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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le jeudi 13 mai 1993 - Vol. 32 N° 96

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Quatorze heures treize minutes)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Affaires courantes

II n'y a pas de déclarations ministérielles. Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

Présentation de projets de loi

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article a du feuilleton.

Projet de loi 97

Le Président: Donc, à l'article a du feuilleton, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources présente le projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur HydroQuébec.

Alors, je vais reconnaître M. le leader du gouvernement, au nom de Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur Hydro-Québec afin de permettre à cette société d'avoir recours à de nouvelles formules de financement, avec l'autorisation du gouvernement ou dans le cadre d'un régime d'emprunt ou de financement autorisé par le gouvernement. À cette fin, Hydro-Québec pourra acquérir des biens et également louer, céder, aliéner ou grever ceux qui ne sont pas destinés à la production, au transport ou à la distribution d'énergie.

Ce projet précise également les pouvoirs d'Hydro-Québec en matière d'acquisition, de location ou d'aliénation de biens meubles. Enfin, ce projet de loi permet aux membres du conseil d'administration d'Hydro-Québec de participer à une assemblée à l'aide de moyens de télécommunication.

Mise aux voix

Le Président: Alors, en requérant l'attention de tous les collègues, s'il vous plaît. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Adopté? Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, l'article b du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 92

Le Président: Donc, à l'article b du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi 92, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives.

M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale, la Loi sur les cités et villes et le Code municipal du Québec quant à divers aspects du régime fiscal municipal applicable aux entreprises ferroviaires.

D'abord, le projet précise de façon rétroactive la portée de certaines dispositions déjà existantes. Il confirme que la règle selon laquelle une voie ferrée n'est pas inscrite au rôle d'évaluation vise autant les voies situées dans une cour ou une gare que les autres voies et que le non-assujettissement à la surtaxe sur les terrains vagues profite à l'assiette de toutes ces voies, sans exception.

De la même façon, le projet de loi clarifie la règle selon laquelle la valeur foncière de l'assiette d'une voie ferrée est établie au moyen de la valeur moyenne au mètre carré des autres terrains du territoire municipal local, en confirmant que cette règle ne s'applique pas à l'assiette d'une voie ferrée située dans une cour ou une gare.

Il tranche également, dans le cas des passages à niveau, le problème de la coexistence du régime fiscal applicable à l'assiette d'une voie ferrée et du régime qui est applicable à l'assiette d'une voie publique, en prévoyant que c'est le second régime qui a préséance. Le projet reconduit aussi l'effet de la jurisprudence en décrétant que l'assiette d'une voie ferrée située ailleurs que dans une cour ou une gare ne constitue pas un lieu d'affaires, ce qui dispense l'entreprise ferroviaire de payer une taxe d'affaires à son égard.

Le projet de loi édicté, en outre, de nouvelles règles concernant les entreprises ferroviaires, lesquelles auront effet dès 1993 sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal, et ailleurs à compter de 1994. D'une part, il exempte de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels l'assiette d'une voie ferrée située ailleurs que dans une cour ou une gare et, d'autre part, il prévoit que, pour calculer le montant de la taxe d'affaires ou de la surtaxe payable à l'égard de l'assiette d'une voie ferrée située dans une cour de triage, on applique

40 % du taux de la taxe ou de la surtaxe décrété par la municipalité.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la fiscalité municipale en ce qui touche l'établissement de la proportion médiane du rôle d'évaluation et autres choses particulières.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Article c du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 96

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre de l'Environnement présente le projet de loi 96, Loi sur les réserves écologiques. M. le ministre.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, ce projet de loi a pour objet de remplacer la Loi sur les réserves écologiques. Ce projet de loi attribue notamment au ministre de l'Environnement le pouvoir de prendre les mesures nécessaires pour protéger les terres du domaine public, sur lesquelles il entend proposer la constitution de réserves écologiques ainsi que les terrains privés qu'il acquiert aux mêmes fins. Il prévoit, en outre, les activités prohibées sur ces terres.

Ce projet prévoit un nouveau mode de constitution des réserves écologiques et définit les conditions de modification et d'abrogation de ces réserves. Il confirme l'autorité du ministre sur les terres publiques comprises dans les réserves écologiques. Ce projet prescrit des sanctions administratives et pénales applicables en cas de violation de la loi et des règlements. Enfin, ce projet de loi contient des dispositions de nature transitoire.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous deman- derais, M. le Président, d'appeler l'article d du feuilleton.

Projet de loi 102

Le Président: À l'article d du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, président du Conseil du trésor, présente le projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal. M. le ministre.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président, ce projet de loi a pour objet de prolonger de deux ans la durée des conventions collectives des organismes publics et de maintenir, durant cette période, les taux et échelles de salaires, ainsi que les primes qui sont en vigueur lors de leur expiration. Il prévoit, par ailleurs, à compter du 1er octobre 1993 une réduction de 1 % des dépenses reliées à l'application de ces conventions collectives par l'octroi d'au plus trois jours de congé sans solde aux salariés concernés ou par une autre mesure équivalente. Les parties à une convention collective pourront cependant convenir d'autres moyens afin d'en arriver à un plafonnement ou à une réduction comparables. (14 h 20)

Le projet de loi prévoit, en outre, l'application de mesures analogues aux administrateurs d'État, aux dirigeants et aux membres des organismes publics, ainsi qu'aux cadres et autres membres de leur personnel non visés par une convention collective. Il fait de même à l'égard des députés et des professionnels de la santé.

Enfin, le projet de loi rend applicable ce plafonnement de la rémunération et cette réduction des dépenses aux organismes municipaux. Toutefois, ces organismes pourront, par résolution, se soustraire à son application.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Première question: Est-ce qu'il y a des consultations de prévues au projet de loi?

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Nous aviserons, s'il y a lieu, M. le Président.

M. Chevrette: Je demande le vote enregistré, M. le Président.

Le Président: Donc, vote enregistré. Qu'on appelle les députés. (14 h 21 - 14 h 26)

Mise aux voix

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Alors, je mets maintenant aux voix la motion de la présentation du projet de loi 102, Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public et le secteur municipal, présenté par M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, président du Conseil du trésor. Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missis-quoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Levesque (Bonaventure), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bour-beau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Ri-vière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Bégin (Belle-chasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapé-dia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Tremblay (Rimouski), M. Dauphin (Marquette), M. Farrah (îles-de-la-Madeleine) M. Fra-det (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Hun-tingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Gobé (LaFontaine), M. Joly (Fabre), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Audet (Beauce-Nord), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papïneau).

M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Président: Alors, que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Godin (Mercier), Mme Juneau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford),

M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Hol-den (Westmount), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou). M. St-Roch (Drummond).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? le secrétaire: pour: 66 contre: 22 abstentions: 0

(14 h 30)

Le Président: En conséquence, la motion est donc adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article e de notre feuilleton.

Projet de loi 87

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi 87, Loi modifiant la loi sur l'aide juridique. M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur l'aide juridique afin de prévoir que la Commission des services juridiques assume le coût des déboursés de cour exigibles par le gouvernement du Québec et des droits qu'un registrateur aurait autrement perçus, et dont les bénéficiaires sont dispensés du paiement en vertu de cette loi. Ces coûts seraient ainsi assumés depuis le 1er janvier 1992 et, en vertu de l'accord intervenu dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada, deviendraient partageables entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Donc, adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Article f du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 88

Le Président: À l'article f du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi 88, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. M. le ministre.

M. Gil Rémillard M. Rémillard: M. le Président, ce projet de loi

modifie la Loi sur les substituts du procureur général. En premier lieu, il introduit dans cette loi des dispositions de nature à assouplir le mode de nomination des substituts occasionnels et confère au gouvernement le pouvoir de régir, par voie réglementaire, leur nomination, leur rémunération, leurs avantages sociaux et leurs autres conditions de travail.

En deuxième lieu, ce projet de loi étend aux substituts occasionnels l'obligation qui est actuellement faite aux substituts permanents de s'occuper exclusivement du travail et des devoirs de leurs fonctions. Par ailleurs, il change l'appellation des procureurs-chefs et des procureurs-chefs adjoints par celle de substituts en chef et substituts en chef adjoints.

Enfin, le projet de loi édicté des dispositions relatives à l'exercice de certaines activités politiques par les substituts permanents du procureur général.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Oui.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Article g du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 93

Le Président: À l'article g du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi 93, Loi modifiant le Code de procédure civile et la Charte des droits et libertés de la personne. M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, ce projet de loi modifie le Code de procédure civile et, par concordance, la Charte des droits et libertés de la personne en vue de permettre aux journalistes d'assister aux audiences qui, en matière familiale, se tiennent à huis clos en première instance.

Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi modifie le Code de procédure civile afin d'établir en matière civile certaines règles relatives aux délibérés. À cette fin, il prévoit notamment que le délai pour rendre jugement est fixé à six mois, lequel peut, dans des circonstances exceptionnelles, être prolongé par le juge en chef personnellement. Le projet de loi prévoit en outre, lorsqu'un juge fait défaut de rendre jugement dans les délais requis, que le juge en chef peut personnellement dessaisir ce juge et ordonner que l'affaire soit confiée à un autre juge ou qu'elle soit remise au rôle. Ce projet prévoit, de plus, certaines règles relatives à la preuve applicables dans une telle situation. De plus, M. le Président, le projet de loi porte d'un à cinq jours francs le délai de signification et de présentation de certaines requêtes en Cour d'appel.

Enfin, ce projet de loi modifie ce Code en vue d'apporter un contrôle plus rigoureux de l'exercice du droit d'appel, d'enrayer le dépôt tardif des documents et d'accroître l'efficacité du traitement des dossiers devant la Cour d'appel du Québec. À cette fin, M. le Président, le projet de loi prévoit, notamment, une hausse du seuil pécuniaire de l'appel de plein droit. Il prévoit également que des jugements qui prononcent la requête en annulation d'une saisie avant jugement et les jugements ou ordonnances rendus dans les matières non contentieuses, à l'exception des matières qui touchent à l'état et à la capacité des personnes, ne feront dorénavant l'objet d'un appel que sur permission d'un juge de la Cour d'appel.

Le projet de loi prévoit en outre certaines mesures relatives à la production des mémoires et au défaut de les produire dans les délais requis. Les pouvoirs du greffier de la Cour d'appel sont valorisés afin d'améliorer le fonctionnement et l'efficacité du tribunal. En certains cas, M. le Président, il pourra délivrer un certificat attestant que l'appel est déserté, avec dépens.

Finalement, le projet de loi modifie les règles applicables à l'exécution provisoire, notamment lorsqu'il s'agit d'une demande d'aliments ou de garde d'enfants.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Ça va.

Le Président: Adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article h de notre feuilleton.

Projet de loi 94

Le Président: À l'article h du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi 94, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires. M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Ce projet de loi, en résumé, modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires afin de permettre au gouvernement de prévoir, dans un tarif en matière civile, des frais judiciaires et des droits de greffe différents selon qu'ils sont exigibles d'une personne physique ou d'une personne morale.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Article j du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 91

Le Président: À l'article j du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi 91, Loi modifiant le Code de la sécurité routière. M. le ministre.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: M. le Président, ce projet de loi propose diverses modifications au Code de la sécurité routière afin d'en faciliter l'administration. Ces modifications concernent notamment l'obligation de munir les autobus d'écoliers d'un signal d'arrêt obligatoire, l'identification des points routiers qui sont critiques pour les camions et l'obligation de les munir d'un système de freinage supplémentaire.

Ce projet de loi introduit des nouvelles mesures concernant la vérification mécanique et l'expertise technique des véhicules. Il propose également des modifications permettant d'uniformiser les montants des amendes prévues pour les infractions dans les voies réservées et permet à la Société de l'assurance automobile du Québec d'exiger des frais pour l'échange électronique de données.

Ce projet de loi modifie, par ailleurs, les règles applicables en matière de transmission des avis de suspension et de révocation des permis de conduire. Il permet en outre à la Société de conclure avec tout ministère ou organisme désigné par le gouvernement une entente en vue de l'application de la Loi sur la transformation des produits marins et de la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers.

Enfin, ce projet contient des modifications de nature technique et des dispositions de concordance.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, l'article k de notre feuilleton.

Projet de loi 90

Le Président: À l'article k du feuilleton, M. le ministre du Revenu présente le projet de loi 90, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac, la Loi sur le ministère du Revenu et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le ministre.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi donne suite à diverses mesures relatives à l'application des lois fiscales et à la luttre contre la fraude en matière d'impôt sur le tabac. Ces mesures ont été annoncées par le ministre des Finances du Québec principalement dans le bulletin d'information 93-1, publié le 23 avril 1993.

Il modifie, d'abord, la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin d'assujettir à l'impôt sur le tabac le tabac brut en feuilles et afin de prévoir certaines mesures pour freiner la fraude en matière de tabac, dont, notamment, l'augmentation de l'amende maximale; la création d'une nouvelle infraction; le renforcement des pouvoirs en matière de perquisition.

Il modifie également la Loi sur le ministère du Revenu afin de solutionner différents problèmes liés à l'interprétation et à l'application de cette loi et d'autres lois fiscales. Merci.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Sur ledit projet de loi, étant donné que le ministre des Finances déclarait, il y a à peine trois ou quatre jours, en cette Chambre... Plus précisément, le 6 mai, à une période de questions, il déclarait que ça faisait un large consensus dans la société. Est-ce que je pourrais savoir si on pourrait inviter ce large consensus à venir nous donner leur avis sur le projet de loi?

Une voix: On verra.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, en temps et lieu, et compte tenu des réactions, nous aviserons en conséquence.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que... S'il vous plaît! Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Sur division.

Le Président: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 1 de notre feuilleton.

Projet de loi 95

Le Président: À l'article 1 du feuilleton, Mme la ministre déléguée aux Finances présente le projet de loi 95, Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Alors, au nom de Mme la ministre déléguée aux Finances, M. le leader du gouvernement.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Ce projet de loi propose de modifier les règles relatives à la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Ainsi, il assujettit à ses dispositions les personnes physiques qui exploitent une entreprise au Québec, qu'elle soit ou non à caractère commercial, sous un nom ne comprenant pas leur nom de famille et leur prénom.

Il assujettit également les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite constituées au Québec, ainsi que les sociétés étrangères qui y exercent une activité. Enfin, il assujettit les personnes morales de droit privé constituées au Québec ainsi que les personnes morales étrangères qui y ont leur domicile et y exercent leur activité. (14 h 40)

Ce projet de loi impose aux personnes et aux groupements assujettis l'obligation d'immatriculation. Il permet également aux personnes et aux groupements non assujettis de s'immatriculer volontairement. Par ailleurs, ce projet indique les principales informations qui doivent être déclarées lors de l'immatriculation et détermine certaines règles relatives à l'utilisation des noms déclarés. Il impose l'obligation de mettre à jour les informations déclarées lors de l'immatriculation au moyen de déclarations à cette fin.

Ce projet de loi prévoit que la radiation de l'immatriculation d'une personne ou d'un groupement a lieu lorsque cesse l'obligation d'immatriculation ou lorsque certaines autres obligations n'ont pas été remplies. Il prévoit également la révocation de la radiation, dans certains cas, permettant ainsi aux personnes morales constituées au Québec de reprendre leur existence.

Ce projet prévoit en outre l'établissement d'un registre des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales et détermine les règles relatives à son administration. Il précise aussi que toute personne peut consulter le registre, mais que certaines informations qui y sont contenues sont opposables aux tiers à compter du moment où elles apparaissent à l'état des informations. Il détermine les pouvoirs de réglementation du gouvernement et prévoit des dispositions pénales.

Ce projet modifie les lois publiques qui ont pour objet de constituer des personnes morales en prévoyant, notamment, que ces dernières seront désormais immatriculées au registre. Il remplace la Loi sur les déclarations des compagnies et sociétés, ainsi que la Loi concernant les renseignements sur les compagnies et abroge la Loi sur les compagnies étrangères. Enfin, ce projet de loi prévoit des dispositions transitoires et finales nécessaires à l'application de la loi et à la mise en place du registre.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler l'article i de notre feuilleton.

Projet de loi 99

Le Président: À l'article i du feuilleton, M. le ministre du Tourisme présente le projet de loi 99, Loi sur la Société du Centre des congrès de Québec. M. le ministre.

M. André Vallerand

M. Vallerand: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'instituer la Société du Centre des congrès de Québec. Il prévoit que la Société sera un mandataire du gouvernement et qu'elle sera administrée par un conseil d'administration dont les membres seront nommés par le gouvernement.

La Société aura pour objet d'administrer et d'exploiter le Centre des congrès de Québec. En plus d'élaborer des projets de développement du Centre des congrès, la Société pourra exercer des commerces et autres activités de nature à contribuer au développement du Centre des congrès.

Le projet de loi prévoit également que la Société pourra se substituer à la Société immobilière du Québec pour l'aménagement et l'amélioration du Centre des congrès. Il modifie enfin la Loi modifiant la Charte de la ville de Québec afin de permettre l'addition d'une superficie additionnelle au complexe immobilier connu sous le nom de Place Québec, malgré la réglementation municipale adoptée après le 12 juin 1984.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. Maintenant, dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions

Dépôt de rapports de commissions. M. le prési-

dent de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Consultation générale sur le document intitulé

«L'appui au secteur financier: des dividendes

pour le Québec ? Propositions de politiques

pour le secteur financier du Québec»

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 4, 5 et 6 mai 1993 afin de procéder à une consultation générale et de tenir des auditions publiques sur le document intitulé «L'appui au secteur financier: des dividendes pour le Québec ? Propositions de politiques pour le secteur financier du Québec» et, à cette fin, d'examiner les principes et mesures mis de l'avant par le gouvernement du Québec pour le secteur financier québécois.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Vanier. Votre rapport est déposé.

Maintenant, dépôt de pétitions.

Alors, maintenant, interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Décision du président sur

la question de privilège

du député de Labelle

Je vais maintenant rendre ma décision sur la question de privilège du député de Labelle, que j'ai prise en délibéré à la séance de mardi dernier.

Le député de Labelle allègue que le président du Conseil du trésor et les fonctionnaires impliqués au dossier auraient porté une atteinte délibérée aux droits et privilèges de l'Assemblée prévus au paragraphe 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale en rendant public un document intitulé: «Résultats de la commission parlementaire sur le financement des services publics».

Pour ce faire, le président du Conseil du trésor aurait fait fabriquer et diffuser un document concernant un mandat dévolu à une commission parlementaire, usurpant ainsi les fonctions et attributs de la commission du budget et de l'administration.

À cet égard, le député de Labelle soutient qu'il s'agit d'un détournement du processus réglementaire officiel de l'Assemblée nationale et, d'autre part, que le procédé employé par le ministre véhicule de fausses impressions constituant un outrage et du mépris envers l'Assemblée. Selon le député de Labelle, le président du Conseil du trésor et député de Vaudreuil ne peut prétendre parler pour et au nom de l'Assemblée ou de l'une de ses commissions puisque ce privilège n'appartient qu'à l'Assemblée.

Il est de la connaissance de tous les membres de l'Assemblée nationale et des citoyens que la commission du budget et de l'administration s'est vu confier par l'Assemblée nationale, le 2 décembre 1992, le mandat de tenir des consultations générales sur le financement des services publics au Québec et d'examiner les orientations à privilégier à court et à moyen terme en ce qui a trait à l'évolution des dépenses gouvernementales, de la fiscalité, du déficit, des besoins financiers et de la dette.

Le député de Labelle de même que le ministre responsable du Conseil du trésor étaient membres de cette commission pour la durée de ce mandat. La commission du budget et de l'administration a complété l'exécution de ce mandat, comme l'indique le rapport de cette commission déposé le 9 mars 1993. Voilà pour les faits.

Le député de Labelle prétend que le président du Conseil du trésor et les fonctionnaires impliqués au dossier auraient contrevenu au paragraphe 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale. Cette disposition énonce ce qui suit, et je cite: «Nul ne peut porter atteinte aux droits de l'Assemblée. Constitue notamment une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait de: 4° contrefaire, falsifier ou altérer, dans le dessein de tromper, un document de l'Assemblée, d'une commission ou d'une sous-commission ou un document présenté ou produit devant elles.»

Selon l'ouvrage intituté «Vocabulaire juridique» de Gérard Cornu, les termes «contrefaire» et «falsifier» ou «altérer» signifient respectivement une imitation frauduleuse ou fabrication d'une chose au préjudice de celui qui avait seul le droit de la fabriquer ou de la reproduire et la présentation d'un document ou d'une chose qui ne correspond pas à son état originaire. Dans quelle circonstance pourrait-on prétendre qu'il y a contravention au paragraphe 4° de l'article 55 de la Loi sur l'Assemblée nationale?

Maingot, à la page 236 de son traité portant sur le privilège parlementaire, illustre une situation qui constituerait un tel délit, et je cite: «De même, si une personne présente à un comité de la Chambre des communes des documents faux, falsifiés ou altérés avec l'intention de tromper ce comité ou la Chambre, ou en étant au courant de la falsification ou de l'altération, elle se rend coupable d'outrage au Parlement parce que le fait de présenter de tels documents constitue une insulte évidente à la Chambre des communes. Celle-ci a non seulement droit au plus grand respect, mais exige qu'on l'observe à son égard lorsqu'on lui présente des documents pour examen, enquête ou étude.» Fin de la citation.

Après avoir analysé les documents transmis avec son avis par le député de Labelle, je constate que le document préparé et diffusé par le ministre ne correspond d'aucune manière aux actes mentionnés à l'article 55, paragraphe 4°, de la Loi sur l'Assemblée nationale. En effet, le document en cause est un document gouvernemental, identifié comme tel, et dont la présentation et le contenu ne viennent d'aucune façon

usurper les fonctions d'une commission parlementaire. Il ne peut prétendre se substituer au rapport de la commission.

En effet, le contenu du rapport d'une commission parlementaire est régi, notamment, par les articles 176 et 177 du règlement de l'Assemblée nationale. D'une part, l'article 176 stipule ce qui suit, et je cite: «Au terme de l'examen d'une affaire qui lui a été confiée par l'Assemblée, toute commission dispose d'un jour franc pour déterminer en séance de travail les observations, conclusions et recommandations qu'elle entend déposer à l'Assemblée.» Fin de la citation. D'au-trepart, l'article 177 précise que, et je cite: «Le rapport de la commission est constitué du procès-verbal de ses travaux et, le cas échéant, de ses observations, conclusions et recommandations.» Fin de la citation.

La commission du budget et de l'administration a produit et déposé son rapport à l'Assemblée le 9 mars 1993. Il est identifié comme document de la session 620. Ce rapport est constitué uniquement du procès-verbal de ses travaux, ladite commission s'étant abstenue de déterminer des observations, conclusions et recommandations conformément à l'article 176 de notre règlement. Cette décision de la CBA de ne pas présenter de recommandations n'a pas pour effet d'empêcher le gouvernement ou tout autre intéressé de tirer ses conclusions, d'émettre son point de vue ou de dresser un bilan des conclusions menées par la commission parlementaire.

Les travaux d'une commission parlementaire siégeant en public relèvent du domaine public. Le gouvernement, l'Opposition parlementaire et tous les citoyens peuvent exprimer des avis, opinions ou observations sur les travaux qui s'y déroulent. Ils le font en leur nom. On ne doit donc pas se surprendre qu'il y ait des divergences dans l'appréciation des débats parlementaires. C'est dans l'ordre des choses.

Donc, à première vue, il me semble évident que le ministre ne s'est pas immiscé dans les fonctions et attributs de la commission. Le gouvernement, comme tout autre intervenant ou observateur, peut bien faire sa propre analyse de la consultation et en tirer ses propres conclusions. Le document rendu public par le ministre ne constitue donc pas, prima facie, une atteinte aux privilèges de l'Assemblée. En conséquence, je déclare cette question de privilège irrecevable. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, question de directive ou une nouvelle question de règlement ? je ne sais pas. Vous l'interpréterez et vous me le direz. Le document est intitulé «Résultats de la commission parlementaire sur le financement des services publics». Vous avez même dit, dans votre plaidoirie, que la commission a refusé de donner des résultats. Est-ce que vous pourriez me dire, à ce moment-là, comment on peut publier des résultats, si la commission elle-même s'est refusé d'en faire, des résultats? Ça n'empêche pas le gouvernement, effectivement, de publier ce qu'il veut, mais il aurait pu marquer «Résultats tels que vus par le ministre», mais pas par la commission. Je vous demanderais de me donner une directive sur la façon dont un ministre, à l'intérieur de ses fonctions, peut tirer des résultats que seule une commission elle-même peut tirer en tant qu'organisme. Il peut tirer des conclusions personnelles, mais il ne peut pas tirer des résultats au nom d'une commission qui ? vous-même, vous le dites ? a refusé d'en donner. Ça m'apparaît tellement incohérent, à sa face même. Je vous demanderais une directive, au moins, là-dessus. Si vous voulez virer ça en demande de décision additionnelle, virez-le. (14 h 50)

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, sur la question soit de règlement, soit de directive, et sans remettre en question la sagesse, la justesse ou le fondement de la décision que vous venez de rendre, je pense que le leader de l'Opposition est en train de faire, présentement, ce que vous ne nous permettez pas de faire. Et je veux plaider pour le leader de l'Opposition, cette fois-ci, M. le Président. Je vous soumets respectueusement que la façon de procéder habituelle, le député, comme c'a été le cas du député de Labelle, soumet une question de privilège à la présidence. Il argumente dans sa question de privilège. Nous n'avons pas, de ce côté-ci de la Chambre, accès à l'argumentation du député de Labelle. Une seule partie se fait entendre. Vous consultez vos conseillers en matière parlementaire. Vous rendez une décision, et on n'a pas eu la chance, de part et d'autre, d'argumenter sur le fondement comme tel. Et j'éprouve la même frustration que mon vis-à-vis, M. le Président.

Le Président: Alors, sur la question soulevée, évidemment, je ne prends pas ça comme un appel de la décision rendue. Simplement, le document qui avait été déposé est un document identifié au nom du gouvernement. On l'a intitulé «Résultats». Je n'ai pas à examiner tel quel...

M. Chevrette: Vous plaidez, puis...

Le Président: Je n'ai pas plaidé, j'ai rendu une décision. J'ai dit simplement que...

M. Chevrette: Vous rendez un jugement. C'est encore pire.

Le Président: J'ai simplement rendu la décision suivante: le document n'est pas un document de la commission, c'est un document identifié au nom du gouvernement. Qu'on puisse donner les conclusions qu'on veut à ce qu'on tire de la consultation, c'est le choix du gouvernement. Qu'on l'intitule comme on

voudra, c'est le choix de celui qui produit le document. Ce que j'ai mentionné, c'est que la commission a produit un rapport, mais n'a produit aucune conclusion, recommandation ou quoi que ce soit, tel que le règlement aurait pu le prévoir. Donc, en ce sens-là, c'est un document du gouvernement et non pas un document de l'Assemblée, et je dis que, prima facie, ça ne constitue pas une question de droit ou de privilège.

Nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales, et je vais reconnaître, en première question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

Questions et réponses orales

Enseignement de l'anglais par le Blais de classes d'immersion

M. Brassard: M. le Président, le gouvernement entend accroître la place de l'anglais à l'école. Le projet de loi 86 permettra à la ministre de l'Éducation de modifier le régime pédagogique afin d'augmenter l'enseignement de l'anglais dès le primaire sur des périodes concentrées. Hier, dans son discours sur la motion de l'Opposition, le ministre responsable de la Charte de la langue française a évoqué les bains linguistiques ou classes d'immersion par lesquels le gouvernement entend soumettre un enfant à un enseignement exclusivement en anglais, pendant une période de trois à cinq mois. Du même souffle, il ajoutait que sa collègue de l'Éducation définira plus tard la nature et l'étendue des modifications que le gouvernement veut apporter au régime pédagogique. Le projet de loi 86 introduit le principe des classes d'immersion, mais l'on remet à plus tard les modalités d'application. C'est ce qu'on appelle un véritable chèque en blanc.

Ma question à la ministre de l'Éducation: Est-ce que la ministre de l'Éducation peut nous indiquer qui, quelle personne, quel organisme, quel groupe lui ont demandé formellement un changement aussi important à la loi 101 et à la loi de l'instruction publique visant à accroître l'enseignement de l'anglais par le biais de classes d'immersion dès le niveau primaire? Peut-elle nous identifier le lobby qui revendique de tels changements?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Robillard: D'abord, M. le Président, le député de Lac-Saint-Jean oublie de dire que, dans le projet de loi de mon collègue, nous réaffirmons qu'il n'y a aucun changement au niveau de l'article 72 de la Charte, qui réaffirme que l'enseignement doit se faire en français, premièrement. Deuxièmement, il y a un ajout qui est fait pour faciliter l'apprentissage d'une langue seconde. Est-ce que le député de Lac-Saint-Jean serait contre l'enseignement de la langue seconde, autant chez les francophones que chez les anglophones, aux niveaux primaire et secondaire? Et troisièmement, M. le Président, sait-il qu'à l'heure où on se parle, il y a des échanges qui se font entre des élèves du Québec et des élèves d'autres provinces, justement dans le but d'un apprentissage d'une langue seconde, et que ces échanges ont commencé en 1978 au Québec? Sait-il ça?

Une voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, puisqu'il est question de bains linguistiques ou de classes d'immersion, j'ai l'impression qu'on patauge. Ma question, j'y reviens. Puisque le gouvernement a décidé d'apporter des changements majeurs, non seulement à la loi 101, mais à la loi de l'instruction publique, est-ce que la ministre pourrait nous indiquer si c'est une initiative pure et simple du gouvernement ou si c'est à la suite de demandes, et de demandes par qui? Qui veut cela? Qui a demandé ces changements-là?

Le Président: Alors, Mme la ministre.

Mme Robillard: Nous avons quelques problèmes, M. le Président, si le député de Lac-Saint-Jean n'a jamais été en contact avec des parents dans son propre comté...

Une voix: C'est ça.

Mme Robillard: ...ou s'il n'a jamais entendu des demandes de parents d'autres comtés, dont celui de Terrebonne, ou d'autres comtés du Québec, où des parents francophones demandent que leurs enfants aient un bon apprentissage de la langue seconde. Il s'agit de moyens pédagogiques. Est-ce que le député de Lac-Saint-Jean est contre le fait qu'on apprenne une langue seconde au Québec?

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Brassard: Ce n'est pas ça que je lui demande, M. le Président...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il vous plaît! MM. les députés. Alors, pour une question complémentaire.

M. Brassard: Est-ce que la ministre pourrait nous indiquer quels groupes, quels organismes, dans le monde de l'éducation ou ailleurs, ont formellement demandé au gouvernement de modifier, pas un détail, de modifier de façon substantielle la Charte de la langue française et sa propre loi de l'instruction publique? C'est ça que je veux savoir. C'est ça que je veux savoir, pas les parents, quelque part...

Le Président: MM. les députés, À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Oui, il y a un ministre qui est en interrogation, en interpellation avec un autre député de l'Opposition. Oui, je réprime effectivement ces choses-là et je vais les nommer à l'avenir, carrément, du premier coup. Il n'y aura personne qui va me dire: Écoutez, d'un côté ou de l'autre. Je vous demande de respecter le règlement purement et simplement. Alors, terminez votre question rapidement.

M. Brassard: Quelles sont les demandes formelles que la ministre a reçues et pourrait-elle les déposer, les demandes formelles d'organismes et de groupes qui ont revendiqué les changements qu'on retrouve à la fois dans la loi 101 et dans la loi de l'instruction publique?

Le Président: Alors, Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, je me demande dans quelle sorte de monde vit le député de Lac-Saint-Jean, où il est très clair que la population nous demande de façon insistante que la maîtrise des langues soit améliorée chez nos jeunes, autant l'enseignement de la langue maternelle que de la langue seconde. Ces demandes-là sont fréquentes et, au niveau de l'enseignement de la langue seconde, on nous demande que les enseignants soient mieux formés; on nous demande que les temps soient respectés dans les régimes pédagogiques; on nous demande de reconnaître l'enseignement intensif et on nous demande, via des commissions scolaires et des comités d'école, qu'on permette des échanges linguistiques entre des écoles francophones et des écoles anglophones sur le territoire du Québec.

Où vit-il, M. le Président? Est-ce que je devrais faire comme le leader de l'Opposition et être encore plus drastique pour exiger que tout le monde soit bilingue au Québec? Ce n'est pas l'approche qui a été retenue par le gouvernement...

Une voix: Le chef de l'Opposition. (15 heures)

Mme Robillard: ...le chef de l'Opposition. Excusez-moi, M. le Président. On se souvient de ses déclarations au niveau de l'apprentissage de l'anglais au Québec. Ce qu'on a choisi, c'est d'avoir des bons moyens pédagogiques pour l'enseignement d'une langue seconde au Québec. Qui peut être contre ça?

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Brassard: Comment la ministre de l'Éducation peut-elle ne pas faire la différence entre le désir et le goût d'améliorer l'apprentissage de l'anglais langue seconde dans les écoles françaises et la mise en place de moyens pédagogiques qui vont nous conduire directement à l'instauration d'écoles bilingues? Comment peut- elle ne pas faire la différence, elle qui est ministre de l'Éducation?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: C'est assez incroyable, M. le Président, que dès que nous abordons la question de la langue avec l'Opposition, ils deviennent très émotifs et soulèvent des peurs.

Il n'est nullement question d'écoles bilingues. Il est question de choisir des bons moyens pédagogiques pour apprendre une langue. C'est clair. Que ce soit l'anglais, que ce soit l'espagnol ou l'allemand, quels sont les meilleurs moyens pédagogiques pour apprendre une langue? Ça peut être l'enseignement intensif, ça peut être des échanges linguistiques, comme ça peut être aussi certaines formules d'immersion. Et le député d'Argenteuil a eu la sagesse, dans son projet de loi, d'inscrire que ce sera contrôlé par le régime pédagogique du primaire et du secondaire. Alors, je pense que là on a toutes les garanties que ce soit strictement des finalités éducatives qui nous guident dans le choix des moyens pour apprendre cette langue.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Brassard: La ministre de l'Éducation sait-elle que le ministre responsable de la Charte de la langue française nous a avoué aussi hier que vous ne saviez pas comment serait modifié le régime pédagogique, que vous ne saviez pas comment cette mesure-là, cette disposition-là serait encadrée et mise en oeuvre? Vous ne savez pas dans quelle direction vous allez...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député.

Pour une question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, à l'intérieur de notre processus éducatif réglementaire, je rappellerais au député de Lac-Saint-Jean les dispositions du quatrième alinéa de l'article 35 de notre règlement qui stipule que le député qui a la parole ne peut s'adresser directement à un autre député.

Le Président: Alors, si vous voulez reformuler votre question, M. le député.

M. Brassard: M. le Président, comment ça s'appelle, un comportement d'un ministre qui introduit des amendements à des lois aussi importants que ceux-là et qui ne sait pas comment ça va être mis en oeuvre? Comment ça s'appelle, sinon un comportement irresponsable?

Le Président: Pour un rappel au règlement, M. le

leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'aurais dû poursuivre la lecture de l'article 35 de notre règlement pour le bénéfice du député de Lac-Saint-Jean, qui, après avoir violé les dispositions du quatrième alinéa, s'attaque maintenant aux dispositions des alinéas 5, 6, 7, 8 du même article, M. le Président.

Dans les circonstances, je vous demanderais de l'inviter à reformuler sa question suivant les dispositions de notre règlement, s'il en est capable.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, vous comprendrez qu'il devrait y avoir un article du règlement spécifique pour le leader du gouvernement: l'art de faire perdre du temps durant les périodes de questions.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je juge la question acceptable.

Mme la ministre, pour la réponse.

Mme Robillard: M. le Président, le choix de ce gouvernement est d'accorder la priorité de la maîtrise des langues pour les jeunes du Québec, priorité no 1 pour nos jeunes au Québec. Et c'est dans ce contexte-là que les choix ont été faits.

Ce à quoi réfère le député de Lac-Saint-Jean concernant la référence au régime pédagogique dans l'introduction de la modification apportée nous révèle très bien que le député d'Argenteuil est respectueux de toutes les responsabilités ministérielles au sein de ce gouvernement, ce que vous ne semblez pas réaliser vous-même.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: Merci. M. le Président, why does the Minister, who said recently that she would like to see all Quebeckers bilingual by the year 2000, why does she not consider changing the «régime pédagogique» to allow francophone students to learn English as a second language as early as grade 1 instead of waiting till grade 4 when they are already 9 years old?

Le Président: Alors, Mme la ministre de l'Éducation.

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, M. le député!

Mme Robillard: M. le Président, nous avons fait des choix au Québec, et je pense que le député de D'Ar-cy-McGee les connaît très bien, où l'enseignement doit se faire d'abord en français. Tous nos choix au niveau de la langue ont été articulés autour de ce choix de base qui ne nous empêche pas du tout d'apprendre une langue seconde. Et quant à l'enseignement de la langue seconde, il est très clair que, pour nos élèves francophones, ça se fait à partir du quatrième du primaire.

Le Président: Alors, en question principale maintenant, Mme la députée de Chicoutimi.

Étendue des pouvoirs de l'Office de la langue française

Mme Blackburn: Oui, M. le Président.

Je voudrais d'abord rappeler que l'Opposition estimait qu'il n'était pas le temps d'ouvrir un débat sur la langue, mais bien que c'était le travail et l'emploi qui étaient la priorité. Mais comme le gouvernement a ouvert ce débat en affaiblissant lourdement la loi 101, nous croyons qu'il aurait dû, au moins, renforcer certaines dispositions de la loi, particulièrement au chapitre du travail. Et une analyse du projet de loi 86 permet de constater que le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française a choisi d'écarter la quasi-totalité des recommandations du Conseil de la langue française dans l'avis qu'il avait lui-même sollicité le 11 décembre dernier. De plus, le ministre a choisi de passer outre aux résolutions de son propre parti sur la question de la francisation des entreprises, alors que les progrès demeurent extrêmement fragiles et que seulement SI % des travailleurs francophones dans la grande région de Montréal travaillent en français. Évidemment, la situation à Montréal même est sans doute beaucoup plus déplorable.

Ma question au ministre responsable de la Charte: Pourquoi le ministre n'a-t-il pas jugé opportun de donner suite à la recommandation du Conseil visant à accorder à l'Office de la langue française un pouvoir réglementaire lui permettant d'intervenir de sa propre initiative et d'exiger qu'une entreprise de moins de 50 employés s'engage à appliquer un programme de francisation?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Ryan: Tout d'abord, je voudrais signaler, M. le Président, contrairement à ce que nous avons entendu de l'autre côté de la Chambre à maintes reprises depuis le début du débat, qu'il y a des dispositions très importantes dans le projet de loi pour le renforcement de la langue française dans les milieux d'entreprises, et je vais en donner un exemple pour que cessent ces affirmations fausses que l'on répète de manière irresponsable et sans écouter les réponses.

Je vais donner lecture d'un article. «Toute entreprise...

Une voix: ...

Le Président: Écoutez, si vous avez une question de règlement, je vais écouter, là-dessus, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, le seul député en cette Chambre qui se permet constamment, régulièrement d'insulter, de prêter des intentions...

Des voix: ...

M. Chevrette: Je peux terminer?

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...le choeur de l'Armée rouge s'excite, M. le Président.

M. le Président, le ministre n'a pas le droit de juger, de porter des jugements sur la façon dont on fait notre travail. Lui, qui se permet de la prédication même sur la tolérance, pourrait-il garder son mépris pour lui, l'homme de l'action catholique imperturbable?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Alors, sur la même question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui...

Le Président: Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'ai été très attentif aux propos tenus par le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française, et ses propos étaient conformes aux dispositions de notre règlement, plus particulièrement aux dispositions de l'article 35. Et si on les compare aux propos tenus tantôt par le député de Lac-Saint-Jean ou par le leader de l'Opposition officielle, il s'agit de propos dignes. (15 h 10)

Le Président: Alors, j'invite... S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, là! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Alors, M. le ministre, si vous voulez poursuivre, s'il vous plaît.

Une voix: ...

Le Président: M. le député, s'il vous plaît! J'ai une question de règlement qui m'a été soulevée. Jusqu'à ce moment-ci, je ne considère pas les propos comme étant antiparlementaires. Même, d'une certaine façon, on se lève sur un propos qui a été énoncé tantôt, même en question principale, et que vous jugiez acceptable. Je pense que, en réponse, le même propos peut être acceptable. Je demande simplement aux parlementaires... C'est évident que, d'un côté à l'autre, certains propos peuvent être sévères, mais chacun a la responsabilité de ses propos et en porte le poids. Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Parfois, le poids est très léger, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: J'ai remarqué que le député, dans ses...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Un instant! Alors, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le ministre, je vous invite à répondre à la question, s'il vous plaît.

M. Ryan: O.K. Dans le projet de loi, là, pour ceux qui l'ont lu...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: II y a une disposition... Est-ce que je peux continuer, M. le Président?

Le Président: Oui, allez-y, s'il vous plaît.

S'il vous plaît! Bon... J'ai avisé, tantôt... là, j'ai, encore une fois, des réactions. Je prierais chacun des députés de respecter le règlement, l'article 32. Le leader de l'Opposition l'a énoncé, le leader du gouvernement également. Alors, M. le député, je vous prierais de respecter le règlement, également.

Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Alors, j'allais lire une disposition du projet de loi qui contient des éléments importants de réponse à la question de la députée de Chicoutimi. Toute entreprise qui possède un certificat de francisation délivré par l'Office a l'obligation de s'assurer que l'utilisation du français y demeure généralisée à tous les niveaux, selon les termes de l'article 141, et elle doit remettre à l'Office, à tous les trois ans, un rapport sur l'évolution de l'utilisation du français dans l'entreprise.

Je défie quelque critique que ce soit, dans cette Chambre et à l'extérieur, de trouver dans le texte actuel de la Charte de la langue française une disposition de cette nature. À l'heure actuelle, la Charte dit qu'une entreprise doit se procurer un certificat de francisation et, après, sur tout ce qui doit suivre, elle est complètement silencieuse. Il n'y a aucune obligation ni pour l'entreprise, pour pour l'Office de continuer le travail.

Nous l'avons commencé, ce travail de suivi, depuis trois ans. Depuis trois ans, il s'est fait des milliers de visites dans les entreprises afin de s'assurer que

le travail se poursuivait et, avec cet article-ci, le travail de francisation ne sera pas seulement un travail d'obtention de certificat que l'entreprise viendra afficher dans le hall d'entrée de son siège social, mais ce sera une obligation quotidienne dont elle devra rendre compte à la société québécoise. Et, de l'autre côté, on ose appeler ça recul. Je ne comprends plus le français!

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, pour une question complémentaire.

Mme Blackburn: m. le président, le ministre ne reconnaît-il pas que la disposition qu'il invoque apparaissait dans les règlements, qu'il y a encore 30 % des grandes entreprises qui n'ont pas de certificat de francisation? pourquoi n'a-t-il pas retenu la recommandation du conseil de la langue française et de son parti? c'était la seule recommandation qui avait un peu de consistance. serait-il le seul à avoir la vérité et le pas?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Non. Je vous dirai une chose qui vous étonnera peut-être, M. le Président, mais j'avais moi-même, dans des séances de travail consacrées à la préparation du projet de loi, esquissé une idée comme celle qu'a proposée le Conseil de la langue française. Les conseillers juridiques du gouvernement m'ont fait comprendre que c'eût été une disposition exorbitante qui eût donné trop de pouvoirs à un organisme.

Et vous remarquez que, dans la loi actuelle, c'est écrit que l'Office peut le faire avec l'autorisation expresse du ministre. On ne peut pas donner un pouvoir... C'est vous autres qui l'avez fait, ça, puis ça reste là, d'ailleurs; ça reste là. Mais donner un pouvoir aussi exorbitant d'action et de contrôle sur la vie d'une petite entreprise à un organisme de l'État est absolument exorbitant, et toute personne qui regardera sérieusement de quoi elle parle se rendra compte qu'on ne peut pas adopter une chose comme celle-là.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Mme Blackburn: Le ministre ne reconnaît-il pas qu'en reconnaissant le droit sans limites aux individus d'afficher dans leur langue, ce droit pourrait être justifié ou réclamé par les employeurs pour s'adresser, soit par écrit ou verbalement, à ces employés dans la langue de leur choix, ce qui compromettrait de façon radicale tous les progrès ? faibles, faut-il le dire ? qu'on a réalisés dans ce domaine?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: On ne reconnaît pas cela. Et si ça devait être le résultat logique de quelque disposition que ce soit du projet de loi, la députée aura l'occasion d'en faire la démonstration en commission parlementaire, puis nous nous pencherons volontiers sur le problème.

C'est absolument contraire à l'intention du gouvernement. Je ne peux pas souscrire à l'interprétation que propose la députée de Chicoutimi, pas du tout.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

Mme Blackburn: Le ministre, qui accuse tout le monde de ne pas écouter, n'a peut-être pas bien compris la question.

Le ministre réalise-t-il qu'en reconnaissant sans limites aux individus le droit d'afficher dans leur langue, sur la base de ce même principe, les employeurs, demain matin, pourraient exiger de s'adresser à leurs employés dans la langue de leur choix, que ce soit verbalement ou par écrit?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: Je pense que nous ne discutons pas du même projet de loi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Et ça me confirme mon impression que la députée l'a lu trop vite, puis s'est trop pressée d'aller faire une conférence de presse, après en avoir pris connaissance, sans l'avoir étudié... empreint de négativisme. Des déclarations empeintes de négativisme comme toutes celles qu'on a entendues, de l'autre côté de la Chambre. La première...

Oui, puis c'est mon droit le plus strict. Et je ne vous demanderai jamais de permission.

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre, à la question.

M. Ryan: En matière d'affichage, la première règle inscrite dans le projet de loi, c'est que tout affichage doit obligatoirement être en français.

Taxes sur le tabac et le tabac en feuilles

Le Président: En question principale, M. le député de Montmorency.

M. Filion: M. le Président, la semaine dernière, les médias relataient la perte de centaines d'emplois au Québec, suite à l'application de la nouvelle taxe sur le tabac en feuilles, comme si l'industrie du tabac n'était pas assez taxée.

J'aimerais souligner, M. le Président, et saluer la

présence dans nos galeries d'une vingtaine de producteurs de tabac en feuilles qui sont ici parce qu'ils ont à coeur leur emploi.

Par ailleurs, cette semaine, un quotidien citait l'Association des détaillants en alimentation du Québec qui dénonçait avec vigueur la perte de milliers d'emplois légitimes, légaux. En effet, des constatations récentes nous indiquent la faillite de 1 propriétaire de dépanneur sur 4, parce qu'ils respectent nos lois en matière du tabac.

M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Est-ce que le ministre des Finances peut nous indiquer comment le maintien des taxes sur le tabac au niveau actuel et l'ajout de la taxe sur le tabac en feuilles pourront stimuler l'emploi dans le secteur de la production du tabac en feuilles et de la vente au détail?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, j'ai eu l'occasion de répondre à la question du député, il n'y a pas longtemps, en cette Chambre, mais je comprends qu'étant donné que nous avons de la visite aujourd'hui... j'aime à m'associer à l'honorable député de Montmorency pour saluer tous ceux et celles qui nous honorent de leur présence aujourd'hui. (15 h 20)

Je vais vous dire en deux mots, même si je me répète... C'est que j'ai toujours résisté à taxer le tabac en feuilles. Pour moi, le tabac en feuilles, c'était le tabac utilisé par les moins bien nantis et ceux qui fument la pipe, comme je l'ai déjà fumée longtemps, et j'étais très sensible à tous ceux et celles qui avaient pris cette habitude, malgré qu'on sache fort bien qu'il y a un fort lobby antitabac qui nous demande de taxer, de toujours taxer davantage afin de faire en sorte que les gens fument moins et qu'il y ait moins de coûts du côté de la santé, et que nous protégions ainsi la santé de nos concitoyens.

Mais, ceci étant dit, je comprends fort bien les problèmes que subissent ceux qui sont dans ce domaine, et je sais qu'ils ont rencontré plusieurs personnes, même dans mon ministère, aujourd'hui. J'espère qu'ils ont eu l'occasion de faire certains progrès du côté de ce qui pourrait être des éléments nouveaux qui pourraient être ajoutés au dossier.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Filion: Toujours dans l'intérêt, M. le Président, bien sûr, des gens qui sont ici, qui sont venus assister à la période de questions, et de la population en général, le ministre peut-il expliquer pourquoi il a sacrifié des emplois au Québec pour s'harmoniser avec le reste du Canada? Pourquoi exactement, quand on sait pertinemment très bien que le taux qu'il a utilisé, de 2,92 $ des 100 kg, ne représente même pas une harmonisation avec le reste du Canada, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Levesque: En effet, M. le Président, le député de Montmorency veut simplement me donner un coup de main dans ma réponse lorsqu'il dit qu'il veut faire des comparaisons avec les autres provinces du Canada. Nous étions la seule province au pays à ne pas taxer le tabac en feuilles et, même en le taxant, nous le taxons deux ou trois fois moins qu'ailleurs. Je remercie le député de Montmorency de faire cette mise au point.

Ceci étant dit, je tiendrais à rappeler brièvement, M. le Président, que, lorsque nous avons eu une commission parlementaire du budget et de l'administration, nous avons invité les gens à venir nous faire part des problèmes qu'ils pouvaient avoir en fiscalité. Voici que toutes les associations de tabac ? et j'en ai nommé ici, en cette Chambre, je ne sais combien; et, même, il y a ici des gens qui sont justement présidents de l'une de ces associations ? sont toutes venues nous dire qu'il y avait un trou béant parce que nous ne taxions pas. Oui! nous ne taxions pas le tabac en feuilles.

Et vu que le leader de l'Opposition met cela en doute par ses gestes, je vais... Et, lui, évidemment, qui est très près du milieu, je tiendrais à lui rappeler que l'Association nationale des distributeurs de tabac et de la confiserie disait ceci: Dans la fiscalité sur les produits du tabac, il y a un trou béant au sujet de la taxation du tabac en feuilles. Et, lorsque les autres sont venus, la coalition qui regroupe l'Office des producteurs de tabac jaune du Québec, que j'ai reçue, d'ailleurs, à mon bureau, l'Association des détaillants en alimentation du Québec, le Conseil canadien de la distribution alimentaire, l'Association nationale des distributeurs de tabac et de la confiserie, le syndicat...

Je pourrais en nommer plusieurs. Ce que je veux dire, c'est que nous avons été à l'écoute de ces gens-là et que nous avons procédé d'une façon très démocratique. Et je suis encore à l'écoute de ces gens pour voir si on ne peut pas améliorer leur sort.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Filion: M. le Président, le ministre des Finances est-il conscient qu'avec une taxe additionnelle il contribue à la contrebande du tabac en territoire québécois? Et est-il également conscient, M. le Président, que le livre au Québec, aussi, n'est pas taxé et que, s'il mettait une taxe sur le livre, bien, ce qui arriverait, c'est qu'il sacrifierait des emplois dans le monde du livre, comme il l'a fait dans le monde du tabac en feuilles, M. le Président? Il a sacrifié des emplois sur le territoire québécois, M. le Président.

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Levesque: Parlant des emplois, je suggère au député de Montmorency qu'il consulte son chef qui a en main toutes les statistiques imaginables, et il lui dira simplement que le nombre d'emplois dans ce domaine n'a pas diminué. Ce qui est arrivé, cependant, c'est qu'il y a eu des emplois de perdus à un endroit pour ceux qui ont été gagnés ailleurs.

Il faut bien comprendre qu'il y a deux ans, il y a deux ans il y avait huit paqueteurs de tabac en feuilles ? et je le dis devant des connaisseurs. Je dis qu'il y avait 8 paqueteurs ? qu'on appelle les paqueteurs ? et aujourd'hui il y en a 22. Pourquoi ça s'est multiplié comme ça? Alors que, moi, j'essayais de ne pas taxer pour protéger ceux qui sont les moins biens nantis, il y en a d'autres qui sont arrivés dans le marché à la faveur du fait que le Québec était la seule province à ne pas taxer le tabac en feuilles et que les autres produits du tabac étaient fort taxés. Il y a eu cette réaction, et je ne blâme personne, mais je dis une chose, c'est qu'on a profité de cette situation-là pour se lancer dans ce domaine-là, ce qui m'a forcé à prendre les mesures que j'ai dû prendre.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances pourrait continuer à se forcer, et non seulement écouter, mais comprendre que ce qu'il a fait... Est-ce qu'il reconnaît que la taxe qu'il a imposée a eu pour objet d'enlever un marché officiel pour encourager le marché noir? Est-ce qu'il reconnaît cela? Et est-ce qu'il reconnaît que ce marché qui n'avait pas de taxes se faisait au grand jour, dans nos dépanneurs, dans nos épiceries, un peu partout, et qu'il a contribué, par sa décision, à augmenter le marché noir qui fait déjà des ravages dans ce secteur-là?

Le Président: M. le ministre.

M. Levesque: Oui, M. le Président. Je n'ai pas insisté pour qu'on m'applaudisse dans les galeries. Tout ce que je puis faire pour le député de Joliette, mon bon ami, le leader de l'Opposition, c'est de le référer au mémoire de la commission parlementaire qui explique si bien... Les gens sont venus ici expliquer ce qui s'était produit. Et là on le dit... Si j'avais le temps, M. le Président, je vous lirais cette page qui explique exactement comment la situation a évolué, et où on nous demande, on nous demande de taxer le tabac en feuilles. On nous le demande. Il n'y a personne qui nous a dit de ne pas le faire; tout le monde nous a demandé de le faire. Maintenant, je vais réexaminer, encore une fois, parce que c'est mon habitude de ne jamais arriver d'une façon doctrinaire. Vous savez, moi, ce n'est pas: La souveraineté ou rien! J'arrive et j'examine la situation d'une façon très objective. Si j'ai pu errer, je vais essayer de corriger, et si c'est comme je crois que c'est, bien, je vivrai avec ce que j'ai fait.

M. Chevrette: M. le Président, je m'aperçois que le ministre des Finances a des tendances, lui aussi, vers les encycliques. Je voudrais être influencé de son côté. Je voudrais avoir... Est-ce qu'il se rappelle que le 6 mai dernier il avait dit ceci: D'abord, c'est suite à un consensus unanime ou quasi unanime que j'ai dû taxer la feuille de tabac? Est-ce qu'il considère que les consommateurs qui sont contre, que les détaillants qui sont contre, que les producteurs qui sont contre, constituent une unanimité, au Québec, sur sa décision?

Le Président: M. le ministre.

M. Levesque: M. le Président, lorsque j'ai dit qu'il y avait un consensus, le consensus, il est apparu à la commission parlementaire. C'est ce que j'ai dit. Et je prierais le député de Joliette, qui n'était pas présent ? il ne devait pas l'être, d'ailleurs, à cette commission ? je lui demanderais de relire les mémoires qui ont été déposés, d'entendre et de relire les épreuves des débats, et il verra qu'il y avait là un consensus. (15 h 30)

Maintenant, il y a sûrement un problème dans le domaine du tabac, et je ne le nie pas. Au contraire, j'ai fait plusieurs démarches auprès du gouvernement fédéral afin de le sensibiliser au fait que je ne pouvais pas seul, comme ministre des Finances du Québec, essayer de lutter contre la contrebande si je n'avais pas un appui égal du côté du gouvernement fédéral. Parce qu'il ne faut pas oublier... N'essayez pas de sauter sur la souveraineté, là, un instant! Je disais justement au gouvernement fédéral qu'il faut qu'on s'attaque à la contrebande ensemble. Il y a évidemment des moyens que nous avons pris du côté des amendes, du côté... Nous allons en prendre encore, du côté de l'implantation de forces qui sont nécessaires au maintien de l'ordre, etc. Mais il y avait aussi cette autre voie qui aurait pu être explorée, de diminuer ensemble, parce que, même si je diminuais...

Le Président: Alors, en conclusion, M. le ministre.

M. Levesque: ...complètement les taxes sur le tabac, ça ne ferait absolument rien. Nous perdrions le revenu et nous n'aurions pas atteint le but que nous recherchons.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre des Finances pourrait faire preuve d'un peu d'initiative dans le dossier et démontrer, M. le Président, qu'on n'est pas toujours obligé de se fier sur les autres et d'attendre que les autres fassent de quoi? De par sa réponse, n'est-il pas en train de nous dire que, si le fédéral et l'Ontario ne font rien, il ne fera rien? Est-ce qu'il n'a pas le

droit, comme gouvernant, de prendre l'initiative d'acculer les autres à en prendre, des décisions, en étant les instigateurs? Ça pourrait peut-être être une forme de fédéralisme, au moins un tantinet acceptable.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, j'aime le regard, une fois qu'il a fait cette déclaration, du leader de l'Opposition vers la galerie. Et il doit être heureux, M. le Président, de lui-même. Mais je demanderais au député et au leader de l'Opposition de bien comprendre que même après cette envolée, le député n'a pas trouvé la solution, et la solution qu'il a, il doit la garder pour lui parce qu'il ne l'a pas communiquée à cette Chambre.

Il n'y a pas une solution que nous n'envisagerons pas, et j'invite le député de Joliette, s'il a une solution à nous proposer, et nous sommes en voie de mettre en place plusieurs éléments de solution, mais s'il a un élément additionnel à nous suggérer, soyez assurés qu'en toute humilité je recevrai ces suggestions-là dans l'intérêt du public et, plus particulièrement, de l'intérêt de ceux et celles qui nous font l'honneur de nous visiter aujourd'hui.

Le Président: En question principale, M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

Réaction de l'UMRCQ au sujet de l'application du projet de loi 102 aux employés municipaux

M. Gendron: Oui. M. le Président, depuis au moins les deux dernières années, l'Union des municipalités du Québec, qu'on appelle communément l'UMQ, demande au gouvernement du Québec qu'il gèle le salaire des employés municipaux à l'instar des employés de la fonction publique québécoise. Pourtant, ce gouvernement a la prétention d'avoir un discours qui répète constamment, est très axé sur la responsabilisation des élus municipaux. Il a même le réflexe très facile et constamment ouvert de pelleter dans la cour des municipalités plusieurs responsabilités comme la police, les routes, la qualité de l'eau, etc., et, bien sûr, toujours sans les ressources financières requises.

Le ministre des Affaires municipales peut-il nous indiquer à quel moment précis l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, qui représente 1100 municipalités, à quel moment l'UMRCQ aurait demandé à votre gouvernement d'exercer leur responsabilité à leur place envers les employés municipaux? Quand est-ce qu'ils vous ont demandé ça?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Le député d'Abitibi-Ouest, étant placé de ce côté de la Chambre où il siège, n'a probablement pas noté, cet après-midi, la présence dans les galeries du président de l'Union des municipalités du Québec, M. Ulric Blackburn, de Chicoutimi, qui était accompagné du directeur général de l'UMQ. Et le député pourra constater que l'UMQ, qui représente la très grande majorité de la population du Québec au plan municipal, non seulement approuve le projet de loi déposé par le président du Conseil du trésor, mais en a fortement demandé l'adoption à plusieurs reprises, au cours des deux dernières années.

Ça, le député doit le savoir, et je le rappelle en cette Chambre parce que c'est fondamental. Il est vrai, d'autre part, que l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec n'a pas adressé une semblable demande au gouvernement. Nous le comprenons facilement parce que les municipalités que regroupent l'UMRCQ sont des municipalités de taille petite, de manière très générale, ou moyenne. Et une municipalité qui compte 5 ou 10 employés, ou 3 ou 4, puis, des fois, seulement 1, 2 ou 3 employés n'a pas les mêmes problèmes avec son personnel que des municipalités solidement constituées. Il peut arriver qu'elle ait fait son ménage en matière de rémunération ou d'organisation du travail, l'an dernier ou l'année précédente, qu'elle ne soit pas intéressée à aller chercher l'appui du gouvernement. Mais quand des municipalités doivent transiger sous l'empire de nos lois qui régissent les relations de travail, par exemple, on comprend davantage qu'elles ressentent le besoin d'une discipline plus efficace dans ces temps difficiles. Je souligne que, dans le projet de loi qui a été déposé cet après-midi, toute municipalité qui voudra en prendre l'initiative pourra se retirer de la politique gouvernementale et choisir sa propre politique, si elle estime être capable de s'en donner une meilleure.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Gendron: Est-ce que le ministre se rend compte qu'il applique la même médecine, dans le projet de loi, à 1100 municipalités du Québec, qui n'ont jamais demandé une telle disposition dans un projet de loi? En conséquence, est-ce qu'il ne convient pas que, par rapport à votre discours, ça fait ridicule d'appliquer une même politique, alors que le problème n'est pas de même nature, tel que vous venez vous-même de le constater?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Ryan: La formule du droit de retrait, de «1'opting out», inscrite dans le projet de loi 102, permet à toute municipalité du Québec de se retirer de cette politique, d'adopter sa propre politique, ses propres décisions. C'est ce que le Québec a demandé combien de fois, au plan fédéral. Nous disions au gouvernement fédéral: Vous pouvez avoir vos politiques, mais donnez-nous, reconnaissez-nous le droit de retrait qui convient à notre caractère particulier. Nous disons la même chose

aux municipalités, et nous laisserons parler les municipalités par elles-mêmes. Je pense qu'elles auront une réaction beaucoup plus équilibrée que celle qu'on voudrait leur prêter sans même les avoir entendues. Je ne viole pas ici de conversation privée, que j'ai pu avoir avec des porte-parole également de l'UMRCQ, et qui m'ont permis de constater qu'il n'y a pas beaucoup d'opposition, au fond, à la politique que nous épousons aujourd'hui, même si, peut-être, on ne le dira pas sur la place publique.

Le Président: Alors, en question principale, maintenant, M. le député d'Anjou.

Accessibilité de la justice et disparition du magazine «Justice»

M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.

Alors qu'en février 1992, lors du Sommet de la justice, le ministre de la Justice multipliait les belles déclarations en faveur d'une plus grande accessibilité de la justice, et qu'il s'engageait formellement à agir dans ce sens, on apprenait hier que le ministre de la Justice allait fermer le magazine Justice, le seul magazine de vulgarisation juridique au Québec, et cela, alors qu'à la veille même de l'entrée en vigueur du nouveau Code civi, la demande en informations juridiques n'a jamais été aussi grande. Comment le ministre explique-t-il que, d'une main, il a cru nécessaire de créer un fonds d'aide aux organismes communautaires, de 500 000 $, pour notamment diffuser l'information juridique en vue d'améliorer l'accès à la justice, et que, de l'autre main, pour sauver 40 000 $, il ferme le seul magazine de vulgarisation juridique au Québec?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: Oui, M. le Président.

En effet, lors du Sommet de la justice, il y a un peu plus d'un an, j'ai pris un ensemble d'engagements pour rendre la justice encore plus accessible, et je pense que les projets de loi que j'ai présentés en cette Chambre, aujourd'hui, témoignent de cette volonté que j'ai de pouvoir rendre la justice plus humaine et plus accessible au Québec, M. le Président. D'ailleurs, on aura l'occasion d'en discuter, lorsque nous discuterons ces projets de loi importants que j'ai présentés en première lecture, aujourd'hui.

En ce qui regarde le magazine Justice, il y a un effort gouvernemental, M. le Président, qui s'impose au niveau de l'ensemble des ministères. Et pour le ministère de la Justice, comme pour les autres ministères, il faut participer à cet effort gouvernemental qui s'impose. Au niveau du ministère de la Justice, j'ai pris les moyens, comme gestionnaire, pour que l'information puisse se faire adéquatement. Nous avons des projets de loi importants, nous avons la réforme du Code civil, que nous avons complétée, et nous savons que le nouveau

Code civil sera en application au mois de janvier prochain. Nous avons donc un effort à faire pour informer la population. Cet effort sera fait, mais malheureusement, en ce qui regarde le magazine Justice ? et je veux rendre hommage à ceux et celles qui, pendant les 15 dernières années, ont offert le meilleur d'eux-mêmes pour que cette revue soit une bonne revue ? elle ne pouvait pas faire ses frais, M. le Président, et il faut procéder d'une autre façon.

Le Président: S'il vous plaît!

M. Rémillard: C'est ce que je vais faire, comme ministre de la Justice.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

Maintenant, motions sans préavis.

Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, il y a consentement avec l'Opposition pour donner les avis...

M. Chevrette: On n'est pas à l'étude des crédits, là. (15 h 40)

Le Président: Non. Je comprends donc qu'il y a, à ce moment-ci, une demande pour procéder aux avis touchant les travaux des commissions immédiatement. Il y a consentement?

Une voix: II y a consentement.

Le Président: II y a consentement. Donc, M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélisle: Merci, M. le Président.

Alors, concernant les avis touchant les travaux des commissions, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La-Fontaine, la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, M. le Président, le vendredi 14 mai 1993, de 10 heures à 11 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'éducation complétera ses auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi 82, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives.

Enfin, M. le Président, j'avise également cette Assemblée que le mardi 18 mai 1993, de 10 heures à 12 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission

de la culture procédera à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi 86, Loi modifiant la Charte de la langue française. Et je dépose les avis, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader du gouvernement.

Est-ce qu'il y a consentement pour qu'on procède également à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée? Non? Alors, plus tard, M. le député de Drummond. On n'en est pas rendu à cette étape-là.

Motions sans préavis

Motions sans préavis. M. le député d'Iberville. M. Chevrette: M. le Président, avant...

Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, sur les motions sans préavis, on en a trois: II y en a une sur le général Dextraze, il y en a une sur les garderies, et il y en a une sur la Semaine de la police. Moi, je n'ai pas l'intention de me faire jouer un tour, là, comme leader, en disant: On accepte une première et on refuse la deuxième. Je suis prêt, de consentement, à ce qu'il y ait un intervenant de chaque côté pour les trois thèmes. J'ai accepté, dans le cas, par exemple, de la police que ce soit le ministre qui la fasse et non moi, et je répondrai au ministre, à sa motion. Mme Carrier-Perreault, députée des Chutes-de-la-Chaudière, fera celle de la Semaine nationale des garderies, parce que c'est elle qui l'a enregistrée en bonne et due forme avant la période de questions, et que le député d'Iberville fasse également sa motion à cause du décès, et que M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, NDG, puisse parler également sur la motion, à moins qu'il y en ait d'autres. Mais que ce soit limité, au moins, à un par formation, et pas essayer d'en accepter une et la deuxième dire non au consentement.

On a fait des motions, et c'est ça que je propose. Qu'on s'entende au moins... Qu'il y ait une intervention de non prévue d'un indépendant qu'on n'a pas consulté, ça, ça ne me dérange pas, mais au niveau des deux formations, c'est un de chaque côté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Compte tenu de l'ensemble des paramètres établis par le leader de l'Opposition, ça nous semble correct. Et s'il y avait un député indépendant qui voulait intervenir ? je ne sais pas si c'est son intention d'intervenir ? il n'y aurait pas de problème. Il faudrait quand même limiter les débats. Alors, une personne de chaque côté, de la formation ministérielle et... C'est surtout quant au contenu des motions, qui est plus important que de savoir qui présente la motion le premier.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous comprendrez que, au fur et à mesure que les motions seront annoncées, je devrai vérifier s'il y a, dans un premier temps, consentement pour qu'on puisse débattre des motions en question. Je comprends que ce que vous venez de m'indiquer, c'est une espèce d'entente entre les parties dont je prends note.

Alors, M. le député de Drummond, ça va?

Première motion sans préavis, M. le député d'Iberville.

Une voix: Monsieur...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre? Alors, M. le ministre des Affaires municipales. Allez-y, M. le ministre.

Souligner la Semaine de la police M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je vous remercie de votre obligeance. Ce n'est pas du tout parce que je veux avoir la priorité dans ce genre de motion, mais parce que je dois quitter pour la métropole, où nous avons ce soir une réunion de la Table Québec-municipalités.

Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante: «Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine de la police, qui se tient cette année du 9 au 15 mai sous le thème "Mieux se connaître pour mieux s'entraider".»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a consentement pour que l'on puisse débattre de cette motion?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Allez-y, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Nous soulignons chaque année, à travers le Québec, le travail qu'accomplit la police au service de la communauté. Cette initiative, qui se répète depuis de nombreuses années, est tout à fait opportune. Elle nous permet de réfléchir ensemble pendant quelques jours sur cette présence parmi nous d'un corps de personnes qui veillent jour et nuit à la sécurité de la population, en assumant souvent, pour exercer leurs fonctions, des risques considérables.

Lors de l'inauguration de la Semaine, qui a eu lieu à l'Institut de police de Nicolet vendredi dernier, nous avons décerné des décorations à plusieurs policiers qui se sont illustrés par leurs actes de bravoure au cours

de la dernière année. Je prenais connaissance des actes que l'on a voulu ainsi honorer, et ces actes illustrent les risques continus que doivent courir les policiers dans l'exercice de leur devoir.

On a, par exemple, accordé une Croix de bravoure au sergent Gaston Lafleur, du Service de police de la ville de Québec. Le sergent Lafleur s'est distingué en mettant fin à une tentative de vol à main armée avec échange de coups de feu dans une institution bancaire. On a souligné le travail du sergent Jean Bissonnette, de la Sûreté du Québec. Celui-ci a été décoré pour le sang-froid et le professionnalisme dont il a fait preuve lors d'une tentative de meurtre, accompagnée de blessures graves, survenue en 1991. L'agent Denis Larochelle s'est vu décerner une médaille pour action méritoire parce qu'avec l'aide de l'agent Marc F. Lauzon ? ils sont tous les deux du Service de police de la ville de Hull ? il a empêché une personne désespérée, qui habitait au huitième étage d'un immeuble à logements, de mettre le feu à ses biens et de se suicider en se jetant du haut de son balcon. On a de même honoré les agents Danie Tremblay et Martin Groulx, du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, pour l'action qu'ils ont posée lors d'un incendie majeur survenu dans un édifice de trois étages qui abritait 15 locataires. On a souligné également le travail des agents Michel Bujold, Yves Francoeur, Robert Giroux, Robert Potvin et autres, qui se sont distingués à l'occasion d'un grave incendie survenu dans une résidence pour personnes âgées non autonomes comptant 116 bénéficiaires. Des citoyens, également, se sont vu reconnaître des actes de bravoure qu'ils ont posés en étant témoins de scènes qui requéraient la présence de policiers et qui requéraient également la collaboration de civils.

C'est bon, à l'occasion d'une semaine comme celle-ci, de souligner cette présence irremplaçable et absolument indispensable dans nos rangs. Nos policiers s'acquittent de leurs tâches maintenant avec un sens professionnel, munis d'une formation technique beaucoup plus poussée qu'autrefois. Ils le font avec distinction et ordre.

J'ai eu l'occasion, depuis que je suis ministre de la Sécurité publique, M. le Président, de travailler en étroite collaboration avec la Sûreté du Québec, qui est notre grand corps national de sécurité publique au Québec, avec le service de police de la CUM, avec les services de police de toutes les grandes villes, de toutes les régions du Québec, avec les syndicats qui réunissent ces policiers, avec le personnel de direction de ces corps de police, et je voudrais vous assurer que j'ai observé dans ces milieux un esprit d'engagement, un amour du travail, une loyauté envers l'autorité civile, une capacité, une volonté de collaboration et un empressement à servir la population qui sont vraiment beaucoup plus élevés que la moyenne.

Nous avons eu, encore ce printemps, une série d'inondations à travers le Québec. Allez vous informer, dans tous les endroits où sont survenues des inondations, qui arrive le premier sur les lieux, qui est présent, en premier lieu, pour venir en aide aux populations concernées. Bien, c'est, très généralement, la Sûreté du Québec. Et j'ai reçu, des autorités municipales des endroits qui ont été affectés cette année, des témoignages renouvelés à cette fin pour reconnaître... Je pense que le député de Joliette, qui a été témoin des inondations qui ont eu lieu dans son comté, à Notre-Dame-des-Prairies et à Saint-Charles-Borromée, est au courant, comme moi, du témoignage que des autorités municipales ont rendu à la Sûreté du Québec pour l'excellent travail qu'elle a accompli. (15 h 50)

Le député de Nicolet était avec moi, il était présent à l'inauguration de la Semaine de la police à Nicolet. Je pense qu'il peut témoigner, dans sa circonscription, des liens de collaboration qui existent, autant entre la Sûreté du Québec et les autorités civiles qu'entre les corps municipaux qui existent chez lui et l'autorité politique. Je pense que nous sommes très fortunés d'avoir, au Québec, des services de police responsables.

À l'occasion du dépôt du projet de loi 102, nous causons une peine réelle à nos policiers regroupés dans des syndicats ou employés au service de municipalités ou de l'État du Québec. Certains d'entre eux étaient présents dans les galeries, cet après-midi, pour le dépôt du projet de loi. J'ai eu l'occasion de les rencontrer. Nous devons demander un sacrifice à tout le monde, à tous ceux qui travaillent dans le secteur public; nous avons même joint le monde municipal, cette année, à cette démarche qu'institue le gouvernement. Je veux les assurer que nous avons procédé à partir d'un principe de fond qui nous apparaît absolument inviolable, c'est le principe de l'égalité de tous, autant devant les privilèges que la loi reconnaît, devant les droits que la loi doit respecter que devant les responsabilités que nous sommes, de temps à autre, appelés à assumer pour assurer une meilleure santé de la société politique.

Alors, nous devons éviter de faire des exceptions. Ça a été fait autrefois, et je pense que certains députés en cette Chambre s'en souviendront. On se disait: II ne faut pas toucher à la police, parce que c'est trop dangereux. Nous avons fait plutôt le pari, au gouvernement, d'inviter la police à accepter d'être traitée sur un pied d'égalité avec les autres. Mais je l'assure, en retour, qu'elle sera traitée sur un véritable pied d'égalité. Elle aura la chance de donner son point de vue.

J'espère qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi nous pourrons entendre les points de vue des principaux organismes concernés, autant du côté des employeurs que du côté des syndiqués. Je suis sûr que les membres de nos corps policiers seront appelés à partager ces sacrifices ? avec nous aussi; le sacrifice sera le même pour les ministres et les députés, je tiens à le souligner. Il n'y aura pas de distinction de classe là-dedans. C'est une mesure qui s'applique à travers tout le secteur public et parapublic québécois. Et je suis sûr que les policiers donneront l'exemple d'une participation

responsable à cet exercice. Je veux les assurer...

J'ai eu l'occasion de discuter avec eux ces derniers jours. J'ai vivement apprécié la grande dignité, en même temps que la fermeté, évidemment, mais la grande dignité, la courtoisie impeccable avec laquelle ils sont venus présenter leur point de vue et défendre leurs intérêts légitimes.

À l'occasion de cette Semaine de la police, nous sommes invités à resserrer les liens qui rattachent la police aux communautés au service desquelles elle est placée. On a trop souvent vu la police comme une force qui intervient quand ça va mal quelque part. La police est surtout là quand ça va bien. Elle est là pour servir la tranquillité publique, pour faire en sorte qu'elle soit maintenue, protégée, conservée. Elle accomplit un travail formidable de ce côté, mais elle a besoin de plus en plus, dans une société où la criminalité est en augmentation constante, de la collaboration de la population. Et dans les sociétés, M. le Président, où il existe une étroite collaboration de la population au travail de la police, dans le meilleur sens du terme, on constate que la criminalité diminue, que la violence recule et que la paix sociale est mieux assurée.

Alors, j'adresse mes hommages sincères à nos concitoyens et concitoyennes qui assument la tâche de servir leurs concitoyens dans le rôle difficile, exigeant mais très noble en même temps, de membres d'un corps policier organisé au Québec. Je souhaite que cette Semaine de la police soit pour nous tous et nous toutes l'occasion de réfléchir, de mieux comprendre le rôle de la police et de mieux percevoir les liens de collaboration, je dirais même d'amitié civique, qui devraient unir la population à la police qui la sert nuit et jour. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique.

Sur cette même motion de M. le ministre de la Sécurité publique, je cède la parole à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

Nous avions précisément voulu cette Semaine, et ce n'est qu'à la dernière minute que le ministre a souligné son intention de la présenter et que nous avons accepté qu'il la présente, puisqu'il était de notre intention de le faire.

Je pense que la réflexion qui se fait cette année et qui s'est amorcée depuis une couple d'années, d'ailleurs, dans plusieurs milieux, est fort intéressante.

Mardi soir dernier, nous, à Joliette, on avait la chance, également, de vivre avec nos policiers ce qu'on appelle un forum des citoyens où les policiers se sont assis avec des gens, des jeunes, des étudiants, des personnes de l'âge d'or, des professionnels, des élus municipaux. Et, ensemble, on a échangé sur ce qu'on attendait, sur nos perceptions de la police, sur ce qu'on attendait, nos attentes de la police et ce qui manquait entre ces perceptions et ces attentes pour faire en sorte qu'on puisse faire quelque chose d'un peu mieux.

Il est bien évident que chaque clientèle pense ou a des perceptions différentes. C'est évident, puis les attentes ne sont pas les mêmes, qu'on soit de l'âge d'or, qu'on soit des jeunes à l'école ou qu'on soit des marchands du centre-ville qui veulent de la protection. Ça, c'est évident. Mais, au-delà de tout ça, moi, j'ai senti qu'il y avait une volonté profonde de plusieurs corps policiers de faire en sorte qu'ils soient perçus différemment, parce qu'il est facile, à partir d'un incident x ou y, de charrier et de noircir tout l'ensemble d'un corps policier, à partir d'un événement, d'un événement qui, soit dit en passant, peut être complètement dicté soit par l'émotion, soit par le danger, puis qui est charrié, par la suite, sous toutes sortes de formes.

Combien d'individus, maintenant, jouent sur leurs différences, même face à la police, les plaçant dans une situation d'intervention difficile? Et je le dis comme je le pense, moi: difficile. Et ça, on n'y pense pas comment ça peut être difficile pour un corps policier, dépendant des tendances ou des tangentes que prennent certaines discussions dans notre société, comment agir.

On leur demande d'être très perspicaces, d'être des diplomates au bout, d'être d'un doigté absolu, total, d'être raffinés, d'être courtois, d'être polis, d'avoir à peu près toutes les qualités. Mais on vit dans une conjoncture, ne l'oublions pas, extrêmement difficile, M. le Président, avec un taux de chômage de 12 %, avec un nombre sur l'aide sociale de 600 000, 700 000. On sait que la criminalité augmente dans ce temps-là, à part de ça. Moins tu as de travail dans une société, plus tu as des difficultés budgétaires, moins tu as de ressources financières pour encadrer.

On demande à des groupes du corps policier, dont on diminue les budgets, de faire plus avec moins, comme partout. C'est une expression: Fais donc plus avec moins. Puis la criminalité augmente. Moi, je voudrais leur dire tout le respect que j'éprouve. Oui, je pense qu'on est servis passablement bien. Il y a toujours place pour la perfection, ça, dans n'importe quel groupe, mais on est bien servis, M. le Président. Il faudrait faire un effort de compréhension vis-à-vis de ces gens dans la conjoncture, en particulier, que nous traversons.

Nous traversons une conjoncture très difficile sur le plan de notre société. Et ces gens-là sont encore dans une situation beaucoup plus difficile qu'on puisse le croire parce que, avec moins d'effectifs, avec moins de ressources financières, ils sont obligés de faire face à un taux de criminalité encore plus fort. On leur demande de faire de la prévention, on leur demande d'être moins répressifs, puis de faire de l'éducation. On leur demande à peu près tout ce qu'il faut et, bien souvent, sans le dire, on leur demande de se substituer au manque au niveau de la famille, au niveau de l'école, au niveau de notre société. C'est ça. Et, dans certains milieux, on leur demande d'être très répressifs puis, dans d'autres,

on dit: aucune répression. Ils sont toujours placés entre deux feux.

Donc, M. le Président, je voudrais leur dire, en tout cas, de la part de l'Opposition officielle, qu'il y a une compréhension. Et, si on a responsabilisé les corps policiers, au cours des dernières années, M. le Président, j'ose espérer que les discours qui font appel à la responsabilisation, on les fera également au monde municipal. On ne peut pas leur pelleter des taxes dans leur cour, puis leur dire: Je fais ça pour vous responsabiliser. Et, au moment où ils doivent être en responsabilité, justement, puis de prendre leurs décisions, le gouvernement se substitue par un projet de loi qu'il dépose cet après-midi. (16 heures)

Franchement, là! La cohérence ne touche pas cette équipe-là, M. le Président. Nous, on va faire appel à la responsabilisation, mais totale. Responsabiliser les gens, c'est leur laisser prendre leurs décisions quand elles sont statutaires, à part de ça, dans des lois. Ce n'est pas de se substituer. L'État n'est là que pour y aller dans les cas d'extrêmes problèmes graves de notre société, mais n'est pas là pour se substituer aux pouvoirs qui sont dévolus aux élus municipaux face à leurs corps de police, face à leurs employés.

On va en parler longuement de cette loi, M. le Président, très longuement. On va s'expliquer les principes qui sont en cause. On va discuter du fond des choses, des principes qui sont en cause. Je vous garantis, M. le Président, qu'on va collaborer, mais on va collaborer à ouvrir les yeux à ceux qui ont des discours vides ou bien contradictoires par rapport aux objectifs qu'ils poursuivent.

Donc, M. le Président, à tous les corps policiers du Québec, nous leur disons: Ne lâchez pas. Continuons la réflexion ensemble pour mieux nous connaître, et j'ai l'impression que plus on se connaîtra, plus on s'appréciera, et ça, au niveau de tous les groupes de notre société. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Joliette.

Sur la motion de M. le ministre de la Sécurité publique, M. le député de Drummond.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président.

Permettez-moi de joindre ma voix en pensant aux policiers et policières de la ville de Drummondville et aussi aux policiers et policières de la Sûreté du Québec qui sont basés à Drummondville, qui, jour après jour, semaine après semaine, sont le digne reflet des représentants de l'ordre, de leur fonction qui les appelle à évoluer dans notre collectivité. Souvent, on oublie toujours...

Vous savez, lorsqu'on regarde nos corps policiers, on pense toujours au côté répression. Moi, j'aime mieux me rappeller, M. le Président, ce qu'on désigne souvent à nos policiers et à nos policières: des agents ou des agentes de la paix. Ces hommes et ces femmes qui, comme a été souligné des deux côtés par M. le ministre et par M. le leader de l'Opposition... Bien souvent, M. le Président, on met nos policiers et nos policières, en 1993, dans des situations qui sont pratiquement intenables.

Mondialisation, oui, ça veut dire ouverture vers le monde, mais ça veut dire aussi des réalignements au niveau économique qui font en sorte, lorsqu'on regarde les derniers indices indicateurs au niveau économique, qu'on a plus de chômage, qu'on a plus d'aide sociale, qui placent aussi de nos citoyens et de nos citoyennes avec les responsabilités familiales dans des cas de désespoir, qui souvent demanderont à ces hommes et ces femmes qui sont les gardiens de nos lois et de nos règlements d'avoir à intervenir, M. le Président. Souvent, on oublie que, ces hommes et ces femmes, M. le Président, contrairement à nous, les hommes et les femmes politiques qui avons des dépôts de projet de loi, qui avons des documents, qui allons en commission parlementaire et qui revenons, échelonnés sur des jours, pour être capables d'approfondir le sens de nos décisions et transférer ça dans des actes, on leur demande, dans l'espace de quelques instants, de faire face à des situations qui sont les plus dramatiques et qui demandent continuellement un sang-froid.

Alors, c'est en pensant à ces hommes et ces femmes, M. le Président, que je joins ma voix pour souligner cette Semaine de la police, qui est sous le thème «Mieux se connaître pour mieux s'entraider». Et je n'ai pas l'intention, M. le Président, de prendre plus de temps qu'il faut, mais simplement vous rappeler et souligner que lorsqu'on a étudié le projet de loi 74, M. le Président... Et M. le ministre faisait référence, cet après-midi, au projet de loi 102 qui a été déposé, où on abolit carrément pratiquement le droit aux négociations des différents intervenants au niveau de ce grand appareil gouvernemental, incluant maintenant le monde municipal.

Alors, je rappellerais à tous mes collègues d'aller jeter un coup d'oeil sur le projet de loi 74, M. le Président, qu'on avait adopté. Allez voir ce que nos corps policiers et pompiers nous ont déposé devant les six mémoires que nous avons entendus. Je pense qu'il y avait une réflexion, M. le Président, comme M. le ministre l'a souligné, d'ailleurs, dans ses propos où on a dénoté un sérieux de la part de nos policiers, où des solutions ont été mises sur table.

Alors, j'ose espérer que, en cette semaine, les recommandations qui nous ont été faites par ces intervenants et intervenantes lors de l'étude du projet de loi 74 ne demeureront pas lettre morte et que nos dirigeants municipaux et aussi les différents dirigeants des unions des corps policiers pourront, à partir de la législation qu'on avait votée avec la loi 74, mettre à profit, M. le Président, ce que le législateur avait voulu. Mais je dois

vous avouer que lorsque je regarde la législation qui est déposée aujourd'hui avec le 102 et lorsque je regarde ce que j'ai eu à faire en commission parlementaire comme travail avec mes collègues lors de l'adoption du projet de loi 74, souvent on se demande si le législateur n'est pas en contradiction.

Ceci étant dit, je n'irai pas plus loin devant cet état de faits. Nous aurons l'occasion d'y revenir, M. le Président. Alors, à tous nos policiers et nos policières de ma région de Drummondville, merci de vous impliquer, les hommes et les femmes de la Sûreté du Québec, à la maison La Rose des vents, qui est une maison pour les femmes violentées. Merci aux policiers et aux policières de la ville de Drummondville, à même les programmes d'éducation, à même de toutes leurs interventions auprès de la jeunesse de chez nous, d'apporter ce message de paix et, aussi, cette lueur d'espoir devant les misères de la vie, M. le Président.

Alors, tous ceux et celles qui, comme dans ma région, comme dans mon patelin, travaillent à travers les différentes collectivités du Québec, vous avez tout notre respect, parce que votre tâche n'est pas facile en 1993. Et osons espérer que les législateurs que nous sommes sauront, dans un avenir rapproché, vous donner les outils ? pas simplement le coffre mais les outils ? pour vous permettre d'accomplir, comme vous l'avez toujours si bien fait, avec professionnalisme votre tâche.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond.

Mise aux voix

Alors, est-ce que la motion de M. le ministre de la Sécurité publique, qui se lit comme suit: «Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine de la police, qui se tient cette année du 9 au 15 mai sous le thème "Mieux se connaître pour mieux s'entraider"», est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous sommes toujours à l'étape des motions sans préavis.

Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, je vous écoute.

Souligner la Semaine nationale des garderies

Mme Carrier-Perreault: Oui, je vous remercie, M. le Président.

Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante: «Que cette Assemblée souligne la Semaine nationale des garderies, qui se déroule du 10 au 16 mai 1993 sous le thème "L'important, ça se mesure"».

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion? Consentement.

Allez-y, Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Alors, je vous remercie, M. le Président.

Effectivement, nous en sommes à la septième édition de la Semaine des garderies. Bien que la semaine soit déjà largement entamée, je pense qu'on ne peut quand même pas manquer l'occasion de souhaiter une agréable semaine à tous les gens qui s'impliquent dans le milieu des services de garde. «L'important, ça se mesure»; c'est le thème qui a été retenu pour démontrer, évidemment, l'importance des garderies pour les tout petits et pour leur famille aussi, mais aussi, M. le Président, pour nous rappeler qu'il est nécessaire de faire des choix sociaux et économiques en fonction de l'importance qu'on accorde à ce dossier. C'est un thème, je pense, qui est particulièrement bien choisi, qui rejoint les préoccupations des gens du milieu et de plusieurs autres milieux en cette période où les choix sont plus difficiles et, par conséquent, où les priorités aussi deviennent plus évidentes.

À chaque année, en cette Chambre, lors de ce moment de la Semaine des garderies, on vient, à toutes fins pratiques, parler de l'importance des services de garde. On vient nous expliquer à quel point ? et on en parle des deux côtés de la Chambre ? il est essentiel, ce service-là, pour les parents, pour les familles au Québec. On vient aussi parler de l'importance de cet outil, parce qu'à toutes fins pratiques cet outil, les services de garde, est essentiel si on veut en arriver à concilier la famille et le travail.

Dans un autre ordre d'idées aussi, lors de cette semaine, on vient aussi, en cette Chambre, reconnaître le travail particulièrement professionnel et important ? toujours important, M. le Président ? des éducateurs et des éducatrices en garderie. À chaque année, c'est la même chose, et je pourrais vous citer des textes qui ont été faits année après année, où on répète toujours des compliments et des félicitations à l'endroit de ces gens qui sont impliqués, qui prennent soin de nos enfants, qui les éduquent. Je vois encore les propos de la ministre, l'an dernier, M. le Président: Le professionnalisme et le travail remarquable et combien complexe des éducatrices et des éducateurs font qu'ils sont bien plus que des gardiens, comme certains seraient tentés de les qualifier. Ils sont au coeur de l'action éducative auprès des enfants. Leur rôle exige d'eux, notamment, beaucoup de jugement, de psychologie, de perspicacité et de patience. L'évolution des services de garde au cours de la dernière décennie est en soi un vibrant hommage aux femmes et aux hommes qui ont bâti les services de garde tels que nous les connaissons aujourd'hui. On pense notamment aux éducateurs, au personnel de

direction, aux différents coordonnateurs, aux associations de parents, etc., M. le Président.

Cependant, il faut quand même constater que la reconnaissance de ce travail-là passe aussi par la reconnaissance au niveau des salaires. Il faudrait qu'on pense à donner des salaires décents aux éducatrices et éducateurs en garderie. Ça, c'est plus difficile, il semble, à faire passer. La reconnaissance des services de garde passe aussi par des modes de fonctionnement, par des modes de financement appropriés. Et on sait que, particulièrement cette année, M. le Président, les services de garde, les garderies sont tout à fait pénalisées et demandent, ont des revendications, je pense, tout à fait justifiées, tant au point de vue des salaires des éducatrices qu'au point de vue des subventions de fonctionnement. On déplore, effectivement, que les subventions qui sont allouées au fonctionnement... (16 h 10)

Le plan qui a été mis sur pied par le gouvernement libéral en 1989 cause de grandes iniquités à travers les garderies au Québec. On sait comment ça fonctionne, ce plan-là, M. le Président: toutes les garderies, peu importe le nombre de places qu'elles ont ? qu'on ait 30 places ou 60 places ? ont exactement le même montant de base. Par après, pour que les subventions soient plus élevées, il faut que les parents paient plus cher. Alors, le résultat que l'on connaît présentement, c'est que depuis 1985, par rapport aux tarifs moyens qui sont chargés aux parents, au Québec, on dépasse de 12 % la courbe de l'inflation. Autrement dit, les parents paient de plus en plus cher parce que les services de garde, pour avoir plus de subventions, doivent charger de plus en plus cher. C'est un mode de financement qui est tout à fait inéquitable, dont les effets avaient été prévus, en 1988, lors de la commission parlementaire. On avait vraiment mis en garde le gouvernement pour qu'il ne mette pas sur pied ce genre de programme de financement et on avait prévu ces iniquités qui arrivent aujourd'hui.

Il y a des demandes sur la table, M. le Président. Je le disais tout à l'heure, je pense qu'il faut le répéter. La ministre, d'ailleurs, convient qu'il y a des problèmes et elle nous dit, elle aussi, que les éducatrices en garderie sont, effectivement, pénalisées, qu'elles ne gagnent peut-être pas le salaire qu'elles devraient et qu'effectivement leur mode de financement, par rapport à l'ensemble des garderies, crée des problèmes. Alors, il y a des demandes qui sont sur la table. J'espère que la ministre va les prendre en considération, j'espère qu'on va reconnaître plus que dans les mots, mais aussi au niveau de l'action, dans les gestes, dans les décisions que le gouvernement va poser, où sont réellement les priorités gouvernementales.

Oui, M. le Président, je pense que l'important, ça se mesure. Je pense que les services de garde ont des besoins, les éducatrices aussi. Les éducateurs et éducatrices en ont. Ça a été démontré. On verra, dans les semaines qui viennent, dans les mois qui viennent, j'espère, que les services de garde sont sûrement importants, autant, au moins, que le gouvernement se plaît, que la ministre se plaît à nous le répéter à quel point ils sont une priorité.

En terminant, M. le Président, bien que la semaine soit déjà avancée, je voudrais souhaiter à tous les éducateurs, les éducatrices, à tous les parents qui sont sur les conseils d'administration, à tous les gens, les intervenants impliqués au niveau des garderies une excellente fin de Semaine des garderies.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, sur cette même motion, je cède la parole à Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et responsable de la Famille.

Mme Violette Trépanier

Mme Trépanier: Merci, M. le Président.

Je suis très heureuse de souligner aujourd'hui la Semaine nationale des garderies parce que c'est, certes, un moment idéal pour sensibiliser la population au dynamisme et au rôle de premier plan que sont appelés à jouer les services de garde dans une société qui s'est engagée à relever le défi de l'égalité, de sorte que les femmes, comme les hommes, tirent des avantages équivalents de notre croissance collective.

La Semaine des garderies, c'est aussi et surtout la réaffirmation d'une solidarité et d'une volonté d'agir du milieu et des partenaires pour offrir aux parents comme aux enfants des services de garde de qualité, diversifiés et sécuritaires, dans un environnement propice au développement social et culturel de la relève.

Les multiples activités qui se tiennent cette semaine, M. le Président, visent, bien sûr, la mise en valeur du travail et des réalisations des intervenants du milieu: les éducatrices, les parents, les partenaires sociaux et économiques. Mais c'est d'abord et avant tout vers les enfants que se tournent nos pensées et nos gestes. «L'important, ça se mesure» est le thème choisi, cette année, pour alimenter la réflexion et les échanges entourant cette semaine spéciale.

Ce leitmotiv peut évoquer plusieurs éléments de réflexion. D'abord, sur l'importance des garderies comme outil favorisant la conciliation des responsabilités familiales et professionnelles et comme un lieu de développement et de socialisation de l'enfant. La volonté et le droit des parents de se réaliser professionnellement tout en maintenant une vie familiale harmonieuse, le désir des Québécoises d'assurer leur autonomie financière et l'augmentation du nombre de familles monoparentales sont quelques-unes des situations qui entraînent de nouveaux besoins et qui contribuent à la croissance de la demande en matière de services de garde. Ce dossier, M. le Président, est sans contredit un dossier de société et nous devons, tous et chacun, être concernés par son évolution qui se présente, aujourd'hui plus que

jamais, comme primordiale à l'évolution des enfants, des femmes et des familles. En plus d'être un soutien essentiel pour les parents travailleurs et étudiants, les services de garde sont des ressources précieuses pour la connaissance, le développement et la stimulation de l'enfant.

Quand on parle de développement et d'épanouissement de l'enfant, ça commence tôt, dans la vie. Le développement du langage, de la sociabilité et de l'autonomie cognitive, pendant la tendre enfance et la petite enfance, est à la base de l'apprentissage qui se poursuit tout au long de la vie. Les garderies régies et de qualité permettent donc aux enfants qui les fréquentent de réaliser leur plein potentiel dans un milieu sain et enrichissant.

Bien entendu, les parents seront toujours les premiers responsables de la protection et de l'éducation des enfants. Ils ont cependant besoin de support pour bien jouer leur rôle. En ce sens, les garderies sont en mesure de les seconder grâce à leur solide expérience d'interaction quotidienne avec les enfants.

J'aimerais, en cette Semaine des garderies, souligner également le travail remarquable des parents gestionnaires de ces services. Le gouvernement, dans sa politique sur les services de garde, a choisi de privilégier le développement de services dont les parents assument le contrôle et ce, pour différentes raisons. Mais c'est principalement parce qu'il est important de maintenir le lien entre la famille, ses valeurs et le milieu de garde.

La mise en oeuvre d'un réseau de services de garde adéquat est étroitement liée à toute stratégie de développement économique et de main-d'oeuvre. Je suis convaincue qu'il est illusoire de croire à une économie efficace, axée sur la productivité et la compétitivité, à l'utilisation maximale d'une main-d'oeuvre de qualité composée à 45 % de femmes, à un plan de lutte à la pauvreté chez les enfants, les femmes et les familles si on ne place pas les services de garde parmi les composantes incontournables de toute stratégie destinée à créer un avenir prometteur à la société québécoise.

Cela, M. le Président, notre gouvernement l'a compris depuis longtemps. Qu'il suffise d'effectuer un bref retour en arrière pour constater l'ampleur du chemin parcouru depuis les premières garderies mises sur pied par des organismes religieux et de bienfaisance afin de venir en aide aux familles défavorisées et à celles dont la mère devait obligatoirement contribuer au revenu familial en accédant au marché du travail.

Oui, M. le Président, «l'important, ça se mesure», et le gouvernement a su mesurer et reconnaître l'importance des services de garde au Québec. Nos efforts et nos actions depuis plusieurs années en témoignent. À titre d'exemple, depuis l'adoption de la politique gouvernementale sur les services de garde à l'enfance, le budget global alloué à l'Office est passé de 99 000 000 $, en 1987, à près de 188 000 000 $, cette année.

Au plan du développement, il est significatif de souligner qu'avant l'instauration de notre politique, les parents pouvaient bénéficier de 64 700 places en services de garde et ce, au 31 mars 1988, alors qu'aujourd'hui, en date du 28 avril précisément, le nombre de places disponibles est de 94 796. On compte actuellement, à l'échelle de la province, 901 garderies, 114 agences en milieu familial, 761 services de garde en milieu scolaire, pour un total de 1776 services. Ce sont des garderies qui offrent le plus de places, soit 46 464.

M. le Président, «l'important, ça se mesure» aussi au quotidien dans les garderies. On ne dira jamais assez l'importance du respect de la réglementation sur les services de garde en garderie qui détermine les règles minimales quant à l'aménagement des locaux, la formation du personnel et les normes de sécurité à appliquer. Un environnement sain, des éducatrices et éducateurs aimants et compétents, voilà autant d'éléments qui sont mesurables et qui sont importants.

Il est aussi possible de mesurer l'importance qu'une société accorde à ses enfants, les travailleurs, les consommateurs et les citoyens de demain. Cette responsabilité sociale prend tout son sens lorsqu'on considère les grands bouleversements que connaît notre société: éclatement du couple, apparition de nouveaux types de familles, déclin démographique, accroissement de la pauvreté, pressions économiques dans un contexte de crise et de récession, augmentation du nombre de familles monoparentales, isolement social, etc. Autant de situations qui font qu'il n'est pas facile d'être parents en 1993 ni d'être un enfant. (16 h 20)

Les réalités modernes des familles québécoises nous forcent à nous adapter. Les gouvernements, les municipalités, les entreprises, les écoles, les médias et les groupes doivent unir leurs efforts pour offrir aux familles un soutien constant, afin qu'elles puissent évoluer dans le respect des individus qui les composent. Dans ce contexte, notre gouvernement est pleinement conscient du rôle important qu'il joue dans le développement d'un réseau de garderies adéquat, efficace et sécuritaire, de même que dans le soutien financier aux parents comme aux services.

J'ai, d'ailleurs, à maintes reprises, réitéré notre engagement dans ce domaine. Outre l'augmentation constante de l'enveloppe budgétaire de l'Office des services de garde à l'enfance, cette année encore, d'importants travaux ont été effectués, particulièrement en matière de réglementation et de planification du développement, et ce, afin d'améliorer la qualité des services offerts et la sécurité des enfants. Je pense notamment à l'élaboration de deux projets de règlement modifiant le Règlement sur les services de garde en garderie, qui viennent d'être adoptés au Conseil des ministres, et qui visent principalement des aménagements concernant l'administration des médicaments et les espaces de jeu extérieurs pour les enfants.

M. le Président, notre gouvernement est égale-

ment conscient qu'il doit exercer son leadership au ; niveau de l'information et de l'évolution des mentalités, : pour faire en sorte que les enfants et leurs parents puis- : sent compter de plus en plus sur la collaboration de tous et, surtout, sur une action concertée du gouvernement avec les milieux des services de garde et avec les partenaires socio-économiques. La volonté de l'État de contribuer de façon significative au bien-être des enfants est sans équivoque. Chaque année, nous pouvons constater une nette progression du dossier des services de garde. Elle ne s'effectue peut-être pas toujours au rythme souhaité, mais avec une constance et une force qui ne permettent aucun recul.

La qualité de vie des familles québécoises et le bien-être de nos enfants ne doivent laisser personne indifférent. C'est pourquoi, en terminant, M. le Président, j'invite les membres de cette Assemblée, de même que les Québécoises et les Québécois, à participer aux activités quotidiennes qui se déroulent cette semaine dans les diverses régions du Québec. Ils pourront ainsi constater et apprécier les réalisations et le travail remarquables de tous ceux et celles qui oeuvrent dans les garderies. Ils pourront, surtout, mesurer l'important, soit l'irremplaçable richesse que les enfants représentent pour notre société.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, sur cette même motion, M. le député de Drummond, je vous écoute.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président.

C'est avec plaisir que je joins ma voix à celles de Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière et de Mme la députée de Dorion et ministre déléguée à la Condition féminine.

M. le Président, j'ai eu le plaisir, au début des années 1980, de contribuer à établir la première garderie en mileu industriel au Québec. Cet après-midi, si je me lève aussi, en tant que député, c'est pour avoir contribué, encore en milieu de travail, dans le milieu scolaire et dans le milieu hospitalier, avoir contribué bien humblement, M. le Président, à créer trois garderies. Alors, je me suis toujours permis, en boutade, de dire que le député de Drummond était père de trois enfants et aussi père de trois garderies.

Mais, cet après-midi, M. le Président, comme j'ai d'ailleurs eu la chance de le souligner, voilà quelques semaines passées, dans différentes interventions, c'est avec des sentiments partagés que je prends la parole pour souligner l'importance de cette Semaine nationale des garderies. M. le Président, j'écoutais attentivement les paroles de Mme la ministre, et lorsque je regarde, dans un premier temps, en pensant à ces femmes majoritairement éducatrices dans nos garderies, M. le Président, en pensant à la qualification qu'elles ont acquise au travers de ces années, en pensant aussi, lorsque je regarde la rémunération de ces travailleuses dans un secteur primordial de la collectivité, quand je regarde, M. le Président, la manière qu'on rémunère ces éducatrices et les quelques éducateurs qui font oeuvre maintenant dans ce secteur, c'est un peu avec, je dirais ? je n'emploierai pas le mot, M. le Président, vous me le défendriez...

Je veux simplement dire qu'en regardant les budgets de 1992-1993, les 177 000 000 $ qui étaient prévus au budget... Lorsque je regarde les crédits qu'on a déposés, M. le Président, lorsque je regarde les dépenses probables, et qu'il y a 10 000 000 $ qui ne seront pas dépensés, M. le Président, je tends la main à Mme la ministre, pour lui dire qu'elle pourra toujours compter sur le député de Drummond pour avoir un défenseur acharné pour convaincre le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, au lieu de périmer des crédits dans un domaine si important de notre collectivité, présentement et «futurement», eh bien, qu'elle aura toujours mon appui, parce que je pense qu'il est inconcevable, en pensant au travail de ces travailleuses et travailleurs de nos secteurs d'activité... Parce que je crois que, les moyens financiers, on les a, mais il va falloir un jour réaliser l'importance, M. le Président...

Et ceci m'amène au deuxième point, parce que j'ai été à même de traiter ou de constater, M. le Président, lorsque je regarde, moi, tous nos services de garderie, que c'est la première porte d'introduction d'un jeune garçon ou d'une jeune fille de chez moi à la collectivité dans laquelle ils auront à «performer». C'est la première fois qu'il est en contact avec des garçons et des filles de son âge. C'est la première fois qu'il aura à «comporter», M. le Président, son tempérament, ses habitudes de vie, ses convictions. Et ce dont je m'aperçois, M. le Président, de plus en plus: il va falloir évoluer, il va falloir regarder tout notre système d'éducation avec une vision intégrée de la problématique humaine. Parce qu'en m'asseyant, M. le Président, comme je le fais régulièrement avec tous les responsables des garderies de chez moi ? et, aujourd'hui, la plus vieille garderie de mon milieu a 20 ans ? qu'est-ce qu'on me dit, M. le Président? Qu'aujourd'hui il y a quatre personnes ? je ne mettrai pas de sexe, M. le Président ? chez qui, dès leur entrée à leur garderie, on a prévu des troubles de comportement. Et on a dit: Un jour, on retrouvera ces quatre personnes-là en difficulté devant la DPJ. Aujourd'hui, M. le Président, quelques années après, on retrouve les travailleurs sociaux qui étaient impliqués dès le début, qui nous disent: Oui, c'est vrai, c'est arrivé.

Alors, c'est en pensant, M. le Président, à cette gestion intégrée qu'il va peut-être être le temps, chez nous, de penser à mettre de l'aide au niveau des garderies pour être capable de détecter les cas problématiques et faire en sorte, M. le Président, qu'on puisse apporter l'aide à ces jeunes citoyens et citoyennes. Et au lieu d'attendre d'investir des sommes en mesures de préven-

tion ou de correction au niveau des DPJ, au niveau des centres de détention, peut-être qu'il y aurait lieu, M. le Président, d'économiser à long terme, lorsqu'on regarde une vision élaborée, une vision de l'an 2000, pour corriger ces problèmes dès ce moment-là.

Aussi, M. le Président, j'aimerais me faire le porte-parole, aujourd'hui, parce que mes lectures m'ont amené à lire «Un Mal invisible: l'R des centres de femmes du Québec». Et, comme je l'ai toujours dit, peut-être à cause de ma position privilégiée aujourd'hui en tant que député de Drummond, j'aimerais, M. le Président, mettre une voix à Francine, aujourd'hui, dans cette Assemblée, et vous dire ce que Francine disait: En plus de toutes ces responsabilités non partagées, le manque de services essentiels comme des garderies empêche les mères d'avoir un peu de répit sans les enfants. Les mères au foyer aimeraient disposer de haltes-garderies accessibles à toute heure du jour, sur la base d'un ou de quelques jours de la semaine.

J'aimerais aussi, M. le Président, cet après-midi, être la voix d'Evelyne qui disait: Le système devrait être fait de telle manière qu'une femme puisse élever ses enfants, se véhiculer facilement pour retourner aux études à temps partiel, revenir chez elle, avoir des contacts avec les autres, évoluer, avoir un but à longue échéance, retourner graduellement au travail et élever ses enfants à travers tout ça sans se préoccuper de savoir où elle va les faire garder.

J'aimerais aussi être la voix, M. le Président, de Fernande qui disait: S'il y avait des services organisés pour les familles monoparentales, un système de gardiennage, par exemple, pour que le parent, père ou mère, puisse prendre des vacances seul sans assumer tout le temps la responsabilité des enfants; il n'y a rien.

Alors, aujourd'hui, M. le Président, si j'ai pu mettre humblement, dans le peu de temps qui m'est alloué, des voix à ces trois femmes de chez nous, c'est simplement pour rappeler que, oui, des progrès ont été faits au Québec au niveau des services de garde, mais il reste encore beaucoup à faire. Et je ne crois pas, M. le Président, qu'on ait les moyens, dans les intérêts à court, moyen et long terme de notre collectivité, de périmer des crédits au niveau des services de garde.

En conclusion, M. le Président, à tous ceux et celles qui ont à oeuvrer dans ce domaine merveilleux qui aide des jeunes de chez nous à faire leurs premiers pas dans la collectivité locale et québécoise, et aussi à tous ces parents qui, par leur bénévolat, contribuent à l'administration, à donner un sens aussi à leur mission de parents ? qui n'est pas simplement de mettre les enfants au monde mais de les faire cheminer jusqu'à l'âge adulte ? et aussi à nous, les législateurs, qui, par nos moyens, faisons les lois qui essaient de mieux encadrer et de mieux engendrer, M. le Président, le bien-être pour les collectivités futures, à tous ceux et celles qui, de près ou de loin, travaillent dans ce milieu, vous avez mon admiration, et bravo!

Et je conclurai en vous disant, Mme la ministre, que vous pourrez toujours compter sur le député de Drummond pouur aller défendre des crédits et que, si on est capable d'investir plus que 185 000 000 $, je suis convaincu que, lorsqu'on regardera sur une période de 10 ans, les sommes qu'on pense une dépense supplémentaire aujourd'hui dans nos budgets, on s'apercevra, sur un échéancier de 10 ans, qu'elles ont été une économie et que, surtout, on a donné un sens, on a donné une vision d'avenir à ces jeunes de chez nous. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond.

Mise aux voix

Est-ce que la motion de Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière, qui se lit comme suit: «Que cette Assemblée souligne la Semaine nationale des garderies, qui se déroule du 10 mai au 16 mai 1993 sous le thème "L'important, ça se mesure"», est adoptée?

Des voix: Adopté. (16 h 30)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.

Nous sommes toujours à l'étape des motions sans préavis. Je reconnais M. le député d'Iberville.

Allez-y, M. le député.

Motion proposant que l'Assemblée nationale

exprime ses condoléances à la famille

du général Jacques Dextraze

M. Lafrance: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale exprime ses condoléances à la famille du général Jacques Dextraze, ancien chef d'état-major des Forces armées candiennes, héros de guerre québécois et membre du Royal 22e Régiment, régiment canadien-français.»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Allez-y, M. le député d'Iberville. On vous écoute.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Merci, M. le Président.

Dimanche dernier, le 9 mai 1993, le général Jacques Dextraze, ancien chef d'état-major de la Défense nationale, héros de guerre québécois et membre du Royal 22e Régiment, nous quittait, à l'âge de 73 ans.

Originaire de Montréal, la carrière militaire du

général Dextraze débute en 1939, alors qu'il s'enrôle comme simple soldat afin de participer volontairement à la Seconde Guerre mondiale. Il est, par la suite, breveté officier et combat dans le nord-ouest de l'Europe. Il termine la guerre au rang de lieutenant-colonel, en 1944, et est nommé commandant de bataillon. En reconnaissance de services exceptionnels, on lui décerne l'Ordre du Service distingué, auquel, en 1945, on ajoutera la palme. La guerre terminée, il retourne dans le secteur privé, en plus de poursuivre des études universitaires. En 1950, éclate la guerre de Corée. Le lieutenant-colonel Dextraze se porte, encore une fois, volontaire et est nommé à la tête du 2e bataillon Royal 22e Régiment, unité désignée pour servir en Corée. Encore là, il se distingue et, en reconnaissance de la qualité de son commandement, on lui décerne l'Ordre de l'Empire britannique. De retour au pays après le conflit en Corée, en 1952, la carrière du lieutenant-colonel Dextraze est remplie de fonctions importantes et de promotions rapides, preuve de sa grande efficacité: colonel commandant le camp de Valcartier, brigadier général commandant le secteur est de la région militaire du Québec, chef d'État-major général pour les opérations des Nations unies au Congo, commandant de la 2e brigade d'infanterie canadienne, major général responsable des opérations au quartier général de la force mobile, lieutenant général chef du personnel au quartier général des Forces canadiennes. En septembre 1972, le général Dextraze est nommé chef d'État-major de la Défense et des Forces armées canadiennes, devenant ainsi le deuxième militaire du Royal 22e Régiment, régiment qui aura bientôt 80 années d'existence, régiment canadien-français, donc le deuxième à accéder au plus haut poste de la hiérarchie militaire canadienne.

En plus de ses très nombreuses décorations militaires, dont celle de commandeur de l'Ordre du Mérite militaire, le général Dextraze était compagnon de l'Ordre du Canada. Le général Dextraze avait pris sa retraite en 1977, après 33 années de loyaux services pour son pays. Canadien français de souche, il s'est distingué partout au pays et à l'étranger tout au long de sa carrière, contribuant ainsi à notre fierté nationale. Il a participé activement à l'implantation des politiques nationales de bilinguisme au sein des Forces armées canadiennes durant les années soixante-dix. C'est d'ailleurs à cette époque que j'ai eu le privilège de le connaître et de servir indirectement sous ses ordres. Membre du Royal 22e Régiment, il fut, par la suite, colonel honoraire de ce glorieux régiment canadien-français, dont la maison mère est la Citadelle de Québec. Ayant servi lui-même avec les casques bleus, je m'en voudrais, en cet instant, de ne pas avoir une pensée spéciale à l'égard des centaines de membres du Royal 22e Régiment servant présentement avec les Nations unies, partout dans le monde et tout particulièrement dans l'enfer qu'est devenue la Yougoslavie, ceci afin de maintenir la paix. Que Dieu leur vienne en aide!

M. le Président, la perte du général Dextraze nous sensibilise tous, en nous rappelant l'apport des milliers de Québécois qui ont combattu dans les guerres mondiales. Ces jeunes qui n'ont pas hésité, à l'époque, à mettre leur vie en péril afin de sauvegarder les valeurs de liberté dont nous bénéficions encore de nos jours. Avec le général Dextraze s'éteint un autre des personnages ayant beaucoup contribué à façonner notre patrimoine militaire canadien-français et nos valeurs fondamentales comme société canadienne et québécoise.

M. le Président, au nom du gouvernement libéral que j'ai l'honneur de représenter en cette Chambre, par le dépôt de cette motion, j'aimerais exprimer nos plus vives condoléances à la famille du général Jacques Dextraze, ancien chef d'état-major de la défense, commandeur de l'Ordre du Canada, titulaire de l'Ordre de l'Empire britannique, Commandeur du Mérite militaire du Canada, titulaire de l'Ordre du Service distingué et de la décoration des Forces canadiennes pour loyaux services.

Nous exprimons également nos condoléances à la grande famille du Royal 22e Régiment dont la devise est celle de la province de Québec, soit: «Je me souviens». Au général Jacques Dextraze, qui a porté fièrement cette devise, ainsi que les fleurs de lis sur son uniforme, partout dans le monde, nous disons merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, sur cette même motion de M. le député d'Iberville, je cède la parole à M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, au nom de notre formation politique, je voudrais nous déclarer en faveur de cette motion, vous dire que nous nous associons à tous les propos prononcés par le député d'Iberville au nom de sa formation politique. Je voudrais réitérer nos plus sincères condoléances aux parents, aux amis et à tous ceux qui ont connu le général.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Joliette. Sur la même motion, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Gordon Atkinson

M. Atkinson: M. le Président, certains ont de la grandeur sans la rechercher. Certains, malgré eux, deviennent des héros de guerre. Cela a été le cas pour le général Jacques Alfred Dextraze qui est décédé, dimanche, à l'âge de 73 ans.

General Dextraze was, of course, not always a general. He rose in the ranks of the famed Montréal Regiment, les Fusilliers Mont-Royal. At the outset of World War II, he was a lowly corporal working in the administration section of his regiment. But there is an old adage in the British army that says: In the backpack

of every private soldier rests the «bâton> of a field marshal 1. No one exemplified that statement greater than General Dextraze.

Comme je suis de sa génération, je crois comprendre les facteurs qui l'ont conduit à une carrière militaire pour ensuite l'amener aux plus hauts sommets de sa profession, de simple soldat au général en charge de toute la force armée du Canada. Le cas de Jacques Dextraze est typique de l'adage dont je faisais mention.

General Dextraze would have succeeded in any profession he might have chosen, but he chose to serve our nation in war and in peace... places him in a special category of canadianism. (16 h 40)

J'ai rencontré le général Dextraze pour la première fois pendant la Deuxième Guerre mondiale. Lui comme moi étions au premier échelon des officiers, c'est-à-dire lieutenants, dans nos régiments respectifs. Il était au service de la division canadienne qui a fait l'assaut des plages de Dieppe et qui a subi de lourdes pertes lorsque les alliés étaient à la recherche de l'invasion massive qui devait finalement avoir lieu deux ans plus tard sur les plages de la Normandie.

For a moment, like my colleague who spoke on the motion, let me relate his vast array of medals that honoured this man of Canada, this man of Québec. He was awarded the Distinguished Service Order, was made a Commander of the British Empire for his service not only to Canada, but to the entire allied and Commonwealth cause. He was named a Companion of the Order of Canada, a Commander of Military Merit as well as a Knight of the Order of St. John of Jerusalem and a Knight of both the Order of Malta and of St. Lazarus. A truly distinguished man.

Notre collègue, le député d'Iberville, qui propose cette motion, lui-même un ancien colonel du célèbre régiment Royal 22e, a servi dans le même régiment que le général Dextraze. Je sais que le député d'Iberville, avec tous les hommes du régiment Royal 22e ainsi que ceux qui ont servi avec Jacques Dextraze pendant la Deuxième Guerre mondiale et la guerre de Corée, lui rendent hommage aujourd'hui.

The song from the First World War sums it up: Old soldiers never die, they only fade away. And I might add, Mr. Speaker, their heroism and dedication will forever be remembered.

Général Jacques Alfred Dextraze, vous pouvez reposer en paix. La nation vous rend hommage pour un travail bien fait par un bon et fidèle serviteur.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Sur cette motion de M. le député d'Iberville, M. le député de Taschereau, je vous cède la parole.

M. Leclerc: Non, M. le Président, ce n'est pas là-dessus.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous ne parlez pas sur cette motion-là? Je comprends qu'il n'y a pas d'autres interventions.

Mise aux voix

Est-ce que la motion de M. le député d'Iberville, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale exprime ses condoléances à la famille du général Jacques Dextraze, ancien chef d'état-major des Forces armées canadiennes, héros de guerre québécois et membre du Royal 22e régiment, régiment canadien-français», est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

M. Bélisle: II n'y en a pas d'autres.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le député de Drummond.

M. St-Roch: Oui, M. le Président.

Hier, j'avais le plaisir de demander au leader adjoint du gouvernement des questions bien précises concernant le projet de loi 73, et sa réponse fut celle-ci: M. le Président, je vais m'informer de la situation et je ferai rapport à la Chambre dans les plus brefs délais. Alors, je suis prêt à écouter les réponses de M. le leader adjoint du gouvernement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je n'ai pas encore l'information, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): D'autres renseignements?

Affaires du jour Affaires prioritaires

Alors, ceci met fin aux travaux quant à la séance des affaires courantes, et nous continuons à l'étape des affaires du jour, aux affaires prioritaires.

Débat restreint sur les rapports des commissions

qui ont étudié les crédits budgétaires pour

l'année Financière 1993-1994

L'Assemblée entreprend le débat restreint

? alors, il faut comprendre qu'il s'agit d'un débat de deux heures ? sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1993-1994.

Suite à une discussion avec les leaders, le partage du temps pour ce débat a été établi de la façon suivante: 10 minutes seront accordées à l'ensemble des députés indépendants, et le reste du temps sera partagé également entre le parti ministériel et celui de l'Opposition officielle, une intervention principale pour chaque groupe parlementaire ne pouvant dépasser 30 minutes.

Alors, je suis prêt à entendre le premier intervenant. M. le député de Taschereau, maintenant je vous reconnais. Allez-y.

M. Jean Leclerc

M. Leclerc: Merci, M. le Président.

Je voudrais m'excuser pour tout à l'heure. En préparant l'intervention que je vais vous livrer, je vous ai peut-être donner l'impression que je voulais prendre la parole sur la motion de mon collègue, mais, comme vous voyez, ce n'était pas le cas. Je m'en excuse.

M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le député de Taschereau. J'ai omis de donner l'avis suivant, tout à l'heure, à l'étape des renseignements sur les travaux.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Alors, je vous rappelle que l'interpellation de demain, le vendredi 14 mai 1993, portera sur le sujet suivant: La politique de gestion des déchets solides. Mme la députée de Taillon s'adressera alors à M. le ministre de l'Environnement.

Je vous avise, également, que l'interpellation prévue pour le vendredi 21 mai portera sur le sujet suivant: La réorganisation administrative du ministère des Transports. M. le député de Lévis s'adressera alors à M. le ministre des Transports.

Alors, M. le député de Taschereau, en m'excusant de nouveau, allez-y, s'il vous plaît.

Reprise du débat restreint M. Jean Leclerc (suite)

M. Leclerc: Pas de faute, M. le Président.

Je suis heureux de prendre la parole pendant ce débat restreint qui constitue, en quelque sorte, la prise en considération des travaux qui ont été effectués en commission parlementaire, depuis trois semaines, sur les crédits budgétaires du Québec.

Pour bien situer, pour ceux qui nous écoutent, le contexte dans lequel nous étudions les crédits gouvernementaux, je vais prendre quelques secondes pour expli- quer comment nous procédons. Ça me paraît plein de sens, parce que les payeurs de taxes du Québec ont le droit de savoir comment, nous, les parlementaires, dont c'est un des mandats de contrôler les dépenses publiques... Ils ont le droit de savoir comment, nous, les parlementaires, nous nous acquittons d'une des tâches les plus complexes qu'il nous soit donné d'avoir à faire, compte tenu du fait que nous avons à étudier 41 000 000 000 $ de dépenses. Alors, s'il est une tâche, parmi toutes celles que nous avons pendant une année parlementaire, qui est complexe, c'est bien celle d'étudier les dépenses gouvernementales, qui s'élèvent, cette année à...

M. Léonard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Labelle. Question de règlement, oui.

M. Léonard: On entreprend un débat restreint sur 41 000 000 000 $ de dépenses, justement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous soulevez le quorum.

M. Léonard: Je vous demanderais d'appeler le quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (16 h 50 - 16 h 52)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le député de Taschereau. Nous avons quorum, Mmes et MM. les députés, et nous reprenons les travaux avec l'intervention de M. le député de Taschereau.

M. Leclerc: Merci, M. le Président.

Je suis heureux de voir le député de Labelle revenir en Chambre, parce qu'il demande le quorum et il sort! M. le Président, j'en étais à vous dire... M. le Président, si c'est important pour les députés ministériels, le débat, il est aussi important pour les députés de l'Opposition. Si les députés ministériels se doivent d'être présents minimalement, celui du côté de l'Opposition qui demande le quorum devrait rester ici pendant qu'on le vérifie.

M. le Président, j'en étais à dire que ceux et celles qui nous écoutent ont le droit de savoir comment nous procédons, comme Assemblée nationale, pour vérifier les crédits du Québec. D'abord, ce qu'il faut mentionner, c'est qu'avant même que le président du Conseil du trésor ne dépose son livre des crédits, un grand nombre de fonctionnaires dans tout l'appareil gouvernemental se penchent sur les données, se penchent sur les besoins qu'ils auront au cours de l'année suivante pour mener à bien les différentes missions qui sont dévolues à leur ministère ou à leur organisme, de sorte que, M. le Président, plusieurs mois avant que le

président du Conseil du trésor ne dépose son document, des gens dans la fonction publique s'y affairent, tant et si bien qu'on peut dire que c'est une démarche qui ne se termine pratiquement jamais puisque, alors que nous terminons l'étude des crédits de l'année en cours, déjà des gens dans l'appareil gouvernemental s'affairent à préparer les crédits de l'année suivante.

Par conséquent, M. le Président, le président du Conseil du trésor dépose, quelque part au mois d'avril, les crédits budgétaires du gouvernement du Québec. Dès lors, l'Assemblée nationale fait un débat pour accepter 25 % de ces crédits-là. Pourquoi? Parce que le gouvernement du Québec a besoin, pour opérer, dès le premier jour d'avril, d'un certain nombre de dollars pour continuer l'opération de l'État.

M. le Président, ce n'est pas parce que, le 3 avril, les crédits complets et entiers du gouvernement du Québec ne sont pas encore étudiés par l'Assemblée nationale que le gouvernement n'a pas de chèques à faire, de sorte que nous acceptons en bloc 25 % des crédits déposés pour permettre au gouvernement de continuer à opérer, et nous procédons ensuite à l'étude complète et détaillée du manuel des crédits.

Vous comprendrez bien, M. le Président, que pour décortiquer un tant soit peu toute la bible d'information de ce cahier-là ? évidemment, il y a des annexes que je n'ai pas apportées avec moi ? ça ne peut pas se faire au salon bleu. Ça ne peut pas se faire au salon bleu, parce qu'il faut que ce soit chacune des commissions parlementaires qui entre en jeu, à ce moment-là, pour procéder à un examen approfondi des budgets des différents ministères.

Donc, M. le Président, c'est important de vous donner un ordre de grandeur de l'étude qui est effectuée en commission parlementaire. M. le Président, l'Assemblée nationale a procédé à 188 h 22 min d'étude des crédits. On peut donc penser, et je vais vous donner quelques exemples, M. le Président, que les députés des deux formations politiques, mais à plus forte raison les députés de l'Opposition, ont un nombre d'heures, un nombre de minutes assez considérable pour demander au gouvernement de rendre des comptes, d'expliquer comment il entend gérer le Québec au cours de la prochaine année financière du gouvernement.

Je vous donnerai des exemples, M. le Président. À la commission des affaires sociales, pour Santé et Services Sociaux, et la Régie de l'assurance-maladie du Québec, nous avons discuté de leurs crédits pendant 7 h 26 min, M. le Président; Agriculture et Alimentation, 6 h 5 min. Et j'ai la liste de tous les ministères du gouvernement qui ont mis un nombre considérable d'heures à étudier leurs crédits. Sécurité publique, par exemple: 5 heures. Industrie, Commerce et Technologie: 8 h 1 min.

Par conséquent, M. le Président, l'Opposition a tout le loisir d'interroger le gouvernement sur la façon dont nous entendons dépenser l'argent des contribuables au cours de la prochaine année financière. Tant et plus, M. le Président, qu'il y a une tradition en cette Cham- bre, qui fait que, pendant les débats sur les crédits, il y a un préjugé favorable envers les membres de l'Opposition qui, bien qu'ils soient en nombre inférieur, comme membres d'une commission parlementaire, ont toujours la majorité du temps, M. le Président, pour poser leurs questions.

M. Léonard: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Léonard: Le député de Taschereau lit un texte fort important. Je vous demanderais de vérifier le quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (17 h - 17 h 2)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, nous reprenons les débats de l'Assemblée avec l'intervention de M. le député de Taschereau.

Allez-y, M. le député.

M. Leclerc: Merci, M. le Président.

J'en étais à vous dire que l'étude des crédits était une occasion privilégiée pour les membres de cette Chambre, à plus forte raison pour les membres de l'Opposition, pour faire leur travail de députés. Le volet, notamment, de contrôle des dépenses publiques, c'est le volet le plus important, l'occasion la plus importante de l'année puisqu'il s'agit de 41 000 000 000 $ de dépenses publiques.

M. le Président, les gens qui nous écoutent peuvent se demander: Comment l'Opposition peut-elle, dans ce contexte-là, faire son travail? Comment les membres de l'Assemblée nationale peuvent-ils faire leur travail? M. le Président, avant même que les commissions parlementaires ne commencent à siéger, chacun des membres des commissions parlementaires reçoit une pochette avec une foule de documents qui lui permettent d'évaluer comment l'argent sera dépensé dans le ministère ou l'organisme qu'il va étudier. Tant et si bien que l'Opposition a loisir, dans les questions préalables qu'elle demande au ministre, avant même de siéger, de connaître un très grand nombre de faits, un très grand nombre de données supplémentaires aux données et aux chiffres qui sont officiellement publiés dans le livre des crédits. Tant et si bien qu'au cours des années, M. le Président, le volume de travail demandé pour préparer ces documents-là, à la demande de l'Opposition et au bénéfice de tous les parlementaires, est de plus en plus important. Et il me semble qu'il faut rappeler, à ce moment-ci, à l'Opposition que tout cela n'est pas gratuit, et il faut leur demander de ne pas abuser de ce privilège, ce droit qu'ils ont, finalement, d'avoir de l'information du gouvernement.

M. le Président, à partir de ces documents-là qui leur sont remis, à partir du livre des crédits, l'Opposition procède pendant plusieurs heures, de même que les députés ministériels, à l'examen des crédits des ministères. M. le Président, c'est de façon très détaillée que l'on peut le faire. Et on n'a qu'à feuilleter quelques secondes le cahier des crédits du gouvernement pour voir combien c'est clairement indiqué, la répartition des dépenses gouvernementales. De sorte que nous avons d'abord un sommaire général des dépenses, qui indique exactement combien sera dépensé au Québec: 41 000 000 000 $. Ensuite, nous avons des tableaux par mission, par domaine, par secteur ? et voici, par exemple, la mission éducative et culturelle, 10 000 000 000 $, etc. ? pour en arriver à des tableaux extrêmement détaillés lorsqu'on arrive ministère par ministère, alors que nous avons les dépenses par programme.

Prenons, par exemple, Agriculture, Pêcheries et Alimentation, programme 4, Assurances agricoles, élément par élément: Assurance-récolte, Assurance-stabilisation, Gestion interne, Programmes nationaux tripartites, etc.

Par conséquent, M. le Président, les citoyens et citoyennes du Québec peuvent prendre pour acquis que l'étude qui est faite du budget des dépenses du Québec peut être faite très sérieusement, parce que les parlementaires de cette Chambre ont en main les outils pour bien faire leur travail.

Ceci dit, M. le Président, au-delà des outils qui nous sont donnés, regardons les résultats. M. le Président, le livre des crédits, c'est l'estimé des dépenses du gouvernement. C'est un des éléments importants de la politique budgétaire du gouvernement du Québec. Parce qu'il n'y a pas 56 façons de préparer le budget du Québec, qu'est-ce qu'on peut faire, M. le Président? C'est un peu comme dans chacune des familles au Québec. On peut emprunter davantage, on peut taxer davantage, on peut dépenser plus, dépenser moins, mais on sait qu'il y a une certaine unanimité au Québec autour des faits suivants, qu'il nous faut cesser d'emprunter, il nous faut cesser de dépenser aujourd'hui et de faire payer les générations futures, il faut cesser d'emprunter au rythme où nous le faisons parce que nous créons un service de dette tellement considérable que chaque année une plus grande partie des taxes et des impôts sert non pas à donner des services aux citoyens et aux citoyennes, mais à payer des intérêts sur des services ou des biens qu'ils ont déjà eus dans le passé.

Considérant, M. le Président, qu'il y a une certaine unanimité là-dessus, considérant qu'il y a une unanimité également au Québec pour dire que les Québécois ne veulent plus être taxés davantage, eh bien, M. le Président, les exercices comptables, c'est à partir du livre des crédits qu'ils peuvent s'opérer. Pourquoi? Parce que, à partir du moment où on ne veut plus emprunter davantage, à partir du moment où on ne veut plus taxer davantage, la seule façon d'équilibrer les dépenses publiques, c'est de dépenser moins. Or, M. le Président, tout est là-dedans. C'est en scrutant à la loupe comme gouvernement les dépenses que nous entendons faire au cours de la prochaine année financière que nous allons pouvoir balancer le budget du Québec.

M. le Président, quand on étudie 41 000 000 000 $, il faut bien réaliser qu'il y a un certain nombre de dépenses qui sont à peu près incompressibles. On donnait l'exemple, tout à l'heure, de la dette. Tout le monde sait, M. le Président, que, à partir du moment où vous avez un bon taux d'intérêt sur votre dette, c'est à peu près incompressible. On ne peut se dérober au fait de payer des intérêts de façon régulière sur les emprunts du Québec, M. le Président. On ne peut se dérober, non plus, lorsqu'il s'agit de programmes ouverts, de programmes gouvernementaux ouverts, qui s'adressent à l'ensemble de la population, et que l'on ne peut contingenter. Le plus bel exemple, M. le Président, l'aide sociale. Quand un Québécois ou une Québécoise est dans une situation difficile, quand il ou elle a droit à l'aide sociale, le gouvernement ne peut se demander: Est-ce qu'il me reste du budget? Non. Lorsqu'un Québécois ou une Québécoise a droit à l'aide sociale, il reçoit ou elle reçoit de l'aide sociale. Par conséquent, c'est un budget ouvert, et ce n'est pas compressible non plus, M. le Président, quel que soit le gouvernement. De la même façon, les prêts et bourses. Lorsqu'un étudiant ou une étudiante, au Québec, a droit aux prêts et bourses, c'est un budget ouvert et, de façon automatique, cette personne-là peut recevoir les bénéfices du programme. (17 h 10) par conséquent, m. le président, lorsqu'on additionne à ça qu'au-delà de 50 % des dépenses inscrites dans le livre des crédits relèvent directement ou indirectement de l'aspect salarial, que ce soit directement comme salaire ou indirectement comme avantages sociaux, vous comprendrez, m. le président, que la marge de manoeuvre de l'état n'est plus ce qu'elle était. et, m. le président, ce qui est toujours intéressant lorsqu'on étudie les crédits, et c'est quand même, pour certains d'entre nous, notre huitième année, pour d'autres ? je regarde mon collègue de marquette ? depuis encore plus longtemps, c'est que nos amis de l'opposition, individuellement, en commission parlementaire, reprochent aux différents ministres de ne pas dépenser assez. on voit, dans toutes les commissions, des reproches, des critiques de l'opposition sur nos crédits, disant: vous devriez dépenser plus ici, plus là, ça n'a pas de bons sens de couper ici, ça n'a pas de bon sens de couper là. et donc, individuellement, commission par commission, ministère par ministère, ils nous critiquent de ne pas dépenser assez. et lorsque le député de labelle, puisque c'est, d'habitude, lui à qui incombe ce travail-là, fait une critique globale des budgets du québec, du budget des dépenses du québec, de façon générale, et on va l'entendre encore ce soir, il nous critique en

disant que nous avons perdu le contrôle sur les dépenses publiques et que nous dépensons trop. Et je le vois, il me fait signe, M. le Président, dans l'affirmative. Il nous dit que nous dépensons trop et que nous avons perdu le contrôle sur les dépenses publiques.

Et vous avez vu là, M. le Président, j'en suis persuadé, un problème mathématique assez simple. Comment pourrions-nous ne pas dépenser assez dans chacun des ministères tout en dépensant trop dans l'ensemble gouvernemental? Comme si la somme des dépenses des ministères ne donnait pas la somme de toutes les dépenses du gouvernement. M. le Président, il y a une contradiction manifeste de la part de l'Opposition, qui revient année après année, M. le Président... Et je vous invite à écouter attentivement la critique du député de Labelle tout à l'heure, vous allez l'entendre, et on relèvera ensemble, si vous voulez, les critiques des différents critiques sectoriels du Parti québécois, qui, ministère par ministère, nous reprochent de ne pas dépenser assez dans tel ministère, dans tel service, dans tel programme de subvention ou dans telle clientèle.

M. le Président, on ne peut pas prêcher une chose et son contraire. Et, du côté de l'Opposition, on ne peut pas en même temps, dans les mêmes trois semaines qui sont dévolues à l'Assemblée nationale pour étudier les crédits, dire que le gouvernement dépense trop et dire, en même temps, que le gouvernement ne dépense pas assez. M. le Président, il faudrait que l'Opposition se mette au diapason. Ou elle nous dit de façon unanime et claire que nous ne dépensons pas assez et elle nous dit où prendre l'argent, ou elle nous dit de façon unanime et claire que nous dépensons trop, mais au moins, M. le Président, nous pourrions demander d'eux, exiger d'eux qu'ils nous disent toujours la même chose.

Ceci dit, M. le Président, le livre des crédits est un exercice qui a permis de résorber la croissance habituelle des dépenses de l'État et de la ramener bien en deçà de l'inflation, tout le monde en conviendra. Évidemment, dépendant de qui commente cette situation-là, ou de qui étudie cette situation-là, M. le Président, nous pouvons avoir toutes sortes d'interprétations. Je vais vous citer, par exemple, un editorial du journal Les Affaires, qui dit: «Compressions 1993-1994, ce n'est pas assez.» Par contre, je peux vous citer La Presse, qui dit: «Outragée par les compressions, la CEQ suspend sa participation.»

Alors, M. le Président, tout ça pour vous dire que dépendant de quel organisme ou de quel individu va se pencher sur le livre des crédits, il est bien évident, clair, que tout le monde ne peut pas y trouver son compte en même temps. Et l'exercice du gouvernement, c'est d'arbitrer les besoins de la population pour tenir compte des priorités, bien sûr, mais aussi de la capacité de payer de ceux et celles qui, à tous les paliers de gouvernement, payent des taxes, M. le Président. Mais ce qui est intéressant, c'est que des observateurs, plus neutres ceux-là, se rendent compte que le gouvernement a posé des gestes sensés.

Et je lisais M. Brunet, dans Le Nouvelliste, qui disait: «Le gouvernement propose une fois de plus à ses employés de s'associer à lui et à la population pour sortir ensemble d'impasses. C'est un geste responsable en accord avec les faits. Les sociétés ont perdu des milliards, ces dernières années. Des emplois ont été perdus par centaines. Les sources fiscales ont été taries au moment où des dépenses comme l'aide sociale grimpent.

M. le Président, nous ne vivons pas sur une île. Nous ne sommes pas seuls, M. le Président. Il y a un contexte mondial qui fait en sorte que les rentrées fiscales du gouvernement ne sont plus ce qu'elles étaient. C'est se comporter en gouvernement responsable que de tenir compte de ce facteur.

Il y a un autre facteur, également, dont il faut tenir compte. Comme nous vivons dans un ensemble nord-américain, dans une économie qui se mondialise de plus en plus, on ne peut administrer une province comme le Québec sans tenir compte des organismes internationaux, souvent, qui donnent des cotes de crédit. Et tout le monde sait, M. le Président, le coût d'une décote.

M. le Président, si le Québec, sur le marché new-yorkais, par exemple, voit son indice de crédit être diminué, être décoté, ça veut dire, à chaque année, pour les Québécoises et les Québécois, des millions de dollars supplémentaires en frais d'intérêt. Et ça, c'est grave, parce que, si on paie des millions supplémentaires en frais d'intérêt, parce qu'un petit pourcent, M. le Président, ou 0,5 % d'intérêt de plus, parce que le Québec aurait été décoté, sur des milliards d'emprunt, bien, ça donne des millions en intérêts, des dizaines de millions en intérêts.

Et, si on paie des dizaines de millions de plus en intérêts, compte tenu que le gouvernement ne peut plus aller chercher plus d'argent dans les poches des contribuables, ça veut dire concrètement des dizaines de millions de services en moins, M. le Président. Et ça, c'est grave. Et ça, c'est grave parce qu'on sait tous qu'il y a des besoins dans l'éducation, qu'il y a des besoins dans les services de santé, qu'il y a des besoins dans le réseau routier.

C'est donc important, et c'est ce que disait Le Devoir du vendredi 19 mars, en titrant: «Des coupes pour garder la cote». Oui, M. le Président, la cote de crédit du Québec, c'est important. C'est important parce que toute décote se traduit inmanquablement par une augmentation du taux d'intérêt que doit payer le Québec sur les marchés étrangers et, par conséquent, une augmentation de la part du budget de la province qui sert à rembourser, chaque année, les intérêts sur nos emprunts.

M. le Président, j'estime donc que, dans un contexte pas facile, l'exercice auquel nous a convié le président du Conseil du trésor a été un exercice qui a été bien tenu, qui a permis aux députés des deux formations politiques, pendant 188 h 22 min, d'interroger les

différents ministres, non seulement sur la gestion de leur ministère, mais également sur la gestion des sociétés d'État et des organismes dont ils ont la tutelle. C'est un exercice annuel. C'est un exercice jamais facile, mais c'est un exercice fondamental dans notre régime démocratique, dans notre régime parlementaire. Et je suis heureux qu'il en soit ainsi.

Par conséquent, M. le Président, j'estime que nous avons devant nous un exercice de dépôt des crédits qui est logique, qui est responsable, dans les circonstances, et qui va permettre, je crois, au ministre des Finances de présenter un budget...

Parce qu'il ne faut pas se le cacher, cet exercice d'étude des crédits prépare, en quelque sorte, le budget du Québec qui sera déposé très bientôt par le ministre des Finances.

Et, en ayant des crédits responsables, raisonnables, avec un taux d'augmentation inférieur à 1 %, il est évident que cela facilite un petit peu la tâche du ministre des Finances lorsqu'il aura la douloureuse responsabilité de prendre des décisions quant à la taxation. On peut croire qu'avec ce livre des crédits les Québécoises et les Québécois pourront, je l'espère, respirer à l'aise, le soir du budget, de sorte que le gouvernement n'aura pas, je l'espère, à imposer de nouvelles taxes et de nouveaux impôts.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Taschereau. (17 h 20)

Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Drummond. Je vous rappelle, M. le député de Drum-mond, tel que je l'ai indiqué tout à l'heure, que vous avez droit, à titre de député indépendant, à une intervention maximale de 10 minutes. Allez-y.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Je vous remercie, M. le Président. C'est très peu, mais je vais essayer de l'utiliser au maximum.

M. le Président, d'entrée de jeu, je vous dirai que j'avais une grande anxiété, une grande hâte à voir le dépôt des crédits et à procéder à l'étude détaillée, commission par commission, parce qu'on se le rappellera, un soir de l'automne dernier, on avait dit que la priorité des priorités était maintenant l'économie, au Québec. Alors, comme je suis membre de la commission de l'économie et du travail, M. le Président, je me suis dit: On va avoir une commission qui va être mouvementée, qui va être chargée. On va être à l'avant-garde, dans le premier siège, pour voir tous les nouveaux programmes, au niveau de la recherche, du développement, de la formation de la main-d'oeuvre, de la capitalisation de l'entreprise. Alors, j'avais appréhendé une étude des crédits, M. le Président, des plus mouvementées.

Comme mon collègue l'a fait, d'ailleurs, tout à l'heure, mon collègue de Taschereau, qui a campé ce que sont les crédits et la manière dont on fait les crédits, ici, pour ceux et celles qui ne connaissent pas notre jargon, je vais continuer dans la même foulée, M. le Président, et vous dire que, lorsqu'on fait les crédits, à l'Assemblée nationale, ici ? et il est important de le réaliser ? pour la transcription des débats, on assigne des priorités. Or, le salon bleu, ici, c'est la première priorité, pour la transcription des débats, pour nous donner les notes manuscrites. Le salon rouge est la deuxième priorité, M. le Président; la salle Papineau, la troisième; LaFontaine, la quatrième; et la salle 1.38 est la cinquième.

C'est un secret de Polichinelle, M. le Président, lorsqu'on demandera à chacun des parlementaires dans cette salle, des deux côtés, comme en avant de moi, mes collègues du Parti Égalité, on va vous dire que la salle 1.38, M. le Président, c'est les catacombes de l'Assemblée nationale, parce que, comme je viens de le mentionner, c'est toujours la dernière commission où on va rendre les notes publiques.

Aussi, M. le Président, ce qui est bon de se rappeler, lorsqu'on regarde l'étude des crédits, c'est que nos amis de la presse vont, naturellement, surveiller le salon bleu, le salon rouge, Papineau, LaFontaine et, s'il reste du temps, le 1.38. Or, ça m'avait étonné, lorsqu'on a fait les premières commissions. Je me suis dit: Coudon, on commence avec le Tourisme. Avec la RIO, il y a des problèmes de toit, c'est peut-être pour ça qu'on nous envoie dans les catacombes, M. le Président. Mais plus on avançait, plus on réalisait qu'on était là.

Lorsqu'on est arrivés, après quatre ministères, M. le Président, et que j'ai soulevé la question, en commission parlementaire, au président, qui était le député de LaFontaine, m'étonnant qu'on enfouisse la commission de l'économie et du travail dans les catacombes de l'Assemblée nationale, on vous en a imputé la responsabilité, M. le Président. Une chance qu'on avait notre collègue de Saint-Maurice, qui a eu l'honnêteté ? et je le félicite ? de dire non. J'ai vérifié, M. le Président, et c'est notre leader qui nous envoie à la salle 1.38.

Alors, M. le Président, au moment où je vous parle aujourd'hui, je suis intervenu dans chacune de ces commissions-là. Je n'ai même pas la transcription des débats, parce qu'on finit les transcriptions du salon bleu, du salon rouge et de 1.38. Dans deux semaines, probablement qu'on aura eu l'ensemble de l'étude des crédits.

Alors, M. le Président, je ne veux pas induire la Chambre en erreur. La commission de l'économie et du travail s'est réunie pendant 1815 minutes, au-delà de 30 heures. Sur les 30 heures, M. le Président, les deux tiers de notre temps ont été consacrés à la salle 1.38. Alors, je me suis interrogé et je me suis dit: Si l'économie est tellement importante, si on a la priorité des priorités, et qu'on se ramasse dans les catacombes de l'Assemblée nationale, il doit y avoir une raison, M. le Président. Alors, je me suis mis à regarder les cinq ministères qui relèvent de la commission de l'économie

et du travail. On trouve: Industrie, Commerce et Technologie, Tourisme, Travail, Forêts et Énergie et Ressources.

M. le Président, lorsqu'on regarde le budget de 1992-1993, comme point de comparaison, les crédits de 1992-1993, on avait un grand total de 1 196 000 000 $, et je vous fais grâce des poussières. Lorsque je regarde les crédits qu'on a eus à étudier, budget 1993-1994 ? et je vous rappelle, M. le Président, qu'on est la priorité des priorités au niveau de l'économie?j'ai retrouvé 948 000 000 $ seulement, soit un manque, comparé à 1992-1993, de 248 000 000 $. J'ai commencé à comprendre, M. le Président, pourquoi on était dans les catacombes.

Vous allez me dire que le député de Drummond en met peut-être un peu cet après-midi. On est à la fin d'une semaine, qu'il est fatigué. M. le Président, j'ai été estomaqué, de même que ma collègue de Maisonneuve, lorsqu'on a fait les premiers crédits, qui étaient ceux de l'Industrie et du Commerce. Lorsque le ministre de l'Industrie et du Commerce nous est arrivé, dans les remarques préliminaires, quand on sait qu'il est de tradition, où chacun des ministres fait le bilan de l'année qui est écoulée, et nous donne une perspective d'avenir. M. le Président, vous regarderez dans les galées, dans deux semaines d'ici, lorsqu'on les aura, ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce nous a dit: Je n'ai aucun commentaire! Alors, je dois vous avouer, M. le Président, que ça a été un choc. On a eu de la difficulté, moi et ma collègue de Maisonneuve, à s'en remettre.

M. le Président, on a regardé chacun des ministères. On a essayé de dégager des perspectives, on a essayé de comprendre. Mais, lorsqu'on a fait les crédits de l'Industrie et du Commerce, j'ai rappelé au ministre de l'Industrie et du Commerce qu'une des catastrophes, à l'heure actuelle, une chose qui est en train de tuer l'initiative de nos jeunes entrepreneurs, de nos entreprises, c'est la bureaucratie qui nous inondait. M. le Président, j'ai déjà eu l'occasion de le faire ici, dans cette Chambre. Lorsqu'on regarde au niveau de la législation, on se rappellera que, dans les années soixante, c'étaient 264 pages; dans les années soixante-dix, c'est 509 pages de législation qu'on a fait; et, finalement ? je vous ferai grâce des années quatre-vingt ? dans les années quatre-vingt-dix, 1700 pages, M. le Président.

Je me suis amusé à regarder ce que c'était, les petits industriels de chez moi, les hommes et les femmes qui partent un commerce comme on a tous dans chacun de nos comtés. Je me suis étonné, j'ai été estomaqué, parce que lorsque je me suis adressé au principal ministère, qui est le ministère du Revenu, où on a à voir, aujourd'hui, avec la TPS, la TVQ et nommez-les, toutes les licences, on a juste à regarder les législations et les réglementations... M. le Président, aujourd'hui, au moment où on se parle, il y a 4304 formulaires actifs au ministère du Revenu. C'est ça qu'on appelle la bureaucratie. Il faut croire que je n'exagérais pas parce que le ministre de l'Industrie et du Commerce m'a dit: Oui, M. le député, vous avez raison, il va falloir atténuer.

M. le Président, je me suis étonné aussi, si on fait la priorité des priorités, lorsque j'ai questionné le ministre de l'Industrie et du Commerce. Où est-ce qu'elle est, la véritable politique, maintenant, de couper toute cette paperasserie qui fait qu'une petite entreprise passe des heures, aujourd'hui, et qu'elle a de la difficulté à trouver du capital? On me dit: Oui, ça viendra. On m'avait dit ça aux engagements financiers. Le ministre m'a dit: Oui, c'est vrai, il va falloir faire quelque chose pour avoir une vraie société de capital de risques.

Je pourrais les prendre ministère après ministère, c'étaient les mêmes réponses. Lorsqu'on a fait le ministère du Travail, j'ai dit au ministre que j'avais énormément de sympathie, parce que, qu'est-ce que vous voulez, le ministre, aujourd'hui, pour faire de la politique moderne, ça prend une équipe, ça prend aussi un programme. Mais on s'aperçoit que, aujourd'hui, au moment où on se parle, on a des difficultés au niveau de la fonction publique. J'ai eu l'occasion de le rappeler lorsqu'on a fait le 1er mai. Je l'ai rappelé à la commission parlementaire, on a un système où on handicape le ministre de toute la fonction publique, où il n'est même pas capable d'intervenir parce que ça regarde un autre ministère. Aujourd'hui, M. le Président, vous réalisez, vous, comme moi, qui venez d'un comté aussi de région, l'importance de harnacher tout ce travail de nos fonctionnaires avec l'entreprise privée, où on a besoin de mettre ensemble tous nos outils et nos efforts pour être capable de faire progresser, accélérer devant la mondialisation.

Il y a un autre domaine aussi. J'ai été participer à la commission de l'aménagement et des équipements pour regarder les crédits aussi du ministère des Transports. On se rappellera que, le 2 décembre, on devait avoir une annonce ici qui nous donnait la réorganisation du ministère des Transports. C'est avec regret que j'ai à vous dire, cet après-midi... Lorsque j'ai regardé les crédits du ministère des Transports, lorsque j'ai regardé la réorganisation, lorsque j'ai interrogé le ministre délégué aux Transports du pourquoi de la cancellation de l'annonce du 2 décembre au soir, lorsqu'on a demandé des questions, de comparer quelles étaient les économies d'échelle au niveau des ressources humaines, au niveau des budgets, au niveau de rapprocher les services, le 2 février versus l'annonce, en catimini, le 8 avril, le jeudi saint, quelle était la différence? Qu'est-ce qu'on va sauver, nous, ici, en tant que parlementaires? Comme le député de Taschereau le disait, avec justesse, on est dans une période où il faut sauver chacun de nos sous pour être capable de donner l'excellence et le service, M. le Président, et j'attends encore après les réponses. Mais lorsque je regarde les cartes et les documents que j'ai, du 2 décembre, ce qu'on était en train d'annoncer, qu'on a engagé une firme d'experts-conseils pour faire des recommandations au gouvernement, et

lorsque je regarde l'annonce du 8 avril, bien, j'aurai l'occasion, le 21 mai, lorsqu'on aura l'interpellation, d'aller chercher les réponses.

Alors, comme vous voyez, dans le peu de temps qui m'est imparti, je suis énormément déçu. Lorsqu'on fait la priorité des priorités, lorsqu'on est transparent au niveau d'un gouvernement, on ne va pas enfouir la commission de l'économie et du travail, dans l'étude importante des crédits, dans les catacombes de l'Assemblée nationale, mais on le fait au grand jour, dans le salon rouge ou, tout au moins, M. le Président, dans la salle Papineau. Sur ceci, je suis déçu, et j'espère que, lorsqu'on aura le dépôt du budget, le ministre responsable du budget, le ministre des Finances, apportera les correctifs nécessaires et recomblera les 248 000 000 $ de manque à gagner que nous retrouvons dans les crédits des S ministères qui relèvent de la commission de l'économie et du travail.

Je vous remercie, M. le Président.

M. Leclerc: M. le Président, en vertu de l'article 213...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond.

Alors, en vertu de l'article 213, vous souhaitez poser une question à M. le député de Drummond, si celui-ci consent.

M. St-Roch: Avec plaisir, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y. Une courte question, une courte réponse.

M. Leclerc: M. le Président, je vous remercie.

Est-ce que le député de Drummond est au courant, dans les remarques qu'il nous fait quant à la diminution des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce, que l'an passé, de façon exceptionnelle et non récurrente, il y a près de 75 000 000 $ de subventions qui ont été donnés à Sidbec-Dosco et à la MIL Davie? Est-ce qu'il est au courant de ça ou est-ce qu'il préférerait qu'on leur donne, à chaque année, 75 000 000 $?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la question est posée. Réponse, M. le député de Drummond. (17 h 30)

M. St-Roch: Oui, M. le Président, aussi brève. Il y a 75 000 000 $, mais il y a beaucoup d'autres domaines aussi, au niveau de la recherche et développement, où on ne retrouve pas les mêmes crédits.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond.

Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Lotbinière. Je vous écoute, M. le député de Lotbinière.

M. Lewis Camden

M. Camden: Je vous remercie, M. le Président.

M. le Président, nous arrivons au terme d'une étape importante dans l'année parlementaire, soit la fin de l'étude des crédits. Au cours du temps qui m'est imparti pour m'adresser à mes collègues, j'aimerais faire valoir la singularité des crédits qu'a présentés notre gouvernement cette année.

Ceci, comme on l'a évoqué à plusieurs reprises et, plus particulièrement, c'a été souligné par le président du Conseil du trésor, réside dans le fait que le gouvernement entend, au cours de l'année 1993-1994, dépenser quelque 41 087 000 000 $. Et ça, si on le compare à l'année 1992-1993, c'était 40 000 000 000$. Donc, l'augmentation des dépenses de l'État est relativement faible. La hausse se situe à 0,9 %, bref, 0,9 % par rapport à l'année précédente. C'est une augmentation qui est relativement faible et qui est, on doit le reconnaître, très nettement inférieure à l'inflation, dont on prévoit qu'elle se situera autour de 2,5 % en 1993.

On aura compris, M. le Président, qu'il s'agit d'un réalignement majeur des dépenses...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le député de Lotbinière.

M. le député de Labelle.

M. Léonard: ...vérifier le quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): II y a quorum. Allez-y. Continuez votre intervention, M. le député de Lotbinière.

M. Camden: Merci, M. le Président.

Alors, je disais donc qu'on aura compris qu'il s'agit d'un réalignement majeur des dépenses publiques, puisque la hausse des dépenses sera la plus faible des 20 dernières années, en faisant exception, bien sûr, de l'année 1982-1983. Pourquoi un tel réalignement des dépenses publiques? La réponse à cette question est connue, pour l'essentiel, mais il n'est pas inutile de le rappeler dans la mesure où il est très important de saisir chacune des occasions qui nous est offerte pour faire comprendre à la population la réalité extrêmement exigeante de nos finances publiques.

En effet, il importe plus que toute autre chose de faire comprendre à ceux et celles qui nous ont élus que le Québec est plus que jamais à l'heure des choix en matière des finances publiques. Nous sommes obligés de voir le contrat social qui existe entre le gouvernement, d'une part, et la société, de l'autre part, et ce, depuis trois décennies. Notre société, comme tant d'autres, s'est donnée, au cours des décennies qui ont précédé, des services publics dont le coût dépasse sa capacité de payer, comme le prouvent les emprunts énormes qu'il nous faut faire annuellement pour défrayer le coût de ces services, et ce, malgré des impôts relativement

élevés.

M. le Président, vous n'êtes pas sans savoir que les progrès réalisés à la fin de la décennie quatre-vingt ont pu laisser croire à certains qu'il serait possible de préserver ce contrat social, mais la récession survenue en 1990 et la mutation industrielle que connaît actuellement notre économie sont, comme vous le savez sans doute, venues modifier les tendances à long terme des revenus et dépenses et, par la même occasion, ont rendu inévitable la révision du contrat social liant le gouvernement et la société en matière de services publics.

En effet, si rien n'est fait pour corriger le déséquilibre actuel entre les revenus et les dépenses, le déficit atteindra, comme vous le savez sans doute, M. le Président, un niveau inacceptable et intolérable. Il ne pourra être rectifié sans remettre en cause les services de base que nous nous sommes donnés.

Ce contexte nous place donc devant la nécessité d'opérer une réduction du déficit et de cesser d'emprunter pour payer les dépenses courantes de façon à sortir le plus rapidement possible du piège de l'endettement dans lequel nous nous sommes enfermés petit à petit depuis une vingtaine d'années.

Pour sortir, évidemment, de ce piège de l'endettement, il n'y a pas d'autre voie que celle d'une croissance zéro des dépenses publiques, dans la mesure, comme vous le savez, M. le Président, où le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises pèse déjà très lourd sur leurs épaules.

L'État est donc aujourd'hui confronté au défi de cesser d'augmenter ses dépenses, et éventuellement de les diminuer afin que nous puissions un jour sortir du cercle vicieux de l'endettement. Pourquoi en est-il ainsi? Pourquoi sommes-nous aujourd'hui confrontés à une telle réalité? La réponse est simple et complexe à la fois, M. le Président. Notre économie n'a plus la force, en raison de la mutation industrielle que nous connaissons, de supporter un appareil étatique aussi considérable que celui que nous nous sommes donné au cours des 30 dernières années.

M. le Président, les difficultés que nous connaissons ne sont pas seulement dues à la récession ? qui prive, comme vous le savez, le gouvernement de revenus ? mais également à une mutation industrielle profonde qui est loin d'être négligeable. Elle est assez profonde et se traduit par le déplacement de secteurs d'activité économique au profit d'autres. On assiste, d'un côté, à la marginalisation des secteurs d'activité économique tels que ceux liés aux ressources naturelles au profit des secteurs d'activité dits de haute et de grande connaissance telles les technologies de l'information, l'industrie pharmaceutique, l'aéronautique et autres domaines dits de pointe.

À cet égard, M. le Président, notre société, notre population se rend compte que la difficile période que nous traversons n'est pas seulement le résultat d'une simple récession mais également celui d'un changement profond dans la nature de notre économie, et surtout des défis que posent les transformations à ceux et celles qui désirent maintenir le niveau de vie appréciable qu'ils ont connu au cours des dernières décennies. Ces défis, ce sont évidemment ceux du passage réussi vers une économie de valeur ajoutée.

En effet, M. le Président, il nous faut réussir ce passage, cette entrée dans l'ère de la valeur ajoutée qui dominera au moins la prochaine décennie en matière économique. Si nous ne réussissons pas à relever ce défi, notre société sera incapable de sortir du piège de l'endettement dans lequel elle s'est enfermée depuis une vingtaine d'années. Du même coup, M. le Président, elle sera incapable de sortir de celui de l'appauvrissement progressif de notre population, ce qui la guette dans la mesure où nous tarderons à faire les choix qui s'imposent en matière de services publics. Oui, M. le Président, c'est bien de cela qu'il s'agit. Nous sommes à l'heure des choix en matière de services publics, des choix que nous devrons faire et qui commanderont sans doute un repli sur des services de base à la population, et donc l'élimination progressive de certains services considérés comme non essentiels. M. le Président, les crédits qu'a présentés notre gouvernement reflètent cette situation inédite depuis la Révolution tranquille.

Le temps avance, et il importe de conclure, M. le Président. Je me propose de le faire en tentant de démontrer le bien-fondé de l'orientation du gouvernement relativement à cette politique salariale. Nous avons annoncé, évidemment, notre intention de procéder à un gel de salaire dans les secteurs public et parapublic. Cette option a été retenue avec beaucoup de difficultés. Cependant, considérant les circonstances et le contexte budgétaire, nous avons donc pris ces mesures, et, évidemment, elles impliquent beaucoup de discipline de notre part et sont également fort exigeantes.

Cependant, M. le Président, je crois que le bien-fondé de la démarche du gouvernement se caractérise, d'une part, par une démarche responsable vis-à-vis de ses employés, et surtout vis-à-vis des contribuables qui, comme vous le savez, se trouvent déjà suffisamment taxés. Le mérite et le bien-fondé de l'orientation gouvernementale en cette matière deviennent évidents. Et si l'on regarde ce qui se passe dans les autres provinces canadiennes, et en particulier du côté de l'Ontario qui se dirige vers un déficit record non enviable de 17 000 000 000 $, nous ne souhaitons nullement, M. le Président, nous retrouver dans cette même situation que nos voisins.

Dans mon esprit, M. le Président, en procédant comme nous le faisons, nous assumons une gouverne responsable de la destinée des Québécois et des Québécoises et, pour ma part, je suis convaincu qu'il s'agit là d'une orientation éclairée et clairvoyante, eu égard aux défis que notre société aura à relever au cours de la prochaine décennie.

Je vous remercie, M. le Président. (17 h 40)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suis

prêt à entendre le prochain intervenant.

M. le député de Lévis, je vous écoute.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, j'entends les députés qui disent que les gens sont fatigués d'être taxés. Ça veut dire, au fond, que le message commence à entrer, puisque depuis plusieurs années nous disons à l'Assemblée nationale que les gens en ont soupe d'être taxés alors que le gouvernement a augmenté les taxes considérablement dans à peu près tous les domaines. Et là je suis content de voir que le député de Lotbinière commence à dire que les gens sont fatigués d'être taxés, sauf qu'il aurait fallu que le message soit compris il y a quelques années, avant qu'on ne les taxe urbi et orbi.

On les a taxés d'une façon incroyable: le permis de conduire qui a triplé; les immatriculations qui ont plus que triplé; des 30 $ qu'on charge aux automobilistes sur leur plaque d'automobile pour un transport en commun qu'ils n'ont même pas, comme à l'île d'Orléans ou dans plusieurs municipalités du Québec puisque, sur les quelque 200 municipalités qui ont été taxées, il y en a à peine 70 qui ont du transport en commun.

Taxes! On a vu récemment que le ministre des Transports veut réinstaller le péage sur les autoroutes. On a vu que l'essence, qui était de 0,133 $ en 1985 est rendue à 0,194 $, alors qu'on paie plus de taxes sur l'essence au litre que n'importe quel État américain n'en paie au gallon. on a beau faire des discours pour dire que les gens sont tannés d'être taxés, mais où étaient-ils, ces députés, lorsqu'ils votaient toutes ces taxes? je vais vous dire, m. le président, que je n'ai pas voté pour une seule de ces taxes. j'ai voté contre toutes ces taxes-là, m. le président. quand j'entends un député libéral qui me dit: les gens sont fatigués d'être taxés, il devrait dire mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa pour être bien compris du ministre des affaires municipales qui a été le plus grand taxeux! il a passé des charges aux municipalités quand il a eu les municipalités; il a passé des charges aux commissions scolaires quand il a été en charge des commissions scolaires, et il ne s'est même pas rendu compte, comme ministre de l'éducation, que c'était le décrochage à 40 %, que les cégeps ne marchaient pas, que les universités... quand on a vu les arpenteurs-géomètres, 12 % seulement des finissants de l'université laval ont passé leurs examens de la corporation; 88 % ont bloqué. je vais vous dire que, comme clairvoyance, là, comme ministre de l'éducation, il ne voyait pas loin devant lui. il ne voyait rien, m. le président; une taupe, une taupe.

Les citoyens, on leur dit maintenant: II ne faut pas taxer, il faut faire attention à nos budgets. Et, en même temps, on gaspille à tour de bras! Les citoyens canadiens ont vu en première page du journal, récemment, qu'ils avaient payé un voyage au premier ministre du

Canada pour aller chasser, la nuit, le sanglier, en Russie; sans doute au «spot» ? la nuit, c'est difficile de chasser un sanglier si tu ne le vois pas ? alors que c'est interdit chez nous. Je vous dis qu'il n'y a pas grand monde qui a été édifié.

Quand on voit, actuellement, des dépenses... Le député de Drummond a commencé à faire allusion à la réorganisation, qu'on appelle, du ministère des Transports. Rappelez-vous, quand le gouvernement a loué un satellite soviétique pour annoncer en grande pompe, au Grand Théâtre de Québec, après avoir loué un satellite soviétique, après avoir fait monter... Us voulaient faire monter... je ne sais pas si c'est 1500 fonctionnaires au Grand Théâtre de Québec; ils trouvaient la salle assez grande ? elle contient à peu près 1500 personnes ? pour leur annoncer qu'ils claireraient 1250 employés occasionnels et 500 permanents. M. le Président, c'étaient des dépenses somptuaires. Combien ça a coûté, canceller le satellite soviétique? On me dit que ça aurait coûté quelque chose autour de 200 000 $. Je ne le sais pas, on n'a pas eu le compte. On n'a pas pu le savoir. Sauf que, pensez-vous que les gens sont édifiés, au point de vue des dépenses gouvernementales, quand on loue des satellites soviétiques dont on n'a même pas besoin? Et, après ça, il faut payer pour le canceller parce qu'on l'avait réservé. Quand on voit, au ministère des Transports, qu'on ferme des bureaux dans une place et qu'on en ouvre dans l'autre... Et on va déplacer les fonctionnaires, on va donner des paiements pour les déménagements, on va faire toutes sortes d'allocations de dépenses pour déménager des fonctionnaires d'un bureau à l'autre alors que les bureaux étaient là et on fait de la chaise musicale.

Les CL-215. Il y a une piste d'aéroport actuellement. Tous les journaux nous ont indiqué que le gouvernement voulait déplacer la piste dans le comté de Rober-val. Croyez-le ou non! On pourrait la déplacer jusque dans le comté de Roberval, M. le Président, alors qu'il y a déjà un aéroport. Ce n'est pas gratis, des aéroports, M. le Président. Ce n'est pas gratis, des aéroports. On a un aéroport, il est là, et là on dit: On ne prendra plus celui-là, on va en faire un autre. Là, on apprend, après ça, par les journaux, par après, on apprend quoi, M. le Président? On apprend qu'on a même truqué les cartes, qu'on a fait croire qu'il y avait telle et telle distance alors qu'on s'est trompé ? je ne me souviens pas si c'est 70 ou 90 kilomètres ? pour essayer de justifier un gaspillage de fonds publics pour faire un aéroport, pour déplacer un aéroport ? pour faire du patronage politique, disons le mot.

Comment ça se fait que les dépenses gouvernementales ne sont pas bonnes quand c'est des salaires aux petits employés, qu'il faut congédier les 1250 occasionnels du ministère des Transports? Et ce n'est pas des gens qui gagnaient des salaires faramineux; tu travaillais quelques mois par année. On les claire. Là, on économise. Et quand on arrive dans les firmes d'ingénieurs, M. le Président, là, l'économie n'est plus nécessaire. On a

passé des contrats de 30 000 000 $ à 93 000 000 $, M. le Président. Là, l'argent ne manque pas. Évidemment, il faut aller les collecter. Pour les collecter, il faut leur donner des contrats. Là, l'économie, on n'entend plus parler de ça autant que ça. Là, pour le gaspillage, l'argent, il y en a.

Quand on regarde les aéroports... L'aéroport des CL-215, actuellement, il est là, je ne sais plus depuis combien d'années; depuis qu'on a des avions qu'on utilise cet aéroport-là. En période de récession, on dit: Non, on n'en a plus besoin, on va en prendre un autre. Comme par hasard, c'est dans le comté de Roberval où le ministre, député de Roberval, est en danger électoral ? tout le monde le sait. Il dit: Si je faisais un petit aéroport, peut-être bien que ça m'aiderait à me faire élire. Comprenez-vous? Ça, c'est du gaspillage de fonds... électoraux. Et, après ça, on dit: On va donner l'exemple. Voyons donc, M. le Président!

Dans la région de Québec, regardons un autre dossier dans la région de Québec. Incroyable: le centre d'ophtalmologie du CHUL, on veut le déplacer. Il est au CHUL. Vous avez comme administrateur au CHUL, imaginez-vous, le Dr Brunet, spécialiste de l'administration hospitalière. À tel point ? je le sais, moi ? que les deux grands experts qu'on envoyait dans les hôpitaux pour les remettre sur le piton, c'était le directeur général de l'Hôtel-Dieu de Lévis puis le directeur général du CHUL. On disait que c'étaient ceux qui contrôlaient le mieux leurs coûts. J'ai vu, à l'Hôtel-Dieu de Lévis, ce que ça nous a donné. On a été pénalisé pour avoir envoyé un bon administrateur. Quand le gouvernement a changé, on s'est rendu compte que ça ne nous avait pas aidés, au contraire: on avait les plus petites augmentations de per diem alors qu'on était considéré comme un hôpital très bien administré. C'était notre directeur général qu'on envoyait un peu partout au Québec, pour ceux qui ne savaient pas s'administrer. Après ça, c'est nous autres qui avons été les plus coupés dans le per diem. C'est quoi, la rationalité, là-dedans?

Là, on nous dit quoi? On veut déplacer le centre d'ophtalmologie du CHUL alors qu'il n'est pas assez grand. Il y a 400 personnes sur la liste d'attente. Pourquoi? Parce que le ministre de la Santé, député de Char-lesbourg, aimerait mieux le voir à FEnfant-Jésus. Il va falloir défaire les bureaux, défaire les installations et faire de la chaise musicale et envoyer ça à l'Enfant-Jésus alors qu'on sait ? et tout le monde s'entend ? qu'au point de vue de l'accessibilité il est mieux localisé au CHUL que n'importe où ailleurs dans la région. On me dit que c'est de l'économie, ça?

Où sont-ils, les députés, quand on parle de ces économies-là? Ils ne sont plus là. Là, le gouvernement peut y aller. Il n'y a pas de danger. Il y a de l'argent en masse. Il n'y a pas besoin de compter, il en a, de l'argent, quand il s'agit de faire des remue-ménage, des transferts de bureaux, des relocalisations de bureaux, de fermer des bureaux, même s'il y a des pénalités à payer, pour en louer d'autres. Voyons donc! M. le Président, on ne peut pas parler des deux côtés de la bouche en même temps. Ou bien on économise parce qu'on manque d'argent, ou bien on en a en masse. Mais si on en a! On en manque.

Il me semble que, par exemple, dans la région de Québec, pour le centre d'ophtalmologie, ce serait bien mieux d'agrandir celui qu'il y a là, pas d'essayer de le déplacer. Pas essayer de faire venir un tuteur, qui est supposé être tuteur, M. Desjardins, grand tuteur de Montréal. Moi, j'ai dit: S'il est si bon tuteur que ça, je l'enverrais tuteur au Stade olympique. Si c'est un gars qui est bon dans le contrôle des coûts, là, je ne lui paierais pas de dépenses pour venir à Québec, je ne lui paierais pas de dépenses de séjour à Québec, je l'enverrais à Montréal. Pas besoin de lui faire de séjour, pas besoin de déplacement pour dire: Vous allez nous régler l'affaire du Stade olympique. (17 h 50)

Là, c'est drôle, apparemment, ils vont avoir besoin d'un toit nouveau, un toit fixe. On change toute la patente. On parle de 50 000 000 $. Il y en a qui disent, et ma collègue de Verchères va avoir des surprises pour certains d'entre eux bientôt, parce qu'elle en parlait avec moi ce midi, et il y en a qui disent que ça va coûter bien plus cher que ça. C'est drôle, pour le toit du Stade olympique, là, qui a entendu parler qu'on manquait d'argent? Il y a de l'argent en masse, semble-t-il, pour le toit du Stade olympique. Mais quand arrivent les citoyens, les gens qui ne gagnent pas cher, quand il s'agit de besoins de soins de santé à la population, pour les besoins du centre d'ophtalmologie du CHUL, là, on n'a plus d'argent, d'un coup sec. Le gouvernement ne peut pas parler des deux côtés de la bouche en même temps et penser que les gens vont le croire.

Et le résultat, bien, on voit de plus en plus des gens dans la rue. On revient ? 1974, 1975, 1976 ? avec le même premier ministre dont le secret est de mécontenter tout le monde. Pourquoi? Parce qu'il n'est pas cohérent dans sa démarche. S'il veut économiser, il dit: Pas de problème, on va économiser. Mais, à ce moment-là, on va agrandir le centre d'ophtalmologie du CHUL au lieu d'essayer de le déplacer. L'argent qu'on prendrait pour le déplacer, agrandissons celui-là, de sorte qu'on n'aura plus besoin d'envoyer le monde à Montréal pour se faire traiter. Ils n'auront pas besoin de se déplacer, ils n'auront pas besoin de gaspiller de l'argent, ils n'auront pas besoin de prendre des moyens de communication, aller prendre des chambres d'hôtel ailleurs pour se faire soigner. Ça, ça fait partie de l'économie. Ça fait partie de l'économie, ça aussi.

Et ce qui me frappe, moi, quand le gouvernement nous parle, il y a deux genres d'économies: il y a l'économie des petits et l'économie des gros. L'économie des petits, c'est qu'ils en ont trop, d'après le gouvernement, et l'économie des gros, c'est qu'ils n'en ont pas assez; il faut leur en donner davantage. Je pense que le gouvernement serait bien plus avisé s'il donnait l'exemple. S'il arrêtait de louer des satellites soviétiques pour faire des

annonces où il va clairer 1250 occasionnels au ministère des Transports, et après ça être obligé de le canceller et payer des pénalités; arrêter de faire des aéroports inutiles, plutôt utiliser ceux qu'il y a là et agrandir ceux qui sont existants plutôt que d'en bâtir des neufs plus loin alors qu'il y en a déjà un, et en payer deux par après en frais d'opération, et qui vont être des charges pour la population; arrêter de faire de la chaise musicale au ministère des Transports comme on le fait actuellement.

Je vais vous en donner un autre: la Commission des transports. Au cours de l'étude des crédits, on s'est rendu compte qu'on avait nommé deux personnes à Québec, M. Mercier et un autre. Mais, depuis qu'ils sont nommés à Québec, ils n'ont pas siégé à Québec, ils ont toujours siégé à Montréal. Alors, il faut leur payer des frais de déplacement à Montréal et 150 $ par jour pour rester à Montréal, alors qu'on les a nommés à Québec. Et depuis qu'ils sont nommés, depuis un an, six mois, un an, on leur paye des frais de séjour et de déplacement alors qu'on les a nommés à Québec, et ils n'ont jamais siégé à Québec. C'est quoi, l'affaire? On va nous dire que c'est ça, de l'économie? C'est ça, de l'économie?

Combien de sous-ministres, actuellement, qu'on nomme à Québec et qui passent leur semaine à Montréal? Combien il y en a? Quand on nous parle d'une capitale nationale, c'est quoi, une capitale nationale aujourd'hui quand, dans les Affaires internationales, toute la division de l'Asie, toute la division de l'Europe sauf la France, toute la division de l'Afrique sauf l'Afrique du Nord est rendue à Montréal? On nous dit qu'on est une capitale! Capitale paroissiale, capitale paroissiale ou capitale de carton. Et, après ça, il faut payer des déplacements. Les gens qui veulent s'adresser au gouvernement, à ce moment-là, ou les fonctionnaires qui ont affaire doivent aller les rencontrer ailleurs. Les sous-ministres sont de moins en moins à Québec, vous le savez. C'est facile de s'en rendre compte, vous n'avez qu'à appeler. Vous allez voir, on va vous dire qu'ils ne sont pas là, ils sont ailleurs.

On voit encore des fonctionnaires tablettes. On a vu le cas de M. Saint-Jean qui l'a été, quoi, trois ans et demi à près de 100 000 $ par année. Lui, il voulait travailler, mais on ne voulait pas l'affecter; on l'avait tassé. On n'a jamais nié sa compétence parce que, si on avait nié sa compétence, on l'aurait mis dehors. Qu'est-ce qu'on fait? On le laisse chez lui à ne rien faire parce qu'il y a des vengeances ou il y a des chicanes. Plutôt que d'affecter quelqu'un qui est compétent à du travail, on le paye 100 000 $ par année et on dit: Reste chez vous. Puis on nous dit qu'on économise? On nous dit qu'on économise, M. le Président? Voyons donc, c'est du gaspillage!

Et du gaspillage comme ça, il y en a beaucoup au gouvernement. Ne nous contons pas d'histoire, il y en a beaucoup, de ça, du gaspillage comme ça, au gouvernement. Pourquoi? Parce que la main droite ignore ce que fait la main gauche. On ne veut pas faire ces allocations de ressources efficaces, et on multiplie...

Le meilleur exemple, c'est le ministère des Transports. Au ministère des Transports, M. le Président, on a deux ministres. On a enlevé la moitié des routes, plus que la moitié des routes. Le ministère des Transports administrait 60 000 kilomètres de routes; maintenant, c'est baissé à 27 000 kilomètres de routes. On en a passé 33 000 aux municipalités, et on garde deux ministres. Si on claire 33 000 kilomètres de routes qu'on donne aux municipalités, peut-être qu'un ministre, ça suffirait. On dit qu'on va décentraliser. Alors, pourquoi deux ministres des Transports, M. le Président, alors qu'on a transféré aux municipalités plus de la moitié des routes.

C'est ça qu'il faut regarder, M. le Président. Les gens vont réaliser que le gouvernement est sérieux, quand il n'arrivera pas des choses comme ça qu'on voit à tous les jours dans les journaux. À tous les jours, on apprend des nouvelles de gaspillage du gouvernement. Je ne fournis pas, moi, à rencontrer des gens qui demandent de me rencontrer pour me donner des exemples de gaspillage. Je ne fournis pas. Je le dis bien franchement, des appels téléphoniques de part et d'autre pour donner des exemples de gaspillage.

C'est ça qu'il faut changer. Il faut changer, au fond, de faire une meilleure allocation des ressources. Puis, actuellement, les gens se rendent compte... J'écoutais les nouvelles, tout à l'heure, les nouvelles de l'heure du midi, puis je voyais des employés qui disaient: Le gouvernement, s'il veut économiser, qu'il n'économise pas toujours sur le dos des employés. Il y a d'autres façons, une meilleure organisation administrative.

Je vais vous donner un exemple. À l'Agriculture, quand je suis arrivé au ministère de l'Agriculture... je vais vous donner un exemple. Pour administrer une piastre à l'assurance récolte, savez-vous combien ça coûtait, en 1976, quand je suis arrivé au gouvernement, M. le Président? 0,70 $ pour administrer 1 $. Quand je suis parti, ça coûtait 0,07 $, 0,07 $ pour administrer 1 $. Quand je suis arrivé, en 1976, ça coûtait 0,70 $ pour administrer 1 $. Pourquoi? Parce que c'était du gaspillage, de la mauvaise organisation administrative.

Regardons aujourd'hui à l'Éducation. Regardons. On taxe de plus en plus les citoyens. On transfère des responsabilités aux commissions scolaires, mais, en même temps, on a toujours 2300 personnes à la tête du ministère de l'Éducation. Vous savez qu'en Suède, M. le Président, pour 9 000 000 de population, au lieu d'avoir 2300 fonctionnaires à la tête de leur ministère, ils en ont 150. Et nous, qu'est-ce qu'on a? On ne peut pas bouger au Québec sans demander la permission à quelqu'un dans l'Éducation. Puis on dit qu'on n'a pas d'argent pour faire de l'éducation. Mais, par ailleurs, on en a en masse pour faire de la bureaucratie. Ne pensez-vous pas que ces gens-là seraient mieux affectés à faire de l'éducation, justement, hein?

C'est ça, M. le Président, il faut faire une réorga-

nisation administrative qui va rendre davantage efficaces les ressources qu'on utilise actuellement. Et les citoyens sont mal pris face à ça. Les fonctionnaires sont mal pris face à ça. Parce que le cas de M. Saint-Jean n'est peut-être pas le seul cas.

Je vais vous donner un autre exemple de gaspillage, M. le Président: M. Gilbert qui, lui, passe d'arbitrage en arbitrage. Il a gagné toutes ses causes à date. Bien, le ministère, qui est en arbitrage avec lui ou en procès avec lui depuis sept ans, on a entendu dire qu'il irait en appel. Combien de temps quelqu'un doit gagner ses procès pour ne pas être coupable? Ça aussi, c'est du gaspillage, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, il manque encore une minute, mais je vais terminer là-dessus...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ou presque.

M. Garon: ...en disant, essentiellement, ce que les gens veulent, c'est que le gouvernement administre mieux l'argent, utilise mieux son personnel. Et, pour ça, il va falloir arrêter tout le gaspillage qui se fait dans le gouvernement, avec des mauvaises décisions qui sont des décisions politiques beaucoup plus pour favoriser les gens qu'on veut favoriser que de l'efficacité administrative, M. le Président.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, merci, M. le député de Lévis.

Il est 18 heures. Je suspends les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît, MM. et Mmes les députés. Nous continuons les travaux de l'Assemblée nationale. Nous sommes toujours à débattre des différents rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1993-1994. Étant donné qu'il s'agit d'un débat restreint, il s'agit d'un débat d'une durée maximale de deux heures. Je vous rappelle que le parti ministériel dispose encore d'une période de 21 minutes, et l'Opposition officielle, de 36 minutes.

Je suis prêt à reconnaître le premier intervenant, M. le député d'Iberville.

M. Yvon Lafrance M. Lafrance: Merci, M. le Président.

Il me fait plaisir, M. le Président, ce soir, de me joindre à mes collègues, le député de Taschereau et le député de Lotbinière, qui, cet après-midi, nous ont entretenus sur ce débat touchant la question des crédits budgétaires. Cette discussion, M. le Président, sur la motion d'adoption des crédits nous donne une dernière chance d'aborder une approche globale en matière de finances publiques québécoises. Si je vous rappelle le titre d'un document, M. le Président, que nous connaissons tous, c'est-à-dire «Vivre selon nos moyens», cela nous ramènera nécessairement à une série de questions et de remises en cause d'un ordre des choses qui nous semblait établi en matière de finances publiques. Cet état de fait a, d'ailleurs, été évoqué pendant la commission parlementaire sur le financement des services publiques québécois, laquelle commission parlementaire, comme nous le savons, s'est tenue au cours du mois de février 1993.

En effet, donc, il y a quelques mois, une commission parlementaire s'est déroulée en vue de déterminer les voies et les moyens pour trouver des solutions réalistes et conformes aux réalités budgétaires que nous connaissons, réalités budgétaires et aussi économiques. Cette commission parlementaire a permis à plusieurs intervenants, comme nous l'avons vu, d'établir des diagnostics précis et d'aider notre gouvernement à trouver ses voies et ses moyens de solution à cette question très difficile.

Vous aurez également compris que l'adoption de ces crédits, pour l'année 1993-1994, a nécessité de très longues discussions à l'interne, au sein du gouvernement, pour en arriver à un consensus le plus large possible ? quoiqu'il est toujours difficile d'avoir l'unanimité ? afin de privilégier des priorités qui n'altèrent en rien le mandat confié à l'État québécois d'assurer des services de qualité à notre population. Et je dis ceci, M. le Président, ayant participé moi-même à deux commissions parlementaires dont je suis membre, c'est-à-dire la commission des institutions et, aussi, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation.

Lorsqu'on parle, M. le Président, d'un budget qui dépasse les 40 000 000 000 $, on doit également parler de rigueur administrative, c'est-à-dire que les contribuables québécois doivent avoir accès à des programmes de qualité, mais le tout en conformité avec, il va de soi, leur capacité de payer. C'est exactement ce à quoi s'attend, d'ailleurs, la population. Elle nous a confié, à nous, les hommes et les femmes de cette Assemblée nationale, le soin de les représenter ici, et d'assurer une saine gestion des fonds publics, en maximisant les ressources financières qui sont mises à notre disposition. En retour, les administrateurs de l'État doivent faire face à de nombreux défis, dont celui d'assurer une plus grande responsabilité à l'égard de l'administration publique. Les crédits, donc, pour la prochaine année financière, dénotent également un souci d'assainissement des finances publiques. Le gouvernement libéral a clairement laissé entendre, depuis 1985, l'urgence d'un re-

dressement de nos finances ? et je redis ceci, l'urgence d'un redressement de nos finances.

Le principe de base, M. le Président, est toujours le même: il faut cesser de remettre les déficits accumulés sur le dos des générations à venir. Certes, nous ne pouvons nous débarrasser, aussi bien collectivement qu'individuellement, des dettes accumulées au cours des années en un seul coup de baguette, mais nous pouvons au moins en ralentir la croissance ? c'est ce que nous faisons ? sinon en diminuer également le fardeau, afin que le Québec retrouve cette marque de confiance qui l'a naguère caractérisé.

De plus, M. le Président, il faut expliquer que l'actuelle situation ne s'est pas développée de façon spontanée. C'est le fruit de l'évolution, grosso modo, d'une quarantaine d'années, d'une évolution récemment fulgurante, une période pendant laquelle les Québécoises et les Québécois se sont payé des services, en faisant en sorte que soient instaurés des programmes accessibles et universels ? mentionnons celui de l'assurance-maladie ? ou encore, dans le domaine économique, la création d'un certain nombre de sociétés d'État qui ont contribué à rendre le Québec plus dynamique que jamais, afin de faire face aux défis de la concurrence et de la performance. D'ailleurs, n'eût été l'intervention de l'État dans plusieurs secteurs d'activité économique, plusieurs régions du Québec se seraient retrouvées en difficulté. C'est grâce à l'intervention de l'État québécois que nous avons pu connaître ce développement aussi rapide et parfois aussi fulgurant durant certaines années, ce qui nous a permis un rattrapage certain par rapport à d'autres provinces canadiennes, en particulier, l'Ontario, dans des domaines où nous accusions des retards importants.

Vous aurez compris que je fais allusion ici, par exemple, M. le Président, au réseau d'autoroutes, lequel nous a permis d'établir un système de communications de plus en plus moderne et rapide à travers le Québec. La situation n'est pas évidemment parfaite. Nous avons eu, d'ailleurs, ce matin même, une importante réunion à ce sujet. Beaucoup reste à faire, mais beaucoup, il faut le reconnaître, a été fait depuis 1985. (20 h 10)

M. le Président, le document, donc, intitulé «Les finances publiques: vivre selon nos moyens» comporte une philosophie d'ensemble qui doit se comprendre à la lumière de la problématique des finances publiques totales du Québec. Comme je viens de le dire, la société québécoise s'est développée à un rythme fulgurant et s'est caractérisée par une évolution rapide de ses manières et aussi de ses comportements, spécialement, récemment, en matière d'administration publique.

La société québécoise s'est offert des services de qualité, il faut le reconnaître. Et je puis vous affirmer, sans craindre de me tromper, que, généralement, je dis bien généralement, les hommes et les femmes qui en administrent les budgets le font avec compétence et rigueur administrative. Le problème ne vient pas du fait que l'appareil étatique est incompétent, généralement parlant. Il vient plutôt du fait que notre capacité de payer n'est plus ce qu'elle était, il y a 10, 15 ou 20 ans. C'est normal, M. le Président, parce que, à cette époque, tout était à construire. Aujourd'hui, nous devons consolider nos acquis. Nous devons procéder à des altérations de nos infrastructures économiques, sociales, culturelles et éducatives. Et il ne nous reste guère d'argent, évidemment, du moins, pour les prochaines années à venir.

M. le Président, la population est à même de comprendre, je pense, ce problème fondamental, car c'est elle qui, en bout de piste, paie les impôts et les taxes pour pouvoir assurer la gestion continue de cette machine administrative. La population est tolérante dans la mesure où elle a confiance et accepte de confier ses ressources afin d'agir en son nom et d'administrer des programmes avec soin. Mais cette population, M. le Président, devient, selon moi, de plus en plus intolérante face à la dette. La population réalise que la gestion des fonds publics est en difficulté. Elle voit bien que la dette est énorme, que le déficit est toujours trop élevé, mais a confiance en un gouvernement qui fait des efforts extraordinaires présentement pour corriger la situation sans créer des réactions incontrôlables. Le message du gouvernement libéral est clair, M. le Président, il faut vivre selon ses moyens. Et c'est exactement la voie que nous avons tracée depuis 1985 et qui nous conduira aux prochaines élections, où nous n'aurons pas honte, je pense, de dresser un bilan complet de l'état des finances publiques du Québec. Et, dans ce sens, M. le Président, j'attends avec impatience le prochain budget qui doit être annoncé, comme on le sait, dans les prochains jours.

Mais, en même temps, M. le Président, nous devrons dresser un bilan de la qualité de vie des citoyennes et des citoyens du Québec. Nous pourrons leur dire que la plupart des programmes ont été reconduits, sauf que certains ont subi des modifications, soit parce qu'ils étaient inadéquats, soit parce qu'ils étaient devenus trop coûteux, et que nous avons dû procéder à des fusions, à des rationalisations ou des regroupements d'organismes, tout ceci afin de minimiser les impacts et les réactions incontrôlables, comme je l'ai dit un peu plus tôt.

Lorsque le gouvernement libéral véhicule une nouvelle philosophie, celle de la qualité totale, qui a été l'objet, principalement, du discours du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, M. Gérald Tremblay, nous ne faisons pas uniquement référence à l'apport du secteur privé dans notre économie; nous parlons aussi d'une administration publique plus moderne, mieux gérée et mieux regroupée autour d'objectifs précis à court terme, et aussi à moyen et à long terme, qui devront tenir compte de cette capacité de payer des citoyens. Récemment, vous vous souviendrez, M. le Président, qu'un groupe de députés ministériels a étudié de très près les programmes gouvernementaux et

formulé des recommandations précises pour une rationalisation des dépenses publiques. Ce groupe, présidé par le député de Chauveau, ici présent ce soir, en est arrivé à la conclusion qu'il fallait procéder, à ce stade-ci de notre évolution économique, à des fusions ou des regroupements d'organismes, à la disparition de directions qui n'étaient plus pleinement efficaces à la bonne marche de certains ministères. D'autres solutions ont été mises de l'avant, comme les privatisations, lesquelles ont déjà fait l'objet de décisions et d'annonces du gouvernement. mais ce qu'il importe de retenir, m. le président, c'est avant tout l'esprit qui anime le gouvernement libéral dans cette gestion des fonds publics. nous sommes persuadés, de ce côté-ci de la chambre, que la population est prête à accepter certains sacrifices. et, à cet égard, permettez-moi de rappeler les statistiques d'un récent sondage à l'effet qu'au niveau national 91 % des canadiens partout au canada ont dit que la situation financière de l'état canadien était grave ou très grave. au québec, 85 % des citoyens et citoyennes du québec ont dit également que la situation des finances publiques était grave ou très grave. et 52 % de ces citoyens-là, autant au québec qu'au canada, se sont dit prêts à accepter la coupure de certains services de l'état. alors, je pense, m. le président, que c'est révélateur, ces sacrifices, dans la mesure où la population sentira que ceux et celles qui administrent les ressources qui leur sont confiées sont soucieux de maximiser les ressources disponibles pour des services, donc, de qualité.

Oui, M. le Président, nous en sommes rendus à un point où des remises en question sont devenues nécessaires. Oui, nous en sommes rendus à un point où nous réalisons que des sacrifices sont nécessaires par une participation plus grande des citoyens et aussi du secteur privé. Oui, nous en sommes bien conscients que le fardeau de la dette et du déficit ont atteint des points que nous ne pourrons tolérer plus longtemps et, surtout, qu'il ne faut pas transférer à des générations futures. M. le Président, l'adoption des crédits pour l'année 1993-1994 est donc marquée au coin de la rigueur administrative.

Le président du Conseil du trésor a déjà passé un message très clair sur cette volonté qui doit naître de la fonction publique d'innover en matière de gestion des affaires publiques. Nous devons collectivement et aussi individuellement trouver des moyens de mieux administrer les fonds publics et surtout de s'assurer que chaque dollar investi dans l'appareil d'État servira, d'abord et avant tout, l'intérêt des contribuables québécois. M. le Président, c'est un véritable enjeu de société, car, en bout de piste, c'est chacun de nous qui paiera la facture. Il en va de la qualité de vie de l'ensemble des Québécoises et des Québécois. Et les crédits 1993-1994 reflètent cette volonté du gouvernement libéral d'assurer des services de qualité dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs d'activité, qu'ils soient économique, culturel, éducatif ou social.

Le gouvernement libéral, M. le Président, est également bien conscient des nouvelles tendances qui se profilent dans une société aussi moderne que la nôtre. Les besoins en matière sociale ne sont plus ce qu'ils étaient il y a 15, 20 ou 30 ans. Les besoins en matière économique ont également évolué vers une modernisation de notre infrastructure industrielle. Les besoins éducatifs également sont marqués par cette nécessité d'une meilleure formation de notre main-d'oeuvre.

Voilà des défis considérables, M. le Président. C'est là un vaste programme à accomplir pour les années à venir, et nous y parviendrons dans la mesure où, nous tous, on percevra cette volonté de se préparer à l'aube des années 2000. Je vous remercie, M. le Président. (20 h 20)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Iberville.

Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Labelle. Je vous rappelle, M. le député, que votre formation dispose encore d'une période de 36 minutes. Cependant, votre intervention ne peut dépasser 30 minutes.

Allez-y, M. le député de Labelle.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président.

Nous en sommes au terme de cette opération d'étude des crédits du gouvernement, qui ont été déposés le 25 mars dernier. M. le Président, il y aurait beaucoup de choses à dire. C'est plutôt le choix qui est difficile à faire entre tout ce qu'il y a à dire par rapport à ces crédits. Mais je devrais revenir d'abord sur une question de forme, et puis, par la suite, sur le contenu.

Premièrement, sur des questions de forme, je voudrais faire remarquer quand même que le responsable des crédits de l'administration gouvernementale, qui est le président du Conseil du trésor, n'est pas ici. Et, bien qu'il ne soit pas de coutume de noter l'absence d'un député dans cette Chambre, il reste que, lorsqu'un ministre présente un projet de loi aussi important que celui des crédits, qui porte, en particulier, sur une somme de 41 000 000 000 $; il m'apparaît essentiel qu'il aurait dû être ici au cours de l'étude, de la conclusion de ce débat restreint portant sur l'étude des crédits. D'autant plus que le gouvernement, devant les problèmes économiques auxquels nous sommes acculés, depuis cette récession qui date d'avril 1990, ce gouvernement, avant Noël, avait décidé, disait-il, de s'occuper d'économie, après avoir perdu son référendum. Alors, on nous a annoncé, au début du mois de décembre, la tenue d'une commission publique sur les finances de l'État, sur la fiscalité et les finances de l'État.

Dès le départ, M. le Président, il y a eu des ratés parce que le gouvernement avait promis la publication d'un document, vers la fin décembre, début janvier, sur les finances publiques, document qu'il n'a rendu public,

à toutes fins pratiques, que le jour de la date limite de dépôt des mémoires de ceux qui voulaient se présenter en commission parlementaire, le 19 janvier. Le jour même, il a rendu public un document sur l'orientation des finances publiques au cours des années subséquentes, alors que les personnes qui avaient eu à rédiger un mémoire n'avaient pas en main ces renseignements. Cela a coloré la tenue de la commission sur les finances publiques parce que, à chaque fois que des groupes se présentaient, ils soulignaient qu'ils n'avaient pas eu ce document en main, parce que leur mémoire aurait pu être différent et même l'aurait été très sûrement dans un certain nombre de cas.

Je voudrais aussi souligner, M. le Président, comme je l'avais fait au début de cette commission parlementaire, qu'elle s'est tenue à la veille, pratiquement comme maintenant, du discours sur le budget, qui pourrait être le dernier avant les prochaines élections générales ? je dirais probablement le dernier avant les prochaines élections générales ? et qu'elle s'est tenue aussi à la veille de la reprise des négociations en vue de renouveler les conventions collectives qui lient le gouvernement à ses employés et qui viendront à échéance le 30 juin. J'ai dit cela au tout début de la commission, au début du mois de février, sans savoir exactement ce qui surviendrait au cours du printemps, mais, quand même, en pensant qu'il y avait quelque relation entre ces deux événements qui se produiraient et la tenue de cette commission parlementaire.

Je l'ai donc qualifiée de vaste opération de conditionnement politique. Nous avons pu, au cours de ces travaux, constater qu'il se produisait là un dialogue de sourds, parce que le président du Conseil du trésor, qui était, je dois le dire, le principal acteur, parce que le ministre des Finances n'y a pas toujours été ? nous avons appris, par la suite, qu'il avait quelques problèmes de santé... Donc, revenons au président du Conseil du trésor. Il ne cherchait qu'à trouver des coupures à droite et à gauche. C'était son seul objectif, sans plus. Il voulait des recettes pour essayer d'équilibrer son budget, alors que ceux qui présentaient des mémoires voulaient apporter des solutions beaucoup plus larges et, je dois dire aussi, beaucoup plus durables aux problèmes qui nous confrontaient tous.

S'il y a eu un consensus, M. le Président, c'est sur la gravité de la situation. Effectivement, les déficits du gouvernement du Québec sont importants, majeurs. Ils se sont accumulés au cours des dernières années, depuis huit ans. Même avec un gouvernement qui prêchait l'équilibre budgétaire, nous avons accumulé des déficits considérables, et cela, même en période de prospérité économique sans précédent, qui a duré sept ans, de 1983-1984 jusqu'au printemps 1990. Sans précédent! Pourtant, durant toutes ces années, nous avons accumulé des déficits, sauf en 1989 où c'était pratiquement l'équilibre. C'est le seul moment, mais on n'a jamais racheté les déficits antérieurs. Problème majeur de déséquilibre structurel dans les budgets du Québec, c'en est un signe évident.

M. le Président, il est évident aussi que l'état lamentable des finances fédérales ajoute encore davantage à la gravité de la situation. Nous aurions voulu, lors de cette commission parlementaire sur les finances publiques, aborder les impacts, les conséquences des déficits fédéraux sur les finances du Québec, et quelles étaient les perspectives aussi, à terme, de ce qui découlait, de ce qui va découler nécessairement de l'accumulation encore plus grave des déficits fédéraux au cours des années dernières. Nous n'avons pas pu aborder cette question ni celle de la politique monétaire, mais je dirai davantage. Celle du déséquilibre des finances fédérales, nous n'avons pas pu l'aborder, le gouvernement refusant de l'aborder, même à travers des questions. Parce que, sur cette question de forme, M. le Président, je dois souligner que ce que l'on voulait tirer, c'était une espèce de consensus sur la gravité de la situation. Gravité des déficits, nous en sommes, mais, comme image, on voulait mettre tout le monde dans le bain pour arriver à faire consensus sur la gravité de la situation et à présenter par la suite des éléments de solution dont nous aurions aimé discuter.

Mais, dans cette commission, M. le Président, tout ce que nous avons eu, ça a été, évidemment, d'entendre les intervenants qui ont présenté des mémoires. Très bien. Il y en a eu de parfaits, il y en a eu de profonds, qui allaient au coeur de la question, mais il n'y a jamais eu de réunion de travail pour la préparer, cette commission, entre l'Opposition et le gouvernement, de sorte qu'on s'est limité, en termes d'élus, à présenter des notes d'ouverture ? d'une part, le gouvernement; d'autre part, l'Opposition ? et ça a été tout ce que nous avons connu comme débat. Tout le reste a consisté à entendre les mémoires et les intervenants qui y venaient. Et il n'y a pas eu de débat sur les conclusions de la commission parce qu'il n'y a jamais eu de projet de conclusion de rédigé.

M. le Président, je mentionne ces faits parce qu'ils ont fait l'objet d'une question de privilège à l'Assemblée. Parce que la commission n'a pas produit autre chose qu'un procès-verbal des délibérations, il n'y a pas eu, donc, de rapport, mais le président du Conseil du trésor s'est permis, lui, de transmettre un mémoire, un rapport qu'il intitule comme ceci: «J'ai le plaisir de vous transmettre une copie du rapport sur les résultats de la commission sur le financement des services publics.» Et je donnerai quelques éléments: le rapport présente les principales conclusions qui se dégagent de cette consultation; il est constitué de trois parties; on rappelle le mandat de la commission, on présente les résultats d'une analyse quantitative et, par la suite, on y relève les principaux points qui en ressortent et les points de convergence. (20 h 30)

M. le Président, il s'agit d'un rapport du gouvernement, mais aussi, en même temps, partisan. Je ne nie pas le droit à un parti politique de faire un rapport pour

présenter son point de vue, mais que cela soit fait de la part du président du Conseil du trésor de façon à donner l'impression qu'il s'agit du rapport de la commission et qu'il y a eu, effectivement, débat à l'intérieur de la commission, qu'on a établi des consensus comme des divergences, ceci est absolument faux. Faux! Et il faut le dire. Et il faut voir là l'intérêt que le président du Conseil du trésor avait à cette commission, que j'avais qualifiée, dès le début de février, de vaste opération de conditionnement politique. Effectivement, nous en avons la preuve.

M. le Président, par exemple aux pages 18 et 19 de ce rapport, on dit qu'il y a eu de nombreux points de convergence qui se sont dégagés sur des sujets très importants, par exemple concernant le déficit et la dette, concernant la fiscalité, concernant la situation économique, où l'on dit, par exemple, «pour certains, y compris les membres de la commission appartenant à l'Opposition officielle ainsi que certaines associations syndicales, la cause des problèmes des finances publiques doit être attribuée au taux élevé de chômage». M. le Président, je dénie à quiconque, même si c'est un fonctionnaire chevronné, de parler au nom de l'Opposition officielle. Je regrette. Je n'ai jamais signé ce rapport et, malgré tout le respect que je peux devoir à ses auteurs, il n'est pas le rapport de la commission parlementaire. Il ne représente en aucun cas le point de vue de l'Opposition officielle. Mais cela indique bien l'intention qu'on avait derrière la commission sur les finances publiques qu'on a instituée.

M. le Président, donc, après cette commission au cours de laquelle on n'a pas eu de délibérations pour tirer des conclusions ? loin de là, elle s'est terminée avec la comparution des derniers intervenants, point, sans aucune discussion sur aucune espèce de recommandation ou même de divergence ? nous attendions donc le dépôt des crédits. Nous l'avons eu, le dépôt des crédits. J'ai dit, de façon générale, que le président du Conseil du trésor n'avait pas livré la marchandise, et je pense que cela est vrai. S'il y avait un consensus, c'est bien celui qui portait sur la gravité de la situation, sur la gravité de cette situation qui comportait l'accumulation de déficits année après année, tant au gouvernement du Québec qu'au gouvernement fédéral, lesquels avaient aussi des impacts sur la situation économique ici, et financière et budgétaire.

M. le Président, le président du Conseil du trésor a présenté des crédits qui comportaient d'abord des artifices comptables: 300 000 000 $ qui portaient sur les régimes de retraite, qui n'étaient qu'un artifice comptable, une écriture aux livres, sans plus. Le président du Conseil du trésor a aussi utilisé un autre artifice comptable, de sorte que, dans ses livres, il diminuait son déficit ou ses dépenses de 243 000 000 $ simplement en finançant de façon un peu différente ou en calculant de façon différente l'année financière des commissions scolaires, sans que cela ne change rien, quoi que ce soit à la subvention que le gouvernement versait aux commissions scolaires.

M. le Président, ce fut de la poudre aux yeux, et ce fut une immense déception de la part de tous les observateurs financiers de l'administration gouvernementale quant au dépôt de ces crédits. Une déception, il faut le dire. Je pourrais citer des éditoriaux, que j'ai déjà cités, d'ailleurs; c'est pour ça que je ne voudrais pas les reprendre. Mais, qu'il s'agisse de M. Robert Sansfaçon dans Le Devoir, de M. Alain Dubuc dans La Presse et de Mme Martine Corriveau dans Le Soleil, M. le Président, tout le monde a été déçu de ces crédits parce que, devant les travaux de cette commission parlementaire, devant les efforts que les intervenants de la société québécoise sont venus démontrer en commission parlementaire, au fond, il y a eu une frustration: c'est que le président du Conseil du trésor n'a pas livré la marchandise. En fait, il a visé un point qui a été celui du gel des salaires des fonctionnaires de la fonction publique ou parapublique. C'est ça. C'était un point et, effectivement, là, il y a quelque 500 000 000 $.

Et, M. le Président, cela nous ramène à une première remarque que j'avais faite dès le départ: que nous nous trouvions à la veille de la reprise des négociations. On a donc proposé un gel de deux ans des salaires. À mon sens ? je le répète encore parce que je l'avais dit à l'époque ? il s'agit d'un geste qui vise à désolidariser la société québécoise. Oui. Un geste facile, trop facile, beaucoup trop facile de geler tout le monde. Et je vous en donnerai, des conséquences, M. le Président, parce que, devant, par exemple, les centrales syndicales qui demandent la réorganisation du travail, la seule chose qu'on a faite en faisant le gel des salaires, c'est qu'on a pris une décision qui s'appliquait généralement sans discernement. je voudrais vous référer tout simplement au journal les affaires de cette semaine qui publie une étude du centre de recherche et de statistiques sur le marché du travail où l'on dit, où l'on titre: «les employés du secteur public ont 12,5 % de plus que ceux du privé». m. le président, cela peut être exact, mais dans la réalité, lorsque le président du conseil du trésor gèle les salaires, il le fait indistinctement. je voudrais vous dire que, dans le tableau de la page 4 du journal les affaires de cette semaine, lorsque l'on compare l'écart du public et du privé et que l'on regarde chacune des fonctions, on trouve justement que ce sont les personnes, les fonctionnaires qui gagnent peu qui vont être les plus durement touchés par ce gel. exemple: les conducteurs de véhicules légers, il y en a 211 au gouvernement; les conducteurs de véhicules lourds, il y en a 317. leur salaire actuel est de 22 % plus bas que ceux du privé. les véhicules lourds, 11% en bas du privé. vous prenez les journaliers. alors, les journaliers, sûrement un des salaires les plus bas dans la société; au gouvernement, ils sont payés 21 % en bas du privé. et je peux en citer un certain nombre. tous les mécaniciens, 10 %, 15 %, 11 %, 11 % en bas du privé. les peintres, 18,8 %. les plombiers, 16,7 % en bas du

privé.

Le public paie les gagne-petit ou une bonne partie de ces gagne-petit plus bas que le privé. Lorsque l'on gèle les salaires, M. le Président, on va accentuer cette tendance. C'est là où je dirais qu'il s'agit d'un gel bête et méchant parce que, justement, on n'a rien modulé. Au lieu de prendre des décisions ad hoc de négocier et de remonter, effectivement, ce n'est pas ce qu'on a fait; on a gelé à la grandeur.

Je sais qu'en face on va nous rappeler certains événements de 1982. Je dirai que ceux qui gagnaient en bas de 18 000 $, à l'époque, n'étaient pas touchés. Et ceux qui gagnaient entre 18 000 $ et 35 000 $ n'avaient que la moitié de la coupure, et ce n'est qu'en haut de 35 000 $, à l'époque, qu'ils étaient complètement touchés, et pour 4,5 % du salaire seulement.

M. le Président, au lieu de prendre des décisions qui touchaient à la réorganisation de l'État, on a pris simplement une décision facile qui a été le gel, point. On n'a pas, justement, recentré l'action de l'État, comme l'avait promis ou comme l'avait suggéré le président du Conseil du trésor. C'est là où le bât blesse parce que c'est là où il y a beaucoup d'argent. (20 h 40)

Je voudrais, dans les 10 dernières minutes qui restent, M. le Président, amener un certain nombre d'éléments parce que c'est vrai que la situation est grave, mais il y a beaucoup de choses à faire. Juste au plan de l'État, de la fonction publique, je rappellerai que le Vérificateur général du Québec a commencé une étude de la gestion des ressources humaines au gouvernement du Québec, qu'il terminera l'an prochain. Mais la première moitié de son travail a déjà été publiée, déposée ici, en cette Chambre, et les constatations ne sont pas à l'avantage du président du Conseil du trésor et de l'administration publique ici, au Québec. Et qu'on n'accuse pas le passé. Ça fera huit ans que ce gouvernement est au pouvoir; cela fera huit ans.

Qu'est-ce que dit le Vérificateur général? «Il y a peu de planification structurée de la main-d'oeuvre dans les ministères et organismes»; c'est écrit, page 21 de son rapport. «Le processus de dotation en matière d'emplois occasionnels nous apparaît non efficient et non économique, principalement à cause de la multiplication des fichiers de candidats dans la fonction publique.» Or, on sait que le président du Conseil du trésor vient de régler en partie la question. Tout simplement, il ne les réengage pas, pour une grande partie d'entre eux; 1200 juste au ministère des Transports. Oui, M. le Président, ceux-là sont vite touchés. Us gagnent peu, mais on les touche d'abord. «De plus, dit-on, certaines pratiques administratives sont même inquiétantes sur les plans de l'équité, de l'impartialité et de la transparence des gestes posés dans la dotation des emplois occasionnels.» Ce sont des constatations du Vérificateur général. «Douloureuse épine au pied du fait que plus de 60 % des emplois comblés le sont par des gens qui ont déjà une expérience dans la fonction publique. Le gouvernement a instauré une infrastructure administrative qui favorise la concertation de différents intervenants, mais, en ce qui concerne la réalisation concrète de ses orientations, le partage et la mise en commun des ressources manquent de cohérence.» Et tout le reste est à l'avenant. En réalité, il y a de grandes déclarations, mais la réalité ne suit pas. Dans la réalité, il n'y a rien qui se passe. «La reddition de comptes des gestionnaires sur la composante la plus imposante de l'appareil gouvernemental, soit la ressource humaine, est à toutes fins utiles inexistante.» Page 22 du rapport. Cela veut dire que les gestionnaires ne rendent pas compte de la gestion des ressources humaines.

M. le Président, je tenais à dire cela, parce que c'est fondamental. C'est une décision facile de geler les salaires, mais, si on ne réorganise pas l'État, il n'y a rien qui va se passer, il n'y aura pas de conséquences au bout de la ligne, et le gaspillage que mon collègue de Lévis a dénoncé ce soir, vers 17 h 45 ou 18 heures, va continuer. M. le Président, le président du Conseil du trésor n'a pas livré la marchandise. Il n'a pas, comme il avait dit qu'il le ferait, recentré l'action de l'État, loin de là. Non, il ne l'a pas fait. Et, surtout, on ne s'est pas posé des questions fondamentales sur les ressources de l'État, sur la façon de les utiliser, sur l'impact de l'environnement même de l'État. Aucune discussion là-dessus.

M. le Président, je pense que, quant à nous, nous sommes d'accord qu'il ne doit pas y avoir d'augmentation du fardeau fiscal durant les prochaines années. Oui, quant à moi, je suis aussi d'accord avec cet énoncé. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne doit pas se poser des questions sur les abris fiscaux. Non, cela ne veut pas dire qu'on doit laisser faire la contrebande comme elle se fait présentement, spécialement dans le domaine du tabac, de l'essence, des alcools. Cela ne veut pas dire qu'on doit laisser continuer l'évasion fiscale qui se fait en ce qui concerne la perception des taxes, taxes de vente, TPS. Il faut que, selon le principe de l'équité, chacun paye les taxes qu'il doit à l'État. Et je pense que, si l'on ne faisait que ce bout de chemin, déjà les ressources de l'État augmenteraient de façon significative.

M. le Président, on est venu aussi nous parler du travail au noir, qui est une forme, aussi, d'évasion fiscale considérable. Je pense que, là aussi, sans toucher au fardeau fiscal général, juridique, technique que nous connaissons, les rentrées de l'État peuvent augmenter. Je rappellerai, pour simple mémoire, qu'au cours de la dernière année le déficit fédéral, qui devait être de 27 500 000 000 $, a été de 34 500 000 000 $, 7 000 000 000 $ de plus. Et la principale composante de l'augmentation de ce déficit, ce sont les ressources qui ne sont pas rentrées, les impôts et les taxes qui ne sont pas rentrés. M. le Président, sans augmenter le fardeau fiscal, il faut avoir le courage de régler les questions d'évasion fiscale, d'abris fiscaux, etc.

M. le Président, il faut aussi, sur le plan des

dépenses, puisque c'est cela surtout qui nous concerne ici, réorganiser l'État. Il y a des dédoublements, des chevauchements à l'intérieur même de l'appareil québécois, à l'heure actuelle. Il y en a de considérables. Tout le monde connaît l'exemple typique des deux ministres des Transports alors que plus de la moitié du réseau routier a été transférée aux municipalités. Majeur, mais c'est un exemple de ce qui se passe là aux Transports. Prenons chacun des ministères, chacun des organismes d'État, il y a des questions à se poser là-dessus, ce qui n'a pas été fait au moment où nous nous parlons. Non, ça ne se fait pas.

M. le Président, il y a aussi des chevauchements et dédoublements entre l'appareil gouvernemental et les réseaux parapublics ? pour ne pas parler du péripu-blic ? entre le ministère de l'Éducation et les réseaux des commissions scolaires, des universités et des cégeps, entre le ministère de la Santé et des Services sociaux et les réseaux des hôpitaux, des CLSC, des centres d'accueil. Prenez tous les organismes du système de la santé et des services sociaux au Québec. Il y a aussi duplication entre les responsabilités municipales très identifiées au plan local et beaucoup de responsabilités qui sont exercées ici au niveau de l'État. Déboublements, chevauchements.

M. le Président, en mentionnant tout cela, les citoyens sont conscients que cela existe. Et je n'ai pas encore parlé des chevauchements et dédoublements entre le fédéral et le Québec, qui sont considérables, qui sont la source d'inefficacité majeure. La commission Bélan-ger-Campeau a estimé que, sur le budget 1990, ces dédoublements et chevauchements pouvaient être d'au moins 2000000000$, 3000000000$, sans compter l'inefficacité dans l'action gouvernementale. Aucune question là-dessus. Et, M. le Président, aucune question, aucune discussion et rien dans ces crédits qui évoque quoi que ce soit en ce qui concerne le service de la dette que l'on considère comme intouchable, inattaquable. Or, M. le Président, le taux d'intérêt réel fait problème, pose des questions à ceux qui regardent la scène économique et budgétaire de l'administration publique, parce que c'est une charge considérable et que ce taux d'intérêt réel est très largement supérieur à tous les autres pays du G 7, à tous les autres pays de l'OCDE. Et ceci est une cause du déséquilibre des finances publiques, ici au Québec comme au fédéral, puisque nous en subissons les conséquences.

M. le Président, je pense que la constatation générale des commentateurs en a été une de déception devant le peu d'ampleur et le fait, surtout, que, finalement, le président du Conseil du trésor s'en soit pris uniquement à ses employés. Et j'espère que ce gouvernement, qui s'en va en élection bientôt, ne fera pas comme M. Clyde Wells qui veut gagner ses élections sur le dos de ses fonctionnaires, parce que ce serait une mauvaise solution en ce qui concerne l'État québécois. Je vous remercie, M. le Président. (20 h 50)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle.

Je vous rappelle, M. le député de Labelle, qu'il reste à votre formation exactement six minutes.

M. le député de Saguenay, vous pouvez intervenir pour cinq minutes. C'est ce qui reste comme temps à votre formation. Allez-y, M. le député de Saguenay.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Je me suis infligé le sacrifice d'entendre les deux porte-parole de l'Opposition en matière de fiscalité, cet après-midi et ce soir, et je ne peux m'empêcher, dans un premier temps, de qualifier ces gens-là d'urubus politiques, M. le Président. Ceux qui ont fait leurs humanités, au classique, vont s'en rappeler.

M. le Président, il faut avoir un certain culot et, d'emblée, mes collègues et moi allons constater une chose, c'est que les critiques financiers du Parti québécois sont en faillite. Lorsqu'on a le député de Lévis et le député de Labelle pour critiquer un gouvernement sur le plan financier, dans ses crédits, c'est qu'on vient de s'apercevoir que, malgré leurs titres de comptable agréable et d'économiste de basse-cour, M. le Président, ces gens-là ont manqué le train. Quel culot de venir à l'Assemblée nationale, particulièrement le député de Labelle, M. le Président ? et j'en profite pour lui rappeler certaines choses: son vécu ? qui vient nous reprocher de geler certains fonctionnaires, alors que les travailleurs et les travailleuses du secteur privé doivent se serrer la ceinture à double trou et que lui-même a voté en cette Chambre ? et je m'en rappelle fort bien, M. le Président ? de son siège, des deux mains... Et je lui ferai relire ses discours lorsqu'il a coupé lui-même les fonctionnaires de 20 %. Quelle hypocrisie, M. le Président! Quelle lâcheté de venir en Chambre, ici, aujourd'hui, et de reprocher à un gouvernement de ne pas partager avec l'ensemble des citoyens et des citoyennes la crise économique! Il faut avoir un certain culot, M. le Président, et c'est inadmissible de mentir à la population comme ça, M. le Président. C'est inacceptable, pour un parlementaire, d'agir de cette façon.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Saguenay, je vous demande de retirer la dernière phrase que vous venez d'utiliser.

M. Maltais: Avec plaisir, M. le Président: de tromper la population comme ça. C'est inacceptable, pour un parlementaire qui a mis la main sur l'Évangile, de venir ici, à l'Assemblée nationale, et de conter ce qui est contraire à la vérité, M. le Président. C'est inacceptable, pour quelqu'un qui se targue d'être un professeur d'université en économie. J'appellerais ça un comptable agréable, dans son cas. M. le Président, il doit avoir enseigné la nuit seulement. Heureusement qu'il a les coupures de presse, qu'il a la revue de presse, parce

qu'il n'aurait pas été capable de faire un discours.

Vivre selon nos moyens, M. le député de Labelle, c'est vivre avec l'argent qu'on a dans nos poches, pas emprunter sur l'avenir de nos enfants. Vous qui avez le père de l'endettement public comme chef de parti, vous avez le culot de venir nous faire la leçon, ici? Vous vous trompez d'adresse. M. le Président, le député de Labelle se trompe d'endroit, et j'ai hâte à la prochaine campagne électorale. J'ai hâte de démasquer ces gens qu'on appelle, particulièrement chez nous, des «black birds», des oiseaux de malheur, qui annoncent des cataclysmes ? les lucioles de sphinx, qu'on appelle par chez nous, également ? alors qu'il n'en existe pas.

Vivre selon nos moyens, c'est vivre avec ce qu'on a dans nos poches. Lorsque le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances ont émis le document, la population du Québec a compris. Lorsque vous pensez que des gens qui gagnent 50 000 $ par année, on doit les comparer à ceux et celles qui gagnent le salaire minimum, qui ne sont pas assurés d'avoir du travail de lundi en lundi, vous allez faire pleurer qui? Les riches, les bien nantis, des gens comme vous. Vous ne ferez pas pleurer un gars du peuple, par exemple, M. le Président. Ce n'est pas de même que ça marche au Québec. Lorsque l'assiette de gâteau est de plus en plus petite, on doit la partager selon le nombre d'enfants, M. le Président. L'ensemble du travail que fait le Conseil du trésor dans ses crédits, c'est de partager équitable-ment, entre les 7 000 000 de Québécois et Québécoises, l'assiette qui reste. Tant et aussi longtemps que vous n'aurez pas compris ça, vous n'aurez pas d'affaire en politique, M. le député de Labelle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le député de Saguenay, je... Alors, il reste encore à la formation de l'Opposition officielle une période de six minutes. Si vous n'utilisez pas les six minutes, je l'offre aux ministériels. Vous pouvez...

Une voix: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...continuer votre intervention. Étant donné que vous n'utilisez pas les six minutes, ce qui vous est encore possible, M. le député de Labelle, c'est le parti d'en face qui peut les utiliser.

M. Maltais: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le député de Saguenay, vous pouvez continuer pour six minutes encore.

M. Maltais: M. le Président, ça indique exactement ce que j'avais dit dans mon argumentation, c'est qu'ils n'en ont pas, d'argumentation. Lorsqu'on n'a pas le courage de se lever en cette Chambre et de prendre le temps qui nous est alloué, c'est qu'on est pauvre en idées. Parce que ce n'est pas facile de défendre sur la place publique ce qu'ils avancent en Chambre, ici. D'aller défendre, M. le Président, quelqu'un qui gagne 50 000 $ et qui est gelé pour un an, deux ans, contre quelqu'un qui en gagne 14 000 $ sans savoir si du lundi au lundi il aura un emploi, ce n'est pas défendable sur la place publique. Ils peuvent le faire ici, à l'Assemblée nationale, parce que les manifestants ne peuvent pas entrer d'une porte à l'autre. Mais venez donc le défendre dans le trafic! Venez donc le défendre dans le trafic!

Quand on a entendu des choses aussi ridicules que le député d'Abitibi-Ouest, M. le Président! On a étudié tous les crédits du ministère des Transports; il n'a pas assisté deux secondes ? deux secondes ? aux huit heures qui étaient allouées aux crédits des Transports et il est venu voter contre. Il était gêné. Je lui ai dit: M. le député d'Abitibi, ça n'a pas de bon sens! Vous n'avez pas assisté et vous votez contre. Oui, il a dit, par solidarité. Mais il était gêné; il se cachait un peu en dessous de la table. Et il pose des questions au ministre des Transports pendant la période de questions. Je voudrais bien m'appeler le ministre des Transports, moi. Je vous jure une chose, il n'en poserait pas deux. Il n'en poserait pas deux. Quand on n'a pas plus de courage que ça...

Le député de Lévis n'endure personne en commission parlementaire, de son parti, avec lui. C'est connu. Il n'y a personne qui veut y aller avec lui parce qu'il n'est pas gardable. C'est connu. Mais, M. le Président, quand on vient voter contre une chose qu'on n'a pas étudiée, qu'on pose des questions, comment voulez-vous qu'on vous prenne au sérieux? Comment voulez-vous qu'on vous prenne au sérieux? Vous avez beau parler pendant des heures et des heures à l'Assemblée nationale, M. le député de Labelle, il n'y a personne qui vous prendra au sérieux. Tous les critiques du Parti québécois ont demandé à chacun des ministères de dépenser plus d'argent. Vous, vous arrivez ici: Pourquoi ils dépensent plus d'argent? Pourquoi vous devriez dépenser plus d'argent? Vous devriez couper. Mais, mon Dieu, faites-vous un caucus, ayez une unanimité quelque part! Parlez-vous! Vous ne vous parlez pas. Le député de Lévis ne vous parle pas, le député de Lévis ne parle pas à sa voisine la députée, parce qu'elle demandait des crédits additionnels au ministère de l'Environnement et on était juste rendu à une heure d'étude. Elle ne savait même pas ce qu'il y avait dans les 14 pages suivantes et elle demandait des crédits additionnels. Ce n'est pas de même qu'on fonctionne au Québec. Il faut être plus sérieux que ça. Quand on se concerte, on est capable de faire un travail d'opposition. La seule chose pour laquelle votre nom va rester marqué dans l'Assemblée nationale, c'est la fusion de Baie-Comeau?Hauterive. Et je vous jure... J'aimerais donc ça. Vous devriez venir faire un petit tour chez nous. On aurait encore des choses à vous dire. Vos promesses que vous avez laissées en blanc...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adressez-vous à la présidence.

M. Maltais: M. le Président, avec plaisir. D'ailleurs, vous avez un visage beaucoup plus reposant. Mais, M. le Président, le député de Labelle ? parce qu'à une commission parlementaire, avant les fêtes j'avais malheureusement eu la maladie du député de Lévis, j'avais perdu la voix ? je lui avais dit: Un jour, je te reverrai. Le jour est arrivé, mon cher ami. Lorsqu'on a ta crédibilité ? M. le Président, en parlant toujours du député de Labelle ? on ne se lève pas dignement à l'Assemblée nationale.

J'ai d'autres choses à lui dire aussi, M. le Président. Lorsqu'il vient parler de sa souveraineté, lui qui a trahi son chef, ici, à l'Assemblée nationale... On a été obligé de le retenir pour ne pas que le sang coule. Il est venu pleurer, M. le Président, à ma place, qui était située là, dans le temps que j'étais dans l'Opposition. Et, à chaque printemps, il va mettre des fleurs sur la tombe de René Lévesque. Quelle hypocrisie, M. le Président, et quelle lâcheté! C'est inadmissible pour un parlementaire, inadmissible! Ces mêmes gens-là qui ont trahi leur chef, aujourd'hui voudraient, encore une fois, prendre le pouvoir pour trahir la population. Mais la population n'est pas dupe, M. le Président, et particulièrement dans le cas du député de Labelle. Quand on a trahi, il y a un vieux proverbe qui dit: Trahissez, trahissez toujours, il restera toujours un Brutus au bout de la corde. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, merci, M. le député de Saguenay.

Cette intervention met fin au débat sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires pour l'année financière 1993-1994. Conformément à l'article 288 de notre règlement, ces rapports seront mis aux voix après que l'Assemblée aura statué sur la motion qui sera présentée par M. le ministre des Finances à l'occasion du discours sur le budget.

Alors, nous continuons les travaux de l'Assemblée, M. le leader adjoint du gouvernement...

M. Bélisle: Assurément.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...avec quel article du feuilleton, s'il vous plaît?

M. Bélisle: Assurément, M. le Président. L'article 5, M. le Président.

Projet de loi 80 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 5 de notre feuilleton, M. le ministre des Approvisionnements et Services propose l'adoption du principe du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et d'autres dispositions législatives. (21 heures)

M. le ministre, vous avez droit, en votre qualité de parrain du projet de loi, à une intervention de 60 minutes.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Merci, M. le Président.

Alors, effectivement, le projet de loi 80 vient modifier la Loi sur l'administration financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et quelques autres dispositions législatives. C'est un projet de loi qui vient faire certains ajustements aux projets de loi que nous avons adoptés il y a maintenant un an et demi, les projets de loi, à ce moment-là, 180 et 181, et également un projet de loi qui a été adopté cet automne, qui portait le numéro 45, et qui vient compléter notre travail en vue de mettre en vigueur certaines recommandations du rapport Bernard.

Si vous permettez, M. le Président, je vais faire un bref historique du rapport Bernard dans les éléments qui nous concernent plus particulièrement ce soir, et en vous rappelant que le rapport Bernard avait d'abord pour titre «Rapport du groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du gouvernement». Et ce rapport-là a été remis, il y a quelque temps déjà, sous le nom de «L'efficacité dans la transparence».

Le comité avait reçu pour mandat d'analyser les législations, réglementations et directives en vigueur en ce qui a trait au processus d'octroi de contrats d'approvisionnement, de contrats de service et de contrats de location ou de construction de biens immeubles, que ces processus soient utilisés par le gouvernement du Québec ou approuvés par le gouvernement à l'égard d'organismes qu'il finance. Il avait également reçu pour mandat d'analyser le fonctionnement de ces processus d'octroi de contrats afin d'évaluer s'ils répondent aux critères d'efficacité, d'équité, d'accessibilité et de transparence, tels qu'exprimé dans la législation, les règlements et les directives en vigueur. Et il avait, finalement, un troisième mandat, qui était de proposer au gouvernement les moyens pour améliorer les processus d'octroi de contrats, les processus existants, ou proposer tout nouveau processus afin de respecter les critères élevés d'efficacité, d'équité, d'accessibilité et de transparence, et également de préciser la liste des organismes ou des catégories d'organisme dont le gouvernement devrait déterminer ou approuver les processus d'octroi de contrats.

Alors, c'est un mandat qui avait été donné à ce groupe de travail le 7 novembre 1989. On se rappellera que le président en était Louis Bernard, d'où le nom du rapport Bernard que nous lui donnons. Je rappellerai que les autres membres du groupe étaient Denis Bédard, alors secrétaire du Conseil du trésor, M. Claude Cham-

berland, qui est un vice-président d'Alcan, M. Claude Séguin, sous-ministre aux Finances, et M. Raymond Sirois, qui, à ce moment-là, était le président de Québec-Téléphone.

Le comité Bernard s'était donné, des l'abord, trois objectifs suite au mandat qui lui avait été remis: le premier, de jeter un regard d'ensemble sur le processus d'octroi des contrats gouvernementaux; le second, d'identifier des améliorations à apporter au processus actuel; et le troisième, de proposer des voies de solution et, si possible, décrire les correctifs à apporter. Le rapport a été remis en mai 1990. Il comprenait 45 recommandations, et la plupart de ces recommandations-là ont actuellement été appliquées par le gouvernement. Nous avons mentionné que, sur les 45 recommandations, il y en avait seulement 2 que nous ne retenions pas. Nous avons expliqué, à ce moment-là, les raisons pour lesquelles nous ne retenions pas ces deux recommandations-là. Quant aux 43 autres, nous les avons graduellement mises en vigueur, et, finalement, on peut dire que notre travail est à peu près complété sur le plan de la réglementation. Il nous restait certains aspects, que nous compléterons avec ce projet de loi, que j'expliquerai un petit peu plus en détail tout à l'heure.

Avant de ce faire, permettez-moi de vous lire la recommandation no 1, qui était une recommandation d'ordre général, qui permet de situer à peu près le contexte dans lequel les autres recommandations ont été faites. Alors, je cite: «Que le gouvernement maintienne l'essentiel du système en matière d'octroi de contrats, mais qu'il apporte les ajustements nécessaires pour améliorer la cohérence de la réglementation, la précision du champ d'application de la réglementation, l'efficacité et la transparence des processus d'octroi de contrats, le suivi et l'évaluation de la performance des fournisseurs, le partage des responsabilités et l'imputabilité des divers intervenants gouvernementaux.»

Alors, c'était la recommandation no 1. Suite à ça, il y a eu des règlements, il y a eu des directives, comme je le mentionnais tout à l'heure, qui ont été adoptés et également des lois qui portaient les nos 180, 181 et 45, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. Il y avait plus particulièrement, dans le rapport, trois autres recommandations que je vais vous lire parce qu'elles ont un rapport direct avec l'adoption de principe du projet de loi que nous avons ici, ce soir, devant nous.

Alors, ce sont les recommandations suivantes, les recommandations 4, 5 et 6 qui se lisent comme suit: «Que la réglementation gouvernementale soit rédigée de telle façon qu'elle s'applique automatiquement à tous les organismes du gouvernement, à l'exception de ceux qui seraient expressément désignés soit comme organismes partiellement assujettis, soit comme organismes exempts. «Que les organismes de la catégorie des organismes partiellement assujettis soient assujettis à la réglementation générale à moins qu'ils aient adopté et fait approuver par le gouvernement une réglementation particulière.»

Et recommandation 6, sur laquelle j'attire particulièrement votre attention puisque, dans notre projet de loi, nous éclaircissons cette question-là, recommandation 6: «Que les organismes de la catégorie des organismes exempts soient tenus de se doter d'une politique en matière d'octroi de contrats pour l'acquisition de biens et de services et que cette politique, une fois adoptée par le conseil d'administration, soit rendue publique.»

Alors, M. le Président, effectivement, dans le projet de loi que nous apportons ce soir et pour lequel nous demandons l'adoption de principe de l'Assemblée nationale, il est particulièrement question de modifier le terme «règle», que nous avions initialement prévu, par le terme «politique».

Et je pense que ce point-là exige une explication assez substantielle qui est importante. On retrouve, dans le libellé de l'article 2 de notre projet de loi, le texte suivant: «Le gouvernement peut, aux conditions qu'il détermine, exempter un organisme public par le paragraphe 1° de l'article 5 de la Loi sur le Vérificateur général de l'application de l'ensemble des règlements pris en vertu de l'article 49.» Et l'on ajoute: «L'organisme doit adopter une politique portant sur les conditions de ses contrats et la rendre publique.»

Nous avions un texte, dans le projet de loi 180 ou 181, puisque l'un touche la Loi sur l'administration financière et l'autre touche la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services. Nous avions un texte qui disait que l'organisme doit avoir adopté par règlement des règles particulières. Et c'est justement le point qui faisait ici difficulté et qui portait à diverses interprétations pour la raison suivante.

Dans la formulation actuelle de l'article 49.4, dans un cas, celui de la Loi sur l'administration financière, dans le cas de l'article 7.5, si l'on parle de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, alors, dans sa formulation, il prévoit que l'organisme public doit avoir adopté par règlement des règles particulières portant sur les conditions de ces contrats et les rendre publiques afin de pouvoir bénéficier de l'exemption qui pourrait être décrétée par le gouvernement.

À l'origine, un tel règlement ne devait pas être assujetti aux formalités d'adoption et de mise en vigueur prescrites par la loi sur les règlements. Il devait également assurer à ces organismes une latitude administrative pour répondre à des cas particuliers. Il appert toutefois que, tel que formulé, l'article 49.4 actuel confère aux règlements édictés par ces organismes publics la nature d'un règlement au sens de la Loi sur les règlements, privant ainsi ces organismes de la latitude administrative nécessaire pour assurer la bonne marche de leurs activités financières ou commerciales.

Dans un tel contexte, il s'ensuit, en effet, que les règlements adoptés par ces organismes seraient soumis au processus uniforme d'adoption et d'entrée en vigueur défini par la Loi sur les règlements et qu'ils lieraient les

organismes de telle sorte qu'il leur serait impossible d'y déroger autrement qu'en les modifiant.

En transformant l'obligation de se doter d'un règlement portant sur les conditions de ces contrats en une obligation de se doter plutôt d'une politique telle que proposée par le nouvel article, soit 49.4, dans le cas de la Loi sur l'administration financière, soit l'article 7.5, dans le cas de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, les difficultés juridiques inhérentes à la nature réglementaire des règles particulières, soit l'application des formalités prescrites par la Loi sur les règlements, le fait que l'organisme est lié par ses règles et qu'il ne peut y déroger, et les exigences rédactionnelles propres à la nature d'un règlement seront à toutes fins utiles écartées, nous permettant de régler cette difficulté qui avait été soulevée par plusieurs organismes. (21 h 10)

M. le Président, nous avons également mis que cette disposition-là regrouperait les organismes qui se retrouvent dans le paragraphe 1° de l'article 5 de la Loi sur le vérificateur général, et j'attire également l'attention de l'Assemblée là-dessus. Nous encadrons, nous définissons très bien quels sont les organismes qui peuvent être touchés par cette disposition-là et d'une façon qui n'est pas subjective, mais bien objective. Les organismes qui sont touchés par le paragraphe que je viens de mentionner, sur la Loi sur le vérificateur général, sont très clairement définis. Cette idée nous est venue du projet de loi 45 où nous avions encadré les organismes qui pouvaient être exemptés totalement. Ces organismes qui pouvaient être exemptés totalement, nous les avions définis comme étant les organismes définis dans le paragraphe 2° du même article, l'article 5 de la Loi sur le vérificateur général. Et je pense que c'est à la satisfaction générale que nous avions apporté cet encadrement-là, suite à des discussions et des arguments qui nous avaient été apportés lors de la commission parlementaire de la loi 45, où on trouvait que la latitude de classer un organisme dans un statut exempté ou dans un statut partiellement exempté ou dans un statut non exempté n'était pas très claire et laissait une latitude que l'on jugeait inadéquate dans ce cas-là. Alors, cette question-là serait réglée par le projet de loi 80.

Nous avons également regardé une clause de prépondérance pour la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services. Alors, c'est un article qui vise à introduire, dans la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, une clause de prépondérance des dispositions des articles 7.1 à 7.7 de la loi sur toute disposition d'une loi générale ou spéciale antérieure qui leur serait incompatible ou sur toute disposition d'une loi générale ou spéciale postérieure qui leur serait incompatible. L'absence d'une disposition de prépondérance dans la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services risque, en effet, de soulever des problèmes d'interprétation, en raison même de la préséance d'une disposition de prépondérance, qui, elle, existe dans la Loi sur l'administration financière, soit à l'article 49.5. Je tiens à faire noter que cet article de prépondérance est exactement le même que celui que l'on retrouve à l'article 49.5 de la Loi sur l'administration financière. L'insertion, donc, de cette disposition, aura le double avantage d'assurer une meilleure sécurité juridique et de résoudre à l'avance les conflits d'interprétation qui pourraient surgir en cas d'incompatibilité entre les articles 7.1 à 7.7 et les dispositions d'autres lois susceptibles de venir en contredire la teneur. Nous soulignons, enfin, que l'article 7.8, évidemment, tient compte, dans sa rédaction, de la disposition de prépondérance prévue à la Loi sur l'administration financière, les deux articles ne pouvant pas être prépondérants l'un par rapport à l'autre.

Alors, c'était une troisième disposition du projet de loi 80 que nous présentons. Il y a également une disposition qui est importante, à mon sens, au niveau de la Corporation d'hébergement du Québec. Nous avons, effectivement, une disposition qui permet de soustraire la Corporation d'hébergement, comme nous le recommandait, d'ailleurs, le rapport Bernard... Je vais lire, tout à l'heure, ce que nous recommandait exactement le rapport Bernard, mais permettez-moi d'abord de vous préciser les raisons qui nous ont amené à faire cette soustraction.

Alors, c'est l'article 488.1 qui aura pour effet de traiter la Corporation d'hébergement du Québec de la même façon que les établissements du réseau de la santé en ce qui concerne les projets de construction d'immeubles. Dans les faits, une seule réglementation sera donc applicable à cette corporation, dans ce domaine, soit celle qui découle des articles 485 à 488 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, en modifiant diverses dispositions législatives. Tel qu'il appert de ces articles, la réglementation concernée est adoptée par le ministère de la Santé et des Services sociaux avec l'approbation du Conseil du trésor, et je pense qu'il est important de le souligner. Donc c'est un processus similaire à celui qui est suivi, sauf l'approbation du Conseil du trésor et l'approbation gouvernementale. C'est le même processus qui est suivi, sauf qu'on veut éviter qu'il y ait double emploi, double réglementation dans le même ministère.

Et ça m'amène à vous lire exactement le texte, qui n'est pas une recommandation mais qui était un texte d'introduction dans le rapport Bernard, et qui concernait spécifiquement la Corporation d'hébergement du Québec. Ce texte-là, on le retrouve à la page 13, en bas, et à la page 14 du rapport que je citais tout à l'heure, le rapport Bernard.

Alors, je vous le lis: «La Corporation d'hébergement du Québec est une société d'un type bien particulier. Son conseil d'administration est composé uniquement de fonctionnaires, et ses fonds proviennent principalement du Trésor public. Elle devrait donc, logiquement, être assujettie à la réglementation gouvernementale. Toutefois, l'objet de cette corporation est de voir à la

réparation des projets de construction d'institutions dans le domaine de la santé et des services sociaux. Elle agit, en quelque sorte, pour le compte de ces établissements. Ainsi, nous croyons qu'il est préférable que cette corporation soit assujettie à la réglementation qui s'applique dans ce secteur plutôt qu'à la réglementation qui s'applique aux organismes gouvernementaux. C'est pourquoi nous suggérons que la Corporation d'hébergement du Québec soit exempte de la réglementation gouvernementale, pourvu qu'elle soit assujettie à la réglementation adoptée en vertu de la Loi sur la santé et les services sociaux.»

Alors, c'est exactement ce que nous faisons. La Corporation d'hébergement du Québec est assujettie à la réglementation adoptée en vertu de la Loi sur la santé et les services sociaux, ce qui fait que nous sommes justifiés, ici, de les exempter de la réglementation générale de façon à éviter qu'il y ait une double réglementation qui vienne régir le domaine de la construction à la Corporation d'hébergement par rapport au ministère de la Santé et des Services sociaux.

Évidemment, M. le Président, ces dispositions-là, ces discussions ont eu lieu au cours de l'hiver, entre autres sur la notion de règlement versus politique. Les discussions se sont faites avec plusieurs organismes, qui seront dans le statut 2, et nous ont soulevé ce problème d'interprétation entre règle, règlement et politique. Elles nous ont souligné que le terme spécifiquement employé dans le rapport Bernard était «politique», en vue d'éviter des conflits, entre autres avec des tiers, entre autres avec des compagnies qui auraient pu se servir du libellé de la loi, tel qu'il était, pour exiger certaines choses alors que ce n'était pas dans l'esprit de la loi, à ce moment-là, que ces règles-là soient prises pour des règlements au sens de la Loi sur les règlements.

Après ces discussions-là, et après bien des bavardages entre nos amis les avocats, de part et d'autre, qui ont regardé le pour et le contre, les avantages et les inconvénients, nous en sommes effectivement arrivés à la conclusion que nous devions nous en tenir à la lettre du rapport Bernard et modifier le terme «règlement», le terme «règle» par le terme «politique». Toutefois, ces discussions-là ont eu pour effet de retarder la mise en vigueur de la loi. On sait que nous avions prévu que tous les organismes devaient être assujettis à la réglementation gouvernementale. À moins d'avoir adopté des règles particulières s'ils étaient exemptés partiellement, ou à moins d'avoir adopté des règles d'octroi de contrats lorsqu'ils étaient exemptés complètement et de les avoir rendues publiques, ils étaient assujettis automatiquement à la règle gouvernementale à partir du 1er avril 1993.

Les discussions nous ont amenés au 1er avril 1993, et nous avons déposé ce projet de loi là. D'ailleurs, le 30 mars 1993, il est évident que l'application de cette loi-là, l'application que nous prévoyons, l'adoption des règles particulières ? ou plutôt des politiques particulières maintenant, puisque ce sont des politi- ques ? ne pouvait pas se faire avant l'adoption de notre projet de loi et que ça ne se ferait qu'après. Donc, il faut se donner un délai, un délai que nous avons estimé raisonnable en le fixant au 1er novembre 1993. (21 h 20)

Donc, nous nous sommes donné quelques mois de plus pour l'application. Je rappelle à la Chambre qu'il ne s'agit pas d'une date obligatoire, c'est-à-dire que les organismes qui seront prêts avant le 1er avril 1993 pourront être assujettis, pourront nous avoir fourni leurs règles particulières, pourront avoir écrit, adopté leur politique et pourront l'avoir rendue publique avant cette date-là, du 1er novembre 1993, mais le 1er novembre 1993 est une date ultime. C'est la date définitive. Et je pense qu'il est important, toutefois, de mettre une date définitive pour s'assurer que tous les organismes, d'ici cette période-là, auront fait leurs devoirs et se seront adaptés à cette nouvelle situation. Je rappelle que le rapport Bernard avait également comme objectif d'obtenir une certaine uniformité, lorsque cela était possible, des diverses politiques d'octroi de contrats. C'est la raison pour laquelle il nous avait suggéré d'assujettir l'ensemble des organismes, et de décider qui nous devions désassujettir par la suite, de façon à poser cas par cas la question de ceux qui devaient être désassujettis complètement, de ceux qui devaient l'être avec des conditions, de ceux qui devaient être assujettis partiellement, et de ceux qui devaient être assujettis complètement.

Ce n'est pas un exercice simple, ça concerne près de 200 organismes et ministères, et il y a des particularités dans chacun de ces organismes-là ou ministères. Alors, à titre d'exemple, il est évident qu'un musée ne peut pas avoir un processus d'octroi de contrats qui est le même pour l'achat de ses tableaux que lorsqu'on décide, au ministère des Approvisionnements et Services, d'acquérir des biens meubles qui sont redistribués dans les divers ministères. On ne peut pas, par exemple, aller en soumissions publiques pour l'achat de tableaux, tout le monde le comprend parfaitement. On comprend parfaitement, également, que des organismes, qui sont plutôt commerciaux, ne peuvent pas non plus être assujettis de la même façon qu'un ministère est assujetti à cette règle d'octroi de contrats.

J'ai eu l'occasion, dans le passé, de parler d'un exemple typique. Un centre d'achats, qui serait une filiale de la Caisse de dépôt, ne peut pas avoir des politiques de location de locaux et les rendre publiques, alors qu'il est en concurrence ? et ça nous apparaît évident ? avec l'ensemble des autres locateurs de locaux, un peu partout à travers la province. Alors, il y a une série, donc, d'organismes qui ont des particularités. Je mentionnerai également Hydro-Québec. Ils ont des particularités, ils donnent beaucoup de contrats, mais ils sont dans un marché concurrentiel et commercial, avec des contraintes dont il nous fallait tenir compte.

Ces organismes-là, ces sociétés d'État, si je puis l'exprimer ainsi, qui, eux, seraient dans ce qu'on ap-

pelle maintenant le statut 2 ? c'est-à-dire les organismes exemptés avec conditions; ces conditions étant d'avoir une politique et de la rendre publique ? devront faire cet exercice-là. Ce sera à eux, par la suite, s'il y a des débats à y avoir, à justifier les raisons qui les ont amenés à adopter cette politique-là. Ce sera à ces organismes-là de justifier son application face à ceux qui sont responsables des deniers publics.

Alors, ça fait un tour d'horizon, je pense, de ce projet de loi, qui est relativement bref, mais qui nous permet de compléter le travail que nous avons amorcé, maintenant, depuis à peu près deux ans, c'est-à-dire depuis le dépôt du rapport Bernard. Je rappelle que ce rapport-là a été déposé au printemps 1990, que le gouvernement, dès l'automne 1990, s'est engagé à le mettre en vigueur, dans la plupart des cas ? j'ai mentionné tout à l'heure que c'était dans 43 cas sur 45, 43 recommandations sur 45. C'est ce que nous nous sommes efforcés de faire depuis l'automne 1990, et ce projet de loi nous permettra de compléter définitivement notre travail sur l'ensemble du rapport Bernard. Ça nous permettra de dire que nous avons atteint l'objectif que nous visions dans la réforme du processus d'octroi de contrats, et de garder un processus efficace dans la transparence.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Approvisionnements et Services.

Sur la même motion, je cède la parole à Mme la députée de Verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président.

Je constate que le ministre, en proposant l'adoption du pricipe du projet de loi 80, fait largement référence au rapport Bernard. Effectivement, on ne peut parler du projet de loi 80 sans se référer au rapport Bernard. Depuis la publication de ce fameux rapport, au mois de juin 1990, le 4 juin 1990, on en est maintenant rendu, M. le Président, à la cinquième loi visant à mettre en oeuvre, directement on indirectement, ses principales recommandations, ou tout simplement, en ce qui concerne les lois précédentes, à réparer les erreurs, les imprécisions, ainsi qu'à bonifier ces lois. Il nous reste à espérer qu'il s'agit là de la dernière étape législative d'un long cheminement, malheureusement pas toujours très cohérent, dont l'objectif final visera à rendre entièrement transparent et réellement efficace le processus d'octroi de contrats dans la fonction publique.

Afin de bien situer, je pense qu'il serait pertinent et nécessaire de faire un bref historique. Rappelons que ce sont les révélations-chocs de l'ingénieur Real Deschênes qui, au cours de la dernière campagne électorale, avaient finalement forcé le gouvernement à réagir par l'instauration du comité Bernard. Par la suite, il y a eu l'affaire Vincent Rochette qui révéla l'existence d'un réseau de favoritisme dans l'attribution des contrats avec les architectes, les ingénieurs, dans les cas...

Et on sait que l'affaire Rochette constitue, à son tour, l'élément déclencheur qui provoqua, à l'automne 1989, l'adoption du premier projet de loi dans ce secteur, qui est la loi 103, qui venait modifier la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services. Puis, au mois de décembre 1991, ce fut au tour de l'adoption des lois 180 et 181. On se rappellera que la première, venant remplacer l'article 7 et modifier l'article 8 de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, tandis que la seconde, substituant l'article 49 de la Loi sur l'administration financière par des ajouts des articles 49 à 49.6. Ces deux lois venaient, en fait, circonscrire le rôle de chacun des ministères responsables dans le processus de clarification de la réglementation gouvernementale sur les politiques d'octroi de contrats, tel que le préconise le rapport Bernard.

Ces lois prévoyaient également que le gouvernement pourrait soustraire, totalement ou partiellement de la réglementation sur les octrois de contrats, certains organismes publics. Cependant, un organisme exempté de la réglementation générale devait, en contrepartie, adopter des règles spécifiques sur son processus d'octroi de contrats. En plus, ces règles devaient être entérinées par le Conseil du trésor ou le ministère des Approvisionnements et Services, dans le cas des organismes qui étaient partiellement assujettis. Enfin, l'organisme exempté devait rendre publique sa politique de réglementation en matière d'octroi de contrats.

On peut dire, M. le Président, qu'à ce moment le niveau de progression de la réforme semblait avoir atteint un niveau qu'on peut dire fort acceptable. Car la règle de base, qui était devenue telle que tout organisme devait être assujetti, à moins d'avoir été spécifiquement exclu par décret, ça semblait passablement satisfaisant.

Pourtant, en décembre 1992, le ministre des Approvisionnements et Services revenait à la charge pour légiférer à nouveau dans ce secteur, par le biais du projet de loi 45. Ce projet de loi, on s'en rappellera, fort simple en apparence, qui visait à modifier une nouvelle fois les lois qu'on a énumérées précédemment de façon à donner au gouvernement le pouvoir d'exempter tout organisme, sans aucune condition particulière, de la réglementation générale établie afin d'encadrer les processus d'octrois de contrats. (21 h 30)

Un petit peu d'historique encore. Le ministre se rappellera certainement que nous avions eu de sérieux doutes, au départ, quant à la pertinence de cette réforme, parce que nous croyions que l'ouverture qui était préconisée dans ce projet de loi 45 était un peu large, peut-être trop large, et que ça permettait à un organisme, par exemple, tel que la RIO ou Hydro-Québec, de ne plus avoir aucune condition à respecter ni de comptes à rendre à personne, suite à son exemption à l'application des règles générales. Le ministre, tantôt, faisait référence largement et amplement au rapport Bernard.

Effectivement, jamais le rapport Bernard n'avait préconisé l'instauration d'une telle pratique, on s'en souviendra, puis les recommandations 4, S et 6 sont claires, à cet égard. Cependant, après étude du projet de loi et tout, nous nous étions rendus aux arguments du ministre lorsqu'il fut précisément établi que les articles 49.3 et 49.1 de la Loi sur l'administration financière et l'article 7.6 de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services ne visaient qu'à exempter les entreprises à caractère commercial découlant de l'application du deuxième paragraphe de l'article 5 de la loi du Vérificateur général.

La pratique avait démontré que ces entreprises, qui sont, en fait, des filiales de nos principales sociétés d'État, étaient en sorte prises à l'intérieur d'une sorte de carcan qui les rendait peut-être un peu inefficaces que vu qu'elles devaient se donner des règles, puis ces règles-là devaient être rendues publiques, ensuite, alors... Puis ça, ça avait été prévu par la loi 180 et la loi 181. Les obligations se trouvaient à être un petit peu incompatibles avec la nature et la vocation du bon fonctionnement de ces entreprises. On n'a qu'à considérer, par exemple, l'état dans lequel se retrouvaient certains centres d'achats, comme le ministre le mentionnait tantôt, et la Caisse de dépôt et placement pour être convaincu que c'était nécessaire d'instaurer ces mesures. Il n'en demeure pas moins, M. le Président, que c'est grâce à la perspicacité de l'Opposition ? et le ministre en conviendra, nous avons réussi à faire adopter le même type d'amendements aux deux principaux articles de loi ? si, aujourd'hui, le gouvernement se retrouve au moins avec l'obligation de considérer l'opportunité de mettre certaines conditions avant d'exempter de l'application un organisme susceptible de l'être.

Et, en ce sens, je peux vous dire, M. le Président, que nous resterons vigilants. Et, si jamais le gouvernement tente de désassujettir, partiellement ou sans condition, un organisme qui n'a pas, à proprement parler, une vocation commerciale, comme la RIO, par exemple, ou encore une société d'État majeure comme HydroQuébec, ou une de ses filiales, le gouvernement aura besoin d'avoir d'excellentes raisons et de nous proposer d'excellentes justifications pour procéder, car nous avons encore l'intention de jouer un rôle de chien de garde à cet effet.

Pour en venir au projet de loi 80, maintenant, où donc se situe-t-il dans toute cette dynamique, si vous voulez, qui se veut, je pense, honnêtement, un suivi ou qui va dans l'esprit de ce que recommandait le rapport Bernard? En tout premier lieu, croyez-le ou non, le projet de loi tente d'abord de réparer certaines erreurs d'inattention qui s'étaient glissées dans le projet de loi 45, à l'article 49.3.2 de la Loi sur l'administration financière, ainsi que dans celui de l'article 7.7 de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, qui avait pour effet d'en fausser un petit peu les prémisses de départ.

Des divergences d'appréciation sur la question portant sur la prétention, de la part de certains spécialistes, qu'un bout de phrase, par exemple, et je le cite, «le pouvoir d'adopter les règles particulières qui y sont visées», aurait comme principal impact de faire passer involontairement certains organismes qui étaient reconnus comme faisant partie de la catégorie des organismes partiellement assujettis, établie en vertu du rapport Bernard, à celle d'organismes assujettis. Et c'est là qu'il y a eu un petit peu confusion au niveau de l'interprétation de la formulation de l'article du projet de loi 45. Les conséquences de cette interprétation directe, de ce transfert involontaire étant que certains organismes qui, normalement, n'auraient eu qu'à établir une politique et à la rendre publique, devaient maintenant adopter une réglementation avec, en plus, l'autorisation gouvernementale, ce qui, évidemment, aurait pour effet d'alourdir et de complexifier le système, tout en réduisant la marge de manoeuvre dont bénéficient certains de ces organismes. Comme on le disait, ce sont des organismes, surtout, de location qui seraient un petit peu embêtés avec toutes ces procédures.

Les quatre premiers articles du projet de loi 80 visent essentiellement à mettre en oeuvre ce qu'on a discuté précédemment. Par ailleurs, il faut prendre note que les articles 2 et 3 viennent modifier substantiellement les articles 49.4 de la Loi sur l'administration financière et 7.5 de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, en indiquant qu'un organisme visé par le paragraphe 1° de l'article 5 de la Loi sur le Vérificateur général peut maintenant être exempté en lieu et place d'un organisme public ? à moins que j'en fasse une mauvaise lecture, du projet de loi, là ? autre qu'une personne que l'Assemblée nationale a désignée pour exercer une fonction qui en relève, et autre que la Commission de la représentation. Sur cet aspect, il nous faudrait découvrir, M. le Président, si les organismes visés par le paragraphe 1° ne sont, en fait, que des sociétés d'État, entreprises qui sont des entreprises du gouvernement, étant considérées comme les maisons mères de certaines filiales, ou si ce dernier réfère aussi à certains autres organismes du gouvernement.

En deuxième lieu, le projet de loi, par le biais de son article 5, insère un nouvel élément, qui est l'article 7.8, dans la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services. Cet article vise à établir une clause de prépondérance à l'égard de certaines des dispositions relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et services par des organismes publics, cette clause s'avé-rant nécessaire, par mesure de sécurité, afin d'éviter tout conflit provenant d'une incompatibilité imprévue entre certaines dispositions des deux lois. Car, contrairement à la Loi sur l'administration financière, qui possédait déjà une telle clause en vertu de l'article 49.5, celle-ci, c'est-à-dire la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, elle, n'en avait prévu aucune.

En troisième lieu, l'article 6 vise à exempter la Corporation d'hébergement du Québec des effets de l'application de la Loi sur le ministère des Approvision-

nements et Services ? et le ministre y a fait référence, tantôt ? et de celle sur l'administration financière, lorsqu'elle agit en vue de la réalisation d'un projet de construction d'immeuble, parce que la Corporation d'hébergement du Québec possède déjà des règles de conduite en ce sens, en vertu des dispositions qui sont dans son propre règlement, dans sa propre réglementation.

Dans ce cas présent, M. le Président, il y a une question, je pense, qu'on est en droit de se poser. Pourquoi cherche-t-on à exempter, à ce moment-ci, la Corporation des effets des deux lois qu'on a énumérées tantôt, par le biais d'une modification à la Loi sur les services de santé et les services sociaux? L'explication qu'on pourrait donner, qui serait la plus plausible, ce serait peut-être qu'il y a eu une erreur ? je pense qu'il n'y a pas d'autre explication; en tout cas, selon moi, ça serait la plus plausible ? qui semble découler, peut-être, de l'inconsistance du gouvernement en place. Car, si cette modification est pertinente, elle aurait pu être faite en premier lieu, lors de l'adoption des projets de loi 180 et 181, qui a eu lieu en novembre 1991, puis mise à jour, lors de l'adoption du projet de loi 45, à laquelle nous avons procédé en décembre dernier.

En dernier lieu, M. le Président, les articles 7 et 8 du projet de loi 80 ne font que reporter, du 1er avril au 1er novembre 1993, la date ultime de l'application, à l'ensemble des organismes publics, de certaines dispositions de la Loi sur l'administration financière et de celle sur le ministère des Approvisionnements et Services. (21 h 40)

Si on trace un bilan de ce processus sinueux, on peut commencer par dire que nous espérons sincèrement qu'il s'agit là du dernier projet de loi dans ce secteur, et que le gouvernement libéral doit mettre enfin de l'ordre dans sa cabane, lui qui, par la voix de son ministre responsable, se targue souvent, et très souvent même, d'aller au-delà des normes d'efficacité et de transparence qui sont soutenues dans le rapport Bernard.

Sérieusement, cependant, je dois dire que l'Opposition a l'intention d'appuyer ce projet de loi, mais seulement ? et je le répète ? seulement si chacun des points que nous avons soulevés précédemment sont pris en considération et de façon satisfaisante.

J'ouvre ici, M. le Président, une parenthèse, rapidement. Je tiens à rappeler au ministre que nous ne sommes pas tout à fait dupes des pressions qu'il a dû subir de la part de certaines gens ayant des liens d'affaires avec Hydro-Québec, afin que cette dernière ne soit pas soumise à l'obligation d'adopter un règlement autorisé par décret dans ce secteur, de peur, bien sûr, que son efficacité commerciale ne s'en trouve réduite. Je comprends très bien que ce soit nécessaire d'adopter des règles souples puis réalistes, surtout en cette période de globalisation des marchés. Cependant, nous mettrons à nouveau le ministre en garde contre toute tentative d'incartade à l'égard d'Hydro-Québec ou une de ses filiales, dans ce dossier. A cet égard, la récente décision, de la part d'Hydro-Québec International, d'oc- troyer un contrat de gré à gré à la compagnie privée du président de son conseil d'administration, M. Paul Gobeil, tend à confirmer certaines de nos appréhensions, que j'ai signalées tantôt, quant aux conséquences envisageables du non-respect éventuel de l'esprit de cette réforme.

Sur un autre aspect, M. le Président, j'apprécierais fortement que le ministre nous indique en quoi, comme il l'a rappelé à satiété lors de l'étude du projet de loi 45, la réforme va plus loin que ce qu'exigeait le rapport Bernard, en ce qui concerne, entre autres, la RIO et Hydro-Québec. En effet, même si le ministre relève le fait que ces deux organismes sont maintenant considérés comme étant partiellement assujettis et non plus exempts, comme le suggérait le rapport Bernard, du moins pour ce qui est d'Hydro, la conséquence de ces changements n'est que sémantique, car les deux organismes doivent quand même adopter une politique et la rendre publique. Par ailleurs, la comparaison entre les quatre catégorisations établies en vertu des articles 3 et 5 de la Loi sur le Vérificateur général et les trois catégories du rapport Bernard fait ressortir une source de confusion évidente qui mériterait d'être signalée. Comment expliquer autrement, en effet, que le ministre semble maintenant considérer que les organismes exempts n'ont plus à adopter de politique et à la rendre publique, et que cette obligation reviendrait plutôt aux organismes partiellement assujettis, alors que seuls les organismes assujettis devraient, quant à eux, adopter une réglementation ayant reçu l'approbation gouvernementale?

Dans ce sens-là, effectivement, ce n'est pas très clair, et il faudra qu'on ait quelques explications en commission parlementaire et qu'on arrive à clarifier peut-être les termes. Parce que, sous l'apparence de même aller un peu plus loin que le rapport Bernard ? parce qu'il semblerait que les organismes partiellement assujettis passent dans la catégorie des organismes assujettis et que les organismes exempts passent dans la catégorie des partiellement assujettis, mais les partiellement assujettis, eux, comme l'indique... Bon, ce n'est qu'une recommandation, mais, dans le rapport Bernard, ils nous disent qu'ils se doivent d'adopter une réglementation, tandis que les exempts, ils se doivent d'avoir une politique. Alors, ce qu'on fait, dans les faits, M. le Président, on prend les recommandations qui étaient faites pour les organismes exempts et on les applique aux organismes que l'on dit partiellement assujettis. Alors, il y aurait lieu, là, de clarifier, je pense, les termes et qu'on s'entende pour que les mots veuillent dire la même chose pour tout le monde.

En terminant, M. le Président, permettez-moi de souhaiter bonne chance au ministre dans sa volonté de soumettre chacun des 226 organismes et sociétés d'État à l'application des règles applicables dans ce secteur d'ici l'automne 1993. Cependant, je tiens à assurer le ministre de toute ma collaboration pour l'étape suivante qui sera celle de la commission parlementaire. Je vous

remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Verchères. Sur cette même motion, je cède immédiatement la parole à M. le député de LaFon-taine.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Étant donné l'heure tardive et le nombre important d'intervenants qu'il reste, mon discours sera assez bref. J'aurais aimé pouvoir prendre, moi aussi, 15, 20 minutes afin de parler de ce projet de loi très important, mais, dans le respect des droits des parlementaires, je ferai en sorte qu'au moins un autre de mes collègues puisse intervenir d'ici la clôture. Alors, je résumerai rapidement, M. le Président, l'essentiel de ma position sur ce projet de loi.

Tout le monde le sait, ce projet de loi est issu directement du rapport Bernard, rapport qui a été réalisé par un groupe de travail formé à la demande du premier ministre, M. Robert Bourassa, afin de voir à ce que les procédures d'octroi de contrats gouvernementaux et de services gouvernementaux soient empreintes d'une grande limpidité, d'une grande transparence, mais aussi d'une certaine efficacité, car, M. le Président, vous conviendrez avec moi, étant donné le volume important d'achats que notre gouvernement réalise, qu'on se doit d'agir de manière très professionnelle, non pas seulement dans le but de l'équité ? et ça, c'est tout à fait normal, il faut que les soumissions publiques puissent se faire en toute impartialité ? mais aussi en termes de qualité. Car, qu'en serait-il si, sous prétexte d'égalité ou d'équité, nous nous retrouvions à prendre ou à faire des marchés, où l'État se retrouvait à faire des marchés d'approvisionnement ou de services qui n'auraient pas les qualités ou les nonnes nécessaires à une bonne gestion ou une bonne utilisation des produits? Et cela peut être aussi bien, M. le Président, pour une ligne électrique d'Hydro-Québec que pour un pont. Ça peut être pour la construction d'un hôpital. Alors, il est donc très important qu'il y ait des normes de transparence, des normes d'appels d'offres, mais aussi, M. le Président, qu'il y ait des distinctions qui se fassent en ce qui concerne certains types d'action, car les besoins ne sont pas toujours les mêmes, et les services à rendre n'ont pas toujours- comment dirais-je, le même but. Alors, on ne peut pas comparer, les mettre tous là, sur le même pied. Et c'est pourquoi le rapport Bernard disait ? et je vais en faire lecture pour les téléspectateurs qui auraient survécu à l'exposé de la députée de Verchères ? «de notre point de vue, l'ensemble des organismes du gouvernement devraient être classés, en ce qui concerne le processus d'octroi de contrats, dans trois catégories ? et la députée de Verchères l'a dit, M. le ministre l'a dit, et d'autres collègues le diront certainement ? et ces organismes sont: les organismes assujettis ? ça, c'est la catégorie qui regrouperait les organismes gouvernemen- taux qui ne sont pas spécifiquement et nommément classés dans les deux autres catégories ? les organismes partiellement assujettis et les organismes exempts [...] et il y aurait aussi Corporation d'hébergement du Québec, sociétés d'État et, en particulier, Hydro-Québec.»

Et, M. le Président, tout le monde comprendra que c'est très important, ces catégories, et que ce n'est pas pour des motifs frivoles que le rapport Bernard ? et on se rappellera que M. Bernard fut quand même un personnage important dans le Parti québécois, et c'est pour ça que, justement, nous pouvons aujourd'hui, invoquer son indépendance d'esprit lorsque ce rapport et ces recommandations furent faites, parce que je ne vois pas un ancien baron du «péquisme» aller faire un rapport à notre gouvernement, qui dirait que nos procédures d'achat sont bonnes mais qu'elles demandent à être un peu améliorées, ou un peu, comment dirais-je, modernisées. (21 h 50)

Et je lirai peut-être ces recommandations. «Que le gouvernement maintienne l'essentiel du système en matière d'octroi de contrats, actuel, mais qu'il apporte les ajustements nécessaires pour améliorer la cohérence de la réglementation.» Et c'est là un bon point, M. le Président. Il ne peut pas, non plus, en effet, y avoir toutes sortes de réglementations. Ensuite, il disait: «La précision du champ d'application de la réglementation». Cela, aussi, est important, et ça revient à ce que je disais précédemment, parce qu'on ne peut pas, non plus, M. le Président, agir un peu de la même façon pour tous les organismes, ou sociétés d'État, ou comités ministériels, ou sociétés parapubliques qui ont à faire des achats ou des appel d'offres. Troisièmement, il disait: «L'efficacité et la transparence des processus d'octroi de contrats.» Et là, c'est évident, M. le Président, il est très important ? et c'est toujours la priorité que le premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa, a fait valoir ? il est très important que la transparence du processus d'octroi de contrats, de biens et de services soit conservée. Il faut même la renforcer. Et c'est là une des marques fondamentales et premières de notre gouvernement et du gouvernement de Robert Bourassa, M. le Président.

Aussi, le projet de loi 80 vient dans ce sens-là et donne suite à ces recommandations du rapport Bernard dans l'esprit du premier ministre du Québec et de notre gouvernement. Et je trouve cela très bien, M. le Président, car c'est là la base de la crédibilité de toute administration publique, à savoir que l'intégrité soit respectée. Il y a aussi des recommandations comme le suivi et l'évaluation de la performance des fournisseurs. C'est très important, M. le Président. On ne peut pas retourner acheter un produit, même si on l'avait acquis au plus bas prix, s'il n'a pas la qualité ou s'il n'a pas donné les services auxquels on s'attendait. C'est très important, donc, de faire le suivi et l'évaluation car, sans cela, on risquerait de s'engager dans des achats qui nous amèneraient peut-être, à l'occasion, à faire des

erreurs importantes.

Et, M. le Président, je vais terminer parce que je sais que j'ai un collègue qui veut parler avant 22 heures, et je douterais d'avoir à cette heure-ci l'accord de l'Opposition pour continuer, mais les députés du gouvernement sont là en grand nombre et on pourrait parler longtemps.

Ensuite, M. le Président, il terminait en disant: «Le partage des responsabilités et Pimputabilité des intervenants gouvernementaux.» Et là, M. le Président, on rejoint, encore une fois, dans ce projet de loi, grâce à ce rapport, la préoccupation des députés gouvernementaux. On sait actuellement qu'un certain nombre de députés, que ce soit le député de Mille-Îles, que ce soit le député de Verdun, que ce soit le député Rémy Poulin, travaillent sur des projets d'imputabilité pour faire en sorte de responsabiliser l'appareil gouvernemental, en particulier sur les achats. Eh bien, M. le Président, c'est encore une des marques du gouvernement Bourassa: une marque de transparence et de responsabilité.

Aussi, M. le Président, je devrai malheureusement couper, j'aurais beaucoup de choses à dire, mais j'aurai l'occasion, en deuxième ou en troisième lecture, de revenir et de continuer à préciser ma pensée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de LaFontaine. Sur le même sujet, M. le député de Nicolet-Yamaska.

M. Maurice Richard

M. Richard: Merci, M. le Président. Le projet de loi 80 prévoit que le gouvernement pourra exempter, aux conditions qu'il détermine, certains organismes publics de l'application de l'ensemble de la réglementation gouvernementale portant sur les conditions des contrats faits par les organismes publics et sur l'acquisition et la fourniture des biens et services de ces organismes. Par ailleurs, un organisme ainsi exempté devra apporter et adopter une politique sur ces sujets et la rendre publique.

Le projet de loi introduit donc dans la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services une clause de prépondérance, et cette clause de prépondérance est à l'égard de certaines des dispositions relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et services par les organismes publics. Il introduit également, M. le Président, dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux une disposition spécifique applicable à la Corporation d'hébergement du Québec.

M. le Président, le projet de loi 80 reporte du 1er avril au 1er novembre 1993 la date ultime d'application à l'ensemble des organismes publics de certaines dispositions de la Loi sur l'administration financière et de la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services.

Bien qu'il soit de nature très technique, ce projet de loi revêt une grande importance. D'une part, parce qu'il se situe dans le sillon des engagements pris par le gouvernement, mais également parce qu'il prône la transparence dans le processus d'octroi des contrats gouvernementaux. En termes clairs, cela signifie qu'on devra rendre des politiques claires et transparentes et qu'il devra être vigilant dans ses activités, parce que, en bout de piste, cet organisme sera lié par des règles et ne pourra y déroger. Le projet de loi 80, vous l'aurez compris, M. le Président, fera en sorte que soit maintenue la transparence dans l'octroi des contrats gouvernementaux. Il s'agit là d'un principe auquel le gouvernement est profondément attaché.

Je suis donc fier de l'attention particulière que porte le gouvernement aux questions de limpidité et de transparence dans l'attribution de l'ensemble des contrats gouvernementaux. Cette attitude démontre notre volonté de rendre perméable l'ensemble des gestes que nous posons.

M. le Président, il est évident que je voterai en faveur de ce projet de loi qui est porté à notre attention aujourd'hui, parce que, je tiens à le mentionner, il vient renforcer le rapport Bernard. En terminant, je tiens à souligner que le projet de loi 80 est un exemple de la bonne gestion du gouvernement, un gouvernement, est-il nécessaire de le rappeler, qui a jugé essentiel de resserrer des règles d'attribution des contrats. Nous avons dénoncé, et ce, dès 1985, un système qui, selon nous, manquait de rigueur. En terminant, je tiens à souligner que le projet de loi 80 est un exemple de bonne gestion. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Une voix: Pas pour le moment, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lefebvre): II y a une réplique, M. le ministre? Pas de réplique. Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 197, Loi modifiant la Loi sur les services... Je m'excuse. Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et d'autres dispositions législatives, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

: M. Bélisle: oui, m. le président, je fais motion

pour que ledit projet de loi 80 soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je fais motion, M. le Président, pour ajourner nos travaux au mardi 18 mai 1993, à 14 heures.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Alors, les travaux de l'Assemblée nationale sont ajournés à mardi, le 18 mai, à 14 heures.

(Fin de la séance à 21 h 58)

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