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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 8 mai 1996 - Vol. 35 N° 18

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de parlementaires de la Communauté française de Belgique

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, nous reprenons les affaires du jour.

Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Conformément à l'ordre de l'Assemblée qui a été donné hier, je vous demande de prendre en considération l'article 2 du feuilleton.


Projet de loi n° 1


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): L'Assemblée reprend le débat ajourné le 7 mai dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole. Conformément à l'ordre adopté hier soir, le débat sera limité à trois interventions, soit celle de Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, celle de M. le député de Lac-Saint-Jean et celle de M. le ministre d'État à la Métropole qui exercera son droit de réplique.

Alors, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et critique officielle de l'opposition au niveau de la métropole. Mme la députée.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Tout d'abord, avant de discuter du principe même du projet de loi n° 1, loi créant le ministère de la Métropole, j'aimerais revenir sur la présence ou plutôt la naissance d'un ministre d'État à la Métropole et plus particulièrement sur un message positif que le ministre répand à Montréal. Bien sûr, il est important, voire primordial, de positiver l'image de la métropole et de donner une espèce d'influx positif justement à Montréal. Cependant, il ne faut pas pour autant se fermer les yeux sur la réalité qui prévaut à Montréal. Je suis favorable et je m'associerai à toute annonce ou initiative positive pour la métropole.

D'ailleurs, je ne peux ignorer les nombreuses difficultés, par exemple, qui existent. M. le Président, le ministre d'État à la Métropole en est la preuve vivante. La grande région de Montréal représente un cas à part. La métropole vit des problèmes particuliers et nécessite donc une attention toute spéciale et des solutions qui lui conviennent. Le rôle du ministre à ce titre est éloquent. Si tout allait si bien dans la métropole, on n'aurait pas nécessairement besoin d'y accorder une attention aussi spéciale. Mais, malheureusement, la réalité est tout autre. Il est du devoir et de la responsabilité des gouvernants de voir à poursuivre le travail amorcé, à appuyer aussi les projets positifs et, encore plus, M. le Président, à injecter les fonds nécessaires pour redynamiser la métropole du Québec.

Le ministre nous a dit hier que l'époque où on pouvait arroser d'argent les problèmes est révolue. Eh bien, je l'invite à repenser cette phrase, car, arroser, comme il l'a dit, on peut certainement, sans le faire, appuyer des projets. Innovatech, par exemple, n'arrose pas les problèmes d'argent, mais elle fonctionne drôlement bien. Il l'a dit, d'ailleurs, lui-même.

Mais, avant de discuter de la structure proposée par le gouvernement et de voir si elle est fonctionnelle, permettez-moi, M. le Président, de rappeler certaines réalités au ministre d'État à la Métropole et, même, de lui suggérer, bien humblement, certaines pistes de réflexion car, dans les faits, je crois que le ministre a bien compris aussi ce message. On a tous la même volonté, les mêmes souhaits pour les citoyens et les citoyennes de la métropole. Il faut leur redonner confiance, leur permettre de s'épanouir et leur permettre de vivre et d'être fiers de leur métropole.

Montréal représente la métropole de l'Est du Canada, le moteur économique du Québec. Cependant, le Grand Montréal, qui totalise plus de 45 % de la population totale du Québec, qui est responsable de plus de 50 % de sa population intérieure et où l'État québécois retire près de 80 % de tous ses revenus, affiche le taux de chômage le plus élevé des grandes agglomérations urbaines canadiennes et le second plus élevé en Amérique du Nord. C'est la réalité, M. le Président. Ce n'est pas être prophète de négativisme, les chiffres sont là.

Au plan de la main-d'oeuvre, on observe, dans la région de Montréal, que les travailleurs sont souvent mal préparés à affronter une première fois le marché du travail ou à le réintégrer à la suite d'une perte d'emploi. Ceci explique notamment le peu de mobilité des travailleurs d'un secteur à un autre, la difficulté de rencontrer les employeurs en quête d'une main-d'oeuvre qualifiée en nombre suffisant. Par ailleurs, le déséquilibre du marché de l'emploi contribue au phénomène d'appauvrissement qui est non seulement en croissance à Montréal ville, mais sur tout le territoire de la CUM. Actuellement, les familles de la ville de Montréal comptent pour 23,4 % des familles pauvres du Québec, alors qu'elles ne représentent que 13,6 % de l'ensemble des familles. Pour compléter ce tableau, M. le Président, soulignons que Montréal vient au premier rang au Québec en ce qui a trait à la pauvreté enfantine.

Également, la population de Montréal souhaite que les services qui lui sont offerts par les différents gouvernements correspondent à ses attentes. À ce titre, le vieillissement de la population et la réorganisation du système de santé créent une pression énorme sur les établissements de santé à Montréal.

Au chapitre de l'habitation, la désuétude des immeubles locatifs contribue à l'exode des populations de Montréal vers la banlieue. Il en va de même des problèmes d'habitation qui incitent les jeunes familles à quitter Montréal pour la périphérie. De plus, la récession a limité l'accès à la propriété. Ceci a occasionné une baisse marquée des activités de construction résidentielle dans la région de Montréal.

Transport, M. le Président. Pour ce qui est du transport en commun, le gouvernement du Québec vient de créer une agence qui doit voir à son efficacité et à son développement. Depuis quatre mois, on le sait, on l'a dit, les Montréalais paient 0,015 $ de plus le litre d'essence pour financer une agence que l'on attend encore.

L'essentiel des actions qui doivent être initiées pour permettre à Montréal de jouer pleinement son rôle de métropole du Québec et de l'Est du Canada se retrouve encore aujourd'hui dans le plan stratégique du Grand Montréal mis en place par le gouvernement du Parti libéral, en 1991, pour redresser l'économie de la métropole. Or, M. le Président, nous attendons toujours du gouvernement du Parti québécois l'ombre d'une parcelle d'une nouvelle mesure pour la relance de Montréal.

(10 h 10)

D'ailleurs, à l'occasion de l'étude des crédits du ministère de la Métropole, le mardi 30 avril dernier, j'ai demandé un bilan, M. le Président, du Comité spécial d'initiative pour le Grand Montréal, alors présidé par le député de Bourget, Comité sur lequel le gouvernement devait fonder son action pour la région de Montréal. Le ministre de la Métropole n'a pas été en mesure de répondre à cette question simple, claire. J'ai bien peur qu'on ne puisse y répondre, d'ailleurs. D'ailleurs, le ministre, dans son discours, hier, sur le principe de ce projet de loi, a été discret sur les pouvoirs d'initiative que lui confère à lui-même le projet de loi que nous avons devant nous.

D'autre part, le rapport du groupe de travail sur Montréal et sa région, le rapport Pichette, dégage des solutions reliées à l'aménagement du territoire et à la qualité des institutions publiques appelées à desservir sa population. J'ose espérer que, pour le gouvernement du Parti québécois, la création du ministère de la Métropole n'est pas sa réponse au rapport Pichette. Si c'est le cas, le gouvernement a une vision rétrécie de ce qu'est la grande région de Montréal. On verra, M. le Président, au fur et à mesure de l'étude du projet de loi.

Or, ce n'est certainement pas en cachant d'un voile de belles paroles positives, j'en suis, mais en cachant la réalité quotidienne des Montréalais et Montréalaises que les problèmes de Montréal vont disparaître comme par magie. Les faits, M. le Président, parlent par eux-mêmes. En février dernier, La Presse annonçait une hausse fulgurante des faillites personnelles. Depuis deux ans, les dettes à la consommation et les prêts hypothécaires représentent 81 % du revenu personnel disponible des Québécois après impôts. Je me permets de vous rappeler qu'en 1982, alors que le Québec vivait une récession, le taux d'endettement était de 46 %.

Dans Le Devoir du 4 mai 1996, on apprend que Montréal ville sombre à pas de géant. Les reprises hypothécaires représentent la moitié de l'activité résidentielle dans la plupart des quartiers de la métropole. Ce sont des faits, M. le Président. Les gens, à Montréal, perdent leur propriété à cause de l'économie qui frappe durement. 50 % des unités résidentielles mises en marché dans Hochelaga-Maisonneuve, le centre, le centre-sud et le sud-ouest de Montréal, sans oublier tout l'est de Verdun, sont des reprises hypothécaires. Selon le chiffre de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, la part des reprises hypothécaires dans le nombre de maisons mises en vente dans le centre-est de Montréal est passée de 37,4 % en 1993 à 61 % en 1996. Ça, M. le Président, c'est la réalité de milliers de familles montréalaises qui n'ont plus le moyen de consommer, d'aller au restaurant, d'assister à des spectacles, voire tout simplement de dépenser. Ce sont des gens qui voient leurs rêves s'écrouler et qui perdent leur maison dans cette réalité.

Les experts mentionnent certains facteurs aussi pour expliquer cette hausse phénoménale. L'immigration internationale a diminué de moitié depuis 1991: de 51 000 personnes à 25 000 personnes, environ, l'an dernier. La formation des ménages ne cesse de reculer: de 17 000 en 1994 à 11 000 cette année. Les faillites personnelles ne cessent de grimper: de 9 606 en 1995 contre 7 297 en 1994. Ce sont des faits aussi, M. le Président.

En emploi, il n'y a rien dans le projet de loi pour le développement de l'emploi. Il n'y a pas d'orientation précise à cet égard, même pas dans les considérants. Le législateur n'a pas ajouté au texte cette obsession qui devrait colorer chacune des décisions de ce gouvernement en faveur de l'emploi. Parce qu'on sait tous que le développement économique à lui seul n'est plus le synonyme, aujourd'hui, de création d'emplois, comme le disait elle-même, d'ailleurs, la ministre de l'Emploi. Or, M. le Président, les auteurs de ce projet de loi n'ont pas cru nécessaire d'ajouter aux grands et nobles objectifs de soutien à l'essor économique, culturel et social – j'en suis – celui du développement de l'emploi.

Le 24 janvier dernier, Le Devoir rapportait une étude de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre et titrait: «Le chômage aux Montréalais, les nouveaux emplois aux banlieusards.» Selon cette étude, le chômage se propagera à Montréal au cours des prochaines années, alors que les habitants de l'île, faute de compétences requises, verront les banlieusards décrocher de nouveaux emplois. Cette étude, M. le Président, décrit également l'augmentation de la population inactive à Montréal, qui se situait à 38,6 % en 1994. On mentionne aussi que la population des 65 ans et plus a grimpé de 22 % entre 1987 et 1994, alors que celle des jeunes de 15 à 29 ans a diminué de 23 %. L'île de Montréal, avec le quart de la population, compte environ le tiers des personnes âgées et assistés sociaux de la province. C'est aussi sur son territoire que résident près de 40 % des Québécois à faibles revenus. Cet article nous apprenait que le gouvernement accorde 170 000 000 $ par année à l'aide à l'emploi, dont la moitié est affectée aux personnes assistées sociales. On espère que le ministre d'État à la Métropole comprend bien les impacts des décisions de son gouvernement en ces matières pour la région de Montréal.

L'emploi périclite à Montréal île, M. le Président, ce sont des faits, ce n'est pas parce qu'on veut être négatifs, ce sont des faits aussi que le ministre d'État à la Métropole ne peut ignorer. Cette préoccupation devrait être au centre des analyses de son ministère. Pourquoi ne pas l'indiquer alors dans le texte du projet de loi?

À cet égard, parce qu'il faut quand même faire un retour en arrière, puiser dans le passé pour trouver certaines solutions d'avenir, je me permets de souligner avec fierté le bilan de l'action gouvernementale du gouvernement libéral à Montréal. Ce bilan traduit bien la place centrale qu'occupe le Grand Montréal québécois dans tous les secteurs d'activité de notre société. Le gouvernement libéral s'était doté d'un comité ministériel permanent du Grand Montréal, formé de huit ministres, dont le mandat était d'assurer la cohérence des politiques et des activités gouvernementales en vue de promouvoir le développement du Grand Montréal. C'est ce comité qui a préparé le plan stratégique du Grand Montréal déposé en 1991. Ce plan comportait des déboursés d'environ 500 000 000 $ sur cinq ans. Il créa aussi, en plus, la Société Innovatech, qui fut reconnue par le Parti québécois comme une grande réussite et un outil de développement majeur pour le Grand Montréal et, depuis, pour les autres régions du Québec. D'ailleurs, le plan stratégique était arrivé au constat que nous devions axer nos efforts sur les exportations et la haute technologie. Et nous constatons les résultats concrets aujourd'hui.

Le gouvernement libéral a aussi contribué à l'amélioration des attraits touristiques de Montréal en investissant 92 000 000 $ pour la construction du Casino, en subventionnant aussi l'aménagement du Biodôme pour 50 000 000 $, en participant à l'amélioration et à la modernisation du Jardin botanique pour 3 200 000 $. Soucieux de contribuer également au renouveau des infrastructures de Montréal, le gouvernement libéral a investi, dans le programme Travaux d'infrastructures Canada-Québec, 117 400 000 $ dans des projets totalisant 401 000 000 $, sans oublier les investissements culturels de presque 300 000 000 $ pour le Musée d'art contemporain, le Musée des beaux-arts, le musée de Pointe-à-Callière, pour ne nommer que ceux-ci, sans compter la plupart des théâtres de la région de Montréal qui ont été rénovés.

Le gouvernement libéral a également consacré plus de 125 000 000 $ dans la relance de l'est de Montréal et 28 800 000 $ pour le plan de relance du sud-ouest. Investir pour le développement, la création d'emplois, avoir un budget, des fonds pour des projets susceptibles de relancer l'économie, ça aide beaucoup, M. le Président, et ce n'est pas de distribuer, de propager, c'est tout simplement de soutenir souvent des projets qui, eux-mêmes, génèrent des fonds qui font en sorte aussi qu'ils génèrent de l'emploi. C'est, à mon avis, aussi beaucoup plus efficace qu'un simple projet de loi.

Si on parle d'affaiblissement de l'économie de Montréal, M. le Président, il y a cinq principaux facteurs qui peuvent expliquer cet affaiblissement: la globalisation des marchés et la libéralisation des échanges internationaux qui ont entraîné des économies à l'échelle de la planète dans une course sans retour vers la compétitivité; le déplacement vers Toronto du secteur financier de Montréal; le renouvellement trop lent de la base manufacturière de Montréal; l'approche économique, aussi, divergente de divers gouvernements, et j'en suis, M. le Président; projets, aussi, qui ont soutenu temporairement l'économie de Montréal, grands projets, mais qui ont créé aussi un vide, un manque à gagner après, qu'on parle de l'Expo 67, qu'on parle des Olympiques; peu de mesures aussi visant à la restructuration concertée de Montréal.

Il y a aussi, et ça, on ne peut pas s'en cacher, la question linguistique et l'option indépendantiste; des politiques linguistiques qui semblent, pour certains, extrêmes; le départ de plusieurs dizaines de milliers d'anglophones et, aussi, l'incertitude souvent, incertitude sur la question politique qui amène l'incertitude économique. Et on en discutait, lors de la défense des crédits, et le ministre disait: Dans toute démocratie, on se remet en question. Il a raison, M. le Président, c'est vrai, excepté qu'il y a aussi un critère de base au niveau de l'investissement économique, critère de base qui motive les financiers à investir, et celui-ci, c'est que, s'il y a instabilité politique, on va attendre, on investira après, quand la situation sera stabilisée. Alors, la démocratie joue son rôle, fait son jeu, vit aussi ses changements, excepté que les investisseurs financiers, la finance, elle, préfère la stabilité.

(10 h 20)

Pour redresser l'économie de Montréal, M. le Président, ce qu'il faudrait, c'est: accroître la capacité d'innovation; accélérer la modernisation de notre économie; valoriser les ressources humaines par le soutien à la création d'emplois au niveau local; favoriser la formation professionnelle en entreprise; renforcer les mesures d'adaptation; améliorer et aider les milieux d'enseignement et intégrer aussi nos communautés culturelles, puisque l'ensemble des communautés culturelles en proportion au Québec se situent dans la grande région de Montréal, particulièrement dans la métropole même, Montréal île; renforcer aussi le soutien au développement des marchés par l'activité internationale, le tourisme, les activités culturelles aussi; accroître le rôle de Montréal comme ville internationale; redonner aussi à Montréal son statut de véritable métropole avec les outils qui l'accompagnent. Tout ça, M. le Président, nécessite une intervention concrète, d'une part, du ministre d'État à la Métropole et, d'autre part, de l'ensemble de ses collègues.

Or, à ce jour, le rôle et les pouvoirs dévolus au ministre d'État à la Métropole ne m'apparaissent pas très, très clairs. Bien que j'espérais en connaître un peu plus avec le dépôt du projet de loi créant le ministère, je dois dire que c'est encore flou. Je peux vous dire, M. le Président, pour avoir siégé au Conseil des ministres, qu'il faut beaucoup plus que de la persuasion pour souvent régler certains dossiers, avec la bonne volonté de tous. Mais le ministre sectoriel a une responsabilité globale et, exceptionnellement, nous avons maintenant un ministre territorial qui, lui, a la responsabilité de son territoire. Veux veux pas, encore une fois, malgré la bonne volonté de tous, il peut y avoir des conflits.

Montréal représente un cas unique et, à mon avis, elle mérite un pouvoir unique. Et j'ai d'ailleurs été surprise d'entendre le ministre nous dire hier qu'il préférait avoir le pouvoir de demander de l'information que d'avoir un droit de veto. Et, quand on parle d'un droit de veto, c'est une façon de dire que le ministre d'État à la Métropole devrait avoir, dans certains cas, un, le pouvoir de trancher, sachant que, en bout de ligne, c'est le premier ministre qui a le pouvoir suprême. Mais, dans certains cas, puisqu'on crée pour la première fois un ministre territorial, parce que la situation, disons-le, est en état d'urgence, alors, à un poste unique, une création nouvelle et unique, on devrait lui donner des pouvoirs uniques, des pouvoirs qui sont peut-être différents de ce qu'on entend dans notre jargon, si on veut, soit parlementaire ou encore habituel, mais trouver une façon de doter le ministre d'État à la Métropole d'un pouvoir qui fait en sorte que, sur son territoire, lorsqu'il y a des positions divergentes, il ait suprématie, qu'il ait la décision finale.

Quelques exemples nous laissent déjà présager certaines difficultés, voire aussi des frictions entre le ministre et ses collègues. À ce titre, je dois rappeler, M. le Président, qu'il ne faudrait pas non plus que l'agenda du ministre soit consacré à la gestion de crises entre lui et ses collègues. Il ne faudrait pas non plus que le résultat de cette nouvelle organisation retarde les solutions à apporter à l'aboutissement de plusieurs dossiers.

Je l'ai dit, l'action du ministre est tributaire d'une équipe ministérielle dévouée, convaincue, dynamique à la relance de Montréal. Malheureusement, certaines de mes craintes semblent déjà fondées. Je vais vous donner quelques exemples, M. le Président. Dans le cas d'Innovatech, c'est le ministre d'État à la Métropole qui est responsable d'Innovatech Montréal, alors que les deux autres Innovatech, soit Québec et Sherbrooke, sont sous la responsabilité du ministre d'État de l'Économie et des Finances. Or, comment un ministre à vocation territoriale pourrait-il diriger un organisme qui couvre une région beaucoup plus grande que la sienne, soit de l'Abitibi à l'Outaouais? Question.

L'Agence métropolitaine de transport et l'ensemble du transport à Montréal. En ce qui a trait à l'Agence métropolitaine de transport, la responsabilité a été transférée du ministre des Transports – lorsque, initialement, on avait entrepris ce projet de créer une agence métropolitaine de transport, elle était sous l'égide du ministère des Transports – au ministre d'État à la Métropole. Comment expliquer que l'un soit responsable du plan de transport global, le ministre des Transports, alors que l'autre coordonnera une agence qui, de plus, perçoit des sommes d'argent? Un a des revenus, l'autre est en demande de revenus.

Cette division de responsabilités demeure encore complexe. J'aimerais vous citer, d'ailleurs, à ce sujet le ministre des Transports, en commission parlementaire, afin de vous faire part un peu de nos craintes dues à une certaine ambiguïté. Le ministre dit: Il faudrait – en parlant du plan de transport et de l'Agence métropolitaine de transport – qu'il y ait un arrimage, une concertation. Je pense qu'entre l'Agence et la direction générale du ministère des Transports à Montréal c'est évident qu'il va falloir qu'il y ait un arrimage constant et permanent entre le ministère et l'Agence. Il faut se concerter parce que l'Agence va élaborer une programmation en matière de transport en commun pour prévoir certains développements, soit les prolongements de lignes de métro, des choses du genre, prolongement d'un train de banlieue en direction de Saint-Jérôme, par exemple, etc.

Bien. Le financement de tout cela, c'est à partir de programmes du ministère des Transports qui sont toujours gérés par le ministre des Transports. Alors, vous voyez que la concertation est l'aboutissement indispensable et essentiel, incontournable.

Ma question, M. le Président, elle est simple: En transport, qui a le vrai pouvoir? Qui, à la fin, va pouvoir dire: Sur le territoire, on tranche, c'est ça qui va se passer sur l'ensemble de la région de Montréal? Question. Qui décide? Qui dirige? Le ministre des Transports qui a un budget global pour le transport ou le ministre de Montréal qui a un budget, qui est une parcelle aussi du transport, qui provient de l'Agence métropolitaine de transport? Et on ne veut pas sous-estimer la bonne foi des deux. C'est qu'en quelque part on sait qu'encore une fois un ministre a la responsabilité globale et qu'encore une fois, venant l'élection, à un an de l'élection, les ministres vont se faire dire, M. le Président, que l'élection se gagne par les régions. Ça, on l'a entendu de part et d'autre, ça ne change pas.

Les taxes scolaires. Un décret ministériel du 6 mars 1996 concernant le mémoire au Conseil des ministres nous apprend, et je le cite, le mémoire indique: «si les mesures proposées affectent la région métropolitaine de Montréal ou, au contraire, n'ont aucune incidence sur la métropole.» Dans l'affirmative, le ministre précise les impacts. Si des échanges de vues ont lieu avec le ministre d'État à la Métropole, il en décrit les résultats. Or, M. le Président, le ministre a droit de regard sur tout ce qui se passe au Conseil des ministres et qui concerne la métropole. Mais, outre ce droit de regard et, selon ses dires, son pouvoir de persuasion, outre ça, est-ce qu'il a vraiment un pouvoir? Si oui – je reviens aux taxes scolaires – comment justifie-t-il qu'il ne soit pas intervenu auprès de sa collègue ministre de l'Éducation quant à la taxe dérivée refilée aux commissions scolaires et qui augmentera le fardeau fiscal des contribuables montréalais?

De plus, et ce qui a découragé un peu l'administration municipale de Montréal île, c'est qu'ils ont fait des efforts énormes pour réduire le compte de taxes à Montréal. Pourquoi? Parce que, pour vivre à Montréal, il en coûte aux Montréalais – je parle toujours de Montréal île, parce qu'il faut toujours faire la différence; la région, elle est très, très grande – Montréal île, pour vivre à Montréal, M. le Président, ça nous coûte 24 % de plus que vivre ailleurs en banlieue. Pour avoir un commerce à Montréal, ça coûte 44 % de plus. Ça coûtait 64 %, il y a deux ans. Alors, l'administration municipale, l'administration Bourque, fait en sorte de réduire ou de se concentrer à réduire le plus possible les taxes pour que, habiter sur l'île de Montréal, ce soit quand même plus alléchant, parce que, présentement, les gens, évidemment, quittent Montréal pour s'en aller en banlieue, parce que ça coûte moins cher. Alors, cette taxe dérivée va faire en sorte que les efforts de l'administration Bourque, par exemple, vont être complètement neutralisés par une taxe qui, oui, provient des commissions scolaires, mais qui sort de la même poche, c'est-à-dire des contribuables montréalais.

Il en va de même pour les coupures au niveau des garderies en milieu scolaire et qui touchent plus particulièrement les familles sous le seuil de la pauvreté – on le voyait tantôt, M. le Président – qui se retrouvent en grande partie à Montréal ville.

(10 h 30)

M. le Président, j'ai beaucoup de respect pour mon collègue, ministre d'État à la Métropole, beaucoup, mais je m'inquiète non pas de sa volonté, au contraire, mais de sa capacité d'agir avec les outils qu'on lui offre. Dans les faits, quand on regarde ce projet de loi, on a l'impression qu'il s'agit ni plus ni moins que de la mise en place d'un secrétariat spécialisé dans les questions montréalaises, un secrétariat par où les papiers du gouvernement vont transiter le temps nécessaire pour que le ministre et ses fonctionnaires – 50 jusqu'à maintenant – les lisent et se préparent à réagir. On ne sent pas qu'il a le pouvoir d'avoir une vision mobilisatrice où la créativité du milieu pourra s'exprimer, se développer, être à l'origine d'une véritable politique de développement en fonction des besoins des citoyens et citoyennes de la métropole, appuyée aussi – parce que ça en prend – d'un support financier approprié, je dirais même exceptionnel, mais encore une fois à une situation, ou enfin à une situation unique, comme je le disais tantôt. C'est la première fois qu'un ministère territorial se crée. À une situation unique, pouvoir unique et aussi budget unique, ne serait-ce que pour justement redynamiser, donner des outils nécessaires pour redynamiser une région qui est en état d'urgence, M. le Président, et qui en a bien besoin.

Le ministre, selon le projet de loi actuel et selon nous, deviendrait une espèce de tuteur au développement, sans détenir les leviers essentiels pour donner un deuxième souffle à cette région. Il fonde toute son action sur des pouvoirs de surveillance et sur son rôle de siéger sur les comités ministériels pour surveiller les projets de ses collègues, le rôle d'assurer la cohérence de l'action gouvernementale. Or, l'essentiel de l'action gouvernementale porte sur l'équilibre des finances publiques, donc sur des compressions qui affectent directement la population de Montréal.

Alors que le ministre est incapable de nous dire à combien s'élèvent les montants à la disposition de sa mission pour l'instant, en disant: Ce sera à l'usage, on sait que le ministre des Finances, lui, a un chiffre très précis, il a un manque à gagner de plus de 600 000 000 $, et que le président du Conseil du trésor, lui, cherche désespérément 275 000 000 $ en périmés pour de nouvelles compressions durant l'année. J'ai bien peur, M. le Président, que le bar ouvert dont le ministre de la Métropole parlait dans La Presse du 2 mai dernier ne soit, en réalité, qu'un discours pour l'encourager et aussi pour attirer l'attention.

Le ministre a la responsabilité d'assurer la concertation entre tous les acteurs publics et privés de la grande région de Montréal – 112 municipalités, M. le Président, c'est énorme – des commissions scolaires, des MRC coupées en deux et, dans certains cas, des institutions nombreuses dont les intérêts sont souvent divergents; le rôle de coordonner fondé essentiellement sur celui de recevoir de l'information.

M. le Président, bien que nous soyons en accord avec le principe, on considère que, dans sa formulation actuelle, le projet de loi ressemble davantage, et je le disais tantôt, à un secrétariat qui relève du Conseil exécutif. En 1991, lorsque nous avons créé le Comité ministériel permanent de développement du Grand Montréal, nous ne sommes pas passés par l'Assemblée nationale pour faire adopter un projet de loi. On a toujours été favorable à une action concertée. Le CMPDGM en était la preuve, et il relevait, lui, du Conseil exécutif et consultait le milieu. Le plan stratégique en était le fruit. On n'a pas fait de loi pour ça, M. le Président, on a tout simplement agi.

J'ai plutôt l'impression que, pour ne pas donner l'impression d'assurer une certaine continuité, dire: Bon, bien, là, nous autres, on va faire quelque chose d'autre, on va répondre à une mesure d'urgence, le Parti québécois n'a pas voulu reprendre un concept qui fonctionnait bien, qui a donné aussi des résultats concrets. On le dit, M. le Président: Autres temps, autres moeurs. J'en suis. On revient, par exemple, à une formule semblable avec le pouvoir d'un ministre au lieu de huit. Et c'est ça, M. le Président, qui nous inquiète. Et deux ans d'attente aussi, M. le Président, pour un processus qui était, lui, déjà en place. D'ailleurs, le seul bilan positif jusqu'à maintenant qu'on a pu me faire du développement du Grand Montréal lors de l'étude des crédits fut celui du plan stratégique, celui du plan stratégique qu'on avait déposé.

Voilà, M. le Président, quelques-uns des commentaires que je voulais formuler à ce moment-ci. On aura l'occasion, d'ailleurs, de travailler, dans les étapes suivantes, avec le ministre d'État à la Métropole. Cependant, ce temps que nous aurons à notre disposition sera utilisé – et je le veux, M. le Président – avec intelligence, de manière à bonifier la proposition du gouvernement, la rendre plus dynamique et plus sûre pour la métropole. Ce qu'on veut, M. le Président, ce n'est pas compliqué, c'est aider le ministre d'État à la Métropole pour lui faciliter, justement, son travail et pour qu'il puisse, M. le Président, lui-même avoir les leviers nécessaires dans ses mains, pour qu'il puisse agir et toujours, évidemment, pour le bien des Montréalais, des gens de la métropole et du Grand Montréal.

En conclusion, je laisse à la réflexion de tous la mission du ministre et de son ministère, le rôle qu'il aura à jouer, l'influence qu'il détiendra et, bien sûr, les moyens financiers qui seront mis à sa disposition pour relancer concrètement la métropole et lui assurer, M. le Président, un avenir prometteur.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre d'État à la Métropole. M. le ministre, vous disposez d'un temps de 20 minutes pour votre réplique. M. le ministre.


M. Serge Ménard (réplique)

M. Ménard: Merci, M. le Président. D'abord, M. le Président, je tiens à remercier tous ceux qui sont intervenus au cours de ce débat. Je pense qu'ils l'ont fait avec un souci d'objectivité, en mettant de côté, pour la majorité, des intentions partisanes. Je pense que c'est un des débats qui honorent la nouvelle image que nous cherchons à donner à l'Assemblée nationale, celui de critiques au point, de critiques qui ne sont pas uniquement partisanes. J'ai remarqué aussi que l'accord qui a été donné avec la création de ce ministère, même par les gens de mon parti, n'a pas été un accord complaisant.

Je suis quand même flatté, c'est vrai, des manifestations d'appréciation à ma nomination comme ministre de la Métropole, d'une certaine façon, de l'inquiétude que l'on donne sur les pouvoirs que je n'aurais pas en assez grande quantité, mais que, moi, j'estime, en tout cas, suffisants pour le moment, certainement, en tout cas, suffisants pour faire une expérience dans un domaine totalement nouveau. Peut-être avais-je exagéré un peu en parlant de «révolutionnaire»; c'est certain, en tout cas, que c'est quelque chose de totalement nouveau.

Comme le signalait le député de Westmount– Saint-Louis, je ne voudrais pas être comparé, après cette expérience, à Robespierre, j'aimerais plutôt être comparé à Gandhi. Mais je n'ai aucune illusion, je n'ai pas cette qualité et ce dévouement extraordinaire de cet homme, mais ce serait plutôt... Mon idéal, pour quelqu'un de révolutionnaire, serait plutôt du côté de Gandhi que de Robespierre. Je souhaite, justement, plutôt des pouvoirs de conviction, de témoignage dans son cas, mais aussi des pouvoirs de persuasion, et surtout dans ces temps difficiles où les gouvernements doivent livrer des compressions importantes.

Mais, justement, ces critiques qui ont été apportées me font constater qu'il faut que j'apporte quand même certaines clarifications. Oui, je voudrais simplement dire, avant d'apporter ces clarifications, que je vois qu'il y a quand même deux consensus qui se dégagent de l'ensemble des interventions d'un côté comme de l'autre de cette chambre: c'est d'abord la nécessité de faire quelque chose d'exceptionnel pour la relance économique de la métropole par laquelle passerait la relance économique de l'ensemble du Québec; et l'autre consensus, c'est l'ensemble des difficultés énormes que représente cette mission. Mais c'est un défi que j'ai accepté de relever, bien que, comme l'ont signalé quelques-uns, à première vue, je ne me sente ni la préparation ni les capacités pour le relever. D'après ce que j'ai entendu, j'ai l'impression qu'aucun homme ou aucune femme ne semble avoir l'ensemble des capacités que cela prend. Ce qui est important, c'est que nous essayions, cependant, et que nous y mettions toutes nos énergies.

(10 h 40)

Cette façon aussi d'aborder le problème me convainc que le consensus sera peut-être plus facile à établir, en tout cas, puisque nous avons établi un consensus à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Il est important, ensuite, parce que, une des choses qui a le plus nui au développement de la métropole, c'est la difficulté à obtenir des consensus avec tant d'élus, avec tant de niveaux décisionnels, avec tant d'acteurs. Bien, effectivement, l'une des choses auxquelles je me suis consacré pendant ces trois premiers mois, c'est de faire comprendre à tous les acteurs de cette région qu'au-delà de nos divergences politiques, qui, soit dit en passant, sont probablement l'une des causes de notre dynamisme aussi, de nos différences constitutionnelles, au-delà de nos langues maternelles, au-delà de nos origines ethniques, qui sont aussi source de dynamisme et source d'enrichissement futur, au-delà de toutes ces différences, il faut réaliser un consensus sur le développement.

Je terminerai, probablement, si j'en ai le temps, je l'espère... Je voudrais bien que les médias de la métropole participent à ce consensus, mais, encore là, sans qu'ils soient complaisants et qu'ils se forment eux-mêmes leur opinion. Je trouve qu'ils ont parfois des attitudes trop négatives, trop pessimistes dans la description de l'état de la métropole actuel. Mais ces critiques, généralement positives, m'amènent à être convaincu qu'il faut apporter certaines clarifications. D'abord, sur le territoire. Certains se sont amusés sur la définition du territoire en le comparant à la paroisse; d'autres se sont inquiétés en parlant de l'inclusion de la réserve indienne de Kahnawake; certains se demandent, voyant le territoire très large, s'il sera possible de réaliser un consensus. J'ai moi-même rédigé la fin de l'article 6, au-delà des fonctionnaires, parce que j'ai senti tout de suite le besoin que l'on comprenne déjà dans la loi que la définition de la métropole, la définition du territoire, était essentielle, mais que cette définition devait correspondre à une entité naturelle et qu'elle devait aussi être jugée à partir d'un critère objectif.

Mais, évidemment, je sais bien que la plupart des gens, comme moi il y a à peine deux mois, ne savaient pas ce qu'était la région métropolitaine de recensement, ne savaient pas que c'était un critère international, un critère reconnu par l'OCDE, un critère unanimement appliqué en Amérique du Nord. Donc, je pense qu'il était mieux de donner, dans une annexe, la liste des communautés qui faisaient partie de ce territoire. Mais j'ai cru bon de rajouter: «Le gouvernement modifie au besoin cette annexe pour que la description de ce territoire continue de correspondre à celui de la région métropolitaine de recensement» pour que tout le monde comprenne que ce qui est dans l'annexe, c'est l'actuelle région métropolitaine de recensement et que, s'il y a des modifications à l'annexe à l'avenir, ce sera pour qu'elle continue de correspondre à cette définition au fur et à mesure que nous avons les connaissances statistiques pour la définir.

Je rappelle encore comment est définie une région métropolitaine de recensement et, donc, comment est définie la métropole. D'abord, elle est définie par un noyau urbain, lequel est défini par la densité de la population, 400 habitants au kilomètre carré. Ce n'est jamais uniforme dans un noyau urbain. On dit donc que, lorsque des noyaux de 400 habitants par kilomètre carré sont à une distance de moins de 2 km, eh bien, ils forment un noyau urbain. Ensuite, on adopte la définition du navettage; le navettage, c'est-à-dire combien de travailleurs d'une communauté se rendent dans ce noyau urbain chaque jour pour y gagner leur vie. Bien, lorsque plus de la moitié des travailleurs d'une communauté se rendent dans ce noyau urbain pour y gagner leur vie, on dit que cette communauté fait partie de la région métropolitaine. Voilà ce qui définit la métropole.

Je tenais aussi à ce que, dans le nom du ministère, l'on parle de métropole et non du Grand Montréal, d'abord parce que je sais que, bien qu'à l'étranger, les gens, quand ils sont... Le maire Drapeau disait ça souvent et avec raison, que, quand vous habitez la région de Montréal et que vous allez à l'étranger, vous dites que vous êtes de Montréal, n'est-ce pas, plutôt que de la paroisse de Saint-Colomban, ou de celle de Bellefeuille, ou même de Saint-Lambert, et même, parfois, de Laval. Ou encore, vous dites: Laval, mais c'est près de Montréal. Mais la métropole, c'est plus que Montréal. La métropole, c'est une unité naturelle, unité qui est reliée par des liens économiques intenses qui font que toutes sortes d'autres liens, qui en font la richesse et la diversité, se tissent entre ses membres. Donc, j'ai pensé que la métropole est un nom rassembleur et que ce pourrait être aussi un objectif.

Ensuite, je voudrais clarifier sur l'Agence métropolitaine de transport. Il me semble avoir dit à plusieurs reprises que, d'abord, s'il y avait urgence au mois de décembre, avant même que j'occupe ces fonctions, de créer l'Agence métropolitaine de transport, c'est parce que le mode de subvention prévu par le gouvernement auparavant prenait fin le 31 décembre. Il fallait donc prévoir un nouveau mode pour amasser les fonds nécessaires à l'opération d'un organisme qui remplacerait le Conseil métropolitain de transport, qui, à cause de sa formation, s'était avéré incapable d'obtenir des consensus et de travailler ensemble.

Donc, c'est sûr qu'il fallait percevoir ces montants dès le 1er janvier. Mais ces montants, quand on regarde l'utilisation qui doit en être faite par l'Agence métropolitaine de transport – entre autres, des subventions qui sont données aux différentes sociétés de transport, je pense qu'il y a aussi quelque chose sur les trains de banlieue, l'achat de stationnements incitatifs et enfin de donner un certain budget d'opération à cette Agence – cet argent pourrait être utilisé au cours de l'année. Ce qui est important, c'est que, pendant qu'il est perçu présentement, il est soit en fidéicommis soit dans les mains d'un fiduciaire que j'ai nommé, soit dans les mains du ministère du Revenu pour l'Agence lorsqu'elle sera créée. Mais, justement parce que le Conseil métropolitain de transport avait été tellement peu efficace ou condamné presque à l'immobilisme par l'impossibilité d'atteindre des consensus, je pense que le choix de ses dirigeants, de son conseil d'administration, était probablement l'une des décisions les plus importantes, sinon la plus importante, que j'avais à prendre et j'ai voulu y apporter tout le soin prévu.

J'ai déjà expliqué que j'ai eu des malchances. Le premier parmi les meilleurs candidats qui m'avaient été présentés par une agence spécialisée – dont le mandat avait été donné par l'ancien ministre des Transports, M. Jean Campeau – a eu un drame familial épouvantable qui l'a forcé à refuser. D'autres qui avaient été approchés ont changé d'idée. Parmi les autres ensuite que j'ai approchés, que voulez-vous, s'ils ont cette qualité que nous recherchons, ce sont des gens occupés dans certains domaines, qui ne peuvent être disponibles immédiatement. Ils ne sont pas là assis sur un banc. C'est rare que vous allez trouver assis quelque part, sans emploi, quelqu'un qui a la qualité que nous recherchons pour diriger une pareille agence. Alors, cela a pris un certain temps.

Là, je crois bien que, d'ici deux semaines et demie, le temps de passer au jaune mercredi prochain, puis au blanc, c'est-à-dire dans le processus de nomination, on devrait connaître la personne qui va diriger. Et, ensuite de ça, puisque le conseil d'administration devait être de cinq personnes, selon la personne que nous retenons pour diriger, les autres personnes doivent représenter un certain équilibre – et Dieu sait que c'est important dans cette grande région. Donc, là, j'étais plus prêt, mais j'attendais de faire la première nomination pour faire les autres.

On a fait aussi beaucoup de remarques sur le fait que certains secteurs importants ne sont pas mentionnés dans la loi; on parle de la santé et de l'éducation. Bien, d'une part, la loi, c'est vrai, m'indique certaines priorités, mais la loi reste assez large, et il faudra lire, en fait, les paragraphes 1° et 2° de l'article 4, qui disent bien que je dois être «associé à l'élaboration des mesures et des décisions ministérielles ayant un impact significatif sur la métropole» – donc, toutes les décisions ministérielles, y compris en santé et en éducation – et que mon «avis est requis sur toute mesure ayant un impact significatif sur la métropole, avant qu'elle ne soit soumise pour décision au Conseil du trésor ou au gouvernement».

Voilà. Donc, c'est vrai que le ministre de la Métropole doit être associé à l'élaboration de toutes les mesures, mais il faut reconnaître que, dans certains domaines, l'expertise sectorielle est la plus importante. Puisque, comme je l'ai expliqué hier, je n'avais pas l'intention de regrouper 40 % des fonctionnaires de l'État sous un seul ministère, ce qui aurait été de créer un autre monstre administratif, c'est donc qu'il faut se fier à l'expertise de ces ministères. On ne fait pas le virage très important qui a dû être fait dans le domaine de la santé et qui est nécessairement, d'ailleurs, différent à Montréal que dans le reste de la province, sans avoir à la tête quelqu'un de très compétent.

(10 h 50)

D'ailleurs, ce virage a été fait, on l'a déjà signalé, dans plusieurs autres territoires en Amérique, dans plusieurs États américains, dans plusieurs autres provinces. S'il faut le faire aussi rapidement au Québec, c'est qu'on a trop tardé à le faire – je dois dire que, là-dessus, j'ai confiance en mon collègue de la Santé – mais je me suis assuré qu'effectivement il y avait des mesures qui prenaient en considération le caractère particulier de la métropole.

Même chose pour l'éducation. Le problème des commissions scolaires linguistiques est un problème typiquement montréalais, mais c'est un des problèmes d'abord constitutionnels et, sur le plan légal, à peu près des plus complexes qui soient. Il faut l'aide nécessairement de la machine, des gens qui sont là depuis des années et qui le connaissent à fond pour trouver la solution qui permettra de réaliser cet objectif le plus rapidement possible et avec l'accord des deux majorités qu'il y a à Montréal: de la majorité anglophone comme de la majorité francophone. Encore là, c'est évident que je fais confiance, et elle me tient au courant, en ma collègue de l'Éducation, qui elle-même ne peut faire autrement que de faire confiance aux fonctionnaires qui ont développé cette expertise très pointue.

Maintenant, du côté du parti ministériel, l'on a, de façon qui m'a beaucoup ému, beaucoup impressionné en général, bien appuyé, et encore là je crois sans complaisance, la création du ministère de la Métropole. Je dirais, entre autres, que je respecte beaucoup le député de Labelle, président du Conseil du trésor, qui a des qualités tellement différentes des miennes, mais que j'apprécie tellement – sa rigueur intellectuelle, sa rigueur financière – et j'ai été très heureux de le voir dire peut-être les plus belles choses que l'on peut dire sur notre métropole, quand il disait: C'est la métropole d'un pays en devenir, c'est la métropole des francophones d'Amérique. J'appréciais d'autant plus son support que je sais qu'il a été ministre de l'Aménagement dans un gouvernement antérieur, qu'on lui doit entre autres le concept des MRC. Son appui est important, puisqu'il a compris, comme ministre de l'Aménagement qu'il était alors, l'importance de donner à la métropole un caractère distinct et de la traiter de façon distincte.

J'ai beaucoup apprécié aussi le témoignage d'autres députés, ceux de Sainte-Marie–Saint-Jacques et de Vachon, pour avoir fait valoir les avantages de la métropole pour sa relance, mais aussi j'ai apprécié ceux du député de Marguerite-D'Youville et de la députée de Terrebonne, qui viennent justement de la couronne, l'un de la couronne sud, l'autre de la couronne nord, et qui démontrent, je pense, cet esprit régional, cet esprit métropolitain que nous cherchons à créer. Ils ont compris que la métropole ne se bâtira pas en opposition aux autres régions, que la métropole ne se bâtira pas uniquement sur Montréal, uniquement sur l'île de Montréal, et c'est un sentiment que je partage. La richesse de la métropole est étendue dans toutes ces régions.

Il est cependant nécessaire que nous pensions à arrêter le phénomène de l'étalement urbain dans la mesure où il amène aussi le fait que l'on vide l'intérieur de la métropole. Ces phénomènes sont arrivés dans bien des villes américaines et ils ont toujours été source de concentration de la misère et, ensuite, de concentration de la délinquance, de sorte que les citoyens les ont fuies, et, ensuite, les autres villes qui se sont formées autour se sont aperçues qu'elles avaient besoin du support de leur centre. Nous ne sommes pas aussi loin que les villes américaines et, donc, nous pouvons corriger.

Je voudrais parler enfin... J'aurais aimé dire ce qu'est la métropole pour moi, mais je l'ai dit de façon... Mais je veux dire une chose qui est très importante, c'est qu'une métropole est peut-être la définition d'une très grande ville, mais toutes les très grandes villes du monde, toutes les métropoles du monde sont des endroits où on a absorbé des influences diverses qui se sont mêlées pour faire quelque chose d'original. Et c'est pourquoi l'on me permettra de dire quelques mots en anglais.

I think that the people who speak English in Montréal are an essential and integral part of the metropolis. I personally never wanted, in the development of my sovereignist convictions, that we should have any feeling of vengeance against the people who were different and who, at one point, considered themselves superior to us.

I think it is very important... We were always concerned, in the PQ, to make sure that we would protect the rights of the minorities, because we know what it is to be a minority. I don't think the English minority is in danger in the metropolis, because it's a different thing to be a minority in a continent where the majority is of the same language, than the situation we are now. I know that the people who stay in Montréal right now love Montréal because of its French character. They appreciate that we have preserved this originality and they are proud to be part of it. Therefore, I consider them as an essential part of the metropolis.

I would like them to call upon themselves, however, not to promote all the bad reputation that was made in other provinces and in other parts of the continent. We are trying to have measures that can correct quickly when a right of a minority is not respected. There is no need to push this all across the world, because, when rumors like this expand, they generally don't diminish.

Enfin, je voudrais dire aussi un peu... On a parlé du climat morose... Oui, je vais conclure rapidement, M. le Président. Je croyais, en fait, que j'avais un peu plus de temps. Je voudrais conclure un peu sur le climat morose. C'est certain que, si on a créé ce ministère, c'est parce qu'il y a un besoin. Mais il me semble que ce qui arrive à la métropole est quelque chose qui est arrivé à d'autres villes nord-américaines. Je ne crois pas qu'il y ait eu un endroit où l'on ait pu renverser ces tendances dans la dégradation du tissu urbain sans avoir le support des gens qui sont à l'intérieur de ce tissu et, notamment, de leurs médias. Je trouve, peut-être parce que je suis trop sensible à ça, que, récemment, les titres, beaucoup plus que les articles d'ailleurs, qui sont écrits sur Montréal sont injustement pessimistes. Quand on parle des reprises d'hypothèque dans les quartiers défavorisés de Montréal, alors que, la semaine précédente, nous avons justement mis des actions particulières pour ces quartiers, bien, il faut dire avec assez de clarté que cela ne concerne pas toute l'île.

La même chose sur le chômage, c'est vrai qu'il y a une diminution...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre...

M. Ménard: ...des emplois sur l'île, mais, par contre, dans l'ensemble de la région, nous avons une relance de l'emploi. C'est particulièrement vrai dans la couronne sud.

Je pense donc que je voudrais bien rejoindre ce consensus, même si j'ai tout le respect qu'il faut pour la liberté de presse. Encore là, je n'ai qu'un pouvoir de persuasion, mais j'estime qu'il peut être aussi grand que celui que j'aurais avec les ministres. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le principe du projet de loi n° 1, Loi sur le ministère de la Métropole, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

Mme Caron: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

(11 heures)

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 8 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 132


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 8, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du principe du projet de loi n° 132, Loi modifiant la Loi sur les permis de distribution de bière et de boissons gazeuses. M. le ministre, vous disposez d'un temps de parole de 60 minutes, et je vous cède la parole.


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. C'est un plaisir pour moi de déposer, effectivement, ce projet de loi n° 132 qui vise à modifier la Loi sur les permis de distribution de bière et de boissons gazeuses. Comme vous le savez sans doute et comme sans doute le sait l'environnementaliste et critique officiel de l'opposition, le député d'Orford – comme il se décrit lui-même environnementaliste – c'est depuis 1995 que le ministre de l'Environnement et de la Faune est responsable de cette loi qui vise essentiellement à encadrer la notion des permis, de la délivrance et du contrôle des permis de distribution de bière et de boissons gazeuses au Québec. Et, en effet, selon cette loi, les permis ne sont donnés à des requérants que si ces requérants font partie d'une entente conclue entre le ministre de l'Environnement et de la Faune et la Société québécoise de récupération et de recyclage, mieux connue sous le nom de RECYC-QUÉBEC, corporation publique dont j'ai la responsabilité ministérielle.

Ce projet de loi n° 132 s'inscrit dans l'élaboration, en 1996, d'une politique de gestion intégrée des matières résiduelles. Comme vous savez, M. le Président, le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, en ce moment, mène des audiences publiques d'importance à la grandeur du Québec pour entendre les Québécois, les groupes et tous ceux qui se sentent interpellés ou concernés par notre proposition de politique de gestion des matières résiduelles. Or, le projet de loi que je dépose ce matin pour étude au niveau de l'adoption de son principe s'inscrit spécifiquement dans le cadre de cette politique québécoise qui, entre autres, notamment vise à favoriser le recyclage des contenants à remplissage unique de bière et de boissons gazeuses.

Afin que vous compreniez mieux le contexte dans lequel je dépose ce projet de loi au niveau de son principe, quelques chiffres, quelques notions qui vont permettre aux membres de cette auguste Assemblée de mieux comprendre le milieu et l'environnement dans lesquels cette loi s'insère. D'abord, il y a eu une première adoption d'une politique de gestion intégrée des déchets solides, comme on l'appelait à ce moment-là. Elle a été adoptée en 1989 par le gouvernement de l'époque. Cette politique, je vous le rappellerai, visait essentiellement à réduire de 50 % le volume des déchets – ce que nous appelons maintenant les matières résiduelles – que nous envoyons dans les lieux d'enfouissement du Québec.

C'est essentiellement sur deux principes que cette politique, qui découle également des grandes discussions au niveau de l'ONU, se base. D'abord, c'est la notion de cesser le gaspillage des ressources qui sont trop communément appelées déchets. Et dans nos sacs verts, comme vous le savez, M. le Président, il y a là des matières résiduelles qui ne sont pas des déchets, mais qui sont plutôt des ressources, de véritables matières qui peuvent être subséquemment soit nettoyées, réutilisées et recyclées pour un nouveau cycle de vie dans le cycle de vie de la consommation.

Deuxièmement, les lieux d'enfouissement sanitaire du Québec, qui sont au nombre de 69, se remplissent rapidement, trop rapidement pour les gestionnaires municipaux et les autres gestionnaires privés. Ils se remplissent trop rapidement. L'élimination de 50 % du volume des matières que nous y envoyons chaque année pour enfouissement, la réduction d'un volume va, par la même occasion, M. le Président, vous en conviendrez, augmenter la vie de ces lieux d'enfouissement et également permettre aux municipalités d'économiser le coût de l'enfouissement qui se situe, au moment où on se parle, entre 25 $ et 30 $ la tonne à l'enfouissement. Et, si on ajoute à ces frais à l'enfouissement les frais de transport, de collecte, c'est entre 40 $ et 50 $ la tonne que les municipalités doivent absorber pour la gestion de leurs déchets. Et, comme les municipalités sont financées par les contribuables, chaque contribuable québécois paie donc de sa poche, bon an, mal an, 50 $ par an pour la gestion de ses propres déchets.

Les chiffres, en termes de matières résiduelles et de déchets, sont simples à retenir: chaque citoyen québécois que nous sommes, nous produisons bon an, mal an une tonne de matières résiduelles, de déchets, de sorte qu'au Québec – les derniers chiffres les plus exacts que j'ai en filière datent de 1992 – en 1992, M. le Président, nous avons produit – j'ignore si on doit s'en enorgueillir; certainement pas – 7 000 000 de tonnes de matières résiduelles que nous avons générées. Et 35 % proviennent du secteur domestique, notamment des sacs verts que, comme je lui ai délégué la gestion des matières résiduelles dans mon foyer, mon fils, Louis-Joseph, apporte les lundis et jeudis sur le trottoir. Ça représente 35 % des déchets que nous produisons au Québec.

Il y a un autre secteur d'importance, c'est le secteur des industries, des commerces et des institutions qui produisent énormément de carton, qui produisent énormément de papier qui, malheureusement, n'est pas encore tout recyclé. Et ces volumes des secteurs industriels, commerciaux et institutionnels représentent, M. le Président, plus de 40 % des déchets que nous produisons chaque année au Québec, spécifiquement, concrètement 41 %. Et le reste va à l'industrie de la construction, de la rénovation et de la démolition. Et, comme il y a un secteur important de l'industrie de la construction, maintenant, qui est voué à la rénovation, ce pourcentage a augmenté au fil des ans; en ce moment, il se situe à 24 %, comme j'ai dit. Il est sans doute, au moment où on se parle, en 1996, de l'ordre de 96 %.

Pour faire, encore une fois, l'explication du contexte dans lequel je dépose ce projet de loi pour adoption au niveau de son principe, en 1993, la collecte, le tri, le conditionnement et l'élimination des matières résiduelles, ça a coûté aux municipalités 318 000 000 $, ce qui représente, grosso modo, 4 % de leurs budgets municipaux. Et il est important de noter que ces coûts augmentent de façon importante, parce que, depuis 1989, notamment, le coût de l'élimination des matières résiduelles des citoyens du Québec, qui en produisent 7 000 000 de tonnes par année, a augmenté de 76 %.

Où en sommes-nous dans les efforts? Quel est le bilan des efforts que nous avons maintenant amorcés pour la réduction des matières résiduelles, objectif que le gouvernement du Québec s'était donné en 1989? Alors, à partir de l'année 1988, qui est l'année de référence que nous nous sommes donnée pour le calcul de la réduction des matières résiduelles, nous devons signaler que la performance n'est pas très éblouissante. En 1992, la quantité des résidus que nous envoyons dans les lieux d'enfouissement avait été seulement réduite de 8,4 %.

Il me serait facile de blâmer l'ancien gouvernement pour cette pauvre performance, mais j'évite de le faire parce que ce n'est pas ma façon de faire de la politique. Et, comme, dans ma vie antérieure d'expert-conseil, j'ai eu l'occasion d'étudier à fond cette question pour divers clients, au lieu de blâmer l'ancien gouvernement, je dois signaler qu'il est facile de réduire le premier 5 % ou le premier 10 % de l'élimination des déchets, mais que, au-delà de cette marque de 10 %, il devient difficile de réduire à la source l'élimination, et c'est maintenant à ce nouveau défi qu'on fait face.

Dans ce défi, le réemploi et le recyclage sont un élément important par lequel nous allons continuer à progresser vers l'atteinte de cet objectif de réduction de 50 % des déchets. Ainsi, la consigne est un élément clé dans l'atteinte de ces objectifs. Au Québec, essentiellement, il y a trois systèmes parallèles qui fonctionnent et qui font appel à la consigne, et qui font également en sorte que les matières diminuent en volume. Les matières qu'on envoie dans les lieux d'enfouissement diminuent.

D'abord, il y a ce système privé, auquel nous sommes tous habitués, qui est celui des bouteilles de bière. Ça fait partie de nos moeurs de rapporter nos bouteilles de bière brunes au dépanneur, parce que, lorsque nous sommes allés acheter ce divin liquide chez le dépanneur, nous avons payé 0,10 $ auprès du dépanneur et nous nous attendons à retrouver ce 0,10 $ lorsque nous allons retourner nos bouteilles de bière. Ce système, qui fonctionne bien, il est privé, l'État n'intervient pas. Et les brasseurs du Québec, que j'ai rencontrés récemment, me demandent de garder ce système, se disent satisfaits de ce système.

(11 h 10)

Et ceux et celles qui pensent que les importateurs de bière américaine, qui sont maintenant présents sur le marché du Québec, voudraient faire sauter ce système, alors, ces gens se trompent. J'ai moi-même rencontré le principal importateur de bière américaine au Québec, M. Geloso, de Laval, qui importe différentes sortes de bière américaine. Il me disait lui-même être à l'aise avec ce système et vouloir conserver ce système de consigne de bouteilles, parce que ses camions qui amènent de la bière américaine peuvent retourner vers les États-Unis avec un chargement et qu'il se satisfait très bien du système privé de contenants réutilisables, qui fait consensus dans le monde de la bière. C'est le premier système et ce projet de loi, en aucune façon, ne vient modifier ce système de bouteilles de bière réutilisables.

Le deuxième système qui est en place, et c'est celui-ci que ce projet de loi vient modifier, c'est le système de RECYC-QUÉBEC qui est le système qui vise à s'assurer que les contenants réutilisables soient réutilisés par le recyclage; de là le nom de la corporation RECYC-QUÉBEC dont j'ai la responsabilité. Et je vais revenir plus à fond, naturellement, sur les intentions du projet de loi et comment ce projet de loi n° 132 vient modifier le système en place.

Le troisième système qui est en place, et, lui, il est un système privé, encore une fois, c'est le système de la collecte sélective. Alors, ceux et celles qui ont à leur domicile ce bac de plastique, quelquefois vert, quelquefois bleu, que nous sortons au moins une fois par semaine, dans lequel bac nous déposons les bouteilles de vin, nous déposons les canettes d'aliments, certaines autres canettes, d'autres récipients, les bouteilles de lait, les cartons de lait... Ce système de collecte sélective, c'est un système privé, et le projet de loi que je dépose ce matin ne vient pas le modifier pour les entreprises qui contribuent au financement de cette collecte sélective et les municipalités qui, également, contribuent à ce système de collecte sélective.

Ce que le projet de loi n° 132, que je dépose ce matin, cependant, vient faire, il vient modifier le régime actuel de RECYC-QUÉBEC, le régime de la consigne à RECYC-QUÉBEC. J'explique en quelques mots, M. le Président, la façon dont le système de consigne de RECYC-QUÉBEC, qui vise à consigner les remplissages uniques de bière et de boissons gazeuses, fonctionne. Alors, contrairement aux bouteilles de bière qui ne sont pas à remplissage unique, qui retournent à l'entreprise, qui sont stérilisées, qui sont nettoyées et qui sont subséquemment reremplies de bière, les contenants à remplissage unique ne servent qu'une seule fois pour les bières et les boissons gazeuses. Ils sont subséquemment repris par l'industrie qui les recycle.

Dans le cas de l'aluminium, les canettes d'aluminium que nous connaissons tous, ces canettes d'aluminium sont nettoyées, ces canettes d'aluminium sont refondues et elles sont retransformées en canettes, soit de boissons gazeuses ou de bière, pour une autre utilisation. De même, pour les boissons gazeuses dans ces petits contenants de plastique que nous appelons dans le jargon les contenants en pec, de par le jargon de la définition du plastique qui est utilisé. Également, ces contenants de plastique, lorsqu'ils sont repris, sont refondus et sont retransformés en petits contenants de liqueur.

Alors, le système, il est le suivant. Lorsque nous allons acheter une canette de boissons gazeuses – je vous laisse le choix de la sorte – nous payons une consigne de 0,05 $. Chaque fois que nous retournons cette même canette au magasin où nous l'avons achetée, que ce soit le dépanneur qui la reprenne – ou le magasin, l'épicerie qui la reprenne – celui-ci, lorsqu'il la remet à un recycleur du secteur industriel, à un acheteur qui recycle ces matériaux résiduels, il reçoit de RECYC-QUÉBEC 0,07 $. C'est 0,07 $ que nous donnons aux dépanneurs et aux épiceries, aux autres magasins qui reprennent la canette. Le 0,02 $ supplémentaire, lui, sert à payer pour la manutention de ces canettes, parce que la plupart des dépanneurs – vous l'avez vu lorsque vous y allez – souvent, engagent du personnel surnuméraire, souvent des jeunes qui font cela les fins de semaine ou les soirs, pour manutentionner ces canettes, pour les mettre dans des sacs. Et, également, il y a un coût réel pour ces commerces à entreposer temporairement ces matières.

En ce moment, ce système a deux limites et comporte deux difficultés. La première, c'est que vous aurez compris que, si, entre guillemets, RECYC-QUÉBEC collecte 0,05 $ chaque fois qu'une canette est vendue et que nous donnons 0,07 $ au dépanneur ou à l'épicerie qui reprend cette canette, éventuellement le système sera non rentable pour la corporation publique qu'est RECYC-QUÉBEC, corporation publique, je le répète, dont j'ai la responsabilité. Le point de rupture entre la rentabilité et la non-rentabilité pour RECYC-QUÉBEC a été fixé à 72,8 %, c'est-à-dire que RECYC-QUÉBEC, qui est maintenant victime de son succès, qui rembourse plus que 72,8 % des canettes qui initialement avaient été consignées, maintenant assume certaines pertes. Heureusement, les fonds de RECYC-QUÉBEC accumulés sont de l'ordre de 28 000 000 $, et c'est à partir de ce surplus accumulé que nous pouvons, à court terme – je dis bien à court terme – financer les pertes qui sont générées par le succès de la consigne sur la canette d'aluminium.

Le projet de loi n° 132 n'a pas pour objet de spécifiquement répondre à ce problème. Il y aura, M. le Président, d'autres mesures, que j'annoncerai certainement à l'automne, pour rectifier le tir dans ce domaine pour s'assurer que RECYC-QUÉBEC puisse continuer à accumuler des fonds qui servent à générer cette industrie du recyclage qui est importante et servent, par exemple, à soutenir d'autres secteurs importants dans l'environnement et le recyclage, comme le secteur de l'éducation. Et c'est RECYC-QUÉBEC, entre autres, qui finance les écoles Brundtland, qui sont les écoles de jeunes, primaires et secondaires, qui participent à des efforts au niveau de l'environnement. C'est également RECYC-QUÉBEC qui soutient la recherche et le développement, et le développement d'entreprises qui sont vouées à l'industrie du recyclage. Je reviendrai, à l'automne, devant cette Chambre pour proposer des mesures pour corriger cette situation.

Un autre problème, et la loi n° 132 y fait référence spécifiquement, est le suivant: la loi actuelle ne vise pas les détaillants; elle vise uniquement les grossistes et les producteurs. Et l'entente qui a été signée portant sur... Les signataires de l'entente sur la consignation ne sont pas les détaillants, et l'entente sur la consignation et la loi actuelle ne visent pas les détaillants. Je signale que les signataires de l'entente pour la récupération et le recyclage des contenants à remplissage unique de bière et de boissons gazeuses, qui l'ont signée et l'ont reconduite à plusieurs occasions depuis 1984, sont naturellement la Société québécoise de récupération et de recyclage, RECYQ-QUÉBEC, l'Association des brasseurs du Québec, l'Association des détaillants en alimentation du Québec, l'Association des embouteilleurs de boissons gazeuses du Québec, le Conseil canadien de la distribution alimentaire, l'Association des distributeurs de bière sans alcool du Québec et le ministère de l'Environnement et de la Faune, dont je suis le ministre.

(11 h 20)

Cette entente avait – et ce sont les principes qui la sous-tendent – les objectifs et les principes suivants: d'abord, les contenants à remplissage unique utilisés pour la vente de la bière et des boissons gazeuses sont des contenants recyclables. Le deuxième principe et objectif de cette entente, c'est qu'il y a un système de consignation qui est établi pour s'assurer de la récupération de ces contenants à remplissage unique. Le troisième principe, c'est qu'il y a un système de récupération pour récupérer ces contenants qui sont retournés en vertu du deuxième principe, le principe de la consignation. Et, finalement, il y a un mécanisme qui fait en sorte qu'il y a une contribution à même le système pour soutenir ceux qui ont à manutentionner ces contenants qui sont retournés en vertu des trois premiers principes.

Ce système fonctionne avec les deux difficultés et les deux réserves que j'ai mentionnées précédemment, et il fonctionne à un tel point que les dernières données que nous avons indiquent que, sur les 1 100 000 000, M. le Président, soit les 1 100 000 000 de contenants à remplissage unique qui sont produits et utilisés au Québec, maintenant, grâce à la consignation, 800 000 000 de ces contenants sont retournés au dépanneur ou à l'épicerie.

Comme je l'ai dit, M. le Président, cette loi actuelle de permis de distribution de bière et de boissons gazeuses vise les grossistes, vise les embouteilleurs, mais ne vise pas le commerce de détail. Et, même si la politique générale, globale de gestion des matières résiduelles, après sa révision, cette nouvelle politique ne sera connue qu'au printemps de 1997 compte tenu des audiences publiques présentement en cours par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, j'ai néanmoins décidé de bouger avec ce projet de loi et d'aller de l'avant avec une mesure qui m'apparaît essentielle pour corriger la deuxième faille de ce système qui fait en sorte que les détaillants ne sont pas visés par la loi actuelle.

Et voici comment ce problème crée des distorsions. D'abord, il y a ces détaillants à très grande surface, que nous connaissons tous, que, personnellement, j'ai beaucoup de difficultés à visiter parce que je trouve que les quantités sont trop grosses et que je perds beaucoup de temps à trouver la chose dont j'ai besoin, enfin. Ces superficies à grande surface vendent, écoulent des quantités énormes de boissons gazeuses dans des contenants qui ne sont pas consignés et qui ne font pas l'objet de la consigne de RECYC-QUÉBEC et de la consigne du Québec et qui – ce n'est pas l'objectif de la loi, mais je le souligne – proviennent de l'Ontario et qui sont écoulés en très grande quantité dans ces magasins à grande surface.

Or, le problème, c'est que le consommateur qui y achète ces contenants à remplissage unique subséquemment va se faire rembourser pour la consigne qu'il n'a pas payée, en fait. Vous avez tous vu dans les supermarchés ces gobeuses de canettes, ces gobeuses de bouteilles. Alors, le consommateur – je n'ai pas l'intention de qualifier ses intentions – fait gober ses canettes par la gobeuse, se fait rembourser le 0,05 $ qu'il n'a pas payé, de sorte qu'il fait, entre guillemets, un petit profit sur le dos du système de la consigne que nous avons mis en place. C'est le premier problème, de sorte que ça crée un déséquilibre dans le système: nous nous trouvons à rembourser une consigne que les gens n'ont pas payée. Vous conviendrez que ça crée nécessairement, M. le Président, un déséquilibre dans le système. Premier problème.

Le deuxième problème. Si vous vous présentez avec un sac de canettes que vous avez consignées, dont vous avez payé la consigne, à ces magasins à grande surface ou à d'autres magasins, ça m'est arrivé personnellement de m'être fait dire: Nous ne reprenons pas les canettes, nous trouvons que ça prend trop de place, nous trouvons que c'est trop dispendieux. Excusez-nous, M. le consommateur ou Mme la consommatrice, nous ne reprenons pas les canettes. De sorte que ces grandes surfaces et, également, je dois le dire, des pharmacies à grande surface, des stations-service qui, souvent, font des promotions... Je parle des stations-service. On le sait tous, l'été, souvent, la promotion, c'est des ballons de plage ou des boissons gazeuses. Les stations-service ne reprennent pas ces canettes; de même, les chaînes à grande surface et les pharmacies à grande surface dont j'ai parlé ne reprennent pas ces canettes, invoquant, dans le cas des pharmacies, des questions de salubrité.

Or, le dépanneur, le petit commerçant qui, lui, reprend les canettes, même s'il reçoit 0,07 $ la canette, se retrouve à véhiculer, à manutentionner l'ensemble des canettes vendues sur le territoire du Québec. Et je conviens avec eux que c'est une charge de travail et je conviens avec eux – parce que je les ai rencontrés – que, lorsqu'on entre dans un dépanneur et qu'il y a un gros sac de canettes, ce n'est peut-être pas le présentoir le plus alléchant pour attirer le consommateur à ce commerce.

De sorte que le coeur de la loi n° 132 que je dépose ce matin, l'objectif de cette loi, c'est d'obliger tous les détaillants – je le répète, M. le Président, c'est d'obliger tous les détaillants – qui vendent de la bière ou des boissons gazeuses en contenants à remplissage unique à ne les vendre que dans des contenants consignés et, d'autre part, M. le Président, à obliger ces mêmes détaillants à reprendre les contenants vides. Avec cette loi, je règle donc deux problèmes. D'abord, les grandes surfaces au Québec ne pourront plus vendre à rabais, j'en conviens, des liqueurs douces dans des contenants qui ne sont pas consignés. De sorte que, si les embouteilleurs, les producteurs de boissons gazeuses de l'Ontario veulent écouler sur notre marché des boissons gazeuses, grand bien leur en fasse, ils devront s'assurer qu'elles sont consignées en vertu de notre loi et que le système de la consigne que j'ai décrit brièvement s'applique. Première chose.

Deuxième problème que je règle, c'est que ces grandes surfaces qui vendent des liqueurs en grande quantité – il faut voir la grosseur des carrosses utilisés par les consommateurs qui sortent de ces grandes surfaces pour réaliser la quantité des boissons gazeuses qui y sont vendues – devront, comme tout le monde le fait, comme le dépanneur au coin de la rue à mon domicile le fait, comme l'épicerie où je vais le fait, reprendre les contenants à remplissage unique.

Ces modifications donnent plein effet à la volonté du gouvernement d'avoir un système qui est équitable et de faire en sorte que les intervenants dans ce domaine ne se sentent pas lésés. Et le phénomène intéressant que je vis à titre de ministre de l'Environnement et de la Faune – et je m'en surprends toujours agréablement lorsque je fais l'objet de représentations qui vont dans ce sens – c'est le principe de l'équité.

Je vais signaler deux dossiers que j'ai fait progresser récemment et qui sont également sous-tendus par ce principe de l'équité. Le premier, c'est celui des neiges usées, où la très grande majorité des villes s'étaient conformées à notre exigence, à notre politique de stopper, d'arrêter, excusez, le déversement des neiges usées dans les cours d'eau. Or, d'autres villes s'étaient manifestement traîné les pieds et, à tous les ans, les représentants de ces municipalités retardataires allaient voir le ministre de l'Environnement, faisaient des représentations, et le ministre de l'Environnement disait: Ah! On pourra attendre une autre année.

Or, aussitôt que j'ai été nommé ministre de l'Environnement et de la Faune, plusieurs municipalités m'ont fait des représentations dans le sens de l'équité, me disant: Nous, municipalités, nous sommes conformées à la politique. Nous avons investi dans des équipements qui nous permettent de gérer nos neiges usées en terre ferme, de ne plus les jeter dans les cours d'eau; nous trouvons qu'il est inéquitable que la municipalité voisine, elle, le fasse impunément. Et nous pensons que, sur la base de l'équité, vous devriez, M. le ministre, être ferme et appliquer également, à tous, la même politique. Ce que j'ai fait.

(11 h 30)

Et je me fais un plaisir de rappeler aux maires qui s'inquiètent de la fermeté du nouveau ministre dans l'application de ces politiques que je le fais sur la base de l'équité. Pas plus tard que ce matin, très tôt, j'étais au téléphone avec un maire qui se plaignait de la fermeté de l'application de la politique et l'argumentation que je lui ai faite, sur la base de l'équité et de représentations d'une ville voisine à la sienne, que je n'avais pas l'intention de bouger mit fin à la conversation. Il a dit: J'ai compris. Je comprends que sur la base de l'équité, M. le ministre, vous êtes inébranlable. Il avait compris.

Le deuxième exemple, c'est le domaine industriel, le domaine des papetières. Sur la même base de ce principe de l'équité, j'ai fait l'objet de moult représentations, de moult rencontres que j'ai eues avec des producteurs de pâtes et papiers qui me disaient: Nous nous sommes conformés à votre règlement, nous avons investi, nous nous sommes dépollués, nous avons diminué les rejets dans les cours d'eau. Sur la base de l'équité, M. le ministre, nous vous demandons d'intervenir auprès de notre concurrent qui, lui, compétiteur, s'est traîné les pieds. Lui, rejette encore impunément dans les cours d'eau et, sur la base de l'équité, nous vous demandons d'intervenir.

Le même principe prévaut dans le projet de loi n° 132. Il sous-tend et appuie le projet de loi n° 132 que je dépose ce matin parce qu'il y a eu auprès des signataires de cette entente dont j'ai parlé précédemment et auprès des organismes qui oeuvrent, des intervenants qui oeuvrent dans la boisson gazeuse et dans la bière et dans le contenant à remplissage unique, il y a eu, en 1992, une résolution unanime qui, essentiellement, me demandait, demandait au gouvernement d'aller de l'avant avec une loi qui, sur la base de l'équité, fasse en sorte que tous les détaillants doivent reprendre les contenants consignés et que tous les détaillants doivent vendre des contenants consignés.

Sur la base de cette résolution unanime, sur la base du consensus très fort qui prévaut dans le milieu, j'ai décidé de déposer ce projet de loi immédiatement et, je l'espère, avec la collaboration positive de l'opposition officielle et de son critique environnementaliste, de faire en sorte que cette loi soit adoptée avant la relâche de l'été parce qu'elle fait l'objet d'un très vaste consensus, elle est basée sur l'équité, elle permettra à RECYC-QUÉBEC de colmater les brèches, dont la brèche qui fait en sorte que leur capital, leur surplus accumulé fonde, et elle permettra, cette loi, de progresser encore une fois dans cet objectif que nous nous sommes donné, à titre de société, de réduire de 50 % le volume des matières résiduelles, communément appelées déchets, qui, malheureusement, se retrouvent dans nos lieux d'enfouissement sanitaire.

Cette loi, c'est un pas dans la bonne direction. Je la dépose même si la nouvelle politique, qui sera meilleure, de gestion intégrée des matières résiduelles au Québec n'est pas encore proposée. Mais je le fais parce que je pense que l'on peut progresser dans des domaines qui font consensus, qui font l'unanimité dans le milieu sans attendre que ce domaine soit intégré dans une politique d'ensemble. Je conviens cependant, M. le Président – et je suis sûr que l'opposition va certainement, à juste titre, soulever cette question – qu'au-delà de ce pas dans la bonne direction il y a d'autres pas que nous devons faire. Et ces autres pas que j'étudie en ce moment et qui sont amplement débattus devant les audiences du BAPE sur la gestion des matières résiduelles portent sur les autres contenants à remplissage unique. Par exemple, ces Tetrapaks, ces petits jus, avec la paille, que les enfants ont une trop mauvaise habitude de presser, qui coulent sur les bancs des voitures, notamment la vôtre, M. le Président. Ces petits Tetra Pak que nous produisons, que nous utilisons dans l'ordre de 500 000 000 par année au Québec, un demi-milliard de ces petits contenants à jus que tous les ados et enfants siphonnent allégrement devant la télévision se retrouvent tous dans le site d'enfouissement. Également, d'autres produits qui pourraient être soit consignés, soit recyclés par d'autres méthodes se retrouvent, malheureusement trop souvent, dans les lieux d'enfouissement. Je pense ici à certains équipements, certaines matières résiduelles reliés au monde de l'automobile. On n'a qu'à penser, M. le Président, aux piles, communément appelées batteries, les accumulateurs d'énergie qui servent à démarrer nos voitures. Le plomb qu'on y retrouve pourrait être recyclé dans une proportion encore plus grande qu'il l'est en ce moment. Je pense aux pneus, M. le Président, que nous achetons, donc dont nous disposons à tous les ans, au Québec. C'est de l'ordre de 7 000 000 de pneus que nous achetons et dont nous disposons chaque année au Québec. Vous conviendrez, M. le Président, que la méthode de mon enfance de transformer des pneus en boîtes à fleurs ne permet pas d'intégrer l'ensemble des 7 000 000 de pneus que nous produisons chaque année au Québec.

Je conviens que d'autres pas doivent être faits et faits dans la direction de diminuer les matières que nous envoyons dans les lieux d'enfouissement sanitaire et de recycler, réutiliser de plus en plus de ces matières. Et le projet de loi que je dépose ce matin, j'en conviens, ne couvre pas tout, est un pas dans la bonne direction que je demande à l'Assemblée nationale de faire. Et ce bon pas dans la bonne direction sera suivi d'autres qui permettront au Québec de se doter, d'ici à un an, d'une politique intelligente, d'une politique intégrée de gestion des matières résiduelles qui non seulement permettra de réduire l'enfouissement sanitaire qui comporte des risques environnementaux certains, mais permettra de continuer à développer ce créneau industriel et ce créneau économique, ce secteur économique et ce secteur industriel qu'est l'industrie du recyclage et de la réutilisation.

Alors que certains de nos créneaux ou secteurs industriels stagnent quant à leur progression et que notre PIB, malheureusement, n'augmente que de l'ordre de 2 % par année, par contre, au contraire, le secteur industriel de l'environnement, lui, croît de façon substantielle. Sa croissance annuelle, dans les quatre ou cinq dernières années, se situe entre 10 % et 15 %. Il y a là, de l'avis de tous les experts, il y a là, de l'avis de la grappe industrielle environnementale, il y a là, de l'avis de tous ceux et celles que j'ai rencontrés, un potentiel de développement important, il y a là un créneau important de développement, de création d'emplois qui existe et qui ne sera pleinement utilisé ou pleinement développé que dans la mesure où le gouvernement se donne une politique cohérente, ferme de gestion des matières résiduelles au Québec.

Et j'aurai, M. le Président – je termine là-dessus – le plaisir d'annoncer, en cette même Assemblée nationale, d'autres mesures à l'automne, et le tout culminera dans une apothéose de la gestion des matières résiduelles au printemps prochain lorsque le BAPE m'aura remis ses recommandations, conclusions suite à son enquête publique. Cette enquête publique, et le rapport du BAPE me sera remis... J'ai réexigé encore récemment que ce rapport me soit remis le 31 décembre 1996, de sorte qu'au printemps prochain, M. le Président, je serai en mesure, je l'espère, de pouvoir affirmer que mon humble contribution au ministère soit celle, notamment, d'avoir doté le Québec d'une gestion intelligente, progressive, créatrice d'emplois, protectrice de notre environnement, de matières résiduelles au Québec. Merci, M. le Président.

(11 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vimont et ministre de l'Environnement et de la Faune. Je cède maintenant la parole au député d'Orford et critique officiel de l'opposition en matière d'environnement et de faune. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Je serai probablement un peu moins long que le ministre sur le projet de loi n° 132. Nous aurons l'occasion, vous comprendrez, à plusieurs occasions dans les prochaines semaines, j'imagine, de reparler article par article. Il faut aussi voir que le projet de loi est peut-être un peu moins long que le discours du ministre. C'est un projet de loi qui a huit articles, M. le Président, au total, dont quatre sont des articles de concordance, et dont le nom est: Loi modifiant la Loi sur les permis de distribution de bière et de boissons gazeuses. Alors, c'est un très court projet de loi, M. le Président. On a été habitués, d'ailleurs, depuis deux ans, par le gouvernement en place... ou bien on n'a pas eu de législation en environnement, à toutes fins pratiques, on n'en a pas eu, et, si on en a eu, on a eu des projets de loi d'un seul article. Alors, vous comprendrez que, comme opposition officielle, on aimerait ça pouvoir faire du vrai travail en environnement, passer des vrais projets de loi avec des vraies orientations. Mais non, ça a été des projets de loi d'un article; là, huit, dont il y en a quatre que c'est de la concordance et un article qui nous dit que ça va passer du ministère de l'Industrie et du Commerce au ministère de l'Environnement. Je vous le dis tout de suite, ça ne fera pas grand changement chez les citoyens, ce soir, quand ils vont se coucher, de savoir que le 0,02 $ ne sera plus régi par le ministère de l'Industrie mais par le ministère de l'Environnement.

Au total, ce n'est pas le projet de loi du siècle. C'est dans la bonne direction, d'autre part. Mais, comme souvent j'ai été obligé de le rappeler au ministre, ça fait deux ans que ce gouvernement est en place, M. le Président, malheureusement, ils ont référendé tout l'été et, ayant référendé tout l'été, on a dû oublier pas mal de priorités que le programme électoral du PQ avait données, M. le Président. Et on aurait fort bien pu, avec un projet de loi si court, si simple, huit articles dont quatre de concordance, on aurait pu fort bien, le lendemain de l'élection, en 1994, rapidement... Parce qu'on voit que RECYC-QUÉBEC est après s'embourber dans des déficits incroyables – M. Leblanc était aux crédits il y a quelques jours; je le salue au passage pour le bon ouvrage qu'il fait à RECYC-QUÉBEC – mais ils sont après s'embourber avec des déficits et, si on avait passé ce projet de loi au lendemain de l'élection, avec l'aide de l'opposition, bien sûr, on aurait réglé le problème de RECYC, on aurait réglé aussi le problème de tous ces contenants qui traînent un peu partout.

Je rappellerai au ministre que, non seulement ils ont référendé tout l'été, M. le Président, mais, maintenant, là, ne voulant pas référender – les citoyens ont comme dit que c'était assez, les référendums, ils en avaient plein le pompon, comme on dit chez nous – ils ont décidé de se lancer la tête la première dans un débat linguistique, ce gouvernement. Alors, on sort d'un débat référendaire, deux ans, référendum, référender, et là on va se lancer dans un débat linguistique. On a vu le spectacle il y a deux semaines, c'était de toute beauté: On «met-u» un trait d'union? On n'en «met-u» pas? On «rouvre-tu» le projet de loi? C'était de toute beauté. Alors, je laisserai les citoyens juger si c'est ça, au Québec, que les citoyens veulent en ce moment, un référendum et un débat linguistique, ou si ce n'est pas plutôt de parler d'environnement, ce qu'on n'a pas fait depuis deux ans, je vous l'avoue bien candidement, M. le Président.

Alors, je dirai au ministre: C'est trop peu et c'est trop tard, comme on dit. Et je l'invite, bien sûr, le ministre de l'Environnement, à regarder son programme électoral encore une fois. Je pense souvent que je l'ai plus lu que les gens du PQ, ce programme-là. Franchement, je l'invite à regarder à la page 45, les articles 2.8 et 2.7. On parle beaucoup de la consigne et on va beaucoup plus loin que le très beau et très long discours du ministre il y a quelques minutes. Je l'invite aussi à regarder à la page 48 de son programme, les articles 2.28 et 2.29. Là aussi, M. le Président, on va beaucoup plus loin que le beau et dynamique discours du ministre il y a quelques minutes, beaucoup plus loin, je vous le dirai là. Et, avant d'embarquer dans le coeur du projet de loi, je veux rappeler au ministre que, non seulement on a peu légiféré en environnement depuis deux ans, mais il y a des grandes urgences au Québec, il y a des grandes urgences.

Vous m'avez peut-être vu traverser la Chambre tantôt pour aller parler pendant une minute ou deux avec le ministre. Je voulais lui donner la dernière horreur que j'ai entendue en fin de semaine, à une réception dans mon comté, sur la production porcine. C'est un maire qui le dit dans le journal, d'ailleurs, pas plus tard qu'avant-hier, où il dit que, dans sa MRC, il y a 100 productions porcines – de très grosses, en passant, de très, très grosses – et là il figure que, dans la prochaine année... alors, ce qui aura pris 200, 300 ans à bâtir 100 productions porcines... C'est le préfet, un homme tout à fait raisonnable, président de la Table des MRC, dans les MRC, donc il sait de quoi il parle. Alors, là, il dit: Écoutez, j'ai l'impression que, dans la prochaine année, on va avoir au-dessus de 100 demandes de porcheries, juste dans cette MRC-là. Alors, je suis allé mentionner au ministre qu'on peut parler des 0,02 $ sur les bouteilles, puis je l'encourage à continuer à parler des 0,02 $ sur les bouteilles, mais, au même moment, les nappes phréatiques sont après se polluer, les rivières le sont, 30 % des poissons dans la rivière L'Assomption où le ministre a levé le moratoire, les poissons sont difformes. Les gens de la santé au Québec, la plus haute instance de la santé nous dit: Attention! Attention, on a des symptômes évidents qu'il y a des problèmes graves au niveau de la santé causés, entre autres...

Je le voyais la semaine passée sur les MMT. Comment un ministre de l'Environnement peut appuyer toute la dynamique des MMT dans la gazoline alors qu'on sait les répercussions? J'avais l'occasion... Et probablement que le ministre les a rencontrés lui aussi, lundi. Je les ai rencontrés après lui, le groupe du Sierra Club, de Toronto, qui est le grand organisme nord-américain de l'environnement, et qui me disait: Comment se peut-il que ce gouvernement ait appuyé cette mesure des pétrolières finalement sur les MMT? Mesure absolument incroyable. Je vous dirai que j'ai bien de la misère à comprendre que le ministre de l'Environnement puisse appuyer une telle mesure, alors qu'on sait tous que l'ensemble des compagnies d'automobiles au monde en ce moment – bien sûr, les nôtres chez nous – sont contre l'arrivée du MMT dans le pétrole, prétendant qu'il y a une pollution de l'atmosphère et, entre autres, répercussion, bien sûr, chez les enfants qui souffrent d'asthme, de façon très importante.

Mais, ceci dit, ce n'est pas le propos du projet de loi, M. le Président. Ce projet de loi, et je pense que le ministre l'a bien expliqué, c'est tous ces contenants à remplissage unique qui devront maintenant être payés, car nous les rapporterons, ce qu'on appelle la consigne. Elle sera plus large, elle sera plus efficace et je pense qu'on a à s'en réjouir. On aura, article par article, un certain nombre de questions à poser au ministre et il aura avec lui, j'imagine, les gens de RECYC-QUÉBEC.

J'aimerais qu'il amène peut-être avec lui les gens de la Société des alcools du Québec. Quand je disais que le programme électoral va un petit peu plus loin que ce qu'il nous propose, il y a un aspect là-dedans, c'est toute la dynamique de la Société des alcools du Québec qui, de quelque façon, est arrivée, à travers les temps, à passer à travers toutes ces belles règles et tous ces beaux règlements, se donne bonne conscience en mettant sur les camions de la Société des alcools – je voyais ça pas plus tard que lundi, à Montréal – un beau poster de RECYC-QUÉBEC.

Alors, on se donne bonne conscience, mais, dans la vraie vie, la bonne conscience, ce serait de reprendre les bouteilles et de les réutiliser. Alors, on fait du sable avec les bouteilles, à peu près, en ce moment. Dans la vraie vie, c'est ça, et je ne suis pas sûr qu'on va aller bien loin comme société à mettre des pancartes sur les camions, puis dire: C'est bien le fun, la Société des alcools, on commandite RECYC-QUÉBEC. Je pense qu'il faut aller pas mal plus loin que ça. Dans le programme électoral du PQ, je pense qu'on allait pas mal plus loin que de faire du sable avec ces bouteilles-là, M. le Président.

M. Leblanc nous le disait: La situation se détériore à RECYC-QUÉBEC et, encore une fois je veux le souligner, on a tardé bien trop longtemps à prendre cette position que le ministre va maintenant prendre. Il y a des sommes d'argent là. Mais M. Leblanc, le président de RECYC-QUÉBEC, nous disait aussi, il invitait le ministre de l'Environnement avant le ministre actuel à faire passer la consigne de 0,05 $ à 0,10 $. Il disait: Ça, c'est la solution. Il nous disait que les sondages étaient à 80 %, que les citoyens étaient d'accord avec ça; et là c'est une mesure très proactive. Je comprends qu'on a pas mal d'autres mesures par lesquelles on veut passer des coûts aux citoyens au Québec... Il y a une mesure, entre autres, les 2 $ dans les parcs, dont on aura le plaisir de rejaser, bien sûr, dans les prochaines semaines. Mais si le ministre avait voulu vraiment faire quelque chose, c'était de faire passer la consigne de 0,05 $ à 0,10 $, et là, quand il parle d'éducation, RECYC-QUÉBEC aurait eu les moyens, non pas des déficits comme on connaît depuis nombre d'années.

Il y a toute la dynamique des contenants qui sont vendus par des appareils. Comment tout ça va être géré, en ce moment, quand c'est sur le coin de la rue, puis quand c'est dans le centre communautaire, puis à côté de la piscine, puis ici, à l'Assemblée nationale, en bas? Qui devient responsable de ces bouteilles-là, puis de ces «cacannes», en bout de ligne, quand la machine semble flotter quelque part dans le milieu de «nowhere»? Il va falloir que le ministre nous réponde à ça aussi.

Et, quand il dit: Toutes les institutions seront maintenant responsables, on va jaser avec le ministre sur les mots «toutes les institutions». Il a mentionné les stations-service, et tout ça. Alors, on va vouloir que ce soit bien clair, qu'il n'y ait pas d'échappatoire là-dedans, que tous ceux qui vont vendre vont devoir éventuellement reprendre.

(11 h 50)

Parce que nous aussi, de ce côté-ci de la Chambre, on est arrivés avec nos boîtes de bouteilles et avec nos sacs de bouteilles. On n'a pas tous un fils, comme lui, qui transporte ça pour nous; souvent, c'est nous-mêmes qui les transportons. Mais on s'est fait dire effectivement qu'on ne les prenait pas. Par contre, je vois des petits dépanneurs, dans mon petit village d'Austin, où, souvent, pour toutes sortes de raisons, des choses que j'ai achetées à Québec, eux vont les reprendre, à Austin, dans mon petit dépanneur. Et je me dis: Il y a une inéquité là-dedans. Quelque part, la madame d'Austin fait plus que sa part dans notre société au niveau de l'environnement et, à côté, j'ai la grosse station de service, j'ai le gros magasin qui, lui, me dit: Non, vous êtes bien gentil, M. Benoit, on aime bien ça vous avoir comme client, mais, vos bouteilles, vous pouvez les garder. Ça va être long de nettoyer la planète de cette façon-là.

Mais le plus surprenant de tout le débat, le ministre a fini en nous disant que c'était une mesure parmi tant d'autres qu'il était pour apporter. De deux choses l'une, M. le Président, ou bien le ministre, il laisse la générique aller... Il a demandé à sa présidente, une femme extraordinaire, de déposer son rapport au mois de décembre. Il me semble que c'est ça qui va être l'agenda. Moi, je ne sais pas comment ils vont arriver à faire pour déposer ce rapport-là au mois de décembre, vous devriez voir la quantité de dépôts de mémoires, de rapports et tout ça. Mais, enfin, supposons, pour un instant, que le rapport de la générique soit déposé au 31 décembre. Le ministre nous dit qu'il va, ensuite, lui, nous arriver, à peu près à cette date-ci, jour pour jour, dans un an, avec une politique. Là, quand on parle de politique, le container n'est pas encore devant la maison et il y a encore bien des choses qui vont aller dans les sites de déchets, dans les sites de déchets privés, d'ailleurs, dans neuf sites de déchets privés; 60 % de vos déchets, M. le Président, s'en vont dans neuf sites de déchets privés au Québec.

Alors, là, on va être loin du compte, on va être rendu dans un an d'aujourd'hui. De deux choses l'une, ou bien le ministre prend toutes ces mesures-là et il dit à la générique: Écoutez, regardez donc tout ça, qu'on n'arrive pas avec des morceaux de casse-tête un peu tous azimuts comme trop souvent on a fait en législation, des projets de loi de huit articles, d'un article et de deux articles... Qu'on nous propose en février ou en mars ou en juin l'an prochain quelque chose qui se tienne, qui va parler des pneus, qui va parler des bouteilles, qui va parler des petits contenants en aluminium dans lesquels nos enfants mettent une paille, etc. Bon! Qu'il nous propose tout ça dans un an et qu'on arrête de faire de la législation à la pièce, à coups de 0,02 $. Et là on va gérer un bout... Là on va gérer, si j'ai bien compris, les «cacannes» de jus de V 8 et les bouteilles d'eau. C'est à peu près ça qu'on va gérer, là, alors qu'il y en a des milliards. Il donnait des chiffres, le ministre, tantôt, des milliards qu'on ne réglera pas encore, M. le Président.

Alors, on avait le choix de dire: Écoutez, on passe à une législation tout de suite, on sait où sont les problèmes, ou bien on va attendre, rendu là on va attendre et on va toute la passer et on va avoir un portrait d'ensemble. Ce que j'ai peur, c'est qu'on est après faire des manières de législations qu'on devra rouvrir dans un an, parce que la générique va nous amener sur d'autres sentiers que sur ceux que le ministre pense qu'on s'en va.

Je veux aussi dire au ministre que, nous, de notre côté, vous le savez, on a toujours tenu un discours: Oui, l'environnement, mais on pense aussi qu'il y a quelque chose à faire au niveau de l'industrie du recyclage. On pense qu'il y a des milliards de dollars là-dedans. D'ailleurs, c'est le très bon ministre Paillé qui a été, malheureusement...

Une voix: Mis sur la tablette.

M. Benoit: ...mis sur la tablette... Je pense que c'est un des bons ministres que nous avions eu avant. Le ministre de l'Industrie, il avait une très bonne continuité; très bon ministre, le ministre Paillé. Une de ses dernières déclarations qu'il a faites, c'était à l'industrie du recyclage, où le ministre Paillé disait: Écoutez... Je suis d'ailleurs surpris, je dois le dire, je suis surpris d'avoir, pendant si longtemps, vanté les mérites du programme Paillé et du ministre Paillé et, soudainement, on ne parle plus du programme Paillé et on ne veut plus parler du ministre Paillé. Bien, moi, je vous dis que le ministre Paillé, une de ses dernières déclarations qu'il a faites, c'était de dire à l'industrie de la récupération, du recyclage: Vous êtes l'industrie qui fonctionne le mieux. La grappe, la grappe industrielle qui fonctionne le mieux au Québec, c'est celle du recyclage.

J'aurais aimé entendre ce discours de la part du ministre: comment on arrive à créer des emplois, comment on arrive à créer chez les jeunes, cet été, des emplois. D'autres l'ont fait. Vous savez, je vais aller même plus loin que ça, quand j'ai entendu, pendant toutes ces grandes consultations sur la souveraineté, les gens venir dire au PQ: Un projet de société que ça nous prendrait au Québec, bien, moi, je vous dirai qu'il y a eu avant vous, qu'il y a eu plusieurs continents au monde où le projet de société, ç'a été l'environnement. Je ne vous en donnerai que un, Gandhi. Gandhi, avant qu'il parle de démocratie, avant qu'il parle de famine, avant qu'il parle de quoi que ce soit aux Indes, il a d'abord donné comme projet de société à ces gens-là un grand projet d'environnement.

Quand j'entendais la société québécoise dire, jour après jour, dans ce grand sommet de la souveraineté commandité par mes deniers publics: Le projet de société, en avez-vous un? bien, je dis au ministre de l'Environnement: Peut-être que le grand projet de société, M. le ministre, c'est celui de l'environnement. Que nous parlions rapidement de pneus, que nous parlions rapidement de recyclage, que nous parlions de création d'emplois dans cette industrie-là, il y a quelque chose d'extraordinaire à faire, mais je n'entends pas ce discours-là, malheureusement, et ça me peine. Ça me peine, quand je vois les taux de chômage que nous avons au Québec, qu'on ne se serve pas à sa juste valeur de cette industrie qui ne demanderait pas mieux que ça, M. le Président.

Alors, le ministre le disait tantôt, je veux le redire: Chaque Québécois, tous autant que nous sommes, à la fin de l'année, nous avons produit une tonne de déchets. C'est beaucoup, M. le Président. Les Nord-Américains, nous avons les pires statistiques à cet égard-là. Et, si vous étiez aux États-Unis, vous seriez probablement encore pires que du fait que vous êtes au Québec. Nous sommes les gens qui consommons le plus et qui jetons le plus. On n'est certainement pas un modèle. Le ministre était, lundi, à ce grand débat, à la Biosphère, et on voyait déjà poindre tout ce débat du Sud et du Nord: nous, les gens du Nord, qui sommes après nous donner des critères d'environnement absolument extraordinaires dans la planète, et les gens du Sud à qui on essaie d'imposer ces critères-là nous disent: Écoutez, on n'a pas les moyens, nous. On n'a même pas les moyens d'aller aux Nations unies puis d'écrire une petite demande de subvention. Aidez-nous un peu.

Finalement, les problèmes d'environnement que nous vivons, c'est bon que nous prenions certaines dynamiques, que nous soyons en avant du reste. Mais le Québec, à cet égard-là, à la fin de l'année, M. le Président, vous, votre femme, vos enfants, individuellement chacun aura produit plus d'une tonne de déchets. Mais ça, c'est avec l'industrie, bien sûr.

Vous savez, quand le ministre nous disait que son fils va porter le sac de déchets sur le bord de la route... Très chanceux, lui. Dans notre cas, chez nous, c'est moi qui le fais. M. le ministre, est-ce que vous réalisez que, dans votre sac de déchets, 60 % des déchets qui sont dans ce sac-là sont récupérables? Mais, parce qu'on n'est pas encore trop organisés, bien, finalement, il y en a 15 %, 20 % qui vont dans le bac vert. Celui-là, il est récupéré. Celui-là, c'est le plastique, c'est le verre. Mais il y a encore, dans le grand sac vert, 70 % qui pourraient être récupérés. Alors, quand le ministre nous dit qu'on est loin du compte, qu'il va nous revenir avec d'autres projets de loi, j'espère qu'il va nous revenir avec des projets de loi parce qu'il y a 70 % du sac qu'on dépose sur le bord de la route qui seraient récupérables demain matin. C'est une question d'organisation, M. le Président.

Et, moi, je ne blâmerai pas les gens du Québec de ne pas récupérer à ce point-ci. Je vais vous conter un incident. Au moment où mes enfants ont dû aller au secondaire, j'ai dû prendre un appartement, demeurant un peu loin de la grande ville de Sherbrooke. On a dû prendre un appartement là-bas. Et, à ma grande surprise, quand mes filles sont arrivées là il y a quelques années, le lundi matin il sortait du bloc-appartements huit immenses contenants de déchets, tous azimuts. Alors, il y avait des journaux, du verre, du plastique, des matières humides. Il y avait de tout, là-dedans. Un bon jour, la ville de Sherbrooke – je vois la députée de Sherbrooke qui est ici – a décidé de s'organiser un peu. Ella a décidé d'organiser la collecte, non pas ensuite... l'autre aspect, et ça, on en reparlera peut-être un peu plus tard, mais la collecte de maison en maison. Or, du jour au lendemain, dans ce même édifice où nous voyions huit ou neuf immenses contenants de déchets, parce qu'on a passé d'appartement en appartement et qu'on nous a donné un bac vert ou, dans certains cas, dans les édifices à appartements, c'étaient des genres de grands sacs, à l'intérieur d'une semaine nous sommes passés de huit grands contenants à déchets à un contenant à déchets, l'inverse, et soudainement, dans les garages, il y avait un certain nombre de contenants où on mettait le verre, le plastique et, en moins de deux, ces contenants-là débordaient de toutes sortes de matières qu'on peut récupérer. Et, avec mon oeil d'environnementaliste, j'étais même surpris de voir que, sans éducation originale à Sherbrooke, les gens... beaucoup de gens nettoyaient leurs contenants de verre, etc.

(12 heures)

Or, les gens de Sherbrooke n'étaient pas moins environnementalistes ou plus environnementalistes le lendemain qu'on a organisé la situation. Mais la ville de Sherbrooke s'est organisée. D'autre part, dans mon petit village d'Austin, on n'a pas encore un bac communautaire. Alors, les gens qui veulent récupérer, dans le village d'Austin, doivent aller jusqu'à Magog, mettre ça dans la voiture, etc. Mais la journée où le conseil municipal, à qui j'ai fait la demande et je la referai dans quelques semaines, va décider d'organiser, comme on l'a fait à Coaticook, comme on l'a fait dans d'autres MRC rurales, bien, M. le Président, les gens d'Austin vont récupérer leurs choses. Il s'agit qu'on l'organise. Sherbrooke l'a fait, bien d'autres villes l'ont fait, et c'est une question d'organisation.

Alors, 70 % de nos sacs verts, encore, sont pleins de choses. Et, je pense, la prochaine étape, M. le ministre, à cet égard-là, c'est ce qu'on appelle la double collecte. Une première collecte... M. le ministre nous disait qu'il doit aller deux fois par semaine sur le bord de la route; bien, pourquoi pas le mardi avec tout ce qui est métal, carton, verre, plastique, etc., et le jeudi – surtout que, encore une fois, il ne semble pas que ce soit lui qui ait les contretemps de tout ça – bien, ce seraient les déchets humides, les déchets de table, qui, eux, deviendront du compost? Encore là, c'est une question d'organisation, M. le Président. Ce n'est pas très, très malin. Soyez assuré que ce n'est pas moi qui ai pensé à ça, il y a des gens bien intelligents qui ont étudié tout ça bien avant nous autres, puis ce n'est pas si compliqué à organiser.

M. le ministre nous a parlé un peu de la problématique qu'il y a eu avec nos voisins des autres provinces. Moi, vous savez, les problèmes avec les voisins, c'est quelque chose que j'essaie d'éviter. Et une des façons de régler nos problèmes avec un voisin, quand on n'est pas trop souverainiste, c'est de jaser avec lui et de dire: Écoute donc, aurais-tu le même problème avec tes «cacanes» en aluminium? Aurais-tu le même problème avec tes bouteilles de verre? Et puis on «pourrait-u» s'entendre? Et puis, quand tu n'es pas trop séparatiste et qu'il n'y a pas trop de clôture entre ton voisin et toi, normalement, ces choses-là, on s'entend assez bien avec ça. Alors, je suis un peu surpris de voir qu'on a même des problèmes avec nos voisins au niveau des bouteilles puis des «cacanes» d'aluminium, M. le Président.

Moi, je pense qu'il y aurait eu des façons de le régler, et ça n'aurait pas coûté quelques millions de dollars, comme nous le laisse sous-entendre le ministre. Je pense qu'entre deux ministres de l'Environnement on peut se parler. Je sais que le ministre a parlé au ministre du fédéral, et le ministre du fédéral a pris bonne note des points de vue du ministre sur l'Irving Whale, et vice versa. Il me semble qu'on pourrait se parler sur des choses comme ça et on aurait pu aboutir beaucoup plus rapidement, je pense, à une solution. On va y arriver avec le projet de loi, mais on aurait pu y arriver beaucoup plus rapidement.

Alors, M. le Président, il faut le dire, ça prend une certaine grandeur d'âme, encore, au Québec pour récupérer. Ce n'est pas tout à fait dans les moeurs, ce n'est pas encore tout à fait dans les coutumes, mais on approche du but. Il faut continuer. Il faut inviter nos gens, partout, à faire, finalement, ce qu'on nous disait de faire quand on était jeune scout, où, finalement, on nous disait qu'on devait laisser un emplacement plus propre qu'on l'avait pris. Et, oui, sur cette terre, on n'est que locataire, M. le Président, on ne fera que passer. Je pense qu'on a une obligation de laisser aux générations après la nôtre une planète qui va être plus verte, plus bleue, plus propre, plus organisée au niveau de l'environnement. Et soyez assuré que l'opposition officielle aura une approche très positive vis-à-vis de ce projet de loi là, dans la mesure où on aura réponse à toutes les questions qu'on a l'intention de poser. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Orford et critique officiel de l'opposition en matière d'environnement et faune. M. le ministre, l'article 216 vous permet un droit de réplique. Est-ce que vous avez l'intention de l'utiliser?

M. Cliche: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Vachon et ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Vimont, Vimont.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Vimont.


M. David Cliche (réplique)

M. Cliche: Vimont. Merci, M. le Président. Je prendrai quelques minutes, je serai bref, parce que le critique officiel de l'opposition, pour qui j'ai beaucoup de respect, soulève des questions auxquelles j'aimerais apporter certaines réponses.

D'abord, je veux lui confirmer qu'il y a deux collectes: il y a la collecte du sac vert, mais il y a la collecte du bac. Et, s'il est impressionné par le fait que ce soit mon fils qui soit responsable du sac vert, c'est ma fille qui est responsable de la collecte sélective. Et je dois dire que, l'autre jour, lorsque j'ai essayé, devant son regard horrifié, de passer dans le sac vert une canne de spaghetti que j'étais trop paresseux pour nettoyer ou trop pressé pour nettoyer, je m'étais fait rapidement ramener à l'ordre. Parce que, pour les jeunes, l'environnement, ce n'est pas une mode; l'environnement, c'est une façon de penser. L'environnement, c'est une façon d'agir. Ma fille est également très préoccupée par l'énergie. Elle a la mauvaise habitude de se promener dans la maison – je pense que c'est une bonne habitude, sauf que je me suis pratiquement cassé le cou l'autre jour – et elle ferme les lumières pour sauver l'énergie. Son pauvre père y a quasiment laissé sa peau, l'autre jour, dans le grand escalier qui tourne, où elle avait fermé la lumière pour économiser de l'énergie.

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais répondre à quelques questions qui m'apparaissent importantes, qui ont été soulevées par le critique officiel de l'opposition qui semble laisser croire à la population que, lorsque nous avons fait le référendum, tout s'était arrêté. Au contraire. Au contraire, plusieurs des citoyens nous faisaient le reproche, au moment où nous avions cette réflexion fondamentale sur notre avenir collectif: nous avions engagé trop de réflexions.

Et, je le rappelle au passage, au même moment où nous avons engagé le référendum, cette réflexion de fond sur notre avenir collectif, nous avons également engagé une réflexion de fond sur l'éducation, la réforme de l'éducation, les états généraux de l'éducation; nous avons engagé une réflexion de fond sur une réforme majeure de la politique de l'énergie au Québec; nous avons engagé une réflexion de fond sur la réforme de la main-d'oeuvre; et également nous avons lancé, l'an dernier, en année référendaire, cette audience majeure, cette réflexion de fond sur la politique de gestion des matières résiduelles. Donc, non. Il est faux de dire que le référendum a tout arrêté. Au contraire, le référendum s'est ajouté à d'autres réflexions de fond qui vont bientôt porter leurs fruits.

Je lui rappellerai humblement, même si ce n'est pas le genre de politique que je fais, que son parti était au pouvoir entre 1992 et 1994 et que la résolution unanime des gens qui sont signataires de l'entente sur le recyclage, sur la réutilisation des contenants à remplissage unique, elle a été signée en 1992. Entre 1992 et 1994, leur propre ministre de l'Environnement et de la Faune non seulement n'a pas engagé de réflexion de fond sur une politique de gestion des matières résiduelles, mais n'a rien fait.

Le critique officiel de l'opposition en matière d'environnement – l'environnementaliste, comme il se désigne lui-même – fait souvent référence à notre programme. Oui, on a un programme, et c'est normal qu'il y fasse référence, parce que eux n'en ont pas, de programme. Il se plaît à citer le programme auquel j'ai contribué. J'aimerais connaître quel est leur programme. J'aimerais connaître quelle est leur vision.

Nous, nous avons le courage de l'avoir écrit et nous avons le courage, cette année, de le remettre sur le rond, de le refaçonner et de faire en sorte que, à l'automne, nos militants, nos membres soient appelés à refondre, à réécrire ce projet de société, parce que, oui, vous avez raison, l'environnement est un projet de société. Et, oui, vous avez raison, le chapitre sur l'environnement, dans notre programme, est celui qui suit immédiatement le programme en matière de souveraineté. Donc, notre projet de société en matière d'environnement suit immédiatement notre autre projet de société qui vise à donner aux Québécois l'ensemble de leurs outils.

Je ne veux pas ouvrir aujourd'hui le débat des porcheries, sauf que je conviens avec M. le député, critique officiel de l'opposition, que la question de la production porcine au Québec est préoccupante. Elle me préoccupe. Et je rappellerai que le ministre de l'Environnement et de la Faune du gouvernement libéral est celui qui a été à la source, en partie, en très grande partie à la source des problèmes que nous vivons. C'est lui qui a enlevé tous les liens qu'il y avait auparavant entre le respect des règlements environnementaux et l'accès au programme de stabilisation en production porcine. C'est lui qui a ouvert la valve du purin de cochon. Et c'est à cause de ses politiques que, maintenant, nous subissons une explosion de l'industrie porcine sans aucune relation avec le respect des règlements et des certificats d'autorisation en environnement, question que je vais corriger, chose que je vais corriger dans un proche avenir.

On nous accuse de faire une législation à la pièce. Au même moment où on nous accuse de ne pas en faire assez, on nous accuse de faire des choses. J'aime mieux faire immédiatement ce qu'il est possible de faire, ce qui est consensuel, ce qui fait consensus parmi les intervenants que d'attendre la politique qui, j'en conviens, nous permettra de faire d'autres pas dans l'autre direction.

M. le Président, je vais terminer en disant que j'apprécie les critiques positives de l'opposition, c'est leur rôle. J'apprécierais que le critique officiel de l'opposition mette peut-être plus d'emphase sur les aspects positifs et constructifs de ses remarques et ne joue pas nécessairement à la petite politicaillerie, ce que je ne fais pas, pas plus avec mon collègue du Nouveau-Brunswick qu'avec mon collègue d'Environnement Canada.

(12 h 10)

Je souligne que, dans le débat de l'Irving Whale, entre autres, les discussions entre nos experts, qui étaient au nombre de 18, hier, autour d'une même table, ont duré toute la journée. Au moment où on se parle, j'attends le rapport de cette réunion d'experts et je peux immédiatement vous affirmer qu'à la lumière de cette réunion d'experts le plan de récupération de l'Irving Whale a été modifié suite aux interventions du Québec, interventions justifiées qui visent à assurer les Québécois de la protection de leurs écosystèmes et qui ne visent surtout pas à faire de la petite politicaillerie et d'embourber le Québec dans des chicanes fédérales-provinciales. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vimont et ministre de l'Environnement et de la Faune. Alors, puisque toutes les interventions ont été effectuées... M. le député d'Orford.

M. Benoit: Oui. Est-ce qu'il me serait possible de poser une seule question au ministre de l'Environnement?

Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de l'article 213?

M. Benoit: Oui, exactement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre de l'Environnement et de la Faune, est-ce que vous acceptez de recevoir une question du député d'Orford en vertu de l'article 213 de notre règlement? Alors, veuillez poser votre question, M. le député d'Orford.

M. Benoit: Merci, M. le Président. Le ministre de l'Environnement, à deux occasions maintenant, mentionne aujourd'hui et mentionnait à d'autres occasions que le Parti libéral du Québec n'avait pas de programme en environnement. Je pense que c'est, d'abord, faux, c'est de la mauvaise information, c'est de la petite politique...

Mme Caron: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi...

M. Benoit: Ma question au ministre, M. le Président: Est-ce que le ministre a lu le programme environnemental du Parti libéral du Québec?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Vimont et ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Oui, M. le Président, j'ai lu des passages d'un texte qui m'apparaissait, essentiellement, sans grande substance. Et, comme je l'ai lu en campagne électorale, en 1994, ce n'est pas tellement les promesses qu'on retrouvait dans votre maigre programme, mais surtout le bilan de votre gouvernement qui a motivé mon action et qui m'a amené à me présenter pour faire en sorte que, maintenant, à ce moment-là, vous soyez jugés sur votre bilan plutôt que sur des promesses assez maigres, j'en conviens.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vimont. Alors, comme toutes les interventions sont maintenant closes, le principe du projet de loi n° 132, Loi modifiant la Loi sur les permis de distribution de bière et de boissons gazeuses, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 6 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 129


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Article 6. Alors, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce propose l'adoption du principe du projet de loi n° 129, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement relativement aux navires de croisières internationales. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi?

Mme Dionne-Marsolais: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la députée de Rosemont et ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce, vous avez droit à un temps de parole de 60 minutes. Mme la ministre.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. D'abord, je suis très heureuse, aujourd'hui, en cette Semaine nationale du tourisme, de proposer ce projet de loi. On sait que le tourisme est une industrie qui est très importante pour le Québec et c'est aussi une industrie en plein essor. Laissez-moi vous rappeler peut-être quelques chiffres. En 1995, c'est 20 000 000 de touristes qui ont dépensé 5 000 000 000 $ au Québec. C'est 29 000 entreprises et 100 000 travailleurs dont l'emploi dépend directement de l'activité touristique au Québec. Le tourisme, c'est aussi des revenus fiscaux de plus de 800 000 000 $ pour le gouvernement du Québec et, dans les faits, M. le Président, le tourisme, c'est le sixième produit d'exportation du Québec, juste après l'avionnerie. En fait, l'industrie touristique québécoise, c'est une industrie dynamique dont les recettes imputables au tourisme international ont augmenté de 36 % de 1993 à 1995 et ont représenté, strictement liées au tourisme international, la création de 7 500 emplois.

Mais, évidemment, le tourisme évolue au rythme des grandes destinations internationales. Et le tourisme au Québec fait face à des défis exigeants. La concurrence internationale entre destinations de calibre international est très vive à cause, évidemment, de l'apparition de multiples nouvelles destinations, à cause de la déréglementation aérienne et tout simplement à cause de la forte augmentation de la demande. Une chose est certaine, l'environnement à l'intérieur duquel le Québec évolue change, et change rapidement. Or, ces défis exigent une rapidité d'exécution et une flexibilité administrative au niveau de nos opérations quotidiennes et ça exige surtout une écoute attentive de nos clientèles. L'objectif de ce projet de loi, c'est effectivement de répondre à un marché en émergence qui présente un potentiel extrêmement intéressant pour le Québec.

Essentiellement, l'industrie des croisières internationales génère des retombées qualitatives – et je parlerai des quantitatives tout à l'heure – pour le Québec. Au plan des retombées qualitatives, il faut mentionner l'allongement de la saison touristique. En effet, l'automne est une saison privilégiée pour les croisières sur le Saint-Laurent. D'abord, les touristes, les croisiéristes sont attirés par la beauté des paysages d'automne du Québec, comme beaucoup d'autres touristes internationaux, et la présence des bateaux de croisières internationales sur le Saint-Laurent nous permet d'allonger la saison touristique.

Deuxièmement, le marché des croisières présente un marché de développement de nouveaux marchés touristiques. Et je m'explique. Des études ont démontré que les croisières constituent une très bonne façon, pour la clientèle, d'évaluer une destination future. Un croisiériste satisfait, c'est un client potentiel pour un séjour prolongé. Or, compte tenu du haut taux de satisfaction des croisiéristes sur l'axe Québec–Maritimes–Nouvelle-Angleterre, le développement de l'industrie des croisières constitue un bon moyen de développer ces nouveaux marchés touristiques. Et, de fait, les croisiéristes américains, qui fréquentent le Saint-Laurent à 96 % – puisque 96 % de ces croisiéristes sont des américains – proviennent à 40 % des États de l'ouest des États-Unis, à 24 % des États du sud et à 21 % des États du centre de la côte atlantique, ce qui veut dire une toute nouvelle clientèle en plus de la clientèle naturelle que l'on connaît dans l'Est américain.

Le troisième impact de l'industrie des croisières internationales au Québec, c'est le développement des secteurs portuaires. La présence des bateaux de croisières – on le sait, on le voit à Québec, on le voit à Montréal et j'espère qu'on le verra aussi ailleurs – contribue à l'atmosphère animée des ports du Québec. Lorsqu'un navire est à quai, les promeneurs se font plus nombreux. Ces prestigieux hôtels flottants donnent à la ville un prestige qui charme les touristes comme les habitants de la ville. Cet achalandage accru profite beaucoup aux marchands des secteurs périphériques portuaires, quel que soit le port d'accueil.

Et, enfin, l'industrie des croisières internationales permet une mise en valeur de notre destination. Une mise en valeur, qu'est-ce que ça veut dire? Eh bien, l'inscription des ports de Québec et de Montréal dans le circuit des grandes croisières internationales contribue clairement au prestige de la destination du Québec. Cette inscription confirme que ces villes sont suffisamment attrayantes pour que les plus privilégiés des voyageurs décident de venir les visiter. Les offices du tourisme utilisent régulièrement ce levier de marketing pour mettre en marché leur ville auprès du public touristique international.

Je pense que ces quatre points illustrent l'intérêt de poursuivre le développement de l'industrie des croisières internationales du Québec, ce qui, essentiellement, est l'objectif du projet de loi que nous présentons aujourd'hui. On pourra toujours me dire que le marché des croisières est un produit touristique en croissance, au Québec comme ailleurs. C'est vrai, mais il reste beaucoup à faire parce que le potentiel est énorme.

(12 h 20)

Les croisières internationales ont connu une croissance partout dans le monde, mais particulièrement en Amérique du Nord dans les 20 dernières années, peut-être un peu à cause du vieillissement de la population, peut-être à cause de l'effet de richesse au niveau de l'Amérique. Mais, dans les faits, on comptait, en 1970, 500 000 croisiéristes; en 1992, 22 ans plus tard, l'industrie des croisières a attiré 4 000 000 de passagers. On prévoit que cette clientèle atteindra 8 000 000 de passagers annuellement à la fin de ce siècle, c'est-à-dire dans un peu moins de quatre ans, et que les recettes générées par cette industrie seraient de l'ordre de 50 000 000 000 $ à l'échelle mondiale.

Malgré son potentiel important, le Québec n'a pas pleinement profité des retombées économiques associées à ce produit. En fait, la zone de croisières du Saint-Laurent occupe le douzième rang parmi les destinations de croisières mondiales. Quand on sait que l'Alaska occupe le deuxième rang, il y a de la place pour amélioration.

Les croisières internationales génèrent des retombées économiques très importantes pour le Québec. On les évalue à 10 000 000 $ et des emplois équivalant à 320 années-personnes. Bien sûr, les croisières internationales amènent aussi des bénéfices qui ne sont pas négligeables pour l'industrie touristique québécoise, et je les ai mentionnés tout à l'heure, au niveau de l'allongement de la saison touristique tout le long du fleuve Saint-Laurent.

Malgré ce potentiel énorme, qui est d'ailleurs reconnu de tous – et je suis persuadée que mon collègue, le député de Papineau, attirera notre attention là-dessus – le développement des croisières internationales est affecté de manière très négative, et ce, particulièrement au Québec, à cause des restrictions de la législation canadienne sur l'exploitation des casinos sur les bateaux de croisières internationales. Or, cette situation est un obstacle au développement de la compétitivité du Québec comme destination de croisières internationales. J'ai mentionné tout à l'heure la concurrence vive de toutes les destinations, mais, dans le marché des propriétaires de bateaux de croisières, la concurrence est tout aussi vive et les marges de profit sont très faibles, d'où l'importance de l'exploitation des casinos qui peut faire quelquefois la différence entre la rentabilité d'un circuit et la non-rentabilité d'un autre.

C'est le Code criminel canadien qui interdit, sur l'ensemble de tout le territoire canadien, toute forme de jeux ou de loteries publiques, à l'exception de ceux qui sont exploités ou autorisés par le gouvernement du Québec. En vertu de la loi fédérale, les provinces peuvent accorder une licence d'exploitation de jeux ou de loteries publiques à trois types d'organisation seulement: les établissements de bienfaisance, les organismes religieux et les conseils de foire et d'exposition. Cette législation empêche les bateaux de croisières internationales d'exploiter leurs casinos quand ils sont en eaux canadiennes.

Cet empêchement est plus dommageable pour l'économie du Québec que pour les autres ports du territoire canadien, parce que le Québec, pour accueillir les croisières... les bateaux de croisières doivent descendre le Saint-Laurent et doivent y rester longtemps, trois, quatre jours, contrairement à des ports qui seraient dans les Maritimes ou en Colombie-Britannique, où ils n'ont que 200 milles... ils n'ont qu'à s'éloigner de 200 milles de la côte pour pouvoir ouvrir leurs casinos. Donc, les conditions sont plus difficiles pour le Québec et la législation canadienne fait plus mal. On le sait, ce n'est pas le seul secteur, mais ça en est un qui, pour l'avenir, peut être corrigé.

Après notre élection, Tourisme Québec, à l'automne 1994, a constitué un groupe de travail pour établir un consensus sur la pertinence et surtout sur l'intérêt pour le Québec de permettre l'exploitation des casinos sur les bateaux de croisières internationales. Le projet de loi que nous vous proposons aujourd'hui vise justement à confirmer ce consensus et à donner suite à des demandes de plusieurs intervenants non seulement gouvernementaux, mais de l'industrie; non seulement de l'industrie québécoise, mais internationale.

Nous pensons que le Québec présente une opportunité d'affaires exceptionnelle pour les compagnies de croisières qui devraient profiter des attraits du Saint-Laurent pour développer un marché prometteur, qui n'est ni saturé ni arrivé à maturité quand on le compare à d'autres destinations. Et je vous dirais, pour avoir rencontré les intervenants de cette industrie, des propriétaires de bateaux de croisières depuis notre élection, qu'ils sont séduits par ce qu'offrent les rives du Saint-Laurent et voudraient bien établir ici des circuits complets.

J'aimerais vous parler un peu de la position du Saint-Laurent comme potentiel sur le marché des croisières, parce que je pense que nous qui le voyons tous les jours, surtout à Québec, on oublie la beauté du Saint-Laurent et ce que le Saint-Laurent offre à des touristes internationaux. Le fleuve Saint-Laurent constitue un tronçon clé de la zone de croisières Québec–Maritimes– Nouvelle-Angleterre, laquelle comprend essentiellement pour le Québec deux arrêts, deux itinéraires, celui de Montréal et celui de Québec.

Sur le premier itinéraire, le plus populaire, les navires océaniques de grande taille – on parle de 600 à 1 200 passagers – longent les côtes de l'Atlantique, américaines et les nôtres, pour ensuite, comme je le disais tout à l'heure, remonter le Saint-Laurent. Sur le second, des navires de plus faible taille, plus ou moins 20 passagers, empruntent le réseau intérieur Hudson– Érié avant de descendre le Saint-Laurent, et cette fois, jusqu'au beau pays du Saguenay. C'est ce qui fait que la destination québécoise occupait le douzième rang parmi les destinations de croisières mondiales.

Cette position s'est traduite au cours des dernières années par un trafic annuel moyen de l'ordre de 25 000 à 30 000 passagers pour le port de Montréal; de 32 000 à 35 000 pour le port de Québec. La part du Québec, malgré ces bons chiffres, demeure très modeste si on la compare à d'autres destinations nordiques. Et je dois insister sur les croisières en Alaska, puisque, après les Caraïbes, c'est la deuxième destination privilégiée des Américains. Je ne vois pas pourquoi le Québec ne pourrait pas espérer rejoindre ou, à tout le moins, suivre l'Alaska au rang des grandes destinations des croisières ou des croisiéristes internationaux.

Un mot sur les difficultés et cette interdiction d'exploiter un casino sur les bateaux de croisières lorsque ces derniers sont en eaux canadiennes. C'est un problème que le Québec a partagé avec d'autres provinces canadiennes comme la Colombie-Britannique et les Provinces atlantiques. Plusieurs critiques ont été faites, parce que, dans les faits, c'est un irritant majeur au développement et à la compétitivité du Québec. Cette interdiction découle du Code criminel, qui est de juridiction fédérale, on le sait, et qui prohibe sur l'ensemble du territoire toute forme de jeux ou de loteries publiques, à l'exception, bien sûr, de ceux qui sont exploités ou autorisés par le gouvernement des provinces.

En commercialisant activement la destination du Saint-Laurent et en éliminant l'irritant majeur que représente l'obligation de fermer le casino, les parts du Québec devraient pouvoir atteindre des taux de croissance similaires et je pense supérieurs à l'ensemble de l'industrie. Une étude faite pour le compte de sociétés privées a établi sur 10 ans les retombées économiques de la réforme que nous vous proposons par ce projet de loi à 65 000 000 $ au minimum et pouvant aller jusqu'à 215 000 000 $ au maximum. C'est beaucoup d'argent et cela permettrait de continuer le développement du secteur touristique au Québec.

En éliminant la contrainte que représente l'obligation de fermer le casino lorsqu'un bateau de croisières est dans les eaux canadiennes, la fréquentation par les passagers des ports du Québec devrait pouvoir atteindre des taux de croissance importants. Si l'Alaska occupe le rang qu'il occupe, le Québec peut certainement aspirer à un meilleur rang que le douzième.

(12 h 30)

Nous recevons d'ailleurs de l'ensemble de l'industrie un appui important pour ce projet. J'aimerais mentionner ici le nom de quelques intervenants qui ont écrit aux instances à la fois québécoises et fédérales concernant cette épineuse question de l'exploitation des casinos sur les bateaux de croisières internationales. Bien sûr, l'organisme du SODES a manifesté son appui à ce projet. Le groupe de Montréal, un organisme, Gerry Lou & Associés, qui oeuvre dans le tourisme réceptif et qui travaille beaucoup au niveau des croisières internationales, a aussi manifesté son appui. La Société de promotion économique du Québec métro, la Chambre de commerce et d'industrie du Québec métro, l'Office municipal de développement économique de Québec, de la ville de Québec, le port de Québec, l'Office du tourisme et des congrès de la Communauté urbaine de Québec, la Communauté urbaine de Québec elle-même et, enfin, le Comité sur les croisières internationales du Saint-Laurent.

D'autres intervenants sont directement concernés par cette problématique, et je les mentionne en groupe: toutes les agences maritimes québécoises, les associations d'armateurs et différentes associations intéressées par le développement touristique à Montréal, autant au niveau des aéroports que des lignes maritimes. On se rappellera, l'été dernier, quand le Holland-America Line avait tenu une très grande conférence de presse, à Québec, pour justement sensibiliser la ministre et le gouvernement à l'importance du potentiel que représente Québec dans le circuit des grandes croisières internationales.

En terminant, M. le Président, j'aimerais souligner, pour le député de Papineau et l'opposition, que je compte bien sur leur appui pour ce projet de loi, puisque, le 19 avril 1996, le ministre de l'Industrie du Canada, mon homologue fédéral, m'a envoyé une très belle lettre, en réponse à la mienne, en indiquant qu'il appuyait ce projet, qu'il allait faire des démarches à son collègue de la Justice. Puisque le fédéral nous appuie dans notre démarche, au moins sur le plan industriel, j'espère bien que je pourrai compter sur l'appui de l'opposition et que ce projet de loi sera adopté. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Rosemont et ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce. J'accorde maintenant la parole au député de Papineau et critique officiel de l'opposition en matière de tourisme. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Je dois mentionner à Mme la ministre que c'est assez rare dans cette Chambre qu'on entend les porte-parole du gouvernement nous dire que, oui, ce n'est pas la faute du fédéral. Alors, ça me fait plaisir, étant un fédéraliste, de vous dire qu'il y a quelques points qu'on aura sûrement la chance de discuter en commission parlementaire. Mais il est très clair dans notre esprit que le tourisme, au Québec, nous devons travailler ensemble pour le développer, et un point avec ce projet de loi n° 129, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement relativement aux navires de croisières internationales.

Comme Mme la ministre l'a mentionné tantôt, M. le Président, la Semaine nationale du tourisme au Québec, qui en est à la dixième édition, met en évidence une industrie importante au Québec et qui, plus que jamais, constitue un moteur de développement économique. Ayant pour thème «Le défi: la qualité du service», cette semaine prendra fin le 12 mai prochain. Comme à chaque année, la tenue de cette semaine coïncide avec la publication d'un sondage sur les intentions des Québécois et des Québécoises du lieu de leurs vacances. Une fois de plus, en 1996, et depuis quatre ans, je dois le mentionner, M. le Président... Les efforts consentis par le gouvernement au cours des dernières années portent aujourd'hui fruits. En effet, depuis quatre ans, le pourcentage des gens manifestant l'intention de prendre leurs vacances au Québec n'a cessé de croître, et Mme la ministre l'a mentionné tantôt.

Il est vrai que le potentiel touristique du Québec est indiscutable et le bilan des dernières années en fait foi. Toutefois, pour poursuivre sur cette lancée, il est primordial de maintenir la qualité de nos services touristiques en plus d'examiner l'impact des nouvelles tendances internationales sur l'offre et la demande touristique au Québec. Il ne faut pas oublier que l'apport des visiteurs étrangers de passage chez nous, qu'ils viennent des États-Unis, de la France ou d'ailleurs, contribue à notre développement technique, mais aussi économique.

Nous voilà donc, M. le Président, cinq mois plus tard, réunis pour discuter de cette pièce législative de deux articles qui a été déposée le 14 décembre 1995 – en passant, le jour de ma fête. En conséquence, vous comprendrez, M. le Président, que mes remarques seront très brèves, et ce, en raison de la taille du projet de loi, mais surtout en raison de ses effets.

Et, tantôt, Mme la ministre mentionnait les visites du port de Québec et, dans Le Soleil du 26 avril, on parlait... Et je dois me joindre à Mme la ministre sur le fait que, oui, effectivement, nous devons changer cette loi pour attirer les gens de l'extérieur et même des Québécois, et peut-être inciter... On cherche toujours des moyens pour avoir du développement économique au Québec, la création d'emplois. Peut-être qu'on pourrait aider, inciter des Québécois, des Canadiens à investir dans des... à acheter des bateaux de croisières pour développer nous-mêmes, sur le Saint-Laurent, des attraits touristiques. Je suis un qui dit: On a... Je n'ai jamais pu... J'ai des amis qui ont pris le bateau pour aller à Saint-Pierre-et-Miquelon, si je ne me trompe pas, et c'est formidable. Alors, pourquoi nous, les Québécois et les Canadiens, ne pourrions-nous pas nous regrouper et avoir nos propres bateaux sur le Saint-Laurent pour visiter, sur nos eaux, nos différents attraits touristiques qu'on pourrait ensemble...

Mais il y a une diminution quand même de 25 %, dans l'année qui vient, à Québec, au port de Québec, pour plusieurs raisons: des compagnies qui ont fait faillite, des compagnies qui ont eu des accidents, un feu, etc. Alors, je pense qu'il y a sûrement un travail à faire chez nous pour le développement des croisières. J'espère qu'on pourra peut-être ensemble ou les hommes d'affaires, ou peut-être au sommet du mois de novembre, que ce serait... Les femmes d'affaires aussi. Excusez. Vous avez absolument raison. On pourrait peut-être devenir partenaires, Mme la ministre, ensemble pour acheter un bateau pour développer le tourisme au Québec.

Je vous le dis, peut-être qu'au sommet économique... Et, très sérieusement, il devrait y avoir un volet touristique, un volet qui inciterait nos gens du Québec à investir du côté des croisières. Je pense qu'il y a vraiment... Et ce n'est pas obligé d'être des bateaux de 1 200 et de 600. On peut avoir même des bateaux de 50, 60, 100 qui aideraient à développer notre propre tourisme, puis nos Québécois, les Québécois et les Québécoises eux-mêmes, à visiter le Québec, visiter le Canada, ce qu'on ne fait pas. On cherche toujours à aller peut-être trop aux États-Unis ou ailleurs sans commencer par visiter, chez nous, tous les attraits qu'on a.

Alors, M. le Président, il faut comprendre aussi que ces modifications proposées dans ce projet de loi ne prendront effet qu'au moment fixé par le gouvernement, lequel ne pourrait être antérieur à la date d'entrée en vigueur des dispositions législatives modifiant le Code criminel et visant à permettre l'exploitation des systèmes de loteries sur les navires de croisières internationales.

En un mot, M. le Président, le gouvernement veut donner l'illusion qu'il est au travail, puisque, dans les faits, aucune mesure concrète ne découlera de l'adoption de cette législation. Pourtant, en matière de tourisme, le gouvernement aurait tellement mieux à faire, lorsqu'on pense à la fermeture du bureau du Québec à Paris. Hier, j'ai posé la question à Mme la ministre. Je n'ai pas eu la chance de poser mon additionnelle. Mais pourquoi ne pas se joindre à l'ambassade du Canada à Paris pour pouvoir donner les informations? C'est un ajout. Une ligne 1-800, je ne pense pas, ne pourra donner le service que la maison du tourisme du Québec donnait antérieurement: au-delà de 50 000 demandes par année, de vos propres paroles en commission parlementaire. Alors, je pense qu'on devrait penser sérieusement à avoir un ajout et avoir une entente, si vous voulez, avec l'ambassade du Canada, pour pouvoir donner le service pour inviter nos amis les Français à venir nous visiter au Québec. Je pense que c'est assez important qu'on ait une discussion. Et, en commission, on aura sûrement la chance de parler de ce volet-là.

Je limiterai, M. le Président, mes brèves remarques en concluant que nous sommes, à ce moment-ci, pour le principe de ce projet de loi, car il pourrait apporter au Québec un attrait touristique supplémentaire. Lorsque nous nous retrouverons en commission parlementaire, j'indique à la ministre que j'aurai, bien sûr, certaines questions à lui poser.

(12 h 40)

Pour terminer, M. le Président, je voudrais en profiter pour souhaiter, donc, à tous les Québécois et les Québécoises une excellente Semaine nationale du tourisme. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Papineau et critique officiel de l'opposition en matière de tourisme. Alors, s'il n'y a pas d'autres intervenants, Mme la ministre, vous avez droit, conformément à notre règlement, à un droit de réplique de 20 minutes. Alors, Mme la députée de Rosemont et ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. J'aimerais tout simplement clore ces échanges sur une note peut-être plus sereine. D'abord, quand le député de Papineau indique que le fédéral n'est pas en cause, je lui rappelle que c'est la législation fédérale qui fait que nous devons passer ce projet de loi. Donc, c'est malheureusement la faute du fédéral. Toutefois, il est prêt à reconnaître son erreur et à apporter les correctifs, du moins au dire de mon homologue fédéral. Alors, c'est une bonne nouvelle pour nous. Ça veut dire que, quand on regarde le développement économique du Québec, à l'occasion, on a une oreille attentive. Espérons que cette oreille attentive se maintiendra comme cela, auprès du ministre de la Justice du Canada, puisqu'il s'agit d'une loi qui relève du ministre de la Justice.

Je dois aussi dire que c'est faux de prétendre que ce projet de loi n'aura pas d'impact immédiat. Le dossier des croisières n'est pas un dossier nouveau pour le gouvernement du Québec; c'est un dossier qui est là depuis à peu près 10 ans. Et, durant la période où le Parti libéral a été au pouvoir, il ne s'est pas passé beaucoup de choses. Il a fallu que nous soyons élus pour faire une concertation et faire l'unité de pensée chez nous. Il a fallu que j'écrive, en collaboration avec mon collègue de la Justice, en février 1995, pour demander l'appui de mon homologue fédéral. Et ce n'est que presque un an plus tard, en avril de cette année, que mon homologue me répondait. Ça fait long pour répondre à une lettre pour demander strictement d'appuyer une démarche. Quand on parle de flexibilité, ce n'est pas ce qu'il y a de plus flexible.

Et, enfin, je pense que le député de Papineau n'a pas compris ma réponse, hier, concernant nos activités touristiques en France. Nos activités touristiques en France se maintiennent. La Délégation générale du Québec à Paris, elle est ouverte. Et j'ai même indiqué que nous allions avoir un conseiller responsable de la promotion des investissements, qui va s'occuper des investissements industriels et touristiques. Donc, c'est une nouveauté, M. le Président. L'activité touristique demeure et nous allons, en plus – parce que c'est ça, le défi – l'étendre à tous les agents de voyages français qui, maintenant, peuvent vendre le Québec à leurs clients. Et c'est l'objectif que nous poursuivons, M. le Président, dans le redéploiement de nos efforts sur le marché français. Nous avons maintenant cinq partenaires qui développent le marché français pour que, justement, plus de touristes français visitent le Québec. Et, si nous pouvons développer le marché des croisières, je suis persuadé que nous aurons aussi beaucoup d'autres touristes français, qui sont fort amateurs de croisières internationales, qui viendront découvrir le Québec par la voie des eaux.

Alors, je vous remercie, M. le Président, et j'espère que nous pourrons donner suite à ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Rosemont et ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Mise aux voix

Alors, les interventions étant terminées, le principe du projet de loi n° 129, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement relativement aux navires de croisières internationales, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à cet après-midi, 15 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement sur cette motion de suspension jusqu'à 15 heures cet après-midi? Consentement. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, conformément aux directives qui vous ont été adressées, de permettre à la présidence de bien vouloir se retirer.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise à 15 h 5)

Le Président: Nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Merci. Veuillez vous asseoir.


Présence de parlementaires de la Communauté française de Belgique

J'ai d'abord le très grand plaisir de souligner la présence dans les tribunes aujourd'hui d'une délégation de parlementaires de la Communauté française de Belgique participant à la treizième session du comité mixte de l'Assemblée nationale du Québec et de la Communauté française de Belgique. La délégation est présidée par M. Yvon Biefnot, que plusieurs d'entre vous connaissez, qui est un vieil ami du Québec. M. Biefnot est accompagné de M. Gil Gilles, de M. Jean-Pierre Perdieu, de M. Étienne Knoops et de M. Daniel Marchant, cet après-midi.

Alors, le président a été témoin et même participant des travaux du comité mixte, et je pense que les membres de l'Assemblée auront prochainement un rapport des travaux qui ont été effectués par nos collègues, tant du côté de la Communauté française de Belgique que du côté de l'Assemblée nationale.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article c de notre feuilleton.


Projet de loi n° 12

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives.

M. le ministre des Transports.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, ce projet de loi modifie le Code de la sécurité routière afin principalement de prévoir, dans le but de mieux assurer la protection et la sécurité du public sur les routes, de nouvelles règles concernant l'accès graduel à la conduite des véhicules routiers, la conduite avec capacités affaiblies et la conduite sans permis ou lorsqu'une personne est sous le coup d'une sanction du droit de conduire.

Selon les nouvelles règles concernant l'accès graduel à la conduite des véhicules routiers, le titulaire d'un permis d'apprenti-conducteur devra, pour conduire un véhicule routier, être assisté d'une personne titulaire d'un permis de conduire valide depuis au moins deux ans et en état de conduire. De plus, l'obligation de détenir pendant une période de 24 mois un permis probatoire ne s'appliquera qu'à l'égard des personnes âgées de moins de 25 ans.

Par ailleurs, ce projet de loi abroge les dispositions relatives à l'obligation de suivre des cours de conduite, mais prévoit que la durée du permis d'apprenti-conducteur sera réduite pour les personnes ayant volontairement suivi un tel cours dans une école reconnue.

En ce qui concerne la conduite avec capacités affaiblies, ce projet de loi introduit une suspension administrative immédiate du permis à l'égard du titulaire d'un permis d'apprenti-conducteur ou d'un permis probatoire lorsqu'il y a présence d'alcool dans son organisme et à l'égard de tout autre conducteur ayant une alcoolémie supérieure à 80 mg d'alcool par 100 ml de sang. Cette suspension est d'une durée de 15 ou 30 jours, selon qu'il s'agit d'une première suspension ou d'une récidive. En outre, ce projet prévoit, dans les cas d'infractions criminelles relatives à la conduite en état d'ébriété, la possibilité d'obtenir un permis restreint lorsque la moitié de la période de révocation du permis est écoulée. Le permis restreint autorise alors la conduite d'un véhicule routier muni d'un dispositif détectant la présence d'alcool dans le sang du conducteur et assurant alors le blocage de l'allumage du véhicule.

Dans les cas de conduite sans permis ou lorsqu'une personne est sous le coup d'une sanction du droit de conduire, ce projet introduit de nouvelles mesures permettant la saisie de tout véhicule routier, que celui-ci appartienne ou non au conducteur. La saisie est d'une durée de 30 jours.

La Société de l'assurance automobile du Québec est autorisée à communiquer, sur demande, des renseignements sur la validité du permis de conduire d'une personne.

Ce projet de loi prévoit, en outre, la mise sur pied d'un programme d'entretien préventif pouvant être substitué au programme de vérification mécanique obligatoire des véhicules routiers et supprime, dans certains cas, les avertissements de 48 heures.

Parmi les autres mesures proposées, ce projet de loi interdit dorénavant tout recours contre la caution d'un commerçant de véhicules routiers à l'égard du cessionnaire d'un contrat de vente d'un véhicule comportant une réserve de propriété et supprime le seuil actuel de 500 $ au-delà duquel le rapport d'accident est obligatoire, lequel sera remplacé par des critères reliés à la sécurité routière déterminés par règlement.

Enfin, ce projet contient des dispositions de nature transitoire et des modifications de concordance.

(15 h 10)


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: À deux mains.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre des Transports.


Rapport d'activité de la Société de l'assurance automobile du Québec ainsi que du contrôle du transport routier

M. Brassard: Oui, M. le Président. Je voudrais déposer le rapport d'activité 1995 de la Société de l'assurance automobile du Québec ainsi que du contrôle du transport routier.

Le Président: Ce document est déposé.


Rapport de mission des réunions du printemps du comité de direction et des groupes de travail du Council of State Governments

Je dépose, de mon côté, le rapport de mission concernant les réunions du comité de direction et des groupes de travail du Council of State Governments tenues à Portland, Oregon, du 18 au 21 avril dernier. Cette mission était sous la responsabilité de M. Robert Kieffer, député de Groulx.

Dépôt de rapports de commissions.


Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions, M. le député de Montmorency.


Surseoir à l'application de la surtaxe de 30 $ sur les droits d'immatriculation pour les résidents de Sainte-Famille, île d'Orléans

M. Filion: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 143 pétitionnaires de la municipalité de Sainte-Famille, île d'Orléans, comté de Montmorency.

Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le taux de navettage retenu par le ministre des Affaires municipales comme critère d'application de la surtaxe de 30 $ aux droits d'immatriculation est un concept injuste et flou basé sur un échantillonnage statistique fait aux 10 ans;

«Considérant l'incompréhension des citoyens face à l'application de cette surtaxe aux droits d'immatriculation;

«Considérant les nombreuses plaintes de citoyens à chaque semaine depuis l'avènement de cette surtaxe de 30 $;

«Considérant la promesse faite par l'ancien premier ministre, M. Parizeau, lors de la campagne électorale d'août 1991 dans le comté de Montmorency à l'effet que cette surtaxe injuste serait abolie;

«Considérant que rien n'a été corrigé depuis l'élection du gouvernement péquiste;

«Considérant la rencontre infructueuse du 4 juillet 1995 avec l'ex-ministre des Transports, M. Jacques Léonard;»

L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre des Transports afin qu'il sursoie à l'application injuste de la surtaxe de 30 $ sur les droits d'immatriculation pour les résidents de Sainte-Famille, île d'Orléans.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Je vous avise qu'après la période des questions et des réponses orales M. le ministre de la Justice répondra à une question posée, hier, par M. le député de Chomedey, concernant les dépenses effectuées par le juge en chef Louis-Charles Fournier.


Questions et réponses orales

Nous en arrivons maintenant à la période de questions et réponses orales. Mme la députée de Saint-François.


Projet de loi sur l'équité salariale

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. M. le Président, avant le référendum et lors de la marche des femmes «Du pain et des roses», le gouvernement du Parti québécois s'était engagé à donner aux femmes une loi sur l'équité salariale. Alors, on se souviendra que même l'ex-premier ministre Parizeau l'avait inscrit dans son testament politique et que le premier ministre actuel a réitéré cet engagement, lors du discours du trône et lors des crédits du Conseil exécutif. Alors, M. le Président, on se souviendra aussi que l'avant-projet de loi qui avait été déposé par le gouvernement avait mécontenté à peu près tous les intervenants et que la commission parlementaire n'avait pu, à l'époque, dégager un consensus sur l'équité salariale.

On constate, malheureusement, encore aujourd'hui, qu'il n'y a pas de consensus et qu'il existe toujours une dissension majeure entre les patrons, qui favorisent une démarche de relativité salariale, et entre la coalition des groupes de femmes, qui exige l'équité salariale. Et je doute, M. le Président, qu'il y ait même divergence au sein du Conseil des ministres actuel.

Ma question: Peut-on savoir, M. le Président, de la ministre qui siège au Conseil des ministres aujourd'hui, quelle recommandation elle a faite à ses collègues, celle de l'équité salariale ou celle des relativités salariales?

Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

Mme Harel: Alors, M. le Président, la marque de commerce du gouvernement du Parti québécois est justement de respecter ses engagements, et je rappelle...

Des voix: Bravo!

Mme Harel: Alors, M. le Président, le premier ministre l'a lui-même rappelé au moment du discours inaugural, le 25 mars dernier, cet engagement à déposer un projet de loi sur l'équité salariale pour le 15 mai. Alors, nous en discutons, M. le Président, mes collègues et moi-même, avec la collaboration, également, de mon adjointe parlementaire, Mme la députée de Sherbrooke, qui a présidé un comité technique qui, suite à la commission parlementaire qui s'est tenue sur l'avant-projet de loi, a réuni des représentants d'associations patronales, d'associations syndicales et de groupes de femmes pour favoriser le dialogue et l'échange sur cet objectif que nous visons tous, je crois, comme société, d'atteindre l'équité salariale entre hommes et femmes.

Le Président: Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, la ministre peut-elle s'engager à déposer l'étude d'impact qu'elle a ou qu'elle aurait dû commander, à défaut de quoi, l'analyse du Conseil du trésor?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, je crois bien que nous nous entendons tous dans cette Assemblée pour considérer que l'écart salarial de 30 % entre les hommes et les femmes, dans notre société, n'a pas de bon sens. Alors, nous avons déjà, depuis 20 ans, dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, une disposition qui prévoit l'équité salariale mais qui n'a pas trouvé matière à s'appliquer parce qu'il n'y avait pas suffisamment de dispositifs pour y arriver. Pourtant il y avait un recours qui était fondé sur les plaintes, mais on a vu que ces recours étaient très onéreux, très lourds pour celles qui voulaient s'en prévaloir. Alors, ce que nous cherchons présentement, c'est une loi d'application qui va permettre, de la façon la plus efficace possible, de corriger ces iniquités salariales. Et, M. le Président, je comprends que les études que nous avons sont celles qui ont été examinées attentivement au moment même de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi.

Le Président: Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Étant donné, M. le Président, qu'on n'a rien retrouvé en termes de crédits dans les derniers crédits qui ont été déposés, en termes de sommes qui ont été déposées dans les derniers crédits, est-ce que la ministre a fait des recommandations auprès de son collègue des Finances pour s'assurer que, si elle va de l'avant avec un tel projet, elle aura les sommes nécessaires non seulement pour l'application d'une telle loi ou d'une loi quelconque, mais, en même temps aussi, les sommes nécessaires pour tout écart salarial?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, j'allais dire à Mme la députée de Saint-François que je la remercie de sa question. Ça ne peut évidemment que bien nous faire comprendre que, pour rendre efficace l'application d'un tel principe d'équité, il faut effectivement des ressources, et c'est plus auprès de mon collègue, le président du Conseil du trésor, que j'ai obtenu la collaboration qu'auprès du ministre des Finances.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Est-ce que la ministre pourrait nous dire quelle est la position du président du Conseil du trésor sur le sujet?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, nous allons justement en discuter aujourd'hui même à l'occasion de ce Conseil des ministres qui aura lieu immédiatement après la période de questions, et j'ai donc une proposition qui, je souhaite, sera acceptée.

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier, en principale.


Diminution de l'aide financière pour les enfants en service de garde

M. Kelley: Merci, M. le Président. Mercredi dernier, la ministre de l'Éducation a caché dans la Gazette officielle une autre mauvaise nouvelle pour les familles québécoises: l'aide finan cière accordée pour les enfants en service de garde sera coupée de 15 000 000 $, ce qui s'ajoute aux compressions déjà annoncées pour les services de garde en milieu scolaire. Pour une famille avec un revenu brut de 30 000 $, cette nouvelle compression va augmenter les frais de garde de 780 $ par année par enfant en garderie. Encore une fois, la ministre va chercher l'argent dans les poches des familles à faibles revenus.

Au moment où le gouvernement de l'Ontario augmente le soutien pour les gardes d'enfants, malgré les compressions budgétaires importantes, comment est-ce que la ministre peut défendre son désengagement envers les familles québécoises?

(15 h 20)

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Évidemment, il y a différentes façons de cacher les choses, mais, en les publiant dans la Gazette officielle , je ne crois pas qu'il s'agissait de cacher les choses, au contraire. Nous avons effectivement publié un projet de règlement qui concerne l'aide aux familles qui utilisent les services de garde réguliers, soit ce qu'on appelle plus généralement l'exonération aux familles. J'avais, à cet égard, déjà rencontré des regroupements de garderies pour leur en faire part, discuter avec ces regroupements de la possibilité de maintenir la base d'aide financière aux garderies elles-mêmes, et, pour la phase de transition dans laquelle nous sommes, pour respecter l'enveloppe budgétaire qui m'a été impartie, j'avais effectivement à demander des efforts dans l'ensemble du réseau.

Vous savez que je l'ai fait du côté du scolaire. Je le fais aussi d'une façon comparable et équitable, malgré que je ne croie pas que ce soit souhaitable, mais cependant j'espère être capable de corriger la situation dans un temps relativement court. Mais, oui, il y a un effort qui est demandé du côté des services de garde réguliers, comme on le fait d'ailleurs du côté de la garde en milieu scolaire.

Je termine, M. le Président, en vous disant cependant qu'il s'agit, bien sûr, d'une prépublication du règlement. Je recevrai donc les commentaires quant à la hauteur de l'effort demandé et quant à la variation qui pourrait toucher différemment les familles concernées par cet effort budgétaire.

Le Président: M. le député.

M. Kelley: Comment est-ce que la ministre peut concilier cette réponse avec la réponse de la semaine passée où elle a dit qu'on va privilégier l'aide directe aux parents?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Je reviens maintenant à la forme d'aide qui est apportée aux parents. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que le parent pourra recevoir, s'il est, par exemple, dans une mesure de réinsertion, une compensation. S'il est bénéficiaire, par exemple, de l'aide sociale et impliqué dans une mesure de réinsertion, il ne se verra pas du tout touché, puisqu'il aura une compensation par le bénéfice de la sécurité du revenu.

Dans le cas des autres parents, ils peuvent utiliser le crédit d'impôt remboursable, qui permet, à ce moment-là, de compenser l'aide qui n'est pas immédiatement versée mais qui le sera selon cette formule. Donc, dans ce sens, l'aide directe aux parents est préservée. Cependant, elle n'est pas versée de la même façon. Je conviens qu'il est préférable que nous imaginions une formule qui va continuer à aider directement les parents d'une façon plus significative et autrement qu'on le fait maintenant, et c'est le mandat qu'a reçu l'Office des services de garde à cette fin, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Kelley: Encore une fois, monsieur... Pour les parents du Québec, j'aimerais savoir comment la ministre, la semaine passée, pouvait répondre: On va abandonner les crédits d'impôt remboursables pour privilégier l'aide directe aux parents semaine après semaine, alors que cette semaine la réponse est complètement le contraire? Comment est-ce qu'on peut justifier ça?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: La réponse n'est pas contraire. Cependant, on pose des gestes successivement dans le temps, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: En complémentaire ou en principale?

Mme Frulla: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée.

Mme Frulla: Au ministre de Montréal: Est-ce que celui-ci est partie prenante de cette décision-là, compte tenu que les familles de la ville de Montréal comptent pour 23,4 % des familles pauvres du Québec alors qu'elles ne représentent que 13,6 % de l'ensemble des familles? Est-ce qu'il est partie prenante de la décision de la ministre de l'Éducation?

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Écoutez, je fais partie d'un cabinet qui a la solidarité ministérielle. Il y a des domaines qui sont plus pointus, celui-là en est un. Ça ne veut pas dire que je m'en désintéresse, mais je crois que, dans les contraintes qu'elle a à rencontrer, ma collègue de l'Éducation fait du mieux qu'elle peut pour aider au maximum les enfants et les parents, non seulement de l'île de Montréal, mais de la région métropolitaine.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Fusion de municipalités

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Lors de l'étude des crédits, nous apprenions que le programme incitatif au regroupement était majoré, pour 1996-1997, de 2 000 000 $, passant de 3 700 000 $ à 5 700 000 $. Ce gouvernement, qui, depuis septembre 1994, nous vante sans cesse les bienfaits de la décentralisation et des regroupements, a entendu, samedi dernier, au Congrès de l'Union des municipalités du Québec, l'ex-président de la commission d'étude sur les municipalités et l'ex-premier ministre Jacques Parizeau déclarer, et je le cite: «Le regroupement des municipalités n'entraîne aucune économie d'échelle et ne sert, en réalité, que pour les commodités du gouvernement.» Fin de la citation.

M. le Président, comment le premier ministre concilie-t-il le discours du Parti québécois, depuis deux ans, sur le lien qui existe entre les regroupements et la décentralisation, et les propos tenus par l'ex-premier ministre du Québec qui vient tout juste de quitter son poste?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement mène une politique qui favorise les fusions municipales et surtout des petites municipalités. Nous considérons que c'est une politique qui vise à assurer la cohésion dans l'action, puisque le morcellement des interlocuteurs, surtout dans le cas des petites municipalités, n'aide pas à mettre en place des décisions concrètes et efficaces. D'autant plus que cette politique est de nature essentiellement volontaire, qu'elle est exclusivement volontaire, je dirais, et qu'il appartient à celles de ces municipalités qui estiment devoir le faire, d'entrer dans la voie de cette politique.

Quant à M. Parizeau, c'est un citoyen qui a le droit d'exprimer ses opinions. Je ne pense pas qu'on lui en voudra, lui qui a été un conseiller éminent des municipalités, de revenir sur des questions qui lui tiennent à coeur.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le premier ministre pourrait répondre à la question et nous dire s'il est d'accord avec le citoyen Parizeau lorsqu'il dit qu'il n'y a aucune économie d'échelle et que c'est des inventions du gouvernement pour ses propres commodités?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Alors, M. le Président, ce qui nous a été indiqué et rappelé, c'est qu'après 10 années d'exercice la commission sur l'avenir des municipalités avait identifié, en 1986, qu'il n'y avait pas d'économies significatives, donc, au niveau des économies d'échelle, pour un certain nombre de services.

Cependant, depuis 1990, 97 municipalités, à travers le Québec, ont pris cette décision dans le sens que le premier ministre vient d'indiquer, de façon volontaire, de se renforcer, d'avoir une seule unité municipale pour leur communauté de base et, pour 83 % de ces municipalités, cela a signifié une réduction du taux de taxe, pour 83 % de ces 97 municipalités, ce qui indique donc, M. le Président...

Des voix: ...

M. Trudel: ...ce qui indique donc, M. le Président, que, lorsque des communautés désirent se réunifier, se consolider autour d'un seul gouvernement, c'est d'abord une décision de se renforcer, c'est d'abord une décision pour un partage équitable des coûts. Et, dans une majorité de cas, cela se traduit par des économies au niveau des contribuables, au niveau des taxes municipales. Mais il y a également beaucoup d'autres raisons, c'est-à-dire la capacité de prise en charge et de développement de la communauté qui doit être à la base de la prise de décision par ces communautés municipales concernées.

(15 h 30)

Le Président: En principale, M. le député de Saint-Laurent.


Expertise du Vérificateur général sur la question de l'abandon, par Hydro-Québec, de son programme d'économie d'énergie

M. Cherry: Merci, M. le Président. Lundi dernier, la Société Radio-Canada informait la population au sujet de l'abandon, par Hydro-Québec, de son programme d'économie d'énergie. Elle faisait la liste des coûts impliqués et, dans un premier temps, informait que, pour acheter la paix avec les sous-traitants, ça a entraîné un déboursé de 400 000 $, également une poursuite avec la firme National pour 1 200 000 $, également une poursuite de la firme ConversAction qui, elle, gérait le programme, une poursuite de 1 500 000 $. La même émission nous informait également que l'inventaire de thermostats non utilisés équivalait à 11 000 000 $.

Le ministre se souviendra que, lors de la parution d'Hydro-Québec en commission parlementaire, les 27 et 28 février dernier, les membres de la commission ont posé des questions sur la décision d'Hydro-Québec d'abandonner le projet d'économie d'énergie et qu'aucune des informations révélées par Radio-Canada ne nous a été communiquée par les responsables d'Hydro-Québec en commission parlementaire. Donc, ces informations-là, décision prise en janvier 1995, ne nous ont pas été révélées en février 1996.

Ma question au ministre: À quel moment le ministre des Ressources naturelles entend-il faire appel à l'expertise du Vérificateur général dans les affaires d'Hydro-Québec?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai demandé conseil à nos procureurs pour voir exactement, dans un premier temps, s'il était normal qu'un ministre puisse s'adresser directement au Vérificateur pour aller vérifier des points très pointus dans une vérification. On me dit qu'il n'y a aucun problème à le faire, en autant, bien sûr, qu'on identifie. Si on dit que le Vérificateur général a accès de façon complète et totale, il s'agirait, à ce moment-là, de déboursés extrêmes pour le Vérificateur dans une société d'État avec autant d'envergure qu'Hydro-Québec et ça demanderait des budgets additionnels pour le Vérificateur. Donc, fort de ces renseignements-là, je rencontrerai le Vérificateur personnellement en lui donnant des cibles bien précises.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Cherry: En additionnelle, M. le Président: Est-ce que le ministre peut convenir qu'un président du conseil d'administration d'Hydro à temps partiel payé 150 000 $ par année, mais qui, lui, bien sûr, est à temps partiel, mais il dépense à plein temps...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Est-ce que le ministre ne juge pas plutôt que ce dont Hydro-Québec a besoin, c'est d'un président à plein temps qui est capable de prendre en main le fonctionnement d'Hydro-Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, nous avons demandé à Hydro-Québec, et ce, par décret, en plus, gouvernemental, de procéder à un plan de redressement bien précis, avec des cibles. Nous avons créé un comité avec des gens, je pense, de haut calibre en la personne de M. Henri-Paul Rousseau, de la Banque La Laurentienne, qui a accepté de présider ce comité-là, accompagné du sous-ministre Geoffrion, qui est sous-ministre au Conseil du trésor, ainsi que de M. Rhéaume, qui est sous-ministre des Finances, et qui sont à travailler présentement sur un plan de redressement d'Hydro. Ce qui sort quotidiennement, si ça ose vous fatiguer, je «peux-tu» vous dire que ça me fatigue doublement? Et vous aurez remarqué que ces événements-là tirent leur origine d'il y a à peu près trois ou quatre ans.

Le Président: M. le député.

M. Cherry: M. le Président, comme le ministre parle des origines, peut-il nous dire qui a nommé Yvon Martineau président à temps partiel d'Hydro-Québec?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, M. Martineau a effectivement été nommé il y a moins d'un an. Cependant, je dois vous dire ceci: tous les événements qui sont sortis, que ce soit dans la réserve La Vérendrye, que ce soit le voyage à Tokyo autorisé préalablement, que ce soit le délégué à Québec qui sort, ce matin, dans une société d'État en France, que ce soient tous ces événements-là, ils tirent leur origine de 1993, 1992, 1991, et, à ce que je sache, je n'ose même pas vous demander qui était au pouvoir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Sauvé, en principale.


Obligation alimentaire des grands-parents à l'égard de leurs petits-enfants

M. Parent: Merci, M. le Président. L'article 585 du Code civil, bien qu'il soit légal, est immoral à certains égards. Ses effets sont désastreux non seulement pour le fardeau financier imposé aux grands-parents, mais surtout pour la santé physique et psychologique. On apprenait dernièrement qu'un grand-parent poursuivi avait attenté à ses jours et qu'un autre s'était vu réclamer 20 000 $ sur une somme de 26 000 $ qui sont ses revenus financiers pour lui et son épouse; il a dû être hospitalisé à l'Enfant-Jésus, victime d'une crise cardiaque.

Permettez-moi, M. le Président, de vous faire reconnaître l'intensité de ce problème-là que vivent des grands-parents. Cette personne-là qui a subi une crise cardiaque, qui a été hospitalisée, disait – c'est un cri du coeur qu'il lançait, que cet homme a lancé au ministre de la Justice – et je le cite: «Que le ministre de la Justice Paul Bégin mette ses culottes et qu'il change cette maudite loi de fou avant de nous faire tous crever.» Et je ferme les guillemets.

Alors, M. le Président, au ministre. C'est ma quatrième intervention, M. le Président, auprès du ministre concernant l'article 585, puisque le ministre de la Justice a trouvé comme seule réponse au cri de désespoir qu'il y aurait une décision prise aujourd'hui au Conseil des ministres: Il est 15 h 35 aujourd'hui, M. le Président, est-ce que le ministre peut donner une réponse aux députés de cette Chambre? Qu'est-ce qu'il entend faire avec l'article 585 du Code civil?

Une voix: C'est ça.

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, je voudrais d'abord dire que, s'il y avait un lien entre l'hospitalisation et l'attente d'une décision judiciaire, je dois dire que j'ai beaucoup de compassion pour la personne en question et que je ne voudrais pas que les gens subissent des effets de ce genre-là.

Compte tenu de l'importance de la question, quand elle a été soulevée, vous vous rappellerez, j'ai déclaré en cette Chambre que j'entamais une procédure de consultation à travers tout le Québec parce qu'il m'apparaissait que ce problème de l'article 585 n'était pas simplement de modifier un article, mais qu'il posait une question de société et que je voulais entendre toutes les personnes à cet égard. Et j'ai entrepris cette consultation à travers le Québec. Et je dois souligner que j'avais invité les députés à participer, et ça, des deux côtés de la Chambre, à ces consultations, et des députés de l'opposition, la députée de Jean-Talon, le député de Hull ont participé et ont entendu les gens et ont pu voir que c'était un problème extrêmement complexe et qu'il valait la peine de faire le tour du Québec.

Ceci étant fait, j'ai dit et je le redéclare que j'ai fait une recommandation au Conseil des ministres et que j'espère bien que le Conseil des ministres pourra se pencher sur cette question aujourd'hui. Et j'ai également dit qu'avant le 15 mai il y aurait dépôt d'un projet de loi en cette Chambre, et je pense que ce sera déposé avant le 15 mai. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Laurier-Dorion.


Langue de documents d'information destinés aux néo-Québécois

M. Sirros: Merci, M. le Président. Hier, en commission parlementaire, le député de Vachon et adjoint parlementaire du premier ministre a déploré le fait que le Directeur général des élections avait publié de l'information relative au processus électoral en plusieurs langues. Cette initiative a pourtant mérité au Directeur général des élections, pas plus tard qu'en novembre 1995, le Prix du rapprochement interculturel ainsi que les éloges de la ministre de la Solidarité, qui, dans le temps, était la ministre des Communautés culturelles. Malgré ce fait, M. le Président, le vice-premier ministre a renchéri quant aux propos du député de Vachon et il croit, lui, que le Directeur général des élections, en agissant de la sorte, envoie, et je le cite: «un mauvais signal en matière d'intégration». Le ministre délégué aux Relations avec les citoyens trouve, quant à lui, que, si on se limite au français et à l'anglais, on se met le doigt dans l'oeil parce que l'anglais prendrait autant d'ampleur que le français.

Le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire peut-il nous dire, lui, quel signal il croit qu'il faut envoyer aux nouveaux citoyens? Est-il prêt, lui, à faire des accommodements? Veut-il qu'on envoie un signal d'inclusion ou d'exclusion?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, au Québec, la langue officielle et commune est le français, et il appartient au gouvernement et à ses instances administratives de donner l'exemple à cet égard. C'est d'ailleurs l'objet principal de la consultation que nous menons sur les mesures que nous avons annoncées en vue d'assurer la promotion du français. Le Québec reconnaît en plus spécifiquement d'autres langues qui ont un statut particulier – il s'agit, en l'occurrence, comme nous le savons, de la langue anglaise et des langues amérindiennes – mais nous rejetons la vision fédérale du multiculturalisme.

(15 h 40)

Ceci étant dit, le Directeur général des élections, puisqu'il s'agit de lui, étant une personne désignée par l'Assemblée nationale, jouit de l'autonomie de gestion que nous lui reconnaissons et que nous respectons, mais, comme il se doit, il a rapporté hier qu'il s'astreint à appliquer les principes de la Charte de la langue française dans toute la mesure du possible. Et, s'agissant plus particulièrement de cette brochure qui a été distribuée l'an dernier, M. le Président, le Directeur général des élections a jugé à propos de faire une exception au principe dont je viens de parler, une exception que j'estime compréhensible, compte tenu du souci qu'il avait d'informer les gens sur les procédures qui entourent l'exercice d'un droit fondamental, celui du droit de vote. Quant à l'avenir, j'ai noté, comme nous tous, que le Directeur général a annoncé qu'il apporterait une clarification à sa politique de communications, et j'ai toutes les raisons de penser qu'il s'attachera à incorporer, dans cette clarification de ses communications, une préoccupation importante et essentielle concernant le français, langue officielle et commune du Québec.

Le Président: M. le député.

M. Sirros: Oui, M. le Président. Est-ce que le Directeur général des élections devrait retourner son prix? Et est-ce que le premier ministre pourrait répondre clairement, lui? Est-ce qu'il vient de nous dire que, dorénavant, l'État, et tout ce qui dépend de l'État, va communiquer uniquement en français ou en anglais, ici et là, selon les droits qu'on considère sacrés? Est-ce que c'est ça qu'il vient de nous dire?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, l'État du Québec, comme tous les États de droit, agit à l'intérieur des obligations qui lui sont faites par les lois qui existent, et nous avons adopté, au Québec, un principe fondamental, dans la Charte de la langue française, qui est que la langue officielle et commune du Québec, c'est le français et qu'il y a un statut particulier de reconnu, cependant, à d'autres langues qui sont, exclusivement, la langue anglaise et les langues amérindiennes.

Ceci étant dit, il n'y a pas que des États et des gouvernements et des administrations, il y a des individus, il y a des organismes, il y a des partis politiques. Par exemple, le Parti québécois s'est toujours fait un point d'honneur de communiquer en un très grand nombre de langues avec les électeurs et électrices du Québec. Des brochures électorales, des brochures qui expliquent les politiques du Parti québécois ont été diffusées largement dans un grand nombre de langues que parlent des minorités québécoises. Donc, rappelons les principes. Nous ne sommes pas un État qui favorise le multiculturalisme. Soyons clairs. Soyons honnêtes. Il y a ici une langue commune, officielle, c'est la langue française. Il y a deux langues... Il y a une langue historique qui est la langue anglaise, qui a un statut particulier, qui est reconnue et que nous respectons totalement. Il y a, en plus, les langues amérindiennes. Pour le reste, il faut reconnaître que l'État agit à l'intérieur du cadre qui est le sien.

Le Président: M. le député.

M. Sirros: Ma question, M. le Président, au ministre de la Santé: Est-ce que le ministre de la Santé peut nous dire s'il va donner instruction aux CLSC d'arrêter d'envoyer des pamphlets pour la prévention du sida en d'autres langues que le français, l'anglais ou les langues amérindiennes?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, la politique et les lois du Québec, que vient très bien de nous résumer le premier ministre, appliquées au domaine de la santé, veulent dire que le réseau de la santé et des services sociaux communique avec l'ensemble des citoyens dans la langue commune des Québécois qui est le français, et, comme il le fait présentement, rend accessibles, en vertu de l'article 15 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui reconnaît que des gens de langue anglaise peuvent recevoir des services de santé et des services sociaux en anglais, les services en anglais quand la clientèle des établissements est de langue anglaise et demande les services en anglais. C'est une application directe de nos lois.

Le Président: M. le député.

M. Sirros: Est-ce que quelqu'un dans ce gouvernement peut répondre clairement à cette question qui n'a rien à faire avec ce que le ministre disait? Et je répète pour les fins du ministre de la Santé: Est-ce qu'il va donc, en fonction des instructions du premier ministre, donner instruction aux CLSC d'arrêter de publier des dépliants d'information en d'autres langues que l'anglais ou le français, en particulier pour la prévention du sida, le dépistage des maladies infectieuses ou d'autres affaires? Est-ce que lui, contrairement au premier ministre, il est prêt à faire des accommodements pour la réalité pluriculturelle du Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, ça me semble très simple, je viens de le dire: la Loi sur les services de santé et les services sociaux, reconnaissant et fonctionnant dans le cadre de ce qu'est la Charte de la langue française, les lois du Québec, a un réseau. Le réseau de la santé et des services sociaux n'est pas un réseau bilingue, c'est un réseau qui fonctionne dans la langue commune du Québec, qui fonctionne en français. Mais, en vertu de l'article 15 de la loi, on rend les services disponibles dans la langue anglaise pour la population de langue anglaise.

Alors, prenons un CLSC, pour être très clairs; ça veut dire que l'information disponible sous forme de brochures, sous forme de dépliants ou autrement est disponible dans des dépliants qui sont rédigés en français, mais le CLSC, comme il le fait maintenant et comme il va continuer à le faire, peut aussi avoir, s'il y a une partie de sa clientèle qui est de langue anglaise, des dépliants dans la langue anglaise qu'il va rendre disponibles à ceux qui sont de langue anglaise. Alors, c'est simple: la langue officielle de base, c'est le français, et les gens de langue anglaise qui ont besoin de l'anglais pour avoir un service vraiment accessible ont aussi l'information qui leur est donnée en anglais. C'est comme ça que ça fonctionne, et ça fonctionne très bien. Je ne vois pas pourquoi on essaierait de réparer ça, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Sirros: Le ministre sait-il qu'actuellement il y a des pamphlets qui circulent en d'autres langues que le français ou l'anglais, publiés par le réseau? Est-ce qu'il va agir pour les interdire?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, les CLSC, entre autres – mais c'est valable aussi pour les autres établissements – travaillent avec beaucoup de groupes communautaires, par exemple, surtout quand il s'agit de communautés culturelles, et le réseau a collaboré et va continuer à collaborer avec d'autres communautés culturelles, comme on l'a dit, comme le Parti québécois l'a fait lui-même, pour rendre des services disponibles et pour rejoindre le plus les gens. Et, en général, dans le réseau, c'est en travaillant avec les communautés culturelles elles-mêmes qu'on voit à les aider, à avoir les moyens de faire les traductions nécessaires pour que les gens de leurs communautés puissent avoir les services et l'information dans la langue qu'ils peuvent comprendre, mais en comprenant très bien que la culture dans laquelle ils sont venus s'intégrer est exprimée par une langue française. Mais, quand il s'agit des services que le réseau leur donne, on a un autre article dans la loi qui dit qu'on fait tout ce qu'il faut pour s'adapter aux spécificités des gens d'une culture, et les groupes communautaires collaborent très, très bien avec le réseau pour nous permettre de rendre cette disponibilité conforme et adéquate aux besoins des gens.

Le Président: Principale? En complémentaire, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. À l'honorable premier ministre: Compte tenu que le Directeur général des élections a demandé de l'Assemblée nationale des clarifications – et on comprend pourquoi il l'a fait, ça a été bien expliqué par le député de Laurier, des félicitations, des trophées d'un ministre, des commentaires positifs d'un autre, des réprimandes d'un autre – est-ce que le premier ministre peut indiquer au Directeur général des élections clairement si la politique qu'il a suivie jusqu'à ce jour est endossée par le gouvernement et l'Assemblée nationale du Québec? Ou est-ce qu'il peut indiquer à cette Assemblée quelles sont les modifications qui sont exigées du Directeur général des élections quant à sa conduite dans le domaine linguistique?

Le Président: M. le ministre responsable de la Réforme électorale et parlementaire.

M. Chevrette: M. le Président, le Directeur général des élections n'a pas dit qu'il consulterait l'Assemblée nationale. Il a dit, à cause du débat qui a été soulevé, qu'il réviserait lui-même ses politiques, mais qu'il ne cessait d'essayer d'être conforme à la loi 101, loi qui nous régit tous. C'est ça qu'il a dit et, au besoin, qu'il corrigerait son tir, si besoin y était, advenant des cas où il se trouverait en illégalité avec la loi 101.

Le Président: Complémentaire, M. le député de Laurier-Dorion?

M. Sirros: Une complémentaire: N'est-il pas vrai que le Directeur général des élections n'a pas dit ça? Et est-ce que le ministre responsable des Relations avec les citoyens va parler à ses collègues pour leur expliquer de quoi il s'agit?

Le Président: M. le ministre.

(15 h 50)

M. Chevrette: M. le Président, on est loin de la question principale. On essaie de nous faire répondre à une question visant à nous emmener dans le multiculturalisme, alors que la question de fond, c'est qu'on a une loi, la Charte de la langue française, qui dit qu'on a une langue officielle, la langue commune des Québécois, et qu'il y a des droits historiques pour la langue anglaise rattachés à l'individu, qui a le droit de recevoir des services de santé en anglais s'il le désire. Donc, à partir de là, M. le Président, on est comme tout pays normal, on a notre langue et on va la faire respecter.

Le Président: En complémentaire. M. le député de Mont-Royal, en complémentaire.

M. Ciaccia: Est-ce que le premier ministre nous dit qu'au-delà de toute considération politique ils n'ont rien à faire avec le multiculturalisme? L'État du Québec ne peut pas donner l'exemple de générosité et d'humanité envers...

Des voix: Ah! Ah!

M. Ciaccia: ...par l'utilisation de leur langue dans des circonstances très spécifiques et très humanitaires, aux communautés culturelles. Est-ce que c'est ça que le premier ministre nous dit?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que, si on veut être honnête, on va reconnaître que l'État du Québec, que la société québécoise est d'une grande générosité, d'une grande compréhension et d'un grand respect pour toutes ses minorités, de quelque ethnie qu'elles soient.

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: Je pense que nous vous le démontrons tous les jours, M. le Président, par rapport aux politiques d'ouverture, dans le domaine de l'intégration, que nous pratiquons, par exemple. Et quand les gens ne sont pas citoyens encore, qu'ils n'ont pas la connaissance suffisante de l'anglais et du français, ils ont l'assistance de communication dans leur langue originale, ce qui leur permet de s'intégrer plus facilement à notre communauté.

Mais, ceci étant dit, M. le Président, il s'agit ici de savoir si l'État du Québec devrait se donner un système de droit, un encadrement de droit qui ferait en sorte qu'il y aurait le français, l'anglais comme statut particulier, les langues amérindiennes et une multiplicité d'autres langues qui auraient toutes des droits. C'est la question fondamentale qui est posée. Ces choix ont été faits, ces choix ont été arrêtés. Et le Québec n'est pas la seule société, M. le Président, qui a une langue officielle, une langue commune. Et, en plus, nous avons trouvé le moyen d'établir un équilibre linguistique qui a fait en sorte que la pratique et le respect... Si vous me permettez, M. le Président, c'est important, j'aimerais avoir un peu de temps pour répondre, si vous me permettez. Nous avons fait en sorte, par un équilibre linguistique péniblement acquis, longuement acquis, par la compréhension réciproque qui fait en sorte que l'anglais a un statut particulier très vivant et une communauté qui est pleine de vitalité ici, qui participe de façon éclatante à la réussite du projet social du Québec, et nous allons faire en sorte que cela continue comme tel. C'est la même chose pour les langues amérindiennes. Elles ont un statut particulier que la loi leur reconnaît, il sera respecté. Mais qu'on ne demande pas à l'État, à cette société de faire ce que personne n'a fait ailleurs, d'ériger des systèmes de droit qui vont plus loin que cela.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député d'Orford, en principale.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je ne voudrais pas...

Des voix: ...

Le Président: Je m'excuse! Je ne voudrais pas être obligé de suspendre la séance. M. le député d'Orford.


Participation de fonctionnaires à l'ÉcoSommet, à Montréal

M. Benoit: Oui, M. le Président. Depuis hier se tient à Montréal l'ÉcoSommet, colloque sur le développement durable qui durera quelques jours, où on va échanger entre groupes verts, industriels et autres. M. le ministre, nous comprenons que les voyages forment la jeunesse. Est-il exact – c'est la question qu'on pose au ministre de l'Environnement – que 75 fonctionnaires du ministère de l'Environnement participent à l'événement? Pouvons-nous connaître le nombre de jours où ils seront présents dans cet hôtel à Montréal? Peut-on savoir combien il en coûtera pour les repas, en déplacements et en hébergement, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Merci, M. le Président. Alors, sur le précis de la question, le kilométrage, qu'est-ce qu'ils ont mangé, etc., vous aurez exactement la réponse, je vous l'apporterai, les dépenses encourues. Mais, sur le principe, sur le principe, il est en train de se passer quelque chose d'important à Montréal, où tous les partenaires dans le développement du Québec, qui ont une vision de développement durable du Québec, on parle des «miniers», on parle des forestiers, on parle des agriculteurs, on parle des municipalités, tous les acteurs, on parle des ministères. L'ensemble des ministères du Québec sont représentés, et je suis fier que mon ministère ait été associé à cette démarche unique et je suis fier qu'il participe à ces trois jours de discussions qui vont culminer sur une série de projets, de l'économie soutenable, qui vont créer de l'emploi et qui démontrent que la force du Québec, c'est via la solidarité et la concertation qu'on la bâtit, M. le Président.

Le Président: M. le député d'Orford.

M. Benoit: M. le Président, nous sommes aussi très heureux que le ministère de l'Environnement soit impliqué dans le débat. La question que je demande au ministre: Est-ce que, pour être heureux qu'il soit impliqué, ça en prend 75?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Pour un ministère, la réponse à ça, c'est: le ministère a 3 100 employés, des directions dans les 16 régions du Québec, des directions professionnelles, et s'ils ont jugé que, compte tenu de l'importance de l'événement, ils seraient ce nombre, c'est parce que l'événement est important et qu'ils veulent être associés à cet événement qui est un point de départ d'une vaste opération de concertation et de développement durable au Québec.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en complémentaire.

M. Paradis: Simple question, M. le Président: Est-ce que le ministre de l'Environnement, compte tenu du contexte budgétaire actuel, trouve justifiée l'implication de 75 fonctionnaires du ministère de l'Environnement à Montréal à l'occasion de l'ÉcoSommet, toutes dépenses payées par les contribuables?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Cette question venant de l'ex-ministre de l'Environnement et de la Faune, qui aurait eu intérêt à impliquer son ministère dans le Québec, qui aurait eu intérêt à faire quelque chose, je la trouve bizarre. La réponse à l'ex-ministre de l'Environnement et de la Faune, qui a fait zéro dans le domaine de l'environnement, c'est: Oui, mon ministère s'implique et mon ministère va continuer à s'impliquer, et mon ministère va continuer à être un partenaire dans le développement économique du Québec, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Quand les contribuables connaîtront-ils le coût de l'implication de 75 fonctionnaires qui se déplaceront à Montréal, toutes dépenses payées par le ministère de l'Environnement?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Cliche: Vous aurez la réponse spécifiquement à cette question, je m'y suis engagé. Mais, contrairement à l'ex-ministre de l'Environnement et de la Faune, je n'ai pas honte de mes fonctionnaires, je suis fier de travailler avec eux, ils sont fiers de travailler avec moi, M. le Président.

Le Président: Alors, cet échange met fin à la période des questions et des réponses orales.


Réponses différées


Compte de dépenses du juge en chef de la Cour du Québec

Nous en arrivons maintenant aux réponses différées. M. le ministre de la Justice répondra maintenant à une question posée hier par M. le député de Chomedey concernant les dépenses effectuées par le juge en chef Louis-Charles Fournier. M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, le député de Chomedey a posé la question suivante: Est-ce que le ministre peut nous dire si, en plus de payer une chambre au Château Frontenac toute la semaine, les contribuables ont payé aussi pour des nuits d'hôtel pour le juge en chef Louis-Charles Fournier lorsque celui-ci séjournait, par exemple, à Ottawa ou à Montréal?

Le Président: Écoutez, il y a deux raisons pour lesquelles on n'entend pas dans cette Assemblée. D'une part, il y a un bruit de fond qui est originaire même des membres de l'Assemblée; deuxièmement, il y a peut-être un problème de micro en ce qui nous concerne actuellement. Alors, je pense que les techniciens vont s'activer à corriger le problème technique; quant à l'autre problème, c'est aux membres de l'Assemblée à essayer de...

M. Bégin: Alors, M. le Président, la réponse. Après vérification, je suis en mesure de confirmer que mon ministère a remboursé les frais encourus par le juge en chef pour la location de deux chambres la même nuit à sept occasions entre le 4 septembre 1995 et le 29 mars 1996, pour un montant total de 1 059,80 $. Ces frais auraient été occasionnés alors que le juge en chef se trouvait dans l'impossibilité de revenir à Québec et d'annuler à temps la chambre réservée à Québec.

Deuxième question: Est-ce que le ministre peut confirmer si, en plus des 6 000 $ de kilométrage, le juge Louis-Charles Fournier s'est fait payer une voiture Mercedes avec chauffeur privé pour ses voyages, notamment pour la rencontre des juges en chef du Canada?

(16 heures)

Réponse: Effectivement, M. le Président, le juge en chef de la Cour du Québec est autorisé à utiliser un véhicule automobile de type limousine pour ses déplacements dans l'exercice des fonctions propres au poste de juge en chef. Il s'agit d'une pratique qui a été mise en place par le gouvernement précédent en 1989 pour le juge en chef de la Cour du Québec, de la Cour supérieure et de la Cour d'appel du Québec.

Des voix: Ah!

M. Bégin: Je suis prêt à déposer une lettre du 17 février 1989 du sous-ministre de la Justice, Me Jacques Chamberland, à l'attention du juge en chef Albert Gobeil, l'informant de l'autorisation du ministère de la Justice à utiliser une limousine. Cependant, je dois vous dire que s'ajoute à ces demandes de l'utilisation de la limousine un montant de 31 122,40 $, pour un total de dépenses de 59 582 $.

Permettez-moi de dire que je considère qu'il s'agit là de frais encourus qui sont nettement – nettement – supérieurs à ce que j'envisageais au moment de permettre au juge en chef une période de transition pour son transfert de Chicoutimi à Québec. J'ai donc l'intention de revoir l'application des règles en vigueur, particulièrement en ce qui concerne l'usage de limousines et l'article 113 de la loi. Et, s'il y a eu des dépassements qui étaient non autorisés, je demanderai le remboursement de ces dépenses.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey, en complémentaire.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je tiens à dire, comme parlementaire, que j'apprécie l'honnêteté de la réponse du ministre et sa réaction. À la veille d'un budget, on vient d'apprendre qu'une somme de près de 60 000 $ – ce qui représente deux fois plus que le salaire annuel moyen de beaucoup de familles au Québec – a été dépensée sans raison. On apprend qu'un juge en chef a le don d'ubiquité, qu'il peut être à deux places en même temps. Il l'a peut-être appris de la députée de La Prairie, qui réside à deux places en même temps.

Des voix: Ah!

Le Président: M. le député de Chomedey, vous avez compris que je voudrais vous inviter à rester sur votre question complémentaire et sur le sujet.

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. La troisième question que l'on a posée au ministre est qu'on lit, par le biais des journaux aujourd'hui, que le ministre a dit que lui-même ne s'est jamais ingéré dans le paiement des factures de son ministère. Mais notre question, hier, ne l'accusait pas lui-même de l'avoir fait. On lui demandait si des gens de son personnel politique étaient intervenus pour assurer le paiement des factures. Alors, nous désirons savoir si, effectivement, il y a des gens de son cabinet politique qui sont intervenus auprès des fonctionnaires pour s'assurer des paiements, alors que les fonctionnaires avaient refusé les paiements parce qu'ils les trouvaient, comme le ministre les trouve aujourd'hui, nettement exagérés.

Le Président: M. le ministre.

M. Bégin: M. le Président, j'ai répondu à cette question, hier, à l'effet qu'il n'y avait eu ni de ma part ni de personne dans mon cabinet de directive, d'orientation quelconque relativement à ça. Je dois vous dire que je suis étonné, et je l'ai mentionné, des montants en cause et je viens de passer un commentaire qui indique très bien que je n'ai certainement pas autorisé des dépenses que je considère comme étant trop élevées.

Le Président: Il n'y a pas de votes reportés, aujourd'hui.

Aux motions sans préavis...


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer, maintenant, dans ce cas-là, aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions poursuivra les consultations générales sur le document du Directeur général des élections intitulé «Document de réflexion: amendements à la Loi électorale» le jeudi 9 mai 1996, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Président: De mon côté, je vous avise que la commission des affaires sociales se réunira en séance de travail demain, jeudi le 9 mai, de 10 heures à 12 h 30, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Est-ce que je pourrais demander aux membres de l'Assemblée de quitter discrètement et en silence pour permettre aux travaux de se poursuivre?

Nous en sommes maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

Nous allons passer maintenant aux affaires du jour.


Affaires inscrites par les députés de l'opposition


Motion proposant que l'Assemblée dénonce la perception du rôle des aînés véhiculée par le gouvernement pour justifier l'augmentation de leur fardeau financier

À l'article 34 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de Sauvé présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement du Parti québécois qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société pour justifier, malgré son engagement, l'augmentation de leur fardeau financier par différentes mesures.»

Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la discussion de cette motion. Mis à part la réplique de 10 minutes accordée à l'auteur de la motion et les 10 minutes allouées à l'ensemble des députés indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront également la période consacrée à ce débat. Dans ce cas, les interventions ne sont pas limitées. Je suis maintenant prêt à...

M. le leader du gouvernement.


Débat sur la recevabilité


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, avant de commencer le débat comme tel sur la motion du député de Sauvé, je voudrais vous présenter quelques arguments relativement à la recevabilité, toujours, de la motion.

Je sais que c'est la troisième fois en cette Chambre que je fais la présente argumentation. Comme vous avez pu le constater, encore une fois, pour cette motion, M. le Président, présentée par le député de Sauvé, on a choisi... et là-dessus, je voudrais porter à votre attention que c'est l'opposition qui rédige la motion qu'elle veut bien mettre au feuilleton. Et, à ce moment-là, donc, ils ont choisi encore d'utiliser le terme «dénonce». Je vous soumets respectueusement, M. le Président, toujours – j'avais fait la même argumentation les deux fois précédentes – que cette motion est une motion qui s'apparente à une motion de blâme ou de censure du gouvernement. Le terme «dénonce» est, quant à moi, sans équivoque.

Je comprends que le leader de l'opposition va probablement vous dire qu'il s'est inspiré peut-être de certaines motions qui ont été faites par des précédents leaders du gouvernement ou leaders de l'opposition. Moi, ce que je vous dis, M. le Président, c'est qu'on ne peut plaider sa propre turpitude. Si, à l'époque, il n'a pas voulu alléguer l'irrecevabilité d'une telle motion, c'est son choix et, bon, il doit vivre avec les conséquences des choix qu'il a faits à l'époque. Moi, comme leader du gouvernement, M. le Président, je soumets à votre attention le fait que cette motion, telle que présentée par le député de Sauvé, est une motion de censure qui devrait être donc présentée dans le cadre des articles 304 à 307 de notre règlement, pour ce qui a trait aux motions de censure. Je pense que c'est important.

Et je sais, M. le Président, que vous m'avez déjà invité, que vous nous avez conviés, le leader de l'opposition et moi-même, à une rencontre pour pouvoir essayer de baliser ce genre de chose là. Je vous soumets respectueusement qu'une rencontre ne réglera rien présentement, puisque je suis certain, sans pour autant prêter aucune mauvaise intention au leader de l'opposition, que le leader jamais ne retirera une motion qu'il a déjà inscrite au feuilleton, qui a été annoncée et que, maintenant, nous nous apprêtons à débattre.

En vertu de notre règlement, on a le droit, au niveau de l'opposition, à six motions de censure. Je vous soumets respectueusement... Moi, ce que je vous propose, ce que j'argumente devant vous, M. le Président, c'est qu'on serait déjà rendu à rajouter une huitième motion de censure à l'opposition. On ne peut pas attendre une prochaine réforme parlementaire. On ne peut pas attendre une réunion des leaders où on va tout simplement baliser pour le futur les motions de censure ou les motions du mercredi.

Et, pour moi, il est essentiel, M. le Président – c'est la troisième fois en cette Chambre que je me lève pour vous le demander – qu'il y ait un jugement, une décision qui soit rendue quant à la recevabilité d'une telle motion comme étant une motion du mercredi, une motion de l'opposition. Évidemment, M. le Président, je ne peux que proposer, puisque c'est la présidence qui va décider si, oui ou non, elle doit prendre une décision là-dessus. Vous pourriez même tout simplement vous lever, M. le Président, et déclarer: Elle est recevable. Et, à ce moment-là, votre décision, vous le savez, est sans appel. Mais il faut être conscient, M. le Président, du précédent que vous allez créer.

Et on ne peut évidemment présumer, M. le Président, à quel moment la réforme parlementaire va avoir lieu. Je sais que c'est un voeu qui vous est cher de l'appeler le plus rapidement possible et de l'amorcer le plus rapidement possible, mais on sait aussi que c'est un... comment je pourrais dire... c'est un mécanisme qui est quand même assez lourd, qui fait l'objet de négociations de la part de l'opposition officielle et du gouvernement, et on ne peut, quant à moi, attendre, à ce moment-là, une réforme avant de décider sur ce point.

(16 h 10)

Donc, je vous le soumets encore une fois, M. le Président, cette motion est irrecevable comme une motion du mercredi. Elle pourrait faire l'objet d'une motion de censure, mais ils ont choisi, du côté de l'opposition officielle, de la présenter comme étant une motion du mercredi. Et je vous soumets donc, quant à moi, qu'il est impérieux, il est nécessaire que vous rendiez une décision quant à la recevabilité de telles motions, parce que, la semaine prochaine, si on décide d'inscrire au feuilleton une motion, encore, qui utilise le terme «dénonce», quant à moi, ça va être une neuvième motion de blâme ou de censure qu'on va donner, à ce moment-là, à l'opposition officielle, et il faut être conscient du précédent qu'on va créer. On ne peut tout simplement faire silence sur cette question et dire tout simplement, donc, qu'on présume que c'est recevable, sans vraiment porter d'arguments sur la question.

Alors, je répète donc ma demande, M. le Président, respectueusement, tout en étant conscient de la discrétion que vous avez. Quant à moi, il est impérieux, nécessaire, que vous rendiez une décision quant à la recevabilité d'une telle motion. Quant à moi, cette motion est irrecevable, comme motion du mercredi, et elle pourrait, à ce moment-là, sous réserve, encore, de la recevabilité, comme motion de blâme... Mais, quant à moi, elle s'apparente à une motion de blâme, à une motion de censure.

Le Président: Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition officielle.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, très brièvement, M. le Président, quant à l'obsession de mon bon ami le leader du gouvernement, un seul argument nouveau a été ajouté à ce qu'il avait déjà plaidé ad nauseam, la semaine dernière, hier, aujourd'hui. Il veut me prêter des intentions ou simplement me dire qu'on plaide notre propre turpitude, de ce côté-ci de la Chambre, en disant qu'on ne s'est pas opposé, à l'époque où son prédécesseur avait déposé de telles motions lorsqu'il occupait ma fonction. M. le Président, vous étiez un observateur privilégié de la scène politique. Non seulement nous nous étions opposés, mais nous avions perdu.

Et, par la suite, lorsque nous avons inversé nos rôles, comme tels, les motions du mercredi étaient copiées par celles inventées par le leader de l'opposition de l'époque, le député de Joliette. Et, quand il s'est retrouvé leader du gouvernement, comme tel, jamais il n'a plaidé l'irrecevabilité des motions qu'il avait lui-même imaginées, M. le Président, et ça se comprenait. Compte tenu de ce long historique de motions du mercredi, je vous souligne tout simplement qu'à la fois la loi, le règlement, les précédents, la jurisprudence, les rôles occupés par des prédécesseurs du leader actuel du gouvernement plaident en faveur de la motion de l'opposition. C'est beaucoup plus que ce que nous sommes habituellement habitués de connaître, tous ces plaideurs de notre côté, M. le Président.

M. Gendron: Sur la recevabilité.

Le Président: Alors, M. le député d'Abitibi-Ouest...

M. Gendron: Oui, très simplement...

Le Président: Juste avant que vous interveniez, M. le député d'Abitibi-Ouest, je voudrais demander aux membres de l'Assemblée de faire en sorte que, finalement, le temps de l'Assemblée soit d'abord consacré aux affaires qui sont prévues pour l'Assemblée et non pas aux affaires qui, idéalement, devraient être réglées à l'extérieur de l'enceinte, pour permettre aux parlementaires de jouer leur rôle. Ceci étant dit, je vais permettre encore quelques brèves interventions sur la recevabilité ou non de la motion et, par la suite, je vais prendre une décision. M. le député d'Abitibi-Ouest.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui, très rapidement, M. le Président. Je suis convaincu, en tout cas, que, pour les parlementaires, la question soulevée par le leader du gouvernement, indépendamment du contexte historique, elle est très pertinente parce que, si on a voulu limiter le nombre de motions de censure par un chiffre exprimé dans le règlement, censure ou blâme, c'est qu'il y avait une réalité, à ce sujet-là. Et, moi, j'ai pris connaissance... Je vais probablement m'exprimer là-dessus parce que je tiens à parler du fond plutôt que de la forme. Mais c'est uniquement pour vous indiquer que ce qui est soulevé est majeur. C'est la meilleure façon, telle que je la lis, et j'ai quand même une certaine expérience dans cette Chambre, de lire clairement une motion de blâme. Devant l'incapacité de l'opposition et, c'est son problème, de ne pas avoir de motions du mercredi que je connais, traditionnelles, qui permettent d'apprécier le travail du gouvernement, on prend un moyen détourné.

Moi, la seule place où je veux attirer votre attention, M. le Président... Il y a un autre règlement au-delà de tout ça: on ne peut jamais faire indirectement ce que le règlement défend directement. Et là vous avez un exemple parfait de faire indirectement ce que le règlement ne permet pas de faire parce que, dans mon sens à moi – je l'ai lue à plusieurs reprises – il s'agit carrément d'une motion de blâme et de censure du gouvernement, parce qu'elle est basée sur les perceptions, et ça n'a rien à voir avec une motion du mercredi, traditionnelle, que je connais. Et ce qu'ils vous demandent, c'est de regarder ça indépendamment. Comment voulez-vous que je conclue que le Parlement évolue, M. le Président, si notre base est toujours l'économie, la culture, l'habitude et les dimensions historiques? Dans le présent cas, manifestement, il me semble qu'on n'a pas resserré, et ça donne ce que ça donne aujourd'hui. On a une motion de blâme qu'on va débattre un mercredi parce qu'il n'y avait pas d'autres choses à amener, qui n'a rien à voir avec le sens et la portée du règlement qui disait: Oui, on laisse une journée dans la semaine à l'opposition pour être capable de faire ce qu'on appelle une motion de l'opposition sur un sujet donné. Ce n'est pas le cas, là. Là, ils veulent blâmer le gouvernement sur des perceptions. Pensez-y.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en réplique.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui. M. le Président, en soutenant les propos de mon bon ami le leader adjoint du gouvernement...

Une voix: Ex-leader.

M. Paradis: ...oui, oui, ex-leader adjoint du gouvernement sur la question, reconnaissant son expérience, il n'est pas question, en cette Chambre, que nous demeurions dans des situations qui soient immuables. Vous-même êtes un des plus grands supporters d'une réforme parlementaire qui s'impose. Tout ce que je souligne, c'est que, en attendant cette réforme parlementaire qui est urgente, nous continuons à appliquer la loi, le règlement et les traditions. Et, si j'avais une suggestion à faire à mon bon ami le leader du gouvernement, ce serait de nommer le député d'Abitibi-Ouest à la commission de l'Assemblée nationale, où nous pourrons ensemble réviser le nouveau règlement que vous aurez le devoir d'appliquer.

Le Président: M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Très court. M. le Président, quand le leader de l'opposition invoque notre amitié, ça m'inquiète toujours un peu. Tout ce que je voudrais dire, c'est qu'il a fait mention qu'il a déjà plaidé l'irrecevabilité d'une motion semblable à celle-ci. J'aimerais peut-être, à ce moment-là... Il pourrait faire travailler peut-être ses adjoints – son leader adjoint ou les membres de son cabinet – pour nous trouver un précédent où il l'a plaidée, où il a perdu, parce que, quant à nous, nous avons cherché les précédents. Quant à nous, en tout cas à moins qu'il fasse des recherches différentes et trouve des décisions différentes, ça n'a jamais été plaidé, l'irrecevabilité d'une telle motion qui utilise le mot «dénonce», et il n'y a jamais eu de décision qui a été rendue soit quant à la recevabilité d'une telle motion, soit quant à l'irrecevabilité d'une telle motion. S'il y a des précédents, qu'il les dépose; à ce moment-là, ça mettra fin aux débats et ça éclairera l'ensemble des parlementaires en cette Chambre.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Pour conclure...

Le Président: En terminant, M. le...

M. Paradis: ...si j'ai plaidé et perdu, comme je l'ai dit, c'est sans doute par humilité que je l'ai dit. J'ai sans doute plaidé et gagné. Je suis prêt à retirer le terme.


Décision du président sur la recevabilité

Le Président: J'ai déjà mentionné, je pense, à trois reprises qu'effectivement, M. le leader du gouvernement, vous m'avez soumis le problème à trois reprises. La première fois, je vous en avais référé à la décision qui avait été prise par mon prédécesseur, qui indiquait qu'effectivement on avait un problème. Le problème, dans le fond, il vient de quoi? Il vient d'un texte qui est imprécis, d'un esprit qui prévalait pour différencier les motions du mercredi et les motions de censure, les motions de blâme, et d'une tolérance qui a prévalu à l'Assemblée depuis plusieurs années déjà et qui a fait en sorte que l'esprit qui avait prévalu dans la différenciation des motions du mercredi par rapport aux motions de censure avait, à un moment donné, fait en sorte qu'on avait cessé de voir clairement cette distinction entre ce qui était, à l'origine, prévu d'être discuté et débattu un mercredi après-midi, à l'initiative de députés de l'opposition, et ce qui était prévu pour être initié à l'encontre du gouvernement par les députés de l'opposition, en utilisant la technique des motions de censure ou, donc, des motions de blâme.

Le problème, c'est que la sous-commission de la réforme parlementaire ne s'est pas encore réunie. Le président – et ce n'est un blâme ni pour le leader du gouvernement ni pour le leader de l'opposition officielle – profite de l'occasion pour informer les deux leaders qu'il souhaiterait qu'on puisse avoir une commission de l'Assemblée nationale le plus rapidement possible pour qu'on puisse, d'une part, constituer la sous-commission de la réforme parlementaire. Puis, deuxièmement, mon intention, et je l'ai indiqué aux deux leaders, c'est de créer rapidement un groupe de travail, et je sais que le député d'Abitibi-Ouest a été pressenti pour travailler sous la responsabilité du vice-président Pinard, et d'autres collègues du côté de l'opposition, pour accélérer le processus.

Mais, entre-temps, le problème que pose le leader du gouvernement est le suivant: Est-ce que le président doit maintenant statuer et précéder cette réforme parlementaire qu'on veut rapidement et indiquer dans quelle direction on doit aller, ou si le président, compte tenu de ce qui a déjà été décidé par l'ancien président, d'une part, et du temps où on a toléré... Il ne s'agit pas d'une tolérance qui date d'hier ou de la semaine dernière, mais d'une tolérance qui s'est prolongée dans le temps depuis plusieurs années.

(16 h 20)

À ce moment-ci, je serais porté à statuer que le président ne peut pas, aujourd'hui ni très rapidement, faire en sorte qu'on modifie la pratique qui est établie dans la Chambre depuis plusieurs années, sauf que – et ce serait la contrepartie – dans la mesure où on peut rapidement en arriver à une proposition qui serait acceptable de part et d'autre, le président pourrait, à ce moment-là, prendre une décision avant que la réforme parlementaire soit complétée, avant même qu'on ait l'idée globale de ce qui pourra être initié, parce que, à ce moment-là, il ne s'agit pas d'un équilibre à défaire entre ce que l'opposition a comme technique pour faire son travail et ce que le gouvernement a comme arme aussi pour faire le sien, mais il s'agit plutôt de voir dans quelle mesure on ne peut pas clarifier quelque chose qu'on a laissé aller pendant plusieurs années.

Ceci étant dit, il y a une autre chose qui m'incite aujourd'hui à permettre au député de Sauvé d'engager sa discussion telle qu'il l'a formulée. C'est que, avant-hier, quand la motion a été mise au feuilleton, quand j'ai annoncé que c'est cette motion qui serait en discussion aujourd'hui, vous avez effectivement soulevé le problème. J'avais à ce moment-là répondu un peu ce que je viens de répondre sans donner tous les détails et j'avais compris, très franchement, que, au-delà de la formulation, la motion serait autorisée aujourd'hui. Alors, je ne veux par revenir sur cette décision et je ne veux pas, à ce moment-ci, trop brusquement engager une décision qui va plus dans l'esprit d'une réforme parlementaire que d'une décision précipitée.

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Toujours relativement au même problème, M. le Président, tout en respectant le statu quo que vous décidez de maintenir, finalement, je ne conteste pas la décision du président, j'ai beaucoup trop de respect pour la présidence pour le faire, et je pense que les gens dans cette Chambre le savent. Moi, ce que je vous dis, c'est que c'est peut-être une question de directive, j'espère mal comprendre vos propos, M. le Président. Vous ne souhaitez pas, j'espère, qu'on va faire une réforme à la pièce, c'est-à-dire qu'on va essayer de régler ce problème-là de façon urgente et que, après ça, on fera une réforme parlementaire, parce que, quant à moi, je vous soumets respectueusement que ce n'est pas souhaitable.

Et, moi, ce que je vous dis, M. le Président, c'est qu'il y a une décision qui doit se rendre relativement à ça, parce que, si le leader de l'opposition avait décidé de ne pas rédiger sa motion de cette façon-là, on pourrait attendre une réforme parlementaire, mais là ça fait deux semaines de suite, M. le Président, où systématiquement on utilise le terme «dénonce» pour faire une motion du mercredi. Alors, je pense qu'on ne peut plus attendre, M. le Président. Peut-être que vous avez décidé de laisser aller le débat sur cette motion, mais peut-être que, après que cette motion aura été débattue et votée, il serait temps de rendre une décision relativement à la recevabilité ou l'irrecevabilité d'une motion semblable, pour ne pas qu'il en arrive une autre la semaine prochaine.

Le Président: J'ai indiqué, M. le leader du gouvernement, que je comprenais la situation mais qu'en même temps le président considérait que, à ce moment-ci, compte tenu de ce qu'on a toléré de part et d'autre, parce que vous avez été d'un côté et de l'autre de la Chambre depuis un certain nombre d'années, et cette tolérance-là n'est pas une tolérance récente... Je ne voudrais pas, rapidement, trancher sur l'interprétation qu'on veut faire et l'utilisation qu'on veut faire des motions du mercredi par rapport aux motions de censure, dans la mesure où on peut le faire dans le cadre de la réforme. Vous avez raison de souligner le danger de procéder à une réforme parlementaire à la pièce, mais je considère que, dans ce cas-là, il y a moyen de trancher cette question sans nécessairement engager l'équilibre qu'on ne veut pas bousiller quand on va procéder à la réforme parlementaire, parce que la réforme parlementaire doit se faire en maintenant un équilibre.

Ce n'est pas compliqué, pour les gens qui nous écoutent, ce qui doit prévaloir dans le contexte de la réforme parlementaire, c'est une espèce de désarmement équilibré qui va permettre aux uns et aux autres d'avoir la possibilité d'opérer plus légèrement à l'Assemblée nationale sans que l'un ou l'autre, c'est-à-dire ni l'opposition ni le gouvernement, ne soit compromis dans son rôle, dans sa responsabilité, ici, à l'Assemblée nationale. Ceci étant dit, je souhaite qu'on en reste là pour aujourd'hui, puisque j'ai déjà décidé que le député de Sauvé pouvait présenter sa motion.

M. Bélanger: Question de directive, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Vous nous soumettez, M. le Président, que vous voudriez trancher à un autre moment. Voulez-vous indiquer à cette Chambre de quelle façon vous voulez trancher ce problème?

Le Président: Il y a deux façons, M. le leader du gouvernement. J'en avais indiqué une, mais il semble qu'il y a un certain nombre de difficultés. J'avais indiqué que je serais prêt, éventuellement, à rendre une décision plus rapidement si je pouvais avoir une réunion des deux leaders où on pourrait discuter de cette question-là franchement. Il semble que ça soit assez difficile pour le moment de faire cette réunion-là.

L'autre hypothèse que je viens de soumettre, c'est celle de rapidement convoquer la commission de l'Assemblée nationale, qu'on puisse mettre sur pied la sous-commission sur la réforme parlementaire et qu'on embraie et qu'on puisse mettre à l'ordre du jour de nos travaux de réforme parlementaire cette question-là en priorité pour qu'une décision soit prise.

Il ne faut pas oublier une chose: il nous reste deux mercredis d'ici l'ajournement du mois de juin. Il est possible aussi qu'à ce moment-là on puisse envisager qu'on pourrait en arriver à des conclusions qui nous permettraient, à la reprise de la session à l'automne, d'avoir une formule qui aurait permis au président de trancher si on n'en arrive pas à un consensus. Parce que c'est clair, à moins d'attendre la réforme parlementaire qui nous amènerait à modifier le règlement par vote, le président devra trancher.

Alors, M. le député de Sauvé.


Débat sur la motion


M. Marcel Parent

M. Parent: Alors, je vous remercie, M. le Président.

Je comprends facilement, M. le Président, que le leader du gouvernement ait une peur morbide d'entendre les gens de l'opposition parler de leur attitude et de la politique qu'ils ont adoptée vis-à-vis de nos aînés, vis-à-vis des personnes âgées. C'est tout à fait normal, M. le Président, dans un régime démocratique, suivant les traditions parlementaires britanniques, qu'à l'occasion l'opposition se lève pour critiquer le gouvernement face à des orientations, face à des décisions, face à des politiques qu'il prend. Et c'est le devoir d'un député de le faire, aussi. Mais ce qui est pénible, c'est lorsqu'un député se sent moralement obligé de se lever en Chambre pour dire à un gouvernement qu'on met en doute certains gestes, qu'on met en doute la moralité de certains gestes.

Motion de blâme aujourd'hui, c'est pour décrier à la face du Québec la façon dont le gouvernement péquiste s'acharne auprès de la population vieillissante de notre société. Un gouvernement, M. le Président, qui renie ses aînés renie son histoire. Une grande partie de l'histoire moderne du Québec a été écrite par nos pères, par nos mères, qui ont passé toute leur vie à bâtir pour notre génération et pour celles qui vont nous suivre une société juste. Ils ont trimé dur, nos aînés, pour s'assurer une vieillesse à l'abri de l'indigence, une vieillesse dans la pleine sécurité. Ces personnes, à l'automne de la vie, ont le droit de vivre en toute sérénité à l'abri des affres de la pauvreté.

Il faut s'interroger, M. le Président, sur l'attitude et les orientations d'un gouvernement qui cherche son équilibre budgétaire en s'acharnant à faire payer des personnes âgées. Ce n'est pas ce que nous avait promis ou laissé entendre le premier ministre lors du discours d'ouverture. Il nous disait: «L'État doit se serrer la ceinture.» Mais, contrairement à ce qu'il nous annonçait, on serre maintenant la ceinture des aînés en attendant de leur serrer la corde autour du cou en les étouffant avec de nouvelles taxes et de nouvelles tarifications.

Des voix: Oh!

M. Parent: C'est ça, c'est ça, les taxes déguisées. Et c'est facile à comprendre. Lorsque l'on veut équilibrer son budget en taxant les personnes âgées...

M. Boisclair: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Sauvé, s'il vous plaît. Une petite minute, s'il vous plaît.

M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens.

M. Boisclair: M. le Président, est-ce que, tout simplement, on pourrait rappeler au député les dispositions de l'article 35.5° et 35.6°? Et je me permets de lire l'article 35.6°: On ne peut «imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole». Et on ne peut non plus «attaquer la conduite d'un député, si ce n'est par une motion mettant sa conduite en question».

Je pense qu'on vient de voir une infraction nette aux dispositions de l'article 35 de notre règlement.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Très brièvement. Compte tenu de votre expérience, vous vous seriez immédiatement levé si vous aviez constaté une infraction à l'article 35. L'article 35 concerne la conduite d'un député et des attaques envers les députés. Les propos de mon collègue étaient à l'endroit du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je ne suis pas tout à fait d'accord avec l'interprétation du leader de l'opposition. Que ça s'adresse à un ensemble de députés – dont le gouvernement est un exemple, d'ensemble de députés – ou à un individu, l'interprétation de cette règle vaut aussi pour l'ensemble, un groupe de députés.

(16 h 30)

Mais j'inviterais le député de Sauvé, si vous voulez, à faire attention à ses paroles. Je dois avouer que j'étais en train de régler ma montre – ha, ha, ha! – pour bien minuter le temps et, malheureusement, je n'ai pas saisi les paroles du député de Sauvé. Alors, je m'excuse, ça arrive rarement, mais je croyais que le tout irait très bien. J'étais en train d'ajuster... Alors, je vous inviterais à faire attention, si vous voulez, à vos propos, pour ne pas prêter des motifs indignes aux adversaires. Alors, M. le député de Sauvé.

M. Parent: Alors, M. le Président, maintenant que votre montre est réglée, nous allons mettre les pendules à l'heure. Nous allons continuer. Mais il demeure un fait, M. le Président, lorsqu'on surtaxe, lorsqu'on surcharge par des tarifs et des tarifications des personnes qui sont plus vulnérables que les autres, on les étouffe littéralement.

Une voix: C'est vrai.

M. Parent: Au seul chapitre des médicaments, lorsqu'on dit qu'on est en train de frapper d'une façon brutale les plus démunis de la société, au chapitre des médicaments, après avoir déclaré que les personnes âgées sont repliées sur elles-mêmes et enfermées dans des ghettos, le gouvernement poursuit sa croisade dans cette clientèle.

Des voix: Ah! Ah!

M. Parent: M. le Président, nul n'ignore que l'implantation du nouveau régime d'assurance-médicaments fera supporter à nos aînés un nouveau fardeau de 215 000 000 $ sur les 300 000 000 $ que le gouvernement compte épargner. Pensez-y, M. le Président! Les personnes les plus vulnérables! Ce n'est pas la majorité de la population du Québec, les personnes âgées. On leur charge, en «taxage», en prix de médicaments, une nouvelle tarification. On va chercher 215 000 000 $ chez les personnes âgées pour économiser 300 000 000 $; c'est les deux tiers du montant. Alors, si on dit qu'on ne frappe pas les personnes âgées, si on dit qu'on ne donne pas une baffe aux aînés, bien, qu'est-ce qu'on leur fait, M. le Président?

Cette nouvelle taxe, elle a été décriée, elle a été décriée par 83 % des citoyens, suite à des sondages qui ont dit que nous contestons l'alourdissement du fardeau financier imposé aux personnes âgées. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, M. le Président, les faits sont là. Et ils se sentent étouffés, ils se sentent bafoués, ils se sentent ignorés par ce gouvernement.

Dans un souci de transparence, d'honnêteté vis-à-vis des bâtisseurs de notre société, j'aimerais que le ministre de la Santé et des Services sociaux s'engage à ce que son projet de loi qui implantera le nouveau régime médical d'assurance-médicaments corrige cette iniquité. Hier, je lui ai posé une question. Hier, je lui ai posé une question, M. le Président. Je lui ai demandé s'il était prêt à faire du réaménagement. Il ne m'a pas répondu. Il a dit: Quelle iniquité? Bien, quand on charge 215 000 000 $ à une partie de la population pour en économiser 300 000 000 $, M. le Président, les deux tiers, toujours sur les mêmes, s'il n'y a pas d'iniquité là, il n'y en aura jamais. Alors, je ne comprends pas que le ministre de la Santé et des Services sociaux, hier, disait: Quelle iniquité? Il y a une iniquité envers ces personnes âgées et, encore une fois, on les met au rancart de la société.

J'ai demandé, hier, au ministre, lors de la période des questions: Est-ce qu'il est capable de rencontrer le ministre des Finances, le ministre de l'Économie, son collègue, et lui dire, comme ça se passe au Conseil des ministres: Bernard, pense donc aux personnes âgées. Dans ton budget qui s'en vient, veux-tu être prudent? On les a assez frappées. On leur a assez dit qu'il fallait couper chez eux. Veux-tu nous aider à aider les gens qui ont bâti la société d'aujourd'hui? Il est encore temps de le faire. Le budget, c'est jeudi.

Et ça, il n'y a pas seulement l'opposition qui décrie ça. Il n'y a pas seulement le député de Sauvé qui décrie ça. Je regardais dans le journal du 24 avril, un citoyen, Roger Sauriol, de Chambly. Roger Sauriol, de Chambly, écrivait une lettre ouverte, dans le journal, à MM. les ministres et MM. les députés. J'imagine que c'était à des députés du parti ministériel. Il leur disait: Je viens d'apprendre avec stupéfaction la manière dont vous allez instaurer l'assurance-médicaments. C'est tout simplement une taxe déguisée. Vous voulez faire payer des personnes âgées qui ont un revenu de 25 000 $ brut et plus par année ou par couple. Vous devriez vivre, M. le ministre, avec cette somme. Vous considériez que cette catégorie de gens, gens riches, comme vous le laissez entendre... Laissez-moi vous dire que vous rêvez en couleur. Messieurs du gouvernement – et je cite encore M. Sauriol...

Une voix: Messieurs dames...

M. Parent: Messieurs dames, aussi.

Une voix: Messieurs dames.

M. Parent: Mais, lui, il disait: Messieurs du gouvernement – je cite; messieurs dames, si vous voulez – vous vous mettez le pouvoir gris à dos. Si vous croyez que les gens âgés oublient vite, détrompez-vous. Aux prochaines élections ou au référendum, nous nous souviendrons de ce que vous avez fait aux gens âgés. Et j'ai hâte que les travailleurs disent aux gouvernements, soit provincial ou fédéral: Assez, c'est assez! Nous avons au Québec – et je cite encore M. Sauriol – une très belle devise qui dit «Je me souviens». Eh bien, au moment opportun, messieurs du gouvernement, dit M. Sauriol, nous nous en souviendrons.

M. Sauriol, c'est un citoyen qui demeure à Chambly, qui vit justement une situation difficile et qui la décrit comme nous la décrivons aujourd'hui et comme c'est notre devoir de le faire en tant qu'élus. Denis Lessard, comme citoyen, c'est un journaliste, ce n'est pas un député. Dans La Presse de samedi: «Les aînés passent encore à la caisse – c'est lui qui le dit. Les retraités passeront de nouveau à la caisse dans le budget que prévoit déposer, jeudi prochain, le ministre des Finances, Bernard Landry. Après la fin de la gratuité des médicaments proposée par le ministre de la Santé, la fin des remboursements pour hospitalisation à l'étranger – on en reparlera plus tard – l'abolition du crédit en fonction de l'âge sur l'impôt foncier dans les budgets de l'an dernier, Québec s'apprête à donner un autre coup de vis qui touchera les aînés, a-t-on appris hier. Québec touchera aux déductions accordées aux personnes âgées.»

Écoutez, on parle de ne pas reconnaître les frais occasionnés par la maladie pour un Québécois qui est à l'étranger, un Québécois qui passe sa vie ici, au Québec, qui paie des taxes 12 mois par année et qui prend un mois de vacances, par exemple en Floride ou dans le Sud, ou à un autre endroit; s'il est malade, on nous annonce que, dans le prochain budget, on ne reconnaîtra plus ses frais d'hospitalisation. Pensez-y, c'est du vol! C'est du vol, parce que cette personne-là sort... Il faudrait qu'elle soit ghettoïsée au Québec, qu'elle ne bouge plus puis qu'elle demeure sur la rue Saint-Antoine, là, puis qu'elle reste là malade? Ou en bonne santé? Écoutez... Et qui va dans le Sud? Quelles sont les personnes qui sont sujettes à voyager le plus? Ce sont les personnes qui sont retraitées, ce sont les personnes qui sont vieillissantes, ce sont les personnes qui ont besoin de repos, de soleil, d'un meilleur climat. Et c'est sur eux autres qu'on va encore frapper.

M. le Président, j'aimerais que les gens de l'autre bord prennent leur siège et respectent le droit de parole des membres de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à vous asseoir. M. le député de Sauvé.

M. Parent: Merci beaucoup, M. le Président.

Une autre mesure qui va apparaître dans le budget de jeudi. Dans le budget de jeudi, les mauvaises nouvelles qui s'annoncent commencent à faire grincher des dents, même les personnes âgées. Mme Langlois, directrice adjointe de la Fédération de l'âge d'or, elle dit: Ces nouvelles prises... Ces nouvelles...

Je peux continuer à parler? Est-ce que le député, là, l'ancien ministre qui est devenu député, peut jouer son rôle de député et laisser les autres...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, je vous inviterais effectivement à respecter celui qui a la parole, parce que ça dégénère. Alors, M. le député de Sauvé, vous avez la parole, et je demanderais aux autres de respecter le droit de parole.

M. Parent: J'espère. Moi, je respecte la parole des autres, et, ici, du côté de la Chambre, on respecte toujours la parole des autres. Je ne comprends pas ça. Quand ça fait mal... Je le sais que ça fait mal. Ça fait mal. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? C'est eux autres qui font mal, ce n'est pas moi. Ce n'est pas le fun de se le faire dire, je le sais.

Selon les données de la Fédération de l'âge d'or du Québec – ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Fédération de l'âge d'or du Québec, c'est Mme Langlois – le revenu moyen des plus de 65 ans était de 17 265 $ par année en 1994. Près de 2 000 $ de moins que la moyenne canadienne. Les femmes, surtout, ont des problèmes. Les retraités du Québec ont en moyenne 13 200 $ par année pour vivre. Seulement 5 % des retraités ont un revenu de ménage dépassant 40 000 $. Et c'est sur elles, ces personnes-là, que l'on frappe le plus.

On a l'impression, M. le Président, que le gouvernement au pouvoir a entrepris une croisade contre les personnes âgées, contre les aînés. Est-ce qu'ils veulent leur faire payer un prix pour les gestes qu'ils ont peut-être posés il y a à peine six mois? J'espère que non. J'espère qu'on ne dira plus, qu'on n'entendra plus dans cette Chambre que le référendum a été perdu à cause de telle, telle, telle catégorie de personnes. Eh bien, ça semble ça. On dirait que l'on veut se venger. Et, ça, c'est regrettable, M. le Président. Les personnes âgées, les Québécois et les Québécoises n'ont pas le droit de recevoir un tel traitement.

(16 h 40)

Ce qui arrive... Je regarde l'autre éditorial, Jean Martel, Le Soleil : «Les grands-parents pris au piège.» Québécois pris dans la cage aux homards, les grands-parents pris au piège. À l'heure où on se parle, avec les familles éclatées, les parents, les grands-parents, les familles divisées, on demande aux grands-parents de prendre des responsabilités face au paiement d'une pension alimentaire pour les petits-enfants, des petits-enfants qu'ils n'ont souvent jamais connus, qui ne savent même pas qu'ils existent, et tout de suite on retourne sur les grands-parents puis on leur dit: Vous êtes responsables de vos petits-enfants.

Mais êtes-vous conscients, en amenant les grands-parents devant la cour, devant un tribunal, des maux que vous leur causez, des maux psychologiques que vous leur causez? Des gens qui ont respecté la loi toute leur vie, une bonne journée, se ramassent avec devant eux une sommation de paraître en cour pour pourvoir à la pension alimentaire d'une personne dont souvent ils ignoraient l'existence. Imaginez-vous le traumatisme de nos pères, nos mères qui ont suivi la loi, qui ont été respectueux de la loi toute leur vie et qui, une bonne journée, reçoivent un subpoena pour passer en cour. Il n'y a pas seulement les traumatismes financiers, il y a les traumatismes moraux que subissent ces gens-là.

M. le Président, je n'irai pas plus loin; la motion, elle a été déposée. Ce gouvernement-là a fait la preuve qu'il manquait de respect envers les aînés, et j'inviterai tous les membres de l'Assemblée nationale à prendre conscience de la réalité, à prendre conscience de l'importance du rôle des aînés dans notre société et à voter pour cette motion de blâme.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Sauvé. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens. M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, d'entrée de jeu, je voudrais offrir mes remerciements au député de Sauvé de m'avoir donné l'occasion, une occasion que je pourrais appeler en or, de faire le point sur la condition des aînés, sujet non seulement qui m'importe à titre de citoyen, mais qui constitue en lui-même un enjeu considérable pour notre société. Je dis qu'il s'agit là d'une occasion en or, parce que j'avais envisagé toutes sortes de moyens prévus au règlement de l'Assemblée nationale afin de rectifier un certain nombre de faits dont je vous parlerai plus loin. Mais, compte tenu de l'application très restreinte de la disposition sur la question de fait personnel et de l'impossibilité, à toutes fins pratiques, de faire le point, de me prévaloir d'une question de privilège, seule l'initiative de l'opposition pouvait me permettre d'intervenir et d'exposer les véritables principes que je prône à titre de ministre responsable des aînés.

Les propos qui me sont prêtés sont repris par le libellé de la motion qui est devant nous et découlent d'un article de la page frontispice du quotidien Le Soleil en date du 26 avril dernier. C'est ce qui fait dire au député de Sauvé, en introduction à la motion qu'il propose au débat aujourd'hui à l'Assemblée: «Que l'Assemblée dénonce le gouvernement du Parti québécois qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société...»

Il nous faut faire le point. D'abord, cet article paru dans Le Soleil , sous la plume de Mme Marie Caouette, soulignait qu'à l'occasion du conseil provincial de l'Association des retraitées et retraités de l'enseignement du Québec j'avais fait lire mon discours par le député de Taschereau, M. André Gaulin, un discours qui, selon la journaliste, accusait les retraités – et elle me citait, apparemment, et je reprends l'expression utilisée – de constituer une génération «tentée de vivre repliée sur elle-même et enfermée dans des ghettos». C'est ce qu'on retrouvait à la première page du Soleil .

Or, quels sont les faits? D'abord, à propos de mon absence au conseil provincial, c'est une séance spéciale du Conseil des ministres qui a été convoquée à la veille de l'événement, à l'heure même où j'avais convenu de participer au conseil provincial, qui m'a empêché d'y participer. Et, afin de ne pas laisser en plan une assemblée à laquelle j'avais convenu de participer, j'ai demandé à un collègue, le député de Taschereau, de me remplacer, lequel a d'ailleurs aimablement accepté de me représenter à pied levé afin de prononcer le discours, dont copie, d'ailleurs, a été déposée en Chambre et transmise à tous les députés, y compris au député de Sauvé.

Deuxièmement, à propos du discours, à propos du ton du discours, ceux et celles qui auront lu ce texte auront bien constaté que le discours en question n'affirmait en rien ni ne laissait sous-entendre que les aînés, comme on me prêtait ces propos, et je cite: «se complaisent à vivre repliés sur eux-mêmes et à s'enfermer dans des ghettos.» Le texte souligne plutôt, aux pages 7, 8 et 9, et je cite: «Il faut déplorer – déplorer, M. le Président – l'isolement, la solitude et l'exclusion des aînés de la vie active de la société, qu'il résulte parfois de cette problématique un phénomène qui fait en sorte que des gens vivent dans une situation qui est déplorable, que cet isolement peut aussi se traduire par un repli sur soi amenant certains aînés à vivre en marge de la société et, surtout, que cette situation n'est pas souhaitable et qu'il faut la dénoncer.»

Voilà le sens, M. le Président, des propos. Au contraire, et je l'expliquais, dans le discours, qu'il faut voir dans les aînés un type de ressources, d'expérience, de savoir-faire qui ne peuvent que s'acquérir au fil des années, donc une expérience tout à fait exclusive; que les aînés, aussi, participent depuis toujours à la vie active de la société et qu'il nous faut aussi faire en sorte de projeter ce que j'appellerais une image positive du vieillissement, qu'il faut promouvoir la complémentarité entre les générations, qu'il nous faut éliminer les barrières qui se sont installées progressivement et préserver la dignité des uns et des autres.

Par conséquent, M. le Président, je n'accusais en rien qui que ce soit. J'évoquais et je déplorais tout simplement un phénomène réel et véritable qui se traduit, pour certains aînés, par la solitude et par un sentiment d'exclusion. La lettre et l'esprit du discours étaient donc marqués au coin non pas de l'accusation, mais plutôt de la compassion et de la volonté d'éliminer les barrières entre les générations. Le texte qui a été transmis à tous nos collègues et déposé en cette Chambre est donc tout à fait contraire à l'interprétation de la journaliste Caouette. Je souligne aussi, par ailleurs, qu'il est intéressant d'observer que cette dernière ne m'a jamais sollicité d'entrevue avant de rédiger l'article en question. Je m'en remets aussi au jugement critique de l'Assemblée afin d'apprécier si les règles d'éthique consistant à obtenir les deux versions d'une problématique avant de rédiger un article de presse ont été correctement appliquées.

Consécutivement aussi à la publication de l'article, le 26 avril dernier, le journal Le Soleil a recueilli, par voie d'entretien téléphonique, le lundi 29 avril 1996, les commentaires de Mme Julie Lévesque, vice-présidente du Conseil permanent de la jeunesse. Celle-ci a souligné que mon propos à l'occasion du conseil provincial des retraités de l'enseignement du Québec apparaissait, disait-elle, dangereux et alimentait les préjugés. Or, il s'avère que le Conseil permanent de la jeunesse, par la voie de son président, M. Michel Philibert, a indiqué à mon cabinet que ni le Conseil ni Mme Lévesque n'avaient pris connaissance du texte de mon allocution au moment d'accorder l'entrevue au Soleil , que le Conseil permanent de la jeunesse n'avait pas eu le réflexe d'en demander la copie, que les propos de Mme Lévesque ne s'inscrivaient qu'en réaction à une coupure de presse et non au verbatim du discours.

Par ailleurs, Mme Lévesque soulignait que le Conseil permanent de la jeunesse – et je cite – «avait mal pris mon affirmation voulant que les jeunes soient sans porte-parole». Je n'ai jamais écrit ni prononcé de telles paroles. En effet, le discours, aux pages 5 et 6, soutient, et je cite: «Si vos enfants sont un peu plus âgés, c'est-à-dire autour de la trentaine, et qu'ils ont une jeune famille, vous les voyez peut-être se débattre pour concilier le travail et les responsabilités familiales et, s'ils le peuvent, en plus, leur vie sociale. Vous les entendez peut-être parler de leurs difficultés financières, des frais de garde élevés, etc. Ces jeunes familles n'ont pas, comme vous, une voix pour se faire entendre. Ces jeunes gens sont peut-être trop occupés pour créer une association de jeunes familles.» Ainsi, les articles publiés le 26 avril et le 1er mai derniers sont tout à fait contraires au texte du discours prononcé au conseil provincial des retraités de l'enseignement du Québec.

(16 h 50)

Cette mise au point étant maintenant faite, il nous faut insister sur le fondement du véritable discours qui, essentiellement, porte sur les liens, sur la solidarité entre les générations. Et, sur le fond, M. le Président, comme député, comme ministre, je crois que, devant la réduction des ressources de l'État, face aussi au vieillissement de la population et aux problèmes sociaux comme le chômage, le décrochage scolaire ou même la pauvreté, la société n'aura d'autre choix que d'apprendre la concertation et le dialogue entre les générations. Un projet de société auquel nous tenons tous ici, au Québec, et au-delà de la vie partisane, ne peut réussir sans tenir compte des besoins et du potentiel de l'une ou l'autre des générations.

Et c'est en septembre 1994, lors d'un colloque, que le sociologue Jacques Grand'Maison disait, et je me permets de le citer: «Nous allons vers un nouveau pacte intergénérationnel. Nous n'avons pratiquement pas fait de choix durant la prospérité, nous allons faire des choix terribles à faire. Durant ces choix, est-ce qu'on va jouer les vieux contre les jeunes, les jeunes contre les vieux? Trop souvent, je crois que nous avons comme défaut de chercher à établir dans nos relations un rapport entre dominants et dominés. La complicité sur cette base ne peut certainement pas s'établir. Elle ne peut s'établir, cette complicité, sur des bases d'obligation et de culpabilité, mais plutôt, cette complicité, cette solidarité doit s'établir sur des fondements où jamais la compréhension et le partage ne sont étrangers.»

Les enjeux qui nous interpellent...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le ministre. M. le député de Sauvé, s'il vous plaît.

M. Parent: M. le Président, je voudrais m'excuser auprès du ministre, M. le Président, mais j'ai l'impression que ses collègues ne sont pas ici pour...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, est-ce que c'est une question de règlement, s'il vous plaît? Est-ce que c'est une question de règlement ou... Appel au quorum.

Alors, si vous voulez attendre une minute, je vais vérifier, s'il vous plaît. On me dit qu'il n'y a pas de commission qui siège présentement, je vais vérifier.

Effectivement, il manque quelques députés pour le quorum. Alors, à moins qu'ils n'entrent immédiatement, nous allons suspendre.

Alors, je vais revérifier à nouveau, là, rapidement.

Il en manquerait un. Alors, rapidement, je vais être obligé de suspendre si ça ne se règle pas immédiatement.

Alors, nous allons suspendre, et que l'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 16 h 54)

(Reprise à 16 h 55)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons reprendre nos travaux. J'inviterais M. le député... M. le ministre à reprendre la parole, s'il vous plaît. Je vous cède la parole.

M. Boisclair: M. le ministre et aussi député. M. le Président, donc, il y a un certain nombre d'enjeux qui nous interpellent, et non seulement ces enjeux sont-ils bien réels, mais ces enjeux sont aussi immédiats, que ce soit au titre de la révision du régime de rentes, de l'obligation alimentaire des grands-parents, auxquels M. le député de Sauvé a fait référence tout à l'heure, ou de la réforme de santé. Il est clair que certaines décisions heurteront tôt ou tard parfois certaines habitudes acquises, parfois aussi heurteront une certaine forme d'indifférence. D'où, il me semble, M. le Président, que la nécessité de dialoguer franchement – donnons l'exemple de la dernière conférence socioéconomique – et aussi de mettre en plan, ne serait-ce que pour quelques mois et peut-être pour quelques heures seulement, de mettre de côté la langue de bois, de mettre de côté les jeux de coulisses et de mettre de côté la montée en épingle et la mise hors contexte, pour des fins de politique partisane, d'un discours qui, à l'instar de celui dont je vous parle, cherche tout simplement, tout bonnement à évacuer les clichés. Le député de Sauvé me saura fort gré, j'en suis convaincu, de ne pas identifier ceux qui tiennent pareil discours.

D'une façon plus générale, aussi, la motion d'aujourd'hui réfère aux gestes que pose ou posera, ou que l'on prête au gouvernement de vouloir poser. Il serait aussi fort intéressant de prendre quelques minutes pour aborder les gestes que, précisément et fort heureusement, le gouvernement ne posera pas à l'égard des aînés. Lors de la dernière session, c'est le député de Sauvé qui a déposé le projet de loi 191 portant sur la protection du droit des aînés. Et j'invite tous mes collègues à être attentifs au propos qui suit. Ce projet de loi s'inspire de 66 articles de la Loi sur la protection de la jeunesse et met notamment sur pied une commission de protection des droits des aînés calquée sur l'actuel volet jeunesse de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ou, si on préfère, de l'ancienne Direction de la protection de la jeunesse.

Même si le principe a pu apparaître généreux, après une consultation et après étude, je considère, comme le Conseil des aînés le souligne, que ce projet de loi dont les dispositions sont simplement calquées sur une loi qui s'adresse aux enfants, même si ce projet de loi a fait l'objet de l'adoption ici, à l'Assemblée nationale, qu'il ne faut pas procéder plus loin dans l'adoption de ce projet de loi. M. le Président, ce n'est pas par hasard si le projet de loi 191 ne se retrouve pas au feuilleton de l'Assemblée. Je me permets de le souligner, M. le Président, parce que, à titre de ministre responsable des aînés et aussi récemment entré en fonction, j'ai été stupéfait de l'ampleur de l'opposition que suscite l'initiative du député de Sauvé, et ce, à peu près auprès de tous les groupes d'aînés, y compris auprès du Conseil des aînés, qui, dans un avis récemment soumis, a carrément rejeté les modalités prévues au projet de loi 191. Et afin, M. le Président, de joindre l'écrit à la parole, je requiers le consentement de l'Assemblée pour déposer l'avis en question, accompagné du communiqué de presse émis à cette occasion par le Conseil des aînés.

Une voix: Consentement.


Document déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement. Alors, le document est déposé. M. le ministre.

M. Boisclair: Cet avis, M. le Président, que je viens de déposer à l'Assemblée nationale, à la page 3 et au deuxième paragraphe, soutient, et je cite: «Que le projet de loi vise spécifiquement la protection des droits des aînés uniquement en raison de leur âge et s'avère donc discriminatoire. Une telle loi ne réussirait qu'à entretenir les stéréotypes qui associent la vieillesse avec l'improductivité, la dépendance, l'incapacité d'agir, la maladie et la mort. La logique – et les dispositions de cette loi – risquerait de marginaliser, voire d'infantiliser les aînés, elle dénoterait une attitude paternaliste à leur égard et créerait chez eux un faux sentiment de sécurité».

M. le Président, le député qui a déposé à l'Assemblée nationale ce projet de loi devrait aujourd'hui profiter de ce débat pour s'engager à ne plus jamais redéposer le projet de loi 191 à l'Assemblée nationale. Il nous faut mettre fin à l'incertitude que la position inconnue du parti de l'opposition, du député de Sauvé, crée auprès des personnes âgées, et j'espère qu'en réplique il aura l'occasion de dire qu'il abandonne cette idée de revenir avec le projet de loi 191.

(17 heures)

Je souligne que ce verdict est partagé par tous les membres du Conseil des aînés, dont certains représentent les associations d'aînés les plus importantes, dont l'Association des retraités du gouvernement du Québec, la Fédération de l'âge d'or du Québec, l'Association québécoise de défense des droits des retraités-es et préretraité-es et, enfin, l'Association québécoise de gérontologie. J'aimerais d'ailleurs aussi rappeler au député de Sauvé que figure parmi les membres du Conseil des aînés un représentant de l'Association des retraitées et retraités de l'enseignement du Québec, en l'occurrence M. René Allard, lequel souscrit par écrit et publiquement à la cinglante opposition du Conseil à l'égard des dispositions prévues au projet de loi présenté par le député de Sauvé. J'invite le député de Sauvé à se joindre à moi à la prochaine réunion du conseil provincial de l'Association des retraités. J'en suis convaincu, il sera interpellé, c'est le moins qu'on puisse dire, sur la condition des aînés.

Là, cependant, où diffère mon opinion de celle du Conseil des aînés, c'est que le projet de loi du député de Sauvé ne crée pas un faux sentiment de sécurité mais plutôt un vrai sentiment d'insécurité. Cette insécurité, elle se mesure à l'ombre de mesures et de nombreuses voix qui s'élèvent pour dénoncer ce bijou de l'âgisme et de l'infantilisme. J'ai d'ailleurs reçu, non seulement à titre de ministre responsable de la Condition des aînés, mais aussi à titre de député de Gouin, de nombreuses lettres et entendu moult représentations d'aînés vertement opposés aux dispositions prévues au projet de loi 191, et je me permets de faire la lecture d'une de ces lettres adressées à mon intention par le vice-président de l'association québécoise des retraités, et je cite: «M. André Boisclair, député de Gouin.

«La présente est à l'effet de vous informer que j'ai pris connaissance du mémoire sur le projet de loi déposé au gouvernement du Québec en février 1996 par le Conseil des aînés.

«J'appuie fortement les revendications du Conseil des aînés et je m'oppose à ce projet.

«Veuillez agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.»

M. le Président, j'ai ici une série de lettres qui confirment ce point de vue et je pourrais, à la demande du député, les déposer et les rendre publiques. On m'en voudra donc peut-être d'insister autant sur les dispositions, sur le contenu du projet de loi 191 présenté par le député de Sauvé, mais il ne s'agit pas ici de s'appesantir sur des conjectures, sur des propos tenus ou non tenus à l'occasion d'une rencontre, ou il ne s'agit pas non plus d'insister sur des procès d'intention que l'on veut intenter, mais bien, et bel et bien, sur des écrits, sur des écrits sérieux: les dispositions d'un projet de loi et un avis du Conseil des aînés. Ce n'est pas de l'exégèse, comme tentent de le faire certaines personnes, et de le démontrer, mais bel et bien une proposition dont nous avons été saisis à titre de législateurs.

Les dispositions, les articles, lorsqu'on les regarde un par un, de ce projet de loi préparé par le député de Sauvé... Parce que c'est quand même assez original: c'est un député qui, à titre de député, s'est servi de son initiative pour présenter un projet de loi public. Donc, c'est le député qui a rédigé ce projet de loi. Ce projet de loi, si on allait au bout et si on faisait l'étude article par article, même si on peut s'entendre sur un certain nombre de principes, aurait pour effet de marginaliser les aînés et de les placer sous une juridiction, un régime particulier de droit faisant totalement abstraction des recours dont disposent déjà tous les citoyens du Québec aux termes de lois comme le Code civil, au titre aussi de l'ouverture des régimes de protection, de la Loi sur la curatelle publique, de la Loi sur la protection du consommateur, de la Charte des droits et libertés de la personne, et j'en passe.

Par ailleurs, les aînés qui éprouvent des difficultés et des problèmes peuvent compter sur le réseau familial ou sur des réseaux informels de même que sur plusieurs organismes communautaires qui défendent leurs droits et leurs intérêts. Selon, bien sûr, la gravité des cas, ils peuvent aussi recourir à ce qu'on appelle dans notre jargon le réseau institutionnel, pour s'informer, se protéger, pour se défendre ou pour recevoir des services. Et, parmi ces derniers, bon, on les connaît bien. Il s'agit des CLSC, du Protecteur du citoyen. Il s'agit aussi des tribunaux ou des cas de la curatelle publique ou des régimes de protection privés. Cette situation n'est peut-être pas idéale, mais elle consiste en le prix à payer pour laisser à tous et à toutes le droit de vivre normalement et aussi de consacrer l'obligation tout aussi incontournable qui incombe à l'État de laisser vivre, de laisser vivre simplement, de laisser vivre normalement.

Ce projet de loi, et je reviens sur ces dispositions écrites par le député de Sauvé, selon le Conseil, selon l'opinion du Conseil, se fonde strictement sur l'âge et sur une loi destinée aux enfants. À l'heure où tous s'entendent quant à l'urgence de favoriser l'intégration sociale des aînés, les dispositions du projet de loi 191 les marginaliseraient et les infantiliseraient. Chose plus grave, il s'agirait de faire abstraction du potentiel des aînés. Et rappelons qu'en 1992 «La politique de la santé et du bien-être» révélait que 65 % à 70 % des aînés ne nécessitaient aucun service particulier et avaient une vie active. Et, contrairement à la croyance populaire, la très grande majorité des aînés se comportent comme des citoyens engagés, comme des citoyens qui continuent d'assumer leurs responsabilités après l'âge de 65 ans. Les nombreux acquis provenant de connaissances, provenant de ce que je pourrais appeler aussi d'expériences variées qu'ils ont su accumuler au fil des ans contribuent à maintenir pendant de nombreuses années leur engagement dans la société.

Ainsi donc, M. le Président, notre gouvernement part de ce principe simple et clair que les aînés, qui sont, en très grande majorité, en pleine capacité de tous leurs moyens – moyens physiques, moyens intellectuels, moyens moraux – disposent, si je peux m'exprimer ainsi, d'une parfaite autonomie et sont parfaitement capables de défendre leurs droits et leurs intérêts. Ce principe, bien sûr, comporte un certain nombre d'exceptions, mais le principe, lui, demeure. C'est ce qui faisait dire au Conseil des aînés, suite à l'initiative du député de Sauvé, que: Il ne peut être accepté – je cite – que des droits fondamentaux de ces personnes soient mis en jeu par une quelconque loi et que, sous prétexte de poser un geste qui irait dans le sens d'agir en raison des intérêts d'un aîné, c'est-à-dire son bien, la commission pourrait ainsi le priver de son droit fondamental, soit celui de décider pour lui-même.

Ainsi donc, à l'instar de nombreux aînés, ma propre grand-mère de 92 ans a choisi de prendre le pari de vivre en parfaite autonomie et de vaquer aux activités sociales et culturelles qui caractérisent n'importe quel citoyen, qui caractérisent n'importe quelle citoyenne. Elle serait, M. le Président, la première à s'objecter, et avec raison, à une mise en tutelle aussi virtuelle que celle proposée dans les dispositions du projet de loi 191.

Ce que d'aucuns semblent oublier, M. le Président, c'est que les personnes âgées ne sont pas principalement des aînés et accessoirement des citoyens, mais d'abord des citoyens et accessoirement des aînés, et des citoyens qui, parfois, à cause de leur situation, doivent avoir recours à des services particuliers. Ces personnes ont d'abord le droit d'être reconnues pour ce qu'elles sont et non en considération de leur âge. La vision contraire à cette pleine et entière reconnaissance des aînés à titre de citoyens assujettis à tous les droits et à toutes les obligations d'usage revient précisément à véhiculer, pour employer le verbatim de la motion, une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société.

(17 h 10)

Et, puisque nous en sommes au verbatim, M. le Président, comment décrire plus adéquatement les intentions sous-jacentes aux dispositions, aux articles de loi qui sont contenues au projet de loi qui a été l'initiative du député de Sauvé, M. le Président? La seule façon de le faire, c'est en utilisant le même terme que l'on a galvaudé au sujet du discours dont j'ai déposé copie en Chambre. Ce terme, il apparaît maintenant clair à tous, c'est la fameuse ghettoïsation, et elle décrit à merveille, au mieux, les effets et, au pire, les intentions qu'emporte le projet de loi 191 avec ses dispositions qui lui sont précises. M. le Président, c'est précisément non pas ce que nous tenterions de faire, mais bien ce que nous assurerions, soit la ghettoïsation des aînés, s'il nous fallait proposer et aller plus loin dans l'étude détaillée du projet de loi 191.

C'est pourquoi, en conclusion, je demande à nouveau au député de Sauvé, et une fois pour toutes, de donner des suites et répondre au Conseil des aînés, de prendre l'engagement, ici, à l'occasion de ce débat, de ne pas représenter en Chambre son projet de loi dit Loi sur la protection des aînés et, ainsi, de ne plus continuer, par son silence, à faire planer le doute, l'insécurité auprès d'une population qui ne doit pas faire l'objet de telles pressions... et qui inquiète bien des aînés. J'ai été étonné, M. le Président, du nombre de représentations que j'ai reçues. Le député de Sauvé doit profiter de ce débat pour faire connaître l'intention de sa formation politique.

Quant à moi, M. le Président, je vous rappellerai que mes collègues ministériels me reconnaissent l'habitude d'accoler à mes formules le préfixe «dé». Je reprends aujourd'hui ce préfixe pour inviter mon collègue à déghettoïser sa conception des aînés et à travailler avec nous à un projet plus intégrateur et plus rafraîchissant, celui d'assurer, de faciliter et de promouvoir la pleine et entière insertion sociale des aînés, de faire en sorte que leur potentiel puisse continuer à prendre davantage de place dans notre société. C'est ce que nous devons dire à tous et à toutes.

En conclusion, M. le Président, à l'évidence même, la motion du député de Sauvé contient un vice de fond et elle doit être rejetée. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin. Je vous rappelle qu'il reste 19 minutes à votre formation, sans compter les 10 minutes de réplique. Alors, si vous voulez partager votre temps en conséquence, là. Peut-être que vous aurez un cinq minutes additionnel si les députés indépendants ne se présentent pas.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. C'est à mon tour de supporter la motion du député de Sauvé:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement du Parti québécois qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société pour justifier, malgré son engagement, l'augmentation de leur fardeau financier par différentes mesures.»

Je voudrais également souligner que le député de Sauvé est sûrement le meilleur défenseur des droits des personnes aînées, et ça me fait plaisir d'avoir la chance et le privilège de travailler avec un collègue de cette compétence.

Je voudrais, M. le Président, si vous me permettez, vous rappeler que, hier, j'ai présenté une motion qui voulait souligner la semaine du 5 au 11 mai, Semaine provinciale des centres d'hébergement et de soins de longue durée. Alors, les deux côtés de la Chambre ont accepté, mais, de l'autre côté, on a refusé de débattre la motion, on a refusé d'entendre ce qu'on aurait pu, ensemble, dire sur les personnes aînées. On voulait souligner que cette semaine du 5 au 11 mai a pour thème «Ma vie est un jardin» et on voulait également souligner l'excellent travail accompli par le personnel de ces centres dans des conditions extrêmement difficiles. «Ma vie est un jardin», c'est aussi maintenir une qualité de vie et de soins dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, puisque, comme on le sait, ces résidents, ils n'y sont pas que de passage, ils y sont pour de longues périodes. C'est leur milieu de vie.

Le président de cette semaine est M. Philippe Lapointe. On connaît M. Lapointe comme étant un homme actif et dévoué qui représente bien les personnes aînées, et je pense qu'on peut le féliciter.

Au moment où il faudrait reconnaître sérieusement la contribution des aînés, eh bien, ce qu'on reçoit comme cadeau du ministre de la Santé et du gouvernement du Parti québécois, ce sont des hausses de tarifs ou de taxes, lorsque les patients, les résidents en hébergement doivent payer une contribution. Et on sait que la grande majorité des patients doivent payer une contribution qui peut varier de 800 $ à 1 150 $. Eh bien, le ministre, dans ses crédits, nous avait indiqué une petite phrase bien cachée disant qu'il voulait faire une augmentation de la contribution des adultes hébergés, et ce n'est qu'en le questionnant qu'on a su l'ampleur de cette augmentation de 7 % à 10 %. Quand on sait que ces montants rapportent au ministère de la Santé plus de 420 000 000 $, 8 % à 10 %, on vient de voir un autre endroit bien caché dans toute l'opération des crédits où les personnes aînées vont être mises à contribution de façon substantielle.

Autre point important, vous vous souvenez, M. le Président, de cette belle promesse de 1 000 nouvelles places par année en centres d'hébergement jusqu'en l'an 2000. Alors, dans l'opération des crédits, on a pu voir qu'il y a eu 384 places de créées. Et le ministre est obligé de rendre à César ce qui est à César, c'étaient les places qui avaient été autorisées sous l'ancien gouvernement, sous le gouvernement libéral. Il a donc confirmé qu'il n'y a eu aucune nouvelle place en hébergement de créée depuis l'accession au pouvoir de ce gouvernement.

Les listes d'attente. Vous vous souvenez aussi de cette belle promesse de diminuer de moitié l'ensemble des listes d'attente des établissements de santé. Eh bien, plus de 5 000 personnes sont actuellement en attente d'une place dans les centres de soins de longue durée du Québec, et on connaît l'interminable délai d'attente qui peut causer des préjudices dans plusieurs cas.

Nous avons également une plaie, au Québec. Cette plaie, ça s'appelle les foyers clandestins. Eh bien, on peut indiquer qu'il y a encore plus de 65 000 patients qui demeurent dans des établissements, des foyers clandestins qui n'ont pas de permis. Quand on sait que le gouvernement actuel est assez habile pour créer des polices partout dans le dossier de la langue – on l'a entendu dernièrement – est-ce qu'on ne pourrait pas avoir des gens qui puissent vérifier les conditions de vie des personnes aînées? Ça, ça ne semble pas important, de l'autre côté de la Chambre.

Moi, je demande au ministre, et au nom de toute notre formation, d'accorder toute l'importance qui se doit à la qualité de vie et à la qualité des soins donnés aux personnes hébergées, car les professionnels du milieu craignent que ces centres ne deviennent des mouroirs, et c'est vraiment l'expression qui est employée par les professionnels. À cause des coupures, des coupures vraiment aveugles dans le secteur de l'hébergement, on craint que ces établissements deviennent de véritables mouroirs.

Autre cadeau du ministre, l'assurance-médicaments. Rappelons-nous cette promesse lorsqu'il y a eu l'introduction de frais modérateurs de 2 $ pour les personnes aînées lorsqu'elles devaient acheter leurs médicaments. Eh bien, les gens d'en face ont déchiré leur chemise en disant que «ça n'a pas d'allure, on exploite les personnes aînées». Bien, là, on va laisser tomber ce 2 $ là et on va les facturer, on va les taxer, mais pas un petit peu. On parle d'un premier 176 $ – et c'est à vérifier, hein? nous avons bien hâte d'étudier leur fameux projet de loi – ensuite, un autre 100 $ et, enfin, 20 % de l'ensemble de la prescription. Alors, une personne qui a besoin, en moyenne, de 800 $ de médicaments dans l'année devra contribuer pour plus de 400 $ avec ce gouvernement et cette autre façon de gouverner.

Le ministre dit que l'assurance-médicaments sera en vigueur en janvier 1997, mais on parle de l'instaurer graduellement. Les personnes aînées craignent qu'elles ne soient encore les premières à écoper. Et il y a trois dates dont ces gens sont très inquiets: la date de demain, avec la présentation du budget, parce qu'ils savent qu'ils vont être taxés de nouveau; le 1er juillet, parce qu'il y a d'autres tarifs qui vont rentrer en vigueur; et le 1er janvier 1997, de la même façon.

Le ministre laisse entendre que les personnes âgées sont riches, et c'est pour ça qu'on peut les taxer davantage. C'est ça qu'il nous dit, le ministre. Alors que les revenus moyens des gens de plus de 65 ans sont de 17 635 $ par année en 1994 – près de 2 000 $ de moins que la moyenne canadienne – seulement 5 % ont un revenu de ménage dépassant les 40 000 $ par année. Alors, on a l'intention...

Dans l'implantation du programme d'assurance-médicaments, on sait qu'on doit assurer 1 400 000 nouvelles personnes et qu'en même temps on doit économiser pour le Trésor 300 000 000 $ dans la même opération. Qui va payer? Les personnes âgées, 215 000 000 $ sur le 300 000 000 $.

(17 h 20)

Un autre élément de crainte pour les personnes âgées, et c'est demain qu'elles le sauront: les déductions pour les personnes âgées pourraient être revues à la baisse. M. le premier ministre a déclaré hier, je crois, que les crédits d'impôt, s'ils ne créent pas d'emplois, ils seront abolis. Bien, les crédits d'impôt pour les personnes âgées ne créent pas des emplois au sens que le premier ministre voudrait, mais ces gens-là ont travaillé toute leur vie, par exemple, et ils vont le perdre, leur crédit d'impôt, à cause de ce gouvernement.

M. le Président, les personnes aînées, dans l'ensemble, ont travaillé toute leur vie pour ramasser un peu d'argent, et, au moment où certaines d'entre elles peuvent en avoir un peu – on sait que la majorité n'en a même pas – eh bien, les taxes vont faire qu'on va aller prendre cet argent-là au moment où les gens ont contribué toute leur vie de façon active et qu'ils auraient droit à une retraite bien méritée. Alors, tout ça, c'est des taxes déguisées. Le ministre, il appelle ça des tarifs, des contributions alors qu'on sait vraiment, M. le Président, que ce sont des taxes.

M. le Président, en terminant, si nous sommes tous ici aujourd'hui, c'est parce qu'il y a eu des aînés avant nous et que nous leur devons respect et qu'ils n'ont pas à être traités comme le gouvernement du Parti québécois le fait aujourd'hui. Donc, M. le Président, j'apporte mon support à la motion du député de Sauvé, et je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin.

Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, M. le Président, je veux juste...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député, il reste sept minutes à votre formation plus les cinq... Alors, ça fait en tout 12 minutes.

M. Gendron: On va prendre les 12.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien.


M. François Gendron

M. Gendron: On m'avait dit plus que ça, M. le Président.

Très rapidement, M. le Président, j'ai été absolument renversé et estomaqué des propos tenus par le député de Sauvé. Je connais habituellement son professionnalisme comme député en cette Chambre, et je trouve que leur motion ne correspond pas du tout à la réalité objective des faits, incorrecte par rapport à son libellé et incorrecte par rapport aux faits. Il me semble qu'ici, en cette Chambre, lorsqu'on a l'occasion non pas de faire un discours pour ce que j'appelle «la galerie», non pas un discours partisan, non pas un discours de facilité à court terme, le nez dans la vitre, plutôt que de prendre un peu de dégagement...

La réalité des personnes âgées, je veux quand même en parler un peu. Je suis d'une circonscription où j'ai 50 municipalités. Il n'y a aucune de ces municipalités-là qui n'a pas son club de l'âge d'or, et ça fait 20 ans que j'ai des contacts fréquents, multipliés avec les personnes âgées. Ma propre mère vit ici, elle a 78 ans, j'ai quand même de très bonnes relations avec elle. Et, quand je prends juste quelques phrases, il faut vraiment être rendu loin ou avoir peu de choses à se mettre sous la dent de l'autre côté pour utiliser une motion du mercredi, qui est une motion de censure, je n'en démords pas, et non pas une motion de l'opposition... Et je reprends les termes du député de Sauvé. Nous, selon ce qu'il a dit, on s'acharne sur les personnes âgées, on les met... on le voit encore, et on renie nos aînés. Imaginez la sanction qui pourrait nous arriver, des gens qui renient leurs aînés. Moi, je ne ferais pas partie d'une formation politique qui renierait ses aînés puis qui n'aurait pas énormément de considération pour les personnes du troisième âge. Faire des discours... Je n'en reviens pas comme c'est malhonnête. Les derniers propos, encore, de l'autre intervenant, là: Ces personnes-là ont oeuvré toute leur vie, ont travaillé fort. Pensez-vous qu'on ne le sait pas? Pensez-vous qu'on n'est pas conscient de cette réalité-là, M. le Président?

Mais regardons honnêtement la réalité. La réalité scientifique, pas le discours démagogique des gens d'en face. Je cite la fin de leur discours. Il y avait un article qui disait ceci... Bref, l'opposition fait des discours sans aucun rapport avec la réalité parce qu'ils ne la connaissent pas et qu'ils veulent exploiter une situation politique partisane d'une façon incorrecte. Toutes les études scientifiques... Le titre, c'est: «Les aînés victimes des mythes de l'opposition et des mythes des gouvernements.» Les deux principaux mythes véhiculés le plus souvent, c'est que les aînés seraient repliés sur eux et seraient pauvres. Or, je cite: «ni repliés sur eux ni pauvres, comme groupe social, relèvent les études scientifiques».

Regardons quelques données, et, ça, c'est pas mal moins démagogique que ce qu'on a entendu. La réalité est la suivante: Il y a une fraction de personnes âgées qui ont certains problèmes, admettent les scientifiques qui ont regardé ces questions-là, mais cette proportion varie entre 7 % et 9 %. Elle n'est pas plus élevée que chez les autres groupes d'âge. Un tout petit nombre de personnes âgées se sentent malheureuses, déprimées ou seules. C'est un effet de myopie sociale propre aux organismes d'aide, disent-ils, que de projeter ces caractéristiques sur l'ensemble des aînés.

Regardez d'autres considérations: Les aînés ne sont pas isolés, affirment les chercheurs, ils ne sont pas repliés sur eux-mêmes. À cet égard, les chercheurs se sont penchés sur leurs sujets de préoccupation. Et j'aurais aimé ça, entendre une phrase là-dessus. Parce que, moi, quand je rencontre des personnes du troisième âge et des aînés, c'est effectivement ce dont ils me parlent. Regardez, M. le Président, leur sujet de préoccupation majeur... Et ça, c'est propre aux aînés, ça, c'est respectueux de relever ça, parce que c'est de ça que nos personnes du troisième âge parlent. Ils ont découvert – les chercheurs – que le souci majeur des gens du troisième âge ou des gens âgés, c'est le bien-être de leurs descendants et c'est le bien-être de leurs petits-enfants.

En termes clairs, les personnes du troisième âge ont exactement la même lecture que des gens responsables, qu'ils soient parlementaires ou pas. C'est qui, dans la société d'aujourd'hui, objectivement – pas d'un côté de la Chambre versus l'autre côté, moi, il me semble que ça n'a rien à voir – aujourd'hui, en 1996, dans la société québécoise, le groupe le plus mal foutu? C'est les jeunes. Et, ça, c'est une réalité prouvée, ce n'est pas une réalité de motion du mercredi de l'opposition qui, n'ayant rien d'autre à faire, décide d'utiliser le temps de la Chambre en utilisant faussement une motion de censure ou de blâme plutôt qu'une motion normale du mercredi.

Qu'est-ce que ça traduit, M. le Président? Ça traduit les personnes âgées que je connais. Je les rencontre fréquemment et elles me disent beaucoup plus leur inquiétude: Est-ce que tu es inquiet, toi, François, avec l'avenir qui a l'air à se préparer, par rapport à nos jeunes? Est-ce que tu penses qu'on va finir par régler nos problèmes d'endettement public? Ça, ils me parlent de ça. Est-ce qu'on va finir par prendre les virages dus à l'industrialisation et à la mondialisation, qui vont créer plus d'espoir pour plus de jeunes? Est-ce que, à un moment donné, il y aurait moins d'exclus?

Je cite encore le député de Sauvé, j'ai pris toutes les notes. Il dit que, nous, on frappe d'une façon brutale les plus démunis de la société. L'autre, qui a pris la parole, après – parce que je ne me rappelle pas de sa circonscription: La majorité des personnes du troisième âge n'ont pas d'argent, à ce qu'il a dit. Moi, je ne dis pas qu'elles sont riches, je n'ai jamais dit ça. Et on ne veut pas dire que les personnes du troisième âge sont riches. On veut dire objectivement: Les personnes du troisième âge ont compris la même chose que toute personne normale dans la société: le groupe d'âge le plus en difficulté, c'est les jeunes. Et, quand on a le culot de parler des vulnérables en associant les personnes du troisième âge, on sait qu'on n'est pas correct, parce que les plus vulnérables dans toute société, c'est les exclus, les malades, les pauvres et les jeunes. Et oui, la poche de pauvreté grandit nationalement, malheureusement, à cause de phénomènes, comme j'ai parlé tantôt, de mondialisation, d'endettement collectif, public exagéré dû à toutes sortes de folies qui ont été faites dans le passé et dû également à ce que j'appelle les virages de l'industrialisation, et ça nous prend du temps à les prendre pour adapter la réalité, que la croissance de la richesse se traduise plus par de l'emploi.

Moi, je me rappelle, il y a 10, 15 ans, dès qu'il y avait une croissance du produit national brut, c'était automatique, il y avait une croissance de l'emploi. Aujourd'hui, ce n'est plus vrai, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise! Et ce n'est pas de la faute du PQ ou des libéraux, c'est la faute de phénomènes beaucoup plus larges que de regarder ça à travers une petite lunette, un mercredi après-midi où on n'a rien à faire et on décide de faire une motion très bassement démagogique. Il n'y a pas d'autre terme, M. le Président.

Et la réalité objective nous dit: Les aînés comprennent que, dans une société comme la nôtre, les protections qui ont été offertes par la plupart des gouvernements, au chapitre des soins à domicile, au chapitre, entre autres, des centres d'accueil... Le député, critique de la santé de l'opposition disait: Écoutez, vous aviez pris un engagement de livrer 1 000 lits en centres d'accueil. Bien, premièrement, de 1976 à 1985, nous, on a fait beaucoup de développement en centres d'accueil. Ils ont été neuf ans ou bien presque neuf ans et demi – en tout cas, ça a été très long pour moi et la population du Québec – au pouvoir, il n'y en a pas eu, de développement, dans les centres d'accueil. Nous, on a repris un engagement d'en livrer 1 000 par année. Pensez-vous que le critique de la santé ne devrait pas savoir que cette réalisation d'engagement va se faire? Il fallait attendre les plans adoptés par les diverses régies régionales, mais, en 1996, oui, on maintient toujours l'engagement de livrer 1 000 nouvelles places en centres d'accueil.

(17 h 30)

Qu'est-ce que ça traduit, M. le Président? Ça traduit que la préoccupation des gens du troisième âge, nous l'avons et il faut l'avoir. Nous l'avons et il faut l'avoir au chapitre des soins à domicile, au chapitre du soutien à la Fédération de l'âge d'or, au chapitre des aides, au niveau des différents clubs de l'âge d'or. Et, moi, ce que je vois, c'est des gens de l'âge d'or qui, effectivement, sont généreux en bénévolat, qui ont augmenté énormément ce qu'on appelle le bon vieillissement ou l'espérance de vie. Ça doit être dû à des conditions objectivement meilleures qu'il y a 15 ans; et, ça, c'est des données réalistes.

Mais, quand je regarde la situation de mes trois jeunes, là, moi aussi, j'ai des inquiétudes et je ne trouve pas que... La mienne, quand j'étais jeune, versus la leur, j'aime mieux la mienne que la leur parce que j'avais bien moins d'inquiétudes sur le marché du travail, par rapport aux perspectives de l'avenir, puis ainsi de suite. Donc, même les gens du troisième âge reconnaissent correctement, avec objectivité, que tout gouvernement responsable doit mettre l'accent sur les deux drames qu'on vit actuellement: l'endettement public sans précédent et se forcer les méninges pour qu'il y ait moins d'exclus et qu'il y ait plus de jeunes qui aient confiance en l'avenir.

Mais, la motion, ce n'est pas ce qu'elle dit. «Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement du Parti [...] – regardez les termes – qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés...» Je n'ai jamais entendu, moi, le premier ministre ou des ministres de ce gouvernement-là qui ont déblatéré sur le rôle de nos aînés dans la société. C'est quoi cette affaire-là? C'est quand même ça, la motion. Ça prend un certain culot, M. le Président, pour arriver avec une motion du mercredi où les gens d'en face n'ont rien à faire et nous font accroire qu'ils vont améliorer la condition des personnes âgées et de déblatérer sur quelque chose qui n'a jamais été dit.

Ça n'a pas de bon sens qu'on soit rendu là, et c'est ça que j'entends. Puis, là, ces gens-là, ils disent: Écoute, tantôt, quelqu'un a dit: Le député de Sauvé, c'est le plus grand défenseur des personnes âgées. J'ai de sérieux doutes, là. Il y a toujours un bout. Oui, s'il pense qu'il améliore la situation des personnes âgées en faisant une motion qu'il sait incorrecte sur les faits, qui ne correspond pas du tout à ce que toutes les études scientifiques démontrent et qui, en plus, n'a aucune commune mesure par rapport à leurs propres préoccupations. Leurs préoccupations, je vous l'ai dit tantôt, c'est leurs petits-enfants, c'est d'arrêter de vivre au-dessus de nos moyens, d'arrêter de s'endetter.

Et là ça aurait été intéressant de dire: Est-ce que, dans les mesures que le gouvernement va adopter, il n'y a pas lieu aussi, cependant, de se préoccuper de la couche de personnes âgées pauvres? Parce qu'il y en a. Je n'essaie pas de vous dire que les personnes âgées, c'est toutes des gens qui ont des revenus exagérés. J'en connais, moi, dans mes 50 municipalités, qui sont pauvres. Mais les personnes âgées disent: Occupe-toi bien plus des jeunes puis de l'avenir, puis de l'emploi, puis de l'endettement, puis du gaspillage. Ça, occupe-toi de ça en étoile puis, après ça, nous, on va passer à travers. On a toujours réussi à passer à travers, puis on va se débrouiller. Et je regarde les mesures de mon gouvernement, et ce que je constate, c'est qu'il y aurait une espèce de mauvaise foi, qu'il y aurait une espèce de comportement, puis ils disent que, nous autres, on trouve ça le fun d'écraser davantage les personnes âgées, qu'on va essayer encore une fois, là, de les amenuiser puis de les rapetisser. Voyons donc! C'est quoi cette affaire-là?

Et même, attendez donc, d'abord, pour ce qui est de l'assurance-médicaments. Attendez de voir. Et quand un ministre se lève en Chambre – puis je conclus là-dessus – puis il dit: Écoutez, une chose qui est garantie, là, la règle universelle pour constater les plus démunis au niveau des personnes âgées, c'est ceux qui ont le supplément de revenu garanti, parce que, ça, ça veut dire que c'est une règle objective qui dit que tu es plus en difficulté que l'autre. Qu'est-ce qu'il a dit là-dessus, sur l'assurance-médicaments? Ces gens-là, ils n'auront pas à payer, puis ça va être gratuit, puis on va tout faire pour, socialement, les supporter, parce que, effectivement, une société qui ne serait pas capable d'assurer une certaine dignité puis une certaine qualité de vie à ses personnes du troisième âge, oui, on serait une société en difficulté, puis ce n'est pas le cas. Alors, moi j'aime les faits, M. le Président, puis je tenais à faire la présentation que je viens de faire.

Une voix: Très bien.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Semble-t-il que le député d'Abitibi-Ouest est devenu expert des pensées et des préoccupations des personnes âgées. Je tenais à parler dans le cadre de la motion du mercredi sur la condition des personnes âgées au Québec en grande partie à cause de la démographie de mon comté. Le comté de Notre-Dame-de-Grâce a 17 % de sa population qui est âgée de plus de 65 ans. 17 % du comté de Notre-Dame-de-Grâce sont âgés de plus de 65 ans. La moyenne pour le Québec est de 13 %. Alors, on constate très vite une très forte concentration de personnes âgées dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce. Malgré le fait que je suis le plus jeune député de ma formation politique, malgré le fait que je suis le plus jeune député dans l'histoire de Notre-Dame-de-Grâce, je suis également, comme le prétend le député d'Abitibi-Ouest, à l'écoute de mes concitoyens, et la vision en rose que le député d'Abitibi-Ouest vient de décrire, la condition des personnes âgées, n'est pas tout à fait partagée par mes concitoyens de Notre-Dame-de-Grâce âgés de 65 ans et plus.

Juste dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce, pour vous donner un petit aperçu, il y a deux fois plus de logements loués que possédés. C'est intéressant parce que ça vous donne un indice de la démographie de mon comté. Il y a 10 000 personnes qui vivent seules, dans mon comté, et on sait que beaucoup de personnes, en majorité les personnes qui vivent seules, c'est des personnes âgées.

Alors, tout ça pour dire que j'entends des préoccupations des personnes de 65 ans et plus quotidiennement dans Notre-Dame-de-Grâce, dans la communauté où je demeure et dans la communauté que je représente ici, à l'Assemblée nationale. Et, oui, les personnes âgées sont inquiètes également quant à la situation financière du gouvernement du Québec, la dette. Oui, ces citoyens sont inquiets. Ils ont raison d'être inquiets au niveau de l'implication des jeunes, de l'emploi pour les jeunes. Ils ont raison d'être inquiets, en partie parce que le Parti québécois est au pouvoir. Je comprends qu'ils ont raison de s'inquiéter sur l'avenir des jeunes. Ils s'inquiètent sur beaucoup de choses, mais il est faux, quant à moi, de prétendre qu'ils n'ont pas, pour eux autres, des préoccupations assez importantes quant à leur avenir et quant à leur fardeau fiscal, parce que c'est de ça qu'on parle, le fardeau fiscal des personnes de 65 ans et plus.

Parlant des faits objectifs – c'est ça qui intéresse le député d'Abitibi-Ouest – une récente étude menée par la firme Léger & Léger sur la situation des personnes âgées de 65 ans et plus sur l'île de Montréal a été très récemment dévoilée. Très intéressant: 41 % des personnes de 65 ans et plus sur l'île de Montréal déclarent un revenu de moins de 20 000 $ par année. 40 %. On ne sait pas quel pourcentage est en bas de 15 000 $ ou de 10 000 $. L'étude que j'ai en main: une tranche jusqu'à 20 000 $, et 41 % des personnes âgées déclarent un revenu en bas de 20 000 $. C'est beaucoup. Une autre tranche de 20 % déclare des revenus inférieurs à 35 000 $. Alors, il est très clair que le revenu moyen des personnes âgées au Québec n'est pas faramineux, il est de 17 000 $. Ça, c'est la moyenne. Il y en a une bonne partie qui sont en bas de 17 000 $, une bonne partie qui sont en haut de 17 000 $. C'est ça qui donne la moyenne. Mais, pour ceux qui sont dans la moyenne de 17 000 $, ils ont raison de s'inquiéter quant aux mesures fiscales que le gouvernement du Parti québécois s'apprête à imposer.

48 % des personnes, sur l'île de Montréal, de 65 ans et plus demeurent seules. C'est de ça qu'on parle, de l'isolement. Elles sont isolées un peu dans la société québécoise. Ces gens sont impliqués, oui, mais le fait de demeurer seul implique un certain isolement. Leur situation socioéconomique, pour parler des faits et des données objectives: 34 % des personnes de 65 ans et plus sur l'île de Montréal déclarent une situation socioéconomique, après analyse, inférieure à la moyenne du Québec. C'est des données assez importantes. Et, juste pour le bénéfice du député d'Abitibi-Ouest, 63,5 % des répondants déclarent que, leur principale source de revenus, il s'agit de la pension de sécurité de la vieillesse. Oui, ils s'inquiètent. Ils s'inquiètent parce que ce gouvernement a décidé, par différentes mesures, et c'est ça, le libellé de la motion, par l'application de différentes mesures, que leur fardeau fiscal va être augmenté.

(17 h 40)

And that's the issue, Mr. Speaker. The financial burden of seniors under this regime is increasing, and it is going to increase dramatically. It's increasing in part because of the proposal on health insurance, universal health insurance, whereby 215 000 000 $ is going to be taken from senior citizens to compensate everyone else, Mr. Speaker. And if that is equity in the intergenerational sense, if that's the PQ's notion of equity when 215 000 000 $ out of 300 000 000 $ are taken from the pockets of people 65 years and older, if that's equity, then the people who form this Government do not understand the word «equity», Mr. Speaker. And seniors are also very concerned about the level of services under the «maintien à domicile» program.

M. le Président, ce n'est pas évident que tous les CLSC du Québec ont la capacité de fournir des services de maintien à domicile gratuits à des personnes de 65 ans et plus. Dans mon propre comté, M. le Président, ça arrive hebdomadairement qu'un citoyen, un résident de 65 ans et plus est référé à une agence privée pour obtenir des services de maintien à domicile, une agence privée pour laquelle il doit payer, M. le Président, parce que ce gouvernement n'a pas augmenté de façon assez significative les budgets nécessaires pour le programme de maintien à domicile. Ça, c'est une autre préoccupation que j'entends, M. le Président, comme député de Notre-Dame-de-Grâce.

Également, la hausse dans la contribution pour les personnes dans les centres d'hébergement. Le ministre de la Santé a été obligé de confirmer qu'il va y avoir des hausses entre 7 % et 10 % pour les personnes qui sont hébergées dans les centres d'hébergement. Ça, c'est un autre fardeau, M. le Président.

Three measures, Mr. Speaker, that will increase the financial burden of seniors under this Government: medical insurance, the fact that many of them have referred to private agencies for homecare services for which they have to pay because the State has not adequately funded CLSC's to provide those services and in increasing the personal contribution that individuals will have to make, somewhere between 7 % and 10 %, if they reside in a «centre d'accueil» or «centre d'hébergement». Those, objectively speaking, Mr. Speaker, are the issues that many of my «concitoyens» in NDG raise with me.

M. le Président, on a encore une fois un exemple des belles paroles du gouvernement versus les gestes concrets. Le ministre délégué aux Relations avec les citoyens a parlé 30 minutes sur cette motion, M. le Président, 15 minutes pour expliquer à nous et à la population québécoise comment il se fait qu'il était tellement mal cité dans les articles de journal lors d'un récent discours. Ce n'est pas bien intéressant, je pense, M. le Président, pour la vaste majorité des Québécois que le ministre délégué aux Relations avec les citoyens soit obligé de clarifier un discours qu'il a fait. Ce n'est pas mon problème. Peut-être qu'il a des problèmes avec les journalistes, peut-être qu'il a des problèmes avec d'autres groupes dans la société québécoise, M. le Président, mais il a strictement évité de parler de la motion. Il s'est engagé dans des critiques très personnelles à l'égard du député de Sauvé. Moi, j'ai été étonné. Mais il n'a pas vraiment traité le fond de cette motion, qui est l'augmentation du fardeau fiscal des personnes âgées de 65 ans et plus. Que fait l'actuel gouvernement du Parti québécois au Québec? Et c'est ça qu'on déplore, et c'est pour ça qu'on a amené la motion du mercredi, et c'est pour ça qu'on va voter pour. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

J'accorde maintenant la parole au député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Dans le temps qui nous reste, je vais me concentrer sur un aspect particulier du fardeau financier qui est imposé aux aînés dans notre société: il s'agit de l'article 585 du Code civil du Québec. Comme le ministre de la Justice nous l'a dit tout à l'heure, le Conseil des ministres se réunit aujourd'hui, et ça fait partie d'un ensemble de mesures qui vont être regardées. Quelle va être la solution retenue vis-à-vis d'un grand problème que l'on connaît surtout depuis les deux dernières années? Les journaux n'arrêtent pas de titrer, comme j'ai un exemple ici: Les grands-parents réclament justice: plus question de payer des pensions pour leurs petits-enfants.

On reconnaît, dans notre société, le droit aux grands-parents de voir leurs enfants, avec de plus en plus de divorces et de séparations. C'était nécessaire de l'inclure dans le Code civil. Historiquement, notre Code civil prévoyait aussi l'obligation des grands-parents de fournir des aliments à leurs enfants et à leurs petits-enfants lorsque ceux-là étaient dans le besoin. Mais notre société a changé, a évolué beaucoup. Dorénavant, c'est l'État, le gouvernement qui prend en charge ces obligations très souvent, et c'est là qu'on a commencé à voir, il y a deux ans, une situation assez inquiétante. Le nouveau développement auquel on a assisté, c'est que le gouvernement lui-même, pour alléger son fardeau financier, entamait ou aidait à entamer des poursuites contre des grands-parents en se disant: Ce n'est pas correct pour nous autres de payer de l'aide sociale alors qu'il y a des grands-parents dans le tableau qui ont des sous.

On a suivi avec beaucoup d'intérêt... et on tient à féliciter le ministre de la Justice d'avoir entrepris une consultation ouverte là-dessus, mais le problème va être juste exacerbé si le ministre de la Justice ne fait pas la chose évidente, et c'est éliminer l'article 585 du Code civil du Québec, éliminer la possibilité que des grands-parents soient appelés à contribuer financièrement pour leurs enfants. On a entendu certaines indications de la part du ministre à l'effet qu'il allait peut-être faire des balises, qu'il appelait. Quand les payeurs de taxes entendent les fonctionnaires en train de dire à leur ministre qu'ils vont poser des balises, ils devraient tous courir dans l'autre sens. Les balises, pour un fonctionnaire, ça veut dire qu'on va faire des programmes, un peu comme l'aide sociale. On va déterminer quand on peut intervenir, quand on n'interviendrait pas, et tout cela va coûter beaucoup d'argent en soi parce qu'il va falloir le décider devant les tribunaux.

Lorsque des grands-parents, qui ont travaillé toute leur vie, qui ont été honnêtes, reçoivent des subpoenas, reçoivent des sommations pour aller à la cour, ils ne comprennent pas ce qui leur arrive, et c'est souvent pour un enfant dont ils ignoraient l'existence. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond là-dedans. C'est à la société, de nos jours, d'assumer ces obligations. Ces aînés, c'est ceux dont on parle aujourd'hui dans notre motion, lorsqu'on dit que le gouvernement du Parti québécois, par diverses mesures, augmente le fardeau financier des aînés. Bien, c'est exactement un exemple de ce dont on est en train de parler. Il ne faut plus permettre que des grands-parents soient appelés devant les tribunaux pour des enfants, ou des petits-enfants dont ils ne sont responsables dans aucune autre société. Il faut qu'on se rende compte que c'est une obligation du gouvernement à cet égard.

J'ai aussi entendu le ministre des Relations avec les citoyens passer la plupart de son temps, pendant son discours, à parler – et ça semble être une de ses habitudes – de lui-même. Il nous a surtout parlé de lui-même, pas des citoyens qu'il est appelé à défendre, mais de lui-même, parce qu'il trouvait qu'il avait été mal cité dans les journaux. Mais il n'a qu'à faire un petit peu plus attention à comment il présente les choses, parce que, effectivement, et c'est ça qu'on reproche dans notre motion aujourd'hui, on reproche que le député en question, le député de Gouin, qui est le ministre des Relations avec les citoyens, fait preuve d'une attitude irrespectueuse, à notre sens, envers les aînés.

M. le Président, il a été beaucoup question aussi du projet de loi présenté par mon collègue le député de Sauvé. Il avait présenté un projet de loi qui visait à accroître la protection des personnes âgées dans notre société. Tous les jours, M. le Président, on lit dans les journaux des exemples de personnes âgées qui sont victimes de mauvais traitements. Alors, au lieu de rejeter en bloc la proposition de mon collègue de Sauvé, que le ministre des relations avec les citoyens arrive avec une meilleure solution, une meilleure idée, on va l'appuyer.

On veut tous la même chose. On veut que les gens qui ont contribué à bâtir cette société puissent, dans leurs jours d'âge d'or, comme on dit souvent, profiter de ce qu'ils ont fait, ce qu'ils ont bâti, ce qu'ils ont construit pour nous tous. Et on veut, surtout lorsqu'il y a des gros problèmes, parfois de violence envers les personnes âgées, que la société prenne les démarches qui s'imposent, tout comme le ministre de la Justice et certains de ses collègues l'ont annoncé l'année dernière avec la création de certaines escouades spéciales de la police et certaines équipes spécialisées du procureur de la couronne pour s'adresser à cette problématique particulière.

Non, M. le Président, de notre côté, on est persuadé que c'est tout à fait approprié d'exprimer notre désarroi, notre déception et de dénoncer le gouvernement du Parti québécois pour son attitude vis-à-vis des aînés. Et on n'a qu'à écouter le pauvre discours du député de Gouin, ministre délégué aux Relations avec les citoyens, pour se rendre compte à quel point celui-ci est d'abord et avant tout préoccupé par son image personnelle et non pas du tout préoccupé par les réels problèmes que vivent quotidiennement les aînés dans notre société, problèmes qui sont exacerbés souvent par l'attitude du gouvernement du Parti québécois, dont le ministre délégué aux Relations avec les citoyens fait partie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Chomedey. J'accorderai maintenant la parole, pour votre droit de réplique, à M. le député de Sauvé. M. le député.

(17 h 50)


M. Marcel Parent (réplique)

M. Parent: Je vous remercie, M. le Président, je vais faire brièvement. Le gouvernement a répondu à cette motion de blâme que nous avons déposée par l'entremise de deux de ses députés, deux de ses bons députés, deux bons «debaters», ici, à l'Assemblée nationale. Mais ce que j'ai trouvé curieux en ce qui concerne le député et ministre délégué aux Relations avec les citoyens, c'est que, dans la période de temps qui lui a été réservée, il a pris le tiers de cette période de temps à s'excuser ou à expliquer la teneur d'un discours qu'il a fait devant les retraités de l'enseignement. Il n'a pas soufflé, M. le Président, un traître mot sur les politiques du gouvernement face aux personnes âgées. Il n'a répondu à aucune des avances que nous avons mentionnées dans notre discours. Il ne nous a donné aucune politique qu'avait son parti à l'égard des personnes âgées. Et il a dénoncé l'énoncé de la motion que nous avons déposée. Il l'a dénoncée en disant qu'elle n'était pas conforme, en disant qu'elle pouvait être sujette à être recevable ou pas recevable. Il disait qu'elle ne reflétait pas la réalité face aux politiques de son parti. Nous y reviendrons. Et, après ça, toujours en continuant, il n'avait pas encore répondu, il n'était pas encore entré dans le sujet, il nous a parlé avec beaucoup de respect de sa grand-maman âgée de 92 ans qui est très autonome. Bien, M. le Président, je veux profiter de l'occasion pour saluer la grand-maman du député de Gouin et lui dire, si elle nous écoute, que je comprends la fierté qu'elle éprouve à écouter son jeune petit-fils député.

Par contre, on ne peut pas, M. le Président, laisser terminer un débat comme ça sans revenir sur quelques sujets d'importance. Lorsqu'on nous dit qu'on ne fait pas preuve d'iniquité envers les personnes âgées lorsqu'on taxe les médicaments – et on sait que les plus grands consommateurs de médicaments sont les personnes âgées – lorsqu'on les taxe pour un montant de 215 000 000 $ dans le seul but d'amenuiser un déficit et d'aller chercher 300 000 000 $, il faut quand même être lucide, M. le Président, on demande aux personnes âgées d'assumer les deux tiers du montant que ce gouvernement-là veut aller récupérer. Je veux bien croire que les personnes âgées ne sont pas toutes dans la faillite, ne sont pas toutes dans l'indigence, mais ce que je sais, par exemple, c'est qu'elles sont de grands consommateurs de médicaments à cause de leur vieillissement puis à cause de leur état de santé. Et, ça, je trouve ça injuste. Il n'a pas dit un mot, le ministre délégué aux Relations avec les citoyens, sur ça, et mon collègue, le député de l'Abitibi, non plus, n'a pas dit un mot sur ça.

Sur l'abolition des crédits d'impôt en fonction de l'âge, comme si c'était normal, on n'a pas dit un mot sur ça. Mais ce sont encore des mesures restrictives, ce sont encore des baffes que l'on donne aux personnes âgées. Ça ne paraît pas. Une petite tape par ici, une petite tape par là, à la fin, ça fait une bonne volée. Et c'est ça qu'ils sont en train d'administrer aux personnes âgées.

Il nous a parlé aussi, plus longuement, d'un sujet que je n'avais pas abordé, mais j'étais très heureux qu'il l'aborde. J'étais très heureux qu'il aborde le projet de loi 191. Le projet de loi 191, M. le Président, il a été déposé par l'opposition dans le but de protéger et d'aider les personnes âgées qui pouvaient en avoir besoin, et elles en ont un grand besoin. Il est certain... J'ai lu, moi aussi... Et j'ai reçu le mémoire du Conseil des aînés. J'ai entendu la FADOQ, M. le Président, j'ai entendu l'AQDR, j'ai entendu celle de mon comté, l'AQDR aussi, et j'ai entendu, monsieur, aussi le Protecteur du citoyen. J'ai entendu aussi le Curateur public, qui émettait des doutes face à la nécessité d'arriver avec une nouvelle structure et d'amener une commission de protection des personnes âgées. Je les comprends. Lorsqu'on dit que c'est un projet de loi qui est fait en fonction de l'âge, bien, écoutez, il est fait pour les personnes âgées, c'est sûr qu'il est fait en fonction de leur âge.

Ce projet de loi là a été accepté, en principe, par les députés du gouvernement et par les députés de l'opposition. Il y avait peut-être de la place, si on avait été réellement décidé de tâcher de trouver des moyens d'aider encore plus les personnes âgées, de le ramener, ce projet de loi, dans la présente législation, mais on ne l'a pas ramené. On aurait pu le ramener et aller en commission parlementaire et aller en audiences publiques pour tâcher de le bonifier. Et si le peuple nous dit: On n'en veut pas, du projet de loi, moi, je suis d'accord pour le retirer, le projet de loi. Je ne l'ai pas fait pour moi. Mais, par contre, lorsqu'on dit que la FADOQ dit: On n'a pas besoin de ça, que le Curateur public dit: On n'a pas besoin de ça, on s'en occupe, c'est faux, M. le Président. Le Curateur public s'occupe des personnes en perte d'autonomie. Les personnes âgées ne sont pas toutes en perte d'autonomie.

Mais Mme Latour, qui demeure sur la rue Monty, à Montréal-Nord, elle, et qui se fait enlever son chèque de pension par son garçon qui va la voir le premier du mois et qui lui donne deux, trois petites claques, qui la violente, par exemple, elle, l'AQDR, elle ne connaît pas ça, la FADOQ, elle ne connaît pas ça. C'est une femme qui est isolée, elle ne vit pas dans un foyer où elle peut être encadrée à l'intérieur de grands paramètres qui vont lui donner des outils, qui vont lui donner des béquilles pour s'aider à se prendre en main. Elle est toute seule, elle est souvent isolée. Et ce projet de loi là, il a été présenté, M. le Président, justement pour aider les gens qui n'étaient pas en mesure de s'aider ou de se faire aider.

Alors, je pense que, lorsque le ministre des Relations avec les citoyens dit: J'invite – j'invite! – le député à retirer le projet de loi 191, le député de Sauvé n'a pas à retirer le projet de loi 191. Son parti a accepté le principe de ce projet de loi, et il est le gardien des projets de loi. Alors, c'est au leader du gouvernement à le rappeler ou à ne pas le rappeler. Et ça me fait de la peine de dire aux personnes âgées qui y croyaient... Parce que, moi aussi, j'ai vu toutes les copies et j'ai eu des inquiétudes des organismes face au projet de loi, mais j'ai eu aussi une foule de lettres de personnes seules, de personnes qui ne sont pas regroupées, qui ne sont pas engagées dans des mouvements, qui me disaient: Enfin, ce projet de loi là, il nous intéresse, je pense qu'on en a besoin. Et j'ai des cas flagrants de personnes qui sont victimes de violence physique, de violence morale. Et j'ai aussi des gouvernements, j'ai d'autres gouvernements provinciaux qui, lorsqu'on a déposé ce projet de loi, nous ont écrit pour avoir copie du projet de loi et tâcher de le bonifier, de l'améliorer et de l'appliquer dans leur milieu.

Alors, le projet de loi 191, il a été là, il a été déposé en toute bonne foi, il a été déposé pour aider les personnes âgées. Et soyez certains que le député de Sauvé et que l'opposition ne retireront pas le projet de loi. Que le parti au pouvoir ait l'odieux de le garder dans ses filières, de ne pas le ramener, ça, c'est son choix et je le respecte, c'est le jeu du parlementarisme.

Alors, M. le Président, j'invite les membres de cette Assemblée à voter pour la motion, qui se lisait comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le gouvernement du Parti québécois qui véhicule une perception fausse et irrespectueuse du rôle de nos aînés dans la société pour justifier, malgré son engagement, l'augmentation de leur fardeau financier par différentes mesures.»

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sauvé.

Les interventions sur la motion du député de Sauvé étant complétées, nous allons mettre la motion aux voix. Mme la leader adjointe du gouvernement.


Vote reporté

Mme Caron: Oui, M. le Président. Conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote à demain.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le vote sera reporté à demain.

Dû à l'heure, nous allons maintenant ajourner nos travaux à jeudi, 14 heures. Merci. Je vous demanderais de bien vouloir demeurer à vos places afin de permettre à la présidence de sortir.

(Fin de la séance à 17 h 59)