Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures une minute)
Le Président: À l'ordre! Nous allons nous
recueillir quelques instants.
Veuillez prendre vos places.
Présentation du haut-commissaire de
l'Inde
Vous me permettrez de présenter aux quelques collègues
matinaux qui sont ici ce matin le haut-commissaire de l'Inde, Son Excellence M.
Kalarickal Pranchu Fabian, qui est dans la tribune ce matin.
Reprise du débat sur la motion du premier
ministre
Ce sur quoi nous poursuivons le débat aux affaires du jour sur la
motion du premier ministre: "Que cette Assemblée reconnaisse l'existence
au Québec des nations abénaquise, algonquine, attikamek, crie,
huronne, micmaque, mohawk, montagnaise, naskapie et inuit; "Reconnaisse leurs
droits ancestraux existants et les droits inscrits dans les conventions de la
Baie James et du Nord québécois et du Nord-Est
québécois; "Considère que ces conventions, de même
que toute autre convention ou entente future de même nature, ont valeur
de traités; "Souscrive à la démarche que le gouvernement a
engagée avec les autochtones afin de mieux reconnaître et
préciser leurs droits, cette démarche s'appuyant à la fois
sur la légitimité historique et sur l'importance pour la
société québécoise d'établir avec les
autochtones des rapports harmonieux fondés sur le respect des droits et
la confiance mutuelle; "Presse le gouvernement de poursuivre les
négociations avec les nations autochtones en se fondant, sans s'y
limiter, sur les quinze principes qu'il a approuvés le 9 février
1983 en réponse aux propositions qui lui ont été
transmises le 30 novembre 1982 et à conclure avec les nations qui le
désirent ou l'une ou l'autre des bandes qui les constituent des ententes
leur assurant l'exercice: "a) du droit à l'autonomie au sein du
Québec; "b) du droit à leur culture, leur langue, leurs
traditions; "c) du droit de posséder et de contrôler des terres;
"d) du droit de chasser, pêcher, piéger, récolter et
participer à la gestion des ressources fauniques; "e) du droit de
participer au développement économique du Québec et d'en
bénéficier, "de façon à leur permettre de se
développer en tant que nations distinctes ayant leur identité
propre et exerçant leurs droits au sein du Québec.
"Déclare que les droits des autochtones s'appliquent également
aux hommes et aux femmes; "Affirme sa volonté de protéger dans
ses lois fondamentales les droits inscrits dans les ententes conclues avec les
nations autochtones du Québec; et "Convienne que soit établi un
forum parlementaire permanent permettant aux autochtones de faire
connaître leurs droits, leurs aspirations et leurs besoins".
Je cède la parole au député de Vachon.
M. David Payne
M. Payne: Merci, M. le Président. Effectivement, cette
motion s'adresse aux droits des autochtones. Je crois que s'il y a une
déclaration, une proposition, une motion à cette session, qui
doit être considérée en premier lieu ce doit sûrement
être la motion qui touche les autochtones.
Au moment même où le peuple québécois tient
à mettre en évidence sa propre spécificité dans
toutes ses dimensions, je pense qu'il est opportun que le gouvernement du
Québec perçoive et reconnaisse qu'un pareil projet ne peut avoir
de sens que si on arrive à tenir rigoureusement compte de la
spécificité de nos peuples autochtones. À mon avis, une
telle spécificité exige que le gouvernement du Québec
s'engage à régler le très lourd contentieux politique
autochtone dans la justice, la dignité et le respect de ces droits
collectifs.
Je vous ferai part, d'abord, de quelques données pour vous
permettre de voir le portrait de la population autochtone
québécoise. Près de 35% des Indiens du Québec
habitent les régions urbanisées du sud comme les Hurons, les
Mohawks, les Abénaquis et les Micmacs, tandis qu'à peu
près 65% se retrouvent dans les zones plus nordiques et moins
urbanisées, par exemple, les Attikameks, les Montagnais, les Cris et les
Algonquins. Ces huit groupes représentent deux grandes familles
linguistiques au Québec. Tous ces gens sont regroupés dans une
quarantaine de communautés dont la plupart ont le statut juridique de
bandes occupant des réserves. Ils sont répartis un peu partout
sur le territoire québécois. Les Inuit, quant à eux,
habitent les quatorze
villages, comme on le sait, entre la baie d'Ungava et la baie d'Hudson
sur la côte arctique du Québec et ils regroupent des villages
comme Povungnituk, Ivujivik, Saglouc, Ikaluit, Koartak, Quaqtac. Ce sont les
Inuit d'à peu près quatorze villages regroupant un nombre
d'environ 1400 personnes dans les petits villages.
Le contentieux autochtone existe depuis fort longtemps. Plusieurs des
droits de cette population étaient d'ailleurs énoncés dans
une clause que la France elle-même avait insérée dans
l'Acte de capitulation de Montréal, clause reprise en 1763 dans une
proclamation du roi d'Angleterre, des droits d'ailleurs qui étaient
reconduits en 1912 au moment où le Québec a fait l'acquisition
d'un certain nombre de terres de Rupert.
Il est à noter, cependant, dans le contexte de cette motion que
la motion s'adresse à la reconnaissance que le Québec doit aux
autochtones - c'est important - la reconnaissance des nations autochtones, la
reconnaissance de leurs droits ancestraux, la reconnaissance des droits
à leur culture, leur autonomie au sein du Québec. Mais, à
mon avis, la reconnaissance appelle le respect et, le respect, cela ne se
légifère pas.
La motion du premier ministre portant sur la reconnaissance des droits
des autochtones repose, selon mon analyse, sur trois principes.
Premièrement, une mise en garde que le gouvernement se donne
lui-même, c'est-à-dire qu'on rejette implicitement au moins toute
tentative de définir l'avenir des autochtones à leur place. Il
revient donc d'abord à ces communautés de décider de leur
développement. Pour quelqu'un, comme d'autres, qui a passé
beaucoup de temps avec les communautés du Nord, particulièrement
les Inuit mais aussi avec les bandes du Sud, je pense que si on apprend quelque
chose, Dieu sait qu'on apprend tout le temps de leur culture, de leurs
traditions, de leur système démocratique, tout gouvernement
devrait rejeter toute tentative de définir leur politique à leur
place.
Il y a un deuxième principe que j'ai vu, M. le Président,
et c'est celui-ci: Que les autochtones, sous prétexte que l'on respecte
leur autonomie, ont droit à un appui formel, positif et actif de
l'État québécois dans la poursuite de leurs mêmes
objectifs. Voilà les deux principes.
Le troisième principe que j'ai déniché dans cette
motion de ce matin est le suivant: En vue de concilier ces trois principes, je
crois que les autochtones doivent garder la responsabilité d'inventer
les institutions qui leur conviennent. Il n'y a rien de pis si en reconnaissant
certains droits, le droit à la culture, le droit de s'exprimer, le droit
à leurs institutions, si on voulait par la suite inventer et même
imposer les institutions qu'ils voudraient, eux, créer, inventer et
façonner selon leurs propres priorités. À cet
égard, je pense que le gouvernement du Québec, sans se
péter les bretelles, peut dire au moins qu'on a fait pas mal d'efforts
pour, justement, faire en sorte que nos lois, nos directives, nos
règlements, émanant de l'Exécutif et de l'administration
publique, soient flexibles. Souvent, trop souvent, les lois du Sud, celles du
Blanc, s'accommodent mal aux moeurs des autochtones. (10 h 10)
Je peux vous donner deux exemples. Sans entrer dans les détails,
on avait quelque chose qui était assez épineux dans les villages
de Povungnituk, Saglouc et Ivujivik, il y a quatre ans, concernant une question
d'école. Bref, ces trois villages ne voulaient pas respecter le mandat
confié par la loi du Sud pour cette partie du nouveau Québec. Ils
ne respectaient donc pas la responsabilité de la Commission scolaire du
nouveau Québec. Je me souviens des discussions longues et difficules
qu'on a eues avec les responsables. Finalement, le gouvernement du
Québec a signé un accord avec les villages qui étaient
devenus les villages dissidents et qui avaient d'ailleurs leurs propres
revendications face à la convention de la Baie James. Il y avait une
entente de signée. Jusqu'à ce moment-ci, cela va bien, c'est la
souplesse que le législateur, je pense, a apportée dans la mise
en application de sa propre loi.
On a vu dernièrement la même chose -on s'en souvient
également - c'était avec la communauté mohawk, la bande
mohawk à la réserve de Caughnawaga. La question de la
construction d'un hôpital et la gestion du même hôpital par
les autochtones s'est avérée un net et un franc succès.
J'ai rencontré Andrew Delisle au colloque international qu'on a eu, la
semaine dernière, au Château Frontenac, sur les droits des
minorités. On avait reçu, d'ailleurs, la visite de Peres de
Cuellar, secrétaire général des Nations Unies qui pouvait
parler du problème des minorités dans le monde, les
minorités visibles. Il y avait également une partie de la
conférence qui était adressée aux autochtones. Lorsque
j'ai parlé à Andrew Delisle, il a dit: Chez nous, les questions
de l'hôpital, cela fonctionne très bien. Un exemple de souplesse
de la part du législateur face aux priorités des autochtones.
On ne rendrait pas justice à la vérité si on ne
signifiait pas au moins d'une manière modeste, ne serait-ce que pour les
fins de la comparaison, que la motion d'aujourd'hui a une portée
particulière, et dans son application, elle va beaucoup plus loin que
des dispositions semblables dans d'autres Législatures provinciales au
Canada. Pour ma part, de telles garanties devraient normalement trouver leur
place dans une constitution du Québec. J'appuie
formellement la motion, mais je pense que beaucoup de
préoccupations enregistrées par l'Opposition et de notre
côté, à savoir de quelle manière on peut renforcer
les droits, devraient trouver une solution raisonnable, juste et
équitable dans une constitution québécoise. Je reviendrai
là-dessus un peu plus tard.
Il a aussi été question plus tôt dans le
débat d'enchâsser de tels droits dans la constitution du Canada,
mais, à cet égard, j'aurais deux préoccupations; cela
touche les préoccupations soulignées hier par le
député de Mont-Royal. Mes préoccupations sont les
suivantes. D'abord, comment le gouvernement du Québec pourrait-il
transférer - n'importe quel gouvernement du Québec - ses propres
compétences en matière d'éducation, de culture, de
santé et de communications au gouvernement fédéral, peu
importe le gouvernement? Et ma deuxième préoccupation est la
suivante, non moins réaliste et pragmatique: De quelle manière le
sort des autochtones pourrait-il être amélioré si une
province, devançant déjà les provinces partenaires dans la
reconnaissance des droits des autochtones, décide de ne rien
enchâsser dans une constitution propre à elle, avant même
l'enchâssement dans la constitution du Canada? Ce serait un geste
répugnant. Ce serait une manière de retarder la reconnaissance
des droits des autochtones et je ne peux pas appuyer la proposition qui a
été faite par l'Opposition. Non, je pense qu'un progrès se
fait par un chemin plus rapide et moins hasardeux si l'Assemblée
nationale du Québec adopte une politique claire, précise,
progressiste, et cela, dans les plus brefs délais par cette
Assemblée, et de façon unanime.
I should like to express a few words to our native communities who do
not speak French, because the thrust and the purpose of this motion, Mr.
Speaker, cannot be underestimated. And, as I was saying before, there is very
little that can be found in Provincial Legislatures throughout Canada that can
be comparable to the kind of declaration which we are voting today. Because it
is a start and it is a bold start.
It says: "The Assembly recognizes the existence of the Abenaqui,
Algonquin, Attikamek, Cri, Huron, Micmac, Mohawk, Montagnais, Naskapi and, of
course, the Inuit nations". Recognition is a word, at least in English and as
much in French, which goes a long way. You cannot recognize somebody or you
cannot recognize an institution without certain responsibilities being
accrued... to the person who is making the recognition. If I recognize you as
the Speaker, it is because you have a certain function, a delegated function
and that recognition has certain obligations on me and on my colleagues. That
is the whole philosophy of the notion of recognition.
Secondly, we recognize existing ancestral rights and rights drawn up,
for example, in the James Bay Agreement. Because, very often in the past,
rights, even though the were supposedly existing, (the ancestral rights in
particular) were very much questioned under the philosophy that the conqueror
took away all rights.
Thirdly, this Legislature, the National Assembly, considers these
agreements and future conventions, which we may draw up, as having the value of
a treaty. That, I think, is a sacred word to the native peoples. To put your
signature to something means to give your honor and a treaty is something which
goes far beyond a symbolic reference to recognition.
The Legislature supports also the steps the Government is taking to
better recognize and clarify their rights. This, obviously, is based on the
historical legitimacy and on the importance for Québec society to have
harmonious ties with its native peoples, based of their respect, on the respect
for their rights and on a certain mutual confidence. I think, with respect to
the number of meetings that we have had with the native peoples over the last
seven or eight years, with summits, mini-summits, whether it was in Fort Chimo,
whether it was in Povungnituk or Saglouc, whether it was in Poste-de-la-Baleine
or whether it was in Québec city, I think that we can say that we have
made progress. I refer to a discussion I had sometime ago with Billy Diamond
and similarly with Andrew Delisle, this kind of progress, this kind of climate
takes time, takes understanding. That is the spirit of that part of the motion
today. This Legislature supports these steps of the Government, steps that have
been taken already to better recognize and clarify their rights as they have
been worked out in the meetings. This step is based not only on the historical
legitimacy of their claims, but also on the importance of Québec society
to have harmonious ties its Native peoples.
I think that this is some thing which we have neglected in the past.
Very often, prejudice and the prejudice that has resulted from prejudice -
here, we are talking about the Native peoples when they come to live in the
South, or work temporarily in the South - are based on ignorance. How much more
we can do as a Government and the institution responsible for carrying out this
policy to in fact reduce that kind of prejudice to better integrate and welcome
Native peoples into the mainstream of Québec life in the degree in which
they would choose themselves. (10 h 20)
And so further, to press the Government - this is the last part of the
proposal - to pursue its negotiations with
Native peoples on the basis of the 15 principles which they themselves
drew up on the 9th of February 1983 with a view, obviously, to drawing up new
agreements... I do not think that the Government can easily ignore the
proposition which was put to them on the 9th of February 1983. We have a first
reply to that, from the Government of Québec, the National Assembly,
Members of the National Assembly, this morning. But that has to be followed up
in a very practical way. I think that our Legislature, the National Assembly,
has the vocation, the role and the mission to remember to the Government, to
recall to the Government what are those 15 principles and to what extent they
can be followed through.
But to give a very practical example today - here, I conclude, Mr.
Speaker - we already allude right to the very beginning -this is a step
forward, I think, and I hope that other provinces throughout Canada are
listening - the right to autonomy in Québec, the right to culture,
language and traditions. We know, for example, the efforts which have been made
by SAGMAI and Government institutions to translate material into Native
languages, to allow justice to be made accessible in Native tongues and to have
a cultural and socio-cultural framework whereby the language and the culture
can be respected. There is no one culture which is precisely and exactly like
another.
Thirdly, the right to possess but, no less important, the right to
dispose of their lands, the right to hunt, to fish and to trap, the right to
take part in the economic development of Québec and benefit from it, in
order that the native groups may develop their own distinct and recognized
nations in Québec.
In addition, this contentious issue, which has suffered so much at the
hands of a federal policy which is outdated, inapplicable and downright
prejudicial to women's interest in Canada and in Québec, the National
Assembly, if this is voted, declares that native rights apply to men and
women.
Finally, the National Assembly affirms that it has the will to respect
the rights of Natives and to respect the treaties. The National Assembly agrees
more over in a final disposition of this motion, to set up a permanent
parliamentary forum where Native people can make known their rights, their
needs and their aspirations.
I think that that is one of the most important recommendation out of
this motion, precisely that the native people can find here, in the National
Assembly, a reflection, as well as a respect, for their own aspirations, for
their own needs, because if Québec is anything of value to itself, it is
a value to the people of the outside world by its own collectivity. That
includes not francophone, not anglophone, but primarily the founders, the first
inhabitants of this land which go back many thousand of years long before the
francophone or the anglophone.
This is our heritage which we are proud and hopefully the motion before
the floor this morning, Mr. Speaker, will be a modest gestuse to all that
recognition of the grand inheritance that we have received, as Quebeckers, from
our own Native peoples. Je vous remercie.
Une voix: Très bien!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Charlesbourg.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté: M. le Président, c'est avec plaisir
que je prends la parole ce matin sur la motion déposée par le
premier ministre et à propos de laquelle le député de
Mont-Royal a fait part des intentions du Parti libéral de voter contre
pour certaines raisons que je vais tenter de vous expliquer dans les quelques
minutes qui sont mises à ma disposition.
Pour une bonne compréhension du dossier, il s'agit de faire un
rappel de certains événements qui se sont produits principalement
depuis novembre 1982. Souvenons-nous que le 30 novembre 1982 les autochtones
faisaient parvenir au premier ministre une lettre dans laquelle ils
revendiquaient quinze points.
Le 10 février 1983, quelque quatre mois plus tard, le premier
ministre répondait sur certains points de la lettre du mois de novembre
des autochtones, ce qu'on peut appeler une réponse restrictive quant
à la portée des revendications des autochtones.
En mars 1983 - tout cela se tassait, c'était important de
créer de l'animation, il y avait une conférence constitutionnelle
sur les droits des autochtones qui se tenait à Ottawa. Il faut se
rappeler que M. Trudeau était encore, à l'époque, premier
ministre du Canada. M. Lévesque a fait un choix personnel.
Frustré de ce qui s'était produit en 1981, aux lendemains de
l'élection, M. Lévesque a décidé de participer aux
conférences constitutionnelles, mais à titre d'observateur. Il
est donc allé à la conférence, à titre
d'observateur, n'utilisant pas son droit de parole alors que les autochtones
avaient dit au premier ministre, à l'époque: Soyez pleinement
conscient qu'en étant observateur, vous ne défendez pas les
droits des autochtones du Québec. C'est exactement ce qui s'est
passé.
Le 1er novembre 1983, les autochtones font des contre-propositions au
premier ministre, en réponse à sa lettre du 10 février. Le
24 novembre 1983, en commission
parlementaire, ici même à l'Assemblée, le premier
ministre s'engage à déposer devant l'Assemblée nationale
une résolution - c'était il y a deux ans - et le premier ministre
espère même aller plus loin que ce qui a été
discuté en commission. On verra tantôt les conséquences de
tout cela.
Décembre 1983, préparation d'une résolution qui ne
sera d'ailleurs jamais déposée devant l'Assemblée. Cette
résolution allait beaucoup plus loin que celle qui est devant
l'Assemblée actuellement. Ce qu'il faut cependant dire, c'est que les
autochtones, même si cela allait plus loin, n'étaient pas
satisfaits de cette résolution.
Décembre 1984, le premier ministre dépose la
résolution qui est devant cette Assemblée, sans aucune
espèce de consultation des personnes visées qui auront à
vivre avec cette résolution.
Janvier 1985, télégrammes, lettres des autochtones qui se
sentent lésés - aucune consultation - et qui n'acceptent pas du
tout le libellé et le texte de la motion déposée par le
premier ministre. Nous sommes aujourd'hui en mars où le temps presse
d'adopter une résolution, parce que en avril se tiendra à Ottawa
une nouvelle conférence constitutionnelle sur les droits des autochtones
et il faut que le premier ministre aille là-bas - maintenant que les
beaux risques sont à l'ordre du jour -défendre les droits des
autochtones. Cela prend donc une résolution de l'Assemblée, sans
nécessairement avoir reçu l'appui et l'accord des autochtones,
des personnes directement visées par la résolution.
Je voudrais, à ce moment-ci, puisque le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche et député du Lac-Saint-Jean est venu
hier soir nous lire un texte certainement préparé par un de ses
fonctionnaires qui s'occupent du dossier, un texte avec lequel, d'ailleurs, il
ne semblait pas du tout à l'aise. Le texte était en deux temps:
il parlait d'hier et de demain. Hier, le ministre se félicitait que son
gouvernement ait réussi à signer des ententes quant à
l'exploitation de certaines rivières à saumon, quant au
prélèvement de la ressource avec les autochtones dans
différentes rivières de la Gaspésie et de la
Côte-Nord. Le ministre, tout pompeux, disait: C'est une première,
on a réussi à s'entendre. Hier matin, lors de l'étude des
engagements financiers, il disait: On espère avoir des ententes à
plus longue portée, de trois ou cinq ans même, pour éviter
les répétitions des affrontements du passé. Ce que le
ministre a oublié de nous dire, c'est que ces ententes ont
été forcées par des manifestations des autochtones. Ce que
le ministre a oublié de nous dire, c'est que l'un de ses
prédécesseurs à la tête du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, l'ex-député de
Saguenay, avait, lui, pris la méthode forte pour régler les
problèmes au niveau de Restigouche. De quelle manière avait-il
qualifié les autochtones à l'époque? C'est un langage qui
lui appartient et l'histoire le jugera quant à sa pensée sur les
droits des autochtones. Le ministre n'en a pas parlé hier. (10 h 30)
Deuxièmement, comme réalisation extraordinaire, le
ministre nous disait: À l'intérieur de la résolution il y
a reconnaissance de la Convention de la Baie James et du Nord
québécois, droit confirmé officiellement par la motion.
Comme si c'était extraordinaire! Il a oublié de dire que cette
convention a été signée sous un gouvernement
libéral grâce aux bons offices du député de
Mont-Royal qui a négocié avec les autochtones et qui s'y connatt
grandement dans ce domaine et qu'une loi adoptée par l'Assemblée
nationale reconnaît tous ces droits déjà. Ce n'est pas une
motion de dernière minute du premier ministre qui va ajouter au poids de
cette loi.
Ayant parlé d'hier, c'était cela le bilan au niveau des
autochtones. Il dit: Maintenant, envisageons l'avenir. Qu'est-ce qu'on peut
offrir? Actuellement, on est en négociation ou on amorce des
négociations dans le but de concéder des territoires additionnels
pour les autochtones. On a pensé à deux moyens: des concessions
réservées uniquement à l'utilisation d'autochtones et des
pourvoiries et des sociétés de gestion qui seraient
administrées et gérées par des autochtones mais auxquelles
tous les Québécois ou les étrangers auraient accès
en y payant un droit et administrées par les autochtones.
Le ministre est venu nous dire cela, hier soir, dans un discours parce
qu'il en a été question au ministère hier. On a même
défini deux territoires potentiels que la communauté huronne de
la région de Québec qui revendique depuis de nombreuses
années un territoire à elle pourrrait avoir. On a parlé
d'un territoire aux alentours de La Malbaie et on a parlé d'un
territoire près du Triton.
Le ministre aurait pu aller aussi loin que cela et dire que c'est
très avancé, qu'on progresse, qu'on a même
déterminé des territoires et qu'on se dirige vers cela. Il n'en a
pas parlé. Il a parlé des grands principes. Après cela,
c'est fini. Le ministre est revenu, comme lui seul est capable de le faire,
à son théâtre: Des mots, bonne prononciation, des mots, des
mots, sans aucune espèce de substance.
Mais pour être capable de juger si le ministre, dans le peu qu'il
a avancé, est sérieux, si on peut comme d'autres prendre sa
parole, il faut aller vérifier dans le passé ce qui s'est fait au
ministère. Prenons un exemple où les autochtones sont directement
impliqués: les caribous. On se souviendra de la tragédie des
caribous: 10 000 caribous noyés dans la rivière Caniapiscau.
Quelle a
été l'attitude du ministère? Le ministre actuel
n'était pas là à l'époque; c'était son
prédécesseur mais il doit assumer les responsabilités de
son prédécesseur.
Dans un document rendu public par l'Opposition libérale qui a
fait une analyse très sérieuse du dossier, on a conclu à
une incompétence crasse du ministère tant dans la conservation de
la faune que dans l'administration de la Loi sur la conservation de la faune.
Il y a des questions qui se posent et qui se sont posées. M. le
Président, je ne veux pas les reprendre toutes mais il y a des
constatations très sérieuses.
Souvenez-vous à l'époque, en plus d'avoir noyé les
caribous, pour tenter de noyer le poisson, pour que la responsabilité ne
revienne pas sur le ministère, il y a un brillant en communications du
MLCP qui avait décidé qu'il y avait une étude sur la
commercialisation du caribou et on l'a sortie en même temps pour mettre
le focus sur la commercialisation, possibilité de création
d'emplois dans le Nord et d'exploitation du troupeau de caribous à des
fins commerciales. On a dévié du débat et on a dit
parfait, oublions cela.
On n'en a plus entendu parler sauf hier, aux engagements financiers du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, où le
ministre est venu nous dire: Oui, c'est prévu pour une exploitation en
1987, mais entre-temps on doit compléter les études quant au sexe
des animaux, quant à la proportion des petits par rapport aux
mâles, par rapport aux adultes. Toute une série d'études
qui sont encore à être données par le ministère de
façon à éclairer le dossier. C'est ce que le ministre est
venu nous dire hier. Il aurait pu nous dire: Je ne connais pas le dossier -
cela aurait été bien plus honnête - et je reconnais que le
ministère n'a pas fait son travail dans le cas des caribous et nuit
ainsi finalement à tous les droits des autochtones.
Ce qui est étonnant, M. le Président, c'est que le
ministère a été avisé, et c'est sur ce point que je
veux insister. Le 25 septembre 1984, les autochtones - c'est quelques jours
avant la tragédie - ont avisé le ministère qu'il se
préparait une catastrophe parce que le niveau de l'eau de la Caniapiscau
était très élevé, même le double du niveau
habituel. Qu'est-ce qu'on a eu comme réaction du ministère? Rien!
La catastrophe se produit. La réponse du ministère: C'est une
hécatombe, bien sûr, mais c'est un phénomène de la
nature, c'est la nature qui est responsable de cela. Lorsque j'ai
interrogé le ministre hier sur le rapport interne du ministère
dont un biologiste a laissé couler une partie en disant que
c'était effectivement une catastrophe naturelle, ils l'ont remis au
SAGMAI. Mais on n'est même pas sûr qu'on va le rendre public parce
que peut-être que cela irait à l'encontre de la SEBJ et
peut-être que cela irait à l'encontre du SAGMAI aussi en termes de
rapport. Donc, dans un cas comme celui-là, le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche est sous la tutelle du SAGMAI. Quand
le ministre vient nous ronronner des intentions, comme il l'a fait hier, cela
ne fait pas sérieux. C'est comme un gars qui vient faire du
théâtre et dire des mots, et il est un spécialiste dans ce
domaine au ministère.
On a donc l'expérience des caribous. Elle est là,
l'expérience. Très bientôt, la vérité sortira
quant à la responsabilité du ministère.
M. le Président, il arrive quelquefois qu'on trouve des
documents. Pour savoir jusqu'à quel point le ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche a à sa tête un homme qui prend
ses responsabilités, qui s'impose au cabinet, j'ai mis la main sur un
rapport du ministère concernant les négociations avec le Conseil
Attikamek-Montagnais. Très intéressant! Vous me permettrez de
vous en lire un petit bout, cela va vous dire très nettement où
se situe le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche dans
toutes les négociations. Ce qui veut dire que M. Gourdeau, du SAGMAI,
peut dire au ministre, député de Lac-Saint-Jean: Tu n'as pas
beaucoup d'expérience, petit garçon, tasse-toi donc un peu!
Laisse-nous aller et on t'apprendra ce qu'on va décider. Il est dit
textuellement dans le rapport, à la page 7: "Le Québec n'a pas
encore défini clairement sa politique de négociation, mais il a
clarifié plusieurs points en réponse à une demande
expresse faite par le CAM." On fait référence aux quinze points
que les autochtones ont revendiqués auprès du premier ministre.
C'est là que cela devient intéressant: "Des comités de
travail ont été formés: un comité d'orientation, un
comité de stratégie. Plusieurs réunions ont eu lieu; 12
à ce jour du comité de stratégie où le MLCP est
présent. Malheureusement, le MLCP n'est pas représenté au
comité d'orientation." D'une certaine façon, voici ce qu'on dit
au député de Lac-Saint-Jean, ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche: Vous pouvez assister aux réunions du comité de
stratégie pour vous informer un peu où on s'en va, mais sur le
plan de l'orientation, ne vous mettez pas le nez là-dedans, vous n'avez
pas affaire à cela! C'est clair, c'est écrit dans leur propre
document. Quand le ministre vient ronronner ici en nous disant qu'il va
défendre les droits des autochtones, je pense qu'il ne faut pas un
faiblard pour défendre les droits des autochtones, mais quelqu'un qui a
de la poigne. Quand on considère avec quelle facilité le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a pataugé
dans toutes les responsabilités du ministère concernant l'habitat
faunique, cela laisse
présager des jours très sombres quant au respect de ce
gouvernement des droits des autochtones.
M. le Président, comme il ne me reste que cinq minutes, je
voudrais aborder la dernière partie qui est celle de l'intervention
personnelle du premier ministre. Mon collègue de Mont-Royal, dans son
discours sur la motion, a relevé trois lacunes importantes, trois
raisons essentielles qu'il faudrait corriger pour que le Parti libéral
vote pour la motion et qu'elle soit conforme au moins à un minimum
d'aspirations des autochtones. C'est que le gouvernement, malgré les
contre-propositions des autochtones, s'en tient très
énergiquement aux positions du premier ministre du 10 février
1983. Je voudrais, à ce moment-ci, ne vous citer qu'un seul exemple de
l'intransigeance du premier ministre et voir ce que cela donne en termes
concrets. La revendication 14. Qu'est-ce que demandent les autochtones? Ce
n'est pas bien compliqué. Je suis convaincu que le député
de Mille-Îles peut comprendre cela, même l'adjoint parlementaire du
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le député
de Limoilou. Revendication 14: "Que tout amendement constitutionnel concernant
directement les peuples aborigènes soit soumis à leur
consentement". C'est un minimum. C'est leur avenir à eux. C'est la
demande des autochtones. (10 h 40)
Voici ce que répond le premier ministre: "S'il
légifère sur des sujets qui concernent les droits fondamentaux
reconnus par les nations autochtones, le Québec s'engage à les
consulter par le truchement de mécanismes déterminés avec
elles." Dans l'exercice, dans la pratique aujourd'hui, on a une motion qui les
concerne. Qu'est-ce qu'on reçoit depuis le mois de janvier? On
reçoit des télégrammes, des lettres des autochtones qui
disent: On n'a pas été consultés et on ne veut rien savoir
de cette résolution parce qu'elle ne correspond pas à nos
revendications. Premier point. Le deuxième: Le gouvernement du
Québec s'engage formellement à participer aux conférences
constitutionnelles. C'est drôle. Du temps où il était
séparatiste, du temps où il était indépendantiste,
avant le virage, dans la résolution dont on a parlé qui devait
être déposée et qui ne l'a jamais été, ce
dernier "souscrit à l'engagement solennel pris par le premier ministre
que le Québec participe ainsi qu'il l'a fait jusqu'à ce jour
à toutes les conférences constitutionnelles qui
intéressent directement les autochtones et auxquelles les autochtones
désirent qu'il participe." Maintenant qu'ils sont devenus
fédéralistes pour le beau risque, on regarde la résolution
du premier ministre. Ah! cette partie a été
éliminée. Qu'est-ce qui se passe? Donnez-nous des explications.
Cela presse, parce que vous êtes dans le trou.
Pierre-Marc Johnson est allé à la dernière
conférence constitutionnelle à titre d'observateur, lui, en bon
fédéraliste. Lui qui a donné le coup de barre pour le bon
virage fédéraliste est allé à une conférence
récente. Il dit: Je ne parle pas. Probablement parce qu'il n'avait rien
à dire ou parce que, finalement, le beau risque n'en vaut pas la peine.
Il va falloir qu'il finisse par montrer ses couleurs. Et, troisième
lacune, c'est que les droits des autochtones ne doivent en aucun cas être
soumis aux aléas d'un gouvernement provincial ou d'un gouvernement
fédéral. L'exigence, c'est que ces droits soient
enchâssés dans la constitution et c'est ce que le Québec
devrait aller revendiquer à Ottawa.
Deuxièmement, les faits. Le premier ministre, à une
commission parlementaire du 23 novembre 1983, disait très clairement, et
je le cite: "C'est évident que quant à nous, au moins,
sûrement, c'est un strict minimum en ce qui concerne la substance des
engagements qui avaient été pris à Ottawa par le
gouvernement fédéral. Forcément, on espère aussi
pouvoir ajouter des choses qui vont plus loin.", alors qu'actuellement, c'est
un recul. Et il disait le lendemain, en conclusion: "On va continuer à
participer -j'espère utilement - aux conférences
fédérales-provinciales et offrir par ce mécanisme
l'occasion - parce que je pense que cela a été utile la
dernière fois, au mois de mars 1983 - aux porte-parole des autochtones
du Québec qui désirent le faire, de venir avec nous pour
s'exprimer librement." Pensez-vous que les autochtones vont y aller,
après toute cette ribambelle de promesses qui n'ont pas
été tenues?
M. le Président, en conclusion, le premier ministre joue le jeu
que son gouvernement a toujours joué. Il veut créer l'illusion
qu'il fait quelque chose, mais lorsqu'on analyse la résolution sur le
fond, en termes de substance, il n'y a absolument rien là. La
résolution est un recul très net par rapport aux engagements pris
par le premier ministre au moment de la commission parlementaire. Aujourd'hui,
le premier ministre nous demande de le croire. Aujourd'hui, le premier ministre
dit: Appuyez notre résolution de façon qu'on puisse aller de
manière unanime a Ottawa revendiquer les droits des autochtones. M. le
premier ministre, le passé est garant de l'avenir et en ce qui vous
concerne, vous et votre gouvernement, vous avez renié l'article 1 de
votre programme. Vous avez manqué à votre parole, même
à votre signature quant aux conventions collectives signées avec
les secteurs public et parapublic. Vous avez manqué à votre
parole vis-à-vis des policiers de la Sûreté du
Québec...
Une voix: C'est cela.
M. Côté: ...et aujourd'hui, vous voudriez que
l'Opposition officielle croie en votre démarche qui n'est même pas
un minimum dans la résolution? Nous disons, M. le premier ministre:
L'Opposition a déjà joué une fois avec vous. Elle vous a
déjà cru une fois. C'est fini. C'est fini dans tous les cas et
c'est fini dans ces cas-là. Par le geste que vous avez posé avec
votre résolution, vous ne rendez pas service aux autochtones et vous ne
défendez pas les droits des autochtones. Le Parti libéral
appuiera des motions qui ont de la substance et qui sont appuyées par
des personnes qui veulent véritablement défendre les
intérêts des autochtones.
Des voix: Bravo!
M. Gratton: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Je m'excuse auprès de ma collègue de
L'Acadie. Pourriez-vous vérifier si les deux députés
péquistes qui sont présents à l'Assemblée nationale
ce matin, ajoutés à la douzaine de députés
libéraux, constituent effectivement le quorum requis pour que cette
Assemblée puisse siéger?
Une voix: Deux députés péquistes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, le leader de l'Opposition sait
très bien qu'il y a actuellement une trentaine de députés
à deux pas d'ici, qui sont au Conseil des ministres. Il sait très
bien qu'il y a aussi des commissions parlementaires qui siègent. Je
trouve son attitude un peu mesquine mais, comme c'est conforme au
règlement, nous pouvons effectivement demander le quorum.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Je fais faire le calcul
nécessaire.
M. Gratton: Est-ce que madame...
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Nous avons effectivement le quorum sans aucune difficulté. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Si j'ai choisi d'intervenir quelques minutes sur
cette résolution présentée par le premier ministre,
touchant les droits des autochtones du Québec, c'est que je veux
vraiment m'associer aux propos de mes collègues qui dénoncent
depuis hier la démarche gouvernementale à cet égard.
Évidemment, c'est peut-être la première fois que,
dans l'enceinte de l'Assemblée nationale, depuis que ce gouvernement est
au pouvoir, mises à part les lois subséquentes à
l'adoption de la Convention de la Baie James et qui découlaient de
l'application de cette convention, le gouvernement, après huit ans et
demi, vient devant nous pour présenter cette résolution. Je ne
veux pas non plus passer sous silence que, de fait, il y a eu une commission
parlementaire en décembre 1983, à laquelle j'ai participé
et où les ministériels, le premier ministre en tête,
semblaient souhaiter faire beaucoup pour les peuples autochtones. Aujourd'hui,
je pense que c'est le suivi de cette commission parlementaire. Nous nous
retrouvons devant une résolution qui, non seulement, ne tient pas compte
ou, enfin, tient compte d'une façon très amoindrie des intentions
exprimées par le premier ministre à ce moment-là, mais ce
qui est encore plus sérieux, c'est qu'on vient, à un moment qui
me paraît tout à fait inopportun, présenter à
l'Assemblée nationale, pour obtenir son consentement, une
résolution qui donnerait au gouvernement un mandat d'aller
négocier à rabais des droits que les autochtones réclament
depuis fort longtemps, lors de la prochaine réunion constitutionnelle
portant sur les droits des autochtones, à Ottawa, en avril prochain. Ce
sont des droits sur lesquels le premier ministre avait donné des
indications, lors de la commission parlementaire, à savoir qu'il
était prêt à y souscrire. Il s'est même engagé
à aller plus loin que la démarche fédérale.
Aujourd'hui, nous nous retrouvons devant une résolution fort
chétive, il faut bien l'admettre.
Mon collègue de Mont-Royal a passablement explicité hier
les droits dont il est fait mention dans la résolution du gouvernement.
Je ne voudrais revenir que sur deux points, c'est-à-dire sur un qui n'y
est pas et sur un autre qui s'y trouve. Le premier est le droit à
l'autonomie au sein du Québec. Vous savez, concernant le droit à
l'autonomie, qu'il faut se rappeler du régime Duplessis où on
parlait aussi de l'autonomie. On n'a jamais su exactement ce que cela voulait
dire, sauf qu'on se battait contre le gouvernement fédéral. (10 h
50)
II reste que ce que je pense que les autochtones désirent, c'est
certainement une autonomie qui soit qualifiée. Il est fort
étonnant qu'alors que le ministre Crosbie à Ottawa parle d'une
autonomie politique qu'on pourrait accorder aux peuples autochtones, le
gouvernement du Québec, pourtant spécialiste dans ces
matières d'autonomie politique, d'autodétermination, etc. s'en
tiennent à un terme aussi vague que l'autonomie. Comme
vous le savez, il y a l'autonomie des familles, il y a l'autonomie des
individus, il y a l'autonomie des municipalités. Je me demande ce que
ceci vient ajouter.
C'est un principe fondamental dans notre société que
l'autonomie des individus soit respectée. D'ailleurs, je pense que les
peuples autochtones, dans leur réponse au premier ministre du
Québec, parlent de ce droit à l'autodétermination. Je cite
une réponse à une contre-proposition que le gouvernement leur
faisait à la suite des réclamations qu'ils avaient faites au
gouvernement en octobre 1982: "Le droit à l'autodétermination des
peuples autochtones devrait constituer un principe sous-jacent à notre
dialogue avec le Québec de façon que nous, peuples autochtones,
puissions mieux régir les questions qui nous touchent et qui touchent
nos terres. Le droit à l'autodétermination va beaucoup plus loin
que les droits à la culture, à la langue, aux coutumes
traditionnelles ainsi qu'au développement de l'identité, droits
auxquels le Québec se réfère. Il implique le pouvoir
constitutionnellement protégé pour les peuples autochtones d'agir
à l'égard d'eux-mêmes, de leurs terres et de leurs
ressources, y compris le droit de déterminer la nature de leur relation
avec les gouvernements fédéral et provinciaux."
Je pense qu'il n'est pas besoin d'ajouter beaucoup pour démontrer
l'insuffisance du premier droit énuméré dans la
résolution du premier ministre, c'est-à-dire le droit à
l'autonomie au sein du Québec. Depuis, notre société, tant
québécoise que canadienne, a beaucoup évolué dans
le sens de cette reconnaissance du droit à l'autonomie politique pour
les peuples autochtones et c'est presque incompréhensible qu'à ce
moment-ci, le gouvernement revienne devant nous avec un droit aussi restrictif
et je dirais sans portée réelle dans les faits.
Je voudrais, en deuxième lieu, parler d'un droit qui, lui, n'est
pas exprimé dans la liste des droits que l'on retrouve dans la
proposition. Je veux parler du droit des autochtones d'avoir leurs propres
institutions, de pouvoir les gérer, de pouvoir décider de leurs
orientations selon leurs besoins propres. Je fais particulièrement
référence aux institutions dans le domaine social et dans le
domaine de l'éducation.
M. le Président, vous savez qu'il est extrêmement important
pour les autochtones d'être assurés d'avoir leurs propres
institutions - que, dans le contexte économique où ils vivent,
ils partagent d'une façon fort mitigée, il faut bien l'admettre,
malheureusement, avec le reste du Québec -mais il faut aussi leur donner
les ressources nécessaires pour que ces institutions fonctionnent. Et
ceci n'est pas du luxe. Faut-il se rappeler en 1982 - ce gouvernement
était déjà au pouvoir depuis certainement six ans à
ce moment-là - des articles qui condamnaient l'attitude du gouvernement
du Québec, particulièrement du ministère des Affaires
sociales et du ministère de l'Environnement, concernant les conditions
de vie, de santé et d'hygiène générale des
communautés autochtones, particulièrement des communautés
inuit du Grand-Nord où, à la suite de la convention de la Baie
James, le gouvernement s'était engagé à justement servir
et permettre à cette nation d'avoir ses institutions propres et faire en
sorte, avec les ressources suffisantes, de les faire fonctionner d'une
façon adéquate.
Pourtant, tout ce que l'on retrouve dans les communiqués du
temps, dans les articles de journaux du temps et dans les études qui,
à ce moment-là, ont été faites, par exemple, par
certains anthropologues, par certains médecins - je me rappelle, entre
autres, une étude d'un médecin du Montreal Children's Hospital -
c'est le terme "le tiers monde au Québec", au plan de la santé,
chez les communautés autochtones. Même avec cette assurance que
lui donnaient les suites de la convention, ce qui était convenu dans les
ententes de la convention de la Baie James, on se retrouvait devant une
situation pitoyable et, je n'hésite pas à le dire, honteuse pour
ceux qui avaient la responsabilité d'assumer cette qualité de
services pourtant si fondamentaux et essentiels pour ces populations.
Aujourd'hui il n'est même pas fait mention de ces institutions, M.
le Président. On est silencieux là-dessus. Que faut-il penser? Je
voudrais citer ici encore une fois cette réplique que les peuples
autochtones envoyaient au premier ministre du Québec à la fin de
novembre 1983: "Le Québec doit reconnaître le droit
constitutionnel des peuples autochtones à leurs propres institutions et
ne pas soumettre ce droit à son appréciation des besoins des
peuples autochtones." On sait fort bien - et ceci n'est pas particulier au
gouvernement du Québec, je pense que c'est particulier à tous les
gouvernements du Canada - combien, par exemple, dans le domaine de
l'éducation, en dépit de ressources éducatives qu'on
disait mettre à la disposition des peuples autochtones, on a fait fausse
route, si bien que, malgré eux, les peuples autochtones ont
été décimés au plan culturel, ont été
intégrés à un rythme plus ou moins rapide, selon les
communautés, aux populations blanches du Sud faisant fi de la tradition
millénaire que ces peuples avaient au plan culturel.
Je pense que, quand ils indiquent de ne pas soumettre ce droit à
son appréciation des besoins des peuples autochtones, on indique que si
ce sont les autochtones eux-mêmes qui gèrent vraiment,
décident des orientations et pensent leurs propres
institutions, on a beaucoup plus de chance que ce droit, auquel on fait
référence dans la motion, à leur culture, leur langue et
leur tradition, soit véritablement respecté. Mais encore faut-il
s'assurer que ce droit s'incarne dans quelque chose, et il ne peut s'incarner
que dans des institutions qui seront au service des communautés.
M. le Président, je voudrais ici revenir sur une couple
d'arguments que mes collègues ont invoqués. Si j'y reviens c'est
que je pense que c'est important. Il est extrêmement difficile de
comprendre pourquoi, alors que les communautés elles-mêmes ont
fait des représentations, pas plus tard que is jours derniers ou les
semaines dernières, au sujet de cette motion qui est devant nous, elle
serait adoptée - fort malheureusement, avec la majorité
gouvernementale, elle sera probablement acceptée sans même qu'on
les ait consultés, et ils s'élevaient contre ce fait.
Je sais que des fois le gouvernement ne s'embarrasse pas dans les fleurs
du tapis quand il s'agit pour lui d'imposer quelque chose, mais je voudrais
quand même qu'en cette occasion particulière il y ait une relation
véritable entre les discours, les principes qu'on évoque et la
pratique. Je pense qu'il n'y a pas un député dans cette Chambre
qui oserait nier que les peuples autochtones au Canada et au Québec,
dans le cas qui nous préoccupe, ont des droits qui sont bien
antérieurs aux droits que nous présumons avoir. À cet
égard, je dirais que dans les deux dernières décennies
s'est développée, fort heureusement, une sensibilité des
citoyens et de la population à l'égard des droits des peuples
autochtones. Pour moi il apparaît inconcevable qu'à ce moment-ci
nous adoptions une motion qui, d'abord, est en deçà des
engagements que le premier ministre a pris, en deçà de ce que le
gouvernement fédéral est prêt à faire adopter,
puisqu'il a parlé, comme je le disais tout à l'heure, d'autonomie
politique et que nous parlons strictement d'autonomie, et que nous adoptions
ceci pendant que les principaux intéressés, à qui on
accorde au moins dans nos discours un statut très particulier dans notre
pays, sont oubliés. Cela me semble absolument inconcevable. Je pense que
le premier ministre a dû être mal informé des
réactions des peuples autochtones à l'égard de cette
motion parce que je ne comprends pas qu'il puisse persister dans la
démarche qu'il est en train de demander à l'Assemblée
nationale. (11 heures)
M. le Président, il me semble aussi tout à fait injuste
à l'endroit des peuples autochtones que, si nous acceptons cette
résolution, nous allons affaiblir leur position à la table de
négociation touchant les droits des autochtones qui se tiendra en avril
prochain au Canada. Comment voulez-vous que le gouvernement
fédéral, devant des représentations des autochtones du
Québec, puisse agir avec une extrême prudence quand il aura devant
lui une résolution émanant de l'Assemblée nationale du
Québec qui est en deçà de ce que lui-même est
prêt à offrir aux autochtones de crainte de soulever des conflits
de juridictions?
Je demande au premier ministre - il est encore temps... J'ai entends des
députés du côté ministériel dire: Enfin, ce
n'est pas aussi loin qu'on voudrait aller, mais on pose un geste positif.
À défaut de rien, c'est vrai que c'est un pas en avant et
j'aurais mauvaise grâce à ne pas le reconnaître. Mais ce
qu'il faut comprendre, c'est que cette résolution ne respecte pas les
demandes, fait même fi de certains éléments contenus dans
une résolution antérieure que le premier ministre n'a pas
déposée en cette Chambre mais qu'il avait remise à
certaines personnes, qu'elle est même en deçà de cette
résolution. Je pense que, comme Parti libéral, qui... À
cet égard, historiquement, on a été comme les autres.
Parce que le Parti libéral au Québec existe depuis bien des
années, nous n'avons pas toujours eu cette mentalité ouverte.
Mais comme je le disais tout à l'heure, au cours des deux
dernières décennies, il y a eu une évolution
considérable. Je pense que le Parti libéral ne peut pas
s'associer à une résolution qui ne reconnaît que d'une
façon extrêmement timide les revendications des peuples
autochtones et qui, plus est, les met dans une position de faiblesse à
une table de négociation. À cela, M. le Président, nous
disons: Non, merci.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: M. le Président, je veux associer ma voix
à celles de mes collègues et, je pense bien, à celles de
la totalité sinon de l'immense majorité des populations
autochtones pour dire notre déception, au fond, face au texte de la
résolution présentée par le premier ministre et voulant,
semble-t-il, appuyer les revendications historiques légitimes des
populations autochtones.
Je pense, comme ma collègue, la députée de
L'Acadie, le signalait en terminant son intervention, qu'il y a eu très
certainement dans l'évolution de nos sociétés en
Amérique du Nord une très grave injustice commise à
l'endroit des premiers occupants de notre territoire, c'est-à-dire les
populations autochtones. Ce n'est, malheureusement, que dans une période
relativement récente que les gouvernements, l'opinion publique, ont
reconnu ce comportement injuste à l'endroit de nos
populations autochtones et que, dans divers milieux, des
démarches, des initiatives ont été entreprises avec les
populations concernées pour essayer de corriger les injustices et,
surtout, pour reconnaître la plénitude des droits historiques de
ces populations.
D'ailleurs, on n'a qu'à constater, en particulier dans les
milieux de jeunes, dans les milieux collégiaux et universitaires,
comment cette question de la protection des populations autochtones
intéresse, préoccupe l'ensemble de la jeunesse canadienne et de
la jeunesse québécoise. Les jeunes adoptent cette nouvelle
échelle de valeurs et ils la partagent maintenant de plus en plus avec
l'ensemble de nos concitoyens. Je pense bien que tout le monde restera
frappé, par exemple, comme autre témoignage d'une
évolution des mentalités... Pour ma part, je suis toujours
frappé de voir l'intérêt et la préoccupation du chef
de l'Église catholique, au cours de ses voyages, de reconnaître,
d'appuyer et de sensibiliser l'ensemble de la communauté
chrétienne aux droits historiques des populations autochtones. Je pense
que le dernier séjour au Canada de Sa Sainteté le pape Jean-Paul
II l'a illustré d'une façon absolument remarquable. Il l'a fait
ici et il l'a fait également sur d'autres terrritoires.
C'est donc dire, M. le Président, que, lorsque l'on traite d'un
sujet comme celui-là, il me semble que le minimum de décence,
étant donné que maintenant il existe dans la population une
reconnaissance des situations injustes qui ont existé, il me semble
qu'on aurait été légitimement en droit de s'attendre de la
part du premier ministre du Québec à beaucoup plus de rigueur,
d'engagement dans la façon dont il a saisi l'Assemblée nationale
de cette résolution.
Ce que mes collègues ont déploré lors du
débat que nous venons d'avoir, comme d'ailleurs ce que les populations
autochtones elles-mêmes ont déploré, il est inconcevable,
mais vraiment inconcevable, que le premier ministre du Québec ait saisi,
sur une question aussi importante, l'ensemble de l'Assemblée nationale,
sans avoir même pris le temps de consulter les populations
concernées qu'il nous dit par sa résolution vouloir appuyer.
Je m'explique très mal, mais vraiment très mal, l'attitude
du premier ministre sur cette question et, je n'y vois finalement, à
défaut de lui prêter quelque mauvaise intention, ce dont je me
garderai, mais je lui vois simplement cette espèce d'improvisation
fatiguée qui illustre depuis quatre, cinq, six mois les attitudes de ce
gouvernement qui essaie littéralement, non seulement lorsqu'il s'agit
des populations autochtones de ce dossier combien important, mais de tellement
d'autres dossiers actuellement qui confrontent le gouvernement qui essaie de
bâcler les questions.
M. le Président, je pense qu'en procédant de la sorte le
premier ministre met l'Assemblée nationale dans un embarras réel
parce que mon collègue, le député de Mont-Royal, qui est
très au fait des questions des autochtones, tous mes collègues de
ce côté et sans doute des collègues de l'autre
côté auraient aimé et souhaité pouvoir, pour une
fois, d'une façon solennelle et claire, engager l'Assemblée
nationale du Québec derrière les revendications légitimes
des populations autochtones vivant sur notre territoire. Or, par un
défaut de consultation, par un jeu de double résolution,
où, dans une première résolution, certaines choses sont
mentionnées et, dans une deuxième résolution, ces
mêmes choses n'existent plus.
Par le manque de consultation, une question se pose sur la
crédibilité même -c'est ce que les populations autochtones,
je pense, ont signifié par les télégrammes et la
correspondance qu'ils nous ont adressés - et il y a une interrogation.
Qu'est-ce qui se cache derrière ces incongruités, derrière
ces contradictions, derrière ces demi-affirmations, ces demi-engagements
qui sont faits par le premier ministre et par le gouvernement du Québec?
Il y a là très certainement une inquiétude légitime
et d'autant plus légitime que l'on sait très bien qu'à la
conférence du mois d'avril, sur le plan constitutionnel au niveau
canadien, sera discutée cette question de façon à
enchâsser dans la constitution canadienne, c'est-à-dire au-dessus
des velléités ou des prétentions du gouvernement canadien
ou du gouvernement du Québec ou du gouvernement des provinces, les
droits des populations autochtones.
Évoquant au début de mon intervention le changement de
valeurs, cette nouvelle préoccupation que nos jeunes, l'église et
la population ont face aux droits des populations autochtones, il me semble
qu'il aurait été tellement plus constructif, tellement plus
positif que le premier ministre ait pris le temps de consulter les populations
autochtones concernées, de s'entendre sur un texte et de venir ici
à l'Assemblée nationale. Et, d'une façon solennelle,
formelle et décisive, l'Assemblée nationale aurait pu appuyer ce
texte et le premier ministre du Québec et les populations autochtones
auraient pu alors participer en toute clarté, en toute transparence
à la conférence constitutionnelle canadienne sur les droits des
autochtones. Je pense qu'il y aurait eu là un pas drôlement
significatif dans la correction de l'injustice historique dont les populations
autochtones ont été les victimes. (11 h 10)
C'est d'autant plus décevant, M. le Président, que le
gouvernement du Québec en tant que tel a quand même eu un
passé positif à l'égard des populations autochtones.
L'entente de la Baie James, je sais qu'il y a
eu des difficultés d'application en cours de route, mais les
droits que ce même gouvernement du Québec a reconnus dans le cadre
de l'entente de la Baie James, on ne les retrouve même pas, lorsqu'il
s'agit de reconnaître les droits de l'ensemble des populations
autochtones. Il me semble que cette entente de 1974 aurait pu au moins inspirer
d'une façon beaucoup plus significative et beaucoup plus complète
le texte de la résolution que l'Assemblée nationale
s'apprête à adopter par une majorité ministérielle
que je qualifierai de servile dans la mesure où cette majorité
ministérielle qui va adopter cette résolution va le faire non pas
tellement contre finalement les réserves et la déception que lui
manifestent les députés de l'Opposition, mais elle va adopter une
résolution pour les populations autochtones, résolution qui sera
contestée et dont les populations autochtones ne veulent même pas,
étant donné sa nature et sa rédaction.
M. le Président, un autre aspect, on reconnaît le principe
de l'autonomie. Mes collègues l'ont signalé et les populations
autochtones l'ont dit, non pas qu'on soit contre l'autonomie, mais il n'y a pas
eu dans l'intervention du premier ministre non plus que dans les interventions
de nos collègues ministériels un quelconque effort de
précision sur ce que l'on devait entendre dans le texte de la
résolution par l'expression "autonomie".
Ma collègue, la députée de L'Acadie, mon
collègue, le député de Mont-Royal, le député
de Charlesbourg et d'autres de mes collègues sont intervenus. On dit:
Est-ce qu'il y aura derrière cette expression l'octroi aux populations
autochtones des mesures financières ou des ressources humaines,
techniques et financières, dis-je, pour assumer la plénitude de
cette autonomie que l'on dit reconnaître? Nulle part dans la
résolution, il n'est fait mention de cet aspect tellement important. Je
pense que, comme Québécois dans la fédération
canadienne, cette expression d'autonomie, de respect des droits historiques
d'une société comme le Québec, les gouvernements et le
gouvernement actuel aussi parlent toujours non seulement de reconnaître
ce droit, mais de reconnaître aussi les moyens nécessaires
d'exercer ce droit. Il n'y a même pas - cela n'existe pas au niveau des
moyens - une définition, une qualification de l'expression "autonomie",
alors que, sauf erreur - mon collègue de Mont-Royal pourra me le
préciser - le ministre fédéral de la Justice actuellement,
M. Crosbie, a très bien précisé, dans une
déclaration récente, que le gouvernement canadien était
prêt à reconnaître l'autonomie politique aux populations
autochtones. Peut-on obtenir de la part d'un quelconque porte-parole
gouvernemental au moins une précision analogue à celle-là?
S'agit-il d'une autonomie politique, d'un droit de gérer, d'administrer
et de se doter, pour les populations autochtones, d'institutions dans le monde
de l'éducation, de services de santé et de services sociaux ou de
l'administration en général? Est-ce de cela dont on veut parler?
Est-ce cette revendication qui est historique aux populations autochtones que
l'on veut appuyer? Veut-on appuyer cette reven-Jication? Si c'est cela, qu'on
le dise dans les interventions et qu'on le dise dans le texte même de la
résolution. C'est ce que les populations autochtones nous ont
demandé dans les télégrammes et la correspondance que nous
avons reçus. Ne l'ayant pas dit, ne l'ayant pas précisé,
les populations autochtones disent au gouvernement du Québec: Nous ne
voulons pas de votre résolution. Elle nous est inutile, et tout ce que
cette résolution fait, c'est qu'elle nous inquiète quant à
la volonté réelle du gouvernement du Québec d'appuyer les
revendications des populations autochtones.
Je pense que ma collègue de L'Acadie a énormément
insisté là-dessus. Lorsqu'il s'agit des droits d'une
communauté, que ce soit la communauté autochtone ou, à
l'intérieur du Canada, que ce soit ceux d'autres communautés
culturelles, au niveau du droit de se doter et de gérer ses
institutions, il me semble que c'est là dans le coeur même du
droit fondamental et de ce qui est essentiel à toute communauté
qui est minoritaire dans une société quelconque. Pourquoi, alors
que l'on revendique souvent cela pour nous ou, par exemple, au niveau canadien,
dans le domaine de l'éducation, pour les Canadiens d'expression
française en dehors du Québec? C'est le débat central. Il
n'est question, finalement, que de cela, du droit de gérer et d'avoir
les moyens de gérer les institutions, par exemple, dans le domaine de
l'éducation et des services sociaux. On ne reconnaît même
pas cela d'une façon explicite dans la motion du gouvernement. Nous
demandons au premier ministre, au ministre délégué aux
Affaires intergouvernementales canadiennes et aux autres porte-parole
gouvernementaux, comme les populations autochtones: Pourquoi ne le faites-vous
pas dans le coeur même d'une motion? Enfin, on n'évoque même
pas dans le texte de la motion les droits ou les rapports des
communautés autochtones avec le gouvernement canadien en vertu de
l'article 91, paragraphe 24. On a aussi demandé que ce soit clairement
exprimé.
Pour ces raisons, M. le Président, et pour d'autres que mes
collègues ont évoquées, je pense bien que c'est
extrêmement difficile pour l'Opposition qui voudrait bien... Avec mon
collègue, le député de Mont-Royal, qui est le porte-parole
de notre formation politique en la matière, l'expertise qu'il a acquise,
sa participation combien éminente et appréciée à
la
négociation des ententes de la Baie James et
l'intérêt qu'il a toujours manifesté depuis ce temps au
dossier des populations autochtones, ce que nous demandons au gouvernement,
finalement, c'est: Pourquoi n'avez-vous pas consulté les populations
autochtones avant de rédiger votre motion? Pourquoi, maintenant que vous
savez que, de toute manière, sur le texte que vous proposez à
l'Assemblée nationale, vous n'avez pas l'appui des populations
autochtones? Non seulement vous n'avez pas leur appui, mais les populations
autochtones vous ont demandé de retirer cette motion parce qu'elle
pourrait, dans un avenir immédiat, constituer une entrave à
l'avancement et à la définition des droits des populations
autochtones. Pourquoi persistez-vous à faire adopter par
l'Assemblée nationale une motion dont les premiers
bénéficiaires ne veulent pas? Mes collègues l'ont dit:
Pourquoi le faites-vous? Pour des raisons probablement politiques, pour faire
semblant que vous vous intéressez à un dossier. Il n'y a pas
d'autre... Je vois le ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes qui me dit non. Il n'y a pas d'autre raison
que celle-là.
Les gens n'en veulent pas, de votre motion, de son texte. Ou bien c'est
un refus stratégique du gouvernement du Québec de se commettre
réellement en faveur des droits des populations autochtones, ou bien
c'est simplement une manoeuvre politique pour feindre un intérêt
quelconque pour les droits des populations autochtones. Si j'avais le choix
entre les deux hypothèses, j'opterais peut-être pour celle
où je dis que le gouvernement du Québec - en somme, c'est
peut-être cela, la vraie raison - n'est pas prêt politiquement et
financièrement à se commettre réellement et à
appuyer réellement les prétentions des populations autochtones du
Québec lors de la prochaine conférence constitutionnelle. C'est
peut-être ce qui explique, finalement, la prudence, la réserve et,
vraiment, le caractère totalement incomplet du texte de la motion que
vous avez présentée. D'ailleurs, simplement pour illustrer cela,
il y a eu deux motions, comme mes collègues l'ont signalé: il y a
celle qui nous a été présentée en décembre
1984 et l'autre qui date de 1983. Il y a déjà une
différence dans le texte des deux et cette différence n'est pas
favorable à une augmentation des droits des autochtones; elle est
plutôt pour une réduction des droits des autochtones.
C'est donc dire qu'on ne peut que conclure - je pense être assez
honnête en disant cela; en tout cas, c'est l'interprétation que
les populations autochtones ont faite -que le gouvernement du Québec est
prêt à appuyer à rabais - malheureusement à rabais -
les droits des autochtones puisque, dans une motion antérieure, il
appuyait plus de droits, ce qui était encore incomplet, et que dans la
motion qu'il nous présente, il y a encore moins d'appui. L'appui est
moins significatif. La question fondamentale qu'on pose au gouvernement par le
débat que nous avons mené sur cette question et par le vote
négatif que nous donnerons au texte de cette motion, appuyés dans
cette attitude par les populations autochtones elles-mêmes, ce que nous
demandons au gouvernement, c'est pourquoi agissez-vous ainsi? Expliquez-vous.
Est-ce que vous croyez vraiment aux droits des populations autochtones? Est-ce
que vous êtes prêts, comme gouvernement du Québec, non
seulement à donner un appui verbal, un appui par des mots, mais un appui
qui traduise l'expression d'une volonté politique claire en faveur des
droits des autochtones et surtout d'une volonté politique
engagée, c'est-à-dire qu'on appuie les autochtones, qu'on y met
les moyens et les ressources nécessaires pour corriger une injustice que
tout le monde reconnaît à l'endroit des populations autochtones et
reconnaître aussi, pour une fois de la part de votre gouvernement, au
delà des mots, puisque, déjà dans l'entente de la Baie
James, énormément de choses ont été faites, la
légitimité des droits des populations autochtones du
Québec, à l'intérieur du Canada. (11 h 20)
Le Vice-Président (M. Brouillet): En réplique au
nom du gouvernement, M. le ministre de la Justice et ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Pierre-Marc Johnson (réplique)
M. Johnson (Anjou): J'ai pris connaissance de l'intervention, que
je qualifierai de regrettable, du député de Mont-Royal et qui
restera sûrement dans nos débats une intervention remarquable par
son caractère incomplet, les inexactitudes incroyables qu'elle comporte,
l'incompréhension qu'elle manifeste et surtout la nouvelle attitude du
Parti libéral en matière constitutionnelle. Incomplète et
truffée d'inexactitudes. On nous a cité un
télégramme envoyé par un individu, une personne, au nom,
prétendait-il, de l'ensemble des nations autochtones. Il nous
annonçait dans ce télégramme, non signé par les
autres nations autochtones, que des lettres suivraient. Nous avons reçu
sept lettres et ces sept lettres prétendaient s'opposer à cette
résolution mais elles ne représentaient que 10% des populations
autochtones, alors que nous savons que le reste des populations autochtones que
nous mentionnons dans cette résolution, que ces peuples et ces nations,
dans des échanges fructueux, constants, souvent complexes, avec le
gouvernement du Québec depuis plusieurs années, appuient pour
l'essentiel cette affirmation, par l'institution qu'est
l'Assemblée nationale québécoise, de leurs droits
collectifs.
Deuxièmement, incomplète parce que cela travestit des
engagements pris par le premier ministre du Québec qui, pourtant, en
novembre 1983, disait que ce serait à l'intérieur des
institutions québécoises que nous procéderions à
cette reconnaissance des droits collectifs des nations autochtones et non pas
dans le cadre du "Canada Bill", pour des raisons évidentes et des
raisons que les nations autochtones comprennent. La position du gouvernement,
sur cette question à l'égard du "Canada Bill", si elle est
comprise par les nations autochtones, ne semble pas l'être par le Parti
libéral du Québec.
Inexactitude incroyable quand le député de Mont-Royal nous
dit que les nations autochtones réclamaient le droit de veto pour le
Québec, alors qu'elles le réclamaient pour elles-mêmes.
Incompréhension quant à l'évolution des droits et de
l'exercice des droits réels des autochtones sur notre territoire. Depuis
20 ans, des services, des instruments ont été mis de plus en plus
à la disposition des nations et des peuples autochtones du
Québec. Incompréhension quant à la notion même des
droits collectifs. Le député de Mont-Royal, je le sais, a une
espèce de réaction allergique et épidermique à la
notion même des droits collectifs.
Je vous citerai, à cet effet, Rivero, grand auteur sur les droits
individuels et collectifs et Capotorti, qui sont des experts souvent
cités aux Nations Unies sur ces questions fondamentales de
l'évolution du droit des peuples et du droit des personnes.
Rivero nous dit: "L'homme est indissociable des groupes dont il tient sa
vie, sa substance, sa culture. Reconnaître les droits des groupes, c'est
affirmer que l'homme, pour être pleinement homme, a des besoins et il a
besoin qu'il puisse remplir leurs fonctions à son service. Les droits
des groupes ne sont pas autre chose que le droit de l'homme à recevoir
des groupes les moyens nécessaires à son
épanouissement."
Capotorti, se référant au pacte sur les droits politiques,
nous dit que: "Seul l'exercice collectif des droits énoncés
à l'article 27 peut garantir le respect du principe de
l'égalité réelle et non seulement formelle des personnes
appartenant aux groupes minoritaires. La mise en oeuvre de ces droits exige une
intervention active et soutenue de la part des États." Si nous voyons le
texte de cette motion, si nous le lisons simplement, nous nous rendons compte
qu'au milieu de la page 7 de notre feuilleton, on retrouve le paragraphe
suivant: L'Assemblée nationale du Québec... "presse le
gouvernement de poursuivre les négociations avec les nations autochtones
en se fondant, sans s'y limiter, sur les quinze principes qu'il a
approuvés le 9 février 1983 en réponse aux propositions
qui lui ont été transmises le 30 novembre 1982 et à
conclure avec les nations qui le désirent ou l'une ou l'autre des
bandes..." ou communautés, comme nous le dirons tout à l'heure
dans la résolution "...qui les constituent des ententes leur assurant
l'exercice... du droit à l'autonomie..." Quand le député
de Mont-Royal nous parle des compagnies de chemin de fer et des gens qui
peuvent se servir d'un permis de pêche, il ne parle pas de droits
collectifs. Cette résolution parle résolument de droits
collectifs des peuples autochtones.
Incompréhension aussi quant au sens de nos institutions, au sens
de ce qu'est une résolution de l'Assemblée nationale où se
retrouvent les élus de l'ensemble de la population
québécoise. Une résolution de l'Assemblée nationale
engage celles et ceux qui votent dans un sens pour longtemps et nous aurons
à le rappeler tout à l'heure dans le cas du député
de Mont-Royal. Elle engage aussi - une résolution de l'Assemblée
nationale - le gouvernement. Nous sommes l'institution démocratique
élue par le peuple québécois. Que cette institution
démocratique élue presse un gouvernement de reconnaître les
droits collectifs des peuples autochtones ne me paraît pas une chose
banale.
Étonnante aussi cette approche en matière
constitutionnelle: Peut-être que le député de Mont-Royal
est devenu le nouveau critique du Parti libéral en matière
constitutionnelle. Son attitude vise, présume, postule l'acceptation
implicite très claire du "Canada Bill". Je ne devrais pas être
surpris dans le cas du député de Mont-Royal, puisqu'il
était l'un des neuf, de l'autre côté, qui, au mois
d'octobre ou novembre 1981, s'opposaient avec quelques-uns de ses
collègues à cette résolution à laquelle pourtant
une majorité de députés libéraux avait concouru
à l'égard de notre opposition au rapatriement unilatéral
de la constitution. On vit avec ces votes et le Parti libéral devra
vivre avec ces votes contre l'affirmation, à l'intérieur des
institutions québécoises, des droits collectifs des peuples
autochtones.
Au niveau de la constitution interne du Québec, il y aurait
peut-être des choses intéressantes à faire pour
reconnaître ces droits collectifs de nos frères peuples
autochtones, mais c'est le Parti libéral, encore une fois, qui, au mois
de juin dernier, à la commission de l'Assemblée nationale,
s'opposait à ce qu'il y ait un mandat d'initiative de cette commission
pour revoir l'ensemble des textes de la constitution interne du Québec,
ce qui aurait été un forum remarquable pour que, de façon
encore plus solennelle, le peuple québécois puisse
reconnaître ces droits collectifs aux peuples autochtones.
La critique du représentant du Parti libéral sur ces
questions procède d'une incapacité de reconnaître qu'on
puisse faire
confiance au peuple québécois dans ses relations en termes
de droits collectifs à l'égard des nations autochtones du
Québec. Cette espèce d'attitude de mépris, cette
espèce d'attitude complètement écrasée qui tient
pour acquis qu'il n'y a que le gouvernement par les juges qui est bon et que
les assemblées doivent se départir de leurs
responsabilités, alors qu'elles sont élues
démocratiquement, cette attitude qui, à toutes fins utiles,
postule que, si ce n'est pas dans la constitution canadienne, ce n'est pas bon,
cette attitude de dévalorisation des institutions
québécoises ne m'étonne pas de la part du
député de Mont-Royal et je regrette que le Parti libéral
endosse implicitement, en en faisant son critique officiel sur des questions
pareilles, sur des questions aussi importantes, une telle attitude qui
méprise les institutions démocratiques du Québec. (11 h
30)
Le Parti libéral, qui ignore les peuples autochtones dans son
nouveau programme, qui ne les fait pas progresser dans son "Maîtriser
l'avenir", a une attitude légère à l'égard de cette
question déphasée et malheureusement en votant contre cette
résolution, en invoquant ce qui est le fait d'une minorité quand
ils nous ont cité les réactions des peuples autochtones, ils
briseront un consensus qui durait depuis 20 ans au Québec autour du
progrès des peuples autochtones.
Ils marquent, à toutes fins utiles, par leur comportement, un
recul à l'égard du progrès des peuples autochtones dans
les institutions québécoises.
L'adoption de cette motion de reconnaissance des droits des autochtones
et des nations et peuples autochtones du Québec se situe dans le
prolongement d'une politique québécoise amorcée il y a
déjà plus de 20 ans. Le premier ministre du Québec y a
été associé à divers titres depuis 20 ans, ne
serait-ce qu'au moment de la création de la Direction
générale du Grand-Nord québécois au moment
où il était responsable des richesses naturelles, ce qui a
été la phase déterminante au niveau du progrès des
services à l'égard des populations autochtones.
Cette motion vise d'abord et avant tout à concrétiser la
reconnaissance de la présence autochtone au Québec puisque le
Québec y reconnaît en tout premier lieu que les groupes
autochtones constituent des nations ayant droit à l'autonomie, M. le
Président, non pas des compagnies de chemin de fer qui peuvent passer
quelque part, des municipalités qui prétendraient être
autonomes ou des individus qui sont autonomes pour aller chercher un permis de
pêche.
Cette reconnaissance en tant que nation autonome que le Québec
lui-même ne s'est pas encore vu reconnaître dans un régime
fédéral dans lequel il vit depuis 118 ans est
considérée par le gouvernement québécois non
seulement comme un prérequis nécessaire pour permettre à
chacune de ces nations de négocier d'égal à égal
mais encore et tout simplement comme une reconnaissance d'une
réalité historique et politique.
La vision que les non-autochtones entretiennent de l'histoire des
peuples autochtones varie grandement avec celle des autochtones
eux-mêmes, c'est évident. Pour ces derniers, les
découvreurs et les explorateurs à la mémoire desquels nous
avons érigé des monuments ou émis des timbres
commémoratifs, sont considérés comme des envahisseurs des
territoires déjà bien connus des nations qui les habitaient.
Les peuples autochtones en effet savent que leur nation était, au
moment du contact avec les Européens, déjà productive,
cultivée, religieuse et intelligente. Plutôt que d'accepter la
version autochtone de leur propre histoire et de leur culture, les
non-autochtones ne retiennent que trop souvent hélas des
stéréotypes dont ils contribuent à la
perpétuation.
La loi fédérale sur les Indiens adoptée en 1876 et
amendée la dernière fois il y a plus de 30 ans présente un
paradoxe pour ces peuples. Si elle confirme le statut particulier des Indiens,
elle a plus souvent qu'autrement été un outil de contrôle
et de ghettoïsation. En délimitant les activités des
communautés indiennes dans tous les secteurs, elle a imposé des
contraintes aux Indiens quant à leurs droits et limité leur
capacité de s'autogérer efficacement.
En outre, en faisant sourde à la diversité des nations
indiennes, elle a traité les Indiens comme un groupe homogène,
sans tenir compte des différences de langue, de culture et de
ressources. Ce manque de compréhension, M. le Président, devait
s'avérer, à toutes fins utiles, pendant toutes ces années,
un instrument d'assimilation très efficace.
Nous devons nous rendre compte que la plupart des premières
nations possèdent une forme de gouvernement complexe qui remonte loin
dans l'histoire et qui a évolué au cours des siècles. Les
valeurs spirituelles et démocratiques y dominaient souvent. À
l'instar des Britanniques, les autochtones n'avaient pas
généralement de constitution écrite mais menaient leurs
affaires en se fondant sur la tradition modifiée par des innovations
pragmatiques. Ces gouvernements permettaient aux Indiens de se gouverner dans
la continuité en maintenant une identité collective forte et tous
les moyens pour mener leurs propres affaires, régler leurs
problèmes et déterminer eux-mêmes leur destinée.
Le gouvernement du Québec est convaincu depuis plusieurs
années déjà de la
nécessité d'une prise en charge la plus complète
possible de leurs propres affaires par les autochtones. Après avoir
identifié le protectionnisme exagéré dont ils ont
été les sujets, le Québec a reconnu l'existence des
nations autochtones. Plusieurs moyens leur permettant une prise en charge
graduelle de leurs droits et de leurs responsabilités ont
été élaborés.
Le 9 février 1983, le gouvernement du Québec, en
réponse point par point aux quinze principes invoqués par les
autochtones du Québec, a concrétisé dans un nouveau cadre
de discussion sa volonté de reconnaître l'existence des nations
autochtones au Québec, leur droit à se gouverner et à
disposer, dans le cadre des lois du Québec, de ressources suffisantes
pour ce faire.
Cette motion est une étape additionnelle dans le cheminement du
Québec à l'égard des autochtones et elle met en relief
notre conviction que ces nations doivent disposer des pouvoirs requis pour
régler leurs propres problèmes et orienter leur avenir afin que
nos rapports soient harmonieux et fondés sur le respect des droits et
sur la confiance mutuelle. De plus, elle consacre la politique du Québec
en cette matière, orientée essentiellement sur la conclusion
d'ententes avec les nations qui le souhaitent. Des ententes qui assureront,
selon les modalités qui pourront varier d'une communauté ou d'un
groupe à l'autre, l'exercice de leurs droits.
La reconnaissance des nations autochtones implique que les ententes
conclues entre elles et le gouvernement du Québec ne peuvent être
modifiées unilatéralement. Nous assurons ainsi aux
premières nations avec lesquelles nous cohabitons sur le même
territoire plus de garanties que le Québec lui-même n'en a jamais
obtenu. Je pense ici, encore une fois, au "Canada Bill".
Il faut bien dire que le Québec est dans une situation
particulière par rapport à la plupart des autres provinces. Sur
le territoire du Québec, en effet, hormis la partie de territoire
couvert par les conventions, aucun traité n'a été conclu
avec les premiers habitants de ce pays et leurs descendants. Le Québec a
amorcé, en 1981, une négociation avec les nations indiennes
attikamek et montagnaise. L'automne dernier, il a conclu avec la nation mohawk
une entente particulière sur la construction et la gestion de
l'hôpital de Kahnawake. Il faudra poursuivre ces efforts afin de conclure
des ententes avec l'ensemble des nations autochtones. Le gouvernement du
Québec estime que cette approche permettra à chacune de ces
nations de s'exprimer sur les questions qu'elles entendent négocier.
L'approche proposée par le Québec donne donc toute la
flexibilité nécessaire pour permettre aux peuples indiens de se
développer en tant que nations distinctes ayant leur identité
propre.
Les ententes conclues avec les nations autochtones viendront parfois
modifier les lois actuelles du Québec afin de nous permettre de
respecter plus fidèlement l'organisation sociale des autochtones. Cette
approche a été retenue récemment dans la loi sur
l'hôpital de Kahnawake, adoptée l'automne dernier, par notre
Assemblée et sanctionnant l'entente intervenue entre le Québec et
la nation mohawk, reconnaissant à celle-ci des pouvoirs particuliers
quant à la construction et à la gestion de son propre
hôpital, pouvoirs pourtant incompatibles avec les dispositions actuelles
de la Loi sur la santé et les services sociaux.
Depuis quelques années, le gouvernement fédéral a
aussi choisi de modifier son approche et d'accorder une importance accrue
à la reconnaissance d'une identité propre à ces nations.
Cette démarche devint particulièrement évidente lors du
rapatriement de la constitution en 1982. La Loi constitutionnelle de 1982, en
plus de prévoir quelques articles relativement à la
reconnaissance des droits des autochtones, contient une mécanique par
laquelle pourront être déterminés et définis les
droits des peuples autochtones. Le premier ministre canadien s'engageait alors
à convoquer une conférence constitutionnelle des premiers
ministres, dans un délai d'un an de l'adoption de la loi, pour
étudier avec les autochtones les questions qui touchaient leurs droits.
Les 15 et 16 mars 1983 avait lieu cette conférence. Elle se termina par
un accord entre le gouvernement fédéral, les gouvernements
provinciaux - à l'exception du Québec, pour des raisons
manifestes, évidentes et partagées - et les quatre associations
nationales autochtones, prévoyant la tenue de trois autres
conférences constitutionnelles des premiers ministres sur les questions
des droits des autochtones en 1984, 1985 et 1987.
La non-signature de cet accord constitutionnel par le Québec ne
signifiait pas, comme chacun le sait, que nous sommes opposés aux
bénéfices qu'en attendent les nations autochtones, bien au
contraire. Le gouvernement du Québec, malgré son refus
catégorique d'adhérer à la Loi constitutionnelle de 1982
dans sa forme actuelle et malgré le maintien de ce refus -je crois que
les nations autochtones respectent la clarté et la fermeté de
cette position québécoise - a, néanmoins, accepté
de participer à ces conférences, à la demande expresse des
autochtones. Au cours de ce processus, le gouvernement du Québec a
refusé de poser tout geste qui aurait pu impliquer une reconnaissance
même implicite de la Loi constitutionnelle de 1982. Il n'a donc pas
concouru à l'accord de 1983. Jusqu'à ce jour donc, sans
s'opposer, le
Québec n'a été partie à aucun accord visant
à amender une constitution que le Québec ne saurait
reconnaître dans son état actuel. (11 h 40)
Cette participation du Québec cependant au processus portant sur
des questions constitutionnelles autochtones a pourtant
bénéficié aux autochtones du Québec. Ils ont pu
s'adresser aux participants à partir du siège du Québec.
Plus de la moitié de la délégation du Québec,
à chacune de ces rencontres, était composée de
représentants des autochtones choisis par eux. D'ailleurs, dès
1983, cette présence des autochtones au sein de la
délégation du Québec aura permis aux Cris de la Baie James
et aux Inuit du Québec de participer à la rédaction d'un
amendement constitutionnel ayant pour effet d'inclure dans l'expression des
droits issus des traités visés à l'article 35 de la loi
constitutionnelle de 1982, les droits reconnus par la Convention de la Baie
James et du Nord québécois et celle du Nord-Est
québécois.
Cette même présence aura permis aussi aux femmes
autochtones du Québec de participer activement aux efforts
déployés par leurs consoeurs des associations nationales afin de
convaincre les premiers ministres de la nécessité de mieux
garantir l'égalité entre les hommes et les femmes autochtones.
Elles ont particulièrement manifesté le désir de
s'assurer, dans la perspective où certains droits collectifs seraient
reconnus aux autochtones, que les droits ancestraux et les nouveaux droits
inscrits dans la constitution soient également garantis aux deux
sexes.
Enfin, la délégation du Québec a saisi toutes les
occasions pertinentes de faire connaître aux participants la politique du
Québec face aux autochtones. Notre conviction est qu'il importe de
reconnaître d'abord les droits des nations autochtones et, par la suite,
qu'il faut négocier avec elles afin d'en aménager l'exercice au
sein de la société québécoise.
Cette démarche est maintenant bien connue des participants au
forum constitutionnel canadien et, sans fausse prétention, M. le
Président, elle sert d'inspiration aux travaux en cours sur le plan
constitutionnel dans tout le Canada. Ottawa, l'Ontario, le Manitoba et le
Nouveau-Brunswick ont adopté des positions allant dans le même
sens que l'approche québécoise. Même s'il est vrai que des
réticences de certaines provinces risquent de retarder la
constitutionalisation de cette approche, il n'en demeure pas moins qu'un
consensus prend forme autour de la nécessité de négocier
et de conclure des ententes avec les nations autochtones. Par conséquent
la démarche québécoise et la motion qui est devant nous,
qui en est un jalon absolument majeur, font figure sous certains aspects de
modèles à appliquer.
Pour terminer, M. le Président, reconnaître les droits des
autochtones et leur autonomie politique comme elle évoluera afin qu'ils
puissent se développer selon leur identité propre, dans le
respect de leur culture, de leur langue, de leurs coutumes et traditions, tout
cela repose fondamentalement sur la reconnaissance du principe
généreux de l'égalité des nations mais aussi sur le
principe inaliénable de l'égalité des individus dans notre
société comme est tout à fait en droit de le souhaiter
toute personne humaine, homme ou femme, qui aspire à la
dignité.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que la motion est
adoptée?
M. Blouin: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: Conformément à l'article 216 de notre
règlement je suggère que nous reportions ce vote à la fin
de la période des affaires courantes cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Vote
reporté. M. le leader du gouvernement.
M. Blouin: Oui. M. le Président, après avoir
parlé des droits des autochtones nous allons parler des droits de tous
les citoyens et citoyennes du Québec. Je vous demande donc d'appeler
l'article 5 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 20
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien.
Reprise du débat sur l'adoption du principe de la loi 20, loi portant
réforme au Code civil du Québec du droit des personnes, des
successions et des biens. L'ajournement du débat avait été
demandé par le député de Sainte-Anne. Est-ce que... Oui,
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Oui, effectivement, M. le Président, mais il a
été convenu que c'est Mme la députée de Dorion qui
reprendrait ce débat ce matin.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mme la
députée de Dorion.
Mme Huguette Lachapelle
Mme Lachapelle: M. le Président, je voudrais parler
aujourd'hui pour appuyer mon collègue, le ministre de la Justice, et sa
volonté de faire du projet de loi 20, portant sur le droit des
personnes, des successions et
des biens, un élément majeur dans la réforme et la
modernisation de notre Code civil. C'est un projet très vaste,
très complexe, très technique qui couronne les mesures contenues
dans les projets de loi 106, 107, 58 et qui complète la réforme
entreprise par la loi 89 déjà adoptée sur les droits de la
famille.
Je ne suis ni fiscaliste, ni notaire, ni comptable, mais je me souviens
des multiples recommandations faites par une batterie d'organismes
qualifiés, allant d'un regroupement de femmes aux chambres de commerce,
en passant par toute la gamme des intérêts visés par cette
réforme de notre Code civil.
Lors de la présentation du projet de loi 20, le ministre a
rapidement rappelé les antécédents de cette
réforme. Je me permettrai d'y revenir pour essayer de mesurer le chemin
parcouru et de dégager quelques enseignements.
En 1955, on sentit le besoin de réviser le système de
droit privé de façon à y intégrer les traditions
encore actuelles et les valeurs présentes véhiculées par
notre société moderne. Les experts ont noté que la
persistance des lois françaises, malgré l'imposition d'un
régime anglais, est due à l'attachement des citoyens à
leurs coutumes et à leur langue.
Je ne peux m'empêcher, M. le Président, de faire un
rapprochement avec aujourd'hui. Si nos ancêtres ont su maintenir une
spécificité pour un Québec vraiment pas comme les autres,
comment, aujourd'hui, n'aurions-nous pas la sagesse et le coeur de maintenir ce
qui nous différencie? La loi 101 et nos affirmations d'une
société distincte sont tout à fait dans l'esprit de ceux
et celles qui ont sauvegardé nos lois françaises. Notre Code
civil nous ressemble. Il parle de notre originalité et de notre
désir de durer.
Notre Code civil, on a raison d'en être fiers, puisque la Cour
suprême elle-même, celle qui est toujours censée pencher du
même côté, a reconnu qu'il est en lui-même un
système de droit complet qui peut vivre et se développer par
lui-même. Donc, dans les années cinquante, on a senti le besoin
d'une réforme, et c'était normal. Ceci nous mènera
à une patiente révision qui aboutira aux propositions de 1977 qui
ont elles-mêmes inspiré la législation sur le droit de la
famille ainsi qu'un deuxième bloc législatif, les livres I, III,
IV sur le droit des personnes, des successions, des biens que le projet de loi
20 englobe et qui est soumis à notre étude.
Voilà pour le rapide historique qui permet de mieux nous situer,
mais, pour celui qui n'est pas juriste, ce qui est mon cas, en quoi le Code
civil peut-il m'intéresser et en quoi puis-je me réjouir comme
législatrice et comme citoyenne? En le regardant de plus près,
j'ai compris que notre Code civil revêt une importance
particulière dans notre société, en ce sens qu'il
régit les rapports quotidiens entre personnes. Il régit nos
biens. Il détermine nos droits. Il prescrit nos devoirs et obligations.
On ne peut donc laisser ce projet aux seuls spécialistes. Chacun est
concerné par ce projet de loi. Il nous accompagne dans tous nos gestes.
D'ailleurs, le nombre de mémoires et la qualité des intervenants
sur cette question prouvent à quel point le sujet est important. (11 h
50)
Le code exprime en grande partie la manière d'être, la
culture de notre peuple. Mais la culture n'est pas une chose statique,
immobile. La culture vit. La culture s'exprime. La culture vieillit et change.
Si l'on veut que le Code civil soit un instrument juridique complet et
fonctionnel qui réponde avant tout aux besoins de la population et de la
communauté juridique, il doit évoluer, suivre le
développement de la société québécoise. Il
doit, en somme, s'ajuster à nos réalités de 1985. En 1866,
la société québécoise était plus
homogène. Elle n'était pas aussi ouverte et pluraliste
qu'aujourd'hui. Les lois doivent correspondre à ces nouvelles
mentalités. Au XXe siècle, il a fallu aussi se débarrasser
du vieux Code Napoléon qui faisait de la femme un être sans
droits, une sorte de handicapée sociale, condamnée à une
perpétuelle domination. Napoléon était un grand
conquérant, mais il avait peut-être trop tendance à
considérer la femme comme une terre conquise. Depuis lors, heureusement,
les femmes ont su conquérir leurs droits, droit de vote au
fédéral en 1918 et au provincial, en 1940, droit d'administrer
leurs biens en 1941, mais qui n'est devenu véritablement opérant
qu'en 1964, société d'acquêts en 1969 et enfin, la loi 89
et le droit de la famille qui fut l'étape majeure de la progression
juridique de la femme vers l'égalité. Alors, un code qui ne
tiendrait pas compte de cette nouvelle dynamique sociale manquerait le
bateau.
Si le XIXe siècle était patrimonial, c'est-à-dire
tourné vers le père, le XXe siècle, lui, s'est
orienté vers la reconnaissance de l'égalité et de
l'autonomie des personnes, aussi bien dans le couple que dans les autres
situations de la vie quotidienne. Les mêmes principes sur le droit de la
famille: égalité des membres, liberté dans leurs
relations, droits des enfants, se retrouvent dans le projet de loi 20. C'est
normal puisqu'ils font partie de la même réforme qui était
de proposer un contexte nouveau de la société
québécoise.
La réforme du droit de la famille constituait le premier bloc de
la réforme du Code civil et cela a été fait. Pourquoi
avoir alors commencé par le livre II en 1981 et de ne proposer que les
livres I, III et IV en 1985? Lors de l'étude de la loi 89, le
ministre de la Justice avait déjà répondu parce que
là peut-être plus qu'ailleurs, le vieillissement et
l'éparpillement des lois s'étaient fait sentir de façon
aiguë. C'était devenu évident et nécessaire. Le droit
de la famille est en tout conforme au changement. Le gouvernement a entrepris
la réforme de ce qui est une suite nécessaire, le droit des
personnes, le droit des successions, le droit des biens. Si les délais
ont été longs et même si l'Opposition dit qu'il est trop
tard, dans une réforme d'une telle ampleur, il faut faire place à
une consultation aussi savante que variée, à une réflexion
aussi sérieuse que possible, mais le droit ne se bâtit pas d'un
trait de plume et les textes de loi ne doivent pas seulement représenter
l'avis d'un expert, qu'il soit juriste ou fiscaliste. Ils doivent
refléter l'état de la société, celle qui a
été et celle qui doit changer, celle qui s'en vient et à
laquelle on doit s'ajuster. Il doit y avoir de la place pour la discussion, la
critique, les ajustements, ce que les experts appellent le droit transitoire
entre le droit passé et le droit futur.
M. le Président, je ne voudrais pas aujourd'hui entreprendre une
lecture systématique des quelque 1200 articles de la loi. Je voudrais
seulement me réjouir de la cohérence de certaines dispositions
quant à la société actuelle. Je me félicite d'abord
que la réforme s'articule autour des principes de la Charte des droits
et libertés de la personne. Cela me semble être un départ,
une garantie supplémentaire. Je me souviens des principales
inquiétudes des groupes entendus lors de la commission parlementaire. Si
le projet de loi ne répond pas à toutes leurs inquiétudes,
il en rassurera plus d'un.
Permettez-moi, sans aller dans les aspects trop techniques, d'en relever
quelques-uns. Avec les progrès de la médecine et les
expériences nécessaires, au nom de l'intégrité de
la personne, la loi précise les conditions de soins de garde,
d'interventions, aussi bien mineures que majeures. Elle règle les cas de
prélèvements d'organes à certaines conditions.
Voilà qui assure une protection dans ces questions si troublantes.
Dans le droit de succession, les principales réclamations seront
satisfaites, je crois. D'abord, dans le cas d'acceptation d'une succession, le
paiement des dettes du défunt ne peut pas dépasser l'actif de la
succession. Cela me semble plus conforme à notre société.
Le prêteur ou le créancier ne doit pas avoir plus de garantie
à la mort que pendant la vie du débiteur.
De plus, le projet de loi 20 introduit des droits de survie pour la
succession au conjoint. Si cette formule est mitigée entre la
créance alimentaire et la réserve héréditaire,
demandée, entre autres, par le Conseil du statut de la femme et le
Réseau d'action et d'information pour les femmes, elle est de nature
à assurer une meilleure protection au conjoint survivant. Auparavant,
lorsqu'une personne décédait sans avoir fait un testament, la
succession accordait le tiers de l'héritage au conjoint et les deux
tiers aux descendants. Certains demandaient les deux tiers au conjoint. Le
projet de loi accorde la moitié au conjoint et la moitié aux
descendants. Ce principe semble plus juste, surtout à cause des liens
affectifs privilégiés dans le couple. De plus, le conjoint
survivant, en acceptant la succession, n'a plus à renoncer à son
régime matrimonial pas plus qu'à une prestation compensatoire, le
cas échéant. Encore une fois, ce principe réaffirme le
principe de la stricte égalité des époux.
Permettez-moi de citer un dernier exemple, une autre preuve de la
tentative du législateur d'ajuster son code à des
réalités nouvelles. Je veux parler du désir
légitime d'accéder à la propriété. Notre
gouvernement, qui l'a encouragé et soutenu sous toutes ses formes,
serait bien mal venu de légiférer dans le sens contraire. Dans le
livre IV sur les biens, le législateur précise, à partir
de recommandations qui lui ont été faites, les droits et le
statut des copropriétaires dans une copropriété divise et
établit un nouvel équilibre dans leurs rapports.
Quand on connatt les aspirations à la propriété,
mais, en même temps, l'incapacité financière d'y
accéder, la copropriété est souvent la meilleure solution.
Encore là, voilà un exemple de la loi 20 qui correspond à
la réalité de notre époque.
Je laisserai à d'autres le soin de discuter plus amplement
d'autres articles. Je voudrais simplement exprimer un accord avec le
rajeunissement de notre code qui va dans le sens d'un meilleur respect des
personnes et d'une meilleure adaptation à notre société.
La révolution des mentalités que la société
québécoise a connue, depuis une vingtaine d'années,
imposait cette réforme en profondeur. Je me réjouis de faire
partie du gouvernement qui aura mené cette réforme à
terme. Merci, M. le Président. (12 heures)
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le
député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. L'importance du sujet
qui est devant l'Assemblée nationale aujourd'hui nous fait sentir
jusqu'à quel point la fonction de législateur qui nous est
impartie en tant que députés est une fonction exigeante, une
fonction qui a des répercussions importantes sur ce que devient, sur ce
qu'est la société du Québec. Nous sommes en train de
toucher présentement, avec la réforme du Code civil,
au coeur même de nos traditions, de notre
spécificité québécoise, de ce qui fait que nous
sommes fiers d'être Québécois, que nous pouvons conserver
un certain nombre de lois fondamentales qui, au cours des siècles
maintenant, ont su nous protéger et permettre à notre
société de se développer selon ses tendances profondes et
selon les choix personnels qu'elle faisait.
C'est avec beaucoup de fierté que je voudrais dire quelques mots
sur la réforme qui nous est proposée par le gouvernement. La
tâche à laquelle les codificateurs se sont attaqués est
immense, est énorme. Songeons un instant que les codificateurs du
siècle dernier sont passés à l'histoire, sont devenus des
géants; tout étudiant qui passe à l'une des
facultés de droit du Québec apprend leurs noms, connaît
leur date de naissance et sait qui sont ces personnes. Nous sommes actuellement
en train de refaire une tâche qui avait été tellement bien
faite qu'elle a su supporter l'usure des ans, qu'elle a su supporter le passage
des hommes.
Le moment est venu cependant de refaire un examen de tout ce qui a
été le fondement de nos lois civiles. Nous avons devant nous un
projet de loi qui contient plus de 1200 articles qui portent sur le droit des
personnes, le droit des successions, le droit des biens. Nous ne pourrons pas,
quels que soient les efforts que nous voulions faire, porter un jugement final
sur la valeur des dispositions législatives qui nous sont
présentées puisqu'il est de la nature d'un code de regrouper sous
un seul chapeau l'ensemble des dispositions législatives qui nous
régissent au point de vue civil et qu'un code n'est un bon code que s'il
sait résister à l'usure du temps, que s'il sait donner
satisfaction dans cinq ans, dans dix ans, dans vingt-cing ans.
Tout ce que nous pouvons espérer, c'est que toutes les
précautions nécessaires ont été prises, que toutes
les études qu'exigeait une réforme semblable ont
été faites. Je pense que le temps qui a été
consacré par les codificateurs, par l'office, ce temps a
été consacré à bon escient et permet
d'espérer que nous aurons entre les mains un instrument qui permettra
à notre société de s'épanouir, qui permettra
à notre société d'être plus juste, qui permettra
à notre société de donner ouverture à toutes les
possibilités qui sont en elle.
En tant qu'avocat, l'application des lois est une préoccupation
première. Il est sûr que dans une oeuvre de l'ampleur que celle
qui nous est présentée, nous pourrions passer des heures et des
heures... La preuve en est que dans les prochaines années les
étudiants des facultés de droit passeront deux ou trois ans
à assimiler ce qui est aujourd'hui devant l'Assemblée nationale.
Les futurs avocats devant les cours de justice passeront des jours, des
semaines et des mois à faire valoir leur interprétation de
certains articles de loi ou groupes d'articles de loi, interrogeront des
témoins et feront valoir leurs arguments devant des juges qui, eux
aussi, dans le secret de leur cabinet, prendront en
délibéré les représentations qui leur auront
été faites par les juristes et rédigeront des jugements
qui feront jurisprudence et ce à partir des Cours provinciale,
supérieure, d'appel, suprême.
L'influence du Code civil va se faire sentir partout. Il est aussi
remarquable que déjà de savants juristes ont commencé
à se pencher et à écrire une amorce de doctrine sur ce que
sera le nouveau Code civil. Tout cela nous amène à
réaliser que ce n'est pas dans les quelques minutes qui nous sont
imparties que nous pouvons faire le tour des questions soulevées par le
Code civil.
Déjà le projet de loi 89 faisait, dans un
préambule, un certain retour en arrière où on disait que:
"Considérant qu'en 1955 - il y a déjà 30 ans, M. le
Président - la Législature décidait de confier à un
juriste la révision générale du Code civil du Bas-Canada;
"Considérant qu'en 1960, la Législature décidait que le
rapport de ce juriste servirait de base à la préparation d'un
projet définitif d'un nouveau Code civil; - nous sommes 25 ans
après. "Considérant que le rapport de ce juriste a
été déposé à l'Assemblée nationale le
20 juin 1978; - donc, 18 ans après avoir reçu le mandat initial.
"Considérant - c'est l'Assemblée nationale qui parle à ce
moment-là - qu'il convient d'instituer un nouveau Code civil mais qu'il
importe d'échelonner l'adoption de ses différentes parties en
raison de l'ampleur des réformes proposées et des études
qu'elle requiert..."
Ce court préambule nous permet de situer très
brièvement dans un continuum historique les dispositions
législatives qui nous sont proposées. Il y en a un grand nombre
qui portent sur le droit des successions. Plusieurs de mes collègues ont
eu l'occasion d'aborder différents aspects du droit des successions.
C'est un droit difficile, c'est un droit technique mais c'est en même
temps un droit extrêmement important, dans ce sens qu'il permet à
notre société, il permet aux gens qui la composent de
connaître d'une façon certaine les règles qui
régiront la disposition de leurs biens après leur
décès.
On sait que le décès, comme les taxes, sont deux choses
auxquelles on n'échappe pas, surtout quand on connaît le niveau
des taxes au Québec. Le droit des successions permet aux
héritiers de pouvoir connaître les règles auxquelles ils
seront soumis, et tout doit se passer dans l'ordre. Les dispositions qui nous
sont proposées sont des dispositions qui visent cet objectif-là.
Il est évidemment
trop tôt pour en faire une évaluation définitive.
Cependant, je crois pouvoir dire que nous avons l'assurance que toutes les
précautions nécessaires ont été prises pour
éviter que nous nous trouvions dans des impasses ou dans des culs-de-sac
légaux, juridiques ou législatifs. C'est ce qui importe et c'est
pour ça que le travail que nous effectuons ici à
l'Assemblée nationale est extrêmement important. Il nous
appartient finalement en dernier ressort d'évaluer le travail des
spécialistes. Bien sûr, on ne peut demander aux
députés de l'Assemblée nationale d'être des
spécialistes en droit fiscal, en droit des successions, en droit de la
famille, du droit des biens, mais on peut exiger - et c'est ce à quoi on
s'est engagé en prêtant serment ici à l'Assemblée
nationale - de mettre toutes les connaissances dont on dispose et qu'on a pu
acquérir au cours de notre vie, de façon que les projets de loi
qui sont adoptés en cette Assemblée soient justes, conformes aux
désirs de la population et adoptés démocratiquement.
Plus particulièrement, j'aimerais dire quelques mots sur ce qui
concerne la copropriété divise d'un immeuble, ce qui porte
communément le nom de condominium. Les principaux objectifs qui ont
été poursuivis, d'après ce que je comprends de la
présentation qui nous en a été faite par les commissaires,
par la réforme en ce qui concerne les condominiums, d'apporter des
correctifs à un certain nombre de problèmes affrontés dans
le domaine et de proposer des mesures législatives qui tiennent compte
de l'évolution et de la transformation de nos habitudes en ce qui
concerne ce domaine de l'hébergement. Il y a donc eu des modifications
proposées et on peut s'apercevoir qu'elles touchent
particulièrement l'établissement lui-même de la
copropriété, la déclaration de copropriété,
le contrôle du syndicat par le promoteur ainsi que les droits et
obligations de ce qu'il est convenu d'appeler le syndicat. (12 h 10)
L'établissement de la copropriété divise doit se
faire par l'enregistrement d'une déclaration - tel que le prévoit
l'article 1093 - en vertu de laquelle la propriété de l'immeuble
est divisée en fractions, appartenant à une ou plusieurs
personnes. C'est le texte de l'article 1093 et c'est là l'essence de la
copropriété divise. Il faut également savoir qu'à
la suite de cette déclaration, la collectivité des
copropriétaires devient une personne morale qui a des
responsabilités en ce qui concerne la conservation de l'immeuble, son
entretien, son administration, sa destination future, etc.
Le projet de loi traite aussi assez longuement des fractions de la
copropriété. L'article 1097, par exemple, établit que les
parties des bâtiments et des terrains qui sont la propriété
d'un copropriétaire unique, déterminé, sont exclusives
à lui. Il en a toute l'utilité. C'est important pour bien saisir
l'essence même de la copropriété divise. Dans un article
subséquent, le projet de loi détermine ce que sont les parties
communes, celles qui sont la responsabilité globale de l'ensemble des
copropriétaires. On en donne une liste et la loi est assez
précise là-dessus. Il est sûr qu'on ne peut, dans une
semblable énumération, épuiser la totalité des
possibilités de parties communes. Il est probable qu'il y aura des
difficultés dans le sens qu'il est normal, dans la rédaction des
lois, lorsqu'on procède à une énumération, qu'on
risque par le fait même de ne pouvoir tout englober. C'est le risque
qu'on prend. Le législateur a décidé de le prendre.
Espérons qu'il n'y aura pas de difficultés qui s'ensuivront.
Il faut aussi souligner qu'aux fins d'imposition des taxes, chaque
fraction, chaque unité divise de copropriété est une
unité séparée, distincte. Le contenu de la
déclaration est défini dans la loi. On y indique ce que l'acte
doit comprendre et on précise aussi que cet acte doit contenir un
règlement qui précise les pouvoirs et devoirs respectifs du
conseil d'administration, du syndicat et de l'assemblée des
copropriétaires. La loi prévoit aussi que la déclaration
de copropriété ne peut imposer aucune restriction - et c'est
important - aux droits des copropriétaires, sauf celles,
évidemment, qui sont justifiées par la destination même de
l'immeuble, par son caractère distinct ou par sa situation propre; c'est
entendu. L'enregistrement de la déclaration doit être
notarié; c'est aussi important.
Les droits et obligations des copropriétaires. Chaque
copropriétaire - je le disais tout à l'heure et la loi revient
là-dessus en parlant des droits des copropriétaires - dispose de
sa fraction d'immeuble. Il en est le propriétaire de plein droit, il en
a la pleine utilité et il peut s'en servir librement, sans demander de
permission à quiconque. Ce copropriétaire a aussi des obligations
en ce qui concerne les charges résultant de la cohabitation, de la
copropriété de l'immeuble ainsi que de l'exploitation de cet
immeuble. Le copropriétaire est sujet à certains recours en ce
qui concerne la répartition des charges, au cas où il ne
s'acquitterait pas des parties qui lui incombent relativement aux frais
d'entretien de l'immeuble, en ce qui concerne ces parties communes.
La loi prévoit aussi que le conseil d'administration doit fixer,
après consultation de l'assemblée des copropriétaires, la
contribution à un fonds de prévoyance parce qu'on a voulu
éviter que les copropriétaires ne se retrouvent dans une
situation où ils ne puissent faire face à certaines exigences
imprévues ou imprévisibles en ce qui concerne certaines
réparations, comme cela peut arriver dans n'importe quelle
propriété. Pour ceux qui sont propriétaires, on sait qu'il
y a certaines choses qui peuvent arriver et auxquelles on doit pouvoir faire
face rapidement sous peine de détérioration importante de
l'immeuble.
Il y a aussi tout un chapitre qui est consacré plus
spécifiquement aux problèmes liés au contrôle de la
copropriété par le promoteur, par les copropriétaires. Il
est normal que ces intérêts, à un moment donné,
soient en friction, en conflit les uns avec les autres. Dans certaines
circonstances le problème a été extrêmement aigu
où les copriétaires désiraient protéger
l'espèce de vision qu'ils avaient de l'utilisation de ce qui
était maintenant leur maison, leur domicile, et s'opposaient à ce
que pouvait désirer faire le promoteur qui lui, très souvent,
était majoritaire à l'assemblée des copropriétaires
et désirait protéger ou maximiser son investissement. Il
s'agissait de trouver une méthode qui puisse réduire ce conflit,
qui puisse en tout cas à la longue faire en sorte que chacun y trouve
son dû.
La solution qui a été abordée, qui a
été acceptée et qui est proposée dans le projet de
loi fait en sorte que le promoteur ne pourra jamais avoir plus de 60% de la
copropriété divise d'un immeuble pour la première
année, cette proportion diminuant automatiquement à 40% la
deuxième et ensuite à 25%, de façon à éviter
qu'il ne se retrouve d'une façon permanente dans une situation où
il est jusqu'à un certain point en conflit d'intérêts,
étant en même temps le promoteur, le constructeur, souvent le
vendeur, l'administrateur et aussi le copropriétaire de la
copropriété divise.
Le projet a aussi voulu limiter le nombre de voix dont peut disposer une
seule personne autre que le promoteur ou le créancier
hypothécaire, de façon à empêcher qu'un groupe
restreint de personnes ne prenne le contrôle des destinées de
toute la propriété et n'impose de cette façon ses
volontés personnelles aux autres copropriétaires.
Le projet de loi propose également de limiter la période
pendant laquelle le promoteur peut être l'administrateur de la
copropriété en procédant à l'élection - la
loi l'exige, la loi est formelle là-dessus - dans les 90 jours où
le promoteur ne détient plus la majorité des voix, en
procédant à l'élection, donc, du conseil d'administration.
À cette occasion le promoteur devra ouvrir ses livres, le comptable
devra mettre l'assemblée des copropriétaires au courant de la
situation financière de l'immeuble qui leur appartient en
copropriété divise. Tout pourra être vérifié
sur place, c'est un droit strict qui appartient aux copropriétaires,
dans les 90 jours.
La loi va plus loin que cela. Le comptable a l'obligation légale
de dévoiler aux copropriétaires toute illégalité,
toute irrégularité qu'il aurait pu constater. Il est important
pour la sécurité des copropriétaires qu'on puisse savoir
à quoi s'en tenir au moment où on prend la pleine
responsabilité de l'immeuble.
M. le Président, je pourrais continuer pendant quelques minutes
encore. Je vois que vous me faites signe. Je regrette de ne pas avoir le temps
suffisant pour faire le tour de ce chapitre qui est extrêmement
important. Je souhaite vivement que les dispositions qui nous sont
proposées permettent finalement une véritable relance de
l'industrie de la construction. (12 h 20)
Tout le monde doit y trouver son compte: les promoteurs et les acheteurs
éventuels de copropriété divise. Il faut que le syndicat
et la loi, heureusement, prévoient des dispositions qui sont de nature
à faciliter les choses. Il faut que le Syndicat des
copropriétaires puisse, grâce aux droits et obligations qui lui
sont dévolus, s'organiser pour faire fonctionner d'une façon
normale, comme si c'étaient des propriétés
immobilières ordinaires, l'investissement important qu'est, pour les
personnes qui y habitent, la copropriété divise. C'est ainsi -je
le mentionnais tout à l'heure - que le syndicat a maintenant
l'obligation de se constituer un fonds de réserve pour les
réparations éventuelles majeures ou pour des fins de remplacement
de biens communs ou d'éléments communs. C'est nécessaire,
on le sait, parce qu'il deviendrait trop onéreux, au moment où la
dépense serait nécessaire ou inévitable, d'imposer aux
copropriétaires la totalité de la dépense à
laquelle ils ont à faire face momentanément pour acquitter une
bris quelconque ou une difficulté imprévue ou
imprévisible.
Le syndicat a aussi l'obligation d'assurer l'immeuble, tant dans les
parties communes que dans les parties exclusives, sauf pour ce qui est des
améliorations apportées par un copropriétaire à sa
fraction contre les risques ordinaires. Cela demeure la responsabilité
du copropriétaire divis.
Enfin, le projet de loi accorde aussi des droits importants pour faire
respecter efficacement la déclaration de copropriété que
je mentionnais au début de mon allocution, notamment en permettant de
demander la résiliation du bail d'une fraction, lorsque
l'inexécution d'une obligation du locataire cause un préjudice
sérieux à un copropriétaire ou à un autre occupant
de l'immeuble.
Pour terminer, M. le Président, le projet de loi,
malheureusement, est plus que discret en ce qui concerne la question de la
sorte de multipropriété, ce qui s'appelle, en anglais, le
"time-sharing". À cet égard, le
projet de loi oblige les promoteurs de tels projets à
déclarer, dès le début, aux copropriétaires
éventuels, clairement leurs intentions et les modalités de cette
multipropriété qui s'appelle, en anglais, le "time-sharing". Mais
il faut reconnaître la timidité du projet de loi dans ce domaine.
Disons, à la décharge du législateur ou de la proposition
gouvernementale, que cette forme de multipropriété n'est pas
très répandue actuellement au Québec. Il y a des
expériences qui se font; il y a des tentatives et des ajustements. Nous
sommes en train, au Québec, de faire l'essai de ce qui est devenu
ailleurs, par exemple, une façon ordinaire d'être
propriétaire d'un immeuble en copropriété divise.
Il faut espérer que les personnes à qui le gouvernement
avait confié le mandat de nous faire des propositions qui ont
été traduites dans le projet de loi 20, continuent leur travail
et qu'elles soient aux aguets dans le domaine de la
multipropriété de façon que nous puissions avoir des
propositions qui collent à la réalité, qui sont conformes
aux intérêts des promoteurs et des futurs copropriétaires,
de façon que ce soit un élément de plus dans ce que nous
recherchons tous, en tout cas les gens de ce côté-ci de la
Chambre, une véritable reprise économique qui doit
évidemment, comme c'est normal et comme cela a toujours
été le cas, passer par la reprise de la construction
immobilière.
M. le Président, ce sont les quelques réflexions que je
voulais faire en ce qui concerne le projet de loi 20. J'espère que les
juristes, les étudiants en droit, les utilisateurs, les
administrés, les justiciables y trouveront leur compte, que nous aurons
fait oeuvre utile et que nous pourrons nous réjouir d'avoir donné
une suite digne de ce qu'était le Code civil avec lequel nous avons
vécu jusqu'à maintenant, grâce aux travaux auquels nous
participons ici à l'Assemblée nationale.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Mille-Îles.
M. Jean-Paul Champagne
M. Champagne: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup
de fierté que j'interviens pour commenter le projet de loi 20, projet de
loi portant sur la réforme du Code civil du Québec du droit des
personnes, des successions ou des biens. Je suis fier particulièrement
parce que notre Code civil est basé sur le droit privé
français. En effet, si nous faisons un peu d'histoire, nous avons
été liés par ce qu'on appelait à cette
époque la coutume de Paris jusqu'en 1866; et le droit privé
québécois d'alors était lié aux lois civiles
françaises. Le Bas-Canada a toujours été lié par ce
Code civil français. Malgré la conquête, Sa Majesté
britannique a jugé bon de garder ce même code de lois civiles
françaises et nous l'avons encore devant nous. Cependant, nous avons
depuis lors amendé certaines dispositions. Certaines institutions
nouvelles ont été créées; entre autres, les bureaux
d'enregistrement dans les années 1840. On a ajouté aussi
l'abolition du régime seigneurial en 1854; et nous avons aussi
établi l'origine du cadastre dans les années 1860. Je suis
content de voir que le ministre de l'Énergie et des Ressources vient
d'annoncer que l'application de la Loi du cadastre sera amendée pour
être plus à la mode, être plus claire pour tout le monde. On
s'aperçoit que, considérant la justesse de ces lois,
considérant aussi la clarté de ces lois du temps, nous avons
gardé pendant un siècle ce même code sans l'avoir
changé. Mais, dès 1955, le gouvernement a jugé bon de
faire quand même une révision. Le gouvernement d'alors a
désigné quatre codificateurs qui ont fait un travail de
consultation, un travail de recherche; et ils ont déposé en 1978
à l'Assemblée nationale leur travail de recherche et des
recommandations. Ces recommandations ont abouti au dépôt du projet
de loi que nous avons devant nous, le projet de loi 20 qui amende et qui adapte
notre Code civil.
M. le Président, on doit se demander enfin ce qu'est un Code
civil. Un Code civil, cela nous régit tous les jours. On est lié
du matin au soir et du soir au matin par le Code civil parce que le Code civil,
c'est le droit commun de tous. Ce sont les droits de tous et aussi les devoirs
de tous. En effet, le Code civil régit toutes les diverses
manifestations de la vie sociale. Le Code civil règle les rapports
quotidiens entre les personnes. Le Code civil gouverne nos actions. Le Code
civil régit nos biens. Le Code civil détermine le nombre de nos
droits et le nombre de nos obligations. On s'aperçoit de l'importance de
ce code et l'importance pour nous de voir à ce que les droits de la
personne, à ce que le droit à l'égalité des
individus soient sauvegardés. C'est tellement important pour notre
gouvernement, le droit de la personne, que, depuis 1976, nous avons voté
plusieurs lois très importantes sur le droit de la personne, sur le
droit à l'égalité des individus. (12 h 30)
Je veux rappeler brièvement certaines lois qui ont
été adoptées. Le droit de la personne était
tellement important pour notre gouvernement que nous avons adopté la Loi
sur la réforme du droit de la famille. La personne est importante et
nous avons aussi adopté la Loi sur la protection de la jeunesse. La
personne est très importante pour nous et nous avons adopté la
Loi sur la protection du malade mental. Nous avons
aussi adopté la Loi sur la protection du consommateur. Nous avons
adopté la Loi sur la protection des personnes et des biens en cas de
sinistre.
Je suis fier d'une loi que nous avons adoptée malgré
qu'à l'époque nous ayons connu beaucoup d'opposition: c'est la
loi sur la protection de l'accidenté. En 1978, nous avons adopté
le régime d'assurance automobile parce que, pour nous, le droit de la
personne était très important et que le droit à
l'égalité des individus était indispensable.
Nous avons aussi dans cette lignée le Code civil. Je me
réjouis et je suis fier de voir que c'est nous qui allons y apporter
certains amendements. Je veux simplement, pour donner une idée de ce
qu'est le respect de la réputation et de la vie privée, souligner
qu'au chapitre III, nous disons que toute personne a droit au respect de sa
réputation et de sa vie privée. Personne ne peut porter atteinte
à la vie privée d'autrui sans être autorisé par la
loi. On peut se demander quelles sont ces atteintes à la vie
privée qui protègent les individus.
Vous avez certains droits qui sont, pour vous, des droits de protection.
Vous n'avez pas le droit de pénétrer dans le logis d'une personne
et d'y prendre quoi que ce soit. Cela semble évident mais on doit le
mentionner dans le Code civil. On n'a pas le droit non plus d'intercepter ou
d'utiliser volontairement une communication privée; l'écoute
électronique et le reste, demeurent défendus. On n'a pas le droit
de capter ou d'utiliser son image ou sa voix, lorsqu'on se trouve dans des
lieux privés. On n'a pas le droit de surveiller la vie privée de
quelqu'un par quelque moyen que ce soit. Je pense qu'il est très
important d'avoir ces protections quotidiennes. Nous n'avons pas le droit
d'utiliser le nom d'une autre personne, son image, sa ressemblance ou sa voix
à toute autre fin que l'information légitime du public. Nous
n'avons pas le droit d'utiliser sa correspondance, ses manuscrits ou ses autres
documents personnels.
Nous voyons que le respect de la vie privée des gens est
protégé par le Code civil. Le projet de loi 20, que nous avons
devant nous, protège les droits des personnes, comme autrefois dans le
Code civil français.
Je voudrais m'attarder d'une façon particulière au
régime de protection du majeur. Je pense que, comme principe
fondamental, nous devons dire que tout est établi dans
l'intérêt de l'individu. Je pense que fondamentalement l'individu
est très important. C'est le personnage au centre de toutes les
préoccupations sociales. Comme gouvernement, comme
société, on doit assurer la protection de la personne. On doit
assurer l'administration de son patrimoine dans le régime de protection
du majeur. On doit assurer aussi l'exercice de ses droits civils dans le cas
où la personne est inapte à le faire.
Je vais traiter ici de l'incapacité de certaines personnes
à voir à leur protection, à l'administration de leurs
biens. Si une personne est incapable par elle-même d'administrer ses
biens, notamment, si quelqu'un est trop malade ou si quelqu'un a une
défaillance quelconque ou si quelqu'un, par un affaiblissement dû
à l'âge, subit une altération de ses facultés
mentales ou dans le cas d'une incapacité corporelle, ne peut exprimer sa
volonté, à ce moment, nous devons comme société en
prendre soin. Maintenant, cela se fait de quelle façon? Il s'agit de
voir à ce qu'un curateur ou un tuteur et aussi un conseiller puissent
assister ces personnes dans le besoin quand leur protection n'est pas
assurée, quand l'administration de leur patrimoine n'est pas
assurée parce qu'elles souffrent d'une incapacité mentale ou
physique.
Maintenant, avant de parler du curateur, je voudrais souligner ici un
élément nouveau dans notre code. Ce qui est très important
ici, à l'article 286, c'est que nous ajoutons qu'un directeur
d'établissement de santé, que ce soit d'un CLSC ou d'une
institution hospitalière, ou encore un directeur générai
de services sociaux pourra, lorsque la loi sera adoptée, prendre
certaines décisions pour les personnes qui en sont incapables. Il
prendra la place du curateur, du tuteur ou du conseiller momentanément,
dans certaines circonstances. Nous veillons d'une certaine façon
à ce que le régime de protection soit bien établi, que le
degré d'incapacité soit bien établi et que la façon
d'administrer les biens soit bien établie.
Je voudrais ici parler, entre autres, du curateur. Vous pouvez avoir un
curateur public dans le cas où personne ne veut s'occuper d'un individu.
Nous avons aussi la curatelle privée qui a été
instituée afin qu'un conseil de famille désigne une personne qui
va s'occuper d'administrer les biens, de protéger la personne dans le
besoin. Vous avez à ce moment-là une curatelle privée.
Vous avez aussi le tuteur qui, pour certains actes, doit aussi protéger
l'individu simplement dans des cas particuliers.
On peut se demander maintenant comment l'ouverture d'un régime de
protection doit s'établir, comment en arriver à dire que telle
personne, tel individu a besoin d'un secours, a besoin d'être
dirigé, a besoin d'être conseillé, a besoin d'être
administré dans ce qu'il a, dans son patrimoine. La demande peut se
faire par le majeur lui-même s'il en est conscient. Cette demande
d'ouverture d'un régime de protection peut se faire aussi par le
conjoint. Elle peut être faite par des proches parents ou des
alliés, de même que par toute personne qui démontre pour le
majeur un intérêt particulier.
On peut voir aussi quel moyen il faut prendre pour établir cette
tutelle ou cette curatelle. Bien sûr, le tribunal doit prendre en
considération beaucoup d'éléments, prendre avis des
personnes qui ont traité cet individu. Il doit prendre conseil au point
de vue de l'expertise et des preuves médicales, analyser son
degré d'autonomie de même que son degré
d'incapacité. Ce sont tous quand même des facteurs permettant
d'établir un diagnostic très précis afin d'aider la
personne, l'individu le plus possible.
On doit aussi donner au majeur la permission d'être entendu
lui-même et voir au bien-fondé de la demande. Si un conjoint fait
une demande pour que l'autre partie, l'autre conjoint soit sous tutelle ou sous
curatelle, on doit montrer le bien-fondé d'une telle demande, on doit
voir aussi à l'analyse de la nature du régime sur la personne qui
est chargée de la représenter. Pour le tribunal, la durée
de cette protection est de trois ans dans les cas de tutelle et de nomination
d'un conseiller et de cinq ans dans le cas de curatelle. (12 h 40)
J'aimerais aborder ici la troisième section en parlant de la
curatelle. Lorsque j'ai expliqué la curatelle tout à l'heure
c'est l'incapacité majeure. Nous avons une curatelle, nous
établissons une curatelle lorsqu'il y a une incapacité majeure et
que celle-ci est totale et permanente. Dans le cas d'une tutelle, c'est
l'incapacité peut-être partielle et temporaire.
Lorsque nous établissons qu'un conseiller doit aider à
administrer les biens d'un individu, ce conseiller doit peut-être aider
pour certains actes et cela se fait d'une façon très temporaire.
C'est bien beau d'établir ce régime-là mais quand le
régime de protection prend-il fin? Il cesse par l'effet d'un jugement ou
par le décès du protégé. Je pense que ce sont tous
des éléments très importants qui aident au bien-être
collectif des individus qui sont plus ou moins aptes à se prendre en
main.
Je voudrais aussi aborder un autre sujet, celui du mineur. Je regarde le
chapitre premier de la majorité et de la minorité. Tout le monde
sait que l'âge de la majorité est fixé à 18 ans.
Cela veut dire en pratique que la personne jusqu'alors mineure devient capable
d'exercer pleinement tous les droits civils.
Le mineur de quatorze ans, je vois ça à l'article 170, est
réputé majeur pour tous les actes relatifs à son emploi.
Cela veut dire que même si un jeune n'a que quinze ans il est responsable
des actes du travail qu'il fait dans une entreprise. Qu'il exerce son art,
qu'il exerce sa profession, qu'il ait 15 ans, 16 ans ou 17 ans, il est tenu
responsable il est comme une personne majeure. C'est peut-être un
détail assez important.
Lorsque le mineur va devant les tribunaux il doit être
représenté en justice soit par son tuteur ou les personnes qui
sont responsables de ses actes.
M. le Président, le régime pour les mineurs c'est à
peu près la même chose que la protection du régime des
majeurs mais le régime est plus adapté et la tutelle est
établie dans l'intérêt du mineur, comme du majeur,
d'ailleurs, mais pour le mineur; il y aussi la protection de la personne,
l'administration de son patrimoine et l'exercice de ses droits civils. La
tutelle pour un mineur peut être légale et aussi dative. Une
tutelle légale résulte de la loi et la tutelle qu'on appelle
dative est octroyée par soit le père et la mère, soit par
le tribunal. C'est sûr que, pour accepter une tutelle, nous avons aussi
le droit de refus. Nulle personne n'est tenue ou contrainte d'accepter une
tutelle. À défaut d'avoir le consentement d'une personne, le
directeur de la protection de la jeunesse doit voir à trouver une autre
personne ou à faire en sorte que la société prenne soin
d'elle. Quant à la tutelle des biens de ce mineur, c'est la Curatelle
publique qui va prendre en charge ses biens et qui va les administrer et qui va
l'aider dans la conduite de ses droits. Un peu plus loin, on parle de la
tutelle légale d'une façon plus détaillée, de la
tutelle dative, de l'administration et des dispositions générales
de l'application de cette tutelle.
En terminant, pour nous, le Code civil est très important parce
que nous sommes liés, tous et chacun. C'est comme si c'était un
code d'éthique, un code de morale. On vit en société en
étant protégés et aussi en protégeant les autres.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, pour nous du Parti
québécois, nous du gouvernement, les multiples lois que nous
avons adoptées concernant la famille, les accidentés, la
protection de la jeunesse, les consommateurs, démontrent que notre
gouvernement a cette préoccupation d'égalité des droits
des individus. C'est pour cela que le projet de loi est devant nous pour
témoigner de notre désir de continuer dans cette veine de
respecter les droits des personnes. Nous acceptons, aujourd'hui, le principe du
projet de loi 20. Ce projet de loi sera étudié en commission
parlementaire afin d'en faire l'étude article par article. Et si on peut
bonifier certains articles, Dieu merci! qu'on le fasse! Je pense que c'est
très important de s'arrêter et de voir, article par article, en
commission parlementaire, que la protection de tous les individus, de tous les
Québécois et les Québécoises, que cette protection
soit juste, qu'elle soit entière et équitable. Tous les
Québécois et Québécoises, considérant le
sérieux de notre Code civil, considérant le sérieux des
droits d'égalité des individus, seront sûrement plus
protégés, auront le goût de vivre au Québec et
seront contents d'y
exercer tous leurs droits, tous leurs pouvoirs pour un État du
Québec en devenir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, tel que nous nous sommes
entendus entre les deux formations politiques présentes à cette
Assemblée, nous allons maintenant proposer l'ajournement de ce
débat.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M le
leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Voilà et puisqu'il est presque 13 heures, nous
n'aborderons pas d'autre sujet. Je vous demande donc également la
suspension de nos travaux.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
de suspension est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté?
Adopté. Nos travaux sont donc suspendus jusqu'à 14 heures. 15
heures, je m'excuse, c'est mercredi.
(Suspension de la séance à 12 h 49)
(Reprise à 15 h 2)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclaration
ministérielle ni de présentation de projets de loi.
Lettre de démission de M. Jacques Perrin comme
membre de la CFP
Au dépôt de documents, j'ai reçu la lettre suivante
que je dépose: "M. le Président, en conformité avec
l'article 108 de la Loi sur la fonction publique, sanctionnée le 22
décembre 1983, la présente constitue l'avis de ma
démission en ma qualité de membre de la Commission de la fonction
publique. L'Assemblée nationale m'a nommé à cette fonction
le 19 décembre 1978 pour un mandat d'une durée de sept ans qui
débutait le 15 février 1979. Cette nomination fut faite en
conformité de l'article 19 de la Loi sur la fonction publique,
sanctionnée le 23 juin 1978. Je demeure évidemment sensible
à la confiance qu'on m'a faite en me nommant à la fonction que
j'abandonne avec effet à compter d'aujourd'hui." C'est daté du 12
mars. "Veuillez agréer, M. le Président, l'expression de mes
sentiments distingués." C'est signé par M. Jacques Perrin.
Toujours au dépôt de documents, M. le ministre des
Finances.
Rapport annuel de la Caisse de dépôt et
placement
M. Duhaime: M. le Président, c'est avec plaisir que je
voudrais déposer le dix-neuvième rapport annuel,
c'est-à-dire au 31 décembre 1984, de la Caisse de
dépôt et placement du Québec qui, cette année,
affiche des revenus nets des déposants de 1 964 000 000 $.
Le Président: Toujours au dépôt de documents
et toujours M. le ministre des Finances.
Rapport annuel sur la tarification en assurance
automobile
M. Duhaime: Je voudrais également déposer, M. le
Président, le rapport sur la tarification en assurance automobile
préparé par l'Inspecteur général des institutions
financières pour l'année 1984.
Le Président: Je crois comprendre, M. le ministre, que
vous avez encore un troisième document.
Une voix: Un troisième et un quatrième. Il y en a
un à côté.
Le Président: Non? M. le ministre de l'Énergie et
des Ressources.
Rapport annuel de la Société de
cartographie
M. Rodrigue: M. le Président, il me fait plaisir de
déposer, en cette Chambre, le rapport annuel 1983-1984 de la
Société de cartographie du Québec.
Le Président: Rapport déposé. M. le ministre
des Finances.
États financiers de la Caisse de
dépôt et placement
M. Duhaime: Je voudrais également déposer, M. le
Président, les états financiers et les statistiques
financières au rapport de gestion 1984 de la Caisse de
dépôt et placement du Québec.
Le Président: Rapport déposé.
Au dépôt de pétitions, M. le député
de
Beauharnois.
Demandes de retrait du projet de loi 42 et de
modifications à la loi actuelle
M. Lavigne: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
2013 pétitionnaires du Comité d'appui des travailleurs
accidentés de Valleyfield. Essentiellement, ils demandent le retrait du
projet de loi 42, l'adoption immédiate des modifications à la loi
actuelle, conformément à leurs revendications.
Des voix: Adopté.
Le Président: Pétition déposée. M. le
député de Saguenay.
M. Maltais: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale par 725 pétitionnaires du Conseil central
de la Côte-Nord Inc., (CSN), invoquant les faits suivants: ils ne sont
pas d'accord avec l'abolition de la rente à vie et son remplacement par
un montant forfaitaire ridicule; ils ne sont pas d'accord avec la disparition
de l'évaluation de l'incapacité permanente basée sur la
difficulté de se retrouver un travail rémunérateur
à la suite d'une lésion permanente; ils ne sont pas d'accord avec
les restrictions concernant le droit de retour à son emploi; ils ne sont
pas d'accord concernant la sécurité du revenu qui n'est pas
assurée jusqu'au moment de se retrouver un emploi; ils ne sont pas
d'accord car le choix de son médecin et le respect de son diagnostic ne
sont pas respectés; ils ne sont pas d'accord car le droit d'en appeler
des décisions est limité; ils ne sont pas d'accord avec
l'orientation de ce projet de loi, car la responsabilité des employeurs
n'est pas reconnue et une partie des coûts de réadaption est
transférée aux régimes d'assistance sociale, tels que
l'aide sociale, l'assurance-chômage, la Régie des rentes du
Québec, qui sont défrayés par l'ensemble de la population
et concluant à ce que l'Assemblée nationale demande au
gouvernement de retirer le projet de loi 42 ou, à défaut, que
l'Assemblée nationale rejette le projet de loi 42.
Le Président: Pétition déposée. M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée par 607 pétitionnaires du Conseil central de
Trois-Rivières (CSN), invoquant les faits suivants: nous ne sommes pas
d'accord avec l'abolition de la rente à vie et son remplacement par un
montant forfaitaire ridicule; nous ne sommes pas d'accord avec la disparition
de l'évaluation de l'incapacité permanente basée sur la
difficulté de se retrouver un travail rémunérateur
à la suite d'une lésion permanente; nous ne sommes pas d'accord
avec les restrictions concernant le droit de retour à son emploi; nous
ne sommes pas d'accord, car la sécurité du revenu n'est pas
assurée jusqu'au moment de se retrouver un emploi; nous ne sommes pas
d'accord car le choix de son médecin et le respect de son diagnostic ne
sont pas respectés; nous ne sommes pas d'accord car le droit d'en
appeler des décisions est limité; nous ne sommes pas d'accord
avec l'orientation de ce projet de loi car la responsabilité des
employeurs n'est pas reconnue et une partie des coûts de la
réadaptation est transférée aux régimes
d'assistance sociale, tels que l'aide sociale, l'assurance-chômage et la
Régie des rentes du Québec, qui sont défrayés par
l'ensemble de la population et concluant à ce que, M. le
Président, l'Assemblée nationale demande au gouvernement de
retirer le projet de loi 42 ou, à défaut, que l'Assemblée
nationale rejette le projet de loi 42. Merci.
Le Président: Pétition déposée. M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée par
860 pétitionnaires du Comité ad hoc contre le projet de loi 42,
secteur Verchères, Varennes et Boucherville. Les signataires soutiennent
que le projet de loi élimine des acquis importants du système
d'indemnisation des accidentés du travail et ils demandent le retrait du
projet de loi 42 et son remplacement par des amendements à la loi
actuelle qui iraient dans le sens de leurs revendications. Je certifie que cet
extrait de la pétition est conforme à l'original et au
règlement, M. le Président.
Le Président: Pétition déposée. Ceci
nous mène à la période des questions. Je vous rappelle
qu'il y aura, à l'issue de la période des questions, des votes
qui ont été reportés. M. le député de
Portneuf. .
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS
L'évolution des traitements dans les secteurs
public et parapublic
M. Pagé: Merci, M. le Président. À la suite
du dépôt des crédits par le gouvernement hier, on retient
que la rémunération des employés du gouvernement du
Québec, c'est-à-dire les 350 000 employés des secteurs
public et parapublic représente environ 50% des dépenses
budgétaires. Donc, pour 1985-1986, ce sont 13 500 000 000 $ sur des
dépenses prévues de
27 400 000 000 $. L'hypothèse de calcul la plus importante dans
tout l'exercice des crédits, c'est celle relative à
l'évolution de la masse salariale. Or, la convention collective actuelle
des travailleurs des secteurs public et parapublic vient à
échéance, comme on le sait, le 31 décembre prochain, de
sorte que le gouvernement a dû préparer les crédits
1985-1986 à partir d'une hypothèse à l'égard de la
rémunération pour les trois derniers mois de l'année
financière, soit du 1er janvier 1986 au 31 mars 1986.
Or, M. le Président, on note en page 46 du cahier de
renseignements supplémentaires que le gouvernement a mis 118 700 000 $
au fonds de suppléance du ministère des Finances pour faire face
aux coûts supplémentaires des conventions collectives. Ce montant,
qui représente 0,9% de la rémunération comporte
déjà la provision pour neuf mois de rajustement à
l'égard des professionnels de la santé, dans un premier temps,
ainsi qu'une provision pour le rajustement du salaire des cadres,
l'augmentation salariale des cadres qui a déjà été
annoncée. Cela veut donc dire qu'en se référant à
ce document - et j'en arrive à ma question - il ne reste pratiquement
rien pour la nouvelle convention collective des travailleurs de l'État
qui est prévue comme devant commencer le 1er janvier 1986. Ma question
au président du Conseil du trésor est la suivante: Quelles sont
vos hypothèses comme président du Conseil du trésor
à l'aube ou à quelques jours du début de cette
négociation, à l'égard de l'évolution de la masse
salariale pour l'année 1986 chez les travailleurs de l'État et
quelle somme avez-vous mise de côté à cette fin, à
l'intérieur des 118 700 000 $ qui sont prévus au fonds de
suppléance du ministère des Finances?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: M. le Président, c'est la tradition
effectivement que l'année de négociation des conventions
collectives en termes de rémunération a toujours
entraîné que l'on mette au fonds de suppléance les
provisions nécessaires pour faire face à des augmentations de
traitement. Je vous souligne qu'en ce qui concerne ce fonds de
suppléance de quelque 100 000 000 $, non seulement il y a
là-dedans des provisions pour les employés syndiqués mais
également pour les cadres et pour la réouverture de l'entente en
ce qui concerne la Fédération des médecins omnipraticiens
du Québec. Je voudrais simplement rappeler au député de
Portneuf qu'en ce qui concerne l'importance des sommes qui y sont
allouées, on sait également que, généralement, il y
a toujours un décalage dans le temps entre le moment où l'on
convient d'une augmentation de salaire et le moment où elle est
effectivement versée.
Quant à dire sur quoi sont assises ces provisions pour 1985-1986,
je ne lui dévoilerai sans doute pas le détail des mandats de
négociation qui seront donnés le moment venu pour les
médecins omnipraticiens, pour les syndiqués et syndicables, de
même que pour les cadres. Je lui dirai simplement que les chiffres qui
sont là sont honnêtes et qu'ils sont basés sur la politique
de rémunération du gouvernement du Québec qui consiste, en
ce qui concerne l'ensemble des secteurs public et parapublic, en une
comparabilité en termes d'évolution des
rémunérations dans le secteur public à ce qui se fait dans
le secteur privé.
Le Président: M. le député de Portneuf, en
complémentaire.
M. Pagé: Le ministre aura beau nous répondre que
c'est compatible, mais comment concilier votre langage d'hier, comme
gouvernement, où vous disiez: "Nous manifestons de l'ouverture. Nous
sommes prêts à réviser !e régime de
négociation. Nous sommes prêts à négocier. Nous
sommes de bonne foi", avec votre langage d'aujourd'hui et, par surcroît,
avec votre langage qui est libellé ici où vous avez une provision
de 118 000 000 $ seulement au fonds de suppléance, avec neuf mois pour
les médecins omnipraticiens, avec l'entente des cadres? Comment
concilier tout cela avec le fait qu'aujourd'hui vous confirmez, par les
crédits déposés, un taux de croissance de 0% pour les
travailleurs des secteurs public et parapublic, pour les trois premiers mois de
1986? Où est votre bonne foi?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: C'est inexact. Je ne vois pas comment le
député de Portneuf peut en arriver à ces résultats.
Je lui dis simplement qu'il confond deux choses. La réforme du
régime de négociation est un dossier qui n'entraîne pas en
soi des négociations hâtives sur le contenu des conventions
collectives pour 1984-1985. J'ai déjà eu l'occasion, en
décembre dernier, lors d'une déclaration ministérielle au
nom du gouvernement, d'indiquer qu'il n'y aurait pas de réouverture sur
les clauses salariales pour l'année 1984-1985.
Il restait une période de trois mois à "provisionner" pour
l'année budgétaire 1985-1986, puisque les conventions collectives
pour l'ensemble des secteurs public et parapublic se terminent le 31
décembre. Je vous indique que ces provisions sont établies sur la
base de la politique de rémunération du gouvernement qui est
toujours la même évolution comparable des
rémunérations dans le secteur public à celles du secteur
privé. Au delà de cela, il y a effectivement certaines
provisions qui ont été incluses à ce fonds de
suppléance pour faire face à des négociations qui seront
amorcées bientôt en ce qui concerne les médecins.
Je lui indique également que se retrouvent là-dedans des
provisions pour les cadres, enfin pour des employés qui ne sont pas
syndiqués, et que que toutes ces provisions sont honnêtes et
basées sur les politiques habituelles du gouvernement en termes de
rémunération. Une chose que je dis clairement également au
député de Portneuf, c'est que, s'il pense que je vais
déposer ici, sur la table, les mandats de négociation avant
même que les discussions soient engagées, je ne le ferai pas.
Le Président: M. le député de Portneuf.
M. Pagé: Question additionnelle. Devons-nous comprendre,
à moins que l'exercice budgétaire, les renseignements
supplémentaires et le dépôt des documents que vous avez
faits hier ne soient pas sérieux, M. le président du Conseil du
trésor, que la provision de 118 000 000 $ représente les sommes
que devra affecter le gouvernement pour couvrir: 1) les médecins
omnipraticiens; 2) les cadres; 3) l'ensemble des travailleurs des secteurs
public et parapublic qui sont au nombre de 350 000 pour la période des
trois premiers mois? Si vous me dites que non, que ce sera plus que cela,
pourquoi ne l'avez-vous pas prévu dans votre document? Vous confirmeriez
ainsi le caractère non sérieux du document qui a
été déposé.
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: Je ne peux que répéter ce que je viens de
dire au député de Portneuf. Il y a, à l'intérieur
du fonds de suppléance, des provisions suffisantes pour faire face
à la situation sur la base des politiques de rémunération
du gouvernement du Québec actuellement. Ces provisions sont
honnêtes et je répète que je ne déposerai pas devant
lui des mandats de négociation sur le plan salarial avec qui que ce soit
ici, à l'Assemblée nationale, parce qu'il sait fort bien quel en
serait le résultat.
Je lui indique également que s'il regarde un peu dans le
passé, chaque fois qu'est survenue une année de
négociation, jamais le Conseil du trésor n'a
dévoilé, au moment du dépôt du livre des
crédits, le détail du contenu des conventions envisagées
au cours de la prochaine année. Je lui répète
également que ces provisions sont basées sur les politiques
habituelles de rémunération du gouvernement du Québec.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Dernière question additionnelle. Est-ce
que l'enveloppe de 118 000 000 $ du fonds de suppléance à cette
fin est définitive?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: Dans la mesure où on l'adopte, oui, elle est
définitive. On verra s'il y a un budget supplémentaire et s'il y
a...
Des voix: Ah!
M. Clair: Effectivement. Le Parlement est souverain, il adopte le
livre des crédits qui est préparé et qui prévoit
des provisions normales pour faire face à la situation. C'est sûr
que si l'an prochain, à pareille date ou lors du budget
supplémentaire, il y a des modifications à apporter à
quelque point du budget de dépenses que ce soit, le Parlement est
souverain et peut en disposer.
Le Président: Question principale, M. le
député de Mont-Royal.
Les coûts des services de santé
consécutifs aux accidents d'automobile
M. Ciaccia: M. le Président, hier, le président du
Conseil du trésor annonçait que les coûts des services de
santé consécutifs aux accidents routiers devront
dorénavant être assumés par les assurés de la
Régie de l'assurance automobile plutôt que par la Régie de
l'assurance-maladie et les établissements du réseau des affaires
sociales. Il évaluait alors à 40 000 000 $ les coûts
découlant des accidents routiers. Nous avons des informations en
provenance du Conseil du trésor, à savoir que la Régie de
l'assurance automobile défraierait actuellement une partie des
coûts. Est-ce exact? Est-ce que le ministre peut nous dire quels sont les
coûts réels annuels? Est-ce que le montant de 40 000 000 $ est le
montant total? Est-ce que c'est un montant de 80 000 000 $, comme le
prétendent certains? Peut-il nous dire quel est le montant exact par
année?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: M. le Président, les estimations les plus
précises dont nous disposons présentement nous permettent de
considérer qu'il s'agit d'une somme de 80 000 000 $ par année.
Les 40 000 000 $ paraissant au livre des crédits - j'ai eu l'occasion,
hier, de l'indiquer en réponse aux questions des journalistes -
présument d'une entrée en vigueur à la mi-année, de
cette pratique de la vérité des coûts en termes de
coûts de services de santé occasionnés par des
accidents d'automobile. J'indique également au député de
Mont-Royal que, somme toute, il s'agit d'appliquer à la Régie de
l'assurance automobile du Québec exactement la même politique que
celle qui est appliquée à la Commission de la santé et de
la sécurité du travail, où ce sont effectivement les
cotisants au régime de santé et de sécurité du
travail qui défraient les coûts de santé reliés
à des accidents du travail. C'est le même régime qui
s'implanterait à la mi-année au niveau de la Régie de
l'assurance automobile du Québec.
M. Ciaccia: M. le Président, en complémentaire.
Le Président: M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Ma question s'adresse au ministre des Transports.
Est-ce que le ministre des Transports peut nous dire si les coûts
supplémentaires prévus pourront être absorbés par la
régie sans qu'il y ait augmentation des primes d'assurance automobile ni
augmentation des frais d'immatriculation et d'émission de permis?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Tardif: M. le Président, non, je ne peux pas donner
cette réponse au député de Mont-Royal pour la simple
raison que les primes d'assurance sont calculées sur le volume et la
gravité des accidents. Ceux-ci ont été en baisse
continuelle depuis la création de la Régie de l'assurance
automobile - j'entends le nombre d'accidents - et les primes sont
demeurées à un niveau relativement stable. Les données
préliminaires que nous avons pour l'année 1984 nous indiquent une
légère augmentation du nombre des accidents qu'il faut
déplorer et, à ce titre, il appartiendra à la
régie, en se basant sur les données actuarielles, tant pour le
volume actuel d'accidents que pour les coûts qui portent parfois sur de
nombreuses années, d'établir les réserves
nécessaires et de faire les recommandations au gouvernement. (15 h
20)
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: M. le député de Mont-Royal, en
complémentaire.
M. Ciaccia: Je voudrais savoir du ministre des Transports comment
il peut expliquer sa réponse évasive et pourquoi le ministre ne
dit pas clairement qu'il entend imposer une nouvelle taxe aux automobilistes
comme il l'avait fait il y a deux ans, quand le ministre des Finances a
récupéré 20 000 000 $ de la Régie de l'assurance
automobile du Québec et que la régie a immédiatement
augmenté ses tarifs. Alors, pourquoi le ministre, tout simplement et
honnêtement, n'avoue-t-il pas qu'il s'agit encore une fois d'une nouvelle
taxe déguisée?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Tardif: M. le Président, le député de
Mont-Royal a sa façon habituelle de déformer les faits. Il y a un
volume donné d'accidents. Ce volume donné d'accidents
entraîne des coûts sociaux. La question est donc de savoir...
J'aimerais que le député de Mont-Royal, qui a posé une
question, mais ne semble pas intéressé par la réponse,
écoute. Il s'agit de savoir si les coûts des accidents seront
assumés par 6 000 000 de citoyens ou par les 4 000 000 d'automobilistes.
Il me semble que poser la question, c'est y répondre. Il n'y a aucun
coût nouveau dans le fait de faire assumer les coûts par
ceux-là mêmes qui les entraînent.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président: M. le député de Mont-Royal, en
complémentaire.
M. Ciaccia: Je pense que c'est le ministre qui ne comprend pas.
Le président du Conseil du trésor vient de nous dire qu'il va y
avoir un montant de 80 000 000 $ qui seront assumés par la régie
de l'assurance. Alors, vous avez le chiffre. Est-ce que vous pouvez nous dire
maintenant s'il va y avoir une augmentation, oui ou non, par la régie
des permis d'immatriculation et des permis de licence?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Tardif: M. le Président, le député de
Mont-Royal ne veut pas comprendre. Les 80 000 000 $ doivent être
assumés pour couvrir les frais d'accidents. Est-ce que ce sera le
contribuable faisant son rapport d'impôt qui assumera les coûts ou
l'automobiliste? M. le Président, poser la question, c'est y
répondre.
Le Président: Question principale... M. Bisaillon: M. le
Président.
Le Président: M. le député de Richmond.
La diminution des crédits consacrés
à la construction de routes
M. Vallières: M. le Président, ma question
s'adressera au ministre délégué au
Développement et à la Voirie des régions. À
la lecture des crédits budgétaires déposés hier,
nous pouvons constater une diminution du budget consacré à la
construction du réseau routier dans toutes les catégories de
routes, qu'il s'agisse des autoroutes, des routes principales, des routes
régionales ou des routes à caractère local; une diminution
de l'ordre de 15 000 000 $. Est-ce que le ministre pourrait indiquer à
cette Chambre et aux contribuables dans les régions en particulier si
cette diminution du budget est la conséquence directe du nouveau
leadership qu'il exerce au sein de son ministère? Et comment entend-il
répondre à cette diminution face aux besoins croissants qui sont
exprimés par la population à la suite de cette négligence
dont a fait preuve son gouvernement depuis 1976? Le budget était
passé de 511 000 000 $ en 1976 à 393 000 000 $, selon les
provisions qui ont été déposées hier.
Le Président: M. le ministre délégué
au Développement et à la Voirie des régions.
M. Le May: L'intervention du député de Richmond
m'inquiète beaucoup parce que je pense qu'il n'est pas au courant qu'on
a quand même un budget actuellement de 832 000 000 $ consacré au
système routier québécois. Étant donné, que
notre système routier vieillit actuellement, nous avons pensé
peut-être mettre un peu plus d'argent dans l'entretien et
l'administration de notre réseau que dans les nouvelles initiatives.
C'est ainsi que cette année, nous consacrerons, seulement pour
l'entretien de notre réseau routier et son amélioration, 438 000
000 $. Je pense que pour les années difficiles que nous traversons,
c'est un bel effort de la part du gouvernement.
Le Président: Une question complémentaire, M. le
député de Richmond.
M. Vallières: Le ministre aurait avantage à se
promener dans les régions. Je demande au ministre s'il admet... Ma
question est fort précise, M. le Président, elle porte sur le
budget qui est réservé à la construction de routes. On
aura l'occasion de parler d'entretien à un autre moment. Est-ce que le
ministre reconnaît que le budget qui était de 511 000 000 $ en
1976 et maintenant de 393 000 000 $ en ce qui a trait au budget de construction
de routes, représente une diminution catastrophique?
Le Président: M. le ministre délégué
au Développement et à la Voirie des régions.
M. Le May: Je répète ce que j'ai dit tout à
l'heure. Nous construisons moins de routes parce que notre système
routier est parfois détérioré dans certaines
régions. On aime mieux entretenir ce qu'on a que d'avoir de nouvelles
routes et ne pas entretenir ce qui nous appartient actuellement. On met plus
d'argent dans l'entretien et on en met moins dans la construction. Pour ce qui
est de visiter les régions, je l'ai fait, je pense, pas mal davantage
que M. le député de Richmond.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Richmond.
M. Vallières: J'aimerais, pour faire allusion aux propos
que vient de tenir le ministre, qu'il nous explique comment il se fait que dans
les crédits qui ont été déposés hier, - il
nous parle de l'augmentation des crédits au niveau de la conservation -
on remarque une diminution du budget de 8 000 000 $ par rapport à l'an
passé? Comment peut-il parler d'augmentation du budget au niveau de
l'entretien? Faites vos classes, allez voir ce qui est contenu dans vos
crédits.
Le Président: M. le ministre délégué
au Développement et à la Voirie des régions.
M. Le May: Quand on parle d'augmentation pour l'entretien, on
parle en termes de pourcentage. Actuellement, on a un budget de 832 000 000 $
et en termes de pourcentage on en consacre plus à l'entretien
qu'à la construction. Je ne comprends pas que le député de
Richmond ne soit pas capable de lire cela.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Gatineau.
M. Gratton: Est-ce que je pourrais demander au ministre de lire,
à la page 63 des crédits qui ont été
déposés hier, les renseignements supplémentaires à
la rubrique "Conservation du réseau routier", il y a effectivement une
diminution - il veut parler de pourcentage - de 1% sur l'an dernier.
Pourrait-il nous dire s'il sait que le chapitre québécois de
l'Association canadienne de la construction évalue qu'il y a plus de
2100 kilomètres de routes au Québec qui ne répondent pas
aux normes d'acceptabilité du ministère des Transports, qu'il en
coûterait 464 000 000 $ sur cinq ans, donc 93 000 000 $ par année,
soit pour repaver ou reconstruire ces 2100 kilomètres de routes, et
comment peut-il concilier qu'au lieu d'augmenter de 93 000 000 $...
Le Président: M. le député, dans la
même question complémentaire, vous en êtes rendu à la
troisième. J'ai indiqué, la semaine dernière, au
député de Deux-Montagnes que trois questions dans une, c'est une
bonne façon de faire en sorte qu'il n'y en ait pas d'autres
complémentaires. Je
préférerais qu'on pose les questions une à une,
sinon il est difficile de contrôler le temps de réponse lorsqu'il
y a trois questions dans la même.
M. Gratton: M. le Président, soit que je m'exprime mal ou
que vous entendiez mal, mais c'est toujours la même question. Bref,
comment le ministre, qui est si fort en pourcentage, peut-il concilier que
l'Association canadienne de la construction recommande qu'on dépense 93
000 000 $ de plus par année sur une période de cinq ans et qu'il
diminue plutôt de 7 000 000 $ les sommes qui sont consacrées
à la conservation du réseau routier?
Le Président: M. le ministre délégué
au Développement et à la Voirie des régions.
M. Le May: M. le Président, d'abord, en 1976, lorsqu'on
est arrivé au pouvoir, on a dû finir toutes les autoroutes
chromées que le Parti libéral avait commencées avant,
premièrement.
En plus, sur les budgets attribués avant 1976, 30% allaient au
patronage. Cela explique...
Des voix: Bravo!
M. Le May: Actuellement, M. le Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition. (15 h 30)
M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.
Je rappelle le contenu de l'article 79. Si vous voulez faire un débat
sur le patronage, on est prêt n'importe quand.
M. le Président, à l'article 79, on dit bien...
Des voix: ...
M. Gratton: Si vous voulez parler de l'assiette au beurre du
premier ministre, on peut en parler n'importe quand.
Le Président: Allons! allons! allons! Allons! allons!
allons! M. le leader de l'Opposition... Allons! S'il vous plaît! Du
calme! M. le leader de l'Oppostion invoquait une question de règlement
fondée sur l'article 79. En effet, il a tout à fait raison de
souligner que l'article 79 dit ce qu'il dit, mais encore, je rappelle aux deux
côtés de la Chambre qu'il ne doit y avoir aucune argumentation,
autant dans les réponses que dans les questions.
M. Gratton: J'en conviens, M. le Président. Je n'ai pas
posé de question sur le patronage, que je sache, mais si, pour le
permettre au ministre, on doit en poser, on va parler de Luc Cyr. Voulez-vous
en parler de Luc Cyr, par exemple?
Le Président: Chacun a pu faire ses remarques. Nous
pouvons maintenant poursuivre sur le fond de la question, si tant est que M. le
ministre a quelque chose à ajouter à la réponse qu'il
avait donnée. Non? D'accord. Deux dernières questions
complémentaires, M. le député de Berthier et, ensuite, M.
le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Houde: Merci, M. le Président. Le ministre est-il au
courant de l'étude qui est faite par son propre ministère des
Transports du Québec à savoir que les routes ne se maintiennent
même pas au niveau zéro pour l'usure et l'entretien. Cela est fait
par votre ministère depuis deux ans et l'an dernier, encore la
même chose. Êtes-vous au courant de cela?
Le Président: M. le ministre délégué
au Développement et à la Voirie des régions.
M. Le May: M. le Président, selon les normes
établies par le ministère, nous devons, comme ministère
responsable de la voirie, intervenir généralement et en moyenne
tous les 12 ans sur le système routier pour l'entretenir. Actuellement,
nous nous sommes aperçus, après étude, que nous
intervenions environ tous les 14 ou 15 ans. Pour corriger cela, c'est
exactement ce qu'on fait, on en met plus sur l'entretien et moins sur les
nouvelles routes.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Baril (Rouyn-Noranda-Témisca-mingue): M. le
Président, le ministre pourrait-il indiquer à cette Chambre et,
tout particulièrement en ce qui concerne les citoyens et les citoyennes
des grandes régions du Québec, si le ministre va continuer
à appliquer en priorité la caractéristique fondamentale du
Parti québécois c'est-à-dire de développer les
infrastructures routières des grandes régions du Québec
plutôt que de répondre à des dépenses
éhontées sur des autoroutes qui nous ont coûté
cher...
Des voix: Bravo!
Le Président: Une lecture attentive, M. le
député, de l'article 79 vous convaincra sans doute que votre
question était irrégulière. Question principale, M. le
député de Bourassa.
Le prochain sommet sur l'industrie du
vêtement
M. Laplante: On va parler d'emploi, M. le Président. On me
dit que la semaine prochaine, il y aura un sommet sur l'industrie du
vêtement à Montréal. Cette question s'adresse au ministre
délégué à l'Emploi et à la Concertation. Je
voudrais savoir qui sont les invités de ce sommet.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Laplante: Les discussions à l'ordre du jour de ce
sommet porteront-elles sur les quotas et surtout, ce qui m'intéresse
plus particulièrement, sera-t-il question, à ce sommet des
décrets dans l'industrie du vêtement?
Le Président: M. le ministre délégué
à l'Emploi et à la Concertation pour ce qui est de la
deuxième partie de la question, en effet, il n'y a pas de
problème. La première partie ressemble davantage à une
question au feuilleton, quant à savoir la liste des invités
à un sommet. M. le ministre délégué à
l'Emploi et à la Concertation.
M. Dean: M. le Président, effectivement les jeudi et
vendredi soir de la semaine prochaine aura lieu à Montréal une
deuxième phase... Est-ce que les emplois, ça vous
intéresse le Parti libéral?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre...
M. Dean: ...la deuxième phase du sommet sur l'industrie du
vêtement où seront regroupés les employeurs, les
travailleurs de ce secteur et les représentants du nouveau centre de la
productivité de l'industrie du vêtement qui est lui-même le
résultat d'un sommet antérieur à la demande des
partenaires ainsi que le centre de la mode. Seront également
présents les représentants du gouvernement du Québec et,
pour la première fois, un représentant du gouvernement
fédéral...
Des voix: Ah!
M. Dean: ...à cause de l'importance de la question des
importations et des quotas sur les emplois dans ce secteur industriel. La
préoccupation primordiale des partenaires économiques de ce
secteur industriel serait de sauvegarder les 55 000 emplois qui existent
déjà, dont les emplois majoritairement occupés par des
femmes et des représentantes des communautés culturelles et la
possibilité réelle de créer d'ici à trois ans, dans
ce secteur seulement, 15 000 nouveaux emplois.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Dean: Évidemment, parmi les sujets de discussion, il y
aura la continuation de la restructuration et de la relance de ce secteur, par
l'introduction de nouvelles technologies, le développement des
marchés d'exportation; et, effectivement, pour la première fois,
les partenaires patronaux et syndicaux ont la volonté de revoir toute la
question des décrets en vertu de la Loi des conventions collectives dans
le sens de leur impact positif ou négatif sur le maintien et la
création d'emplois dans ce secteur.
Le Président: Complémentaire? En
complémentaire, M. le député de Maskinongé.
M. Picotte: Durant le sommet économique, est-ce que le
ministre pourrait me dire ce qu'il y aura en fait de discussions pour
tâcher de régler le problème de Wabasso à
Trois-Rivières et à Shawinigan?
Le Président: M. le ministre délégué
à l'Emploi et à la Concertation.
M. Dean: M. le Président, que je sache, Wabasso fait
partie du secteur industriel du textile et c'est un sommet sur le
vêtement. Évidemment, il y a...
Des voix: Ha! Ha!
M. Dean: M. le Président, je ne veux aucunement que le
parti d'en face interprète ma réponse comme minimisant la
situation tragique vécue dans la région de la Mauricie par des
fermetures d'entreprises, sauf que je trouve que ce serait un peu difficile de
fabriquer des vêtements avec des taies d'oreiller et des draps.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député de Portneuf.
M. Pagé: Question additionnelle, M. le Président,
à l'honorable ministre délégué à l'Emploi et
à la Concertation. Compte tenu que son collègue des Finances, le
député de la région, semble beaucoup plus
préoccupé par la coupe Memorial que par la réouverture de
Wabasso, qui, dans le gouvernement, s'occupe de la Wabasso? Qui s'en occupe?
C'est vous?
Le Président: M. le ministre délégué
à l'Emploi et à la Concertation.
M. Dean: M. le Président, je pense que le ministre des
Finances et le ministre de l'Industrie et du Commerce, de par leurs fonctions,
sont impliqués avec les députés gouvernementaux de la
région dans ce qui se fait, dans une tentative pour réorganiser
et relancer ce secteur industriel. Cela ne fait
sûrement pas partie du sommet sur le vêtement au moment
où on se parle.
Le Président: Question principale, M. le
député de Sainte-Marie.
Les pourparlers entre le gouvernement
et la coalition des syndicats des
secteurs public et parapublic
M. Bisaillon: M. le Président, ma question s'adresse au
président du Conseil du trésor, coresponsable, avec le premier
ministre, du dossier sur le régime de négociation dans les
secteurs public et parapublic.
Des voix: Ha! Ha!
Une voix: C'est beaucoup dire!
M. Bisaillon: On sait, M. le Président, qu'aujourd'hui,
à travers le Québec, les travailleurs et travailleuses des
secteurs public et parapublic ont pris des moyens pour sensibiliser la
population sur les actions gouvernementales et surtout sur l'avant-projet de
loi que le président du Conseil du trésor a déposé
en cette Chambre. Or, on sait aussi que, depuis quelque temps, on a
été informé de rencontres entre le gouvernement et la
coalition des syndicats des secteurs public et parapublic. Ma question au
président du Conseil du trésor, s'il peut me répondre, est
de savoir ce qu'ont donné les différentes rencontres avec les
centrales syndicales. Est-ce que, à l'intérieur des rencontres
que vous avez eues, vous avez pris connaissance de positions nouvelles de la
part des centrales syndicales? Est-ce que, par exemple, vous pourriez nous
parler de la position des centrales syndicales sur la question des services
essentiels, selon le code d'éthique dans le domaine des affaires
sociales. (15 h 40)
Le Président: M. le député.
M. Bisaillon: Est-ce que les positions avancées par les
centrales syndicales peuvent nous laisser croire au moment où on se
parle que l'avant-projet de loi déposé par le président du
Conseil du trésor sera retiré? Est-ce qu'on peut penser
aussi...
Le Président: M. le député...
M. Bisaillon: Je termine ma question...
Le Président: Oui, je veux bien croire que vous terminez
mais vous êtes rendu à peu près au cinquième "est-ce
que"? Chaque élément constitue autant de questions
complémentaires. Je veux bien revenir à la question
complémentaire, mais cela va faire une réponse pour chaque
élément de question et il faut bien que j'accorde un temps de
réponse. Cela risque de faire une réponse très longue.
M. Bisaillon: M. le Président, vous avez parfaitement
raison. J'enlève les cinq "est-ce que" en demandant au ministre de nous
faire le point sur la situation de ces cinq éléments.
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: Effectivement, il y a eu, comme chacun le sait, trois
rencontres entre des représentants du gouvernement et des
représentants de la coalition en cause. Ce que je peux indiquer au
député en termes d'événements à suivre
à la suite de ces rencontres, c'est que le premier ministre a
indiqué à la sortie même de cette rencontre, vendredi
dernier, au nom du gouvernement, qu'il y aurait dépôt d'un projet
de loi à l'Assemblée nationale au cours des prochaines semaines.
J'ai eu l'occasion de faire le point avec les collègues
intéressés à ces questions: le ministre des Affaires
sociales, le ministre de l'Éducation et le ministre de l'Enseignement
supérieur. Nous travaillons présentement à préparer
un projet de loi. Le dossier sera officiellement transmis au Conseil des
ministres vraisemblablement la semaine prochaine ou la semaine suivante.
Je n'ai pas l'intention de divulguer maintenant le contenu des
discussions que nous avons eues au moment de ces rencontres. Je pense,
d'après la question du député, qu'il voudrait que je parle
de la position des centrales syndicales sur le code d'éthique en
matière de services essentiels. Je pense que les porte-parole syndicaux
sont de bien meilleurs porte-parole de leur position sur ces questions que le
président du Conseil du trésor. Je pense qu'ils ont largement
fait connaître, en particulier dans un document de plate-forme, de
même que la CSN qui est venue en commission parlementaire, quels
étaient leurs points de vue sur ces questions.
En peu de mots, le gouvernement a rencontré les centrales
syndicales et les représentants de la coalition. Il a approfondi avec
ces représentants la compréhension de leur position et des pas
qu'ils étaient prêts à franchir sur certaines questions.
J'avais déposé un avant-projet de loi en indiquant bien que cela
représentait une double volonté du gouvernement,
premièrement, de tenir compte de l'avis de tous nos partenaires en
disant bien qu'il n'y avait pas de vérité absolue
là-dessus mais que, par ailleurs, cela indiquait aussi une
volonté très nette du gouvernement, à ce moment-là
et qui ne s'est pas démentie jusqu'à maintenant - je ne pense pas
qu'il le fasse - de modifier en profondeur le régime de
négociation dans le
secteur public.
Le Président: En complémentaire, M. le
député de Sainte-Marie.
M. Bisaillorc Y aura-t-il consultation des centrales syndicales
avant le dépôt du projet de loi? Le ministre retiendra-t-il les
positions qui ont été avancées par les centrales
syndicales?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Clair: Oui. À la question de savoir si le gouvernement
reverra les représentants de la coalition et non pas seulement les
représentants des centrales syndicales, c'était dans les journaux
de samedi matin où on avait déjà indiqué que nous
les reverrions avant de déposer le projet de loi. Il est évident
que nous souhaitions depuis des mois avoir l'occasion de recueillir le point de
vue des représentants des employés des secteurs public et
parapublic sur une réforme du régime de négociation.
J'avais indiqué que nous souhaitions recevoir ce point de vue afin d'en
tenir compte, comme nous tiendrons compte aussi du point de vue de l'ensemble
des bénéficiaires des services publics, des associations
patronales, des étudiants, des enseignants. Oui, certainement. Si on les
a rencontrés, c'est parce qu'on a l'intention de tenir compte de ce
qu'ils nous ont dit.
Le Président: Question principale, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Question complémentaire, M. le
Président.
Le Président: Question complémentaire, M. le
député d'Argenteuil.
M. Ryan: Le ministre de l'Éducation est-il prêt
à confirmer que des négociations parallèles ont eu lieu en
même temps que le ministre affirmait qu'on ne négociait rien tant
que le nouveau régime de négociation n'aura pas été
défini? Peut-il confirmer que des négociations parallèles
se seraient poursuivies avec les syndicats du domaine de l'éducation?
Pourrait-il faire le point sur l'état de ces négociations et nous
indiquer en particulier s'il entrevoit la possiblité d'un renouvellement
de l'entente collective dans ce secteur, avant même l'expiration de la
période des décrets?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Gendron: Je suis en mesure d'informer cette Chambre que nous
n'avons pas mené de négociation parallèle. Mais comme on
l'a fait à l'Éducation depuis au-delà d'un an et demi, on
a essayé de maintenir des échanges constants, très
étroits, avec la CEQ pour, en particulier, régler des
problèmes réels au niveau du comité mixte. Vous êtes
au courant qu'il y a à peu près une année, on avait
créé le comité mixte pour essayer ensemble de trouver des
solutions à des problèmes réels qui avaient
été identifiés par le Conseil supérieur de
l'éducation. On a poursuivi ces échanges et on a également
fait ce qu'on appelle certaines explorations sur des sujets réguliers,
mais, d'aucune façon, on n'a mené des négociations
parallèles. Donc, je ne peux pas faire le point sur des séances
de négociations qu'on n'a pas eues.
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor m'indique qu'il aurait une courte information
complémentaire à donner, s'il n'y a pas d'objection.
M. Clair: Oui, c'est simplement, M. le Président, pour
corriger... Dans sa question, le député d'Argenteuil laisse
entendre que j'aurais déclaré que nous refusions de mener toute
discussion sur d'autres sujets parallèles à la réforme du
régime de négociation. Je voudrais encore une fois le ramener
à la déclaration ministérielle que j'ai faite en
décembre dernier, aux alentours du 20 décembre, alors que j'avais
bien indiqué que ce que nous refusions, c'était une
réouverture globale et générale des négociations
quant au contenu en parallèle à une réforme du
régime, mais qu'on ne s'opposait aucunement à ce que le travail
des comités mixtes, que nous avions nous-mêmes proposé de
mettre sur pied, se continue.
Le Président: M. le député d'Argenteuil en
complémentaire.
M. Ryan: Le ministre de l'Éducation est-il en mesure de
confirmer que les entretiens, pour ne pas parler de négociations, pour
ne pas blesser sa pudeur, auraient achoppé en bonne partie sur
l'étendue de la période devant être couverte par la
prochaine entente collective?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Gendron: Je vous remercie d'avoir des inquiétudes
concernant ma pudeur. Je tiens à vous signaler, M. le
député d'Argenteuil, pour être très sérieux,
que dès que j'ai été nommé ministre de
l'Éducation, j'ai indiqué que je ne voulais ménager aucun
effort afin que nous ayons régulièrement et fréquemment
des échanges sur les problèmes réels soulevés en
éducation. Quant au problème particulier que vous soulignez,
à
savoir que ces pourparlers - qu'on a fréquemment, de toute
façon, sur des sujets qu'eux-mêmes veulent que nous discutions
-auraient achoppé sur une question de durée de convention, je ne
suis pas en mesure, à ce moment-ci, de donner une information
précise à ce sujet.
Le Président: Question principale, M. le
député de Saguenay.
Le rôle de REXFOR dans le dossier ITT de
Port-Cartier
M. Maltais: Merci, M. le Président. Toujours dans le
domaine de l'emploi, il s'agit ici des 2000 perdus à Port-Cartier. Hier,
on s'est fait couper par le temps. Le ministre nous a confirmé que ITT
allait démolir ses installations et il nous a dit aussi que
peut-être il pourrait récupérer certaines machineries
à l'intérieur de l'usine actuelle.
Le 3 octobre 1984, un arrêté en conseil demandait à
REXFOR, avec un organisme du milieu, de faire des prévisions pour savoir
s'il n'y avait pas possibilité de rouvrir ITT. Le Conseil du
trésor à ce moment-là consentait 500 000 $ à
REXFOR... 500 000 $, c'est écrit ici, M. le ministre, à moins que
l'arrêté en conseil ne soit faux. Pouvez-vous nous dire exactement
si l'argent a été dépensé et quel est le rapport
que REXFOR vous a remis? Pourriez-vous aussi le déposer ici, à
l'Assemblée nationale?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Forêts.
M. Jolivet: Concernant le dossier de ITT, je dois dire que la
société REXFOR est toujours dans le dossier. L'argent qui a
été voté sert encore actuellement à des rencontres
avec des investisseurs potentiels. J'ai parlé hier d'un groupe
finlandais, d'un groupe norvégien et d'un groupe
québécois. Donc, au moment où je vous parle, tout n'est
pas perdu puisque le démantèlement partiel des équipements
de ITT à Port-Cartier, échelonné sur 18 mois, permet
à d'autres groupes qui veulent investir de venir nous rencontrer ou
d'aller les rencontrer. Quand le maire Detroio dit que nous n'avons presque
rien fait dans le dossier, je dois lui rappeler que le député de
Duplessis, le ministre des Finances, le ministre de l'Énergie et des
Ressources et moi-même avons rencontré des gens qui étaient
prêts à investir. Ces gens ont rencontré un groupe à
Ottawa auprès de M. Mulroney. Quand des gens demandent à
l'ensemble des investisseurs de venir et qu'ils sont reçus par
différents ministres, de quelque niveau que ce soit, on
s'aperçoit qu'ils sont peut-être trop exigeants dans les demandes
qu'ils font.
Quant à nous, nous sommes ouverts à trouver des solutions
à l'ensemble de ce problème en vous disant que REXFOR continue
à travailler sur le dossier. Des rencontres ont lieu avec d'autres
investisseurs. Tout n'est pas perdu dans le dossier. Au contraire, il faut dire
aux gens que nous avons bon espoir de trouver des solutions aux
problèmes de ITT. (15 h 50)
Le Président: M. le député de Saguenay, en
complémentaire.
M. Maltais: M. le Président, est-ce que, après sept
ans de rencontres... Je comprends que le ministre a rencontré beaucoup
de monde. Tout le monde se rencontre, tout le monde est heureux. Mais le
ministre n'aurait-il pas un petit document à nous remettre, un petit
rapport préliminaire de REXFOR contenant des solutions qui pourraient
rassurer la population de Port-Cartier? Il s'agit de 2000 emplois, M. le
ministre, et vous savez très bien que cette région ne peut se
permettre de les perdre. Mais, d'espoir en espoir...
Le Président: M. le ministre délégué
aux Forêts.
M. Jolivet: Écoutez, d'espoir en espoir, quant à la
conclusion, nous ne referons certainement pas, avec la relance de l'ensemble de
ITT, l'erreur qui a été faite au lancement premier de ITT. C'est
le gouvernement qui nous a précédés qui a fait en sorte
qu'aujourd'hui, on a des problèmes. À partir de cela, nous avons
décidé, il y a cinq ans, des actions dans le milieu. Nous avons
aidé, par une entente fédérale-provinciale, à
l'entretien des équipements; nous avons donné 200 000 $ au groupe
SOREF; nous avons permis à des gens d'aller chercher des investisseurs
à l'aide de REXFOR et nous sommes encore à travailler dans le
dossier. Je n'ai pas d'autre rapport à faire que celui-là.
Le Président: Dernière question, M. le
député d'Outremont.
M. Fortier: En complémentaire, est-ce que le ministre peut
nous confirmer ce que nous disait son collègue, le ministre du Commerce
extérieur, à savoir que si cela traînait tellement en
longueur, c'était dû au fait que REXFOR avait reçu
seulement un mandat d'étude et que REXFOR avait reçu... Je cite
M. Landry, le ministre du Commerce extérieur: "REXFOR n'a pour l'heure
comme marge de manoeuvre qu'un mandat d'étude. Il ne s'agit pas d'un
mandat en vue de faire la promotion du projet." Est-ce que le ministre est
d'accord sur le fait qu'après avoir donné un mandat aux officiers
du ministère, il a donné, ou son prédécesseur a
donné un mandat trop limité à REXFOR et que c'est
l'une des raisons pour lesquelles le projet n'est pas plus avancé
qu'il ne l'est maintenant?
Une voix: La vérité, la vérité!
M. Jolivet: M. le Président, je ne suis pas au courant des
déclarations faites par mon collègue, mais je peux dire une
chose, par exemple. Le groupe qui s'appelle REXFOR dans le dossier a le mandat
d'aller faire de la recherche au niveau d'investisseurs potentiels. Des
représentants de REXFOR sont allés dans les pays de la
Scandinavie, en Finlande et en Norvège en particulier. Ils sont
allés avec le groupe dont M. Saulnier a la responsabilité, avec
SOREF. Quand on vient nous dire que REXFOR a un mandat limité, c'est
faux.
Deuxièmement, ce qui me fait toujours rire...
Le Président: M. le ministre des Relations
internationales, à quel sujet vous levez-vous?
M. Landry: Je me lève parce qu'on m'a mis en cause.
Le Président: Un instant, un instant. Votre
collègue est en train de répondre à une question. Je
suggère qu'on le laisse finir sa réponse. M. le ministre.
M. Jolivet: Ce qui me fait toujours rire, M. le Président,
dans le dossier de REXFOR, c'est qu'à chaque fois que REXFOR arrive dans
un dossier, les libéraux de l'autre côté sont contre.
Des voix: C'est faux. Une voix: C'est cela.
M. Jolivet: J'ai eu l'occasion d'entendre beaucoup de discours,
ici en cette Chambre, dans lesquels les libéraux dénigraient la
société REXFOR. Dans ce contexte, nous lui avons donné un
mandat précis, c'est-à-dire d'aller chercher des investisseurs
pour Port-Cartier.
Le Président: La période de questions est
terminée.
Une voix: Un complément de réponse.
M. Landry: Je pense que j'ai une question de
privilège.
Le Président: Ce n'est pas... Un rappel au
règlement, M. le député de Saint-Louis.
M. Landry: Vous verrez après.
M. Blank: M. le Président, vous avez déjà
statué que, sur une demande de question de privilège, le
député doit se conformer à l'article 71, à savoir
de vous en donner l'avis demain.
Le Président: Si quelqu'un veut soulever une question de
privilège, il doit d'abord me préciser quel privilège il
invoque.
M. Landry: C'est plutôt une question de fait personnel.
L'Opposition en jugera, d'ailleurs.
Le Président: Pour une question de fait personnel, M. le
ministre, ce sera à la prochaine période, avec un avis en bonne
et due forme, selon le règlement.
M. Landry: J'insiste, M. le Président. Je trouve que la
situation est odieuse et je demande au leader de l'Opposition d'écouter
au moins ce que j'ai à vous dire.
Des voix: Non, non, non.
Le Président: II faut bien que vous vous leviez en vertu
d'une disposition du règlement. Or ce n'est pas le cas à l'heure
actuelle. Je ne peux donc vous céder la parole malgré tout le
plaisir que... Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gratton: Peut-être pourrais-je faire une suggestion qui
accommodera le ministre du Commerce extérieur. Étant donné
que c'est son collègue qui l'a attaqué, peut-être
pourrait-il en discuter...
Le Président: Ce serait un excellent canal pour la
prochaine suggestion que vous avez à lui faire aussi. Nous allons
maintenant mettre aux voix...
M. Landry: Je resoumets une question de privilège et je
demande...
Le Président: En vertu de quel privilège, M. le
ministre?
M. Landry: Je demande au député... Voici ce qui est
arrivé. Je ne dis pas que l'Opposition... Laissez-moi l'expliquer. Le
député de Portneuf rigole et il sait très bien...
Le Président: M. le ministre des Relations
internationales, quand on se lève... M. le ministre. Je suis tout
disposé à vous accorder une question de privilège, mais
encore faut-il qu'en commençant la question de privilège vous me
précisiez lequel des privilèges vous invoquez et non pas me
décrire la situation.
M. Landry: M. le Président, ce que je veux vous dire et je
ne mets pas en cause la
bonne foi de l'Opposition. Un membre de l'Opposition m'a attiré
pour une question que j'ai cru urgente. Il m'a fait venir...
Mise aux voix de la motion du premier
ministre proposant que l'Assemblée reconnaisse
les droits des autochtones
Le Président: Cela a dû permettre à tous nos
collègues qui étaient à l'extérieur d'entrer, si
bien que nous allons maintenant mettre aux voix... On me dit qu'il y a un
amendement que M. le premier ministre souhaiterait apporter à sa propre
motion pour remplacer le mot "bande" par "communauté" si je ne
m'abuse.
M. Lévesque (Taillon): Oui. Je ne me souviens plus de
l'endroit exact, M. le Président, mais là où se trouve
"bande" cela devrait, à notre avis, s'il n'y a pas d'objection, parce
que cela couvre tout plus complètement, "bande" ne s'applique pas
partout. Alors ce serait plutôt "communauté", si vous voulez
bien.
Le Président: S'il y a consentement au remplacement de ce
terme nous pourrions procéder au vote sur la motion principale telle que
modifiée en remplaçant le mot "bande" par "communauté".
Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement? Bien. Si bien que je
mets maintenant aux voix la motion suivante de M. le premier ministre. "Que
cette Assemblée reconnaisse l'existence au Québec des nations
abénaquise, algonquine, attikamek, crie, huronne, micmaque, mohawk,
montagnaise, naskapie et inuit; "Reconnaisse leurs droits ancestraux existants
et les droits inscrits dans les conventions de la Baie James et du Nord
québécois et du Nord-Est québécois;
"Considère que ces conventions, de même que toute autre convention
ou entente future de même nature, ont valeur de traités;
"Souscrive à la démarche que le gouvernement a engagée
avec les autochtones afin de mieux reconnaître et préciser leurs
droits, cette démarche s'appuyant à la fois sur la
légitimité historique et sur l'importance pour la
société québécoise d'établir avec les
autochtones des rapports harmonieux fondés sur le respect des droit et
la confiance mutuelle; "Presse le gouvernement de poursuivre les
négociations avec les nations autochtones en se fondant, sans s'y
limiter, sur les quinze principes qu'il a approuvés le 9 février
1983 en réponse aux propositions qui lui ont été
transmises le 30 novembre 1982 et à conclure avec les nations qui le
désirent ou l'une ou l'autre des communautés qui les constituent
des ententes leur assurant l'exercice: a) du droit à l'autonomie au sein
du Québec; b) du droit à leur culture, leur langue, leurs
traditions; c) du droit de posséder et de contrôler des terres; d)
du droit de chasser, pêcher, piéger, récolter et participer
à la gestion des ressources fauniques; e) du droit de participer au
développement économique du Québec et d'en
bénéficier, de façon à leur permettre de se
développer en tant que nations distinctes ayant leur indentité
propre et exerçant leurs droits au sein du Québec;
"Déclare que les droits des autochtones s'appliquent également
aux hommes et aux femmes; "Affirme sa volonté de protéger dans
ses lois fondamentales les droits inscrits dans les ententes conclues avec les
nations autochtones du Québec; et "Convienne que soit établi un
forum parlementaire permanent permettant aux autochtones de faire
connaître leurs droits, leurs aspirations et leurs besoins."
Que les députés qui sont favorables à cette motion
veuillent bien se lever. (16 heures)
Le Secrétaire adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Bédard (Chicoutimi), Rancourt (Saint-François), Marcoux
(Rimouski), Mme Marois (La Peltrie), MM. Clair (Drummond), Duhaime
(Saint-Maurice), Johnson (Anjou), Landry (Laval-des-Rapides),
Bérubé (Matane), Richard (Montmorency), Tardif (Crémazie),
Jolivet (Laviolette), Godin (Mercier), Roche-fort (Gouin), Dean
(Prévost), Léger (Lafontaine), Gendron (Abitibi-Ouest), Martel
(Richelieu), Fallu (Groulx), Le May (Gaspé), Biron (Lotbinière),
Garon (Lévis), Fréchette (Sherbrooke), Bertrand (Vanier), Mme
Lachapelle (Dorion), MM. Rodrigue (Vimont), Chevrette (Joliette), Brassard
(Lac-Saint-Jean), Ouellette (Beauce-Nord), Brouillet (Chauveau), Leduc (Fabre),
Bordeleau (Abitibi-Est), Gravel (Limoilou), Marquis (Matapédia),
Gauthier (Roberval), Beaumier (Nicolet), Blouin (Rousseau), Lavigne
(Beauharnois), Baril (Arthabaska), Dupré (Saint-Hyacinthe), Gagnon
(Champlain), Dussault (Châteauguay), Baril
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Desbiens (Dubuc), Mme Juneau (Johnson),
MM. Charbonneau (Verchères), Perron (Duplessis), Beauséjour
(Iberville), Le Blanc (Montmagny-L'Islet), La-plante (Bourassa), Champagne
(Mille-Îles), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Blais (Terrebonne),
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Tremblay (Chambly), Lachance
(Bellechasse), Paré (Shefford), Payne (Vachon), Lafrenière
(Ungava), Mme Le Blanc-Bantey (Iles-de-la-Madeleine), MM. Paquette
(Rosemont)
Bisaillon (Sainte-Marie), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Boucher
(Rivière-du-Loup), Grégoire (Frontenac).
Le Président: Que les députés qui s'opposent
à la motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: MM. Levesque (Bonaventure), Gratton
(Gatineau), O'Gallagher (Robert Baldwin), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce),
Ciaccia (Mont-Royal)...
Des voix: Bravo!
Le Secrétaire adjoint: ...Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), MM.
Ryan (Argenteuil), Vaillancourt (Orford), Mme Bacon (Chomedey), M. Marx (D'Arcy
McGee)...
Des voix: Ah!
Le Président: Allons! allons!
Le Secrétaire adjoint: ...Mme Dougherty (Jacques-Cartier),
MM. Middlemiss (Pontiac), Vallières (Richmond), Assad (Papineau), Caron
(Verdun), Blank (Saint-Louis), Hains (Saint-Henri), Polak (Sainte-Anne),
Saintonge (Laprairie), Rocheleau (Hull), Fortier (Outremont), Rivest
(Jean-Talon), Côté (Charlesbourg), Pagé (Portneuf), Johnson
(Vaudreuil-Soulanges), Bourbeau (Laporte), Lincoln (Nelligan), Cusano (Viau),
Doyon (Louis-Hébert), Dubois (Huntingdon), Maciocia (Viger), Picotte
(Maskinongé), Bissonnet (Jeanne-Mance), Dauphin (Marquette), Kehoe
(Chapleau), Houde (Berthier), Leduc (Saint-Laurent), Maltais (Saguenay), Mmes
Bélanger (Mégantic-Compton), Saint-Amand (Jonquière), MM.
Fortin (Marguerite-Bourgeoys) Pratt (Marie-Victorin), Parent (Sauvé),
Viau (Saint-Jacques).
Le Président: Attention!
Le Secrétaire: Pour: 66
Contre: 44
Abstentions: 0
Le Président: La motion est adoptée.
Aux motions sans préavis, M. le ministre
délégué aux Relations avec les citoyens.
Hommage aux bénévoles de l'AQDM M.
Élie Fallu
M. Fallu: M. le Président, j'aimerais demander
l'unanimité de cette Chambre pour l'adoption d'une double motion dont je
fais lecture: "Que cette Assemblée rende hommage aux efforts, à
la persévérance des bénévoles de l'Association du
Québec pour les déficients mentaux et que cette Assemblée
formule le voeu que les personnes qui vivent avec un handicap mental soient de
plus en plus dans notre société des citoyens et des citoyennes
à part égale."
Le Président: Y a-t-il consentement à la discussion
d'une telle motion? Il semble que oui. M. le ministre
délégué aux Relations avec les citoyens, dès que
nos collègues qui ne sont pas intéressés par cette motion
auront eu le loisir de quitter les lieux.
M. le ministre délégué aux Relations avec les
citoyens.
M. Fallu: M. le Président, c'est pour la septième
année consécutive que l'Association du Québec pour les
déficients mentaux organise cette Semaine de la déficience
mentale. Je rappellerai que cette association groupe maintenant environ 10 000
membres, c'est-à-dire 10 000 bénévoles qui oeuvrent
auprès des déficients mentaux, soit dans leur propre famille ou
encore pour les assister dans les familles voisines.
Le slogan de l'année 1985 est: "Je suis capable, le savais-tu?"
C'est-à-dire que c'est la personne elle-même qui s'adresse
à l'ensemble de la société pour nous rappeler qu'une
déficience chez un être humain n'est qu'une limitation partielle
et qu'il reste, au-delà de cette déficience,
énormément de capacité résiduaire qu'elle a le
droit d'exercer au maximum. En conséquence, comme société,
nous avons le devoir de lui permettre d'exercer cette capacité. C'est
donc le sens de l'appel cette année. Je suis capable, nous dit la
personne handicapée mentale, le savais-tu? Intègre-moi dans ta
société.
Le temps est venu, M. le Président, de sortir, d'intégrer
l'ensemble des personnes handicapées au Québec non seulement sur
le plan social, mais également sur le plan économique. Notre
société a fait, à cet égard, des pas
extraordinaires. En résumé, au sommet À part égale,
il y a maintenant trois semaines, nous pouvions dire, en répétant
d'ailleurs ce que nous avions entendu: La société
québécoise a fait des pas de géant. Il reste
néanmoins très certainement, dans le domaine des personnes
handicapées mentales, des pas de géant encore à
réaliser.
M. le Président, c'est donc un hommage que je voudrais rendre en
premier lieu aux bénévoles de l'Association du Québec pour
les déficients mentaux. En second lieu, c'est une sollicitation que
j'adresse à tous les citoyens et citoyennes du Québec de voir
à l'intégration des personnes handicapées mentales dans
nos milieux naturels. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de Nelligan.
M. Clifford Lincoln M. Lincoln: M. le Président, je
voudrais
m'associer à la motion du ministre délégué
aux Relations avec les citoyens pour marquer la semaine de la déficience
mentale au Québec et au Canada. Je pense que les déficients
mentaux sont les grands oubliés de notre société. En bien
des sens, ils représentent la conscience de notre société.
En effet, je pense qu'il y a un mouvement dans notre société
aujourd'hui dans le sens qu'on voudrait faire tout à fait
négation de tout ce qu'il y a de handicaps dans la
société. Si on pouvait recommencer à neuf, on dirait: II
ne nous faut plus de handicapés. Il ne nous faut plus de
déficients mentaux. Il faudrait presque oublier qu'ils existent dans
notre société. Si on pouvait recommencer à neuf, on
voudrait que tout ce qu'il y a de déficiences, tout ce qu'il y a de
handicaps physiques ou mentaux n'existent plus dans notre
société. Pourtant, il faut se rappeler que la déficience
mentale, comme les handicapés physiques, comme les aveugles, comme les
sourds, comme tous les handicapés dans notre société,
c'est un peu la conscience qui nous fait réaliser qu'il y a des gens qui
sont plus démunis que nous, qu'il y a des gens qui ont besoin de nous,
de tout l'apport de nos facultés pour les aider, eux qui sont les moins
lotis dans la société, à mieux vivre, à trouver
leur place au soleil.
Je pense que nous, au Québec - c'est vrai, ce que le ministre a
dit - on a fait des pas de géant par rapport à la normalisation
de la vie des déficients mentaux. En même temps, il reste tant
à faire. Il reste tant à faire dans tellement de domaines. Il
reste tant à faire pour aider les parents qui ont des enfants
déficients mentaux pour que ces parents eux-mêmes puissent
être plus aptes à garder dans le milieu familial ces mêmes
déficients mentaux. Il reste tant à faire pour le transport des
déficients mentaux, pour leur trouver du travail, du travail productif
dans la société, pour leur éducation dans un milieu plus
normal que des écoles spécialisées. Il y a tellement
à faire que c'est un pas de géant qui est demandé, tant
pour le gouvernement lui-même, mais réellement pour maximiser le
bénévolat. Je pense qu'il faudrait mettre encore plus d'accent
sur le bénévolat dans la société pour aider les
organismes communautaires qui oeuvrent au sein de la société pour
que les gens se prennent en main eux-mêmes. (16 h 10)
Je pense qu'aujourd'hui il faudra réaliser aussi que même
les déficients mentaux ont fait un pas de géant. Ils peuvent
participer eux-mêmes à leur évolution. Il faudra leur
donner une place tout à fait spéciale dans notre
société parce qu'ils représentent pour nous tous, avec
leurs collègues qui ont une déficience quelconque, cette prise de
conscience, ce rappel à la réalité qu'ils nous apportent
tous de penser à ceux qui ont bien moins que nous et qui sont
déficients d'une façon ou d'une autre, les grands démunis
qui cherchent leur place à plein temps dans notre société
québécoise et canadienne. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre des
Affaires sociales.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Vous me permettrez de
me joindre à mon collègue et à l'Opposition pour appuyer
cette motion pour ce groupe fort important de notre société qui
constitue 3% de celle-ci. Donc, au moins 200 000 personnes au Québec
sont touchées par ce handicap. Je voudrais souscrire d'une façon
particulière aux objectifs de cette semaine qui vise, bien sûr,
à faire connaître d'abord les faits suivants: que la personne
handicapée par une déficience mentale possède un
réel potentiel d'apprentissage et de développement. On en a
actuellement des preuves concrètes qui sont démontrées
dans les ateliers protégés, par exemple. Également, cela
vise à faire connaître les besoins réels de ces personnes
en général, les besoins coutumiers, habituels, leur droit de
recevoir des services de qualité adaptés à leurs besoins
généraux et spécifiques et également, le droit de
pouvoir vivre de façon intégrée dans leur milieu familial,
scolaire, résidentiel et même professionnel.
Donc, compte tenu de l'importance et des objectifs de cette semaine, je
crois que l'Assemblée nationale tout entière doit appuyer cette
motion qui vise à reconnaître le travail inlassable des organismes
bénévoles.
M. Blouin: Très bien.
Le Président: Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais m'associer
à mes collègues qui ont déjà parlé pour
appuyer cette motion qui veut reconnaître le travail des
bénévoles dans le domaine de la déficience mentale.
J'aimerais simplement rappeler, parce que c'est un domaine où
j'ai oeuvré pendant plusieurs années, il y a déjà
un bon nombre d'années, que n'eussent été justement les
efforts des bénévoles dans ce domaine, on serait peut-être
encore à l'âge noir dans le domaine de la déficience
mentale. Parmi ces bénévoles, ceux qui méritent le plus
grand hommage sont les parents. Ce sont les parents qui se sont
regroupés à une période donnée et qui ont
lutté contre les préjugés énormes qui existaient.
Je ne parle pas d'il y a 100 ans, je parle d'il y a à peu près
30
ans, alors qu'on était encore à l'époque où
souvent, au Québec en tout cas, un enfant atteint de déficience
mentale était un enfant relégué autant qu'on le pouvait
dans quelque institution d'où très rarement il pouvait
sortir.
C'est ce travail des parents qu'il faut souligner, qu'ils continuent
inlassablement pour tenter d'abattre les barrières de
préjugés qui existent à l'égard des personnes qui
sont atteintes d'un handicap mental.
Comme le soulignait mon collègue de Nelligan, il reste, en
dépit du chemin qui a été parcouru et que nous sommes
heureux de reconnaître, beaucoup de chemin à parcourir. Il y a une
catégorie de ces personnes atteintes d'un handicap mental que je
voudrais porter à l'attention du nouveau ministre des Affaires sociales.
C'est celle des déficients mentaux adultes. Je pense que, avec plus ou
moins de succès mais quand même avec un succès certain,
nous avons franchi l'étape de la scolarisation ou de
l'entraînement ou de la formation spéciale qui est requise par ce
type d'enfant jusqu'à l'âge de 21 ans maintenant. Mais trop
souvent, à partir de l'âge de 21 ans, c'est la coupure parce que
les CTA ou les CRA ou enfin les différents types d'ateliers
protégés pour cette clientèle sont loin d'être
suffisants. On sait fort bien que, pour un grand nombre de ces jeunes adultes
qui pourraient profiter de ce type d'atelier, les ressources n'existent
pas.
Le deuxième problème des adultes déficients mentaux
est celui de leur avenir, si je puis dire, ou du sort qui leur est trop souvent
réservé au moment de la disparition de leurs parents. Vous les
retrouvez maintenant, parce qu'Us vivent beaucoup plus longtemps et que leur
longévité se rapproche assez d'une façon
générale de la moyenne de la longévité de nos
concitoyens. Mais ils se retrouvent dans des institutions très souvent
tout à fait inadaptées pour eux. Des parents qui ont passé
leur vie à essayer de les rendre autonomes, de les rendre
indépendants voient au moment de leur décès leurs enfants
devenus adultes intégrés dans des institutions regroupant
d'autres types de handicaps que celui dont est atteint celui qui souffre de
déficience mentale ou de handicap mental. C'est très rapidement
que tous les efforts qui ont été déployés, tous les
progrès que ces individus ont pu réaliser - il y a chez eux un
potentiel limité, mais un potentiel qui peut être
développé - sont perdus et on assiste à une
régression extrêmement rapide des progrès qui ont
été accomplis.
Je ne veux pas m'attarder davantage, mais je pense qu'une attention
particulière devrait être portée dans les efforts à
venir, à la suite à donner aux efforts qui ont déjà
été faits au niveau, comme je le disais tout à l'heure,
d'une certaine scolarité, d'une certaine formation ou d'un certain
entraînement pour que soient respectés jusqu'au bout leur
potentiel de fonctionnement et leur capacité de s'adapter à notre
société. Merci, M. le Président.
Le Président: La motion de M. le ministre
délégué aux Relations avec les citoyens est-elle
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Bédard: M. le Président, il y aurait les avis
à la Chambre à donner.
Avis touchant les travaux des commissions
Le Président: J'y arrivais, en effet, aux avis.
M. Bédard: Tout d'abord, aujourd'hui, jusqu'à 18
heures, à la salle 91...
Est-ce que le député de Portneuf a quelque chose de
spécial à dire?
M. Pagé: Vous faites cela avec
élégance...
M. Bédard: Toujours avec élégance, merci.
À la salle 91, M. le Président, la commission de
l'économie et du travail poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail
et les maladies professionnelles; après les affaires courantes et
jusqu'à 18 heures également, à la salle du Conseil
législatif, la commission de l'aménagement et des
équipements poursuivra la consultation particulière sur le projet
de loi 13, Loi sur les parcs nationaux.
Demain, jeudi, de 10 heures à 12 h 30, à la salle 81, la
commission des affaires sociales procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur le
régime de rentes du Québec et la Loi sur les régimes
supplémentaires de rentes. À la salle 91, la commission de
l'économie et du travail poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 42, Loi sur les accidents du travail
et les maladies professionnelles.
Demain également, de 10 heures à 12 heures, à la
salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et
des équipements poursuivra la consultation particulière sur le
projet de loi 13, Loi sur les parcs nationaux.
Ce sont, M. le Président, les avis que nous avons à donner
pour aujourd'hui.
Le Président: J'en ai deux autres, quant à moi. De
sa propre initiative, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le
May, la commission des affaires sociales tiendra une séance de
travail immédiatement après les affaires courantes.
Demain matin, la sous-commission sur la réforme parlementaire...
Demain après-midi. On aura le temps d'y revenir.
Une voix: C'est le Bureau, demain matin.
Le Président: C'est le Bureau, demain matin, en effet, M.
le député, vous avez tout à fait raison. Ce qui nous
mène aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le
député de Deux-Montagnes.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
M. de Bellefeuille: Est-ce que le leader parlementaire du
gouvernement pourrait nous dire quand il a l'intention d'appeler la motion
inscrite en mon nom qui figure au no 27, à la page 8, de notre
feuilleton et qui se lit comme suit: "Que l'Assemblée, par une motion du
leader du gouvernement, confie à la commission permanente de la culture
le mandat d'étudier la situation qui règne à
Radio-Québec et d'inviter les personnes et les groupes
intéressés par cette question à comparaître devant
elle."
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Elle vient tout juste d'être inscrite et
je ne suis pas en mesure présentement de donner des renseignements au
député.
Le Président: M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Si vous me le permettez, la motion a
été inscrite en date du 28 novembre dernier.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Je pense que le député comprendra
qu'une large place est faite pour appeler les motions présentées
par l'Opposition. Quand nous verrons une possibilité, nous en aviserons
le député.
Le Président: M. le député de Frontenac.
M. Gilles Grégoire membre de la commission de
l'économie et du travail
M. Grégoire: Aux avis. Selon ce que dit le
règlement, un député indépendant a droit de choisir
la commission de laquelle il veut être membre d'une façon
permanente, avec droit de vote. Je siège depuis déjà trois
mois d'une façon régulière à la commission de
l'économie et du travail sur le projet de loi 42. J'aimerais choisir
cette commission pour en devenir membre permanent et je demanderais le
consentement de la Chambre. (16 h 20)
Le Président: Je n'ai pas d'objection à ce que l'on
procède ainsi mais, normalement, il serait plus orthodoxe que
vous...
Une voix: Pardon?
Le Président: II serait plus orthodoxe...
Des voix: Ha! Ha! Ha!
Le Président: Enfin, j'espère qu'on peut encore
utiliser le terme! Il serait plus orthodoxe que vous m'adressiez une lettre
pour que je la communique à la Commission de l'Assemblée
nationale qui va siéger mardi prochain car c'est celle-ci qui est
compétente pour déterminer la composition des commissions.
À la suite de cela, la commission fait rapport à
l'Assemblée qui adopte le rapport de la commission. Maintenant, si
personne n'a d'objection, nous pouvons bien, en effet, régler le cas
tout de suite à l'Assemblée même. Si tout le monde est
d'accord pour que le député de Frontenac fasse partie de la
commission de l'économie et du travail, cela réglerait le
cas.
M. Bédard: M. le Président.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Bédard: Que ce soit par un avis écrit ou
autrement, peut-être qu'on pourrait régler la question tout de
suite. En ce qui nous concerne, nous sommes d'accord pour que le
député de Frontenac soit membre de la commission à
laquelle il vient de faire référence.
Le Président: S'il y a consentement... Il y a
consentement? Donc, M. le député, vous faites officiellement
partie de la commission de l'économie et du travail.
Une voix: Bravo!
Reprise du débat sur la motion de l'Opposition
proposant que l'Assemblée
déplore que le gouvernement
défavorise
l'établissement d'un climat propice à
l'investissement et à l'emploi
Le Président: Cela nous mène aux affaires du jour
et à la reprise du débat ajourné le 13 mars par M. le
député de Saint-Laurent sur la motion de M. le
député de Vaudreuil-Soulanges, proposant "que l'Assemblée
nationale déplore vivement que
le gouvernement du Parti québécois, par son refus
d'alléger le fardeau fiscal des particuliers et celui des entreprises et
d'implanter des mesures fiscales plus incitatrices, défavorise
l'établissement d'un climat propice à l'investissement et
à l'emploi."
Considérant qu'il reste moins de 90 minutes au débat, en
divisant le temps entre les deux groupes parlementaires par périodes de
40 minutes chacune et un droit de réplique de 10 minutes en sus pour M.
le député de Vaudreuil-Soulanges, cela devrait nous mener
à 18 heures, étant donné qu'aucun député
indépendant ne m'a signalé qu'il avait l'intention de prendre la
parole cet après-midi. M. le député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais M. le Président, mon collègue de
Saint-Laurent n'utilisera pas son droit de parole et je vais prendre sa
place.
Tout d'abord, j'aimerais remercier d'une façon non
équivoque mon collègue de Vaudreuil-Soulanges de nous donner
l'occasion de discuter en cette Chambre de points aussi importants que celui de
la relance économique et, particulièrement, de celle des
régions que je représente ici, soit du comté de
Saguenay.
Les régions éloignées doivent faire face à
des défis de 1985 qui sont extrêmement difficiles. Le ministre des
Finances devrait prendre sans retard, immédiatement, des mesures pour
permettre aux régions éloignées des grands centres
d'effectuer cette remontée économique tellement nécessaire
pour réduire d'une façon appréciable et tangible ce
fléau qui répand la terreur parmi les régions et qu'on
appelle le chômage.
Depuis 1981, la Côte-Nord en particulier a été
affectée d'une façon dramatique. Lorsqu'on voit avec quelle
désinvolture le gouvernement actuel a traité ce problème,
nous pouvons nous demander si le reste du Québec ou si le gouvernement
du Québec n'a pas décidé de se séparer de la
Côte-Nord. Quand on regarde la fermeture de Schefferville, de Gagnon, de
Rayonier, des Produits Forestiers, toute la panoplie d'usines fermées,
d'usines qui ont fermé et qui ont réouvert puis, refermé,
on se demande si le gouvernement du Québec n'a pas décidé
d'abandonner la Côte-Nord et de la retourner à Terre-Neuve. Il
faut se poser des questions. Depuis 100 ans qu'il réclame le Labrador
pour le Québec, on est en train de se poser une question: Est-ce que le
gouvernement du Québec ne veut pas nous retourner au Labrador?
Les gens des régions ne croient plus aux programmes folkloriques
du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu. Déclic, stages en milieux d'emplois, travaux communautaires,
pour ne pas dire travaux forcés dans certains cas, pour eux et pour
nous, c'est de la foutaise, du travail à rabais, à la petite
semaine de bohème d'étudiant, comme on l'appelait il y a un
certain temps. Cela n'intéresse plus personne, ces choses-là. Les
seuls qui prêchent cette belle grande aventure, ce sont les ténors
péquistes. Malheureusement, ils prêchent dans le désert,
dans un désert économique qu'ils ont grandement contribué
à créer.
M. le Président, le premier syndrome ministériel auquel le
gouvernement doit s'attaquer doit apporter une solution pratique et permanente
dans les régions et particulièrement sur la Côte-Nord.
D'abord et avant tout il faut faire un X sur la taxe ascenceur,
c'est-à-dire la faire disparaître. C'est la première
condition d'un véritable développement économique.
Non seulement le gouvernement persiste-t-il à la garder mais,
pour prouver un petit peu l'énoncé que je faisais tout à
l'heure, il a décidé encore une fois, dans son estimation des
dépenses qu'il annonçait hier, de vraiment oublier la
Côte-Nord. Le budget des dépenses 1985-1986, et je cite le
communiqué de presse du ministre: "Les investissements publics, une
présence gouvernementale plus importante sur tout le territoire du
Québec." Mon dieu, le beau gros titre, que cela va bien! Je m'en vais
à la région 09 qui est la Côte-Nord, qui regroupe
également les comtés de Saguenay et de Duplessis, 450 milles de
littoral, 450 milles de routes qui ont été depuis 1976
négligées d'une façon aberrante. La preuve: Les ponts
s'écroulent. On ne les remplace pas et, ce qu'il y a de plus tragique,
lorsqu'on voit le projet d'immobilisation sur la Côte-Nord alors qu'on
est la région où il y a un plus grand système de
réseaux routiers de 450 milles de Tadoussac à Havre-Saint-Pierre,
M. le Président, on ne voit pas un sou pour le réseau routier
dans les dépenses d'immobilisation. Pas un sou!
Le gouvernement du Québec a complètement oublié la
Côte-Nord. Qu'il oublie le comté de Saguenay, cela fait longtemps
qu'il l'a oublié et il peut l'oublier pour longtemps encore parce que
jamais il ne reviendra dans le Parti québécois. Mais je ne
comprends pas une chose: le député de Duplessis, le chouchou du
premier ministre, à quoi a-t-il pensé d'accepter une pareille
chose dans son caucus? Pas un sou pour son réseau routier, même
pas les 3 000 000 $ pour remplacer son pont qui est tombé. Est-ce que ce
sont des gens sérieux? Est-ce que c'est un député
sérieux? À moins, M. le Président, qu'on garde en cachette
pour les petits amis du régime quelques petits millions pour le
patronage, dans lequel ce gouvernement a démontré depuis 1976
qu'il était le roi. Ce qu'on a vu dans le passé était de
la petite bière à comparer à ce qu'on a
présentement.
Non seulement cela, mais c'est aussi de l'hypocrisie, parce qu'on sait
qu'on est à l'heure électorale. Et je vois déjà les
ténors, certains ténors péquistes... Je suis sûr que
ce n'est pas le premier ministre qui va venir à Baie-Comeau; la
dernière fois les gens l'avaient tellement bien accueilli qu'il les
avait traités de tous les noms possibles et imaginables; je suis
sûr qu'il va venir annoncer 5 000 000 $ pour le réseau routier
là, 3 000 000 $ pour ici, 3 000 000 $ là. Mais pourquoi ne pas
avoir le courage de les dépenser immédiatement pour que la
population puisse savoir à quoi s'en tenir?
Lorsqu'on parle de développement il est essentiel qu'un
réseau routier soit adéquat. On ne demande pas une autoroute de
Tadoussac à Blanc Sablon, avec des poteaux de téléphone
tout le long comme dirait Gilles Vigneault. On demande une route passable. On
demande que le gouvernement répartisse d'une façon
équitable, à l'intérieur de cet immense territoire, une
partie des taxes qui reviennent à l'ensemble de la population.
M. le Président, la taxe ascenseur sur l'essence est un
impôt régressif auquel personne ne peut échapper en
région. Les produits alimentaires sont majorés d'autant
puisqu'ils coûtent plus cher à transporter. Donc la facture
alimentaire d'un chef de famille y est beaucoup plus élevée que
celle des régions près des grands centres. Le gouvernement
maintient sa taxe inique au détriment des besoins essentiels tels que
l'alimentation en région éloignée.
Tous les outils nécessaires au développement
économique passent dans la taxe ascenseur: transport plus
élevé, matériaux de construction plus cher, des effets
néfastes dans le secteur de la construction qui avait été
l'un des premiers à contribuer au développement de la
Côte-Nord, cela se traduit par un chômage accru dans ce secteur,
donc des pertes d'emplois. Pourtant notre activité économique ne
peut pas se passer du secteur de la construction. (16 h 30)
Les PME, créatrices d'emplois indispensables,
génératrices d'une économie saine et continue, sont
pénalisées dans les deux sens, soit à l'importation des
produits à manufacturer et à l'exportation des produits finis.
Encore là, cela crée un ralentissement des petites et moyennes
entreprises et cela crée automatiquement du chômage. Il y a donc
moins d'emplois dans ce secteur. L'industrie lourde subit les mêmes
soubresauts et ralentit ses opérations. Il y a donc du
chômage.
L'industrie du camionnage qui était une industrie très
florissante sur la Côte-Nord, à cause de cette taxe inique, y est
devenue presque inexistante.
M. le Président, le premier geste concret qui doit être
posé par le gouvernement, s'il veut, comme il le prétend,
s'occuper d'économie, c'est d'abolir immédiatement la taxe
ascenseur. Sans cela, il est inutile de penser qu'une région va pouvoir
se prendre en main. En parlant de régions, je peux parler des
régions aussi très éloignées, parce que la
Côte-Nord est très éloignée, mais il y a la
région du Lac-Saint-Jean aussi, celle de l'Outaouais, celle de l'Estrie,
celle du Bas-Saint-Laurent-Gaspésie. Je ne comprends pas que les
députés de ces régions ne soient pas intervenus ici et
davantage ceux du côté ministériels qui devraient
être à l'écoute de leur ministre et faire comprendre ces
choses à leur ministre. Que font-ils? Que fait le député
de Duplessis, par exemple, présentement? A-t-il demandé au
ministre de baisser, d'enlever la taxe ascenseur afin que les camionneurs
soient capables de se payer des plaques pour leurs camions au mois d'avril?
Est-il ici pour demander que l'alimentation soit diminuée du prix de la
taxe ascenseur pour les contribuables de son comté?
M. le Président, je pense que les députés
ministériels ont une tâche à remplir envers la population.
Malheureusement, dans le moment, ils ne la remplissent pas. Lorsque le ministre
des Finances, d'une façon hypocrite - je le dis en toute
sincérité, M. le Président - néglige d'investir
dans le réseau routier de la Côte-Nord, c'est tout à fait
inacceptable. Non seulement il pénalise de sa taxe ascenseur et c'est
nous autres qui en payons une plus grosse partie mais il n'est même pas
capable d'en faire une redistribution juste et équitable pour les
citoyens de la Côte-Nord en mettant une partie de cet argent sur le
réseau routier.
Tant et aussi longtemps qu'on aura un gouvernement qui s'ajuste ainsi,
je pense que la Côte-Nord aura raison de le mettre dehors à la
prochaine élection. Je pense qu'un parti qui se tient debout, un parti
qui tient au développement en région, comme le Parti
libéral le fait et le propose, parle de l'abolition de la taxe
ascenseur, et c'est cela qu'on va faire lorsque la prochaine élection
sera déclenchée. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le
député de Fabre.
M. Michel Leduc
M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. En fait, la
motion du Parti libéral porte sur le refus du gouvernement actuel
d'alléger le fardeau fiscal des particuliers, des entreprises et de
cette façon de défavoriser l'établissement propice
à l'investissement et à l'emploi.
C'est toujours la même rengaine avec le Parti libéral. On
accuse toujours le gouvernement des mêmes maux qui, supposément,
affligent les Québécois. Mais il
faut remercier le Parti libéral de nous donner l'occasion de
rectifier les faits et de dire exactement aux Québécois et aux
Québécoises ce qui se passe au Québec.
Je ne ferai pas de "phrasage", comme l'a fait le député de
Saguenay qui m'a précédé. Je voudrais présenter un
certain nombre de chiffres touchant le fardeau fiscal des
Québécois, tirés d'une étude de
l'économiste, M. Rodrigue Tremblay, pour le compte du ministre
fédéral des Finances. C'est une étude récente qui
démontre tout simplement ceci: Que, de 1970 à 1976,
période bien connue de la part de nos amis d'en face, puisque
c'était sous le règne d'un certain Robert Bourassa, c'est la
période où la taxation des Québécois a atteint des
proportions catastrophiques. Si on dit que le passé est garant de
l'avenir, ce n'est pas rassurant pour le Québec, lorsqu'on examine le
passé du parti de l'Opposition dont le slogan est "Maîtriser
l'avenir".
En 1970, au moment où le Parti libéral a pris le pouvoir,
M. le Président, l'écart fiscal entre le Québec et
l'Ontario était de l'ordre de 6,5%. En 1976, au moment où il
était temps que les Québécois et les
Québécoises renvoient dans l'Opposition le gouvernement
libéral de l'époque, l'écart entre l'Ontario et le
Québec atteignait 30%. On est passé de 6% en 1970 à 30%,
voilà ce que nous révèle l'étude d'un
économiste pour le compte du ministre fédéral des
Finances.
Aujourd'hui, on a le culot d'accuser le gouvernement de refuser de
diminuer les impôts. Or, qu'en est-il, M. le Président? En 1976,
l'écart entre le Québec et l'Ontario était de l'ordre de
30%. Aujourd'hui, en 1984, l'écart entre le Québec et l'Ontario
est de l'ordre de 9%. On est passé d'un écart de 30% en 1976, au
moment où le gouvernement a pris le pouvoir, à un écart de
9% en 1984. Voilà la vérité sur cette question du fardeau
fiscal des Québécois.
Il faut continuer l'effort de réduction du fardeau fiscal. Nous
en sommes très conscients. Mais qu'on ne vienne pas nous dire qu'il n'y
a pas eu réduction de l'effort fiscal des Québécois.
Dans le cas du Parti libéral, M. le Président, encore une
fois le passé n'est nullement garant de l'avenir. Ces gens-là ont
hypothéqué l'avenir du Québec. Comment peuvent-ils
prétendre aujourd'hui vouloir maîtriser l'avenir au
Québec?
J'ai examiné, comme beaucoup de mes collègues, le
programme politique du Parti libéral. Qu'est-ce qu'on promet, de l'autre
côté, aux Québécois? On promet une réduction
des taxes, une réduction des impôts, une diminution du
déficit, mais une augmentation des ressources dans les domaines des
services sociaux, de la santé, de l'éducation, de la
recherche.
M. le Président, les Québécois et les
Québécoises vont comprendre que c'est la quadrature du cercle.
Comment peut-on à la fois vouloir tout réduire et, de l'autre
côté, vouloir augmenter les ressources dans des domaines tels que
la santé, l'éducation, la recherche, etc.? En fait, c'est
tellement élémentaire ce que fait le Parti libéral d'en
face que tout le monde au Québec est en train de comprendre
l'espèce de discours magique que le Parti libéral sert
actuellement aux Québécois.
J'ai pris connaissance, M. le Président, du journal des
étudiants de l'Université de Montréal. Ils ont tout
simplement conclu que le Parti libéral est effectivement en train de
maîtriser l'avenir, mais l'avenir électoral. Ils ajoutent: "Le
dernier congrès plénier du Parti libéral a tracé
les grandes lignes de son programme politique. Électoralement, c'est
sans faille. On donne à chacun ce qu'il désire, entre autres, on
a voulu plaire aux jeunes. Vont-ils préférer le bien-être
social à l'emploi?" C'est la question qu'on pose. En fait, les gens sont
de moins en moins dupes du discours que nous sert le Parti libéral,
surtout depuis son dernier congrès.
Comment réaliser ces promesses que nous font les gens de l'autre
côté? Le programme est complètement muet à cet
égard. En fait, voici ce qu'on nous dit: Faites confiance à notre
chef Robert Bourassa, faites confiance à son équipe et Robert le
magicien va tirer de son chapeau toutes les solutions miracles aux
problèmes des Québécois.
Maîtriser l'avenir par la magie, voilà la promesse du Parti
libéral. Ne rien dire qui soit compromettant. Laisser croire à la
population qu'on a toutes les solutions aux maux de tête des
Québécois. C'est la stratégie de l'aspirine et du valiurn.
(16 h 40)
Je le dis, M. le Président, mais je vais citer, pour donner un
autre témoignage, M. Gilles Lesage, dans le Devoir du 2 octobre 1984:
"M. Bourassa, c'est bien connu, est un politicien roué, rusé, qui
ne laisse rien au hasard et tente de surveiller en même temps tous les
angles de la patinoire. S'il a appris une chose durant ces années d'exil
volontaire, c'est de porter à un raffinement suprême l'art d'avoir
l'air de se compromettre tout en laissant ouverte de multiples avenues sur
quelque sujet que ce soit." Voilà, rapidement brossé, un portrait
réel, véritable, du chef du Parti libéral du
Québec.
Quant aux investissements, qu'en est-il de la vérité?
Qu'en est-il de la vérité quant au climat économique qui
doit être propice aux investissements? Les faits nous montrent, encore
une fois, que les critiques du Parti libéral sont complètement
faussées par leur vision partisane, par leur désir
également d'aspirer au plus vite au pouvoir. Du côté des
investissements, la réalité est celle-ci. Encore une fois, ce
sont des chiffres que je
présente rapidement puisque le temps ne me permet pas d'aller
dans les détails, mais quelques chiffres qui indiquent bien les
priorités du gouvernement actuel. En 1984, il y a eu un accroissement
record de tout près de 42% au chapitre des immobilisations
manufacturières. Il s'agit d'une augmentation de 9,5% - en 1984 toujours
- des immobilisations totales du secteur public et du secteur privé au
Québec au regard d'une augmentation de 1,2% pour l'ensemble du Canada.
Le Québec - ce n'est pas nous qui le disons, je pourrais citer les gens
de la Banque de Montréal, de la Banque Canadienne; en fait, on le dit un
peu partout dans des organismes reconnus pour leur neutralité - affiche
une meilleure performance que l'Ontario et l'ensemble du Canada pour une
troisième année consécutive. Encore mieux, la part du
Québec dans l'ensemble des immobilisations manufacturières
canadiennes est ainsi passée de 17,8% en 1981 à 31,4% en 1984. Il
s'agit d'un sommet jamais atteint auparavant, même pas à
l'époque des grands travaux de la baie James.
Pourquoi cette performance, M. le Président? Encore une fois, il
faut aller rapidement, mais rappelons les effets de programmes importants tels
que Corvée-habitation, programme d'accélération des
investissements, programme de financement des entreprises, le programme
tarifaire d'Hydro-Québec qui accorde un rabais temporaire à
quelque 200 entreprises pour des investissements de 1 200 000 000 $, le
recrutement d'immigrants investisseurs qui remporte un vif succès
actuellement puisque, en 1984, des investisseurs étrangers sont venus
investir au Québec plus de 249 000 000 $. C'est une augmentation de 87%
par rapport à 1983. Ces quelques chiffres - et j'aurais pu continuer,
mais, malheureusement, le temps m'en empêche -me permettent de conclure
que le discours libéral ne s'appuie pas sur des chiffres, mais sur des
paroles, que les promesses qu'ils font sont des promesses qui empruntent
beaucoup plus à des solutions miracles, qui empruntent beaucoup plus
à une certaine forme de magie. Et la magie, on sait ce que cela donne.
Cela dépend beaucoup du magicien qui est en face de nous et
jusqu'à maintenant, en politique, on n'a pas vu beaucoup de magiciens
régler véritablement les problèmes des
Québécois.
M. le Président, je termine en disant ceci: "Un tiens vaut mieux
que deux tu l'auras". Aux promesses nébuleuses et gélatineuses du
Parti libéral, j'oppose des réalisations qui démontrent
que le gouvernement actuel mérite la confiance des
Québécois pour continuer le travail commencé et ce, pour
un troisième mandat. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le
député de Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Je viens à peine d'écouter les propos
du député de Fabre et je trouve absolument inconcevable que ce
gouvernement, que les ministériels tiennent compte du fait... Il y a
quand même une certaine appréciation parce que si on peut
apprendre quelque chose à ces ministériels dans notre document
Maîtriser l'avenir, je pense que ce sera déjà quelque
chose. Je suis heureux que certains membres du côté
ministériel aient rapporté certains éléments des
engagements politiques de notre formation.
Il est difficile de faire comprendre à ce gouvernement,
premièrement, ses bévues au cours des huit dernières
années, cet essouflement que ce gouvernement connaît après
ces huit dernières années, alors qu'il a tout simplement failli
à la tâche de trouver aujourd'hui les moyens de relancer
l'économie.
Je comprends qu'on puisse critiquer le document Maîtriser
l'avenir, du Parti libéral, parce qu'on ne peut plus apprécier
son propre document du côté ministériel. Vous avez encore
dans votre document politique, comme premier article, la souveraineté du
Québec, au Canada. Arrêtez de leurrer cette population alors que
vous avez totalement abandonné cette idée de
l'indépendance, pour des fins purement électoralistes. On se
souvient de la mise en veilleuse de 1976, de 1981. C'est une autre mise en
veilleuse et la population s'en souvient et s'en souviendra drôlement
lors du prochain scrutin, la journée où le premier ministre aura
le courage et la décence d'aller demander au peuple ce qu'il pense de
son administration depuis 1981.
On pourrait simplement citer quelques cas où ce gouvernement
pourrait récupérer des millions de dollars. Pourquoi ce
gouvernement ne veut-il pas procéder à des changements aussi
normaux? Si on prend l'exemple d'une recommandation que l'on retrouve dans le
document du Parti libéral du Québec, c'est-à-dire
l'élimination des droits successoraux et celle complémentaire de
l'impôt sur les dons. Sur les droits de succession, au Québec, on
perçoit à peu près 49 000 000 $ de revenus par
année. Est-ce que le gouvernement s'est arrêté pour penser
combien de millions de dollars on perdait par année en maintenant une
politique semblable? Combien de gens, de hauts salariés, d'industriels,
de créateurs d'emplois ont quitté le Québec à cause
de politiques folichonnes de la sorte? La seule province au Canada qui
maintient encore des droits de succession, c'est le Québec. C'est
dépassé. On pense, en maintenant des politiques semblables,
conserver au Québec ceux qui
sont pour nous des créateurs d'emplois, c'est-à-dire des
jeunes industriels, des gens bien rémunérés, des gens qui
ont accumulé une certaine fortune et qui voudraient la laisser à
leurs enfants. Mais, encore aujourd'hui, lorsqu'il y a décès, le
Québec procède à l'imposition des biens au delà de
100 000 $. (16 h 50)
On pourrait prendre un autre exemple, que je ne comprends absolument
pas; c'est le maintien du règlement de placement dans la construction.
Nous, du Parti libéral, avons dans notre programme politique, et encore
ici, c'est écrit noir sur blanc: qu"'un gouvernement libéral
entreprenne prioritairement l'étude de la déréglementation
dans l'industrie de la construction." On lisait dans le journal, il y a
à peine quelques semaines, qu'il se faisait au Québec plus de 335
000 000 $ de travail au noir; du travail au noir pour 335 000 000 $, des gens
qui, dans la construction, n'ont plus leur carte de classification d'une part
parce que l'économie n'a pas été profitable pour ces gens
et pour l'ensemble du réseau de la construction. Au cours des
années, les gens décrochaient et ne pouvaient plus avoir leur
carte de classification. Dans bien des cas, si on voulait continuer à
pourvoir aux besoins de la famille, on devait travailler. Il y a donc 335 000
000 $ qui se font au noir.
Ces gens ne paient pas d'impôt, ils ne paient pas de régime
de rentes, ils ne paient pas d'assurance-maladie; en plus, ils ont toujours la
crainte de se faire pincer, d'être traduits en cour et de payer une
amende pour avoir travaillé. Et c'est le cas dans plusieurs des
régions du Québec où on s'aperçoit aujourd'hui que
ce sont des gens de l'extérieur qui viennent travailler en région
éloignée où, malheureusement, la plupart ont perdu leur
carte de classification.
Quand on touche cet élément important, la carte de
classification, du règlement de placement dans la construction, on
touche aussi aux jeunes. On a permis à ces jeunes d'étudier dans
les universités, dans les cégeps, dans les polyvalentes. Entre
autres, dans les polyvalentes, certains jeunes sortent avec des diplômes
longs comme le bras; ils sont spécialisés dans certains secteurs
de la construction et parce qu'ils sont diplômés, ils sont en
attente pour avoir un job dans le domaine de la construction. On n'a pas
pensé encore, c'est-à-dire ce gouvernement n'a pas pensé
encore aujourd'hui d'abolir tout simplement ce règlement de placement et
de le changer par des structures plus appropriées au contexte
d'aujourd'hui.
On a modifié ce règlement au cours des années
passées, depuis 1978, et le parrain était nul autre que le
dauphin de ce gouvernement, Pierre-Marc Johnson. On traîne encore en
longueur aujourd'hui l'application de ces correctifs.
Notre motion touche effectivement ce gouvernement parce que ce
gouvernement ne fait rien de bien: les impôts qu'on est allé
chercher, les taxes qu'on a appliquées entre autres sur l'essence. On a
appliqué une surtaxe sur l'essence. Quand on veut aller chercher du
tourisme, quand on veut inviter des touristes chez nous, au Québec, et
qu'on leur charge à la pompe à peu près 0,08 $ le litre de
plus, cela fait quoi aux visiteurs qui viennent au Québec? Cela ne les
incite sûrement pas à revenir ou cela ne les incite pas à
dire à leurs voisins ou à leurs amis d'aller visiter le
Québec. Effectivement, le Québec est la province où cela
coûte le plus cher pour vivre au Canada. Alors, on va se promener
ailleurs.
On peut toucher d'autres éléments très importants.
Dans la région chez nous, en plus de la carte de classification, en plus
des droits successoraux, on pourrait parler tout simplement... J'examinais un
peu hier les crédits du président du Conseil du trésor. Le
réseau routier vient d'en prendre pour son rhume une autre fois.
J'examine l'Outaouais québécois et, malheureusement, il n'est pas
encore relié au reste du Québec par le Québec; il faut
emprunter l'Ontario pour se rendre à Montréal, en 1985. Encore
là, une façon de développer l'économie en
région serait d'avoir un réseau routier sain, d'avoir un
réseau routier qui puisse permettre la construction de nouvelles
entreprises, la venue de nouveaux investisseurs. Mais non, on
préfère nous laisser emprunter la voie de l'Ontario, la province
voisine.
Pour toutes ces raisons... On est dans le Canada et on apprécie
d'être dans le Canada. Mais nous, de l'Outaouais québécois,
nous voulons nous développer aussi à l'intérieur de nos
propres frontières. Nous voulons être en compétition avec
le reste du Canada. Nous voulons procurer à nos concitoyens non
seulement le plaisir d'emprunter les routes du Québec pour se rendre au
Québec, mais aussi pour faire de l'argent, pour implanter des
industries, pour activer la création d'emplois chez nous. On en sait
quelque chose... Quand on a augmenté la taxe sur l'essence, le ministre
du Commerce extérieur de l'époque avait souligné - cela
avait paru dans un des journaux de l'Outaouais, le Droit - que c'était
là qu'on allait reconnaître les vrais Québécois,
ceux qui allaient accepter de payer l'augmentation occasionnée par la
taxe sur l'essence. C'était une façon de venir nous dire que
c'était plus économique d'acheter au Québec. Tandis que le
ministre des Finances nous disait de nous serrer la ceinture, le ministre
responsable de l'Outaouais, d'autre part, et cela a été sa
dernière déclaration en Outaouais, parce que le premier ministre
a décidé dans les jours qui ont suivi de le remplacer par Mme la
ministre...
Une voix: Ce n'est pas vrai.
M. Rocheleau: Pour le bénéfice de notre
collègue, le ministre du Commerce extérieur, je vais lui envoyer
une copie de sa déclaration. Cela me fera plaisir de le faire dans les
heures qui viennent.
Nous pourrions parler très longuement de notre motion qui, d'une
part, blâme ce gouvernement, mais nous souhaiterions parler aussi de ce
que nous proposons. Mon collègue, le député de
Vaudreuil-Soulanges, y a déjà fait allusion. Il aura aussi dans
son droit de réplique le loisir de corriger certaines affirmations
gratuites que nos collègues ministériels ont lancées au
cours des dernières heures.
En terminant, je tiens à souligner que nous, de l'Outaouais
québécois, comprenons très bien les injustices faites aux
citoyens et aux citoyennes du Québec, tenant compte du fait que nous
demeurons dans une région frontalière et que nous voyons de
l'autre côté les coûts, qui sont drôlement moins
élevés qu'au Québec. C'est ce que nous voulons
améliorer, nous du Parti libéral, dans le but que le
Québec soit concurrentiel avec les autres provinces canadiennes.
Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre du
Revenu.
M. Maurice Martel
M. Martel: M. le Président, cette motion libérale
nous permet de faire le bilan sur la situation de l'économie et de
l'emploi au Québec et, également, de montrer l'incohérence
en toutes matières, mais surtout en matière fiscale, du Parti
libéral.
Le candidat libéral de Québec, M. Yves Séguin, veut
abolir le ministère du Revenu...
Une voix: II veut devenir ministre.
M. Martel: ...tout en voulant en être le ministre. Il veut
faire des politiques fiscales alors que le ministre des Finances ferait la
perception. Est-ce que vous comprenez cette attitude, M. le critique financier
du Parti libéral? Est-ce là une nouvelle façon chez vous
de créer des emplois? Est-ce une nouvelle façon aussi de
préserver cette sécurité fiscale acquise sous Duplessis en
1954 et conservée sous Lesage, sous Johnson, sous Bertrand, sous
Bourassa et même sous Lévesque?
Une autre incohérence, celle-ci dans le domaine de la
santé: le député de Brome-Missisquoi veut privatiser les
hôpitaux. Évidemment, il s'est vite fait rabrouer par la
députée de L'Acadie et même par son chef. Ce même
chef invisible, quant à lui, veut créer une deuxième Baie
James. M. le critique financier, vous n'êtes pas d'accord avec cette
position de votre chef. Vous voulez qu'il y ait une signature de contrats de
vente d'électricité avant de passer à cette phase. Nous
aussi. C'est la logique. Il y a encore incohérence dans ce domaine. (17
heures)
Le député de Laporte, votre collègue, veut
créer 500 000 jobs, mais dans 20 ans. Cela fait 25 000 par année.
Voyons donc! Ce n'est pas assez. En 1983, au Parti québécois,
nous en avons créé 57 000; en 1984, nous en avons
créé 80 000. Justement, aujourd'hui, nous avons annoncé
des crédits de 180 000 000 $ sur l'exercice financier de 1985-1986
précisément pour créer des jobs pour les jeunes
Québécois et Québécoises. Vous voyez cela, M. le
Président. Le Parti libéral de ce côté-ci de la
Chambre avec un arbitrage perpétuel de la part du chef du parti qui a
même de la misère à s'arbitrer lui-même ces
temps-ci.
Cette motion de l'Opposition entre autres nous dit: Refus
d'alléger le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises. La
synthèse des opérations financières du deuxième
trimestre en date du 30 septembre 1984 indique que l'impôt des
particuliers a été réduit de 266 000 000 $ parce que les
contribuables ont eu davantage recours aux déductions et aux exemptions
prévues à la loi.
Il y a 3 800 000 contribuables au Québec qui on produit un
rapport d'impôt en 1984. Sur cela 2 800 000 contribuables ont reçu
un chèque équivalent à 1 100 000 000 $. Les revenus totaux
déclarés par les Québécois sont de 60 000 000 000 $
pour 1984. Ceux qui ont présenté des déductions telles
l'assurance-chômage, la Régie des rentes du Québec, ont
obtenu 6 000 000 000 $ de déductions. Ceux qui ont
présenté des exemptions, par exemple, comme personnes à
charge, personnes invalides, transfert entre conjoints, cela représente
une déduction de 23 000 000 000 $. Donc, sur 60 000 000 000 $ de
revenus, 31 000 000 000 $ sont imposables en 1984, ce qui fait une
entrée de 6 000 000 000 $ dans les coffres du Québec.
Le ministère du Revenu du Québec... Ce serait bon que le
candidat Yves Séguin qui veut abolir le ministère du Revenu sache
que Revenu Québec est différent de Revenu Ottawa car nous avons
des programmes sociaux à caractères fiscaux dans le cadre de
cette politique sociale-démocrate de notre gouvernement. Par exemple, en
1984, nous avons remboursé de l'impôt foncier à 815 000
contribuables pour un montant de 125 000 000 $. Nous avons également
remboursé à 385 000 familles pour les allocations familiales aux
enfants de moins de six ans une somme de 140 000 000 $. Le supplément de
revenu au travail a été accepté pour 28 000 personnes et
nous avons remis aux contribuables 25 000 000 $. Le
programme de Logirente des allocations de logement pour les personnes de
65 ans et plus, ces 19 000 personnes ont reçu un montant de 8 500 000
$.
De plus, M. le Président, il serait peut-être bon de
rappeler que 32 000 contribuables du Québec ont eu droit à des
déductions d'impôt de 308 000 000 $ à la suite des
cotisations qu'ils ont versées aux différents partis politiques.
Nous avons non seulement assaini ces caisses électorales occultes que
nos amis d'en face connaissent bien mais nous permettons par cette mesure
précisément de faire économiser 308 000 000 $ aux
contribuables.
M. le Président, vous êtes au courant également que
nous avons retourné 308 000 000 $ à 1 300 000 personnes qui ont
payé soit des cotisations syndicales ou professionnelles et tout cela
bien que le Québec ait été particulièrement atteint
par cette crise économique de 1982 à la suite des politiques
budgétaires des libéraux fédéraux. Le gouvernement
du Québec a réussi à diminuer l'écart existant
entre la fiscalité du Québec et la fiscalité ontarienne
tant au niveau des particuliers que des entreprises. Sous les libéraux
de Robert Bourassa de 1970 à 1976 l'écart était de 20,1%
alors qu'aujourd'hui, sous un gouvernement péquiste, l'écart est
maintenant de 9% entre les contribuables des deux provinces. Pour les
entreprises la différence est passée de 4,8% en 1984 à 3%
en 1985. Si on prend la moyenne des particuliers et des entreprises cet
écart en 1977 qui était de 14,1% est maintenant rendu en 1984
à 7,8%. Cela veut dire, au point de vue pratique qu'une entreprise qui
fait des profits de 200 000 $ au Québec est taxée à 5% et
si cette même entreprise est en Ontario elle sera taxée à
10%.
De plus, M. le Président, je pense que lorsqu'on parle de
fiscalité il faut tenir compte du coût de la vie. Le coût de
la vie au Québec est inférieur à celui de l'Ontario. Tout
le monde le sait. Les frais de scolarité au niveau universitaire sont
supérieurs en Ontario à ce qu'ils sont au Québec. Le
Québec consacre 600 $ par individu pour les services de santé et
les services en éducation, ce qui permet d'avoir aux
Québécois et aux Québécoises une quantité et
une qualité de services supérieures à ce qui peut se
donner en Ontario.
L'Opposition nous reproche, dans cette motion, l'absence de mesures
fiscales incitatives. M. le Président, nous sommes la seule province au
Canada à avoir un Régime d'épargne-actions, ce qui
s'appelle un REA, où près de 109 000 contribuables ont obtenu, en
1984, près de 500 000 000 $ de déductions sur leur rapport
d'impôt. C'est la seule province au Canada. C'est tellement vrai que M.
Wilson, porte-parole du gouvernement en matière de fiscalité
à
Ottawa, songe à établir ce programme au niveau du
Canada.
De plus, comme mesure incitative, nous avons vu, en 1984, grâce au
programme Corvée-habitation, près de 42 000 mises en chantier au
Québec. Nous avons innové dans ces mesures incitatives, et nous
sommes la seule province au Canada à avoir obtenu un tel succès
par ces mesures.
La motion libérale dit encore qu'on défavorise
l'établissement d'un climat propice à l'investissement et
à l'emploi. Voyons ce qui se passe. Pourtant, c'est bien sous le
gouvernement du Parti Québécois que les investissements
privés et publics ont augmenté de 10% pour passer à 15 000
000 000 $ contre une hausse de seulement 1% dans l'ensemble du Canada, en
1984.
Prenons le secteur manufacturier. C'est au Québec que les
investissements ont connu la plus forte progression dans l'ensemble du Canada.
Nous avons obtenu 22,9% d'augmentation au Québec; 9,9% au Canada et 5,5%
dans l'ensemble du Canada, en 1984.
Le ministère du Commerce extérieur n'a pas
été créé par les libéraux, parce qu'il a
été créé en 1982, alors que nous étions de
ce côté-ci. Cela a procuré des sommes importantes qui ont
été exportées en dehors du Québec, parce qu'il y a
eu une augmentation, en 1984, de 16% de nos exportations vers les autres
provinces du Canada, mais surtout vers les États-Unis. À ce
moment-là, il y a eu près de 17 000 000 000 $ qui ont servi
à l'exportation. Ce sont vraiment les marchés de l'avenir qui
vont permettre de créer des jobs. Encore là, îe
Québec est présent dans ces domaines.
De plus, M. le Président, 2 600 000 0000 $ ont été
investis au Québec dans la relance de la forêt et des pâtes
et papiers. Cela a permis à des industries comme il y en a une chez moi
à Beloeil où il y avait une cinquantaine de travailleurs, au mois
de juin, de passer à 600. Il y a 600 travailleurs dans cette industrie
de Beloeil actuellement.
Prenons le secteur de l'énergie. Les programmes tarifaires
d'Hydro-Québec ont permis l'implantation de Reynolds, à
Baie-Comeau, de l'Alcan, à Laterrière, de Pechiney, à
Bécancour. Ils ont permis également des investissements dans mon
comté, pour l'année 1985-1986, de 250 000 000 $, par exemple, 150
000 000 à Fer et Titane pour agrandir l'entreprise, ce qui crée,
dans l'immédiat, 1500 jobs pour l'agrandissement de cette usine Fer et
Titane, qui va consolider ses 800 jobs à cette fonderie de Sorel et ce
qui va permettre également la création de 200 nouveaux emplois.
Ces programmes ont permis à 200 entreprises du Québec de faire
des investissements de 1 200 000 000 $.
Qu'est-ce que l'on voit dans le programme libéral en
matière de fiscalité? De l'incohérence complète. On
parle de toutes sortes de coupures: la non indexation, 250 000 000 $;
régler les problèmes d'urgence, 250 000 000 $; 200 000 000 $,
pour la parité chez les jeunes, alors que le problème n'est pas
là. Le problème, c'est de retourner les jeunes sur le
marché du travail par des programmes précis comme ceux que nous
avons, par exemple, le stage en milieu de travail, la poursuite des
études, des travaux communautaires, le bon d'emploi pour les jeunes. Ce
sont des mesures concrètes, en plus de ces 180 000 000 $ qui seront
consacrés sur l'exercice financier 1985-1986, afin justement de
permettre à ces jeunes de retourner sur le marché du travail. (17
h 10)
M. le Président, en dix mois, au-delà de 32 000 jeunes de
18 à 30 ans se sont prévalus de cette nouvelle innovation dans
ces programmes de retour au travail de ces jeunes.
M. le Président, de quelle façon les libéraux
vont-ils appliquer ces coupures, ce manque d'argent dans les coffres du
Québec de 1 000 342 000 $? Vont-ils augmenter le déficit à
4 500 000 000 $? Parce qu'ils veulent, ces libéraux, maintenir les
mêmes services à la population, vont-ils faire cela ou s'ils vont
taxer les petits en éliminant, par exemple, les droits de succession qui
vont favoriser les riches? C'est le genre de mesure qu'ils semblent vouloir
préconiser.
M. le Président, tout à l'heure, le député
de Hull nous montrait le programme du Parti libéral. Pour ceux qui n'ont
pas vu ce programme, c'est un véritable jeu de cartes qu'on y trouve. Il
y a, par exemple, une carte des entreprises, une carte du Canada, de la
francophonie, une carte du nouveau style de gouvernement. Cependant, ce sont
des cartes de jokers. Nous avons la carte maîtresse, celle qui permettra
véritablement de créer des jobs chez les jeunes en stimulant
justement la venue d'investissements chez nous, comme nous l'avons fait, et
aussi en aidant les exportations et en améliorant notre
productivité. Ce sont des mesures réalistes des politiques
cohérentes qui vont permettre de répondre à ce besoin chez
les jeunes en leur créant des milliers de jobs. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député d'Huntingdon.
M. Claude Dubois
M. Dubois: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de
prendre la parole aujourd'hui sur la motion présentée par mon
collègue, le député de Vaudreuil-Soulanges, motion
d'intérêt fiscal et économique. Pour ma part, je vais
intervenir dans un domaine très particulier et je vais discuter de
compagnies en agriculture, de commerces qui touchent l'agriculture et tout ce
qui entoure la production agricole au Québec. Je vais faire ressortir
certains points qui touchent la fiscalité de ces gens-là qui sont
impliqués en agriculture.
M. le Président, il y a des aberrations sur le plan
économique, tel que les péquistes nous le présentent. On
dit qu'on veut développer l'agriculture du Québec, qu'on veut
favoriser la relève agricole, mais on n'apporte pas les mesures
fiscales, nécessaires, pour que cela se produise. Je vais
dénoncer certaines prises de position du ministre des Finances aussi
bien que du ministre du Revenu qui aurait pu nous parler certainement de sujets
très importants qui affectent la plupart des Québécois,
mais il a voulu parler du programme du Parti libéral. C'est tout ce
qu'avait à nous offrir tout à l'heure le ministre du Revenu du
Québec.
Une voix: Ils n'ont pas de programme, eux autres!
M. Dubois: M. le Président, la fiscalité en
agriculture, c'est primordial et c'est important. Je vais vous indiquer tout de
suite comment un agriculteur québécois est traité
comparativement à un agriculteur ontarien. Je vais vous indiquer aussi
qu'on est loin en arrière, ici au Québec, sur le plan fiscal si
on veut une fois pour toutes favoriser un peu la production agricole.
D'une main, le ministère du Revenu enlève les aides
financières que pourrait accorder le ministère de l'Agriculture.
Je vais vous le prouver, M. le Président. Quand le ministre de
l'Agriculture parle de programmes généreux, il ne parle jamais,
par exemple, de la fiscalité qui s'applique à l'agriculteur non
incorporé comme à l'agriculteur incorporé. L'aspect fiscal
actuellement, tel qu'il se présente au Québec, est totalement
contre-productif. Il est impossible actuellement, M. le Président, de
développer des unités très rentables au Québec si
on continue avec le genre de fiscalité qui s'applique pour nos
agriculteurs. La fiscalité a apporté un endettement massif chez
les producteurs agricoles. Actuellement, le ministre de l'Agriculture se
pète les bretelles d'avoir augmenter l'auto-approvisionnement au
Québec d'un certain pourcentage qui, selon lui, varierait d'environ 15%.
Je dois vous dire, M. le Président, que ce pourcentage d'augmentation
d'auto-approvisionnement correspond exactement à l'augmentation de
l'endettement des fermes québécoises. M. le Président, si
on met 1 000 000 000 $ de surplus en endettement sur les fermes, c'est bien
sûr qu'on va produire plus. Les fermiers sont pris jusqu'au cou. Ils
doivent produire de force puisqu'ils
ont des dettes à payer. C'est la façon dont le ministre
s'est servi pour augmenter la production agricole au Québec, mais cela
laisse les agriculteurs dans une situation désastreuse au plan
économique et au plan fiscal.
M. le Président, il y a d'autres mesures improductives, telles
que la taxe ascenseur sur l'essence, sur les pétroles. En effet, il y a
une politique qui existe pour les fermiers à savoir qu'on leur retourne
les taxes appliquées sur l'essence dont on se sert pour les tracteurs de
ferme. Par contre, quand il s'agit de transfert de biens agricoles par camion
sur les routes, il n'y a pas de ristourne de taxe. La taxe ascenseur qui a
été appliquée par M. Parizeau, il y a quelques
années, a des effets néfastes dans le monde agricole et
para-agricole parce que tous les biens agricoles qu'on transporte sont sujets
à cette taxe ascenseur.
Un autre élément. Les droits de succession devraient
disparaître parce que c'est un des éléments - ce n'est pas
le seul - négatifs et contre-productifs au Québec. Nous l'avons
dit à plusieurs reprises et mes collègues l'ont indiqué,
les droits de succession, cela doit tomber. Cela doit disparaître.
À la suite du degré d'endettement inquiétant des
agriculteurs du Québec dont le capital est majoritairement
composé de dettes - c'est là qu'est le problème et mon
collègue de Vaudreuil-Soulanges l'a indiqué dernièrement -
la taxe sur le capital qu'on applique sur les fermes aussi bien que sur toute
autre forme de compagnie est contre-productive. Cette taxe a des effets
néfastes et je vais vous donner tout à l'heure des chiffres
comparatifs entre le Québec et l'Ontario pour une ferme
incorporée, une compagnie agricole, comme on dit. En Ontario, sur une
base de 20 ans, on paierait actuellement 1000 $ de taxes sur le capital,
c'est-à-dire 50 $ par année pendant 20 ans. La taxe sur le
capital en Ontario pour les fermes est strictement symbolique puisqu'elle ne
dépasse jamais 50 $. Donc, pour une ferme dont le coût de fonds de
terre serait, par exemple, de 400 000 $, l'agriculteur québécois
incorporé paierait, sur 20 ans, 36 000 $ de taxes sur le capital,
comparativement à 1000 $ en Ontario, ce qui fait 35 000 $ de
différence sur 36 000 $. C'est dire qu'on paie 36 fois plus qu'en
Ontario de la taxe sur le capital. C'est un élément
contre-productif pour les agriculteurs du Québec.
En plus, un agriculteur au Québec qui achèterait un fonds
de terre de 400 000 $ avec une dette assumée à l'achat de 200 000
$, par exemple, devrait débourser -un agriculteur du Québec,
incorporé toujours - 279 900 $ pour acquitter sa dette de 200 000 $,
comparativement à 236 300 $ pour le producteur ontarien, pour acquitter
la même dette de 200 000 $, ce qui veut dire qu'un agriculteur du
Québec qui achète une ferme de 400 000 $ avec une dette de 200
000 $, cela lui prend environ 44 000 $ de plus pour acquitter la même
dette de 200 000 $. Quand on parle d'équilibre fiscal avec nos
concurrents, il serait temps que le ministre de l'Agriculture se
réveille, parle à son ministre des Finances et à son
ministre du Revenu et essaie au moins d'obtenir un taux comparatif pour les
agriculteurs du Québec. Il est bien évident que le ministre de
l'Agriculture ne protège absolument pas les agriculteurs du
Québec actuellement. C'est sûr que le ministre se pète les
bretelles en disant: J'ai monté l'auto-approvisionnement. Mais: J'ai
endetté massivement, par exemple, les Québécois du
même pourcentage, il ne le dit pas. Il ne dit pas que les
modalités fiscales au Québec ne se comparent pas à celles
de l'Ontario, qu'elles sont beaucoup plus désavantageuses. Il ne dit
jamais cela. Le ministre de l'Agriculture se contente de se peter les bretelles
avec ses petits programmes qui font presque des agriculteurs des
assistés sociaux sur la ferme actuellement.
J'ai donné la comparaison Québec-Ontario sur deux points
particuliers et, M. le Président, nous parlons souvent de relève
agricole. C'est un sujet dont on a discuté tout dernièrement, il
y a quatre ou cinq jours, en commission parlementaire. La relève
agricole au Québec, c'est très important. D'ailleurs, si nous
voulons avoir des agriculteurs demain, il faut la favoriser. Il faut avoir des
éléments pour la favoriser. (17 h 20)
Dans ce sens, la taxe sur le capital devient un des
éléments majeurs qui empêchent le transfert des fermes
parce qu'une compagnie incorporée peut mieux transférer une ferme
qu'une compagnie non incorporée. Étant donné que
très peu de fermes au Canada, seulement 4% des fermes canadiennes sont
incorporées, cela veut dire que la moyenne ne doit pas être
tellement différente au Québec mais je n'ai pas de données
précises sur le Québec.
Ce qui arrive, c'est que les agriculteurs québécois aussi
bien que canadiens ont actuellement une certaine réticence à
transférer leur ferme étant donné que la ferme n'est pas
incorporée. Ils ont des difficultés dans leur transfert, s'ils
vendent tout d'un bloc ou s'ils ne vendent rien. Une fois incorporée, il
serait plus facile de vendre progressivement des actions à son fils ou
à ses fils pour les intégrer dans le commerce de la ferme, mais
la taxe sur le capital est un des éléments qui empêchent
les agriculteurs d'aller vers la formation d'une compagnie incorporée,
parce que les neuf vingtièmes pour cent qu'on applique sur le capital
représentent, dans certains cas pour les grosses fermes, 4000 $ à
5000 $
par année. C'est un élément important et il faut
que le ministre des Finances pense à l'effet que cela cause au transfert
des biens agricoles et à la relève agricole.
Il y a aussi une nécessité qu'il faut aborder
immédiatement au Québec. Il s'agirait d'abolir l'impôt sur
les dons pour les transferts de biens agricoles. Aussi longtemps que cela ne
sera pas fait, cela cause des problèmes majeurs et seulement
l'évaluation des biens à transférer est déjà
un élément trop dispendieux. Cela ralentit le transfert des biens
agricoles de père à fils. C'est un élément qui
devrait disparaître. C'est une politique qui devrait être mise de
l'avant. Cela fera bientôt neuf ans que ces gens sont en face et ils
n'ont pas pensé à grand-chose depuis neuf ans, c'est
évident.
Je pense qu'on peut suggérer d'abolir l'impôt sur les dons
pour les transferts des biens agricoles. C'est une suggestion que je fais
à titre personnel mais il me paraît important que nous nous
penchions sur cette question primordiale.
Si on parlait maintenant du niveau des impôts payés par une
entreprise agricole québécoise par rapport à une
entreprise agricole ontarienne. Un agriculteur qui a réussi à
faire un profit de 25 000 $ et qu'il veut le réinvestir dans sa ferme,
un particulier non incorporé au Québec paierait 37%
d'impôt. La compagnie agricole incorporée au Québec
paierait 32% d'impôt, en comparaison avec la compagnie agricole de
l'Ontario qui ne paierait que 15%. Vous voyez tout de suite la
différence entre la situation d'un agriculteur québécois
et d'un agriculteur ontarien sur le plan fiscal. Si on s'en tient strictement
aux compagnies agricoles, la compagnie québécoise paie plus que
le double en pourcentage d'impôt que la compagnie ontarienne agricole.
C'est un autre élément qu'il faudrait songer à analyser
à fond et à réduire, si on veut effectivement se comparer
avec l'Ontario.
Quand je disais au début que l'on donne d'une main et qu'on
retire de l'autre, c'est exactement ce qu'on fait. On donne des subventions
d'une main, des aides sur les intérêts mais on les retire d'une
autre main par le bras du fisc. C'est exactement ce qui arrive chez les
agriculteurs.
Je vais terminer sur cette note. Je laisse quand même aux gens,
qui sont près des agriculteurs, qui sont désireux de voir le
progrès dans l'agriculture et qui sont désireux de voir le
transfert des biens agricoles se faire d'une façon plus logique, le soin
de penser à des formules nouvelles. J'indique au gouvernement qu'il n'a
pas fait ses devoirs depuis huit ans. Il n'a pas pensé à la
relève agricole au plan fiscal, au monde agricole et au
développement de l'agriculture au Québec. Merci.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du
Commerce extérieur et des Relations internationales.
M. Bernard Landry
M. Landry: M. le Président, la motion de l'Opposition, qui
est radicalement fausse et va totalement à l'encontre de la
réalité québécoise d'aujourd'hui, pourrait
être vraie à une condition: c'est qu'elle ait été
datée de l'époque où les libéraux gouvernaient le
Québec.
Une voix: C'est cela. Voilà.
M. Landry: Cela décrirait parfaitement la période
de Robert Bourassa, de 1970 à 1976: Que l'Assemblée nationale du
temps déplore vivement que le gouvernement de Robert Bourassa, par son
refus d'alléger le fardeau fiscal des particuliers et celui des
entreprises et d'implanter des mesures fiscales plus incitatrices,
défavorise l'investissement. Le député qui a
proposé cette motion s'est fait historien sans le savoir. Je lui fais
mes compliments au nom du gouvernement. Il vient de nous donner une excellente
description pour la prochaine campagne électorale de ce que les
Québécois doivent faire pour que nous ne revenions pas à
une période si bien décrite par le député de
Vaudreuil-Soulanges. Surtout parce que la motion est orientée autour de
la fiscalité. Or, tous les indices, toutes les analyses, et non pas
celles du gouvernement du Québec mais celles, en général,
de Statistique Canada, celles, en général, du Conference Board of
Canada, démontrent jusqu'à plus soif que ceux qui ont agrandi
l'écart fiscal entre l'Ontario et le Québec
particulièrement - qui est réel, cet écart - c'est
précisément ceux qui aujourd'hui nous reprochent de ne pas
l'avoir réduit.
Est-ce vrai qu'on l'a réduit ou si on ne l'a pas réduit?
Regardons cela objectivement parce que la question se pose. Il était de
20%, le jour où on est arrivé au pouvoir, avec l'Ontario et,
aujourd'hui, il est de 9%; réduction de 11%. Cependant, la motion du
député pourrait être vraie aussi aujourd'hui pour une
partie, à condition que l'on attribue le fait d'avoir créé
un climat défavorable à l'"entrepreneurship" et à
l'économie du Québec aux critiques stériles d'une
opposition qui a pour rôle de critiquer le gouvernement, oui, c'est l'un
des bienfaits de notre système, mais qui au cours des années
s'est évertuée, par des déclarations intempestives et
incompétentes, non pas à nuire au gouvernement, mais à
nuire à l'économie du Québec.
Qu'ont fait les porte-parole de l'Opposition officielle, sinon d'aller
colporter des faussetés dans tous les milieux et parfois à
l'extérieur des frontières, aidés en cela par
ceux qui étaient à la maison mère, à Ottawa,
le Parti libéral fort heureusement défait? Le climat des
investissements, d'ailleurs, s'est amélioré automatiquement
dès que des gens comme Serge Joyal n'ont pu, avec l'argent des
contribuables, prendre les avions du gouvernement du Canada pour aller
déblatérer sur l'économie du Québec, à New
York en particulier.
Les efforts des libéraux d'ici et ceux d'Ottawa réunis,
effectivement, ont peut-être eu un effet néfaste sur
l'investissement au Québec mais, malgré leurs efforts et leurs
erreurs, l'économie québécoise a fait preuve d'un tel
dynamisme que toutes les années où le présent gouvernement
a été au pouvoir, sauf deux - et on reparlera de ces
deux-là -le taux de croissance de notre économie a
été supérieur à celui de la moyenne nationale et de
l'Ontario. Depuis 1976, le Québec, qui était à la
traîne sur le plan économique, il n'y a pas à le cacher -
toutes les analyses le démontraient et le démontrent dans une
perspective historique -a commencé un vigoureux rattrapage. Pour les
investissements en particulier, c'en est surprenant; les chiffres sont à
peine croyables. Certaines années, dans l'investissement industriel,
alors que le Québec fait 30, le Canada fait à peine 1, parfois 0
et parfois régresse.
S'il y a un signe de confiance des investisseurs dans l'économie,
s'il y a un signe qui démontre que nos entreprises privées sont
bien appuyées par le présent gouvernement, c'est bien leur
décision d'investir, d'acheter de la machinerie, d'acheter des terrains,
construire. Jamais, sous un gouvernement libéral, des chiffres de
croissance des investissements aussi spectaculaires ne sont apparus à
aucune des périodes; même pas sous M. Lesage qui, pourtant, avait
autrement d'envergure que les libéraux d'aujourd'hui et ceux de Robert
Bourassa, on n'avait jamais réussi à atteindre des chiffres
d'investissement aussi élevés. Cela a eu aussi un effet sur un
aspect bien plus dramatique de la situation économique qui est le
chômage. Les investissements, ce sont des décisions d'entreprise
et cela a un impact sur l'emploi à terme alors que l'indice du
chômage, lui, frappe directement des hommes et des femmes dans leur vie
de tous les jours.
Or, il est bien connu que, de tout temps, l'écart du
chômage entre le Québec et le reste du Canada a toujours
été positivement élevé au détriment du
Québec. Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, en particulier,
en novembre 1976, nous avions un écart de 32%. Il y avait 32% de plus de
chômeurs et de chômeuses au Québec que dans le reste du
Canada. Aujourd'hui, cet écart est rendu autour de 28%. C'est le plus
bas niveau de l'histoire statistique du Québec.
(17 h 30)
Le député de Vaudreuil-Soulanges qui aura un droit de
réplique pour parler de sa motion pourra nous expliquer comment il se
fait, alors qu'il prétend qu'on a un climat défavorable à
l'investissement, que nos taux de croissance et d'investissement font des
records et font honte à l'ensemble du Canada, de Halifax à
Vancouver, et qu'en même temps, la différence du taux de
chômage entre le Québec et le reste du Canada est à son
plus bas de l'histoire? Là-dessus, j'espère que la population du
Québec, non seulement les économistes, mais tout le monde va
demander des explications et que le député de Vaudreuil-Soulanges
va essayer de nous en donner. C'est beau d'essayer d'ameuter les populations.
Le Parti libéral l'a fait et c'est en cela que, peut-être, il a
empêché des investissements au Québec.
Ameuter les populations en parlant de la différence
d'impôts, en particulier. L'impôt est une chose, mais ceux qui sont
les amis et à peu près les seuls amis du Parti libéral,
c'est-à-dire ceux qui ont des revenus supérieurs dans la
société, ont peut-être, pour certains d'entre eux, des
raisons de se plaindre - bien qu'il y en ait plusieurs qui ne se plaignent pas
et qui disent: Je fais de l'argent, je paie des impôts et je suis heureux
d'habiter au Québec à cause de son système de santé
exceptionnel qui est gratuit et où il n'y a pas d"'overbilling", comme
en Ontario. Je paie des impôts et je suis heureux que le Québec
ait un système de sécurité pour les plus démunis
plus développé que dans n'importe quelle province du Canada. Je
paie des impôts, mais quand j'envoie mes enfants à
l'université, c'est au Québec que les frais de scolarité
sont les plus bas et ils sont plafonnés depuis qu'on est là. Cela
peut être une réaction de personne riche qui a réussi et
qui dit: Oui, je paie plus d'impôts au Québec que si
j'étais en Ontario, mais cela me fait plaisir de le faire parce que le
Québec est une société plus humaine, plus sociale, moins
dure, plus égalitaire. En mentionnant cela, le Parti libéral ne
fera pas honte au gouvernement mais à lui-même. C'est pourquoi
toutes les populations occidentales ont compris que des partis libéraux
ne devaient plus gouverner des sociétés modernes.
Des voix: Ha! Ha! Ha! Une voix: Bravo!
M. Landry: C'est une idéologie tellement
dépassée qu'il n'y a plus un seul pays au monde qui se laisse
gouverner par une idéologie aussi rétrograde, aussi paresseuse et
aussi foncièrement antisociale et contradictoire.
Une voix: Vrai, vrai. Il n'en a plus
nulle part au Canada, en tout cas.
M. Landry: II n'y en a plus au Canada, mais il n'y en a plus en
Angleterre non plus; il n'y en a plus en Australie; il n'y en a plus nulle
part.
Une voix: C'est vrai, c'est fini. Bonjour!
Une voix: Et il n'y en aura plus d'autres.
M. Landry: Leur idéologie, au fond, ressemble un peu aux
idéologies passéistes d'extrême-gauche. Être à
l'extrême-gauche ou è l'extrême-droite, c'est néfaste
pour les sociétés. C'est pour cela que, dans les systèmes
démocratiques, quand les gens ont vraiment le choix, ils récusent
les extrêmes.
Je reviens donc à ces écarts dont il fut question. J'ai
parlé des riches. Maintenant, je vais parler non des pauvres mais des
classes moyennes, c'est-à-dire l'essentiel en nombre des gens qui paient
des taxes. Qui paie des taxes? Ce sont les gens des classes moyennes. Ceux qui
n'ont pas d'argent n'en paient pas. Au Québec, ceux qui ont beaucoup
d'argent paient beaucoup de taxes. Ceux des classes moyennes,
c'est-à-dire-Oui, c'est vrai, je vous l'ai dit. Et il y a deux
réactionnaires de droite au fond de la salle en face qui prouvent toute
ma démonstration: ils rigolent pendant que je dis cela. Ce n'est pas
drôle.
Une voix: C'est vrai. Ce sont des réactionnaires.
M. Landry: Parlons maintenant, encore une fois, des classes
moyennes. Allons jusqu'à 30 000 $. L'essentiel des hommes et des femmes
qui nous écoutent et qui sont des actifs font partie de cette
catégorie de revenus: entre 18 000 $, 19 000 $ et 30 000 $.
Ceux-là qui sont les plus nombreux et qui font marcher
véritablement une économie ont été traités
par le présent gouvernement d'une façon juste et loyale sur le
plan fiscal et leur sort est meilleur que celui des contribuables ontariens de
même niveau. Je suis fier d'appartenir à un gouvernement qui n'a
pas travaillé pour une infime minorité de la
société mais qui a travaillé pour le plus grand
nombre.
Une voix: Bravo!
M. Landry: Permettez-moi de revenir aux riches, parce que... Que
personne dans mes propos ne voit un désintéressement du sort - le
mot n'est peut-être pas très bien choisi - de ceux qui gagnent 100
000 $, 150 000 $, 250 000 $. Il y en a. À quoi ressemble leur sort si on
le compare à celui des gens qui vivent dans d'autres villes canadiennes?
Les libéraux se sont illustrés en parlant de fuite des cadres, de
fuite des capitaux. Cela a été leur refrain pendant des
années et des années. Le Conference Board du Canada nous donne
des chiffres extrêmement intéressants. Quand on compare cinq
villes du Canada pour l'impôt des particuliers, ce dont j'ai parlé
auparavant, les autres impôts et dépenses - parce qu'il y a
d'autres impôts et d'autres dépenses pour lesquels le
Québec a une situation beaucoup plus favorable - quand cela coûte
pour vivre à Ottawa 117 $, cela en coûte 100 $ à
Montréal, tout pris en compte.
Alors un bon homme d'affaires, même s'il gagne 50 000 $ et plus
parce que pour les 50 000 $ et plus, d'après le Conference Board, c'est
105 $ à Ottawa et 100 $ à Montréal pour chaque 100 $
dépensés... Cela a été tellement bien compris - je
regrette que le député de Hull ait quitté cette Chambre -
qu'au cours des dernières années un très grand nombre de
citoyens de l'Ontario ont décidé de traverser la rivière
d'ouest en est pour venir profiter de tout ce que j'ai dit il y a un instant,
c'est-à-dire notre système de santé exceptionnel, notre
système d'éducation qui coûte le moins cher du monde et le
programme Corvée-habitation, de telle sorte que des Ontariens, la
plupart francophones je dois dire mais plusieurs anglophones aussi, ont choisi
cette bonne ville québécoise d'Aylmer et ont abandonné
l'Ontario pour venir profiter de la social-démocratie qui règne
au Québec parce que ce sont des gens qui savent compter.
À Toronto l'écart est plus grand. Je ne veux pas dire
qu'il y a des gens qui ont déménagé de Toronto à
Aylmer, mais cela aurait peut-être été une bonne
idée aussi. Pendant que cela coûte 100 $, toutes dépenses
comprises, à Montréal, c'est 121 $ à Toronto, 107 $
à Edmonton et 125 $ à Vancouver. C'est cela qui s'est
passé dans l'économie québécoise au cours des
dernières années. Une bonne croissance économique, un
traitement juste et équitable des contribuables, surtout les plus
nombreux de la société et ceux qui font véritablement
fonctionner l'économie, mais tout cela est doublé d'un
phénomène extrêmement intéressant dont l'Opposition
ne parle jamais, parce que je suis sûr que cette chose ne la
préoccupe pas mais nous, cela nous préoccupe, ici, de ce
côté.
Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en 1976, la revendication
des nationalistes québécois, dont nous sommes, était
depuis 75 ans que notre économie était dominée, dans
l'exploitation en particulier des richesses naturelles, la forêt et les
mines, bref une situation de pays du tiers monde. Des étrangers venaient
et avec leur argent exploitaient nos richesses naturelles, prenaient des
dividendes et des sommes énormes sortaient du Québec,
étaient payées
à des actionnaires qu'on n'avait jamais ni vus ni connus, qui ne
savaient pas où était Roberval, qui ne savaient pas où
était Chicoutimi et qui empochaient le fric.
Mais cela a radicalement changé. Je dois dire aujourd'hui
à cette Chambre -l'Opposition n'en parle jamais parce que ce n'est pas
pour elle une préoccupation que le Québec soit dominé
économiquement ou ne le soit pas - qu'autant dans les mines que dans la
forêt ceux qui sont les principaux actionnaires et majoritairement les
décideurs ce sont les Québécois et les
Québécoises. En huit ans on a réussi à
régler un problème lancinant qui obsédait le Québec
depuis au moins 75 ans.
J'aimerais entendre le député de Vaudreuil-Soulanges nous
parler du fait qu'en moins de huit ans les Québécois et les
Québécoises, suivant des méthodes tout à fait
acceptées et conventionnelles, ont réussi à prendre le
contrôle de cette immense richesse qu'est la forêt
québécoise et que la Caisse de dépôt et placement,
avec nos fonds de retraite, a pu acquérir, en particulier avec la SGF,
Domtar. C'est là une différence dans notre approche.
Nous allons entendre tout à l'heure des propos
égoïstes, des propos pour les grands, des propos qui plaignent ceux
qui sont déjà les plus favorisés dans notre
société. Le gouvernement n'a pas que tenu des propos, il a
travaillé pour les classes moyennes, il a travaillé pour
l'économie du Québec, il a réduit l'écart du taux
de chômage, et c'est ce qui fait qu'on peut parler d'une économie
dynamique.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le
député de Vaudreuil-Soulanges, votre droit de réplique.
(17 h 40)
M. Daniel Johnson (réplique)
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, je ne
cesse jamais de m'étonner du genre de propos...
Une voix: ...démagogiques.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... du ministre du Commerce
extérieur. D'aucuns, les qualifieraient de démagogiques. Je les
qualifie, quant à moi, de fantaisistes, dans la mesure où le
ministre a voulu nous décrire la relance extraordinaire que
connaît le Québec sous la gouverne du PQ, relance...
Des voix: Bravo!
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...qui, sous des
applaudissements nourris...
Une voix: Moqueurs.
Une voix: Ils ne comprennent rien.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...d'une part, sous des
applaudissements moqueurs des péquistes eux-mêmes, cette relance
qui aurait eu lieu sous les applaudissements nourris de dizaine de milliers de
Québécois en chômage et bénéficiaires de
l'aide sociale de plus que ce qu'il y avait il y a quelques années... La
galerie ne rit pas, parce que la galerie, au Québec, assiste à
une relance qu'on nous décrit de façon fort fantaisiste. Cette
galerie est constituée d'un nombre croissant de jeunes
Québécois qui veulent de l'emploi. C'est la réalité
des choses et nous la décrivons. Nous sommes, comme tous les
élus, extrêmement sensibles au problème no 1,
l'économie du Québec, le développement économique,
la croissance économique, des perspectives remplies d'espoir pour les
jeunes. Notre discours n'en est pas un de destruction de l'économie du
Québec, de vouloir nuire à la création d'emplois, mais,
bien au contraire, de proposer des solutions, de suggérer des choix aux
politiques suivies par le gouvernement du Parti québécois depuis
maintenant neuf ans.
Qui va semer l'incertitude chez les investisseurs? Les libéraux?
A quel moment? Ce n'était certainement pas un premier ministre
libéral qui était devant l'Economic Club, à New York, en
1977, qui, tout bonnement comparait la situation politique du Québec
déterminée par le PQ, grâce à son accession au
pouvoir, à l'époque, à celle que les Américains -
c'est ce qu'ils ont entendu - avaient vécue 200 ans plus tôt, dans
une guerre civile. C'est ainsi que les Américains ont
interprété les propos du premier ministre, M. René
Lévesque, devant l'Economic Club.
Une voix: C'est cela.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le premier ministre a
tenté de démontrer que c'était la réalisation de la
souveraineté dont il parlait ouvertement devant des investisseurs
nord-américains équivalant à la souveraineté
qu'avaient acquise les Américains, les treize États
américains pour se libérer du joug de l'empire britannique, mais
le parallèle n'était pas celui-là. Ce que les
Américains ont nettement compris, c'est qu'un parti politique, au
Québec, désirait la séparation du Canada et non pas le
rejet d'un empire colonialiste quelconque qui n'existe plus depuis belle
lurette. Il y a longtemps que le soleil se couche sur beaucoup d'autres nations
que celle de l'empire britannique. D'aller prétendre que c'est
l'Opposition, dans son rôle de suggérer des choix et de relever
les erreurs du
gouvernement, qui sème l'incertitude, c'est, le moins qu'on
puisse dire, un peu fort.
Les inexactitudes du gouvernement sont nombreuses. Je n'en prends que
quelques exemples dans l'ordre où elles se sont
présentées. Parce qu'il s'agit de fiscalité, on a fait
état, de l'autre côté, de mesures qui, soi-disant, auraient
favorisé les Québécois depuis l'accession au pouvoir du
Parti québécois. Qu'en est-il véritablement lorsqu'on
regarde le portrait global? On nous suggère souvent un portrait global
de l'autre côté - le ministre vient de le faire -notamment sur le
coût de la vie dans les autres villes canadiennes. Regardons pour avoir
une image complète, nous dit-on, quelles sont les différences de
coûts de la vie au-delà des coûts d'impôt dans les
différentes villes canadiennes. Intégrons le coût de la vie
avec le coût de l'impôt, et voyons ce qui se passe. On nous cite
à tour de bras à chaque fois des chiffres qui, après
analyse, s'avèrent comprendre la portion de financement et de coût
d'acquisition, si on veut, de biens immobiliers. Une maison coûte plus
cher à Toronto, nous dit-on. Il est évident qu'une maison
coûte plus cher à Toronto; c'est devenu, depuis huit ou neuf ans,
un meilleur investissement que d'acheter une maison au Québec, à
cause des perspectives économiques, des politiques qui sont en place
dans ces régions. Confondre constamment dépenses et
investissements, c'est une erreur de base.
Une voix: Ils font cela dans leur budget.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si on regarde les perspectives
pendant huit ans, si on regarde ce qui s'est produit en termes de
création d'emplois, de récupération des emplois perdus
pendant la crise et qu'on voit le rythme supérieur, c'est
déplorable pour nous, Québécois! Tant mieux pour les
Ontariens! Mais si on regarde les rythmes de croissance, il est bien
évident qu'ils se traduisent à un moment donné par des
valeurs plus élevées pour des actifs comme un domicile, une
maison, une résidence, que les gens achètent. Acheter une maison,
ce n'est pas une dépense, c'est un investissement.
Deuxièmement, on nous a indiqué que, quant aux profits des
sociétés, les profits sur les revenus des corporations
étaient moins élevés au Québec. Tout le monde sait
cela! Mais ce que tout le monde sait également, lorsqu'on regarde qui va
investir et pour quelle raison, c'est que la charge qui pèse sur les
entreprises créatrices d'emplois monte d'autant plus rapidement qu'elle
crée des emplois et monte d'autant plus rapidement qu'elles font des
investissements, qu'elles soient rentables ou non rentables. C'est le propre
d'une petite entreprise qui vient d'être fondée, qui commence
à engager des gens, qui commence à construire, qui achète
de la machinerie, de ne pas être rentable les premières
années. Cela fait partie de la nature des choses que ceux d'en face ne
connaissent pas. À mesure que l'entreprise grandit, elle peut
effectivement faire éventuellement des profits. Mais pourquoi la taxer
alors qu'elle n'en fait pas, alors qu'elle est dans la phase la plus difficile,
la plus sensible, la plus délicate, la phase de la fondation, de la
croissance, de l'établissement et de l'implantation d'une nouvelle
activité dans une de nos villes, un de nos villages, une de nos
régions? Pourquoi la pénaliser par des charges fixes chaque fois
qu'elle crée un emploi de plus, chaque fois que de la machinerie est
achetée, chaque fois que des emprunts doivent être
contractés pour financer le développement et la croissance d'une
entreprise? C'est cela qu'on a dénoncé et le genre de charges
fixes qui pèsent sur les entreprises au Québec ont
été évaluées par d'autres que nous, par des gens
qui sont des conseillers auprès du bureau du premier ministre qui
indiquent, par exemple, que chaque pourcentage de taxe sur la masse salariale
supérieur à une situation de base qui serait celle d'aujourd'hui,
celle d'une autre province, peu importe, la taxe sur la masse salariale en
pourcentage comparatif représente pour chaque point 10 000 emplois
perdus, parce que l'entreprise est moins concurrentielle, parce que ses
coûts de main-d'oeuvre sont plus élevés. Je n'en veux que
comme exemple final, M. le Président, d'indiquer que lorsque des
décisions d'investir sont en phase de réflexion, que les gens,
les hommes et les femmes, les Québécois francophones,
formés dans les affaires, qui font partie de la génération
que je connais parce que j'y appartiens, qui ont contribué en
français dans le secteur privé au Québec au
développement de l'économie du Québec grâce à
leurs efforts sans jamais sentir l'appui efficace, positif, voulu du
gouvernement qui est en face de nous, pour avoir été
témoin de cela, je sais pertinemment qu'ils se posent une série
de questions, qu'il s'agisse d'approvisionnement en matières
premières... Quels sont les coûts de livraison des matières
premières lorsqu'on s'approvisionne? Les coûts sont
affectés par la surtaxe sur l'essence. Est-ce que ces coûts vous
permettent de demeurer concurrentiel? Un peu moins. C'est la réponse que
la fiscalité du Québec dicte clairement. Au point de vue du
transport, de la distribution et de la vente des produits, donc, le transport
dans l'autre sens, même genre de question quant aux coûts de
livraison, quant à la capacité de demeurer concurrentiel en vertu
de ces coûts. Malheureusement, la fiscalité
québécoise dicte une réponse qui est plutôt
négative que positive. De la même façon,
est-ce que les taux de rémunération qui doivent être
payés dans l'entreprise...
M. Blouin: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!
Question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement. (17 h
50)
M. Blouin: Le député de Vaudreuil-Soulanges sait
très bien qu'il n'a droit qu'à une réplique de dix
minutes. J'ai très bien noté le moment où il a
commencé à parler. Son droit de parole est épuisé
et en conséquence, M. le Président, je vous demande d'appliquer
l'article 97. Je vous signale que le député de
Vaudreuil-Soulanges a utilisé exactement la même technique
à l'égard du ministre qui a parlé avant lui et je vous
demande donc d'appliquer l'article 97, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlements, M. le député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Question de règlement,
M. le Président. Il est question très clairement d'un
débat de 90 minutes où les enveloppes ont été
partagées: 40 minutes à la portion ministérielle et 50
minutes - c'est bien évident - pour l'Opposition. Et nous ne sommes pas
encore rendus à la fin du débat.
M. Blouin: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Sur cette question, M. le Président - et je
vous demande d'appliquer le règlement tel qu'il doit être
appliqué - je vous signale que le député de
Vaudreuil-Soulanges a déjà, au début de ce débat la
semaine dernière, utilisé son droit de parole. Il n'a pas le
droit d'utiliser deux droits de parole dans un même débat. Tout ce
qu'il a le droit de faire, c'est d'utiliser un droit de réplique de dix
minutes. Je vous demande donc d'appliquer intégralement l'article 97, M.
le Président. Nous devons malheureusement mettre fin au débat et
je répète au député de Vaudreuil-Soulanges que je
ne fais qu'avoir un comportement identique à celui qu'il a eu à
l'égard du ministre du Commerce extérieur tout à
l'heure.
Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:
Effectivement, le droit de réplique est de dix minutes, mais je veux
dire, pour être honnête et juste envers tout le monde, que le Parti
libéral, le parti de l'Opposition, n'a pas utilisé totalement son
temps. Ce qui veut dire qu'il reste quatre minutes qui pourraient être
utilisées. S'il vous plaît! Je m'excuse. Quand j'ai reconnu le
député de Vaudreuil-Soulanges, je l'ai reconnu comme celui qui
avait le droit de réplique. Vous utilisez votre droit de
réplique. Évidemment, avec le temps qui passe, il vous en reste
moins. Mais vous avez encore quelques minutes, M. le député de
Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
En conclusion, ce dont il est question à ce moment-ci...
Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur une question de
règlement, M. le ministre du Commerce extérieur.
M. Landry: Le député m'avait coupé la parole
assez vertement tout à l'heure en invoquant strictement le
règlement. Mais je trouve que plus il parle, plus il fait la
démonstration de notre cause. Alors, nous consentons
généreusement à quatre minutes de plus.
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du
Commerce extérieur, quand je vous ai interrompu dans votre discours,
dans votre intervention, vous aviez utilisé le temps voulu. M. le
député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Merci, M. le Président.
Je remercie le leader adjoint du gouvernement de sa
générosité à mon endroit de même que le
ministre du Commerce extérieur pour sa grandeur d'âme et son
absence totale, comme d'habitude, de mesquinerie.
Ce qui est le fondement même de cette motion repose sur des
différences réelles ou perçues - c'est ce que le
gouvernement n'a jamais compris - de traitement qu'un gouvernement accorde
à l'endroit des gens qui font des investissements, qui créent des
emplois et qui décident de s'implanter à un endroit ou à
un autre, sur un territoire donné. La réalité existe entre
les régions. C'est pour cela que mon collègue de la
Côte-Nord a dénoncé la taxe sur l'essence comme
étant particulièrement nuisible dans son cas. Même si cette
taxe est la même dans tout le Québec, certaines régions
sont plus durement affectées. Il y a des choix d'implantation qui se
font par les industriels, par les créateurs d'emplois, en faveur d'une
région plutôt qu'une autre, à cause de l'existence de cette
taxe.
De la même façon à l'égard des impôts
où le ministre a voulu saluer la générosité dont il
fait lui-même preuve, prétend-il, à l'endroit des gens
à revenu moyen de
18 000 $ ou 19 000 $, nous dit-il. Il se félicite sans même
regarder que les statistiques fiscales démontrent qu'à partir de
15 000 $ pour un célibataire - c'est dans le livre blanc et je vous
souhaite de le lire -75% des contribuables font des rapports d'impôt
comme célibataires. Comme si vous l'ignoriez! Et oui, je vois que vous
l'ignoriez!
La plupart des contribuables précisément sur lesquels un
gouvernement compte pour le développement de la société
sont plus lourdement taxés à partir du moment, au Québec,
où ils ont comme niveau de salaire le salaire industriel moyen. C'est
précisément ce que le livre blanc démontre; de là
la résultante des politiques fiscales dont se vante le gouvernement. Il
faut au moins savoir de quoi on se vante. Ce dont on se vante, de ce
côté-ci, c'est d'avoir posé le même diagnostic que
tous les autres partis politiques au Québec, au Canada, dans le monde
industrialisé: la nécessité de changements profonds,
d'adaptabilité à la concurrence internationale, donc, pour un
gouvernement, de poser des gestes et de fixer des objectifs qui tiennent compte
de ces nouveaux changements, de ces nouvelles réalités.
On ne voit rien du côté gouvernemental qui laisse
même soupçonner un iota de compréhension de la façon
dont les gens vont décider d'investir ici plutôt qu'ailleurs, de
prendre de l'expansion ici plutôt qu'ailleurs, d'assurer la croissance,
la recherche, le développement ici, au Québec, plutôt
qu'ailleurs. Lorsque le gouvernement aura compris cela, il pourra voir tout de
suite qu'une des raisons fondamentales pour lesquelles cela ne fonctionne pas
aussi bien que cela pourrait fonctionner à cause de la qualité
des Québécois, sinon de leur gouvernement actuel, c'est que les
politiques fiscales, que pour des raisons idéologiques le gouvernement a
retenues, sont nuisibles à l'économie du Québec. Ce ne
sont pas les propos de l'Opposition qui sont nuisibles, c'est ce qu'il y a sur
les rapports d'impôt que le PQ envoie aux contribuables depuis maintenant
neuf ans.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Rancourt): La motion du
député de Vaudreuil-Soulanges est-elle adoptée?
Des voix: Vote!
Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Blouin: M. le Président, conformément à
l'article 216, je demande que ce vote soit reporté à demain,
à la fin de la période des affaires courantes.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, le vote est
reporté à demain. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Blouin: Sur ce, M. le Président, je propose que nous
ajournions nos travaux à demain après-midi, 14 heures.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. Nos
travaux sont ajournés à demain, 14 heures.
(Fin de la séance à 17 h 58)