L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 18 décembre 1996 - Vol. 35 N° 72

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien, si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons débuter les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, j'aimerais qu'on prenne en considération l'article a de notre feuilleton.


Projet de loi n° 81

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre délégué au Revenu présente le projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le ministre du Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Alors, ce projet de loi modifie diverses lois, afin de donner suite principalement au discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1996, à sa déclaration ministérielle du 26 novembre 1996, ainsi qu'à différents bulletins d'information.

Ce projet de loi abroge, en premier lieu, la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux en raison de sa désuétude.

Le Président: M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. Il modifie, en deuxième lieu, la Loi concernant les droits sur les transferts de terrains afin, d'une part, d'étendre la portée de l'exonération des droits à certains cas de transferts faits entre sociétés appartenant à un même groupe et, d'autre part, de soustraire de son application tout transfert fait après le 9 mai 1996 relatif à un terrain situé au Québec.

Il modifie également la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, principalement pour abaisser de 60 à 55 ans l'âge à compter duquel un particulier qui se prévaut d'un droit à la retraite ou à la préretraite peut obtenir le rachat d'une partie ou de la totalité de ses actions du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec.

Il modifie également la Loi sur les impôts afin principalement d'y modifier ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec. Ces mesures concernent notamment: l'introduction d'une déduction pour les employés qui cotisent à une convention de retraite; la réduction progressive des montants servant de base au calcul des crédits d'impôt non remboursables accordés aux personnes seules, à celles qui ont atteint l'âge de 65 ans et à celles qui ont certains revenus de retraite; également, l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour la production de titres multimédias; le report de l'abolition du crédit d'impôt remboursable pour taxi.

Il modifie également la Loi sur le ministère du Revenu afin notamment: d'étendre la responsabilité d'une personne qui liquide les biens d'une autre personne aux montants de frais exigibles de cette autre personne; de permettre au ministre du Revenu de modifier les modalités de versement d'un montant que doit lui remettre un contribuable qui se retrouve en situation d'insolvabilité; de prévoir une amende à l'égard d'une personne qui omet de s'inscrire en vertu de la Loi sur la taxe de vente du Québec.

Alors, il modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec principalement afin d'y insérer des mesures propres au régime fiscal du Québec ou d'ajuster de telles mesures.

Il modifie également d'autre lois afin d'y apporter diverses modifications à caractère technique, de concordance et de terminologie. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le ministre. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article b de notre feuilleton.


Projet de loi n° 194

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le député de Lévis présente le projet de loi n° 194, Loi sur la divulgation de la rémunération des dirigeants de certaines personnes morales. M. le député de Lévis.


M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, le projet de loi n° 194, Loi sur la divulgation de la rémunération des dirigeants de certaines personnes morales, a pour objet d'obliger toute personne morale qui est un émetteur assujetti au sens de la Loi sur les valeurs mobilières, soit notamment une personne morale dont des titres sont cotés en Bourse, ou un émetteur d'un investissement décrit dans les paragraphes 4.1° à 5.1° de l'article 3 de cette loi, soit notamment une fédération ou une confédération de caisses d'épargne et de crédit, une coopérative ou une fédération de coopératives et une société mutuelle d'assurance, à produire, dans le rapport annuel transmis, selon le cas, aux actionnaires ou aux membres de la caisse d'épargne et de crédit ou de la coopérative, un état de la rémunération qu'elle verse à ses cinq dirigeants les mieux rémunérés et à ses autres dirigeants.

(10 h 10)

L'état de la rémunération qu'une personne morale verse à ses cinq dirigeants les mieux rémunérés doit indiquer séparément pour chacun d'eux: 1° tous les montants inclus dans le calcul du revenu du dirigeant, en application de la Loi sur les impôts, en indiquant le salaire de base et les bonis; 2° tous les frais remboursés, allocations et avantages, soit notamment tous frais de voyage ou de représentation, usage d'une résidence de fonction ou de séjour; 3° les avantages conférés au dirigeant, dans l'année, à titre d'actionnaire ou de membre de la personne morale et visés par la Loi sur les impôts, soit notamment les prêts; 4° la nature et la valeur, en regard de chacun des avantages et compensations à long terme accordés au dirigeant, soit notamment la prime de séparation, les options d'achat d'actions et la participation de l'employeur à son régime de retraite ou un régime de participation différé aux bénéfices.

Quant aux autres dirigeants, l'état de la rémunération doit indiquer leur nombre et globalement les montants ci-haut mentionnés.

Ce projet de loi prévoit enfin que la Commission des valeurs mobilières est chargée de l'administration de la présente loi et qu'elle exerce à cette fin tous les pouvoirs que sa loi constitutive lui confère.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: L'article c de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 237

Le Président: À l'article c du feuilleton, un projet de loi privé. À l'article c du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 237, Loi concernant la Ville de Charny. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé, et je dépose donc ce rapport.


Mise aux voix

M. le député de Lotbinière présente le projet de loi d'intérêt privé n° 237, Loi concernant la Ville de Charny. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Alors, M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: La motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre des Transports.


Rapport annuel de la Société des traversiers du Québec

M. Brassard: M. le Président, je voudrais déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Société des traversiers du Québec.


Rapport détaillé des résultats du scrutin tenu dans la circonscription électorale de Pointe-aux-Trembles le 9 décembre 1996

Le Président: Merci, M. le ministre. J'ai reçu du Directeur général des élections, en vertu de l'article 381 de la Loi électorale, le rapport détaillé des résultats officiels du scrutin qui s'est tenu le 9 décembre dernier dans la circonscription électorale de Pointe-aux-Trembles et je dépose ce document.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le vice-président de la commission de l'éducation et député de Bourassa. M. le député de Bourassa.


Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 212

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, je voudrais déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a siégé le 16 décembre 1996 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 212, Loi concernant Champlain Regional College of General and Vocational Education. Le projet de loi a été adopté avec un amendement.


Auditions et étude détaillée du projet de loi n° 235

Et je voudrais déposer aussi le rapport de la commission de l'éducation qui a siégé le même jour, le 16 décembre, afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 235, Loi modifiant la Loi concernant la Fédération des commissions scolaires du Québec. Le projet de loi a été adopté.


Mise aux voix des rapports

Le Président: Alors, ces rapports sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député d'Arthabaska.


Étude détaillée du projet de loi n° 69

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, je dépose le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 17 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 69, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.


Auditions et étude détaillée de divers projets de loi d'intérêt privé

Je dépose également cinq projets de loi d'intérêt privé qui ont été adoptés le même jour, à la même commission, soit: le projet de loi n° 202, Loi modifiant la Loi constituant en corporation Les Soeurs de Sainte-Anne; le projet de loi n° 238, Loi concernant la conversion de l'Entraide assurance-vie, société de secours mutuels, en une compagnie mutuelle d'assurance; le projet de loi a été adopté avec un amendement; le projet de loi n° 214, Loi concernant le Groupement des chefs d'entreprise du Québec, le projet de loi a été adopté sans amendement; le projet de loi n° 209, Loi concernant des fédérations, conseils centraux et syndicats affiliés à la Confédération des syndicats nationaux (C.S.N.), le projet de loi a été adopté sans amendement; et, enfin, le projet de loi n° 210, Loi concernant la Congrégation Shaar Hashomayim (Porte du Ciel), la commission a adopté le projet de loi sans amendement.

Le Président: Le rapport de la commission sur le projet de loi n° 69 est déposé.


Mise aux voix des rapports

Les autres rapports sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Mme la présidente de la commission de l'aménagement et des équipements et députée de Mégantic-Compton.


Étude détaillée du projet de loi n° 82

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 17 décembre 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 82, Loi reportant l'élection générale de 1996 à la Ville de La Baie. La commission a adopté le projet sans amendement.


Auditions et étude détaillée de divers projets de loi d'intérêt privé

J'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 17 décembre 1996 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 250, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Charlevoix-Est et la Municipalité de la rivière Malbaie. La commission a adopté le projet avec amendement.

J'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 16 octobre et le 17 décembre 1996 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 225, Loi modifiant la Charte de la Ville de Hull. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Et, enfin, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 17 décembre 1996 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté du Domaine-du-Roy. La commission a adopté le projet avec des amendements.

Le Président: Alors, le rapport de la commission portant sur le projet de loi n° 82 est déposé.


Mise aux voix des rapports

Les autres rapports sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, Mme la députée de Mille-Îles.


Maintenir les loyers dans les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires, augmenter leur nombre et assurer la protection des HLM

Mme Leduc: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 442 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la région de Laval.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement du Québec s'apprête à réviser ses programmes en habitation et que les mesures envisagées menacent directement plus de 800 000 ménages à faibles revenus déjà très affectés par d'autres compressions budgétaires;

«Considérant l'augmentation importante des loyers dans les HLM, les coopératives et les autres logements sans but lucratif afin de puiser 50 000 000 $ dans les poches des 85 000 locataires;

«Considérant le retrait graduel du financement de nouveaux logements sociaux;

«Considérant l'abolition du remboursement d'impôts fonciers afin de récupérer 133 000 000 $ auprès de 724 000 ménages;

«Considérant le transfert de la propriété des HLM aux municipalités sans aucune mesure garantissant qu'ils ne pourront être privatisés et que les droits des locataires seront protégés;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: maintenir les loyers dans les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires; augmenter le nombre de logements sociaux réalisés chaque année; sauvegarder le remboursement d'impôts fonciers; et, enfin, assurer la protection intégrale des HLM et le traitement équitable des locataires où qu'ils demeurent au Québec par le maintien de normes nationales strictes.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, Mme la députée. Votre pétition est déposée.

M. le député de Robert-Baldwin, au nom de Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Au nom de la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, j'aimerais demander le consentement pour déposer une pétition de 1 202 pétitionnaires de Pointe-Saint-Charles, M. le Président.

Le Président: Consentement. M. le député.


Apporter des modifications à la Loi sur l'assurance-médicaments

M. Marsan: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1 202 pétitionnaires de Pointe-Saint-Charles, des citoyens et citoyennes inquiets des conséquences de l'assurance-médicaments.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que la Loi sur l'assurance-médicaments a pour objectif d'assurer et de faire contribuer toute la population aux coûts du nouveau régime, mais aussi de réduire la facture globale de l'État en soins de santé et de transférer une partie de ces coûts aux citoyens;

«Attendu que cette loi met fin à la gratuité des médicaments pour les personnes âgées et assistées sociales qui feront les frais de ce nouveau régime, qu'elle n'est pas vraiment basée sur la capacité de payer de chaque personne et qu'elle peut conduire à une sous-consommation de médicaments pour les personnes à faibles revenus;

«Attendu que la Loi sur l'assurance-médicaments ne prévoit pas de mesures de contrôle des coûts du régime dont la prime suivrait les augmentations de coûts des médicaments établis par les compagnies pharmaceutiques;

«Attendu qu'avec la diminution des durées d'hospitalisation et l'augmentation des traitements en clinique externe et des soins à domicile les gens devront payer de plus en plus de médicaments qui étaient couverts pendant l'hospitalisation;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous réclamons des modifications à la Loi sur l'assurance-médicaments dans le sens: d'un régime d'assurance-médicaments entièrement public, comme l'actuel régime d'assurance-maladie; d'une meilleure couverture des personnes plus démunies en maintenant la gratuité pour les personnes assistées sociales et en l'élargissant aux personnes âgées et aux personnes dont le revenu est sous le seuil de pauvreté; d'un meilleur contrôle des coûts du régime et des prix fixés par les compagnies pharmaceutiques, en privilégiant l'utilisation de médicaments génériques et en assurant les médicaments nécessaires au rétablissement de la santé dans les situations où les gens ne sont plus hospitalisés.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

And in English, it reads:

«Considering that the bill on the prescription drug insurance plan aims to guarantee that the entire population is covered and contributes to costs related to the new regime, but also to reduce the State's health costs by transferring part of these to the citizens;

(10 h 20)

«Considering that this bill puts an end to free medication for the elderly and social assistance beneficiaries in order to help cover this new regime, that it is not based on each person's ability to pay and that it could force people with a low income to cut down on medication;

«Considering that this bill does not foresee any control measures for costs incurred by a raise in cost by pharmaceutical companies;

«Considering that with shorter hospitalization periods and an increase in treatments at external clinics and home care, people will have to pay for their medication which otherwise would be covered during a stay in hospital;

«We demand that the bill on the prescription drug insurance plan be modified as follows: that the prescription drug insurance regime be entirely public, like our present medicare plan; a better coverage for those who are underprivileged by maintaining free medication for the elderly and social assistance beneficiaries and by allowing people whose income is below the poverty line to also benefit from a free medication program; and a better control on premiums for this regime and on prices fixed by pharmaceutical companies, favouring the purchased medication under a generic name and assuring the necessary medication for a health recovery in cases where people are no longer hospitalized.»

Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée également. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Exempter les personnes à faibles revenus du programme d'assurance-médicaments

M. Copeman: Merci, M. le Président. Dans la même veine, j'ai l'honneur de déposer l'extrait, pour la cinquième fois, d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 177 pétitionnaires de la région de Montréal, principalement du comté de Notre-Dame-de-Grâce.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«We, the undersigned, residents of the Province of Québec, do hereby petition the National Assembly to instruct that the Government of Québec exempt those individuals and families whose annual incomes are below the poverty line from any payment of a premium, deductible or coinsurance applicable under Bill 33, An Act respecting prescription drug insurance.»

«Nous, soussignés, résidents du Québec, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du gouvernement du Québec afin qu'il exempte tout individu ou famille dont le revenu annuel est au-dessous de l'indice de pauvreté du Québec, de la prime, de la franchise et de la coassurance applicables selon la loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Nelligan.


Tenir un débat public sur le programme d'assurance-médicaments

M. Williams: Oui, merci, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer l'extrait d'une pétition de 136 pétitionnaires du comté de Nelligan, qui n'est pas conforme. Merci.

J'ai l'honneur de déposer l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 136 pétitionnaires du comté de Nelligan.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux pour qu'il tienne un débat public sur le programme d'assurance-médicaments, pour qu'il comprenne la réalité et comprenne les inquiétudes et les recommandations de la population.»

And in English, the petition signed by 136 petitioners from the riding of Nelligan reads:

«We, the undersigned, ask the National Assembly to prevail on the minister of Health and Social Services to suspend implementation of the health insurance plan. Not until the well founded concerns and recommendations of the public have been fully addressed should such wide ranging, fundamental changes in Québec society occur.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Cette pétition est également déposée.

Il n'y a pas aujourd'hui d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales Mme la ministre de l'Éducation répondra à une question posée le 13 décembre par M. le député de Verdun concernant les droits spéciaux de 2 $ par heure de cours pour les étudiants du secteur technique, tel que prévu au projet de loi n° 85.

Je vous avise également qu'après la période de questions et de réponses orales Mme la ministre de l'Éducation répondra à une question posée le 17 décembre par M. le député de Marquette concernant l'utilisation de la subvention allouée pour la mesure Lait-école.


Questions et réponses orales

Nous en arrivons maintenant à la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Accueil par les syndicats de la contre-proposition du gouvernement concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique

M. Johnson: Dans ce qui s'appelle, avec un bel euphémisme, les négociations avec le secteur public, dans lesquelles le premier ministre et le président du Conseil du trésor, à des degrés divers et inconnus, sont impliqués depuis quelques semaines, il est évident qu'il y a encore quelques brèches qui ont été pratiquées dans la belle solidarité à laquelle fait appel le premier ministre. Les dernières en date se retrouvent à l'Alliance des professeures et professeurs de Montréal. Le premier ministre, lorsque les gens ne sont pas d'accord avec lui, dans ce dossier-là à tout le moins, dit que les gens, on l'a vu hier, sont des égoïstes. C'est égoïste, pour le premier ministre, que de ne pas être d'accord avec lui.

Parmi ces égoïstes, maintenant il y a des milliers, pour ne pas dire des dizaines de milliers de femmes dans la cinquantaine, des professeures notamment, des employées au bas de l'échelle dans le secteur de la santé, qui croient – probablement honnêtement, je ne veux pas mettre leurs motifs en doute – que c'est de piquer leurs cotisations pour leur régime de retraite que de vouloir imposer à l'endroit de quelques milliers d'entre eux des conditions de retraite dorée. Ah bon!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, j'aimerais savoir si l'expression «piquer», qui, à mon avis, ne peut être qu'associée au mot «voler», est réglementaire et est acceptable en cette Chambre, M. le Président.

Le Président: J'ai eu l'occasion de réfléchir sur la période de questions d'hier et sur l'échange qui s'est déroulé, et en particulier la controverse qui s'est produite à l'égard de l'utilisation d'un mot qui a été prononcé dans cette Chambre, et, dans le contexte, je voudrais rappeler un certain nombre de choses qui sont reliées aux articles 32 et 35 de notre règlement. D'abord, dans le contexte d'un forum...

M. le chef de l'opposition, il y a une question de règlement qui a été invoquée par le leader du gouvernement et... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. La question de règlement posée par le leader du gouvernement est bien simple: il s'est levé sur l'acceptabilité ou non du mot «piquer», mot que vous avez accepté dans une de vos décisions d'hier, la réponse est facile à donner. Qu'on procède aux questions et aux réponses, M. le Président.

Le Président: Alors, j'étais à expliquer que l'incident d'hier et la controverse qu'ont suscitée les mots qui ont été prononcés m'ont appelé à réfléchir sur toute la question de l'utilisation des mots parlementaires et des propos qui ne sont pas parlementaires. Et, dans le contexte... Le président ne bâillonne personne, M. le député, il répond à une question de règlement.

Dans le contexte d'un forum d'affrontement verbal et de débats, les mots qui sont prononcés prennent une importance très grande, à l'évidence. Et les balises qui encadrent l'usage du vocabulaire se retrouvent à la fois à l'article 32, qui concerne le décorum, et à l'article 35, et dans l'usage qu'on laisse également au président qui a la lourde tâche d'apprécier divers facteurs dont le contexte, l'intensité, l'objet du propos et également, finalement, si on s'en rapporte à la doctrine, au questionnement sur la conduite personnelle ou privée d'un membre de l'Assemblée.

Alors, la tradition veut que le premier ministre et le chef de l'opposition officielle jouissent d'une tolérance plus grande dans l'application du règlement, mais, en contrepartie, je crois que la tradition veut également qu'il leur confère une responsabilité plus grande à l'égard de l'exemple qui doit être donné aux membres de l'Assemblée. Néanmoins, pour eux comme pour les autres membres de l'Assemblée, il doit y avoir des limites, et, compte tenu des défis que nous avons tous à l'égard de la valorisation et la revalorisation de notre institution, je crois opportun, à ce moment-ci, d'indiquer que – et je l'ai dit, hier soir, au leader de l'opposition officielle ou au leader adjoint de l'opposition officielle lors d'une intervention – je n'ai pas l'intention de laisser la décision d'une journée devenir la règle perpétuelle. Et, dans ce contexte, j'ajouterai que la rédaction de l'article 32 et de l'article 35 s'est faite dans une intention de perpétuer, dans notre pratique parlementaire, un esprit chevaleresque et un code d'honneur aux plans de la joute verbale et de l'atmosphère qui doit prévaloir dans l'enceinte où se déroulent les débats.

(10 h 30)

Et, en conséquence, M. le chef de l'opposition, je vous demanderais de ne plus utiliser ce terme, pour éviter que l'article 32, qui concerne le décorum, et que l'article 35 ne soulèvent inutilement des débats. Alors, je vous demanderais de reformuler.

M. Johnson: M. le Président, évidemment en vous demandant si le temps que vous venez de prendre pour déclamer des évidences a été pris sur le temps de nos questions ou des réponses du gouvernement...

Le Président: Vous savez, M. le chef de l'opposition officielle, que le président a la latitude d'apprécier le 45 minutes réglementaire, et j'ai bien l'intention de faire en sorte que les membres de l'Assemblée ne soient pas pénalisés. J'ai dit, par ailleurs, la semaine dernière, deux choses, parce que les deux leaders ont fait remarquer que le président – à mots couverts – prenait un certain temps. Il y a deux façons pour le président de prendre du temps: lors de la période des questions et des réponses orales, parce qu'il y a des questions de règlement auxquelles il doit répondre, d'une part, et il y a des décisions qui doivent être rendues sur ces questions de règlement; et, deuxièmement, lorsqu'il y a des problèmes de décorum et que le président est obligé de se lever et d'attendre que le calme et que l'ordre soient revenus à l'Assemblée pour que la poursuite des échanges puisse se faire. À ce moment-ci, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, en espérant qu'on va pouvoir sortir d'ici avant midi avec des interventions comme celle-là, je recommence donc. Je présume que l'horloge recommence à courir pour 45 minutes.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, juste une question de directive. Est-ce que je dois comprendre que vous voulez créer un précédent et rallonger la période des questions? Ça ne s'est jamais vu, M. le Président.

Le Président: Ce n'est pas ça que j'ai indiqué, M. le leader du gouvernement. Je pense que tout le monde sait très bien que la présidence apprécie le 45 minutes. Alors, M. le chef de l'opposition, sur la question de fond.

M. Johnson: Maintenant qu'on apprend qu'on va apprécier subjectivement une donnée objective, M. le Président, il y a d'autres données objectives dans le portrait de ce qui s'appelle, d'une façon, je le répète, un peu euphémiste, la négociation dans le secteur public.

Il y a maintenant des brèches de plus en plus nombreuses qui se manifestent par le vote des syndiqués, des travailleurs et travailleuses du secteur public. Le dernier en date se retrouve à l'Alliance des professeures et professeurs de Montréal où on retrouve un grand nombre de femmes dans la cinquantaine. C'est ça le profil habituel dans l'enseignement primaire et secondaire, on le sait.

Il est évident que les exhortations du premier ministre à la solidarité trouvent réponse, comme il le disait lui-même, par l'expression d'un égoïsme sans borne. C'est le premier ministre qui trouve...

Des voix: Oh!

M. Johnson: Non, le premier ministre trouve, M. le Président, il l'a dit hier, que les gens qui ne sont pas d'accord avec lui sont des égoïstes. On est nombreux de ce côté-ci à être égoïstes dans des circonstances comme celles-là. C'est exactement ce que le premier ministre a dit.

Est-ce que le premier ministre, dans le fond, est à la veille de comprendre que, pour des dizaines de milliers d'employés à bas salaire dans la santé, pour des milliers, des dizaines de milliers de femmes dans le milieu de l'éducation, dans le secteur de l'éducation, et on peut retrouver des centaines, voire des milliers de fonctionnaires et de professionnels du gouvernement qui trouvent, je le répète – il n'y a pas d'autres mots pour le dire, M. le Président, dans le dictionnaire de la langue française qui est utilisé dans l'acception de tous les jours – qu'on est en train de vouloir leur subtiliser, détourner et pourquoi pas piquer les cotisations qui ont été...

Le Président: M. le chef de l'opposition, j'en appelle à votre sens des institutions et du fair-play pour vous demander de ne pas utiliser ce terme et de le retirer à ce moment-ci. Alors, je vous demanderais, le dernier terme que vous avez utilisé, puisque j'ai rendu une décision, de le retirer, s'il vous plaît.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre est à la veille de se rendre compte que ce que des milliers...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Vous avez demandé au chef de l'opposition officielle de retirer les propos. Il y a une façon de le faire, c'est de le...

Le Président: M. le leader du gouvernement, je comprenais que le chef de l'opposition était à reformuler sa question d'une façon, donc, à retirer ses propos. Je lui en laisse l'occasion. Avant de prendre une décision, je voudrais bien entendre le chef de l'opposition, le laisser... Je pense qu'on doit le laisser s'exprimer pour voir dans quelle mesure il se conforme à la décision que j'ai prise. Je suis convaincu qu'il va le faire. M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Oui, simplement, au moins qu'on permette au président de constater quels autres mots de la langue française de tous les jours on ne peut pas utiliser en cette Chambre. Est-ce que le premier ministre est à la veille de comprendre que, pour des dizaines de milliers de femmes dans l'éducation au Québec, pour des milliers et des dizaines de milliers d'employés dans le secteur de la santé où les salaires ne sont pas extraordinaires, au bas de l'échelle, là, que pour ces dizaines de milliers de Québécoises là et de Québécois, la proposition du premier ministre vise à leur subtiliser, à leur enlever, à leur ôter les cotisations qu'il leur a été permis de contribuer à leur régime de retraite et qu'aujourd'hui on demande à 96 % de ces femmes de se priver d'un enrichissement de leur rente, de leur retraite au bénéfice de 4 % d'entre eux?

Une voix: C'est ça.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos du chef de l'opposition, il n'a pas retiré le mot.

Le Président: À ce moment-ci, je pense que, si on veut aussi respecter l'esprit de l'article 32, qui est le décorum, je crois que le président a à apprécier la façon dont les décisions sont exécutées par les membres de l'Assemblée et le respect qu'on y donne. Je pense que le chef de l'opposition a reformulé sa question d'une façon conforme et, à ce moment-ci, je pense que le premier ministre peut répondre à la question.

M. Bélanger: M. le Président, il y a une différence entre reformuler et retirer des propos. Si vous aviez demandé, à ce moment-là, au chef de l'opposition officielle de reformuler, ça aurait été correct, mais vous lui avez demandé de retirer, ce qu'il n'a pas fait, M. le Président.

Le Président: Alors, je voudrais en appeler à l'article 41 à partir duquel tout le fonctionnement de l'Assemblée nationale est basé, les appels au règlement: «Le président se prononce sur les rappels au règlement au moment où il le juge opportun en indiquant le motif de sa décision.» C'est ce que j'ai fait. «La décision du président ou de l'Assemblée – en l'occurrence – ne peut être discutée.» J'ai rendu une décision. Je me suis satisfait, en fonction de la décision que j'avais prise, de la façon dont la question avait été formulée. Je considère que, dans les circonstances, il s'agit d'un retrait des propos, puisqu'ils ont été reformulés d'une façon à ne plus utiliser le terme qui a été jugé inacceptable par la présidence.

À ce moment-ci, j'invite le premier ministre à répondre à la question.

M. Bouchard: M. le Président, ce que le chef de l'opposition oublie, c'est que le cadre de discussion qui a été proposé par le gouvernement et qui a été ensuite proposé à leurs instances intermédiaires par les centrales et les trois principaux syndicats qui représentent les salariés de l'État a été offert par le gouvernement dans un cadre volontaire, que les départs dont il est question sont des départs volontaires et que les centrales syndicales et les syndicats ont accepté de proposer, de recommander, en général, cette proposition à leurs syndicats. Une immense majorité d'instances intermédiaires des syndicats l'ont acceptée et vont la recommander à leurs membres.

(10 h 40)

Nous avons appris hier, en effet, que l'Alliance des professeures et professeurs de Montréal, qui regroupe environ 8 000 professeurs – c'est un syndicat important, c'est évident, mais c'est une partie minoritaire de la CEQ; la CEQ comprend une cinquantaine d'autres syndicats qui, eux, vont la recommander – s'est dissociée du consensus de la CEQ, mais, d'une façon très, très large et très majoritaire, le mouvement syndical québécois accepte de recommander la proposition du gouvernement, proposition d'ailleurs qui fait l'objet de discussions intensives présentement, encore hier soir, et qui devrait déboucher sur la signature d'un accord pour tracer le cadre de la discussion.

Donc, on procède de façon volontaire, de façon consensuelle, M. le Président, on traite avec les représentants autorisés et légitimes des salariés de l'État, et je crois que le gouvernement n'a absolument rien à se reprocher. Nous allons engager, à compter du mois de janvier, des négociations intensives pour faire en sorte que les mesures requises pour diminuer de 1 400 000 000 $ les dépenses de l'État en matière de coût de main-d'oeuvre soient, année après année, réalisées. Et ces mesures portent sur 800 000 000 $ dans le cas des personnels qui font l'objet des présentes négociations, 200 000 000 $ pour les autres personnels et 400 000 000 $ dans l'exercice du droit de gérance.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre pourrait cesser de se faire discret sur son évaluation des raisons pour lesquelles ces femmes du secteur public se comportent, comme il le dit très peu subtilement, comme des égoïstes? Est-ce qu'il pourrait nous indiquer pourquoi, selon lui, les votes à l'Alliance des professeurs et dans le domaine de la santé sont l'équivalent de comportements égoïstes? Et est-ce qu'il pourrait nous dire, le premier ministre, ce qu'il a à dire à ces femmes qui espéraient une retraite davantage enrichie après des années de gel salarial et de diminutions salariales? Est-ce qu'il pourrait nous dire pourquoi il ne leur explique pas pourquoi elles devraient cesser d'être égoïstes?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Le gouvernement n'a jamais qualifié les comportements des instances intermédiaires qui ont refusé de recommander. Nous n'avons jamais qualifié ces décisions qui ont été prises par les instances intermédiaires. Nous n'avons jamais qualifié, bien sûr, les décisions des membres de la base, puisqu'il n'y a, encore là, aucun membre de la base qui a été consulté là-dessus. Les membres de la base vont recevoir les recommandations des syndicats au cours des prochaines journées, donc le chef de l'opposition n'a pas à décider pour eux. Ils sont parfaitement capables de le faire eux-mêmes; ils sont parfaitement capables de comprendre la proposition.

Et il n'est aucunement dans l'intention ou dans les propos du gouvernement d'attribuer des sentiments péjoratifs à ceux qui réagissent d'une façon ou d'une autre vis-à-vis de la proposition du gouvernement. M. le Président, je m'attendrais, de la part du chef de l'opposition, à une attitude plus relevée dans ce débat. Le Québec...

Une voix: Oui, oui.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Oui, M. le Président. Une attitude plus responsable. Je ne parle pas uniquement des mots choisis; je parle de l'attitude vis-à-vis d'une démarche profonde au Québec, une démarche collective pour redresser la situation au Québec, pour relancer l'emploi, pour faire circuler de l'espoir dans une société qui en a besoin. Et je pense que le chef de l'opposition, au lieu de chercher à attiser des réactions négatives par des inventions de qualifications que nous n'avons pas eues, devrait coopérer avec le gouvernement pour que nous puissions ensemble, au Québec, réussir ce grand geste de solidarité, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: D'abord, ce qui devrait être relevé, c'est le nombre d'emplois, pas les impôts ici, au Québec. Première des choses.

Des voix: Bravo!

M. Johnson: Deuxièmement, est-ce que le premier ministre, avec son habituelle sincérité sélective, pourrait se souvenir que ce n'est pas plus tard qu'hier, il y a à peine 24 heures, qu'il a interprété les questions qui visent les raisons pour lesquelles les syndiqués, des hommes et des femmes du secteur public, votent contre l'offre gouvernementale comme étant un appel à l'égoïsme? C'est ça que le premier ministre a dit hier. Est-ce qu'il veut nous expliquer comment il fait équivaloir le refus et le rejet de l'attitude du premier ministre par des femmes du secteur public comme une manifestation d'égoïsme, elles qui s'attendaient à une meilleure pension plutôt que d'être prises à se faire imposer par la dictature de la majorité du premier ministre une espèce de diminution de leurs conditions de travail et de leur régime de retraite?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition vient de le reconnaître lui-même, c'est sa propre attitude que j'ai qualifiée hier en disant qu'il lançait des appels à l'égoïsme. C'est bien différent, M. le Président.

Deuxièmement, et surtout, M. le Président, s'agissant des régimes de retraite, la proposition du gouvernement comporte une mention expresse à l'effet que le gouvernement garantit intégralement l'intégrité des régimes de pension, et le chef de l'opposition doit savoir que nous demandons aux gens, volontairement, d'accepter d'imputer un surplus actuariel qui existe, au-delà de tout ce qui est nécessaire pour garantir les régimes de retraite, à un fonds qui va permettre de diminuer les coûts de main-d'oeuvre au gouvernement et de réduire les effectifs pour ceux qui voudront partir. Voici donc un geste éminemment démocratique, éminemment consensuel, qui se fonde sur une attitude de solidarité.

Une voix: Exactement.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Ce qu'on ne peut pas déduire de la réponse du premier ministre qui vient de nous dire qu'il y aura une situation où les gens vont partir, dans le cas de ceux qui voudront partir, mais que ceux qui restent, dans la mesure où il y a des dizaines de milliers de femmes dans le secteur public qui ne veulent pas contribuer de cette façon-là, à partir d'un enrichissement possible de leur régime de retraite, ça signifie que les gens qui vont partir sont ceux qui voudront partir, mais qui vont partir avec l'argent de ceux qui ne voudront pas payer.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: C'est justement, les gens vont décider eux-mêmes. Ce n'est pas seulement ceux qui vont partir qui vont répondre à la proposition des syndicats, à la recommandation, c'est tout le monde qui va devoir répondre. S'il n'y avait que ceux qui vont se prévaloir de l'offre qui votaient pour la recommandation, il y en aurait rien que 15 000. Il y en a 400 000, ça veut dire que c'est la majorité des 400 000 qui va décider, c'est donc la majorité démocratique des gens qui sont invités à poser un geste de solidarité qu'ils assumeront.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'on peut imposer la solidarité?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Non, mais on peut l'accepter, on peut la vouloir, on peut l'assumer au nom de la générosité sociale. C'est ce qu'ils feront, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Alors, j'ai bien compris que le premier ministre maintenant reproche à ces femmes qui votent contre la proposition gouvernementale de manquer de générosité sociale, et donc elles sont égoïstes, il leur dit encore.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, les gens n'ont pas encore voté. Il n'y en a pas encore un qui a voté, M. le Président. Qu'il laisse donc les gens tranquilles. Qu'il laisse donc les gens...

Une voix: L'Alliance a voté.

M. Bouchard: Les gens de l'Alliance? C'est l'instance, hier...

Le Président: J'en appelle encore une fois à l'article 32 du règlement, s'il vous plaît, mesdames, messieurs. M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il s'agit d'au-delà de 400 000 personnes qui auront une décision difficile à prendre. On me dit que l'Alliance, hier, ce sont les 8 000 qui ont voté par leurs syndicats locaux. Tous ces gens-là vont réfléchir durant les Fêtes. Il y a des votes qui vont se prendre cette semaine, il y en a d'autres qui vont se prendre après les Fêtes. Il y aura au Québec... On sait comment ça se passe au Québec, en particulier à la période des fêtes: les gens se revoient en famille, discutent de la situation familiale, individuelle et collective du Québec. Ils vont devoir réfléchir à cela, ils vont devoir peser les valeurs qui sont en présence, ils vont devoir faire une évaluation de la situation au Québec, ils vont devoir décider si, en effet, ce n'est pas le moment venu pour les Québécoises et les Québécois de poser un grand geste de corvée nationale. Et je suis très confiant, M. le Président, que nous arriverons.

Des voix: Bravo!

(10 h 50)

Le Président: Mme la députée de Saint-François, en principale.


Croissance de l'économie et de l'emploi au Québec

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Ce gouvernement a été élu en promettant le plein-emploi et la croissance économique, c'est ce qu'on retrouvait sur la première page du résumé du programme du Parti québécois. Or, il est ironique, M. le Président, de constater que le Québec, depuis l'assermentation du premier ministre, a perdu 60 000 emplois, soit 200 pertes d'emplois par jour. Mais, pour ce qui est de la prospérité économique, après deux ans de pouvoir, le Québec accuse un nombre record de faillites personnelles et d'entreprises. En effet, pour les 10 premiers mois de l'année, 4 900 entreprises ont fait faillite au Québec.

Ma question, M. le Président, à la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce: Comment peut-elle nous expliquer que le Québec accuse plus de 40 % de toutes les faillites d'entreprises au Canada?

Le Président: Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, quand on parle de plein-emploi, on doit parler aussi de finances publiques. La première chose que ce gouvernement a décidé de faire, c'est de rétablir la santé de nos finances publiques, et c'est la seule façon que l'on va retrouver le dynamisme et la confiance à la fois des entreprises et des individus en l'économie du Québec, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce que la ministre peut reconnaître qu'il y a une autre colonne à un bilan, qu'il n'y a pas seulement la colonne des dépenses mais qu'il y a la colonne également des revenus? Et comment peut-elle nous expliquer que 4 900 entreprises au Québec ont fait faillite? C'est beau, les discours, M. le Président, mais ce sont des milliers de Québécois qui se retrouvent sans emploi au Québec.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Dans le même article, M. le Président, on parle des perspectives de l'année 1997 et on constate que même l'Alliance des manufacturiers et des exportateurs du Québec prévoit que 40 % de l'augmentation des emplois en 1997 se fera au Québec, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, est-ce qu'on pense que ça va bien au Québec? Est-ce qu'on pense qu'on a le ton? Quand on regarde les prévisions à la baisse du ministre des Finances, comment allons-nous pouvoir créer des emplois et éviter de nombreuses faillites au Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Premièrement, la députée de Saint-François m'a mis en cause. Deuxièmement, je confesse que je suis pas mal plus vieux que la ministre déléguée et je vais ajouter à sa réponse dans une perspective historique.

Le Québec a toujours eu, depuis qu'on a des statistiques, un niveau de faillites plus élevé que le Canada. C'était vrai du temps de Daniel Johnson, père, comme du temps de Maurice Duplessis. De un. Vous devriez savoir ça, vous avez été ministre des Finances. Et, de deux, il naît plus d'entreprises au Québec proportionnellement qu'à peu près dans n'importe quel pays occidental. Alors, quand il y a plus de naissances, le niveau de risque est plus élevé, il y a plus de décès. Ce n'est pas le phénomène négatif que vous présentez, bien au contraire.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en complémentaire.

M. Johnson: Oui, simplement pour savoir du ministre d'État de l'Économie et des Finances comment il se fait que la croissance économique et la croissance de l'emploi au Québec étaient supérieures à la moyenne canadienne en 1993 et 1994 quand la députée de Saint-François était ministre des Finances, alors qu'elles baissent depuis qu'il est là, lui.

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Vous n'avez pas besoin de vous mettre à deux pour ajouter à la confusion, vous étiez assez...

Le Président: À ce moment-ci, il n'y a qu'un député qui est autorisé à prendre la parole, c'est le ministre des Finances.

M. Landry (Verchères): Je regrette, M. le Président, d'avoir dit une chose pendant que vous étiez debout et qui n'a pas été enregistrée. Je dis que, quand ils se mettent à deux, M. le Président, ils ajoutent à la confusion. La confusion, c'est qu'ils devraient méditer à la différence entre le taux d'emplois et le taux de chômage. Le taux de chômage au Québec, et toujours suivant des perspectives historiques, a toujours à peu près le même écart avec l'Ontario, autour de 2 %, mais le taux d'emplois, le taux de création d'emplois, disons, par 1 000 habitants, cet écart, il tend à se resserrer de façon constante. Et le professeur Fortin a écrit, ces temps derniers, des choses définitives sur la question. Je pense que la députée de Saint-François, comme son chef, aurait intérêt à utiliser la période des fêtes pour faire quelques lectures économiques sérieuses.

Le Président: M. le député de Jacques-Cartier, en principale.


Rôle des garderies à but lucratif dans les services à la petite enfance

M. Kelley: Merci, M. le Président. Lundi dernier, la ministre de l'Éducation a dit que les garderies à but lucratif devraient se transformer en garderies sans but lucratif pour être intégrées dans le nouveau réseau des centres à la petite enfance. Sa déclaration a semé un vent de panique dans le réseau des garderies privées.

Selon les chiffres de l'Office des services de garde à l'enfance, les coûts de démarrage et de fonctionnement pour une garderie sans but lucratif sont de l'ordre de 350 000 $. Pour transformer 400 garderies à but lucratif existantes, la ministre devra trouver 140 000 000 $, M. le Président, 140 000 000 $, sans créer une nouvelle place dans une garderie, les places dont les familles québécoises ont grandement besoin.

Comment est-ce que la ministre va transformer les garderies à but lucratif en garderies sans but lucratif et où est-ce qu'elle va trouver l'argent nécessaire?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: J'ai l'impression, M. le Président, que notre collègue souhaiterait qu'il y ait panique et tend à l'entretenir, M. le Président. Cela étant, pour le rassurer, cependant, pour le rassurer, je peux lui dire que nous sommes régulièrement et systématiquement en contact avec les représentants des garderies privées, tant par l'Office des services de garde que par les responsables de mon bureau, les responsables politiques de mon bureau.

Ce que j'ai répondu à la question qu'a soulevée le député, je crois, hier ou avant-hier, c'est qu'effectivement nous comptions travailler avec les garderies à but lucratif dans la perspective de l'implantation de la politique à la petite enfance et, particulièrement, des services de garde à la petite enfance, et que, pour ce faire, nous allions développer des modèles de collaboration et de coopération nous permettant d'utiliser les places disponibles aux fins de combler les objectifs que nous avons fixés, M. le Président.

J'ai dit aussi, cependant, que, si les garderies à but lucratif souhaitaient remplir les fonctions que nous comptons confier aux garderies sans but lucratif qui deviendront des centres à la petite enfance, elles devront, bien sûr, se transformer pour ce faire. Et, en ce sens-là, évidemment, M. le Président, il y aura, si ça devait être le cas d'un grand nombre de celles-ci, un plan de transformation qui devrait nous permettre d'étaler dans le temps, de telle sorte qu'on ne pénalise pas les garderies concernées mais qu'en même temps on assume les coûts progressivement, cela va de soi, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Normalement, M. le député de Westmount–Saint-Louis, je ne vous donnerais pas la parole, mais je pense que nos concitoyens qui nous entendent rire ont peut-être besoin d'explications.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le temps imparti en cette Chambre pour la période des questions pourrait ne pas compter pour l'incident qui vient d'arriver?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Je pourrais toujours dire qu'un député n'a l'autorisation de parler que de son siège, mais, dans les circonstances, rassurez-vous à la fois sur le siège et sur le temps. M. le député de Jacques-Cartier.

(11 heures)

M. Kelley: Est-ce que la ministre est consciente que, sous la gouverne de M. Rae, le gouvernement de l'Ontario a dépensé 52 000 000 $ pour transformer uniquement une centaine de garderies à but lucratif, et ça, sans qu'il y ait des nouvelles places, et que, cette année, le gouvernement de l'Ontario a dû abandonner ce programme parce qu'il était trop dispendieux?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, au-delà de la réponse que je donnais au député de Jacques-Cartier, je lui demanderais d'être un peu patient. Le livre blanc sera rendu disponible dès le mois de janvier, et nous verrons comment nous aborderons cette question. Mais il va de soi, et je suis tout à fait consciente de ce que soulève le député, M. le Président, que, si on devait procéder, il y aura une période de temps pour ce faire. De telle sorte qu'à l'intérieur des sommes imparties – parce que dans le cadre du livre blanc on va le constater – dans le cadre des sommes imparties, des sommes actuellement disponibles, mais que nous utiliserons différemment aux fins d'offrir des services directs aux enfants, il y aura des périodes de temps prévoyant ce fait, si c'était le cas des garderies à but lucratif et qu'elles souhaitaient s'intégrer au réseau des garderies sans but lucratif, qui deviendront, je le répète, M. le Président, des centres de services à la petite enfance.

Le Président: M. le député.

M. Kelley: Est-ce que la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce peut nous informer combien de garderies sont incluses dans le plan Paillé et quelle démarche elle entend prendre pour protéger l'argent des contribuables québécois face à l'élimination des garderies à but lucratif?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Cette question n'est pas dépourvue d'intérêt, mais demande une recherche statistique que nous ferons volontiers. Donc, nous en prenons avis.

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.

M. Ouimet: Non, en additionnelle, M. le Président.

Le Président: En additionnelle.

M. Ouimet: Y aura-t-il également une période de temps pour l'implantation des maternelles cinq ans, compte tenu du manque d'espace dans l'ensemble des écoles de la province de Québec?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Le livre blanc prévoira le plan d'implantation. Cependant, nous croyons être capables de rendre disponibles pour l'automne les maternelles cinq ans sur l'ensemble du territoire. Je sais, et nous sommes à le faire d'une façon systématique, que, dans certains milieux, il y a actuellement des manques de locaux, et c'est vrai particulièrement, évidemment, dans les couronnes, par exemple, de l'île de Montréal, où il y a des concentrations de jeunes familles qui se sont installées là en nombre important et dans un laps de temps très court, ce qui fait qu'il y a des manques de locaux là. De façon générale, cependant, je dois dire que ce n'est pas le cas.

Alors, nous sommes à relever de façon systématique là où les problèmes existent, pour bien les identifier, pour bien les loger et voir comment avec les commissions scolaires nous trouverons des solutions qui pourront être, dans certains cas, temporaires, mais qui nous permettront d'assurer les services de maternelle plein temps – sur une base volontaire, on s'entend, M. le Président – pour tous les enfants du Québec.

Le Président: En principale, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Projet de loi instaurant une commission de développement de la métropole

Mme Frulla: Après avoir bâillonné en pleine nuit l'opposition pour aller chercher plus de 400 000 000 $ dans la poche des contribuables – sous le prétexte d'une grande corvée de solidarité pour faire dorer la pilule – le gouvernement, par le biais du ministre d'État à la Métropole, déposera demain le projet de loi instituant la commission de développement de la métropole, créant ainsi une nouvelle structure chapeautant les 200 structures qui structurent la région la plus structurée au Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Frulla: Cette structure supplémentaire présidée par le ministre d'État à la Métropole serait constituée d'un conseil d'administration composé de 23 élus et de 13 non-élus nommés par le gouvernement, disposant chacun d'un droit de vote égal, et coûterait en fonctionnement 3 500 000 $ annuellement aux contribuables.

Une voix: Un détail.

Mme Frulla: En principale, M. le Président: Le ministre d'État à la Métropole peut-il nous confirmer que, dans le cas d'une commission décisionnelle en matière de transport, d'aménagement du territoire et de gestion des déchets, entre autres, tel qu'inscrit...

Des voix: ...

Mme Frulla: En principale, M. le Président: Est-ce que le ministre d'État à la Métropole peut nous confirmer que, dans le cas d'une commission décisionnelle en matière de transport, d'aménagement du territoire et de gestion des déchets, tel qu'inscrit dans la version du projet de loi du 29 novembre, les non-élus auront effectivement un droit de vote équivalent à celui des élus, qui, eux, sont imputables devant la population?

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Dans l'élaboration du projet de loi qui sera probablement présenté demain s'il est approuvé par le Conseil des ministres aujourd'hui, il a fallu faire état de beaucoup de consensus. Donc, effectivement, il y a eu plusieurs projets qui ont été présentés. Que certains aient coulé et que certains autres n'aient pas coulé, c'est malheureux, ils n'auraient pas dû couler, mais vous verrez demain quel est le projet véritable si le Conseil des ministres l'approuve aujourd'hui.

Quant aux structures, il s'agit d'un organisme, le seul qui appelle les municipalités à collaborer ensemble. De plus, s'il regroupe des élus municipaux, il regroupera des élus municipaux qui n'ont pas été élus pour cette fonction et dont certains, d'ailleurs, n'ont pas été élus au suffrage universel dans le poste qu'ils occupent. Il fallait, à la suite du consensus atteint au forum, retrouver la meilleure représentation pour que Montréal soit enfin dotée d'un organisme où les gens ne s'affrontent pas, mais collaborent ensemble et ait un véritable partenariat avec le gouvernement du Québec pour obtenir la meilleure planification pour la région métropolitaine.

Le Président: Mme la députée.

Mme Frulla: M. le Président, est-ce que le ministre réalise qu'on ne demande pas les détails du projet de loi, on comparera demain avec ce qu'on a. La seule chose qu'on veut savoir, c'est: Est-ce que, effectivement, le conseil d'administration sera composé d'élus municipaux et de non-élus et que chacun aura un droit de vote égal, ce qui fait que les élus, eux, sont redevables devant la population et les non-élus ne le sont pas? C'est seulement ça, la question, M. le Président. Les détails, on les analysera demain.

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Comme je l'ai expliqué, vous saurez tous ces détails demain, et probablement vous avant les autres. Je veux dire: avant les autres membres.

Des voix: Oh!

M. Ménard: Certainement! Je veux que les...

Des voix: Oh!

Le Président: M. le ministre. Je ne voudrais pas que par la suite on reproche au président d'avoir pris trop de temps, hein. M. le ministre.

M. Ménard: Non, je préfère des critiques réfléchies qu'impulsives. Mais je rappelle encore une fois qu'aucun élu n'a été élu à Montréal pour siéger sur un organisme qui rassemblerait les municipalités. À la suite du forum, nous cherchons le meilleur type de représentation pour obtenir la meilleure planification possible en partenariat avec le gouvernement du Québec, qui assumera ses responsabilités puisque, lui, il est élu.

Le Président: Mme la députée de La Pinière, en principale.


Rôle de la commission de développement de la métropole

Mme Houda-Pepin: M. le Président, le 25 octobre dernier, 200 décideurs montérégiens ont pris part à une consultation sur la commission de développement de la métropole. Un mémoire a été préparé par la Société montérégienne de développement et soumis à différents membres du gouvernement à cet effet. L'un des consensus clairs qui s'est dégagé de ce forum spécifiait que la commission n'aurait qu'un rôle consultatif. C'est sur cette base-là que les élus de la Rive-Sud ont été les premiers à appuyer le ministre de la Montérégie dans son projet de commission.

(11 h 10)

M. le Président, maintenant que le ministre de la Métropole s'apprête à déposer son projet de loi, est-ce que le ministre responsable de la Montérégie peut nous confirmer que la commission de développement de la métropole aura un rôle décisif en matière d'aménagement urbain? Et, si c'est oui, comment peut-elle expliquer sa volte-face à l'égard d'un consensus montérégien qu'elle a elle-même suscité et auquel elle a adhéré publiquement?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Je remercie la députée de sa question, parce qu'elle souligne en même temps l'excellent travail auquel elle-même a contribué, d'ailleurs, M. le Président, que nous avons fait en Montérégie pour définir quelles seraient les grandes orientations que nous souhaitions pour que la Rive-Sud et la Montérégie participent au développement de la métropole et se sentent concernées par ce qui se passe dans l'ensemble de la métropole. Cependant, M. le Président, elle devra, comme sa collègue de Marguerite-Bourgeoys, être un peu patiente et attendre que le projet soit déposé, demain, par notre collègue, si les décisions se prennent en ce sens, M. le Président.

M. Gobé: Question principale, M. le Président.

Le Président: M. le député de LaFontaine, une question.


Menace de coupure de postes chez CP–Saint-Laurent & Hudson, à Montréal

M. Gobé: M. le Président, il y a deux semaines, l'usine de Maple Leaf annonçait sa fermeture et son départ pour Toronto. La semaine dernière, c'était au tour des fabricants des produits Schwartz d'annoncer leur déménagement, leur fermeture et leur installation aux États-Unis et dans la région de Toronto. Résultat: des centaines d'emplois perdus pour la région de Montréal et les Montréalais. Malheureusement, le ministre du Travail ne l'avait pas venu venir.

M. le Président, cette semaine, c'est au tour de Canadien Pacifique Rail de continuer le transfert, après 700 pertes d'emplois au profit de l'ouest de Montréal, d'un autre 100 emplois vers Calgary. M. le Président, nous apprenons en plus que le président de cette compagnie, M. Ritchie, a menacé les employés d'une de ses filiales, la CP–Saint-Laurent & Hudson, qui gère des réseaux de rails dans l'est du Canada, qui est située à Montréal et qui emploie 4 300 employés, de sabrer ou de couper 30 % de ses emplois, soit 1 350, s'ils n'arrivaient pas à s'entendre avec leur syndicat.

Or, M. le Président, ma question est la suivante: Devant ces pertes d'emplois continuelles à l'extérieur du Québec et devant l'urgence de sauver 1 350 emplois dans la région de Montréal – la question est au ministre du Travail – qu'est-ce qu'il entend faire? Est-ce qu'il entend s'impliquer? Est-ce qu'il entend être proactif là-dedans ou de regarder le train passer, encore une fois, vers l'ouest du pays?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, j'aurais aimé que le député de LaFontaine parle aussi des choses intéressantes qui se sont passées au Québec sur le front des relations de travail. Il devrait parler, par exemple, du règlement des cols bleus de la ville de Montréal, où on a eu une entente de principe. Il aurait dû aussi parler que, dans l'industrie de la construction, on est en train de régler, à 75 %, l'industrie de la construction.

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: C'est un élément important. J'ajoute aussi qu'une des grandes préoccupations du député de LaFontaine, M. le Président, c'étaient les hôtels qui étaient en grève. On les a tous réglés pendant la période d'été et au cours de l'automne. J'imagine que ça devrait faire plaisir au député de LaFontaine. Les nouvelles sur Kenworth sont également très bonnes.

Quant à la situation qu'il évoque, je dois rappeler, M. le Président, que nous en sommes à examiner la question et on espère, au cours des prochains jours, être capables d'en arriver à régler la question qui a été soulevée, comme on le fait dans tous les autres dossiers où le ministère du Travail est interpellé.

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions et des réponses orales.


Réponses différées


Frais spéciaux imposés aux étudiants ayant échoué plus d'un cours au cégep

Nous en arrivons à l'étape des réponses différées. Mme la ministre de l'Éducation répondra maintenant à une question posée le 13 décembre par M. le député de Verdun et concernant les droits spéciaux de 2 $ par heure de cours pour les étudiants du secteur technique, tel que prévu au projet de loi n° 85. Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. À l'automne 1995, le nombre d'étudiants – parce qu'il y avait plusieurs sous-questions à la question du député de Verdun, je vais les ramasser en quelques éléments, là, concrets – qui ont plus d'un échec et qui auraient été assujettis à la nouvelle mesure était de 17 131 au secteur technique, comparativement à 22 705 au secteur général, soit 39 836 étudiants.

Le député a raison, M. le Président, les cours au secteur technique comptent un plus grand nombre d'heures que ceux du secteur général. En fait, il s'agit d'une moyenne de 4 h 8 min pour le secteur technique par rapport à une moyenne de 3 h 43 min pour le secteur général. Malgré ce fait, cependant, M. le Président, cette mesure n'est pas discriminatoire pour les étudiantes et les étudiants du secteur technique parce que la très grande majorité des cours échoués par les étudiants du secteur technique sont les cours communs obligatoires.

Par exemple, et nous avons fait le calcul concret pour voir ce que cela signifiait, si la mesure proposée avait été appliquée à l'automne 1995, en tenant compte du nombre d'heures suivies, la différence entre les étudiants du secteur technique et ceux du secteur général aurait été de 10,80 $. Cette légère différence s'explique aussi par le fait que les étudiants inscrits au secteur technique suivent en moyenne 24,1 heures de cours, alors que ceux inscrits au secteur général suivent 21,3 heures de cours.

Enfin, M. le Président, j'aimerais rappeler à cette Assemblée que le but premier de cette mesure – et je l'ai dit déjà, mais je pense que c'est important de se le rappeler – ce n'est pas de faire payer les étudiants, mais, bien sûr, c'est de changer les mentalités et les comportements, c'est de lutter contre la culture de l'échec pour développer une culture de la réussite, pour introduire de la rigueur, de l'exigence, et je pense que nous réussirons non pas lorsque les jeunes paieront pour reprendre des cours, mais lorsqu'ils n'auront pas à en reprendre parce qu'ils auront réussi leurs cours, M. le Président.

Donc, en terminant, j'aimerais assurer le député que sa préoccupation est aussi la nôtre. Et je l'assure que je surveillerai et que mon ministère surveillera de très près l'évolution de ce dossier. Si jamais il y avait des ajustements à apporter parce que nous serions à même de constater qu'il y a des différences significatives et que le coût était plus élevé pour les étudiants du secteur technique, nous introduirions des mesures de correction.

Je termine en disant, M. le Président, que je remercie le député de Verdun de sa question qui nous a permis de clarifier un autre élément du dossier qui est devant nous, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je prends acte de la réponse, actuellement, de la ministre. Ma question donc, question complémentaire: Est-ce que dans le projet de loi n° 85 – que malheureusement nous n'aurons pas l'occasion de pouvoir étudier comme nous aurions dû l'étudier s'il n'y avait pas eu ce bâillon qui nous est imposé – est-ce qu'à l'intérieur de ce projet de loi n° 85 vous allez pouvoir déposer des amendements qui vous donneraient la latitude d'agir, tel que vous venez de le dire à l'instant, si vous voyiez une distorsion majeure envers les étudiants du secteur professionnel et technique?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: M. le Président, il n'est pas question à ce moment-ci que nous introduisions une telle mesure. Nous pourrions éventuellement procéder, bien sûr, par amendement. On sait que la loi couvre actuellement les étudiants du cégep, que nous souhaitons couvrir aussi les étudiants universitaires éventuellement. Il y a actuellement certaines embûches – que le dossier de Verdun connaît, bien sûr – c'est cette fameuse notion de code permanent, et que, j'espère, nous corrigerons dans les mois qui viennent, ce qui nous permettra sans doute de revenir devant cette Assemblée, et nous aurons sûrement l'occasion d'en discuter très longuement, M. le Président.

M. Gautrin: M. le Président, je ne suis pas un dossier, je suis un député.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: À ce moment-ci, une autre réponse différée. Mme la ministre de l'Éducation va répondre maintenant à une question posée le 17 décembre par M. le député de Marquette concernant l'utilisation de la subvention allouée pour la mesure Lait-école. Mme la ministre de l'Éducation.


Utilisation par les commissions scolaires de la subvention allouée au programme Lait-école

Mme Marois: Alors, je m'excuse auprès du député de Verdun.

(11 h 20)

C'est au sujet des sommes non utilisées pour le Lait-école. Alors, le ministère transfère aux commissions scolaires une enveloppe, et cela, en base complémentaire de financement sous l'item Réussite éducative. Le Lait-école, comme d'autres mesures, entre autres l'aide aux devoirs et aux leçons à l'école primaire, l'éducation préscolaire, l'encadrement au secondaire ou encore l'insertion sociale et professionnelle des jeunes – et je ne nomme que quelques mesures – font partie de l'ensemble des mesures adoptées pour favoriser la réussite éducative. La commission scolaire peut donc choisir parmi ces mesures ses priorités d'intervention et répartir l'enveloppe qui lui est disponible selon ses besoins, évidemment, en choisissant l'une ou l'autre des mesures identifiées comme venant favoriser la réussite.

Cela a d'ailleurs été le cas, M. le Président. Et ça m'étonne un peu que le député le mentionne, puisque, dans les faits, il a connu une telle situation comme président d'une commission scolaire, puisqu'il y a eu des diminutions de sommes allouées au Lait-école. Par contre, les sommes disponibles aux fins de la réussite éducative sont complètement dirigées vers la réussite éducative et servent à implanter ou à mettre en oeuvre d'autres mesures. Alors, je reste étonnée et surprise d'entendre le député de Marquette poser des questions sur des sujets qu'il devrait normalement connaître très bien, puisque, au quotidien, il a eu à les voir se gérer. J'imagine qu'au fur et à mesure de nos débats on continuera à contribuer à sa formation.

Le Président: M. le député de Marquette, en complémentaire.

M. Ouimet: La ministre de l'Éducation est-elle en train de nous dire qu'il y a des élèves au Québec qui n'ont pas reçu le Lait-école auquel ils avaient droit et que, dans les règles budgétaires qui s'appliquaient jusqu'à l'arrivée du député de Lévis et de la députée de Taillon au ministère de l'Éducation, il y avait une règle qui interdisait la transférabilité de ces montants? L'argent pour le Lait-école devait servir pour le Lait-école. Et, si, en juin 1996, il y a 2 000 000 $ qui n'ont pas été utilisés pour la mesure Lait-école, avec une règle de trois, lorsqu'on sait que le berlingot de lait coûte 0,20 $ et qu'il est distribué 150 jours par année, c'est près de 63 000 élèves qui n'auraient pas reçu le Lait-école. Est-ce que c'est ça que la ministre de l'Éducation est en train de nous dire?

Une voix: Honteux!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: La ministre est en train de dire, M. le Président, qu'il y a eu 87 000 000 $, en 1994-1995 – et ces sommes ont été confirmées pour l'année actuelle – il y a eu 87 984 000 $ rendus disponibles dans les mesures de réussite éducative, que l'on retrouve à l'intérieur de ces mesures de réussite éducative le Lait-école, les projets d'école secondaire avec approche sur mesure, les maternelles à cinq ans à temps plein, les services éducatifs aux enfants de quatre ans, des mesures alimentaires au primaire et au secondaire, de l'encadrement au secondaire, des devoirs et leçons à l'école primaire et que, parmi ces mesures, dont d'autres que je n'ai pas identifiées, M. le Président, il y a le Lait-école et que les écoles, selon les besoins qu'elles constatent des enfants, choisissent la mesure la plus pertinente. Dans certains cas, c'est le Lait-école et dans d'autres cas, c'est d'autres mesures. Il me semble que c'est de responsabiliser les intervenants qui prennent soin des enfants auxquels ils ont à répondre, M. le Président.

M. Garon: M. le Président, comme j'ai été impliqué par la question...

Le Président: Je m'excuse, M. le député de Lévis. À ce moment-ci le règlement ne permet pas...

Des voix: Consentement.

Le Président: ...à moins qu'il y ait consentement.

Des voix: Consentement.

Le Président: Alors, s'il y a consentement, à ce moment-ci, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, comme le député de Marquette a fait une affirmation, j'aimerais que la ministre confirme que ça a été fait avant le député de Lévis, par le député de Portneuf, lorsqu'il était ministre de l'Éducation.

Des voix: Ah!

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, je remercie le député de Lévis de sa question. Effectivement, c'est sur le budget 1994-1995, qui avait été approuvé par le député de Portneuf, alors ministre de l'Éducation, M. le Président, dans l'ancien gouvernement.

Des voix: Ah!

Le Président: Oui, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: J'aimerais pouvoir avoir le privilège de corriger la réponse que vient de donner le député de Lévis parce que c'est faux.

Le Président: Je vais procéder de la même façon, puisque j'avais indiqué que le député de Lévis ne pouvait pas prendre la parole à moins qu'il y ait consentement. Il y a eu consentement. Est-ce qu'il y a consentement pour le député de Marquette?

Des voix: Consentement.

Le Président: Alors, M. le député de Marquette, une dernière question complémentaire.

M. Ouimet: Oui, M. le Président. Les règles budgétaires qui s'appliquaient lorsque le député de Portneuf était ministre de l'Éducation étaient les suivantes: les ressources allouées par allocations spécifiques ne sont pas transférables ni entre elles ni aux allocations de base et supplémentaires. Quand le député de Lévis est arrivé au ministère de l'Éducation, M. le Président, dans les règles budgétaires, ce paragraphe-là a sauté pour permettre de tripoter et de jouer dans ces chiffres-là, M. le Président. C'est lui qui...

Des voix: ...

Le Président: Alors, Mme la ministre de l'Éducation, en terminant l'échange.

Mme Marois: Je ne crois pas, M. le Président, que ce soit vraiment le genre du député de Lévis. Cela étant, ce sont les commissions scolaires qui tripoteraient à travers les budgets, puisque, dans le fond, on leur donne la possibilité – et je pense que c'est correct, M. le Président, de le faire – de choisir la mesure la plus pertinente compte tenu des besoins des enfants qui fréquentent l'école. Parfois ça peut être le Lait-école et parfois ça peut être toute autre chose et qui est absolument essentielle pour les enfants qui sont là, M. le Président. C'est responsabiliser les intervenants, c'est responsabiliser les équipes-écoles, et cela va essentiellement dans le sens de ce que nous ont recommandé les états généraux, de ce que nous recommande l'Association des directions d'école, de ce que nous recommandent les fédérations de commissions scolaires. Alors, j'imagine que le député va être d'accord avec moi, M. le Président.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Très bien. Alors, nous en arrivons maintenant à l'étape des avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre indiqué: le projet de loi n° 83, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives; et le projet de loi n° 67, Loi instaurant une procédure de révision administrative en matière d'évaluation foncière et modifiant d'autres dispositions législatives, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 62, Loi modifiant le Code des professions concernant les comités de discipline des ordres professionnels, de 11 h 30 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission du budget et de l'administration... M. le leader du gouvernement, avant...

M. Paradis: Oui.

Le Président: De l'opposition officielle, je m'excuse.

M. Paradis: Compte tenu que le leader du gouvernement a déposé une motion de suspension des règles hier, qui est très restrictive quant à l'utilisation des droits de parole des députés, c'est-à-dire cinq minutes par intervention comme telle, quelle mesure la présidence entend-elle prendre pour protéger le droit de parole des députés qui sont appelés à siéger en commission parlementaire et qui devront intervenir à cinq minutes d'intervalle, alors qu'on sait où se situent les salles dans ce Parlement?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que c'est juste une question d'organisation. On regarde le nombre de commissions qui vont siéger, c'est quand même peu par rapport au maximum qui est permis, et, à ce moment-là, je crois que tout simplement, en prévoyant quels députés sont en commission, c'est possible pour l'opposition de faire en sorte que les députés qui doivent intervenir aient le temps de venir aux commissions et de venir en Chambre, M. le Président.

M. Paradis: M. le Président, les commissions ont des règles de fonctionnement. Le leader du gouvernement a choisi des temps de parole de cinq minutes par député, ce qui, physiquement, ne donne pas le temps à un député qui a à intervenir de quitter sa commission parlementaire et de venir parler. Moi, je m'adresse à la présidence à ce moment-ci: Vous êtes le gardien des droits des parlementaires, de quelle façon ces parlementaires-là vont-ils pouvoir, dans la réalité, exercer le droit de parole de cinq minutes? Quelle mesure entendez-vous prendre comme président?

Le Président: Très franchement, M. le leader de l'opposition officielle, vous me prenez un peu au dépourvu, je n'avais pas réfléchi à la question plus que ça. Je vais voir avec les services du Secrétariat des commissions parlementaires dans quelle mesure on peut organiser les choses. Et je vous rappelle, par ailleurs, que les présidents de commission ont une marge de manoeuvre qui leur permet de faire en sorte que les intervenants qui doivent participer aux débats en commission puissent le faire correctement. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je voudrais juste faire remarquer au leader de l'opposition, pour peut-être calmer certaines inquiétudes qu'il a, qu'il n'y a qu'une seule commission qui siège ce matin.

(11 h 30)

Des voix: ...

M. Bélanger: Une seule ce matin.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, moi, je ne comprends pas le sens de l'argumentation du leader du gouvernement. S'il y a un seul député qui est privé de son droit d'intervenir à cause du temps qui est accordé, très limité, de cinq minutes, M. le Président, l'article 2 du règlement... Moi, je n'ai plus de droit d'intervenir comme leader, je n'ai plus le droit de demander d'ajourner, et caetera, pour permettre à ce député-là de se rendre à nos travaux. Il ne reste que le leader du gouvernement qui peut le faire. Il nous a indiqué par son attitude d'hier qu'il ne comptait pas le faire.

À ce moment-là, il ne nous reste que la présidence à qui nous pouvons avoir recours pour garantir ces droits de parole de cinq minutes. M. le Président, le sous-paragraphe 8 de l'article 2 se lit comme suit: «Outre les pouvoirs que la loi lui confère – et cet article n'a pas été suspendu – le président exerce les autres pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée» et des membres de l'Assemblée, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, peut-être que le leader de l'opposition n'a pas lu attentivement les règles qui avaient été suspendues et celle qui est encore opérante. Mais j'aimerais lui faire remarquer, M. le Président, que nous allons siéger ici en Chambre pendant l'heure du dîner, pendant, normalement, le temps où le Parlement ne siège pas, entre 13 heures et 15 heures. Alors, à ce moment-là, le nombre de députés qui, eux, vont être en commission... À ma connaissance, la commission ne siégera pas entre 13 heures et 15 heures; alors, à ce moment-là, il y a juste à faire en sorte que les députés qui sont en commission, entre 13 heures et 15 heures, viennent tout simplement prendre leur temps de parole. Et, à ce moment-là, il n'y a aucun député qui va être brimé et qui va perdre son droit de parole. C'est certain, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, moi, là, je suis surpris de l'intervention du leader du gouvernement. L'article 143 de nos dispositions n'a pas été suspendu et ça contredit exactement ce qu'il vient de nous dire. «Les heures de séance des commissions sont les mêmes que celles où l'Assemblée peut se réunir.» M. le Président, donc, s'il poursuit les travaux entre 13 heures et 15 heures, normalement les commissions doivent continuer à ce moment-là. On doit suivre le même calendrier, à moins qu'on choisisse de suspendre, à ce moment-là, cet article-là du règlement et que, là, le leader puisse procéder à sa façon. Ça commande, à ce moment-là, une autre motion de suspension d'un autre article.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, encore là, malheureusement, ce que je dois constater... Je ne sais pas, peut-être que, ce matin, il était un peu inattentif, le leader de l'opposition; ça peut se comprendre, M. le Président, il est peut-être préoccupé par certaines choses. Mais, s'il avait écouté mon avis, M. le Président – j'ai dit de quelle heure à quelle heure les commissions doivent siéger – il aurait lu mon avis et il aurait constaté que ça ne siège pas entre 13 heures et 15 heures.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, l'avis ne peut contredire l'article 143 du règlement.

Le Président: Ceci étant dit, je vous rappelle ce que je viens d'indiquer, c'est que, puisque le problème ne m'avait pas été soumis au préalable, je ne sais pas jusqu'où la présidence, en fonction des prérogatives qui sont les siennes, celles qui ont été rappelées par le leader de l'opposition... Je vais vérifier dans quelle mesure, en tout cas, en ce qui me concerne, je pourrai faire en sorte que les privilèges et les droits des membres de l'Assemblée puissent être respectés.

J'en appelle également, je vous l'indique, à la collaboration de mes collègues de l'Assemblée qui sont présidents de commission permanente et qui ont, eux aussi, une responsabilité dans la façon dont les travaux se déroulent en commission parlementaire. Et finalement j'en appelle également à la collaboration des leaders de telle sorte que l'organisation des travaux se fasse en respectant les droits et privilèges de l'Assemblée. De toute façon, en ce qui me concerne, je vais voir dans quelle mesure des interventions de mon côté seront possibles pour faciliter le travail des députés qui doivent légiférer à ce moment-ci.

Alors, ceci étant dit, de mon côté, je vous avise que la commission du budget et de l'administration se réunira en séance de travail aujourd'hui, le mercredi 18 décembre, de 14 heures à 15 heures à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'étudier le rapport final qui doit être déposé à la suite des consultations particulières concernant la Loi sur les intermédiaires de marché.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée maintenant. Il n'y a pas d'intervention?

M. le député de Rivière-du-Loup, je crois qu'à ce moment-ci, compte tenu de la motion qui a été adoptée hier soir, la motion de suspension des règles, il n'y a que le leader du gouvernement qui pouvait intervenir à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Puisqu'il a indiqué qu'il ne souhaitait pas le faire, il n'y a aucun autre membre de l'Assemblée qui peut le faire à ce moment-ci.

Alors, nous en arrivons... Question de règlement?

M. Lefebvre: S'il vous plaît. M. le Président, vous avez, tout à l'heure, sur l'intervention de mon collègue de Brome-Missisquoi, indiqué vouloir apprécier l'article 2, sous-paragraphe 8, de quelle façon vous allez l'interpréter, de quelle façon vous allez en tenir compte en regard de ce qui se passe avec la suspension des règles. Il me semble, M. le Président, qu'on devrait suspendre pour que vous rendiez votre décision, parce qu'on a, nous, à planifier, du côté de l'opposition, en partant de ce que, vous, vous allez décider et, sauf erreur, M. le Président, on doit s'attendre à ce que le leader appelle, dans les prochaines secondes, le début des débats engendrés, provoqués par la suspension des règles. Je ne sais pas aussi s'il entend procéder dans l'ordre, tel qu'il apparaît à la motion de suspension des règles.

Alors, M. le Président, il me semble qu'on devrait suspendre pour que vous rendiez votre décision et qu'on sache à quoi s'en tenir, qu'on puisse planifier notre journée. Pour ce qu'il nous reste de pouvoirs, M. le Président, on aimerait bien savoir à quoi s'en tenir.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'ai déjà, tout à l'heure, fait signe au leader adjoint de l'opposition à l'effet que nous allons procéder dans l'ordre; donc, il n'y aura pas de surprises au niveau des projets de loi tels qu'énumérés dans la motion.

Maintenant, il n'y a aucune nécessité de suspendre, puisque nous allons commencer par l'article 6 du feuilleton, M. le Président, la Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Et, à ce moment-là, ça commence par une intervention de 20 minutes de part et d'autre. Donc, à ce moment-là, ça donne amplement le temps; si vous désirez, à ce moment-là, M. le Président, réfléchir sur la question, vous pouvez vous faire remplacer par un vice-président qui va continuer à siéger et vous pourrez revenir, à ce moment-là, pour rendre votre décision.

Il n'y a absolument aucun motif, je vous le soumets respectueusement, pour suspendre les travaux. La motion, telle qu'adoptée, est claire, M. le Président, et je crois qu'aucun droit des parlementaires, au niveau du droit de parole tel qu'il est prévu dans la motion, n'est menacé.

Le Président: Une dernière intervention, M. le député.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Simplement, quand on s'embarque dans ce type de procédures qui sont tout à fait exceptionnelles, M. le Président, on tente de déterminer, avant de s'y embarquer, quelles sont les règles du jeu. Ce n'est pas en cours de chemin qu'on tente d'arriver avec des modifications sur la façon de procéder.

Dans les circonstances – nous sommes dans une circonstance tout à fait exceptionnelle de suspension des droits de parole des députés à l'Assemblée nationale du Québec – qu'on connaisse les droits des députés avant d'entreprendre le débat, je pense que c'est sain. Et je pense que, si le leader du gouvernement regarde la problématique dans son ensemble et qu'il fait preuve d'un petit peu de bonne foi dans un contexte extrêmement difficile pour l'Assemblée nationale du Québec, il va vous permettre de délibérer, de rendre votre décision. Lorsqu'il appellera sa motion, il saura à quoi s'en tenir; nous autres aussi, on saura à quoi nous en tenir, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président.

Le Président: À ce moment-ci, je ne crois pas qu'il faille suspendre les travaux pour la raison suivante, M. le leader de l'opposition officielle et M. le leader adjoint: dans la mesure où la présidence est soumise aux ordres de l'Assemblée également, hier, l'adoption de la motion de suspension des règles a donné un ordre spécial à l'Assemblée à l'égard de la façon dont les travaux doivent être organisés à partir de ce moment-là et, en conséquence, c'est ce qui prévaut. Et, dans les limites qui sont imparties par cet ordre-là, néanmoins le président exerce ses responsabilités, bien sûr.

Et c'est la raison pour laquelle je crois qu'à ce moment-ci, tout en vous indiquant que je vais, le plus rapidement possible, me retirer pour vérifier dans quelle mesure, de mon côté... Et je vous ai indiqué que je n'étais pas le seul acteur à l'égard du contexte dans lequel les députés pourraient être appelés à intervenir et à travailler au plan législatif, mais, en ce qui me concerne, je vais voir ce qui peut être fait du côté de la présidence. Mais néanmoins, je ne pense pas, à ce moment-ci, qu'il faille suspendre les travaux; je pense qu'on devrait, maintenant, passer aux affaires du jour.

M. Paradis: M. le Président, vous avez basé votre décision en prenant pour acquis, quitte à effectuer des vérifications additionnelles, que l'article 44 du règlement était suspendu par la motion du leader du gouvernement, ce qui n'est pas le cas. Et, si cet article, je vous le soumets respectueusement, n'est pas suspendu, vous n'êtes pas lié par cette motion du leader du gouvernement quant à votre discrétion quant à la suspension du débat comme tel. Vous conservez...

Le Président: Vous avez raison, M. le leader de l'opposition. Le problème, c'est que, malgré tout, je considère que, dans l'ordre des choses et en termes de priorités, l'ordre de l'Assemblée, un vote de l'Assemblée, majoritaire, qui réorganise nos règles de procédure d'une façon particulière et spéciale, est un ordre fondamental. Et, dans ce contexte-là, je crois qu'il est possible à la présidence de réfléchir et de vérifier dans quelle mesure elle peut faciliter le travail dans la limite de ses moyens, de ses capacités aux députés sans, pour autant, à ce moment-ci, nécessiter une suspension de nos travaux. Et je vous inviterais, à ce moment-ci, à vous conformer à cette décision, et nous allons passer aux affaires du jour. Je ne voudrais pas qu'on en appelle de ma décision.

M. Paradis: Pour une clarification, M. le Président. Je veux bien comprendre que, s'il survient un autre incident en cours de débat, vous n'invoquiez pas, au motif de la décision que vous venez de rendre et que nous allons respecter, que l'ordre de la Chambre vous empêche d'utiliser les pouvoirs qui vous sont dévolus à l'article 2.8° ainsi qu'à l'article 44 de notre règlement, que ce n'est pas la base de votre décision.

(11 h 40)

Le Président: D'aucune façon, M. le leader de l'opposition. Je pense qu'on se comprend très bien à cet égard-là.


Affaires du jour


Projet de loi n° 84


Adoption du principe

Alors, aux affaires du jour, conformément à l'ordre adopté à la séance d'hier, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Je vous rappelle que les temps de parole pour le débat sur l'adoption du principe sont limités à 20 minutes pour le ministre qui présente le projet de loi, à 20 minutes pour un représentant de l'opposition officielle, à cinq minutes pour tout autre député et il y a cinq minutes de réplique pour celui qui présente le projet de loi.

Alors, à ce moment-ci, je vais reconnaître Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Le projet de loi n° 84 qui est déposé devant cette Assemblée, M. le Président, essentiellement modifie la Loi sur la sécurité du revenu, notamment par une capitalisation des intérêts, mais qui est limitée aux situations de fraude; par un tarif aux débiteurs alimentaires, mais seulement quand ils sont fautifs en matière de pension alimentaire; et par des intérêts récupérés dans le cas, par exemple, de l'aide conditionnelle versée par des organismes tiers comme, par exemple, la Commission de la santé et de la sécurité du travail ou la Société de l'assurance automobile, mais uniquement dans la limite des intérêts versés.

En d'autres termes, ce dont il s'agit essentiellement par le projet de loi n° 84, c'est soit de récupérer les sommes versées en trop, mais dans des situations où intentionnellement il y aurait eu des déclarations de mauvaise foi, soit, dans le fond, de charger pour la négligence des débiteurs alimentaires fautifs qui négligent de payer une pension alimentaire qu'il leur a déjà été enjoint de payer par ordonnance ou de récupérer des intérêts versés dans le cas de l'aide conditionnelle, dans la limite justement de ceux qui l'ont effectivement été.

D'autre part, le projet de loi n° 84 modifie aussi la Loi sur la sécurité du revenu afin de permettre dorénavant de fixer par règlement les cas où les personnes chefs de famille monoparentale n'auront plus l'allocation de non-disponibilité, mais graduellement et au fur et à mesure que les services de garde leur seront octroyés.

Alors, M. le Président, je crois qu'il y a matière à procéder, notamment à l'égard du recouvrement, puisque l'application au 1er avril prochain exige dès maintenant la mise en place de travaux administratifs et informatiques pour finaliser l'implantation de manière à donner suite à la décision gouvernementale.

M. le Président, dans le cas des chefs de famille monoparentale, il faut comprendre que c'est exclusivement, strictement limité à celles qui ont charge d'enfants de cinq ans qui auront accès à plein temps à la maternelle au mois de septembre prochain. Et, je le dis, M. le Président, la décision du gouvernement et celle du Conseil des ministres est d'implanter cette disposition au 1er septembre seulement et pour strictement celles qui ont la responsabilité d'enfants de cinq ans qui dorénavant seront à plein temps à la maternelle.

Alors, pourquoi maintenant? Parce qu'il y a lieu, je crois, de préparer ces femmes chefs de famille monoparentale – en fait, il s'agit de 8 000 d'entre elles qui ont la responsabilité d'enfants de cinq ans qui iront à la maternelle à plein temps – justement à l'avance en les informant bien de ce qui s'en vient pour qu'elles puissent recevoir le soutien requis pour s'insérer à nouveau dans une démarche, soit de formation, soit de préparation à l'emploi, de façon justement qu'elles ne soient pas perdantes au 1er septembre prochain, pour s'assurer justement qu'elles remplacent le 100 $ d'allocation mensuelle, qui leur était versée au titre de l'allocation de non-disponibilité, par l'allocation, par exemple, de participation de 120 $ par mois, qui est versée soit pour la poursuite d'un rattrapage scolaire, ou encore ça peut être aussi la poursuite d'une démarche d'alphabétisation, ou pour permettre, dans le cadre du rattrapage scolaire, l'apprentissage d'une formation professionnelle ou d'un métier.

Alors, je pense, M. le Président, que ç'aurait été quasi honteux d'attendre au printemps prochain pour procéder à la mise en place, à l'implantation de ce qui a déjà été annoncé, qui a fait l'objet quand même d'une couverture médias importante. Et je comprends que la démarche individuelle et institutionnelle qui devra être entreprise durant les prochains six mois, c'est justement d'accompagner ces 8 000 femmes, chefs de famille monoparentale, dont l'enfant a cinq ans, donc, vers un parcours d'insertion, de formation et d'emploi.

Alors, ceci étant dit, je souhaiterais, M. le Président, faire état d'une lettre que le Protecteur du citoyen m'a fait parvenir hier, dans la journée, concernant le projet de loi n° 84 qui est à l'étude maintenant, laquelle lettre a été également transmise à l'opposition ainsi qu'aux députés indépendants. Alors, j'ai immédiatement pris contact avec le Protecteur du citoyen, hier, pour donner suite à certaines des recommandations – et je vais les identifier, là – à savoir, notamment, transmettre le projet de règlement qui accompagne la législation.

Ce projet de règlement, j'entends bien le déposer à la fin de mon intervention pour également permettre aux membres de cette Assemblée d'en prendre connaissance. Alors, M. le Président, dans ce projet de règlement, nous pourrons d'ailleurs constater qu'il est clairement spécifié que c'est au fur et à mesure, et graduellement, que les services de garde vont être disponibles que l'allocation de non-disponibilité va diminuer pour les enfants de six à deux ans.

Et puis, on va également, en prenant connaissance du projet de règlement, pouvoir constater que l'intention du gouvernement n'est pas de charger des intérêts sur l'aide conditionnelle versée. Cette aide conditionnelle, vous savez, elle est versée dans les cas où une personne victime d'un accident d'automobile ou encore d'un accident de travail est, en fait, en attente d'une décision d'un organisme-payeur. Et, dans l'attente de cette décision, elle est dans le dénuement et a besoin d'avoir recours à l'aide sociale. En fait, c'est dans l'esprit où l'aide sociale, c'est l'aide de dernier recours, celle qui constitue le filet de sécurité lorsqu'on a épuisé les autres droits à des prestations qui pouvaient s'ouvrir.

Or, donc, il ne s'agit pas, n'est-ce pas, là – ce n'est pas du tout ça, la question – d'imposer des intérêts sur cette aide conditionnelle. Il s'agit, dans le fond, lorsque les intérêts sont versés par un organisme-payeur, qu'ils puissent tout simplement, M. le Président, être remboursés au titre de l'aide déjà versée par la sécurité du revenu. Pourquoi? Pour la bonne raison que, dans la même situation, des personnes vont avoir recours à un endettement et vont devoir, que ce soit auprès d'une institution financière, auprès d'une caisse populaire ou même auprès d'un particulier, en plus de l'argent à rembourser, payer des intérêts. Ce n'est pas le cas dans ce qui est proposé maintenant. Mais, étant donné que des intérêts étaient versés sur de l'aide qui avait été elle-même octroyée, je crois qu'il est équitable, qu'en toute équité il est juste et raisonnable de considérer que l'aide de dernier recours doit pouvoir récupérer cet argent.

(11 h 50)

Il en va, bien évidemment, autant pour les débiteurs alimentaires fautifs qui négligent de verser les pensions alimentaires et qui obligent le ministère de la Sécurité du revenu d'être subrogé, n'est-ce pas, c'est-à-dire de remplacer la créancière alimentaire, en général, disons-le clairement, la gardienne, en fait, le parent gardien, qui est plus souvent la mère. Donc, le ministère, se trouvant subrogé de la créancière alimentaire, doit mettre en branle tout un dispositif lourd et coûteux pour procéder, d'abord, à l'obtention d'une ordonnance de pension alimentaire et, ensuite, pour s'assurer qu'il n'y a pas défaut ou négligence de la part du débiteur.

Il y avait, M. le Président, au moment où j'arrivais au ministère de la Sécurité du revenu, en février dernier, pour 133 000 000 $ – c'est beaucoup d'argent, ça, 133 000 000 $ – de pensions alimentaires dues et non versées à des familles monoparentales qui ont l'obligation, bien, qui sont dans la nécessité, à ce moment-là, de recourir à l'aide sociale. Alors, il s'agit de frais de 100 $ qui vont dorénavant être chargés au débiteur alimentaire fautif pour, dans le fond, s'assurer qu'il n'y a pas de prime, en fait, à sa négligence, à son irresponsabilité et pour s'assurer, M. le Président, qu'il puisse y avoir un effet peut-être persuasif pour, en fait, procéder au paiement de la pension alimentaire.

Et puis finalement le projet de loi contient également des dispositions prévoyant, dans les cas strictement limités aux situations de fraude... Donc, ce sont là des situations qui sont répréhensibles, ce sont là des situations, je pense, qui sont réprouvées très largement dans notre société. Alors, lorsqu'il y a un trop-payé... Un trop-payé finalement, c'est un montant de trop qui est versé parce qu'il y a eu, intentionnellement, une fausse déclaration. Cette année, ce sera à peu près 83 000 000 $ qui seront versés, qui constitueront, en fait, les trop-payés dus à de fausses déclarations. Et j'insiste pour vous signaler que c'est à peu près la moitié des trop-payés dans une année, parce qu'il peut y en avoir aussi, des trop-payés qui sont dus à des erreurs, autant des erreurs de bonne foi du prestataire que des erreurs du ministère.

On a hérité d'un système tellement compliqué. Quand vous pensez qu'il y a 70 barèmes différents que, heureusement, dans la réforme sur la sécurité du revenu déposée le 10 décembre dernier, M. le Président, on prévoit pouvoir simplifier avec, notamment, l'introduction de l'allocation unifiée des enfants qui va, dans le fond, littéralement permettre de sortir les enfants de l'aide sociale en s'assurant dorénavant que l'ensemble de tous les enfants du Québec puissent recevoir... que leurs parents, plutôt, puissent recevoir un chèque directement de la Régie des rentes et en s'assurant également que le parent qui a la possibilité, la capacité d'occuper un emploi puisse considérer qu'il n'appauvrit pas son enfant en allant travailler et en pouvant additionner l'allocation unifiée des enfants.

Vous vous rendez compte, M. le Président, de l'aberration de la situation, présentement, où finalement travailler, ce n'est pas payant, ce n'est pas suffisamment payant, de l'aberration d'une situation où, pour ne pas appauvrir leurs enfants, bien des parents sont obligés, quasi, de ne pas accepter, par exemple, de faire quelques heures, ou, en fait, de faire quelques semaines, ou de faire quelques mois ou quelques années de travail pour le motif que ça va appauvrir la famille.

Alors, l'intention du gouvernement est de s'assurer qu'il pourra y avoir une passerelle, là, facile, entre le marché du travail et puis la sécurité du revenu, passerelle qui va servir de tremplin et qui ne va pas confiner, isoler les personnes qui ont charge d'enfants dans l'aide sociale parce que finalement ce n'est pas assez encourageant d'aller travailler étant donné que ce n'est pas suffisant. Et là ça va le devenir; ça va être non seulement encourageant, mais ça va être payant aussi, M. le Président.

Alors, je rappelle qu'à cause de la complexité du système en place présentement – qu'on veut simplifier en réduisant les 70 barèmes à 11 barèmes de manière vraiment à ce que les personnes qui ont recours à l'aide sociale puissent savoir, là, à quoi elles ont droit en regard de ce que les autres ont pu obtenir également – dans la situation présente, il y a donc des trop-payés qui sont causés par des erreurs de prestataires et des erreurs du ministère dues à ce système compliqué qu'on va simplifier. Mais il y a aussi la moitié des trop-payés, annuellement, qui sont dus à des fausses déclarations, et c'est quand même pour le total de 83 000 000 $ dus à de fausses déclarations. C'est un montant qui est considérable. Le total des trop-payés, vous voyez, est évalué à environ 150 000 000 $ à chaque année.

Alors, pour ce trop-payé dû à de fausses déclarations, eh bien, dorénavant, il y aura un intérêt qui sera chargé et qui devra être versé, et cet intérêt sera, dans le fond, capitalisable, l'idée et évidemment l'objectif poursuivi étant de dissuader des personnes qui pourraient avoir la tentation d'utiliser la fausse déclaration, puisque la seule sanction, c'est, dans le fond, d'avoir peut-être un jour à rembourser. Alors, c'est afin d'être finalement beaucoup plus dissuasifs qu'on ne l'est présentement, en s'assurant que ça puisse décourager des personnes qui utiliseraient ce moyen d'une fausse déclaration intentionnelle.

J'en profite cependant pour corriger une impression qui avait pu se dégager à la lecture d'une manchette publiée dans le journal Le Soleil , le 13 décembre dernier. Vous voyez le genre de manchette, parfois, avec laquelle on doit composer. On disait: «La fraude en hausse au BS. Québec tente de récupérer 425 000 000 $.» Ça, c'était la manchette du journal Le Soleil , le 13 décembre, il y a quelques jours de ça maintenant.

Alors, M. le Président, le 425 000 000 $ dont il s'agit, là, c'est, dans le fond, le total accumulé depuis que le régime de la sécurité du revenu existe, en 1970. Alors, vous vous rendez compte que c'est un résultat de toutes les créances accumulées depuis 26 ans. C'est évident que la manchette ne donnait pas cette impression-là. Alors, c'est l'accumulation depuis donc 26 ans, et, pour la moitié de ce montant, il s'agit, dans le fond, de fausses déclarations, l'autre moitié étant constituée, bon an, mal an, finalement d'erreurs commises, en particulier, avec la complexité du système depuis les 10 dernières années.

(12 heures)

En fait, ce n'est pas la fraude qui a augmenté; c'est, je pense, clairement, là, que les contrôles sont plus efficaces. Et ces contrôles plus nombreux ont porté fruit parce que notamment le ministère de la Sécurité du revenu, l'an passé, a obtenu, avec l'approbation d'ailleurs de la Commission d'accès à l'information, une entente sur les échanges de renseignements notamment avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le ministère de l'Éducation, le ministère du Revenu, la Société de l'assurance automobile du Québec et le ministère de la Sécurité publique. Pourquoi, M. le Président? Parce qu'il serait vraiment inquiétant qu'on trouve normal qu'on paie des deux côtés sans vérifier. C'est tout à fait légitime, et ça a d'ailleurs été entériné, de pouvoir s'assurer qu'il y a conformité des dossiers, en fait, aux montants qui doivent effectivement être versés. Dans ces circonstances, je comprends que c'est là un projet de loi qui devrait recevoir l'appui de cette Assemblée. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Vous me permettrez de me faire la porte-parole de ma collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne qui, en raison d'une vilaine grippe, est alitée présentement. Alors donc, je ferai les commentaires qu'elle avait prévu faire sur l'adoption du principe de ce projet de loi.

M. le Président, c'est presque rendu une tradition pour le gouvernement du Parti québécois, à la veille de Noël, de déposer et forcer l'adoption d'un projet de loi qui vise à faire des compressions sur le dos des plus démunis. Je vous rappelle, M. le Président, que le projet de loi n° 115, qui récupérait 145 000 000 $ dans les poches vides des bénéficiaires de la sécurité du revenu, était le cadeau insensible de Noël 1995. Je rappelle à votre mémoire que ce cadeau brutal et antisocial abolissait le barème de disponibilité et coupait d'un coup de 50 $ le chèque des personnes qui désiraient participer à une mesure d'intégration en emploi ou de formation. Ce projet de loi n° 115, cette gifle à la motivation modifiait également le règlement afin de couper 30 $ dans le barème de participation, démontrant ainsi le manque de considération de ce gouvernement vis-à-vis de ceux et celles qui font l'effort de s'en sortir. La triste réalité de cette mesure est que certaines familles monoparentales ont vu leurs revenus fondre de 150 $ et un couple avec enfant, de 225 $.

Une mesure tout aussi inhumaine qu'on retrouvait dans le projet de loi n° 115 était l'abolition des avoirs liquides pour le premier mois de la demande d'aide sociale. Dorénavant, les personnes doivent arriver les poches vides avant d'être admissibles à l'aide de dernier recours. Comment assumer les frais inhérents à la recherche d'emploi? Comment remplacer le réfrigérateur qui vient de briser? Comment remplacer les bottes d'hiver égarées d'un enfant à l'école? Cette mesure oblige les gens à quémander dans les comptoirs de linge, dans les centres de dépannage ou encore dans les banques alimentaires.

Suite au projet de loi n° 115 et pour fêter la nouvelle année qui commençait, une autre série de coupures s'est abattue sur le dos des plus démunis: coupure au niveau de l'allocation-logement qui touche près de 90 000 familles à faibles revenus; désengagement au niveau des frais dentaires et optométriques; coupure au niveau de l'assurance-médicaments qui exige un effort additionnel de la part des prestataires de dernier recours qui doivent payer une franchise de 100 $ et faire faire une économie de 60 000 000 $ au gouvernement.

Mais, à l'approche de Noël 1996, le scénario se reproduit. La ministre dépose le projet de loi n° 84 quelques jours à peine avant la fin de la session. Aucune discussion n'a eu lieu au niveau de son principe et la ministre le place en tête de liste du bâillon qui a été décrété hier soir. Il est clair qu'il s'agit ici d'un autre cadeau empoisonné du gouvernement du Parti québécois jadis social-démocrate.

Le projet de loi n° 84 n'est pas plus reluisant que le projet de loi n° 115. C'est un autre projet de loi qui s'attaque et s'acharne à appauvrir ceux et celles qui se débattent tous les jours afin de joindre les deux bouts. Mais comment parler du projet de loi n° 84 sans parler de la pauvreté et des conséquences du fléau de la pauvreté? Depuis deux ans, le climat social au Québec n'a cessé de se détériorer. Pour la deuxième année consécutive, le Québec a le plus haut taux de pauvreté au pays, soit 20 %. Les familles monoparentales dirigées par une femme sont les familles les plus pauvres parmi les familles les plus pauvres et le projet de loi n° 84 s'attaque directement à elles.

M. le Président, je vous rappelle qu'il y a plus de 315 000 enfants pauvres au Québec, dont 254 000 se retrouvent à l'aide de dernier recours. Les familles défavorisées et, particulièrement, les familles monoparentales n'ont plus le choix et doivent se retourner vers les banques alimentaires pour survivre. À Montréal, les centres de dépannage ont enregistré une hausse non pas de 100 %, non pas de 200 %, M. le Président, mais bien de 1 000 %. Le taux de chômage à Montréal est de plus de 14 % et une personne sur cinq vit de l'aide sociale. Ce sont des chiffres alarmants.

L'obsession du déficit zéro de ce gouvernement fait basculer petit à petit les plus démunis dans la misère. Ce gouvernement n'est même pas intéressé à connaître les conséquences brutales que ses gestes et ses actions font vivre aux plus démunis de notre société. On applique des coupures aveugles et irréfléchies à des gens, des familles qui ont déjà de la difficulté à survivre. Le projet de loi n° 84, c'est bien le cadeau empoisonné de Noël 1996, cadeau de la ministre de la Solidarité. Et même le nom de son ministère devrait faire frissonner de gêne les députés ministériels qui voteront, dans les prochaines heures, en faveur de ce projet de loi.

Il est clair, en prenant connaissance du projet de loi n° 84, que le gouvernement cible plus précisément les mères, ces chefs de famille monoparentale avec jeunes enfants. Une chose est claire, M. le Président, ce projet de loi a été écrit, a été libellé de façon à cacher la vérité. Seulement sept articles. Un petit projet de loi qui, à sa face même, semble bien anodin, M. le Président, sept articles seulement. Mais chaque article nous réfère aux règlements, règlements que l'opposition officielle n'a pas connus, ne connaît pas, règlements que l'opposition officielle n'a jamais vus, règlements que le gouvernement n'avait pas l'intention de remettre hier soir, et là la ministre vient de nous annoncer qu'elle remettra bientôt les règlements. Nous n'avons absolument pas pris connaissance encore de ces règlements, M. le Président, et on sait très bien que ce n'est pas dans le projet de loi, ce ne sont pas les articles du projet de loi qui vont permettre les nombreuses coupures ou obligent le gouvernement... c'est-à-dire permet au gouvernement de couper. C'est davantage dans la réglementation.

(12 h 10)

Nous ne connaissons ni la portée véritable des compressions et des économies que le gouvernement entend réaliser avec ce projet de loi ni les impacts réels que subiront encore une fois les bénéficiaires de l'aide sociale. Je vous rappelle, M. le Président, que, dans la loi actuelle, le barème de non-disponibilité est accordé à un adulte ayant un enfant à sa charge qui ne fréquente pas l'école parce qu'il n'a pas atteint l'âge requis, soit six ans au 30 septembre d'une année, ou en raison d'un handicap physique ou mental, peu importe son âge. L'article 1 du projet de loi n° 84 transfère ce pouvoir législatif en un pouvoir réglementaire. Cela permettra à la ministre de la soi-disant solidarité de modifier les conditions d'admissibilité du barème de non-disponibilité par un simple avis de 45 jours dans la Gazette officielle , et ce, afin d'éviter que l'Assemblée nationale n'en débatte. Mais, si on se fie au livre vert que la ministre vient de déposer, le barème de non-disponibilité sera accordé uniquement aux mères d'un enfant de moins de deux ans. Et, même si la ministre a dit en Chambre à la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne que c'est faux, il suffit de consulter la synthèse de son livre vert sur la réforme de la sécurité du revenu, à la page 20, pour être convaincu du contraire.

Du même coup, l'article 1 abolit le principe du libre choix des parents de décider de l'éducation de leurs enfants. Cette semaine, le Conseil de la famille a publié un avis qui vient reconnaître l'importance de la liberté de choix des parents et des mères à élever eux-mêmes leurs enfants. Permettez-moi, M. le Président, de vous lire quelques passages dudit avis. Dans cet avis du Conseil de la famille, on retrouve, à la page 31: «Les premiers responsables de l'éducation de leurs enfants, les parents, veulent être reconnus et choisir ce qui leur semble le plus approprié pour les leurs. Nul ne peut ni ne doit se substituer aux parents dans leurs décisions d'opter pour une formule plutôt qu'une autre en ce qui a trait à la socialisation ou à l'éducation de leurs enfants.» Et je poursuis: «Les parents veulent également être soutenus au moment de faire des choix pour leurs tout-petits. Qu'ils choisissent un mode d'éducation plutôt qu'un autre, qu'ils décident de rester à la maison ou de poursuivre leur carrière à l'extérieur du foyer, ils ont besoin du support leur permettant d'assumer pleinement leurs décisions.» C'est pourquoi, M. le Président, le Conseil de la famille recommandait au gouvernement, dans cet avis, «de réaménager le soutien financier aux parents afin de leur permettre d'exercer leurs choix au regard des soins et des services offerts à leurs jeunes enfants».

Je pense, M. le Président, qu'on doit prendre acte de cet avis du Conseil et qu'on devrait tout simplement reporter le projet de loi, ou les décisions gouvernementales, lorsque la ministre donnera suite au livre vert qu'elle vient de déposer; suites, on me dit, qui seront données au printemps prochain.

Revenons au projet de loi, M. le Président. L'article 2 indique que toute personne qui n'a plus de revenus peut obtenir de l'aide sociale en attendant de recevoir soit une rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec, de la SAAQ, des prestations de la CSST ou des prestations d'assurance-chômage. Cette aide que l'on dit conditionnelle doit être remboursée au ministère. L'article 2 vise à imposer des intérêts sur les prestations d'aide de dernier recours qui ont été versées à une personne en attente de la réalisation de ce droit. Encore une fois, M. le Président, les modalités et les conditions seront déterminées par règlement; règlements que nous ne connaissons pas encore; règlements qui seront déposés ultérieurement par la ministre. Ce qui signifie que l'on ignore tout des normes et de l'impact d'un tel article sur les personnes concernées.

Beaucoup de questions subsistent concernant cet article. Toutefois, on peut conclure que la ministre ne se contente pas d'appliquer des coupures, mais vise également à générer des revenus, sûrement, bien sûr, à la demande de son collègue le ministre des Finances, parce que le ministre des Finances est incapable de générer de la croissance économique, incapable de collecter ce qui lui est dû.

L'article 3, M. le Président, impose aux débiteurs alimentaires de nouveaux frais. Mais de quels frais s'agit-il? Quels seront les montants de ces frais? On ne le sait pas. Tout est bien caché dans le règlement, règlement qui est lui-même caché au ministère de la ministre. On n'a pas encore pris connaissance des règlements, les règlements n'ont pas encore été déposés, on ne connaît pas encore la substance desdits règlements.

L'article 4 du projet de loi prévoit la possibilité de capitaliser mensuellement les intérêts payables sur une dette. Cette modification signifie qu'à chaque mois le calcul des intérêts s'ajoute à la dette pour le calcul des intérêts du mois suivant. Moi, M. le Président, ce que j'en comprends, c'est de l'intérêt composé pour les plus démunis. On ne sait pas si ces intérêts seront appliqués sur des dettes contractées de mauvaise foi seulement ou en cas de fraude, on ne le sait pas, ou sur des dettes contractées de bonne foi également. Ces intérêts s'appliqueront-ils aux personnes qui sont toujours à l'aide sociale ou s'appliqueront-ils aux personnes qui sont sorties de l'aide sociale? Cet article est très inquiétant, M. le Président, parce que, dépendant du montant de la dette, des gens pourraient faire des versements mensuels durant toute leur vie sans jamais parvenir à rembourser le capital.

Avec le bâillon, on nous retire notre droit de parole et notre droit parlementaire le plus fondamental, d'amender ou de bonifier un projet de loi. Mais, même si on nous retire ce droit de parole aujourd'hui, M. le Président, nous ne sommes pas aveugles pour autant. Oui, je comprends le député de Joliette qui intervient en disant: La députée peut intervenir. Oui, j'interviens, mais j'interviens sur quoi, M. le Président? Nous n'avons même pas les règlements, et on sait très bien que ce sont les règlements qui font force de ce projet de loi. Nous n'avons pas encore obtenu ces règlements.

Donc, M. le Président, il s'agit d'un projet de loi qui a le même objectif que le projet de loi n° 115 – souvenons-nous du cadeau de Noël 1995 – même objectif, aller chercher des millions dans les poches des plus démunis de notre société. L'opposition officielle, M. le Président, espère que la ministre de la soi-disant solidarité aura le courage de nous dire quelle est la somme des économies dont elle fera profiter son collègue avec l'adoption forcée de ce projet de loi. Nous, de l'opposition officielle, M. le Président, nous ne pouvons nous associer à un projet de loi qui appauvrit davantage les citoyennes et les citoyens du Québec qui se débattent, jour après jour, pour survivre.

M. le Président, j'aimerais, en terminant, vous citer quelques commentaires de journalistes respectés qui feront sûrement réfléchir les ministres et les députés ministériels durant le temps des fêtes, période généralement propice à la vraie compassion et à la générosité de coeur. Et là je vous fais grâce de la lettre que je viens de recevoir du Protecteur du citoyen qui demande au gouvernement de surseoir à ce projet de loi.

M. le Président, dans un article du Devoir , Jean-Robert Sansfaçon disait justement: «Ça fait mal. Le malheur, avec le gouvernement du Québec, c'est qu'entre deux discours du budget bien des surprises nous attendent qui risquent de coûter cher. Un exemple parmi d'autres, celui des assistés sociaux qui, avouons-le, sont passés à la caisse plus souvent qu'à leur tour depuis un an. Vivement, le plan de match, la réforme tant promise.» Il ajoutait que «c'est plutôt l'addition de toutes ces compressions et son effet désastreux sur la vie quotidienne de familles bien réelles, en chair et en os et en misère, qui devient totalement intolérable».

D'autres commentaires, toujours dans Le Devoir , de Lise Bissonnette, M. le Président, qui disait: «Malgré ses grands airs de social-démocrate et ses discours à l'avenant, le gouvernement Bouchard est désormais dangereusement proche de ceux qui font la lutte aux assistés sociaux plutôt qu'à la pauvreté elle-même.» Et, M. le Président, je conclus avec le commentaire de Nathalie Petrowski – qui est très dur, très dur, j'en conviens – elle dit: «Comment un gouvernement théoriquement sain d'esprit et qui n'a cessé de jurer qu'il ne ferait pas porter l'odieux du déficit aux plus démunis, comment un tel gouvernement peut-il arriver à une solution aussi dégueulasse et débile?» Et ça, M. le Président, c'est Nathalie Petrowski qui le mentionne.

(12 h 20)

Donc, M. le Président, c'est un projet de loi qui, à sa face même, comme je le mentionnais, contient très peu d'articles, mais c'est la réglementation, la réglementation que nous ne connaissons pas encore... C'est un projet de loi que la ministre veut absolument adopter avant la fin de la présente session, c'est-à-dire faire un nouveau cadeau, un cadeau de 1996 aux nombreux démunis, qui n'ont déjà rien dans les poches. Et c'est malheureux, M. le Président, parce que la ministre aurait pu attendre lorsqu'elle aurait décidé des conclusions de son livre vert, au printemps prochain. Elle aurait pu attendre et nous amener un projet qui est cohérent, qui se tient et, finalement, qui, en même temps, est en mesure de vérifier l'impact que chaque mesure peut avoir sur les plus démunis de notre société.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez un temps de parole d'une durée maximale de cinq minutes. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Il est très difficile, comme vous pouvez l'imaginer, dans cinq minutes de temps, de tenter de faire un exposé sur le fond du projet de loi. On aurait eu des choses à dire rendus à l'étude détaillée tronquée, que la motion de suspension des règles nous permet de faire, une heure de temps, une étude détaillée très tronquée, à tenter de faire valoir nos points de vue, mes points de vue sur le fond de la question.

Sur la forme, M. le Président – parce que, vous savez, de temps en temps la forme peut même l'emporter sur le fond des choses – hier le Protecteur du citoyen a effectivement écrit à Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité en faisant état de la situation avec le projet de loi n° 84. Le projet de loi n° 84 semble un projet de loi assez anodin: sept articles dans le projet de loi, dont un qui est l'entrée en vigueur, alors effectivement six articles dans le projet de loi. Sur les six articles, on réfère au pouvoir réglementaire; c'est le pouvoir réglementaire dans cinq des six vrais articles dans le projet de loi. La ministre, pendant sa présentation du projet de loi, a indiqué qu'elle était pour déposer le projet de règlement. Ce n'est pas encore fait. Elle a dit qu'elle le ferait à la fin de son intervention. On attend toujours le dépôt des règlements pour être capable de tenter de saisir vraiment la nature des changements proposés par la ministre.

Quelques commentaires, M. le Président, basés sur la lettre du Protecteur du citoyen envoyée hier et signée par le Protecteur lui-même, Me Daniel Jacoby. Deuxième paragraphe: «Comme ce projet vise avant tout à accorder au gouvernement de nouveaux pouvoirs réglementaires...» Réglementaires, M. le Président, pour les gens qui nous écoutent, c'est très clair, là. Pouvoirs réglementaires, il s'agit de 22 personnes qui vont prendre la décision. C'est 22 ministres qui siègent au Conseil des ministres. Ce n'est plus le domaine de l'Assemblée nationale quand on parle des pouvoirs réglementaires; ça relève de 22 ministres péquistes. Le processus législatif est complètement écarté. On est 125 députés; notre rôle dans le processus réglementaire, sauf pour les 22 ministres, zéro. Aucun projet de loi, aucune étude détaillée, rien. Vingt-deux personnes dans le Québec qui vont décider du sort des bénéficiaires de l'aide sociale, 22 personnes. Si c'est ça, la qualité de notre vie démocratique, M. le Président, on peut bien poser des questions, hein? On est rendu que 22 personnes, 22 ministres péquistes vont décider. Ce n'est plus les élus en général.

M. le Président, je reprends la lettre du Protecteur du citoyen: «...ce projet de loi vise [...] à accorder au gouvernement de nouveaux pouvoirs réglementaires, il va de soi qu'il nous a été très difficile – là, c'est le Protecteur du citoyen – d'en évaluer la portée sans avoir à notre disposition les normes réglementaires pertinentes qui viendront compléter la loi. Je dois le déplorer – dit le Protecteur du citoyen – vivement, puisque, comme j'ai eu hélas trop souvent l'occasion de le souligner, l'absence des normes réglementaires portant la substance réelle des mesures nouvelles proposées ne permet à personne, à personne, et, au premier rang, aux parlementaires, de pouvoir évaluer adéquatement le bien-fondé de ces dernières.

«Dans un contexte – et je conclus avec la lettre, M. le Président – dans un contexte où non seulement ces normes réglementaires demeurent inconnues – ce qui est toujours le cas au moment où on se parle – mais où, en outre, le Parlement s'apprête à devoir adopter ces modifications législatives de façon dérogatoire à sa procédure normale – autrement dit, par la suspension des règles, M. le Président – je me permets encore une fois de souligner l'atteinte ainsi portée à la qualité du processus législatif et, notamment, à la transparence dans laquelle devrait baigner celui-ci dans un régime comme le nôtre où la démocratie se veut au premier plan.» Des mots très, très, très significatifs du Protecteur du citoyen, M. le Président, et nous aurons l'occasion, je pense, d'ici les quelques intervenants intéressants qui suivent, d'enchaîner sur l'importance de la transparence de notre vie démocratique parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le prochain intervenant, M. le député de LaFontaine, pour une durée maximale de cinq minutes.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes aujourd'hui sous les effets d'une loi spéciale. Une loi spéciale, pour les téléspectateurs qui nous regardent, nos concitoyens, nos compatriotes, je rappellerai que c'est une action que le gouvernement pose afin de limiter le débat démocratique sur les projets de loi qui les concernent. En effet, lorsqu'un gouvernement, n'étant plus capable de défendre, n'ayant plus d'arguments pour défendre publiquement ses lois, les lois qu'il passe, qui touchent les citoyens, décide d'avoir recours à ce qu'on appelle ici un bâillon... Et le mot «bâillon» veut tout dire, M. le Président: on fait en sorte de limiter le temps des intervenants, le temps des députés, des parlementaires, particulièrement ceux de l'opposition, pour les empêcher de s'exprimer et de parler. À un point tel que, moi, qui suis député de la région de Montréal et qui connais des problèmes importants d'assistés sociaux, je n'ai que cinq minutes pour m'adresser au gouvernement pour faire valoir le point des gens de ma région, l'est de Montréal, qui sont aux prises avec cette réforme. Cinq minutes pour un député! Si cela, M. le Président, c'est la démocratie, je pense que nous aurions certainement des leçons à recevoir d'autres pays ou d'autres contrées.

Alors, M. le Président, ce projet de loi là, sous bâillon, va toucher fondamentalement la qualité de vie, la condition de vie d'une grande partie des gens qui vivent de l'aide sociale. Et attention aussi aux préjugés et aux stéréotypes! Les gens qui vivent de l'aide sociale, la très grande majorité d'entre eux sont ou des gens qui sont inaptes ou des gens qui ont été laissés pour compte par le système, des gens qui font que, n'ayant pu trouver d'emploi, ayant fini leurs prestations d'assurance-chômage, ne pouvant se replacer pour des raisons d'âge, ou de qualifications, ou de santé, n'ont que cela pour vivre. On y retrouve aussi un nombre important de mères de famille qui élèvent seules leurs enfants et qui n'ont comme seules ressources que ces prestations. Et loin de moi l'idée, qui est répandue, de vouloir dire qu'il faut couper ces gens-là. Il ne faut pas les couper, M. le Président, il faut les aider, et ce n'est pas en coupant les prestations qu'ils reçoivent que nous allons les aider. Nous allons simplement les brimer, nous allons brimer leurs enfants qui vivent avec eux, nous allons brimer leur famille.

(12 h 30)

M. le Président, on coupe d'une manière arithmétique dans ce gouvernement. Dans tous les projets de loi qu'on a touchés dans cette session, ou quasiment tous, c'était pour chercher des économies sur le dos des travailleurs: la Loi sur les normes du travail, projet de loi n° 31, où on va tarifer les gens qui vont aller devant la Commission des normes; les femmes enceintes victimes de congédiement illégal; la CSST, on va chercher 15 000 000 $ dans la caisse de la CSST, où le gouvernement se désengage, et on pourrait en citer combien d'autres: les allocations au logement, les prestations pour les aînés, l'assurance-médicaments où on va chercher de l'argent. Tout ce qui est amené par ce gouvernement est amené de manière technocratique, parce qu'ils ont des commandes d'économiser des milliards et ils oublient qu'ils ont été élus, que nous sommes élus par la population pour administrer la population, pour administrer des gens, des gens qui vivent, des gens qui sont heureux, qui souffrent, qui ont des peines, des difficultés, des joies, pas simplement pour gérer des fonds publics, pour gérer des argents. Ceci ne veut pas dire qu'il ne faut pas bien le faire, mais il faut le faire avec humanité, avec attention, avec considération des problèmes que ça peut occasionner lorsqu'on prend des décisions qui peuvent être, à l'occasion, difficiles à prendre, je le reconnais.

M. le Président, ce n'est pas la marque de ce gouvernement. Ce n'est pas sa marque, sa marque, elle est technocratique: pas de considération pour les classes les plus démunies. Un gouvernement qui est reconnu maintenant par l'ensemble des intervenants sociaux comme un gouvernement antisocial. M. le Président, ce n'est pas moi qui le dis, je le lisais encore ce matin dans un titre du Journal de Montréal où on disait: «La CSN dénonce le ministre Rioux pour son attaque sauvage sur les travailleurs qui sont sur la CSST.» Voilà, M. le Président, ce que les gens pensent de ce gouvernement, les anciens alliés des gens d'en face qui tenaient un discours social pour se faire élire, qui disaient: Nous allons tout faire ce que vous nous demandez. Les libéraux – l'ancien gouvernement – sont un gouvernement qui ne tient pas compte de vos préoccupations. Nous, nous allons répondre à vos besoins et plus encore. Et ils en remettaient.

Et, aujourd'hui, force est de constater que ça a été de la poudre aux yeux. On a trahi la population, on a trahi le peuple, on a trahi les travailleurs, on a trahi les plus démunis de notre société. C'est là, M. le Président, la marque de commerce de ce gouvernement qui a trahi ses engagements et trahi ses promesses, et nous ne pouvons l'accepter, nous ne pouvons le tolérer. Et malheureusement le bâillon démontre encore une fois que ce que je dis est vrai, que j'ai raison, parce qu'en plus de ça non seulement on a trahi les classes laborieuses du Québec, mais on oblige l'opposition à rester coite, à ne pas parler, en mettant des lois d'exception comme celle-là pour la museler, la bâillonner. Voilà, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je remercie M. le député de LaFontaine. Le prochain intervenant, M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. À mon tour de signifier que nous n'avons que cinq minutes pour parler d'un projet de loi extrêmement important. Ce n'est pas la première fois, M. le Président, que je dois intervenir en cette Chambre, mais ils commencent à devenir ce que les gens conviennent d'appeler maintenant les champions du bâillon, et c'est le parti gouvernemental.

Je dois vous rappeler, seulement dans des secteurs qui touchent la santé, par exemple, tout ce qui a été fait. D'abord, la loi n° 115, et on y reviendra, celle qui est à l'origine de la loi n° 84 que nous étudions aujourd'hui, mais aussi la loi 83, la première loi qui a décidé, donné le pouvoir au gouvernement de fermer les hôpitaux, eh bien, ça a été fait sous le bâillon.

Six mois après, on amène une nouvelle loi, la loi n° 116, sous le bâillon toujours, pour amender la loi n° 83. Hier encore, nous discutions en cette Chambre d'une autre loi, le projet de loi n° 41 qui, lui, vient encore amender une autre loi, la loi n° 116. Alors, trois lois en l'espace d'un an, à six mois d'intervalle, qui ont dû être amendées. C'est vraiment un constat d'improvisation, M. le Président.

Le pire – je pense que c'est une loi qui mérite le qualificatif d'une des lois les plus antisociales que le Québec ait connues – c'est la loi n° 33, la loi qui a été faite sous le bâillon, un vote à 5 heures du matin. M. le Président, vous savez que je me suis engagé à en parler à chaque fois que j'en aurais l'occasion en cette Chambre: à 5 heures du matin, on nous fait voter sur la loi n° 33, sur l'assurance impôt-médicaments, alors qu'à minuit on nous dépose plus de 120 pages d'amendements, M. le Président.

Aujourd'hui, nous sommes de nouveau de retour avec cette loi n° 84 qui amende déjà – il y a un peu moins d'un an – la loi n° 115. Alors, rappelons-nous, M. le Président, que la loi n° 115 voulait abolir les barèmes de disponibilité et que le gouvernement a coupé de 50 $ le chèque des personnes qui désiraient participer. Mais le ministère n'avait aucune mesure d'intégration en emploi ou de formation à leur offrir. Rappelons-nous que, parallèlement au projet de loi n° 115, la ministre a modifié le règlement et a coupé les barèmes de participation de 30 $, démontrant ainsi son manque de considération vis-à-vis de ceux et celles qui font l'effort de s'en sortir.

Et, également, rappelons-nous l'abolition des avoirs liquides pour le mois de la demande d'aide sociale. Les personnes doivent donc se présenter à l'aide sociale sans un sou en poche afin d'être admissibles à l'aide de dernier recours. Sans un sou en poche, M. le Président, comment assumer les frais inhérents à la recherche d'emplois, les frais de photocopie, d'envois postaux, de téléphone, de transport?

Et, comme ce cadeau de Noël de l'an passé n'était pas suffisant, eh bien, d'autres mesures, une série de mesures se sont abattues sur le dos des plus démunis: coupures dans l'allocation-logement, désengagement au niveau des soins dentaires et optométriques, coupures au niveau de l'assurance-médicaments, puisque les prestataires devront payer une franchise beaucoup plus importante au niveau de leurs médicaments. Et, M. le Président, vous devez vous rappeler que, sous un gouvernement libéral, les prestataires ne payaient rien pour leurs médicaments.

M. le Président, il apparaît de plus en plus évident qu'il est difficile de voter pour le principe de ce projet de loi, considérant qu'on ne peut pas en mesurer la teneur et la véritable portée. On n'a même pas les règlements, M. le Président. C'est encore une autre façon soi-disant de gouverner. En plus de ça, on nous fait voter sur ce projet de loi à un moment où les députés n'ont à peu près pas le temps de questionner, où nous n'avons pas le temps d'ajouter, de bonifier un projet de loi qui le mériterait sûrement, M. le Président.

M. le Président, en guise de conclusion – le temps passe tellement vite – en plus de souligner qu'il n'y a pas de règlements, bien, j'aimerais, comme l'a si bien fait la députée de Saint-François, demander aux députés ministériels, aux députés péquistes, de prendre le temps de Noël, le temps du jour de l'An, pour vraiment réfléchir, réfléchir à ce qu'ils sont en train de faire au tissu social de notre société et peut-être, en même temps, réfléchir à leur avenir aussi, M. le Président.

Le gouvernement a le championnat des bâillons, le championnat des taxes, on l'a vu et on le voit de plus en plus, M. le Président. C'est un gouvernement qui, seulement après un peu plus de deux ans, démontre un vieillissement prématuré. Et, M. le Président, malheureusement, nous aurons donc... Ça va être difficile pour nous de voter pour un tel principe. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, moi aussi, comme plusieurs collègues – j'espère qu'il y aura des collègues ministériels qui feront la même chose – je vais d'abord me prononcer contre le principe de ce projet de loi. Et c'est malheureux, M. le Président, qu'on se retrouve dans des circonstances comme celles-ci pour discuter d'un projet de loi dont un certain nombre de volets ont du mérite. Parce que, dans des programmes qui existent, des programmes sociaux, l'objectif d'instaurer de la rigueur, l'objectif de s'assurer que les sommes sont bien dépensées, que les fonds publics, tout en aidant les plus démunis de notre société, sont véritablement protégés, c'est un objectif qui est louable. C'est un objectif où, dans un travail bien fait, moi et le parti que je représente à l'Assemblée nationale, les gens qui seraient susceptibles d'appuyer ce genre de projet là, sur la base de principes valables...

Maintenant, de la façon dont ça se présente, M. le Président, je pense que, comme personne responsable, comme parlementaire élu pour travailler sérieusement pour une population, il est très difficile d'appuyer un projet de loi comme celui-là.

On recevait, M. le Président, il y a quelques jours, une correspondance du Protecteur du citoyen, le Protecteur du citoyen inquiet, qui, dans ses fonctions, regarde un peu les législations du gouvernement et qui soulevait une série de questions sur le projet de loi n° 84; qui n'apporte pas une opposition tous azimuts, mais qui dit aux parlementaires, qui nous indique, le Protecteur du citoyen, bien: Soyez prudents.

Or, non seulement le gouvernement ne prend pas le soin d'observer ses avis, non seulement le gouvernement ne prend pas le temps un peu de voir quelle mise en garde il fait, mais on fait exactement le contraire: l'adoption à toute vapeur d'un projet de loi comme celui-là, le fait de ne pas l'étudier en commission, comme il se doit, article par article, pour les évaluer un par un, le fait de ne pas regarder, dans son ensemble, ce que ça donne comme changement, ce projet de loi là. On fait exactement le contraire. On est devant un appel à la prudence du Protecteur du citoyen sur certains volets, puis on fait le contraire de la prudence, on se lance à adopter un projet de loi sur la base d'une urgence. Puis, encore là, on est dans une situation qui dure depuis longtemps, où le gouvernement nous promettait, au Sommet, une réforme de la sécurité du revenu, nous l'a promise plusieurs fois, a traîné, a remis, a reporté.

(12 h 40)

Tout à coup, il arrive sur certains volets précis, puis il plaide l'urgence. En fait, devant une incapacité d'apporter une réforme, d'identifier des principes qui vont remettre à l'avant-plan des valeurs la valorisation du travail, un système de sécurité du revenu, oui, qui protège les plus démunis mais sans dévaloriser le travail, devant leur incapacité d'avoir un système qui, globalement, est mieux organisé, de le réformer, ils vont chercher, en fin de session, à la dernière minute, des économies de bouts de chandelles sans trop savoir quel impact ça va avoir sur des citoyens.

Autre élément, M. le Président, qui m'empêche, comme parlementaire, d'appuyer le principe du projet de loi, c'est que, la dernière fois, il y a une couple d'exemples où, moi, des projets de loi qui dans les principes pouvaient être valables, je les ai appuyés. Je me souviens, en agriculture, du droit de produire. Moi, comme parlementaire, j'ai voté en faveur de ça parce que je crois dans l'agriculture au Québec. L'aide juridique, j'ai appuyé le projet de loi sur l'aide juridique. On s'est aperçu que le gouvernement se garde une grande marge de manoeuvre dans la réglementation, adopte des projets de loi, mais, quand, au Conseil des ministres, derrière des portes closes évidemment, on travaille les réglementations, on dénature les projets de loi.

Selon les avertissements du Protecteur du citoyen, le projet de loi n° 84, c'est bien beau, il y a des principes, de la vertu et de la rigueur, mais, dans la réglementation, comment on va appliquer ça? On a un taux d'intérêt qui va être mis en vigueur, des principes d'intérêts qui vont être versés. Encore là, il y a une logique derrière ça, mais de quelle façon ça va se faire? Est-ce qu'on va procéder comme le ministère du Revenu? Il procède comment, le ministère du Revenu? Si vous devez de l'argent au ministère du Revenu, même si vous étiez de bonne foi... On l'a vu dans le cas des contribuables qui ont été pris par des problèmes du gouvernement en recherche et développement. On est revenu les recotiser, pui les amendes, puis les intérêts. Par contre, à l'inverse, quand des gens ont des sommes versées en trop du ministère du Revenu, il n'y a rien en retour.

Alors, est-ce que ça va être le même genre de système qui va juste sur un côté, où le citoyen est toujours perdant, où le citoyen, lui, paie des amendes, des intérêts, et en retour, s'il y a des sommes qui lui sont dues, il n'a pas d'intérêts. Alors, c'est des réglementations... Ce ne sont pas des sujets minces à discuter, M. le Président. C'est la différence entre un système qui a une justice et un système qui n'en a pas. C'est la différence entre un système où le citoyen est respecté, un système où le gouvernement est au service du citoyen et un système où le citoyen est au service et à la merci du gouvernement.

Alors, à la veille d'une grande réforme de la sécurité du revenu, un bout de projet de loi incomplet comme celui-là, M. le Président, qu'on n'a pas eu le temps d'étudier, il est impossible d'en adopter le principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Chapleau. Mme la députée.


Mme Claire Vaive

Mme Vaive: Merci, M. le Président. Le 10 décembre 1996, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité a déposé le projet de loi n° 84 venant faire de nouvelles compressions budgétaires notamment auprès des mères jouissant de prestations de non-disponibilité à la sécurité du revenu. Par ailleurs, la ministre vient de déposer son livre vert sur la sécurité du revenu, livre qui fera l'objet d'une vaste consultation en janvier 1997.

En regardant le projet de loi n° 84, M. le Président, étant donné que j'ai seulement cinq minutes, je me suis attardée à l'article 1. Dans la loi actuelle, le barème de non-disponibilité au travail est accordé à un adulte ayant un enfant à sa charge qui ne fréquente pas l'école parce qu'il n'a pas atteint l'âge requis, qui est six ans au 30 septembre d'une année, ou en raison d'un handicap physique ou mental, peu importe son âge. Mais, dans l'article 1 qu'on retrouve dans ce projet de loi... L'article 1 transfère ce pouvoir législatif en un pouvoir réglementaire, ce qui permettra à la ministre de modifier les conditions d'admissibilité du barème de non-disponibilité par un simple avis de 45 jours dans la Gazette officielle , et ce, afin d'éviter que l'Assemblée nationale n'en débatte.

Quelles seront les nouvelles modalités prévues au règlement? Nous ne le savons pas. Si on se fie au livre vert, le barème de non-disponibilité sera accordé uniquement aux mères d'un enfant âgé de moins de deux ans. Même si Mme la ministre a dit en Chambre que c'est faux, il suffit de consulter la synthèse du livre vert, à la page 20, pour être convaincu du contraire. Ainsi, on apprend que l'abaissement de l'âge se fera graduellement, en diminuant d'un an à chaque année financière. L'article 1 évite donc à la ministre de venir débattre devant l'Assemblée nationale à chaque année de cette nouvelle situation dont l'impact social est considérable.

Le Conseil de la famille, dans un avis publié le 11 décembre 1996, vient de reconnaître l'importance de la liberté de choix des parents et des mères à élever eux-mêmes leurs enfants. Et l'une de ses recommandations se lit comme suit: «Premiers responsables de l'éducation de leurs enfants, les parents veulent être reconnus et choisir ce qui leur semble le plus approprié pour leurs enfants.»

Moi, M. le maire... M. le Président – je me pense encore à l'assemblée du conseil de la ville de Gatineau – je suis mère de deux fils et j'ai choisi à un moment donné – vous allez dire que mes fils ne sont plus jeunes, 36 et 34 ans – lorsqu'ils sont nés, de rester avec mes enfants et j'ai choisi de faire carrière d'une autre manière. C'est évident que j'ai été pénalisée. Je ne l'ai pas eu facile, parce qu'on avait des compressions budgétaires à ce moment-là comme on en a aujourd'hui. J'ai dû faire de grands sacrifices pour être en mesure d'élever ces enfants-là. Je n'étais pas seule, j'avais mon époux.

Et c'est ce que je reproche aujourd'hui. On voit de plus en plus de gens qui sont divorcés, des gens les plus démunis, des femmes qui sont monoparentales, des hommes aussi, et nous mettons tellement de contraintes dans la vie de ces gens là... Encore hier, j'ai reçu un appel d'une dame qui est monoparentale et qui a un enfant handicapé, elle voulait avoir de l'aide pour son système de chauffage.

Je pense, M. le Président, que ce qu'il serait important de faire, ce serait d'accepter le développement de mesures propres à aider les prestataires à réintégrer le marché du travail. Je pense que ce qui est essentiel, c'est de créer et de donner un regain d'espoir à ces personnes qui sont dans le besoin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Chapleau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sauvé. M. le député.


M. Marcel Parent

M. Parent: Je vous remercie, M. le Président. M. le Président, je lisais en fin de semaine, dans les journaux, une nouvelle attristante pour tout l'ensemble du Québec, c'était le décès du grand poète Gaston Miron. Je lisais, un peu plus bas, dans un autre article, que le premier ministre du Québec avait demandé que l'on honore le départ de M. Miron avec des funérailles nationales et que le drapeau du Québec soit en berne sur tous les bâtiments du Québec. Alors, c'est une initiative louable, et je profite de l'occasion pour offrir mes condoléances aussi à toute la famille littéraire du Québec qui a bien connu M. Miron.

Mais, il y a 10 minutes, je m'en venais sur la rue et je regardais le Parlement, je regardais l'Assemblée nationale, l'endroit où se prennent les décisions qui vont guider le peuple québécois dans son cheminement. Et j'étais tout estomaqué de voir que le drapeau n'était pas en berne, parce que, depuis deux ans, l'Assemblée nationale est en deuil, M. le Président. Depuis deux ans, on bafoue les droits de l'Assemblée nationale. Depuis deux ans, on amène bâillon par-dessus bâillon, M. le Président. Depuis deux ans, on n'arrête pas de bâillonner et de refuser aux députés des deux côtés de l'Assemblée nationale d'exercer leurs droits. Parce que, contrairement à ce qu'on pense, M. le Président, le gouvernement ne passe pas de droits. Le gouvernement n'amène jamais une loi. Le gouvernement propose une loi aux députés de l'Assemblée nationale, et ceux-ci ont le devoir de l'étudier, de l'amender, de la bonifier et de l'approuver. Et, depuis deux ans, on a été brimés à cinq ou six fois de notre droit de parole sur des projets de loi très importants.

Je me souviens du projet de loi n° 33 – on l'a tous vécu ici, hein, une opération nocturne – où on a passé une loi sur l'assurance-médicaments du Québec qui brimait le droit des personnes âgées à l'accès à leurs médicaments sans être obligés de payer, chose qu'elles ne connaissaient pas avant. Et la semaine passée et cette semaine, on avait le projet de loi n° 130 sur la justice administrative. On passait le bâillon en commission parlementaire et on nous empêchait ici de fouiller ce projet de loi même à l'Assemblée nationale.

(12 h 50)

Et ce matin, on nous amène, M. le Président, le projet de loi n° 84, pour nous en proposer l'adoption du principe. Un projet de loi, M. le Président, incomplet, un projet de loi qui enlève à l'Assemblée nationale, aux députés, le droit de faire leur travail, parce que ce projet de loi là contient sept articles principaux et que ces articles-là, M. le Président, ne passent pas devant l'Assemblée nationale. Ce sont des articles qui relèvent d'un pouvoir discrétionnaire du ministre. Alors, comment voulez-vous que les députés puissent se prononcer sur un projet de loi dont ils ne connaissent pas les aboutissements? C'est tout à fait immoral, M. le Président, de faire ça. Il y a d'autres gouvernements qui l'ont fait avant, je le reconnais, mais ce n'est certainement pas une habitude à encourager pour des parlementaires des deux côtés de cette Chambre.

Et j'ai hâte, M. le Président, d'entendre les gens du côté ministériel se lever puis dire: Écoutez, nous sommes ici des députés, nous ne sommes pas des étampes pour approuver les décisions du gouvernement, mais bien pour les bonifier, pour les améliorer et les discuter. Et ils n'ont pas ce droit-là. Je vois le député de Duplessis devant moi, qui me regarde en souriant. Bien, M. le député, je serais gêné, M. le député, à votre place d'être membre d'un gouvernement qui se fout de vous, qui ne s'occupe même pas de votre opinion et qui amène ici un projet de loi, et béatement vous allez voter pour ce projet de loi.

M. le Président, je pourrais parler de ces sept articles. Je pourrais les passer un par un, ces articles-là. Je les ai ici devant moi. Je pourrais vous parler de l'article 3, par exemple, un petit article, l'article 3. Et juste l'écouter, vous allez comprendre enfin l'immoralité de ce projet de loi là: Le débiteur alimentaire... On parle du débiteur alimentaire qui sera tenu au paiement des frais dans les cas et aux conditions déterminées par règlement. Quel règlement, M. le Président? Où il est, ce règlement-là? Quels seront les montants de ces frais? Dans quelles circonstances le débiteur alimentaire sera tenu au paiement des frais? On ne le sait pas, et on nous demande de nous prononcer. Alors, inutile de vous dire qu'on va voter contre le principe de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Sauvé. M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Courte intervention, M. le Président, comme chaque parlementaire a un droit de cinq minutes, je crois, sur le principe. Alors, j'écoutais le député de Sauvé qui disait que nous devrions avoir honte de faire partie de ce gouvernement. Je me demande comment il se sentait, en juin 1992, quand il a voté en faveur de la suspension des règles pour 28 projets de loi, 28. Je me demande comment il devait se sentir. Alors, je pense qu'à ce moment-là ça peut remettre en contexte, peut-être, certaines déclarations, certains déchirements de chemises. Alors, voici mon intervention.

M. Parent: M. le Président, est-ce que j'ai le droit de répondre?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, une seule intervention par projet. Écoutez, monsieur. Alors, je remercie M. le leader du gouvernement et je vais maintenant céder la parole, pour une intervention d'une durée maximale de cinq minutes, à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, une fois de plus, je me vois dans l'obligation de prendre la parole devant cette Assemblée pour dénoncer vigoureusement les compressions aveugles et improvisées de ce gouvernement. Après avoir bâillonné l'opposition officielle pour faire adopter en pleine nuit des projets de loi qui ont des incidences financières majeures et qui vont chercher des millions de dollars dans les poches des contribuables, voilà que le gouvernement veut faire adopter à toute vapeur le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, par lequel la ministre de l'Emploi et de la Solidarité effectue de nouvelles coupures budgétaires qui affecteront sévèrement les personnes les plus démunies, notamment les mères qui jouissent de prestations de non-disponibilité.

Il y a lieu, M. le Président, de s'interroger sur la pertinence d'introduire ce projet de loi n° 84 à ce moment précis, dans la hâte et l'improvisation, à quelques jours de la période des fêtes, alors que la ministre vient tout juste de déposer son livre vert sur la sécurité du revenu, qui doit faire l'objet d'une vaste consultation en janvier 1997, c'est-à-dire d'ici quelques semaines. Où est l'urgence, M. le Président? Pourquoi ne pas attendre les consultations de janvier, sachant que l'abolition du barème de non-disponibilité au travail pour les mères ayant des enfants à charge de moins de six ans fait précisément partie de la réforme visée par ce livre vert?

De toute évidence, le seul impératif qui motive l'improvisation de la ministre par rapport à ce projet de loi en est un d'ordre budgétaire. De plus, ce qui est inconcevable dans ce projet de loi qui contient à peine sept articles, c'est de voir que la ministre se réserve le pouvoir de fixer les conditions et les modalités d'application de chacun de ces articles par simple règlement. Il est donc difficile pour les législateurs que nous sommes d'en mesurer la portée et les effets sur les personnes directement touchées.

Déjà, à pareille date l'année dernière, la ministre de la Sécurité du revenu a frappé de plein fouet les personnes les plus démunies en les privant de 145 000 000 $, un cadeau empoisonné découlant du projet de loi n° 115. On se rappellera que le projet de loi n° 115 a aboli le barème de disponibilité, ce qui a eu pour effet de couper le chèque des prestataires participant à une mesure d'employabilité de 50 $ sans qu'aucune mesure n'ait été prévue pour assurer l'intégration de ces personnes au marché du travail. Le projet de loi n° 115 a également amené une coupure de 30 $ dans les barèmes de participants destinés aux prestataires qui font les efforts nécessaires pour augmenter leur chance d'employabilité et sortir progressivement du cercle vicieux de la dépendance du bien-être social.

Et comme si ces mesures ne suffisaient pas, le gouvernement s'est attaqué de façon sauvage aux plus démunis de notre société en coupant dans l'allocation au logement et l'assurance-médicaments. Ce qui oblige les prestataires à payer une franchise de 100 $.

Par ailleurs, le livre vert laisse supposer, à la page 20, que le barème de non-disponibilité sera accordé uniquement aux mères ayant un enfant de moins de deux ans au lieu de six ans comme avant.

M. le Président, en plus de poser un problème de pertinence, ce projet de loi n° 84 soulève de nombreuses questions à chacun des articles et une sérieuse interrogation quant à l'arbitraire qui entoure le transfert du pouvoir législatif au pouvoir réglementaire comme mode d'application de ce projet de loi.

Considérant que la seule et unique raison d'être de ce projet de loi consiste à conférer à la ministre des pouvoirs ayant des incidences monétaires considérables sur les prestataires de la sécurité du revenu et considérant qu'il est difficile d'en mesurer la portée et l'impact sur les plus démunis, je ne peux que m'inscrire en total désaccord avec un tel projet de loi.

M. le Président, si la ministre voulait entreprendre une véritable réforme qui va dans le sens d'un contrôle des programmes de sécurité du revenu, j'aurais collaboré à cet objectif. Malheureusement, tel n'est pas le cas. On note que les montants versés en trop et sans droit à la sécurité du revenu ont enregistré une hausse vertigineuse de près de 50 % en moins de trois ans, passant de 280 000 000 $ à 425 000 000 $. Au seul chapitre de l'année dernière, le ministère a versé 153 000 000 $ en trop aux prestataires, dont 83 000 000 $ sont dus à de fausses déclarations. C'est pourquoi je m'oppose à l'adoption du principe de ce projet de loi n° 84 qui ne s'attaque pas aux vrais problèmes mais qui s'attaque aux démunis de notre société.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Quelle gang de bandits!

Des voix: Hein?

Une voix: Qu'est-ce qu'il a dit?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, il me semble que je n'ai pas... Bien, écoutez, est-ce que j'ai bien compris? Mais, M. le député de Nelligan, là... Alors, M. le député de Nelligan, je ne comprends vraiment pas, là. Il faudrait vraiment que vous retiriez ces paroles – «je retire ces paroles» – et vous pourrez poursuivre après.

(13 heures)

M. Williams: Je respecte votre position, je retire mes paroles, M. le Président, mais ce n'est pas moi qui ai attaché ces mots au gouvernement, ils ont, avec leur comportement, je pense, fait présumer de leur culpabilité déjà. Mais je retire mes mots, M. le Président, et je vais changer... Peut-être que ce gouvernement est en train de créer une nouvelle tradition à Noël. Je peux utiliser, je pense, le mot «Scrooge», qui vient d'un roman de Dickens. Ça vient d'un roman de Dickens et il n'y a rien d'antiparlementaire avec ce mot. Mais c'est loin d'être un bon mot, un mot positif. C'est un drôle de cadeau de Noël pour les plus démunis de notre société, M. le Président. Encore une fois, cette année, le gouvernement péquiste arrive avec un projet de loi, comme il l'a fait l'année passée avec le projet de loi n° 115. Il est en train de fouiller dans les poches des moins avantagés de notre société. L'année passée, ils ont fait 145 000 000 $; cette année, on ne sait pas exactement le montant, mais on sait qu'il est en train de frapper les plus démunis de notre société avec le projet de loi n° 84.

Moi, je pense, M. le Président, qu'avec ces comportements que nous avons vus avec le bâillon, avec des lois antisociales comme ça, le Parti québécois est en train de perdre toutes ses racines sociales-démocratiques. Le bâillon: quatre projets de loi bâillonnés. Avant que nous ayons eu la chance de faire un débat sur le principe de ce projet de loi, il va nous forcer à adopter ce projet de loi sans avoir la chance de discuter, sans avoir la chance de voir l'impact de ce projet de loi. Il fait ça dans plusieurs autres dossiers. Quatre projets de loi, M. le Président.

M. le Président, malheureusement, nous sommes la capitale de la pauvreté, particulièrement depuis les derniers deux ans. Nous avons vu dans les manchettes aujourd'hui qu'il y a une hausse record de faillites. Un sur quatre... un sur cinq Montréalais est sur l'aide sociale. La ministre, dans mon opinion, n'a pas de coeur. The Minister doesn't have a heart.

M. le Président, presque 300 000, 254 000 enfants sont pauvres. Comme mes collègues en ont déjà parlé, ils ont eu une augmentation de 1 000 % dans les banques alimentaires. Mais qu'est-ce que ce gouvernement a dit? Il veut frapper encore ces personnes qui ont besoin de beaucoup plus de protection. Sept articles dans ce projet de loi, six avec le pouvoir de réglementation. Et nous avons une lettre du Protecteur du citoyen qui déplore vivement l'attitude de ce gouvernement. Il veut avoir ces règlements pour comprendre ce que ça veut dire, ce projet de loi. Et, entre parenthèses, M. le Président, je voudrais féliciter l'excellent travail du Protecteur du citoyen. Avec ce gouvernement, pendant la session intensive, je vais lui lancer une recommandation: Il doit déménager ici, il doit être ici pour vérifier chaque geste de ce gouvernement, parce que, de plus en plus, on voit que le Protecteur du citoyen est complètement insatisfait de ce gouvernement et de la façon dont il procède. Particulièrement dans ce projet de loi, M. le Président, il donne le pouvoir de réglementer presque sans limite.

M. le Président, qu'est-ce qu'on voit, comme citoyens? On voit les coupures de services. De plus en plus, il coupe les services, il augmente les taxes. Il cache les mots et il utilise les autres mots, mais chaque jour nous avons vu une augmentation de taxes entre 3 000 000 $ et 4 000 000 $, par jour, depuis l'entrée de ce gouvernement. Il coupe les droits. Nos droits sont coupés aujourd'hui comme parlementaires, mais il coupe les droits des citoyens. Le seul droit qui reste, c'est de payer et de continuer de payer ce gouvernement.

Je trouve ça un peu bizarre qu'il ait assez d'argent de caché, 19 000 000 000 $, pour son obsession pour la séparation, mais qu'il n'en ait pas assez pour aider les familles monoparentales, les familles qui ont besoin d'aide. Au contraire, ils ont augmenté le fardeau de 50 % depuis l'entrée de ce gouvernement.

M. le Président, je trouve ça dégueulasse, je trouve ça complètement inapproprié. Je vais voter contre ce projet de loi. And as I said, very quickly, this is a government that is intellectually and politically bankrupt. They're hitting the least advantaged of our society. And I will do everything in my power to make sure that they correct their measures immediately. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. C'est avec tristesse aujourd'hui que j'interviens dans le cadre du projet de loi n° 84, pour deux raisons: tout d'abord, on se trouve dans une situation où le gouvernement fait fi de toutes nos procédures, de tous nos règlements parlementaires pour bâillonner l'opposition, l'empêcher de faire une étude sérieuse de ce projet de loi; la deuxième raison, c'est qu'on a un projet de loi qui affecte les plus démunis de notre société et on va adopter ce projet de loi sans avoir eu l'occasion de faire un débat sérieux, un débat ouvert sur les conséquences du projet de loi.

C'est insultant, M. le Président, pour l'opposition de voir qu'un projet de loi d'une telle importance, d'un tel impact quotidien pour tous les plus démunis de notre société, on nous concède cinq minutes pour en discuter. Ça peut être insultant pour l'opposition, mais ce qui est le plus insultant encore, c'est qu'on concède cinq minutes à des porte-parole qui sont ici pour faire écho aux revendications de nos concitoyens qui sont peut-être les moins avantagés dans la société. C'est ça qui est insultant, M. le Président.

Pourquoi on suppose l'urgence pour mettre ce projet de loi dans le bâillon? Essentiellement, ce n'est pas pour apporter des solutions à des problèmes sociaux urgents, c'est essentiellement une opération financière où le seul objectif du gouvernement est de récupérer 400 000 000 $. Et c'est ça qu'il y a de commun entre les projets de loi qui sont inclus dans le bâillon que nous a présenté le leader du gouvernement. C'est strictement une opération de récupération budgétaire et, dans le cas du projet de loi qui nous préoccupe actuellement, sur le dos des plus démunis de la société. On pige dans les poches, et c'est devenu une tradition pour le gouvernement, surtout depuis que le premier ministre actuel est en place. Depuis janvier dernier, on ne fait strictement que procéder à des coupures, à des taxes déguisées où on va piger continuellement dans les poches des concitoyens.

M. le Président, le projet de loi n° 84, on aurait pu, si on avait eu l'occasion d'en discuter sereinement, aborder les objectifs de ce projet de loi, les moyens qu'on veut mettre en place pour atteindre les objectifs et surtout les impacts réels que ce projet de loi aurait eus sur la catégorie des gens qui sont, encore une fois, peut-être ceux qui sont les moins fortunés. On sait que, dans le projet de loi, on fait référence à des nouvelles compressions budgétaires, notamment auprès de mères jouissant des prestations de non-disponibilité de la sécurité du revenu. Pourquoi, M. le Président, adopter à la hâte ce projet de loi, alors que la ministre nous a annoncé une consultation en janvier 1997? Il aurait été préférable, je pense, d'attendre cette consultation avant de procéder plus avant.

Et il y a de nombreuses interrogations qui ont été soulevées, notamment par le Protecteur du citoyen, qui, dans une lettre qu'il faisait parvenir hier, mentionnait d'abord avec surprise qu'on comptait faire adopter ce projet de loi, déposé la semaine dernière, avec empressement. Et la conclusion que le Protecteur du citoyen mentionnait, c'est que – on parle des pouvoirs que la ministre se donne éventuellement par voie de réglementation – «l'attribution d'un tel pouvoir, disait le Protecteur du citoyen, me semble prématurée, alors qu'une vaste consultation doit avoir lieu dans les mois qui viennent sur les modifications à apporter au régime de la sécurité du revenu». Alors, M. le Président, je pense que ça aurait été logique qu'avant de frapper encore une fois sur la classe de nos concitoyens qui sont peut-être le plus dans des situations de misère on inclue le débat à l'intérieur d'une réflexion plus générale.

Et, M. le Président, je veux juste conclure. Il y a un article qui est paru ce matin et qui décrit très bien la situation dans laquelle on se trouve présentement, un article d'un professeur de l'Université d'Ottawa, qui nous dit, et je cite: «Derrière la façade social-démocrate se dessine le véritable visage du gouvernement péquiste. Alors que le gouvernement proclame la création d'emplois par des actions stratégiques et ciblées, sa pratique budgétaire est génératrice de chômage.» Et c'est de cette façon-là qu'on se retrouve avec de plus en plus de personnes qui doivent faire des demandes au niveau de l'aide sociale. «Combinée, dit ce même professeur, à l'affaissement des salaires et à la progression du chômage, cette gestion macroéconomique aboutit à une compression sans précédent du niveau de vie des Québécois.»

Alors, je pense qu'on devrait avoir un peu de décence au sein du gouvernement et que, si on veut tout simplement se comporter – ce que fait le gouvernement actuellement – comme une caisse enregistreuse, on devrait au moins mettre de côté nos concitoyens qui sont les moins favorisés et aborder la discussion du projet de loi n° 84 dans le cadre de la consultation que nous a annoncée le ministre. Merci, M. le Président.

(13 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de l'Acadie. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Bertrand. M. le député.


M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci, M. le Président. Tout comme mon collègue, c'est une journée exceptionnelle et très triste que nous allons vivre. J'écoutais hier le leader du gouvernement qui disait: Écoutez, le bâillon qu'on met, c'est moins pire que celui que vous avez mis. Mais rappelez-vous, M. le leader, vous étiez ici, vous aviez dit que vous ne feriez pas des gestes moins pires, mais que vous ne mettriez surtout pas de bâillon; vous ne feriez pas ça de la même façon. C'est ça que vous avez dit. Sortez vos discours, et vous avez dit que vous alliez faire ça. Et, même, la campagne électorale était assez exceptionnelle: vous alliez faire ça d'une autre façon. Mais, en fait, vous faites ça de la même façon, puis, je vous dirais, surtout avec le genre de loi à nature ou à caractère social que vous faites présentement, vous trahissez énormément ce que vous avez dit, ce que vous avez dénoncé dans le passé.

Il va y avoir d'autres lois au courant de la journée sur lesquelles on va avoir l'occasion de parler. On demande juste qu'il y ait des gens du parti ministériel qui, à l'époque de l'opposition, s'étaient levés, avaient déchiré leur chemise sur le fait qu'on mettait une taxe punitive sur l'échec scolaire... Aujourd'hui, on se glorifie de ça, imaginez-vous, deux ans après!

Donc, la loi n° 84, c'est assez étonnant que la députée de Maisonneuve, dont ont connaît l'orientation, puisse accepter ce genre de traitement qu'on fait aux plus démunis. On sait tous, je pense, que la députée – et la ministre – s'est dévouée constamment pour, je pense, honnêtement propager les lois d'équité ou les principes d'équité. Mais aujourd'hui on s'aperçoit que, une fois qu'elle est sur le bord ministériel, elle a complètement oublié le genre de véhicule qu'elle utilisait auparavant. On l'a vu par la loi n° 115, qui coupait des montants aux plus démunis. Écoutez. Au sommet économique, on nous avait dit une chose: chaque loi qui va être passée, il va y avoir une étude d'impact déposée. Bien, l'étude d'impact, on ne l'a pas. L'étude d'impact est simple: on veut aller récupérer de l'argent et on va récupérer de l'argent sur les plus démunis, dans ce cas-ci. Et je suis convaincu que la personne qu'on a connue, elle qui se battait pour défendre les droits et l'équilibre et l'équité de ces gens-là, je dois vous dire, elle a beaucoup de difficulté à tenir le même langage parce qu'elle sait très bien que cette loi-là va venir en contrariété avec tout ce que cette personne a défendu pendant une vingtaine d'années.

De plus, la loi n° 84, qu'on n'a pas eu l'occasion d'étudier article par article, on en aurait connu vraiment les impacts de chacun des articles. La difficulté ici, on le dit très bien, et ce qui est inconcevable, c'est que les conditions et les modalités d'application de chacun de ces articles-là lourds d'implications sont prévues éventuellement par règlement, puis on n'a pas le règlement. On nous demande de voter quelque chose où il va y avoir des conséquences lourdes pour les individus, et ça va être fait par règlement, et ces règlements-là, on ne les a pas.

Je peux vous dire une chose, si c'était si bon, cette loi-là, il y a des gens du parti ministériel qui se lèveraient, qui utiliseraient leur temps de parole pour dire: Écoutez, nous, on veut la loi n° 84 parce qu'on va aider nos citoyens. Absolument pas. Les gens du parti ministériel sont bâillonnés. Et, comme mon collègue le disait précédemment, c'est la caisse enregistreuse qui passe, et on a décidé de collecter, cette fois-ci, chose qu'on avait dénoncée au Sommet, qu'on ne toucherait pas aux plus démunis, mais on le fait encore une fois. Donc, c'est inconcevable, on l'a dit précédemment.

Même le Protecteur du citoyen dit qu'il faut être prudent. On aurait tout avantage à légiférer en douceur là-dessus. Il n'y a rien qui se fait dans ce sens-là. On a décidé de passer le rouleau compresseur. Et je rappelle au leader du gouvernement, même au député de Laviolette, qui était ici, que, les bâillons, ils n'en souhaitaient pas, mais ils en mettent à chaque session parlementaire. Donc, écoutez, là, on nous dit: C'est moins pire. Moins pire de collecter des gens qui sont démunis dans la société? Bien, je trouve ça un peu difficile...

Donc, M. le Président, bien entendu, on va être contre. Puis on trouve ça regrettable qu'on frappe encore ceux qui sont les plus bas dans la société. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Bertrand. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Je serai très bref, mais je ne peux pas laisser passer tout ce qui s'est dit sans rappeler que la situation qu'on vit présentement est bien différente de celle qu'on vivait il y a sept, huit ans, quand une campagne orchestrée par le gouvernement d'alors essayait de faire croire à tout le monde que les assistés sociaux, c'était une bande d'abuseurs et qui fraudaient la société. Aujourd'hui, la situation est bien différente. Tout le monde reconnaît que la large, très large, très, très large majorité des gens qui sont réduits à l'aide de dernier recours sont des gens parfaitement honnêtes et qui sont tout simplement dans une situation particulièrement malheureuse. Alors, c'est cette situation qu'il faut reconnaître quand on voit actuellement les jeunes et des gens de tout âge être obligés d'avoir recours à toutes sortes d'expédients pour réussir à joindre les deux bouts.

C'est pour ça qu'on a un programme d'aide aux personnes, de dernier recours, aux personnes qui sont vraiment démunies, et je pense que ce programme d'aide, sans être trop généreux... Je ne dirai pas qu'il est trop généreux, M. le Président, je pense même qu'il ne l'est pas assez. Cependant, il est peut-être aussi généreux que la société peut se le permettre présentement. Ce qui est certain, c'est qu'un très petit nombre de ces personnes ne se comportent pas comme elles le doivent et, pour un montant d'au-dessus de 70 000 000 $, en moyenne, font de fausses déclarations et font en sorte de détourner les fonds qui devraient être destinés aux personnes les plus démunies, détournent ces fonds-là de leur véritable finalité. Et je pense que ces personnes-là, en agissant ainsi, non seulement privent des gens qui ont besoin de cet argent, de ces sommes, mais en plus elles contribuent à discréditer l'intégrité de la très vaste majorité des personnes qui sont réduites à cette situation.

C'est pour ça que la loi n° 84 donne le pouvoir à la ministre de la Sécurité du revenu de corriger cette situation pour faire en sorte que ces sommes soient récupérées et affectées aux fins pour lesquelles elles ont été votées par l'Assemblée nationale, c'est-à-dire à soulager les plus démunis et aussi à faire en sorte de protéger autant que faire se peut leur dignité. Alors, c'est pour ça que je voterai pour cette loi, de façon à ce que ces personnes puissent bénéficier des fonds qu'on a votés pour leur venir en aide. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je remercie M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je veux, avec évidemment l'approbation de tous mes collègues, indiquer tout de suite au leader du gouvernement que le député de Saint-Hyacinthe n'a pas souvent l'occasion de s'exprimer en cette Chambre, parce que son leader ne le lui permet pas. Alors, dans les circonstances, on serait d'accord, de notre côté, pour lui permettre de continuer son intervention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, c'est un... M. le député, quand il veut avoir du temps supplémentaire, il peut le demander lui-même, je pense bien.

Maintenant, pour le prochain intervenant, je serais prêt à reconnaître quelqu'un. Alors, M. le député d'Argenteuil.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. Je suis heureux de voir que le député de Saint-Hyacinthe a pris deux positions tout à fait opposées. Au début, il décriait la position que le gouvernement antérieur avait prise il y a sept à huit ans, puis, à la fin, il disait que le ministre prend la même position, puis là, c'est correct. Alors, c'est difficile de concilier deux positions aussi différentes et paradoxales.

Ce que l'on retrouve aujourd'hui, pour le projet de loi n° 84, M. le Président, c'est un peu avec grande tristesse qu'on se lève, parce qu'on a imposé le bâillon, on enlève tout le processus démocratique, la capacité de s'exprimer.

Je vais vous dire, M. le Président, la ministre de la Sécurité du revenu, elle fait la guerre aux pauvres au lieu de faire la lutte à la pauvreté. Elle nous dit qu'elle veut favoriser l'intégration des gens qui sont sur la sécurité du revenu, leur réinsertion sociale, les responsabiliser, et tout cela. M. le Président, il va falloir qu'on leur trouve quelque chose à faire à ces gens-là. Et pour leur trouver quelque chose à faire, il faut leur donner un emploi, puis pour créer de l'emploi, il faut créer un climat favorable à ce que les gens puissent venir investir au Québec, que les administrateurs, les investisseurs puissent venir s'implanter au Québec pour créer des jobs, pour créer des emplois où les gens qui sont sur la sécurité du revenu vont pouvoir se réintégrer.

(13 h 20)

Malheureusement, M. le Président, ce n'est pas ce que nous vivons au Québec actuellement. Le climat politique, le climat social, le climat économique sont tous des paramètres qui défavorisent, qui désincitent les gens à venir investir chez nous.

Aujourd'hui, ce que l'on retrouve dans notre société, M. le Président, le gouvernement tente de récupérer de l'argent. Qu'on n'essaie pas de mettre sur le dos des plus démunis toutes sortes de politiques de réintégration sociale, d'autonomie, de réimplication, de réinsertion, alors qu'au fond tout ce que l'on recherche, c'est d'aller chercher de l'argent dans la poche des plus démunis. Et Dieu sait qu'il y a tellement d'autres endroits où le gouvernement aurait pu obtenir des fonds, obtenir des fonds par la création d'un climat favorable, inciter les gens à venir investir chez nous, M. le Président. Ce n'est pas d'aller chercher de l'argent dans la poche des plus pauvres, des plus démunis, c'est de demander à ceux qui en ont le plus dans leurs poches de venir en mettre chez nous. C'est une philosophie tout à fait inverse, c'est une philosophie tout à fait paradoxale que le gouvernement essaie de nous mettre en place, et ça, ça m'apparaît inacceptable, en plus du fait que la ministre, qui dépose son livre vert, nous dise: Bien, écoutez, là, en janvier, on va commencer à consulter toute la population, tous les intervenants, tous les groupes qui voudront venir se faire entendre, on va les entendre et mettre en place des mesures pour corriger ce parcours, qu'elle nous dit, un parcours d'insertion, de formation et d'emploi.

M. le Président, quelle est la presse aujourd'hui de nous bâillonner, nous qui sommes les représentants démocratiques? Dans mon comté, j'ai 45 000 électeurs; je n'ai que cinq minutes pour essayer de défendre leur position. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse dans cinq minutes? C'est à peine si on a le temps de vous dire bonjour! Ça me fait penser au livre du Petit Prince: «je suis un allumeur de réverbères puis un éteigneur de réverbères», puis c'est fini. Mais c'est ça qu'on nous demande de faire alors qu'on a tout le temps pour étudier ce document, faire les interventions appropriées. Et, à ce moment-là, elle pourrait revenir avec son projet de loi.

Et je vois les gens du côté ministériel qui rient de ma comparaison avec l'éteigneur et l'allumeur de réverbères. Bien, je peux vous dire, M. le Président, que, si on est les allumeurs, nous, eux, ce ne sont que des éteigneurs, car tout ce qu'ils essaient de faire, c'est d'aller éteindre la motivation des gens, leur autonomie, leur réinsertion, leur capacité de s'intégrer dans la société, et c'est ça aujourd'hui qu'on vit. C'est une tristesse aujourd'hui d'imposer le bâillon sur un si grand nombre de projets de loi où on enlève à tous les députés de l'opposition leur capacité de faire valoir leur droit démocratique le plus élémentaire, le plus fondamental. Alors, vous allez comprendre que, même si je ne partage pas les commentaires du député de Saint-Hyacinthe, qui associe les gens sur la sécurité du revenu à des fraudeurs, on ne peut pas s'associer à de telles démarches alors qu'on connaît les difficultés avec lesquelles les gens ont à boucler les deux bouts, à être capables de s'alimenter et de progresser dans cette société. Alors, vous allez comprendre qu'on va s'opposer à une telle démarche. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laporte. M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. J'ai eu l'honneur, pendant au-delà de cinq ans, de présider à ce ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et, à ce moment-là, j'ai eu pendant au-delà de cinq ans, comme critique, l'actuelle ministre de l'Emploi qui nous présente aujourd'hui des mesures affectant la sécurité du revenu. Ce qui me désole, mais vraiment me désole, c'est de voir aujourd'hui cette ministre de l'Emploi, responsable de la Sécurité du revenu, qui tient un langage totalement et diamétralement opposé à celui qu'elle m'a tenu pendant cinq ans.

Alors que je faisais la réforme de l'aide sociale, tentant d'inciter les assistés sociaux à reprendre le chemin du travail par toutes sortes de programmes, elle dénonçait en termes virulents les efforts que nous faisions à ce moment-là. Le coup de pouce que nous voulions donner, elle le dénonçait, et aujourd'hui elle reprend les mêmes propos. Alors qu'on voulait contrôler les dépenses excessives à l'aide sociale, M. le Président, elle nous dénonçait avec des propos larmoyants, et aujourd'hui elle fait pire, elle coupe sans vergogne des clientèles qui parfois sont les plus sensibles, comme les monoparentales, les jeunes. Sans aucune sensibilité, cette ministre-là contredit aujourd'hui par ses actes le langage qu'elle a tenu pendant cinq ans. Si j'étais elle, j'aurais honte de me présenter en cette Chambre et de tenir un pareil langage, surtout après ce qu'elle a dit.

Et d'ailleurs, quand on regarde ses projets, il n'y a pas vraiment de réforme dans ce qu'elle nous propose. Elle garde essentiellement les mêmes structures que la réforme que nous avions faite, c'est-à-dire que la distinction entre les aptes et les inaptes, c'est conservé. Dans le programme APTE, elle garde les mêmes catégories, les non-participants, les non disponibles et les participants. Les barèmes que nous avions sont encore là. La seule chose qu'elle fait, c'est qu'elle coupe dans les barèmes à l'égard de ceux qui voulaient faire un effort pour s'en sortir. On avait ajouté 150 $ pour inciter les assistés sociaux à aller participer à des programmes de réinsertion sociale, des programmes, par exemple, dans les entreprises, de stage dans les entreprises, elle coupe toutes ces incitations-là dans sa proposition. Les mesures de contrôle qu'on avait adoptées, 100 $ de coupure pour ceux qui refusaient un emploi, 200 $ pour ceux qui refusaient un deuxième emploi, elle dénonçait ça en termes absolument virulents; elle fait pire aujourd'hui. Le 100 $ pour le premier refus, elle va charger 150 $, elle va déduire 150 $. Le 200 $ – parce qu'on doublait – elle en fait 300 $ de pénalité. Donc, elle s'inscrit dans la lancée de la réforme de l'aide sociale en allant chercher un peu plus d'argent. Et je ne veux pas commenter ces décisions-là, mais je dénonce le double langage de la ministre.

S'il y a des choses qu'on peut dire, c'est que cette ministre-là, elle travaille à la tronçonneuse dans le dossier de l'aide sociale, pour employer les mots mêmes du premier ministre. Elle concerve exactement le même système que nous avions, mais en retranchant des sommes d'argent. Et les plus frappés là-dedans, ce seront vraiment les enfants. Parce que, dans les barèmes qu'on avait, on avait une famille monoparentale, par exemple, il y avait une somme d'argent pour la famille et une somme d'argent pour les enfants. Aujourd'hui, on enlève la composante enfants et on dit qu'on va la remplacer par un chèque qui va s'ajouter à l'allocation familiale. Malheureusement, on sait ce qui va arriver, c'est que le chèque de l'allocation familiale ne sera pas augmenté d'une somme d'argent équivalente à ce qu'on va retrancher dans les barèmes – ça, qu'on se le dise bien – tant pour une personne monoparentale avec un enfant que pour deux enfants ou un couple avec des enfants aussi. On voit très, très bien ce que la ministre veut faire. Elle retranche des sommes d'argent dans les barèmes. Elle dit: Je vais mettre ça sur les prestations enfants, mais en retranchant au passage avec sa tronçonneuse une partie des sommes d'argent.

Aujourd'hui, la seule réforme qu'elle va faire, c'est de mettre ensemble les deux réseaux, le réseau de l'aide sociale et le réseau de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Mais, comme c'est le réseau de l'aide sociale qui est le plus gros, c'est celui-là qui va bouffer le deuxième, de sorte que dorénavant la dynamique, ça va être une dynamique de soutien en emploi, de paiement de chèques et non pas réellement une dynamique d'insertion sociale pour les assistés sociaux.

M. le Président, tout ce que la ministre nous propose, oubliez ça, il n'y a pas de réforme là-dedans, c'est une opération à la tronçonneuse pour aller chercher de l'argent de plus pour les coffres du gouvernement dans les poches des assistés sociaux. Qu'on ne se trompe pas, cette ministre-là fait aujourd'hui le contraire de ce qu'elle prêchait pendant cinq ans. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Berthier. M. le député.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur cette question. D'abord, peut-être reprendre, parce que le député de Laporte a quand même été pendant longtemps à la tête du ministère de la Sécurité du revenu, tout simplement rappeler à cette Chambre ou aux gens qui nous écoutent que le député de Laporte, c'est quand même lui qui a construit puis empilé, année après année, les 357 barèmes à l'aide sociale qui ont caractérisé la gestion d'un des systèmes les plus bureaucratiques et les plus technocratiques de l'histoire du Québec. Trois cent cinquante-sept barèmes pour gérer le régime de l'aide sociale au Québec, si ce n'est pas de la folie bureaucratique, qu'est-ce que c'est? C'est quasiment du délire. Comment une société a été amenée à plonger du pauvre monde confronté à un système bureaucratique qui ne laissait aucun espoir et aucun avenir? C'est ça, la réalité, un système qui a été bâti particulièrement par le Parti libéral, qui fittait davantage en fonction des critères des fonctionnaires plutôt que ceux du pauvre monde qu'on devait déprendre. C'était ça, la réalité, un système aussi qui a construit, au fil des ans, 132 mesures d'employabilité.

(13 h 30)

Comment voulez-vous qu'une personne puisse s'en sortir quand elle est aux prises avec ce qu'on appelle... On peut peut-être quand même identifier ça un peu aux livres d'Astérix: Astérix au pays des fonctionnaires. Pour la personne qui veut s'en sortir, qui n'a pas fini son secondaire III ou IV, ou la femme monoparentale, elle arrive au bureau d'aide sociale, et là on lui défile ça: 132 mesures d'employabilité. Essayez de vous retrouver là-dedans. Est-ce qu'un jeune, ou un plus vieux, ou une femme seule avec des enfants à la maison peut se retrouver là-dedans? Je ne pense pas qu'on puisse bâtir un avenir là-dedans.

Donc, c'est ça, le virage que le gouvernement du Parti québécois a décidé de prendre et la ministre de la Sécurité du revenu, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve ma collègue. C'est un virage fondamental. Et, quoi qu'on en dise, cette réforme est une pièce maîtresse de l'action gouvernementale du gouvernement de Lucien Bouchard. C'est une réforme fondamentale qui va réhabiliter au Québec et qui va réinstaurer la notion suivante: la notion de responsabilisation de l'individu, d'autonomie de l'individu. Et c'est une réforme qui casse avec le passé, qui casse avec le phénomène de dépendance dans lequel étaient plongées des centaines et des centaines de milliers de personnes. Il n'y a pas d'avenir pour un individu dans la société dans la dépendance, il y a de l'avenir dans la responsabilisation et l'autonomie. Et c'est ça que ça fait, la réforme de la sécurité du revenu.

M. le Président, au début des années soixante-dix, quand on a créé au Québec le ministère de la Sécurité du revenu, il y avait 80 % d'inaptes qui composaient les clientèles de la sécurité du revenu. Aujourd'hui, c'est l'inverse: il y a 80 % des personnes qui sont aptes au travail. Alors, il fallait peut-être conclure aussi que l'assistance sociale telle qu'elle était organisée au Québec était une forme de dépendance, c'était une trappe à dépendance. Il y a 137 000 jeunes, au Québec, de moins de 30 ans qui n'ont pas terminé le secondaire IV; ces jeunes-là ont bien plus besoin d'un banc d'école que d'un chèque d'aide sociale. Il n'y a pas d'avenir là-dedans. Ce n'est pas une façon de vivre, l'aide sociale.

Qu'est-ce que ça génère à côté, l'aide sociale? Bien, ça génère des problèmes qui sont graves pour la société: des problèmes de désespoir, de détresse, de souffrance intérieure, des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie. Il n'y a pas d'avenir là-dedans. Il faut avoir des mesures qui vont remettre ces jeunes-là, particulièrement au bas de l'échelle, sur le chemin, sur le sentier de la responsabilisation. Alors, il faut leur donner les outils nécessaires, et c'est ce que la réforme va faire.

Elle fait le ménage d'abord dans ces maudits barèmes de fou: ces 357 barèmes que le député de Laporte a alignés les uns par-dessus les autres au fil des ans alors qu'il était ministre responsable de la Sécurité du revenu. On fait le ménage là-dedans. On fait le ménage dans les mesures d'employabilité pour que le monde arrête d'être victime d'un match de ping-pong entre une mesure et une autre. Les programmes «pic-pac-poc» qu'on appelle. Ça n'a pas de bon sens. C'était un système de fou. La ministre a décidé de faire table rase là-dessus, de rebâtir une réforme fondamentale, qui est une pièce importante de notre présent gouvernement.

Et, moi, je suis convaincu qu'on va être capable de l'expliquer à l'ensemble de la population et que nos jeunes particulièrement vont retrouver la dignité et la fierté et ils vont surtout retrouver l'espoir, parce qu'ils l'avaient drôlement perdu au fil des ans, particulièrement avec le système éhonté qu'avait mis en place le gouvernement du Parti libéral qui nous a précédés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Berthier. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Outremont. M. le député.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. La contradiction qui ronge ce gouvernement et qui va continuer à le ronger jusqu'à ce que nous réussissions à nous en débarrasser, M. le Président, cette contradiction est illustrée d'une façon exemplaire par la loi 84. Le désintéressement de l'État-providence, le désinvestissement de l'État-providence prend la forme de coupures draconiennes dans les dépenses de l'État et en particulier dans les dépenses des programmes sociaux. Or, ce désinvestissement qui frappe de plein fouet les plus démunis de notre société entraîne partout, et partout les mêmes effets, les mêmes conséquences.

Des sociologues éminents nous l'ont dit et nous le répètent: nous entrons de plain-pied dans ce qu'ils appellent le «nouvel âge des inégalités». Mais, au Québec, sous la gouverne péquiste, nous entrons dans ce nouvel âge des inégalités à pleine vitesse, à 150 km à l'heure, parce que, en même temps que le gouvernement péquiste et son chef, le député de Jonquière, coupent rageusement dans les dépenses sociales de l'État, il est impuissant, et toutes les études le démontrent.

Je lisais dernièrement une étude récente du Conference Board, qui le démontre en abondance: Ce gouvernement est impuissant à cause de sa religion politique, de sa recherche de la séparation comme d'un absolu. Ce gouvernement est incapable de créer de la croissance et de la richesse. Sur tous les indicateurs de croissance économique dont nous disposons et sur tous les indicateurs de création de richesse dont nous disposons – et nos amis d'en face le savent – nous sommes derrière tout le monde au Canada et nous sommes évidemment derrière tout le monde partout ailleurs si on se compare à beaucoup d'autres pays dans le monde.

Donc, voilà la contradiction. D'une part, le gouvernement coupe, mais, d'autre part, le gouvernement est incapable, à cause de son engagement idéologique, de produire les conditions qui pourraient permettre que, au-delà de ces coupures, nous puissions arriver à une situation qui nous donne de l'espoir. On coupe sans pouvoir créer de la richesse et on va continuer à couper sans pouvoir créer de la richesse tant et aussi longtemps qu'on sera engagé sur cette voie destructrice qui est celle de ce gouvernement.

Et, pour ceux et celles d'entre nous qui ont refusé de se taire devant cette conspiration du gouvernement péquiste à nous faire entrer de plain-pied, de pleine vitesse dans le nouvel âge des inégalités, eh bien, qu'est-ce que ce gouvernement fait pour ceux qui décident de parler? Ce gouvernement décide de nous imposer le bâillon. Mais, M. le Président, je voudrais, en terminant, vous dire que, si on peut bâillonner une opposition, on ne réussira pas à bâillonner toute une société. C'est donc parce qu'il faut prévenir que ce bâillon qui nous est imposé s'étende à l'ensemble de nos concitoyens que, nous, de l'opposition, nous nous inscrivons dans cette activité de résistance aux mesures de ce gouvernement – de résistance active – afin qu'on puisse éviter le silence que le gouvernement veut nous imposer, mais qu'il ne réussira pas, s'il réussit à nous l'imposer, à imposer à l'ensemble de la société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Mégantic-Compton. Mme la députée.


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Nous sommes à étudier le principe du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Ce projet de loi ne devrait pas s'appeler le projet de loi sur la Sécurité du revenu, on devrait dire l'«insécurité du revenu» de ceux qui auront à subir les effets de ce projet de loi qui a pour but d'aller récupérer dans les poches des plus démunis des argents manquant dans les coffres du gouvernement. Ce gouvernement a le don de faire des cadeaux à l'approche des fêtes, puisqu'on se rappellera qu'à pareille date, l'an passé, la ministre de la Sécurité du revenu faisait un beau cadeau de Noël aux personnes les plus démunies de notre société et déposait le projet de loi n° 115, qui visait des compressions budgétaires de l'ordre de 145 000 000 $. Le projet de loi n° 115 était, en somme, une gifle à la motivation, puisqu'il pénalisait particulièrement ceux qui faisaient l'effort de s'en sortir.

(13 h 40)

Et, après le projet de loi n° 115, on continue à imposer une série de coupures sur le dos des plus démunis: coupures dans l'allocation du logement, désengagement au niveau des soins dentaires et optométriques, coupures au niveau de l'assurance-médicaments, puisque les prestataires devront payer une franchise de 100 $ au niveau des médicaments. Et tout ça pour des économies de 60 000 000 $.

Pour le gouvernement, on récidive. Le 10 décembre 1996, la ministre de la Solidarité a déposé le projet de loi n° 84, venant faire de nouvelles compressions budgétaires, notamment auprès des mères jouissant de prestations de non-disponibilité à la sécurité du revenu: un autre beau cadeau de Noël. Mais je ne comprends pas pourquoi, étant donné que la ministre vient de déposer son livre vert sur la sécurité du revenu... C'est un livre vert qui fera l'objet de consultations au mois de janvier. Pourquoi déposer maintenant ce projet de loi qui touche un point essentiel de sa réforme, soit l'abolition du barème de non-disponibilité au travail pour les mères ayant des enfants d'âge préscolaire?

Ce qui est inconcevable, M. le Président, c'est que les conditions et les modalités d'application de ce projet de loi, lourdes d'implications, seront prévues éventuellement par règlement. Donc, il est assez difficile, pour les députés qui auront à légiférer, de pouvoir se prononcer sur ce projet de loi, puisqu'il est impossible d'en connaître ni la portée ni l'impact auprès des personnes visées.

Il m'apparaît évident qu'il est difficile de voter pour le principe de ce projet de loi. D'ailleurs, le Protecteur du citoyen, il dit que d'attribuer un tel pouvoir lui semble prématuré parce que, lui aussi, il parle de la consultation qui doit avoir lieu dans les mois qui viennent sur les modifications à apporter au régime de la sécurité du revenu. Puis il dit que, si elle devait être adoptée, cette loi, la modification législative proposée à l'article 1 du projet devrait donc n'être mise en vigueur que conditionnellement à l'implantation des autres mesures envisagées, sinon le pouvoir accordé au gouvernement pourrait équivaloir à une pure autorisation de décréter la réduction des prestations. C'est pour ça qu'il nous apparaît évident que, voter pour le principe de cette loi, n'en connaissant pas les conséquences, on ne peut pas en mesurer la teneur ou la portée véritable.

L'objet de ce projet de loi consiste, somme toute, en l'octroi de droits et de pouvoirs au ministre... incidences monétaires pour les prestataires. L'impact sur les personnes visées dépendra essentiellement des règlements tant au chapitre des modalités qu'à celui des coûts ou frais imposés. Dire oui à l'adoption du principe serait comme signer un chèque en blanc à la ministre. M. le Président, n'eût été du laxisme de ce gouvernement au niveau des mesures de contrôle depuis deux ans et demi, on n'aurait pas besoin de faire ces compressions douloureuses sur le dos des personnes les plus démunies. C'est pourquoi, nous, de l'opposition officielle, étant donné qu'on nous impose ce projet de loi en fin de session en nous mettant le bâillon, on ne peut, avec toute notre conscience, voter pour le principe de ce projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Mégantic-Compton. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viau. M. le député.


M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Il est un peu surprenant d'entendre les gens de l'autre côté venir nous dire qu'il faut consulter la population. C'est des beaux discours, des beaux discours démocratiques. Lorsqu'on envisage une réforme, particulièrement au niveau de l'aide sociale – et Dieu sait qu'on a besoin de regarder ça de très proche – c'est qu'ils nous arrivent toujours avec des discours de bonnes intentions. Comme on dit en anglais: «The road to hell is paved with good intentions». Ça, c'est les intentions du jour, puis la nuit ils deviennent des vampires qui sortent pour aller sucer du sang et s'attaquer aux plus démunis de notre société.

Le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, abolit le barème de disponibilité et la ministre va couper par ce projet de loi un 50 $ sur le chèque des personnes qui désiraient y participer, mais pour lequelles le ministère n'avait aucune mesure d'intégration à l'emploi ou de formation à leur offrir.

M. le Président, depuis quelques mois, on entend beaucoup les ténors encore de l'autre côté, et particulièrement le leader parlementaire, qu'il est primordial qu'on procède à une réforme de nos règles du Parlement. Juste pour le souligner à quelques-uns, parce que je pense que vous le savez fort bien, vous, puisque vous occupez votre siège, que le règlement de l'Assemblée nationale en ce qui concerne l'adoption de projets de loi est fait non pas pour accommoder des parlementaires, mais pour essayer de pouvoir donner à la population le temps d'être informée, de réagir. C'est pour ça que dans notre règlement, présentement, nous avons justement un dépôt de projet de loi: on en prend connaissance et, au moment où on en prend connaissance, la population en prend connaissance. Ce n'est pas pour rien, M. le Président, qu'il est prévu dans nos règlements que, avant qu'on puisse passer au principe de l'adoption de ce projet de loi, il faut qu'il y ait sept jours de prévus, et, après ces sept jours là, les parlementaires s'expriment et l'opposition est là pour faire valoir les points des gens qui s'opposent à un projet de loi.

C'est bien important de comprendre ça, parce que je crois qu'il est immoral d'arriver avec le bâillon. Justement, en empêchant des députés de l'opposition de faire leur travail, c'est qu'en même temps ils bousculent, ils enlèvent des droits à la population de pouvoir se faire entendre. Parce qu'on présume que, lorsqu'un projet de loi est présenté par un ministre, il a été bien étudié, il y a eu toutes sortes d'études d'impact, n'est-ce pas, et on présume aussi que les gens ont un droit, que la population a un droit, elle, de regarder ce projet de loi et de voir de quelle façon ce projet de loi va les affecter.

Ce qui est inconcevable de la manière que ces gens-là opèrent, M. le Président... C'est vrai que, dans nos règlements, le leader du gouvernement peut suspendre les règles – imposer le bâillon comme on le dit dans le jargon parlementaire – lorsqu'il y a urgence ou lorsqu'il y a obstruction systématique. La vraie urgence, M. le Président, à ce moment-ci, c'est le fait que ce gouvernement manque de revenus. Pourquoi manque-t-il de revenus? Parce que, au Québec, il s'est perdu au cours de la dernière année 60 000 emplois. Des personnes qui travaillent, normalement, au Québec, qui paient des impôts. Tu as 60 000 personnes aujourd'hui de moins que l'année dernière qui paient des impôts. Puis, si on fait un peu la moyenne de ce que le gouvernement perd en impôts par les jobs qui ont été perdues, ça fait à peu près 400 000 000 $. Étrange. Ce que le leader vient de faire en nous imposant le bâillon, il va chercher les 400 000 000 $. L'urgence, c'est qu'au lieu d'arriver ici à ce temps-ci et de nous donner des lois semblables il devrait plutôt s'occuper comme d'autres de l'emploi, M. le Président.

(13 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Le gouvernement a réussi cette nuit à bâillonner l'opposition, à utiliser sa majorité en Chambre pour faire passer des lois à toute vapeur, des lois sur lesquelles on n'a pas eu l'occasion de se pencher. Si le gouvernement peut bâillonner l'opposition, M. le Président, en se servant et en suspendant les règles de procédure que nous nous sommes données dans un parlement démocratique, le gouvernement ne peut pas bâillonner les citoyens et les citoyennes du Québec. Le gouvernement ne peut pas bâillonner non plus le Protecteur du citoyen, celui qui a été désigné par le parti ministériel et par le parti d'opposition pour veiller aux intérêts des citoyens et des citoyennes du Québec.

Regardons, M. le Président, ce que nous dit le Protecteur du citoyen. J'ai rarement vu une lettre aussi sévère à l'égard de la ministre de la Sécurité du revenu. On se rend compte rapidement du double discours du gouvernement auquel nous assistons depuis maintenant trop longtemps. Première chose que dit le Protecteur du citoyen dans sa lettre, récente, du 17 décembre 1996 – parce qu'on imagine que c'est hier que, lui aussi, il a appris que le gouvernement voulait faire passer une loi importante à toute vapeur – il dit: «Ce projet vise avant tout à accorder au gouvernement de nouveaux pouvoirs réglementaires.»

Rappelons-nous du premier ministre qui se levait en cette Chambre et qui disait qu'il voulait diminuer le nombre de règlements. Je me souviens de mon collègue le député de Shefford qui avait déposé la pile de règlements qui avaient été adoptés par le gouvernement, M. le Président, elle faisait à peu près deux pieds d'épaisseur. Le député d'Orford était là pour remettre les documents, il s'en souvient fort bien, il y avait des boîtes et des boîtes de règlements. Et le premier ministre qui disait: On veut diminuer la réglementation au Québec.

Première remarque du Protecteur du citoyen: Le gouvernement vise à se donner de nouveaux pouvoirs réglementaires, donc de nouveaux règlements. Quel double discours. Le premier ministre qui dit: On veut réduire le nombre de règlements; le projet de loi, ils veulent augmenter la réglementation. M. le Président, ils veulent augmenter la réglementation. Ils veulent que les parlementaires puissent adopter ce projet de loi là, sauf qu'on ne connaît pas les règles. On ne connaît pas les règles, on ne connaît pas les règlements parce qu'ils n'ont pas été déposés avec le projet de loi.

Autre commentaire du Protecteur du citoyen: l'atteinte portée à la qualité du processus législatif et notamment à la transparence. Un autre mot dans le vocabulaire du parti ministériel: la transparence. On va faire ça avec la plus grande transparence. Tout ce qu'on fait est transparent. Pourtant, M. le Président – ce n'est pas n'importe qui qui le dit, ce n'est pas les députés de l'opposition – le Protecteur du citoyen, il dit que, par le dépôt de la motion de bâillon adoptée cette nuit par le parti ministériel, eh bien, ça porte atteinte non seulement au processus législatif, mais également à la transparence.

M. le Président, le premier ministre, combien de fois a-t-il répété son engagement en cette Chambre de respecter le principe de l'appauvrissement zéro? C'est-à-dire dans la volonté du gouvernement d'assainir les finances publiques, on lui a posé la question: Nous espérons que vous ne ferez pas ça sur le dos des plus démunis. Que nous dit le Protecteur du citoyen, M. le Président: «C'est un projet de loi qui autorise le gouvernement à modifier par règlement les conditions d'admissibilité au barème de non-disponibilité.» Et vous proposez de réduire de six ans à deux ans la période durant laquelle certains prestataires de la sécurité du revenu, et notamment les familles monoparentales, peuvent recevoir des prestations. Quel double discours! On en vient, M. le Président, à créer un nouveau mot en cette Chambre: on fait face à des «bouchardises». Je pense que vous savez exactement ce que ça veut dire; la population, elle, le sait. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Marquette. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, je voudrais peut-être laisser à votre appréciation le fait de prendre le nom d'un député et de le transformer pour en faire une expression qui n'existe nulle part. Alors, je pense, M. le Président, que ce n'est pas... Je laisse ça à votre appréciation, mais je crois que ça ne devrait pas être permis, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, je crois que dans cette enceinte-ci on ne peut pas utiliser le nom d'un membre pour en constituer un substantif tel que vous l'avez fait. Je ne crois pas que ça corresponde à l'esprit de notre règlement. Alors, je vous inviterais, à l'intérieur de nos débats, à ne pas avoir recours à ces expressions dans l'enceinte de nos débats. Alors, M. le député d'Orford, je vous cède la parole.


M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, nous voilà, après avoir passé une partie de la nuit debout, après avoir débattu toute la nuit, nous voilà encore à parler d'un bâillon, où le gouvernement n'a pas la conviction de ce qu'il essaie de faire, donc il le fait en grande partie en pleine nuit. Et là, n'ayant pas le courage de débattre sur la place publique des points de vue et des opinions qui sont souvent à l'inverse des opinions avec lesquelles il s'est fait élire... Et on ne pourra pas le dire assez souvent, M. le Président, j'invite les citoyens du Québec à aller dans les bibliothèques et à prendre le programme du Parti québécois, prendre le programme du Parti québécois et regarder les belles phrases, les beaux paragraphes, les chapitres. Il y en avait pour 235 pages, M. le Président, plus 50 pages ensuite, la constitution du PQ, ajoutées à ce programme-là. C'est un document ça d'épais. Et, là-dedans, c'était le paradis: tout le monde était heureux; tout le monde, il était beau; tout le monde, il était fin. Il n'y avait plus de problème. Ceux qui n'en avaient pas, on leur en donnait; ceux qui en avaient un petit peu trop, on leur en enlevait un petit peu. Tout le monde était heureux, M. le Président, il n'y en avait pas, de problème.

Nous voilà un référendum plus tard. Là on s'aperçoit qu'entre le programme électoral, où on a dit n'importe quoi... Et puis, pour avoir travaillé d'une façon un peu plus particulière sur le programme en ce qui a trait à l'environnement, non seulement on ne va pas dans le sens du programme, mais, dans bien des cas, on va complètement à l'encontre du programme, M. le Président. Complètement à l'encontre du programme, et je pourrais donner des cas précis si le gouvernement me posait des questions ensuite. Or, c'est ça qu'on est après faire ici aujourd'hui, un gouvernement qui s'est fait élire avec un discours et qui, deux ans après, tient un discours complètement opposé.

Et, comme le disait si bien le député avant moi, le député de Viau, le problème, c'est le manque d'entrées d'argent. Ce n'est pas en tapant sur les plus démunis de la société, les laissés-pour-compte, comme les appelait l'abbé Pierre, qu'on va régler ce problème-là. Ce n'est pas là qu'est le problème, c'est de remettre un climat d'investissement propice dans la terre de chez nous, au Québec. Mais si vous pensez pour un instant qu'en se tapant la gueule sur le référendum comme on l'a fait pendant un an... Et on n'a pas sitôt laissé le référendum qu'on s'est embarqué dans un débat linguistique...

Et je n'ai rien inventé en disant qu'à travers les peuples, l'histoire, les continents, les trois sujets qui ont divisé les gens sont toujours les mêmes, M. le Président. D'abord, le territoire. Les guerres, à travers les temps, ont été faites sur le territoire. Or, au référendum, c'était le grand débat: Où est-ce qu'on commence, où est-ce qu'on finit? Est-ce que le West Island fera partie, etc.? Alors, le territoire.

Le deuxième grand débat, M. le Président, qui divise les peuples à travers les temps depuis toujours, c'est la langue. Alors, nous, on en a laissé un. On l'a perdu, celui-là, hein. Le gouvernement a perdu ce référendum-là. Ils ont dit: On va se reprendre. Je vous dis qu'au CHUS à Sherbrooke, ça n'a pas été long que les petites pancartes des deux langues, on a enlevé ça de là: il fallait diviser les gens.

Et puis, si on laisse ces gens-là aller un petit peu plus longtemps, le troisième sujet qui divise les peuples à travers les temps, c'est la religion. Lâchons-les pas lousses trop longtemps, parce que je sens qu'ils vont glisser sur la religion. Et puis là ils auront fait le tour complet du portrait: le territoire, la langue et la religion, M. le Président.

Et, pendant ce temps-là, on essaie de nous passer en pleine nuit des projets de loi: le projet de loi n° 84, la Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Eh bien oui! l'abbé Pierre les appelait les laissés-pour-compte, des gens qui n'ont pas les moyens de se défendre, des gens qui sont à la dernière ressource. Et est-ce qu'il y a une période de l'année plus mal choisie, M. le Président? Exactement sept jours avant Noël. Sept jours, jour pour jour, avant Noël, une semaine, on est après dire aux plus démunis de la société... Pas ceux qui ne veulent pas faire des efforts. Ici, ceux qu'on coupe, c'est ceux qui sont après essayer de faire des efforts dans le système, de se replacer, de trouver un emploi. On est après les démotiver et on fait ça quelques jours avant Noël. On essaie de faire ça en pleine nuit, comme on a fait cette nuit. On ne peut pas être d'accord avec ça, du côté de l'opposition. Et merci de m'avoir écouté avec tant d'intérêt, M. le Président. Merci.

(14 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Il était question, durant la période des questions aujourd'hui, du nombre de faillites au Québec. Je pense que ce qu'on a devant nous, c'est une autre faillite, c'est la faillite de la notion de l'autre façon de gouverner. On peut ajouter ça à la longue liste des faillites au Québec. Parce que, effectivement, ce qu'on a ici, c'est le bâillon sur un projet de loi très important qui touche les personnes les plus démunies dans notre société, sans consultation, sans débat. On n'a même pas eu l'occasion d'aller en commission parlementaire pour regarder les implications de ce projet de loi. On a déjà vu, du Protecteur du citoyen, un avis sur le projet de loi n° 84, qui nous met en garde qu'il y a beaucoup de problèmes que ça comporte, tout ça. On a vu, dans un avis publié la semaine passée par le Conseil de la famille, des problèmes importants quant au respect du choix des parents, un élément qui n'est pas respecté dans l'article 1 de ce projet de loi.

Alors, il y a beaucoup de problèmes, mais le gouvernement va procéder à toute vitesse pour chercher de l'argent. Ils sont toujours rapides pour faire ça. Quand c'est le reste de la réforme, les bons éléments, les programmes pour aider les plus démunis, ça, c'est toujours pour plus tard. Ça, c'est quelque chose qu'on ne peut pas mettre en place aujourd'hui, mais on va chercher l'argent tout de suite. Mais, dans un an, dans deux ans, après avoir lu le livre blanc, le livre vert, le livre jaune, le livre bleu, je ne sais pas trop quoi, un jour on va arriver avec des réformes qui vont aider ces personnes. Je pense que ça va être au moment où on va réélire un gouvernement libéral. Mais, en attendant, on va vous faire payer la note tout de suite!

C'est comme la grande politique familiale annoncée en grande pompe au sommet économique. Mais on voit aujourd'hui, dans les choses concrètes qui découlent de ça, que le gouvernement n'a même pas commencé à faire des contacts avec le gouvernement fédéral, par exemple, au niveau du congé de maternité prolongé. Alors, c'est une grande annonce, et tout ça, mais, deux mois après, M. le Président, le gouvernement n'a même pas encore pris la peine d'aviser son partenaire fédéral – parce que ça prend une entente sur l'argent qui est dans l'assurance-chômage – de ses intentions. Alors, quelle coquille vide, cette belle annonce qui a été faite au Sommet pour satisfaire tout le monde! Mais, quand on cherche dedans les vrais problèmes, les vraies choses pour aider les familles québécoises, il n'y a rien là-dedans.

Encore une fois, qu'est-ce qu'on va faire dans l'article 1? Peu importent les circonstances, une femme monoparentale surtout, on va l'obliger à aller travailler ou à retourner aux études, même si elle vit un divorce, même s'il y a des raisons très pertinentes, très importantes pour garder la femme à la maison avec son enfant, s'il y a une rupture de la famille. Il y a un jeune de 4 ans, la femme est tombée dans la pauvreté parce que le mari ne respecte pas ses obligations dans les pensions alimentaires, on va obliger cette femme, au lieu de rester avec son enfant, dans une période d'insécurité, une période de catastrophe, d'éclatement d'une famille, on va dire: Non, non, non, il faut aller au travail, ou on va couper dans votre subvention.

Alors, c'est ça qu'on est en train de faire ici, dans l'article 1, sans débat, sans débat. On n'a pas eu l'occasion de consulter les experts, le Conseil de la famille, entre autres, qui a publié un avis la semaine passée, qui a dit: Toutes les démarches, toutes les réformes dans la politique familiale doivent être axées sur le respect des choix des parents. Mais, maintenant, ça va être le choix de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité. C'est elle qui va décider, c'est la ministre de l'Éducation qui va décider parce qu'elles savent tout. Et les choix des parents, des parents qui doivent vivre dans la situation, qui sont dans le ménage, oublie ça. L'article 1, ça va donner le pouvoir réglementaire à la ministre de couper ces personnes qui veulent, des fois, pour des situations qu'on ne peut pas prévoir, rester avec leurs enfants.

Alors, ça, c'est quelque chose où on n'a même pas eu l'occasion de consulter le Conseil de la famille, consulter le Protecteur du citoyen. Comme je l'ai dit, le seul intérêt de ce gouvernement, c'est dans les poches des plus démunis. Je sais que je ne peux pas dire «piquer», je ne peux pas dire «voler», alors peut-être que je vais dire «enlever» l'argent pour...

Le Vice-Président (M. Pinard): Comme vous n'avez pas le droit de le dire, ne le dites point, mon cher. Une minute.

M. Kelley: Non, mais c'est juste pour alimenter mon vocabulaire français, M. le Président.

On va aller chercher l'argent tout de suite. Ça, le gouvernement est toujours rapide pour aller chercher un autre 50 $ par mois dans les poches des familles les plus pauvres au Québec. On est toujours vite. On a fait ça dans les garderies, on a fait ça l'année passée avec la loi n° 113, on a fait ça de nouveau. Quel beau cadeau de Noël!

Mais quand c'est une question de vraie réforme de la politique familiale, de mettre les mesures en place, d'avoir l'occasion d'avoir la maternelle cinq ans en place pour septembre, il y a beaucoup de problèmes. Le gouvernement les cache, il ne veut pas discuter des problèmes, avec toutes les mesures qu'il veut mettre en place. Alors, c'est pourquoi il faut couper le débat, il faut bâillonner l'opposition, parce qu'ils savent, dans les mesures concrètes pour aider les familles démunies, qu'ils n'ont aucune idée comment ils vont le faire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Nous cédons maintenant la parole au whip en chef de l'opposition et député des Îles-de-la-Madeleine. Alors, M. le député.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui, merci. Nous sommes nombreux. Alors, merci, M. le Président. Cinq minutes seulement pour parler sur un projet de loi qui a des conséquences atroces au niveau des clientèles qui sont les plus démunies au Québec.

M. le Président, un bâillon nous est imposé, nous est enfoncé dans la gorge, pour faire en sorte que ce gouvernement qui ne décide rien ou qui a de la misère à décider... Moi, depuis que je suis député de l'Assemblée nationale, depuis déjà 11 ans, c'est la première fois que je vois une session parlementaire où le leader du gouvernement improvise autant au niveau du déroulement des travaux. Et on nous arrive, en fin de session, alors qu'on n'a pas eu le temps de discuter des projets de loi aussi importants pour la société, alors qu'on a mal planifié ses travaux, on fait en sorte, maintenant, de dire: Ces projets de loi là, compte tenu qu'il y a des incidences financières, bien, on doit les passer à toute vapeur. Et ça, pour notre démocratie, c'est dangereux, de nous imposer des projets de loi d'une telle importance et qui font en sorte que les clientèles les plus démunies, notamment les assistés sociaux, sont victimes, à l'intérieur de ces projets de loi là.

À mon bureau de comté, j'en rencontre, comme tout le monde, comme tous les députés ici, en cette Chambre, des citoyens et des citoyennes, Québécois et Québécoises qui malheureusement n'ont pas la chance que peut-être d'autres ont eue, ou les circonstances font en sorte que ces gens-là sont en difficulté, des gens qui ont peut-être un chèque de 500 $, 600 $ par mois et qui veulent se prendre en main. Ils veulent aussi faire en sorte de s'intégrer le mieux ou le plus vite possible au niveau du marché du travail. Et là, j'ai rencontré des gens à mon bureau de comté, quand ils se sont fait couper le barème de disponibilité, c'était absolument catastrophique. Imaginez-vous, quand vous avez un chèque de 500 $ par mois, ou de 600 $ par mois et qu'on vous ampute un tel montant, et vous devez payer le loyer, vous devez payer la nourriture et les imprévus de la vie, malheureusement! Alors ces gens-là sont vraiment à l'abandon.

Et comment ce gouvernement peut-il justifier de s'attaquer aux clientèles les plus démunies de notre société, alors que le rôle primordial d'un gouvernement, dans la société, c'est de préserver le minimum vital au niveau de ces clientèles-là? Mais on s'en prend à ses gens qui sont vulnérables, par l'abolition de ce barème de disponibilité, et ce, avant Noël.

J'aimerais entendre les députés du côté ministériel, j'aimerais les entendre, M. le Président, ce qu'ils en pensent. Ils ont le droit, ces députés, de prendre leurs cinq minutes, un petit cinq minutes pour nous expliquer qu'ils sont d'accord pour couper ces gens-là. Pas un! Je n'en ai pas encore entendu un se lever puis dire qu'il est d'accord pour couper ces clientèles qui ont le strict minimum, à ce stade-ci, et qu'on ne peut pas amputer des sommes additionnelles à leurs prestations. Pas un ne s'est levé! Pas un ne s'est levé, M. le Président, pour défendre un projet de loi qui affecte les plus démunis de notre société.

(14 h 10)

M. le Président, c'est inacceptable, un tel projet de loi dans une société dite civilisée. Par contre, quand c'est toute la question de l'option, là, de l'argent, il y en a en masse, par exemple. Quand c'est pour des référendums, pour des commissions nationales, des commissions régionales, il y en a de l'argent pour l'option. Et là on se retrouve aujourd'hui avec une situation financière difficile. Pourquoi également, M. le Président? Parce qu'on a devant nous un gouvernement qui n'a aucune vision économique. On a un gouvernement qui n'est pas capable de prendre des décisions pour faire en sorte que les investissements viennent au Québec, qu'on crée de la richesse, qu'on amène des revenus pour faire en sorte, justement, que, si on a des revenus supplémentaires, bien, on ne soit pas obligé de couper ces gens qui sont les plus démunis. Comment expliquer à ces gens que le référendum, toutes les commissions et tout le processus peuvent avoir coûté pas loin de 100 000 000 $? 100 000 000 $, M. le Président, mais on leur coupe un petit 50 $ par mois, alors que ces gens-là ont de la misère à arriver. Allez expliquer à ces gens-là la logique et la priorité de ce gouvernement. On va investir 4 000 000 $ dans une police de la langue à Montréal pour vérifier les enseignes, alors qu'on coupe les plus démunis de notre société. Comment voulez-vous que les gens du Québec puissent avoir du respect et de la confiance en un gouvernement qui ne respecte pas les plus démunis de notre société? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le whip en chef de l'opposition. Nous cédons maintenant la parole au député de Hull. M. le député.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Mes collègues qui ont pris la parole avant moi ont clairement établi que le projet de loi n° 84 aurait des conséquences néfastes pour les plus démunis de notre société. Moi, ce dont j'aimerais vous entretenir dans le peu de temps qui m'est alloué, c'est l'entrave qu'on est en train de se faire nous-mêmes comme membres d'une démocratie. Il y a quelques années, cette Assemblée était l'hôte d'un colloque international sur la démocratie, et j'ai eu l'occasion à ce moment-là d'adresser la parole à des parlementaires qui venaient de partout dans le monde, et je leur disais à ce moment-là: Ce qui nous guette et ce qui est le plus dangereux pour notre avenir, c'est de prendre pour acquis notre démocratie. Il y en a eu, des démocraties ailleurs qui sont tournées en dictatures, et c'est ce que nous avons devant nous, M. le Président, un gouvernement de dictature. À preuve...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je pense qu'on connaît vraiment, dans l'histoire, les dictatures, et ça ne ressemble absolument pas à ce qu'on fait au Québec. D'ailleurs, dans un système de dictature, vous savez très bien que le député de Hull ne pourrait même pas s'exprimer ici, en cette Chambre. Alors, M. le Président, s'il vous plaît.

M. LeSage: Justement, M. le Président, j'aimerais m'exprimer en cette Chambre sur le projet de loi n° 84, mais ce qu'on me demande de faire, on me dit: Robert, veux-tu voter oui à ceci? Il n'y a rien d'écrit là-dessus. Non, non, vote oui pareil, Robert. C'est de même que ça fonctionne maintenant. L'autre façon de gouverner, c'est ça: tu votes oui. Il n'y a rien, M. le Président, là-dessus. Oui, mais vote oui pareil, Robert. C'est ça qu'on me dit de faire.

M. le Président, si, dans les municipalités, on fonctionnait de la façon dont ce gouvernement-là nous demande de fonctionner, ça ferait longtemps que toutes les municipalités au Québec seraient en faillite. Quand une municipalité veut passer un règlement, bien, elle met dans son règlement ce qu'elle veut avoir puis elle le soumet à son conseil municipal, puis il vote dessus, sur quelque chose qu'il voit. On ne dit pas aux conseillers municipaux – et je vois des gens dans la salle qui ont de l'expérience municipale, puis ils ne pourront pas me contredire – Votez pour ceci, là, puis sur telle rue on va mettre ça à sens unique. On ne sait pas tout à fait de quel coin à quel coin, mais donnez-nous la permission de faire un «one-way» quelque part! Ce n'est pas de même que ça marche, mais, ici, c'est ce qu'on nous demande de faire. On nous dépose un projet de loi, dans lequel projet de loi la ministre nous dit: Votez le projet de loi me permettant d'adopter des règlements pour faire en sorte que je prive les plus démunis d'argent qu'ils ont présentement. Mais comment voulez-vous qu'on vote sur quelque chose qu'on ne voit pas? On ne les a pas, les règlements. Elle ne les dépose pas, ses règlements. Tout ce qu'elle nous demande, c'est l'autorisation de faire des règlements.

M. le Président, vous avez bien trop de députés dans cette Chambre. Coupez ça de plus des trois quarts. Un Conseil des ministres, c'est suffisant. Chaque ministre va venir devant vous et va dire: M. le Président, donnez-moi l'autorisation de faire des règlements. Il n'a pas besoin de notre approbation. Comment est-ce que les députés péquistes peuvent voter et appuyer une ministre qui leur demande de voter sur ceci? Il n'y a rien, M. le Président, d'écrit là-dessus, et c'est ça qu'elle leur demande. Et je suis convaincu qu'il y en a, des péquistes qui vont voter avec la ministre. «C'est-u» assez fort? On leur demande de voter sur rien et ils vont voter oui. Nous, ce qu'on demande à la ministre: Écrivez ce que vous voulez et on va voter oui ou on va voter contre, mais écrivez-nous quelque chose! On ne nous dit rien.

M. le Président, le Protecteur du citoyen dit que ça n'a pas de bon sens. Si on n'est pas pour l'écouter ici, le Protecteur du citoyen, quand on a des projets de loi, qu'on abolisse la fonction, on va sauver au moins cet argent-là. Ça a été la même chose dans des projets de loi, le Barreau nous disait: Ils ne sont pas bons, vos projets de loi, qu'on abolisse la fonction, M. le Président, si ce n'est pas bon.

M. le Président, il faut arrêter de rire des députés. Il y a assez que la population pense qu'on ne fait rien ici, qu'on ne leur prouve pas qu'on ne fait rien, qu'on ne leur prouve pas qu'on vote sur des projets de loi sur lesquels on ne retrouve rien d'écrit. M. le Président, la ministre, elle ne veut pas aller en commission parlementaire pour étudier son projet de loi. Je la comprends, il n'y a rien d'écrit dans son projet de loi. On nous demande d'étudier quelque chose et il n'y a rien.

Moi, je regrette, je ne peux pas voter sur rien. Si elle veut nous soumettre les règlements qui accompagnent son projet de loi, ça va me faire plaisir de les étudier en commission parlementaire et ça me fera plaisir de me prononcer dessus. S'ils sont bons, je voterai pour. Mais qu'on ne me demande pas de voter sur une feuille en blanc, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Hull. Nous céderons maintenant la parole au député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, le député de Hull a très bien résumé la situation. Pratiquement, le projet de loi va retirer au Parlement des pouvoirs que le Parlement a pour les transférer à ce qu'on appelle dans notre jargon les pouvoirs réglementaires ou les pouvoirs de décret, ce qui est le pouvoir qu'un ministre a de décider de certaines applications d'une loi sans en référer au Parlement. Alors, M. le Président, vous comprendrez à quel point l'opposition peut être aujourd'hui inquiète, extrêmement inquiète. Et je vous explique pourquoi.

Un livre vert avait été déposé par la ministre qui voulait envisager une réforme globale de tout ce qu'on appelait l'aide aux prestataires du soutien de dernier recours, une réforme globale. Et là, en catimini, rapidement, on s'en va sélectionner des éléments de la réforme globale et on dit: Ces éléments-là, non seulement il faudrait les appliquer, tout de suite ou pas, mais donnez-moi un pouvoir réglementaire pour pouvoir, sans venir vous revoir ici, à la Chambre, décider.

Ce pouvoir réglementaire, il va s'appliquer sur quoi? Alors, je m'excuse d'être un peu technique pour ceux qui nous écoutent, M. le Président, mais il va s'appliquer sur les personnes qui vont être admissibles au barème de non-disponibilité. Ça veut dire quoi, le barème de non-disponibilité? Vous savez que, pour les personnes qui sont prestataires de la sécurité du revenu, si vous ne pouvez pas être disponible, vous avez des prestations qui sont supérieures à celles qui sont disponibles et qui ne sont pas impliquées dans un programme de formation.

À l'heure actuelle, dans le projet de loi tel qu'il est, on est en train de donner non pas au législateur la possibilité de déterminer qu'est-ce qu'une personne qui sera non disponible qui sera admissible au barème de non-disponibilité, mais nous abandonnons complètement les droits que nous avons comme législateurs pour les confier à la ministre, à son pouvoir réglementaire. C'est-à-dire que, si nous passons le projet de loi aujourd'hui, la ministre, par règlement, c'est-à-dire par une décision passée par le gouvernement et publiée après dans la Gazette officielle , sans qu'il y ait réellement de débat parmi les parlementaires, sans que l'opposition puisse exprimer son point de vue, sera en mesure de changer les personnes qui seront admissibles au barème de non-disponibilité, et ça touche tout à fait particulièrement une catégorie de personnes, M. le Président.

(14 h 20)

Vous n'êtes pas sans savoir qu'actuellement les mères qui sont mères de famille, qui sont sur la sécurité du revenu et qui ont un enfant qui a moins de six ans, et jusqu'au 30 septembre qui suit cet âge de six ans, c'est-à-dire jusqu'à la période où l'enfant est admissible pour entrer à l'école, ces personnes, ces mères de famille sont admissibles au barème de non-disponibilité. Si on confie à l'heure actuelle le pouvoir réglementaire à la ministre, tel qu'elle le demande dans le projet de loi, on a des craintes. Mais elle n'y va pas franchement, elle ne nous dit pas ce qu'elle va faire avec son règlement. Mais on a des craintes que le pouvoir réglementaire, à ce moment-là, soit restreint et que ne soient admises au barème de non-disponibilité que seules les mères avec des enfants de deux ans. Une énorme inquiétude, M. le Président, du côté de l'opposition. Nous ne pouvons pas accepter que du pouvoir législatif soit transmis globalement en un pouvoir réglementaire et, dans ce cadre-là, nous devons voter contre le projet de loi n° 84, qui est un abandon complètement des responsabilités du Parlement. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous céderons maintenant la parole au député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. J'ai écouté attentivement l'énoncé et l'élocution de mon collègue le député de Verdun, qui vise très juste. On parle, dans ce projet de loi là, de soustraire, en fin de compte, la connaissance d'une loi à l'Assemblée nationale pour la donner au Conseil des ministres ou aux ministres. Donc, comme on l'a fait à plusieurs reprises depuis le début de cette Législature-là, on passe une loi, en fin de compte, qui permet à quelqu'un d'autre de décider. Cette personne-là, c'est un ministre, mais, quand même, là, ça peut se faire en catimini et à l'insu de beaucoup de gens.

Dans le cas qui nous occupe, c'est d'autant plus important parce que c'est un projet de loi qui s'occupe, qui s'attaque ou qui est pour le filet social de nos concitoyens les plus faibles. Et, tout comme moi, M. le Président, vous faites du bureau de comté, vous êtes du comté de Saint-Maurice, un comté sûrement où vous avez affaire à rencontrer un tas de gens. Moi, dans mon comté, j'ai 7 500 personnes qui dépendent de l'aide sociale, des gens qui, depuis particulièrement deux ans, sont inquiets, et je peux vous certifier que, moi, depuis un an, dans mon bureau, j'ai eu au moins trois personnes qui ont menacé de se suicider. Donc, lorsqu'on parle d'aide sociale ou quand on parle de couper ces gens-là ou de toucher le filet social des personnes les plus démunies de notre société, je pense que c'est notre devoir de s'élever contre ces choses-là.

M. le Président, je ne suis pas le seul à m'inquiéter. Naturellement, mes citoyens s'inquiètent énormément, et le Protecteur du citoyen aussi s'inquiète de la façon de faire de ce gouvernement-là. J'ai occupé quelques postes comme critique, et, à chaque fois et à chaque poste que j'ai occupé comme critique, on est arrivé face à des projets de loi et à des lois, éventuellement, qui permettent un pouvoir réglementaire de plus en plus grand à un ministre ou au Conseil des ministres, ce qui fait en sorte que ça échappe à l'attention des élus du peuple, ces gens-là qui doivent rendre compte à ces mêmes personnes là qui sont bénéficiaires de l'aide sociale.

M. le Président, le Protecteur du citoyen disait, et c'est très important – le Protecteur du citoyen, cette personne qui est dotée des pouvoirs pour protéger justement les citoyens et particulièrement les plus démunis de notre société – dans une lettre du 17 décembre – ça ne date pas de tellement longtemps – et je cite, parce que c'est très important: «Comme ce projet vise avant tout à accorder au gouvernement de nouveaux pouvoirs réglementaires, il va de soi qu'il nous a été très difficile d'en évaluer la portée sans avoir à notre disposition les normes réglementaires pertinentes qui viendront compléter la loi.» Donc, on ne les connaît pas, ces règlements-là, d'avance. Moi, je suis certain qu'on ne les connaîtra pas, parce que, en fin de compte, il y a le bâillon qui nous arrive. On n'a pas la chance de pouvoir expliquer à nos concitoyens quelles seront les mesures qui seront déposées dans les prochaines semaines ou les prochains mois et qui pourront, de toute évidence, donner un fardeau supplémentaire à ces citoyens-là qui sont les plus démunis de notre société.

Il continue. Le Protecteur du citoyen nous dit: «Je dois le déplorer vivement, puisque, comme j'ai eu, hélas, trop souvent l'occasion de le souligner, l'absence des normes réglementaires portant la substance réelle de mesures nouvelles proposées ne permet à personne, et au premier rang aux parlementaires, de pouvoir évaluer adéquatement le bien-fondé de ces dernières.» Donc, M. le Président, c'est un projet de loi qui nous permet, à nous tous, en fin de compte, entre guillemets, de ne rien savoir, d'être toujours devant des faits accomplis.

Le premier mandat que nos concitoyens nous donnent comme élus, c'est de voir à la gérance des choses publiques et aussi de voir à ce que tous les citoyens et citoyennes du Québec aient un filet social et vivent dans un niveau décent et non dans un niveau de pauvreté élevé. Présentement, ce qu'on fait, on partage la pauvreté plutôt que d'essayer de créer de la richesse. Et c'est un projet de loi qui, en fin de compte, va nous permettre encore de partager de la pauvreté plutôt que de créer autre chose au Québec.

M. le Président, un peu plus loin, et c'est très important pour imager les propos de l'opposition, le Protecteur du citoyen ajoute: «Si elle devait être adoptée, la modification législative proposée à l'article 1 du projet devrait donc n'être mise en vigueur que conditionnellement à l'implantation des autres mesures envisagées, sinon le pouvoir accordé au gouvernement pourrait équivaloir à une pure autorisation de décréter la réduction des prestations.»

M. le Président, vous me dites que mon temps est terminé. Mais c'est justement là-dessus qu'on a peur. Ça va faire en sorte que le ministre qui est chargé de l'application de cette loi-là pourra unilatéralement couper dans la substance essentielle de tous nos citoyens. Je vous remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Shefford. Nous cédons maintenant la parole au député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Vous admettrez que – et je vais enchaîner sur les propos de mon collègue de Shefford – quand on reçoit un avis comme celui du Protecteur du citoyen sur un projet de loi comme celui-là, il me semble que la réaction du législateur, ça se doit de porter une attention tout à fait spéciale aux indications, aux signaux que nous donne le Protecteur du citoyen. Et je crois qu'il est normal, vous me permettrez de le dire, qu'on se serait attendu à ce qu'une personne comme la ministre qui a déposé le projet de loi exerce cette forme de sensibilité que bien des gens lui prêtent. Alors, on se dit: Mais pourquoi, un 10 décembre, la ministre a déposé le projet de loi n° 84? Pourquoi ne pas d'abord faire les consultations puis ensuite agir? Pourquoi le bâillon immédiatement.

Et il est bien évident que le seul impératif qu'il y a dans ce projet de loi, c'est les visées du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor. C'est les seules explications qui font que le gouvernement a décidé hier soir d'imposer le bâillon sur ce projet de loi là.

(14 h 30)

L'an dernier, à la même date, c'était le projet de loi n° 115. Je ne sais pas si c'est là le sens du slogan «L'autre façon de gouverner», il semble qu'annuellement maintenant le gouvernement arrive avec des projets de loi qui ont pour objet de frapper une clientèle aussi vulnérable que celle-là. Bien sûr, vous le comprendrez, dans le cinq minutes qui m'est alloué – puis déjà quelques unes ont été utilisées – en plus de citer l'alarme que sonne le Protecteur du citoyen, vous me permettrez également de rappeler les propos qu'a tenus hier Mgr Couture. C'est pour viser ces gens-là, c'est pour dire aux législateurs que nous sommes: Attention, vous frappez là, vous êtes en train de diviser notre société davantage. Attention! Au nom d'un objectif qui peut sembler fort louable, il faut faire attention, il y a un minimum de protection dans notre société qu'on doit préserver. C'est pour ça que les citoyens acceptent de payer des impôts, M. le Président. Bien sûr, on veut que ce soit bien utilisé, le mieux utilisé possible.

Vous m'indiquez qu'il me reste deux minutes, M. le Président. Je suis obligé de vous indiquer que, récemment, il y a un article dans le journal sur le sens du timing de cette nouvelle-là, de dire que les gens qui font de fausses déclarations à l'aide sociale, c'est augmenté. Donc, le signal, c'est qu'il faut resserrer. Mais, M. le Président, nous en avions installé une forme de contrôle que l'arrivée au pouvoir du Parti québécois... Avant le référendum, le Parti québécois a décidé qu'il fallait faire confiance, qu'il fallait cesser cette mesure de contrôle là, qu'il fallait empêcher la remise de chèques. Bien oui, mais c'est ça, M. le Président.

Mais les conséquences de ça font que, après le référendum, le gouvernement constate qu'au lieu de maintenir la mesure de contrôle, au lieu de permettre une meilleure utilisation des fonds publics, on arrive avec des résultats qui obligent un gouvernement, encore pour une deuxième année consécutive, à la veille de la période des fêtes, à donner le signal à ces gens-là que les obligations d'équilibre budgétaire, comme le veut le gouvernement... Et le premier ministre dit à tout le monde qu'il faut que tout le monde fasse sa part. Mais, dans ce cas-ci, M. le Président, c'est des gens à qui on va tirer ce qui est un minimum vital. Et c'est à ces gens-là que ça fait mal. Vous comme moi savons les conséquences sociales que ça peut avoir sur ces gens-là. Il me semble que ce n'est pas pour ça qu'on est venus en politique, pour frapper cette clientèle-là. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Nous céderons maintenant la parole au député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. Je tenais à m'inscrire sur ce projet de loi, le projet de loi n° 84 concernant des modifications sur la Loi sur la sécurité du revenu.

M. le Président, on a souvent tendance à penser que le comté de Westmount–Saint-Louis, c'est un comté où il y a uniquement des gens qui sont riches. C'est vrai qu'il y a des gens qui sont riches dans le comté de Westmount–Saint-Louis, mais ils sont évidemment minoritaires. Il y a aussi des gens qui sont pauvres dans le comté de Westmount–Saint-Louis, et qui sont très pauvres. C'est un comté relativement spectaculaire sur le plan de son organisation sociale. On retrouve les gens les plus riches au Canada et les plus pauvres aussi, en même temps, au Canada: non seulement les itinérants, mais pensez seulement aux 3 000 familles qui sont sur l'aide sociale, par exemple dans le secteur de la Petite Bourgogne, qui est un secteur important de mon comté, M. le Président. Alors, je ne peux pas faire autrement que de m'inscrire comme orateur sur les modifications concernant la Loi sur la sécurité du revenu.

M. le Président, je suis un peu sidéré de constater que la personne, la députée qui, dans cette Chambre, pendant les 11 ans que je siège ici, nous a fait le plus de discours moralisateurs à l'égard de toute cette qualité de relations qu'on devait avoir avec les gens les plus démunis de notre société, soit la députée de Hochelaga-Maisonneuve, se soit transformée, transfigurée tout d'un coup en espèce de fée des étoiles tout à fait particulière pour le temps des fêtes, M. le Président.

L'an dernier, notre bonne fée des étoiles, la députée de Hochelaga-Maisonneuve, a, par le biais du projet de loi n° 115, fait en sorte de compresser de 145 000 000 $ les sommes qui allaient généralement aux personnes sur l'aide sociale, en les pénalisant de façon à abolir leur barème de disponibilité, en coupant de 50 $ le chèque des personnes qui désiraient participer. 50 $ par mois, M. le Président, c'est énorme pour des gens qui n'ont presque pas d'argent pour vivre. Le règlement coupait le barème de participation de 30 $ démontrant ainsi le manque de considération, je dirais, M. le Président, envers ceux et celles qui cherchent à se sortir du bourbier de l'aide sociale. D'autant plus que les gens n'ont pas choisi d'être sur l'aide sociale. C'est une mesure palliative sur laquelle, lorsqu'ils cherchaient à s'en sortir, l'an dernier, ils étaient taxés, ils étaient pénalisés.

M. le Président, l'abolition des avoirs liquides pour le mois de la demande d'aide sociale a été aussi une autre mesure pénalisante l'an dernier, par le biais de la loi n° 115. Il y a des coupures dans l'allocation de logement, il y a des coupures dans les prestations à l'égard des franchises au niveau des médicaments, à l'égard des soins dentaires et optométriques. Bref, M. le Président, c'est 145 000 000 $ l'an dernier, et la fée des étoiles, députée de Hochelaga-Maisonneuve, a tout simplement récidivé cette année. La fée des étoiles, cette année, pour les gens les plus démunis, leur apporte le projet de loi n° 84, projet de loi n° 84 qui va faire en sorte, encore une fois, de taper, d'aller compresser davantage sur les gens les plus démunis de notre société, qui va faire en sorte que sa réforme, sa soi-disant réforme qui sera étudiée ce printemps, que cette réforme, même avant la réforme, qu'on puisse récupérer le plus d'argent possible chez les gens les plus démunis.

Mais, dans la loi actuelle, l'article 1 de la loi qui nous est présentée et sur laquelle nous parlons dit que le barème de non-disponibilité au travail est accordé à un adulte ayant un enfant à sa charge qui ne fréquente pas l'école parce qu'il n'a pas atteint l'âge requis – six ans au 30 septembre d'une année – ou en raison d'un handicap physique ou mental, peu importe son âge. Mais notre bonne fée des étoiles va faire en sorte que, lorsque votre enfant aura deux ans – puis vous êtes une mère seule, célibataire – vous aurez l'obligation de retourner sur le marché du travail, sinon vous verrez vos compensations diminuer d'autant.

M. le Président, je pense que le gouvernement du Parti québécois aurait été mieux avisé de faire en sorte de conserver les moyens de recouvrement et les moyens qui avaient été pris auparavant pour faire en sorte de s'assurer que les gens qui ont droit à l'aide sociale puissent la recevoir. Malheureusement, le gouvernement actuel a vu les montants versés en trop à la sécurité du revenu passer de 280 000 000 $ à 425 000 000 $ parce que, justement, par laxisme, on avait tout simplement abandonné les mesures de contrôle. On aurait été mieux de garder les mesures de contrôle puis d'éviter à la fée des étoiles de Hochelaga-Maisonneuve de faire des compressions, par la loi n° 115, de 145 000 000 $ l'an dernier et, par la loi n° 84, d'au-delà d'une centaine de millions encore cette année. Comme cela, les gens les plus pauvres de notre société auraient été singulièrement moins pénalisés. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Nous céderons maintenant la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme la députée.

Mme Frulla: Merci.

Une voix: ...de Montréal, elle?

Mme Frulla: Pardon? J'entends des voix.

M. Chagnon: Ce n'est pas Jeanne d'Arc? Jeanne d'Arc?


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: M. le Président, moi aussi, je veux m'inscrire pour commenter un peu le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Je dois vous dire une chose: compte tenu de ce qui est arrivé hier soir, c'est-à-dire le bâillon permettant au gouvernement d'aller chercher plus de 400 000 000 $ dans les poches des contribuables pour évidemment renflouer les goussets de l'État, et la façon dont ça a été fait, c'est-à-dire à 22 heures, presque, après ça, en pleine nuit, où, là, on dit: Taisez-vous, tout le monde, nous, on décide de piger et on se le met dans nos poches – ou enfin dans les poches du gouvernement – on a besoin de cet argent-là, puis que, parallèlement à ça, on voyait aussi une nouvelle hier, vers 18 h 30, où le gouvernement avait conclu une entente, ou enfin avec une des centrales syndicales, pour 300 000 000 $...

Alors, quand on regarde tout l'ensemble, on trouve ça un petit peu désolant, justement à la veille de Noël, de voir que l'argent qu'on prend dans les poches d'un contribuable, on ne va pas le chercher dans les poches des contribuables les plus riches... Parce que, encore là, ça peut passer. On dit: Bon, quand même, les plus nantis, les plus chanceux paient pour les autres. Le problème, c'est qu'on va chercher de l'argent dans les poches vides de certains contribuables qui n'ont rien.

Et j'écoutais le premier ministre ce matin parler d'une grande corvée de solidarité, puis il fallait que tout le monde partage et que tout le monde finalement se donne l'objectif qu'il faut pour se sortir du trou. Moi, j'entends les gens qui vont être concernés et frappés, je dirais, par le projet de loi n° 84 nous dire: On veut bien, nous autres, être solidaires, puis on veut bien participer puis on veut bien contribuer, mais c'est parce qu'on n'a rien. Alors, c'est difficile de contribuer rien. On n'a rien à donner, on n'a plus rien à donner.

(14 h 40)

Quand on parle de gens qui sont sur l'aide sociale, puis je ne parle pas... On parle d'aide sociale. Souvent, il y a des personnes qui pensent à ceux qui abusent. Ce n'est pas ceux qui abusent. Ceux qui abusent du système, il faut aller les attraper, il faut les punir. Ce n'est pas ça, là. On parle de gens qui sont dans un système qui s'appelle «l'aide sociale», qui ne veulent pas y être aussi. Il y a beaucoup de gens dans mon comté qui ne demanderaient que ça, de sortir de l'aide sociale et d'aller travailler, pour qui ce serait un beau cadeau de Noël d'avoir un job pour l'année qui vient, mais qui n'en trouvent pas. Et ils sont là à vivre dans un système, bien souvent ils sont malheureux et humiliés dans ce système-là, mais ils n'ont pas le choix. Et on leur dit, juste avant les Fêtes: Bien, vous allez passer à la caisse, vous aussi, comme l'année passée. L'année passée, on vous a passés à la caisse avec la loi n° 115 et on a été chercher 145 000 000 $. Même chose pour le temps des fêtes: un beau cadeau de Noël pour vous et vos enfants. On a aboli le barème de disponibilité et on a coupé de 50 $ le chèque des personnes qui désiraient participer. Bon. Parallèlement aussi au projet de loi n° 115, on modifie le règlement et on coupe le barème de participation de 30 $. On abolit les avoirs liquides pour le mois de la demande d'aide sociale. Donc, les personnes qui se présentent à l'aide sociale sans un sous en poche afin d'être admissibles à l'aide de dernier recours, ils n'ont rien. Ça, c'était l'année passée: on coupe dans l'allocation-logement, on se désengage au niveau des soins dentaires, on coupe au niveau de l'assurance-médicaments. Ils n'ont rien.

Cette année, on revient puis on leur dit: Bon. Belle nouvelle, vous ne serez plus humiliés. Après deux ans, vous, les femmes monoparentales – là, je parle de l'article 1 – on va vous sortir de là et on va vous inciter à vous trouver un emploi. Maintenant, quels sont les règlements? Quels sont les barèmes? On ne les connaît pas. L'année prochaine, on aura une grande consultation sur le livre vert. Donc, vous le saurez l'année prochaine, mais cette année vous ne le savez pas. La seule chose que je vous dis, c'est: Une fois que votre enfant a deux ans, trouvez-en ou trouvez-en pas un emploi, vous ne faites plus partie de la mesure de non-disponibilité.

Moi, j'entends beaucoup de femmes qui nous disent: Moi, j'aimerais bien, là... Garantissez-moi que je vais pouvoir me trouver un emploi qui va faire en sorte que je vais pouvoir m'occuper de mes enfants, bien, je vais me trouver un emploi. Ça va me faire plaisir d'y aller. Le seul problème, c'est qu'il n'y en a aucune garantie, parce que, au moment où on se parle, il n'y en a pas d'emplois. Et, dans la région de Montréal particulièrement, avec un taux de chômage record de presque 13 %, demandez-leur, à ces gens-là, où ils vont aller pour se trouver un emploi.

Alors, c'est un peu ça, M. le Président, qui fait en sorte que c'est dommage que l'on dépose ce projet de loi sans préalablement – comme le disait le Protecteur du citoyen – avoir l'implantation des autres mesures envisagées, sans avoir aussi les règlements qui font en sorte que ces gens peuvent voir clair dans la mesure qui est ainsi proposée par l'article. Alors, beau cadeau de Noël, M. le Président, de la ministre!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, nous allons maintenant céder la parole à la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Je ne pensais pas être obligée de parler seulement cinq minutes sur ce projet de loi là, c'est-à-dire le projet de loi n° 24, Loi qui modifie la Loi sur la Sécurité du revenu, un projet de loi qui, aux yeux de la ministre... Pardon, n° 84. Excusez-moi. Qu'est-ce que j'ai dit, n° 24? Bien, c'est une déformation de mes projets de loi à caractère municipal. Je m'en excuse.

Alors, je reviens donc au projet de loi n° 84, qui modifie de façon importante toute la problématique, la réalité de la Sécurité du revenu. On se rappellera que la députée de Hochelaga-Maisonneuve, ministre de la Sécurité du revenu, l'an dernier, avait fait aussi un cadeau de Noël aux personnes démunies de notre société et déposé un projet de loi, celui-là qui était le projet de loi n° 115 et qui visait des compressions budgétaires de l'ordre de 145 000 000 $. C'était en fait, dans notre jargon, une gifle à la motivation, puisqu'il pénalisait, ce projet de loi là, particulièrement ceux qui faisaient l'effort de se sortir de l'aide sociale. On avait aboli le barème de disponibilité. La ministre avait coupé, à l'époque, de 50 $ le chèque des personnes qui désiraient participer, mais le ministère n'avait aucune mesure d'intégration en emploi ou de formation à leur offrir. Parallèlement au projet de loi n° 115, la ministre avait modifié le règlement et coupait le barème de participation de 30 $, démontrant ainsi son manque de considération vis-à-vis de ceux et celles qui font l'effort de s'en sortir.

Il y avait aussi, M. le Président, l'abolition des avoirs liquides pour le mois de la demande d'aide sociale. Les personnes doivent donc se présenter à l'aide sociale sans un sou en poche afin d'être admissibles à l'aide de dernier recours. Sans un sou en poche, comment fait-on pour assumer les frais inhérents à la recherche d'un emploi? Qu'on pense aux frais de photocopies, aux envois postaux, aux téléphones, au transport. Si on a un enfant, si on est femme chef de famille monoparentale, mère d'un enfant de moins deux ans, on doit donc faire l'effort – c'est dans le projet de loi – et on doit donc avoir une gardienne. Sans un sou en poche, c'est exactement ça.

Après le projet de loi n° 115, une série de coupures se sont abattues sur le dos, encore une fois, M. le Président, pas des plus riches, non, des plus démunis: coupure dans l'allocation-logement, désengagement au niveau des soins dentaires et optométriques, coupure au niveau de l'assurance-médicaments, puisque les prestataires devront tous et toutes payer une franchise de 100 $ au niveau des médicaments. C'est une économie de 60 000 000 $ qu'on est venu chercher, encore une fois, dans la poche des plus démunis.

Lors du dépôt du projet de loi n° 84, M. le Président, la ministre venait nous annoncer de nouvelles coupures budgétaires, de nouvelles compressions budgétaires donc, par ce projet de loi là, notamment auprès des mères jouissant de prestations de non-disponibilité à la sécurité du revenu. Concurremment à ça, la ministre dépose son livre vert sur la sécurité du revenu, livre qui fera l'objet d'une vaste consultation en 1997.

Ce qui est un peu étonnant – mais il faut dire que ça devient la marque de commerce de ce gouvernement-là, puisqu'on l'a vécu au municipal, ça se vit dans d'autres ministères également, mais prenons plus précisément celui de la Sécurité du revenu – on dépose un projet de loi qui vise le retour à l'emploi de gens qui sont sur l'aide sociale, la sécurité du revenu et on dépose en même temps un livre vert qui prévoit une grande et une vaste consultation. On propose donc les solutions avant même d'avoir organisé la consultation et d'avoir entendu les solutions proposées ou les commentaires, M. le Président, qui pourraient venir bonifier un projet de loi ou toute mesure visant le retour à l'emploi des gens qui se retrouvent à l'aide sociale. Il y a donc une contradiction assez flagrante entre le fait d'avoir déposé ce projet de loi là et le fait d'avoir évidemment déposé ce livre vert dans l'attente d'une consultation publique. Il y a plusieurs articles qui auraient dû faire l'objet d'une commission parlementaire, de discussions article par article. Cette possibilité nous a été enlevée par le fait qu'il y a un bâillon.

Donc, M. le Président, vous me faites signe que je dois terminer. Je termine tout simplement en vous disant ma grande déception de voir qu'on passe à la vapeur ce projet de loi, alors qu'il n'y a eu aucune discussion préalable permise par les parlementaires, ici, en cette Chambre.

(14 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Nous allons céder maintenant la parole... Donc, s'il n'y a pas d'autres... Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 84? M. le député de Brome-Missisquoi, le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je constate l'arrivée de la ministre, qui, sur ce point, va être soulagée de voir que quelqu'un s'est levé, qu'elle va pouvoir reprendre son souffle avant de faire possiblement sa réplique, s'il n'y a pas d'autres intervenants. Cinq minutes pour parler de l'attitude de ce gouvernement à l'intérieur d'un projet de loi qui affecte les plus démunis de notre société.

M. le Président, vous aurez compris, comme tout le monde, que l'incapacité, la passivité de ce gouvernement dans le dossier de l'emploi fait en sorte qu'il y a des gens qui vont avoir à payer pour ce manque de capacité du gouvernement du Parti québécois à créer des emplois. Il y a des gens qui vont avoir à payer pour les pertes d'emplois que le Québec a connues au cours des 10 derniers mois. On a perdu 60 000 emplois au Québec, alors que l'Ontario, le Nouveau-Brunswick, les autres provinces canadiennes en ont créés, alors que les autres provinces à l'intérieur du Canada avaient une croissance économique. Soixante mille emplois, c'est 6 000 emplois par mois de moins, c'est 200 emplois par jour que l'on perd, sept jours par semaine, depuis que le nouveau premier ministre est arrivé à la barre des affaires de l'État, du gouvernement du Québec.

M. le Président, les premières victimes, puis c'est normal, quand on n'a pas un sens des valeurs puis un sens des priorités, comme parlementaires, qu'on s'attaque premièrement, par une motion de clôture, c'est-à-dire une motion qui empêche les députés de s'exprimer plus que cinq minutes sur un projet de loi... Les premières victimes, ce sont les plus démunis de la société. La manoeuvre est à la fois habile et un peu hypocrite – vous me le permettrez, M. le Président. Habile parce que, au moment où on dépose un projet de loi qu'on n'appelle pas pour étude à l'Assemblée nationale, sauf sous un bâillon, on présente un livre vert. Puis là on va dire: Dans le cadre du livre vert, tout le monde aura le droit de se prononcer. Mais ce que les gens de l'autre côté de la Chambre savent, c'est qu'on va profiter de ce projet de loi pour aller chercher des millions et des millions de dollars chez les premières victimes des pertes d'emplois, les gens qui se retrouvent à l'aide sociale parce que ce gouvernement n'a pas été capable de créer l'emploi nécessaire pour leur assurer qu'ils se trouvent une job dans la société québécoise.

M. le Président, quand un gouvernement agit de la sorte, il faut que les députés, en cette Chambre, quelle que soit leur étiquette partisane, deviennent ce qu'on appelle des protecteurs du citoyen. Il faut que tous les députés se lèvent et utilisent le peu de temps qui est mis à leur disposition pour joindre leur voix à celle du Protecteur du citoyen, qui nous a prévenus, dans son rapport, que, lorsqu'un gouvernement a perdu le sens des valeurs, a perdu le sens des priorités, crée la pauvreté plutôt que de générer de la richesse, il faut, à ce moment-là, que les députés aient le courage de représenter les plus démunis.

Moi, je suis un petit peu surpris que la première loi, dans le cadre de ce bâillon qui vise à aller fouiller dans les poches des plus démunis, soit présentée par Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le Président, c'est un comté qui est encore plus durement frappé que les autres comtés du Québec. Ce sont des gens qui ont davantage besoin – compte tenu des pertes d'emplois à Montréal, du taux de chômage à Montréal, du taux d'aide sociale à Montréal, des taux qui sont encore plus dramatiques dans l'est de Montréal et qui frappent encore davantage la jeunesse – que leur députée se lève non pas pour leur dire, dans le cadre d'un bâillon, d'une suspension des règles: Je vais aller fouiller dans vos poches. Ils ont besoin d'une députée qui dise: J'ai pris connaissance du rapport du Protecteur du citoyen et je me refuse, comme députée, d'agir comme la marionnette du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor. J'ai encore plus d'affection, plus de conviction à l'égard de mes électeurs et de mes électrices que j'en ai pour mon poste de ministre et ma job d'aller fouiller dans les poches des plus démunis de la société.

Et, si chacun d'entre nous, en cette période des fêtes, prend le temps de réfléchir, assume la responsabilité... peut-être, qu'on n'a pas été une opposition assez vigilante pour pousser le gouvernement dans la création d'emplois, mais sans doute, et sans aucun doute, les membres du Conseil des ministres et les députés de l'autre côté, eux, ne l'ont pas été, parce qu'ils ont la responsabilité de gouverner pour créer des emplois. S'ils sont des complices de ces pertes d'emplois, qu'ils ne se fassent pas, aujourd'hui, complices du premier ministre, du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor, qui, sous le couvert d'un bâillon parlementaire, vont aller s'attaquer premièrement et avant tout à ceux et à celles qui sont, dans notre société, les plus démunis, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. Alors, Mme la ministre...

Mme Harel: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...de la Sécurité du revenu...

Mme Harel: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...vous avez un droit de réplique de cinq minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Parfait. Je me rends compte que les députés de l'opposition ont, d'une façon généralisée, tous commis la même erreur, c'est-à-dire qu'ils se sont trompés d'année, ils se sont trompés de loi puis ils se sont trompés de ministre. Ils ont fait des interventions les uns après les autres contre la loi n° 115. C'était l'an passé.

Sur la loi n° 84, là, il y a une inflation verbale à tout casser. Le leader de l'opposition vient de prétendre qu'il y avait là des millions et des millions. Le total de tout ça, là, puis ça concerne essentiellement des gens qui ont fait des fausses déclarations ou encore des gens qui ont négligé de payer leur pension alimentaire – c'est de ça essentiellement qu'il s'agit – le total de ce que ça peut rapporter, toute l'application des articles du projet de loi n° 84, c'est 7 800 000 $.

Mais je reviens rapidement à la question des gens qui ont perdu leur emploi dans notre société. Permettez-moi de vous dire qu'entre 1990 et 1995, au moment où l'opposition était au gouvernement, on a assisté à l'augmentation de 90 000 nouveaux ménages à l'aide sociale, pour un total de 205 000 personnes. Et, à Montréal – je sais que ça intéresse particulièrement l'opposition, Montréal – pensez qu'entre 1990 et 1995 c'est 53 % de plus de ménages à l'aide sociale sur l'île de Montréal. Alors, faut-il rappeler qu'on a à gérer un héritage qui est lourd, qui est très lourd à porter, et notre intention, et la mienne en particulier, est de le porter avec le plus de compassion possible. Je ne comprends pas l'opposition de passer l'éponge sur les personnes qui font des fausses déclarations. C'est de ça qu'il s'agit dans le projet de loi.

Et je reviendrai aussi rapidement sur la démarche qui est entreprise avec des chefs de famille monoparentale dont les enfants de cinq ans commenceront à plein temps la maternelle au mois de septembre prochain, parce que c'est d'elles qu'il s'agit, seulement. Cette démarche qu'il s'agit d'entreprendre à l'avance pour ne pas les mettre devant le fait accompli l'été prochain, c'est peut-être ça que l'opposition aurait fait, mais ce n'est pas ça qu'on pense faire, parce qu'on veut leur donner un coup de pouce et pas un coup de pied, comme elles ont reçu pendant tant d'années.

Je ne comprends pas comment il peut être possible que l'opposition ait fait ces tirades à la veille de Noël, tandis qu'elle s'acharne à chaque période de questions à dénoncer le fonds de 80 000 000 $ que le gouvernement a décidé, durant les trois prochaines années, à raison d'un total de 250 000 000 $, de mettre en place pour favoriser l'insertion, l'intégration sur le marché du travail des personnes pauvres, démunies qui sont en particulier ces chefs de famille monoparentale. Comment comprendre qu'on puisse en même temps être aussi contradictoire, d'un côté prétendre aider des personnes qu'on veut garder dans la pauvreté, sur l'aide sociale?

Alors, sur le projet de loi, parce qu'on en a beaucoup fait mention, j'ai moi-même écrit d'ailleurs au Protecteur du citoyen. Je vais déposer la lettre et je vais vous la lire, M. le Président. Non seulement je lui ai écrit, je lui ai parlé, et ce que j'entends faire, c'est de donner suite à ses recommandations. Alors, je lui écrivais: «Il me fait plaisir de vous transmettre le projet de règlement qui accompagnera le projet de loi n° 84.» Oui, c'est inédit, ce n'est pas fréquent, mais je vais le déposer, le projet de règlement, immédiatement, s'il y a consentement et si vous me le permettez.

Des voix: Consentement.


Documents déposés

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement.

Mme Harel: Alors, j'écrivais donc au Protecteur du citoyen: «Il me fait plaisir de vous transmettre le projet de règlement qui accompagnera le projet de loi n° 84. J'ai l'intention de présenter les amendements que vous recommandez sur la définition, dans la loi elle-même, de la fausse déclaration – puisque c'est ça vraiment à quoi on veut remédier – ainsi que sur la récupération des intérêts versés.» Et j'ajoutais: «Je vous remercie de vos judicieux commentaires et vous prie d'agréer ma considération pour le travail que vous effectuez.» Alors, M. le Président, j'en fais donc le dépôt. Merci.

(15 heures)

Je vous dirai que personne qui est intervenu du côté de l'opposition ne m'a semblé avoir lu le projet de loi n° 84. Il accorde le droit d'imposer des frais de 100 $ au débiteur alimentaire fautif. Mais je vous rappelle que la pension alimentaire impayée aux chefs de famille monoparentale à l'aide sociale totalisera 160 000 000 $. Combien on va récupérer avec ce tarif, ces frais de 100 $ pour essayer de dissuader des débiteurs alimentaires fautifs? On va récupérer 500 000 $, M. le Président.

Alors, j'aurai l'occasion d'y revenir pendant la plénière. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Sécurité du revenu et députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Ayant terminé les interventions sur le principe du projet de loi n° 84, le principe du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Non, vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que l'on appelle les députés, s'il vous plaît. Nous allons suspendre quelques instants.

(15 h 1 – 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci.

Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Mise aux voix

Merci. Nous reprenons nos travaux. Nous en étions au principe du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Nous en étions au vote.

Or, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui s'abstiennent? M. le secrétaire.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce qu'on pourrait obtenir le consentement pour que le député de LaFontaine, qui a prononcé un excellent discours, critique en matière de travail, malgré le cinq minutes qui lui était alloué, puisse quand même enregistrer son vote?

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement?

M. Bélanger: Oui, M. le Président, à la condition que le député d'Abitibi-Est, qui fait aussi d'excellents discours, soit inclus dans le vote du côté ministériel.

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement?

M. Paradis: Même si le député d'Abitibi-Est n'a pas parlé, il y a consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Il y a consentement. Alors, veuillez enregistrer les votes des députés de LaFontaine et d'Abitibi-Est. Alors, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Pour:64

Contre:37

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je déclare donc la motion adoptée. Donc, le principe du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Bélanger: Adopté. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: ...je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je suspends donc les travaux durant quelques instants afin que l'Assemblée se constitue en commission plénière.

(Suspension de la séance à 15 h 17)

(Reprise à 15 h 25)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission plénière est maintenant réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu

Je vous rappelle que, conformément à l'ordre adopté, la durée de la commission plénière est d'un maximum d'une heure. À l'expiration de ce délai, je vais mettre aux voix, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que la ministre n'aurait pas pu proposer en cours d'étude.

Alors, avant de procéder aux remarques préliminaires, qui seront de cinq minutes de chaque côté pour les groupes parlementaires, je tiens à vous mentionner que le temps de parole sera le suivant. Les députés indépendants ont cinq minutes, et la balance de l'heure, soit 55 minutes, sera répartie équitablement entre les deux formations politiques. Et le 5 minutes, s'il n'est point utilisé par les députés indépendants, à ce moment-là, sera réparti également équitablement. Alors, au niveau des remarques préliminaires, Mme la ministre.


Remarques préliminaires


Mme Louise Harel

Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Le projet de loi n° 84, essentiellement, contient des dispositions qui ont des incidences budgétaires. De là à prétendre qu'elles sont considérables, il y a évidemment une distance qu'il ne faut pas franchir, mais, cependant, il n'y a pas de petites sommes. D'autant lorsqu'elles ne sont pas versées par des débiteurs alimentaires fautifs qui négligent de verser à leur famille la pension alimentaire requise ou lorsque les sommes obtenues suite à de fausses déclarations ou à la transmission de faux renseignements doivent être remboursées, il nous est apparu légitime que ces sommes dues suite à de fausses déclarations soient remboursées avec une charge d'intérêts.

Alors, le total de l'ensemble de ces dispositions à incidence monétaire est de l'ordre de 7 800 000 $, en vous rappelant cependant qu'il y a pour 160 000 000 $ de créances alimentaires impayées aux familles, suite à la négligence des débiteurs alimentaires fautifs, en vous rappelant qu'il y aura eu 83 000 000 $, l'an dernier, de prestations versées en trop, suite à la transmission de fausses déclarations ou de faux renseignements, et puis en vous rappelant qu'en matière de récupération des intérêts versés dans le cadre de l'aide conditionnelle il s'agit simplement, je crois, d'une disposition qui, en toute équité, amène non pas à dépasser la limite de ce qui a été versé en aide conditionnelle, mais simplement à la rembourser et à rembourser avec les intérêts qui ont été versés dans l'année.

Il s'est dit beaucoup de choses durant la première étape, l'adoption du principe, il s'est dit des choses complètement fausses. Par exemple, M. le Président, il s'est dit qu'il y a de plus en plus de personnes qui font des demandes à l'aide sociale. C'est complètement faux. Il y en a eu beaucoup au début des années quatre-vingt-dix, quand l'opposition était au gouvernement, mais nous sommes maintenant en diminution de ménages. Cette diminution est légère mais réelle: 4 000 ménages, au mois de novembre, de moins qu'en comparaison à l'an passé.

On a dit aussi qu'on allait attaquer les démunis. Non. Essentiellement, ce sont les personnes qui ont quelque chose à se reprocher. Une seule des dispositions est certainement sujette à un débat de société: c'est celle qui concerne les chefs de famille monoparentale qui reçoivent une allocation de non-disponibilité de 100 $ par mois. Mais il faut bien comprendre que le principe reste le même. Le principe demeure absolument inchangé, à savoir que la personne... Tel qu'exprimé dans nos lois, on dit que le barème de non-disponibilité s'applique à une personne qui garde un enfant à sa charge et qui ne fréquente pas l'école. Alors, comme, à partir de septembre prochain, la maternelle plein temps va être accessible aux enfants de cinq ans, il s'agit simplement... Et on verra bien que c'est là l'intention du gouvernement pour tout de suite, rien de plus, puisqu'il y aura aussi un débat en commission parlementaire en fin janvier, et sans doute pour quelques semaines sinon quelques mois, mais il y aura un débat qui nous amènera par la suite à adapter cette disposition dépendamment de la capacité d'offrir véritablement des services à la petite enfance, des services de garde disponibles, adéquats.

(15 h 30)

Mais ce qui est déposé là, ce sur quoi on va voter, M. le Président, c'est qu'à partir de septembre prochain, pour les enfants qui fréquentent à temps plein une classe maternelle, le parent gardien va perdre son allocation de non-disponibilité. Mais puis-je vous rappeler qu'il va pouvoir participer ainsi à un barème de participant qui va lui donner 120 $ par mois et que le parent gardien qui a un enfant qui fréquente une classe maternelle à plein temps pourra aussi participer de façon prioritaire au parcours d'insertion sur le marché du travail et à la formation que le gouvernement entend mettre en place? Alors, de quoi se plaint-on, surtout quand on pense que le 80 000 000 $ dont on va disposer à partir du 1er avril, grâce à la déclaration du ministre des Finances et à la décision unanime du sommet économique du Québec, ce 80 000 000 $ va en priorité servir à ces chefs de famille monoparentale? Quatre-vingt millions!

Là, l'opposition a pu pleurer sur le sort de ces monoparentales, mais comment expliquer qu'elle refuse, là, systématiquement? En dénonçant le 80 000 000 $, elle refuse systématiquement d'y contribuer. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. Alors, Mme la députée de Saint-François, critique officielle de l'opposition.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Merci. Toujours au nom de ma collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, j'interviendrai sur ce projet. Ma collègue est alitée présentement en raison d'une très vilaine grippe, alors je prendrai sa place pour débattre de ce projet.

M. le Président, si le gouvernement décide d'imposer un bâillon à l'opposition, ce n'est sûrement pas pour donner quelque chose à la clientèle. Au contraire, c'est pour enlever quelque chose. Parce que, si ce n'était pas pour enlever quelque chose, on n'aurait pas eu besoin d'un bâillon. Et la ministre l'a admis, d'ailleurs; elle admet que c'est 7 800 000 $ qu'on viendra chercher dans la poche des contribuables, des plus démunis. Ceux qui, justement, n'ont à peu près rien dans leur poche, alors c'est ceux à qui on va aller chercher 7 800 000 $. C'est le cadeau de Noël 1996 qu'on leur fait, M. le Président.

Je voudrais aussi revenir sur certains commentaires de la ministre dans sa conclusion. La ministre accusait l'opposition de ne pas avoir lu le projet de loi. Elle disait que, puisqu'on était prêt à passer l'éponge sur... entre autres, si on était prêt à passer l'éponge sur les fraudeurs... Mais ce n'est pas parce que l'opposition n'a pas lu le projet de loi, c'est parce que le projet de loi n'est pas suffisamment clair à cet effet. D'ailleurs, on n'est pas les seuls, même le Protecteur du citoyen, à la page 3, mentionnait ceci: «Si la disposition proposée a effectivement pour objet de lutter contre les fausses déclarations en matière de sécurité du revenu, ne devrait-on pas y retrouver clairement un tel objet? La rédaction proposée est trop générale et permettrait d'étendre la règle à tous les débiteurs, y compris ceux dont la dette a été contractée de bonne foi.» Alors, je pense, M. le Président, qu'on n'est pas les seuls à se poser des questions et je pense qu'il est injuste de dire que l'opposition n'a pas lu le projet de loi. Au contraire, on l'a lu, le projet de loi, et je pense que la ministre doit avoir l'honnêteté d'admettre que nulle part, dans le projet de loi, il est mentionné que... c'est clair, finalement, qu'il s'agit de passer l'éponge sur les fraudeurs.

La même chose au niveau des intérêts, M. le Président. Il n'est nulle part mentionné dans le projet de loi que les intérêts prévus à l'article 4 visaient les dettes de mauvaise foi. D'ailleurs, nous n'étions pas les seuls. Je le mentionnais, le Protecteur du citoyen en a fait mention aussi. Mais ce que je trouve par contre inacceptable, c'est que le projet de loi en lui-même, comme je le mentionnais, est très anodin – il contient sept articles – mais c'est davantage au niveau de la réglementation, et c'est ce que soulève, d'ailleurs, le Protecteur du citoyen.

M. le Président, la ministre a déjà fait parvenir – qu'elle disait – les règlements. Elle nous disait que le Protecteur du citoyen a déjà les règlements en main. Tout à l'heure, à la dernière minute de son intervention, elle a déposé les règlements. Mais, M. le Président, nous n'avons pas encore les fameux règlements. Les membres de l'opposition, les parlementaires, n'ont pas encore les règlements.

Alors, vous comprenez, M. le Président, que ce geste-là, je devrais dire, dénote un manque flagrant de considération de la part de la ministre envers les députés de l'opposition, et je dirais même envers les députés ministériels. Nous n'avons pas les règlements au moment où on se parle, et c'est à partir des règlements qu'on va savoir ce qui arrive exactement et qu'on va répondre à toutes nos questions. Alors, on a beau lire le projet de loi, mais finalement on n'est pas plus avancé, puisque c'est dans les règlements qu'on trouvera toutes les réponses à nos questions.

Il a un autre point que je voudrais soulever également, quand la ministre dit que, par exemple, il y avait beaucoup plus de ménages... Je tiens à lui rappeler qu'entre décembre 1985 et mars 1993 le nombre de ménages dépendant de la sécurité du revenu s'est accru de 9,5 % au Québec et de 50,5 % au Canada. Donc, la performance du Canada est lourdement hypothéquée par la situation en Ontario, on le sait, où le nombre des ménages inscrits à l'aide sociale s'est accru de 136,9 %. Donc, si le Québec a atteint un taux de croissance de 9,5 %, c'est parce qu'il y avait un bon contrôle.

Je reviendrai sur d'autres points, M. le Président, au fur et à mesure qu'on discutera des articles du projet de loi, article par article, puisque mon temps est écoulé.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Saint-François.


Étude détaillée

Alors, nous allons maintenant procéder à l'étude détaillée article par article. Y a-t-il des interventions sur l'article 1 du projet de loi? Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, vous allez me permettre d'inviter Mme la députée de Saint-François ainsi que le député de Notre-Dame-de-Grâce, ainsi que tous les membres qui désirent consulter le projet de règlement – qui restera toujours un projet avant que la loi soit adoptée... Il n'y a pas de règlement, jamais, avant l'adoption d'une loi. Pour qu'il y ait un règlement, tel qu'existant, il faut définitivement qu'il y ait une loi. Alors, les députés de cette Chambre qui veulent en avoir copie n'ont qu'à le demander au greffier, je l'ai déposé tantôt. Il s'agit simplement de faire venir un page et puis de demander copie du règlement. Imaginez, c'est la première fois...

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, je vous arrête immédiatement. Nous avons demandé à un de nos pages d'aller faire des photocopies pour les remettre ici, à la table, ainsi qu'au député de Notre-Dame-de-Grâce et à Mme la députée de Saint-François. L'article 1.

Mme Harel: Alors, M. le Président, vous comprendrez que, si le projet de loi n° 84 a été déposé le 10 décembre, le jour même du dépôt de la réforme de la sécurité du revenu tant attendue, c'est parce qu'on n'avait rien à cacher. Vous vous rendez compte qu'on a voulu justement en même temps déposer le projet de loi qui portait essentiellement sur des dispositions à l'égard non pas des contribuables démunis, mais de ceux qui ne paient pas leur pension alimentaire ou encore de ceux qui font des fausses déclarations ou transmettent de faux renseignements. C'est ça essentiellement dont il s'agit dans le projet de loi n° 84. Je comprends que l'opposition a semblé vouloir passer l'éponge sur ces catégories-là, mais peut-être faut-il penser que c'est par méconnaissance du projet de loi que cette impression-là a été laissée par les interventions faites aujourd'hui.

Ceci dit, non seulement on n'a rien à cacher, mais, n'eût été de l'opposition systématique de l'opposition, justement, depuis le début de cette session intensive le 1er décembre dernier, je suis convaincue qu'on aurait pu normalement, comme on le fait habituellement, adopter le principe et se retrouver en commission parlementaire pour l'étude article par article d'un projet de loi qui en contient sept, dont la date de mise en vigueur. Mais il faut comprendre que ce n'est pas parce qu'on a à cacher quelque chose qu'il faut procéder ainsi. C'est parce qu'à un moment donné le gouvernement peut reconnaître que l'opposition a le droit de ne pas collaborer, mais le gouvernement, lui, a l'obligation, en vertu des responsabilités qui lui sont attribuées par la population, de décider. Alors, si tant est que ce fût si effrayant d'avoir adopté la loi qui nous permet de procéder plus rapidement, ce ne serait pas dans notre règlement. Si c'est dans notre règlement, c'est donc, dans le fond, vu comme une façon qui peut être démocratiquement utilisée.

(15 h 40)

L'article qui est devant nous, M. le Président, l'article 1 de la loi n° 84 porte sur la catégorie des parents gardiens qui reçoivent le barème de non-disponibilité pour la garde d'enfants et, si vous lisez cet article en prenant en considération celui du règlement, vous verrez qu'il s'agit essentiellement, dans l'article 1, de permettre de préciser les cas et conditions qui s'appliquent à une personne qui garde un enfant à sa charge, de manière à ce que le règlement soit modifié afin de prévoir que le barème de non-disponibilité s'applique à une personne qui garde un enfant à sa charge ayant moins de cinq ans au 30 septembre ou, s'il a cinq ans à cette date, qui ne peut fréquenter à temps plein une classe maternelle.

C'est donc dire que la mesure serait effective le 1er septembre 1997 par décret du gouvernement. Il devient nécessaire de fixer de telles conditions par règlement pour adapter l'évolution de notre règlement en matière de services de garde et de services à la petite enfance et évidemment pour l'harmoniser à la politique familiale que le gouvernement entend mettre en place. Mais je rappelle que, si l'enfant fréquente une classe maternelle à temps plein, il sera possible au parent gardien de participer à des mesures d'employabilité – pour lesquelles il recevra une supplémentation du barème de base de 120 $ par mois – et évidemment de participer à un parcours d'insertion ou de formation.

J'aurai sûrement l'occasion de plaider, dans l'échange qui devrait s'ensuivre, sur cette recommandation contenue à la fois dans le rapport Bouchard et Fortin, du nom des coauteurs, qui ont, pendant neuf mois, examiné les modifications et les changements majeurs à apporter au régime de sécurité du revenu. Alors, j'aurai l'occasion certainement de faire valoir les très nombreuses études, chez nos voisins américains et canadiens, qui démontrent que l'intervention la plus appropriée, en l'occurrence, pour ces familles pauvres et monoparentales, c'est celle que nous allons envisager dans le livre vert. Et certainement que j'aurai l'occasion de faire valoir ce point de vue qui est très largement partagé dans notre société.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François ou M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: J'étais à la veille de vous demander, M. le Président, de suspendre nos travaux jusqu'au moment où le projet de règlement sera disponible. La ministre vient d'admettre que ça nous prend le projet de règlement pour faire une étude sérieuse; on ne l'a toujours pas. Semble-t-il, ça arrive, là. Ça va mieux déjà, mais...

Mme Harel: M. le Président, à ce sujet-là, je rappelle qu'il y a une pratique courante dans cette Assemblée nationale et dans ce Parlement. C'est une pratique non seulement légale, mais en même temps légitime, et cette pratique consiste à adopter une loi et ensuite à publier dans la Gazette officielle , pendant 45 jours, un règlement pour lequel une consultation est menée. Alors, on n'adoptera pas le règlement durant la présente plénière, ai-je besoin de le rappeler.

Il est important, dans le fond, de souligner que, dans la loi, on précise des principes et on les adopte, ces principes, et, dans le règlement, on précise les modalités d'application. C'est la loi seulement qui sera adoptée aujourd'hui. Cette façon de procéder est tout à fait légitime dans le cadre légal actuel. Alors, je vais vous inviter, M. le Président, à poursuivre.

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, comme la ministre a déjà utilisé environ 12 minutes de son temps...

Mme Gagnon-Tremblay: Moi, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): ...je vous inviterais maintenant à prendre la parole.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. M. le Président, je voudrais souligner encore aux membres de cette commission que le projet de loi, ce projet de loi qui fait l'objet actuellement de l'étude article par article, est un projet de loi qui a été déposé par le gouvernement mardi dernier. Une semaine après, on impose le bâillon pour le faire adopter.

Ce projet de loi dépend en tout du règlement que la ministre vient de déposer. Je comprends qu'il est d'usage qu'on adopte une loi, que, par la suite, on connaisse les règlements, que les règlements soient prépubliés et publiés et que, par la suite, on puisse mettre en vigueur ces règlements, mais il est également d'usage que, lorsqu'il s'agit d'une loi qui dépend entièrement de règlements... On retrouve, à l'article 1, M. le Président, on mentionne: aux conditions prévues par règlement. L'article 2: conditions et modalités prévues par règlement. L'article 3: conditions déterminées par règlement. L'article 4: Ces intérêts sont, dans les cas déterminés par règlement... Alors, tout est déterminé par les règlements. Comment voulez-vous que l'on adopte une loi ou qu'on discute des articles de cette même loi, alors que tout est déterminé par le règlement?

Je veux faire une autre mise au point, aussi. Lorsque la ministre parle de contrôle ou de... je dois lui dire que, si le gouvernement actuel avait poursuivi le contrôle qu'avait implanté l'ancien gouvernement, peut-être qu'on aurait moins de mauvaises créances à percevoir. On n'aurait peut-être pas besoin d'aller chercher autant dans les poches des plus démunis. Je rappelle que, dès l'entrée au pouvoir de ce gouvernement, la ministre de l'époque a aboli certaines mesures de contrôle qui étaient... C'était agréable de connaître qu'on abolissait certaines mesures de contrôle, entre autres, la veille du référendum. Ça faisait plaisir à certaines clientèles, M. le Président. Mais aujourd'hui on se rend compte qu'on est obligé de recommencer à recouvrer les comptes et les créances à percevoir. Donc, c'était une mise au point que je voulais faire à ce moment-ci, et dire qu'il est tout à fait important que l'on puisse avoir un bon contrôle, mais, en même temps aussi, il est important de bien connaître le projet de loi. Je le disais tout à l'heure que, si on impose un bâillon, ce n'est pas pour donner quelque chose aux plus démunis, c'est davantage pour enlever – la ministre l'a mentionné – 7 800 000 $, et j'espère que la ministre va pouvoir le décortiquer tout à l'heure, le 7 800 000 $, savoir où on va aller le chercher, dans quel domaine on va aller le chercher, ça concerne quoi exactement. Alors, j'aimerais que la ministre puisse nous informer quant aux 7 800 000 $.

Maintenant, M. le Président, le règlement, que voulez-vous, il vient de nous arriver, je n'ai pas eu le temps encore d'en prendre connaissance. Je dois vous dire cependant que même le Protecteur du citoyen est étonné de la rapidité avec laquelle la ministre veut faire adopter ce projet étant donné que la ministre a déjà déposé un document de consultation – et c'est quand même assez récent, c'est la semaine dernière – «Un parcours vers l'insertion, la formation et l'emploi». Alors, ce livre vert sera discuté au début de l'année, et la ministre reviendra avec un plan plus global. Il aurait été souhaitable que la ministre attende de consulter les gens et d'avoir une vue d'ensemble quant à l'impact, entre autres, de ce projet de loi sur les clientèles.

Je sais qu'elle est obligée de le faire, M. le Président, parce qu'on l'impose. On a des sommes à aller chercher. C'est 7 800 000 $. C'est quand même considérable quand on doit aller le chercher chez des gens qui n'ont pas le sou. Et je sais très bien aussi que... Au fond, je suis persuadée... Je sens la ministre très mal à l'aise. Je sais qu'elle est très mal à l'aise parce qu'elle est sensible à ces clientèles. Elle les connaît bien, ces clientèles. Elle vit dans un comté dont les contribuables sont démunis. Elle le sait que c'est difficile et elle a dû faire de nombreuses coupures depuis qu'elle est dans ce ministère, et je sais que ce n'est pas de gaieté de coeur qu'elles les a faites, ces coupures, et je suis persuadée qu'elle est... Je la sens mal à l'aise, parce qu'elle ne souhaiterait pas aller chercher encore auprès des plus démunis des sommes, ne serait-ce que 7 800 000 $. Mais elle a... Bien sûr qu'on lui a passé une commande, et ça ne répond pas...

Actuellement, ce n'est pas dans le but d'aider – comment pourrais-je dire, donc? – au suivi de son document vert qui a été produit récemment, parce que, de toute manière, la question des maternelles cinq ans, c'est pour l'automne. Ce n'est pas pour le printemps, c'est pour l'automne. Donc, on aurait pu fort bien attendre au printemps, à la session du printemps pour adopter ce projet de loi et en connaître davantage quant à ce que la ministre a l'intention de faire au niveau de sa politique d'ensemble et on aurait pu arriver en même temps à l'automne. Parce que, même l'automne, M. le Président, on se questionne énormément sur la faisabilité ou sur la possibilité d'implanter des maternelles cinq ans à la grandeur du Québec. Alors, c'est une chose que de vouloir implanter des maternelles cinq ans, encore faut-il avoir l'espace qu'il faut. Encore faut-il avoir les moyens et les ressources également. Alors, je me questionne même à ce niveau-là.

Je ne pense pas qu'il y ait urgence à adopter ce projet de loi, surtout à la toute fin d'une session, comme je le mentionnais. C'est davantage parce qu'on veut aller chercher dans les poches des plus démunis, et c'est ce qui finalement nous indique l'urgence de ce projet de loi.

(15 h 50)

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: J'avais une courte question pour la ministre. Elle a utilisé beaucoup de son temps, mais peut-être qu'elle peut répondre quand même. Où est effectivement l'urgence d'adopter l'article 1 du projet de loi? C'est un article qui sera en vigueur, semble-t-il, selon le dire même de la ministre, à partir du 1er septembre de l'année prochaine. Où est l'urgence de le faire adopter par bâillon aujourd'hui?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que je comprends que le temps est partagé moitié-moitié, c'est bien ça?

Le Président (M. Pinard): On essaie, dans la mesure du possible, d'en arriver à ce que le temps soit le plus équitablement partagé.

Mme Harel: Bon. Alors, je vais aller assez rapidement...

M. Copeman: Question de directive. Non, juste...

Le Président (M. Pinard): Oui, monsieur...

M. Copeman: M. le Président, vous avez dit «dans la mesure du possible». Au début de cette commission plénière, vous avez dit clairement que le temps est partagé 50-50.

Le Président (M. Pinard): Oui.

M. Copeman: O.K.

Le Président (M. Pinard): C'est bien évident que, si vous posez une question sans que le préambule soit très long, donc, de votre part, il n'y aurait pas utilisation de votre temps. Et, à ce moment-là... Si vous demandez des questions à la ministre continuellement, à ce moment-là, j'imagine que vous vous attendez à avoir des réponses. Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, disons-le clairement, je suis très à l'aise avec les dispositions qu'on retrouve dans le projet de loi n° 84 parce que, d'une part, elles concernent des personnes qui n'ont pas de raison, elles, d'être fières d'avoir fait de fausses déclarations ou d'avoir transmis de faux renseignements ou de négliger de payer leur pension alimentaire. Il y en a pour 160 000 000 $ d'arrérages en pensions alimentaires.

En même temps, je reviendrai sur le fait que je crois sincèrement que c'est un meilleur appui, c'est vraiment un meilleur soutien que l'on peut donner au parent gardien, au chef de famille monoparentale dont les enfants commenceront à cinq ans la maternelle plein temps, c'est un meilleur soutien maintenant de leur dire qu'en septembre prochain elles pourraient perdre leur barème de non-disponibilité de 100 $ par mois et qu'elles le perdront si l'enfant – puis je dis exactement quelle sera la situation – à charge a cinq ans et qu'elles ne le perdront pas si cet enfant de cinq ans ne peut pas fréquenter à temps plein une classe maternelle – ça peut quand même arriver – si l'enfant de cinq ans ne peut pas, pour toutes sortes de considérations liées à sa santé physique, à un handicap ou liées à ce que disait tantôt Mme la députée de Saint-François, à la non-disponibilité de services de garde. Alors, c'est dans la mesure où l'enfant peut fréquenter à temps plein une classe maternelle.

Ceci étant dit, l'application au 1er avril pour toutes les dispositions qui portent sur du recouvrement exige la mise en place de tout un dispositif administratif et informatique. Et on pense que ça peut avoir un effet dissuasif. Contrairement à ce que disait Mme la députée de Saint-François, il n'y a pas eu de laxisme en matière de recouvrement. Les chiffres des cinq dernières années, au contraire, font valoir un effort accru. L'effort accru, ce n'est pas dû à une augmentation de la fraude, mais il y a vraiment eu un effort de contrôles qui ont porté fruit.

Par exemple, en 1992-1993, c'est un montant total de 35 000 000 $ qui sera déterminé pour les fausses déclarations; 1993-1994, on en était à 62 000 000 $; 1994-1995, à 76 000 000 $; et 1995-1996, à 83 000 000 $. Et ça, c'est dû en grande partie à l'amélioration des mesures d'échange de renseignements qui ont été permises par la Commission d'accès à l'information et qui permettent à des organismes payeurs, par exemple la Commission de la santé et de la sécurité du travail, le ministère de l'Éducation, en matière de prêts et bourses par exemple, la Société de l'assurance automobile du Québec et le ministère de la Sécurité publique également, de s'échanger des informations pour s'assurer qu'il n'y a pas un, deux ou trois chèques, pour les mêmes motifs, qui sont versés à la même personne.

Alors, il y a donc eu un contrôle qui non seulement s'est maintenu, mais qui, dans le fond, a progressé en efficacité, de même que la mise en place, au ministère de la Sécurité du revenu, d'un centre de recouvrement en sécurité du revenu, c'est-à-dire une unité autonome gouvernementale qui a remplacé...

Le Président (M. Pinard): On pourra peut-être y revenir?

Mme Harel: ... – je termine là-dessus – qui a remplacé l'expérience-pilote avec l'entreprise privée que le gouvernement précédent avait mise en place et que le gouvernement actuel a mise de côté parce qu'il s'agissait de mettre en collection ces comptes-là. Maintenant, ça se fait avec l'éthique, là, publique, mais je pense que ça révèle que c'est efficace tout autant.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: On va tenter de se comprendre puis de travailler comme du monde, là. Question très précise, très courte à la ministre: Quelle est l'urgence aujourd'hui de faire adopter l'article 1, qui sera mis en vigueur à partir du 1er septembre 1997? Quelle est l'urgence de le faire adopter aujourd'hui par bâillon?

Mme Harel: Alors, M. le Président, vous comprenez bien que ce qui est souhaité, ce qui est recherché, c'est de donner suite aux recommandations des rapports Bouchard-Fortin. Je voudrais, pour répondre précisément à cette question du député de Notre-Dame-de-Grâce, l'inviter à prendre connaissance des recommandations du rapport Bouchard – le nom, donc, du coprésident de ce groupe de travail – qui faisait état des études nombreuses qui démontrent les effets négatifs que peut engendrer une fréquentation prolongée de l'aide sociale, particulièrement chez les mères monoparentales pauvres. Et il faisait état de diverses études, dont une réalisée à Baltimore, à partir de laquelle, pendant 20 ans, on a suivi 400 jeunes mères adolescentes pour se rendre compte que les meilleurs, en fait, «prédicteurs», comme on dit, d'une carrière à l'aide sociale, et je cite le rapport, «sont une sous-scolarisation, un stage prolongé de la mère à l'aide sociale dans ses premières années de vie parentale et l'absence de conjoint – dans le fond – durant ces années».

La politique actuelle des programmes d'aide, consistant à octroyer un barème de non-disponibilité, semble avoir un effet direct sur la non-participation à des mesures de scolarisation et de préparation à l'emploi, mesures sans lesquelles ces mères augmentent les risques de se condamner à la pauvreté chronique et, avec elles, leur enfant. Et le rapport ajoutait: «Cette mesure de non-disponibilité est discriminatoire envers les mères travailleuses à bas revenus.»

Notre intention, c'est d'informer à l'avance, très concrètement, dès le mois de février prochain, dans le chèque mensuel, ces 8 000... Il s'agit de 8 000 chefs de famille monoparentale dont les enfants de cinq ans entreront à la maternelle en septembre prochain et de les amener à s'inscrire dans une démarche, démarche qui leur permettra de s'inscrire peut-être elles-mêmes en septembre prochain pour compléter un secondaire, pour améliorer leur alphabétisation...

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, comme le temps doit être équilibré entre les deux formations politiques, je vais vous demander... Je sais que vous avez tellement d'explications à donner, mais je vais vous demander d'être beaucoup plus concise, sinon on ne pourra pas passer à travers. Alors, toujours à l'article 1, Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président, parce que, à la longueur des réponses de la ministre, à ce moment-là on ne parlera pas des articles puis on va, chacun de notre côté, donner les pour et les contre.

Mais je dois vous dire que, par la réponse donnée par la ministre à mon collègue, il y a une seule raison pour laquelle il est urgent d'adopter l'article 1: c'est tout simplement pour aller chercher 7 800 000 $. Ça, on l'aura compris, parce que la ministre l'a encore mentionné, que, dans son souci de vouloir sortir les femmes monoparentales de l'aide sociale pour qu'elles puissent réintégrer soit le marché du travail ou encore poursuivre une formation, bien, on ne pourra pas le faire tant et aussi longtemps qu'on ne pourra pas lui permettre d'envoyer son enfant à la maternelle. Donc, encore là, il n'y a pas d'urgence avant l'automne prochain, puisqu'on ne sait même pas encore si la ministre de l'Éducation pourra mettre en vigueur cette mesure.

Mais, lorsque je parlais, M. le Président, d'une somme de 7 800 000 $, c'est parce qu'on coupe 100 $. En plus, il ne faut pas oublier que, si la personne décide de ne pas s'inscrire dans une mesure de formation ou encore d'employabilité, à ce moment-là c'est de 150 $ qu'elle verra son chèque coupé. Donc, il s'agit vraiment, quant à l'urgence d'adopter l'article 1, d'aller chercher – je le répète, M. le Président – 7 800 000 $ dans les poches des contribuables les plus démunis. C'est le cadeau de Noël que ce gouvernement veut faire à la clientèle la plus démunie.

(16 heures)

D'ailleurs, je reviens à la lettre du Protecteur du citoyen. Je pense que le Protecteur du citoyen, quand même, a bien compris. Il a pris le temps de lire, lui, le projet de loi et il a eu les règlements peut-être un petit peu.... Chose certaine, c'est qu'il les a eus avant nous. Alors donc, il mentionnait dans sa lettre que, si elle devait être adoptée, cette loi, la modification législative... Parce que, là, M. le Président, avec ce projet de loi, en somme, on modifie la législation pour la transformer en réglementation: donc, pouvoir législatif versus pouvoir réglementaire. Et on sait qu'il est beaucoup plus facile pour un gouvernement de modifier un règlement, parce qu'un règlement doit être modifié par un autre règlement. Alors, on connaît la procédure pour l'adoption d'un règlement et on connaît la procédure pour l'adoption d'un projet de loi. On sait que pour un projet de loi c'est beaucoup plus difficile. On doit revenir devant l'Assemblée nationale, on doit en discuter – quand on n'est pas bâillonné – et c'est beaucoup plus difficile que de modifier un règlement.

Donc, je reviens à l'interrogation du Protecteur du citoyen, et il dit que, si cette mesure devait être adoptée... «La modification législative proposée à l'article 1 du projet devrait donc n'être mise en vigueur que conditionnellement à l'implantation des autres mesures envisagées, sinon le pouvoir accordé au gouvernement pourrait équivaloir à une pure autorisation de décréter la réduction des prestations.» Or, M. le Président, comme la ministre nous a dit à la fin de son intervention, tout à l'heure, qu'elle avait donné suite à toutes les recommandations du Protecteur du citoyen, peut-elle nous dire si elle a l'intention de reporter la mise en vigueur de l'article 1 dudit projet de loi?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, je voudrais vraiment mettre en garde Mme la députée de Saint-François ainsi que les membres de cette commission plénière contre une interprétation qui serait complètement erronée et qui prétendrait que l'article 1 va économiser, par exemple, sur le budget de la sécurité du revenu, 7 800 000 $. Ce n'est pas du tout de ça dont il s'agit. Le 7 800 000 $ consiste, dans la totalité du projet de loi, y compris en matière de débiteurs fautifs pour les pensions alimentaires, en perception d'intérêts qui seront dorénavant chargés pour les fausses déclarations et y compris à l'égard de remboursements d'intérêts pour l'aide conditionnelle qui a été octroyée en attente d'une indemnité sur laquelle il y a un intérêt qui est versé.

Je vous dirai, M. le Président, que l'urgence d'agir, là, vient du fait, justement, qu'on va mener une grande consultation à partir de fin janvier, que l'opposition nous presse d'accepter au-delà d'une centaine d'organismes, ce qui peut mettre cinq à six semaines – peut-être plus même – d'auditions, que l'on peut raisonnablement croire qu'au mois d'avril il pourra y avoir un projet de loi qui pourra modifier la Loi sur la sécurité du revenu – avril ou mai – et qu'on pourra raisonnablement, si tout va bien, en faire l'adoption, sans bâillon, à la fin juin. Et vous comprendrez qu'une publication d'un règlement durant l'été, suite à l'adoption de cette loi en juin, publication, donc, du règlement, comme on va le faire maintenant... Parce que le règlement sera publié, il y aura 45 jours, et les personnes pourront faire valoir leur point de vue. Ce n'est donc pas avant mars, là, et même peut-être mi-mars qu'on pourra informer les chefs de famille monoparentale avec enfants de cinq ans qui commencent à la maternelle qu'ils doivent se préparer à ce qui s'en vient.

Mais imaginez-vous ce que l'opposition dénoncerait s'il avait fallu qu'on n'assume pas la responsabilité de ce qui s'en vient et qu'on attende à la fin juin pour adopter la disposition 1 de l'article qui est dans la loi maintenant et qu'on la publie en juillet, août, pour avertir le 1er septembre, à la date où les enfants commencent la maternelle cinq ans, le parent que maintenant elle a perdu l'allocation de non-disponibilité de 100 $ puis qu'elle doit participer, ce serait dénoncé. Alors, entre les deux, quant à être dénoncée pour avoir fait quelque chose qui n'était pas fair-play, j'aime autant le faire maintenant, d'autant plus que c'est là la voie dans laquelle on veut s'engager en matière d'aide aux 100 000 chefs de famille monoparentale, aux 75 % des familles monoparentales dont les enfants ont moins de six ans et qui, au Québec, sont sur l'aide sociale. Il y a un phénomène de société, M. le Président.

Je termine en vous citant les recommandations du comité présidé par M. Camil Bouchard à l'effet, et je cite, «de soutenir ces mères dans tout effort qui viserait à les sortir de l'isolement et du sentiment d'accablement et d'impuissance qu'elles peuvent avoir développé vis-à-vis de leur capacité à s'en sortir, en particulier les encourager à s'inscrire dans toutes formes de projets associatifs: ACEF, cuisines collectives, clubs d'emplois, coopératives de logement, regroupements de mères de familles monoparentales, qui viseraient à la fois la sociabilité et l'amélioration de leur condition économique.»

Alors, je comprends qu'on est dans une fin de session et que l'opposition tire sur tout ce qui bouge, mais tout ce qui bouge, absolument tout ce qui bouge, puis aveuglément tout ce qui bouge, mais je dois vous dire, M. le Président, que je crois que c'est responsable de la part du gouvernement d'avoir introduit cet article 1.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Un petit commentaire, M. le Président. La ministre nous écorche pas mal. Le Protecteur du citoyen, lui, dit: «L'attribution d'un tel pouvoir me semble prématurée.» Je veux bien que la ministre nous dise qu'on tire partout, tous azimuts, aveuglément, mais le Protecteur du citoyen, lui, semble-t-il, il a lu le projet de loi, il connaît son affaire: «L'attribution d'un tel pouvoir me semble prématurée, alors qu'une vaste consultation doit avoir lieu dans les mois qui viennent sur les modifications apportées au régime de la sécurité du revenu.» Lui, il juge que c'est prématuré. Que l'on juge, nous, que c'est prématuré, c'est une chose; lui, c'est peut-être autre chose.

On va tenter de clarifier la chose. Est-ce que la ministre est prête à prendre l'engagement aujourd'hui, l'engagement, comme députée de Hochelaga-Maisonneuve, de mettre son siège en jeu, que...

Des voix: Ah! Ah!

M. Copeman: ... – non, une petite question, ne vous inquiétez pas, M. le député de Laviolette, je suis convaincu que la ministre va le faire si elle est sincère – aucun prestataire de la sécurité du revenu ne va voir son barème de non-disponibilité baisser avant le 1er septembre 1997 à cause de ce projet de loi? Si elle met son siège en jeu, avec cet engagement, on peut peut-être passer à un autre article.

Mme Harel: M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Une seconde. Question de règlement, M. le leader?

M. Bélanger: On doit présumer de la bonne foi de tout parlementaire en cette Chambre, M. le Président.

M. Copeman: Laissez la ministre répondre! C'est une grande madame, elle va le faire elle-même.

Le Président (M. Pinard): S'il vous plaît.

Mme Harel: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, le projet de règlement, qui a été distribué aux membres de cette commission plénière, contient, à l'article 3, une disposition qui prévoit qu'il entrera en vigueur le 15ème jour qui suit la date de sa publication à la Gazette officielle , sauf l'article 1, qui entrera en vigueur le 1er septembre 1997.

M. Copeman: Je crois comprendre que la réponse de la ministre est oui.

Mme Harel: Oui. Parce que c'est l'intention du gouvernement de faire en sorte, et on le voit, en fait, avec le projet de règlement qui a été distribué et qui sera prépublié dans la Gazette officielle , c'est l'intention du gouvernement de mettre en vigueur l'ensemble de la loi, sauf l'article 1, qui, lui, ne le sera qu'au 1er septembre.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que ça vous satisfait, M. le député Notre-Dame-de-Grâce? Alors, à ce stade-ci, est-ce que nous pouvons maintenant passer à d'autres interventions sur les articles du projet de loi? À moins que Mme la députée de Saint-François ait d'autres commentaires.

Mme Gagnon-Tremblay: Non, sur l'article 1, M. le Président, je n'ai pas d'autres commentaires.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

Mme Harel: Adopté.

Mme Gagnon-Tremblay: Sur division, M. le Président.

(16 h 10)

Le Président (M. Pinard): Sur division. Sur l'article 2, Mme la ministre, brièvement.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Alors, l'article 2 prévoit qu'une personne doit rembourser des prestations d'aide de dernier recours si elle a reçu ces prestations après la survenance d'un événement qui lui donne la possibilité d'exercer un droit. Ce que ça veut dire, c'est que c'est une aide de dernier recours. Avant d'avoir recours à l'aide de dernier recours, il faut épuiser les droits qu'on peut avoir d'une rente de la Régie des rentes, ou ça peut être une rente d'invalidité ou une rente de retraite, il faut épuiser aussi le droit qu'on puisse avoir d'une indemnité de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, si c'est un accident de travail, ou de la Société de l'assurance automobile du Québec, en attendant qu'il y ait une décision de ces organismes payeurs que je viens de décrire. Alors, en attendant la décision, si la personne est dans un état de dénuement, elle peut obtenir de l'aide conditionnelle. En fait, l'aide est conditionnelle au fait qu'elle ait une décision qui lui donne l'indemnité qu'elle recherche et, si tant est que cette indemnité lui est versée, l'aide conditionnelle est remboursée. Ce que dit l'article 2, c'est, si l'indemnité est versée avec un intérêt, l'aide conditionnelle est remboursée avec l'intérêt.

Alors, ce que ça signifie – et je voudrais insister là-dessus – c'est donc que le prestataire, cependant, ne pourra rembourser plus qu'il n'a reçu. Il n'est pas question de lui charger de l'intérêt sur l'aide conditionnelle. Ce n'est pas de ça du tout qu'il s'agit. Il n'aura pas à payer de l'intérêt comme s'il empruntait en attendant l'aide sociale. Il va simplement rembourser l'intérêt, si tant est – ce n'est pas toujours le cas – qu'un organisme payeur en ait versé avec l'indemnité, et jamais plus que ce qu'il aura reçu.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. M. le Président, on ne peut pas dire que les notes explicatives du projet étaient très, très explicites à ce sujet. Je comprends que les intérêts, ce sont des intérêts qui auront été payés par un tiers, justement.

Par contre, je tiens à souligner les commentaires du Protecteur du citoyen pour voir si, finalement, la réglementation corrige.

À l'article 2 du projet de loi, le Protecteur du citoyen mentionne: «L'article 2 autorise le gouvernement à déterminer les conditions et modalités selon lesquelles des intérêts pourront être réclamés d'un prestataire à qui le ministre a avancé des sommes en attendant qu'il puisse réaliser un droit. S'il est légitime que le gouvernement puisse percevoir des intérêts sur les sommes qu'il a ainsi prêtées à un prestataire de la sécurité du revenu, il s'imposerait que le taux d'intérêt alors appliqué n'excède pas celui dont a pu bénéficier le prestataire durant la période de réalisation de son droit. Ceci permettrait au prestataire de ne pas être pénalisé lorsque le retard à pouvoir réaliser son droit est notamment dû à des délais inhérents au fonctionnement de l'administration publique», que ce soit la SAAQ, la CSST, le Régime de rentes du Québec, ou du Revenu, etc. «À ce sujet, il faut se rappeler que la personne ainsi secourue par le régime est une personne admissible à la sécurité du revenu.» Donc, ce n'est pas quelqu'un qui a un compte de banque qui est bien garni et qui peut se permettre de payer des intérêts au point qu'à un moment donné les intérêts deviennent un capital qui est pratiquement non remboursable.

Alors, est-ce que la ministre peut m'expliquer, à partir de son règlement, si elle répond aux préoccupations du Protecteur du citoyen quant à l'article 2?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Harel: J'invite, M. le Président, les membres de la commission et Mme la députée de Saint-François à prendre connaissance, dans le texte de la Loi sur la sécurité du revenu, à l'article 35 – texte modifié par l'ajout d'un deuxième paragraphe – du paragraphe 3 qui, lui, demeure dans son intégralité et qui prévoit que le montant de remboursement exigible l'est jusqu'à concurrence de la valeur de ce droit et, le cas échéant, des intérêts.

Alors, ce que ça signifie, c'est ceci: il n'y aura jamais quelqu'un qui aura à payer toute sa vie des intérêts qui s'accumulent, ce sont simplement les intérêts versés pour les remboursements attendus. Donc, il s'agit jusqu'à concurrence de la valeur du droit, à savoir, M. le Président, que...

Il est toujours possible aussi pour le Protecteur du citoyen de poser des questions. Moi, j'ai eu l'occasion de lui parler hier pour lui faire valoir que l'objectif qu'il recherchait était atteint justement par ce paragraphe 3 de l'article 35, qui prévoit toujours, en fait, que le montant du remboursement exigible l'est jusqu'à concurrence de la valeur de ce droit et, le cas échéant, des intérêts. Jamais l'aide sociale, jamais, ne peut se faire rembourser plus que l'indemnité versée.

Vous savez, par exemple, une personne pourrait...

Le Président (M. Pinard): Je m'excuse, Mme la ministre, il nous reste 10 minutes...

Mme Harel: D'accord.

Le Président (M. Pinard): ...et nous nous étions entendus que le dernier 10 minutes... Alors, Mme la députée de Saint-François, est-ce que vous désirez continuer à questionner la ministre?

Mme Gagnon-Tremblay: Bon, M. le Président, étant donné qu'on a pris passablement de temps pour le début, pour l'article premier, je souhaiterais qu'on puisse poursuivre. Je pense que c'est important qu'on puisse bien comprendre les autres articles, surtout la réglementation.

Alors donc, dans ce sens, M. le Président, je serais prête à continuer à questionner la ministre et inclure les 10 minutes.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, si vous voulez continuer votre réponse.

Mme Harel: Bien. M. le Président, aujourd'hui même, il y a eu une communication avec le Protecteur du citoyen qui s'est dit satisfait de la réponse qui lui a été transmise quant à sa préoccupation, puisque l'article 35 contient un maximum fixé.

Concrètement, par exemple, une personne pourrait aller chercher, à cause d'obligations familiales ou autres, un montant qui est supérieur à celui qui va lui être remboursé par la Régie des rentes ou par la CSST, mais il ne sera jamais question de se faire rembourser la différence. Il est juste question, lorsqu'il y a cette aide conditionnelle, lorsqu'elle est versée avec des intérêts, que ça vienne compenser la somme, disons, la prestation versée.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Quel est l'ordre des sommes dont on parle, M. le Président? Moi, j'essaie de comprendre. Je comprends la mécanique, mais il me semble que c'est un cafouillage pas mal, ça, tenter de savoir, à un moment donné, quel est l'intérêt qui a été porté sur un droit que quelqu'un a reçu versus un intérêt qui est dû sur une aide conditionnelle. C'est des calculs pas mal fins pour des fonctionnaires. Quelle est la somme globalement due? On parle de...

Mme Harel: Ils sont capables d'en faire, des calculs, encore plus sophistiqués.

M. Copeman: Oui, oui, mais est-ce que c'est efficace ou non? Ça, c'est autre chose.

Mme Harel: Mais, en fait, l'aide conditionnelle, ça représente un montant d'environ 15 500 000 $.

M. Copeman: Par année?

Mme Harel: Par année, l'aide conditionnelle qui est versée par la sécurité du revenu en attendant des indemnités, et c'est 1 000 000 $, à peu près, les intérêts.

M. Copeman: Alors, on peut parler de récupérer 1 000 000 $...

Mme Harel: C'est ça.

M. Copeman: ...avec ces mesures-là, en autant que l'aide d'une tierce partie que la personne reçoit porte également des intérêts.

Mme Harel: Uniquement.

M. Copeman: Uniquement.

Mme Harel: Et c'est bien spécifié d'ailleurs là-dessus. M. le Président, j'aimerais d'ailleurs en profiter pour déposer...

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Ça, M. le Président, j'essaie de voir quels sont les organismes qui généralement paient des intérêts? Est-ce que c'est fréquent? Quels sont les organismes qui paient des intérêts sur des sommes avancées?

Mme Harel: Je vais vous les énumérer. Alors, il s'agit de la CSST, à la suite d'une décision rendue en révision ou en appel; de la Régie des rentes du Québec, sur une prestation due; de la Société de l'assurance automobile du Québec, à la suite d'une décision rendue en révision ou en appel; de la Commission des normes du travail, sur le salaire dû lorsque la Commission a exercé à l'encontre d'un employeur un recours en réclamation d'une somme d'argent.

M. le Président, je voudrais déposer deux amendements, à l'article 4 et à l'article 6, qui donnent suite aux représentations du Protecteur du citoyen et qui vont donc satisfaire les recommandations qu'il a faites aux membres de cette Assemblée.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je comprends bien, finalement, que c'est surtout dans des cas d'appel, des cas de révision. Alors, comme on n'a versé aucune somme et qu'on doit les verser suite à une décision qui est rendue par... suite à un appel ou encore une révision, à ce moment-là, l'organisme est obligé de rembourser les intérêts. Donc, ce sont ces intérêts, si je comprends bien, en vertu du projet de loi de la ministre, que la personne qui est sur la sécurité du revenu est obligée de rembourser au gouvernement. C'est-à-dire tous les intérêts que la personne a pu percevoir à cause du délai de révision ou encore du délai du droit d'appel.

(16 h 20)

Mme Harel: Je peux vous donner un exemple concret qu'on m'a transmis. Par exemple, prenons un cas de CSST. Alors, la personne reçoit 500 $ par mois de prestations d'aide sociale, pendant une période de cinq mois, en attente d'une décision de la CSST, puis, au bout de ces cinq mois, elle a la décision et la CSST lui verse un montant de 10 000 $. Ça couvre donc cette période-là, mais ça couvre une période, dans le fond, qui a pu être plus longue aussi que les cinq mois. La CSST a versé 1 000 $ d'intérêts sur le 10 000 $. Alors, le ministère de la Sécurité du revenu va récupérer le montant des prestations versées, soit 2 500 $, plus des intérêts sur la période de cinq mois seulement. Ces intérêts devront être calculés au prorata du montant des prestations. Donc, il va s'agir de 250 $. Ça signifie 100 $ par mois et, finalement, 50 $ d'intérêts. Alors donc, il ne pourra jamais se rembourser de plus...

Mme Gagnon-Tremblay: Jamais s'enrichir.

Mme Harel: Non. Ce n'est pas un enrichissement sans cause.

Mme Gagnon-Tremblay: Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Ça va. Est-ce qu'à ce stade-ci l'article 2 est adopté?

Mme Gagnon-Tremblay: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division.

Mme Harel: Je comprends, M. le Président, que vous avez reçu les amendements.

Le Président (M. Pinard): Oui.

Mme Harel: Aux articles 4 et 6.

Le Président (M. Pinard): Pour les articles 4 et 6.

Mme Harel: C'est bien le cas.

Le Président (M. Pinard): Les amendements ont été transmis également à l'opposition. Alors, l'article 3, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, à l'article 3, on prévoit le paiement de frais. C'est des frais de 100 $, dans le règlement, par débiteur alimentaire qui est fautif et qui oblige le ministère de la Sécurité du revenu à être subrogé aux droits du créancier alimentaire.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Comme l'article 3 réfère à la réglementation, on me permettra de regarder la réglementation qui sous-tend.

(Consultation)

Mme Gagnon-Tremblay: Qu'est-ce que la ministre, M. le Président, a répondu à l'interrogation du Protecteur du citoyen, à la page 2, concernant l'article 3?

Mme Harel: Rappelez-moi ce que disait le Protecteur du citoyen.

Mme Gagnon-Tremblay: En somme, il disait: «En ce qui concerne les frais qu'un débiteur alimentaire sera tenu de payer au ministère de la Sécurité du revenu en vertu de la disposition proposée par l'article 3, nous en ignorons la nature puisqu'ils seront fixés par règlement. Cependant, puisqu'ils s'ajouteront aux frais judiciaires de déclaration et de perception d'une créance alimentaire, nous porterons évidemment une attention particulière aux dispositions réglementaires décrétant ces frais qui diminueront encore plus la capacité du débiteur de répondre aux besoins des siens. Des efforts devront être faits afin de régler de la façon la plus simple et la moins onéreuse les litiges entre le ministère et le débiteur alimentaire.»

Mme Harel: D'abord, les frais sont de 100 $. Ce sont des frais qui sont ouverts seulement lorsqu'il y a subrogation.

D'autre part, les frais ne peuvent jamais être perçus avant que les arrérages n'aient été payés. Ça signifie que les arrérages doivent être en priorité payés à la créancière. C'est vraiment important de souligner que les frais n'auront jamais priorité sur un paiement au créancier alimentaire. Donc, il y a d'abord le paiement au créancier alimentaire et lorsqu'il y a, en surplus du paiement au créancier alimentaire, possibilité, finalement, d'une certaine façon, de blâmer le débiteur, si vous voulez, créancier... Vous savez, il y a 160 000 000 $ d'arrérages, c'est-à-dire de pensions alimentaires impayées, à l'aide sociale.

Mme Gagnon-Tremblay: Vous pouvez me donner un exemple précis d'un cas d'une pension alimentaire qui serait impayée et ce qui arrive à ce moment-là? Est-ce que vous pouvez me donner un cas précis d'application du règlement et de l'article 3 du projet de loi?

Mme Harel: Me permettez-vous de demander à Me Oudar, qui pourrait donner un exemple.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, sûrement.

Le Président (M. Pinard): Maître.

Mme Oudar (Manuelle): Manuelle Oudar, Direction des affaires juridiques à la Sécurité du revenu. La subrogation s'applique lorsque, dans ce cas-ci, une personne serait en retard dans un versement de pension alimentaire. Il y a deux situations. Il peut arriver que ce soit une situation qui est visée, dont le ministère du Revenu effectue la perception. S'il y a un retard qui est dû à la perception effectuée par le ministère du Revenu, il n'y a aucuns frais d'imposés. Il faut que ce soit effectivement un retard du débiteur alimentaire de verser sa pension alimentaire soit au ministère du Revenu, soit directement à la créancière, retard qui fait que la créancière se trouve à la sécurité du revenu et que le ministère de la Sécurité du revenu est obligé de se subroger, d'effectuer les calculs de pension alimentaire, d'engendrer des coûts pour effectuer ce calcul, analyser les jugements, et c'est au bout de ce processus-là que des frais de 100 $ seront imposés au débiteur alimentaire, mais jamais en pénalisant la créancière alimentaire, tout comme dans la Loi sur le ministère de la Sécurité du revenu, où la créancière alimentaire n'est jamais pénalisée pour des frais imposés au débiteur.

Le Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Alors...

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Je remercie...

Le Président (M. Pinard): ...Mme la députée de Saint-François, nous avons maintenant complété...

Mme Gagnon-Tremblay: Oh! déjà?

Le Président (M. Pinard): Oui. Le temps passe, le temps file.

Mme Gagnon-Tremblay: Alors, vous voyez, M. le Président, hein, c'est ce qui arrive avec un bâillon. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François...

Mme Gagnon-Tremblay: On a de la difficulté lorsqu'on suspend les règles.

Le Président (M. Pinard): Mme la députée de Saint-François...

Mme Gagnon-Tremblay: On reste sur notre faim.

Le Président (M. Pinard): ...maintenant, est-ce que vous êtes disposée à ce que nous adoptions l'article 3? Sur division?

Mme Gagnon-Tremblay: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Alors, à l'article 4, je vais vous lire l'amendement. L'article 4 de ce projet de loi est modifié par le remplacement du paragraphe 1° par le suivant:

1° par l'addition, à la fin du deuxième alinéa, de la phrase suivante: «Ces intérêts sont capitalisés mensuellement dans la situation où une personne doit un montant à la suite d'une déclaration qui contient un renseignement faux ou à la suite de la transmission d'un document contenant un tel renseignement de manière à se rendre ou, le cas échéant, à rendre sa famille admissible à un programme d'aide de dernier recours, ou de manière à recevoir ou à faire octroyer à sa famille des prestations supérieures à celles qui lui auraient autrement été accordées.» Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Harel: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Adopté sur division. D'accord. Est-ce que l'article 4, tel qu'amendé, est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que l'article 5 est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Je vais maintenant vous lire l'amendement à l'article 6 qui nous a été déposé. L'article 6 amendé: l'article 6 de ce projet de loi est modifié par la suppression du paragraphe 3°. Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que l'article 6, dûment amendé, est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Sur division. L'article 7. Est-ce que l'article 7 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Alors, en conséquence, nous avons maintenant terminé nos travaux. Je remercie le député de Notre-Dame-de-Grâce, la députée de Saint-François ainsi que la députée de Sherbrooke et la ministre de la Sécurité du revenu qui y ont participé.

Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 29)

(Reprise à 16 h 32)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Nous reprenons nos travaux. Nous venons de terminer la commission plénière. Alors, M. le Président.

M. Létourneau (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, et qu'elle l'a adopté avec des amendements.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demande de passer à l'étape de l'adoption du projet de loi.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 6 de notre feuilleton, Mme la ministre de la Sécurité du revenu propose l'adoption du projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. Je vous rappelle que la durée maximum de ce débat est de 30 minutes: 10 minutes réservées pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et, enfin, cinq minutes de réplique pour la ministre de la Sécurité du revenu.

Y a-t-il des intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 84? Mme la ministre de la Sécurité du revenu.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, j'ai eu l'occasion de le dire: À entendre l'opposition tantôt, je me suis rendu compte qu'elle s'était trompée d'année, de loi et de ministre. Ils parlaient de la loi n° 115 qui était déposée en 1995 par ma collègue, Mme la députée de Chicoutimi; nous sommes en 1996, et je dépose le projet de loi n° 84. Et, en peu de mots, je vous le résume.

J'ai compris qu'aujourd'hui l'opposition avait décidé de tirer sur tout ce qui pouvait bouger, y compris en passant l'éponge sur ce que le projet de loi n° 84 prévoit, c'est-à-dire essentiellement dissuader les prestataires qui pourraient être tentés de transmettre des faux renseignements puis des fausses déclarations ou encore des personnes qui pourraient être tentées, parce qu'elles sont débiteurs de créances alimentaires d'une famille qu'elles ont à l'aide sociale, de ne pas respecter leur ordonnance, qui pourraient être tentées de le faire. Alors, l'opposition a décidé, là, qu'elle passait l'éponge au complet.

Ça m'est apparu tellement, d'une certaine façon... Ça m'est apparu irresponsable, ça, je vous le dis bien honnêtement, M. le Président, de ne pas vraiment non seulement avoir lu le projet de loi, mais, en plus de ça, de faire un discours complètement échevelé sur la question des chefs de famille monoparentale dont les enfants de cinq ans commenceront en maternelle plein temps au mois de septembre prochain tout en tenant un discours qui, de prime abord, peut avoir l'air généreux, quand on sait qu'ils ont tiré à boulets rouges sur la décision du Sommet, auquel ils participaient et où ils n'ont pas dit un mot, quand on était au Sommet. Mais ici, dans l'Assemblée, ils ont tiré à boulets rouges sur ce fonds de lutte à la pauvreté qui va justement favoriser l'insertion en priorité de ces 8 000 chefs de famille monoparentale dont les enfants commenceront la maternelle plein temps en septembre.

Et je vous rappelle aussi l'urgence de ne pas attendre à la fin de session du mois de juin prochain pour prépublier dans la Gazette officielle , pendant 45 jours, de manière à ce qu'au mois d'août, à la dernière minute, quand les enfants rentrent à la maternelle, de les avertir en sauvage qu'elles doivent maintenant s'inscrire dans un barème de participant, avec la possibilité d'avoir 120 $. Parce que c'est maintenu. Contrairement à tout ce qu'on a prétendu, M. le Président, c'est maintenu, y compris – et j'en profite, là, parce que j'ai devant moi le député de Laporte qui en a parlé tantôt – l'allocation unifiée pour enfant. La couverture des besoins essentiels des enfants, comme on la retrouve à l'aide sociale, va être entièrement maintenue pour les familles, pour celles des familles qui sont à l'aide sociale ou qui en sortent et qui ont à y revenir du fait, peut-être, de ne pas avoir trouvé la job «steady», comme disait Yvon Deschamps.

Alors, pour ces familles, la couverture des besoins essentiels est entièrement maintenue. Il est faux de prétendre, comme cela a été le cas plus tôt, que l'allocation unifiée permettra au gouvernement, de façon détournée, d'aller chercher un certain montant sur les allocations familiales actuellement versées qui va être intégrée. C'est faux. L'allocation unifiée des enfants va maintenir, pour les familles qui sont sur l'aide sociale, la pleine couverture des besoins essentiels des enfants, sans perte, comme on l'a prétendu, de 100 $ par mois pour une monoparentale avec un enfant ou avec une perte encore plus élevée s'il y a deux enfants. Non, ce n'est pas le cas.

Alors, qu'est-ce que fait le projet de loi n° 84? À l'égard des chefs de famille monoparentale qui bénéficient du barème de non-disponibilité mensuel de 100 $, le principe reste le même, à savoir que le barème de non-disponibilité s'applique à une personne qui garde un enfant à sa charge, sauf si cet enfant peut fréquenter l'école. À partir de septembre prochain, l'enfant de cinq ans pourra fréquenter à temps plein l'école. Et ce qu'on adopte aujourd'hui va être prépublié dans la Gazette officielle , va donner lieu à toute une information et à tout un parcours d'insertion pour que le 1er septembre prochain, le parent gardien d'un enfant de cinq ans qui commence l'école à plein temps puisse peut-être pouvoir commencer l'école aussi ou, en fait, commencer une démarche d'insertion.

Alors, la modification apportée va s'appliquer par règlement à la garde d'un enfant qui peut fréquenter à temps plein une classe maternelle, et la mise en vigueur est prévue pour le 1er septembre prochain seulement. Ça devient nécessaire d'introduire cette disposition, M. le Président, parce qu'il faut adapter cette façon de faire à la grande réforme qu'on introduit en matière familiale. Et, si l'enfant fréquente une classe maternelle à temps plein, il va être possible dorénavant au parent gardien d'obtenir un barème de participant de 120 $ mensuellement en participant à des mesures d'employabilité, ou encore en travaillant un retour sur le marché du travail, ou en formation.

(16 h 40)

La loi aussi accorde un droit d'imposer des frais de 100 $ au débiteur alimentaire fautif qui oblige le ministère de la Sécurité du revenu à utiliser le mécanisme de subrogation pour obtenir la perception des arrérages de pension alimentaire. Rappelons que les pensions impayées depuis des années aux parents gardiens qui ont recours à l'aide sociale totalisent 160 000 000 $. Les frais engagés pour remédier à ces négligences sont considérables – les frais gouvernementaux – alors que l'imposition telle que prévue dans le projet de loi n° 84 d'un frais rapportera annuellement 500 000 $. L'idée, c'est de ne pas donner de prime à la négligence.

De plus, dans les cas où il y aura transmission de faux renseignements ou de faux documents, le ministère capitalisera des intérêts sur les sommes dues suite à ces fausses déclarations. Cette capitalisation des intérêts imposera une pénalité totale annuelle de 1 000 000 $. Mais il faut comprendre qu'il y a pour 83 000 000 $ de trop-payé qui sont dus à de fausses déclarations. Alors, ce qui sera chargé en intérêts, ce sera l'équivalent de 1 000 000 $. Rappelons que l'an dernier, donc, Québec a versé en trop 83 000 000 $, dû à ces fausses déclarations.

La loi permet également au ministère de la Sécurité du revenu d'obtenir le paiement des intérêts versés sur l'aide conditionnelle remboursable suite à l'obtention de l'indemnité d'un organisme comme la CSST, la Société de l'assurance automobile, la Régie des rentes ou encore de sommes reçues à la suite d'un jugement. Tout en laissant le principe que le prestataire ne pourra jamais rembourser plus qu'il n'a reçu, la règle permet de récupérer un revenu annuel d'intérêts estimé à environ 500 000 $ sur les 15 000 000 $ d'aide conditionnelle versés en attendant. C'est comme si la sécurité du revenu jouait un peu le rôle d'une institution prêteuse pour des personnes qui ne pourraient pas obtenir un prêt et c'est finalement cette aide conditionnelle qui, lorsqu'elle est remboursée avec intérêts... Le prestataire n'aura pas à payer, lui, des intérêts si l'organisme payeur n'en paie pas, mais, lorsqu'il y a des intérêts versés sur les indemnités et qu'il y a remboursement de l'aide conditionnelle, alors, à ce moment-là, ça comprendra les intérêts.

M. le Président, permettez-moi aussi de signaler, puisqu'on a beaucoup fait état du commentaire du Protecteur du citoyen, que j'ai eu l'occasion de communiquer avec lui hier, que j'ai déposé, d'ailleurs, en cette Chambre la lettre que je lui ai transmise suite à notre communication téléphonique pour lui dire que je lui transmettais le règlement et que j'avais l'intention d'apporter deux amendements – ce que j'ai fait, d'ailleurs, en comité plénier – pour donner suite à ses recommandations, notamment pour que la loi, et pas seulement le règlement, spécifie que les intérêts chargés ne sont versés que dans les cas de fausses déclarations. Et je dois vous dire que le Protecteur du citoyen avait également dans ses commentaires salué l'introduction d'une disposition qui permet un pouvoir discrétionnaire au ministre de concéder une diminution ou une annulation des intérêts ou de prévoir un remboursement mensuel moindre que celui prévu par règlement de manière à tenir compte de la réalité des personnes aux prises avec de sérieuses difficultés.

À cet effet, le Protecteur du citoyen a spécifié qu'il était très favorable à une telle disposition, et, voyez, je vais vous citer, d'ailleurs, le Protecteur: «Cette souplesse nouvelle de la règle me semble plus conforme aux exigences de la Charte des droits et libertés de la personne en matière d'assistance financière. Il est intéressant de noter le pouvoir discrétionnaire accordé à la ministre de permettre à un débiteur de rembourser un montant mensuel moindre que celui fixé par règlement si elle estime que le minimum réglementaire exigé risque de compromettre la santé ou la sécurité du débiteur ou de l'amener au dénuement total.»

Le Président: Mme la ministre, je vous invite à conclure à ce moment-ci.

Mme Harel: Alors, mon Dieu! M. le Président, je vous dirai simplement en conclusion que ce projet de loi me semble s'imposer pour justement faire en sorte qu'on puisse ne pas prendre par surprise des débiteurs fautifs, mais non plus prendre par surprise les chefs de famille monoparentale dont les enfants entreront à l'école au mois de septembre prochain. Je vous remercie.

Le Président: Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, la ministre se souviendra que la ministre a déposé ce projet de loi n° 84, qui modifie la Loi sur la sécurité du revenu, mardi dernier. Nous sommes rendus le mercredi 18 décembre, et le gouvernement est obligé de suspendre les règles de l'Assemblée nationale pour faire adopter à toute vapeur ce projet de loi: un autre bâillon. Il y a d'autres projets de loi aussi qui feront partie du même bâillon. Entre autres, il y a le projet de loi n° 91, qui a été déposé hier, puis on voudrait qu'on l'adopte aujourd'hui. Alors, c'est ça, l'autre façon de gouverner. L'autre façon de gouverner devait faire les choses autrement, mais on se rend compte que c'est pire que c'était auparavant.

On se souviendra que ce projet de loi a été déposé mardi dernier. Aujourd'hui, on voulait en faire l'étude et on n'avait même pas les règlements. Les règlements ont été déposés au tout début de la commission plénière. Je conviens que la ministre nous a mentionné qu'on n'a pas besoin d'avoir les règlements, que ce n'est pas urgent nécessairement d'avoir les règlements, qu'on peut très bien adopter le projet de loi, que la réglementation viendra après. Mais on se rend compte que, dans le projet de loi, ce projet de loi qui ne contient que sept articles, tout dépend des règlements, tout, du premier article au quatrième, cinquième article, dépend des règlements.

À l'article premier, on mentionne – il est très clair – on dit: «garde un enfant à sa charge qui ne fréquente pas l'école parce qu'il n'a pas atteint l'âge requis ou» par les mots... – on fait des modifications concernant la garde d'un enfant à la charge – «dans les cas et aux conditions prévues par règlement». Alors donc, il faut aller voir le règlement pour savoir ou connaître la portée de l'article 1. À l'article 2, on modifie tout ce qui touche les intérêts qui peuvent s'ajouter au montant du droit réalisé; encore là, on se réfère toujours au règlement. L'article 3, c'est la même chose: «aux conditions déterminées par règlement». L'article 4: «dans les cas déterminés par règlement». Alors, ce projet de loi est fonction des règlements. Et on sait très bien qu'un projet de loi...

Il est beaucoup plus difficile de modifier un pouvoir législatif qu'un pouvoir réglementaire. Un pouvoir législatif, on ne peut pas le modifier sans le faire par une autre loi. Donc, il faut revenir devant l'Assemblée nationale, il faut en discuter, il faut souvent aussi consulter les gens, écouter les gens, entendre les gens et bien sûr réagir à ces interventions, parce qu'il faut bien connaître aussi l'impact que tout projet de loi peut avoir sur des clientèles. Tandis que le pouvoir réglementaire peut être changé par un autre règlement. Donc, dans les circonstances, on prépublie un règlement, on le publie et souvent on le fait durant les vacances, les vacances estivales ou... On le fait durant les vacances. Quand il s'agit d'aller chercher des sommes auprès de la clientèle, on le fait souvent à des moments qui ne permettent pas des manifestations, qui ne permettent pas de faire trop de vagues.

Alors, M. le Président, on nous demande d'adopter un projet de loi et on nous blâme de vouloir faire de l'obstruction sur un projet de loi qui contient sept articles, qui a été déposé mardi dernier et que le gouvernement voudrait qu'on adopte immédiatement. Tout à l'heure, en commission plénière, c'est là qu'on a constaté jusqu'à quel point cet exercice est ridicule, cet exercice du bâillon. De bonne foi, nous avons discuté du projet de loi. Nous avons eu une heure – parce qu'on a suspendu les règles – pour étudier le projet de loi et pour prendre connaissance des règlements. Je pense que l'exercice a été fait de bonne foi, de part et d'autre. On est arrivé à l'article 3 et on a dû suspendre cette commission plénière, on a dû rester sur notre faim parce que le délai était terminé.

Alors, donc, l'opposition n'a pas été en mesure de faire son travail. Ça signifie que le gouvernement aurait été aussi bien de déposer son projet de loi, de siéger tout seul, de l'adopter, parce que je ne vois pas de quelle utilité on a été, je ne vois pas de quelle utilité l'opposition a été, puisque, de toute manière, quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, quelle que soit la volonté ou non, on nous passe dessus puis on adopte de toute façon le projet de loi.

M. le Président, le gouvernement a aboli certaines mesures... La ministre nous parlait tout à l'heure de questions de laxisme et de la possibilité d'aller chercher des sommes qui normalement devraient être récupérées. Mais je rappelle que, dès l'entrée au pouvoir de ce gouvernement, ce gouvernement a aboli certaines mesures de contrôle, notamment la remise de chèques de main à main, cette remise à laquelle on a mis fin. Il s'agissait d'un projet-pilote. Souvenons-nous qu'il s'agissait d'un projet-pilote qui avait été mis en place par mon collègue de l'époque et qu'il s'agissait de remettre de main en main le chèque au bénéficiaire de la sécurité sociale, donc qui permettait, entre autres, un contrôle, puis ce projet-pilote donnait des résultats fort intéressants, M. le Président.

(16 h 50)

Dès que ce gouvernement a pris le pouvoir, la ministre de l'époque a décidé d'y mettre fin. Elle y est revenue par la suite. Par la suite, elle y est revenue, mais elle y a mis fin pendant un certain temps parce qu'elle pensait de faire mieux puis elle pensait qu'on pouvait réussir à contrôler, à avoir le contrôle tout en faisant confiance et en faisant foi, là, de... pensant qu'il n'y avait pas de problème et que personne ne pouvait faire de mauvaise déclaration ou encore que tout allait pour le mieux. Alors, on se rend bien compte que des mesures de contrôle sont importantes. Malgré qu'on ne puisse pas présumer de la bonne foi des gens, je pense que les mesures de contrôle sont tout à fait importantes.

La ministre mentionnait tout à l'heure que l'opposition tire sur tout ce qui bouge. Mais je dois dire que le gouvernement actuellement taxe et impose, surtout taxe tout ce qui bouge, sans planification. On taxe de façon tout à fait improvisée. On a vu la pluie de taxes qui s'abat sur le Québec depuis un certain temps, surtout depuis la venue du nouveau premier ministre. Donc, on ne peut pas faire autrement que de s'opposer, puis de s'opposer au fameux projet de loi pour lequel on a des bâillons, parce qu'on se rend bien compte que ce n'est pas pour redonner aux clientèles, mais c'est pour aller chercher.

S'il y a urgence actuellement pour pouvoir adopter ce projet, ce n'est pas parce que la ministre veut donner des sommes à cette clientèle qui est la plus démunie au Québec, M. le Président; au contraire, c'est pour aller chercher dans la poche des plus démunis. Et la ministre l'a bien admis, c'est 7 800 000 $ qu'elle ira chercher dans la poche des contribuables avec l'adoption de ce projet de loi. Et ça, quand je parle des contribuables, ce n'est pas les députés ici, à l'Assemblée nationale, là, c'est ceux qui en ont déjà peu, c'est ceux qui n'en ont pas dans leur poche. Alors, c'est pour ça qu'il est urgent d'adopter ce projet de loi. C'est dans le but de redonner au ministre des Finances une somme de 7 800 000 $ qu'elle pourra aller chercher dans les poches des contribuables les plus démunis.

Parce qu'il n'y a pas d'urgence à adopter ce projet de loi. Il n'y a aucune urgence à l'adopter, puisque la mesure, la principale mesure visée dans ce projet de loi entrera en vigueur seulement en septembre prochain, c'est-à-dire lorsque la ministre de l'Éducation pourra permettre aux personnes, aux enfants de la maternelle cinq ans d'aller à l'école, et ainsi cette mesure pourra affecter les mères actuellement qui ont charge d'enfant. Mais actuellement il n'y a absolument aucune mesure. D'ailleurs, M. le Président, le Protecteur du citoyen le mentionne. Étant donné que la ministre a déjà déposé un livre vert pour discuter et élaborer davantage avec les intervenants du milieu lors d'un forum ou d'une commission parlementaire, alors, à ce moment-là, il eût été préférable d'attendre justement les conclusions de cette étude et de permettre à la ministre d'arriver avec un plan d'ensemble, un plan qui aurait permis d'évaluer l'impact sur les clientèles au lieu d'improviser, d'aller rapidement dans le but d'aller chercher un 7 800 000 $.

C'est un très mauvais cadeau qu'on fait à cette catégorie des plus démunis, la veille de Noël 1996. Cette clientèle se souvenait du cadeau empoisonné qu'avait fait le gouvernement en décembre 1995. On récidive, actuellement. Ils se souviendront bien sûr de ce cadeau de Noël 1996. C'est une autre somme, comme je le mentionnais, qu'on va chercher dans les poches des contribuables les plus démunis. On est obligé d'imposer le bâillon à l'opposition pour pouvoir adopter ce projet de loi qui n'est pas un projet de loi qui est urgent. Alors, M. le Président, vous comprendrez, dans les circonstances, que l'opposition ne peut pas être en faveur d'un tel projet de loi.

Le Président: Merci, Mme la députée. Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité. Ah! M. le député de Rivière-du-Loup, pardon.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. On est à adopter une loi sur laquelle on a déjà eu l'occasion d'intervenir lors de l'adoption du principe. Ça fait à peine quelques heures, avec les règles bousculées qu'on vit à l'heure actuelle.

Alors, je me dois, M. le Président, de revenir au moment de l'adoption en m'étonnant d'abord qu'au moment où on est à préparer une grande, une vaste consultation sur toute la réforme de la sécurité du revenu, une réforme qui ne semble pas en elle-même être si urgente que ça, parce que le gouvernement nous l'avait promise pour le Sommet. Évidemment, il nous l'avait promise pour avant le Sommet, il nous l'a promise pour le Sommet et, à la suite de ça, ça a été remis. On est rendu avec des consultations pour l'hiver.

Maintenant, on nous plaide l'urgence pour adopter quelques modifications pour venir chercher de l'argent. Si on pouvait être convaincu que l'argent qu'on viendra chercher et l'application uniforme de règles de rigueur, une meilleure gestion des fonds publics... Évidemment, on pourrait souscrire à ce projet de loi là, en tout cas, c'est un des principes auxquels, moi, personnellement, je souscris. Mais, pour vérifier ça pleinement, il y a des étapes d'étude de projets de loi qui sont essentielles.

On est à la veille, je disais, d'une grande consultation sur l'aide sociale, le régime de la sécurité du revenu. On nous plaide aujourd'hui l'urgence pour des bouts de réforme de la Loi sur la sécurité du revenu. Mais la vraie urgence en matière de sécurité du revenu, en matière d'aide sociale, c'est de créer des emplois. On a trop de monde sur l'aide sociale. On aura beau enlever à ceux qui sont dessus présentement un peu d'argent comme ci, des intérêts, on aura beau faire toutes sortes de choses, il y a trop de monde qui est présentement sur l'aide sociale.

On peut se demander comment le gouvernement peut nous plaider aujourd'hui – un projet de loi, en matière de sécurité du revenu, qui vient tout juste d'être déposé il y a quelques jours – l'urgence de l'adopter quand on s'apercevait il y a quelques semaines, au moment où on questionnait le gouvernement... On annonçait un beau matin: Au mois de novembre, 6 000 emplois de plus ont été perdus. On questionnait le gouvernement: Avez-vous une politique économique? Savez-vous un peu comment vous allez vous y prendre pour développer des emplois pour les gens qui sont sur la sécurité du revenu? Puis le gouvernement, les gens se regardaient, parlaient de mesures diverses dans différents domaines qui sont prises, mais personne ne pouvait dire: Bien, oui, dans notre réforme sur la sécurité du revenu, l'objectif, c'est qu'on sait qu'il va se créer des milliers, des dizaines de milliers d'emplois. C'est là qu'on espérait avoir l'urgence.

Si on voulait nous faire adopter de toute urgence, en fin de session, des projets de loi sur lesquels le gouvernement nous dirait: On mise là-dessus, on mise sur ce projet de loi là, on pense que ça va créer dans les prochains mois des entreprises qui vont permettre de générer en six mois 10 000, 15 000 emplois, sortir 10 000 ou 15 000 personnes de la sécurité du revenu, je suis convaincu que les parlementaires, unanimement, adopteraient des projets de loi comme ceux-là, qui généreraient de l'emploi, qui feraient qu'il y aurait moins de monde sur la sécurité du revenu. Et il y aurait le même effet; ils auraient exactement le même effet: ils réduiraient... ils permettraient au gouvernement, via des primes moindres à payer, moins d'aide sociale à payer et plus de gens qui paient des impôts, d'atteindre le même objectif au niveau de ses finances publiques.

Mais, non, plutôt que ça, on nous arrive avec un projet de loi pour lequel on ne connaît pas la réglementation. M. le Président, on me pardonnera d'être extrêmement prudent quand le gouvernement dépose des projets de loi aussi larges, avec des réglementations qui peuvent avoir autant d'impact, parce que tout le monde va être, en cette Chambre, prudent pendant plusieurs années avec ce gouvernement-là.

Ceux qui ont vu, par exemple, le dossier de l'aide juridique ou le droit de produire en agriculture – j'en ai parlé tout à l'heure – quand on a vu les beaux principes énoncés dans des lois puis les discours qui venaient avec, quand on a vu les réglementations, ensuite, qui derrière les portes closes du Conseil des ministres étaient adoptées, on s'aperçoit qu'il faut être extrêmement prudent quand on vient pour voter et, surtout, voter sur des lois, M. le Président, qui sont passées sans que les étapes appropriées d'étude, de discussions publiques aient pu être faites.

Alors, c'est pour ces raisons-là, M. le Président, que je vais voter contre l'adoption du projet de loi n° 84.

Le Président: Très bien, M. le député de Rivière-du-Loup. Maintenant, je cède la parole à Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité pour sa réplique de cinq minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Alors, M. le Président, en écoutant le député de Rivière-du-Loup, je me rends compte qu'il est, dans des dossiers différents, toujours égal à lui-même, c'est-à-dire vertueux en principe, mais, en pratique, jamais là lorsqu'il s'agit d'appliquer ces principes. J'avais eu l'occasion, dans le dossier de l'équité, de m'en rendre compte et à nouveau je m'en rends compte dans le dossier qui est déposé aujourd'hui.

(17 heures)

M. le Président, je pense qu'il y a une confusion. Les règlements, ils ont été déposés. On a même eu l'occasion en comité plénier de les regarder. Et ce n'est pas un projet de loi très substantiel. Il y a sept articles, puis il y en a un, c'est la date. Alors, il en reste six, et il y en a un, finalement, c'est un pouvoir discrétionnaire pour être capable de moduler si les personnes rencontrent des difficultés sérieuses. Alors, de façon substantive, il reste cinq articles. Il me semble que ce n'est pas là matière à complication puis que, avec un règlement déposé il y a déjà maintenant, en Chambre, deux heures, il aurait été possible d'en prendre connaissance.

J'avais mis en garde Mme la députée de Saint-François contre une interprétation qui me semblait inadéquate, inappropriée, qui consistait à dire qu'avec le projet de loi le gouvernement allait chercher 7 800 000 $. Ce n'est pas vrai. Je veux le répéter parce que je comprends que ma mise en garde n'a pas été, disons, retenue. Mais ce n'est pas plus le fait aussi que les contribuables les plus démunis vont payer. J'entends ça: les contribuables les plus démunis. En fait, ceux dont il s'agit dans ce projet de loi, ce sont les débiteurs alimentaires fautifs qui ne paient pas la pension alimentaire, pour lesquels il y a 160 000 000 $ d'arrérages.

Ceux qui sont touchés par ce projet de loi, ce sont les prestataires qui ont fait de fausses déclarations ou fourni de faux renseignements, pour lesquels il y a eu 83 000 000 $ de trop-payé cette année et évidemment aussi – et je terminerai par cela – les chefs de famille monoparentale dont les enfants de cinq ans entreront à la maternelle à plein temps au mois de septembre prochain. Mais, pour celles-là, justement, est-ce qu'il n'est pas de loin beaucoup plus responsable – puisqu'elles pourront justement ne pas être perdantes, dans la mesure où elles savent suffisamment d'avance où, pouvant se préparer, elles seront en mesure d'aller chercher une participation, un programme d'employabilité, un rattrapage scolaire, une formule d'alphabétisation dans un groupe communautaire ou tout simplement le maintien, si vous voulez, de la fréquentation postsecondaire, avec le programme pour les chefs de famille monoparentale qui peuvent compléter le collégial – de ne pas attendre la fin de session en juin prochain puis de me faire reprocher par le député de Rivière-du-Loup, la députée de Saint-François d'avoir finalement agi en sauvage, hein, si tant est qu'on avait laissé les choses aller et qu'en juin on avait averti que ça s'en venait pour septembre, puis qu'on aurait prépublié dans la Gazette au mois de juillet puis au mois d'août puis, finalement, dans le chèque du mois de septembre, envoyé un petit dépliant pour dire: C'est fait?

M. le Président, je préfère de loin me faire faire le reproche qu'il n'y a pas d'urgence ce mois-ci, prépublier dans la Gazette comme c'est requis, puis en mars, quand tout sera complété, envoyer dans le chèque mensuel l'information sous forme de dépliant pour qu'en avril, mai la personne concernée puisse s'inscrire dans une mesure d'employabilité, où elle ne sera pas perdante. Et là, Mme la députée de Saint-François, si le projet de loi touche, si vous voulez, pour 7 800 000 $ de considérations budgétaires, le moindrement que la prestataire veut participer, alors c'est le ministère qui va avoir à débourser 6 000 000 $, puisque c'est l'équivalent de la participation mensuelle avec une supplémentation à 120 $ par mois.

Donc, c'est faux à sa face même de dire qu'on va économiser. Il y a deux objectifs recherchés dans le projet de loi: dissuader les débiteurs alimentaires de ne pas payer la pension puis dissuader, essentiellement, les prestataires de faire des fausses déclarations. L'autre objectif, c'est d'informer les chefs de famille monoparentale dont les enfants rentreront à la maternelle à plein temps que, vraiment, c'est de leur intérêt de participer à une mesure, à un programme, à une formation. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la ministre. Alors, est-ce que le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est adopté? M. le député de Viau.

M. Cusano: Vous l'avez deviné, vote nominal, s'il vous plaît.

Le Président: Bien sûr, j'avais deviné. Alors, que l'on appelle les députés.

(17 h 5 – 17 h 14)

Le Président: Mmes, MM. les députés, si vous voulez vous asseoir.


Mise aux voix

Nous allons procéder au vote sur le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Jolivet (Laviolette), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre cette veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. LeSage (Hull), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, est-ce qu'on pourrait avoir le consentement pour que le vote du député d'Argenteuil soit enregistré contre ce projet de loi?

Le Président: Alors, il y a consentement.

Le Secrétaire adjoint: Pour:49

Contre:40

Abstentions:0

Des voix: Oh!

Le Président: La motion est donc adoptée et, en conséquence, le projet de loi n° 84, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demande d'appeler l'adoption du principe du projet de loi n° 85.


Projet de loi n° 85


Adoption du principe

Le Président: Alors, conformément à l'ordre adopté à la séance d'hier, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Alors, ceux qui ont à quitter l'enceinte, je vous prierais de le faire rapidement et immédiatement, s'il vous plaît.

(17 h 20)

Je vous rappelle que les temps de parole pour le débat sur l'adoption du principe sont limités à 20 minutes pour le ministre qui présente le projet de loi, à 20 minutes pour un représentant de l'opposition officielle, à cinq minutes pour tout autre député et à cinq minutes de réplique pour celle qui présente le projet de loi. Alors, à ce moment-ci, je cède la parole à Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Est-ce que c'est adopté? M. le Président, j'ai le plaisir de soumettre aujourd'hui devant l'Assemblée nationale le projet de loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Dans un premier temps, ce projet de loi propose des changements au Programme de prêts et bourses afin d'assurer une plus grande équité entre les différentes catégories de bénéficiaires, de réduire les coûts du programme, de limiter l'endettement des étudiantes et des étudiants et, enfin, de continuer à protéger ceux et celles qui connaissent les situations les plus difficiles. Ce projet de loi comporte aussi des mesures d'incitation à la réussite pour les étudiants et les étudiantes du collégial.

En fait, je suis assez fière de présenter ce projet de loi puisqu'il s'ajoute aux mesures déjà amorcées et bien sûr à celles qui suivront, mesures qui visent à faire de la réforme de l'éducation une réalité. Cette réforme, elle se fera sous le signe de la rigueur, sous le signe de la réussite. Elle n'écorchera pas tout sur son passage, s'implantant plutôt graduellement.

Le Québec détient des acquis précieux et qu'il doit préserver. Le Programme des prêts et bourses en fait partie. Il est un levier majeur pour prendre le virage du succès. Depuis 30 ans, le Programme de prêts et bourses permet aux étudiants qui le désirent de poursuivre des études supérieures, et ce, même si leurs ressources financières sont insuffisantes. L'éducation profite autant à la société qu'aux étudiants, et nous avons de quoi être fiers collectivement du soutien financier par lequel le gouvernement contribue au bien-être de la population étudiante.

En matière d'aide financière aux étudiants, l'année 1995-1996 a été marquée par la publication du rapport du Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants. Ce Groupe de travail avait pour mandat de revoir la nature et le fonctionnement du Programme de prêts et bourses. Le comité était formé d'étudiants, de parents, de personnes travaillant dans des établissements d'enseignement et de personnes provenant du ministère de l'Éducation.

Pour formuler leurs recommandations, les membres du Groupe de travail se sont notamment appuyés sur la quarantaine de mémoires reçus dans le cadre de la consultation publique qu'il a menée. Les membres du Groupe ont conclu, au terme d'une comparaison, que dans l'ensemble le Programme de prêts et bourses québécois se situe parmi les meilleurs qui soient, ce qui est vrai. Et c'est à la lumière de ce constat que les membres du Groupe de travail recommandaient le maintien d'un programme comportant à la fois des prêts et des bourses ainsi que la sauvegarde de son caractère contributif et supplétif. Les personnes et les groupes qui souhaitaient faire part de leurs commentaires ou de leurs suggestions sur les propositions du Groupe de travail ont été invités à le faire, et ce, dans le cadre de la consultation menée par la Commission des états généraux sur l'éducation. Celle-ci a donné son appui au maintien des caractéristiques de base du programme. En somme, des consensus se sont dégagés là-dessus.

Le Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants et la Commission des états généraux sur l'éducation ont suggéré au gouvernement et à la société québécoise de préserver les acquis tout en apportant certains correctifs au Programme de prêts et bourses. Donc, la consultation a eu lieu, les débats ont eu lieu. Nous disposons maintenant de suffisamment de balises pour passer à l'action.

De façon globale, les amendements législatifs que je propose aujourd'hui à l'Assemblée nationale permettront de relever un défi important. Il s'agit à la fois de maintenir les avantages du Programme de prêts et bourses, d'en réduire le coût et de limiter l'endettement lié aux études tout en ne pénalisant pas les personnes qui en ont le plus besoin. Je crois que nous réussissons, avec ce projet de loi, à atteindre ces objectifs ou ces balises auxquels je fais référence. Ce projet de loi vise aussi à diminuer le temps nécessaire à la diplomation et à accroître la réussite, l'objectif essentiel, de toute façon, de la réforme de l'éducation.

J'ai déjà posé des gestes visant à soutenir davantage les étudiants et les étudiantes dans leur démarche vers la réussite. J'ai mis sur pied un groupe de travail qui examinera les règles actuelles de financement des universités et qui proposera des moyens d'améliorer la diplomation. De même, un groupe d'experts aura le mandat d'examiner les modalités de remboursement de la dette étudiante, ce qui était un souhait depuis longtemps exprimé par les différents regroupements d'étudiants et d'étudiantes. Ces différents groupes de travail devront nous remettre leur rapport dans les prochains mois, soit d'ici la fin du printemps 1997. Ce n'est donc pas un travail qui se fait dans une perspective de repousser à plus tard les décisions, mais plutôt de faire en sorte que les propositions qui seront faites soient le plus opérationnelles possible, de telle sorte que nous puissions procéder rapidement.

Je vous informe d'ailleurs, M. le Président, que j'ai récemment invité les étudiants et les étudiantes à faire leur part. Ce que je leur ai demandé, c'est tout simplement de réussir leurs études. L'augmentation de leur taux de réussite, la réduction du temps requis pour obtenir un diplôme permettront de limiter l'endettement auquel ils devront faire face. Je les ai assurés de mon appui en leur confirmant notamment que les montants actuels de prêts et bourses ne seraient pas modifiés. Je leur ai aussi rappelé que le Programme de prêts et bourses du Québec est encore le plus généreux au Canada.

J'ai aussi indiqué aux étudiants et aux étudiantes que des ajustements seraient apportés qui permettront d'arriver à des rationalisations administratives tout en permettant de sauvegarder l'essentiel du Programme de prêts et bourses. Celui-ci continuera de considérer la situation concrète dans laquelle se trouve chacune des personnes en cause. Il donnera toujours des chances égales d'accès aux études, peu importe l'origine ou la situation géographique des étudiantes et des étudiants. Il en sera ainsi tout le long de leurs études en formation professionnelle au secondaire ou, dans le cas des études postsecondaires, du collégial jusqu'au troisième cycle universitaire.

Les amendements que je propose aujourd'hui s'inscrivent tous dans le sens des engagements qui ont déjà été rendus publics à ce jour. Le fil conducteur est le respect de l'équité entre les catégories d'étudiants, la réduction de l'endettement et la préservation des acquis de ceux et celles qui vivent des situations financières plus difficiles. Dans cet esprit, voici un aperçu des principales modifications législatives que je propose à l'Assemblée nationale.

Dans un premier temps et par souci d'équité, je soumets une modification qui concerne le principe d'autonomie. C'est ce principe qui permet de ne plus tenir compte, dans le calcul de l'aide, d'une contribution des parents. Le statut d'autonomie ne sera plus rattaché à l'accumulation d'un nombre d'unités, qu'on appelle parfois crédits, mais bien à l'obtention d'un diplôme de premier cycle. Ainsi, tous les étudiants seront traités de la même façon. La mesure que je propose vise à ce que la capacité des étudiants et des étudiantes de subvenir à leurs besoins ne soit pas modifiée du seul fait qu'ils aient accumulé un certain nombre d'unités sans avoir obtenu leur diplôme.

Je propose également que le statut d'autonomie soit dorénavant accordé aux personnes qui effectuent un retour aux études après un délai de sept ans suivant la fin de leurs études à temps plein. Cette modification vise, par exemple, les personnes qui, après leurs études secondaires, n'ont pu poursuivre leurs études ni accéder au marché du travail en raison du fait qu'elles ont pris soin de leurs parents âgés ou malades. En plus de permettre de les traiter de façon équitable, cette mesure facilitera leur retour aux études et, bien sûr, éliminera les tracasseries administratives.

(17 h 30)

Le chapitre de l'endettement mérite une attention particulière. Même si une personne doit parfois accumuler des dettes pour s'instruire, il faut agir dès maintenant pour éviter que l'endettement étudiant n'atteigne un niveau inacceptable. À cet égard, depuis quelque temps, le ministère de l'Éducation a entrepris une campagne d'information et de sensibilisation auprès des étudiants et des étudiantes. Cependant, j'estime primordial de faire davantage en fixant un niveau maximal d'endettement. La modification législative proposée permettra de déterminer des limites pour les montants cumulatifs de prêt par ordre d'enseignement, par cycle d'études ainsi que pour certains programmes. Cet amendement vise aussi à limiter l'endettement des étudiants qui étirent leurs études à chaque ordre d'enseignement, qui les prolongent à plus d'un cycle d'études ou qui fréquentent des établissements privés non subventionnés.

À ce moment-ci, je me permets d'insister, M. le Président, sur l'importance qu'il y a pour un étudiant, pour une étudiante à terminer ses études dans les délais prévus. Des études trop longues ont des conséquences importantes: elles représentent des débours considérables pour l'État, une contribution supplémentaire pour les parents et un endettement accru pour les personnes en cause.

Toutefois, dans le but de limiter l'endettement que devront assumer les finissants et les finissantes, je propose que la Loi sur l'aide financière aux étudiants plafonne le montant des droits de scolarité admissibles des personnes qui fréquentent des établissements d'enseignement professionnel privés non subventionnés. Je pense ici à certains établissements spécialisés qui perçoivent des droits de scolarité parfois extrêmement élevés, beaucoup trop élevés. La situation actuelle doit changer, puisque, à eux seuls, de tels droits de scolarité génèrent un endettement accru. Le fardeau d'une telle dette est difficile à assumer pour la plupart des diplômés, plusieurs déclarent même faillite à la fin de leurs études. La dette est alors supportée, bien sûr, par l'ensemble de la population, et, à ce chapitre, M. le Président, je crois que la vigilance est de rigueur.

Les mesures visant à réduire l'endettement s'adresseront aussi aux personnes aux études en formation professionnelle du secondaire et au programme d'études du régime d'apprentissage. La situation actuelle fait que certaines de ces personnes doivent s'endetter davantage simplement à cause de la date du début de leur programme. Par exemple, une personne qui commence un programme en janvier peut recevoir son aide financière sous la forme de deux prêts plutôt que sous celle d'un prêt et d'une bourse, parce que son programme couvre deux années différentes au sens de la Loi sur l'aide financière aux étudiants. Dans le cas de ces personnes, une meilleure adéquation de l'attribution de l'aide avec le début de certains programmes – c'est donc une amélioration – favorisera également l'accès aux études secondaires en formation professionnelle. Ce genre de parcours est emprunté par un nombre croissant de personnes – et nous espérons qu'il augmentera encore – ces personnes étant désireuses de retourner aux études pour obtenir de meilleures chances d'emplois ou pour parfaire leur formation.

La modification législative que je propose permettra d'adapter le Programme de prêts et bourses aux réalités de cet ordre d'enseignement et facilitera aussi la poursuite des études des personnes du régime de la sécurité du revenu vers le Programme de prêts et bourses, en faisant disparaître des obstacles artificiels à un début des études en cours d'année scolaire.

Comme je l'ai mentionné au début de mon allocution, M. le Président, le coût du Programme des prêts et bourses devra diminuer. Cet objectif s'inscrit à l'intérieur des orientations gouvernementales visant l'équilibre budgétaire.

Je réitère aussi, M. le Président, mon intention de protéger ceux et celles qui sont le plus dans le besoin. Je propose tout d'abord de réduire d'un mois la période au cours de laquelle une personne qui a terminé ses études à temps plein est exemptée de remboursée sa dette d'études. Ce délai passerait, dans la majorité des cas, à environ six mois au lieu de sept. Cette modification permettra aussi d'harmoniser la période d'exemption avec celle qui à cours dans la majorité des autres programmes d'aide financière aux étudiants à l'extérieur du Québec.

J'estime aussi qu'une réduction du coût du programme devra passer par l'arrêt du remboursement par la ministre de l'Éducation du quart d'un emprunt contracté par un étudiant ou une étudiante pendant ses études de deuxième ou de troisième cycle si ce programme est complété dans les délais prévus. Cette démarche s'effectue dans le cadre du Programme de remise de dettes. Celui-ci n'a pas atteint l'objectif visé. En effet, lors de son implantation à l'automne 1991, le taux de diplomation dans les délais prescrits était de 29,3 %, alors que, quatre ans plus tard, il se situe encore à peu près au même niveau, soit à 30,7 %.

Le Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants souhaitait d'ailleurs que le Programme de remise de dette soit évalué, car il n'était pas convaincu de son efficacité. Ce sont des ressources qu'on laisse ainsi dans le régime pour servir à d'autres fins, dont les bonifications auxquelles j'ai fait référence. Je tiens cependant ici à rassurer l'Assemblée nationale sur ce sujet. Le taux de placement et les revenus anticipés de ces personnes leur permettront de faire face adéquatement à leur endettement. En effet, ce sont ces personnes qui connaissent les plus hauts taux de placement et les plus bas taux de chômage.

De plus, j'estime essentiel que la ministre de l'Éducation puisse accorder par anticipation de l'aide financière sous forme de prêts aux bénéficiaires du régime de la sécurité du revenu qui s'inscrivent en cours d'année à un programme d'études secondaires en formation professionnelle ou à un programme d'études du régime d'apprentissage. Actuellement, ces personnes reçoivent une aide conditionnelle du ministère de la Sécurité du revenu, qu'elles doivent ensuite rembourser à même leurs prêts et bourses. Cette mesure de bonification facilitera le retour aux études de ces personnes et permettra d'assurer la continuité du soutien financier accordé aux personnes qui ont le plus de besoins financiers.

Par ailleurs, dans un souci d'équité et de clarification, je propose aussi à l'Assemblée nationale que la Loi sur l'aide financière aux étudiants autorise la ministre de l'Éducation à ne pas reconnaître les stages aux fins de l'admissibilité à l'aide financière. Cette modification vise uniquement à préciser plus clairement le fait que les personnes qui effectuent un stage exigé par un ordre professionnel ne sont pas admissibles au Programme de prêts et bourses. Toutefois, ces stagiaires continueront de bénéficier d'un prolongement de la période d'exemption du paiement des intérêts.

Je propose finalement un amendement qui fera en sorte que toute décision rendue par la ministre de l'Éducation en matière d'aide financière puisse être révisée. Un processus interne au ministère existe déjà. Toutefois, tout comme le Protecteur du citoyen et le Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants, j'estime essentiel qu'un tel mécanisme de révision soit inscrit dans la loi afin d'assurer la permanence de ce recours.

Par ailleurs, afin de responsabiliser et d'inciter les étudiants et les étudiantes du collégial à réussir, des modifications à la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel s'imposent. De tels objectifs s'inscrivent d'emblée dans la perspective de la réforme de l'éducation. En effet, si cette réforme vise à instaurer plus de rigueur dans l'ensemble des parcours offerts aux étudiants et aux étudiantes, elle vise aussi à améliorer les taux de diplomation aux différents ordres d'enseignement. Elle cherche donc à instaurer une culture de la réussite, et à l'enseignement supérieur il y a largement place à amélioration en ce domaine.

En effet, M. le Président, alors que la durée prévue d'un programme d'études préuniversitaires est de deux ans, les étudiants et étudiantes mettent en moyenne 2,4 ans à le compléter. Au niveau des études techniques, qui en demandent normalement trois, ce sont 3,8 années qui y sont consacrées et 3,5 années pour les trois que devrait durer le programme de baccalauréat. Il y a là un coût énorme pour le contribuable, mais aussi pour l'étudiante et pour l'étudiant. Ce sont d'ailleurs ces mêmes personnes qui m'ont proposé de songer à des mesures permettant d'augmenter la réussite pour optimiser l'utilisation des sommes consacrées à l'éducation.

Nous nous étions déjà engagés dans cette voie d'amélioration de la réussite. C'est ainsi que j'avais fixé aux cégeps l'objectif de réduire de 2 % le taux d'échecs d'ici 1998. Le mode de subvention des cégeps a été modifié en conséquence. Cela représentera des économies d'environ 10 000 000 $. Pour y arriver, les collèges ont recours à différentes mesures telles un meilleur encadrement ou encore des examens de reprise, comme le souhaitaient les étudiants. Mais, à l'enseignement supérieur tout particulièrement, ce sont les étudiants et les étudiantes qui sont les principaux artisans de leur réussite.

Je l'ai déjà dit et je me permets d'insister, M. le Président, si nous voulons nous doter ou nous donner une culture de la réussite il faut d'abord détruire celle de l'échec. L'échec coûte cher, trop cher. Les 17 % d'heures de cours non réussis coûtent quelque 135 000 000 $ annuellement. Les mesures déjà retenues par les collèges ramèneront ce taux de 17 % à 15 %; ce n'est pas suffisant. Il nous faut réduire ce taux à 10 % d'ici l'an 2000. Cela représenterait donc, en vitesse de croisière, des économies de 40 000 000 $ par année. La mesure de responsabilisation et d'incitation à la réussite que propose le projet de loi déposé devrait permettre de faire un grand pas vers l'atteinte de cet objectif. Cette mesure fait en sorte qu'à compter de l'année scolaire 1997-1998 l'étudiante ou l'étudiant ayant plus d'un cours non réussi durant une même session devra, pour s'inscrire à temps plein dans un cégep la session suivante, assumer des droits spéciaux établis à hauteur de 2 $ par heure pour chacun des cours non réussis, à l'exception du premier.

(17 h 40)

Alors, M. le Président, vous m'indiquez que mon temps est écoulé. Si vous me permettez, je vais aller à mes conclusions. J'aurai l'occasion, au moment du débat en plénière, de revenir sur chacune des mesures. Je vous dis ceci en terminant: rigueur, qualité et réussite, ce sont là les principaux critères qui constituent les fondements mêmes de la réforme de l'éducation que j'ai proposée. Les modifications à la Loi sur l'aide financière aux étudiants et à la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel s'inscrivent en toute équité dans cette perspective.

J'invite encore une fois la population étudiante à souscrire à ces objectifs, c'est elle qui en sortira gagnante. J'ai confiance aux étudiantes et aux étudiants. Ils ont toujours été porteurs d'espoir. J'en suis fière. La réforme de l'éducation n'est pas l'affaire que du gouvernement ou de la ministre de l'Éducation, nous sommes tous et toutes concernés.

En terminant, M. le Président, je vous informe que des amendements devront nécessairement être apportés au règlement sur l'aide financière aux étudiants de même qu'au règlement sur les droits de scolarité qu'un collège d'enseignement général et professionnel doit exiger. Je les soumettrai à la population par la voie de la prépublication dans la Gazette officielle du Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Le fait que la ministre n'ait même pas pu terminer son discours dans le temps imparti par le bâillon est l'exemple parfait à quel point la situation que nous vivons actuellement ne nous permet pas de faire un travail législatif correct. J'aurais certainement aimé lui permettre de pouvoir terminer l'intégralité du discours qu'elle voulait présenter. Malheureusement, les situations imposées par notre leader sur la manière dont on doit travailler ne nous permettent pas de le faire.

Je dois vous dire que derrière tout l'emballage et le discours que la ministre de l'Éducation vient de présenter se cache une réalité un peu sombre dans ce projet de loi. Il a un seul but ou un but principal: celui d'aller chercher dans la poche – parce que, dans le fond, c'est ça que ça veut dire – des étudiants 40 000 000 $. Alors, c'est un peu pénible de voter un tel projet de loi, et je dois dire que l'opposition va s'opposer à l'adoption d'un tel projet de loi.

Je vais avec vous, si vous me permettez, dans ce débat de principe, essayer de traverser les mesures qui sont contenues dans la réforme de l'aide financière aux étudiants. Premièrement, on va abolir le critère – alors, ça devient assez technique, mais les étudiants qui nous écoutent vont comprendre – de 90 crédits pour devenir un étudiant autonome, c'est-à-dire pour que, dans le calcul de son prêt et bourse, on n'ait pas à compter la contribution parentale. On remplace ça par uniquement l'obtention d'un diplôme de premier cycle. Alors, vous savez parfaitement, M. le Président, qu'il existe des diplômes de premier cycle qui dépassent cette limite de 90 crédits, donc on va pénaliser un certain nombre d'étudiants qui ne pourront pas atteindre, à ce moment-là, le statut d'autonome et voir leur prêt-bourse augmenter, le cas échéant.

Je vais peut-être parler un peu des points positifs, parce qu'il y en a quelques-uns à l'intérieur de ce projet de loi. Le projet de loi instaure une mécanique de révision des décisions. C'est un peu inquiétant, la manière dont elle est écrite. Je ne sais pas s'il y a un amendement qui est proposé ou non. J'ai d'énormes réticences à voir le fonctionnaire, qui peut-être a déjà pris la décision, agir comme juge et partie dans la révision de la décision. Ça, c'est le premier élément.

Il y a un deuxième élément dans le projet de loi qui n'a aucun effet financier, mais qui peut permettre d'anticiper l'aide financière, autrement dit, d'attribuer tout de suite un prêt à l'étudiant qui va obtenir un prêt-bourse. L'ensemble du réseau demandait que ce soit décentralisé, c'est-à-dire que ça se passe au niveau des institutions. Malheureusement encore, dans ce projet de loi, cette mesure, qui est une des petites mesures positives qu'on a dans le projet de loi, reste encore éminemment centralisée.

Ceci étant dit, M. le Président, j'arrive maintenant dans les deux gros morceaux qui sont majeurs et sur lesquels on a à s'opposer à l'intérieur du projet de loi. Tout d'abord, la suppression du Programme de remise de dette pour les étudiants qui avaient été les meilleurs étudiants, pour ceux qui avaient performé, pour ceux qui avaient réussi, lorsqu'ils faisaient des études de deuxième et troisième cycle, à atteindre l'obtention de leur diplôme dans les délais impartis, c'est-à-dire les délais qui avaient été fixés. Le régime de prêts-bourses leur disait: Vous qui avez travaillé fort pour obtenir votre diplôme rapidement – ce qui est un objectif soi-disant que le gouvernement veut défendre... Dans le régime actuel, on leur disait: Le quart de votre endettement va vous être effacé. Autrement dit, l'État va effacer le quart de votre endettement. On supprime cette mesure. On supprime cette mesure, c'est-à-dire qu'on va cesser de reconnaître la qualité, on va cesser de reconnaître ceux parmi nos étudiants qui iront travailler pour être les meilleurs et travailler rapidement à l'obtention de leur diplôme. Ça, c'est une mesure sur laquelle, de ce côté-ci, nous ne pouvons pas être d'accord.

Il y a, à l'intérieur du projet de loi, une autre mesure qui est assez importante et qui touche la limitation du taux maximum d'endettement. Alors, à première vue, c'est une mesure qui peut sembler banale, de dire: Bon, il faudrait éviter que les étudiants s'endettent trop. Quand on y réfléchit bien, ça va avoir quoi comme effet? Ça va avoir comme effet que l'étudiant qui va être inséré dans un processus d'études risque de ne plus avoir accès aux prêts-bourses, ne pourra pas compléter, à ce moment-là, son diplôme, et on devrait avoir d'autres mécanismes justement pour l'inciter à compléter son diplôme. Il va devenir une personne instruite mais non diplômée, avec toutes les difficultés qu'il va y avoir pour elle d'insertion sur le marché du travail. Alors, M. le Président, cette mesure matraque, hachoir, qui ne distingue pas la réalité, qui est réelle, d'endettement des étudiants actuels, qui ne distingue pas la nécessité aussi pour eux de terminer leurs études et de terminer un diplôme, me semble dangereuse.

Deuxièmement, la ministre l'a abordé, mais il faudrait quand même aborder de plain-pied ce qu'on appelle les programmes du collégial non subventionnés. Alors, les programmes du collégial non subventionnés, ça touche principalement trois secteurs: le secteur de la mode, le secteur de l'informatique de pointe et le secteur de l'avionnerie, c'est-à-dire du pilotage des avions. Ce sont des secteurs où vous avez des collèges qui donnent des attestations d'études collégiales dans des domaines extrêmement spécialisés qui permettent un accès immédiat au marché du travail, mais qui, en contrepartie, parce qu'ils ne reçoivent aucune subvention du gouvernement, parce qu'ils doivent charger à l'étudiant le véritable coût... c'est-à-dire où les frais de scolarité sont importants, on parle, dans certains cas, de frais de scolarité qui voisinent 15 000 $ ou 16 000 $ pour certains établissements purement privés; on parle de frais de scolarité, dans le cas des collèges de pilotage, qui peuvent voisiner le 50 000 $.

(17 h 50)

Mais, par contre, ces établissements, à l'heure actuelle, permettent aux étudiants de rentrer de plain-pied sur le marché du travail parce qu'ils se sont dotés soit d'équipement de pointe, particulièrement dans le secteur de l'informatique et du dessin assisté par ordinateur, soit... Ils ont même, dans le cas du pilotage, été en mesure d'obtenir des appareils qui sont des appareils de dernière génération.

Alors, jusqu'à maintenant, ces étudiants pouvaient avoir accès au régime de prêts et bourses. Avec le mécanisme qui est mis de l'avant, où on va planifier l'endettement et où une des parties importantes de l'endettement correspond évidemment aux frais de scolarité, M. le Président, je me pose des questions, à l'heure actuelle, jusqu'à quel point on va être en mesure, purement et simplement, d'éliminer du marché ces institutions privées.

Si nous avions pu débattre en commission parlementaire du projet de loi, et non pas en une heure rapide – oui, oui, en une heure rapide dans laquelle on va absolument survoler le projet de loi – on aurait ici lieu de se pencher sur cette question. Je demanderai... ou peut-être que j'aurai l'occasion de déposer un amendement de manière que le niveau maximal d'endettement ne tienne pas seulement compte du niveau d'études ni de l'ordre d'enseignement, mais aussi du type d'institutions qui est l'institution fréquentée.

Il y a peu d'étudiants dans ces secteurs. Ce sont des secteurs qui sont adaptés à la réalité du marché du travail, qui ont une clientèle tout à fait réelle, puisqu'ils ont réussi à exploiter ce marché que malheureusement le secteur public n'a pas su exploiter. Et empêcher ou gêner ces étudiants de pouvoir avoir un accès direct au marché du travail pose, à mon sens, d'énormes problèmes.

Si vous me permettez, M. le Président, je vais encore maintenant aborder l'autre volet du projet de loi. Parce qu'il faut bien être conscient que ce projet de loi a deux volets: un volet qui modifie la Loi sur l'aide financière aux étudiants et un autre volet qui va toucher la question de la loi sur les cégeps.

Je ne vous rappellerai pas, parce que vous le savez, M. le Président, que, dans ce qu'on a qualifié de réforme Robillard, qui avait été présentée par Mme la députée de Chambly lorsqu'elle était ministre de l'Éducation – Mme Robillard, enfin, l'ancienne députée de Chambly, je veux dire – pour faciliter la réussite, pour inciter les étudiants à transiter le plus rapidement possible à l'intérieur des cégeps, elle avait instauré une pénalité de 50 $, un montant financier de 50 $ par cours pour les gens qui avaient échoué plus de cinq cours.

C'était une mesure qui, lorsque nous l'avions mise de l'avant, avait soulevé l'ire de la part des ministériels, qui, à l'époque, étaient dans l'opposition. Dans la campagne électorale, ils avaient qualifié cette mesure non pas d'une mesure pour faciliter, comme on vient de le rappeler, la réussite, mais, comme étant un frein – je vais reprendre les mots – inadmissible à l'admissibilité au réseau des cégeps. Dès qu'ils sont arrivés au pouvoir, ils ont supprimé cette pénalité de 50 $ pour ceux qui échouaient plus d'un cours.

Alors, voici, M. le Président, et je suis heureux de voir que les discours répétés peuvent aller de l'avant, l'esprit de la réforme de Mme Robillard se retrouve aujourd'hui dans le projet de loi. Donc, ce gouvernement qui l'avait purement et simplement supprimée, qui l'avait qualifiée comme étant un frein inadmissible à l'admissibilité au réseau des cégeps, maintenant le réintroduit, mais le réintroduit d'une manière légèrement différente et beaucoup plus pénalisante pour l'étudiant.

Ce qui est devant nous, c'est non pas un 50 $ pour ceux qui avaient échoué plus de cinq cours, c'est une pénalité, pour celui qui aura échoué plus d'un cours, de 2 $ par heure de cours. Alors, il ne faut pas être grandement sorcier, et je ne rentrerai pas dans le débat que nous avons eu, Mme la ministre et moi-même, entre le professionnel technique et les cours au général, mais ça veut dire que, après un échec de plus d'un cours, les étudiants, par cours, auront à payer 90 $ de pénalité. M. le Président, le montant est important. Le montant est important parce que, si vous avez échoué deux ou trois cours, on voit tout de suite, hein, que 90 $ par deux, c'est 180 $, par trois, c'est 270 $, en moyenne, ça peut être un peu plus. Ça peut devenir un poids important à assumer pour les étudiants. Ce n'est plus seulement un incitatif, une forme d'incitatif à la réussite, tel qu'il était prévu par Mme Robillard, ça peut devenir très rapidement un empêchement financier, pour certains étudiants, à continuer leurs études.

Alors, si tant est que nous soyons favorables au fait que l'on incite les étudiants d'une manière financière à réussir dans les délais impartis, les délais les plus rapides possible, leurs études au niveau cégep, nous avons des craintes que cette mesure, par l'ampleur de la pénalité, soit contreproductive et ait pour effet réellement d'éliminer de l'enseignement collégial un certain nombre d'étudiants.

Alors, ce projet de loi était-il urgent? C'est encore une question qu'on a débattue hier, mais il faut maintenant qu'on le regarde en détail, on l'avait inclus dans le bâillon. Ce projet de loi était-il urgent? Était-il urgent par lui-même ou est-il urgent simplement par les montants d'argent qu'il va chercher dans la poche des étudiants? C'est bien simple, les éléments de réforme qui sont à l'intérieur du projet de loi n'ont pas le caractère d'urgence. À la session de mars, on aurait pu très rapidement procéder à l'étude de ce projet de loi et réviser, comme on le fait régulièrement, la Loi sur l'aide financière aux étudiants. On aurait pu aussi réviser la loi sur les collèges, puisque la mesure qui est proposée ne s'appliquera pas avant septembre 1997. On aurait eu un peu de temps devant nous. La ministre ayant déjà fait... aurait pu procéder par déclaration ministérielle en signifiant ses intentions.

Ce n'est pas ça, M. le Président, qu'on a devant nous. On a un projet de loi qu'il faut adopter d'urgence parce qu'il va chercher, M. le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques, dans la poche des étudiants, 40 000 000 $. Et je comprends de votre remarque qu'il est urgent d'aller écraser actuellement les étudiants et les plus petits pour aller chercher dans leur poche 40 000 000 $. Il est urgent de la part de votre gouvernement de faire cela. Bravo! Bravo! de votre part. Vous me signalez que ce n'est pas de 40 000 000 $. On aura à faire les calculs tout à l'heure. Je les ai additionnés en partie. Si on avait pu avoir l'échange normal et naturel dans une commission parlementaire, on aurait pu échanger nos chiffres et tâcher de savoir réellement quel était le montant qui était imposé. L'estimé qu'on peut faire, si vous permettez, peut arriver à ce montant important.

(18 heures)

Mais, en tout cas, l'urgence est liée à quoi? À aller chercher dans la poche de nos étudiants et de nos étudiantes – des étudiants qui souvent sont les plus défavorisés – ce montant important qui est, à mon sens, injustifié, parce qu'on va encore mettre un frein à l'excellence. Mettre un frein à l'excellence, c'est ça que vous faites devant nous, un frein à l'excellence. Ceux qui sont les meilleurs, vous leur dites: Mon cher monsieur, vous avez été bon, vous êtes rentré à l'intérieur du processus parce que vous pensiez que vous alliez pouvoir avoir une remise de dette...

Lorsque j'ai débattu, avec la ministre, des crédits, je lui ai demandé: Est-ce que, cette mesure, il y aurait une clause grand-père ou grand-mère pour dire à ceux qui sont actuellement dans le système: Bon, dans le futur, on imposera, on abolira cette remise de dette pour ceux qui auront travaillé et qui auront réussi leurs études dans les délais impartis, mais ceux qui actuellement travaillent dans le système, on va maintenir la règle telle qu'elle est? Et la réponse de la ministre a été: Non, non et non. On est obligé de l'appliquer dès maintenant. Donc, ceux qui auront commencé, qui sont à l'orée de terminer leurs études vont perdre cette possibilité de remise de dette.

Alors, ce projet de loi n'avait qu'un objectif: aller chercher dans la poche des étudiants un montant important, que j'estime à 40 000 000 $, en fonction des informations que la ministre nous avait données. Je trouve que c'est scandaleux de le faire de la manière dont elle est en train de le faire. Ça pose des problèmes importants sur tout ce qu'est le plafonnement de la dette pour les collèges non subventionnés. Et la manière dont elle aborde la taxe à l'échec, c'était comme ça qu'elle l'avait abordée, risque d'être non pas un incitatif à la réussite, mais un moyen pour les étudiants de devoir quitter l'enseignement collégial. Et pour ces raisons, M. le Président, nous allons voter contre le projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. D'abord, au moment de me prononcer sur le principe du projet de loi n° 85 dans les conditions qu'on connaît, je pense qu'il faut d'abord se questionner sur l'urgence, dans un bâillon, dans une situation d'accélération des règles parlementaires pour réduire le droit de parole, le droit d'étudier les projets de loi, essayer de voir où est l'urgence d'un projet de loi comme celui-là. On a un régime de prêts et bourses où un certain nombre de règles existent depuis fort longtemps, et le gouvernement, qui vient tout juste de penser à ça il y a à peine une semaine, décide, une semaine après avoir déposé son projet de loi, que là il est urgent.

On est en train de discuter d'un projet de loi qualifié par le gouvernement d'urgent, par le même gouvernement qui, il y a quelques semaines, a annoncé la formation d'un groupe de travail, suite au sommet socioéconomique, où les jeunes... Tout le monde disait travailler au nom des jeunes. Les représentants du gouvernement disaient: On fait tout ça pour les jeunes. Mais on ne veut pas savoir ce que les jeunes en pensent. C'est la façon dont les jeunes se sont sentis. Ils ont senti qu'ils se faisaient dire: Tout le monde veut travailler pour vous autres, dans les mots, parce que ça paraît bien, mais, dans la pratique, personne n'est même prêt à écouter un peu ce que les jeunes ont à faire comme suggestions constructives.

Suite à ça, la ministre s'est sentie en rupture avec les milieux étudiants, a dû changer d'ailleurs un certain nombre de ses décisions, puis une des décisions qu'elle a eu à prendre, c'est de former un groupe de travail. Pourquoi est-ce que c'est ces questions-là qui sont importantes? Et je la comprends d'avoir formé un groupe de travail, parce que la question de l'endettement étudiant, question de plus en plus sérieuse, qui a des impacts sur l'accès à la propriété... Quand on a un gouvernement qui pellette sur le dos des municipalités des comptes de toutes sortes, quand on a un gouvernement qui s'apprête à augmenter – c'est la même ministre – probablement les taxes scolaires d'une façon spectaculaire, quand les mêmes ménages de la classe moyenne se retrouvent avec des taxes au niveau foncier de plus en plus élevées, qu'en même temps ils ont de plus en plus d'endettement étudiant, on aura beau leur faire des politiques familiales de toutes sortes puis changer les noms des allocations, il reste que, dans la pratique, si on coupe de façon aussi importante l'accès à la propriété, on touche des choses fondamentales.

À cause des problèmes liés à l'endettement étudiant – donc, je reviens, M. le Président, au projet de loi – on la comprend de former un groupe de travail. Par contre, on ne comprend pas qu'on ne puisse pas soumettre ces questions-là au groupe de travail, qui pourrait les étudier, comme, nous, on aurait dû d'ailleurs les étudier en commission parlementaire, en travaux du Parlement, et peut-être que là on aurait découvert que, plutôt que d'enlever, par exemple, l'encouragement à ceux qui font leurs cours dans les délais prescrits, ceux qui utilisent juste le nombre de sessions qu'on est supposé utiliser, ces étudiants-là, qui procurent des économies importantes au système...

Présentement, on avait ça au niveau de la maîtrise, au niveau du doctorat. On remboursait une partie du prêt quand des étudiants remplissaient leurs obligations à l'intérieur des délais, faisaient leur formation, on encourageait leur succès, on leur remboursait une petite portion de leur prêt.

La plupart des gens que j'ai entendus analyser cette mesure-là, un peu dans tous les domaines, disaient: Il faudrait l'étendre. Au niveau du baccalauréat aussi, on a des délais, on a des gens qui prennent plusieurs sessions, qui étirent ça. Dans certains cas, c'est à cause du travail étudiant. Mais s'ils savaient qu'au bout de leurs études, s'ils faisaient leur cours de six sessions en six sessions plutôt qu'en sept, huit ou neuf, ils pourraient avoir accès au remboursement d'une petite partie de leur prêt, ça pourrait les encourager, ça pourrait sauver des coûts pour le système. On fait le contraire. Plutôt que de l'étendre – la plupart des gens disaient: Il faudrait étendre cette pratique-là pour avoir un système d'éducation où les gens accélèrent, sont là moins longtemps – on le coupe. Alors, c'est difficile de comprendre les priorités.

C'est difficile de comprendre aussi exactement quels liens la ministre entretient. Hier, il y avait des discussions, entre autres, entre le cabinet de la ministre... Je parlais de ce groupe de travail qui doit être formé, M. le Président. Il y avait des discussions hier, pas plus tard qu'hier avec le cabinet de la ministre et les représentants du mouvement étudiant pour former un comité de travail. Et ces étudiants-là – M. le Président, vous ne me croirez probablement pas – les étudiants en question n'ont pas été informés que, dans les heures qui allaient suivre, par le bâillon, on allait imposer des choses comme celles-là qui ne seraient pas étudiées, qu'ils ne feraient pas partie du groupe de travail.

C'est comme pour la déréglementation du premier ministre, après que le mal est fait, on commence à analyser les conséquences de ses actions. Alors, c'est ces raisons-là, M. le Président, qui vont m'amener à voter contre le principe du projet de loi n° 85.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je remercie le député de Rivière-du-Loup. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, M. le député d'Argenteuil. M. le député, je vous cède la parole.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. Moi aussi, je me lève pour dire à la ministre que je vais voter contre ce projet de loi. Je vais voter contre ce projet de loi parce qu'elle nous dit clairement dans son projet que la raison d'être, c'est vraiment d'aller chercher de l'argent. Et je peux citer comme exemple la lettre du Protecteur du citoyen que nous avons reçue tout récemment, où on disait: «Il y a, me semble-t-il, une certaine injustice à l'égard des étudiants qui, dans l'année d'attribution en cours, ont reçu, pour des études de même niveau, de l'aide financière sous forme de prêts remboursables et qui peuvent légitimement s'attendre à une telle remise de dette.» Mais malheureusement ces jeunes étudiants ont appris aujourd'hui, avec l'imposition du bâillon, que mal leur en est, que, s'ils ont bien pris la décision de ne pas avoir d'emploi à temps partiel pour ajouter à leurs finances dans l'espoir qu'on aurait une récompense à leur réussite, bien, aujourd'hui ils se retrouvent le bec à l'eau. Oui, le bec à l'eau, M. le Président, parce que la ministre nous disait que son projet de loi, c'est une taxe à l'échec. Moi, j'aurais aimé qu'elle laisse une récompense à la réussite.

(18 h 10)

Souvenez-vous du temps où nous étions tout jeunes enfants, M. le Président, et où, à la fin de l'année, lorsqu'on recevait les prix, mon Dieu qu'on était heureux de voir que nos travaux, notre travail avait été récompensé! On reconnaissait la réussite, et c'était malheureux pour ceux qui étaient les derniers de classe, parce qu'ils avaient quelques petits cadeaux, mais ce n'étaient évidemment pas vraiment les plus importants. Mais les premiers de classe, ils en avaient, des cadeaux: des livres, des piles, des dessins, tout ce qu'on pouvait imaginer. Et combien nous étions heureux lorsque, à la fin de cette présentation, on s'en allait à la maison tout heureux d'avoir eu nos cadeaux de fin d'année, nos prix de fin d'année. On s'en allait tout heureux et on disait: Bien, moi, l'année prochaine, je vais travailler encore plus fort, parce que je suis tellement heureux d'avoir eu ces présents-là en reconnaissance de mon travail que je vais faire encore plus d'efforts pour réussir.

Aujourd'hui, la ministre a dit à ces jeunes qui font des efforts pour travailler, pour réussir, pour accomplir leurs études dans le temps prescrit, s'ils la font en six sessions: Écoute bien, là, force-toi, force-toi pas, pas très important; de toute façon, tu n'auras rien. Oui, tu vas avoir la satisfaction de la réussite. Mais, si on veut taxer l'échec, M. le Président, il me semble qu'il y a une logique à dire: On va récompenser la réussite.

Quand, nous, au gouvernement, nous avons mis en application cette loi, ce règlement pour favoriser les gens qui accomplissaient leurs études dans les temps prescrits, on y avait réfléchi, on avait pris une décision sensée, fondée sur l'étude, le partage, en commission parlementaire, pour en arriver à favoriser la réussite et à la récompenser. Mal nous en est aujourd'hui, où la ministre nous convie à une taxe à l'échec puis rien à la réussite. Encore pire, ceux qui ont pris des engagements pour cette année, bien, ceux-là, ils sont dans le trouble, parce qu'ils avaient pris l'engagement, eux, de travailler plus fort, de passer encore plus de temps à dédier à leurs études, et aujourd'hui ils vont se retrouver sans aucune possibilité de remise de dette et ils devront assumer une dette plus importante, puis ils n'ont pas eu les ressources financières appropriées.

Alors, vous comprendrez, M. le Président, que, dans une période de cinq minutes où le ministre nous impose d'essayer de discuter intelligemment, à l'intérieur d'une période de temps aussi courte, on peut à peine effleurer un aspect du sujet. J'aurais voulu parler pendant longtemps de la non-réussite, du 17 % d'heures non réussies dans les cours. Et on s'adresse à des éléments de prêts et de réorganisation de prêts et bourses au lieu de s'attaquer au fond du problème qui est la qualité des cours qui sont donnés et, au lieu de niveler par le bas, essayer de rehausser tout le monde et de leur donner une qualité d'enseignement et de réussite encore plus grande. Alors, vous comprendrez que devant cette situation, M. le Président, je vais voter non avec tout le côté de l'opposition, et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

M. Williams: Merci beaucoup. Je serai prudent ce soir, M. le Président, avec mes mots, parce que je me lève tellement déçu. Encore une fois, pour la deuxième fois aujourd'hui, nous sommes bâillonnés, bâillonnés dans un projet sur lequel nous n'avons pas eu même la chance de faire un débat de principe. C'est la deuxième fois en quatre projets de loi, et, comme quelqu'un qui croit beaucoup en cet établissement, cette institution québécoise, il me semble que c'est une trahison du respect que nous avons entre les parlementaires et la population.

Avec ça, M. le Président, il me semble qu'on doit être tellement clair sur ce qui se passe aujourd'hui: quatre projets de loi sur lesquels nous n'avons pas eu la chance de faire un débat de principe parce que nous sommes bâillonnés. Il y en a un plus tard ce soir. Il a été déposé hier. Avec ça, on doit se demander ce qui se passe et c'est quoi, l'urgence de ce projet de loi. J'ai appris par la ministre de l'Éducation qu'elle allait arriver bientôt avec les amendements. Nous avons le projet de loi sur lequel il y a le bâillon, nous n'avons pas le temps d'étudier ça comme il faut, et elle est déjà arrivée avec les amendements. Qu'est-ce qui se passe, M. le Président?

Moi, j'ai compris, dans ma brève expérience de sept ans comme parlementaire, particulièrement pendant les derniers deux ans, que la seule et unique raison pour laquelle ce gouvernement arrive avec un bâillon, c'est parce qu'il cherche de l'argent. Il cherche à fouiller dans les poches des Québécois. Mais, M. le Président, les poches sont vides. Ils sont tous taxés. Nous avons vu un gouvernement qui a taxé jusqu'à nos limites. Selon l'information que j'ai reçue, dans les mesures qu'on trouve dans le projet de loi que nous sommes en train de discuter, le projet de loi n° 85, on peut trouver 40 000 000 $ que le gouvernement cherche dans les poches des étudiants. Il me semble que c'est complètement inacceptable comme approche de ce gouvernement. Et c'est un autre geste comme le projet précédent, le projet de loi n° 84. Dans mon opinion, c'est un autre geste antisocial.

M. le Président, on voit deux choses aussi dans ce projet de loi, une taxe à l'échec, comme nous l'avons appelée, et aussi tout un changement du Programme de remise de dette. Malgré le temps limité, je vais essayer d'expliquer mes opinions sur ces deux choses-là. Premièrement, la taxe à l'échec. Le gouvernement, le Parti québécois était carrément contre ce que nous avions proposé. Mais maintenant ils sont arrivés avec une punition pour les élèves, 2 $ par heure, qui peut être tellement chère, qui, dans mon opinion, peut amener les élèves à quitter l'école, à quitter le cégep. Je pense, j'espère, pendant cette soirée, ce débat assez limité, qu'on pourra convaincre la ministre qu'effectivement ce n'est pas une bonne façon de procéder. Mais c'est clairement un autre exemple du double langage de ce gouvernement, double langage qui commence à être le sigle...

Une voix: La marque de commerce.

M. Williams: ...la marque de commerce de ce gouvernement. Merci, M. le député.

Deuxième chose, le changement de Programme de remise de dette. Ceux et celles qui ont respecté tous les engagements, ceux et celles qui atteignent leurs objectifs, ceux et celles qui ont eu l'excellence ont une chance d'avoir 25 % de leur dette mis de côté par le gouvernement pour encourager l'excellence, encourager les étudiants à atteindre leurs objectifs, mais le gouvernement est en train de mettre tout ça de côté. Il me semble que c'est un message à tous nos étudiants, un message contre l'excellence. M. le Président, on doit encourager l'excellence d'une façon beaucoup plus positive que ça. Il me semble que la ministre a un peu peur de l'excellence, de la compétitivité. On voit un comportement tellement contre les garderies privées, contre l'éducation privée et maintenant contre l'excellence. On doit s'assurer que le gouvernement encourage nos élèves et ne pénalise pas nos élèves.

M. le Président, l'article 12 de ce projet de loi parle des droits spéciaux, c'est la fameuse taxe à l'échec. Je voudrais ajouter un nouveau mot à mon lexique, c'est le mot «déguisé», le mot qui cache le concept de taxes. Maintenant, nous avons les nouveaux mots «des droits spéciaux», c'est une autre taxe cachée à nos élèves. C'est pourquoi, M. le Président, je voterai contre ce projet de loi, et j'espère qu'on peut convaincre le côté ministériel de voter contre ce projet de loi avec nous. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Hull. M. le député de Hull.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 85 apporte, entre autres, des modifications à la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Sous prétexte que pour créer une culture de la réussite il faut d'abord détruire celle de l'échec, la ministre avait annoncé en octobre qu'à compter de 1997-1998 l'étudiant ayant plus d'un cours non réussi durant une même session devra, pour être inscrit à temps plein dans un cégep la session suivante, assumer des droits spéciaux établis à 2 $ l'heure pour chacun des cours non réussis, à l'exception du premier. L'étudiant qui échouerait un seul cours n'aurait donc pas à assumer de droits pour la session suivante, mais, s'il échoue deux cours, il devrait, avant de commencer sa prochaine session, payer des droits correspondant à 2 $ l'heure, soit environ 90 $. Le projet de loi n° 85 introduit les modifications requises par l'annonce de la ministre. Il apparaît toutefois important de préciser que le projet de loi prévoit des droits spéciaux, mais que ces derniers seront fixés par règlement plus tard. Alors, il va falloir attendre, M. le Président, pour savoir si ça correspond à tout ça.

(18 h 20)

Le Directeur général des élections, quand on fait des fausses déclarations, quand on fait de la fraude, quand on fait quoi que ce soit, fait en sorte qu'il y ait des règlements et des moyens pour ramener à l'ordre ou intenter des poursuites devant les tribunaux, s'il le faut, pour la personne qui a commis des erreurs en campagne électorale. Ce que je déplore, c'est qu'il n'y ait pas un mécanisme, comme ça se fait dans le commerce de tous les jours, pour les personnes qui font de la fausse représentation.

M. le Président, le gouvernement que nous avons devant nous, je l'ai mentionné tantôt, a fait durant la campagne électorale de la fausse représentation en déblatérant et en disant que ce qui avait été créé par le Parti libéral, à savoir qu'on imposait des frais de 50 $ par cours aux étudiants qui échouaient cinq cours ou plus, c'était épouvantable, c'était du vol direct. C'est ce qu'ils nous disaient, les candidats du Parti québécois durant la dernière campagne électorale; 50 $ par cours après cinq cours; eux autres, là, c'est 90 $ après un cours. Beaucoup mieux! Ce n'est pas pour rien, M. le Président, que les étudiants sont venus se promener en bas, ici, devant la colline. Mais ils vont s'en rappeler, ça fait deux fois qu'on leur fait ça.

J'ai mentionné tantôt qu'il fallait faire attention à la démocratie. On ne peut pas nous bulldozer des projets de loi sans qu'on ait le temps de les étudier. Quand on bafoue la démocratie, je m'excuse, M. le Président, mais on s'en va vers la dictature, puis je pense qu'on est rendu là avec ce gouvernement-là.

Une voix: À Hollywood...

M. LeSage: Vous pouvez dire ce que vous voulez, mais vous savez de quoi je veux parler. Je vous ai mentionné lors de l'adoption du projet de loi n° 84, tantôt, que c'est encore un bulldozage sans qu'on ait le temps d'avoir les documents requis. On n'avait rien pour étudier le projet de loi. Et, si ce n'est pas ça, de la dictature, M. le Président, j'aimerais qu'on me dise c'est quoi, une dictature. Quand on bafoue les droits des parlementaires et qu'on leur présente un projet de loi sans leur donner toute l'information, c'est une forme de dictature.

À preuve, dans une lettre datée d'hier, 17 décembre 1996... Vous m'indiquez qu'il me reste une minute; je vais faire ça vite. Elle est adressée à la ministre de l'Éducation. Deuxième paragraphe: «Il va de soi que mon premier commentaire – puis ça, ça fait rapport au projet de loi que nous avons devant nous, le projet de loi n° 85 – consistera à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi semble en voie d'être adopté, surtout dans un contexte où les principaux intéressés, incluant bien sûr les parlementaires, ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées par le projet de loi. Il m'apparaît qu'un tel empressement va à l'encontre du principe de transparence du processus législatif essentiel à un sain exercice de ce pouvoir en régime démocratique.»

Une voix: Ha, ha, ha!

M. LeSage: Si ce n'est pas bon, le Protecteur du citoyen, mettez-le à la porte, vous allez sauver de l'argent! Et, s'il est bon, bien, écoutez-le donc quand il vous fait des suggestions! Je vais voter contre, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Hull. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Outremont.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: M. le Président, je suis heureux que la ministre ait décidé de se rejoindre à nous.

Mme Caron: Question de règlement.

Une voix: Tu n'as pas le droit de dire ça.

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Le député d'Outremont doit se conformer... Non, M. le Président, je suis sur une question de règlement. Je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une petite seconde. Excusez, M. le député d'Outremont, Mme la leader adjointe a la parole actuellement.

Mme Caron: M. le Président, ça pourra être utile au député d'Outremont pour les années qui vont suivre. Il y a un règlement qui existe, l'article 35 paragraphe 6°, qui dit qu'on ne peut souligner l'absence ou la présence d'un député en cette Chambre. Alors, nous devons tous nous y conformer.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député d'Outremont, on apprend tous les jours. Alors, je vous cède la parole.

M. Laporte: M. le Président, mon inexpérience m'excuse peut-être, mais je m'en excuse de toute façon. Donc, le projet de loi n° 85 est un mauvais projet de loi, un projet de loi improvisé, inspiré par de faux sentiments d'urgence et, ainsi que je vais le montrer, motivé par une vision à courte vue de la gestion des finances de l'État.

La loi n° 85 en est une démonstration convaincante, M. le Président. Prenons un exemple. Mes collègues en ont parlé plus tôt, mais je vais revenir là-dessus malgré tout. L'exemple de la méchanceté de ce projet de loi: l'abolition du Programme de remise de dette. Cette mesure, introduite en 1991 par le gouvernement libéral, permettait aux étudiants du deuxième et du troisième cycle qui terminaient leurs études dans le temps normal de bénéficier d'une remise de 25 % de leur dette. La loi n° 85 abolit cette mesure sans en avoir fait une évaluation, sans la remplacer par aucun incitatif visant à encourager la diplomation dans des délais normaux. Et la ministre, comme beaucoup de ses collègues, se sent présumément en possession tranquille de la vérité et elle a décidé d'abolir la mesure sans avoir évalué son efficacité, comme le recommandait d'ailleurs le rapport Macdonald.

Le pire, M. le Président, c'est la vision qui inspire ce projet de loi. Le gouvernement gère nos finances publiques comme le ferait un avare. Ce n'est pas la rentabilité financière de ses choix qui l'inspire mais un désir de thésaurisation. Le gouvernement, hanté par l'objectif du déficit zéro comme s'il s'agissait d'un fétiche, n'investit plus, il thésaurise. Ce projet de loi vise davantage la réalisation d'économies et d'économies à très court terme plutôt que l'augmentation de la réussite scolaire. L'attitude fétichiste du fétichisme du gouvernement à l'endroit de l'élimination du déficit courant l'amène à multiplier des actions financières à courte vue sans égard pour leurs conséquences à moyen et à long terme. En plus d'hypothéquer le présent par toutes ces coupures improvisées à gauche et à droite, le gouvernement met en danger notre avenir en s'attaquant aux conditions de vie des générations montantes et aux exigences de leur scolarisation. Cette loi n° 85 est mauvaise, M. le Président, très mauvaise, et ce ne sont pas les trémolos de la ministre de l'Éducation qui vont réussir à nous convaincre du contraire, non plus qu'évidemment à convaincre ces pauvres étudiants qui vont faire les frais des mesures qui nous sont maintenant présentées.

Le pire, je le répète, c'est que ce projet de loi n° 85 est inspiré par une vision de la gestion des dépenses publiques qui est une vision à si court terme... On adopte dans ce projet des mesures qui compromettront l'avenir des étudiants qui sont touchés par le projet, et j'en ai mentionné une, celle de la remise de dette, mais on pourrait aussi en mentionner plusieurs autres, et mes collègues l'ont fait antérieurement.

Donc, M. le Président, je pense qu'il faut s'opposer à ce projet avec toute la vigueur, avec toute la ténacité, avec toute la – comment dirais-je – détermination dont on est capables, et c'est la raison pour laquelle nous allons continuer la résistance et pour laquelle nous voterons évidemment contre ce projet de loi n° 85. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Outremont. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je veux prendre la parole sur le projet de loi n° 85. Il y a quelques minutes, je prenais la parole sur le projet de loi n° 84 qui touchait des compressions budgétaires sur les assistés sociaux et je mentionnais que, dans mon comté, dans une bonne partie d'un secteur qui s'appelle la Petite-Bourgogne, on retrouvait un nombre important d'assistés sociaux qui seront touchés, affectés par les compressions budgétaires de celle que j'ai qualifiée de la fée des étoiles de Hochelaga-Maisonneuve, vous vous en souviendrez.

(18 h 30)

Dans le projet de loi n° 85, on touche maintenant aux étudiants. Et, aussi, dans mon comté, j'ai trois universités: l'Université Concordia, l'Université du Québec à Montréal et l'Université McGill, qui ont des élèves de deuxième et de troisième cycle et dont je vais parler un peu plus tard.

M. le Président, la fée des étoiles, puisque c'est de saison, la fée des étoiles de Hochelaga-Maisonneuve me mentionnait que ce n'était pas elle qui avait adopté, l'an dernier, le projet de loi n° 115 qui avait permis une compression de 145 000 000 $ dans les chèques des assistés sociaux et que la compression de 100 000 000 $ de cette année ne pouvait pas être imputable deux fois de suite à la fée des étoiles du comté de Hochelaga-Maisonneuve. Mais elle me mentionnait que c'était l'autre fée des étoiles, de Chicoutimi, qui, l'an dernier, encore une fois par bâillon, avait été récupérer 145 000 000 $ chez les assistés sociaux.

Nous avons une troisième fée des étoiles ce soir, la fée des étoiles du comté de Taillon, qui nous amène aussi un projet de loi pour récupérer de l'argent. Non seulement ce n'est plus les assistés sociaux qui passent au comptoir, ce sont les étudiants qui passent à la caisse enregistreuse du gouvernement. Et la fée des étoiles de Taillon a décidé qu'elle récupérait de l'argent pour le gouvernement chez les étudiants. Mais à quel endroit le récupère-t-elle? Elle le récupère, entre autres, et mon collègue d'Outremont en a parlé, dans l'abolition du Programme de remise de dette. Et, M. le Président, je vous avoue que, personnellement, je trouve dommage que le Programme de remise de dette soit aboli.

Qu'est-ce qu'il en était du Programme de remise de dette? Le Programme de remise de dette permettait aux étudiants de deuxième et de troisième cycle, c'est-à-dire les étudiants qui finissaient leur maîtrise ou leur doctorat dans le temps imparti pour le faire, soit deux ans pour la maîtrise, puis un autre deux ans pour le doctorat... Les étudiants qui finissaient leur doctorat dans le temps prescrit, qui le faisaient à un rythme prévu par l'organisation de nos cours, c'est-à-dire deux ans pour le doctorat et deux ans pour la maîtrise, voyaient une réduction d'un quart, de 25 % de leur prêt, pour ceux qui avaient obtenu un prêt ou une bourse. Ceux qui avaient un prêt puis qui avaient un endettement voyaient 25 % de leur endettement, pour leur programme d'études en maîtrise et au doctorat, diminuer. Moi, il m'aurait semblé plus intelligent de la part du gouvernement de décider que, même les étudiants de niveau du baccalauréat auraient dû avoir droit... On aurait dû l'élargir, le Programme de remise de dette, aux étudiants du baccalauréat plutôt que de l'enlever aux étudiants de maîtrise et de doctorat.

On a des taux de diplomation qui sont relativement bas dans plusieurs universités, moins de 50 % de taux de diplomation à l'Université du Québec à Montréal, un peu plus de 60 % à l'Université Laval. On aurait intérêt à faire en sorte que la plus grande partie des étudiants puissent terminer leurs études en dedans de trois ans pour le bac, en dedans de cinq ans pour le bac et la maîtrise, en dedans de sept ans pour le bac, la maîtrise et le doctorat.

Le Programme de remise de dette était spécifiquement fait pour les étudiants de maîtrise et de doctorat. Pourquoi? Parce que, au Québec, nous sommes un peu en arrière de la moyenne canadienne en ce qui concerne les études du deuxième et du troisième cycle. Il est malheureux que les étudiants fassent les frais de ce gouvernement qui cherche à récupérer de l'argent sur leur dos aujourd'hui, qui cherchait à récupérer de l'argent sur le dos des assistés sociaux il y a quelques minutes, qui a cherché à récupérer de l'argent sur le dos des assistés sociaux et qui a récupéré de l'argent, 145 000 000 $, sur le dos des assistés sociaux l'an dernier. Il est étonnant qu'en cette période des fêtes nos fées des étoiles récupératrices de l'argent, d'une part, des assistés sociaux et maintenant des étudiants se transforment en fées Carabosse. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Nous avons eu l'occasion de discuter d'un certain nombre de projets de loi en cette Chambre et nous n'avons point manqué de faire valoir à chaque fois que nous étions sous l'emprise d'une loi spéciale qui fait en sorte de museler et de bâillonner les députés. Et, pour les gens qui nous regardent, je pense qu'il est toujours intéressant de rappeler que cette loi spéciale que nous appelons un bâillon est une mesure qui est prise par un gouvernement selon les lois du Québec lorsqu'il veut faire en sorte que l'opposition ne puisse plus intervenir, ou du moins de limiter le temps de l'opposition quant à ses interventions sur des projets de loi, et c'est ce que j'appellerais une situation qui frise le déni de démocratie. Car, en effet, ce qui est une règle fondamentale dans tous les Parlements à travers le monde, c'est bien celle de pouvoir s'y exprimer – et le temps qu'on a le goût de le faire – pour expliquer, faire valoir les points ou les problèmes ou les critiques que nous avons ou que nous pensons que les électeurs pourraient avoir si on adoptait un projet de loi tel qu'il est présenté.

Malheureusement, M. le Président, nous avons en face un gouvernement qui fait fi de cette règle démocratique et qui décide de gouverner par bâillons. C'est la première étape, puis quelquefois ça se rend plus loin, et il n'y a plus du tout de Parlement qui siège, on gouverne par décrets. Il y en a même qui le font déjà maintenant, car on se rend compte que, dans certains ministères, ce gouvernement adopte des décrets, passe des décrets avant des projets de loi. À titre d'exemple, j'aimerais citer le projet de loi n° 31, qui est un projet de loi qui modifie l'administration de la caisse des normes minimales du travail, et, dans le projet de loi, il est question, il est prévu que le gouvernement pourra aller chercher une somme d'argent importante dans la caisse des normes. C'est les cotisations des participants et des employeurs pour financer un autre organisme qui est le Bureau du Commissaire général du travail. Alors, le projet de loi n'a jamais été adopté, il a été déposé au mois de mai – ha, ha, ha! – et on a appris il y a quelques mois, quelques semaines que le gouvernement, vu qu'il n'a pas pu faire adopter le projet de loi, eh bien, il avait passé un décret pour ramasser l'argent tout de suite, quitte à faire adopter la loi plus tard et à régulariser. Ça, c'est l'étape suivante.

M. le Président, on ne peut pas l'accepter et nous ne pouvons pas être d'accord avec ça. Ce n'est pas comme ça qu'au Québec on se développe, ce n'est pas comme ça que nous sommes habitués de faire. Au Québec, la tradition, c'est que les parlementaires puissent s'exprimer, c'est que les parlementaires puissent faire valoir les points de la population, car, je le répète, nous avons été élus par la population du Québec pour faire valoir leurs points auprès du gouvernement et non pas le contraire. Malheureusement, force est de constater que les députés d'en face, ceux du gouvernement actuel, pensent qu'ils sont là pour faire valoir les points du gouvernement auprès de la population et non les points de la population. Alors, le rôle de l'opposition, bien sûr, c'est de le faire, et nous le faisons. Malheureusement, nous avons tellement peu de temps, nous sommes limités.

Imaginez, sur un projet de loi aussi important que le projet de loi n° 85, qui touche en partie au financement des étudiants postuniversitaires mais qui touche aussi aux étudiants du collégial... Et on sait qu'au Québec un grand nombre d'étudiants qui sont au collégial ont de la difficulté à pouvoir survivre, ils sont obligés de travailler. Les parents, les familles touchés durement par la crise économique ont de plus en plus de difficultés à assumer les frais inhérents aux études. Eh bien, là, on va les tarifer, les gens. On va faire en sorte qu'une pénalité soit instituée, et c'est tout à fait contre ce que je pense être la philosophie du système d'enseignement québécois qui est de donner la plus grande ouverture possible, la plus grande accessibilité possible, le plus longtemps possible aux jeunes pour que, lorsqu'ils sortent des études, ils soient capables de fonctionner dans la société, de trouver un emploi, avec tout ce qui en découle, la création d'une famille, l'achat d'une maison et s'établir dans la société.

M. le Président, c'est un projet de loi qui, à cet effet-là, est rétrograde, et nous ne pouvons être pour cela. Nous ne pouvons accepter que, parmi les élèves, les jeunes qui vont être parmi certainement les plus démunis, parmi ceux qui sont les plus sensibles, les plus fragiles, eh bien, nous allons les tarifer 2 $ de l'heure, un peu comme un chauffeur de taxi ou comme d'autres activités où on dit: Bon, bien, c'est 2 $ de l'heure pour pouvoir fonctionner. M. le Président, nous sommes contre, nous ne pouvons pas être pour. L'éducation au Québec ne doit pas être tarifée, surtout pas au collégial. Et, à cet effet-là, il est significatif que, pour passer ça, le gouvernement le fasse dans un bâillon. Pourquoi? Parce qu'ils n'ont pas voulu qu'on en discute, ils n'ont pas voulu qu'on en débatte, ils n'ont pas voulu faire de commission parlementaire, d'audiences publiques, écouter les gens, et nous devons le regretter, le déplorer. Et, pour ce faire, pour le démontrer, bien sûr, bien, nous allons voter contre ce projet de loi. Ce n'est pas un projet de loi qui est intéressant, qui est positif pour la société québécoise. Alors, nous sommes contre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Je vais à mon tour ajouter mon appui à l'opposition de notre formation politique au projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Juste par hasard, aujourd'hui, dans la période des questions, on a parlé des faillites et du nombre très élevé des faillites au Québec. Et qu'est-ce qu'on a encore une fois devant nous ce soir? C'est la faillite de la notion de l'autre façon de gouverner. On peut dire que c'est le tome numéro 2 ce soir, parce que ce avec quoi on arrive, c'est le bâillon sur un projet de loi qui a été déposé en Chambre il y a quelques jours seulement. Les parlementaires de ce côté de la Chambre n'ont même pas eu l'occasion de consulter leurs commettants, de trouver le temps pour voir si ça marche ou si ça ne marche pas. Le gouvernement veut procéder, passer ça discrètement, à la cachette parce qu'il ne veut pas que tout le monde comprenne tout ce qu'il y a dans tout ça.

(18 h 40)

On bâillonne les projets de loi pour aller chercher de l'argent. C'est aussi simple que ça. Il faut être très prudent avec les mots qu'on utilise. Alors, peut-être qu'on peut dire «les apprentis de Fagin». La référence, c'est le roman célèbre de Charles Dickens, «Oliver Twist». Alors, peut-être que c'est les apprentis de Fagin, un après l'autre, qui ont décidé qu'il faut aller chercher l'argent encore une fois dans les poches des contribuables québécois. Cet après-midi, nous avons décidé que les démunis ont trop d'argent. Nous avons passé la loi n° 84 pour aller en chercher, parce que nos démunis, ils sont trop à l'aise, ils ont trop d'argent. Alors, il faut jouer avec les barèmes, il faut trouver les moyens pour, encore une fois, couper l'aide sociale.

Maintenant, ce soir, on a décidé que nos étudiants sont gâtés, sont trop riches, qu'ils ont trop d'argent. Il y a un 40 000 000 $ qu'on peut aller chercher dans leurs poches. Tantôt, la ministre a contesté le chiffre de 40 000 000 $. On verra peut-être plus tard, mais je sais que mon collègue de Verdun est fort dans les chiffres. Alors, quand mon collègue de Verdun parle de 40 000 000 $, j'ai toute confiance dans sa façon de calculer les choses. On verra en commission plénière plus tard, M. le Président, mais, si mon collègue de Verdun m'a assuré de 40 000 000 $, je pense qu'on a décidé que nos étudiants sont trop riches et qu'on va aller chercher un 40 000 000 $ de plus.

Et, d'une façon complètement incohérente, une des belles promesses de l'autre façon de gouverner, c'est une attaque, parce que, nous autres, nous avons dit: Après cinq échecs, il faut commencer à payer pour les cours; et on a été attaqués pour notre taxe de 50 $, qualifiée d'inhumaine. On ne comprenait rien, c'était injuste, il fallait abolir ça. Le gouvernement arrive, il met fin à tout ça pour le remplacer par quelque chose de beaucoup plus généreux, une taxe de 90 $ après un échec. Alors, si on était aussi méchants, si on était aussi pas bons à 50 $ après cinq échecs, comment on peut qualifier un gouvernement et une ministre qui mettent une taxe de 90 $ pour un cours de 45 heures après juste un échec? Où est la logique? Où est la cohérence? Où est l'autre façon de gouverner? Ça fait faillite, M. le Président. C'est quelque chose qui n'existe plus. Aller chercher l'argent, imposer le bâillon, travailler en secret, à la cachette parce qu'on ne veut pas tenir les audiences publiques, on ne veut pas consulter les fédérations des étudiants, on ne veut pas consulter les universités et les cégeps qui doivent appliquer ces règlements... On n'a pas le temps, on est trop pressé pour le faire, parce qu'on est conscient qu'il n'y a rien dans tout ça qui va aider la création de ce que la ministre a qualifié d'une culture de la réussite.

C'est vraiment un autre projet de loi commandé par le président du Conseil du trésor pour livrer l'argent. Et c'est quoi, l'autre façon de gouverner? On va chercher l'argent tout de suite et, pour les réformes, les choses pour aider les étudiants, on vient de créer un autre groupe de travail, et le groupe de travail va produire un livre blanc, ou un livre bleu, ou un livre vert, jaune, je ne sais pas. On a besoin d'une chose, c'est d'un livre rouge un jour pour corriger tout ça.

Alors, la réforme, c'est toujours dans six mois, dans un an, dans trois ans, mais, quand c'est pour aller chercher de l'argent, le gouvernement est toujours très vite à le faire. Alors, l'argent, on va aller chercher ça tout de suite. La réforme, le groupe de travail va créer une table de concertation qui va publier un livre blanc, qui va aller sur le terrain pour faire une tournée de consultation pour revenir avec un livre vert, et tout ça. Ça ne finit jamais. Pour la réforme, les choses pour aider nos étudiants, on n'a pas le temps. La seule mesure concrète, c'est qu'on va abolir la remise de dette pour nos meilleurs étudiants. Les personnes de deuxième, troisième cycle, les personnes vraiment qui ont fait la réussite, on va abolir ça parce qu'ils sont trop riches. On sait que nos étudiants de deuxième cycle et de troisième cycle sont dans le grand luxe, qu'ils vivent dans des Cadillac, et tout ça. Alors, on va chercher l'argent. Quelle drôle de façon de promouvoir une culture de la réussite! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Le prochain intervenant sera M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. À mon tour, même au moment d'un bâillon, je tiens, comme porte-parole de l'opposition, comme député de l'opposition, à me prononcer sur le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

D'abord, je suis un peu surpris qu'il y ait seulement l'opposition qui veuille débattre de ce projet de loi là. On a l'impression d'avoir affaire, du côté du gouvernement, à des statues de l'Île de Pâques, à des gens qui ne se prononcent pas. Et ce n'est pas vrai, dans leurs circonscriptions – parce qu'on y va, dans leurs circonscriptions, à ces gens-là – que les gens sont d'accord avec ce projet de loi-là, pas plus qu'avec les autres projets de loi. Et, j'invite les députés du gouvernement à se lever et à dire que, chez eux, il y a des gens qui ne sont pas d'accord avec ça, et ne pas juste écouter ce que les gens de l'opposition disent. Je pense qu'il serait agréable d'entendre les députés du gouvernement nous dire ce qu'ils entendent des citoyens dans leurs circonscriptions.

On a l'impression depuis quelques semaines – et j'aurai l'occasion de revenir plus tard ce soir sur cette approche-là des choses – qu'on est géré par une pieuvre qui met une patte dans chacune de nos poches pour aller chercher un peu plus d'argent; cette grosse pieuvre qui est l'État, quand ce n'est pas la petite poche d'en avant, c'est la poche de côté ou la poche d'en arrière ou la poche des pantalons, pour ne pas dire la poche du père Noël. C'est incroyable! On n'a jamais vu, dans une même année, un gouvernement qui s'acharne... On a l'impression d'être à l'époque des rois, où toutes les taxes étaient permises et personne n'avait le droit de parler. Je n'ai jamais vu, dans une même année, une pieuvre rentrer dans chacune de nos poches à tous les jours et venir nous chercher d'autre argent.

Il n'y a pas une journée où on n'ouvre pas le journal, quand ce n'est pas le 4 $ sur nos pneus qu'on va venir nous chercher dans quelques semaines, c'est sur la taxe d'affaires. J'en ai deux pages ici, M. le Président. Savez-vous combien de nouvel argent ce gouvernement va venir chercher jour après jour dans la prochaine année? Non seulement on a trouvé le moyen, depuis neuf mois, de perdre 200 jobs par jour au Québec, à tous les jours, incluant le samedi et le dimanche, la journée de Noël, le Jour de l'An et le jour de Pâques, mais on va venir chercher dans les poches des citoyens du Québec, en nouvelles taxes, 3 000 000 $ par jour. C'est du jamais vu dans l'histoire du Québec. Et j'aurai le plaisir, lors d'un autre cinq minutes ce soir, pour les gens du gouvernement, de leur énumérer les 962 000 000 $ de nouveaux revenus, alors qu'on ne crée pas la richesse au Québec.

C'est ça qui est le drame en ce moment au Québec, c'est qu'on taxe comme à l'époque des rois, où personne n'avait le droit de dire un mot. La preuve, c'est qu'on nous bâillonne, ici, on n'a pas le droit de parler. On vient chercher constamment partout, comme cette pieuvre, des dollars, mais on ne crée pas la richesse. Si au moins on pouvait annoncer jour après jour qu'on a créé 200 emplois, si on pouvait annoncer la relance d'une industrie, si on pouvait annoncer que nos jeunes ont des projets d'avenir, là on créerait cette richesse collective. Et, une fois que tu as la richesse collective, on peut la diviser, on peut aider les plus démunis de la société. Mais, ici, ce n'est pas ça. On a pris une autre attitude, M. le Président, on coupe tout le monde. Après les gens d'affaires, ça a été les gens âgés, ça a été les gens riches sur l'aide sociale – il faut le faire, couper ces gens-là – et là, ce soir, on s'acharne maintenant sur les étudiants.

On sait qu'au Québec – et la ministre de l'Éducation, j'espère qu'elle nous écoute – les gens, au niveau de la maîtrise et au doctorat, à la porte d'entrée des universités, sont encore les moins nombreux en pourcentage. Alors, il me semble que la mesure qu'on devait prendre, c'était une mesure incitative pour aider nos gens, pour aider nos jeunes, comme le disait si bien d'ailleurs le programme du PQ. Il faut relire ce programme, M. le Président, c'était de toute beauté. Mon confrère parlait des différentes couleurs des livres qu'ils sont après imprimer, de l'autre côté. Je leur parlerai de leur programme en rose. C'était un programme où tout était beau, tout était facile pour les jeunes du Québec. Et là on a la preuve, 16 mois après, du désastre de cette administration péquiste. Alors, nous voterons contre, bien sûr, le projet de loi n° 85. Merci, M. le Président.

(18 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Alors, M. le député de Laviolette, si vous voulez prendre la parole, je vous cède la parole.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je suis un peu surpris, et, pour les gens qui nous écoutent à la télévision et les gens qui sont dans l'assistance, il serait peut-être important de rappeler une chose. Le député a parlé de n'importe quoi, là, dans le fond. Il est arrivé, vers la fin, sur le projet qui est devant nous, et il a dit une affaire que je trouve abominable. Il a dit qu'on les bâillonne, on les empêche de parler. Ça fait cinq minutes que lui-même parle, ça fait cinq minutes que ses autres collègues parlent, calculez-les tous ensemble, on ne les empêche pas de parler, ils parlent. La preuve, c'est qu'ils peuvent parler de n'importe quoi à ce moment-ci, d'après ce que je peux voir. La seule chose dont il n'a pas fait mention – qui est son habitude – ça aurait été de parler des cochons. Il n'en a pas parlé, mais, à part ça, il a parlé de toutes sortes de choses, sauf ça. Mais, sur le discours tel quel, sur la mesure qui est apportée par le ministre, il ne peut pas dire qu'on les empêche de parler, puisqu'il a parlé.

Alors, pour les besoins des téléspectateurs, je ne prendrai pas plus de temps que cela. Simplement rappeler qu'il y a des règles parlementaires qui existent. Ces règles parlementaires peuvent être changées par une décision qui a été celle qui a été votée la nuit dernière, suite à une motion de suspension des règles, pour justement permettre au gouvernement d'agir. Ces gens-là parlent de toutes sortes de choses, n'ont jamais été capables de régler dans le passé des problèmes, on les règle, ils veulent nous empêcher de les régler. Ils veulent nous augmenter les déficits, parce que, dans le fond, c'est ce qu'ils ont réussi à faire pendant qu'ils étaient au pouvoir, 1 000 000 000 $ de plus par année que les prévisions normales, avec des déficits records, de 5 700 000 000 $ dans la dernière année.

M. le Président, ce n'est pas le chemin que nous avons choisi. C'est un chemin difficile, cependant, que l'équipe gouvernementale a décidé de prendre. Ce chemin difficile, c'est de demander à chaque personne au Québec, de quelque catégorie de personnes que l'on soit, de se donner un projet collectif permettant de régler les difficultés dans lesquelles ce gouvernement précédent nous a placés. Alors, pourquoi, à ce moment-là, il faut agir? Bien, la ministre en donne un exemple, tout à l'heure on a eu un autre exemple, on va en avoir d'autres, on a six projets de loi qui vont être dans cette mesure de suspension des règles qui est permise par notre règlement. Ce n'est pas anormal, ce n'est pas illégal. Eux autres, ils l'ont utilisée de façon encore plus difficile à l'époque: on avait, sur un projet de loi, le droit de parler cinq minutes seulement. Nous, on leur donne la chance, tout le monde, de parler un maximum de cinq minutes. À chaque personne qui le veut! Ils sont 47; s'ils le veulent, ils peuvent parler, les 47. Donc, qu'ils arrêtent de dire des choses qui ne sont pas vraies. Ils ne sont pas empêchés de parler. Ils sont, en vertu du règlement, diminués quant à leur droit de parole, mais ils ont le droit de le dire.

Et, comme on l'a vu tout à l'heure – le député aller porter le discours qu'il venait de faire à l'autre député, le député de LaFontaine, qui a reçu de l'autre député le papier et qui a parlé à partir de ça – si, au lieu de répéter la même chose, chacun prenait le cinq minutes pour parler de choses différentes les unes des autres, il y aurait peut-être des discours qui seraient plus cohérents, plus intéressants, et la population comprendrait leur indignation. Merci, M. le Président.

M. Benoit: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Laviolette. M. le député d'Orford, une question de règlement.

M. Benoit: Oui, question de règlement. On a prêté des intentions au député...

M. Jolivet: Non, non, non.

M. Benoit: ...d'avoir été porter un discours à un autre député.

M. Jolivet: Ce n'est pas une question de règlement.

M. Benoit: M. le Président, j'ai vu...

M. Jolivet: M. le Président... M. le Président...

M. Benoit: Un instant, M. le Président. J'ai vu le document.

M. Jolivet: M. le Président... M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. S'il vous plaît! M. le député de Laviolette, ce n'est pas à vous à décider si c'est une question de règlement, oui ou non. Ah! une question de règlement. Laissez-moi finir.

M. Benoit: ...l'intention était que le même discours avait été employé deux fois. C'est absolument erroné, M. le Président, ayant vu les documents.

M. Jolivet: C'est vrai. C'est vrai! C'est vrai! M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Bon! Vous êtes défoulés, là?

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): On peut vous donner encore cinq minutes, si vous voulez.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): On peut même suspendre. Alors...

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement. J'aimerais savoir de votre part: Est-ce que la question précédente était une question de règlement?

Le Vice-Président (M. Brouillet): La vôtre, ce n'en est pas une. Assoyez-vous.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Joyeux Noël, Jean-Pierre!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Farrah: Merci. M. le Président, je pense que vous faites preuve d'une compétence exemplaire en cette Chambre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ah oui!


M. Georges Farrah

M. Farrah: Je vous félicite. Je vous félicite, M. le Président.

M. le Président, c'est avec plaisir que je joins ma voix à celle des membres de la formation qui forme l'opposition officielle en cette Chambre relativement au débat sur le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

On fait face à un bâillon. Un bâillon, pourquoi? Mauvaise planification des travaux parlementaires. D'ailleurs, le projet de loi qui nous est présenté nous a été déposé le 10 décembre dernier, ce qui fait en sorte qu'on n'a pas pu passer les étapes normales justement pour voir quels étaient les principes directeurs de ce projet de loi. Sauf qu'à la lumière des informations que nous avons eues et notamment une lettre du Protecteur du citoyen qui nous dit, et je le cite... Dans une lettre adressée le 17 décembre 1996 à Mme la ministre de l'Éducation, il dit ceci: «Il va de soi que mon premier commentaire consisterait à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi semble en voie d'être adopté, surtout dans un contexte où les principaux intéressés, incluant bien sûr les parlementaires, ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées par le projet de loi.» Alors, le Protecteur du citoyen nous avise très clairement que, dans le contexte actuel, ce projet de loi là aurait dû être étudié de façon beaucoup plus exhaustive.

Deuxièmement, on se rend compte que les députés formant le gouvernement, de la formation ministérielle sont des gens qui sont des représentants du gouvernement du Québec dans leur comté et non pas des représentants de leur comté à Québec et au gouvernement. Et c'est pour ça qu'on se rend compte que ces gens-là sont complètement déconnectés de la réalité, déconnectés de leur clientèle respective, ce qui va faire en sorte que ces gens-là, les clientèles ne se sentent pas défendues.

Tantôt, je faisais mention justement de l'improvisation dans laquelle nous sommes conviés en cette fin de session. J'aimerais vous citer un article de M. Bourgault – Pierre Bourgault, je pense que c'est un analyste objectif, on ne dira pas que c'est un ami du Parti libéral du Québec – dans un texte ou un éditorial qu'il livrait le samedi 7 décembre 1996, où il dit ceci, et je cite M. Bourgault, un paragraphe: «En effet, tout se déroule comme si [...] – le premier ministre – se disait en se levant le matin: "Il me semble qu'on a oublié de frapper sur quelqu'un hier. Alors, on va s'en occuper aujourd'hui."» C'est à peu près ça, le gouvernement que nous avons en face de nous. On se réveille le matin: Sur qui on n'a pas frappé aujourd'hui? Alors, quels sont les démunis, les gens dans la misère qu'on a oubliés? Un peu plus loin, en faisant état du gouvernement qu'on a devant nous, M. Bourgault disait que c'est un gouvernement arrogant, avec beaucoup d'improvisation, «...cachotteries. Cavalier et sournois.» Et ça, c'est Pierre Bourgault qui disait ça samedi le 7 décembre dernier. Et un autre commentaire. M. Bourgault disait: «On court en tous sens comme une poule à qui on vient de couper la tête.»

Alors, c'est ça, le gouvernement qu'on a en face de nous. C'est ça aussi qu'on doit, nous, comme opposition officielle, relever et faire en sorte que les clientèles sur l'ensemble du territoire du Québec se sentent défendues par des députés à l'Assemblée nationale qui sont conscients de leurs revendications et surtout de leur défense.

Nous sommes confrontés à un gouvernement où les ministres sont voués à un seul homme, soit le président du Conseil du trésor. Uniquement. Ils ne sont pas là pour défendre leurs clientèles, ils sont là pour défendre le président du Conseil du trésor. Et là, tantôt, on avait un projet de loi où c'étaient les assistés sociaux qui passaient à la caisse, qui passaient au cash. Et là, maintenant, ce sont les étudiants, pour lesquels on introduit une taxe à l'échec, taxe que nous avions proposée, nous, alors qu'on était au gouvernement, qu'on a dénoncée, de la part de ces gens du gouvernement du Parti québécois. Et qu'est-ce qu'on fait maintenant? On introduit cette taxe, mais elle est encore plus punitive et coûte davantage aux étudiants. C'est le double langage, M. le Président. Et c'est la raison pour laquelle on doit s'objecter et s'opposer à l'adoption de ce projet de loi.

(19 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Laurent. M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Hier, quand le leader du gouvernement a introduit la motion de bâillon, il disait qu'il le regrettait, que ce n'était pas agréable de faire ce geste-là, et c'est une façon polie, bien sûr, d'exprimer qu'il avait honte d'être obligé de procéder de cette façon. Mais, quand on regarde les lois qui ont été insérées à l'intérieur de la motion de bâillon, là, ça s'explique encore davantage. Il est malheureux que, à l'Assemblée nationale, dans une période comme celle qui nous occupe présentement, certains d'entre eux ne puissent porter des masques pour ne pas se faire reconnaître, parce que, comme ils sont tous ou presque étrangement silencieux, c'est comme s'il n'y avait pas dans leurs comtés d'étudiants, de gens qui sont affectés par la loi qui est devant nous. Ils sont demeurés également extrêmement silencieux sur un autre projet de loi qui a fait l'objet du bâillon, les assistés sociaux, comme si ça n'existait pas, ces clientèles-là, dans leurs comtés.

Même si vous ne voulez pas en parler ici, quand vous serez de retour chez vous, il y en a des étudiants qui vont vous aborder, qui vont vous poser des questions. Il y a des étudiants qui vont vous rappeler et qui vont rappeler à cette formation politique qu'en période électorale, avant le référendum, le premier ministre de l'époque, M. Parizeau, s'indignait devant une taxe à l'échec de 50 $ après cinq échecs et qu'il fallait absolument abolir ça. Et toute cette jeunesse qui était à l'écoute, qui s'abreuvait de ses paroles était convaincue qu'elle avait devant elle un aspirant premier ministre qui la représentait et qui lui disait exactement ce qu'elle croyait qui était le mieux pour elle. C'est ce qu'ils croyaient, ces jeunes, M. le Président, et pourtant, un peu plus de deux ans après la fin de la campagne électorale, une année après le référendum, ces mêmes étudiants qui applaudissaient et qui criaient à s'époumoner: «Merci d'abolir la taxe de 50 $ à l'échec» se voient placés devant une situation comme celle-là.

En écoutant ceux qui ont précédé, on apprenait que, à peine hier, des groupes représentant des étudiants étaient en conversation avec le bureau de la ministre pour former un comité pour se pencher sur le dossier, et, à ce moment-là, ils ignoraient que, dans les heures qui allaient suivre, avant même que le projet de loi ait fait l'objet de débat en cette Assemblée, le gouvernement imposerait le bâillon. Le gouvernement, à la recherche d'argent, a décidé d'inventorier toutes les clientèles au Québec. Tous les gens qu'ils soupçonnent d'avoir encore un peu d'argent, ils sont à leur recherche. Cet après-midi, M. le Président, c'était la clientèle des assistés sociaux. Maintenant, ce sont les étudiants. Et, au fur et à mesure que se déroulera le bâillon, nous serons à même de constater qu'un inventaire systématique a été fait de l'ensemble des clientèles. Des gens qu'on a trompés, dont on a manipulé la confiance, parce que, quand on s'adressait à cette clientèle-là en campagne électorale, on leur disait: Un vote pour le Parti québécois, ça va se transformer en une loi qui va abolir le 50 $ de la taxe après cinq échecs. Vous souvenez-vous comment ceux et celles d'entre vous qui avez utilisé ces propos en campagne électorale, qui avez distribué votre programme électoral pour vous attirer l'appui de ces jeunes... Eh bien, aujourd'hui, vous leur offrez en retour un message de déception, un message de désespoir.

Et je terminerai, parce que vous m'indiquez qu'il me reste à peine une demi-minute, M. le Président. Lors des incidents de la place T'ien an Men, François Mitterrand avait dit: Un peuple qui tire sur sa jeunesse n'a pas d'avenir. Je répéterai qu'un gouvernement qui traite sa jeunesse comme vous le faites ne mérite pas l'appui que cette jeunesse vous a donné. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): On vous remercie, M. le député de Saint-Laurent. Mme la députée de Saint-François, je vous cède la parole.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le gouvernement a décidé, hier, de suspendre les règles, de bâillonner l'opposition et de faire passer en toute vapeur plusieurs projets de loi. Le projet de loi qui nous préoccupe présentement, le projet de loi n° 85, a été déposé en Chambre le 10 décembre dernier; nous sommes au 18 décembre, et on voudrait l'adopter rapidement. La même chose pour le projet de loi n° 84. Le projet de loi n° 84 que nous avons adopté cet après-midi, concernant la sécurité du revenu, avait été déposé mardi, et on a dû l'adopter à toute vitesse cet après-midi.

M. le Président, c'est une chose que de bâillonner l'opposition, mais c'est une chose que de se rendre compte de quelle sorte de procédure ou quelle sorte d'étude on peut faire d'un projet de loi. Cet après-midi, ce projet de loi avait sept articles, nous n'avions pas la réglementation, mais malgré tout il fallait adopter le projet de loi. Presque chacun des articles référait à la réglementation. C'est à la toute fin que la ministre a déposé la réglementation, et je dois vous dire qu'en plus elle l'avait envoyée au Protecteur du citoyen avant même que les parlementaires aient obtenu la réglementation qui était reliée au projet de loi n° 84. Après avoir passé une heure, nous sommes restés sur notre faim. On a dû lever le comité plénier, étant donné que bien sûr on avait suspendu le processus, donc on a dû quitter sans avoir le temps d'étudier les autres articles du projet de loi de même que toute la réglementation.

La même chose avec le projet de loi n° 85, M. le Président. Ce projet de loi, la ministre dit qu'il est urgent de l'adopter. Lorsqu'on bâillonne pour faire adopter des projets de loi, généralement, ce n'est pas pour donner à des clientèles, c'est pour aller chercher dans les poches des clientèles. C'est ce qu'on a fait cet après-midi avec le projet de loi n° 84 – on est allé chercher dans la poche de la clientèle des plus démunis de la société québécoise – et c'est exactement ce que nous faisons actuellement avec le projet de loi n° 85.

Si ce n'était pas pour aller chercher dans la poche des contribuables, il n'y aurait pas d'empressement à faire adopter ce projet de loi. D'ailleurs, le Protecteur du citoyen a fait parvenir à la ministre une lettre en date d'hier, hein, où il mentionnait: «Il va de soi que mon premier commentaire consistera à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi semble en voie d'être adopté, surtout dans un contexte où les principaux intéressés, incluant bien sûr les parlementaires, ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées par le projet de loi – tout comme le projet de loi n° 84, cet après-midi, où on ne possédait pas la réglementation – Il m'apparaît qu'un tel empressement va à l'encontre du principe de la transparence du processus législatif essentiel à un sain exercice de ce pouvoir en régime démocratique. Dans les circonstances, la lecture du projet de loi n° 85 nous laisse donc sur notre appétit face à certaines interrogations auxquelles seul l'avenir pourra nous permettre de trouver réponses, lorsque les dispositions réglementaires pertinentes seront rendues publiques.» Exactement, M. le Président, comme le projet de loi. Alors, quel est l'empressement? Même le Protecteur du citoyen mentionne à la ministre et suggère à la ministre de reporter l'adoption de son projet de loi, puisqu'il n'y a pas urgence à le faire.

On se souviendra que, lorsque la ministre a décidé, en invoquant des raisons d'éthique politique, de respecter l'engagement et de ne pas hausser les droits de scolarité, je dois vous dire que la ministre aurait été mieux d'agir plus rapidement, avant que tous les étudiants se retrouvent dans la rue. Aujourd'hui, on disait que, dans ma région, les étudiants devront retourner à l'école, au cégep les 23 et 24 décembre jusqu'à 22 heures et les 2 et 3 janvier. Est-ce qu'on pense à toutes ces familles? Est-ce qu'on pense aux étudiants qui sont de l'extérieur, qui doivent venir étudier dans un cégep et qui devront, les 23 et 24 jusqu'à 22 heures et les 2 et 3 janvier, revenir pour reprendre les cours qui ont été perdus?

Si la ministre avait été plus vigilante, M. le Président, si c'était à cause d'une raison d'éthique politique, elle aurait avisé les étudiants bien avant. Alors, bien sûr que, dans les circonstances, on ne peut pas être pour l'adoption de ce projet de loi.

(19 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. J'interviens sur ce projet de loi n° 85 et je vais aborder certains des éléments que ma collègue de Saint-François a abordés tantôt. Il y a deux points à relever dès le départ malheureusement, et c'est peut-être – je vais reprendre là où j'ai laissé hier soir, M. le Président – de noter la honte qui se répand à l'extérieur de cette Chambre lorsqu'on voit la façon dont le gouvernement décide de procéder avec son menu législatif. Une honte, M. le Président. Parce que, de l'autre côté, on peut toujours se dire: Ah! C'est l'opposition, c'est le Parti libéral qui nous dit ça, dans le fond, on n'a pas besoin de les écouter. Il faut savoir que lorsqu'on dénonce le bâillon, lorsqu'on dénonce le fait que ce gouvernement fait très peu de cas de la démocratie, de notre rôle de représentant...

Moi, lorsque je retourne dans mon comté de Châteauguay, les gens veulent savoir comment j'ai pu participer à l'élaboration des règles, à l'élaboration de l'environnement législatif que tous nous devons respecter. Et lorsque je suis obligé de leur dire que, session après session, cette autre façon de gouverner consiste à nous bâillonner ici, en Chambre, tantôt, en commission, comme c'était encore le cas à la commission de l'éducation cet après-midi, lorsque les membres du parti ministériel ont décidé qu'on devait se refuser, à la commission, d'entendre les acteurs directement concernés par des projets de loi...

La méthode choisie par ce gouvernement, c'est l'autruche, la tête dans le sable, se boucher les oreilles, ne pas entendre ce que le peuple que nous représentons a à dire, ne pas écouter ce que les gens que nous représentons cherchent à avoir comme société de demain.

M. le Président, il y a un protecteur du citoyen qui est une institution ici, au Québec. Le gouvernement n'entend plus, n'écoute plus, ne respecte plus les écrits, la parole, les commentaires du Protecteur du citoyen. Ma collègue de Saint-François l'a dit tantôt. Le Protecteur du citoyen n'y va pas de main morte, il nous dit que son premier commentaire, c'est de déplorer l'empressement, où les parlementaires eux-mêmes ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées. Il dit: «Il m'apparaît qu'un tel empressement va à l'encontre du principe de la transparence du processus législatif.»

«Transparence», maître mot de celui qui était le premier ministre, M. Parizeau, il y a de cela encore quelques mois. Il nous parlait beaucoup de transparence. On sait que la vérité était tout au contraire, c'était l'obscurité. Mais, depuis qu'il y a maintenant un nouveau premier ministre, ce n'est plus l'obscurité, c'est le retour de la grande noirceur. Et c'est ce que le Protecteur du citoyen nous dit. Le retour de la grande noirceur, c'est ça le choix qui a été fait comme autre façon de gouverner, nous empêcher de plaider la cause des citoyens que nous devons représenter.

Et pas juste nous de l'opposition, vous aussi, de l'autre côté, vous êtes interpellés, vous aussi, vous êtes bâillonnés. Et que dites-vous, dans vos comtés, que dites-vous aux citoyens qui vont vous demander, par exemple, comme dans le projet de loi n° 85: Comment se fait-il que, pour gagner des élections, M. Parizeau faisait montre, avec beaucoup de théâtre, s'exprimait sur des politiques adoptées par les libéraux avant, politiques où il y avait, en matière d'échec de cours, des frais de 50 $ par cours imposés pour le cinquième échec? Et vous vous souvenez de ce que M. Parizeau a dit, vous avez tous fait campagne... M. le Président, tous les ministériels ont fait campagne à ses côtés, se sont réjouis lorsque M. Parizeau disait: C'est épouvantable, ça attaque la gratuité, on va casser ça, cette affaire-là. Ah oui, M. le Président!

Il faut que les gens sachent ce qu'ils ont fait, de l'autre côté: ils ont cassé ça, le 50 piastres. Maintenant, c'est 45 $ à partir du deuxième. Autrement dit, la gratuité, c'est eux qui l'attaquent. Ils ont choisi de renier, encore une fois. Est-ce que c'était nécessaire de le prouver, encore une fois, combien la parole donnée n'est jamais respectée, les actions ne suivent jamais le discours? Au contraire, on présente une position et on fait le contraire. C'est le couteau dans le dos des Québécois, jour après jour, mesure législative après mesure législative. Et on ne s'étonnera pas, dans ce contexte, des bâillons répétitifs qu'on nous impose, et la population saura juger ce gouvernement qui fait si peu de cas de la démocratie. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole, particulièrement après le député de Châteauguay qui est toujours si éloquent, et nous sommes fiers, nous sommes fiers de tous nos collègues ici qui n'ont pas peur et, du moins, qui insistent, dans le peu de temps qui nous est alloué, pour dénoncer la méthode dont le gouvernement passe les projets de loi non pas seulement aux élus, ici, M. le Président, mais aussi à la population du Québec.

M. le Président, j'aurais aimé voir, en éducation, un projet de loi qui aurait favorisé la réussite scolaire. Je pense qu'on était rendu à ça après les états généraux. Tout ce qu'on a présentement, M. le Président, c'est des projets de loi qui favorisent la taxation.

On a malheureusement eu encore un autre projet de loi qui tendait seulement à taxer, mais qui a été présenté à la hâte, je dirais, presque en catimini, peut-être pour éviter certaines protestations. On sait que, lorsqu'on en parle depuis trop longtemps, les étudiants ont tendance à sortir, les agriculteurs ont tendance à sortir. Bien, maintenant, si on passe ça à quelques jours des Fêtes, vite... D'ailleurs, je me suis laissé dire que les étudiants avaient discuté avec la ministre pas plus tard qu'hier après-midi et, quelques heures plus tard, on dépose un bâillon sur un projet de loi qu'on n'a pas eu le temps de regarder et qu'on enfonce, en fin de compte, dans la gorge des étudiants, comme des projets de loi qu'on a enfoncés ce matin dans la gorge des assistés sociaux.

M. le Président, on frappe tout le monde. J'ai entendu tantôt le député des Îles-de-la-Madeleine citer Pierre Bourgault. Je pense que c'est bon de le répéter ici, M. le Président. Pierre Bourgault disait, la semaine dernière, il parlait du premier ministre actuel, que la fonction semble le dépasser; il dirige ce qui semble devoir être un des pires gouvernements des 40 dernières années. M. le Président, lorsqu'un type comme Pierre Bourgault, qui est un ami, un ami des gens d'en face, pense, il l'écrit, il le dit publiquement, que ce gouvernement est le pire des 40 dernières années, c'est parce que, M. le Président, l'usure se fait à grande vitesse de ce gouvernement. Il rajoute: En effet, tout se déroule comme si le premier ministre – pour ne pas employer de mots antiparlementaires, maintenant – se disait, en se levant le matin: Il me semble qu'on a oublié de frapper sur quelqu'un hier, alors on va s'en occuper aujourd'hui. Mais aujourd'hui, on s'en occupe beaucoup, M. le Président. On frappe depuis ce matin, puis on frappe tout le monde.

Donc, il semble qu'il est plus facile pour ce gouvernement-là, plutôt que de créer une richesse, que de faire en sorte qu'on puisse créer des emplois pour aider ces gens-là... on crée plutôt la décroissance du Québec en annonçant des taxes. M. le Président, juste depuis l'arrivée du nouveau député de Jonquière à la tête de ce gouvernement, on a déjà, vous ne le croirez pas, M. le Président, 962 000 000 $ de nouvelles taxes cette année. Il faut justifier, M. le Président, qu'il y a seulement 10 mois, là-dessus... le premier ministre est en fonction depuis fin janvier 1996.

J'aurais aimé entendre des députés de l'autre côté, parce qu'ils auront à se prononcer dans leur comté. Parce que, évidemment, ceux qui ont des comtés, au moins... ou ceux qui sortent un peu vont se faire poser des questions par leurs commettants, et j'aurais été curieux de savoir, par un des députés d'en face... Je demande juste à un de se lever puis de nous dire ce qu'ils vont répondre aux étudiants lorsqu'ils vont leur poser des questions sur ces frais-là. Qu'est-ce qu'ils vont répondre aux assistés sociaux? Qu'est-ce qu'ils vont répondre aux autres groupes de la société?

C'est bien facile, ici, de se cacher dans ce salon-là, mais ils auront à sortir. J'aurais aimé les entendre. J'aurais aimé entendre le député d'Anjou qui, lui, nouveau père, aura à envoyer des enfants à l'école prochainement. Je suis certain qu'il va être touché par ce projet de loi là. Je suis certain que, s'il avait le droit de parole, s'il n'était pas bâillonné lui-même, il pourrait quand même nous avouer, peut-être à mots couverts, son désaccord sur ces projets de loi là.

Donc, M. le Président, tel que je le disais ce matin, malheureusement on s'attaque, je dirais, de façon presque malicieuse à ces groupes de la société: ce matin, aux assistés sociaux; cet après-midi, aux étudiants; et, ce soir, sur autre chose, ici, au salon bleu, ou ailleurs en commission parlementaire. Donc, c'est pour cette raison, M. le Président, qu'on doit dénoncer ces méthodes, premièrement ce bâillon, les méthodes qu'entreprend le gouvernement pour passer ses lois, et c'est pourquoi je voterai contre, M. le Président.

(19 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, si j'interviens dans le cadre du projet de loi n° 85 à cette étape-ci, c'est d'abord pour déplorer que le débat sur ce projet de loi se fasse dans le cadre d'une motion de bâillon qui oblige les parlementaires à avoir cinq minutes seulement pour débattre des questions qui ont quand même des incidences importantes, notamment dans le cadre du projet de loi n° 85 concernant les étudiants, puisqu'il s'agit du projet de loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Alors, M. le Président, il faut signaler que ce projet de loi a été déposé le 10 décembre dernier. Alors, s'il y avait des corrections à apporter, je pense que la ministre était en mesure de le savoir depuis longtemps, et on nous dépose, le 10, la semaine dernière, un projet de loi et on l'inclut dans un bâillon. Et on peut se demander quelle est l'urgence de procéder si rapidement dans le cadre de ce projet de loi. Est-ce que c'est pour améliorer l'accessibilité des étudiants à l'enseignement au niveau collégial et au niveau universitaire? Certainement pas, M. le Président. Est-ce que c'est pour apporter plus de support aux étudiants pour favoriser la réussite au niveau des études collégiales et universitaires? Encore une fois, M. le Président, on doit répondre non. La seule raison pour laquelle il y a une urgence, c'est pour encaisser 40 000 000 $ sur le dos des étudiants. Et ça, M. le Président, ça fait partie de la stratégie du gouvernement et des actions concrètes du gouvernement qui démontrent clairement qu'il y a continuellement incompatibilité, incohérence entre les paroles et les gestes de ce gouvernement.

Alors, M. le Président, essentiellement, on a un gouvernement qui se comporte comme une caisse enregistreuse, et la seule chose qui l'intéresse, c'est de voir l'argent rentrer dans la caisse. Le premier ministre se fait un plaisir fou de peser sur des boutons, il n'a que pour seule vision, M. le Président, le clavier de la caisse enregistreuse et le seul son qui l'intéresse, c'est le son de la cloche. Alors, M. le Président, on doit déplorer malheureusement ce fait-là et déplorer aussi le manque de vision total du gouvernement par rapport aux réformes sociales qui doivent se faire dans toute société et qui demandent un certain temps, qui demandent d'avoir une vision, une perspective de développement, d'évolution, et non pas tout simplement une caisse enregistreuse en considération. Alors, malheureusement, M. le Président, on doit déplorer cette situation-là.

Au niveau du projet de loi n° 85, essentiellement, si on essaie de résumer, parce qu'on a évidemment peu de temps, il s'agit tout simplement d'ajouter certaines contraintes au niveau de l'aide financière qui vont permettre au gouvernement d'encaisser de l'argent, encore une fois en ne tenant pas compte des besoins réels des étudiants, et on le fait sur le dos des étudiants. On supprime, par exemple, l'encouragement au succès par la suppression de l'endettement, du quart de l'endettement étudiant qu'on accordait à des étudiants qui pouvaient réussir dans des délais donnés. Alors, de cette façon-là, M. le Président, il y avait une incitation au succès, à l'effort, à la réussite. On abolit cet aspect-là qui était quand même une motivation positive pour encourager les étudiants à faire les efforts nécessaires. On touche également à l'endettement en plafonnant l'endettement maximum des étudiants. Il aurait fallu, M. le Président, dans le cadre d'un débat qu'on aurait pu avoir, évaluer quelles sont les conséquences d'une telle mesure, puisque, si on fixe un maximum, il faudra voir si ça ne mettra pas en péril les études de certains étudiants qui, rendus en bout de ligne, vers la fin de leurs études, compte tenu d'un endettement qui aurait déjà atteint le maximum permis, devraient, à ce moment-là, peut-être considérer la possibilité d'arrêter les études pour aller travailler.

Alors, M. le Président, on a, comme je le mentionnais, un gouvernement qui a des comportements tout à fait incohérents. La ministre a pris une mesure récemment, de geler les frais de scolarité des étudiants pour probablement... en tout cas, le rationnel qu'on peut y voir, c'est de favoriser l'accessibilité des étudiants à l'enseignement universitaire et, en même temps qu'on fait ça, on diminue l'aide financière nécessaire aux étudiants pour que ceux-ci puissent fréquenter l'université et terminer leurs études. On a un contexte économique difficile présentement où il y a relativement peu d'emplois accessibles aux jeunes et on vient, dans ce projet de loi, réduire également la période d'exemption des prêts. Donc, les étudiants devront rembourser plus rapidement dans un contexte où il y a relativement peu d'emplois.

Malheureusement, M. le Président, on aurait pu discuter longtemps sur ce projet-là, qui fait en sorte que les étudiants paieront pour l'inertie du gouvernement, pour le manque de considération du gouvernement, pour le manque de perspective du gouvernement et, dans ce contexte-là, on doit nécessairement être en désaccord total avec le projet de loi n° 85. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de l'Acadie. Le prochain intervenant? Mme la députée de Chapleau, je vous cède la parole.


Mme Claire Vaive

Mme Vaive: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 85 apporte entre autres des modifications à la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel sous prétexte que pour créer une culture de la réussite il faut d'abord détruire celle de l'échec.

La ministre avait annoncé en octobre qu'à compter de 1997-1998 l'étudiant ayant plus d'un cours non réussi durant une même session devra, pour être inscrit à temps plein dans un cégep la session suivante, assumer des droits spéciaux établis à 2 $ l'heure pour chacun des cours non réussis à l'exception du premier. Il y a aussi d'autres restrictions. On s'est fait critiquer, nous, lorsqu'on avait imposé des frais de 50 $ aux étudiants qui échouaient cinq cours.

M. le Président, si je viens ici ce soir parler, c'est parce que je parle en connaissance de cause. J'ai enseigné durant 34 ans. Pas au primaire, mais au secondaire, postsecondaire et en enseignement professionnel. Et je peux vous dire que j'étais très près de mes étudiants. J'ai dû prendre ma retraite parce que... Dans deux ans d'ici, ça ne m'intéressera plus de retourner, les programmes ont tellement changé et je suis fatiguée de me recycler. Ça fait seulement deux ans que je ne suis plus aux études. J'ai toujours été aux études, toute ma vie.

Mais tout ça pour vous dire que j'étais près de mes étudiants et j'ai eu à éteindre des feux, à aider financièrement et psychologiquement et à avoir une écoute attentive chez beaucoup de mes étudiants qui avaient de la difficulté. Aujourd'hui, on vit dans un monde où tout est vite et vous pouvez être certains que plusieurs de nos étudiants... Ce n'est pas au primaire que les enfants ont de la difficulté. Au secondaire, au premier cycle, bien, ils font la transition entre le primaire et le secondaire et c'est une petite révolte. Mais, lorsque arrivent les secondaires III, IV et V, le postsecondaire ou l'enseignement professionnel, c'est à ce moment-là qu'on rencontre des étudiants qui sont mis à la porte par les parents et qui ont à travailler et, en fait, à se débrouiller seuls dans la vie. Et souvent ces étudiants-là n'ont pas l'âge et ils font face à de graves problèmes.

Aussi, ce qui m'attriste, c'est l'aide financière aux étudiants. L'abolition des 90 crédits, cette mesure aura pour effet de restreindre l'admission au régime d'aide financière, un baccalauréat général équivalant en moyenne à 96 crédits, et de pénaliser le choix de carrière d'un certain nombre d'étudiants qui auront choisi un programme de plus de 96 crédits.

Je pense, M. le Président, qu'on doit se pencher plus profondément sur le système d'enseignement professionnel. Vous allez dire: Elle parle pour sa paroisse. C'est vrai. Moi, quand j'entends parler du programme du Parti québécois et qu'ils étaient pour instaurer l'enseignement professionnel, bien, je regrette, je fais ça depuis des années. Je l'ai fait des années de temps et mes étudiants faisaient des stages en entreprises privées et c'était valorisant.

(19 h 30)

Je n'avais pas les budgets puis il fallait que je les case pour leur donner l'expérience du bureau ou quelque soit l'endroit où ils allaient. C'était soit infirmière auxiliaire, soit esthéticienne, coiffure ou, en fait, secrétariat, bureautique et ainsi de suite. Et aussi, ce qui est malheureux, c'est qu'ici, au Québec, c'est très rare qu'on va rencontrer... On rencontre dans certaines universités le système coopératif. Le système coopératif devrait être plus élaboré, et je pense que ça aiderait beaucoup de nos jeunes.

Étant donné qu'il ne me reste plus grand temps, M. le Président, je pense que le gouvernement veut faire des économies avec ce projet de loi là au détriment de nos jeunes et je trouve ça vraiment malheureux. J'espère qu'on va revoir certaines économies qu'on s'apprête à faire dans le moment sur le dos de nos étudiants. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Chapleau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. M. le Président, au sujet de la loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, une motion de suspension des règles pour ce projet de loi. Comme plusieurs de mes collègues l'ont mentionné ici, dans cette Chambre, aujourd'hui, pourquoi le projet de loi n° 85 à l'intérieur d'une motion de suspension des règles? Pourquoi cette urgence? Mme la ministre – comme on vient juste de le mentionner, mais je le répète pour le bénéfice de ceux et celles qui viennent de se joindre à nous par le biais de la télévision – a déposé ce projet de loi là tout récemment, le 10 décembre. S'il y avait urgence, j'imagine que ça a dû être planifié, ça a dû être évalué bien avant le 10 décembre. Donc, on doit se poser cette question: Pourquoi ce projet de loi à l'intérieur de la suspension des règles pour passer ce projet de loi à toute vitesse?

Je pense que nous sommes plusieurs de l'opposition, ici, à la défense des étudiants, de la clientèle qui est touchée par ce projet de loi. Parce que ce que voient la ministre et le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois, c'est d'aller chercher des revenus additionnels, de faire des économies sur le dos des étudiants dans le cadre de ce projet de loi là. Donc, il y a quelqu'un de ce côté-ci qui est à la défense des étudiants, dans des circonstances semblables, mais il y a aussi le Protecteur du citoyen, M. le Président. Ça a sûrement été mentionné, parce que je pense que c'est frappant, la façon avec laquelle le Protecteur du citoyen dénonce la ministre par son attitude et l'urgence qu'elle a donnée à l'adoption de ce projet de loi là. Je veux juste vous lire un passage.

«Il va de soi que mon premier commentaire – dit le Protecteur du citoyen – consistera à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi semble en voie d'être adopté, surtout dans un contexte où les principaux intéressés – on parle des étudiants, évidemment – incluant, bien sûr, les parlementaires, ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées par le projet de loi.» Donc, ce que le Protecteur du citoyen vient nous dire, ce que plusieurs de mes collègues ici, du côté de l'opposition, déplorent en commission parlementaire à l'occasion de l'adoption article par article de la plupart de nos projets de loi – je ne dirai pas tous, mais je dirai la plupart des projets de loi qu'on adopte – c'est que nous n'avons pas les règlements appropriés pour être en mesure d'apprécier et d'évaluer l'impact de ces projets de loi là. C'est le cas du projet de loi n° 85, M. le Président, «qui porteront – comme je le dis – la substance des mesures annoncées par le projet de loi».

«Il m'apparaît qu'un tel empressement va à l'encontre du principe de la transparence du processus législatif essentiel à un sain exercice de ce pouvoir en régime démocratique.» Évidemment, ce n'est pas ce que nous vivons aujourd'hui. Nous ne vivons pas une situation où on peut démontrer à la population que nous sommes dans un régime démocratique, dans tous les sens du mot. Il y a six projets de loi, et c'est le choix du gouvernement, qui ont été inclus dans une motion de suspension des règles, pour faire passer ces projets de loi à toute vitesse et s'assurer que le gouvernement puisse disposer de ces projets de loi là. Il y en a d'autres avec lesquels nous aurons à expliquer à la population notre désaccord justement à l'empressement de passer ces projets de loi, M. le Président.

Mais, pour revenir au projet de loi n° 85, je pense que, si on ne lisait qu'une partie de la lettre du Protecteur du citoyen, ça dirait tout ce que la très grande majorité de la population et surtout de la clientèle visée peut déplorer. Le Protecteur du citoyen termine en disant justement qu'il a senti et a reconnu sa responsabilité de prendre la défense de cette clientèle visée que la ministre semble avoir ciblée à la toute dernière minute. Je sais très bien que mes collègues de l'opposition, et, s'ils l'ont fait, vont continuer à le faire... Mais on se doit, au nom d'une très grande majorité de la population, comme je le mentionnais, la clientèle visée et tous ceux et celles qui auraient aimé que ce projet de loi là puisse être débattu, de prendre le temps qu'il faut pour l'approfondir et probablement apporter à l'intérieur du même projet de loi... Il y a peut-être des articles qui auraient pu être ajoutés si on avait pris le temps de le préparer et de le présenter ici, à l'Assemblée nationale, pour couvrir des points qui vont rester en suspens et qui devront être présentés dans d'autres projets de loi.

Donc, M. le Président, c'est pour cette raison que j'ai pris les quelques minutes à ma disposition pour intervenir et voter contre ce principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je prends la parole sur le projet de loi n° 85 intitulé par le gouvernement «loi instituant la taxe à l'échec au niveau collégial», parce que c'est de ça qu'il s'agit véritablement, M. le Président.

On se rappelle et on se souvient fort bien, durant la dernière campagne électorale... Le Parti libéral, en 1994, avait proposé qu'après cinq échecs au niveau collégial les étudiants devraient payer des frais de scolarité additionnels de 50 $. M. le Président, de l'autre côté, en campagne électorale, les ténors qui parlaient sur l'éducation avaient littéralement déchiré leur chemise et avaient dit que c'était une brèche inacceptable dans le principe de la gratuité collégiale, qui ne contribuait en aucun cas au renforcement de la réussite et à l'accélération des études. M. le Président, que se passe-t-il ce soir? Deux ans plus tard, ces mêmes gens présentent un projet de loi encore plus radical que celui qu'ils dénonçaient – puis ce n'était même pas un projet de loi, c'était une intention. Après le deuxième échec, le gouvernement propose d'imposer une nouvelle taxe, 2 $ l'heure par cours; si un cours dure 45 heures: taxe de 90 $.

Aucune étude n'a été déposée par la ministre de l'Éducation pour nous démontrer comment ce projet de loi là va favoriser la réussite scolaire des jeunes au collégial. Parce que le problème du décrochage scolaire existe non seulement au niveau secondaire, mais il existe également au niveau collégial. Ça fait partie des grands défis de la ministre de l'Éducation, de mettre des mesures qui vont favoriser la réussite scolaire. Or, la mesure qui est déposée ce soir, c'est une mesure qui va bien sûr favoriser le décrochage scolaire dès le premier échec. M. le Président, on est en train de placer des motifs financiers qui vont faire en sorte que l'élève devra se poser la question, après un premier échec: Dois-je continuer mes études et payer les taxes que m'impose le gouvernement péquiste ou devrais-je plutôt aller sur le marché du travail parce que ça pourrait coûter cher, tout ça?

(19 h 40)

Jamais je n'aurais pensé, comme critique en éducation, que j'assisterais au dépôt d'un projet de loi qui viserait à augmenter le décrochage scolaire. Pourtant, c'est bel et bien ça que la ministre de l'Éducation dépose ce soir. M. le Président, on a bien compris le mécanisme. On voit bien, depuis des mois et des mois, depuis l'arrivée du député de Jonquière, actuel premier ministre, que tous les projets de loi n'ont qu'un seul objectif: piger dans la poche des citoyens, piger dans la poche des contribuables, piger dans la poche des étudiants au collégial, en l'occurrence. Pourquoi? Pour tenter d'assainir les finances publiques du Québec, qui est un objectif louable en soi, mais, lorsqu'on regarde les moyens qu'utilise le gouvernement pour atteindre ses objectifs, c'est proprement scandaleux. Voici une mesure qui va rapporter au gouvernement 40 000 000 $ sur le dos des jeunes de 16 ans, 17 ans, 18 ans. C'est dans leur poche qu'on va aller fouiller.

On avait un autre projet de loi aujourd'hui où le gouvernement va aller piger dans les poches des gens qui ont quelques cennes, les gens qui sont prestataires de la sécurité du revenu. Le gouvernement va aller chercher les quelques sous qui restent dans leur poche. Et c'est de cette façon-là, alors que, il n'y a pas plus d'un an, on se souvient de la grande générosité du gouvernement à la veille du référendum. On distribuait des milliards de dollars aux petits amis du régime pour les amener à voter oui. Là, on est en train de payer les pots pour ça, les prestataires de la sécurité du revenu et les étudiants. Proprement scandaleux, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, une fois de plus, je me vois dans l'obligation de me lever dans cette Assemblée pour dénoncer le gouvernement péquiste, qui n'arrête pas de s'attaquer aux citoyens pour les dépouiller de leurs ressources sous prétexte de lutte au déficit, et qui le fait de la façon la plus odieuse, en imposant le bâillon et en faisant adopter des projets de loi à incidence financière à la hâte, la nuit.

Nous voilà face à un autre projet de loi, le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Ce projet de loi n'a qu'un seul but, celui d'aller fouiller dans les poches des étudiants pour y chercher 46 200 000 $, dont 40 000 000 $ sous forme de droits spéciaux, 2 000 000 $ suite à l'abolition du programme de remise de dette aux étudiants de deuxième et troisième cycle et 3 000 000 $ générés par la réduction de la période d'exemption.

Concrètement, ce projet de loi n° 85 va abolir le critère de 90 crédits pour devenir un étudiant autonome. On sait que l'autonomie d'un étudiant lui permet d'avoir accès à l'aide financière du gouvernement sous forme de prêts et bourses. Normalement, pour être considéré comme indépendant aux yeux de la loi, l'étudiant doit avoir accumulé 90 unités au premier cycle universitaire. Or, le projet de loi n° 85 vient abolir ce critère de façon à ce que l'autonomie soit désormais conditionnelle à l'obtention d'un diplôme de premier cycle et non au nombre de crédits.

L'effet immédiat de cette mesure est de restreindre l'admissibilité des étudiants au régime d'aide financière et de pénaliser le choix de carrière d'un certain nombre d'entre eux qui auraient opté pour un programme de plus de 96 crédits, par exemple la médecine dentaire.

Une autre mesure tout aussi contestable est celle qui consiste à modifier la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel pour pénaliser les étudiants qui ont le malheur d'échouer des cours. L'annonce faite par la ministre de l'Éducation en octobre dernier établit des droits spéciaux de 2 $ l'heure pour chaque cours non réussi, à l'exception du premier. Aussi, à compter de l'année scolaire 1997-1998, les étudiants qui ont plus d'un cours non réussi durant la même session se verront obligés de payer une pénalité de 2 $ l'heure. Avant même de commencer la prochaine session, un étudiant qui aurait échoué deux cours dans la session précédente doit passer au cash, une mesure qui risque de décourager les jeunes et surtout les plus défavorisés d'entre eux. Quand on sait qu'en 1994-1995 le régime des prêts a bénéficié à 162 000 étudiants et que 72 000 d'entre eux ont eu accès à une bourse, il y a lieu de s'inquiéter pour le taux de succès de nos jeunes qui doivent aujourd'hui plus que jamais être soutenus dans leur démarche académique.

Ce projet de loi, M. le Président, a des effets dévastateurs sur le décrochage scolaire. Ce projet de loi, dont le principal objectif est de presser le citron des étudiants, tombe bien mal, car il va à l'encontre des mesures adoptées par d'autres gouvernements qui sont soucieux de préparer leurs jeunes au XXIe siècle. Et, si vous le permettez, M. le Président, je tiens à souligner la lettre du Protecteur du citoyen datée du 17 décembre dernier dans laquelle il écrit ceci: «Il va de soi que mon premier commentaire consistera à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi semble en voie d'être adopté, surtout dans un contexte où les principaux intéressés, incluant, bien sûr, les parlementaires, ne disposent pas des normes réglementaires qui porteront la substance des mesures annoncées par le projet de loi.»

Alors, je terminerai là-dessus, M. le Président, et je voterai contre le projet de loi n° 85.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président, j'interviens à mon tour ce soir concernant le projet de loi n° 85, projet de loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

M. le Président, il est difficile pour moi en cinq minutes, de la même façon que c'est très difficile pour mes collègues, de pouvoir aller au fond de ce projet de loi là, puisque ce projet de loi n'a été déposé que le 10 décembre, donc il y a huit jours, la ministre sachant fort bien que ce projet de loi là, puisqu'elle y tenait, c'était un projet de loi à incidence financière – donc, parce que le gouvernement a besoin d'argent – que ce projet de loi là ne serait jamais étudié ici, à l'Assemblée nationale.

Parce que, pour le bénéfice des gens qui viennent de nous prendre en direct à la télévision, M. le Président, il faut expliquer que les projets de loi, pour qu'ils soient étudiés à l'Assemblée nationale, étudiés article par article en commission parlementaire, adoptés ici, à l'Assemblée nationale, en première, deuxième et troisième lecture, comme on avait l'habitude de le dire il y a plusieurs années... Je dis donc que ces projets de loi là doivent être déposés, M. le Président, avant le 15 novembre. Pas le 10 décembre, le 15 novembre. La ministre de l'Éducation a déposé ce projet de loi là le 10 décembre, sachant fort bien qu'il ne serait jamais question d'en discuter ici, en cette Chambre, puisqu'il passerait dans le bâillon, que les règles qui nous gouvernent ici, à l'Assemblée nationale, seraient suspendues et qu'elle pourrait passer ce projet de loi là sans qu'on ait quelque mot à dire, sauf les cinq minutes qui nous sont consacrées ici – et on doit défiler un en arrière de l'autre – pour tenter de faire comprendre aux citoyens la portée de ce projet de loi là.

M. le Président, moi, j'ai cru aux promesses du PQ, j'ai cru au député de Joliette lorsqu'il a dit que jamais plus on ne siégerait la nuit, que jamais plus les projets de loi ne seraient passés à la vapeur. Et j'ai entendu certains de mes collègues du côté ministériel rappeler aux collègues, les nouveaux surtout, que ça s'était fait dans le passé à la fois par leur gouvernement et par celui qui a précédé celui-ci. Mais il me semble que le Parti québécois s'est promené, en campagne électorale, en promettant aux gens une nouvelle façon de gouverner, une autre façon de gouverner. Bien, l'autre façon de gouverner, M. le Président – et j'ai eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises – c'est en plein visage qu'elle nous revient à tous les jours. On ne cesse, M. le Président, de rappeler aux citoyens comment ce gouvernement a réussi, depuis l'arrivée au pouvoir du député de Jonquière, à piger tous les jours dans les poches des contribuables.

(19 h 50)

Dans ce cas-ci, ce sont les étudiants qui vont écoper. Mais les étudiants sont aussi des contribuables. Des contribuables, ce n'est pas juste un terme qu'on utilise comme ça, ce sont des jeunes, des moins jeunes – un peu comme moi qui suis dans la cinquantaine, au tout début mais quand même – des préretraités, des retraités, hein? c'est ça, des contribuables. Des gens qui, aujourd'hui, vont devoir payer beaucoup plus... D'abord payer pour leurs médicaments. Et ça m'amène à vous dire, M. le Président, que ça m'a fait bien rire quand j'ai vu le ministre de la Santé, qui était à l'époque candidat dans Charlesbourg, se promener avec mon adversaire, qui était la candidate péquiste dans Jean-Talon, se scandaliser du 2 $ qu'on était pour imposer aux gens, 2 $ de tarification. Qu'est-ce qu'on a fait aujourd'hui de cette attitude scandaleuse? C'est mille fois pire que ce qu'on avait l'intention de faire. Mille fois pire.

M. le Président, je ne peux accepter de voter pour ce projet de loi sans qu'on ait pu s'asseoir et discuter à la fois du fond, à la fois de la forme, à la fois des incidences. Tout ce qu'on sait, c'est que ce projet de loi, il y a 40 000 000 $ dedans – 40 000 000 $. Comme 48 000 000 $ dans le projet de loi n° 77, qu'on sera appelé à critiquer tout à l'heure, comme tous les autres projets de loi, ceux qui sont rentrés dans le bâillon et qui ont des incidences financières.

Donc, M. le Président, moi, j'ai toujours pensé que les valeurs, la vérité, c'était quelque chose qui était important. Je m'aperçois aujourd'hui qu'il est très difficile pour le Parti québécois de respecter ses engagements. Alors, je vais voter contre ce projet de loi là et je vote contre la procédure, M. le Président. Ça n'a aucun sens de nous faire voter à la vapeur sur des projets de loi comme ceux-là.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour d'intervenir sur le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Outre le fait qu'on puisse, je pense, très légitimement déplorer le processus utilisé ce soir, processus que je vous rappelle, M. le Président – le curieux cheminement du projet de loi n° 85 déposé tout récemment en cette Chambre... Aucun effort de la part du gouvernement afin de suivre la procédure normale. Le projet de loi n'a pas été appelé. On dit maintenant, je pense, plus correctement, M. le Président: n'a pas été pris en considération par cette Chambre. Outre sa présentation, aucun effort fait par le gouvernement afin de le faire adopter par nos voies normales; recourir simplement à la suspension des règles, des mesures extraordinaires pour essentiellement bâillonner l'opposition et s'assurer que le projet de loi soit adopté le plus vite possible.

Alors, M. le Président, je déplore le processus. J'ai déjà échangé des mots assez chauds avec le leader du gouvernement en privé là-dessus. Je les maintiens. C'est un processus, quant à moi, M. le Président, qui ne fait honneur à personne. Le fait que, oui, des gouvernements formés par notre formation politique l'ont fait dans le passé ne m'impressionne guère, M. le Président, ne m'impressionne guère, ce n'est pas une excuse. Et, au moment où le Parti libéral du Québec reviendra au pouvoir, je parlerai à l'intérieur de mon caucus contre la procédure qu'on utilise ce soir. Et, si le leader du gouvernement en doute, il a juste à traverser la Chambre, devenir député libéral, on va partager le même point de vue ensemble.

Des voix: Ah!

M. Copeman: On le prendra, M. le Président. Malgré ses défauts, on le prendra. On le prendra.

M. le Président, le projet de loi n° 85 resserre les critères d'éligibilité pour l'aide financière aux étudiants. C'est très clair. Mesure de récupération d'à peu près 10 000 000 $. C'est une des raisons pour lesquelles on utilise le bâillon.

Mais l'autre impact direct du projet de loi tourne autour de ce qu'on appelait, il y a deux ans, la taxe à l'échec, M. le Président, introduite par le gouvernement libéral précédent. Maintenant, semble-t-il, des mesures très similaires, quasiment similaires mais pires, ne sont plus une taxe à l'échec mais un incitatif à la réussite. Bon. On peut changer les mots comme on voudra, mais les choses sont claires. Le Parti québécois, quand il était dans l'opposition, a dit que cette taxe à l'échec, imposée après le cinquième cours échoué et de l'ordre de 50 $ par cours, constituait une brèche inacceptable dans le principe de la gratuité collégiale, qui ne contribuait en aucun cas au renforcement de la réussite et à l'accélération des études. Ça, c'est le Parti québécois il y a deux ans.

M. le Président, le plus grand reproche que j'entends comme politicien, comme parlementaire, c'est qu'on dit une chose avant qu'on soit élu puis on fait exactement quelque chose d'opposé quand on est élu. Ce sont les manoeuvres qu'on a devant nous ce soir. C'est des tromperies, c'est des artifices, c'est la fourberie, c'est l'illusion.

M. Bélanger: M. le Président.

M. Copeman: En anglais, M. le Président, on dirait «sleight of hand».

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, le député de Notre-Dame-de-Grâce tout à l'heure a parlé des mots chaleureux qu'il a eus à mon égard ou chauds – moi, je préfère le terme «chaleureux». Je m'en veux de l'interrompre dans une envolée oratoire si chaleureuse aussi, mais il faut qu'il retire le mot «fourberie» ou, en tout cas, au moins qu'il ne l'utilise pas. Je le connais comme gentleman et je suis certain qu'il est dans un état qui fait en sorte qu'il dépasse sa pensée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous savez que le mot «fourberie» n'est pas admissible dans cette Assemblée. Alors, je vous demanderais de le retirer puis de poursuivre et terminer.

M. Copeman: Je le retire, M. le Président. Alors, je disais: tromperie, artifice, illusion, en anglais «sleight of hand», une manoeuvre sournoise, une sournoiserie, de décrier quelque chose il y a deux ans et de le mettre en vigueur aujourd'hui. Sournoiserie, M. le Président, c'est un excellent mot.

Des voix: Ça n'existe pas.

M. Copeman: Alors, si ça n'existe pas – vous allez comprendre ma deuxième langue – on va revenir à la phrase que j'ai utilisée: une manoeuvre sournoise. Les gens d'en face peuvent bien rire, mais les gens qui nous écoutent savent ce que ça veut dire et ils savent que c'est exactement ça que le gouvernement du Parti québécois fait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, on vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Y a-t-il un autre intervenant? M. le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition, je vous cède la parole.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, on est, à l'Assemblée nationale, tous bâillonnés. De notre côté à nous, on ne peut pas intervenir pour plus que cinq minutes. C'est assez épouvantable. On discute d'un projet de loi... Je vois le député de Gaspé plus bâillonné que moi encore, lui, comme tous ses collègues, le député de Gaspé, le député de Bellechasse, le député de Matapédia. J'en nomme quelques-uns, là, qui sont ici, qui écoutent, qui encaissent. Savez-vous pourquoi ils sont ici? Parce qu'ils sont obligés en vertu de la règle du quorum. La règle du quorum n'a pas été abolie. Donc, les députés ministériels sont obligés d'être ici pour encaisser, mais ils ne parlent pas. Bâillonnés par leur leader, pas un mot, M. le Président, alors qu'on discute d'un projet de loi qui agresse une clientèle que le Parti québécois a fait rêver de façon absolument épouvantable il y a à peine un an, à l'occasion du référendum.

(20 heures)

M. le Président, on disait aux jeunes: Venez avec nous, on va vous amener vers la Terre promise. Avec nous, ce sera le Ciel, le Paradis terrestre, le nirvana, en autant, mes chers petits jeunes étudiants, que vous êtes souverainistes. Si vous êtes souverainistes, on va prendre soin de vous autres. Ça n'a pas été long qu'on leur a tourné le dos pas à peu près. Volte-face, trahison, sournoiserie avec les aînés dans un premier temps et maintenant avec les jeunes qu'on frappe dans le dos. Un peu comme Pierre Bourgault le disait, il y a une dizaine de jours, il n'y a pas un groupe dans la société québécoise qui n'a pas été agressé de façon absolument sauvage par le Parti québécois, M. le Président. Là, c'est les jeunes: 46 000 000 $, ou à peu près, de nouvelles taxes, de frais, déguisés de toutes sortes de façons, imposés par Mme la ministre de l'Éducation.

Et savez-vous qui s'est élevé contre cet empressement absolument impensable à taxer les jeunes comme on le fait? C'est le Protecteur du citoyen, M. le Président, qui, le 17 décembre – c'est hier, ça – a écrit au premier ministre en pensant qu'il allait être écouté. Il déplore... Je lis une ligne: «Il va de soi que mon premier commentaire consistera à déplorer l'empressement avec lequel ce projet de loi serait adopté.» Savez-vous quelle a été la réponse du premier ministre? C'est qui, ce gars-là, le Protecteur du citoyen? Je vais lui en faire une, réponse, moi, M. le Président. Ça a été ça, la réponse du premier ministre. Le Protecteur du citoyen ose se mêler de ce qui ne le regarde pas.

La réponse du premier ministre, de Mme la ministre de l'Éducation, du leader du gouvernement aux commentaires qu'a osé faire le Protecteur du citoyen, ça a été la suspension des règles, hein, ce qu'il y a de plus agressif dans notre règlement; il n'y a pas de procédure plus sauvage que la suspension des règles. Ça a été la réponse au Protecteur du citoyen qui disait: Vous allez trop vite. Je le dénonce, ça n'a pas de bon sens. Suspension des règles. Non seulement on va aller le chercher, notre 46 000 000 $; on ne permettra même pas, M. le Président, à l'opposition, aux groupes qui veulent se faire entendre de pouvoir parler, de pouvoir nous contester.

M. le Président, moi, je trouve ça absolument inqualifiable. Là, ces jeunes-là, qu'on a courtisés bassement pendant une période de plus ou moins deux mois, aujourd'hui, savez-vous ce qu'on fait avec eux? On a décidé qu'ils allaient payer 2 $ l'heure pour étudier. Les étudiants qui sont, jusqu'à un certain point, le plus en difficulté au collège, qui ont des problèmes, jusqu'à un certain point, dans certains cas, avec le cégep, des problèmes d'études, des problèmes avec l'enseignement du collège, qui peuvent subir des échecs tout en étant de bonne foi, la façon de les aider, ces jeunes qu'on a courtisés d'une façon absolument impensable, M. le Président, on les taxe en leur imposant un tarif horaire: 2 $ l'heure. Ça, c'est du jamais vu. Moi, je ne peux pas comprendre comment on a réussi à trouver cette nouvelle façon sournoise de taxer des citoyens et des citoyennes, jeunes en l'occurrence: on leur charge un tarif horaire pour étudier. Bon.

Et l'autre façon, ça a été de réajuster le programme des prêts et bourses pour récupérer plus ou moins 3 000 000 $ ou 4 000 000 $. Ces jeunes-là à qui on a dit, au cours de la dernière campagne électorale, au cours du référendum: Vous êtes notre relève, c'est vous qui allez prendre notre place, on les traite comme ils le savent maintenant, comme les aînés l'ont constaté.

Vous savez, M. le Président, ce n'est pas nouveau, hein? Pierre Bourgault disait que tous les citoyens du Québec sont frappés. Ça me faisait penser à ce qu'Albert Camus disait, à un moment donné, dans «La peste»: «Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés.» C'est ce qui se passe au moment où on se parle au Québec: par la peste péquiste, on les frappe tous. Sans égard à leur âge, sans égard à leur condition, ils sont tous frappés, comme Albert Camus l'a déjà dit, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député.

M. Lefebvre: Oui, oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Pour reprendre là où mon collègue a arrêté, M. le Président...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: ...parce que justement, dans les cinq minutes qui nous sont imposées, est-ce qu'il est possible de tout raconter sur cette sournoiserie que nous avons devant nous, M. le Président? Une sournoiserie qui est l'épitomé de ce que nous avons vu de plus «double-langagiste», pour ne pas utiliser un mot antiparlementaire, ce que je n'ai pas fait. Mais ça demeure sournois, parce que je me rappelle très bien, dans le cas qui nous préoccupe – on parle de l'aide aux étudiants – avec quelle arrogance, avec quel mépris, quels déchirements de chemises constants on avait eus des députés péquistes du temps, du temps pas si lointain quand même, à peu près trois ou quatre ans, M. le Président, quand le gouvernement précédent, dans un effort de rationalisation correct, de façon transparente et correcte, avait dit aux étudiants au cégep qu'il allait y avoir une certaine imposition quant aux cours qui avaient été échoués à répétition. Mon Dieu! c'était l'épouvantail du siècle. La ministre de l'Éducation actuelle, tous ses collègues l'ont décrié comme si c'était la fin du monde. On taxait l'échec, disaient-ils.

Mais on avait traité correctement, honnêtement et visière levée les étudiants. On leur avait dit la vérité. On ne les avait pas amenés sur le terrain de faire croire à des illusions comme celles qui ont fait en sorte que des milliers puis des milliers d'étudiants sont descendus dans la rue pour rappeler à la ministre de l'Éducation en particulier qu'elle avait donné une certaine parole par rapport à des gestes comme, par exemple, le gel des frais de scolarité; parole irresponsablement donnée parce qu'on a vu tout de suite les manoeuvres manipulatrices de la ministre pour essayer de faire en sorte qu'elle se libère de sa parole. Les étudiants l'ayant ramenée à l'ordre, la ministre a finalement décidé de reculer en disant: Mais, vous savez, je n'aurais pas dû renier la parole que j'avais donnée; il faudrait que j'essaie de garder ma parole parce que c'est quand même un exemple qu'on devrait donner aux plus jeunes, comme parlementaires tout au moins, de dire ce qu'on veut dire et de tenir parole.

Mais, ce faisant, elle a été obligée par la suite de faire la manoeuvre qu'on connaît et qui nous amène où nous sommes aujourd'hui pour que, tout d'un coup, on trouve cette mesure qui avait été auparavant si décriée, glissée en douce, mais augmentée davantage; parce que, là où on parlait de 50 $ à l'époque, c'est rendu maintenant... Et ce n'est pas à cause de l'inflation parce que, toutes les années qu'on a vécues, l'inflation a été à peu près maîtrisée presque à zéro. Qu'est-ce qui explique donc qu'on est rendu à 90 $ par cours échoué et plus rapidement imposé, à part de ça, d'après ce que je comprends?

Mais, M. le Président, vous me dites déjà que c'est deux minutes qu'il me reste. C'est, dans un processus que le Protecteur du citoyen qualifie de non transparent, un affront le plus direct à la démocratie. Comme le dit si bien Pierre Bourgault, ami cher aux péquistes: «Arrogance, improvisation, cachotteries. Cavalier et sournois». Voilà l'attitude qui caractérise ce gouvernement. Cafouillage le plus total dans l'organisation de nos travaux parlementaire. Un projet de loi qui n'avait même pas été appelé pour être pris en considération par l'Assemblée se retrouve tout d'un coup à l'intérieur d'un bâillon qui suspend les règles.

Nous siégeons quand même depuis le mois d'octobre. Pas une seule fois cette Chambre n'a été appelée à discuter de ce projet de loi, de l'adoption de son principe. Et pourtant le gouvernement et son leader le ramènent aujourd'hui avec une suspension des règles en nous faisant siéger je ne sais pas combien de fois durant la nuit où le sommeil est devenu quelque chose d'extrêmement rare dans cette enceinte. Et une arrogance la plus totale, un mépris le plus total de la démocratie avec des gens en face qui disent finalement: Nous avons le nombre, on peut bien s'en foutre de ce que les gens vont dire en face.

Ce n'est pas comme ça qu'on a compris la démocratie. La démocratie, cette institution qui a été inventée il y a maintenant longtemps par des ancêtres lointains, a fait en sorte que les gens se sont battus à plusieurs reprises pour sauvegarder l'institution qui est si légèrement bafouée avec cette arrogance, les cachotteries et les sournoiseries de ce gouvernement.

M. le Président, vous me faites signe que c'est déjà fini? Bien, je pense que quelqu'un pourrait reprendre et continuer. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il d'autres intervenants? À ce stade-ci, Mme la ministre, vous avez droit...

Mme Marois: Merci, M. le Président.

(20 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition, vous avez cinq minutes.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Je vérifiais simplement la règle de l'alternance, M. le Président, pour vérifier si quelqu'un avait quelque chose à dire de l'autre côté. Je comprends que, devant un projet de loi qui vise à aller chercher plus de 45 000 000 $ dans la poche des étudiants, il n'y a pas grand monde qui a quelque chose à dire de l'autre côté.

Vous m'indiquez, M. le Président, qu'il me reste à peine cinq minutes. Je vais donc immédiatement sauter aux conclusions et rappeler aux députés de cette Chambre une expérience que j'ai vécue, à l'occasion de la dernière campagne référendaire, au cégep de Saint-Félicien. À l'occasion de la dernière campagne référendaire, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les étudiants du cégep de Saint-Félicien qui m'ont indiqué à quel point ils tenaient à ce que le programme des prêts et bourses aux étudiants ne soit pas seulement maintenu, mais qu'il soit amélioré.

Ils m'ont indiqué à quel point ils souhaitaient que le gouvernement considère l'accessibilité à l'éducation pour les couches de population qui n'en ont pas nécessairement les moyens financiers comme étant une accessibilité qui leur permette d'avoir accès à des études supérieures, M. le Président. Au cégep de Saint-Félicien, ces jeunes m'ont dit qu'ils s'apprêtaient en vaste majorité à voter oui au référendum parce que le Parti québécois leur avait promis non seulement qu'il maintenait le programme de prêts et bourses aux étudiants, mais qu'avec un vote oui au référendum de la part des étudiants il les récompenserait en ajoutant des deniers publics dans le programme de prêts et bourses aux étudiants.

M. le Président, c'était il y a un peu plus d'un an au cégep de Saint-Félicien. Et il y a quelqu'un, de l'autre côté, qui va s'en souvenir tout particulièrement parce que son fils était parmi les étudiants qui étaient là. Et ce jeune étudiant, qui est un fils d'un député péquiste, croyait sincèrement que les péquistes bonifieraient le régime de prêts et bourses aux étudiants. C'était une des antennes qui convainquaient les autres étudiants de voter oui au référendum sous prétexte qu'on aurait une amélioration des prêts et bourses aux étudiants.

Moi, j'espère que ce jeune étudiant est à l'écoute, M. le Président, ce soir. J'espère, là, qu'il va voir son papa tantôt en cette Chambre. J'espère même que son papa, suite à ces propos, va se lever de son siège et venir s'expliquer sur ce qu'il a dit à son fils, et venir s'expliquer sur ce qu'il a dit aux amis de son fils au cégep de Saint-Félicien, venir expliquer pourquoi il les a très catégoriquement trompés, pourquoi il a tenté d'acheter le vote des jeunes et de son fils avec des fausses promesses, qu'il va avoir le courage de venir parler en cette Chambre – M. le Président, je réfère au député de Roberval – et dire qu'il s'excuse au moins d'avoir trompé; qu'il ne supportera pas...

M. Bélanger: Trompé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, tromper la population, tromper des gens, c'est antiparlementaire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, je vous prierais de poursuivre votre allocution tout en respectant en tout point le règlement que vous connaissez si bien.

M. Paradis: M. le Président, en utilisant le vocabulaire que j'ai utilisé, je voulais me faire le porte-parole de ces étudiants et de ces étudiantes, y inclus le fils d'un député péquiste qui, ce soir, à l'occasion d'une motion de bâillon en cette Chambre, voient qu'ils ont été bernés, qu'ils ont été trahis. Et, quand, comme député, on n'est plus le représentant de ces jeunes étudiants à l'Assemblée nationale, mais qu'on est le représentant du premier ministre, du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor et de la ministre de l'Éducation, et qu'on abandonne ses électeurs puis qu'on a des explications à fournir à sa famille à l'occasion du congé de Noël sur des engagements qu'on a pris, M. le Président, on est descendu, en l'espace d'un peu plus de 12 mois, très bas dans l'opinion publique.

Moi, j'espère simplement que ces étudiants et ces étudiantes ne seront pas à ce point désillusionnés des politiciens, de la politique, qu'ils ne seront pas complètement écoeurés d'avoir été trahis par des promesses et qu'ils se souviendront qu'il y a quand même, dans la société, des gens qui, par le passé, ont déjà respecté leurs engagements, ont déjà respecté leur parole, et qu'ils demeureront confiants dans les institutions. Mais, malheureusement, le geste posé par le leader du gouvernement et la ministre de l'Éducation, ce soir, ne nous amène pas dans la bonne direction, M. le Président, et c'est décourageant pour la jeunesse québécoise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. Nous cédons maintenant la parole au chef de l'opposition.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Je me suis demandé, en écoutant le débat, M. le Président, comment ça se faisait que le principe de l'alternance, dont le député de Frontenac peut nous entretenir pendant des heures, vous le savez, n'était pas respecté ou appliqué. Je me suis demandé si c'était par respect du décorum, parce que c'est le genre de chose qui peut arriver. On peut décider, du côté du gouvernement, de ne pas intervenir afin de laisser l'opposition faire le débat seule et de ne pas la contredire, la contradiction pouvant être une source, on le sait, de manque de décorum.

Je me suis demandé, M. le Président, comment il se faisait que le nouveau leader, le député d'Anjou, avait décidé de faire sa marque, maintenant, en 1996, en suspendant les règles et en mettant dans ce bâillon, ce qu'il est convenu d'appeler un bâillon, des projets de loi qu'on ne peut même pas discuter – c'est cinq minutes, le maximum, par personne; et ils n'ont même pas été présentés, même pas été étudiés comme du monde – jusqu'à ce que je découvre que ce sont des projets à caractère financier. Je ne m'attendais pas à quelque chose d'aussi...

Une voix: Sournois...

M. Johnson: Non, on me souffle toutes sortes de termes antiparlementaires...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ...et je vois la députée de Terrebonne qui est à l'affût, là. C'est assez inusité, c'est le moins qu'on puisse dire, de voir un leader qui utilise la force de la majorité pour nous rentrer dans la gorge des projets de loi sans qu'on puisse même les discuter, à condition que ça donne au ministre des Finances évidemment des deniers publics qu'il vient chercher. Je me suis demandé comment ça se faisait que le député d'Anjou faisait ça. Parce que je me souviens que, lorsqu'il a été nommé, il y a des gens qui ont dit que le décorum s'en trouverait relevé, ici, à l'Assemblée nationale; que, lui, il ne ferait pas comme le député de Joliette. De mauvaises langues, M. le Président. Le premier ministre voulait libérer le député de Joliette afin de lui confier des tâches extrêmement importantes en matière de ressources naturelles, de développement régional.

Je me suis demandé si c'était... Il y a d'autres mauvaises langues qui ont dit que c'est parce que le premier ministre avait un grand respect des institutions, dans la mesure où il a été élevé à la Chambre des communes au point de vue parlementaire. Et, très souvent, il invoque les traditions de la Chambre des communes, à Ottawa, pour dire: Ah! si, à Québec, c'était donc de même, à l'Assemblée nationale. J'ai pensé qu'il voulait repartir à zéro, avec ses traditions de la Chambre des communes, à lui, et un nouveau leader. Avec 20 ans de pratique, ici, là, du député de Joliette, ce n'était pas exactement dans le ton de la Chambre des communes. D'ailleurs, ça aurait été le fun de voir le député de Joliette à la Chambre des communes, ha! ha! ha!...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ...simplement pour le choc culturel que ça aurait pu donner là-bas.

Alors, moi, les mauvaises langues, je ne crois pas ça, hein? Moi, je crois que le député d'Anjou et le premier ministre voulaient véritablement, là, de façon positive, peut-être changer le ton ici, peut-être donner un nouvel élan à la procédure parlementaire, dans le plein respect des institutions. Et je me suis demandé si ce n'était pas pour ça, dans le fond, et ça, c'est logique, que les députés ministériels, ils ne disent pas un mot sur ces projets de loi là. Pas un mot. Parce que ça serait désolant et les institutions en prendraient pour leur rhume, hein, et le respect de la vérité serait passablement écorché si, pour suivre la ligne de parti de façon un peu aveugle, les députés ministériels allaient à la défense du projet de loi n° 85 présenté par la ministre de l'Éducation.

Pourquoi est-ce que la vérité serait écorchée? Bien, ha! ha! ha! parce qu'ils seraient obligés d'avoir honte devant tout le monde, là. Ils seraient obligés d'avoir honte devant tout le monde, devant les gens à qui ils ont fait des promesses, devant les jeunes du Québec, notamment, dont ils ont été les défenseurs, comme ça vient d'être souligné par le député de Brome-Missisquoi, dans la campagne préréférendaire et en campagne électorale.

(20 h 20)

On se souvient qu'ils évoquaient, avec force chemises déchirées, combien il était épouvantable, mesquin et répréhensible pour le gouvernement libéral d'alors d'imposer un incitatif à la réussite de quelques dollars par session à des étudiants au cégep qui s'y attardaient indûment, appelons les choses par leur nom. Il faut se souvenir de M. Parizeau, ici, dans ce fauteuil-là, le voir vraiment, là, faire des sparages, c'est le moins que je puisse dire, du grand grand théâtre là. Je vois le député de Masson qui apprécie le souvenir.

Mais là, aujourd'hui, ce n'est plus ça. Aujourd'hui, ce n'est plus ça. Le même gouvernement, le même parti qui déchirait ses vêtements serait obligé de se lever derrière la députée de Taillon, la ministre de l'Éducation, pour l'appuyer et trouver que ça a du bon sens. Ils auraient l'air assez fous, M. le Président, là. Ça serait assez honteux de voir de telles manifestations d'incohérence que le décorum en prendrait pour son rhume et, en fin de compte, c'est pour éviter de se vautrer dans la honte qu'il n'y a pas d'alternance de ce côté-ci et qu'on voit un bâillon qui est imposé à la majorité ministérielle et non à l'opposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le chef de l'opposition. Alors, en réplique, Mme la ministre de l'Éducation et députée de Taillon. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. J'imagine que la confiance envers l'opposition, qui a, elle, si bien défendu, nous dit-on en face, les étudiants, aurait dû se traduire, la semaine dernière, lorsqu'il y a eu une élection dans Pointe-aux-Trembles, alors que j'ai compris que leur vote s'est plutôt divisé et est allé vers l'Action démocratique, M. le Président, et que c'est plutôt le Parti québécois qui a fait élire sa candidate, maintenant députée de Pointe-aux-Trembles, M. le Président. Alors, j'imagine qu'il va y avoir quand même un signe dans la façon dont se sont exprimés les électeurs et électrices de Pointe-aux-Trembles.

Maintenant, M. le Président, vous savez, cinq minutes, c'est très long lorsqu'on dit des banalités. J'ai essayé d'écouter attentivement chacune des interventions, et on a fait toute espèce de remarques en disant qu'on avait été bâillonnés, qu'on ne pouvait pas parler. Mais, en cinq minutes, lorsqu'on a des choses importantes à dire, on peut les dire. On peut les dire en ciblant exactement ce avec quoi on est en désaccord, pourquoi on est en désaccord, ce qu'on aurait fait à la place du gouvernement si on avait eu à faire des choix.

Quelques députés à peine ont souligné quelques mesures et certains d'ailleurs ont erré complètement, M. le Président, parce qu'on a parlé de sommes de l'ordre de 45 000 000 $. Le leader de l'opposition disait que la loi emportait un effort budgétaire de l'ordre de 45 000 000 $, M. le Président. Par la loi elle-même, il s'agit d'un effort de l'ordre de 22 000 000 $, M. le Président. Éventuellement, par voie réglementaire, on pourra aller jusqu'à 37 000 000 $, M. le Président, mais par la loi elle-même effectivement c'est de l'ordre de 22 000 000 $, M. le Président. Alors, on fait de l'inflation verbale, de l'autre côté.

Il y a une chose qu'on n'a pas pu faire non plus, M. le Président. C'est d'attaquer les mesures qui sont là dans le sens qu'elles aient un effet sur ceux et celles qui ont besoin du régime d'aide financière aux étudiants, qui en ont besoin pour avoir accès à l'université, pour avoir accès au cégep, pour avoir accès à la formation professionnelle. En effet, toutes les mesures que nous proposons au projet de loi sont des mesures, au contraire, qui vont dans le sens d'un plafonnement de l'endettement des étudiants, dans le sens d'un effort de rationalisation misant sur le succès, et ça, c'est inattaquable. C'est pourquoi, M. le Président, ils ont dit, prenant chacun cinq minutes pour le faire, un tas de banalités.

M. le Président, j'aimerais souligner aussi que, contrairement au gouvernement précédent, notre gouvernement a fait connaître, d'abord, aux premiers intéressés, les étudiants, parce que nous avons été en contact avec eux... Avant que je n'annonce les mesures au mois de novembre, après que je l'ai fait, nous avons été en contact avec les associations étudiantes pour leur expliquer le sens des mesures que nous avions choisies, pourquoi c'était celles-là plutôt que d'autres que nous avions privilégiées.

Savez-vous ce que faisait le gouvernement précédent, M. le Président? Il déposait les crédits au printemps et, quelques mois plus tard, il appliquait les mesures, M. le Président. Il n'y avait pas de loi, il n'y avait pas de consultations, M. le Président, et ils ont eu, à chaque fois, des blâmes très importants, très sévères de la part du Protecteur du citoyen qui effectivement a reconnu que notre gouvernement avait corrigé des façons de faire que l'autre gouvernement appliquait, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président; je sais qu'il me reste peu de temps. Je crois donc que le projet que nous avons déposé...

Des voix: Bravo!

Mme Marois: Merci, j'apprécie l'appui que m'offre l'opposition M. le Président, à ce moment-ci. Cela étant, je crois que ce projet de loi est équitable, permet justement de corriger ce reproche qui avait été fait à l'opposition où on ne savait jamais quelle mesure allait s'appliquer et où les gens étaient pris, à la toute dernière minute, pour se les voir imposer. Il y a donc un temps, maintenant, d'information qui sera possible et c'est ce qui explique d'ailleurs, M. le Président... Et je l'ai mentionné au moment où j'ai expliqué pourquoi je souhaitais que ce projet de loi soit adopté maintenant, M. le Président, c'est que nous pourrions ainsi mieux informer les étudiants, de telle sorte qu'ils ne seraient pas pris par surprise au moment où on appliquerait ces mesures, à l'automne ou à la fin du printemps, M. le Président.

Et, comme l'année dernière, j'espère que le Protecteur du citoyen, pour d'autres raisons, nous appuiera dans la façon de faire que nous avons privilégiée, même s'il peut avoir, à ce moment-ci, quelques réserves. Je vous remercie, M. le Président.

M. Lefebvre: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation et députée de Taillon. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je comprends que l'article 213 a été suspendu, mais Mme la ministre pourrait, elle, consentir, malgré la suspension, elle qui a démontré un peu plus de courage que ses autres collègues, à répondre à une de mes questions, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat sur l'adoption du principe étant terminé, le principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, est-il adopté?

Des voix: Rejeté.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. Nous allons suspendre quelques instants.

(20 h 28 – 20 h 35)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, nous reprenons nos travaux. Nous en étions à l'adoption du principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Est-ce que le principe du projet de loi n° 85 est adopté?

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Brodeur (Shefford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Pour:55

Contre:27

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Je déclare donc que la motion est adoptée. Donc, le principe du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, est adopté. M. le leader du gouvernement.

(20 h 40)

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée? Je suspends donc les travaux durant quelques instants afin que l'Assemblée se constitue en commission plénière.

(Suspension de la séance à 20 h 41)

(Reprise à 20 h 47)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): La commission plénière est maintenant réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Je vous rappelle que, conformément à l'ordre adopté, la durée de la commission plénière est d'un maximum d'une heure. À l'expiration de ce délai, je vais mettre aux voix, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que la ministre n'aurait pas pu proposer en cours d'étude. Avant de débuter les remarques préliminaires, je tiens à vous mentionner que je vous réserve, à chacun des groupes parlementaires, cinq minutes de conclusion.

Alors, est-ce qu'il y a des remarques préliminaires ou si nous débutons immédiatement? On attaque le projet de loi?

M. Gautrin: On peut débuter tout de suite, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): O.K.

Mme Marois: Je suis d'accord pour qu'on débute maintenant, M. le Président.


Étude détaillée

Le Président (M. Pinard): Alors, allons-y immédiatement avec l'article 1 du projet de loi n° 85.

Mme Marois: Alors, il n'est peut-être pas utile de lire formellement l'article parce que c'est très technique quand on le lit. Je vais plutôt faire état de ce qu'il veut signifier, de ce qu'il vient changer.

En fait, cet article vient modifier les conditions que doit remplir un étudiant pour ne pas être réputé recevoir une contribution de ses parents ou de son répondant. Alors, il prévoit que le principe d'autonomie sera dorénavant rattaché à l'acquisition d'un moyen pour gagner sa vie, en l'occurrence un diplôme universitaire de premier cycle. Auparavant, il s'agissait de l'accumulation de 90 unités dans un programme d'études universitaires. Ce critère ne sera plus celui qui sera retenu; il ne suffira plus, donc, pour être réputé autonome, mais, et c'est ce que nous introduisons par les amendements, aussitôt qu'un diplôme universitaire de premier cycle aura été obtenu, on considérera que l'étudiant est autonome.

L'article prévoit en outre l'addition d'un nouveau paragraphe afin d'accorder le statut d'étudiant autonome – et ça, c'est intéressant, c'est une amélioration – à ceux qui ont interrompu leurs études à temps plein pendant au moins sept ans depuis qu'ils ne sont plus soumis à l'obligation de fréquentation scolaire. Seize ans, fréquentation scolaire, donc, sept, ça nous amène à 23 ans. À partir de là, on considérera que ces gens sont autonomes. Donc, on ne comptera plus sur la contribution des parents dans le calcul du montant d'aide financière auquel ils ont droit. Ça favorisera, bien sûr, des personnes qui, parfois, ont dû quitter l'école ou n'ont pas continué des études soit pour prendre soin de parents malades ou soit tout simplement parce qu'ils n'avaient pas la possibilité de le faire. Et je crois que c'est une mesure qui est intéressante pour des gens qui veulent revenir aux études.

Alors, c'est essentiellement ce en quoi consiste, M. le Président, l'article 1 qui est au projet de loi.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Verdun.

(20 h 50)

M. Gautrin: M. le Président, si vous me permettez, il y a trois éléments dans l'article 1, si vous regardez. Est-ce qu'on peut les débattre séparément? Si vous permettez. Je vais donc intervenir sur le 1°. L'article 1.1° a pour effet de rendre autonomes, comme l'a rappelé la ministre, les gens qui ont obtenu un premier diplôme universitaire et non pas ceux qui ont obtenu 90 crédits. Donc, ce qui est important, peut-être, pour comprendre... Est-ce que vous pourriez nous expliquer quels sont les programmes universitaires qui comportent plus que 90 crédits? Je peux vous en citer un certain nombre: il y a la médecine; je pense aux études d'ingénieur; le droit ne comporte... Comporte-t-il plus que 90 crédits?

Une voix: Non.

M. Gautrin: Je ne crois pas. La médecine dentaire comprend plus que 90 crédits. Est-ce que vous pourriez nous donner une idée de combien d'étudiants sont touchés par cela? Alors, combien de programmes ont plus que 90 crédits?

Mme Marois: Alors, selon les évaluations que nous faisons, je pense que les facultés ou, si on veut, les cours auxquels le député de Verdun faisait référence sont des exemples qui viennent illustrer les objectifs que vise l'article que nous amendons. On prévoit que 3 700 étudiants seraient touchés par une telle mesure.

M. Gautrin: Attendez, est-ce qu'il y a 3 700 étudiants qui sont...

Mme Marois: Ah, attention! Oui, je...

M. Gautrin: Mais ils ne sont pas tous admissibles aux demandes de prêts et bourses, c'est bien cela? Alors, ceux...

Mme Marois: Bien, c'est-à-dire qu'il y a plus... Évidemment, si on prenait la mesure en dehors du contexte de l'aide financière aux étudiants, c'est-à-dire si on prenait la notion d'autonomie en dehors de l'aide financière aux étudiants, évidemment, ça concernerait un plus grand nombre. Mais, si on regarde ceux et celles qui sont susceptibles ou sont inscrits au régime de prêts et bourses ou d'aide financière aux étudiants, c'est 3 700 étudiants dont il s'agit.

M. Gautrin: Votre estimé, c'est que cette année, avec l'application de la loi, il y a 3 700 étudiants qui auraient pu avoir le statut d'autonome et qui n'auront pas le statut d'autonome à l'heure actuelle.

Mme Marois: C'est ça.

M. Gautrin: Pour nos fins de discussion, est-ce que vous auriez l'amabilité, peut-être dans les jours qui viennent, de nous déposer le nombre d'étudiants qui sont touchés par ces mesures? Autrement dit, je suis intéressé à connaître le nombre d'étudiants dans les programmes où il y a plus que 90 crédits mais qui auront déjà accumulé 90 crédits. Est-ce qu'on comprend bien ma question? C'est-à-dire ceux qui auraient eu normalement le statut d'autonome mais qui vont perdre actuellement la possibilité d'obtenir le statut d'autonome advenant l'application du projet de loi. Je pense que c'est un élément qui est important. Vous estimez à combien les économies que vous faites avec ça?

Mme Marois: Alors, ou – et je tiens à apporter une précision – qui l'obtiendront plus tard.

M. Gautrin: Ou qui l'auraient obtenu. Je suis d'accord.

Mme Marois: Alors, on s'entend, ils l'obtiendront, bon, à un moment.

M. Gautrin: Vous avez raison. Vous estimez à...

Mme Marois: Alors, c'est exactement le chiffre que j'ai donné au député de Verdun, M. le Président.

M. Gautrin: Donc, 3 700.

Mme Marois: C'est 3 700 étudiants, et nous croyons que cela pourrait représenter, les estimations que nous avons, une économie de l'ordre de 2 700 000 $, dû, d'une part, à la réduction du volume de prêts et du volume de bourses évidemment, l'un et l'autre étant concerné.

M. Gautrin: Je vais quand même faire... Vous comprenez bien que je vais faire une addition depuis le départ. Vous voyez déjà que vous prenez – et c'est la base de notre discours qu'on aura – 2 700 000 $ dans la poche d'étudiants qui sont des étudiants assez performants, puisqu'ils sont en dernière année soit d'un programme de médecine, soit d'un programme de génie, et qui, probablement, auraient pu rembourser leurs études.

M. le Président, comme on a peu de temps et que je voudrais couvrir le maximum d'articles, je vous suggère d'adopter les premier et deuxième alinéas sur division.

Mme Marois: J'aimerais peut-être cependant, M. le Président, si vous le permettez, ajouter que cette mesure que nous avons retenue ici répond à une recommandation quand même – hein, on se comprend? – du Groupe de travail sur l'aide financière aux étudiants, où siégeaient des étudiants. Bon. Je pense que c'était important de le mentionner.

M. Gautrin: Il y a des fois où vous interprétez des recommandations à la marge, vous me permettrez. Donc, M. le Président, je suis prêt, moi, à adopter sur division les paragraphes 1° et 2° de l'article 1.

Mme Marois: Et le 3°?

M. Gautrin: Alors, M. le Président, le 3°, ça sera adopté.

Mme Marois: Ah oui! C'est adopté sans...

M. Gautrin: Sans division.

Mme Marois: ...sans division. Alors, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'article est...

M. Gautrin: Là, attendez un instant. L'article 1, dans son ensemble, va donc être adopté sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division.

M. Gautrin: Mais je tenais à me prononcer en faveur du 3°.

Le Président (M. Pinard): O.K. Est-ce qu'il y a des amendements sur l'article 1?

Mme Marois: Il n'y a pas d'amendement sur l'article 1, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Donc, l'article 1, actuellement, est adopté sur division.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Article 2.

Mme Marois: Alors, l'article 2, j'aurai un amendement, M. le Président. Je vais d'abord peut-être passer à l'explication générale. Alors, cet article prévoit qu'un étudiant qui a atteint le niveau d'endettement maximum déterminé par règlement ne sera plus admissible au programme d'aide financière.

M. Gautrin: Si on adopte les autres règlements.

Mme Marois: Si nous les adoptons, bien sûr. Il permet de limiter l'endettement des étudiants qui prolongent leurs études à plusieurs ordres d'enseignement ou qui fréquentent des établissements d'enseignement privé dont les droits de scolarité sont élevés. La somme de tous les prêts consentis à un étudiant en vertu de la loi ne pourra donc pas excéder le montant maximum prévu au règlement pour chaque ordre d'enseignement et pour chaque cycle d'études, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Cet amendement est déposé?

Mme Marois: Alors, maintenant, je dépose l'amendement. J'expliquais l'article 2, M. le Président. Je propose donc, par l'amendement que je vais déposer, de modifier l'article de la façon suivante. On remplace l'article 2 par le suivant:

L'article 11 de cette loi est modifié par l'addition, après le paragraphe 5°, du suivant:

«6° ne pas avoir atteint le niveau d'endettement maximum prévu par règlement.»

C'est ça. C'est que, au lieu du paragraphe 4°, on parle du paragraphe 5°.

M. Gautrin: L'amendement est purement d'écriture.

Mme Marois: Technique, mais il a une conséquence, cependant, M. le Président, et je vais demander à M. Bisson, qui m'accompagne, d'expliciter concrètement.


Amendement déposé

Le Président (M. Pinard): Est-ce que vous pourriez déposer l'amendement pour qu'on le fasse connaître également à l'opposition?

Mme Marois: Oui. Bien sûr, M. le Président. Je vous dépose immédiatement et de ce pas l'amendement.

Le Président (M. Pinard): Est-ce qu'on en a deux? En avons-nous deux copies ici?

Une voix: Voilà.

Mme Marois: Oui, les deux copies. Voilà.

Le Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Alors, une copie ici et une copie là.

Mme Marois: Alors, je vais demander à M. Bisson, qui est directeur des politiques et programmes à l'aide financière au ministère de l'Éducation, de nous dire qu'il y a un aspect, bien sûr, qui semble bien technique et qui a l'air de dire: Vous vous êtes trompés de numéro, mais qui a une conséquence concrète. M. Bisson.

M. Bisson (Michel): Oui. C'est que, de la façon dont il était libellé auparavant en référant au 4°, le pouvoir de dérogation qui a été accordé à la ministre le limitait uniquement sous forme de prêt, alors que le fait de le passer au 6° va permettre d'accorder également une aide sous forme de bourse à ceux qui pourraient excéder les plafonds d'endettement qui sont proposés.

Mme Marois: Voilà. Alors, ce qui, évidemment, nous permet d'assurer que les étudiants qui se trouveraient dans une situation tout à fait particulière puissent venir, par voie de dérogation, faire reconnaître cette situation particulière et ainsi avoir accès, soit au prêt ou à la bourse, ce qui, dans le cas où l'article n'aurait pas été amendé, aurait exclu l'accès à la bourse.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce que vous avez des idées, est-ce que vous... Parce que, là, vous comprenez bien qu'on vous donne, par cet article, un énorme pouvoir. Par règlement, vous allez pouvoir décider quel est le niveau maximum d'endettement, donc vous allez pouvoir éliminer des étudiants de leur droit actuellement aux prêts et bourses, parce que vous direz: Il est trop endetté.

Alors, j'ai un certain nombre de questions et je veux les aborder ici; j'aurais pu les aborder dans les autres articles. C'est quoi, votre idée des plafonds d'endettement? C'est-à-dire, vous avez quoi dans votre tête? Autrement dit, je comprends...

Mme Marois: Oui.

M. Gautrin: ...que vous n'êtes pas obligée de déposer aujourd'hui les règlements, mais là on dit à peu près: Vous pouvez, demain, arriver à des positions quasiment...

Mme Marois: Alors, je vais répondre.

M. Gautrin: ...illusoires, de dire: Bon. Si vous êtes à plus de 2 000 $, vous n'avez plus le droit à un prêt et bourse. Vous avez un pouvoir discrétionnaire actuellement dans ce qu'on vous donne.

Mme Marois: Bon. Alors, ce n'est pas tout à fait un pouvoir discrétionnaire, parce que... Je veux dire, il y a un pouvoir discrétionnaire sur la dérogation possible au plafond qui aura été fixé.

M. Gautrin: J'avais compris, mais vous devez le faire par règlement...

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: ...et les règlements, c'est un pouvoir qui est, sinon discrétionnaire...

Mme Marois: Non.

M. Gautrin: ...du moins qui est propre à l'Exécutif, et en général l'Exécutif vous suivrait, j'en suis sûr.

Mme Marois: Bon. J'imagine que ce sera le cas, évidemment, parce que...

M. Gautrin: Alors, c'est quoi...

Mme Marois: ...je plaiderai correctement le projet que j'ai.

M. Gautrin: Je comprends, mais votre idée, à l'heure actuelle, sur les plafonds, c'est quoi?

(21 heures)

Mme Marois: Bon. Alors, je vais informer les membres de la commission, M. le Président, et le député de Verdun, je n'ai aucune réserve à cet égard. Il y aura de toute façon prépublication du règlement, ce qui justement permettra aux gens de faire valoir leur point de vue, ce qui est l'objectif d'une prépublication. Alors, ça ne se fera pas en catimini, loin de là.

Alors, j'explique ce que nous souhaitons retenir. Ce que nous nous proposons de retenir et ce qui sera prépublié, à moins de modifications, là, qui pourraient être mineures, serait les montants suivants: on pense à un plafond de l'ordre de 21 000 $ pour le secondaire en formation professionnelle, de 15 000 $ pour le collégial général, de 21 000 $ pour le collégial professionnel, de 25 000 $ pour le baccalauréat, le programme court, de 30 000 $ pour le baccalauréat, le programme long, de 35 000 $ pour le deuxième cycle universitaire et de 45 000 $ pour le troisième cycle universitaire.

En fait, nous nous sommes assurés que, évidemment, en prenant un cours qu'un étudiant suivrait, normalement, selon les temps impartis ou prévus pour le cours, les sommes auxquelles il puisse avoir accès sous forme de prêt soient un peu au-delà du temps prévu pour réussir le cours s'il utilisait au maximum le régime de prêt. Bien sûr, ici, on parle du prêt, de l'endettement. On ne parle pas de la bourse, puisqu'elle ne contient pas d'obligation de remboursement. Elle ne s'accumule pas avec le prêt. Donc, nous croyons que ce sont des limites raisonnables, qui envoient un signal aussi. On dit: Au-delà de ça, on croit que quelqu'un qui a un cours secondaire en formation professionnelle risque de se retrouver dans des situations difficiles de remboursement s'il devait aller au-delà de la somme qui est prévue ici.

M. Gautrin: Je vous signale qu'il y a d'énormes problèmes avec ce que vous mettez sur la table. Je vais commencer par en aborder un.

Une personne qui a fait des réorientations de carrière, et ça arrive souvent, quelqu'un a commencé dans une certaine direction, n'est pas nécessairement dans la direction qu'il veut prendre, ou il se rend compte que le choix qu'il avait fait quand il avait 16 ou 17 ans est dans un endroit où il y a peu d'emplois ou un domaine qui est relativement bouché, et il se réoriente, ce qui est fréquent.

Autrement dit, vous avez un jeune qui, à 16 ans ou 17 ans, choisit, par goût, une discipline d'études, se rend compte, au bout d'un certain temps, soit que ce n'est pas la discipline qui l'intéresse, soit qu'il connaît un peu mieux la discipline et il se rend compte que les emplois dans la discipline sont virtuellement nuls ou presque nuls et il se réoriente dans une autre discipline... Très rapidement, il va atteindre le plafond, et là, à ce moment-là, vous allez forcer l'individu à sortir du système, et c'est ça qui m'inquiète avec votre technique du plafond.

Autant je suis d'accord, autant je suis d'accord avec vous qu'il importe qu'on ait une réflexion, dans notre société, sur l'endettement énorme que peuvent avoir certains étudiants lorsqu'ils finissent leurs études et les difficultés qu'ils ont à rembourser, autant le choix que vous faites, c'est que vous allez risquer de faire sortir du système, parce qu'ils auront atteint la limite, le plafond, des étudiants qui, dans le fond, n'auront ni diplôme ni formation complétée et qui vont être des personnes dont l'intégration sur le marché du travail va être extrêmement difficile. Je dois vous dire que j'ai de la difficulté à vous suivre dans vos choix. Je les trouve très dangereux, actuellement, strictement pour l'avenir des jeunes.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Oui. Alors, M. le Président, juste pour revenir sur ce que je disais tout à l'heure, en fait, c'est la durée normale d'un cours plus trois trimestres. On se comprend? Donc, ça donne un peu la mesure.

On a fait des analyses de situations. En appliquant cela sur la clientèle actuelle – il n'y a jamais meilleure façon de faire que de tirer des leçons de la réalité avec laquelle nous travaillons – ce dont l'on se rend compte, c'est qu'il s'agit de 1 % de la clientèle qui serait touché dans le cas présent et, je vous dirai, bien ciblée, puisque 14 % de toute la clientèle se retrouveraient du côté du collégial non subventionné, soit les écoles privées non subventionnées...

M. Gautrin: Alors, je...

Mme Marois: ...qui sont souvent des écoles qui ont des coûts très élevés – d'ailleurs, on va venir un peu plus loin...

M. Gautrin: On peut l'aborder tout de suite, si vous voulez.

Mme Marois: ...pour en parler un peu...

M. Gautrin: Est-ce que vous auriez l'amabilité de déposer cette analyse sur... Auriez-vous l'amabilité de déposer cette analyse dont vous faites état? Peut-être pas ici, si vous ne l'avez pas, mais vous pourriez me l'envoyer?

Mme Marois: Oui, on vous la fera parvenir. C'est parce que là, évidemment, il y a plein d'autres données avec ce que j'ai.

M. Gautrin: Il y a peut-être d'autres informations, mais je pense que les données que vous nous donnez actuellement quant aux gens qui seraient susceptibles de ne pas pouvoir poursuivre leurs études à cause des plafonds que vous imposez... je pense que vous pourriez le déposer à la commission, M. le Président, et le faire parvenir aux parlementaires, le cas échéant.

Mme Marois: C'est ça, oui. J'aimerais, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: ...corriger ce que je viens de dire, parce que je trouvais que ce chiffre ne correspondait pas à ce que j'observais, puis, effectivement, je lisais mal la donnée. Bon. Mais je vais revenir.

D'abord, on a actuellement 159 000... On a pris l'ensemble des étudiants et étudiantes bénéficiaires d'un prêt et on a fait porter l'analyse sur 160 000 personnes, 159 476, donc 160 000. Et on constate que c'est 1 950 personnes qui seraient concernées, soit 1 % du 160 000, et on constate que 50 % de ces 1 900 étudiants se retrouvent dans le collégial non subventionné. Bon. Et les autres, ce sont des tout petits nombres qui se répartissent à l'universitaire, au secondaire professionnel, etc.

Maintenant, j'ajoute une dernière chose, M. le Président. Je comprends la préoccupation du député et je la partage, mais on voit qu'on rétrécit, on s'en va dans l'entonnoir, on réduit cette mesure, c'est-à-dire, ça présente des risques pour ces personnes-là par rapport à 160 000. Mais il y a toujours une possibilité de recours, c'est-à-dire, on croit que... Imaginons la situation que le député mentionnait tout à l'heure, puis je pense qu'elle peut se passer, bien ça va amener ce cas, sûrement, en révision et il est possible à ce moment-là d'intervenir et d'accorder l'accès prolongé au régime de prêts et bourses, M. le Président. Mais je pense qu'en même temps c'est un message qu'on envoie, et ça, il faut être clair, c'est un message qu'on envoie et qui, oui, exige qu'on soit plus vigilant quant au choix qu'on fait. Si on reste pendant deux ans dans une même formation et puis que, je dirais, d'un mois à l'autre on se rend compte qu'on y est mal à l'aise, qu'on n'aime pas le métier auquel on nous forme, ou la profession ou la technique auxquelles on nous forme, j'imagine que, sachant cela et ayant besoin d'avoir accès au régime pour pouvoir continuer ses études, on va peut-être se poser la question plus tôt pour se dire: Bien, ce n'est pas la bonne orientation que j'ai choisie, ce n'est pas le bon plan de carrière, et je dois remettre en question ce choix parce que je risque d'avoir des ressources plus limitées si je continue. Bon. Je pense qu'il y a un prix, ce n'est pas un prix seulement... ce n'est pas un coût financier, c'est le coût humain, hein – je n'ai pas besoin, je pense, d'expliquer ça au député de Verdun – c'est le coût humain qui fait en sorte qu'on oriente des jeunes qui prennent des mauvaises voies et qui, bon, n'osent pas trop revenir en arrière et puis le font peut-être un peu tard.

Encore, dernièrement, je rencontrais des gens de la commission scolaire Jérôme-Le Royer. J'ai rencontré une jeune femme qui était en train d'apprendre un métier dans le domaine de l'électronique et puis qui me disait: J'ai tout fait mon cégep technique dans telle matière et puis je n'aimais pas ça, je n'étais pas heureuse, puis là je reviens dans le professionnel. C'est intéressant, elle va être contente; lorsqu'elle va sortir de son cours, elle va pratiquer un métier dans lequel elle va être confortable. Mais je me dis: Peut-être qu'on aurait pu faire l'économie des trois ans. Remarquez qu'elle saura quelque chose de plus et ce n'est jamais perdu; ça, je crois à ça, moi. Mais, en même temps, peut-être que ce n'est pas souhaitable non plus.

M. Gautrin: Bon, personnellement, j'ai des réticences sur les plafonds que vous faites, je ne veux pas en faire un long débat, on voudrait rentrer sur l'autre question. Je voudrais profiter de la chance d'aborder maintenant les collèges privés non subventionnés.

Les collèges privés non subventionnés, comme vous le savez, sont dans des secteurs qui sont des secteurs de pointe; souvent, c'est l'informatique, la mode et la conduite, le pilotage, si je ne me trompe pas. Les frais de scolarité sont importants, varient, dépassent les 10 000 $ par année, même ça peut approcher les 50 000 $, je crois, pour les écoles de pilotage. Là, à l'heure actuelle, ces étudiants ont des cours accélérés qui leur permettent de rentrer très rapidement sur le marché du travail, c'est le jeu qu'il y a entre les deux. C'est des cours de pointe tout à fait adaptés à la réalité du marché du travail.

(21 h 10)

La situation, si vous mettez des plafonds à l'endettement... Souvent, l'étudiant va dans ces institutions lorsqu'il a déjà commencé dans un cégep, voit qu'il n'est pas dans une direction qui lui permet de travailler rapidement, et vous allez limiter considérablement la possibilité qu'il puisse avoir un prêt-bourse. Vous savez que, dans les prêts et bourses, les montants qui sont les montants des frais de scolarité peuvent être contributoires, font partie du calcul du prêt. À ce moment-là, vous allez quasiment les tuer dans l'oeuf, tous ces collèges privés non subventionnés. Parce que tous les gens... Écoutez, avec les plafonds que vous avez donnés là, les gens ne pourront pas le faire. Et ça va être un amendement que je vous déposerai plus tard, à moins que vous ayez... Et je comprends que les indications que vous nous avez données sont des indications qui ne sont pas dans le projet de loi, à moins que vous ayez une approche différente pour les collèges privés non subventionnés quant à la réglementation.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Ce sont des données que je pourrai fournir aussi au député de Verdun dans les tableaux qu'on pourra lui fournir. Dans le collégial non subventionné, où on retrouve 50 % de ceux qui sont touchés, il y a 6 900 étudiants, 6 850 étudiants. Or, ce qu'on constate, c'est 946 qui seraient concernés par le plafond auquel on fait maintenant référence et qui va éventuellement devenir le plafond officiel lorsque...

M. Gautrin: Écoutez, 900 sur 6 000, c'est important.

Mme Marois: Oui, c'est important, mais il ne faut quand même pas dire qu'on va tuer toutes les écoles qui sont concernées là.

M. Gautrin: Non, non, mais, écoutez... Je comprends ça.

Mme Marois: Effectivement, on sait que c'est surtout certains secteurs, peut-être davantage les cours de pilotage que les deux autres secteurs, d'ailleurs, de formation. Les deux autres domaines de formation.

M. Gautrin: Enfin, si vous avez les chiffres et si vous pouvez me les donner, les déposer, ce serait intéressant de les avoir à cet effet-là. L'information que j'ai, c'est que, pour la majeure partie des étudiants qui prennent ce cheminement-là, c'est des gens qui ont déjà un diplôme universitaire ou un diplôme de cégep, qui, ayant obtenu leur diplôme de cégep ou d'université dans des disciplines des plus traditionnelles, se rendent compte que le marché du travail est très difficile pour eux. Ils vont suivre, dans ces collèges à la fine pointe d'une technologie, des cours qui leur permettent de rentrer très rapidement sur le marché du travail.

Et souvent ils ont déjà épuisé, si vous mettez votre plafond, la limite de leur plafond de prêts et bourses. Vous comprenez, M. le Président, parce qu'ils ont souvent fait soit déjà tout un cours universitaire dans une discipline que je ne qualifierai pas, mais une discipline plus traditionnelle, et, après avoir erré et cherché un travail pendant un an ou deux dans leur formation, ils vont chercher ce complément de formation dans ces disciplines de pointe, en informatique, pour la majeure partie du temps, afin de pouvoir pénétrer rapidement sur le marché du travail. Donc, les plafonds, souvent ils les ont déjà atteints avant de rentrer dans ces cégeps privés non subventionnés. Donc, ils ne pourront même pas faire appel aux prêts et bourses à ce moment-là.

Mme Marois: Je ne comprends pas dans quel sens...

M. Gautrin: Alors, je vous explique. L'information que j'ai, qui est à vérifier, bien sûr, est à l'effet que pour plus de la moitié, pour 60 % des étudiants qui fréquentent des cégeps non subventionnés, ce sont des gens qui ont déjà eu, je le répète, un cours universitaire, qui ont terminé leur cours universitaire, qui ont réalisé que la pénétration sur le marché du travail était difficile et qui vont chercher ces 30 crédits supplémentaires...

Mme Marois: Je comprends que ça peut être pertinent qu'on soulève la question, mais, comme j'ai la donnée devant moi, je pense que je pourrais la fournir immédiatement à mes collègues de la commission et au député de Verdun: il n'y en aurait que 125. On a fait vraiment une analyse très serrée. Quand on fait ces choix-là, je vais vous dire, on essaie de les faire en regardant qui ça touche, de telle sorte qu'on n'ait pas d'effets pervers ensuite, dont on ne soit pas trop heureux.

Bon. Alors, dans le cas précité, dans le cas de gens qui seraient passés à l'université avant d'aller vers un établissement privé non subventionné, on parle ici de 125 cas, donc ce ne sont pas des nombres énormes. Je comprends que 125 cas, c'est toujours une personne derrière chaque cas.

M. Gautrin: C'est quand même... Écoutez. Comprenez-moi bien, madame. Il faut bien comprendre, Mme la ministre, la situation d'étudiants qui ont fait un plein cours universitaire, qui, munis d'un bac dans une discipline – que vous preniez les mathématiques, parce que c'est ma discipline, vous pourriez prendre la littérature, vous pourriez prendre d'autres disciplines – essaient de se placer sur le marché du travail, se rendent compte qu'ils n'ont pas facilement un emploi actuellement et vont chercher ce complément de formation d'une année qui leur permet, à ce moment, d'entrer sur le marché du travail. Mais, même si c'est seulement 125, c'est déjà 125 cas problématiques, parce qu'ils ont souvent, si vous imposez le plafond tel que vous le faites, épuisé la totalité du plafond qu'ils pourraient avoir.

Alors, M. le Président, je ne pourrai pas convaincre aujourd'hui la ministre. Je lui demanderai simplement de me déposer les chiffres, et puis on pourrait débattre après et lui signaler que sa mesure, ici, peut créer des distorsions importantes pour des gens qui, munis d'un diplôme qu'ils ont été chercher de bonne foi, essaient de se trouver un emploi. C'est quand même tout à fait valorisant pour ces jeunes qui essaient de se trouver un emploi quand même.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, je conviens avec le député que je lui ferai parvenir toutes les données. Mais je lui rappelle qu'il y a quand même cette mesure de recours pour l'étudiant, de telle sorte qu'il puisse faire traiter son cas d'une façon particulière si vraiment il y a préjudice et que cela serait justifié.

M. Gautrin: Comprenez quand même la difficulté – c'est pour ça que nous allons voter contre votre proposition – que l'opposition a en disant: Nous votons une proposition dont nous savons à première vue qu'elle aura des effets pervers... Mais vous nous dites: Vous savez, les effets pervers, j'aurai un mécanisme plus tard pour pouvoir les corriger. Alors, j'aurais préféré que nous ne votions pas les effets pervers. Et, dans ce sens-là, M. le Président, je pense qu'on peut passer au vote, et nous allons voter contre à ce moment-là.

Mme Marois: ...l'amendement, j'imagine.

Le Président (M. Pinard): Si vous le permettez...

M. Gautrin: Non, non, l'amendement... Oui, bien là, écoutez. L'amendement, M. le Président, est purement de forme, hein?

Mme Marois: Tout à fait.

Le Président (M. Pinard): Alors, là, j'en suis à l'article 2 amendé. On va commencer par l'amendement. Est-ce que...

M. Gautrin: Alors, pour l'amendement, je pense qu'on peut être d'accord sur l'amendement parce qu'il est de forme. Mais, une fois que l'amendement est adopté...

Le Président (M. Pinard): O.K.

M. Gautrin: ...je vais voter contre l'article à cause des effets pervers. Donc, il va être adopté sur division à cause des effets pervers.

Le Président (M. Pinard): Donc, sur l'amendement?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté.

M. Gautrin: Oui.

Le Président (M. Pinard): Et sur l'article 2 amendé?

Mme Marois: Adopté.

M. Gautrin: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. D'accord. Maintenant, nous passons à l'article 3, en vous rappelant qu'il nous reste environ 30 minutes au total.

Mme Marois: Bon. Ça va bien.

M. Gautrin: Vous allez faire le maximum pour essayer quand même de faire...

Le Président (M. Pinard): Oui.

Mme Marois: Oui, ça va bien parce que...

Le Président (M. Pinard): Alors, sur l'article 3, madame.

Mme Marois: L'article 3. Un instant, j'y viens, M. le Président. C'est ici, voilà! L'article 3 vient modifier l'article 13 de la Loi sur l'aide financière. Cela concerne le montant maximum d'un prêt et, encore, ça réfère à la situation que l'on vient de discuter, là. Je vais vous fournir quand même les explications.

Les modifications apportées à cet article ont pour but de permettre de majorer ou de réduire le montant maximum d'un prêt afin de tenir compte de certaines situations. Ainsi, on pourra, notamment, tenir compte du fait que le début de certains cours dispensés à l'ordre d'enseignement secondaire, en formation professionnelle, ne coïncident pas avec l'année d'attribution. Par exemple, les étudiants qui débutent à l'hiver un programme de plus d'un trimestre doivent obtenir le même montant de prêt que ceux qui ont débuté à l'automne avant d'être admissibles à la bourse. En réduisant le montant maximum du prêt, l'endettement par trimestre sera alors comparable à celui des étudiants qui débutent leurs études à l'automne, et l'obtention d'une bourse sera ainsi facilitée. Alors, c'est ce que fait l'article 3, qui vient modifier l'article 13.

M. Gautrin: L'article 3, qui modifie l'article 13, M. le Président. Et nous allons le voter sur division. La raison pourquoi on le vote sur division, c'est parce qu'il augmente le pouvoir réglementaire de la ministre.

Le Président (M. Pinard): Alors donc, l'article 3 est adopté sur division.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, l'article 4.

Mme Marois: L'article 4. Il s'agit de l'article 14, qui est modifié dans le sens suivant. C'est une modification qui concerne le montant du prêt, qui est calculé en soustrayant du montant déterminé à titre de dépenses admises le montant déterminé à titre de contribution de l'étudiant. Le montant ainsi obtenu ne peut excéder le montant maximum du prêt établi en application de l'article 13 ni le solde de l'aide financière pouvant lui être accordée sous forme de prêt.

(21 h 20)

Alors, ici, c'est encore là afin de tenir compte du niveau d'endettement maximum établi par règlement. Le prêt accordé, donc, ne pourra excéder le solde disponible de l'aide financière accordée sous forme de prêt.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Ça va être adopté sur division, donc par concordance.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'article 4 est donc adopté sur division. L'article 5, Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, l'article 5 vient modifier l'article 23. Essentiellement, on réduit d'un mois – là, je ne lirai pas l'aspect très technique de l'article parce que ça pourrait apparaître comme difficile à comprendre, mais, quand on l'explique, ça se comprend bien – la période d'exemption, c'est-à-dire la période pendant laquelle l'étudiant qui a terminé ses études est exempté de rembourser ses prêts. Cette période d'exemption sera dorénavant, pour la majorité des étudiants, de six mois au lieu de sept, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Gautrin: Je voudrais simplement confirmer, pour ceux qui écoutent nos débats, que, ça, ça va chercher 3 000 000 $ dans la poche des gens qui remboursement leur prêt.

Mme Marois: Tout à fait. Mais on se comprend bien que, si ça rapporte des sous, c'est parce que les gens ont des emplois et qu'ils peuvent rembourser. Bon.

M. Gautrin: Attendez un instant, là, madame, je m'excuse, là, on diverge d'opinions. Parce que vous devez commencer à rembourser votre prêt même si vous n'avez pas d'emploi. Après la fin de vos études, indépendamment du fait que vous soyez salarié ou non salarié, après la période d'exemption, le prêt devient exigible.

Mme Marois: Oui, mais il peut y avoir des circonstances où il y a un remboursement différé. C'est ça.

M. Gautrin: Oui, oui, 18 mois, à ce moment-là, mais qui vont compter, à ce moment-là... Le 18 mois supplémentaire va être donc raccourci aussi d'un mois...

Mme Marois: Oui, oui, oui, tout à fait.

M. Gautrin: ...puisqu'il y a un phénomène de transition qui va être fait.

Mme Marois: Tout à fait. Mais on se comprend aussi que l'étudiant devrait le payer quand même, là; il le paierait plus tard, c'est tout. Il paie juste un peu plus tôt.

M. Gautrin: Non, non, ça ne change pas le montant du prêt...

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: ...ça raccourcit simplement la période avant...

Mme Marois: Où il n'a pas à le rembourser.

M. Gautrin: ...que l'étudiant ne soit obligé de rembourser son prêt. On va chercher 3 000 000 $ dans la poche des étudiants. Pour cette raison, nous allons l'adopter sur division.

Mme Marois: Adopté sur division. Adopté, dans mon cas, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Donc, l'article 5 est adopté sur division. L'article 6, Mme la ministre. Il est abrogé.

Mme Marois: L'article 6, nous abrogeons l'article 26. Cet article supprime les dispositions de la loi qui permettent le remboursement par le ministre de l'Éducation d'une partie de l'emprunt contracté par un étudiant pendant ses études de deuxième ou de troisième cycle. C'est le fameux Programme de remise de dette qui n'a pas atteint, comme je l'ai expliqué à quelques reprises déjà, l'objectif visé, c'est-à-dire qui était d'inciter davantage d'étudiants à compléter une maîtrise ou un doctorat dans les temps impartis ou prévus pour le faire. Il est donc aboli.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Mme la ministre, je l'ai dit dans mon discours, je vais le redire encore, cet article est un article que je considère totalement inacceptable. Vous avez des étudiants qui ont... de bonne foi et qui actuellement dans nos universités travaillent très fort pour pouvoir terminer dans des délais, les délais impartis, leur programme de doctorat ou leur programme de maîtrise de manière à pouvoir bénéficier de ce remboursement. Ils ne prennent pas de travaux sur le côté, souvent ils se privent parce qu'ils ont dans leur esprit de dire: Je vais pouvoir bénéficier du remboursement du quart de ma dette si je réussis dans les délais qui sont courts.

Souvent, ils faisaient un choix qui était un choix, pour eux, même économique en disant: Si je consacre tout mon temps à mes études de maîtrise ou à mes études de doctorat et que je ne cherche pas de travaux complémentaires, soit comme assistant de recherche, soit comme assistant d'enseignement, je pourrai bénéficier, à la fin de mon programme de maîtrise ou de mon programme de doctorat, d'une annulation du quart de ma dette, ce qui fait que, en calculant l'un dans l'autre, ce que je pourrais gagner et ce que j'obtiendrai si je travaille assez vite, à ce moment-là, j'ai avantage à ne pas travailler, de consacrer tout mon temps à mes études de maîtrise ou de doctorat. Ces étudiants se sont engagés dans ce programme croyant que ça va être le cas et ils l'ont fait de bonne foi. En votant ce soir cette loi, des gens qui se sont engagés dans ce programme de bonne foi vont perdre cette possibilité de remboursement.

Déjà, sur le principe, je suis opposé parce que je croyais que la mesure était bonne et permettait justement à nos meilleurs étudiants ...une forme de récompenser ceux qui avaient été les performants. Et ce n'est pas mauvais dans une société de savoir récompenser les gens qui performent. Bon Dieu! C'est quasiment comme si, quand on fait un effort, etc., ça devient un mal puis, à ce moment-là, il faut au contraire qu'on soit pénalisé pour ça. C'est des étudiants qui sont des étudiants performants, on les récompensait de cette manière-là. Mais, en plus, là, ceux qui sont entrés dans le programme... Je vous l'ai posée à l'étude des crédits: Y aurait-il ce qu'on appelait une clause grand-mère ou une clause grand-père? C'est-à-dire que pour ceux qui sont déjà engagés dans le programme on ne leur imposerait pas la mesure. Il est clair que, la rédaction de la loi telle qu'elle est, la mesure va s'appliquer pour eux. Je trouve ça totalement inique. Et je ne voudrais pas faire de jeux de mots, M. le Président, je trouve ça vraiment injuste et inacceptable. Pour les quelques dollars que vous allez économiser de cette manière-là vous êtes en train de pénaliser probablement – et je ne voudrais pas faire de... – la fleur de notre jeunesse. Et je regrette vraiment que vous mettiez de l'avant une telle mesure.

Le Président (M. Pinard): Merci. Mme la ministre.

Mme Marois: Bon. Alors, je pourrais reprendre un par un les arguments que j'ai déjà défendus, M. le Président, c'est-à-dire les arguments que j'ai présentés pour défendre l'amendement que nous apportons. C'est vrai que ce sont des gens qui sont parmi ceux qui probablement pourront rendre le plus à la société ce qu'ils en ont reçu, et ils auront reçu beaucoup. Mais, justement parce qu'ils auront reçu beaucoup, ils seront aptes à aller chercher des revenus conséquents à l'endettement qu'ils auront contracté ou aux responsabilités qu'ils auront à assumer.

Et, en ce sens-là, à partir du moment où on avait un objectif par cette mesure, qui était d'augmenter de façon sensible le nombre de personnes terminant dans les temps impartis ou prévus, c'est-à-dire, pour l'obtention d'un baccalauréat... pas d'un baccalauréat mais d'une maîtrise ou d'un doctorat, et qu'on se rend compte que la mesure n'a pas eu d'effets, est-ce qu'il n'est pas mieux – et c'est le choix que nous avons fait – de nous assurer que ces sommes soient rendues disponibles pour bonifier certains autres aspects du régime et ainsi être plus équitable à l'endroit de gens qui en ont davantage besoin? C'est le choix que nous avons fait.

Évidemment, quand on est rendu là et qu'on doit faire des efforts de rationalisation, il n'y a pas de mesures qu'on voudrait voir enlever, dont celle-là, mais on croit que ça reste un choix plus équitable que d'autres qui nous avaient été soumis. Et c'est donc celui-là que j'ai retenu, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Gautrin: M. le Président, c'est l'odieux des statistiques. Et je dis bien les mots l'«odieux des statistiques». Mettez-vous à la place d'un étudiant qui performe, qui a fini dans les délais qui lui sont impartis et vous lui dites: Parce qu'il n'y a pas assez de gens qui ont réussi comme vous, à ce moment-là, on cancelle la mesure. Je trouve ça absolument odieux. Et vous dites: Le programme n'a pas donné les effets escomptés. Bien sûr, sur un plan statistique, vous avez raison, mais ceux qui l'ont fait, ceux qui ont réussi, ceux qui ont travaillé et qui se sont échinés et époumonés pour pouvoir arriver à atteindre l'obtention du diplôme dans les délais impartis, bon Dieu, que leur importe s'il y en a 29 % parmi eux qui l'ont obtenu et non pas 35 % ou 37 %? Eux ont réussi et vous les privez de ce remboursement de dette auquel ils pensaient avoir droit.

Alors, M. le Président, il y a beaucoup d'autres articles dans ce projet de loi que je voudrais aborder, mais je voudrais réellement, avec la plus grande véhémence – et je ne voudrais pas utiliser des termes non parlementaires – je m'oppose à cette mesure, et je m'y oppose avec la plus grande... je la trouve inique, inacceptable, et je pourrais vous faire la liste, si vous doutez de mon vocabulaire.

Le Président (M. Pinard): Donc, j'en conclus, M. le député de Verdun, que l'article 6...

M. Gautrin: Que l'article, s'il est adopté – nous votons contre – il est adopté sur division parce que...

Le Président (M. Pinard): C'est ça. Donc, adopté sur division. À l'article 7.

M. Gautrin: Sur division. C'est important. Sur division avec un grand D et un D qui est très, très...

Le Président (M. Pinard): Également, M. le député de Verdun, je tiens à vous rappeler ainsi qu'à la ministre de l'Éducation que le temps imparti... Il nous reste 17 minutes. L'article 7.

M. Gautrin: Nous allons essayer de...

(21 h 30)

Mme Marois: ...d'accélérer un peu, oui, M. le Président. C'est un article qui était inexistant. Nous ajoutons un article 37.1 à la loi de l'aide financière. Ça se retrouve à l'article 7 de l'actuel projet de loi. C'est tout simplement pour me permettre, comme ministre de l'Éducation, d'accorder par anticipation de l'aide financière sous forme de prêt. En fait, cette mesure va permettre, notamment, d'accorder rapidement un prêt aux bénéficiaires de la Loi sur la sécurité du revenu ou à ceux qui bénéficient actuellement de l'aide sociale qui s'inscrivent, en cours d'année, à un programme d'études secondaires en formation professionnelle. Cette mesure va permettre de plus de suppléer au fait que la plupart des commissions scolaires, contrairement aux collèges et aux universités, n'ont pas de fonds de dépannage. Alors, c'est une mesure qui est positive, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Gautrin: Oui, nous n'en doutons pas, M. le Président. Ma seule question, c'est: Pourquoi vous l'administrez encore centralement, c'est-à-dire au ministère, et pourquoi vous n'en décentralisez pas l'application au niveau des établissements?

Mme Marois: Parce qu'il n'y a pas de fonds de dépannage actuellement disponible dans le cas... Parce que, ici, on parle particulièrement de gens à la formation professionnelle.

M. Gautrin: Vous savez comme moi que le rapport MacDonald pouvait concevoir un fonds de dépannage qui serait centralisé, mais dont la gestion aurait pu être décentralisée.

Mme Marois: J'ai le goût de vous dire, M. le Président, que le régime d'aide financière est de plus en plus efficace. Vous le savez sans doute, le député de Verdun le sait sans doute, on a, entre autres, encore cette semaine, fait état de grandes améliorations qu'on a apportées au régime. Il est beaucoup plus convivial qu'il ne l'était au plan informatique. On peut avoir facilement accès à son dossier, s'y inscrire, etc. Alors, si administrer une mesure centralement avait pour effet d'allonger les délais, de rendre difficile l'accès, je serais d'accord avec le député de Verdun. Mais, dans le cas présent, ça ne semble pas être la situation.

M. Gautrin: Vous me permettrez d'en douter.

Mme Marois: Au contraire, je le répète, on est de plus en plus efficace.

M. Gautrin: Vous me permettrez d'en douter – on va terminer le débat là-dessus – parce que, si vous décentralisez, vous humanisez le processus. Promenez-vous parmi les étudiants et sachez ce qui circule comme problèmes ou les histoires sur les boîtes vocales que vous avez dans le régime des prêts-bourses: on passe d'une boîte vocale à une autre boîte vocale, à une sous-boîte vocale, à une troisième boîte vocale. Faites l'expérience vous-même, si vous voulez, chez vous, en vous prenant pour une étudiante, et vous en ferez l'expérience.

Le Président (M. Pinard): Donc...

M. Gautrin: C'est adopté, M. le Président.

Mme Marois: C'est ça. Il faut bien comprendre que c'est une avance sur le prêt, là, aussi, hein, M. le Président. On se comprend.

M. Gautrin: Non, non, mais j'ai déjà compris, là. Et c'est pour ça que, même si ce n'est pas décentralisé, nous votons en faveur de la mesure.

Mme Marois: Bon, adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, l'article 8, Mme la ministre.

Mme Marois: Un instant, s'il vous plaît. L'article 8...

M. Gautrin: Les pouvoirs de révision.

Le Président (M. Pinard): C'est le pouvoir de révision.

M. Gautrin: C'est les deux pouvoirs de révision dont vous m'avez parlé tout à l'heure.

Mme Marois: Ah oui! C'est les pouvoirs de révision.

Le Président (M. Pinard): Dans les 30 jours.

Mme Marois: On est d'accord? C'est un processus de révision.

M. Gautrin: Bien, Mme la ministre, on aurait souhaité qu'on n'en ait pas besoin, des pouvoirs de révision, mais, étant donné que...

Mme Marois: Mais il y en a toujours! C'est toujours utile, M. le Président. Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Chère madame, j'aurais souhaité qu'il ne soit pas nécessaire, autrement dit que les mesures que vous mettriez de l'avant ne nécessitent pas un pouvoir de révision. Mais, comme on a déjà voté sur division les autres articles et que celui-ci va corriger légèrement, donc nous sommes en faveur de cet article.

Mme Marois: Ha, ha, ha! Alors, c'est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Adopté unanimement. Alors, l'article 9.

Mme Marois: Bien, ça va dans le sens des articles précédents.

M. Gautrin: Concordance, M. le Président.

Mme Marois: En fait, on prévoit que l'étudiant devra d'abord demander la révision de la décision du ministre de l'Éducation avant de faire une demande dérogatoire.

M. Gautrin: Concordance.

Mme Marois: Ça vient corriger le renvoi qui est fait à la Loi sur le ministère de l'Éducation. C'est adopté, M. le Président?

M. Gautrin: C'est de la concordance.

Le Président (M. Pinard): Concordance. Adopté, l'article 9?

M. Gautrin: C'est la logique qu'implique l'autre.

Mme Marois: C'est tout à fait de la concordance. M. le député de Verdun a raison.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'article 9 est adopté. L'article 10.

M. Gautrin: Ça supprime les stages... Les stages ne sont plus acceptables aux prêts-bourses. Pour quelle raison?

Mme Marois: Non, non, attendez un peu! Les stages exigés par un ordre professionnel. Attention!

M. Gautrin: Mais attendez un instant, on va se comprendre, là.

Mme Marois: On dit: Cette modification permet au ministre de l'Éducation de ne pas reconnaître les stages qui font partie d'un programme d'études aux fins de l'admissibilité à l'aide financière. Sera ainsi clarifié le fait que les personnes qui effectuent un stage exigé par un ordre professionnel pourront ne pas être admissibles à des prêts et bourses. Ces stagiaires pourront toutefois bénéficier d'un prolongement de la période d'exemption pour le remboursement de leur prêt, comme le prévoit l'article 24 de la loi.

M. Gautrin: Et c'est le Barreau, les gens comme le Barreau...

Mme Marois: Oui, et souvent ces...

Le Président (M. Pinard): La Chambre des notaires.

M. Gautrin: ...les ingénieurs junior, des choses comme ça?

Mme Marois: C'est ça. Et souvent ces stagiaires reçoivent une rémunération déjà.

M. Gautrin: Déjà. Parce que, souvent, ces stagiaires ont droit à une rémunération.

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: C'est la raison pour laquelle vous retirez ça.

Mme Marois: Tout à fait.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'article 10 est adopté?

M. Gautrin: Attendez un instant, je regarde la lecture, là, 56, 4°. Parce que vous mettez «stage», mais est-ce que vous... Je m'excuse, mais le mot «professionnel», je ne le vois pas. Je vous écoute, mais je ne le vois pas.

Le Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre.

M. Gautrin: Autrement dit, ce que vous me dites et ce qui est écrit, ce n'est pas la même chose, sans vouloir vous faire de peine.

Mme Marois: Non, mais regardez...

M. Gautrin: Mais on parle de stages sans parler de stages exigés par un ordre professionnel. Or, vous savez qu'il y a un certain nombre d'enseignements universitaires ou collégiaux qui nécessitent des stages qui ne sont pas des stages de nature, disons, professionnelle. Alors, il faudrait que vous écriviez ça autrement.

Mme Marois: L'article 56 dit: «Le ministre peut – quatrième alinéa – [...] établir la liste des programmes d'études qu'il reconnaît aux fins de l'admissibilité à l'aide financière...» Ce qu'on ajoute, c'est ceci: «établir la liste – c'est-à-dire qu'on répète l'article – des programmes d'études incluant ou non le stage qu'il reconnaît aux fins de l'admissibilité à l'aide financière». Et, dans les faits, ce que l'on voulait clarifier, c'est la question des stages.

M. Gautrin: Autrement dit, vous vous donnez le pouvoir de choisir parmi les stages et vous avez la gentillesse de nous dire: Les stages que je vais choisir, ça sera ceux-là. Puis ceux que je ne choisirai pas, c'est ceux qui sont liés à un ordre professionnel. Mais la loi, actuellement, ne précise pas ça.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

M. Gautrin: Autrement dit, vous pourriez, demain ou après-demain, décider qu'il y a un certain nombre de stages que vous laissez tomber.

Mme Marois: En fait, il faut bien comprendre que les stages intégrés à l'obtention du diplôme...

M. Gautrin: Ils sont inclus dans les programmes d'études.

Mme Marois: Voilà, alors que, là, on parle de stages exigés par des ordres professionnels et pour lesquels, la plupart du temps, il y a une rémunération. Le Barreau est un exemple.

M. Gautrin: Je sais.

Mme Marois: En ingénierie, il y en a.

M. Gautrin: Oui.

Mme Marois: Il y en a ailleurs, en architecture, etc.

Le Président (M. Pinard): Alors, concernant l'article 10, M. le député de Verdun?

Mme Marois: Adopté.

M. Gautrin: M. le Président, parce que le temps passe, on va adopter ça sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division.

Mme Marois: Ah bon! D'accord.

Le Président (M. Pinard): L'article 10, adopté sur division. L'article 11, Mme la ministre.

Mme Marois: À l'article 11, bien, on fait la même chose, là; c'est de la concordance, ça. C'est les pouvoirs réglementaires qui sont liés à la détermination des «montants maximums des prêts, selon l'ordre d'enseignement, le cycle et la classification de l'établissement d'enseignement fréquenté».

M. Gautrin: L'article 11, on l'a déjà fait. L'article 11 a deux éléments importants...

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: ...le programme de remise de dette, d'une part, et le programme de niveau maximum d'endettement. Je dois dire que nous ne sommes d'accord ni avec l'un ni avec l'autre, mais il est un article de pure concordance avec les deux autres.

Le Président (M. Pinard): Donc, il est adopté.

M. Gautrin: Alors, nous allons voter contre l'article 11...

Le Président (M. Pinard): Adopté sur division.

M. Gautrin: ...mais tout en étant conscients qu'il est en pure concordance avec les deux autres articles.

Le Président (M. Pinard): Alors, adopté sur division, l'article 11.

Mme Marois: Adopté sur division.

M. Gautrin: C'est ça, madame.

Le Président (M. Pinard): L'article 12.

Mme Marois: Bon. Nous avons un papillon, M. le Président, un amendement. On va, d'abord, expliquer de quoi il s'agit.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce que je peux revenir sur l'article 11, si vous le permettez?

Le Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Oui. Je voudrais revenir sur l'article 11.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que vous aviez un amendement sur l'article 11?

M. Gautrin: Oui. J'avais, moi, un amendement à soumettre à la ministre pour l'article 11.

Le Président (M. Pinard): Alors, si vous le permettez, Mme la ministre.

M. Gautrin: Vous permettez que je revienne sur l'article 11?

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, comme nous avons déjà...

Mme Marois: Ah! Sur l'article 11. Nous l'avions adopté.

M. Gautrin: Oui, mais je veux revenir sur l'article 11 parce que j'avais un amendement à vous suggérer, si vous me permettez.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que vous permettez, madame, que je le rouvre?

Mme Marois: Oui, je n'ai pas d'objection à écouter le député de Verdun, M. le Président, si c'est pertinent. On le verra.

M. Gautrin: Bon. Alors, voici. Vous me permettez... C'est donc qu'on est en train de parler du pouvoir réglementaire de la ministre.

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député de Verdun. Est-ce qu'à ce stade-ci vous pourriez nous soumettre votre proposition d'amendement pour l'article 11?

M. Gautrin: Oui, je pourrais vous le donner.

Une voix: Il est mal rédigé.

M. Gautrin: Il est mal rédigé?

Le Président (M. Pinard): Deux exemplaires, un pour la table et un pour la ministre.

M. Gautrin: Bien sûr, j'en ai deux exemplaires, mais je pense qu'il était bien rédigé.

Une voix: Non, il est mal rédigé.

M. Gautrin: Qu'est-ce qui est mal rédigé? Ah! du premier paragraphe. Bon. Il s'agit de la place où il va, c'est tout.

Alors, M. le Président, il s'agit essentiellement... Là, on est en train de parler du pouvoir réglementaire de la ministre. Alors, je me permets de revenir, donc, sur le niveau d'endettement. Et, si je regarde l'article 23°, donc qui est l'article 3°, 23°, on a: «déterminer pour chaque ordre d'enseignement, pour chaque cycle ainsi que pour certains programmes d'études qu'il identifie, le niveau d'endettement maximum...» J'avais dans ma tête aussi de me dire: Il existe des types de programmes, et spécifiquement, par «types de programmes», je pensais couvrir les programmes offerts par les collèges privés non subventionnés qui pourraient nécessiter éventuellement une décision différente de la part de la ministre en ce qui touche le niveau d'endettement.

(21 h 40)

Alors, par l'amendement, M. le Président, qui vient donc modifier l'article 23°, je viendrais augmenter le pouvoir réglementaire de la ministre dans ce qu'elle fixe comme borne au niveau maximal d'endettement en disant: Le niveau maximal d'endettement peut être différencié. Il peut être différencié en fonction, d'une part, de ce qui est écrit ici, c'est-à-dire de l'ordre d'enseignement, du cycle, des programmes d'études, mais aussi des types de programmes pour couvrir le débat qui touche les collèges privés non subventionnés, tout en laissant, bien sûr... J'aurais voulu qu'on ait une approche différente, mais je lui laisse la possibilité d'avoir une approche différenciée par rapport à ce genre d'établissements, ce qu'elle n'aurait pas eu si on avait voté l'article tel qu'il est.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député. Mme la ministre, suite à...

Mme Marois: Bon, écoutez, on est en train de le regarder, mais, à première vue, je vous dirai, M. le Président, que ça nous amène à établir une série de catégories qui évidemment pourraient alourdir, et de beaucoup, le règlement.

M. Gautrin: Vous me permettez, M. le Président?

Mme Marois: Mais ce qui...

M. Gautrin: Si vous me permettez, Mme la ministre, l'article que nous débattons est un article qui vous donne le pouvoir, mais qui n'oblige pas. Donc, ça ne vous oblige pas à établir différentes catégories, mais ça vous donne éventuellement la possibilité; donc, ça augmente votre pouvoir réglementaire, ça vous permet d'avoir un pouvoir réglementaire différencié sans nécessairement vous obliger à avoir un pouvoir réglementaire différencié. Donc, j'ouvre la possibilité à un programme réglementaire différencié sans nécessairement, bien sûr, vous en donner l'obligation.

Mme Marois: Je comprends, M. le Président. Est-ce qu'on peut s'entendre sur une chose? Comme on procède régulièrement, dans les cas habituels, quoi, et que nous sommes presque dans l'habituel, puisque nous sommes en train de passer...

M. Gautrin: On fait un effort pour rentrer à l'intérieur de cette contrainte horrible...

Mme Marois: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: ...que votre leader nous a imposée.

Mme Marois: D'accord, d'accord. On perd du temps, là, M. le député de Verdun. Revenons à nos moutons, bon!

M. Gautrin: Vous avez raison, continuez!

Le Président (M. Pinard): Mais, quant à moi, il me reste à vous spécifier, à tous les deux, qu'il vous reste seulement quatre minutes.

Mme Marois: Bon.

M. Gautrin: Bon.

Mme Marois: Alors, moi, je suis prête... Après la fin de nos travaux, ici, en commission, on a encore quelques minutes en débat, n'est-ce pas, et je pourrai signifier dans ma réplique si je peux ou non retenir l'amendement. Parce que je voudrais, et je pense que c'est normal, prendre la précaution de vérifier avec nos légistes pour nous assurer qu'il n'y a pas d'enfarges...

M. Gautrin: Tout à fait d'accord. Je suis tout à fait d'accord.

Mme Marois: ...ou d'embûches. Bon.

Le Président (M. Pinard): Donc, on laisse en blanc le 11.

Mme Marois: On le laisse en blanc. Le député de Verdun est habitué à travailler dans ce sens-là avec moi. Si nos légistes nous disent qu'il n'y a pas d'enfarges ou de difficultés particulières...

M. Gautrin: Aucun problème, M. le Président.

Mme Marois: ...je le reçois et je le dirai dans ma réplique, à la fin.

M. Gautrin: Parfait. Et, à ce moment-là, il sera présenté comme papillon en troisième...

Mme Marois: Voilà!

M. Gautrin: Parce qu'il existe encore une troisième lecture.

Mme Marois: Il sera présenté comme papillon...

M. Gautrin: Donc, il pourra être présenté comme papillon en troisième lecture.

Mme Marois: ...pour la dernière partie de nos travaux.

M. Gautrin: Est-ce que c'est faisable? Est-ce qu'on demande à notre...

Le Président (M. Pinard): Non, je ne crois pas, là. Non, non.

Mme Marois: Maintenant, j'ai moi-même un dernier amendement.

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi. Excusez-moi. Il faut qu'on procède à l'adoption article par article. Après votre réplique, je mettrai les amendements et les articles qui n'auront pas été étudiés aux voix.

Mme Marois: Pas maintenant, là? Dans une demi-heure, là.

Le Président (M. Pinard): Non.

M. Gautrin: Mais est-ce que, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): O.K.

M. Gautrin: ...comme c'est la pratique courante, la ministre pourra, quand elle présentera le projet de loi dans ce qu'on appelle la troisième lecture...

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre... Excusez-moi, excusez-moi, là.

M. Gautrin: ...être en mesure de présenter son papillon?

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Pinard): Si vous permettez, en vertu de notre règlement, vous pouvez toujours, lors de la troisième lecture...

M. Gautrin: Parfait.

Mme Marois: Bon.

Le Président (M. Pinard): ...nous arriver avec un amendement qui pourrait régulariser le tout.

M. Bélanger: Lors de la troisième lecture.

Mme Marois: Et je le ferai mien, à ce moment-là.

M. Gautrin: Parfait. Non, non, il n'y a aucun problème.

Mme Marois: Et on se comprend. On est habitués à travailler comme ça avec le député de Verdun...

M. Gautrin: Aucun problème. Aucun problème, M. le Président.

Mme Marois: ...lui et moi.

Le Président (M. Pinard): C'est parfait. Donc, à ce moment-ci, moi, je comprends que l'article 11 a été dûment accepté sur division.

Mme Marois: Oui...

M. Gautrin: C'est exact.

Mme Marois: ...avec un possible amendement.

Le Président (M. Pinard): O.K.

M. Gautrin: C'est exact. Et l'amendement, pour l'instant...

Le Président (M. Pinard): Écoutez, écoutez...

M. Gautrin: ...est retiré par le député de Verdun...

Le Président (M. Pinard): ...pour l'instant, je considère et je constate...

M. Gautrin: Parfait.

Le Président (M. Pinard): ...que l'article 11 a été accepté sur division.

M. Gautrin: C'est exact.

Le Président (M. Pinard): Ça va?

Mme Marois: C'est ça.

Le Président (M. Pinard): Alors, en troisième lecture, vous arriverez avec...

Mme Marois: Voilà, s'il y a lieu.

M. Gautrin: Parfait.

Le Président (M. Pinard): Donc, nous...

Mme Marois: Non, il me reste, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Deux minutes.

Mme Marois: ...un amendement à l'article 12 – nous étions à l'article 12? – ...

Le Président (M. Pinard): Oui, oui, nous étions rendus à l'article 12.

Mme Marois: ...qui se lirait comme suit: Dans l'article 24.1, remplacer, dans la deuxième ligne du deuxième alinéa, le mot «échec» au singulier par le mot «échecs» au pluriel. Donc, c'était une faute, une coquille, finalement.

Le Président (M. Pinard): O.K.

Mme Marois: Et, deuxièmement, remplacer...

M. Gautrin: Les étudiants vont faire plusieurs échecs?

Le Président (M. Pinard): Ha, ha, ha!

Mme Marois: Au moins plus qu'un. Remplacer, dans la dernière ligne du deuxième alinéa, les mots «au terme de la session» par les mots «à la date de la délivrance du bulletin».

Le Président (M. Pinard): Deux copies, s'il vous plaît.

Mme Marois: Les deux copies sont ici, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'amendement est déposé.

M. Gautrin: Amendement adopté, M. le Président.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté.

M. Gautrin: L'amendement est adopté.

Le Président (M. Pinard): L'amendement est adopté. Alors, article 13.

M. Gautrin: L'article 12, monsieur, est adopté sur division.

Mme Marois: Adopté.

M. Gautrin: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi. Vous avez parfaitement raison.

M. Gautrin: C'est-à-dire que l'amendement est adopté.

Le Président (M. Pinard): Amendement adopté. Et l'article 12 amendé, adopté sur division.

M. Gautrin: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Article 13.

Mme Marois: L'article 13...

Le Président (M. Pinard): Une minute. À 47...

Mme Marois: C'est l'article 40... Attendez un peu. Où est-ce que j'en suis? On a pas mal de papier ici.

M. Gautrin: L'article 13, c'est de la pure concordance, M. le Président. L'article 13, c'est de la concordance.

Mme Marois: Ah! c'est ça essentiellement. Oui.

M. Gautrin: Il est adopté sur division, compte tenu que c'est de la concordance.

Mme Marois: Tout à fait. C'est de la concordance.

M. Gautrin: C'est de la concordance. Adopté sur division.

Le Président (M. Pinard): Article 13, adopté sur division. Article 14. Mme la ministre, il vous reste une minute.

Mme Marois: L'article 14... C'est la même chose, M. le Président.

M. Gautrin: Adopté sur division.

Mme Marois: C'est de la concordance.

M. Gautrin: Sur division, M. le Président, parce que c'est la même logique.

Mme Marois: C'est ça. Alors, adopté sur division, M. le Président, dit mon collègue.

Le Président (M. Pinard): Adopté sur division, l'article 14. Article 15. Mme la ministre.

Mme Marois: Bien, évidemment c'est, je pense, normal: «Les dispositions de l'article 26 de la Loi sur l'aide financière [...] continuent de s'appliquer à l'égard des études terminées avant la date d'entrée en vigueur de l'article 6 de la présente loi.»

M. Gautrin: C'est le problème de la remise de dette.

Mme Marois: Voilà.

M. Gautrin: Alors, c'est par concordance qu'on le fait adopter. Je suis contre. Donc, adopté sur division.

Mme Marois: Et nous allons quand même l'adopter. Ce sera sur division, j'imagine?

M. Gautrin: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, ça, c'est l'article 16 que vous venez d'adopter sur division. J'en étais rendu, moi, à l'article...

M. Gautrin: L'article 15, M. le Président.

Mme Marois: L'article 17, je pense que c'est tout à fait...

M. Gautrin: Attendez, M. le Président. On vient d'adopter 15. Moi, je suis à 15: sur division.

Le Président (M. Pinard): L'article 15, sur division. Ça va.

M. Gautrin: L'article 16...

Le Président (M. Pinard): L'article 16, sur division?

M. Gautrin: L'article 16, sur division aussi, oui.

Le Président (M. Pinard): L'article 17?

Mme Marois: L'article 17, c'est essentiellement pour signifier qu'évidemment on ne considérera pas les échecs des étudiants se rapportant à une session...

M. Gautrin: O.K. Mais, comme globalement je vais adopter sur division 17, à ce moment-là, parce que je trouve la taxe trop élevée...

Mme Marois: O.K.

M. Gautrin: Il n'y a plus de temps, mais l'article 18, on ne peut pas l'adopter?

Mme Marois: C'est la date...

M. Gautrin: C'est la date de mise en vigueur du programme.

Mme Marois: ...fixée par le gouvernement. Bon.

M. Gautrin: Alors, est-ce qu'on nous laisse le temps d'adopter 18?

Le Président (M. Pinard): Alors, si vous le permettez, est-ce que...

M. Bélanger: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'article 18 est adopté?

M. Gautrin: Adopté, M. le Président.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Merci. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Gautrin: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, en conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux.

M. Gautrin: M. le Président, vous devez demander si le projet de loi, dans son ensemble, est adopté.

Mme Marois: Le projet, dans son ensemble, est-il adopté?

Le Président (M. Pinard): C'est dans la troisième lecture, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Ah! Excusez. Non, ce n'est pas en commission?

Le Président (M. Pinard): Je tiens à vous remercier, M. le député de Verdun, ainsi que Mme la ministre de l'Éducation et tous les gens qui ont participé pendant cette dernière heure. Afin de permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends donc les travaux quelques instants et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement et le plus rapidement possible.

(Suspension de la séance à 21 h 48)

(Reprise à 21 h 49)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le Président de la commission plénière.

M. Lachance (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, et qu'elle l'a adopté avec des amendements.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

(21 h 50)

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de procéder à l'adoption du projet de loi n° 85.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 7 de notre feuilleton, Mme la ministre de l'Éducation propose l'adoption du projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel.

Je vous rappelle que la durée maximum de ce débat est fixée à 30 minutes: 10 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et, enfin, Mme la ministre de l'Éducation, vous aurez droit à une réplique de cinq minutes.

Y a-t-il des interventions? Alors, Mme la ministre de l'Éducation et députée de Taillon. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Comme nous venons de terminer la commission plénière pour étudier le projet de loi article par article, je vais en profiter, en commençant cette intervention, pour remercier notre collègue le député de Verdun, ainsi que vous-même qui avez présidé la commission pour la qualité de nos travaux, puisque, malgré qu'il y ait eu certaines remarques de l'autre côté de cette Assemblée à l'effet que nous avions procédé peut-être un peu hâtivement, il reste que, lorsque l'on travaille sérieusement... Et on a prouvé par les travaux auxquels nous venons de procéder, M. le Président, que nous pouvions le faire en tout respect les uns pour les autres, sachant que nous n'étions pas d'accord sur certains aspects du projet de loi, mais nous permettant cependant de le bonifier, de mieux le comprendre, de mieux en saisir la portée, ce à quoi doit servir une étude de projet de loi lorsqu'on est à l'étape de l'étude article par article, pour bien saisir la teneur de chacun des articles, leur portée, les personnes concernées, M. le Président.

Alors, je voudrais vous remercier ainsi que le député de Verdun. Et j'aurai l'occasion, à ma réplique finale, M. le Président, de voir s'il y a lieu de retenir même un amendement, qui a été suggéré par notre collègue le député de Verdun, pour l'intégrer au projet de loi. Il est actuellement sous étude par les légistes pour nous assurer qu'il n'y a pas de problèmes de concordance ou qu'il n'y a pas d'effets secondaires non perçus à première vue. Alors, j'aurai l'occasion, M. le Président, d'y revenir.

Je reviens maintenant sur le fond de la loi que nous étudions ce soir. C'est une loi qui concerne l'aide financière aux étudiants et qui vient modifier la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel dans une perspective d'inciter à la réussite, M. le Président, pour la deuxième partie de la loi. Et, comme, tout à l'heure, j'ai eu peu de temps pour expliciter en quoi cela consistait, j'aimerais y revenir, M. le Président.

On sait que le gouvernement qui nous a précédés avait implanté une mesure qui se rapproche de celle que nous avons retenue et que nous retiendrons par le projet de loi, mais qui en même temps était différente. Ce que l'on constate – et je le rappelais dans mon intervention de départ – c'est que souvent, pour des gens qui sont au collégial – et c'est très souvent, puisqu'on constate que les moyennes de temps prévues pour réussir les cours ou pour obtenir un diplôme sont plus élevées que le temps qu'il serait nécessaire normalement de prendre pour y arriver – ces temps donc sont dépassés. Et nous nous rendons compte que plusieurs jeunes et plusieurs adultes qui sont inscrits dans les cours au cégep connaissent des échecs. D'ailleurs – et je pense que les gens le savent très bien – certains échecs constatés n'en sont pas, parce que, en cours de route, quelqu'un va décider de cesser de suivre le cours et va s'inscrire éventuellement à un cours différent ou autre au semestre qui suit.

Et ces cours évidemment sont considérés comme des échecs, mais, comme il n'y pas d'autre sanction que celle de reconnaître qu'il y a un échec, on peut, à répétition comme ça, se réinscrire à des cours pendant plus de semestres que ce qui est prévu pour obtenir son diplôme. Cela comporte, bien sûr, des coûts pour l'étudiant, des coûts humains, puisqu'il allonge la période qu'il consacre à ses études, mais des coûts financiers aussi, puisqu'on paie des professeurs, puisqu'on assure l'administration, puisqu'on assure les actifs qui sont rendus disponibles pour les étudiants qui suivent ces cours.

Le gouvernement qui nous a précédés avait implanté une mesure décriée comme étant une taxe à l'échec, puisqu'on disait, après qu'un étudiant a raté cinq ou sept cours, qu'il devait payer certains montants avant de pouvoir reprendre ces cours. C'était donc une banque d'échecs auquel il avait droit. Et cette banque évidemment, on l'accumulait tout au long de l'exercice et on se retrouvait à la fin avec un nombre d'échecs qui étaient difficiles à rattraper.

Alors, ce que nous faisons – et c'est pour ça que nous parlons davantage d'un incitatif à la réussite – c'est que nous allons travailler semestre après semestre. Une personne qui sera donc inscrite à quatre cours, si, par malheur, elle devait en rater un de ces cours, ne connaîtra aucune sanction négative et donc pourra continuer à suivre son cours régulier le semestre suivant. Si, cependant, cette personne devait connaître deux échecs, l'un dû à un véritable échec et l'autre, par exemple, dû au fait qu'on s'est retiré du cours, elle devrait, cette personne, pour pouvoir entreprendre le semestre qui suit, débourser une somme de l'ordre de 2 $ par heure de cours à reprendre pour un des deux cours manqués ou ratés, ou un échec. Et, une fois ce semestre passé, si elle réussit ses quatre cours ou si elle connaît à nouveau un échec, elle peut reprendre le semestre suivant sans contrainte, M. le Président.

L'objectif évidemment, c'est d'augmenter le niveau de réussite. Ce n'est pas de faire en sorte que les gens paient parce qu'ils font des échecs et qu'on accumule ainsi des sous, mais c'est qu'au contraire on procède à des économies et, surtout, que le jeune puisse réussir son cours. Et c'est dans ce sens-là que je mentionne qu'il s'agit de détruire la culture de l'échec pour finalement s'engager dans la culture de la réussite, M. le Président.

Alors, c'est ce qu'on retrouve au projet de loi. Nous croyons que c'est une approche qui est saine, qui peut être stimulante et qui aura un effet sur la réussite, et sur la réduction des coûts, ce qui n'est pas négligeable. Parce qu'on le fait sans effet négatif sur les services éducatifs, et c'est ce qu'on cherche quand on fait des rationalisations, que ce soit en santé, en services sociaux ou en éducation qui sont évidemment des services essentiels auxquels la population a droit, M. le Président.

Quant aux autres aspects de la loi qui concernent l'aide financière aux étudiants, ce sont, pour la plupart, des mesures de rationalisation qui visent, entre autres, à limiter le niveau d'endettement des personnes et des jeunes qui ont accès au régime d'aide financière aux étudiants. Je pense que c'est souhaitable parce que l'on constate actuellement que certaines personnes se retrouvent avec des niveaux d'endettement absolument démesurés qu'elles ne pourront jamais rembourser. Et, devant ce risque ou devant cette difficulté appréhendée, elles vont plutôt choisir de faire faillite, ce qui n'est finalement pas tellement souhaitable, et pour la personne elle-même qui commence avec un échec assez important dans la vie, et, d'autre part, évidemment par le fait qu'elle prive ainsi des collègues qui pourraient – parce que les prêts sont remboursés et donc remis au fonds consolidé; ils viennent reconstituer le fonds disponible pour d'autres personnes – avoir accès au régime d'aide financière aux étudiants et aux étudiantes.

Il y a une série d'autres mesures qui permettent de rationaliser en essayant de toucher le moins possible aux personnes qui ont accès au régime, M. le Président. En ce sens, plusieurs de ces mesures étaient d'ailleurs proposées par le groupe qui s'est penché sur le régime d'aide financière aux étudiants et qui nous avait fait un certain nombre de recommandations.

Alors, je souhaite que ce projet de loi reçoive l'appui, l'aval des membres de cette Assemblée, de telle sorte qu'on puisse rapidement en informer les étudiants qui, déjà, ont reçu une information de base, mais évidemment on ne pouvait présumer de l'adoption du projet de loi. Dès qu'il sera adopté, donc nous pourrons en informer les étudiants. Il y aura donc un délai suffisamment long avant que les mesures ne s'appliquent, et ceux-ci pourront ainsi prévoir leur planification financière de la prochaine année. M. le Président, je vous remercie.

(22 heures)

Le Président: Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Je cède la parole maintenant à M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Non, M. le Président, nous n'allons pas voter en faveur de ce projet de loi. Nous n'allons pas voter en faveur de ce projet de loi car, comme on l'a démontré dans l'étude article par article, il comporte des mesures particulièrement iniques envers les populations étudiantes. Il comporte des mesures particulièrement iniques pour – et je vais vous donner cet exemple-là parce qu'il me semble tout à fait pertinent – les jeunes parmi nos plus performants, nos étudiants parmi les plus performants qui terminent dans des délais courts et les délais qui leur étaient impartis soit une maîtrise, soit un doctorat – et je vois parmi les membres ministériels un certain nombre de députés qui ont déjà été des professeurs d'université, qui ont dirigé des thèses de doctorat – et qui avaient, jusqu'à aujourd'hui, droit à l'annulation du quart de la dette qu'ils avaient contractée pour leur prêt étudiant, ces mesures-là vont être effacées aujourd'hui. C'est-à-dire que quelqu'un qui, il y a quatre ans, de bonne foi, a travaillé extrêmement fort et qui soutiendra d'ici un mois ou deux sa thèse de doctorat, qui avait droit à cette remise de dette, va la perdre aujourd'hui. C'est une pénalité injuste, inique sur les gens qui sont les plus performants parmi nos jeunes. M. le Président, je ne peux en aucune manière, quels que soient les besoins financiers dont on parle à tort et à travers, concourir à une mesure qui s'en va pénaliser les plus performants parmi nos jeunes.

Je ne peux pas être d'accord, comme on l'a vu lorsqu'on a fait l'étude article par article, avec cette mesure qui va priver les étudiants de dernière année – de dernière année de génie, de dernière année de médecine, de dernière année de médecine dentaire – du statut d'autonome. Ça veut dire quoi? Ça veut dire... Vous savez que, lorsqu'on calcule – et vous le savez parfaitement, M. le Président – le montant du prêt et de la bourse auquel vous avez droit, si vous avez le statut d'autonome, la contribution parentale, c'est-à-dire la contribution de vos parents, n'est plus calculée à l'intérieur de votre prêt-bourse. Jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire jusqu'au moment où on aura promulgué la loi, les étudiants de ces programmes, qui étaient des programmes de quatre ans, c'est-à-dire des programmes plus longs, des programmes comme le programme de génie ou le programme de médecine, qui prenaient une année de plus que les programmes plus traditionnels, de bacs plus traditionnels, ces gens-là, dans leur dernière année, avaient le droit, étaient considérés, pouvaient être considérés comme des étudiants autonomes. Ils le perdent aujourd'hui, dès qu'on passera le projet de loi.

Et vous voyez, M. le Président, ce qui se passe. C'est que, petite mesure par petite mesure, on s'en va puiser dans la poche des étudiants, on s'en va puiser 1 000 000 $ par-ci, 3 000 000 $ par-là, 2 000 000 $ par-ci, on s'en va augmenter la contribution qu'on va demander aux étudiants dans le régime de prêts et bourses. On a eu aussi dans la mesure – et on en a débattu – une situation qui me semble extrêmement dangereuse lorsque l'on dit à un étudiant: Lorsque vous avez atteint le niveau maximal de prêt – et la ministre ou le ministre le déterminera par règlement – vous n'aurez plus droit au régime de prêts et bourses. Alors, vous comprenez facilement ce que cela va pouvoir avoir comme effet. Cela aura pour effet que des étudiants, parce qu'ils ont eu un parcours un peu différent, parce qu'ils sont en fin de processus, seront amenés à devoir peut-être abandonner leurs études. M. le Président, c'est un gaspillage d'argent. Lorsque l'on aura investi pendant un an, deux ans ou trois ans sur un jeune et lorsqu'il sera à la limite de pouvoir obtenir son diplôme, on lui dira: Vous ne pourrez pas obtenir votre diplôme parce que le plafond que l'on impose au régime de prêts-bourses aujourd'hui, le plafond est tel que vous n'avez plus le droit, à partir d'aujourd'hui, d'avoir un prêt ou d'avoir une bourse. M. le Président, il s'agit d'une situation grave. C'est clairement proposé par le gouvernement dans un but, dans le but avoué d'aller chercher un certain nombre de millions dans la poche des étudiants et, très franchement, M. le Président, nous ne pouvons pas partager ce point de vue là.

J'aborderai aussi le danger, et je voudrais le signaler tout à fait particulièrement aujourd'hui à la ministre, la situation tout à fait particulière dans laquelle se trouvent les collèges privés non subventionnés. Les collèges privés non subventionnés – il est important de le rappeler, M. le Président – donnent des formations extrêmement pointues dans les domaines liés au marché du travail, souvent dans les secteurs de l'informatique, de la mode, du pilotage des avions, et dans les secteurs où les étudiants peuvent rapidement entrer sur le marché du travail. Une bonne partie des étudiants qui choisissent ce type de programme sont des gens qui ont déjà obtenu un diplôme dans un autre secteur, que ce soit le cégep ou l'université, et qui se retrouvent à ce moment-là avec des difficultés d'insertion sur le marché du travail et qui essaient de trouver une meilleure chance d'insertion sur le marché du travail. Les frais de scolarité sont extrêmement importants dans ces secteurs-là. Ils dépassent souvent les 10 000 $ par année. Et clairement, si on ne permet plus à ces gens-là d'avoir droit au régime de prêts-bourses, M. le Président, on tue purement et simplement ce type d'enseignement.

Je terminerai, M. le Président, en vous rappelant aussi que la mesure qui est faite pour ce qu'on appellerait accélérer le transit des étudiants à l'intérieur des cégeps, c'est-à-dire accélérer la réussite à l'intérieur des cégeps, la mesure qui était semblable à celle qui avait été mise de l'avant par Mme Robillard lorsqu'elle était ministre de l'Éducation, est beaucoup plus punitive que celle que nous avions mise de l'avant, au point que l'effort financier qui va être demandé aux étudiants de cégep qui auront raté deux ou trois cours, l'effort financier qui va être demandé peut risquer de mettre en danger leur capacité financière de poursuivre leurs études.

Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, nous allons voter contre le projet de loi, un projet de loi pour lequel je ne vois d'autre raison que des raisons budgétaires. Je ne vois d'autre raison à la présentation de ce projet de loi que celle de vouloir aller chercher plus de 40 000 000 $ – et on peut débattre actuellement, parce qu'il y a évidemment la mesure dans les cégeps, on a un peu de difficulté à estimer, entre 40 000 000 $ et 45 000 000 $ – plus de 40 000 000 $ dans la poche des plus jeunes, des étudiants à l'heure actuelle, et d'aller leur demander une contribution supplémentaire. Ce geste, M. le Président, alors qu'on va demander cet effort particulier supplémentaire à ceux qui sont les plus performants, particulièrement dans l'abolition de la remise de dette, est un geste que nous ne pouvons, en aucune manière, partager de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président. Et je regrette de dire à la ministre: Nous allons voter contre, actuellement, le projet de loi n° 85. Merci, M. le Président.

(22 h 10)

Le Président: Merci, M. le député de... M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Au moment d'adopter le projet de loi n° 85, je me suis posé une première question. Le projet de loi a été déposé il y a quelques jours, il y a à peine une semaine. Je me suis demandé si le projet de loi était véritablement prêt, parce que si, dans une étude de quelques minutes, une étude tout à fait restreinte dans le temps, une semaine après que le projet de loi est déposé devant l'Assemblée, la ministre elle-même est forcée de déposer déjà des amendements pour essayer de réarranger un peu les choses, on est en droit de se demander comme parlementaire, avant de voter sur le projet de loi, s'il y avait eu une semaine de plus, est-ce qu'il y aurait eu encore d'autres amendements? Et, si on avait eu le temps d'en faire une étude approfondie, est-ce qu'il n'y aurait pas eu d'autres correctifs qu'on va être obligés d'apporter dans les sessions qui viennent?

On l'adopte sur l'urgence et je ne comprends pas, M. le Président. Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas des urgences dans le domaine de l'éducation. Dieu sait comment il serait urgent d'améliorer la qualité de l'éducation. Comment les parents du Québec espéraient des états généraux de l'éducation des orientations précises, claires, pour améliorer la qualité de l'éducation du primaire au secondaire. Il y aurait des urgences aussi, M. le Président, pour avoir des investissements en recherche et développement, un meilleur partenariat entre nos universités et le secteur privé pour garder chez nous nos meilleurs cerveaux. C'est dramatique de voir partir les meilleurs cerveaux du Québec, les meilleurs finissants des maîtrises, des doctorats dans les hautes technologies, qui quittent le Québec pour aller travailler à l'extérieur, qui vont créer et développer des entreprises, créer des emplois aux États-Unis ou ailleurs. Dans tous ces domaines-là, M. le Président, je suis à peu près convaincu que, si vraiment le gouvernement avait manqué de temps et avait été obligé de plaider l'urgence, il aurait pu obtenir l'assentiment d'à peu près tout le monde pour des motifs aussi importants que ceux-là.

Maintenant, pour taxer l'échec scolaire tant dans le domaine des affaires, dans le domaine scolaire que dans à peu près toutes les activités de la vie, l'échec en soi est rarement recherché, c'est-à-dire que l'échec en soi est un désincitatif à l'échec. Personne ne recherche l'échec. Je ne pense pas qu'on ait besoin de taxer l'échec, d'y accrocher... d'ailleurs, c'est un argument sur lequel ceux qui sont aujourd'hui au gouvernement, qui étaient dans l'opposition à l'époque, ont fait une partie de leur campagne électorale dans les cégeps en disant: Voyons, ça n'a pas d'allure de taxer l'échec. On disait au contraire qu'il fallait avoir une philosophie positive: il faut encourager la réussite. Il ne s'agit pas de punir l'échec. Quelqu'un qui a un échec est puni par le fait même de ne pas avoir réussi et d'être obligé de reprendre son cours et de perdre du temps. Il est déjà puni. Mais il faut encourager, il faut donner des incitatifs, il faut avoir une pensée positive pour la réussite. Et on avait là une mesure qui avait été imaginative, je pense, le remboursement d'une partie du prêt pour les gens dans les cycles supérieurs qui finissaient dans les délais prescrits.

Je l'ai dit tout à l'heure dans le débat sur l'adoption du principe – je le répète – il y a plein de monde dans tous les domaines qui disaient: Il faudrait élargir ça. Il faudrait élargir cette idée extraordinaire de remboursement d'une portion du prêt pour ceux qui finissent dans les délais prescrits, l'élargir au baccalauréat, en faire une utilisation plus élargie. Et je suis convaincu – je vois que le député de Verdun est d'accord avec moi – que les comités de travail, le groupe de travail qui va commencer à se réunir serait probablement arrivé à cette conclusion-là, aurait probablement fait la même recommandation à la ministre mais, malheureusement, là on vient éliminer cette mesure-là sans même tenir compte – et c'est ma conclusion, M. le Président, mon dernier motif, et trop souvent le gouvernement fait ça – des gens qui sont déjà inscrits dans le système.

Donc, le gouvernement a permis à des gens de s'inscrire sous un certain nombre de motifs, de considérations et, en cours de route, on vient leur retirer ça. Et c'est ce qui fait, M. le Président, que tant de nos concitoyens et de nos concitoyennes perdent confiance dans le gouvernement. Dans plusieurs dossiers, les gens, de bonne foi, font confiance à leur gouvernement, considèrent que telle ou telle mesure va s'appliquer et, en cours de route, on vient comme briser le contrat. Ce sont souvent des contrats non écrits, mais tous les programmes gouvernementaux sur la fiscalité ou des programmes comme ceux-là sont des contrats entre les citoyens et l'État. Et, quand l'État se retire sans consultation, sans avertissement, c'est une rupture de contrat qui crée une rupture de confiance. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Maintenant, pour la réplique de cinq minutes, Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. Je veux rassurer le député de Rivière-du-Loup, la réforme de l'éducation dont j'ai annoncé déjà les grandes lignes il y a quelques semaines, qui a été très favorablement reçue et de façon, je dirais, unanime, M. le Président, sera faite sous le signe de la rigueur et sous le signe de la réussite. Nous devons augmenter notre niveau de diplomation. Nous devons lutter contre le décrochage scolaire et ce sera tolérance zéro au fait que l'on sorte de l'école sans diplôme ou en ne sachant pas lire, ni écrire, ni compter. On saura lire, on saura écrire, on saura compter, on connaîtra son histoire et celle des autres, M. le Président. Ce sera la réforme de la rigueur, de l'exigence et de la réussite.

D'autre part, M. le Président, en terminant, nous avions laissé en suspens un projet d'amendement que je suis prête à recevoir – et qui nous a été proposé par le député de Verdun et que je reprends à mon compte, je crois qu'il sera d'accord avec cela – et il se lirait comme suit, M. le Président: À l'article 11 du projet de loi qui concerne l'article 57 de la Loi sur l'aide financière aux étudiants, dans le paragraphe 23°, proposé par le paragraphe 3° de l'article 11, insérer, après les mots «d'études», les mots «ou certaines classes d'établissements».

Et si nous pouvions procéder aux écritures, M. le Président, je crois que cela satisfait...

Une voix: Consentement.

Mme Marois: ...les intentions qui ont été exprimées lors de l'étude du projet de loi, nous pourrions ainsi procéder à l'adoption du projet de loi, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation, est-ce qu'on pourrait avoir l'amendement? Est-ce que, entre-temps, M. le député de Verdun, vous donnez votre consentement pour qu'on procède aux écritures?

M. Gautrin: M. le Président, il n'y a aucun problème que je donne mon consentement sur cet amendement. Je suis évidemment en faveur de cet amendement, ce qui ne veut pas dire nécessairement que je serai en faveur du projet de loi tel qu'amendé.


Amendement adopté en commission plénière

Le Président: Très bien. Alors, les choses étant claires et l'amendement étant reçu par les officiers de la table, le consentement étant accordé également pour les écritures, nous allons donc procéder aux écritures. Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien. Alors, ça complète donc la réplique de Mme la ministre de l'Éducation sur le projet de loi n° 85. À ce moment-ci, est-ce que le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Président: Alors, que l'on appelle les députés.

(22 h 18 – 22 h 27)


Mise aux voix

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, si vous voulez prendre place. Nous allons mettre aux voix la motion de Mme la ministre de l'Éducation, proposant que le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, soit adopté.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je demanderais consentement, M. le Président, pour ajouter les votes du vice-premier ministre et du député de Berthier, du côté ministériel.

(22 h 30)

Le Président: Alors, il y a consentement.

Le Secrétaire: Pour:60

Contre:33

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de Mme la ministre de l'Éducation est adoptée. Et, en conséquence... Merci beaucoup. Donc, le projet de loi n° 85, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux étudiants et la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Article 9, je vous demanderais de procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 87.


Projet de loi n° 87


Adoption du principe

Le Président: Alors, conformément à l'ordre adopté à la séance d'hier, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal.

Alors, je vous rappelle que les temps de parole sur le débat sur l'adoption du principe sont limités à 20 minutes pour la ministre qui présente le projet de loi, 20 minutes pour un représentant de l'opposition officielle, 5 minutes pour tout autre député, avec une réplique de 5 minutes pour celui qui présente le projet de loi.

Avant de procéder, je demande aux députés qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte de quitter l'Assemblée le plus vite possible. Je cède maintenant la parole à Mme la ministre de l'Éducation.

Des voix: Bravo!


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, merci, chers amis. J'attendais ces applaudissements avec... Bon.

Alors, je vous remercie, M. le Président, de me permettre d'intervenir à ce moment-ci. D'abord, je voudrais dire que le projet de loi que je propose aux membres de cette Assemblée n'a, à toutes fins pratiques, qu'un seul objectif: de s'assurer que des enfants aient accès à des services éducatifs de qualité dans leur milieu et dans leur quartier au-delà et malgré toutes les chicanes, toutes les déconvenues, toutes les difficultés qui se vivent entre des administrations scolaires à Montréal. En effet, essentiellement, c'est du bien-être des enfants qu'il s'agit ici.

J'ajouterai cependant, M. le Président, qu'il y a aussi l'intérêt des contribuables – et j'y reviendrai – puisque, en effet, ce que je propose par le projet de loi, c'est essentiellement de résoudre un problème auquel est confronté une communauté depuis bientôt deux ans – deux ans au printemps – communauté pour laquelle ni une commission scolaire ni l'autre, soit la Commission des écoles catholiques de Montréal ou la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, n'a trouvé, jusqu'à ce jour, une solution.

Est-ce que je pourrais vous dire, M. le Président, d'autre part, que la loi que je vous propose d'adopter, que je propose à mes collègues de l'Assemblée nationale d'appuyer, c'est une loi à laquelle je n'aurais pas voulu procéder, pour laquelle je n'aurais pas voulu souhaiter l'appui de mes collègues, parce que je ne voulais pas qu'il y ait de loi spéciale, ou particulière, venant résoudre un problème que, je crois, les parties auraient dû résoudre elles-mêmes?

De quoi s'agit-il? Essentiellement, de voir à utiliser rationnellement des espaces qui sont disponibles dans les écoles du quartier Côtes-des-Neiges, de façon à ce que nous évitions – et c'est là où l'intérêt des contribuables est en jeu – de construire une nouvelle école. Et j'écoutais le député de Marquette hier sur cette question, qui disait: La ministre refuse de construire une école de 2 000 000 $ mais est prête à investir 1 500 000 $ pour faire de la rénovation, M. le Président. Alors, écoutez, il disait: Ça n'a aucun sens, elle est prête à faire ça, pour tout simplement travailler sur des écoles qui sont déjà là, et refuse de construire des écoles.

Ce qu'il oubliait de dire, M. le Président, c'est que la part dont il parlait, qui est le 2 000 000 $ qui aurait constitué la part du ministère de l'Éducation, s'ajoutait à une part fournie par la commission scolaire, de l'ordre de 2 200 000 $, sans inclure le terrain, qui nous amenait sans doute à un coût de l'ordre de 5 000 000 $. Ce n'est pas de 1 500 000 $ qu'on parlait, et le député de Marquette le sait très bien. Il s'agit, là encore, des contribuables qui étaient concernés, que ces contribuables soient ceux qui envoient leur argent à Québec ou qu'ils envoient leur argent au Conseil scolaire de l'île de Montréal. Voyons, M. le Président, il ne faut pas être grand clerc pour ne pas voir cette situation-là!

Donc, je reviens, M. le Président, parce que, à chaque fois que je pense à ça, je me fâche et j'ai le goût de monter le ton. Alors, je vais essayer de me calmer un peu, parce que je ne peux pas accepter qu'on ne trouve pas une solution à un problème identifié, connu, et pour lequel problème il existe une possibilité d'agir. Donc, le bien-être des enfants, c'est d'abord et avant tout, et essentiellement, ce qui me motive.

Alors, qu'est-ce qu'on a fait depuis deux ans pour essayer d'amener les parties à s'entendre et à trouver des solutions? D'abord, je dois dire que la solution à laquelle nous arrivons maintenant, dans le projet de loi, est une solution que nous avions déjà proposée aux commissions scolaires concernées. Qu'est-ce que ça va permettre de faire? Essentiellement, d'éviter le transport scolaire de près de 600 élèves de la Commission des écoles catholiques de Montréal et de 125 élèves de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal.

Ces enfants du quartier qui étaient éparpillés un peu partout, qui étaient véhiculés pendant 30, 40, 50 minutes, c'est complètement inadmissible dans une ville où il y a une si grande concentration que celle de Montréal, en plus du fait qu'on devait diviser les familles. Et je sais ce que c'est, parce que mes enfants, lorsqu'ils ont fréquenté l'école primaire, ont connu des situations où l'un allait dans une école primaire et l'autre dans une autre, c'est très exigeant pour les parents. Je crois qu'on doit essayer de trouver les façons de faciliter la vie des parents. Je suis persuadée que le député de Marquette, qui est parent lui-même, va comprendre ça et va accepter ça, qu'on est là d'abord et avant tout pour ça, M. le Président. C'est à ça qu'on doit travailler.

(22 h 40)

D'autre part, je crois, M. le Président, que les discussions qui ont eu cours depuis de nombreux mois auraient dû nous mener à des solutions mais ne l'ont pas fait. Alors, j'entendais, encore là, le député de Marquette qui disait: On devrait entendre les parties, pouvoir les écouter. Ça fait deux ans, M. le Président, qu'on les écoute, puis ça n'a donné absolument rien. Il n'y en a pas eu, de solution de trouvée. Alors, ce n'est pas une heure de plus qui va nous permettre d'en trouver.

D'ailleurs, s'ils pensent qu'ils peuvent en trouver, ils ont encore un mois de plus pour en trouver. Parce que, M. le Président, le projet de loi qui est devant nous prévoit que de maintenant – au moment où nous l'adopterons – jusqu'au 20 janvier la Commission des écoles catholiques de Montréal, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal peuvent discuter ensemble, en arriver à une entente qui n'est pas la solution nécessairement que je propose au projet de loi.

Je n'ai aucun problème, aucun. Qu'on m'apporte une solution qui soit une solution qui n'implique pas que nous ajoutions une nouvelle construction, M. le Président, qui sont des coûts considérables pour notre société au moment où on gratte les fonds de tiroir pour nous assurer que les services éducatifs soient préservés, qu'on m'apporte n'importe quelle solution qui va répondre raisonnablement aux besoins des enfants du quartier Côte-des-Neiges, M. le Président, et je signerai en bas de l'entente à laquelle seront intervenues les commissions scolaires. Donc, il y a encore un mois pour s'entendre. Au lieu de venir discuter avec moi pendant une heure ou avec le député de Marquette ou avec les membres de cette Assemblée, s'ils prennent le temps, sagement, de discuter entre eux, de trouver une solution, je signerai cette entente et il n'y aura pas de projet de loi spécial ou particulier, M. le Président.

Bon. Alors, qu'est-ce qui s'est passé? En 1995-1996, au moment où on a fait la programmation pour les investissements – vous savez qu'au gouvernement, année après année, évidemment, on procède à l'adoption d'un budget pour savoir où on construit des écoles, s'il y a nécessité d'en construire, où on met l'argent pour la réparation là où il y a nécessité de procéder à des réparations – donc, à ce moment-là, la Commission des écoles catholiques de Montréal nous propose la construction d'une nouvelle école dans le quartier Côte-des-Neiges. De son côté, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal soumet, elle aussi, un projet de construction mais pour le quartier Rivière-des-Prairies, M. le Président.

En juin 1995, ces projets sont présentés au ministère de l'Éducation. Ils ont été reçus tardivement parce que, habituellement, les immobilisations sont vues un peu plus tôt dans l'année. On décide à ce moment-là – et c'est le député de Lévis qui occupe la fonction de ministre de l'Éducation – de retarder la décision et de procéder à toutes les analyses requises, ce qui est normal et nécessaire, d'ailleurs, M. le Président. Et on constate que, effectivement, il y a nécessité d'ajouter des places-élèves.

Et ce qu'on constate aussi, c'est qu'il y a des superficies excédentaires, c'est-à-dire qu'il y a des espaces libres dans les écoles qui font en sorte, dans les écoles des deux quartiers respectifs, que nous pourrions répondre aux besoins des deux communautés. Dans le quartier Côte-des-Neiges, c'est le cas et dans le quartier Rivière-des-Prairies, c'est le cas aussi. Dans le quartier Rivière-des-Prairies, la CECM dispose de deux écoles: l'école Sainte-Marthe annexe, qui est déjà louée par la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, et l'école Sainte-Marthe, qui est située près des besoins de la clientèle à desservir. Et ces deux écoles permettraient de répondre aux besoins de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal.

En décembre 1995, la proposition à laquelle je fais référence est soumise aux directeurs généraux des deux commissions scolaires. Le directeur général de la CECM accepte, en principe, de recommander la proposition à son Conseil des commissaires. Le directeur général de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal considère, lui, pour sa part, que cette proposition est inacceptable. Pourquoi trouve-t-il que c'est inacceptable? Il dit qu'il l'avait présentée quelques semaines auparavant à son Conseil des commissaires et que ce dernier l'avait refusée.

Alors, de décembre 1995 à mai 1996, on va procéder à plusieurs tentatives de rapprochement avec la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Je peux vous dire que, dans ces tentatives, moi-même j'ai rencontré le président du conseil de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Mon cabinet, mon sous-ministre adjoint responsable du dossier, tous se sont impliqués afin de trouver une solution avec les intervenants. Pas contre eux, M. le Président, avec eux. Malheureusement, toutes les tentatives ont échoué. Le 3 mai dernier, c'est à ce moment-là que j'ai rencontré M. Butler, qui est président de la Commission des écoles protestantes, et ce dernier s'était engagé personnellement à libérer une école au bénéfice des enfants de la CECM. Et j'étais, je dois vous dire, assez heureuse de ce dénouement.

J'apprends, en août dernier, que ce n'est pas possible de rendre disponibles des écoles. Est-ce qu'on a pris prétexte du fait qu'à Rivière-des-Prairies, comme on ne s'était pas entendus, la Commission des écoles protestantes n'est pas venue me demander de procéder, M. le Président? Parce que je crois que l'école que lui proposait la Commission des écoles catholiques de Montréal était une école où on considérait qu'il y avait un certain nombre de réparations à faire. On ne m'a jamais demandé, M. le Président: Est-ce que vous voulez nous aider à procéder aux réparations? On a refusé l'offre de la CECM et ce qu'on a fait, on a préféré passer un peu à côté des règles en décidant de louer une école qu'un contracteur ou une entreprise avait décidé de prendre le risque de construire, M. le Président. C'est à peu près comme ça que ça s'est passé. On a donc ajouté une école dans l'est et on a laissé en plan les enfants du quartier Côte-des-Neiges. En cours de route, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal a fait une contre-proposition en disant: On vous offre l'école Merton. Cette école est située à Côte-Saint-Luc, à l'ouest de l'autoroute Décarie, et elle ne vient pas répondre aux besoins de la clientèle du quartier Côte-des-Neiges. Donc, nous sommes toujours dans l'impasse.

Au début de septembre, je dois tirer un certain nombre de conclusions. On sait qu'il y a des espaces dans certaines écoles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. On constate que l'Académie Shadd, qui est un bâtiment actuellement utilisé pour les élèves en formation professionnelle et pour des élèves adultes, pourrait, avec quelques réaménagements, accueillir des élèves du primaire. Il y a en plus un centre sportif adjacent qui est en construction, qui pourrait être disponible pour les élèves et qui répondrait d'ailleurs davantage à une clientèle jeune qu'à une clientèle adulte; clientèle jeune qui le fréquentera davantage que la clientèle adulte.

Alors, devant cette situation, M. le Président, devant la possibilité de relocaliser des adultes, je me suis dit: Est-ce qu'il n'y a pas une possibilité de voir à des transferts d'enfants dans certaines écoles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal pour aller vers l'Académie Shadd et libérer ainsi des écoles pour les enfants de Saint-Pascal-Baylon qui sont répartis à travers pas toute la ville, mais quasiment. Alors, ça n'aboutit jamais, tout ça. Démarche après démarche. Téléphones. Et, tout ce temps-là, j'essaie d'éviter qu'on vienne ici avec une loi. Parce que je trouve ça un peu inadmissible qu'on doive procéder de cette façon-là. Mais c'est toujours une fin de non-recevoir. Alors, je dirais que, en dernière instance, ne sachant plus quelle voie utiliser, voulant toujours éviter la loi, j'ai demandé à M. Thomas Boudreau, qui est un ancien sous-ministre à l'Éducation qui a toute la crédibilité voulue en ces matières, d'aller rencontrer les parties et de voir s'il n'y avait pas une possibilité de les faire cheminer vers soit cette solution ou une autre qu'ils auraient pu imaginer.

Il m'est revenu avec son rapport il y a une semaine pour me dire: Mme la ministre, il y a effectivement deux solutions. Il y en a une qui est celle que vous avez imaginée. Et là il la décrit très bien. Il dit: Des enfants occupent actuellement l'École Coronation. Ce sont des jeunes enfants anglophones desservis par la Commission des écoles protestantes. Ils pourraient, ces jeunes, se retrouver à l'Académie Shadd. Les adultes de l'Académie Shadd pourraient utiliser une autre école appartenant à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Et l'école Coronation ainsi libérée, nous pourrions y retrouver les enfants de Saint-Pascal-Baylon. Cette école est bien située dans le quartier et, avec des aménagements, de même que dans le cas de l'Académie Shadd, nous pourrions arriver à reloger tout notre monde en utilisant des places disponibles, en évitant la construction, à la satisfaction, en plus, des parents des enfants qui fréquentent l'école Coronation. Parce que, parfois, déplacer des enfants, les parents sont en désaccord, mais, dans ce cas-là, ils nous disent: Non, c'est plus intéressant l'Académie Shadd; il y a un centre sportif, il y a une possibilité pour nos enfants d'avoir accès à des services de qualité.

(22 h 50)

Alors, le médiateur, ou le conciliateur, ou la personne que j'avais désignée, soit M. Thomas Boudreau, me dit: Il y a deux solutions, il y a celle-là, Mme la ministre, ou il y a la possibilité d'une construction. Puis là il y avait la possibilité d'échange de terrains avec la ville, enfin, deux possibilités dans ce sens-là mais qui coûtent des sous, bien sûr, des investissements. Alors, la solution est apparue très clairement, et il m'apparaissait qu'il n'y avait plus d'autre avenue à utiliser que celle que j'ai choisie, M. le Président.

Alors, j'ai déposé ce projet de loi qui comporte la solution décrite mais qui comporte la possibilité, pour les deux commissions scolaires, de s'entendre. On n'exproprie aucun des édifices, propriété de l'une ou l'autre des commissions scolaires, M. le Président. On répond aux besoins des enfants. On évite les coûts de construction. Les gens me disent: Oui, mais, Mme la ministre, peut-être que, dans cinq ans, on devra construire parce qu'il y a une population en croissance. Bien, on construira dans cinq ans, M. le Président. On décidera dans trois ans, s'il y a lieu. Et, si on peut répondre maintenant aux besoins des enfants qui sont là, je crois qu'il est de notre devoir de le faire. En tout cas, si ce n'est pas du devoir de l'opposition, je pense que c'est du mien, M. le Président, comme ministre de l'Éducation. Et c'est ce que je fais avec le projet de loi qui est devant nous.

Des voix: Bravo!

Mme Marois: Et je termine en vous disant ceci: Je souhaite, et je le redis, je souhaite que les parties nous proposent une solution et nous évitent l'adoption ou nous amènent à faire en sorte que la loi que nous adopterons – parce que nous l'adopterons – soit caduque parce qu'on aura trouvé une autre solution. Si on ne trouve pas d'autre solution, on saura exactement quelle est la solution que j'appliquerai, puisqu'elle est au projet de loi qui est devant nous. Il n'y a donc pas de cachette. Ça a été fait en toute transparence.

Et maintenant je fais appel à l'opposition, à son sens des responsabilités, M. le Président. Je suis persuadée que le député de Marquette, qui connaît bien ce monde scolaire, qui le connaît à ce point bien qu'il a occupé une fonction de responsabilité à la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui sait très bien que la solution qui est là est une solution sage, est une solution intéressante qui répond aux besoins des enfants... Et, s'il croit que ça ne répond pas aux besoins des enfants, qu'il aille leur dire aux parents et aux enfants de Saint-Pascal-Baylon qu'ils pourront attendre encore trois ou quatre ans, faire promener leurs enfants à travers toute la ville et que ça coûtera 4 000 000 $ de plus aux contribuables du Québec. S'il trouve que ça a du bon sens, qu'il vote contre la loi et qu'il aille le dire aux parents, M. le Président!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Oui, amicalement, la ministre de l'Éducation accepterait-elle de consentir à une brève question? Non?

Alors, ça va, M. le Président. Je vous demanderais le consentement pour déposer, à ce moment-ci, une résolution adoptée ce soir par la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal avec le communiqué de presse qui l'accompagne. Il y a consentement?


Document déposé

Le Président: Il y a consentement, M. le député.

M. Ouimet: Alors, le dossier évolue rapidement, M. le Président, et j'ai le même objectif que la ministre de l'Éducation. J'ai eu l'occasion de lui dire privément.

Il faut trouver une solution pour les enfants de l'école Saint-Pascal-Baylon. Cependant, il y a toujours deux côtés à une médaille. La ministre vient de présenter les faits à sa façon. J'aimerais pouvoir les présenter de l'autre façon, M. le Président, de la façon qui m'a été présentée par les deux commissions scolaires.

Dans un premier temps, la CECM, en décembre 1994, a expédié une résolution et une demande formelle au ministère de l'Éducation, exposant les besoins pour le quartier Côte-des-Neiges en disant que nous avons besoin de places-élèves. Les réponses qui ont été fournies par le député de Lévis de l'époque et les fonctionnaires du ministère de l'Éducation ont été à l'effet que: Nous, on pense qu'il y a des espaces dans le quartier Côte-des-Neiges et on ne vous autorise pas la construction; allez voir chez la CEPGM. Ah! c'est facile, M. le Président. La CECM est allée voir la CEPGM. La CEPGM a répondu: Nous nous occupons chacune de nos écoles. Et ça, c'est tellement vrai que la ministre le reconnaît dans ses communiqués de presse. Elle dit qu'à l'école Coronation il y a 320 élèves qui sont dans cette école-là, elle a une capacité de 550. À l'école Shadd Academy, M. le Président, il y a également des élèves dans cette école-là.

Or, M. le Président, il m'est apparu soudainement que la ministre était à la recherche d'un bouc émissaire. Je suis heureux de voir qu'elle prend connaissance des documents officiels de la CEPGM, et elle constate le problème dans lequel elle se retrouve maintenant. Je pense qu'elle est d'accord avec moi, M. le Président. Elle a un problème et j'aimerais attirer la ministre de l'Éducation sur ce qui suit. La CEPGM est en train d'exercer ses droits constitutionnels en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés de la personne. Même si le projet de loi est adopté ce soir, M. le Président, ça ne donnera pas de solution pour les élèves de Saint-Pascal-Baylon. Parce que la ministre, en adoptant, en déposant un projet de loi spécial – et elle le savait fort bien – braquait la CEPGM. Parce qu'elle demande à la CEPGM: Vous avez 300 élèves dans une de vos écoles, on vous demande de prendre ces élèves-là, vous allez les transférer ailleurs. Ailleurs, c'est Shadd Academy. Là, vous avez des élèves, vous allez prendre ces élèves-là et vous allez les transférer ailleurs à l'école Marymount, indépendamment de la planification que vous avez faite, indépendamment du fait que vous avez investi un demi-million de dollars pour convertir l'école Shadd Academy pour en faire votre centre de formation professionnelle, avec les autorisations du ministère de l'Éducation, M. le Président.

Or, il y a un sérieux problème. Demain matin, les parents de Saint-Pascal-Baylon seront inquiets. Les parents de l'école Coronation seront inquiets aussi. Ils comprennent qu'il n'y a pas de solution. Ils comprennent que la ministre de l'Éducation, en déclarant la guerre à la CEPGM, qui va exercer fort probablement ses droits constitutionnels... J'ai pataugé dans ces dossiers-là depuis trois ans, je commence à voir ce qui se profile à l'horizon: ils vont vouloir exercer leurs droits en vertu de l'article 93 et de l'article 23 de la Charte canadienne. Je pense que c'est dans leurs intentions lorsque je lis leur résolution et lorsque je prends connaissance du communiqué de presse qui l'accompagne.

Or, M. le Président, il n'y aura pas de solution pour les parents de Saint-Pascal-Baylon, et c'est ça qui est notre objectif. Le rapport du médiateur – et la ministre, j'ai été content, ne l'a pas nié – lui proposait deux solutions, elle en a... Dans son projet de loi, qui devient caduc pour l'essentiel, il n'y en a qu'une seule de retenue. Et pourtant, la solution qu'elle retient, c'est une solution à très court terme, parce qu'elle sait comme moi que le quartier Côte-des-Neiges est un quartier en explosion sur le plan démographique. Les nouveaux arrivants se dirigent vers le quartier Côte-des-Neiges. Et d'année en année, depuis au moins les six dernières années, il manque d'espaces. La ministre propose des économies de bouts de chandelles et elle se fout éperdument de déplacer des élèves d'une école à l'autre, et elle le fait, ça a un effet de dominos.

(23 heures)

Or, M. le Président, c'est elle-même aujourd'hui qui disait qu'elle avait pleine confiance en l'autonomie des commissions scolaires sur le dossier du Lait-école. Et on va voir là aussi de graves problèmes, M. le Président, qui vont se manifester avec le genre d'autorisation qu'a émis le gouvernement du Parti québécois.

Mais revenons à notre problème. La ministre a admis qu'elle était prête à mettre 1 500 000 $ comme compensation monétaire pour payer les pots qu'elle va casser. C'est-à-dire une école a été transformée, elle doit être retransformée, les équipements doivent être transférés. Ça, c'est 1 500 000 $. Son médiateur lui dit: Avec votre participation financière de l'ordre de 2 000 000 $, on pourrait construire une école, trouver une solution – je tiens à le souligner – à long terme pour les problèmes de ce quartier-là. Et, M. le Président, la CEPGM est de bonne foi, elle va céder gratuitement un terrain pour la construction de cette école-là. Dans un deuxième temps, et c'est dans les programmes du ministère, le ministère, lorsqu'il y a des espaces excédentaires, va amener les commissions scolaires à vendre certaines écoles qui sont désaffectées lorsqu'on est face à des études démographiques qui démontrent qu'il n'y a aucune prévision de hausse de la clientèle.

Donc, M. le Président, quand la ministre dit: C'est impensable d'investir pour la construction d'une nouvelle école, je tiens à lui rappeler quatre choses. Premièrement, son engagement de mettre 1 500 000 $ qui serait de l'argent gaspillé parce que c'est de refaire ce qui a déjà été fait. Dans un deuxième temps, en 1995-1996, le ministère et le gouvernement du Parti québécois – tenez-vous bien – a autorisé 213 projets de construction et d'agrandissement d'écoles pour un coût total de – tenez-vous bien, M. le Président – 615 000 000 $. Troisièmement, la ministre, qui dit ne pas vouloir investir dans le béton, qu'est-ce qu'elle fait dans le dossier du cégep de l'Ouest-de-l'Île de Montréal? Elle va construire un nouveau cégep, même s'il y a un avis du Conseil supérieur de l'éducation qui lui dit: Vous n'avez pas besoin d'un nouveau cégep dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal. On commence à voir le double discours.

Le député de Lévis, on s'en souvient fort bien, alors qu'il était ministre de l'Éducation, il disait, il se pétait les bretelles: Pas question pour nous d'investir dans le béton. Qu'a-t-il fait – et je vois le député de Bellechasse, il va sûrement se rappeler du dossier? Il a pris une commission scolaire, qui s'appelait la commission scolaire Lévis-Bellechasse, et il a créé deux commissions scolaires: la commission scolaire de Lévis et la commission scolaire de Bellechasse. Combien ça a coûté, ça? Le ministre de l'Éducation de l'époque n'a jamais hésité à investir des fonds publics parce que c'était dans le comté du député de Lévis.

C'est ça qui est la réalité des choses, alors qu'ici on est face à un besoin criant, à un besoin important que le gouvernement et les deux ministres de l'Éducation n'ont pas traité. Ils se sont traîné les pieds. La ministre de l'Éducation se ramasse avec le problème aujourd'hui. C'est mon collègue le député de Mont-Royal qui l'a alertée au problème – ça a été une émission au Point – qui lui avait dit: Vous faites quoi, Mme la ministre? Ça fait un an et demi qu'on vous demande d'autoriser l'agrandissement ou la construction d'une école dans le quartier Côte-des-Neiges. Elle a trouvé un bouc émissaire. Elle a dit: Les deux commissions scolaires sont en chicane puis c'est la CEPGM qui est fautive là-dedans. Hé! M. le Président, il faut le faire!

On a vu ce que le président de la CECM a dit, Michel Pallascio. Et je cite un article du Devoir du 14 décembre dernier. La ministre de l'Éducation déclarait: «Il y a toujours eu des conflits entre les deux commissions scolaires». Ah! on trouve un bouc émissaire. On pointe du doigt les deux commissions scolaires et on dit: Elles sont en chicane. Or, ce que le président de la CECM a rétorqué... Et c'est une solution qui le favorise, mais il a quand même voulu rétablir les faits et dire la vérité, il a dit... «Le président de la CECM, Michel Pallascio, ne reconnaît pas cette mésentente – et je le cite: "Ce n'est pas une querelle entre deux commissions scolaires, il s'agit plutôt d'une divergence entre la ministre de l'Éducation et la CEPGM."» C'est de ça qu'il s'agit, M. le Président, d'une guerre entre la CEPGM et le ministère de l'Éducation.

Malgré tout ça, malgré le projet de loi spécial et malgré le fait que j'avais dit à la ministre de l'Éducation: Vous avez mon entière collaboration, c'est un domaine que je connais bien, j'ai parlé aux deux parties, tenté de les rapprocher également pour voir s'il n'y avait pas lieu de s'entendre sur la place d'une construction... Et là j'ai été très heureux de constater que, dans le rapport du médiateur, il y avait une solution, M. le Président, il y avait une des deux hypothèses que la ministre n'a malheureusement pas retenues. Et c'est à la page 12 du rapport du médiateur. La ministre en a très peu parlé. Je cite le rapport du médiateur Thomas Boudreau, ancien sous-ministre à l'Éducation: «Ces deux hypothèses de construction sont considérées intéressantes par les deux directeurs généraux qui acceptent alors de les soumettre à leur conseil des commissaires.» Et là, parmi les deux, il y en a une qu'ils privilégiaient davantage.

Pourquoi la ministre de l'Éducation a-t-elle attendu si longtemps? Pourquoi le gouvernement s'est-il traîné les bottines dans ce dossier-là? Et c'est le cas, elle ne peut pas le nier, M. le Président. J'avais indiqué aux ministres de l'Éducation, à deux reprises différentes, en avril 1995 et en janvier 1996: Vous avez un problème dans Côtes-des-Neiges et vous avez un problème dans Rivière-des-Prairies, qu'attendez-vous pour régler ce problème-là? Ils ne s'en sont pas occupés, M. le Président, et aujourd'hui on se retrouve avec le problème. Là, c'est pas mal gênant pour la ministre de l'Éducation. La solution qu'elle et son cabinet, je suis convaincu, ont trouvée: Ça nous prend un bouc émissaire, ça prend ce que les anglophones appellent «a fall guy». We will use the Protestant Schoolboard of Greater Montréal as our fall guy, it's their fault. C'est la faute de la CEPGM. Pourtant, dans tous les autres dossiers... Et je vous ai indiqué, M. le Président, qu'ils en ont autorisé 213, projets, en 1995-1996, pour un montant totalisant près de 615 000 000 $.

Une des commissions scolaires est prête à céder son terrain gratuitement. Les deux D.G. disent: Ce sont des solutions intéressantes, la construction, ça va répondre au problème à long terme. La solution de la ministre de l'Éducation, elle le sait parce qu'elle l'admet dans son propre communiqué distribué le 13 décembre dernier... Elle dit: Il va falloir réévaluer la situation. Parce qu'elle le sait, je le sais, nous le savons tous: c'est un quartier où la tendance démographique démontre qu'il y a des besoins de places-élèves. Pourquoi ne pas y répondre, ce serait tellement plus simple? Et je fais appel au sens des responsabilités de la ministre si elle ne veut pas se retrouver dans un débat judiciaire devant les tribunaux, parce que c'est ça qui se prépare. La ministre, j'ai voulu qu'elle ait l'information ce soir pour que, lorsque nous allons faire l'étude du projet de loi, elle puisse parler en connaissance de cause. Elle a une résolution qui a été adoptée ce soir unanimement par le Conseil des commissaires de la CEPGM, et on voit exactement ce qui va se profiler.

Donc, la guerre que livre la ministre de l'Éducation à une commission scolaire anglo-protestante, ce sont les élèves de Saint-Pascal-Baylon qui vont en faire les frais, ce sont eux qui seront pris en otage. La position de la CECM a toujours été extrêmement claire: On n'a aucune querelle, nous, CECM, avec la CEPGM. Le président le dit lui-même dans Le Devoir , c'est la ministre de l'Éducation qui a une mésentente avec la CEPGM. M. le Président, que la ministre m'invoque un seul précédent. Depuis quand est-ce qu'on sort 300 élèves du primaire d'une école pour faire de la place à 500 élèves? À travers la province de Québec, je n'ai jamais vu ça.

(23 h 10)

Pourquoi la ministre s'acharne-t-elle et pourquoi son gouvernement s'acharne-t-il sur la minorité linguistique anglophone de cette façon-là, en les dépossédant de leurs biens? Et la réaction que ça provoque – c'était écrit dans le ciel, M. le Président – c'est que la CEPGM va se défendre, va invoquer ses droits constitutionnels en vertu de l'article 93 de la Constitution et de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, où elle va exercer la gestion et le contrôle de ses écoles. Et, si la ministre veut toucher à ça, elle va se retrouver devant les tribunaux. La guerre sera prise devant les tribunaux, ça va coûter extrêmement cher en frais d'avocats. Mais, ceci étant dit, les élèves de Saint-Pascal-Baylon, quant à eux, n'auront toujours pas de toit, et ça, parce que la ministre refuse une construction d'école.

Et en vertu de quel principe? Peut-elle me déposer une étude ce soir qui démontre le nombre de places-élèves dans le quartier Côte-des-Neiges? Peut-elle me déposer les études démographiques? Parce qu'elle le sait, tout comme moi, qu'il va y avoir des besoins urgents d'au moins 900 places-élèves dans deux ans ou dans trois ans. Elle le sait, c'est un fait reconnu. Pourquoi choisit-elle cette solution à court terme? Ça aurait été beaucoup plus facile de permettre aux parties, dans le projet de loi spécial qui est déposé ce soir... de dire: Vous avez deux solutions possibles, choisissez entre les deux. Mais il y en a une, mon médiateur me dit: Les deux commissions scolaires sont d'accord avec celle-là. Oui, ça va coûter un demi-million de dollars.

M. le Président, en 1995-1996, 213 projets, 615 000 000 $. Jamais personne n'a dit quoi que ce soit. Le député de Lévis, d'une commission scolaire, il décide d'en faire deux. Le cégep de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, la ministre décide de l'annoncer, investissement dans le béton. Où est son discours qu'elle nous tient ce soir en disant: Ça n'a pas de bon sens qu'on mette 4 000 000 $ pour construire une école pour des enfants au niveau primaire? Il faudrait qu'elle aille voir également les écoles dans le quartier Côte-des-Neiges, l'état délabré de certaines écoles, délabré parce que, M. le Président, avec les compressions budgétaires que connaissent les commissions scolaires, et c'est l'Association des directeurs et directrices généraux des commissions scolaires qui l'a dit à la ministre de l'Éducation, on ne peut plus entretenir nos bâtiments, on n'a plus les moyens, et les immeubles sont en train de périr et de dépérir.

Alors, M. le Président, j'espère que la ministre va réfléchir à la situation dans laquelle elle va placer 600 jeunes élèves du primaire de l'école Saint-Pascal-Baylon si elle s'entête à vouloir braquer la CEPGM. Elle a sa réponse ce soir: Vous avez déclenché les hostilités, ils vous déclarent la guerre, M. le Président. C'est exactement ça, ils vous déclarent la guerre, et vous allez vous retrouver devant les tribunaux assez rapidement et vous n'aurez pas trouvé de solution pour les élèves de Saint-Pascal-Baylon. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Marquette. M. le député de Hull.


M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous, M. le Président, un projet de loi, le projet de loi n° 87, qui concerne les conditions d'utilisation d'immeubles d'une commission scolaire protestante du Grand Montréal par les élèves de la Commission des écoles catholiques de Montréal. J'écoutais le député de Marquette donner des arguments à la ministre et il me semble que les arguments étaient assez clairs. Je suis convaincu que, si le Barreau avait été appelé à regarder ce projet de loi là, possiblement qu'on aurait eu encore un avis informant le gouvernement qu'il fait fausse route, qu'il s'enlise probablement dans des débats juridiques interminables.

Et la ministre, lorsqu'elle nous a présenté ce projet de loi tantôt, M. le Président, au début de son allocution, elle se disait choquée parce qu'il n'y avait pas eu de solution puis qu'on essayait d'en trouver depuis deux ans puis qu'on n'en trouvait pas. Elle disait: Qu'on m'apporte n'importe quelle solution acceptable, et je signerai tout de suite. Elle a fait quoi, elle, depuis deux, trois ans dans le dossier, si ce n'est que d'envoyer un émissaire, un ex-sous-ministre pour tenter de trouver des solutions acceptables par les deux parties?

Le sous-ministre en question ou l'ex-sous-ministre en question lui a fait des suggestions, entre autres de construire une école. Ça coûtait 2 000 000 $, une école. Ça n'a pas de bon sens, 2 000 000 $! On n'a pas d'argent pour payer une nouvelle école, ça n'a pas d'allure! Mais des référendums, ça on en a, du fric! Inquiétez-vous pas. À coups de 100 000 000 $. Il n'y a rien là puis il n'y a rien de trop beau. On sait d'avance qu'on les perd, ça ne fait rien. Un jour viendra, il y aura une catastrophe qui fera en sorte qu'il y aura des gens qui n'iront pas voter ou quelque affaire de même, puis ça va passer.

M. le Président, elle, la ministre, a trouvé la solution au problème des deux commissions scolaires. Et sa solution, on la retrouve dans le projet de loi. Elle est tellement bonne, sa solution, qu'elle va la leur imposer par une loi. Elle a la solution, l'infaillible ministre de l'Éducation. Si elle est si bonne, sa solution, pourquoi est-ce qu'elle ne va pas la présenter aux commissaires des deux commissions scolaires et aux parents des deux commissions scolaires? Ces gens-là doivent être moyennement intelligents, ils devraient être capables de comprendre un petit peu c'est quoi, sa solution à elle.

M. le Président, ça m'inquiète. Ça m'inquiète beaucoup. Je suis inquiet de voir de quelle façon la ministre traite les commissions scolaires. Parce qu'il n'y a pas juste dans le Greater Montreal puis dans le Grand Montréal qu'il y a des commissions scolaires, il y en a à travers la province. Et des écoles, il y en a à travers la province. Et des problèmes d'écoles, il y en a à travers la province. Puis j'en ai eu dans mon comté, M. le Président, qui est la ville de Hull. On en a démoli, des écoles, parce qu'elles étaient désuètes, puis on en a construit d'autres, écoles. C'est quoi, le problème de construire des écoles? 2 000 000 $, comparativement à 100 000 000 $ pour un référendum, pour des enfants. On sait que, lorsque les enfants ne sont pas bien localisés, ils ne captent pas bien, et l'éducation mal partie risque de finir mal également. Pourquoi est-ce qu'on s'acharne à faire en sorte que ces jeunes-là ne pourraient pas avoir des locaux convenables pour étudier?

M. le Président, j'entendais parler à travers les branches – peut-être que c'est le début qui s'en vient – que le gouvernement en place, pour ne pas dire un gouvernement de dictateurs... On ne peut pas dire ça, M. le Président. Par contre, je pense que la démocratie en prend pour son rhume depuis quelques jours, ici. D'ailleurs, le Protecteur du citoyen nous l'a dit dans une lettre, hier. J'ai l'impression que ce gouvernement-là tente de faire sauter les commissions scolaires.

Vous m'indiquez, M. le Président, que mon temps est presque écoulé. J'aimerais tout simplement vous faire penser que, lorsque l'on s'insurge dans les affaires des autres gouvernements subalternes, qu'ils soient municipaux ou des commissions scolaires, je pense qu'il n'est pas sage d'imposer une décision par l'entremise de l'Assemblée nationale lorsque les commissions scolaires pourraient facilement régler leurs problèmes ou les dilemmes qu'il pourrait y avoir entre les deux commissions scolaires. Des solutions, ça se trouve. Elle en a trouvé une et elle l'a mise dans sa loi. Comme je vous le mentionnais tantôt, si c'est bon, qu'elle aille leur expliquer. Ces gens-là sont aussi intelligents qu'elle. Si c'est bon, ils vont le comprendre; puis, si ce n'est pas bon, ils vont le lui dire puis ils vont lui dire quoi changer dans son projet de loi.

Mais ça ne presse pas de passer ça, là. Qu'elle aille donc leur expliquer puis elle reviendra au printemps. D'ici ce temps-là, qu'elle pense donc que son référendum, le prochain sur l'indépendance, il va prendre encore plusieurs années. Sur le 100 000 000 $ qu'ils sauveraient là, qu'elle en prenne donc 2 000 000 $ puis qu'elle en construise donc une, école. M. le Président, moi, je vais voter contre ce projet de loi là.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de l'Acadie, maintenant.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. On a aujourd'hui, à l'intérieur du bâillon que nous a réservé le leader du gouvernement, un projet de loi qui vise essentiellement à obliger la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques de Montréal à conclure une entente permettant à la Commission des écoles catholiques de Montréal d'établir une école dans un immeuble qui appartient à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal.

(23 h 20)

M. le Président, la première question que je me suis posée en voyant qu'on incluait ce projet de loi à l'intérieur du bâillon, c'est la question de l'urgence. Il faut rétablir peut-être un certain nombre de faits. Le gouvernement et la ministre étaient au courant du problème qui existe depuis décembre 1994. M. le Président, ça fait deux ans que la ministre est au courant du problème, que le problème lui a été mis sur la table. Il y avait eu à ce moment-là, à l'origine, une demande pour la construction d'une école de la part de la CECM. En mars 1995, le ministère refuse. Alors, on voit bien qu'à ce moment-là, il y a plus d'un an et demi, le ministère était au courant que le problème était complet, demeurait sur la table. Il se passe deux ans pratiquement depuis que le problème a été soumis, et on nous dépose, le 13 décembre dernier, un projet de loi où, là, il y a urgence, un projet de loi qui a quand même des dimensions importantes, dans le sens qu'on touche à toute la question des droits de gérance et du respect de l'autonomie des commissions scolaires et des relations qui doivent exister entre ce niveau de gouvernement et le gouvernement du Québec.

Alors, je pense qu'on se lance dans un problème qui est relativement complexe. Et pourquoi, tout d'un coup, on s'est réveillé à la fin et là on se lance un peu partout, dans toutes sortes de directions, pour trouver des solutions? C'est qu'il y a eu une émission Le Point , alors évidemment ç'a remis sur la table le problème. Et mon collègue le député de Mont-Royal a posé une question, début décembre, sur ce sujet-là. Avant ça, M. le Président, le dossier dormait. Alors, il y avait un laxisme, un laisser-aller autour de ce dossier-là, qui nous laisse aujourd'hui voir beaucoup d'improvisation dans le dossier. On essaie de trouver des solutions, malheureusement, en essayant de monter certains partenaires du milieu scolaire contre d'autres partenaires du milieu scolaire. Et je pense que ce n'est pas la façon de régler ce genre de problème là. Mais c'est quelque chose auquel le gouvernement est habitué, ça, diviser pour régner.

Et là la ministre est ressortie de tout ça et s'est trouvé un bouc émissaire, c'était la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Et le problème était un problème de chicane soi-disant entre la CECM et la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Là-dessus, c'est très clair que le président de la CECM disait, dans un article qui nous est rapporté: «Ce n'est pas une querelle entre deux commissions scolaires; il s'agit plutôt d'une divergence entre le ministère et la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal.»

Alors, essentiellement, pourquoi on se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi inclus dans le bâillon? Étant donné l'importance du projet de loi, du précédent que ça crée, du fait que le gouvernement, la ministre savait depuis deux ans qu'il y avait un problème, pensez-vous, M. le Président, qu'on n'aurait pas pu amener ce projet-là plus tôt, si c'était une solution qui pouvait être envisagée? Qu'on aurait pu discuter, qu'on aurait pu amener ce projet de loi plus tôt, qu'on aurait pu le discuter en commission parlementaire avec les intervenants, pour qu'on ait la possibilité d'analyser toutes les facettes du problème et toutes les alternatives du problème? Parce qu'il y a des facettes à ce problème-là qui sont importantes, dont on doit tenir compte dans la solution à moyen et à long terme, c'est toute la question de l'évolution démographique dans le quartier Côte-des-Neiges. Alors, on aurait pu avoir un portrait de ça et être en mesure de mieux évaluer quelles étaient les actions appropriées que le gouvernement devait prendre.

On aurait pu également évaluer la question de la construction versus des échanges entre écoles ou la possibilité d'utiliser certains terrains qui sont vacants actuellement. Mais non! On attend à la dernière minute et on nous met ça sur la table, et là, maintenant, tout est urgent. Et je veux prévenir la ministre que, malheureusement, je pense qu'elle ne sera pas au bout de ses peines, parce que la ministre aura probablement à revenir en arrière étant donné que les gens de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal considèrent, en toute bonne foi, qu'ils ont besoin de cette école. Et je réfère, ici encore, à une déclaration du président, M. Butler, de la CEPGM, qui faisait valoir que «le dépôt d'une loi nuit à la planification avec le processus de consultation de ces parents et ne règle aucunement le problème à long terme, puisque les prévisions de la CEPGM font état d'une augmentation de son secteur français au cours des prochaines années».

Alors, M. le Président, on voit le résultat de ça, c'est que les gens nous disent: Si on est rendu qu'il faut défendre nos droits constitutionnels, c'est-à-dire des droits qui existent en vertu de la Charte, bien on est rendu devant les tribunaux. Et c'est la résolution qu'on nous a annoncée ce soir, où on nous dit: On a besoin de nos locaux et on ira se défendre devant les tribunaux. Mais malheureusement, M. le Président, la ministre sera probablement obligée de faire comme elle a fait dans le cas des commissions scolaires linguistiques, revenir en arrière, et comme elle a fait dans le cas du dégel des frais de scolarité, sous la pression du milieu, revenir en arrière encore. Elle aurait dû y réfléchir avant.

Une voix: Bravo!

Le Président: Merci, M. le député de l'Acadie. Mme la députée de Saint-François.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. M. le Président, la ministre croit qu'avec son projet de loi elle va pouvoir régler un problème qui traîne sur sa table de travail depuis maintenant deux ans. Ce projet de loi, M. le Président, vise à solutionner une situation conflictuelle mettant en cause les deux plus importantes commissions scolaires du Québec, à savoir la Commission des écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, dont les territoires sont superposés. En somme, non seulement le territoire est superposé, mais il est aussi surpeuplé, et, là où il y a explosion démographique, il est largement composé d'immigrants, c'est-à-dire de nouveaux arrivants.

M. le Président, tout à l'heure la ministre nous disait que les solutions qui avaient été proposées avaient été rejetées par les parents et que, même si, suite à des pressions, la CECM devait demander au ministère de l'Éducation l'autorisation de construire une nouvelle école, le ministère refuse en invoquant bien sûr la disponibilité des locaux à la CEPGM. De son côté, M. le Président, cette commission scolaire soutient que ses écoles sont remplies ou presque et, par conséquent, qu'elle doit s'occuper de sa clientèle avant de permettre une utilisation de ses locaux par la CECM.

Je tiens à souligner, M. le Président, que la ministre s'en vient également avec un autre projet, celui de ses maternelles cinq ans. Mais est-ce que la ministre a fait un inventaire, est-ce que la ministre a évalué les espaces disponibles pour mettre en application ces maternelles cinq ans? En obligeant, par exemple, une commission scolaire à céder une école à une autre commission scolaire, est-ce qu'elle rend service à cette commission scolaire, puisqu'elle arrivera en septembre prochain et elle demandera à ces mêmes commissions scolaires des espaces pour pouvoir créer ces maternelles cinq ans?

M. le Président, j'entendais la ministre, dans ses remarques préliminaires, je ne sais pas si c'est tout simplement une erreur, mais elle disait: S'il y a une entente – c'est ce qu'elle souhaite – entre les deux commissions scolaires, il n'y aura pas de projet de loi. Mais, M. le Président, on est en train de voter un projet de loi. C'est un projet de loi qui est ici. M. le Président, je vous réfère à l'article premier, il est bien mentionné que «la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques de Montréal doivent s'entendre afin de permettre à la Commission des écoles catholiques de Montréal d'établir une école dans l'immeuble décrit à l'annexe I». Là, M. le Président, on ne laisse pas le choix à la commission scolaire. Si on vérifie ce qu'on mentionne à l'annexe I, ça fait référence à un immeuble qui est situé au numéro civique 4810, avenue Van Horne, à Montréal, et à l'immeuble situé au numéro civique 1100, Côte-Saint-Luc, à Montréal et occupé par l'école établie par la Commission des écoles catholiques de Montréal et portant le nom de Marymount Academy.

Mais c'est très précis dans le projet de loi, M. le Président. On ne dit pas à la commission scolaire: Essayez de vous entendre, là. On dit: Essayez de vous entendre, mais sur quelque chose que j'ai décidé à l'avance. Parce qu'on identifie des immeubles. Vous n'avez pas le choix, dans le projet de loi, on vous indique sur quel immeuble l'entente devra porter. Et, en plus de ça, M. le Président, avec l'épée de Damoclès, le couteau sous la gorge, parce que, si vous ne vous entendez pas, de toute manière le projet de loi est passé. Moi, comme ministre, bien sûr, je serai capable de prendre les décisions à votre place. Comme on le mentionne ici, c'est que l'entente doit être approuvée par le ministre: «Si la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques de Montréal n'ont pas soumis au ministre une entente au plus tard le 20 janvier 1997, ou que celle-ci n'a pas alors été approuvée, les conditions d'utilisation des immeubles décrits aux annexes I et II peuvent être déterminées par le ministre.»

(23 h 30)

M. le Président, c'est un autre projet de loi qui nous est apporté ici, en Chambre, à la toute dernière minute. J'entendais la ministre, M. le Président, nous parler tout à l'heure avec beaucoup d'émotion dans la voix. Elle nous disait qu'elle ne pouvait pas obliger la population du Québec à payer de 2 000 000 $ à 4 000 000 $ pour la construction d'une nouvelle école. Mais, moi, M. le Président, je voudrais lui rappeler que son gouvernement, le Québec a dépensé, il y a environ un an, près de 100 000 000 $ pour des commissions régionales sur la souveraineté du Québec, pour des études Le Hir qui ont été jetées au panier, pour un grand happening au Grand Théâtre. Le référendum, M. le Président, a tout simplement divisé la population québécoise comme, par exemple, ce projet de loi va également braquer et diviser deux commissions scolaires, M. le Président.

Le Président: M. le député...

M. Jolivet: M. le Président, l'alternance. Je n'ai pas le droit de parler?

Le Président: Ah oui! vous avez le droit, bien sûr. Je m'excuse.

M. Jolivet: Merci.

Le Président: Alors, M. le député de Laviolette.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je suis un peu surpris, ce soir, d'entendre une ex-ministre des Finances nous parler comme elle vient de le faire. Je comprends bien qu'elle a une commande de son parti de venir parler cinq minutes sur un projet de loi comme celui-là, mais j'aimerais lui faire remarquer, M. le Président, que la ministre a bien dit: J'ai tout essayé – au moment où elle a pris le titre de ministre de l'Éducation – pour faire entendre les gens. Donc, voilà un an. Indépendamment de ce que disent d'autres députés, le député de Hull qui disait n'importe quoi et qui indiquait «depuis deux ans, deux ans et demi»... Écoutez, la ministre est là depuis un an. Il ne faut pas dire n'importe quoi, ici, en cette Chambre. Ça, c'est la première des choses.

La deuxième, c'est qu'au moment où elle l'a pris, elle a essayé par tous les moyens nécessaires d'arriver à un compromis permettant aux deux commissions scolaires d'avoir une entente. Elle n'a pas réussi jusqu'à maintenant. Elle sait très bien qu'en se donnant ce soir le projet de loi qu'elle dépose elle permettra, j'en suis assuré, que les négociations perdurent et se terminent à un moment donné. Et elle dit: Dans ces circonstances-là, si une entente intervient et pour laquelle je donnerai mon approbation, il est évident que le projet de loi deviendra caduc, ne sera pas nécessaire, mais, malheureusement, si, par hasard, d'ici telle date ça n'a pas lieu, le projet de loi deviendra donc en application et j'appliquerai la décision que je propose dans le projet de loi.

Juste un exemple, M. le Président, quand on parle de gaspillage, je vais le prendre à partir d'un exemple que j'ai chez moi, que j'ai vécu chez moi. Il y a une bâtisse qui s'appelle le centre hospitalier Saint-Joseph, à La Tuque. Des locaux disponibles, monsieur, en voulez-vous, en voilà. Pendant ce temps-là, le directeur du centre hospitalier demande au gouvernement de l'époque, libéral, d'utiliser, parce qu'on devait retransférer le CLSC quelque part, les bâtiments disponibles et en même temps en profiter pour amener les gens du secteur de soins prolongés dans la même bâtisse. Le gouvernement libéral refuse, décide de donner à son chum Tommy D'Errico en partie, Devesco Limitée, une bâtisse du domaine de ce qu'on appelle l'école des Indiens, à La Tuque, et puis ça, c'est clé en main avec un contrat de 20 ans, gaspillage d'argent éhonté alors que le gouvernement possède lui-même, par le ministère des Affaires sociales, des bâtiments pour ce faire.

Et voilà, une chance qu'on a plus de voix, M. le Président, une chance que dans le projet qui était... l'entente de 20 ans, il y a une clause permettant de rediscuter de cette clause. Et qu'est-ce qu'on a fait, nous, comme gouvernement, avec le ministre des Affaires sociales, dans le contexte du regroupement? Bien là, on a une entente qui vient d'intervenir, où les bâtiments vont être fermés et Tommy D'Errico restera avec ses bâtiments. Ça ne nous regardera plus, on ne paiera plus tant par année pour ces bâtiments-là et on va rapatrier à la fois les soins prolongés et le CLSC dans le bâtiment et ça va devenir un centre de soins de santé et de services sociaux dans la ville de La Tuque, M. le Président.

C'est de même qu'on sauve de l'argent. C'est de même qu'on permet à des gens d'occuper ce qui appartient d'abord à l'État. On a deux commissions scolaires à Montréal qui ne s'entendent pas. Ça adonne qu'il y en a une qui est du côté protestant et l'autre du côté catholique, puis il y a des utilisations qu'on pourrait faire, correctes, raisonnables. Je ne vois pas comment l'ex-ministre des Finances viendrait, elle qui, avec le premier ministre de l'époque et chef de l'opposition à ce moment-ci, a fait 5 500 000 000 $ de déficit, nous faire la leçon et puis nous dire qu'on va gaspiller encore de l'argent alors qu'on est capable d'utiliser convenablement, raisonnablement des locaux disponibles, M. le Président.

Alors, je ne vois pas en quoi l'opposition... Ils prendront bien ces cinq minutes comme ils le veulent... on voit bien qu'ils ont l'intention de les utiliser, mais, au moins, les gens qui nous écoutent comprendront que l'état actuel des finances publiques permet à la ministre d'agir comme tel pour faire en sorte que les commissions scolaires dans les deux cas utilisent au meilleur les bâtiments qu'elles possèdent au profit des étudiants, M. le Président, et des jeunes.

Le Président: Merci, M. le député de Laviolette. M. le député de Nelligan maintenant.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai voulu faire une intervention aussi ce soir sur le projet de loi n° 87 qui a le titre Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Je voudrais renommer ce projet de loi, c'est la déclaration de guerre de la ministre de l'Éducation contre la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Je pense que c'est clair et simple et je pense que le député de Marquette a expliqué ça comme il faut.

M. le Président, c'est le troisième bâillon ce soir – c'est une journée triste dans l'histoire démocratique de la province de Québec – troisième bâillon sur un projet de loi pour lequel nous n'avons pas une chance de faire un débat sur le principe. Je pense que, de plus en plus, c'est la stratégie de ce gouvernement d'essayer de bâillonner leurs bancs en arrière mais aussi l'opposition et toute la société québécoise. Ce projet de loi, cette déclaration de guerre est un autre exemple de la marque de commerce de ce gouvernement. Cette marque de commerce, il pratique une politique de division, politique de confrontation; il ne sait pas comment agir dans une façon de trouver un consensus. Un exemple après l'autre, il y a une stratégie de confrontation. C'est pur et simple ici, dans cette déclaration de guerre, cette confrontation.

Je voudrais expliquer un peu pourquoi, M. le Président. Nous avons – peut-être que ce n'est pas important pour le côté ministériel – les commissions scolaires avec le pouvoir bel et bien partagé dans la constitution, comme le député de Marquette a déjà mentionné. Lui, il a cité des articles, juste quelques-uns, pour la communauté d'expression anglaise: 93 «in the BNA Act» et aussi 83 dans la Charte, qui donnent une certaine protection pour la communauté d'expression anglaise et aussi pour les commissions scolaires.

The concept of control and management is fundamental to the protection of minority rights. And, in this law, it is clearly going against that fundamental concept. This is an example of a minister that is wanting to spend a lot of time in courts. This will be challenged, this will be challenged by everybody legally because I believe this goes far beyond those basic fundamental concepts of control and management.

This is how this Government treats the English-speaking community. There are 300 students in that school, 300 students in their school, in the Protestant School Board, their school, 300 students. It's not an empty building. And the Minister says: Get out! Time to move on! This is expropriation, Mr. Speaker. The Minister may not want to call it expropriation, and maybe, legally, it's not exactly expropriation, but de facto, when you're throwing somebody out, you're taking control of something, that's expropriation. I think it's very clear.

This is how the Government treats the English-speaking community: closes our hospitals, closes our schools, takes over our schools, says that people can't speak our language, tries to take off English office signs, spends money, 5 000 000 $ on tongue troopers, on Bill 40, 5 000 000 $. Why don't you take that money and put it in education?

Mr. Speaker, it seems to me, if you want to be responsible, you're gonna spend your money on education versus on this kind of expenditure that doesn't help anybody. Who pays for this strategy of confrontation? Is it you or is it me? No, it's the students. It is those students, those 300 students and other students that are being held hostage by this Government, held hostage because the Minister has declared war on the PSBGM. She has decided that that's her next victim, the PSBGM. She has decided to find a scapegoat, a target, to confuse everybody and pretend this is a battle between the CECM and the PSBGM. It isn't! It's between her and the PSBGM. And who is paying the price? The students.

You know, I have the same problem in my riding, the French-language «cégep» that I was very proud that we announced. La ministre a décidé qu'il y avait une guerre entre le PLQ et le ministère de l'Éducation dans le cas d'un cégep francophone. Qui paye pour cette guerre maintenant? C'est les élèves encore une fois. Parce que, dans ce bel exemple, nous avons eu un projet annoncé, 5 000 000 $ encore. Elle est arrivée avec un projet beaucoup plus cher que ça. Voilà un exemple. Si la ministre veut vraiment construire quelque chose, qu'elle trouve, au moins qu'elle essaie de montrer qu'elle est capable de trouver de l'argent pour ça. J'ai mes doutes dans cet exemple. Mais qui paye pour ça? Encore les étudiants.

M. le Président, le gouvernement a de l'argent quand il veut avoir de l'argent. Ils ont caché 19 000 000 000 $ pour leur option sur la séparation; ils ont gaspillé des millions pour l'option sur la séparation. Mais, pour l'éducation, elle a décidé qu'elle n'avait pas assez d'argent. Je trouve ça inacceptable. J'espère que tous les députés vont voter contre ce projet de loi. Nous n'avons pas besoin d'une déclaration de guerre contre la communauté d'expression anglaise, contre le PSBGM. J'espère que tout le monde va accepter notre proposition et voter contre ce projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.

(23 h 40)

Le Président: M. le député d'Argenteuil, maintenant.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci, M. le Président. C'est la troisième occasion aujourd'hui où on doit se lever en Chambre parce que le gouvernement nous a imposé un bâillon. Il semble que ce soit dans les habitudes de ce gouvernement d'arriver avec des stratégies de confrontation. Confrontation en Chambre parce qu'on nous impose le bâillon; on nous enlève nos droits démocratiques de nous exprimer pour les citoyens que l'on représente. Chaque comté a élu un député. Dans mon comté, j'ai 45 000 électeurs qui m'ont donné comme mandat de les représenter. Aujourd'hui, on fait une confrontation, on nous empêche de nous exprimer.

La négociation dans le secteur public, encore un affrontement potentiel. Le conflit entre la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques, encore un affrontement. Contrairement à ce que le député de Laviolette nous disait tantôt, qu'il avait un bel exemple pour démontrer comment ça pouvait se passer dans son comté, bien, moi, je lui dis: C'est vrai. Le député a tout à fait raison. C'est la négociation qui a fait qu'ils en sont arrivés à une entente. Ils se sont entendus ensemble pour fusionner leurs regroupements. Là on leur dit: Vous n'êtes pas capables de vous entendre? on va vous légiférer. M. le Président, est-ce que c'est comme ça qu'on entend régler tous les conflits dans notre province? Si c'est ça qui nous attend puis si c'est ça la nouvelle façon de gouverner, à coups de législations, c'est très inquiétant. Laissez-moi vous dire que je n'aurais jamais envisagé qu'on puisse gouverner de cette façon-là dans une société démocratique.

Je peux comprendre la ministre quand elle me dit: Écoutez, ça fait juste neuf mois... Elle nous disait un an tantôt, ça ne fait même pas un an qu'elle est là. Je peux comprendre qu'elle n'a peut-être pas eu le temps. Mais, lorsqu'on parle d'un gouvernement, il doit y avoir une certaine continuité là-dedans. S'ils ne sont pas capables de se suivre puis de continuer ce qui a été mis en place, ils ont un problème. Si, à chaque fois qu'on change de ministre, on change de politique, on ne suivra jamais. Puis c'est peut-être ça qui arrive. Alors, Dieu nous garde qu'ils se mettent à changer de ministre à tous les six mois, parce qu'on va changer de cap à tous les six mois. Ça va être inquiétant.

Depuis le mois de décembre que ce problème-là est sur le bureau du ministre ou de la ministre. Je peux comprendre, si l'autre ministre ne l'a pas réglé, elle n'a pas à prendre tout le blâme. J'accepte ça. Je comprends qu'elle travaille très fort. Je suis prêt à accepter tout ça, qu'elle fait un beau travail sur certains aspects. On accepte ça. Mais, M. le Président, il ne faut quand même pas qu'elle passe des législations à chaque fois qu'il y a un conflit. À chaque fois qu'il y a une petite affaire de travers, elle va nous arriver avec une loi? Qu'elle prenne son temps. Qu'elle laisse les gens négocier, laissez les deux commissions scolaires négocier entre elles. Elles vont trouver le problème. Ça fait deux ans? Ça prendra deux ans et demi. Mais, au moins, on aura la paix plutôt que la guerre.

Une voix: Ah, Mon Dou!

M. Beaudet: Le ministre nous dit: Ah, Mon Dou! Mais, son nom, ce n'est pas Mondoux!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Beaudet: M. le Président, le ministre devrait prendre ça au sérieux. Ha, ha, ha! On peut bien badiner, M. le Président...

Le Président: Je vais vous donner une chance, M. le député, de reprendre le fil. Merci, M. le ministre de votre collaboration. Alors, M. le député d'Argenteuil.

M. Beaudet: Merci, M. le Président, de votre aide, d'être venu à mon secours. Le ministre semble prendre ça de façon badine, mais ce n'est pas badin quand on commence à passer des lois pour toutes sortes de problèmes de commissions scolaires pour une école. On s'en va où, M. le Président, comme société? On s'en va où? On va légiférer pour toutes sortes de choses, de banalités. Il faut que ça arrête, M. le Président. D'autant plus que la loi va probablement donner raison à la commission scolaire protestante. Puis là on s'en va en cour. Puis, nous, les dindons de la farce, on va payer les avocats des deux bords. C'est encore plus beau, M. le Président. C'est encore plus joli comme attitude et présentation dans le futur. C'est ça qu'on donne comme marque de respect des structures qu'on a mises en place, d'une part. Puis, d'autre part, si on nous parle d'économie, puis qu'on a de la difficulté sur le plan économique actuellement, on va s'en aller s'engager dans des poursuites judiciaires avec une institution qui est mise en place par le gouvernement. Alors, on va payer les avocats de la commission scolaire catholique, les avocats de la commission scolaire protestante, puis les avocats du gouvernement, M. le Président.

Alors, vous allez comprendre que, quand je vois ça, je ne peux pas, malgré que ça ne fait que neuf mois que la ministre est là, puis je sais qu'elle peut mettre encore du temps pour essayer de négocier avec ces gens-là, elle peut mettre du temps comme, nous, on nous oblige à en mettre ce soir, M. le Président... Alors, qu'elle en mette encore un petit peu plus puis elle va arriver aux mêmes résultats que le député de Laviolette nous disait tantôt, elle va arriver à un résultat positif, les gens vont s'entendre entre eux, ils vont trouver la solution la plus favorable pour les élèves, puis tout le monde sera en paix, puis il n'y aura pas de poursuite, puis la ministre va obtenir ce qu'elle recherche, M. le Président, c'est-à-dire l'école qui nous sera confiée, dont les enfants et les élèves ont besoin pour arrêter de voyager 30, 40, 50 minutes par jour.

Alors, M. le Président, vous allez comprendre que, devant cette situation, on va contre ce projet de loi. Merci beaucoup.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Thank you, Mr. Speaker. Mr. Speaker, this is the third time this evening, since this afternoon, that I have risen to speak on a piece of legislation, the object of which is closure by the Government before even this National Assembly has had a reasonable amount of time to discuss the issue in its normal parliamentary procedure, its reasonable amount of time, Mr. Speaker. This Government, for the third time today, is invoking closure on legislation that has essentially been presented in this House, in this particular instance just last Friday.

You know, Mr. Speaker, the Government could not accuse us. Sometimes they accuse us of slowing down the process here in the House; it does occasionally happen but these are accusations, I think that are gratuitous in many instances and most instances. But in this particular instance with Bill 87, Mr. Speaker, the bill was presented for the first time in the House four days ago. Four days ago. No discussion, and today the Government votes closure. It is a very peculiar situation, Mr. Speaker. It's a situation that I think we have to pick at a little bit, to try to find out why this is happening.

Mr. Speaker, the bill before this House this evening essentially orders a resolution of a dispute between two school boards: the Protestant School Board of Greater Montréal and the Montréal Catholic School Commission. Now, Mr. Speaker, right off the bat, the idea of ordering a resolution between two school boards, we could question the motives, we could question even the legality of that. We know that school boards are vested with certain powers in this province, they are local governments, they have the power to tax, they elect commissioners by universal suffrage, they have constitutional rights under the Constitution Act 1867 and the Constitution Act 1982. So, despite the fact, even, Mr. Speaker, that the whole legality of this process could be called into question, we have a situation which, I think, most objective observers would suggest, is a situation of bias against the Protestant School Board of Greater Montréal.

Mr. Speaker, yes there is a problem at Saint-Pascal-Baylon school in Côte-des-Neiges, a French school. Yes, everyone recognizes that there is a problem there. But, you know, the Minister and the Government sort of stand up and say: Well, the PSBGM has three or four vacant or half empty or three-quarters empty buildings in the general area that ought to essentially be taken over.

Mr. Speaker, the truth is very far from that. The schools in question, Coronation School, Shadd Academy, Marymount Academy, have students in them now. The Protestant School Board of Greater Montréal, in fact, has a plan for the use of Coronation School as a French-language elementary school. The impact of all this domino effect, with the Minister shunting students around within the PSBGM and CECM may in fact be to the detriment of a French-language elementary school, protestant school, in Côte-des-Neiges.

(23 h 50)

Mr. Speaker, the solution, quote unquote – and it's in big quotes, Mr. Speaker – proposed by the Minister is, to put it simply, inane. It makes no sense whatsoever, none whatsoever. The use of those schools, they have a vocation now and, as I said before, the PSBGM even has a future vocation for the school. Mr. Speaker, The Gazette , in an editorial, has indicated already that Mrs. Marois's bias is an outrage. The Minister of Education's bias is an outrage. It's interesting that in this particular instance, this Minister of Education, this PQ Government, is intervening with extraordinary legislative powers against the PSBGM. It's a very interesting coincidence. The Minister of Education thinks it's for the PSBGM, the PSBGM tends to think otherwise. Mr. Speaker, this solution will not resolve the problems of the children in Côte-des-Neiges, it will create more problems, it will create a domino effect, including schools in Notre-Dame-de-Grâce, and it is absolutely outrageous that the Minister should proceed in this biased fashion, Mr. Speaker.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. J'ai, avec beaucoup d'attention, écouté les propos de la ministre et également les propos de notre collègue responsable dans ce dossier. En écoutant les propos de la ministre, j'avais l'impression que, finalement, il n'y avait qu'une seule solution et que c'était à regret qu'elle choisissait – et je la vois acquiescer à mes propos, là – de déposer cette pièce de législation. Alors, j'étais heureux de voir que la ministre indiquait qu'elle souhaitait d'autres solutions, mais, disait-elle, j'ai même envoyé un ancien sous-ministre à la retraite, M. Boudreau, puis il n'y en a qu'une seule ou à peu près.

J'ai écouté mon collègue et là j'ai réalisé que c'était passablement moins étroit comme piste de solution et que la ministre a choisi de favoriser sa version des faits. Quand j'ai entendu la ministre dire: Écoutez, là, on est prêt à accepter une solution en autant que ça ne coûte pas trop trop de sous, bien sûr que c'est une approche qui est correcte, mais, quand on apprend des propos de mon collègue que la ministre, cette année seulement, a autorisé 213 projets de construction, de modification pour 615 000 000 $, alors ce que je dis, c'est: Quand on est à la recherche d'une solution, pas d'un affrontement, et que, à l'intérieur des sommes dont dispose le ministère, moins de 1 % de ce que la ministre a autorisé cette année répondrait, mais de façon on ne peut plus exacte, non seulement aux problèmes actuels, mais également aux problèmes futurs... La ministre dit: Écoutez, si on a besoin d'une école en 1999, on en construira une. Quand mon collègue a fait valoir – et la ministre a semblé acquiescer à ses propos – qu'on reconnaît que dans ce coin-là il y a une explosion démographique puis une arrivée de nouveaux citoyens avec le résultat... On a parlé d'un besoin d'environ 900. Alors, si on autorisait, en 1997, avec les plans et devis et tout ce que ça demande et qu'on débutait la construction, on arriverait à 1999 ou presque. Ça, c'est quand on est à la recherche d'une solution durable qui répond aux problèmes, mais qui, en même temps, se fait en priorisant ce qui, dans un dossier comme celui-ci, devrait être la seule, mais alors la seule préoccupation: Quelle est la meilleure solution dans l'intérêt des enfants? C'est de ça qu'on doit se préoccuper. Quelle est la meilleure solution dans l'intérêt des enfants des nouveaux arrivants dont on veut l'intégration des enfants? Quel est le meilleur signal qu'on peut leur donner, M. le Président? De répondre à leurs besoins avec une construction neuve qui prendrait soin des besoins des années futures. Ça, c'est quand on place comme priorité le souci de répondre aux besoins des enfants.

Vous m'indiquez qu'il me reste une minute, M. le Président. Une des choses les plus difficiles quand on exerce le pouvoir, c'est de ne pas en abuser. Et la solution que me semble vouloir prendre la ministre, c'est qu'elle a décidé, elle a trouvé un bouc-émissaire, elle a jugé que c'était «sa» solution. Le but de mon intervention, c'est de lui demander – et je suis convaincu que, si elle le fait, elle se rendra à une des solutions qui sont reconnues parmi les deux hypothèses de construction qui sont acceptables – si elle accepte de céder le pas de sa décision aux besoins des élèves. Je suis convaincu qu'elle retirera son projet de loi et acquiescera à la solution. Autrement, elle connaît les conséquences de sa décision de ce soir. Quand on recherche l'affrontement comme elle le fait, elle va le trouver. Quand on recherche la solution, on prend l'approche que j'ai privilégiée dans mon intervention. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, la ministre de l'Éducation a déposé dans la hâte et l'improvisation, le 13 décembre dernier, le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Le leader du gouvernement porte aujourd'hui l'odieux du bâillon qui nous force, nous, les députés de l'opposition officielle, à expédier dans un temps de parole limité à cinq minutes des projets de loi d'une importance capitale qui ont des incidences graves sur la situation financière et la qualité de vie de nos concitoyens.

Le projet de loi n° 87 vise à obliger la Commission des écoles catholiques de Montréal et la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal à conclure une entente d'ici le 20 janvier 1997 sur l'utilisation des espaces, à défaut de quoi la ministre imposera de façon unilatérale sa solution, celle qu'elle préconise dans son projet de loi n° 87. De quoi s'agit-il au juste et en quoi ce projet de loi peut-il apporter une solution au problème de l'utilisation rationnelle des espaces-écoles?

D'abord, le constat. Le quartier Côte-des-Neiges est le secteur de la ville de Montréal où la démographie est en croissance constante, tant par le nombre que par sa diversité ethnique, raciale et religieuse. C'est l'un des creusets les plus cosmopolites de Montréal. Déjà, en 1986, les données du recensement indiquaient que l'arrondissement Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce comptait près de 48 % de résidents qui étaient d'origine autre que française, britannique ou autochtone, contre 26,5 % pour l'ensemble de la ville de Montréal. C'était également l'arrondissement le plus peuplé à Montréal avec au-delà de 150 000 personnes. Durant les 10 dernières années ce pourcentage n'a cessé de croître. La plupart des communautés qui ont enrichi la diversité de Montréal depuis le XVIIIe siècle sont passées par là avant d'essaimer dans la grande région de Montréal.

(minuit)

Ce n'est donc un secret pour personne que Côte-des-Neiges compte une population relativement jeune et en pleine expansion, d'où l'importance de développer des infrastructures d'accueil et d'établissement pour une population en perpétuelle augmentation.

L'école étant le lieu d'intégration par excellence, on aurait pu s'attendre à ce que des mesures appropriées soient adoptées pour assurer aux enfants et aux jeunes de Côte-des-Neiges un accès favorable à leurs écoles de quartier. Le problème s'est posé en effet dès le début des années quatre-vingt-dix, et la CECM a tenté d'y remédier en 1992-1993 en logeant les élèves issus de l'immigration à l'école anglophone St. Kevin's. Mais ce n'était qu'une solution ponctuelle, car la croissance démographique constante commande une solution à long terme. Selon les estimations de la CECM, le nombre d'élèves augmentera de plus de 20 % dans Côte-des-Neiges d'ici 2001. Déjà en 1994, la CECM avait signifié au ministre de l'Éducation les besoins criants en espaces-écoles, et, en mars 1995, la CECM a demandé au ministre de l'Éducation l'autorisation de construire une nouvelle école, mais sans succès. Avec le résultat qu'aujourd'hui la ministre de l'Éducation cherche à imposer sa solution unilatérale qui est rejetée d'emblée par les deux commissions scolaires concernées et par les parents.

Malgré l'urgence de la situation et le fait que le ministère de l'Éducation ait autorisé 213 projets de construction et d'agrandissement d'écoles pour un montant de 615 000 000 $, la ministre de l'Éducation continue à faire la sourde oreille. La ministre est tellement enfermée dans ses dogmes qu'elle a oublié que, par son projet de loi, elle risque de déclencher une guérilla juridique, considérant que la CEPGM est en droit d'invoquer ses prérogatives constitutionnelles. Tout ça, pour une école de 4 200 000 $ que la ministre refuse de construire pour donner aux élèves de Côte-des-Neiges une école de quartier et un sentiment d'appartenance justifié.

C'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que je voterai contre ce projet de loi n° 87.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais céder la parole à M. le député de Laporte.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. le Président, je ne comprends pas pourquoi la ministre insiste tant pour tenter de faire adopter à la vapeur, comme ça, en fin de session, aux petites heures du matin, un projet de loi qu'on tente de nous rentrer dans la gorge de force, à la dernière minute, alors qu'il est évident que la ministre n'a pas fait son travail. La ministre et ses prédécesseurs, disons-le. Parce que la ministre elle-même n'est pas en place depuis très longtemps, M. le Président, mais ce gouvernement est en place depuis plus de deux ans maintenant, et le problème, justement, a fait surface quelques mois à peine après l'arrivée de ce gouvernement.

Et c'est un problème qui, on l'a expliqué, je ne reprendrai pas les données du problème, je ne voudrais pas ennuyer les téléspectateurs avec ces faits-là... Mais il est évident que l'attitude du gouvernement dans ce dossier ressemble étrangement à l'attitude du gouvernement récemment dans un dossier concernant les municipalités, alors que le gouvernement, d'office, d'autorité, sans consulter les municipalités, avait décidé d'imposer une solution à ses finances en leur transférant des responsabilités, des taxes nouvelles, sans les consulter. C'est la même chose, M. le Président. Ce gouvernement-là n'a aucun respect pour les corps élus que sont les commissions scolaires, comme il n'a aucun respect pour les corps élus que sont les municipalités.

M. le Président, quand on traite avec des élus, des gens qui ont des mandats de la population, il y a des façons de s'y prendre pour trouver des solutions, et tout est dans la manière. Ce gouvernement n'a pas la manière de traiter avec des élus. Il le fait avec arrogance, tente d'imposer ses solutions, alors que ces gens-là ont des mandats, comme nous, et que ce sont des élus qui sont capables de régler leurs problèmes quand on leur fiche la paix.

Dans ce cas-ci, nous avons deux commissions scolaires qui ont un problème entre elles d'élèves en trop, trop d'élèves dans chacune des deux commissions scolaires, et la ministre, par une solution, M. le Président, alambiquée, compliquée, un genre de jeu de chaise musicale, veut déplacer des élèves d'une école vers l'autre, d'une autre école vers une troisième, faire tourner ces gens-là dans plusieurs écoles, pour finalement dégager 600 places. Or, en faisant tourner comme ça des élèves d'une école à l'autre, on en vient à réaliser que ça va coûter 1 500 000 $ pour aménager les écoles, comme veut le faire la ministre, pour pouvoir loger ces nouvelles clientèles. Or, il a été mis en preuve que construire une nouvelle école, ça coûterait au gouvernement 2 000 000 $. La belle affaire!

La ministre a le choix, M. le Président, entre dépenser 1 500 000 $ pour faire tourner des gens en rond et ne pas régler le problème à long terme ou encore, de ses propres deniers, débourser 2 000 000 $ et, avec ce 2 000 000 $ là, régler à long terme le problème. N'importe qui qui serait placé devant un problème semblable trouverait qu'on est mieux de régler à long terme, pour 2 000 000 $, un problème que de jeter littéralement à l'eau 1 500 000 $ pour ne rien régler du tout. C'est ça, en fait, que la ministre de l'Éducation devrait réaliser.

On est, M. le Président, dans un quartier de Montréal qui est surpeuplé, peut-être pas surpeuplé mais en voie d'être peuplé de plus en plus, où il y a beaucoup de nouveaux arrivants. On n'est pas dans une section rurale du Québec où il n'y a pas d'immigration, où, même, parfois, on voit qu'il y a des pertes de population et qu'il y a des écoles de libres et personne pour les occuper. C'est le phénomène inverse qui se passe ici dans Côte-des-Neiges. On a de plus en plus d'élèves, beaucoup de nouveaux arrivants, et on manque d'espace. Et la ministre, plutôt que de prendre la décision logique d'affecter quelques fonds pour construire une nouvelle école dont on a besoin, tente une solution qui vise à faire déménager des élèves de plusieurs écoles pour finalement encourir des coûts qui vont être à peu près les mêmes coûts que de construire une école nouvelle. M. le Président, ce n'est pas logique et c'est pour ça que l'opposition officielle s'objecte à ce projet de loi là qui n'est pas logique et puis qui est antidémocratique parce qu'il ne respecte pas l'autorité et les mandats qu'ont reçus ces commissions scolaires là.

M. le Président, quand le gouvernement aura appris à respecter les commissions scolaires comme les municipalités, à ce moment-là il ne rencontrera pas des oppositions comme il en rencontre présentement dans ce dossier-là et les autres dossiers où il a agi comme ça à l'égard de ces corps politiques que sont les commissions scolaires et les municipalités, avec arrogance. Aujourd'hui, il est pris pour imposer des solutions parce qu'il n'a pas su négocier et trouver des solutions qui rencontrent les objectifs de la saine démocratie. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Le prochain intervenant sera le député d'Outremont. M. le député.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: M. le Président, s'il fallait une démonstration de l'incurie de ce gouvernement, de sa pratique de l'improvisation et de son manque total de planification face à l'évolution des populations scolaires, le projet de loi n° 87 nous en fournit une démonstration éloquente. Tout était prévisible, M. le Président. Nous savons depuis belle lurette que les équipements scolaires du quartier Côte-des-Neiges sont insuffisants. Nous savions que l'évolution démographique du quartier, de ce qu'on appelle la démolinguistique du quartier, est telle que, fatalement, tôt en tard, nous serions entrés dans le four dans lequel la ministre de l'Éducation nous entraîne maintenant.

(0 h 10)

Ce qui est encore plus désolant, M. le Président, c'est d'entendre la ministre, c'est de voir la ministre utiliser, avec une candeur que nous n'avons vue nulle part, le masque du bien-être des étudiants et de l'intérêt des contribuables pour nous annoncer sa solution boiteuse, qui coûtera aux contribuables beaucoup plus d'argent que ce qu'elle espère économiser à long terme, n'est-ce pas? Un cataplasme, une solution boiteuse qui ne fait aucun sens, alors que celle qui lui a été recommandée par son médiateur, à savoir la construction d'une école nouvelle, répondrait non seulement aux besoins des populations étudiantes actuelles, aux attentes des parents, mais aussi aux besoins de l'avenir de ce quartier, de l'avenir scolaire de ce quartier.

M. le Président, la ministre a retenu une solution à courte vue. Mais la question qu'on peut se demander, c'est la question suivante: Quelle est donc la logique du comportement de la ministre? Cette logique, ça n'est pas une logique nouvelle, on l'a vue à l'oeuvre dans d'autres projets de loi qu'a adoptés ce gouvernement. Je l'ai vue à l'oeuvre moi-même dès les lendemains de mon élection à Outremont, lorsque je me suis associé à la lutte des assistés sociaux et des gens âgés contre la loi sur les médicaments. Dans ce cas-ci, la logique est la même. Mais quelle est donc cette logique? C'est une logique de cassage, M. le Président. Le gouvernement, la ministre de l'Éducation a décidé – et on peut même se demander si elle le fait consciemment – plutôt que d'être mue par une logique inconsciente, de casser la résistance de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et de lui imposer de toutes pièces une solution qui lui est inacceptable.

Nous sommes donc, M. le Président, encore une fois – on l'a vu, comme je le mentionnais tantôt, dans le cas de la loi sur les médicaments; on l'a vu dans le cas de la loi sur les municipalités – en présence d'un gouvernement qui taxe et qui casse, parce que, à force de casser des résistances bien légitimes à ses décisions arbitraires, à ses décisions basées sur l'improvisation et la courte vue, ce gouvernement espère finalement en arriver à la situation dans laquelle nous sommes tous placés, qui sera une situation où les résistances ayant été cassées, on se retrouvera dans une situation d'impuissance qui leur permettra finalement de réaliser le plus cher de leurs grands projets, M. le Président. Et je ne voudrais pas le nommer, tout le monde le connaît.

Nous sommes donc, M. le Président – et je termine là-dessus – en présence d'un gouvernement qui casse, qui casse les résistances: qui casse les résistances individuelles, qui casse les résistances collectives, qui casse les résistances institutionnelles, qui casse l'autonomie des décideurs locaux. Et c'est au nom de ce refus de voir casser ces résistances que l'opposition s'objecte et s'objectera toujours au projet de loi que nous avons devant nous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Outremont. Je vous inviterais, s'il vous plaît, à revenir au respect des droits de parole. Ça dérape un peu trop, là. Alors, le prochain intervenant, M. le député de LaFontaine, je vous cède la parole.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Le projet de loi que nous avons devant nous paraîtra, pour les citoyens du comté de Rivière-des-Prairies, un projet de loi un peu particulier. Car, en effet, la ministre de l'Éducation, à l'aide d'une loi qui bâillonne cette Assemblée, va faire en sorte de donner aux citoyens de Rivière-des-Prairies, aux citoyens de Côte-des-Neiges, pardon, de la CECM, donner à la CECM ce qu'elle a refusé aux citoyens de Rivière-des-Prairies. Et je m'explique, M. le Président.

M. le Président, nous avons, dans Rivière-des-Prairies, une situation de croissance démographique qui a fait en sorte qu'un grand nombre de nos concitoyens qui envoient leurs enfants dans les écoles protestantes francophones devaient les envoyer dans un rayon d'une heure, une heure et quart de transport en autobus. Pour les gens qui habitent en région, ça peut paraître, des fois, pas trop long, mais, en ville, c'est extrêmement loin.

Nous avions, avec les parents de ces élèves, dont la grande partie réside dans Rivière-des-Prairies – on parle de 350 élèves – fait une demande au ministère pour qu'une école soit construite par la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal dans Rivière-des-Prairies. Cela n'avait pas été accepté. La Commission des écoles protestantes du Grand Montréal avait demandé à ce moment-là à la CECM de pouvoir louer une école qui est inoccupée, une école qui peut accueillir au-delà de 500 élèves et qui, actuellement, est barricadée et où il n'y a personne. Quelle a été la réponse? Ç'a été non, ni location ni achat.

Nous sommes revenus à la charge avec les parents, des citoyens francophones, afin de demander au ministère, au prédécesseur de la ministre, avant elle, l'autorisation et les fonds nécessaires, à ce moment-là, pour construire une école, et cela a été refusé. Non seulement ça n'a pas été refusé dans un premier temps, mais le dossier a traîné sans réponse pendant presque un an, incapables que nous étions d'avoir une communication avec les gens du ministère. Et je parle d'une école primaire, M. le Président, pas d'une école secondaire où les jeunes peuvent à la limite se déplacer en autobus.

Par la suite, M. le Président, nous avons encore essayé avec la nouvelle ministre. Personnellement, je suis intervenu pour lui demander, à son cabinet, à ses collaborateurs, à ses collaboratrices, de faire en sorte de débloquer la situation, d'intervenir auprès de la CECM pour que cette école qui est vide, qui est inutilisée – il y en a même deux dans Rivière-des-Prairies – soit donnée et mise à la disposition des parents et des enfants qui fréquentent la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal dans Rivière-des-Prairies. À un tel point que les parents, avec la commission scolaire, ont décidé de la faire, cette école, sans le ministère. Et, comme député qui supportait ces parents et ces élèves depuis le tout début, j'ai fait une première pelletée de terre sur un chantier de construction d'une école d'une commission scolaire – une école publique et non pas une école privée – dans laquelle le ministère a refusé d'investir et dans laquelle la ministre et son prédécesseur ont refusé d'intervenir auprès d'une autre commission scolaire pour qu'ils mettent des écoles vides à la disposition de ces enfants. Il y a là deux poids, deux mesures.

Inadmissible, M. le Président, que l'on fasse un bâillon pour forcer une commission scolaire qui utilise une école à la donner à une autre dans un quartier destiné de Montréal, alors que dans un autre quartier on n'a rien fait, on s'est lavé les mains, on a laissé traîner le dossier. Inadmissible, M. le Président, et je ne peux pas l'accepter. Il y a là deux poids deux mesures.

Encore une fois, c'est la marque de commerce de ce gouvernement, de la ministre, l'improvisation, le laisser-aller, ou alors le parti pris, je ne le sais point. Mais nous ne pouvons pas l'accepter et je souhaite que le peuple, les gens de Rivière-des-Prairies, les gens du Québec et de Montréal vous jugent un jour là-dessus, Mme la ministre, ainsi que votre gouvernement. C'est inadmissible, c'est intolérable et nous ne l'acceptons pas. Merci, madame.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie. Le prochain intervenant, M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Thank you, Mr. Speaker. Many hours ago today, in the question period, we were talking about bankruptcies. And what we have before us tonight is the bankruptcy of the idea of «l'autre façon de gouverner», because this Government has clearly run out of ideas, run out of things.

The bill that is before us tonight, Bill 87, this legislation that we are going through closure before opening, it was tabled only four days ago. It's urgent. It's something that the Minister has had in her office for the last two years. Suddenly, four days ago, it became urgent. And we come... we don't have... The Minister tries to set herself up as a judge. And the most elementary thing to be the judge, Mr. Speaker, is that you have to be neutral. And I think that we have seen clearly in the way that this thing has been handled that the Minister has no neutrality. She is biased. It has been criticized in the local paper. So she sets herself up as a judge when she has already taken sides. It is clearly unfair.

(0 h 20)

But what this bill shows, I think, is a lack of respect on three levels. The first is the lack of respect for local institutions. There are school boards that are democratically elected, that have constitutional rights, that are protected, and the Minister is overriding all of that. She's just charging in, as I say, arriving with a piece of legislation at the very last minute: four days to look at it, no parliamentary hearing, no chance for the parliamentarians here to listen to both sides.

I would have liked nothing more than to have the parliamentary commission on Education here, the Montréal Catholic School Commission, the Protestant School Board of Greater Montréal, representatives of the parents and the schools involved to come down here, take the time, so we could all listen to them before we set the Minister off within a blank cheque to solve the problem.

I'm not ready to do that tonight because, as a parliamentarian, my colleagues on this side of the House have a right to hear it. So, it's a big lie to our respect for local institutions. It puts a lie to this Government's respect to parliamentary institutions, because all of us on this side of the House have a right to listen to the groups, all of us. And Mr. Boudreau, who looked at the problem carefully, could have come and testify before the parliamentary commission. I have lived some distance from these schools, so I'm less familiar with the actual problems of it, but it's the lack of respect for the process that I find inexcusable.

Also, it again puts a lie to this Government's notion of minority rights. It wouldn't know a minority right if it tripped over it, Mr. Speaker. The solution the Minister has found, as her colleague the Minister of Health, is, when they're really stuck: Let's close another English institution. Within two years, Mr. Speaker: the Queen Elizabeth Hospital, the Lachine General Hospital, the Reddy Memorial Hospital, the Sherbrooke General Hospital, the Jeffrey Hale's Hospital, the list goes on, and on... They say: It's a coincidence. Ho! it's just our bareme, it's just all our norms, and everything else like this. What a load of nonsense, it's just: What's the easy way out? What's expedient? We'll take another institution away from the minority community. That is the solution. They do it again.

We see it here tonight that they're in a jam. We don't hear anything about it. We don't have a fair open discussion. As I say, the Minister's neutrality is called into question. We're talking about her bias quoting fromThe Gazette editorial: «The Minister has overstepped her authority. If she must intervene, she should do so to help, not to take sides.» But the Minister has already taken sides, so she cannot set herself up as a judge, she cannot, she's in no position to judge the minority rights that are at stake.

What we have is a suggestion from a mediator that the Government put in $1 500 000. So, we already have $1 500 000 on the table, with the constitutional questions that are at stake here we're heading right for court. The taxpayer is going to be asked to pay for the lawyers, for the various intervening parties, probably the friends of the Minister of Justice. I don't know who that will be who will get the contract to defend us, the Government or the various school boards. So, once again, we'll be spending millions of dollars. Why not take the legal fees and turn it into a project to enlarge one of the schools and find a solution that way?

The Government is spending $615 000 000 this year on growing schools and everything else. There's lots of money available in that fund. The Minister knows it. If she wanted to find a solution that would help the parents, come up with a deal that would keep everyone happy, it's available, Mr. Speaker. But she doesn't want to. And she's come up, as I say... Because she's taking sides, because she cannot be the judge, because she's prejudiced in the question. She's already made a decision. But if she were to take, as I say, the legal fees that, I know, were headed right for a constitutional quarrel over this... It will be a long legal case, it will cost hundreds of thousands of dollars.

I know what we lived through a similar experience in my riding over the closure of Dorval School that has cost the school boards over $100 000 arguing that one out. Not one book purchased for the school library, not one improvement for the classroom, nothing else. Just good news for lawyers' fees, and quarrels, and everything else. We're heading exactly in that direction with Bill 87. I say: Stop the process. Take the hundreds or thousands of dollars we might spend on legal fees, spend it on improving the quality of education for the children, both of Coronation School, of St-Pascal-Baylon and all the other schools involved in this question to find a solution that will help the children involved. Thank you, Mr. Speaker.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Comme le mentionnaient d'autres de mes collègues avant moi, une autre façon de gouverner amène le gouvernement du Parti québécois à introduire le projet de loi n° 87 dans le bâillon. Projet de loi qui concerne des conditions d'utilisation des immeubles dans la région de Montréal, un projet de loi présenté à défaut d'avoir pu s'entendre dans une grande région où tout le monde, évidemment, reconnaît qu'il y a un besoin évident d'immeubles. Mais, depuis des mois et des mois, on devrait se questionner à savoir est-ce que la ministre, le ministère de l'Éducation a fait tous les efforts pour en venir à trouver une entente, un point d'entente pour utiliser, soit de façon temporaire ou soit tant et aussi longtemps... d'ici à ce qu'on trouve le moyen de mettre en place un établissement neuf ou un établissement, en fait, déjà occupé pour d'autres fonctions, ce qu'on peut appeler un établissement recyclé, pour les besoins de la commission scolaire.

Mais non, M. le Président, on en est aujourd'hui à présenter un projet de loi qui forcera une commission scolaire à céder de ses locaux pour le service des élèves – évidemment, tout le monde le reconnaît – qui souhaitent recevoir leur formation dans leur milieu pour éviter des temps de transport exagérés, ça, on doit le reconnaître. Je dois vous dire que, n'étant pas de cette région, de Montréal, connaissant moins la problématique, je reconnais que, pour les parents ou ceux et celles qui sollicitent, pour leurs enfants, des services dans leur milieu immédiat, dans leur quartier immédiat, c'était un problème, un problème qui devait être solutionné dans les meilleurs délais, soit pour septembre 1997.

Mais, il y a deux ans, il y a un an, il y a six mois, il y avait des négociations. Le ministère de l'Éducation n'a probablement pas, et c'est ce dont plusieurs les accusent, fait les efforts nécessaires pour tenter de rapprocher les deux parties. Aujourd'hui, la ministre de l'Éducation aura, et le gouvernement du Québec, à débourser des montants importants pour réorganiser, c'est-à-dire aménager certains locaux, des montants qui auraient pu servir, il y a déjà six mois, à aménager des locaux ou d'autres édifices, comme je le mentionnais, qui pourraient avoir été mis au service de la formation de ces élèves.

Le projet de construction d'une école au coût de 4 200 000 $, M. le Président, a donc été écarté par la ministre, et on va faire la démonstration qu'avec le temps elle va probablement dépenser presque le même montant d'argent. Quant au besoin de places-élèves pour l'an 2000, estimé au minimum à 500 places, la ministre a indiqué en conférence de presse qu'il faudra réévaluer la situation et attendre de voir si la tendance démographique se maintient. Bien, je pense qu'elle a déjà la réponse. Depuis plusieurs années, si on recule de trois, quatre, cinq ou six années, c'est un endroit où plusieurs immigrants se regroupent, dans ce quartier, ce qui amène, d'année en année, une augmentation d'élèves. Et la démonstration en a été faite dans le passé, il y a quelques années, comme je le mentionnais, et l'année dernière à nouveau. Donc, on n'a pas à attendre de voir s'il y aura une augmentation de clientèle, c'est déjà démontré de par l'expérience et les statistiques des années passées.

La solution susceptible d'être imposée par la ministre aura un impact financier en 1996, M. le Président. Quand on parle d'impact financier où le gouvernement a coupé, dans les derniers mois, dans le domaine de la santé et de l'éducation, au niveau d'autres secteurs, je pense que ce n'est pas à négliger, l'impact financier. Selon nos informations, la ministre a prévu une compensation financière de 1 500 000 $, et je dis bien une compensation financière. On n'a pas encore réglé le problème, on a juste sorti de l'argent pour tenter de trouver une solution qui pourrait être à la satisfaction de certaines personnes. Mais – encore une fois, je le dis – la ministre n'a pas réglé le problème. Elle est en train de débourser 1 500 000 $ et, un jour ou l'autre, il devra y avoir des locaux neufs dans ce quartier pour répondre à l'augmentation de la clientèle et à la clientèle actuelle connue.

(0 h 30)

Donc, c'est une autre démonstration que, dans ce bâillon, on a inclus un projet de loi qui aurait pu être réglé soit dans le passé ou réglé dans les prochaines semaines. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui, M. le Président, je veux prendre la parole sur le projet de loi n° 87, loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles à la Commission des écoles catholiques de Montréal versus – et on reviendra sur le mot «versus» – la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, M. le Président.

Alors, nous en sommes exactement... Pour les gens qui nous écoutent, ce n'est pas une émission en différé, M. le Président. Effectivement, c'est en direct. Il est minuit et demi, on est à six jours de Noël, et un problème qui durait depuis des mois, deux ans, M. le Président, on n'a pas été capable, on n'a pas été capable de rapprocher les parties. On n'a pas été capable de déposer un projet de loi plus tôt. On n'a pas été capable de demander aux parents de s'impliquer, au législateur de s'impliquer, pour que nous puissions le regarder article par article.

Alors, nous arrive «from nowhere», comme on dit si bien en anglais, un projet de loi n° 87, en pleine nuit, quelques jours avant Noël. La panique est prise dans la place, et personne ne comprend ce qui arrive vraiment. Si le problème était là en septembre et qu'il était là en octobre, qu'il était là il y a un an, comment se fait-il que, quatre jours avant Noël, sept jours avant Noël, soudainement, il faut y aller, tout casser avec un projet de loi que personne n'aura le temps d'étudier, M. le Président? Parce que, qu'on aime ça ou pas, le législateur qui vous parle – par le bâillon qu'on vient de lui imposer – et tous les législateurs dans cette Chambre n'auront que cinq minutes pour se prononcer. Alors, les dirigeants de la communauté, là-bas, des communautés, les parlementaires, les parents, les représentants des parents, les représentants des étudiants n'ont pas un mot à dire à ce point-ci.

Et ce qui est un peu désolant dans tout ça, c'est qu'il me semble que c'était un problème qui était réglable avec des solutions. Et faire de la politique, c'est souvent essayer de rapprocher les gens. On le voit dans nos comtés, les gens s'affrontent pour beaucoup de choses. Et, quand on a un peu de doigté, comme devrait l'avoir la ministre de l'Éducation, normalement on arrive à rapprocher les gens. Et une des façons de les rapprocher, bien sûr, en bout de ligne, c'est de leur dire: Écoutez, on va essayer de trouver, pour le meilleur des enfants... Parce que, dans le cas présent, c'est les enfants qui sont mis en situation problématique, ici. Et la ministre, normalement, aurait dû, avec ces gens-là, qui sont des gens de bonne volonté, arriver à trouver une solution en deux ans.

Mais, vous savez, le lien de confiance entre ce gouvernement et les élus est cassé à bien des égards. Et ça, en très peu de temps, M. le Président. On a l'impression, comme l'ont dit d'autres avant, c'est... La stratégie du PQ, c'est de diviser les gens pour bien régner et pour bien régner longtemps. Alors, on n'a qu'à penser au référendum, M. le Président. On ne pouvait pas mieux diviser. On est presque arrivé à diviser exactement dans le centre, M. le Président. Presque dans le centre. Cinquante-cinquante. Il faut le faire, hein.

Il faut le faire, et ça, un an après une élection, alors que ce gouvernement avait tellement de choses à faire économiquement. On perd en ce moment 200 jobs par jours; 60 000 emplois de perdus au Québec. Il y a des pans de murs complets de problèmes, M. le Président, qu'on ne veut pas regarder. On perd en ce moment... Nouvelles taxes de tout acabit – et je reviendrai plus tard cette nuit pour en parler – nouvelles taxes et impôts, c'est environ 3 000 000 $ par jour, sept jours par semaine, au Québec, qu'on nous imposera dans la prochaine année.

Alors, on divise les gens; on divise les groupes. On a commencé par le référendum. Ensuite, comme si on n'avait pas assez divisé les gens du Québec, on a essayé de les diviser sur la langue, M. le Président. Et ça, on sait que, s'il y a un débat pour diviser le peuple qui est parfait, c'est celui de la langue, M. le Président. Alors, on continue. Et on pourrait regarder à peu près tous les dossiers, nous, porte-parole de l'opposition, puis s'apercevoir que ce gouvernement, en deux ans, n'a pas été capable d'exercer ce rôle de leader, de rapprocher les gens, de les amener dans une même direction.

Et, à titre de porte-parole en environnement, est-ce qu'il y a un sujet plus extraordinaire où on a été capable de diviser tout le monde: les agriculteurs sur un bord et les environnementalistes sur l'autre bord, M. le Président? Pour ne pas dire que, souvent dans le même village, on a même les agriculteurs en chicane l'un contre l'autre sur le sujet de la production porcine. Et le député, là-bas, m'a reproché de ne pas en avoir parlé dans mon discours au préalable, mais je voulais en parler ici ce soir. Maintenant, on est arrivé dans son propre comté, M. le Président, dans une même famille, à avoir deux individus à se présenter à la mairie et – deux frères...

Alors, on est arrivé à diviser tout le monde, M. le Président, et ce projet de loi n° 87 démontre comment, M. le Président, encore une fois, dans une même ville, on est arrivé à diviser, mais d'une façon totale, deux communautés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais céder la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, ce soir – ce matin, je devrais dire puisqu'il est maintenant 0 h 30, 0 h 35 – nous sommes à discuter du projet de loi n° 87, qui... Pardon?

Je regarde, M. le Président, le secrétaire parlementaire du ministre responsable de la Métropole, qui, à cette heure-ci, a l'air d'avoir à peu près 63 ans et qui est en train d'essayer de nous rendre plus confus que le gouvernement pourrait l'être à cette heure-ci. M. le Président, je sais que le secrétaire parlementaire du ministre de la Métropole aurait dû s'occuper de ce dossier-là. Il aurait dû s'occuper de ce dossier-là d'abord parce que, antérieurement, il avait fait, dans une autre vie, il a fait profession dans le monde des commissions scolaires. Et il aurait pu dire à la ministre responsable du secteur de l'éducation que le projet de loi n° 87, en fait, était, dans le fond, une attaque en règle contre l'autonomie des commissions scolaires. La première...

M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de constater que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques...

Une voix: Sainte-Marie–Sainte-Anne.

M. Chagnon: Non, Sainte-Marie–Saint-Jacques – Saint-Jacques–Sainte-Marie, en tout cas, appelez-le comme vous voulez, dans l'ordre ou dans le désordre – voudrait casser les commissions scolaires. Bien, effectivement, si c'est le cas, il serait mieux de le dire honnêtement. Parce que l'autre façon de gouverner, aujourd'hui, avec le projet de loi n° 87, nous amène à constater que la ministre veut faire en sorte... La ministre est prise dans un problème.

Depuis décembre 1994, la CECM, M. le Président, depuis le mois de décembre 1994 – là ça fait deux ans aujourd'hui – demande d'avoir une école, de construire une école dans le secteur Côte-des-Neiges. Cette requête est refusée systématiquement par le ministère de l'Éducation. Alors, ça fait deux ans que le gouvernement laisse traîner les choses. Deux ans. La requête est arrivée en décembre 1994, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques; je n'étais plus ministre de l'Éducation, c'était le député de Lévis, votre collègue, qui était ministre de l'Éducation. Et, à ce moment-là, ni le député de Lévis ni la députée de Taillon n'ont pris la décision de construire une école.

Construire une école? D'abord, il y avait un problème. Il y a problème de répartition de places-élèves dans le secteur de Côte-des-Neiges, c'est assez évident; et, dans le fond, le gouvernement ne s'est pas... s'est traîné les pieds, je pourrais dire, jusqu'à temps que l'émission Le Point , l'émission télévisée, le journal télévisé Le Point , traite de cette question.

Alors, le gouvernement, dans le fond, a su trouver un bouc émissaire pour camoufler son inertie, et ça a été la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, à qui on a demandé de libérer une école. Mais libérer une école, l'école Coronation, on l'a signalé un peu plus tôt, il y a des élèves dans cette école-là. Les élèves qui sont dans cette école-là, bien, devront être transférés ailleurs, et ceux qui sont dans l'autre école, celle qui recevra les élèves de l'école Coronation – on pense à l'école Shadd – eh bien, eux devront aussi s'en aller ailleurs. C'est une espèce de théorie de dominos dans laquelle, lorsqu'on sort les enfants de l'école Coronation de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, les autres suivent, et il y en a des centaines et des centaines qui sont affectés par une décision que voudrait nous faire voter, ce soir, cette nuit, ce matin, la ministre.

Et je répète que c'est une entorse, je dirais, à la règle d'autonomie des commissions scolaires. La Commission des écoles protestantes du Grand Montréal a voté unanimement une résolution qu'on pourrait vous déposer, M. le Président, et qui réclame de pouvoir conserver son école Coronation pour ses élèves. Pourquoi deux poids deux mesures, M. le Président?

L'an dernier – on ne remontera pas au crétacé antérieur, là – l'an dernier, la Commission des écoles protestantes a reçu un refus de la Commission des écoles catholiques de Montréal, la CECM, concernant une demande visant à lui céder des écoles disponibles pour répondre à un besoin d'espaces dans le quartier Rivière-des-Prairies. Le même problème qu'on a dans Côte-des-Neiges, on l'avait dans Rivière-des-Prairies l'an dernier, puis le gouvernement l'a laissé traîner parce que Le Point n'a pas fait d'émission, M. le Président.

Cette année, on a le problème dans Côte-des-Neiges, puis là on décide que, par loi spéciale, avec le bâillon, on va enlever une école à la Commission des écoles protestantes de Montréal puis la redonner à la CECM. Dans le fond, c'est un peu ridicule, c'est une véritable bouffonnerie qu'on nous demande de faire ce soir. Et, dans ce cas-là, on ne peut pas faire autre chose que de s'y opposer. Merci, M. le Président.

(0 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Je vais maintenant céder à parole à M. le député de Robert-Baldwin.

Des voix: Bravo!


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Cinq minutes seulement pour parler d'un dossier qui touche autant de jeunes, particulièrement dans l'ouest de la ville de Montréal, eh bien, ce n'est pas beaucoup.

M. le Président, il y a une constante dans le gouvernement. Dès qu'ils sont arrivés au pouvoir, le gouvernement péquiste a commencé à frapper la communauté anglophone, d'abord en fermant des hôpitaux qui desservaient majoritairement des citoyens anglophones, je pense aux hôpitaux comme l'hôpital Reddy Memorial, L'Hôpital général de Lachine, l'hôpital Saint-Laurent et l'hôpital Queen Elizabeth.

Ce n'était pas assez, M. le Président. Dernièrement, on sait, le ministre de la Justice – ça, c'est le ministre de la Santé qui a commencé à s'attaquer aux hôpitaux qui desservent le bassin de population anglophone – lui, tout de suite après, a décidé de fermer la cour juvénile. On sait qu'on fait beaucoup d'efforts dans l'Ouest-de-l'Île pour approcher les jeunes, surtout les polices communautaires, là, qui sont en développement. Eh bien, pour le ministre de la Justice, lui, il a décidé: Non, on ferme la cour juvénile. On sait que ça desservait beaucoup la population anglophone.

Autre intervention d'un autre ministre, cette fois, c'est la ministre de l'Éducation concernant un cégep francophone qui, de l'avis de tous les concitoyens – et, M. le Président, je peux vous en parler, on en parle dans mon comté – eh bien, c'est une belle farce. Il y avait sous le gouvernement libéral une décision extrêmement importante et, je dirais, un peu audacieuse, mais qui répondait aux besoins de la communauté, qui était de construire plutôt une antenne du cégep de Saint-Laurent dans la partie ouest de l'île. Eh bien non, il fallait, pour le gouvernement, créer, inventer un nouveau cégep francophone. Et, depuis cette annonce, cette promesse électorale, deux grandes décisions ont été prises: d'abord de choisir le nom et ensuite de choisir le logo. Quant au cégep comme tel, ça, ça reviendra, M. le Président, et on aura sûrement d'autres occasions de s'en reparler.

I'd like to remember what the Premier said at the Centaur Theater. The Premier wants to be the Premier for all Quebeckers. But, for us in the West Island, we feel that we are orphans. After all those closings, we really feel that we are orphans, that we don't have a Premier anymore. And I'd like to recall what The Gazette wrote two days ago regarding this issue: «The Minister of Education's bias is an outrage. The Minister of Education is way out of line to threaten to pass a law imposing her own solution if the two boards don't work out a deal to her liking by January 20. What's worst is that her so-called solution smacks of bias and favoritism toward the Montreal Catholic School Board. Her bullying tactics against the Protestant School Board of the Greater Montreal, if indeed they are illegal, are outrageous and have seriously undermined her credibility.»

M. le Président, je pense que c'est quand même important. Un gouvernement qui avait promis d'être à l'écoute des concitoyens, eh bien, est à l'écoute des concitoyens qui ne pensent que comme eux. Si on ne pense pas comme eux, et je pense particulièrement aux citoyens qui regroupent la communauté anglophone de mon comté, de l'Ouest-de-l'Île, eh bien, on ne les écoute pas.

M. le Président, nous avons devant nous un gouvernement qui a le championnat des bâillons, des bâillons en pleine nuit – et je me suis engagé à vous le dire à chaque fois que j'en aurais l'occasion – des bâillons sur la loi n° 83, loi qui fermait les hôpitaux; bâillon sur la loi antisociale, la loi n° 33, sur l'assurance-impôt médicaments; bâillon sur la 116, monument aux régies régionales; bâillon sur la 115, qui dépouillait les assistés sociaux; et, maintenant, bâillon sur la loi n° 87.

De plus, M. le Président, les députés du gouvernement, qui parlaient tant en campagne électorale, ne parlent plus maintenant. On n'est pas capable d'avoir leur opinion. Ils nous font bien des simagrées quand, nous, nous parlons, mais on ne les entend pas. Ils ne veulent plus intervenir. Ils ne veulent pas défendre leurs concitoyens.

M. le Président, nous avons devant nous un gouvernement qui, en un peu plus de deux ans, a vieilli, un gouvernement aigri, un gouvernement épuisé, désabusé, divisé, et qui veut reproduire sa division dans l'ensemble de la société québécoise. M. le Président, après la santé, eh bien, voici un autre fiasco, et c'est la loi n° 87. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député. Je vais maintenant céder la parole à M. le député des Îles-de-la-Madeleine. M. le député.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui. Merci, M. le Président. Minuit quarante-cinq. Alors, dans un bâillon, M. le Président, en pleine nuit, où on veut camoufler l'inaction du gouvernement, évidemment, c'est avec beaucoup de plaisir que j'interviens sur le projet de loi n° 87, M. le Président.

Le projet de loi n° 87 qui nous arrive en toute hâte, dans un bâillon où il faut l'adopter très rapidement. Ce qu'il faut indiquer, M. le Président, au niveau de ce dossier, c'est que le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois, laisse traîner les choses depuis décembre 1994, dans ce dossier.

Alors, on voit que ce gouvernement s'est laissé traîner les pieds tout au long de ce dossier. Et qu'est-ce qui a fait en sorte que, tout à coup, le gouvernement a réagi, M. le Président? Alors, qu'est-ce qui a fait en sorte que le gouvernement a réagi? Ç'a été lors de l'émission Le Point , où il y a eu un reportage sur la problématique qui existait au niveau de Côte-des-Neiges, au niveau de cette école, et des questions de notre collègue, M. le Président, le député de Mont-Royal, qui a fait en sorte que la ministre a été obligée de réagir, réagir.

Mais, ceci étant dit, le dossier était sur la table de la ministre depuis décembre 1994. Et là, M. le Président, compte tenu que le gouvernement n'a pas agi au cours de ces deux dernières années, alors on avait besoin d'un bouc émissaire, d'un bouc émissaire pour cacher cette inertie. Et le bouc émissaire, M. le Président, c'était de faire en sorte de semer la division, semer la chicane entre deux commissions scolaires et de leur passer la balle, en quelque sorte, compte tenu qu'on n'était pas capable de régler le dossier, et ça, M. le Président, au détriment des élèves. Ce sont les élèves qui sont en otage. Et je pense que l'action de gouvernement, l'action du législateur... Et, nous, comme députés membres de l'Assemblée nationale, M. le Président, nous devons toujours être préoccupés par les clientèles, par les gens qui sont concernés par les décisions qui sont prises, et non pas par les structures. Alors, on n'est pas capable de décider? On crée une chicane artificielle au niveau des commissions scolaires, et ça, sur le dos des élèves, M. le Président.

Compte tenu que la ministre aurait pu régler le dossier sans passer la balle à d'autres, M. le Président, et sans intervenir, en bout de piste, dans un bâillon avec un projet de loi à la toute dernière minute, M. le Président... Car la ministre offrait 1 500 000 $ pour réaménager des locaux, M. le Président, qui ne réglaient pas le problème de toute façon, dans une perspective à moyen terme.

Alors, M. le Président, qu'est-ce qui s'est passé? C'est que ça prenait 500 000 $ de plus pour régler le problème, en construisant une école neuve et faire en sorte d'accommoder jusqu'à 900 élèves. Et les pronostics du ministère, M. le Président, nous indiquent que, d'ici 1999, la clientèle serait à 900. Et, en plus, M. le Président, la ministre nomme un médiateur dans le dossier, qui lui recommande d'accepter cette solution et d'injecter 500 000 $ de plus pour faire en sorte qu'on construise une école neuve.

(0 h 50)

Mais, M. le Président, quelle est la vraie raison pour laquelle la ministre n'a pas voulu intervenir? Quand on sait qu'en 1995-1996, il y a eu des projets pour 615 000 000 $ au niveau des infrastructures en construction, M. le Président, d'écoles, au Québec. Alors, 500 000 $ sur 615 000 000 $, la ministre ne viendra pas nous dire qu'elle n'était pas capable de le trouver, M. le Président. Et compte tenu que son médiateur, son propre médiateur, lui a indiqué que c'était la solution appropriée... Mais non! Quelle est la vraie raison qui cache l'inaction de la ministre, M. le Président? Est-ce que la vraie raison, c'est que c'est des anglophones qui sont touchés? On peut se poser la question.

On peut se poser la question, d'autant plus, M. le Président, que ce gouvernement a priorisé une solution au niveau du cégep de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, une solution beaucoup plus dispendieuse que même les gens voulaient en termes de besoins. Et comment comprendre, M. le Président, que la ministre ne peut pas investir 500 000 $, alors que le député de Lévis, lui, à l'époque, pour sa gloire personnelle, a décidé que, au niveau de la commission scolaire de Lévis-Bellechasse, il les a scindé en deux, lui, parce qu'il en voulait une dans son comté, une commission scolaire. Et ça, investir dans des structures...

Alors, M. le Président, vous comprendrez que nous nous objectons farouchement à l'adoption de ce projet de loi, compte tenu que ce serait cautionner l'inaction de la ministre et cautionner aussi les mauvaises priorités de la ministre au niveau de l'éducation. Je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Je vous remercie, M. le député des Îles-de-la-Madeleine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viau. M. le député.


M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Et puis il est exactement 00 h 53. Est-ce qu'on a changé... Oui, on a changé, justement, la date. M. le Président, on a commencé le 18 décembre, à 10 heures le matin; on est maintenant rendu au 19 décembre, sans interruption. Et je comprends qu'il y a certains députés ministériels, M. le Président, de votre côté qui sont en train de jouer avec des jeux informatisés sur l'ordinateur portatif, mais je ne soulèverai pas l'article 32, ils semblent être très intéressés beaucoup plus par des jeux d'ordinateur, M. le Président, que par le problème ici qu'on est en train de...

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, on sait très bien qu'on ne peut attaquer la conduite d'un député autrement que par une motion. Alors, si le député de Viau a l'intention de faire une motion, il l'a fera selon nos règles, M. le Président. Et je dois dire que les ordinateurs sont acceptés ici, en cette Chambre, et qu'ils ont le droit de faire du travail sur leur ordinateur. Même s'il est 0 h 55 du matin, ils ont le droit de travailler, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Je crois que votre leader adjointe a bien fait son travail. Je demanderais aux autres de respecter le règlement. Alors...

Alors, M. le député de Viau, vous savez qu'on ne doit pas indiquer, là, ce que l'un et l'autre peut faire et ce à quoi il s'occupe dans cette Chambre; c'est une règle qu'on s'est imposée. Et l'utilisation d'un ordinateur est permis depuis quelques temps, pour... On sait que c'est un instrument de travail moderne, et on l'a permis dans cette Chambre dans la mesure où ça ne distrait pas et que ça ne dérange pas les autres.

Alors, M. le député de Viau, je vous cède la parole.

M. Cusano: Dans ce cas-là, M. le Président, question de règlement. Est-ce qu'on pourrait vous demander d'appliquer l'article 32, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, s'il vous plaît! Alors, j'inviterais, de part et d'autre, tous ceux qui ne sont pas à leur endroit, à leur place... M. le député.

Alors, nous allons poursuivre. M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le Président, c'est ça la farce: imposer un bâillon depuis quelques heures pour adopter des projets de loi sans que les gens aient la possibilité de s'exprimer, M. le Président.

C'est que, il faut comprendre une chose, M. le Président, ce problème n'est pas un problème qui est arrivé du jour au lendemain. La CECM de Montréal, la Commission des écoles catholiques de Montréal avait souligné son besoin d'espaces-élèves il y a deux ans. Puis je ne peux pas croire – parce que ça fait longtemps que je connais la ministre, l'actuelle ministre de l'Éducation – qu'elle ne se soit pas occupée de ça. Pourquoi elle ne s'est pas occupée de ça? Il faudrait qu'elle nous le dise, qu'elle nous dise pourquoi elle s'est traîné les pattes depuis au moins deux ans, M. le Président.

La réalité, effectivement, M. le Président, c'est qu'il y a besoin de places-élèves dans le secteur de Notre-Dame-de-Grâce. C'est ça... De Côte-des-Neiges. Je m'excuse, c'est dans le même bout. M. le Président, c'est ça qui est la réalité. Et là on arrive avec un projet de loi qui dit que la loi va obliger des personnes à en venir à une entente. Mais quelle entente?

Vous avez un organisme, un niveau de gouvernement, qui est le gouvernement scolaire, qui existe ici au Québec depuis des années, vous avez une commission qui s'appelle la Commission des écoles catholiques de Montréal qui gère un certain territoire où des citoyens, M. le Président, paient des taxes. Ils ont le droit, eux, de gérer leur territoire et leurs immeubles. De l'autre côté, vous avez un autre territoire qui est géré par la PSBGM. Ce territoire est géré par un conseil d'administration des commissaires, qu'on appelle, et ces personnes-là gèrent entre autres des argents qui sont justement payés par nos concitoyens pour qu'ils aient le droit à certains bénéfices particuliers au niveau de leurs élèves.

Savez-vous c'est quoi, M. le Président? Je pense que la ministre, elle n'a pas connu ça. Avec ce qui est proposé dans le projet de loi et l'effet domino... Moi, je l'ai été avant que j'arrive ici en 1981, directeur d'une école où mes 600 élèves que j'avais dans cette école-là étaient transportés. Je vais vous dire une affaire: Là, ce n'est plus les professeurs qui contrôlent l'acte pédagogique, ce n'est plus les directeurs d'écoles qui contrôlent l'acte pédagogique, c'est les chauffeurs d'autobus qui contrôlent l'acte pédagogique, et c'est ça que vous êtes en train de faire, oui.

Mme la leader adjointe du gouvernement, elle dit non. Mais qu'elle visite son comté, parce que j'en connais, des écoles dans votre comté qui ont le même problème, Mme la députée, où, justement, lorsqu'on demande à des enfants... Oui, j'en connais plusieurs écoles dans votre comté; vous seriez surprise, Mme la députée, où c'est justement le problème qui... La solution qui est apportée, M. le Président, ce n'est pas une solution. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Viau. Je cède la parole maintenant à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, c'est un drôle de projet de loi. C'est un projet de loi où on oblige deux personnes à s'entendre, deux personnes – qui sont de deux corporations, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et la Commission des écoles catholiques de Montréal – et on leur dit: Si vous ne vous entendez pas, bien, on va probablement prendre une décision, mais on ne vous dit pas quelle décision on va prendre. Alors, si je comprends bien, à l'article 1, on dit: Vous devez vous entendre, et, à l'article 2: Si vous ne vous entendez pas, à ce moment-là on imposera notre décision. Il aurait été beaucoup plus sage, M. le Président, de commencer par dire quelle était la décision qu'on voulait imposer plutôt que de dire: Vous devez vous entendre.

M. le Président, on a devant nous un problème qui est dû à quoi? Dans le fond, il est dû au retard que ce gouvernement a pris à imposer les commissions scolaires linguistiques. Si on avait commencé normalement, sans prendre des retards énormes parce qu'on ne veut pas négocier ou demander au gouvernement fédéral de rouvrir l'article 93 et de redessiner et repartager les écoles sur l'île de Montréal en fonction de critères qui ne sont plus des critères religieux, mais des critères linguistiques... On trouve aujourd'hui des aberrations qui font qu'il y a des écoles qui sont... Pour la même communauté linguistique, on a des gens qui sont dans des écoles qui sont de religions différentes les unes à côté des autres, et on est obligé de trouver des solutions barbares, bizarres ou biscornues pour résoudre ce problème.

(1 heure)

Parce que, dans le fond, qu'est-ce qu'on est en train de faire? On a trois écoles et on en prend... Enfin, on ne sait pas exactement ce qu'on va faire, M. le Président, parce qu'on dit: Il y en a trois qu'on est en train de considérer. Vous regardez celle de l'annexe 1, il s'agit de l'école qui est située sur la rue Vézina. On rappelle aussi, dans l'annexe 2, qu'il y a l'école qui est située sur la rue Van Horne, l'école Shadd Academy; et il y a l'école qui est située sur le Chemin de la Côte-Saint-Luc, qui est une école de la CECM et qui est Marymount Academy.

Et qu'est-ce qu'on demande ni plus ni moins? On demande: Entendez-vous tous les trois. Vous êtes obligés de vous entendre, sinon la ministre, elle va imposer je ne sais quelle solution. D'abord, ce n'est même pas dit, nulle part, quelle est la solution qu'elle veut imposer. Est-ce qu'il n'aurait pas été plus simple, M. le Président, de faire des démarches rapides pour tâcher d'en arriver à mettre sur pied un réseau de commissions scolaires linguistiques? Est-ce qu'il n'aurait pas été plus simple, Mme la ministre, sérieusement, de commencer à travailler – parce que le problème, vous allez l'avoir, il va arriver, il va arriver – pour être en mesure de déposer quel va être le partage des écoles que vous allez devoir faire sur la base linguistique? Ça va vous arriver à un moment ou à un autre.

Si jamais vous avez le courage d'aller dans cette direction-là, le jour où vous allez devoir, sur l'île de Montréal, repartager les écoles, vous allez devoir avoir un plan de repartage des écoles, vous allez devoir avoir une mécanique, un moyen pour repartager les écoles entre les écoles qui actuellement sont des écoles protestantes et demain pourront devenir des écoles anglophones, des écoles qui actuellement sont des écoles catholiques et demain redeviendront des écoles francophones et celles qui sont au milieu. Il faut voir ça à l'intérieur d'un plan global et non pas sur une manière, un abord à la pièce tel que c'est fait ici.

Il y a un élément absolument déplaisant dans ce projet de loi, où, du haut de notre grandeur, on vient dire aux gens: La Commission des écoles protestantes de Montréal et la Commission des écoles catholiques doivent s'entendre. On décrète ça comme ça. On prend deux personnes, deux corporations, deux personnes morales et on leur dit: Vous devez vous entendre. Ça n'a pas de sens, M. le Président. Ça n'a pas de sens. La loi ne doit pas dire «doivent s'entendre». Le rôle de la ministre aurait été de mettre sur pied des conditions objectives pour en arriver à une entente, mais non pas de décider qu'il faut qu'il y ait une entente. Ça ne peut pas fonctionner comme ça.

M. le Président, il est clair qu'on va voter contre le projet de loi n° 87. Il n'y a pas d'autre solution intelligente que de voter contre ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Verdun. Je vais céder la parole à M. le député de Bourassa. M. le député.


M. Yvon Charbonneau

M. Charbonneau (Bourassa): Oui. M. le Président, nous nous devons d'intervenir à ce moment-ci sur le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal.

À ce stade-ci, j'allais dire du jour mais plutôt de la nuit, M. le Président, il nous faut quand même tenter de faire la lumière sur la portée de ce projet de loi et son caractère particulièrement inacceptable. Nous sommes sous le coup du bâillon. Il y a plusieurs gens d'en face qui bâillent d'ailleurs de l'autre côté.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, quant à nous, nous nous devons de prendre nos responsabilités et de parler, parce que, pour eux autres, c'est ça que ça veut dire, le bâillon, ça veut dire bâiller au lieu de se taire ou de prendre la parole au micro quand c'est le temps. J'entends le poulailler qui se réveille, là, à 5 heures du matin. M. le Président, l'essentiel de ce projet de loi...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Alors, rapidement, Mme la leader adjointe du gouvernement. Rapidement.

Mme Caron: Oui. Je pense que le règlement est très clair, 35.7°. Il est interdit pour un député qui a la parole de se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant pour qui que ce soit.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Bourassa, il faut éviter les qualificatifs qui sont peut-être blessants. Alors, je vous recède la parole, mais évitez les qualificatifs blessants pour les gens.

M. Charbonneau (Bourassa): Ce qui est inacceptable dans ce projet de loi, M. le Président, c'est que la ministre se serve finalement des commissions scolaires comme bouc émissaire et, en particulier, qu'elle tombe sur le dos de la commission scolaire protestante du Grand Montréal. C'est ça, la vraie portée de cette loi-là.

M. le Président, en prenant compte du dossier, en prenant compte des éléments du dossier, ce que nous découvrons, c'est que le médiateur nommé par la ministre, qui a fait un travail extraordinaire en quelques jours – en gros, là, une semaine – qu'est-ce qu'il dit au début de son rapport? Il dit une chose, M. le Président, qu'on devrait rappeler sans cesse: que la réalisation de ce mandat dans une si courte période de temps n'aurait pas été possible sans la collaboration totale et empressée des deux commissions scolaires. Durant toute la semaine, ces personnes se sont tenues constamment disponibles, et tout le rapport, M. le Président, un rapport intelligent, un rapport perspicace, un rapport fait d'une manière très compétente par M. Thomas Boudreau, un ancien sous-ministre, tout ce rapport, pendant 14 pages, fait état de la collaboration que lui ont apportée les deux commissions scolaires en question, collaboration totale pour mettre sur pied, mettre au point des hypothèses, vérifier, contrevérifier les hypothèses et en arriver à deux solutions possibles.

J'arrive à la fin du rapport, M. le Président, deux solutions possibles: ou bien on construit une école – et ils ont même trouvé un terrain fourni par la commission scolaire protestante – ou l'autre solution, une loi spéciale. La ministre a sauté sur la loi spéciale, qu'elle introduit dans un bâillon en pleine nuit, le bâillon de la nuit dernière pour ne pas que ça paraisse trop. Pour faire le moins de dommages politiques possible, on fait adopter le bâillon la nuit. Comme ça, ça ne fait pas trop des gros titres dans les journaux, on commence les débats une fois que les heures de tombée sont faites. Et, cette nuit, bien, on fait la deuxième partie de la job, on fait adopter les projets de loi également au moment où peu de gens sont à l'écoute.

M. le Président, c'est inacceptable. C'est les enfants qui paient. C'est les enfants qui paient et les francophones qui paient, et également les enfants issus des communautés ethniques. Laissez-moi vous lire deux paragraphes du rapport de M. Boudreau, page 4 du rapport: «Ces élèves, au nombre de 600, sont transportés chaque jour dans une dizaine d'écoles différentes de la CECM. Durée de trajet: 30 à 50 minutes. Il arrive que des enfants d'une même famille ou des copains habitant la même rue soient séparés dans des écoles différentes.»

Deuxième grand constat des enfants et des familles qui sont touchés: «Les parents de ces quelque 600 enfants sont en grande majorité des Québécois de diverses communautés ethniques.» Il n'y en a pas beaucoup, des députés péquistes qui représentent des comtés à haute densité de communautés ethniques. «Selon eux, l'effort qui leur est demandé et qu'ils font pour s'intégrer à la société québécoise francophone ne rencontre pas, du moins dans le domaine scolaire, l'appui et la compréhension nécessaires.» La ministre a choisi une solution d'autoritarisme: imposer une solution plutôt que de travailler et de laisser travailler les commissions scolaires ensemble. C'est inacceptable, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Bourassa. Je vais céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis malheureux que nous soyons réunis ici ce soir; malheureux que l'on nous ait enlevé notre droit de nous exprimer librement et ouvertement, conformément aux règles et procédures de cette Assemblée nationale; malheureux aussi parce que le gouvernement du Parti québécois a suspendu les règles de la démocratie; malheureux parce que ce gouvernement du Parti québécois nous a imposé un bâillon.

Mr. Speaker, I stand before you tonight outraged against Bill n° 87, the bill which we are dealing with here tonight, a bill which has been presented to us in the dark of the night, at one o'clock in the morning, in the dark and depth of an immoral PQ Government.

(1 h 10)

Mr. Speaker, I stand before you ashamed of this PQ Government, ashamed of the strong-armed tactics being used against the Protestant School Board of Greater Montreal, tactics which you only can find in a banana republic, tactics which are odious and outrageous. Yes, there is a shortage of classroom space in the Côte-des-Neiges area for the children of the area, many of whom have to attend schools belonging to the Montreal Catholic School Commission.

Yes, I agree, a solution must be found, a solution could be found, and a solution will be found, but not on the back of the Protestant School Board of Greater Montréal and not on the back of the anglophone community of Greater Montréal. I find it immoral, odious to find a solution at the expense of the Protestant School Board of Greater Montréal.

If the rules were reversed, you could be sure that the same answer would not be found in favor of the Protestant School Board of Greater Montréal. Mrs. Marois and the PQ Government are guilty of a double standard, guilty of favoring one school board over the other. She and her Government are narrow-minded, biased and prejudiced against the Protestant School Board of Greater Montréal, the anglophone community of the province of Québec. The PQ Government is guilty of grabbing, of seizing, of taking, of profiting, without any legal right whatsoever, of a school which belongs, legally, validly, historically and by the Constitution, to the Protestant School Board of Greater Montréal, namely Shadd Academy, a building in which the Protestant School Board has recently invested much money, a school which is absolutely necessary for an anglophone community struggling to retain its continuity and growth in this province.

Once again, we see that the commitment made by the Premier to the anglophone community at the Centaur Theater was a hoax and lie. This illegal act by the PQ Government constitutes a new threat to the survival of the anglophone community, a community which needs positive acts, a positive signal from the Government and which is getting a negative message, a threat to its survival, not only to the survival of the anglophone community, but to the good and welfare of the whole of this province of Québec.

Alors que nous nous balançons entre l'intolérance que personne ne désire et le ridicule que personne ne souhaite, nous privons la province d'une de ses plus précieuses ressources: une génération future d'anglophones et de francophones à la fois dynamiques, entreprenants et bien éduqués. On comprend que la composante anglophone de cette future génération reçoit un message que le gouvernement du Parti québécois lui envoie avec ce projet de loi n° 87. Moi, je joindrai ma voix à celles des députés de l'aile parlementaire libérale pour voter contre ce projet de loi n° 87. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Je vais céder la parole à M. le député de Bertrand.


M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci, M. le Président. On se retrouve ici, au moins pour une deuxième soirée consécutive, une deuxième nuit, je pense une quatrième nuit dans la session, ou une cinquième nuit. C'est presque un record. Je ne sais pas si le député de Joliette, avec sa grande expérience, se rappelle qu'on a siégé aussi souvent sur des soirées. Il dit honnêtement: Jamais. Donc, ça n'a vraiment pas de bon sens, et en particulier sur ce genre de projet de loi qui nous indique que... On fait une loi pour que les gens s'entendent. Imaginez-vous, les gens qui habituellement doivent se parler et s'entendre, s'ils ne s'entendent pas, il y a une loi.

Je veux faire un parallèle, M. le Président, avec la belle entente du secteur public et je vais peut-être donner quelques résultats parce que j'ai eu l'occasion de parler ce soir à des syndiqués de l'enseignement de ma région qui ont rejeté l'entente. Et il y a eu une résolution – et je dis ça à mes collègues – qui est assez surprenante, parce que n'oubliez pas que les syndiqués ont perdu confiance pas juste au gouvernement, aux chefs syndicaux. Il y a eu une résolution d'un syndiqué, ce soir, dans ma région, qui demandait un appui à ce que les chefs syndicaux se retirent de la négociation. Écoutez, on est rendu loin, là. On est rendu dans une belle entente, dans une négociation où les syndiqués mêmes demandent aux chefs syndicaux de se retirer parce qu'on a perdu confiance aux chefs syndicaux. Et vous allez avoir des surprises que la belle entente... Parce que la belle entente, les syndiqués commencent à trouver que... Il y a deux choix: le premier choix, on prend votre surplus de fonds de retraite, on vous coupe cinq, six journées de maladie ou on vous l'impose. Un ou l'autre. Elle est où, l'entente? Elle est où, la possibilité de négociation? Donc, les syndiqués commencent à se réveiller. Un peu comme on est en train d'imposer aux commissions scolaires, les syndiqués sont en train de dire: Écoutez, si on accepte, on va nous dire qu'on a négocié. Il n'y a rien à négocier, absolument rien à négocier. Il y a un plan de tracé où on impose quelque chose.

Donc, M. le Président, ça n'a pas de sens d'avoir une loi n° 87 qui dit... Écoutez, la ministre, surtout avec sa loi, menace d'imposer une décision qu'on ne connaît pas: Vous allez vous entendre, vous allez vous asseoir. Je ne suis pas convaincu que la ministre n'aurait pas pu régler ça de façon différente. On parle tout le temps: Écoutez, les parties vont s'asseoir, elles vont s'entendre, elles vont réussir à trouver un terrain commun. Ce n'est pas le cas. On dépose une loi. En plus, on met le bâillon, M. le Président, on met le bâillon puis on vous dit: Écoutez, vous allez parler cinq minutes, vous allez vous taire après. Pas question qu'on étudie ça en commission parlementaire, puis on va imposer notre directive.

M. le Président, il y a eu même un médiateur qui a proposé des solutions à la ministre, qui, là, permettaient une solution négociée. Mais ce n'est pas ça qui s'est passé. On a dit: Non, c'est la loi. C'est nous qui dictons, puis, les autres, vous exécutez. En fait, le gouvernement avait besoin d'un bouc émissaire pour camoufler un petit peu ce qui ne s'est pas fait dans le passé et a décidé donc de lancer une querelle entre deux commissions scolaires. C'est exactement ça, M. le Président. Pourquoi on n'a pas suivi les directives du médiateur? Comme je vous le disais, les gens sont en train de perdre confiance. Les belles ententes négociées sont en train de s'effriter parce que les gens commencent à s'apercevoir réellement qu'il n'y en a pas, d'entente; qu'il n'y a pas de façon de négocier. Il y a déjà une ligne de tracée, et cette ligne-là va être mise en oeuvre.

Regardez, M. le Président, l'article du Devoir du 14 décembre: le président de la CECM ne reconnaît pas cette mésentente. Il n'y en a pas, de mésentente. Ce n'est pas une querelle entre deux commissions scolaires; il s'agit plutôt d'une divergence entre le ministère et une commission scolaire. Là, la ministre a décidé: Écoutez, on va obliger les gens à se parler, on va les obliger a s'entendre. S'ils ne s'entendent pas, on fait une loi.

Donc, M. le Président, les gens vont... je dis «vont», ont perdu confiance dans le mot «entente», le mot «dialogue», le mot «consensus» du gouvernement, parce qu'il n'y en a pas, de consensus. Il n'y a pas de possibilité de consensus. C'est une loi, un bâillon, une directive, surtout une taxe. Donc, on va être contre la loi n° 87.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Bertrand. Je vais maintenant céder à M. le député de... Laurier-Dorion, oui.

M. Sirros: C'est bien. Laurier-Dorion, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. D'abord, le jamais vu, le jamais vu étant le fait qu'on dépose un projet de loi il y a à peine deux, trois jours sans jamais avoir l'occasion de pouvoir saisir ça et discuter de ça. Et, tout d'un coup, le projet de loi, qui a été, comme par magie, trouvé sur les tablettes ici, se retrouve également au sein d'un bâillon. Je constate que le premier ministre n'est pas ici, M. le Président, et j'espère qu'il dort en paix... Ah! je m'excuse.

M. Bélanger: Question de règlement.

M. Sirros: Ah! Bien, allez-y, allez-y.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, en fait le... M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: On ne peut mentionner la présence ou l'absence d'un député, M. le Président.

M. Sirros: C'est vrai, M. le Président. C'est vrai, ça m'a échappé à cette heure-ci, à une heure et demie, après quelques nuits. C'est vrai que ça m'a échappé qu'on ne pouvait pas mentionner le fait qu'un député était absent. Ce que je voulais dire est que, peu importe, figurativement parlant, le premier ministre peut dormir en paix: le titre de négociateur en chef ne sera certainement pas volé par la ministre de l'Éducation. Certainement pas parce que ce qu'elle est en train de faire, au lieu de trouver une solution à négocier puis permettre aux instances concernées d'arriver à une solution – et il y en a, des solutions – au lieu de ça, elle est en train de mettre le trouble, pour ne pas dire le bordel, M. le Président, et de créer ainsi plus de conflits dans une situation qui, déjà, est un peu sensible sous l'aspect linguistique.

(1 h 20)

Ce que la ministre fait, c'est qu'elle prend un parti pris assez évident entre deux commissions scolaires, tandis que, dans une situation très similaire, il y a à peine quelques mois, sinon une année... J'écoutais tantôt mon collègue qui référait à une situation similaire dans l'est de l'île, où la PSBGM, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, avait demandé à peu près la même chose à la ministre et elle avait refusé à ce moment-là d'intervenir pour que la CECM transfère une école pour l'utilisation par la PSBGM.

Ce n'est que tout d'un coup, ici, qu'elle a trouvé que c'était urgent. Et ça met en cause un peu la bonne foi de la ministre quant à la façon d'agir dans ce dossier, M. le Président, parce qu'on constate que la préoccupation devrait être, normalement, de s'assurer que les élèves en question vont avoir accès à une éducation en français, pas nécessairement à travers une commission scolaire ou l'autre, M. le Président. Parce que la ministre a choisi de ne pas agir pour s'assurer qu'on puisse avoir des commissions scolaires linguistiques, et, si on avait eu des commissions scolaires linguistiques, peut-être que ce problème ne serait pas un problème, M. le Président.

Mais, à cause des convictions séparatistes de ce gouvernement et de la peur bleue qu'ils ont de démontrer que ce serait possible de faire évoluer la fédération avec des amendements constitutionnels, ils ont refusé d'agir à l'ouverture qui a été, évidemment, mise sur la table pour qu'on puisse avoir rapidement un amendement constitutionnel pour avoir ce que tout le monde réclame et ce que le bon sens dicte: des commissions scolaires linguistiques. Mme la ministre a quelque chose a dire, M. le Président? Ce serait intéressant qu'elle aille s'asseoir pour le dire, je serais prêt à l'écouter.

Alors, il est quand même 1 h 30, on est en droit de s'attendre à ce qu'on puisse ne pas nous interpeller de cette façon-là, M. le leader parlementaire, n'est-ce pas?

Alors, cela étant dit, M. le Président, il est évident que le fait de ne pas avoir agi pour régler le problème à sa source au niveau de la création des commissions scolaires linguistiques force la ministre à prendre un parti pris, à dire: Moi, c'est à travers la Commission des écoles catholiques de Montréal que je veux m'assurer que l'accessibilité à l'éducation en français soit assurée. Parce que la PSBGM, eux autres, ils disent: Nous sommes peut-être une commission scolaire protestante, ça ne nous empêche pas de décider qu'on veut mettre à la disposition des élèves qui veulent bien se servir de nos écoles des services en français. Et les 600 élèves de la CECM pourraient facilement avoir accès à l'éducation en français à la PSBGM. N'eût été du fait que la ministre décide de prendre un parti pris, ce qui crée le genre de «outrage» évident dans la communauté anglophone et plus particulièrement au sein de la PSBGM au niveau de la gestion des écoles, sans dire le fait qu'elle va se créer des problèmes juridiques parce que la solution réelle ne sera pas une solution, M. le Président, en plus du fait de nous faire subir ce genre d'agissement antidémocratique pour, finalement, imposer une solution qui ne sera pas une solution parce qu'elle aura évité de vraiment solutionner le problème à sa source...

M. le Président, vous me dites que, dans 10 secondes... Je suis convaincu que la ministre va finalement comprendre le bon sens, retirer ce projet de loi et laisser tout le monde aller dormir en paix, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour dans cette opération bâillon, 1 h 25 du matin, le projet de loi n° 87...

Des voix: ...

M. Fournier: Et, M. le Président, pour rappeler les propos de l'ancien leader, qui s'ennuie peut-être de ses anciennes fonctions, qui nous dit qu'il a bien hâte de faire jouer sa majorité oppressante contre la minorité qui se fait l'écho de la population... C'est ça, c'est ça, M. le Président, qu'on constate ici, de voir cette joie de pouvoir «bulldozer» des projets de loi. Et, dans le cas de ce projet de loi ci, j'avais à l'idée d'ouvrir ma présentation courte et qui devra être plutôt limitée, M. le Président, à cause du bâillon, en rappelant les propos de Pierre Bourgault du 7 décembre.

Des voix: ...

M. Fournier: Je voudrais m'intéresser à ce passage, M. le Président... La ministre de l'Éducation me dit qu'elle l'a entendu assez souvent; j'espère que ça va les marquer pour l'avenir. Il disait, M. Bourgault: «Tout se déroule comme si M. Bouchard – enfin, je m'excuse, l'actuel premier ministre – se disait, en se levant le matin: Il me semble qu'on a oublié de frapper sur quelqu'un hier, alors on va s'en occuper aujourd'hui.»

Une voix: C'est ça.

M. Fournier: Bien, aujourd'hui, M. le Président, c'est les commissions scolaires.

Une voix: Les Anglais.

M. Fournier: Aujourd'hui, c'est cette idée de décentralisation, comment on la voit, et c'est cet aspect que je voudrais qu'on regarde ensemble. Mes collègues ont parlé d'abondance, notamment, des commissions scolaires linguistiques, de ce discours au Centaur, de ses promesses: Oui, on va aller de l'avant. Et puis, bien, l'improvisation – dont parle d'ailleurs M. Bourgault – le cafouillis: tout ça revient dans la façon dont on gère au gouvernement.

Mais je voudrais m'intéresser à un autre aspect, M. le Président. Cet autre aspect, vous vous souvenez de la belle époque des consultations sur la souveraineté. Vous vous souvenez de ces commissions régionales où on se promenait partout en se disant que, nous, on voulait prôner la décentralisation, on voulait responsabiliser les intervenants locaux. On croyait donc à ça, la responsabilisation des intervenants locaux! Eh bien, on voit ce que c'est, cette décentralisation en action, ce gouvernement qui se dit: Ah! on va aller décider où sont les écoles, on va le faire nous-mêmes; on va faire ça dans la nuit à Québec. Il y a des commissions scolaires qui ont des rôles, qui sont élues, qui ont des budgets, qui ont des fonctions, qui sont imputables. Nous, à Québec, grâce à ce merveilleux gouvernement, on va tout scraper ça, on va faire ça à une heure et demie du matin, on va mettre le bâillon là-dessus puis on va prendre les décisions pour tout le monde.

C'est ça, la décentralisation. C'est ça, la décentralisation dans la tête de ce gouvernement. Et qu'est-ce qu'ils cherchent? Pourquoi font-ils ça? Parce qu'ils n'ont aucune base pour décider d'aller à côté de la décision ou de la recommandation qui a été faite par le médiateur. Aucune base, M. le Président. Ça a été très bien démontré par mon collègue de Marquette que, si on voulait avoir un peu de vision, si enfin un jour ce gouvernement pouvait renoncer à l'improvisation et se dire: Je vais avoir de la vision... Pas facile, M. le Président.

Une voix: Impossible.

M. Fournier: Pas facile. Pas facile d'avoir de la vision quand on s'est fait élire sur des engagements et qu'à chaque jour on se dit: Comment je vais pouvoir les renier, aujourd'hui? Ça, c'est le prochain article de M. Bourgault, la semaine prochaine, ça.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Ça, je suis sûr que M. Bourgault va nous dire: Ce gouvernement, à chaque matin, se dit: Quel engagement je vais renier aujourd'hui? Il n'en reste plus beaucoup. Il y en a beaucoup déjà qui ont été reniés. Mais celui-ci de la décentralisation, celui-ci du respect supposé, prétendu des gens de la base, des gens qui ont à coeur... et qui sont responsables, qui doivent être imputables, pourquoi on ne veut pas le faire? Qu'est-ce qui se cache derrière tout ça? Pourquoi créer de la chicane? Pourquoi inventer de la chicane entre deux commissions scolaires qui nous disent: Bien, voyons donc, on ne se chicane pas! La chicane, elle vient d'où? Elle vient de Québec, une heure et demie, le bâillon, la ministre de l'Éducation qui invente de la chicane, comme bien d'autres dans ce gouvernement qui inventent de la chicane. Dans quel but? Diviser, M. le Président, diviser, s'approprier tous les pouvoirs, toutes les fonctions et diviser les Québécois entre eux.

Je pense que le gouvernement, s'il ne veut pas nous entendre, pourrait au moins entendre son allié Pierre Bourgault, pourrait le lire, pourrait entendre des gens qui sont tout autour d'eux et qui leur disent, même dans les commissions scolaires... – et ils les connaissent, dans toutes les commissions scolaires au Québec – qui regardent la façon dont on procède. Et je termine là-dessus, M. le Président. Malheureusement, je n'ai pas assez de temps pour dire à ce gouvernement...

Des voix: Ah!

M. Fournier: ...combien il doit écouter même les gens qui sont leurs propres amis, qui leur donnent des conseils. Je termine en voyant la ministre de l'Éducation, qui semble trouver ça bien drôle de pouvoir assumer toutes les fonctions du pouvoir à elle seule, avec ses amis du gouvernement, sans aucun respect pour ceux qui nous ont envoyés ici, à Québec, pour les représenter.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je remercie M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Joliette et ministre d'État des Ressources naturelles. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Oui, la ministre de l'Éducation trouve ça triste, triste et décevant. Ces 22 ténors en ligne qui viennent de nous dire, là: Oui, nous autres, on est d'accord avec le fait que 650 jeunes fassent 50 minutes de transport par jour, alors que, dans leur quartier, il y a des locaux vides...

Des voix: Oui.

(1 h 30)

M. Chevrette: ...puis qu'on n'a pas le courage de prendre des décisions. C'est pour ça qu'on est triste. Vingt-deux ténors – puis je suis parlementaire, parce que j'ai failli utiliser des termes... Ces gens-là, sous le prétexte de dire qu'il y a de la conciliation, de la médiation, ils essaient de mêler ça aux problèmes linguistiques, ils essaient de faire n'importe quoi. Dans des communautés naturelles, il y a des locaux payés par les taxes des citoyens québécois. On leur dit: L'utilisation maximale des locaux, dans une région naturelle. Vous êtes en train de défendre le fait que des jeunes, 650 jeunes, soient obligés de quitter leur quartier, de faire 50 minutes de trajet pour aller dans des écoles alors qu'ils ont des locaux vides à proximité. Vous défendez ça? Vous allez être longtemps de l'autre bord de la Chambre! Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir après le député de Joliette. Ce qu'on lui dit, de ce côté-ci de la Chambre, il y a 22 ténors qui lui disent, M. le Président, que ce problème existe depuis longtemps. Déjà en décembre 1994, la CECM avait demandé des locaux pour loger ces gens-là. On se réveille, M. le Président, hier ou avant-hier, puis on essaie de nous passer une loi entre les dents, en pleine nuit. Ç'est ça qu'on leur dit. Comme dit le ministre, ça fait 22 ténors qui lui disent ça. Il n'y a pas eu de plan d'ensemble. On parle de consensus, ce gouvernement-là parle de consensus, M. le Président? Il ne connaît même pas la définition d'un consensus. Il nous passe tout, en fin de compte, de force. Le consensus, M. le Président, ce n'est pas un enfant à qui on enlève la bouteille. C'est autre chose, un consensus.

M. le Président, puis je vais prendre une analogie ce soir, toute la journée... D'ailleurs, j'étais à la commission de l'éducation où on traitait du Code des professions, une autre loi – parce que ça me surprend qu'elle ne soit pas ici, dans le reste du bâillon – une autre loi qu'on a déposée hier ou avant-hier, qu'on nous demande d'adopter à une vitesse record, sans consultation, sans rien. Donc, M. le Président, c'est inacceptable de ce côté-ci de la Chambre.

Ce qu'on fait dans le cas de la présente loi, ce qu'on cherche, c'est un bouc émissaire. On cherche à trouver des coupables, à dire qu'il n'y a aucun consensus, mais tout ce qu'on fait, M. le Président, c'est enfoncer d'autres choses dans la gorge des intervenants. Le député de Châteauguay, tantôt, a cité Pierre Bourgault. Je sais que ça achale un peu les députés ministériels, mais l'article de Pierre Bourgault est très clair. M. le Président, il dit: «La consultation est à peu près inexistante. On frappe. Le dialogue n'a duré que trois jours.» Là il parle, à ce moment-là, du sommet économique. Et il dit: «À ce fameux sommet économique bidon, on frappe encore.»

Donc, M. le Président, il n'y a aucune mesure vraiment concrète pour relancer ce qui est important aujourd'hui, relancer l'économie, relancer les emplois et faire en sorte que, dans l'éducation, on ait un système qui entraîne une meilleure qualité d'éducation pour nos enfants. Tout ce qu'on fait, on impose des consensus, c'est-à-dire qu'on n'impose pas un consensus mais on impose la volonté du gouvernement.

M. le Président, il est aussi malheureux qu'on siège à 1 h 35, et puis on s'aperçoit que le seul porte-parole de la population, c'est l'opposition. J'invite les collègues de l'autre côté de la Chambre... Naturellement, il y a le député de Joliette qui a eu le courage de se lever, et peut-être le whip, mais on n'a entendu personne d'autre. J'oserais même dire, je ne sais pas s'il y en a un qui garde encore l'oeil, un oeil sur ce qu'on étudie durant la nuit. Donc, M. le Président, c'est tout à fait inacceptable parce que...

Une voix: ...

M. Brodeur: Pardon? Donc, M. le Président, il semble que, lorsqu'on intervient de cette façon-là, on réveille certaines gens, on réveille le poulailler, comme nous a dit tantôt le député de Bourassa...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, j'avais invité tantôt le député de Bourassa à ne pas utiliser des paroles blessantes. Alors, M. le député de Shefford, je vous invite à poursuivre.

M. Brodeur: C'est une figure de style, M. le Président. Donc, M. le Président, on s'aperçoit que, chaque fois qu'il y a des propos dans ce genre-là, le parti ministériel se jouque pour crier, en fin de compte, lorsque le temps de crier serait venu et d'intervenir sur le projet de loi. Donc, M. le Président, je n'irai pas tellement plus loin de ce côté-ci, en ce qui me concerne, tout simplement pour ajouter que, lorsqu'on intervient dans le domaine de l'éducation, depuis quelques mois, ce n'est que pour ajouter des taxes. Et on a ajouté des taxes, M. le Président, depuis le début de l'année, presque 1 000 000 000 $, et on n'a épargné absolument personne. Et, comme disait Pierre Bourgault, on se demandera demain matin qui on a oublié de frapper et on en frappera d'autres. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. On limite le temps de parole aux députés de l'opposition. C'est ça, une motion de suspension des règles que nous a imposée le leader du gouvernement avec la complicité de tous ses collègues, dont certains n'ont pas encore compris ce qui se passait ici. Alors, le temps de parole de l'opposition est limité, mais le temps de parler, du côté des ministériels, n'est pas arrivé.

On a eu droit tout à l'heure à peu près à 45 secondes du député de Joliette et, sauf erreur, le whip du gouvernement. La députée de Matapédia, je ne l'ai jamais entendue parler en cette Chambre. Je ne me souviens pas du son de sa voix, sauf des grognements à l'occasion. Le député de Bellechasse, la députée de Rimouski, la députée de Vanier, le député de Taschereau, qui sont ici, et rien à dire, rien à dire. C'est la loi du silence. Le bâillon, il n'est pas imposé strictement et seulement à l'opposition, on l'a imposé aux ministériels. La loi du silence. pourquoi? Parce qu'évidemment on a compris, au gouvernement, que, si on permet à un ou à une de ceux-là de se lever, ils risquent de dire des bêtises, parce qu'on ne peut pas évidemment défendre la position du gouvernement.

Deux heures moins le quart du matin, M. le Président: motion de suspension des règles pour faire passer des lois qui, en soi, sont déjà des lois matraque comme celle-là, le projet de loi n° 87. C'est quoi, l'objectif du projet de loi n° 87? C'est d'imposer le bâillon à deux commissions scolaires plutôt que de provoquer un consensus. Je dois avouer cependant que la ministre a essayé de le faire, puis elle a échoué, comme son prédécesseur d'ailleurs, le député de Lévis. On a essayé tant bien que mal. On dit qu'on a essayé. On a négligé nos devoirs, on a laissé traîner le dossier, puis là, bien, il y a des urgences. On s'est dit: On va aller chercher 400 000 000 $ puis on va passer en plus cette matraque à deux commissions scolaires.

Il faut se souvenir, M. le Président, que ça va un peu avec ce que ces gens-là disent depuis deux ans. Il faut se souvenir de la déclaration du député de Lévis qui souhaitait abolir les commissions scolaires. Il faut s'en souvenir. Et, la ministre de l'Éducation, bien, vous savez, elle n'est pas trop écoutée à l'intérieur de son gouvernement. Lorsqu'elle a suggéré l'imposition d'une taxe de 1 %, une taxe de vente, le premier ministre l'a tassée d'un revers de la main et ne l'a pas écoutée, puis elle n'a pas été appuyée par ses collègues dans la recherche d'une solution dans ce dossier-là. On lui a dit: Mme la ministre, faites-nous confiance, en temps et lieu on va le régler. On le règle à l'intérieur de la procédure la plus agressive qu'on ne peut pas trouver dans notre règlement: motion de suspension des règles, hein. Et on tasse le pouvoir municipal avec le projet de loi n° 77, 48 000 000 $ de taxes et, en plus, une ingérence absolument inqualifiable au niveau du pouvoir des élus municipaux.

Qu'est-ce qu'on fait avec le projet de loi n° 87? On tasse maintenant les élus scolaires. Il n'y aura de la place tout à l'heure au Québec que pour le gouvernement du premier ministre et député de Jonquière, et ça, ça ne comprend pas, évidemment, l'opposition. L'Assemblée nationale, à toutes fins pratiques, n'existe plus. Loi bâillon, 2 heures du matin, procédure de bâillon pour pousser des lois qui, en soi, comme je le disais tout à l'heure, sont des matraques imposées au monde scolaire, aux élus municipaux. Un dossier qui traîne depuis décembre 1994, puis on a l'audace, l'indécence de venir plaider l'urgence, depuis deux ans que le député de Lévis taponne dans ce dossier-là. Lorsque Mme la députée et ministre de l'Éducation a ramassé le dossier tant bien que mal, elle a essayé de trouver une solution, mais elle a carrément, après quelques semaines, baissé les bras puis elle s'est dit: Trouvez-moi une solution, trouvez-moi une solution. Son premier ministre et son leader la lui ont trouvée. C'est ce qu'on vit aujourd'hui à 1 h 45. C'est remarquable, hein! C'est remarquable. Ce gouvernement-là donne ses coups les plus salauds à la population du Québec toujours de nuit.

(1 h 40)

M. Bélanger: M. le Président. M. le Président...

M. Lefebvre: Toujours de nuit.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le... Il y a l'article 7, hein, qui parle des propos injurieux ou blessants. C'est un terme qui n'est pas très, très parlementaire. Je vous inviterais à éviter, si vous voulez, ces expressions.

M. Lefebvre: M. le Président, les coups les plus inavouables, inavouables, à un point tel que les députés n'osent même pas soutenir la décision de leur propre gouvernement. Alors, la chose parle d'elle-même, puis on fait ça de nuit. Je ne sais pas jusqu'à quelle heure cette nuit, hein? Alors, il nous reste encore un petit peu de droit de parole, on va l'utiliser, soyez-en assuré. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Frontenac, et je cède la parole à M. le député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. On se retrouve encore ce soir sous le coup du bâillon de ce gouvernement que nous avons en face. À part tous les autres projets de loi qui ont été déposés, ça fait un certain temps, sous le coup du bâillon, on se retrouve avec le projet de loi n° 87, une loi qui a été déposée ça fait seulement quatre jours dans cette Assemblée nationale. Je ne peux pas comprendre l'urgence d'un dépôt de projet de loi n° 87 à quatre jours de la fin de la session.

Pourtant, ce problème, il existe depuis 1994. Le député de Lévis était au courant, Mme la députée de Taillon, la ministre de l'Éducation, est au courant, et pourtant on arrive à la dernière journée, aux derniers deux ou trois jours avec une loi spéciale, qu'on n'a même pas eu la possibilité d'étudier en commission parlementaire, pour nous dire que l'urgence était là pour passer cette loi. Puis pourtant il y a eu même un conciliateur, un médiateur dans ce problème-là pour essayer de le régler, et le médiateur, il a conclu que la meilleure façon de régler ce problème-là, c'était de construire une école, parce que, dans ce quartier-là, la nécessité, elle était là. Depuis 1986 à 1991, la population des jeunes a augmenté de 3,4 % et, dans certains secteurs, est allée même à 7 %. Voilà la nécessité d'avoir une nouvelle école.

Je ne comprends pas la ministre de l'Éducation, parce que la solution qu'elle prône devant l'Assemblée nationale ce soir, ça va coûter au gouvernement 1 500 000 $. C'est ça que ça va coûter. Et une nouvelle école, ça coûterait 2 000 000 $. C'est seulement 500 000 $ qui seraient la différence entre la construction d'une école puis l'aménagement de l'école en question. Je ne peux pas comprendre ce gouvernement qui a pris un plaisir fou à frapper toujours les plus démunis, les personnes âgées, et là il s'en prend aux enfants. On se rappellera, M. le Président, l'assurance-médicaments. On va aller chercher 300 000 000 $ dans les proches des plus démunis et des personnes âgées, parce que c'est seulement ces personnes-là qui en font les frais actuellement. Là ils nous arrivent avec ce projet de loi n° 87 et ils frappent qui? Ils frappent les enfants, les jeunes qui ne peuvent pas se défendre. C'est ça qu'ils sont en train de faire.

Comme le disait le député de Marquette ce matin, qu'est-ce qu'il a fait encore, ce gouvernement-là? Deux millions qui devraient être dépensés pour le lait dans les écoles pour les enfants; on a enlevé même ça, 2 000 000 $ de lait pour les enfants. Voilà en face de quel gouvernement on se trouve actuellement. M. le Président, c'est vraiment irresponsable de la part de la ministre de l'Éducation et du gouvernement en général d'agir de cette manière. Qui va en souffrir encore? Je le disais et je le répète: Ça va être les enfants. Parce que, là, la Commission scolaire protestante du Grand Montréal, ce soir, a passé à l'unanimité une résolution à l'effet d'utiliser les places-élèves de son école, l'école Coronation, pour ses propres élèves francophones qui sont actuellement transférés à l'extérieur. Il va arriver quoi, M. le Président? Il va arriver que la commission scolaire va faire tous les recours possibles et imaginables pour que son école reste à elle; le gouvernement, il va dire le contraire. Et qui va subir les conséquences de tout ça? Ce sont encore les enfants, M. le Président. C'est ça qui est irresponsable, c'est ça que je ne comprends pas de la part de ce gouvernement. Je le répète, il s'en prend aux personnes les plus démunies de la société: les personnes âgées, les enfants. Mais ça ne va pas aller trop loin. Si ça continue de cette manière-là, ce gouvernement-là, il ne fera pas longue vie, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je remercie le député de Viger. Et je vais céder la parole à M. le député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre un peu du temps du gouvernement pour pouvoir discuter d'un projet de loi suite à notre collègue de Joliette, notre collègue dont je me rappelle, quand eux étaient dans l'opposition, qu'il déchirait sa chemise disant comment on ne pouvait pas avoir de bâillon dans cette Chambre, que c'était impossible de passer des lois comme on le faisait. Et voilà que c'est lui, c'est le député de Joliette qui se lève en cette Chambre, M. le Président, pour défendre des projets de loi qui... Au-delà de 200 projets cette année au Québec, 615 000 000 $, et, pour 500 000 $, on veut prendre des élèves d'une école et les pousser ailleurs, M. le Président. Ça va à peu près, comment je vous dirais, l'article de Pierre Bourgault, dans le dernier...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: C'est à peu près ça. Je vais vous en lire un bout. Le grand journaliste du Journal de Québec et du Journal de Montréal avait vraiment un article qui était intéressant pour les gens de l'autre côté. Je ne sais pas si vous l'avez lu. Dans mon bureau, tantôt, en haut, M. le Président, je me demandais quoi dire sur le projet de loi n° 87...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: ...et qu'est-ce qui est apparu sur ma table de travail, M. le Président? «Ne cherchez plus». J'ai dit: Maudit! c'est la vraie affaire pour aujourd'hui, ça, pour ce soir, «Ne cherchez plus», pour parler de ce projet de loi n° 87, la loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles, «Ne cherchez plus»! Comment voulez-vous qu'on comprenne quelque chose? Ah! j'ai dit: Ça, c'est le vrai article pour ce projet de loi là.

M. Pierre Bourgault dit que le plus grand premier ministre qu'on n'ait jamais eu depuis 40 ans, il n'est plus là, ils veulent l'envoyer à Ottawa pour remplacer... Et je vous l'ai dit la semaine passée, moi, si j'avais été quelqu'un du Bloc québécois... M. le Président, j'ai même offert au député de Joliette de lui vendre des cartes pour qu'il aille à Ottawa remplacer M. Bouchard et M. Gauthier. C'est lui qui aurait dû aller là, à Ottawa, à la place de venir ici et nous mettre des bâillons, lui qui, pendant neuf ans de temps, M. le Président, disait: L'Armée rouge, qu'ils nous défendent, qu'ils nous donnent... Mais là je vais appeler ça l'Armée bleu raisin, M. le Président!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: Et je vois Mme la ministre de l'Éducation. Je ne sais pas si on a le droit, mais, moi, je l'ai toujours comparée à Michèle Richard, M. le Président: des chansons, des chansons et des chansons, et, quand il y a un miroir, on se regarde! C'est ça qu'on est en train de faire avec ça. Six cent quinze millions de dollars, M. le Président, 615 000 000 $! Un petit 500 000 $ pour aider 300 élèves, 600 élèves, M. le Président. Non! Ah non! Au lieu, on a 1 000 000 000 $ de taxes qu'on a mises sur la table et on n'est pas capable de trouver 500 000 $ pour avoir 600 élèves qui seraient chez eux. Et tout le monde le leur recommande, un médiateur, même, que notre critique me dit.

Alors, M. le Président, ce projet de loi qui était pour... C'était une situation qui était vraiment difficile pour ces gens-là. Notre collègue le député de Mont-Royal avait indiqué, à un moment donné, ici, en cette Chambre, que Mme la ministre avait discuté avec les deux commissions scolaires depuis le printemps et que la commission scolaire avait refusé, et qu'il y avait un local qui était disponible pour ces gens-là. Maintenant, on ne veut plus, on ne veut plus pantoute, du tout. Encore une fois, mon ami Pierre Bourgault, et je vois mon député de Joliette... Il me reste rien qu'une minute? Eh maudit que c'est de valeur! J'en avais tellement à dire, M. le Président.

Alors, M. le Président, je demande aujourd'hui... C'est de valeur qu'on ne soit pas en commission parlementaire pour pouvoir avoir une motion au lieu d'avoir ce débat-là toute la nuit sur les différents projets de loi. On pourrait avoir une motion et demander à ce gouvernement de donner à la commission scolaire du Grand Montréal cette école pour à peu près 500 000 $. Et tout le monde serait heureux puis, nous autres, on pourrait aller se coucher. Merci, M. le Président.

(1 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Chapleau.


Mme Claire Vaive

Mme Vaive: Merci, M. le Président. Eh bien, j'ai l'impression d'être en spoutnik vers la planète Mars. Ça va tellement vite qu'on n'a pas le temps de voir l'heure et on n'a pas le temps de voir le temps se dérouler.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, je vous invite, malgré l'heure et la fatigue, à ne pas trop dépasser les bornes. Mme la députée de Chapleau, vous avez la parole.

Mme Vaive: Merci, M. le Président. Ce projet de loi vise à solutionner une situation conflictuelle mettant en cause les deux plus importantes commissions scolaires au Québec. On demande d'avoir une entente forcée relative à l'utilisation de bâtiments.

Chez nous, dans l'Outaouais, sur mon territoire de comté, j'ai la commission scolaire des Draveurs qui, je pense, est la plus populeuse des commissions scolaires du Québec, d'après ce que j'ai entendu dire de ma commission scolaire, et nous avons fait des négociations d'entente entre la municipalité et les différentes municipalités au sujet de certains échanges de terrains et d'ententes au niveau de la construction d'écoles.

Chez nous, à la commission scolaire des Draveurs, depuis 1989, il y a une école primaire qui se construit à chacune des années. Chaque année, il y a une école qui se construit et, l'an dernier... bien, cette année, en 1995, il n'y en a pas eu... en 1996, c'est-à-dire, mais, en 1997, il y en a une de prévue et nous sommes en demande d'une autre commission scolaire en 1997. Et même une polyvalente est en demande aussi parce que la population le demande.

Je comprends les gens de la région de mon collègue de Marquette, à savoir qu'il y a 600 élèves qui ont des problèmes de locaux, j'ai moi-même un problème de local, puis j'en ai 900. Je peux vivre ce qu'il vit. Je pense que Mme la ministre, qui est là dans le moment, elle m'entend et elle peut dire qu'à la commission scolaire des Draveurs, nous aussi, on a un problème. Mais il y a un conflit ici que je ne partage pas. Je pense que la commission scolaire protestante devrait peut-être manigancer ou transiger avec la commission scolaire de la CECM, à savoir qu'il y a peut-être une raison qui peut se faire...

Nous avons eu des accords, chez nous, dans l'Outaouais, nous avons eu des accords, et je comprends la préoccupation des gens, des parents, du transport scolaire des jeunes. Je comprends ces gens-là, que ce n'est pas facile de transporter ces jeunes-là sur de longues distances. Mais il y a sûrement des ententes... Parce que, chez nous, à la commission scolaire des Draveurs, la ville de Gatineau a accepté de donner le terrain. Mais, tout ceci, M. le Président, je pense que c'est malheureux, tout ce dossier se fait sur le dos des enfants, et je comprends que c'est vraiment malheureux. Mais on devrait se pencher sur le problème du territoire en question et des enfants qui ont à se déplacer et qui souvent sont des enfants en très bas âge. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Chapleau. Il n'y a pas d'autres intervenants. Alors, je vais céder le droit de réplique à Mme la...

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition, je vous cède la parole.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, vous me demandez de conclure mon intervention sur le projet de loi n° 87. Vous m'indiquez qu'il me reste à peine, à 2 heures, cinq minutes pour en parler.

J'ai écouté attentivement, ou j'ai tenté d'écouter attentivement les interventions de l'autre côté de la Chambre. Et, après avoir écouté le député de Joliette et après avoir écouté le député de Laviolette tenter de venir à la rescousse de leur leader parlementaire dans cette magnifique stratégie, M. le Président, de bâillonnement, j'ai été obligé de retourner au titre du projet de loi, là, pour qu'on se comprenne bien. C'est bien la Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Moi, j'ai écouté ces deux parlementaires de région, qui n'avaient jamais lu le projet de loi, qui n'en avaient jamais pris connaissance, nous parler du dossier scolaire comme on nous parlait, il n'y a pas tellement longtemps, en campagne électorale, de la dernière école du village. Vous vous êtes trompés de dossier. C'est un dossier qui touche Montréal. Prenez donc connaissance du projet de loi comme tel et joignez donc votre voix à celle de l'opposition, qui vise à éviter à la ministre de l'Éducation, qui tente d'improviser dans ce dossier...

Tout ce qu'on a demandé comme parlementaires dans ce dossier-là, c'est la possibilité d'entendre en commission parlementaire les principaux intéressés, M. le Président, des gens qui ont été élus par la population, des commissaires d'école qui sont imputables devant leurs électeurs. La ministre a dit: Non, il n'est pas question qu'on entende ces gens-là. On a dit: Est-ce qu'on peut au moins entendre l'ancien sous-ministre de l'Éducation, qui a agi comme médiateur? Non, il n'est pas question que les parlementaires entendent ni les élus ni le médiateur.

M. le Président, on se retrouve face à un projet de loi qui a été déposé à l'Assemblée nationale du Québec il y a quatre jours. Dans quelques moments, on appellera un autre projet de loi qui a été déposé à l'Assemblée nationale hier. Le texte est encore chaud. Parce qu'on vise à s'attaquer à des clientèles. Quand on s'attaque à des clientèles, là, qu'il s'agisse d'attaquer le monde municipal, qu'il s'agisse d'attaquer le monde agricole, qu'il s'agisse d'attaquer les étudiants, qu'il s'agisse d'attaquer les contribuables québécois, il n'y a plus de règles qui tiennent. On tente de bâillonner les parlementaires à l'Assemblée nationale.

Moi, j'aimerais peut-être que la ministre de l'Éducation nous explique, ou que le leader du gouvernement nous explique, ou qu'un parlementaire de l'autre côté de la Chambre nous explique, ou peut-être que la ministre responsable de la Charte de la langue française nous explique la cohésion, si cohésion il y a, dans cette fin de session parlementaire, M. le Président. La ministre responsable de la Charte de la langue française émettait un communiqué ce soir – puis là vous essaierez, vous, de comprendre, vous êtes le responsable de la gestion des règles parlementaires en cette Chambre – qui disait ce qui suit: «Le gouvernement – et je la cite – Bouchard – du premier ministre, donc – a décidé de reporter au printemps le débat linguistique.» Pourquoi? «On va reprendre le débat en mars», a déclaré Mme Beaudoin, invoquant le fait que l'étude du projet de loi n'était pas assez avancée pour en forcer l'adoption en suspendant les règles de procédure en Chambre. Ça, c'est un projet de loi qu'on a en Chambre depuis une bonne secousse. Ce n'est pas assez avancé, d'après elle, mais c'est plus avancé que l'ensemble des projets de loi qu'on étudie ce soir. C'est un débat linguistique, puis les péquistes se cachent.

M. le Président, quand les péquistes se cachent dans un débat linguistique, quand la ministre de la langue fait de telles déclarations, quand la ministre de l'Éducation improvise, quand le ministre du Revenu fouille dans la poche du monde, quand le leader du gouvernement nous explique que ces projets de loi sont plus avancés que le projet de loi sur la langue qui n'est pas assez avancé, on se retrouve devant quel genre de gouvernement, quel genre d'improvisation, M. le Président? Si, de l'autre côté de la Chambre, on n'a pas assez de courage pour débattre des débats qui touchent la population, si on a décidé d'être de serviles députés qui font en sorte que le message...

(2 heures)

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, j'ai très bien saisi «serviles députés». Alors, je vous demanderais d'être prudent et de le retirer également, parce que je ne pense pas que personne ici, dans cette Assemblée, soit un servile député, ni de l'opposition, ni du côté ministériel, ni de nos députés indépendants. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, remplaçons-le par des agneaux silencieux qui ont préféré, plutôt que de se porter à la défense des électeurs et des électrices qui les ont élus, se porter à la défense d'un gouvernement qui a perdu tout sens des priorités et tout sens de direction. Si vous n'êtes pas capables de prendre position en faveur de la langue, si vous n'êtes pas capables de prendre position en faveur des agriculteurs, des élus municipaux, des élus scolaires, prenez au moins position en faveur des étudiants et des étudiantes. Permettez à l'Assemblée nationale de jouer son rôle. C'est l'institution fondamentale dans notre société. Quand, passé 2 heures du matin, M. le Président, on tente de bâillonner les parlementaires, on devrait avoir honte d'agir de telle façon.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous remercie beaucoup, M. le leader de l'opposition. Mme la ministre de l'Éducation et députée de Taillon, vous avez droit à une réplique de cinq minutes. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Merci, M. le Président. Les gens qui ont écouté Jean Chrétien, la semaine dernière, lors d'un débat télédiffusé, ont été très durs à l'égard du premier ministre pour toute espèce de raisons. Mais la raison principale, M. le Président, c'est parce qu'ils ont senti, chez le premier ministre du Canada, qu'il y avait une absence de compassion à l'égard des problèmes que vivaient quotidiennement les gens. Et, ce soir, M. le Président, c'est à ce même spectacle que j'ai eu droit d'assister de la part des membres de l'opposition, qui n'ont aucune espèce de compassion pour les enfants qui vivent quotidiennement les problèmes auxquels ils sont confrontés parce que des adultes ne réussissent pas à s'entendre pour trouver des solutions, M. le Président.

Des voix: Bravo, Pauline!

Mme Marois: Et je suis d'accord avec les gens de l'opposition: j'en ai un, parti pris, M. le Président. Ce parti pris, c'est celui des enfants, c'est celui des parents et c'est celui des contribuables, des contribuables de Côte-des-Neiges, des contribuables de Montréal et des contribuables du Québec, M. le Président. Il y a quelques semaines, le député de Mont-Royal s'est levé en cette Chambre et m'a posé une question en m'accusant, en m'accusant de me servir des enfants de Saint-Pascal-Baylon, de les utiliser, de ne pas répondre à leurs besoins parce qu'ils étaient des jeunes issus des communautés culturelles, M. le Président. Il faudrait trouver un peu son langage. Ce soir, on me dit que ce ne sont pas les enfants de Saint-Pascal-Baylon qui sont un prétexte; on me dit: C'est le PSBGM, dans le fond, que vous voulez accuser, que vous voulez blâmer. Choisissez votre camp! Je pense que c'est important, à un moment ou l'autre, M. le Président, qu'on puisse le faire.

J'ai tout fait depuis 10 mois et demi – et je sais que mon collègue, avant moi, avait rencontré les commissions scolaires en cause – pour rapprocher les parties: rencontré les présidents des commissions scolaires, proposé des solutions, envoyé mon sous-ministre, envoyé mon chef de cabinet adjoint, Tout a été fait, tout a été essayé pour éviter justement que nous ayons à adopter ici une loi, parce que ce n'est pas ma solution et ce n'est pas ce que je souhaitais, M. le Président. Cependant, à chaque fois, ce fut une fin de non-recevoir, parce qu'on avait la solution facile. C'est toujours facile, M. le Président, de décider de prendre l'argent des autres et de construire alors qu'on a des espaces libres et disponibles dans nos écoles. À chaque fois, fin de non-recevoir.

Je me suis dit: Je vais choisir l'un d'entre nous qui est le meilleur à cet égard, qui a du talent, qui est capable, là où j'ai échoué, de faire la médiation, d'aller chercher les compromis utiles, d'aller imaginer les solutions. J'ai envoyé M. Boudreau, ancien sous-ministre à l'Éducation, qui a servi sous l'autre gouvernement, qui a servi sous le nôtre, M. le Président. Il est arrivé en me disant qu'effectivement on refusait toujours une solution qui permettrait d'utiliser des ressources disponibles; que la solution qui pourrait peut-être agréer aux commissions scolaires, c'était, encore une fois, une construction. Pas une construction qui va coûter 2 000 000 $; une construction qui va coûter, au bas mot, 4 200 000 $, plus 1 000 000 $, si on inclut le terrain, M. le Président, 5 000 000 $. C'est ça, la solution des deux commissions scolaires.

Je me suis trouvée donc devant une seule solution, c'est celle qui est devant nous ce soir. Je ne veux pas faire plaisir à la CECM, je ne veux pas faire plaisir à la PSBGM, je ne veux pas non plus agresser, si on veut, déplaire à l'une ou l'autre de ces commissions scolaires; je veux répondre aux besoins des enfants du quartier de Côte-des-Neiges, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat étant terminé, le principe du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Ils n'ont pas eu le temps de le demander.

Le Vice-Président (M. Pinard): J'ai bel et bien entendu, M. le leader du gouvernement, un député demander le vote nominal.

(2 h 7 – 2 h 13)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît!

Alors, nous avons terminé le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 87. Alors, le principe du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly)...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez.

Le Secrétaire adjoint: ...M. Brassard (Lac-Saint-Jean)...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez, excusez, excusez. S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, pour nous permettre... À cette heure-ci, est-ce que je peux vous demander une collaboration pour permettre à nos officiers de bien vouloir prendre le vote convenablement? Est-ce que je pourrais vous demander d'être un petit peu plus sages? Alors, monsieur, si vous voulez continuer, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: ...M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

(2 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Y a-t-il des abstentions?

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je demanderais le consentement de cette Chambre afin d'ajouter le vote du ministre d'État à la Métropole et du député de Groulx au vote ministériel.

Une voix: De Johnson?

M. Bélanger: De Laval-des-Rapides.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader de l'opposition, est-ce que vous acceptez qu'on enregistre le vote du ministre de la Métropole ainsi que du député de Groulx?

M. Paradis: Dans le cas du député de Johnson, qu'est-ce qu'on fait?

Le Vice-Président (M. Pinard): Écoutez, écoutez une minute, là! Écoutez un minute, là! Le leader de l'opposition est à 12 pieds de la présidence, et, moi-même, je ne suis pas capable de l'entendre. Alors, s'il y en a qui sont fatigués, veuillez donc rester dans vos bureaux. M. le leader de l'opposition, s'il vous plaît.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je vais parler plus fort, là. Le cas du député de Johnson, qu'est-ce qu'on fait avec? Il est rentré pendant le vote.

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le secrétaire, est-ce que vous pouvez vérifier si le député de Johnson avait voté?

Alors, M. le député de Johnson avait déjà voté, mais je tiens à rappeler aux parlementaires... Ça fait déjà deux ans qu'on est ici pour la plupart, là, sauf la députée de Pointe-aux-Trembles.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon! Alors, tout le monde va se décontracter! Alors, je tiens à rappeler à tout le monde ici présent... Je tiens à rappeler une des règles de base, c'est qu'une fois que le vote est commandé alors il n'y a personne qui a le droit de se lever de son siège, sauf pour voter, bien entendu!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader de l'opposition, la question que le leader du gouvernement vous pose: Est-ce que, à ce stade-ci – ça va me prendre un double micro, là – vous acceptez qu'on enregistre les votes du ministre de la Métropole ainsi que du député de Groulx? Oui? Alors, messieurs, si vous voulez les prendre.

S'il vous plaît! Veuillez prendre votre voix la plus forte, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:37

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je déclare donc que la motion est adoptée. Le principe du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, est donc adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, il n'y a pas de vote nominal. Vous savez, l'ordre de la Chambre hier...

Alors, messieurs, dames, je suspends les travaux durant quelques instants afin que l'Assemblée se constitue en commission plénière et j'invite ceux qui ne seront pas présents à bien vouloir se reposer quelques instants.

(Suspension de la séance à 2 h 24)

(Reprise à 2 h 31)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): La commission plénière est maintenant réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Je vous rappelle que, conformément à l'ordre adopté, la durée de la commission plénière est d'un maximum d'une heure. À l'expiration de ce délai, je vais mettre aux voix, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que la ministre n'aurait pas pu proposer en cours d'étude.

Je tiens à vous mentionner, de part et d'autre, que vous avez droit à des remarques préliminaires de cinq minutes chacun et que vous aurez également droit à des remarques de clôture de cinq minutes chacun. Alors, sans plus tarder, Mme la ministre de l'Éducation, si vous voulez bien entreprendre le débat.


Remarques préliminaires


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Certainement, M. le Président. Je crois que j'ai assez bien repris un certain nombre d'éléments dans mes remarques, à la fin du débat sur le principe du projet de loi, M. le Président. On veut faire croire, de l'autre côté de la Chambre, que nous faisons ce projet de loi contre quelqu'un. Je pense qu'il faudra être clair, là – je l'ai été, je le suis et je le serai: Nous ne faisons pas ce projet de loi contre quelqu'un; nous le faisons pour les enfants. C'est ça, la différence, M. le Président. Si les députés d'en face ne le comprennent pas, c'est leur problème. Si eux ont une solution miracle, qu'ils nous la proposent, qu'ils se hâtent de le faire. S'ils nous disent que ce sont les commissions scolaires linguistiques, peut-être auraient-ils dû le faire, puisqu'ils ont été neuf ans au pouvoir, M. le Président, et qu'ils n'ont pas bronché sur ces questions, autrement que de passer de rapport en rapport pour n'aboutir à rien. Bon.

Alors, à partir de là, M. le Président, je voudrais cependant, avant que nous ne commencions nos débats, corriger certaines choses parce que je crois que l'on a induit la Chambre en erreur lors de nos débats, il y a quelques minutes maintenant. On a induit la Chambre en erreur, puisque, à quelques reprises, M. le Président, on a indiqué que j'aurais dégagé 600 000 000 $ pour des projets d'investissement en immobilisation. Ils sont très mal informés, M. le Président, nos amis d'en face. Je ne sais pas où ils ont pris cette information-là, de qui ils l'ont reçue, auprès de qui ils se sont informés, M. le Président. Parce que, dans les faits, nous avons eu des demandes, M. le Président, pour 600 000 000 $, près de 615 000 000 $, pour 213 projets, M. le Président. Les demandes, ça ne veut pas dire que nous répondons à toutes les demandes.

Dans les faits, nous avons investi, en 1995-1996, dans plus ou moins 60 projets, pour 188 000 000 $ – ce n'est pas 615 000 000 $, ça, M. le Président – et, en 1996-1997, nous avons investi dans 27 projets pour 68 000 000 $. On est bien loin du compte, M. le Président. Et, si on nous dit que l'on a accordé des écoles sur la rive nord, sur la rive sud et que l'on n'aurait pas accordé d'écoles à la Commission des écoles catholiques de Montréal ou à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, M. le Président, ce qu'il faut savoir, c'est que, dans des régions ou dans la périphérie de Montréal, entre autres dans la couronne nord et dans la couronne sud, nous avions jusqu'à six demandes de projets dans un même secteur pour des constructions d'écoles et que nous avons autorisé un, deux projets au maximum, M. le Président. Alors, nous n'avons pas privé les gens de Montréal d'investissements au détriment de gens des couronnes.

On est très pernicieux, M. le Président, dans le discours. On laisse entendre qu'on ne veut pas construire à Montréal parce qu'il s'agit d'enfants de communautés culturelles, puis, tout d'un coup, on se retourne puis on nous dit: Ah, c'est à la communauté anglophone que vous en voulez! M. le Président, jamais, jamais, je n'accepterai ces insinuations. L'ensemble des dossiers ont été traités d'une façon équitable, et nous avons fait des choix. Bien sûr, quand on a 200 projets en demande, 213, et qu'on ne peut pas satisfaire à tous ces projets, on doit en faire, des choix.

Alors, il y a certains endroits où il n'y a pas eu de constructions. On a des problèmes sérieux pour loger les enfants. Pas parce qu'il y a des places disponibles dans des écoles vides; il n'y a pas d'écoles. Il n'y a même pas de centre d'achats où les envoyer. Tandis qu'à Montréal, dans le quartier Côte-des-Neiges, il y a des places. Et je fais appel au sens des responsabilités de nos amis d'en face. C'est sûr que ça me fâche quand je les entends dire n'importe quoi parfois. Il est tard, c'est la nuit, on est un peu fatigués. Bon, je peux comprendre que parfois ils disent n'importe quoi. Peut-être pas les gens qui sont devant moi, mais certains de leurs collègues. Mais je fais appel à leur sens des responsabilités: on a un problème concret, réel.

J'ai demandé aux partenaires de s'entendre; ils n'ont jamais voulu le faire. On a tout mis en oeuvre, et les gens qui m'accompagnent peuvent vous en parler. On a jusque fait une maquette pour expliquer, pour démontrer pédagogiquement qu'il y avait des espaces disponibles pour solutionner le problème vécu par les enfants. Moi, je demande leur aide, dans le fond, et ce que je reçois, c'est: On en veut aux uns et aux autres.

On n'en veut à personne, on veut solutionner un problème qui concerne des enfants. Il me semble que vous devriez nous aider. Il me semble que vous devriez nous proposer vos solutions, nous dire: Voici comment procéder. Vous deviez les avoir, puisque vous savez que, depuis un an et demi, ce problème existe, depuis presque deux ans... Oui, je m'excuse, M. le Président. Je termine.

Le Président (M. Pinard): Merci.

Mme Marois: J'attends les solutions de mes collègues.

Le Président (M. Pinard): Alors, le député de Marquette ou le député de Jacques-Cartier.

M. Ouimet: Oui.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Premièrement, si nous avions eu la chance d'entendre les gens qui entourent la ministre de l'Éducation en commission parlementaire dans le cadre d'un processus transparent, nous aurions pu disposer de l'ensemble des données que la ministre a. Ç'aurait déjà été un pas en avant. Nous avions demandé des consultations au niveau de trois personnes: CECM, CEPGM et le médiateur. La ministre a refusé.

Dans un deuxième temps, c'est effectivement un problème concret auquel font face le ministère de l'Éducation et la ministre. Mais elle en a un autre problème auquel elle fait face, et elle le sait. En toute transparence, ce soir, j'ai déposé la résolution de la CEPGM et, dans les discours qu'elle a faits, y compris jusqu'à tout récemment, elle n'en a jamais glissé un mot. Nous avons de la compassion. Vous nous avez accusés de ne pas avoir de la compassion. C'est justement ça: on veut s'assurer que la solution que vous allez mettre de l'avant va véritablement répondre aux besoins des élèves.

Et ce qu'on sait, c'est qu'il y a une contestation judiciaire qui est en train de se dresser. Et vous le savez. Les gens qui vous entourent, qui prennent connaissance de la résolution qui a été adoptée à l'unanimité par la CEPGM, c'est une indication – et la ministre doit en être sûrement consciente – que ces gens-là n'ont pas l'intention de se laisser faire par le ministère et par le projet de loi spécial mis de l'avant par la ministre de l'Éducation. Et on connaît le processus, on connaît le pattern. C'est l'exercice de leur droit de gestion et de contrôle de leurs écoles qui est mis en cause présentement. La ministre peut bien dire: Qu'est-ce que ça lui fout? Mais, s'il y a une injonction prise puis si on se ramasse devant les tribunaux, les écoles ne seront pas plus disponibles pour les enfants de Saint-Pascal-Baylon. Le problème, il est là.

Le problème, il est également relié au fait que j'aimerais bien entendre les gens qui entourent la ministre pour qu'ils nous disent quelles sont les écoles vides de la CEPGM dans le quartier Côte-des-Neiges. Les écoles ne sont pas utilisées à capacité, on en convient, mais je n'ai jamais vu ça, de demander à 300 élèves d'une école primaire de quitter les lieux pour les transférer dans une autre école et, par la suite, ceux qui sont dans l'école Shadd Academy, de leur demander de quitter les lieux pour aller à l'école Marymount. La ministre nous dit que les deux commissions scolaires sont en situation de conflit; vous êtes en train de leur demander, aux deux commissions scolaires, de gérer la même école, l'école Marymount. Ça ne tient pas debout. Ça ne tient pas debout.

(2 h 40)

Vous êtes en train ni plus ni moins d'évincer les élèves d'une école alors que, vous le savez fort bien, il y avait une autre solution. La solution, votre médiateur l'a proposée dans ses conclusions et puis, par la suite, dans le texte même du rapport de médiation. Il vous a même dit, avec toute sa candeur, que les deux D.G. des commissions scolaires étaient d'accord par rapport à cette solution. C'est sûr. Mais ça ne coûterait pas si cher que ça, parce que vous allez avoir le problème à moyen terme. C'est un quartier qui, depuis de nombreuses années, au niveau de l'évolution démographique... Il va y avoir un manque de places-élève.

Vous avez été très conservatrice en disant que ce manque-là était de l'ordre de 500; les partenaires disent plutôt qu'il est de l'ordre de 900. Et c'est d'ici deux ou trois ans qu'on va faire face au même problème. On a fait face au même problème en 1992-1993. On a trouvé des solutions qui ont heurté des gens. Mais là c'est le même problème auquel on va faire face, et vous êtes prête à investir 1 500 000 $ pour défaire ce qui a déjà été fait au niveau d'une compensation monétaire. Vous allez débourser 1 500 000 $ pour transférer les équipements, pour transformer l'école, pour relocaliser. Il va y avoir des coûts afférents aussi au niveau du transport scolaire.

Mme Marois: Bien, il y en a déjà, là.

M. Ouimet: C'est sûr qu'il y a des coûts. Alors, 1 500 000 $. Votre participation traditionnelle à des projets de construction avec la CECM, elle est de l'ordre de 50 %. Même ça, c'est questionnable; j'y reviendrai un jour. Mais, à 50 %, votre participation serait de l'ordre de 2 000 000 $, 2 100 000 $. La CEPGM, elle est prête à céder un terrain gratuitement. Moi, je vous dis que, si vous aviez placé ces deux hypothèses-là dans votre projet de loi, je pense que vous auriez été de la plus grande bonne foi.

Mais maintenant vous avez décidé de choisir. Vous avez pris parti et vous avez vu les éditoriaux, comme moi, de la Gazette : La communauté anglophone se sent dépossédée de ses écoles. Et elle a des droits constitutionnels à gérer et à contrôler ses écoles. Ce soir, elle vous fait la démonstration, par une résolution unanime, qu'elle a l'intention d'utiliser cette école-là. Je vous le dis, Mme la ministre, on va avoir un gros problème sur les bras, et ça risque de faire la manchette pas juste au niveau de la province, là, mais sur la scène nationale canadienne.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député. Alors, nous allons...


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Pardon.

Mme Marois: ...est-ce que je dois comprendre que le député n'a pas de solution à nous proposer autre que de construire une nouvelle école ou la solution que nous propose la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal et qu'elle a adoptée ce soir, qui est d'aller prendre les clientèles, si je comprends bien, de la CECM puis de les recevoir chez elle? Donc, ça prouve qu'effectivement il y a comme un peu de concurrence entre les deux commissions scolaires. Est-ce que c'est ça que je dois comprendre?

Si je comprends ça, je comprends aussi pourquoi on en est là maintenant avec le déficit, hein, qu'on nous a laissé, parce que, si la seule solution, c'est de construire une école... Et je m'excuse, mais 2 000 000 $ du gouvernement, ce n'est pas le coût de l'école. On sait que c'est 4 200 000 $ minimalement, et ça exclut le coût du terrain. Quand bien même on nous le donnerait, là, M. le Président, ça a une valeur, un terrain. Si la commission scolaire le vendait, le terrain, à quelqu'un qui n'est pas le gouvernement et qu'elle allait chercher la valeur marchande réelle, il faudrait en tenir compte dans le projet. C'est un projet de 5 000 000 $.

Et, moi, je ne veux rien imposer aux commissions scolaires. La loi qui est devant nous, M. le Président, elle dit textuellement, à l'article 2: Entendez-vous, proposez-nous une solution qui réponde aux besoins des parents et qui soit raisonnable. On se comprend? Pas d'envoyer les enfants au diable au vert, là. Si le député de Marquette se préoccupe des coûts de transport, ramener les enfants dans le quartier, ça va être une économie de coûts de transport réelle, significative et surtout – j'y reviens toujours – une réponse à des besoins humains auxquels on doit s'attarder. On ne peut pas laisser les situations pourrir comme elles pourrissent maintenant.

Il me dit: On va déplacer des enfants d'une école, 300 enfants d'une école. Les parents m'ont écrit, M. le Président; le comité de parents m'a envoyé une missive pour me dire comment ils seraient heureux que leurs enfants se retrouvent à l'Académie Shadd. Que voulez-vous que je vous dise, moi? Je suis ministre de l'Éducation; ma première responsabilité, c'est l'intérêt des enfants.

J'ai été confrontée à quelques situations problématiques avec les commissions scolaires. J'ai tout fait. Je pense à l'école Dorval. Ce n'était pas la solution qu'auraient souhaitée les parents, mais la commission scolaire, raisonnablement, a fait des efforts pour dire: On va essayer de bien encadrer cette réalité-là, de tenir compte de la culture, du projet éducatif qui s'est développé dans l'école. Je sentais, là, vraiment une bonne foi, une bonne volonté et je me disais: Les besoins et les intérêts des enfants risquent de recevoir une réponse positive, même si ce n'est pas celle qu'ils souhaitent maintenant. Donc, je ne suis pas déraisonnable, M. le Président. J'ai essayé, et à d'autres reprises comme ça on est intervenu pour essayer de corriger des situations. Et là je laisse une chance.

C'est sûr que, dans un contexte de loi, ça ne facilite pas les choses. Je le sais bien, ça, je ne suis pas inconsciente de cette réalité-là. Si j'avais mis dans la loi une expropriation, là, ce serait pas mal plus sérieux, M. le Président. Mais ce n'est pas une expropriation, chacun reste propriétaire de ses actifs. Je dis: Regardons comment on peut utiliser une école pour répondre aux besoins des enfants compte tenu des places disponibles.

Oui, il y a des probabilités, il y a des évaluations qui se font sur le fait que la clientèle pourrait augmenter dans les années à venir, si on se fie aux données historiques jusqu'ici donc connues. Mais, avant qu'on en arrive là, est-ce que le rationnel ne nous amène pas à utiliser les espaces vacants? Si c'est dans trois ans qu'il faut prendre la décision, on aura économisé ces sous pendant trois ans, surtout dans une période qui est la plus dure à traverser au plan des finances de l'État. Il me semble qu'il y a comme quelque chose de raisonnable dans ce qu'on propose.

Moi, j'ai compris que la CECM n'allait pas nous applaudir, je comprends ça, ce serait sans doute mal venu, mais j'ai compris qu'ils trouvaient que c'était une solution honorable. Et on n'enlève rien à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal; leurs bâtisses leur restent. L'utilisation même de la plus intéressante de leurs bâtisses leur reste. Il y a une solution qu'ils peuvent gérer en leur propre sein, au sein de leur propre institution pour les adultes.

Non seulement ça, je leur dis: 1 500 000 $ pour les fins d'aménagement et d'organisation à l'intérieur des édifices. C'est sûr qu'il y a un coût pour répondre aux besoins des enfants. Je suis consciente de ça aussi, M. le Président. Je ne cherche à blesser personne, je ne cherche à agresser personne; je reviens au fond même de ce qu'on discute: il y a des enfants qu'on transporte, il y a des familles qu'on divise, et ça n'a pas d'allure. Même la solution qu'on avait regardée, que la PSBGM nous avait proposée – je ne me souviens pas, ils proposaient qu'on envoie les enfants un peu plus loin – amène qu'on place les enfants pendant une période de temps x dans une des écoles, qu'on les redéplace l'année suivante. Ça, c'est dans l'hypothèse de la construction, je crois. Mais ça n'a pas de bon sens, M. le Président.

Il me semble qu'on devrait être capables ensemble de trouver ça. Moi, je le dis un peu en désespoir de cause quand j'entends tout ce que j'ai entendu ce soir. Je comprends qu'on est dans une fin de session, que c'est une loi spéciale, qu'elle est déposée à la toute fin, parce que j'ai espéré jusqu'à la toute fin qu'on trouve une solution. Écoutez, moi, j'ai été voir le premier ministre et je lui ai dit: Écoutez, premier ministre, je n'en trouve plus, là, j'ai épuisé tous les recours, j'ai tout fait. Il me reste ça.

Le député de Mont-Royal me dit: Vous ne réglez pas le problème. Les députés me posent la question, les parents m'interpellent, puis je les comprends. J'ai dit: J'en ai une. On va déposer un projet de loi, on va donner une chance au coureur encore une fois: deux mois, un mois et demi. Mais on va le faire un peu avant le 27 janvier, parce que, le 27, c'est l'inscription. Les parents vont s'inscrire, puis après ça on va chambarder ça? Ça n'a pas de bon sens. Alors, on a dit: Vous avez jusqu'au 20 janvier. Trouvez-en une solution qui convienne, qui a de l'allure, qui montre que vous êtes capables de vous occuper de vos gens, puis, après ça, moi, je signerai en bas de la feuille.

Alors, voilà, M. le Président. Moi, je travaille en toute bonne foi dans ce dossier-là puis je n'aurais pas voulu en arriver là où j'en suis, je le dis. Ce n'est pas bien, bien plus agréable pour moi, là, hein, de faire ce que je fais ce soir. Ce n'est pas très drôle; je pense que le député va en convenir. Alors, essayons de trouver une solution qui convienne, qui a du bon sens, qui tienne compte des problèmes de ressources qu'on a maintenant et qui fasse preuve un peu d'ouverture, parce que c'est des enfants qui sont concernés, puis, moi, je trouve que ça n'a pas d'allure de les traiter de la façon dont on les traite actuellement.

(2 h 50)

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: M. le Président, je suis étonné par l'attitude de la ministre. Dans tout le processus – et c'est le processus que nous avons attaqué ce soir – elle a tout fait pour exclure l'opposition. Si elle est si fière, si confiante que la solution qu'elle a proposée est bonne, c'est d'amener ça devant une commission parlementaire où les membres de cette Assemblée peuvent poser des questions aux témoins, chercher des solutions, avoir accès à toutes les données. Si elle est si confiante que ça, c'est vraiment la solution; elle aurait dû déposer ce projet de loi avant le 15 novembre et amener ça en commission parlementaire. On n'a pas demandé une liste d'une centaine de témoins; on a dit: Au moins trois, les commissions scolaires impliquées plus le médiateur, pour prendre le temps qu'il faut pour regarder les chiffres, pour avoir une vraie ventilation du projet avant de donner notre approbation.

Non, mais on arrive ici et on dépose ça. Trois jours après, on va bâillonner ça avant de commencer le débat. Et, après ça, on dit: L'opposition, c'est quoi, votre solution? On est exclus du processus; c'est ça, le problème. Ce n'est pas une question de: Comment est-ce qu'on peut être associés à la solution quand on n'est même pas associés aux délibérations? Elle a tout fait, la ministre, M. le Président, pour nous exclure, et c'est ça, le problème. Quand le monde est exclu, quand il y a un manque de transparence dans le processus, ça va causer des problèmes. Et qu'est-ce qui existe ici? Comme je l'ai dit, si le projet est si beau, qu'elle est si fière que ça, amenez ça devant une commission parlementaire, on va prendre le temps qu'il faut, on va regarder ça, parce que tout le monde a intérêt à trouver une solution. On n'est pas contre trouver une solution, de notre côté.

Mais, si elle veut nous associer, elle doit nous associer et elle doit comprendre, comme plusieurs de ses collègues, qu'il y a une règle de base dans le gouvernement: il y a un pouvoir exécutif et, quand elle est ministre, avec ses fonctionnaires, avec le ministère de l'Éducation, elle exécute ses pouvoirs d'exécutif. Mais il y a également un pouvoir législatif et, pour avoir une décision éclairée par les législateurs, les législateurs doivent avoir accès à l'information, doivent avoir accès aux principales personnes intéressées dans la cause, ce qui n'est pas le cas ici, et c'est pourquoi on s'objecte. Et ce manque de transparence va coûter cher à la ministre, parce que nous avons déjà vu dans le milieu que sa neutralité est contestée. Et elle avait une occasion en or, M. le Président, de faire preuve de sa neutralité: une commission parlementaire pour vendre son projet, pour dire: Après avoir regardé toutes les possibilités, après avoir examiné les projets différents, je suis convaincue.

Et ça va nous permettre, de ce côté de la Chambre, de demander un avis juridique. Est-ce qu'on est certains... Parce qu'elle a fait allusion à la situation de l'école secondaire de Dorval, qui était très compliquée, mais la règle de base que la ministre a respectée était l'autonomie des commissions scolaires. Alors, c'est drôle, six mois après, on a oublié tout ça. Mais même cette contestation à Dorval, comme je l'ai dit, a coûté aux commissions scolaires, a coûté, par le manque pour les parents et les enfants dans ces écoles, au-delà d'une centaine de mille dollars en frais d'avocat. Quelle perte! Au lieu de mettre ça dans les bibliothèques, on met ça dans la cour.

Et, moi, ma crainte – et peut-être que c'est non fondé, mais, si on peut avoir accès à l'expertise du ministère de l'Éducation, si on peut avoir accès aux personnes qui travaillent autour de la ministre, on pourra le voir: Est-ce que 87 risque d'être contesté devant la cour? Est-ce que ça va nous diriger devant une contestation où ils vont invoquer l'article 93 de la Constitution, où ils vont invoquer les assurances qui étaient là au moment de la Confédération? Parce que les deux commissions scolaires en cause sont des commissions scolaires qui ont des droits plus profonds que les autres commissions scolaires, parce que c'est des commissions scolaires qui existaient au moment de la Confédération. Alors, c'est une simple question, mais je n'ai pas de réponse. Est-ce que ça va nous amener devant la cour?

Elle a fait référence aux commissions scolaires linguistiques. La raison pour laquelle M. Ryan a pris autant de temps, c'est parce qu'il savait qu'il y aurait des contestations. Eh oui, ça a pris du temps, et M. Ryan a fait ça délibérément pour aller à la Cour d'appel. Il y a eu une décision; la décision a été appelée en Cour suprême. Nous avons pris toutes ces démarches parce que c'était incontournable. Alors, nous avons dit: Il faut poser ce genre de questions, mais, au bout de la ligne, les cours ont donné raison à M. Ryan, et 107 était attachée comme il faut, puis il y avait les protections pour les droits constitutionnels, et tout ça.

Alors, si on arrive en catastrophe dans la Chambre – et c'est ça, c'est l'urgence, on bâillonne l'opposition – j'aimerais savoir que ça ne va pas nous amener devant la cour. Et, au lieu de dépenser 500 000 $, 700 000 $ pour améliorer la qualité de l'éducation pour les enfants du quartier Côte-des-Neiges, qu'est-ce qu'on va faire? On va les dépenser en frais d'avocat. Et je pense que le processus est abusif, le processus est fait pour exclure l'opposition. Alors, ça prend une certaine... je ne sais pas quoi, M. le Président, pour maintenant nous demander de nous associer à une solution alors qu' on est exclus de toutes les données, qu'on n'a pas accès aux témoins, qu'on n'a pas accès aux personnes qui ont travaillé dans ce dossier. C'est incroyable, M. le Président, et je ne comprends pas.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. M. le député de Marquette, autres commentaires?


Étude détaillée

M. Ouimet: Oui. Je suis inquiet un petit peu quand j'entends la ministre de l'Éducation nous indiquer qu'il semblerait que c'est le premier ministre qui prend les décisions au niveau de l'éducation. C'est inquiétant, cet aveu-là.

Mme Marois: Bien, écoutez, M. le Président...

M. Ouimet: Je n'avais pas terminé.

Mme Marois: ...je suis toujours membre d'une équipe ministérielle et, quand je prends une décision d'une telle importance, la première personne à consulter, c'est le premier ministre, et je le fais. Puis je vais le faire encore, à part ça.

Le Président (M. Pinard): Madame, voulez-vous... M. le député de Marquette, si vous voulez poursuivre.

M. Ouimet: Oui. Alors, autre volet, M. le Président. La ministre a fait référence à la situation des élèves, à ses préoccupations pour le quartier Côte-des-Neiges, mais elle est accusée de deux poids, deux mesures. C'est la même situation dans Rivière-des-Prairies, et elle le sait bien. La CEPGM était dans la situation où la CECM se retrouve présentement. Elle avait besoin d'espace; la CECM, pour ses raisons, a refusé. La CEPGM a fait appel au ministère de l'Éducation, selon nos informations, à l'ancien ministre de l'Éducation, le député de Lévis. De la députée de Taillon: fin de non-recevoir. Ils ont dû prendre les moyens qu'ils ont pris pour tenter de loger leurs élèves. Où était la compassion de la députée de Taillon, à ce moment-là?

Troisièmement, M. le Président – puis c'est la réalité avec laquelle nous sommes confrontés – je n'ai toujours pas entendu la ministre parler de ce qu'elle fait avec cela, là, la résolution de la CEPGM. Elle est en train de vous dire: La solution législative que vous avez prévue, on tasse ça du revers de la main et on est prêts à un affrontement avec vous. Et ça, c'est le signal qu'on est prêts à aller devant les tribunaux. Ce n'est pas par huit commissaires contre sept, là. C'est 14 commissaires puis il y avait une absence.

C'est assez fort dans le monde scolaire, 14 commissaires autour d'une table qui disent: On va tenir tête au gouvernement du Québec; on a des protections constitutionnelles, on a la presse anglophone derrière nous, puis ce n'est pas vrai qu'on va se faire déposséder de nos écoles. Je ne dis pas que c'est bien, là, mais je ne sais pas si vous savez ce que vous avez créé. En braquant un partenaire comme ça, vous l'avez campé, ce partenaire-là: il est prêt à vous affronter.

Et vous ne m'avez toujours pas démontré où était l'école vide et libre de la CEPGM dans le quartier Côte-des-Neiges. Quand vous dites qu'il y a des espaces vides, l'école était occupée, selon vos propres chiffres, capacité fonctionnelle: 550, 320 élèves qui sont inscrits à cette école-là. Ils ont des prévisions démographiques qui démontrent qu'au cours des deux ou trois prochaines années ils vont remplir l'école. Le critère au niveau de l'éducation, avant de penser à fermer une école ou de s'interroger sur l'utilisation d'une école, c'est à peu près 225. Ils sont au-dessus de ce chiffre-là.

Alors, comment voulez-vous qu'on pense autre chose que: Ça a pris du temps, ça a pris une émission du Point , ça a pris des questions du député de Mont-Royal, alors que, là, sur le plan politique, on décide de s'occuper du problème. Mais là il était rendu tard. Il était rendu tard parce que la situation est criante pour le mois de septembre. Et on se retrouve face à un projet de loi in extremis, avec un mandat à un médiateur d'une semaine. Heureusement qu'il connaît bien le dossier et connaît bien la situation! Il a fait un bon travail. Vous ne pouvez pas fermer les yeux non plus sur deux recommandations qu'il a faites. Oui, la loi spéciale, mais également le projet d'agrandissement.

Alors, j'aimerais entendre la ministre. De façon claire, elle a ça dans les pattes – pardonnez-moi l'expression – elle a ça dans les pattes à partir de ce soir et, je lui dis, elle va avoir la CEPGM dans les pattes devant les tribunaux, et ça ne réglera pas la situation des élèves de Saint-Pascal-Baylon. La guerre qu'elle a créée avec la CEPGM, ce sont les élèves de Saint-Pascal-Baylon qui vont en faire les frais. C'est eux qui seront tenus en otages.

(3 heures)

Alors, j'aimerais qu'elle puisse me rassurer par rapport à la résolution unanime adoptée par le CEPGM. J'aimerais qu'elle puisse m'identifier l'école qui était vide et qui était libre. Parce que c'est de ça qu'il s'agit. Les ententes entre commissions scolaires, c'est quand tu as une école qui est vide et non utilisée et que tu la mets à la disposition. Où est l'école vide? Quand je regarde le scénario qui nous a été présenté par la ministre, c'est de sortir 320 élèves d'une école primaire pour les loger dans une école, la Shadd Academy, et puis, par la suite, sortir des centaines d'élèves là pour les placer dans une autre école. Je n'ai jamais vu ça, et les collaborateurs que j'ai consultés n'ont jamais vu ça non plus. Alors, j'aimerais que la ministre nous explique la situation.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, si guerre il y a – on n'est pas encore là pour l'instant, il y a une résolution – j'imagine que le député de Marquette va prendre fait et cause pour les enfants, pas pour la guerre, pour la paix et pour les enfants. J'imagine que c'est ça...

M. Kelley: On ne peut pas prêter des intentions à un député.

Mme Marois: Je le comprends comme ça. Je comprends son intention comme ça, qu'il va prendre position pour les enfants et contre la guerre, si guerre il y a, n'est-ce pas. Alors, s'il veut mettre de l'huile sur le feu, il peut effectivement en mettre, mais je ne pense pas qu'il le veuille, j'espère que ce n'est pas ça qu'il veut.

Je voudrais revenir sur deux choses. Il soulève des questions, et nous n'avons jamais refusé de répondre à ses questions. Non seulement je n'ai pas refusé, je lui ai fait parvenir, aussitôt que j'ai pu l'avoir, le rapport du médiateur. En pleine Assemblée, ici, il m'a posé la question. Je n'ai pas attendu la fin de la période de questions – j'aurais pu le faire parce que j'allais en conférence de presse après – pas du tout, M. le Président, j'ai rendu disponible le document dès que je l'ai eu en main.

Alors, revenons sur deux éléments, d'abord, l'histoire de Rivière-des-Prairies. Il y a eu, entre les deux commissions scolaires, une forme de guerre d'usure faite proprement, faite poliment, bien sûr. Ce sont des gens polis, ce sont des gens corrects et ils sont capables de faire ça poliment, et ils le font. Donc, une guerre d'usure, en disant: Tu me donnes une école, je t'en donne une; si tu ne m'en donnes pas, je ne t'en donnes pas. C'est comme ça que ça s'est passé, on se comprend bien. C'était en 1995. Je n'étais pas, à ce moment-là, ministre de l'Éducation, mais il y a eu des efforts de la part de mon collègue, de la part du ministère pour amener les deux commissions scolaires à s'entendre.

Alors, dans les faits, lorsque la CECM a été prête à rendre disponibles des écoles sur son territoire, dont l'une était vide, si j'ai bien compris, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal a refusé ou a estimé que cette proposition ne pouvait pas être acceptée – et c'est le directeur général, dans ce cas-là, qui l'a fait – par le conseil des commissaires, car il n'y avait pas d'école disponible dans le quartier Côte-des-Neiges, on ne voulait pas, en tout cas on ne semblait pas avoir d'écoles disponibles dans le quartier Côte-des-Neiges. Donc, on disait: Comme on n'a rien à offrir, on ne veut pas celle de la CECM ou on ne veut pas soumettre cette proposition à notre conseil des commissaires.

Et on n'est pas venu demander, enfin, moi, je n'ai pas été au fait d'une demande comme celle-là, je ne crois pas que mes fonctionnaires aient eu non plus cette demande de la part de la CEPGM, pour nous dire: Écoutez, Mme Marois ou Mme la ministre de l'Éducation, on voudrait votre aide pour investir dans de la rénovation de ces écoles ou... L'aide qu'on m'a demandée, c'est effectivement d'amener les deux parties à collaborer ensemble, ce que j'ai tenté de faire – et je le répéterai à satiété s'il le faut – depuis le début: faire cheminer un, faire cheminer l'autre, parler à un, parler à l'autre. J'ai même essayé de faire intervenir des membres éminents de la communauté anglophone auprès de la commission scolaire protestante pour lui dire: Écoutez, il n'y a pas moyen de s'entendre?

Mais il y a, derrière tout ça, puis le député de Marquette le sait, une certaine bataille sur les clientèles, évidemment, puisque chacune des commissions scolaires peut recevoir des clientèles anglophone et francophone qui sont soit catholiques, soit protestantes, bien sûr. Mais on est assez ouvert, lorsqu'il s'agit d'accueillir de nouvelles clientèles.

Alors, donc, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal n'est pas revenue au ministère de l'Éducation pour demander une forme d'aide quelconque, autrement que pour décider, et ils ont décidé de leur propre chef de procéder par une espèce de location-achat ou achat-location d'un édifice qui a été construit pour leurs propres fins, alors qu'il y avait des locaux disponibles à la Commission des écoles catholiques de Montréal. Bon. Alors, je n'ai pas eu à appliquer deux poids, deux mesures. On n'est jamais revenu nous dire: Écoutez, nous, on ne bougera pas sur ça parce que là-bas ils ne bougent pas sur ça, et on veut votre aide puis on veut que vous forciez un petit peu la note. On a décidé de procéder autrement. C'est un choix qu'on a fait. On se retrouve avec le problème tout entier, d'autre part, dans le quartier Côte-des-Neiges. Et maintenant c'est la deuxième question que le député a soulevée.

Où est l'école vide? Il n'y a pas d'école vide, mais il y a des places disponibles. Il faut être un petit peu de bon compte, M. le Président, et je vais en faire la description. À l'Académie Shadd, il y a plus ou moins 200 places disponibles pour adultes et plus ou moins 300 si c'étaient des jeunes. C'est des places en nombre important, ça. À Coronation, le nombre est beaucoup plus petit – on nous parle de 75 places plus ou moins – et à Marymount, on nous parle de 750 places disponibles, d'une école qui a une capacité d'accueil de 1 500 jeunes ou adultes, cela peut dépendre. Si ce sont des adultes, ça prend un peu plus de place. Quand on fait l'addition de cela, il y a près de 1 300 places de disponibles. Ce n'est pas une école, c'est vrai. Ce n'est pas dans une école, mais il y a 1 300 places de disponibles.

Alors, à partir de là, est-ce qu'on ne peut pas, en toute bonne foi, travailler à réorganiser les clientèles qui sont là? Et, dans le fond, le projet de loi, c'est ce qu'il propose en identifiant une école en particulier. Le projet est simple, M. le Président. Ce qu'on dit, c'est que l'Académie Shadd pourrait recevoir les jeunes du primaire et du secondaire de même que des garderies qui sont actuellement à Coronation. Et, en plus, un centre sportif, si on veut, est en construction actuellement, se développe à côté de l'Académie Shadd. Vous savez que des adultes qui viennent, souvent, en cours du soir ou en cours dans la journée viennent strictement pour le cours et immédiatement doivent retourner à d'autres activités professionnelles. Donc, ils utiliseront peu un centre sportif. Et c'est comme ça qu'on utilise actuellement l'Académie Shadd. Ce sont des adultes qui y sont, et on prévoit d'autres adultes, je crois, plus tard. Mais des enfants, par exemple, là, on peut les amener à utiliser les gymnases, utiliser les équipements sportifs. Il me semble que ça a de l'allure, tout ça.

Alors, on dit aux parents – et les parents, en plus, sont d'accord – ramenons les plus jeunes à l'Académie Shadd: primaire, secondaire, garderie. Tout Coronation pourrait se retrouver à l'Académie Shadd, plus 125 élèves qui sont actuellement transportés à l'extérieur du quartier. Et Coronation, elle, par contre, pourrait recevoir 550 élèves regroupant les gens de Saint-Pascal-Baylon qu'on envoie actuellement à l'extérieur du quartier. Et cela satisferait – c'est ce que j'ai compris de la part des gens du milieu – les parents, les enfants, et on éviterait des coûts de transport. C'est quelques centaines de milliers de dollars. Qu'est-ce que vous voulez, calculez le nombre d'enfants qui sont transportés, bien, c'est des sous qui pourraient être mis, sans doute, sur la rénovation.

Et aux adultes on dit: Vous êtes un peu plus capables de vous déplacer. Les métros, j'imagine que ça ne vous embête pas trop, hein? Les autobus? Quelques métros plus loin, il y a Marymount qui offre une possibilité, si je comprends bien, de 1 500 places, c'est bien ça. Et là on retrouverait effectivement des jeunes du secondaire, des adultes de la formation professionnelle. Eh oui, il y aurait CECM et CEPGM dans une même institution. On pourrait faire deux écoles séparées comme entités scolaires dans un même édifice. Cela se fait ailleurs, cela est tout à fait plausible, et je peux vous dire que Marymount, c'était une des suggestions de la CECM, la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui est prête à partager cet équipement. Et je comprends mal que la PSBGM soit si fâchée finalement de ce qu'on propose.

Le Président (M. Pinard): Je vous demanderais de conclure.

(3 h 10)

Mme Marois: Si on proposait l'expropriation, M. le Président, mais ce n'est pas de ça dont on parle: on dit «l'utilisation des écoles».

Le Président (M. Pinard): Je m'excuse de vous interrompre.

Mme Marois: Je répondais aux questions du député, mais, écoutez, je n'ai pas d'objection à en recevoir d'autres.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. Je tiens à vous préciser qu'après le décompte qu'on vient de faire, Mme la ministre de l'Éducation a déjà employé 21 minutes de son temps, alors que vous avez déjà utilisé 16 minutes de votre temps. Alors, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Juste pour revenir... La ministre dit qu'elle propose, mais elle impose. Il y a toute une différence, ici. Et, si elle est convaincue qu'elle a une proposition gagnante – nous avons déjà entendu ça sur un autre dossier, en tout cas – qu'on m'amène les personnes ici, qu'on laisse la chance au PSBGM d'expliquer la position qui est dans la résolution adoptée hier soir.

Une voix: Ce soir.

M. Kelley: Ce soir, hier soir, je ne le sais pas. J'aimerais les entendre témoigner en commission parlementaire, faire une contre-proposition. Comme j'ai dit, tout le monde constate qu'il y a un problème, mais on n'a pas accès, ici, à tous les témoins pour voir les différentes solutions, les différentes propositions. Moi, j'ai dit: Qu'est-ce qu'on a demandé de faire avec le projet de loi n° 87, à 3 h 15 le matin? C'est de donner un chèque en blanc à une ministre sans avoir accès, nous autres, aux données, aux témoins, aux personnes intéressées qui doivent vivre la décision.

Et, quand je dis: Dans la proposition, si c'est de défaire une école primaire de 300 enfants, il faut réfléchir deux fois avant de faire ça. Ça, c'est beaucoup de monde qu'il faut déplacer. Ça, c'est les enfants. Ça, c'est les personnes. C'est une école qui est là depuis des années, avec des traditions, et tout ça. Alors, juste de dire carrément à 300 personnes: Tassez-vous d'ici le 20 janvier, sans consultation, sans avoir le droit, comme citoyens, de venir ici témoigner dans l'Assemblée nationale...

Et, à 3 h 15 le matin, de me dire de me rallier à cette proposition, non, M. le Président, je ne peux pas faire ça. Et je pense que les 300 enfants et leurs parents, à Coronation, j'aimerais les entendre, avant de donner un chèque en blanc, qu'il y a des solutions de rechange entre Marymount et Shadd où il y a des élèves – parce qu'ils sont déjà là – des familles qui sont déjà attachées à Shadd et des familles attachées à Marymount. J'aimerais les entendre pour voir si elles sont d'accord avec la décision imposée par la ministre dans le projet de loi. On n'a pas eu l'occasion de le faire. Alors, juste de dire, ce soir, que: Oh, c'est une proposition gagnante du gouvernement, je suis prêt à signer: non. Et, comme je disais, moi, je viens de loin. Je ne sais pas, dans mon comté, c'est loin de ça. Mais on a eu une expérience comme ça où la ministre a pris la décision de respecter l'autorité locale, et c'est ça qu'elle a dit.

Alors, tout à coup, six mois après, on est dans la situation complètement contraire, et je ne comprends pas. Mais, comme j'ai dit, avant de donner mon accord de déplacer 300 élèves dans une école primaire... Eh oui, il faut comprendre aussi que c'est une école primaire de la minorité linguistique. Alors, c'est une autre raison pour nous autres d'agir avec prudence. C'est tout.

Dans la même chose, la ministre est très consciente de ça... Quand c'est les besoins des étudiants au niveau collégial, dans l'ouest de l'île de Montréal, elle est prête à agir avec une énorme prudence, de dépenser des sommes très, très significatives parce que c'est pour elle une position minoritaire. Alors, je pense qu'on a ici des situations où les droits des minorités linguistiques sont en cause. L'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés est en cause. Alors, je pense qu'il faut agir avec prudence, et c'est ça que la ministre ne fait pas. Alors, moi, je ne suis pas prêt ce soir à donner un chèque en blanc parce que je pense, entre autres... et la proposition qui est adoptée par la commission scolaire, une contre-proposition... Et je pense qu'en tout respect il faut les entendre.

Et, moi et mon collègue le député de Marquette, nous sommes prêts à revenir le 6 janvier en commission parlementaire. Pas de problème. On peut organiser ça pour les faire témoigner. J'adore ça, ici, à Québec. Alors, je peux revenir, parce que c'est très important que le pouvoir législatif ait son mot à dire, et pas uniquement laisser ça entre les mains du pouvoir exécutif. Et, moi, je tiens à ça. Puis on a les commissions parlementaires; on a les parlementaires qui sont prêts à siéger tout de suite après Noël pour entendre les groupes. Et si la proposition est aussi gagnante que ça, la ministre va être capable de vendre son projet.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Moi, je n'ai toujours pas entendu la ministre répondre à la résolution de ce soir. Ça, c'est la réalité des faits. Vous réagissez comment? Quel impact est-ce que ça a par rapport à votre projet de loi et les décisions que vous entendez prendre? Et je vous le dis parce que je me souviens, il n'y a pas si longtemps, par rapport à une autre de vos propositions touchant les commissions scolaires linguistiques, j'avais fait des mises en garde. On m'avait accusé de l'autre côté d'être pessimiste, qu'il fallait faire confiance. Finalement, on s'est retrouvé devant un cul-de-sac. Et, moi, ma crainte, c'est qu'on fait face au même risque ce soir. La CEPGM, elle est très déterminée, et ce n'est pas sa première bataille devant les tribunaux.

Mais j'aimerais savoir, comme personne responsable de ces enfants, et vous n'oubliez pas, j'espère, l'insécurité dans laquelle les parents seront plongés dès demain ou après-demain, lorsqu'ils vont prendre connaissance... Là, il y a un conflit, il y a un conflit important: où seront nos enfants en septembre prochain? Il y en a 600. Où seront-ils? À l'école Coronation? Ou est-ce que c'est le secteur francophone qui y sera? Ça, j'aimerais vous entendre là-dessus, Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, mon taux d'adrénaline recommence à monter. Ça ne va pas. Il crée lui-même l'insécurité auprès des parents. Le député de Marquette, qui a des enfants, il me semble qu'il devrait se préoccuper d'abord de l'intérêt des enfants. Ce matin, ce qu'il devrait me dire, là, c'est: Votre proposition n'est peut-être pas la meilleure, mais je pense qu'il en faut une, puis on va essayer de travailler avec la PSBGM et la CECM pendant les quelques semaines qui viennent pour en trouver une, solution. Parce que, nous, là, c'est les enfants qui nous intéressent, puis on pense que ce que vous proposez ne semble pas plaire aux gens – attention! – de la commission scolaire, parce que, aux parents, elle plaît. Les parents de Coronation sont heureux de l'hypothèse qui est là; les parents de Saint-Pascal-Baylon sont heureux. Pour qui sommes-nous ici, M. le Président? Pour M. Pallascio? Pour M. Butler? En tout respect pour eux, je ne suis pas ici pour eux; je suis ici pour les enfants qui sont dans leurs écoles. Ça, oui. Ça, c'est ma responsabilité. C'est la responsabilité du député de Marquette; c'est la responsabilité de son collègue.

Alors, M. le Président, je vais répondre à une partie de ses questions, enfin à toutes ses questions si je peux, mais je ne voudrais pas, là, qu'il sème lui-même – et je suis certaine qu'il ne veut pas faire ça – l'insécurité chez les parents. Parce que les parents étaient heureux, là, depuis la semaine dernière. Ils disaient: Enfin, la lumière au bout du tunnel. Et puis là on est en train de leur dire: Non, non, vous avez rêvé. Même si c'est une solution applicable, il y a des gens qui n'aiment pas ça. Ils se sentent un petit peu blessés par la façon de faire. Bon.

Alors, là, je ne l'ai pas encore étudiée, la proposition de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, M. le Président, qui a été déposée par le député de Marquette. Mais, si j'ai compris une partie de cela, je comprends qu'on déplace les enfants, puisque, à Coronation, on aurait des enfants francophones. Bon. Eh bien, alors on doit en déplacer quelques-uns, certain. Hein? Alors, là, il me dit que, moi qui veut en déplacer avec ma proposition, ce n'est pas bon, mais, quand c'est la PSBGM, on dit: Ah! Peut-être qu'il y a quelque chose là d'intéressant, on devrait la regarder. Bien, parfait. Regardons-la. Ils ont 20 jours pour la regarder, M. le Président. Et, si la proposition qui est là, assortie d'un certain nombre d'autres réalités... Parce que je crois comprendre qu'on veut s'accaparer une clientèle et exclure la CECM, c'est un petit peu ce que je comprends. Peut-être que je comprends mal, mais enfin on verra. De toute façon, on va la regarder en détail et en profondeur. Puis on aura le temps de le faire, il y a un mois pour discuter de ces hypothèses.

(3 h 20)

Et, pour rassurer le député de Marquette et son collègue, M. le Président, j'ai une petite carte ici: on voit très bien que Coronation, qui est là, Shadd, qui est là, c'est quelques coins de rues. Donc, si on déplace les gens, même qu'on les ramène un peu plus au coeur du quartier, de Coronation à Shadd... Et Saint-Pascal-Baylon, comme ils sont partout, répartis sur le territoire, ils vont être tellement heureux de se retrouver quelque part dans une école dans leur quartier, que je n'ai pas beaucoup d'inquiétudes de ce côté-là. Alors, je ne vois pas où est l'insécurité des parents. Au contraire, depuis quelques jours, ils se sentent sécurisés. Et là, c'est le débat qu'on a, c'est la réaction de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal qui risque d'insécuriser les parents et les enfants.

Moi, je veux aussi essayer de répondre à la question du député de Marquette, qui dit: Oui, mais vous savez, ils vont vous faire la guerre, ils vont vous faire des procédures juridiques. Bien, je trouve qu'on devrait essayer de trouver un terrain d'entente avant de commencer comme ça, M. le Président. Mon intention, moi, ce n'est pas de poursuivre personne, c'est d'essayer qu'on trouve une solution correcte, adéquate.

Les évaluations juridiques qui ont été faites de notre côté sont positives, sont rassurantes. C'est évident qu'on n'a pas intérêt à se poursuivre l'un l'autre. Il y a toujours des coûts pour quelqu'un, puis il me semble que, de ce temps-ci, on devrait essayer d'éviter ces coûts-là, mettre l'argent pour servir les enfants, n'est-ce-pas? Alors, les analyses qui ont été faites, les garanties que nous avons nous assurent que nous avons un dossier très solide à cet égard.

Évidemment, si j'ai l'appui de l'opposition, si l'opposition aidait – elle n'est peut-être pas obligée de me le donner directement ici ce soir, je suis capable de vivre avec un vote contre le projet – concrètement, sur le terrain, ça serait un pas dans la bonne direction. Je serais contente, ça me satisferait, parce que ça répondrait aux besoins des enfants, puis c'est ça que je souhaite, moi. Alors, si vous ne voulez pas le faire par la loi, ça ne me dérange pas, ça ne me dérange pas du tout, mais faites-le autrement. Puis vous n'êtes même pas obligés de me le dire, vous n'êtes même pas obligés de le faire dans le sens que je le propose. S'il y en a une solution, qu'elle plaît, qu'elle plaît dans le sens où elle répond aux besoins, pas que tout le monde est de bonne humeur, mais dit: Ce n'est pas ça qu'on voulait, c'est tout croche, ça ne va pas, là... Alors, c'est juste ça, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci, M. le Président. Encore une fois, je suis étonné. Si elle veut la collaboration de l'opposition, la ministre devrait nous donner les outils pour le faire. Et, moi, dans la bonne tradition, on peut même tenir une commission parlementaire à Montréal, entendre les parents. Si les parents sont si heureux, j'aimerais les entendre, ça ne prend pas longtemps. Mais, si c'est vraiment une proposition si gagnante que ça, on va organiser une journée d'audiences dans une des écoles, le 7 janvier, à Montréal, on va les convoquer, on va les entendre.

Mais de dire que... On n'a rien de ce côté, on n'a rien donné, juste un projet de loi qui arrive en catastrophe. Si la ministre est aussi fière de son projet de loi, pourquoi est-ce qu'on en discute à 3 h 25 du matin? Si c'est vraiment une proposition gagnante, et tout ça, on va faire ça. Peut-être que ça va être difficile pour les deux commissions scolaires de venir témoigner devant une commission, devant les caméras, avec les micros, enregistrées, et tout ça. Si elle pense vraiment que les deux commissions scolaires sont réfractaires et que c'est elles qui sont le problème, elle a tout intérêt, au nom de la transparence, de les faire témoigner publiquement devant les deux partis de l'Assemblée nationale. Comme je l'ai dit, le 7 janvier, à Montréal, commission de l'éducation, on peut aller les entendre, comme ça l'opposition va être alimentée.

Mais, moi, à part le projet de loi, on n'a pas beaucoup d'information de ce côté-ci. Si elle veut vraiment chercher le partenariat, si elle veut chercher la collaboration, ce n'est pas en faisant le bâillon, à 3 h 25 du matin, qu'elle va réussir à associer l'opposition officielle à son projet.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Dernière question. Compte tenu que le temps file rapidement, deux questions: La ministre accepterait-elle que nous puissions rencontrer avec elle, en commission parlementaire, à Québec ou à Montréal, les commissions scolaires, le médiateur et les parents des comités d'écoles concernés? D'une part. D'autre part: Si jamais on se retrouve dans une impasse avant le 20 ou le 21 janvier, la ministre accepte-t-elle d'envisager la possibilité d'une construction pour solutionner le problème à long terme? Je suis convaincu que, si elle place cette solution-là sur la table, ça va rallier les deux parties. Elle le sait déjà.

Mme Marois: Voyons!

M. Ouimet: Si ce n'est pas ça, les élèves de Saint-Pascal-Baylon n'auront toujours pas de place. Et nous sommes ici ce soir, mon collègue de Jacques-Cartier et moi-même, pour l'intérêt des élèves de Saint-Pascal-Baylon, et la ministre le sait.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre, est-ce que vous désirez répondre à ces deux questions?

Mme Marois: Oui, tout à fait, M. le Président. Écoutez, moi, je pense que le temps va être mieux utilisé si les gens se rencontrent, se parlent, imaginent des scénarios et en trouvent un, surtout. On se comprend? Parce que je pense que c'est possible d'en trouver. On en a un, là, nous, dans une loi, puis qui est tout à fait rationnel, qui a de l'allure. Et le député de Marquette et le député de Jacques-Cartier m'amènent la solution de la construction, mais c'est la solution facile. C'est la solution facile...

M. Ouimet: C'est dans votre rapport de médiateur, ça.

Mme Marois: ...qui coûte 5 000 000 $, 4 200 000 $ en construction, puis, dans ce quartier-là qui est déjà bâti pas mal, hein... On le connaît assez bien, ce quartier. Je le fréquente régulièrement, je vais y faire parfois des courses, je circule à travers ce quartier, je vais dans les institutions qui sont là. M. le Président, c'est un quartier bâti, donc c'est coûteux et c'est en plein coeur de Montréal. Alors, c'est sûr, au bas mot, un 5 000 000 $.

Nous proposons un choix rationnel. Nous croyons que les députés, le député de Jacques-Cartier et le député de Marquette ont en main toutes les données leur permettant de bien évaluer la situation. J'ai remis le rapport du médiateur, nous n'avons jamais refusé de donner quelque information que ce soit, les documents rendus publics au moment de la conférence de presse leur sont disponibles aussi. J'imagine que le député de Marquette doit avoir encore quelques contacts avec la CECM, M. le Président. Il peut donc aller voir quelques-uns de ses amis qui s'y trouvent sûrement. Je pense que le député de Jacques-Cartier doit aussi avoir un certain nombre de contacts, de connaissances à la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal. Je pense que ce serait peut-être plus utile, si on travaillait en toute honnêteté à trouver avec les personnes en cause la solution la plus adéquate. Je pense qu'on utiliserait au mieux le temps qui est imparti, qui est prévu au projet de loi, pour arriver à mieux servir les enfants du quartier Côte-des-Neiges.

C'est le seul intérêt que j'ai en déposant ce projet de loi. Je crois que nous avons suffisamment d'éléments d'information pour être éclairés sur ce qui se passe dans ce quartier et sur les solutions possibles à appliquer. Je ne le fais, et je le répète au profit de mes collègues de Marquette et de Jacques-Cartier, même au profit des commissions scolaires en cause, contre personne, ce projet de loi, je le fais pour les enfants et je souhaite qu'on soit assez adulte dans la démarche à venir pour proposer une solution qui convienne aux enfants, qui ne les amène pas à l'autre bout du monde. C'est ça, la solution qu'on avait initialement proposée, en utilisant des écoles vacantes, mais ça n'avait pas d'allure. Transporter des petits au-dessus de Décarie, voyons! Pensons-y deux minutes! Il faut connaître un peu Montréal pour savoir ce que ça veut dire, hein! Puis il me semble que je travaille avec des députés, là, qui connaissent assez bien Montréal, en tout cas sûrement aussi bien que moi. Bon. Alors, je pense qu'on propose une... À l'autre bout du monde! Mais Mertons, c'est à l'autre bout du monde! Il faut voir comment c'est excentrique complètement, ce qu'on nous proposait.

Alors, il y en a, des solutions. Moi, je fais appel aux parties en cause et, je le dis, je ne veux blesser personne dans ce débat-là. Je veux surtout qu'on trouve des solutions pour les enfants. Je ne pense pas... Je l'ai dit au député de Marquette, je l'ai dit peut-être un peu drument. Parfois je le fais, je le sais que je suis un peu comme ça, parce que je deviens horripilée par ce que je vois. J'ai dit un peu drument au député de Marquette: Écoutez, là, ça fait quelques mois que je les entends, puis ils ne réussissent pas à en trouver, des solutions. Alors, peut-être que, si on arrête de les entendre, de les écouter, ils vont se parler. Ils vont peut-être en trouver une, solution. On va leur donner un moyen pour en trouver une. Il va y avoir une loi qui va leur dire: Voici la solution qu'on va appliquer, si d'ici là vous n'en trouvez pas une autre.

Alors, moi, c'est à cela que je m'en tiens pour l'instant, M. le Président. Je pense qu'il y a une certaine sagesse dans ce qui est proposé. On n'enlève rien à personne, on n'enlève d'actif à personne, on propose une utilisation d'actif pour répondre aux besoins des enfants, puis je pense qu'on le fait raisonnablement. Un des joyaux, m'a dit la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, de leurs institutions, c'est l'Académie Shadd. On n'y touche pas, elle reste pour les fins de l'utilisation propre de la PSBGM.

Alors, voilà, M. le Président, moi, j'assure les membres de cette Assemblée, les membres de la commission de ma pleine et entière collaboration. Je compte sur celle aussi des membres de l'opposition à cet égard.

(3 h 30)

Le Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Très rapidement, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Dernier commentaire. Nous prenons acte du refus de la ministre d'envisager la solution de la construction, solution qui rallie les parties. Le terrain d'entente est là, je prends acte de ça. Je prends acte également, et nous prenons acte de son refus d'entendre les parties en consultation, quelque part dès après le début du mois de janvier. Alors, nous prenons acte de ça. La ministre vivra avec les conséquences des décisions qu'elle a prises.

Le Président (M. Pinard): Merci. Nous allons maintenant procéder, article par article, à l'adoption. L'article 1 est-il adopté?

Mme Marois: Adopté, M. le Président.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Si vous avez des amendements à me soumettre de part et d'autre, alors c'est le moment. Est-ce que l'article 2 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que l'article 3 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que l'article 4 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que l'article 5 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que l'article 6 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que le titre... Est-ce que l'Annexe I est adoptée?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que l'Annexe II est adoptée?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que le projet de loi n° 87 est adopté?

Mme Marois: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Merci, MM. les députés de Marquette et de Jacques-Cartier ainsi que Mme la ministre de l'Éducation. Je tiens également à remercier tous les gens de son ministère et collaborateurs ainsi que le député adjoint parlementaire, le député de Lotbinière.

Alors, en conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je suspends quelques instants, en priant bien évidemment toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement afin que l'Assemblée poursuive ses travaux. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 3 h 33)

(Reprise à 3 h 35)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la Présidente de la commission plénière.

Mme Doyer (présidente de la commission plénière): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Matapédia. Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Alors, M. le Président, je vous demanderais de procéder maintenant à l'étape de l'adoption du projet de loi.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 9 de notre feuilleton, Mme la ministre de l'Éducation propose l'adoption du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal.

Je vous rappelle que la durée maximale de ce débat est de 30 minutes: 10 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et, enfin, cinq minutes de réplique pour Mme la ministre.

Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 87? Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci. Je crois que nous avons longuement débattu de ce projet de loi. La pertinence parfois pouvait être questionnée, M. le Président, quant aux propos tenus, mais je crois que, de notre côté, tout a été clairement dit: nos orientations, nos objectifs, notre parti pris, un seul, les enfants.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre de l'Éducation et députée de Taillon. Alors, nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition et député de Marquette.

M. Ouimet: Cinq minutes ou 10 minutes?

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous avez droit à 10 minutes, M. le député.

M. Ouimet: Arrêtez-moi à cinq minutes, s'il vous plaît. Partagez...

Le Vice-Président (M. Pinard): Très bien, M. le député. Alors, à vous la parole.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Effectivement, après un très court processus, nous avons demandé à la ministre de l'Éducation, comme le disait si bien mon collègue le député de Jacques-Cartier: Si la formule est gagnante, si la ministre veut tellement prendre les intérêts des enfants, pourquoi refuse-t-elle d'envisager une deuxième solution où elle sait, parce que son médiateur lui a dit dans un rapport, qu'il y a un terrain d'entente entre les parties?

Oui, bien sûr, M. le Président, ça coûte des sous. Toute construction d'école au Québec coûte des sous et, quand on veut loger des enfants dans une école, il faut pouvoir investir. On sait que c'est un quartier qui est en croissance démographique importante depuis les six dernières années. La ministre sait également, par ailleurs, qu'il va y avoir des besoins de places-élèves d'ici deux ans, d'ici trois ans, on parle de 900 places-élèves. Et on sait fort bien, les parties le savent et la ministre doit elle-même le savoir, que c'est une solution à très court terme qu'elle met de l'avant parce qu'elle doit répondre, non pas aux intérêts des enfants – elle se présente ici et elle dit: C'est les intérêts des enfants que j'ai à coeur – elle doit tout simplement répondre à une commande du président du Conseil du trésor, et du ministre des Finances, et du premier ministre. Et, si ça se fait sur le dos des enfants, M. le Président, et, en l'occurrence, d'une minorité linguistique, il y a encore moins de problème.

Alors qu'on sait la solution, son médiateur lui a dit. Nous, ce que nous lui avons demandé, c'est qu'elle place les deux hypothèses de solution dans son projet de loi. Et il va bien falloir trancher. Mais, lorsqu'on sait qu'il y a une partie qui est prête à céder un terrain gratuitement, lorsqu'on sait que la ministre est prête à gaspiller 1 500 000 $... Parce que son projet de loi, c'est ça, c'est un effet domino. On prend des élèves entre six ans et 11 ans d'une école primaire, ils sont 300, puis on dit: Vous autres, là, vous allez quitter l'école, vous allez aller à l'autre école. Par la suite, on prend les élèves de l'école de l'Académie Shadd, quelques centaines d'élèves, on dit: Vous autres, vous allez quitter l'école et vous en aller à l'école Marymount. Et, par rapport à l'école Marymount, on dit: Là, vous allez vous organiser. M. le Président, ça n'a aucun sens.

(3 h 40)

Est-ce que ça va être ça, la nouvelle façon de gérer de la ministre de l'Éducation pour réaliser des économies? Elle parle d'autonomie des commissions scolaires, mais là elle est en train de dire aux commissions scolaires où placer leurs élèves. C'est ça qui est le résultat de son projet de loi. Du jamais vu! Sans précédent, M. le Président! Et tout ça, elle prétend vouloir défendre les intérêts des enfants? Vraiment? Si c'est ça, son véritable intérêt, pourquoi ne pas mettre dans la solution également la construction de l'école, comme il se fait partout ailleurs à travers la province. Mais non, son véritable intérêt, c'est de réaliser des économies et de réaliser des économies sur le dos de ces enfants-là. Et, si jamais ça va devant les tribunaux, je vais me lever à la période de questions et je vais lui rappeler ce qui s'est déroulé ce soir. Je vais céder le reste du temps à mon collègue le député de Jacques-Cartier. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Oui, juste encore une fois, M. le Président, juste dénoncer le processus. Nous voulons avoir accès à l'information, aux données. Nous avons fait l'offre de bonne foi. Moi, je suis prêt, le 7 janvier, à venir ici à Québec; on peut faire une commission parlementaire à Montréal, peu importe, nous sommes prêts pour entendre les groupes parce que j'ai des doutes un petit peu. «I'm from Missouri, show me.» Mais, si la proposition est si gagnante que ça, pourquoi est-ce qu'on discute ça à quatre heures moins le quart le matin? Si c'est vraiment quelque chose dont le gouvernement est fier, la ministre est fière, elle veut démontrer ça à toute la population, on va faire ça dans une commission parlementaire, devant les journalistes, devant les caméras pour montrer à tout le monde que nous avons une recette magique avec le projet de loi n° 87. Mais on n'aurait pas procédé comme ça. On a bâillonné un projet de loi avant de commencer à discuter.

«We had closure before opening, Mr. Speaker.» C'est du jamais vu. Alors, moi, j'ai mes doutes sur le bien-fondé, sur la solution qui est si gagnante que ça. Mais, si la ministre est convaincue, et, moi, je ne mets pas ça en doute, on va siéger un jour à Montréal, les deux commissions scolaires, le médiateur, les représentants des parents parce qu'on est tout le monde intéressé pour s'assurer que les parents sont satisfaits avec la proposition gagnante dans ce projet de loi. Ce n'est pas prendre grand-chose, j'imagine, une des commissions scolaires ou une église dans le coin qui serait prête à nous accueillir, à organiser tout ça. On peut faire ça rapidement, c'est faisable, aller sur le terrain pour tester la proposition.

Mais, si on ne peut pas faire ça, si l'opposition est bâillonnée et n'a pas l'occasion de le faire, moi, je dis que ce n'est pas une proposition, c'est une imposition. C'est quelque chose que la ministre va imposer. Elle va déplacer les parents, elle va déplacer les enfants, et sans que, nous, dans l'opposition, puissions voir comment ça marche sur le terrain. Alors, c'est évident, on va voter contre le projet de loi n° 87.

C'est un problème qui dure depuis deux ans; je pense que le député de Lévis en a été saisi en décembre 1994. Il y avait toute une occasion de s'associer à l'opposition pour trouver une solution; le gouvernement ne voulait pas faire ça. Il arrive, il passe ça à la vapeur, à quatre heures le matin. C'est leur choix de le faire, mais je pense qu'on met une proposition très raisonnable sur la table: on est prêts à aller s'asseoir avec les témoins, à les entendre pour s'assurer qu'on a quelque chose qui ne nous amènerait pas, comme c'était le cas dans Dorval, comme je dis, au-delà de 100 000 $. Un parent qui n'a même pas un enfant dans la commission scolaire est maintenant toujours devant la cour. Et ça, c'est de l'argent qu'on peut mettre dans la bibliothèque de l'école. C'est de l'argent qu'on peut mettre dans l'achat des ordinateurs. C'est de l'argent qu'on peut mettre pour bonifier les conditions à l'école. Et c'est juste une crainte et peut-être que c'est non fondé, mais il y a des contestations juridiques et la protection des juridictions, et tout ça. Alors, je pense qu'on a tout intérêt de s'assurer qu'on va éviter un conflit juridique qui risque de coûter un agrandissement. Au lieu d'acheter une solution durable, on va signer les contrats d'avocats, et je pense que ce serait regrettable.

Et si on peut tester la proposition gagnante de la ministre, sur le terrain, pour s'assurer que ce ne sera pas le cas et, comme je dis, peut-être que ce serait une bonne chose pour les commissions scolaires, devant les caméras, dans les micros, devant les parlementaires des deux côtés de la Chambre de venir expliquer leur position... Et, si la ministre est si convaincue que sa position est la seule, est la bonne position, je pense qu'avec les journalistes et les parlementaires autour de la table on va être capables de révéler ça. Et ça va mettre une ou les deux commissions scolaires, peut-être, dans l'embarras de venir témoigner devant une commission parlementaire. Alors, c'est une occasion en or, M. le Président, pour la ministre. Mais elle veut laisser ça de côté, elle veut adopter un projet de loi à 3 h 45 le matin qui, à mon avis, même mon soupçon, n'est pas une proposition gagnante. Et c'est pourquoi on est obligé de faire ça de cette façon, cette méthode, à cette heure-ci, et c'est fort regrettable. Parce que, comme j'ai dit, moi, je viens de loin, ce n'est pas dans mon comté, mais je pense qu'on a tout intérêt, à cause des questions qui sont en cause, à cause du fait qu'on parle d'un établissement de la minorité linguistique, à agir avec prudence.

Moi, j'ai lu la décision Mahe de la Cour suprême qui a touché les droits des parents francophones en Alberta. C'est une décision de la Cour suprême fort éloquente. Mais il y a des leçons sur le «control and management» qui ...l'article 23 sur une minorité linguistique. Il faut en tenir compte. Et c'est fort compliqué, cette décision, mais ça dit effectivement que les minorités linguistiques ont un grand mot à dire sur le contrôle et la gestion de leurs établissements. Et, moi, si je regarde ça, j'imagine que ça doit comprendre l'école Coronation, l'Académie Shadd et les autres.

Alors, on soulève d'énormes questions. Et, comme j'ai dit, moi, je ne veux pas semer l'inquiétude. Moi, je veux juste assurer que le gouvernement agit avec prudence. Et, moi, je dis: Arriver, bâillonner, adopter un projet de loi à 4 heures le matin, ce n'est pas de la prudence, c'est de l'improvisation, et on va voter contre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique de cinq minutes? Mme la ministre.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Certainement, M. le Président, très brièvement. Évidemment, si nous discutons à 3 h 45 ce matin, on sait très bien, de l'autre côté de la Chambre, que nous aurions pu discuter à 18 heures hier soir, et même procéder à l'étude en commission parlementaire à 18 heures hier soir. À ce moment-là, je pense que ça aurait été en pleine lumière. Mais ce n'est pas moi qui ai décidé que chaque cinq minutes devait être utilisé. C'est l'opposition qui a choisi cette stratégie. Je vis avec celle-là, M. le Président.

Le choix que nous proposons, c'est le choix des enfants, c'est le choix des parents et c'est aussi le choix du respect des contribuables, M. le Président, puisque les contribuables seraient amenés à devoir débourser encore des sommes considérables alors qu'il y a des espaces disponibles. Et c'est ça que nous proposons, c'est une rationalisation des espaces. Et, M. le Président, les intervenants ont le loisir de trouver une solution qui leur convienne, qui soit la solution la plus adéquate à leur point de vue, mais, surtout, qui va répondre aux besoins des enfants et aux besoins des parents. Ils ont quelques semaines pour y arriver, M. le Président, et ça rendra la loi complètement caduque. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Alors, nous avons maintenant terminé les interventions concernant l'adoption du projet de loi n° 87. À ce stade-ci, je vous demande: Le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que l'on appelle les députés. Et nous suspendons les travaux pour quelques instants.

(3 h 49 – 3 h 56)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous en sommes maintenant à l'adoption du projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal. Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

(4 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je demanderais consentement pour que le vote du député de Lac-Saint-Jean et que le vote du député de Labelle soient rajoutés au vote ministériel, et le vote du député de Nicolet-Yamaska. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, est-ce qu'on peut connaître les motifs des retards, M. le Président?

M. Bélanger: Des embouteillages.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je dois prendre ça comme un consentement? Oui. Alors, M. le secrétaire, est-ce que vous voulez nous dévoiler le résultat du vote, s'il vous plaît?

Le Secrétaire: Pour:58

Contre:31

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion est donc adoptée. Alors, le projet de loi n° 87, Loi concernant...

Je disais donc: Le projet de loi n° 87, Loi concernant les conditions d'utilisation d'immeubles de la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal par la Commission des écoles catholiques de Montréal, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je vous demanderais que nous procédions à l'adoption du principe du projet de loi n° 91.


Projet de loi n° 91


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 12 du feuilleton. Conformément à l'ordre adopté à la séance d'hier, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu. Je vous rappelle que les temps de parole sur le débat sur l'adoption du principe sont limités à 20 minutes pour le ministre qui présente le projet de loi, 20 minutes pour un représentant de l'opposition officielle, cinq minutes pour tout autre député, et enfin cinq minutes de réplique seront accordées à l'auteur du projet de loi.

Y a-t-il des intervenants? M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Je soumets donc...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le ministre. Si vous le permettez, nous allons tout simplement attendre que les députés qui ont à vaquer à d'autres occupations veuillent bien quitter cette enceinte le plus rapidement possible, s'il vous plaît.

M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf, nous vous écoutons.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui. Merci, M. le Président. Je soumets à cette Assemblée pour qu'elle en adopte le principe le projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu.

Ce projet de loi a pour objet d'introduire dans la Loi sur le ministère du Revenu une disposition établissant à cinq ans le délai de prescription des créances fiscales. Ce projet de loi donne suite à une mesure prévue dans le dernier discours sur le budget du ministre des Finances dans les termes suivants. «Une modification sera apportée à la Loi sur le ministère du Revenu afin que la prescription de telles dettes ne puisse s'accomplir à l'encontre du ministère du Revenu avant l'expiration d'un délai qui, ajouté à celui prévu par le Code civil du Québec et par les dispositions d'entrée en vigueur de ce Code prévues par la Loi sur l'application de la réforme du Code civil, n'excède pas 10 ans au total.»

Cet ajout dans la Loi sur le ministère du revenu découle du fait que le Code civil du Québec, en vigueur depuis le 1er janvier 1994, prévoit que des créances, y compris les créances de l'État, se prescrivent par trois ans, à moins, bien sûr, que la dette ne soit garantie par une hypothèque immobilière ou qu'un jugement n'ait été introduit contre le débiteur.

En conséquence, vous comprendrez, M. le Président, qu'il est important que ce projet de loi soit adopté avant le 1er janvier prochain pour éviter la prescription de certaines des créances du ministère du Revenu, ce qui entraînerait la perte de plusieurs centaines de millions de dollars.

J'aimerais préciser ici que cette mesure n'est nullement inéquitable envers les citoyens. En effet, le Code civil du Québec prévoit que le droit d'action, lorsqu'il s'agit de droit personnel ou de droit réel mobilier, se prescrit par trois ans. Il en est de même en matière fiscale, puisque le délai normal pour recotiser un contribuable est également de trois ans. Par ailleurs, le citoyen qui obtient un jugement en sa faveur dispose d'un délai de 10 ans pour l'exécuter. Or, le ministère du Revenu, pour recouvrer les impôts et les taxes impayés, donc une situation similaire à sa mesure, ne bénéficie actuellement que du délai de trois ans déjà mentionné. Ce délai est nettement insuffisant, surtout en période économique parfois difficile. L'État ne peut se priver des quelques centaines de millions de dollars qui y sont impliqués.

Je crois utile de préciser également, M. le Président, et c'est une donnée très importante, qu'au niveau fédéral de telles dettes fiscales sont imprescriptibles. Délai illimité. On ne parle pas de trois ans, on ne parle pas de cinq ans, on ne parle pas de 10 ans et même de 30 ans, le délai est imprescriptible. Alors, nous proposons cinq ans pour un tel délai au Québec, délai correspondant d'ailleurs à celui qu'on retrouve en ce qui regarde les créances du côté de la sécurité du revenu.

Certes, M. le Président, le ministère du Revenu pourrait toujours obtenir un jugement contre les contribuables qui sont débiteurs et bénéficier lui aussi du délai de 10 ans prévu par le Code. Toutefois, cette façon de faire a de nombreux inconvénients. Premièrement, elle est très coûteuse. Ainsi, pour protéger les créances qui pourraient se prescrire d'ici au 1er janvier, le ministère du Revenu devrait débourser une somme de plus de 3 500 000 $, sans compter l'engorgement des greffes que pourrait produire le nombre élevé de certificats que le ministère du Revenu du Québec devrait délivrer en vertu de l'article 13 de sa loi.

Deuxièmement, puisque l'utilisation de telles procédures de recouvrement entraîne la divulgation de la dette fiscale du contribuable en cause, il s'ensuit que ces mesures ne sont pas sans effet sur ce dernier, notamment en ce qui regarde éventuellement ses possibilités de crédit, voire même sa réputation. En dernier lieu, le recours systématique à des mesures de perception lourdes va à l'encontre de la politique de recouvrement du ministère du Revenu, où nous privilégions plutôt la négociation d'entente de paiement.

(4 h 10)

Enfin, le Centre de perception fiscale planifie actuellement l'implantation pour le début de la prochaine année de nouvelles mesures de perception mieux adaptées aux diverses catégories de créances. M. le Président, je tiens à préciser que cette mesure ne porte pas préjudice aux contribuables québécois, en ce sens que cette nouvelle disposition s'appliquera aux situations en cours compte tenu du délai déjà écoulé. Il s'agit de bien comprendre. Il s'agit en effet de récupération de créances, de montants qui sont déjà dus et connus et non pas de nouveaux revenus pour le gouvernement, contrairement aux avancés de l'opposition officielle. J'entendais, hier, le porte-parole de l'opposition officielle pour les circonstances, M. le député de Verdun, qui concluait à des augmentations de taxes et d'impôts par conséquence de l'adoption éventuelle d'un tel projet de loi. Il ne s'agit absolument pas de la situation. Je le répète, il s'agit de créances, donc de revenus qui ont déjà été escomptés dans l'ensemble des revenus du gouvernement et à l'égard desquels nous avons l'obligation maintenant de percevoir ces créances-là, de faire en sorte que les débiteurs s'acquittent de leurs responsabilité, ce qui constituera en temps et lieu des recettes pour le gouvernement et non pas des revenus. Je pense que les personnes qui sont habituées à manipuler ces concepts-là savent très bien de quoi il s'agit.

Il s'agit aussi, M. le Président, d'une mesure d'équité. En effet, il s'agit de faire en sorte que ce qui est dû soit effectivement versé au gouvernement et donc à l'ensemble de la collectivité. Une mesure, également, de bonne gestion, puisqu'elle permet d'éviter de consentir des sommes d'argent importantes, soit près de 13 500 000 $, donc, en dépenses additionnelles au ministère du Revenu aux seules fins de pallier à la situation actuellement créée si tant est qu'on faisait défaut d'adopter le présent projet de loi.

Enfin, il s'agit aussi d'une mesure qui relève de la simple décence, M. le Président, ou d'un minimum de compassion ou de respect, je dirais, à l'égard des contribuables visés qui, à défaut que ce projet de loi soit adopté, auraient à en subir les conséquences au niveau de leurs possibilités de crédit, voire même de leur réputation. Alors, il est important de procéder avec ce projet de loi.

Je ferai également une invitation pressante à mon vis-à-vis, nommément le porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, que je sais être une personne responsable, tout à fait raisonnable, pour faire en sorte qu'on ne tombe pas dans ce que j'appellerais peut-être de la désinformation. J'ai entendu courir certaines prétentions à l'effet qu'on conclurait, avec l'adoption de ce projet de loi, une augmentation des taxes et des impôts. On sait très bien que ce n'est pas le cas. Il ne s'agit pas d'impôts additionnels, et je crois qu'en cette Chambre la vérité a ses droits, et j'ai confiance dans le sens des responsabilités et le sérieux habituels du député de Nelligan pour faire en sorte qu'on puisse vraiment avoir un échange sur ce projet de loi qui va au fond des choses et non pas qui reste en superficie, où on utilise des images pour éventuellement leurrer le public quant aux conséquences de l'adoption d'un tel projet.

Donc, revenons au fond de la question. Revenons au bon sens. Quand il s'agit, par exemple, d'évoquer le bâillon, je vois déjà certains porte-parole de l'opposition officielle évoquer le fait que, bon, le gouvernement emploie la technique du bâillon, qui pourtant est une disposition du règlement tout à fait normale dans les circonstances. Il arrive, M. le Président, effectivement, que dans des fins de session l'engorgement du menu législatif fait en sorte que, devant certaines manoeuvres – par ailleurs tout à fait normales de l'opposition officielle aussi, parce que ça fait partie du jeu parlementaire – on y aille d'un certain nombre de manoeuvres de diversion qui ont pour objet de finalement retarder la progression des travaux de la Chambre, et ça fait en sorte que le gouvernement se prévaut, à ce moment-là, comme tous les gouvernements depuis des décennies, d'une disposition spécifiquement prévue au règlement pour modifier certaines règles dans le parcours vers l'adoption d'un projet de loi et qui permet, malgré, je dirais, les tentatives fort généreuses d'une opposition officielle de retarder l'adoption d'un projet de loi, qui permet quand même de procéder de façon tout à fait démocratique et dans l'ordre à l'adoption de ce qui apparaît être requis.

Alors, M. le Président, j'invite encore une fois l'ensemble de cette Chambre à adopter le principe du projet de loi n° 91, et ceci, vous l'aurez compris, dans l'intérêt de l'ensemble de nos concitoyens, sans exception. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, nous sommes ici ce soir bâillonnés, bâillonnés pour la quatrième fois, quatrième loi en principe. Et je voulais discuter quelques commentaires sur ça, M. le Président.

Le bâillon sur le projet de loi n° 91, maintenant, qu'on appelle Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, moi, je voudrais ajouter mon propre titre: loi modifiant de nouveau et à la toute dernière minute la Loi sur le ministère du Revenu. C'est le quatrième bâillon, à 4 h 15 ce matin, M. le Président. Et c'est un bâillon sur le principe de la loi, sur le principe de la loi. Nous n'avons pas eu une chance d'avoir une vraie discussion sur le principe; et je souhaite ça. Le ministre délégué au Revenu a dit qu'il veut avoir une discussion de fond; moi aussi, je voudrais avoir une discussion de fond. Mais, chaque fois que j'essaie d'entrer dans une discussion de fond avec ce ministre, il a besoin d'avoir ses fonctionnaires pour répondre à ses questions. Avec ça, M. le ministre délégué, j'espère que, pendant la plénière, nous allons avoir une chance, malgré le temps limité par ce bâillon, d'avoir une discussion sur qu'est-ce que ça veut dire, toutes les nuances de ce projet de loi n° 91.

M. le Président, dans mon opinion – quelques remarques en général – c'est un autre exemple de la confusion de ce gouvernement, de l'incompétence de ce gouvernement, de l'incohérence de ce gouvernement, des contradictions de ce gouvernement et aussi de l'improvisation de ce gouvernement.

M. le Président, vous savez que, dans une procédure plus démocratique, nous sommes en train d'étudier le projet de loi n° 42 en commission parlementaire. Le ministre et moi avons travaillé sur ça. Ils ont parlé d'harmonisation avec le Code civil, harmonisation avec le Code civil. Sauf qu'à la toute dernière minute ils sont arrivés avec un projet de loi n° 91 qui est en effet désharmonisé avec la loi fiscale ou la loi du Revenu avec le Code civil. Pourquoi, M. le Président? Pourquoi ça se passe comme ça? Est-ce que le gouvernement était trop occupé avec les sommets économiques? L'année avant, c'était le référendum. Cette année, ça a retardé toutes les décisions économiques de ce gouvernement pour le sommet économique. Ou est-ce que le ministre est trop impliqué dans son projet de loi n° 32 où, encore une fois, il a utilisé le bâillon pour faire le couplage de toute l'information, tous les dossiers, de brimer les droits des citoyens, de remettre en question toute la confidentialité de la vie privée de la population québécoise? Est-ce que le ministre a été trop impliqué dans cet exercice pour se souvenir qu'il y a une responsabilité? Et, quelle grande surprise! le 31 décembre arrive, le 1er janvier arrive. Un conseil amical, M. le ministre: chaque année, nous avons le 1er janvier, chaque année, nous avons Noël. Ce n'est pas surprenant que, trois années après janvier 1994, nous ayons janvier 1997. Hello, Mr. Minister! Hello! Wake up. Smell the coffee, read the budget, read the budget. The budget, May 9th...

Le budget de M. le ministre des Finances a clairement expliqué ce qu'il veut faire dans ce projet de loi. Mais, malgré que le budget ait mentionné ça, je ne suis pas certain, M. le Président, que le ministre ait actuellement lu le budget. Le ministre de la Justice a admis qu'il ne lit pas ses lois. Maintenant, le ministre du Revenu admet dans cette Chambre, par son comportement, qu'il ne lit pas le budget. Le budget, à l'annexe A, page 111, indique clairement que le ministre des Finances – et lui, il joue le rôle d'adjoint parlementaire au ministre des Finances – dit qu'effectivement il veut changer les lois et il veut avoir les changements de prescription des créances fiscales dans un délai qui n'excède pas 10 ans au total. Il a dit ça le 9 mai, 9 mai, on arrive le 17 décembre. Quelle grande surprise! Urgence! Le ministre a oublié de faire les choses. Il me semble qu'il est assez évident que c'est un geste irresponsable.

(4 h 20)

Il y a 5 776 travailleurs et travailleuses au ministère du Revenu. Je ne blâme personne pour cette erreur, je blâme juste le ministre. Je blâme le ministre qui n'a pas compris qu'il a une responsabilité à ce sujet, de s'assurer que, effectivement, les contribuables sont traités d'une façon juste et équitable, comme il l'a dit, mais aussi qu'il respecte la parole du ministre des Finances dans le budget du 9 mai 1996.

M. le Président, il y a plusieurs années de passées, trois années depuis que nous avons mis le Code civil en vigueur, et les législateurs ont décidé ensemble, unanimement, selon ma mémoire, que nous allions avoir un délai de trois ans.

Le ministre de la Justice de l'époque a expliqué, dans ses commentaires, pourquoi ils ont décidé les trois ans. Et je voudrais juste lire: Cette adaptation de la prescription extinctive au temps actuel s'appuie, d'une part, sur l'intérêt dans... et tous les particuliers que pour les entreprises... d'une certaine stabilité et rapidité des affaires courantes et, d'autre part, sur la valeur de la preuve et ses responsabilités de dépérissement. M. le Président, c'est les commentaires du ministre Rémillard, le ministre de la Justice à cette époque.

M. le Président, encore une fois, les législateurs, quand ils ont discuté, quand ils ont parlé du Code civil, le nouveau Code civil que nous avons passé unanimement ici, ils disaient: Le nouveau Code prévoit que la prescription peut courir en faveur ou à l'encontre de tous, même de l'État. Mais, M. le Président, le fisc a décidé que ce n'est pas ça qu'il veut. Il veut avoir une exception à ça, il veut avoir une exception qui donne plus de marge de manoeuvre pour le délai de prescription.

Mais qu'est-ce qu'ils ont fait pendant les derniers trois ans, M. le Président? Ce n'est pas... Effectivement, le ministre a plaidé l'urgence. Le 1er janvier 1997 arrive. Quelle grande surprise! Il y a l'urgence de sa date, deux semaines. Mais qu'est-ce qu'ils ont fait pendant les dernières années? Qu'est-ce qu'ils ont fait depuis le 9 mai? Pourquoi il n'a pas déposé ce projet de loi, nous donner une chance de discuter c'est quoi l'impact de ce projet de loi?

Je vais demander pendant la plénière – je le demande tout de suite, peut-être ses fonctionnaires peuvent trouver la réponse pour lui – quelles consultations est-ce qu'il a faites pour arriver avec le délai de cinq ans? Quelle analyse? Avec qui il a discuté de cette question? Parce que le ministre des Finances a suggéré de ne pas aller plus loin que 10 ans. Il a trouvé, peut-être avec raison, cinq ans, mais je voudrais avoir l'analyse, ou s'ils ont juste pris un chiffre en l'air. Est-ce qu'ils ont juste décidé: Oups! Oups! Trois ans, j'ai oublié, «I nearly missed it, Christmas is coming, I'd better fix it.» Comment ils ont trouvé ce délai?

Deuxième question: Qu'est-ce qu'il va dire sur la question de la stabilité des commerces, stabilité des contribuables, quand nous sommes en train de changer les règles? Et quand on donne une chance, un autre deux ans pour le fisc, de harceler, de pousser, de questionner et, dans quelques cas, sans raison? Dans quelques cas, et je vais expliquer ça un peu plus tard, ce n'est pas toujours le fisc qui a raison. De plus en plus, avec les rapports que nous avons vus, ils ont des problèmes, et on doit s'assurer que le citoyen est bel et bien protégé.

Je demande aussi ce soir – parce que je n'ai pas de réponse, c'est un bâillon – avant le débat sur le principe: Est-ce que c'est le premier geste? Est-ce que, l'année prochaine, ils vont arriver avec un prolongement d'une autre année? Je n'ai aucune idée. Est-ce qu'il va l'utiliser quelques autres années? Dans le budget de 1996, il a été décidé que ça ne peut pas excéder 10 ans; maintenant, j'arrive avec un autre parce que nous n'étions pas capables de remplir nos tâches. Je ne sais pas la réponse à cette question, M. le ministre, M. le Président.

Cette semaine, M. le Président, ici, dans cette salle, nous avons fait un débat sur les crédits supplémentaires de ce ministre délégué au Revenu. Il est allé chercher 30 000 000 $ spécifiquement ou plus particulièrement pour engager le monde, et il était fier d'annoncer qu'il est en train d'employer un autre 1 000 employés. Pourquoi, M. le ministre... Pourquoi, M. le Président, le ministre ne met pas comme priorité à son équipe ces recouvrements de fonds? Selon lui, il a dit qu'il reste plusieurs centaines de millions de dollars – plusieurs centaines de millions de dollars! – et il a presque oublié ça. Ils ont déposé un projet de loi le 17 décembre: plusieurs centaines de millions, et il a oublié. Par le temps qu'il est en train de créer tous les programmes, de harceler les honnêtes contribuables, il est en train d'aller dans les questions de pourboires, ils sont en train de questionner tout le monde, il est en train de coupler les fichiers.

M. le Président, il a oublié que, selon ses propres mots, il y a 300 000 000 $ sur la table, selon l'information que j'ai reçue. Je voudrais savoir pendant la plénière, M. le Président, pourquoi il pense qu'avec un autre deux ans il peut recouvrer ces sommes quand il n'a pas été capable de le faire dans les premiers trois ans. Peut-être qu'il a les bonnes réponses, je vais lui laisser le temps de répondre à cette question, mais il me semble que, de plus en plus, avec le niveau de faillites que nous avons ici, au Québec, particulièrement pendant les derniers deux ans, à cause de l'obsession de la séparation par ce gouvernement péquiste, nous avons de plus en plus... le plus haut record de faillites. Si vous n'avez pas d'argent, vous n'êtes pas capables de payer, vous pouvez prolonger ça, illimité. Mais le monde n'est pas capable de payer! Je trouve ça encore intéressant, M. le Président, que le ministre, quand il a essayé de trouver quelque chose pour se protéger, il s'est caché en arrière du fédéral. Il a dit: Ah! le fédéral, c'est le temps illimité. Effectivement, M. le Président, avant le Code civil, avant que nous ayons unanimement changé ce Code civil, c'était illimité ici. Mais nous avons décidé de changer ça. Je trouve ça un peu bizarre, M. le Président, que le ministre ait voulu citer le fédéral dans cette question.

M. le Président, le ministre a essayé de dire que c'est des sommes dues. Peut-être dans un certain pourcentage, oui, effectivement, c'est des sommes dues, et je voudrais savoir combien et dans quel type de sommes. Mais, plusieurs fois, M. le Président, et vous pouvez le voir dans le rapport du Protecteur du citoyen, cette année, il est question, dans plusieurs pages, du comportement du ministère du Revenu. Je voudrais juste lire quelques titres: la raisonnabilité de la demande; on ne peut pas donner plus que ce que l'on a; une exigence démesurée; une exigence irréaliste, «unrealistic»; une exigence quelque peu inhumaine; des intérêts surprenants; pénalités et intérêts imposés sans tenir compte des circonstances; deux tons ou deux mesures; à l'impossibilité nul n'est tenu. Voilà juste quelques titres concernant la particularité de cette loi, et je n'ai pas lu les chapitres, M. le Président. Nous n'avons pas assez de temps ce soir, à cause du bâillon. Mais le fait que j'aie mentionné le rapport du Protecteur du citoyen, je voudrais dire clairement au ministre, avec tout le respect que j'ai pour le travail du ministère du Revenu, que juste le fait que le ministre du Revenu décide que c'est des sommes dues, ce n'est pas nécessairement 100 % correct, 100 % à l'État. On doit donner la chance à ces personnes et aux contribuables de plaider leur cause.

(4 h 30)

Sans entrer dans un long débat, M. le Président, je voudrais juste mentionner le cas qui a été soulevé cette semaine, le cas de la recherche et développement, les abris fiscaux. Le Protecteur du citoyen a dit que le ministère a maltraité les contribuables honnêtes quand ils ont mis leur argent avec bonne foi dans la recherche et développement, et il a lui-même, le Protecteur du citoyen, demandé que le ministère renonce à la cotisation de 1991-1992. Il me semble, M. le Président, que c'est un bon exemple, un exemple assez clair que le ministre peut faire des erreurs. Nous sommes tous humains, mais il me semble qu'on ne peut pas cacher dans une phrase qui dit: Bon, c'est des sommes dues, les citoyens doivent payer... On doit s'assurer qu'il y a un système équitable et raisonnable.

M. le Président, il y a une autre chose assez inquiétante dans ce projet de loi, et j'espère que je pourrai avoir des réponses pendant la plénière. Je voudrais savoir – et j'ai une question sur ça – est-ce que c'est vraiment quelque chose... un jeu des comptables? Est-ce qu'il y a quelque chose... on essaie de changer les chiffres, de s'assurer qu'ils donnent une image qui est... je ne veux pas dire qui est fausse, mais qui n'est pas nécessairement correcte.

Le Vérificateur général, cette année encore... J'ai parlé du Protecteur du citoyen, mais le Vérificateur général a dit «soyez prudent» à ce gouvernement. Soyez prudent afin qu'ils n'arrangent pas les chiffres d'une façon incorrecte pour donner une autre image sur le niveau de déficit, le niveau des dettes. Moi, j'ai une question, et je dis que c'est une question à M. le ministre délégué. J'espère que, ce soir... ce matin, à 4 h 30, nous allons avoir une chance de discuter de ça.

J'arrive à la page 175 des crédits de 1996 et 1997 et c'est une page de séries de chiffres. Plus particulièrement, je voudrais cibler votre attention aux chiffres «État des comptes à recevoir au 31 mars 1995». Avec ça, c'est un rapport annuel des comptes à recevoir. En ce temps-là, ils avaient, dans les comptes à recevoir, 1 212 000 000 $ des impôts des particuliers, des impôts des sociétés, de taxes diverses, de comptes à recevoir, et il y avait aussi une provision pour créances irrécouvrables, 800 000 000 $, un total de 921 000 000 $.

M. le Président, je demande, ce soir, et j'espère que je vais avoir une réponse... Il a dit... Les 300 000 000 $, dont j'ai entendu dire qu'ils étaient touchés par cette loi 91, c'est où, ça, dans ce budget? C'est où, ça, dans les comptes recevables? Et, si la loi ne passe pas... Avec le bâillon, vous allez utiliser la majorité, je sais, comme vous avez fait toute la soirée, le bulldozer de la majorité. Peut-être que vous êtes fiers de ça, mais je pense que c'est loin d'être démocratique.

M. le Président, il me semble que la question est assez importante. Si le projet de loi n'est pas passé, est-ce qu'on doit baisser ce chiffre à 300 000 000 $? Parce que, dans ce temps-là, ça va être les comptes... On ne peut pas traiter ces 300 000 000 $ comme comptes à recevoir. Et, en conséquence, est-ce qu'il aura besoin d'augmenter le déficit de 300 000 000 $, le même chiffre? Parce que si vous n'avez pas, au moins sur papier, le 300 000 000 $, tu vas avoir besoin de déclarer un autre déficit de 300 000 000 $.

Avec ça, dans l'intérêt de la population du Québec, pour les contribuables, pour les citoyens, je vais insister ce soir pour qu'on connaisse exactement où on trouve ces 300 000 000 $. Ou, si c'est plus, où on trouve ces plusieurs centaines de millions? Est-ce que c'est dans les comptes à recevoir? Et est-ce que c'est d'un truc de comptables que nous sommes en train de discuter? Donnez-moi ça et je peux regarder... Si tu me donnes un autre deux ans... Si tu me donnes un autre deux ans, M. le Président... Ce n'est pas moi, là. Si vous donnez deux ans au ministre du Revenu, est-ce que, au moins pour deux ans, il peut essayer de cacher ce qui se passe en réalité? Est-ce qu'il peut cacher qu'effectivement il y a un autre trou de 300 000 000 $? Est-ce que c'est ça, le vrai objectif de ce projet de loi? Est-ce que c'est ça, l'urgence de ce projet de loi?

Parce que j'essaie de comprendre pourquoi le ministre a oublié ça pendant sept mois. Il n'a rien dit dans les mois de juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre. Arrive décembre. Ah! Noël arrive, j'ai besoin de faire ce projet de loi. C'est quoi en arrière de ça? Est-ce que c'est un truc de comptables qui va mettre un autre 300 000 000 $? Avec ça, il peut parler avec le ministre des Finances et dire: Tu n'as pas besoin d'augmenter – ce qui est vrai – le déficit pour un autre 300 000 000 $. Il me semble qu'on doit avoir réponse à ça. Je lance un défi au ministre ce soir de dire... Il doit prouver que ce délai, ce prolongement va donner une raison de croire qu'il va actuellement recouvrer ces sommes. Jusqu'à maintenant, je n'ai rien entendu à cet égard.

M. le Président, I think this is smoke and mirrors. This is either taking $300 000 000 out of taxpayers' pockets or it's smoke and mirrors and accountants figuring, playing around with figures. So the Government and the very «quartier général» warned them about this: Don't play around with the figures to make things look better than they are. We know that the economy is horrible. We know that the economy has been devastated by this Government. We have to understand for sure, Mr. Speaker, in conclusion, that this is not something that is, in fact, an accountant's trick. We have to make sure that this is real, this is doable and this is fact. And if we can prove this, we will certainly do our best to support measures that allow the Government to collect what is due to it, but in full and complete respect to the citizens of Québec. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Nous sommes ce soir au troisième projet de loi de notre séance. Ce matin, pardon, car il est maintenant 4 h 40.

Une voix: Quatrième.

M. Gobé: Le quatrième que nous adoptons. M. le Président, pour les gens qui nous regardent, s'il y en a encore à cette heure-ci, ou qui commencent à nous regarder, j'aimerais rappeler que nous sommes actuellement sous l'emprise d'une mesure spéciale adoptée par le gouvernement grâce à sa majorité et qui fait en sorte de suspendre les droits habituels des députés en cette Chambre. C'est ce que nous appelons en jargon politique un «bâillon» – et les gens comprendront – c'est-à-dire que le gouvernement a décidé de faire en sorte, pour faire adopter ses projets de loi rapidement sans discuter devant le public, en plein jour, devant les journalistes, de passer un règlement qui lui permet de limiter le temps dans lequel les députés doivent parler.

Alors, voyez-vous, M. le Président, nous avons – et je parle surtout pour les téléspectateurs qui peuvent nous écouter et qui peuvent dire: Qu'est-ce qu'ils font à cette heure-ci? – un projet de loi, le projet de loi n° 91, qui est un projet de loi très important parce que c'est un projet de loi qui traite de mesures fiscales. La fiscalité, tout le monde au Québec y est assujetti, tout le monde doit vivre avec, et c'est ce qui règle en général les impôts et les taxes que nous payons, comment les percevoir et toute la mécanique qui vient avec. Et je pense qu'il est important que les Québécois et les Québécoises puissent savoir ce qui se passe dans cette Assemblée lorsque l'on parle de ce qui les concerne, particulièrement en termes de projets de loi fiscaux.

Et là que fait-on? Eh bien, voilà, on suspend les règles, on fait discuter les députés le soir, la nuit. Je ne pense pas que les gens, s'il y en a qui nous regardent maintenant, trouvent normal qu'à cette heure-ci nous discutions de la manière dont leurs impôts, leurs taxes seront administrés ou collectés. Et pourquoi ça, M. le Président? Bien, parce que le gouvernement, certainement, ne veut pas passer le test de la discussion de l'opposition. Il veut passer outre la démocratie. Lorsque les gens nous élisent pour être députés à l'Assemblée nationale, ils nous élisent pour aller surveiller le gouvernement dans les décisions qu'il prend et qui les concernent. C'est pour ça que les gens nous élisent. Ils ne nous élisent pas pour nous envoyer à Québec pour passer la nuit comme ça, pour s'asseoir sur notre banc. Ils nous élisent parce qu'ils disent: Maintenant, vous allez à Québec puis vous surveillez ce qu'ils font là-bas, et puis faites en sorte de défendre nos intérêts.

Et c'est ça, le parlementarisme, M. le Président. Le gouvernement amène des projets de loi, les présente, les parlementaires en discutent, il y a des commissions parlementaires qui se réunissent, des députés autour de la table des deux côtés de chacune des salles de commission et il y a des fonctionnaires en arrière ou de chaque côté, des spécialistes qui conseillent les groupes parlementaires, et nous discutons des projets, et les citoyens qui sont informés par les porte-parole font valoir des points, nous envoient des lettres ou nous rencontrent, nous demandent de faire certaines recommandations ou demandent que nous demandions au gouvernement d'opérer des changements. Il se peut aussi que les gens demandent directement à leur député du côté gouvernemental de bien vouloir le faire auprès de leur ministre. Alors, lorsqu'il ne le fait pas ou lorsqu'ils ne se sont pas entendus, les citoyens viennent voir les gens de l'opposition.

(4 h 40)

Et c'est là un des rôles fondamentaux de notre société, M. le Président, c'est l'opposition. C'est ce qui fait qu'un gouvernement ne va pas gouverner ni décider n'importe quoi comme ça sans que les citoyens, au moins, puissent y être représentés. Et c'est important, parce que, sinon, on aurait un gouvernement qui déciderait de n'importe quelle taxe, de n'importe quelle mesure en dépit de l'intérêt profond des gens, simplement pour ses intérêts à lui ou des intérêts de groupes partisans ou particuliers qui l'appuieraient, pour des raisons partisanes, de politique. À titre d'exemple, un gouvernement pourrait décider de passer des lois favorisant un groupe en particulier parce qu'il l'appuie dans un référendum. C'est un exemple que je donne, mais, M. le Président, c'est des choses qui peuvent se produire.

Alors, voilà, nous sommes sous un bâillon. Il y a un projet de loi qui touche, M. le Président, des lois fiscales. Cinq minutes, je n'ai pas le temps d'entrer dans le projet de loi en cinq minutes. Je ne vois pas comment je pourrais, en cinq minutes, convaincre le ministre de renoncer à ce bâillon et de consulter les gens, faire une commission publique, faire en sorte que les citoyens puissent se faire entendre. Il a décidé que, non, que ça se ferait d'urgence en pleine nuit. Il a certainement eu une commande de son gouvernement. Peut-être que, lui, il aurait préféré écouter les gens. Je sais que, dans d'autres dossiers, il est un homme de consensus, un homme qui aime entendre ses concitoyens. Malheureusement, on voit que, à ce poste, il n'a pas eu ce mandat de son premier ministre.

M. le Président, en terminant, j'aimerais dire que nous ne pouvons pas voter pour ce projet de loi là et nous déplorons que nous devions l'étudier sous bâillon, en cinq minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Outremont. M. le député.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. Dans le cadre du projet de loi n° 91, le gouvernement et le ministre délégué au Revenu font preuve d'un manque flagrant de prévoyance. La mesure de prolongation du délai de prescription de trois ans à cinq ans nous avait été annoncée en mai par le ministre des Finances, et ce n'est qu'aujourd'hui, à 5 heures du matin, que le projet nous est soumis pour le principe. Le ministre nous prive de sommeil, lui dont on pourrait croire qu'il a dormi sur ses deux oreilles au cours des sept derniers mois. Le ministre aurait donc été tout d'un coup, subitement, réveillé par une espèce de cauchemar, celui d'avoir à perdre des sous à deux semaines de l'expiration du délai de prescription de trois ans.

Comment se fait-il que c'est seulement maintenant, cette semaine, que le ministre délégué au Revenu sent le besoin de déposer ce projet de loi? Ce projet de loi est inclus dans la motion de suspension des règles parce que, nous dit le ministre, nous serions en face d'une urgence. Un autre faux prétexte, M. le Président, comme on en a vu circuler tout au long de cette session dans cette Assemblée.

Pourtant, il est clair, M. le Président, que la seule vraie raison urgente, la seule vraie raison qui motive le ministre, mais raison inavouable évidemment, c'est ce que j'ai mentionné plus tôt, à savoir le manque de prévoyance. Enfin, c'est toujours la même chose, c'est l'improvisation qui fait place ou qui tient lieu de planification. Et pourtant c'est étonnant, puisque finalement nous sommes devant un gouvernement qui est composé de ministres qui ont été et sont toujours de grands planificateurs. Il y en a même ce soir ici, dans cette Chambre, M. le Président; j'en connais un en particulier qui a été un grand planificateur. Peut-être aurait-il pu donner un coup de main à son collègue?

Il n'est donc pas inutile de rappeler que, si ce gouvernement n'avait pas passé son temps à «référender», à se remettre de sa dépression postréférendaire, n'est-ce pas, et à «sommetter», à tenir des sommets, des sommets qui, dit-on, mènent à des consensus mais à des consensus qui s'effritent, eh bien, si le gouvernement et le ministre n'avaient pas été si occupés à toutes ces bizarreries, le ministre aurait sûrement eu le temps de penser à son projet de loi pour le déposer avant le 15 novembre et nous ne serions pas ici, privés de notre sommeil et en train de subir l'affront du bâillon.

Alors, pour toutes ces raisons, parce qu'on ne peut pas sanctionner l'imprévoyance, on ne peut pas sanctionner l'incurie, on ne peut pas sanctionner – comment dirais-je – la méchanceté d'un ministre qui nous prive de sommeil, il faut évidemment se prononcer contre ce projet et faire son rôle normal d'opposition, même si la situation est tout à fait – comment dirais-je – inacceptable. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Outremont. Je vais céder la parole maintenant à M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Nous en sommes au projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu. Les gens qui nous écoutent peuvent peut-être avoir l'impression qu'on est en différé, étant donné qu'il est 4 h 50. Eh bien, non. Pour prendre une vieille expression américaine, on est live, et l'opposition est vraiment en forme et en santé.

Ce qu'il y a d'absolument extraordinaire dans ce projet de loi, c'est que c'est un projet de loi de deux articles. Le ministre a été mis au courant au mois de mai de ce projet de loi là. Mai, juin, juillet, août, septembre, octobre, novembre, je suis rendu à huit mois pour deux articles. Ça fait quelque chose comme un article par quatre mois à écrire. Et, quand je regarde les articles, qui ont à peu près cinq ou six mots par article – puis il y a 1 500 fonctionnaires dans le ministère – divisez ça comme vous voudrez, par mois, par fonctionnaire, par ministre, par sous-ministre, je vous garantis que ce n'était pas une grosse job à faire.

Comment se fait-il que le ministre nous arrive dans la dernière ou l'avant-dernière nuit d'une session parlementaire, quelques jours avant Noël, à 4 h 50, défendant au peuple du Québec de pouvoir se prononcer sur ce projet de loi, défendant aux gens impliqués en fiscalité au Québec, aux fiscalistes du Québec – on sait que la fiscalité est quelque chose de compliqué – de pouvoir se prononcer? Non. Ce qu'on fait, c'est qu'on nous arrive à quelques heures d'une fin de session parlementaire, en pleine nuit, on passe le bâillon, et là personne ne peut regarder ce projet de loi là, on n'a pas le temps, alors que le ministre a eu huit mois, un paquet de fonctionnaires, et puis il nous arrive à la dernière minute avec une affaire comme ça.

M. le Président, le but de l'opération, il est bien évident: c'est de cacher des choses. Il ne faut pas penser, là... C'est Lincoln, le président américain, qui disait: On peut cacher à une personne constamment toute sa vie, on peut cacher à tout le monde une fois, mais on ne pourra pas cacher des choses à tout le monde tout le temps.

Il faut rappeler aux citoyens du Québec qui sont après se préparer pour aller travailler ce matin, ceux qui commencent tôt, les chauffeurs d'autobus, les chauffeurs de taxi, les gens qui nous serviront dans les restaurants dans quelques minutes... Ces gens-là sont après se préparer pour aller travailler. Ils doivent se demander ce qui se passe. Bien, moi, ce que je vais leur dire, c'est que ce qui se passe au Québec, c'est que, jour après jour depuis que ce gouvernement a été élu, il y a 200 emplois par jour qui se sont perdus, depuis neuf mois sous le règne du nouveau premier ministre. Mais, pire que ça, ces gens qui vont aller travailler avec force doivent savoir que, à chaque jour depuis que ce gouvernement est en place, sous toutes formes de tarification, d'impôts, de taxation, de cotisations, de tarifs, c'est plus de 3 000 000 $ par jour de nouvelles taxes et de nouveaux impôts qu'on leur impose, quotidiennement.

(4 h 50)

Et permettez-moi de leur en citer quelques-uns, M. le Président, qui vont dans le sens de la Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu. Il n'y a pas de fin. C'est cette grosse bebite qui pige dans nos poches jour après jour, qui vient chercher la dernière cent qu'il reste à ces travailleurs qui sont après se préparer pour aller travailler ce matin. Dans les 900 000 000 $ et quelques, 962 000 000 $ qu'on veut aller chercher de plus, une augmentation de 2,5 % de la tarification d'Hydro-Québec, des frais de service à Hydro-Québec pour 17 000 000 $, les diminutions des transferts aux municipalités – du jamais vu dans l'histoire de la démocratie du Québec, les maires sont venus manifester devant le parlement, M. le Président, et ce n'est qu'un début – 115 000 000 $, les augmentations des taxes scolaires pour compenser les coupures des transferts aux commissions scolaires, 77 000 000 $.

M. le Président, vous me dites que mon temps est terminé. J'aurai l'occasion de revenir plus tard; il fera clair quand on reviendra. Mais il y en a pour 962 000 000 $ de nouvelles taxes de tout acabit dont les travailleurs et travailleuses du Québec seront affublés dans les prochaines semaines. Et ça, c'est le nouveau gouvernement péquiste qui nous taxe sans merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. La faillite de l'autre façon de gouverner, tome IV. Encore une fois ce soir, ce matin, je ne sais pas trop quoi, on est devant le fait que ce gouvernement improvise, a mal planifié son travail.

Moi, j'ai eu l'occasion de faire des recherches un petit peu plus poussées que mon collègue d'Orford dans le projet de loi n° 91. Moi, je compte, du 9 mai jusqu'au 10 décembre, parce que le projet de loi a été déposé vers le 15 décembre, il y a 215 journées, 215 journées où le monde, les 5 500 fonctionnaires au ministère du Revenu ont eu l'occasion de préparer le projet de loi n° 91. Quand le ministre a présenté ça dans la Chambre, il y a deux jours, il a dit: C'est juste une suite logique au budget du mois de mai déposé ici, dans la Chambre, le 9 mai 1996.

Alors, je regarde, dans tout ça, c'était quoi, le fardeau soit pour le ministre, soit pour son équipe au ministère, je ne le sais pas. Les notes explicatives, premier paragraphe, 20 mots, M. le Président. Alors, peut-être une bonne semaine, mais peut-être même moins que ça, peut-être une couple de jours pour rédiger 20 mots, on serait capable. Alors, j'ai mon «bag» de 215 jours, je vais en prendre une couple pour faire une vingtaine de mots pour le premier paragraphe des notes explicatives, il va me rester du temps aussi pour préparer le deuxième paragraphe qui est un petit peu plus détaillé, c'est vrai, c'est 22 mots. Alors, je suis rendu à 42 mots. Mettons que, avec les 5 500 fonctionnaires, le cabinet du ministre, le ministre lui-même qui, j'imagine, a travaillé le projet de loi de près – je vois sa main derrière les mots, le choix qui a été fait ici – alors peut-être une semaine pour préparer les premiers 42 mots.

Alors, on arrive vers la fin mai, on commence à faire la première ébauche sur le coeur même de la loi, et ça, c'est le titre. Ça, c'est 19 mots, y compris «Le Parlement du Québec décrète ce qui suit». Alors, 19 mots, peut-être une autre semaine. Le ministre est préoccupé avec ses projets de brancher tout le monde, ficher tout le monde. Il avait d'autres préoccupations au mois de juin. Alors, on va donner toute la semaine pour préparer les 19 mots pour le titre et l'introduction. Peut-être, après ce boulot, j'imagine que le monde était fatigué. Je comprends très bien, M. le Président, on va leur donner une semaine de congé. La réussite des 20 mots dans le premier paragraphe des notes explicatives, des 22 mots dans le deuxième paragraphe, des 19 mots pour préparer le titre, on va leur donner une semaine de congé, parce qu'on est généreux.

On revient pour vraiment le coeur de tout ça. Article 1, 27 mots. On va leur donner un gros 10 jours de travail pour faire ça, M. le Président, parce que c'est 27 mots. La commande avant était juste de 22 mots pour un paragraphe, on tombe à 27 mots, alors c'est vraiment quelque chose qui va prendre beaucoup plus de temps. On va leur donner ça, peut-être une autre semaine de congé. Ils reviennent pour une énorme tâche qui est dans la nouvelle formulation de l'article 27.3, une quarantaine de mots, une autre couple de semaines. On est rendu maintenant peut-être vers la fin juin, début de juillet. Article 2, 16 mots, une petite commande. Je pense que le ministre et son équipe, son cabinet, 16 mots, je ne sais pas, peut-être que dans une semaine ils vont être capables. Troisième article, 18 mots, c'est une grosse commande, mais c'est: «La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).» Pas très original, on a déjà vu ça. Alors, ça prend peut-être deux journées de travail pour préparer ça. Tout ça, on aurait pu avoir ça vers le début du mois de juillet. Alors, il n'y a aucune raison – blague à part, M. le Président – qu'un ministre doive arriver dans cette Chambre avec un projet de loi comme ça, qu'il a pris huit mois à préparer. Il y a des implications importantes quant à l'harmonisation, le Code civil, avec les lois sur le revenu. On a un autre projet de loi devant l'Assemblée nationale qui traite de ça. Je ne comprends pas pourquoi nous sommes ici à 5 heures. Quelqu'un n'a pas fait ses devoirs, quelqu'un n'a pas travaillé comme il faut pour présenter un projet de loi aussi court, aussi... Si ça donne suite au budget qui a été déposé, on aurait pu faire ça avant le 15 novembre. Il n'y a aucune raison pour être ici à ce moment-ci. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Westmount–Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, le projet de loi n° 91, cette loi qui modifie encore la Loi sur le ministère du Revenu, est une loi abjecte. C'est une loi qu'on n'a même pas eu le temps de regarder, d'entendre, ni ici ni en commission parlementaire. Le ministre vient de la présenter il y a à peine une heure, à 4 heures, et elle était déjà incluse dans le bâillon gouvernemental. Cette loi, une loi inique, qui est dans la suite de celles que le ministre a présentées depuis les trois derniers mois, fait en sorte de permettre et de donner aux fonctionnaires du Revenu des pouvoirs énormes, des pouvoirs qui vont faire en sorte de donner cinq ans au lieu de trois ans au ministère du Revenu pour récupérer les sommes qu'il se croit capable de pouvoir reprendre dans les poches des citoyens.

L'urgence de cette législation est tout à fait susceptible d'être remise en question. Le ministre prétend que c'est là un objet qui découle du budget. Le budget a été déposé au mois de mai et, depuis le mois de mai, le gouvernement, le ministre du Revenu n'a pas trouvé le temps, n'a pas trouvé le loisir, n'a pas trouvé la façon, n'a pas trouvé le moyen de déposer en cette Chambre un projet de loi avant le 18 décembre. Six mois de perdus, avec ce ministre du Revenu. Six mois de perdus. Pendant ce temps-là, on a fait des sommets, le ministre a participé à des sommets: sommet du printemps, sommet d'automne. Mais qui travaillait au ministère du Revenu pour préparer les projets de loi? Qui faisait en sorte de faire avancer ce projet de loi du ministère du Revenu vers le Conseil exécutif, et du Conseil exécutif vers le Comité de législation? Où était le ministre du Revenu?

Le délai de prescription. Le délai de prescription qui est applicable aux créances fiscales et qu'on retrouve dans notre Code civil était un délai de prescription de trois ans. Il est remplacé, par le ministre du Revenu, par un délai de prescription qui sera maintenant porté à cinq ans, de façon à être capable évidemment de chercher noise aux contribuables du Québec davantage qu'on le fait actuellement. Si le ministère du Revenu n'est pas capable, en trois ans, d'aller chercher ses créances auprès des contribuables, c'est qu'il n'est pas susceptible et, je dirais, digne de pouvoir faire le travail que nous jugeons être celui qu'il doit faire, c'est-à-dire être capable annuellement de récupérer ses créances. Si ça lui prend plus qu'un an, si ça lui prend deux ans puis trois ans, comme le stipulait le Code civil, ça nous apparaît au moins le temps maximal qui devrait être prescrit pour qu'un ministère puisse aller récupérer les sommes qu'il pense que vous lui devez.

(5 heures)

Le projet de loi n° 91 est un projet de loi qui va dans le sens des autres projets de loi, dans lesquels le ministre, contre l'avis, entre autres, du Protecteur du citoyen, contre l'avis de plusieurs intéressés et de plusieurs éditorialistes, est en train de bâtir un système, un réseau qui permet aux fichiers électroniques de pouvoir donner une information presque sans pareille au ministère du Revenu.

Malgré tout, M. le Président, le ministre ne semble pas à court de réflexes punitifs à l'égard des contribuables, il nous amène, et par bâillon, avant qu'un seul mot puisse être discuté sur ce sujet, nous amène un délai de deux ans applicable à la prescription des créances fiscales.

M. le Président, on ne peut pas faire autrement que de citer Pierre Bourgault quand on voit ça, quand Pierre Bourgault disait: «On frappe partout, en environnement, en santé, dans la fonction publique, dans les affaires juridiques», on peut dire qu'on frappe aussi dans le secteur fiscal.

«En effet, on ne peut imaginer que tous les ministres et tous les députés souffriront éternellement de jouer le rôle d'ennemis du peuple. On ne peut imaginer que les militants se feront faire deux fois le coup de la dernière fois.» On peut aussi penser, M. le Président, que le peuple, s'il ne se laissera pas faire deux fois, se faire arranger et organiser par ce gouvernement, M. le Président, on peut souhaiter que son joug se termine le plus rapidement possible. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Quel gouvernement! Quel gouvernement qui nous promettait le plein-emploi! M. le Président, le premier ministre, lors du congrès du Parti québécois, aurait dû effectuer quelques changements au programme; il a fait quelques changements, effectivement, mais il aurait dû changer le plein-emploi pour la pleine taxation, c'est de ça qu'il s'agit.

On perd, au Québec, des emplois, 200 par jour. Depuis que le premier ministre a été assermenté, pertes d'emplois: 60 000! M. le Président, que fait-on à 5 h 5 le matin? Vite, vite, vite, il faut se dépêcher pour aller chercher d'autres revenus. Comment est-ce qu'on procède? Il faut reconnaître l'imagination du gouvernement pour aller piger dans les poches des contribuables ou pour aller chercher des sommes d'argent, qui sont peut-être dues par les contribuables, ils ont trouvé: on va extensionner la période de prescription de trois ans à cinq ans. Beaucoup d'imagination, on va aller chercher des revenus de cette façon-là. Pourtant, ce sont les mêmes gens qui nous promettaient le plein-emploi, l'emploi durable.

M. le Président, on assiste depuis des semaines, depuis des mois, à toutes sortes de stratégies de la part du gouvernement, comment aller piger dans les poches des contribuables. On pourrait rédiger un traité sur le sujet, ils sont en train de développer une expertise. Et comme le disait mon collègue le député de Westmount–Saint-Louis, et c'est Pierre Bourgault qui le disait, le gouvernement se lève le matin et se pose la question: Qui doit-on frapper? Est-ce qu'on a oublié quelqu'un? Ah! le ministre du Revenu me dit: Écoutez, on n'a peut-être pas oublié quelqu'un, mais on pourrait extensionner la période, on en frapperait plus pendant plus longtemps. Pendant cinq ans, on va être à leurs trousses, on va aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables; de cette façon-là, on va équilibrer nos finances.

Mais, par rapport aux pauvres personnes qui perdent leur emploi... Dans le comté de Marquette, et je vois le ministre du Travail qui est au courant du dossier, j'ai sensibilisé le ministre du Travail par rapport à un licenciement important dans mon comté, par rapport à une entreprise, 150 emplois qui ont été perdus à l'entreprise Valmet. Et les motifs? La compagnie a décidé de transférer ses activités à l'extérieur de la province. Une autre compagnie frappe les citoyens durement. Ça, c'est après la fermeture de l'Hôpital général de Lachine; ça, c'est après, également, les difficultés que rencontre une autre entreprise, La Cantinière, plusieurs dizaines d'emplois qui sont en jeu.

Et on espérerait, de notre côté, voir le gouvernement consacrer ses énergies, au lieu de se réveiller le matin et dire: Qui est-ce qu'on frappe? dire plutôt: Qui pourrait-on faire travailler? Quelles idées avons-nous pour faire en sorte que nous allons attirer les investissements au Québec? Quelles idées, quelles stratégies pourrions-nous mettre de l'avant pour faire en sorte qu'il y ait plus de Québécois qui travaillent? Surtout à la veille de la période des fêtes. Mais non, mais non. Le gouvernement n'a pas d'idées de ce côté-là, mais il a beaucoup d'idées, par exemple, comment aller piger dans les poches des contribuables. On se sert même de l'éducation, hein, la taxe à l'échec. On vient de découvrir quelque chose. Les jeunes de 16 ans, 17 ans, 18 ans, ils travaillent et ils ont des revenus. Ceux qui n'en ont pas, ce n'est pas grave, leurs parents ont des revenus.

Une chose est sûre et certaine, s'ils sont au cégep, si jamais ils ont le malheur d'échouer un cours, on va les pincer là. On va aller chercher 90 $ à chaque fois qu'il y aura un échec. Ce qu'on prévoit aller chercher, grosso modo, 40 000 000 $ bon an mal an. Ce n'est pas mal, M. le Président, mais il me semble qu'un gouvernement n'est pas élu pour ça. Un gouvernement est élu sous la bannière suivante: Comment améliorer la qualité de vie des citoyens et des citoyennes; pas comment frapper les citoyens, pas comment les assommer, comment améliorer leurs conditions de vie. Malheureusement, on a un projet de loi devant nous qui ne va pas dans ce sens-là. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. L'adoption de ce projet de loi n° 91 est un autre bel exemple de l'inaction, de l'incohérence et je dirais même de l'improvisation de ce gouvernement. À sa face même, ce projet de loi semble assez anodin, de sorte qu'il contient trois articles. Mais je pense qu'il est important de mentionner que ce projet de loi a été déposé mardi le 17 décembre et a été inclus dans le bâillon pour adoption. Pourquoi? Le ministre vient de se réveiller. Pourquoi depuis fort longtemps il a dormi sur la «switch»? Je m'excuse de l'anglicisme.

Dans le budget du ministre des Finances qui a été déposé le 9 mai dernier, on pouvait y lire, à la page 111 de l'annexe A: «Délai de prescription des créances fiscales du ministère du Revenu. Généralement, les droits et les autres montants dont un contribuable est redevable en vertu d'une loi fiscale se prescrivent par trois ans, à moins que la dette ne soit garantie par une hypothèque immobilière ou qu'un jugement n'ait été rendu contre le contribuable concerné. Une modification sera apportée à la Loi sur le ministère du Revenu afin que la prescription de telles dettes ne puisse s'accomplir à l'encontre du ministère du Revenu avant l'expiration d'un délai qui, ajouté à celui déjà prévu par le Code civil du Québec et par les dispositions d'entrée en vigueur de ce code prévues par la Loi sur l'application de la réforme du Code civil, n'excède pas dix ans au total.»

Donc, M. le Président, l'ajout de ces articles donne suite à une mesure prévue dans le discours du budget du ministre des Finances, comme je le mentionnais, qui a été déposé le 9 mai dernier et découle du fait qu'actuellement les créances se prescrivent par trois ans en vertu du Code civil du Québec. Or, si ces nouveaux articles ne sont pas adoptés dans un projet de loi avant le 1er janvier 1997, certaines des créances du ministère du Revenu seront prescrites, ce qui entraînerait la perte de plusieurs centaines de millions de dollars. Mais, M. le Président, le Code civil a été adopté le 1er janvier 1994. Que s'est-il passé entre le 1er janvier 1994 et le dépôt du budget, en mai 1995. Il y a quelqu'un, là, qui ne s'est pas rendu compte que la prescription du Code civil pouvait créer problème au niveau des créances du ministère du Revenu et n'a rien fait. C'est le ministre des Finances, soudainement, qui s'est rendu compte de cette prescription et qui, par le dépôt de son budget, a décidé d'en faire une mesure pour correction.

Mais, M. le Président, le dépôt du budget a été fait en mai. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas déposé ce projet de loi pour adoption en juin, lors de la dernière session? Mais non. On a passé tout l'été. Pourquoi le ministre n'a pas déposé ce projet de loi avant le 15 novembre, date à laquelle le consentement de l'opposition n'était pas nécessaire? Mais non, on ne s'en est pas aperçu. C'est un oubli. Comment on gère ce ministère, puisque ce projet de loi vient d'être déposé? Alors, on se rend compte, M. le Président, qu'il y a eu vraiment négligence. Il me semble que le ministre aurait pu être un peu plus vigilant, puisque, naturellement, il tient à son projet de loi et que c'est un projet de loi, je dois dire, quand même important. Alors, je pense qu'il aurait pu être beaucoup plus vigilant.

(5 h 10)

Mais, M. le Président, depuis qu'on a décidé de suspendre les règles, nous avons droit, bien sûr, à un bâillon, que ce soit sur ce projet de loi, que ce soit sur le projet de loi n° 84, n° 85, mais ce sont des projets de loi dont l'empressement a été dénoncé, entre autres, par le Protecteur du citoyen, à l'exception de celui-ci, parce que, comme celui-ci aurait dû être adopté bien avant aujourd'hui, il aurait dû être adopté en mai dernier. Mais quant aux autres projets, n° 84 et n° 85, même le Protecteur du citoyen disait qu'il n'y avait aucun empressement. Il a d'ailleurs dénoncé l'empressement avec lequel le gouvernement voulait faire adopter, en toute vitesse, ces deux autres projets de loi.

Mais on est ici, comme je le mentionnais, pour passer à la vapeur certains projets de loi, alors qu'il aurait été tellement important, M. le Président, de parler de création d'emplois, de parler de croissance économique, de relance de l'économie. Actuellement, le Québec a perdu, depuis janvier, depuis l'assermentation du premier ministre, 60 000 emplois. Ce sont 200 emplois par jour que le Québec perd actuellement. Mais j'aurais préféré qu'on parle justement de ça, puisque le gouvernement n'a rien fait pour arrêter la dégradation. Le menu législatif n'a offert aucune perspective de création d'emplois ou de mesures de développement économique.

M. le Président, la motion de suspension des règles à l'Assemblée nationale présentée par le leader du gouvernement révèle, il faut le dire, les vraies priorités d'un gouvernement par des projets de loi qu'il veut faire adopter absolument. Et, cette année, le message qu'on retiendra du gouvernement péquiste est très clair: Ce sont les mesures fiscales qui priment. Les six projets de loi imposés de force par le premier ministre Bouchard permettront de taxer davantage la population. Ils ne visent que des entrées supplémentaires d'environ 415 000 000 $ dans les coffres de l'État. C'est autant d'argent qui ne sera pas investi dans l'économie québécoise pour en assurer la croissance.

M. le Président, c'est désolant, mais c'est ça, l'autre façon de gouverner.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de l'Acadie. M. le député.

M. Bordeleau: Avant de commencer, M. le Président, est-ce que vous pourriez vérifier si on a le quorum?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, on n'a pas quorum. Veuillez, s'il vous plaît... Je vais attendre quelques secondes, là. Ce n'est pas au président à aller les chercher. Alors, nous allons suspendre quelques minutes.

(5 h 16 – 5 h 17)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Asseyez-vous, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos débats, et je cède la parole à M. le député de l'Acadie.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Oui, merci, M. le Président. Alors, effectivement, les gens peuvent peut-être être surpris de voir que l'Assemblée nationale est en train de siéger à 5 h 15 sur un projet de loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu; et je pense que c'est le choix du gouvernement, M. le Président, que nous soyons ici à cette heure-ci. Pour les gens qui se lèvent, je ne voudrais pas que les gens pensent que l'Assemblée nationale a commencé plus tôt ce matin. On n'a pas commencé plus tôt; on est ici depuis hier matin, à 10 heures. Alors, essentiellement, si on se retrouve un peu dans une situation aussi ridicule, c'est la volonté du gouvernement qui organise l'horaire des travaux et qui a décidé qu'on siégerait depuis 10 heures hier matin, et nous sommes maintenant rendus à 5 h 15.

Alors, je pense que ça dénote un petit peu, là, le sérieux du gouvernement, qui présente des projets de loi qu'on a discutés, là, dans le cadre du bâillon qui nous a été imposé et qui recouvrent certaines compressions budgétaires qui touchent les gens sur la Sécurité du revenu, les étudiants, et là on est rendu maintenant à une mesure qui concerne tous les individus, tous les concitoyens, puisqu'il s'agit d'une mesure qui concerne le ministère du Revenu.

Alors, si les gens trouvent ça ridicule, en passant, M. le Président, de nous voir siéger à cinq heures le matin et de passer des nuits comme ça, ce qui ne fait pas très sérieux, ça, je pense que les gens sont en mesure de l'apprécier, moi, je leur conseillerais, peut-être, de faire des représentations. Vous savez, quand on est arrivés ici, ça devait être une nouvelle façon de gouverner, et le nouveau premier ministre, quand il est arrivé en poste, au mois de janvier, nous avait dit que ça serait tout changé, ça, ce système-là, qu'on ne travaillerait plus la nuit, qu'on ferait ça à des heures raisonnables, qu'on ferait ça au grand jour, et, malheureusement, on s'aperçoit qu'il n'y a rien de changé. Alors, si les gens trouvent que c'est ridicule, moi, je leur conseillerais peut-être d'écrire au premier ministre ou d'appeler directement au bureau du premier ministre à Québec et de se plaindre de cette situation-là, parce que ça ne démontre pas le sérieux qu'on doit accorder aux travaux parlementaires.

Alors, M. le Président, le projet de loi n° 91, essentiellement, découle, comme l'a mentionné le ministre du Revenu, du budget qui nous a été présenté le 9 mai 1996. Alors, depuis le mois de mai, il n'y a rien qui s'est passé. Il n'y a rien qui s'est passé. On a attendu à la dernière minute, et le ministre du Revenu nous a déposé, mardi matin, le projet de loi n° 91, mardi matin, et, mardi en soirée, on débattait de la suspension des règles.

(5 h 20)

Alors, absolument aucun respect, comme tel, pour les parlementaires. Ce projet de loi là a été déposé à la dernière minute, plusieurs mois après que le gouvernement ait été informé qu'il y avait des suites à donner au discours du budget. Alors, qu'est-ce qui se passe exactement du côté du ministère? Bien, je pense qu'on est en droit de se poser un certain nombre de questions.

Essentiellement, M. le Président, le projet de loi qu'on a à étudier fait un changement important au niveau du délai de prescription, qui était de trois ans et qu'on allonge maintenant à cinq ans, au niveau des créances fiscales. Alors, on essaie de nous glisser ça en douce à la dernière minute, faire passer le projet de loi. Mais il y a un certain nombre de questions, je pense, qu'on doit se poser, en plus de se questionner sur la vigilance du ministre délégué au Revenu. On peut se poser la question: Pourquoi on veut faire ce changement-là?

Je veux juste rappeler, M. le Président... vous dites que le temps est déjà pratiquement terminé, que le délai a été fixé... dans le nouveau Code civil, était de trois ans, et ça, c'est une règle générale, ça s'appliquait pour tout le monde, et le nouveau Code civil avait voulu réduire les délais, qui étaient, dans le passé, trop longs; et, d'un commun accord, dans le cadre de la révision du Code civil, on a écourté les délais.

Là, on arrive avec le ministère du Revenu qui, lui, se donne une autre règle, décide que ce n'est plus trois ans, que, pour lui, ce sera cinq ans. Le ministre du Revenu... le ministre de la Justice, dans le recueil des commentaires au moment de la réforme du Code civil, mentionnait: «Le nouveau Code prévoit que la prescription peut courir en faveur ou à l'encontre de tous, même de l'État.» Et là on fait une exception, on décide que, dans le cas des créances fiscales, le gouvernement se donne un délai plus long pour aller les récupérer. Alors, il y a comme deux mesures différentes, M. le Président: ce qui s'applique généralement en fonction du Code civil et le gouvernement qui se permet d'autres règles de fonctionnement.

Alors, on doit déplorer ce fait-là, M. le Président, et surtout déplorer qu'on n'ait pas eu l'occasion de discuter du projet de loi dans un cadre un peu plus intelligent que celui dans lequel on se trouve présentement, à 5 h 20. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, s'il vous plaît, il y a des genres de farces qui peuvent passer pour une minute, mais, quand on les répète à perpétuité, ça commence à être moins drôle. Alors, un peu de respect pour ceux qui ont la parole.

Alors, M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. M. le Président, on ne peut pas le répéter assez souvent et autant de fois: Regardez l'heure! Quelques insomniaques qui sont encore debout quelque part à travers le Québec et qui nous regardent, ils doivent dire: C'est quoi, ça? Quel est le spectacle qu'on est en train d'offrir, M. le Président? Un gouvernement qui est en train, à 5 h 25, de discuter du principe d'une loi qui a été déposée mardi. On est... c'est jeudi, je crois, 5 h 25, jeudi.

Il y a à peine deux jours, le gouvernement arrive avec un projet de loi; il savait qu'il devait avoir quelque chose à faire dans ce domaine depuis déjà trois ans. Alors, pendant trois ans, on était assis dans le coin, on se roulait les pouces un peu et on n'agissait pas. Tout à coup, le mardi, 17 décembre, on décide de déposer un projet de loi qu'on adopte à 5 h 25, le matin, le jeudi; on est en train d'en discuter. Et, comme je le disais, c'est votre Parlement au travail, Mmes et MM. les citoyens du Québec, votre gouvernement, qui est en train d'aller chercher par tous les moyens possibles des sommes pour combler les prévisions qui tardent à venir au niveau des revenus. Pourquoi? Parce que depuis deux ans et demi ils se sont efforcés à perdre 60 000 jobs. Je m'excuse, M. le Président, j'ai fait une erreur, ce n'est pas depuis deux ans et demi, c'est juste depuis 12 mois que ces 60 000 emplois ont disparu.

Depuis l'arrivée du travailleur de miracles, M. le Président, 60 000 jobs ont miraculeusement disparu. C'est ça qui fait en sorte que le ministre du Revenu s'est réveillé tout d'un coup et a dit: Mon Dieu! la fin de l'année s'en vient, trou dans le budget au niveau des revenus, M. le Président, où est-ce qu'on peut trouver d'autre argent? Ah oui! La prescription, c'était trois ans, il faut remonter à cinq ans pour se donner plus de temps pour aller chercher les sommes dues. Oui, ce sont des sommes dues, mais ce n'est pas contre ça qu'on en a. Est-ce que c'est une façon responsable et sérieuse, pour un gouvernement, d'agir? Est-ce qu'on doit se surprendre, à ce moment-là, que les citoyens considèrent qu'à 4 % de taux de crédibilité de leurs élus, M. le Président... Connaissez-vous beaucoup de personnes qui travaillent dans ces conditions-là? Un processus de démocratie au travail à 5 h 25 le matin.

Pourquoi? Imprévoyance. Je pense qu'il y avait un certain M. Bourgault qui parlait d'arrogance, cachotteries, imprévoyance, et mettez-en. Je pense que ça a tout été dit ce soir, M. le Président. Je vois que les gens sont un petit peu calmes.

Mais ça n'empêche pas, M. le Président, qu'il faut qu'on rappelle aux quelques-uns qui nous regardent, aux quelques-uns ou quelques-unes qui pourraient nous lire dans l'avenir, aux quelques... Non, il n'y a pas de journalistes à ce moment-ci qui regardent, M. le Président. Et c'est peut-être pour ça que le gouvernement a choisi d'agir de cette manière, d'adopter une loi bâillon, guillotine, pour faire passer des choses comme ça, M. le Président, à cette heure-ci de la nuit, ou du matin plutôt, parce qu'effectivement il n'y a personne qui regarde à ce moment-ci.

Mais les gens vont se réveiller pour se rendre compte qu'un gouvernement qui normalement doit prendre un peu de soin à s'assurer que les choses se fassent correctement, à ce que les gens aient au moins la possibilité de débattre de façon sérieuse des mesures fiscales qui vont aller chercher 300 000 000 $ dans un contexte économique qu'on connaît, où les gens souffrent à ce moment-ci, après avoir eu une baisse constance de revenus, à cause surtout des 60 000 qui ont été perdues, M. le Président...

Est-ce normal de fonctionner comme ça? Qu'est-ce qui a empêché le ministre du Revenu, que je vois ici et que je salue d'ailleurs, M. le Président, même si c'est lui qui me fait travailler à cette heure inusitée du matin, M. le Président... Ça ne doit pas nous empêcher de sourire un petit peu, même si on doit décrier cette imprévoyance, cette façon complètement inacceptable de sa part d'avoir manqué à son devoir pendant tout le temps qu'il avait à sa disposition, lui et son prédécesseur, pour prévoir que ce genre de mesures aurait pu être débattu dans un cadre normal, aurait pu être évalué à sa juste mesure, aurait pu être mis en contexte aussi avec les besoins financiers et les façons d'aller chercher les besoins financiers. Où sont les efforts sérieux pour créer des emplois, pour qu'on puisse véritablement agir sur la colonne des revenus plutôt que tout le temps étrangler de plus en plus le monde et faire travailler les députés à des heures complètement farfelues, M. le Président?

C'est un gouvernement farfelu. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion.

Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président.

M. le Président, nous sommes à discuter du principe du projet de loi n° 91. J'ai regardé les notes explicatives, M. le Président; ça me semblait approprié puisqu'on n'a pas beaucoup parlé de ce projet de loi. Ça nous est arrivé à la toute dernière minute dans ce procédé de bâillon. Je tiens à rappeler, comme mes collègues l'ont dit, puisqu'il faut suivre l'évolution de la journée: 5 h 30, jeudi, 19 décembre, au matin. C'est là qu'on va parler des vraies affaires, M. le Président!

Notes explicatives: «Ce projet de loi donne suite à une mesure prévue dans le Discours sur le budget du 9 mai 1996» déposé, si je ne me trompe pas, le 17 décembre, M. le Président... Donne suite au Discours sur le budget du 9 mai! Le plus ironique, c'est le sujet de ce projet de loi. Le sujet, M. le Président, c'est le délai de prescription de trois ans qu'on porte à cinq ans.

M. le Président, lorsqu'on voit le délai, le temps que ç'a pris au ministre pour pondre... Je vais le montrer aux gens, là; c'est une demi-page, très distancée. Deux cents quelques jours pour pondre une demi-page très distancée... Et ça nous parle de prescription! C'est le projet de loi qui est prescrit, M. le Président! C'est le ministre qui est prescrit, M. le Président! C'est ça qu'on devrait dire.

(5 h 30)

Mais je dois avouer que ce serait peut-être un peu injuste. Il faut toujours bien répartir les responsabilités lorsqu'on parle d'imputabilité. Mes collègues savent que je pense que c'est une notion importante. Et dans ce cas-là, je ne pense pas que le ministre délégué au Revenu est celui qui doit supporter toute la responsabilité. Il est fort possible que le ministre des Finances, réel ministre responsable en cette matière, soit celui qui soit responsable, M. le Président, d'un tel délai d'attente, du fait qu'on soit obligé de nous déposer ça à la toute fin pour nous imposer, dans le bâillon, une discussion qui se fait dans la nuit, dans l'ombre, M. le Président, dans l'obscurité. Je disais, j'ai eu l'occasion, sur un autre projet de loi, de parler de retour à la grande noirceur. Nous sommes les deux pieds dedans, la grande noirceur. La transparence, c'était une autre époque. On en a parlé dans les discours, puis, dans les gestes, ce n'est pas là.

Lorsqu'on regarde un projet de loi comme celui-ci, qui étend la prescription extinctive pour permettre au gouvernement d'acquérir, on est aux limites de la prescription extinctive et de la prescription acquisitive, M. le Président. Le but, c'est, pour le gouvernement, d'aller chercher dans les poches des citoyens des revenus que le gouvernement n'est pas capable d'aller chercher à partir de la création d'emplois, de la croissance économique, du développement économique. Il n'est pas capable, parce qu'il n'aime pas imaginer qu'il pourrait y avoir de la croissance économique. Il ne veut pas y penser. Ça ne paraît pas bien.

Alors, qu'est-ce qui paraît bien? Mes collègues l'ont dit. Depuis 11 mois, depuis que l'actuel premier ministre occupe cette fonction, M. le Président, 200 emplois sont perdus par jour. Alors, qu'est-ce qu'on fait, vu que les impôts ne peuvent plus rentrer? On va chercher noise aux, semble-t-il – le ministère du Revenu aurait des informations qu'on n'a pas – millions de Québécois qui seraient en dette face au gouvernement. On l'ignore, on n'a pas les chiffres. S'il y avait eu des consultations, peut-être qu'on aurait pu avoir des informations. Mais, faites-vous-en pas, des consultations, il ne faut pas trop en faire parce qu'il ne faut pas aviser les citoyens qu'on va aller leur chercher de l'argent, 3 000 000 $ de taxes. Juste à le dire, c'est assez...

Une voix: Par jour.

M. Fournier: Par jour, c'est incroyable! 3 000 000 $ de taxes vont être pris dans les poches des contribuables québécois par jour. Depuis 11 mois, M. le Président... 3 000 000 $ par jour par ce gouvernement qui a dit que trop de taxes tuent l'emploi. Je comprends, 200 emplois perdus par jour. L'équation, 3 000 000 $ de taxes par jour, on a 60 000 emplois perdus, 950 000 000 $ de taxes depuis que le député de Jonquière est le premier ministre, M. le Président.

Je sais que vous allez me dire que je n'ai presque plus de temps pour parler là-dessus. J'aimerais qu'on ait plus de temps, M. le Président.

Une voix: Consentement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Je vais, en tout cas, certainement laisser ce message à l'Assemblée. Ils vont pouvoir, M. le Président, voir les effets de leur gouverne, même si ça ne fait pas tellement longtemps. En lisant la page B-3 de La Presse aujourd'hui, j'invite tout le monde qui nous écoute en ce moment à aller lire la page B-3 de La Presse . Voilà les surprises qui vous attendent lorsqu'on ne respecte pas les gens qui nous élisent. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je remercie M. le député de Châteauguay. Un autre intervenant. M. le député de Shefford, je vous cède la parole.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord saluer nos téléspectateurs. Vous savez, on a deux genres de téléspectateurs ce soir, qui sont aussi des contribuables, ceux qui sont suspendus à nos lèvres depuis hier, pour discuter de la chose publique, et ceux qui dorment et qui ont laissé leur portefeuille sur le coin du bureau. C'est pendant la nuit que le gouvernement s'occupe de leur portefeuille. Les pickpockets ne circulent pas seulement le jour...

Mme Caron: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Vous savez très bien, M. le Président, que le député de Shefford vient d'utiliser un terme non parlementaire, et j'aimerais bien qu'il le retire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Shefford, il faudrait, je crois, éviter ce terme-là dans notre enceinte non pas sacrée, mais enfin respectable, enceinte respectable. Je vous inviterais à retirer, si vous voulez, ce propos. Je vous cède la parole.

M. Brodeur: M. le Président, j'ai bien dit que les pickpockets ne circulaient pas seulement le jour, je n'ai pas accusé personne ici d'être pickpocket et non plus personne d'autre. On sait qu'une journée, il y a eu une décision, une journée, une autre, et nous sommes à une autre journée. Et je pense que, dans le cas qui nous occupe, le mot «pickpocket» n'a pas été employé pour un député de l'Assemblée nationale. À tout hasard, je retire l'expression pour pouvoir continuer mon allocution.

Je disais donc que les portefeuilles sont quand même toujours sur le bureau, et les contribuables qui se lèveront ce matin devront s'attendre à ce que les goussets auront été déliés durant la nuit et encore quelques dollars de leur portefeuille disparaîtront.

Donc, M. le Président, on va chercher un 300 000 000 $ de plus non pas en créant une richesse et en allant chercher des impôts sur une richesse supplémentaire, mais en prenant une mesure pour aller, entre guillemets, je dirais, écoeurer le monde encore. On va s'acharner à fouiller dans leurs affaires. Les gens qui nous écoutent ce matin devront penser à sortir leurs rapports d'impôts d'il y a quatre ans et cinq ans et vérifier vraiment s'il n'y a pas un accroc ou un petit quelque chose qui pourrait faire en sorte que le gouvernement pourrait aller leur chercher encore quelques dollars additionnels dans leur poche. C'est ça qu'on fait durant la nuit, M. le Président, et ceux qui se lèvent ce matin auront tout simplement à serrer leur portefeuille, et à sortir leurs rapports d'impôts, et à surveiller ça pour les prochaines semaines.

M. le Président, il est 5 h 35. On est ici... Depuis au moins hier qu'on n'a pas eu la chance de sortir, parce qu'on légifère pendant la nuit plutôt que de penser à ce qu'on va faire durant les jours et les semaines antérieurs. On est ici pour appliquer une mesure du budget du 9 mai 1996. Le projet de loi qui nous occupe a été déposé... j'étais pour dire hier, mais, je m'excuse, avant-hier – nous sommes ici depuis un petit bout de temps – et le ministre n'a pas trouvé d'autre temps, ou peut-être vaquait-il à d'autres occupations, je l'ignore. Je regardais son bulletin, comme tous nos collègues, il y a quelques jours et je ne crois pas que le ministre puisse justifier un tel retard pour le dépôt du projet de loi.

Une voix: Il va doubler son année.

M. Brodeur: Oui. Comme on me le souffle, le ministre va doubler son année. Il a travaillé très fort depuis quelques jours. D'ailleurs, je l'avais ici, à côté de moi, il y a quelques instants; il s'est défilé. J'aurais aimé le présenter à la population, parce qu'on n'a vu personne encore de l'autre côté en discuter.

Donc, M. le Président, depuis des... Il me reste seulement une minute? Donc, M. le Président, le gouvernement, dans cette mesure-là, va chercher 300 000 000 $. Le gouvernement actuel, depuis l'arrivée du député de Jonquière, du nouveau premier ministre, est allé chercher 1 000 000 000 $ dans la poche des contribuables en plus, sans compter qu'on perd depuis ce temps-là des dizaines de milliers d'emplois. On a perdu 60 000 emplois, on a perdu 200 jobs par jour, sept jours par semaine. En plus, M. le Président, nos taxes ont été augmentées de 3 000 000 $ par jour, sans compter que nos entreprises, qui auraient besoin d'un souffle nouveau, font faillite de l'ordre... On a 41 % des faillites de compagnies au Canada.

Donc, M. le Président, je voterai tout simplement contre ce projet de loi là. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Shefford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le Président, je veux rappeler à mes collègues d'en face une déclaration qui fait maintenant partie de l'histoire. Le 28 mars 1996, le nouveau premier ministre, la main sur le coeur, presque la larme à l'oeil, s'adressait aux citoyens du Québec. Il leur envoyait le message aussi touchant que celui-ci: On va respecter les missions essentielles de l'État, on va rétablir les finances publiques. Les citoyens ne sont pas touchés, c'est les machines, l'administration, les appareils, c'est sûr, mais les citoyens ne sont pas touchés.

Je pense que le premier ministre n'a pas la même définition que le monde ordinaire, que le monde normal de ce que c'est, un citoyen, M. le Président. Voyons si le premier ministre a dit la vérité. Et est-ce que son engagement a été respecté? Moi, je vous dis tout de suite que non, et c'est pour ça que le gouvernement légifère en cachette, légifère la nuit, en pensant que la population ne le saura pas. Vous savez, une assemblée législative, un Parlement comme l'Assemblée nationale, malheureusement, dans certains cas, M. le Président, c'est contrôlé, entre guillemets, par l'Exécutif, c'est l'Exécutif qui trace le programme. Et parce que l'Exécutif est appuyé par la majorité, bien, essentiellement, la conclusion qu'il faut tirer: c'est l'Exécutif qui contrôle l'Assemblée nationale. Alors, alors, ce n'est pas beau à voir, ce que les Québécois puis les Québécoises ont eu à subir au cours des derniers mois.

(5 h 40)

Est-ce que le premier ministre a respecté son engagement? Est-ce que le premier ministre a tenu parole? Voyons, M. le Président, voyons. Voyons rapidement, là, si c'est rien... Comment est-ce qu'il a dit ça, donc? Attendez un petit peu, là, je vais le répéter: Les machines, l'administration, mais pas les citoyens. 900 000 000 $ d'impôts, de taxes, de tarifs au cours des 10 derniers mois. Si le premier ministre a dit la vérité, c'est rien que les machines, c'est rien que l'administration. Mais ça ne doit pas être possible, parce qu'il a imposé des taxes, des impôts et des tarifs nouveaux. Diminution des transferts aux municipalités. Le premier ministre, probablement qu'il répondrait: Bien oui, les municipalités, ce n'est pas du monde. Mais, à l'intérieur des municipalités, tout le monde comprend qu'il y a des contribuables, des citoyens. 115 000 000 $.

Assurance-médicaments. Il me semble que c'est du monde qui prend ça, des médicaments, il me semble que c'est des citoyens, M. le Président. 196 000 000 $. Alors, le premier ministre, il n'a pas dit la vérité, à l'époque, ou encore il était plein de bonnes intentions, puis, chemin faisant, bien, il a complètement dévié de ses engagements, puis aujourd'hui il ne veut pas l'admettre, il ne veut pas l'avouer. Il continue à conter des histoires à plein de monde. C'est ce qui fait dire à ses alliés d'antan que c'est de la sournoiserie.

C'est très sévère comme accusation, c'est très sévère: sinistre, sournois. Ça s'adresse au premier ministre, qui est considéré par Pierre Bourgault comme étant le pire premier ministre que le Québec n'a pas connu depuis 40 ans. Ce n'est pas un libéral qui dit ça, là. Pourquoi? Pourquoi? Parce qu'il frappe partout. Parce qu'il dit une chose, puis il fait le contraire. Ou il fait quelque chose, puis le lendemain il dit qu'il ne l'a pas faite. Alors, Pierre Bourgault n'est pas dupe. Il l'a démasqué mieux que quiconque, mieux qu'aucun libéral ne l'aurait jamais fait, parce que c'est tellement évident.

Permis de conduire: «c'est-u» des machines qui conduisent des automobiles? C'est du monde, c'est des citoyens. Le permis de conduire, ça a l'air de rien, M. le Président, c'est 4 300 000 $ qu'on va aller chercher dans la poche des citoyens et citoyennes du Québec, conducteurs, conductrices d'automobile. Immatriculation: 13 000 000 $. La taxe sur le tabac: 17 000 000 $. J'en saute, il y en a pour 962 000 000 $. Vous me dites qu'il me reste une minute. Je ne sais pas si je ne pourrais pas prendre le cinq minutes de mon ami le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. S'il voulait me le donner, moi, je continuerais, il me semble que ça va bien.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Lefebvre: J'en aurais encore pour au moins cinq minutes. J'ai trois feuilles de taxes, d'impôts puis de tarifs. Mais peut-être qu'on a tous mal compris, au Québec, puis que le premier ministre, député de Jonquière, est le seul à avoir dit la vérité puis à maintenir le cap. Je vous rappelle ce qu'il avait dit, M. le Président: Les citoyens ne sont pas touchés; c'est les machines, l'administration, les appareils, c'est sûr, mais les citoyens ne sont pas touchés. Quel cynisme! Quel cynisme! Déjà démasqué après à peine 10 mois.

Je serais prêt, moi, à suspendre les travaux pour permettre à mes collègues d'aller voir ce qui se dit dans la presse, ce matin. Mauvaise surprise pour vous autres: le peuple comprend de plus en plus à tous les jours. 3 000 000 $ de taxes par jour, moins 200 jobs par jour, ça fait mal, puis ça fait mal vite. M. le Président, il est grand temps qu'on corrige le cap, de l'autre bord. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Frontenac. Maintenant, je m'en vais céder la parole à M. le député de Saint-Laurent.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Comme vous, j'ai écouté avec intérêt les propos du ministre qui nous a présenté, à 4 heures ce matin, son projet de loi. Je comprends pourquoi il le présente à 4 heures le matin. Comme stratégie, c'est le genre de projet de loi qu'on n'est pas fier – ha, ha, ha! – de présenter en plein jour. Donc, on s'organise pour qu'à 4 heures le matin, quand il y a le moins possible de gens qui nous écoutent, on puisse introduire des notions comme celle-là.

Puis j'ai écouté les propos qu'il a tenus. Il s'est empressé de dire: Écoutez, là, ce n'est pas des nouvelles taxes, c'est des dus au gouvernement. Et il dit: Ça constitue des recettes puis ça peut devenir des revenus, puis ceux qui sont habitués à manipuler les concepts... Hein? C'est vos propos, hein? Relisez votre texte, là, c'est ça que vous avez dit.

Je vais vous dire, M. le Président, là – ha, ha, ha! – la serveuse de restaurant qui s'apprêtait à aller préparer les cafés puis les rôties à matin, là, elle, elle dit: Que ça soit des dus, des recettes, des revenus, des manipulations ou des concepts, il faut que je prenne tout ça dans ma sacoche. Puis, elle dit: Moi, je ne lui dois rien. Je ne parlais pas du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, je ne sais pas pourquoi il s'est senti visé.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Alors, M. le Président, le chauffeur de taxi qui ce matin, lui, est convaincu qu'il paie son dû à la société puis que, pour réussir à faire ses paiements, il est obligé de faire de plus en plus d'heures, là, maintenant, il faut qu'il se dise: Est-ce qu'il est en train de fouiller dans mon rapport d'impôts? Est-ce qu'il est en train de trouver quelque chose pour m'envoyer une facture additionnelle?

M. le Président, c'est à ce monde-là qu'il faut penser quand on fait des affaires comme ça. Si ce gouvernement-là avait seulement la moitié de l'imagination pour créer des emplois comme il en a pour taxer, je suis convaincu, M. le Président, seulement la moitié, on ne serait pas devant la situation d'avoir perdu 60 000 emplois. Ce n'est pas vrai que, quotidiennement, il y a 200 travailleurs et travailleuses qualifiés au Québec qui perdent leur emploi, M. le Président. Là, la ministre de la Sécurité du revenu dit: On va trouver 100 000 emplois pour les gens qui sont sur la sécurité du revenu quand on sait, vous et moi, M. le Président, qu'à tous les jours vous avez 200 Québécois et Québécoises compétents qui en avaient un emploi et qui le perdent.

M. le Président, on réalise bien que c'est faux. Les gens qui nous écoutent, le ministre du Revenu aura beau manipuler les mots comme il le veut, il y a des gens qui vont dire: Tiens, ils sont encore en train de fouiller dans mes poches. Il y a des gens qui vont dire, j'en suis convaincu, M. le Président: On est en train encore une fois de se faire arnaquer, de se faire dépouiller, de se faire vider. Je suis convaincu qu'il y a des citoyens qui vont dire ça. Le ministre, lui, utilise des beaux mots, il dit: Non, non, ce sont des sommes qui nous sont dues; ce ne sont pas de nouvelles taxes; c'est au nom de l'équité; ce sont des revenus qui deviennent des recettes; c'est un concept. Aïe! Arrêtez, là. Arrêtez de prendre le monde pour des valises. Je comprends que vous teniez ces propos-là à 4 heures le matin, mais on est obligés d'être devant vous puis rappeler aux citoyens que ces gens-là, qui font leur possible pour gagner leur vie, pour être des citoyens honorables ont le sentiment qu'à eux on ne leur donne jamais la moindre chance. Et ça, dans ce sens-là, M. le Président, c'est dangereux pour un climat social quand on pousse les citoyens dans leurs derniers retranchements, quand on leur laisse...

Vous m'indiquez qu'il ne me reste qu'une minute, M. le Président. Vous savez, comme toujours, je vais respecter vos directives, je vais m'engager à terminer. Je vois le député de Crémazie qui nous honore de son sourire habituel. Je vais inviter l'ensemble de mes collègues d'en face à continuer de la façon dont vous faites votre travail et, quand vous aurez terminé de remplir vos fauteuils pour maintenir le quorum, vous irez voir le sondage de La Presse de ce matin, les citoyens du Québec ont une façon bien directe de vous dire ce qu'ils pensent de la façon dont vous faites votre travail. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, vous intervenez? Je vous cède la parole.


Mme France Dionne

Mme Dionne: Merci, M. le Président. M. le Président, je prends la parole ce matin, en ce jeudi matin, 5 h 50, pour appuyer mes collègues qui essaient de faire comprendre à ce gouvernement, à cette équipe ministérielle silencieuse quel travail ils sont en train de faire et comment ils sont en train de faire mal à la population et aux contribuables du Québec. M. le Président, ce n'est pas drôle pour personne avant Noël – parce qu'on est effectivement quelques jours avant Noël – de se retrouver avec un gouvernement qui, durant la nuit, essaie, encore là, d'enlever de l'espoir aux citoyens du Québec.

(5 h 50)

Quand on est avant Noël, M. le Président, à quoi on pense? On pense à sa famille, on pense à ses amis, on pense à ses proches et on dit: Comment on va passer un beau Noël? Comment on va préparer l'année 1997? Comment on va leur donner de l'espoir à ces gens-là? Et, au Québec, depuis un an, pendant l'année 1996, il s'est perdu 60 000 emplois au Québec. 60 000 emplois, ce n'est pas des chiffres; c'est des gens, c'est des Québécois et des Québécoises qui ont des familles et qui voudraient, bien sûr, offrir à leurs familles une qualité de vie, offrir aux jeunes, à leurs enfants des cadeaux pour Noël. Mais il y a 60 000 familles qu'on oublie, et c'est 60 000 familles de plus qu'il y avait avant que le premier ministre Bouchard arrive, en janvier 1996.

Et, si ce n'était que ça, M. le Président, encore. C'est triste, mais il y a encore, en plus de ça... Depuis qu'il est arrivé, c'est 3 000 000 $ de taxes, de tarifs de toutes sortes qui est ajouté sur les épaules des travailleurs et des travailleuses. Et, en plus, le ministre du Revenu, lui, arrive pour dire: Écoutez – mardi matin, hein, deux ou trois jours avant la fermeture de la session – il faut absolument passer un projet de loi parce que j'ai oublié. Il n'est pas là depuis hier, M. le Président; il a été nommé en janvier. Il y a toute une équipe qui travaille pour lui au ministère du Revenu. Il a oublié et il nous demande en pleine nuit de passer un projet de loi pour allonger le délai de prescription, pour aller chercher encore des taxes et des impôts.

Il va nous dire que ça lui est dû, M. le Président, sauf qu'il faut se rendre compte d'une chose: s'il y a des gens qui n'ont pas payé leurs taxes et leurs impôts, qui sont en retard, il y a des raisons pour ça. Et le ministère du Revenu, lui, avec ses grands bras, ses grands doigts, vient avec une loi dire: Je vais aller vous chercher ça, là, puis n'oubliez pas, cinq ans en arrière. Mais les gens qui n'ont pas payé, c'est des gens, bien souvent, qui n'ont pas pu respecter leurs responsabilités parce qu'ils se sont trouvés sans emploi, M. le Président.

Et ces employés-là, s'ils avaient un travail, ils étaient employés d'entreprise. Il y a aussi des entreprises qui ont des difficultés financières. Il y a un climat qui est là au Québec, qui est difficile. C'est morose; ce n'est pas encourageant. Et, à chaque fois qu'on a vu le gouvernement faire un geste positif, faire un sommet – on en a eu deux, hein, un sommet au printemps, un sommet à l'automne – qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? Tout de suite, quand les gens ont dit: On va se prendre en main, on va se tenir, puis on va aller de l'avant, puis on va oublier ce que le gouvernement est en train de faire, deux jours plus tard il y a le vice-premier ministre, dans une envolée oratoire, qui leur dit: C'est beau, les sommets, c'est beau, la confiance, mais n'oubliez pas. Nous autres, l'indépendance, on ne l'a pas oubliée. Puis, si vous avez eu confiance pendant deux semaines, fini, oubliez tout ça. On n'a pas oublié nos objectifs, puis ce n'est pas vous autres, notre objectif, citoyens et citoyennes du Québec, c'est l'indépendance du Québec.

Les citoyens, là, ces gens-là qui ont perdu leur emploi, ce n'est pas important. C'est ça qu'il nous a dit à peu près deux semaines après chaque sommet, comme s'il ne fallait pas oublier l'égoïsme dans lequel travaille le gouvernement du Parti québécois. Ses objectifs ne sont pas pour la population du Québec, M. le Président. Ils ne sont pas pour les citoyens et les citoyennes. Avez-vous entendu une fois le ministre responsable de l'Économie, la ministre déléguée à l'Économie, la ministre responsable des Forêts et des Mines annoncer des choses intéressantes, faire des discours de confiance, dire: On va s'enligner de cette façon-là? Non, rien entendu. Ils sont tout à fait silencieux sur des façons d'aider les entreprises du Québec à avoir confiance, à être agressives sur les marchés extérieurs. C'est le plus grand silence de toute cette équipe-là. Les seuls qui ont le droit de parler, c'est ceux qui font des projets de loi pour aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables. Alors, il est certain que ce n'est pas intéressant, et je me joins à mes collègues de l'opposition pour dire que c'est incroyable comme on oublie les citoyens en cette veille de Noël, et je pense que les citoyens vont s'en souvenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je remercie Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à l'un ou l'autre des députés qui sont debout, là. Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, il est 5 h 55 du matin. Nous sommes le jeudi 19 décembre 1996. Nous avons siégé jour et nuit, sans interruption. C'est la quatrième fois que je me lève en cette Assemblée pour dénoncer l'incurie du gouvernement qui a érigé le bâillon comme étant l'autre façon de gouverner. C'est la quatrième fois depuis hier soir que j'interviens sur des projets de loi introduits dans la hâte et l'improvisation par le gouvernement péquiste qui, en pleine nuit et à l'insu du public, impose la guillotine pour faire adopter des projets de loi qui n'ont qu'une seule raison d'être, celle d'aller fouiller dans les poches des contribuables pour renflouer les coffres de l'État.

C'est dans cet esprit qu'il faut inscrire le projet de loi n° 91 que le ministre délégué au Revenu a introduit de toute urgence cette semaine en vue de modifier de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, dans le but d'amender le projet de loi n° 42. Dans les notes explicatives, on peut lire: «Ce projet de loi donne suite à une mesure prévue dans le discours sur le budget du 9 mai 1996. Ainsi, le délai de prescription de trois ans applicable aux créances fiscales est remplacé par un délai de prescription de cinq ans.»

M. le Président, d'entrée de jeu, on peut questionner la capacité de ce gouvernement à gérer la chose publique. Comment se fait-il que ce projet de loi qui découle du discours sur le budget du 9 mai 1996 ait mis plus de sept mois pour voir le jour, alors qu'il ne porte en fait que sur trois articles? De quoi s'agit-il au juste? Concrètement, le projet de loi n° 91 vise à prolonger de deux ans le délai de prescription applicable aux créances fiscales, passant de trois ans, tel que prévu par le Code civil, à cinq ans. Il s'agit ici d'un délai durant lequel l'action du gouvernement s'étend en matière de poursuite ou de sanction pénale.

Le ministre délégué au Revenu, qui avait tout le loisir, pendant sept mois, de donner suite au discours sur le budget, vient à peine de se réveiller pour constater que, s'il ne fait pas adopter son projet de loi n° 91 avant le 1er janvier 1997, certaines créances de son ministère tomberont sous le coup de la prescription, ce qui se traduira par la perte de plusieurs centaines de millions de dollars.

Il faut se rappeler, M. le Président, que le Code civil du Québec qui est entré en vigueur le 1er janvier 1994 stipule que l'action qui tend à faire valoir un droit personnel ou un droit réel mobilier et dont le délai de prescription n'est pas autrement fixé se prescrit par trois ans. Il faut aussi dire que le Code civil avait écourté les délais de prescription de plusieurs recours, dont certains pouvaient aller jusqu'à cinq, 10, voire 30 ans. Il s'agit là d'une adaptation qui allait dans le sens des intérêts à la fois des particuliers et des entreprises. Or, non seulement le ministre délégué au Revenu a fait preuve d'improvisation en déposant ce projet de loi à la dernière minute, mais, de plus, la décision de prolonger le délai de prescription de trois à cinq ans contredit celle du ministre d'État de l'Économie et des Finances qui prévoit un délai allant de trois à 10 ans.

Voilà autant d'exemples, M. le Président, qui démontrent que ce projet de loi est bâclé et que le ministre du Revenu a manqué à son devoir, tout comme l'ensemble de ce gouvernement qui a passé les deux dernières années à «référender» au lieu de se préoccuper de la création d'emplois. Avec le résultat que, depuis l'arrivée du député de Jonquière à la tête du gouvernement en janvier dernier, le Québec a perdu 60 000 emplois, c'est-à-dire 200 emplois par jour, ce qui est dramatique pour des familles et des milliers de Québécois et de Québécoises, M. le Président.

(6 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Alors, M. le député de Bertrand, vous avez la parole.


M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci, M. le Président. Je pourrais laisser ma place au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, j'ai l'impression qu'avec tout... Je vois qu'il a une espèce de goût de parler, particulièrement sur ces lois, avec le procédé qu'on vit depuis 24 ans, que le député dénonçait vertement à l'époque où il était dans l'opposition et qu'il demandait toutes sortes de quorums, et tout ça, à l'époque. Mais je sais que le pouvoir lui a fait perdre la mémoire, comme à bien des parlementaires de l'autre côté.

M. le Président, on se retrouve, à 6 heures du matin, encore avec un bâillon, on se retrouve encore avec une loi passée en vitesse. Vous savez, ce que réussit le mieux le gouvernement, c'est de taxer le monde, et on le voit un petit peu dans le sondage ce matin. Vous savez, en politique – je le répète tout le temps – les faits rattrapent les paroles. On ne peut pas frapper tout le monde sans qu'à un moment donné les citoyens, ces gens-là, ces mêmes personnes qu'on frappe, réagissent.

Écoutez, j'ai fait une espèce de nomenclature de toutes les personnes sur lesquelles le gouvernement s'est acharné. Aujourd'hui, c'est le ministre... aujourd'hui... je dis bien cette nuit, ce matin, c'est le ministre du Revenu qui nous arrive avec une loi, en toute vapeur. Puis ça s'ajoute à bien des gens, là. Écoutez, on n'a pas identifié les classes de la population. Écoutez, on parle des syndiqués. Les syndiqués, la belle entente où on va couper une convention collective qu'on avait signée. On avait donné une augmentation à ces gens-là juste avant le référendum. L'histoire se répète.

Les assistés sociaux, les plus démunis qu'on frappe. C'est notre quatrième loi. Précédemment, on avait passé, on avait parlé d'une loi où on avait touché encore une fois aux assistés sociaux, aux agriculteurs, aux municipalités. Quand on touche aux municipalités, on touche aux citoyens. Je voyais un député qui disait récemment: Les municipalités doivent payer. Mais une municipalité, ça n'existe pas: c'est les citoyens. Donc, on ne taxe pas une municipalité, on taxe ses citoyens encore une fois. Les avocats. Écoutez, les avocats étaient en grève. On a eu l'occasion de lire hier – là, on ne sait plus dans quelle journée on se situe – on a eu l'occasion de lire que c'était réglé, puis on recevait des téléphones dans cette même journée, 12 heures après, que ce n'était pas réglé du tout puis que, aujourd'hui, jeudi, il y a une rencontre, à midi, pour continuer la grève.

Donc, M. le Président, qu'est-ce qui fonctionne au Québec si ce n'est le fait de taxer le monde? Et je suis convaincu que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques va se lever puis va répondre à mes interrogations, parce que, lui, il va nous dire ce qui fonctionne. Il n'y a rien qui fonctionne si ce n'est que de voter des lois en toute vapeur contre les citoyens du Québec, contre les citoyens. Moi, je vois le ministre du Revenu qui semble me dire: Voyons donc! Mais c'est ça, la réalité. C'est ça, la réalité.

On a parlé des 60 000 emplois. Y a-t-il quelqu'un qui se lève dans cette Chambre... Il y a des gens qui se lèvent puis qui disent: On a créé tel ou tel emploi. Mais ils ne parlent pas des diminutions qui se passent constamment, M. le Président.

Le Sommet. Écoutez, on a voulu créer de l'espoir par le Sommet. Il y a un éditorialiste qui disait: Ça a duré le temps des roses. Ça a fané. Les belles paroles, tout le monde était content. Pas de nouveaux emplois. Un petit peu d'espoir, 48 heures, le temps de faire la première d'une nouvelle. Mais, après, absolument, absolument rien. La belle entente! Et là on nous dit que ce n'est pas une nouvelle taxe, que c'est des dus, des recettes, des revenus additionnels. Bien oui, mais, si c'est un revenu additionnel, si c'est une recette, il y a quelqu'un qui paie ça. Je pense qu'on a oublié. Il y a une affaire qu'il va falloir se dire: On a oublié les citoyens du Québec. Et je n'utilise pas le temps de la période des fêtes, parce qu'on a choisi cette période-là présentement. Mais, depuis deux ans, on a choisi toutes les périodes. Oui, toutes les périodes.

J'écoutais ma collègue la députée de... Même malade, elle vient ici ce matin, 6 heures du matin, la députée de Kamouraska s'en vient dénoncer... Oui. Il y a des gens en parfaite santé ici, au pouvoir, qui ne se lèvent pas. Il y a des gens qui viennent ici défendre leurs citoyens, parce qu'ils trouvent ça immoral, M. le Président, immoral. Vous me faites un signe qui veut dire que vous venez d'arriver?

Le Vice-Président (M. Pinard): Je regrette, le signe ne veut pas dire que je viens d'arriver, mais le signe veut tout simplement vous dire, mon cher ami, que votre temps est expiré. Je vous remercie infiniment. Mon cher André... Nous allons maintenant céder la parole à la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour ce matin, à 6 h 6, 6 h 7, en ce 19 décembre, M. le Président, pour dénoncer le projet de loi n° 91, qui est le projet de loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu. Le contenu du projet de loi, je vais avoir un petit peu de difficulté à le commenter, puisqu'on n'a pas eu d'explications en profondeur de la part du ministre et parce qu'on n'a pas eu non plus l'occasion, comme parlementaires, de s'asseoir et de discuter article par article, comme on le fait pour tout projet de loi qui se respecte, si vous me passez l'expression, M. le Président. C'est de cette façon-là que les parlementaires travaillent, ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président.

Or, comme vous le savez – ça fait d'ailleurs plusieurs fois que vous l'entendez cette nuit et la nuit dernière – le gouvernement a plutôt choisi la loi du bâillon, c'est-à-dire, pour ceux qui ont la grande chance de nous entendre à cette heure-ci... le bâillon, qui fait en sorte que les règles sont suspendues. La mécanique normale et la procédure normale pour entendre, étudier, adopter un projet de loi, tout ça, ça saute et le gouvernement passe à toute vapeur, finalement, une série de projets de loi.

Il faut s'interroger, entre autres, sur celui-ci plus spécifiquement. Comment se fait-il que le ministre du Revenu, qui choisit... Parce que c'est son choix, M. le Président. Ce n'est pas le choix des autres, ce n'est pas le choix des contribuables, ce n'est pas mon choix d'être ici, c'est son choix de faire en sorte que le projet de loi n° 91 soit étudié de cette façon-là. On peut être surpris et pas surpris. Je suis surprise que le député de Portneuf, que j'ai connu avant qu'on soit tous les deux assis en cette Chambre... je suis surprise parce que je n'ai jamais eu l'impression que le député de Portneuf pourrait être complice d'une telle procédure, et pas surprise parce qu'il fait partie d'un gouvernement pour qui ces règles-là n'ont aucune importance. L'important, M. le Président, c'est de passer ces projets de loi, c'est d'aller piger dans la poche des contribuables sans même s'assurer, dans ce cas-ci, de la création d'emplois.

M. le Président, le discours du budget a été lu le 9 mai dernier. Comment se fait-il que c'est seulement cette semaine que le ministre a senti le besoin de déposer ce projet de loi? J'ai fait référence, plus tôt cette nuit, à un autre projet de loi qui, au lieu d'être déposé dans les délais normaux, c'est-à-dire avant le 15 novembre – étude du projet de loi en commission parlementaire, on revient ici, adoption finale du projet de loi... On choisit de déposer le projet de loi cette semaine, sachant très bien, M. le Président – ça s'appelle de la complicité – qu'on devait passer ce projet dans un bâillon. Comment peut-on être complice d'une telle façon de faire?

On me servira que ça s'est fait avant et que ça s'était fait par le biais des gouvernements précédents. Ça ne veut pas dire que c'était mieux. Mais je vous dirai, M. le Président, que ce n'est pas moi qui me suis promenée, en 1994, en campagne électorale, en promettant une autre façon de gouverner, en promettant... Le député de Joliette, qui était à l'époque le nouveau leader du gouvernement: Jamais au grand jamais! et qui a le front, cette nuit, sur un autre projet de loi, de venir nous dire qu'on va passer plus de temps qu'on ne pense dans l'opposition parce qu'on ose s'objecter à certaines de ces façons de faire.

Moi, ça fait deux ans que je suis élue, M. le Président, et je n'ai jamais pensé que j'interviendrais à 6 h 10 sur un projet de loi de cette importance-là. Il faut croire que le gouvernement n'accorde pas d'importance à ce projet de loi ou n'accorde pas d'importance à mon rôle comme parlementaire, à la démocratie et à l'importance du rôle que l'opposition a à jouer aussi. Si les députés ministériels ne sont pas capables de prendre leurs responsabilités puis de défendre comme il faut les contribuables et que ça a été laissé uniquement à nous, qu'on ne coupe pas notre droit de parole et qu'on nous permette d'intervenir sur les projet de lois comme c'est prévu dans la procédure. Je vous remercie.

(6 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Nous allons maintenant céder la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Mr. Speaker, it's 6:10 in the morning, and I have to say that the ludicrous situation that this Government has brought us to resembles, as far as I can suggest very humbly, nothing more than a farce. The legislative process, at 6:10 in the morning, on a bill presented in this House on the same day that the motion of closure is presented, cannot be anything more than a farce, Mr. Speaker. How could any other rational or intelligent human being describe what the Minister of Revenue and the Government House Leader have cooked up?

Bill 91, an Act to again amend the Act respecting the ministère du Revenu, presented for the first time in this House on the 17th of December. On the same day, we get by the Government's majority, force of numbers, a motion that suspends the regular rules of procedures in the National Assembly, a motion that would be more commonly known in English as closure. And, in that motion of closure, lo and behold, we find Bill 91! The fact that it was presented on the same day as the motion of closure can only be described as farcical. How could the Minister of Revenue expect us to treat the situation any differently than that?

If that weren't enough, Mr. Speaker, we have the other farcical situation which is contained right in the bill. Right in the bill, it says: «This bill gives effect to a measure announced in the Budget Speech delivered on – now, get this, Mr. Speaker, get this – 9 May 1996.» Not the 9th of December, the 9th of May. This Minister of Revenue had until June, July, August, September, October, November, December, this Minister of Revenue had seven months to give effect to a piece of legislation that is three articles long. And he had to do it on the 17th of December, on the same day that his own Government House Leader invokes closure on the bill. I mean, nothing could be more farcical than that, Mr. Speaker.

I don't see how the Minister of Revenue can stand up and suggest to this House that this is a serious legislative process. The Minister of Revenue, in a previous parliamentary life, sat in the chair that you're sitting in. He was, at one time, the guardian of the rights of all members of this National Assembly. However, I beg to suggest rather humbly that the Minister of Revenue has forgotten completely what his responsibilities were when he acted as Speaker of this House by so flagrantly leading this House into a ludicrous situation that we have before us.

Mr. Speaker, I have mentioned to my wife on a couple of occasions the hours that we keep here in December, and I must say one of her reactions, and I think it would be common amongst laypeople generally, is that there must be some crisis that forces a National Assembly, a Parliament to sit until 6:15. Is the country at war? Is there a major crisis afflicting the Government? Has the Premier resigned? Apparently not. The crisis is: 60 000 jobs lost, more taxes – oh!, and P.S. – Bill 91, which should have been introduced seven months ago. It's farcical, Mr. Speaker, that's the best thing we can say about it. Thank you.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Laporte. Excusez, M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour sur ce très important projet de loi, qui nous arrive en dernière minute comme ça, que nous présente le ministre du Revenu. Un projet de loi qui ne prend pas beaucoup de temps à lire, puisqu'il n'y a que deux articles.

Et j'écoutais, il y a quelques heures, le ministre du Revenu nous présenter ce projet de loi là et je dois dire qu'à la fin de son intervention le ministre du Revenu a quitté ses notes pour s'adresser à l'opposition et plaider littéralement en regardant l'opposition pour que l'opposition ne fasse pas trop de discours, ne lui brasse pas trop la cage et soit un peu compréhensive à son endroit. Il nous expliquait qu'après tout présenter comme ça un projet de loi sous forme de bâillon, dans une procédure de bâillon, une procédure où on suspend les règles, c'est normal, c'est dans les règlements de l'Assemblée nationale. Alors, messieurs de l'opposition, allez-y doucement.

M. le Président, il faisait un peu pitié, il me faisait penser à un individu qui se présente devant le tribunal et qui plaide sur la sentence. Il plaidait littéralement pour que l'opposition fasse attention de ne pas trop endommager le pauvre ministre qui, après tout, faisait son possible et qui se trouvait à l'intérieur des limites de notre règlement. Oui, à l'intérieur des limites de notre règlement, c'est vrai, c'est les limites spéciales de notre règlement. Parce que ces règles-là, c'est des règles exceptionnelles que l'on emploie très rarement, on le voit – dans le cas de ce gouvernement-là, ce n'est pas si rare que ça – à l'occasion de projets de loi importants, et la tradition veut que le ministre emploie une procédure comme celle-là lorsque l'opposition a débattu pendant des heures, et des heures, et des heures en commission parlementaire et que, finalement, le gouvernement, devant l'obstruction systématique de l'opposition, décide de mettre fin aux débats. Ce n'est pas le cas ici, ce projet de loi là n'a jamais même été apporté en commission parlementaire; il a été déposé hier en catastrophe à la dernière minute par un ministre qui était un peu honteux – je dirais honteux comme un renard qu'une poule aurait pris, pour parodier, pour citer La Fontaine – d'avoir oublié littéralement de lire le budget du ministre des Finances, au mois de mai dernier, qui nous annonçait une mesure semblable.

Alors, puisqu'il avait oublié, puisqu'il n'avait pas fait son travail, voilà qu'en catastrophe il nous amène un projet de loi en plein milieu de la nuit, en nous demandant: S'il vous plaît, soyez gentils, passez ce projet de loi là, on ne l'étudiera pas, on n'aura pas le temps de faire notre travail, mais faites-moi confiance, c'est une très bonne affaire.

Moi, M. le Président, j'ai de la difficulté à porter un jugement sur un projet de loi qui a atterri hier seulement sur ma table, que je n'ai pas eu le temps réellement d'étudier en profondeur. Même s'il est court, ce projet de loi là a des implications, pourrait, en tous les cas il me semble, avoir des implications drôlement importantes, puis je n'ai pas eu le temps de consulter les fiscalistes. Je connais quelques fiscalistes qui, certainement, auraient des observations à me faire à ce sujet-là. Je n'ai pas eu le temps parce que ces gens-là dorment. J'ai regardé l'heure, je ne suis pas pour les appeler à 3 heures du matin pour savoir ce qu'ils en pensent et si vraiment le gouvernement a raison d'apporter un projet de loi comme ça à la sauvette.

(6 h 20)

Devant ces faits-là, vous savez que la sagesse nous enseigne que, dans le doute, on s'abstient, et, moi, je n'ai pas l'intention de voter en faveur d'un projet de loi, pas parce que nécessairement je suis convaincu que c'est mauvais, je ne le sais pas. Je ne le sais pas et je n'ai pas eu le temps non plus de faire le travail qu'il faut pour le savoir. Je ne suis pas de ceux qui votent, comme ça, aveuglément, sans savoir trop sur quoi on vote.

C'est quand même une mesure importante, même s'il n'y a que deux articles. On veut changer nos règles, on veut faire en sorte d'accorder au gouvernement plus de latitude dans la possibilité qu'il a d'aller fouiller dans le passé des payeurs de taxes, des citoyens. Est-ce que le gouvernement a raison de le faire? Est-ce que le fédéral fait la même chose? Je ne le sais pas. Est-ce qu'on est harmonisé avec le fédéral? Parce que vous savez qu'il y a une coutume, au Québec: on tente de faire en sorte que les deux régimes fiscaux soient semblables pour ne pas que les citoyens soient mélangés, d'avoir les mêmes règles qui prévalent à Québec comme à Ottawa.

M. le Président, je vois que vous me faites signe. Alors, tout ça, on est présentement dans le noir, littéralement dans le noir à tous égards. Et, parce que le ministre n'a pas fait son travail en temps opportun, il ne faut pas compter sur l'opposition pour venir le dédouaner de son erreur et de sa négligence. Dans les circonstances, comme on n'est pas trop certain des implications de ce projet de loi là, vous me permettrez de vous dire que c'est la sagesse qui va prévaloir, et j'ai l'intention de voter contre le projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laporte. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci. Enrôlez-vous! qu'ils disent, M. le Président. Je reviens encore à ce qui a été dit par le passé et selon certaines interventions. Vous savez que cette session-ci, d'après le député de Joliette, qui est ici quand même depuis une vingtaine d'années – moi, depuis sept ans – a probablement été la pire session qu'on n'a jamais vécue. Si on pense que les gens vont nous respecter en nous regardant faire et en faisant ce qu'on fait, c'est-à-dire en passant des projets de loi qui sont importants, que ce soit celui-ci ou d'autres, qui ont des implications importantes aussi, la nuit, comme ça, à la sauvette, honnêtement, non seulement on est, en termes de crédibilité dans la société, au dernier rang, mais, si on continue comme ça, on va y rester. Alors, il y a une réforme parlementaire qui a été suggérée, et on n'en a pas entendu beaucoup parler ces derniers temps, mais j'espère qu'en janvier, février et mars on va s'y remettre, parce que ce qu'on fait présentement est totalement ridicule, et je pense et je parle comme parlementaire, et ce, je sais, des deux côtés.

Pour revenir au projet de loi, si le député de Laporte, ex-ministre des Finances, dit qu'il ne comprend pas, au niveau du projet de loi n° 91, les implications de ce projet de loi, pouvez-vous vous imaginer, M. le Président, ceux qui n'ont pas eu la chance de travailler dans les finances – ou enfin de jouer dans les finances, comme l'ex-ministre des Finances – et le citoyen ordinaire qui, lui, se demande d'une certaine façon si on prend, oui ou non, ses intérêts à coeur?

Ce que j'ai compris au niveau de la note que nous avions, une espèce de note technique, c'est que le délai de prescription sera augmenté, passant de trois ans à cinq ans. Ce que je comprends aussi, c'est que c'est une certaine harmonisation avec le Code civil, c'est-à-dire qu'avant, ce qu'on m'a expliqué... Puis ce n'est pas des farces. On est là à voter, et puis je me demande un peu ce qu'il en tient de ce projet de loi. Alors, on m'a expliqué tout simplement que, avant, le délai de prescription était à vie et que maintenant il est de trois ans à cause du changement au niveau du Code civil, et on veut l'augmenter à cinq ans. Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président? Je fais comme mon collègue le député de Laporte: je ne le sais pas. On ne l'a pas étudié, on n'a pas demandé effectivement des conseils ou analyses à des gens, des fiscalistes, des gens qui sont dans le système et on ne sait absolument pas à quoi ça tient.

Chose certaine, M. le Président, c'est qu'au niveau du Revenu ça aurait été bien de prendre cette mesure... ou enfin de l'étudier, mais de l'étudier dans le cadre peut-être d'une réforme au niveau du ministère du Revenu. Et je ferai... enfin, je termine, là, en laissant ça au ministre du Revenu: c'est que la commission de la culture a décidé, M. le Président, d'étudier tout l'aspect de la protection de la vie privée, entre autres. Et le ministère le plus délinquant, ou un des ministères, je dirais, avec la Sécurité du revenu, mais un des ministères les plus délinquants, c'est celui du Revenu, M. le Président. Et, même si le ministre du Revenu me dit non, le Vérificateur l'a dit. Et j'inviterai le ministre du Revenu à assister à la commission parlementaire, puisque l'ensemble des parlementaires, des deux côtés de la Chambre, sont inconfortables par rapport aux méthodes utilisées par les gens du Revenu et par le croisement de fichiers qui se fait.

Cela dit, M. le Président, on revient au projet de loi. Si on est capable d'aller fouiller, M. le Président, comme le Vérificateur l'a dit, 365 fois dans le dossier d'un artiste connu pour savoir certains renseignements, M. le Président, pouvez-vous vous imaginer... Là, le délai de prescription est allongé de trois à cinq ans. Comment les gens du Revenu, avec les possibilités données par les nouvelles technologies, vont pouvoir faire et combien de temps, parce qu'on parle de trois à cinq ans, ils vont pouvoir utiliser, justement, le croisement de fichiers pour venir fouiller chez nous, dans nos renseignements personnels, pour, supposément, chercher des fraudeurs?

Alors, selon moi, M. le Président, je ne voterai pas pour, parce que, effectivement, on ne connaît pas les implications. Mais, deuxièmement, M. le Président, j'inviterai certainement le ministre du Revenu à venir assister à la commission parlementaire et à venir entendre, justement, nos spécialistes nous dire les abus qui se font dans son ministère.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Alors, ce 19 décembre est une autre de ces journées sombres dans l'histoire de notre Parlement. Il est 6 h 30, M. le Président. Nous commençons à être...

Des voix: ...

M. Marsan: M. le Président, je vois qu'il y a des députés ministériels qui aimeraient parler. Ce serait très agréable de les entendre, M. le Président, surtout qu'on ne les entend jamais lorsqu'il y a des lois aussi importantes qui touchent... qui vont chercher dans la poche des contribuables des argents. Ce serait bien intéressant, M. le Président, et, s'il y en a qui veulent parler immédiatement, moi, je serais prêt à les écouter pour continuer ensuite. Ils n'auraient simplement qu'à vous le signifier.

M. le Président, le discours du budget a été lu le 9 mai dernier, et la question qu'on se pose, c'est: Pourquoi est-ce que le ministre du Revenu a déposé seulement cette semaine, mardi, son projet de loi et que, tout de suite, jeudi, deux jours après, eh bien, il sent déjà l'obligation de l'imposer à travers un bâillon? On est rendu avec un gouvernement qui, en plus d'avoir le championnat des taxes, a aussi le championnat des bâillons, M. le Président.

(6 h 30)

Ce projet de loi est inclus dans la motion de suspension des règles sous prétexte de l'urgence. Pourtant, il est clair que la seule raison urgente, c'est le manque de prévoyance et, il faut le dire, M. le Président, l'improvisation qui est associée à ce gouvernement. D'ailleurs, M. le Président, je ne suis pas le seul à évoquer cette improvisation du gouvernement.

Je voudrais faire référence à un article d'un des collègues du gouvernement, M. Pierre Bourgault, qui, tout dernièrement, parlait du gouvernement et du premier ministre en disant: «Il tire tous azimuts sur tout ce qui bouge, il se fait des ennemis de plus tous les jours et chaque mouvement qu'il fait sent l'improvisation à plein nez.» Ça, là, ce n'est pas les députés libéraux, ce n'est pas le député de Robert-Baldwin qui dit ça. C'est Pierre Bourgault, qui dit que ça sent... ce gouvernement sent l'improvisation à plein nez. «À supposer qu'il sache où il va, il est à peu près certain qu'il ne s'y rendra jamais, tant il a l'art de se mettre à dos à peu près tout le monde.»

M. le Président, le journaliste, M. Bourgault, continue en disant: «tout se déroule comme si...» M. le premier ministre – parce qu'on ne peut pas le nommer – «...se disait en se levant le matin: "Il me semble qu'on a oublié de frapper sur quelqu'un hier, alors on va s'en occuper aujourd'hui."» C'est vraiment la citation. C'est grave, M. le Président, quand on est rendu à qualifier le gouvernement de cette façon.

Il continue en disant: «C'est pourquoi tout le monde est en beau maudit – excusez le mot – dans tous les dossiers. Un jour, ce sont les municipalités régionales de comté qui écopent, le lendemain ce sont les étudiants, les agriculteurs, puis les assistés sociaux – et, M. le Président, vous savez jusqu'à quel point ce gouvernement s'est attaqué et s'attaque encore aux assistés sociaux – puis les transporteurs scolaires, puis les commissions scolaires» – on l'a vu tantôt avec la loi n° 84 – et maintenant, ce soir, bien, je pense que ce qu'on est en train de faire, c'est d'aller piger dans les poches des contribuables.

Et là aussi, M. le Président, je voudrais tout simplement vous rappeler une des promesses ou un des slogans, en campagne électorale, où on disait: On va mettre fin aux coupures des libéraux. Regardez jusqu'à quel point ils les ont triplées, quadruplées et quintuplées, ces coupures, M. le Président.

M. Bourgault continue en disant: «On frappe partout, en environnement, en santé – et vous savez jusqu'à quel point on frappe en santé, on frappe les patients particulièrement – dans la fonction publique, dans les affaires juridiques. On frappe d'abord les grands groupes pour ensuite s'en prendre à leurs composantes plus petites.»

M. le Président, vous me faites signe que mon temps achève. Je voudrais, en guise de conclusion, tirer la conclusion de M. Bourgault, ce journaliste que les gens d'en face connaissent très bien: «Arrogance, improvisation, cachotteries. Cavalier et sournois.» M. le Président, c'est des accusations qui sont extrêmement graves, qui ne viennent pas de la députation libérale. Et nous assistons encore une fois à un gouvernement qui, après seulement deux ans, est un gouvernement vieilli, vieillot, un gouvernement aigri, divisé et qui divise la société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine et whip en chef de l'opposition. M. le whip en chef.


M. Georges Farrah

M. Farrah: Oui. Merci, M. le Président. Alors, j'en suis à ma quatrième intervention cette nuit... de la part d'un gouvernement qui nous présente un bâillon, M. le Président, sur des projets de loi qui nous ont été présentés à la toute dernière minute, sur lesquels on n'a pas pu vraiment faire une étude exhaustive, M. le Président.

Dans le projet de loi qui nous occupe présentement, le projet de loi n° 91 présenté par le ministre délégué au Revenu, je pense qu'il y a un mot qui est important, c'est le mot «nu». Parce que ce ministre est en train de déshabiller les Québécois et les Québécoises. Et si ça continue comme ça, c'est notre chemise, c'est nos pantalons, M. le Président; il est en train de tout nous arracher, ce ministre. Et là peut-être que je comprends la raison pour laquelle il passe ses projets de loi en pleine nuit. La nuit, il faut que les enfants soient couchés, à la lumière de qu'est-ce qu'on entend et de qu'est-ce qu'on voit d'un ministre de la sorte.

M. le Président, l'essentiel du projet de loi, c'est qu'il augmente le délai de trois à cinq ans au niveau des prescriptions. Et ça, ça veut dire quoi essentiellement? C'est que ces gens-là du ministère du Revenu vont être à l'affût de l'ensemble des Québécois et des Québécoises pour les déshabiller davantage. De là le mot «nu» du ministère du Revenu. Alors, c'est ça essentiellement qui va se passer avec cette mesure. Et la raison pour laquelle on doit fouiller dans les poches des contribuables, à condition qu'il nous reste des pantalons sur le dos, c'est que ce gouvernement n'est pas capable... n'a pas de vision économique, n'est pas capable d'aller chercher des revenus supplémentaires en termes de création d'emplois, en termes d'investissements. Alors, pour combler ce manque à gagner et pour atteindre les objectifs budgétaires que ce gouvernement s'est fixés, bien, il faut que les Québécois et les Québécoises en paient plus, puis qu'ils soient surveillés plus, puis qu'on parte à la poursuite de l'ensemble des contribuables comme si on était tous des bandits, M. le Président.

Essentiellement, on se rend compte... Et d'autant plus que ce projet de loi découle du budget, du discours du budget du ministre de l'Économie et des Finances qui a été déposé le 9 mai dernier. M. le Président, décision prise le 9 mai dernier et le projet de loi a été déposé dans les derniers jours. Alors, qu'a fait le ministre du Revenu durant tout ce temps-là? Durant tout ce temps-là, M. le Président, à ce que je sache, ce n'est pas le ministre le plus occupé du cabinet, on le voit souvent ici jouer avec son ordinateur. Alors, essentiellement, qu'est-ce que le ministre a fait durant tous ces mois, toutes ces semaines? Alors, dois-je comprendre que le ministre avait des préoccupations autres que le travail qu'il aurait dû faire?

Et là on nous amène un projet de loi en pleine nuit, qu'on n'a pas eu le temps d'étudier en commission parlementaire, M. le Président, dont on n'a pas eu le temps de discuter, et d'autant plus que ce projet de loi touche l'ensemble des contribuables du Québec. Et là on nous dit qu'on va aller nous chercher 300 000 000 $ dans les poches, et ça, on n'a pas pu justifier ce chiffre-là. Alors, qu'est-ce qu'on va faire pour aller chercher 300 000 000 $, M. le Président? Comment on va le faire? Est-ce qu'on va être plus agressif? Est-ce qu'on va être plus tannant? Est-ce qu'on va déshabiller davantage le contribuable? De là le mot «nu» dans «revenu»?

C'est ça qu'on doit comprendre de ce gouvernement? Au lieu de créer des emplois, de susciter des investissements et de générer des revenus au gouvernement d'une façon très efficace, bien non, regardez le bilan de ce gouvernement, notamment depuis l'arrivée du député de Jonquière, premier ministre du Québec: 60 000 emplois de perdus depuis l'arrivée de ce premier ministre. Alors, de là l'incurie gouvernementale en matière économique, c'est un gouvernement qui est même rendu antiéconomique. Juste sa présence comme telle, sa gestion comme telle nuit aux investissements et ça fait en sorte que quoi? Les investissements, ils se créent en Ontario, au Nouveau-Brunswick. Et c'est la raison pour laquelle le premier ministre du Québec est en nomination pour l'homme de l'année au Nouveau-Brunswick. Celui qui aura généré le plus d'emplois et d'économie au Nouveau-Brunswick, c'est le premier ministre du Québec. Il est en tête de liste à la Chambre de commerce de Fredericton, M. le Président, pour être nommé l'homme de l'année au Nouveau-Brunswick. «C'est-y» épouvantable à votre goût?

Puis là qui est-ce qui va payer pour ça, cette incurie-là? Bien, c'est les contribuables, avec des sorciers et des sorcières qui vont partir à la chasse au lendemain de l'adoption de ce projet de loi là. Ça n'a pas de bon sens, ça n'a pas de bon sens! C'est la raison pour laquelle l'opposition officielle s'objecte à ce strip-tease gouvernemental qui est tellement indécent, et c'est probablement pour ça que ce projet de loi là nous est présenté en pleine nuit, parce que les enfants sont couchés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député des Îles-de-la-Madeleine et whip en chef de l'opposition. Nous allons céder maintenant la parole au député de Verdun. Alors, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Bonjour, M. le Président. Il est 6 h 40, donc, après cette nuit agitée, il est temps maintenant de se réveiller et de revenir aux choses sérieuses. Là on a un projet de loi qui, théoriquement, d'après ce qu'on nous dit, est issu du discours du budget – alors, il faut bien comprendre, le discours du budget, c'était au mois de mai – sauf qu'il n'est pas issu du discours du budget – je ramasse mon projet de loi qui est tombé – il n'est pas issu du discours du budget. Et je vous explique pourquoi, et on a personne... et le ministre ne l'a pas expliqué du tout.

Le discours du budget parlait d'une exemption de 10 ans, d'un délai de prescription maximum de 10 ans, c'est ça qui était dans le discours du budget. Et il y a cinq ans qui sont tombés on ne sait pas comment, on ne sait pas où, on ne sait pas de quelle manière, depuis le mois de mai, depuis le 9 mai, au discours du budget, jusqu'à aujourd'hui. Alors, ce gouvernement qui, soi-disant, veut faire en sorte que chaque personne paie réellement son dû, qui trouvait que le Code civil était tel que le délai de prescription était trop court, vient d'abandonner, entre la date du discours du budget et aujourd'hui, cinq ans. Et on ne comprend pas, il n'y a personne qui nous a donné une explication. Pourquoi, le 9 mai, le ministre des Finances disait dans son discours du budget: J'ai l'intention de faire en sorte, suite à la mise en vigueur du Code civil qui introduit un délai de prescription de trois ans, de porter ce délai de prescription à 10 ans, et dans le projet de loi qu'on dépose aujourd'hui, c'est un délai de cinq ans?

(6 h 40)

Si nous avions eu le temps d'étudier ce projet de loi d'une manière normale et naturelle, s'il avait été déposé à temps pour qu'on puisse l'étudier dans une commission parlementaire, il est sûr qu'on aurait eu énormément de questions à poser au ministre. Pourquoi il abandonne cinq ans à l'heure actuelle? Pourquoi, dans le discours du ministre des Finances, au moment où il a déposé son budget, on parlait d'un délai de prescription de 10 ans et pourquoi on commence à rapetisser, à voir les choses plus petites, etc., lorsqu'on en arrive à déposer un projet de loi qu'on aurait dû normalement déposer en septembre ou octobre, au moment où on dépose les lois qui sont issues d'une déclaration du ministre des Finances?

Vous savez bien, M. le Président, qu'après chaque budget il y a une loi qui est une loi où on met en pratique les éléments du budget. Ça ne l'était pas, à l'intérieur. Ça ne l'était pas. Alors, on pensait que, soit c'était oublié, soit que tacitement, puisque ça avait été déjà annoncé par déclaration ministérielle... Et il faut bien comprendre que, un discours du budget, c'est un vote, il y a un vote sur un discours du budget. L'Assemblée nationale s'est déjà prononcée, nous n'avons pas voté en faveur, mais, lorsque la majorité ministérielle a voté en faveur du discours du budget, elle s'est prononcée déjà en faveur d'un délai de prescription de 10 ans. On l'a fait au moment où on adopté le discours du budget.

Maintenant, il faut bien que quelqu'un m'explique pourquoi, dans un projet de loi qu'on a oublié de déposer et qu'on donne en retard, qu'on est obligé d'adopter à la vapeur au mois de décembre, en dehors de toutes règles, on a en plus coupé de moitié le délai de prescription. Il y a une raison quelque part, je voudrais la connaître, personne ne l'a dit. Dans le discours du ministre du Revenu, on ne me l'a pas expliqué. Ça aurait nécessité, d'après moi, de longues discussions en commission parlementaire.

Nous n'aurons malheureusement pas la chance de pouvoir débattre de ce projet de loi en commission parlementaire parce que les règles... on nous a imposé des semblants d'études article par article. Alors, il est clair que, face à cette improvisation de la part du gouvernement, nous ne pouvons faire autrement que de voter contre le projet de loi n° 91. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous allons maintenant céder la parole au député de D'Arcy-McGee. M. le député.

Une voix: Bravo!


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Mr. Speaker, I stand before you here, this morning, outraged against Bill 91 which the PQ Government, in the dark of the night, in the dark of the morning, is presenting before us, a government which itself is dark, which itself is immoral, which itself has imposed upon us closure, taken away our liberty of speech, our liberty of free discussion of a bill which is a pure and simple tax grab, a tax grab in the dark of the night by a separatist government.

The Government, by this bill, extends the time limit, the limit for prescription, from three to five years, the time limit in which they can chase down debtors who owe money to the government. The government now has an additional period in which they, like shylocks, can chase after those who owe the money. These are people...

Une voix: Mr. Chairman... Mr. Speaker, I'm sorry but...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques... C'est une question de règlement, M. le député? Je vous écoute, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: J'aimerais attirer votre attention, M. le Président, sur les paroles que vient de prononcer de député de D'Arcy-McGee, qui a parlé du gouvernement comme étant un «shylock», M. le Président. Vous connaissez bien l'expression? Elle est antiparlementaire, elle est méprisante, monsieur. Un «shylock», là... La police même a une loi pour eux.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de D'Arcy-McGee, je vous demanderais d'utiliser d'autres termes que ce mot et d'être prudent dans votre allocution que vous allez poursuivre. Alors, je vous demanderais d'utiliser un autre mot.

M. Bergman: Mr. Speaker, of course, with all due respect to you, I speak on behalf of those who are struggling financially, those who haven't got the money to pay their bills, those who take a look at the law and know that at the end of three years, their debt to the government will be disregarded, they will receive a... for their debt. And now, as a result of the bill being passed here in the dark of the night there is an extension of two years. There is a tax grab on these people, an additionnal time period on which these people can be chased down for money which they owe to the government.

M. le Président, la population du Québec est prise avec un des pires gouvernements de son histoire, un gouvernement sans direction, un gouvernement sans vision, un gouvernement sans esprit moral, sans compassion pour le vrai monde, les Québécois et Québécoises moyens qui vivent dans l'insécurité ne sachant si demain ils auront un job. Mais, M. le Président, dans la situation économique difficile que nous connaissons actuellement, avec un taux inquiétant et désastreux de chômage créé par les politiques du gouvernement péquiste, les épouses, les frères, les amis du régime au pouvoir ont tous des jobs garantis.

Le premier ministre, dans une récente allocution aux membres de son parti, leur a demandé de faire preuve de plus de tolérance dans le futur. J'en déduis que les propos du premier ministre étaient aussi destinés aux députés assis en face de lui, puisque ces députés sont aussi membres du Parti québécois. Comment, après avoir parlé de tolérance, le premier ministre peut permettre que soit imposé le bâillon, une mesure antidémocratique, sur cette Assemblée nationale? C'est un affront à la population du Québec et un exemple flagrant de l'attitude antidémocratique dont fait preuve ce gouvernement du Parti québécois.

Ce gouvernement du Parti québécois frappe et taxe, taxe et frappe, mais toujours les plus démunis, les plus vulnérables de notre société. Un gouvernement qui manque de compassion envers nos aînés, nos étudiants, nos assistés sociaux, notre coeur, notre esprit. Croyez-vous que les jeunes se sentent à l'aise devant un gouvernement qui n'a pas de vision, qui est arrogant et qui improvise sans presque aucune consultation? Croyez-vous que les jeunes se sentent à l'aise avec un groupement péquiste qui taxe, qui frappe? M. le Président, moi, je vais voter contre ce projet de loi. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous cédons maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet. M. le député...


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. À l'intérieur d'un bâillon, on a introduit le projet de loi n° 91, un bâillon en toute fin de session, au moment où l'ensemble des députés de cette Chambre auraient souhaité débattre, travailler, mettre du temps en commission parlementaire et ici, au salon bleu, pour aider les citoyens qui sont à la recherche d'emplois, les citoyens qui souhaiteraient voir le gouvernement du Québec faire des efforts de tous les jours pour tenter de rétablir la confiance dans la situation économique pour les investisseurs et permettre de développer des emplois, permettre à ceux et celles qui se cherchent des emplois d'en trouver et permettre aux étudiants qui sont présentement soit au cégep ou à l'université, qui dans quelques mois seront à la recherche d'emploi, de se trouver des emplois.

M. le Président, nous sommes plusieurs députés aujourd'hui ici, dans cette Chambre, et probablement, à leur grande surprise, tout comme nous, qu'ils se demandent ce que vient faire le projet de loi n° 91 à l'intérieur d'un bâillon, en toute fin de session, ne serait-ce que pour s'assurer, par la complicité du ministre du Revenu, que le gouvernement du Québec n'a oublié personne dans ses nouvelles formules de taxation, c'est-à-dire pour aller chercher dans la poche de tout le monde une participation pour boucler le budget de la province en 1996 et dans les années à venir.

(6 h 50)

On pourrait même – et quelqu'un y a sûrement pensé – ouvrir un concours pour se demander qui le gouvernement du Québec aurait oublié à ce moment-ci pour aller taxer, et probablement qu'il n'a rien oublié. Mais quelqu'un l'a fait, quelqu'un a fait cette suggestion-là dans les journaux. Il y a quelqu'un qui nous dit, et c'est M. Bourgault – et je ne reprendrai pas ça parce que ça a été lu par la plupart des Québécois: «Ne cherchez plus», le gouvernement du Québec a probablement, au moment où on se parle, touché tout le monde. Mais non, il en avait oublié quelques-uns. C'est pourquoi le projet de loi n° 91 a été introduit à la toute dernière minute. Comme plusieurs l'ont mentionné, cette législation aurait pu se retrouver à l'intérieur d'un autre projet de loi, soit le projet de loi n° 42. On introduit un tout petit projet de loi justement pour s'assurer que tout le monde va être touché. Puisqu'il y a des gens qu'on aurait pu échapper à cause des prescriptions, on vient changer les délais.

C'est un projet de loi qui a trois articles, M. le Président, dont un sur le fond. Ce projet de loi donne suite à une mesure prévue dans le discours du budget du 9 mai. Quand la plupart d'entre nous avons écouté, lu et relu le discours du budget, le budget du 9 mai 1996, on aurait probablement imaginé qu'un certain nombre de citoyens étaient touchés. Nous sommes en train de réaliser aujourd'hui, et en plus avec l'ajout du projet de loi n° 91, que tout le monde va être à peu près touché. Donc, comme je le mentionnais, si jamais on veut faire un concours pour voir si le gouvernement du Québec en a oublié, probablement que quelqu'un d'assez imaginatif trouvera à gauche ou à droite une possibilité que certaines personnes aient probablement été oubliées. Mais il faut toujours être prudent, parce que probablement que ces gens-là vont se retrouver à un moment où ils feront leur rapport d'impôts, en janvier, février, mars 1997, et eux autres réaliseront qu'ils n'auront pas été oubliés.

Donc, M. le Président, c'est l'image du gouvernement dans les derniers mois: aller tarifer, appliquer une tarification partout où les Québécois avaient l'habitude de recevoir des services. On peut commencer par les plus importants, au niveau de la santé, des médicaments, de l'éducation, pour revenir à un projet de loi où on va s'assurer que les gens qui sont assis bien tranquillement chez eux, qui avaient évidemment, probablement, un dû envers le gouvernement, qui n'avaient pas la capacité de débourser et qui cherchaient des solutions pour un jour pouvoir débourser... Le gouvernement dit: Ils ne nous échapperont pas; le projet de loi n° 91 va les avoir à l'oeil, et on va pouvoir s'accrocher à eux autres dans les délais, donc nous changeons la prescription.

M. le Président, je serai un de ceux qui voteront contre le projet de loi au nom et pour la population du Québec que je représente. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Alors, puisqu'il n'y a plus d'intervenant... M. le leader de l'opposition et député de Brome-Missisquoi.

Des voix: Bravo!


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui. M. le Président, je vous ai regardé vérifier si, de l'autre côté, il y avait quelqu'un, du côté gouvernemental, qui pouvait s'associer à ce geste du ministre délégué au Revenu de taxer en pleine nuit les Québécois, encore une fois, M. le Président. Un ministre qui s'inscrit très bien, d'ailleurs, dans un Conseil des ministres, dans un gouvernement qui, au cours de la dernière année, a affaibli le Québec journée après journée. On en est rendu à se demander, de ce côté-ci de la Chambre, comment on peut sérieusement et raisonnablement participer à une action gouvernementale qui fait en sorte que, le soir, quand on va se coucher, M. le Président, les soirs qu'on y va, il y a 200 travailleurs et travailleuses de moins qui occupent un emploi au Québec. Le soir, quand on va se coucher, M. le Président, pour les soirs qu'on y va, il y a 3 000 000 $ de taxes, d'impôts, de droits additionnels qui sont chargés à chaque Québécois. Deux cent emplois de moins, 3 000 000 $ de taxes de plus par jour, sept jours par semaine, au cours de la dernière année. Et ces gens-là sont encore à l'Assemblée nationale en train de nous garantir que ce qui va se passer au cours des prochains jours puis des prochains mois, ça ne changera pas.

Au cours de la nuit, M. le Président, des taxes ou des impôts additionnels sur les prêts et bourses aux étudiants de façon à priver ceux et celles qui peuvent aspirer à une éducation encore accessible des moyens financiers de le faire. Des taxes et des impôts additionnels, M. le Président, chez ceux et celles qui ont le moins les moyens d'en payer dans notre société, chez les gens qui bénéficient de la sécurité du revenu. Puis, pour combler le tout, pour compléter le bâillon gouvernemental, 300 000 000 $ de taxes additionnelles chez les particuliers. M. le Président, cette nuit, rapidement, là, c'est 400 000 000 $ de taxes et d'impôts additionnels qui sont imposés.

Ça veut dire quoi, ça, M. le Président? Si on maintient le rythme de croisière, là, ça veut dire qu'on nous garantit pour les jours, les semaines et les mois à venir qu'on va continuer d'ajouter 3 000 000 $ de taxes par jour aux contribuables québécois, puis ça veut dire qu'en taxant ainsi les contribuables et l'entreprise au Québec, on va continuer à perdre 200 emplois par jour. Combien de temps peut-on endurer un tel affaiblissement du Québec? Combien de temps peut-on endurer un tel affaiblissement à tous les niveaux des populations de chacun des comtés que l'on représente? M. le Président, à qui ça s'adresse, ces taxes et ces impôts? Aux personnes vivant seules, aux personnes âgées, aux personnes qui sont à la retraite. On taxe tour à tour les municipalités en les forçant à hausser la taxe municipale; les commissions scolaires. On taxe l'assurance-médicaments, l'immatriculation, les permis de conduire. M. le Président, à chaque jour, le gouvernement ajoute des taxes.

M. le Président, un éditorialiste se demandait dernièrement pendant combien de temps ça va durer. Je le cite au texte: «En effet, on ne peut imaginer que tous les ministres et tous les députés souffriront éternellement de jouer le rôle d'ennemis du peuple.» Quand vous êtes rendus à vous faire taxer par un éditorialiste d'ennemis du peuple, de l'autre côté de la Chambre, peut-être qu'il commence à être temps que vous vous réveilliez, que vous disiez à votre ministre des Finances, que vous disiez à votre ministre délégué au Revenu, que vous disiez à votre premier ministre... il commence à être temps que vous vous adressiez à ces gens-là et leur dire: C'est assez! Ce n'est pas pour ça qu'on a été élus.

Et pour ajouter l'injure à l'insulte, M. le Président, on nous présente ça en catastrophe, on nous présente ça à la dernière minute. Parce qu'on a été occupés, M. le Président... Ceux qui ont lu les journaux dans la région savent ce qu'il a fait, le ministre délégué au Revenu, au printemps. Il a fait le tour de ses cabanes à sucre en limousine, M. le Président. Déconnecté de la population de son comté et de la population de l'ensemble du Québec. Il a pris des vacances au cours de l'été, et on l'a vu cet automne en Chambre, avec son petit appareil, jouer au Nintendo à l'Assemblée nationale. C'est ce qui fait, M. le Président...

Des voix: ...

M. Paradis: C'est ce qui fait, M. le Président, qu'à la toute dernière minute...

Mme Caron: Question de règlement.

(7 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition. M. le leader de l'opposition, qu'il ait travaillé avec un appareil électronique, c'est permis en Chambre, mais que vous mentionniez qu'il jouait avec un Nintendo, là, je pense que c'est vraiment péjoratif et je pense que vous imputez... Vous n'avez pas le droit d'aller aussi loin que ça. Alors, je vous prierais de terminer, de conclure, tout en respectant en tous points notre règlement. M. le leader.

M. Paradis: Oui. M. le Président, il nous expliquera à quoi il joue. M. le Président, qu'il arrive à la toute dernière minute dans un tel contexte, ancien président de l'Assemblée nationale, qu'il n'y ait pas d'adoption de principe, qu'il demande à son leader d'imposer un bâillon à l'ensemble des parlementaires, qu'il exige de procéder de nuit pour aller piger dans la poche des contribuables un 300 000 000 $ additionnel, M. le Président, ça constitue un outrage à l'Assemblée nationale, ça constitue un outrage à l'ensemble de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader de l'opposition et député de Brome-Missisquoi. Alors, M. le ministre du Revenu et député de Portneuf, vous avez un droit de réplique de cinq minutes. M. le ministre.


M. Roger Bertrand (réplique)

M. Bertrand (Portneuf): Oui, merci, M. le Président. J'avais prédit, au tout début de ce débat, que l'opposition officielle allait tomber dans trois pièges habituels. Le premier, c'est d'interpréter à sa façon et de façon tout à fait réductionniste la réalité en parlant, semble-t-il, d'augmentation de taxes, alors que ce dont il s'agit, c'est de protéger nos créances, à toutes fins pratiques. Je vous avais dit également qu'ils nous parleraient du bâillon pour essayer effectivement de faire croire au monde que ce qui se passe est inhabituel, alors qu'il s'agit d'une disposition qui apparaît à notre règlement, qui est tout à fait fondée. Ça fait partie effectivement de la mécanique parlementaire, pour l'opposition, d'utiliser tous les trucs possibles dans le règlement, à des fins plus ou moins dilatoires, pour empêcher le gouvernement d'arriver à faire adopter ses législations et le gouvernement a la possibilité, effectivement, d'utiliser le règlement pour modifier certaines règles de façon à lui permettre de progresser dans ses projets de loi.

J'avais dit également que, pour la plupart, on passerait à côté du fond des questions, ce qui s'est bien produit aussi. Vous avez pu constater, M. le Président, qu'à deux exceptions près, à toutes fins pratiques, les exceptions étant le député de Verdun et le député de Nelligan, ce qu'on a fait, c'est attaquer la personne. On va soupçonner votre humble serviteur de peut-être ne pas avoir assez préparé de longue main la législation, d'avoir été... bon, enfin, un certain nombre d'accusations du genre, sauf exceptions, M. le Président.

La réalité, c'est la suivante. M. le Président, nous ferons en sorte, dans une perspective d'équité, de protéger effectivement les créances du gouvernement et donc de la collectivité à l'égard des personnes qui doivent des argents au public. Deuxièmement, nous nous servons d'une disposition du règlement qui est usuelle et que tous les gouvernements, en fin de session, à toutes fins pratiques, utilisent, ont déjà utilisé. Troisièmement, j'entendais le député, je crois, d'Outremont, non, je crois que c'est le député de Jacques-Cartier qui se vantait d'une recherche fouillée qu'il avait faite – d'ailleurs, il se comparait au député de Richmond, ce n'était pas un beau compliment pour le député de Richmond – alors, sa recherche fouillée a finalement abouti sur cinq minutes d'un exposé en ce qui regarde le nombre de mots qui apparaissent au projet de loi n° 91.

Ce que le député a oublié, c'est que souvent, comme le dit l'expression, un train en cache un autre. Le ministère du Revenu et le ministre ont travaillé très fort depuis le dernier discours sur le budget pour produire ce que j'ai déposé ce matin, le projet de loi n° 81, 200 pages, M. le Président, avec plus de 300 articles. Or, il est d'usage, M. le Président, que ce genre de projet de loi est déposé normalement à l'automne et adopté soit à l'automne, soit au printemps. Et ça, c'est la procédure tout à fait normale. On lui a accordé énormément de soins parce que, sur les indications autant de l'opposition officielle que des ministériels, on nous a demandé de préparer très soigneusement ces projets de loi là de façon à les rendre le plus clair possible, les plus transparents possible, ce que nous avons fait.

Or, il apparaissait que, dans les versions originales du projet de loi, un des éléments pouvait poser problème s'il était adopté uniquement au printemps, et c'est la disposition relative à la prescription de trois ans. On aurait été obligés, si on avait adopté cette disposition-là, de dénier un droit qu'auraient acquis des contribuables à partir du 1er janvier, ce qui nous apparaissait être, sur le plan, je dirais, de l'éthique, quelque chose d'incorrect qu'on n'acceptait pas. Alors, c'est la raison pour laquelle nous avons extrait du projet à la base qui a mené au projet de loi n° 81 la disposition relative à ce qui apparaît maintenant dans la loi n° 91. Nous avons sollicité la collaboration de l'opposition officielle pour pouvoir avoir l'occasion, à l'intérieur d'un processus normal, d'avoir une bonne discussion de fond sur la question. Et on nous a refusé, à toutes fins pratiques, cette collaboration-là, ce qui nous a obligés, effectivement, à adopter le chemin dans lequel nous sommes dans le moment, M. le Président.

Alors, par voie de conséquence, je pense que nous avons fait notre travail de la façon la plus responsable possible dans une perspective, encore une fois, d'équité. Parce que qu'est-ce que l'opposition dira à l'ensemble des contribuables si ce projet de loi là, n° 91, n'est pas accepté, quand on aura laissé, comme ça, filer 300 000 000 $, ou à peu près, de créances, non pas des taxes additionnelles, mais de créances, des choses déjà dues?

Deuxièmement, qu'est-ce qu'on dira également, c'est qu'on aura, en négligeant, je dirais, en omettant ou en n'adoptant pas éventuellement ce projet de loi là, incité le gouvernement ou obligé le gouvernement à engager des dépenses supplémentaires de 13 500 000 $ pour protéger ses créances, de toute façon. Je pense que c'est un comportement complètement irresponsable auquel nous invite l'opposition officielle, M. le Président. J'aurai l'occasion d'y revenir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le débat étant terminé sur l'adoption du principe, le principe du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, voulez-vous appeler les députés, s'il vous plaît. Et nous allons suspendre les travaux pour quelques minutes.

(7 h 7 – 7 h 14)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous venons de compléter le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu.

Alors, que les députés qui sont en faveur du principe du projet de loi n° 91 veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Gobé (LaFontaine), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount– Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions?

M. Bélanger: Je demande consentement, M. le Président, pour que le vote du député de La Peltrie et le vote du député de Louis-Hébert soient ajoutés au vote ministériel.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, est-ce que vous acceptez?

M. Paradis: Oui, simplement pour savoir s'il va voter en faveur d'une imposition de 300 000 000 $ de taxes additionnelles.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je suppose que vous acceptez. Alors, les deux votes sont acceptés. Alors, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Pour:47

Contre:26

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. La motion est donc adoptée. Le principe du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, est adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière, pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je suspends donc les travaux durant quelques instants afin que l'Assemblée se constitue en commission plénière.

(Suspension de la séance à 7 h 20)

(Reprise à 7 h 25)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): La commission plénière est maintenant réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu.

Je vous rappelle que, conformément à l'ordre adopté, la durée de la commission plénière est d'un maximum d'une heure. À l'expiration de ce délai, je vais mettre aux voix, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre n'aurait pas pu proposer en cours d'étude.


Remarques préliminaires

Est-ce qu'il y a des remarques préliminaires? Alors, M. le ministre du Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord vous présenter les personnes qui m'accompagnent: Mme Nicole Malo, sous-ministre du Revenu; Me André Brochu, sous-ministre adjoint à la législation; M. Jean-Guy Tessier, responsable et directeur général du Centre de perception fiscale; de même que Alain Lavigne, mon chef de cabinet.

M. le Président, je pense qu'on a assisté à un débat sur le projet de loi n° 91 qui, quant à sa substance, de la part de l'opposition officielle, m'a laissé certainement sur ma faim. Cependant, je retiens deux sujets sur lesquels l'opposition officielle souhaite éventuellement, si j'ai bien compris, que nous approfondissions les choses. Le premier, c'est sur la question des comptes à recevoir, le 300 000 000 $ par rapport au 1 200 000 000 $ contenu dans les remarques du Vérificateur général, en ce qui regarde le total des créances. C'est des choses qu'on peut explorer effectivement, de même que la question du cinq ans. Pourquoi cinq ans plutôt que 10 ans ou quatre ans, etc.? Ce sont des choses certainement qu'il me fera plaisir de discuter, comme d'autres que mon distingué collègue le député de Nelligan voudrait éventuellement aborder.

Je rappelle simplement que l'objectif de ce projet de loi est de permettre d'établir à cinq ans le délai de prescription des créances fiscales, corrigeant ainsi ou ajustant ainsi en fonction des besoins des autorités fiscales les dispositions contenues actuellement au Code civil et qui, à défaut de l'adoption du projet de loi, font en sorte que ces créances actuellement se prescrivent et continueraient de se prescrire dans un délai de trois ans. Alors, je l'ai déjà expliqué et je tiens à le répéter parce que c'est important, pour nous, c'est une question d'équité que d'adopter aujourd'hui les dispositions qui vont permettre d'étendre la période à cinq ans, puisque ça permet, à l'intérieur de ce délai-là – on pourrait y revenir ultérieurement – effectivement d'initier toutes les procédures et les gestes qui ont toutes les chances de nous permettre de récupérer la plus grande partie des créances et donc de ce qui est dû au gouvernement et à l'ensemble de la collectivité.

C'est une question de principe importante au niveau de l'équité, parce que nous sommes d'avis que, comme tous les Québécois et les Québécoises ont un accès, je pense, qu'on peut considérer comme équitable, à l'ensemble des services, qu'il s'agisse du domaine de la santé, du domaine social, de l'éducation et d'autres, il est aussi important que les Québécois et les Québécoises contribuent sur une base équitable au financement de ces services-là. Et, à ce moment-ci, en n'adoptant pas un tel projet, si tant est que l'effet soit effectivement une perte de 300 000 000 $ de créances, je pense qu'au niveau de l'équité on n'atteint pas les objectifs que nous souhaitons atteindre.

Par ailleurs, bien sûr, le gouvernement et le ministère pourraient adopter des mesures, je dirais, palliatives en l'absence d'un projet de loi. Mais ça amènerait le ministère à engager d'ici la fin du mois de décembre des ressources importantes de l'ordre de 3 500 000 $, avec d'autres désavantages au niveau, par exemple, de l'engorgement des greffes et des coûts qu'on pourrait observer très certainement, également, à l'intérieur du système de justice. Et on connaît, M. le Président, l'état des finances publiques comme conséquence du legs du gouvernement libéral pendant ses 10 années au pouvoir, avec un endettement ou une dette totale qui a plus que doublé en 10 ans.

Alors, nous sommes donc dans des exercices excessivement rigoureux de rétablissement des finances publiques et, à ce moment-ci, il est bien sûr que devoir investir 3 500 000 $ de ressources additionnelles uniquement pour protéger nos créances, je pense que ce ne serait pas la meilleure décision en ce qui regarde une gestion responsable des ressources publiques.

(7 h 30)

J'en viens au dernier élément que je trouve tout aussi important, M. le Président, c'est à l'égard de ceux et celles des contribuables qui doivent ces montants à l'impôt. Le fait de procéder, effectivement, en vertu de l'article 13 de la Loi sur le ministère du Revenu pour, au fond, nous donner une garantie sur ces créances-là – en l'absence d'un projet de loi qui sera adopté – pourrait mettre les personnes visées dans une situation peut-être plus difficile en ce qui regarde leur possibilité de crédit et faire en sorte également que leur réputation ou, en tout cas, leur notoriété – dans des choses où on ne veut pas toujours être reconnu par tout le monde – pourrait être affectée à ce moment-là.

Donc, à la fois pour une question d'équité, une question d'efficacité, une question de simple respect à l'égard des citoyens concernés, nous avons privilégié la voie de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

Alors, M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Et bienvenue à tous ce matin, après une longue soirée de débats sur quatre projets en bâillon. Là c'est le quatrième et peut-être que c'est le seul pour lequel, effectivement, il y a une urgence. Parce que les trois premiers, je n'étais pas convaincu qu'il y avait urgence d'avoir un bâillon. Le ministre a plaidé il y a quelques heures une certaine urgence et peut-être qu'il a raison. Sauf que c'est lui qui a causé l'urgence. C'est lui qui a causé l'urgence. C'est le problème que bientôt nous allons avoir un échéancier légal qui finit à minuit le 31 décembre. Et, avec ça, il me semble qu'effectivement il y a urgence, mais on veut savoir et on veut profiter de cette courte plénière peut-être pour explorer un peu plus pourquoi nous avons cette urgence, législativement, mais aussi en pratique.

Je voudrais savoir pourquoi on arrive au 17 décembre avec un projet de loi qui met en vigueur quelque chose qui était annoncé le 9 mai par le ministre des Finances. Et là il va essayer de l'expliquer, mais je pense qu'il va accepter mon point que ça fait drôle, devant les contribuables, d'arriver avec quelque chose comme ça. Malgré peut-être que ce soit important de le faire, mais il me semble que c'est loin d'être transparent et clair.

Deuxième chose dans cette urgence, je voudrais savoir plus c'est quoi, le 300 000 000 $. Quels types de créances, quels types de contribuables? Pourquoi le fisc, avec tout le personnel n'a pas eu une chance de recouvrer ces sommes? Pourquoi, avec tous les efforts... Et je sais que le fisc travaille fort quand il cherche de l'argent. Nous avons eu un débat sur ça et nous allons continuer d'avoir un débat sur ce point, mais il me semble que, si vous avez eu les trois ans, je prends comme acquis – mais peut-être que le ministre va me corriger – que vous avez essayé de chercher cet argent, mais finalement ça n'a pas marché. Je voudrais savoir pourquoi ça n'a pas marché et pourquoi les contribuables, pas juste le député de Nelligan et le Parti libéral du Québec, vont croire ça. Je voudrais avoir une explication qui est défendable devant les contribuables, parce qu'il me semble... Est-ce que c'est effectivement logique de donner un délai maintenant, d'une façon permanente, de cinq ans? Je voudrais être convaincu que le cinq ans va actuellement aider le gouvernement à faire le travail qu'il veut faire, toujours en respectant l'équité, comme vous l'avez mentionné, des contribuables, mais aussi la justice sociale.

Avec ça, j'ai plein de questions sur ça. M. le Président, j'ai mentionné que je voudrais avoir une explication du pourquoi le ministre a décidé effectivement le cinq ans. Est-ce qu'ils ont fait une recherche? Où sont les données? Est-ce qu'il a fait des consultations? Est-ce qu'il a parlé avec ceux et celles qui sont impliqués, qui étaient formés, depuis le Code civil, pour trois ans et qui maintenant doivent tout changer? Je voudrais savoir les réponses à ces questions.

Je voudrais aussi... parce que nous avons eu, en commission parlementaire, souvent la chance de parler d'harmonisation de nos lois, harmonisation de nos lois avec le Code civil, mais aussi avec le fédéral. Le ministre, ce soir, a mentionné qu'effectivement c'est différent au fédéral. C'est encore illimité, le temps. Je voudrais savoir son opinion, et pourquoi. C'est quoi, la logique d'avoir cinq ans? Parce qu'on travaille tellement fort, et lui-même a parlé de temps en temps sur ça. On essaie d'harmoniser, de simplifier le système de taxation pour nos contribuables.

Je voudrais certainement avoir quelques minutes, M. le ministre, et peut-être qu'on peut commencer sur ça, sur la question des comptes recevables. J'espère qu'après votre explication je ne garderai pas mon image que j'ai maintenant, que peut-être c'est juste un truc comptable, un truc de comptable, de jouer avec les chiffres, de garder 300 000 000 $ dans les comptes recevables, parce que, sans ça, il doit augmenter dans une autre colonne plus tard un déficit ou une lacune dans une autre place. Mais, avec ça, je voudrais être convaincu que c'est un geste juste, faisable et raisonnable dans notre approche. Nous allons avoir la chance de procéder pendant cette plénière.

Et j'ai oublié de mentionner, juste en terminant, que le ministre a dit qui sont avec lui. Nous avons notre département de recherche ici, Jean Séguin. Nous ne sommes pas aussi nombreux que le ministère, mais les lacunes en quantité, on remplit ça avec la qualité.


Étude détaillée

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Alors, nous y allons avec l'étude article par article.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, si vous permettez, M. le Président...

M. Williams: Il y a...

M. Bertrand (Portneuf): ...le député de Nelligan a posé un certain nombre...

Le Président (M. Pinard): De questions auxquelles vous aimeriez répondre?

M. Bertrand (Portneuf): ...de questions que je suggérerais qu'on puisse aborder l'une après l'autre.

Le Président (M. Pinard): O.K. Ensuite, on...

M. Bertrand (Portneuf): On pourrait se garder un peu de temps, vers la fin, pour l'adoption des articles.

M. Williams: M. le Président, je suis complètement à l'aise et j'espère qu'on ne divise pas le temps 50-50. J'espère qu'on peut avoir un échange. Et j'annonce à l'avance qu'effectivement – il y a juste deux articles de cette loi, en plus du troisième, la mise en vigueur – j'ai deux amendements que je vais proposer.

Le Président (M. Pinard): Alors, on va vous remettre, M. le ministre, à ce moment-ci, immédiatement copie des amendements.

M. Williams: Non... O.K. Allons-y. Mais peut-être qu'on peut commencer avec mes questions?

Le Président (M. Pinard): Et, pendant que vous allez discuter ensemble, je vais me permettre de regarder les amendements pour voir s'ils sont conformes en tous points à notre règlement.

M. Williams: Ah bon! O.K. M. le Président, on peut commencer sur les questions?

Le Président (M. Pinard): Oui, allez. Alors, M. le ministre, si vous voulez répondre aux interrogations du...

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Je suggérerais peut-être qu'on y aille dans l'ordre sur les quatre points. Le premier, c'est sur la nature de l'urgence. Ensuite, si je comprends bien, pourquoi a-t-on besoin de cinq ans éventuellement en ce qui regarde... Bon, ensuite, la question de l'harmonisation aussi, qui était liée avec le fédéral, notamment, et enfin les comptes recevables.

Concernant l'urgence, bon, je pense que le député de Nelligan reconnaît effectivement que la situation que j'ai décrite en présentant le projet de loi, je pense, justifiait une certaine urgence. Maintenant, ce qu'il se demande, c'est: Est-ce que c'est le ministre qui a provoqué l'urgence par peut-être certains retards qui auraient pu être occasionnés, je ne sais pas, par des travaux qui auraient pu être plus longs que prévu, etc.? Je dois tout d'abord rappeler que ce genre de projets de loi là, si je réfère, par exemple, au projet de loi n° 81, avec les 300 et quelques articles et 200 pages, ce sont des projets de loi qui sont présentés à chaque année, qui font suite au discours du budget et qui traduisent dans les dispositions législatives et, plus tard, réglementaires les décisions qui avaient été annoncées au discours du budget. Il s'agit d'un exercice relativement compliqué, comme on le voit, de par la facture du projet de loi en question qui a été présenté aujourd'hui.

Cette année, nous avons apporté à la préparation de ce projet de loi là, je dirais, une attention encore plus grande que dans les années précédentes parce que, à l'invitation même de la commission du budget et de l'administration et des députés des deux côtés de la Chambre, on nous a demandé d'y aller davantage avec soin, encore plus qu'avant. Je pense que le député de Nelligan avait deux préoccupations: premièrement, qu'il y ait le moins d'amendements possible et, deuxièmement, qu'on arrive peut-être avec des factures plus simples dans le contenu des projets de loi. En tout cas. Ceci a fait en sorte, effectivement, qu'on fasse notre travail de la façon habituelle, en escomptant pouvoir certainement déposer le projet de loi cet automne et peut-être même l'adopter cet automne ou au plus tard le printemps prochain.

(7 h 40)

Cette opération-là, liée à d'autres opérations très importantes, comme vous le savez, M. le Président, au niveau du ministère cette année, tout le programme de lutte contre l'évasion fiscale, le travail au noir, tout le travail qu'on fait au niveau du Centre de perception fiscale, parce que, en travaillant davantage à dénicher les revenus qui sont dus et qui ne sont pas payés, on augmente, à un moment donné, les créances, et donc il faut faire des efforts de ce côté-là également... La question de la loi n° 32 a été également... Dans ses suivis, par exemple, l'élaboration du plan de comparaison des fichiers a effectivement été excessivement exigeante pour le ministère. Alors, toutes ces opérations-là combinées, et si on y ajoute le calendrier assez ambitieux au niveau législatif du gouvernement, bien, ça a créé cette situation où nous étions à la veille de déposer le projet de loi n° 81. Nous avions constaté à ce moment-là l'inéluctable, c'est-à-dire qu'il ne pourrait être adopté, dans les circonstances, qu'au printemps prochain. Ce qui, en soi, n'est pas quelque chose d'inhabituel. Ça se rencontre souventefois dans les années antérieures.

Mais il y avait à l'intérieur du projet de loi une disposition qui, sur le plan du principe, nous posait un problème si on l'adoptait rien qu'au printemps prochain. Le délai de trois ans fait en sorte qu'il y aurait eu pour les créanciers actuels des droits acquis, d'une certaine façon. Les créances auraient été périmées à compter du 1er janvier. Pour pouvoir respecter les dispositions du discours du budget, on aurait dû, d'une certaine façon, adopter des dispositions qui enlevaient, je dirais, les avantages et les droits qu'auraient acquis les créanciers à partir du 1er janvier, ce qui nous apparaissait être une formule inacceptable sur le plan du principe, je dirais. Alors, on a donc préféré retirer du projet de loi n° 81 – du projet qui est devenu le projet de loi n° 81 – cette disposition relative au délai de trois ans pour plutôt préparer un projet de loi spécial, spécifique sur cette question-là.

J'ai sollicité la collaboration de l'opposition officielle dans le sens qu'on puisse le passer le plus possible selon les règles normales. Ça n'a pas été possible, même si on le souhaitait ardemment, je dirais, tous les deux, le porte-parole de l'opposition et moi-même. C'est sûr que, dans les fins de sessions, il y a toujours des arbitrages entre les leaders, qui sont corrects, c'est ainsi qu'est la vie. Alors, on s'est retrouvé dans cette situation où on a dû inclure, à ce moment-là, le projet de loi à l'intérieur de la motion de suspension des règles. Alors, ce que je veux dire par là...

M. Williams: M. le ministre...

M. Bertrand (Portneuf): Ce que je veux dire par là, c'est que je puis assurer le député de Nelligan, porte-parole de l'opposition officielle, qu'on a fait tout ce qu'il apparaissait raisonnable de faire dans les circonstances pour produire les pièces législatives à temps, mais le contexte a fait en sorte que ça n'a pas été possible.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Bon, le «deadline» pour ça a commencé le 1er janvier 1994. Et, selon mon information, quand nous avons discuté de ce projet de loi n° 91, à ce temps-là, le ministre du Revenu a plaidé contre le concept de trois ans de perception.

Avec ça, je m'excuse, M. le ministre, je n'accepte pas les excuses comme ça. Je présume qu'il y a un département qui suit les affaires comme ça, une direction; je présume qu'il y a des discussions. J'espère, comme payeur de taxes ici, qu'il y a du monde qui suit les dossiers. Et je trouve ça inacceptable, avec toutes les excuses, et là, de se cacher en arrière d'une session intensive. Non.

Si vous voulez parler d'une autre discussion – et c'est vous qui avez commencé ça – c'est complètement inacceptable. La première idée que j'ai entendue pour ajouter ça au projet de loi n° 42, qui a actuellement un titre d'harmonisation avec le Code civil... c'est une loi qui met en vigueur exactement le contraire, la désharmonisation.

Avec ça, M. le Président, le point le plus important, parce que je pense que tout le monde sait que ce n'est pas une façon de passer les lois, d'arriver à la toute dernière minute, de déposer... Ce n'est pas l'opposition qui a appelé le bâillon, il a déposé le matin, le bâillon était appelé la même journée. Moi, j'étais complètement étonné de ça.

Mais, pour le 300 000 000 $... Parce que, quand j'ai parlé, et dans les notes que j'ai reçues, le ministre a parlé de plusieurs centaines de millions de dollars. Dans nos discussions privées, j'ai appris, quelquefois, 300 000 000 $. Avec ça, je pense qu'on ne fait pas un débat de chiffes; 300 000 000 $, quand ce gouvernement est en train de couper partout, de fermer nos hôpitaux. Là, nous avons passé une soirée de bâillon. Dans les autres lois, on frappe les étudiants, on frappe les femmes chefs de famille monoparentale, on frappe partout. Je voudrais savoir c'est quoi, ces créances, c'est quoi, ce 300 000 000 $. Expliquez-nous ça comme il faut, s'il vous plaît, avec les chiffres, avec les données, avec les totaux et, j'espère, avec les documents que vous pouvez déposer, M. le ministre, et avec les dates d'échéance. Si vous pouvez me dire en privé qu'il y a 300 000 000 $ en risque, en péril maintenant et que vous avez besoin de ce projet de loi, je présume que vous avez un document, une analyse qui explique ça comme il faut, qui montre quels sont les contribuables qui n'ont pas payé, c'est quoi, les créances.

Et l'autre chose que je voudrais bel et bien comprendre, c'est si c'est 300 000 000 $ par année. Est-ce que c'est 300 000 000 $ qui sont juste en arrière à cause des trois ans ou est-ce que le 300 000 000 $ va continuer? Et je voudrais vraiment avoir une explication. Pourquoi, après trois ans, ça reste sur la table, selon les mots du ministre, 300 000 000 $ de sommes dues au gouvernement? Si ce sont vraiment les sommes dues, pourquoi ne les avez-vous pas collectées? Est-ce qu'il y a des bonnes raisons? Est-ce que c'est parce que vous n'avez pas fait votre travail ou est-ce que vous avez fait votre travail et que ça n'a pas marché? Et, si c'est vrai que ça n'a pas marché, pourquoi vous pensez qu'avec un autre deux ans vous allez avoir cet argent? Parce que, comme le Protecteur du citoyen l'a dit, si vous êtes en faillite, si vous n'avez pas d'argent, si vos poches sont vides, le fisc peut frapper deux, trois, quatre fois. Il peut envoyer des lettres de harcèlement, il peut vous menacer de n'importe quelle chose. Mais, si je n'ai pas d'argent, je ne peux pas payer. Avec ça, je pense que c'était le noyau de notre discussion ce matin, M. le Président. On doit comprendre le 300 000 000 $, c'est qui, c'est quoi et pourquoi le gouvernement n'a pas collecté ça pendant les trois ans prescrits par la loi.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, sur la question du 300 000 000 $, juste une clarification. J'espère qu'on s'en souviendra, le député de Nelligan dit que je lui ai dit en privé 300 000 000 $ et que j'ai parlé de quelques centaines de millions dans la présentation du projet de loi tout à l'heure. J'ai aussi mentionné, lors du dépôt du projet de loi, effectivement, 300 000 000 $. Ça a été dit publiquement, ce n'est pas un secret. Notre estimé, c'est effectivement 300 000 000 $, actuellement. Alors, ce 300 000 000 $ là, c'est, dans le total des créances qui sont des comptes à recevoir du ministère du Revenu du Québec, la partie, effectivement, qui serait échue, donc relativement à des créances de plus de trois ans à partir du premier janvier prochain. Et ce montant-là est même dégrossi des provisions pour mauvaises créances qui sont applicables, justement, à nos comptes à recevoir.

M. Williams: Ils sont tous échus le premier janvier 1997?

M. Bertrand (Portneuf): Le 300 000 000 $, oui.

M. Williams: Tous, 100 %?

(7 h 50)

M. Bertrand (Portneuf): Oui. Et c'est pour ça qu'il est important d'adopter la disposition contenue au projet de loi n° 91. Maintenant, je ne voudrais pas que le député conclue de l'existence de ces 300 000 000 $ que le ministère ne fait pas tous les efforts nécessaires pour récupérer les montants. Je voudrais tout simplement vous mettre au fait que, en 1993-1994, les recettes perçues étaient de l'ordre de 475 000 000 $, en 1994-1995, 550 000 000 $, en 1995-1996, on atteint 645 000 000 $, et nous avons un objectif de 650 000 000 $ pour la présente année. Donc, on voit que les efforts du ministère du Revenu en ce qui regarde la perception font en sorte qu'un montant de plus en plus élevé soit effectivement perçu à chaque année relativement à ces comptes à recevoir.

M. Williams: Merci pour la partie de réponse. Je voudrais clarifier ça comme il faut. Est-ce que j'ai bien compris? Depuis le 1er janvier 1994, nous avons eu un compte recevable de 300 000 000 $ dans ces cas-là? Parce que vous avez dit que 100 % de ces 300 000 000 $ sont échus à partir du 1er janvier. Avec ça, est-ce que nous avons transféré ce fardeau une année après l'autre pour les derniers 36 mois? Et, depuis ce temps-là, M. le ministre, si c'est vrai... Je ne sais pas si le ministre écoute. Je pense qu'il écoute le sous-ministre. Je comprends, il cherche la réponse. J'ai une autre question. Voulez-vous répondre à ma première question?

M. Bertrand (Portneuf): Bien, comme je disais tout à l'heure, les 300 000 000 $ sont les montants qui auraient, en date du 1er janvier 1997, plus de trois années d'âge, si vous voulez. Alors, ça peut être des créances qui ont quatre, qui ont cinq ans à ce moment-là et qui deviendraient périmées si tant est qu'on n'adopte pas la loi.

M. Williams: À cause qu'avant 1994 il n'y avait pas de délai...

M. Bertrand (Portneuf): Exact.

M. Williams: ...comme ça existe à Ottawa maintenant, et qu'on va discuter plus tard? Mais, avec ça, c'est la totalité jusqu'en 1994, avant le Code civil. O.K. Maintenant que nous avons établi un peu le 300 000 000 $, je voudrais savoir un peu plus c'est quoi, c'est qui, c'est quels types de créances. Qu'est-ce que vous avez fait pendant ces trois ans? Une somme de 300 000 000 $, quand nous sommes en train de couper partout et de taxer partout, là, et c'est ça que vous êtes en train de faire comme gouvernement, 300 000 000 $, le président est d'accord avec moi, c'est de l'argent. Je pense que le président est 100 % d'accord avec moi. Je voudrais savoir ce que vous avez fait. Je voudrais avoir, pas juste les bons mots, je voudrais savoir quels départements, quelles directions suivent ce sujet. Qu'est-ce qu'ils font concrètement? Donnez-moi les gestes concrets; 300 000 000 $ ont flotté pendant trois ans. Quels départements suivent ça et qu'est-ce qu'ils font?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, la question du député de Nelligan me surprend un peu. Lui qui suit de si près les dossiers du ministère du Revenu devrait savoir qu'il y a eu création du Centre de perception fiscale, une unité autonome dont la vocation est justement d'aller récupérer ce qui est dû au niveau des comptes à recevoir, qu'il y a eu création, donc, de cette unité autonome de services, et le projet de loi n° 29, en juin 1996, est venu créer le fonds de perception qui devient un outil additionnel nous permettant d'être plus efficaces. Cette année, de mémoire, il y a des argents additionnels qui ont été consentis également, en termes de ressources humaines, au Centre de perception fiscale pour nous permettre de récupérer davantage de ce qui nous est dû, ce qui apparaît tout à fait normal. Comme je vous disais tout à l'heure, à partir du moment où on intensifie les efforts de lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir, ça implique une pression additionnelle sur le volume de comptes à recevoir, et donc on doit consentir davantage d'efforts.

Maintenant, j'aimerais compléter...

M. Williams: ...de perception. Qui est en charge de ça?

M. Bertrand (Portneuf): ...si vous permettez, la réponse en indiquant que, quand on fait l'analyse de la distribution des créances par strates monétaires, par exemple de 0 $ à 1 000 $, de 1 000 $ à 5 000 $, on constate un nombre considérable de créances chez les 0 $ à 1 000 $, donc un nombre considérable de petites créances. Il y en a pour 310 000, grosso modo, tout près de 311 000.

M. Williams: Combien?

M. Bertrand (Portneuf): Il y en a 310 741, pour être très précis, et il s'agit toujours des débiteurs dont l'âge du dossier est de plus de trois ans. Dans les 1 000 $ à 5 000 $, on en compte 39 000, tout près de 40 000 – 39 925 – les 5 000 $ à 100 000 $, 12 000; et les plus de 100 000 $, 480. On voit donc que le gros du volume est dans les strates monétaires inférieures à 5 000 $, 5 000 $ et moins, et ce sont des strates sur lesquelles nous avons entrepris des efforts particuliers via, notamment, je crois, de mémoire, le centre de Laval, où on a des interventions par des moyens légers mais néanmoins efficaces, téléphoniques, auprès de nos débiteurs, à l'intérieur de ces strates-là, qui comptent quand même pour des montants importants. Quand on parle de 310 000 à, disons, 500 $ en moyenne, supposons, ça fait quand même des montants importants.

M. Williams: Qui est en charge du Centre de perception fiscale chez vous, M. le ministre?

M. Bertrand (Portneuf): Pardon?

M. Williams: Qui est en charge du Centre de perception?

M. Bertrand (Portneuf): C'est M. Tessier, que je vous ai présenté tout à l'heure, qui agit comme directeur général du Centre.

M. Williams: Est-ce que M. Tessier vous a rencontré pendant l'année? Est-ce qu'il a dit qu'il y a un grave problème et que vous aviez besoin d'agir, que vous aviez besoin de trouver une autre façon de «collectionner» assez d'argent? Est-ce que, suite au discours du budget, le 9 mai, M. Tessier vous a rencontré et a dit: Effectivement, nous avons un problème et on doit le faire d'une autre façon? Alors, 300 000 000 $, c'est beaucoup d'argent. Il me semble que, si vous aviez vraiment une stratégie, comme vous avez essayé de nous en convaincre, vous allez avoir un département qui veut aller à la personne en charge... C'est vous ou, peut-être, ce n'est pas vous. Mais, si c'était vous, M. Tessier, je présume, vous le rencontrez et vous dites: Nous avons un problème, ça ne marche pas, et voilà la stratégie qu'on peut faire pour corriger ça. Est-ce qu'il l'a rencontré? Et pourquoi vous n'avez pas commencé à corriger ce problème avant le 17 décembre?

M. Bertrand (Portneuf): En ce qui concerne M. Tessier, je vous signale qu'il est arrivé tout récemment. Son prédécesseur, M. Cayer, a pris, je crois, une préretraite récemment. J'ai eu l'occasion effectivement de rencontrer autant M. Cayer que M. Tessier, parce que les opérations du Centre de perception fiscale constituent une des préoccupations, je dirais, un des secteurs importants pour le ministère.

Je vous rappelle que, le printemps dernier, à l'occasion de la commission du budget et de l'administration, nous avons exposé quel était le plan de travail du Centre de perception fiscale pour la prochaine année. Ceci faisait suite, bien sûr, aux réflexions habituelles d'un ministère et de son ministre à l'égard de la planification de la présente année financière. Alors, le plan est en application actuellement, et bien sûr on en suit la progression. Et je peux vous dire qu'à l'heure actuelle les quelque 650 000 000 $ que nous espérons récupérer pourront être rencontrés conformément à notre planification.

M. Williams: Vous avez, dans les autres commissions, M. le ministre délégué, souvent sorti des chiffres pas mal exacts, sur combien ça coûte ou combien chaque percepteur peut collecter. Juste cette semaine, quand vous êtes arrivé avec une trentaine de millions de dollars dans les crédits supplémentaires, vous avez parlé des chiffres de ça. Je voudrais savoir, chez vous, quand votre département essaie de chercher 500 $ après trois ans – parce que vous avez dit qu'il y a plus que 300 000 cas de 500 $ à 1 000 $, si j'ai bien compris les chiffres – combien ça vous coûte, combien ça coûte à l'État pour recouvrer ces 500 $? Je présume que, parce que vous avez des ratios dans tous les autres départements, vous avez ce ratio aussi. Combien ça coûte pour collecter 500 $ après trois ans?

M. Bertrand (Portneuf): La question du député de Nelligan porte sur une partie de nos opérations, celle où on s'intéresse davantage aux strates monétaires inférieures. Je dois dire que les efforts... Je n'ai pas actuellement sous la main, ici, ce matin, des renseignements, je dirais, par strates sur le rendement des interventions que nous faisons. Ça me fera plaisir, si tant est que ça puisse être rendu disponible facilement et rapidement, de transmettre ces informations-là au porte-parole de l'opposition officielle.

Ce que je dirais, c'est que les strates monétaires moins élevées, les moins de 5 000 $, ont effectivement fait au cours des dernières années – et je ne parle pas rien que des deux dernières années, depuis longtemps – l'objet d'une attention, je dirais, peut-être moindre que les strates plus élevées, où, étant donné l'importance des montants en cause, dossier par dossier, la perspective de perte éventuellement pouvant être importante, on avait tendance à s'occuper davantage de ceux-là.

(8 heures)

Maintenant, la centrale téléphonique que nous allons mettre en opération dès le début de l'année, une fois qu'on aura réglé les questions de système téléphonique, d'embauche et de localisation, va nous permettre d'agir, nous le pensons, très efficacement dans les strates inférieures pour pas mal moins cher aussi, puisqu'on y va avec des mesures, à ce moment-là, plus légères, c'est-à-dire en privilégiant notamment le contact téléphonique.

M. Williams: Merci. J'ai de la misère à vous croire actuellement, pas sur la bonne foi, là, mais juste: Est-ce que c'est efficace? Est-ce que ça peut marcher? Vous êtes arrivé avec un projet de loi à la toute dernière minute. Nous avons bel et bien établi ce fait. Vous avez bâillonné le Parlement et ce matin, après une longue soirée, vous avez dit qu'il y avait une grande partie de ce projet de loi...

C'est 310 000 créances, maximum de 1 000 $, moyenne de 500 $, si j'ai bien compris. Et vous n'avez pas le chiffre, vous n'avez pas le chiffre le plus substantiel qui touche ce projet de loi. Parce qu'il me semble que, peut-être, avant de procéder avec un prolongement de trois ans, on doit vérifier si effectivement c'est rentable comme stratégie après, parce que ce n'est pas juste trois ans. Selon l'information que j'ai reçue, encore une fois, juste avec mes questions ce matin, les créances datent de trois ans et plus, si j'ai bien compris. Et, avec ça, ça peut être une créance de 500 $ qui date de cinq ans. Je présume, parce que je connais l'efficacité du ministère, que vous avez travaillé pour chercher ce 500 $.

J'ai de la misère à vous croire que, un, vous ne savez pas combien ça coûte. Et j'ai de la misère à croire aussi que ça va être actuellement quelque chose de rentable, parce que ça coûte cher de chercher de l'argent, et je comprends la frustration de temps en temps de tout le monde qui essaie d'être équitable avec tout le monde, je comprends ça. Mais, selon l'information que vous me donnez, sans les faits, sans les chiffres concrets, vous avez dit 300 000 créances, moyenne de 500 $, datées de plus de trois ans. Comment je peux croire ce matin, comment les contribuables peuvent croire que, si je vous donne, si le Parlement vous donne un autre deux ans, comment on peut croire que ça va être rentable? Je présume qu'il y a une analyse – et pas demain, je voudrais ça maintenant.

Je pense que j'ai le droit, comme parlementaire, de savoir: Est-ce que le ministre a étudié ce projet de loi? Est-ce que le ministre a étudié les coûts de ce projet de loi? Est-ce que le ministre a demandé un avis au ministère de la Justice? Est-ce que le ministre a demandé l'avis à quelqu'un ou est-ce qu'il y a juste décidé, non, il veut avoir ce droit de continuer pour deux ans de plus sans avoir une analyse? Et j'espère que je vais avoir une réponse claire, concrète avec les chiffres et les détails qui disent effectivement si c'est rentable de continuer à harceler quelqu'un pour 500 $ pour trois, quatre, cinq, six ans.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je pense que le député de Nelligan cherche la bête noire. Tu sais, il pose des questions bien, bien pointues. Il va s'imaginer, parce que, éventuellement, on veut avoir le souci de lui donner la bonne information, la donnée exacte par rapport à ce qu'il demande et qu'il ne l'a immédiatement, là, qu'on n'a pas en main ce qu'il faut pour nous amener à prendre nos décisions au niveau de la ventilation des efforts dans la perception. Je pense que c'est un peu exagéré, là.

Globalement, il en coûte 0,065 $ actuellement par dollar perçu pour l'ensemble, O.K.

M. Williams: Pas pour les petits cas.

M. Bertrand (Portneuf): Nous estimons que, si nous devions mettre le même genre d'effort ou de ressource qu'on met sur les gros comptes, si vous me permettez l'expression, on ne pourrait probablement pas atteindre ce niveau de performance là. Il faut avoir, je dirais, des outils plus modernes, plus adaptés à la perception de petits comptes. Et c'est la raison pour laquelle nous mettons en place tout un système de perception via la téléphonie, avec des ressources appropriées sur le plan également de... suite aux embauches que nous faisons, de façon à nous permettre d'être efficace également dans ce secteur-là. Mais, globalement, ce qu'on va chercher à atteindre comme performance dans les petits comptes, c'est le même niveau, 0,062 $ à 0,065 $ par dollar perçu. C'est notre objectif.

M. Williams: Et j'espère que plus tard, au moins, je vais avoir les chiffres. Mais je pense que le secrétaire a pris note que le ministre a offert de nous fournir ces chiffres plus tard.

M. le Président, je présume que le fisc connaît bien ces 310 000 créances. Ce n'est pas les chiffres, ce n'est pas juste un numéro, c'est M. et Mme Tout-le-Monde, c'est des particuliers et c'est des corporations. Je voudrais avoir un portrait un peu plus clair de qui sont ces personnes. Là, je ne cherche pas juste à embarrasser le ministre. Franchement, je pense qu'il a fait ça lui-même avec le dépôt de ce projet de loi et le bâillon. Je cherche l'information pour les contribuables. Je voudrais connaître plus qui sont les 310 000 créances. C'est quoi, l'état de leur situation? Quel pourcentage? Maintenant, je ne demande pas un chiffre exact, donnez-moi juste un pourcentage. Combien sont en faillite? Combien de ces créances veulent payer les sommes dues, mais ne sont pas capables? Je présume, j'espère que le ministre ou le ministère a les documents comme ça. On doit être humain. Effectivement, on peut se cacher en arrière d'une loi du revenu et dire: Mon rôle, c'est de collecter les sommes dues à l'État. C'est correct, mais on doit être humain aussi.

Je voudrais avoir, M. le ministre – et j'ai demandé ça plusieurs fois ce matin – un portrait de qui sont les créances et pourquoi ils ne payent pas. Je présume que vous avez une réponse à cette question. Et ce n'est pas tout le monde qui ne veut pas payer, je présume qu'une grande partie ne sont pas capables de payer. Je voudrais savoir le pourcentage de ça, un portrait de ces créances de 300 000 000 $.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, j'ai fait référence effectivement, dans mon intervention en Chambre tout à l'heure, au fait que nous cherchons justement à adapter, je dirais, notre approche de perception en fonction de la caractéristique des différents comptes qui sont devant nous. Le fait, par exemple, de nous donner les outils pour travailler sur les strates monétaires moins élevées est un exemple de ces efforts-là que nous faisons. Alors, c'est notre intention très certainement de récupérer la plus grande partie des montants – là, je parle du 300 000 000 $ – qui nous échapperaient à défaut d'adopter la loi en question.

J'ai donné une ventilation tout à l'heure de ces créances-là par strates monétaires. D'autres ventilations pourraient être préparées au bénéfice de l'opposition officielle. Bien sûr qu'on ne peut pas a priori imaginer toutes les demandes que pourrait faire l'opposition en termes de ventilation de ces montants-là. J'en prends note et je transmettrai l'information appropriée aux députés dans les plus brefs délais.

M. le Président, j'ai un problème au niveau de la procédure, là. Le député nous a proposé, a mis sur la table deux projets d'amendements. Est-ce qu'on va avoir le temps un peu d'entendre le député sur ces projets de façon à ce que je puisse en saisir la portée et éventuellement indiquer si le gouvernement est d'accord ou pas avec ces projets d'amendements là? Je suis juste préoccupé pour éventuellement, si on a la possibilité de bonifier le projet de loi, qu'on ait le temps de le faire.

M. Williams: Effectivement, j'ai plein d'autres questions et je tiens compte de toutes les offres d'informations que le ministre a données et j'espère, malgré que ça va être après le fait, que je vais avoir toute l'information.

And just to be perfectly clear, because we're all very tired after a long night of being at closure, I'm asking for the information about these debts of $ 300 000 000. I want to know who they are, what they are, and why they haven't paid. I think it is a very legitimate question. I'm not playing any games here at all. I'm repeating in English just to make sure I'm comfortable, Mr. Minister, that I've expressed myself.

We have to be absolutely clear that we are treating people fairly, and I think that, before this is bill passed, it would have been more appropriate to have all the information of who these people are, why they're not paying, and maybe there's a better way of dealing with this. I accept your answer at this point to get the information later on.

M. le Président, j'ai proposé deux amendements que j'ai écrits à cause de...

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi...

M. Williams: Mais je vais juste plaider ça officieusement, là.

Le Président (M. Pinard): Mais est-ce qu'on peut d'abord régler l'article 1? Parce que vos amendements portent sur l'article 2.

M. Williams: Oui.

(8 h 10)

Le Président (M. Pinard): Alors, si l'article 1 vous convient ou si vous décidez de l'adopter sur division, ça sera fait, et, ensuite de ça, on passera à l'article 2, parce que je veux vraiment vous entendre sur les amendements que vous avez apportés à l'article 2.

M. Williams: Je pense que ça va être bon, si tu veux faire... On essaie de s'adapter avec le bâillon. On peut faire un appel au vote de l'article 1 tout de suite et on peut continuer notre discussion.

Le Président (M. Pinard): O.K. Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Williams: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. D'accord. Alors, l'article 2.

M. Williams: Avec ça, est-ce qu'on peut continuer dans la façon informelle avant de...

Le Président (M. Pinard): Oui.

M. Williams: Parce que le temps passe vite.

Le Président (M. Pinard): Écoutez, vous nous avez déposé deux amendements, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Laissez-moi juste expliquer.

Le Président (M. Pinard): Oui, j'aimerais ça, parce qu'on ne peut pas les retenir tous les deux.

M. Williams: O.K. J'ai écrit ça et je les ai donnés à tous les membres de cette Assemblée avec un esprit de coopération que malheureusement nous n'avons pas eu par ce gouvernement, avec le bâillon. Mais, en tout cas...

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je regrette, là, mais je m'inscris en faux contre les avancées du député de Nelligan. J'ai déjà indiqué que nous avions sollicité la collaboration de l'opposition officielle dans les circonstances que j'ai expliquées tout à l'heure pour pouvoir soit attacher la modification législative au projet de loi n° 42, qui, selon notre prétention, aurait été acceptable, ou bien effectivement à l'aide d'un projet spécial, mais néanmoins, à l'intérieur des procédures normalement prévues, avoir la collaboration de l'opposition officielle pour procéder de cette façon, ce qui nous aurait donné tout le temps nécessaire pour répondre aux questions de l'opposition officielle sur ces questions-là.

On n'a malheureusement pas eu cette collaboration, et d'ailleurs, peut-être un peu malgré la bonne volonté du député de Nelligan là-dedans, pour des raisons qui certainement lui échappent également tout autant qu'à moi, nous avons dû prendre une disposition – à l'intérieur d'une motion de suspension des règles, qui est une motion dûment prévue à notre règlement – nous avons dû procéder par cette voie. J'aimerais ça que le député de Nelligan en revienne un peu, là, puis qu'on s'intéresse davantage à ses amendements plutôt qu'à constamment des commentaires inappropriés.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre et M. le député de Nelligan, moi, je vous mentionne, si vous me permettez, qu'il nous reste 13 minutes et je dois obligatoirement vous entendre sur les amendements, parce que la décision finale d'accepter les amendements ou de les rejeter m'appartient, et là j'ai besoin de vous entendre.

M. Williams: Oui. Juste pour clarifier le fait, ce n'est pas nous autres qui...

Le Président (M. Pinard): D'accord. Allons-y donc immédiatement sur les amendements que vous nous avez proposés.

M. Williams: Oui. L'esprit des deux amendements, je vais l'expliquer, parce que, peut-être avec les juristes ici, si ce n'est pas 100 % clair, on peut nettoyer le langage légal. Mais, quand j'ai dit: Le délai introduit à l'article ne s'applique qu'aux – je change ces mots-là – situations en cours, l'esprit de ma proposition était que, s'il y a un problème à cause du changement... Avant le Code civil, c'était illimité, selon mon information; maintenant, on arrive avec trois ans. C'est toute une adaptation. On comprend ça. Il y a 300 000 000 $ sur la table. Je ne suis pas sûr de ça non plus, mais j'ai pensé que, avec l'esprit du législateur, à l'époque, unanime d'avoir une période de prescription de trois ans, on peut... L'esprit de mon intervention, M. le Président, c'est une exception. Avec ça, on prolonge ça pour deux ans cette fois-là pour donner une chance au fisc de récupérer ces fonds, mais, après ça, on retourne à des règles généralisées dans le Code civil. C'est l'esprit de l'intervention, et j'espère que c'est clair dans mon amendement. Veux-tu que j'explique le deuxième en même temps pour procéder plus vite?

Le Président (M. Pinard): Non. On va s'en tenir à celui-là.

M. Williams: Non? O.K. Excusez. Avec ça, M. le ministre, est-ce que vous avez bien saisi que l'idée en arrière de ça, c'est qu'on vous donne le deux ans que vous voulez avoir, mais juste temporairement, juste une fois?

The delay is a two-year temporary thing; we return back to the three years of the Civil Code after that. That's the spirit of the amendment.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, est-ce qu'on en est à la recevabilité? Vous avez statué sur la recevabilité de l'amendement?

Le Président (M. Pinard): Bien, vous savez très bien qu'actuellement, sur la recevabilité, il faut que je m'en tienne à mon règlement et il faut que je m'en tienne également à la jurisprudence, et ça a une implication financière pour le gouvernement.

M. Bertrand (Portneuf): Oui.

Le Président (M. Pinard): Donc, à ce moment-ci, si vous acceptez de retenir l'amendement, l'amendement n'est plus la propriété du député de Nelligan, mais l'amendement devient votre amendement, parce que seulement le ministre a droit de nous apporter un amendement avec incidence financière. Et, là-dessus, je pourrais vous citer de la jurisprudence et également les articles de notre règlement.

M. Bertrand (Portneuf): Mais c'est juste au niveau de la procédure, pour être sûr de...

Le Président (M. Pinard): O.K.?

M. Bertrand (Portneuf): O.K.

Le Président (M. Pinard): Et l'autre amendement, c'est exactement le même effet, il y a une incidence financière. Les deux amendements, au premier coup d'oeil, sont rejetables par la présidence. Maintenant, si vous en faites votre propriété, à ce moment-là les règles du jeu changent. Alors...

M. Bertrand (Portneuf): Bien, je vous indique...

Le Président (M. Pinard): ...si vous avez besoin de quelques instants pour en discuter avec vos proches, pas de problème, nous n'avons pas de problème.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, je vous indique tout de suite, M. le Président, qu'en ce qui regarde le projet d'amendement qui a été proposé par le député de Nelligan, intitulé «L'article 2: remplacer par "Le délai introduit à l'article 1 ne s'applique pas qu'aux situations en cours", il ne m'apparaît pas que je vais le prendre à mon compte, notamment parce que le délai de cinq ans, à ce moment-là, ne s'appliquerait pas aux créances à venir, ce qui nous apparaît inacceptable, de notre point de vue, parce que nous estimons vraiment que le délai de cinq ans est nécessaire pour nous permettre à la fois de récupérer les montants et de le faire dans des conditions vivables pour les créanciers, qui pourraient, si le délai était différent, était plus court, être dans des situations financières parfois difficiles. Alors, donc, je ne porterai certainement pas à mon compte le projet d'amendement qu'avait soumis le député de Nelligan.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que vous avez bien saisi, M. le député de Nelligan? Moi, ce que j'ai saisi, si vous me permettez, c'est que le débiteur de la créance...

M. Williams: Oui, oui, j'ai bien saisi. Je voudrais juste... J'ai cherché cette information 60 minutes, ce matin. C'est quoi, la différence, pour le ministre, de trois ans à cinq ans? Qu'est qu'il va faire de différent, dans les derniers deux ans, de ce qu'il a fait dans les premiers trois ans?

M. Bertrand (Portneuf): Ça va permettre et au ministère et aux personnes concernées une plus grande flexibilité, je dirais, et plus de réalisme dans la perception. Prenons la situation d'une personne qui se voit cotisée pour un montant x et qui, pour une raison ou pour une autre, pendant un an ou deux ans, se voit dans l'impossibilité de pouvoir rembourser ce dû-là simplement parce qu'elle a perdu son emploi. Elle recouvre son emploi au bout de la troisième année et pourrait être en mesure de commencer à rembourser sur un certain nombre d'années, mais ça serait difficile, avec le délai de trois ans, de pouvoir rembourser la créance en totalité. Alors, ça risquerait de mettre la personne dans une situation financière précaire, difficile.

M. Williams: Avec ça, il rejette mon amendement. J'arrive avec mon deuxième amendement?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président?

Le Président (M. Pinard): Alors, le deuxième amendement, M. le...

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, juste pour compléter. Ou, à défaut, ça obligerait le ministère à initier souvent des procédures qui pourraient être coûteuses, à ce moment-là, de façon à pouvoir garantir la créance. Alors, pour toutes ces raisons, il nous apparaît tout à fait raisonnable de penser à effectivement un délai de cinq ans plutôt que trois ans.

Le Président (M. Pinard): Et, quant au deuxième amendement...

M. Williams: Je voudrais juste plaider ça, et le ministre peut répondre, parce que la même règle, ça marche, là.

Le Président (M. Pinard): Oui, il peut toujours...

M. Williams: Et, avec une des réponses, ce matin, du ministre, je vais changer le libellé que vous avez devant vous, je vais changer le chiffre de 1 000 $ à 500 $. Mais l'idée de ça, M. le ministre, était, un, de protéger M. et Mme Tout-le-Monde, deuxième chose aussi, de dire que... Et malheureusement vous n'avez pas répondu à ma question aujourd'hui. J'attends la réponse plus tard. C'est quoi, les coûts pour collecter pendant trois ans 500 $?

J'ai pensé qu'effectivement, si vous avez besoin de cinq ans... Je ne comprends pas toute votre logique jusqu'à maintenant. Pour les grosses créances, je peux comprendre mieux, mais, pour 500 $, vous traînez, faire les lettres, faire les avis et continuer à contacter, il me semble que ce n'est pas nécessairement rentable. L'esprit de ça, M. le Président, actuellement, était de sauver de l'argent, de respecter les contribuables. Et c'est pourquoi j'ai offert cet amendement à l'article 2.

(8 h 20)

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, est-ce que vous avez une réplique?

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Prenons le cas des créances dans des strates inférieures, disons de 0 à 1 000 $. Étant donné les volumes en cause, 310 741 dossiers, imaginez ce que ça coûterait d'initier des procédures pour protéger notre créance à ce moment-là avec des volumes semblables. Ça n'a pas de bon sens. Il faut pouvoir se donner un petit peu plus de temps de façon à permettre au ministère du Revenu de percevoir l'ensemble des montants dans un délai qui peut-être est un peu plus long, mais qui est un délai qui permet à la fois aux autorités fiscales de s'ajuster à la nature de ces petits comptes là et également à la personne de pouvoir étaler son remboursement sur une longueur de temps plus réaliste compte tenu des moyens de la personne.

M. Williams: Mon deuxième amendement est rejeté.

Le Président (M. Pinard): Bon. Alors, il nous reste maintenant trois, quatre minutes.

Une voix: Quatre minutes.

Le Président (M. Pinard): Alors, l'article 2 est-il adopté?

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

M. Williams: L'article 2?

Le Président (M. Pinard): L'article 2.

M. Williams: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. L'article 3, adopté sur division?

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

M. Williams: Oui.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

M. Williams: J'ai recommandé pendant mon premier discours de changer le titre et de dire: «Loi modifiant de nouveau et à la toute dernière minute la Loi sur le ministère du Revenu», mais je pense que le ministre va rejeter ma proposition aussi.

Le Président (M. Pinard): Alors, j'imagine que c'est adopté sur division.

M. Williams: Sur division.

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que le projet de loi n° 91 est adopté?

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

M. Williams: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Alors, en conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux.

Je tiens à vous remercier, M. le député de Nelligan, M. le ministre et vos collaborateurs, d'avoir été présents. Et nous allons suspendre quelques instants afin de pouvoir reprendre nos activités.

(Suspension de la séance à 8 h 23)

(Reprise à 8 h 24)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le Président de la commission.

M. Pinard (président de la commission plénière): Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, et qu'elle l'a adopté.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de procéder à l'adoption du projet de loi n° 91.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre délégué au Revenu propose l'adoption du projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu. Est-ce qu'il y a des interventions? Alors, le projet de loi n° 91 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Alors, M. le Président, je vous demanderais de procéder à l'adoption du projet de loi n° 77...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon, s'il vous plaît! S'il vous plaît, j'ai attendu, et tout ça, et j'ai demandé le vote...

M. Williams: Non.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...et finalement, ça a été adopté.

M. Williams: Non. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, quand le moment du vote arrive... J'ai pris le temps d'attendre, et tout...

Une voix: Il n'y a pas quorum.

M. Williams: M. le...

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...et ça prend cinq personnes présentes pour demander le vote par appel nominal. Question de règlement, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, lorsque vous avez demandé si la motion était adoptée, il n'y a eu aucune réponse de ce côté-ci, ça n'a été ni positif, ni négatif. Vous ne pouvez donc pas en conclure que l'opposition a voté en faveur, enfin a donné son accord, plutôt. Il n'y a pas eu de vote nominal. Ça prend quand même l'accord de l'opposition. Vous ne pouvez pas conclure que c'est adopté. Il faut qu'on dise de ce côté-ci «adopté» ou «sur division». Rien n'a été dit. Donc, vous ne pouvez pas conclure à ce moment-là, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, quand on pose la question, il y a des gens qui ne répondent pas, ça va. Mais, quand il y a...

Une voix: Bien oui, mais ils ne sont pas ici.

M. Williams: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien oui, ils ne sont pas là, que voulez-vous.

Des voix: Il n'y a pas quorum.

M. Williams: M. le Président...

Des voix: Il n'y a pas quorum.

Une voix: Il n'y a pas quorum non plus.

M. Williams: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous étions en continuité.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le...

M. Bélanger: Par courtoisie, moi, je serais consentant, à ce moment-là, à ce qu'on recommence, qu'on puisse convoquer les députés et qu'on puisse à ce moment-là procéder au vote.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, par consentement, nous pouvons reprendre le vote, et cette fois-ci par appel nominal, si c'est le voeu de... Alors, que l'on appelle les députés.

(8 h 28 – 8 h 41)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît. Veuillez vous asseoir. Alors, pour expliquer brièvement la situation, c'est que, quand j'ai pris la relève, tantôt, je n'ai pas réalisé qu'on était sous une suspension des travaux avant de faire le rapport, et nous avons procédé au rapport sans s'assurer que les partis étaient présents, finalement. C'est le fait qu'il y avait une suspension qui, finalement, m'a un peu... Je ne l'ai pas réalisé comme je prenais la relève. Alors, c'est pour ça que ça justifie qu'on reprenne le vote par appel nominal à la demande des membres de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. L'erreur est humaine, surtout lorsque l'on siège... Et vous avez occupé ce fauteuil pendant de nombreuses heures. À ce moment-là, non seulement l'appel du vote a été compromis comme tel, escamoté, mais également les dispositions de la motion de suspension des règles du leader du gouvernement, particulièrement les éléments que l'on retrouve à la page 4 de sa motion de suspension des règles qui spécifient ce qui suit: «La durée du débat sur l'adoption des projets de loi – là, je saute les autres, je vais à la loi qui nous intéresse – [...] et n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption des projets de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal.»

Je vous soumets très respectueusement, M. le Président, que ce qui a été escamoté, c'est cette étape-là qui est prévue dans la motion de suspension des règles, et il n'y a pas eu de débat comme tel sur l'adoption. Qu'on procède là où l'erreur a été commise et, par la suite, qu'on prenne le vote.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Au niveau de l'adoption, vous vous souviendrez qu'à ce moment-là vous vous êtes levé et vous avez demandé: Est-ce qu'il y a des intervenants? Et, à ce moment-là, vous avez fait le tour et vous avez constaté qu'il n'y avait pas d'intervenant. Donc, à ce moment-là, le débat qui aurait pu se faire ne s'est pas fait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, c'est que, effectivement, je me suis levé, mais c'est là, je crois, que, étant donné qu'il y avait eu une suspension, il aurait été dans les habitudes d'attendre que les deux partis puissent être présents avant de reprendre les travaux, ce qui n'a pas été fait à ce moment-là, justement. Et, comme je l'ai dit, comme je prenais la relève, je n'ai pas réalisé à ce moment-là qu'on était dans une période de suspension des travaux. Alors, en l'occurrence, je permettrais, là, les débats pour ceux qui veulent... Bon, il y a 10 minutes pour M. le ministre, il y aurait 10 minutes pour le groupe parlementaire, cinq pour les indépendants et une réplique de cinq minutes.

Alors, est-ce qu'il y a des intervenants? M. le ministre. Alors, je vous donne la parole pour le temps que vous voulez.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, juste mentionner, M. le Président, effectivement, que ce projet de loi m'apparaît nécessaire pour rétablir à cinq ans le délai de prescription des créances fiscales. Il s'avère nécessaire également, comme j'ai eu l'occasion de l'exprimer précédemment, à des fins d'équité, à des fins, également, d'efficacité, pour nous éviter d'avoir à dépenser inutilement 3 500 000 $, et à l'égard également des créanciers et de l'ensemble de la population. Donc, j'invite cette Chambre à bien vouloir l'adopter.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. M. le député de Nelligan, votre intervention.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président, et merci pour votre décision.

Des voix: Bravo!

M. Williams: Je n'ai jamais été aussi fier du Parti libéral du Québec que je le suis maintenant.

Des voix: Bravo!

M. Williams: Après une soirée complète de bâillon...

Une voix: Une nuit.

M. Williams: Une nuit complète, quatre projets de loi, en principe, sur lesquels le gouvernement était en train de nous bâillonner. Nous avons essayé toute la soirée, et merci beaucoup pour la chance de continuer la bataille pour la population québécoise, pour M. et Mme Tout-le-Monde. Le Parti libéral du Québec a essayé toute la soirée de défendre la population québécoise, M. et Mme Tout-le-Monde qui paient les taxes contre le «juggernaut» de ce gouvernement du Parti québécois.

Une voix: Le quoi?

M. Williams: Le «juggernaut», M. le député. Bulldozer. Nous avons eu quatre projets de loi bâillonnés: 91, que nous avons juste fini, 300 000 000 $ qui étaient oubliés par le ministre délégué au Revenu; 300 000 000 $ des contribuables. Le projet de loi n° 87, le projet de loi n° 85 et le projet de loi n° 84. Ce gouvernement et son bâillon, ce soir et toute la nuit, est en train de frapper les plus démunis: les femmes monoparentales, les étudiants, les commissions scolaires. Il ne «relate» à rien. Nous avons eu un bâillon qui frappe la population québécoise d'un montant de 400 000 000 $. Tout en se cachant pendant la nuit, ils espéraient que la population n'écoute pas. Mais, avec les collègues... Et je voudrais féliciter chaque collègue de ce côté qui a parlé pour la population québécoise.

Des voix: Bravo!

M. Williams: Je trouve ça intéressant que, pendant la soirée, presqu'aucun député d'arrière-ban n'a eu le courage...

Une voix: ...

Des voix: Ah! Ha, ha, ha!

M. Williams: Merci beaucoup pour cette correction. Mais, quand même, il n'y en a pas beaucoup qui se sont levés, qui ont eu le courage de défendre M. et Mme Tout-le-Monde, de défendre les citoyens et citoyennes du Québec. Le dernier projet de loi, n° 91, 300 000 000 $ sur la table, pas un député ne s'est levé et n'a parlé pour le ministre délégué au Revenu. Pas un. Pas un. Ils ont tous honte. C'est 300 000 000 $ sur la table. Quelle grande surprise! Et j'espère que la population nous écoute.

Des voix: Oui.

M. Williams: Le ministre délégué a oublié 300 000 000 $ sur la table. Dans le même temps, il est en train de fouiller dans toutes les poches des Québécois et il est en train de coupler l'information et de mettre la vie privée en danger, de mettre la confidentialité en danger. Lui a oublié 300 000 000 $. C'est bien intéressant: nous avons un ministre de la Justice qui a admis dans cette salle qu'il ne lisait pas les lois; maintenant, nous avons un ministre délégué au Revenu qui a admis par son comportement qu'il ne lisait pas le budget, parce que cette annonce était dans le budget du 9 mai 1996. Mais je pense qu'il ne l'a pas lu, c'est juste quelqu'un de son département qui a finalement dit: Le 31 décembre arrive, M. le ministre, nous avons besoin de 300 000 000 $. Il a eu besoin d'arriver avec un projet de loi spécial pour corriger ce problème.

Il me semble que c'est clair, M. le Président, que le ministre a dormi sur la «switch»...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: ...comme la députée de Saint-François a dit. C'était tout un téléthon ici ce soir, de 400 000 000 $. Il est en train de prendre 400 000 000 $ dans les poches des Québécois. M. le Président, regardez le bilan de ce gouvernement: nous avons vu qu'ils perdaient 200 emplois par jour; 200 personnes de moins qui travaillent ce matin qu'hier soir, 200 jobs. Mais juste ce chiffre-là est assez dégueulasse. Il y a un autre chiffre. Dans la même période de 24 heures, ils ont augmenté les taxes de près de 300 000 000 $; perte de 200 jobs, augmentation de taxes: 300 000 000 $. Chaque jour, ce gouvernement est en train de fouiller dans les poches des Québécois.

(8 h 50)

Mr. Speaker, it's been a long night, and I said when I started off: I'm very proud of the Liberal Party because we did attempt to defend the citizens of Québec in a way that I think has made all of our constituents very proud. When they look at the behavior of the Liberal Party of Québec in this House during the last 24 hours, and they look at the péquistes, I'm sure everybody is going to say clearly they have confidence in the people that defend their rights, their services and their concerns. And when they look at what's happening on the other side, all this Government is interested in doing, is collecting taxes. I believe that there is a special committee within the bunker that wakes up every morning and says: How can we tax people more? How can we get deeper in the pockets of Quebeckers? That's what this Government is all about. And that is what we have attempted to show the people of Québec, that they deserve much better than they're getting from this Government.

J'ai mentionné, M. le Président, que nous avons commencé la soirée avec un projet de loi qui frappe les plus démunis de notre société, avec une facture de 40 000 000 $. Et je voudrais féliciter les interventions de tous les députés, mais particulièrement la députée de Saint-François, pendant le débat, parce que je pense qu'il n'y a aucun intérêt, de l'autre côté de la salle, pour ces personnes-là. Mais nous avons bel et bien défendu cette perspective.

L'autre projet de loi, qui touchait l'éducation, les étudiants, quand le gouvernement est en train de... Je m'excuse, je suis un peu fatigué, c'est beaucoup plus que 40 000 000 $, selon mon information.

Mais, par le prochain projet de loi, nous avons décidé de frapper les étudiants. Oui, frapper les étudiants: taxes et chèques, prendre de l'argent des étudiants. Prendre l'argent des étudiants. Pour tous les étudiants qui vous ont supporté la dernière fois, vous allez avoir une grande surprise la prochaine fois. Ils sont tannés de vous. Ils sont complètement tannés du comportement du PQ qui dit une chose avant les élections mais qui fait exactement le contraire après les élections. Les étudiants ne veulent rien savoir de ce double langage de ce Parti québécois. Nous avons vu aussi...

Des voix: ...

M. Williams: Je vois qu'il y a effectivement de l'appui dans les arrière-bans du Parti québécois. M. le Président, il y a aussi un projet... Et je voudrais féliciter le député de Verdun de toutes ses interventions pour ce projet de loi.

Des voix: Bravo!

M. Williams: Finalement, n'oubliez pas le geste qui a été posé par la ministre de l'Éducation, quand elle pratique les politiques de division, les politiques de confrontation. Il y a un problème entre la ministre et la commission scolaire protestante du Grand Montréal, «PSBGM, in English». Il y a une bataille entre elle et la commission scolaire. Elle a décidé de déclarer la guerre à cette commission. Elle est arrivée avec un bâillon pour un projet de loi qui, dans mon opinion, fait de l'expropriation peut-être légalement, peut-être pas légalement, mais l'expropriation d'une école anglophone protestante.

Mr. Speaker, I have to take this opportunity as Quebeckers are listening this morning. When you look at the charade that we saw at the Centaur Theater, what have we seen since? They close our hospitals. PQ closes our hospitals. They are now taking away our schools. They deny the fact that some of our civil servants need and want to speak English to certain people. They don't allow us English signs in hospitals. Mr. Speaker, that is not the way to treat the English-speaking community.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Williams: I particularly commend again all the speakers on this, and I think everyone of them, on this side, spoke. The deputy from Marquette, I think, did an extraordinary job, with his great background in education, to show this is not the way to proceed. You have to respect the individual school commissions. You have to respect them in a way that is much more consistent with their role. It's very interesting that the Minister won't build a school in that area but that she'll come up with a French-language cégep, or at least pretend to come up with one, that is more expensive than what the population wanted.

Voyons donc, ce n'est pas une façon de protéger la langue française, ici. Nous avons eu un modèle que nous avons adopté, dans l'Ouest-de-l'île-de Montréal, mais elle a refusé, elle a carrément rejeté ce que nous avons fait. Et elle a pris comme otage – c'est un mot assez... dans les nouvelles aujourd'hui – la communauté d'expression anglaise, dans le cas du PSBGM, et la communauté d'expression française, dans le cas du cégep francophone.

Je pense, M. le Président, que c'est clair que ce gouvernement ne comprend pas la démocratie, ne comprend pas la bonne façon de gouverner et qu'il doit arrêter le bâillon et qu'il doit respecter la population québécoise d'une façon beaucoup plus efficace et honnête que ce qu'ils ont fait cette nuit. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Il n'y a plus d'autres intervenants. Je vais céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique.


M. Roger Bertrand (réplique)

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. En terminant, j'aimerais tout d'abord féliciter mes collègues d'avoir su endurer avec autant de courage les inepties de l'opposition officielle pendant cette nuit. J'aimerais également convoquer la Chambre à l'adoption de ce projet de loi qui est une autre pièce qui va contribuer à réparer ce que le gouvernement libéral a provoqué comme gâchis pendant et au terme de 10 années de pouvoir. Et, enfin, M. le Président, vous aurez noté que le député de Nelligan était absent à la phase importante de l'adoption du projet de loi pour amorcer...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition, rapidement.

M. Lefebvre: M. le Président, c'est d'autant plus grave que ça vient d'un ancien président, qui n'a pas été là longtemps, mais, il me semble, assez longtemps pour savoir qu'on ne peut pas souligner l'absence d'un député.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, je vous inviterais à poursuivre sans revenir en arrière.

M. Bertrand (Portneuf): Alors, effectivement, M. le Président, donc, a feint d'être prêt au moment où il était temps d'intervenir sur l'adoption du projet de loi. Alors, pour ce qui est de dormir sur le commutateur, il repassera.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, est-il adopté?

Une voix: Vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal. Alors, les gens, vous êtes prêts? Alors, nous allons procéder au vote immédiatement.


Mise aux voix

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé (LaFontaine), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions? M. le leader du gouvernement.

(9 heures)

M. Bélanger: Oui. Je demanderais le consentement pour que les votes du député de Joliette, du député de Vimont et du député d'Abitibi-Ouest soient rajoutés au vote ministériel.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement.

M. Paradis: Compte tenu, M. le Président, qu'il s'agit de deux parlementaires qui ont plus de 20 ans d'expérience en cette Chambre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Ainsi que pour le député de Drummond, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et le député de Drummond. Alors, il y a consentement? Alors, les quatre. Très bien. Alors, M. le secrétaire, pour le résultat du vote.

Le Secrétaire: Pour:53

Contre:26

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi est adopté. Donc, le projet de loi n° 91, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le ministère du Revenu, est adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 31, M. le Président, projet de loi n° 77.


Projet de loi n° 77


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 31 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de la Sécurité publique.

Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 37.1, 37.4, 37.7.1 de l'article 4, et les articles 4.1, 6, 11, 14, 18, 19, 22, 23, 24.1 et 26.

Alors, je vous rappelle que, conformément à l'ordre adopté, la durée maximum de ce débat est de 30 minutes: 10 minutes pour le groupe parlementaire formant le gouvernement; 10 minutes pour le groupe parlementaire formant l'opposition officielle; cinq minutes pour les députés indépendants; cinq minutes de réplique pour celui qui présente le projet de loi.

À l'expiration de ce délai, je vais mettre aux voix, sans appel nominal, les amendements, les articles du projet de loi amendé, les articles du projet de loi n° 77 dont la commission des institutions n'aurait pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission tel qu'amendé.

Alors, je suis prêt à entendre les premiers intervenants. M. le ministre de la Sécurité publique, je vous cède la parole.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Merci, M. le Président. Alors, rapidement, M. le Président, le projet de loi qui est devant nous vise à stabiliser la carte policière au Québec. On sait qu'il confirme, ce projet de loi, donc, que les municipalités de 5 000 habitants et plus devront maintenir les services d'un corps de police; celles de 5 000 et moins, se regrouper au sein de la municipalité régionale de comté, se doter d'un comité de sécurité publique, négocier avec la Sûreté du Québec une entente de services et assurer ainsi, M. le Président, les services policiers pour leur communauté.

Ce faisant, je pense que le projet de loi vise également à atteindre des objectifs d'une plus grande équité entre les divers contribuables du Québec, M. le Président, en matière de coûts des services policiers, et également, en rapprochant les services policiers des élus, faire en sorte que ces services soient davantage proches des besoins de la population, aller dans le sens d'une police qui soit plus communautaire.

M. le Président, je sais qu'on n'a pas le droit en cette salle de souligner des absences, mais il y a une absence qu'on me permettra de souligner: c'est l'absence de vision qui avait procédé à la réforme de M. Ryan – M. le Président, je pense que ça, j'ai le droit, M. le Président, de la souligner – puisqu'on s'était contenté d'envoyer – le gouvernement précédent – une facture concernant les services de police sans d'aucune façon proposer un modèle, une vision, de l'organisation des services policiers au Québec.

Or, le projet de loi qui est devant nous vient corriger ça, vient apporter à la carte policière une stabilité qui était nécessaire. On assistait de plus en plus à une forme de désorganisation des services policiers au Québec. En tout cas, tous les éléments, les ingrédients étaient là pour nous y mener. Alors, M. le Président, je pense que, de ce point de vue là, le projet de loi qui est devant nous est intéressant.

Maintenant, j'ajouterais deux éléments. On a procédé, depuis le printemps dernier, à une vaste consultation. On a également entendu des groupes, et aujourd'hui nous apportons un certain nombre de corrections pour répondre aux demandes que nous avons entendues. Notamment, lors de la tournée, les maires nous ont demandé que le produit des amendes leur soit retourné. Nous avons tenu compte également de certaines représentations dans le cadre du financement de l'IPQ, puisque nous acceptons de phaser sur deux ans l'introduction de la tarification entre les municipalités; la même chose dans le cas de la tarification des propriétés foncières dans les territoires non organisés. Et nous avons également tenu compte de certaines représentations des policiers concernant leurs droits démocratiques, puisqu'il y a également un amendement qui va permettre notamment à ces policiers non seulement de pouvoir faire des activités politiques, mais d'être membres d'un parti politique.

M. le Président, je terminerais en disant ceci: Nous n'avons pu malheureusement, en commission, faire les débats sur chacun de ces amendements. Je sais que, à partir des interpellations de l'opposition, certains de ces amendements vont rencontrer sûrement leurs préoccupations. En tout cas, ils rencontrent pour une part, pas en totalité, les préoccupations des organismes qui sont venus nous voir. Et, dans ce cas-là, M. le Président, je dirais qu'il ne s'agit sûrement pas de procéder à la dernière minute. Depuis le printemps dernier, les orientations du gouvernement sont connues, sont claires. On a fait le tour de tout le Québec. On a tenu des audiences. Et je pense maintenant, M. le Président, que le moment est venu de corriger une situation qui aurait dû l'être dès le départ.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, nos amis d'en face sont plus nombreux, mais malheureux. Malheureux parce que, depuis 20 heures consécutives, ou à peu près, ils ont subi les foudres de l'opposition, M. le Président. Ils ont subi les foudres de la vérité, de la vérité, se contentant béatement, là, d'encaisser. D'encaisser, parce qu'on l'a dit, je l'ai dit, d'autres de mes collègues l'ont dit: le bâillon, M. le Président, oui, il a été imposé techniquement à l'opposition, mais surtout aux ministériels, qui ont honte de défendre leurs ministres et les projets de loi soutenus par leurs ministres, particulièrement celui-ci, le projet de loi n° 77.

Ça prend pas mal d'audace, M. le Président, pour accuser l'ex-ministre Ryan d'avoir manqué de vision. M. le Président, je dis au ministre qui pilote le projet de loi n° 77 qu'il a manqué de transparence, qu'il a manqué à une règle fondamentale lorsqu'on veut procéder à une réforme de cette envergure, avec autant de conséquences que l'on peut prévoir: l'écoute, la consultation, M. le Président. Je ne peux pas dire que le ministre est de mauvaise foi, parce que, si je pouvais le dire, M. le Président, je n'hésiterais pas à le faire. Je le dirais à l'extérieur de la Chambre: je ne peux pas le dire ici, M. le Président.

M. le Président, on a proposé au ministre, en commission parlementaire, d'écouter une dizaine de groupes, tous aussi importants les uns que les autres, des groupes et des experts. À titre d'exemple, Me Jacques Bellemare: refus catégorique. Refus catégorique, et je veux, avant d'aller plus loin, rappeler au leader du gouvernement, qui m'a accusé d'avoir dès le début indiqué qu'il n'y aurait pas de collaboration de la part de l'opposition, c'est carrément faux, et le leader a fait encore une fois ce qu'il a la mauvaise habitude de faire, tout jeune leader qu'il est – mauvais exemple, M. le Président, peut-être du député de Joliette... J'ai indiqué, M. le Président, au moment de mon discours sur le principe, le 3 décembre: Le projet de loi n'a pas de bon sens. Il est contesté par tous ceux et celles qui sont interpellés. Tous les moyens mis à la disposition de l'opposition pour bloquer le projet de loi, on va les utiliser de façon bien correcte et démocratique.

Voilà, M. le Président, et c'est ce qu'on fait, parce que l'opposition est évidemment le porte-parole de tous ceux et celles qui sont interpellés par le projet de loi. Il n'y a pas – et je mets au défi le ministre de me contredire – un seul groupe interpellé, que ce soit la force policière ou des élus municipaux, directement concernés, qui est d'accord avec le projet de loi. Il n'y en a pas. Il n'y en a pas, M. le Président.

En cachette la nuit, pour régler évidemment des vieilles notes – le référendum, 60 000 000 $ – on a besoin d'argent, M. le Président. On a besoin d'argent, et je vais, très rapidement... Je suis bâillonné; j'ai droit à 10 minutes. C'est incroyable, M. le Président. C'est incroyable, sur des projets de loi d'une telle importance, être muselé, devoir me contenter d'une dizaine de minutes pour essayer d'expliquer, pas aux parlementaires d'en face, qui s'en foutent comme de l'an 40, qui n'écoutent pas, qui sont accrochés après leurs ministres... Pas celui-là: le président du Conseil du trésor et le ministre des Finances. C'est ces deux-là qui passent les commandes. Le ministre de la Sécurité publique n'est que l'exécuteur des basses oeuvres des deux autres, M. le Président, rien d'autre.

(9 h 10)

C'est un projet essentiellement soumis à l'attention des parlementaires bâillonnés, écrasés, «bulldozés» pour aller chercher 48 000 000 $: il n'y a rien d'autre là-dedans, M. le Président. Qui le dit? Ceux qui sont interpellés. Et je vais en quelques minutes essayer d'en citer quelques-uns. Le chef de police de la Communauté urbaine de Montréal, M. Duchesneau: «De toute évidence, le ministre de la Sécurité publique ne veut pas de débat de fond sur la réorganisation policière. Il souhaite s'en tirer avec quelques pirouettes et une «réformette» à la sauvette.» C'est incroyable, M. le Président! Ce n'est pas n'importe qui qui dit ça, là, ce n'est pas un député de l'opposition libéral: Jacques Duchesneau, une sommité en matière de police au Québec.

M. le Président, je ne peux en dire autant du modèle de réorganisation policière que le ministre de la Sécurité publique tente de nous enfoncer dans la gorge. C'est inqualifiable, la façon avec laquelle le gouvernement et son ministre procèdent dans un dossier comme celui-là, et c'est dénoncé, dénoncé très vivement. Je viens de donner un exemple, il y en a beaucoup d'autres dans le monde de la police qui dénoncent également l'intention, la décision du gouvernement.

Mais je vais maintenant enchaîner avec les autres groupes concernés directement. Évidemment, les élus municipaux. «Une ingérence gouvernementale inacceptable»: l'Union des municipalités du Québec. Les sentences – parce qu'il y en a eu plusieurs – Mme Simard de l'UMRCQ a sentencé le ministre et en commission de consultation, le 28 novembre, et à la radio et à la télévision, par tous les médias disponibles au Québec. Des sentences extrêmement virulentes, vigoureuses, sans appel, du ministre. Moi, je ne peux pas concevoir qu'un ministre puisse encaisser de telles attaques d'une femme quand même très crédible, et c'est peut-être ça, M. le Président, qui oblige le ministre à s'écraser dans son fauteuil.

M. le Président, Mme Simard a qualifié la réforme de «pas intelligente» et elle a dit à peu près la même chose de celui qui est le porteur du dossier, M. le Président. Moi, je n'ai pas le droit de le répéter. J'ai trouvé ça dur pour le ministre. Je dois avouer que c'était une sentence extrêmement cruelle à l'égard du ministre. Cependant, c'est un avertissement qui aura dû l'amener à s'amender, à réévaluer la situation puis à indiquer à son ministre des Finances puis au président du Conseil du trésor: Non, je n'embarque pas, faites faire votre job de bras par d'autres.

«Une arnaque pour prendre en otage les citoyens des municipalités les moins bien nanties.» Est-ce que ceux et celles qui sont en face de moi savent ce que c'est, une arnaque, M. le Président? Une entourloupette inqualifiable. C'est un crime, ça, une arnaque. C'est un crime, M. le Président. Pas de problème, on est embarqué là-dedans, on ne sait pas trop ce qu'il y a dans le projet de loi n° 77, on fait confiance à M. le ministre des Finances.

M. le Président, ça continue: «La position de votre ministre nous mène à l'affrontement.» Mme Simard, le 16 décembre 1996, adresse ce message au premier ministre du Québec. Ça n'a rien changé. Il y a deux ministres qui sont attaqués d'une façon absolument virulente sur la place publique par plein d'intervenants, deux des ministres les plus importants quant à la sécurité des citoyens et des citoyennes du Québec, quant à la protection des institutions: le ministre de la Justice et Procureur général, le ministre de la Sécurité publique. Deux complices, M. le Président, qui se donnent la main pour écraser le peuple plutôt que de le protéger. Inqualifiable, M. le Président!

M. le Président, le premier ministre se fait dire par Mme Simard: «Un changement dans l'attitude des divers représentants du gouvernement envers les élus municipaux est nécessaire.» Le ministre des Affaires municipales, ministre de la Sécurité publique, ministre de la Justice et premier ministre lui-même. Ça continue, ça ne s'arrête pas là. La charge à fond de train de Mme Simard, appuyée par 1 100 municipalités – maires, préfets, élus municipaux – est du jamais vu. Sans précédent. Mme Simard qui comprend que «le gouvernement du premier ministre ne songe qu'à empocher des revenus à la pelle sans se soucier de saine gestion». Condamnation extrêmement sévère du premier ministre: «la mauvaise foi du ministre Perreault – du ministre de la Sécurité publique – est si évidente qu'il impose par ailleurs», etc. On parle de mauvaise foi. C'est la présidente de l'UMRCQ, M. le Président.

Évidemment, le gouvernement, par sa procédure de suspension des règles, écrase l'opposition pour aller chercher 48 000 000 $ de taxes. Le gouvernement – vous m'indiquez qu'il me reste deux minutes, M. le Président – n'a pas la vérité et il le sait. C'est ça qui est dramatique. Je suis personnellement convaincu que le ministre de la Sécurité publique, à qui je prête quand même un peu de jugement, est certain et convaincu que tous ceux et celles qui se sont opposées à son projet de loi l'ont éclairé depuis trois semaines, un mois, mais il ne l'avouera pas. Ça ne se peut pas qu'il n'ait pas compris. C'est impossible qu'il n'ait pas compris, et je le soupçonne peut-être d'avoir dit à son ministre des Finances: Ça n'a pas de sens. Peut-être qu'on en a parlé au caucus du Parti québécois, M. le Président.

Je ne peux concevoir qu'avec une telle attaque venant de tous bords et de tous côtés le ministre de la Sécurité publique ose prétendre que ce projet de loi en est un qui vise à réorganiser la police au Québec: c'est tout le contraire, M. le Président. L'objectif en est un strictement de finances. On a besoin d'argent. Tous les moyens sont bons pour y arriver, avouables comme pas avouables. 48 000 000 $.

Et la conséquence – j'ai fait une prédiction, j'espère me tromper – le ministre aura provoqué, c'est commencé, un affrontement entre la Sûreté du Québec, les policiers municipaux, un affrontement également entre les élus municipaux des petites régions, des petites municipalités et des grands centres. Et l'affrontement avec le gouvernement, ça c'est en marche et dans ce dossier-là et dans bien d'autres, et le ministre de la Sécurité publique aura été un des principaux acteurs de ce désastre qu'on vit actuellement au Québec, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, vous avez... Non? Alors, pas d'autres interventions. Ceci met fin au débat sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions et des amendements de M. le ministre de la Sécurité du revenu.


Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements du ministre aux articles 37.1, 37.4, 37.7.1 de l'article 4, les articles 4.1, 6, 11, 14, 18, 19, 22, 23, 24.1, 26 sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des articles amendés

Je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 77 amendés par le vote précédent. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 77 que la commission des institutions n'a pas adoptés. Ces articles sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.

Les intitulés, le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Je mets maintenant aux voix le rapport tel qu'amendé de la commission des institutions sur le projet de loi n° 77. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): On ne peut pas à cette étape-ci. Les règles...

Donc, le rapport, tel qu'amendé, est adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je vous demanderais de procéder à l'étape de l'adoption, M. le Président.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Vous connaissez les temps de parole: 10 minutes pour le groupe parlementaire du gouvernement, 10 minutes pour celui de l'opposition, cinq minutes pour les indépendants et cinq minutes pour la réplique. M. le ministre.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui, très rapidement, M. le Président. J'écoutais tantôt le critique de l'opposition. Je pense qu'au-delà des débats partisans on doit reconnaître qu'il y a quand même un problème lorsqu'on a des corps policiers au Québec qui n'ont aucun policier et que c'est le résultat d'un modèle d'organisation qui a été développé dans le cadre de ce qu'on a appelé «la réforme Ryan». On ne peut pas dire, avec un système comme ça qui perdurait, que la sécurité du public est bien assurée. Le projet de loi va corriger ça.

Quant aux commentaires des groupes, il faut savoir qu'effectivement le projet de loi soulève plusieurs questions. Les commentaires se partagent dépendamment des aspects. Il n'y a pas le tollé dont parle le critique de l'opposition. Il y a des oppositions, sur certains aspects, des divers groupes, mais... Je veux juste lire, M. le Président, très rapidement un paragraphe d'une lettre qui m'est parvenue du président de l'Union des municipalités du Québec, qui regroupe 5 000 000 de contribuables du Québec, et qui dit ceci: «Comme vous le savez, l'Union des municipalités du Québec avait appelé de ses voeux une réforme de l'organisation policière au Québec, car ses membres constataient l'inéquité d'un système basé sur de multiples contrôles de l'État sur les corps policiers municipaux et sur l'obligation faites aux municipalités ayant une population supérieure à 5 000 habitants de se créer à grands frais de tels corps de police.

«Nous vous accordons, d'ailleurs, le crédit d'avoir initié une telle réforme, notamment par le biais de consultations publiques tenues tout au long de l'été, aux quatre coins du Québec. Le projet de loi n° 77 est le fruit de cette volonté de réforme qui vous anime. L'UMQ est en général favorable aux dispositions de ce projet de loi en ce qui concerne la carte policière.»

(9 h 20)

M. le Président, je veux tout simplement dire ceci. Au-delà des débats partisans, ma conviction c'est que nous marquons une étape importante pour nous donner un système de sécurité publique plus adéquat au Québec. Il y aura d'autres étapes. Je pense qu'il faut procéder à celle-là, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, je vous remercie. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, je disais tout à l'heure que et le ministre de la Justice et le ministre de la Sécurité publique étaient, quant à moi, à l'intérieur du cabinet du premier ministre, à l'intérieur de l'exécutif, les deux ministres qui s'exécutent le moins bien de leur tâche, alors que la tâche de un et de l'autre sont peut-être – pas sont peut-être – sont les plus importantes au Québec. Et je vais donner deux exemples, M. le Président. Ils n'ont pas le respect de l'institution dont ils ont la responsabilité.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Compte tenu de l'importance du discours du député de Frontenac, est-ce que vous auriez l'obligation de vérifier le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il manquerait trois députés pour avoir le quorum. Alors, que l'on appelle les députés. Nous allons suspendre quelques minutes.

(9 h 22 – 9 h 24)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons reprendre notre débat, et je cède la parole à M. le député de Frontenac pour qu'il poursuive son intervention.

M. Lefebvre: Alors, M. le Président, j'étais à expliquer à mes collègues d'en face – s'ils sont intéressés, à tout le moins, à l'évaluer – que deux ministres, à l'intérieur du gouvernement ont, quant à moi, des responsabilités absolument fondamentales et essentielles: la Justice et la Sécurité publique. Et, dans l'un et dans l'autre cas, M. le Président, j'arrive à la conclusion qu'on ne protège pas l'institution, bien au contraire, on s'en sert. Ça c'est très grave, M. le Président.

À titre d'exemple: le ministre de la Justice, qui suspend, avec la complicité du leader, les règles pour adopter le projet de loi n° 130, une réforme majeure, la justice administrative, M. le Président. Tous les projets de loi qui touchent la justice – c'est une coutume, c'est une règle ici, à l'Assemblée nationale, comme dans n'importe quel parlement – se font en partant d'un consensus entre le gouvernement et l'opposition. Le ministre de la Justice et député de Louis-Hébert n'a pas hésité d'aucune façon à faire fi de cette règle fondamentale, de cette coutume fondamentale: bâillon pour passer sa réforme de la justice administrative.

Évidemment, le minorité de la Sécurité publique s'est dit: Moi je vais faire encore mieux. Alors voici que lui, il est le complice du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor, qui ont désespérément besoin d'argent. Sous le prétexte d'une réorganisation policière factice, fictive, M. le Président, le ministre de la Sécurité publique fouillera dans les poches des contribuables partout au Québec pour un montant de 48 000 000 $. Et on l'a fait comment? Avec la suspension des règles, bâillonnant l'opposition et bâillonnant également, M. le Président, les ministériels, qui ne se sont pas exprimés, pour l'une ou l'autre raison: ils ont honte ou on leur défend de parler. Dans l'un et l'autre cas, ce sont des ministériels, M. le Président, qui se comportent comme des freluquets. Écrasés, incapables, M. le Président, de défendre les intérêts de leurs concitoyens et concitoyennes...

M. Bélanger: M. le Président, M. le Président... fatigué... doit enfreindre le règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vous avez été à même de remarquer vous-même que c'était un propos blessant.

M. Lefebvre: M. le Président, je ne trouve pas ça blessant. Il y a pire que ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous invite à éviter ces... Très bien M. le député de Frontenac, je vous cède la parole.

M. Lefebvre: M. le Président, je n'ai pas le temps de perdre deux ou trois minutes sur les questions de décorum, là, et vous l'avez remarqué, il y a deux ou trois députés qui sont ici strictement et seulement pour me déranger.

Alors, M. le Président, oui des députés qui n'ont pas eu la décence de protéger les droits de leurs électeurs et électrices. Ça va ça, M. le Président? Ça veut dire la même chose que le terme que j'ai utilisé. Pas de différence, M. le Président.

Le bilan du ministre de la Sécurité publique, c'est quoi, en dix mois? Très rapidement – il me reste cinq, six minutes. Les absences temporaires des prisons. Pas de problème, on se promène comme on veut dans les prisons du Québec. Des absences illégales, au vu et à la connaissance du ministre de la Sécurité publique: pas d'intervention, il tolère ça. Inacceptable, M. le Président!

Contrebande d'alcool, dénoncée partout au Québec, particulièrement sur l'île de Montréal: pas de problème, on continue, on y va gaiement. L'illégalité au Québec pour le ministre de la Sécurité publique, ce n'est pas une inquiétude, M. le Président.

L'enquête de la Sûreté du Québec relativement au contrat du Secrétariat de la restructuration: on attend toujours, M. le Président. Sauf qu'on a des informations que ça serait complété. On verra. On verra, et je dis tout de suite au ministre d'être extrêmement prudent dans ce dossier-là, M. le Président. D'être extrêmement prudent, de suivre la règle.

La crise à la Sûreté du Québec: l'incapacité du ministre de la Sécurité publique, l'absence de leadership totale a conduit à toute une série de mauvaises décisions qui ont provoqué ce qu'on connaît. La seule solution qui restait, M. le Président, c'était l'enquête à la Sûreté du Québec. Du jamais vu. Le ministre de la Sécurité publique est le premier responsable de la situation que vit la Sûreté du Québec, avec toutes les conséquences que ça peut comprendre.

Formation des pompiers volontaires: on attend.

Le bilan du ministre de la Sécurité publique, M. le Président, c'est: zéro. Pas un seul dossier. Il ne peut pas, en onze mois, se vanter d'avoir réussi une seule démarche, un seul dossier. C'est raté dans tous ses dossiers, M. le Président, sauf le projet de loi n° 77. Il l'a réussi, celui-là. Savez-vous pourquoi? Parce qu'il n'a rien décidé. Ce n'est pas lui qui a décidé. C'est le président du Conseil du trésor, c'est le ministre des Finances qui lui ont dit: Viens ici, M. le ministre, on va t'écrire un projet de loi qui va nous permettre d'aller chercher 48 000 000 $, et, toi, tu feras semblant de croire que c'est une réorganisation policière. Tu n'a pas le choix. Et, si tu ne veux pas marcher, on va parler au premier ministre. Si tu ne marches pas, tu vas te retrouver sur les banquettes arrière. Alors, il s'est dit: J'embarque, je n'ai pas le choix. Alors, il a essayé de faire croire à l'un et à l'autre, mais personne n'est dupe. Tout le monde l'a condamné. Tout le monde a dit au ministre de la Sécurité publique qu'il était de mauvaise foi, M. le Président, et même qu'il manquait de jugement carrément.

Moi, je suis préoccupé, très inquiet, de voir un ministre, qui a une telle responsabilité, avec le sourire, le sourire de la naïveté. C'est dangereux, la naïveté lorsqu'on a une responsabilité comme celle-là. Et, vous savez, lorsque je parle de naïveté, c'est, dans son cas, quelque chose de pas trop grave. Je pourrais l'accuser de quelque chose de plus grave que ça. C'est dangereux, M. le Président, parce qu'il a la responsabilité de me protéger comme citoyen, de protéger les gens de mon comté, dans le beau comté de Frontenac. Dans tous les comtés du Québec, partout au Québec, c'est ce ministre qui a la responsabilité de nous protéger.

On voit ce qui se passe actuellement dans la vieille capitale. Il m'avait assuré le 24 octobre dernier que la guerre entre les gangs de motards criminalisés, c'était réglé. Ce n'est pas le cas, M. le Président. Naïveté. Naïveté dangereuse. Naïveté inquiétante. Et j'ai l'impression, j'espère, qu'il est sous haute surveillance de la part du premier ministre et de l'entourage du PM et qu'on va réévaluer son bilan et qu'on comprendra que la sécurité publique est peut-être en danger avec lui.

M. le Président, on ne peut pas – et je conclus là-dessus – lui, comme le ministre de la Justice, lorsqu'on a la responsabilité de protéger ces deux institutions, se prêter à des manoeuvres quant à moi douteuses, douteuses dans le sens acceptable du terme, venant de l'Exécutif et, au premier rang, du ministre de la Sécurité publique et du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor et évidemment, M. le Président, du premier ministre. Vous savez, le résultat de tout ça, on le lit dans les sondages ce matin. On joue avec le feu de l'autre côté. On se sert des institutions pour faire une petite «game» politique, et la population n'est pas dupe. Le Québécois, la Québécoise ont un bon jugement. Ils regardent aller ce gouvernement-là, surtout depuis l'arrivée du député de Jonquière.

(9 h 30)

Pour un certain temps, ça a été le miroir aux alouettes. Ça semblait être quelque chose d'absolument extraordinaire, mais, à chaque semaine, il y a un masque qui tombe. À chaque jour, il y a plein de Québécois qui découvrent que ce gouvernement, et surtout ceux et celles qui sont au premier rang, est dangereux. Alors, ça donne le résultat qu'on connaît aujourd'hui. Sondage SOM- La Presse , répartition réaliste de l'intention de vote: Parti libéral du Québec, 45 %; Parti québécois, 44 %. Toutes les raisons, pour ceux et celles qui sont en face de nous, de s'inquiéter. J'espère qu'ils ont compris le message. Et, au-delà de la petite démarche électoraliste, je leur dis: Ils ont des responsabilités, ils ont été élus pour gouverner, non pour maquignonner. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Frontenac. Alors, bonjour, M. le député de Rivière-du-Loup. Vous avez une intervention de cinq minutes. Je vous cède la parole.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. On a un projet de loi devant nous dont l'objectif avoué, officiel, dans le titre, serait: Améliorer l'organisation policière, revoir l'organisation policière. On peut comprendre que, si le gouvernement veut la revoir, la théorie serait pour l'améliorer. J'ai regardé le projet de loi de fond en comble et je partage certainement l'objectif d'améliorer l'organisation policière. Le ministre le sait. Il y a des MRC au Québec qui, durant des heures importantes, un nombre d'heures important, n'ont pas de services policiers, sont couvertes par la MRC voisine. Alors, s'il se passe un incident dans une municipalité qui est aux frontières de la MRC et que les policiers s'adonnent être de passage aux frontières de l'autre MRC, il faut que les policiers traversent deux MRC: kilométrage énorme pour aller porter secours dans certains cas où il y aurait urgence. La responsabilité du ministre de la Sécurité publique serait d'améliorer l'organisation policière pour corriger des situations comme celles-là.

On pourrait peut-être même comprendre, dans un cas comme celui-là, si vraiment il s'agissait d'améliorer, de rehausser les niveaux de services via une réforme d'organisation policière, qu'il plaide l'urgence à l'Assemblée nationale, parce que, effectivement, depuis qu'il est ministre de la Sécurité publique, plusieurs personnes lui ont signalé ce problème-là au niveau de l'organisation policière, puis il ne semble pas, lui, voir d'urgence à régler ça.

Par contre, là, il a vu une urgence à refiler une facture: 48 000 000 $ de factures à prendre, transférées aux municipalités pour forcer, dans bien des cas, les municipalités à augmenter leurs taxes. Ce n'est pas des petites augmentations, M. le Président, dont on parle, des municipalités qui ont 1 000 habitants, dans certains cas, même pas 1 000 habitants, qui voient leur facture... Je les ai vus, les ordres de grandeur des factures des municipalités, on parle de factures qui passent de 25 000 $ à 50 000 $; on parle de factures qui passent de montants...

M. Lefebvre: Du simple au double.

M. Dumont: Du simple au double, comme le dit le député de Frontenac, et qui forcent les municipalités dont le budget total n'est pas immense ni plus ni moins à augmenter leurs taxes municipales, à augmenter leurs taxes foncières, et ça, de la part d'un gouvernement qui a, lors de la dernière campagne électorale... Parce que tout le monde s'en souvient, ils se promenaient dans le monde municipal puis ils disaient: C'est fini, les transferts de factures, on va bâtir des nouvelles relations plus harmonieuses avec le monde municipal, on va collaborer avec le monde municipal. Le monde municipal, M. le Président, n'a jamais été, je pense, aussi outré de la façon dont un gouvernement le considère. Le nombre de blâmes sur l'administration du gouvernement du Parti québécois qui ont été... Les charges de l'UMRCQ, c'est une derrière l'autre, parce que ces gens-là, les élus municipaux, les représentants de l'UMRCQ, M. le Président, ce n'est pas tellement leur rôle. Ces gens-là ont été élus... Ce n'est pas tellement leur rôle comme élus municipaux qui les préoccupe. Ce qui les préoccupe, c'est qu'ils savent, ces gens-là... Ils sont proches du terrain puis ils savent que, à chaque fois qu'ils sont forcés, par un gouvernement qui leur transfère des factures, à chaque fois qu'ils sont forcés d'augmenter leurs taxes foncières, ils coupent l'accès à la propriété, ils le rendent de plus en plus difficile, et ce n'est pas fini d'être rendu plus difficile.

J'ai hâte de voir les augmentations qui s'en viennent au niveau des taxes scolaires qui touchent le même champ foncier. Chaque fois qu'on augmente ces taxes-là, pendant que le gouvernement, de son côté, augmente les taxes de toutes sortes, vient chercher l'argent par centaines de millions – en quelques jours cette semaine, ça va être un autre 400 000 000 $ dans les poches des contribuables – bien, à chaque fois, les gens ont un accès restreint à la propriété. On fera les politiques familiales qu'on veut, on changera les noms des allocations, on prendra le dictionnaire pour inventer des nouveaux noms aux politiques familiales, il reste que, si les familles de la classe moyenne, des honnêtes travailleurs n'ont plus les moyens d'avoir accès à la propriété à cause de transferts de taxes continus, ça, M. le Président, ça va être, au niveau de la famille, beaucoup plus dommageable que toutes les annonces puis les communiqués de presse que le gouvernement pourra faire.

Alors, c'est pour cette raison-là et aussi pour une question de principe, de respect des instances municipales, pour une raison de refus d'accepter qu'il y a urgence là-dessus, alors que, dans l'organisation policière, il y aurait tellement à faire au niveau de l'urgence, et parce que je considère que toute augmentation de taxes déguisées est un frein à l'économie qu'on va voter contre le projet de loi n° 77. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Il n'y a plus d'autres intervenants. Le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le vote par appel nominal est demandé. Alors, que l'on appelle les députés. Nous allons prendre quelques minutes.

(9 h 39 – 9 h 43)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous voulez vous asseoir.


Mise aux voix

Alors, je m'en vais mettre aux voix le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx)...

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé (LaFontaine), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Charbonneau (Bourassa), M. MacMillan (Papineau), Mme Vaive (Chapleau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je demanderais le consentement à ce que les votes du député de Gouin, du député de Charlesbourg et du député de Duplessis soient rajoutés au vote ministériel.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, et des députés également de Notre-Dame-de-Grâce et de Marquette.

Une voix: Contre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement mutuel. Ça va? Alors, que les députés entrent, s'il vous plaît. Prenez vos places.

M. le secrétaire général, pour le résultat.

Le Secrétaire: Pour:52

Contre:31

Abstentions:0

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Brouillet): La motion est adoptée. Donc, le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à ce matin, 10 heures.

Une voix: Oh!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée? Alors, nos travaux sont ajournés à ce matin, 10 heures, donc dans 10 minutes.

(Fin de la séance à 9 h 48)