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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 26 mars 1997 - Vol. 35 N° 83

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures sept minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour

Alors, nous allons débuter les affaires du jour.


Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Nous allons maintenant procéder aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.


Motion proposant que l'Assemblée condamne le nationalisme ethnique sous toutes ses formes

À l'article 38 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député d'Iberville présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale, dans un souci de réaffirmer les principes de la Charte des droits de la personne et de favoriser la bonne entente entre tous les citoyens du Québec, quelles que soient leurs origines, condamne le nationalisme ethnique sous toutes ses formes et l'utilisation par qui que ce soit de ses thèmes, de ses stratégies et de son langage pour favoriser et entretenir la discorde entre les Québécois, dans quelque intérêt que ce soit, et invite en conséquence tous les groupes d'intérêts qui représentent des Québécois, indistinctement ou selon leurs origines, à s'abstenir de favoriser ou d'entretenir la discorde entre les Québécois sur la base de leurs origines ethniques.»

Avant le début de la séance, nous avons tenu une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat. Le partage du temps a été établi de la façon suivante: 20 minutes sont allouées à l'auteur de la motion, qui disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées aux autres députés indépendants; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement; et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants pourra être redistribué entre les groupes parlementaires. Et, enfin, les interventions ne seront soumises à aucune limite.

(10 h 10)

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant, M. le député d'Iberville. M. le député.


M. Richard Le Hir

M. Le Hir: Merci, M. le Président. En demandant que l'Assemblée nationale aborde cette question aujourd'hui, je me rendais bien compte que c'était un sujet difficile, délicat, mais nécessaire. Et, si l'actualité doit parfois nous servir de guide pour nous rappeler ce qui est nécessaire, il se trouve que, justement, aujourd'hui, dans les journaux, dans le cas du Devoir , un grand article porte, justement, sur cette question, le Québec et la diversité, et que hier un grand leader de la communauté juive, M. Edgar Bronfman, a tenu des propos qui – je m'empresse de le souligner – ont été corrigés par les leaders locaux, et qui démontrent que la question du nationalisme ethnique se pose, est d'actualité, et qu'on doit trouver le moyen de composer avec cette réalité.

Il se trouve que notre histoire à cet égard – et, il faut bien le dire, cette histoire, elle se compare très avantageusement à celle d'autres pays – recèle quand même quelques pages assez tristes et même gênantes. Il y a eu des propos qui ont été tenus à une certaine époque par une frange d'intellectuels catholiques au Québec, à la tête desquels on trouvait le chanoine Groulx, qui ont défini le nationalisme dans des termes ethniques et souvent sans égard pour les autres personnes des autres groupes ethniques. Je sais que c'était une autre époque, M. le Président. Je sais que certaines lois qui existent aujourd'hui et qui interdiraient ce genre de propos n'existaient pas à l'époque et je n'ai pas l'intention de faire un procès rétrospectif à ces gens-là. Je pense cependant que, si ces personnes-là sont mortes, leurs idées, elles, sont encore en vie et que ces idées-là sont suffisamment répandues pour qu'il soit nécessaire pour l'Assemblée nationale de s'en démarquer très clairement.

Je ne dis pas que le Québec est une société intolérante, loin de là. Je ne dis pas que le Québec est une société qui n'est pas ouverte, loin de là. Je dis qu'il y a des gens qui utilisent le nationalisme ethnique pour parvenir à certaines fins qui, dans le contexte d'une société qui est diversifiée comme la nôtre, ne sont pas acceptables.

Dans «Le Grand Larousse encyclopédique», on définit le nationalisme comme suit, on dit que c'est un mouvement des individus qui prennent conscience de former une communauté nationale en raison des liens qui les unissent et, parmi les liens qui les unissent, on parle de langue, de culture, d'origine ethnique et d'histoire.

M. le Président, le fait est que notre histoire n'est pas une histoire homogène. L'histoire, elle est ce qu'elle est, on ne peut pas la refaire. Mais le fait est que cette histoire-là n'est pas l'histoire d'une seule ethnie. En fait, après le régime français, il y a eu des gens qui sont venus, d'origine britannique. Par la suite, il y a eu des Irlandais, dont a souligné justement la contribution la semaine dernière en cette Chambre. Il y avait, bien sûr, précédemment, des peuples autochtones, et le XXe siècle a vu déferler vague après vague d'immigration. Ces gens-là sont tous venus se joindre à la société québécoise, à la communauté québécoise, et il est impossible, selon moi, de prétendre qu'aujourd'hui la société québécoise forme un tout homogène sur une base ethnique. Au contraire, je pense qu'une des richesses de la société québécoise est justement sa diversité.

Mais, M. le Président, j'ai dit que c'était un sujet difficile. Effectivement, c'est difficile parce qu'il soulève beaucoup de susceptibilités. On ne peut pas prétendre qu'on puisse faire abstraction de cette réalité-là. Les susceptibilités, bien sûr, ont trait à la difficulté qu'ont eue les Canadiens français, les Québécois à développer leur propre sens d'une identité, à défendre leur langue. Je pense que les problèmes qu'ils ont connus sont réels et qu'on doit en tenir compte. On ne peut pas, non plus, escamoter ces problèmes-là et prétendre que l'insécurité des francophones, des Québécois soit sans fondements. Elle existe, elle est réelle et elle est justifiée dans le sens où aujourd'hui, par exemple, la langue anglaise, on reconnaît fort bien que, avec le développement des moyens de communication, cette langue n'a plus de frontières et qu'elle est constamment à nos portes. Elle nous sollicite de toutes sortes de façons. La question de la préservation de l'identité culturelle française au Québec se pose avec une acuité certaine.

De tous les pays qu'on peut regarder, il reste quand même que nous sommes privilégiés parce que, si effectivement il y a eu ces égarements coupables que j'évoquais tout à l'heure, le fait est que le Québec a la chance de ne pas avoir vu de luttes politiques dégénérer en luttes fratricides et n'a pas connu les débordements sanglants qu'a connus l'Europe, par exemple, et que connaissent encore d'autres pays aujourd'hui.

Cela dit, il faut quand même aussi souligner au passage que, si le Québec s'en tire assez bien, on ne peut pas en dire autant de tout le monde et que certains pays ont eu, et encore aujourd'hui, à examiner cette période-là de leur histoire et à prendre leurs distances par rapport à cette histoire-là. C'est le cas, par exemple, de la Suisse qui, avec l'image de neutralité qu'elle avait, se voit aujourd'hui confrontée avec des gestes qui ont été posés dans le passé. La situation du Québec ne se compare d'aucune façon à celle de la Suisse ni d'aucun de ces pays européens. En fait, au Québec, tout ce qu'on a pu connaître, ce sont des égarements de langage et quelques manifestations intempestives étudiantes, à une certaine époque, et finalement pas grand-chose d'autre.

Donc, de conclure sur cette base-là que le Québec est une société intolérante serait tout à fait grossier, et ce n'est absolument pas mon propos. Cependant, il y a dans notre société des gens que cette question-là préoccupe. Et vous me permettrez, M. le Président, de donner un petit peu l'exemple de ma propre situation pour tâcher de faire comprendre à mes collègues la façon dont le problème se pose.

Il se trouve que les circonstances ont voulu que je sois né d'un père français et d'une mère québécoise. Mon père français, lui, a fait la guerre et conserve de cette époque des souvenirs difficiles. Ma mère, elle, est une Québécoise qui est née à Loretteville, à quelques kilomètres au nord de Québec, et dans un environnement... tout près du village huron et tout près des villages avoisinants, du lac Ferré, de cette région-là, où il y avait une communauté irlandaise importante. L'évidence à laquelle il faut se rendre, M. le Président, c'est que, dans cette communauté-là, il y a eu des brassages considérables et que les familles sont assez mélangées.

Quant à l'expérience de mon père, M. le Président, je dirai simplement ceci: Il s'est retrouvé à faire de la prison parce qu'il cherchait à rejoindre les forces françaises libres en Angleterre, il s'est retrouvé à faire le débarquement, à poursuivre les Allemands vers l'Allemagne, et il retient de cette expérience-là un souvenir très vivace et une réelle angoisse face à la menace que faisait peser sur le monde de cette époque – et c'est son point de vue encore aujourd'hui, sur le monde d'aujourd'hui – le nationalisme ethnique.

Par la suite, lorsque mes parents se sont établis au Québec, nécessairement, à cause de la nationalité de mon père, ils se sont retrouvés à fréquenter beaucoup d'immigrants qui avaient des expériences semblables à celle de mon père. Et, de mon enfance, je garde le souvenir de ces rencontres amicales entre gens de toutes sortes d'origines qui évoquaient les raisons qui les avaient fait quitter leur pays d'origine et vouloir s'établir ici.

Les circonstances ont aussi voulu que, dans mon enfance, lorsque ma famille s'est établie à Montréal, on se soit établis dans un quartier qui était très polyglotte, très diversifié et où on retrouvait des gens de toutes les communautés. Ça m'a permis d'apprendre l'anglais. Finalement, c'est une chose qui m'a bien servi pendant toute ma carrière. Mais ça m'a aussi appris à comprendre d'autres choses. Par exemple, la famille qui était propriétaire de l'immeuble que nous habitions était une famille juive. Ces gens-là nous ont acceptés dans leur milieu, nous ont aidés à comprendre certains aspects de leur religion, de leur culture, et le tout se déroulait dans un climat, je dois le dire, extrêmement agréable et finalement extrêmement enrichissant pour les enfants que nous étions, ma soeur et moi. Mais ces gens-là qui venaient de toutes sortes d'horizons avaient tous en commun, encore une fois, la crainte du nationalisme ethnique et la crainte que ce nationalisme-là les oblige, encore une fois, à un moment donné de leur vie, à un déplacement.

(10 h 20)

Je n'ai pas connu, personnellement, d'expériences où j'ai pu constater de l'intolérance ou un manque d'ouverture de la part des Québécois. Mon expérience a plutôt été celle du contraire. Mais je respecte énormément les craintes des personnes qui, ayant vécu des circonstances différentes, ayant connu une certaine époque du Québec qui leur rappelait des circonstances qu'ils avaient vécues ailleurs, continuent d'entretenir aujourd'hui des craintes sur la question. Je pense que, dans la mesure où nous justifions ces craintes absolument non fondées, il est de notre devoir de réitérer à toute la population du Québec qu'effectivement la société québécoise est une société ouverte, tolérante et qu'il n'y a pas de place en son sein pour des manifestations d'intolérance comme peuvent le devenir les débordements du nationalisme ethnique.

Je prends la peine de sortir, de vous citer quelques extraits d'un article qui est paru justement ce matin dans Le Devoir et qui illustre, qui confirme... C'est un article de M. Gérard Bouchard, qui professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi et directeur de l'IREP. Je souligne que le texte qu'il a publié ici sera publié dans le numéro d'avril de la revue L'Action nationale qui, comme on le sait, est le véhicule par excellence des nationalistes. Parlant du chanoine Groulx dont j'évoquais la mémoire tout à l'heure, il disait ceci: «Certains font aussi valoir que l'homme était de son temps, que toute l'époque était plus ou moins contaminée par l'antisémitisme et le fascisme, que Groulx ne le fut pas plus que la majorité de ses contemporains. Il n'empêche. À cause de la gravité des enjeux et de la nature des valeurs mises en cause, c'est précisément de cette époque et toutes ses contaminations qu'il faut prendre nettement congé.» Et, M. le Président, je vous soumets très respectueusement que la motion que je dépose aujourd'hui vise justement à faire en sorte que l'Assemblée nationale, au nom de tous les Québécois, prenne effectivement congé, comme le professeur le dit, de cette idéologie, de cette philosophie.

Il dit un peu plus loin: «Il existe un besoin de marquer une rupture, de signifier clairement tout ce qui sépare le nationalisme d'aujourd'hui de celui que pratiquaient des intellectuels comme Lionel Groulx.»

«Enfin, dans une direction un peu différente, dit-il, mais qu'on aurait bien tort de négliger, l'ambiguïté qui règne présentement comporte un autre coût. Lorsque des nationalistes prennent la défense de Groulx (sur le terrain de l'ethnicité et du rapport à l'autre), ils compromettent l'ensemble du nationalisme québécois et ils fournissent du carburant à une machine à stéréotypes (dont les voies et les moyens sont bien connus) qui est en train de valoir au Québec une réputation de xénophobie et de racisme au sein de la communauté internationale.»

M. le Président, c'est justement le propos de la motion d'aujourd'hui. C'est de faire en sorte que nous envoyions, comme Assemblée nationale, comme représentants de tous les élus québécois, un signal très clair démontrant que le Québec est une société de tolérance et que, vu la diversité des origines des Québécois qui vivent au Québec, il ne saurait être question d'encourager ou de favoriser la définition de l'identité québécoise en termes d'ethnicité. Encore une fois, je rappelle la définition que donnait le dictionnaire: le nationalisme est un mouvement des individus qui prennent conscience de former une communauté nationale en raison des liens qui les unissent. Ces liens ne doivent pas, dans le cas d'un Québec diversifié, être les seuls fondés sur l'ethnicité ou la langue. Il doit y avoir d'autres éléments qui contribuent à définir l'identité québécoise, et la réalité veut que, justement, il y en ait. Ces liens, M. le Président, sont pourtant assez évidents. C'est vrai que la majorité des Québécois sont de langue et de culture françaises. C'est vrai qu'il y a une minorité qui est de langue anglaise. C'est vrai que nous comptons sur le territoire du Québec un nombre relativement restreint d'autochtones qui peuvent prétendre à l'antériorité, à leur antériorité sur le territoire. C'est vrai aussi que, au fil des années, le Québec a accueilli vague après vague d'immigration.

C'est justement cette richesse, l'apport de toutes ces composantes de la société qui définit l'identité québécoise et ce serait souhaitable qu'à l'avenir, plutôt que de baser la définition de l'identité québécoise sur une exclusion, on le fasse justement sur la base d'une inclusion. Et je pense que la société québécoise y gagnerait grandement.

M. le Président, je suis conscient d'avoir à peu près épuisé mon temps de parole et je garderai mes propos pour la conclusion, à la fin.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Iberville. Nous cédons maintenant la parole au ministre des Relations avec les Citoyens et de l'Immigration. M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, d'abord je voudrais dire aux membres de l'Assemblée, et au député d'Iberville qui est l'auteur de la motion, qu'après avoir pris connaissance attentivement de la motion, du libellé, c'est d'entrée de jeu que je peux annoncer au nom du gouvernement que nous souscrivons à la motion présentée par le député d'Iberville.

Cependant, lorsque nous écoutons le député d'Iberville, nous nous apercevons qu'il va beaucoup plus loin que la motion qui est aujourd'hui présentée. Je pense que, d'entrée de jeu, je voudrais apporter un certain nombre de correctifs. Je parle de la conclusion du député d'Iberville qui, tout à l'heure, nous disait qu'il y a des gens au Québec qui définissent l'identité québécoise sur une base ethnique. Pourtant, M. le Président, comme le député d'Iberville, j'ai suivi attentivement tous les débats de la commission Bélanger-Campeau. Nous avons lu des dizaines et des dizaines de mémoires de gens qui, de bonne foi, sont venus s'exprimer devant la commission Bélanger-Campeau. Et, s'il y a une leçon que nous devons retenir de ce moment important dans notre histoire, c'est bien ce cheminement d'une nouvelle définition du nationalisme où, de plus en plus... ou effectivement peut-être, à une autre époque que, de par mon âge, M. le Président, vous comprendrez, je n'aurais pas connue, mais où on aurait peut-être davantage fait référence à un nationalisme qui aurait été basé sur l'identité ethnique. De plus en plus, qu'est-ce que les gens sont venus rechercher à la commission Bélanger-Campeau, qu'est-ce qu'ils nous ont dit à cette commission, si ce n'était pas d'abord un rationalisme d'État qui les amenait à choisir pour la souveraineté beaucoup plus que l'appartenance à ce que seraient les relents d'une identité canadienne-française tricotée serrée?

Et qu'est-ce que les gens sont venus nous dire à Bélanger-Campeau? C'est que justement la société québécoise avait évolué et, comme le rappelait cependant le député d'Iberville, qu'effectivement, au fur et à mesure que les vagues d'immigration ont, je ne dirais pas déferlé, mais que des immigrants se sont joints à la société québécoise, des gens ont apprécié cette richesse, la vivent, l'apprécient, particulièrement cette jeune génération qui vit au quotidien ce que ça veut dire, l'intégration, qui apprécie ce que ça veut dire que de connaître des codes culturels différents. Cette génération qui, comme aucune autre auparavant, aura à subir le vent froid de la concurrence sait jusqu'à quel point ce sont des avantages incroyables que de connaître d'autres codes culturels pour entrer en contact, avoir une meilleure compréhension de l'altérité et, dans le fond, avoir une meilleure compréhension du monde.

Donc, M. le Président, je pense qu'en souscrivant à la motion qui est présentée par le député d'Iberville il nous faut aussi éviter de sombrer dans un certain nombre d'excès, comme l'a fait le député d'Iberville dans son propos en laissant croire qu'il y a encore des gens dans les institutions qui définissent le nationalisme sur une base ethnique. Je souhaite prendre mes distances de ce propos.

C'est d'autant plus important de prendre une distance des propos du député d'Iberville que, concrètement, le gouvernement, depuis des années, pose un certain nombre de gestes. Et, rappelons-le, depuis le début des années soixante-dix, au-delà de toute partisanerie politique – je le rappelle, M. le Président, au profit de mes collègues de l'opposition – nous, comme société, nous, comme institution, comme parlementaires à l'Assemblée nationale, et avec l'ensemble aussi des membres de la société civile, avons, je pense, véritablement toujours affirmé le souci d'associer l'ensemble des citoyens et des citoyennes au développement social, économique et collectif du Québec, de le faire au-delà de l'origine ethnique, comme de le faire au-delà du sexe, au-delà de la couleur de peau, au-delà, finalement, des caractéristiques qui, dans les faits, peuvent distinguer les individus les uns des autres.

Comment cela s'est traduit dans les faits, dans les institutions? Le député d'Iberville, jamais il n'y a fait référence. Nous avons, depuis 1975, une Charte québécoise des droits et libertés qui affirme, dans le préambule de cette Charte, qu'elle est, et je le cite, «le symbole des valeurs de la société québécoise». Qu'est-ce qu'il y a de plus riche qui vient qualifier notre citoyenneté que cette Charte qui nous rassemble au-delà de nos différences bien réelles?

Le député d'Iberville aurait pu aussi rappeler que les membres de l'Assemblée nationale, à l'unanimité, ont adopté la Déclaration sur les relations interethniques et interraciales, en décembre 1986. Le député d'Iberville aurait pu rappeler aussi qu'en 1982, sous l'initiative de la députée de Saint-François, ministre, à l'époque, de l'Immigration et des Communautés culturelles, nous avons adopté, à l'Assemblée nationale, à l'unanimité, l'Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration et un plan d'action dont les principes guident encore aujourd'hui nos intentions.

(10 h 30)

Donc, je pense que les Québécois et les Québécoises, que les citoyens et les citoyennes du Québec ont largement prouvé par leurs actions, par leurs gestes, par leurs discours qu'ils adhèrent clairement aux principes d'ouverture, qu'ils adhèrent aux valeurs de pluralisme, de solidarité et de recherche aussi d'équité que prônent soit la Charte québécoise des droits et libertés, soit la Déclaration sur les relations ethniques, soit l'Énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration. À plusieurs reprises, nous, comme parlementaires, au-delà des différences politiques et partisanes, nous l'avons fait, et, à bien des reprises, des centaines de Québécois sont venus nous dire la même chose à Bélanger-Campeau, à la commission parlementaire de la culture.

C'est ainsi, M. le Président, que de nombreux groupes communautaires, d'entraide et des organismes, aussi, multiethniques d'accueil, autant de premier établissement que de nouveaux arrivants, ont vu le jour. Plusieurs projets de rapprochement interculturel à chaque jour s'organisent à l'initiative des citoyens, appuyés par le gouvernement qui, à chaque année, consacre quelque chose comme 1 500 000 $ à toutes sortes d'activités de rapprochement qui font en sorte de soutenir la connaissance des uns et des autres. Travaillant ainsi à faire quoi, M. le Président? À faire tomber les préjugés. Travaillant ainsi à faire quoi, M. le Président? À lutter contre le racisme, contre la discrimination et contre l'exclusion. Je donne, par exemple, cette réflexion riche d'ensemble de plusieurs grandes universités qui ont ramassé le meilleur de leur savoir, de leurs connaissances, de leurs expertises et qui ont créé, dans plusieurs universités, je pense à l'Université de Montréal, à l'Université du Québec, à l'Université Concordia, à l'Université McGill, des chaires d'études ethniques qui travaillent à documenter la connaissance sur ces questions.

Donc, les universités agissent, les gens de l'entreprise privée aussi agissent et, en plus, font des efforts pour adapter leur pratique à la diversité, parce que, là, le député d'Iberville a raison, c'est là sans doute un des grands défis pour la société québécoise.

Je voudrais aussi rappeler que le gouvernement, depuis l'élection du Parti québécois, a posé des gestes concrets. Un de ceux-là, dans la symbolique qui reprend les propos du député d'Iberville, c'est de faire en sorte qu'on mette de côté cette expression, cette appellation de «communauté culturelle», comme si, dans l'imaginaire collectif, en utilisant cette expression, on faisait en sorte de continuellement perpétuer une distinction entre les gens de la société d'accueil et ceux et celles qui s'y joignent par la voie de l'immigration; comme s'il y avait d'un côté, M. le Président, la société d'accueil qui serait composée de Blancs francophones catholiques établis ici depuis des générations et, de l'autre côté, les communautés culturelles.

Nous avons voulu briser ce symbole et faire en sorte de bien d'abord rappeler que la société d'accueil, la société québécoise n'est pas formée uniquement des Blancs francophones catholiques, que la société d'accueil est formée de gens qui se sont joints à la société québécoise, au fil des ans, par l'immigration, des gens qui, à chaque jour, participent et contribuent au développement de cette société québécoise. Donc, ne pas maintenir une dichotomie entre les communautés culturelles et les gens de la société d'accueil.

Et, s'il y a quelque chose de rassembleur que nous pouvons faire pour bien rappeler que les gens, dans la définition et dans la recherche de l'identité... Bien sûr, l'ethnicité est une composante qui fait partie de notre identité; ce n'est pas sans doute là la communauté la plus large qui peut rassembler l'ensemble des citoyennes et des citoyens. Et c'est pour ça qu'en remplaçant l'expression «communauté culturelle» nous avons plutôt choisi de faire une réflexion sur des relations civiques et sociales.

Concrètement, M. le Président, qu'est-ce que je veux dire quand je parle de relations civiques et de relations sociales? Nous sommes à faire en sorte qu'au Québec, particulièrement sous l'impulsion du gouvernement du Québec, chaque citoyen, chaque citoyenne soit capable, d'abord, de dire que les différences qui nous distinguent – qui vous distinguent, vous, M. le Président, de moi, de par notre âge, de par notre éducation, nos choix de vie, les régions où nous sommes nés... Il y a... Malgré le fait que nous soyons tous deux Blancs francophones catholiques, nous sommes différents l'un de l'autre, comme cependant je peux l'être d'autres collègues qui sont ici à l'Assemblée nationale, qui ont une religion différente de la mienne ou une origine différente de la mienne. Mais il y a une communauté de pensée, une communauté, je dirais, politique plus large qui nous rassemble, et cette communauté, elle se définit comment? Par les attributs essentiellement de notre citoyenneté.

Qui que nous soyons dans cette Assemblée, peu importent nos convictions religieuses, peu importent nos origines ethniques, nous ne pouvons pas... Il y a des choses qui sont, je dirais, non négociables dans la société québécoise. Au-delà de nos différences, l'égalité entre les hommes et les femmes dans la société québécoise est non négociable. Je continue sur cette liste, M. le Président. Au-delà de nos différences de convictions religieuses, de nos origines ethniques, de nos choix de vie, nous condamnerons toujours, comme société, la violence qui est faite aux enfants et nous avons des lois qui l'établissent clairement. Nous ne pouvons pas, comme nous le rappelle notre Charte québécoise des droits et libertés, discriminer en fonction de la race, de la couleur de la peau, du sexe, de l'orientation sexuelle et des autres motifs qui sont contenus à la Charte québécoise des droits et libertés.

C'est là le socle sur lequel devra s'asseoir la société québécoise. C'est là ce qui sera la base de l'identité québécoise, c'est cette communauté, je n'oserais pas dire juridique, mais cette communauté de... je cherchais un mot juste, M. le Président, je n'oserais pas dire non plus une communauté politique, mais je dirais certainement un lieu de rencontre qui fera en sorte... le ciment, une communauté...

Une voix: Civique.

M. Boisclair: Oui, civique est le mot juste, je remercie mon collègue de me le rappeler. Il y a là une communauté civique qui est très riche et qui nous permettra à la fois d'affirmer des différences bien réelles.

Je ne pense pas que le modèle d'intégration, par exemple, que la société québécoise a choisi au fil des ans, c'est de dire: Si vous voulez vous intégrer, bien, il faut, par exemple, faire en sorte d'adopter les mêmes coutumes ou les mêmes pratiques que les gens qui sont établis ici depuis longtemps. Nous avons rejeté, au gouvernement du Québec, ce concept de culture publique commune. D'abord, parce que la culture publique commune, d'une façon très large, qu'est-ce qu'elle incluait? Ça peut être autant la façon de se vêtir, que la façon de danser, que la façon de parler, que l'attachement plutôt à un certain nombre de valeurs, elles, fondamentales qui sont plus facilement identifiables. Nous avons préféré remplacer cette appellation par une réflexion sur les relations civiques. Je pense que c'est là un grand défi.

Je vous dirais, M. le Président, que cette nouvelle orientation s'inscrit en continuité avec le modèle d'intégration qui était proposé par les libéraux, à l'époque. Je ne pense pas que la vision que nous adoptons et que nous avons proposée à l'Assemblée nationale, entre autres par la création du ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, soit un virage par rapport à ce qui a été proposé, à l'époque, par ma collègue Gagnon-Tremblay, mais bien que cette réflexion s'inscrit en continuité avec celle qui avait été proposée, se propose comme un enrichissement au modèle d'intégration qui avait été développé à l'époque.

Je pense, M. le Président, que, par des gestes clairs, par une volonté politique, nous cherchons à faire en sorte que des gens voient leur identité et voient leur réalité d'abord à travers ce qui nous rassemble tous comme société, qui est cette espèce de communauté civique, cette communauté, cet ensemble de valeurs bien définies dans des institutions qui nous rassemblent, mais, au même moment où on est capable de faire en sorte de voir ce qui nous rassemble, d'affirmer aussi que les différences sont bien réelles et qu'elles enrichissent, comme le député d'Iberville le rappelait, notre vécu de tous les jours.

Donc, si on parle d'institution, la Charte québécoise des droits et libertés; si on revient aux déclarations sur les relations interethniques et interraciales, adoptées à l'unanimité à l'Assemblée nationale; si on reprend l'énoncé de politique de ma prédécesseure, la députée de Saint-François, adopté à l'unanimité à l'Assemblée nationale; si on reprend le projet de loi qui crée le ministère des Relations avec les citoyens et de l'Immigration qui propose un enrichissement de notre modèle d'intégration, adopté à l'unanimité aussi à l'Assemblée nationale.

Je pense que nous pouvons rappeler, en ajoutant aussi tout ce qu'on a entendu dire dans les mémoires à l'occasion de notre commission Bélanger-Campeau, nous pouvons véritablement dire, comme le rappelle justement M. Bouchard aujourd'hui, M. Gérard Bouchard, professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi et directeur de l'IREP, que la nation est passée du rapport d'exclusion à un rapport d'inclusion. Bien, je pense que, par des gestes que collectivement, nous, comme parlementaires, nous posons depuis des années, au-delà de toutes frontières politiques et de toutes barrières politiques partisanes, nous sommes, oui, effectivement passés d'une nation basée peut-être sur un rapport d'exclusion à un rapport d'inclusion ou, selon les termes du néo-libéralisme, d'une conception ethnique à une conception civique.

(10 h 40)

Et je peux vous dire, M. le Président, que, pour faire en sorte que cette conception civique puisse aussi être davantage partagée dans les semaines et dans les mois qui vont venir, l'ensemble de nos programmes d'accueil et d'établissement des immigrants, de rapprochement interculturel, qui ne s'adressent pas uniquement aux clientèles immigrantes, qui s'adressent aussi aux membres de la société d'accueil qui cherchent à avoir une meilleure compréhension des dynamiques sociales et des réalités culturelles québécoises, nous allons faire en sorte d'inscrire la Charte québécoise au coeur de ces réflexions-là, puisque j'estime que, s'il y a un symbole qui pourra nous rassembler, duquel nous devons être fiers et dont nous ne parlons pas suffisamment dans cette société, c'est bien cette Charte québécoise des droits et libertés.

M. le Président, je pense que c'est en affirmant un certain nombre de convictions dont je viens de rappeler les grandes lignes que nous pourrons faire en sorte, dans le quotidien des choses, d'illustrer par des gestes que le nationalisme dont la société québécoise, dans son ensemble, s'enorgueillit, au-delà, encore là, des barrières partisanes... Je sais que plusieurs de mes collègues de l'opposition, membres du Parti libéral, se définissent comme nationalistes. Ils ne sont pas non plus des gens qui vont faire la promotion d'un nationalisme ethnique. Ils sont, comme nous, des gens qui font la promotion d'un nationalisme ouvert, tolérant, accueillant, mais surtout inclusif.

Mais je sais qu'au même moment où tous, de chaque côté de cette Chambre, nous faisons cette affirmation et professons de nos convictions, nous savons aussi que nous avons des défis particuliers à relever comme société. Regardez, par exemple, jusqu'à quel point les gens des minorités visibles sont sous-représentés ici, à l'Assemblée nationale. Ils sont sous-représentés dans la fonction publique. Regardez, par exemple, la situation des jeunes Noirs à Montréal. Les jeunes Noirs de moins de 30 ans à Montréal: un sur cinq est en chômage. Il y a encore dans la société québécoise des zones d'exclusion qui persistent, même si nous parlons de façon très large et très généreuse, de façon plutôt philosophique, d'une communauté civique, d'une vision de notre identité d'abord basée sur des critères, en tout cas des notions qui tournent alentour de notre citoyenneté. Nous savons que des zones d'exclusion persistent. Et, même si, depuis longtemps, nous avons acquis l'égalité de fait, l'égalité entre chaque citoyen – nous avons tous le même droit de vote, tous égaux devant la loi, tous égaux devant les tribunaux – nous savons que, sur une base communautaire, il y a des difficultés qui persistent.

Lorsqu'on regarde, par exemple, jusqu'à quel point les jeunes Noirs sont surreprésentés dans le système carcéral, et particulièrement à la Direction de la protection de la jeunesse, parce que nous n'avons pas su nécessairement communiquer toujours des bons messages et comprendre la réalité de ces personnes; lorsque nous regardons la situation de l'emploi de certains jeunes des minorités visibles; lorsqu'on regarde l'absence de représentation dans la fonction publique ou même ici, à l'Assemblée nationale, nous savons qu'il reste encore beaucoup de chemin à faire. Et je pense que c'est en soutenant la participation de ces personnes que nous pourrons, de la façon la plus efficace, lutter contre la discrimination, lutter contre l'exclusion. C'est en rappelant que, oui, si nous avons acquis une égalité dans les faits, peut-être que sur d'autres réalités il y a des problèmes à l'atteinte de l'égalité entre tous les citoyens.

Sur cette idée, M. le Président, nous pourrions ici facilement admettre que ce serait discriminatoire de traiter de façon inégale des gens qui sont égaux. Ça serait ça, de la discrimination, de traiter des gens égaux de façon inégale. Mais peut-être... Est-ce que nous n'avons pas aussi la responsabilité de traiter de façon inégale des gens qui, à cause de leur réalité, sont inégaux par définition? Et, à cette question, bien, le gouvernement du Québec est en train d'y répondre. J'ai annoncé, pas plus tard que la semaine dernière, une révision complète du programme d'obligations contractuelles que, je regrette de le dire, nos prédécesseurs avaient un peu mis de côté. Il faut le revoir et lui donner un second souffle. Nous allons revoir l'ensemble des programmes d'accès à l'égalité qui font en sorte de donner une chance à des gens qui ont besoin d'un coup de pouce parce que victimes d'une discrimination systémique.

Alors, M. le Président, il reste du chemin à faire pour que nous puissions, au-delà des mots, dans les faits, faire en sorte que chaque citoyen au Québec sente qu'il peut participer et contribuer à la société québécoise et que sa contribution est appréciée. Il y a encore un bout de chemin à faire. La société québécoise est une société ouverte, une société tolérante. La question, M. le Président, n'est pas de savoir s'il y a davantage de racisme ou davantage de discrimination dans la société québécoise qu'il y en a ailleurs. Ce que nous devons nous dire aujourd'hui, comme parlementaires, au-delà du nationalisme ethnique auquel fait référence le député d'Iberville, ce contre quoi nous devons nous élever, c'est contre l'exclusion. Et une des formes d'exclusion, ce serait un nationalisme ethnique.

Mais profitons peut-être du débat que nous offre le député d'Iberville pour aller plus loin. Je ne proposerai pas d'amendement à la motion du député d'Iberville, je pense qu'elle est fort convenable dans sa présentation, mais notre défi, c'est d'aller encore plus loin que la motion du député d'Iberville et de nous élever, nous, ici, contre des formes d'exclusion. La meilleure façon de le faire, ce sera, bien sûr, de nommer des choses. Parce qu'il y a toute sortes de courants de pensée qui font en sorte de dire: Bien, le racisme, puisque ce n'est pas pire ici qu'ailleurs, on n'en parle pas puis on cache ça sous le tapis. Ce n'est pas la voie que les parlementaires de longue date ici, à l'Assemblée nationale, ont retenue.

Nous allons nommer les choses, nous allons les identifier. Nous allons tenter, avec les moyens qui sont ceux de l'État, d'agir sur ces comportements. Nous allons tenter de faire en sorte de soutenir le rapprochement interculturel, donc une meilleure connaissance de l'altérité. Je pense, M. le Président, que c'est de cette façon que nous serons capables, riches de ces expériences – moi, comme souverainiste, et mes collègues qui sont ici, à l'Assemblée nationale, comme souverainistes – de concevoir des rapports avec le reste du monde qui ne seront pas uniquement fondés sur l'ethnicité, bien au contraire, mais qui seront fondés sur l'appartenance à un certain nombre... La fraternité, me dit-on. Oui, la fraternité, la solidarité, l'ouverture qui feront en sorte, M. le Président, qu'au lendemain d'un vote sur la souveraineté tous et chacun, même s'ils ont voté contre la souveraineté, pourront se reconnaître dans ce projet collectif.

C'est ce que j'ai déjà dit à l'Assemblée nationale, c'est ce que j'ai déjà dit lorsque je me suis élevé contre certaines formes d'intégrisme qui sont présentes parfois dans la société québécoise. Je suis toujours heureux de rappeler que, dans nos institutions, dans les discours publics, nous avons adopté une vision beaucoup plus large que celle-là. Je pense que, par des gestes concrets, par l'occasion que nous donne le député d'Iberville par sa motion, par nos propos, nous le réaffirmons à nouveau. En étant capables de bâtir justement ces rapports avec le reste du monde de façon ouverte, fraternelle, soucieuse de l'enrichissement de tous et chacun, soucieuse de voir que chaque citoyen, au-delà des opinions politiques, peut participer au projet collectif, je pense que c'est comme ça que nous aurons démontré, par la parole et par les faits, que nous souhaitons, d'abord et avant tout, rassembler plutôt que diviser. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Nous cédons maintenant la parole au député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que j'interviens sur la motion de notre collègue d'Iberville. J'avais l'intention de commencer un peu différemment, mais je vais quand même peut-être commencer, de fait, différemment, puisque le ministre m'y invite dans ses derniers propos nous parlant du prochain référendum. J'aurais préféré qu'on écarte... Quoique ça fait partie du débat, alors, oui, il faut en parler.

Il parle donc du prochain référendum en se disant qu'il est sûr que tous vont se reconnaître dans cette appartenance. Je peux lui parler du dernier référendum et je peux lui dire que tous se reconnaissent sans doute dans ce projet d'appartenance multiple qui inclut l'appartenance canadienne. Si sa logique est vraie pour le prochain, elle devrait être vraie pour le dernier que nous avons eu. Bien sûr, il y a des changements à faire pour fortifier cette appartenance canadienne, bien qu'elle soit chez certains de nos concitoyens déjà très présente, déjà très intense; chez certains autres, elle n'y est pas du tout; puis, pour un bon nombre, elle y est, mais elle mérite d'être animée, alimentée.

(10 h 50)

Je pense que c'est ce à quoi nous devrions nous attarder. Et pourquoi nous devrions nous attarder à ce projet? Bien, peut-être justement à cause de la motion qui est sur la table aujourd'hui. Cette motion nous invite à nous interroger sur la société. Je trouve très utile que nous ayons parfois, à l'Assemblée, ce genre de débat qui nous permet d'avoir un certain recul. Lorsqu'on a des points précis, des modifications à des lois qui sont apportées, ce sont des enjeux très, très précis. On va avoir un débat cet après-midi, M. le Président, sur des enjeux très précis, très pointus, et c'est difficile de prendre du recul. Mais là on a l'occasion ce matin de prendre du recul et de dire pourquoi, dans le fond... C'est un peu ça, c'est un peu de dire pourquoi on est engagé en politique, parce que l'engagement en politique, c'est une implication, une action pour la société: Qu'est-ce qu'on veut faire de notre société, la société à bâtir, celle qui est devant nous?

Ça me fait toujours rire un peu l'expression «projet de société». C'est un peu un fourre-tout. On met 22 ou 50 idées et puis on dit: Voilà mon projet de société. Mais, dans le fond, un projet de société, c'est, pour moi – certains diront que c'est un peu court, d'autres diront que c'est très large – celui où nous bâtissons, dans le respect des individus, le respect de leurs appartenances, une société où nous sommes capables de faire vivre ensemble, en cohabitation harmonieuse, malgré les aléas de la vie, qui sont normaux... Que le projet qui nous anime soit celui qu'il y ait des communautés distinctes, soient-elles des communautés nationales, qui vivent ensemble, qui s'épanouissent ensemble, qui comprennent qu'elles ne sont pas menacées par l'autre, mais qu'elles sont en expansion et en rayonnement avec l'autre.

C'est le projet humain, M. le Président. Le projet de société que nous devons viser pour le Québec, c'est un projet universel: celui de rapprocher les gens, non pas pour qu'ils se fondent dans un seul moule. Le député d'Iberville l'a bien précisée, la richesse qu'on peut avoir, au plan personnel, de constater les différences. Mais cette richesse, nous ne devons pas la perdre, M. le Président, il faut l'encourager, l'acceptation de la différence, la reconnaissance que la différence est un enrichissement plutôt qu'un appauvrissement. La différence n'est pas menace, et il faut savoir s'appuyer sur cette confiance pour préparer la société de demain.

Voilà un projet de société: l'attrait des appartenances multiples, des appartenances, je dirais, volontaires. C'est au citoyen à choisir. Lorsqu'on parle du nationalisme civique, c'est de ça dont on parle. Et je me fais fort de dire que j'en suis, puisque ce nationalisme civique, c'est un peu les bons côtés du nationalisme et les bons côtés de l'humanisme. C'est ça, le nationalisme civique, c'est s'assurer qu'on va respecter les gens, qu'on ne va pas les forcer dans un moule et qu'on va pouvoir profiter de leurs différences.

Lorsqu'on s'écarte, qu'on regarde les institutions... Le ministre nous a encouragés à regarder les institutions. On peut regarder les régimes politiques. Bien qu'il soit vrai que dans les régimes unitaires on soit capable de bâtir des sociétés accueillantes, ouvertes; le système fédéral – et je ne parle pas ici pour apeurer les gens du fédéralisme canadien, j'en parlerai tantôt – l'idée fédérale, qu'est-ce qu'elle soutient, sur quoi repose-t-elle? Elle repose sur l'association de communautés différentes. C'est ça, l'idée fédérale. Elle est un moyen de mettre de l'avant la société que nous voulons tous bâtir. C'est un moyen. Certains peuvent être pour, d'autres peuvent être contre. Je dis: Voilà un des moyens qui a été créé et qui permet cela.

Alors, s'il y a des changements à apporter à notre propre système, cela ne veut pas dire que l'idée n'est pas bonne; cela veut dire qu'il faut regarder vers les changements à lui apporter pour s'assurer que tous vont se sentir à l'aise dans leur appartenance propre, que tous vont dire: J'y suis bien, j'y suis chez moi, je m'y reconnais. C'est à ça qu'il faut s'attarder plutôt qu'à se diviser, plutôt qu'à s'opposer, parce que, bien qu'on puisse faire de long discours, on ne peut pas nier non plus, bien que le ministre tantôt nous ait invités à accepter la théorie qui le guide à l'effet qu'il n'y a personne, au Québec, qui vive d'exclusion ou encourage l'exclusion... C'est un faut débat, dit-il.

Je n'irai pas très loin... Et je n'ai pas fait de recherche, je suis allé avec un tout petit papier, M. le Président, aujourd'hui, pas parce que je veux dire que ce papier-là fait... est généralisé, je ne veux pas qu'on généralise le cas, je veux juste qu'on n'oublie pas que c'est là, quand même, que ça existe, que c'est dans le débat. C'est un texte qu'il y avait dans Le Devoir du 3 mars dernier, qui est de Jean-Marc Léger et qui dit ceci, et ça, c'est le titre que je vais vous lire: «Seule la langue justifie le combat pour la souveraineté. Premier facteur de la survivance des francophones d'Amérique, le français est notre patrie, et les concessions en ce domaine sont l'antichambre de la démission.» Il y a un texte qui est cité. Dans un passage, l'auteur dit: «Dans son "Esthétique de la langue française", Remy de Gourmont écrivait: "Diminuer l'utilité d'une langue, c'est diminuer son droit à la vie. Lui donner, sur son propre territoire, des langues concurrentes, c'est amoindrir son importance dans des proportions incalculables".»

Ça, c'est ce qui soutient la thèse, l'espèce de thèse d'exclusion, en fait, de méfiance. Il n'y a pas de confiance là-dedans. C'est de la survivance, une grande méfiance, et c'est souvent la base de l'exclusion. Lorsqu'on est en méfiance, craintif, il y a un repli qui s'exerce. Et je pense qu'il faut combattre ce genre de réduction qu'on fait de la société québécoise, soit-il du projet de souveraineté.

Mais, dans le discours des forces qui encouragent, soutiennent le projet d'indépendance, on ne peut pas dire non plus qu'il n'y a pas cet élément de division et d'exclusion. On ne peut pas faire semblant. Je ne veux pas faire porter tout mon propos là-dessus, mais il faut bien quand même remarquer que, dans la division, dans la stratégie du «nous» contre «eux», qui est présente tout le temps dans la stratégie du gouvernement et lorsqu'il formait l'opposition avant, de toujours de diviser les Québécois contre les Canadiens... Les Canadiens hors Québec, ce n'est pas l'ennemi, M. le Président. Lorsqu'on parle du nationalisme civique, il faut respecter l'appartenance même, le sentiment d'appartenance même de nombreux Québécois qui sentent une double appartenance, et québécoise et canadienne, une fierté pour les deux. Et on peut respecter ça. Si on veut faire un débat sur le nationalisme civique comme on le fait ici, je pense qu'on est capable de dire ça. On est capable de le reconnaître.

Pourquoi il y a cette division qui s'installe? C'est une question que je vous pose, M. le Président, et qu'on se pose. Pourquoi même il y a des éléments de division, au sein même de la société québécoise, qu'on crée? Le débat sur la langue le démontre pas mal. Avait-on besoin vraiment... Je veux dire, moi, je me souviens de 1995. Je me souviens même de l'avant-projet de loi sur la souveraineté, là, que M. Parizeau avait déposé, qui avait été attaqué par un certain nombre de personnes parce qu'on avait oublié d'écrire la langue là-dedans. Il y en avait qui avaient pensé que la langue, c'était une bonne stratégie pour faire peur au monde, pour faire de l'exclusion un peu: nous contre eux. Ils l'avaient oublié, pourquoi. Tout le monde avait un sentiment que, là, on avait trouvé un équilibre avec la loi 86 et qu'il y avait une possibilité de ramener tout le monde, d'avoir une société plus harmonieuse, plus accueillante.

Bon. Alors, là, on s'est rendu au référendum, et là, bien, je ne vous rappelle pas les propos, depuis ce temps-là on a eu d'autres personnes qui commencent à disséquer le vote. Alors, là, il y aurait eu une majorité chez les uns et une majorité chez les autres dans certains pôles, comme s'il y avait deux classes de citoyens. Moi, je pense qu'il ne faut pas faire ça. C'est pourtant ça qui existe dans le discours. Dans la foulée de tout ça, on a relancé le débat linguistique. Et ce n'était pas nécessaire. Même la première année du mandat de ce gouvernement, ils l'admettaient eux-mêmes, que ce n'était pas nécessaire. Mais tout à coup la stratégie revient.

Et, moi, je veux bien partager avec le ministre ses envolées oratoires pour nous dire que nous sommes tous porteurs du projet de nationalisme civique d'une société ouverte et d'inclusion, mais je suis obligé de lui dire: Dans les gestes de tous les jours, puisque c'est de ça dont il nous parlait, quel est notre mandat? Bien, je pense que notre mandat, c'est de nous ouvrir, de respecter la différence, d'inciter, d'appuyer, de favoriser les appartenances multiples parce qu'elles sont le choix des citoyens. C'est la liberté, M. le Président. Lorsque l'État vient dicter l'appartenance des gens, il n'y a plus de liberté. Je me lève ici assez régulièrement pour exercer cette liberté et rappeler au gouvernement qu'il doit la favoriser.

(11 heures)

On a parlé des éléments qui vont favoriser une société d'inclusion plutôt que d'exclusion. Moi, je peux vous dire, M. le Président – je pense qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, je n'aurai pas le temps de terminer l'idée – que, lorsque je regarde mon propre comté, ce que je regarde – parce qu'il faut aussi regarder ça à une dimension, là, plus près de nous... Vous savez, dans mon comté, il y a une communauté francophone, une communauté anglophone et une communauté mohawk. Et c'est toujours plaisant de voir que... ah, plaisant... toujours intéressant de voir que ce qui nous anime souvent, c'est ce qu'on retire de l'histoire, c'est notre façon de voir la réalité, inspirés par les enseignants, par nos amis, notre petite société tout près de nous qui nous entoure.

Alors, quand vous parlez à des francophones, ils vont vous faire l'histoire du Québec et du Canada à la façon des francophones; c'est une vérité que nous avons. Lorsque vous allez voir des gens de la communauté anglophone, ils vont vous conter leur version de l'histoire du Québec et du Canada, et c'est leur vérité à eux. Et, lorsque vous allez voir des Mohawks, il y a une troisième vérité qui apparaît, M. le Président. Et je dis «trois vérités» parce que ce sont des présomptions ou des croyances, des motivations qui habitent les gens, et, pour eux, ce sont des vérités. Elles pourraient, à l'analyse, paraître contradictoires, mais l'idée, ici, ce n'est pas de les mettre en opposition, c'est de voir leur complémentarité, c'est de voir qu'il y a au départ une compréhension à développer. Respecter l'autre, c'est d'abord savoir qui il est, comme il se perçoit, et de là va se bâtir une confiance et de là va se bâtir une société d'inclusion.

Le nationalisme ethnique que nous pourfendons de tous les côtés de cette Chambre, c'est une société d'exclusion qui ne veut pas prendre la peine de comprendre l'autre, mais qui appuie son projet pour se protéger de l'autre parce qu'il se sent menacé par l'autre, et il développe donc des stratégies de «nous contre eux». En tout temps, il faut savoir regarder la vérité.

Je termine, M. le Président, puisqu'on m'indique que nous sommes plusieurs à vouloir débattre sur cette motion, en rappelant simplement que je souhaite ardemment qu'à chaque occasion que nous avons d'intervenir dans le débat public nous pensions à la motion du député d'Iberville et que nous nous rappelions que c'est dans nos propos de tous les jours, dans nos actions quotidiennes que nous pouvons encourager une société d'accueil ou l'inciter à développer un nationalisme ethnique et d'exclusion. À tous les jours. Souvenons-nous de cela et nous aurons déjà tiré un profit du débat d'aujourd'hui. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Châteauguay. Je tiens à rappeler à l'opposition officielle qu'il vous restera un temps de parole de 22 minutes, sans compter, bien entendu, le temps dont les députés indépendants disposent. Alors, M. le député d'Abitibi... Excusez-moi. Alors, nous allons céder maintenant la parole au député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Qui peut être opposé à la motion présentée devant nous aujourd'hui? Qui a envie que nos sentiments de fierté, d'appartenance à nos traditions soient réduits à une supercherie de nationalisme qui cause discorde et rivalité entre les Québécois? Sûrement pas nous, les membres du Parti libéral du Québec. Non, car personne quelque peu sensé ne peut avoir envie de prendre le chemin de l'isolement qui nous conduira vers un mur de haine et de méfiance. Ce chemin nous mènera vers une société divisée, comme mon collègue a dit, entre «eux» et «nous», où l'injustice et le préjudice seront présents, pour finalement s'arrêter dans un climat que personne ne veut.

And yet, Mr. Speaker, we are drifting towards such an impasse. The current Government's actions, words and deeds are producing a situation that no one wants, that everyone fears. If its sentiments are not translated into a change in policy as well as in spirit, a change that has to come first and foremost from the PQ Government, then the motion today will only be, as we say in English, a vote in favour of motherhood.

À quoi est-ce que je fais référence? Je réfère au gouvernement péquiste qui a l'habitude de parler deux langages. Je fais référence aussi à l'entrevue accordée par le premier ministre au journal Le Devoir , il n'y a pas si longtemps, où il a mentionné que les leaders de la communauté anglophone portaient le fardeau des difficultés rencontrées par le gouvernement dans sa tentative de dialogue avec eux. Il les a accusés d'être incapables d'exprimer leur confiance envers le gouvernement qui leur a fait des propositions en toute bonne foi, d'après lui.

Je ne vous ressortirai pas l'histoire des remarques lamentables de M. Parizeau à propos de l'argent et du vote ethnique qui ont fait couler...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député. J'aimerais qu'on s'en tienne rigoureusement à notre règlement. Vous savez qu'en vertu de 35.7° le député qui a la parole ne peut se servir d'un langage blessant à l'adresse de qui que ce soit. Alors, je vous demanderais simplement de faire attention, dans les propos qui vont suivre, pour ne pas faire en sorte que je sois obligé d'appliquer l'article 35.7°. Merci.

M. Bergman: Merci, M. le Président. Alors, je ne vous rappellerai pas les remarques de M. Parizeau à propos de l'argent et du vote ethnique qui ont fait couler à pic les rêves des souverainistes. Je ne vous parlerai pas non plus du refus du gouvernement de condamner les menaces proférées par Raymond Villeneuve à l'égard des gens d'affaires de la communauté juive, alors qu'il était invité à le faire par M. Johnson.

J'imagine que vous me pardonnerez si je vous rappelle le discours du premier ministre, au théâtre le Centaur, où il a invité la communauté anglophone à dialoguer, lui mentionnant l'importance de respecter les aspirations démocratiques du Québec, ayant sûrement en tête une victoire du Oui à un référendum, alors que lui-même n'a jamais accepté le vote démocratique de la vaste majorité des Québécois au référendum de 1995.

If I return to these incidents, Mr. Speaker, and to others to which I shall refer, it is because the Government before us has a terrible blind spot. And what about the Premier himself who has the audacity to go on public record and to state that Quebeckers are not Canadians? Granted, the Premier might feel like this, but the reality is that Québec is still a part of Canada and that Quebeckers are still Canadians and, to my knowledge, have not and will never sever those ties.

Does the Premier not understand that when people hear him make these outlandish claims, they have every good reason to wonder how much good faith he has? And, if it is not his good faith they question, then certainly it is his hold on reality. Does he not understand that these statements foment the very mistrust and discord that this motion would rather see banished from our public realm? Is this ethnic nationalism, Mr. Speaker? Is it healthy nationalism? Or is it plain ignorance, the inevitable consequence of a party so tied to its outlook that it loses sight of reality and in the process heaps ridicule on all of us?

(11 h 10)

Il n'y a pas si longtemps, M. le Président, un article paru dans un journal allemand indiquait que le Québec est antisémite. Moi, je rejette fermement, comme plusieurs autres, cette affirmation. Je veux que ce soit très, très clair que, moi, le député de D'Arcy-McGee, je rejette cette affirmation, M. le Président. Quiconque a des yeux pour voir et une tête pour penser est capable de se rendre compte que la société québécoise est semblable aux autres: ouverte sur le monde, composée d'immigrants venus de partout. Le Québec est une société démocratique et pluraliste et, en conséquence, apporte son lot de contradictions, et c'est normal. Mais, pour le gouvernement, une société démocratique et pluraliste, ce ne sont que des mots, des mots cependant fort utiles pour le rassurer dans ses illusions qu'il est tolérant alors qu'il met en place des programmes qui ne tiennent aucun compte des diversités culturelles de notre société qui sont l'une de nos forces.

Instead, the Government does not miss an opportunity to irritate the many pluralist currents in Québec and open up to the preposterous charges such as were written and continue to be written in newspapers at home and abroad. Yet when the Government is criticized, and justly so as befits the democratic process, the Government wraps itself up in the mantle of democracy and accuses its own citizens of not being democratic, as if that were enough to justify its policies.

Il ne faudrait pas oublier que c'est le gouvernement du Parti québécois qui a ramené le projet de loi n° 40 pour instaurer ce que tout le monde appelle la «police de la langue», et ce, en dépit du fait que, pour la communauté anglophone, le vrai problème, ce n'est pas la grandeur des affiches dans les magasins, mais bien de préserver l'existence même de ces magasins et de ces commerces partout dans le Québec. Le gouvernement s'est tellement dissocié des besoins des Québécois pour ne poursuivre que ses propres buts qu'il n'est pas capable de savoir les dommages qu'il est en train de causer à notre société.

Quand la population parle, M. le Président, le gouvernement a l'obligation d'écouter. Ce qu'elle s'efforce de lui dire, c'est qu'il faut qu'il cesse de créer des divisions et des dissensions parmi les membres des communautés qui composent notre société et qu'il est en train de faire, ce gouvernement, un tort irréparable à notre démocratie.

If this nightmare of policies of intolerance and ethnocentricity does not end, the open and diverse society we all cherish will be more closed, more inward-looking, and what is now merely characterized as ethnic nationalism will have become a reality. But the Premier and his party will not see that, cannot see that, because they continue to think that they can have it all, that they can square the circle and talk of an open, pluralist, democratic society as emblematic of their nationalist dream. But they refuse to accept in practical and legal terms diversity. They refuse to accept and recognize that those who constitute that pluralism do not share their vision for the way in which an open and forward-looking Québec ought to be and ought to look.

La motion présentée devant nous, moi, je l'accepte au nom de tous les Québécoises et Québécois, et c'est la raison pour laquelle, moi, j'appuie cette motion. Mr. Speaker, I support this motion on behalf of all Quebeckers. I thank you.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous cédons maintenant la parole au député d'Abitibi-Ouest. M. le député.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Je voudrais profiter de cette motion que je juge importante aujourd'hui pour apporter quelques considérations. C'est évident que ça me déplaît d'avoir l'obligation de le faire après les propos que je viens d'entendre. Je ne crois pas que c'est de manquer de respectabilité envers les parlementaires d'indiquer que c'est justement de tels propos qui donnent de la légitimité à une motion comme celle d'aujourd'hui et qui donnent l'impression qu'on peut être d'accord, comme il vient de conclure à la fin: Je suis parfaitement d'accord avec cette motion parce que ça me permet d'en faire, du nationalisme ethnique.

Alors, moi, ce n'est pas pour ces motifs-là que je vais être d'accord avec la motion, M. le Président, et je pense que les propos que nous venons d'entendre sont, tout compte fait, déplorables. Je voudrais juste faire deux, trois considérations très rapides là-dessus, M. le Président. Il faut, dans une société, faire une distinction fondamentale entre la nécessité pour d'aucuns de faire un constat sur une réalité observable par tous. Ça, c'est une chose. Et, oui, il y a des gens qui ont fait ça. Oui, il y a des gens qui ont fait ça, puis je peux vous garantir, sans être un prophète, que ça va se refaire à nouveau. Des gens qui vont évaluer, analyser, sur des bases qui ne sont pas nécessairement les miennes, un résultat, une réalité observable, factuelle, par toutes sortes de monde.

Mais il y a toute une distinction à faire entre ce que je viens de dire puis commencer à porter, comme on vient de l'entendre, des jugements qualitatifs sous forme d'accusations. Moi, pour un, c'est un passage que je ne franchirai pas. Et d'entendre, à satiété: Vous, le Parti québécois, vous, les péquistes, vous avez fait ci, vous êtes ce que j'appelle préoccupés par une forme de nationalisme qui oppose, qui divise plutôt qu'il rallie. Je regrette, ça fait 20 ans que je suis membre de cette formation – ça fait plus longtemps que ça, mais ça fait 20 ans que je suis en politique – je n'ai pas senti ça, je n'ai pas vécu ça et ce n'est pas la réalité, en tout cas, d'un grand morceau de cet État québécois là que je connais et qui s'appelle le Québec de base, le Québec des régions.

Je ne dis pas que cette réalité n'est pas plus présente dans des milieux à concentration de population où, effectivement, il y a une pluralité ethnique, où il y a toutes sortes de communautés distinctes. Parce qu'il faut faire attention aux nominatifs puis aux appellations, puis, moi, je n'ai pas de trouble avec ça. Mais ce que je sens de plus en plus au Québec, c'est que, dans les faits, dans nos législations, dans la réalité quotidienne, on a développé un souci de plus en plus constant de cette réalité.

Parce qu'on ne peut pas dire à la fois, M. le Président, d'un côté: Oui, compte tenu que, pour toutes sortes de raisons que je ne juge pas... On n'a pas un taux de renouvellement de la population qui correspond à une progression, et, en conséquence, l'enrichissement qui nous est donné par l'arrivée de toutes sortes de communautés immigrantes, c'est un plus, puis on va composer avec ça, puis on va s'arranger pour que ce soit de plus en plus quelque chose qui fasse grandir, par cette diversité culturelle, diversité de tendances, diversité de communautés, le Québec profond, le Québec de base, le Québec concentré, urbain, où on retrouve des réalités plus importantes.

Je rappelle – parce que je trouve que c'est important – ce que le député d'Iberville a voulu faire... Et, moi, je n'ai aucun trouble, sincèrement, et je suis convaincu que ma formation n'en a pas. D'ailleurs, le ministre des Relations avec les citoyens l'a rappelé tantôt. Mais, moi, un peu comme à titre de président du caucus de cette formation, je suis très à l'aise ce matin pour dire: L'Assemblée nationale, dans un souci de réaffirmer les principes de la Charte, et ainsi de suite, favorise... bon, quelle que soit l'origine... condamne le nationalisme ethnique sous toutes ses formes, parce que, oui, le nationalisme ethnique, quand on le condamne, c'est pour éviter qu'on pratique ce que j'appelle un comportement d'exclusion dans les faits, dans la législation, dans tout l'arrimage d'éléments nécessaires à un gouvernement responsable pour qu'une société se développe, grandisse et soit en mesure d'offrir un projet collectif, indépendamment des questions de race, d'ethnie, de religion, de culture. Et je crois que c'est beaucoup plus de ce tissu que nous sommes.

Et l'autre bras de la motion... Et c'est là que je suis énormément déçu des propos du député de D'Arcy-McGee. Parce que c'est tellement facile de dire: Regardez, vous, ce que vous faites. C'est comme si ça le justifiait de pratiquer le nationalisme ethnique qu'on condamne par la motion. Puis, à la fin, pour se donner bonne bouche probablement: Ah! bien, on va voter, on va être d'accord, on va voter pour, parce que, moi, je vais pouvoir continuer à dire que, de l'autre côté, vous faites du nationalisme ethnique. Je ne qualifierai pas plus que ça, mais je trouve ça proprement scandaleux.

(11 h 20)

L'autre bras de la motion, c'est: On invite, en conséquence, tous les groupes d'intérêts qui représentent des Québécois indistinctement de leur origine à s'abstenir de favoriser ou d'entretenir, ainsi de suite. Moi, je suis pour ça à mort, et je veux le pratiquer à mort, mais je ne peux être d'accord que parce qu'on aurait un projet politique. Il me semble que c'est un droit fondamental, ça, de dire que le projet politique, moi, qui m'anime, qui m'habite et qui conditionne mon action politique, il est noble, il est beau, il est pur, je n'ai pas de trouble avec ça, mais il n'est pas exclusif. Il n'est pas exclusif d'aucune façon. Ce que je veux, c'est un régime politique qui correspond à ce que je suis.

Puis, quand j'entendais le député de Châteauguay qui parlait du «nous» contre «eux», il n'y a pas de «nous» contre «eux», quant à moi, parce que, si c'était exact, moi, j'érigerais des frontières très hermétiques entre ma circonscription et mes voisins, parce que ça, ça l'est, le «nous» contre «eux», selon son discours. Il n'y en a pas, de frontières, puis je n'en veux pas. Est-ce que j'ai l'intention, dans mon projet collectif, d'en ériger avec le reste du Canada? Non! Pas question. On veut un voisin en santé, on veut un voisin fort, on veut un voisin avec qui on a des relations.

Mais c'est quoi, le péché? Il est où, le péché, M. le Président, de dire: Nous, sur le plan politique, nous croyons qu'on aurait un instrument plus fort, comme collectivité, si nous disposions de l'entièreté de ce que nous sommes? C'est du nationalisme. C'est du nationalisme ethnique de réclamer que tout le monde soit porteur de ce projet collectif là, que tu sois un Allemand, un Grec, un Portugais, un Haïtien, peu importe, on pourrait tous les nommer? C'est quoi, le problème, là? Parce qu'on a permis à ces communautés-là – bien, on a permis, c'est une expression – on a invité ces communautés-là à s'intégrer à la société québécoise tout en conservant...

Quand je vois, par exemple, les COFI, quand je vois tous les éléments de soutien que l'État québécois offre aux communautés distinctes pour permettre à la fois de mieux comprendre la société québécoise, mais en même temps de pouvoir s'épanouir comme elles le veulent, comme elles l'entendent, dans le respect de leurs traditions, de leur culture puis, entre autres, pour la deuxième plus grande majorité qui est les anglophones – c'est-à-dire minorité au Québec mais majorité dans le reste du Canada – est-ce que les Québécois ont eu un comportement ouvert, concret, pragmatique? Parce que ce qu'on sent – puis je veux le citer, là – on sent que les Québécois puis les Québécoises de toutes origines, leur ferveur, là, c'est justement qu'ils sont tous d'accord pour combattre des mécanismes créateurs d'exclusions et qu'ils favoriseraient davantage plutôt – c'est ce à quoi ils adhèrent – une intégration harmonieuse de tous les citoyens et de toutes les citoyennes.

Le ministre l'a mentionné lui-même, est-ce qu'il reste encore des poches – excusez l'expression – d'exclusion? Est-ce qu'il reste des zones, est-ce qu'il reste des secteurs où il y a encore des difficultés concrètes, majeures, pour plusieurs groupes, de témoigner de cette intégration? La réponse, c'est oui. Je ne me mettrai pas de bandeau sur les yeux. Et, quand le député de Châteauguay rappelait ça dans son exposé en disant: Oui, mais regardez telle affaire, telle affaire, je reviens au principe que je développais tantôt: il y a une distinction à faire entre constater une réalité observable par le plus grand nombre d'observateurs neutres puis ce que j'appelle un comportement qui ferait qu'on tente de juger, qu'on tente d'exclure, qu'on tente de diviser.

Moi, je ne veux pas exclure, je ne veux pas diviser. Je veux rassembler, puis, de toute façon – je le dis comme je le pense – ça ne m'intéresse pas pantoute, moi, d'avoir une souveraineté politique si jamais je l'avais faite en disant: Bien, eux autres, je ne les veux plus; eux autres, je ne les veux plus, puis là je fragmente moi-même dans mon projet futur – qui n'est pas le mien, en passant, mais qui est le projet de cette société québécoise, de la formation politique à laquelle j'adhère... Ça ne me tente pas, moi, de fragmenter ça par groupes, par sections, par couleurs de peau, puis ainsi de suite.

Alors, la motion d'aujourd'hui, là où je sais gré au député d'Iberville, c'est de rappeler que, oui, malheureusement... Parce que ça ne donne rien de vivre toujours avec un bandeau sur les yeux. Il y a des gens qui malheureusement continuent à pratiquer un nationalisme plutôt exclusif basé sur l'ethnicité.

Mais ma question, M. le Président – puis je l'ai posée en privé au député d'Iberville – c'est: Est-ce que l'ethnicité occupe une place si grande que ça au Québec, si importante que ça? Est-ce que ce n'est pas plutôt des valeurs de solidarité, de fraternité, de générosité qui sont davantage des valeurs plus universelles qui rallient l'ensemble des Québécois et des Québécoises sans distinction, encore là, d'ethnicité ou d'ethnie? Moi, je crois que c'est ça. Moi, je connais bien plus ce Québec-là, où les valeurs plus fondamentales comme la solidarité, la fraternité, la générosité... On le voit à chaque campagne, à chaque souscription, à chaque coup dur que le Québec a à passer à travers. Ce qu'on sent, c'est des valeurs plus universelles qui, elles, ces valeurs-là, sont moins divisibles, sont moins exclusives, permettent davantage d'être conscient qu'on est dans une société qui a progressé, qui a évolué, parce que c'est quand même des éléments auxquels... Si je reviens au Québec que je connais davantage, le Québec de l'ensemble des régions, il a dû évoluer, s'habituer à cette réalité-là. Ce n'était pas la nôtre il y a 30, 40 ou 25 ans, mais, de plus en plus, c'est notre réalité.

Est-ce que, moi, François Gendron, en Abitibi-Ouest, je dois vivre, peut-être moins quotidiennement que ces Montréalais et ces Montréalaises, avec des réalités ethniques que je ne connaissais pas il y a 15, 20 ans? La réponse, c'est oui. Puis est-ce que pour autant j'ai un comportement qui indiquerait à ces gens-là qu'ils ne sont pas les bienvenus puis que ça me tente justement de leur rappeler davantage que, moi, je serais le «nous» québécois et eux autres seraient le «eux» que je veux tasser? La réponse, c'est non. Et c'est pour ça que c'est toujours un peu déplorable d'avoir des gens qui en profitent pour faire de la petite politique un peu, pas mal basse et très partisane en ne contextant pas ce que la motion appelle. Ce que la motion appelle ce matin, M. le Président, c'est justement une solidarité pour que dans l'avenir on soit très exigeant.

Et là où je rejoins le député de Châteauguay... Là, j'essaie de le citer. Il dit: Je suis content de la motion du député d'Iberville parce qu'elle devrait nous rappeler, dans les débats futurs que nous aurons, dans les propos que nous tiendrons sur d'autres questions, qu'il est toujours important de se rappeler que, si on adopte cette motion-là pour le condamner, bien, il faut avoir une pratique qui prouve qu'on ne fait pas que le condamner, mais on fait la promotion inverse. On fait la promotion de l'entente, on fait la promotion de la nécessité de favoriser cette nécessaire compréhension chez tous les Québécois que, oui, on va progresser davantage si on a une politique qui, au lieu de diviser les Québécois dans leurs rapports puis dans nos rapports, que ce soit avec l'État, que ce soit entre nous... On veut être un Québec au XXIe siècle, et, pour que le Québec du XXIe siècle soit vraiment vivant, concret, bien, c'est évident qu'il faut inviter tous les Québécois, les Québécoises, les parlementaires, l'ensemble des citoyens et des citoyennes du Québec, sur la base, comme on le disait tantôt, d'une notion civique, qui regroupe davantage ce que nous sommes, la nécessité, je pense, de supporter, en termes d'aide...

Puis c'est le cas, d'ailleurs. Regardez tous les groupes communautaires, regardez l'ensemble des intervenants qui essaient d'offrir ce support pour qu'il y ait progrès à l'intérieur même du projet plus collectif que les Québécois veulent offrir, porter, très haut, très noble, mais pas avec ce que j'appelle des relents où on aurait effectivement un comportement condamnable par rapport à toutes les sociétés modernes qui sont ouvertes sur le monde et qui sont conscientes que la seule façon, je pense, de progresser dans le projet collectif, c'est d'en faire vraiment un projet très, très, très stimulant, emballant, en sachant qu'il n'y a pas d'exclus. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Nous allons maintenant céder la parole au député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je suis fier de faire partie de cette société québécoise: une société ouverte, ouverte sur le monde, M. le Président, une société qui est à l'intérieur d'un grand pays qui est le Canada et qui a intégré ses valeurs de solidarité, qui a été en mesure, à partir de gens qui viennent de différentes origines, ensemble, de construire un avenir commun. Et je fais partie de ceux qui croient que l'avenir de la société québécoise, en représentant l'ensemble des communautés que nous représentons et que nous sommes, doit et peut se faire à l'intérieur de ce qui est mon pays, le Canada. Je comprends qu'on peut avoir des divergences sur cela, mais ça n'empêche pas que notre société a su démontrer – et nous avons tous, ici, quel que soit l'endroit d'où nous siégeons, des raisons d'en être fiers – des valeurs d'intégration, des valeurs d'ouverture, des valeurs de solidarité.

(11 h 30)

M. le Président, il n'est néanmoins pas inutile de voter la motion du député d'Iberville et de l'appuyer fortement, parce qu'il existe – et quelles que soient les tendances politiques; ce n'est pas l'apanage d'un groupe plus que d'un autre – des extrémistes qui pratiquent et qui veulent pratiquer ce qu'on appelle dans un langage le nationalisme ethnique, c'est-à-dire le fait de vouloir défendre les intérêts d'un groupe au détriment d'une société, qui est une société multifacettes, une société qui est rassembleuse, une société comme la nôtre, je dois dire, comme la nôtre et aussi à l'intérieur du grand ensemble canadien, qui est une société en mesure de témoigner de grandes valeurs.

Le Charte canadienne des droits et libertés, M. le Président, est probablement quelque chose qui nous unit tous dans la protection de droits fondamentaux. Peu de pays sont dotés d'une telle charte qui protège le citoyen, qui donne des droits au citoyen contre des actions des gouvernements. Et je suis sûr que, de part et d'autre de la Chambre, quels que soient les choix politiques que l'on peut faire, on retrouvera l'importance de la déclaration canadienne des droits et libertés, qui est probablement un des ciments qui unissent l'ensemble des Canadiens et Canadiennes autour d'un projet commun, M. le Président.

Je dois dire que je suis aussi en faveur de la résolution et du deuxième attendu de la résolution. Il y a des éléments – et je dois encore dire «indépendamment des choix politiques» – qui ont comme objectif de vouloir diviser les Québécois. Nous serons forts et nous serons en mesure de rentrer dans le XXIe siècle unis... Et je dois dire, M. le Président, que c'est un des principes de la formation politique que je représente ici, d'être un parti essentiellement d'inclusion, un parti qui essaie de rassembler les gens, quel que soit leur groupe, quelles que soient leurs origines, de manière à être un parti qui veut la promotion de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, M. le Président. C'est une raison pour laquelle je suis particulièrement fier de ce que le Parti libéral du Québec a pu faire depuis plus de 150 ans pour l'avancement des Québécois et des Québécoises, M. le Président. Et il a été capable de le faire en ayant toujours une ligne orientée vers les citoyens et en sachant qu'on peut à la fois défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises et aussi adhérer pleinement au miracle ou au rêve canadien, M. le Président.

Donc, en terminant, je voudrais rappeler que cette société qui est la nôtre dans sa grande majorité a des valeurs qui ne sont pas des valeurs d'exclusion, qui sont des valeurs d'inclusion, des valeurs de solidarité, des valeurs nobles. Mais il existe, à l'intérieur de notre société, des tendances – des tendances, et je ne voudrais pas ici les nommer pour leur donner plus de publicité – qui, d'un côté ou de l'autre du spectre politique, ont fait leur jeu ou leur avantage de positions qui étaient des positions ethniques.

Et je ne dis pas que c'est le propre d'aucun membre, ici, de cette Assemblée. Mais, à l'extérieur de cette Chambre, il y a des gens qui ont eu des discours qui étaient inacceptables, et la motion du député d'Iberville vient rappeler que les parlementaires québécois – et je souhaiterais qu'elle soit adoptée à l'unanimité du Parlement actuellement – ici, dans cette Chambre, représentant la population, vont condamner tous les extrémistes qui, dans le débat qui nous anime, vont utiliser des propos à caractère ethnique et qui sont totalement inacceptables dans notre société, parce que la société québécoise que je connais n'est pas celle qui adhère à ces propos extrémistes.

Alors, en conclusion, M. le Président, je vais voter en faveur de la proposition. Je vote en faveur de la proposition en réaffirmant qu'il est bon de rappeler que la société à laquelle vous adhérez et à laquelle j'adhère n'est pas une société qui promeut les éléments à caractère nationaliste ethnique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous céderons maintenant la parole au député de Viger, en lui rappelant que le temps disponible pour sa formation est maintenant de six minutes et demie. Alors, M. le député de Viger.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. J'interviens sur la motion qui a été présentée par le député d'Iberville parce que je pense que c'est très important, spécialement dans mon cas, d'intervenir sur cette motion, étant donné que je suis un peu concerné par cette motion.

M. le Président, d'entrée de jeu, je vais dire très clairement que je suis fier et même très fier d'être Québécois et en même temps d'être Canadien. Je suis au Québec et au Canada depuis 1964. Ça fait 33 ans bientôt que je suis ici. Et mes parents et ma soeur étaient ici avant moi. Ils sont arrivés deux ans avant moi. J'ai toujours considéré et je continue à considérer que je me sens parfaitement un citoyen du Québec, avec tous les mêmes privilèges et tous les mêmes devoirs et responsabilités que les citoyens en général ont ici, au Québec. Je me sens un Québécois à part entière. Non seulement je me sens, mais je suis convaincu d'être un Québécois à part entière.

M. le Président, j'ai déjà, dans cette enceinte, l'année dernière, je pense, eu l'occasion de dénoncer certains gestes qui ont été posés et qui sont des gestes que la communauté québécoise, la société québécoise... Les citoyens du Québec, en général, ne sont pas comme ça. Cette société d'ouverture, cette société de liberté, cette société qui nous a accueillis d'une façon remarquable n'est pas comme certains gestes qui sont posés par certaines personnes peuvent donner l'impression qu'elle puisse être. Et, tout le monde se rappellera, j'avais posé la question, à ce moment-là, parce que, dans certains journaux, il y avait eu... Comme l'affaire de mon père. Et ce sont des gestes comme ça qui ne devraient absolument pas survenir encore dans notre société, parce que c'est là qu'il va arriver encore des moments où il y aura des tensions, en disant: Voilà, il y a, d'un côté, des communautés culturelles ou des groupes ethniques – comme on veut les appeler – puis, de l'autre côté, les citoyens de souche. M. le Président, ça n'existe pas. Je le répète, je me sens et je suis très fier d'être Québécois à part entière.

On peut avoir, comme le disait le député d'Abitibi, des divergences politiques, et ça, c'est clair. C'est pour ça que le Parlement existe, c'est parce qu'on n'a pas tous les mêmes vues, on n'a pas tous les mêmes aspirations et on n'a pas tous les mêmes objectifs. Je peux comprendre, et je l'accepte très bien, que le Parti québécois a un objectif qui est celui de la souveraineté du Québec, de l'indépendance du Québec, et je le respecte, M. le Président. Seulement, c'est sûr que je vais me battre pour que ça ne se réalise pas, parce que mon opinion, mon option, mon objectif n'est pas le même, c'est très clair.

Mais c'est un débat qu'on va faire entre hommes sincères, honnêtes, respectueux l'un de l'autre. Et c'est dans des moments comme ceux-là... Parce que ce n'est pas tellement dans les campagnes électorales qu'on vit des moments vraiment, je dirais, pénibles, des moments très fragiles où la démocratie vraiment est mise d'une certaine manière en péril. C'est dans des moments, justement, où on doit se prononcer sur l'objectif qui est celui du Parti québécois... Parce que vous savez bien que c'est au moment du référendum qu'il arrive des choses pareilles.

(11 h 40)

Et c'est là que je fais appel aux hommes politiques pour garder le débat très haut. Il ne faudrait pas s'attaquer à un groupe en particulier, il ne faudrait absolument pas s'attaquer à un groupe en particulier, parce que c'est là qu'il peut y avoir encore des tensions en disant: Est-ce qu'on est des citoyens de deuxième catégorie ou on est des citoyens de même catégorie que tout le monde? Je le répète, je me sens un citoyen à part entière du Québec, et la très grande majorité, la totalité des gens qui sont venus ici, ils se sentent très bien intégrés, ils se sentent vraiment appartenant à cette société.

Mais c'est ça qu'il faut éviter. C'est ça, mon appel, M. le Président. Parce que des propos... C'est malheureux. Probablement que c'est dans le feu de l'action, je ne sais pas trop, mais des propos qui ont été tenus le soir du référendum, le dernier, c'est là que ça crée des problèmes, quand, de la bouche d'un premier ministre, on nous dit: On a perdu le référendum parce que c'est la faute des groupes ethniques et de l'argent. C'est ça qu'il faut éviter. Je sais que la très grand majorité de la classe politique n'est pas comme ça. Je vais le considérer comme si ça a été dans le feu de l'action, dans la déception d'avoir perdu le référendum. Mais c'est ça qu'il faut essayer que nous évitions tous ensemble, ici. Il faut l'éviter parce que c'est là que ça crée à certains moments des problèmes.

Moi, je sais très bien que, si demain il arrivait que la souveraineté du Québec se réalise parce que le peuple, la population du Québec a voté démocratiquement en faveur de la souveraineté, c'est clair que je vais l'accepter. Il faut que je l'accepte, et je me sens très à l'aise de l'accepter. Je vais me battre pour que ça ne se réalise pas, mais je suis sûr que je vais l'accepter comme n'importe quel autre citoyen. Mais il ne faut jamais faire porter sur mon dos que, si ça ne se passe pas, c'est à cause de mon vote que la souveraineté n'est pas passée. Et c'est ça, le message que je veux passer au gouvernement. C'est le message d'être des gens avec lesquels on peut parler, avec lesquels on va se sentir bien, parce que, le lendemain d'un référendum, le lendemain de n'importe quelle autre élection, on est tous là pour vivre ensemble. Il faut continuer à vivre ensemble. Et, si on se chicane entre nous, pas sur la question des options, parce que c'est normal, mais faire porter le poids de la décision qui a été prise démocratiquement par tout le monde uniquement sur les épaules d'une catégorie de gens, c'est là que ça devient très dangereux.

Et je répète: Je fais appel à tous les membres de l'Assemblée nationale pour que ça, ça n'arrive plus et qu'on puisse dire: On est tous là pour travailler dans le même objectif, qui est celui du bien-être de tous les citoyens du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Viger. Il reste au gouvernement trois minutes et demie. Alors, est-ce que vous désirez prendre les trois minutes et demie ou si immédiatement nous passons à la réplique du député d'Iberville? Alors, M. le député d'Iberville, en réplique. Vous avez un droit de parole de 10 minutes.


M. Richard Le Hir (réplique)

M. Le Hir: Merci, M. le Président. J'ai écouté avec intérêt les commentaires qu'avait à faire le ministre des Relations avec les citoyens. Je comprends mal qu'il m'ait fait un mauvais procès parce que je n'avais pas fait référence à la Charte des droits et libertés. En fait, le libellé même de la motion y fait référence, et c'est donc dire que j'avais évidemment à l'esprit l'existence de cette Charte lorsque j'ai présenté cette motion, et que cette Charte constitue effectivement, à n'en pas douter, un des éléments les plus importants que les citoyens du Québec aient pour assurer l'exercice de leurs droits et les garantir, ces droits-là.

Cependant, à entendre le ministre, tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Si nous sommes aujourd'hui réunis à discuter de cette motion, c'est parce que cette motion semblait nécessaire. Je pense que les débats qui se sont déroulés dans la société québécoise au cours de la dernière année, depuis l'incident qu'a rappelé le député de Viger, témoignent amplement du fait que cette question, tout aussi désagréable puisse-t-elle être à aborder, dans le sens où, mon Dieu, on souhaiterait tous qu'on ait dépassé ce stade-là, il faut quand même constater qu'il y a encore des circonstances qui nous obligent à l'aborder.

Je vous ai parlé tout à l'heure de commentaires qui avaient été faits par un leader de la communauté juive hier, M. Bronfman. L'article que j'ai devant moi, de la Gazette d'aujourd'hui, indique très clairement – et je pense qu'il faut le noter – que les personnes du Congrès juif canadien, M. Jack Jedwab, se distancient des propos de M. Bronfman en se demandant même si c'est bien ce qu'il aurait dit, mais notent quand même le besoin de rajouter ceci: «He admitted there is a feeling among Jews here that there is an actual and potential interethnic conflict in Québec.»

M. le Président, personnellement, j'ai la conviction que le potentiel d'un tel conflit n'existe pas. Mais, par respect pour mes concitoyens du Québec de toutes origines, je pense qu'on ne peut pas faire comme si leur inquiétude n'existait pas ou n'était pas justifiée. Je pense que nous avons tous l'obligation – et c'est le sens de l'intervention que j'ai voulu faire aujourd'hui – de nous pencher, d'être à l'écoute de ce que ces gens-là nous disent et de répondre à leurs préoccupations.

Le gouvernement actuel a un projet et ce projet-là soulève la controverse. Il ne faudrait pas que, parce que le gouvernement n'aurait pas pris la peine d'écouter et de répondre à ces questions-là, certaines personnes, par la suite, se sentent légitimées de saboter un processus démocratique qui aurait conclu dans une direction.

C'est le sens de la motion que j'ai présentée aujourd'hui M. le Président. Quant à moi, je pense que, pour éviter que nous nous retrouvions dans une situation comme celle-là, le gouvernement doit s'engager dans un exercice réel de réconciliation dans lequel il va tenir compte, écouter et pas simplement dire: Ce n'est pas justifié. Si les gens ont des revendications, peut-être qu'elles sont justifiées, peut-être qu'ils les exagèrent, peut-être qu'ils leur donnent une ampleur qu'elles n'ont pas, mais il reste quand même qu'il y a un malaise et que c'est ce malaise-là qu'il convient de dissiper avant d'amener le Québec à franchir une autre étape.

Peu importe quelle sera la décision à ce moment-là, le Québec sortira plus fort d'un tel exercice s'il a pris la peine de s'assurer que tous les citoyens du Québec ont eu l'occasion d'être entendus, ont pu exprimer les craintes qu'ils avaient, ont pu faire comprendre les préoccupations qu'ils avaient par rapport à leur propre avenir et ainsi ont réussi à développer un modus vivendi acceptable pour faire en sorte que, quelle que soit la décision qui pourra être prise par la suite, elle sera prise en toute sérénité et elle aura les chances de rallier le maximum de gens.

M. le Président, j'ai eu le privilège – je considère que c'est un privilège – d'examiner de très près certaines questions relativement à l'avenir du Québec, et j'ai constaté qu'il y avait, sur le plan économique, deux choses qui pouvaient avoir des conséquences négatives: soit l'exode de la population, d'une partie de la population, soit un morcellement territorial. C'est ça qu'il faut éviter. C'est la raison pour laquelle il faut être à l'écoute de très, très près de tous ceux qui à l'heure actuelle sentent que le processus les laisse en dehors, et il faut s'assurer qu'ils aient eu l'occasion d'y être inclus le plus généreusement possible. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député d'Iberville. Ceci termine le débat sur la motion que vous nous avez présentée ce matin.


Mise aux voix

Alors, nous allons maintenant vous demander: Est-ce que la motion du député d'Iberville est adoptée?

Des voix: Adopté.

M. Maciocia: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Viger, il faut que j'aie une demande de cinq députés pour le vote nominal.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Parfait. Alors, voulez-vous appeler les députés, s'il vous plaît? Nous allons suspendre quelques instants.

(11 h 50 – 11 h 58)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Nous allons maintenant mettre aux voix. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Simplement une question d'information au leader du gouvernement. On s'aperçoit que les banquettes ministérielles, là, sont – excusez, là – dégarnies, et on sait qu'à 10 heures, ce matin, il y avait un Conseil des ministres, comme tel.

La tradition veut que, dans ces circonstances, le leader du gouvernement, qui conserve toute sa latitude, fasse en sorte que le vote soit reporté après la période des questions, de façon à pouvoir permettre aux ministériels et aux ministres, aux membres du cabinet, de se prononcer sur une question importante soumise par un député. Pourquoi, là, ne suit-on pas cette tradition, à ce moment-ci?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je comprends, M. le Président, je comprends la question du leader de l'opposition, surtout que les banquettes de l'opposition sont pas mal dégarnies aussi, M. le Président. Alors, peut-être pour permettre...

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, messieurs dames! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader de l'opposition.

(12 heures)

M. Paradis: Oui. D'autres députés de l'opposition se sont ajoutés, là, les cloches viennent de sonner. De l'autre côté, est-ce que le leader du gouvernement peut nous indiquer, si on suspend pour cinq minutes, que les banquettes vont être regarnies, de façon à permettre aux ministres, aux membres de l'exécutif, de se prononcer sur une motion de base dans la société québécoise?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Nous sommes prêts à voter en faveur, M. le Président. Nous allons voter en faveur, nous sommes fiers de voter en faveur, et nous sommes prêts à voter, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion du député d'Iberville se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale, dans un souci de réaffirmer les principes de la Charte des droits de la personne et de favoriser la bonne entente entre tous les citoyens du Québec, quelles que soient leurs origines, condamne le nationalisme ethnique sous toutes ses formes et l'utilisation par qui que ce soit de ses thèmes, de ses stratégies et de son langage pour favoriser et entretenir la discorde entre les Québécois, dans quelque intérêt que ce soit, et invite en conséquence tous les groupes d'intérêts qui représentent des Québécois, indistinctement ou selon leurs origines, à s'abstenir de favoriser ou d'entretenir la discorde entre les Québécois sur la base de leurs origines ethniques.»

Que les députés qui sont en faveur de la motion du député d'Iberville veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Le Hir (Iberville).

M. Bélanger (Anjou), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), Mme Beaudoin (Chambly), M. Jolivet (Laviolette), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des députés qui sont contre cette motion? Y a-t-il des abstentions?

Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:78

Contre:0

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous déclarons la motion... J'ai l'impression qu'il y a en plusieurs dont l'appétit... Alors, nous déclarons la motion du député d'Iberville adoptée.

Alors, nous allons maintenant suspendre nos travaux à cet après-midi, mercredi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 6)

(Reprise à 14 h 7)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous débutons immédiatement aujourd'hui par les affaires courantes.


Déclarations ministérielles

Déclarations ministérielles. Mme la ministre de l'Éducation.


Orientations en matière d'éducation morale et religieuse à l'école publique


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Dans le cadre de la volonté du gouvernement de récupérer ses pleins pouvoirs en matière d'éducation et d'être soustrait à l'application de l'article 93 de la Constitution de 1867, je veux indiquer les orientations et les aménagements que le gouvernement propose en vue de répondre aux attentes diverses des citoyens en matière d'éducation morale et religieuse à l'école publique.

Il convient, premièrement, de gérer ces demandes dans la perspective d'une société pluraliste et ouverte. La diversité du paysage socioreligieux éclate partout au Québec. L'école publique se doit donc de respecter le libre choix ou le libre refus de la religion, cela fait partie des libertés démocratiques. C'est dire que toute école doit assurer la liberté de conscience de chaque individu, fût-il seul devant la majorité, et apprendre aux jeunes à vivre dans le respect des allégeances diverses. Pour autant, l'école n'a pas à devenir réfractaire à tout propos sur la religion. Elle doit se montrer ouverte, capable d'accueillir, par delà les convictions particulières et dans un esprit critique, ce que les religions peuvent apporter en fait de culture, de morale et d'humanisme.

Deuxième orientation. Il convient de gérer ces demandes dans le sens d'une démarche progressive. C'est certes un défi pour l'école de répondre à la diversité croissante des attentes morales et religieuses de la population, mais ce n'est pas un défi insurmontable. Un constat s'impose. Bien des difficultés qui paraissent insolubles sur le plan des principes deviennent surmontables dans les faits dès que l'on fait preuve de réalisme et de conciliation. La gestion des attentes des citoyens en matière religieuse appelle ainsi une démarche progressive, ajustée et accordée aux possibilités du moment et des milieux.

(14 h 10)

Troisième orientation. Il importe de gérer ces attentes dans le respect de l'histoire et de la culture québécoises. Même une fois disparues les contraintes de l'article 93, il n'est pas question de faire table rase de l'histoire et de la culture socioreligieuses du Québec. Si l'égalité de traitement s'impose pour toutes les options, humaniste et religieuse, en ce qui touche l'exercice de la liberté de conscience, il reste un fait évident: la tradition chrétienne, catholique et protestante a marqué profondément et continue de marquer distinctement le paysage architectural, toponymique, culturel, social du Québec de manière aussi distinctive, je dirais, que la neige en hiver et les pointes de clocher des villes et villages. Nous croyons qu'il est possible de reconnaître à l'école cette donnée historique et patrimoniale sans pratiquer l'exclusion ou la discrimination, sans oublier les apports des nouvelles cultures et des autres groupes religieux. À la lumière de ces orientations, nous prévoyons donc les aménagements suivants.

Premièrement, la structure des commissions scolaires sera désormais, dans l'ensemble du territoire, sans référence confessionnelle. Cette déconfessionnalisation des structures fait l'objet d'un très large consensus dans la population.

Deuxième aménagement: afin de favoriser une mise en place harmonieuse des commissions scolaires linguistiques, nous maintiendrons le statut confessionnel actuel, catholique ou protestant, des écoles. Toutefois, deux ans après l'implantation des commissions scolaires linguistiques, les écoles seront appelées à réviser, après consultation des parents, la signification et la pertinence de leur statut confessionnel. Par ailleurs, en vertu de l'économie générale de la Loi sur l'instruction publique, à la demande expresse de parents, une telle révision pourrait avoir lieu dès la mise en place desdites commissions.

Troisième aménagement: le libre choix entre l'enseignement moral et l'enseignement religieux catholique et protestant continuera d'être offert, en conformité avec la Charte québécoise des droits et libertés. Le service d'animation pastorale ou religieuse sera également offert au libre choix. Enfin, dans le contexte d'une société pluraliste, serait-il souhaitable que tous les élèves reçoivent une certaine formation au sujet du phénomène religieux, des cours de culture religieuse intégrant les diverses grandes traditions, des cours d'histoire des religions? J'entends soumettre ces questions à un groupe de travail dont l'avis serait référé à la commission de l'éducation de l'Assemblée nationale, qui pourrait alors entendre l'ensemble des groupes qu'intéresse cette question.

En présentant ces orientations et ces aménagements, le gouvernement propose la voie non pas de la rupture complète, mais de l'évolution graduelle et tenace qui recherche à la fois l'évolution et le consensus. En indiquant cette voie, il invite chacun des milieux à construire un contrat moral de respect de la diversité, de recherche d'innovation pour que chaque école devienne vraiment responsable de ses valeurs et de l'éducation pleine et entière des jeunes. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Marquette, maintenant, pour vos commentaires.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la déclaration ministérielle présentée par la ministre de l'Éducation arrive à un moment stratégique, arrive quelques heures avant l'amorce du débat de l'Assemblée nationale sur une motion qui vise à modifier la Constitution canadienne, à soustraire le Québec des articles 93.(1) à 93.(4) de la Constitution, et certains diront à faire disparaître le droit des catholiques et des protestants, droit constitutionnel, d'avoir des écoles confessionnelles au Québec et des structures pour les gérer. La déclaration vise à rassurer l'épiscopat, vise à rassurer l'ensemble des catholiques et des protestants qu'au niveau de l'école l'enseignement religieux sera préservé et qu'il y aura un libre choix offert aux parents entre l'enseignement religieux et pas d'enseignement religieux.

M. le Président, on ne peut pas passer sous silence le fait que, bien que le gouvernement veuille rassurer les communautés religieuses, il y a une communauté linguistique, la communauté anglophone, qui, elle, est extrêmement inquiète, parce que, dans les faits, l'article 93, qui donne des droits constitutionnels aux protestants... Eh bien, depuis 1867, les protestants, au Québec, ont été très largement des anglophones. Et le gouvernement aurait pu saisir l'offre de l'opposition de tenir une commission parlementaire, d'aller rassurer la communauté anglophone pour, par la suite, obtenir le même appui de la communauté anglophone qu'il obtient de l'épiscopat québécois.

Préserver le libre choix. Le gouvernement nous indique que l'école reflétera les réalités sociales et historiques de la tradition chrétienne tout en reflétant aussi l'évolution sociale, suite à l'apport des nouvelles cultures des communautés culturelles et de nouveaux groupes religieux. Ce sont des compromis qui existent au sein de commissions scolaires. Ce sont des aménagements possibles, en autant qu'il y ait des écoles en nombre suffisant. Parce qu'il ne faut pas leurrer personne, une école sera catholique, ou une école sera protestante, ou une école sera non confessionnelle, et les communautés devront choisir parmi ces écoles-là.

Le gouvernement vise à rassurer les catholiques et les protestants en leur donnant un sursis de deux ans. Parce que la ministre dit bien qu'elle mettra sur pied un groupe de travail qui étudiera l'ensemble de la question de la place de la religion à l'école. Poser la question de la place de la religion à l'école, c'est également poser la question: La religion a-t-elle sa place à l'école? Et on sait que, dans les programmes antérieurs du Parti québécois, le Parti québécois favorisait des écoles laïques. Leurs partenaires, les gens qui les soutiennent, sont également de cet avis-là. Le Parti libéral du Québec a toujours voulu préserver le libre choix des parents, et ce, afin de tenir compte de la réalité sociale du Québec à l'effet que plus de 80 % des parents tiennent toujours à l'école confessionnelle. Mais le gouvernement dit bien: Rien n'est figé ni fermé pour l'avenir. L'équilibre restera toujours révisable et réformable, et on donne une période de deux ans. On rassure aujourd'hui des clientèles et on dit: Le prochain rendez-vous sera dans deux ans. On déconfessionnalise les structures, et le Parti libéral a toujours été en accord avec ça. C'est Claude Ryan, en 1970, qui a été le premier au Québec à mettre de l'avant l'idée des commissions scolaires linguistiques, et ça, il ne faudrait pas l'oublier.

M. le Président, il y a un aménagement qui m'inquiète cependant. La ministre dit qu'il va falloir maintenir le statut des écoles, le statut actuel des écoles pour une période de deux ans. M. le Président, dans le scénario où nous obtenons une modification constitutionnelle pour soustraire le Québec des articles 93.(1) à 93.(4), et le Parti libéral du Québec n'y fera pas obstacle...

Des voix: Bravo!

M. Ouimet: M. le Président, dans le scénario où nous obtenons cette modification constitutionnelle... Dans le scénario où nous obtenons la modification constitutionnelle, il n'y a pas de problème qui se pose. Dans le scénario cependant, le scénario de la ministre, s'il n'y a pas de modification constitutionnelle, s'il y a superposition, à Montréal, de la commission scolaire confessionnelle et de la commission scolaire linguistique, la commission scolaire linguistique sera une coquille vide parce que toutes les écoles, pendant deux ans, seront catholiques et relèveront de la commission scolaire catholique. Et ça, pourtant, je pensais que la ministre avait appris sa leçon au mois de juin dernier. Manifestement, ce n'est pas le cas.

Alors, M. le Président, en terminant, il ne faut pas se leurrer. On rassure les clientèles qui donnent leur appui au projet de modification constitutionnelle. Cette assurance-là va durer pendant deux ans. La question va refaire surface dans deux ans, pour un autre rendez-vous, et on verra quelle sera alors la position du gouvernement. Merci.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation, pour votre réplique, maintenant.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Je suis toujours étonnée des réactions du député de Marquette. Quand on veut faire un débat sur une question, il nous amène sur une autre chose, il ne fait jamais les vrais débats qu'on lui propose de faire. Il soulève la question linguistique, alors que l'article 93 parle de la question confessionnelle, et c'est cela que nous voulons modifier.

D'abord, la prise de position que nous annonçons aujourd'hui, nous semble-t-il, assure l'exercice des libertés démocratiques et en même temps, justement, le respect non pas nécessairement d'un groupe ou de l'autre, ce groupe soit-il l'épiscopat, mais plutôt du respect de la volonté des parents que leurs enfants puissent continuer d'avoir, à l'école, accès à des cours de religion selon qu'on est de foi protestante ou de foi catholique, et c'est ce que nous disons aujourd'hui. Nous confirmons ce qu'il y a dans la loi 107, loi 107 d'ailleurs que nos collègues d'en face ont eux-mêmes adoptée, et il le rappelait, le député de Marquette, en parlant de M. Ryan qui était à ce moment-là ministre de l'Éducation. Et, dans cette loi, il est prévu que les parents choisissent le statut confessionnel de leur école. Nous maintenons cela.

(14 h 20)

Quand le député de Marquette nous dit que nous remettons en question cet élément de la loi, au contraire, et je l'ai affirmé très clairement dans mes propos au départ, nous confirmons le fait que les parents auront droit de faire le choix du statut de leur école. Cependant, cette école devra être commune, en ce sens où elle devra recevoir tous les enfants qui veulent la fréquenter, peu importent leurs convictions religieuses, et cette école devra être capable d'offrir le libre choix aux parents qui la fréquenteront... c'est-à-dire aux parents des enfants qui la fréquenteront, soit la possibilité d'une formation religieuse catholique, protestante ou une formation morale.

J'ouvre, oui, un nouveau front auquel je veux pouvoir confier les membres de l'Assemblée nationale, puisque je souhaiterais que ce soit la commission de l'éducation de l'Assemblée nationale qui procède à une telle discussion: Est-ce qu'il ne serait pas pertinent d'offrir des cours d'histoire de religion à l'école? Est-ce qu'il ne serait pas pertinent d'ouvrir de nouvelles perspectives à cet égard? En ce sens, je vais souhaiter, donc, que la commission de l'Assemblée nationale se penche sur cette question.

Je répète, M. le Président, que l'école publique doit respecter le libre choix comme le libre refus de la religion qu'expriment les parents. Elle doit cependant respecter la diversité que le paysage socioreligieux du Québec exige aujourd'hui, gérer la diversité des attentes religieuses, se situer dans une perspective d'une société ouverte et pluraliste, dans le sens d'une démarche progressive ni figée ni fermée, mais dans le respect, enfin, de notre histoire et de notre culture. M. le Président, je vous remercie.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Seulement une question d'information au leader du gouvernement. Est-ce qu'on doit comprendre des propos de Mme la ministre de l'Éducation qu'elle a repris à son compte l'engagement du premier ministre de tenir une commission parlementaire sur cet important sujet?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, notre intention n'a jamais changé, de regarder la possibilité de faire une commission parlementaire sur le projet de loi qui va être déposé. C'est ce qui a toujours été dit et c'est ce qui va être fait, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Simplement une précision. Est-ce que vous excluez une commission parlementaire sur la résolution qui va être débattue à l'Assemblée nationale cet après-midi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Sur ce sujet précis, oui.

Le Président: Présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport annuel de la Caisse de dépôt et placement du Québec

M. Landry (Verchères): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport d'activité pour 1996 de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.


Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Bélanger: M. le Président, je dépose la réponse à la question 30 inscrite au feuilleton du 18 décembre 1996 par le député de l'Acadie.

Le Président: Alors, cette réponse est déposée.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laurier-Dorion.


Étude détaillée du projet de loi n° 88

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 20 et 25 mars 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de congé annuel et de congé parental.

Le Président: Alors, ce rapport de la commission est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Robert-Baldwin.


Maintenir les services en santé scolaire

M. Marsan: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 165 pétitionnaires, infirmières en santé scolaire.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant l'importance reconnue de toutes parts d'oeuvrer précocement et directement auprès de la petite enfance et de l'enfance;

«Considérant la priorité qu'accordait à la petite enfance et à l'enfance le rapport intitulé "Un Québec fou de ses enfants" et les déclarations récentes de la ministre de l'Éducation à la suite des états généraux sur l'éducation et lors du Sommet sur l'économie et l'emploi;

«Considérant l'annonce de coupures additionnelles de 100 000 000 $ pour l'année 1996-1997 – il faut comprendre que les coupures de cette année n'étaient pas connues à ce moment-là – dans le secteur de la santé et des services sociaux;

«Considérant l'urgence de la situation, puisque nous recevons de nos CLSC et des régies régionales de la santé et des services sociaux respectifs des indices alarmants d'une volonté de nous retirer du milieu privilégié d'intervention qu'est l'école.»

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignées, infirmières – il y en a 165 – en santé scolaire qualifiées à intervenir sur le plan biopsychosocial, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès de la ministre de l'Éducation, Mme Pauline Marois, et du ministre de la Santé et des Services sociaux, M. Jean Rochon, afin de maintenir sinon de renforcer les services en santé scolaire au Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Montmagny-L'Islet... Alors, il n'y a pas d'autre pétition aujourd'hui.

À ce moment-là, il n'y a pas d'interventions, aujourd'hui non plus, portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Ce qui nous amène immédiatement à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Bilan et perspectives en matière de création d'emplois

M. Johnson: Dans un discours sur le budget, à part les équilibres financiers et diverses annonces, on doit quand même sentir – c'est ce que je soumets au premier ministre – qu'il y a une préoccupation constante pour l'emploi, que, surtout, les résultats viennent annoncer des perspectives les plus brillantes possible qui vont donner de l'espoir aux sans-emploi au Québec et notamment aux jeunes – comme le premier ministre et moi échangions sur le sujet hier – et qu'à tout le moins on peut avoir confiance que les perspectives qui sont là-dedans, que les chiffres qui sont amenés reposent sur du solide. Un budget, si ça doit être la pierre d'assise du programme du gouvernement, ça doit quand même être crédible et solide.

Je rappelle au premier ministre que, l'an dernier, son ministre des Finances avait prédit que 45 000 emplois seraient créés au Québec. À l'occasion du Sommet, ça a été révisé à la baisse à 26 000. Et on a appris hier évidemment que c'est seulement 8 500 emplois qui ont été créés au Québec l'an dernier.

(14 h 30)

Lors du Sommet, le premier ministre, par son ministre interposé, s'est engagé à réduire l'écart du taux de chômage entre la moyenne canadienne et ce qu'on vit au Québec, d'ici l'an 2000, et ça, ça requerrait 35 000 emplois de plus qu'autrement afin de combler cet écart, donc 105 000 emplois de plus, sur trois ans, que la tendance à long terme.

On a vu, malheureusement – et c'est ma question au premier ministre – qu'hier son ministre des Finances annonçait la création nette de 25 000 emplois ici, au Québec. Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire que c'est grâce à son engagement d'augmenter de 35 000 emplois par année de plus qu'il ne le faut qu'on en arrive à 25 000? Parce que, autrement, ça aurait été une perte de 10 000 emplois, encore une fois, qu'on aurait connue.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, d'abord, je remercie le chef de l'opposition de me donner l'occasion de dire tout le bien que je pense du budget que notre ministre d'État de l'Économie et des Finances a déposé hier. Nous en sommes très fiers, M. le Président.

M. le Président, c'est en effet un budget qui, par lui-même, répond à la préoccupation que vient d'exprimer le chef de l'opposition, puisqu'il nous parle d'emploi. Ce budget, si on peut le résumer rapidement, c'est l'emploi.

On voit, par exemple, que pour la première fois depuis très longtemps nous avons un gouvernement qui va provoquer des investissements de l'ordre de 5 300 000 000 $, et 4 200 000 000 $ qui vont venir du privé, avec un effet de levier, avec un programme nouveau, imaginatif, M. le Président, avec des chiffres très conservateurs, M. le Président.

Et je pense que le chef de l'opposition devrait constater que, malgré toutes les difficultés financières que nous avons, dans le contexte difficile où nous nous trouvons, grâce aux sacrifices des employés de l'État, grâce aux efforts de rigueur que le gouvernement a faits depuis maintenant au-delà de deux ans pour arriver à redresser les finances publiques, nous commençons à voir la lumière poindre au bout du tunnel, et nous sommes capables maintenant, sans augmenter le fardeau fiscal, en termes de TVQ et d'impôt des particuliers confondus, d'annoncer que nous pourrons, cette année au Québec, donner un coup de fouet à l'économie par un investissement massif de 5 300 000 000 $, M. le Président.

Je pense que l'opposition devrait voir là qu'il y a un effort considérable, et je peux vous dire que, si elle ne le fait pas, d'autres l'ont fait pour elle, et avant elle. Je vois, par exemple, dans l'éditorial du Devoir de M. Jean-Robert Sansfaçon, qu'on salue le budget Landry comme présidant «l'immense intérêt de sortir des lieux communs pour s'attaquer, enfin, à la complexité de la fiscalité, la lourdeur des impôts des particuliers et des PME et la léthargie en matière d'investissements». Et Alain Dubuc conclut son éditorial dans La Presse en disant: «Avec ce deuxième budget du ministre Landry, le Québec est sur la bonne voie, pour la première fois depuis plus de 20 ans, pour se débarrasser du fardeau du déficit.»

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment le premier ministre peut-il se dire fier d'un budget où littéralement on trouve un aveu que la façon de s'attaquer au déficit, c'est principalement par la réduction des dépenses plutôt que par la création de la richesse? Comment le premier ministre peut-il être fier d'avoir transféré un fardeau fiscal de 500 000 000 $ sur les contribuables municipaux, qui ont la même poche que les contribuables québécois au titre des autres impôts, qui n'ont pas de chèque de paie de plus pour payer 500 000 000 $ de plus, qui n'ont pas de chèque de paie de plus pour payer 28 $ d'immatriculation de plus, qui n'ont pas de chèque de paie de plus pour payer des taxes scolaires de plus? Comment le premier ministre peut-il être fier de dire que c'est un budget de création d'emplois, alors que c'est un budget d'augmentation du fardeau fiscal total et global des Québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est un budget qui est orienté vers l'emploi, mais qui repose aussi sur des bases d'équité, M. le Président. La semaine dernière, on a vu en particulier les employés de l'État faire un sacrifice, qu'ils ont consigné par des signatures et une acceptation de la démocratie syndicale, qui nous permet de récupérer 800 000 000 $ par année, en moins de dépenses.

Et, dans le budget, on voit, en particulier, que les corporations sont mises à contribution, c'est le tour des corporations de contribuer par leurs efforts au maintien et à la relance de l'économie du Québec, et il est normal que, s'agissant du secteur municipal, où on a 10 000 000 000 $ de budget, on puisse s'attendre aussi à une contribution à l'effort collectif, à l'effort équitable. Et, dans cette mesure, M. le Président, le gouvernement vise à ce que, dans toute la mesure du possible, il n'y ait pas de répercussion sur le fardeau fiscal des contribuables municipaux par le fait de cet effort de 500 000 000 $ qui est demandé aux municipalités.

Vous aurez remarqué, M. le Président, en plus – et je suis sûr que les dirigeants municipaux l'ont remarqué – que, dans le budget de cette année, ils ne sont pas touchés – donc, leur budget en cours est intact – et que, pour l'an prochain et d'ici là, il y a des échanges intensifs qui auront lieu entre le gouvernement et les parties intéressées pour qu'on examine les enjeux de la réforme de la fiscalité et de la répartition des efforts, qu'on examine surtout les mesures qui vont être prises. Et le ministre des Affaires municipales, d'ici très peu de temps, va rendre public un énoncé de proposition à ce sujet. Autrement dit, c'est une chose qui peut se faire, qui doit se faire et qui en plus se fait dans l'harmonie, pour le meilleur dynamisme de l'économie du Québec.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, comment peut-on parler de dynamisme de l'économie et d'un budget axé sur l'emploi lorsque les perspectives du ministre des Finances sont qu'il va encore y avoir un taux de chômage de près de 12 %, qu'il va y avoir encore un taux de chômage, dans la région du premier ministre, qui est déplorable – au-dessus de 15 % ou 17 % – qu'il va encore y avoir 400 000 Québécois sans emploi, 800 000 Québécois sur la sécurité du revenu? Comment le premier ministre peut-il être fier d'un budget qui ne fait qu'alourdir le fardeau fiscal de l'ensemble des Québécois, y compris...

Et c'est ça, l'objet de ma question précise: Au titre des entreprises, il devrait savoir et ne sait-il pas qu'une taxe sur une entreprise, c'est une taxe qui est répercutée soit sur le consommateur, qui est déjà surtaxé, soit sur les employés, qui attendent un salaire, ou soit sur les actionnaires, y compris nos régimes de retraite, donc les personnes âgées, les personnes qui vont prendre leur retraite? C'est comme ça que ça fonctionne. Une entreprise, ce n'est pas une entité autre que ses employés, que les actionnaires et que les consommateurs. Pourquoi le premier ministre est-il fier d'augmenter non seulement le fardeau fiscal municipal, mais également sur les entreprises, sur les consommateurs, sur les actionnaires, sur les employés?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Je vais parler surtout des entreprises, d'abord. Le chef de l'opposition officielle sait très bien que nos principaux concurrents, ils sont en Ontario, sur le plan manufacturier, et il sait très bien aussi qu'en Ontario, parce qu'ils ne se sont pas harmonisés avec le fédéral, il n'y a aucun remboursement des intrants. Alors, les entreprises québécoises, avant le budget comme après le budget, restent plus concurrentielles, et particulièrement dans les secteurs dynamiques de recherche et développement de nouveaux investissements, comme l'a démontré hors de tout doute le rapport de la firme Price Waterhouse, qui était vrai avant le budget et qui est encore plus vrai après le budget à cause des diminutions que j'ai faites sur les taxes sur la masse salariale des PME, qui sont exemptées pendant cinq ans de trois catégories d'impôts.

Alors, je crois que les jérémiades sur les entreprises peuvent être inspirées par des sentiments partisans, mais lisez ce que dit le porte-parole des entreprises, M. Ponton, qui n'a que des louanges pour le présent budget. Alors, ne vous plaignez pas pour les entreprises quand les entreprises ne se plaignent pas.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: La réalité n'est-elle pas – et ma question est au premier ministre – qu'en réalité le fardeau fiscal des entreprises qui créent des emplois, qui doivent voir aux investissements a été augmenté par le budget du prédécesseur du ministre actuel sous l'excuse et avec le prétexte que les intrants seraient remboursés pour 500 000 000 $ et plus et que cette promesse-là n'a pas été livrée, comme d'autres promesses qui n'ont pas été livrées? Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte qu'il alourdit à tous égards, autant dans les poches des particuliers que sur les entreprises, et donc celles qui créent des emplois et investissent, le fardeau fiscal global et que la réduction du déficit se fait, oui, par la réduction des dépenses, mais certainement pas par la création d'emplois mais par l'augmentation des taxes?

Le Président: M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je n'ose pas vous reproposer les litanies, je sais que ça vous ferait froncer les sourcils. Mais ces litanies sont bien connues, j'en ai trois pages. Alors, ils peuvent bien s'essayer de façon marginale à parler d'alourdissement de fardeau, ils ont écrasé le Québec sous les taxes. Après 10 ans de leur administration, le Québec est la province la plus taxée et la plus endettée. Depuis que nous sommes là, et nous avons deux ans de crédibilité derrière nous... D'ailleurs, les marchés l'ont assumé parce que les experts du ministère des Finances m'ont prévenu que le taux d'écart, le fameux «spread», comme vous disiez de votre côté, s'est rétréci de deux points après le budget. Ça va nous coûter deux points de moins pour emprunter.

Si vous voulez qu'on parle aussi de création d'emplois, puisque c'était dans la question, l'opposition fait semblant de ne pas savoir – même si le chef de l'opposition a été premier ministre et président du Conseil du trésor et que le député de Laporte pourrait le conseiller 100 fois là-dessus – que les prévisions du budget sont une somme mathématique agglomérée de toutes les prévisions du secteur privé, que nous mettons plus pessimistes par prudence et par sagesse. L'an dernier, j'avais prédit 1 %; j'ai eu le bonheur de me tromper dans le bon sens: il y a eu 1,2 % de croissance. Et, cette année, j'espère me tromper aussi dans le même sens et, avec les mesures du budget qui donnent un espoir certain, avec un effet de levier extraordinaire, renouveler l'exploit de l'an passé, une année record pour les investissements étrangers en haute technologie et en haute valeur ajoutée, aller plus loin encore pour une deuxième année, établir un record d'investissements étrangers au Québec.

Le Président: En principale, M. le député de Laporte.


Mesures visant à favoriser la création d'emplois par les PME

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Ma question ne porte pas sur la montagne de taxes que le gouvernement va nous obliger à escalader au cours des prochains mois, tant les taxes imposées dans le budget que...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: ...tant les taxes que le ministre des Finances nous a annoncées dans le budget que celles qu'il avait annoncées au printemps dernier par voie de déclaration ministérielle ou que les taxes à retardement du dernier budget qui viennent en vigueur. Ça ne porte pas là-dessus, ma question, M. le Président. Ça porte sur la pseudostratégie de création d'emplois par laquelle le gouvernement péquiste nous annonce que l'entreprise privée au Québec va, au cours des prochains mois, des prochaines années, investir 4 200 000 000 $ d'argent frais au Québec.

M. le Président, je suis très heureux de savoir que le premier ministre, dans sa boule de cristal, a vu ces investissements-là. Et vous me permettrez d'être un peu sceptique, parce qu'on a de la difficulté à comprendre pourquoi les grosses entreprises viendraient investir au Québec, à la veille d'un référendum, semble-t-il, avec l'instabilité politique que ça crée, des sommes aussi colossales. M. le Président, le passé du Parti québécois n'indique nullement que les entreprises privées se bousculent pour ce genre d'investissement là.

Dans les documents du ministre des Finances, on nous dit que le gouvernement va investir 250 000 000 $ dans un programme pour les grosses entreprises. On nous dit également qu'il y a des sociétés d'État qui vont investir beaucoup d'argent pour des projets conjoints. M. le Président, on sait que ce sont les PME qui créent des emplois et non les grosses entreprises.

(14 h 40)

Et ma question au ministre des Finances est la suivante: Puisque ce sont les PME qui créent des emplois – on le sait, de nombreux emplois sont créés – et que les grosses entreprises ne créent pratiquement plus d'emplois nets, est-ce que le ministre des Finances pourrait nous dire combien il y a d'argent dans le budget pour la création d'emplois par les PME, qui sont les créateurs d'emplois, par rapport aux sommes colossales que le ministre dit vouloir investir pour des emplois des grosses entreprises?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le député de Laporte a dit, dans son introduction, qu'il était sceptique. Il y a des sceptiques inguérissables. Il y a, à Londres, en Angleterre, une société qui s'appelle la Société de la terre plate, Flat Earth Society. Quand les Américains ont prouvé d'une façon optique, indubitable, que la terre était ronde, la Société de la terre plate a perdu la moitié de ses membres. Alors, je pense que je pourrais dire n'importe quoi, et le député de Laporte serait toujours sceptique.

S'il avait été quelques pages plus avant et plus après – parce qu'il citait mon petit livre bleu, une belle vulgarisation du budget – il se serait rendu compte que d'abord il y a un fonds particulier de développement industriel qui est dessiné spécifiquement pour la petite et moyenne entreprise. Il se serait rappelé... Il pourrait nous aider à en faire la publicité, ça aiderait les investissements de ce fameux congé fiscal total pour toute nouvelle PME – impôt sur le capital, impôt sur les frais de santé, impôt sur le revenu – pour cinq ans.

M. Johnson: ...rien.

M. Landry (Verchères): Le chef de l'opposition vient de dire que ça ne donne rien. Alors, qu'il aille expliquer aux associations de PME qui nous ont louangés pour ça, qu'il aille expliquer à l'Association des manufacturiers que cette mesure n'est pas bonne et que, si, par une hypothèse invraisemblable, il revenait au pouvoir, il l'abolirait immédiatement.

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances est au courant que, alors qu'il propose 250 000 000 $ pour les grosses entreprises, 186 000 000 $ plus un autre 35 000 000 $ pour les sociétés d'État pour faire créer des emplois par les grosses entreprises, qui n'en créent pas, comme on le sait, l'ensemble des mesures dont il vient de nous parler va coûter 3 000 000 $ au gouvernement? Comment peut-il expliquer ça?

Le Président: M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Le député de Laporte n'est pas que sceptique, il est en retard dans ses informations et il véhicule des flots de banalités. Moi, qui, pendant des années, ai prétendu qu'il fallait soigner la petite et moyenne entreprise hautement créatrice d'emplois, je n'ai jamais prétendu que la grande entreprise n'en créait pas. Est-ce que vous êtes contre la grande entreprise? Quand Bombardier crée 1 000 emplois pour un seul avion, est-ce que Bombardier, c'est une PME? L'emploi au Québec est créé par la petite et par la moyenne entreprise, et les 2 500 000 000 $ d'investissements étrangers, année record l'an dernier, ont été faits surtout par des grandes entreprises, ont créé des dizaines et des dizaines de milliers d'emplois, et ce n'est pas parce que les grandes en créent que les petites n'en créeront pas, et vice versa.

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances sait ce que c'est que des emplois nets? Comment peut-il prétendre que les grosses entreprises ont créé des dizaines et des dizaines de milliers d'emplois au Québec l'an dernier quand il ne s'est créé que 8 500 emplois nets? Alors, le ministre des Finances devrait savoir ce que c'est qu'un emploi net.

Et est-ce que le ministre des Finances ne reconnaît pas que les grosses entreprises ne créent pas d'emplois nets – ce sont les PME qui créent des emplois nets – et qu'il n'y a pas d'argent, semble-t-il, à moins qu'il nous dise où dans son budget, pour les PME créatrices d'emplois?

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Je pense avoir une assez bonne idée de ce que sont les emplois nets, mais ce n'est pas en écoutant le député de Laporte que je comprends ce que sont des idées nettes. Si vous voulez parler de net net, et même de net net net, il y en a eu 10 000 par mois depuis trois mois, et, depuis juillet dernier, le Québec, notre Québec, a créé plus de 60 % des emplois créés d'Halifax à Vancouver, net net.

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, au-delà des farces plates du ministre des Finances, qui nous parlait de la...

Le Président: M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le vice-premier ministre et ministre des Finances, pseudo-président de la société des farces plates de Londres, pourrait nous dire combien, dans son budget, il y a d'argent frais pour la création d'emplois par les PME?

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Je vous l'ai dit, rien que par les mesures qui vont favoriser la naissance de PME, l'abolition des taxes... On a déjà eu des téléphones, au ministère, dès ce matin, d'entreprises qui nous ont félicité pour dire que leur plan d'affaires venait de s'améliorer très sensiblement à cause de ça. Alors, on fait des prévisions économiques. L'économie n'est pas une science exacte, on ne peut pas prédire l'avenir, mais, plus ça nous coûtera cher, ce programme-là, plus ça prouvera qu'il aura réussi et plus il aura créé d'emplois.

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre, donc, qu'en toute logique le ministre des Finances nous dit qu'il y a 3 000 000 $ – c'est le montant dans le budget – pour les PME créatrices d'emplois, celles qui créent des emplois, et qu'il y a des centaines de millions de dollars pour les grosses entreprises qui ne créent pas d'emplois nets? C'est ça que le premier ministre nous dit?

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Non, M. le Président, il est évident que, même la version simplifiée, le député de Laporte ne l'a pas lue. Il n'a rien vu sur le Fonds de développement industriel. Il n'a rien vu sur les efforts particuliers pour aider les PME à exporter – concernant l'obsession du député de Shefford, qui nous questionne régulièrement et qui a eu une partie de sa réponse dans le budget, d'ailleurs – alors qu'il y a 600 nouvelles entreprises qui s'y intéressent, notre objectif étant de 2 000 en l'an 2000, à cause de nos efforts et à cause de beaucoup d'argent qui a été mis dans les grandes entreprises comme les petites.

Mais je dois vous dire, M. le Président, que beaucoup des sommes qui sont dans le budget sont utilisées comme effet de levier et sont amorties sur plusieurs années. Nous avons la sagesse, nous, de ne pas dépenser l'argent que nous n'avons pas. Nous ne croyons pas que des sommes massives d'argent public peuvent relancer l'économie à partir de l'argent des taxes. D'abord parce que nous n'avons pas cet argent, et, deuxièmement, même si nous l'avions, quand on peut utiliser des moyens d'intervention légers, adaptés à notre temps... La subvention des entreprises n'est plus permise ni par l'ALENA ni par l'Organisation mondiale du commerce. Alors, comme tous les commentateurs avertis le disent, ce budget démontre que, même quand on est écrasé sous un héritage insupportable, même quand on s'est fait laisser un déficit de 6 000 000 000 $, au bout de quelques années, on est quand même capable, avec de l'imagination et du courage, de recommencer à bouger.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, tout en partageant les vues du ministre des Finances sur le manque de moyens, est-ce que...

Le Président: Vous êtes en complémentaire, M. le député de Laporte. Directement.

M. Bourbeau: M. le Président, vous êtes d'une sévérité exemplaire. Le ministre des Finances, à ce moment-là, comment peut-il expliquer qu'il se vante, dans son petit document, ici, d'investir 509 000 000 $ pour créer des emplois chez les grosses entreprises essentiellement, alors qu'il vient de nous dire qu'il n'a pas les moyens de mettre de l'argent pour la création d'emplois?

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Premièrement, comment se fait-il que le député de Laporte prétende que tous ces programmes sont réservés aux grandes entreprises? Ils sont faits pour les entreprises du Québec, grandes et petites. Et la naissance de certaines grandes, à cause du phénomène de la sous-traitance, va faire naître des dizaines de petites. C'est ça, une économie moderne. Et une approche économique grossière et insupportable aujourd'hui, c'est d'opposer la grande entreprise à la petite. Les deux sont complémentaires, le Japon en a fait la preuve. Avec quelques centaines de supergrands consortiums industriels servis par 1 000 000 de PME derrière, le Japon est devenu la deuxième puissance économique du monde. Ce ne sont pas nos ambitions. Mais heureusement qu'on peut prendre cette voie, parce qu'on ne confond pas et n'oppose pas la grande entreprise et la petite.

(14 h 50)

Quant à l'autre partie de sa question, j'y avais répondu avant qu'il la pose. J'ai dit: C'est un effet de levier amorti sur plusieurs années avec des garanties de prêts. Il me semble que je l'ai bien expliqué, ça, n'est-ce pas, M. le Président. J'ai dit qu'on ne pouvait plus donner de subventions à cause de l'Organisation mondiale du commerce et de l'ALENA. Alors, des garanties de prêt. On garantit le prêt. Tout ce qui peut nous arriver si ça va mal, c'est la provision de 15 %, puis, dans certains cas, on n'a pas à la prendre. Dans votre temps, vous avez endetté la SDI de 1 000 000 000 $; là il fallait prendre une provision de 100 %. Mais, depuis qu'on est là, 15 % suffit.

Des avances remboursables. Par définition, un notaire le sait, on l'avance et ça revient. Alors, c'est avec des moyens ingénieux, quand on n'a pas beaucoup d'argent, qu'on peut faire des choses intéressantes.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, Mme la députée de Jean-Talon.


Transfert de responsabilités aux municipalités

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Hier, le gouvernement du Parti québécois a tenté de faire croire aux citoyens que leurs impôts diminueraient de façon significative. Hier, le gouvernement du Parti québécois a tenté de faire croire aux municipalités qu'il réformerait la fiscalité locale, et je les cite, «en respectant les principes d'autonomie locale», fin de la citation. Hier, le gouvernement du Parti québécois a dressé la table pour et au nom des municipalités en leur annonçant un transfert de 625 000 000 $. Le ministre des Affaires municipales a réalisé l'irréalisable: les maires, tous les élus sont furieux contre lui, et ça, c'est pour la deuxième fois en moins d'un an.

Comment le ministre des Affaires municipales, qui doit défendre les intérêts des municipalités et des citoyens, peut-il être complice d'un tel délestage, et peut-il s'engager aujourd'hui qu'il n'y aura aucune hausse d'impôts, de taxes pour les contribuables municipaux?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, il y avait une partie de la question, comme vous l'avez bien remarqué, qui s'adressait à moi, puisque, dans son introduction, la députée a dit que le gouvernement a essayé de faire croire au monde que les impôts allaient baisser. Je ne laisserai pas passer une affirmation comme celle-là, M. le Président. Non. Non. Non. Premièrement, parce que nous avons bien expliqué que cette réforme était neutre, pour le gouvernement comme pour le contribuable. On n'a pas essayé de faire croire au monde qu'on basculait de l'argent vers eux ou qu'on en basculait vers nous. De un.

Et, deuxièmement, dans la partie réforme de l'impôt sur le revenu de cette réforme, on ne fait rien accroire au monde. On fait simplement dire, de façon formelle et de mon siège, que les gens qui gagnent 50 000 $ et moins en terme fiscal, c'est-à-dire 2 800 000 ménages, vont voir leur impôt diminuer en moyenne de 15 %. C'est 77 % de tous les ménages québécois. On ne fait rien croire au monde.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, ma question, je la réadresse encore une fois au ministre des Affaires municipales: Comment peut-il nous garantir aujourd'hui qu'il n'y aura aucune hausse de taxes municipales, alors qu'il y a un délestage de 625 000 000 $? Et puis-je lui rappeler, M. le Président, que c'est 450 000 000 $ qu'on a transférés aux municipalités, et ça, à l'intérieur de l'année qui vient de se terminer?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, ce serait vraiment être pessimiste que de se résigner à l'idée que ça va se transformer en taxes au niveau municipal.

M. le Président, le niveau municipal est un niveau de gouvernement aussi. Ce sont des gens qui ont des moyens, qui gèrent des budgets importants – tantôt, j'ai dit que c'était 10 000 000 000 $ en gros, en totalité – qui gèrent d'ailleurs très souvent très bien. On sait, par exemple, que beaucoup ont des surplus, qu'il y a des centaines de millions de dollars de surplus dans des municipalités, puis il faut les en féliciter. Ils sont donc capables de gérer.

Et, en plus, comme nous, je crois – elles le savent aussi, ces autorités municipales, plusieurs ont commencé à le faire avec beaucoup de bonheur – il faut rationaliser les dépenses maintenant. C'est une obligation dans laquelle nous nous trouvons tous. Nous, le gouvernement, nous le faisons. Et nous pensons, par exemple, que, du côté des fusions, il y aura des économies importantes qui vont aider les municipalités. Nous pensons que, en particulier à un poste comme la main-d'oeuvre, il y a du travail à faire. Comment oublier le poste main-d'oeuvre dans les budgets des municipalités quand on sait que, dans les municipalités où il y a 25 000 habitants et plus, les niveaux de salaires sont à peu près de l'ordre de 27 % plus élevés que les salaires des employés de l'État qui viennent de sacrifier 6 % de leur masse de main-d'oeuvre, récemment. Donc, il y a quelque chose à faire de ce côté-là, M. le Président. Ça doit se faire par négociation.

Le gouvernement a fait la démonstration qu'on est capable de négocier des choses comme celles-là et que les syndicats sont capables de reconnaître qu'il y a un effort à faire. Il y a donc des vis-à-vis syndicaux qui doivent et qui certainement consentiront à s'asseoir vis-à-vis de leurs vis-à-vis municipaux pour examiner les moyens de trouver, en particulier, des compressions dans la masse salariale parce que l'équité le requiert, l'équité au sens absolu par rapport à l'effort qu'on doit faire partout au Québec, dans tous les secteurs; l'équité aussi au sens spécifique en termes de comparaison de niveaux de rémunération globale, M. le Président. Le gouvernement va aider les municipalités et les syndicats à trouver un cadre de discussions qui va leur permettre de trouver des solutions négociées, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Compte tenu de l'insistance du premier ministre sur le poste de rémunération dans les municipalités, est-ce qu'il pourrait nous expliquer pourquoi son gouvernement, avant le référendum, a fait sauter la loi 102, qui plafonnait la rémunération dans les municipalités comme dans le secteur public?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je ne veux pas engager de débats partisans sur des aspects techniques comme ceux-là. Nous sommes...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous sommes tous en face, au même moment, d'une situation qui nous confronte nous, les Québécois, et l'opposition comme les autres. Ils ont beau essayer de s'en sortir et de nous ramener à toutes sortes de débats partiels, des débats superficiels, des évasions de la discussion, il y a des responsabilités à prendre et eux aussi doivent en prendre, des responsabilités. Et, comme opposition, eux aussi doivent reconnaître qu'il y a un effort d'équité à faire. Eux aussi, ils doivent reconnaître que, dans l'éventail des mesures que peuvent envisager les municipalités pour rationaliser leurs dépenses, il y a certainement ce poste de main-d'oeuvre aussi. Il y a certainement un effort d'équité à faire, et, à cet effort d'équité, je crois, que nous sommes tous interpellés.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre sait que l'opposition, alors qu'elle formait le gouvernement, a édicté la loi 102 pour plafonner la rémunération dans le secteur public? Est-ce que le gouvernement sait que l'opposition, alors qu'elle formait le gouvernement, a édicté la loi 142 pour créer de l'emploi dans la construction pour les jeunes? Est-ce que le premier ministre ne sait pas que c'est son gouvernement qui a fait sauter ces lois-là, qui étaient bonnes pour l'emploi pour les jeunes et qui limitaient la rémunération dans le secteur public? Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'il n'envisage pas de loi dans le secteur municipal pour plafonner la rémunération ou accorder le droit de lock-out ou quoi que ce soit aux municipalités? Si oui, est-ce qu'il en a parlé à la FTQ, son alliée souverainiste?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je n'entrerai pas dans le débat de la loi 102, sinon pour faire remarquer qu'il y a 1 100 municipalités qui sont exclues de son application, dès le départ. Pour le reste...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Pour le reste, je pense qu'il faudra attendre les propositions qui vont venir du ministre des Affaires municipales, qui vont tracer un cadre d'échange avec les intéressés et qui vont permettre de faire évoluer le dossier vers une solution équitable, efficace et harmonieuse.

(15 heures)

Le Président: M. le député de Pontiac, en principale.


Hausse des droits d'immatriculation

M. Middlemiss: Oui, merci, M. le Président. Le budget d'hier assène aux automobilistes québécois une nouvelle taxe de 105 000 000 $ qui se traduit par une hausse de 28 $ des droits d'immatriculation, soit une augmentation de 26 %. À compter du 1er mai prochain, ce n'est donc plus 106 $, mais 134 $ annuellement que devront payer les Québécois.

Il est ici important, M. le Président, de se rappeler qu'en novembre dernier les droits d'immatriculation ainsi que le permis de conduire ont été haussés, venant ainsi puiser 17 000 000 $ dans les poches des automobilistes québécois. Ils ne sont pas des structures, ils sont des citoyens.

Ma question, M. le Président: Le ministre des Transports se rappelle-t-il que le P.D.G. de la Société de l'assurance automobile du Québec avait pris l'engagement, en juillet dernier, de ne pas augmenter les primes d'ici quatre ans?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, je pense qu'il convient d'informer le député qu'il y a une distinction à faire entre les primes d'assurance et les droits d'immatriculation.

Le président de la Société de l'assurance automobile du Québec parlait des primes d'assurance, l'assurance automobile qui prévoit, comme on le sait, un régime d'indemnisation pour les victimes d'accidents automobiles. Les droits d'immatriculation, c'est une autre chose, et les droits d'immatriculation sont versés directement au trésor, au fonds consolidé du Québec.

Alors, je pense qu'il faut faire la distinction qui s'impose, les primes ne seront pas augmentées. Je pense que, si le président de la Société de l'assurance automobile s'est engagé, j'imagine qu'il l'a fait en connaissance de cause et, donc, que cet engagement-là sera respecté.

Le Président: M. le député.

M. Middlemiss: M. le président, est-ce que le ministre réalise que c'est encore le citoyen qui doit payer l'augmentation? Donc, je crois, M. le Président, que c'est bien important.

Le ministre des Transports, en plus, est-ce qu'il réalise que c'est la deuxième hausse des droits d'immatriculation en six mois qui est imposée aux automobilistes du Québec? Deux. Et vous savez que la CAA vous dit qu'il y a 2 000 000 000 $ qui sont taxés et que seulement un quart va sur le réseau routier, M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: Oui, la première fois, c'était une indexation des droits d'immatriculation. M. le Président, cette année, il y aura une augmentation des investissements dans le réseau routier...

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, tous les intervenants et tous les intéressés par l'état du réseau routier au Québec réclamaient depuis longtemps que l'on atteigne le plus rapidement possible un niveau de ressources consacrées au réseau routier qui soit suffisant pour maintenir en bon état le réseau qui est un patrimoine d'une valeur extraordinaire, inestimable. C'est ce qu'on fait. Sur trois ans, d'ici trois ans, nous atteindrons 638 000 000 $ d'investissements dans le réseau routier, et c'est reconnu par tout le monde comme étant le niveau requis pour maintenir en bon état le réseau.

Pour ce faire, oui, c'est vrai, nous demandons une contribution additionnelle aux usagers automobilistes de 28 $ sur les droits d'immatriculation. Nous considérons que c'est une contribution raisonnable pour répondre à une demande pressante des usagers de la route d'empêcher la dégradation du réseau routier. C'est ce que le gouvernement fait.

Le Président: M. le député.

M. Middlemiss: M. le Président, est-ce que le ministre des Transports se souvient que, la semaine dernière, j'ai déposé une pétition de 35 000 noms d'usagers de la route qui disaient qu'ils n'en voulaient pas d'augmentation, immatriculation ou taxe sur l'essence? Est-ce qu'il l'a oublié, ça, déjà?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: Oui, mais M. le Président, ils veulent des bonnes routes aussi. Puis, pour avoir des bonnes routes, il faut investir de l'argent, puis des sommes considérables, des centaines de millions, pour avoir des bonnes routes. Dans l'état actuel, la situation budgétaire actuelle – vous le savez, on a eu le discours du budget hier, tout a été étalé publiquement – dans le contexte budgétaire actuel, il n'était pas possible de trouver ces centaines et ces centaines de millions requis pour maintenir en bon état le réseau routier. Il fallait demander une certaine contribution des usagers de la route. C'est 105 000 000 $ qu'on leur demande et c'est 155 000 000 $ de plus qu'on va investir par rapport à l'an passé.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Chomedey.


Mode de nomination au Tribunal administratif du Québec

M. Mulcair: Merci, M. le Président. On se souvient tous que, à l'automne, quand le projet de loi n° 89 a été discuté, le ministre de la Justice se défendait bien de vouloir faire cette réforme des tribunaux administratifs dans le but de pouvoir nommer ses gars, de pouvoir mettre son monde en place. Par contre, on aimerait savoir si le ministre de la Justice, qui vient de nommer son directeur de cabinet, Me Mathieu Proulx, au poste de président de la Commission d'examen des troubles mentaux, poste qui ouvre automatiquement, en vertu du projet de loi n° 89, une place au sein du futur Tribunal administratif du Québec pour son chef de cabinet, même si celui-ci ne bénéficie pas des 10 années d'expérience pertinente...

Alors, est-ce que le ministre peut enfin admettre ce que nous avons affirmé au cours de l'automne, que le projet de loi n° 89, sa réforme des tribunaux administratifs vise d'abord et avant tout à lui permettre de nommer son monde, de mettre ses gars en place, de nommer les chums du gouvernement?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, je suis persuadé, comme au début des travaux...

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: M. le Président, lorsque nous avons entrepris l'adoption du projet de loi n° 130, nous avions certains objectifs en vue, et je vois que le député de Chomedey, lui, a d'autres objectifs: c'est d'imputer des motifs à ceux qui sont en face. Mais les motifs que nous avions en instaurant le projet de loi n° 130, c'était de faire en sorte que la justice administrative soit réformée complètement, ce qui était demandé par tous les intervenants dans cette matière.

Malgré le fait que la Cour suprême ait confirmé que la méthode de nomination qui était déjà en place était valide, qu'elle était correcte et que nous améliorons ce point de vue, et malgré le fait que nous maintenons les droits d'appel sur permission d'appeler dans les cas où ils existaient, l'opposition considère toujours que ce n'est pas valable. Nous pensons, au contraire, que ce projet de loi est excellent.

En ce qui concerne les nominations, il y a un règlement qui sera publié très prochainement et qui entrera en vigueur, bien sûr, quand l'opposition manifestée, l'obstruction systématique qui a été manifestée à l'égard du projet de loi n° 130 et celle qui commence maintenant pour le projet de loi n° 89 aura cessé. Nous pourrons mettre en vigueur le projet de règlement qui est connu et qui vise le mode de nomination des personnes occupant des postes, et à ce moment-là on pourra appliquer le règlement.

Le Président: En principale, M. le député de Shefford.


Effets du congé fiscal de cinq ans aux PME

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Le ministre des Finances, on le sait, aime les superlatifs. Il symbolise dans cette Chambre le style théâtral. Hier et il y a quelques instants encore, il déclarait, dans son style habituel, que les nouvelles PME pourront profiter d'un congé fiscal pour leurs cinq premières années d'existence. Tous ceux qui connaissent un tant soit peu l'opération d'une PME savent très bien que, de toute façon, elles paient peu ou pas d'impôts à leurs cinq premières années d'existence. Même son ancien chef, M. Parizeau, disait: Une PME qui paie de l'impôt devrait changer de comptable.

Ma question au ministre des Finances: Est-il capable de me dire sans rire combien d'emplois cette mesure «grand vizirienne» pourra créer au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

(15 h 10)

M. Landry (Verchères): Je vais quand même rire un peu, M. le Président, d'abord parce que mon ancien chef et premier ministre n'a pas précisé s'il s'agissait d'une PME de deux ans ou d'une PME de 30 ans. Deuxièmement, mon ancien chef parlait à une époque où les entreprises québécoises, après des années de laxisme libéral, avaient pris l'habitude de ne guère tenir compte de la fiscalité. Tout ça a été corrigé depuis. Et j'affirme que les chefs d'entreprises du Québec, petites et moyennes, sont d'excellents citoyens fiscaux aujourd'hui.

Je me rappelle d'une émission du Point , que tout le monde avait vue, qui critiquait les fonctionnaires du ministère du Revenu du Québec en les accablant au maximum, d'une façon injuste. Dernier interviewé, le ministre lui-même qui accable ses fonctionnaires au lieu de diriger son ministère. C'est à ça que M. Parizeau faisait allusion.

Le Président: C'est la fin, pour aujourd'hui, de la période des questions et des réponses orales.

Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.

Nous en arrivons maintenant à l'étape des motions sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

Je voudrais demander aux collègues qui doivent quitter le salon bleu pour travailler à l'extérieur de le faire rapidement, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le livre vert intitulé «La réforme de la sécurité du revenu: un parcours vers l'insertion, la formation et l'emploi», aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, et demain, le jeudi 27 mars 1997, de 9 heures à 10 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Que la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 40, Loi modifiant la Charte de la langue française, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May.

Le Président: Alors, de mon côté, je vous avise que la commission de l'économie et du travail se réunira aujourd'hui, le mercredi 26 mars, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'entendre les dirigeants d'Hydro-Québec dans le cadre du mandat de surveillance de cet organisme.

Je vous avise également que la commission des institutions se réunira en séance de travail demain, le jeudi 27 mars, de 9 heures à 10 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de donner suite à certains mandats effectués par la commission et d'organiser ses travaux.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignement sur les travaux d'Assemblée, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, le leader du gouvernement a déposé aujourd'hui une réponse à une des questions inscrites au feuilleton. Il demeure quand même qu'il y a des questions qui sont inscrites depuis le mois de mai 1996 et qui ne relèvent pas d'une complexité ou d'une recherche épouvantable. Est-ce qu'il pourrait assurer cette Chambre qu'il fera diligence auprès de ses collègues fautifs pour s'assurer que les renseignements soient communiqués aux membres de l'Assemblée nationale dans les meilleurs délais?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Le leader de l'opposition peut être rassuré. Je vais faire comme d'habitude, M. le Président, oeuvre, travail diligent afin de faire en sorte que mes collègues puissent le plus rapidement possible, répondre aux questions qui ont été formulées relativement... et qui sont inscrites au feuilleton.


Affaires du jour

Le Président: Alors, très bien. Nous en arrivons maintenant aux affaires du jour et, à cette étape, nous allons procéder d'abord à la rubrique des autres affaires. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 34 de notre feuilleton.


Motions du gouvernement


Motion proposant que l'Assemblée autorise la modification de la Constitution par proclamation du gouverneur général afin de mettre en place des commissions scolaires linguistiques

Le Président: Alors, à l'article 34 du feuilleton, aux motions du gouvernement, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes présente la motion suivante:

«Considérant que le gouvernement entend mettre en place dans les meilleurs délais les commissions scolaires linguistiques;

«Considérant qu'à cette fin une modification de la Loi constitutionnelle de 1867 est souhaitable pour que le Québec récupère sa pleine capacité d'action en matière d'éducation;

«Considérant qu'une telle modification ne constitue en aucune façon une reconnaissance par l'Assemblée nationale de la Loi constitutionnelle de 1982 qui fut adoptée sans son consentement;

«Considérant les engagements pris par le gouvernement fédéral de donner suite rapidement à une telle modification de façon bilatérale avec l'accord de l'Assemblée nationale et du Parlement fédéral;

«En conséquence, que l'Assemblée nationale autorise la modification de la Constitution du Canada par proclamation de Son Excellence le gouverneur général sous le grand sceau du Canada, en conformité avec le texte suivant:

«Modification de la Constitution du Canada, Loi constitutionnelle de 1867.

«1. La Loi constitutionnelle de 1867 est modifiée par l'insertion, après l'article 93, de ce qui suit: "93A. Les paragraphes (1) à (4) de l'article 93 ne s'appliquent pas au Québec."

«Titre.

«2. Titre de la présente modification: "Modification constitutionnelle de..."», et on mettrait l'année de proclamation pour le Québec.

Alors, je cède maintenant la parole à M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, le gouvernement du Parti québécois, eh oui, un gouvernement souverainiste, a décidé d'enclencher un processus de modification constitutionnelle afin de permettre au Québec de récupérer sa pleine juridiction en matière d'éducation et de faciliter ainsi la mise en place des commissions scolaires linguistiques sur tout son territoire, et uniquement des commissions scolaires linguistiques.

L'amendement proposé par le Québec vise tout simplement – vous venez d'en faire la lecture – à le soustraire des dispositions que l'on peut, je pense, qualifier d'archaïques que sont devenus dans notre société moderne et pluraliste les paragraphes (1) à (4) de l'article 93 de l'acte constitutionnel de 1867.

Cet amendement constitutionnel, si nous l'obtenons rapidement, s'inscrit aussi dans la réforme en profondeur du système scolaire que ma collègue la ministre de l'Éducation a entreprise avec audace et avec courage. Au terme de cette réforme, ce sont tous les Québécois et toutes les Québécoises qui bénéficieront d'un enseignement scolaire mieux adapté aux réalités contemporaines et plus respectueux du pluralisme culturel de notre société, tout en constituant un meilleur ciment de notre langue commune.

Si nous obtenons cet amendement constitutionnel, nous aurons enfin tous les pouvoirs qu'un État moderne se doit de posséder en matière d'éducation pour former, pour éduquer ses citoyens et leur permettre de répondre aux défis qui se dessinent à l'aube du XXIe siècle.

Récupérer notre pleine et entière compétence en matière d'éducation a toujours été une des revendications fondamentales des gouvernements québécois qui nous ont précédé, qui se sont succédé. Elle s'inscrit d'ailleurs dans ce qu'on a l'habitude d'appeler les positions traditionnelles et historiques du Québec en matière constitutionnelle. Déjà, en 1946 – ce n'est pas d'hier, M. le Président – le premier ministre du Québec d'alors, M. Duplessis, indiquait, dans le cadre d'une conférence fédérale-provinciale tenue à Ottawa – et je le cite – que «les droits exclusifs des provinces, notamment en matière d'éducation, doivent être intégralement conservés et sauvegardés si la Confédération doit survivre».

En 1965, Jean Lesage mentionnait le domaine de l'éducation comme une compétence qui s'inscrit dans les droits et les besoins prioritaires du Québec. En 1968 – cela fait presque 30 ans aujourd'hui – le père du chef de l'opposition, le premier ministre Daniel Johnson, réclamait comme demande constitutionnelle de son gouvernement l'attribution exclusive de l'éducation sous toutes ses formes et à tous les niveaux.

Tous les premiers ministres du Québec, de Duplessis à aujourd'hui, incluant M. Lesage, M. Bourassa aussi, tous les premiers ministres du Québec, je pense, j'en suis persuadé, appuieraient aujourd'hui le gouvernement du Québec dans sa démarche et poseraient le même geste afin que nous puissions récupérer notre pleine capacité d'action dans le domaine de l'éducation. Je souhaite aujourd'hui que le chef de l'opposition et son parti suivent la voie de la sagesse et de la raison et appuient également la proposition et la démarche du gouvernement.

(15 h 20)

Si un gouvernement du Parti québécois, donc un gouvernement souverainiste dont on connaît le projet et l'option, a décidé de réclamer un amendement constitutionnel à l'article 93 de la loi de 1867 et d'enclencher un processus à cet égard, il le fait dans un contexte très précis et selon des paramètres bien identifiés.

D'abord, dans un contexte précis parce que notre gouvernement a répondu à des ouvertures publiques du gouvernement fédéral par la voix de certains de ses ministres, plus particulièrement M. Dion, à l'effet que cet amendement pouvait se faire rapidement et de façon bilatérale. C'est sur la base de ces ouvertures que le gouvernement m'a mandaté, il y a un certain nombre de semaines, pour aller en vérifier le bien-fondé, en particulier à l'égard des deux conditions fondamentales, à savoir un processus de modification qui soit rapide et un processus de modification qui soit bilatéral.

Pourquoi est-il essentiel au gouvernement que le processus soit rapide? Parce que le gouvernement agit, M. le Président. Ma collègue de l'Éducation, je reviens là-dessus, a annoncé sa réforme de l'éducation. Le gouvernement mettra en place dans les meilleurs délais des commissions scolaires linguistiques sur tout le territoire québécois. Le réaménagement des structures administratives en éducation devra être complété pour le mois de juillet 1998 en vue de l'année scolaire commençant en septembre 1998. Comme la ministre de l'Éducation l'a d'ailleurs expliqué cette semaine, et à plusieurs reprises, cette opération implique une réduction du nombre des commissions scolaires de même qu'une modification de leur territoire. Considérant l'échéancier et le calendrier établis pour la réforme du système de l'éducation, la rapidité d'un éventuel processus de modification de l'article 93 est, comme vous pouvez le constater, importante, essentielle, pour le Québec. Je vous rappelle d'ailleurs à cet égard quelques dates que ma collègue de l'Éducation a déjà largement et à maintes reprises évoquées.

À l'été qui vient, août 1997, on devrait, par décret, adopter les nouveaux territoires des commissions scolaires. Après cela, c'est la confection des listes électorales – ça prend un certain temps – en prévision d'une élection des commissaires pour les nouvelles commissions scolaires, qui devrait avoir lieu en juin 1998, pour que justement, lors de l'année scolaire 1998, en septembre 1998, eh bien, les commissions scolaires linguistiques au Québec soient opérationnelles, avec des conseils scolaires dûment élus par la population. Alors, c'est à cause et compte tenu de ce calendrier qu'il est important que le processus de modification soit rapide.

Pour le gouvernement du Québec, le processus de modification de l'article 93 doit aussi emprunter une procédure bilatérale qui n'implique que l'Assemblée nationale et le Parlement fédéral – Chambre des communes et Sénat. Le 7 février dernier, le ministre Stéphane Dion confirmait d'ailleurs la nature bilatérale de la proposition du Québec, tout en déclarant publiquement qu'il était possible de l'adopter de façon rapide et bilatérale. Par sa proposition, le Québec ne vise qu'à se soustraire de l'application des paragraphes (1) à (4) de l'article 93. Par conséquent, cela n'a aucun impact, aucun effet sur les autres provinces concernées par l'article 93. En d'autres termes, il ne s'agit pas d'une abrogation de 93; 93 ne disparaît pas de la Constitution, 93 est toujours là, mais il y a une modification qui vient s'ajouter pour dire que, au Québec, les paragraphes (1) à (4) de cet article ne s'appliquent pas. Mais, n'étant pas abrogé, l'article continue de s'appliquer dans les autres provinces concernées.

Comme je l'ai déjà dit, le gouvernement du Québec réclame cet amendement constitutionnel à l'intérieur de paramètres bien identifiés et qui ont d'ailleurs été exprimés clairement à mon homologue fédéral, M. Dion, lors de cette rencontre. Cet amendement constitutionnel, s'il est obtenu, ne constituera d'aucune façon une reconnaissance par le gouvernement du Québec de la Loi constitutionnelle de 1982, qui lui fut, comme on sait, imposée sans son consentement ni celui de l'Assemblée nationale. Le 1er décembre 1981, cette même Assemblée nationale avait d'ailleurs clairement exprimé son refus d'accepter le rapatriement unilatéral de la Constitution et les modifications qui lui furent imposées en 1982. Encore aujourd'hui, cette résolution a toute sa valeur et toute sa pertinence. D'ailleurs, aucun gouvernement du Québec n'a reconnu la Constitution de 1982 depuis son adoption, celui qui est au pouvoir actuellement, mais celui qui nous a précédés avec, comme premier ministre, M. Bourassa, puis celui de M. Lévesque, évidemment. Depuis 1982, aucun gouvernement n'a reconnu la Constitution de 1982. Le Québec demeure cependant assujetti à cette Loi constitutionnelle de 1982.

Cependant, cette situation a amené les différents gouvernements du Québec à prendre certaines mesures au nom des intérêts mêmes du peuple québécois, comme par exemple l'adoption de clauses dérogatoires sous le régime de la Charte canadienne, afin de préserver les pouvoirs du Québec. Il y a un paragraphe de l'article 23 qui ne s'applique pas au Québec, on le sait, parce que le gouvernement, l'Assemblée nationale en a décidé ainsi. La clause dérogatoire a été à maintes reprises utilisée. C'est une disposition de la Loi constitutionnelle de 1982. M. Ryan, alors qu'il était ministre de l'Éducation et qu'il a modifié substantiellement la Loi sur l'instruction publique, a eu recours à la clause dérogatoire, ce qu'on appelle aussi la «clause "nonobstant"», qui est une disposition de la Loi constitutionnelle de 1982.

C'est dans cette perspective, dans cet esprit que s'inscrit aujourd'hui la motion constitutionnelle visant à modifier l'article 93 de la loi de 1867. Il nous faut enfin lever cet obstacle majeur à la modernisation de nos structures scolaires. Il faut se débarrasser de cette contrainte archaïque qui date du XIXe siècle. Il faut agir au nom des intérêts mêmes les plus fondamentaux du peuple québécois. Mais, rappelons-le, il est important de ne pas confondre pour autant assujettissement et consentement formel, lorsqu'il s'agit de la Loi constitutionnelle de 1982. Un amendement spécifique limité à l'article 93 ne règle d'aucune façon la question fondamentale du statut politique du Québec. La réponse à cette question, ai-je besoin de vous le rappeler, M. le Président, appartient et appartiendra toujours au peuple québécois et à lui seul.

Dans ce contexte historique et dans la foulée des épisodes récents de Meech et de Charlottetown, le gouvernement du Québec est légitimé de demander quelques assurances, quelques garanties au gouvernement fédéral. Nous attendons ces assurances et nous attendons ces garanties à l'effet que cette résolution constitutionnelle sera adoptée par le Parlement fédéral avant le déclenchement des élections fédérales, si elles ont lieu, comme le veut la rumeur, en juin. Et, si elles n'ont pas lieu en juin, alors il faudrait que l'amendement constitutionnel soit adopté par le Parlement fédéral avant l'ajournement de juin, à cause toujours du calendrier bien connu de ma collègue de l'Éducation. En d'autres termes, on dit: Avant les élections fédérales, parce que, bon, il y a une rumeur très forte ou très persistante qu'il y aurait des élections générales quelque part en juin, mais, s'il n'y en pas puis si les élections sont reportées à une autre saison, attention. Ce qu'on demande, le gouvernement du Québec, c'est que l'amendement constitutionnel soit adopté par le Parlement fédéral avant l'ajournement de juin. On en a besoin pour respecter le calendrier de la réforme scolaire.

(15 h 30)

C'est d'ailleurs ce que j'ai réitéré à mon homologue fédéral, à M. Dion, lors de ma rencontre cette semaine, la deuxième rencontre que j'ai eue avec lui, lundi dernier. Au nom du gouvernement provincial, nous avons demandé au premier ministre, M. Chrétien, premier ministre fédéral, par l'intermédiaire d'une lettre adressée à lui par le premier ministre du Québec, de nous indiquer clairement qu'il entend offrir de telles assurances au Québec. Si nous obtenons ces assurances, si nous obtenons ces garanties de la part de M. Chrétien, répondant à l'appel et à la lettre du premier ministre du Québec, eh bien, à ce moment-là nous reprendrons le débat sur la motion et nous l'adopterons pour ensuite faire en sorte que le Parlement fédéral prenne le relais, en quelque sorte, si vous me permettez l'expression, et l'adopte également.

M. Dion, lors de cette deuxième rencontre, a réitéré que le gouvernement fédéral pourrait agir rapidement si la proposition du Québec fait consensus. Nous reconnaissons, avec lui, d'ailleurs, je le lui ai clairement exprimé, que, sur une question aussi fondamentale, il est important qu'il y ait consensus, non pas unanimité – je pense que, dans une société complexe comme la nôtre, il n'y a pas grand-chose qui puisse recueillir l'unanimité – mais un consensus le plus large possible. Là-dessus, on s'entend très bien sur cette question.

Le consensus québécois sur la déconfessionalisation des structures scolaires existe depuis plusieurs années, je pense que c'est un fait reconnu par tout le monde. Il y a eu cependant plus ou moins six tentatives de modernisation et de restructuration du système scolaire qui ont échoué depuis le rapport Parent, depuis les années soixante. La dernière tentative est celle de l'ancien ministre de l'Éducation, M. Ryan, en faisant adopter la fameuse loi 107. Je rappelle que la loi 107 – petit rappel historique – comporte toute une série de dispositions en gris; en gris. Il y en a qui ne sont pas en vigueur – toutes les dispositions qui portent sur les commissions scolaires linguistiques – parce que, à partir de l'adoption de cette loi, il y a eu un référé en Cour suprême sur toute la question des commissions scolaires confessionnelles, et la décision de la Cour suprême a fait en sorte que ces dispositions sont demeurées lettre morte, en quelque sorte, ne sont toujours pas en vigueur. C'est la dernière tentative; c'est la plus récente.

La proposition du gouvernement du Québec est, à mon sens, M. le Président, la seule qui permette une mise en place simple et efficace de structures scolaires linguistiques sur tout le territoire du Québec. Un nombre substantiel d'intervenants majeurs aussi bien des milieux de l'éducation que de la société civile se sont déclarés favorables à cette position et d'accord avec cette démarche. Il y a toute une liste d'ailleurs de groupes et d'intervenants, que j'ai rendue publique lundi dernier. Il y en a d'autres qui s'ajoutent également depuis cette époque-là, depuis lundi, et je suis persuadé, moi...

D'abord, notre lecture de la réalité, si on veut, c'est que, pour le gouvernement, il y a un consensus suffisant pour aller de l'avant avec une modification constitutionnelle, et je suis persuadé qu'à partir d'aujourd'hui ce consensus va se reconfirmer, non seulement qu'il va se reconfirmer, mais je suis profondément convaincu qu'il va se renforcer et qu'il va s'élargir, qu'il y a d'autres intervenants de la société québécoise qui vont venir s'ajouter à la liste déjà longue d'intervenants, d'organismes, d'organisations, d'associations de tous ordres qui ont donné publiquement leur appui à la position et à la démarche du gouvernement.

M. le Président, je veux dire aussi que la proposition Proulx-Woehrling, c'est sans doute un effort louable pour résoudre cette question complexe, mais nous pensons, nous, que la proposition que l'on fait, la motion que l'on a déposée et qu'on est en train de débattre, est une proposition plus simple et plus efficace. Parce que la solution Proulx-Woehrling, tout le monde le reconnaît, entraînerait quand même, surtout sur l'île de Montréal, une superposition de structures, un enchevêtrement de structures linguistiques et confessionnelles. C'est évident. Ce serait ça, le résultat ou les conséquences de l'application de la solution Proulx-Woehrling.

Alors, nous, on pense que, tant qu'à faire quelque chose, si vous me permettez l'expression, M. le Président, tant qu'à amender la Constitution – ce n'est pas un geste banal, c'est un geste important – bien faisons-le pour appliquer une solution qui vraiment en soit une et qu'elle soit à la fois simple, efficace et qu'on se retrouve après avec uniquement, exclusivement des commissions scolaires linguistiques.

Alors, le gouvernement fédéral, je voudrais terminer là-dessus, M. le Président, et le ministre M. Dion l'a rappelé encore lundi, peut procéder rapidement s'il le veut, s'il y a une volonté politique qui se manifeste du côté d'Ottawa. Je pense que ce sera le cas. Je pense que M. Dion s'est donné quelques jours, si l'on veut, et je peux comprendre ça – ça ne m'embarrasse pas trop, pas outre mesure – entend se donner un certain nombre de jours pour vérifier si le consensus tient, si le consensus est vraiment réel. Nous, on le pense, on en est convaincus, c'est pour ça qu'on va de l'avant. Mais il est tout à fait d'accord pour permettre au gouvernement fédéral de prendre encore un certain nombre de jours pour en arriver, j'en suis convaincu, aux mêmes conclusions que nous.

Il existe, M. le Président, rarement à l'Assemblée nationale des moments où les élus peuvent s'entendre sur un sujet d'importance – c'en est un – celui de lever l'hypothèque de l'article 93 pour permettre enfin au Québec de récupérer sa pleine juridiction en matière d'éducation. C'est un moment important. Il n'y en a pas beaucoup en cette Chambre. Par conséquent – et je veux terminer là-dessus – je souhaite sincèrement que l'Assemblée nationale parle d'une seule voix. Je pense que c'est trop important pour que, je dirais, les lignes de parti prévalent. Ça n'arrive pas souvent... Ça fait 20 ans que je suis ici, M. le Président, que je représente mes concitoyens en cette Chambre, ça fait plus de 20 ans. Ça n'arrive pas souvent – c'est normal à part ça, c'est normal – qu'on doive en quelque sorte mettre de côté nos allégeances partisanes. Mais il y a des moments, il y a parfois des moments où ça arrive. Je pense que ce moment-là en est un. Moi, je vous le dis bien sincèrement et je le dis à mes collègues de l'opposition officielle: je souhaite sincèrement que l'Assemblée nationale parle d'une seule voix, qu'il y ait, en cette Chambre, unanimité pour demander que l'article 93 soit modifié.

J'espère que je ne serai pas déçu par la position du Parti libéral du Québec. Parce qu'au bout du compte, M. le Président, c'est tout le Québec qui va y gagner, c'est tout le Québec, en disposant de structures scolaires qui vont enfin correspondre à sa réalité linguistique et à son pluralisme culturel. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Si j'interviens en premier, M. le Président, vous l'aurez constaté, c'est parce que, pour notre formation politique, le volet éducationnel de ce dossier est le volet prioritaire. Les intérêts supérieurs des enfants au Québec, c'est là toute notre préoccupation et c'est la raison pour laquelle nous avons toujours traité ce dossier comme étant un dossier d'éducation et que le volet constitutionnel était l'accessoire nécessaire pour pouvoir rendre le dossier éducationnel faisable.

(15 h 40)

Quand j'entends le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes presser le pas, puis-je lui rappeler que le premier ministre a fait ces promesses aux communautés francophones et anglophones de livrer des commissions scolaires linguistiques au mois de février 1996. Plus d'un an s'est écoulé. La ministre de l'Éducation, dans une première tentative, a dû fermer les livres sur la première option du gouvernement, et on était au mois de juin 1996. Plus de huit mois se sont écoulés depuis ce temps-là. Le gouvernement aurait pu bénéficier de l'éclairage de l'ensemble des citoyens et des citoyennes, particulièrement des intervenants du monde scolaire, qui ne demandent pas mieux que d'accorder leur confiance au gouvernement dans la démarche que le gouvernement entend emprunter envers Ottawa, mais qui demandent à être rassurés. C'est le cas de la communauté anglophone, qui a de graves inquiétudes par rapport aux intentions du gouvernement en ce qui a trait aux commissions scolaires linguistiques.

J'aimerais revenir et faire un rappel historique: Pourquoi des commissions scolaires linguistiques? Parce que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes ne nous en a pas vraiment parlé. Suite à la Révolution tranquille, au début des années soixante, au Québec, constat de société: on doit moderniser nos structures. Cette modernisation-là se réalise dans le domaine de la santé et des services sociaux. Les institutions étaient autrefois gérées et administrées par des communautés religieuses. À partir des années soixante, avec la Révolution tranquille, cela change. Même chose à travers la société, sauf pour le volet de l'éducation.

En éducation, les structures scolaires sont toujours divisées sur une base religieuse et non pas sur une base linguistique. En d'autres termes, nos commissions scolaires sont pro-catholiques ou pro-protestantes et non pas des commissions scolaires francophones ou anglophones.

Le premier intervenant, la première personne à mettre de l'avant l'idée des commissions scolaires linguistiques au Québec, ça a été M. Claude Ryan. Et je tiens à lui rendre hommage aujourd'hui parce que l'aboutissement de tout ça, de tous ses efforts, de sa réflexion, de sa conception, ça s'est retrouvé dans la loi de 1987, la Loi sur l'instruction publique mise de l'avant et adoptée sous un gouvernement libéral, qui visait à implanter des commissions scolaires linguistiques au Québec. Et qu'on ne se trompe pas sur l'orientation du Parti libéral du Québec. Nous avons toujours, dans nos programmes politiques, mis de l'avant l'idée des commissions scolaires linguistiques. Et, là-dessus, le PLQ et les chefs successifs du PLQ n'ont jamais changé d'idée. L'objectif, nous avons toujours cherché comment l'atteindre, comment implanter les commissions scolaires linguistiques.

Il se trouve qu'au fil des années et au fil des générations nous sommes rendus en 1997 où il y a une convergence extraordinaire entre les intérêts de la communauté francophone et les intérêts de la communauté anglophone, au Québec, pour voir des commissions scolaires linguistiques. Pour la communauté francophone – et je pense qu'il est important de le rappeler – il est important que les nouveaux arrivants, qui arrivent la plupart du temps à Montréal, qui sont de communautés autres que francophone ou anglophone, qui sont de religions autres que catholique ou protestante, que ces communautés-là puissent être bien accueillies à l'intérieur de notre société. Le système actuel fait en sorte qu'un nouvel arrivant doit choisir entre une commission scolaire catholique et une commission scolaire protestante, entre une école catholique et une école protestante. Il n'a pas d'autre choix, à Montréal, aujourd'hui, parce que toutes les écoles sont, de droit, catholique ou protestante.

Par ailleurs, une autre préoccupation, c'est que la structure d'accueil pour les nouveaux arrivants se doit d'être une structure francophone et non pas une structure anglophone; il y a consensus au Québec à cet égard-là également. Et, dans la réalité des choses, le secteur francophone de la CEPGM accueille d'année en année un nombre d'élèves, de nouveaux arrivants, de plus en plus important.

For the English community, Mr. Speaker, we know that over the past twenty years, the number of students has been reduced dramatically from 250 000 that they were in the 1970s to roughly 105 000 that they are today as a result of Bill 101 – and nobody will deny the impact of Bill 101 on the English community. They have been spread across catholic boards and protestant boards. The have been within English sectors of catholic boards and placed in a minority position. Over the years, most of the representatives of the English community have pushed for, have lobbied, have been instrumental in forcing the governments to deliver on linguistic school boards.

Why? Because the vitality of their community depends on the existence of linguistic school boards. The English community wants to consolidate its resources, wants to bring all the English people together, and they want to be able to manage their schools, to control their schools, to control their school boards, based on a philosophy which is particular to them. That is why in Québec we have a consensus on the need to implement linguistic school boards.

Mais, une fois que nous avons dit ça, M. le Président, comment réaliser ce consensus? Et, contrairement à ce qu'affirme le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, il y a consensus sur l'objectif d'implanter des commissions scolaires linguistiques, mais il n'y a certainement pas consensus sur le moyen d'y arriver.

Au niveau des moyens, il y a en a quatre qui sont reconnus. Le premier moyen est celui de la loi 107, qui avait été prévu par le gouvernement libéral – il est important de le noter – avant le jugement de la Cour suprême, en 1993, jugement de la Cour suprême qui venait faire en sorte que, à Montréal et à Québec, les catholiques et les protestants avaient droit à des écoles confessionnelles et à des structures pour gérer ces écoles confessionnelles là. Donc, dans les faits, on peut prétendre que la commission scolaire, reconnue comme étant confessionnelle aujourd'hui, subsisterait. Le problème que ça pose, c'est qu'on ne peut pas, en 1997, vivre avec une augmentation de structures scolaires sur le territoire de la ville de Montréal. Ça n'a aucun sens.

L'orientation préconisée par la ministre de l'Éducation, et c'est l'orientation du programme du Parti libéral du Québec, c'est de réduire le nombre de structures scolaires afin que les économies réalisées au niveau de la réduction du nombre de structures puissent bénéficier directement aux élèves. Le système est là pour les élèves, les élèves ne sont pas là pour alimenter le système.

Par ailleurs, donc, superposition, duplication de structures à Montréal. Il faut comprendre que la loi 107, quant à moi, est inapplicable, parce qu'il faut se placer dans la peau des parents qui auront à choisir parmi trois réseaux d'écoles francophones: le réseau de la commission scolaire linguistique française, le réseau des écoles francophones de la commission scolaire catholique et le réseau des écoles francophones de la commission scolaire protestante. Ça, M. le Président, ça va être le fouillis le plus total.

Le risque qu'il y a à cela, c'est que les Québécois de souche se dirigent vers les écoles francophones de la commission scolaire catholique. Et c'est pour ça que le projet mis de l'avant par la ministre de l'Éducation, de dire: S'il n'y avait pas une modification constitutionnelle, j'irai quand même de l'avant en superposant les commissions scolaires linguistiques sur les commissions scolaires confessionnelles. Ça n'a aucun sens. Je pensais qu'elle avait appris sa leçon au mois de juin dernier. Malheureusement, je note que ce n'est toujours pas le cas. Mais ses partenaires et les 40 partenaires qui appuient la démarche du gouvernement lui ont rappelé dans un paragraphe important de la lettre: La duplication et la superposition de structures à Montréal, ça n'a pas de sens. Renoncez à cela, Mme la ministre.

(15 h 50)

Autre scénario, le scénario Kenniff. Le scénario Kenniff est semblable au scénario de la loi 107. Il prévoit, au lieu que ça soit des commissions scolaires confessionnelles, des comités confessionnels qui vont gérer les aspects confessionnels pour répondre aux impératifs de l'article 93 de la Constitution canadienne. On retrouve, dans les faits, au sein d'une même commission scolaire linguistique, la superposition de structures que nous avons dénoncée et qui a obligé la ministre de l'Éducation à faire marche arrière, au mois d'août dernier.

Il reste quoi? Il reste deux voies constitutionnelles. La première voie, qui est la voie préconisée et privilégiée par le Parti libéral du Québec, est un amendement bilatéral à l'article 93 de la Constitution, qui est l'essence même des compromis qui sont nécessaires dans notre société pour s'assurer que tous puissent être à l'aise avec les grands projets de société, grands projets gouvernementaux. Et aujourd'hui j'entendais la ministre de l'Éducation reconnaître ce nécessaire compromis au niveau de l'école. Mais ce nécessaire compromis est peut-être aussi important au niveau des commissions scolaires pour permettre de sauvegarder le droit des minorités, droit des minorités, je le rappelle, qui a soulevé un tollé à Terre-Neuve dans le cadre du débat qu'ils ont eu concernant la modification constitutionnelle livrée par le gouvernement fédéral.

Proulx-Woehrling vise également à harmoniser les droits de tous les citoyens au Québec. Il est impensable qu'au Québec des citoyens qui demeurent sur les territoires de la ville de Montréal et de la ville de Québec aient plus de droits que des citoyens qui ne demeurent pas sur ces territoires-là. C'est ça qu'il faut corriger, et ça nous permet également d'atteindre l'objectif des commissions scolaires linguistiques de façon bilatérale. Et même le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales canadiennes, M. Dion, reconnaissait que notre position, elle était beaucoup plus sûre, elle était beaucoup plus à l'abri de toute controverse juridique ou de toute contestation judiciaire. Cependant, le gouvernement du Parti québécois a toujours refusé la solution dite Proulx-Woehrling pour des motifs qui ne résistent pas à l'analyse, et je renvoie la ministre de l'Éducation à la lettre que lui avaient rédigée les deux spécialistes sur la question. Si elle est prête à vivre avec des compromis au niveau de l'école et si elle est prête également à permettre la duplication de commissions scolaires linguistiques et confessionnelles à Montréal et à Québec, comment peut-elle, par la suite, dire que Proulx-Woehrling, ça n'a pas de sens?

La ministre le sait, Proulx-Woehrling a emporté l'adhésion de tous les observateurs, et c'est la raison probablement pour laquelle le gouvernement a décidé de mettre ça de côté. Ça venait du Parti libéral du Québec et, dans un deuxième temps, ça avait des chances très élevées de réussir. Ce n'est pas le choix que fait le gouvernement, gouvernement légitimement élu. Il a le droit de faire ses choix. Ils choisissent la voie de soustraire le Québec des articles 93.(1) à 93.(4) de la Constitution canadienne, ce que nous appelons communément l'«abrogation». On peut bien s'enfarger dans les mots, c'est la même chose, c'est l'abrogation, par rapport au Québec, de l'application de 93.(1) à 93.(4). On ne se racontera pas d'histoires, là, c'est ça qui est la réalité.

Donc, M. le Président, le gouvernement du Parti québécois vise à faire disparaître l'ensemble des droits confessionnels qui sont régis par la Constitution de 1867, qui donnent aux catholiques et aux protestants à Montréal et à Québec et aux minorités catholiques et protestantes à l'extérieur de Montréal et Québec le droit d'avoir des écoles confessionnelles et le droit d'avoir des structures pour gérer ces mêmes écoles là.

M. le Président, c'était de bonne stratégie aujourd'hui. Dans le cadre de sa déclaration ministérielle, la ministre de l'Éducation fait une déclaration pour rassurer les catholiques et les protestants. J'en suis très heureux. Cependant, elle les rassure pour combien de temps? Il y a un sursis dans cette loi-là. Pourquoi, Mme la ministre, si vous faites le choix politique aujourd'hui de respecter le libre choix des parents entre l'école confessionnelle et l'école non-confessionnelle, expliquez-moi pourquoi vous mettez sur pied un groupe de travail qui vise à regarder la question de la place de la religion à l'école? Si votre choix est fait aujourd'hui, pourquoi en même temps mandater un groupe de travail, lui demander de faire un rapport dans deux ans?

Vous manquez de cohérence dans ce discours-là, et ça, c'est évident, et on sait pourquoi. La stratégie gouvernementale a été la suivante: Je vais rassurer les catholiques et les protestants en leur disant que je vais préserver leur droit d'avoir des écoles confessionnelles, mais en même temps – et ça a toujours été le double discours du gouvernement – je tends des perches à mes partenaires souverainistes, la CEQ, la CSN, la FTQ, la Société Saint-Jean-Baptiste, le Mouvement national des Québécois et des Québécoises et je leur dis: Ça va prendre fin d'ici deux ans – en tous les cas, on va s'interroger là-dessus – et là-dessus, on sera conforme aux orientations du Parti québécois de privilégier les écoles laïques.

La ministre de l'Éducation milite au sein du Parti québécois depuis un grand nombre d'années et elle devrait savoir que l'orientation toujours privilégiée par sa formation politique a été des écoles laïques. Le Parti libéral du Québec a toujours privilégié, lui, le libre choix des parents parce que ça correspond à une réalité sociale au Québec. Les parents souhaitent choisir et avoir le choix de la liberté de pouvoir donner l'enseignement religieux à leurs enfants.

La ministre ne peut pas nier ça, M. le Président. Dans les états généraux de l'éducation, on proposait l'abrogation de l'article 93, qui est le projet de motion que nous avons devant nous aujourd'hui, pour laïciser les écoles. La ministre ne peut pas le nier. Seule chose que nous disons au gouvernement: Au Québec, le Parti libéral a toujours été un parti libéral. Nous devons suivre l'évolution de la société. Ce que le gouvernement du Parti québécois et ses partenaires souverainistes font trop souvent, c'est de précipiter les choses pour des raisons idéologiques et de couler tout le monde dans le même moule. Le Parti libéral n'a jamais été de cette foi-là.

M. le Président, nous avons demandé des avis juridiques, et – mon collègue le député de Châteauguay va y revenir – ça a été refusé. Nous avons demandé une commission parlementaire pour donner l'occasion à la ministre de l'Éducation de rassurer les communautés. We wanted to make sure that the Government of Québec, the Minister of Education could, within a parliamentary commission, explain exactly how the provisions of article 23 of the Canadian Charter of Human Rights and Freedoms would apply in Québec because, if we are in a linguistic school board framework, article 23 kicks in. Article 23 obliges the Government to respect some of the imperatives in that article and the English Community wants to know what the Government has up its sleeve, how it will treat its linguistic minority. They are concerned, we know they are concerned, and it is important that the Government understand that message.

(16 heures)

That is why we still feel that a parliamentary commission would be able to rally a greater consensus around the Government's proposal and the Government's motion.

Mais, si le gouvernement refuse d'accorder une commission parlementaire, ce qui m'apparaît être le plus strict minimum quand on propose de modifier la constitution canadienne de 1867 – et mon collègue y reviendra... Je pense qu'il n'y a aucun précédent pour aucune législature à travers le pays où une législature va de l'avant avec une modification constitutionnelle sans avoir une commission parlementaire pour à tout le moins entendre les partenaires et voir leurs points de vue. Ce sont des droits constitutionnels qu'on affecte ici, et on ne peut pas traiter ça à la légère.

Ceci étant dit et une fois que l'opposition indique au gouvernement les risques de la voie qu'il entend suivre, une fois que l'opposition demande des avis juridiques pour voir sur quoi vous vous appuyez, une fois qu'on demande une commission parlementaire pour voir comment vous allez rassurer les clientèles et catholiques et anglophones, une fois qu'on fait part au gouvernement que plusieurs constitutionnalistes réputés au Québec ont déjà regardé cette question-là et ont dit que ça ne pouvait pas se faire de façon bilatérale, l'opposition agit de façon responsable. Et le chef de l'opposition agit de façon responsable lorsqu'il demande au gouvernement à tout le moins une commission parlementaire pour pouvoir éclaircir ces choses-là. Le gouvernement dit non, refuse. On doit, comme opposition, prendre acte de cela.

Cependant, M. le Président, parce que les intérêts supérieurs du Québec en matière d'éducation le commandent, parce qu'il y a trop de gens qui mènent une bataille depuis trop d'années pour voir l'implantation des commissions scolaires linguistiques, because it will be so good for the English community to have linguistic school boards, and then we hope the Government will not pull a fast one... M. le Président, c'est la raison pour laquelle on ne s'arrêtera pas aux moyens, mais on vise l'objectif, nous aussi, que nous avons toujours mis de l'avant. Et nous ne bloquerons pas le processus visé par le gouvernement, nous ne voterons pas contre la motion qui a été déposée par le gouvernement, mais nous appelons le gouvernement, nous tentons de les rappeler une ultime fois à la raison. Tenez donc des commissions parlementaires pour rassurer les clientèles. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Ce que je viens d'entendre, M. le Président, me réjouit. Je comprends que nous aurons donc un appui de la part de l'opposition à la proposition d'amendement parce que celle-ci vient résoudre effectivement un problème qui date non pas d'il y a quelques années à peine, mais d'au moins 35 ans, puisque nous nous y penchons depuis 35 ans et depuis plus longtemps pour certains, si j'ai bien compris ce que le député a conclu. Parce que, dans toute sa démonstration, c'était plutôt le double langage, le double discours, une chose et son contraire.

Alors, on va essayer de refaire le point. Mais je suis très heureuse de ce que j'entends du député de Marquette. Ça veut dire qu'il sera d'accord avec nous pour que nous entreprenions cette discussion en ce qui a trait à l'amendement constitutionnel de l'article 93 de 1867 qui nous permet, pas d'enlever des droits à la communauté anglophone, là... Il ne faut pas faire croire des choses qui seraient complètement fausses. Les alinéas que nous voulons modifier, que nous voulons abroger dans l'article 93 sont ceux qui concernent la confessionnalité des commissions scolaires, des structures scolaires, pas la question linguistique. On essaie à chaque fois d'ailleurs de faire croire qu'il y a ces deux éléments-là dans l'article 93. Les députés de l'opposition le savent très bien.

Ce qui est absolument intéressant, dans le fond, dans cette ouverture qu'ont manifestée, il faut bien le dire, le ministre Dion et d'autres de ses collègues avant lui, c'est de dire... Et c'est ça, dans le fond, qui nous a incités comme gouvernement, mon collègue le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, moi-même comme ministre de l'Éducation, à proposer la démarche pour laquelle nous demandons un appui à l'Assemblée nationale, cette ouverture à l'effet qu'il était possible d'abroger 93, les éléments qui concernent la confessionnalité et qui se trouvent dans 93, d'une façon bilatérale, nous permettant donc de procéder dans des délais qui vont me permettre, comme ministre de l'Éducation, de répondre plus rapidement et surtout plus facilement, bien sûr, parce que c'est vrai qu'appliquer la loi 107, ce sera très complexe. On aura l'occasion d'en discuter, puisqu'on verra comment ça pourrait se faire, si l'amendement n'était pas accordé.

Alors, ce qui m'étonnait un peu dans les propos tenus jusqu'à maintenant par le député de Marquette – parce que sa démonstration était un petit peu particulière, compte tenu de la conclusion à laquelle il arrive – ce qui m'étonnait un peu dans la démonstration du député de Marquette, c'est qu'il disait: Il y a la possibilité d'amender 93, pas comme vous le proposez, pas comme M. Dion semble le recevoir positivement, il y a une autre façon, et c'est cette fameuse proposition Proulx-Woehrling. Il dit: Nous, on préférerait ça, si je comprends bien, et ça semble être encore le cas. Mais ce qu'il faut ensemble comprendre, c'est que la proposition Proulx-Woehrling, elle consacre les questions confessionnelles au niveau des structures. Elle les consacre essentiellement et elle ouvre la porte à la superposition. Alors, on va procéder à un amendement constitutionnel qui, on le sait, n'est pas toujours facile à faire, à obtenir, qui a des effets durables pour confirmer la confessionnalité des structures.

Parce que, si on dit: On applique à Montréal et à Québec ce qu'on fait pour l'ensemble de la population québécoise qui n'habite pas ces deux villes, c'est de permettre à des gens de demander une commission scolaire s'ils jugent qu'ils ne sont pas de la même foi que la majorité. Donc, ça présume que ceux qui occupent les fonctions à la commission scolaire forment une majorité qui est soit catholique ou protestante. Donc, on confirme la confessionnalité des structures.

Il me semble qu'en 1997 la voie moderne, la façon ouverte de tenir compte de la diversité de la réalité québécoise, c'est, au contraire, de nous permettre de déconfessionnaliser les structures, cependant – et ça a été l'objet d'ailleurs de mon propos dans ma déclaration ministérielle de cet après-midi – dans le respect des garanties, des engagements pris, faits à l'égard des communautés que nous avons servies, que ce soit la communauté catholique ou protestante, et pour lesquelles nous avons effectivement toujours permis... Et c'est une obligation, de toute façon, qui nous est faite par la loi, mais nous le confirmons, nous permettons que des cours de religion puissent s'offrir à l'école, que le statut confessionnel de l'école puisse être conservé, toujours évidemment dans une perspective d'ouverture, de pluralisme et d'école commune qui va continuer à recevoir l'ensemble des Québécois, peu importent leur foi, leurs croyances, et ça, c'est le respect de la liberté de conscience, de la liberté de religion. C'est absolument fondamental. Et, dans le fond, je le confirme.

Alors, ce qui m'inquiétait dans les propos du député de Marquette, c'est qu'il nous dise: Prenez donc la voie compliquée, prenez donc la voie qui vient confirmer les questions confessionnelles plutôt que la voie que semble vous offrir Ottawa, qui serait bilatérale, qui permettrait de lever la contrainte. Une fois levée la contrainte, il n'y a pas meilleure garantie constitutionnelle et juridique que nous puissions procéder. Et il nous dit: Oui, c'est possible. Le ministre fédéral nous dit: C'est possible de le faire bilatéralement.

(16 h 10)

L'opposition dit: Tout d'un coup il y aurait des risques qu'on ne puisse pas le faire, que ça demande l'aval des autres provinces? Mais, M. le Président, il appelle lui-même l'opposition! Il y a quelque chose qui est incompréhensible dans ça. Le ministre nous dit: J'ai des avis juridiques. Nous en avons aussi, des avis juridiques à cet égard-là. Le ministre de la Justice fédéral dit: Nous pourrions être à côté du Québec, si je comprends bien, s'il y a une opposition qui se manifeste. Nous sommes quand même des démocraties! Nous sommes des élus. Nous avons la capacité de juger, d'évaluer. Nous avons donc la possibilité aussi de décider, et il nous dit: Ho! là, mais vous prenez la voie simple. Voyons donc! Attendez donc! Tout d'un coup, en Ontario, ils ne seraient pas d'accord. Tout d'un coup, ailleurs, ils ne seraient pas d'accord, et donc, à ce moment-là, il appelle lui-même ce désaccord. Ça m'inquiète, M. le Président, une attitude comme celle-là. Est-ce que c'est parce qu'il ne veut pas que ça fonctionne? Parce qu'il nous a...

M. le Président, il faut bien dire que l'opposition, sans arrêt, m'a demandé: Quand est-ce que vous implantez les commissions scolaires linguistiques? Alors, je lui ai répondu régulièrement, systématiquement, M. le Président: Nous travaillons à un projet pour y parvenir. Il a dit: Ah, le gouvernement a peur d'aller discuter avec Ottawa des questions constitutionnelles, de vouloir ainsi reconnaître la constitution de 1982. Nous ne la reconnaissons pas, M. le Président. De toute façon, nous amendons un article de 1867, n'est-ce pas, qui était le pacte confédératif de l'époque. Mais nous y allons, M. le Président, et en toute bonne foi, et nous faisons la démarche. Mon collègue le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes a rencontré déjà à deux reprises son collègue d'Ottawa. Nous préparons un projet de loi. Nous préparons un ensemble de documents. Nous sommes prêts, M. le Président. Nous le faisons en toute bonne foi, en toute honnêteté et, surtout, nous souhaitons choisir la voie qui va simplifier les choses, le moyen qui va simplifier les choses.

Alors, nous ramener – et je le dis, M. le Président, à tous les membres de cette Assemblée, à tous et à toutes celles qui nous écoutent – à la proposition Proulx-Woehrling, c'est, dans le fond,nous ramener sur la base confessionnelle et à le, je dirais, confirmer, à le consolider dans un changement qui nous lierait pour encore 20 ans. Bon. Alors donc, devant cela, j'espère avoir bien compris. Parce que parfois c'est un peu ambigu.

On nous a dit qu'on n'empêcherait pas, hein, j'ai bien entendu le député, qu'on n'empêcherait pas le gouvernement de procéder. Pour moi, si on ne l'empêche pas, c'est que, j'imagine, on est un peu d'accord avec ce qu'on veut faire.

Le député a beaucoup insisté sur la proposition Proulx-Woehrling. Ça, ça m'inquiète, par exemple, hein; ça m'inquiète assez sérieusement. Et puis en plus, il a mêlé la question linguistique à ça en faisant référence au fait qu'on devrait se conformer à certaines autres lois ou chartes. Nous nous y conformons, M. le Président, avec bien sûr des choix qu'à faits l'Assemblée nationale. Mais l'article 93 ne fait pas référence aux questions linguistiques, aux garanties linguistiques. Ce sont des garanties confessionnelles.

Alors, maintenant, oui, nous procédons à la démarche, M. le Président, et nous avons confiance qu'elle réussisse. Parce que je pense que nous sommes d'abord et avant tout, élus à Ottawa ou élus à Québec, malgré des orientations fondamentales profondément différentes – je pense à l'option que nous défendons, d'un État libre, souverain – nous n'oublions jamais, et je n'oublie jamais, quant à moi, que je suis d'abord et avant tout au service des intérêts du peuple québécois, dans un contexte qui peut être contraignant et que je trouve contraignant à ce moment-ci, mais, dans ce contexte-là, je vais d'abord et toujours choisir l'intérêt de la population québécoise lorsqu'il s'agit de débat comme celui-là.

Et donc, ce que ça nous permettrait, si nous nous entendons sur une base bilatérale, c'est que rapidement nous puissions procéder à la mise en place de commissions scolaires linguistiques sans toutes les contraintes que nous impose la constitution actuelle et qui risqueraient de nous amener effectivement à une superposition des commissions scolaires sur les territoires des villes de Montréal et de Québec et aussi à un risque semblable à l'extérieur des villes de Montréal et de Québec, puisque le droit à la dissidence existe et donc, par exemple, que des francophones de foi protestante, ne s'identifiant pas à une majorité catholique, puissent demander une commission scolaire, qu'on puisse voir apparaître comme ça des institutions sur le territoire québécois. Il y en a déjà, d'ailleurs, M. le Président.

Donc, abrogation des éléments de l'article 93 qui nous permettrait d'assumer l'ensemble de nos responsabilités comme ministère, comme gouvernement, et nous, comme ministère de l'Éducation, évidemment, à l'égard de l'éducation au Québec, M. le Président. En même temps, ce que nous disons, compte tenu que nous sommes aussi en train de procéder à une restructuration des territoires des commissions scolaires et que je ne crois pas qu'il soit utile de faire subir deux chocs d'une ampleur assez importante à l'ensemble des institutions concernées, nous croyons que nous devons implanter et réduire le nombre de commissions scolaires que nous avons au Québec et nous croyons que nous devons le faire dans la perspective de moyen et de long terme et, j'espère, de court terme, si nous nous entendons rapidement, soit d'implanter sur une base linguistique ces nouvelles commissions scolaires. C'est d'ailleurs le choix que j'ai fait et c'est ce que j'ai annoncé au début de la semaine. Donc, notre volonté est ferme. Je rassure le député de Marquette, nous n'avons jamais eu l'intention de ne pas procéder à l'implantation de commissions scolaires linguistiques, au contraire.

Et pourquoi veut-on faire ça? Il faudrait peut-être s'en souvenir. Et, après ça, je reviendrai sur la question de l'enseignement de la religion à l'école, où le député de Marquette a interprété de toutes espèces de façons ce que j'ai dit ici, et à la limite de l'honnêteté, M. le Président. Donc, ce que nous proposons comme démarche, en ce qui a trait à la restructuration scolaire et à l'implantation de commissions scolaires linguistiques, vise deux objectifs fondamentaux. Il y en a des plus secondaires, je vous dirais, mais il y en a deux fondamentaux. Le député de Marquette y a un peu fait référence tout à l'heure.

Ce que l'on constate, c'est qu'actuellement beaucoup de nouveaux Québécois qui ne sont pas de foi catholique ou qui même ne sont pas de foi protestante se sentent actuellement mieux accueillis dans les commissions scolaires protestantes à majorité anglophone. Ces jeunes, cependant, sont scolarisés évidemment en français, en vertu de la loi 101, en vertu de la Loi sur l'instruction publique. Mais, comme ils sont dans une culture anglophone, à l'intérieur d'une commission scolaire qui, tout en agissant très honnêtement et en tout respect des lois, évidemment offre davantage de services et est davantage organisée pour servir les anglophones, puisque c'est sa première clientèle, même si ce sont d'abord des protestants anglophones, la tendance que nous constatons, c'est que, lorsqu'on est passé, comme nouveau Québécois, à l'intérieur des institutions protestantes à majorité anglophone, on s'intègre davantage à la communauté anglophone. On choisit, par exemple, de continuer ses études dans un cégep anglophone, à hauteur de 70 %.

Nous nous sommes suffisamment battus, au Québec, et nous croyons suffisamment essentiel ce débat qui concerne notre avenir collectif, qui concerne la langue, qui concerne le fait que nous puissions conserver sur ce territoire une majorité suffisante nous permettant de continuer à progresser et à nous développer comme peuple, que nous avons un intérêt au premier titre et au premier chef à cet égard à offrir dans des commissions scolaires francophones des services d'éducation, des services de formation, de formation professionnelle, des services périphériques de bibliothèque, pédagogiques et autres dans une culture et dans une organisation francophones. C'est le fondement même de l'implantation de commissions scolaires linguistiques, particulièrement sur le territoire de l'île de Montréal. On focusse beaucoup le problème sur la ville de Montréal, mais ce que je dis ici est particulièrement vrai pour l'ouest de l'île de Montréal, où, selon Charles Castonguay – et j'utilise ses propres mots – «on constate des taux d'assimilation inacceptables», en termes de passage du français vers l'anglais, et de la commission scolaire, où on a étudié en français mais dans un contexte anglophone, vers la communauté anglophone, si on est un nouveau Québécois.

Le deuxième fondement de cette politique, c'est de permettre à la communauté anglophone de gérer ses institutions, d'avoir la responsabilité de l'ensemble de son réseau scolaire, ce que lui reconnaît la Charte, ce que nous sommes prêts à lui reconnaître, en utilisant le moyen le plus rapide qu'est cet amendement, cette motion qu'a proposée mon collègue le ministre responsable du dossier des Affaires intergouvernementales canadiennes. Alors donc, en ce sens-là, ce sont les fondements qui nous amènent à souhaiter que nous modifiions l'article 93.

(16 h 20)

L'autre aspect qui est aussi important pour moi, bien sûr: nous déconfessionnalisons les structures des commissions scolaires, nous respectons davantage le libre choix à l'égard des parents, à l'égard des enfants, la liberté de conscience, de religion; c'est fondamental dans une société démocratique comme la nôtre.

Cependant, nous vivons dans un contexte historique, dans un contexte culturel qui fait en sorte que la Constitution a garanti aux ressortissants de foi catholique et de foi protestante qu'ils auraient accès à des cours dans les écoles en vertu de leurs convictions religieuses. C'est ce que l'article 93 fait, c'est ce que la loi 107 reprend, une loi adoptée par l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président. Ce que j'ai dit aujourd'hui, pas pour faire plaisir à quelque lobby que ce soit, je le répète, ce lobby soit-il l'épiscopat – et en tout respect – par respect pour la volonté, le souhait et le désir de la population québécoise de pouvoir maintenir pour leurs enfants l'accès à une formation de foi catholique ou de foi protestante dans les écoles, des cours de religion – c'est simple, M. le Président – alors, j'ai dit que, oui, cela serait maintenu. Cependant, comme nos écoles sont des écoles communes qui doivent accueillir et accepter tous les Québécois peu importent leurs convictions, il y aura libre choix, pour le parent, que son enfant suive des cours de religion catholique, suive des cours de religion de foi protestante ou suive des cours de morale. Pour moi, c'est fondamental. C'est ce que j'ai redit ici aujourd'hui, c'est ce que la loi 107 prévoit, et je le confirme.

Il y a un autre article dans la loi qui prévoit que les parents choisissent le statut de l'école. Est-ce que ce sera une école à statut catholique, à statut protestant ou à statut laïc? C'est dans la loi de M. Ryan, pas dans ma loi. C'est dans la loi qui est devenue une loi de l'Assemblée nationale, mais proposée et défendue par M. Ryan. Alors, j'ai tout simplement dit aujourd'hui que, dans cette loi, il est prévu que l'on puisse régulièrement, aux cinq ans, réviser le statut de l'école. Je maintiens que la loi va continuer de s'appliquer. C'est essentiellement ce que j'ai dit. J'ai ajouté ceci, cependant: Parce que nous procéderons à des changements majeurs, dans les deux ans qui vont suivre l'implantation de commissions scolaires linguistiques, nous demanderons aux parents de revoir ce choix, c'est-à-dire de le reconfirmer ou de l'infirmer si telle était la volonté. Et la loi prévoit, de toute façon – les parents n'ont pas à attendre deux ans – qu'à n'importe quel moment, si un nombre suffisant de parents le demandent, on peut procéder à une rediscussion de cette question et choisir à nouveau le statut de l'école. Donc, je n'ai rien dit de différent de ce qui est dans la loi. Le député de Marquette a essayé de me faire dire à peu près n'importe quoi, mais je n'ai pas dit n'importe quoi, M. le Président, c'est exactement ce que j'ai dit.

Cependant, j'ai ajouté ceci, et je vais terminer avec cette dernière intervention, M. le Président: Il y a une préoccupation de l'ensemble de la société québécoise, de ceux et celles qui ne choisissent pas pour leurs enfants, entre autres, une formation religieuse, que ces enfants puissent avoir accès à une connaissance du patrimoine religieux de leur pays, puissent avoir accès à une histoire des religions, des grandes religions. Cela permet d'ailleurs de développer un certain esprit critique, pour éviter que des situations comme celle qu'on vient de connaître avec l'OTS ne soient possibles, qu'on soit critique à l'égard de tous ces mouvements, de toutes ces sectes qui apparaissent; donc, que nos enfants à l'école puissent avoir accès à des cours qui vont traiter de l'histoire des religions, qui vont développer un esprit critique à l'égard des phénomènes religieux et qui vont traiter de l'histoire de leur patrimoine religieux et de celui du pays dans lequel ils habitent. Alors, ce que je dis, c'est qu'il y a une préoccupation des parents à cet égard-là. Je l'ai entendu à moult reprises.

Je vais donc demander à un groupe de me faire des suggestions sur ces questions et, non seulement de me faire des suggestions, mais je vais demander que la commission parlementaire de l'éducation, donc de l'Assemblée nationale, puisse en débattre, en discuter, puisse même procéder à des audiences et puisse me faire des recommandations. Donc, en ce sens, je pense que la garantie que nous offrons, la déclaration ministérielle à laquelle j'ai procédé aujourd'hui pour bien informer les gens... Parce que je crains de la désinformation, M. le Président, du député de Marquette. Il a commencé, dans sa réplique, cet après-midi, et ça, c'est inquiétant, en voulant dire: Ah!... Et il a continué par la suite: Ah! non, ce gouvernement ne veut pas faire en sorte qu'il y ait de l'enseignement religieux dans les écoles, ne veut pas préserver le statut religieux des écoles.

J'affirme, je réaffirme ce que j'ai annoncé dans la déclaration ministérielle, mais en même temps je dis, M. le Président, nous sommes dans une société pluraliste, nous sommes dans une société démocratique et nous devons avoir cette ouverture d'esprit, cet accueil et ce respect – d'ailleurs, c'est une obligation que nous avons – ce respect à l'égard de la liberté de conscience, de la liberté de religion. Et c'est ce que permet notre système scolaire.

Alors, en ce sens, j'espère, je l'espère très sincèrement, que nous allons pouvoir compter sur l'opposition. Ce serait rater peut-être un moment historique. Je ne sais pas s'ils en sont conscients. Ce serait rater un moment historique, puisque, depuis le rapport Parent, gouvernement après gouvernement, ceux qui l'ont formé en face, qui ont souhaité que l'on procède à l'implantation de commissions scolaires linguistiques, les ministres de l'Éducation les uns après les autres – ce n'est pas arrivé trois fois, hein, c'est arrivé 15 fois que des ministres commandent des rapports, que des ministres présentent des projets...

M. le Président, ce serait un événement absolument remarquable dans la société dans laquelle on vit si ensemble, d'un commun accord, nous pouvions dire: Oui, nous procéderons pour le meilleur intérêt des citoyens et des citoyennes du Québec, et je vous dirais d'abord et avant tout pour le meilleur intérêt des élèves, des enfants du Québec, qui seraient reçus dans des écoles mieux adaptées à la réalité de 1997, que d'un commun accord nous puissions adopter la motion qui est là, qui fait d'ailleurs l'objet d'un appui considérable, pour ne pas dire pas unanime, mais presque. Ce n'est pas le consensus, c'est presque l'unanimité.

J'invite donc l'opposition à se joindre à ce consensus, à appuyer la démarche à laquelle nous allons procéder avec nos collègues fédéraux de telle sorte que nous puissions rapidement amender l'article 93, adopter une loi qui va permettre l'implantation de commissions scolaires linguistiques d'une façon harmonieuse. Il m'apparaît que c'est un devoir que nous procédions ainsi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Éducation. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay. Vous avez une intervention d'une durée maximale de 20 minutes. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Évidemment, c'est aujourd'hui la lancée d'un débat qui va se poursuivre encore sous plusieurs formes au sein de cette Assemblée, et je l'espère en commission. Et après avoir, de façon constructive – je pense que tout le monde va le constater – apporté et plaidé pour des solutions à l'égard des commissions scolaires linguistiques, mon collègue de Marquette, depuis un an, en parle. Alors, lorsque j'entends la ministre plaider pour l'intérêt supérieur de nos enfants et du Québec, je suis obligé de constater qu'elle a perdu deux ans et demi, qu'elle s'est réveillée plutôt tard.

Quoiqu'il en soit, nous avons, de façon constructive, apporté et plaidé pour des solutions. Et après avoir, de façon responsable, depuis six semaines exploratoires bidon, allumé toutes les lumières rouges possibles devant l'entente fédérale-provinciale, nous exprimons que notre volonté de voir s'implanter des commissions scolaires linguistiques prend le dessus sur notre moyen privilégié, sur notre premier choix. Et, bien que nous plaiderons encore pour ce meilleur moyen, nous ne bloquerons pas l'entente fédérale-provinciale.

Et je vais profiter aujourd'hui de cette première intervention dans ce débat qui va se poursuivre pour réallumer les feux rouges et d'abord faire une remise en contexte. La ministre s'est permis quelques commentaires concernant la proposition Proulx-Woehrling, qui visait essentiellement à harmoniser les règles au Québec, faire en sorte que ce qui existe en Gaspésie puis à Mont-Laurier s'applique aussi à Montréal. C'est ça, Proulx-Woehrling, c'est très simple.

(16 h 30)

Qu'est-ce que des commentateurs avisés ont dit de cette proposition? Je vous cite Lise Bissonnette, il y a un an, qui disait à propos de Proulx-Woehrling – et vous avez entendu ce que la ministre vient de dire, hein? elle ne veut pas en entendre parler de Proulx-Woehrling. Que disait Lise Bissonnette? «La proposition que vient de déposer l'opposition officielle à l'Assemblée nationale est la plus prometteuse de toutes. Aucune raison partisane – aucune raison partisane – ne devrait empêcher le gouvernement de l'étudier et de l'adopter.» Onze mois après, la partisanerie s'est mise là-dedans, un petit peu d'astuces, et on a sorti d'autre chose, M. le Président. Elle a dit: «Le rapport, que le Parti libéral du Québec rendait public mercredi, emporte l'adhésion du début à la fin.» Là, mettez ça en contexte avec la ministre de l'Éducation qui vient de se prononcer tantôt, vous voyez qu'il y a un peu d'incohérence.

Qu'est-ce qu'elle disait, Lise Bissonnette? Elle disait: «Cette solution n'est pas une astuce – la solution du Parti libéral; on a déjà allumé des lumières pour l'astuce de l'autre côté, et je vais y revenir – elle réglerait enfin le problème quant au fond, car elle correspond pleinement au consensus actuel.» Un mot qui est utilisé beaucoup, ça, le «consensus». «Elle correspond pleinement au consensus actuel – on parle de la proposition que nous avons faite, notre premier choix, comme meilleur moyen, celle qu'on privilégie – elle épargnerait d'immenses problèmes administratifs liés à la transition entre les systèmes et unifierait un régime de droit qui imposait une distinction absurde entre les uns, à Montréal et Québec, et les droits des autres.»

Ça, c'était il y a un an, M. le Président. Ça a pris un an de tergiversations. Il faut bien le dire, là, parce que là le gouvernement va vous dire: Il faut que ça aille vite. Moi, je n'ai pas de problème que ça aille vite, je suis bien content que ça aille vite. J'aurais aimé ça que ça commence avant. Ils n'ont rien fait avant, et, tout à coup, on sort, il y a six semaines, en phase exploratoire... En phase exploratoire, il y a six semaines, on nous annonce à peu près ce que le gouvernement va faire: On va enlever 93.(1) à (4), à l'égard du Québec. Là, tu regardes ça, cette affaire-là, et tu dis: Il me semble que j'ai déjà lu sur ce sujet-là. Qu'est-ce que ça veut dire, ce qu'ils veulent faire?

Alors, on retourne à nos papiers, M. le Président. Et cette petite démonstration que je veux vous faire, encore une fois... Parce qu'il faut les allumer, les lumières rouges, c'est important de les allumer. Qu'est-ce qui est arrivé? Où on a pris ça? Mais on retourne à Proulx-Woehrling. C'est comme si le gouvernement avait reçu le rapport et s'était dit: Qu'est-ce que je peux faire pour contrer ça? Je vais prendre le chemin qu'ils me disent de ne pas prendre.

Alors, vous lisez Proulx-Woehrling, et ça dit ceci, et là je suis à la page 60: «Bien que le paragraphe (2) de l'article 93 ne s'applique qu'au Québec, on devrait tenir compte du fait qu'il est intimement lié au premier paragraphe et, par conséquent, considérer qu'il fait indissolublement partie avec ce dernier du compromis qui existe entre le Québec et l'Ontario. Pour favoriser l'adoption de la thèse de la procédure trilatérale – «tri», ça, c'est trois – il faudrait laisser subsister les paragraphes (3) à (4), parce que, si vous touchez à (3) à (4), dit Proulx-Woehrling, ça peut impliquer quatre autres provinces.»

Alors, pourquoi on choisit une méthode dont on veut une modification bilatérale qui nous est annoncée comme se faisant, au minimum, à trois ou peut-être à plus? Pourquoi choisir ce moyen-là? Nous, on a allumé des lumières. Depuis le début que ça a été annoncé, il y a six semaines, de cette phase exploratoire où on n'a rien exploré, on dit: Il y a un problème, là. Il y a un problème au niveau de la méthode. On pense que ça ne marche pas.

Proulx-Woehrling disait ça il y a un an, mais Me Woehrling a revu ce qui s'est passé, a suivi le dossier. Hier, le ministre citait des petits bouts de Me Woehrling. J'aurais aimé mieux qu'il cite au complet. C'est plus transparent, c'est plus honnête quand on cite au complet. Me Woehrling disait, le 28 février... Ça, c'était après l'entente fédérale-provinciale. Qu'est-ce qu'il disait? Il disait, et c'est dans Le Devoir , tout le monde peut le lire, le 28 février 1997: «Notre projet, en effet, ne permet pas, en principe, d'atteindre une déconfessionnalisation complète, puisqu'il maintient le droit à la dissidence pour les minorités religieuses, catholiques ou protestantes. Cependant, nous avons choisi cette solution parce que nous croyons qu'elle a plus de chances de pouvoir être adoptée de façon bilatérale qu'une abolition complète des garanties confessionnelles de l'article 93. Il existe, en effet, de solides arguments pour prétendre qu'une modification complète exigerait également l'accord de l'Ontario, voire d'une ou de plusieurs autres provinces.

«Par conséquent, la proposition que nous avons faite il y a un an examine le problème non pas du point de vue de ce qui est souhaitable, mais de ce qui est faisable, juridiquement et politiquement.»

On a allumé une lumière parce que le même juriste spécialiste de ces questions-là a dit, avant et après la prise de position du gouvernement: Bilatérale et la modification que vous envisagez avec ce libellé-là, c'est irréconciliable.

Mais il n'est pas seul. Me Pelletier, qui a aussi écrit un livre, M. le Président, avant que le gouvernement fasse son lit, disait ceci: «L'ensemble des paragraphes 93.(1) à (4) de la loi de 1867 ne devrait être modifié qu'avec le consentement des autorités centrales des six provinces auxquelles l'article 93 s'applique», et là il fait la démonstration par la suite.

Et il y en a d'autres: Me Brun, qu'on ne peut pas, quand même, taxer d'être celui qui fait des opinions juridiques pour le Parti libéral du Québec, dit la même chose, et Me Beaudoin a dit la même chose. Et Me Pelletier, que je viens de vous citer, a aussi reparlé après l'entente fédérale-provinciale, et on s'est reparlé, pour nous dire que ça ne se faisait pas à deux, que ça ne se faisait pas d'une façon bilatérale.

Alors, qu'est-ce qui s'est passé? Nous, qui sommes dans l'opposition, qui, de façon constructive, avons déposé une proposition et, de façon responsable, avons allumé des lumières, qu'est-ce qu'on a fait? On a dit: Est-ce que ce n'est pas possible d'avoir les opinions juridiques que le ministre doit avoir dans son classeur, dans son coffre-fort en quelque part? Il est au courant de ces opinions juridiques. Tout ce qui est public en ce moment, tout ce qui est public dit que ce n'est pas faisable à deux. C'est le chemin qu'ils ont choisi. Il dit que ce n'est pas faisable à deux.

Alors, le ministre dit: Ce n'est pas grave, j'ai une opinion juridique qui me dit que je peux le faire. Alors, nous, on dit: Je comprends que le ministre me dit ça puis je comprends qu'il y a un autre ministre, à Ottawa, qui me dit ça, mais est-ce qu'on peut le lire? Est-ce que ce n'est pas légitime de demander de voir cette information? Quand on veut bâtir un consensus, est-ce que ce n'est pas normal qu'on donne de l'information?

Alors là, M. le Président, on me répond que ce n'est pas dans la tradition, que ce n'est pas coutume de donner des opinions juridiques. Imaginez-vous! On veut bâtir un consensus, ce n'est pas de coutume. Bien, moi, je dis, M. le Président, que le gouvernement, il dit n'importe quoi. Il dit n'importe quoi, parce que, quand ça fait son affaire, il les dépose, les opinions juridiques. Et là on veut bâtir un consensus, et on le cache, on cache des opinions juridiques.

Le 6 décembre 1995, on a déposé une opinion juridique concernant le rapport de l'enquête du Vérificateur général dans l'affaire du ministère de la Restructuration. Le 27 novembre 1996, le même gouvernement a déposé un avis juridique sur certains événements survenus en mai 1966, concernant la Loi sur les jeunes délinquants, le suivi qui avait été fait ici, en Chambre. Des opinions juridiques, M. le Président, ce gouvernement-là, il en a déposé quand ça faisait son affaire, quand ça pouvait lui sauver la mise.

Mais comment expliquer qu'on cache l'opinion juridique qui permet de donner une assurance, qui permet d'apaiser les craintes qu'a l'opposition à l'égard de sa façon de procéder? C'est quoi, la patente? C'est quoi, l'idée? L'argument de «ce n'est pas coutume», ça ne tient pas. Je veux dire, il n'y a pas personne qui peut accepter ça quand on voit que ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai! Ce n'est pas vrai!

On nous trompe, on nous induit en erreur quand on nous dit que le gouvernement ne dépose pas les avis. Je viens d'en citer deux cas, dans les deux dernières années, où il a déposé, ce gouvernement, des opinions juridiques, et ce n'est que justice et légitime de demander au gouvernement ses opinions juridiques pour que les gens puissent voir, dans cette entente fédérale-provinciale, si, oui, ça va fonctionner ou si, au contraire, il y aurait des contestations judiciaires.

Nous autres, on veut que ça fonctionne pour vrai, les commissions scolaires linguistiques. On veut pour vrai que les enfants puissent bénéficier d'une structure qui va leur donner les meilleurs services. C'est pour vrai qu'on le dit. On n'est pas pris dans la partisanerie, à essayer de trouver des petites astuces, on dit: On veut avoir des commissions scolaires linguistiques qui fonctionnent, donnez-nous la preuve que ça fonctionne, présentez-nous l'argumentation, et ils nous le refusent, M. le Président. Nous avons allumé les lumières rouges. En termes d'opposition responsable, on a allumé les lumières rouges.

M. le Président, nous avons aussi demandé... Parce que ça ne sert à rien de jouer à l'autruche comme le gouvernement veut le faire, on entend quand même les craintes dans notre société, la méfiance au sein de nombreux groupes dans notre société à l'égard de ce gouvernement, à cause de ses politiques, à cause de ses propos, à ce gouvernement. Alors, on s'est dit – il y en a peut-être qui vont nous reprocher d'être un peu trop démocrates, qu'est-ce que vous voulez, on voudrait donner la voix aux gens dans la communauté, aux intervenants qui sont affectés par ça – on demande une commission parlementaire. Alors, c'est incroyable, une commission... Je me demande encore comment ça se fait que je suis en train de plaider devant vous pour qu'il y ait une commission parlementaire. Incroyable! On parle d'une modification à la Constitution et on ne fait pas ça à tous les jours. On ne fait pas ça à tous les jours, M. le Président.

(16 h 40)

Je regardais le feuilleton d'hier, vous avez un nouveau préavis sur la modification constitutionnelle: aucune commission parlementaire. Et, juste à côté, il va y avoir une nouvelle politique sur la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole: là, ça ne se voit pas à la télévision, mais il va y avoir une commission avec tout ce monde-là. Tout ce monde-là est invité à venir. Mais, quand ça concerne les commissions parlementaires pour les commissions scolaires linguistiques, ce n'est pas important.

M. le Président, le 25 février, ça, c'est dans la foulée de l'engagement du premier ministre de tenir des commissions parlementaires. Il l'a dit le 21 février. Ça, c'était avant qu'il la renie. Parce que je ne sais pas si vous l'avez constaté, il a renié son engagement, reculé. Dans la foulée de ce temps-là – il était plus généreux en démocratie dans ce temps-là, j'imagine – le 25 février, savez-vous ce que ce gouvernement-là a fait? Ils ont dit qu'ils annonceraient qu'ils allaient élargir la consultation dans le cas de la couleur de la margarine. Ah, pour la couleur de la margarine, ça, on élargit la consultation, mais, quand c'est le cas de la modification constitutionnelle qui concerne des droits de nos concitoyens, ça, il n'y a pas de commission parlementaire.

Pourtant, quel est le précédent en matière de résolutions, de modifications à la Constitution? Ça s'est passé une fois, c'était en 1987, et c'était à l'occasion de l'accord du lac Meech. Il y a une commission parlementaire qui s'est tenue du 12 mai 1987 au 25 mai 1987; il y a eu huit séances, M. le Président, sous un gouvernement qui avait l'air d'agir avec beaucoup plus de transparence et de respect pour la population. Il y a des péquistes qui sont venus, on n'a pas fermé la porte aux péquistes. Il y avait du monde de partout qui allait là. Du 12 mai au 25 mai, huit séances, et ce n'est qu'après, c'est après ça que la résolution a été déposée et évidemment après qu'il y a eu le vote. Comment ça se fait que, là, maintenant, on va procéder différemment? Quel est le respect que le gouvernement a pour l'opposition? Quel est le respect que le gouvernement a pour la population du Québec? Quel est le respect qu'il a pour la démocratie? Pas beaucoup, M. le Président, pas beaucoup.

Lorsque l'entente fédérale-provinciale est intervenue, là, le 7 février, ou dans ce coin-là, il y avait le ministre Dion qui était avec le ministre des Affaires intergouvernementales du Québec et qui avait dit à propos... On lui avait demandé comment ce consensus était pour se voir. Bien, il avait dit: Ça sera au Parlement, avec des consultations publiques. Bon. Alors, c'est comme ça que l'entente est partie. Je veux dire, le ministre n'a jamais contredit ça, là, hein? Le 8 février, le ministre était avec lui. Il n'a pas dit qu'il n'y en aurait pas, de commission parlementaire. Bien non. Au contraire, même, son chef, le premier ministre du Québec – je ne parle pas de n'importe qui, là, je parle du premier ministre du Québec – lui, a dit, le 21 février: Il va y avoir... Sur un sujet d'une telle importance – ça, c'était le fondement, parce que c'est tellement important, et c'est ce qu'on dit depuis tantôt – il est bien évident qu'il va y avoir une consultation. Le 21 février, imaginez-vous. Le 21 février, le premier ministre nous a dit ça.

Et savez-vous pourquoi il disait ça, le 21 février? Savez-vous pourquoi c'est important d'avoir une commission parlementaire? Savez-vous pourquoi c'est important lorsqu'on touche à des modifications à la loi fondamentale? D'abord, parce qu'une commission parlementaire, c'est un forum qui permet de révéler le consensus qui existe, de voir où sont tous les partenaires de notre société, où tout le monde loge. Quand tu favorises la transparence, la limpidité, quand tu n'as pas peur des Québécois, tu leur laisses la parole, tu leur ouvres la porte à une commission parlementaire. Quand tu as peur du Québec, tu fermes la porte, tu bâillonnes, tu ne fais pas de commission parlementaire. Voilà ces gens qui se drapent dans le drapeau du Québec, qui se disent: Nous, c'est les intérêts du Québec. On dit: Ouvrez la porte à ça. On ne parle pas de faire ça pendant 22 ans, là. Ils auraient pu le faire depuis six semaines. On peut faire ça pendant deux, trois séances; au moins donner la chance à ceux que ça intéresse de venir.

Qu'est-ce que ça fait aussi? Ça fait aussi que ça favorise un rapprochement sur les moyens, parce que, comme on l'a dit tantôt, il y a différents moyens. Nous, on en a un qu'on privilégie, qu'on privilégiait et puis qu'on va continuer de défendre puis de plaider, parce que le débat n'est pas fini. Mais on n'est pas au gouvernement. Nous autres, notre travail, qu'est-ce que vous voulez, c'est d'allumer des lumières rouges puis d'espérer de se faire voir, puis, quand les gens nous disent: On les a vus, vos feux rouges, mais on sait ce qu'on fait... Le fédéral-provincial, on est sûr de notre coup puis on ne se trompera pas. Bon. Nous, on pense que, s'il y avait eu une commission parlementaire, on aurait pu aller plus loin dans la compréhension, voir si c'est bien le meilleur moyen, pour la fin que tout le monde veut – puis, de notre côté, en tout cas, on est sincères: des vraies commissions scolaires linguistiques qui n'auront pas de contestation juridique.

Ça permet aussi de faire un peu de pédagogie, une commission parlementaire, M. le Président, pour apaiser des craintes. Parce qu'il y en a, des craintes. Je veux dire, je ne peux pas croire que le monde de l'autre bord ne les voie pas. En fait, je pense qu'il les attise, qu'il les attire, les craintes. Je pense que c'est ça, plutôt, la stratégie qu'ils ont. Parce que des craintes, il y en a dans notre population, puis il ne faut pas faire l'autruche, il faut les voir, il faut avoir intérêt à ramener une cohésion sociale plutôt qu'à créer une division sociale. Alors, une commission parlementaire, ça aurait permis d'approfondir le consensus.

Il y a des gens, des commentateurs – moi, je n'ai pas peur de le dire – qui nous disent: Oui, mais vous allez étirer le débat, si vous demandez une commission parlementaire. Il y a du monde qui nous a dit ça. M. le Président, je n'ai aucune honte à demander une commission parlementaire qui prend trois ou quatre jours. Quand je regarde que le rapport Kenniff avait été déposé en 1994 et que, tout de suite après, le gouvernement est arrivé, en 1995 il n'a rien fait; en 1996, nous autres, on avance avec Proulx-Woehrling, eux autres, ils ne font rien; en 1997, ils font une phase exploratoire de six semaines où il ne se passe rien, puis là ils nous disent: Hé! c'est des mesures dilatoires! Moi, je leur dis: Jusqu'au bout, on se lève debout puis on dit ce qu'on a à dire, puis on demande au gouvernement d'ouvrir les portes d'une commission parlementaire pour s'assurer que les gens vont pouvoir aller exprimer leurs points de vue. Nous avons été constructifs, responsables, et, si le gouvernement était sincère, il répondrait à nos demandes légitimes.

Le débat, M. le Président, sera ajourné aujourd'hui, et, dans l'intervalle du rappel de ce débat, nous voulons rappeler que nous avons toujours été partie au consensus sur les commissions scolaires linguistiques. En fait, nous y étions avant eux. Nous avons utilisé toutes les tribunes pour allumer les lumières rouges à l'égard de l'entente fédérale-provinciale pour plaider pour notre proposition, que nous considérons la meilleure. Le gouvernement a été sourd à nos arguments, et les gouvernements fédéral et provincial laissent entendre que leur moyen peut fonctionner. Aujourd'hui, nous exprimons que notre volonté de voir s'implanter des commissions scolaires linguistiques prend le dessus sur notre choix du meilleur moyen, bien que nous plaidions encore pour que ce meilleur moyen puisse être entendu par les gens de l'autre côté.

Il reste du temps devant nous, M. le Président – et je termine, ça ne sera pas très long – et ce n'est pas trop tard pour le gouvernement pour apaiser les craintes, pour approfondir le consensus, pour déposer son opinion juridique, pour appeler une commission parlementaire. Et, lorsque le débat va reprendre ici, en cette Assemblée, nos collègues des deux côtés vont demander au gouvernement d'assurer que ces engagements soient respectés. Encore des engagements pris aujourd'hui: que les droits des minorités ne soient pas affectés et, au contraire, considérés favorablement; que toute l'opération qu'ils ont mise sur pied soit exempte de contestations juridiques.

Au cours de ces débats à venir, par nos propos, par nos offres de libellés alternatifs, peut-être par une commission parlementaire, nous ferons tout pour favoriser la cohésion sociale, assurer le respect des droits de tous les Québécois et préparer l'avenir de nos enfants. Le gouvernement – et je termine, M. le Président – par ses politiques et ses propos depuis qu'il est à la gouverne, a rompu le lien de confiance avec beaucoup de nos concitoyens, ce que... Et, avec la façon dont nous exprimons aujourd'hui que nous n'allons pas bloquer leur moyen, nous leur montrons qu'il est possible de s'élever au-dessus de la partisanerie. Nous leur demandons de suivre notre exemple et de bâtir pour vrai des structures qui seront favorables pour les jeunes. Nous, nous y croyons vraiment. Y croyez-vous, vous?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. S'il n'y a plus d'autres interventions, je peux accorder un droit de réplique. Alors donc...

M. Bélanger: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah, vous intervenez? Ah bien, excusez-moi, là. Je croyais...

M. Bélanger: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ha, ha, ha! Oui, très bien. Je me demandais pourquoi vous étiez debout. Si c'est pour intervenir, alors je vous cède la parole. Très bien.

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour ajourner le débat, conformément à l'article 100 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

(16 h 50)

M. Bélanger: M. le Président, article 35 de notre feuilleton.


Motion proposant que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procède à des consultations particulières sur la «Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole»

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 35 du feuilleton, M. le leader du gouvernement propose la motion qui suit:

«Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur la "Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole" dans le cadre de la loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole les 8, 9, 10 et 15 avril 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: Association des aménagistes régionaux du Québec; Association des directeurs généraux de MRC; Centre québécois du droit de l'environnement; Centre de recherche industrielle du Québec; Comité de santé environnementale du Québec conjointement avec la Direction régionale de la santé publique Chaudière-Appalaches; Convention Saint-Valentin – préfet de la MRC du Haut-Richelieu, maire de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, UPA Saint-Jean de Valleyfield, Service de développement de l'aménagement et la commercialisation; Coopérative fédérée du Québec; Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec; Direction régionale de la santé publique du Bas-Saint-Laurent conjointement avec COSAPUE – c'est bien ça, oui; Fédération des producteurs de porcs du Québec; Greenpeace Québec; Direction régionale de la santé publique de Lanaudière; Centre national en électrochimie et en technologie environnementale inc.; Groupe DEC; Meunerie J.-B. Dionne et Fils ltée; Ordre des agronomes; Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec; UPA; UMQ; UMRCQ; Union des citoyens du monde rural; Union québécoise pour la conservation de la nature;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre de l'Environnement et de la Faune, le ministre des Affaires municipales et le ministre de la Santé et des Services sociaux soient membres de ladite commission pour la durée du mandat.»

Alors, avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous rappelle que cette motion ne peut être amendée et peut faire l'objet d'un débat restreint d'au plus une heure, conformément à l'article 146 du règlement.

Alors, je pourrais réunir les leaders rapidement pour qu'on s'entende sur le partage du temps. Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour le partage du temps.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

(Reprise à 16 h 56)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous reprenons nos travaux. Je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la discussion de cette motion. Il y aura cinq minutes mises à part pour la réplique, cinq minutes accordées aux députés indépendants, et les deux groupes parlementaires se partageront également la période consacrée à ce débat, c'est-à-dire le 50 minutes restant, réparti 25 minutes de chaque côté. Alors, je réserverai cinq minutes pour la réplique à la fin. Alors, je suis prêt à céder la parole au premier intervenant. M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, M. le Président, cette motion, je crois, est quelque chose qui est important parce qu'elle détermine quels sont les groupes qui seront entendus relativement à la consultation sur la préparation, finalement, du règlement qui va permettre l'application du projet de loi n° 23, le projet de loi sur le droit de produire, qui était attendu depuis longtemps dans le milieu agricole.

Je tiens tout de suite à dire, M. le Président, que c'est déjà exceptionnel de consulter sur un règlement alors qu'un règlement est fait, de consulter, de faire des consultations particulières sur ce point-là. Mais c'est encore plus exceptionnel, M. le Président, quand on consulte avant même d'élaborer un règlement sur un projet de loi. C'est vous dire, M. le Président, à quel point nous voulons que ce règlement, qui est attendu par les gens qui vont bénéficier du projet de loi n° 23 sur le droit de produire, réponde aux impératifs du milieu.

Et, encore là, quelque chose d'encore plus exceptionnel, il y a quatre ministres, quatre ministères, qui se concertent, qui travaillent de concert pour faire en sorte, M. le Président, que cette réglementation va, à la fois au niveau de la Santé, au niveau de l'Environnement, au niveau des Affaires municipales et au niveau de l'Agriculture, que les intérêts qui pourraient peut-être, pour certains, paraître potentiellement divergents, que ces intérêts vont être convergents. Alors, évidemment, M. le Président, qu'on aurait pu dire: On va consulter des mois, on va consulter deux mois, on va consulter trois mois, on va consulter quatre mois.

Ça n'aurait pas été possible. Pourquoi? Parce que la session du printemps est un peu spéciale. Vous le savez, il y a la présentation du budget, la présentation des crédits, ce qui fait en sorte qu'on perd, au niveau du temps de la Chambre, énormément... Ce n'est pas qu'on perd du temps, M. le Président, là je tiens tout de suite à me corriger, on ne perd pas du temps, mais c'est du temps de moins qu'on a pour la législation, pour les commissions parlementaires, parce que le temps qui doit être pris prioritairement, à partir de notre règlement, doit être pris au niveau de l'étude des crédits et au niveau du discours sur le budget. Donc, à ce moment-là, M. le Président, on a quatre jours. Nous avons quatre jours, les 8, 9, 10 et 15 avril 1997, que nous avons réussi à réserver pour cette consultation. À ce moment-là, pour nous, ce qui est important, je crois, c'est de pouvoir maximiser le plus possible ces quatre jours et faire en sorte que les groupes les plus ciblés possible puissent être entendus.

À la lecture même de la motion, M. le Président, vous allez voir d'ailleurs que tout à l'heure je vais vous proposer un amendement, suite à certaines propositions et recommandations qui m'ont été faites. On va même rajouter des groupes, M. le Président, pour vous dire comme quoi... Je comprends qu'à un moment donné il faut que le gouvernement, il faut que l'Assemblée nationale... Finalement, c'est l'Assemblée nationale qui va statuer sur la motion et qui va déterminer les groupes qui vont être entendus, mais, à un moment donné, il fallait trancher, il fallait dire quels sont les groupes qui allaient être entendus, parce que, sinon, si on n'avait pas procédé de la sorte, bien, ça aurait voulu dire, M. le Président, que probablement ça n'aurait pas été à cette session-ci que ça aurait été fait. On aurait fait ça à l'automne. Et je crois que le milieu agricole, en particulier, attend déjà depuis trop longtemps cette réglementation. Je crois que les différents intervenants attendent depuis déjà trop longtemps.

(17 heures)

Donc, nous prenons la responsabilité, à ce moment-ci, M. le Président, de proposer à l'Assemblée nationale, de demander à l'Assemblée nationale de statuer sur les groupes qui seront entendus lors de cette consultation. Et je crois que vous avez fait la lecture, M. le Président, de ces groupes que nous allons inviter.

Il faut admettre que ce sont des groupes significatifs, que ce sont des groupes qui représentent les différents intervenants. Je crois que, suite à cette consultation, à la fois les membres de la commission et les ministres aussi qui vont y participer, ça va leur donner une bonne idée, ça va leur donner, je crois, l'heure juste sur plusieurs impacts, sur plusieurs retombées de la réglementation que nous voulons faire. Et ce gouvernement, parce que, là, j'anticipe – il faut dire que j'anticipe, on essaie toujours d'anticiper un peu quel va être le discours de l'autre côté... On voudrait dire: Ah! le gouvernement ne consulte pas assez, le gouvernement aurait pu plus consulter. Je pense qu'il y a une statistique qui doit être connue, M. le Président. Pour la période du 1er avril 1996 au 25 mars 1997 – aujourd'hui – ce gouvernement et les commissions parlementaires ont entendu 747 groupes ou individus en commission parlementaire, un record absolu. Alors, si on veut mettre ça en perspective par rapport au temps où le leader de l'opposition était leader du gouvernement, c'est trois fois plus qu'à la même période, pour une année, quand c'était le leader de l'opposition qui était leader du gouvernement, trois fois plus, puis on n'a pas encore fini. On n'a pas encore fini, on a jusqu'au 1er avril pour fermer la même période. Donc, ce gouvernement consulte énormément, et je crois que c'est tout à son honneur, et on peut être fier de ça.

Cependant, pour les raisons que je vous ai expliquées tout à l'heure, on a des contraintes au niveau de l'horaire, au niveau de la législation, on le sait, qui va être abondante encore une fois cette session-ci, au niveau du fait qu'il va y avoir un débat sur le budget qui commence. Il va y avoir des échanges au niveau des crédits qui vont retenir aussi le temps de la Chambre, alors, à un moment donné, bon, bien, il y avait quatre jours que nous avions. Nous avons essayé de dégager le maximum de temps possible, puis, vous le savez, ce n'est pas facile, M. le Président. La preuve, ils demandent encore des commissions parlementaires, de l'autre côté. Juste encore il y a à peine 20 minutes, ils demandaient une autre commission parlementaire sur la démarche de ce gouvernement relativement à l'article 93. Je pense que c'est ça. Il y a une contrainte au niveau, à un moment donné, de la disponibilité de la Chambre qui fait en sorte qu'on soit obligé, à ce moment-là, de faire des choix, et c'est donc pourquoi nous sommes limités au niveau de quatre journées. Et, relativement au projet de loi qui va être déposé par la ministre de l'Éducation, oui, on va faire une consultation, mais quand il y aura un projet de loi qui va être déposé. C'est là qu'on pourra, à ce moment-là, considérer des consultations.

Donc, c'est ça. Consulter pour consulter, non, mais consulter d'une façon ciblée, mais toujours évidemment le faire d'une façon la plus large possible, je crois que c'est ce que nous faisons et je crois que les groupes que nous suggérons à l'Assemblée nationale, que nous recommandons à l'Assemblée nationale sont représentatifs des différents milieux.

L'opposition nous est arrivée avec 75 recommandations, 75 groupes. Soixante-quinze groupes, M. le Président, avez-vous idée de ce que ça aurait représenté? Bien, je pense que ça aurait été la bonne façon de dire qu'on n'en veut pas, à cette session-ci, de règlement. Je ne pense pas que c'était ça qui était voulu. Mais 75 groupes, là, c'est impossible; c'est matériellement impossible au niveau de la disponibilité du temps au niveau de la Chambre. Donc, c'est pour ça que nous avons fait la recommandation qui est présentée sous forme de motion, et l'Assemblée nationale aura, par son vote, à déterminer si elle accepte ou pas la proposition qui est faite.

Je dois tout de suite le dire, M. le Président, j'ai un amendement à proposer. Je sais que normalement cette motion n'est pas amendable, mais je sais que j'ai le consentement des membres de l'opposition relativement à l'amendement. Alors, cet amendement se lirait ainsi:

Que la motion en discussion soit amendée par l'ajout, à la fin du premier paragraphe, de la date du 16 avril et par l'ajout, dans la liste des organismes, des trois organismes suivants: «Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalières; Centre de développement d'agrobiologie du Québec; COGENOR».

La motion, telle qu'amendée, se lirait comme suit:

«Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur la "Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole dans le cadre de la loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole" – projet de loi n° 23 – les 8, 9, 10, 15 et 16 avril 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: Association des aménagistes régionaux du Québec; Association des directeurs généraux de MRC; Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalières; Centre québécois du droit de l'environnement; Centre de développement d'agrobiologie du Québec; Centre de recherche industrielle du Québec, CRIQ; COGENOR; Comité de santé environnementale du Québec conjointement avec la Direction régionale de la santé publique Chaudière-Appalaches; Convention Saint-Valentin – préfet de la MRC du Haut-Richelieu, maire de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, UPA Saint-Jean de Valleyfield, Service de développement de l'aménagement et la commercialisation; Coopérative fédérée de Québec; Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec; Direction régionale de la santé publique du Bas-Saint-Laurent conjointement avec COSAPUE; Fédération des producteurs de porcs du Québec; Greenpeace Québec; Direction régionale de la santé publique de Lanaudière; Centre national en électrochimie et en technologie environnementale inc., CNETE; Groupe DEC; Meunerie J.-B. Dionne et Fils ltée; Ordre des agronomes, Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec; UPA; UMQ; UMRCQ; Union des citoyens du monde rural; Union québécoise pour la conservation de la nature;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre de l'Environnement et de la Faune, le ministre des Affaires municipales et le ministre de la Santé et des Services sociaux soient membres de ladite commission pour la durée du mandat.»

Donc, M. le Président, ce que je vous disais tout à l'heure, la preuve à l'effet que ce gouvernement fait vraiment l'impossible pour pouvoir entendre le plus grand nombre possible de groupes, nous rajoutons trois groupes, suite aux recommandations, d'ailleurs, qui nous ont été faites du côté de l'opposition, et en plus nous rajoutons une journée d'auditions afin de pouvoir entendre ces trois groupes.

Alors, je pense que vous avez un consentement à demander, M. le Président. C'est ça?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour déroger à l'article 146?

Une voix: Pour le dépôt de...

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est-à-dire pour le dépôt d'un amendement. L'article prévoit qu'il n'y a pas d'amendement sur une telle motion, mais il y a consentement pour...

Des voix: Consentement.


Amendement déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Il y a consentement, alors l'amendement est déposé. Ça fait partie de la proposition maintenant, et puis on pourra en débattre...

M. Bélanger: M. le Président, je vais terminer mon argumentation sur ce point. Je crois que le ministre de l'Agriculture aussi va parler à la fois sur les groupes qui font partie de la motion et sur ce qu'il attend aussi de cette consultation. Nous croyons, en tout cas, qu'avec les groupes qui sont là c'est une proposition qui est raisonnable, qui va chercher, je crois, les opinions dans les quatre sphères, quand je mentionnais les quatre ministères qui étaient impliqués au niveau de la consultation. Et je crois que ça va être excessivement précieux à la fois pour les ministres qui vont participer à la commission parlementaire pour l'élaboration... Je tiens à le répéter, c'est excessivement rare qu'un gouvernement consulte avant l'élaboration même d'un règlement. Alors que ce règlement n'est même pas encore fait, on écoute la population et on veut que la population puisse, à ce moment-là, nous faire ses propositions.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader du gouvernement. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Et vous savez que vous disposez d'un temps de 25 minutes pour votre groupe parlementaire.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. J'interviens à mon tour pour tenter de persuader le gouvernement de revenir sur sa décision de ne pas rajouter des groupes à la commission parlementaire, et je vais vous expliquer pourquoi.

D'abord, j'aimerais rappeler au leader du gouvernement qu'il est le gardien et le responsable de la gestion du temps en cette Chambre; deuxièmement, qu'on aurait intérêt, s'il veut maximiser le temps, à aller voir ce qui se passe à la commission des affaires sociales, qui achève d'entendre 110 groupes concernant la réforme de l'aide sociale. Ça a été effectivement une réforme majeure, mais je pense que, dans le dossier qui nous concerne ici, c'est majeur aussi. Et je m'explique.

Si on veut rajouter des groupes, c'est parce qu'on veut que les gens de la base puissent venir s'exprimer sur ce dossier-là. Le projet de loi sur le droit de produire a été adopté sans les règlements. On se rappellera qu'en commission parlementaire le ministère de l'Environnement et de la Faune et le ministère de l'Agriculture ne s'entendaient pas – je ne dis pas ça par manque de respect – sur certaines formules, sur certains règlements. On a consulté et on nous a déposé tout récemment un document qui, semble-t-il, ferait peut-être consensus, mais il faut aussi, M. le Président, qu'on puisse entendre les groupes qui sont directement concernés.

(17 h 10)

Avec tout le respect que je dois à l'UMQ et à l'UMRCQ – je vais m'attarder davantage à ces groupes-là, puisque je suis la critique, comme vous le savez, des affaires municipales pour l'opposition officielle – je n'ai aucun doute que leur représentation va être importante dans le débat, mais les municipalités qui, depuis l'an dernier, depuis deux ans, vivent sur le terrain des confrontations entre citoyens... Ces confrontations-là, ça se fait de bonne foi. Vous avez les agriculteurs qui veulent vivre de l'agriculture, ça fait partie du développement économique de nos régions. C'est important, on ne peut pas laisser aller ça. On a laissé construire, aussi, près de ces zones-là. On a des gens qui ont choisi d'aller vivre proche des secteurs zonés agricoles. Ces gens-là pensent aussi que leurs droits sont lésés.

Je veux bien qu'il y ait des instances qui regroupent de nombreuses municipalités qui viennent s'exprimer, mais je voudrais bien aussi... et ma formation politique souhaiterait, M. le Président, entendre les municipalités qui sont directement concernées, sur le terrain. Certaines ont vécu des moments déchirants; je pense qu'on a qu'à se rappeler ce qui s'est passé à Saint-Jean-Chrysostome, dans la région de Québec, Pintendre. J'en ai, j'ai l'Acadie, Sainte-Luce, Saint-Basile-le-Grand, La Prairie, Saint-Esprit, et j'en passe. Je pense, M. le Président, qu'on aurait tout intérêt à permettre ces débats-là dans un esprit d'échange, d'ouverture.

Je comprends mal le leader qui vient nous dire qu'on manque de temps. Il est celui-là même qui gère le temps de la Chambre, qui gère le temps des commissions parlementaires. Si, M. le Président, le leader trouve que ce n'est pas assez important de recevoir une soixantaine de groupes... M. le Président, est-ce qu'il y a un problème? Peut-être que le député de Saint-Hyacinthe voudrait s'exprimer tout de suite.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous inviterais à ne pas mentionner, comme ça... Des fois, on peut se tromper et faire erreur sur...

Mme Delisle: Je sais qu'il...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, mais vous avez un exemple ici. Ce n'est pas pour rien qu'on demande, autant que possible, de ne pas désigner les personnes, dans ces situations-là, parce que des fois on peut faire erreur sur la personne parce qu'on n'est pas tout à fait au courant quand on discute.

Alors, moi, je n'ai pas à trancher non plus. Je surveille et j'invite tous ceux, finalement, qui ont à le faire à respecter le droit de parole de Mme la députée Jean-Talon. Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, c'est justement parce que je veille aux intérêts du député de Saint-Hyacinthe et de mon collègue, M. Benoît, le député d'Orford, que je pense que c'est important qu'on prenne le temps. Est-ce que c'est une journée et demie de plus qui va changer grand-chose à notre agenda? On est ici pour ça. On est ici, M. le Président, pour les entendre, les citoyens, pour entendre les citoyens nous exprimer, par le biais de leurs élus municipaux, qu'est-ce qu'ils ont vécu, quelles sont les solutions qu'ils ont trouvées, quelles seraient les solutions possibles ou comment ils ont réglé leurs problèmes. S'il avaient eu certains outils, je pense à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, si ça avait été un peu plus souple, est-ce qu'ils auraient mieux réussi? Je n'en sais rien.

M. le Président, vous savez, j'ai un comté qui n'est pas très rural. Bon. Mais ça ne veut pas dire que je ne comprends pas la réalité justement des régions, que je ne comprends pas la réalité, ce que vivent les élus municipaux qui doivent composer avec cette problématique, cette réalité-là qui... Aujourd'hui, c'est un problème majeur pour eux.

Alors, je fais appel, M. le Président, à la compréhension du leader, au ministre responsable de l'agriculture pour qu'il puisse entendre les municipalités qui ont vécu ces problèmes-là venir nous dire comment on doit gérer ça, comment, entre citoyens qui veulent une qualité de vie, comment, comme citoyens agriculteurs, on veut gagner sa vie. Moi, je pense que la logique veut qu'on puisse les entendre, ces groupes-là, qu'on y mette le temps. Ce n'est pas une semaine ou deux de plus qui va changer grand-chose pour nous, on est ici pour ça. Mais, pour ces gens-là, c'est très important, et je pense que pour le ministre de l'Agriculture... Il est excessivement important que le ministre de l'Agriculture puisse avoir l'information directement de la bouche de ces gens-là. Je pense que les 27 groupes, quant à moi, ce n'est pas suffisant. Je lui demande de parler avec sa collègue responsable de la réforme de l'aide sociale, qui a entendu tout près de 110 groupes très patiemment, très patiemment; tous les députés qui étaient là l'ont fait aussi. Je pense que ce serait important, M. le Président, et c'est pour ça que je suis ici, devant mes collègues, à leur demander de réviser leur position et d'inclure les groupes qu'on a proposés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Le prochain intervenant, je vais céder la parole à M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. M. le ministre.


M. Guy Julien

M. Julien: Alors, merci, M. le Président. Je vous dirais: Enfin, on arrive à la dernière phase de cette saga qui a commencé depuis 18 ans. Depuis 18 ans qu'on attendait enfin la mise en vigueur de la loi et des règlements. On l'a adoptée l'an dernier, le 23 juin. Et je dois vous dire que, au préalable, il y avait eu moult et moult consultations avec tous les groupes concernant ce projet de loi là, M. le Président.

Ça a abouti à l'adoption de la loi. Et, lors de l'adoption de cette loi-là, on s'était entendus pour se donner une année, une année pour réglementer le bruit, les poussières et pour s'entendre sur des paramètres, concernant les odeurs, qui seront transmis par le ministre des Affaires municipales dans le cadre des orientations gouvernementales. Et nous arrivons, évidemment, à cette échéance.

Évidemment, on aurait pu faire une réglementation sans consulter, puis l'imposer. Comme le leader l'a mentionné au préalable, on a pensé que la voie de connaître l'opinion des gens sur un cadre de principe directeur sur lequel on va se baser pour définir ces réglementations-là, compte tenu du sujet, ça nous apparaissait important et, comme gouvernement, on a pris la décision de tenir une commission parlementaire et d'inviter certains représentants soit du monde municipal, du monde de l'environnement, de la santé, de l'agriculture. Et on a même fait rajouter des représentants de groupes qui ont développé des nouvelles technologies, et ça, ça m'apparaît fondamental.

Donc, on a respecté notre engagement. Il y a eu une décision du Conseil des ministres, on s'est entendus pour la commission parlementaire au mois d'avril, dépôt et acceptation des règlements et de la loi pour d'ici à la mi-juin. Et je souhaiterais, si on a une bonne collaboration de l'opposition, que ça se fasse avant.

La semaine dernière, M. le Président, on a déposé un document de travail qui concernait les principes directeurs sur lesquels règlements et paramètres seront définis. Ce à quoi je m'attends des groupes qui vont être invités, M. le Président, c'est que, un, on nous fasse part des commentaires sur les principes directeurs qui sont émis dans le document; deux, c'est qu'on nous suggère des normes réglementaires qu'on pourrait utiliser pour constituer ce règlement. Moi, je pense que, quand on parle de partenariat, c'est une des meilleures façons de le faire.

Alors, M. le Président, quand on va avoir adopté ça, on va avoir atteint nos objectifs. Mais on n'a pas attendu ça pour passer à l'action, on n'a pas attendu d'adopter la loi; on l'a vu hier dans le budget du ministre des Finances. Qu'est-ce qu'il a proposé, le budget du ministre des Finances? Il a proposé un projet de financement pour permettre aux producteurs de s'adapter à toutes les nouvelles technologies, s'adapter au développement durable. C'est ça qu'on a proposé. On va en financer 60 % des coûts, les gens vont avoir cinq ans pour appliquer à ce programme et de 10 à 15 ans pour le financer avec notre collaboration.

Dans le contexte actuel, je dois vous dire, M. le Président, que je remercie le ministre des Finances. C'est un mouvement important et ça donne aussi le sens, la ligne qu'on veut donner au monde agricole. C'est qu'on veut leur donner les outils pour s'adapter à tous les changements. Dans ce cas-là, on le fait, il y aura d'autres cas.

Et l'autre élément important que je veux mentionner, parce qu'on se préoccupe aussi de notre réalité, je veux remercier le ministre des Finances concernant le support qu'il va donner à Solidarité rurale pour faire en sorte que notre ruralité soit bien développée. Ça, c'est le gouvernement.

Mais, dans le monde agricole, qu'est-ce qui s'est passé? Le monde n'a pas attendu qu'on passe notre loi. Qu'est-ce qu'ils ont fait? Déjà, il y a des comités agricoles de créés dans les MRC. Moi, dans ma région, dans le comté, par exemple, de Maskinongé, il y a un comité qui fonctionne depuis maintenant deux ans. Puis je parlais avec madame qui est le préfet, la mairesse de Louiseville, qui me disait: Au début, ça a été ardu, question de communication. Maintenant, ça va très bien. Formule des avis au préfet, formule des avis aux municipalités, ça va de façon... très bien.

Le président de la fédération, chez nous, en région, dans la Mauricie, est en train d'en implanter dans toutes les MRC. Et je vous dirais que c'est un mouvement qui est en train de se faire partout au Québec. On n'a pas attendu une loi. Les producteurs, ils l'ont pris, le virage du développement durable, ils l'ont pris. Il va falloir que le monde le comprenne, ça.

(17 h 20)

L'autre élément que je veux vous mentionner, M. le Président, c'est que les présidences de fédérations spécialisées – je pense, entre autres, à l'industrie porcine, à l'industrie bovine – se sont dotées de plans agroenvironnementaux. «C'est-u» assez clair, ça? Il y a du monde qui ne comprend pas ça encore. C'est fait, c'est en application. Pourquoi? Parce que les gens sont conscients qu'on doit prendre un virage vers le développement durable parce que, d'une part, ça va permettre une cohabitation harmonieuse, mais, d'autre part, ça va nous permettre de pénétrer des marchés à l'exportation, où on est très exigeant, et de plus en plus, sur la qualité de notre produit. C'est important, ça, puis ce n'est pas juste une question normative. Toutes les technologies qu'on va développer, on va pouvoir les exporter. On va créer une industrie de technologies au niveau de l'environnement. Ça aussi, c'est un phénomène important.

M. le Président, ce que je veux vous mentionner, c'est qu'on va adopter cette loi-là au mois de juin, on va adopter les règlements, nos producteurs sont déjà en cours, ils ont mis des plans stratégiques, ils ont mis des plans agroenvironnementaux pour les respecter; puis je vais vous dire une affaire, moi, je les comprends, ces plans-là, puis je vais les défendre. Puis ce que je souhaite, c'est que tous les intervenants, autant du monde de l'environnement que du monde municipal, comprennent qu'actuellement les producteurs puis les productrices du Québec, ils l'ont pris, le virage. C'est ça que je voulais vous mentionner.

Alors, j'ai hâte, à la commission parlementaire, d'entendre les commentaires sur le plan directeur, sur les plans directeurs sur lesquels on va se baser, et les suggestions, les propositions quant aux normes de réglementation qui vont originer du milieu. Après ça, les sous-ministres, les ministres vont se réunir pour s'entendre sur une réglementation qui fera en sorte que la loi n° 23 soit en application, tel que l'engagement que le Parti québécois a pris lors de son élection, que le gouvernement du Parti québécois avait pris lors de sa prise de pouvoir, qu'il a répété au congrès des producteurs et des productrices, et c'est dans ce cadre-là qu'on va l'adopter. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je pense que ça me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour insister auprès du gouvernement pour entendre des groupes, comme l'a mentionné tantôt le leader du gouvernement, pour mieux se préparer à préparer justement le règlement qui découle de la loi n° 23, loi n° 23 qui est attendue dans son application partout au Québec, dans toutes les régions du Québec où l'agriculture est concernée. Donc, c'est tout le Québec, en principe, qu'on doit dire.

Le ministre de l'Agriculture vient tout simplement de nous dire: Le monde de l'agriculture est préparé. Oui, c'est vrai, le monde de l'agriculture est préparé; il nous l'a démontré quand il s'est présenté en commission parlementaire à l'occasion de l'adoption du projet de loi n° 23, d'une part. Ils se sont préparés, et le monde rural, de façon générale, est prêt à ce que la loi n° 23 puisse s'appliquer, ce qu'on appelle, dans le jargon du milieu, le «droit de produire». C'est ce qui va les sécuriser. Mais le gouvernement a retardé mois après mois. On est toujours en attente du règlement.

On vient de nous déposer une proposition de principes généraux relatifs à la gestion. C'est bien. C'est bien, ça nous permet de voir les réflexions du ministère de l'Agriculture, du gouvernement du Parti québécois et de tous ceux qui conseillent le ministre dans ce domaine. Mais c'est une raison de plus, M. le Président, d'entendre les groupes mentionnés qui souhaiteraient être entendus.

Le leader du gouvernement tantôt nous a dit: On manque de temps. Il s'est repris et il a dit: Écoute... Au début, il avait dit: On n'a pas de temps. Ensuite, il s'est repris – et je pense que c'est de bonne guerre: Nous n'avons pas tout le temps nécessaire pour entendre tous les groupes. Il trouvait exagéré que l'opposition ait suggéré au-delà de 70 groupes. Mais il y aurait peut-être eu lieu, M. le Président, de s'asseoir, d'échanger avec chacun de ces groupes et de voir s'il n'y aurait pas lieu de faire un compromis et d'aménager du temps. Plutôt que d'en recevoir 17, 18 – ou une vingtaine avec l'amendement, je crois comprendre – ou 30, 35, ce n'est pas une affaire de nombre, c'est tous ceux et celles parmi ces groupes qui sont en mesure d'aider le gouvernement, d'aider le ministre de l'Agriculture, d'aider ses conseillers à préparer un projet de règlement qui va répondre justement à l'aspiration d'abord des producteurs agricoles de chacune de nos régions, de permettre aux municipalités... comme ma collègue de Jean-Talon vient de le mentionner, même si elle a reconnu qu'il y avait peu de production de porcs dans son comté. Évidemment, c'est un problème québécois. Pour elle aussi bien que moi, dans nos relations avec le monde municipal, c'est une préoccupation. Le projet de loi prévoit que les municipalités auront à préparer de la réglementation et à revoir leur plan d'aménagement en fonction de l'application de la loi n° 23. Je pense que ça peut être intéressant de voir les groupes qui se sentent concernés par une future ou probable réglementation préparée par les municipalités en rapport avec l'application du règlement qui découle du projet de loi n° 23.

Donc, je reviens à ce que le leader disait. Soixante-dix, il trouvait que c'était exagéré, 17, 18, 19 ou une vingtaine... C'est tout le temps que le leader a trouvé pour entendre ces groupes, pour aider le ministre de l'Agriculture et le gouvernement à préparer leur règlement ou à travailler sur le projet de règlement. C'est toutes les régions au Québec, c'est le monde agricole; comme ma collègue l'a demandé, c'est important au Québec. C'est des relations avec le monde municipal, c'est des relations avec les citoyens. Je pense que plusieurs de ces groupes qui ont été proposés au leader du gouvernement pour être entendus nous auraient permis, à nous, députés, ici, à l'Assemblée nationale, qui voulons faire un travail constructif... Je pense que c'est la volonté de tout le monde, c'est le principe avec lequel on travaille pour essayer d'amener finalement une loi, un projet de règlement le mieux adapté aux besoins de chacune de nos populations, d'une part.

Là, on vient de parler du monde municipal, du monde agricole ou des groupes qui s'inquiètent. Vous avez le monde qui suit de près l'impact que peut avoir sur l'environnement ce projet de réglementation. Tantôt, on a parlé de Solidarité rurale, je pense que c'est un groupe qui est mesure d'apporter beaucoup au gouvernement, aux députés de l'Assemblée nationale, aux membres de la commission de l'agriculture. La Chambre des notaires, évidemment, et le Barreau du Québec, on reconnaît qu'ils auraient des choses à dire, mais ça pourrait peut-être se regrouper et permettre à un ou à ces deux groupes-là finalement d'être entendus. L'UPA de la Beauce, du Québec et d'autres régions au Québec, et celle que je représente, l'UPA de la Côte-Sud, je suis certain, M. le Président... J'invite le ministre à y penser, à y réfléchir deux fois, parce que c'est des régions... Et je vois notre collègue, aussi, de la région de la Matapédia, où récemment il y a eu des demandes de développement de production porcine et où il y a des demandes d'agrandissement. Toutes ces régions, celles du Bas-Saint-Laurent, de la Côte-Sud, de Québec, de la Beauce et d'autres régions au Québec, ont avantage à venir de nouveau nous préciser leurs préoccupations, de quelle façon ils voient leur collaboration avec le monde municipal pour préparer de la réglementation adaptée au milieu local. Les préoccupations de chacune de nos régions peuvent être assez différentes, dans certains cas, d'une région à l'autre.

(17 h 30)

Donc, on comprend très mal que le leader, tout bonnement, comme ça, très à l'aise, nous dise: On manque de temps, je n'ai pas la capacité d'aménager du temps pour recevoir 70 groupes. Il n'y aurait pas lieu d'en recevoir, en fait, un certain nombre qui viendraient s'ajouter à la liste existante que vous venez de nous présenter? Et je pourrais vous en lister, M. le Président, plusieurs dizaines d'autres groupes. Je pense qu'on a des gens qui ont fait de la recherche, qui ont mis du temps pour essayer d'améliorer leurs relations avec les citoyens dans leurs activités de tous les jours. Ils seraient peut-être en mesure de venir nous dire ce qu'ils ont fait, ce qui a été fait et ce qu'ils sont en mesure de faire dans un avenir futur pour aider et démontrer à la population justement que le monde agricole, les producteurs dans leur ensemble, ces gens-là sont conscients qu'ils ont une responsabilité. Comme M. le ministre le mentionnait tantôt, ils ont le goût de s'améliorer, ils ont le goût de collaborer, donnons leur la chance de venir aider le ministre de l'Agriculture à l'Assemblée nationale à préparer un projet de règlement adapté aux situations de chacune de nos régions.

Donc, M. le Président, c'est décevant de voir que le leader, comme je le mentionnais, trouve qu'il manque de temps, et je pense que, dans des situations comme celle qu'on vient de voir, c'est irrespectueux – en fait, ce qu'on vient de voir, c'est qu'il refuse de recevoir certains groupes – à mon avis envers ceux qui se préoccupent depuis des années et qui souhaitent justement une amélioration de la situation.

Donc, nous allons continuer, même quand nous aurons à entendre ces groupes-là, à négocier avec le leader du gouvernement pour essayer de voir s'il n'y a pas lieu, dans le temps déjà prévu, d'aménager et d'inviter des personnes qui seraient en mesure – s'il y a lieu de revoir la position du leader – de nous aider à mieux comprendre la problématique, d'abord, de l'application de la loi 23 et la problématique d'un prochain règlement dans les relations agriculteurs-monde municipal. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. Alternance. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. Je crois que vous pouvez disposer d'un temps de neuf minutes, parce que nous allons répartir le temps des indépendants... Alors, maximum neuf minutes. Allez, monsieur.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président, de me donner l'occasion de parler sur cette question. Vous savez à quel point l'agriculture m'intéresse, m'occupe et me préoccupe. C'est pour ça que parfois je peux être un peu intempestif dans les manifestations d'intérêt, et ça peut déranger parfois mes collègues, et je m'en excuse. Mais c'est la manifestation de l'intérêt que j'ai et que je porte pour l'agriculture. Vous comprendrez qu'étant de Saint-Hyacinthe je ne peux pas ne pas m'y intéresser, parce qu'on baigne dans tout ce qui est l'économie agricole chez nous.

Je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises des différentes institutions qu'on a, qui sont fantastiques. Que ce soit dans l'enseignement, l'ITA de Saint-Hyacinthe, la Faculté de médecine vétérinaire, que ce soient les centres de recherche: le Centre de recherche en développement des aliments, le Centre de transfert technologique agroalimentaire. Mais, toutes ces belles institutions, M. le Président, ça servirait à quoi si on n'avait pas une agriculture dynamique, si, sur le terrain, il n'y avait pas vraiment des producteurs qui puissent produire avec profits et des façons modernes de façon à pouvoir compétitionner sur la scène internationale avec leurs produits, M. le Président?

Pour cela, il faut que l'agriculture soit prospère et il faut que l'on puisse établir des conditions de production qui soient favorables aux producteurs et qui soient aussi acceptables pour l'ensemble de la population. C'est sûr qu'on a connu, tout le monde, après une période d'urbanisation intense dans les années cinquante, une période de retour à la campagne où le peuple québécois, attaché comme il l'est à son terroir, à sa terre, à son milieu naturel, avait tendance à quitter la ville et à s'acheter des lots, des petits emplacements à la campagne et à s'y installer. Bon. Ça a amené des choses très intéressantes, mais aussi des problèmes.

Des choses intéressantes parce qu'en intensifiant un peu le tissu rural ça a permis d'améliorer les services dans les villages. Mais ça a amené aussi des contraintes parce que, là, les besoins de quelqu'un qui demeure à la campagne, ce n'est pas nécessairement les mêmes besoins que celui qui produit à la campagne. Alors, le premier problème, donc, un problème de coexistence parfois un peu difficile à cause des inconvénients que toute production apporte.

Mais il y a aussi un autre facteur qui a joué, celui de la prise de conscience, depuis une vingtaine d'années dans le peuple québécois, dans la population québécoise, de tous les problèmes de pollution, qui sont bien autre chose que des inconvénients, qui sont des problèmes de santé, qui sont des problèmes de pouvoir apprendre à vivre et à avoir une qualité de vie dans notre milieu sans le détruire.

Alors, tout ça a fait que, évidemment, on est arrivés à une situation où il y avait un problème à la fois pour les résidents de pouvoir bénéficier de leur droit de propriété et pour les producteurs, donc, de pouvoir produire d'une façon convenable sans être constamment inquiétés. Alors, tout ça a fait qu'on a... M. le ministre de l'Agriculture a fait adopter au printemps dernier une loi sur le droit de produire qui est une loi ouverte, une loi qui permet la concertation entre les gens, qui permet aux gens de discuter des vrais problèmes et de s'entendre sur les vrais enjeux pour pouvoir coexister pour le bien-être et le bénéfice de tous.

C'est sûr que maintenant on est rendu à la dernière étape qui est l'application du règlement, la décision concernant le règlement qui va permettre d'appliquer cette loi-là de façon à la rendre plus efficace. Ça, M. le Président, c'est un autre enjeu qui est difficile, et c'est pour ça qu'il est important d'entendre un certain nombre de groupes.

Mme la députée de Jean-Talon disait qu'il fallait entendre les municipalités concernées. Bien, dans ce sens-là, si on tenait compte de ça, on entendrait à peu près 1 000 municipalités, 1 200 municipalités qui sont concernées par ça. C'est sûr qu'elle ne voulait pas aller jusque-là, parce qu'elle dirait: C'est exagéré, vous voulez ridiculiser ma proposition, et je ne veux pas ridiculiser sa proposition. Je veux juste dire que c'est vrai qu'il faut entendre le monde municipal, il faut entendre les gens qui sont spécialisés en environnement et qui en font une occupation et une préoccupation constante. Il faut entendre les producteurs, mais il faut aussi agir. On pourrait passer six mois à étudier ça, mais évidemment il y aurait des perdants là-dedans. Alors, je crois que ce qui a été décidé, environ 25 groupes qui vont être entendus – il y a déjà près de 30 groupes qui ont été entendus sur l'avant-projet – je trouve ça raisonnable.

Vous savez, là-dedans, M. le Président, trop, c'est comme trop peu. Je pense que ça ne donne pas de bons fruits. Je pense que, si on veut avoir des résultats, il faut écouter avec attention les gens, mais il faut aussi savoir décider. En ce qui me concerne, je pourrais dire: Mais les gens de l'UPA de Saint-Hyacinthe veulent être entendus! Mais les gens de l'UPA de Saint-Hyacinthe, ils sont entendus régulièrement. Ils savent qu'ils ont un député qui les écoute, comme, dans le Bas-du-Fleuve, ils ont des députés qui les écoutent. Mme la députée de Matapédia, elle est constamment à l'écoute des producteurs agricoles, mais elle est à l'écoute aussi des milieux municipaux, et c'est pour ça qu'on est ici, pour porter la parole des gens de notre milieu, porter leurs préoccupations et faire en sorte qu'on arrive à des solutions. Alors, je suis très fier de porter la parole, les préoccupations et les inquiétudes des gens de mon milieu, et c'est pour ça que je suis ici.

Vous savez, M. le Président, on dit parfois que qui prouve trop ne prouve pas du tout. Alors, c'est une question d'équilibre. Je ne sais pas combien il me reste de... – deux minutes – mais, si j'avais le temps, je vous donnerais un exemple pour vous montrer que trop, c'est comme trop peu. Je pense qu'en deux minutes je peux vous donner ça. Dans un roman de Bernanos... Je pense que je vous ai déjà raconté ça.

Des voix: Non.

M. Dion: Non? On voit à un moment donné une bonne petite religieuse qui est chargée de l'entretien d'une église, et c'est une religieuse qui veut faire ça à la perfection. Elle ne veut pas qu'il y ait le moindre brin de poussière. Alors, à tous les deux ou trois jours, elle entre et, avec son seau d'eau, elle jette de l'eau par terre et elle frotte et elle frotte. Un semaine, elle est malade, elle ne peut pas venir; alors, en fin de semaine, avant que le dimanche arrive, elle dit: Faut absolument que j'aille faire le ménage. Alors, elle se présente à l'église, et qu'est-ce qu'elle voit? L'herbe qui pousse sur le plancher. Vous voyez, trop, c'est comme trop peu, M. le Président, hein? Alors, je pense qu'il faut savoir avoir de la mesure, et il faut savoir marier la consultation avec l'action. Je crois qu'environ 25 groupes représentant les différents secteurs de la société, c'est quelque chose de raisonnable, et ça va nous permettre, comme députés, comme membres de la commission, de prendre les décisions qui doivent être prises pour assurer l'harmonie et aussi l'essor de la production agricole, M. le Président. Je vous remercie.

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. Vous disposez d'un temps de 11 minutes, M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, merci. Je viens d'entendre avec grand intérêt le député de Saint-Hyacinthe, tout comme le ministre de l'Agriculture, bien sûr. Il faudrait peut-être que le député de Saint-Hyacinthe ajuste ses violons avec le leader parlementaire. Le leader, il y a quelques minutes, nous a dit qu'on avait entendu 747 groupes et il se pétait les bretelles, il était tout heureux de nous dire que c'était un record de tous les temps, etc. Et là, via un roman d'amour dont vient de nous parler le député de Saint-Hyacinthe, on apprend soudainement que 25 groupes, là c'est trop. J'espère que le leader et le député de Saint-Hyacinthe vont souper ensemble ce soir pour s'entendre: Est-ce que 747, ce n'était pas trop, puis est-ce que 25, c'est trop? Il y a une incohérence entre ces deux individus-là et je les invite à se parler à un moment donné pour qu'on comprenne lequel des deux chiffres est le bon chiffre, M. le Président.

Et si 25 groupes, c'est trop, bien, vous irez dire ça au ministre de la Santé, vous irez dire ça aux gens dans la santé qui m'ont demandé d'aller les rencontrer à Rivière-du-Loup, qui m'ont demandé d'aller les rencontrer dans la région de Joliette, qui m'ont demandé d'aller les rencontrer dans la région de Saint-Hyacinthe où, là, il y a des problèmes de santé causés par la pollution agricole. Vous irez dire ça aux milliers de citoyens, dont ceux de Sainte-Luce qui étaient réunis hier soir, qui n'ont pas de retours d'appels de grand monde en ce moment, où la bataille est poignée bien carrée, à Sainte-Luce. Vous irez dire ça aux gens de Sainte-Luce, M. le Président, que 25, c'est assez.

Vous irez dire ça aux gens des affaires municipales, incluant la présidente de l'UMRCQ, qui a été une de vos candidates à une convention, qui a décrié sur toutes les tribunes possibles au Québec, disant que ça n'avait pas d'allure, ce qui se passait dans cette histoire-là. Les gens de l'environnement veulent être entendus, les gens de la santé veulent être entendus, les gens des affaires municipales veulent être entendus et les gens de l'agriculture, M. le Président, veulent être entendus. Sans parler des simples citoyens – et je vous en parlerai tantôt – qui ont été pris en otages des fois par les environnementalistes, des fois par les conseils municipaux, des fois par les producteurs agricoles. Ces gens-là aussi ont des choses à dire, et on ne les a pas entendus, M. le Président.

Le débat, il est là. Et quand le leader nous dit: Écoutez, on manque de temps, bien, je rappellerai au leader que, quand nous avons fini ce projet de loi, avec la fin de la session au mois de juin, nous, le Parti libéral du Québec, nous qui sommes préoccupés par la santé, l'environnement, l'agriculture et les gens, nous avons dit: Nous sommes prêts à passer l'été ici pour étudier la réglementation. Et ce gouvernement, M. le Président, qui est en place a refusé. Nous devions nous réunir au mois de septembre. On a été appelés dans nos comtés en nous disant: N'usez pas vos pneus, restez chez vous, on n'est pas prêts. On devait être rappelés – et je me souviens très bien de la date – le 6 octobre, M. le Président. On avait tous – les députés – mis sur nos agendas... On nous avait juré sur la tête de nos mères que nous serions invités le 6 octobre. Eh bien, M. le Président, le 6 octobre, on a été appelés, nous disant: N'usez pas vos pneus d'auto, ça ne vous donne rien de venir à Québec, on n'est pas tout à fait prêts encore.

On nous a dit ensuite: Dormez tranquilles, on entre à Québec; en novembre, là c'est vrai qu'on va l'entendre, tout ce beau monde là. Qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président, au mois de novembre? On ne les a pas entendus; pas plus qu'au mois de décembre, pas plus qu'au mois de janvier, pas plus qu'au mois de février, pas plus qu'au mois de mars. Et là on est rendus qu'on nous parle du 8 avril. Pourquoi? Parce que, là, il n'y a plus de temps. Là, il n'y a plus de temps puis on ne veut pas les entendre. La vraie raison, c'est ça, M. le Président: On ne veut pas les entendre. On les a poussés du mois de juin jusqu'au mois d'avril, et là le leader est pris – comme il est souvent pris, d'ailleurs – dans ses agendas, et la raison, c'est: On n'a plus de temps. Bien, on en avait, du temps, M. le Président, puis, nous, on était prêts à passer l'été à Québec pour regarder cette réglementation. Et on l'a dit sur toutes les tribunes et je l'ai dit partout où je suis allé voir des groupes d'environnement et des agriculteurs. Si ce gouvernement a essayé de passer une loi en sachant pertinemment que le problème, ce n'était pas la loi, c'était la réglementation, et qu'ils ne veulent pas que les citoyens se prononcent sur cette réglementation-là, c'est leur problème, M. le Président. Mais on était prêts à collaborer pour les aider.

Quand le ministre de l'Agriculture nous dit: Il va falloir que le monde comprenne qu'il n'y en a pas, de problème, bien, je vais lui rappeler que si, lui, il n'a pas compris, qu'il lise le rapport du Vérificateur général de l'Assemblée nationale 1995-1996. Par un concours de circonstances, c'est eux autres qui sont au pouvoir, M. le Président. Il y en a une vingtaine de pages là-dedans. C'est épouvantable, ce qu'on nous dit: des agriculteurs qui déclarent 3 000 porcs pour la distribution des purins, mais pour la subvention, 76 000 porcs. Il y en a 40 pages, M. le Président, de choses absolument astronomiques, extraordinaires dans ce rapport-là. Et le ministre de l'Agriculture vient nous dire: Il va falloir que le monde comprenne que ça va très bien au Québec. Bien, ce discours-là, moi, je ne l'achète pas. Je vais faire comme Gérald Larose, je n'embarquerai pas dans ce voyage-là. Il est mieux de se tenir solide. Moi, je n'embarquerai pas dans ce voyage-là, parce qu'il y en a, des problèmes au Québec.

Les gens de la santé vous l'ont dit. Les gens de la santé vous ont dit que dans des régions complètes on est capables de démontrer qu'il y a des problèmes de santé, et notre porte-parole, le très bon député qui est à côté de moi, notre porte-parole en santé, si on avait du temps, vous démontrerait les problèmes qu'on a en santé.

Le monde municipal nous dit à tous les jours: Vous êtes après nous donner une patate qu'on ne veut pas avoir. On ne veut pas s'en occuper, de cette affaire-là, c'est tout croche. Le monde de l'environnement, voulez-vous... C'est pour ça qu'on veut agrandir. Il y a des gens ici qui ont fait de l'ouvrage extraordinaire, extraordinaire, qui ont écrit des documents, qui sont prêts à venir nous dire qu'il y a des solutions. Et, là-dessus, on va collaborer. On va collaborer avec le leader, on va collaborer.

Ce n'est pas pour rien qu'on a demandé qu'il y ait 75 groupes, M. le Président. C'est parce qu'il y a des gens qui ont des choses à dire. Le très bon député de Saint-Hyacinthe – je riais – il nous a nommé une série d'organismes qui sont extraordinaires en production agricole. Bien, invitons-les, ces gens-là! Il nous parle de l'ITA. Bien, c'était sur notre liste, l'ITA, justement. Et, pour une fois, le député de Saint-Hyacinthe et moi, on va s'entendre, voyez-vous. L'ITA, c'est un très bon organisme qui pourrait très bien nous dire comment on pourrait améliorer notre sort.

Les gens de Sainte-Anne-de-la-Pocatière, qui font exactement la même chose que l'ITA de Saint-Hyacinthe, on devrait les écouter aussi, M. le Président. Dans le monde agricole, il y a des gens qu'on devrait entendre, et je suis bien surpris que le ministre de l'Agriculture ne les invite pas.

Comment ça se fait qu'on n'a pas le ministre pour venir nous dire aujourd'hui... Le ministre de l'Environnement, qui est supposé défendre la cause de l'environnement, qui est supposé défendre l'environnement, comment se fait-il qu'on ne l'entend pas ici aujourd'hui, M. le Président? Comment se fait-il qu'on n'entend pas le ministre de la Santé, le ministre des Affaires municipales, alors que les municipalités se questionnent.

J'étais avec Roger Nicolet pas plus tard qu'il y a quelques jours sur une consultation dans mon comté. Les maires se questionnent, les préfets se questionnent. Il y a un préfet dans mon comté, Michel Belzile, lui, il est arrivé presqu'à un compromis – c'est un milieu agricole – entre les environnementalistes, entre les gens de chalets, entre les gens de la ville, entre les gens de l'agriculture. Il est presqu'arrivé à un compromis acceptable, M. le Président. Je pense qu'il l'a, la solution, lui.

Je demande au leader, peut-être pas 75, mais au moins Michel Belzile, le préfet de la MRC de Coaticook, qui est un sage, qui a fait un ouvrage extraordinaire. On l'a tous aidé dans ce débat-là chez nous. Ah non, on ne l'a pas invité; il était sur notre liste. Un simple citoyen qui est pris à la gorge dans Danville, M. André Lafond. Lui, ce n'est pas compliqué, on étend le fumier, là, à côté. Puis, quand il va au conseil municipal puis quand il va voir les gens, on lui dit: Ah non, on ne peut rien faire. On ne peut rien faire.

Les gens de Sainte-Luce, hier, qui étaient en réunion – le député était ici, malheureusement il ne pouvait pas être à cette réunion-là, j'en suis convaincu – ont démontré les problèmes d'approvisionnement en eau dans Sainte-Luce. 90 % des citoyens sont prêts à refuser de payer leur compte de taxes municipales à ce point-ci tellement ils sont en furie devant ce qui se passe là-bas.

Et notre bon ministre de l'Agriculture nous dit: Ça va bien au Québec, il n'y a pas de problème. On va faire une petite rencontre pendant 30 heures. Bien, ça, M. le Président, 30 heures, ce n'est pas le dixième des groupes qui, en ce moment, voudraient être entendus. Il y a 300 groupes au Québec en ce moment qui ne peuvent pas obtenir leur permis de production porcine, 300 groupes qui demandent des permis de production porcine et qui ne peuvent pas les obtenir, pour toutes sortes de raisons. On devrait au moins en entendre un ou deux de ces gens-là qui sont frustrés de ne pas obtenir leur permis. Le ministre de l'Agriculture aurait dû demander qu'on les entende, ces gens-là.

L'Université Laval, un milieu de haut savoir qui est en avant de tout le monde, d'ailleurs qui a une cote d'écoute très forte auprès des agriculteurs, qui s'est fait brasser par ces gens-là et qui les écoute. L'Université du Québec à Rimouski, l'Association des vignerons. Ça a de l'air de rien, le ministre se pétait les bretelles, hier, dans son budget, et l'autre budget avant, sur les très bons vignerons qu'on avait au Québec et tous les avantages qu'il veut leur donner. Extraordinaire! Bien, savez-vous qu'ils ont demandé d'être entendus, eux autres? Ils ont demandé d'être entendus parce que, quand vous allez humer et sentir le bon vin et, à côté, le gars vous produit du fumier, c'est moins bon pour sa production un peu, voyez-vous! Ils aimeraient ça, être entendus, ces gens-là, et nous parler de règlement. Il y en a même un qui a gagné dans son coin; le ministre vient de reculer dans ce cas-là. Il y en a plein, M. le Président, de gens qu'il nous faut écouter.

Mais non, on n'a pas voulu le faire l'été passé, on n'a pas voulu le faire à l'automne, on n'a pas voulu le faire cet hiver, alors là, notre bon leader nous dit: Bien, là, je suis coincé, excusez-moi, on va faire ça à la sauvette, rapidement; on va en écouter une petite gang de 30, je vais vous en donner trois de plus, si vous voulez, dont... Je ne suis pas sûr qu'on les connaît tous, d'ailleurs.

(17 h 50)

On va vous dire: On est très déçu. On est très déçus, moi comme environnementaliste, mon confrère comme porte-parole de la santé, notre consoeur comme porte-parole aux affaires municipales, notre autre confrère comme porte-parole en agriculture, nous sommes très déçus, très déçus de ne pas pouvoir aller au fond. Parce que c'est une chose de berner les gens et leur dire: On a passé une loi, mais ce sera une autre chose quand l'application du règlement va tomber en place et qu'on va s'apercevoir qu'il aurait fallu avoir eu une grande compréhension de ce que nous sommes après faire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le leader du gouvernement pour sa réplique. M. le leader.


M. Pierre Bélanger (réplique)

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'écoutais le député d'Orford qui me disait que, peut-être, je devrais parler au député de Saint-Hyacinthe. Mais je crois que le député d'Orford devrait peut-être parler avec le nouveau ou la nouvelle porte-parole de l'opposition officielle en matière d'agriculture, que nous ne connaissons pas encore, nous attendons toujours son identité. Parce que je l'entends et je l'écoute et je ne suis pas certain qu'il en veut un, règlement. En tout cas, je ne suis pas certain qu'il en veut un qui va favoriser la production agricole, M. le Président. Je l'écoute, puis ce n'est pas évident. Ce n'est pas évident, il a l'air d'être plutôt contre. Mais, en se parlant, je pense que ça va peut-être faire en sorte qu'il va y avoir une synergie qui va se développer et, encore une fois, qu'on va assister à un moment donné à une position commune de l'opposition officielle. Et je pense que ça va être déjà un grand pas vers l'avant, M. le Président, quand l'opposition officielle aura une position dans ce dossier. Je pense qu'encore une fois ce sera peut-être l'aboutissement d'une procédure parlementaire qui va faire en sorte que l'opposition officielle va se concerter et avoir une position. Je crois déjà que ça va être quelque chose d'assez extraordinaire.

Il mentionnait le porte-parole de l'opposition en matière d'agriculture. En tout cas, semble-t-il, il a été nommé, donc je m'en réjouis, M. le Président. Ce qu'on a oublié de dire, c'est vrai qu'il va y avoir peut-être juste les groupes qui ont été mentionnés, qui sont dans la motion, qui seront entendus, mais tout groupe – et j'aimerais que le député d'Orford retienne ça, M. le Président, parce que je suis certain qu'il va pouvoir le dire dans son comté, qu'il va pouvoir le dire aux nombreux groupes qu'il a mentionnés tout à l'heure – chaque individu, chaque groupe qui va envoyer un mémoire à la commission parlementaire, ce mémoire sera déposé, sera distribué aux membres de la commission, aux ministres qui vont être membres de la commission, et sera pris en considération par les parlementaires. Alors, ça, c'est important, il faut le dire. Ce n'est pas parce qu'on n'est pas entendu que votre voix n'a pas été entendue, que votre position n'a pas été présentée aux membres de la commission parlementaire. Ça, le député d'Orford n'en a pas parlé, évidemment pas. Il ne parle pas de ça. Pourtant, c'est un parlementaire d'expérience, le député d'Orford, il sait comment ça fonctionne. Il sait qu'il y a des fois des choses qu'on lit, comme le rapport du Vérificateur général. Même si chaque parlementaire n'a pas l'occasion de lui parler, on peut lire son rapport, on peut prendre en considération ce qu'il nous dit. Mais, ça, le député d'Orford semble oublier ça, M. le Président.

Alors donc, je recommande à l'Assemblée nationale, aux membres de l'Assemblée d'appuyer la motion qui est présentée. Je crois qu'elle est raisonnable. Je pense qu'on a fait des efforts sincères pour essayer d'entendre le plus grand nombre possible de groupes parce qu'elle est importante, cette audition, cette commission parlementaire, et nous voulons que ces règlements soient, dans les meilleurs délais, élaborés et adoptés par le gouvernement. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader du gouvernement.

Ceci met fin au débat sur la motion. Je vais maintenant mettre aux voix la motion. Cette motion est-elle adoptée?

M. Marsan: M. le Président, est-ce qu'on peut demander un vote par appel nominal, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, nous aurons un vote par appel nominal. Que l'on appelle donc les députés.

(17 h 54 – 18 h 9)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Veuillez vous asseoir, nous sommes prêts.


Mise aux voix de l'amendement

Alors, il y a consentement et une entente avec les leaders pour que nous prenions un vote à main levée sur l'amendement. Après ça, nous prendrons le vote par appel nominal sur la motion telle qu'amendée.

Alors, je vous lis la motion:

Que la motion en discussion soit amendée par le remplacement, à la sixième ligne du premier paragraphe, des mots «et 15» par les mots «, 15 et 16» et par l'ajout dans la liste des trois organismes suivants: «Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalières; Centre de développement d'agrobiologie du Québec; COGENOR».

Alors, est-ce que cet amendement est adopté?

(18 h 10)

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, maintenant, la motion telle qu'amendée se lirait comme suit – je vous demande d'écouter, s'il vous plaît:

«Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur la "Proposition de principes généraux relatifs à la gestion des odeurs, du bruit et des poussières en milieu agricole" dans le cadre de la loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole les 8, 9, 10, 15 et 16 avril 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: Association des aménagistes régionaux du Québec; Association des directeurs généraux de MRC; Association québécoise des industries de nutrition animale et céréalières; Centre québécois du droit de l'environnement; Centre de développement d'agrobiologie du Québec; Centre de recherche industrielle du Québec; COGENOR; Comité de santé environnementale du Québec conjointement avec la Direction régionale de la santé publique Chaudière-Appalaches; Convention Saint-Valentin – préfet de la MRC du Haut-Richelieu, maire de Notre-Dame-du-Mont-Carmel, UPA Saint-Jean de Valleyfield, Service de développement de l'aménagement et la commercialisation; Coopérative fédérée du Québec; Corporation des officiers municipaux en bâtiment et en environnement du Québec; Direction régionale de la santé publique du Bas-Saint-Laurent conjointement avec COSAPUE; Fédération des producteurs de porcs du Québec; Greenpeace Québec; Direction régionale de la santé publique de Lanaudière; Centre national en électrochimie et en technologie environnementale inc.; Groupe DEC; Meunerie J.-B. Dionne et Fils ltée; Ordre des agronomes; Regroupement national des conseils régionaux de l'environnement du Québec; UPA; UMQ; UMRCQ; Union des citoyens du monde rural; Union québécoise pour la conservation de la nature;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre de l'Environnement et de la Faune, le ministre des Affaires municipales et le ministre de la Santé et des Services sociaux soient membres de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix de la motion amendée

Que les députés en faveur de cette motion telle qu'amendée veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount– Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Laporte (Outremont), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire adjoint: M. Garon (Lévis).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rapport du secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:51

Contre:32

Abstentions:1

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion est adoptée. Alors, étant donné l'heure, nous allons ajourner nos travaux à demain matin, 10 heures. Alors, si vous voulez attendre une minute, s'il vous plaît, avant de quitter.

(Fin de la séance à 18 h 16)


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