L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le jeudi 30 août 1990 - Séance extraordinaire

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Onze heures huit minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes, MM. les députés.

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

M. René Serge Larouche, député indépendant

Avant de débuter nos travaux, je ferai part à l'Assemblée que j'ai reçu de M. le député d'Anjou la lettre suivante, dont je vous donne lecture. "M. le Président, j'ai l'honneur de vous informer de ma décision de siéger dorénavant comme député indépendant représentant la population du comté d'Anjou a l'Assemblée nationale du Québec. "Vous avez déjà reçu, comme tous les autres collègues de cette Assemblée, copie de ma lettre au premier ministre et chef du Parti libéral du Québec exposant les raisons principales de ma démission du groupe parlementaire ministériel. "En comptant sur votre bienveillance active habituelle pour que mes droits et privilèges de député indépendant soient respectés, je vous prie de recevoir, M. le Président, l'expression de mes sentiments les plus cordiaux." Et c'est signé: M. René Serge Larouche. Je dépose donc cette lettre.

M. le leader du gouvernement.

Entente intervenue entre les membres de l'Assemblée nationale

M. Michel Pagé

M. Pagé: M. le Président, je voudrais, avant de procéder aux affaires courantes et avec le consentement de cette Chambre, vous faire part d'une entente intervenue entre les membres de l'Assemblée nationale pour déroger à notre règlement et fixer l'ordre et la procédure des travaux dans le cadre de la séance spéciale convoquée à la demande du premier ministre.

Selon l'entente intervenue, M. le Président, les travaux se dérouleront dans l'ordre suivant pour ce jeudi, 30 août 1990. Aux affaires courantes, nous entendrons une déclaration ministérielle de M. le ministre des Finances. M. le ministre des Finances interviendra pour une période de 15 minutes. Le porte-parole de l'Opposition officielle interviendra pour une période de 20 minutes. M. le député de Jacques-Cartier, pour 5 minutes. M. le député d'Anjou, pour 5 minutes. Et la réplique du ministre des Finances sera de 10 minutes.

Je procéderai, évidemment, immédiatement après, à une motion... Je déposerai une motion sans préavis concernant l'attribution d'un mandat à la commission du budget et de l'administration avec entente comme quoi cette motion sera adoptée sans débat.

À la présentation de projets de loi, M. le ministre délégué aux Transports présentera le projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine.

Nous aborderons ensuite les dépôts de documents, de rapports de commissions, de pétitions, qui sont conformes au règlement de l'Assemblée nationale. Nous procéderons, par la suite, à la période de questions et de réponses orales des députés et des ministres. Votes reportés, avis touchant les travaux des commissions, si nécessaire, et renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Aux affaires du jour, nous aborderons l'étude en deuxième lecture du projet de loi 82 concernant la construction du tronçon de l'autoroute 30. Dans un premier temps, l'adoption du principe. Nous nous sommes entendus sur l'alternance et le cadre des interventions où notre groupe politique aura 120 minutes, l'Opposition officielle aura 120 minutes, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce aura 15 minutes, M. le député d'Anjou aura 20 minutes et le ministre délégué aux Transports procédera à sa réplique.

La commission plénière nous conviera pour deux heures d'étude et d'analyse en comité plénier. Nous procéderons ensuite à la mise aux voix en commission plénière des articles et des amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre, qui présente le projet de loi, n'aurait pas pu proposer en cours d'étude. nous procéderons ensuite au rapport verbal à vous, m. le président de l'assemblée, pour procéder ensuite à l'adoption, en troisième lecture, du projet de loi. nous nous sommes entendus que les intervenants par alternance, un représentant du gouvernement, un représentant de l'opposition officielle, m. le député de westmount pour cinq minutes et la réplique du ministre.

Il y aura alors ajournement des travaux à une séance subséquente au cours de laquelle l'Assemblée complétera l'examen des affaires spécifiques pour lesquelles elle a été convoquée en séance extraordinaire.

Il a été convenu, M. le Président, que les dispositions du règlement de l'Assemblée nationale qui concernent les mesures suivantes ne s'appliqueront pas. Les motions sans préavis, sauf celle concernant l'attribution d'un mandat à la commission du budget et de l'administration, les motions de censure, les débats d'urgence, les

débats de fin de séance, les motions de scission, les motions de report, les motions d'ajournement du débat à l'Assemblée, ainsi que les motions d'ajournement du débat et de suspension du débat en commission plénière, sauf dans tous ces cas, celles que pourraient présenter le leader du gouvernement, un leader adjoint ou un ministre.

Les motions proposant l'ajournement de l'Assemblée pour plus de 15 jours, sauf celles que pourraient présenter le leader du gouvernement, un leader adjoint ou un ministre.

M. le Président, je dépose ce document pour que ça puisse devenir un ordre de l'Assemblée.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au dépôt de ce document?

Des voix: Consentement.

Le Président: Consentement. Le document est déposé.

M. Holden: M. le Président.

Le Président: Oui, M. le député de Westmount.

M. Holden: Question de précision, M. le Président. J'ai cru comprendre que l'entente vaut uniquement pour la loi 82 et que, pour les prochaines étapes, il y aura d'autres consentements de déposés.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: L'ordre de la Chambre d'aujourd'hui se réfère à deux sujets inscrits à l'ordre du jour et, d'ailleurs, qui sont prévus dans l'avis donné par le premier ministre: l'étude du projet de loi 82 et son adoption et la déclaration ministérielle du ministre des Finances, les répliques et la motion d'envoi à la commission du budget et de l'administration. À la fin du document que je viens de déposer à l'Assemblée, j'ai dit qu'en fin de séance, aujourd'hui, nous allions ajourner nos travaux à une journée subséquente et je me propose, avec la bonne collaboration des députés indépendants, de déposer un document - je l'espère bien - analogue à celui que j'ai déposé aujourd'hui, au cours de cette prochaine séance.

Le Président: Ça va? Maintenant, est-ce qu'il y a consentement à la présentation de la motion du leader du gouvernement aux fins de fixer l'ordre et la procédure des travaux en séance extraordinaire, conformément au document déposé? Y a-t-il consentement?

M. Chevrette: Consentement.

Le Président: Consentement. Est-ce que cette motion est adoptée? Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Je constate donc que, du consentement de l'Assemblée, sur la motion du leader du gouvernement, le document déposé constitue un ordre de l'Assemblée relativement à l'ordre du jour de la séance extraordinaire pour ce jeudi 30 août 1990 et que c'est la règle de procédure qui s'appliquera malgré toute disposition du règlement inconciliable. Nous allons donc procéder à nos travaux immédiatement.

Affaires courantes, déclarations ministérielles. Je vais reconnaître M. le ministre des Finances.

Administration de la TPS et réforme des taxes à la consommation au Québec

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: M. le Président, lors du discours sur le budget prononcé en cette Assemblée le 26 avril dernier, j'avais indiqué que le gouvernement du Québec explorait, avec le gouvernement fédéral, les solutions susceptibles d'atténuer les problèmes sérieux de complexité administrative posés par la coexistence, d'une part, du régime québécois des taxes à la consommation et, d'autre part, du régime de la taxe sur les produits et services, mieux connue comme TPS, que le gouvernement fédéral entend mettre en place à compter du 1 er janvier 1991.

Le 12 juillet dernier, le ministre des Finances par intérim, le député de Vaudreuil, annonçait par voie de communiqué que des progrès importants avaient été réalisés dans les discussions avec le gouvernement fédéral, mais que des études plus approfondies s'avéraient nécessaires. Parmi ces études, nous avons voulu examiner avec soin les voies qui s'offraient au Québec ainsi que les conséquences qui en découlaient. Une de ces voies aurait pu être de ne rien faire pour ajuster notre régime des taxes à la consommation à l'introduction de la TPS, mais les dépenses et les énergies improductives que cette voie aurait entraînées pour les entreprises, à cause justement de la complexité et de la confusion qui en aurait résulté, nous l'a fait rapidement rejeter.

La possibilité d'attendre avant d'agir a aussi été examinée. Dans cette optique, certains ajustements à notre système de taxes à la consommation auraient pu être apportés pour en éliminer les irritants mineurs en regard de sa coexistence avec le régime de la TPS. Bien sûr, cela aurait pu diminuer quelques problèmes de complexité et certains coûts pour les entreprises. Tout en laissant des coûts d'ajustement importants pour les entreprises, cette approche risquait de placer le Québec dans une situation où il aurait été forcé d'agir par suite de la mise

en place éventuelle d'une harmonisation substantielle à la TPS de la part de certaines provinces. Le Québec aurait pu être désavantagé par une telle approche, car il est loin d'être évident que les systèmes de taxation et les ententes entre les autres provinces et le gouvernement fédéral auraient été bien adaptés aux institutions et au contexte québécois.

Le gouvernement du Québec a donc décidé de s'engager dans une voie qui, non seulement protégera les intérêts économiques des Québécois, mais consacrera la maîtrise du Québec sur l'orientation et la gestion des politiques fiscales sur son territoire. Cette décision nous amène à poser des gestes d'une importance capitale. Ainsi, considérant l'urgence de préciser dès maintenant aux entreprises le cadre dans lequel elles auront à appliquer, le 1er janvier 1991, les régimes fédéral et québécois des taxes à la consommation, je vous fais part aujourd'hui même des résultats de nos négociations avec le gouvernement fédéral et des modifications qui seront apportées au régime québécois des taxes à la consommation. (11 h 20)

En effet, nos négociations avec le gouvernement fédéral dans le but de simplifier substantiellement l'administration des taxes à la consommation au Québec se sont avérées un succès. Je suis ainsi eh mesure d'annoncer aujourd'hui qu'à compter du 1er janvier 1992, c'est le ministère du Revenu du Québec qui administrera la TPS sur le territoire québécois pour le compte du gouvernement fédéral, conformément à un protocole d'entente entre les deux gouvernements, qui sera signé au cours des prochaines heures.

En fait, dès que possible cet automne, le ministère du Revenu du Québec procédera à l'embauche du personnel additionnel nécessaire à l'administration unifiée des régimes fédéral et québécois, personnel qui sera prêté à Revenu Canada jusqu'au transfert complet le 1er janvier 1992. Quant aux employés fédéraux travaillant dans le cadre de la TPS au Québec au 31 décembre 1991, ils seront assurés d'un emploi équivalent au sein du ministère du Revenu du Québec dès le transfert des opérations. De plus, l'administration unifiée permettra des économies d'opération pour les deux gouvernements de l'ordre de 35 000 000 $ annuellement.

Ce transfert de l'administration de la TPS constitue un geste de délégation fédérale sans précédent en matière fiscale. Il permettra, en plus de procurer des économies aux deux gouvernements, de simplifier considérablement l'application des taxes à la consommation au Québec. Les entreprises n'auront alors à transiger qu'avec une seule administration et elles auront à gérer des systèmes de prélèvement similaires. Ce sera le premier pas essentiel vers la simplification recherchée.

Le second pas, indissociable du premier si l'on désire réellement simplifier le régime fiscal et donner tout son sens à une administration unifiée, proviendra de la réforme du régime de taxation québécois pour l'harmoniser substantiellement à celui du gouvernement fédéral. J'annonce donc la mise en place à compter du 1er janvier 1992 d'un nouveau système de taxe de vente. La nouvelle taxe de vente sera imposée à l'acheteur sur la plupart des biens et services assujettis à la TPS, dans les limites cependant de nos pouvoirs constitutionnels en matière de taxation. Étant d'application plus large, le nouveau régime permettra de réduire à 7 % le taux des taxes à la consommation au Québec. Il remplacera ainsi l'actuelle taxe de vente de 9 %, celle de 10 % sur les repas, et celle de 9 % sur les télécommunications. Ces modifications sont décrites plus en détail à l'annexe jointe à la présente déclaration ministérielle et qui en fait partie intégrante. Avec le consentement de cette Assemblée, M. le Président, je dépose deux copies du document intitulé "Annexe à la déclaration ministérielle concernant l'administration de la TPS et la réforme des taxes à la consommation au Québec." (Voir annexe).

Une voix: Consentement.

Le Président: Consentement. Les documents sont déposés.

M. Levesque: Afin d'éliminer la taxation en cascade qu'on retrouve actuellement dans notre régime de taxation et de rendre les produits québécois plus concurrentiels sur tous les marchés, la nouvelle taxe de vente comportera un mécanisme de remboursement aux entreprises pour les taxes payées sur leurs achats.

Le gouvernement a ainsi opté pour un système québécois de taxe à la consommation comportant un taux unique plutôt que des taux différenciés entre les produits. Il nous est apparu, étant donné la coexistence de la TPS et de la taxe de vente du Québec, qu'un tel système était beaucoup moins complexe à administrer, tant pour les entreprises que pour le gouvernement. de plus, nos études ont démontré qu'un taux réduit ou une exemption de taxe sur certains biens ou services constituait une façon inutilement coûteuse de protéger les ménages à faible revenu car cela profitait principalement aux ménages à plus haut revenu. en effet, par exemple, pour l'exemption actuelle des vêtements et chaussures, les ménages gagnant moins de 31,500 $, lesquels représentent 40 % de l'ensemble des ménages, ne tirent profit que de 16 % des bénéfices totaux de cette exemption, alors que les ménages gagnant plus de 48,200 $, lesquels représentent aussi 40 % de l'ensemble des ménages, soit les plus fortunés, profitent de 67 % des bénéfices de cette exemption.

Enfin, les systèmes de taxes à taux va-

riables que plusieurs pays européens ont mis en place sont actuellement remis en cause dans le cadre du marché commun européen, démontrant ainsi les limites qu'apporte au régime fiscal la mobilité des biens et des services dans une économie ouverte. de plus, afin d'améliorer l'équité du régime fiscal, un mécanisme important est mis en place, soit un crédit d'impôt remboursable pour la taxe de vente à l'intention des contribuables à faible revenu. ce crédit fera en sorte que non seulement ceux-ci n'auront pas à subir de hausse de fardeau fiscal, mais ils verront ce fardeau diminuer. aussi, afin de protéger complètement le pouvoir d'achat des contribuables, j'annonce pour 1992 l'indexation au taux de 4,5 % des crédits d'impôt sur le revenu et des barèmes des programmes apte et apport. je peux assurer les contribuables que cette réforme s'inscrit dans les préoccupations qu'a toujours eues le gouvernement au cours des dernières années à l'égard des familles et des ménages à faibles et à moyens revenus.

En effet, par exemple, pour un célibataire vivant seul, bénéficiaire de l'aide sociale, la hausse de ses prestations de 140 $, représentant la valeur du crédit d'impôt remboursable, équivaut à plus du double de l'impact du montant de la taxe de vente supplémentaire, soit de 68 $ par année. Dans le cas où ce célibataire bénéficie également de l'indexation de ses prestations du programme APTE pour un montant de 272 $, son revenu disponible sera ainsi majoré de 344 $. Si le bénéficiaire est inapte, il profitera de l'indexation automatique déjà prévue dans le régime de la sécurité du revenu.

L'ensemble des mesures annoncées aujourd'hui se traduira aussi par des gains importants pour les familles gagnant jusqu'à 50 000 $ par année. Ainsi, un couple avec deux enfants gagnant 25 000 $ se verra accordé un crédit d'impôt remboursable de 230 $, lequel fera plus que compenser l'impact de la taxe de vente supplémentaire, de 147 $. Lorsqu'on ajoute la baisse d'impôt de 309 $ par suite de l'indexation des besoins essentiels, son fardeau fiscal est réduit de 392 $ à la suite des mesures que je viens d'annoncer. Pour une telle famille gagnant 40 000 $, soit un niveau de revenu voisin du revenu familial moyen, son fardeau fiscal sera réduit de 207 $. M. le Président, ces gains pour les familles à revenu moyen s'ajoutent aux baisses d'impôt que nous avons apportées à chacune des années depuis 1985, si bien que l'impôt d'une telle famille à revenu moyen est passé de 6401 $ en 1985 à 4129 $ en 1991, soit une baisse de 35 %. Et, à la suite des mesures que j'annonce aujourd'hui, l'allégement du fardeau fiscal se poursuivra en 1992. (11 h 30)

De plus, dans le but de protéger les équilibres financiers du gouvernement et compte tenu de l'impact substantiel de la réforme sur l'amélioration de la position concurrentielle des entreprises québécoises, il apparaît approprié et non préjudiciable de modifier les impôts de ces entreprises à compter du 1er janvier 1992. Sur une pleine année, cette modification des taux augmentera le fardeau fiscal des entreprises de 297 000 000 $.

En outre, comme je l'ai indiqué, la nouvelle taxe de vente du Québec commencera à s'appliquer le 1er janvier 1992, en même temps que l'administration unifiée de la TPS fédérale et la taxe québécoise. Au cours de l'année 1991, la TPS fédérale sera en vigueur, mais elle sera provisoirement administrée par Revenu Canada.

L'année 1991 sera donc une année de transition. Étant donné notre objectif de simplifier l'administration des taxes à la consommation, notre gouvernement a cherché à assurer une harmonisation maximale des deux régimes, au moins au niveau du commerce de détail des biens, et ce, dès le 1er janvier prochain. C'est pourquoi j'annonce qu'à l'égard du commerce de détail, les biens mobiliers assujettis à la TPS feront aussi l'objet de la taxe de vente du Québec à compter du 1er janvier 1991. Il s'agit là d'un élargissement de l'assiette imposable, de sorte qu'il nous sera possible d'abaisser, dès ce moment, de 9 % à 8 % les taux de la taxe de vente et de la taxe sur les télécommunications, et de 10 % à 8 % le taux de la taxe sur les repas et l'hôtellerie.

Au total, sur la pleine année 1992, les mesures annoncées aujourd'hui auront pour effet de diminuer le fardeau fiscal des contribuables de 523 000 000 $. Quant à l'impact sur les équilibres financiers, il s'élève à 77 000 000 $ pour l'année 1990-1991 et représente un manque à gagner global de 19 000 000 $ pour les trois années, 1990-1991, 1991-1992 et 1992-1993. Les estimations des impacts étant très avancées au moment du discours sur le budget, ces montants ont été inclus aux équilibres budgétaires déposés le 26 avril dernier, de sorte que les revenus et les dépenses, ainsi que le solde des opérations budgétaires alors présentés n'ont pas à être révisés.

M. le Président, non seulement cette réforme permettra-t-elle de simplifier le régime fiscal, mais elle permettra aussi de l'améliorer afin de mieux l'adapter aux impératifs de l'environnement économique international de plus en plus compétitif. De plus, par les mécanismes de compensation qu'elle comporte, cette réforme permettra de poursuivre l'effort du gouvernement fait au cours des dernières années en vue d'améliorer la situation des ménages à faibles et moyens revenus et particulièrement celle des familles.

Enfin, M. le Président, étant donné les circonstances exceptionnelles de la déclaration d'aujourd'hui, je vous fais part de mon intention de discuter plus à fond de cette réforme dès que possible. Mon collègue, le leader parlementaire du

gouvernement, proposera donc que l'Assemblée nationale confie un mandat à cet effet à la commission du budget et de l'administration. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Je reconnais maintenant le représentant de l'Opposition officielle, M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le ministre des Finances vient de nous lire une déclaration ministérielle qui coûtera aux Québécois, en 1991, au moins 329 000 000 $ net et qui va imposer une taxe de plus de 15 %, à partir du 1er janvier 1991, sur les livres, les imprimés, les journaux, les chaussures, les vêtements qui n'étaient pas taxés jusqu'ici. De plus, les appareils ménagers et les meubles subiront la taxe de vente du Québec par-dessus le fédéral. M. le Président, c'est ça, sa déclaration ministérielle, même si le ministre des Finances a parlé surtout de 1992 et qu'il a gommé 1991.

Je voudrais, M. le Président, dans un premier point, vous dire que nous n'acceptons pas le procédé qui est employé ce matin. Il s'agit d'une déclaration ministérielle du ministre des Finances, qui comporte des modifications profondes au système de la fiscalité du Québec. Par le biais d'une déclaration ministérielle, il évite d'avoir un débat normal qui aurait dû avoir lieu sur un tel sujet et qui aurait dû durer huit heures au moins. Il l'évite. Il nous limite à une réplique de quelques minutes, 20 minutes au maximum, sur un sujet fondamental, qui a amené un large débat, en particulier, à la Chambre des communes d'Ottawa. Le gouvernement fédéral, le 15 juin 1987, a déposé un livre blanc sur la fiscalité et tout le monde en a parié dans le pays. Ils en ont parlé lors de leurs élections. Mais, ici, c'est une simple déclaration ministérielle avec un droit de réplique de 20 minutes.

Une voix: Scandaleux!

M. Léonard: Nous nous élevons contre ce procédé, M. le Président, en plein été, à l'occasion de la convocation de la Chambre pour adopter une loi spéciale en rapport avec la crise de Kahnawake et d'Oka. M. le Président, le procédé est inqualifiable. Et je vois aussi, je note aussi, que, dans cette Chambre, aujourd'hui, le ministre du Revenu n'est pas présent. Et je pense qu'il faut se rappeler, le printemps dernier, les débats et les déclarations qui ont eu cours à ce sujet au Québec.

Je voudrais simplement rappeler ici, dans les Débats de l'Assemblée nationale, une déclaration qui a été faite par le premier ministre du Québec - et je la lirai. M. le Président, si vous le permettez - en réponse à une question du chef de l'Opposition. "M. le Président, on connaît la réputation de frugalité du gouvernement que j'ai l'honneur de diriger. Cela étant dit, je vais répondre au chef de l'Opposition que j'ai mentionné, il y a quelques instants à peine, les propos du ministre du Revenu vis-à-vis de la TPS, qui reprenaient ceux que nous avions tenus, que le ministre des Finances avait tenus, que nous avions endossés à la conférence interprovinciale des premiers ministres en août dernier à Québec. Nous avons eu l'occasion, à de très nombreuses reprises, de dénoncer le caractère régressif, notamment, de cette taxe." Le premier ministre du Québec, le 15 mars 1990.

Des voix: Deux discours!

M. Léonard: M. le Président, il y a des débats qui doivent avoir lieu dans la société québécoise et qui doivent commencer ici à l'Assemblée nationale, et on les escamote aujourd'hui par une déclaration ministérielle.

D'autre part, le ministre des Finances dit ce matin, nous apprend ce matin qu'il avait déjà prévu, aux équilibres financiers, l'impact de l'harmonisation de la taxe de vente du Québec à la TPS fédérale. Je crois qu'au lieu d'une déclaration d'intention d'étudier la question de l'harmonisation avec la TPS fédérale dans son discours sur le budget il aurait dû avoir la franchise de dire et d'indiquer les impacts de cette taxe et de cette harmonisation qu'il avait déjà inclus à ses équilibres financiers, mais dont il n'a pas parlé dans son discours sur le budget comme tel. (11 h 40)

Je pense que, là aussi, le procédé est inqualifiable, parce que personne n'avait imaginé que les impacts financiers d'une telle harmonisation étaient déjà inclus aux états financiers. Nous avions noté, à l'époque, que ie taux de rendement des taxes à la consommation augmentait considérablement, qu'il passait à 7,7 % cette année. Et nous nous étions interrogés parce que, normalement, en période de récession, on s'en tient, tout au plus, à l'inflation. Mais personne, et surtout pas le ministre des Finances, ne nous a indiqué qu'il s'agissait de l'harmonisation et des coûts de l'harmonisation pour l'année 1990-1991 et 1991-1992. M. le Président, il s'agit là de camouflage qu'on découvre après coup. Même si on dit qu'on étudie, on n'a jamais indiqué que les impacts financiers étaient là.

Alors, quels sont les impacts, aujourd'hui, pour les contribuables? Il y a des biens qui étaient exemptés aux deux paliers de gouvernement, au Québec et au fédéral. Ces biens sont les vivres, les imprimés, les journaux, ce qui touche la culture en gros, l'information. Ces biens sont les vêtements, ce sont les chaussures qui ne portaient de taxe ni au fédéral ni ici au Québec, aucune taxe. Ce que le ministre des Finances fait ce matin, c'est que, par-dessus la

taxe fédérale de 7 %, on ajoutera 8 % sur les 7 %. La taxe réelle sera de 15,56 % à partir du 1er janvier 1991. À partir du 1er janvier 1991, de 0 % à 15,56 %. Les meubles étaient déjà taxés au fédéral, mais, ici, on y ajoute 8 % à partir du 1er janvier.

M. le Président, il s'agit là d'une modification considérable et, dès le 1er janvier 1992, tous les services seront imposés, TPS fédérale et TPS québécoise composées. Alors, il s'agit d'une augmentation considérable aussi pour tous ces services. Chez le coiffeur, 14,49 % de plus; chez les taxis, 14,49 % de plus. Lorsque vous irez chez le nettoyeur, 14,49 % de plus tout le temps. Lorsque vous irez chez votre comptable, chez votre notaire, chez votre avocat, toujours 14,49 % de plus.

M. le Président, nous n'avons pas eu le temps de passer à travers cette déclaration ministérielle parce que, au-delà des six pages que le ministre nous a lues, il y a 93 pages de texte et de tableaux, ici, 93 pages que nous avons dû lire en vitesse ce matin. Je suppose bien que l'impact réel, nous allons le découvrir dans les tableaux qui vont concerner en particulier la classe moyenne au Québec, celle qui travaille à des salaires réduits, mais qui n'a pas accès au crédit de taxe sur les ventes, sur la consommation. Celle-là va payer. C'est celle-là qui va payer partout. Nous aurons le loisir, ultérieurement, de regarder ces questions, mais, évidemment, nous ne pourrons pas revenir en Chambre parce que le débat sera terminé. Après les mots que je vous dis, c'est terminé sur le plan politique, sur le plan public. M. le Président, il y a beaucoup de choses à y voir.

Quant aux impacts financiers, je pense que cela mérite examen quelque peu. Je prierais les parlementaires d'aller voir à la page 58 de leur document, ce matin, parce qu'il comporte les vrais...

Des voix: On ne l'a pas eu.

M. Léonard: On ne l'a pas, très bien. Alors, ceci dit...

Une voix: Bâillonnés!

M. Léonard: ...les revenus additionnels du gouvernement en 1990-1991,92 000 000 $.

Une voix: C'est encore plus grave.

M. Léonard: Les revenus additionnels du gouvernement en 1991-1992, 323 000 000 $. Le total de ces deux années, 415 000 000 $, moins les indexations qui, pour certaines, auraient été faites automatiquement, 86 000 000 $. L'impact net sur l'année 1991: 329 000 000 $ que le gouvernement, au passage de la réforme, met dans sa poche. C'est ça, l'annonce de ce matin. 329 000 000 $! Parce que, quand vous aurez le tableau, vous verrez qu'en 1991 il n'y a pas de crédit d'impôt remboursable pour la taxe de vente; pour toute l'année 1991, il n'y en a pas. il n'y a pas d'indexation de 4,5 % du régime d'imposition des allocations familiales; il n'y en a pas, c'est zéro. alors, pour 1991, le gouvernement empoche, net, au moins 329 000 000 $.

M. le Président, il faut revenir, finalement, à ce discours sur le budget du printemps dernier et rappeler ce que nous avions dit. Ce gouvernement fait un budget morceau par morceau, il a annoncé des taxes avant le discours sur le budget. Total de ces taxes sur l'impact du budget de cette année: 505 000 000 $. Il a annoncé des taxes durant son discours sur le budget, pour 340 000 000 $, celles dont il a parlé, et, par la suite, il en a additionné d'autres. Une dont vous n'avez pas entendu parler, celle qui a été annoncée par le ministre des Transports le 28 juin dernier, au lendemain de la commission parlementaire: 148 000 000 $ additionnels. Personne ne l'a su, en plein été, en pleines vacances. Les permis de conduire sont passés de 11 $ à 20 $ et l'immatriculation, de 55 $ à 90 $; vous n'en avez pas entendu parler. La cachette, des taxes après le discours sur le budget! Pourquoi cela n'a-t-il pas été dit au discours sur le budget?

Ce matin, pour l'année 1990, on doit ajouter 77 000 000 $, plus 252 000 000 $ - les 329 000 000 $ dont je parlais - qui portent globalement sur l'année 1991. Alors, une autre cachette, une autre façon de camoufler, tout en parlant de l'année 1992. On nous a parlé de l'année 1992, tout le temps de l'année 1992! Un seul paragraphe, un seul, à la page 6 de la déclaration ministérielle traite de l'année 1991, de la période de transition qui coûte 329 000 000 $ net aux contribuables québécois. C'est tout ça dont on nous parle, ce matin.

M. le Président, ce que nous regrettons, c'est que le débat sur un changement aussi fondamental de la fiscalité québécoise n'ait pas lieu, qu'on le glisse maintenant à la commission du budget et de l'administration au lieu de le faire ici, devant l'Assemblée nationale, comme il aurait été normal de le faire. On le fait d'un coup, derrière, en refilant le tout à la commission du budget et de l'administration.

M. le Président, je pense que les Québécois vont se rendre compte des attitudes de ce gouvernement que je qualifie d'hypocrite, finalement, parce qu'on n'a pas, dans le budget... Quand on lit le discours sur le budget du printemps, on n'a rien de tout ce qui s'est passé finalement autour. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. Recent events help remind us of the ancient saying that the only things that are really inevitable are death and taxes. The federal Goods and Services Tax now appears to be one demonstration of this inevitability, so the Québec Government policy of harmonization with provincial sales taxes is obviously a good idea both in reducing the cost and complexity of administrating these taxes and reducing the paperwork burden for businesses. If I understand the proposal correctly, for example, it should mean that small businesses will not have to change all their cash registers, over which there will be many sighs of relief. Québec should be doing everything in its power to encourage small business, which will be at the heart of future economic development. If we cannot afford to abolish these taxes, we may at least slightly reduce the pain. (11 h 50)

I would like to add three brief comments, however. The first is that it is certainly about time this announcement be made. We have had two years in which business people in Québec have been kept in suspense as to just how Québec intended to deal with the GST issue. If more time-tabling problems arise, for example as a result of Senate delaying tactics, we hope the Government will show more speed in indicating what it intends to do next.

Secondly, it appears that the full implementation of the harmonized system will not take place until 1992, with the year in-between in which Revenue Canada officials are responsible for administrating the tax, though a whole lot of them are then to be shifted over to Revenue Québec once everything has been set up. It is surely likely that this transfer of personnel will raise all kinds of interesting problems, notably in adjusting civil service ranks and working out arrangements will the civil service unions. We can only hope the resulting tangles do not themselves make the tax collection procès a great deal messier than it sounds in the ministerial statement.

Finally, it is always useful to remind governments and Parliamentary Assemblies that they should not be too filled with a sense of self-satisfaction because they have succeeded in finding a more efficient and streamlined way of getting money from businesses and private citizens that they would not need so much had they not spent too freely in the first place.

The real fear that most of us have of all valuate taxes is not so much of the type of tax itself as for its great capacity to be steadily increased, year by year, until it becomes an unbearable burden. We would have a better cause for celebration if it can be announced in future that this tax rate is to be reduced rather than increased. I hope this noble objective will always be kept before the eyes of the Finance Minister and the Government. Merci, M. le Président.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député d'Anjou.

M. René Serge Larouche

M. Larouche: M. le Président, dans un premier temps, il faut bien établir que la TPS, l'instauration de la taxe sur les produits et services est une décision fédérale que nous devons subir, pour laquelle nous n'avons aucun choix. Alors, peu importe, je pense, ce qu'on pourrait en dire quant à sa validité, quant au niveau de la taxe, la décision a été prise par le gouvernement fédéral.

Alors, on sait que le gouvernement fédéral est en faillite technique. On sait aussi que le gouvernement conservateur, en 1985, a mis sur pied le comité Nelson pour mettre de l'ordre dans les affaires fédérales et qu'on s'est dépêché de placer sous le couvert les recommandations intelligentes de ce rapport. Alors, on en subit, en 1990, les conséquences et on doit payer les dettes.

Je vais donner mon accord à la proposition, à la déclaration ministérielle qui demande de référer à la commission du budget et de l'administration cette étude, cette taxe. Je suis d'accord parce que, tout simplement, la formule, à mon point de vue, vise à protéger tes intérêts économiques du Québec et des Québécois. Elle renforce aussi la position du Québec dans la gestion de ses politiques fiscales. Alors, j'espère que ce sera mieux examiné en commission. Je suis d'accord aussi parce qu'elle assure une harmonisation de la fiscalité. Elle évite des dédoublements coûteux. On sait qu'il y en a des dédoublements entre le Québec et Ottawa. Alors, au moins pour l'application de cette taxe, il me semble que l'harmonisation s'impose. Elle évite, je l'espère, des conflits. Elle assure aussi aux employés fédéraux, aux employés québécois qui travaillent pour le gouvernement fédéral, qu'ils seront réintégrés au ministère du Revenu du Québec dès que les opérations seront sous la responsabilité complète du Québec, en janvier 1992.

Quant au système de taxe de vente, je ne peux pas être en désaccord de réduire à 7 % le taux actuel de la taxe qui est à 9 % et à 10 % sur les repas. Je ne peux pas être en désaccord non plus avec mon collègue Léonard concernant une augmentation indirecte de taxes. Mais c'est clair qu'en bout de ligne il y a quelqu'un qui doit payer la note et on est condamné à la payer pour des extravagances fédérales en particulier. Je suis d'accord aussi parce qu'on rendra les produits et services du Québec plus concurrentiels sur les marchés locaux comme internationaux.

Et, enfin, je crois sur parole le ministre

des Finances qui nous rassure quant à l'amélioration de l'équité du régime fiscal par l'instauration d'un crédit d'impôt personnel remboursable pour la taxe de vente et surtout à l'intention des contribuables à faible revenu. Alors, ça permet de simplifier le régime fiscal, d'harmoniser nos deux politiques. Et, pour ces raisons, considérant surtout que ça sera examiné par la commission du budget et de l'administration, je ne peux pas refuser mon accord à un examen par cette commission. Merci, M. le Président.

Le Président: Je cède la parole à M. le ministre des Finances pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Gérard D. Levesque (réplique)

M. Levesque: M. le Président, brièvement, je voudrais tout d'abord remercier ceux qui sont intervenus à la suite de la déclaration. J'arrive à la conclusion que, sur le fond, il semble y avoir un certain consensus, sinon l'unanimité parfaite. Et ça ne...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Levesque: ...me surprend pas, M. le Président. Je pense que nous vivons aujourd'hui un moment important. Nous allons, dans quelques instants, signer une entente que je pourrais qualifier d'historique. Dans le domaine fiscal, il s'agit d'un précédent à l'avantage d'un Québec qui a de plus en plus la maîtrise de son avenir. Et je comprends, évidemment, que le critique financier de l'Opposition officielle se soit principalement penché sur certaines modalités, parce que, dans le fond, il est bien difficile pour lui d'attaquer quelque chose qui fait partie du programme du Parti québécois. Et je vais expliquer que, dans certaines modalités, il y a des différences, mais, s'il y a quelqu'un qui a un doute là-dessus, justement, j'ai ici le programme lui-même qui mentionne l'abolition des autres taxes de vente pour en faire une TVA dans la souveraineté, évidemment à des taux multiples. Mais, évidemment...

Des voix: Ah! Ah!

M. Levesque: Ah oui! Lorsque je suis transparent, on crie. Et, lorsqu'on pense que ce n'est pas assez transparent, on crie. De l'autre côté, on semble crier pas mal souvent. Mais, voici, c'est que nous avons présentement, je pense, et très sérieusement, franchi un pas important dans l'autonomie du Québec, une autonomie fiscale qui s'est imposée. Ne vous imaginez pas que ça été facile, tous ces mois de négociations avec le gouvernement fédéral, le gouvernement fédéral qui accepte qu'une taxe qui est la sienne soit administrée par le gouvernement du Québec. Ça ne s'est jamais fait et j'avais mentionné, il y a même trois ans, au gouvernement fédéral, que, si on pensait à une taxe unifiée, ça ne serait certainement pas le gouvernement fédéral qui en aurait l'administration et que jamais le gouvernement fédéral n'administrerait les taxes au Québec. Et c'est le contraire qui est arrivé et nous avons réussi, au cours de ces négociations, à justement être en mesure maintenant de signer cette entente historique.

Deuxièmement, je remercie également les autres intervenants. Je les remercie de l'espoir et de la confiance qu'ils mettent dans le ministre des Finances et dans la politique mise de l'avant par le gouvernement. Et, quant aux modalités - parce qu'il ne me reste que quelques minutes - relevées par le député de Labelle, le député de Labelle s'insurge parce qu'il y a une augmentation des revenus en 1991. Mais il doit prendre les trois années: 1991, 1992, 1993. Et, pour ces trois années, tout cet exercice-là fait perdre des revenus au gouvernement de 19 000 000 $. Alors, qu'on ne vienne pas nous dire qu'il y a là un profit pour le gouvernement. Au contraire, il s'agit d'une opération relativement neutre sur le plan des revenus. (12 heures)

Deuxièmement, il parle du premier ministre qui s'était objecté? Oui, il s'est objecté parce que la TPS fédérale, telle que proposée, était inacceptable, et ça, pour quatre raisons principales: premièrement, à cause des effets négatifs sur l'économie. À 9 %, c'était inacceptable, une TPS, et nous l'avons fait réduire à 7 %. Deuxièmement...

Des voix:...

M. Levesque: Deuxièmement, il y avait là des effets négatifs pour le Québec, pour les finances du Québec, particulièrement dans le domaine des loteries, particulièrement dans le domaine des municipalités, particulièrement dans le domaine des commissions scolaires, particulièrement dans le domaine des hôpitaux et, dans tous ces cas, incluant les universités, nous sommes intervenus et nous avons réussi à faire en sorte que ces effets négatifs disparaissent.

Troisièmement, nous nous sommes opposés également au fait qu'il y avait là un envahissement d'un champ traditionnellement occupé par les provinces. À ce propos-là, nous avons réussi à avoir une déclaration que je pourrai montrer à cette Chambre, en commission parlementaire ou lorsqu'on jugera à propos de le faire, où le gouvernement fédéral, par la voix du ministre des Finances, indique son intention de ne pas laisser le champ être envahi par le gouvernement fédéral, mais de garder cette taxe le plus bas possible. Quatrièmement, la complexité qui était dénoncée par tout le monde et même par plusieurs de nos amis d'en face, eh bien, nous avons réussi justement à faire sauter cette

complexité en prenant le leadership dans tout ce dossier et en faisant en sorte que ce soit le Québec qui constitue l'administration unique de toutes les taxes à la consommation, fédérale et provinciale.

Finalement, lorsque le député de Labelle s'inquiète de ce qui arrive dans certains domaines qui n'étaient pas taxés et qui le seront, il oublie de mentionner que nous avons une compensation qui est plus importante que ce que n'auront à supporter la plupart des contribuables. Tous les gens qui sont dans les moins bien nantis, toutes les familles, même jusqu'à 50 000 $ et 75 000 $, pas seulement les moins bien nantis, même la classe moyenne sera protégée.

Qu'on regarde les documents, et j'espère qu'on aura l'occasion de les étudier en commission parlementaire. On verra que, justement, les contribuables à faible et à moyen revenu sont amplement protégés par les mesures que nous prenons par le remboursement que nous allons faire aux contribuables concernés.

M. le Président, le député de Labelle mentionne: C'est bien beau, c'est pour 1992, mais, en 1991, il n'y a pas de remboursement. Mais c'est faux. Nous commençons les remboursements dès le 1er janvier 1991. S'il a mal lu les documents, qu'il les relise et il verra que c'est une compensation qui commence dès 1991. Évidemment, en 1992, il y a une compensation qui tient compte des changements additionnels qui seront faits. Il y a une période transitoire: 1991; 1992, c'est la pleine réforme. Je pense que, s'il regarde bien les choses, il verra que les remboursements commencent dès le moment où les contribuables sont affectés. finalement, je remercie cependant tous les gens qui sont intervenus parce que, dans le fond, ils ne peuvent pas s'objecter à une diminution du fardeau fiscal de 523 000 000 $. ils ne peuvent pas nous féliciter mais, dans le fond de leur coeur, ils nous félicitent pour avoir pris ce leadership, ils nous félicitent d'avoir pu, par ces négociations, faire en sorte que le gouvernement fédéral assume les 20 000 000 $ que coûte l'implantation du régime et ils nous félicitent encore implicitement, lorsqu'ils se rendent compte que cette politique, cette mesure qui est prise aujourd'hui fait en sorte que, par rapport à ce qui serait arrivé si nous avions attendu, nous avons une économie pour le québec de 35 000 000 $ annuellement, quelque chose de récurrent. ça, c'est la preuve très claire d'une négociation réussie et je suis persuadé que cette chambre sera de plus en plus convaincue de la justesse de notre approche. encore une fois, je remercie tous ceux qui sont intervenus, et je suis convaincu que l'assemblée entière va être très heureuse de pouvoir appuyer cette mesure, qui sera sûrement une mesure qui, même chez nos successeurs... dans combien d'années? soyons généreux: dans une vingtaine d'années. ils seront les derniers à vouloir toucher à cela, parce qu'ils seront fiers d'avoir cet instrument-là entre les mains d'un gouvernement du Québec. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Je reconnais maintenant M. le leader du gouvernement pour la présentation d'une motion sans préavis.

Examen de l'annexe à la déclaration ministérielle sur la TPS

M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je fais motion pour que jeudi, le 6 septembre 1990, de 10 heures à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de l'administration tienne une séance afin de procéder à l'examen de l'annexe à la déclaration ministérielle du ministère des Finances concernant l'administration de la taxe sur les produits et services et la réforme des taxes à la consommation au Québec. Il va de soi que je fais motion pour que le ministre des Finances soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.

Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Projet de loi 82

Le Président: maintenant au niveau de la présentation de projets de loi, m. le ministre délégué aux transports présente le projet de loi 82, loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre châteauguay et sainte-catherine. m. le ministre délégué aux transports.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, ce projet de loi a pour but d'accorder au ministre des Transports les pouvoirs lui permettant de procéder dans des délais réduits à l'acquisition de tous les biens qu'il juge nécessaires à la construction du tronçon de l'autoroute 30 reliant les villes de Châteauguay et de Sainte-Catherine.

À cette fin, il établit les règles devant régir les expropriations visées par la loi ainsi que celles relatives à la fixation des indemnités provisionnelles et définitives. À défaut d'entente avec l'exproprié sur l'indemnité définitive, les parties pourront s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer cette indemnité.

Ce projet de loi contient par ailleurs des dispositions dérogatoires visant à faciliter l'application des mesures établies et prévoit que certaines dispositions ont été faites à compter de la date d'autorisation initiale des travaux routiers.

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Dépôt de documents.

Décision du Bureau de l'Assemblée

Je dépose la décision 372 du Bureau de l'Assemblée nationale.

Dépôt de rapports de commissions.

Demande de budget supplémentaire

J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'Assemblée nationale qui a siégé le 10 août 1990 afin de statuer sur une demande du comité directeur de la commission du budget et de l'administration en vue d'obtenir un budget supplémentaire. Je dépose donc ce document.

Dépôt de pétitions, M. le député de Shef-ford.

Services de chimiothérapie au Centre hospitalier de Granby

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 4125 pétitionnaires, citoyens et citoyennes principalement du comté de Shefford.

Les faits invoqués sont les suivants: considérant que les personnes atteintes du cancer veulent vaincre la maladie; considérant que pour ces personnes la chimiothérapie est un espoir de survie; considérant que ces personnes ont déjà suffisamment de soucis et que leur état de santé ne supporte pas le déplacement de Montréal à Granby ou de Sherbrooke à Granby après le traitement.

L'intervention réclamée se résume ainsi:

Que l'Assemblée nationale exige du ministère de la Santé et des Services sociaux qu'il octroie au Centre hospitalier de Granby les budgets suffisants pour fournir les services de chimiothérapie à tous les patients dont l'état de santé nécessite ce traitement et qui en font la demande.

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: alors, cette pétition est déposée. nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales. je reconnais en première question principale m. le chef de l'opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

L'objet des négociations qui se déroulent à Dorval

M. Parizeau: M. le Président, je suis certain que tous les membres de cette Chambre, comme la population du Québec, d'ailleurs, ont appris avec soulagement hier que l'armée avait commencé à démanteler les barricades, sans affrontement violent. (12 h 10)

J'ai noté aussi que le premier ministre a dit très clairement, hier, que ce démantèlement des barricades fait par l'armée était assez indépendant des négociations qui avaient lieu d'autre part à Dorval. Alors, je voudrais lui poser la question - puisque, enfin, nous siégeons - la première question, au fond: Qu'est-ce qu'on discute à Dorval? De quoi s'agit-il? De quel sujet? Sur quel sujet portent les négociations de Dorval pendant que l'armée a l'air de s'entendre, à l'heure actuelle, avec les Mohawks pour le démantèlement? De quoi s'agit-il?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je suis heureux de retrouver, évidemment, le chef de l'Opposition, même si les circonstances ne sont pas idéales. Je suis évidemment d'accord avec lui, avec la situation qui s'est nettement améliorée dans la région de Châteauguay, hier. Le ministre délégué aux Affaires autochtones, qui est ici présent - il pourra compléter ma réponse - a, comme c'est sa responsabilité, accepté une demande de discussion de la part d'un groupe d'autochtones, d'une confédération d'autochtones, qui sont impliqués, d'une certaine façon, dans le dossier.

J'ai dit hier - et c'est la réalité - que les négociations sont indépendantes de l'action militaire. Lundi, j'avais demandé à l'armée canadienne, puisqu'en vertu de la Loi sur la défense nationale, lorsque nous invoquons cette loi, l'armée reçoit les instructions du gouvernement du Québec. Après la suspension ou la rupture des négociations avec les interlocuteurs qui existaient à ce moment-là, qui étaient les interlocuteurs des deux gouvernements, j'ai demandé à l'armée canadienne de démanteler les barricades, dans toute la mesure du possible sans recourir à la violence. Ce qui est fait depuis hier.

À Dorval, actuellement, on discute des possibilités d'une entente, du retour à la normalité. Nous souhaitons pouvoir nous entendre avec les Mohawks de manière à favoriser un retour à une situation normale dans notre collaboration avec les groupes autochtones. Pour ce qui a trait au contenu ou au détail des négociations, en tenant compte, toutefois, qu'il est difficile pour le ministre d'élaborer, étant

donné que les discussions sont en cours, que ces discussions impliquent un autre gouvernement et que rien n'est encore signé, je demanderais quand même au ministre de compléter ma réponse.

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Ciaccia: M. le Président, les activités de l'armée peuvent solutionner les questions des barricades, mais l'armée ne peut pas solutionner les revendications des autochtones. Et dans le présent conflit, il ne faut ménager aucun effort pour trouver une solution pacifique et honorable, car les enjeux pour notre société sont trop importants.

Alors, nous discutons de certaines revendications, certains problèmes des Mohawks.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, je pense que quand cette crise-là sera terminée, on dira à quel point - et là, je demande encore au premier ministre - il aura été difficile d'obtenir du premier ministre et du gouvernement de savoir ce qui se passe. La réponse du premier ministre m'amène, comme celle d'ailleurs du ministre, à reposer la même question. Est-ce qu'on peut nous dire sur quel sujet on est en train de discuter à Dorval? Je ne veux pas des abstractions. Je voudrais savoir de quel sujet spécifiquement discute-t-on? Est-ce qu'on discute des revendications territoriales? Est-ce qu'on est en train de discuter des poursuites judiciaires? De quel sujet parle-t-on?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition, qui a suivi, comme c'était son devoir, la crise depuis 50 jours, est au courant de la position du gouvernement, qui a été énoncée le 27 juillet, pour ce qui a trait au dépôt des armes, pour ce qui a trait à la question des terres qui relève, on le sait, du gouvernement fédéral. Cela a été la position du gouvernement, des différents points qui ont été soumis à ce moment-là. Alors, c'est évident que les discussions qui ont lieu ont trait aux propositions qui ont été faites par le gouvernement du Québec, en collaboration avec le gouvernement fédéral, et qui ont été rendues publiques.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, je demande au premier ministre d'être un peu plus concret. Est-ce que le premier ministre ne convient pas que le succès obtenu par l'armée canadienne, jusqu'à maintenant, est largement dû à la transparence de ses prises de position? Est-ce qu'il ne convient pas que l'armée canadienne qui, manifestement, à l'heure actuelle, est un élément important de solution de la crise, a pu jouer ce rôle parce que, au lieu de considérer le public comme des imbéciles, elle a essayé d'expliquer de quoi il s'agissait et qu'est-ce qu'elle allait chercher à faire? Est-ce qu'il ne convient pas que son gouvernement, à travers cette crise, pourrait montrer autant de transparence?

M. Bourassa: M. le Président...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: ...est-ce que le chef de l'Opposition ne convient pas que l'explication d'une opération militaire, avec des objectifs et des moyens qu'on peut facilement identifier, le nombre de troupes, l'utilisation de telles armes, est une opération qui est différente que lorsque nous devons négocier avec des interlocuteurs qui ne sont pas toujours les mêmes et dont les opinions peuvent évoluer?

Je dis au chef de l'Opposition que la position du gouvernement du Québec a été clairement exprimée. Je prends l'exemple de l'amnistie, qu'il n'était pas question d'accorder l'amnistie. Nous avons toujours maintenu cette position. Le Procureur général l'a répétée à plusieurs reprises. Pour la question des terres, ça relève du gouvernement fédéral. Sur tous les points, nous avons énoncé la position du Québec et nous discutons avec des interlocuteurs. Les interlocuteurs qui discutent actuellement avec le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec ne sont pas les mêmes que la semaine dernière, du moins, dans une très bonne partie.

Alors, la situation... On ne peut pas comparer - si je puis dire au chef de l'Opposition - les détails concrets et précis d'une opération militaire qui est faite, forcément, en collaboration avec le gouvernement du Québec. L'opération... Le chef de l'état-major l'a dit à plusieurs reprises, il reçoit ses instructions, pour ce qui a trait aux objectifs, du gouvernement du Québec. Nous avons demandé l'intervention de l'armée. Nous avons demandé le déplacement de l'armée dans les régions de Châteauguay et d'Oka. Nous avons demandé à l'armée de remplacer la Sûreté du Québec aux barricades et nous avons demandé à l'armée de démanteler les barricades.

L'action concrète, les moyens précis, ce sont des moyens de nature militaire qui peuvent très bien être exprimés, quoique, à l'occasion, les dirigeants militaires ont refusé de dévoiler - ça se comprend tout à fait - certains éléments de leur action. Mais quant aux négociations, qui durent depuis des décennies ou même des siècles, on ne peut pas demander au gouvernement du Québec de régler un problème qui a été créé par une décision du roi Louis XV.

Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que ce problème dure depuis des siècles. Les revendications territoriales existent depuis des siècles et nous essayons - dans une situation très complexe - d'arriver à une solution pacifique.

Le Président: Toujours en question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeaù: M. le Président, puisque deux membres au moins du gouvernement ont indiqué qu'à l'occasion des négociations qui ont marqué la signature d'une entente par deux ministres, un juge en chef et un Warrior masqué, le gouvernement avait été entraîné dans un traquenard, puisque, dans la seconde ronde de négociations, les négociateurs de Québec et d'Ottawa, lorsqu'ils ont rompu les négociations, ont présenté ces négociations comme une sorte de bouffonnerie, est-ce que le premier ministre trouve anormal qu'à l'occasion de cette troisième ronde de négociations, pas seulement nous, mais nous au nom du public, nous lui demandions: Voulez-vous nous dire ce qui se passe?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Par ses questions mêmes, le chef de l'Opposition met lui-même en relief la complexité de la situation, en ce sens qu'il y a des changements d'interlocuteurs et qu'à cause du changement des interlocuteurs, de l'évolution des positions ou du changement des points de vue et des contradictions mêmes, à l'occasion, entre différents groupes, la situation du côté des deux gouvernements n'est pas simplifiée. Il vient de le démontrer lui-même, mais comme nous voulions arriver - et je pense qu'on représentait la très grande majorité de la population - à une solution du conflit sans affrontement armé, il était évident que ça prendrait un certain temps pour en arriver à cette solution pacifique, sans affrontement armé. Il aurait été facile, pour le gouvernement, il y a quelques semaines, de demander à l'armée d'intervenir d'une façon directe et en risquant un affrontement armé. (12 h 20)

Je demande au chef de l'Opposition de ne pas oublier qu'il y a quand même eu une victime, le caporal Lemay, et, dès ce moment-là, les risques de tout affrontement devenaient par eux-mêmes extrêmement sérieux. Il y avait également eu deux victimes dans un affrontement à Akwasasne il y a quelques semaines. Alors, ce n'est pas un contexte normal. C'est une situation tout à fait particulière, avec des risques incalculables dans toutes les décisions qui étaient prises et qui étaient compliquées par les changements d'interlocuteurs. C'est pourquoi, actuellement, avec ces nouveaux interlocuteurs, nous discutons toujours de la position du gouvernement du Québec. Il y a deux semaines, il y a une semaine, on pariait des propositions du 27 juillet; on parie encore des propositions du 27 juillet. de notre côté, la position a toujours été la même. malheureusement, je ne peux pas faire la même affirmation pour nos interlocuteurs.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Oui, M. le Président, en complémentaire. Face aux interlocuteurs, est-ce que le ministre délégué aux Affaires autochtones peut nous dire si, à la table de négociation qui se tient à Dorval actuellement ou qui s'est tenue à Dorval, il y avait des négociateurs seulement du Québec ou s'il y en avait d'autres qui provenaient de l'Ontario ou de l'État de New York?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Ciaccia: M. le Président, la Confédération des six nations iroquoises a demandé d'intervenir afin que nous puissions discuter avec elle pour essayer de trouver une solution au conflit. Alors la Confédération des six nations iroquoises, ce ne sont pas seulement celles du Québec, mais elle représente l'ensemble des Mohawks et des autres nations iroquoises en Ontario, dans l'État de New York et au Québec. À la table de négociation, de discussion qui a eu lieu à Dorval, elle s'est impliquée, mais en présence majoritairement des représentants de Khanawake et de Kanesatake, d'Oka. Alors, les discussions qui ont eu lieu à la table avant-hier et jusqu'à tôt ce matin, se passaient avec les représentants de ces deux communautés, je pourrais dire, chapeautées par cette Confédération qui cherche une solution pacifique et qui cherche à solutionner beaucoup de problèmes qui existent dans les communautés mohawks présentement.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Westmount.

M. Holden: Thank you, Mr. Speaker. My supplementary question is for the Premier. Has the government contemplated setting up a judicial inquiry to study the police violence and the mob violence which has been happening these days in and around Montréal and particularly which started with the ill-fated attack by the Québec police Force on July 11th, 1990?

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Bourassa: le ministre de la justice a fait plusieurs déclarations sur les incidents qui sont survenus à quelques reprises. alors, je lui demanderais de compléter la réponse.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, ma position est la même que celle que j'avais au lendemain du 11 juillet. Personne n'est au-dessus de la loi. La loi doit s'appliquer peu importe la race, la langue, la religion ou tout autre élément. Comme ministre de la Justice, je peux appartenir à un gouvernement. Comme Procureur général, je n'appartiens à aucun gouvernement, aucun parti politique, et mes décisions sont prises, en mon âme et conscience, en fonction des éléments de preuve qu'on présente devant moi. Au fur et à mesure que ces éléments de preuve nous sont présentés, nous les étudions; plusieurs dossiers ont été ouverts et la justice va suivre son cours d'une façon exactement semblable à celui qu'elle doit suivre dans tous les autres cas où on enfreint des éléments qui sont fondamentaux au respect de notre liberté et de notre démocratie, c'est-à-dire notre règle de droit; que ce soit d'un côté ou de l'autre des barricades, peu importent les citoyens, la justice va s'appliquer.

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition.

Trafic d'armes à Kahnawake et Akwesasne

M. Chevrette: M. le Président, partant précisément du principe que tout le monde est égal devant la loi, je voudrais demander... Ma question s'adressera au ministre de la Sécurité publique. Le 16 août dernier, on apprenait, par la voie des médias, que les Warriors amassaient des stocks d'armes importants à Kahnawake et à Akwesasne. Comment se fait-il... Ça a été confirmé également par le premier ministre du Québec qu'ils étaient au courant depuis au moins trois ans. Ma question s'adresse au ministre de la Sécurité publique. Comment se fait-il qu'il ne sort pas intervenu préalablement pour désarmer, pour saisir les armes, si c'est vrai, votre principe de justice: Tout le monde est égal?

M. Bourassa: M. le Président, je vais laisser... Le ministre pourra compléter, mais, puisque le leader parlementaire m'a impliqué, tout le monde savait, et c'était de notoriété publique, qu'il y avait du trafic d'armes qui se faisait. Il y a même eu des incidents à Akwesasne à cet égard-là. Le problème s'est compliqué par le fait qu'il y avait quatre juridictions: il y avait les Etats-Unis, il y avait la Sûreté du Québec, la Gendarmerie royale et la police de l'Ontario. Donc, il faut faire une distinction entre reconnaître qu'il y a un trafic d'armes, qui ne se fait pas en. plein jour, et la connaissance de l'ampleur qui, elle, a pu être beaucoup plus récente. Et il faut quand même tenir compte aussi qu'il y a quatre juridictions qui étaient impliquées, ce qui suppose la collaboration des quatre juridictions pour assurer la pleine efficacité de l'action. Alors, je demanderais au ministre de compléter ma réponse.

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Elkas: M. le Président, pour compléter la réponse du premier ministre, je devrais mentionner que nous avons conclu une entente avec Akwesasne, il n'y a pas longtemps, ainsi qu'avec les Hurons, à l'effet que l'on devait avoir une force policière à l'interne, conformément à nos lois. J'ai discuté avec le chef Joe Norton, ce printemps, d'une entente semblable. On voulait conclure celle d'Akwesasne. On a toujours voulu, évidemment, l'autonomie pour ces gens. On voulait respecter cette autonomie, mais on voulait absolument s'assurer qu'il y ait une force policière qui respecte les lois du Québec.

Le Président: En complémentaire, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: En additionnelle, M. le Président. M. le Président, le premier ministre vient d'invoquer des questions juridictionnelles, des conflits de juridictions. N'est-il pas exact qu'à l'article 39 du Code criminel la Sûreté du Québec est responsable, sur le territoire, de garder la paix, notamment sous le chapitre des armes prohibées? Comment expliquer que vous sachiez tout ça depuis trois ans et que vous n'ayez pas détaché des policiers pour saisir ces armes et faire en sorte qu'on ne se retrouve pas avec la crise qu'on vient de vivre?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Elkas: Très facile de le dire, M. le Président. Vous étiez là, entre 1976 et 1985; je me demande quelle sorte d'action vous avez prise. Nous, faisant face à des caches d'armes, on n'avait pas nécessairement d'informations au niveau du volume d'armes. On savait qu'il y avait des armes. D'ailleurs, nos interventions auprès du chef Norton, du chef Mitchell d'Akwesasne, c'était pour contrôler ces armes. Les ententes, c'était pour s'assurer qu'on ait des forces policières à l'intérieur qui pourraient s'assurer qu'il n'y en ait pas. (12 h 30)

D'ailleurs, lorsqu'on regarde la situation à Akwesasne, c'est très simple: On a 75 policiers sur les lieux et il n'y a pas d'armes. C'est un peu ça les raisons pour lesquelles les gens d'Akwesasne sont intervenus à Oka. Ils veulent que la Sûreté du Québec se déplace d'Akwesasne pour qu'il y ait un trafic d'armes et toute autre chose. La présence de notre police est là. On a fait notre job. Elle va se maintenir là tant et aussi longtemps qu'on va avoir un corps policier sur place qui va s'assurer que la loi est respectée.

Le Président: En complémentaire, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, quand le ministre de la Sécurité publique a été mis au courant du trafic d'armes, quelles dispositions a-t-il prises pour que ce trafic cesse? Quelles dispositions a-t-il prises pour en faire la saisie? Quelles dispositions a-t-il prises - ça, ce n'est pas la juridiction du fédéral, c'est provincial - et quelles actions concrètes, à part discuter avec M. Norton, a-t-il prises pour protéger le public?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Elkas: M. le Président, les dispositions qu'on a prises, ce sont des discussions avec les deux chefs. On s'est assis avec le chef Mitchell d'Akwesasne pour s'assurer que ces gens-là aient en place une force policière qui fera respecter la loi. J'ai envoyé... On a "dispatché", on a dépêché des gens de la Sûreté du Québec pour s'assurer que les lois, soient respectées. C'est un peu quand on a su qu'il y avait des caches d'armes, des armes qui se transportaient entre les US et le Canada, c'est là qu'on a agi et on a agi d'une façon très responsable.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: dernière question additionnelle, m. le leader de l'opposition.

M. Chevrette: ...il ne faut pas prendre les gens pour des valises. est-ce que le ministre peut confirmer que, depuis trois ans, il sait qu'il y a un trafic d'armes? est-ce qu'il peut confirmer...

Une voix: II l'a dit.

M. Chevrette: ...qu'il discutait avec le chef Norton pour installer une police amérindienne, tout en restant tout à fait inactif sur le plan de la responsabilité du Québec, de protéger les citoyens, non pas en vertu des juridictions, en vertu du Code criminel qui s'applique au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Elkas: m. le président, à savoir si j'étais au courant qu'il y avait des caches d'armes depuis trois ans, j'étais maire de la ville de kirkland dans ce temps-là, alors... je suis ici depuis 10 mois.

M. Chevrette: Le ministre peut bien avoir admis qu'il s'était fait avoir, M. le Président.

Le Président: Un instant, un instant! Alors, question additionnelle.

M. Chevrette: La responsabilité, M. le Président, vous comprendrez qu'elle est au gouvernement. On sait qu'il est là depuis un an et il a bien hâte de partir. Ce n'est pas ça qu'on veut savoir.

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Ce qu'on veut savoir de sa part: depuis un an, qu'a-t-il fait auprès de la Sûreté du Québec pour la mandater spécifiquement pour contrer ce trafic d'armes et mettre ainsi en danger une population, créer une crise de 50 jours, créer une insécurité totale? Qu'a-t-il fait comme action concrète?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Elkas: M. le Président, on a envoyé 75 policiers de la Sûreté du Québec à Akwesasne pour régler la question des armes.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre...

Le Président: Dernière question additionnelle.

M. Chevrette: ...peut nous dire quand il a envoyé 75 policiers de la Sûreté du Québec à Akwesasne? À quelle occasion? Est-ce que c'était pour contrer la crise - il n'a rien fait - ou s'il admet explicitement ou implicitement que, dans le fond, il n'a rien fait pour désarmer ces gens?

Une voix: II y avait deux morts.

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Elkas: Six mois après mon arrivée.

Le Président: À l'ordre! Question principale, M. le député de Duplessis.

Suites données à la résolution du 20 mars 1985 reconnaissant les nations autochtones

M. Perron: Oui, M. le Président. Le 9 février 1983, le Conseil des ministres du gouvernement du Parti québécois répondait aux demandes formulées par les autochtones du Québec en 1982 et adoptait 15 principes énonçant la politique du Québec à leur égard. Le 20 mars 1985, le regretté M. René Lévesque présentait à l'Assemblée nationale une motion qui était adoptée, reconnaissant l'existence des nations autochtones du Québec, ainsi que leurs droits, s'appuyant sur les 15 principes déjà mentionnés. On se rappellera que cette résolution était rejetée par tous les députés de l'Opposition de l'époque, au

nombre de 44. Lors de son intervention en Chambre, l'actuel ministre délégué aux Affaires autochtones demandait au gouvernement de retirer cette résolution, la qualifiant de très limitative et disant qu'elle restreindrait et affaiblirait considérablement la position des autochtones. Lors de la conférence constitutionnelle d'avril portant sur les droits des autochtones, il concluait en soulignant que l'adoption de cette résolution serait très disgracieuse envers les autochtones, malgré que les autochtones étaient d'accord.

Après avoir plongé le Québec dans une crise sans précédent et en être venu à un doigt de la catastrophe, le ministre délégué aux Affaires autochtones peut-il nous dire ce que son gouvernement a fait depuis 1985 face à cette résolution du 20 mars 1985 et face aux 15 principes de 1983?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Ciaccia: M. le Président, premièrement, je voudrais rectifier une des affirmations du député de Duplessis, quand il dit que les autochtones étaient d'accord avec la résolution. Ce n'est pas exact, pour ne pas dire que c'est absolument faux. Et la raison pour laquelle nous avions voté contre la résolution, c'est que nous avions obtenu des représentations de toutes les communautés autochtones du Québec contre cette résolution et je vais vous dire pour quelle raison. Parce que votre résolution n'allait pas dans le sens d'enchâsser les droits des autochtones dans la constitution canadienne, parce que le programme de votre parti n'acceptait pas la constitution canadienne. Et nous - c'était avant le lac Meech, je dois vous le souligner - nous acceptions de discuter et nous acceptions le principe que ces droits pouvaient être enchâssés. C'est pour ces raisons que nous avons été contre cette résolution, et c'est pour cette raison que les autochtones eux-mêmes étaient contre la résolution que vous aviez déposée à l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne ce que nous avons fait depuis, je peux vous dire que nous sommes allés beaucoup plus loin. Nous avons été beaucoup plus loin en répondant aux attentes des autochtones. Écoutez, si vous voulez faire de la petite politique...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Pour le bon ordre de l'Assemblée, si on veut que le ministre réponde à la question posée, je vous demanderais de lui laisser la parole. Si vous avez des commentaires, vous pourrez les manifester dans d'autres questions complémentaires. En conclusion, M. le ministre. S'il vous plaît!

M. Ciaccia: Nous...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre, rapidement en conclusion, s'il vous plaît.

M. Ciaccia: Alors, rapidement, M. le Président. Nous avons entrepris avec les autochtones des discussions sur le gouvernement autonome. C'est ça qu'ils voulaient et nous avons des décisions du Conseil des ministres nous autorisant à poursuivre ces discussions. C'est ça le vrai problème des groupes autochtones de vouloir discuter sur ces sujets, ce que nous faisons et ce que nous sommes prêts à continuer et à poursuivre et à régler avec les groupes autochtones au Québec.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, est-ce que le ministre délégué aux Affaires autochtones peut s'engager à tenir très prochainement une commission parlementaire afin d'examiner les suites données depuis cinq ans à la résolution du 20 mars 1985, ainsi que les ententes qui auraient été conclues avec certaines nations autochtones du Québec depuis la présence des libéraux au pouvoir?

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, je suis prêt en tout temps et en toute transparence à discuter de tous les actes que le gouvernement libéral a pris envers les autochtones, incluant l'entente de la Baie James qui n'a pas été respectée à certains égards entre 1965 et 1985. Mais, en ce qui concerne la tenue d'une commission parlementaire, je vais examiner la proposition du député de Duplessis et je lui laisserai savoir en temps et lieu si c'est le vrai forum pour en discuter. Parce qu'une des accusations - et peut-être que vous n'avez pas encore appris cette leçon - que nous avons c'est qu'on discute ces choses-là entre nous. Le problème des autochtones, ce n'est pas à la commission parlementaire. Le problème des autochtones, c'est dans leurs communautés, leurs problèmes sociaux, leurs problèmes économiques. Il faut répondre à leurs revendications sur le terrain et ce n'est pas seulement en discutant dans une commission parlementaire, en faisant de la partisanerie d'un côté ou de l'autre et en les utilisant, les autochtones, pour des fins politiques, comme vous semblez le faire aujourd'hui, qu'on va résoudre les problèmes. (12 h 40)

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Duplessis.

M. Perron: Oui, M. le Président. Puisque le ministre délégué aux Affaires autochtones a parlé

d'ententes qui auraient été conclues avec certaines nations autochtones du Québec depuis la présence de son gouvernement, est-ce que le ministre peut déposer, en cette Chambre, les ententes qui auraient été conclues, pour qu'on puisse être bien informés de la situation actuelle et, aussi, de ce qui a amené les problèmes que nous avons actuellement?

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: C'est avec grand plaisir que nous allons déposer les ententes qui ont été conclues. Vous allez voir que c'est la solution; dans ces ententes qui ont été acceptées par les autochtones, nous avons répondu à leurs attentes.

Le Président: Une question additionnelle, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Ubman: Merci, M. le Président. C'est pour la ministre de l'Énergie et des Ressources. La ministre peut-elle laisser savoir à l'Assemblée nationale quel est le statut ou quelles sont ses intentions vis-à-vis des audiences impartiales sur l'impact environnemental de la Baie James II qui, sûrement, va avoir un impact sur nos peuples autochtones?

Le Président: M. le député, je regrette. Je ne crois pas qu'on puisse rattacher cette question à la question principale. Ce pourrait être une question principale ultérieurement que nous pourrions reconnaître. En question principale maintenant, M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président... Le Président: Oui. Un instant.

M. Ciaccia: Un complément d'information au député de Duplessis.

Le Président: Alors, un complément d'information. Est-ce qu'il y a consentement? M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Ciaccia: Les ententes signées auxquelles vous avez fait référence ont déjà été déposées par le gouvernement à l'étude des crédits, mais ça va me faire un plaisir de vous en envoyer d'autres copies.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais demander une question additionnelle pour rectifier la réponse qui vient d'être donnée.

Le Président: Alors, une question addition- nelle.

M. Chevrette: Ce qu'on veut savoir, M. le Président, c'est: Est-ce que le ministre s'engage à parler un jour de ce qui se trame à Dorval? Va-t-il déposer les ententes qu'il est en train de conclure? C'est ça, fondamentalement. On dit: Les autres ententes.

M. Perron: Les autres.

M. Ciaccia: M. le Président...

M. Perron: Pas celles qu'on connaît déjà.

Le Président: Un instant. Votre question est complémentaire, évidemment, parce qu'elle s'ajoute à la question du député de Duplessis. M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, ne commençons pas à jouer avec les mots et à changer la question du député de Duplessis. Le député de Duplessis m'a demandé de déposer les ententes signées; il n'a pas fait référence aux ententes en discussion. Je me suis engagé à le faire et j'ai porté à son attention le fait que les ententes auxquelles il faisait référence ont déjà été déposées aux crédits, et je suis prêt à les lui renvoyer encore. S'il y en a qui n'ont pas été déposées, M. le député de Duplessis... On m'informe qu'elles ont été déposées, mais ça va me faire un grand plaisir de les redéposer et de vous en donner des copies.

Une voix: Parfait.

Le Président: En question principale, M. le député de Labelle.

Impact de la TPS en 1991

M. Léonard: Oui, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre des Finances qui nous a déposé ce matin un document de 93 pages comportant de multiples tableaux, comme je disais, et que les parlementaires viennent tout juste de recevoir. Évidemment, ces tableaux portent sur l'année 1992 dont il a traité longuement dans sa déclaration ministérielle. Mais il y a aussi quelques renseignements sur les budgets 1990-1991 et 1991-1992. En particulier, il a fait longuement état des bénéfices, paraît-il de sa déclaration ministérielle, mais il faut voir tout de suite, dans ces tableaux, qu'il a inclus l'indexation de 4,5 % du régime d'imposition et des allocations familiales et l'indexation aussi des programmes de sécurité du revenu, ce qui fait que ça comporte tout de suite 381 000 000 $ qui n'ont rien à voir avec l'ensemble du tableau, avec la question de la TPS comme telle, parce que cette indexation aurait eu lieu de toute façon.

M. le Président, pour les années 1990-1991 et 1991-1992, c'est-à-dire l'impact de l'imposition de la TPS en 1991 le ministre peut-il nous confirmer que l'impact sera de 329 000 000 $, le coût net, d'au moins 329 000 000 $ aux contribuables québécois?

Le Président: Alors, M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, la question du député de Labelle me permet d'ajouter quelques éléments, je pense, qui vont intéresser cette Chambre. D'abord, on parle de l'indexation pour 1992 dont j'ai fait part, évidemment, dans les documents auxquels il fait allusion. Je pense qu'il était important de faire connaître immédiatement à cette Chambre et à la population nos intentions quant à l'indexation de 1992. Et je reprends une phrase du député de Labelle, qui dit: Cette indexation aurait eu lieu de toute façon. Or, M. le Président, il ne faut pas retourner bien loin au cours des années où l'honorable député faisait partie d'un gouvernement qui, à certains moments, a oublié d'indexer ou qui n'a pas voulu indexer. Alors, il était important pour nous d'indiquer que nous avions l'intention de continuer la politique que nous avons maintenue depuis notre arrivée au pouvoir; c'est-à-dire, chaque année, cette année comme les autres et l'année 1992 également, nous avons indexé et nous continuerons d'indexer et les allocations familiales, et le régime d'impôt, et les APTE, et les APPORT. Nous allons continuer de le faire et nous avons même donné le montant d'indexation que nous allions annoncer, et nous l'avons fait tout de suite.

Deuxièmement, il était important, parce que nous parlions justement de TPS et des taxes à la consommation du Québec, d'indiquer que nous ne ferions pas comme le gouvernement fédéral. Il indexe, oui, mais il indexe à l'IPC moins 3 %. Ce qui veut dire à peu près, quoi, 1 1/2 %. Nous, au Québec, nous allons avoir une indexation pleine et entière de 4,5 %.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, je demanderais la collaboration des députés, s'il vous plaît. Alors, en question additionnelle, M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, pourquoi le ministre refuse-t-il de répondre à la question qui porte, pour les années 1990-1991 et 1991-1992, sur l'impact de sa déclaration, qui est de 329 000 000 $? Et pourquoi, lui qui fait des tableaux pour l'année 1992, lorsqu'il a fait son discours sur le budget, a-t-il camouflé ce fait que cet impact était déjà compris dans les impacts financiers du discours sur le budget?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, le député de Labelle utilise un vocabulaire assez fort pour simplement poser une question! C'est clair, M. le Président, et je l'ai mentionné tout à l'heure dans ma déclaration, que pour les trois ans, 1990-1991, 1991-1992 et 1992-1993, le résultat net, le "bottom line* pour employer un mot chez nos amis d'Égalité, c'était moins 19 000 000 $. C'est ça, M. le Président. Si on prend une année, on peut dire l'année 1991-1992, il y a là un plus, c'est vrai, mais il y a un moins à peu près semblable en 1992-1993. Alors, ce que nous disons, c'est que dans ces trois années-là - parce que je pense qu'il faut prendre une certaine période pour voir les effets - les effets, pour le gouvernement, c'est moins 19 000 000 $. Je dis donc que c'est un effet neutre au point de vue des revenus du gouvernement.

Alors, je réponds: Oui, mais en même temps, tenez compte de l'ensemble des trois. Et l'ensemble des trois donne ce moins 19 000 000 $, je pense. Donc, autrement dit, c'est un effet neutre.

Le Président: Question principale, Mme la députée de Taillon.

Taxe imposée sur les ventes de biens essentiels

Mme Marois: Merci, M. le Président. On se souviendra que le gouvernement du Parti québécois avait aboli la taxe de vente sur des biens essentiels, entre autres sur les chaussures, les meubles, les appareils électroménagers de base, de même que les vêtements. Tous s'étaient entendus, à ce moment-là, pour dire que cette décision avait eu un impact sur les secteurs manufacturiers concernés, soit dans le cadre d'une relance de ces secteurs-là, ou soit dans le cadre du maintien de ces secteurs économiques qui, on le sait, sont, dans l'économie québécoise, des secteurs fragiles.

Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, que le ministre des Finances, en choisissant de taxer ces biens, nous dit qu'il laisse tomber, qu'il abandonne un soutien important à ces industries qui donnent du travail à des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses au Québec, M. le Président? (12 h 50)

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, je suis heureux de la question posée par Mme la députée parce que ça me permet justement de faire une précision à cet effet.

D'abord, on peut prendre les contribuables, et, deuxièmement, les entreprises. Quant aux contribuables, j'ai eu l'occasion de mentionner deux choses importantes. Premièrement, ces

exemptions profitaient beaucoup plus aux mieux nantis qu'aux moins bien nantis. Et j'ai mentionné, justement, des chiffres qui sont une preuve éclatante à cet effet. Deuxièmement, même dans ce cas-là, les crédits d'impôt remboursables que j'ai annoncés font en sorte que les gens de revenus bas et moyens vont être protégés.

Quant à l'entreprise, c'est là la question de Mme la députée: Est-ce que ça va avoir un impact sur les entreprises elles-mêmes? Or, M. le Président, il ne faut pas oublier de distinguer entre le genre de taxe à la consommation que nous avons de 9 % actuelle, par rapport à ce qui est présenté dans notre projet et qui fait en sorte que les intrants seront exemptés de taxe. De sorte que, prenez par exemple dans le cas du meuble, la TPS remplace une taxe, qui était déjà là, de 13 %. Bon. Et, deuxièmement, notre propre taxe de 1992, le nouveau genre qui va remplacer les 9 %, mais qui sera de 7 % - sera remboursée au niveau de l'entreprise, de sorte que pour l'entreprise elle-même, d'après les études qui ont été faites au ministère des Finances - parce que nous n'avons pas fait ça, vous savez, d'une façon absolument aveugle, je l'espère du moins - en me fiant sur le rapport des économistes qui ont fait ces études-là, l'impact sur les meubles sera positif plutôt que négatif, comme le craint Mme la députée, et presque sans effet du côté des vêtements.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: M. le Président, si des études d'impact ont été faites, si effectivement le ministre nous affirme ici qu'il n'y aura pas d'impact sur ces secteurs, donc, pas de perte d'emplois ou si peu, semble-t-il nous dire, dans ces secteurs industriels, est-ce qu'il peut nous déposer ces études d'impact, ici, à l'Assemblée nationale?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Je suis heureux, M. le Président, de pouvoir dire à Mme la députée que je la convie à la commission parlementaire, le 6 septembre prochain. J'aurai là l'expertise nécessaire pour répondre justement et déposer, s'il y a lieu, les documents pertinents.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que la ministre des Affaires culturelles est au courant de l'étude fédérale, canadienne qui prouve que la TPS Wilson va faire chuter, dans le domaine de l'édition, les ventes de 17,5 % et que celle de son collègue va les faire chuter de 20 % additionnels, donc en tout de 40 %? Est-ce que la ministre est d'accord, oui ou non, avec la nouvelle taxe qui s'ajoute avec la décision de son collègue, le ministre des Finances?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Robillard: M. le Président, je suis très consciente de l'impact de la TPS sur différentes activités culturelles au Québec. En particulier, on sait que, dans certaines industries culturelles, on peut avoir des impacts. L'industrie du livre est une des industries qu'on doit suivre de très près. Il ne faut pas oublier non plus que, d'un côté, il y a de fait la TPS qui va être appliquée à l'industrie du livre, mais, d'un autre côté, les industries culturelles vont pouvoir bénéficier aussi de crédits à l'intrant. Alors, dans ce sens-là, nous sommes en train d'analyser cela, avec nos collègues des Finances d'ailleurs, pour en connaître vraiment les impacts réels. En fin de compte, quel sera l'écart dans le domaine de l'industrie du livre? De plus, on peut peut-être supposer que, dans le domaine de l'exportation, il pourra y avoir des bénéfices. Alors, je veux assurer cette Chambre que je suis ce dossier de très près et que nous pourrons réajuster nos mesures en conséquence.

Des voix: Très bien.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions.

Il n'y a pas de vote reporté.

Avis touchant les travaux des commissions.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Je demanderais la collaboration des députés, s'il vous plaît. Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît.

Projet de loi 82 Adoption du principe

Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour suivant l'ordre adopté par la Chambre. M. le ministre délégué aux Transports propose maintenant la motion d'adoption du principe du projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine. Alors, je vais maintenant reconnaître M. le ministre délégué aux Transports.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, la population de la région de Châteauguay fait face à une situation sans précédent, le gouvernement du Québec en est fort conscient. Les événements qui perdurent depuis une cinquantaine de jours sont venus contribuer à une situation problématique

au niveau des déplacements quotidiens d'un bassin de population de la rive sud de Montréal de plus en plus considérable. Cette population a vécu des moments extrêmement difficiles et pénibles. Peu de citoyens au Québec ont eu à vivre une situation aussi délicate, aussi explosive. Ces gens, M. le Président, ont été privés pendant une cinquantaine de jours de leur lien direct et principal avec IHe de Montréal, ce qui leur a occasionné des détours de plusieurs dizaines de kilomètres. Ces personnes ont également subi de profonds désagréments, autant au niveau financier qu'au niveau de l'emploi. Je vous le dis avec toute la vigueur que je peux mettre dans mon intervention, M. le Président, il ne faut plus que ce genre de situation se reproduise.

La construction de ce tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine doit se faire dans les plus brefs délais. Même si aujourd'hui la situation semble se résorber, il nous faut apporter des solutions permanentes. C'est pourquoi le gouvernement du Québec, par l'intermédiaire du ministère des Transports, a décidé d'intervenir rapidement et efficacement.

Nous nous devions d'apporter une solution permanente et réaliste aux problèmes de circulation que vit quotidiennement la population de ce secteur de la rive sud de Montréal. Je le répète, M. le Président, c'est la notion d'efficacité qui a guidé le ministère des Transports dans sa décision de devancer les travaux de construction de l'autoroute 30 afin de contourner la réserve amérindienne de Kahnawake. J'aimerais d'ailleurs, M. le Président, à ce stade-ci, saluer cette population et ses représentants qui sont présents dans les tribunes pour l'esprit d'ouverture et de tolérance qu'ils ont démontré dans une situation, il faut bien le dire, très difficile à accepter, une situation extrêmement difficile, complexe et inédite. Comme le soulignait notre premier ministre, je ne crois pas qu'on puisse trouver de précédent d'un gouvernement et d'une population qui, presque dans un centre-ville, doivent compter avec un très grand nombre de personnes armées qui défient ouvertement l'ordre public. C'est à cette population que je veux aujourd'hui signifier notre volonté très ferme de lui livrer ce lien routier indispensable qu'est l'autoroute 30. Je voudrais ajouter que le projet de l'autoroute 30, dans son ensemble, se veut un projet prioritaire d'une voie de contournement rapide et efficace de l'île de Montréal.

Permettez-moi maintenant, M. le Président, de brosser brièvement le tableau de la situation qui prévaut. Le 9 août dernier, mon collègue ministre des Transports et ministre de la Sécurité publique annonçait qu'il amorçait toutes les démarches nécessaires afin de réaliser, dès cette année, un tronçon de 8,5 kilomètres de l'autoroute 30 reliant le boulevard Ford, à Châteauguay, à la route 132, à Sainte-Catherine, sur la rive sud de Montréal. Évalué à près de 10 000 000 $, ce projet consiste à construire d'abord une chaussée à deux voies de circulation. Dès l'an prochain, les travaux se poursuivront afin de compléter la deuxième chaussée, les étagements et les échangeurs. Il a également été décidé que le ministère des Transports procédera, toujours l'an prochain, à la construction de deux chaussées d'autoroute entre le boulevard Ford et la route 138, à Châteauguay. On parle donc, M. le Président, d'un projet autoroutier de 12,5 kilomètres, évalué à 43 800 000 $, qui reliera la route 138, à Châteauguay, et la route 132, à Sainte-Catherine. (13 heures)

Nous avons également décidé récemment de procéder dès cette année à la première phase du tronçon entre la route 138, à Châteauguay, et le rang Sainte-Marguerite, à Mercier. Cette première phase aura comme conséquence de soulager la circulation urbaine de Châteauguay et profitera grandement aux usagers en provenance de Châteauguay, de Mercier et des villes plus à l'ouest, comme Léry, Maple Grove et Beauhar-nois. Je suis convaincu, M. le Président, qu'il s'agit là d'une mesure additionnelle considérable qui contribuera grandement à améliorer la circulation routière au bénéfice de la population de toute cette région.

Par ailleurs, pour procéder à la réalisation de ce projet autoroutier le plus rapidement possible, le Conseil des ministres a autorisé, lors de sa séance du 15 août dernier, que le projet soit soustrait de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, prévue à la section IV. 1 du chapitre I de la Loi sur la qualité de l'environnement.

La loi stipule que, lorsque la réalisation dans les meilleurs délais d'un tel projet de construction routière est requise afin de prévenir les dommages d'une catastrophe réelle ou appréhendée, le gouvernement peut, sans avis, soustraire ce projet de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. Le gouvernement doit, dans ce cas, "délivrer un certificat d'autorisation pour le projet et l'assortir des conditions qu'il juge nécessaires pour protéger l'environnement." C'est ce que nous avons fait, M. le Président.

Toujours à la même séance du 15 août, le Conseil des ministres a également ordonné, par décret, que soit enclenché le processus d'expropriation visant la réalisation de ce projet autoroutier. Je tiens ici à rappeler que ces deux décrets sur l'environnement et l'expropriation visent la totalité du tronçon de l'autoroute 30, entre la route 138 à Châteauguay et la route 132 à Sainte-Catherine, soit 12,5 kilomètres. D'ailleurs, la teneur de ces deux décrets ministériels est reconduite dans le présent projet de loi spécial.

Aujourd'hui, M. le Président, je présente aux membres de cette Assemblée un projet de loi qui a pour objectif d'accélérer le processus d'acquisition des immeubles nécessaires à la

construction de l'autoroute 30 entre les municipalités de Châteauguay et de Sainte-Catherine et à l'extérieur de la réserve de Kahnawake. La décision de présenter ce projet de loi a été prise le 22 août par le Conseil des ministres.

Les membres de cette Chambre savent tous que la loi actuelle sur l'expropriation prévoit différents avis et délais procéduraux, et que l'exercice de certains recours, avant qu'un expropriant puisse prendre possession d'un bien exproprié, occasionne des délais additionnels. Sous l'actuelle loi, l'application des délais et recours aurait pour effet, dans la meilleure des hypothèses, de reporter le début des travaux de construction de ce tronçon de l'autoroute 30 au début de novembre 1990. Devant ce constat, nous avons donc voulu présenter un projet de loi spécial sur l'expropriation, qui contient quelques modifications quant à la loi actuelle. Nous avons donc comme objectif, grâce à ce projet de loi spécial, M. le Président, de permettre une procédure tout aussi spéciale d'expropriation afin de réduire au maximum les délais qu'impose la loi actuelle d'expropriation.

Cependant - et il est important de le noter - des mesures d'atténuation des inconvénients que pourraient subir les personnes expropriées seront mises de l'avant. Pour illustrer mon propos, M. le Président, et à titre d'exemple, le ministère des Transports devra, avant de prendre possession d'un bien exproprié, verser une indemnité substantielle à l'exproprié afin de lui éviter tout inconvénient de nature financière. De plus, les garanties de juste indemnisation de la loi actuelle seront maintenues, puisque la Chambre de l'expropriation sera appelée à fixer l'indemnité définitive comme c'est le cas présentement. Bien que ce jugement de la Chambre de l'expropriation deviendra exécutoire, puisqu'il sera homologué par la Cour supérieure, la personne visée par l'expropriation aura toujours la possibilité d'aller devant la Cour d'appel contester cette indemnité, si elle la juge inappropriée ou insuffisante. Il devient donc évident, M. le Président, que notre action s'inscrit dans une démarche qui vise l'amélioration non seulement de la circulation routière sur la rive sud de Montréal, mais également de la qualité de vie de ces citoyens et citoyennes dont la patience et la bonne volonté sont appréciées par tous les membres en cette Assemblée.

Le projet de loi spécial que nous étudions aujourd'hui donnera certains pouvoirs additionnels au ministre des Transports. Ces pouvoirs ne seront utilisés par le ministre des Transports que pour le tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine. Je suis persuadé que les membres de cette Chambre ont compris que de tels pouvoirs ne seront exercés par le ministre qu'en fonction de l'intérêt et pour le mieux-être de la population concernée. Il est important de noter, M. le Président, que le projet de loi spécial que je présente aujourd'hui à l'Assemblée nationale est une loi d'ordre très technique. Nous discuterons donc simplement des moyens et des procédures à appliquer afin d'arriver à accélérer le processus d'acquisition des terrains qui sont requis afin de procéder aux travaux sur l'autoroute 30.

Ainsi, M. le Président, ce projet de loi m'autorisera à procéder à la construction du tronçon projeté et à exercer à cette fin les pouvoirs prévus dans la Loi sur la voirie, de même qu'à acquérir à l'amiable ou par expropriation les biens que nous jugerons nécessaires. La loi spéciale nous permettra également d'acquérir à l'amiable ou par expropriation les biens que nous jugerons nécessaires à la relocalisation des lignes d'Hydro-Québec et de mettre à la disposition d'Hydro-Québec les biens ainsi acquis.

D'autre part, la loi spéciale permettra que les actes concernant la construction du tronçon, plus particulièrement en ce qui concerne les servitudes de drainage et la relocalisation des lignes d'Hydro-Québec, soient soustraits de l'application de la Loi sur la protection du territoire agricole. De plus, grâce à cette loi spéciale, certains ajustements seront apportés aux procédures d'expropriation de manière à garantir le plus possible les droits des personnes expropriées et de tous ceux qui seraient susceptibles de subir un dommage du fait de ces expropriations, notamment les locataires et les occupants de bonne foi.

Le réseau routier de cette région de la rive sud de Montréal profitera grandement de cette amélioration. Pour la population de cette région, il s'agit là d'un outil essentiel à une meilleure circulation vers les autres liens qui unissent la rive sud à l'île de Montréal. M. le Président, outre l'amélioration de la qualité de vie de la population de cette région, la réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30 viendra également contribuer au développement économique de tout ce secteur de la rive sud.

Notre projet de loi spécial est conditionné par la nécessité d'offrir rapidement à la population de Châteauguay et des environs une alternative valable, sécuritaire et permanente. Peu importe ce que nous réserve l'avenir, M. le Président, les gens de cette région de la rive sud doivent pouvoir compter sur une solution de rechange. Et, pour donner à cette population ce qui lui revient, le gouvernement doit agir vite et efficacement. Voilà ce qui nous motive à présenter aujourd'hui ce projet de loi spécial.

Je me permettrai de vous faire remarquer, M. le Président, que ce projet de construction de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine ne vient pas de tomber sur nos planches à dessin. Il était d'ailleurs déjà programmé au ministère des Transports. Ce que nous faisons aujourd'hui, c'est tout simplement devancer sa construction. Je suis convaincu que les membres de cette Assemblée sont tous bien conscients des raisons qui nous guident à devan-

cer nos travaux. À mes yeux, le bien-fondé de notre décision est irréfutable.

Au même titre que la population de Châ-teauguay et des environs, nous faisons face, aujourd'hui, à une situation délicate et complexe, une situation qui commande de grandes précautions, autant qu'une action efficace et bien préparée de la part du ministère des Transports du Québec. (13 h 10)

À ce sujet, vous me permettrez, M. le Président, de saluer publiquement les efforts de notre premier ministre et des ministres impliqués dans cette difficile situation. Grâce à leur travail, à leur sens exceptionnel de l'intérêt public et aux qualités évidentes de grand démocrate de notre premier ministre, le gouvernement du Québec aura agi selon les assises essentielles à toute nation dont l'objectif primordial est le bien-être de sa population. Bien peu de sociétés, M. le Président, auraient eu le courage et la sagesse d'épuiser tous les moyens démocratiques à sa disposition pour en arriver à un règlement dans un tel conflit. Notre administration a encore une fois démontré non seulement à la population québécoise, mais également aux leaders d'opinion internationaux sa capacité d'oeuvrer sous d'énormes pressions dans le sens du bien commun de tous les Québécois et de toutes les Québécoises. Le premier ministre du Québec a fait face à la situation avec la prudence, la fermeté et, surtout, la lucidité qui le caractérisent.

La population de Châteauguay et de ses environs a considérablement souffert d'être privée de son lien routier principal vers l'île de Montréal. J'ai d'ailleurs rencontré, dimanche dernier, en compagnie de la députée de Châteauguay, les maires de la municipalité régionale du comté de Roussillon. Ces élus, qui représentent un bassin de population évalué à plus de 110 000 personnes et qui atteint les 200 000 personnes si on ajoute la population environnante, m'ont fait part avec beaucoup de justesse de leur situation. J'ai d'ailleurs apprécié cette rencontre lors de laquelle les maires de la MRC de Roussillon m'ont proposé d'accélérer si possible la première phase des travaux de construction de l'autoroute 30 entre la route 138 et le boulevard Ford, à Châteauguay. Je m'étais engagé à étudier sérieusement cette proposition et c'est pourquoi, mardi dernier, j'ai annoncé que le ministère des Transports y donnerait suite en débutant, dans toute la mesure du possible, dès la semaine prochaine, la première phase de ce tronçon entre le boulevard Ford, à Châteauguay, et le rang Sainte-Marguerite, à Mercier, ce qui permettra de soulager grandement le débit de circulation urbain dans les limites de Châteauguay.

Par ailleurs, depuis l'annonce, le 9 août dernier, de nos intentions de procéder à la construction de l'autoroute 30 en contournant la réserve de Kahnawake, certaines personnes, dont le député de La Prairie, ont semblé être en désaccord avec le tracé proposé, sous prétexte que ce dernier devait passer sur des terres appartenant à un résident de Kahnawake. Le député de La Prairie a même suggéré que le ministère des Transports modifie le tracé de l'autoroute 30 entre le boulevard Ford, à Châteauguay, et la route 132, à Sainte-Catherine. À mon avis, il s'agissait là d'une proposition que nous devons rejeter, comme en témoignent d'ailleurs les nombreuses demandes qui m'ont été faites par le milieu de procéder sur le tracé actuel. C'est tout à fait impensable, à moins que l'on souhaite, au détriment d'une population déjà victime d'une situation peu enviable, de reporter le début de ces travaux tant attendus de plusieurs mois, voire même, M. le Président, de plus d'une année.

Le ministère des Transports avait d'ailleurs arrêté le tracé de l'autoroute 30 à cet endroit, en collaboration étroite avec la Commission de protection du territoire agricole du Québec qui nous demandait de rapprocher le tracé le plus possible de la réserve afin de protéger les terres agricoles de grande qualité.

Je voudrais également rappeler que, toujours dans le but d'agir efficacement et le plus rapidement possible, nous accorderons trois contrats à trois entrepreneurs différents pour ce tronçon de l'autoroute 30. Pour ce faire, nous inviterons des entrepreneurs à nous présenter des soumissions pour les trois sections de l'autoroute. Les entrepreneurs ainsi choisis pourront effectuer leurs travaux de façon simultanée, ce qui accélérera grandement la réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30. C'est, en fait, ce qui nous permet d'avancer que ces travaux seront terminés vers la fin de la présente année.

Il faut comprendre, M. le Président, que les événements que nous avons connus et qu'a subis la population de Châteauguay et de ses environs lui occasionnent de grands désagréments. On n'a qu'à penser au détour considérable qu'a provoqué la fermeture du pont Mercier et des routes 132 et 138. La construction de cette section de l'autoroute 30 vient s'ajouter aux autres mesures que le gouvernement du Québec a mises en place. Je crois pertinent de le rappeler, M. le Président: en raison de la fermeture du pont Mercier et des routes 138 et 132 aux abords de la réserve de Kahnawake, le ministère des Transports a mis en place un service de trains de banlieue et de navettes d'autobus qui permettent aux citoyens des municipalités de la rive sud de contourner ce secteur. J'ajoute, M. le Président, la ligne ferroviaire temporaire Saint-Isidore - gare centrale, qui connaît une immense popularité et qui relie sur une distance de 45 kilomètres en une heure, via les voies du Canadien National et du pont Victoria.

Il n'y a pas d'arrêt sur le parcours et nous sommes d'ailleurs à prévoir une augmentation de ce service. De plus, un service de navette

d'autobus qui converge au terminus de la Société des transports de la Rive-Sud de Montréal, à Brossard, permet aux usagers des commissions de transport du sud-ouest d'avoir accès sans frais supplémentaire à la voie réservée du pont Champlain et aux stations de métro de Montréal via les autobus de la STRSM. Par ailleurs, nous sommes également à aménager une voie destinée au transport des personnes sur la jetée de la voie maritime jusqu'à l'estacade longeant le pont Champlain. Ces travaux urgents et prioritaires ont été amorcés le 18 août dernier et seront terminés pour l'ouverture de cette voie aux usagers dès la semaine prochaine. Nous avons donc aménagé une voie réservée aux automobilistes pratiquant le covoiturage aux taxis, aux autobus ainsi qu'aux véhicules d'urgence. Cette importante mesure vise à offrir une voie d'accès supplémentaire à Montréal via l'île des Soeurs.

À toutes ces mesures d'urgence vient donc s'ajouter une alternative permanente, M. le Président. Il faut bien garder à l'esprit que la construction de l'autoroute 30 dans ce secteur n'est pas une solution temporaire. C'est plutôt un acquis de grande valeur qui profitera à toute la population de la région et j'ajouterais à toute la population du Grand Montréal. La réalisation de ce tronçon autoroutier, entre la route 138 à Châteauguay et la route 132 à Sainte-Catherine, devient donc, à mes yeux, primordiale et surtout dans les délais les plus courts possible.

Le projet de loi spécial que nous adopterons aujourd'hui a donc justement pour but de réduire au maximum ces délais. Le bien-être d'un important bassin de la population en dépend, M. le Président. C'est pourquoi je propose à l'Assemblée nationale l'adoption de ce projet de loi spécial sur l'expropriation.

Je compte évidemment, M. le Président, sur la collaboration de tous les membres de cette Assemblée, y incluant l'Opposition qui nous a déjà permis, grâce à sa collaboration, de pouvoir procéder à l'intérieur d'une même journée de calendrier afin d'accélérer tout le processus d'expropriation et l'adoption, donc, de cette loi. Je compte sur leur collaboration et sur l'ensemble des membres en cette Chambre.

J'ai également indiqué, M. le Président, que seule l'application de cette loi spéciale permettra au ministère des Transports de débuter et de réaliser ces importants travaux de construction routière avant la fin de la présente année.

Je vous remercie, M. le Président, et, comme je vous l'indiquais tout à l'heure, je suis persuadé que tous les membres de cette Assemblée pourront contribuer à nos efforts afin de doter la population de cette région d'un axe routier considéré comme étant vital et primordial. Je vous remercie.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre délégué aux Transports. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette. M. le leader de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. D'un terrain de golf de neuf trous, on se ramasse convoqués à l'Assemblée nationale avec une route pour parler d'une crise qui marquera, qu'on le veuille ou non, l'histoire du Québec.

M. le Président, si j'ai donné mon consentement au nom de l'Opposition, c'est à cause de la population de la rive sud de Montréal, de Châteauguay et des environs. Population victime, M. le Président, de l'inertie, de l'inaction, de l'improvisation et de l'incompétence la plus totale. Jamais on n'aura assisté, pendant sept longues semaines, à autant d'improvisation. Jamais! Un ministre qui s'en va annoncer, M. le Président, qu'il s'est fait flouer littéralement par les Warriors; un autre qui signe une entente alors qu'il y a des gens masqués; un autre qui dit que, depuis trois ans, il sait que les Warriors sont armés. M. le Président, jamais il n'y a eu autant d'incompétence étalée au si grand jour, jamais autant d'improvisation, jamais autant de manque de capacité de gouverner, puisque gouverner, c'est l'art de prévoir. Gouverner, ce n'est pas de gérer les crises. Il y a plus d'honneur, de compétence, de lucidité dans le fait d'essayer d'empêcher les crises que d'essayer de récupérer les fins de crises, M. le Président. Quelqu'un qui se tient debout, se tient debout d'abord avant les crises plutôt que d'essayer de se tenir debout pendant les crises ou dans les fins de crises, M. le Président. (13 h 20)

Cela dit, oui, j'ai donné des consentements, au nom de notre formation politique, M. le Président, pour la population qui est victime, depuis 49 jours, population qui a été patiente - on ne peut pas le dire, le mot - population qui a été brimée dans ses droits les plus fondamentaux, population à qui on a laissé croire toutes sortes de choses. Mais avant de donner mon consentement, même mardi, M. le Président, au nom de notre formation politique, on s'est assurés auprès des élus municipaux que le projet que présenterait le ministre des Transports soit quelque chose qui règle des problèmes, pas une béquille à court terme.

On voulait faire un projet sans faire de bretelle qui donnait accès; 24 000, 25 000 véhicules, par jour, auraient pu emprunter des rues d'un quartier domiciliaire; imaginez-vous! Et on disait aux gens: On va régler ça. M. le Président, de l'improvisation, de l'incompétence, de l'inertie, de l'inaction qui va coûter cher sur le plan des mentalités au Québec, M. le Président. Et je voudrais m'exprimer pendant quelques minutes là-dessus, M. le Président.

Personnellement, j'ai vécu cette crise, M. le Président, avec beaucoup d'angoisse. Il y a eu mort d'homme. Il y a eu mort d'homme, dans ce dossier, M. le Président. Et quand j'ai appris, un certain dimanche soir, que le premier ministre du Québec savait depuis trois ans que ces gens-là ¦ trafiquaient des armes - et c'était durant la crise qu'on apprenait ça, M. le Président - j'avais la chair de poule. Je me disais: Mais il n'y a pas de gouvernement, bonne mère! C'est quoi, gouverner? C'est d'assurer la sécurité d'une population, M. le Président.

Quand j'ai vu, une semaine avant, un ministre responsable signer une entente avec quelqu'un masqué, j'ai dit: Qu'est-ce qui se passe? Où est-ce qu'on s'en va? Le gouvernement du Québec est inexistant. Ça n'a pas d'allure? Ça n'a pas de bon sens. N'importe qui ailleurs aurait démissionné de son poste et se serait caché. Mais non, on discute, M. le Président, avec tellement d'efficacité que l'armée canadienne a été plus efficace que tous ceux qui ont discuté avant, de par le dialogue et sans violence, M. le Président. Moi, je n'en reviens pas.

La mentalité, au Québec, tantôt, ça va être: Fais-toi justice toi-même. C'est ça, fondamentalement, qui va arriver. Chaque groupe va vouloir prendre des moyens, alors que l'État est là, fondamentalement, pour faire respecter les lois, les règlements, pour prévenir des crises, entamer des dialogues avant, non pas pendant et après une crise. C'est ça, gouverner, M. le Président. Là, on arrive, M. le Président, et on nous dit: On convoque l'Assemblée nationale, pour essayer, bien sûr, de corriger une situation, à laquelle nous allons concourir. Nous avons déjà concouru et nous avons dit, aux élus municipaux: Oui, nous allons accepter la convocation de la Chambre; oui, nous allons voter pour la loi; oui, cependant, ils vont vous donner un projet qui a de l'allure, qui ne crée pas d'autres problèmes monstres, dans votre région. Et c'est pour ça qu'on a obtenu qu'il y ait une bretelle, une fois pour toutes, pour au moins qu'on ait accès à ces huit kilomètres. Parce que, là, c'aurait été la farce: bâtir huit kilomètres de route, M. le Président, puis, pas d'accès ou pratiquement pas d'accès, par les petites rues de quartier. Imaginez-vous.

C'est quoi, gouverner, M. le Président? C'est de solutionner les problèmes, pas d'en créer d'autres. Oui, nous avons accepté, M. le Président, d'en discuter. Mais je vous avoue, personnellement, que je crois fondamentalement qu'on est sur une très mauvaise pente présentement, au gouvernement du Québec, M. le Président. Ça n'a pas de bon sens de laisser s'instaurer ce fameux climat où quelque groupe que ce soit puisse s'armer, poser des barricades, puis exiger, le revolver sur la tempe, et: Donne-moi ça ou je marche, je fais une crise. Ça n'a pas d'allure de fonctionner de même, M. le Président. Ça n'a pas de bon sens.

Et on sera surpris après, M. le Président.

On sera surpris après que des groupes utilisent des moyens similaires ou comparables. On sera surpris que s'installe, dans la population, cette idée de se faire justice soi-même. Quand on n'a pas un gouvernement qui voit à faire respecter ses législations, qui doit se tenir informé quotidiennement, qui doit quotidiennement être au courant de ce qui se passe dans la collectivité québécoise. Ce n'est pas de gérants de crise dont on a besoin à l'Assemblée nationale, ce n'est pas de gens qui cherchent à récupérer les fins de crise dont on a besoin à l'Assemblée nationale, c'est d'un gouvernement qui doit gouverner en essayant d'éviter les crises, précisément. Je répète qu'il y a beaucoup plus d'honneur, d'intelligence dans le fait d'éviter une crise que dans le fait d'essayer de la gérer tout croche, tout de travers, en improvisant quotidiennement, 24 heures par jour, M. le Président.

J'ai donné des exemples d'improvisations et je pourrrais continuer. On n'a pas informé le public, M. le Président. Qu'est-ce qu'on discute? Vous avez remarqué les réponses comme moi ce matin et je sais, M. le Président, que vous avez pu observer... Et puis encore là, on ne sait même pas ce qui se discute. Oui, on est heureux qu'il y ait un début de dénouement, il faut le dire, mais, si on n'est pas capable d'informer la population sur les enjeux fondamentaux, si on n'est pas capable de dire à cette même population: II y a des principes qui seront intouchables dans ces négociations-là, il y a des actes que nous ne tolérerons plus au Québec, il y a des gestes que nous ne poserons plus ou que nous n'accepterons plus de voir posés... Nous allons discuter dans un cadre d'une démocratie éclairée, M. le Président.

Fondamentalement, l'Assemblée nationale aurait pu être convoquée beaucoup plus avant pour avoir des discussions de fond sur ce qui est en train de se créer comme mentalité au Québec. Ces gens-là, à ce moment-là, sortiront le bâton et ils diront: "C'est-u" effrayant, la mentalité qui est en train de s'installer au Québec! Ils y auront contribué, M. le Président, parce que ce sont des gérants de crise et non pas des administrateurs d'État, parce que ce sont des gens qui préfèrent gérer des crises au lieu d'essayer de les éviter, M. le Président.

Moi, je vous dis que ça avait l'air d'une vraie débandade à la télévision, ce qu'on a vécu cette année; ce qu'on a lu dans les journaux quotidiennement; ça faisait pitié. Ça faisait pitié, un ministre responsable de la Sécurité publique qui s'en va dire: Bien, je me suis fait avoir. Aie! c'est rassurant pour une population! C'est lui qui a la responsabilité ultime de la sécurité publique. Tu en vois un autre qui signe une entente avec un gars masqué. On ne sait même pas; il aurait pu signer le nom de n'importe quel député ici. Il ne lui voyait pas la face. Signer une entente pour un gouvernement, pensez-y 30 secondes, avec quelqu'un de masqué, puis c'est encore ministre au moment où on se parle, puis ça

trafique encore dans les corridors d'hôtel dans une négociation.

M. le Président, ça fait pitié. Ça fait pitié quand le premier citoyen du Québec, le premier ministre annonce à la télévision que ça fait trois ans qu'il sait que les armes circulent de même, qu'on amasse des stocks d'armes. M. le Président, comment se fait-il qu'en vertu du Code criminel canadien, à l'article 39, c'est la police, la sécurité publique, la Sûreté du Québec ici qui a le mandat d'assurer la paix, la sécurité et qui a spécifiquement un rôle face aux armes prohibées? Ce que l'armée nous a montré à la télé, c'était à en faire peur à plusieurs, n'est-ce pas? Un vrai arsenal, M. le Président, de quoi défoncer des blindés. Rien de fait avant, M. le Président.

Où est-ce qu'on s'en va? Où est-ce qu'on va avec ce gouvernement, M. le Président? Que les gens de Châteauguay maintenant, M. le Président, puissent compter sur une décision de l'Assemblée nationale, je dois leur dire que cette décision-là - s'il y en a ici - est pas mal plus sûre, pas mal plus juste qu'une proposition du gouvernement actuel, parce que là, c'est un mandat de l'Assemblée nationale qu'il aura pour réaliser des choses. Ils ont été victimes pendant sept semaines, M. le Président, sept longues semaines. Je peux vous dire une chose, M. le Président, ces gens-là ne sont pas près d'oublier ce qu'ils ont vécu. Je ne le souhaite à aucune autre population du Québec, ce que ces gens-là ont vécu, mais c'est peut-être le moment de se dire des choses ici, par exemple. Gouverner, c'est l'art de prévoir et non pas de gérer des crises. (13 h 30)

Cette population de Châteauguay pourra compter sur un moyen de circulation plus efficace, plus rapide et c'est pour ça qu'on va y adhérer, parce qu'elle est une victime. Je n'aurais pas été surpris, par exemple, qu'on nous convoque pour récompenser autre chose, parce que, je vais vous dire très honnêtement, ce qui est en train de s'installer comme mentalité, c'est que le crime paie, au Québec. Et je me serais opposé à des motions à l'Assemblée nationale qui auraient amnistié, par exemple, qui auraient posé des gestes fondamentaux vis-à-vis ce qu'on défend comme société démocratique. C'est parce que ce sont des victimes que j'ai accepté, au nom de notre formation politique, M. le Président, de siéger aujourd'hui, de faire fi de certaines règles pour permettre l'adoption de ce projet de loi là aujourd'hui.

M. le Président, je voudrais dire au ministre des Transports et au gouvernement libéral que, cependant, j'arriverai, tantôt, avec une proposition au niveau du comité plénier. L'objectif n'est pas de retarder les travaux. À l'intérieur du délai qui est confié en comité plénier, j'ai l'intention de suggérer un préambule pour bien démontrer que c'est à cause d'une crise spécifique, que ce n'est pas une règle générale qu'on va établir, qu'on veut voter, ce matin.

Je veux, au niveau du préambule de cette loi, que ce soit très clair, M. le Président, que ça ne doit pas constituer, pour aucun motif, un précédent. Il existe des législations de portée générale qui ont fait leurs preuves, qui présentent des inconvénients mais qui assurent, M. le Président, le respect d'un processus fondamentalement démocratique, ce que cette Assemblée nationale a voulu, d'ailleurs. Qu'on parle en matière d'expropriation, de consultation, d'étude d'impact ou d'évaluation environnementale, on a voulu, comme peuple du Québec, se doter, par l'Assemblée nationale, de mécanismes précis. Et le fait de suspendre les effets de ces mécanismes à ce stade-ci, M. le Président, ne doit en aucun temps être interprété comme étant une volonté de faire d'une exception une règle générale. C'est une crise profonde qu'on a vécue, je le reconnais. Et on ne doit considérer ce projet de loi que dans le cadre d'une crise très profonde, où une population bien identifiée, bien située, bien identifiable, a été victime pendant sept longues semaines. C'est dans ce contexte et dans cet unique contexte qu'on accepte de dévier aux règles normales établies, tant en matière d'expropriation qu'en matière de contrôle d'impact environnemental ou de qualité de l'environnement. J'espère que c'est bien compris.

Et je demande au ministre des Transports de bien étudier le préambule que je lui ferai parvenir dans les prochaines minutes, pour que cette volonté soit clairement exprimée dans le projet de loi, clairement exprimée. Parce que si on ne manifeste pas publiquement notre point de vue à ce stade-ci, qu'est-ce qu'on ferait, comme Parlement? Quel geste poserions-nous, comme Parlement? On dirait: Écoutez, quand vous n'avez pas justice à un de vos points, vous n'avez seulement qu'à vous monter une crise. Ça, ça ne peut pas marcher. Ça ne doit pas marcher. C'est inacceptable, c'est inconcevable. C'est ça qu'il faut dire clairement à la population du Québec. Il faut se comporter comme des hommes et des femmes élus, responsables, pas comme des gérants de crise à la pièce, pas comme des improvisateurs à toutes les dix minutes, M. le Président. Pas poser des gestes qu'un enfant le moindrement intelligent ne poserait même pas, s'il avait conscience de ce que c'est que siéger dans un État, que d'être membre d'un gouvernement. Pas avoir assisté à ce à quoi on a assisté depuis sept semaines.

Je sais que, du groupe ministériel, vous ne pourrez jamais dire ce que je peux dire. Je sais que, par solidarité ministérielle, vous allez être obligés de vous la fermer. Mais, fondamentalement, les citoyens de vos comtés n'ont pas voté pour des hommes et des femmes qui ne prévoyaient rien. Ils ont voté pour des hommes et des femmes qui avaient le devoir de prévenir, au lieu du devoir de gérer des crises. Fondamentalement, vous vous êtes fait dire, tout comme

dans nos comtés, qui que vous soyez en cette Chambre: Mais pourquoi avoir attendu sept semaines? Mais pourquoi n'avez-vous pas pu prévoir ça? Aviez-vous des renseignements? Vous ne pouviez même pas répondre ça, parce que votre premier ministre vous a dit qu'il le savait depuis trois ans. Qu'est-ce que vous pouviez répondre au sujet du geste du ministre responsable des autochtones qui a signé une entente avec un mouchoir? Qu'est-ce que vous pouviez répondre, quand vous avez votre propre ministre de la Sécurité publique qui dit: Je me suis fait avoir?

Vous ne pouviez rien répondre. Je suis convaincu que ça a été très dur pour vous autres. Mais c'est ça, fondamentalement, que les citoyens veulent. Ils veulent un gouvernement qui se tient debout, avant les élections et après les élections. Ils ne veulent pas d'hommes et de femmes qui se contentent de laisser faire les choses, qui se contentent d'improviser, qui se contentent de gérer à la pièce sans vision globale de ce qu'est la société québécoise. On avait des outils en main depuis 1983 et 1984 pour aborder ce problème dans un contexte de quiétude, non pas dans un contexte de crise où là on "s'effervesce".

Je me rappelle que le même monsieur le ministre délégué aux Affaires autochtones avait voté contre une motion s'adressant aux autochtones, présentée par M. Lévesque, en 15 points. Ça ne va pas assez loin, disait-il. On vote contre. Vous aviez voté contre, le temps que vous étiez ici à l'Assemblée nationale et que vous aviez un rôle d'Opposition. Ça n'allait pas assez loin. Vous n'avez rien fait de concret, si bien que l'exaspération a conduit à une crise et que la conjoncture a aidé la crise en plus. Faites une analyse un tant soit peu rigoureuse et vous allez vous rendre compte que l'improvisation, l'inertie, l'inaction et l'incompétence ont pris place. Puis on est surpris, M. le Président, que des citoyens posent les gestes qui ont été posés.

Je trouvais ça épouvantable, M. le Président, moi, de voir qu'il y avait des réactions aussi violentes, mais, tout en les trouvant épouvantables, je comprenais, parce qu'un citoyen qui n'a pas un gouvernement pour le protéger, qui n'a pas un gouvernement pour défendre ses intérêts, qui n'a pas un gouvernement pour faire respecter ses législations et ses règlements, qui n'a pas un gouvernement pour administrer et qui se contente de gérer, ce citoyen-là, devant quoi est-il placé?

On a vécu dans un contexte d'anarchie au Québec, M. le Président, et nous, l'Opposition, nous avons ménagé nos interventions durant toute cette crise. On les a ménagées parce que, dans le fin fond, on est des citoyens pareils comme les autres au Québec. On avait les mêmes réactions. Nous demeurons des hommes et des femmes, même si on est élus ici. Et nous avions les mêmes réactions que la population en général.

On se disait: Ils vont peut-être se réveiller, ils vont peut-être prendre des moyens, mais le réveil est venu tard. Quand on gouverne au sondage et qu'on attend que la population soit tellement exaspérée que là il soit possible de poser un geste, eh bien là, on agit, M. le Président. C'est ce qui arrive. On ne gouverne pas par sondage, quand on a des principes fondamentaux. S'il avait fallu gouverner par sondage, jamais cette Assemblée nationale n'aurait voté la Loi sur l'assurance automobile. Si on avait gouverné par sondage, jamais on n'aurait passé la Loi sur la protection du territoire agricole. Pourquoi? Parce qu'on est arrivé là avec des convictions et des principes et on a dit: Ce sont ces législations-là que nous allons faire voter parce que nous y croyons. C'est une orientation qu'on donne au peuple québécois. On ne nous élit pas pour suivre, mais on nous élit pour les précéder, les gens. C'est ça, un leader. C'est ça que les gens attendent d'un homme ou d'une femme élue. C'est de savoir ce que tu penses, où est-ce que tu t'en vas. Ois-nous où tu veux aller et pourquoi tu veux y aller. C'est ça, fondamentalement.

J'avais honte, M. le Président, du gouvernement du Québec, une honte quasi inexplicable. Ce matin, M. le Président, je suis heureux au moins de livrer ce que j'ai ressenti durant toute cette crise: une incapacité chronique permanente à prendre des décisions au bon moment. On est des gérants de crise, M. le Président. Je n'accepte pas cela. Ça se sentait venir, M. le Président. J'ai lu du courrier échangé avec le ministre délégué aux Affaires autochtones du mois de mars. Depuis le mois de mars qu'il y avait des mouvements! On a attendu pour s'écraser après que la crise ait été déclenchée. C'est aberrant, c'est inacceptable, ça ne mériterait même pas de siéger au Parlement et de se dire au pouvoir pour pouvoir véritablement gérer les choses de l'État. (13 h 40)

M. le Président. Je comprends l'exaspération des gens. En général, la population est très claire, d'ailleurs. C'est inacceptable la façon dont ça a été conduit. Mais ce n'est pas parce que c'est inacceptable la façon dont ça a été conduit qu'il faudrait se payer le luxe de pénaliser encore davantage des gens qui ont subi sept semaines intensives de préjudice: préjudice de faire des heures . et des heures d'automobile, préjudice de vivre une tension parce qu'on connaissait plus ou moins les résultats, imprévisibles parce qu'on ne savait jamais ce qui se passait.

M. le Président, on a été mieux informés - ce n'est pas des farces - sur ses agissements par l'armée canadienne et sur sa volonté d'agir en toute transparence qu'on l'a été du gouvernement du Québec. Totalement inacceptable, et c'est là le sentiment de honte, M. le Président, que j'ai présentement. Un sentiment

d'appartenir à une Assemblée nationale gouvernée par des gens qui administrent à la petite semaine, à la pièce, comme s'ils avaient été mandatés pour se créer une crise pour pouvoir la gérer au lieu d'avoir compris fondamentalement que le rôle premier d'un député dans cette Chambre, le rôle premier d'un ministre dans cette Chambre, c'est d'assumer, justement, ses responsabilités, créer une quiétude, créer une paix sociale; c'est ça fondamentalement.

Je ne me suis pas permis de le faire publiquement, M. le Président, mais, ce matin, j'ai le goût de le faire. J'ai le goût de faire un parallèle du mandat 1970-1973 avec le mandat 1985-1989. Mon Dieu que plus ça change, plus c'est pareil avec ces gens-là, M. le Président. La débandade au deuxième mandat comme ce n'est pas possible: débandade dans les prises de décision; débandade dans la perspective d'avenir du développement du Québec; une TPS en pleine crise, ce matin. 329 000 000 $ de plus, M. le Président! 329 000 000 $ de plus qu'on va chercher dans les poches des contribuables québécois en 1991, en pleine crise. Des citoyens qui auront à payer une facture prohibitive de tout ce gâchis qu'on n'a même pas tenté d'éviter, M. le Président. Je trouve ça inconcevable.

Je termine, M. le Président - vous me faites signe - en disant que l'Opposition officielle, d'une façon très responsable, dans un but non pas de créer un précédent à l'Assemblée nationale mais dans un but bien précis de rendre justice à une population victime... nous serons là précisément pour les représenter si jamais on dévie d'un iota des volontés politiques exprimées. C'est le rôle fondamental de l'Opposition et permettez-moi de souhaiter, M. le Président, que le message sans équivoque, clair que je veux passer à cette Assemblée c'est de faire en sorte qu'au Québec on aille le plus rapidement possible vers l'électorat et qu'on leur demande de s'élire un gouvernement responsable.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le leader de l'opposition officielle. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de la prairie. m. le député.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Les remarques exprimées par le ministre délégué aux Transports tout à l'heure sont à l'effet qu'étant donné un état de crise nous devons... cette Assemblée nationale doit approuver un projet de loi qui suspend les règles normales de procédure à divers égards. Le leader de l'Opposition vient de le dire officiellement et je répète: Nous allons voter pour ce projet de loi mais, en même temps, M. le Président, nous allons déplorer que l'imprévoyance de ce gouvernement, l'incompétence de ce gouvernement fait en sorte qu'il est obligé de convoquer une session spéciale pour accomplir des travaux de voirie qu'il devait accomplir depuis des années.

Le parachèvement de l'autoroute 30 apparaissait au programme des engagements électoraux du Parti libéral en 1985 pour être complété, disait-on, en 1990. En 1989, à la campagne électorale, aucune lueur de début de travaux, M. le Président, dans la région, que ce soit dans le comté que je représente ici, le comté de La Prairie, ou dans le comté de Châteauguay ou dans le comté de Beauharnois-Huntingdon, dans toute cette sous-région de la Montérégie. Aucun début des travaux en 1989. Par conséquent, le Parti libéral suit un peu la doctrine de M. Duplessis: un pont, une route, c'est bon pour trois élections.

Le Parti libéral revient à la charge et repromet, notamment la candidate qui est devenue députée de Châteauguay repromet le parachèvement de l'autoroute 30, repromet. Cependant, il y a quatre ou cinq mois, le ministre des Transports - on ne sait plus lequel est le vrai ministre des Transports; est-ce que c'est l'ancien maire de Kirkland ou si c'est le député de Richmond? - mais, à tout événement, un des ministres des Transports, il y a cinq ou six mois, vient annoncer dans la région: On n'est pas prêts pour l'autoroute 30. Ça nous prend encore des études qui vont durer un an, un an et demi, deux ans, a-t-on dit officiellement, il y a quatre ou cinq mois dans la région, M. le Président.

Ce qu'il faut que la population comprenne, c'est que, si ce gouvernement avait respecté ses engagements électoraux de 1985 et de 1989 en matière de voirie, en matière de parachèvement de l'autoroute 30, nous n'aurions pas eu besoin d'être convoqués pour une assemblée spéciale aujourd'hui. Ce qu'il faut que la population comprenne, c'est que ce gouvernement ne prend des décisions que quand il est acculé au mur, que quand il est en état de crise.

On a entendu ce matin le premier ministre dire tout béatement: Bien écoutez, c'est complexe, les négociations avec les Mohawks. Par conséquent, on ne peut pas vous en parler. Comme si, à partir du moment où un problème est complexe, ce gouvernement ne serait plus habile, ne serait plus apte à gouverner, ne serait plus apte à renseigner la population!

M. le Président, le principal reproche que les gens de mon comté, Sainte-Catherine, Saint-Constant, Delson en particulier, qui ont été touchés de façon immédiate par la crise... Parce que ce n'est pas seulement les gens de Châteauguay qui ont été touchés par la crise. On a surtout parlé de Châteauguay parce que la ville de Châteauguay est plus considérable que la ville de Saint-Constant ou la ville de Sainte-Catherine, mais les gens de mon comté ont été directement touchés par cette crise. Le reproche principal que la population exprimait, c'était: Pourquoi le premier ministre, comme chef d'État, ne vient-il pas nous expliquer ce qui se passe

ou, tout au moins, pourquoi le premier ministre n'envoie-t-il pas un ministre rencontrer la population et expliquer à la population les enjeux de la crise, les raisons de la crise, ce que le gouvernement essaie de faire? Les gens sont raisonnables, les gens sont intelligents. Ils auraient compris pourquoi le gouvernement agissait de telle ou telle façon si on lui avait expliqué.

Il y a des ministres qui sont venus. Ah oui! Il y a des ministres qui sont venus, mais ils se sont contentés de rencontrer les maires. C'est déjà beaucoup, c'est déjà beaucoup parce que les maires représentent la population, mais la population aurait souhaité que, lors des assemblées publiques, un ministre ou une ministre ose se présenter et répondre aux questions du public. Personne n'est venu le faire, personne. Je vous assure que, lorsque la population est gardée dans l'ignorance, c'est à ce moment-là qu'on voit des réactions d'insécurité, des réactions de colère. (13 h 50)

II ne faut pas être surpris si la population a eu des réactions de colère. On la tenait dans l'ignorance des faits, dans l'ignorance des plans de ce gouvernement, si jamais il y avait des plans. Il faut le répéter, l'armée canadienne a donné l'exemple à ce gouvernement, en matière d'information à la population. La population de cette région, surtout celle du comté de La Prairie et du comté de Châteauguay, a souffert des préjudices considérables, depuis 50 jours. Dans ces préjudices considérables, bien sûr, il y aura des compensations financières. Bravo! Bien sûr, on devance le parachèvement de ce tronçon de 12,5 kilomètres. Bravo!

Je dirai au ministre, qui a fait allusion tantôt à une remarque que je faisais il y a deux semaines, que, si j'ai suggéré, il y a deux semaines, que le trajet de ce tronçon soit légèrement modifié, c'était dans le but d'éviter que le trajet passe sur quelques terres achetées par des Mohawks. On m'a répondu: II n'y a pas de problème, les Mohawks en question vont collaborer. Espérons-le. Mais je voudrais que ce soit clair que ma suggestion n'avait pas pour but de retarder le projet. Au contraire, ma suggestion avait pour but d'éviter une impasse, d'éviter qu'en passant sur des terres appartenant à des Mohawks, le ministère soit obligé de faire face à certaines tactiques d'obstruction. C'est ça qu'était l'intention de ma suggestion.

M. le Président, les candidats du Parti québécois, lors de l'élection de 1989, se sont prononcés, prioritairement, pour le parachèvement de l'autoroute 30; non seulement le petit tronçon de 12 kilomètres dont il est question aujourd'hui, M. le Président, mais le parachèvement de ville Brossard jusqu'à Châteauguay. Et je répète, M. le Président, qu'on n'a pas besoin de nous convaincre, de ce côté-ci de la Chambre, de la nécessité de parachever cette autoroute. Et, à cet égard, je pense que le ministre fait une erreur s'il ne prolonge pas, s'il ne complète pas les 12,5 kilomètres du tronçon. Il a commencé par 8,5 kilomètres et, si je comprends bien, là, il est rendu à 10,5 kilomètres. Mais, M. le Président, ce n'est pas pour 2 kilomètres de plus ou de moins qu'on va prendre la chance d'avoir une oeuvre mal réussie, mal fignolée. Alors, dans le texte de loi, il s'agit de la distance située entre Châteauguay, la route 138, et Sainte-Catherine, la route 132. Alors, de grâce, mettons tout en oeuvre pour compléter ces 12,5 kilomètres avant la fin de l'année 1990. Et je donne avis tout de suite au ministre que, tantôt, en comité plénier, je proposerai un amendement pour que nous puissions obtenir l'engagement de l'Assemblée et du gouvernement pour que ce tronçon de 12,5 kilomètres sera complété d'ici la fin de l'année 1990.

Il y a deux semaines, lorsque la position du gouvernement a été rendue publique, à savoir que, par décret, le Conseil des ministres avait décidé de se soustraire aux obligations de la Loi sur la protection de l'environnement, de la Loi sur la protection du territoire agricole, de la Loi sur les expropriations et de la mécanique habituelle, les appels d'offres publics, nous avons aussi déploré le fait que ce bout de route soit construit sans qu'il y ait d'audiences publiques. Bien sûr, l'étude d'impact sur l'environnement a été faite et il y a eu, au printemps, au mois d'avril et au mois de mai, M. le Président, un certain nombre de consultations dans la région, il restait la dernière étape, qui est celle des audiences publiques. Nous avons dit et nous répétons que, si le gouvernement avait gouverné avec prévoyance, il aurait pu, il y a quelques mois, organiser un certain nombre d'audiences publiques, limitées dans le temps afin de ne pas retarder les travaux. Personne ne veut retarder ces travaux-là. Mais, par contre, c'est important de respecter des lois de l'Assemblée nationale, surtout en matière d'environnement. J'espère, M. le Président, qu'au moins le ministre responsable du projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui, va s'assurer, comme promoteur du projet, que les mesures d'atténuation qui sont contenues dans l'étude d'impact, que ces mesures d'atténuation vont être observées. Autrement dit, que le moins d'effets néfastes possible sera infligé à l'environnement.

M. le Président, il est normal que cette population qui, pendant sept semaines, a subi des préjudices graves, pas seulement en devant prendre deux fois ou trois plus de temps que d'habitude pour se rendre à son travail, ça va plus loin que ça... Il y a des gens qui ont perdu leur emploi. Il y a des gens qui ont dû déménager, pas seulement dans la région d'Oka mais dans la région de Kahnawake. À Sainte-Catherine, notamment, dans mon comté, il y a des gens qui ont dû déménager, se rendre avec leur famille dans des motels. Il y a des gens qui ont vu leur vie familiale complètement perturbée, M.

le Président. Or, il est normal que le gouvernement, sous forme d'une certaine compensation, accélère ces travaux-là. Et, encore une fois, on doit lui reprocher amèrement de ne pas avoir tenu ses engagements électoraux, ce qui aurait pu éviter cette session spéciale.

Les autochtones de Kahnawake, les Blancs de Sainte-Catherine, de Châteauguay, de Saint-Constant, vont devoir continuer de vivre comme voisins. Et j'espère que ce gouvernement-ci va se préoccuper non seulement du tronçon de 12,5 kilomètres et des compensations financières aux individus et aux commerces, mais va s'occuper aussi de favoriser, par une assistance financière, le rapprochement entre ces voisins, entre la population autochtone et la population blanche. On ne peut pas laisser ce climat de méfiance et de colère réciproque, mutuel, se développer. Et, M. le Président, moi je suis un peu pessimiste quand on sait que ce gouvernement avait voté contre des résolutions qui étaient de nature à donner aux autochtones une plus grande influence dans la conduite de leurs propres affaires, un plus grand pouvoir. Le ministre délégué aux Affaires autochtones nous a répondu toutes sortes de choses ce matin. Mais la principale chose qu'il faut retenir de ses réponses, M. le Président, c'est qu'il n'avait rien prévu. Il n'avait rien prévu depuis 1985. De 1985 à 1990 il ne s'est rien passé entre ce gouvernement et les populations autochtones.

Alors, M. le Président, on n'a pas besoin de nous convaincre de ce côté-ci de la Chambre, encore une fois, de l'importance de compléter ce tronçon le plus rapidement possible. Et j'insiste pour que ce tronçon soit de 12,5 kilomètres, non pas de 8,5 ou de 10,5, mais de 12,5 kilomètres, et qu'il soit complété avant la fin de l'année 1990, comme d'ailleurs le réclament les 11 maires de la municipalité régionale de Roussillon. (14 heures)

Et je veux aussi ajouter, M. le Président, une autre remarque quant à la nécessité de compléter ce tronçon. Ce n'est pas seulement pour permettre aux gens d'avoir une solution de rechange, c'est-à-dire en contournant la réserve Kahnawake, de pouvoir se rendre à Montréal, soit par le pont Champlain, soit par le pont de l'estacade qui pourra être atteint par la digue de la voie maritime, mais il y a aussi l'hôpital de Châteauguay, le centre hospitalier Anna-Laberge à Châteauguay qui a été construit par un gouvernement qui était prévoyant, celui-là, le gouvernement du Parti québécois. Et cet hôpital, malheureusement, à cause des routes secondaires, est très peu accessible à une bonne partie de la population, surtout celle de Saint-Constant, Sainte-Catherine, Delson. Alors, M. le Président, en complétant les 12,5 kilomètres, on pourra rendre plus facilement accessible cet hôpital qui est censé être au service de la population non pas seulement de Châteauguay, mais aussi d'une bonne partie du comté de La Prairie.

En terminant, je veux répéter que l'Opposition va apporter sa collaboration à l'adoption de ce projet de loi le plus rapidement possible. Je veux répéter aussi que la population de mon comté regrette que ce gouvernement-ci ait attendu cette crise interminable pour, enfin, respecter son engagement électoral. En terminant, je voudrais aussi répéter que ce gouvernement, qui est un gouvernement dépassé lorsqu'il s'agit de prendre des grandes décisions, devra apprendre à communiquer avec la population, sinon il sera rejeté par cette population. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de La Prairie. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. M. le ministre.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Par-delà le contexte particulier qui préside à la présentation de ce projet de loi spécial, il ne faut surtout pas oublier l'objet premier, c'est-à-dire le prolongement de l'autoroute 30 en Montérégie. Et, en cela, le gouvernement pose aujourd'hui un important geste de développement régional et économique.

En tant que ministre responsable de la Montérégie, je voudrais expliquer ici le véritable sens de cette intervention du gouvernement. De région quasiment dortoir qu'elle était il y a une vingtaine d'années, la Montérégie est devenue aujourd'hui une force industrielle et économique de premier ordre. Elle connaît une croissance économique soutenue et même, ce qui est exceptionnel au Québec présentement, une véritable croissance démographique.

La Montérégie, c'est une région de production, de services, de recherche et d'exportation. Depuis plusieurs années, les leaders du développement économique de la région ont signalé, et aux deux ordres de gouvernement, que le maintien de la croissance des emplois et la poursuite de l'essor économique nécessitent des améliorations substantielles au réseau routier qui dessert la région de la Montérégie.

Cette nécessité devient encore plus criante dans un contexte de libre-échange. Peu de gens savent que c'est en Montérégie que se réalise plus de 40 % de toute la recherche-développement au Québec. Cet atout, lié à la proximité du marché américain, fait que notre région occupe une position stratégique pour intensifier la présence de nos entreprises et de nos produits chez nos voisins du Sud.

Mais pour que ce potentiel se transforme en réalisations concrètes, il faut que les entreprises exportatrices de chez nous puissent acheminer rapidement et efficacement leurs produits, et donc, qu'elles puissent compter sur un réseau

moderne d'autoroutes. Lors de la tenue du sommet socio-économique de 1987, en Montérégie, il s'est rapidement dégagé un large consensus sur la nécessité de doter cette région d'un réseau d'autoroutes capable de soutenir adéquatement le développement économique de la région et d'y insuffler une vigueur encore plus grande.

La première priorité dégagée par les participants au sommet socio-économique de 1987 concernait précisément l'autoroute 30 dont nous parlons aujourd'hui. Nous avions même précisé que la première phase du prolongement de cette autoroute devait débuter à Châteauguay et que le tracé aurait notamment pour effet de contourner la réserve de Kahnawake. Notre gouvernement s'est associé à ce consensus et il a placé en haut de ses priorités la réalisation de l'autoroute 30. Dans le plan d'action que le ministre des Transports a déposé à l'été 1988 pour la grande région métropolitaine de Montréal, le prolongement de l'autoroute 30 figurait au rang des ouvrages pressants à réaliser et à mettre en chantier. Tout le monde sait que les difficultés budgétaires auxquelles le gouvernement a été confronté ces dernières années ne nous ont pas permis de réaliser aussi vite que nous l'aurions souhaité les travaux d'aménagement routier. En rationalisant les dépenses budgétaires, le gouvernement n'en reconnaissait pas moins que des projets comme celui de l'autoroute 30 conservaient toute leur pertinence. Nous en avons simplement différé la construction afin d'atténuer les pressions sur les finances publiques.

Les événements des dernières semaines ont rendu la réalisation de l'autoroute 30 encore plus imperative. Nous faisons en sorte que les travaux qui devaient être exécutés soient devancés par rapport aux échéanciers fixés il y a quelques mois. Quoi qu'en dise et quoi qu'en pense le député de La Prairie qui, il y a une semaine encore, s'opposait à la construction urgente de ce tronçon de l'autoroute 30, qui demandait que non seulement on en diffère la construction, mais qu'on change le tracé et qui vient de nous dire le contraire il y a quelques minutes, ce qu'il faut comprendre, M. le Président, c'est que l'autoroute 30, ce n'est certainement pas un truc que le gouvernement invente tout à coup à cause d'une crise. Ce n'est pas un geste improvisé, une dépense de 10 000 000 $ que l'on consent pour acheter la paix en temps de crise. L'autoroute 30, c'est la réponse du gouvernement déjà prévue à court terme dans le plan de transport à un problème criant d'accessibilité et de mobilité d'une population urbaine de plus de 150 000 personnes qui est littéralement enclavée dans un territoire, avec ou sans le passage sur le pont Mercier.

Nous avions reconnu ce fait, nous avions également reconnu ce problème avant la crise et nous avions annoncé des travaux imminents en ce qui concernait l'autoroute 30. Le projet de loi que nous déposons aujourd'hui ne fait donc qu'accélérer des travaux qui étaient déjà prévus. Nous répondons à une situation d'urgence par une décision exceptionnelle, c'est-à-dire par une loi d'urgence. Voilà, M. le Président, un gouvernement qui agit, un gouvernement qui ne se traîne pas les pieds et qui sait répondre rapidement et s'ajuster à la conjoncture. Les événements des dernières semaines ont donc rendu la construction de l'autoroute 30 plus imminente et plus imperative.

M. le Président, lors du sommet socio-économique de 1987, le projet prioritaire de l'autoroute 30, ça a été le résultat de la solidarité et de la cohésion des décideurs de la Montérégie qui ont été capables, à cette occasion-là, de s'élever au-dessus des intérêts immédiats et ponctuels de chacune de leur localité respective. Pour concevoir une vision régionale de développement économique, au lieu de dresser une liste exhaustive de multiples petits projets de construction de routes locales, les agents socio-économiques et les élus de la région ont opté pour un aménagement structurant qui contribuera à l'expansion économique de la Montérégie dans les années quatre-vingt-dix.

Le prolongement de l'autoroute 30, c'est aussi le fruit de la persévérance des députés ministériels de la Montérégie qui ont travaillé sans relâche pour que se matérialise cet investissement essentiel du gouvernement dans la région. (14 h 10)

Je tiens, M. le Président, à les remercier pour leur appui indéfectible. Et, plus précisément, je tiens à féliciter la députée de Châteauguay qui, au cours des dernières semaines, a fait preuve d'un dévouement et d'une persévérance à toute épreuve à l'endroit de sa population et de ses électeurs.

La reprise imminente des travaux sur l'autoroute 30 signifie également une amélioration de la qualité de vie des résidents de Châteauguay, des municipalités avoisinantes et de toute la région de la Montérégie. Je suis convaincu qu'ils soutiennent énergiquement, ces gens-là, la décision du gouvernement de procéder sans délai et d'une façon urgente au prolongement de l'autoroute 30.

C'est en leur nom, M. le Président, de même 'qu'au nom du développement économique de la Montérégie, que je voterai en faveur du projet de loi 82. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le ministre. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Gordon Atkinson

M. Atkinson: M. le Président, I speak to the legislation before the House with mixed feelings. On the one hand, it is imperative that free access to and from the island of Montréal be unrestricted. On the other hand, I question the wisdom of what can only be described as a

panic situation in light of the blockades created by the native peoples of Kahnawake, all because of nine holes of golf on land in Oka claimed for over 200 years by the native people to be their inheritance.

La question d'une route secondaire pour Itle de Montréal a fait l'objet de nombreuses discussions depuis la dernière année et aucune décision n'a été prise. Maintenant, tout à coup, à cause d'inconvénients subis par les usagers de la rive sud-ouest, nous avons à faire face à des dépenses de plusieurs millions de dollars. Les problèmes du pont Mercier existent depuis des dizaines d'années et sont dus à une augmentation du nombre d'usagers suite à des développements domiciliaires créés sans examiner la question de l'accessibilité du noyau central pour le travail, c'est-à-dire la ville de Montréal et ses environs.

In March of this year, the native peoples in the Oka region erected a barricade to prevent the town of Oka and those who favoured an extension of the Oka Golf course from trespassing on what the native peoples considered their land. The problem was exacerbated when the Québec Provincial Police was ordered to remove the barricades. That action resulted in the death of one of their officers.

The loss of a Provincial Police officer's life was indeed a high cost to pay, all for the sake of nine extra holes of golf. The situation escalated to other regions, mainly with respect to the Mercier bridge, which has nothing whatsoever to do with the central argument of who owns the disputed land in Oka.

Alors, ce qui aurait dû être une simple question pour s'asseoir et discuter a été enflammé par le gouvernement et par les autochtones. Jusqu'à très tard hier après-midi, nous avions à faire face à une guerre possible dans la région de Châteauguay. Et, même au moment où je vous parle, il n'y a aucun règlement à Oka. Tout cela pour neuf trous de plus au terrain de golf d'Oka. C'est inconcevable pour une personne sensée.

Les autochtones ont depuis environ 200 ans contesté la vente de cette parcelle de terre. Cependant, personne ne s'est occupé de leurs revendications qui ont mené à la présente situation. When all seemed hopeless, the Government of Québec appealed for help from the Federal Government, for Canadian Armed Forces intervention. The call for assistance of the military is the last court of resort after all reasonable dialogue has been exhausted and from which there can be no backing away, for the armed forces of our nation cannot be allowed to lose any confrontation. For such is the role of the military.

Faire appel à l'armée canadienne, cela veut dire que ceux qui ont opté pour cette solution sont également prêts à accepter les conséquences des actions d'un soldat bien entraîné. Les membres des forces armées, bien que citoyens du pays, ont également le pouvoir de réprimer toute insurrection ou présumée insurrection. L'armée a le pouvoir de tirer et une fois qu'elle a le mandat d'agir, un changement d'avis politique ne peut la maîtriser. En fait, une fois que vous avez appelé l'armée, vous avez lâché les chiens de guerre et vous ne devez pas vous plaindre ou gémir si elle remplit la fonction pour laquelle vous l'avez demandée.

As the stand-off continues at Oka, the scene of one death already, it is to be hoped there will be no further loss of life. But if such be the case, then so be it. Any death or injury then rests squarely on the heads of those who issued the call for the assistance, including the despicable act of Tuesday, when a convoy of women, children and elderly was stoned by vandals as these people were being evacuated from the Kahnawake region.

No person, whether they be a member of the native population or the mainstream of the population, is above the law of the nation. That is the reason for bringing in the troops. If those troops then employ the firepower of the military tanks, then they are but fulfilling the orders implicitly handed them by the political infrastructure.

Je dis tout cela, parce que j'ai été membre au cours de deux guerres des forces de l'infanterie canadienne et je sais ce que c'est que d'avoir à exécuter un ordre qui, dans certains cas, est déplaisant, mais qui a été jugé nécessaire par ceux qui tiennent les commandes. Je dis tout cela également, parce que j'ai en horreur et je condamne cet appel à l'intervention militaire, probablement parce que je sais plus que tout autre qui siège dans cette Chambre, les implications de la responsabilité du militaire une fois les ordres reçus. Les retombées politiques seraient énormes, si les Forces armées canadiennes devaient exécuter avec rigidité le mandat qu'elles ont reçu.

This is all a preamble to the reason for the urgent building of a bypass highway on the south-shore. The building of this alternate route will do little to discourage any further confrontational stand. The only resolution must be between the government and the native peoples. If anyone believes that a bypass autoroute is the solution has not thought through the implications of protest. In some parts of Canada, the railway lines are being blockaded, the highways disrupted, bridges being burned, all because we could not resolve the question of a tiny piece of land under dispute for the creation of an extra 9 holes of golf. Our priorities, Mr. President, are indeed askew, if we believe the extension of highway 30 is the panacea for all our ills. (14 h 20)

Le prolongement de l'autoroute 30 est une solution de pansement à un problème qui couve depuis longtemps au Québec. Dans les circonstances, si le gouvernement n'a pas réalisé la sévérité du problème, laissez-moi lui dire qu'on

doit s'attendre à ce que l'extension du projet de la Baie James II fasse l'objet de sérieuses interruptions par les autochtones du Nord s'il n'y a aucun règlement de ce qu'on peut décrire comme un des petits problèmes entre le gouvernement du Québec et les autochtones. i fully support the government's intention to finally accept the inevitability for the need to construct highway 30. the traffic that presently flows through the major core of greater montreal is intolerable. but to now reach this conclusion because we could not settle the problem of an extra nine holes of golf is indeed a farcical situation. however, autoroute 30 between sainte-catherine and châteauguay does not alleviate the problem of traffic attempting to circumvent the island of montréal by the south shore. this extension should continue westward until it joins up with the macdonald-cartier highway commonly known as highway 401.

The cost of this mini autoroute bandaid is pegged at some 10 000 000 $ to 20 000 000 $. That is however but the tip of the iceberg of the cost to the Québec taxpayers. When the cost of this bypass is calculated into the costs of the military and police force intervention, along with the indemnity costs to the citizens, promised by the government, I would be surprised indeed if the cost of the autoroute 30 would not closer approach the figure of 300 000 000 $ or 400 000 000 $. That, M. le Président, is an incredibly high cost to pay, all because we could not or would not listen to the native peoples of Oka and halted the extension of an extra nine holes of golf. ii n'y aura aucune paix tant que les deux gouvernements, fédéral et provincial, ne se seront pas assis pour discuter sérieusement de ces problèmes. merci, m. le président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, malheureusement, les étés se suivent et se ressemblent. Je le dis parce que c'est malheureux pour la population qui, depuis quelques années, à tous les étés, est littéralement prise en otage, prise dans une situation absolument inextricable causée par l'incapacité de prévoir et d'agir de ce gouvernement.

D'ailleurs, il y a à peu près unanimité chez tous les commentateurs politiques, chez tous les analystes de la vie politique pour dire qu'il y a, à Québec, absence de gouvernement. Il faudrait se souvenir, l'année dernière, de la saga des BPC alors que pendant des semaines on a insécurisé une population qui ne savait plus ce qui allait lui arriver, qui ne savait plus si des familles allaient pouvoir continuer à demeurer dans leur maison à cause d'un règlement que ce gouvernement n'avait pas eu le courage d'appliquer, de mettre en oeuvre à cause, encore une fois, de l'improvisation de ce gouvernement.

Cette fois-ci, évidemment, c'est encore plus ¦grave, à mon point de vue, parce que, par cette attitude on a négligé de résoudre les problèmes au fur et à mesure qu'ils se présentaient, on a négligé de faire en sorte que nos relations avec les autochtones soient de plus en plus saines, permettant d'établir, effectivement, un processus continu de négociations. D'ailleurs, l'Assemblée nationale avait adopté ici une résolution en ce sens lorsque nous étions au pouvoir et lorsque M. René Lévesque était chef de ce gouvernement. Pas de suivi dans le sens de cette négociation continue. On attend, comme toujours, la situation de crise avec les résultats absolument malheureux auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui, avec des manifestations inacceptables d'agressivité envers une communauté, envers des personnes qui ne le méritent pas; et ça, j'en tiens responsable le gouvernement qui est devant nous.

Quand j'entends le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle nous parler d'un gouvernement qui ne se traîne pas les pieds et qui répond à la conjoncture, qui nous dit: Nous répondons à l'urgence de la situation, bien, M. le Président, je suis absolument sidérée. Comment un ministre, député de la rive sud, député de la Montérégie, responsable pour son gouvernement de ce qui peut se coordonner, des actions qui peuvent se concerter sur ce territoire, peut-il affirmer devant les membres de cette Assemblée qu'il ne s'agit pas d'improvisation, mais qu'il s'agit, tout simplement, de répondre à la conjoncture, comme s'il ne s'était rien passé? Mais sur quelle planète vivons-nous, M. le Président?

Voyez-vous, à ce que je puisse me souvenir, c'est en 1985 - pas en 1989 pendant les élections, mais pendant les élections de 1985 - que ce gouvernement s'était engagé par une promesse électorale... Parce que, dans leur cas, ce sont des promesses et non des engagements; et ils ne les tiennent pas, de toute façon, on le constate encore aujourd'hui. Alors, en 1985, on s'était engagé, en pleine campagne électorale, à finaliser le prolongement de l'autoroute 30; pas celui dont on parle aujourd'hui, pas le petit tronçon dont on parle aujourd'hui, mais le prolongement de l'autoroute 30 entre Brossard et Valleyfield. Où était-il, M. le Président, ce ministre et où étaient ses collègues de la Montérégie pendant les quatre années et demie où le gouvernement du Parti libéral a été au pouvoir? Comment ose-t-il nous dire aujourd'hui, M. le Président, qu'il répond à une planification, à un grand plan fait par le ministère des Transports? Savait-il de quoi il parlait, en 1985, lorsqu'il a pris cet engagement?

Si on regarde les budgets qui ont été

alloués aux routes, à l'entretien routier pendant les années où le Parti libéral était au pouvoir, on constate que non seulement on ne réussit pas à entretenir les routes, mais on investit moins que notre gouvernement, que l'on critiquait à ce moment-là, ne le faisait lorsque nous y étions, en essayant, justement, de planifier les investissements et de faire en sorte qu'on ne se retrouve pas dans des situations de crise comme celle dans laquelle on se trouve aujourd'hui. Alors, qu'on vienne me dire aujourd'hui que tout ça est normal, je ne le prends pas, M. le Président. Ce n'est absolument pas normal. Je suis absolument estomaquée et je n'accepte pas qu'à la fin du mois d'août on improvise tout d'un coup sur une loi qui concerne une autoroute dont on parle depuis des années et qu'on nous amène à cautionner un tel processus. C'est ridiculiser, finalement, à mon point de vue, tout le processus démocratique dans lequel on s'inscrit comme membres de l'Assemblée nationale.

Je dois vous dire que je m'opposerais avec véhémence à ce projet-là si je ne savais qu'il finit par enfin répondre à des besoins exprimés depuis longtemps par des citoyens et des citoyennes de la rive sud. Mais j'ose croire que ça ne leur fera pas oublier - et je mets le mot entre guillemets, mais je n'en pense pas moins pour autant - le merdier dans lequel on s'est retrouvé depuis quelques mois et qui m'apparaît carrément inacceptable pour un gouvernement qui dit se respecter et qui dit vouloir répondre aux besoins de la population. Alors, effectivement, si ce n'était dans l'intérêt de la population, des personnes qui vivent autour du pont Mercier, si ce n'était dans l'intérêt des personnes qui vont utiliser cette route et qui en ont besoin, je m'opposerais à l'adoption de cette loi. (H h 30)

II faut se rappeler, M. le Président, qu'on suspend aussi les règles en ce qui a trait aux consultations exigées en matière environnementale. Il faut se le dire. Il ne faut pas se cacher en dessous de nos pupitres, parce que, c'est ça, aussi, le projet de loi qui est devant nous. On fait ça à la fin du mois d'août. Est-ce que c'est pour se disculper, pour dire aux gens de la région de Châteauguay, aux gens de Sainte-Catherine, aux gens de Saint-Constant: Nous sommes un bon gouvernement, nous nous occupons de vous? Nous nous occupons de vous! Vous irez les voir, parce que effectivement - mon collègue de La Prairie le mentionnait tout à l'heure - est-ce qu'on est allé rencontrer ces populations? Est-ce qu'on est allé leur expliquer le processus dans lequel on était engagé comme gouvernement? Est-ce qu'on est allé leur présenter une possibilité d'ouverture au bout du tunnel? Absolument pas, M. le Président. Alors, on se retrouve encore une fois avec une réponse improvisée à un problème connu depuis un bon moment, pour lequel ce gouvernement avait pris des engagements très clairs à l'égard de la population, et tout ça, dans un processus absolument catastrophé où on met de côté des lois fondamentales en ce qui concerne la gestion du territoire, ce qui m'apparaît carrément inacceptable.

Je veux donc bien préciser que c'est pour la seule raison que ce projet va répondre aux besoins d'une population qui est absolument prise au dépourvu et en otage, actuellement, que j'accepterai de voter pour un projet comme celui-là, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Taillon. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Châteauguay.

Mme Pierrette Cardinal

Mme Cardinal: Merci, M. le Président. Inutile de vous exprimer mon soulagement et ma satisfaction d'intervenir dans le débat sur le présent projet de loi. Le gouvernement québécois a choisi la voie d'une loi spéciale afin de dénouer une impasse qui, à plusieurs égards, était rendue complexe et délicate à la fois. À n'en pas douter, les événements de Châteauguay parlent d'eux-mêmes. Et, si j'avais plus de temps, je pourrais en causer longuement. Ils témoignent de la frustration de la population concernée devant les difficultés de déplacement quotidien, un droit des plus légitimes.

À cet égard, vous me permettrez de vous résumer en quelques mots les sentiments que j'ai vécus à titre de députée du comté de Châteauguay depuis le début de ce conflit. J'aimerais d'abord insister, avant même que soit réglé ce dossier, sur les conséquences économiques et sociales ressenties par l'ensemble de la population de Châteauguay. Il m'est très difficile de vous décrire en quelques minutes, en des termes simples et concrets, l'intensité des émotions et des tensions ressenties dans le milieu depuis plus de 50 jours. Les médias d'information, tant parlés qu'écrits, ont reflété le mieux possible la frustration qui s'est installée dans le milieu dès le mois de juillet dernier. Nous avions déjà subi, il faut s'en souvenir, une expérience antérieure. La réalité est simple: la population s'est littéralement sentie désemparée et lésée dans ses droits les plus fondamentaux. En effet, les inconvénients subis ont impliqué pas moins d'une centaine de milliers de personnes; directement et indirectement concernées, ça pourrait couvrir jusqu'à 150 000 personnes. Je parle ici d'inconvénients à court terme, puisque l'on devra, un jour ou l'autre, dresser un bilan des pertes totales qui finiront, si l'on n'y prend garde, par crever le tissu social actuel.

Voilà la véritable portée du conflit vécu aussi bien à Châteauguay que dans les autres régions impliquées de près ou de loin dans le conflit autochtone. Et j'irai plus loin en disant que ma priorité sera de refaire, voire même de

reconstruire le tissu social sérieusement entaché depuis plusieurs mois. (14 h 40)

Je ne saurais continuer sans rendre hommage à la population de Châteauguay et des environs, qui a fait preuve d'une immense patience. Malgré les nombreux inconvénients vécus, ils ont conservé, à quelques exceptions près, leur patience, leur tolérance et leur dignité. Également, mon appréciation au premier ministre, aux ministres concernés et à leur personnel pour leur constant appui dans un conflit si difficile. J'ai également reçu l'appui de la Chambre de commerce de Châteauguay et de la SODEQ. Merci à tous ceux qui, de près ou de loin, m'ont soutenue dans ce conflit.

M. le Président, que dire de la collaboration de tous les instants du maire de Châteauguay, du préfet et des maires de la MRC de Roussillon? Merci à vous tous. Mais je veux particulièrement remercier ma famille que j'ai mise dans des situations plus que difficiles, mon personnel qui a été disponible et est toujours disponible 7 jours semaine, 24 heures par jour et ça, depuis le début du conflit. J'en suis très fière, c'est ce qui m'a aidée à passer au travers. À Rollande, à Françoise, à Normand, merci et ma reconnaissance.

Aujourd'hui, les membres de l'Assemblée nationale sont appelés à solutionner un élément essentiel pour l'avenir de Châteauguay et des environs. D'ailleurs, le projet de loi fait suite à une annonce, le 9 août dernier, alors que le ministre des Transports annonçait qu'il amorçait les démarches nécessaires afin de réaliser dès cette année un tronçon de 8,5 kilomètres de l'autoroute 30 reliant le boulevard Ford, à Châteauguay, et la route 132, à Sainte-Catherine.

Le gouvernement dépose ce projet de loi afin d'accélérer le processus d'acquisition des immeubles nécessaires à la construction de l'autoroute 30 entre les villes mentionnées. Ce projet aura un impact bénéfique et concret pour l'ensemble de la région puisque, dès l'automne prochain, les travaux seront achevés, soit un projet de l'ordre de 10 000 000 $, alors qu'une chaussée à deux voies de circulation aura été construite. Et on parle également du tronçon entre la 138 et le boulevard Ford, du boulevard Ford au rang Sainte-Marguerite à Mercier. L'an prochain, on complétera le projet autoroutier de 12,5 kilomètres qui coûtera 43 800 000 $.

Le processus d'expropriation comportant certains délais à respecter, il a été décidé, au Conseil des ministres, le 22 août dernier, de déposer ce projet de loi spécial à l'Assemblée nationale afin d'accélérer ce processus. Cette procédure spéciale d'expropriation devait être prévue afin de réduire au minimum les délais qu'impose la loi actuelle. Cependant, des mesures d'atténuation des inconvénients que pourraient subir les expropriés seront mises de l'avant.

Les travaux devraient s'échelonner sur environ deux mois de calendrier. Ainsi, dans la perspective de l'adoption rapide de cette loi spéciale au début de septembre, ce qui nécessitera la bonne collaboration de tous les membres de l'Assemblée nationale, nous assisterons, une semaine plus tard, au début des travaux tant attendus.

L'adoption d'une loi spéciale apparaît nécessaire pour rencontrer l'objectif du gouvernement de mettre à la disposition de la population de Châteauguay une voie de contoumement de la réserve de Kahnawake. À coup sûr, il s'agit là d'une mesure que l'on peut qualifier de considérable qui contribuera à améliorer la circulation routière. Quand on sait que 80 % de la population transite entre les villes avoisinan-tes et Montréal et ce, sur une base quotidienne, vous pouvez imaginer les inconvénients puisque nous n'avions qu'une seule voie d'accès. Je vous laisse le loisir d'imaginer les inconvénients vécus depuis le début de ce conflit alors que toute la circulation automobile fut détournée, provoquant des coûts et des retards importants se reflétant sur la santé et la sécurité des gens.

D'ailleurs, le projet de l'autoroute 30 n'est pas né spontanément dans le sillon du présent conflit. On se rappellera en effet que, depuis plus de 20 ans, on parle de ce dossier de façon abondante et seul l'espoir semblait constituer la réalité. De plus, le dossier de l'autoroute 30 a fait l'objet d'études dans le cadre du dernier sommet socio-économique de la Montérégie, dossier qui fut d'ailleurs retenu parmi les priorités d'action et qui devra être complété dans son entier et sans interruption.

La présentation de ce projet de loi aura ceci de bénéfique en ce qu'il rassurera la population de la région puisque la réalisation de cette autoroute constituera une alternative efficace pour les déplacements de la population et assurera la relance économique de notre région.

Je n'ai pas à insister, M. le Président, le gouvernement libéral accorde une importance certaine au développement régional dont le raffermissement du réseau routier constitue une priorité et assure un lien essentiel entre les différentes régions du Québec. Quant à la gestion globale de ce présent dossier, je tiens à souligner que le gouvernement québécois a assumé le leadership nécessaire au règlement de ce conflit dans la paix et surtout d'une façon pacifique afin d'assurer à ma population la sécurité nécessaire à son développement.

Les développements récents furent rendus nécessaires parce qu'à un moment donné, dans toutes les négociations, il y a une limite qu'un État moderne doit assumer pleinement, soit lorsque les interlocuteurs menacent la sécurité d'une population civile. Somme toute, les avantages de l'adoption de cette loi spéciale sont concrets et se situent dans une perspective d'une

solution à un problème de développement régional.

D'abord, le délai initial de 105 jours en ce qui a trait à l'expropriation est réduit à 45 jours. De plus, le début des travaux pourrait s'effectuer dès le début du mois de septembre. Espérons-le. En second lieu, la population se sentira sécurisée en ce sens qu'une alternative est enfin trouvée pour assurer une circulation plus normale, plus efficace entre la ville de Châteauguay et ses environs et la ville de Montréal. En troisième lieu, la réalisation de ce projet constitue une réponse du gouvernement à un engagement pris dans le cadre de la dernière campagne électorale, engagement qui se retrouvait dans notre programme officiel.

Il est donc important de souligner que, dans le cas d'accélération de ces travaux, le Conseil des ministres a fait en sorte que le projet soit soustrait de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, tel que prévu dans la Loi sur la qualité de l'environnement. À cette même séance du Conseil des ministres du 15 août dernier, il a été ordonné par décret que soit enclenché le processus d'expropriation visant la réalisation de ce projet autoroutier.

On retiendra également que le gouvernement québécois était confronté à un dilemme important par rapport à l'ensemble du dossier. D'une part, il s'est vite aperçu que la population souffrait d'inconvénients majeurs à cause de ce chaos social créé depuis ces 50 derniers jours. D'autre part, le gouvernement a toujours estimé les demandes formulées par les autochtones comme étant légitimes dans la mesure où les négociations sont gérées dans un processus normal d'échanges entre différents partenaires. Et, quand on y pense bien, ce projet d'autoroute témoigne d'un respect certain du gouvernement à l'égard des autochtones puisque celle-ci contournera la réserve.

La solution retenue aujourd'hui tient également compte des inconvénients vécus par la population de Châteauguay et de ses environs. Vous comprendrez, M. le Président, qu'il y a certainement une considération humaine qui a été prise en ligne de compte lorsque est venu le moment de solutionner ce problème et cette solution s'inscrit dans la perspective d'une action légitime de la part du gouvernement à l'égard de la population visée.

Cette action s'inscrit dans un processus visant à améliorer la qualité de vie des citoyens et citoyennes durement éprouvés, dont la patience et la bonne volonté, et je leur en rends hommage, méritent d'être soulignées à nouveau. Mais cette action s'inscrit également dans un processus d'amélioration de la circulation routière sur la rive sud de Montréal. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, Mme la députée de Châteauguay. M. le député de Duplessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Encore une fois, le gouvernement du Parti libéral invoque l'urgence pour nous amener en catastrophe ici, en Chambre, en plein été, afin de régler un problème qu'il a lui-même créé. Le projet de loi 82 concernant l'autoroute 30 a bien sûr son importance aujourd'hui pour le gouvernement libéral. Cependant, il n'avait pas beaucoup d'importance pour ce même gouvernement au cours des cinq dernières années. Et tout ça parce que le gouvernement libéral du Québec a pratiqué l'Incurie dans la gestion du dossier autochtone.

M. le Président, je voudrais vous rappeler en passant et rappeler aux membres de cette Chambre que le fameux dossier du terrain de golf à Oka existe sur la place publique depuis janvier 1989. Au cours de l'été 1989, il y a eu des protestations qui ont été fartes par les Mohawks de Kanesatake et d'Oka afin que ce terrain de golf ne soit pas construit. Au cours des mois qui sont suivi, à aller jusqu'en mars dernier, c'est-à-dire jusqu'à mars 1990, où d'ailleurs on s'est ramassé avec les barricades à Oka, ce gouvernement aurait pu très bien agir, soit en négociant directement avec la municipalité, soit encore en légiférant si c'était nécessaire pour ne pas permettre à la municipalité la construction d'un terrain de golf, voire même en entamant des négociations avec le Français Rousseau. D'autre part, il n'est pas question pour l'Opposition de blâmer la municipalité d'Oka ou quelque autre municipalité que ce soit dans l'affaire des Mohawks, et en particulier dans l'affaire des Warriors, parce que le gouvernement n'est pas intervenu au bon moment.

Aujourd'hui, on fait face à une loi qui déroge carrément aux coutumes habituelles, aux étapes normales du cheminement d'un dossier comme celui de l'autoroute 30. Les audiences publiques, on s'en balance. La protection du territoire agricole, par-dessus bord. Le processus normal d'expropriation, chez le diable, et l'octroi des contrats, sur le bras.

Tout ça pour vous dire, M. le Président, que ce gouvernement, en particulier l'équipe ministérielle, c'est-à-dire les gens, les personnes qui sont ministres dans ce gouvernement, ne savent pas gouverner. Comme le plaidait mon collègue, le leader de l'Opposition en Chambre, on dirait que ce gouvernement cherche à créer des crises pour ensuite gérer ces crises, pour se faire du travail à faire, pour se faire une crise à gérer. On dirait que ce gouvernement attend le dernier moment propice pour agir en conséquence, c'est-à-dire pour régler le problème des autochtones.

Et j'entendais, ce matin, le ministre délégué aux Affaires autochtones qui semblait dire en

cette Chambre que son gouvernement avait réglé plusieurs dossiers autochtones au cours des cinq dernières années. S'il avait mis en application les 15 principes de 1983, qui ont conduit par la suite à la fameuse motion à l'Assemblée nationale, à cette fameuse résolution de l'Assemblée nationale reconnaissant toutes les nations autochtones du Québec, en les nommant une par une, en passant, comme des nations, en leur reconnaissant même l'autonomie gouvernementale à l'intérieur de leur territoire, en particulier les territoires de catégorie I, ce que je puis vous dire c'est que le problème, on ne l'aurait pas sur les bras aujourd'hui. On ne serait sûrement pas ici en cette Chambre. (14 h 50)

Quant à moi, je n'ai jamais accepté... Lorsque est arrivée, le fameux 11 mars, la levée des barricades à Oka, je me demande pourquoi le gouvernement, à ce moment-là, lorsqu'il y avait peut-être 10 à 15 Warriors en arrière des barricades et sur les barricades, n'a pas permis que la Sûreté du Québec intervienne. Et pourquoi être intervenu quatre mois plus tard lorsqu'il y avait peut-être 150, 200 Warriors de l'autre bord des barricades? Et l'intervention faite par la Sûreté du Québec, je voudrais bien connaître la personne dans ce gouvernement, au niveau ministériel, qui a donné l'autorisation et l'ordre à la Sûreté du Québec d'intervenir face à des gens qui étaient armés jusqu'aux dents, qui étaient armés jusqu'aux oreilles, même jusque par-dessus la tête, si on s'en tient aux découvertes qui ont été faites par l'armée. Je ne comprends pas cette attitude gouvernementale qui a fait en sorte qu'un des plus beaux corps de police que nous avons au Québec, communément appelé la Sûreté du Québec, intervienne comme des gens qui font partie de l'armée canadienne ou de l'armée québécoise, appelez ça comme vous voulez, et armé même avec des armes de l'armée canadienne. Ce n'était pas leur travail. Le travail, à ce moment-là, aurait dû être fait, dans un premier temps, dans les jours qui ont suivi le 11 mars ou, encore, le travail aurait dû être fait par l'armée et non pas par la Sûreté du Québec. C'est un grand reproche que je fais au gouvernement libéral d'avoir donné l'ordre à la Sûreté du Québec d'intervenir quatre mois plus tard et, en passant, quatre mois trop tard.

Si on se ramasse aujourd'hui, en cette Assemblée nationale, et si on s'est ramassés au cours des 50 derniers jours avec les problèmes qu'ont connus des populations du Québec et qui ont eu d'ailleurs des répercussions dans l'ensemble de tous les territoires québécois dans toutes les régions du Québec... Qu'on se rappelle le blocage de la route 138 par les Montagnais de Betsiamites; qu'on se rappelle la manifestation des Montagnais de Sept-îles; qu'on se rappelle ce qui est arrivé tout dernièrement avec les Micmacs; qu'on se rappelle ce qui se passe dans le dossier des autochtones dans le cas des Algon- quins du lac Barrière et ça, depuis plusieurs années; qu'on se rappelle ce qui se passe au niveau des négociations avec les Attikameks-Montagnais.

Moi, ce que je peux vous dire, c'est que ce gouvernement, au cours des cinq dernières années, n'a vraiment rien fait pour régler la question des autochtones. Et là, au moment où on se parle, encore une fois, comme ça a été fait en 1970, il s'est allié l'armée pour venir au Québec et, en passant, il faut admettre cependant que, n'eût été de l'armée, il y aurait eu de la casse pas mal plus qu'il y en a eu. Comme on paye pour cette armée, je ne vois pas pourquoi cette armée n'était pas venue ici antérieurement sur une commande du premier ministre du Québec pour régler ce problème de fond, pour régler ce problème qui nous est amené même de l'extérieur du Québec, soit de l'Ontario ou encore de l'État de New York. Je ne comprends pas que ce gouvernement se soit reculé et ait regardé le train passer au lieu d'embarquer dedans et en prenant les bonnes décisions qui s'imposaient dans le temps.

De plus, et j'écoutais la députée de Châ-teauguay, avec tout le respect que j'ai pour cette dame qui a vécu probablement des moments extrêmement difficiles et, ça, je le regrette, mais, si elle a vécu des moments difficiles, c'est justement à cause de l'incurie de son gouvernement, de l'absence de son gouvernement malgré les promesses qui avaient été faites en 1985 - et ça, elle a oublié de le dire tout à l'heure - de régler la question de l'autoroute 30. Promesse qui a été renouvelée, en passant, comme l'a dit la députée de Châteauguay, en 1989, encore une fois, au cours de la campagne électorale. Bien là, c'est rendu que vous faites à peu près la même chose que ce que Duplessis faisait lorsqu'il était au pouvoir, lorsqu'il voulait gagner une élection. Il disait à ses lieutenants: Vous promettez dans une première élection, vous montrez les plans et devis dans une deuxième élection et, à la troisième élection, vous travaillez sur le terrain pour construire la route. Bien, les attitudes que vous avez, vous, les libéraux en cette Chambre qui représentez le gouvernement et la population du Québec, ça me rappelle exactement ces attitudes qui étaient prises par l'ancien premier ministre du Québec, M. Duplessis. Vous faites des promesses et vous ne les tenez jamais.

M. le Président, en conclusion... Il est vrai que je suis d'accord aujourd'hui avec la construction de l'autoroute 30. Il vrai que je suis d'accord. Mais je suis d'accord non pas parce que le gouvernement a apporté le projet ici en cette Chambre, mais parce que ce sont des besoins exprimés par la population de Châteauguay et de ses environs, la population de la rive sud. Et j'espère que nous n'aurons pas à revenir en cette Chambre pour régler à la pièce des problèmes comme ceux-là, à travers le Québec.

II fallait la signature d'un document avec

un Warrior. Il fallait des barricades à Kanesata-ke, à Kahnawake et au pont Mercier. Il fallait la présence de l'armée. Il fallait que le gouvernement libéral pousse la Sûreté du Québec à agir. Là, on a pris une mauvaise décision, et ça, je trouve ça extrêmement dommage. Il fallait aussi des manifestations blanches face aux agissements illégaux qui ont été amenés par les Warriors et par certains Mohawks. Cette population blanche, je crois, tout comme une grande partie de la nation mohawk, a été lésée dans ses droits parce que le gouvernement n'a pas su agir au moment propice pour régler les problèmes de l'ensemble des autochtones du Québec ainsi que de l'ensemble de la nation mohawk. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le député de Duplessis. Prochain intervenant, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Je ne peux pas, même si, en ce qui me concerne, ce n'est pas un des plus beaux jours de cette Assemblée... Mais ce n'est pas la première fois, depuis ce gouvernement-là, qu'on se retrouve devant une loi spéciale. Et, comme je le mentionnais tantôt, ce n'est pas de gaieté de coeur que je dois y aller de quelques considérations. Il est certain, je pense, que nous avons vécu cet été une des plus difficiles crises que le Québec aura jamais connues. Ce qui est malheureux, déplorable, dénonçable, c'est d'être obligés de faire ça en une convocation spéciale d'urgence. Imaginez qu'on le fait sur un projet de loi qui se termine par une question - excusez l'expression - de "garnotte". Et j'expliquerai pourquoi c'est tellement honteux et décevant d'être obligés d'en arriver là.

Ma collègue disait tantôt que ce n'est pas parce que ce gouvernement-là nous a habitués à l'indécision chronique qu'on doit se réjouir d'être convoqués aujourd'hui pour une loi spéciale, concernant un projet de loi pour se soustraire à une série de mesures qui sont les nôtres depuis plusieurs années, que ce soit concernant la protection du territoire agricole, que ce soit concernant les normes d'études d'impact lorsqu'on fait un projet de cette envergure-là, concernant aussi les droits à l'expropriation. Ce n'est pas grave, on met ça par-dessus bord et on procède.

On a eu droit à la saga des BPC, on a eu droit à la saga des pneus de Saint-Amable, on a eu droit à la saga des heures d'affaires. Il s'agit juste de faire un aparté. Moi, je le vis chez nous. C'est à peine appliqué que, déjà, on est dans une situation absolument intenable, invivable, encore là, parce que le gouvernement s'est traîné les savates, s'est traîné les pieds, n'a pas eu l'heur de prendre une décision et, finalement, n'a pas tranché. Mi-chair, mi-poisson, comme d'habitude, une loi un peu entre les deux, qui fait que ça crée de l'insatisfaction presque partout. Mais qu'est-ce que vous voulez? Depuis quatre ans, depuis 1985, on dirait que la caractéristique principale de ce gouvernement-là, c'est de laisser pourrir les problèmes, pourrir les situations et, après ça, justifier une action par loi spéciale ou autrement.

La crise que nous avons vécue cet été est une crise majeure, d'envergure, difficile, qui méritait effectivement d'être gérée avec beaucoup de circonspection, beaucoup de parcimonie, compte tenu des conséquences qu'elle peut avoir sur l'avenir de cette nation québécoise et de l'image que nous avons à l'étranger. Mais ce n'est pas une mince affaire, quand un des leurs est obligé de démissionner pour indiquer combien il a eu honte. Et c'est principalement pour ça que j'interviens. J'ai rarement eu aussi honte que cet été, M. le Président, de voir la caricature que ce gouvernement-là a faite de ce que c'est, un gouvernement qui prend des décisions, un gouvernement qui a le respect de certaines règles qui sont établies. (15 heures)

J'entendais le ministre de la Justice, avec ses beaux principes et ses déclarations: II ne peut pas y avoir deux types de justice et il ne peut pas y avoir des avantages pour les uns et quand ça ne fait pas leur affaire, à ce moment-là, ils ne les prennent pas. Moi, je vais faire appliquer la justice pour tout le monde. Alors qu'on sait très bien que ces gens-là savaient depuis au moins trois ans que, en particulier, les Warriors étaient des gens qui agissaient illégalement. Je n'ai rien contre la nation mohawk, je n'ai rien contre les nations amérindiennes, mais j'en ai contre les Warriors parce que ces gens-là étaient dans l'illégalité, ces gens-là pratiquaient l'illégalité. Le gouvernement le savait et on a toujours laissé faire.

Essayez donc, vous, M. le Président, de ne pas payer votre compte d'Hydro pour voir ce qui va vous arriver. Moi, comme député de comté, constamment, je suis obligé de faire des interventions pour des citoyens qui sont sur l'aide sociale avec une loi de fou - on va en parler tantôt dans quelques minutes - et qui sont incapables, complètement incapables de faire face à leurs obligations. Je vous dis que la discussion n'est pas longue. La discussion n'est pas bien bien longue parce qu'ils sont obligés de payer, eux autres, leur mensualité, leur dû à HydroQuébec. Et on dit ça en pleine télévision. Il y a des gens qui ne paient pas leur électricité depuis deux ans, deux ans et demi même s'ils s'en servent comme s'ils avaient des privilèges auxquels nous, on n'aurait pas droit. À un moment donné, le ministre de la Sécurité publique - bien sûr qu'il ne porte que le nom en ce qui me concerne - est obligé de dire, membre

d'un Conseil des ministres: On s'est fait rouler sur toute la ligne. On s'est fait avoir sur toute la ligne, alors que ça faisait des mois que la population... Et n'importe lequel parlementaire le moindrement averti, ça ne prenait même pas un parlementaire, ça prenait juste quelqu'un qui a un gros bon sens commun pour se rendre compte que le gouvernement est en train de se faire avoir sur toute la ligne. Mais, à un moment donné, il arrive au Conseil des ministres et il l'a dit avant qu'il ne décide de se cacher parce que ce matin on apprend que je vous dis qu'ils sont bien moins montrables qu'ils l'étaient... C'est un gouvernement qui se cache. On n'a qu'à regarder dans les journaux là. Ils aimaient ça passer par la porte principale quand ils entraient au Conseil des ministres au début de leur mandat. Mais je vous dis qu'il n'y en a plus bien bien qui ont le courage de passer par la bonne porte.

M. Pagé: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Cannon): M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, avec le consentement de mon collègue et bon ami, M. le député d'Abitibi, il me permettra très certainement de porter à son attention un fait auquel, j'en suis persuadé, il a déjà été associé, à savoir que le mercredi, lorsque le Conseil des ministres est à 10 heures en matinée, le Comité ministériel du développement régional, le Comité ministériel du développement économique et celui du développement social se réunissent avant. Le problème auquel vous référez, c'est que, au-delà de quatorze ministres étaient présents dans ces comités au Conseil des ministres hier, comme tous les mercredis, depuis 8 heures le matin. Le problème, c'est que notre ami, Normand Girard, arrive vers 10 heures.

Une voix: Oups!

Le Vice-Président (M. Cannon): Alors, merci de votre intervention, mais je ne crois pas que c'était une question de règlement. Alors, M. le député...

M. Gendron: ...M. le Président, c'est plutôt rare que j'entends dire d'un membre du Parti libéral qu'il a des problèmes avec leur ami, comme il vient de le dire, M. Normand Girard. C'est très rare que j'entends ça, je veux dire, en tout cas... Alors là, j'en apprends une bonne. Tant mieux. Mais au-delà de ça, M. le Président, très sérieusement, quand le ministre de la Sécurité publique indique qu'on s'est fait avoir, c'est parce qu'il voulait traduire lui aussi le sentiment de l'ensemble de la population du Québec qu'on avait éprouvé lorsqu'un membre de ce gouvernement, surtout responsable du dossier des affaires autochtones, s'en va signer en pleine télévision un document avec des gens masqués, des gens anonymes, et on ne sait même pas qui ils sont véritablement. Là, on venait de donner l'image publique que, pour eux autres, entre ce qu'ils disaient et l'action de leur gouvernement, il y avait un monde de différence.

Et on a raison, je pense, de rappeler ces faits-là, M. le Président, surtout quand on entend ce qu'on a entendu, pas plus tard qu'il y a quelques minutes. C'est vrai qu'il faut avoir du culot et Dieu sait si celui qui l'a dit en a, le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je vous dis que c'en est un qui est bien culotté, ça, pour avoir le culot de dire: Nous, on est un gouvernement qui agit, qui prend ses responsabilités, qui ne se traîne pas les pieds et qui répond en termes de gestion à des éléments de conjoncture. Qu'est-ce qu'il venait de dire, M. le Président? Il venait de nous dire que ce gouvernement-là gère suivant la lecture qu'il fait de la conjoncture, alors que j'ai toujours appris que gouverner, c'est un peu prévoir des situations. Or, cette situation-là était prévisible depuis des mois, depuis plusieurs mois et il est absolument impensable, inconcevable qu'on ait aujourd'hui le culot de venir dire dans une loi spéciale que c'est un gouvernement qui assume ses responsabilités, qui prend les décisions au bon moment, surtout quand on en rajoute.

Moi aussi, j'ai eu beaucoup de sympathie, je suis sincère, pour ce que la députée de Château-guay doit avoir vécu cet été. Ça ne doit pas avoir été drôle, ce qu'elle a vécu. Mais moi, je n'aurais pas félicité, par flatterie, mon premier ministre. Ça, ce n'est pas vrai, je n'aurais pas été capable. Je n'aurais pas été capable d'avoir cette attitude qui ne peut pas correspondre aux faits. Je n'aurais pas été capable d'avoir l'attitude de continuer sa phrase quand elle a dit, et je la cite au texte: "Pour notre gouvernement, il est important, c'est capital, de se préoccuper du développement régional, surtout quand on le lie au réseau routier." C'est une farce monumentale. J'ai failli m'éclater de rire, mais c'est trop triste, quand on sait que son collègue, le ministre des Finances, n'a pas mis une cenne dans le budget de cette année pour le développement du réseau routier, pas une cenne. Est-ce qu'il va falloir faire des barricades partout? Est-ce qu'il va falloir annoncer que c'est nos industriels qui vont prendre leurs tracteurs, leurs camions? Nous aussi, on a droit à des routes.

Pensez-vous qu'aujourd'hui c'est intéressant pour un régionaliste d'être d'accord avec la loi 82? Ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens pantoute sur le plan des faits, parce que moi, je n'ai pas une cenne cette année, même si je me promène avec une lettre de l'ancien ministre des Transports qui me disait il y a un an: Oui, on va dépenser 400 000 $ à tel endroit. Une lettre de ministre de ce gouvernement-là ne vaut même plus rien. Ça ne veut rien dire. J'en ai une autre du ministre actuel. Ça ne veut

encore rien dire parce qu'il ne s'est rien fait et je le sais, qu'il ne se fera rien. Au niveau de la loi 82, bien sûr qu'on va être obligés d'être d'accord sur la loi 82, parce qu'il faut au moins offrir une alternative aux gens de Châteauguay qui, effectivement, se sont comportés en suscitant beaucoup, beaucoup d'admiration dans ce dossier-là, quand tu te fais écoeurer pendant 50 jours. Il faut leur offrir une alternative parce que ça fait tellement longtemps qu'ils sont susceptibles d'être complètement à la merci du comportement de certains éléments terroristes à l'intérieur de certaines bandes amérindiennes qui ont comme conséquence de bloquer le pont Mercier, et ça, c'est leur seul lien routier pour accéder...

Mais, comme on n'a pas beaucoup de temps, je vais conclure en disant ceci, et ma conclusion est, je pense, capitale: Nous allons exiger, lorsqu'on sera rendus au comité plénier, certains amendements à ce projet de loi là. Je tiens à terminer en vous lisant les trois considérants suivants parce que c'est à cette seule condition-là qu'il nous apparaît que le projet de loi 82 concernant l'autoroute 30 est convenable un peu: considérant que des événements extraordinaires et d'une extrême gravité impliquant divers éléments de la communauté mohawk vivant principalement à Oka, à Kanesatake et à Kah-nawake ont dégénéré depuis le 11 juillet 1990 en un conflit armé et ont ainsi contraint une large partie de la population de la rive sud de Montréal de vivre sous un véritable régime de guerre; considérant que ce conflit armé a privé, pendant plus de 50 jours, cette population de l'accès à 111e de Montréal par le pont Mercier; considérant que malgré que l'accès au pont Mercier soit redevenu possible depuis le 30 août 1990... Mais ne pensez pas que c'est utilisable. Ne pensez pas qu'on peut circuler sur le pont Mercier, qu'on va pouvoir le faire demain et après-demain. Il y a une barricade qui a été levée et il y en a 30. Alors, pensez-vous que le pont Mercier va être utilisable dans les prochains jours? Bien non. Considérant qu'il y a lieu de mettre sur pied des mesures extraordinaires et de déployer des efforts exceptionnels et sans précédent pour améliorer rapidement les déplacements des citoyens de la rive sud et de l'île de Montréal...

Voilà des considérants, voilà un préambule qui devrait être inscrit pour ce qui est du projet de loi 82, pour montrer son caractère unique, exceptionnel, particulier, et j'espère qu'on n'aura plus jamais à revenir en Chambre pour passer des législations spéciales de "garnottes" pour régler un problème de 50 jours, parce qu'un gouvernement a été ridicule, a été complètement incapable de prendre les décisions au bon moment, s'est traîné les pieds. C'est ça qui arrive quand on pratique l'indécision pendant quatre ans et demi. Quand le moment est venu de prendre une décision, bien, on est dépourvu, on est démuni, on n'est pas capable, on panique et ça donne des situations comme celle-là.

Le Vice-Président (M. Cannon): Merci, M. le leader adjoint de l'Opposition. Le prochain intervenant, M. le député d'Anjou. (15 h 10)

M. René Serge Larouche

M. Larouche: M. le Président, évidemment, je suis d'accord qu'on construise le plus rapidement possible ce tronçon de l'autoroute 30. J'ai l'idée de commencer mon intervention par une citation de Lord Durham, du fameux rapport Durham, en 1839, que j'ai lu in extenso. J'ai lu la copie du premier ministre Chauveau qui est à la Bibliothèque, ici. Alors j'ai fait une photocopie quand même parce que le livre est assez sec. Je vous donne la citation à la page 63. Il dit: Je suis très surpris de l'importance indue qui est donnée ici en regard des travaux publics. En parlant du caractère d'un gouvernement, ses mérites semblent être évalués en fonction de la quantité de travaux publics qu'il met en marche. Si on questionne un individu sur la performance de son Assemblée législative, il se référera généralement au nombre de routes ou de ponts qui ont été construits dans son comté. Si on le consulte sur des changements constitutionnels à apporter, il évaluera les changements proposés en considérant si de tels changements lui donneront de meilleures routes ou de meilleurs ponts que dans le système actuel.

Alors, c'est clair que les questions de routes et de ponts sont importantes depuis longtemps au Québec et dans le Bas-Canada. Mais la question de la route 30 revêt une importance particulière parce qu'on en parle depuis 30 ans; heureusement que ce n'est pas la route 45.

Je rencontrais tantôt le maire, M. Bosco Bourcier, de Châteauguay. J'ai eu l'occasion de me rendre sur les lieux et je l'ai félicité en mon nom personnel concernant la conduite des citoyens de Châteauguay, des citoyens d'Oka aussi, qu'il ne faut pas oublier dans ce terrible conflit qui est alimenté au moyen de différents procédés qu'il serait trop long d'expliquer ici, mais qui font référence à la psychologie, qui font référence à des moyens d'alimenter les plus basses passions humaines. Il est clair que, lorsqu'on voit, à la télévision, des gens qui tirent des pierres contre des voitures, on peut se poser la question: Mais pourquoi donc les voitures passaient-elles à ce moment-là? A-t-on invité les gens à se poster au même endroit où ils devaient recevoir des roches? Alors, j'ai une foule de petites questions comme ça, mais je pense que ce n'est pas le temps ni le lieu d'en parler.

Vous savez que le conflit qui oppose les Québécois, racistes et intolérants, selon l'ensemble des médias du Canada, selon l'ensemble

des médias internationaux - et j'ai fait faire un relevé qui touche autant le Japon, l'Espagne, l'ensemble des États-Unis - les Québécois racistes et intolérants qui veulent écraser les Indiens... Dans l'ensemble du Canada, on ne parle jamais des Warriors, on parle toujours des Québécois qui sont contre les Indiens.

Il existe des conflits partout dans le monde. Il existe des moyens de résoudre les conflits. Je pense que ça vaut la peine ici de regarder... Prenons en Irlande, il y a des "patterns" de conflits qui durent depuis des dizaines d'années, par exemple, entre les catholiques et les protestants. Je vais vous en lister un bon nombre et vous allez arriver à la conclusion. En Belgique, entre les Flamands et les Wallons; en Espagne, ça touche les Basques; au Moyen-Orient, les arabes et Israël; au Royaume-Uni, les Écossais et les Gallois; au Soudan, les musulmans et les chrétiens; au Burundi, les Tutsi et les Hutu; en Egypte, les coptes chrétiens et les musulmans; en Yougoslavie, les Serbes et les Croates; au Ceylan, les Singalais et les Tamouls; au Liban, des musulmans et des chrétiens; à Chypre, les Grecs et les Turcs. Dans cette liste où on donne tous les conflits, on disait: Pour le Québec, c'était les francophones et les anglophones. Mais, depuis le 10 juillet, c'est les francophones contre les Indiens.

Un conflit, ça se fabrique, un conflit, ça s'alimente. J'ai eu l'occasion personnellement d'étudier cette question. J'ai préparé des textes qui s'appellent, par exemple, Les images transnationales et les conflits. J'ai eu l'occasion d'enseigner à plusieurs groupes à l'École nationale d'administration publique et il existe des "patterns" très bien établis dans l'agrandissement d'un conflit. Le maire Bosco Bourcier me disait tantôt... Et on le sait tous; on connaît des gens qui allaient acheter des cigarettes chez les Mohawks, des gens qui allaient se reposer à Oka. Ce qui est dommage de voir, de dire, c'est que, depuis 50 jours, on veut écraser tout le monde. Je vais me limiter à ça concernant le conflit entre le Québec et les autochtones, pour en arriver à la loi elle-même.

Il est bien clair qu'il est rare qu'il y ait des lois qui touchent les autoroutes. J'en ai fait sortir deux. Il y avait la loi 10, qui a été sanctionnée le 21 février 1957, sur la création d'un office de l'autoroute Montréal-Laurentides. Et une deuxième, qui était la loi 61, Loi concernant le boulevard Métropolitain, le 27 avril 1961, question de clarifier la répartition des coûts et le remboursement de la part du Québec avec la Corporation du Montréal métropolitain, dans le temps. Moi, j'ai toujours insisté pour que, lorsque des gens se voient pris psychologiquement et sans porte de sortie, on puisse en ouvrir une le plus rapidement possible. Je crois personnellement que ce n'était pas nécessaire de faire une loi pour ça. D'accord, il y a des considérations au niveau, par exemple, des lois sur l'expropriation, et on parie de versement d'une indemnité supplémentaire. Mais je crois qu'en cas de catastrophe réelle ou appréhendée, comme le disait tantôt le ministre des Transports, le gouvernement peut agir de façon ultrarapide.

M. Raymond Giroux, un éditorialiste du Soleil, disait ce matin: "La convocation extraordinaire de l'Assemblée nationale pour assurer la construction d'une route de contournement évitant la réserve de Kahnawake donne l'impression d'un monde kafkaïen, complètement décroché de tout sens moral. Hypocrisie majeure que cette session d'aujourd'hui." Je ne sais pas pourquoi il en rajoute tant que ça. Mais moi, personnellement, je crois qu'il n'aurait pas été nécessaire de faire une loi. Alors, je suis d'accord quand même avec ce qui nous est présenté. Il y a certainement des détails techniques qui m'échappent, des détails qui touchent d'autres législations ou qui contournent certaines difficultés pour accélérer les choses mais, en gros, je félicite le gouvernement, enfin, d'ouvrir le plus rapidement possible cette autoroute 30 qui, déjà, faisait partie du plan de transport de la région de Montréal, je crois, et qui est demandée aussi par l'ensemble des intervenants économiques de la rive sud. Alors, ce plan de transport, justement, prévoit aussi l'autoroute 25, vers le nord, pour décrocher éventuellement à Laval. C'est clair qu'en situation de crise ça peut être plus facile d'obtenir une route. Mais, vraiment, cette situation nécessitait la passation de cette loi.

Alors, sur ces mots, je donne mon accord à cette loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou. Je reconnais maintenant M. le député de Salaberry-Soulanges. M. le député.

M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci, M. le Président. C'est certain que cette séance extraordinaire qui a été appelée pour adopter la loi spéciale visant à effectuer le prolongement de l'autoroute 30 de la ville de Châteauguay à la ville de Sainte-Catherine, c'est assez exceptionnel. On n'a pas besoin de revenir sur l'urgence d'adopter une telle loi aujourd'hui, au moment où le Québec vit une des situations les plus tristes de son histoire. Cependant, il est important de vous rappeler que la construction de l'autoroute 30 et son parachèvement ne datent pas du 11 juillet. J'aimerais vous résumer l'historique de l'autoroute 30, en Montérégie, surtout pour démontrer qu'indépendamment de la prise d'otage de la population de Châteauguay au sud-ouest de la Montérégie cette autoroute est essentielle, oui, pour le développement économique, mais aussi pour des raisons de sécurité puisque la Montérégie ne bénéficie que d'un seul réseau routier. (15 h 20)

Pour situer les gens dans le contexte, la 132 part des lignes américaines dans le sud-ouest du Québec pour se terminer dans l'est du Québec et lorsque l'on passe dans Châteauguay, la 132 passe sur la réserve. Donc, c'est la seule route qui permet à près de 100 000 de population de sortir de la région de Châteauguay, soit pour se rendre sur l'île de Montréal, soit pour aller vers l'ouest du Québec. Donc, quand cette route est bloquée et, comme elle est sur un territoire amérindien, il risque déjà d'y avoir deux blocages, il est sûr et certain qu'on ne peut plus vivre une telle situation. On ne peut plus faire vivre à cette population une telle situation.

Je vous rappelle que la construction de cette autoroute a été revendiquée par les autorités municipales et par la population depuis 1960. Nous avions assez de problèmes de congestion, de nombreux accidents, des problèmes de circulation et, dès ce moment, le gouvernement a été sensibilisé à ce dossier et a déjà commencé les études, envisageant la construction de ce réseau routier. J'aimerais juste vous résumer un peu, en ordre chronologique, les faits qui sont rattachés, justement, à ce projet. D'abord, le début des travaux qui était prévu pour 1964-1965, à la hauteur de la 20 jusqu'à la 116 sur la rive sud de Montréal pour améliorer le flot de circulation sur la rive sud, en prévision de l'Exposition universelle de 1967. Entre 1970 et 1976, un tronçon important fut aménagé entre Sorel et l'autoroute 20 à la hauteur de la rive sud et, de 1979 à 1980, de la 20 jusqu'à l'autoroute des Cantons-de-l'Est, ce qui signifie environ huit kilomètres. Plusieurs embûches, autant administratives que politiques, sont venues interrompre la poursuite de l'autoroute. Ainsi, pour le tronçon qui nous concerne, M. le Président, celui de Châteauguay à la ville de Sainte-Catherine, l'histoire remonte aux années mil neuf cent soixante-dix où le ministère des Transports a suggéré que l'autoroute 30 sort aménagée à l'intérieur même de la réserve amérindienne pour la poursuivre jusqu'à Valleyfield. Les négociations avec les gens de la réserve ont amené le gouvernement, seulement en 1977, à proposer un tracé afin de contourner cette réserve. Cependant, avec la venue de la loi agricole, la Loi sur la protection du territoire agricole, le corridor Châteauguay-Saint-Thimotée disparaît et l'on rétrocède les terres aux agriculteurs. Le tracé du contournement de Kahnawake a donc été modifié à cinq reprises: en 1970, en 1976, en 1981, en 1986 et, finalement, en 1988. Cette volonté s'est clairement exprimée lors du sommet socio-économique de la Montérégie où le ministre des Transports du temps, M. Marc-Yvan Côté, a déclaré: oui à l'autoroute 30 et nous allons procéder par phases. Et là, je m'explique.

Tantôt j'écoutais le député de La Prairie qui disait à la population du Québec, qui nous disait, il y a quelques minutes, aux gens ici en cette Chambre, également à la population de Châteauguay, à la population de Beauharnois-Huntingdon, à la population de Salaberry-Soulanges, à la population de La Prairie, ceci: Si le gouvernement actuel avait été prévisible ou avait réalisé ce tronçon de l'autoroute 30, on aurait évité le problème actuel. Pourtant, le député de La Prairie a été député de Chambly de 1976 à 1985. Si je me souviens bien, il était ministre à l'époque. Il faisait partie du Conseil des ministres avec le premier ministre, M. René Lévesque, qui, lui, était député de Taillon, également un comté de la Montérégie. Il y avait aussi un dénommé Pierre Marois, qui était ministre de Marie-Victorin, un autre comté de la Montérégie. Il y avait aussi un dénommé Maurice Martel, ministre du Revenu, si ma mémoire est bonne, qui était député de Richelieu, un autre comté de la Montérégie. La question que je me pose, c'est quelle était la position du gouvernement du Parti québécois quant à l'avenir du réseau routier dans la région de Montréal, de 1976 à 1985? C'était quoi, la position de ces ministres, de ce gouvernement, concernant l'autoroute 30?

Je vais vous en parler, moi. D'abord... Là, je me sers du mémoire qui avait été déposé à la commission parlementaire sur le plan de transport, mémoire qui s'intitule "Le parachèvement de l'autoroute 30, la seule direction souhaitable", mémoire présenté à la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements par le comité du parachèvement de l'autoroute 30 sur lequel siégeaient à peu près tous les maires de la Montérégie, les députés de la Montérégie, les membres de différents organismes, chambres de commerce et ainsi de suite.

Et dans leur introduction, justement, on pariait de l'historique de l'autoroute 30. Et je cite un paragraphe, parce qu'on dit que le dossier s'acheminait à la vitesse des camions devant les... Donc, on faisait beaucoup d'images dans le texte. Et à la fin de la page 1, on dit: Peu s'en fallut pour que l'on s'emballe. Mais moins de deux ans plus tard, c'est un retour à la case de départ, parce qu'à l'époque, le ministre Paul Berthiaume avait annoncé cette autoroute 30. En avril 1978, le ministre délégué à l'Aménagement - le ministre à l'époque, c'était Jacques Léonard qui, aujourd'hui, est député de Labelle - déclarait, et je cite, qu'il n'y aura pas d'autoroute 30 dans le sud-ouest suite à la politique gouvernementale de mettre l'accent sur l'extension du réseau de transport en commun. C'était ça, leur position à l'époque.

Des voix: Bravo!

M. Marcil: Le transport collectif devait prendre le dessus sur le transport routier partout dans la grande région métropolitaine. Pourtant, jamais le ministre n'a envisagé d'étendre ou de développer ce réseau dans le sud-ouest. Bien

plus, on ignorait totalement le transport des marchandises. Au début des années 1980, le ministre des Transports, M. Denis de Belleval, réentérine à ce moment-là... Là, il avait décidé de changer, parce qu'il y avait eu des propositions d'élargir la 132 à la place, au lieu de faire une autoroute. Lui, il a dit: On accepte le principe de prolonger l'autoroute 30. Le premier ministre du temps, René Lévesque, a même donné son accord de principe. Pourtant, le dossier était encore en panne sèche lors du sommet socio-économique de la Montérégie en 1987.

On a pris le pouvoir le 2 décembre 1985, disons, janvier 1986, pour être plus pratique, parce que je ne pense pas qu'entre le 2 décembre 1985 et janvier 1986, on aurait réalisé l'autoroute 30. On avait, dans notre programme électoral... C'est ce que les gens disaient tantôt et c'est vrai. On s'est engagés à terminer l'autoroute 30 dans son entier et je pense que cet engagement-là est encore présent et plus présent que jamais.

On a mis sur pied une table de concertation au niveau de la Montérégie. On a préparé le sommet socio-économique de 1987 et on l'a répété depuis tantôt. Tous les intervenants en parlent. On a décidé que la priorité, c'était de parachever l'autoroute 30 dans son entier. Il y avait la phase 1 qu'il fallait compléter pour laquelle on avait engagé une trentaine de millions, tout près de 40 000 000 $.

La phase 1, c'était de réaliser, premièrement, le tronçon de Kahnawake, c'est-à-dire contourner la réserve de Kahnawake. La phase 2, c'était de terminer, de Brossard à la 10, et la phase 3, c'était de réaliser le dossier de Châ-teauguay jusqu'à la 20. Effectivement, tout le monde s'est mis au travail. En 1988, le ministre dépose un plan de transport pour tout le grand Montréal métropolitain, donc qui touche environ 3 000 000 de personnes, plan de transport qu'on amène en commission parlementaire. Et, là, on invite tous les organismes à intervenir également en commission parlementaire.

Et on avait des dates bien précises dans l'échéancier. Le contournement de la réserve de Kahnawake était prévu, de 1988 à 1993. La finalisation du dossier de Châteauguay à Val-leyfield, 1993-1998. Ça, c'est écrit noir sur blanc et je pense que tout le monde l'a lu et le tronçon de Brossard à la 10, 1988-1993. Tout le monde est d'accord, on s'en va en commission parlementaire. On questionne les gens. Tout le monde nous arrive. Il y avait deux positions différentes, deux philosophies différentes. (15 h 30)

II est entendu que le maire Doré de l'île de Montréal ne préconisait pas une voie de contournement ou des voies de contournement de ffle de Montréal. Il était contre l'étalement urbain, donc, contre la réalisation de la 440 dans la région de Laval et la réalisation de l'autoroute 30. Le député de Lévis, qui était le porte-parole aux transports, était contre l'autoroute 30 également et il était contre la 440 aussi. Donc, là, on commençait à ressentir un peu la position du Parti québécois concernant les voies de contournement de l'île de Montréal. On se fichait bien des problèmes du réseau routier sur l'île de Montréal, du boulevard Métropolitain. Ça, ce n'était pas grave, mais on ne voulait pas faire des autoroutes autour de IHe de Montréal, quand on sait que toutes les grandes villes américaines sont toutes équipées de grandes routes de contournement.

Là, ça va, jusque là. Tout le monde est d'accord. Bon, on met le plan de transport en marche. Des études se font. Dans la région de Châteauguay, il y a des négociations très sérieuses qui se font entre les agriculteurs et la ville de Châteauguay. Comme président du caucus de la Montérégie, avec Mme Cardinal, députée de Châteauguay, et d'autres députés de la Montérégie, on a assisté à des rencontres avec le maire de Châteauguay, M. Bosco Bourcier, de même qu'avec le commissaire industriel de Châteauguay et les agriculteurs, pour qu'il y ait une entente sur le fameux tracé. Ça a pris du temps, ça aussi, parce que les agriculteurs voulaient quelque chose et la municipalité de Châteauguay, avec raison aussi, voulait protéger son parc industriel. Ça a pris du temps avant qu'ils s'entendent. Au moment où ils se sont entendus, la machine s'est enclenchée.

On a eu la biennale, en mai 1990, pour faire le point sur le sommet socio-économique. À cette biennale, le président de la Société monté-régienne de développement pose la question à Mme la ministre responsable du développement régional, Mme Bacon, et dit: Mme Bacon, qu'est-ce qui arrive avec cet engagement de l'autoroute 30? Où en sommes-nous rendus? Et Mme la ministre répond. Là, quand on veut savoir si l'autoroute 30 vient des limbes, c'est tout simplement pour vous dire que nous avions enclenché le mouvement et qu'on était prêts à faire le travail comme tel. Je cite. Ce ne sera pas long. C'est Mme la ministre qui parle: "L'ensemble du prolongement de l'autoroute 30 à une chaussée, entre Brossard et Valleyfield, est inclus parmi les projets de développement du réseau routier du plan d'action de 1988-1998 pour la région de Montréal. Ce tronçon Brossard-Candiac et le contournement de la réserve de Kahnawake y sont prévus pour la période de 1988-1993 - toujours en référence au plan de transport - pour un total d'environ 44 000 000 $. Pour le tronçon Brossard-Candiac, le ministre a obtenu un accord des municipalités concernées sur un tracé d'avant-projet préliminaire. "Dans le cas du contournement de la réserve de Kahnawake, les plans d'avant-projet sont terminés. Le ministère a obtenu l'accord des municipalités concernées ainsi que l'autorisation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec. Au plan technique, l'échéan-

cier qu'on va vous donner - donc, on donnait l'information à ceux qui ont participé à cette biennale - est considéré toujours pour les deux tronçons. D'abord, pour Brossard-Candiac, dépôt de l'étude d'impact en novembre 1990; obtention du certificat d'autorisation de réalisation, novembre 1981; expropriation et plans et devis, février 1992; appel d'offres, avril 1992.

Tour ce qui est du contournement de Kahnawake, dépôt de l'étude d'impact, juillet 1989 - c'est ce qui a été fait - obtention du certificat d'autorisation de réalisation, juin 1990; expropriation et plans et devis, décembre 1991; appel d'offres en avril 1992." Elle ajoutait: "C'est évident que la tenue des audiences publiques sur l'un ou l'autre des tronçons viendrait certainement décaler l'échéancier d'environ 6 à 12 mois." Mais, là, on suit la Loi sur la protection du territoire agricole.

Effectivement, les études ont été affichées pendant 45 jours. Il y a eu des groupes qui se sont inscrits pour pouvoir se faire entendre aux audiences publiques. La crise a fait en sorte que le problème du réseau routier était de plus en plus évident. Tout ce qu'on fait aujourd'hui, c'est qu'on dit qu'au lieu de commencer les travaux en 1992 on les décale pour les commencer en 1990. C'est ce qui se fait aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle on est ici.

Mais, tout simplement pour vous montrer encore l'incohérence des membres de l'Opposition, en mai 1990, il y a eu une commission parlementaire du budget et de l'administration où on a étudié les crédits et le député de Labelle, qui est le porte-parole, a clairement dit, encore, qu'il était contre l'autoroute 30, qu'il était contre la 440, qu'il était contre l'étalement de la population. Encore en mai 1990, et aujourd'hui, on vient nous dire: On est pour l'autoroute 30. Là, il nous disait ça en mai 1990. Deux minutes après qu'il eut parlé, le député de La Prairie entre en commission parlementaire et vient dire le contraire. Lui, il dit: II faut réaliser l'autoroute 30. Encore là, on ne sait plus quelle est la position de ce parti.

Une voix: Qui dit vrai?

M. Marcil: Qui dit vrai? Oui, ce serait une très belle émission.

Aujourd'hui, on accuse le gouvernement actuel d'inertie face au dossier de l'autoroute 30. En l'espace de quatre ans, on a réengagé la machine, on a rembarqué les gens dans une table de concertation. On prévoyait le début des travaux en 1992. Lorsqu'on se réfère au rapport Vallières, quand il disait qu'entre le moment où on décide de faire une route et le moment où on la réalise il se passe 13 ans. On aurait réussi à commencer les travaux en l'espace de six ans, et là, on va le faire en l'espace de quatre ans.

M. le Président, j'aurais aimé que le débat soit un petit peu moins partisan. J'aurais préféré que les gens essaient plutôt de mettre en évidence l'importance de réaliser ce réseau routier, l'importance pour les gens de la région du sud-ouest et pour toute la grande région métropolitaine, parce qu'on touche quand même 3 000 000 de personnes. C'est sûr que la crise actuelle a posé des problèmes énormes à la population de Châteauguay, à la population du comté de Salaberry-Soulanges, particulièrement, aussi, à la population de Beauharnois-Huntingdon, et également à la population du comté de Deux-Montagnes. Ces gens-là ont vécu quelque chose d'assez spécial et, comme le disait tantôt le leader de l'Opposition, on ne le souhaite à personne.

Moi, je suis profondément peiné de cette situation et probablement aussi de mon impuissance comme député à intervenir pour régler ce problème, mais je tiens quand même à rendre hommage à cette population qui a été très tolérante; ils se sont conduit en gens civilisés. Je ne parle pas des cas isolés qu'on s'acharne à montrer toujours sur les écrans de télévision ou à mettre dans les journaux. Cette population a vécu un problème majeur et les séquelles vont être longues à régler. Il va falloir, justement, comme gouvernement, qu'on intervienne pour aider cette région à se prendre en main.

J'aimerais également rendre hommage à Mme la députée de Châteauguay, Mme Cardinal, qui pendant ces 50 jours-là a été disponible, a été au service de la population. Ça n'a pas été drôle, ce qu'elle a vécu. Le député de Deux-Montagnes a vécu le même problème, également, à Oka. Ce sont des situations presque intenables. Malgré tout ça, ces gens-là se sont tenus debout et ils ont réussi quand même à communiquer un certain calme auprès de la population. Et probablement que le résultat, aujourd'hui, de la négociation, où on voit un peu la fin de ce dossier-là, la fin du problème, est dû au travail que ces deux députés ont réalisé.

Il y a une autre personne à qui j'aimerais rendre hommage: le maire de Châteauguay, le maire Bosco Bourcier. Être maire d'une ville de 40 000 de population et vivre ce qu'il a vécu... Il l'a vécu quand même dans un climat serein, intérieurement. Ce gars-là n'a jamais perdu le contrôle, il a toujours été calme, dans cette situation-là. Il a réussi quand même à garder toute sa population derrière lui. Je tiens à lui rendre hommage et j'espère que les gens de cette région vont l'évaluer dans ce qu'il a fait. Je suis convaincu que, pour une région de ce coin-là, avoir un maire comme ça, c'est déjà une sécurité pour l'avenir de la ville de Châteauguay. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. J'ai pris bonne note des efforts louables du député de Salaberry-Soulanges pour justifier l'immobilisme du gouvernement dans le prolongement de l'autoroute 30. Indépendamment des faits qu'il a cités, j'aimerais néanmoins souligner qu'une des raisons qui nous amènent aujourd'hui en session spéciale, c'est que le budget du gouvernement du Québec ne prévoyait pas de fonds, à courte échéance, pour la construction de l'autoroute 30. Ce fait a été souligné de façon tout à fait éloquente lors de la biennale de la Société montérégienne de développement, qui s'est tenue en février dernier, où le dossier du prolongement de l'autoroute 30 ainsi que d'autres dossiers majeurs ont été évincés des dossiers prioritaires.

M. le Président, à titre de président du caucus des députés du Parti québécois de la Montérégie, je ne puis que féliciter le gouvernement de prendre la décision de prolonger l'autoroute 30. Bien sûr, je vais appuyer cette décision, ainsi que tous mes collègues qui représentent les comtés avoisinants de la région. (15 h 40)

J'aimerais quand même souligner la forme sous laquelle cette décision est prise et, également, le contexte dans lequel nous prenons cette décision. Bien que nous nous félicitions tous du prolongement de l'autoroute 30, outil indispensable au développement régional de la Montérégie, outil indispensable aux investissements économiques et outil indispensable à l'avenir de cette région, il demeure que la forme et le contexte dans lequel cette décision est prise me paraissent un peu tristes.

Pour obtenir ce que les députés gouvernementaux, de même que les députés du Parti québécois, que les candidats du Parti québécois, au cours des dernières élections, s'étaient engagés à apporter à la population de la région, il nous a fallu une situation de crise qui a démontré l'impuissance du gouvernement face finalement, à une mise en tutelle, par quelque 450 individus masqués et armés, de toute une population d'une quarantaine de milliers d'habitants. Il est regrettable que le prolongement de l'autoroute 30 soit le résultat d'une situation de crise plutôt que le résultat d'une saine planification de la part du gouvernement et plutôt que le résultat, tout simplement, de la livraison d'une promesse électorale faite par les candidats du Parti libéral au cours des dernières élections et d'ailleurs reprise par les députés de ma propre formation.

Il est regrettable que cette décision soit prise dans un contexte où l'image du Québec se trouve ternie, où on laisse sous-entendre que la meilleure façon d'obtenir quelque chose du gouvernement, surtout dans des dossiers majeurs, c'est par l'intimidation, le chantage, l'utilisation et la menace de la force. Ce contexte est inacceptable. Et même si nous sommes ici d'accord avec la mesure d'urgence que propose le gouvernement, nous sommes tout à fait en désaccord avec le contexte dans lequel elle se prend.

Si vous avez lu comme moi, aujourd'hui, les revues de presse, vous vous êtes aperçus que le Québec sort perdant, dans son ensemble, de toute cette situation. Notre image a été ternie sur le plan international et il est regrettable qu'il en soit ainsi parce que, s'il y a un État ou une province au Canada qui ne méritait pas de se faire traîner dans la boue, sur la place publique internationale quant au traitement qu'il réserve à sa population indigène, c'est bien le Québec. Et pourtant, comme l'a souligné d'ailleurs le député d'Anjou, c'est nous, maintenant, qui sommes accusés de racisme, c'est nous qui sommes traînés dans la boue, sur le plan international, comme si nous ne savions pas traiter de façon civilisée les populations autochtones de ce pays, ce qui est tout à fait faux; les dossiers sont là pour le prouver. Mon collègue, le député de Duplessis, a mentionné, ce matin, à la période de questions, les efforts qui avaient été faits sous le gouvernement de M. René Lévesque pour reconnaître la dignité, l'existence et les droits des populations autochtones. Ce pas avait été franchi, au Québec, et le dialogue avait été amorcé de façon convenable. Cette crise est venue tout ternir.

Mais vous me permettrez, M. le Président, de m'interroger sur le contexte dans lequel tout ça se développe. Il est un peu mystérieux que cette situation arrive au moment où nous avons assisté à l'échec de l'entente du lac Meech, à un moment où les sondages nous révèlent qu'il existe au Québec une sorte de consensus sur une refonte des structures fédérales, sur une remise en question de notre appartenance au fédéralisme canadien traditionnel. Il est assez curieux, alors que ce consensus existait au Québec, que tout à coup, une action comme celle-là vienne, somme toute, mettre en question la capacité des Québécois de régler par eux-mêmes un problème de chez eux; et c'est là que je regrette d'autant plus le contexte dans lequel cette décision se prend.

Je pense que, si l'action avait été bien menée et bien coordonnée, la Sûreté du Québec aurait dû, normalement, être en mesure de mettre de l'ordre dans les barricades et d'intervenir de façon que le conflit ne prenne pas les proportions qu'il a prises. Quelles que soient les raisons de l'échec de la Sûreté du Québec, il demeure qu'en dernière analyse nous avons dû faire appel à l'armée fédérale pour régler ce conflit. Je trouve que le gouvernement du Québec et, du même coup, tous les Québécois, nous sortons un peu diminués de cette crise parce que nous avons donné l'image que nous ne pouvons pas régler nos propres problèmes par nous-mêmes. Bien sûr que nous avons droit à Tinter-

vention de l'armée fédérale, puisque nous en payons une partie des frais, mais il aurait été préférable, si le gouvernement avait eu un peu plus de leadership dans le dossier, que nous réglions cette affaire entre nous-mêmes sans avoir la proportion internationale que le conflit a prise.

M. le Président, dans le contexte actuel, le prolongement de l'autoroute 30 est une question qui, à mon avis, fait l'assentiment de la majorité des deux côtés de cette Chambre. Bien sûr, certains collègues des deux côtés de la Chambre vont s'opposer à la méthode qui est utilisée ici pour que, dans la grande région de Montréal, en périphérie de Montréal, on obtienne la construction d'une route alors que des investissements routiers sont indispensables dans d'autres régions du Québec. Je comprends ceux qui se sentent un peu frustrés de voir que, malgré les efforts qu'ils poursuivent depuis des années, ils n'aboutissent pas à obtenir des raccordements routiers qui s'imposent dans leur région. Sur ce point, je pense que nous convenons tous - le premier ministre l'a déclaré, le chef de l'Opposition l'a également déclaré - que jamais le gouvernement du Québec ou les gouvernements du Québec, ni même le gouvernement fédéral, ne céderont au chantage d'une bande armée pour obtenir le règlement de nos dossiers. Mais il demeure que nous sommes face à une situation qu'aucun d'entre nous n'a voulue, j'en suis sûr.

Dans ce contexte, il m'apparaît que le prolongement de l'autoroute 30 ne vient pas récompenser ceux qui font de la désobéissance civile, ne vient pas récompenser ceux qui prennent les armes pour obtenir les revendications de leurs droits; il vient plutôt accorder une certaine compensation à une population qui, malgré elle, a été la victime d'une situation qu'elle n'a pas cherchée.

M. le Président, nous disons oui au prolongement de l'autoroute 30, mais nous disons également oui, à la suite de ce qui vient de se passer, au dialogue, à la reprise du dialogue avec les populations autochtones, avec les Mohawks de la grande région de la Montérégie, et nous disons oui, également, à la fin de la montée de cette intransigeance qui est devenue l'apanage des situations de crise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Laviolette. M. le député de Laviolette, la parole est à vous.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je vais vous dire - vous n'en serez certainement pas surpris, M. le Président, ni les membres de cette Assemblée - que l'ensemble des députés de cette formation politique que je représente et ceux de l'autre côté auront l'oc- casion de voter ce projet de loi. Donc, nous sommes devant le fait que c'est inévitable; avec les accords de part et d'autre, nous allons voter le projet de loi. Cependant, vous me permettrez, par ma voix, de peut-être faire sentir qu'il y a une partie des gens qui sont - aussi bien de ma formation politique que de l'autre côté - en désaccord sur le projet de loi comme tel.

Qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas, les décisions que nous prenons aujourd'hui auront des conséquences très difficiles à supporter dans le futur. On prend pour acquis que, même si on parle - comme mon collègue vient de le dire -d'une forme de compensation pour des gens qui ont subi des préjudices pendant un état de crise, on en arrive à obtenir pour nos régions des routes ou d'autres choses que des routes simplement parce qu'il y a eu crise et qu'au bout de la course on donne un peu le message à tout le monde - que ce soient les gens du gouvernement actuel ou même nous, comme membres de l'Opposition, qui désirons et souhaitons, le plus rapidement possible, former le gouvernement - que nous cédons à des formes... aussi difficiles à accepter que celle-là. (15 h 50)

II est évident que le message qui peut être ressenti par des gens... C'est peut-être pour ça qu'en exprimant une part de ce désaccord j'indiquerais, à ce moment-là qu'on devrait bien regarder à donner un message autre que celui-là à l'ensemble de la population.

J'ai eu l'occasion de suivre, comme responsable et critique de l'Opposition en matière de forêts, le problème que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a eu à vivre dans sa propre région quand des gens ont décidé de couper des arbres sur un territoire qui appartenait au gouvernement du Québec, au ministère de l'Énergie et des Ressources, parce qu'ils avaient l'intention d'obtenir du gouvernement du Québec les subventions nécessaires pour faire une station de ski. On a vu que c'est une chose qui s'est produite et pour laquelle je n'étais pas d'accord. Mais le ministre a décidé, comme ministre responsable, de donner - et on a vu de quelle façon - à ces gens-là une sorte d'absolution. Les gens sont en train de construire, suite à ces ententes-là, leur station de ski.

Vous avez des gens qui sont des Algonquins - et j'ai eu l'occasion, avec mon collègue de Duplessis, de les rencontrer au lac Barrière - qui posent des conditions semblables dans un contexte où ils disent: II y a des contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier qui doivent être donnés et ces contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier ne seront pas exécutés parce que nous allons barrer les routes d'accès à cette ressource forestière.

Vous voyez donc, M. le Président, un cheminement qui semble être celui de ce gouvernement de céder sous la pression dans des états de crises qui sont plus ou moins fortes. Nous en

avons vécu une, durant l'été, qui était très forte et nous sommes réunis aujourd'hui dans un contexte où on décide d'une route alors qu'on aurait dû fort probablement être réunis bien avant pour obtenir beaucoup plus de renseignements et, ensemble, comme Assemblée nationale, essayer de dénouer la crise qui était devant nous. Dans d'autres Parlements à travers le monde, ça fait longtemps qu'ils auraient été réunis d'urgence pour en arriver à former une coalition des membres de l'Assemblée nationale devant des gens armés qui menaçaient la sécurité publique d'une large proportion de la population.

Mais je ne peux pas, M. le Président, accorder mon accord sans regarder aussi ce qui se passe chez moi. On parle de l'autoroute 30. Je ne ferai pas comme le député du parti ministériel qui a précédé, à savoir dire qui a tort et qui a raison. Je vous dirai simplement, M. le Président, que, nous aussi, on a eu un sommet économique dans notre région, que, nous aussi, on a eu des demandes, que, nous aussi, on dit dans nos documents qu'il devrait y avoir, de la part du gouvernement, et c'est écrit comme tel dans nos documents "prolongement de l'autoroute 30 jusqu'à Nicolet, 5,5 kilomètres". Le député de Nicolet-Yamaska n'est pas ici aujourd'hui, parce que je sais qu'il a aussi d'autres préoccupations et d'autres occupations aujourd'hui. Mais je sais que lui-même est préoccupé par cette demande qu'ils ont eux-mêmes acceptée et on disait: On pourrait débuter les travaux à la fin de l'automne ou au début de l'hiver 1989. Nous sommes en 1990 et il n'y a rien de fait encore. m. le président, une route que vous connaissez très bien, la route 155 entre matawin et rivière-aux-rats, section 160. même affaire, même résultat: rien de fait encore. et, nous autres aussi, on a des études d'impact et, nous aussi, on est, avec la journée d'aujourd'hui, devant le bureau d'audiences publiques, et on va savoir, dans les jours qui viennent, s'il y aura des audiences publiques ou pas. nous aussi, on a des demandes importantes. je ne peux pas, pour ma population, laisser ça de côté et ne pas le dire. je regarde, pendant le sommet économique, ceux qui y ont assisté, le ministre de l'époque de l'office de planification et de développement du québec, avec la verve qu'on lui connaît, nous a fait des remontrances, aux gens du sommet économique, pour ne pas avoir pensé à des routes d'accès aux communautés attikameks dans mon coin. moi, j'en ai trois, m. le président: obedjiwan, weymontachie et manouan. trois réserves indiennes dans mon comté qui ont des problèmes de routes, moi aussi.

Puis, je peux vous dire qu'au moment où je vous parle, d'après les renseignements que j'ai pris, ce n'est pas à régler non plus. Pourtant, le ministre nous a fait des remontrances en nous disant qu'on ne s'était pas préoccupé d'eux autres. Bien, je peux vous dire qu'on s'en était préoccupé. Le seul problème, c'est qu'on n'avait pas les garanties nécessaires qu'on l'obtiendrait et, à la fin du sommet économique, en grande pompe, on nous a dit: Moi, comme ministre, je vais leur donner ça. Ça, c'était en 1989. Depuis ce temps-là, M. le Président, rien. Rien n'est réglé encore actuellement.

Puis, moi, je vais accepter de cautionner que, par des moyens de pression, on puisse obtenir des choses? J'en suis incapable, M. le Président, et je voulais le dire. Je sais qu'on va voter la loi, je sais que, de part et d'autre, des deux côtés de la Chambre, il y a des gens qui, comme moi, disent qu'il y a des précédents importants, dangereux qu'on est en train de créer. Mais, compte tenu des circonstances, il est évident que nous allons voter pour. Dans mon humble conscience, M. le Président, je serais porté à dire non. Pas pour la route, mais pour les moyens utilisés, pour les circonstances dans lesquelles nous sommes plongés parce que je ne voudrais pas que dans mon coin on puisse dire: Bien, écoute, le seul moyen, Jean-Pierre, d'obtenir quelque chose, ça serait de faire des barricades, ça serait de s'organiser pour que, finalement, on attire l'attention. Les tentations, M. le Président...

Il parlait de la seule route entre un lieu et un autre, en passant par la réserve. Je peux vous dire que la seule route entre Grand-Mère et La Tuque, vous la connaissez très bien. Il y a des camionneurs qui ont pensé, fort longtemps, à bloquer cette route. Je les avais empêchés. La Chambre de commerce de La Tuque leur avait dit: Ce n'est pas le moyen, essayons plutôt d'y aller tranquillement et de persuader. Et, au moment où je vous parle, je ne sais même pas si on va faire une graine de travaux l'année prochaine. Pas cette année parce qu'il n'y en a pas, mais l'année prochaine.

Aujourd'hui, moi, je me tairais, je ne protégerais pas ma population, je ne dirais pas ce que je pense! M. le Président, j'en suis incapable. Je parle avec mes tripes et mon émotion dans un contexte où, chez nous comme ailleurs... Et il y a des députés, de l'autre formation politique comme de la mienne, qui le pensent. Devant les circonstances où nous sommes placés, compte tenu des circonstances - qui ont été peut-être provoquées ou non, ça n'a pas d'importance - il y a une chose qui est certaine, c'est que nous sommes devant un état de fait et nous sommes placés pour prendre une décision. Elle n'est pas facile, M. le Président, cette décision. Elle est plus facile pour les gens qui se trouvent là-bas, qui vivent là-bas. Il faut donc les appuyer. Mais, d'un autre côté, pour nous, ce n'est pas facile. Les gens vont dire: Cette année, pas de travaux dans notre région. Parce qu'on leur a dit que c'était sur le boulevard Métropolitain que ça se passait.

Le député de Nicolet-Yamaska a répondu à ma question dans les journaux et à la radio, la semaine passée, quand il disait que le

1 700 000 000 $, c'était normal qu'il n'y en ait pas eu cette année, parce que c'est l'année prochaine que ça commence. Moi, je n'en suis pas encore sûr, parce que, avec les millions qu'on a dépensés pour la crise et avec les millions qu'on va mettre ailleurs, je ne sais pas ce qu'il va rester pour notre région l'année prochaine. C'est ça que je veux défendre. Je veux m'assurer que l'an prochain, M. le Président, dans ma région comme dans d'autres régions au Québec, il y ait des travaux aussi urgents et aussi importants. Parce que, quand on parle de désenclaver les réserves indiennes chez moi, pour des gens qui vivent en accord avec nous, même si, des fois, il y a des difficultés, il va falloir leur donner raison un jour ou l'autre et les faire, les routes. Quand on a un trafic lourd important, des centaines et des centaines de camions sur la route de La Tuque qui amènent de la pitoune, comme on dit chez nous, vers Trois-Rivières, il va falloir qu'on donne les sommes d'argent nécessaires pour la faire, la maudite réfection. C'est ça que je voulais dire. C'est mes gens, que j'ai le devoir de protéger, tout en pensant à mes collègues et à ceux qui vivent là-bas, dans le coin de Châteauguay. Il faut peut-être aussi leur donner raison, mais pas au détriment de nous, M. le Président.

Dans ce contexte-là, le message que je veux lancer au gouvernement: premièrement, il faut arrêter de céder au chantage et à la pression comme on les a vécus mais, deuxièmement, il faut planifier et s'assurer que toutes les régions auront leur part de gâteau. Je voulais le dire, je l'ai dit, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le député de laviolette. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de shef-ford. m. le député, vous avez la parole.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Moi aussi, étant un député de la Montérégie, je tenais absolument à intervenir sur ce projet de loi, le projet de loi 82. Je dis que je suis heureux qu'enfin il y ait un bout de la 30 qui se construise. Et je vais vous dire qu'il doit y avoir bien des intervenants dans la Montérégie présentement qui pensent comme ça. Je vais vous dire pourquoi. C'est bien simple, c'est que c'était un des sujets prioritaires retenus au niveau du sommet socio-économique de 1987 en Montérégie. Donc, si c'était important en 1987, imaginez-vous comment c'est important en 1990. Sauf, par contre, que j'aurais aimé que ça se passe dans un autre contexte. Je dois vous dire que c'est plutôt gênant pour un gouvernement de se ramasser à l'Assemblée nationale avec un projet de loi qui se lit: Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine. C'est aberrant, M. le Président, que la deputation soit appelée d'urgence pour voter un bout de route. Ça, c'est de l'inconscience, c'est un manque de planification et c'est surtout à l'image d'un gouvernement sans parole. Parce qu'il faut se rappeler que la 30, c'était l'engagement majeur des candidats libéraux à l'élection de 1985 en Montérégie. En 1985! (16 heures)

Au sommet socio-économique de 1987, c'était le deuxième projet retenu par l'ensemble des centaines d'intervenants en Montérégie dont, évidemment, les élus municipaux et spécialement les élus municipaux de la région concernée. C'était le deuxième projet majeur en 1987. C'était encore l'engagement électoral prioritaire au niveau de l'élection de 1989. C'était redevenu un projet important et majeur à la biennale de février 1990 et on n'avait encore rien fait. On n'avait encore rien planifié, rien annoncé, rien budgeté après tous ces engagements. Et on se retrouve aujourd'hui avec un nouveau tracé et une loi spéciale pour en faire un bout. Je dois vous dire que c'est presque aberrant et inacceptable.

Les deux projets majeurs du sommet de 1987 en Montérégie, les pneus de Saint-Amable et l'autoroute 30... Les pneus de Saint-Amable, ça s'est réglé par un incendie dernièrement qui va nous coûter des millions. Et, la 30, c'est ce qu'on est en train de faire aujourd'hui, on va en faire un bout par une loi spéciale. Donc, oui, je suis heureux qu'il s'en fasse un bout. Et on va voter pour. Au moins, ça va faire avancer la cause. Ça va faire avancer le dossier. Il y a un bout d'asphalte qui va se faire. Tant mieux. Sauf que c'a pris une catastrophe sociale. Je trouve tout simplement lamentable et pitoyable qu'on doive passer une loi semblable dans un climat de crise. Imaginez-vous, c'a pris 50 jours de tension, d'insécurité, d'instabilité et de violence pour que le gouvernement se décide à régler une situation qui était pourtant un engagement qui date de cinq ans. C'est incroyable.

Comme je vous disais tantôt, M. le Président, si le gouvernement d'en face avait tenu parole, avait tenu ses engagements et avait construit des routes et celles qui étaient des promesses électorales, - la route 30 en est une dans la Montérégie, - on ne serait pas ici aujourd'hui en train de passer une loi spéciale pour un bout de route. Parce que ça ferait longtemps que ce serait réalisé ou ce serait, selon l'échéancier de 1987, en voie de parachèvement. Bien non, c'est un commencement d'urgence. Ce n'est pas du tout la même chose. Donc, c'est incroyable. On est ici parce qu'on n'a pas tenu parole. On est ici parce qu'on n'a pas tenu parole et c'a pris un état de crise. Et dans ce dossier ici, ce qu'il y a de plus pitoyable, on l'a dit souvent et on l'a vu souvent dans des crises, le gouvernement Bourassa, le gouvernement actuel, joue aux pompiers. Il éteint des

feux. Et là, je ne parie pas au figuré de Saint-Basile-le-Grand et de Saint-Amable, c'est deux parmi tant d'autres. Il joue aux pompiers. Mais dans le cas qui nous intéresse, dans la crise actuelle, non seulement il est pompier, il est le pyromane. Parce que c'est lui qui a allumé le feu. C'est lui qui a fait en sorte qu'on soit en crise sociale au Québec, avec l'année dans les rues. Parce que c'est lui qui, depuis 1985, a refusé de travailler sur la motion votée à l'Assemblée nationale par rapport à la situation des autochtones au Québec. Il ne s'est rien passé de valable depuis, ce qui a fait en sorte que la pression a monté et qu'on se retrouve dans une situation où les autochtones manifestent par des moyens violents.

Il a fait quoi ensuite? Qu'on se rappelle en 1988 quand le pont a été bloqué pour une première fois à cause des cigarettes vendues sans taxe. Le gouvernement a envoyé la police et l'a retirée et il a laissé faire. Donc, il a commencé à allumer l'incendie. Le bingo illégal, le printemps dernier. Il a envoyé la Sûreté du Québec. Il l'a retirée. Les Indiens se sont dit: Bien, c'est la façon de gagner. Et, finalement, les bingos continuent. Et là, maintenant, eh bien, c'est la crise qu'on connaît. J'espère que ça ne viendra pas salir, pour les années à venir, la réputation des Québécois. Parce que, effectivement, les Québécois sont des gens ouverts et généreux. C'est prouvé. C'est reconnu au niveau mondial. Et si, aujourd'hui, il y a des comportements qui sont plus violents, c'est à cause de la frustration des citoyens, frustration qui est occasionnée par le manque d'autorité de ce gouvernement, le laisser-faire, le manque de planification qui fait en sorte qu'on ne sait plus où on va.

C'est tellement vrai que les gens manquent maintenant de confiance en ce gouvernement et en son premier ministre que même les maires des municipalités, à qui on avait promis la route 30, ont jugé indispensable d'aller commencer les travaux eux-mêmes pour s'assurer que le gouvernement ne reviendrait pas sur son engagement. Imaginez-vous, le manque de confiance des élus municipaux par rapport à leur gouvernement au point où, d'une façon qui n'est pas normale, qui n'est pas légale, les maires s'installent sur des "bulls" pour aller faire le tracé de la route pour être sûrs que le gouvernement ne reculera pas. Il faut le faire, on ne voit pas ça souvent dans des sociétés. Donc, c'est qu'on est rendu vraiment dans une situation qui est grave, qui est grave non seulement par rapport à ce qu'on vit comme insécurité, mais aussi par rapport à ce que ça va venir ternir l'image du Québec parce que les Québécois n'ont pas changé comme tels, même s'ils ont vécu des moments troublés, troublants. Mais les Québécois sont encore les mêmes et ils espèrent qu'on va être capable de régler ça rapidement. Mais on a terni l'image du Québec.

On a réussi à faire en sorte que l'autorité soit mise en doute et c'est pour ça qu'on voit des routes bloquées un peu partout. On a laissé une situation inacceptable perdurer pendant 50 jours. Ça, c'est dangereux pour une société. On a compromis le respect de l'autorité. On a même réussi à compromettre ce qui n'était même pas une image, mais une réalité, la fierté qu'on avait de la Sûreté du Québec. On a réussi, pendant quelques jours en plus, à faire en sorte que l'armée, qui est un instrument offensif et d'attaque, devienne quelque chose d'un peu risible. On a réussi à aller aussi loin que ça comme société. Ça, c'est lamentable et pitoyable. C'est pour ça que les gens sont un peu perdus, parce qu'une société aussi moderne que la nôtre, aussi efficace, aussi avancée, mais surtout aussi paisible, qui se ramasse dans une situation semblable, ce n'est pas explicable et ce n'est pas acceptable.

C'est pour ça que les gens se questionnent et c'est pour ça que les gens, finalement, surtout dans la situation des gens de Châteauguay et de Sainte-Catherine, ont décidé, eux autres, d'aller de l'avant. Ils ont raison et c'est pour ça qu'on ne peut pas faire autrement qu'être pour le projet de loi aujourd'hui, même si on est très déçus des raisons qui nous amènent ici. On est très déçus. Mais ça n'a pas de bon sens que toute cette population de la région de Châteauguay, de Beauhamois, de Mercier et de Sainte-Catherine soit victime et pénalisée plus longtemps à cause de l'incohérence et de l'incapacité du gouvernement d'en face de prendre ses responsabilités.

Je conclus là-dessus, parce que vous me dites que j'ai fini mon temps, M. le Président, en disant ou en montrant toute l'insignifiance de cette situation. Imaginez-vous! Le tout a commencé par un terrain de golf, dans le nord, à Oka, et ça se termine ici, à l'Assemblée nationale, par un bout d'autouroute dans le sud, à Châteauguay. Ça nous montre toute l'incohérence et toute l'insignifiance de cette situation à cause d'un gouvernement qui n'a pas su prendre ses responsabilités parce qu'il n'a jamais eu d'objectif, de plan précis d'intervention quand il posait des gestes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Shefford. M. le ministre, voulez-vous utiliser votre droit de réplique? M. le ministre délégué aux Transports.

M. Yvon Vallières (réplique)

M. Vallières: Oui, M. le Président. Vous me permettrez rapidement de clore cette partie de notre débat. Je constate, et ça me rappelle certains souvenirs, que, quand on est dans l'Opposition, souvent on se doit d'intervenir sur les projets de loi en faveur desquels on est, mais qu'on doit aussi parler contre. Il faut dire qu'à la longue on développe une certaine habileté à le faire, habileté plus particulière de l'Opposition. À

écouter récemment tout particulièrement le député de Shefford, j'ai l'impression qu'il a déjà réussi à bien développer cette qualité et que probablement il risque de devenir très habile, tout au long des années en cette Chambre, dans l'Opposition, j'espère.

M. le Président, vous me permettrez également d'indiquer que je reconnais d'une façon générale l'appui massif, pour ne pas dire unanime, des députés qui se sont exprimés sur ce projet de loi, même si certains émettent quelques réserves à l'endroit non pas du contenu du projet de loi, parce que très peu, à part mes collègues ministériels qui ont parlé du contenu du projet, très peu de gens de l'Opposition nous ont parlé de son contenu... Il faut indiquer également que certains nous ont annoncé des amendements qui pourraient être présentés lors du comité plénier. On est prêts à regarder cela. Je constate que, dans l'ensemble, les propos qui ont été tenus par l'Opposition parlent plutôt du contexte général, du climat, de l'atmosphère, de l'armée, de l'action comme telle, du conflit ou de la crise comme telle qui a sévi dans la région de Châteauguay plus particulièrement, mais très peu du contenu de la loi. (16 h 10)

Je comprends la prudence de l'Opposition qui est très certainement bien informée de l'appui massif de la population régionale, de tous les maires en particulier et de la MRC de Roussillon au projet de loi spécial déposé ici en cette Chambre, et plus particulièrement à l'intention du gouvernement du Québec d'intervenir rapidement et avec efficacité pour la reconstruction du tronçon de l'autoroute 30 dont il est question et qui est visée dans le projet de loi 82.

Donc, vous me voyez réjoui de cette attitude positive dans le contexte dans lequel nous vivons. Je suis persuadé que les minutes qui nous attendent en comité plénier nous permettront de voir avec davantage de détails toutes les précautions que prend le gouvernement du Québec et en particulier le ministère des Transports afin de s'assurer qu'on puisse donner suite et qu'on puisse appliquer cette loi si indispensable afin de donner aux citoyens de la grande région de Châteauguay une route attendue depuis fort longtemps. On pourrait longtemps parler du pourquoi des attentes que l'on a dans certains dossiers.

J'aurais aimé pouvoir - probablement que si le député de Lévis avait été là, on aurait fait une bonne partie du débat là-dessus - connaître le contexte budgétaire qui nous mène dans certains dossiers à retarder les échéanciers face au contexte budgétaire que nous a légué le gouvernement précédent, dans un contexte qui se redresse avec le dernier budget du ministre des Finances qui vient injecter des fonds additionnels au ministère des Transports, sur une base maintenant quinquennale, avec un budget de base qui nous permettra de donner suite à plusieurs projets et de répondre, je vais l'ajouter, favorablement à de nombreuses demandes qui nous parviennent tant des députés de l'Opposition que des députés ministériels. Je pense en particulier au député de Laviolette qui a défendu avec beaucoup d'intérêt sa région. Je vais immédiatement lui indiquer qu'il n'est pas le seul en cette Chambre à avoir des besoins considérables dans le domaine des transports. J'ose espérer qu'on pourra, dans sa région comme dans d'autres, intervenir de façon favorable au cours des prochains mois, des prochaines années.

Le leader de l'Opposition et député de Joliette a annoncé son intention de proposer en comité plénier l'ajout en particulier d'un préambule au projet de loi, faisant état de la situation de crise à laquelle le projet de loi se veut une réponse. J'ai regardé ça tantôt avec attention. On le regardera avec plus de détails tantôt en comité plénier. Dès à présent, cependant, j'inviterais l'Opposition à évaluer juridiquement les effets d'un tel préambule sur l'interprétation des autres dispositions que ça pourrait avoir sur la loi que nous présentons. Nous voulons que la loi qui est devant nous s'applique et que, juridiquement, elle prête le moins possible le flanc à la contestation ou à l'interprétation. Cela dit, M. le Président, je me réjouis de l'appui massif que l'on reçoit face à notre projet de loi spécial et je vous convie maintenant en comité plénier pour l'étude article par article.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Est-ce que la motion du ministre délégué aux Transports proposant l'adoption du principe du projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: m. le président, je fais motion pour que la chambre se transforme en comité plénier pour l'étude du projet de loi, article par article.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du leader du gouvernement est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, cette Assemblée se transforme en commission plénière.

(Suspension de la séance à 16 h 15)

(Reprise à 16 h 19)

Commission plénière Étude détaillée

M. Cannon (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous sommes effectivement en commission plénière pour étudier le projet de loi 82. Je rappellerai aux intervenants que, tel qu'il a été stipulé ce matin par ordre de la Chambre, la commission plénière a une durée de deux heures. Alors, pour ce qui est des remarques préliminaires, je vais maintenant entendre le ministre délégué aux Transports. M. le ministre.

M. Vallières: Oui. M. le Président, j'aimerais que l'on aborde immédiatement l'article 1 de ce projet de loi. Je ne sais pas si la coutume veut que vous le lisiez et que par la suite nous en discutions...

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition, remarques préliminaires.

M. Chevrette: Je n'ai pas de remarques préliminaires moi non plus. Je pense qu'on a abondamment discuté, au niveau du principe, et on a dit ce qu'on pensait de la situation. Cependant, j'ai une question d'ordre technique. Étant donné que j'ai avancé la possibilité d'un amendement dans le préambule, est-ce qu'on touche immédiatement au préambule, ou si on y vient à la fin? C'est juste technique. Je veux savoir.

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition, la jurisprudence, à l'égard de la présentation d'une motion préliminaire au niveau du préambule... Je cite l'article 244, au niveau de l'étude détaillée d'un projet de loi, et je cite la décision du président Richard, le 9 décembre 1986. Je vous mets en contexte. Avant d'entreprendre l'étude de l'article 1, un député de l'Opposition propose d'ajouter un préambule au projet de loi public. Alors, restait à savoir si cette motion préliminaire était recevable.

La décision qui a été rendue était à cet effet que la motion était irrecevable, puisque lorsqu'un projet de loi public contient un préambule, ce dernier doit être étudié après tous les articles du projet de loi et avant l'étude du titre. Dès lors, une motion proposant de joindre un préambule à un projet de loi public qui n'en contenait pas à l'origine est irrecevable.

M. Chevrette: Je m'en doutais bien, M. le Président, mais c'était une façon de rappeler que j'avais un amendement sur le préambule.

Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce qu'on est prêts à commencer avec...

M. Chevrette: Article 1.

Le Président (M. Cannon): ...l'article 1?

M. Vallières: Oui.

Le Président (M. Cannon): Alors, s'il y a consentement, je peux faire la lecture ou si vous le jugez bon, vous pouvez...

M. Chevrette: Moi, je n'ai pas d'objection. Pour les fins du procès-verbal, en tout cas, je pense qu'étant donné que le ministre m'a annoncé que les motifs étaient d'ordre assez technique, personnellement, je ne détesterais pas, étant donné que c'est technique, qu'ils soient lus, pour qu'on puisse les consigner également aux procès-verbaux.

Le Président (M. Cannon): Alors, s'il y a consentement de part et d'autre, je vais procéder à la lecture de l'article 1. Donc, le Parlement du Québec décrète ce qui suit à l'article 1: "Le ministre des Transports est autorisé à construire ou à faire construire un tronçon de l'autoroute 30 reliant la route 138 à Châteauguay et la route 132 à Sainte-Catherine et peut exercer, pour cette route, les pouvoirs énumérés aux paragraphes 1° à 5° de l'article 10 de la Loi sur la voirie (chapitre V-8 des Lois refondues du Québec)." M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, cette disposition énonce le champ d'application du projet de loi qu'il convient de préciser, particulièrement en raison de son caractère exceptionnel. De plus, elle confère au ministre des Transports, en regard de ce champ d'application, l'autorisation nécessaire pour agir. Voilà, en résumé, M. le Président, la justification du présent article.

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, quand je lis que c'est pour relier un tronçon de l'autoroute entre les deux routes, 132 et 138, est-ce que, de facto, - je pose la question pour être bien certain que j'ai compris - ça inclut les travaux en ce qui regarde l'accès à cette autoroute?

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: Là, ça va me prendre des précisions. Je ne sais pas si vous faites allusion actuellement à ce que plusieurs ont qualifié de bretelle entre une section qui est située plus particulièrement dans Mercier, qui donnerait accès au boulevard Ford en particulier. Oui, effectivement - je l'annonçais tantôt dans mon allocution sur l'adoption du principe de la loi - nous prévoyons intervenir rapidement, peut-être même plus rapidement sur ce tronçon

où, si tout allait bien, nous pourrions débuter les travaux dès la semaine prochaine. Alors...

M. Chevrette: J'avais...

M. Vallières: ...ça confirme ce dont vous venez de me parler.

M. Chevrette: Mais dans la description technique, quand vous parlez du tronçon de l'autoroute entre 132 et 138, est-ce que vous vous donnez les pouvoirs... Est-ce que c'est suffisamment large, suffisamment vaste pour inclure tous les travaux de relais ou de bretelle ou, appelons ça comme on voudra, de liaison?

M. Vallières: Oui, tous les travaux qui sont situés sur le corridor de notre autoroute effectivement, c'est prévu.

M. Chevrette: Question. Les travaux que vous annoncez pour la liaison, qui ne faisaient pas partie de la première déclaration que vous avez déjà faite en ce qui regarde le tronçon de l'autoroute, est-ce que ce sont des travaux conformes aux directives, aux normes en usage ou si ce sont des travaux en régie?

M. Vallières: Ces travaux, afin de s'assurer qu'on puisse intervenir rapidement et compte tenu aussi de la nature des travaux qui, au départ, lors des discussions que j'ai eues avec, en particulier, les maires de la MRC de Roussil-lon, devaient être des travaux de nature temporaire qui étaient, à ce moment-là, évalués à quelques centaines de milliers de dollars, et qui vont maintenant être des travaux de nature permanente. C'est-à-dire que les travaux qu'on va effectuer cette année, ce n'est pas de l'argent perdu, ce sont des travaux qui, de toute manière, auraient été effectués l'an prochain. Alors, c'est donc indiqué qu'on procédera cette année et les travaux seront effectivement effectués en régie. C'est donc dire que c'est le ministère des Transports du Québec qui, lui-même, effectuera ces travaux ou les fera faire par des entreprises, en vertu du manuel des charges qu'on connaît.

Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Chevrette: Non.

M. Lazure: Non. M. le Président.

M. Chevrette: L'amendement.

Le Président (M. Cannon): Oui, je m'excuse, M. le député de...

M. Lazure: Avant de formuler l'amendement que j'ai à présenter, on m'a informé tout à l'heure... Le maire Lazure de la ville de Mercier, qui est présent ici, dans les galeries, m'informait que, techniquement parlant, dans l'article 1, quand on dit: "...reliant la route 138, à Château-guay, et la route 132, à Sainte-Catherine", il semble que la partie de la 138, à cet endroit-là, n'est pas dans Châteauguay, mais bien dans la ville de Mercier. C'est une information très technique, mais je pense que le maire de Mercier est la personne la mieux placée. Le maire de Châteauguay était là aussi et les deux concouraient pour dire que la partie de 138 en question est située véritablement dans la ville de Mercier. Alors, si tel est le cas, il faudrait peut-être le corriger dans la version finale du projet.

M. Chevrette: II faut faire un amendement.

M. Lazure: Alors, si tel est le cas, je propose l'amendement...

M. Chevrette: On va poser la question différemment.

M. Lazure: Je vois que le ministre est en train de vérifier avec ses adjoints si l'affirmation du maire de la ville de Mercier est véridique, oui ou non.

M. Vallières: L'information qu'on me donne est à l'effet que la section qui est visée est située dans la municipalité de Châteauguay...

M. Lazure: Alors, écoutez, si tel est le cas...

M. Vallières: ...selon la carte que j'ai à ma disposition.

M. Lazure: ...je laisse tomber l'amendement. L'amendement que je veux proposer est le suivant. Ça viendrait, si vous voulez, modifier, par l'insertion, après l'article 1, de l'article suivant: "Le gouvernement doit tout mettre en oeuvre, sur le plan des ressources financières, humaines et matérielles, afin que le ministre puisse compléter les travaux de construction de ce tronçon d'autoroute d'ici le 31 décembre 1990." Je m'explique.

Le Président (M. Cannon): Simplement pour avoir une copie, s'il vous plaît, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui.

M. Chevrette: M. le Président, il y a une question toujours technique. Je suppose que, si on dit l'article 1.1, on doit adopter l'article 1 avant et y aller, après, sur une complémentaire.

Le Président (M. Cannon): C'est exact.

M. Chevrette: Donc, moi, l'article 1, je

veux y revenir, dans ce cas-là.

Le Président (M. Cannon): Oui.

M. Chevrette: Est-ce qu'on a la certitude que c'est Mercier ou c'est Châteauguay? On dit qu'on a des informations que... Mais c'est sérieux, ça. Si on arrive avec une législation et si on n'est pas dans fa bonne paroisse, vous savez ce que ça fait, juridiquement. Moi, je veux avoir la certitude, avant de voter l'article 1, que c'est bien ou dans Mercier ou bien dans Châteauguay.

Une voix: C'est dans Mercier.

M. Lazure: c'est dans mercier. alors, les maires le disent, ils sont là, m. le ministre. les deux maires en question sont là, alors, ils doivent le savoir.

M. Vallières: Ce qu'on va faire, dans les minutes qui vont suivre, on pourra le vérifier de façon...

M. Chevrette: Donc, je propose...

M. Vallières: Je pense que c'est important qu'on le sache.

M. Chevrette: ...qu'on le mette en suspens.

Le Président (M. Cannon): Oui. Et je pourrais vous indiquer également, M. le ministre, que, si vous le désirez, je ne vois aucune espèce d'objection à ce que MM. les maires ou les représentants viennent s'asseoir ici et vérifier la carte avec vous.

M. Chevrette: Pas d'objection.

Le Président (M. Cannon): Alors, tel que demandé, on va suspendre peut-être deux ou trois minutes afin... Non?

M. Chevrette: Non. On pourrait suspendre l'article et les vérifications pourraient se faire. Et on reviendra à l'article 1...

Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord. M. Chevrette: ...au moment où...

Le Président (M. Cannon): Alors, l'article 1 est suspendu. Donc, nous allons porter nos discussions sur l'amendement présenté par M. le député de La Prairie qui devient l'article 1.1. (16 h 30)

M. Lazure: Deux mots d'explication sur l'amendement, M. le Président. La raison pour laquelle on a été convoqués à cette session spéciale, c'est le caractère urgent, le caractère de crise qui fait que, pour construire ce tronçon, le gouvernement doit mettre en veilleuse ses lois habituelles dans quatre secteurs, si vous voulez: la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur la protection du territoire agricole, la Loi concernant l'expropriation et, la quatrième n'étant pas une loi mais une pratique, la pratique des appels d'offres publics.

Nous avons dit tantôt que nous comprenions cette situation de crise, cette situation d'urgence et, par conséquent, nous votons pour le projet de loi et nous acceptons que le Conseil des ministres, le 15 août dernier, ait passé un décret qui disait, justement à cause de l'aspect de crise: On doit mettre de côté les quatre procédures, dont je viens de parler.

Avec ce point de départ, cette prémisse qu'il s'agit d'une situation de crise, donc d'une situation urgente, il me paraît tout à fait normal que dans l'article 1 on mette une date quelconque. Si le 31 décembre paraît irréaliste, qu'on nous le dise, qu'on nous le fasse comprendre et ça pourrait être le mois de janvier, mais il nous paraît normal de mettre une date parce que, si l'article 1 reste vague comme ça, sans échéance précise, bien, à notre avis, ça enlève le caractère de crise et le caractère d'urgence de tout le projet de loi. Autrement dit, si on est pour laisser au ministre le soin de bâtir ce tronçon de 12,5 kilomètres au rythme qu'il voudra bien utiliser, bien, à ce moment-là, ça entre en contradiction avec l'hypothèse de base qu'il s'agit d'une situation critique, qu'il s'agit d'une situation d'urgence.

Alors, M. le Président, pour tous ces motifs-là, nous pensons qu'il est important qu'une date soit retenue et nous proposons le 31 décembre 1990. D'ailleurs, le ministre a toujours parlé de décembre, avant la fin de l'année 1990. Il nous apparaît important, donc, d'avoir cette date-là pour l'ensemble du tronçon de 12,5 kilomètres.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, je loue les bonnes intentions du député de La Prairie. Il comprendra cependant, comme moi... Je partage les objectifs, j'y souscris volontiers, qu'il aimerait... J'ai déjà indiqué que mon intention était de procéder dans les meilleurs délais au cours de la présente année. On a même réservé des sommes égales à 10 000 000 $ afin d'intervenir cette année en priorité sur un tronçon originalement de 8,5 kilomètres auquel on vient d'ajouter une autre section afin de pouvoir être relié par le boulevard Sainte-Marguerite au boulevard Ford.

C'est donc dire que celui qui vous parie a l'intention de tout mettre en oeuvre au plan des ressources humaines, matérielles et financières, comme le dit d'ailleurs ce que vous proposez comme amendement, mais, malheureusement, je dois vous indiquer que le type de proposition que

vous faites ressemble beaucoup plus à une motion qu'à un amendement que l'on doit retrouver à l'intérieur d'un projet de loi. Je trouve aussi énormément dangereux, et vous allez me comprendre parce que vous avez aussi fait des lois à l'époque, comme ministre, de coucher officiellement dans un article de loi une date finale pour la construction d'un tronçon routier. Avec tous les imprévus que comportent pareils travaux, je pense que ça ne serait véritablement pas prudent de procéder de la sorte.

J'apprécie, par ailleurs, cette proposition d'amendement du député, même si je pense qu'elle n'est pas recevable parce qu'elle attire, à tout le moins, l'attention sur la volonté du législateur et, je vous le répète, cette volonté de procéder dans les plus brefs délais possible et de tout mettre en oeuvre pour que, au cours de la présente année, les tronçons dont on parle soient entièrement complétés, tel que nous l'avons annoncé.

Mais, à ce moment-ci, je veux vous indiquer que je ne pense pas, à la face même de l'amendement que vous proposez, qu'il soit recevable et qu'il soit intégré dans un projet de loi. De toute manière, s'il était jugé recevable, je veux vous indiquer que je ne partage pas le point de vue de l'intégrer comme tel à l'intérieur du projet de loi que nous présentons ici aujourd'hui.

Le Président (M. Cannon): Au fait, simplement pour clarifier, M. le ministre, quant à moi, cet amendement-là, il est bel et bien recevable. Alors, M. le député de...

M. Lazure: Juste une dernière remarque avant qu'on puisse passer au vote peut-être, puisqu'il semble bien que le ministre n'est pas disposé à l'accepter, cet amendement qui paraît fort raisonnable. . Je lui rappelle que l'amendement ne dit pas que le tronçon doit être terminé le 31 décembre. L'amendement, lisez-le bien, M. le ministre, dit que le gouvernement doit tout mettre en oeuvre. S'il s'avérait que c'est humainement impossible, on comprendra. Tout le monde va comprendre, y compris la députée de Chome-dey, tout le monde va comprendre qu'il s'agit de tout mettre en oeuvre sur le plan des ressources financières, humaines et matérielles. C'est ça que l'amendement dit. Il ne faut pas lui faire dire ce qu'il ne dit pas.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, l'amendement dit également qu'il faut que le ministre puisse compléter les travaux de construction du tronçon de l'autoroute d'ici le 31 décembre 1990. Alors, moi, je veux simplement vous indiquer que je ne prendrai pas le risque de placer de pareils amendements à l'intérieur d'un projet de loi, compte tenu de tous les différents imprévus qu'on peut rencontrer sur un chantier de construction: l'élément température, entre autres, et bien d'autres facteurs qui ne sont pas sous le contrôle du ministère des Transports. Ce qui est sous notre contrôle, c'est la volonté ferme de procéder dans les meilleurs délais, et je pense que les moyens, tous les moyens, toute cette série de moyens que l'on retrouve à l'intérieur de notre projet de loi démontre non seulement la volonté mais le sérieux du ministère des Transports, qui se donne mais alors tous les moyens possibles et imaginables pour être sur le terrain dans les plus brefs délais et réaliser ce tronçon d'autoroute.

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je dois vous dire que je ne comprends pas l'argumentation. L'amendement vise à officialiser, dans un cadre très exceptionnel, une volonté politique claire, sans équivoque, de réaliser le tout pour le 31 décembre. Il ne dit pas que les travaux doivent être terminés, mais que l'on doit prendre tous les moyens pour qu'ils soient terminés. Refuser d'inclure cette volonté politique dans le projet de loi...

Une voix: II n'y a plus d'urgence.

M. Chevrette: ...signifie, à mon point de vue, par le rejet de cet amendement, purement et simplement, qu'on va le réaliser, mais qu'on n'est pas prêt à dire qu'on prendra tous les moyens. Ça m'apparaît dangereux. On n'est pas dans le cadre normal de législation. On a convoqué l'Assemblée nationale d'une façon tout à fait extraordinaire pour voter une loi sur une autoroute et on n'est pas prêts à accepter de mettre tous les moyens en oeuvre pour qu'elle se réalise. Moi, je vous avoue, M. le Président, que mon latin, je l'ai perdu. Je voudrais qu'on me dise carrément comment on peut dire qu'il y a une volonté politique très ferme et refuser du même souffle de prendre tous les moyens pour le faire. Il y a quelque chose que je ne comprends pas et que je voudrais qu'on m'explique.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, je pense que la seule convocation de l'Assemblée nationale aujourd'hui témoigne de notre intention de procéder rapidement. L'amendement qui est proposé, à mon humble avis, constitue tout simplement un énoncé politique, un objectif. Pour moi, il ne s'agit pas là d'un article législatif. J'ai de la difficulté à voir comment on peut intégrer ça dans un projet de loi. Il s'agit là, selon moi, purement et simplement, d'une déclaration d'intention. C'est bon dans les discours, remarquez, mais pas dans un projet de loi, à mon humble avis. Donc, je suis, évidemment, contre cet amendement.

Le Président (M. Cannon): Yes, M. le député de Westmount.

M. Holden: M. le Président, j'arrive un peu en retard, mais je lis l'amendement comme le leader de l'Opposition officielle. Il n'y a rien de forçant dans l'amendement. Ce n'est qu'une déclaration d'intention du gouvernement. Il n'y a rien qui empêche un législateur de dire qu'il a l'intention de compléter ce qu'il commence pour une certaine date. Il n'y a rien dans la loi non plus qui dit qu'il y a des amendes ou quoi que ce soit si on n'arrive pas à faire compléter la route. Mais quand même, M. le Président, quand on est ici en plein été à cause d'une crise incroyable, on veut faire quelque chose pour essayer de régler cette crise. Le gouvernement n'a pas le courage de dire: Oui, on va la compléter pour telle date. Essayons de compléter ça pour une date fixe. Je trouve que, forcément... D'abord, l'amendement est non seulement tout à fart acceptable, mais le gouvernement devrait avoir ça dans la loi. Il devrait être content de l'avoir dans la loi, pour qu'il puisse dire au contracteur: Écoutez, la loi dit que le 31... Qu'est-ce que vous faites là? Alors je suis tout à fait en faveur de cet amendement, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président... (16 h 40)

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...plus encore, je voudrais ajouter, le fait de refuser d'introduire cette volonté, de l'officialiser, peut être interprété, très clairement, M. le Président, comme un somnifère à court terme. On vous endort. On vous dit qu'on va la faire, mais on refuse de l'écrire. Moi, je m'excuse, mais il n'y a pas de sanction, comme le disait le député de Westmount, il n'y a aucune sanction, mais on vous dit: Vous avez déplacé les parlementaires. Vous les avez convoqués à une séance extraordinaire. Vous dites, au niveau du discours, que vous voulez réaliser avant le 31, mais vous refusez d'incorporer à votre projet de loi l'officialisation de cette volonté politique qui peut devenir même intéressante et une arme pour le ministre des Transports. Parce que s'il n'a pas l'argent, il va être obligé de dire: Écoutez, je m'excuse, mais je me suis lié dans une déclaration officielle incluse dans le projet de loi à l'effet que je veux le réaliser. La, le lendemain matin, on va retourner à Châteauguay. Et ça "voudrait-u" dire que le 1er décembre les travaux arrêtent et qu'ils recommenceront au mois de janvier, mars, pour toutes sortes de raisons? Il n'y a rien qui l'oblige à les finaliser ou à les continuer. Il n'a même pas à prouver sa bonne foi. Il n'a même pas à prouver sa bonne foi si les travaux sont arrêtés ou discontinués ou... On ne force pas les gens à le faire. Moi, je pense très clairement que c'est un test de bonne foi. C'est un test de bonne foi. Si le ministre n'est pas capable de se lier sur un amendement qui l'aide auprès du Trésor, qui l'aide auprès des contracteurs et qui rassure aussi la population... Vous avez convoqué pour aider à un dénouement de crise et vous n'êtes même pas capable d'écrire que votre objectif, c'est de finir à telle date. Et ça, ça m'apparaît très, très faible.

Le Président (M. Cannon): Alors, s'il n'y a aucun autre intervenant, nous allons passer à la mise aux voix de l'article 1.1. M. le ministre, avez-vous une réaction?

M. Vallières: Non, M. le Président, j'ai déjà fait mon point là-dessus. Le présent projet de loi se veut le plus précis possible. Et ce qu'on veut mettre à l'intérieur d'un projet de loi, ce sont des règles précises. C'est ce qu'il contient. Je n'ai pas l'intention d'y mettre des intentions comme celles qui sont soulignées ici. Ce qui n'enlève en rien à la volonté très ferme du gouvernement de procéder dans les plus brefs délais, de donner suite. Et, pour ce qui est des 10 000 000 $ qui sont nécessaires, j'ai immédiatement... Le député de Joliette sait pertinemment bien que quand le Conseil des ministres a approuvé le projet, il y avait dans les coffres les fonds requis pour y donner suite.

Le Président (M. Cannon): Alors, nous allons donc passer à la mise aux voix de l'article 1.1. Je le relis: "Le gouvernement doit tout mettre en oeuvre sur le plan des ressources financières, humaines et matérielles afin que le ministre puisse compléter les travaux de construction de ce tronçon d'autoroute d'ici le 31 décembre 1990." Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Chevrette: Adopté. Une voix:...

Le Président (M. Cannon): Contre. Donc, sur division.

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Cannon): Rejeté, pardon. Alors, est-ce que nous sommes prêts à revenir à l'article 1? Est-ce que des clarifications sont apportées?

M. Chevrette: Avez-vous de l'information? Donc, il faudrait qu'il y ait un amendement formel, je suppose.

M. Vallières: Effectivement, les travaux qu'on prévoit faire en régie, dont on parlait au tout début, sur une section de deux kilomètres

afin de permettre le lien avec le boulevard Ford, sont situés dans la municipalité de Mercier et Châteauguay, à l'extrémité est près du boulevard Sainte-Marguerite.

M. Chevrette: Vous proposez quel type d'amendement pour vous rendre conforme?

Le Président (M. Cannon): On peut poursuivre avec la suspension, toujours, de l'article 1. Je pense qu'on...

M. Chevrette: On est prêt.

Le Président (M. Cannon): Oui, voilà. Mais il nous faut un amendement effectivement à la table.

M. Chevrette: Donc, on peut le suspendre à nouveau?

Le Président (M. Cannon): Oui. Et à noter qu'il y a eu un certain progrès fait de ce côté-là.

Une voix: Ah oui.

Le Président (M. Cannon): À l'article 2, 2.1: "Le ministre peut acquérir à l'amiable ou par expropriation, même sans l'autorisation du gouvernement: "1° tout immeuble ou droit réel immobilier, y compris les servitudes visées à l'article 12 de la Loi sur la voirie, qu'il juge nécessaire en vue de la construction du tronçon de l'autoroute 30 ou en vue de l'exercice, pour cette route, des pouvoirs énumérés aux paragraphes 4° et 5° de l'article 10 de cette loi, du rétablissement de la situation de terrains morcelés, du déplacement de constructions ou de la réduction du coût d'acquisition de l'emprise."

M. le ministre.

M. Vallières: Oui, vous pourriez lire tout l'article, M. le Président, et je vais y revenir.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que ça va? Oui? On peut continuer? Alors, "2° tout immeuble ou droit réel immobilier qu'il juge nécessaire à la relocalisation des lignes, postes de transformation ou tout autre équipement pour le transport ou la distribution d'électricité appartenant à Hydro-Québec et situés sur le tronçon à construire ou à proximité de celui-ci; "3° tout immeuble situé entre le tronçon à construire et la réserve de Kahnawake ainsi que tout droit réel grevant un tel immeuble. "L'acquisition à l'amiable ou par expropriation peut porter sur des biens meubles lorsqu'ils sont des accessoires de l'immeuble à acquérir."

M. Vallières: M. le Président, le premier alinéa accorde au ministre des Transports l'autorisation de procéder à l'acquisition des biens visés aux paragraphes premier et troisième en procédant à l'amiable ou par voie d'expropriation, et ce, sans être tenu d'obtenir un décret, de façon à réduire au maximum les délais. Il est nécessaire d'utiliser l'expression "même sans l'autorisation du gouvernement" parce que les expropriations commencées avant l'adoption du projet de loi l'ont été avec autorisation. Dans le cadre des expropriations faites en vertu de la loi spéciale, comme cette loi écarte l'article 36 de la Loi sur l'expropriation qui prévoit une autorisation, il faut mentionner que le ministre peut procéder sans autorisation.

Il convient de spécifier que les immeubles ou droits réels immobiliers pouvant être expropriés sont ceux nécessaires a la construction du tronçon de l'autoroute 30 et qu'à cette fin le ministre peut également exercer tous les pouvoirs énumérés aux paragraphes 4° et 5° de l'article 10 de la Loi sur la voirie ainsi qu'à l'article 12, lequel porte sur les servitudes.

Au second paragraphe, en raison de la nécessité de réduire au maximum tous les délais, il convient d'accorder au ministre des Transports le pouvoir d'acquérir tous les immeubles nécessaires aux fins de relocaliser les lignes d'Hydro-Québec qui se trouvent sur le tracé même du tronçon projeté. Le projet prévoit, à l'article 3, que le ministre devra, par la suite, mettre à la disposition d'Hydro-Québec les biens ainsi acquis.

Au troisième paragraphe, comme les terres situées entre le tronçon projeté et la réserve indienne ne sont pas nécessaires à la construction du tronçon, il s'avère essentiel d'accorder au ministre des Transports le pouvoir de les exproprier, de même que tout droit réel pouvant grever ces immeubles, de façon à pouvoir s'assurer, par l'octroi de baux ou autrement, de la continuation d'activités agricoles sur ces résidus.

Le dernier alinéa, enfin, vise le pouvoir prévu à l'article 38 de la Loi sur l'expropriation qui est requis dans le projet de loi en raison du deuxième alinéa qui, lui, exclut le titre II de la Loi sur l'expropriation, dont l'article 38. De plus, comme le premier alinéa prévoit l'acquisition d'immeubles et de droits réels immobiliers, il y a lieu d'étendre également ce pouvoir d'acquisition à l'amiable aux meubles.

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Sur le paragraphe 1°, le ministre a lu dans son commentaire "pour les travaux nécessaires à la construction du tronçon". Est-ce que ce pouvoir ne serait pas aussi important et indispensable pour la bretelle, ou si vous ne vous donnez pas les pouvoirs d'expropriation au niveau de la bretelle?

M. Vallières: La bretelle à laquelle fait

allusion le député de joliette est située sur le tronçon de la route. ça fait partie de l'autoroute comme telle. donc, la question ne se pose pas parce que...

M. Chevrette: Vous n'avez besoin d'aucune expropriation pour réaliser les liaisons?

M. Vallières: Non, non. On donne sur une route déjà existante.

M. Chevrette: Non, c'est parce que vous aviez spécifié dans votre exposé "tronçon". Je craignais qu'il ne pourrait y avoir des expropriations...

M. Vallières: Non.

M. Chevrette: ...pour bien faire le raccordement et donc, on n'aurait pas eu de pouvoir en ce qui regarde le raccordement. C'est ça qui me...

M. Vallières: Non, on a pris nos précautions de ce côté.

M. Chevrette: C'est de ça que j'avais peur.

M. Lazure: Sur le paragraphe 2° concernant Hydro-Québec, est-ce que le ministre pourrait nous donner un peu plus de détails, l'ampleur de ce qui devra être relocalisé?

M. Vallières: En fait, ce sont quelques tours d'Hydro-Québec et postes de transformation. C'est un déplacement mineur...

M. Lazure: Mineur?

M. Vallières: Mais ils sont actuellement dans le tracé de l'autoroute, ce qui fait qu'on devra les relocaliser et c'est le ministère des Transports qui le fera, qui expropriera et le tout sera, par la suite, remis à Hydro-Québec.

M. Chevrette: Les meubles. Donnez-moi donc un exemple ou deux de l'obligation d'inclure les immeubles et les meubles, pour bien faire saisir... Parce qu'on parle d'accessoires dans le projet de loi; dans l'exposé, vous parlez de meubles. C'est la première fois que je vois ça au niveau d'un projet de loi. (16 h 50)

M. Vallières: On vient de me dire que là où on va travailler, c'est surtout sur des exploitations agricoles, et que certains équipements qui devront être expropriés sont considérés comme étant des biens meubles.

M. Chevrette: Des quoi? Des caveaux, des... M. Vallières: Des silos.

M. Chevrette: Des silos?

M. Vallières: On m'indique qu'un silo, peut être considéré comme ça. On me fart remarquer qu'un silo ça se déménage. Ça peut être considéré comme un bien meuble. Evidemment, ce n'est pas comme une table de cuisine, mais ça se déménage.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que ça va pour l'article 2? M. le ministre, est-ce que vous avez un complément de renseignements à fournir?

M. Vallières: Non, ça va.

Le Président (M. Cannon): Oui. M. le député, ça va? Donc, l'article 2 est adopté?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. J'appelle l'article 3. "Le ministre peut céder, louer, échanger tout bien construit, établi ou acquis en application de l'article 1 ou de l'article 2 ou en disposer de la manière qu'il juge appropriée; toutefois, il doit mettre à la disposition d'Hydro-Québec les biens acquis en application du paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 2, aux conditions que détermine le gouvernement." M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, les pouvoirs prévus à l'article 3 ne sont pas nouveaux, puisqu'on retrouve une disposition semblable au paragraphe 6 de l'article 10 de la Loi sur la voirie. La reprise d'une telle disposition plutôt qu'un renvoi au paragraphe 6 de l'article 10 s'avère nécessaire, compte tenu du paragraphe 3, où le ministre doit pouvoir disposer comme bon lui semble des immeubles limitrophes à la réserve indienne.

Quant à Hydro-Québec, qui est une société de la couronne, on ne pouvait lui céder des biens qui, par ailleurs, sont devenus du domaine public du fait de leur acquisition par le ministre des Transports, d'où l'expression "mettre à la disposition d'Hydro-Québec les biens acquis"; expression que l'on retrouve d'ailleurs à l'article 32 de la Loi sur Hydro-Québec.

En effet, les biens d'Hydro-Québec étant des biens de la couronne, celle-ci ne peut faire cession à elle-même de ce qui lui appartient.

Le Président (M. Cannon): M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, moi, ici, je ne comprends pas pourquoi le ministre se donne un pouvoir en dérogation avec les procédures normales existant au gouvernement. L'urgence, c'est d'exproprier pour construire une route.

Mais profiter d'une loi d'exception pour se donner un pouvoir allant en dérogation au système en cours, je ne comprends pas l'objectif de la loi. Je pense que, lorsqu'on veut vendre des parcelles de terrain, il y a des procédures, il y a des appels d'offres publics, il y a des gens qui peuvent soumissionner, on peut vendre à la meilleure offre. Mais, au niveau de la législation, pourquoi s'approprier une procédure qui, elle, ne crée aucune urgence, dans les circonstances? L'urgence ne réside pas dans le fait de céder les meubles accessoires, elle est dans la façon de construire. Je voudrais qu'on me donne les motifs, les raisons qui font que l'on va jusqu'à mettre de côté toutes les procédures de vente, par exemple, tous les baux de location alors, que ça ne se justifie pas en fonction de la situation. Il y a quelque chose qui accroche, là.

M. Vallières: M. le Président, on reconduit ici des dispositions qui sont déjà, comme je l'ai indiqué, contenues dans la loi. Mais compte tenu qu'on est en loi spéciale, ici, les effets de la loi générale tombent. On a été obligés de reconduire dans la loi spéciale les éléments que l'on retrouve. Ce qu'on indique ici c'est que l'on peut céder, louer, échanger tout bien ainsi établi ou acquis, ou en disposer de la manière que l'on juge appropriée. C'est ce qu'on retrouvait dans l'ancien article, l'article 10, à l'alinéa 7.

M. Chevrette: Mais si c'est la reconduction, M. le ministre, pourquoi ne dites-vous pas, purement et simplement, que l'on pourra disposer des excédents et de tout ce qui serait en surplus conformément à la politique du ministère? Pourquoi sent-on le besoin de mettre une clause plus particulière, laissant au ministre une discrétion totale, alors qu'il y a des procédures établies qui sont connues par les gens, par les citoyens en général? Moi, personnellement, je suis perplexe devant ce bout de phrase, parce que ça peut donner ouverture à n'importe quoi: au changement de procédure, au changement de formule... Le ministre s'est donné un pouvoir seul, alors qu'il y a des procédures existantes, il y a des normes existantes, il y a des cahiers qui font état de ça et c'est connu du public. Moi je ne vois pas en quoi c'est relié à la loi d'exception, sinon de prêter flanc après à n'importe quoi.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Holden: M. le Président, pour ajouter à ce que le leader a dit.

Le Président (M. Cannon): Oui, si c'est sur le même sujet, évidemment, je vais permettre votre intervention.

M. Holden: Oui. J'abonde justement, M. le Président, dans le même sens que le leader de l'Opposition officielle parce que, à la limite, cet article pourrait même amener quelqu'un à disposer de ces objets ou de ces terrains sans aucune espèce de contrôle. Et qui sait qui pourrait être acheteur. Ça pourrait amener justement des problèmes légaux et politiques. Si je comprends bien, ce ne sont pas des terrains qui vont empêcher que la route soit construite. Ce sont des terrains accessoires qui vont être vendus ou cédés. Alors, la route va procéder malgré la vente de ces terrains-là. Est-ce que je me trompe, M. le ministre?

M. Vallières: Non, je pense que vous ne vous trompez pas, mais je vais demander à Me Drolet, qui m'accompagne, de vous donner tous les détails pertinents. Comme je vous l'indiquais tantôt, il y a des technicités qui sont importantes. On se réfère à des articles de la loi existante, qui doivent être reconduits à l'intérieur de la présente loi. Et H y a aussi des dispositions qui visent à donner certains pouvoirs au ministre d'acquérir et de remise, à ces conditions, de certaines parcelles de terrains. Je laisserai M. Drolet vous expliquer la mécanique qui entoure ce pouvoir.

M. Chevrette: Si vous me le permettez, avant que martre...

Le Président (M. Cannon): Oui, simplement, M. le leader de l'Opposition, pour vous aviser qu'il est clair que si M. Orolet prend la parole, il la prend en votre nom et ça prend le consentement des membres de la commission aussi.

M. Chevrette: Non, non, je n'ai pas d'objection.

Le Président (M. Cannon): O.K.

M. Chevrette: Je vais poser une question en tout cas plus complète quant à donner la parole à M. Orolet pour qu'il nous réponde. Lorsque le gouvernement acquiert par expropriation, ça devient une propriété du ministère des Transports. Pourquoi, à ce moment-là, les biens acquis à cause de l'urgence ne deviennent-ils pas la propriété du ministère des Transports et ne seraient-ils pas liquidés conformément aux politiques, aux règles de fonctionnement édictées par le ministère des Transports? C'est ça que je ne comprends pas.

Le Président (M. Cannon): M. Drolet.

M. Drolet: Si vous permettez, M. le Président, à l'heure actuelle, les biens qui sont acquis en application de la Loi sur la voirie deviennent propriété du gouvernement, de l'État et lorsque ces biens ne sont plus requis, l'article 7 de la Loi sur la voirie s'applique et le ministre peut céder, louer, échanger tout bien ainsi établi ou

acquis, ou en disposer de la manière qu'il juge appropriée. C'est l'état actuel. Le ministre se soumet, à ce moment-là, au règlement sur la disposition des immeubles excédentaires.

Dans le cas présent, vous avez des pouvoirs spéciaux d'acquisition qui sont donnés par la loi spéciale et qui nous obligent, comme on donne ces pouvoirs spéciaux dans la loi spéciale, à donner le même pouvoir correspondant de cession ou de location, ou d'échange d'un bien acquis et, en particulier, lorsque vous parlez des immeubles qui sont situés entre le tronçon à construire, comme te dit l'article 2, et l'autoroute 30, il faut pouvoir s'assurer que ces immeubles pourront continuer d'être utilisés à des fins agricoles, ce qu'on ne pourrait pas faire si nous devions nous soumettre à la procédure du règlement sur la disposition des immeubles excédentaires. De sorte que la partie de terre qui sera acquise pourra être consentie à nouveau à un exploitant agricole pour qu'il continue l'exploitation et c'est pour ça qu'on a besoin du pouvoir spécial qui est donné là et qui, encore une fois, est la répétition du paragraphe 7 de l'article 10 de la Loi sur la voirie.

M. Chevrette: M. le Président, c'est une autre question d'ordre technique.

Le Président (M. Cannon): Oui, M. le leader. (17 heures)

M. Chevrette: En renouvelant, en réitérant dans ce projet de loi spécial le pouvoir normalement dévolu dans la loi de portée générale-Dans la loi de portée générale, tous les biens acquis deviennent assujettis à des règles administratives et la façon de procéder, ça peut être selon une procédure établie par le gouvernement. Avec ce pouvoir spécial que vous donnez au ministre, qui est peut-être indispensable pour pouvoir en disposer, pourquoi ne dites-vous pas, cependant, que ça sera soumis aux mêmes directives et mêmes règles que ceux que le ministère des Transports utilise dans les cas normaux? Pourquoi ne le mettez-vous pas, d'abord?

M. Drolet: À l'heure actuelle, le pouvoir du paragraphe 7° de l'article 10 de la Loi sur la voirie est un pouvoir discrétionnaire du ministre de disposer de la manière qu'il juge appropriée. C'est le ministre des Transports qui a décidé de se soumettre à la réglementation sur la disposition des immeubles excédentaires en temps normal, mais il n'est pas obligé de la suivre. Mais il le fait pratiquement toujours dans tous Jes cas et cette procédure prévoit d'abord l'offre de ces immeubles excédentaires là à certains organismes, dont des municipalités. Or, dans le cas présent, ce qu'il est possible de faire, ce qui est fait par le paragraphe 2° de l'article 2, c'est notamment d'acquérir des immeubles qui seraient situés entre le tronçon et la réserve. Mais comme il s'agit de terres agricoles et qu'on est intéressés, par suite de la décision de la Commission de protection du territoire agricole, qui confirme d'ailleurs qu'il s'agit de terres arables très riches, le ministre des Transports est intéressé à ce que ces exploitations-là ou ces terrains-là puissent continuer à être utilisés à des fins agricoles, il a besoin de ce pouvoir spécial là pour non pas céder nécessairement aux municipalités mais aux exploitants agricoles un bail pour qu'ils continuent l'exploitation.

M. Chevrette: Si je comprends bien, on demande un peu plus loin d'être relevé des obligations, par exemple, de consulter la population, on demande d'être relevé de l'obligation d'aller à la CPTAQ, etc., et là, vous manifestez une intention... Dans votre réponse, vous dites: II y a une intention de garder agricoles, par exemple, les terres que nous nous trouverons à dézoner de par le projet de loi. Mais si le ministre ne restreint pas dans son projet de loi spécial, ne se limite pas à garder intactes les vocations des terrains qu'il acquiert - avec le pouvoir de portée générale que vous vous donnez, il peut tout faire - il pourrait donc... Même sur les terres de Kahnawake qui ont été achetées par les Mohawks, il pourrait très bien dire: Dorénavant, ça ne sera pas de l'agriculture. Comme il a l'intention de dire que c'est de l'agriculture, mais le pouvoir qu'il se donne sans le limiter, avec la suspension des droits que vous obligez aux citoyens, si on ne le limite pas du tout, il va pouvoir en disposer d'une façon très discrétionnaire, comme il veut. C'est bien ça que j'ai compris dans votre réponse?

M. Drolet: II a, de toute façon, ce pouvoir à l'heure actuelle en vertu de la Loi sur la voirie si on n'adoptait pas une loi spéciale.

M. Chevrette: II l'a de toute façon, mais, avant de porter un jugement discrétionnaire libre, il serait obligé de se soumettre à la Loi sur la qualité de l'environnement, il serait obligé de se soumettre à la Loi sur la protection du territoire agricole et il serait obligé de consulter la population comme telle. Après ça, dépendant de ce que les instances lui diraient, il aurait une pression politique sur lui de sorte qu'il ne pourrait pas faire ce qu'il veut. Là, vous vous donnez un pouvoir discrétionnaire illimité et on suspend en plus les mécanismes, ce à quoi on est bien prêts à adhérer, mais vous comprendrez que le pouvoir de portée générale que vous vous donnez, quand tu as enlevé toutes les contraintes de gens qui auraient pu influencer le jugement du ministre par la suite... Parce que quand vous y allez d'une façon normale, le ministre est nécessairement influencé dans la façon ¦ de céder les biens parce qu'il a écouté les auditions publiques, parce qu'il y a une étude d'impact qui

est terminée, parce que la commission de protection du territoire agricole a négocié un tracé ou un changement de tracé ou a proposé des choses différentes. mais là, vous lui donnez le pouvoir de portée générale en suspendant tout mécanisme qui pourrait dire: allez-vous, au moins, vous lier d'ores et déjà à garder intactes toutes les parcelles de sol agricole qui vont rester? allez-vous changer ça en du commercial? allez-vous changer ça en du domiciliaire? tout est permis, vous me l'avez dit. je le savais. je savais que vous répétiez le paragraphe t de l'article 16 de la loi du ministère. je savais ça. ce que je veux vous faire comprendre, c'est que vous répétez un pouvoir qui, d'après moi, est essentiel en ce qui regarde le fait de céder, mais, comme il n'y a pas eu d'audience, il n'y a pas eu de ci, il n'a pas eu de ça, puis on les suspend, peut-on au moins assujettir le tout à la procédure normale du ministère des transports, qui implique un peu de monde dans le décor, avant de procéder à vendre les biens? je comprends que là c'est plus technique, c'est vraiment politique, mais c'est à partir d'une politique du ministère.

M. Vallières: II importe entre autres, M. le Président, de mentionner que, si le tracé se retrouve là où il est présentement, dans le corridor que nous utilisons, c'est suite à une recommandation de la Commission de protection du territoire agricole du Québec, qui nous a demandé de nous rapprocher au maximum de la réserve, et l'objectif que nous poursuivons, c'est qu'au maximum on puisse conserver la vocation des terres qui sont situées entre le tracé et la réserve. C'est l'objectif que nous poursuivons. Maintenant, je pense que Me Drolet vous indiquait la façon dont on va procéder pour liquider ces parcelles qui seraient acquises, mais toujours en fonction de l'objectif de poursuite de la vocation actuelle du territoire sur lequel on est.

Il y a l'article 15 qui va regrouper ça tantôt, qui va recouper cette question-là également.

M. Chevrette: C'est correct. Allez-y.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 4: "Les articles 5 à 12 s'appliquent à toute expropriation autorisée par la présente loi et pour laquelle aucun avis d'expropriation n'a été signifié en application de l'article 40 de la Loi sur l'expropriation (L.R.Q., chapitre E-24) avant le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi). "Sauf disposition contraire de la présente loi, le titre II de la Loi sur l'expropriation ne s'applique pas à une telle expropriation." M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, il importe par cette disposition de s'assurer que les articles 5 à 12 du projet, en ce qu'ils prévoient des mesures exceptionnelles, ne vont s'appliquer qu'aux expropriations qui seront commencées à l'entrée en vigueur de la présente loi. Aux extrémités du tronçon projeté, des expropriations sont déjà en cours, pour lesquelles il y a lieu de continuer d'appliquer les procédures de la Loi sur l'expropriation. Le second alinéa, quant à lui, prévoit l'exclusion du titre II de la Loi sur l'expropriation, puisque les articles 5 à 12, par leur contenu souvent incompatible, se trouvent à écarter implicitement les dispositions prévues dans ce titre.

M. Chevrette: Combien y-a-t-il d'expropriations en cours, par rapport à celles qui pourraient venir, en proportion?

M. Vallières: Bon, alors on m'indique qu'il y a 100 expropriations qui ont été faites sous la loi actuelle, non pas la loi spéciale, dont 80 ont été complétées, donc 20 qui resteraient à transiger en fonction de la loi spéciale. La loi spéciale comme telle, que nous avons devant nous, vise quelque 65 expropriations.

M. Chevrette: Est-ce qu'il y en a qui contestent encore le droit d'expropriation, dans les 20?

M. Vallières: Non, il n'y a pas de contestation du droit d'expropriation. Il y a certaines discussions pour les indemnités, par ailleurs, et tantôt on va retoucher ça dans d'autres paragraphes du projet de loi.

M. Chevrette: C'est beau.

Le Président (M. Cannon): Ça va pour l'article 4? L'article 4 est donc adopté. L'article 5: "L'expropriation commence par le dépôt, au bureau d'enregistrement de la division où sont situés les immeubles et droits réels immobiliers à exproprier, d'un plan général de ces biens signé par un arpenteur-géomètre. Ce plan doit être accompagné d'une description sommaire et d'une évaluation globale des immeubles et droits réels immobiliers à exproprier. "La description sommaire contient la mention des numéros de lots sur lesquels des droits sont acquis par expropriation, la nature de ces droits ainsi que la superficie sur laquelle porte l'expropriation. "Le ministre peut, en tout temps, modifier le plan et les descriptions déposés; toutefois, il ne peut retirer tout ou partie des documents déposés concernant un bien ou y apporter d'autres modifications après le transfert de

propriété de ce bien. "une copie de tout document déposé au bureau d'enregistrement doit être déposée auprès de la chambre de l'expropriation de la cour du québec." m. le ministre. (17 h 10)

M. Vallières: M. le Président, le fait d'initier la procédure d'expropriation par le simple dépôt d'un plan général des biens à exproprier, accompagné d'une description sommaire et d'une évaluation globale de ces biens, a pour effet d'éliminer tous les délais relatifs à la signification et à la contestation de l'avis d'expropriation. Il apparaît nécessaire, en raison des aléas reliés à toute la procédure, même régulière, d'expropriation, de permettre à l'expropriant de pouvoir modifier le plan initialement déposé et même de lui permettre de ne plus retenir le bien exproprié, pour autant que le transfert de propriété n'ait pas eu lieu. Il s'agit ici de la procédure de désistement à l'égard de l'expropriant qu'autorise la Loi sur l'expropriation, mais sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'autorisation de la Chambre de l'expropriation.

Quant au troisième alinéa, il va de soi que la Chambre de l'expropriation puisse être saisie des plans, des descriptions et évaluations des biens à exproprier en vertu du présent projet de loi, puisqu'elle aura, cette Chambre de l'expropriation, à fixer l'indemnité définitive.

M. Chevrette: M. le Président, je n'ai pas de question.

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Alors, ça va? Donc, l'article 5 est maintenant adopté.

L'article 6. "Le ministre dépose, pour le compte de l'exproprié, au greffe de la Cour supérieure du district où est situé l'immeuble ou le droit réel immobilier à exproprier, une indemnité provisionnelle d'au moins 70 % de l'évaluation municipale de ce bien ou, si le ministre le juge à propos, d'au moins 70 % de l'évaluation qu'il en a faite. "Le protonotaire de la Cour supérieure délivre au ministre un récépissé du document de l'indemnité provisionnelle; le récépissé mentionne le numéro de lot correspondant au dépôt de l'indemnité et le nom de l'exproprié pour le compte duquel ce dépôt a été effectué. Le protonotaire remplit en outre les obligations prévues au premier alinéa de l'article 53.15 de la Loi sur l'expropriation." M. le ministre.

M. Vallières: alors, le dépôt de l'indemnité provisionnelle au greffe de la cour supérieure et la norme de 70 % de la valeur des biens sont déjà prévu dans la loi actuelle. toutefois, en raison de l'urgence et de l'expertise du ministère en matière d'évaluation, il n'y aura pas lieu de tenir compte, dans certains cas, de l'évaluation municipale qui, parfois, en matière agricole plus particulièrement, s'avère inférieure à celle proposée par le gouvernement. Or, les biens visés par le présent projet sont, pour la plupart, des terres agricoles.

La délivrance d'un récépissé par le protonotaire s'avère d'abord une mesure de preuve qui aura aussi un effet important, soit celui de transférer la propriété du bien à exproprier à la couronne par le seul enregistrement de ce récépissé. C'est pourquoi le récépissé doit faire mention du numéro de lot, du montant de l'indemnité provisionnelle et du nom de l'exproprié. Enfin, il est également prévu que le protonotaire doit aussi accomplir les obligations prévues par la loi actuelle, c'est-à-dire celles, en l'espèce, relatives aux charges grevant les immeubles expropriés, en particulier les taxes foncières.

Le Président (M. Cannon): Juste avant de continuer, je demanderais aux collègues de vouloir poursuivre leur caucus à l'extérieur de la commission plénière, parce qu'on a de la misère à comprendre. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai une question. Je voudrais savoir pourquoi vous avez enlevé la notion d'évaluation municipale qu'on retrouve dans la Loi sur l'expropriation.

M. Vallières: Un peu, comme je l'indiquais...

M. Chevrette: Parce que, dans l'avant-projet, il me semblait qu'on était... À toutes fins pratiques, si vous décidez que vous jugez trop cher une ferme... Vous décidez vous autres mêmes que c'est trop cher. Vous faites faire votre évaluation à vous. Il m'apparaH que, maintenant, les municipalités ont toutes des rôles d'évaluation scientifiques; c'est très sérieux. C'était un paramètre qui était connu et qui figure dans la Loi sur l'évaluation municipale, alors que vous l'enlevez dans le projet final.

M. Vallières: En fait, ce qu'on introduit ici, c'est une disposition où le ministre a le choix. Il peut choisir entre l'évaluation municipale ou celle que le ministère a établie. La coutume ou la façon dont on procède... L'expertise acquise par le ministère nous indique que, quand ce sont des terres agricoles, de façon générale, ou bien la valeur municipale est beaucoup trop réduite, ce qui fait que notre offre de 70 % ne serait pas bonne, et là, on préfère choisir celle du ministère parce qu'elle est plus élevée, ou bien, dans d'autres cas, pour question fiscale, la valeur de la ferme est trop forte par rapport à sa valeur réelle. À ce moment-là, quand arrive le versement de l'indemnité finale, si on se basait sur l'évaluation municipale, l'exproprié devrait rembourser un montant. Donc, on essaie plutôt d'y aller en fonction de la formule la plus

avantageuse pour l'exproprié. C'est la raison pour laquelle on introduit ici le double choix.

Le Président (M. Cannon): Ça va. Donc, l'article 6 est adopté? Adopté.

L'article 7. "Le ministre transmet, par la poste ou par le moyen qu'il juge le plus approprié, un avis à l'exproprié de la procédure d'expropriation contenant: "1° les règles de transfert de propriété prévues à l'article 8; "2° une demande à l'exproprié de déclarer par écrit au ministre les noms et adresses de ses locataires, la nature, la date, la durée et le loyer de chaque bail ainsi que les noms et adresses des occupants de bonne foi et les conditions auxquelles ils occupent les lieux."

M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, je ne demanderai pas au ministre de me l'expliquer, il est tellement clair, sauf que je lui demanderais d'apporter un amendement: Qu'il écrive au moins "par poste recommandée". Parce que, avec les problèmes qu'on peut vivre, il me semble que c'est un minimum de s'assurer que les gens l'aient reçu. C'est quasiment un non-sens d'écrire "poste" de même. On a assez de problèmes, comme députés, avec la poste. Il me semble qu'on peut comprendre ça tout de suite.

Le Président (M. Cannon): Au fait, M. le leader...

M. Chevrette: Je peux comprendre les objectifs, mais...

Le Président (M. Cannon): Si j'ai bien compris, M. le leader, j'aurais pu m'empêcher de le lire, parce qu'il était très clair.

M. Chevrette: Oui, effectivement. Mais je pense que, pour les fins du procès-verbal, je comprends.

Le Président (M. Cannon): Non, non. Ça va. M. Chevrette: Mais là...

M. Vallières: M. le Président, on serait d'accord avec un ajout...

Le Président (M. Cannon): Oui.

M. Vallières:...qui serait "par poste recommandée ou certifiée".

M. Chevrette: Ou certifiée. C'est correct. Le Président (M. Cannon): O.K.

M. Vallières: Alors, nous allons faire une rédaction.

M. Chevrette: D'accord. On va la mettre en suspens et on l'ajoutera tantôt.

Le Président (M. Cannon): Alors, on va suspendre cet article-là en attendant le nouvel amendement.

Une voix: Oui, oui.

Le Président (M. Cannon): Alors, on peut procéder maintenant à l'article 8. "La couronne du chef du Québec devient propriétaire du bien exproprié par l'enregistrement, par dépôt au bureau d'enregistrement de la division où est situé ce bien, du récépissé du dépôt de l'indemnité provisionnelle et la possession de ce bien est immédiatement dévolue au ministre."

Au cas de résistance à la prise de possession, l'article 56 de la Loi sur l'expropriation s'applique."

M. le ministre.

M. Vallières: Cet article, M. le Président, s'inspire d'anciennes dispositions du Code de procédure civile, à la différence que le transfert des propriétés et la prise de possession ne peuvent être effectifs qu'après le dépôt de l'indemnité provisionnelle et l'enregistrement du récépissé de dépôt, de manière à éviter de placer les expropriés dans un embarras financier.

La propriété, étant dévolue à la couronne, suivant le droit public, il convient de préciser qu'il s'agit de la couronne du chef du Québec en la manière prévue dans les autres lois. Voir article 4 de la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Au second alinéa, il importe de prévoir qu'une résistance à la prise de possession puisse être contestée devant les tribunaux suivant la procédure d'urgence prévue par la loi actuelle.

M. Chevrette: J'aurais le goût de faire un long discours sur cet article, M. le Président, parce que, ici, c'est clairement enlever aux individus le droit de contester le droit à l'expropriation. Mais, qui plus est, on prévoit, par exemple, que les individus ne pourraient pas contester la légalité de cette législation par rapport à la constitution.

On enlève tout droit de contester. C'est ce que je comprends. Le transfert est automatique. En tout cas, c'est de même qu'on en fait la lecture. Puis, les deux dernières lignes en haut, l'article 56, je m'abstiendrai, pour le moment, de tout commentaire.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Chevrette: Parce que l'article 56, si on le connaît bien, c'est pour empêcher que se produisent des choses qui sont en action présentement.

M. Vallières: m. le président, on m'indique, au niveau légal, que cet article ne vient pas enlever la possibilité de contester le droit à l'expropriation.

M. Chevrette: Vous êtes en train de me dire, M. le ministre... Je vais vous poser la question bien comme il faut. Êtes-vous en train de me dire que le droit de contester l'expropriation de 30 jours est toujours dans la loi, est toujours possible? À moins qu'on ne fasse pas la même lecture.

M. Vallières: Non, non. Il n'y a plus de délai de 30 jours.

M. Chevrette: Donc, si on enlève le délai du droit à l'expropriation, y a-t-il un droit de contester le droit d'expropriation? Ça serait... Depuis quand donne-t-on 30 jours à quelqu'un pour contester un droit et qu'on dit: Dorénavant, tu n'a plus 30 jours? Je conclus, à moins que ma méthodologie du travail intellectuel soit à l'envers, que, si on m'enlève le délai, c'est bien qu'on vient de m'enlever le droit. Et, à ce moment-là, si je suivais le raisonnement encore plus loin, si je peux contester le droit à l'expropriation, pourquoi votez-vous une loi?

M. Vallières: alors, me bilodeau, qui m'accompagne, pourra répondre avec plus de détails. c'est un point important. je pense qu'on doit y répondre.

Le Président (M. Cannon): Est-ce qu'on a le consentement pour écouter Me Bilodeau?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Cannon): Oui. Alors allez, madame.

Mme Bilodeau (Anne-Marie): Alors cette disposition-là qui vient déclarer la propriété...

M. Chevrette: Je n'ai pas compris, madame, je m'excuse.

Mme Bilodeau: ...qui vient déclarer la propriété...

M. Chevrette: Un instant. J'entends beaucoup de "chuchotages". Je m'excuse l'acoutisque n'est pas bon aujourd'hui dans cette Chambre.

Le Président (M. Cannon): Pourriez-vous peut-être baisser un peu le micro devant vous, madame? Bon, voilà!

Mme Bilodeau: Alors cette disposition, qui vient déclarer la propriété à la couronne suivant la procédure de dépôt au bureau d'enregistrement du récépissé du dépôt de l'indemnité provision- nelle, fait simplement déclarer la propriété à un moment bien précis. Ça n'empêche pas l'exproprié de contester le droit à l'expropriation, que ce soit pour un motif de droit administratif, de droit constitutionnel suivant les chartes des droits et libertés. Il pourrait toujours présenter, en principe, des recours qui sont actuellement connus, les recours extraordinaires, les actions en nullité, pour des motifs qu'on connaît...

M. Chevrette: ...de 30 jours.

Mme Bilodeau: II n'y a pas de délai comme nous connaissons, les 30 jours dont vous faites mention, dans la loi.

M. Chevrette: L'article 44 existe toujours? Mme Bilodeau: Non. M. Chevrette: Donc...

Mme Bilodeau: la loi spéciale a pour effet d'écarter le titre ii de la loi sur l'expropriation, à l'exception des articles dont on verra plus loin qu'on les rend applicables.

M. Chevrette: Mais si l'exproprié conserve le droit de contester, non pas par la Loi sur l'expropriation, mais de contester par des mesures extraordinaires - c'est ça que vous me dites, prendre une injonction, prendre un bref ou bien en appeler devant la Cour supérieure sur un jugement déclaratoire ou je ne sais pas trop quoi, rendant la loi nulle et inhabile à cause de la constitution canadienne - je me demande à ce moment-là quelle est l'utilité de faire sauter un article par lequel, au moins, vous connaissiez d'avance la procédure qui avait lieu. Je ne comprends pas.

Mme Bilodeau: C'est que ça nous permet quand même de réduire les délais procéduraux. Je m'explique. Par la loi actuelle, il en prend un minimum de 109 jours entre la signification d'un avis d'expropriation et la prise de possession. C'est un délai minimal, si on compute tous les délais que nous avons dans la loi. La procédure que vous avez ici, c'est une procédure beaucoup plus réduite, beaucoup plus simplifiée qui nous permettrait de prendre possession plus rapidement. C'est évident qu'on ne peut pas, sur un plan strictement de chartes prépondérantes, écarter les recours.

M. Chevrette: M. le Président, je demande une suspension d'une minute.

Le Président (M. Cannon): Oui, nous allons suspendre pour des questions hydrauliques.

(Suspension de la séance à 17 h 24)

(Reprise à 17 h 28)

Le Président (M. Cannon): Alors nous en étions... M. le ministre.

M. Vallières: Nous en étions à l'article 8, M. le Président. Me Bilodeau venait d'expliquer la justification de l'article 8 comme tel, en réponse au député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, j'aurais une remarque. Je comprends l'explication de Me Bilodeau, mais je dois vous dire que la loi vient donc faire encore bien plus mal au citoyen exproprié, parce que la procédure qui lui est offerte, c'est par la voie des tribunaux civils et non plus par le processus d'expropriation contenu dans la Loi sur l'expropriation. Donc, quand on allait devant le tribunal d'expropriation, le notaire, le procureur, les évaluateurs étaient payés à même le processus d'expropriation normal dans la loi, et là vous laissez tout l'odieux de la contestation à l'individu, à ses frais. Est-ce que je fais erreur?

Le Président (M. Cannon): Me Bilodeau.

Mme Bilodeau: Ce sont aussi les règles usuelles, c'est-à-dire que la contestation d'un droit à l'expropriation, c'est toujours présenté devant la Cour supérieure, aux termes de la Loi sur l'expropriation, par exemple. La chambre de l'expropriation a compétence pour fixer les indemnités et entendre les experts, évaluateurs, arpenteurs, etc. C'est toujours aux frais de l'exproprié, sauf en ce qui concerne l'indemnité. C'est aux frais de l'exproprié.

Le Président (M. Cannon): M. le leader. Ça va?

M. Vallières: l'article 8, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 8 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 9: "Le ministre doit, dans les 30 jours de la réception d'un avis l'informant qu'un locataire ou un occupant de bonne foi occupe le bien exproprié, déposer, pour le compte de celui-ci, au greffe de la Cour supérieure du district où est situé ce bien un montant forfaitaire équivalant à trois mois de loyer selon l'évaluation de la valeur locative du bien exproprié faite par le ministre, auquel peut s'ajouter, dans le cas d'une telle exploitation agricole, commerciale ou industrielle, un montant fixé par le ministre." M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, il convient de prévoir que les locataires et occupants de bonne foi puissent aussi être indemnisés provisoirement d'une somme forfaitaire de trois mois dans le cas d'un bail d'habitation et, lorsqu'il s'agit d'un bail commercial, agricole ou industriel, que l'exploitant puisse recevoir une indemnité provisoire plus élevée en attendant que soit fixée l'indemnité définitive.

M. Chevrette: Fixée par le ministre? Avez-vous des explications à donner sur... Pourquoi vous vous donnez... Pourquoi ça ne serait pas fixé par le tribunal, par exemple, si ça va au tribunal?

M. Vallières: C'est un type d'avance, un dépôt qui est fait officiellement. C'est un avantage dont jouit l'exproprié et même, ici, on l'ajoute, on le prévoit pour les locataires et les occupants de bonne foi.

La loi actuelle prévoit trois mois de loyer automatique qui sont versés lors du dépôt sans aller au tribunal. Donc, ça devient plus avantageux, cette proposition, parce que, en plus du procédé que je viens de vous expliquer, compte tenu du caractère exceptionnel, on donne une avance qui est encore plus importante que celle généralement versée.

M. Chevrette: Si vous prenez l'article 53.13 de la loi actuelle, quel lien faites-vous entre l'article 53.13 et votre article? Il me semble qu'on vise à peu près les mêmes genres d'entreprises?

M. Vallières: Me Bilodeau va pouvoir compléter ma réponse ou encore Me Michel Leclerc, qui est un spécialiste en la matière.

Le Président (M. Cannon): Alors, pour écouter Me Leclerc, il y a consentement. Alors, Me Leclerc, vous pouvez procéder.

M. Leclerc (Michel): L'article 53.12 vise les baux résidentiels; l'article 53.13 vise les commerçants, les industries et les exploitations agricoles et ne vise pas simplement les locataires. Il vise aussi les propriétaires. À défaut d'entente, on va devant la chambre pour l'article 53.13. Mais, lorsqu'on a un locataire résidentiel, en matière d'expropriation, on peut déposer trois mois de loyer comme indemnité provisionnelle, un montant forfaitaire équivalant à trois mois de loyer. On n'a pas besoin de s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire ça.

M. Chevrette: À l'article 53.13, on dit: Malgré les articles 53.11 et 53.12.

M. Leclerc (Michel): Oui, en matières commerciale, agricole et industrielle, si on n'a pas d'entente avec ces gens-là, on doit s'adresser

à la Chambre pour foire fixer. Actuellement, l'article 9 prévoit justement que, si on est en matières agricole, industrielle ou commerciale, on va ajouter un montant pour ces gens-là pour sauver les délais de la Chambre.

M. Chevrette: Je comprends. Mais il reste que là c'est un autre pouvoir discrétionnaire que le ministre se donne alors que, dans les mêmes types d'exploitation à l'article 53.13, vous dites: C'est la Chambre de l'expropriation qui fixe le montant forfaitaire des trois mois.

M. Leclerc (Michel): L'article 53.13 est d'application assez restreinte. Il s'applique uniquement dans les cas où il n'y a pas d'entente avec les expropriés; dans la grande majorité des cas, il y a des ententes au niveau de l'indemnité provisionnelle. C'est uniquement dans des cas très exceptionnels qu'on va devant la Chambre, dans ces cas-là où il n'y a pas eu d'entente.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: On vient de m'indiquer ici que c'est une mesure d'atténuation finalement. Le ministre vient bonifier ce qui était déjà prévu, les trois mois de loyer.

M. Chevrette: Mais là il y a quelque chose qui n'est pas clair. Dans le cas du locataire, l'article 53.12 est très clair. Je pense qu'on peut le relire: Dans les cas du locataire et de l'occupant de bonne foi, l'indemnité provisionnelle est un montant forfaitaire équivalant à trois mois; c'est fixé, ça. Quand vous tombez à l'article 53.13, malgré ça, malgré le fait que vous ayez les articles 53.11 et 53.12, c'est dit que dans le cas d'une entreprise spécifique, c'est la Chambre qui fixe. Quand vous écrivez votre article 9, vous faites une amalgamation des articles 53.12 et 53.13 et vous vous donnez un pouvoir discrétionnaire sur le tout. J'essaie de voir la logique et je ne la comprends pas.

Le Président (M. Cannon): Me Leclerc.

M. Leclerc (Michel): Ceci évite sûrement les délais d'application. Si on avait à appliquer un article comme 53.13, il y aurait tous les délais pour s'adresser à la Chambre de l'expropriation.

M. Chevrette: Ce n'est pas ça que vous m'avez répondu tantôt. Vous m'avez dit que vous étiez un spécialiste en droit. Donc, en tant que spécialiste de droit, vous ne m'avez pas parlé de - délai dans votre première réponse. Là, vous venez de me donner une raison, c'est les délais. Ce n'est pas ça que je vous avais posé comme question. Je ne vous ai pas demandé de patiner, j'ai demandé pourquoi les articles 53.12 et 53.13 étaient d'une clarté... Dans les cas de location, c'est le forfaitaire. Dans les cas d'une entreprise, vous allez devant la Chambre et vous vous faites fixer. Vous voulez sauver des délais devant la Chambre juste pour établir un quantum provisionnel?

M. Vallières: M. le Président, Me Drolet, à ma droite, va tenter d'éclaircir la situation. Je pense que c'est important que le député de Joliette comprenne très bien ce qu'on veut signifier à l'intérieur de cet article.

M. Drolet: Les règles actuelles font en sorte que, pour les baux d'habitation, la loi fixe forfaitairement à trois mois de loyer l'indemnité provisionnelle. Ça ne bouge pas, c'est trois mois de loyer. Si vous avez un locataire qui a non pas un bail d'habitation, mais un bail commercial, par exemple, qui exploite un commerce, là vous vous prévalez de l'article 53.13 et vous allez devant la Chambre de l'expropriation pour faire fixer l'indemnité provisionnelle, dans des cas qui, dans la pratique, s'avèrent très rares parce que, effectivement, l'expropriant s'entend avec l'exproprié.

Lorsqu'on prend, par exemple, un commerce, qu'on doit le déplacer, vous comprendrez sûrement que, effectivement, il y a des dommages beaucoup plus considérables que s'il s'agit simplement d'une maison d'habitation. Pour vous reloger en tant que locataire, c'est plus facile de le faire que si vous voulez reloger un commerce qui, lui, a tout son environnement et sa clientèle. Alors, l'indemnité, à ce moment-là, la loi actuelle prévoit qu'elle est fixée par le Tribunal de l'expropriation. L'indemnité provisionnelle.

Pour ne pas avoir à nous présenter devant le Tribunal ou la Chambre de l'expropriation, dans le cas où nous avons à déplacer un commerce ou une exploitation agricole ou industrielle, en plus des trois mois de loyer, parce que les trois mois de loyer, dans ce cas-là, c'est une somme insuffisante pour couvrir les dommages ou les déboursés immédiats du locataire, nous prévoyons l'addition d'un montant additionnel qui sera déterminé par le ministre plutôt que par la Chambre, parce que le ministre est conscient qu'une exploitation commerciale entraîne des déboursés immédiats beaucoup plus considérables que le déplacement d'une personne qui habite un loyer.

Mais, au lieu d'être la Chambre qui fixe le montant, dans ce cas-là ce sera le ministre. Il y a effectivement un pouvoir discrétionnaire qui est donné, mais c'est que dans la plupart des cas, dans la pratique, on ne se rend même pas à la Chambre de l'expropriation parce qu'il y a entente entre l'expropriant et l'exproprié. Mais il s'agirait qu'on ait un cas où on devrait aller à la Chambre de l'expropriation pour le fixer, parce qu'on ne s'entend pas pour une différence de 1000 $ ou 2000 $, où on serait obligé d'aller à la Chambre de l'expropriation, pour retarder les

travaux. On dit que c'est le ministre, à ce moment-là, qui va le fixer.

M. Chevrette: Est-ce que vous êtes après me dire que ça retarderait les travaux? (17 h 40)

M. Drolet: Ça pourrait éventuellement retarder les travaux.

M. Chevrette: à cause de quoi, quand vous avez fait le transfert de propriété, que vous avez donné 70 % et que vous vous êtes...? en quoi?

M. Drolet: Oui, mais, là, c'est que nous déplaçons le locataire. Nous avons donné l'indemnité provisionnelle sur le bien exproprié au propriétaire, mais le locataire, lui, il faut s'en occuper aussi. Comme il a des déboursés, dans le cas d'un bail d'habitation, pour se reloger, on lui verse trois mois. Dans le cas d'un bail pour une exploitation commerciale, on lui dit: Ça va être tes trois mois, mais on va t'ajouter un montant supplémentaire qui sera fixé par le ministre et non pas par la Chambre, comme on le prévoit à l'heure actuelle, parce que, pour aller plus vite, pour accélérer le processus, c'est le ministre qui va déterminer le montant à verser. Je rappelle que, comme indemnité provisionnelle, ça ne change rien à l'indemnité finale qui, elle, sera fixée par la Chambre de l'expropriation.

M. Vallières: Ce qu'on va voir à l'article 11, si ma mémoire est bonne.

M. Drolet: C'est ça.

M. Chevrette: Donc, la réponse, c'est celle-là que je dois prendre.

M. Vallières: Oui. M. Chevrette: O.K.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 9 est adopté?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 10: "Lorsque le bien exproprié est grevé de droits réels enregistrés, ceux-ci sont purgés par l'enregistrement du récépissé du dépôt de l'indemnité provisionnelle; il en est de même des actions en résolution, en revendication ou autres actions réelles qui sont transformées en créances personnelles contre l'exproprié. "Les effets de toute clause de déchéance du terme, y compris la clause de dation en paiement et la clause résolutoire, sont éteints par l'enregistrement du récépissé du dépôt. "Le registrateur est tenu de radier les droits purgés. Le protonotaire doit distribuer l'indemnité provisionnelle de la manière prévue à l'article 53.15 de la Loi sur l'expropriation et l'article 53.16 de cette loi s'applique à cette distribution."

M. le ministre.

M. Vallières: cet article, m. le président, reprend substantiellement, en les adaptant au contexte d'une procédure spéciale, les articles 53.17 et 55.2 de la loi actuelle, qui, tout en s'avérant essentiels, constituent des mesures tout à fait normales et usuelles en matière d'expropriation.

M. Chevrette: M. le Président, juste une petite remarque. Quand la procédure de la loi actuelle fonctionne, on peut se permettre de s'y référer. Pourquoi ne pas s'être référé, tantôt, dans le cas de la cession des biens, à la procédure existante, à ce moment-là?

M. Vallières: Me Drolet aurait le goût de vous répondre, sauf que je pense qu'on a clarifié cet article-là quand on est passés dessus. Je peux peut-être le demander quand même. Si ça vous...

M. Chevrette: non. c'était plutôt une allusion. je n'ai pas demandé un renseignement technique, c'est une allusion politique que j'ai faite.

Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 10 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 11: "À défaut d'entente avec l'exproprié sur l'indemnité définitive dans les 90 jours du transfert de propriété, le ministre ou l'exproprié peuvent s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer cette indemnité. "Le locataire ou l'occupant de bonne foi d'un bien exproprié peuvent s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer l'indemnité qui leur est due en raison des dommages résultant directement de l'expropriation. "Les articles 58, 59, 64, 67, 67.1 et 68 de la Loi sur l'expropriation s'appliquent à la fixation de l'indemnité, compte tenu des adaptations nécessaires; pour l'application de l'article 64, la réserve qui y est prévue en est une aux dispositions des articles 4 à 12 de la présente loi; pour l'application de l'article 67.1, l'expression "avis d'expropriation" désigne l'avis prévu à l'article 7 de la présente loi." M. le ministre.

M. Vallières: Oui, alors, ayant exclu l'application du titre II de la Loi sur l'expropriation, il y a lieu de préciser que la Chambre de l'expropriation constitue néanmoins le tribunal compétent aux fins d'entendre toute partie

intéressée concernant une indemnité définitive à être versée à la suite d'une expropriation effectuée en vertu de la présente loi. Il y a lieu également de se référer aux articles pertinents de la Loi sur l'expropriation pour la fixation de l'indemnité définitive, de manière à garantir aux expropriés le droit à une juste indemnité.

M. Chevrette: Vous avez ajouté l'article 64 par rapport à votre avant-projet que vous nous aviez envoyé. Je suppose que c'est parce que vous avez l'intention de vous servir des biens meubles déjà acquis par le ministère des Transports pour faire des échanges avec les biens meubles que vous allez acquérir en vertu de la présente loi.

M. Vallières: ...D'immeubles, non pas de biens meubles.

M. Chevrette: J'aurais pu dire "immeubles", M. le ministre. C'était juste pour vous montrer que cette fois-ci, ça joue dans le sens inverse de ce que je vous demandais tantôt. Il y a un petit peu de cohérence de notre côté, aussi, dans l'étude du projet de loi.

M. Vallières: On recherche tous les moyens les plus efficaces possible d'arriver à la reconstruction de la route le plus rapidement possible.

Le Président (M. Cannon): Alors, ça va, M. le leader?

M. Chevrette: Oui. Dans le droit actuel - là, ma question, c'est vraiment à un avocat - est-ce qu'un type peut y aller... Au tout début, à l'article 11, on a 90 jours. Parce que là, si j'ai bien compris, il n'y a aucune possibilité d'y aller avant 90 jours. Est-ce qu'il peut y aller en bas de 90 jours dans le droit actuel? Me... va nous le dire.

M. Vallières: on cherche, là, mais on m'indique qu'actuellement, en vertu de la présente loi, c'est seulement après un délai de 90 jours. mais, auparavant, c'eût été possible avant 90 jours.

M. Chevrette: C'était possible avant? M. Vallières: Oui.

M. Chevrette: Mais pourquoi mettre 90 jours dans cette loi-ci, alors que, déjà, on fait sauter un peu tout, on suspend un peu tout? L'individu, au moment où lui pourrait avoir un avantage, au moins à garder, quant au délai, la Loi sur l'expropriation, pourquoi vous... Vous auriez pu mettre au moins 60, je ne sais pas, quant à...

M. Vallières: L'indemnité définitive n'empêche nullement la réalisation des travaux.

M. Chevrette: ii ne peut pas aller devant la chambre avant 90 jours, puis dans 90 jours vos travaux seront finis, si tout roule sur des roulettes! vous auriez pu mettre 60!

Une voix: Ça n'affecte pas les travaux.

M. Chevrette: Mais en quoi l'indemnité va affecter les travaux? Vous lui avez envoyé un chèque de 70 %...

M. Vallières: Non. Définitivement, ça n'affecte pas les travaux.

M. Chevrette: Bon, bien, pourquoi, à ce moment-là, le pénaliser à 90 jours, si l'ancienne loi lui donnait la possibilité d'y aller avant? Là, vous créez l'obligation de ne pas y aller, si j'ai bien compris.

M. Vallières: M. le Président, nous aurions aimé... En tout cas, on peut mettre 60, on n'a pas d'objection, sauf qu'on pense qu'on peut étendre le délai de négociation sur 90 jours.

M. Chevrette: Oui, mais là, M. le ministre, on va bien se comprendre. La loi de portée générale ne crée aucun problème par rapport à l'exécution des travaux. On se comprend? Bon. À partir de ça, au moment où l'individu est déjà bousculé par les événements, on lui enlève une prérogative qui n'est pas reliée aux travaux. Il me semble qu'on pourrait ou laisser le pouvoir qui était dans la loi de portée générale d'expropriation, ou rétrécir le délai quant à la permission au moins d'y aller. Il me semble que, là, c'est superfétatoire, comme disait Camille Morin.

Le Président (M. Cannon): Claude Morin ou Camille Laurin?

M. le ministre.

M. Pagé: Superfétatoire! Les lettres de mon ami Guy qui sortent.

Mme Robillard: La culture!

M. Pagé: Tu n'as pas siégé, toi, avec Camille Laurin.

Le Président (M. Cannon): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: On n'avait pas suspendu? Le Président (M. Cannon): Non.

M. Chevrette: Peut-être que je devrais faire une suggestion à Me Leclerc. Si on disait: À défaut d'entente, n'importe qui pourra se présenter au tribunal, ça donne exactement la portée du droit qui est dans la loi générale. On pourrait

peut-être le rédiger de cette façon-là et... Moi, personnellement, je n'accepte pas - et je veux bien me faire comprendre - qu'on pénalise potentiellement un individu quand on sait que ce n'est pas relié, en aucune façon, aux gestes que l'on pose. Il me semble qu'on pourrait peut-être le mettre en suspens et demander une rédaction autre que celle-ci.

Le Président (M. Cannon): Alors, M. le ministre, est-ce que vous consentez à ce que nous suspendions l'article 11?

M. Vallières: Non. Il faudrait qu'on l'explique maintenant. On a des explications.

Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord.

M. Vallières: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: Me Bilodeau va vous donner quelques explications sur ce délai de 90 jours requis dans la loi.

Mme Bilodeau: On m'informe qu'en pratique le délai de 90 jours est justifié dans la mesure où, pour s'adresser à la Chambre de l'expropriation pour faire fixer l'indemnité, ça nécessite des rapports d'évaluation d'évaluateurs agréés, il y a un temps qui est requis et il n'est pas trop de passer à 90 jours, par rapport à un délai de 60 jours, pour obtenir ces rapports d'experts là. C'est la situation pratique dont on m'informe.

Le Président (M. Cannon): M. le leader.

M. Chevrette: Mme Bilodeau, vous savez pertinemment que ça ne répond en rien à ma question ou à mes remarques. J'ai posé une question. Me Leclerc ne l'a pas dit au micro parce qu'il n'a pas répondu, mais je lui ai demandé si c'était relié aux travaux, si ça pouvait nuire aux travaux. Il a dit: Non, ce n'est pas relié comme ça aux travaux. Et il fart encore signe que non. (17 h 50)

À partir de là, vous allez m'expliquer, à part que sur le plan politique... Et ça a paru que ce n'était pas sur le plan du droit que vous avez répondu: On m'informe que, il paraît que... Ce n'est pas ça, ma question. La question est fondamentale. Pourquoi, dans une loi d'exception, une loi spéciale, une loi extraordinaire, on vient limiter un individu qui a un droit dans la loi de portée générale qui, elle, n'a pas de limite? Ne m'expliquez pas ça par: On m'informe que les délais, en pratique... Sur le plan du droit, oui ou non, est-ce que vous limitez la loi de portée générale par votre loi d'exception? C'est ça, la question.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, le député de Joliette est convaincant. C'est la preuve que, des fois, ça peut être utile d'argumenter. Alors, on m'indique qu'on pourrait simplement rayer ce délai de 90 jours. Je prends pour acquis que ça n'a aucun effet sur nos travaux à être effectués. Alors, je pense qu'on pourrait...

M. Chevrette: Ce n'est pas la question que j'ai posée à Me Leclerc. Ça m'apparaît un petit peu outrancier, même, pour l'individu qui a un pouvoir de portée générale et qui se le voit limité dans une loi d'exception alors que ça n'a aucune incidence sur l'objet même de la législation. C'est ça que...

M. Vallières: M. le Président, on prépare l'amendement. On va suspendre l'article. On va le soumettre tout à l'heure.

Le Président (M. Cannon): D'accord. Alors, l'article 11 est suspendu. On passe à l'article 12: "Lorsque le dépôt de l'indemnité provisionnelle n'a pas suffi pour acquitter les créances garanties par droits réels enregistrés avant l'enregistrement du récépissé de ce dépôt, le ministre peut déposer le solde de l'indemnité au greffe de la Cour supérieure; dans ce cas, le protonotaire continue la distribution de la manière prévue à l'article 53.15 de la Loi sur l'expropriation." M. le ministre.

M. Vallières: Cet article reprend substantiellement l'article 55.3 de la Loi sur l'expropriation. Adopté.

Le Président (M. Cannon): Ça va. Adopté. Article 13: "Pour l'application des dispositions du Code civil du Bas-Canada aux expropriations faites selon les articles 5 à 12 de la présente loi, un renvoi à la Loi sur l'expropriation est un renvoi à la présente loi." Adopté?

M. Chevrette: Un instant.

Le Président (M. Cannon): Non?

M. Chevrette: Ce n'était pas dans l'avant-projet, cet article-là, à moins que je ne m'abuse. Pourriez-vous me donner les motifs de droit pour lesquels on l'a inséré?

M. Vallières: La disposition suivante en est une de concordance, puisqu'il s'avère essentiel qu'un renvoi à la loi actuelle dans le Code civil soit un renvoi au projet de loi qui, en l'espèce, a préséance. C'était nécessaire de l'indiquer. Me Bilodeau pourrait peut-être donner quelques explications additionnelles.

Mme Bilodeau: Étant donné que nous

sommes dans une loi spéciale qui a pour effet d'écarter l'application des lois générales y compris le Code civil... Le Code civil contient quelques dispositions relativement à l'expropriation, lesquelles dispositions, comme l'article 1649 qui est relatif au bail d'imputation, font référence à la Loi sur l'expropriation. Alors, à ce moment-là, on rend applicables certaines dispositions du Code civil et on indique qu'un renvoi à la Loi sur l'expropriation est un renvoi à la présente loi.

Le Président (M. Cannon): Ça va? M. Chevrette: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Cannon): L'article 13 est adopté. L'article 14: "La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme (L.R.Q., chapitre A-19.1) ne s'applique pas à l'égard de toute intervention du gouvernement ou du ministre des Transports au sens de l'article 149 de cette loi et résultant de l'application de la présente loi. Il en est de même de toute intervention d'Hydro-Québec relative à la relocalisation de lignes, postes de transformation ou tout autre équipement pour le transport ou la distribution d'électricité, visée au paragraphe 2° du premier alinéa de l'article 2." M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, il est nécessaire d'écarter l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme en ce qui a trait aux avis d'intervention, afin d'éviter tout ce qui pourrait servir de prétexte à une contestation, d'autant qu'elle porterait sur des points non fondamentaux. Le dimanche 26 août 1990, les maires de la MRC de Roussillon ont été avisés officiellement de nos prochaines interventions. Ils ont exprimé, séance tenante, leur accord par résolution, pressant même le ministre des Transports d'agir dans les meilleurs délais.

M. Chevrette: Ça non plus, ça n'existait pas dans l'avant-projet, à moins que je ne m'abuse. Quand vous dites que vous vous soustrayez de toute la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, "à l'égard de toute intervention du gouvernement et du ministre des Transports au sens de l'article 149 de cette loi et résultant de l'application la présente loi", la présente loi ne va pas seulement jusqu'à faire construire une autoroute; elle vous donne les pouvoirs, et selon votre discrétion, de faire tout ce que vous voulez avec ce que vous acquérez. Est-ce que ce n'est pas une porte ouverte très, très large pour changer même des... Par exemple, Hydro-Québec pourrait instituer un poste de - comment t'appelles ça? - transmission indépendamment de toute négociation avec la MRC ou avec une municipalité. La municipalité pourrait dire: Moi, j'avais conçu dans mon plan d'urbanisme ce qui était là, mais là, vous venez de vous dérober à toute cette loi-là.

Une voix: C'est les lignes.

M. Chevrette: Écoutez, je veux bien lire: "d'Hydro-Québec relative à la relocalisation de lignes, postes de transformation..." Ce n'est pas moi qui l'ai inventé. C'est marqué tel quel là "postes de transformation".

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, des consultations ont déjà été menées auprès du ministère des Affaires municipales relativement à l'article qu'on a ici, à la disposition qui vise finalement à se soustraire à l'application de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. On m'indique également que pour certains équipements auxquels on se réfère, comme ceux d'Hydro-Québec, il était nécessaire, dans le contexte d'une loi spéciale et des délais, là encore, qu'on pourrait encourir, que l'on puisse procéder de la sorte. J'ai néanmoins pris la précaution de soumettre le tout à la MRC de qui dépend finalement l'autorisation requise et qui nous a autorisés, après vérification des intentions du ministère des Transports. On veut tout simplement être très prudent pour éviter que des délais ne soient encourus suite à l'application de cette loi.

Le Président (m. cannon): ça va? donc, l'article 14 est adopté. l'article 15. "la loi sur la protection du territoire agricole (lois refondues du québec, chapitre p-41.1) ne s'applique pas aux aliénations en faveur de la couronne du chef du québec ou en faveur d'hydro-québec, aux lotissements, aux utilisations à des fins autres que l'agriculture et aux autres actes autrement régis par cette loi, s'ils sont faits en vue de la réalisation de travaux, ouvrages ou constructions visés par la présente loi, y compris ceux relatifs à la relocalisation de lignes, postes de transformation ou tout autre équipement pour le transport ou la distribution d'électricité, ou s'ils résultent de leur réalisation."

M. Vailières: Alors, il s'avère nécessaire, en raison de l'urgence de la situation, d'écarter expressément de l'application de la Loi sur la protection du territoire agricole certains actes dont il n'est pas fait mention dans la décision de la Commission relative au tracé de l'autoroute 30, plus particulièrement ceux relatifs - on y a fait allusion précédemment - à la relocalisation des lignes d'Hydro-Québec et aux travaux de drainage qui n'avaient pas été prévus originellement dans l'autorisation obtenue de la CPTAQ. J'ai pris la précaution de demander un avis au président de la Commission qui écrivait à mon collègue ministre délégué à l'Agriculture, aux Pêcheries et à l'Alimentation et qui consent à ce que l'on procède de la façon présente dans le climat d'exception qu'on connaît. (18 heures)

Le Président (M. Cannon): M. le leader.

M. Chevrette: Est-ce que l'avis est un avis public? La semaine passée, en commission parlementaire, il y avait autant de téléphones que d'avis avec la CPTAQ. J'aimerais savoir si vous avez un avis écrit et si vous êtes consentant à le déposer.

M. Vallières: Je peux même vous le lire.

M. Chevrette: Ah bien, ce n'est peut-être pas nécessaire. Il n'y a pas de problème.

M. Vallières: oui, je peux le déposer, oui, il n'y a pas de problème.

M. Chevrette: D'accord.

Le Président (M. Cannon): II y a consentement pour le dépôt.

M. Chevrette: Vous aviez dit tantôt, Me Bilodeau, je crois - peut-être que je fais erreur sur la personne - mais il y a quelqu'un qui a dit que vous aviez reçu au préalable au ministère un avis de la CPTAQ. Est-ce que vous faisiez référence à celui-ci ou aux négociations antérieures sur...

M. Vallières: Non, c'est une négociation antérieure sur le tronçon routier comme tel.

M. Chevrette: Est-ce que cet avis antérieur était écrit ou si c'était un avis verbal?

M. Vallières: C'est une décision, un certificat qui a été émis par la CPTAQ.

M. Chevrette: Mais qui ne tenait pas compte de deux, trois éléments dont vous avez parlé.

M. Vallières: C'est ça, dont les déplacements des lignes et des servitudes concernant le drainage agricole.

M. Chevrette: Est-ce qu'il y a possibilité que vous m'envoyiez les deux ensemble?

M. Vallières: Oui, on peut vous faire parvenir les deux.

Le Président (M. Cannon): Très bien, pour le dépôt de ce document, oui, il y a consentement.

M. Vallières: Celui-ci et l'autre qui va suivre ultérieurement, qu'on n'a pas en notre possession.

Le Président (M. Cannon): Ce sera inscrit au procès-verbal. Alors, est-ce que l'article 15 est adopté, M. le leader?

M. Chevrette: Juste deux minutes.

Le Président (M. Cannon): Oui, d'accord.

M. Vallières: M. le Président, on va déposer également le certificat de la CPTAQ, on l'a en notre possession.

M. Chevrette: Le certificat autorisant le dézonage.

M. Vallières: C'est un document daté du 27 novembre 1989 émis effectivement par le vice-président de la Commission. J'en fais dépôt, M. le Président, avec le consentement.

M. Chevrette: Merci.

Le Président (M. Cannon): D'accord. Il y a consentement pour le dépôt de ce document? Consentement. Le document est maintenant déposé. M. le leader de l'Opposition vous aviez d'autres questions relatives à l'article 15?

M. Chevrette: Non.

Le Président (M. Cannon): Non? Ça va. L'article 15 est donc adopté.

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. L'article 16. "La Loi sur la qualité de l'environnement (L.R.Q., chapitre Q-2) ne s'applique pas aux travaux, ouvrages et constructions visés par la présente loi, y compris ceux relatifs à la relocalisation de lignes, postes de transformation ou tout autre équipement pour le transport ou la distribution d'électricité." M. le ministre.

M. Vallières: II importe, M. le Président, d'écarter, au moyen d'une disposition législative, et ce, en raison de l'urgence de la situation, les dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement pouvant avoir une incidence sur les travaux, ouvrages et constructions, de même qu'à la relocalisation des lignes d'Hydro-Québec.

M. Chevrette: si j'ai bien compris, m. le président, le ministre vient nous dire par cet article qu'il doutait de la validité juridique du décret, basé sur l'article des catastrophes.

M. Vallières: M. le Président, je préférais l'inclure dans la loi spéciale, afin que tout soit bien armé.

M. Chevrette: Pour être sûr qu'il y ait une assise juridique plus forte que celle existant dans l'autre. C'est ça?

Le Président (M. Cannon): Alors, l'article 16 est donc adopté?

M. Chevrette: Non, mais je voudrais dire que c'est une catastrophe... J'ai deux ou trois questions, par exemple, relatives au décret et non pas à la loi. C'est parce que dans votre décret, M. le ministre, vous posiez certaines... Vous vous créez des obligations, en vertu de votre décret, par exemple, d'informer sur une base régulière, de faire des rapports, etc. Est-ce que ces conditions, qui ont été écrites dans le décret... Étant donné que vous doutiez de la force ou de la validité de votre décret, est-ce qu'au moins les obligations que vous avez créées à partir d'un décret sont maintenues, même si vous substituez à ce décret un article 16 de cette loi d'exception?

M. Vallières: Oui, M. le Président. C'est un engagement qu'on prend, à partir du moment où on a accepté de procéder de la façon dont on agit présentement, et j'ai indiqué tantôt... Je pense que certains de mes collègues se posaient cette interrogation, dont le député de La Prairie, je crois. Il posait la question à savoir si on allait tenir compte des mesures de mitigation que notre propre ministère avait identifiées. Effectivement, nous allons, dans toute la mesure du possible, tout faire pour que ce soit respecté.

M. Chevrette: Mais étant donné que c'est l'article de loi qui prévaut, si j'ai bien compris... Le décret n'existe plus, au sens juridique, à partir du moment où nous votons l'article 16, c'est bien ça?

M. Vallières: Oui.

M. Chevrette: En vertu de ça, les obligations créées par décret, théoriquement, sont dans le vide. Vous me dites cependant que vous maintenez les orientations et les obligations que vous avez établies par décret, indépendamment que le décret sort assis sur du juridique assez fort. Vous transposez les obligations que vous vous faisiez en vertu d'un décret et vous les faites vôtres à partir de l'article 16 de la loi.

M. Vallières: Exactement. M. Chevrette: Merci. M. Vallières: C'est ça.

Le Président (M. Cannon): Ça va? L'article 16 est adopté, M. le leader?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. À l'article 17: "les articles 1 à 3, 15 et 16 ont effet depuis le 30 août 1989." Est-ce que cet article est adopté?

M. Chevrette: C'est l'article qui me répugne beaucoup, M. le Président, parce qu'il a un caractère rétroactif, vous savez. C'est là la notion de rétroactivité dans la loi. Moi, je vous avoue que je comprends mais sur le plan des principes, ça m'a toujours répugné de légiférer rétroactivement. Je dirai: sur division.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article 17 est adopté sur division?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Sur division. L'article 18: "La présente loi entre en vigueur le..." Ici, on indique la date de la sanction de la présente loi. Alors, est-ce que c'est adopté?

Articles en suspens

M. Vallières: On revient sur l'article 1, M. le Président.

Le Président (M. Cannon): Alors, si vous le désirez, on peut revenir à l'article 1. M. le ministre.

M. Chevrette: Sur l'article 1, il n'y a pas d'amendement, si j'ai bien compris? Après les informations que vous nous avez données, ça l'incluait et ce n'était pas nécessaire de l'écrire. M. le Président, ça pourrait être adopté si les explications qu'on nous donne sont...

M. Vallières: Oui. Adopté.

Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Chevrette: Adopté. M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Alors, on procède maintenant à l'article 7. Et à l'article 7, l'amendement qui est proposé est de remplacer, dans la première ligne de l'article 7, les mots "la poste" par les mots "courrier recommandé ou certifié".

M. Chevrette: Adopté. M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Alors, cet amendement est donc adopté. Est-ce que l'article 7 est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. Nous procédons donc à l'article 11 qui avait été suspendu et l'amendement qui est introduit vise, à la première ligne du premier alinéa de l'article 11, les mots "avec l'exproprié". Deuxièmement, à la première ligne du premier alinéa de l'article 11, les mots "dans les 90 jours du transfert de propriété". Est-ce qu'il y a des questions?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que l'article, tel qu'amendé, est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Chevrette: Dans le préambule, vous avez annoncé quelque chose à deux reprises.

Le Président (M. Cannon): Les notes explicatives.

M. Chevrette: Oui. Est-ce que vous me permettez, M. le Président, de...?

Le Président (M. Cannon): Je peux vous permettre, M. le leader. Je peux bien vous permettre. Oui. Allez. Je vais vous écouter.

(18 h 10)

M. Chevrette: Parce qu'on a déjà amendé des préambules de lois. On a déjà modifié... Le ministre des Finances a modifié complètement les notes explicatives de son projet de loi. Il y a du monde qui se le rappelle, ici. Moi, M. le Président, je pense que toute ma plaidoirie de ce matin en deuxième lecture portait expressément sur le caractère d'urgence, le caractère exceptionnel, sur un caractère qui ne doit pas servir de précédent, qui ne doit pas être un exemple à suivre, parce qu'on suspend des droits fondamentaux, une procédure démocratique à l'intérieur de laquelle le peuple a le droit de s'exprimer. On est obligé d'aller jouer dans ces droits-là, qu'on s'était donnés par l'Assemblée nationale du Québec, et on écarte des lois, des prérogatives qu'on donnait aux citoyens. Et je voudrais que ce projet de loi ait un caractère, mais véritablement exceptionnel et qu'il y ait un message . dedans, on dit pourquoi.

C'est dans ce contexte-là que j'ai soumis un texte au ministre des Transports et c'est un projet de loi qui... Je dis ceci, M. le Président, c'est un amendement: Le projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-

Catherine, est modifié par l'insertion, après le titre de la loi, du préambule suivant... J'ajouterais un préambule: Considérant que les événements extraordinaires et d'une extrême gravité impliquant divers éléments de la communauté mohawk vivant principalement à Oka, Kanesatake et Kahnawake ont dégénéré depuis le 11 juillet 1990 en un conflit armé et ainsi contraint une large partie de la population de la rive sud de Montréal à vivre sous un véritable régime de guerre; considérant que ce conflit armé a privé pendant plus de 50 jours cette population de l'accès à IHe de Montréal par le pont Mercier, entraînant ainsi une dégradation majeure des conditions de vie de dizaines de milliers de citoyens et citoyennes concernés; considérant, malgré que l'accès du pont Mercier soit redevenu possible depuis le 30 août 1990, que le pont lui-même restera inutilisable pour un temps indéterminé; considérant qu'il y a lieu de mettre sur pied des mesures extraordinaires et de déployer des efforts exceptionnels et sans précédent pour améliorer rapidement les déplacements des citoyens entre la rive sud et l'île de Montréal; considérant que l'une de ces mesures exceptionnelles consiste en l'accélération des travaux de construction d'un tronçon déjà prévu de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, par l'abolition ou la réduction des délais légaux prévus dans des lois d'application générale; le Parlement décrète donc...

Cela donne toute la situation, le contexte d'exception. Ça justifie au moins le caractère exceptionnel et ce n'est pas vrai, à mon point de vue, comme Parlement, qu'on peut laisser faire une législation comme celle-là sans indiquer aux citoyens du Québec que c'est une procédure d'exception, qui ne doit nullement être perçue comme un précédent de quelque nature que ce soit.

Le Président (M. Cannon): Je suis prêt, moi, à me prononcer sur la recevabilité de l'amendement, mais si vous voulez plaider la recevabilité ou l'irrecevabilité, M. le ministre, je suis prêt à vous écouter.

M. Vallières: non, M. le président, je n'ai pas l'intention de plaider sur la recevabilité ou la non-recevabilité. je vais vous laisser vous exprimer là-dessus.

Le Président (M. Cannon): Alors, en fait, j'ai eu l'occasion plus tôt au cours du débat en commission plénière de vous indiquer la référence à l'article 244 et la décision qui avait été rendue par le président Richard. J'attire notamment votre attention aux doctrines qui avaient été invoquées à cette occasion: Beauchesne, le numéro 779, où il est clairement dit, en regard des préambules: "II n'est pas loisible au comité de joindre un préambule à un projet de loi ou à une proposition de loi qui n'en comporterait pas

à l'origine." et, que je sache, ce projet de loi ne comporte pas de préambule. alors, pour ces raisons, évidemment, l'amendement qui est proposé par m. le leader de l'opposition est irrecevable. nous pouvons donc poursuivre. je vous demanderais si le titre du projet de loi est adopté.

M. Vallières: Adopté.

Le Président (m. cannon): m. le leader de l'opposition... je considère donc que le titre du projet de loi est adopté. est-ce que le projet de loi 82, loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre châteauguay et sainte-catherine, est adopté?

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président (M. Cannon): M. le leader.

M. Chevrette: Vous avez interprété la recevabilité. Vous me permettrez de vous dire que je pourrais très bien demander au ministre...

Le Président (M. Cannon): Comment?

M. Chevrette: Je pourrais très bien demander au ministre, sans que vous ayez à vous prononcer sur la recevabilité, si, de consentement, il accepte d'introduire un préambule et la nature du préambule. Vous n'auriez pas à vous prononcer sur la recevabilité, puisque personne ne vous l'aurait demandé.

Le Président (M. Cannon): Vous êtes tout à fait dans votre droit de le lui demander, sauf que, dans votre démarche et dans vos explications plus tôt, vous ne l'avez pas fait, donc j'ai conclu que...

M. Chevrette: Non, mais...

Le Président (M. Cannon): J'attendais...

M. Chevrette: ...j'avais envoyé...

Le Président (M. Cannon): Juste pour compléter, M. le leader de l'Opposition, j'attendais, de ce côté, si effectivement il y avait des interventions quant à la recevabilité de cet amendement. Puisqu'il n'y en avait aucun de ce côté-là et que vous, vous aviez complété votre argumentation, j'ai donc jugé utile de me prononcer sur la recevabilité. Maintenant, si vous demandez au ministre s'il est prêt à introduire un préambule dans son projet de loi, vous pouvez procéder, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je vais le lui demander sûrement, au ministre, parce qu'il y va de l'intérêt de tout le Parlement. Ce n'est pas une question de formation politique, ça. Les gestes qu'on pose à l'Assemblée nationale ont des portées, peuvent modifier énormément les mentalités. On ne légifère pas en fonction de créer des précédents, on légifère en fonction d'une mesure à l'intérieur d'une crise. Comment le ministre qui règle un conflit, M. le Président, à l'intérieur d'une crise plus qu'extraordinaire... C'est une crise armée, besoin de l'armée pour contrer des individus, c'est grave, ça. Là, je ne voudrais pas, le lendemain matin, qu'on se ramasse avec l'autoroute de Rimouski, puis l'autoroute de ci et l'autoroute de ça.

C'est quoi? Est-ce qu'on légifère dans le cadre de la crise actuelle et on ne dit rien? On laisse constituer un précédent par l'Assemblée nationale? Si c'est ça, votre façon de gouverner, c'est correct. Mais, moi, ça m'apparaît pour le moins inélégant de ne même pas situer le projet de loi dans le cadre d'une crise exceptionnelle, inacceptable et puis bien spécifique, dans un contexte bien précis. Je ne comprends pas. Et on continuera à accréditer le fait qu'au Québec bougez et vous allez avoir de quoi. Moi, en tout cas, je n'en reviens pas.

Le Président (M. Cannon): M. le ministre.

M. Vallières: Alors, j'ai remarqué, tout au long des différents exposés de tous les collègues qui sont intervenus sur le projet de loi, que beaucoup - et j'en faisais mention dans ma réplique - de gens ont parlé du contexte, de la situation qui prévalait, du climat spécial qui entourait l'adoption de ce projet de loi. Je pense que le point a suffisamment été marqué et personne ne pourra se dissocier du caractère exceptionnel dans lequel se situe l'adoption de ce projet de loi.

Mais je n'ai pas l'intention, pour ma part, de donner mon accord à ce que l'on introduise, à l'intérieur du projet de loi, un préambule de la nature de celui qu'on retrouve ici, où on fait allusion à tout ce qui a été dit tantôt, dans de nombreuses allocutions. Ce n'est pas la coutume non plus qu'on le fasse. Je sais que de nombreux projets de loi spéciaux ont été votés ici, en cette Chambre, et à ma connaissance il n'y a pas de préambule, de façon coutumière, qui les accompagne.

L'objet de notre projet de loi ? je l'ai indiqué au début, dans mon allocution en deuxième lecture - vise à nous donner une procédure, donne des pouvoirs au ministre afin de procéder dans des délais réduits pour l'acquisition de tous les biens qu'il juge nécessaires afin de réaliser le projet autoroutier dont il est question. À cette fin, le projet de loi vient établir des règles devant régir, en particulier, les expropriations qui sont visées par la loi, de même que celles qui sont relatives à la taxation, à la fixation des indemnités provisionnelles et puis définitives. Alors, je n'ai aucun mandat, non plus, autre que

celui qui m'a été confié de défendre ce projet de toi à l'Assemblée nationale et, donc, n'en déplaise au député de Joliette, je n'ai pas l'intention de souscrire à son intention d'introduire son préambule à l'intérieur du projet de loi.

Le Président (M. Cannon): Messieurs, le temps qui nous avait été alloué par l'ordre de la Chambre est maintenant terminé, et je répète, il reste effectivement deux adoptions... Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. Est-ce que le projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, est adopté?

M. Vallières: Adopté.

Le Président (M. Cannon): Adopté. En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé, et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

(Suspension de la séance à 18 h 21)

(Reprise à 18 h 26)

Le Président: Mesdames et messieurs les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît. M. le Président de la commission plénière.

M. Cannon (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, et qu'il a été adopté avec amendements.

Le Président: Ce rapport est-il adopté? Une voix: Adopté.

Adoption

Le Président: Adopté. Nous allons maintenant procéder à l'étape suivante de l'étude du projet de loi. En conséquence, M. le ministre délégué aux Transports propose la motion d'adoption du projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine. Je vais donc reconnaître M. le ministre délégué aux Transports.

M. Yvon Vallières

M. Vallières: Merci, M. le Président. Nous voici maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi spécial sur l'expropriation. La nécessité d'agir rapidement et efficacement à l'intérieur de ce projet de loi a pu être démontrée.

Je veux, M. le Président, en premier lieu, féliciter et remercier mes collègues qui ont participé tout au long de cette journée à faire en sorte qu'on puisse procéder sans délai, sans délai afin de donner à la population de la région de Châteauguay, à cet important bassin de la population de la rive sud, un lien tant désiré et le plus direct possible avec l'île de Montréal. Plusieurs de mes collègues, M. le Président, ont insisté sur la pertinence de ce projet de loi. Sans exception, les députés à s'adresser à cette Assemblée ont approuvé, avec des niveaux différents cependant de persuasion, avec certaines réticences dans certains cas, réticences venant plus particulièrement de certains députés de l'Opposition... Je veux néanmoins, M. le Président, les féliciter du niveau du débat qui a été tenu et qui permet à cette Chambre de se doter d'une pièce législative qui va permettre hors de tout doute de faire en sorte qu'on puisse livrer la marchandise à une population qui, au cours des quelque 50 derniers jours, dans cette région, a été fortement mise à l'épreuve.

Je veux de façon particulière profiter de cette occasion et de la fin de ce débat afin de rendre un hommage particulier et public à toutes ces personnes du secteur public, les représentants de la population du secteur concerné, pour la grande lucidité dont ils ont fait preuve, et également le sang-froid, le sens du devoir qui les a animés tout au long des circonstances particulières qui ont amené l'étude de ce projet de loi à l'Assemblée nationale. Je pense en particulier à mes collègues, à tous mes collègues à l'Assemblée nationale, d'un côté ou de l'autre de cette Chambre, mais aussi aux nombreux maires des municipalités des régions directement affectées, et également à la population en général, qui a hâte et bien hâte que le gouvernement du Québec, une fois pour toutes, soit sur le terrain.

La réalisation de ce tronçon de l'autoroute 30, comme l'ont souligné le milieu, les députés et les maires de cette région, en plus de désenclaver en cas de crise toute une région, viendra, M. le Président, contribuer à l'essor économique de cette région et vous m'en voyez réjoui.

Je veux, M. le Président, également indiquer que c'est avec plaisir qu'on a accepté quelques modifications en comité plénier, qui nous ont été apportées par l'Opposition, visant à bonifier notre projet de loi. Je veux également vous indiquer que, hors de tout doute et même si un des éléments qui a fait l'objet de discussions en comité plénier visait à apporter un amendement, un ajout à la loi afin que le gouvernement du

Québec, le ministère des Transports soit sur le terrain dans les meilleurs délais possible... On parlait d'une date qui est le 31 décembre, ce que je me suis refusé à introduire dans la loi. Mais je veux déclarer, M. le Président, pour mettre toute I'"emphase" requise là-dessus, que la volonté ferme du gouvernement du Québec - et c'est l'objet de la loi qu'on a devant nous, d'accélérer la procédure - c'est d'être sur le terrain dans les meilleurs délais et de compléter nos travaux dans les meilleurs délais. Je veux donc, M. le Président, féliciter mes collègues qui ont permis l'adoption de ce projet de loi, les assurer de ma plus entière collaboration afin que les objectifs qui sont poursuivis par cette loi soient non seulement adoptés en cette Chambre mais soient également réalisés sur le terrain. Je vous remercie beaucoup.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je serai bref, également. Je voudrais rappeler que l'Opposition officielle a collaboré à ce projet de loi, M. le Président, et a accepté, à la demande du gouvernement, de suspendre des délais afin de permettre à une population qui, depuis neuf semaines, je pense, vit des malaises extraordinaires... C'est vraiment parce que ces gens sont victimes d'une situation qu'ils n'ont pas voulue, qu'ils n'ont jamais recherchée que l'Opposition officielle s'est rangée derrière ce projet de loi pour dire à ces victimes: On vous comprend. On sait que ce n'est pas un cadeau. On sait que ce n'est pas de votre faute.

J'ai souligné ce matin et je voudrais le refaire... De même que le ministre vient d'afficher sa volonté de réaliser les travaux, moi, M. le Président, je veux réitérer qu'en aucune façon on se doit de continuer à oeuvrer de la façon dont on oeuvre. On ne peut pas continuellement convoquer l'Assemblée nationale pour légiférer suite a des gestes. On ne peut pas faire ainsi d'une mesure exceptionnelle un précédent qui deviendrait quelque chose d'usuel dans notre société québécoise. Ça m'inquiète drôlement comme élu du peuple d'avoir à légiférer dans des conditions aussi aberrantes que celles que nous vivons présentement. Je pense, M. le Président, que gouverner, je le disais ce matin, c'est l'art de prévoir, c'est l'art d'éviter des choses, c'est l'art de régler les problèmes à leur source même avant que ces problèmes ne dégénèrent en crise. On n'est pas des élus du peuple pour gérer des crises; on est là pour éviter des crises.

Et je suis persuadé, M. le Président, qu'à cause de l'improvisation - il faut que je le dise comme je le pense, ça ressemblait à une ligue d'improvisation - jamais on n'aura vu en si peu de temps des ministres d'un gouvernement afficher une impuissance totale devant une population alors que la population, nous élit précisément pour qu'on prenne les rênes, qu'on assume un leadership et qu'on dise à cette même population où est-ce qu'on va. C'est la première fois que je vois un ministre aller afficher carrément qu'il s'est fait berner, leurrer, qu'il s'est fait flouer, qu'il s'est fait avoir. C'est la première fois de ma vie que je vois un élu du peuple, un responsable ministériel aller signer des documents, au vu et au su de la population, d'une façon tout à fait inacceptable pour une société dite civilisée. C'est la première fois que je vois un gouvernement dire que ça fait trois ans qu'il est au courant d'un fait et ne pas avoir contribué, en appliquant les législations, à désarmer des individus avant que ne se produisent des événements, alors qu'on sait que c'est anticipé depuis fort longtemps.

C'est la première fois que je vois ça et je trouve ça tout à fait inacceptable, inconcevable, sauf que pour ce projet de loi je comprends, M. le Président, que la population de la rive sud de Montréal et plus spécifiquement de Châteauguay, de Mercier et de tout le secteur entre la 132 et la 138 avait besoin d'une soupape pour décompresser. Quand des élus municipaux sont, à toutes fins pratiques, contraints d'expliquer à leurs gens: Bien, le gouvernement va faire quoi? et qu'on tergiverse entre les juridictions, le citoyen ne nous a pas demandé de tergiverser sur des juridictions, c'est de régler les problèmes. C'est ça fondamentalement qu'il demande.

À ce compte-là, M. le Président, j'espère, je souhaite et je formule le voeu de tout coeur qu'on n'ait plus à légiférer dans de telles circonstances. Ça n'a pas de bon sens. Je souhaite également, même si je l'ai dit ce matin, que cette mentalité qui est en train de s'instaurer au Québec: bouge, place le gouvernement devant une situation tout à fait affolante, mais on va régler quelque chose... Il ne faut pas que cette mentalité gagne du terrain. Il nous faut développer chez nos concitoyens québécois une mentalité du respect des droits et du respect des règlements, sinon on vit dans une société anarchique et une société anarchique, on en connaît tous les soirs dans les bulletins de nouvelles à la télé. Vous le savez pertinemment, il y a des sociétés qui littéralement s'affrontent et se confrontent entre elles, qui cherchent à se faire justice et qui font fi des lois du pays, du gouvernement. Ça n'a pas de bon sens.

Je souhaite, M. le Président, que la présente crise fasse suffisamment mûrir les Québécois pour bien comprendre que c'est dans l'ordre minimal qu'on doit régler nos problèmes sur le plan démocratique avec nos institutions, mais qu'elle fasse comprendre aussi au gouvernement que l'art de gérer un État, d'administrer un gouvernement, une société, ce n'est pas de gérer les crises, c'est de faire en sorte d'attaquer les

problèmes dès qu'ils surgissent. il y a autant d'honneur, de gloire et d'intelligence à éviter une crise que de la gérer et de tenter de la récupérer. merci, m. le président.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de Westmount.

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. Mr. Speaker, we are faced with legislation in a forum of crisis. The legislation has been passed because of the crisis that we all are aware of, a crisis which could have been avoided, a crisis which, as a matter of fact, the minister who is in charge of Indian Affairs tried fruitlessly to avoid and whose efforts we praise. We give all the credit in the world to the member for Mont-Royal for his efforts in trying to avoid this crisis but he could not do it.

The crisis was precipitated, Mr. Speaker, because the Sûreté du Québec is out of control. The Sûreté du Québec acted without political guidance, it acted without legal guidance, and it acted in a manner which eventually lead to the problems that we have today. The Sûreté du Québec is one of the prime problems in our society today and it's got to be controlled.

I am suggesting, Mr. Speaker, that we have a judicial inquiry as soon as this crisis is over. The judicial inquiry should concentrate on: Why did we have police violence? Why did we have mob violence? What has happened to the political control and the legal control of the Sûreté du Québec?

Mr. Speaker, these are questions that have to be answered and it cannot be answered by... I asked the question today to the Minister of Justice. All he said: Yes, we are going to prosecute all these nasty people who threw stones and these... That is not the way. Mr. Speaker, you and I know that judicial inquiry is the only avenue whereby we can find out what is really happening in the Sûreté du Québec. It troubles me greatly, it troubles my colleagues, and I think it troubles all the members of this House.

The people of Québec, of course, want to know why all of this crisis, as arisen as the result of somebody wanting to increase a golf club from 9 to 18 holes. They could have walked around twice and that would have solved the problem. But no. We have this problem. We want to know, first of all, why this occurred, what the violence in our society means and we want to know, Mr. Speaker, what the future holds, whether there will be peaceful relations between our native people and the residents of Québec. Quebecers want to know what the future holds for their relations with the native community. And so, I say to you, Mr. Speaker, obviously, we support the law. It is part of the cost of the crisis. We are certainly going to vote for it if there is a vote but it is not the way legislation should be carried on. I am sure the government does not like being under the gun this way. And we say to you, Mr. Speaker, and through you, to the Premier and to the minister of Justice: after this is all over, there has to be a full judicial inquiry to find out what happened and why.

Merci, M. le Président.

Le Président: Le débat est terminé. En conséquence, est-ce que la motion de M. le ministre délégué aux Transports proposant l'adoption du projet de loi 82, Loi concernant la construction d'un tronçon de l'autoroute 30 entre Châteauguay et Sainte-Catherine, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, avant que certains de mes collègues et moi n'allions à la sanction par le lieutenant-gouverneur de ce projet de loi, je voudrais faire motion pour que nous ajournions nos travaux à mardi, le 4 septembre, à 13 heures.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. En conséquence, l'Assemblée ajourne ses travaux à mardi, le 4 septembre prochain, à 13 heures.

(Fin de la séance à 18 h 42)

Document(s) associé(s) à la séance