivest: A ce titre, est-ce qu'on pourrait demander au ministre
des Finances d'adresser la requête à son collègue des
Affaires culturelles, celle de déposer la liste des organismes qui vont
recevoir ces subventions?
M. Parizeau: Volontiers, M. le Président.
M. Rivest: Merci. Au sujet de la politique des musées,
vous savez qu'à Québec, il y a toute une polémique
entourant cela, il y a des chiffres de $30 millions qui ont été
avancés par le ministre des Affaires culturelles. Est-ce que pour le
ministre des Finances cela en est encore au niveau des grandes sympathies ou
s'il y a des décisions quelconques qui ont été prises?
M. Parizeau: M. le Président, il y a déjà
deux ans et demi que j'avais indiqué au ministre des Affaires
culturelles du temps que la reconstruction ou le réaménagement du
musée serait considéré comme une priorité sur le
plan budgétaire. A ce moment, nous ne parlions pas d'une trentaine de
millions, mais, si je ne m'abuse, de $21 millions ou $22 millions. J'admets que
l'inflation a joué et, de toute façon, l'argent est toujours
disponible.
L'importance cependant, c'est qu'on s'entende sur ce qu'on veut faire et
la querelle à laquelle fait allusion le député de
Jean-Talon, même les Montréalais en ont entendu parler.
M. Rivest: Quand vous parlez de l'argent qui est toujours
disponible, est-ce que vous vous référez aux $21 millions ou aux
$30 millions?
M. Parizeau: On ne fera pas un demi-musée, M. le
Président, on essaiera de le compléter.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président; au programme 5,
élément 2, projet d'économie d'énergie à la
Régie de la Place des Arts, $220 000; quel montant la Place des Arts
prétend-elle économiser en mettant ce projet à
exécution? (21 h 20)
M. Parizeau: Sauf erreur là, je parle de
mémoire j'ai vu passer ce dossier et il est tout à fait
remarquable. Je pense que les dépenses en question se rembourseraient,
sauf erreur, en deux ans.
M. Cordeau: Quel genre d'énergie est-ce? M. Parizeau:
II s'agit essentiellement du plan du chauffage en particulier. Il y a
à l'heure actuelle des travaux à faire, à la Place des
Arts, qui sont extraordinairement rentables. Encore une fois, je le dis de
mémoire, mais ils sont très rentables. Je dois rendre hommage ici
d'ailleurs aux gens de la Place des Arts de s'être rendu compte qu'avec
quelques travaux, sur le plan des économies en termes de chauffage,
c'est considérable.
M. Cordeau: II y a peut-être d'autres institutions aussi,
sachant quel genre d'économie la Place des Arts va faire, qui seraient
intéressées à savoir de quelle façon on va
procéder.
M. Parizeau: Je dois dire à ce sujet que le
ministère des Travaux publics a mis en branle une série
d'études à ce sujet, non seulement pour les immeubles
gouvernementaux, mais aussi une sorte de méthodologie pour examiner cela
même dans les réseaux. Il est évident que, compte tenu de
l'augmentation considérable du prix du chauffage, l'examen de ce qu'on
peut faire pour les immeubles du gouvernement, les écoles, les
hôpitaux, etc., peut donner lieu à des économies
très importantes. Il y a pas mal de travaux, d'études qui sont en
cours à cet égard. C'est un des premiers qu'on voit passer
ici.
Excusez-moi, M. le Président, je viens d'avoir quelque chose de
plus précis quant à ce que j'avais à dire sur la Place des
Arts. Pour une dépense de $200 000, on économisera $173 000 par
an sur la fourniture de combustible. C'est considérable.
M. Cordeau: Est-ce qu'on indique, dans ce document, le genre de
réparations ou d'améliorations qu'on va faire à la Place
des Arts pour économiser un tel montant sur le plan de
l'énergie?
M. Parizeau: Je ne suis pas certain...
M. Cordeau: Pas dans le détail, mais en gros.
M. Parizeau:... que je comprenne tout ce dont il s'agit, mais je
vais quand même le lire. A la salle Wilfrid-Pelletier, on m'indique des
modifications des séquences de contrôle et additions de
contrôleurs d'enthalpie.
M. Lalonde: Est-ce un opéra?
M. Parizeau: Investissement requis: $36 200; économie
annuelle anticipée: $85 000. Théâtres Maisonneuve et
Port-Royal, modifications des séquences de contrôle et addition de
contrôleurs toujours d'enthalpie. Modification des systèmes de
ventilation. Investissement requis: $33 400; économie annuelle
anticipée: $48 700, etc.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: Est-ce que je pourrais poser une question
d'information? Est-ce qu'on est au programme 5 des Affaires culturelles?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Nous
sommes aux Affaires culturelles, M. le député.
M. Raynauld: Au programme 5, on parle d'un programme visant
à favoriser l'accès du public aux arts d'interprétation
par la formation d'artistes de la scène et par l'aide à la
production, et on parle de chauffage. Je ne comprends plus rien! Au programme
5, on parle d'aide aux artistes, de la formation d'artistes, et la discussion
porte sur le chauffage. C'est ce que je ne comprends pas.
M. Parizeau: C'est parce qu'il y a deux éléments.
Il y a une aide financière aux organismes, au programme 5,
élément 2, et il y a les projets d'économie
d'énergie de la Régie de la Place des Arts. Cela va là
parce que la Place des Arts, c'est un théâtre.
Une Voix: Et il faut garder nos artistes au chaud!
M. Raynauld: On va les isoler!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mégantic-Compton.
M. Grenier: Le ministre me permettrait sans doute de lui poser
une question. Il doit avoir quelqu'un des Affaires culturelles autour de lui.
J'ai déjà écrit une lettre au ministre. J'aimerais savoir
si, dans le montant qu'on voit ici, de $520 000, il y a une somme annuellement
pour peut-être pas des sondages, mais pour des recherches faites pour
l'implantation de troupes théâtrales dans différents
secteurs de la province. Une étude de marché, par exemple.
M. Parizeau: Je n'ai pas d'indication à cet égard,
mais cela ne veut pas dire que dans le montant il ne puisse pas y avoir des
montants pour ce genre de fins. Le problème est que dans la mesure
où cela représente des montants inférieurs à $5000,
on ne les voit pas passer au Conseil du trésor. Je vais poser la
question et je...
M. Grenier: La question se résume à savoir s'il y a
une étude de marché qui est faite pour le théâtre en
région rurale du Québec.
M. Parizeau: Je poserai la question et je donnerai avis au
député. J'y répondrai dans les plus brefs
délais.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que les crédits du ministère des Affaires culturelles...
M. Rivest: Une question.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Les sympathies du ministre des Finances
m'intéressent ce soir. Au programme 2, les biens historiques et
archéologiques, à quels sites vont les sympathies du ministre des
Finances? $1 537 000.
M. Parizeau: C'est très clair. Il suffit de prendre les
deux chiffres de la colonne de gauche, de les additionner et cela donnera le
chiffre de la colonne de droite.
M. Rivest: A quels sites s'adressent-ils? Quel programme
exactement? Je comprends vos additions.
M. Parizeau: Travaux de restauration à la Place
Royale.
M. Rivest:Ah bon! c'est cela.
M. Parizeau: Cela fait $1 087 000.
M. Rivest: Bon.
M. Parizeau: Plus l'acquisition de l'orphelinat
Sainte-Thérèse-de-Hull, $450 000. Vous additionnez les deux
montants, cela donne $1 537 000.
M. Rivest: On n'a pas les données sur...
M. Parizeau: Et ce sont donc deux sites. Il y a des documents qui
doivent circuler.
M. Rivest: On ne les a pas eus, nous.
M. Parizeau: Manifestement, le député de
Mégantic-Compton l'a.
M. Rivest: C'est parce que les sympathies de l'Union Nationale
sont plus près de vous. On ne les a pas distribués de ce
côté-ci.
M. Parizeau: Je m'excuse. On vient de m'indiquer que cela a
été remis au chef de l'Opposition.
M. Rivest: II les a gardés, vous savez comment il est.
M. Parizeau: M. le Président, si on peut communiquer
à nos amis d'en face une autre copie du document, on pourrait en faire
faire une, à moins qu'on n'en ait d'autres.
M. Brochu: Le chef de l'Union Nationale s'est empressé
d'en donner copie à tous les députés.
M. Parizeau: En espérant que les communications
s'améliorent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors,
les photocopies vont se faire. M. le député de Jean-Talon. Alors,
est-ce que les crédits supplémentaires du ministère des
Affaires culturelles seront adoptés?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté.
Affaires intergouvernementales
J'appelle maintenant les crédits supplémentaires du
ministère des Affaires intergouvernementales. M. le ministre, est-ce que
vous avez quelque chose à dire? Non? L'Opposition officielle?
M. le député d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, il s'agit d'une question un
peu plus générale. Est-ce que ces crédits
supplémentaires ne sont pas présentés d'habitude lorsque
les choses sont survenues qui étaient imprévues lorsque la
préparation du budget ordinaire s'est faite? Est-ce que je peux
demander, à propos du ministère des Affaires
intergouvernementales, par exemple, si le ministre voudrait nous indiquer les
raisons pour lesquelles il faut un budget supplémentaire parce que,
premièrement, cela n'a pas été prévu en
début d'année et, deuxièmement, ce serait trop tard si on
attendait au 1er avril pour faire la dépense? Il me semble que dans un
cas de budget supplémentaire, il devrait y avoir une certaine notion
sinon d'imprévu, du moins de certains événements qui se
sont produits qui ont amené le ministre à proposer justement une
réaffectation des crédits périmés.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Parizeau: M. le Président, il faut d'abord comprendre
qu'ici il y a un certain nombre de décisions qui n'avaient pas
été prises à l'occasion du dernier budget comme, par
exemple, l'ouverture de maisons représentant le Québec à
Moncton, à Edmonton et au Mexique. Ce sont des décisions qui se
prennent dans le courant de l'année; il faut bien mettre les montants
nécessaires. D'autre part, sur le plan du taux de change, il y a une
série de modifications à apporter aux allocations que l'on paie
à ceux qui habitent à l'étranger et qui,
évidemment, ont été soumis depuis deux ans à des
modifications ou qui auraient été soumis à des
modifications considérables de leur train de vie ou de leurs allocations
si les ajustements n'avaient pas été faits.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond.
M. Brochu: M. le Président, sur la
délégation à Moncton justement, est-ce qu'on a une
indication du nombre de personnes qu'on va éventuellement engager
là? Est-ce qu'il y a une prévision de faite sur la
quantité de personnel?
M. Parizeau: Cela me paraît être une
délégation modeste à première vue, pas dans le sens
où l'entend le maire de Montréal, mais modeste vraiment. Combien
de personnes? Il s'agit d'un chef de poste et d'une secrétaire, c'est
vraiment modeste.
M. Brochu: C'est simplement un point de départ.
D'accord.
M. Parizeau: Or, dans la mesure où nos rapports avec
l'Acadie s'intensifient, ce n'est qu'un début. (21 h 30)
M. Brochu: C'est ce que je voulais...
M. Parizeau: Pardon?
M. Brochu:... dire justement. Cela semble être à ce
moment-là une porte ouverte sur l'Acadie.
M. Parizeau: M. le Président, il faut toujours un
commencement à tout.
M. Brochu: Pour enchaîner, M. le Président,
j'espère que...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
avez encore la parole, M. le député de Richmond.
M. Brochu: Ce n'était pas l'impression que j'avais,
mais...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Malheureusement.
M. Brochu: Merci. M. le Président, au programme 2,
élément 1, on parle de l'ouverture éventuelle d'une
délégation générale du Québec, cette
fois-ci, au Mexique. Pourrait-on avoir plus de précisions
là-dessus, à savoir quand on s'attend que cette
délégation sera ouverte? J'aimerais également savoir quel
est le but plus spécifique de l'ouverture de cette
délégation et en particulier je précise le sens de
ma question à savoir si l'ouverture de cette
délégation a un rapport quelconque et je vois le ministre
des Ressources qui me prête une oreille attentive par exemple,
avec l'importation de pétrole et l'importance de plus en plus
marquée que prennent les produits pétroliers dans notre monde en
bouleversement. L'ouverture de cette délégation et la hâte
qu'on semble vouloir y donner, cela aurait-il un rapport quelconque avec les
approvisionnements de pétrole en provenance du Mexique?
M. Parizeau: Comme on le sait, nous avons ouvert, il y a quelque
temps, notre première délégation en Amérique
latine, c'est-à-dire à Caracas. Il était évident
que Caracas, à la fois au plan du commerce des produits
énergétiques et au plan aussi de certains intérêts
industriels et commerciaux que le Québec a en Amérique latine,
semblait être un endroit particulièrement indiqué.
Néanmoins, il s'en est fallu de très peu que l'on choisisse
Mexico comme première délégation plutôt que comme
deuxième, parce que Mexico représente, au plan des contacts que
l'on peut avoir au niveau de la commercialisation des produits
énergétiques, un intérêt aussi grand, au moins
à moyen terme, que Caracas peut le représenter et, d'autre part,
comme chacun le sait, il y a
quand même beaucoup de Québécois qui transitent, se
propagent, fructifient au Mexique et, parfois en reviennent. Depuis fort
longtemps, on se posait la question de savoir dans quelle mesure, dans un
endroit où il y a autant de Québécois, on ne devrait pas
avoir une délégation. Disons donc que nos intérêts
mexicains représentent un heureux alliage de tourisme et
d'énergie. Voilà!
M. Brochu: Quant à l'autre partie, avez-vous une
indication à savoir quand...
M. Parizeau: Je n'ai pas d'indication devant moi à savoir
quand cela doit ouvrir, mais le fait que ce soit dans le budget
supplémentaire indique que c'est imminent. On peut considérer
cela, M. le Président, comme une ouverture
appréhendée.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député...
M. Brochu: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui?
M. Brochu:... au programme 4, élément 3, il y a,
à la rubrique "Service du protocole, conférences et
réceptions, $322 800". Qu'est-ce qui justifie une dépense de la
sorte dans un budget supplémentaire comme celui-là?
M. Parizeau: Je vais fournir la réponse rapidement. Il y a
là-dedans le voyage, évidemment, du président du Conseil
de France. Il y a une série d'éléments qui ont dû
être ajustés. Le plus important d'entre eux, c'est la
conférence des premiers ministres du Canada à Pointe-au-Pic du 15
au 19 août 1979. J'imagine que nos amis d'en face n'ont pas d'objection
à ce genre de dépense et à ce genre de colloque?
M. Rivest: Très bien.
M. Parizeau: C'est bien, n'est-ce pas?
M. Rivest: Je vous félicite.
M. Parizeau: II y a, d'autre part, la 32e conférence des
ministres de l'Education des pays d'expression française. Je suppose que
nos amis d'en face diront que c'est presque aussi bien. Il y en a pour $40
000.
M. Rivest: C'est très cher.
M. Parizeau: Ah bon! Et il y a quelques autres bricoles, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, je voudrais demander au
ministre quels étaient les crédits périmés au
ministère des Affaires intergouverne- mentales. Pourrait-on avoir cette
information, d'ailleurs, pour chaque ministère? Ce serait très
utile à l'avenir pour savoir si ce sont des crédits additionnels
sur une base nette par ministère ou s'il s'agit simplement d'une
réaffectation des crédits du ministère.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre des Finances.
M. Parizeau: Je ne comprends pas. Est-ce que le
député d'Outremont veut cela pour les années
antérieures...
M. Raynauld: Non.
M. Parizeau: ... ou de la projection dans l'avenir?
M. Raynauld: Pas les années antérieures,
juste...
M. Parizeau: Nous calculons, sur la base de certains programmes
qui sont un peu en retard, environ $1 million aux Affaires
intergouvernementales, M. le Président.
M. Raynauld: L'interprétation serait que, sur les $5 141
000 qui sont proposés pour les Affaires intergouvernementales, il y en
aurait environ $4 millions qui seraient des crédits
supplémentaires nets.
M. Parizeau: Oui.
M. Raynauld: C'est cela?
M. Parizeau: Oui.
M. Raynauld: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Au programme 2, M. le ministre, les accords entre la
France et le Québec au sujet de l'importation d'émissions de
télévision.
M. Parizeau: Très bon. M. Rivest: Pardon? M.
Parizeau: Très bon.
M. Rivest: C'est très bon. $192 000. Est-ce que, quelque
part je ne sais trop, je vous pose la question a
été déposé devant cette Assemblée le texte
de ces accords?
M. Parizeau: M. le Président, même si j'étais
ici toutes les minutes des séances de l'Assemblée, je ne me
souviendrais pas si vraiment cela a été déposé ou
non. Je pense que c'est une question qu'il faudrait poser, dans le cours normal
des périodes de questions, à mon collègue des Affai-
res intergouvernementales: lui demander un dépôt de
documents, s'il n'a pas été fait.
M. Rivest: Pourriezvous vous engager, parce que je ne voudrais
pas accabler le ministre des Affaires intergouvernementales, étant
donné qu'il a eu sa part, ces derniers temps, durant la période
des questions... Je voudrais simplement l'avoir parce que c'est quand
même assez important lorsqu'il s'agit d'évaluer les relations
France-Québec. C'est un des programmes importants qui a
été négocié, je pense, lors de la dernière
visite du premier ministre, M. Lévesque, en France. N'est-ce pas?
M. Parizeau: M. le Président, il y a deux façons de
procéder: ou je demande à mon collègue qui, dans des
conditions comme celles de notre séance de ce soir, doit l'envoyer au
député qui le demande un point, c'est tout ou je
demande au député de Jean-Talon d'inscrire sa question au
feuilleton, auquel cas cela lui serait remis un mercredi en grandes pompes et
disponible pour tous les membres de l'Assemblée. Qu'est-ce qu'il
préfère, M. le Président?
M. Lalonde: En 1982. M. Rivest: En quelle année?
M. Lalonde: En quelle année? M. Parizeau: Pardon?
M. Rivest: En quelle année, si j'inscris ma question au
feuilleton, cela va-t-il m'être remis?
M. Parizeau: Non, dans les délais les plus brefs, M. le
Président.
M. Lalonde: Oui.
M. Parizeau: Mais enfin. Ecoutez! Je me rangerai aux
recommandations ou aux suggestions du député de Jean-Talon.
M. Rivest: Je suppose que vous allez me donner la même
réponse lorsque je vois, au programme 4, une révision de la masse
salariale affectée au cabinet du ministre des Affaires
intergouvernementales.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Rivest: Nouvelle révision, $200 000 que je lis. Est-ce
exact?
M. Parizeau: C'est cela.
M. Rivest: $200 000 au cabinet du ministre des Affaires
intergouvernementales, crédits supplémentaires. Pourquoi?
Où? Quand? Comment? Qui?
M. Lalonde: Le candidat battu dans le comté de
Jean-Talon.
Une Voix: La Maison du Québec à Québec.
Une Voix:La Maison du Québec, oui.
M. Rivest: Cela va devenir la Maison du Québec à
Québec.
M. Parizeau: Je suis un peu étonné de la question,
M. le Président, parce qu'il s'agit de la révision des enveloppes
que l'on trouve à plusieurs cabinets de ministre, révision qui a
été décidée enfin, proposée
par le comité de régie interne de l'Assemblée nationale
dont, sauf erreur, nos amis de l'Opposition font partie.
M. Rivest: Est-ce que c'est uniquement cela? Le ministre a
également mentionné... Au service du protocole, par exemple, je
remarque que, pour les réceptions, il y a des prévisions non
prévues puisqu'il s'agit d'un crédit supplémentaire de
$322 000. Quelles sont les réceptions qui ont occasionné un tel
exercice?
Une Voix: La question a été posée.
M. Parizeau: Je vais recommencer ma liste de tout à
l'heure. La Conférence des premiers ministres du Canada à
Pointe-au-Pic. Lorsqu'on a fait le budget, au mois de mars, on ne savait pas
que les premiers ministres du Canada se rencontreraient, qu'ils se
rencontreraient à Pointe-au-Pic et qu'on aurait à payer.
Là, on le sait. Mais c'est une oeuvre pie, M. le Président, dans
l'oeil, j'imagine, de nos amis d'en face. $144 000 pour recevoir les premiers
ministres du Canada, ils ne peuvent pas s'opposer à cela. Je disais tout
à l'heure qu'il y avait la 32e session de la Conférence des
ministres de l'Education des pays d'expression française, $40 734.
Voyez, j'ai une liste.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de...
M. Rivest: A l'intérieur de chaque programme, lorsqu'on
voit ces supercatégories, catégories, éléments
dans le jargon au titre des Communications, je me
réfère au cahier, en ce moment. Aux Communications, on voit
qu'à chaque programme... Par exemple, $122 000, je pense que c'est le
montant total des crédits additionnels qui sont demandés au titre
des communications. Est-ce bien cela? (21 h 40)
Une Voix: Affaires canadiennes seulement.
M. Rivest: Oui, c'est cela. Ensuite, aux affaires
internationales, il a dû y en avoir d'autres; $90 000 si je lis bien. Que
sont tous ces programmes de communications additionnelles dont le
ministère des Affaires intergouvernementales a soudainement besoin?
Est-ce qu'il y a des sondages plus ou moins luxueux qui traîneraient
encore quelque part dans le décor?
M. Parizeau: M. le Président, le mot "communications" doit
s'interpréter ici dans son sens le plus large. Cela pourrait être
tout aussi bien des
frais de voyage que des émissions. C'est communications dans le
sens de communiquer.
M. Rivest: De communiquer?
M. Parizeau: Oui. Donc, les frais de voyage entrent dans
cela.
Une Voix: Les communications bouche à bouche?
M. Parizeau: De bouche à oreille aussi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: La réponse du ministre est sûrement
très agréable à entendre mais ne règle pas grands
problèmes. Plus précisément, est-ce que le ministre des
Finances sait si les nouvelles prévisions incluent des sondages? Le
ministre des Affaires intergouvernementales a été assez peu
loquace quand on lui a demandé s'il y avait d'autres sondages luxueux
comme le disait le député de Jean-Talon tantôt
sondages qui n'ont même pas pu prévoir l'immense victoire
libérale dans les partielles il y a quelques jours. Est-ce que le
ministre des Finances a autorisé, dans les crédits qu'il nous
présente actuellement, de nouveaux sondages partisans de la part du
gouvernement?
M. Parizeau: Ah non! M. le Président, les seuls sondages
que j'ai autorisés sont les sondages non partisans.
M. Rivest: Vous en avez autorisé?
M. Lalonde: Est-ce que vous en avez autorisé alors?
M. Rivest: Vous autorisez des sondages?
M. Parizeau: Non, M. le Président. Je me permettais une
boutade et je regrette que le député de Marguerite-Bourgeoys ne
l'ait pas saisie. Je mettais un point d'ironie.
M. Rivest: M. le Président, si vous me le permettez...
M. Lalonde: M. le Président, j'ai également saisi
le côté boutade mais...
M. Parizeau: J'en suis ravi.
M. Lalonde: ... étant donné que nous discutons de
deniers publics, nous devons être un peu sérieux devant la
population de temps à autre. La question des sondages étant une
question qui a été très sérieusement traitée
par l'Opposition officielle, est-ce que le ministre des Finances peut nous dire
ici si, dans le budget supplémentaire qu'il nous propose, il y a des
sondages de la part du ministère des Affaires intergouvernementales
d'ici le 1er avril 1980?
M. Parizeau: A ma connaissance, absolument pas. De nature
partisane ou non partisane, il n'y en a pas. Je ne vois rien où cela
puisse apparaître dans ce budget.
M. Rivest: Au sujet des communications, le ministre a dit qu'il
s'agissait de communiquer en général, mais quand même, il y
a des sommes assez importantes. Est-ce que le ministre pourrait demander
à son collègue des Affaires intergouvernementales puisque
c'est lui qui défend les crédits supplémentaires de
nous produire le détail des crédits supplémentaires dont
il a besoin au titre des communications? Y a-t-il moyen d'avoir les
éléments?
M. Parizeau: Mais, bien sûr. Seulement, je rappelle qu'il y
a à peu près $6000 de mouvement de fonctionnaires à
l'étranger répartis dans tous ces programmes qui sont dans les
communications. Alors, on prendra des montants de cet ordre et on
ventilera.
M. Rivest: On voudrait l'avoir et au complet, s'il vous
plaît. Insistez auprès de votre collègue des Affaires
intergouvernementales.
M. Parizeau: Ah oui!
M. Lalonde: Quand cela sera-t-il produit?
M. Parizeau: Ce sera complet.
M. Rivest: Oui, promis?
M. Parizeau: Je n'ai pas promis, M. le Président, puisque
je dis que ce sera complet.
M. Rivest: Non, ce n'est pas pour vous M. le ministre, c'est pour
votre collègue des Affaires intergouvernementales qui a tendance
à faire des oublis, comme des études sur
l'assurance-chômage.
M. Parizeau: M. le Président, je pensais qu'il
était depuis fort longtemps clair que nous étions solidaires, mon
collègue et moi.
M. Rivest: Oh ça!
M. Lalonde: A votre grand dam!
M. Rivest: Vous l'en informerez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Pourquoi les crédits périmés ne
sont-ils pas inclus aux crédits supplémentaires ministère
par ministère?
M. Parizeau: M. le Président, je vais être aussi
candide dans ma réponse que le député ne l'est dans sa
question. C'est qu'il s'agit vraiment d'un exercice comment dire?
essentiellement "pifométrique". Il y a des gens qui ont une habitude
fort longue de regarder fonctionner les ministères et le leur en
particulier, en se disant, au fur et à mesure que passent les mois:
Cela, dans tel élément de programme, ils ne dépenseront
jamais tout cela, ou bien: Telle chose ayant été bloquée
ou ayant pris trois mois de retard, la dépense ne se fera pas. C'est
éminemment commode pour un ministre des Finances d'avoir, autour de lui,
un certain nombre de pifomètres aussi exercés, mais il ne faut
pas prendre cela pour de la comptabilité. Une chose est assez
remarquable, cependant, c'est qu'année après année, entre
les prévisions de crédits périmés au total
pas nécessairement dans la répartition entre les
ministères et la réalité, il n'y a pas tellement
d'écart.
M. Scowen: Je vais simplement dire, M. le ministre, que je trouve
que votre réponse n'est pas très satisfaisante. Nous sommes
supposés, ici, regarder et surveiller les comptes du gouvernement
c'est une commission qui est créée pour cette raison et
nous n'avons pas l'information essentielle, d'après moi, pour cette
étude. Je sais très bien qu'il s'agit peut-être d'un petit
jeu entre vous et vos ministères, vos sous-ministres, mais je pense
qu'il y a quand même des moyens autres de contrôler les
dépenses qui ne sont pas nécessaires que ceux que vous avez
choisis. Je pense que nous avons le droit, finalement, d'avoir cette
information, ministère par ministère, sur une base
régulière si vous voulez que nous approuvions les crédits
supplémentaires ministère par ministère.
M. Parizeau: M. le Président, absolument pas. Je pense que
le député embarque dans une erreur de perspective absolument
monumentale. Ce que nous avons approuvé, ce sont des crédits de
fonds publics, des exercices réalisés, en somme, des
données comptables qui représentent, sur le plan soit des
engagements financiers, soit des dépenses faites, des chiffres certains.
Un crédit peut ne pas être dépensé, mais comme
crédit, une fois voté, une dépense ex post
constatée par le Vérificateur général ou par le
contrôleur des finances est, sur le plan comptable, une certitude.
L'Assemblée nationale vote des crédits certains et se prononce
sur des états financiers certains, mais l'Assemblée nationale,
à ma connaissance, ne s'est jamais prononcée et
j'espère qu'elle n'aura jamais à se prononcer sur une
sorte d'évaluation de ce qui peut-être, en cours d'année,
ne serait pas dépensé ou le serait, selon des gens dont le coup
d'oeil peut être professionnel, mais dont les évaluations n'auront
jamais de valeur légale, cela va de soi.
M. Scowen: M. le ministre, je ne suis pas du tout d'accord avec
vous. Au début de l'année, on nous a demandé d'approuver
des crédits certains, comme vous les appelez, dans le budget de
1979/80.
A titre d'exemple, pour le ministère des Affaires
intergouvernementales, il s'agissait de $36 845 000, et ce que vous êtes
en train de me dire maintenant c'est qu'en effet ce n'étaient pas des
crédits certains, que vous saviez à l'époque qu'il y
aurait certainement des crédits périmés, vous avez eu des
expériences dans ce ministère depuis quelques années,
c'est un chiffre qui n'était pas révélé à la
fois et vous saviez, à l'époque, que tous ces crédits de
$36 845 000 ne seraient pas versés. Je pense que ce n'est pas une
information adéquate pour ceux qui sont appelés à
approuver les crédits, quand vous savez dès le début qu'il
y aura des crédits périmés, ce ne sont pas des
crédits certains.
Vous venez de prouver, avec les crédits périmés
dont vous dites qu'ils sont habituels, que vous les attendez mais vous ne
voulez pas révéler à l'Assemblée nationale ou
à la population que ce que nous approuvons, ce ne sont pas des
crédits certains, comme vous les appelez.
M. Parizeau: M. le Président, on recommence la
démonstration. Quand je dis au député de
Notre-Dame-de-Grâce que l'estimation qu'on se fait en cours
d'année se réalise avec des marges d'erreur relativement faibles,
ce n'est pas ministère par ministère, c'est au total. Il y a
toujours une espèce de proportion des crédits dans l'ensemble qui
ne se réalisera pas. Mais s'imaginer qu'au début d'une
année ce serait vraiment du délire l'on puisse
dire: Nous votons $35 millions de crédits, par exemple, pour un
ministère, nous les votons et ce sont les crédits qui sont
alloués à ce ministère, qu'est-ce qui peut faire en sorte
que les $35 millions ne soient pas totalement dépensés? Exemple,
un sous-ministre tombe malade ou un ministre tombe malade et un délai de
quinze jours ou trois semaines se fait dans les CT, c'est-à-dire dans
les autorisations du Conseil du trésor: à cause de cette maladie,
cela peut déplacer quelques centaines de milliers de dollars à la
fin de l'année. (21 h 50)
Deuxième hypothèse, un certain nombre de fonctionnaires
qui devaient aller faire une mission à l'étranger sont retenus
par un dossier fédéral-provincial plus urgent, un certain type de
dépenses ne se fera pas. Il est clair comme de l'eau de roche qu'on ne
peut pas, au début d'une année, prévoir des choses
pareilles.
Passons au ministère des Transports ou des Travaux publics. Le
montant des crédits périmés dépend pour une bonne
mesure du temps. Est-ce qu'il a beaucoup plu à l'automne ou pas? Quand
est-ce que la neige est disparue? Je ne suis pas comme certains Indiens, je ne
peux pas prévoir la durée de l'hiver. Il y en a qui arrivent,
moi, non, je suis plus humble que cela. Si le député de
Notre-Dame-de-Grâce me dit: Dès le mois de mars, quand vous
présentez les crédits, auriez-vous l'obligeance de nous dire
combien de sous-ministres seront malades et à quel moment l'hiver va se
terminer? M. le Président, j'en suis totalement incapable.
M. Scowen: M. le Président, ce que le ministre vient de
nous dire, c'est que les crédits périmés, il a
donné les exemples, sont normalement le résultat de
l'imprévu. J'accepte complètement que ce
soit le cas. C'est exactement le même cas dans la demande des
crédits supplémentaires. Ils sont toujours à cause de
l'imprévu.
Pour ne pas retarder la discussion éternellement, je veux
simplement que le ministre répète maintenant pourquoi, comme
comptable en chef de l'économie du Québec, il refuse aux
actionnaires du Québec, à la population, de faire savoir,
ministère par ministère, pourquoi il y a des crédits
périmés, ministère par ministère, au même
moment où on demande, pour les mêmes types d'imprévus, des
crédits supplémentaires. Quel est son raisonnement, devant la
population? Pourquoi refuser cette information à tout le monde?
M. Parizeau: Quand je demande des crédits
supplémentaires, ce n'est pas pour des imprévus, c'est pour des
prévus. C'est parce qu'en mars on ne savait pas qu'on aurait une
réunion des ministres canadiens à Pointe-au-Pic, pour que je
demande des crédits supplémentaires. Elle a eu lieu, cette
réunion, il faut bien la payer. En mars, on n'avait pas pris la
décision d'ouvrir une délégation au Mexique; là, la
décision est prise et on va l'ouvrir. Ce n'est pas de l'imprévu,
c'est du prévu!
Les budgets supplémentaires de l'automne, ce sont des
corrections. Ce n'est pas de l'imprévu. C'est peut-être de
l'imprévu par rapport au mois de mars précédent, mais pas
rendu au mois de novembre. Au mois de novembre, on prévoit et on
présente des corrections de budget. Les crédits
périmés, ce n'est pas ça. Cela change constamment, les
crédits périmés, de mois en mois. Par exemple, je vais
donner un autre cas que nous connaissons bien: les grèves. On peut
prévoir un certain nombre de perturbations dans quelques réseaux
gouvernementaux, comme chacun le sait; d'ici le mois de mars, est-ce qu'on peut
rattraper le temps perdu ou non? Un peu? Beaucoup? Passionnément? A la
folie, ou pas du tout? C'est très difficile à dire, les gens
viennent de rentrer au travail, dans certains réseaux.
La prévision de crédits périmés
ministère par ministère pour chacun des réseaux
gouvernementaux, forcément, on la fait au pifomètre et, la
semaine prochaine ou le mois prochain, on en fera une autre. Il s'agit
essentiellement d'une estimation qui est extrêmement aléatoire
d'un ministère à l'autre, mais qui, à cause de la loi des
grands nombres, fait qu'à la fin de chaque année, on se rend
compte qu'il y a toujours $350 millions ou S360 millions de crédits
périmés. Une vieille expérience nous apprend cela, mais il
faudrait bien comprendre que, si on commençait à sortir des
tableaux de répartition par ministère, par programme et par
élément de programme de crédits périmés, on
cherchera à jouer à Dieu, ou à remplacer la
température.
M. Scowen: Une dernière brève question. Je veux
simplement demander si le ministre est satisfait de sa dernière
réponse à ma question.
M. Parizeau: M. le Président, il est maintenant 9 h 55. Je
vais recommencer pour une quatrième fois. Allons-y! Je reprends.
M. Scowen: Parce que c'est plutôt nécessaire?
M. Parizeau: II y a dans les crédits...
M. Scowen: Je vais répéter ma question parce que le
ministre n'a pas essayé de répondre la première fois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
que le ministre a compris votre question.
M. Scowen: Vous pensez qu'il a finalement compris?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, est-ce que vous voulez que le député de
Notre-Dame-de-Grâce répète sa question?
M. Parizeau: Moi, M. le Président, je suis d'une patience
exemplaire ce soir, il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Allez-y,
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Parizeau: Si le député veut reposer sa question,
je vais remettre ma réponse.
M. Scowen: J'aimerais que le ministre, brièvement,
explique à la population et à l'Assemblée nationale
pourquoi, comme comptable en chef, si vous voulez, des finances du
Québec, il refuse de donner à la population les détails,
ministère par ministère, pour les sommes qui ne sont pas
versées, mais qui ont été votées, quand il est
prêt à donner l'information sur les crédits
supplémentaires qui sont l'équivalent, dans l'autre sens, qu'il
demande. Pourquoi un et pas l'autre, ministère par ministère?
M. Parizeau: Je reprends, M. le Président. Il y a des
gestes officiels que nous avons à poser, comme Assemblée
nationale. Ces gestes sont l'approbation de crédits; ces crédits
sont des autorisations de dépenser. Pas des certitudes de
dépenser, des autorisations de dépenser. Si, effectivement, ce
soir, nous venons d'autoriser l'ouverture d'une délégation
à Moncton qui comprend un chef de poste et une secrétaire,
advenant il y a un montant pour la secrétaire qu'on prenne
trois semaines de plus pour la recruter parce qu'on ne trouve pas la bonne du
premier coup, il y aura trois semaines d'économisées sur son
salaire. Le crédit aura été autorisé mais, à
la fin de l'année, il n'aura pas été
dépensé.
Ce que nous approuvons, ce sont les crédits autorisés.
C'est là-dessus que nous votons. Alors, on me demande: Pourquoi ne
pouvez-vous pas prévoir, exactement, ministère par
ministère, si toutes les secrétaires seront recrutées
à temps ou à quel moment précis de l'hiver la
dernière tempête de neige aura lieu. M. le Président, je
suis incapable de répondre à cela.
M.Scowen: C'est la caricature pure et simple de ma question, M.
le ministre, et vous le savez.
C'est la caricature et on n'a pas besoin de cela. Pourquoi ne
réponds-tu pas à la question?
M. Parizeau: M. le Président, je n'ai pas l'habitude de
tutoyer nos amis d'en face et il ne me plaît pas beaucoup qu'on le
"fisse". Néanmoins, je reviens, après cet épisode
touchant, à la question posée.
On me demande, comme comptable des fonds du gouvernement, pourquoi je ne
fais pas approuver par l'Assemblée nationale des crédits
périmés. C'est pour une raison très simple. C'est que le
gouvernement ne les demande pas à Sa Majesté, les crédits
périmés. Il ne les fait pas approuver par l'Assemblée
nationale. C'est simplement une estimation de ce qui, dans notre meilleur
jugement, est susceptible de ne pas être dépensé à
même les crédits adoptés par l'Assemblée. On
pourrait dire: II n'y aura pas de crédits périmés. On ne
nous croirait pas parce que chaque année, il y en a. On
préfère indiquer qu'il y en aura. On préfère
indiquer une impression de la masse des crédits périmés
susceptibles de se produire, mais les crédits périmés
n'ont jamais été approuvés par l'Assemblée
nationale. L'Assemblée nationale vote des crédits, ce que nous
lui proposons ce soir, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): Je regrette, M. le ministre,
mais je dois faire rapport.
M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la
commission plénière n'a pas fini de délibérer et
demande d'être entendue à une autre séance.
Le Vice-Président: Quand siégera-t-elle? Une
Voix: A la prochaine séance.
Le Vice-Président: A la prochaine séance. Les
travaux de l'Assemblée sont ajournés à mardi, 14
heures.
Fin de la séance à 22 heures