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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le jeudi 7 décembre 1995 - Vol. 34 N° 85

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons procéder aux affaires courantes. Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Article a du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 123

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi n° 123, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale principalement pour remanier deux mesures de transfert de sommes aux municipalités par le gouvernement, à savoir la péréquation et la redistribution des recettes de la taxe payée au ministre du Revenu par les exploitants de réseaux de télécommunication, de gaz et d'électricité.

Pour ce qui est de la péréquation, le projet de loi prévoit que les municipalités admissibles et les montants versés pour l'exercice financier municipal de 1996 sont les mêmes que pour l'exercice de 1995.

En ce qui concerne la redistribution des recettes de la taxe payée par les exploitants de réseaux, le projet de loi prévoit qu'une partie de ces recettes pourront désormais servir au financement de certains programmes d'assistance financière destinés à des municipalités. Le projet de loi donne au gouvernement le pouvoir de désigner ces programmes dans le règlement relatif à la répartition des recettes de la taxe. Jusqu'à ce que le gouvernement se prévale de ce pouvoir, le projet de loi énumère ces programmes; il s'agit de celui de la péréquation, de celui qui s'adresse aux villes-centres, des régions métropolitaines de recensement et d'une partie de celui qui rend neutres les effets financiers des regroupements municipaux.

Le projet de loi modifie aussi la Loi sur la fiscalité municipale pour changer, à compter de l'exercice financier municipal de 1997, le régime fiscal applicable à l'exploitant d'un réseau de distribution de gaz. D'autre part, toute conduite faisant partie d'un tel réseau et à laquelle aucun consommateur ne peut raccorder directement la conduite d'alimentation de son immeuble sera portée au rôle d'évaluation foncière et deviendra, de ce fait, imposable aux fins municipales et scolaires, avec ses accessoires et son assiette. D'autre part, le taux de la taxe perçue de l'exploitant du réseau par le ministère du Revenu, qui s'applique à la partie de son revenu imposable excédant 5 000 000 $, sera réduit de 5 % à 4 %, pour qu'il y ait un effet neutre sur le propriétaire gazier.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la fiscalité municipale pour permettre à une municipalité locale et au propriétaire d'un immeuble non imposable, par exemple une régie intermunicipale propriétaire d'un ouvrage d'assainissement des eaux, de conclure une entente en vertu de laquelle le propriétaire paie à la municipalité une compensation pour les services municipaux dont bénéficie son immeuble. Le projet de loi supprime la condition actuelle selon laquelle une telle entente n'est possible que si le propriétaire est déjà débiteur d'une compensation imposée unilatéralement par la municipalité.

Le projet de loi modifie enfin la Loi sur la fiscalité municipale pour changer, à compter de l'exercice financier municipal de 1997, le régime fiscal applicable aux coopératives et aux organismes à but non lucratif qui sont titulaires d'un permis d'agence de services de garde en milieu familial. D'autre part, l'immeuble d'un tel titulaire deviendra non imposable, tout en donnant ouverture à une compensation tenant lieu de taxe à titre d'élément du réseau des services sociaux, à la condition d'être inscrit au permis comme adresse de l'agence et d'être utilisé principalement aux fins de l'exercice des fonctions propres à une telle agence. D'autre part, l'exercice de ces fonctions cessera de donner ouverture au paiement de la taxe d'affaires par le titulaire du permis.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Au-delà du savant langage utilisé par le ministre des Affaires municipales, est-ce qu'on peut avoir confirmation qu'il s'agit bien du projet de loi qui autorise légalement les coupures de 45 000 000 $ aux municipalités du Québec?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, c'est avec joie que je vous dis que c'est 46 000 000 $ d'efforts de compressions budgétaires au monde municipal comparativement à 600 000 000 $ sur deux ans en Ontario.

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

(10 h 10)

M. Paradis: Est-ce que, à ce moment-ci, le leader du gouvernement pourrait nous indiquer s'il est de son intention ou de l'intention du ministre des Affaires municipales d'entendre en commission parlementaire, à tout le moins, les unions municipales, l'Union des municipalités du Québec ou l'Union des municipalités régionales de comté, avant de procéder plus avant dans l'étude de ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, c'est déjà fait, pendant une longue demi-journée, vendredi ou jeudi dernier. Je les ai lues, en plus, dans plusieurs journaux, et ils ont très bien transmis leur message, actuellement.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

M. Paradis: Sur division.

Le Président: Sur division. Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement, toujours à la présentation de projets de loi.

M. Chevrette: L'article c de notre feuilleton.


Projet de loi n° 122

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 122, Loi concernant l'article 40 de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de confirmer l'existence de l'article 40 de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction qui, par interprétation de l'article 70 de la Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant d'autres dispositions législatives et de l'article 9 de la Loi sur la refonte des lois et des règlements, a été abrogé.

De plus, le projet de loi reproduit le texte de l'article 40. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, l'article g de notre feuilleton.


Projet de loi n° 245

Le Président: À l'article g du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 245, Loi concernant la Paroisse de Saint-Joseph-de-Lanoraie. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Et je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Alors, M. le député de Berthier présente le projet de loi d'intérêt privé 245, Loi concernant la Paroisse de Saint-Joseph-de-Lanoraie. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Chevrette: Je voudrais donc faire motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Nous en sommes au dépôt de documents. M. le ministre des Transports.


Rapport d'activité de la Société des traversiers du Québec

M. Campeau: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport d'activité 1994-1995 de la Société des traversiers du Québec.

Le Président: Ce document est déposé. Toujours au dépôt de documents, M. le ministre de l'Éducation.


Rapports annuels de l'Université du Québec, conformément à l'article 4.2 de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire, ainsi qu'une lettre précisant la nature des renseignements demandés sur les primes de départ

M. Garon: M. le Président, conformément à l'article 4.2 de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire édicté par l'article 1 de la Loi modifiant la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire, que nous avons adoptée le printemps dernier, j'ai le plaisir de déposer les états financiers incluant les états de traitements et les rapports sur la performance et les perspectives de développement de l'Université du Québec, ainsi que de ses constituantes, de ses instituts de recherche et de ses écoles supérieures, à savoir: l'Université du Québec (en trois volumes); l'Université du Québec à Montréal (en trois volumes); l'Université du Québec à Rimouski; l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue; l'Université du Québec à Hull; l'Université du Québec à Trois-Rivières; l'Université du Québec à Chicoutimi; l'École de technologie supérieure; la Télé-université; l'Institut national de la recherche scientifique; l'École nationale d'administration publique; l'Institut Armand-Frappier.

Et également une lettre du sous-ministre pour indiquer qu'un article voulait dire, pour les primes de départ, non pas seulement celles qui avaient été versées dans l'année, mais celles qui avaient été accordées, pour quelque raison que ce soit, au moment de l'engagement ou en cours de route, pour être payées au moment du départ, alors avec la réponse de l'Université, et, dans les prochains jours, je déposerai les autres documents des autres universités, au fur et à mesure où ils seront complétés.

Le Président: Alors, ces documents... À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Garon: Il y a seulement la première copie, parce que ça aurait fait trop de volumes.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. Nous en sommes toujours au dépôt de documents. M. le ministre responsable des lois professionnelles.


Rapport annuel de l'Office des professions du Québec

M. Bégin: M. le Président, j'ai l'honneur...

Le Président: À l'ordre!

M. Bégin: ...de déposer le rapport annuel 1994-1995 de l'Office des professions du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Nous en sommes au dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et député de Richmond.


Étude détaillée du projet de loi n° 114

M. Vallières: Oui, M. le Président. Je désire déposer le rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, qui a siégé le 6 décembre 1995 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et d'autres dispositions législatives concernant l'industrie des courses de chevaux. Ce projet de loi a été adopté.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. M. le Président de la commission de l'économie et du travail et député d'Outremont.


Étude détaillée des projets de loi 99 et 103

M. Tremblay: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'économie et du travail, qui a siégé le 6 décembre 1995 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Je dépose également le rapport de la commission de l'économie et du travail, qui a siégé le 6 décembre 1995 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les édifices publics. Le projet de loi a été adopté, M. le Président.

Le Président: Alors, ces rapports sont déposés.


Dépôt de pétitions

Nous en sommes au dépôt de pétitions. M. le député de Montmorency.


Surseoir à l'application de la surtaxe de 30 $ sur les droits d'immatriculation pour les résidents de Château-Richer

M. Filion: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 730 pétitionnaires de la ville de Château-Richer. Les faits évoqués sont les suivants:

«Considérant que le taux de navettage retenu par le ministre des Affaires municipales comme critère d'application de la surtaxe de 30 $ aux droits d'immatriculation est un concept injuste et flou basé sur un échantillonnage statistique fait aux 10 ans;

«Considérant l'incompréhension des citoyens face à l'application de cette surtaxe aux droits d'immatriculation;

«Considérant les nombreuses plaintes de citoyens à chaque semaine depuis l'avènement de cette surtaxe de 30 $;

«Considérant la promesse faite par l'actuel premier ministre lors de la campagne électorale d'août 1991 dans le comté de Montmorency à l'effet que cette surtaxe injuste serait abolie;

«Considérant que rien n'a été corrigé depuis l'élection du gouvernement péquiste;

«Considérant la rencontre infructueuse du 4 juillet 1995 avec le ministre des Transports;»

Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre des Transports afin qu'il sursoie à l'application injuste de la surtaxe de 30 $ sur les droits d'immatriculation pour les résidents de Château-Richer.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Toujours au dépôt de pétitions, M. le député de Saint-Maurice.


Intervenir en faveur d'une meilleure protection des droits de retraite des enseignants

M. Pinard: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 12 pétitionnaires, membres de l'Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que la pénurie d'emploi est la principale préoccupation des Québécoises et des Québécois;

«Considérant que les employés de l'État inscrits au RREGOP n'auront droit à leur pleine pension qu'à compter de l'âge de 60 ans, malgré de nombreuses années de service;

«Considérant que l'amélioration des conditions de retraite favoriserait l'accès à l'emploi et la diminution de la précarité dans l'éducation et le reste du secteur public;»

Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir en faveur d'une accélération du rythme de négociation avec le Cartel CEQ-PACT-APEP, d'un accès plus rapide à une meilleure rente de retraite au RREGOP, d'un meilleur contrôle, par les organisations syndicales, de leurs régimes de retraite.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Questions et réponses orales

Nous en venons à la période de questions et de réponses orales. Pour une question principale, M. le député de Châteauguay.


Vérification de l'ensemble des contrats octroyés pour le compte du Secrétariat à la restructuration

M. Fournier: Merci, M. le Président. M. le Président, le rapport du Vérificateur nous rappelle que le décret définissant le mandat du ministre à la Restructuration précise que le ministre travaille en étroite collaboration avec la ministre déléguée aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

(10 h 20)

Ma question à la ministre déléguée aux Affaires intergouvernementales canadiennes: A-t-elle eu un rôle à jouer dans l'octroi de contrats pour le compte du Secrétariat à la Restructuration?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Beaudoin: Non, M. le Président.

Le Président: M. le député de Châteauguay, pour une question complémentaire.

M. Fournier: Complémentaire, M. le Président. Comment la ministre explique-t-elle le contrat négocié, en septembre 1995, quelques jours avant le déclenchement de la campagne référendaire, un contrat négocié par son Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes pour le compte de la Restructuration, et ce, sans appel d'offres, un contrat de services à MM. Ghislain Beaudin et Stéphane Marsolais, pour un montant de 77 300 $ en septembre? M. le Président, comment peut-elle nier avoir eu un rôle à jouer, alors que ses propres engagements financiers démontrent le contraire?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Beaudoin: M. le Président, je prends avis de la question et je répondrai...

Le Président: À l'ordre!

Mme Beaudoin: Absolument!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Beaudoin: Je répondrai quand j'aurai la réponse et je reviendrai devant cette Chambre le plus rapidement possible, M. le Président.

Le Président: M. le député de Châteauguay, toujours en complémentaire?

M. Fournier: Oui. Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, de la ministre, d'abord, qu'elle ne regarde pas ses engagements financiers, premièrement...

M. Chevrette: M. le Président, qu'il pose donc sa question.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Le député doit prendre la parole de la ministre. Elle dit: Je prends avis de la question. Il va avoir une réponse la plus parfaite, correcte. Il n'a pas à interpréter une réponse qui va venir.

Le Président: À l'ordre! M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre de la réponse de la ministre qu'elle n'a pas signalé au Conseil des ministres hier, à l'occasion des discussions sur l'élargissement du mandat du Vérificateur, que les contrats pour le compte du Secrétariat à la restructuration n'émanent pas que de ce seul Secrétariat et qu'elle n'a pas insisté pour que l'élargissement du mandat permette au Vérificateur de vérifier tous les contrats pour le compte de la Restructuration, peu importe d'où ils proviennent?

Le Président: M. le premier ministre.

Des voix: Ah!

Le Président: À l'ordre!

M. Parizeau: M. le Président, c'est exactement ça le décret, que le Vérificateur général complète l'enquête faite en vertu du décret 1255-95 du 20 septembre 1995 en couvrant l'ensemble des contrats octroyés par le Secrétariat à la restructuration et en vérifiant si les règles applicables en matière de conflits d'intérêts ont été respectées. Maintenant, le nouveau mandat, c'est tous les contrats. Est-ce qu'on m'autorise à déposer...

M. Chevrette: Le décret, oui.

M. Parizeau: ...le décret, M. le Président?

M. Chevrette: Consentement.


Document déposé

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du décret? Consentement. M. le député de Châteauguay, toujours en complémentaire.

M. Fournier: Est-ce que je peux rappeler au premier ministre, M. le Président, que, dans les engagements financiers du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes, on parle d'un octroi de contrat de services à MM. Beaudin et Marsolais dans le cadre des travaux du Secrétariat à la restructuration, mais contrat octroyé par le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes? Est-ce qu'on doit comprendre que le mandat que vous avez donné pour élargir le mandat du Vérificateur couvre tous les ministres?

Une voix: Ah!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Non, M. le Président, pas tous les ministres, tous les contrats.

Une voix: Bien oui!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Châteauguay, pour une question complémentaire.

M. Fournier: Est-ce que je peux demander simplement une précision? J'ai compris, dans ce que le premier ministre nous a lu du mandat, qu'il s'agissait de tous les contrats octroyés par le Secrétariat à la restructuration. Je lui signale, par ma question, qu'il y a des contrats d'octroyés pour le compte de la Restructuration par d'autres sources. Est-ce que le mandat couvre tous les ministres?

Une voix: C'est ça!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, tous les ministres, ça couvre tous les contrats. Et, si, dans l'interprétation qu'en donne le député de Châteauguay, on se rendait compte, dans le libellé, qu'il y a certains contrats qui ne seraient pas couverts pour la raison qu'il a dite, alors on pourrait amender ça. Encore une fois, l'important, c'est de faire la lumière sur la totalité de l'affectation de ces contrats. Peut-être qu'il a raison, le député de Châteauguay, dans l'analyse grammaticale; s'il a raison, on va élargir ça.

Le Président: M. le député de l'Acadie, en question principale.


Autorisation, par le Conseil du trésor, des contrats octroyés dans le cadre du mandat du ministre délégué à la Restructuration

M. Bordeleau: En principale, oui, M. le Président. Hier, le président du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec émettait un communiqué de presse dans lequel il déplorait le manque de transparence et le gaspillage de fonds publics sur le dos des payeurs de taxes. Il disait, et je cite: «Si le Vérificateur général analysait tous les contrats gouvernementaux, le jeu d'influence et de favoritisme serait dévoilé au grand jour et nous serions surpris de l'ampleur du phénomène.»

À défaut de ce portrait global, nous sommes tout de même bien informés, depuis quelques jours, de l'application courante de cette pratique au Secrétariat à la restructuration et de la complicité du Conseil du trésor dans l'absence de contrôle...

Des voix: Oh!

M. Bordeleau: ...de dépenses publiques...

Le Président: M. le député de l'Acadie, je vous rappelle les dispositions à l'article 77, notamment – à l'ordre, s'il vous plaît! – deux alinéas de ce règlement, de cet article. Les questions ne peuvent: être fondées sur des suppositions ou être formulées de manière à susciter un débat. Alors, je vous invite, s'il vous plaît, à bien vouloir vous conformer au règlement.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: En vertu de nos règlements, ça ne doit pas se faire. Donc, il doit retirer ses paroles. C'est ça qu'on vous demande.

Le Président: M. le leader du gouvernement, à ce moment-ci, j'ai invité M. le député de l'Acadie à bien vouloir respecter le règlement dans le formulé de sa question et je lui demande donc, par voie de conséquence, de bien vouloir reformuler sa question conformément au règlement.

M. Paradis: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, sur une question de règlement.

M. Paradis: Simplement pour rappeler à cette Chambre des propos prononcés par le premier ministre hier, que vous avez sans doute sanctionnés comme étant corrects suivant l'interprétation de notre règlement. Le premier ministre a parlé de conflit d'intérêts, de système de fraude, de tentative de fraude, de patronage organisé, et, lorsque le premier ministre a prononcé ces paroles, vous les avez tolérées, M. le Président.

M. Chevrette: Question de règlement.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur cette question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, voilà une façon, voilà une façon...

Une voix: Vicieuse.

M. Chevrette: ...vicieuse, M. le Président, de se servir des propos...

Des voix: Oh!

M. Chevrette: Vicieuse. Oui, vicieuse.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement...

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: ...en se rappelant, par ailleurs, les dispositions de notre règlement.

M. Chevrette: Non, question de règlement. Puis je m'en rappelle. Je connais le règlement, M. le Président. On n'a pas le droit d'accuser en cette Chambre qui que ce soit, ni par association, et, surtout, de déformer des propos. Quand un premier ministre dit qu'il élargit un mandat pour couvrir toute la gamme, il n'a pas accusé personne en cette Chambre, il n'a pas accusé personne, lui, comme vient de le faire, de façon vicieuse, le leader de l'opposition.

Le Président: Alors, nous sommes, encore une fois, devant un exemple de situation qui, à l'origine, est tout à fait simple. La question était posée de manière telle, notamment, à susciter un débat; ça apparaît très clair. Dans le formulé de la question du député de l'Acadie, il n'y avait pas d'éléments qui étaient non parlementaires au sens des termes utilisés. Cependant, effectivement, le formulé de la question pouvait... comportait un certain nombre de suppositions, à ma connaissance, et, deuxièmement, elle était formulée de façon à susciter un débat. À partir de ce moment-là, j'ai demandé, j'ai rappelé le député de l'Acadie aux dispositions de l'article 77 et je lui demande de reformuler sa question. Les interventions qu'on a entendues après me sont venues d'un côté comme de l'autre.

Une voix: Ah!

Le Président: Oui, oui. De compliquer davantage la résolution d'une situation qui, en soi, est tout à fait simple. À ce moment-ci, j'en appelle à votre collaboration. Je demande au député de l'Acadie de reformuler sa question conformément au règlement, de façon à ce qu'on puisse passer à d'autres questions. M. le député de l'Acadie.

(10 h 30)

M. Bordeleau: Oui, M. le Président. Je mentionnais donc le fonctionnement du Conseil du trésor caractérisé par l'absence de contrôle des dépenses publiques et par le non-respect des procédures d'appels d'offres.

Avec le président de ce Syndicat, il y a certes lieu de se demander, comme il l'a fait lui-même, et je cite: Pourquoi réglementer le processus d'appels d'offres si les hauts dirigeants obtiennent des dérogations pour entretenir le réseau des petits copains d'abord?

Ma question, M. le Président: Comment, suite à l'information qui a circulé après la rencontre de certains cadres du Secrétariat à la restructuration avec le secrétaire général exécutif, du 1er juin 1995, au cours de laquelle il a été fait état des anomalies dans les procédures d'appel d'offres et dans l'attribution des contrats, la ministre des Finances et présidente du Conseil du trésor de l'époque a-t-elle pu accepter, après avoir retenu, depuis le 26 avril, le contrat d'embauche de M. Claude Lafrance, le principal intimé dans le rapport...

Le Président: En conclusion.

M. Bordeleau: ...d'enquête du Vérificateur général...

Le Président: En conclusion.

M. Bordeleau: ...de signer ce contrat le 24 août 1995? Et qui est intervenu pour faire débloquer le contrat, le dossier?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je répète, M. le Président, ce que j'ai dit aux membres de cette Assemblée, hier, et je reviendrai sur la question plus précise du député. Il est prévu, dans nos règles, effectivement, que le Conseil du trésor, d'abord, procède à la planification budgétaire et procède à l'application d'un certain nombre de règles relativement à l'octroi de contrats.

Il est prévu cependant, dans ces mêmes règles, M. le Président, que nous puissions procéder à des dérogations, et ces dérogations peuvent être de différents types, M. le Président. Lorsque nous les accordons, nous posons et nous soulevons une série de questions, de telle sorte que l'on puisse s'assurer de la transparence, de l'équité, qu'il y avait urgence, et, parfois, malheureusement, parfois nous sommes placés devant le fait accompli. C'est ce qu'a soulevé et présenté le Vérificateur général quand il a étudié certains contrats octroyés dans le cadre du mandat du ministre à la Restructuration. Et, dans ce cas-là, M. le Président, lorsque le Conseil du trésor est placé devant une situation de fait accompli, pour laquelle aucun motif apparent ne saurait justifier une autorisation de déroger à la déréglementation, il peut, selon des circonstances propres à chaque cas particulier, demander des modifications qui rendraient possible une telle autorisation, ce que nous avons fait dans un certain nombre de circonstances.

Le Vérificateur général a le mandat de relever tous ces éléments, de les rendre éventuellement publics et de procéder à des recommandations, s'il y a lieu. Et le règlement prévoit aussi, sur les conditions de contrats, que le paiement puisse être fait afin de ne pas pénaliser injustement un fournisseur de bonne foi.

Oui, en conclusion, M. le Président. Quant à la question très précise que soulève le député, le Vérificateur général a un mandat. Le dossier peut avoir été présenté au secrétariat du Conseil du trésor, avoir été sous analyse pendant un certain temps, très sincèrement, je ne connais pas la situation exacte que décrit le député de l'Acadie, que le Vérificateur général, cependant, pourra étudier, analyser et nous présenter.

Ce que je peux assurer aux membres de cette Assemblée, c'est que les règles ont été suivies, les processus ont été transparents, et nous avons informé régulièrement le Secrétariat à la restructuration, lorsqu'il s'agissait de dérogations, que nous ne souhaitions pas que de telles...

Le Président: À l'ordre!

Mme Marois: ...dérogations puissent se poursuivre, M. le Président.

Le Président: M. le député de l'Acadie, pour une question complémentaire.

M. Bordeleau: Complémentaire, M. le Président. Comment la ministre des Finances et présidente du Conseil du trésor d'alors a-t-elle pu trouver normal, sous prétexte de l'urgence référendaire, que la dérogation était devenue la règle usuelle de fonctionnement au Secrétariat à la restructuration? Et prétend-elle qu'elle n'en a jamais parlé au premier ministre ou au secrétaire du Conseil exécutif?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, il y avait effectivement matière à urgence dans un certain nombre de cas, compte tenu des délais qui étaient impartis au Secrétariat. Il y avait aussi nécessité de s'assurer de l'expertise d'un certain nombre, je dirais, de chercheurs à l'égard des demandes présentées. Alors, M. le Président, dans chaque cas, nous avons très scrupuleusement respecté les règles. Et il n'y a pas eu des dérogations sur tous les contrats, on se comprend bien, M. le Président. Il y en a eu sur un certain nombre, le Vérificateur les mettra à jour, dira exactement dans quelles circonstances, ce qui justifiait l'urgence et le reste, mais, cela étant, moi, j'agis toujours en présumant – et c'est normal qu'il en soit ainsi, je n'ai pas un rôle d'enquêteur – que les règles sont respectées. Je m'assure qu'elles soient respectées dans le cadre des responsabilités que j'ai, M. le Président. Je n'avais pas de raison d'informer le premier ministre...

Le Président: En conclusion.

Mme Marois: ...dû au fait que les données que je possédais, si elles étaient justes – et je devais présumer qu'elles étaient justes – me permettaient de prendre des décisions, soit avec les membres du Conseil ou avec le Secrétariat, en toute transparence et en toute équité et respect de nos règles, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, pour une question complémentaire.

M. Paradis: Oui. Est-ce que la ministre des Finances est en train de dire à cette Chambre que ni le premier ministre lui-même, ni son chef de cabinet, qui était au courant depuis au moins le 8 juin, ni le secrétaire général de la province de Québec, Louis Bernard, qui également était au courant, n'ont avisé personne au Conseil du trésor, y inclus la ministre responsable ni aucun des autres membres du Conseil du trésor, y inclus le ministre de la Sécurité publique, des révélations qui avaient été faites par trois personnes au bureau du premier ministre, y inclus le criminaliste bien connu et ami du ministre de la Sécurité publique?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: M. le Président, je n'ai jamais été informée de ces démarches, d'aucune espèce de façon. Si je l'avais été, j'aurais agi en conséquence, puisque, dès que nous en avons été informés, nous avons demandé qu'il y ait une vérification qui se fasse. Nous avons même demandé, par voie de décret, que cette vérification s'élargisse à tous les contrats donnés à la Restructuration. C'est évident, M. le Président, que j'ai fait des remarques sur le fait que je souhaitais qu'ils soient plus disciplinés au Secrétariat à la restructuration, qu'ils arrivent avec...

Le Président: S'il vous plaît!

Mme Marois: ...qu'ils arrivent dans les délais, M. le Président. On a même refusé des demandes qui avaient été présentées dans les délais, dans certains cas, mais qui ne correspondaient pas aux normes et aux règlements. Alors, dans ce sens-là, nous avons exercé sur la base de la connaissance que nous avions des demandes.

Vous savez, il y a d'autres processus de contrôle dans notre gouvernement et dans l'administration publique en général. D'abord, il y a le Contrôleur des finances, et, soit dit en passant, ça me permettra peut-être de rappeler qu'hier on a un peu interprété mes propos lorsque j'ai dit...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme Marois: Je pense que c'est important, M. le Président.

Le Président: À l'ordre! En conclusion, Mme la ministre.

Mme Marois: Par exemple, nous autorisons la hauteur du contrat, c'est-à-dire que nous savons que le budget est de telle somme, et nous disons: Voici le contrat qui est demandé, il rentre dans les sommes allouées et prévues. Cependant, nous ne sommes pas l'agent payeur. Il y a, dans nos organisations, dans notre administration publique, des gens qui ont cette responsabilité de payer les contrats et de vérifier que le travail est fait...

Le Président: En terminant, s'il vous plaît.

Mme Marois: ...en fonction du contrat prévu. Et, en bout de piste, il y a, d'autre part, le Contrôleur des finances qui, lui, doit s'assurer de l'adéquation entre le service rendu, le paiement fait et qu'il n'y ait aucune malversation au niveau des fonds, M. le Président.

Le Président: M. le député de l'Acadie, pour une question complémentaire.

M. Bordeleau: Oui, M. le Président. Comment l'actuelle ministre des Finances et présidente du Conseil du trésor du moment, alors qu'elle prétend avoir suivi les règles et règlements du Conseil du trésor, a-t-elle pu accepter, avec ses autres collègues du Conseil du trésor, malgré un avis négatif relatif au manque d'expérience de la firme émis par le secrétaire adjoint au Secrétariat à la restructuration et par le coordinateur en matière d'organisation de l'administration publique, d'octroyer à la firme Conseillers en gestion et formation CPDG inc. un contrat de 235 000 $ sans aucune analyse de la part du Conseil du trésor, selon le Vérificateur général?

(10 h 40)

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Marois: Je n'ai pas devant moi chacun des cas cités par le député de l'Acadie. Ce que je dis – et il y a un mandat à cet effet confié au Vérificateur général – ce que je dis aux membres de cette Assemblée, c'est que, dans tous les cas où les contrats nous ont été soumis, où j'ai eu à prendre des décisions, où le Conseil a eu à prendre des décisions, nous avons posé les questions pertinentes, nous nous sommes assurés de la transparence et nous nous sommes assurés que les règles générales s'appliquaient, même lorsqu'il s'agit de dérogations, puisque nos règles – et vous le savez – prévoient qu'il y ait des dérogations.

Je souhaite que le Vérificateur général aille le plus loin possible dans l'analyse fine, systématique, de l'ensemble de cette situation et qu'il nous fasse, s'il y a lieu, les recommandations utiles pour que nous corrigions les règles, si celles-ci doivent être corrigées. J'ai cependant appliqué rigoureusement les règles que nous avons à assumer comme responsables et comme présidente du Conseil du trésor, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac, pour une question principale.


Désignation du Vérificateur général pour enquêter sur l'octroi de contrats par le Secrétariat à la restructuration

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, dans ce dossier de favoritisme au Secrétariat à la restructuration, les révélations extrêmement graves du Vérificateur général, incroyablement banalisées par Mme la ministre des Finances ce matin...

Le Président: À l'ordre! M. le député de Frontenac, je vous rappelle, également, comme je l'ai fait hier d'ailleurs, les dispositions de l'article 77, dernier alinéa, en ce qui regarde la formulation des questions, qui doit être telle à ne pas susciter de débat. M. le député de Frontenac, votre question s'il vous plaît.

M. Lefebvre: M. le Président, vous avez rendu une décision autorisant M. le premier ministre à exprimer son mépris... Je suis sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président: Il revient au président, et au président seul – à l'ordre, s'il vous plaît – d'apprécier, compte tenu du contexte et du climat de la Chambre, ce qui apparaît être des propos susceptibles d'entraîner un débat ou pas. À ce moment-ci, je vous demande de bien vouloir en tenir compte dans votre question.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, je disais que les révélations extrêmement graves du Vérificateur général ont amené M. le premier ministre à nous dire ceci, en cette Chambre, hier matin, je cite le premier ministre: «Le problème consiste à savoir si, au fond, il y a un système de fraude qui s'est organisé. Il faut aller au fond de cette question-là.» Et, M. le Président, le premier ministre ajoutait: «...dès que vont apparaître les conditions nécessaires ou les renseignements suffisants pour mettre la police là-dedans, bien sûr, on met la police là-dedans.»

Pourtant, M. le Président, la seule et unique décision que prend le premier ministre, devant des faits aussi graves, des faits de nature criminelle, c'est de se limiter à demander, M. le Président, une autre vérification, simplement administrative, alors que le rapport du Vérificateur, M. le Président, révèle déjà qu'il y a favoritisme, à la page 21. Dans le Code criminel, ça s'appelle abus de confiance, sous l'article 122, M. le Président.

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Lefebvre: Conflit d'intérêts, à la page 26; fournisseurs payés qui n'ont pas fait de travail, à la page 8 du rapport, M. le Président...

Le Président: À l'ordre! Alors, je vous rappelle qu'un préambule sert à situer brièvement une question dans son contexte. À l'ordre, s'il vous plaît! À ce moment-ci, le temps imparti pour la question est largement dépassé, je vous demande d'en arriver au formulé de votre question.

M. Lefebvre: Et tout ça, M. le Président, amène le premier ministre à s'interroger sur la possibilité d'un système de fraude organisé. Et, M. le Président, avant d'arriver à ma question, si vous me le permettez, le second mandat...

Le Président: M. le leader, votre question, s'il vous plaît, M le leader adjoint.

M. Lefebvre: M. le Président, comment le ministre de la Sécurité publique, qui a lu comme moi le second mandat qui ne vise aucunement l'analyse de ces faits criminels et qui ne couvre pas les autorités politiques, comment, M. le Président, le ministre peut-il, devant des faits aussi troublants, de nature criminelle, révélés par le rapport...

Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît! M. le député, en terminant votre question, s'il vous plaît.

M. Lefebvre: ...accepter que son gouvernement ne soit pas transparent et refuser qu'une enquête policière, par l'escouade du crime économique de la Sûreté du Québec, ne soit pas encore demandée, M. le Président, pour faire toute la lumière sur cette affaire?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, comme cette question met en cause le décret, l'enquête du Vérificateur général, je vais me permettre d'en dire quelques mots et, ensuite, si on nous y autorise, je passerai la parole au ministre de la Sécurité publique.

Depuis hier, j'ai eu l'occasion de préciser un certain nombre de choses et d'avoir davantage de renseignements sur la démarche qui est entreprise. J'ai d'abord parlé avec le Vérificateur général pour bien m'assurer que le mandat qui lui a été donné hier est clair, dans le sens suivant: Il me confirme que l'interprétation qu'il donne à ce mandat, c'est qu'il doit suivre les contrats partout où ils sont passés, par tous ceux qui y ont touchés, qu'il s'agisse de personnel administratif, de personnel politique ou d'élus. Il confirme que c'est bien dans ce sens qu'il va orienter son mandat, ce qui correspond, évidemment, aux orientations qu'on s'était données hier. Je rappelle que le Vérificateur général est nommé par cette Assemblée, il n'est pas quelqu'un qui dépend du gouvernement.

Deuxièmement, le Vérificateur m'a indiqué que, selon lui, tout le travail d'enquête devrait être terminé pour avant Noël et que la rédaction devrait être disponible à partir du milieu janvier. Donc, ce que nous avions évoqué hier, la nécessité d'aller très vite, a été parfaitement compris par le Vérificateur général.

Troisièmement, là je lui ai posé des questions quant à des pratiques que je ne connais pas. Par exemple, s'il trouve, pendant son enquête, un certain nombre de matières – comment dire – qui sont susceptibles d'amener des poursuites ou des enquêtes de nature policière, qu'est-ce qu'il fait dans des cas comme celui-là? Et il me répond: J'avertis le ministère de la Justice. Je lui pose la question aussi: Et, si, pendant que vous faites une enquête, la police a besoin d'entrer en contact avec vous pour voir où vous en êtes sur tel ou tel contrat, qu'est-ce que vous faites? Bien, il dit: Je me mets à la disposition de la police. Voilà!

Dans ce sens, M. le Président, je pense que la table est mise pour que nous y allions très rapidement, que ça couvre tous ceux ou celles qui peuvent être impliqués de quelque façon que ce soit – parce que, encore une fois, il s'agit d'une question très grave – et que, d'autre part, la table est mise, aussi, pour toute intervention de la police au moment où la police elle-même le jugera approprié et où le ministre de la Sécurité publique, périodiquement, examinant la situation, demandera à la police de faire des enquêtes conformément aux pouvoirs qu'il a.

Je pense que, depuis 48 heures, nous avons bougé extrêmement vite et pris toutes les dispositions nécessaires pour que la lumière soit faite.

Le Président: Alors, à ce moment-ci, là, je pense qu'on a largement dépassé le temps requis. Je passerai plutôt à une question complémentaire. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, ma question adressée au ministre de la Sécurité publique... Mais oui, écoutez, M. le Président, j'ai adressé la question...

Une voix: En complémentaire.

(10 h 50)

Le Président: Attention! S'il vous plaît! Non, non, il n'y a pas de panique ici, là. Un instant! J'entends le leader de l'opposition officielle me glisser à l'oreille: En principale. Alors, j'ai la prudence de vérifier si c'est en principale ou pas. Enfin, j'ai entendu cette expression. Alors, je comprends que c'est en complémentaire, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, comment le ministre de la Sécurité publique peut-il accepter, face à ce qu'il a entendu depuis hier, face à ce qu'il a lu, le rapport du Vérificateur général, comment le ministre de la Sécurité publique peut-il accepter la décision de son premier ministre, qui se limite, finalement, à une simple enquête administrative face, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, à des faits de nature criminelle, sachant, lui, M. le Président, qu'une enquête policière, et qu'une enquête policière seulement, peut faire la lumière sur toute cette affaire, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ménard: Mon premier souci, comme celui du gouvernement, M. le Président, dans cette affaire, c'est de faire l'enquête la plus efficace et la plus rapide possible. Si vous voulez, je peux commencer par donner un exemple. J'ai déjà été procureur de la commission d'enquête sur le désastre minier de Belmoral. La Sûreté du Québec avait envoyé un policier avec l'expérience des mines pour faire enquête. Il n'a rien... Il n'a pas trouvé grand-chose. Mais, quand on a eu une commission d'enquête avec un ingénieur minier, alors, là, il a trouvé de quoi justifier des accusations de négligence criminelle à l'égard... Parce qu'il s'agissait d'un domaine bien spécifique, bien spécialisé.

La conduite des affaires gouvernementales et l'examen des contrats, des diverses procédures, savoir quelles questions poser, qui interroger, comment apprécier les réponses qui sont données par cette personne et comment poser les autres questions pertinentes m'apparaît quelque chose qui relève beaucoup plus de la compétence des gens qui travaillent pour cet officier indépendant qu'est le Vérificateur général que pour un policier ordinaire habitué à enquêter d'autres types de crime. Toutes les enquêtes en matière de gouvernement qui se sont terminées par des enquêtes de police et des accusations ont d'abord commencé par des enquêtes d'officiers compétents. Et c'est exactement ce que nous voulons faire ici. C'est que l'enquête administrative aille directement, le plus rapidement possible, à comprendre la situation, à poser les bonnes questions. Et, si la police veut intervenir, je le dis encore, elle est libre de le faire, mais je suis convaincu que la police attend avec impatience les résultats de cette enquête administrative élargie qu'il était essentiel, à ce moment-ci, de commander.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique...

Le Président: M. le député de Frontenac, en complémentaire.

M. Lefebvre: Est-ce que le ministre de la Sécurité publique reconnaît que, lorsqu'on parle de fraude, de système de fraude présumé, tel que l'a dit le premier ministre, ce n'est pas un fonctionnaire, tout compétent qu'il puisse être, qui peut éclaircir une telle situation mais, plutôt, M. le Président, l'escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec, dans laquelle escouade, M. le Président, on retrouve des spécialistes en matière de fraude?

Alors, je veux savoir du ministre de la Sécurité publique: Pourquoi résiste-t-il à requérir, M. le Président, cette enquête de la Sûreté du Québec et de son escouade des crimes économiques, qui est le seul organisme capable d'éclairer toute la population du Québec qui suit ce dossier-là, évidemment, de très, très près?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ménard: Je reste convaincu que ce sont les employés du Vérificateur général qui ont la meilleure compétence pour poser les bonnes questions, aller chercher les bons documents, apprécier les réponses qui leur sont données et avancer le plus rapidement possible. Si les gens de la Sûreté du Québec veulent y aller, ils sont bienvenus aussi. Et, de toute façon, ils examineront les résultats.

Je voudrais vous signaler que, si le gouvernement a été fraudé, c'est parce qu'il y a des gens responsables au gouvernement qui ont d'abord été trompés. Je veux vous dire aussi que j'ai des opinions d'avocats du ministère de la Justice qu'en lisant seulement le rapport du Vérificateur général il n'y a pas assez de faits pour convaincre un juge de paix d'obtenir un mandat de perquisition.

Alors, je pense que ce qui doit être fait, c'est que l'enquête soit menée par des gens qui connaissent bien les procédures gouvernementales, bien les contrats qui sont accordés, comme les gens du Vérificateur général. Il ne s'agit pas uniquement du Vérificateur général, mais des membres les plus compétents de son personnel.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac, toujours en complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique reconnaît qu'il a été informé de toute cette affaire avant même d'avoir reçu le rapport du Vérificateur général, et je prends à témoin M. le premier ministre qui disait hier, en parlant du ministre de la Sécurité publique: Oui, j'ai discuté avec lui de ça – galée 7455? Et, si le ministre de la Sécurité publique reconnaît ce que je viens de dire, M. le Président, comment se fait-il qu'il n'ait pas réagi, qu'il n'ait pas, d'aucune façon, posé le moindre geste, à moins qu'il nous dise qu'il a été complètement écarté après avoir été informé, M. le Président, de la décision du premier ministre et qu'on lui aurait dit de ne pas demander d'enquête policière?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ménard: Mais il me semble avoir clarifié ces choses-là. Je le regrette, je n'ai commencé à lire le rapport qu'hier matin, j'ai justement interrompu ma lecture à la page 15 pour téléphoner et parler au premier ministre de ce que j'avais constaté et qui, à mon avis, devra aller plus loin. Et on a parlé de la meilleure méthode. Il m'a parlé des opinions qu'il recevait du ministère de la Justice, pas du ministre de la Justice, en plus, mais du ministère de la Justice, sur la façon la plus efficace de procéder. On a parlé du décret qui était en préparation au gouvernement. J'ai estimé aussi que c'était la meilleure méthode, et pour d'autres raisons que n'importe quel criminaliste peut comprendre et que je ne veux pas diffuser plus qu'il ne faut. Une enquête bien faite, ça commence, encore une fois, par une enquête menée par des officiers gouvernementaux qui connaissent bien la matière, qui peuvent recueillir des dépositions et qui peuvent juger au fur et à mesure des réponses qui leur sont données, quelles sont les autres questions qui doivent être posées, quels sont les documents qui doivent être demandés.

Le Président: En conclusion.

M. Ménard: La police prendrait des mois et des semaines, des mois avant d'aboutir, avant d'aller au fond d'une histoire comme celle-là, alors qu'un officier gouvernemental qui connaît bien le gouvernement peut aller beaucoup plus rapidement et remettre le résultat de son enquête à la police qui, elle, pourra continuer à obtenir la preuve hors de tout doute raisonnable...

Le Président: En terminant.

M. Ménard: ...dont nous avons besoin avant de porter des accusations.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac, toujours en complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, quelle assurance le ministre de la Sécurité publique peut-il donner aux Québécois et aux Québécoises que les documents, que les documents, M. le Président, extrêmement pertinents, qui feront foi de tout, seront en sécurité, alors que le ministère de la Restructuration n'existe même plus? Comment peut-on avoir la garantie qu'en temps et lieu, si jamais il y avait enquête policière, ces documents existeront encore et qu'ils seront disponibles, M. le Président?

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ménard: Mais c'est justement ce dont on parlait il n'y a pas si longtemps, parce que le premier ministre a trouvé ça tellement important qu'il est allé lui-même aux sources, et c'est...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

(11 heures)

M. Ménard: Justement, c'est le Vérificateur général qui nous assure qu'il conserve la preuve et qu'il ne remettra ces documents à personne. J'imagine qu'il voudra dire «à personne» à moins d'avoir un ordre de la Cour, éventuellement, mais, je veux dire, le Vérificateur général a assuré le premier ministre qu'il conservait cette preuve et qu'il n'y a personne à qui il la remettrait.

Encore une fois, je vous rappelle, hein, que si le gouvernement a été fraudé, c'est parce qu'il y a des gens qui ont été trompés au gouvernement. On n'est quand même pas toujours pour présumer que chaque information qui nous est donnée nous est donnée de mauvaise foi. Hein? Il y a assez de décisions à prendre au gouvernement, assez rapidement, que la bonne foi se présume quand on reçoit des informations, et c'est comme ça qu'on a agi au Conseil du trésor.

Le Président: M. le député de Frontenac, en complémentaire.

M. Lefebvre: Oui. Est-ce que je peux rappeler au ministre de la Sécurité publique que, moi, je me souviens que le premier ministre m'a déjà dit de ne pas lui faire confiance?

Une voix: Exact.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Chevrette: On n'est pas à une période de rappels, c'est une période de questions.

Le Président: Alors, M. le député de Frontenac, à votre question, s'il vous plaît, complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, finalement, est-ce que le ministre de la Sécurité publique refuse de demander une enquête policière de la Sûreté du Québec, et particulièrement de l'Escouade économique...

Une voix: Du crime.

M. Lefebvre: ...de l'Escouade du crime économique de la Sûreté du Québec, parce que, lui, il est membre du Conseil du trésor et qu'il se verrait nécessairement enquêté par la Sûreté du Québec avec quatre autres de ses collègues?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le député de Frontenac, je vous rappelle les dispositions de l'article 77: «Les questions ne peuvent:

«1° comporter ni expression d'opinion ni argumentation;

«2° être fondées sur des suppositions.»

Alors, à ce moment-ci, j'avais déjà attiré votre attention sur les dispositions de l'article 77 et je vous rappelle à l'ordre pour une première fois. M. le ministre, en réponse.

M. Chevrette: M. le Président...

Des voix: Ah!

M. Chevrette: Je m'excuse...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: ...ce n'est pas en vertu de l'article 77 que je me lève, c'est en vertu de l'article 35, moi.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Chevrette: Oui. L'article 35.5°, M. le Président: «Attaquer la conduite d'un député, si ce n'est par une motion mettant sa conduite en question.»

M. le Président, vous avez souligné que ça suscitait un débat, mais il y a plus que ça dans la question. On insinue, on attaque la conduite du ministre de la Sécurité publique sous forme d'une question fort habile, ce qui est complètement inadmissible en vertu de nos règlements.

Une voix: Bravo!

M. Chevrette: Et, s'il faut, M. le Président, qu'on se serve de l'article 55 de la loi et 315, on va le faire. Ce n'est pas vrai qu'on va tolérer en cette Chambre des accusations, même si elles sont feutrées par la bande de façon vicieuse. On va avoir le courage de prendre la parole des députés et des ministres en cette Chambre.

Des voix: Oh!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, sur cette question de règlement.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Le leader du gouvernement est en cette Chambre depuis assez longtemps, il connaît suffisamment bien notre règlement. Il a lu l'article 35.5°, ça s'adresse à la conduite d'un député comme telle. La jurisprudence de vos prédécesseurs est constante. La question a été posée ès qualité de ministre et il y a une distinction fondamentale. Tout ce que le leader tente de faire, M. le Président, c'est de faire partie de ce système de «cover up» qui ne veut pas faire la lumière...

Des voix: Bravo!

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Nous allons, avec votre permission... S'il vous plaît! Oui, oui, je vais vous reconnaître aussitôt que... Nous sommes déjà devant une question de règlement que vous avez posée relativement au libellé de l'intervention, et je vais vous reconnaître sur cette deuxième question de règlement. On va régler une chose à la fois.

En ce qui regarde la première question de règlement qui a été posée, je dois reconnaître que le libellé comme tel pouvait laisser, effectivement, porter à une certaine interprétation. Ceci étant dit, je suis déjà intervenu pour indiquer au député de Frontenac qu'une question ne pouvait être formulée de façon à laisser supposer des choses. Je l'ai déjà rappelé à l'ordre, ce qui constitue en soi une sanction. À ce moment-ci, je considère que la question a été posée et que l'incident est clos.

Maintenant, sur la deuxième question de règlement et suite à l'intervention ou dans le cadre de l'intervention précédente, M. le leader du gouvernement, je suis prêt à vous reconnaître.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. En vertu de nos règlements, je voudrais vous annoncer qu'il y aura une motion de déposée en vertu de l'article 315 contre l'accusation de «cover up» que vient apporter le leader de l'opposition.

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À ce moment-ci, M. le ministre de la Sécurité publique, sur la question posée.

M. Ménard: Bon. Moi, je ne sais pas si j'ai été accusé de quelque chose, mais je dois dire que ça me laisse totalement indifférent. J'ai l'impression que, si je l'ai été, c'est parce que, le député, ses paroles ont dépassé sa pensée.

C'est drôle, dans cette question, vous nous reprochez essentiellement d'avoir été trop vite, mais, dans l'enquête, vous voulez qu'on fasse ça aussi. Vous devez, il me semble, réaliser que les opérations bien préparées, bien faites sont celles qui obtiennent les meilleurs résultats. Regardez ce qu'on a fait avec Jocus, à mon ministère, puis les vidéoloteries qui rapportent aujourd'hui 5 000 000 $ par semaine au gouvernement. Regardez l'opération Carcajou qui a pris un certain temps à démarrer puis qui a bien, bien fonctionné.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre!

M. Ménard: Tout ce qui est bien préparé risque d'aller plus loin.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre!

M. Ménard: Ici, je suis convaincu que la meilleure façon d'agir, c'est d'abord d'envoyer les comptables et les gens qui connaissent le milieu, et la police se servira, sera en bien meilleure posture pour mener son enquête. Et je n'empêche pas la police, s'ils veulent y aller, mais je suis convaincu qu'intelligents et bien formés comme ils sont c'est le meilleur processus pour aller au bout de l'enquête.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales.

Il n'y a pas de réponses différées.

Pas de votes reportés.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que je peux...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Est-ce que je peux demander...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre!

M. Chevrette: ...le consentement de l'opposition pour apporter immédiatement le complément de réponse que la ministre des Affaires canadiennes a pris en compte tantôt? C'est parce qu'elle ne sera pas ici demain pour mission... Donc...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Compte tenu de la gravité, M. le Président, du dossier qui est discuté devant l'Assemblée nationale, bien...

Le Président: Alors, je comprends qu'il y a consentement. O.K.

Des voix: ...

M. Paradis: Pas encore, là. On «peut-u»...

Le Président: Excusez-moi. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Et est-ce qu'on pourrait en même temps, M. le Président, profiter de l'occasion pour demander au premier ministre de déposer en cette Chambre le rapport préliminaire du Vérificateur général du Québec qui a été soumis, tel qu'il l'a mentionné lui-même en cette Chambre hier, le 22 novembre à son bureau, pour fins de validation? Ça pourrait aider à faire la lumière sur l'ensemble du dossier...

M. Chevrette: M. le Président, je vous ferai remarquer...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: ...que j'ai déposé au nom du premier ministre, moi-même, en cette Chambre...

M. Paradis: Non, pas le même...

M. Chevrette: ...le rapport final spécifique. Il me semble que c'est clair. Ils ont tout en main.

Le Président: À l'ordre! À titre d'information, pour qu'on s'en rappelle, l'article 80 de notre règlement prévoit... À l'ordre! ...que «le ministre à qui une question est posée peut y répondre à l'issue de la période de questions ou au cours d'une séance subséquente». Alors, il n'est pas formellement requis de consentement sur une telle question. Mme la ministre.

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Je voudrais déposer, donc, le C.T. 40801 et bien répondre à propos de ce que je disais tout à l'heure, que M. Beaudin et M. Marsolais ont été employés par, embauchés par le SAIC, pour les fins du SAIC, dans l'équipe chargée du dossier des politiques institutionnelles et constitutionnelles du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. Point, à la ligne.

Le Président: M. le député de Châteauguay, pour une question complémentaire.

M. Fournier: Oui. Est-ce que je peux demander à la ministre ce qui explique ce que l'on retrouve dans les documents qui originent de son Secrétariat et qui disent, et je cite: Octroi d'un contrat de services à MM. Ghislain Beaudin et Stéphane Marsolais dans le cadre des travaux du Secrétariat à la restructuration, 77 000 $, septembre 1995, quelques jours avant la campagne référendaire?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Beaudoin: Je vais déposer le C.T., M. le Président, et prouver que c'est une erreur cléricale, une erreur de transcription...

Des voix: Oh!

Mme Beaudoin: Eh oui! Eh oui! ce sont des choses qui arrivent...

Des voix: ...

Mme Beaudoin: ...et j'en donne ma parole, de mon siège...

Le Président: À l'ordre!

Mme Beaudoin: ...M. le Président, en déposant ce C.T.

(11 h 10)


Document déposé

Le Président: À l'ordre! S'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Consentement. Alors, ce document est déposé. Fin de la période de questions et de réponses orales. À l'ordre!

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Simplement pour clarifier avec M. le premier ministre. Tantôt, j'avais semblé, de son hochement du bonnet, reconnaître une acceptation à déposer le rapport préliminaire du 22 novembre, qui avait été remis à son bureau pour fins de validation et qui émanait du Vérificateur général du Québec, concernant l'affaire qui a été discutée à la période de questions.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, bien sûr, mais je ne l'ai pas avec moi. Ce sera déposé demain. Mais pourquoi est-ce qu'on intervient comme ça, alors que la période de questions est terminée? Il ne pouvait pas y penser à temps, non?

Des voix: Ha, ha, ha!


Motions sans préavis

Le Président: À l'ordre! Nous en sommes aux motions sans préavis. M. le ministre des Transports. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre des Transports.


Souligner le travail des bénévoles de l'Opération Nez rouge

M. Campeau: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne le travail accompli partout au Québec par les bénévoles de l'Opération Nez rouge, qui depuis 12 ans contribue à accroître la sécurité routière et à éliminer la conduite en état d'ébriété.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Un intervenant de chaque côté... Mmes et MM. les députés, je sais qu'à ce moment-ci beaucoup de nos collègues doivent quitter pour le travail des commissions ou d'autres occupations. Je leur demande de le faire en silence.

M. le ministre des Transports.


M. Jean Campeau

M. Campeau: M. le Président, je suis très heureux de vous souligner que ce soir marque le début de la 12e édition de l'Opération Nez rouge, partout au Québec. Durant la période des Fêtes, particulièrement propice à la consommation d'alcool, l'Opération Nez rouge réussit, grâce à l'intense collaboration des médias d'information, à faire parler massivement du problème de l'alcool au volant.

Cette campagne de sécurité routière a aussi des répercussions tout au long de l'année en raison de sa très grande notoriété et de la philosophie qu'elle véhicule. Chaque année, plus de 38 000 bénévoles participent à l'Opération Nez rouge. Ils font de cette campagne un formidable exemple de prise en charge sociale du problème de la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool. Cet engagement de la population est un atout majeur, un atout majeur qui contribue à changer les mentalités. Voilà l'aspect qui rend unique cette campagne de sécurité routière.

Le gouvernement du Québec, par le biais de la Société de l'assurance automobile du Québec, est donc très heureux d'être associé une fois de plus à l'Opération Nez rouge, puisque la conduite avec les facultés affaiblies demeure un problème social important. En cette période de réjouissances, comme en tout temps, d'ailleurs, j'aimerais dire aux Québécois et aux Québécoises qu'un seul coup de fil, qu'un seul coup de fil suffit pour rentrer à la maison de façon sécuritaire. Alors, téléphonez à un parent, à un ami, à un taxi, ou à l'Opération Nez rouge. Ce petit «dring» – je dirais «dring» au lieu de «drink» – avant de partir peut vous sauver la vie. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le ministre. M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est avec plaisir que, comme responsabilité de critique en matière de transport et au nom de notre formation, on s'associe à cette motion pour souligner, comme le disait le ministre, le lancement, encore une fois cette année, de l'Opération Nez rouge.

Il est important, M. le Président, de rappeler les différentes interventions et du gouvernement et de la Société de l'assurance automobile du Québec depuis quelques années, et la tenue, bien sûr, de l'Opération Nez rouge, qui ont contribué à diminuer le nombre d'accidents où des automobilistes étaient impliqués avec conduite affaiblie. Il est important de le rappeler. Bien sûr, l'objectif, c'est que ça soit zéro décès, zéro accident.

La situation: une amélioration considérable du nombre de conducteurs interceptés après 21 heures. Et, M. le Président, je rappelle quelques chiffres. En 1981, quand il y avait des opérations de cette nature, c'était 5,9 % des automobilistes interceptés qui étaient impliqués. En 1986, ça avait déjà diminué à 3,6 %. En 1991, c'était à 3,2 %, M. le Président. Donc, on voit là que maintenant l'Opération Nez rouge fait partie des moeurs, des coutumes, des habitudes des Québécois et des Québécoises. Et ce qu'on veut rappeler, au début de cette activité d'aujourd'hui, c'est que les citoyens et citoyennes du Québec ont intérêt à continuer à faire appel à ça, ça aide l'ensemble de la collectivité québécoise.

Il faut rappeler aussi, M. le Président, que l'alcool au volant, c'est la première cause de décès sur les routes au Québec; la première. En 1993, la conduite en état d'ébriété, M. le Président, a causé 400 décès et 9 000 blessés, et les coûts sociaux: 500 000 000 $. Donc, c'est important, là. Il ne s'agit pas là des coûts matériels, il ne s'agit pas des dommages, il s'agit, M. le Président, de 400 décès et 9 000 blessés.

Alors, il faut rappeler l'historique des gouvernements. En août 1986, modification au Code de la sécurité routière pour augmenter la durée des suspensions des permis de conduire. En 1990, modification de l'article 636 du même Code pour donner aux agents de la paix le pouvoir d'intercepter au hasard les conducteurs d'un véhicule routier pour effectuer le contrôle de l'alcoolémie, M. le Président. En 1991, amendement à la Loi sur l'assurance automobile pour réduire l'indemnité de remplacement de revenu des contrevenants subissant une peine de prison pour infraction au Code criminel, dont la conduite avec facultés affaiblies. En 1992, l'instauration d'une nouvelle tarification d'assurance du permis de conduire basée sur le dossier du conducteur.

Quand on voit, M. le Président, de quelle façon le législateur a continuellement voulu s'associer à une activité pour sécuriser davantage la conduite sur les routes, c'est avec énormément de plaisir et en invitant, comme l'a fait le ministre, l'ensemble de la population québécoise à se prévaloir de ce service que nous soulignons encore une fois aujourd'hui le lancement de cette activité pour la période. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Nous en sommes toujours aux motions sans préavis. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Nous aimerions que l'Assemblée nationale réaffirme ce qui suit: Il existe une culture québécoise, elle est majoritairement francophone. Cette réalité justifie d'ailleurs l'inscription d'une clause à la Constitution canadienne reconnaissant le caractère distinct de la société québécoise.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Compte tenu qu'on n'a pas été avisés, qu'on s'avise là, je vous garantis que je suis pour, mais qu'on la ramène après entente, au moment jugé le plus opportun, si vous n'avez pas d'objection, parce que je n'ai pas planifié les travaux, je n'ai pas été prévenu de cette motion.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Je comprends un peu la remarque du leader du gouvernement. Peut-être pour lui faciliter le travail... Il vient de nous indiquer qu'il est en faveur d'une telle motion. Il veut qu'elle soit discutée, également, de façon à ne pas perturber l'agenda de nos travaux, qui ne sont quand même pas trop tricotés serrés, au cours de la journée, à moins qu'il y ait des surprises, là. On pourrait s'entendre immédiatement sur un porte-parole de chaque côté, avec une durée de cinq à 10 minutes par porte-parole, et procéder à l'adoption de la motion, et ça ne perturberait d'aucune façon le déroulement harmonieux des travaux de cette Assemblée, M. le Président.

Le Président: M. le leader.

M. Chevrette: M. le Président, compte tenu que notre porte-parole en matière de langue et de culture a quitté, je préférerais qu'on la reporte, qu'on la ramène demain.

(11 h 20)

Le Président: Alors, je comprends donc que, dans les circonstances, il n'y a pas de consentement. M. le député de Viger, toujours aux motions sans préavis.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je demande le consentement de l'Assemblée pour la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale accepte unanimement et respecte le résultat du référendum du 30 octobre dernier en réponse à la question suivante, qui a été rejetée démocratiquement: "Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de l'entente signée le 12 juin 1995?"»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Non, M. le Président, ça fait plusieurs jours que je me demande de quoi ils cherchent à se convaincre. Le peuple a parlé et nous avons accepté son verdict. On ne commencera pas à se faire plaisir en Chambre, au Parti libéral qui doute qu'il a gagné.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, strictement pour rappeler à mon bon ami, le leader du gouvernement, que l'Assemblée nationale n'a pas formellement accepté. S'il veut le faire sans débat, de façon à ne pas, encore une fois, perturber son calendrier de fin de session, nous serions d'accord. Il n'a qu'à indiquer son accord et, sans que personne ne prenne la parole, M. le Président, la résolution sera acceptée et le voeu de la population sera consacré dans cette enceinte, M. le Président.

Le Président: Je comprends donc qu'il n'y a pas consentement. Nous en sommes toujours aux motions sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 102, Loi sur l'Agence métropolitaine de transport et modifiant diverses dispositions législatives, de 15 à 18 heures et de 20 à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Également, que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 85, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et la Loi sur la fiscalité municipale, de 20 à 24 heures ce soir, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Et que la commission du budget et de l'administration procédera à l'étude détaillée du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, et ce, de 20 h 45 à 24 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May.

Le Président: Alors, toujours aux avis touchant les travaux des commissions, je vous avise que la commission de la culture se réunira en séance de travail aujourd'hui, le jeudi 7 décembre 1995, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de faire le bilan des consultations particulières sur l'avenir de Radio-Québec et de préparer le rapport de la commission de la culture, qui sera déposé à l'Assemblée nationale.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en venons aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Alors, je vous avise qu'il y aura sanction de projets de loi au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur, aujourd'hui, à 16 heures.

Nous en venons aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, pour permettre un peu une planification, parce qu'on sait toujours que, dans une fin de session, il y a beaucoup de ministres qui doivent se présenter, il y aura l'appel immédiatement, si vous me permettez ce cour message...

Le Président: Nous revenons aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée?

M. Chevrette: Oui.

Le Président: O.K.

M. Chevrette: Étant donné que j'appellerai immédiatement après, M. le Président, l'adoption du principe du projet de loi n° 111, il a été convenu entre les parties, pour permettre au critique de l'opposition qui sera de retour aujourd'hui, mais qui est en mission à l'extérieur du parlement, qu'on ajournera le débat immédiatement après le discours de Mme la ministre des Finances, pour faire en sorte que la réplique puisse se faire en début de soirée, avec le critique de l'opposition. Donc, c'était un avis pour ne pas que les parlementaires pensent qu'on veut jouer aux fous avec le menu législatif.


Affaires du jour

Le Président: Alors, donc, nous en venons aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Article 7 du feuilleton.


Projet de loi n° 111


Adoption du principe

Le Président: À l'article 7, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Est-ce qu'il y a des interventions?

Mme Marois: Certainement.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. C'est avec beaucoup de plaisir que je propose, aujourd'hui, l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Ce projet, M. le Président, permet de faire bénéficier le secteur communautaire d'une somme additionnelle de 9 000 000 $ par année, cette somme correspondant à 5 % du bénéfice net réalisé par l'exploitation des casinos d'État. De façon à saisir toute la pertinence et la portée de ce projet de loi, vous me permettrez, M. le Président, d'abord, de décrire le dynamisme et la reconnaissance du secteur communautaire, présenter la mission du Secrétariat à l'action communautaire, en dresser le bilan, les perspectives, expliquer le véhicule financier que constitue le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome; quatrièmement, d'énoncer les principes de la volonté gouvernementale de circonscrire les champs d'action communautaire, et ce, en concertation avec les intervenants concernés; et, enfin, cinquièmement, de préciser en quoi le Fonds encourage et soutient les secteurs communautaires.

D'abord, le dynamisme et la reconnaissance du secteur communautaire. Fondée d'abord sur la solidarité, la défense des droits et la recherche d'une meilleure part de la richesse collective pour les démunis, l'action communautaire a, pour ainsi dire, toujours été présente dans notre société. À ce titre, d'ailleurs, le Québec occupe une place privilégiée, car peu de pays occidentaux peuvent compter sur un secteur communautaire aussi développé que le nôtre. Il s'agit de quelque 6 000 organismes qui mobilisent des dizaines de milliers de personnes engagées dans l'amélioration des conditions de vie des plus démunis de notre société. Ces organismes oeuvrent dans les secteurs vitaux de l'organisation de cette même société et dans des champs aussi variés que le secteur de la santé, les services sociaux – je pense, entre autres, aux services aux femmes, aux jeunes – le maintien à domicile, l'aide dans le secteur de la santé mentale, l'éducation populaire, la justice, la sécurité publique, l'emploi.

Le domaine privilégié par le secteur communautaire est la prévention. Cependant, dans un contexte de complémentarité avec les services donnés en établissement, les organismes communautaires investissent de plus en plus largement le domaine des services: services aux femmes violentées, maintien à domicile, etc. La violence conjugale – dont nous parlions, d'ailleurs, hier, puisque nous avons lancé une politique intégrée visant à contrer la violence, la violence conjugale en particulier et la violence faite aux enfants – l'appauvrissement des familles, l'exclusion sociale, tout autant de sujets et de problématiques autour desquels le mouvement communautaire se solidarise de façon toute particulière.

Un nouveau créneau s'est développé aussi dans le secteur communautaire, et c'est le créneau socioéconomique de ce que l'on peut appeler ou désigner comme l'entrepreneurship communautaire. Des organismes comme les Corporations de développement communautaire, les Carrefours jeunesse-emploi, voire même le maintien à domicile, amènent un élargissement des activités couvertes par le secteur communautaire et un débat autour de la définition de ce qu'est le communautaire. De plus, les tables et regroupements d'organismes communautaires s'intègrent aux instances décisionnelles régionales dans le cadre de la dynamique qui a suivi le mouvement de décentralisation du ministère de la Santé et des Services sociaux et du Secrétariat au développement des régions.

Les récents travaux sur l'économie sociale apportent un regard neuf sur ce secteur qui est porteur de création d'emplois. En région, le développement local et les défis sociaux qui y sont associés ont favorisé des actions intersectorielles articulées autour du partenariat entre les secteurs privé, public et communautaire. Le secteur communautaire joue souvent un rôle de leadership dans cette dynamique.

Il faut reconnaître le travail de toutes ces femmes, de tous ces hommes qui oeuvrent au soulagement de la misère et à l'amélioration de nos conditions de vie. Fondée d'abord sur la solidarité, l'aide aux plus démunis, la défense des droits, l'amélioration des conditions de vie, en fait, l'action communautaire a toujours été très présente dans notre société et mérite d'être supportée, M. le Président.

Maintenant, parlons de la création d'un Secrétariat à l'action communautaire autonome. Le gouvernement du Québec a voulu reconnaître cette action communautaire autonome et soutenir son développement par la création, en avril dernier, d'un Secrétariat à l'action communautaire autonome. Ce Secrétariat a pour mandat général, d'abord, d'assurer une meilleure connaissance de l'action communautaire, notamment, bien sûr, par la collecte d'informations statistiques; deuxièmement, d'établir avec les ministères concernés un certain nombre de normes minimales pour les organismes communautaires souhaitant se prévaloir de l'aide gouvernementale – cela est normal, nous devons assumer la bonne gestion des fonds publics; d'administrer un fonds de réserve ou de dépannage pouvant être accordé directement à des mouvements d'action communautaire pour corriger des situations et pour réaliser des activités spécifiques ou ponctuelles.

(11 h 30)

Le Secrétariat a assumé, dès sa mise en place, un rôle actif. Ainsi, après quatre mois d'opération, le Secrétariat à l'action communautaire autonome affiche un bilan positif. D'abord, de nombreux organismes communautaires se sont vu allouer une ressource permanente. Pour l'année en cours, 15 tables de concertation de groupes de femmes disposeront d'une ressource humaine permanente et 20 corporations de développement communautaire se verront allouer, selon leur taille, de une à deux ressources humaines permanentes. Cinq Carrefours jeunesse-emploi sont créés à ce jour et une vingtaine d'autres sont prévus d'ici la fin de l'année financière.

Plus spécifiquement, pour l'exercice financier 1995-1996, nous pouvons dégager le bilan et les perspectives suivants. Au titre des initiatives locales, le Secrétariat à l'action communautaire a reçu en moyenne depuis deux mois 12 demandes de soutien financier par semaine, ce qui n'est pas peu, M. le Président. Ces sollicitations d'aide se répartissent de la façon suivante: 86 % venant du secteur de la santé et des services sociaux, 11 % reliées au secteur de l'emploi et 3 % à celui de l'éducation. Si le rythme d'entrée est constant, nous estimons que, d'ici le 31 mars 1996, environ 125 nouveaux cas, à une moyenne d'aide financière de 24 000 $, pourraient être autorisés pour une somme d'environ 3 000 000 $.

Au chapitre des regroupements d'organismes communautaires, le Secrétariat à l'action communautaire autonome a élaboré deux cadres de financement, soit les tables de concertation de groupes de femmes et les corporations de développement communautaire. Comment parler des tables de concertation de groupes de femmes? D'abord, un maximum de 17 tables de concertation de groupes de femmes est à prévoir dont 11 recevront une somme de 122 000 $. Cela est peu, bien sûr, mais cela est un pas dans la bonne direction. D'ici le 31 mars 1996, quatre tables additionnelles devraient être approuvées pour une somme de 40 000 $ et deux autres devraient voir le jour au cours de l'exercice financier gouvernemental 1996-1997.

Qu'en est-il maintenant des corporations de développement communautaire? Un maximum de 20 corporations de développement communautaire est à prévoir pour 1995-1996, dont 15 sont actuellement confirmées, pour une somme de 345 000 $. D'ici le 31 mars 1996, cinq corporations additionnelles devraient être approuvées.

Enfin, en ce qui a trait aux Carrefours jeunesse-emploi, le Secrétariat à l'action communautaire autonome en prévoit la création de 56. Les données relatives aux Carrefours jeunesse-emploi révèlent que le Secrétariat aura mis sur pied près de 25 Carrefours jeunesse-emploi dès sa première année d'opération. Soulignons que 30 autres Carrefours pourraient voir le jour durant les trois prochaines années. Le soutien à la création et au démarrage des Carrefours pourrait représenter environ 30 % de l'assistance financière totale du Secrétariat pour l'exercice en cours, soit 1995-1996, sans pour autant affecter tout le Fonds du Secrétariat à ce seul secteur d'activité pour les prochains exercices financiers. En effet, ce qu'il faut constater, c'est qu'à compter de 1996-1997 des sommes d'argent distinctes des sommes allouées à l'action communautaire autonome ont été prévues lors du discours du budget de mai 1995 pour assurer le financement des Carrefours jeunesse-emploi.

Troisièmement, M. le Président, parlons un petit peu de la création du Fonds d'aide à l'action communautaire autonome. Les interventions décrites précédemment commandent de mettre à la disposition du Secrétariat à l'action communautaire autonome un outil financier, tel que le prévoit le mandat général qui lui a été confié par le gouvernement du Québec. Ainsi, le projet de loi n° 111 que nous étudions ce matin a pour objet d'instituer ce Fonds d'aide à l'action communautaire autonome et de dédier annuellement au financement des activités d'aide à l'action communautaire des montants correspondant à un pourcentage actuellement établi à 5 % du bénéfice net résultant de l'exploitation des casinos d'État sur la base de l'exercice financier précédent.

Ce mécanisme de financement aura l'avantage d'assurer la continuité, d'année en année, de ces sommes d'argent additionnelles que le gouvernement entend utiliser pour soutenir l'action communautaire autonome. En effet, contrairement aux dépenses budgétaires des ministères, qui sont soumises aux exercices de compressions, malheureusement, que nous devons faire, que le gouvernement doit faire donc, pardon, les sommes d'argent additionnelles rendues disponibles grâce au mécanisme de financement qui serait mis en place par le projet de loi, soit 9 000 000 $ pour le présent exercice financier, devraient se maintenir au cours des prochaines années et, possiblement, s'accroître quand on regarde les résultats passés au plan financier de cette source de revenus servant à soutenir le Fonds d'aide à l'action communautaire.

Un certain nombre de préoccupations ont été soulevées devant cette volonté, d'ailleurs, du gouvernement de prélever un pourcentage des revenus des casinos pour financer l'action communautaire autonome. Je rappellerai, M. le Président, qu'il s'agit essentiellement, par l'adoption de ce projet de loi, de mettre en place un mécanisme technique de financement qui contribuera aux efforts du gouvernement en vue de se rapprocher, sur un horizon prévisible, de la volonté de notre parti, du Parti québécois, de consacrer l'équivalent de 1 % du budget de l'État à l'action communautaire.

Cet effort additionnel, d'ailleurs, vient s'ajouter aux quelque 195 000 000 $ consentis par les ministères et organismes du gouvernement du Québec à des groupes et organismes d'action communautaire. La partie la plus importante de cet effort est consentie dans le secteur de la santé et des services sociaux. Des efforts significatifs ont également été faits par ces ministères et organismes pour soutenir l'action communautaire dans le secteur de l'emploi, de l'éducation, des communautés culturelles et de la réinsertion sociale. C'est, d'ailleurs, ce que j'expliquais à quelque 100 groupes communautaires, lors d'une rencontre qui a eu lieu le 20 novembre dernier. À l'occasion de cette rencontre, nous avons ainsi convenu d'établir une démarche de partenariat entre le Secrétariat à l'action communautaire autonome et des représentants de groupes pour circonscrire davantage le champ d'action du Secrétariat.

Parlons-en, maintenant, de ce champ d'action qui est à circonscrire avec le milieu communautaire. En effet, l'expérience du Secrétariat à l'action communautaire autonome et la création, de par le projet de loi n° 111, du Fonds dédié à l'action communautaire nous permettent maintenant de baliser, avec le partenariat du milieu communautaire, les paramètres d'une réelle reconnaissance de ce secteur d'activité. Il s'agit d'une occasion exceptionnelle qui nous permettra, j'en suis assurée, de dégager des consensus et de contribuer ensemble au développement du secteur communautaire.

Pour ce faire, le Secrétariat à l'action communautaire autonome a entrepris, en partenariat avec le milieu communautaire, la constitution d'un comité aviseur permanent qui aura le mandat de conseiller le gouvernement sur les orientations en matière d'action communautaire autonome. Ce comité fait suite à de nombreuses demandes en provenance de plusieurs regroupements d'organismes communautaires. Le gouvernement entend également mettre en place un comité de ministres, de députés, qui aura la responsabilité de proposer au gouvernement une politique de reconnaissance de l'action communautaire. Dans cette démarche, ce comité pourra s'appuyer sur les conclusions des consultations entreprises par le milieu communautaire, notamment celles amorcées par L'R des centres de femmes auprès de quelque 1 200 groupes.

Le Fonds, maintenant. Un encouragement et un soutien, croyons-nous, à l'action communautaire. En fait, il ajoute aux sommes déjà prévues dans les ministères et organismes gouvernementaux; il concrétise la volonté gouvernementale d'accentuer l'aide à l'action communautaire. L'action communautaire autonome reçoit ainsi un soutien, longtemps attendu, de la part de l'État. C'est dans le même esprit que nous envisageons d'apporter une contribution à l'action humanitaire internationale. À cet effet, nous pourrions, dans les prochains jours, formuler des propositions dont serait saisie la commission qui étudiera le présent projet de loi. À un moment où la plus grande rigueur s'impose pour assainir les finances publiques, l'engagement du gouvernement à consacrer des sommes d'argent additionnelles pour soutenir l'action communautaire autonome témoigne clairement de la reconnaissance par celui-ci du rôle essentiel des milliers de personnes impliquées dans l'action communautaire partout au Québec et dans tous les secteurs d'activité.

Sur ce dernier point, permettez-moi de préciser dans quel contexte s'amorce cette nouvelle étape de soutien et de reconnaissance de l'action communautaire autonome. Comme vous le savez, les défis actuels du gouvernement du Québec sont importants. Il faut prendre les moyens appropriés pour redonner au Québec sa santé financière en sauvegardant la protection des acquis sociaux qui sont les plus vitaux de notre société. Les défis à rencontrer pour atteindre cet objectif sont: l'assainissement des finances publiques, l'emploi et la relance de l'économie, et l'égalité des chances. Il faut développer ensemble une autre façon de gouverner, un modèle innovateur au Québec, en capitalisant sur les acquis sociaux. Et, contrairement aux exemples qui nous viennent d'ailleurs, où on sabre trop allégrement dans les programmes et les mesures visant une plus grande équité sociale, l'emploi doit devenir dans tous les secteurs d'activité de notre société une véritable obsession de tous les instants.

(11 h 40)

Nous devrons également trouver le meilleur moyen pour adapter et moderniser le filet de sécurité sociale. Les groupes communautaires constituent, dans cette approche, M. le Président, des organismes partenaires de premier niveau, au même titre que les représentants d'employeurs, de travailleurs, de travailleuses. Car qui mieux que les organismes communautaires, partenaires de premier niveau, contribuent, par leurs initiatives, à développer des mesures adaptées aux besoins les plus cruciaux de notre société?

Je vous propose donc, M. le Président, que nous adoptions le principe du projet de loi n° 111 et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Finances. Y a-t-il d'autres interventions? Il n'y a pas d'autres interventions. Alors, je vais... Excusez, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Je voudrais plutôt faire motion pour ajourner le débat, à ce moment-ci, pour permettre, à un autre moment, à un de nos collègues de l'opposition officielle de s'exprimer sur l'adoption de principe. Donc, je fais motion pour ajourner le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion, est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, j'appellerais l'article 12 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 119


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 12, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor propose l'adoption du principe du projet de loi n° 119, Loi modifiant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic et d'autres dispositions législatives.

Je dois, tout d'abord, demander un consentement pour déroger à un article de notre règlement. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 237 du règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi? Y a-t-il consentement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole. Vous disposez d'un temps de 60 minutes.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir à l'occasion de l'adoption du principe du projet de loi n° 119. Ce projet de loi découle de l'entente intervenue le 6 septembre 1995 entre le gouvernement et ses principaux partenaires syndicaux. Il donne également suite à certaines propositions formulées par le Comité de retraite de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, qu'on appelle la CARRA.

Dans le dernier discours du budget, le gouvernement a réaffirmé son objectif d'équilibrer ses opérations courantes. Ainsi, il prévoit réduire de façon majeure ses dépenses de programmes au cours de l'exercice financier 1996-1997 et de celui de 1997-1998. À cette fin, le ministre des Finances indiquait que les baisses d'effectifs qui découleront des moyens retenus pourraient dépasser le taux normal d'attrition. Dans ce contexte, le gouvernement entend mettre en place des mesures qui facilitent la prise de la retraite ou la cessation d'emploi volontaire. Et, de plus, les objectifs de compressions budgétaires impliquent que les ministères et organismes doivent disposer, dans les meilleurs délais, de moyens à la mesure de ces objectifs.

À la demande de ma prédécesseure, Mme Marois, la députée de Taillon, un groupe de travail a été formé afin d'étudier la mise en oeuvre de mesures facilitant le départ à la retraite des employés des secteurs public et parapublic; l'Office des ressources humaines, le Secrétariat du Conseil du trésor et la CARRA ont participé à ces travaux. Les propositions du groupe de travail sont fondées sur les éléments suivants: d'abord, le respect des enveloppes budgétaires fermées des ministères et organismes; l'absence de coût pour les régimes de retraite; la recherche d'un équilibre entre les sommes investies pour favoriser le départ de l'employé et les économies salariales réalisées; la flexibilité d'application des mesures pour répondre aux besoins des employeurs et des participants; et la capacité pour la Commission des régimes de retraite de répondre promptement et efficacement aux demandes des employeurs et des participants.

Plusieurs des mesures proposées par ce groupe de travail ont été soumises aux parties qui négociaient et ont fait l'objet d'une entente, alors que d'autres doivent faire l'objet d'études additionnelles en comité avant de se traduire en règlement. Ainsi, M. le Président, le projet de loi donne suite à cette entente et introduit dans la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, ce qu'on appelle la Loi sur le RREGOP, deux nouveaux critères permanents d'admissibilité à la retraite sans réduction actuarielle.

Une rente de retraite sera accordée à tout employé qui a au moins 35 années de service et 55 ans d'âge, donc un facteur 90, ou qui a au moins 20 années de service et 60 ans d'âge, donc, dans ce cas, un facteur de 80 qui sera appliqué. De plus, la Loi sur le RREGOP sera modifiée afin de réduire de 6 % à 4 % le pourcentage annuel de réduction actuarielle applicable à l'égard de la rente de retraite d'un employé admissible à une rente de retraite réduite.

Cette loi sera également modifiée afin de prévoir que le nombre d'années de service retenues aux fins du calcul de la rente sera limité à 35 années de service à compter du 1er janvier 1996. L'employé ayant atteint ou dépassé ce seuil ne cotisera plus et n'accumulera plus de service aux fins du calcul de sa rente. Le traitement qu'il aura reçu au cours des années ultérieures sera considéré aux fins du calcul du traitement admissible moyen et les années de service créditées excédant 35 années de service le 31 décembre 1995 seront considérées pour les fins du calcul de la rente de l'employé qui cesse de participer au RREGOP après cette date.

En outre, M. le Président, ce projet qui est devant nous modifie la Loi sur le RREGOP pour permettre au gouvernement de prévoir, par règlement, diverses mesures qui visent, notamment, à favoriser la prise de la retraite des personnes qui appartiennent à une catégorie ou sous-catégorie déterminée par le règlement. Et, parmi ces mesures, je vous souligne, d'abord, le transfert de la valeur d'une rente différée dans un compte de retraite immobilisé, avec un sigle, comme l'on fait toujours, un CRI; deuxièmement, l'anticipation du versement d'une rente différée; troisièmement, la compensation, en totalité ou en partie, de la réduction actuarielle applicable à une rente de retraite; et, quatrièmement, le paiement non rétroactif d'une rente de retraite réduite.

Je m'explique brièvement sur chacun de ces points. D'abord, le transfert de la valeur d'une rente différée dans un compte de retraite immobilisé sera accessible au participant qui quitte son emploi et qui a droit à une rente différée. Cette mesure est complétée par la possibilité d'une remise des sommes transférées s'il y a retour dans un emploi visé pour une période minimale de trois mois de service crédités aux fins du calcul d'une rente. Le participant concerné pourra demander un transfert dans un compte de retraite immobilisé s'il n'est pas admissible à une rente immédiate, qu'elle soit avec ou sans réduction actuarielle.

La transférabilité de la valeur de la rente différée améliorera, sans aucun doute, la mobilité de la main-d'oeuvre dans les secteurs public et parapublic. De plus, elle permettra aux personnes qui occuperont un emploi chez plus d'un employeur de regrouper et d'utiliser, au même moment, tous leurs droits de retraite accumulés. Et ce droit de transfert s'appliquera au RREGOP, au Régime de retraite des enseignants et au Régime de retraite des fonctionnaires, c'est-à-dire au RREGOP, au RRE et au RRF. Ceux qui participent à ces régimes de retraite n'utilisent que les sigles, et on m'excusera de les employer, le cas échéant.

Le deuxième point. L'anticipation du versement d'une rente différée permettra à un participant au RREGOP qui a acquis le droit à une rente différée payable à 35 ans de demander que soit anticipé le paiement de cette rente en tout temps à compter de l'âge auquel il pourra se prévaloir de cette option. Le pourcentage de la réduction actuarielle applicable sera calculé en fonction de la date de la demande ou de toute autre date de mise en paiement ultérieure indiquée par le participant.

Tout comme pour le transfert de la valeur d'une rente différée dans un compte de retraite immobilisé, cette mesure a pour objet de faciliter la planification de la retraite et de rendre plus flexible le choix du moment de la retraite, puisqu'elle permet à une personne d'utiliser au même moment les prestations de retraite qu'elle a accumulées chez plusieurs employeurs dans un compte de retraite immobilisé ou dans un régime de retraite enregistré autogéré... pardon, dans un CRI ou dans un REER, un régime enregistré d'épargne-retraite.

(11 h 50)

Troisièmement, la compensation en totalité ou en partie de la réduction actuarielle applicable, le cas échéant, à une rente de retraite permettra à l'employeur et aux participants à un régime en cause de racheter la valeur de la réduction actuarielle applicable à la rente de ce participant. Cette compensation encouragera la prise plus hâtive de la retraite des personnes qui ont accumulé un nombre d'années de service insuffisant pour bénéficier d'une rente sans réduction. Elle permet, en effet, d'augmenter de manière appréciable les revenus de la personne à un moment où ses besoins le justifient.

Enfin, grâce à la non-rétroactivité du paiement d'une rente réduite acquise au RREGOP, l'employé pourra obtenir le paiement de cette rente à la date de son choix, mais sans excéder la date à laquelle elle peut lui être versée sans réduction actuarielle. La réduction actuarielle applicable à cette rente étant calculée pour chaque mois compris entre la date à laquelle elle commence à être versée et la première date à laquelle elle aurait pu être versée sans réduction actuarielle, l'employé pourra retarder le paiement de sa rente et, ainsi, diminuer le montant de réduction actuarielle applicable. Cette mesure assurera au participant une meilleure planification au niveau de ses revenus de retraite.

Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi comporte certaines dispositions visant à prolonger de trois à cinq ans la durée maximale pendant laquelle un participant peut bénéficier du programme de retraite progressive dans le RREGOP, le RRE et le RRF. De cette façon, la personne intéressée pourra réduire son temps de travail avant la prise de sa retraite, tout en continuant à se faire reconnaître, aux fins de son régime de retraite, le service et le traitement qui lui auraient autrement été crédités. Cette mesure requiert une entente entre l'employeur et l'employé, et la prise de la retraite est obligatoire à la fin de la période prévue, à moins d'une entente à cet effet entre les parties.

Le présent projet modifie aussi la plupart des régimes de retraite administrés par la Commission administrative des régimes de retraite afin de permettre la transmission d'un relevé des droits accumulés aux médiateurs familiaux en cas de partage du patrimoine familial. Il faut souligner que ces régimes permettent actuellement l'émission de ce relevé seulement lorsqu'il y a eu introduction d'une instance en séparation de corps, en divorce, en annulation de mariage ou en paiement d'une prestation compensatoire. Il faut donc qu'un recours judiciaire ait été entrepris devant la Cour supérieure du Québec pour obtenir l'émission d'un tel relevé.

La modification proposée facilitera grandement le travail des quelque 300 médiateurs qui sont accrédités pour effectuer de la médiation familiale. En effet, plusieurs d'entre eux aimeraient connaître la valeur actuarielle des droits accumulés au titre d'un régime de retraite administré par la CARRA, au moment même où les parties bénéficient de leurs services. Cette modification permettra à la CARRA de fournir aux conjoints un relevé précisant cette valeur actuarielle.

Une autre modification proposée permettra au gouvernement de ne pas appliquer aux membres des syndicats qui n'ont pas conclu d'entente avec lui les nouvelles mesures que je viens de décrire et de décider à compter de quelle date elles commenceront à s'appliquer. Par ailleurs, ces personnes continueront de bénéficier de leur régime de retraite tel qu'il était défini avant l'entrée en vigueur prévue de cette loi.

Le financement des nouvelles mesures se fera grâce à une majoration de la cotisation des participants du RREGOP. Le gouvernement injectera, quant à lui, plusieurs dizaines de millions de dollars par année au budget afférent aux régimes de retraite des employés de la fonction publique et des réseaux de santé et d'éducation. Soulignons que ces mesures aideront sûrement les ministères, les organismes, ainsi que les établissements du secteur public à accomplir les nécessaires réductions de leur budget. De plus, nous pouvons espérer que les dispositions facilitant la prise de la retraite permettront l'accès à des emplois du secteur public à certains de nos jeunes diplômés dont la présence dans les organismes gouvernementaux est de plus en plus faible, malheureusement.

Par ailleurs, la CARRA devra administrer l'ensemble de ces mesures à même ses crédits actuels. Les autres modifications proposées sont de nature plus technique, s'il en était besoin encore, et ont pour but de faciliter l'administration des régimes de retraite des secteurs public et parapublic.

En terminant, M. le Président, je désire vous souligner que la plupart des modifications proposées par le présent projet de loi ont obtenu l'assentiment des représentants des employés concernés, et c'est la raison pour laquelle j'en recommande l'adoption. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, le député de Westmount–Saint-Louis. Vous avez un temps de parole de 60 minutes en tant que représentant de votre groupe parlementaire. Je vous cède la parole.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, M. le Président, et je remercie les députés ministériels d'avoir pris plus de temps pour applaudir le ministre, ça m'a permis de reprendre ma banquette. Je vous remercie beaucoup.

M. le Président, le projet de loi qu'on a devant nous, que le président du Conseil du trésor nous a déposé hier, le projet de loi n° 119, requérait le consentement de l'opposition pour lui permettre de pouvoir procéder, avant une semaine après son dépôt, à l'adoption en deuxième lecture. Si l'opposition libérale a accepté de bon coeur de faire en sorte de donner son consentement, c'est qu'il y a plusieurs dispositions du projet de loi qui découlent d'ententes, comme l'a signalé le ministre, prises le 6 septembre dernier. Mais aussi il y a des dispositions du projet de loi qui doivent être adoptées avant le 1er janvier 1996 parce qu'elles ont pour effet... Pour les syndiqués et pour les gens qui auront recours à ces régimes de pension, ce sont des dispositions qui sont déclenchées, qui partent, qui débutent le 1er janvier 1996.

M. le Président, l'opposition tient à demander au président du Conseil du trésor, quand nous étudierons le projet de loi article par article, qu'il puisse nous amener le coût détaillé, le coût du service actuariel par régime de retraite que ces nouveaux éléments ou cette bonification de chacun des régimes pourra coûter. On sait pertinemment que nos régimes de pension, que ce soit le RRE, le RREGOP, le RRF, le RRAPIP, sont des régimes de pension dont la plus grande problématique, à mon avis, à notre avis, en fin de compte, c'est le fait qu'ils ne sont pas complètement financés; ils sont financés sur la base d'un endettement progressif de l'État à l'égard de ces régimes. Ils ne sont pas capitalisés – pour utiliser le terme du jargon de ce métier-là – à 100 %.

Une nouvelle législation américaine, d'ailleurs, oblige les États à capitaliser leurs régimes de pension dans chacun des États. Il y avait un excellent article dans le Times , il y a à peu près quatre ou cinq mois, sur le degré de capitalisation des régimes de retraite des États américains et on s'apercevait qu'aujourd'hui il y a à peu près la moitié des régimes américains qui sont maintenant surcapitalisés, c'est-à-dire qu'il y a plus de 100 % du fonds de capital dans le régime, ce qui permet à ces régimes, par leurs comités de retraite – comités conjoints paritaires – de pouvoir offrir ces bonifications de régimes à un coût actuariel qui est déjà comptabilisé, puisqu'il est capitalisé. M. le Président, on ne fera pas de farfinage sur ces questions, mais on aimerait au moins connaître les coûts actuariels de chacun de ces régimes.

Le Comité de retraite, qui a proposé au Conseil du trésor ces modifications, ces bonifications, a proposé des modifications, dans quelques cas, que nous avions déjà... Lors de l'adoption du dernier projet de loi du prédécesseur du député de Labelle, on avait déjà acquis l'idée que, par exemple, le RREGOP serait modifié. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, M. le Président; le député de Labelle doit s'en souvenir. Il s'est déposé ici, dans cette Chambre, au-delà d'une quarantaine de pétitions, particulièrement d'enseignants ayant transféré du RRE au RREGOP. J'imagine que c'est un langage qui vous est familier, M. le Président. Si je ne m'abuse, vous avez eu, dans une autre vie, une carrière de professeur au collège, je pense.

M. Gautrin: Université.

(12 heures)

M. Chagnon: À l'université, excusez-moi. Alors, c'est un autre régime. Les enseignants qui avaient transféré du RRE au RREGOP en 1973, après le 1er juillet 1973, avaient réclamé de pouvoir jouir de certaines modifications au RREGOP, qui sont apportées dans le projet de loi n° 119 que nous avons devant nous, leur permettant ainsi de pouvoir, après 35 ans de service mais à 55 ans d'âge – donc, des profs qui ont commencé à travailler à 20 ans, dans le fond – se retirer, prendre leur retraite, sans avoir une pénalité actuarielle. Les pénalités actuarielles de l'époque, c'étaient des pénalités qui coûtaient 0,5 % de l'ensemble de la valeur du régime par année de service manquante. Alors, le régime se montre donc plus généreux envers ces enseignants, et nous en sommes bien contents.

Dans le secteur de l'éducation, il y aura 35 000 nouveaux enseignants dans les 10 prochaines années, parce que l'âge moyen des enseignants, au Québec, est relativement élevé et, surtout, leur expérience au travail est très forte, ce qui fait que le réseau des enseignantes et des enseignants du Québec, particulièrement au primaire et secondaire, se verra substantiellement modifié au cours des 10 prochaines années et fera en sorte qu'il changera à un rythme de presque 5 % par année, pour les 10 prochaines années, ce qui implique, évidemment, 50 % de l'ensemble du personnel enseignant, primaire et secondaire, qui se verra prendre sa retraite dans les années à venir. Donc, aussi, en même temps, 35 000 nouveaux emplois pour des jeunes enseignantes et enseignants, qui pourront se tailler une place dans le monde de l'enseignement.

M. le Président, la présidente du Conseil du trésor, et nous le verrons un peu plus tard, nous apporte ce projet de loi qui modifie huit lois. Il modifie chacun des régimes de pension, chacun des régimes de retraite – le RRE, le RRAPIP, le RREGOP, le RRF – et fait en sorte de modifier des objets comme des calculs de coordination entre le régime des rentes. On a vu cette semaine la ministre responsable... en tout cas, la députée de Chicoutimi... le nom de son ministère, c'est...

M. Léonard: Le ministère de la Sécurité du revenu.

M. Chagnon: ...le ministère de la Sécurité du revenu – merci, M. le député de Labelle – modifier ou apporter par règlement une modification aux coûts du Régime de rentes. Eh bien, le Régime de rentes sert, après 65 ans, d'objet de coordination avec l'ensemble de chacun des régimes pour les retraités qui ont 65 ans. Évidemment, l'idée, c'est d'éviter de subventionner, par le biais d'un régime de pension, deux fois le même individu.

Alors, le calcul de coordination se fait – et j'aurai des questions, lorsque nous serons en commission parlementaire, à ce sujet-là – sur certains régimes. Le ministre nous a parlé du RRE et du RREGOP; j'aimerais savoir si le RRAPIP, entre autres, qui est un des autres régimes d'État, est touché par ce régime.

La même question se posera aussi pour une excellente disposition du projet de loi, qui concerne le transport de la rente. Quand vous êtes jeune, quand vous avez 25 ans, 20 ans, 25 ou 30 ans, que vous commencez à vous bâtir un régime de pension dans une société d'État ou ailleurs et que vous avez, grâce à ce projet de loi, la possibilité de le transporter dans l'une ou l'autre des fonctions que vous aurez plus tard, comme il est prévu dans le projet de loi avec le RREGOP, le RRE et le RRF, j'aimerais savoir si les autres régimes de pension sont aussi touchés par ce transport de rentes et, sinon, pourquoi.

Alors, c'est le genre de questions, un peu techniques, qui feront en sorte de nous permettre, en commission parlementaire, d'étudier plus profondément ce projet de loi. Mais, au départ, je tiens à signaler, M. le Président, que nous l'accueillons favorablement et que nous avons l'intention de l'adopter le plus tôt possible avant la période des Fêtes, de façon à ce que les salariés et les futurs retraités de l'État du Québec puissent jouir de l'ensemble de ces dispositions avant le 1er janvier 1996, ce qui fait en sorte de nous permettre... et de devoir adopter ce projet de loi le plus rapidement possible. Évidemment, en commission parlementaire, il y aura un questionnement plus précis sur certaines de ces dispositions. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Gautrin: Moi, je veux dire un mot, je veux rajouter un tout petit mot.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y a un autre intervenant avant la réplique du ministre? Oui. Alors, M. le député de Verdun. Très bien, je vous cède la parole.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Comme mon collègue de Westmount–Saint-Louis, je pense qu'on est en face d'un projet de loi qui est le résultat d'une négociation, donc on n'a pas vraiment d'autre choix que de l'accepter tel qu'il est. Néanmoins, il y a un certain nombre de questionnements qu'on peut avoir.

Le dernier rapport actuariel du RREGOP prévoyait qu'on pouvait avoir une baisse du taux de cotisation des participants, qui pouvait passer, pour maintenir l'équilibre du régime, bien sûr, de 7,68 % à 7,04 %. Alors, là, actuellement, on met dans le projet de loi deux modifications qui ont des effets actuariels importants, soit la formule 60 et 90, tel que le ministre l'a rappelé tout à l'heure, c'est-à-dire pour faciliter la mobilité des gens de pouvoir prendre leur retraite plus rapidement, et aussi la diminution de la pénalité actuarielle. La pénalité actuarielle, actuellement, était de 0,5 % pour les gens qui devaient prendre leur retraite plus tôt; on ramène ça à une pénalité de un tiers de 1 %, c'est-à-dire de 0,3333 %. Donc, ça aussi, cette diminution de la pénalité actuarielle pour ceux qui vont prendre une retraite anticipée a un effet extrêmement important ou, du moins, peut avoir un effet important sur le régime.

Alors, ce que je n'ai pas, M. le Président, et je l'ai cherché dans le projet de loi, particulièrement sur ce qui touche le RREGOP, c'est quelle évaluation actuarielle on aurait en main et quel devrait être le taux de cotisation des participants pour pouvoir supporter les bénéfices qui sont proposés. Alors, le ministre en a parlé un peu. Il a dit qu'il va y avoir une augmentation des cotisations éventuelles, qu'il va y avoir une injection de fonds. Il y a une analyse économique à faire aussi, si vous me permettez, pour le gouvernement, qu'on n'a pas, et je voudrais lui demander si, en commission, il pourra nous la déposer. Il est clair, d'après moi, que ce qui est déposé, la bonification du RREGOP, va avoir un coût pour le gouvernement.

Par contre, il est clair aussi que cette mobilité accrue des employés du gouvernement et aussi la possibilité pour les gens de prendre plus rapidement leur retraite vont être bénéfiques aussi pour le gouvernement sur le plan financier. Je lui demande: Est-ce qu'il pourra aussi, en commission parlementaire, déposer ces analyses coûts-bénéfices pour le gouvernement entre ce que les avantages inclus dans le projet de loi vont coûter au gouvernement en termes de cotisation et aux participants en termes de cotisation et, d'autre part, quels bénéfices on compte, sur le plan financier, en escompter?

Alors, M. le Président, je terminerai là-dessus. Ce que je voulais m'assurer, puisqu'on va aller très bientôt en commission parlementaire, c'est d'annoncer déjà le type d'information que nous demanderons au ministre en commission parlementaire, de manière qu'il ait le temps – parce que ce n'est pas des informations qu'on a du jour au lendemain – de se préparer pour pouvoir répondre à nos questions en commission parlementaire.

Je terminerai en disant aussi que – comme le rappelait le député de Westmount–Saint-Louis – nous allons, bien sûr, voter en faveur de ce projet de loi qui est le résultat d'une négociation collective.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre, pour un droit de réplique. M. le ministre.


M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: M. le Président, très brièvement, je veux remercier l'opposition, d'abord, de sa collaboration pour accepter qu'on débatte de ce projet de loi même si nous venons de le déposer. Je remercie, deuxièmement, l'opposition pour, aussi, son appui au projet de loi. Je sais que ces projets de loi sont toujours présentés en fin de session, rendent compte d'ententes syndicales, puis nous arrivons, comme le faisait l'ancien gouvernement, à la dernière minute et nous en débattons.

Je veux assurer l'opposition de toute ma collaboration en commission parlementaire et j'ai bien noté les questions qui m'ont été posées, de sorte que mes fonctionnaires pourront présenter des explications et des réponses à ces questions en commission parlementaire. Nous espérons bien que tout se passera bien, pour revenir ici pour l'adoption avant la fin de la session. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Le principe du projet de loi n° 119, Loi modifiant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

(12 h 10)

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Boisclair: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je ferais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

M. Boisclair: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, l'article 17 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 99


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 17, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment. Alors, Mme la ministre de l'Emploi, vous avez la parole. Vous avez un temps de parole de 60 minutes dont vous disposez.

M. Boisclair: Ça prend un consentement?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez. Avant, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Juste avant, pour ne pas interrompre ma collègue, je voulais juste m'enquérir auprès de vous: n'y a-t-il pas un consentement à requérir en vertu de l'article 253?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, très bien, je vous remercie de me le rappeler, je dois avoir un consentement pour déroger à un article du règlement. Y a-t-il effectivement consentement pour déroger à l'article 253 du règlement, prévoyant que le dépôt du rapport et sa prise en considération doivent avoir lieu à une séance distincte? Consentement?

M. Chagnon: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Alors, Mme la ministre, le temps est à vous.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Mes premières paroles seront pour remercier les membres de la commission parlementaire de l'économie et du travail, en particulier la députée de Saint-François, qui a assuré le gouvernement et moi-même de sa collaboration pour l'examen approfondi de ce projet de loi.

J'aimerais également remercier, M. le Président, l'équipe qui, à la Régie du bâtiment, travaille depuis plus de deux ans avec acharnement, je dirais, et enthousiasme aussi, à la préparation de ce projet de loi. C'est donc au moment du Sommet sur l'industrie de la construction... Parce que, évidemment, on peut dater l'origine de ce projet de loi à plus d'une décennie, maintenant. Des observateurs chevronnés me disent que, déjà à la fin des années soixante-dix, il en était question. En 1985, une loi adoptée par le Parlement viendra habiliter la possibilité d'un tel plan de garantie obligatoire et, en 1992, la Loi sur le bâtiment, adoptée ici, à l'Assemblée nationale, qui créait la Régie du bâtiment, habilitait également la Régie à mettre en place un tel plan de garantie obligatoire pour les maisons neuves.

Je vous rappelle, M. le Président, que ce plan de garantie obligatoire existe déjà en Ontario depuis plus de 20 ans et qu'au Québec, même si les banques à charte ou encore la Société canadienne d'hypothèques et de logement exigent, règle générale, une couverture privée en matière de garantie avant d'accepter de prêter, aucun des plans de garantie qui existent n'était tenu à des règles du jeu publiques, transparentes et claires. Ce qui fait, M. le Président, qu'un certain nombre de consommateurs ont vécu des situations assez dramatiques et, dans certains cas, même assez tragiques.

Alors, nous y remédions et nous y remédions avec l'aide et la collaboration de l'opposition. Le projet de loi qui est devant nous modifie la Loi sur le bâtiment de façon à favoriser l'adoption d'un projet de règlement qui contiendra les dispositions du nouveau plan de garantie des maisons neuves.

Les principaux effets du projet de loi 99 sont les suivants. D'une part, toute personne pourra être bénéficiaire des garanties qui seront rendues obligatoires dans le secteur du bâtiment. La loi actuelle réservait aux seules personnes physiques ou organismes sans but lucratif les bénéfices du plan de garantie. Alors, avec les modifications qu'on apporte à la loi 99, une personne morale pourra également bénéficier du plan de garantie des maisons neuves. C'est donc dire que, par exemple, les copropriétés divises ou indivises pourront bénéficier du plan de garantie.

En fait, ça n'est pas sur la qualité des personnes morales ou physiques que portera dorénavant l'exclusion ou l'inclusion au plan de garantie, mais sur la nature des bâtiments. Je vous rappelle que, dans le cas des bâtiments non détenus en copropriété divise, le régime s'appliquera à la maison unifamiliale isolée, jumelée ou en rangée, au bâtiment multifamilial, à partir du duplex jusqu'au quintuplex, au bâtiment multifamilial de plus de cinq logements appartenant à un organisme sans but lucratif ou à une coopérative. Dans le cas des bâtiments détenus en copropriété divise, le plan de garantie va aussi s'appliquer à la maison unifamiliale isolée, jumelée ou en rangée, au bâtiment multifamilial de moins de quatre étages. Alors, même s'il exclut les gros immeubles en copropriété, puisque au-delà de quatre étages ça ne sera pas inclus dans le bénéfice du plan de garantie, il n'en demeure pas moins que, tel que stipulé, le plan de garantie va couvrir 90 % des bâtiments résidentiels, qu'ils soient, donc, maison unifamiliale ou qu'ils soient en copropriété. Alors, c'est donc un élargissement qui est introduit par la modification qui est apportée.

D'autre part, seule une personne morale dont l'unique objet est d'administrer les garanties financières prévues au chapitre V de la loi et ayant un établissement au Québec pourra être autorisée par la Régie, conformément à un règlement de celle-ci, à administrer un plan de garantie. Il y avait présentement confusion, très souvent, des rôles, M. le Président, confusion des genres, et les différents plans de garantie privés qui étaient administrés l'étaient souvent par ceux-là même qui devaient représenter les entrepreneurs. Alors, il est clairement stipulé, avec les modifications qui sont apportées, que le plan de garantie doit être administré par une personne morale qui est constituée pour la fin même de s'assurer de l'administration du plan. Et ça va donner pas simplement la certitude d'impartialité pour le consommateur, mais ça va aussi préserver la perception qui était tronquée d'une certaine façon, M. le Président, du fait que c'était, à l'évidence, en fait – tout au moins sur le plan légal – une confusion qui était entretenue entre des missions qui ont besoin d'être clarifiées: la mission, par exemple, de représenter des entrepreneurs dans le cadre d'une association et la mission d'administrer un plan de garantie qui a comme objectif de protéger le consommateur.

D'autre part, dans les modifications qui sont apportées par le projet de loi 99 à la Loi sur le bâtiment, l'administration de l'arbitrage sera assurée par un organisme d'arbitrage privé reconnu par la Régie, et les qualités, les conditions et les renseignements requis d'un tel organisme seront prévus dans la loi. C'est un mécanisme important, parce que, dorénavant, avec l'adoption du règlement, qui devrait être publié dans la Gazette tout prochainement, le consommateur, pour se protéger, n'aura qu'à vérifier si l'entrepreneur est licencié, en fait, est détenteur d'une licence de la Régie du bâtiment, et, automatiquement, pour octroyer une licence, il devra y avoir constatation que l'entrepreneur en question est couvert par un plan de garantie. C'est donc dire que ça va simplifier les vérifications que le consommateur peut faire pour s'assurer qu'il est protégé.

Puis, d'autre part, lorsque défaut sera constaté, ou malfaçon, ou non-parachèvement des travaux, dans la mesure justement où on le verra par la subrogation, le consommateur n'aura qu'à s'adresser à un des administrateurs de plan de garantie, qui aura la responsabilité de voir à ce que l'entrepreneur général achève les travaux ou fasse les réparations jugées nécessaires. Et, s'il y a mésentente, il y aura arbitrage.

L'arbitrage. Il sera clairement, dorénavant, entendu que l'arbitre est choisi selon toutes les règles de l'art, de la transparence et de l'impartialité. Alors, ce sont là des modifications qui sont apportées au projet de loi 99.

(12 h 20)

En plus, M. le Président, l'entrepreneur, accrédité par le processus d'accréditation dont je vous parlais tantôt, pour obtenir sa licence d'entrepreneur, sera tenu de réparer tous les défauts de construction couverts par un plan de garantie. À son défaut, l'administrateur du plan devra procéder aux réparations, la subrogation s'opérant alors en sa faveur. Alors, c'est donc dire que le consommateur n'aura plus à courir après des sous-traitants, comme c'est le cas maintenant, et à s'épuiser dans ce mouvement qui peut être à l'infini. Ce sera clairement dit que l'entrepreneur général est tenu de réparer les travaux de construction – lui-même a, ensuite, ses propres recours civils – mais, en même temps, à défaut que l'entrepreneur général satisfasse à cette obligation, eh bien, l'administrateur du plan aura à procéder, donc, aux réparations. À ce moment-là, c'est le phénomène de subrogation qui se trouve à opérer.

Ça aura un effet important, je pense, entre autres, M. le Président, pour autorégulariser l'industrie dans le secteur résidentiel, notamment. Ça aura un effet important du fait que les entrepreneurs qui récidivent – et qui sont peu nombreux, là, mais qui ternissent la réputation de leur industrie – évidemment, deviendront des risques importants pour les administrateurs de plans. Si tant est que ça se répétât, ils auraient sans doute difficulté à trouver un plan de garantie pour les couvrir, auquel cas, on peut penser que, petit à petit, l'autorégularisation va permettre, à l'intérieur de cette industrie, d'écarter ceux des entrepreneurs qui, manifestement, comme on le dit dans le langage courant, botchent leur ouvrage. C'est quand même considérable. Selon certaines études réalisées par des associations d'entrepreneurs, c'est presque le tiers des travaux réalisés qui exigent des réparations. Alors, la qualité totale, c'est, entre autres, de s'assurer que le travail qui est fait est bien fait et que le consommateur, l'acheteur de maison neuve, n'a pas, si vous voulez, à courir ou à dépenser de l'argent pour, finalement, obtenir un produit qu'il aurait dû avoir immédiatement.

Alors, donc, ce phénomène de subrogation et d'accréditation d'entrepreneurs par les administrateurs de plans de garantie sans que l'État, pour autant, s'en mêle, il s'agit, finalement, d'un marché privé de plans de garantie. Ça, c'est un choix qui est important. L'État a décidé de protéger le consommateur et d'intervenir, mais pas de gérer le plan de garantie, puisqu'il y aura un appel de soumissions et, en fonction de certains critères bien établis, de règles du jeu qui sont très, très claires sur les cautionnements et sur les règles de solvabilité, il y aura donc différents administrateurs de plans de garantie et un marché, donc, pourra se réaliser et une meilleure, finalement... C'est un peu comme pour l'assurance automobile, moins il y a d'accidents, normalement, en tout cas du moins, les primes devraient diminuer – à défaut de ce qu'on a connu dans les années précédentes, où une partie des surplus ont été détournés – bien, c'est un peu la même chose: plus il y aura d'autorégularisation, donc moins de réparations à faire, moins de malfaçons à corriger, et, évidemment, plus les primes pourront baisser, parce qu'il n'y aura pas de frais encourus pour effectuer les travaux.

Alors, c'est donc une sorte d'assainissement de l'industrie elle-même, je pense, qui va en résulter. Ça va être un effet bénéfique de ce projet de plan de garantie obligatoire des maisons neuves.

D'autre part, M. le Président, le projet de loi 99 introduit également une modification à la Loi sur le bâtiment pour s'assurer que les comptes de réserves d'un administrateur de plan de garantie obligatoire seront incessibles et insaisissables, puisque ces comptes de réserves sont constitués des sommes versées pour les fins de la protection des consommateurs.

Et, finalement, le projet de loi a été modifié de telle façon qu'il donne satisfaction aux représentations de l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction, qui souhaitait qu'il y ait publication de 45 jours, comme le prévoit notre règlement général. Alors, nous avons retiré du projet de loi 99 l'article qui nous permettait de précipiter, d'une certaine façon, l'application du plan de règlement et nous convenons donc qu'il y aura cette publication de 45 jours qui va permettre, encore une fois, d'examiner à fond le plan de garantie.

Alors, M. le Président, peut-être simplement un mot en terminant pour vous dire qu'il y a un très long historique des consultations qui ont été menées dans ce dossier du plan de garantie dans le bâtiment résidentiel neuf. Tantôt, avec raison, j'en félicitais l'équipe de la Régie du bâtiment. Je voudrais également vous signaler que deux personnes au cabinet de l'Emploi y ont consacré plusieurs mois. En fait, il s'agit de M. Jean-Roch Boivin et d'André Gravel, qui ont vraiment fait un travail exceptionnel. En fait, je le dis parce que cela m'est souvent répété sur le terrain.

Et les associations consultées sont nombreuses. Pensez que plusieurs échanges ont eu lieu à différentes occasions avec l'Association des consommateurs du Québec, l'Association des consommateurs du Canada, l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction, l'ACEF de l'est de Montréal, l'ACEF de Lanaudière, l'Association des syndicats de copropriété du Québec. Depuis 1994, une seconde ronde de consultations avait été menée également et puis, en 1995 également, des consultations ont eu lieu avec l'Ordre des ingénieurs et architectes du Québec, des associations d'organismes municipaux, des associations de propriétaires de bâtiments, les syndicats concernés, la Chambre des notaires, le Protecteur du citoyen, l'Office de la protection du consommateur. La conviction qu'on en a, là, M. le Président, c'est que c'est vraiment un projet de loi qui était mûr et qui avait subi l'épreuve de la consultation.

Alors, nous en sommes fiers parce qu'il y a longtemps qu'il en était question et nous pensons que c'est là une réussite qui mérite d'être soulignée. Il s'agit à la fois d'une initiative qu'avait prise le gouvernement précédent et que nous réalisons maintenant. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Emploi. M. le leader adjoint, est-ce que je dois mettre aux voix immédiatement? Non?

M. Boisclair: Non, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader adjoint, je vous cède la parole.

M. Boisclair: C'est ça. À ce moment-ci, plutôt, pour permettre à la critique de l'opposition de faire sa réplique – qu'elle ne pourra faire, me dit-on, dans les minutes qui viennent – je ferais motion pour ajourner le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, l'article 19 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi 103


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les édifices publics, et je dois obtenir un consentement pour déroger à l'article 253 du règlement prévoyant que le dépôt du rapport et sa prise en considération doivent avoir lieu à une séance distincte. Y a-t-il consentement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement.

Alors, je revois Mme la ministre, qui est toute prête à prendre la parole. Je vous cède la parole, Mme la ministre de l'Emploi.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, le projet de loi 103, qui est soumis à l'attention de l'Assemblée nationale, modifie la Loi sur la sécurité dans les édifices publics. Il faut comprendre que l'essentiel des dispositions qu'on retrouve dans le projet de loi 103 consiste à abroger des articles vétustes et archaïques qui datent du début du siècle passé.

(12 h 30)

M. le Président, en 1928, à Montréal, il y a eu un incendie très important dans un cinéma, le cinéma Laurier, suite à quoi un certain nombre de dispositions – parce que c'était une catastrophe, je crois, 77 personnes sont décédées et il y avait beaucoup d'enfants parmi elles – législatives étaient adoptées, mais qui sont vraiment dépassées maintenant du fait des changements technologiques que l'on a connus et puis du fait aussi de l'adoption d'un règlement sur la sécurité dans les édifices publics en 1971. Donc, pour les bâtiments déjà existants, il y a un règlement qui vient tout prévoir et puis, pour les bâtiments à construire, c'est le Code national du bâtiment qui prévoit tout. Alors, c'est donc dire que cette Loi sur la sécurité dans les édifices publics contenait vraiment des articles qui étaient complètement archaïques. Je ne vous en ferai pas lecture, mais certains de ces articles-là, à leur face même, sont dépassés. Alors, il s'agit essentiellement de faire du ménage là-dedans et puis de les supprimer.

D'autre part, la loi requérait aussi des propriétaires d'édifices publics d'obtenir un certificat d'inspection puis de l'afficher, et ça donnait un faux sentiment de sécurité au public de penser que l'état des lieux, à cause du certificat affiché, était le même que lorsque l'inspection s'était faite. Alors, comme il y a déjà des dispositions très concrètes qui obligent en tout temps le propriétaire d'un édifice public à se responsabiliser par rapport à la sécurité, alors on a retiré ces dispositions d'affichage et de certificat d'inspection. Ça ne signifie pas que la Régie du bâtiment n'a pas une responsabilité d'inspection périodique, ça signifie simplement que le certificat n'est pas requis puis son affichage ne l'est pas. Ça n'enlève rien à la responsabilité du propriétaire de l'édifice public par rapport à la sécurité, mais ça enlève un faux sentiment de sécurité que, parce que le certificat était affiché, tout était sous contrôle.

Alors, c'est là, je pense, l'essentiel du projet de loi 103. Ça va donc épurer de la loi une série de dispositions dépassées, désuètes et inutiles et ça va même nous permettre de retirer des dispositions de la loi qui, si elles étaient appliquées, pourraient même compromettre la sécurité du public. D'autre part, ça n'enlève pas la responsabilité des propriétaires d'assurer la sécurité du public, mais ça vient déréglementer ce qui, dans le fond, n'apparaissait pas, M. le Président, comme pertinent.

Alors, voilà l'essentiel du projet de loi 103. Ça élimine un fardeau, qui est celui, pour le propriétaire, de détenir un certificat d'inspection, mais ça n'élimine pas sa responsabilité d'assurer la sécurité. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Emploi. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Pour les mêmes motifs, M. le Président, je ferais motion pour ajourner le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Boisclair: Je vous demanderais de suspendre les travaux, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, nous allons suspendre les travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 36)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Mmes, MM. les députés, si vous voulez bien vous asseoir, l'Assemblée va reprendre ses travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Veuillez appeler l'article 17 du feuilleton, s'il vous plaît.


Projet de loi 99


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 17, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment. Alors, je suis prêt à entendre le prochain ou la prochaine intervenante sur ce projet de loi. Je vais reconnaître Mme la députée de Saint-François. À vous la parole, Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Il s'agit d'un projet de loi qui permet la mise en vigueur d'un plan de garantie obligatoire pour la construction de maisons neuves. Bien sûr, c'est un plan de garantie qui est en demande depuis fort longtemps. D'ailleurs, le Parti libéral avait déjà travaillé à ce plan de garantie. Alors, on est très heureux de voir que le gouvernement avec, bien sûr, la Régie du bâtiment ont poursuivi dans la même veine, et c'est un plan qui va permettre d'aider les consommateurs pour tout défaut de construction.

Alors, les entrepreneurs en construction, entre autres, devront être accrédités par l'administrateur d'un plan de garantie et, ce qui est intéressant, c'est que la garantie est transférable et s'attachera au bâtiment et non pas à l'acquéreur. Le consommateur continuera aussi de bénéficier de la couverture du plan de garantie même si l'entrepreneur général disparaît ou encore fait faillite ou change de nom. Ce qui est intéressant aussi dans ce projet de loi, c'est la façon expéditive avec laquelle on peut en arriver à un règlement, et surtout que ce règlement se fera pour la réparation des travaux... ou l'amélioration, non pas nécessairement au niveau d'une somme d'argent, à moins, bien sûr, que ce soit pour couvrir, par exemple, soit les frais de déménagement ou de relocalisation ou quoi que ce soit. Donc, en gros, c'est un projet de loi avec lequel nous sommes d'accord.

Ce projet de loi, comme tel, bien sûr, à sa face même, n'est pas tellement volumineux par rapport à toute la réglementation qui suivra ce projet de loi. C'est dans la réglementation qu'on pourra comprendre véritablement le plan de garantie, mais je sais que le règlement sera prépublié dans la Gazette officielle . On a apporté une modification à l'article 9 du projet de loi pour permettre la prépublication, ce qui n'était pas prévu. Donc, ça va permettre, bien sûr, à tous les intéressés de l'examiner et de faire valoir tous les points de vue, s'il y a lieu, et de le bonifier dans le cas contraire.

Alors, donc, M. le Président, l'ensemble du projet de loi nous paraît équilibré et pourra faire l'objet, comme je le mentionnais, d'améliorations, s'il y a lieu, entre la prépublication et la publication. Donc, je suis d'accord avec le projet de loi, M. le Président. Je n'ai pas d'autres commentaires.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce rapport de la commission? Alors, le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur le bâtiment, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Landry (Bonaventure): Merci, M. le Président. Je vous prierais, M. le Président, d'appeler l'article 19.


Projet de loi 103


Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 19 de notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les édifices publics. Je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant sur ce rapport de commission. Alors, je vais céder la parole à Mme la députée de Saint-François. À vous la parole, Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Il s'agit d'un autre projet de loi qui ne contient que cinq articles. C'est un projet de loi qui, surtout, en est un de déréglementation; bien sûr qu'on ne peut pas être en désaccord avec ce projet de loi. En plus de ça, je pense que ce qui était important, c'était de s'assurer que lorsqu'on parle d'éliminer les exigences relatives à l'obligation pour les propriétaires de détenir des certificats d'inspection pour certaines catégories d'édifices publics, on soit toujours exigeant pour la sécurité du public.

Suite aux questions qu'on a posées à la ministre en commission parlementaire hier, c'est-à-dire lors de l'étude article par article, elle nous a fourni toutes les explications nous démontrant que, bien sûr, si on est moins exigeant au niveau du certificat, on le sera tout autant au niveau de la sécurité. Et, dans les circonstances, M. le Président, nous sommes d'accord avec le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi?

M. Landry (Bonaventure): M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bélanger): M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Landry (Bonaventure): ...est-ce qu'il serait possible de suspendre les travaux quelques instants?

Le Vice-Président (M. Bélanger): Oui, M. le député de... Est-ce que je comprends qu'il n'y a pas d'objection à ce que je suspende quelques instants? Je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 10)

(Reprise à 15 h 15)

Le Vice-Président (M. Bélanger): MM. les députés, vous pouvez pendre place. Nous allons continuer nos travaux.


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les édifices publics, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Article 13 de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 120


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 13, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 237 du règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Consentement. Alors, M. le ministre des Affaires municipales, à vous la parole.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais remercier l'opposition de nous donner le consentement pour procéder à l'étude du principe de ce projet de loi. Je soumets à cette Assemblée le projet de loi n° 120, qui est intitulé Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec, afin qu'on en adopte le principe, pour l'instant en tout cas. Ce projet de loi a pour but de rendre obligatoire l'utilisation du formulaire de bail de la Régie du logement lors de la conclusion d'un bail d'habitation. Pour bien comprendre le sens des modifications proposées, je crois qu'il est utile de rappeler les objectifs poursuivis par la législation dans le domaine du louage d'habitations.

Tout d'abord, M. le Président, le logement étant considéré comme un bien essentiel, le législateur québécois a jugé nécessaire d'assurer un équilibre dans les relations propriétaire-locataire et il est intervenu à quelques reprises au fil des ans afin de protéger le droit au logement.

En 1973, une réforme majeure du droit communautaire, si on peut s'exprimer ainsi, a d'abord permis d'établir le principe du droit au maintien des locataires dans les lieux loués et édicté certaines règles auxquelles les parties ne peuvent déroger. Locataire et locateur étaient et sont toujours libres de convenir, bien sûr, d'autres obligations, mais celles-ci ne peuvent jamais aller à l'encontre de ces premières prescriptions qui résument l'essentiel des droits et des obligations du locateur et du locataire. Une nouvelle disposition du Code civil du Bas-Canada crée alors l'obligation pour le locateur de remettre au locataire un formulaire de bail reproduisant ces mentions prescrites par règlement selon un modèle préétabli.

En 1980, la Régie du logement a vu le jour, on a vu naître cette Régie. Le Québec a donc franchi une étape cruciale dans l'évolution de la législation du droit résidentiel à l'instigation de l'un de mes prédécesseurs, qui était à l'époque M. Guy Tardif.

La Régie a pour mission d'informer adéquatement les parties à un bail de leurs droits et obligations respectifs et de favoriser la conciliation entre les parties et de trancher les litiges au besoin. L'exigence de reproduire des mentions prescrites par règlement dans tout formulaire de bail ou, dans le cas d'un bail verbal, de remettre un écrit concernant ces mentions est alors reconduite, et elle fait l'objet d'une disposition du Code civil du Québec en 1991.

Comme je l'ai mentionné, le contenu du bail est dans une large mesure prédéterminé par la loi. Mais cela ne suffit pas. Encore faut-il s'assurer que les règles de droit sont connues et diffusées et que les parties distinguent clairement les clauses contractuelles obligatoires des clauses facultatives. Jusqu'en 1992, tant qu'il a été possible à l'État d'offrir – gratuitement, d'ailleurs – le formulaire de bail de la Régie du logement, cet objectif a été largement atteint. Mais, depuis que les propriétaires doivent défrayer eux-mêmes le coût du formulaire, les problèmes se multiplient. De nombreux formulaires sont apparus sur le marché ainsi que de nombreux baux maison. Trop souvent, il appert que la loi ne soit pas respectée lorsqu'il s'agit d'un formulaire non conforme. En effet, des mentions obligatoires ne sont pas reproduites ou sont modifiées, et de multiples clauses qui apparaissent abusives ou déraisonnables, voire illégales dans certains cas, sont imprimées. Il arrive donc que le locataire ne puisse distinguer la partie négociable de celle qui est obligatoire. Il se trouve alors face à un véritable contrat d'adhésion et il lui est impossible de connaître sa marge de manoeuvre.

(15 h 20)

Le Protecteur du citoyen, pour sa part, s'est joint aux nombreux citoyens et citoyennes de même qu'aux représentants d'associations de défense des droits des locataires qui dénoncent cet état de fait, et ce, depuis un bon moment. Cette situation doit être corrigée. Elle génère des conflits et crée de l'insécurité non seulement chez les locataires, mais aussi chez les propriétaires, qui doutent de la légalité des formulaires qui leur sont offerts. Le gouvernement a donc la responsabilité d'intervenir afin de protéger les droits des parties en présence.

Au moment de la négociation d'un bail, le locataire est souvent vulnérable, son premier intérêt étant de bien se loger ou de bien loger sa famille. Or, nous pouvons nous assurer que la nouvelle relation entre propriétaires et locataires s'engage sur une base correcte, c'est-à-dire équitable et légale, en utilisant donc un formulaire de bail qui renseigne adéquatement les parties sur le droit qui va les gouverner. Ce projet de loi que nous déposons aujourd'hui a donc pour but de prévoir un pouvoir réglementaire afin de rendre obligatoire l'utilisation du bail produit par la Régie du logement. Il ne vise pas, M. le Président, à empêcher d'autres conventions entre les parties, en autant que celles-ci soient permises par la loi. La règle de droit n'est pas changée du tout sur ce plan. Il sera toujours loisible d'ajouter aux clauses obligatoires, et, en ce sens, le contenu du bail constitue un minimum et non un maximum. Pour être bien clair, parce qu'il y a des citoyens qui pourraient mêler cela et interpréter que le bail obligatoire que nous suggérons par cette législation ne permet en aucun temps d'ajouter des clauses facultatives... Dans le cas d'un bail verbal, un écrit devra toujours être remis dans les 10 jours de la conclusion du bail, en utilisant le formulaire produit par la Régie.

L'article 1 du projet de loi propose donc des modifications à l'article 108 de la Loi sur la Régie du logement afin de donner au gouvernement le pouvoir de prescrire par règlement l'utilisation obligatoire du bail de la Régie du logement ou de l'écrit produit par elle suite à une entente verbale et d'en fixer le prix de vente.

Quant à l'article 2, il modifie l'article 1895 du Code civil du Québec dans le même sens. Il y est prévu que l'utilisation d'un bail non conforme pourra être sanctionnée au civil par une ordonnance d'exécution en nature et en dommages et intérêts, sans pour autant entraîner la résiliation du bail.

Les modifications proposées, M. le Président, s'inscrivent dans la continuité de toutes les interventions législatives antérieures en matière de bail résidentiel. Elles s'imposent pour assurer l'efficacité des règles de fond et la sauvegarde des intérêts de chacune des parties à un bail d'habitation.

M. le Président, on a vu une instabilité s'instaurer depuis qu'on a permis, précisément, à plusieurs entreprises de commencer à bâtir toutes sortes de formules de bail, et le citoyen n'est plus en mesure, dans bien des cas, de se défendre adéquatement, parce qu'il ne se retrouve pas. Ce n'est pas pareil d'une ville à l'autre, d'un propriétaire à l'autre. Il y a une multitude de formules et il y a des gens qui sont en train de faire une industrie de complexité dans ce domaine-là, si vous me permettez l'expression. C'est pourquoi cette simple loi, très brève, je voudrais la présenter en insistant pour que l'ensemble de l'Assemblée nationale donne son consentement unanime pour qu'on puisse modifier pour la plus grande protection du locateur et du locataire.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viau, porte-parole de l'opposition officielle en matière d'habitation. À vous la parole, M. le député.


M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Je vous promets d'être aussi bref que le ministre responsable de l'habitation. Et je dois vous dire, M. le Président, que, principalement après avoir écouté le ministre, je n'ai presque aucun commentaire à faire sur son discours, excepté que, lorsqu'on nous a présenté au feuilleton ce projet de loi, qui s'intitule la Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec, franchement, je m'attendais à un projet de loi qui aurait contenu beaucoup plus d'articles que trois articles, M. le Président. Parce que, au fil de la dernière année, on a entendu ici, en cette Chambre, en commission parlementaire, qu'au niveau... que ça soit des propriétaires, des locataires, il y a des problèmes énormes, particulièrement au niveau de la Régie du logement. Et alors, moi, je m'attendais, pas nécessairement que le ministre responsable de l'habitation, M. le Président, arrive avec une réforme majeure, mais, au moins, suite à ses engagements, à une réforme assez importante. Alors, je dois dire que lorsque j'ai pris connaissance du projet de loi tel quel – puis je l'ai lu – bien, je me suis demandé c'est quoi, ça, M. le Président. C'est quoi? Alors, j'ai regardé et j'ai fait un peu le retour en arrière, justement, sur les problèmes qui préoccupent plusieurs citoyens et qui préoccupent le ministre, parce qu'il l'a dit lui-même au niveau de la commission parlementaire, particulièrement au niveau des crédits au printemps dernier.

À titre d'exemple, M. le Président, on sait qu'au Québec il y a 86 000 000 $ par année qui sont perdus par des personnes qui ne paient par leur loyer; 86 000 000 $, M. le Président, c'est beaucoup d'argent. Et c'est des pertes pour les propriétaires, et c'est aussi une perte considérable pour le gouvernement, qui ne va pas chercher des impôts sur ces 86 000 000 $ là, M. le Président. Alors, je m'attendais que le ministre arrive avec une solution, comme il l'avait mentionné, justement, à l'étude des crédits. Je m'attendais aussi, M. le Président, qu'on aurait donné suite au comité ministériel qui avait reçu la responsabilité, justement, de regarder, au niveau des prestataires de l'aide sociale, de quelle façon le gouvernement pouvait s'assurer qu'avec ce groupe de la société on puisse s'assurer au moins que ces gens-là qui reçoivent de l'argent du gouvernement, au moins, on s'assure qu'ils paient le loyer qu'ils occupent, M. le Président. Alors, je suis un peu déçu, de ce côté-là, qu'on n'ait rien entendu du côté du ministre.

L'autre chose, M. le Président, qui me préoccupe, c'est cette question de l'obligation. Je suis d'accord avec le fait qu'il est très important que les gens, que ce soient les propriétaires ou les locataires, aient devant eux exactement tous leurs droits et tous les privilèges concernant un bail, sauf que la question de l'obligation d'avoir ce morceau de papier, le bail, et que le gouvernement en fixe le prix, le prix... Si ma mémoire est bonne, présentement il nous coûte 2 $, M. le Président, parce qu'il est disponible tout partout, 2 $. J'aimerais, de la part du ministre, nous assurer qu'une fois que le gouvernement va avoir le monopole de l'impression et de la distribution, que le gouvernement s'assure, que le ministre nous donne des garanties à l'effet que ça ne devienne pas une taxe déguisée. On se trouve dans une situation où... maintenant, que ce formulaire-là qui est à 2 $ – et je pense que tout le monde peut dire que c'est raisonnable – tout d'un coup on puisse l'amener à 10 $, M. le Président. Vous me dites: Ce n'est pas grand chose. Mais si on fait un peu les calculs à travers le Québec, on peut estimer qu'il y a à peu près 1 200 000, 1 500 000 locataires. À deux copies chaque, ça fait 3 000 000, ça; 3 000 000, à 10 $ chaque, ça fait beaucoup d'argent au niveau du gouvernement. Je pense que si le gouvernement a besoin d'aller chercher de l'argent, ce n'est certainement pas de cette façon-là, M. le Président.

C'est tout simplement les préoccupations que, de ce côté-ci de la Chambre, on avait, mais j'aurai quelques petites questions plus techniques qu'on va aborder au niveau de la commission plénière, M. le Président. Alors, c'est à peu près tout. J'aimerais que le ministre puisse répondre au moins sur la question: Qu'entend-t-il faire pour s'assurer que le 86 000 000 $ qui est perdu en loyers au Québec... Quelles sont les mesures qu'il entend prendre? Où est rendu le comité au niveau des prestataires de l'aide sociale et toute la question du loyer, M. le Président? Et j'aimerais avoir de lui une garantie que ce 2 $ pour le formulaire ne devienne pas une forme d'impôt déguisé pour le gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Viau.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, en réplique.

Le Vice-Président (M. Bélanger): M. le ministre des Affaires municipales, en réplique.

(15 h 30)


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Réplique très courte. Tout d'abord, pourquoi ne pas être intervenu au niveau de la récupération des loyers en souffrance? C'est un peu ça, la question de base. C'est que, au moment où on se parle, je n'ai pas reçu le rapport du comité spécial qui est sous la présidence de la ministre de la Sécurité du revenu. Mais mon ministère y participe. J'aurais pu, avant de déposer cette formule de bail obligatoire, attendre cela, mais je dois vous dire que c'est intéressant qu'on l'ait immédiatement, parce qu'on se rend compte que, plus ça va, plus ça se gâte. Vous savez qu'on fait des efforts de gestion à l'intérieur de chacune des structures, et la Régie a beaucoup plus de travail, précisément à cause de cette diversité de formules imprimées partout, puis avec des petites clauses en petits caractères qui changent, puis dont certaines – parce qu'on en a des exemplaires à la Régie – sont carrément illégales par rapport aux exigences de base. Donc, on veut au moins régler ça le plus tôt possible. La deuxième question, donc, à ce moment-là, viendra dès que le comité aura produit son rapport.

En ce qui regarde les pertes de 86 000 000 $ ou à peu près, j'espère que... En tout cas, en ce qui me concerne, dès que j'aurai le rapport de ce comité-là, je demanderai à ma collègue de transposer dans un projet de loi immédiatement... ou peut-être seulement au niveau réglementaire, on verra. J'ignore quelles seront les recommandations du rapport, mais on y verra immédiatement après.

L'autre, l'obligation. Bien, l'obligation, je l'ai expliquée un peu. L'obligation de faire nous crée un allégement, sur le plan du travail, pour la Régie, et une plus grande sécurité, une plus grande protection pour les deux parties, parce qu'elles sont sûres qu'elles auront en main une formule de bail complètement légale, avec les exigences de base. Quant au coût, je croyais que c'était 1,99 $, on m'a dit 2 $. Tant mieux s'il y a seulement 0,01 $ de différence, on ne s'obstinera pas longtemps. Mais, n'étant pas habitué à ce genre de vice habituel, je n'ai pas pensé qu'on pouvait aller chercher de l'argent par là. On n'est pas habitués à ça, nous autres.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: C'est le coût payant, c'est le coût que ça coûte, c'est à peu près 2 $, puis on n'a pas l'intention d'aller chercher de l'argent par là. Arrangez-vous pas pour essayer de nous inculquer vos procédés qu'on a rejetés. Merci, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Le principe du projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré en commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec.

(Suspension de la séance à 15 h 33)

(Reprise à 15 h 42)


Commission plénière

M. Bélanger (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec. Nous allons donc entreprendre nos travaux par les remarques préliminaires. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Chevrette: M. le Président, étant donné que c'est tout frais, nos exposés, les deux brillants exposés du député de Viau et de votre humble serviteur, nous allons, quant à moi, commencer immédiatement l'étude article par article.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau, pour vos remarques préliminaires.

M. Cusano: Oui, M. le Président, complètement d'accord, sauf que le ministre doit faire bien attention aux mots qu'il emploie. Je ne sais pas si «brillant», dans ce cas-ci, c'est un compliment ou bien une satire.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre des Affaires municipales.

M. Chevrette: Oh! l'heure n'est pas aux insultes, l'heure est à la veille de Noël, vous savez, à la grande réconciliation.


Étude détaillée

Le Président (M. Bélanger): Alors, l'article 1 du projet de loi, j'en fais la lecture. L'article 108 de la Loi sur la Régie du logement est modifié:

1° par le remplacement, dans les première et deuxième lignes du paragraphe 2° du premier alinéa, de ce qui suit: «1652.8 du Code civil du Bas Canada» par ce qui suit: «1913 du Code civil du Québec»;

2° par le remplacement, dans les première et deuxième lignes du paragraphe 3° du premier alinéa, de ce qui suit: «1658.15 à 1658.17 du Code civil du Bas Canada» par ce qui suit: «1952 et 1953 du Code civil du Québec»;

3° par le remplacement, dans les deuxième et troisième lignes du paragraphe 5° du premier alinéa, de ce qui suit: «1651.1, 1651.2 et 1658.21 du Code civil du Bas Canada» par ce qui suit: «1895 et 1896 du Code civil du Québec et, dans le cas du bail ou de l'écrit visé au premier alinéa de l'article 1895 du Code civil du Québec, prescrire l'utilisation obligatoire du formulaire de bail de la Régie du logement ou de l'écrit produit par la Régie et en fixer le prix de vente»;

4° par le remplacement, dans les deuxième et troisième lignes du paragraphe 6° du premier alinéa, de ce qui suit: «1650 à 1665.6 du Code civil du Bas Canada» par ce qui suit: «1892 à 2000 du Code civil du Québec».

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Chevrette: Moi, à moins qu'il n'y ait des questions précises... C'est très technique, donc je vais demander plutôt au député de Viau s'il a des questions pointues.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Sur l'article 1, M. le Président, c'est de la concordance, à ce que je vois. Simplement, justement, au niveau de l'article 3, mais je vais revenir un peu plus tard sur des questions qui vont être reliées à ça. Il n'y aura pas de problème. Alors, c'est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Donc, l'article 1 est adopté. Article 2. L'article 1895 du Code civil du Québec (1991, chapitre 64) est modifié:

1° par la suppression, dans le premier alinéa, des mots «et reproduisant les mentions prescrites par les règlements pris par le gouvernement»;

2° par l'addition, à la fin du premier alinéa, de la phrase suivante: «Le bail ou l'écrit doit être fait sur le formulaire dont l'utilisation est rendue obligatoire par les règlements pris par le gouvernement.»;

3° par le remplacement, dans le dernier alinéa, des mots «lui remettre l'exemplaire du bail ou de l'écrit prescrit» par les mots «se conformer à ces prescriptions».

Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'aurais un amendement à suggérer. Nous voulons revenir à une prescription déjà existante au Code civil, donc je vous propose comme amendement de supprimer le paragraphe 1° de l'article 2 et je vais demander au président de la Régie d'expliquer exactement le sens...

Le Président (M. Bélanger): Je vous prierais de transmettre l'amendement à la table.

M. Chevrette: Est-ce que vous voulez en donner une copie...

Une voix: Oui. J'en ai donné à tout le monde.

Le Président (M. Bélanger): Alors, M. le président de la Régie, est-ce que vous voulez vous identifier pour les fins de l'enregistrement?

M. Dubé (Rodrigue): Oui. Rodrigue Dubé, président de la Régie du logement.

Le Président (M. Bélanger): M. Dubé.

M. Dubé (Rodrigue): L'article 1895 prévoit, que ce soit sous forme de bail écrit ou de bail verbal, que le locateur, le propriétaire, est obligé de remettre au locataire copie du bail, ou encore copie des mentions obligatoires. Dans un premier temps, lorsque nous avons examiné la question de rendre le bail de la Régie obligatoire, on avait cru qu'on pouvait retirer la mention, ici, «et reproduisant les mentions prescrites par les règlements pris par le gouvernement». Sauf que, pour assurer une concordance entre le Code civil et la Loi sur la Régie du logement, nous suggérons de ne pas supprimer ce bout de phrase.

Le Président (M. Bélanger): Merci. M. le député de Viau.

M. Cusano: O.K. Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Alors, l'amendement, tel que proposé par le ministre des Affaires municipales, se lit comme suit: Supprimer le paragraphe 1° de l'article 2. Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Bélanger): Adopté. Est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est adopté?

M. Cusano: Un instant. Au niveau...

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Oui. Simplement une question, M. le Président. Au niveau... Je mentionnais, dans mon discours de deuxième lecture, la question de monopole au niveau du gouvernement et le fait... Je suis très heureux d'avoir entendu le ministre dire que ce n'était pas dans ses intentions, justement, de se servir du coût de la production de ce bail pour augmenter le revenu du gouvernement. C'est bien ça que j'ai entendu.

Ma question est un peu au-delà de ça, mais y est reliée, à savoir: Puisqu'on est rendu à l'ère des communications, de l'informatique qui est presque dans tous les foyers, est-ce que le ministère ou la Régie a prévu, justement pour éliminer certains coûts à certains individus, qu'on puisse avoir ce bail, ce formulaire sur disquette informatisée?

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Non. Je vais demander s'il y a des projets en ce sens à la Régie, mais je dois vous dire que l'argent est si rare qu'on a de la difficulté à s'équiper. Et, au-delà de ce fait-là, il y a beaucoup d'addendas, parce que toute la partie facultative, n'oublions pas qu'elle est entre l'individu locateur et l'individu locataire, et que ce serait... Je me demanderais où on pourrait avoir un guichet unique dans chacune des régions pour que le locateur et le locataire aillent signer leur bail...

M. Dubé (Rodrigue): Sur disquette.

M. Chevrette: ...sur disquette. Ce serait assez complexe. Mais il y a beaucoup de données sur informatique, présentement. D'autre part, on sait que la Régie sait le nombre de formulaires qui circulent; on le sait à peu près. On sait quels sont ceux qui sont illégaux, selon nous – en tout cas, selon nos prétentions légales – par rapport à ceux qui le sont. Et ce n'est pas pour rien qu'on est intervenu, mais je ne crois pas, pour répondre à votre question, que, dans un avenir très prévisible...

M. Cusano: ...

M. Chevrette: Pardon?

M. Cusano: Peut-être que le ministre...

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Merci. Peut-être que le ministre n'a pas tout à fait compris ce que je voulais dire. C'est qu'il est possible, comme vous-même vous le vivez tous les jours à votre bureau de leader, par exemple, vous avez plusieurs formulaires, ici, de l'Assemblée nationale, qui sont sur disquette informatisée. Alors, au lieu d'avoir une pile de documents, votre personnel, M. le ministre, lorsqu'ils ont à remplir un formulaire, ils le tapent sur informatique et le document est imprimé, document approuvé par l'Assemblée nationale. Ce n'est pas un document qui a été inventé par un député quelconque. Approuvé par l'Assemblée nationale. Alors... Et on peut tout mettre, là-dessus, M. le ministre, c'est-à-dire même les ajouts. Il peut y avoir des espaces pour les ajouts et ainsi de suite, il n'y a aucun problème.

(15 h 50)

Alors, ma question, c'est à savoir si, du côté de la Régie du logement, pour éviter des coûts additionnels... À titre d'exemple, un propriétaire qui a 400 logements. Deux copies de bail par logement, ça fait 800 baux. S'il y avait une disquette disponible qui contenait le document en question... et la seule chose que les individus font, c'est de le taper. Puis, à la fin du compte, une fois qu'il est tapé, les deux parties signent, comme pour tout autre document. C'est tout simplement dans le but d'économiser de l'argent du côté de la personne qui a beaucoup de logements à louer. Deuxièmement, je pense aussi au côté environnemental. Il y aurait sûrement un petit impact, je ne dis pas un gros impact, sur le gaspillage de papier qu'on fait à droite puis à gauche.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Voici ce qui arrive. Je saisis mieux le sens de la question. Mais, si on l'a sur disquette et puis qu'on le vend 2 $ l'unité, il faut avoir des points de vente pareil. Actuellement, avec la formule que nous avons, on me dit qu'il y a environ 1 200 points de vente au Québec, soit dans des pharmacies, dans certains dépanneurs, dans certaines caisses pop, dans les 28 bureaux de la Régie. Mais il faudrait installer un système. Ça change complètement les habitudes des citoyens par rapport à ce qui existe, d'abord. Puis, où est-ce qu'ils iraient se procurer... Parce que je suppose que ces points de vente devraient avoir une disquette. Et, lorsque quelqu'un se présente, bien, tu en imprimes une, deux, trois ou quatre copies, je ne sais pas combien il en veut. Parce que je ne vois pas comment, sur le plan pratique...

M. Cusano: Sur le plan pratique, M. le ministre, c'est très, très, très pratique, dans le sens... Premièrement, au niveau des points de vente, que vous vendiez du papier ou des disquettes, ça revient à la même chose. C'est que, du côté de l'utilisateur, particulièrement au niveau du propriétaire, au lieu d'aller chercher une cinquantaine de baux, il y aurait seulement une disquette qui... C'est une disquette que je demande au niveau de la Régie du logement. Vous n'avez même pas besoin de la concevoir. C'est tout simplement de transférer sur ordinateur le bail lui-même, tel quel. Ça se fait en l'espace de cinq, 10 minutes pour avoir des disquettes semblables. Alors, c'est ça que je demanderais. Le ministre ne semble pas être à l'ère technologique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Ce n'est pas une question d'être à l'ère technologique. Moi, je suis doué d'un gros GB, un gros bon sens.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Non mais, tout simplement, je veux suggérer au ministre et au président de la Régie du logement, justement, de pouvoir regarder cette possibilité. Moi, je crois que ça ne serait pas une dépense énorme de la Régie et que ça seraient des économies de papier, de temps et d'argent.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Je vais demander au président comment, concrètement, il pourrait réaliser le voeu que formule le député de Viau. Mais, à prime abord, étant donné que c'est un contrat signé entre deux parties, ça, un bail, je ne vois pas, sur le plan pratique, pratique, comment ça pourrait se faire.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Juste une explication. Je pense que le ministre semble croire qu'il va falloir, au moment où le bail est rédigé, que les deux parties soient là nécessairement. Il y a une entente verbale sur le contenu, et ainsi de suite. Alors, le propriétaire ou, même, ça peut être le locataire qui pourrait avoir ça, parce qu'il y en a beaucoup qui collectionnent toutes sortes de programmes aujourd'hui qui existent, toutes sortes de logiciels... Je voulais tout simplement lui indiquer que la seule différence, c'est qu'au lieu de remplir un morceau de papier à la dactylo ou bien à la main sur un formulaire qui est déjà fait, c'est qu'à ce moment-là le formulaire, lui, est dans l'ordinateur, n'est-ce pas, et on y entre les données. Il y a une copie qui sort avec toutes les informations et les deux parties la signent. Je ne vois pas quelle est la difficulté, là.

M. Chevrette: Je comprends, là. Je comprends ce que vous voulez dire. C'est qu'au lieu de retrouver une pile de papiers dans chacun des points de services, vous retrouveriez une disquette puis les gens ajouteraient les données que vous voulez bien ajouter sur les clauses facultatives – parce que l'objectif du bail unique, c'est d'avoir les mêmes exigences minimales de base – et que, là, tu te sers de l'imprimante puis tu sors le nouveau bail pour qu'il se signe. Ce serait une économie de papier, dites-vous, puis peut-être quelque chose de... C'est juste équiper 1 200 points de vente, je ne sais pas...

M. Dubé (Rodrigue): Il y a plus que ça, monsieur...

M. Chevrette: Allez-y.

M. Dubé (Rodrigue): Il y a plus que ça. C'est que le bail, c'est un contrat qui se situe entre deux parties. Qu'un propriétaire possède 400 logements, il va avoir 400 locataires. Et, s'il y a un problème d'interprétation du contrat, d'abord il va devoir se présenter à la Régie du logement avec son contrat. Chacun, ça lui prend une partie... Au bout de la ligne, chacun devra avoir cette question-là sur support papier.

Maintenant, permettez-moi de compléter. C'est que, si c'était sur support informatique, une des façons pour les locataires de s'y retrouver, c'est le symbole de la Régie du logement, le «crest» du gouvernement du Québec, etc., tout ça. Le locataire... Il y a des locateurs aussi qui nous appellent chez nous, qui disent: Le bail que j'ai, «c'est-u» un bail de la Régie? Parce qu'il y en a dans le moment sur le marché qui ressemblent à celui de la Régie, même couleur et autre, mais... Donc, si c'était imprimé sur imprimante, est-ce qu'il y aurait des questions de couleurs, le bleu, comme maintenant, avec le noir, etc.? Il y a ces questions-là à regarder. Mais je n'ai pas d'objection à ce que nous étudiions la suggestion et de faire rapport au ministre. Et, en temps opportun, si la technologie nous permettait d'arriver aux fins recherchées par le bail unique, comme c'est le cas dans le moment, ça nous fera plaisir de faire le travail.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Le seul problème que je vois, c'est la question des couleurs, M. le ministre. Mais, autrement, je ne vois aucun, mais aucun problème.

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: En tout cas, disons qu'à la prochaine étude de crédits je rendrai... Je vais demander à la Régie d'étudier cette possibilité, puis on en fera part aux membres de la commission parlementaire, comme on a fait aux dernières études de crédits.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que l'article 2... Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur cet article? M. le député de Viau.

M. Cusano: Oui, juste une dernière question, qui est reliée, mais pas tout à fait, M. le Président – mais, puisque le ministre est de bonne humeur: Combien de locataires y a-t-il au Québec? Combien d'appartements qui sont loués existe-t-il au Québec présentement?

M. Chevrette: Environ 1 250 000. Un peu dans les proportions que vous avez données tantôt.

M. Cusano: Que j'ai mentionnées.

M. Chevrette: Exact.

M. Cusano: Merci.

M. Chevrette: Mais ce n'est pas parce que...

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: ...je suis de bonne humeur que je ne vous l'aurais pas dit. Je suis toujours de bonne humeur, c'est vous autres qui la gâchez de temps en temps.

M. Cusano: Ah! bon.

Le Président (M. Bélanger): Est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Bélanger): L'article 3. «La présente loi entrera en vigueur à la date fixée par le gouvernement.» Alors, M. le ministre, est-ce qu'il y a des commentaires sur cet article?

M. Chevrette: Ce sera sans doute vers le mois de mai. Parce que c'est important que je vous donne une indication. C'est d'abord pour permettre à ceux qui auraient des stocks de les écouler, un. Puis il y a la prépublication, la publication et tout dans la Gazette officielle du Québec . Donc, c'est à peu près le délai que ça représente.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Oui. Merci, M. le Président. Tout simplement, on nous a remis des notes explicatives sur le projet de loi. On ne nous a pas remis une copie du bail. Alors, je présume que ça va être le même qui existe présentement, parce que, si c'est le même qui existe présentement, il n'y a aucune difficulté, j'en ai, des copies. Mais est-ce qu'il y a des changements qui sont envisagés sur le formulaire?

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: On me dit que ce sera essentiellement le même, à l'exception de quelques petits changements qui, à l'usage et à la demande des clients, vont simplifier ou modifier quelques termes. Mais, essentiellement, ça va se ressembler.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: Bon. Alors, ça m'amène à deux autres petites questions, M. le Président. Est-ce que le ministre, une fois que le nouveau bail avec les nouvelles prescriptions sera prêt, pourrait nous le déposer ici, en Chambre, ou l'envoyer aux membres de la commission particulièrement? Et je reviens à la question du prix. Vous l'avez devant vous, c'est 1,99 $, vous dites, M. le Président?

M. Chevrette: Exact.

M. Cusano: Pardon?

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Vous avez de bons yeux, M. le député de Viau.

M. Cusano: Ha, ha, ha! Oui. Est-ce que le ministre peut nous garantir que, lorsque la nouvelle version va être prête, pour le mois de mai, ça va être encore 1,99 $?

Le Président (M. Bélanger): M. le ministre.

M. Chevrette: Ça va être sensiblement ce prix-là.

M. Cusano: Non, non. Ma question: Présentement, il est 1,99 $; est-ce qu'au mois de mai il va être encore 1,99 $?

(16 heures)

M. Chevrette: À moins que le coût du papier ait bien changé... Mais l'esprit, c'est de le vendre ce qu'il vaut. C'est le coût de production.

M. Cusano: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Viau.

M. Cusano: C'est fini, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Il n'y a pas d'autres commentaires sur cet article? Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

M. Cusano: Adopté.

M. Chevrette: Je fais une motion de renumérotation.

Le Président (M. Bélanger): Elle n'est pas nécessaire, M. le ministre...

M. Chevrette: Non?

Le Président (M. Bélanger): ...puisque nous avons fait les modifications au sein du même article. Nous n'avons pas rajouté d'articles.

M. Chevrette: Ah bien! vous êtes bien gentil.

Le Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Chevrette: Adopté.

M. Cusano: Adopté.

Le Président (M. Bélanger): En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé. Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants, et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

(Suspension de la séance à 16 h 1)

(Reprise à 16 h 3)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Mmes, MM. les députés, vous pouvez vous asseoir. Nous allons reprendre nos travaux. M. le président de la commission plénière.

M. Bertrand (Charlevoix) (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec, et qu'il a été adopté avec un amendement.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le Président. Alors, ce rapport est-il adopté?

M. Chevrette: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, je demanderais le consentement du représentant de l'opposition pour procéder à l'adoption et aux écritures nécessaires par cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce qu'il y a consentement?

M. Cusano: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Qu'on appelle donc l'article 13 du feuilleton pour compléter l'étude complète du projet de loi.


Adoption

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors donc, à l'article 13, c'est toujours le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec. Alors, je comprends qu'il y a consentement, donc, à déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport de la commission. Consentement?

M. Cusano: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, nous avons été tellement explicites de part et d'autre que je considère mon devoir accompli.

Le Vice-Président (M. Bélanger): M. le député de Viau, est-ce qu'il y a des interventions?

M. Cusano: Il y a consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Il n'y a pas d'interventions.


Mise aux voix

Donc, le projet de loi n° 120, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bélanger): M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: ...je vous demanderais la suspension, une minute.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, donc, nous allons suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 5)

(Reprise à 16 h 6)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Mmes, MM. les députés, si vous voulez prendre place, nous allons continuer nos travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vous prierais d'appeler l'article 7 de notre feuilleton, en vous rappelant, M. le Président, qu'il y a eu une entente entre les deux parties pour qu'il y ait des interventions jusque vers les 16 h 30, parce que vous savez que les ministres doivent se déplacer. Compte tenu du fait que ce sont des législations qui s'adoptent assez vite, on suspendrait le débat à 16 h 30, ou vers 16 h 30, pour permettre au ministre de l'Environnement, à ce moment-là, de procéder à un autre sujet à l'ordre du jour.


Projet de loi n° 111


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): D'accord. Donc, on a appelé l'article 7 du feuilleton. À l'article 7, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Est-ce qu'il y a des interventions sur ce projet de loi? M. le député de Vimont et délégué régional pour la région de Laval, à vous la parole.


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir, effectivement, à titre de député de Vimont et, bien sûr, de délégué régional de Laval, sur ce projet de loi n° 111, qui s'intitule Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Cette loi est importante parce qu'elle signifie essentiellement la volonté politique du gouvernement du Québec, notre gouvernement, d'appuyer de façon concrète les groupes d'action communautaire. Mon intervention portera essentiellement sur l'importance de l'action des groupes à l'action communautaire dans nos municipalités, dans nos villes, dans nos régions, dans nos milieux, et également sur l'importance à la fois de mettre en place un secrétariat à l'intérieur du ministère de l'Exécutif et d'établir clairement une source de financement continu, qui sera récurrente et qui pourra, au fil des ans, augmenter.

Lors de notre dernière campagne électorale, nous avions pris un engagement de deux ordres envers les groupes communautaires. Un de ceux-ci est déjà réalisé, et le deuxième, que nous voulons toujours réaliser, est en voie de l'être. Si vous vous souvenez, nous nous étions engagés à faire en sorte que les groupes communautaires, les associations à but non lucratif – les OSBL, comme on les appelle dans le jargon – soient financés sur une base beaucoup plus stable, parce que nous avons réalisé – parce qu'ils nous l'ont dit – que les groupes communautaires, essentiellement, étant financés jusqu'à ce jour sur une base annuelle, étaient toujours, dans un premier temps, dans un état de faillite quasi perpétuelle et renouvelée. Ce qui faisait en sorte que non seulement leur financement était souvent inadéquat, mais que, comme ils étaient financés sur une base annuelle, une fois qu'ils avaient confirmé le financement de l'année en cours, ils devaient immédiatement recommencer la course aux programmes et la course au financement pour les années subséquentes. De sorte que beaucoup d'énergie à l'intérieur des groupes communautaires et des associations à but non lucratif qui donnent des services à la population... Ils devaient essentiellement mettre une très grande partie de leurs maigres ressources à la recherche perpétuelle de financement et de renouvellement de ce financement.

De sorte que le gouvernement du Québec, dans sa grande sagesse, encore une fois, a rempli son engagement électoral, et maintenant les groupes communautaires reçoivent leur financement sur une base triennale, c'est-à-dire qu'ils peuvent maintenant compter que le financement qu'ils reçoivent, qu'ils ont reçu et qu'ils recevront pour l'année fiscale 1996-1997 et les subséquentes, ils le recevront sur une période de trois ans. De sorte que les ressources qui sont financées à même ce financement pourront donner plus de services à la clientèle au lieu de toujours inévitablement devoir s'attaquer à la question du renouvellement de leur financement qui, maintenant, est récurrent sur une base de trois ans. C'était le premier engagement électoral que nous avions pris face aux groupes communautaires.

(16 h 10)

L'autre engagement fondamental et important que nous avions pris envers ces groupes d'action communautaires, c'était d'amener progressivement le financement de ces groupes à l'équivalent de 1 % du budget de fonctionnement du gouvernement du Québec. Nous n'avons pas encore atteint ce 1 %, mais le dépôt, aujourd'hui, du projet de loi n° 111 est une mesure précise, spécifique qui, le croyons-nous, va nous permettre d'atteindre ce financement.

En ce moment, selon les chiffres que nous avons reçus, on nous indique que, cette année, le financement en provenance du gouvernement du Québec, le financement direct en provenance du gouvernement du Québec est de 185 300 000 $ dans la dernière année fiscale, ce qui est un financement important. Si on ajoute à ce financement direct des ministères et secrétariats du gouvernement du Québec de 185 300 000 $ le financement des organismes gouvernementaux, soit la SQDM, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre et l'Office des personnes handicapées, nous arrivons à un grand total de 194 600 000 $.

Je peux vous dire qu'à l'intérieur de cette comptabilité nous ne retrouvons pas les ministères qui, par exemple, font transiter de l'argent, si je peux m'exprimer ainsi, par les conseils de développement régionaux. Je suis sûr que, si nous additionnions les montants d'argent qui sont donnés par les conseils régionaux de développement dans les 14 régions du Québec, ce montant d'argent, ce total-là serait amplement supérieur au 194 600 000 $ qui, en ce moment, a été versé par le gouvernement du Québec.

C'est donc plus de 200 000 000 $ qui a été versé aux groupes communautaires. Ce 200 000 000 $, je dois vous le dire, M. le Président, est sans doute l'argent public qui est le mieux utilisé par le gouvernement. Et je m'explique. À titre de députés, nous avons l'honneur de remettre directement, via nos enveloppes discrétionnaires, nos petites enveloppes discrétionnaires, un montant d'argent, des montants d'argent aux groupes bénévoles et aux groupes communautaires de nos comtés. Nos enveloppes actuelles sont de l'ordre de 100 000 $. Et, croyez-moi, M. le Président, lorsque je convoque les groupes... À tous les mois, je convoque les groupes à qui j'ai l'honneur de remettre les montants d'argent public dont nous avons la responsabilité de gestion. Je leur dis toujours la même chose: Je pense que ces petits chèques, qui sont de 500 $, 500 $, 1 000 $, que nous remettons à ces groupes communautaires sont sans doute les montants d'argent public les mieux utilisés et les plus profitables. Ce sont essentiellement des dollars qui sont des multiplicateurs, parce que, avec un 200 $ reçu de leur député, ils peuvent faire doubler ces montants d'argent en allant chercher, souvent, l'équivalent d'autres sources, et souvent des sources non publiques, tels les marchands de comté ou les autres intervenants au niveau social. De sorte – encore une fois, je me répète – que, de ce 200 000 000 $, il ne faudrait surtout pas additionner les 100 000 $ multipliés par 125... les montants d'argent qui sont distribués par les députés à même les enveloppes discrétionnaires. Et je suis sûr, encore une fois, que le gouvernement du Québec, dans sa grande sagesse, sachant l'importance de ces enveloppes et de l'utilisation qui est faite de ces enveloppes par les groupes communautaires, malgré les difficultés budgétaires et financières qui sont les nôtres, saura, j'en suis sûr, reconduire ces montants d'argent dans nos enveloppes, parce qu'ils servent directement aux groupes communautaires. Et ces groupes communautaires donnent des services, je dois l'avouer, qui n'ont pas leur équivalent.

J'ai moi-même eu le plaisir de visiter récemment plusieurs de ces groupes communautaires, et plusieurs me viennent à l'esprit. Le dernier que j'ai visité récemment, c'est le CPIVAS, c'est le groupe d'intervention et de prévention pour la violence et les agressions sexuelles de Laval. Et je dois vous dire que les petits montants d'argent – qui sont relativement petits – que reçoit ce groupe d'intervention permettent d'intervenir efficacement et directement dans le milieu et de répondre à des besoins. Malheureusement, ils ne reçoivent pas le financement nécessaire pour répondre à tous les besoins. En ce moment, ils ont 500 dossiers actifs, à Laval, pour une population de 330 000 habitants, ce qui est énorme.

Ces groupes communautaires, avec le financement communautaire qu'ils reçoivent, donnent des services qui n'ont pas leur équivalent, que ce soit la popote roulante qui, tous les mardis et jeudis, va porter un bon repas chaud... Je les ai accompagnés récemment pour aller moi-même livrer ces popotes roulantes, et je peux vous dire que les yeux des personnes qui nous reçoivent et l'amour de ceux qui vont porter ces plats cuisinés n'ont pas d'équivalent au niveau du service public. On retrouve dans ces groupes communautaires des gens qui font du bénévolat, des gens qui se livrent coeur et âme à apporter du soulagement, à apporter des services à une population qui, malheureusement, compte tenu de l'effritement du tissu social, des difficultés de plus en plus importantes de la classe moyenne et, disons-le, de l'appauvrissement de notre société... Ces groupes communautaires, dis-je, donnent des services de plus en plus nécessaires.

Je note au passage, ici, qu'une très grande partie de ce financement aux groupes communautaires actuels... Et je reviendrai plus tard, naturellement, sur le précis de notre projet de loi n° 111 qui vise à modifier la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Je note que plus de la moitié du financement qui est donné directement par le gouvernement du Québec l'est, donnée, par le ministère de la Santé et des Services sociaux, soit un montant annuel de 104 500 000 $. Je dois dire à cet effet que ce montant d'argent qui est véhiculé par les conseils régionaux de santé et de services sociaux est un montant d'argent qui, encore une fois, peut être multiplié dans l'efficacité des soins apportés aux personnes, à la clientèle et aux gens qui ont besoin de ces services, et je m'explique. Je pense que mon humble expérience de délégué régional à cet effet est significative.

Dans la mesure où nous avons reçu le mandat – et je sais que ma voisine de droite est très intéressée par mon allocution, elle qui est elle-même déléguée régionale de Lanaudière... Elle aussi a le mandat de s'assurer que la concertation soit effectivement menée dans le milieu et de s'assurer que les différents agents d'intervention dans le milieu socioéconomique interréagissent entre eux et que la concertation qui doit mener leurs actions et leurs prises de décisions fasse en sorte que leurs actions soient plus profitables à tout le monde, soient plus ciblées et soient plus productives au niveau de la clientèle et au niveau du milieu socioéconomique.

À Laval, les groupes d'action communautaire, par exemple, qui oeuvrent dans le domaine de la santé mentale, les groupes d'action communautaire qui oeuvrent dans la prévention de la violence familiale, les groupes d'action communautaire qui oeuvrent au niveau de la jeunesse, au niveau des aînés se sont regroupés sous la forte impulsion de leur délégué régional, et, lorsqu'il y avait des tables de concertation qui n'existaient pas, ils ont mis en place des tables de concertation qui permettent aux intervenants, dans ce milieu de la santé et des services sociaux, des groupes communautaires d'action communautaire qui oeuvrent dans ce domaine de se concerter pour amener une meilleure qualité des services.

Je note que la régie régionale de santé de Laval... Et je pense que les autres régies régionales du Québec ont tout intérêt à s'assurer que cette concertation nécessaire qui amène une synergie entre les groupes d'action communautaire et un meilleur service soit une réalité dans le Québec de 1995-1996 et des années suivantes.

(16 h 20)

J'aimerais dire deux mots, maintenant, sur le projet de loi lui-même et la création d'un secrétariat à l'action communautaire. Pour la majorité des Québécois, un secrétariat à l'action communautaire, ça veut dire peu de chose. Mais je peux vous parler de l'action concrète que peut avoir un secrétariat à l'intérieur du gouvernement. J'ai la responsabilité, à titre d'adjoint parlementaire du premier ministre aux Affaires autochtones, d'avoir la responsabilité, au jour le jour, du Secrétariat aux affaires autochtones. Donc, je suis, je pense, bien placé pour témoigner du rôle et de l'efficacité d'un secrétariat à l'intérieur du ministère de l'Exécutif. Un secrétariat, c'est un outil que se donnent le ministère du Conseil exécutif et son ministre, qui est le premier ministre, pour intervenir de façon horizontale avec les ministères.

Le support à l'action communautaire de ces groupes à l'action communautaire est l'affaire d'une douzaine de ministères qui passent: du ministère des Affaires internationales, qui, cette année, a contribué pour un total de 6 200 000 $, ce qui est relativement un petit montant; par le ministère de la Justice, qui a contribué pour un montant, encore inférieur, de 1 500 000 $; à ce ministère de la Santé et des Services sociaux, qui, lui, a contribué pour plus de 100 000 000 $ aux groupes d'action communautaire. De sorte que plusieurs ministères agissent essentiellement souvent avec les mêmes objectifs, cependant avec des clientèles sectorielles différentes, de sorte que le rôle du Secrétariat à l'action communautaire, comme les autres secrétariats qu'on retrouve au ministère de l'Exécutif, comme le Secrétariat aux affaires autochtones, le Secrétariat à la jeunesse et le Secrétariat à la concertation... Ils ont essentiellement le rôle, effectivement, de s'assurer que les actions gouvernementales qui sont celles de chacun des ministères sectoriels soient concertées, qu'elles agissent selon une politique globale, que ces actions ministérielles se donnent des actions qui sont cohérentes avec ces politiques globales et que les objectifs et que les programmes spécifiques de ces ministères soient établis en parfait accord avec cette politique et ces objectifs gouvernementaux.

Et c'est effectivement le rôle du Secrétariat de gérer des budgets spécifiques, comme ce sera le cas à l'action communautaire, mais également – je ne veux surtout pas minimiser ce rôle et je pense que c'est le plus important, au-delà de la gestion d'un montant d'argent spécifique – de concerter l'action des ministères et de s'assurer que cette action des ministères soit cohérente, qu'elle ne soit pas contradictoire, par exemple, s'assurer que, au même moment où nous voulons augmenter le financement aux groupes communautaires... Naturellement, il va de soi que ce Secrétariat pourra s'assurer que l'enveloppe discrétionnaire des députés, qui vise également à financer les groupes d'action communautaire, que ces enveloppes de députés ne soient pas diminuées, qu'au contraire elles soient au minimum stabilisées et possiblement améliorées afin d'atteindre cet objectif gouvernemental de support de l'aide aux groupes communautaires. Et je suis sûr que le Secrétariat à l'action communautaire fera de cet objectif de concertation et de cohésion dans nos politiques son tout premier objectif.

En ce qui concerne le financement et l'identification d'un 5 % des revenus nets des casinos pour l'action communautaire, je dois dire que nous établissons là un précédent qui m'apparaît très important. Pour en avoir moi-même parlé avec la ministre des Finances et du Revenu sur un autre dossier que je n'aborderai pas aujourd'hui, ce précédent est important dans la mesure où nous établissons directement un lien entre un revenu généré par les casinos – essentiellement des activités de loisir très lucratives pour l'État... Nous établissons directement un lien entre une portion de ce revenu et une utilisation sociale. À ma connaissance, je pense que c'est la première fois que nous attachons directement une utilisation d'un montant d'argent spécifique, d'un revenu spécifique de l'État, d'un casino ou de la loto, à une utilisation sociale. Nous établissons ce montant d'argent à 5 %, ce qui va permettre d'injecter des montants de l'ordre de 9 000 000 $ par année dans le soutien à l'action communautaire, et ce montant d'argent sera transité par le Secrétariat à l'action communautaire du ministère du Conseil exécutif.

Ce montant d'argent, il devrait aller en croissant. Selon les informations que nous avons, le marché potentiel du casino, au Québec, ou des jeux, au Québec, est un marché qui offre encore des possibilités de développement, et les revenus que Loto-Québec compte retirer de l'implantation du Casino de Hull très bientôt, et possiblement d'autres casinos peut-être plus petits ou saisonniers dans d'autres régions du Québec, permettront d'atteindre un financement soutenu. Et ce financement devrait permettre de financer ces secrétariats à la jeunesse qui sont en voie d'implantation dans toutes les régions du Québec. Et, dans certaines régions, on y va comté par comté, mais, dans d'autres régions, comme celle de Laval, nous avons convenu, les cinq députés de la région de Laval – incluant le député de Chomedey, le député de l'opposition de Chomedey – nous avons décidé d'y aller d'une façon concertée pour qu'il y ait, à Laval, un seul secrétariat à la jeunesse, pour créer de l'emploi dans cette population de 18-35 ans qui, M. le Président, a un objectif principal de devenir part entière et partie entière à l'économie salariée et à la force ouvrière du Québec.

M. le Président, ça m'a fait plaisir d'appuyer ce projet de loi qui, je pense, est important parce qu'il confirme la volonté du gouvernement du Québec de soutenir efficacement le groupe à l'action communautaire. Comme je l'ai dit d'entrée de jeu, nous avons déjà rempli notre premier engagement électoral de s'assurer qu'il y a un financement sur une base triennale afin d'assurer une pérennité au financement des groupes communautaires et de leur permettre de souffler et de donner des services entre les courses effrénées qu'ils ont à faire pour renouveler ce financement. Notre deuxième engagement, qui était de s'assurer d'atteindre le 1 % du budget du Québec, est en voie de l'être: il y a ici plus de 200 000 000 $ qui sont donnés directement du gouvernement aux groupes communautaires, il y a ces enveloppes, comme je le disais, si bénéfiques, des députés, qui servent à l'ensemble des groupes communautaires du Québec et il y aura cet ajout, que nous espérons grandissant, des revenus en provenance de Loto-Québec et des activités de casinos de Loto-Québec. Et, sur ce, M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Vimont. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, je propose donc l'ajournement du débat.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Je demande que vous appeliez l'article 8 de notre feuilleton d'aujourd'hui, M. le Président.


Projet de loi n° 113


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 8, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du principe du projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 237 du règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi? Consentement. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de l'Environnement et de la Faune, à vous la parole. Vous avez un droit de parole maximal, M. le ministre, de 60 minutes.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Alors, nous entreprenons cet après-midi l'étude du principe du projet de loi qui modifie la Loi sur la qualité de l'environnement, qui porte sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets. Je voudrais tracer très brièvement le contexte qui m'a amené, comme ministre de l'Environnement et de la Faune, à proposer à l'Assemblée cette modification législative. L'an dernier, lors de la dernière campagne électorale, ma formation politique, à laquelle j'appartiens, le Parti québécois, avait annoncé son engagement de consulter la population du Québec sur les choix que nous avons à faire pour consommer de façon à moins produire de déchets et pour mettre en valeur les déchets, ou plutôt, je dirais, les résidus, parce que nous ne pouvons plus parler de déchets. Il y a dans ces soi-disant déchets tant de matières qui ne demandent qu'à être transformées ou mises en valeur qu'on doit plutôt les considérer comme des ressources. On leur a même donné le nom de matières secondaires pour les distinguer des matières premières.

(16 h 30)

Le Parti libéral, qui était alors au pouvoir, s'y était, lui aussi – je le signale, M. le Président – engagé dans la loi 101. Mais il rendait cette consultation conditionnelle – je ne sais pas trop pourquoi; je n'avais pas participé aux travaux de cette commission et à l'étude de ce projet de loi – à l'adoption d'une refonte, d'une révision réglementaire du Règlement sur l'évaluation environnementale. La disposition de la loi 101 concernant cette consultation publique était ainsi libellée. Refonte dont il avait d'ailleurs publié une première version dans la Gazette officielle et qui avait eu l'art, on s'en souviendra, de soulever l'ensemble des forces vives du Québec contre elle. Donc, une très forte opposition s'était manifestée contre le projet de Règlement sur l'évaluation environnementale. Et, comme la disposition de la loi 101 indiquait que la consultation publique n'aurait lieu qu'une fois la révision de l'évaluation environnementale faite, bon, bien, le temps passait.

Pour notre part, M. le Président, nous avons décidé d'agir autrement et de lancer maintenant la consultation publique sur la gestion des matières résiduelles. C'est ce que j'ai annoncé d'ailleurs cette semaine, lundi dernier plus précisément. Il est plus que temps, croyons-nous, comme société, de se donner les moyens de mettre en valeur nos résidus. Il faut arrêter le gaspillage que constitue l'élimination de déchets dans des lieux d'enfouissement sanitaire ou dans des incinérateurs. Et, afin de bien encadrer cette consultation, de s'assurer qu'elle porte sur les enjeux de demain et non sur les erreurs du passé, j'ai, lundi dernier, déposé publiquement un document d'orientation qui fait le portrait de la situation actuelle au Québec dans le domaine des matières résiduelles et qui propose un certain nombre de gestes concrets à poser pour nous permettre, comme société, de progresser. Ça s'intitule «Pour une gestion durable et responsable de nos matières résiduelles». C'est un document de consultation publique. La discussion publique portera donc sur ces points, ces propositions, afin d'en vérifier l'à-propos, de les enrichir ou de leur trouver des alternatives encore meilleures, si possible, de voir également si ces propositions peuvent s'appuyer sur des consensus très larges. C'est ce que nous permettra la consultation publique.

Je voudrais, et je pense que c'est tout à fait opportun, vous résumer très succinctement ces propositions qu'on retrouve dans ce document de consultation. On peut certainement dire que des progrès ont été accomplis au cours des dernières années dans le domaine de la gestion des résidus au Québec. La collecte sélective municipale rejoint maintenant près de 70 % de la population du Québec, dont 48 % par le mode porte à porte, avec les fameux bacs bleus ou verts, selon le cas. Les projets de compostage, d'autre part, particulièrement des résidus verts, ce qu'on appelle les résidus verts, c'est-à-dire les herbes et les feuilles, se font de plus en plus nombreux également. Il y a des entreprises, aussi, qui mettent sur pied des programmes de réduction de résidus. Il y en a certaines qui offrent des services de récupération de leurs produits usagés. Il y a des commerces qui récupèrent les huiles, la peinture, les médicaments. Ces initiatives sont réelles et méritent notre appui, sans aucun doute. Mais, malgré tout cela, malgré tous ces progrès notables, méritoires, il faut bien l'avouer, au rythme actuel, le Québec n'atteindra pas l'objectif de réduire de 50 % les quantités de résidus envoyés à l'élimination d'ici l'an 2000. C'était l'objectif, c'est l'objectif que le gouvernement s'était fixé en 1988 par l'adoption de la Politique québécoise de gestion intégrée des déchets solides.

Nos plus récentes données indiquent que nous réussissons à détourner de l'élimination environ 8 % des résidus depuis 1988, qui est considérée comme l'année de référence. Et on dit que les derniers 25 %, c'est ce qu'il y a de plus difficile à atteindre. Donc, manifestement, on ne réussira pas, au rythme où vont les choses, à atteindre l'objectif de 50 %.

En termes d'élimination, nos lieux d'enfouissement présentent encore beaucoup de carences environnementales. Les deux tiers ne respectent pas toutes les normes requises. Par exemple, les eaux de lixiviation – le lixiviat, ce qu'on appelle le lixiviat, en fait, ça désigne les eaux qui percolent à travers les déchets, donc c'est des eaux fortement contaminées – de certains lieux dépassent certains paramètres établis par règlement. Il y a plusieurs lieux d'enfouissement sanitaire qui ne traitent pas ces eaux et qui se servent de la capacité filtrante du sol où sont déposés les résidus pour les évacuer. Par ailleurs, il y a des municipalités et des citoyens qui s'insurgent contre le fait que des lieux d'enfouissement situés sur leur territoire acceptent de recevoir des résidus provenant de l'extérieur de leur région. Il y a des cas bien connus. Vous connaissez, entre autres, le cas de Saint-Nicéphore, qui suscite bien des résistances, bien des oppositions au sein de la population.

Alors, c'est à l'ensemble de ces enjeux que veut répondre la consultation qui sera menée à travers tout le Québec par une commission du BAPE, le Bureau des audiences publiques sur l'environnement. Nous voulons connaître l'opinion et les solutions de ceux et de celles qui sont au premier chef concernés par ces enjeux. Et, en ma qualité de ministre de l'Environnement et de la Faune, j'ai engagé une importante réflexion au ministère sur ce sujet, une réflexion qui me permet de faire un certain nombre de propositions de gestion dans le domaine des résidus. Ces propositions, comme je le disais encore tantôt, sont contenues, on les retrouve dans le document «Pour une gestion durable et responsable de nos matières résiduelles» rendu public récemment.

Je ne prétends pas que ces propositions sont les seules qu'on puisse faire – il y en a 18, en fait – ni qu'on ne peut pas les améliorer. Si c'était le cas, si j'étais convaincu que c'est la vérité révélée et qu'elles ne sont pas perfectibles, bien, je n'engagerais certainement pas le Québec dans une discussion, dans un débat public à leur sujet. Mais elles ont le mérite, je dirais, vous permettez l'expression, de mettre la table, comme on dit. Elles constituent des pistes, des avenues de solutions. Est-ce qu'elles sont applicables? Est-ce qu'elles sont réalistes? Est-ce qu'elles vont assez loin ou pas assez loin ou trop loin? Est-ce que nous sommes prêts, chacun d'entre nous, parce que, les résidus, ça nous concerne tous, à faire l'effort qu'exige notre volonté d'avoir moins de lieux d'enfouissement sanitaire et de gaspiller moins de ressources naturelles?

Ce sont là les questions que nous devrons tous nous poser à l'occasion de ce débat public, et c'est à ces questions que tentent de répondre les propositions contenues dans le document de consultation. De toute évidence, le portrait de situation que brosse ce document nous amène à conclure qu'il faut regrouper les forces qui oeuvrent dans le domaine de la gestion des résidus, qu'il faut resserrer les moyens actuels de mise en valeur, qu'il faut en proposer de nouveaux, plus efficaces, qu'il faut favoriser une meilleure prise en charge des responsabilités qui reviennent à chacun et qu'il faut donner aux régions de réels pouvoirs décisionnels pour gérer les résidus de leur territoire et accroître la participation de la population à cette gestion. L'atteinte de nos objectifs en dépend, dont celui que j'évoquais tantôt, réduire de 50 % les matières résiduelles destinées à l'élimination.

(16 h 40)

Pour déterminer les moyens dont le Québec doit se doter pour mieux gérer ses résidus, vous conviendrez avec moi qu'il importe de définir d'abord, dès le départ, les principes et les objectifs qui encadreront ces moyens. La Commission mondiale sur l'environnement et le développement a mis de l'avant le concept de développement durable. Ce concept propose des modes de production et des modes de consommation viables à long terme pour l'environnement sans réduire les chances de prospérité économique, sociale et environnementale des générations futures. Appliqué à la gestion des matières résiduelles, le développement durable suppose que les différents moyens d'intervention que nous choisirons reposent sur une utilisation plus efficace de nos ressources, diminuent substantiellement la quantité de résidus produits, favorisent la mise en valeur des résidus et réduisent les risques associés à leur élimination afin que les générations futures puissent bénéficier, comme les générations actuelles, d'une qualité de vie et d'un environnement sain.

Ayant comme toile de fond, je dirais, comme référence générale le développement durable, les interventions relatives à la gestion des matières résiduelles au Québec seront, ou doivent être guidées, selon nous, par les principes suivants. Premièrement, la gestion démocratique. La participation de tous les intervenants est essentielle. La gestion des matières résiduelles au Québec doit être réalisée dans un souci de transparence en accordant à tous les intervenants le droit à l'information, un droit de regard sur la gestion et une participation à la prise de décisions relatives à la gestion des résidus.

Deuxième principe, la responsabilité totale. Ce principe spécifique s'applique aux entreprises de production et de distribution de produits de consommation et définit leurs responsabilités à l'égard du produit mis sur le marché. Il stipule que les entreprises doivent se préoccuper des impacts de leurs produits sur l'environnement lors des étapes de conception, de fabrication, de distribution, de récupération, de mise en valeur et d'élimination; tout le cycle complet. Bref, à toutes les étapes, donc, du cycle de vie d'un produit mis sur le marché.

Cette préoccupation doit aussi se traduire par une participation financière des entreprises. Cependant, cette notion de responsabilité totale ne signifie pas que les entreprises sont les seules responsables. Il leur revient toutefois de proposer des produits meilleurs pour l'environnement qui faciliteront la prise en charge par les consommatrices et les consommateurs de leurs responsabilités.

Troisième principe, la responsabilité partagée. Chaque intervenant privé ou public, qu'il soit producteur ou consommateur, doit assumer la part des responsabilités qui lui incombe dans la gestion des matières résiduelles. L'application de la règle qui veut que le pollueur doive payer pour les dommages qu'il cause à l'environnement favorise la prise en charge de cette responsabilité. Cependant, pour agir efficacement, chaque intervenant doit disposer des moyens et des pouvoirs adéquats.

Quatrièmement, quatrième principe, le partenariat. Chaque intervenant, en assumant son rôle, sa mission et sa part de responsabilité, contribue, avec les autres intervenants qui font de même, à mettre en place de façon cohérente, concertée, complémentaire les moyens nécessaires à l'atteinte des objectifs. Cinquièmement, la régionalisation. Les instances locales et régionales, parce qu'elles sont directement concernées par la question des résidus, sont les mieux placées pour trouver les solutions adaptées à leurs besoins. Le gouvernement du Québec entend donc leur donner des outils, des instruments pour assumer leurs responsabilités dans le domaine de la gestion des résidus et les soutenir dans l'utilisation des outils existants. Voilà les principes sur lesquels nous allons nous appuyer.

Donc, je reviens au principe sur lequel tout le monde s'entend, et au premier chef l'industrie: c'est celui de la responsabilité totale dont je parlais tout à l'heure et qui s'applique à l'industrie de la fabrication et de la distribution des produits et des biens. Plusieurs entreprises se sont engagées dans cette voie pour soutenir financièrement la mise en valeur des résidus, il faut le reconnaître. Au Québec, 300 entreprises adhèrent volontairement à l'organisme créé par elles qui s'appelle Collecte sélective Québec. Ces 300 entreprises y versent un montant proportionnel à leur chiffre d'affaires pour soutenir les programmes municipaux de récupération. Collecte sélective Québec, c'est cet organisme financé par les entreprises qui subventionne les municipalités pour les aider à mettre en place des programmes de collecte sélective. Par exemple, une municipalité qui veut faire la collecte sélective à partir du mode porte-à-porte et à partir de bacs, Collecte sélective Québec la subventionne pour acheter les bacs requis, les bacs nécessaires. Il y en a 300. Toutefois, comme cet engagement est volontaire, facultatif, cela crée, depuis un certain nombre d'années, une forme d'iniquité puisque d'autres entreprises oeuvrant dans le même secteur d'activité n'y contribuent pas. Collecte sélective Québec évalue à plus de 900 entreprises le nombre des entreprises concernées qui devraient normalement contribuer financièrement. Il y en a 300 qui contribuent, parce qu'elles ne sont pas contraintes, elles ne sont pas obligées de contribuer.

Là, évidemment, après un certain nombre d'années, les 300 entreprises qui contribuent commencent à considérer qu'il y a là une injustice à leur égard. Il y en a même certaines qui songent, vous me permettrez l'expression, M. le Président, à décrocher, à se retirer, à cesser de contribuer, en se disant: Il y en a 600 qui ne contribuent pas, je ne vois pas pourquoi, nous, on continuerait, on poursuivrait notre contribution. Et M. Martel, qui est le directeur général de Collecte sélective Québec, m'a à plusieurs reprises fait le message suivant: Le volontariat a donné tous ses fruits; il faut maintenant aller plus loin et faire en sorte que toutes les entreprises, par souci d'équité, contribuent à financer la collecte sélective.

Deuxièmement, RECYC-QUÉBEC. RECYC-QUÉBEC, c'est un organisme gouvernemental, une société d'État qui joue un rôle complémentaire à celui de Collecte sélective Québec. RECYC-QUÉBEC soutient financièrement les efforts de mise en valeur des résidus grâce, en grande partie, à l'argent qu'elle récupère de la consigne sur les contenants que le consommateur ne retourne pas. Vous savez qu'il y a une consigne qui est payée par le consommateur sur les contenants à remplissage unique, les cannettes, par exemple, et quand le consommateur rapporte ces contenants, on lui rembourse la consigne. Il y en a un certain nombre qui ne les rapportent pas; cet argent est utilisé par RECYC-QUÉBEC pour financer des efforts de mise en valeur des résidus, un moyen que s'est donné cette industrie pour assumer sa responsabilité à l'égard de ces produits.

Afin de regrouper les forces et de donner à l'industrie les outils nécessaires pour assumer de façon équitable sa responsabilité à l'égard des produits qu'elle met sur le marché, je propose, moi, la création d'une société financée par une contribution de l'industrie. Son mandat serait de mettre en place les moyens nécessaires pour mettre en valeur les résidus. Et cette société, en quelque sorte, assumerait les deux missions des deux organisations existantes actuellement: Collecte sélective Québec et RECYC-QUÉBEC.

Cette société soutiendrait, entre autres, les programmes municipaux de récupération, la mise en place des équipements de tri, de recyclage, la recherche et le développement et aussi les activités de formation, de sensibilisation et d'information. Toutes les industries devraient financer la mise en valeur des résidus. C'est clair. Donc, c'est la fin du volontariat. Une industrie, cependant, ou un groupe d'industries pourrait ne pas contribuer à la nouvelle société s'il met en place son propre système de récupération et de mise en valeur des résidus issu de la vente de ces produits, ce qui pourrait fort bien arriver. À ce moment-là, il serait exempté de contribuer à la société, comme, par exemple... L'exemple, je dirais, le plus connu, l'illustration la plus exemplaire de ce que je dis, ce sont les brasseries. Les brasseries ont un système de récupération et de réemploi des contenants à remplissage multiple, les bouteilles de bière. C'est très efficace, et les brasseries récupèrent 96 % des bouteilles. Donc, c'est un système très, très efficace. Alors, c'est évident qu'à partir de ce moment-là les brasseries ne seraient pas tenues de contribuer à la société, et ainsi pour d'autres industries.

(16 h 50)

La concertation régionale, maintenant, représente le plus grand défi que rencontrent les municipalités dans leurs efforts pour mieux gérer leurs résidus. Il est en effet difficile, voire impossible, de réduire les quantités de résidus, d'éliminer les résidus de sa région dans sa région sans une telle concertation. Aussi, les municipalités devraient-elle, par le biais des communautés urbaines et des MRC – c'est ce qu'on propose – élaborer des plans de gestion des résidus sur leur territoire. Dans ces plans, on retrouverait l'ensemble des moyens de gestion, les équipements, les territoires de collecte de résidus à des fins d'élimination et les mécanismes de consultation publique. Les municipalités pourraient ainsi contrôler la provenance des résidus éliminés sur leur territoire. C'est ce qu'elles réclament, c'est ce que les groupes populaires réclament aussi, c'est ce que la population réclame, c'est la possibilité de contrôler la provenance des résidus éliminés sur leur territoire. Par le biais de ces plans de gestion, on pourrait atteindre cet objectif. Le ministère n'autoriserait l'implantation ou l'agrandissement d'équipements d'élimination que s'ils sont conformes, entre autres, au plan de gestion des MRC ou des communautés urbaines.

Avec le changement notable des mentalités à l'égard des résidus et l'accroissement de la demande pour les matières secondaires, tous les citoyens du Québec devraient avoir accès à des programmes de récupération et de collecte sélective. Je propose donc dans le document – ce sera l'objet d'un débat public – d'étendre la collecte sélective à toutes les municipalités du Québec, qui pourront compter sur le soutien de la nouvelle société dont j'ai parlé tantôt. Cette collecte devra permettre la récupération des résidus recyclables, mais aussi des herbes, des feuilles, des résidus verts, qui représentent 8 % de tous les résidus. Par ailleurs, les marchés pour la mise en valeur des pneus hors d'usage par recyclage ou valorisation existent. Vous savez... Si vous ne le savez pas, M. le Président, je vous indique qu'au Québec, annuellement, on se retrouve avec 7 000 000 de pneus hors d'usage. Alors, il faut les valoriser, les mettre en valeur, les utiliser et éviter que ça s'entasse dans des sites, avec les risques que ça comporte d'incendie, comme on l'a déjà connu dans le passé. Il n'y a plus aucune raison, d'ailleurs, de les enfouir ou de les envoyer dans des entrepôts, dans des sites, ce qu'on fait, ce qu'on pratique encore. Nous proposons – je propose – que cette pratique de l'enfouissement ou du dépôt permanent soit interdite. Les lieux d'entreposage actuellement auraient un certain délai pour mettre en valeur leurs pneus. Et la table de concertation sur les pneus, qui regroupe tous les intervenants de ce domaine-là, devrait être en mesure, à l'occasion des audiences publiques de la commission du BAPE, de présenter une solution pour mettre en valeur tous les pneus hors d'usage au Québec, donc, et de rendre ainsi possible l'interdiction de l'enfouissement ou de l'entreposage dans des sites permanents.

Les résidus de l'industrie de la construction, de la rénovation et de la démolition. Ça représente 35 % de tous les résidus. Une partie importante de ces résidus peut être mise en valeur. On n'a qu'à penser à l'asphalte, à la brique, au béton et aux autres agrégats. Ça peut être mis en valeur, des technologies sont connues. Pourtant, on continue à les éliminer dans des dépôts de matériaux secs à des coûts souvent bien inférieurs à ceux de l'enfouissement. Je propose d'interdire l'aménagement ou l'agrandissement des dépôts de matériaux secs. On doit mettre en valeur ces résidus. Lorsque ce ne sera pas possible, ils devront être envoyés, comme les autres résidus, dans des lieux d'enfouissement sanitaire. Par ailleurs, des mesures seront prises pour faciliter le tri de ces matériaux sur les lieux d'élimination, ce qui est actuellement interdit par le règlement, ce qui est un peu absurde dans les circonstances. C'est paralyser, c'est entraver la récupération.

La réglementation, maintenant, dans le domaine de la gestion des résidus sera revue et actualisée pour être plus efficace, en fonction des connaissances acquises depuis les 15 dernières années. Les activités de mise en valeur seront prises en considération, seront facilitées. Les normes d'enfouissement pourraient prévoir l'étanchéité des cellules, le captage et le traitement des eaux et, lorsque c'est nécessaire, le captage et le traitement des biogaz. Ce sont là quelques-unes des propositions – je le disais tout à l'heure, M. le Président, il y en a 18 – parmi les plus importantes que j'ai rendues publiques lundi dernier. Et je veux avoir l'avis du plus large éventail d'intervenants possible sur ces propositions. Encore une fois, j'insiste là-dessus, il s'agit de propositions que je fais pour engager, faciliter la réflexion et le débat public. C'est pourquoi j'ai mandaté le Bureau d'audiences publiques de tenir, dans toutes les régions du Québec – parce que c'est un problème qui se retrouve dans toutes les régions du Québec, donc, la commission devra parcourir toutes les régions du Québec – une importante consultation à ce sujet.

Je souhaite vraiment que, tous ensemble, nous relevions ce défi et que nous nous dotions d'une politique qui permettra au Québec de marquer le pas et de développer un modèle efficace en matière de gestion des résidus. Je compte déposer, après ces audiences publiques, un plan d'action, des mesures concrètes pour faire prendre le virage qui s'impose dans le courant de l'année 1997, puisque l'ensemble de l'opération... Mme Journault, présidente par intérim du BAPE et qui va présider la commission, le disait lundi, elle a prévu un calendrier qui fera en sorte que toutes les opérations, les audiences publiques, la réflexion, la rédaction du rapport, la remise du rapport, tout ça pourra se dérouler – des séances d'information aussi, au tout début de l'opération – dans un délai d'un an. Fin 1996, le ministre de l'Environnement et de la Faune devrait avoir sur son bureau le rapport de cette commission du BAPE. Donc, un plan d'action suivra et sera ensuite mis en oeuvre.

Si je vous ai assez longuement entretenu, M. le Président, du virage important que je compte faire prendre au Québec dans le domaine des résidus solides, je vous ferai remarquer que, jusqu'à maintenant, je n'ai à peu près pas utilisé le terme «déchet». C'est un terme à bannir, et le terme «déchet» ne va s'appliquer qu'à la matière qui sera éliminée, enfouie; là, c'est vraiment un déchet. Mais, avant de devenir un déchet, je pense qu'elle peut devenir une matière secondaire, une ressource.

Donc, si j'ai parlé assez longuement là-dessus, c'est pour insister sur le fait que la consultation qui sera tenue et le plan d'action qui va en découler viendront changer de façon très significative la façon dont le Québec gère actuellement ses matières résiduelles. Ça ne peut pas faire autrement. Ce virage changera aussi, cela va de soi, la nature et les besoins du Québec en matière d'élimination. De fait, les efforts que nous consentirons pour réduire et mettre en valeur les résidus diminueront de façon substantielle nos besoins d'espaces réservés à l'enfouissement sanitaire. De plus, en donnant aux autorités municipales les pouvoirs de contrôler les résidus qui peuvent être éliminés sur leur territoire, nous allons modifier, à moyen terme et de façon très significative aussi, le nombre, la grandeur, l'emplacement géographique des lieux d'enfouissement dont nous aurons encore besoin dans une dizaine d'années. Nous ne savons pas, à l'heure actuelle, quels seront ces besoins, mais nous savons qu'ils seront différents de ceux que nous connaissons aujourd'hui. Voilà pourquoi il faut, avant de permettre de nouveaux aménagements ou de nouveaux agrandissements d'équipements d'élimination, attendre les conclusions qui se dégageront de cette importante consultation.

(17 heures)

On ne doit pas engager maintenant le Québec dans des choix sans s'être donné le recul nécessaire à l'examen des moyens de gestion qui s'ouvrent à nous, des moyens qui privilégient, bien avant l'élimination, la mise en valeur des résidus, ce qu'on appelle, là – alors, ceux qui sont dans les milieux, qui sont familiers avec cette question-là – ce qu'on appelle les 3R: réemploi, récupération, recyclage, suivi d'un v aussi, valorisation, élimination étant vraiment le dernier recours. Donc, c'est la mise en valeur d'abord.

La Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets, qui avait été sanctionnée au mois de juin 1993, assujettit à la procédure d'évaluation environnementale tous les projets d'établissement ou d'agrandissement d'un lieu d'enfouissement sanitaire ou de dépôt de matériaux secs. Obligatoire. Aucun projet n'y échappe. C'est toute la procédure d'évaluation complète: avis de projet, directives, études d'impact, audiences publiques, analyse environnementale et décret par le Conseil des ministres; c'est le Conseil qui prend la décision. C'est la procédure complète. Et tous les projets, soit de lieux d'enfouissement sanitaire ou de dépôts de matériaux secs, sont assujettis à cette procédure en vertu de cette loi qui a été adoptée il y a deux ans, en 1993.

Cette loi permet au gouvernement aussi, cependant, lorsqu'il délivre un certificat autorisant un tel projet, de fixer des normes différentes de celles prévues par le Règlement sur les déchets solides – qui est en vigueur actuellement, qui date de 1978, je pense – si le gouvernement le juge nécessaire pour assurer une protection accrue de l'environnement. C'est ce qu'il faut faire, d'ailleurs, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas un nouveau règlement sur les matières résiduelles, parce que celui qui est en vigueur présentement et qui s'appelle le Règlement sur les déchets solides est vraiment, je dirais, désuet et inadéquat, caduc, même, c'est le moins qu'on puisse dire. Il faut aller plus loin, il faut imposer des conditions plus sévères.

Cette loi prévoyait également, par ailleurs, que le ministre de l'Environnement et de la Faune doive, dans les 90 jours de l'entrée en vigueur de la nouvelle procédure d'évaluation environnementale qui était prévue à la Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, confier au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement le mandat de tenir une enquête sur les problèmes relatifs à la réduction, à la valorisation et à l'élimination au Québec des déchets solides, au sens du Règlement sur les déchets solides, et de tout autre déchet que peut désigner le ministre.

Bon. C'est ce qui fait que le débat public n'a jamais eu lieu, parce qu'il y avait eu un arrimage qu'on avait introduit dans la loi, un arrimage avec le futur règlement, le nouveau règlement sur l'évaluation environnementale qui n'est jamais venu et, par conséquent, le débat public non plus ne s'est jamais tenu. Cet article ne tient plus, puisque j'ai déjà, comme je vous le disais tantôt, confié au Bureau d'audiences publiques le mandat de tenir le débat public, de tenir les audiences.

Au 1er décembre 1995, quelle était la situation en termes de projets soumis au ministère de l'Environnement, soit des lieux d'enfouissement sanitaire, soit des dépôts de matériaux secs, que ce projet soit un projet d'établissement ou que ce projet soit un projet d'agrandissement? Le 1er décembre 1995, date du dépôt du projet de loi, il y a 48 projets de lieux d'enfouissement sanitaire, qu'on appelle familièrement des LES; il y a 58 projets de dépôts de matériaux secs qui ont été soumis à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. De ce nombre, 18 projets font l'objet d'une analyse, suite au dépôt d'une étude d'impact – donc ils sont rendus assez loin dans la procédure – et quatre projets ont fait l'objet d'un décret gouvernemental, d'une décision du Conseil des ministres.

L'offre d'élimination que représente l'ensemble de ces projets, plus d'une centaine, suffit amplement à combler les besoins du Québec en cette matière, en matière d'enfouissement, pour les 10 prochaines années. Ça représente, en termes de volume, des millions et des millions de tonnes d'enfouissement. J'ajouterai que, depuis l'adoption de cette loi de 1993, plusieurs groupes ont demandé la tenue d'un moratoire sur l'établissement et sur l'agrandissement de ces lieux d'élimination de déchets jusqu'à ce que les conclusions des audiences publiques sur la gestion des résidus au Québec soient connues. On demandait de suspendre tout ça.

Le projet de loi présenté, dont on discute le principe cet après-midi, M. le Président, vient donc modifier la Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets, adoptée en 1993. Cette modification fait en sorte d'interdire l'établissement ou l'agrandissement de lieux d'élimination de déchets, que ce soit d'enfouissement ou d'incinération, qui n'ont pas fait l'objet d'une demande d'autorisation ou d'un avis de projet à la date de son dépôt à l'Assemblée nationale, 1er décembre 1995, cela, afin de donner au Québec le temps nécessaire de réfléchir aux moyens à mettre en place pour mieux gérer les résidus, de donner aussi le temps nécessaire aux promoteurs de projets d'élimination d'adapter leur offre aux nouveaux besoins qui surgiront de la nouvelle façon dont le Québec s'occupera de ses résidus. Dans certains cas, il peut arriver que l'analyse d'une situation particulière nous amène, cependant, à reconnaître la nécessité d'aménager ou d'agrandir un lieu d'élimination dans une région ou une autre. C'est fort possible, et, dans ces cas, où dans tout autre cas particulier d'urgence, la loi permet au gouvernement de les soustraire à l'application de la totalité ou d'une partie de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement. Il faut prévoir, je dirais, une issue de secours.

Les projets pour lesquels il y a eu, avant le 1er décembre 1995, délivrance d'un certificat d'autorisation, ne sont évidemment pas visés par cette interdiction ou par ce moratoire. Il en va de même, aussi, pour les projets qui, au 1er décembre 1995, ont fait l'objet soit d'un dépôt d'avis, soit d'une demande visant à obtenir un certificat, et qui n'ont pas encore fait l'objet d'une décision de la part du gouvernement ou du ministre, accordant ou refusant le certificat demandé. Ça signifie que les projets d'élimination actuellement sous étude au ministère suivront le processus prévu d'évaluation. On a beaucoup réfléchi à toute cette question, mais il s'agit ici d'une décision qui vise à traiter de façon équitable les promoteurs de ces projets. Les entrepreneurs, ou les municipalités dans bien des cas, qui travaillent actuellement à l'évaluation de leurs projets et qui ont engagé des énergies, souvent considérables, en temps, en argent aussi, méritent certainement que nous respections les règles du jeu qui prévalaient jusqu'à aujourd'hui. Ce serait inéquitable de bouleverser les règles du jeu en cours de processus, et on risquerait aussi, probablement, de se retrouver avec des difficultés juridiques. Mais, d'autre part, cependant, je compte bien évaluer chaque projet en fonction des orientations que nous nous sommes données depuis l'application de la Loi sur l'établissement et l'agrandissement de certains lieux d'élimination de déchets.

L'analyse environnementale faite par le ministère prend en compte les recommandations du rapport du BAPE, lorsque ce dernier participe à l'évaluation, qu'il y a eu audiences publiques, et la recommandation que je fais au Conseil des ministres est fondée sur les critères suivants, des critères qui sont généralement reconnus, par exemple: les besoins locaux et régionaux; la protection et la sécurité de l'environnement; les mesures d'atténuation et de compensation possibles en regard des impacts prévisibles; continuité du service à la population; respect de la Politique de gestion intégrée des déchets, de 1989, notamment favoriser la valorisation des déchets plutôt que leur élimination.

À titre d'exemple, le décret autorisant l'agrandissement du lieu d'enfouissement de Lachenaie, dans Lanaudière, tout récent, stipule que l'exploitant doit mettre en place un comité de surveillance formé de représentants d'organismes et de citoyens du milieu. Le Règlement sur les déchets solides est muet à ce sujet-là, donc c'est une condition nouvelle, une exigence nouvelle; la loi le permet. Ce comité doit veiller à ce que les conditions du décret et de la réglementation soient respectées, que toute l'information pertinente soit diffusée à la population. Il y a une garantie financière de près de 9 000 000 $ qui est aussi exigée pour assurer le suivi environnemental du lieu après sa fermeture; c'est ce qu'on appelle le fonds postfermeture, parce qu'un lieu d'enfouissement, M. le Président, quand vous le fermez, ça a des impacts sur l'environnement pendant 30 ans après. Il faut donc assurer un suivi. Ça veut dire des dépenses. Donc, le promoteur doit, en fiducie ou autrement, constituer un fonds postfermeture pour financer les actions et les interventions requises après la fermeture du site. Le Règlement sur les déchets solides actuel ne parle d'aucune façon de cet élément, mais on l'a ajouté au décret.

(17 h 10)

Il y a un programme de contrôle, de suivi environnemental de l'exploitation du lieu qui doit être mis en place également par l'exploitant, et les normes que le promoteur à Lachenaie doit respecter sont nettement supérieures à ce qu'on retrouve dans le règlement. Par exemple, ça doit être des cellules étanches, il faut qu'il traite le lixiviat, qu'il le capte et qu'il le traite, il faut qu'il traite les biogaz. Il va même produire de l'électricité à partir du biogaz. Il va construire un centre de tri. Bon. Donc, les exigences sont beaucoup plus fortes et se retrouvent dans le décret. En quelque sorte, c'est comme si on appliquait ou qu'on intégrait dans les conditions du décret les éléments du futur règlement sur la gestion des matières résiduelles.

Par contre, dans le cas du lieu d'enfouissement de Sainte-Anne-de-la-Rochelle, nous avons refusé la demande. Le Conseil des ministres a dit non. On a dit oui à Lachenaie à certaines conditions, on a dit non à Sainte-Anne-de-la-Rochelle aussi pour, évidemment, des raisons... Parce que nous avons appuyé notre refus d'émettre une autorisation sur des conditions environnementales, mais nous avons aussi tenu compte de l'équité sociale. La région de l'Estrie où est situé ce lieu possède actuellement une capacité d'enfouissement qui peut répondre aux besoins de la région pour plusieurs années, donc il n'était pas requis socialement d'ajouter un volume en autorisant l'agrandissement du site de Sainte-Anne-de-la-Rochelle; ce n'était pas nécessaire. En plus, l'acceptabilité sociale n'était pas très forte suite aux audiences publiques. Le projet ne nous paraissait donc pas créer une situation équitable, puisque les gens de la région auraient eu à subir les inconvénients de l'élimination de résidus provenant de l'extérieur de leur territoire, ce à quoi ils s'opposaient farouchement. On a dit non.

On a dit oui à Lachenaie, avec des exigences très fortes, puis on a dit non à Sainte-Anne-de-la-Rochelle. En d'autres termes, je donne ça comme exemple, c'est de cette façon-là que les autres projets qui sont en cours d'évaluation environnementale vont être traités. On va les traiter de cette façon-là, en tenant compte de la situation, en tenant compte des besoins locaux, des besoins régionaux, des impacts sur l'environnement, en tenant compte aussi du niveau d'acceptabilité sociale. J'ajouterai que nos analyses de projets, donc, vont tenir compte des consensus et des orientations qui vont se dégager aussi de la consultation publique qui s'enclenche au fur et à mesure du déroulement des audiences publiques. On va tenir compte du débat public, en quelque sorte.

Je conclus là-dessus. L'ensemble de ces mesures et engagements fait en sorte que la consultation sur la gestion des résidus au Québec pourra se tenir dans un climat de collaboration qui favorisera des discussions franches, ouvertes, permettant au Québec de décider dans un contexte de développement durable de la meilleure façon d'utiliser les ressources que constituent les matières résiduelles, ce qu'on appelle encore les déchets et ce qu'on va cesser d'appeler les déchets, puisque ça peut devenir dans une très large proportion des ressources, dont les prix, d'ailleurs, sont nettement pas mal plus intéressants, maintenant, qu'il y a quelques années. Je suis donc confiant que cette démarche nous amènera à prendre les meilleurs moyens pour qu'au cours des cinq ou 10 prochaines années nos besoins d'enfouissement diminuent considérablement.

Le présent projet de loi s'inscrit précisément dans cette orientation et engage les promoteurs d'équipement d'élimination, mais aussi toute la population du Québec, à prendre ce virage avec nous. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. Vous avez un droit de parole de 60 minutes à titre de représentant de votre groupe parlementaire. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Je voudrais adresser la parole, pour quelques instants, sur le projet de loi n° 113, suite à la présentation qu'a faite le ministre... Le ministre nous a parlé longuement de la générique, et je m'en réjouis; depuis plus de 14 mois que, de notre côté, on invitait le ministre à aboutir à cette générique-là. Les documents, en lisant leur programme, bien évidemment, étaient prêts depuis longtemps, mais, malheureusement, ça prendra 14 mois. On a finalement brûlé 14 mois, là, et, plutôt que de s'embourber dans ce référendum où, finalement, on réalise maintenant qu'il y a pas mal plus d'environnementalistes au Québec qu'il y a d'indépendantistes, on aurait dû – et on le suggérait au ministre il y a déjà 14 mois – procéder avec ce moratoire, procéder avec cette générique. Bon, bien, finalement, aujourd'hui, le ministre nous annonce la générique. Il l'a fait lundi, il nous l'a expliqué un peu plus aujourd'hui, c'était une belle et agréable présentation.

Il nous propose aussi ce projet de loi n° 113. Je veux d'abord, M. le Président, rappeler la collaboration de l'opposition. Les gens qui nous regardent ont souvent l'impression qu'on est là pour complètement et continuellement bloquer le gouvernement, arrêter... Eh bien, dans ce cas-là, on est tout à fait cohérents. Je veux dire, il y a 14 mois, on a demandé au ministre une générique et, aujourd'hui, parce qu'il est en retard – parce qu'il est en retard – il n'aurait pas pu déposer ce projet de loi si l'opposition n'avait pas voulu. Les règles sont ainsi faites, ce n'est pas à vous que je vais apprendre ça, M. le Président. Et, comme porte-parole de l'opposition, le caucus de l'opposition qui s'est réuni ce matin, d'emblée – d'emblée – a dit: Écoutez, c'est important. Ça fait 14 mois qu'on le demande au ministre; alors, enfin, il veut procéder avec ça, on va lui donner un coup de main et on va le laisser... on va travailler avec lui sur le projet de loi n° 113. Alors, je tiens à dire, là... Une collaboration, d'ailleurs, qu'il a eue de ma part depuis le début, qu'il a eue depuis le début. Quand il veut bien faire avancer l'environnement... Quand c'étaient des projets de loi d'un article, là, et qu'on perdait des journées complètes... Mais, quand c'est quelque chose qui, vraiment, a une implication pour l'environnement, vous allez voir que le porte-parole de l'opposition, là-dessus, va avoir une approche tout à fait dynamique.

M. le Président, ce projet de loi n° 113, il manque un petit peu de Vigoro. Il manque un petit peu de vie dans ce projet-là, dans ce moratoire. Et, là, je ne suis plus sûr si c'est un gel, un moratoire, mais ça manque un peu de vie là-dedans, M. le Président. Et je vais vous expliquer pourquoi, s'il y avait eu un petit peu plus de Vigoro, peut-être bien que, le projet de loi, il serait un peu plus solide, un peu plus fort. Et j'avais l'impression, à écouter le ministre sur son projet de loi n° 113, d'écouter, quand on regarde le projet de loi d'un peu plus près, un dompteur de souris, M. le Président, avec le fouet, la chaise, puis deux, trois souris en avant. Parce que, le moratoire, il aurait pu être sévère et important. Et, là, on aurait eu un vrai dompteur, un vrai dompteur des matières résiduelles, comme il a dit. Là, j'ai l'impression qu'on a un dompteur de souris, quelque chose qui n'est pas mauvais, je le dis tout de suite, c'est mieux que rien – c'est mieux que rien – mais je me serais attendu, là, à un vrai dompteur, un vrai dompteur qui aurait mis de l'ordre dans les matières résiduelles. Ce n'est pas tout à fait ça qu'on va trouver.

Et je tiens à dire tout de suite, et je l'ai dit à deux occasions dans les dernières journées, M. le Président, ce moratoire-là, je vais y souscrire et je vais aussi souscrire à la générique. Non seulement je vais souscrire à la générique, mais je vais y assister le plus souvent possible. J'invite les gens du Québec, qui nous écoutent à cette heure-ci, probablement en prenant leur repas, à participer à ce grand débat de société que sera cette générique. Et j'ai vu trop souvent des consultations, où c'étaient les groupes de pression qui se divisaient le pouvoir entre eux. Et le plus bel exemple, M. le Président, ça a été ce débat que vous avez mené juste avant le référendum, à des fins purement référendaires, celui de la décentralisation. Il fallait aller voir ça, c'était un spectacle extraordinaire, M. le Président. D'un bord, tu avais la MRC qui ne voulait rien lâcher, de l'autre bord, tu avais la gang des maires qui ne voulait rien lâcher, en passant par la commission scolaire, en passant par le CRE, puis le CRD, puis les CLSC. C'était extraordinaire! Un pauvre citoyen qui se ramassait là, il avait quasiment peur. Il disait: Mon Dieu! qu'est-ce qui se passe dans la société?

(17 h 20)

Ici, on aura un grand débat. J'ai dit à Mme Journault, dans une toute petite carte de félicitations, que je pensais que c'était vraiment le débat des années 2000. J'invite la population, pas nécessairement juste les groupes organisés. Faites-vous-en pas, chers citoyens, les groupes organisés, ils sont organisés, ils vont être là. Inquiétez-vous pas pour les firmes d'ingénieurs, inquiétez-vous pas pour les compagnies de ce monde qui sont dans le secteur du déchet, il y a des milliards là-dedans. Inquiétez-vous pas pour la gang des consultants, ils vont tous être là. Inquiétez-vous pas pour les MRC, pour les villes, elles vont toutes être là.

Moi, ce que je voudrais entendre, c'est les gens qu'on retrouve dans nos conseils municipaux et qui vont écouter. On se demande souvent ce qu'ils font là. C'est des citoyens qui ont aussi des impressions de la société. Ces gens-là, on aimerait ça qu'ils soient présents. Et, moi, je le redis, la présidente que le ministre a choisie, elle est extraordinaire à cet égard-là, elle est capable – je l'ai vue dans d'autres débats – d'écouter ces gens qui, souvent, sont coincés entre toutes ces grosses machines, de les écouter, mais avec sincérité, et de reproduire éventuellement ce qu'elle a entendu de ces gens-là. Alors, on va souscrire au moratoire, je vais essayer d'être le plus souvent présent et, troisièmement, j'invite la population à participer.

Mais je reviens à ce projet de loi n° 113, M. le Président. Je parlais de ce dompteur de souris. Pourquoi il est terne, ce projet de loi? D'abord, le ministre nous l'a dit, il y a au-dessus de 100 demandes, en ce moment, dans le ministère qui sont exclues du moratoire. Alors, là, en partant, notre dompteur, il a 100 demandes, il nous les a expliquées: 48 pour des lieux de déchets, 58 pour des sites de déchets secs et puis quatre décrets, etc. Bon. Alors, là, il y en a une centaine qui sont éliminés en partant. Eux autres ne sont pas dans le moratoire, et puis ça va suivre son cours dans la machine. Pendant que la population, elle, sur le terrain, va discuter de ces affaires-là, nos bons fonctionnaires vont autoriser les projets, et puis ça va partir. Alors, là, il y a un problème.

Ensuite, notre dompteur de matières résiduelles, bien, là, il vient d'approuver Lachenaie. Lachenaie, ça, c'est grand comme site. Je vous invite à aller voir ça en avion, vous allez voir que, notre dompteur de souris, il a fait un grand site de déchets. C'est une grande piscine, puis on peut en mettre longtemps, des déchets, là-dedans.

Je suis heureux de voir qu'aujourd'hui il nous dit qu'ils ont mis des conditions, des conditions qui ont été demandées depuis tout temps, le compte en fidéicommis pour la postfermeture. J'aurai des questions à poser au ministre, éventuellement, dans d'autres lieux et dans d'autres commissions, pour ne pas étirer les affaires en fin de session, sur ces comptes en fidéicommis, pour être sûr que l'argent soit bien là quand on arrivera au bout de l'allée. Mais, ça, on ne touchera pas à ça en ce moment. Mais, dans ce moratoire, il vient d'autoriser un site absolument gigantesque.

On entend à travers les branches que le ministre se fait courtiser. Il a le droit, c'est son job. Il est après se faire courtiser sur le projet de la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l'île de Montréal, pour lequel plus de 100 groupes d'environnementalistes sont allés devant le BAPE. Il y a un rapport du BAPE de 326 pages qui disait: Ne touchez pas à ça avec un bâton de 10 pieds. Je vais lui dire plus que ça, j'ai la mauvaise habitude de relire avant de me coucher, presque à tous les soirs, leur programme électoral. J'ai beaucoup de plaisir à relire le programme électoral du PQ. Il y a tellement de choses là-dedans, c'est extraordinaire. Qu'est-ce qu'on y lit sur les incinérateurs? J'ai découvert ça aujourd'hui. On lit, sur les incinérateurs...

Et j'aime ça. Le programme du PQ, il y a bien des choses là-dedans. Trois cents pages, hein, 275 pages. Mais les engagements sur l'environnement, c'était précis, c'était clair. Je vous lis sur les incinérateurs ce que le programme du PQ disait. Écoutez bien ça, M. le Président: «Établir un moratoire sur la construction de...» Non. Même pas un moratoire, dans le cas... Non, non! Hé! «Interdire la construction de nouveaux incinérateurs de déchets solides parce que ce mode d'élimination des déchets est en conflit direct avec la politique des 3R.» Bien, là, arrêtez de vous faire courtiser, M. le ministre. Arrêtez de dire dans les journaux: Peut-être bien, puis peut-être bien pas. Puis il y a 16 maires qui veulent vous rencontrer, puis il y en a un qui est d'accord, puis l'autre qui ne le sait pas. Dites-leur tout de suite que, dans le programme du PQ, les incinérateurs, c'est non; n-o-n, non. C'est clair, c'est précis. Ce n'est pas un long paragraphe, là, M. le Président: «Interdire la construction de nouveaux incinérateurs», l'article 2.20, page 46. Pas besoin de leur en donner plus que ça. Alors, arrêtez de vous faire courtiser, dites-leur non. Les incinérateurs, le BAPE a dit non. Le programme du PQ a dit non. Moi, le ministre de l'Environnement, je vais dire non. Allez-vous-en chez vous, merci beaucoup, bonjour. On passe à d'autre chose. C'est ça que j'aimerais entendre, moi. Mais le moratoire, notre dompteur de souris, il n'ose pas. Il n'ose pas aller aussi loin que ça, M. le Président.

Maintenant, j'aimerais ça, dans ce moratoire-là, qu'on ait un vrai moratoire. Alors, là, il laisse passer les 100 demandes, il vient d'autoriser Lachenaie. Il se laisse courtiser par la gang des incinérateurs et puis, là, dans la loi, il se laisse une porte. Là-dessus, je lui dirai: Moi aussi, si j'étais dompteur, je pense que j'aurais laissé la porte ouverte, parce qu'on ne sait jamais, peut-être bien que... Alors, il se dit: Je vais me garder le droit de rouvrir la loi et puis je vais soustraire les projets, soit en totalité ou en partie, à leur évaluation. Bon, le ministre se garde une discrétion. Moi, je suis d'accord avec ça, si ce n'est que ça appauvrit, ça réduit le rôle de notre dompteur de lions, ici.

M. le Président, dans la loi 101, que le prédécesseur du ministre avait passée, le ministre... On avait passé ça dans une situation un peu semblable. On avait passé ça en fin de session, on avait eu la collaboration de l'opposition. Et, là, c'était qu'on voulait prendre tous les sites et les envoyer aux audiences. Et le ministre n'avait pas hésité, même s'il s'était mis bien des compagnies à dos à l'époque, de dire: Toutes les compagnies devront aller aux audiences, même si elles avaient une manière de droit acquis, finalement, de ne pas aller aux audiences. Alors, quand le ministre me dit, ici: Bien, il y en a 100 dans la machine, puis je vais les laisser là, ils font bien pitié. Il y a quelque chose là-dedans. Mais je lui rappellerai que le ministre de l'Environnement, son prédécesseur, le député de Brome-Missisquoi, mon député, lui, il avait mis ses culottes puis il avait dit: Tous les projets devront aller en audience, même ceux qui pensaient qu'ils avaient un droit acquis là-dessus. Puis, «c'est-u» drôle, tout le monde a écrasé puis tout le monde y est allé, en audience, et puis ça a fini là.

M. le Président, il y a aussi que le ministre semble dire soudainement: Le règlement sur les évaluations environnementales... Ça, il a mis des patins, il a fait des beaux huit sur la glace là-dessus. J'aimerais ça qu'il précise, quand on va aller en plénière un peu plus tard, où en est rendu ce règlement sur les évaluations environnementales. Peut-être qu'on n'aurait pas besoin du projet de loi si notre réglementation, dont il a des épreuves entre les mains... Je les ai moi-même, ces épreuves-là, et Dieu sait que je ne suis pas allé prendre des marches dans son ministère le soir. Ça nous arrive, comme ça, toutes sortes de monde qui veulent nous parler, qui nous envoient toutes sortes de documents, on se met à lire ça, et puis, franchement, les règlements sur les évaluations environnementales sont très avancés. Peut-être que c'était là que le ministre aurait dû aller mais, en fin de compte, il a choisi un autre sentier, celui du moratoire, et je respecte ça.

Maintenant, il nous parlait des 18 balises de la générique. Je les ai lues, vous pouvez bien vous imaginer, M. le Président. Il n'y a rien qu'une affaire qu'il a oublié de nous dire: le grand engagement du Parti québécois. Et peut-être que je devrais le relire, le grand engagement, dans mon livre à moi. Et je vous réexplique que 60 % des déchets du Québec se ramassent dans neuf sites qui sont la propriété d'entreprises privées; 60 % des déchets. Et, si on mettait Miron, qui, lui, est un site public, bien sûr, là, on arriverait à presque 100 % des déchets. Et on sait que Miron, ce n'est pas un exemple à citer: c'est un désastre, c'est dramatique, ce qui se passe là.

(17 h 30)

Mais je ferme le site de Miron pour le moment, je veux vous parler des 60 % des déchets dans neuf sites. Ces neuf sites-là appartiennent à l'entreprise privée, et, encore là, le programme du PQ était très clair, et nulle part dans la générique on retrouve ça. Pourtant, les gens de Drummondville nous ont envoyé une pétition avec 22 000 noms. Les gens de Magog, il y a un an ou deux, sont venus porter une pétition de 10 000 noms ici, au sujet des sites privés. Et on pouvait lire, dans le programme du PQ, encore une fois, que je relis régulièrement, et c'était clair aussi, cet engagement-là: restreindre la propriété des sites d'enfouissement au seul domaine public. Je ne sais pas... Le ministre, là, il nous parle de ses 18 critères, etc. Mais le grand engagement du PQ, le grand engagement de ce groupe-là... Et je vois le député de Vimont qui a collaboré à l'écriture de ce programme du PQ. Lui qui a traité les environnementalistes, dans une commission parlementaire, lui qui a traité les environnementalistes qui voulaient aller à ce grand colloque sur l'énergie... Il leur a dit qu'ils étaient des gérants d'estrade. Ce même député de Vimont, qui a écrit ce programme ou qui a collaboré à écrire ce programme sur l'environnement, M. le Président... Il était là, lui, quand ça s'est écrit. Il était là, il acceptait ça. Où est-ce qu'il est au caucus des députés péquistes, maintenant, quand ils se réunissent? Comment ça se fait qu'il ne se lève pas pour en parler? J'espère que, sur ce projet de loi là, il va venir dire que les sites privés doivent maintenant être du domaine public, c'est écrit à la page 45. Ce n'est pas le parti libéral qui a écrit ça, c'est le PQ, M. le Président.

Alors, M. le Président, le moratoire nous semble correct, et on va y souscrire. Mais on peut se poser des questions sur ces 100 groupes, là, qui sont dans le ministère, auxquels notre dompteur de souris ne veut pas faire face. Qu'est-ce qui arrive au prix de ces sites-là, soudainement, qui seront autorisés? Je pense que c'est absolument extraordinaire, ce qu'on est après consentir à ces 100 compagnies ou sites qu'on va approuver éventuellement dans la machine. Alors, le ministre nous parle d'une équité pour les gens qui sont là. Il dit: Bien, il faut être équitable, ils ont déjà fait beaucoup de travaux. Mais la question que je lui pose sur l'équité: Est-ce que ce n'est pas une iniquité qu'on est après faire? Parce que, au fur et à mesure qu'on va autoriser ces gens-là, est-ce qu'on ne leur donne pas, finalement, une pleine valise d'argent? Parce qu'il n'y en aura pas d'autres, possiblement, après eux. Alors, cette même équité, moi, je me questionne. Je me questionne. Je veux aussi rappeler au ministre qu'on aimerait avoir la liste de ces sites qui sont en étude chez eux. Et on va aller en atelier après, en plénière, et on va demander ces documents-là. On aimerait bien avoir la liste de tous ces sites où il y a en ce moment des demandes.

Alors, nous, on aurait probablement pris une autre avenue que celle-là; le ministre a choisi celle-là. Et je vais vous dire pourquoi on aurait pris une autre avenue, M. le Président, parce que l'avenue qu'on aurait choisie, c'était celle de mettre de la pression sur la générique pour qu'elle arrive le plus rapidement possible. Là, le ministre nous dit: Bien, oui, on a perdu 14 mois avec le référendum. Oui, on va maintenant prendre un an avec la générique, puis, après ça, bien, on va passer à l'action. Moi, je suis obligé de dire au ministre: Entre le moment où vous avez écrit votre programme du PQ – premier semestre 1994 – et le moment où la première mesure sera mise en application – alors, probablement le milieu de 1997, début de 1998 – il y aura eu quatre ans, M. le Président, alors qu'on aurait pu, je pense, en mettant de la pression sur la générique, arriver beaucoup plus rapidement. Maintenant, c'est le choix que le gouvernement a pris. Et je vois trop souvent, dans nos opérations, des longueurs, et puis ça prend bien du temps. Alors, nous, on aurait préféré, bien sûr, que les choses aillent plus vite, y compris le dernier 14 mois qui a été brûlé et durant lequel on n'a pas parlé de déchets, on a parlé de référendum.

Alors, M. le Président, j'arrêterai ici. Nous sommes prêts à aller en commission sur le projet de loi n° 113 et poser une série de questions au ministre sur certains aspects un peu plus techniques du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, il n'y a pas d'interventions. Je vais mettre aux voix le principe du projet de loi. Ah oui! M. le ministre, si vous voulez exercer votre droit de réplique, c'est très bien.


M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: Juste quelques minutes...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous cède la parole, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Brassard: ...pour, je dirais, rétablir les faits. Parce qu'à plusieurs reprises le député d'Orford, dans son intervention... Puis ce n'est pas la première fois qu'il dit ça, mais on a, dit-il, été en retard, on a attendu des mois et des mois. Ce que le député d'Orford devrait se rappeler, c'est qu'avant il y a eu pendant neuf ans un gouvernement issu de sa formation politique, un gouvernement libéral. Et ce débat public sur les déchets était réclamé depuis des années. Les groupes environnementaux, là, dont, il parle, puis on le voit se targuer de leur amitié... Ces groupes environnementaux ont réclamé sans répit, pendant des années, des audiences génériques sur les déchets à son gouvernement, au gouvernement dont il faisait partie. En vain. Le gouvernement faisait la sourde oreille. Il n'a jamais donné suite à cette revendication, à cette demande généralisée.

Quand on est arrivé l'an dernier, en septembre, ça a pris 14... Comme, en 1993, l'ancien gouvernement avait fait inclure une disposition dans le projet de loi n° 101, qui prévoyait des audiences génériques, un débat public – 1993 – quand on est arrivé, en 1994, on s'est dit: Bon, bien, le débat public, les audiences génériques, on va pouvoir les lancer; il doit bien y avoir du travail de fait, la réflexion doit être avancée, peut-être même que le document est prêt. Je l'ai demandé, il n'y avait rien de fait, rien du tout, absolument rien: ni réflexion d'amorcée ni le moindre papier sur les audiences génériques portant sur les matières résiduelles. De telle sorte qu'il a fallu partir de zéro, entreprendre une réflexion, parce que, pour en arriver à un document de cet ordre, qui fait non seulement le point mais qui propose des choses, des pistes, des mesures, il faut réfléchir, il faut vérifier si c'est vraiment la bonne solution, si on est vraiment dans la bonne voie. Alors, il a fallu réfléchir. Le ministère a entamé cette réflexion. Il y a eu plusieurs versions. On a discuté longuement non seulement au ministère, mais à mon cabinet, sur le plan politique, de plusieurs alternatives, de plusieurs solutions, pour en arriver, finalement, à ces propositions.

C'est vrai que le référendum a retardé de quelques semaines ce débat. Je l'admets volontiers, c'est vrai. Parce qu'on aurait sans doute été prêt... Nous étions prêts. Ce document-là était prêt au mois d'août; au mois d'août 1995, il était prêt. Mais le référendum devait avoir lieu. C'est quand même un exercice éminemment démocratique, et ce n'était pas le temps, pendant une campagne référendaire, d'interférer dans le débat référendaire avec un autre débat sur les déchets, les matières résiduelles. Donc, on a attendu après le référendum, puis, maintenant que le référendum est terminé, bien, on enclenche le processus. C'est ce qu'on a fait.

Alors, le retard ne doit pas nous être imputé, le retard doit être imputé à l'ancien gouvernement, qui n'a rien fait pendant des années, absolument rien fait pour permettre ce débat public. Il a fallu tout reprendre à zéro, faire la réflexion, examiner des solutions, faire des propositions, puis rendre public ce document, puis, maintenant, bon, enclencher le débat. Alors, le responsable, il faudrait que le député d'Orford en prenne conscience, il faudrait qu'il regarde dans sa cour... Parce que le député d'Orford, en matière d'environnement, c'est un peu curieux – je termine là-dessus, M. le Président – il fonctionne comme si, avec la constitution du gouvernement du Parti québécois en septembre 1994, c'était le début de l'univers, que la date de constitution du gouvernement du Parti québécois, c'est la date du big-bang. Bien non! Il y a eu un autre gouvernement avant, vous avez été là neuf ans.

Alors, par exemple, dans le rapport du Vérificateur sur la gestion des déchets... Je l'entendais, cette semaine encore, critiquer le gouvernement du Parti québécois, ne prenant pas conscience que ce qu'on retrouve dans le rapport du Vérificateur, c'est d'abord et avant tout la critique de son gouvernement, parce que ça fait uniquement un an qu'on est là. Alors, il est évident que le Vérificateur a examiné la gestion des déchets sur une période de cinq ans, donc, d'abord et avant tout, sur la période où, eux, étaient au gouvernement. Il n'avait pas l'air de se rendre compte de ça, il avait l'air de considérer que tout commence avec le gouvernement du Parti québécois. Non. Il y a eu un gouvernement avant le nôtre, c'est le vôtre. Il faudrait que le député d'Orford en prenne conscience. Merci.

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je propose que... Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

M. Chevrette: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Je fais motion pour que vous vous transformiez en plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 113.

(Suspension de la séance à 17 h 41)

(Reprise à 17 h 46)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion que nous venons d'adopter, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets.

Nous allons débuter par quelques remarques préliminaires de M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Brassard: M. le Président, je viens de faire une longue intervention sur le principe, je n'ai rien à ajouter d'autre.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, je m'en vais mettre en discussion l'article 1 du projet de loi.

M. Brassard: À moins que le député ait des choses à dire aussi...

Le Président (M. Brouillet): Oui, vous pouvez faire quelques remarques.

M. Benoit: Oui, bien, juste répondre au ministre qui, il y a quelques minutes, disait que ça a été le grand bang quand ils sont arrivés. Juste rappeler au ministre que j'ai pris un incident dans le rapport du Vérificateur général et que j'ai fait bien attention d'en trouver un où on parlait des 12 derniers mois du gouvernement PQ, où on nous parlait qu'il y avait eu 342 000 000 de pages de photocopies, dans les 12 derniers mois, qui avaient été servies dans ce ministère-là, dont seulement 10 % étaient du papier recyclé. Alors, oui, il y a bien des choses qui se sont passées avant, mais j'ai pris un exemple, dans mon discours, la dernière fois – pas aujourd'hui – sur les 12 derniers mois. Alors, je tiens à préciser au ministre que ce qui s'est passé avant... Ça me tente un peu de faire comme son futur chef, de dire: Les études Le Hir, ça, ce n'est pas moi qui m'en suis occupé. Alors, moi, je parle maintenant de ce qui se passe, et l'exemple que j'ai donné, c'étaient les 300 000 000 de feuilles de photocopies dans les 12 derniers mois, sous sa gouverne, finalement.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): Alors, nous prenons l'article 1. M. le ministre, avez-vous quelques remarques sur l'article 1?

M. Brassard: Bien, ça, c'est ce qu'on appelle... L'article 1, c'est ce qu'on a l'habitude d'appeler, mais le terme ne se retrouve pas dans le projet de loi, mais ce qu'on a l'habitude d'appeler «le moratoire». C'est-à-dire, donc, à partir du 1er décembre 1995, on ne reçoit plus de projets d'établissement ou d'agrandissement de lieux d'élimination jusqu'à, on le verra tantôt... La durée de ce moratoire, on verra que c'est jusqu'à ce que les dispositions du nouveau règlement sur les matières résiduelles soient en vigueur. À partir du moment où ça va être en vigueur, le moratoire va prendre fin. Mais c'est le moratoire, et ça porte sur évidemment trois types de lieux d'élimination: les lieux d'enfouissement sanitaire, ou les LES, les dépôts de matériaux secs et aussi les incinérateurs de déchets solides.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford, pour quelques remarques.

M. Benoit: Oui, quelques questions au ministre. La première: Dans le document de la générique... Et vous comprendrez qu'on a reçu le document de la générique, nous aussi, lundi seulement, et on a eu deux autres projets de loi, alors on doit le relire et le relire pour bien comprendre tout ce qui est là-dedans. Mais est-ce que je comprends que, dans la générique, vous faites déjà un choix où les dépôts de matériaux secs doivent éventuellement être fermés complètement?

(17 h 50)

M. Brassard: Ça fait partie des propositions. Les propositions, on verra à partir du débat s'il y a un consensus là-dessus. Nous, on pense qu'il y a une si forte proportion de matériaux secs qui peut être recyclée, récupérée, en particulier les matériaux issus de la construction, qu'en fermant les dépôts de matériaux secs pour l'avenir on va inciter fortement à la récupération de ce genre de matière, les matériaux secs, puisque ce qui se passe actuellement, c'est que c'est évident que ça coûte tellement peu d'enfouir des matériaux secs dans des dépôts de matériaux secs, le coût d'enfouissement est tellement bas – pas mal plus bas que dans les lieux d'enfouissement sanitaire – que personne n'a intérêt, personne n'est motivé, d'aucune façon, à récupérer ce genre de matières et à les recycler. À partir du moment où on ferme ce type de lieu d'élimination, ça va évidemment augmenter le coût parce que, là, ils vont être obligés d'aller dans des lieux d'enfouissement sanitaire, des LES, où les coûts sont pas mal plus élevés. Alors, là, l'incitatif va être beaucoup plus fort pour vraiment faire de la récupération et du recyclage de ce qu'on appelle les matériaux secs, particulièrement les matériaux issus de la construction. Or, c'est dans cet esprit-là qu'on fait cette proposition-là. On verra quel consensus va s'établir là-dessus, mais il y a un consensus. Si elle est bien accueillie, bien reçue, cette proposition-là, bien, c'est dans cette direction-là qu'on va s'engager.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui, M. le Président. Je suis tout à fait, je pense, de prime abord, d'accord avec cette approche-là des choses, si ce n'est qu'il y a un délai d'une couple d'années avant qu'on arrive à ça. Est-ce qu'il n'aurait pas été très facile, via votre réglementation, de tout simplement permettre la récupération dans les dépôts de matériaux secs? On me dit en ce moment qu'on est obligé d'enterrer ça. Pour en avoir visité quelques-uns, on est obligé d'enterrer ça à toutes les semaines ou à tous les mois, «God knows», et que même des individus, des groupes de travailleurs qui voudraient récupérer dans ces dépôts-là en ce moment, c'est bien compliqué, parce que ce n'est pas évident, la norme et le critère. Alors, est-ce qu'il n'aurait pas été très simple, si c'est à ça qu'on veut arriver, fermer les matériaux secs, éventuellement, on y arrivera après la générique, mais, pour le moment, qu'on permette, juste en changeant deux, trois virgules dans un règlement, que les gens s'organisent et qu'ils puissent récupérer ces matériaux secs?

M. Brassard: Je suis entièrement d'accord avec le député, M. le Président, que c'est tellement simple, aussi, d'amender le règlement actuel sur les déchets solides pour permettre ça qu'on va le faire. On n'attendra pas la fin des génériques pour faire cet amendement-là, puis rendre possible, rendre légale la récupération des matériaux secs sur les lieux mêmes des dépôts de matériaux secs. Moi, quand j'ai appris ça, j'ai trouvé ça tellement absurde, là, que... C'est tellement simple. Il y a un amendement en préparation pour amender le règlement actuel sur les déchets solides, pour permettre, justement, que puisse se faire de la récupération sur les lieux mêmes, ce qui n'est pas possible actuellement. Et il n'y a pas de raison qu'on attende le futur règlement sur les matières résiduelles pour ça; on va le faire dans les semaines qui viennent.

M. Benoit: Alors, je dois comprendre, M. le Président, qu'on a un engagement du ministre à rouvrir sa réglementation rapidement pour permettre la récupération, sur les sites de dépôts secs, de matériaux qui seraient là?

M. Brassard: Oui, monsieur, vous comprenez très bien.

Le Président (M. Brouillet): Bien. Je vous remercie. Alors, l'article 1 est-il adopté?

M. Benoit: Non, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Excusez. M. le député d'Orford.

M. Benoit: L'article 1. Il y a aussi les incinérateurs de déchets solides, là. Est-ce que je peux en savoir un peu plus là-dessus, M. le ministre, où on s'en va? Parce que, M. le Président, je m'excuse, mais, ça, c'est un des angles qui vont être les plus importants dans tout notre débat. Les sites de déchets, bon, on les connaît, etc. L'incinérateur, je vous avouerai qu'il y a énormément de pression, autant sur le ministre que sur moi, des deux côtés, d'ailleurs, et j'ai relu l'engagement du ministre là-dessus, dans son programme électoral, et je voudrais savoir où on en est dans le débat des incinérateurs ou de l'incinérateur, parce que je pense que le débat porte surtout sur un, là.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Brassard: Oui. Vous faites allusion, sans doute, au projet de la RIGDIM. La procédure d'évaluation est complétée. Elle a été suspendue pendant un certain nombre de mois, à la demande du promoteur du temps du gouvernement précédent. Quand on est arrivé au pouvoir, là, peu de temps après, ils ont demandé de nouveau de reprendre l'analyse environnementale. Comme le promoteur le demandait, je pense qu'il faut donner suite. On a repris l'analyse. Donc, la procédure est complétée. Cependant, vous savez très bien que c'est un projet, disons, controversé au sein même – c'est du moins, je dirais, la conclusion à laquelle beaucoup, beaucoup arrivent – de la RIGDIM.

J'ai reçu, il y a quelque temps, il y a quelques jours, une lettre signée par 16 maires sur 26. Il y a 26 municipalités qui font partie de la RIGDIM – il y a Montréal-Nord et Montréal qui n'en font pas partie – 16 maires sur 26 me demandaient de surseoir à toute décision sur le projet déposé en 1993 et qui avait franchi toutes les étapes de la procédure d'évaluation environnementale. Donc, je sursois. C'est clair que le gouvernement n'ira pas prendre une décision ou adopter un décret, quelle que soit la nature du décret, alors qu'au sein de l'organisation de la Régie il y a une forte majorité de maires qui demandent au gouvernement de surseoir. Donc, je sursois.

Il est supposé y avoir... Je pense que c'est ce soir qu'il y a une réunion formelle de la Régie... Je pense que c'est ce soir.

Une voix: Oui, c'est ce soir.

M. Brassard: Il y a une réunion formelle. Samedi, il y a eu une réunion d'information; ils ont été plusieurs heures à délibérer ensemble. Là, il y a une réunion formelle, ce soir, publique. Je ne sais pas ce qui va en ressortir. C'est évident que c'est pour discuter de leur projet. Alors, j'attends. J'attends.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Merci, M. le ministre.

M. Benoit: Oui.

Le Président (M. Brouillet): M. le député d'Orford.

M. Benoit: M. le ministre, j'imagine que, quand ces gens-là vous rencontrent, vous leur faites part que vous avez un engagement, dans votre programme, qui est très sévère à cet égard-là, qui est très clair. Je vous l'ai lu tantôt: «Interdire la construction de nouveaux incinérateurs de déchets solides parce que ce mode d'élimination des déchets est en conflit direct avec la politique des 3-R (réduction, réutilisation, recyclage).» L'article 2.20, page 46 de votre programme.

Qu'est-ce qu'ils vous disent, ces gens-là, au même moment où ils vous demandent de leur permettre d'aller de l'avant? Parce qu'il y en a un, groupe... Vous nous parlez de 10 qui sont contre, mais est-ce que je dois comprendre qu'il y en a aussi un, groupe, qui est pour? Ça ne règle pas le débat, ça, quand on leur dit ça? Ils continuent à insister, à revenir?

M. Brassard: M. le député, il y a le programme de mon parti que vous citez, pour lequel j'ai beaucoup de respect, n'est-ce pas – ha, ha, ha! – mais, comme ministre de l'Environnement et de la Faune, moi, j'ai des lois à appliquer aussi; entre autres, une loi qui dit que, quand il y a un projet concernant la gestion des déchets, concernant les déchets, qui est soumis à mon ministère, projet portant sur l'élimination soit par enfouissement ou par incinération, quand il y a un projet de cette nature, la loi m'oblige à faire en sorte que ce projet-là puisse franchir toutes les étapes de la procédure. Puis, parce que, dans mon programme, il y a cette disposition que vous venez de lire, je ne peux pas dire: Mon programme est ceci, donc j'arrête, j'interromps, je mets un terme et je suspends la procédure. Il faut que je respecte les lois.

Alors, il y a un projet venant de la RIGDIM, qui comporte un incinérateur. Je suis contraint par les lois de faire en sorte que ce projet-là franchisse toutes les étapes de la procédure. Je ne peux pas l'arrêter. Je ne peux pas l'arrêter parce que, dans le programme de mon parti, il y a cette disposition-là que vous venez de lire. Je me ferais... Ha, ha, ha! Bien, écoutez, si j'arrêtais ce projet-là, je dirais: Compte tenu du programme du parti, là, le projet de la RIGDIM, j'arrête tout. Fini! Je pourrais me retrouver, ou le ministère, le gouvernement pourrait se retrouver devant les tribunaux puis être accusé de ne pas avoir respecté les règles du jeu, de ne pas avoir respecté les dispositions de la loi sur la procédure d'évaluation environnementale.

(18 heures)

Et le gouvernement aura aussi une décision à prendre, dépendamment du résultat des réunions de la RIGDIM. Je ne sais pas ce qui va arriver ce soir, je ne sais pas comment... Est-ce qu'ils vont décider de tout arrêter ou est-ce qu'ils vont refaire une majorité ou un consensus sur le projet? Je l'ignore. Je sais que, au sein de la Régie, il y a des opposants au projet, comme le maire de Saint-Léonard, par exemple, c'est connu.

M. Benoit: Les environnementalistes.

M. Brassard: Oui, puis aussi des groupes qui se sont opposés au projet devant la commission du BAPE, 100 groupes.

Une voix: Comme le maire de Verdun.

M. Brassard: Oui. Mais il y a aussi des partisans du projet. Puisqu'il a été présenté, il y a donc des partisans du projet, dont le président de la Régie, le maire Leduc, de ville LaSalle, puis il y en a d'autres aussi. On verra. Je ne sais pas, je vous avoue que je suis dans l'incertitude. Qu'est-ce qui va arriver du projet? Ça dépend des débats au sein même de la Régie.

M. Benoit: Vous avez parlé, dans votre présentation, M. le Président... Le ministre a parlé de quatre décrets le 1er décembre. Les oreilles m'ont levé un peu, j'étais au courant d'un décret, de Lachenaie. Quels sont les trois autres décrets dont le ministre nous parle depuis le 1er décembre?

M. Brassard: Celui de Sainte-Anne-de-la-Rochelle...

M. Benoit: Oui. Ah! très bien, oui.

M. Brassard: ...j'ai parlé d'eux. C'est un refus.

M. Benoit: O.K. Oui.

M. Brassard: Un DMS de Sainte-Julienne. Trois...

M. Benoit: Qu'est-ce que c'est, un DMS?

M. Brassard: Pardon?

M. Benoit: Un DMS?

M. Brassard: C'est un dépôt de matériaux secs.

M. Benoit: Ah! O.K.

M. Brassard: À Sainte-Julienne.

M. Benoit: Excusez, j'ai de la misère avec les abréviations.

M. Brassard: C'est vrai qu'on développe des jargons.

Le Président (M. Brouillet): Étant donné l'heure présentement, je dois avoir votre consentement.

M. Brassard: ...Ah! Communauté urbaine de Montréal, c'est pour les boues des stations d'épuration. Ça fait quatre.

Le Président (M. Brouillet): Excusez, M. le ministre et M. le député, étant donné l'heure, je dois avoir un consentement pour prolonger au-delà de 18 heures.

M. Brassard: Pour moi, pour ma part, oui. Ça dépend de l'opposition. Moi, je consens à poursuivre.

Le Président (M. Brouillet): M. le député d'Orford, vous acceptez qu'on prolonge quelques minutes au-delà de 18 heures?

M. Benoit: Oui, mais je ne suis pas sûr qu'on va être capable de se rendre à la fin. On a sept articles. On a fait un article en 15 minutes, M. le Président. Moi, je n'ai pas de problème, là. J'ai toute la vie devant moi, je suis tellement jeune, mais je ne suis pas sûr que... Enfin, comme vous voulez. Si le ministre veut terminer son projet, on peut le terminer, mais je ne suis pas sûr que ça va être quelques minutes, ça peut prendre un peu plus de temps que ça.

M. Brassard: On peut prendre une demi-heure encore, ça ne me dérange pas.

Le Président (M. Brouillet): Écoutez, on va poursuivre, et si ça prend trop de temps...

M. Gautrin: M. le Président, est-ce qu'on peut s'entendre pour poursuivre jusqu'à 18 h 20, par exemple? Si jamais... Et...

M. Brassard: Oui, 18 h 20 ou 18 h 30.

M. Gautrin: ...ou jusqu'à...

M. Brassard: On peut prendre encore une demi-heure.

M. Gautrin: Et, à 18 h 30, si jamais on n'a pas fini...

M. Brassard: On avisera.

M. Gautrin: ...bien, là, on revient en arrière et on...

Le Président (M. Brouillet): Écoutez, on se donne 18 h 30 au plus tard et on décidera si on prolonge à ce moment-là, sinon on arrêtera.

M. Brassard: D'accord.

Le Président (M. Brouillet): Donc, pour le moment, on se donne, si vous voulez... On décide jusqu'à 18 h 30.

M. Brassard: D'accord. Si le député est d'accord.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que l'article 1 est adopté? Nous ne l'avons pas encore adopté.

M. Benoit: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 1 est adopté. L'article 2. M. le ministre.

M. Brassard: Oui. C'est l'issue de secours, en quelque sorte. Ça permet au gouvernement de lever l'interdiction qu'on retrouve à l'article 1, si on juge que, dans une région donnée, la situation est telle qu'on risque de se retrouver avec un manque de capacité d'enfouissement. C'est une possibilité. Est-ce que ça va arriver? Je ne saurais pas vous le dire. Je ne suis pas en mesure de vous dire que ça va inévitablement arriver, mais on s'est dit: C'est une possibilité, possibilité que, dans une région donnée – je donne ça juste comme hypothèse – il y ait des lieux d'enfouissement qui arrivent au bout de leur durée de vie puis qui soient obligés de fermer, et que, compte tenu du volume de déchets qui s'enfouit dans cette région, on se rende compte que la capacité d'enfouissement est inférieure, est insuffisante. C'est une possibilité. Alors, à ce moment-là, on se dit: Si on a un moratoire sans la moindre porte de sortie, on risque d'être obligé de revenir devant l'Assemblée nationale pour obtenir... On se dit: Mettons cette issue de secours, cette soupape de sécurité tout de suite, et on pourra l'utiliser si la situation se présente. Mais je vous dirai que, personnellement, là, quand on fait un survol des capacités d'enfouissement dans les régions puis de ce qu'il peut résulter aussi comme capacité d'enfouissement des projets déjà sous analyse, ça m'étonnerait beaucoup qu'une situation comme celle-là se produise. Mais vaut mieux la prévoir. À ce moment-là, le projet de loi nous permettra de parer au plus pressé puis d'ajouter une capacité d'enfouissement pour faire en sorte que la région puisse disposer de ses déchets puis les éliminer correctement.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Merci, M. le ministre. M. le député d'Orford.

M. Benoit: Vous allez plus loin que juste vous donner la permission...

M. Brassard: Oui.

M. Benoit: ...de permettre un site...

M. Brassard: Oui.

M. Benoit: Vous avez aussi la permission, si je comprends bien cet article, de suspendre les audiences...

M. Brassard: De le soustraire à la procédure d'évaluation environnementale...

M. Benoit: ...de suspendre la procédure ou une partie de la procédure.

M. Brassard: ...pour des motifs d'urgence.

M. Benoit: J'étais pour vous demander les cas possibles où ça devait, où, possiblement entre maintenant et la fin de 1998... parce que je pense que c'est à peu près le temps que ça va prendre avant que la générique soit déposée, puis les recommandations, puis qu'on commence à mettre tout ça en application... On va être rendus quelque part en 1998. Ma prochaine question était: Quels sont les cas possibles? Je pensais à chez vous, entre autres.

Vous me dites: Bon, bien, quand je regarde ça, je ne pense pas qu'il y en ait, des cas. On peut peut-être prendre le cas dans votre région en particulier. Effectivement, dans les deux ou trois prochaines années, est-ce qu'il n'y a pas un sérieux problème là-bas?

M. Brassard: Quoique, M. le député, dans ma région, il y ait maintenant deux projets qui sont en processus d'évaluation environnementale. Il y en a maintenant deux, un qui est tout près d'être envoyé au BAPE, puis un autre... Ça ne tardera pas non plus, parce que son étude d'impact est près d'être complétée. Alors, là, il y en a deux, ce qui n'aurait pas été le cas il y a un an.

L'urgence, bon, c'est parce que, si, en soumettant un projet à toute la procédure d'évaluation environnementale, compte tenu des délais que ça implique, on se rend compte que, là, on n'arrivera pas à temps puis qu'on va être en carence de capacité d'enfouissement, bien, là, c'est évident, à ce moment-là, qu'on pourra invoquer l'urgence puis soustraire à la procédure un projet, ce qui, évidemment, ne veut pas dire que ce projet-là ne sera pas assujetti à des normes très sévères quant à l'étanchéité des cellules, au captage des eaux de lixiviation. Ça ne veut pas dire qu'on va revenir aux dépotoirs d'antan. Ce n'est pas ça que ça signifie, mais ça veut dire que, à ce moment-là, le gouvernement pourrait le soustraire à la procédure.

M. Benoit: Est-ce que cet article-là vous donne le droit, M. le ministre... Je comprends que vous avez le droit de piger dans les projets qui sont déjà dans l'appareil, vous avez cité ceux dans votre coin de pays, très bien, mais est-ce que ça vous donnerait aussi le droit d'aller au-delà du moratoire et d'aller chercher un nouveau projet qui n'est pas déjà dans la liste des 100 et quelques projets à l'intérieur du ministère?

M. Brassard: Les projets qui sont déjà actuellement à l'intérieur du ministère, oui. Effectivement, la réponse, c'est oui; c'est oui.

M. Benoit: Alors, cet article-là défait le moratoire complètement sur tout projet. C'est ce qu'il faut que je comprenne?

M. Brassard: Quand, dans une région donnée, l'analyse de la situation nous porte à conclure qu'on va se retrouver ou qu'on est déjà en situation de carence de capacité d'enfouissement et, là, qu'on se retrouve avec un volume de déchets dont on ne sait pas quoi faire ou qu'on serait obligé d'exporter, mais, là, avec toutes les conséquences que ça entraîne et les levées de boucliers... On l'a vécu dans ma région. Quand on a évoqué l'hypothèse qu'on aille à Saint-Tite, ça a créé presque une insurrection de part et d'autre. Il a fallu rapidement régler le problème par des négociations d'urgence. Alors, donc, oui, mais, encore une fois, quand on regarde l'ensemble des projets actuellement sous évaluation, qui se répartissent un peu partout à travers le Québec, moi, je pense que c'est une situation qui risque peu de se produire.

M. Benoit: Est-ce que c'est possible que cette commission ait le dépôt, M. le ministre, de la liste de tous ces projets que vous avez chez vous? On en connaît un bon nombre. Est-ce qu'il est possible que nous ayons le dépôt de cette liste pour...

M. Brassard: De tous les projets, là, dont j'ai parlé, les quelque 100 projets et plus, là? Oui? Oui.

(18 h 10)

M. Benoit: Très bien.

M. Brassard: Je pourrais la déposer, d'ailleurs, M. le Président. J'ai la liste, par région, des projets de lieux d'enfouissement sanitaires et j'ai la liste aussi, par région, des projets de dépôts de matériaux secs, avec la capacité, le volume annuel, le volume total, la localisation, le nombre d'années et l'étape, aussi, dans la procédure.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre... nous allons attendre d'être revenus en plénière...

M. Brassard: Ah oui?

Le Président (M. Brouillet): ...pour faire le dépôt...

M. Brassard: C'est-à-dire en...

Le Président (M. Brouillet): ...à l'Assemblée, oui, pas en plénière, excusez.

M. Brassard: Pas en plénière. On l'est déjà, en plénière.

Le Président (M. Brouillet): Oui, on est en plénière. Quand nous serons revenus à l'Assemblée...

M. Brassard: Ah oui!

Le Président (M. Brouillet): ...pour faire le dépôt, parce que, en commission...

M. Brassard: Pas en commission.

Le Président (M. Brouillet) : ...il n'est pas prévu qu'on puisse recevoir des dépôts de documents.

M. Brassard: Très bien.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Brassard: Mais j'ai ça.

M. Benoit: Je voudrais être sûr que le dépôt se fasse, là, qu'on...

Le Président (M. Brouillet): Vous nous le rappellerez tantôt...

M. Benoit: Très bien.

Le Président (M. Brouillet): ...si jamais, quand on sera revenu en plénière. Pas en plénière, excusez, quand on sera revenu à l'Assemblée.

Est-ce que l'article 2 – c'est ça, nous étions sur le 2 – est adopté?

M. Benoit: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): L'article 2 est adopté sur division.

L'article 3.

M. Brassard: L'article 3, c'est cet article qui, évidemment, indique que les projets qui sont actuellement en demande d'autorisation, donc qui sont parvenus à l'une ou l'autre des étapes de la procédure d'évaluation environnementale, que ces projets-là ne sont pas visés par le moratoire ou l'interdit de l'article 1, donc qu'ils suivent leur cours. C'est évident qu'on s'est posé la question dès le départ, quand on a discuté du moratoire au ministère. C'est que: Est-ce qu'on peut inclure dans le moratoire les projets déjà sous analyse? Après examen puis surtout après que nos juristes eurent examiné le problème, on en est arrivé à la conclusion que ce n'était pas possible, parce qu'on se serait retrouvé avec... on pourrait quasiment appeler ça des injustices à l'égard des promoteurs privés ou publics qui ont... Sur la base de la loi 101, adoptée en 1993, donc sur la base de cette loi-là, ils ont présenté des projets, ils les ont soumis à l'évaluation environnementale, ils ont dépensé de l'argent pour faire une étude d'impact. Bref, ils ont pris connaissance de règles du jeu. Ils se sont soumis à ces règles du jeu. Il serait injuste et ce serait un manque d'équité si, en cours de cheminement de leur projet, on leur disait maintenant, en vertu d'une loi adoptée par l'Assemblée nationale: Les règles du jeu, là, que vous avez accepté de respecter, on vous annonce que c'est terminé, on les fait disparaître. Maintenant, votre projet, là, même si vous avez dépensé de l'argent pour une étude d'impact puis que vous avez fait beaucoup d'efforts pour le faire avancer, le faire cheminer, on vous dit tout de suite: Mettez-le de côté, c'est fini, il y a un moratoire qui tombe dessus.

Nos juristes nous disent: Si vous faites ça, là, dans une loi, vous allez vous retrouver sans aucun doute devant les tribunaux avec des poursuites pour dommages et intérêts, déni de justice, sans aucun doute. Donc...

M. Benoit: N'ayant pas de formation juridique, et Dieu m'en protège...

M. Brassard: Moi non plus. Je ne suis pas un juriste non plus.

M. Benoit: Dans le projet de loi 101, le ministre Paradis, à l'époque – et j'avais collaboré à ce projet de loi avec votre consoeur dont nous avions eu toute la collaboration...

Je vous rappelle les faits. À l'époque, un bon nombre de compagnies pouvaient ouvrir un site sans aller avec toute la panoplie d'études, etc. Le ministre s'est tenu debout puis il a dit: À partir de maintenant, tous les projets devront aller devant les audiences, etc. Ce qui était bon à l'époque... Je comprends qu'il ne les empêchait pas d'ouvrir, mais il les obligeait... Eux prétendaient qu'ils avaient un droit acquis. Du jour au lendemain, ils n'avaient plus de droit acquis, ils devaient aller devant les audiences, etc.

Est-ce qu'il n'y a pas un parallèle à faire entre l'article 3 et le projet de loi 101? Puis, encore une fois, je n'ai pas de formation juridique. Est-ce que ce n'est pas la même situation? Et pourtant, dans le cas de la loi 101, on n'en a pas eu, de recours. Les compagnies ont bien fait les gorges chaudes en nous disant qu'elles avaient des droits acquis, puis c'était ci, puis c'était ça, puis elles ne voulaient pas aller devant le BAPE, mais, entre vous puis moi, elles y sont toutes allées, puis, bon, il y en a encore 100 dans la machine chez vous.

Je ne vois pas trop, trop la différence entre votre article 3 et le projet de loi 101, où on a dit: Toutes les compagnies vont y aller, bingo! on va passer à autre chose, alors qu'ici, bien, on dit: Ceux qui sont déjà là... Et je vous l'ai dit tantôt, quand j'ai parlé du dompteur de souris, c'était cet aspect de l'article 3 qui me fatiguait. Je veux dire, on fait un moratoire, mais on fait un moratoire sur des nouvelles patentes qui pourraient arriver. Celles qui sont déjà là, on ne les met pas dans le moratoire. Le ministre Paradis, lui, m'avait semblé se tenir debout grandement là-dedans. Est-ce qu'il n'y a pas moyen de faire la même chose que le ministre Paradis à l'époque?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Brassard: Bien, c'est différent, parce que, à l'époque, c'est vrai qu'on modifiait les règles du jeu.

M. Benoit: En cours de route.

M. Brassard: Oui, très juste, en cours de route on modifiait les règles du jeu, mais ce n'était pas un interdit. On augmentait les exigences, on alourdissait les exigences, les conditions pour obtenir une autorisation, mais on ne les interdisait pas. Ce n'était pas le moratoire, ce n'était pas l'interdit. Donc, effectivement, à ce moment-là...

Puis, d'ailleurs, il y a aussi un bon nombre de projets qui ont été soustraits, qui ont été maintenus sous l'ancienne procédure. Je l'ai sous les yeux, le projet de loi, l'article 2, on prévoyait que, lorsqu'un projet avait fait l'objet d'une enquête ou d'un rapport du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement en vertu de l'article 6.3 de la Loi sur la qualité de l'environnement, là il était soustrait à l'obligation de préparer l'étude d'impact. Donc, il y avait eu quand même un bon nombre d'exemptions. Mais il reste que la grande différence entre le projet de loi qu'on étudie présentement puis la loi 101, c'est que la loi 101 accroissait les exigences, modifiait les règles du jeu en les rendant plus sévères, mais que les projets pouvaient quand même aboutir, ça pouvait quand même se conclure par des autorisations d'établir ou d'agrandir les lieux d'enfouissement.

Dans le projet qu'on étudie présentement, ce n'est pas la même chose. Là on dit: C'est fini, il n'y en aura plus. C'est l'interdit, c'est le moratoire. Donc, la situation est différente, et, à ce moment-là, ce que nos juristes...

M. Benoit: Est-ce que je dois comprendre...

M. Brassard: ...nous disent, c'est qu'on peut se retrouver devant... Enfin, certains promoteurs pourraient considérer que c'est un déni de justice puis réclamer des dommages-intérêts.

Le Président (M. Brouillet): M. le député d'Orford.

M. Benoit: Est-ce que je dois comprendre, et je pense que c'est un point névralgique du projet de loi, qu'à partir du moment... Prenons un cas précis. Vous autorisez, dans un mois et demi, un site en quelque part, là, dans le village de Saint-Tite. Est-ce qu'il y a en quelque part dans tout ce que vous allez autoriser... Dans la générique, ce n'est pas évident, de la façon que vous le dites. Est-ce qu'il va y avoir ce que je pourrais appeler une clause évolutive? C'est-à-dire que, oui, tu autorises le projet avec, bon, certains critères, normes de compte en fidéicommis, puis tout le «outfit»; ça, c'est très bien. Mais est-ce qu'on peut aussi penser, M. le ministre, que vos fonctionnaires vont avoir une clause évolutive où tu dis au gars: Écoute bien, tu as eu un avantage que les autres n'ont pas, et, au fur et à mesure, pendant le décret – parce qu'on va arriver avec des conclusions dans ce décret-là, les nouveaux sites qui vont ouvrir vont être pris avec les conclusions de cette grande enquête – toi aussi, tu sera pris, dans deux ans, et tu devras te mettre aux nouvelles normes, finalement? Est-ce qu'on peut penser qu'il y aura une clause évolutive et...

De toute façon, ces gens-là veulent tellement en ouvrir, des sites, qu'ils sont prêts à peu près à n'importe quoi, il faut juste leur dire à quoi, nous autres, on est prêts. Est-ce qu'on peut penser qu'on peut aller aussi loin que ça?

(18 h 20)

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Brassard: Oui, oui, tout à fait, et on n'a pas besoin de dispositions législatives nouvelles, parce que, dans la loi 101 dont on parle, il y a une disposition qui va continuer de s'appliquer qui permet cela: c'est l'article 3.

M. Benoit: Après la générique.

M. Brassard: Oui... Pendant. L'article 3 du projet de loi 101 dit que le gouvernement peut fixer, dans ce certificat – certificat d'autorisation – des normes différentes de celles prescrites par le Règlement sur les déchets solides, notamment en ce qui a trait aux conditions d'exploitation d'établissements, d'exploitation et de fermeture du lieu d'enfouissement ou dépôt de matériaux secs visés par ce projet.

C'est un peu ce que j'expliquais tout à l'heure dans mon intervention. Le Règlement sur les déchets solides, actuellement, on peut dire: Il est inapproprié – ha, ha, ha! – c'est le moins qu'on puisse dire. Il est inapproprié. Il faut le remplacer par un nouveau. Mais, par contre, la loi 101, l'article 3 permet au gouvernement d'imposer des normes et des conditions plus sévères ou différentes de celles qu'on retrouve dans le Règlement sur les déchets solides.

M. Benoit: Dans le temps?

M. Brassard: Aujourd'hui. Maintenant.

M. Benoit: Non, mais c'est ça qui est ma question. Je comprends aujourd'hui que si vous émettez un permis, vous pouvez exiger toutes sortes de normes.

M. Brassard: Oui.

M. Benoit: Mais le sens de ma question... Ce n'est pas aujourd'hui, ça. Je comprends bien ça qu'aujourd'hui, si on émet un... Comme vous avez fait à Lachenaie, là. Vous leur avez dit: Voici, on veut tel... Ça, c'est très bien. On n'a pas de problème avec ça. Moi, je vous dis que, dans deux ans, quand on aura fini la générique, il y aura une évolution de la pensée, il y aura une évolution de la norme.

M. Brassard: Il va y avoir un nouveau règlement.

M. Benoit: Il y aura un nouveau règlement. Est-ce que le permis qui aura été émis pour Saint-Tite la semaine prochaine, à titre d'exemple, sera obligé de se mettre aux nouvelles normes après la générique? Parce que, finalement, on leur donne un avantage, à ces gens-là, pendant le moratoire, eux, de pouvoir passer à travers le filet. Puis je comprends, là, pour les raisons légales que vous implorez. Mais il y a peut-être un contrepoids à ça, puis c'est celui-là de lui dire: On te laisse passer à travers le filet, tu vas commencer à faire de l'argent avant tout le monde. Mais il y a quelque part que, quand la générique va être finie... J'ai peur, M. le ministre, que si vous ne faites pas ça, pendant la générique, il y a bien du monde qui va vous coller la gomme sur le nez et qui va dire: On est ici ce soir dans le sous-sol de l'église, on est là qu'on se tape la gueule, mais, en bout de ligne, il donne des permis puis il est trop tard. Pourquoi on se tape la gueule ici, là? Alors, si on est pour se taper la gueule, c'est parce qu'on sait que, dans deux ans, quand les nouvelles normes vont être écrites, le site à Saint-Tite-des-Caps, bien, il va être obligé de se mettre selon les nouvelles normes. Alors, ce que j'appelle une clause évolutive... Encore une fois, je n'ai pas de formation légale, mais... Est-ce que c'est pensable qu'on puisse arriver à ça?

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Brassard: Le nouveau règlement va s'appliquer à partir de la date de son entrée en vigueur. Le nouveau règlement, à partir de la date de son entrée en vigueur, il va s'appliquer. Mais c'est justement à cause de cela que l'article 3 nous est extrêmement utile, parce que les conditions qu'on impose et qu'on inclut dans le décret d'autorisation sont telles qu'il n'y aura pas de distorsion importante entre les conditions imposées actuellement puis d'ici la mise en vigueur du nouveau règlement et les dispositions du nouveau règlement au moment où il va entrer en vigueur. Il n'y aura pas de distorsion majeure. Par exemple, en termes d'étanchéité, on impose, on va imposer, on a imposé puis on va continuer d'imposer aux futurs nouveaux sites, aux nouveaux lieux d'enfouissement sanitaire, des conditions d'étanchéité. On va leur imposer des fonds de suivi. On leur impose de traiter les eaux de lixiviation. Toutes ces conditions-là vont se retrouver dans le futur règlement parce que l'état d'avancement des connaissances scientifiques sur la façon de gérer les déchets va nous inciter à inclure dans le futur règlement de telles conditions, de telles normes, de telles exigences. Par conséquent, on va s'assurer qu'il n'y ait pas de distorsion majeure significative entre ce qu'on va retrouver dans le futur règlement et ce qu'on impose dans les décrets, puisque la loi 101, fort heureusement, à cause de la disposition de l'article 3, nous permet d'inclure dans les décrets.

M. Benoit: Mais la distorsion, elle va se produire... Bon, la réponse que vous me donnez, je pense qu'elle est satisfaisante, là. Elle n'est pas «full proof», mais elle est certainement satisfaisante. Je pense que, effectivement, le ministère est probablement rendu à peu près aussi loin que ce qu'on va entendre en générique. Mais où le problème va survenir, quand on va se réunir dans les sous-sols d'église puis qu'on va se mettre à parler de ça, c'est tout le débat de la régionalisation. Et comment, là, on va dire à des gens: Bien, ce n'est pas déjà tout décidé, cette affaire-là, alors que, pendant qu'on est là, qu'on se chicane dans le sous-sol de l'église, on va donner un permis? Et, celui-là, je ne sais pas comment vous allez... Puis tu ne peux quasiment pas, dans une clause évolutive, dire à un gars: Bien, là, on te donne un permis, mais, une fois que la générique va être finie, ton permis ne sera plus bon.

Alors, vous allez gérer une situation qui va être compliquée. Ou bien le monde ne croira pas à la générique, parce qu'ils vont dire: Écoutez bien, ils sont après les donner, les permis, que le diable les emporte! Ou bien ils vont y croire parce qu'ils se disent: Bien, il y a une poignée au ministre qui fait que, si ça ne fait pas notre affaire, après la générique, là, il peut retirer sur la corde. Là, j'ai l'impression que vous vous en allez dans ce qu'ils disent, en anglais, un «no-man's-land». Vous allez être poignés entre les deux, là, à essayer de gérer ça, à dire à du monde: Bien, on est bien crédible dans notre générique, puis, de l'autre bord, ne pas avoir de poignée pour dire au gars à qui vous avez donné un permis: Il faut que tu te mettes aux normes puis il faut que tu fasses ça, puis la régionalisation... Parce qu'il ne faut pas se leurrer, dans la générique, il y a deux grands angles: la régionalisation sur un bord et puis les 3R sur l'autre bord. Le reste, là, il va y avoir bien des choses qui vont s'écrire, bien des choses qui vont se dire, mais, finalement, ce sont les deux grandes pierres d'assise de la générique.

Alors, s'il y en a une en partant, la régionalisation, qu'on puisse questionner, l'autre, ça ne me fait pas peur. On va y arriver, à la générique, on est déjà pas mal avancé. Mais la régionalisation, ça, c'est le grand débat, surtout quand votre engagement, vous êtes après le «flusher» sur les sites privés. Le débat de la régionalisation, en tout cas chez nous, attachez-vous solide sur la régionalisation, ça va brasser, et puis comptez sur moi pour que ça brasse, à part ça. Ce n'est pas vrai que toute la rive sud de Montréal va venir domper à Magog. «Enough is enough». Puis ce n'est pas vrai qu'ils vont polluer le lac Memphrémagog par-dessus ça puis que Sherbrooke est après polluer la rivière Saint-François – là, c'est assez – pas plus qu'ils ne voudraient les avoir au Lac-Saint-Jean, nos déchets. Alors, il y a un maudit débat de régionalisation, puis, comme ils ne pouvaient plus ouvrir les sites à Montréal, bien, ils les ont ouverts en couronne de Montréal, ça fait que, la couronne, elle est poignée avec tous les sites.

Alors, le grand débat, ça va être celui de la régionalisation, et les gens qui sont dans le milieu municipal, quand on leur parle, ils sont après s'armer jusqu'aux dents. Je ne sais pas comment vous allez gauler ça, toute cette affaire-là, M. le ministre, mais ça va être compliqué tantôt.

M. Brassard: Je suis d'accord avec vous, c'est un grand débat, puis c'est au coeur du débat. On va le gérer... en vous rappelant que les autorisations qu'on va donner... Puis, en tout cas, encore une fois, il n'est pas dit qu'on va toutes les donner, là. Déjà, on en a refusé. Mais, les autorisations qu'on va donner, on prend bien soin de les limiter dans le temps. Lachenaie, c'est un peu plus de cinq ans; ils ont cinq ans. Donc, en les limitant dans le temps, on s'assure que, justement, le principe de la régionalisation puisse progressivement puis assez rapidement s'appliquer.

Mais c'est évident aussi, cependant, qu'il faut que la durée qu'on accorde soit suffisante pour que l'entreprise ou le promoteur ait le temps requis pour constituer son fonds de postfermeture. Vous comprenez? À Lachenaie, si on lui avait donné juste deux ans, bien, là, il n'aurait pas eu le temps de constituer son fonds de fermeture. Donc, il faut que la durée soit limitée, il ne faut pas que ça soit trop long, pour permettre justement que le principe de la régionalisation s'applique assez rapidement. Et, en même temps, aussi, les autorisations qu'on accorde, il faut que la durée soit suffisante pour que le fonds de postfermeture puisse se constituer.

(18 h 30)

Alors, moi, je suis d'accord avec votre analyse, dans le sens qu'il ne faut pas que ça soit de la frime, le débat sur la régionalisation; il faut qu'il puisse concrètement s'appliquer le plus rapidement possible. Mais la façon de le faire puis de permettre son application, c'est justement en étant très soucieux de limiter dans le temps la durée des autorisations.

Le Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Alors, l'article 3 est-il adopté? Adopté. Je dois vous rappeler qu'il est 18 h 30, alors...

M. Brassard: Étant donné que les principaux articles ont été adoptés, on peut peut-être poursuivre encore quelques minutes.

Le Président (M. Brouillet): Bon. Alors, très bien, nous allons poursuivre pour terminer ce qu'il nous reste. L'article 4, s'il vous plaît.

M. Brassard: L'article 4, ça concerne les infractions, puis les amendes. Alors, c'est celles qui sont déjà prévues à la Loi sur la qualité de l'environnement.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 4 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 5.

M. Brassard: «...ne sont pas applicables aux territoires visés au deuxième alinéa de l'article 31.9...» Ah! Bon! C'est au nord du 50e. C'est les territoires assujettis à la Convention de la Baie James ou du Nord-Ouest québécois.

M. Benoit: Là-dessus, j'aurais une question au ministre. Un ex-ministre de l'Environnement au gouvernement fédéral – je ne le nommerai pas, parce qu'il y en a eu deux, trois, puis ils viennent du Québec – me disait qu'un des grands problèmes d'environnement du Canada en ce moment, c'était, effectivement, à l'intérieur des zones autochtones où on avait peu de contrôle comme gouvernement provincial. Et ça s'appliquait dans les autres provinces, ce n'était pas juste au Québec. Est-ce qu'on est à même...

Parce que ce que ce ministre me disait, finalement, c'est qu'on n'a pas de contrôle, et il y a de l'argent là-dedans. Alors, il y a des gens qui trouvaient une façon, dans la communauté autochtone, de faire de l'argent en acceptant toutes sortes de déchets à l'intérieur de leur territoire sur lequel, finalement... D'ailleurs, on l'a vu dans l'histoire des cigarettes, on l'a vu dans l'histoire de la boisson qu'on n'avait pas grand contrôle sur ces territoires-là, et on n'a pas de contrôle non plus vraiment sur les déchets. Et il y a des autochtones qui, malheureusement, font de l'argent avec ça. Et là je vois dans l'article 5 qu'on les exclut, en plus.

D'abord, la première question au ministre: Est-ce qu'il y a des problèmes dans ces territoires, dans les réserves, au niveau de l'environnement? Est-ce qu'on est à même de voir qu'il y a des compagnies qui se servent de ces situations-là, en ce moment, qui abusent de la loi actuelle, etc.?

M. Brassard: Bien, j'avoue que ce que vous évoquez ne m'est pas connu. En milieu nordique ou au nord du 50e, évidemment, on gère les déchets aussi de façon différente, puis les lieux d'enfouissement ne sont pas les mêmes. Bon, le sol est gelé souvent presque à l'année; alors, il y a ce qu'on appelle les dépôts en milieu nordique. Donc, les conditions sont différentes pour gérer les déchets. Mais c'est une problématique vraiment particulière.

Malgré cela, moi, je pense que la commission – je ne sais pas, j'en ai parlé un peu avec Mme Journault – va devoir faire les 16 régions du Québec, mais je pense qu'elle va devoir aller aussi au nord parce que c'est une problématique bien, bien spécifique. Je pense que ce serait intéressant que la commission aille prendre connaissance sur place des problèmes de gestion des déchets en milieu nordique.

M. Benoit: Ma question au ministre... Je réalise, là, qu'effectivement on parle du 55e parallèle ici. Je ne voudrais pas que le ministre pense que...

M. Brassard: Oui, 55.

M. Benoit: Je ne pense pas qu'il y ait vraiment de problèmes de déchets en haut du 55e, là, quoique j'aimerais ça, effectivement, que le BAPE se rende là au moment de la générique. Mais je pensais plus à des tribus autochtones, le long du fleuve ou dans la région de Trois-Rivières, ou en Gaspésie, qui bénéficieraient, qui se serviraient d'avantages qu'elles ont en ce moment pour accepter des déchets. Est-ce que vous seriez familier avec cette situation-là?

M. Brassard: Non.

M. Benoit: Non?

M. Brassard: Non.

M. Benoit: Parfait.

M. Brassard: Mais on va faire...

M. Benoit: Bien, c'est un ministre canadien qui m'a fait part de ça, qui n'est plus ministre maintenant et qui vient du Québec. Alors, vous ferez votre choix sur les ministres de l'Environnement qui viennent du Québec, là.

M. Brassard: Non, mais on va regarder ça, parce que ce que vous...

Une voix: Du fédéral.

M. Benoit: Du fédéral, oui.

M. Brassard: ...me dites là, moi, ne m'était pas connu.

M. Gautrin: Et il est voisin de chez toi?

M. Brassard: Ha, ha, ha!

M. Benoit: Ah! ça, je ne le dis pas. Je ne donne jamais mes sources.

Le Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le ministre, pour vos propos et M. le député d'Orford. L'article 5 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 6.

M. Brassard: À l'article 6, c'est que l'article 5 de la loi 101 devient en quelque sorte caduc. C'est celui qui prévoyait des audiences génériques. Alors, comme ces audiences sont désormais initiées ou enclenchées, donc, c'est un article qui n'a plus sa raison d'être. Alors, on en prévoit l'abrogation.

Le Président (M. Brouillet): L'article 6 est-il adopté?

M. Benoit: Qu'est-ce qu'il advient en ce moment du Règlement sur les déchets solides que j'ai sur mon bureau? C'est à n'y rien comprendre quand un néophyte comme moi se met à lire ça. Où est-ce qu'on est rendu avec ça? Où est-ce qu'on s'en va avec ça? À quel moment on va arriver à quelque chose, etc.? Je sais que, dans le milieu, là, ça va des biologistes en passant par l'association des avocats, tout le monde...

M. Brassard: Vous parlez du Règlement sur l'évaluation environnementale.

Une voix: Les déchets solides.

M. Brassard: Les déchets solides?

M. Benoit: Oui. Non. C'est ça, le Règlement sur l'évaluation environnementale. Excusez, j'ai souligné le mauvais dans le... Oui, vous avez raison.

M. Brassard: Oui, parce qu'il y avait un arrimage...

M. Benoit: Non, non. Vous avez raison. Vous avez raison.

M. Brassard: ...dans l'article 5, là. Bien, il y a des consultations qui ont été faites; moi, j'ai initié des consultations de tous les intervenants. Est-ce que la dernière rencontre a eu lieu? Elle est à la veille, je pense, d'avoir lieu. Il y a eu, pendant les mois précédents, une consultation, puisqu'il y a eu prépublication d'un projet de règlement. À la suite de ça, comme il y avait sur certains points bien des controverses, j'ai initié un processus de consultation. Je devrais bientôt avoir entre les mains le rapport de cette consultation. Forcément, ça va conduire à des amendements, à des modifications du projet, probablement à un projet nouveau de règlement sur l'évaluation environnementale qui devra suivre le processus réglementaire connu. Disons que la consultation des intervenants est à la veille d'être complétée. Et, à partir de ce moment-là, on devrait concevoir et élaborer un nouveau projet de règlement sur l'évaluation environnementale sur la base de cette consultation, puis des consensus qui se sont dégagés. Et puis, bien, le processus réglementaire suivrait son cours.

Le Président (M. Brouillet): Alors, est-ce que l'article 6 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 7.

M. Brassard: Alors, à l'article 7, on s'est demandé: Quand ce moratoire devra-t-il prendre fin? Ce qu'on a conclu à ce sujet-là, c'est que la meilleure date de la fin du moratoire, c'est celle où les nouvelles dispositions réglementaires sur la gestion des matières résiduelles entreront en vigueur. À ce moment-là, le moratoire prendra fin. Ça veut donc dire que, quand la pièce majeure du plan d'action qui suivra les génériques, c'est-à-dire un nouveau règlement sur la gestion des matières résiduelles, donc à partir du moment où cette pièce majeure, ce dispositif majeur de la politique va entrer en vigueur, le moratoire cessera.

M. Benoit: Vous réalisez, M. le ministre, qu'il y a des avantages et des inconvénients à garder le moratoire. Les avantages, c'est, bien sûr, qu'il n'y aura pas de multiplication sur le terrain tous azimuts de toutes sortes de sites. Bon, ça, c'est certainement un avantage. L'inconvénient que je peux y voir, qui n'est pas totalement un inconvénient si on est environnementaliste, c'est que le prix de l'enfouissement pourrait se mettre à monter rapidement. Les compagnies ou les municipalités étant propriétaires de sites, finalement, nous tiendraient un peu par la ganse, sachant qu'il n'y a pas de nouveaux sites qui peuvent s'ouvrir.

La réaction de ça, vous allez me dire, c'est que les 3R vont aller plus vite en application. Vous avez raison, là. Mais il y a en quelque part que le citoyen pourrait être pris en otage un peu là-dedans où, parce qu'il n'y a pas de nouveaux sites, parce que le moratoire dure un peu trop longtemps, parce qu'il n'y a pas de date qui termine le moratoire, le prix est compté sur les «waste management» de ce monde et les Laidlaw pour aller chercher chaque cent qu'ils peuvent aller chercher. Ils sont dans ce milieu-là. Et, bien sûr, sans oublier un certain nombre de municipalités pour qui ça va devenir une source de rentabilité, leur site de déchet, à très court terme. On peut voir ça arriver, comme les compagnies qui ont des petits pouvoirs électriques en ce moment ne se gênent pas de faire de l'argent avec leur pouvoir électrique. Bon, c'est de bonne guerre, tout ça.

(18 h 40)

Mais est-ce qu'un moratoire pas de date ne pourrait pas avoir un effet sur le prix de l'enfouissement et que le citoyen soit un peu pris en otage dans tout ça? Puis le citoyen, puis le maire ne pourront pas le défaire, le moratoire, eux. Ils vont se faire prendre en otage.

M. Brassard: Ce que vous décrivez là, moi, je pense, ça ne risque pas de se produire parce que, quand on fait l'évaluation de la capacité d'enfouissement actuelle, elle est telle et, en plus, compte tenu des projets qui sont sous analyse actuellement, il va s'en ajouter aussi par la suite. Donc, on se retrouve, jusqu'à la fin des génériques, puis jusqu'à la mise en vigueur du futur règlement, avec une capacité d'enfouissement d'un tel niveau que, moi, je ne pense pas que ça puisse provoquer la situation que vous décrivez.

Est-ce que le coût de l'enfouissement va augmenter? Moi, je vais vous dire bien franchement, je l'espère. Je l'espère parce que, au fur et à mesure qu'on va autoriser des lieux d'enfouissement avec les exigences dont on a parlé, puis qu'on retrouve dans le décret sur Lachenaie, par exemple, c'est clair que ça va avoir un effet sur les prix, que ça va avoir un effet sur les coûts, un effet à la hausse.

Bien, cet effet à la hausse, moi, personnellement, je le considère comme bénéfique parce que, à ce moment-là, on le sait, tout le monde en convient, puis le député aussi l'a déjà constaté, puis en a déjà convenu publiquement, le prix, le coût de l'enfouissement actuel est à un tel niveau que ça n'incite pas vraiment à la mise en oeuvre des 3R. Par conséquent, s'il connaît, au cours des mois qui viennent, une augmentation, ça ne peut, à mon avis, qu'être bénéfique, ça ne peut qu'inciter davantage à augmenter le volume des matières récupérées, collectées, recyclées.

M. Benoit: Avant qu'on vote sur l'article 7, une dernière question, M. le ministre. Je ne veux pas étirer. Le ministre, dans les communiqués de presse qu'il a émis sur la générique, finissait ainsi: Finalement, le ministre Brassard a obtenu la collaboration de RECYC-QUÉBEC. RECYC-QUÉBEC, qui a réservé une somme de 250 000 $ à cette fin, dévoilera sous peu les modalités de fonctionnement de ce programme pour aider des organismes non gouvernementaux.

Il est de mon intention, avec le peu de personnel qu'on a, de suivre la générique et d'essayer d'apporter un apport, une contribution à la générique, de ne pas être là comme opposition, mais vraiment d'apprendre ce qui se passe et de faire mon job d'opposition, non pas au moment des génériques, mais d'être capable de revenir ici bien informé.

Pourquoi des organismes non gouvernementaux... J'aurais possiblement pu, M. le ministre, m'adjoindre quelqu'un pour m'aider pendant cette générique. Vous avez tout un... J'étais pour dire un chiard de monde alentour de vous. Je vais être plus respectueux: vous avez une quantité de gens avec vous. On a vu que vous avez été capable de libérer, pendant la commission sur la souveraineté, je pense, plus de 26 personnes de votre ministère et au BAPE pour la grande cause de l'indépendance. Moi, je vous demande: Est-ce qu'il n'y a pas moyen d'avoir un peu d'aide pour la grande cause de l'environnement à laquelle je crois profondément? Et je m'adresse à vous pour voir s'il y a des ententes qui peuvent être prises à cet égard-là. Je le fais publiquement, je le fais devant les médias; je n'ai aucune fausse pudeur de vouloir contribuer à l'environnement et de demander de l'aide.

M. Brassard: Bien, l'aide qui est prévue, de 250 000 $, évidemment c'est pour les groupes parce que les groupes l'avaient réclamée. RECYC-QUÉBEC devrait faire connaître les conditions d'admissibilité à cette aide-là, mais c'est évident que ça ne peut pas concerner les formations politiques. Ça, vous en conviendrez. Pour le reste, les formations politiques disposent d'un budget de recherche; elles peuvent l'utiliser comme bon leur semble. Et puis il y a toujours le Bureau de l'Assemblée nationale. Vous pouvez vous présenter devant le Bureau, puis demander une contribution supplémentaire.

M. Benoit: Bien, je vais vous donner un exemple: le grand débat sur l'énergie, M. le ministre. Le grand débat sur l'énergie, le ministre y était présent et l'opposition avait un siège. Donc, je prends pour acquis qu'à ce moment-là le membre de l'opposition avait des comptes de dépenses en région, etc., ce qui ne sera pas le cas ici...

M. Brassard: Non.

M. Benoit: ...alors que, dans l'énergie, on l'a fait. Votre ministère vient de le faire. Je voyais mon confrère de Laurier siéger là, puis c'était tout à fait heureux qu'il soit présent. Et, si vous excluez, finalement... Vous n'excluez pas, mais vous ne faites rien pour que l'opposition soit présente, alors que, pour vous, chacune de ces dépenses-là sera payée par votre ministère, constamment, partout, le chauffeur, la limousine. Dans le camp de l'opposition, si je dois faire la tournée, je devrai la faire sur le pouce, je devrai la faire vraiment sur le pouce. Vous réalisez ça, hein?

M. Brassard: Je ne sais pas si le député comprend bien le mécanisme qui va être mis en place. Il fait référence au débat sur l'énergie; ce n'est pas du tout la même chose. Mon collègue de l'Énergie – puis je ne veux pas critiquer le mode de consultation qu'il a choisi, c'est son droit – a choisi ce mode-là d'inclure dans sa commission présidant au débat sur l'énergie des intervenants venant de tous les horizons du monde de l'énergie et puis des représentants des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale. C'est son choix.

Moi, le choix que j'ai fait... Parce que c'est ça qu'on voulait aussi, hein, c'est ça qu'on voulait. En particulier, les groupes environnementaux étaient très fermes là-dessus. Le choix que j'ai fait, c'est de demander au BAPE de tenir le débat. C'est une commission du BAPE.

M. Benoit: D'accord avec ça.

M. Brassard: Donc, il n'y a pas de représentants des partis sur une commission du BAPE; c'est les commissaires du BAPE qui vont tenir le débat. Il n'y a pas d'industriels des déchets qui vont être là, il n'y a pas de groupes environnementaux non plus; c'est un...

M. Benoit: Ce n'est pas ça qui est mon point, M. le ministre.

M. Brassard: Oui? Mais, là, c'est parce que les représentants des partis politiques...

M. Benoit: Mon point, ce n'est pas que l'opposition doit être membre du BAPE...

M. Brassard: Vous parlez de Christos Sirros...

M. Benoit: ...ce n'est pas que je dois être membre de la table en avant.

Le Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît.

M. Benoit: Je suis tout à fait d'accord avec vous et j'ai été le premier à vous féliciter et à vous saluer en vous disant: C'est bien, le choix que vous avez fait de la présidente et du BAPE. Le point, c'est que, si je veux assister à toutes ces réunions à la grandeur du Québec, vous savez pertinemment que vous avez tous les moyens de le faire; nous n'avons aucun moyen pour le faire.

M. Brassard: Oui. Moi, je n'y serai pas.

M. Benoit: Il serait peut-être souhaitable...

M. Brassard: Non.

M. Benoit: ...que vous alliez voir dans les sous-sols d'église ce qui va se dire un peu.

M. Brassard: Non! Bien non! C'est le BAPE qui fait son enquête. Je vais lui demander de faire son enquête et c'est évident que, moi, je ne m'ingérerai pas dans la procédure, pas plus que dans des projets précis. Quand le BAPE fait des audiences publiques et tient une enquête, le ministre ne se pointe pas là, parce que c'est lui qui...

M. Benoit: Bien, moi, je vous annonce tout de suite que je serai présent à un certain nombre, dans la salle...

M. Brassard: ...reçoit le rapport. Non, non, ça... Non, non.

M. Benoit: ...avec les citoyens. Je vais aller écouter.

M. Brassard: C'est correct.

M. Benoit: C'est un débat qui est public et, à titre de citoyen...

M. Brassard: Oui, oui.

M. Benoit: ...j'ai le droit d'être présent.

M. Brassard: Vous, ça va, vous êtes député. Mais moi, je ne suis pas juste député; je suis membre du pouvoir exécutif et c'est à moi que le BAPE va remettre son rapport. Donc, une fois que le processus est... Je vais suivre ça de près, évidemment, parce qu'il y aura un porte-parole de mon ministère qui va être présent; M. Fabi va être là constamment, va suivre ça de près. Mais moi, je n'y serai pas.

Le Président (M. Brouillet): Alors, est-ce qu'on peut...

M. Benoit: Oui. Bien, moi, ce que je crois comprendre, c'est qu'on va faire du pouce, M. le Président.

M. Brassard: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 7 est-il adopté?

M. Brassard: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Brassard: Adopté.

M. Benoit: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, en conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je remercie tous ceux qui y ont participé. Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

(Suspension de la séance à 18 h 49)

(Reprise à 18 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le Président de la commission plénière.

M. Gautrin (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le ministre.

M. Brassard: Oui. Avant de solliciter le consentement pour l'adoption, on s'était entendus pour un dépôt de document; je voudrais donc le déposer. Ça porte sur la liste des projets de lieux d'enfouissement sanitaire et de dépôts de matériaux secs par région. Voilà! Et je signale tout de suite qu'on va en faire parvenir une copie un peu plus claire. À cause des photocopies, elle n'est pas très bonne, mais le dépôt est fait.


Document déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement pour le dépôt. Alors, le document est déposé.

M. Brassard: Et je vous demanderais, avec le consentement évidemment toujours de cette Chambre, d'appeler l'article 8.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets. Je dois obtenir deux consentements, tout d'abord, pour déroger à l'article 230 du règlement prévoyant que l'adoption d'un projet de loi doit avoir lieu à une séance distincte de celle de la prise en considération du rapport de la commission. Y a-t-il consentement?

Des voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Et y a-t-il consentement pour déroger à l'article 22 du règlement prévoyant qu'un projet de loi présenté après le 15 novembre 1995 ne peut être adopté avant le 21 décembre 1995? Y a-t-il consentement? Consentement.


Mise aux voix

Alors, je mets aux voix, maintenant, le projet de loi. Le projet de loi n° 113, Loi portant interdiction d'établir ou d'agrandir certains lieux d'élimination de déchets, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, étant donné l'heure, je m'en vais suspendre les travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 52)

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Mmes, MM. les députés, si vous voulez bien prendre place, nous allons reprendre nos travaux. M. le leader du gouvernement.

M. Gendron: Oui, M. le Président, appelez l'article 7 du feuilleton.


Projet de loi n° 111


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): À l'article 7, Mme la ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. Je suis prêt à céder la parole à un intervenant et je vais céder la parole à M. le député de Verdun, tout en vous rappelant, M. le député, que vous avez un droit de parole de 20 minutes. À vous la parole, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je vais être relativement bref sur ce projet de loi. D'emblée, l'objectif qui est poursuivi par ce projet de loi, je dois dire que l'opposition y souscrit, c'est-à-dire que nous sommes en faveur du soutien à l'action communautaire. Le Québec a réussi à développer un mouvement communautaire qui est impliqué en général dans les régions les plus défavorisées ou dans les quartiers les plus défavorisés de la ville de Montréal et qui, d'une manière absolument unique, était en mesure de pallier aux lacunes, parfois, que le gouvernement peut avoir. Donc, M. le Président, si vous me permettez, nous sommes réellement en accord avec le fait qu'il y ait un soutien, qu'il y ait un objectif, que clairement on soutienne l'action communautaire.

J'ai une réserve et je vais vous en parler. J'ai une réserve, dans le projet de loi n° 111, qui est la même réserve que j'avais dans le projet de loi n° 114, qui va être la même réserve qu'on avait dans le projet de loi 102. Cette réserve... D'ailleurs, si vous remarquez, et je suis sûr que vous l'avez fait, M. le Président... Il y a, en termes d'écriture, les mêmes articles que nous trouvons dans le projet de loi n° 114. Pour ceux qui ont un peu oublié, le projet de loi n° 114, c'était celui qui soutenait l'industrie des courses de chevaux à l'aide d'un fonds sur lequel on allait verser une partie du pari mutuel. Le projet de loi n° 111 aussi va créer un fonds dans lequel une partie des revenus de l'État vont être versés pour soutenir l'action communautaire, les revenus de l'État qui proviennent des casinos. Et le projet de loi 102, lui aussi, crée un fonds pour soutenir le transport en commun dans la région de la Communauté urbaine de Montréal, pour soutenir le transport en commun à même une partie de la taxe sur l'essence.

Je dois dire qu'il y a là une objection de principe de notre part. Une objection de principe. Et la même objection que j'ai pu avoir à partir du projet de loi n° 114, je l'ai au niveau du projet de loi n° 111. En commission parlementaire, M. le Président, ce sera un plaisir, pour nous, de questionner la ministre sur ces questions. Nous aurions voulu pouvoir le faire lorsque nous avons été en commission parlementaire pour adopter la loi n° 114, celle portant sur les courses de chevaux. Malheureusement, nos collègues d'en face n'ont pas, et certains députés ministériels aussi, d'ailleurs, n'ont pas voté pour entendre la ministre en commission, pour nous expliquer ce qui est un changement dans la politique du gouvernement, c'est-à-dire qu'au lieu de subventionner, au lieu de soutenir une activité gouvernementale on transfère une partie des revenus, une partie de l'assiette fiscale, pour tel et tel objectif. Pour vulgariser ce qu'on essaie de dire, M. le Président, la question est assez simple. C'est qu'au lieu de dire: Le gouvernement va accorder telle et telle somme d'argent à l'action communautaire on dit: Le gouvernement va se départir d'un certain pouvoir de taxation qu'il a et il va transférer directement les revenus de telle taxe ou de tel impôt en fonction d'un objectif bien spécifique. Alors, si on va dans cette direction, si on choisit cette direction, on va avoir une multiplicité de fonds. Aujourd'hui, le gouvernement a créé un fonds pour le soutien à l'industrie du cheval et, de notre côté, on est prêts à dire: Oui, il était important de soutenir l'industrie des chevaux de course. Cette loi, c'était le projet de loi n° 114. Dans le projet de loi n° 111, le gouvernement dit: Il est important de soutenir l'action communautaire, et, de ce côté-ci, nous disons: Oui, c'est vrai, il faut être en mesure de soutenir l'action communautaire. Mais la manière la plus optimale pour soutenir l'action communautaire n'est pas, d'après nous, pour le gouvernement, de se départir d'un champ de taxation ou d'un champ de revenus. Dans le cas de la loi n° 114, il s'agit de la taxe sur les paris mutuels; dans le cas de la loi n° 111, il s'agit d'une fraction des revenus de casinos qui, normalement, devrait être versés au fonds consolidé et qui, maintenant, vont être versés au fonds que l'on crée par la loi n° 111.

M. le Président, je pense qu'il y a là un vice profond de gestion des fonds publics. Il y a là un vice profond de gestion des fonds public sur lesquels on peut, lentement, aller de fil en aiguille. Pourquoi, demain – et vous pourriez choisir ça – par exemple, la taxe d'amusement ne serait pas dédiée directement dans un fonds pour soutenir l'industrie culturelle? Pourquoi l'ensemble des taxes sur l'essence ou sur les plaques d'immatriculation, enfin, les revenus de l'État sur les plaques d'immatriculation ne seraient pas dédiés directement à l'entretien des routes?

(20 h 10)

Et vous voyez cette approche dans laquelle le gouvernement commence à faire les premiers pas, dans laquelle on va dire: Pour tel projet, on prend tel champ de taxation, que ce soient les revenus des casinos, que ce soient les revenus de la taxe sur les paris mutuels. On prend un champ de taxation et on dit: Ça va aller vers tel objectif. Et, au lieu de permettre la flexibilité au ministre des Finances, dans son discours du budget, de pouvoir dire: Je choisis, comme ministre des Finances ou comme gouvernement, d'accorder tel soutien à l'action communautaire, on se départit, comme parlementaires et comme Assemblée nationale, de notre juridiction sur un champ de taxation et on dit: Ce champ de taxation, ce champ de revenus va aller directement à telle ou telle activité.

Il faut bien se rappeler, M. le Président, qu'une des fonctions les plus importantes des parlementaires, que ce soient les parlementaires ministériels ou que ce soient les parlementaires de l'opposition, une des fonctions les plus importantes du parlementaire, c'est de voter les crédits. La fonction de voter les crédits, que l'on fait en général en février ou mars, sous proposition du gouvernement, c'est de dire: À partir de ce que le gouvernement va aller chercher en revenus, que ce soient des paiements de transfert, des revenus de taxes, des revenus autonomes ou des revenus d'impôt sur les particuliers ou d'impôt sur les sociétés, à partir des revenus que le gouvernement a, le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor allouent des crédits aux différentes fonctions du gouvernement. Et nous, comme parlementaires, nous nous prononçons sur ces crédits, nous débattons ces crédits, nous sommes en mesure de dire: Lui, il en a assez, il n'en a pas assez, ce n'est pas comme ça que ça devrait aller.

À l'heure actuelle, les choix que le gouvernement fait actuellement, les choix gouvernementaux, ce n'est pas si on vote la loi n° 111 telle qu'elle est ou si on vote la loi n° 114... le projet de loi n° 114 tel qu'il a été présenté, ou s'ils ont voté le projet de loi 102 tel qu'il a été présenté aussi. Le Parlement se départit, les parlementaires se départissent à l'heure actuelle de leur juridiction sur un champ de taxation et disent: Ce champ de taxation va aller directement pour telle fonction gouvernementale, c'est-à-dire, on n'aura plus à devoir débattre des crédits. On va dire: L'action communautaire n'est financée que par les revenus de casinos.

Alors, M. le Président, d'après moi, il y a un vice de forme à l'intérieur. L'action communautaire ne doit pas être tributaire du fait que les casinos font plus ou moins de profits. L'action communautaire est quelque chose, de ce côté-ci de la Chambre, auquel nous croyons, auquel nous sommes profondément attachés. Et nous ne pensons pas que si jamais, comme c'est actuellement le cas et comme la Synthèse des opérations financières nous l'a indiqué, ou pour toutes sortes de raisons qui sont liées peut-être à des relations patronales-syndicales difficiles, les revenus de casinos ont chuté dans les derniers trimestres d'opération... Et je ne vois pas pourquoi, parce que les revenus de casinos ont chuté, les besoins des groupes communautaires devraient chuter. Et c'est un risque qu'on a à l'heure actuelle en adoptant le projet de loi n° 111 où on va lier directement les revenus nécessaires à l'action communautaire au fait que les casinos vont faire plus ou moins de profits. Et il n'y a aucun lien entre les deux. Il n'y a réellement aucun lien.

Si on peut m'expliquer... La ministre, dans la présentation de son projet de loi, a débattu sur l'importance de l'action communautaire et nous partageons ce point de vue là. Elle a dit: Nous voulons soutenir l'action communautaire. Elle n'a jamais expliqué pourquoi le soutien gouvernemental à l'action communautaire doit fluctuer avec les revenus de casinos, pourquoi l'engagement de ce gouvernement à soutenir les groupes communautaires doit fluctuer avec le fait que les gens vont jouer plus ou moins. Y a-t-il un lien entre le fait que les gens jouent plus ou moins au casino et les besoins des groupes communautaires?

M. le Président, je me permets de vous dire que, d'après moi, le lien entre les deux me semble extrêmement ténu, si lien il puisse y avoir. C'est ça, le vice de forme que l'on a actuellement dans les projets de loi. On a un projet de loi qui fait un lien entre tel champ de taxation, c'est-à-dire tel revenu que le gouvernement va aller chercher dans une taxation, et un besoin, qui est un besoin criant, réel, que nous partageons, sur lequel nous partageons le point de vue des besoins de ce secteur.

Alors, je vais, en commission parlementaire, M. le Président – parce que nous allons siéger, ça va aller à la commission, j'imagine, du budget et de l'administration, parce que c'est un projet qui vient de la ministre des Finances – réellement questionner le choix que la ministre des Finances fait actuellement, le choix que le gouvernement fait de financer certaines actions éminemment valables par le biais d'une taxe ou d'un fonds dédié, plutôt que de dire, par déclaration ministérielle ou par décision: Nous allons allouer tel ou tel montant à telle fonction ou telle autre fonction.

M. le Président, il s'agit essentiellement d'un vice de forme, à l'heure actuelle, sur la fonction gouvernementale, sur la fonction dans laquelle doit fonctionner ce gouvernement. Il l'a fait dans le cadre de la loi n° 114. Il l'a fait encore, à nouveau, dans le cas de la loi n° 111. Il l'a fait dans le cas de la loi 102. C'est en train de devenir une pratique de la part de ce gouvernement. Si je me fie aussi aux débats, aux informations qui ont été données par les journaux, il semblerait qu'on est en train de préparer aussi un fonds dédié pour soutenir la réfection des routes et de la voirie rurale. Il y a, dans la gestion des fonds gouvernementaux, M. le Président, si on va dans cette direction-là, un vice extrêmement, extrêmement dangereux.

M. le Président, si vous me permettez, je tiens à rappeler que nous partagions les objectifs de la loi n° 114, nous partageons tout à fait les objectifs de la loi n° 111, mais nous sommes opposés au fait qu'on utilise le principe du fonds dédié pour soutenir des actions éminemment valables, éminemment importantes, éminemment dues à être soutenues.

Alors, M. le Président, je ne prendrai pas tout le temps qui m'est dévolu, mais je tiens réellement à faire la distinction entre ce principe sur lequel nous allons voter, et nous allons voter en faveur du principe du projet de loi, et le débat en commission parlementaire, où nous allons poser la question à la ministre, comme nous aurions voulu pouvoir la poser dans le cas de la loi n° 114: Est-il nécessaire, est-il justifié d'utiliser un fonds, la technique du fonds dédié, qui est une technique normalement tout à fait exceptionnelle... Est-il nécessaire d'utiliser la technique du fonds dédié pour être en mesure de soutenir l'action communautaire? Je réponds non. Il y a là un vice de forme, quelque chose de totalement inacceptable, quelque chose d'extrêmement dangereux dans la direction actuellement prise par le gouvernement. Et je pense qu'on va avoir un débat extrêmement important à faire avec la ministre quant à la manière dont, comme Parlement, nous allons nous départir d'un des pouvoirs que nous avons comme parlementaires de décider comment sont alloués les revenus de taxation. Et il y a là un vice qui me semble extrêmement grave, M. le Président.

Alors, je termine en vous rappelant que nous allons voter en faveur du principe du projet de loi, mais nous avons énormément de questionnement à faire en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Johnson et délégué régional pour la région de l'Estrie. À vous la parole, M. le député.

(20 h 20)


M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. J'ai trouvé tout à fait normal que mon collègue de l'opposition s'oppose, justement, à quelque chose dans une intention gouvernementale qui est extrêmement valable et qui, à leur décharge, les touche profondément, puisque, eux, les libéraux, lorsqu'ils étaient au pouvoir, n'ont pas eu le courage de créer les subventions statutaires sur trois ans pour soutenir l'action communautaire. Le gouvernement du Parti québécois s'était engagé à le faire et il l'a fait immédiatement.

Pourquoi mon collègue et son parti s'opposent-ils à ce qu'ils appellent un vice de forme? Je ne comprends pas. Moi, ce que je peux dire, c'est que le gouvernement désire procéder de cette façon-là parce qu'il veut mettre à l'abri de l'opposition, justement, des fonds qu'il pourrait tout aisément consacrer à d'autres programmes gouvernementaux. Les libéraux, on le sait, l'action communautaire, pour eux, ce n'est pas nécessairement très important. Ils n'avaient pas réussi, comme je le disais tout à l'heure, à la financer de façon adéquate, d'une façon statutaire et, là, ils ne veulent pas qu'on crée ce Fonds-là en alléguant que le Fonds pourrait fluctuer. Ces gens-là pensent qu'on gère les fonds publics et les budgets du gouvernement comme eux l'ont fait. Si on crée un fonds, ce n'est pas pour le dépenser complètement à chaque année. Si on crée un fonds, c'est pour se constituer une réserve pour s'assurer d'un financement permanent de l'action communautaire.

Je n'insisterai pas sur ça. L'opposition, par principe, s'oppose évidemment, mais il faut respecter ça, il faut respecter ces règles du jeu là mais, quant à nous, nous allons procéder, nous allons procéder dans le sens des intérêts des groupes communautaires du Québec.

Si on en parlait un peu, d'action communautaire, puisqu'il ne semble pas que l'opposition comprenne exactement ce que c'est, l'action communautaire, et ce que c'est surtout, l'intention du projet de loi. Et, avant de parler de l'action communautaire, j'aimerais répéter ceci. Ce que nous disons aux 3 000 000 de Québécois qui font du bénévolat, qui travaillent dans la solidarité pour les Québécoises et les Québécois, et avec eux, ce que nous leur disons par ce projet de loi, c'est un message très clair. On leur dit: Vous êtes essentiels au développement socioéconomique du Québec et nous le reconnaissons par un fonds ne pouvant pas être soumis aux aléas des coupures du gouvernement. C'est pour ça que nous créons un fonds. Ce Fonds-là ne sera pas touchable par la vague de coupures que nous connaissons depuis quelques années dans les différents gouvernements et que nous allons connaître encore. C'est donc une garantie pour les groupes communautaires que leur financement va demeurer. On sait comment c'est difficile pour les groupes communautaires de, à chaque année, se mettre en branle, ramasser des fonds, mettre énormément d'énergie pour ce faire. On sait que les subventions du gouvernement fluctuaient sous le régime libéral. Ce que nous leur disons, nous: C'est terminé. Nous constituons un fonds. Ce Fonds-là va vous être réservé et vous y aurez accès au mérite.

L'action communautaire, M. le Président, au Québec, c'est une des formes d'activité sociale et économique qui est à la base des solidarités que nous avons créées au Québec et du Québec moderne que nous connaissons. Il y a plusieurs fonctions dans l'action communautaire, mais il y en a deux que je retiens. Il y a celle où des gens, dans un milieu, se regroupent pour pouvoir combler un besoin, se donner des services, l'action communautaire de quartier. Nous avons connu ça, au Québec, depuis les années soixante-dix, et c'est cette action communautaire-là qui a permis au peuple québécois de se prendre en main, au peuple québécois de cheminer comme il l'a fait et comme le dernier référendum nous l'a démontré, d'ailleurs. Il y a l'action communautaire où des gens travaillent pour d'autres, bénévolement, pour rendre service, de toutes sortes de façons. Comme je le disais tout à l'heure, il y a plus de 3 000 000 de Québécoises et de Québécois qui travaillent bénévolement dans la société au service de leurs concitoyennes et concitoyens. C'est ces gens-là à qui nous disons: Nous appuyons ce que vous faites, c'est essentiel au développement socioéconomique du Québec, et nous allons vous garantir un support qui ne fluctuera pas, et même pas avec les changements de gouvernement possibles.

L'organisation communautaire, M. le Président, c'est une des pierres angulaires de l'organisation sociale et démocratique du Québec moderne. Voilà pourquoi il faut supporter cette démarche-là de toutes ces personnes qui y oeuvrent. L'action communautaire, elle est souvent au service des personnes les plus misérables, ceux qui sont dans la misère, et c'est souvent ces personnes-là, d'ailleurs, qui sont coupées lorsque le gouvernement a à faire des économies.

Encore une fois, je vous le dis et je vous le répète, M. le Président, si nous créons ce Fonds-là, c'est pour mettre, justement, les plus démunis de la société à l'abri des coupures qui déferlent actuellement sur le Québec et un peu partout dans les sociétés modernes. Pour une fois que nous réussissons à le faire, comme gouvernement, que nous avons le courage de poser ce geste-là de mettre à l'abri des politiciennes et des politiciens les argents qui vont aux plus démunis dans un secteur d'activité extrêmement important pour le Québec, eh bien, l'opposition s'oppose. Par définition, évidemment, l'opposition s'oppose.

L'action communautaire, évidemment, elle est fondamentale, parce qu'on y retrouve une des notions fondamentales que nous cherchons à établir actuellement, qui est la notion de travail. Beaucoup de gens n'ont pas d'emploi dans la société, mais travaillent au bien-être de leurs concitoyennes et concitoyens et, en mettant de l'avant ce Fonds-là, nous venons reconnaître la valeur de leur travail. Il n'est pas nécessaire d'avoir un emploi, dans la société, pour faire des choses valorisantes, il s'agit de se mobiliser pour aider des gens. Quand je vous disais, tout à l'heure, que 3 000 000 de Québécoises et Québécois sont mobilisés pour venir en aide aux plus démunis, aux plus pauvres... Et, souvent, ce sont des personnes démunies qui le font, d'ailleurs, et qui n'ont aucun moyen, qui n'ont même pas de moyens. Moi, j'ai travaillé dans un quartier pauvre de la ville de Sherbrooke pendant des années dans un CLSC. Quand je vous dis que, pour organiser des rencontres avec, par exemple, des mères monoparentales qui ont des enfants, il fallait même assurer leur transport, puisqu'elles n'avaient même pas le moyen de se rendre aux rencontres au CLSC. Là, quand on parle de ça, on parle de gens très démunis. Il se peut que des gens de l'opposition ne comprennent pas ces choses-là, eux, qui, pour plusieurs, nagent dans l'abondance. Mais, ce que je vous dis, c'est que ces gens-là ont besoin d'être supportés pour se prendre en main, et c'est ce que nous faisons par ce Fonds-là.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président. Au CLSC-SOC, où je travaillais, et dans plusieurs CLSC de ma région, comme dans tout le Québec, d'ailleurs, où on reconnaît ce genre d'engagement de la part des citoyennes et des citoyens, M. le Président, on a mis sur pied un programme qui s'appelait OLO. Ce programme-là consistait à supporter, avec une équipe multidisciplinaire, des mères qui étaient enceintes et qui n'avaient pas les argents nécessaires pour nourrir adéquatement le foetus qu'elles portaient. Alors, nous avons mis au monde... pas mis au monde, je m'excuse, M. le Président, nous avons mis au point un programme qui venait en aide, et qui existe toujours, à ces mères-là pour les aider à donner naissance à un enfant de poids normal et à terme. On sait que, lorsqu'un enfant naît à terme et en santé, c'est des coûts énormes au niveau de la santé qui sont préservés, pour l'enfant qui va grandir, qui ne sera pas un décrocheur, un enfant qui ne sera pas hospitalisé régulièrement, un enfant qui va être capable de s'adapter socialement à son milieu. Et ce Fonds-là va venir supporter ce genre d'action là. C'est des coûts-bénéfices pour la société qui sont extrêmement importants, que l'opposition ne semble pas reconnaître. Mais, de toute façon, l'opposition s'en allait allègrement dans les déficits du temps qu'ils étaient là parce qu'ils ne savaient pas reconnaître ce genre d'activité là.

Alors, comme je vous disais, nous avons mis au point ce genre d'activité là qui vient prévenir la détérioration de la santé de ces enfants-là et de leurs mères et épargner à la société des coûts très importants. Il s'agit de peu d'argent. Un enfant, dans un incubateur à l'hôpital, M. le Président, coûtait 30 000 $, un enfant prématuré, à la société. Un enfant qui était suivi dans le programme OLO n'en coûtait que 1 700 $. Ce genre de chose là, c'est ce que nous allons continuer de faire avec le Fonds d'aide à l'action communautaire.

(20 h 30)

Nous entrons dans une période de fêtes, comme vous le savez, M. le Président, où l'Opération Nez rouge est très importante, assure à un certain nombre de citoyennes et citoyens une aide qui leur permet de rentrer à la maison sans problème et d'épargner des vies humaines et des conséquences très importantes sur le plan social pour des familles. Cette action-là, Nez rouge, est faite par des bénévoles qui travaillent des longues heures sans être rémunérés et, par ce Fonds-là, nous venons reconnaître cette action-là, qui est très importante pour la société, et nous venons assurer Nez rouge notamment, comme d'autres groupes communautaires, des centaines au Québec, qu'ils vont pouvoir bénéficier d'un fonds, dorénavant, qui va les mettre à l'abri des coupures gouvernementales.

M. le Président, on pourrait parler très longtemps de la nécessité de l'action communautaire au Québec, comme je le disais, qui est un peu à la base du Québec moderne que nous connaissons. Je vais tout simplement terminer en vous disant que l'appui au projet de loi est fondamental, et j'ai la conviction, de toute façon, que l'opposition, nonobstant son désaccord de principe sur ce qu'ils appellent un vice de forme et qui est en réalité peut-être la plus belle qualité de ce projet de loi, de garantir de l'aide financière à ces groupes communautaires... Nous allons appuyer ce projet de loi massivement parce que c'est un projet très important. C'est un pas de plus qu'on fait dans le support aux solidarités sociales que nous devons créer au Québec pour passer à travers les années difficiles qui s'en viennent.

Alors, je répète que ce projet de loi vient reconnaître les millions de Québécoises et Québécois qui consacrent bénévolement des centaines d'heures de leur vie au service de leurs concitoyennes et concitoyens. Et c'est parce que nous disons à ces gens-là: Bravo! nous avons besoin de vous, et non seulement nous le disons, mais nous posons des gestes pour le prouver, que nous allons voter pour ce projet de loi et l'appuyer massivement, et je pense que l'opposition le fera aussi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Johnson. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laporte, porte-parole de l'opposition en matière de finances. À titre de porte-parole de l'opposition, M. le député, vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes. À vous la parole, M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. On en est donc à étudier le principe d'un projet de loi, le projet de loi n° 111, qui modifie la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec. M. le Président, on vient d'entendre le député de Johnson qui a décidé, a décidé, lui, proprio motu, que l'opposition s'opposait, était pour voter contre ce projet de loi là. Et je sais qu'il lisait un texte écrit d'avance. Je présume qu'on prend pour acquis que, quand l'opposition fait son rôle, elle est toujours contre, mais il faudrait peut-être attendre la fin du débat pour voir si l'opposition officielle va voter contre le principe du projet de loi n° 111. Et je peux lui dire que, s'il avait attendu d'entendre la position des députés de l'opposition, il se serait rendu compte que, finalement, il a parlé trop vite, M. le Président. Il a parlé trop vite. Ce n'est pas parce qu'on est dans l'opposition qu'on est nécessairement contre chacun des projets de loi que le gouvernement nous propose.

Le gouvernement, ici, nous propose un fonds. Il nous propose un fonds, ce qu'on appelle un fonds dédié. Bon. Alors, M. le Président, le gouvernement veut mettre de l'argent de côté dans un fonds spécial qu'il destine à l'action communautaire. Le geste, en soi, est intéressant et on ne peut pas s'opposer à ce que le gouvernement fasse un effort pour tenter de venir en aide encore davantage à l'action communautaire. On peut, cependant, ne pas être d'accord avec le principe d'établir des fonds spéciaux.

Comme ancien ministre des Finances, M. le Président, je ne peux pas dire que je suis au comble de l'enthousiasme de voir le gouvernement commencer à faire, comme ça, là, des fonds spéciaux un peu partout dans l'administration publique. On comprend pourquoi le gouvernement veut le faire, il veut signaler son intérêt, son intérêt tout à fait particulier pour l'action communautaire. Mais, sur le plan strictement de la gestion des fonds publics, multiplier, comme ça, les fonds, ce n'est pas, à mon avis, une très bonne technique et, quant à moi, je préférerais ne pas avoir de fonds spéciaux, mais que le gouvernement consacre des sommes d'argent à l'action communautaire, ça, je suis tout à fait d'accord, d'autant plus que c'est tout à fait pour la forme que le gouvernement crée ce Fonds, parce que le gouvernement dit que le ministre des Finances peut puiser dans le Fonds, peut éventuellement... Il n'y a aucune obligation pour le ministre de payer des sommes à même ce Fonds d'aide à l'action communautaire.

Il y a une obligation à la Société des loteries du Québec de verser dans le Fonds 5 % des revenus des casinos, mais nulle part il n'est dit que le Fonds, lui, doit verser 5 % à l'action communautaire. On dit que le ministre des Finances peut, s'il le veut, puiser à même ce Fonds pour venir en aide à l'action communautaire, mais il n'a pas d'obligation. Et le ministre des Finances, aussi, peut puiser dans le Fonds pour verser des sommes au trésor, verser des sommes d'argent au fonds consolidé, de même que les intérêts du fonds sont versés au fonds consolidé. Alors, ce n'est pas tout à fait clair, M. le Président, quelles sont les sommes d'argent qui vont être puisées à même ce Fonds-là pour réellement financer l'action communautaire.

Voyez-vous, je prends, par exemple, l'article 3.35, 3.36 plutôt: «Le ministre – des Finances, bien sûr – peut, à titre de gestionnaire du Fonds, octroyer directement une aide financière à des organismes... Le ministre peut également [...] conclure toute entente afin de verser à un ministère – à un ministère, cette fois-ci – des sommes pour lui permettre d'accentuer ses opérations relatives à l'aide communautaire.»

On dit aussi que les surplus accumulés dans le Fonds sont versés au fonds consolidé du revenu, ça veut dire au fonds du gouvernement. Alors, les surplus n'iront pas à l'aide communautaire, bien sûr. Alors, M. le Président, de toute façon, c'est un peu académique. Qu'on soit ou non d'accord avec la constitution d'un fonds dédié – et, moi, je l'ai dit, personnellement, je ne suis pas tellement d'accord – le principe de l'aide à l'action communautaire, lui, est un principe souhaitable. Si le gouvernement a décidé de choisir ce véhicule-là, ce n'est certainement pas moi qui va aller voter contre le projet de loi pour indiquer que l'opposition n'aime pas tellement le véhicule, mais qu'elle ne s'oppose pas au principe.

M. le Président, on ne peut pas discuter de ce projet de loi là sans parler de l'aide ou de l'action communautaire. S'il n'y avait pas d'aide ou d'action communautaire au Québec, bien le gouvernement serait très mal pris. Quand on sait qu'il y a des milliers et des milliers de personnes qui, au Québec, bénévolement, à chaque jour ou à chaque semaine, donnent de leur temps pour venir en aide à leurs concitoyens, bien, il n'y a aucun gouvernement sur la terre qui ne pourrait se payer ces efforts-là, cette main-d'oeuvre-là qui, probablement aussi parce qu'elle n'est pas payée, est tellement dévouée à la cause qu'elle tente de desservir.

Je dis, M. le Président, et je sais que vous êtes d'accord avec moi, qu'il faut rendre hommage à toutes ces personnes, ces femmes et ces hommes qui, semaine après semaine, jour après jour, consacrent leurs meilleurs efforts à venir en aide à leurs concitoyens: que ce soient des personnes esseulées qu'on tente d'aider, des personnes âgées, des personnes malades, que ce soient des personnes handicapées, des jeunes. Dans notre société, il y a un nombre infini de personnes – peut-être pas infini, mais un nombre important – qui reçoivent de l'aide, comme ça, continuellement, jour après jour, de personnes qui ne sont pas rémunérées. Le gouvernement, le meilleur placement qu'on peut faire, à mon avis, c'est de venir en aide à ces personnes bénévoles, enfin pour organiser le bénévolat, et ça a, à mon avis, un effet de levier important. Chaque dollar qu'on peut mettre dans l'action communautaire rapporte au gouvernement probablement 50 $ ou 100 $, puisque ça permet d'organiser le bénévolat et, donc, de rendre des services inestimables à la communauté.

M. le Président, ceci étant dit, il reste quand même que ce bénévolat, il faut qu'il soit organisé justement. Le gouvernement a tenté de le faire en créant le Secrétariat à l'aide communautaire. Malheureusement, les deux principaux organisateurs du Secrétariat sont sur le point de nous quitter. Mais je présume que le Secrétariat, lui, va continuer. Il y a lieu de se demander: Est-ce que la constitution de ce Secrétariat-là était vraiment la meilleure chose à faire pour tenter d'organiser le bénévolat au Québec? Parce que le bénévolat, au Québec, il existe depuis longtemps et il est organisé. On connaît, dans toutes les régions du Québec, dans tous les comtés, les organismes qui oeuvrent à l'aide communautaire. Est-ce que vraiment, en mettant sur pied le Secrétariat, comme a voulu le faire le gouvernement, on a réglé le problème ou pris des dispositions qui vont faire en sorte de régler le problème?

(20 h 40)

J'ai devant moi, M. le Président, un article qui a été écrit il y a quelque temps par l'éditorialiste Claude Masson de La Presse qui disait ceci: Malheureusement – en parlant de la création du Secrétariat à l'action communautaire – disait M. Masson dans La Presse , M. Parizeau a raté sa cible. À l'analyse, ce Secrétariat constitue une sorte de méli-mélo politico-technocratique, mélangeant l'action communautaire et l'employabilité chez les jeunes, par l'implantation, dans le même souffle, de Carrefours jeunesse-emploi dans toutes les régions du Québec à partir, disait-il, d'une seule expérience vécue dans l'Outaouais, confiant du même coup aux députés une sorte de mandat d'organisateurs communautaires dans leur circonscription, une sorte, dit-il, de salade indigeste, un bricolage mal ficelé. C'est à n'y rien comprendre comme structure d'entraide à l'action communautaire, disait-il.

Et l'éditorialiste rappelait le fait qu'un grand nombre d'organismes communautaires, les tables régionales d'organismes communautaires, les regroupements provinciaux d'organismes communautaires et bénévoles, la Fédération québécoise des centres communautaires de loisirs et le Regroupement des groupes populaires en alphabétisation du Québec, ont dénoncé unanimement et sévèrement ce qu'il appelle ce simulacre de projet gouvernemental à l'égard de l'action communautaire. Et il disait: Le Secrétariat annoncé dans sa forme actuelle apparaît inacceptable à ces groupes-là. Les organismes, dit-il, sont à la fois déçus et inquiets.

Et la question, M. le Président, qui se pose, que pose l'éditorialiste, est de bien signaler qu'il y a toute une différence entre l'action communautaire, qui est très souhaitable et qu'on connaît, et l'employabilité chez les jeunes, c'est-à-dire de tenter de venir en aide aux jeunes pour assurer autant que possible leur insertion en emploi. Il s'agit là de deux projets qui sont tout à fait différents. L'action communautaire, c'est une chose, et la réinsertion en emploi des jeunes, c'est une autre chose, une autre chose très différente. Et, de dire l'éditorialiste, de vouloir à tout prix, de vouloir arrimer deux projets qui sont fort différents, je le disais tantôt, soit l'action communautaire et l'employabilité pour les jeunes, porte ombrage à l'un et à l'autre, une politique de l'emploi pour les jeunes, dit-il, étant fort à l'étroit dans un secrétariat à l'action communautaire et l'action communautaire autonome risquant de se faire bouffer par la priorité à l'emploi. L'action communautaire, dit-il, est loin de se limiter aux jeunes et aux emplois. Chaque projet, chaque réalisation est basée sur les besoins et les demandes de la communauté qui est desservie. Il ne sert à rien de vouloir imposer une structure étatique, décidée par le haut, ce qui contredit le discours même de M. Parizeau qui promettait de revaloriser les milieux et les régions et de décentraliser les centres de décisions. C'est tout le contraire qu'il vient de faire.

Maintenant, l'éditorialiste s'opposait aussi au mandat d'organisateurs communautaires confiés aux députés et suggérait au premier ministre de refaire ses classes.

M. le Président, c'est l'avis d'un éditorialiste. Probablement qu'il y en a d'autres qui ont jugé moins sévèrement le projet de Secrétariat à l'action communautaire. Quant à moi, j'ai des doutes sur l'opportunité d'avoir créé un tel secrétariat à l'action communautaire parce que, justement, on tente de régler du même coup deux problèmes qui sont fort différents.

Qu'on prenne, par exemple, l'employabilité chez les jeunes, il y a au Québec présentement un réseau tout à fait expérimenté de personnes qui s'occupent, justement, de l'insertion en emploi des groupes qui sont les plus difficilement employables. On appelle ça, M. le Président, les Services externes de main-d'oeuvre. Vous en avez peut-être dans votre comté, des SEMO. On les appelle les SEMO. Il y en a au-delà d'une cinquantaine, de SEMO, au Québec, dont un certain nombre justement se spécialisent dans l'insertion en emploi des jeunes. D'autres peuvent s'occuper de l'insertion en emploi des personnes handicapées, des femmes, enfin il y en a de toutes sortes, mais il y en a qui se consacrent spécialement aux jeunes. Et voilà des organismes qui ont l'expérience, qui sont sur le terrain, qui sont habitués à travailler à l'insertion en emploi des jeunes. Alors, pourquoi ne pas, plutôt que de tenter, dans un seul secrétariat, de régler deux problèmes différents, pourquoi ne pas aider justement aux SEMO? Pourquoi ne pas consacrer des sommes additionnelles pour venir en aide à ces services externes de main-d'oeuvre déjà spécialisés dans l'insertion en emploi des jeunes et laisser l'action communautaire à ceux qui connaissent ça?

On pourrait donc prendre les fonds dont dispose le gouvernement, en donner une partie aux SEMO, ou créer d'autres SEMO même, s'il le faut, pour l'insertion en emploi des jeunes. Quant à l'action communautaire, là, ce serait beaucoup plus clair. Mais, malheureusement, le gouvernement a choisi de faire autre chose.

M. le Président, parlons maintenant d'argent, si vous voulez. Le Parti québécois avait promis, dans son programme politique, de consacrer 400 000 000 $ à l'action communautaire. Le projet de loi qu'on a devant nous propose 5 % des revenus des casinos. Or, les revenus des casinos, même quand le casino de l'Outaouais sera créé, ça rapportera à peu près 200 000 000 $ par année au Québec. Alors, 5 % de 200 000 000 $, ça fait à peu près 10 000 000 $; 10 000 000 $, ce n'est pas rien, c'est de l'argent, mais on est loin du 400 000 000 $ du programme du Parti québécois.

D'autre part, la structure que le gouvernement a choisi d'implanter, les Carrefours jeunesse-emploi, requièrent des fonds qui vont évoluer, semble-t-il, un peu dans le temps, mais qui vont se situer autour de 250 000 $ à 400 000 $ par comté, si je comprends bien. Alors, 275 000 $ à 400 000 $ par comté, c'est donc dire que le gouvernement entend consacrer à cette structure-là une somme d'argent qui va osciller autour de 40 000 000 $; 40 000 000 $, c'est beaucoup d'argent, c'est quatre fois plus que ce que le projet de loi nous propose. Alors, je ne sais pas, M. le Président, où on va prendre les fonds pour la différence, mais, manifestement, ce n'est pas avec le 5 % qu'on va réussir à financer les Carrefours jeunesse-emploi.

M. le Président, est-ce que ce projet de loi, l'opposition officielle va voter en faveur? Oui, M. le Président, on va voter en faveur. C'est important de donner un signal à l'effet que nous sommes d'accord avec une aide additionnelle à l'action communautaire. Et on n'a pas ici à se prononcer sur l'opportunité de voter pour ou contre le Secrétariat à l'action communautaire. Si le projet de loi portait là-dessus, je peux vous dire, M. le Président, que j'aurais de fortes réserves à endosser le Secrétariat à l'action communautaire.

Maintenant, l'aide à l'insertion en emploi des jeunes, oui, M. le Président, on est d'accord. L'aide à l'action communautaire accrue, oui, on est d'accord. Si on peut, à même les fonds qui sont générés par ce projet de loi, venir en aide aux jeunes, à l'insertion en emploi des jeunes, tant mieux. Les Carrefours jeunesse-emploi, M. le Président, aucun problème avec ça. Ça pourrait s'arrimer avec les SEMO, ce serait encore mieux. Mais disons qu'on ne peut pas s'opposer à une démarche qui, somme toute, n'est peut-être pas la meilleure, mais qui est intéressante et qui, certainement, pourra donner des résultats.

Alors, M. le Président, je termine en disant qu'un fonds ce n'était pas essentiel, ce n'était pas nécessaire, mais, par contre, on ne peut certainement pas s'opposer à ce que le gouvernement mette 10 000 000 $ de plus dans l'action communautaire. Le Secrétariat? On aurait pu faire mieux, je crois, M. le Président, on aurait même pu s'en passer, je crois, en bonifiant davantage la structure des Services externes de main-d'oeuvre, ou des SEMO, et en distribuant des fonds à l'aide communautaire par l'intermédiaire des organismes qui existent déjà.

Le gouvernement nous propose donc, M. le Président, un pas timide, mal assuré, je dois le dire, dans une direction qui, elle, est une bonne direction. Ce qu'on veut faire, M. le Président, l'objet de ce que recherche le gouvernement, l'objectif est louable, est souhaitable; le moyen, à mon avis, n'est pas très bon. Par contre, M. le Président, on ne peut certainement pas s'opposer à ce que des fonds additionnels soient consacrés à l'aide communautaire, et c'est la raison pour laquelle, M. le Président, l'opposition officielle votera en faveur du principe de ce projet de loi. Je vous remercie.

(20 h 50)

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Je suis maintenant prêt à céder la parole à un autre intervenant. Je vais céder la parole à M. le député de Bourassa, en vous rappelant, M. le député, que vous avez un droit de parole maximal de 20 minutes. À vous la parole.


M. Yvon Charbonneau

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, merci, M. le Président. L'Assemblée est saisie d'un projet de loi qui veut assurer, en continu, le financement de l'action communautaire. Il porte malheureusement le n° 111. Je me rappelle une autre loi, la loi 111 de 1983, qui était d'une tout autre nature et qui avait soulevé une vive opposition dans les milieux que je fréquentais et représentais. Mais on va parler de ce projet de loi n° 111, M. le Président, pour ce qu'il est.

Au moment où M. le premier ministre, il y a plusieurs mois, annonçait l'institution du Secrétariat à l'action communautaire, il m'est revenu d'avoir à commenter sur le champ la déclaration du premier ministre sur ce sujet. Dans cette réponse à la déclaration ministérielle du premier ministre, j'ai tout d'abord saisi l'occasion pour saluer l'engagement, je dirais, explicite du gouvernement envers cette forme d'intervention sociale qu'on appelle l'action communautaire. J'ai aussi, au nom de notre formation politique, exprimé, cependant, des réserves sur l'instrument ou sur la structure choisie, le moyen choisi, c'est-à-dire la mise sur pied d'une structure qui s'appelle un secrétariat, un secrétariat de très haut niveau dans l'appareil gouvernemental rattaché au bureau du premier ministre. J'ai soulevé quelques questions sur l'opportunité d'avoir songé à mettre en place un tel instrument.

D'ailleurs, dans les milieux de l'action communautaire, cette initiative a été soulevée... la mise en place d'un secrétariat à l'action communautaire a été saluée de manière ambiguë. Bien sûr, si on regarde l'aspect engagement du gouvernement, on est porté à s'en réjouir, mais, si on regarde l'institution comme telle d'un secrétariat, que certains ont vu comme voulant chapeauter l'action communautaire, qui est multiforme, qui est très diverse, qui est encore jeune dans certains secteurs... Donc, ceux qui ont vu là un chapeautage possible avaient des objections, des réticences.

D'autres ont vu, dans le Secrétariat, un moyen d'encadrer l'action communautaire, voire de l'alimenter financièrement. Et c'est ce qu'on peut voir maintenant. Enfin, il y en a d'autres qui ont souligné que ce Secrétariat pouvait comme dédoubler ou se superposer à des structures déjà efficaces et présentes dans le milieu. D'ailleurs, mon collègue, le député de Laporte, vient de souligner, je pense, de manière fort opportune que, dans le domaine de l'emploi ou de l'employabilité des jeunes, de l'insertion des jeunes au travail, déjà, il y a des mécanismes, il y a les Services externes de main-d'oeuvre qui agissent de manière appréciée. Et c'est la même chose dans le domaine scolaire. De plus en plus, il y a des dispositifs spéciaux au niveau de l'enseignement secondaire, dans certaines polyvalentes que je connais, pour aider à l'insertion des jeunes au travail.

Donc, il y a effectivement un risque de chevauchement ou de superposition des responsabilités en instaurant comme ça, à partir d'en haut, un secrétariat. Donc, ces risques ont été soulignés. Nous avons aussi soulevé des questions sur la nomination de la personne titulaire du poste de direction le plus élevé de ce Secrétariat. Et, d'ailleurs, nos interrogations n'ont plus lieu d'être maintenant, étant donné que cette personne a démissionné, mais elles étaient relativement bien fondées, je pense, dans le temps.

Ceci étant dit, M. le Président, le Secrétariat à l'action communautaire est devenu une réalité. L'opposition est d'accord avec la mise en place de ce cadre appuyant ou renforçant l'action communautaire. La question qui est devant nous, plus particulièrement aujourd'hui, à travers le projet de loi n° 111, c'est le financement de l'action communautaire à travers la mise en place d'un fonds. C'est un projet de loi, somme toute, fort simple, qui contient quelques articles, et c'est un projet de loi dont le principe est facile à saisir. Tout de même, nous pouvons en discuter en nous arrêtant, dans un premier temps, sur, je dirais, le principe, l'inspiration de base de ce projet de loi, et, dans un deuxième temps, on peut discuter du moyen principal retenu par le gouvernement. Tout ça forme l'essence même de ce projet de loi.

Dans un premier temps, ce qu'il nous faut faire remarquer, ce qu'il nous faut faire ressortir, c'est que l'inspiration de base de ce projet de loi, c'est d'assurer le financement en continu de l'action communautaire. En créant un fonds autonome, le gouvernement s'oblige, en quelque sorte, à alimenter en continu l'action communautaire et se prémunit contre des situations où, à cause de difficultés financières, à cause de l'obligation de faire des compressions dans certains domaines, il pourrait être amené, à un moment donné, à balayer ce secteur-là, à l'oublier, à l'effacer, à le priver de tout revenu. En instituant un fonds – comme l'a démontré le député de Laporte tout à l'heure – il est bien sûr possible au gouvernement d'intervenir et de supprimer ce Fonds ou de le vider de ses sommes, mais il y a un feu rouge qui va s'allumer, à ce moment-là, et il y aura un débat qui va se faire parce qu'on contreviendrait à cette idée du financement en continu, on reviendrait sur cette idée. Donc, le bien-fondé du projet de loi, en ce sens-là, nous le reconnaissons d'emblée, et c'est pourquoi, il me plaît bien de répéter ce qu'ont dit mes collègues qui ont pris la parole de ce côté-ci auparavant, nous appuierons le principe du projet de loi.

L'action communautaire est devenue, je dirais, une fonction essentielle, une fonction vitale dans, j'imagine, la plupart de nos milieux, en tout cas dans un milieu comme celui que j'ai le privilège de représenter à l'Assemblée nationale, le milieu du nord-est de Montréal. Je peux vous dire, M. le Président, qu'il y a dans notre secteur, dans notre comté, dans le comté de Bourassa – et c'est la même chose dans le comté voisin – des centaines et des centaines de personnes qui travaillent de manière bénévole dans l'action communautaire à répondre à des besoins cruciaux pour certains secteurs de la population: que ce soit auprès des personnes âgées; que ce soit auprès des immigrants, qui arrivent d'une manière importante dans ce secteur de la ville; que ce soit face à certains problèmes de santé, à l'isolement de certaines catégories de la population, auprès de la jeunesse, auprès des femmes battues, etc. Il y a des dizaines d'organismes qui interviennent et qui apportent soulagement et parfois même des correctifs importants à certaines situations, et qui sont toujours présents dans le milieu. Donc, l'action communautaire mérite d'être encouragée, soutenue de manière stable, de manière continue, de manière formelle.

(21 heures)

D'ailleurs, nous n'avons pas tardé à profiter de la mise en place de cette mesure dans les comtés de Bourassa et de Sauvé, qui représentent la population de Montréal-Nord et une partie de la population de Montréal, du quartier d'Ahuntsic. Les députés que nous sommes, mon collègue de Sauvé et moi-même dans Bourassa, très rapidement, dès le mois de septembre, avons consulté notre milieu et nous avons rapidement fait le consensus qu'il fallait et qu'avait souhaité le premier ministre lorsqu'il a mandaté les députés d'agir dans leur milieu pour rassembler les énergies autour de l'idée des Carrefours jeunesse-emploi. Nous avons réussi, en quelques semaines, à faire l'unanimité du milieu en consultant la Corporation de développement économique de Montréal-Nord, qui regroupe autour de la même table 25 intervenants de toute provenance du milieu, et en consultant aussi la table de concertation sur la jeunesse de notre secteur de la ville où, là encore, il y a une vingtaine d'organismes qui sont présents, l'unanimité s'est faite très rapidement pour confier à un organisme – qui s'occupait déjà en partie des problèmes dont doit s'occuper un carrefour emploi-jeunesse, un organisme qui existait sous le nom de Rond Point jeunesse au travail – et nous avons fait un consensus rapide, M. le Président, de sorte que Rond Point jeunesse au travail présente au Secrétariat à l'action communautaire, dès le mois de septembre, un projet dans le but de se transformer en un carrefour jeunesse-emploi. Et, en cours d'octobre, nous avons reçu du Secrétariat à l'action communautaire l'autorisation d'aller de l'avant, si bien que ce Carrefour jeunesse-emploi, qui doit desservir les deux comtés, de Bourassa et de Sauvé, a pu être annoncé officiellement dès le 7 novembre et sera financé à hauteur de 345 000 $ par année pour les trois prochaines années.

C'est un outil qui est jugé très important dans notre milieu, étant donné les problèmes économiques, les problèmes sociaux que connaissent les jeunes, les problèmes de chômage, de décrochage scolaire, et nous pensons qu'avec ce nouveau montant mis à la disposition de notre milieu nous pourrons, Rond Point jeunesse, Carrefour jeunesse-emploi, avec l'aide des autres forces vives du milieu, répondre aux questions et aux problèmes que vivent plusieurs centaines, voire plusieurs milliers, de jeunes dans notre secteur du territoire de l'île de Montréal en matière d'information sur le marché du travail, en matière de formation, de rehaussement de l'employabilité, d'insertion au travail et toute autre démarche utile pour ces jeunes.

Donc, déjà, ce dont nous parlons en termes de projet de loi, je tenais à le dire, ça existe déjà sur le terrain. Déjà, l'action s'est mise en marche, et je pense que ce serait très intéressant pour beaucoup d'autres secteurs de l'île de Montréal ou d'autres régions du Québec de pouvoir profiter de cet outil qui est à notre disposition, et c'est pourquoi aussi je m'intéresse à ce que cet outil soit assuré, de manière stable, en continu dans son financement.

Quant à l'autre aspect du débat, qui a été soulevé par mon collègue de Laporte, par mon collègue de Verdun, c'est-à-dire le moyen retenu, un fonds, et même ce qu'on appelle ici un fonds dédié... Pour qu'on nous comprenne bien, un fonds dédié, dans l'administration gouvernementale, financière, budgétaire, c'est une portion des revenus du gouvernement qui est réservée à l'avance, qui est, en quelque sorte, étiquetée pour des fins particulières. Cette fois-ci, il s'agit de l'action communautaire.

La question des fonds dédiés, évidemment, peut être discutée longuement. Selon que l'on se place d'un point de vue ou de l'autre, des utilisateurs ou des administrateurs, on peut avoir des points de vue différents. Il est bien sûr que la multiplication à l'infini, si ça devait devenir le cas, de fonds dédiés a un effet d'érosion sur la base fiscale, émiette, en quelque sorte, la marge de manoeuvre, réduit beaucoup la marge de manoeuvre qu'un gouvernement peut légitimement avoir pour affecter ses fonds d'une année à l'autre.

Par contre, on peut s'arrêter à la question des fonds dédiés et en parler longuement comme tels, mais je pense qu'il serait plus avisé d'approfondir ce débat-là dans l'ensemble d'un débat sur le régime fiscal au complet. Parce que les fonds dédiés, ce n'est pas une pratique, si on regarde le fond de la réalité en question, qui est différente d'autres pratiques, par exemple, les mesures qu'on appelle des abris fiscaux ou le Fonds de solidarité de la FTQ ou le Régime d'épargne-actions, le régime d'actions accréditives, dans le sens suivant: les quatre, cinq mesures que je viens de nommer sont des fonds qui sont constitués à même l'épargne, et le gouvernement se prive d'un revenu, à ce moment-là.

Se priver d'un revenu, affecter un revenu, on parle des mêmes réalités. Dans les abris fiscaux, le gouvernement se prive d'un revenu pour des fins particulières. Donc, c'est là aussi de l'ordre du fonds dédié. Il se prive d'un revenu, cette fois-là. Quand on parle, maintenant, de créer un fonds pour une fin particulière, dans l'un et l'autre cas de figure le gouvernement limite sa marge de manoeuvre budgétaire et fiscale en prévoyant à l'avance, soit, dans le cas des abris fiscaux, de se priver de ressources pour des fins particulières ou, dans le cas de fonds dédiés, en affectant à l'avance, en gelant à l'avance certaines affectations. Donc, on est dans le même ordre de problèmes. Et, moi, je soumets que ces questions-là pourraient mieux s'apprécier dans le cadre plus large d'un débat sur la fiscalité, d'ailleurs, qui est un engagement du parti qui forme le gouvernement actuel.

M. le Président, l'autre aspect qu'il me reste à souligner – mon collègue de Verdun l'a fait justement: le fait de nourrir le fonds dont nous parlons aujourd'hui par un pourcentage des revenus nets des loteries assujettit l'alimentation du fonds à certaines fluctuations, au rendement des loteries. Est-ce qu'on doit considérer comme acceptable le fait que, selon le rendement des loteries, il y aura plus ou moins d'argent qui ira à l'action communautaire? C'est une bonne question.

Nous pourrions, je pense, en travaillant à l'étude détaillée du projet de loi, certainement imaginer un dispositif qui pourrait stabiliser, corriger les fluctuations trop brutales qui pourraient découler du rendement des loteries dont on prélève un pourcentage. Si on trouvait un moyen de réduire les écarts de la fluctuation, si on trouvait un moyen d'atténuer l'impact de ces fluctuations sur le financement de l'action communautaire – et ce serait possible en particulier au niveau de l'article 3.38, en regardant d'autres techniques – à ce moment-là, nous pourrions être encore plus à l'aise parce qu'on aurait le sentiment, quand même, que le gouvernement finance en continu; non seulement en continu, mais à une hauteur comparable d'une année à l'autre, progressant normalement d'une année à l'autre. On pourrait se rendre compte, à ce moment-là, que son engagement envers l'action communautaire n'est pas que proportionnel au rendement des loteries, c'est un engagement stable sur le fond.

M. le Président, ceci étant dit et ces quelques réserves étant faites en ce qui a trait aux dispositifs, aux moyens techniques choisis par le gouvernement dans son projet de loi, il n'en reste pas moins que, sur le fond, l'opposition officielle est parfaitement à l'aise avec le concept de ce projet de loi que je résume, quant à moi, comme un engagement explicite et en continu sur le plan financier à l'appui de l'action communautaire. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de Bourassa. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. À vous la parole, M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 111, comme l'ont si brillamment expliqué aussi bien le proposeur du projet de loi, soit la ministre des Finances, que le député de Laporte ainsi que mes collègues de Verdun et de Bourassa, est certainement un projet de loi très important et attendu par l'ensemble du monde communautaire. Je pourrai revenir sur les raisons pour lesquelles le monde communautaire attend ce projet de loi.

Très rapidement, peut-être pour les gens qui n'ont pas écouté les discours précédents en entier et qui se joindraient à nous maintenant en plus des collègues de cette Assemblée devant les caméras de télévision, je rappellerai que ce projet de loi a pour but de créer un fonds qui va permettre le financement de l'action communautaire, et plus particulièrement des carrefours jeunesse-emploi créés et dont le député de Bourassa vous a entretenu sur les modalités.

Je dois dire que, dans la région de l'est de Montréal, du nord-est de Montréal, soit le comté de LaFontaine et le comté de Pointe-aux-Trembles – mon collègue Michel Bourdon – nous avons travaillé et nous travaillons actuellement ensemble à installer et à créer cet organisme qui s'appelle Carrefour jeunesse-emploi, car un grand nombre de jeunes dans notre région sont actuellement dans le désarroi le plus profond, ne trouvant pas d'emploi, ne pouvant pas s'insérer dans la société. Et nous pensons, à juste titre, en dehors des partis politiques et des idéologies, que, lorsqu'un organisme est créé par le gouvernement, lorsqu'une mesure est prise par un gouvernement, qui peut aider à soulager ou à régler une partie des problèmes que notre société connaît, nous devons y souscrire, en dehors des idéologies politiques, dans le meilleur des intérêts de notre société et en respect du mandat qui nous est donné de travailler à son amélioration et à sa progression.

(21 h 10)

Alors, M. le Président, il est évident qu'on pourrait avoir des réserves au niveau administratif, au niveau financier, sur le fait de créer un fonds dédié. Bon. Mais je ne vois point là matière à s'opposer ou à faire en sorte de retarder ce projet de loi là, bien au contraire.

Car, en effet, M. le Président, ce n'est pas la première fois qu'un gouvernement – celui-là ou d'autres précédemment – a recours à ce genre de manière de financement. D'ailleurs, la population, dans sa sagesse... Très souvent, pour les gens qui rencontrent les électeurs, les députés qui les rencontrent, très souvent, les gens nous disent: Pourquoi ne pas mettre une taxe sur les jeux pour aider les démunis, pour aider les itinérants? Pourquoi ne pas mettre une taxe sur l'essence pour financer le transport? Et c'est ce que nous faisons, d'ailleurs, dans la grande région de Montréal, où nous avons, sur les permis de conduire, un montant de 30 $ qui est perçu, pour participer et pour aider le développement du réseau de transport. C'est quelque chose qui, pour la population, semble normal. Cela peut paraître, pour des techniciens du ministère des Finances, des gens qui ont des visions quant à l'administration des finances publiques, une solution qui n'est pas la meilleure, mais, pour moi, comme député issu de la base, proche des électeurs, proche des gens, je pense que c'est une solution qui me semble – et ça n'engage que moi, personnellement, comme député de LaFontaine – appropriée, car, en effet, elle permet de voir d'où viennent les argents, quelles sont les sommes perçues, à quoi elles sont utilisées, et c'est là certainement quelque chose de très clair, de très transparent, et qui permettrait probablement aux citoyens de voir qu'il y a des ressources et des mesures qui sont prises pour venir en aide.

M. le Président, il y a quand même quelques endroits dans le projet de loi qui mériteraient peut-être d'être clarifiés. Je me demande, par exemple, à l'article 3.38 qui se lit: «Les surplus accumulés par le fonds sont versés au fonds consolidé du revenu aux dates et dans la mesure que détermine le gouvernement.» Il ne faudrait pas, par contre, que cela ouvre la porte à un transfert des ressources de ce Fonds vers le fonds consolidé de la province et qui servirait à d'autres activités que le communautaire. Je me demande si, en commission parlementaire, nous ne devrions pas, tous les députés qui sont en faveur de l'action communautaire, faire en sorte d'amender ce projet de loi pour que, dans le sens que le mentionnait le député de Bourassa, lorsqu'il y a des surplus, ils soient versés dans un fonds qui permettrait, lorsqu'il y a moins d'argent, de stabiliser les revenus. Car tout le monde sait que les organismes communautaires ont besoin d'avoir des revenus stables. On ne peut pas fluctuer sans créer de dérangement ou sans mettre en péril certaines actions ou certaines opérations importantes, ce qui aurait, à ce moment-là, des répercussions sur la population concernée et qui serait contre-productif à l'idée de ce projet. Alors, peut-être ce serait là un amendement à apporter au projet de loi. Moi, je le souhaiterais personnellement et je retiens l'idée du député de Bourassa en ce sens, et, s'il le désire, en commission parlementaire, apporter un amendement qui irait dans ce sens-là, certainement, M. le Président, que je serais prêt à l'appuyer et à travailler avec.

Il y a aussi, M. le Président, quelque chose que peut-être j'aurais aimé voir dans le projet de loi. Pourquoi ce Fonds, M. le Président, n'aurait-il pas l'obligation, une fois par année, de faire rapport devant les élus de cette Assemblée nationale? Pourquoi ne devrait-il pas, comme les sociétés d'État ou parapubliques qui dépendent de l'Assemblée nationale, venir y déposer bilan et rapport, devant les députés, devant les élus, ce qui nous permettrait, à nous, les élus proche des gens, qui décidons d'aller dans le sens de l'aide aux organismes communautaires, eh bien, d'avoir un contrôle et, s'il le fallait, de le réorienter dans des directions dont, peut-être, il pourrait s'éloigner. Ce serait souhaitable, peut-être, que la ministre puisse faire en sorte que ce Fonds soit imputable ou puisse se rendre responsable devant les élus de l'Assemblée nationale une fois par année, par un rapport qui serait déposé devant les membres et devant une commission parlementaire compétente, peut-être la commission des affaires sociales ou une autre commission parlementaire qu'il resterait à déterminer, bien entendu, par le gouvernement. Alors, c'est peut-être là une suggestion que je ferai pour bonifier ce projet de loi là, M. le Président, et pour rendre l'action des députés encore plus proche de tout ce domaine qu'est l'action communautaire.

Le député de Bourassa l'a dit, le député de Laporte l'a mentionné fortement et largement, l'importance et tout le travail qui est fait par ces dizaines de milliers de bénévoles que nous avons au Québec, et je dirai, pour avoir voyagé dans plusieurs autres pays et avoir vécu, dans ma jeunesse, dans d'autres pays: je n'ai jamais vu dans d'autres pays autant de gens qui s'impliquent dans le bénévolat auprès de leurs concitoyens, que l'on peut en voir au Québec. C'est une des caractéristiques de notre société québécoise, l'entraide, le bénévolat, la collaboration avec les plus démunis, avec les moins bien nantis, l'abnégation... d'une certaine qualité de loisirs, pour pouvoir aller encourager d'autres qui n'ont pas cette qualité de la part de nos concitoyens. Alors, c'est donc très important. Ça fait partie de notre spécificité, de notre différence, cette mentalité, cette philosophie d'entraide communautaire.

M. le Président, je le mentionnais tout à l'heure, dans le comté de LaFontaine comme dans le comté de Pointe-aux-Trembles, nous avons su, les deux députés de partis différents, nous unir pour travailler à l'action communautaire, pour créer le Carrefour jeunesse-emploi. Je m'en voudrais, après avoir travaillé avec le député, avec les citoyens pour le réaliser, pour y contribuer, de m'opposer à ce projet de loi. Au contraire, je ne peux qu'être d'accord, tout en reconnaissant que peut-être, comme le disaient certaines personnes, certains zélotes peuvent trouver qu'un fonds dédié ne correspond pas, n'est pas la meilleure manière, mais, ça, c'est de l'accessoire. L'important, c'est qu'il y aura de l'argent, c'est qu'il y a des gens qui vont pouvoir en profiter et qu'on va rendre service à notre communauté. Aussi, M. le Président, je suis en faveur du principe, mais, sur le fond du projet, je suis aussi en faveur. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi?


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et la Loi sur la Société des loteries du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: M. le Président, à ce moment-ci, ayant terminé les travaux qu'il avait été prévu de faire aujourd'hui, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain, vendredi, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Excusez-moi, M. le leader adjoint du gouvernement, est-ce qu'il y a une motion de renvoi auparavant que vous...

M. Gendron: Oui, vous avez raison, merci. J'ai omis de faire la motion de renvoi.

Une voix: C'est un bon président.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Gendron: Alors, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission scolaire... à la commission parlementaire...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: ...concernée. Il faut suivre, M. le Président, je m'excuse.

Une voix: On a l'air de petits enfants!

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je comprends donc qu'il y a une motion qui est faite pour qu'il soit renvoyé devant la commission du budget et de l'administration, c'est ça?

M. Gendron: Oui.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. Et je comprends que vous avez proposé une motion d'ajournement des travaux de cette Assemblée.

M. Gendron: Oui, M. le Président. Là, je suis sûr de ce que je fais comme motion: je fais motion pour qu'on ajourne nos travaux à demain matin, vendredi, 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. Alors, les travaux de cette Chambre sont donc ajournés à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 19)