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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 18 juin 1997 - Vol. 35 N° 120

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants d'abord.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous débutons immédiatement les affaires courantes. Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article c de notre feuilleton.


Projet de loi n° 218

Le Président: Alors, à l'article c du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 218, Loi concernant la Régie intermunicipale Argenteuil–Deux-Montagnes. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.


Mise aux voix

M. le député d'Argenteuil présente le projet de loi d'intérêt privé n° 218, Loi concernant la Régie intermunicipale Argenteuil–Deux-Montagnes. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances et ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.


Rapports annuels de l'Inspecteur général des institutions financières sur les assurances, sur les caisses d'épargne et de crédit et sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne

M. Landry (Verchères): Alors, M. le Président – c'est presque déposé en vrac – j'ai l'honneur de déposer les trois rapports annuels 1996 de l'Inspecteur général des institutions financières portant sur les assurances, les caisses d'épargne et de crédit et sur les sociétés de fiducie et les sociétés d'épargne.


Rapports annuels de Loto-Québec, de la Société de développement industriel du Québec et de la Société des alcools du Québec

Le rapport annuel 1996-1997 de Loto-Québec; le rapport annuel 1996-1997 de la Société de développement industriel du Québec; et le rapport annuel 1996-1997 de la Société des alcools du Québec. Je m'excuse pour le poids.

Le Président: Alors, tous ces documents sont déposés. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Rapport annuel de la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec

M. Chevrette: Oui. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1997 de la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec, communément appelée REXFOR.

Le Président: Alors, ce document est déposé. Mme la ministre de la Sécurité du revenu, ministre responsable de la Condition féminine.


Rapports annuels du Conseil du statut de la femme et de la Régie des rentes du Québec

Mme Harel: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 du Conseil du statut de la femme ainsi que le rapport annuel 1996-1997 de la Régie des rentes du Québec.

Le Président: Ces deux documents sont déposés. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Rapport annuel de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes

Mme Beaudoin: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport 1996-1997 de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapport annuel de la Régie de l'assurance-maladie du Québec et états financiers du Fonds de l'assurance-médicaments

M. Rochon: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Régie de l'assurance-maladie du Québec de même que le rapport financier 1996-1997 du Fonds de l'assurance-médicaments.

Le Président: Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre de la Culture et des Communications, pour un autre rapport.


Rapport annuel du ministère de la Culture et des Communications

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 du ministère de la Culture et des Communications.

Le Président: Ce document est également déposé. M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor.


Rapport annuel et états financiers de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances

M. Léonard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel ainsi que les états financiers 1996 de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, la CARRA.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre des Affaires municipales.


Rapport annuel de la Société québécoise d'assainissement des eaux

M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Société québécoise d'assainissement des eaux.

Le Président: Le document est déposé. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Rapport annuel de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires

M. Julien: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires.

(10 h 10)

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre du Travail.


Rapport d'activité de la Commission de la construction du Québec

M. Rioux: M. le Président, je dépose le rapport d'activité 1996 de la Commission de la construction du Québec.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Rapports annuels du Curateur public et de la Commission d'accès à l'information du Québec, rapport intitulé Vie privée et transparence administrative au tournant du siècle , et rapport sur les mesures de sécurité dans les mégafichiers gouvernementaux

M. Boisclair: Oui. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer quatre documents: d'abord, le rapport annuel 1996 du Curateur public; le rapport annuel 1996-1997 de la Commission d'accès à l'information du Québec ainsi que l'important rapport de la Commission d'accès à l'information sur la mise en oeuvre de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé intitulé Vie privée et transparence administrative au tournant du siècle ; finalement, le rapport de M. Bernard Dionne, analyste enquêteur de la Commission d'accès à l'information, sur la sécurité dans les mégafichiers gouvernementaux.

Le Président: Alors, tous ces documents sont déposés. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Rapports annuels du Conseil de la science et de la technologie, et du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 du Conseil de la science et de la technologie ainsi que le rapport annuel 1996-1997 du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement, au nom du ministre des Transports.


Rapports annuels de la Commission des transports du Québec, de la Société de l'assurance automobile du Québec et du contrôle du transport routier

M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Commission des transports du Québec ainsi que le rapport d'activité 1996 de la Société de l'assurance automobile du Québec et du contrôle du transport routier.

Le Président: Ces documents sont déposés.


Dépôt de rapports de commissions

Nous passons maintenant au dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission des finances publiques et député d'Arthabaska.


Auditions et étude détaillée des projets de loi nos 203 et 254

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 17 juin 1997 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée de deux projets de loi. Le premier, le projet de loi n° 203, Loi concernant Fiducie canadienne-italienne, et l'autre, le projet de loi n° 254, Loi concernant Trust Bonaventure inc. Les deux projets de loi ont été adoptés sans amendement.


Mise aux voix des rapports

Le Président: Alors, ces rapports sont-ils adoptés? Adopté. Alors, Mme la présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Mégantic-Compton.


Auditions et étude détaillée de divers projets de loi d'intérêt privé

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 17 juin 1997 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté d'Antoine-Labelle, la Régie intermunicipale des déchets de la Rouge et la Régie intermunicipale des déchets de la Lièvre. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

J'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 17 juin 1997 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 251, Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l'Île de Montréal. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

M. le Président, j'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 17 juin 1997 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 232, Loi concernant la Ville de Trois-Rivières. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 17 juin 1997 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 225, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park. La commission a adopté le projet de loi sans amendement.


Mise aux voix des rapports

Le Président: Merci, Mme la députée de Mégantic-Compton. Les rapports sont-ils adoptés? Adopté. M. le président de la commission des affaires sociales et député de Charlevoix.


Étude détaillée du projet de loi n° 145

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé les 11, 12, 16 et 17 juin 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 145, Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance et modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Très bien, le rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, maintenant, M. le député de Masson.


Maintenir la maternelle mi-temps et octroyer les budgets nécessaires pour ce faire

M. Blais: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 50 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Masson.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le Québec est une société démocratique;

«Considérant que les parents sont les premiers responsables de l'éducation de leurs enfants;

«Considérant que le projet de maternelle temps plein cinq ans ne convient pas à tous les enfants et à tous les parents;

«Considérant que lors des états généraux sur l'éducation, la Fédération des comités de parents du Québec n'a pas demandé la maternelle temps plein, mais a plutôt réclamé la maternelle mi-temps;

«Considérant que la maternelle mi-temps existante répond au choix spécifique de la moitié des parents du Québec, émis lors des sondages des commissions scolaires;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale: de maintenir telle qu'existe présentement la maternelle mi-temps, tout en offrant la maternelle temps plein à la demande des parents; de confier aux commissions scolaires et aux milieux-écoles le pouvoir et les budgets nécessaires pour répondre adéquatement à cette requête.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, M. le député de Masson. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Cesser immédiatement les coupures aux plus démunis

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 261 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du comté de Lévis principalement.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le régime d'assurance-médicaments impose le choix à plusieurs entre la nourriture et les médicaments;

«Attendu que les assistés sociaux ont perdu de 10 $ à 23 $ par mois par l'abolition du crédit d'impôt foncier;

«Attendu que l'allocation familiale unifiée fera perdre plusieurs dizaines de dollars par mois aux assistés sociaux;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de cesser les coupures aux plus démunis, et ce, immédiatement.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est également déposée. M. le député d'Outremont.


Soumettre le projet d'ériger un monument à la mémoire du général de Gaulle à un référendum dans la ville de Québec

M. Laporte: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 228 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que la ville de Québec envisage d'ériger pour le 24 juin 1997 un monument à la mémoire du général Charles de Gaulle;

«Considérant que le général Charles de Gaulle a clairement indiqué dans son testament ce qui suit: "Je désire refuser d'avance toute distinction, citation, décoration, promotion, qu'elle soit française ou étrangère. Si l'une quelconque m'était décernée, ce serait en violation de mes dernières volontés";

«Considérant que la Commission de la capitale nationale injectera 150 000 $ et que le ministère des Affaires internationales injectera 50 000 $ dans ce projet, argent provenant des taxes des contribuables de toute la province de Québec;

«Considérant ces raisons, et dans le respect des dernières volontés du général;

«L'intervention réclamée se...»

Le Président: J'ai déjà rappelé aux membres de l'Assemblée que l'étape du dépôt de pétitions est une étape importante, c'est un droit que les citoyens ont en vertu de la Charte de pouvoir déposer à l'Assemblée nationale leurs représentations. Ça ne veut pas dire que les membres de l'Assemblée qui déposent les pétitions sont nécessairement d'accord avec les pétitions mais ils se font la courroie de transmission de leurs concitoyens.

Alors, M. le député d'Outremont.

À l'ordre! M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Laporte: «L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Que l'Assemblée nationale intervienne auprès du ministère des Affaires municipales pour soumettre ce projet à un référendum dans la ville de Québec.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Beauce-Nord.

M. Poulin: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Chambre afin de déposer une pétition non conforme.

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député de Beauce-Nord.


Respecter les recommandations du rapport SECOR concernant le redéploiement des CHSLD de la MRC de la Nouvelle-Beauce

M. Poulin: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 37 pétitionnaires du comté de Beauce-Nord.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que la firme SECOR, engagée par le conseil d'administration du CLSC et du CHSLD Nouvelle-Beauce pour faire une analyse de la situation, a produit un rapport détaillé et que les résultats clairs et évidents n'ont pas été respectés;

«Attendu que 52 % de la population de Nouvelle-Beauce, soit de Valley-Jonction, Saint-Elzéar, Sainte-Marie, Saint-Bernard, Scott-Jonction, se retrouve avec seulement 18 lits d'hébergement et qu'il restera 107 lits d'hébergement pour 48 % de la population;

(10 h 20)

«Attendu que fermer un centre d'hébergement, c'est dramatique, au moins qu'on cible le bon centre pour que l'équité envers 52 % de la population soit respectée et que la répartition des lits dans la MRC Nouvelle-Beauce soit équilibrée;

«Attendu que le conseil d'administration dit s'être penché sur les besoins de la population, dit avoir retenu une approche MRC plutôt qu'une approche par municipalité pour appuyer cette décision – la firme SECOR avait l'approche MRC mais la décision du conseil d'administration ne reflète pas, mais pas du tout l'approche MRC.»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, la pétition est déposée.

M. Poulin: Je sollicite, M. le Président, le consentement de cette Chambre afin de déposer l'étude de la firme SECOR dont il est fait état dans la pétition que je viens de déposer.


Document déposé

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député de Beauce-Nord.

M. Poulin: Merci, M. le Président.

Le Président: Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège aujourd'hui.

Je vous avise que, après la période des questions et des réponses orales, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra à une question posée, le 17 avril dernier, par M. le député de Brome-Missisquoi concernant la sécurité des personnes hébergées dans les établissements de santé et de services sociaux.

Je vous avise également qu'après la période des questions et des réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor proposant que le projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic, soit adopté.


Questions et réponses orales

Alors, à ce moment-ci, nous engageons la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Augmentation des taxes scolaires

M. Johnson: Hier, les contribuables nous ont entendu parler d'impôt, les contribuables municipaux notamment. D'abord, en relisant les réponses d'hier que le premier ministre ou le ministre des Affaires municipales ont données, lorsqu'on lit les journaux de ce matin, on est obligé de conclure, comme ceux qui étaient ici hier, qu'il y avait quand même une certaine confusion qui s'est jetée dans le débat, à savoir si, oui ou non, les municipalités se verraient accorder un crédit, si on veut, lorsqu'elles vont recevoir la facture de plusieurs centaines de milliers, voire de millions de dollars dans certains cas, que le ministre des Affaires municipales envoie. On a vu vraiment une divergence entre le ministre des Affaires municipales et le premier ministre. Et je dis tout de suite au ministre des Affaires municipales qu'il fasse attention, il a vu ce qui est arrivé au ministre du Travail, l'autre jour, quand le premier ministre s'en mêle devant tout le monde.

Le premier ministre, par ailleurs, n'a jamais rassuré les contribuables des municipalités, qui sont les mêmes personnes qui paient des taxes scolaires, qui paient des taxes, ici, au Québec, l'impôt sur le revenu, les taxes de vente, etc., il n'a jamais rassuré les contribuables municipaux que leur compte de taxes n'augmenterait pas. Ça, c'est contraire à tous les engagements que le premier ministre a pris depuis son discours à Laval, au début de l'hiver 1995, après le référendum, alors qu'il s'est présenté à la direction de son parti; c'est contraire aux engagements de la plupart de ses ministres. Et aujourd'hui, qu'est-ce qu'on voit, contrairement aussi à ces engagements-là de rassurer les contribuables qu'il n'y aura pas d'augmentation de taxes, on sait bien que, au contraire, maintenant, après Montréal, c'est à Québec, la Commission des écoles catholiques de Québec qui augmente de 40 % son compte de taxe. Et, encore une fois, ce sont les mêmes personnes dont le premier ministre a dit qu'elles étaient trop taxées, dont le trou dans leur poche ne cesse d'agrandir, qui sont en cause et qui vont payer davantage.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire quand il va cesser d'agrandir lui-même le trou dans la poche des contribuables? Quand il va se rendre compte qu'un contribuable, ce n'est pas distinctement un contribuable municipal, puis un contribuable qui paie la taxe de vente, puis un contribuable qui paie l'impôt sur le revenu? Qu'un contribuable, c'est un citoyen du Québec qui paie à tous ces niveaux-là et que c'est l'ensemble du fardeau fiscal qui doit être contrôlé, et que le premier ministre a encore, en l'occurrence, comme on le voit aujourd'hui, manqué à sa parole de ne pas surcharger les contribuables québécois?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation et ministre responsable de la Famille.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, le chef de l'opposition fait référence à un article qui paraît ce matin, concernant la hausse de la taxe scolaire qui s'appliquera dans la ville de Québec.

D'abord, évidemment, je comprends que la décision fut prise ces jours derniers, mais, cependant, par la ville, par le commissions scolaires qui couvrent la ville de Québec. Mais on n'apprend rien de très nouveau ce matin, M. le Président, puisque, dans les faits, c'est une décision qui a été annoncée le printemps dernier, lorsque nous avons déposé le livre des crédits, où, effectivement, à cause des efforts demandés à l'éducation, il était entendu qu'une partie de cet effort serait assumée par le biais de la taxe scolaire. Ça a été vrai pour Montréal, c'est vrai pour Québec et c'est vrai pour beaucoup d'autres commissions scolaires sur le territoire québécois, puisque, actuellement, suite au dernier budget, il ne restera que 16 commissions scolaires, dont huit sur l'île de Montréal, qui ne seront pas au maximum, M. le Président.

J'aimerais rappeler cependant une chose. Lorsque nous avons eu la commission sur la fiscalité, cette commission présidée par M. D'Amours a fait le tour du Québec, a rencontré différents intervenants, a entendu différents mémoires. L'un de ces mémoires était celui de la Fédération des commissions scolaires du Québec qui a souhaité qu'effectivement ils puissent assumer à même la taxe scolaire un certain nombre de leurs responsabilités dont, entre autres, la question des sièges sociaux et la direction pédagogique de leurs écoles.

On ne peut pas souhaiter une chose, M. le Président, et son contraire en même temps. Alors, dans les faits, en faisant cela, le gouvernement d'abord a confirmé que la taxe scolaire restait un outil disponible pour les fins de l'éducation et qu'à ce titre les commissions scolaires pouvaient aller au plafond, au maximum, en vertu des règles budgétaires que l'on retiendrait. Mais, cela étant, M. le Président, on sait fort bien que cela réfère essentiellement au fait que chacun d'entre nous doit solidairement trouver une solution au problème de déficit, et cela passe aussi, malheureusement – et ce n'est pas avec plaisir qu'on fait ça, M. le Président – par une contribution des citoyens par la taxe scolaire.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que la ministre – et le premier ministre – ne trouve pas que son vocabulaire est assez homogénéisé et aseptisé, que ce qu'elle appelle «une contribution de l'éducation à l'effort de redressement des finances publiques» – je pense que c'est l'expression qu'elle a utilisée – dans le fond, ce n'est pas l'éducation qui contribue, ce sont encore les mêmes personnes, que le fardeau fiscal qu'a dénoncé le premier ministre comme étant trop élevé, comme surchargeant le citoyen partout, au Québec est encore augmenté par des décisions comme celles-là auxquelles la ministre de l'Éducation et le premier ministre ont à faire? C'est leur responsabilité. L'engagement du premier ministre, c'était de ne pas augmenter le fardeau fiscal des Québécois. Ça va faire deux ans, là, très, très bientôt que le premier ministre s'est engagé à ça, est-ce qu'il a l'intention de respecter son engagement ou encore de faire preuve de double langage comme d'habitude?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que toute la population peut constater les efforts considérables que déploie le gouvernement du Québec pour redresser les finances publiques, et on peut voir que nous le faisons du côté des dépenses. Nous sommes engagés, pour la deuxième année consécutive, dans un programme de compression des dépenses extrêmement rigoureux, il faut en convenir, et la population sait très bien que nous faisons cela à la fois pour permettre de relancer l'économie et pour lui éviter d'accroître indûment son fardeau fiscal. Nous reconnaissons tous que le fardeau fiscal des Québécois est beaucoup trop élevé, qu'il faut travailler ultimement – c'est d'ailleurs la réforme de la fiscalité qui a été annoncée dans le budget récemment – à réduire ce fardeau fiscal pour le rendre plus comparable avec celui de nos compétiteurs, les provinces et les États américains qui nous avoisinent, et, dans cette mesure, M. le Président, je ne pense pas qu'on puisse nous reprocher de faire cet effort du côté des dépenses. S'il arrive que, dans certains cas, des corporations indépendantes estiment devoir procéder par des taxes locales pour régler des problèmes de gestion qui leur sont en partie occasionnés, nous le savons, par les compressions générales du gouvernement, nous le reconnaissons, mais nous pensons que cela est à la marge et que, fondamentalement, l'effort de redressement des finances et d'abaissement du fardeau fiscal se fait du côté d'une réduction des dépenses.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Comment se fait-il que le premier ministre ne se rend pas compte que le reproche qu'on lui adresse, c'est de dire sur toutes les tribunes, des douzaines de fois, dans des douzaines d'intervention, que les citoyens sont trop taxés et qu'en conséquence il faut alléger leur fardeau fiscal, et que toutes les décisions qu'il prend vont plutôt dans le sens d'alourdir le fardeau fiscal des Québécois, notamment, y compris par l'imposition de droits et de taxes scolaires et municipales qui, inévitablement, vont augmenter, qui sont des taxes régressives, qui sont collectées quel que soit le revenu des gens en cause, qui n'ont rien à faire avec la capacité de payer des gens, et que le premier ministre est en train d'entériner et de confirmer une augmentation du fardeau fiscal comme celle qui, évidemment, fait les manchettes ce matin, qui va dans le sens contraire de l'équité, de la justice et de la répartition du fardeau sur tous les Québécois?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

(10 h 30)

M. Landry (Verchères): Lorsque le gouvernement qui nous a précédés est arrivé au pouvoir, il était déjà d'une évidence claire que le fardeau fiscal des Québécois et Québécoises était non seulement trop élevé, mais le plus élevé du Canada. Ce n'est pas parce qu'on constate cela que le fardeau baisse. On le voit bien, ils ont été là 10 ans, puis non seulement il n'a pas baissé, il a continué à augmenter.

Ce qu'il eût fallu faire, c'est d'imiter, par exemple, l'Alberta qui, les mêmes années quand le gouvernement qui nous a précédés est arrivé au pouvoir, a réalisé de façon très responsable la situation et a décéléré l'augmentation des dépenses, les a baissées et ensuite a pu non seulement baisser le fardeau fiscal, mais commencer à remonter les dépenses. La façon douce de faire ce que nous reproche l'opposition aujourd'hui, ça aurait été de faire ça progressivement.

Alors, vous avez parlé de 40 % de hausse. Bien, si l'opposition avait gouverné convenablement, ça ne serait pas 40 %, ça serait peut-être 0,4 % échelonnés sur 10 ans. On est obligé, nous qui sommes un gouvernement progressiste, de faire ce que la droite soi-disant qui nous a précédés et bonne gestionnaire a négligé totalement. Alors, on a le fardeau de la bonne gestion et du progrès en même temps puis on s'en acquitte au mieux.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Alors, en saluant le retour, même avec décalage, pas le décalage horaire temporaire, mais le décalage intellectuel et électoral permanent du ministre des Finances...

Des voix: Oh!

M. Johnson: Permanent. Dans le passé. Dans le passé. En arrière. Toujours les mêmes vieilles idées. Un décalage d'idées, toujours les mêmes vieilles idées. C'est exactement ce que le ministre des Finances vient de nous servir, toujours les mêmes vieux arguments. Est-ce que le premier ministre dont les documents, notamment de son ministre des Finances, démontrent – je dis ça en passant – que depuis 1992, selon les documents du ministère des Finances, il y a un contrôle des dépenses qui s'effectue au Québec de façon crédible – 1992, je n'ai pas dit depuis octobre 1994 – est-ce qu'il n'en reste pas moins que ce qu'on reproche au premier ministre notamment, beaucoup moins à son ministre des Finances, mais à lui, le premier ministre, qui depuis presque deux ans dit sur toutes les tribunes que les Québécois sont trop taxés, qu'il faut diminuer le fardeau fiscal, qu'il faut diminuer les charges de toute nature, c'est qu'il préside, décision après décision, mercredi après mercredi, à des décisions du gouvernement qui augmentent le fardeau fiscal des Québécois? Un exemple de double langage littéralement du premier ministre qui dit une chose, qui fait son contraire; qui dit une chose, qui pense autre chose.

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): D'abord, je ferais remarquer au chef de l'opposition que tous ceux qui connaissent le décalage horaire savent que ça peut se corriger en quelques heures. Mais un décalage de gentilhommerie, des fois, c'est incorrigible.

Le chef de l'opposition...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Le chef de l'opposition, ici, en faisant allusion à ce phénomène aérien, me permet de signaler les fantastiques succès de l'aéronautique québécoise au Salon du Bourget.

Des voix: Bravo!

M. Landry (Verchères): M. le Président, on n'a pas manqué l'avion, mais on a failli manquer d'avions, parce que Bombardier en a vendus. Bell Helicopter de Mirabel, qui a vendu l'an dernier 60 % des hélicoptères civils sur cette planète, avait déjà vendu, après deux jours de salon, 30 de ces appareils, certains valant jusqu'à 5 000 000 $. Parce que, durant les deux dernières années, l'aéronautique québécoise a connu une croissance spectaculaire à hauteur de 3 000 ou 4 000 nouveaux emplois par an, tant et si bien que c'est à peine croyable...

Une voix: Les taxes.

M. Landry (Verchères): J'y viens aux taxes. Si vous aviez su comment vous occuper des taxes... Vous pourriez attendre la fin de ma réponse, vous allez avoir la clé.

Le Président: M. le vice-premier ministre, en terminant, s'il vous plaît.

M. Landry (Verchères): Tant et si bien, M. le Président, que le Québec est maintenant, avec 7 500 000 habitants, la sixième puissance aéronautique du monde, dépassé uniquement par de très grands pays, de très grandes puissances qui ont 50 000 000 d'habitants. Ce qui veut dire...

Des voix: ...

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

M. Bouchard: Il y a des limites, c'est important, là. C'est sérieux, ça.

Le Président: M. le vice-premier ministre, en terminant, s'il vous plaît.

M. Landry (Verchères): Il me semble, M. le Président, et ça doit être une spéculation que vous faites vous-même, que tout cet inconfort qui les fait m'interrompre à tous les deux mots témoigne qu'ils réalisent bien qu'ils ont raté et la gestion de l'économie et celle des finances publiques, alors que, nous, nous poursuivons les deux en même temps. Et j'y viens aux taxes. Si vous aviez pu avoir 3 000 000 000 $ d'investissements étrangers par année pendant les 10 ans que vous avez été là, si vous aviez su seconder la recherche et le développement par le virage technologique, comme nous l'avons fait, vous n'auriez eu de problème ni avec les dépenses – et j'y viens, c'est mon dernier mot – ni avec les taxes.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Après avoir été témoin d'un décalage entre la question et la réponse, comme ce qu'on vient de voir...

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Joliette, s'il vous plaît! Je voudrais vous indiquer qu'à chaque fois qu'on enfreint l'article 35.7° non seulement le téléphone sonne au bureau de la présidence, mais surtout on s'engage dans une spirale qui n'en finit jamais, c'est-à-dire qu'à partir du moment où on s'engage à s'injurier mutuellement et à employer un langage blessant, d'un côté ou de l'autre, la réalité c'est qu'on fait une spirale qui n'en finit plus. Alors, à ce moment-ci, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, quant au décalage de la gentilhommerie, on en reparlera, il y a au moins une réceptionniste à l'hôtel Intercontinental à Montréal qui pourrait témoigner.

Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte...

Le Président: M. le chef de l'opposition.

(10 h 40)

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte que le reproche qu'on lui adresse... Je lui pose la question. Je ne veux pas qu'il passe la parole à gauche ou à droite, où que ce soit, c'est à lui que ce reproche-là s'adresse. Est-ce qu'il pourrait nous expliquer s'il comprend ou s'il ne comprend pas que, depuis qu'il est en poste, il promet la baisse du fardeau fiscal, il déplore le fardeau fiscal qui pèse sur les Québécois, il veut une contribution, dit-il, équitable de tout le monde, mais, en même temps, il augmente le fardeau fiscal non seulement des contribuables soi-disant municipaux, soi-disant scolaires, soi-disant au titre de la taxe de vente ou autrement, que ce sont les citoyens et citoyennes du Québec qui sont en train de payer pour l'exercice de double langage que pratique constamment le premier ministre à cet égard-là?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la vérité c'est que, depuis 10 ans, il n'y a pas eu un gouvernement au Québec qui a fait ce qu'on a fait pour maintenir au niveau actuel le fardeau fiscal, préparer une diminution du fardeau fiscal, relancer l'économie, réparer les erreurs du passé. Ça, c'est la vérité. C'est fondamental. Le reste est accessoire, M. le Président. Ce que nous savons, c'est que nous nous battons tous les jours pour ne pas augmenter le fardeau fiscal, alors que le gouvernement qui nous a précédés l'a augmenté de milliards et de milliards. Et je voudrais répéter ce que ce gouvernement qui nous a précédés a fait et ce que cet homme, qui est maintenant chef de l'opposition et qui se vautre dans l'insulte mesquine, a dit.

Le Président: M. le député de Frontenac, s'il vous plaît. M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques également. Je ne voudrais pas, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, être obligé de vous enlever le droit de parole.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je vais reformuler les commentaires que j'ai faits, ils sont peut-être un peu agressifs. Que cet homme qui se complaît dans des commentaires désobligeants a augmenté les dépenses de 29 % en cinq ans, qu'il a plus que triplé le déficit en le faisant passer de 1 700 000 000 $ à 5 700 000 000 $, qu'il n'a pas, une fois, atteint sa cible de déficit et qu'il a pratiquement doublé la dette, la faisant passer de 42 000 000 000 $ à 75 000 000 000 $. Et c'est lui, aujourd'hui, qui se lève et qui nous reproche de prendre les moyens nécessaires pour sortir le Québec du trou, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Maintenant qu'on a entendu le premier ministre cautionner les propos condamnables du vice-premier ministre le soir du référendum, est-ce que le premier ministre se rend compte que ce qu'on lui reproche – je recommence – c'est ce que lui a fait, ce que lui a dit, ce à quoi lui s'est engagé, c'est-à-dire, depuis qu'il est en poste, de déplorer le fardeau fiscal québécois, de prétendre que le trou dans leurs poches s'agrandit toujours davantage, que les contribuables n'ont pas une poche pour le municipal, une pour le scolaire, une pour la taxe de vente et une pour autre chose, que c'est son engagement de ne pas alourdir le fardeau fiscal des Québécois, et que la réalité, c'est que les taxes augmentent au Québec, que les taxes municipales vont augmenter à cause de ses décisions, que les taxes scolaires augmentent à cause de ses décisions, et que, dans les budgets, il y a eu des augmentations au fardeau fiscal des Québécois, et que c'est ça, l'héritage, actuellement, du premier ministre, c'est le double langage de dire qu'on est trop taxé et de nous taxer davantage?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la réalité c'est que le chemin que nous avons emprunté ensemble au Québec, maintenant, est le chemin qui nous conduit de solidarité en solidarité vers l'issue de cette infernale spirale dans laquelle nous a introduits l'opposition à l'époque où elle était le gouvernement. Ce gouvernement qui nous a précédés a augmenté les impôts et les taxes de plus de 10 000 000 000 $. Nous sommes en train de prendre des mesures qui vont, à terme, réduire le fardeau fiscal du Québec et, quand nous aurons réussi – et je ne doute pas que nous allons réussir parce que nous avons l'appui de la population pour le faire, qui a le sens des responsabilités plus que l'opposition – nous aurons réduit le déficit à zéro, nous aurons relancé l'emploi – 100 000 nouveaux emplois depuis juillet dernier au Québec, 40 % des emplois nouveaux créés au Canada depuis juillet dernier – et nous aurons remis le Québec dans la voie de l'espoir, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.

M. Ouimet: En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, très bien.

M. Ouimet: La ministre de l'Éducation ne poursuit-elle pas l'objectif de faire en sorte que toutes les commissions scolaires atteignent le plafond de taxe à 0,35 $ pour, par la suite, le déplafonner, refiler la facture au niveau du transport scolaire et faire en sorte que les contribuables vont payer beaucoup plus cher? Est-ce que ce n'est pas ça, l'objectif poursuivi par le gouvernement, et, dans le cadre de la décentralisation qui s'en vient à l'automne prochain, c'est ça qu'elle va mettre sur pied?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation et ministre responsable de la Famille.

Mme Marois: Alors, c'est une question hypothétique et ce n'est pas ce que je poursuis comme objectif, M. le Président.

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La ministre de l'Éducation peut-elle s'engager à assurer l'ensemble des contribuables que leur taxe scolaire n'augmentera pas, l'année prochaine?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: La ministre de l'Éducation avec les membres du gouvernement travaillent à ce qu'aucune taxe n'augmente, M. le Président.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, en principale.


Enfants en attente de chirurgie à l'hôpital Sainte-Justine

M. Paradis: Oui, M. le Président. Au mois de juin 1994, il y a maintenant trois ans, Jacques Parizeau déclarait à l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président, que, humainement, c'était inacceptable que la liste d'attente à l'hôpital Sainte-Justine soit composée de 3 000 enfants en attente d'une chirurgie.

En juillet 1994, le Parti québécois, dans son programme électoral, qualifiait d'intolérable le fait que la liste d'attente à l'hôpital Sainte-Justine atteigne 3 000 enfants en attente de chirurgie. En septembre 1994, à l'occasion de l'assermentation du ministre de la Santé, Jacques Parizeau demandait expressément à son ministre de diminuer de 50 % les listes d'attente et, particulièrement, celle des 3 000 enfants en attente d'opération à l'hôpital Sainte-Justine.

Aujourd'hui, 3 300 enfants, soit 10 % de plus qu'à l'époque, sont en attente de chirurgie à l'hôpital Sainte-Justine. Humainement inacceptable, disait Jacques Parizeau; intolérable, disait le Parti québécois. Que répond le ministre de la Santé aux parents et aux enfants toujours plus nombreux en attente d'être opérés à l'hôpital Sainte-Justine?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, sur le...

Le Président: La question a été posée. Maintenant, je pense que la réponse vient au ministre de la Santé. Puis je pense qu'il a le droit au même silence que le député de Brome-Missisquoi a eu. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, le chiffre qui vient d'être mentionné quant à la liste d'attente actuelle de Sainte-Justine, je devrai le vérifier. Je ne sais pas de quelle date il est. Je ne sais pas quelle en est sa source exactement. On a déjà eu des exemples de chiffres et de rapports cités par l'opposition qui, le moins qu'on puisse dire, ne reflétaient pas toujours très fidèlement la situation.

Mais je voudrais bien rappeler ceci, là: l'évolution de la liste d'attente à Sainte-Justine, d'abord, est allée en diminuant. Cette question avait été soulevée, encore ici, il y a quelques mois, et les chiffres, à l'époque, montraient très bien que Sainte-Justine avait réussi à améliorer sensiblement la situation et que la liste d'attente, en autant que je me rappelle, autant pour la chirurgie d'un jour que pour la chirurgie qui demande l'hospitalisation, je n'ai pas les chiffres en mémoire présentement, mais avait diminué de façon notable et était même rendue à peu près au niveau normal d'une liste d'attente, un niveau naturel, compte tenu du temps d'attente.

Il faut toujours se rappeler que le nombre de personnes en attente ne donne vraiment pas la situation réelle, il faut tenir compte du temps d'attente. On en a discuté récemment dans cette Chambre. Parce qu'une liste peut contenir beaucoup de gens en attente, compte tenu de la demande pour un type de service, mais, si le temps d'attente est naturel, correspond aux besoins des gens, c'est tout à fait le reflet d'une situation normale.

(10 h 50)

À part ça, M. le Président, on revient constamment sur cette question des listes d'attente, il faut se rappeler que la situation qu'on a très vérifiée, très validée, c'est: dans l'ensemble, toutes les attentes au Québec dans les chirurgies ont diminué d'à peu près 20 % au cours de la dernière année ou de la dernière année et demie; que, pour toutes les surspécialités, il y a eu une diminution, dans l'ensemble, de 29 000 personnes, sur les listes d'attente, à 20 000; et que, pour tous services médicaux confondus, le temps d'attente pour obtenir une consultation est le plus bas au Québec, comparativement à toutes les provinces canadiennes, tel que confirmé par une étude de l'Institut Fraser l'automne dernier. C'est ça, la situation des attentes au Québec.

Quant au point précis, je vais vérifier quelle est sa statistique, quelle est la situation actuelle et, s'il y a des informations additionnelles, je reviendrai devant cette Assemblée, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Devant l'augmentation des listes d'attente à Sainte-Justine, est-ce que le ministre de la Santé a l'intention de maintenir sa décision de fermer, à compter de lundi prochain, cinq des 11 salles d'opération et, à compter du 1er juillet, six des 11 salles d'opération à l'hôpital Sainte-Justine de Montréal?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, le ministre ne décide pas de fermer des salles d'opération dans les hôpitaux, les hôpitaux sont gérés par des directeurs généraux et par une équipe de gestion qui sont très compétents, singulièrement dans le cas de Sainte-Justine, M. le Président. Ils sont aussi gérés sous la responsabilité de conseils d'administration où la population est représentée et les conseils d'administration prennent des décisions responsables. L'équilibre de l'utilisation des salles d'opération, comme de tout le reste dans les hôpitaux, est ajusté selon les différentes périodes de l'année, en fonction de la demande, et des efforts sont faits constamment pour répondre à cette demande. C'est ça, la situation, M. le Président, et je n'ai jamais eu aucune raison de ne pas faire confiance à ceux qui dirigent ces hôpitaux-là, et surtout à Sainte-Justine, et je ne vois pas pourquoi ça changerait aujourd'hui, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que le premier ministre, face à l'augmentation de cette liste d'attente qui est composée d'enfants qui attendent d'être opérés, est-ce que le premier ministre, conscient qu'il va y avoir des fermetures de plus de la moitié des salles d'opération à l'hôpital Sainte-Justine cet été, va trouver, lui, pense-t-il, que ce qui était humainement inacceptable pour Jacques Parizeau, c'est humainement acceptable pour lui?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président...

Le Président: M. le député de Frontenac, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je pense qu'on assiste encore à cette entreprise de désinformation où, systématiquement, on prend une information, un chiffre hors contexte...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que le sujet de la santé est assez important pour au moins que l'opposition écoute les réponses.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Hors contexte, M. le Président. Je pense qu'on a eu, au cours de cette session-ci, suffisamment d'exemples de situations comme ça, de chiffres hors contexte qui ont été sortis, où l'opposition n'avait pas fait ses devoirs, n'avait pas vraiment vérifié quelle était la situation complète et, quand on a pu vérifier, on s'est aperçu, dans à peu près tous ces cas-là, que ce n'était pas vraiment du tout l'impression qui avait été créée qui était la réalité.

M. le Président, on sait que dans l'ensemble des hôpitaux au Québec il y a une diminution du volume d'activité durant la période estivale qui correspond à une diminution de demandes de services pendant la période estivale. C'est sur cette base-là que, d'année en année, les gestionnaires prennent des décisions responsables, qu'en cours de route, au besoin, des ajustements sont faits, si la demande de services n'est pas ce qui avait été prévu. Il n'y a pas de diminution d'activité à Sainte-Justine, j'en suis certain, qui est due à quoi que ce soit de raisons particulières au-delà que l'ajustement normal, comme à chaque année, du volume de l'activité durant l'été.

Alors, encore une fois, M. le Président, je pense que, pour bien servir la population dans une situation comme ça, il faut que je puisse vérifier exactement d'où vient cette information-là, quel est le contexte, combien exactement d'enfants sont en attente, pour quelles raisons ils sont en attente et pour combien de temps ils sont en attente. C'est là vraiment qu'on aura un portrait de la situation. Continuer à jouer là-dessus, hors contexte comme ça, on continue la belle opération...

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Devant cette situation inacceptable pour Jacques Parizeau, est-ce que le premier ministre va croire son ministre de la Santé ou s'il va plutôt croire Monique Pérazzelli, infirmière-chef à Sainte-Justine, qui déclarait, la semaine dernière, à l'émission Le Point , que les actions posées par le ministre de la Santé, la fermeture des blocs opératoires à l'hôpital Sainte-Justine, au cours de l'été, dans une proportion sans précédent, il ne s'en est jamais fermé autant, va diminuer l'accès à la chirurgie et va causer une augmentation de 100 patients par semaine sur la liste d'attente? On parle de l'avenir du Québec, on parle des enfants du Québec, puis le premier ministre reste assis.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, l'opposition peut bien parler avec plaisir des listes d'attente parce que, dans leur temps, jusqu'à temps que ça soit identifié comme problème – comme le leader de l'opposition l'a bien dit, le député de Brome-Missisquoi, que ça soit identifié par le Parti québécois comme problème – eux autres, ils n'avaient pas de problème, il n'y avait pas de suivi et de monitoring dans les listes d'attente. Ils ne savaient pas, donc ils n'avaient pas de problème. C'est la bonne façon de ne pas avoir de problème.

Maintenant, M. le Président, je peux déjà donner une première information pour préciser la situation. Les autorités de Sainte-Justine, qui se sont habituées à suivre ce que disent d'elles certaines personnes, nous informent que la dernière compilation complète, en date de la fin de mai, il ne s'agissait pas de 3 300 mais de 2 295 qui étaient en attente.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Est-ce que le ministre peut confirmer qu'en date d'aujourd'hui 3 700 patients sont en attente d'une chirurgie, que, parmi ces cas, 300 sont en gynéco-obstétrique, qu'il reste 3 300 enfants en attente et que, sur cette liste d'attente, 100 sont des cas d'urologie et de 200 à 300 des cas de hernie?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je peux vous confirmer l'information que je viens de recevoir que, à la fin de mai...

Une voix: C'est un bon monitoring, ça.

M. Rochon: C'est mieux que ce qu'il y avait dans le temps, il n'y en avait pas. Quand on est en monitoring...

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, l'information, certifiée par les autorités de l'hôpital, était qu'il y avait 2 295 enfants en attente pour une chirurgie à la fin de mai. Est-ce que dans les derniers 15 jours il aurait pu s'en rajouter près de 1 500? On va vérifier. De prime abord, ça n'apparaît pas évident. Ça apparaît un peu hors de proportion. Si c'était le cas, il s'est sûrement passé quelque chose de spécial qui sera résorbé dans les prochaines semaines. On va d'abord vérifier. Mais, entre un chiffre vérifié, certifié par les autorités de l'hôpital, 2 295 à la fin de mai, et ce qu'on nous dit ce matin, que c'est rendu à 3 700 – je pense que ça augmente de complémentaire à complémentaire – la différence est tellement énorme que ça mérite au moins vérification.

Pour l'ensemble des autres chirurgies auxquelles fait référence le député de Brome-Missisquoi, je le rappelle, toutes les données qu'on a, c'est qu'il y a une diminution d'attente, surtout dans des spécialités comme la chirurgie générale, l'orthopédie et la gynécologie, alors que la baisse générale d'attente a été de l'ordre de 20 %, et c'est allé jusqu'à 25 % dans ces cas-là, M. le Président.

(11 heures)

Tout ce qu'on a dit là, ce matin, ne correspond pas du tout à toutes les informations que j'ai. Je vais quand même vérifier, mais j'ai une petite idée où est la réalité. Elle est probablement plus de la part de ceux qui connaissent la situation, qui gèrent avec compétence ces situations-là dans le réseau, qui me donnent l'heure juste, que ce que me dit l'opposition ce matin.

Le Président: Une dernière question complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi, parce que je veux reconnaître le député de Rivière-du-Loup avant la fin.

M. Paradis: Au premier ministre, M. le Président, qui refuse encore de se lever quand il est question des enfants malades du Québec...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, voulez-vous rappeler au leader de l'opposition que finalement, quand une question est posée au gouvernement, c'est au gouvernement de décider quel est le ministre qui va répondre? Nous, on est contents que, pour une fois, le chef de l'opposition permette au leader de l'opposition de poser des questions. Ça, on est contents là-dessus. Mais, je veux dire, M. le Président, rappelez donc le règlement au leader de l'opposition.

Le Président: M. le député de Papineau, s'il vous plaît.

Alors, en vous rappelant aussi non seulement ce qui vient d'être indiqué, mais également les dispositions du paragraphe 6° de l'article 35 qui nous interdisent aux uns et aux autres de prêter des motifs indignes à un collègue.

M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Au premier ministre qui est toujours debout pour le Bloc québécois; cette fois-ci, il s'agit de blocs opératoires où 3 300 enfants sont en attente d'une chirurgie à l'hôpital Sainte-Justine. Le ministre maintient sa décision de fermer cinq des 11 salles d'opération à compter de la semaine prochaine, six des 11 salles d'opération à compter de l'autre semaine. Six des huit infirmières qui sont à la salle de réveil vont quitter compte tenu du programme de retraite anticipée mis sur pied. Devant une telle situation, est-ce que le premier ministre du Québec peut se lever debout et assurer la population que les blocs opératoires ne seront pas fermés pendant la période estivale, qui est la meilleure période pour opérer les enfants qui sont en congé scolaire?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Je ne pense pas qu'il y ait de mots – sûrement pas des mots parlementaires – pour qualifier ce qu'on entend, M. le Président. La situation est dans les chiffres – ce que j'ai dit – venant des autorités de l'hôpital. La gestion des lits et les décisions des lits qui sont ouverts durant l'été, c'est une décision qui est prise par les autorités des hôpitaux. Il faut arrêter de répéter que le ministre ferme des salles. Le ministre ne ferme pas de salles et les autorités des hôpitaux maintiennent à chaque été un niveau de services qui correspond à ce qui est la demande et profitent aussi de cette situation-là, de cette période-là, au besoin, pour faire du rattrapage, M. le Président. Tout ce qu'on insinue là ne correspond pas à la réalité. Il ne faut pas que la population croie ça. C'est dire n'importe quoi, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Rivière-du-Loup.


Carrefours jeunesse-emploi menacés par l'article 45 du Code du travail

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Quand le premier ministre fait son bilan en matière jeunesse, la seule réalisation concrète qu'il peut nommer, c'est habituellement la création des carrefours jeunesse-emploi. Ma question au premier ministre aujourd'hui: Je voudrais savoir s'il considère encore que c'est une bonne chose, des organismes utiles, bien structurés, les carrefours jeunesse-emploi. Est-ce qu'il a l'intention de les conserver, dans la mesure où, récemment, le Syndicat de la fonction publique du Québec a fait une requête devant le Commissaire général du travail, en vertu de l'article 45 du Code du travail, pour forcer les carrefours jeunesse-emploi à respecter la convention collective du Syndicat?

Alors, compte tenu que son ministre du Travail ne semble pas du tout pressé d'agir sur l'article 45, est-ce que le premier ministre aujourd'hui réalise que l'insouciance, l'incapacité d'agir de son ministre non seulement démunit les municipalités dans leur capacité de gérer, non seulement rend non compétitives les entreprises québécoises par rapport aux autres en Amérique du Nord, mais qu'aujourd'hui son gouvernement est couvert de ridicule jusqu'à voir ses propres créatures, ses propres organismes créés par lui menacés par cet article 45 désuet?

Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

Mme Harel: M. le Président, je dirais que ceux qui se couvrent de ridicule sont justement ceux qui ont levé cette requête en vertu de l'article 45 du Code du travail pour prétendre que les activités qui se déroulent dans les carrefours jeunesse-emploi et qui s'adressent à tous les jeunes de 16-35 ans sont des activités qui viendraient retirer du travail aux agents d'aide sociale.

M. le Président, je pense que c'est avec fierté, à l'occasion de la clôture de nos travaux, aujourd'hui, que je peux vous faire le bilan... Demain, plutôt, excusez. En fait, cette semaine...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: C'est sans doute que Mme la ministre a senti un peu l'atmosphère estivale depuis ce matin, mais on va lui laisser terminer sa réponse.

Mme Harel: Alors, rapidement, M. le Président. D'abord, je pense qu'on peut être fiers, à l'Assemblée nationale, d'avoir voté à l'unanimité la loi qui introduit le nouveau régime d'apprentissage et qui va permettre, après le secondaire III, à une personne, à un jeune en particulier, d'aller chercher un diplôme dans l'environnement du travail, à contrat de travail, mais un diplôme sanctionné par le ministère de l'Éducation. Et je pense qu'on peut être fiers aussi, les députés de cette Assemblée nationale qui, depuis un an et demi, deux ans, ont travaillé à l'implantation des carrefours jeunesse-emploi dans leur milieu. Ils peuvent s'en réjouir, s'en féliciter parce que c'est avec l'appui de tous les partenaires scolaires, municipaux, communautaires que cette réalisation a pu avoir lieu.

Le Président: Rapidement, dernière question complémentaire.

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Puisqu'on est à l'heure des bilans, est-ce que, dans son bilan de session, le ministre du Travail, qui a dit qu'on était tellement surchargés de projets de loi qu'on ne pouvait pas adopter un projet de loi sur l'article 45 du Code du travail et qui, aujourd'hui, est probablement celui qui est le plus couvert de ridicule par la démarche qui est entreprise, peut nous dire qu'il est fier de ce qu'il a fait en matière d'actions concrètes sur l'article 45 quand les rapports étaient connus depuis l'automne passé? Et je voudrais déposer, M. le Président, la requête en question en vertu de l'article 45, s'il y a consentement.


Document déposé

Le Président: Alors, il y a consentement. M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, si le député de Rivière-du-Loup pouvait venir en Gaspésie et, de temps en temps, dans son comté pour voir le travail admirable que font les carrefours jeunesse-emploi, il serait gênant de se lever dans cette Assemblée pour essayer d'en contester de près ou de loin, directement ou indirectement, la valeur. Je trouve ça indigne de sa part.


Réponses différées


Normes de sécurité dans les établissements de santé et de services sociaux

Le Président: Alors, nous allons passer maintenant à l'étape des réponses différées. À ce moment-ci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux va répondre à une question posée le 17 avril par le député de Brome-Missisquoi concernant la sécurité des personnes hébergées dans les établissements de santé et de services sociaux. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, effectivement, le député de Brome-Missisquoi s'inquiétait de l'évolution de la situation en ce qui regarde la conformité des établissements du réseau de la santé et des services sociaux aux normes de sécurité du Code du bâtiment. On se rappellera que le député de Brome-Missisquoi faisait état d'un rapport produit par l'Association des hôpitaux du Québec – de deux rapports, en fait: un premier rapport en 1989 et un deuxième rapport en 1995 – et il avait dit que le deuxième rapport montrait qu'il n'y avait pas eu d'amélioration sensible de la situation sur cette période de quatre ans.

Je comprends qu'une opposition vigilante veut s'inquiéter et que, quatre ans encore plus tard, en 1997, surtout sous un autre gouvernement, on veuille bien s'assurer que la situation n'a pas continué à stagner. Alors, je peux vous donner, après avoir refait et vérifié l'inventaire de ce qui a été fait présentement, les informations suivantes quant à ce qui a été réalisé en ce qui concerne les problèmes de vétusté et de sécurité dans les établissements de la santé et des services sociaux et spécialement dans des établissements qui hébergent des personnes âgées ou des personnes en perte d'autonomie.

Les investissements totaux qui ont été faits depuis 1994 par le ministère de la Santé et des Services sociaux pour améliorer la qualité des établissements, c'est de l'ordre de 662 000 000 $, M. le Président, et, de ce montant, c'est 65 % qui ont été affectés à des établissements où il y avait une amélioration à faire au titre de la vétusté et de la sécurité, ce qui représente un montant de 430 000 000 $. L'année 1995-1996, l'effort a été encore plus important; cette année-là, pour tous les investissements qui ont été faits, c'est 80 % qui ont été investis pour des questions de vétusté et de sécurité.

(11 h 10)

À cela, M. le Président, il faut ajouter que le programme accéléré d'immobilisations, qui a été annoncé par mon collègue le ministre des Finances au dernier budget et qui prévoit sur trois ans un investissement de 345 000 000 $, a permis de rajouter à l'effort qui a été fait pour hausser l'effort total au montant de 60 000 000 $. On se rappellera que le rapport de l'Association des hôpitaux évaluait le besoin sur une période de trois ans à 525 000 000 $ et c'est 600 000 000 $ qui ont été investis.

En plus de ça, je prends juste...

Le Président: M. le ministre, je veux bien être indulgent, j'essaie de le faire, mais je voudrais juste vous rappeler qu'une réponse différée n'est pas une déclaration ministérielle et que, dans ce contexte-là, je ne peux pas accepter une réponse qui dure quatre, cinq, six minutes, là. Autrement, on finit par en faire une déclaration ministérielle, ce qui n'est pas l'objet de la réponse différée. À l'étape de la réponse différée, les mêmes règles qu'à la période des questions et des réponses orales doivent s'appliquer. Alors, en terminant, s'il vous plaît.

M. Rochon: Alors, je termine en disant, M. le Président, que, voilà, les chiffres montrent au moins que ce qui a été fait, c'est 65 % – et, certaines années, plus – de l'effort d'immobilisation; que c'est au-delà de ce que l'Association des hôpitaux prévoyait à l'époque de ce qui était nécessaire comparativement à à peu près rien qui avait été fait auparavant, d'après le rapport de l'Association des hôpitaux. Et je n'ai pas le temps de continuer, mais je pourrais donner l'ensemble des autres mesures...

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce qu'on doit comprendre qu'après une recherche de deux mois le ministre conclut que l'Association des hôpitaux du Québec, tout comme les médecins, les infirmières, le Protecteur du citoyen, le président de la Commission des droits de la personne, le député de Saint-Jean, le député de Lévis, les députés de ce côté-ci, tout le monde se trompe et qu'il est faux, comme l'affirme l'Association des hôpitaux du Québec, de dire que, dans 20 % des établissements, la sécurité incendie suscite des craintes majeures quant à la qualité des équipements en place; que, dans 20 % des cas, les équipements de production et de transformation nécessitent des changements pour plusieurs compte tenu de la présence de BPC; qu'il est faux de dire que les génératrices d'urgence sont en général dépassées et posent un risque aux usagers dans plus de 30 % des cas; que les ascenseurs sont dans un état avancé de désuétude?

Est-ce que le coroner Cyrille Delâge, lui, se trompe également quand il dit que le ministre du Travail ne fait pas son travail et que le Régie du bâtiment, depuis cinq ans, n'a même pas inspecté certaines de vos institutions?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Si je comprends bien, M. le Président, le député de Brome-Missisquoi est toujours avec ses mêmes références du rapport de l'Association des hôpitaux qui remonte à 1993. Moi, je viens de donner une mise à jour de 1997. De plus, le coroner Cyrille Delâge, justement dans son rapport, disait – dans deux rapports, en 1995, d'abord, et en 1997 – qu'il était très conscient que ses recommandations quant aux améliorations à faire n'étaient vraiment pas faciles et que ce n'étaient pas des situations qui pouvaient être réglées rapidement compte tenu de la complexité et du coût des solutions. Un an et demi plus tard, en avril 1997 par rapport à décembre 1995, le même coroner disait que le ministère de la Santé et des Services sociaux s'est engagé dans la bonne voie dans le cas des nouveaux bâtiments et lorsque des travaux majeurs de rénovation sont effectués.

Des voix: Bravo!


Votes reportés


Adoption du projet de loi n° 123

Le Président: Nous allons maintenant procéder aux votes reportés. Nous allons passer maintenant au vote sur la motion de M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor proposant que le projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic, soit adopté.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Charest (Rimouski), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Filion (Montmorency).

Le Président: Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:67

Contre:38

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est adoptée. En conséquence, le projet de loi n° 123 est adopté.


Motions sans préavis

Nous arrivons maintenant à l'étape des motions sans préavis. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Souligner le 21 juin, Jour national des peuples autochtones

M. Chevrette: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 21 juin, Jour national des peuples autochtones, en reconnaissance et en hommage à la contribution inestimable des premières nations à l'histoire collective du Québec.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Alors, une intervention de chaque côté. M. le ministre d'État des Ressources naturelles et responsable des Affaires autochtones.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. C'est un de nos collègues disparus qui a présenté cette motion pour la première fois en cette Chambre, le député de Sept-Îles, le député Denis Perron.

(11 h 20)

Une voix: De Duplessis.

M. Chevrette: De Duplessis. Et chaque année depuis l'Assemblée nationale souligne la journée du 21 juin, la journée des nations autochtones. Et je pense que c'est à bon droit, M. le Président, parce que, depuis plusieurs années, je crois que le dialogue est renoué de façon significative avec les communautés autochtones. Il y a de plus en plus de projets qui naissent en partenariat entre les diverses communautés. Encore la semaine dernière, le premier ministre, en compagnie du député d'Ungava et de moi-même, inaugurions un projet de scierie entre la communauté crie et l'industrie Domtar qui démontre une forme de partenariat qu'il nous faut privilégier dans les prochaines années.

Je pense, M. le Président, qu'il est bon que l'Assemblée nationale souligne ces aspects positifs, ces projets concrets. On est porté trop facilement à signaler les oppositions qui existent entre les nations autochtones et les non-autochtones. Au contraire, je crois que, de plus en plus, il y a une sensibilité qui se développe des préoccupations de chacune de ces communautés-là et que nous pouvons parce que – j'utilise une expression qui déplaît souvent à certains groupes – nous sommes «condamnés» à vivre ensemble... Je pourrais dire que nous sommes déterminés à vivre en harmonie ensemble. Ce serait beaucoup plus positif.

Et c'est dans ce contexte-là que le présent gouvernement intensifie ses relations avec les dirigeants des communautés autochtones et que, ensemble, nous allons mettre à contribution, pour le plus grand développement du Québec, l'apport de ces communautés-là à notre développement économique, à notre développement culturel, à notre développement social. Et je suis persuadé que, ensemble, nous pouvons faire grandir à la fois le Québec sur le plan économique, social et culturel, mais que nous allons prouver à plusieurs autres dirigeants d'autres pays que nous pouvons vivre en harmonie en nous respectant mutuellement et que nous sommes capables de partager la richesse collective avec ceux qui ont été les premiers à mettre le pied en terre québécoise, en particulier. Et je suis convaincu que c'est unanimement en cette Chambre que nous allons souligner ce jour des nations autochtones, à l'unanimité de cette Chambre. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles et ministre responsable des Affaires autochtones. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. Au nom de l'opposition officielle, je veux joindre notre voix à celle du ministre responsable des Affaires autochtones pour souligner le 21 juin, Jour national des peuples autochtones, en reconnaissance et en hommage à la contribution inestimable des premières nations à l'histoire collective du Québec.

Je pense que, dans notre histoire, il y avait peut-être deux grandes tendances. Il y avait, je pense, dès le départ, à l'arrivée des premiers colons ici, en Nouvelle-France, un esprit de partenariat qui était peut-être plus prononcé ici, avec, surtout, l'expérience qui a été vécue au États-Unis où il y avait beaucoup plus de confrontation; il y avait une tradition nettement plus violente, plus sanglante qui s'était développée aux États-Unis, en comparaison avec un développement un petit peu plus harmonieux, dès le départ, ici, dans la Nouvelle-France, et subséquemment.

Et on peut citer, quand on parle de la contribution des nations autochtones, une certaine audace, soit les voyages qui étaient faits vers l'Ouest aux XVIIe et XVIIIe siècles. On peut prendre pour exemple aussi l'audace quant au travail fait par les travailleurs mohawks pour la construction du pont de Québec, les gratte-ciel à Montréal, entre autres, ces grands projets de construction, des projets d'audace; il y avait une contribution remarquable des nations autochtones à la réalisation de ces projets.

Mais il y avait également toujours une tendance qui était moins heureuse, une tendance de négligence, une tendance de non-respect à la fois des coutumes et des droits des collectivités autochtones de notre société. On a vu les efforts pour effacer les langues autochtones de notre société et, maintenant, il y a, par exemple, très peu de personnes qui parlent la langue mohawk; c'est quelque chose qui est en perte de vitesse. Et je pense qu'on a tout intérêt à aider les autochtones à préserver leurs coutumes, leur culture et leur langue. Je pense que c'est quelque chose dont tous les Québécois peuvent comprendre l'importance de l'enjeu pour la protection linguistique.

On peut parler, entre autres, du fait qu'on a construit la voie maritime en plein milieu du village de Kahnawake. On peut penser au déplacement triste du village de Chisasibi pour la réalisation de la construction de la Baie James. Alors, il y a eu des moments dans notre passé qui ont laissé des séquelles qui sont moins heureuses, beaucoup plus tristes. Et ça, c'est des choses qu'il faut apprendre à composer avec.

Mais on a vu, je pense, dans les dernières années – je vais joindre ma voix à celle du ministre responsable – une certaine relance d'une fierté dans les premières nations au Québec. On peut prendre, par exemple, juste le grand siège social du Grand Conseil des Cris, à Nemiscau, qui est un grand édifice comme une oie et qui est là, sur le lac Champion. Et c'est incroyable de voir ça. Le village Oujé-Bougoumou qui a été conçu par l'architecte Douglas Cardinal, d'origine autochtone aussi. Ce sont des exemples d'une certaine relance, dans l'esprit, chez les nations autochtones. Et je pense qu'on a tout intérêt, comme société, à travailler en partenariat, à miser sur la première des deux tendances dans l'histoire de nos relations avec les autochtones, à bâtir sur les acquis du passé, à travailler avec cette relance de fierté des nations autochtones pour promouvoir ensemble une relation plus harmonieuse à l'aube du XXIe siècle.

Mais je pense que le ministre doit être très conscient aussi que les attentes sont très élevées. On a passé sur une époque des grandes déclarations, soit l'enquête royale sur les peuples autochtones qui, dans quelque 4 000 pages, a créé des attentes très élevées. Il y avait des grands principes-cadres; on a pris l'engagement de négocier, et tout ça. Il y avait les grandes ententes entre gouvernements. Il y avait des conférences de presse pour souligner notre intérêt d'aller de l'avant. Mais c'est vraiment maintenant le moment de passer à l'action et de prendre ces grands principes, à la fois énoncés par l'Assemblée nationale et par les autres personnes. Les grands principes sont là, mais c'est juste de passer maintenant à comment on va réaliser les principes de l'autonomie gouvernementale, comment on va faire un meilleur respect à la fois des traditions, des droits et des coutumes des premières nations au Québec et au Canada.

Moi, je suis convaincu qu'on va être capables de le faire, mais c'est un enjeu de taille. Et je pense que ça va prendre l'intérêt du gouvernement, de tous les répondants des ministères afin qu'on puisse trouver une meilleure place pour les intérêts et les enjeux qui touchent les nations autochtones et également, je pense, pour promouvoir, comme j'ai dit, des relations plus harmonieuses entre les premières nations du Québec et le gouvernement. Merci beaucoup, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. La motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Procéder à une consultation générale sur le document de la Commission d'accès à l'information du Québec intitulé Vie privée et transparence administrative au tournant du siècle

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de la culture procède à une consultation générale et tienne des auditions sur le document de la Commission d'accès à l'information du Québec intitulé Vie privée et transparence administrative au tournant du siècle , à compter du mardi 30 septembre 1997; que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 10 septembre 1997; que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement?

M. Bélanger: Oui, il y a consentement, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement. Cette motion est-elle adoptée?

M. Bélanger: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Aux avis touchant les travaux.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous avons terminé les motions sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Nous sommes maintenant rendus à l'étape des travaux touchant les commissions, et je vous cède la parole, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 109, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique, la Loi sur les élections scolaires et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants: le projet de loi n° 257, Loi concernant la Ville de Repentigny; le projet de loi n° 244, Loi concernant la Ville de Lac-Mégantic, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Et, M. le Président, j'avise également cette Assemblée qu'en dérogation aux règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale quant aux délais de convocation des intéressés dans le cadre de l'étude d'un projet de loi d'intérêt privé la commission des finances publiques entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 253, Loi concernant l'Association de villégiature du Mont Sainte-Anne, demain, le jeudi 19 juin 1997, de 11 heures à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement pour...

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, c'est tout. M. le leader, vous avez terminé vos annonces. Très bien.

Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de la culture se réunira en séance de travail aujourd'hui, mercredi 18 juin 1997, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Je vous avise également que la commission des transports et de l'environnement se réunira en séance de travail aujourd'hui, mercredi 18 juin 1997, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

À l'item, maintenant, renseignements sur les travaux de l'Assemblée, il n'y a pas de demandes. Alors, ceci met fin aux affaires courantes.


Affaires du jour

Nous allons entreprendre nos débats aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader du gouvernement ou Mme la leader adjointe du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour. Mme la leader.

(11 h 30)

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 35 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 202


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 35, M. le député d'Arthabaska propose l'adoption du projet de loi n° 202, Loi concernant la Ville de Victoriaville. Y a-t-il des interventions? Alors, le projet de loi est-il adopté? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je veux seulement vérifier. Est-ce que vous avez procédé à l'adoption du principe ou à l'adoption du projet de loi? Parce qu'on doit faire les deux étapes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi. Vous aviez indiqué l'article 35; on m'indique qu'il y a une suite. Alors, c'était au niveau de... Excusez-moi. Bon, il y a deux pages pour l'article 35. Je reviens, donc, à l'adoption du principe du projet de loi. Alors, pas d'intervention.


Mise aux voix

Le principe est adopté.


Adoption

Nous allons maintenant à l'adoption du projet de loi. Il n'y a pas d'intervention?


Mise aux voix

Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. L'article 36.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous avez bien dit 106?

Une voix: Trente-six.


Projet de loi n° 207


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah! Article 36, excusez. Je trouvais que c'était rendu loin. Article 36, voilà. M. le député de Roberval propose l'adoption du principe du projet de loi n° 207, Loi concernant la Municipalité d'Hébertville. Y a-t-il des interventions?


Mise aux voix

Alors, le principe de ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Nous serions à l'étape de l'adoption, M. le Président.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adoption du projet de loi. Très bien. Alors, le projet de loi n° 207 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 37.


Projet de loi n° 210


Adoption du principe


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 37, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 210, Loi concernant la Ville d'Anjou. Ce principe est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Nous allons maintenant à l'adoption du projet de loi. Alors, le projet de loi n° 210, Loi concernant la Ville d'Anjou, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 38 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 216


Adoption du principe


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 38, M. le député de Crémazie propose l'adoption du principe du projet de loi n° 216, Loi modifiant la Charte de la Ville de Montréal. Ce principe du projet de loi n° 216 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, je mets aux voix le projet de loi n° 216. Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 39 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 239


Adoption du principe


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 39, Mme la députée de Chapleau propose l'adoption du principe du projet de loi n° 239, Loi concernant la Ville de Gatineau. Ce principe du projet de loi n° 239 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Je mets aux voix maintenant le projet de loi n° 239. Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 40.


Projet de loi n° 245


Adoption du principe


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 40, M. le député de Lévis propose l'adoption du principe du projet de loi n° 245, Loi concernant la Municipalité de Pintendre. Ce principe du projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Et maintenant je vais mettre aux voix l'adoption du projet de loi n° 245. Je dois avoir tout d'abord un consentement pour déroger à l'article 35 des règles de fonctionnement et pour déroger à l'article 22 du règlement. Y a-t-il consentement?

Des voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement. Alors, le projet de loi n° 245 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 41.


Projet de loi n° 252


Adoption du principe


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 41, M. le député de Beauce-Nord propose l'adoption du principe du projet de loi n° 252, Loi concernant la Ville de Beauceville. Ce principe du projet de loi n° 252 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, je mets aux voix le projet de loi n° 252. J'ai besoin d'un consentement pour déroger à l'article 22 du règlement. Il y a consentement?

Des voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement. Le projet de loi n° 252 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, nous aurons besoin du consentement pour déroger à l'article 268 pour les projets de loi privés suivants. Donc, je vous demande de prendre en considération l'article 21.


Projet de loi n° 203


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 21, M. le député de Crémazie propose l'adoption du principe du projet de loi n° 203, Loi concernant Fiducie canadienne-italienne. Il y a consentement pour déroger à l'article 268 du règlement?

Des voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement. Il n'y a pas d'interventions. Alors, le principe du projet de loi n° 203 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Je vais à la suite. Je mets maintenant aux voix l'adoption du projet de loi n° 203. Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 33.


Projet de loi n° 254


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 33, M. le député de Laporte propose l'adoption du principe du projet de loi n° 254, Loi concernant Trust Bonaventure inc. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 268 du règlement?

Une voix: Avec plaisir.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Consentement. Alors, le principe du projet de loi n° 254 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Et je mets maintenant aux voix l'adoption du projet de loi n° 254. Ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 25 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 225


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous me faites voyager, Mme la leader. Ha, ha, ha! À l'article 25, M. le député de Saint-Hyacinthe propose l'adoption du principe du projet de loi n° 225, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 268 du règlement? Il y a consentement.


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 225 est-il adopté?

Une voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et maintenant le projet de loi n° 225 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vais continuer à vous faire voyager, je vous demande de prendre en considération l'article 29.


Projet de loi n° 242


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 29, Mme la députée de Blainville propose l'adoption du principe du projet de loi n° 242, Loi concernant la Municipalité régionale de comté d'Antoine-Labelle, la Régie intermunicipale des déchets de la Rouge et la Régie intermunicipale des déchets de la Lièvre. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 268 du règlement?

Des voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement. Le principe du projet de loi n° 242 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le projet de loi n° 242 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

(11 h 40)

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 31.


Projet de loi n° 251


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 31, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 251, Loi concernant la Régie intermunicipale de gestion des déchets sur l'Île de Montréal. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 268 du règlement? Il y a consentement.


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 251 est-il adopté? Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix l'adoption du projet de loi n° 251. Ce projet de loi est-il adopté? Adopté.

Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 26 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 232


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 26, M. le député de Nicolet-Yamaska propose l'adoption du principe du projet de loi n° 232, Loi concernant la Ville de Trois-Rivières. Il y a consentement pour déroger à l'article 268 du règlement? Il y a consentement.


Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 232 est-il adopté? Adopté.


Adoption


Mise aux voix

Je mets aux voix maintenant l'adoption du projet de loi n° 232. Ce projet de loi est-il adopté? Adopté.

Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 12 de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 12, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur la prévention des incendies. Y a-t-il des interventions? Pas d'interventions.

Alors, ce rapport est-il adopté?

Mme Caron: Avant d'adopter, je vais vous demander de suspendre quelques instants.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 42)

(Reprise à 11 h 44)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous allons reprendre nos travaux. J'inviterais Mme la leader adjointe à nous faire part de...

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vais faire motion pour ajourner le débat sur le projet de loi n° 114.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion d'ajournement est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 18 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 196


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 18, M. le député de Berthier propose l'adoption du principe du projet de loi n° 196, Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.). Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 237 du règlement? Il y a consentement. Il y a des interventions? Alors, M. le député de Berthier, je vous cède la parole.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir, comme parrain du projet de loi, sur le projet de loi n° 196, comme vous l'avez évoqué, la Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.).

Alors, M. le Président, lors du discours sur le budget de 1983-1984, le gouvernement du Parti québécois, dirigé à l'époque par feu M. René Lévesque, a annoncé avec beaucoup d'enthousiasme qu'il appuierait la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec dans son projet de création de fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Il faut comprendre, M. le Président, que cette puissante idée économique est née au début des années quatre-vingt. C'est une grande idée qu'avait mise en place, en fin de compte, feu René Lévesque et Louis Laberge, une idée qui était littéralement tournée vers l'avenir et les grands défis économiques du Québec de cette fin de siècle.

C'était une idée aussi qui a vu le jour – et tout le monde s'en rappellera – lors de la crise économique des années quatre-vingt. On se rappellera que le Québec, comme le Canada, avait été touché durement par une crise économique sans précédent: beaucoup de fermetures d'entreprises, taux d'intérêt extrêmement élevés. Alors, est née, le 23 juin 1983, cette fameuse loi créant un des instruments financiers économiques extrêmement importants qui a joué, qui joue un rôle et qui jouera un rôle extrêmement important dans le développement économique et la création d'emplois au Québec, c'est-à-dire le Fonds de solidarité, ce Fonds qui a fait appel au cours des ans à la solidarité des Québécois et des Québécoises, qui a fait appel, en fin de compte, à l'épargne de la collectivité québécoise et qui a répondu, M. le Président, depuis les années quatre-vingt, à un fort courant qui caractérise particulièrement le développement économique du Québec, c'est-à-dire l'entrepreneurship québécois; un entrepreneurship de plus en plus vigoureux, un entrepreneurship de plus en plus musclé, un entrepreneurship qui s'affirme de plus en plus non seulement ici, mais particulièrement sur les marchés étrangers, un entrepreneurship aussi qui tourne énormément, sur le plan de son financement, autour de ces fonds régionaux qui ont été créés en 1995. Donc, on a vu la naissance de 16 fonds régionaux constitués justement par le Fonds de solidarité des travailleurs et des travailleuses du Québec.

Alors, M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que le gouvernement a suivi l'évolution fulgurante du Fonds de solidarité au cours des dernières années. Le dynamisme du Fonds a démontré que ses dirigeants ont contribué à faire du Fonds un acteur majeur sur la scène du capital de risque au Québec. Il faut souligner aussi, M. le Président, de plus, la contribution exceptionnelle du Fonds à la création et au maintien de quelque 52 000 emplois au Québec, selon une récente étude du groupe SECOR. Cette contribution à l'économie québécoise compense largement la valeur des avantages fiscaux consentis par les différents gouvernements. Avec un actif de 2 000 000 000 $, le Fonds de solidarité est donc devenu un outil de croissance et de développement économique dont le gouvernement et toute la collectivité peuvent être fiers. Cet inestimable levier est appelé de plus en plus fréquemment à soutenir les entreprises locales et à les appuyer lors de la réalisation d'importants projets économiques. M. le Président, le gouvernement entend continuer à appuyer et à soutenir le Fonds dans ses initiatives.

On sait que, lors du récent discours sur le budget présenté par le député de Verchères et ministre des Finances, le ministre des Finances, à l'époque, avait annoncé déjà des modifications au projet de loi qui avait été créé au début des années quatre-vingt pour permettre justement de sortir du corridor étroit dans lequel s'était engagé le Fonds, compte tenu des nouvelles exigences économiques, particulièrement le défi de la mondialisation, pour permettre de respirer davantage et d'être en mesure de répondre aux grands défis économiques du XXIe siècle.

M. le Président, comme vous le savez, et c'est clair, il en va de soi, on produit pour à peu près 176 000 000 000 $ de biens et de services par année au Québec et on en exporte la moitié. 85 % de nos exportations le sont sur un des marchés les plus difficiles, les plus compliqués, les plus «tough» du monde de l'économie qui est les États-Unis d'Amérique. Alors, 85 % de nos exportations sont destinées au États-Unis. Nous exportons au-delà de 50 % de notre PIB. Alors, dans ce sens-là, le Québec est une des sociétés les plus exportatrices de la planète. On sait que, chez les Japonais, ça oscille, en matière d'exportations, autour de 11 % à 12 %. Alors, on voit à quel point les Québécois et les Québécoises sont un peuple, en fin de compte, de marchands, d'exportateurs et d'entrepreneurs. Je peux dire que, depuis les 15 dernières années, on assiste à une présence québécoise de plus en plus marquée sur les différents marchés internationaux.

(11 h 50)

Afin de répondre à ce défi de l'exportation, le gouvernement veut apporter un amendement à ce projet de loi pour faciliter justement l'exportation, qui va permettre en fin de compte de favoriser le développement local des entreprises par la conquête des marchés extérieurs. On sait que, pour chaque tranche de 100 000 $ de biens et services exportés, il se crée, au Québec, 1,1 emploi. Alors, si beaucoup d'entreprises québécoises ont un potentiel d'exportation, peu d'entre elles, malheureusement, exportent dans les faits. Il y a donc là tout un domaine à exploiter. Je pense que, si on veut parler de croissance économique, de développement de l'emploi, de création d'emplois et de croissance de la richesse, il faut mettre à la disposition de nos entreprises des instruments financiers qui vont être en mesure de permettre à nos entreprises de vendre ailleurs.

Il y a donc, comme je le mentionnais, tout un domaine à exploiter, par exemple, en regroupant des partenaires industriels et financiers pour former ce que nous appelons des locomotives. Le président du Fonds l'a expliqué dernièrement dans différentes entrevue. Alors, le Fonds de solidarité veut créer des locomotives à l'exportation.

Par exemple, dans le domaine des forêts et du papier, on sait que le Québec est sans aucun doute un des grands producteurs de papier journal au monde. Il a développé une expertise et un savoir-faire. Alors, le fonds veut constituer une locomotive à l'exportation pour regrouper l'ensemble du savoir-faire québécois dans ce domaine pour nous permettre d'agir sur le plan international, particulièrement en Amérique latine, dans les pays de l'Est et, bien sûr, en Amérique du Sud.

On veut le faire aussi sur le plan touristique, donc créer des locomotives à l'exportation sur le plan touristique, et dans le domaine du transport, justement. Il y a déjà des regroupements qui se sont faits autour de Air Transat et du Groupe Desgagnés justement pour agir particulièrement dans le secteur des Caraïbes. On sait qu'il y a une demande extrêmement élevée en matière touristique, et le savoir-faire québécois dans le domaine touristique, dans le domaine des services, dans le domaine de la gestion touristique, dans le domaine du récréotouristique, eh bien, on a beaucoup de savoir-faire à exporter dans ce sens-là.

Il y a des locomotives, aussi, qui vont se mettre en marche dans le domaine de l'environnement. Le Québec a, sans aucun doute, un des grands savoir-faire dans le domaine de l'environnement et des technologies de l'environnement, que ce soit dans le domaine du recyclage des déchets domestiques, que ce soit dans le domaine du recyclage des déchets industriels, et on le voit par l'entremise des nombreuses missions qu'on a faites depuis 1994. Moi, j'ai vu, particulièrement dans les pays d'Amérique latine, dans les Caraïbes et en Amérique du Sud, l'importance, pour ces pays-là, d'importer de chez nous le savoir-faire québécois qui est extrêmement recherché non seulement en Amérique latine, mais un peu partout à travers la planète.

Alors, M. le Président, afin de permettre au Fonds de solidarité de croître avec le moins d'entraves possible et de profiter ainsi des opportunités de création d'emplois qui lui sont présentées et s'offrent au Québec, le gouvernement du Québec propose d'apporter certaines modifications à la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec. Ces changements consistent à rendre admissibles, comme le prévoyait – je le mentionnais tantôt – le discours sur le budget de 1997-1998, certains investissements dans des projets à l'étranger. Ainsi, le financement de projets réalisés à l'étranger sera considéré comme un investissement dans une entreprise québécoise dans la mesure où ces projets auront des impacts tangibles, naturellement, de création d'emplois au Québec, sur le niveau de l'emploi et de l'activité économique comme telle. Comme je vous dis, M. le Président, on ne peut plus penser développement économique, croissance de la richesse et création d'emplois aujourd'hui sans parler d'exportation.

La loi constitutive du Fonds sera aussi modifiée afin de rendre admissibles certains investissements immobiliers, mais pas n'importe lesquels. Ainsi, le financement d'investissements immobiliers sera considéré comme un investissement dans une entreprise québécoise dans la mesure où ces investissements favoriseront la création d'emplois, naturellement, consolideront l'aménagement du territoire ou de l'économie et amélioreront la compétitivité à l'échelle locale, régionale ou nationale.

Également, M. le Président, afin de lui permettre de jouer pleinement son rôle de partenaire accompagnateur, les réinvestissements du Fonds dans une de ses entreprises partenaires seront aussi considérés comme admissibles, et ça, même si la taille de l'entreprise ne lui permet plus d'être classée comme une entreprise québécoise. Cette modification permettrait au Fonds de solidarité des travailleurs du Québec de continuer à soutenir une entreprise partenaire qui a un besoin ponctuel particulier de financement. De plus, les modifications à la loi constitutive feront en sorte que le Fonds aura le pouvoir de convertir les actions A émises et d'émettre, à l'avenir, des actions A en série. Enfin, un plafond de 12 % de l'actif net du Fonds à la fin de l'année financière précédente sera imposé aux sommes engagées, mais non déboursées.

M. le Président, le chemin parcouru par le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec depuis sa création en 1983 est, somme toute, extraordinaire, ainsi que l'initiative démontrée tout au long de cette période. Les modifications apportées à sa loi constitutive lui permettront de s'adapter aux nouvelles réalités économiques et aux nouveaux besoins des entreprises. Le Fonds de solidarité sera alors plus à même de poursuivre sa mission qui, ne l'oublions pas, M. le Président, consiste à investir dans des entreprises québécoises et à leur fournir des services dans le but de créer maintenant, de maintenir ou de sauvegarder des emplois, ainsi qu'à stimuler l'économie québécoise par des investissements stratégiques qui profiteront aux travailleurs et aux entreprises du Québec.

Alors, en somme, M. le Président, le Québec en sera plus fort, plus solide, plus robuste sur le plan économique et on sera plus en mesure, avec ce nouvel outil, ce nouvel appui justement aux entrepreneurs, aux entreprises du Québec et à l'ensemble des travailleurs et des travailleuses, de se mesurer aux meilleurs au monde et de répondre au grand défi de cette fin de siècle et de début de ce troisième millénaire qui est celui, justement, d'exporter et de répondre par ce fait même aux défis de la mondialisation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Berthier. Oui, M. le député de Laporte, vous intervenez sur le projet?

M. Bourbeau: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous cède la parole, M. le député.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous voici, en ce dernier jour de la session, ou avant-dernier, selon les diverses interprétations qu'on entend du côté gouvernemental, avec un projet de loi, un projet de loi qui nous arrive comme ça, M. le Président, un peu à la dernière minute, on doit le dire, un projet de loi qui n'a pas été déposé avant le 15 mai, qui était la date limite pour le faire, et donc qui requiert le consentement de l'opposition officielle pour qu'il devienne une loi.

Ce serait facile, M. le Président, pour nous, de bloquer ce projet de loi là. On aurait simplement à dire au gouvernement de suivre la réglementation, la procédure, et puis le projet de loi mourrait au feuilleton. C'est une idée qui nous est passée par la tête, M. le Président, parce que l'opposition n'aime pas se faire bousculer, n'aime pas voir arriver en fin de session des projets de loi qui sont importants et qu'on nous met comme ça sur la table à la dernière minute en nous disant: Voici, c'est un bon projet de loi, si vous ne voulez pas le voter, on dira que vous refusez de collaborer à l'essor économique du Québec, etc., etc.

M. le Président, nous avons bien réfléchi avant de donner notre accord à ce projet de loi là, et le fait que ce projet de loi là soit maintenant débattu, c'est un signe que l'opposition a décidé de collaborer à l'adoption de ce projet de loi là, même si nous nous opposons fermement à ce que le gouvernement arrive comme ça en fin de session avec des projets qui sont parfois mal ficelés et qui sont parfois improvisés, et dont on prétend qu'ils sont essentiels.

(12 heures)

Nous allons le supporter, M. le Président, parce que le Parti libéral du Québec supporte d'une façon inconditionnelle le principe du Fonds de solidarité des travailleurs de la FTQ. Nous ne sommes pas d'accord avec tout ce que le Fonds fait, et je le dirai tout à l'heure, mais le principe de ce Fonds-là, nous sommes d'accord, nous avons même voté en faveur lors de l'introduction du Fonds en 1983. Lorsque nous étions au gouvernement, nous avons permis la progression du Fonds qui est passé de zéro en 1983 à un actif de tout près de 800 000 000 $ à la fin du régime libéral: 800 000 000 $, 900 000 000 $, c'est quand même pas mal d'argent qui a été injecté dans le Fonds. Et nous allons, M. le Président, continuer dans l'avenir à supporter l'action du Fonds de solidarité des travailleurs de la FTQ parce que nous sommes d'accord avec la mission du Fonds.

La mission du Fonds, il convient, je pense, de la rappeler pour ceux qui ne la connaîtraient pas, c'est de contribuer à créer, bien sûr, et à maintenir des emplois au Québec, principalement par des investissements dans les petites et les moyennes entreprises québécoises. M. le Président, cette confiance dans le potentiel économique du Québec est un principe de base de la stratégie du Fonds. On doit également dire que le Fonds a pour mission l'éducation de ses membres, dans le sens de bien faire comprendre aux membres du Fonds, ceux qui y souscrivent, l'importance justement, d'une part, d'investir dans la retraite – parce que c'est un fonds de retraite, le fonds de pension; les travailleurs de la FTQ investissent des sommes d'argent dans un fonds qui va assurer éventuellement une retraite aux travailleurs – tout en sachant que ce Fonds-là contribue également à la création d'emplois.

Bien sûr, le Fonds est un fonds de capital de risque, c'est-à-dire que 60 % de son actif net de l'année précédente doit être investi dans des entreprises québécoises, et en tant que capital aussi. Donc, quand on dit du capital, c'est des sommes d'argent qui sont moins bien protégées ou moins bien garanties, si vous voulez, que si on prête son argent sur une hypothèque ou même sur une obligation, une débenture. Donc, c'est ce qu'on appelle du capital de risque.

Alors, parce que le Fonds investit du capital de risque dans des petites entreprises, forcément il peut y avoir plus souvent des échecs, des mauvaises aventures. Et c'est pour ça que, en compensation, le gouvernement a consenti à ceux qui investissent dans le Fonds des crédits d'impôt; crédits d'impôt qui viennent un peu dorer la pilule de ceux qui savent que le rendement qu'ils auront sur le Fonds ne sera pas nécessairement aussi bon que si l'argent était investi ailleurs mais qu'il va quand même être, en général, supérieur, ce rendement-là, au rendement qu'on aurait si on investissait son argent dans les obligations du Québec, par exemple, ou les obligations du Canada. On l'a vu l'an dernier, le Fonds a rapporté un rendement d'environ 11 %. 11 %, ce n'est pas ce qu'il y a de mieux en termes de rendement quand on regarde les fonds de pension, mais c'est quand même pas mal mieux que le rendement des obligations du Canada ou des obligations du Québec, qui se situent autour de 5 %, 6 %.

Donc, M. le Président, nous sommes d'accord avec la mission. Nous avons permis au Fonds de progresser lorsque nous étions là et nous sommes d'accord aussi aujourd'hui pour permettre au Fonds de s'adapter aux changements. Parce que, justement, il y a des changements qui apparaissent, qui sont apparus dans l'économie, la façon de concevoir l'économie et de s'adapter à ces changements-là.

Par exemple, on sait que, depuis un certain nombre d'années, la croissance économique est générée beaucoup plus qu'autrefois par des exportations. Les entreprises québécoises autrefois travaillaient au Québec, exportaient un petit peu aux États-Unis, un petit peu beaucoup dans le reste du Canada, mais on restait un peu chez nous. Dorénavant, les entreprises québécoises, de plus en plus, se portent vers les exportations dans de nombreux pays étrangers, et ça amène une situation qui n'existait pas beaucoup lors de la création du Fonds. C'est pour ça qu'on nous demande des modifications: pour permettre au Fonds d'accompagner les entreprises québécoises lorsqu'elles se préparent à tenter de décrocher des contrats à l'étranger. Et nous sommes d'accord avec ces modifications-là, M. le Président. Nous en parlerons tout à l'heure.

Maintenant, parlons du financement du Fonds. Le Fonds est financé à même des contributions de travailleurs québécois. La limite, maintenant, est de 3 500 $ par année par travailleur, et les gouvernements fédéral et provincial, les deux gouvernements accordent des crédits d'impôt. Ces crédits d'impôt là, M. le Président, ça coûte de l'argent aux contribuables québécois, au trésor québécois. Et c'est pour ça qu'il faut être prudent quand on regarde le niveau d'investissement que le gouvernement permet au Fonds.

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, nous pensons que le gouvernement du Parti québécois a été trop généreux envers le Fonds de solidarité depuis deux ans en lui permettant d'aller chercher dans la population des sommes d'argent qui ont probablement excédé 400 000 000 $ par année de nouveaux investissements québécois dans le Fonds.

Disons ceci. Au cours des premières années, de 1983 à 1995, le Fonds avait accumulé à peu près, d'après les chiffres que nous avons, M. le Président, 754 000 000 $ d'actif. Et en deux ans, deux ans et demi, depuis l'arrivée du Parti québécois, l'actif a doublé, littéralement doublé. L'actif est maintenant de 1 700 000 000 $, un peu plus que ça. En deux ans, le gouvernement du Parti québécois a permis au Fonds d'aller chercher presque 1 000 000 000 $ de contributions des contribuables québécois.

M. le Président, tant mieux pour les contribuables québécois qui vont ainsi pouvoir bénéficier de crédits d'impôt et de sommes d'argent dans le fonds de pension. Mais la question qu'on doit se poser: Est-ce que le Fonds de solidarité a besoin de tous ces fonds-là? Est-ce qu'il est capable même de placer toutes ces sommes-là dans autant de petites entreprises québécoises?

M. le Président, on n'est pas trop convaincu, de ce côté-ci de la Chambre, que le Fonds de solidarité de la FTQ est capable de placer toutes ces sommes-là dans les entreprises québécoises à ce moment-ci. Le Fonds de solidarité n'est pas le seul fonds à capital de risque au Québec. Il y en a d'autres qui oeuvrent aussi sur le marché, et on a une abondance, certains disent une surabondance, de capitaux dans ce domaine-là. Et il ne faudrait pas faire en sorte que le Fonds prenne des risques indus parce qu'il y a trop d'argent. Il ne faudrait pas non plus que le Fonds commence à investir dans des domaines qui ne seraient pas générateurs de création d'emplois. Alors, à ce moment-là, on viendrait défaire les objectifs recherchés. Parce que n'oublions pas que ce sont les taxes des Québécois qui subventionnent le Fonds de solidarité.

Seulement l'an dernier, M. le Président, d'après le rapport, ici, qui a été préparé par une étude de Don Allen de Regional Data Corporation et la compagnie SECOR, d'après ce rapport-là, l'an dernier, l'année l995, l'année précédente plutôt, 80 000 000 $ – ça a été le coût pour le trésor québécois – de taxes des contribuables québécois, si vous voulez, ont été versés ou n'ont pas été perçus par le gouvernement parce que le Fonds de solidarité a pu aller chercher 400 000 000 $. À chaque fois que le gouvernement est allé chercher 400 000 000 $, c'est 80 000 000 $ de taxes de moins pour le trésor québécois.

Donc, M. le Président, il faut en user, selon nous, avec modération, c'est-à-dire qu'il faut donner au Fonds de solidarité les fonds dont il a besoin pour remplir sa mission, mais il ne faut pas lui en donner plus que ce qu'il a besoin parce qu'à ce moment-là ce sont nos taxes qui financent ces excédents d'argent. Et le Parti libéral du Québec l'a dit à plusieurs reprises, nous pensons que de laisser, si vous voulez, le bar ouvert comme c'est présentement, ne mettre aucun maximum sur les sommes d'argent qu'on peut aller chercher, bien, ça fait en sorte que le Fonds s'engraisse de 400 000 000 $, 500 000 000 $ par année et que finalement il ne réussit pas facilement à placer cet argent-là et vient nous voir pour avoir des possibilités d'investir ailleurs, comme par exemple dans l'immobilier, M. le Président.

Nous avons vu un avant-projet de ce projet de loi là où le Fonds de solidarité aurait eu le droit de construire des centres d'accueil. M. le Président, nous nous sommes objectés avec la plus grande virulence à ça. Il n'y a pas de raison que les épargnes des Québécois permettent au Fonds de solidarité de construire des centres d'accueil, parce qu'il y a au Québec des centaines d'entrepreneurs qui sont capables de construire des centres d'accueil sans aucune subvention, d'autant plus que ceux qui opèrent les centres d'accueil conventionnés, privés, ont des permis du ministère de la Santé qui leur permettent de rentabiliser l'opération. Donc, pourquoi est-ce qu'on prendrait des fonds qui ont été soustraits à la fiscalité, les fonds subventionnés, pour venir compétitionner des entrepreneurs québécois qui le feraient sans avoir besoin de fonds subventionnés?

Et, d'autre part, M. le Président, une fois que les centres d'accueil auraient été construits, ça ne crée aucun emploi, c'est statique. Posséder un immeuble, ça ne crée pas d'emplois. Ce n'est pas dynamique, ce n'est pas structurant. Il n'y a aucune raison que le Fonds de solidarité devienne un possesseur d'immeubles. Ça ne crée pas d'emplois, et ce n'est vraiment pas ça, la croissance économique.

(12 h 10)

Autant, M. le Président, nous sommes d'accord avec l'objectif du Fonds, sa mission: investir dans les PME, prendre des risques, parfois perdre de l'argent, parfois en faire aussi, comme on l'a vu avec des succès tels que BioChem Pharma, on l'a vu avec Nova Bus, on l'a vu avec des investissements dans Naya. Voilà des placements qui ont fait que le Fonds de solidarité a aidé à créer des emplois et a fait des profits extrêmement importants ou va en faire dans l'avenir.

Parfois, il y a évidemment des mauvaises expériences; l'un compense l'autre. Mais ce sont toutes des entreprises dynamiques qui créent des emplois, qui font rouler l'économie; pas la construction de centres d'accueil, pas la possession passive d'immeubles à revenus, ce n'est pas dans la vocation du Fonds. Et le Fonds l'a compris, je crois, puisqu'il a retiré ces articles-là de son projet.

M. le Président, donc, nous sommes d'accord avec la mission, nous sommes d'accord avec le financement adéquat du Fonds, mais pas un financement excessif, parce qu'à ce moment-là c'est les contribuables québécois qui paient pour rien. M. le Président, nous avons donc apporté au Fonds de solidarité ces commentaires-là sur une version préliminaire.

L'autre problème, c'est la présentation à la dernière minute. Je l'ai dit tout à l'heure, l'opposition n'est pas du tout contente de se faire, comme ça, apporter un projet de loi. Mais, parce que nous croyons au Fonds de solidarité, M. le Président, nous avons décidé de faire l'effort. Nous avons eu plusieurs rencontres à des moments très difficiles. C'est difficile de réunir les députés à cette période de l'année où il y a tellement de travail. Nous l'avons fait à plusieurs reprises. Et nous allons consentir, à condition évidemment que le projet de loi soit amélioré... Nous avons des objections à certaines formulations du projet de loi, nous l'avons indiqué au présentateur du projet. Et nous comprenons que, un peu plus tard, en commission plénière, des amendements seront apportés au projet de loi pour faire en sorte qu'il soit plus compatible avec une vision saine des choses concernant le Fonds de solidarité, enfin ce que nous considérons comme étant une vision plus réaliste des choses.

M. le Président, en ce qui concerne le projet de loi lui-même – je dirai quelques mots sur le projet de loi – nous sommes d'accord avec l'admissibilité de certains investissements à l'étranger. J'en ai parlé tantôt, l'économie a changé, les entreprises québécoises exportent de plus en plus. Il est normal que le Fonds de solidarité puisse les aider à créer des emplois au Québec, lors de ses investissements, de ses projets à l'étranger. Entendons-nous bien, il ne s'agit pas pour le Fonds d'aller investir dans des immeubles à l'étranger; ça, ce n'est pas du tout dans les cordes. Ce dont on parle ici, c'est d'entreprises québécoises qui vont décrocher des contrats à l'étranger et que le Fonds de solidarité aide à décrocher ces contrats-là et à les financer, créant autant d'emplois au Québec.

M. le Président, l'admissibilité de certains investissements immobiliers, là-dessus, nous sommes opposés énergiquement à certaines clauses, qui ont été retirées d'ailleurs. Nous sommes d'accord que, dans le domaine récréotouristique, par exemple, le Fonds puisse s'intéresser. On me dit qu'il l'a déjà fait au mont Tremblant, avec Intrawest. Voilà un projet qui, semble-t-il, est très dynamique, qui crée des emplois et surtout qui attire des touristes chez nous, lesquels touristes, forcément, contribuent à l'économie du Québec. Ça, il n'y a pas de problème.

Maintenant, les articles qui portent sur l'admissibilité des investissements additionnels dans les entreprises partenaires, nous comprenons qu'une fois que le Fonds investit dans certaines entreprises, si ces entreprises-là prennent de l'expansion, il arrive que le Fonds doive parfois réinjecter des fonds, de même que ses partenaires. Il faut donner au Fonds de solidarité les moyens de suivre ses partenaires actionnaires dans les entreprises qui vont mieux.

La question des sommes engagées mais non déboursées, il s'agit d'une balise qui est imposée, si je puis dire, au Fonds, en ce sens que le Fonds utilisait cette technique d'engager des fonds pour justifier qu'il réussissait à se conformer à la norme de 60 %. Mais, une fois que les fonds sont engagés, parfois on les désengage après. Alors, évidemment, engager des fonds et les désengager, il ne faudrait pas en abuser pour faire croire que finalement le Fonds a investi 60 % dans les entreprises québécoises, alors qu'en fait une partie des sommes d'argent ne sont pas vraiment déboursées. Ce ne serait qu'une opération comptable qui subséquemment ferait l'objet d'un changement de façon à ce que le Fonds puisse se conformer à la norme de 60 %. Donc, nous sommes d'accord avec cette balise qui est dans le projet de loi.

Finalement, la conversion des actions de catégorie A en séries, nous sommes d'accord également. C'est un truc comptable, M. le Président, qui se doit, je pense, d'être réalisé de façon à permettre au Fonds de récupérer des sommes d'argent auxquelles il a droit et qui pourraient être récupérées si on consent à émettre ces séries d'actions en ce qui concerne les porteurs d'actions du Fonds de solidarité, les porteurs qui sont dans les REER et ceux qui ne sont pas dans les REER. M. le Président, c'est un petit peu complexe, puis on aura l'occasion d'en parler tout à l'heure, un peu plus tard, en commission parlementaire plénière.

En résumé, M. le Président, nous pensons que le projet de loi qu'on nous dépose aujourd'hui, même s'il est déposé à la dernière minute, est un bon projet de loi, sujet aux améliorations que nous avons déjà obtenues en obtenant le retrait de certains articles, sujet à d'autres améliorations que nous allons demander un peu plus tard. Nous pensons que ce projet de loi là se justifie par les changements qui sont survenus dans l'économie québécoise au cours des dernières années.

Nous pensons que le projet de loi aussi permet une plus grande transparence en ce sens qu'il permet au Fonds de solidarité de faire des choses directement, clairement, qu'il faisait peut-être jusqu'à maintenant mais d'une façon un peu plus détournée. Et nous pensons aussi que certains articles qui ont été insérés dans le projet de loi, comme le maximum de 5 % dans les placements immobiliers, par exemple, comme le maximum de 12 % dans les fonds engagés mais non déboursés, ce sont des balises qui ont été instaurées là, me dit-on, à la demande des fonctionnaires du ministère des Finances. Ces balises-là permettent un meilleur contrôle du Fonds. Et je pense que le projet de loi permet également une meilleure transparence des activités que le Fonds va mener dans l'avenir.

Alors, M. le Président, sujet aux remarques que j'ai exprimées et aux remarques que d'autres de mes collègues veulent exprimer également, en principe nous sommes d'accord avec ce projet de loi là et on verra, en commission parlementaire, un peu plus tard, si le gouvernement est prêt à consentir aux modifications additionnelles que nous avons demandées. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, M. le député de Verdun, maintenant.

M. Gautrin: Bien, peut-être, en alternance, s'il y a un ministériel qui veut parler.

Le Président: On m'indique que nous vous écouterions volontiers.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Au départ, il faut comprendre que l'histoire du Fonds de solidarité, c'est l'histoire d'un énorme succès. Il faut en être parfaitement conscient. Et ça a été l'histoire d'un énorme succès, on va essayer de comprendre pourquoi, et ensuite on verra quels sont les problèmes auxquels fait face le Fonds aujourd'hui et qui nécessitent une modification à sa loi.

Le Fonds de solidarité, M. le Président, c'est un moyen pour drainer une partie des épargnes, suite à des avantages fiscaux qui sont donnés à ceux qui investissent dans le Fonds de solidarité, pour permettre à ces épargnes d'être réinvesties dans les secteurs qui sont créateurs d'emplois ou réinvesties pour la protection de l'emploi. Alors, somme toute, depuis la création du Fonds de solidarité, on parle, grosso modo – et je n'entrerai pas dans le détail des chiffres – de 1 000 000 000 $ qui a été investi par le Fonds de solidarité. Sur ce 1 000 000 000 $, pour chaque dollar investi par le Fonds de solidarité, il faut comprendre que les avantages fiscaux qui ont été consentis font que 0,80 $ proviennent en quelque sorte de manques à gagner des gouvernements provincial et fédéral. Ce 0,80 $ se fractionne en 0,42 $ venant du gouvernement du Québec, 0,38 $ venant du gouvernement fédéral.

(12 h 20)

Donc, à première vue, on pourrait se dire: Oui, le Fonds de solidarité, c'est quelque chose qui investit de l'argent qui est presque de l'argent public. La réponse, c'est oui. Mais, parce qu'il a investi avec des obligations claires d'investir soit pour la protection de l'emploi soit pour la création de l'emploi, on peut calculer – parce qu'on a protégé un emploi, parce qu'on a créé un nouvel emploi – quel est le temps que ça va prendre pour que – le fait qu'un nouvel emploi ait été créé, qui va donc contribuer aussi à payer les impôts – on récupère le montant de notre investissement.

Et vous remarquez que, pour les gouvernements, que ce soit le gouvernement provincial ou le gouvernement fédéral, évidemment, on est rendu... Je vous ferai grâce, M. le Président, des détails de calcul avec la situation actuelle du Fonds, où il a investi soit dans des entreprises qui étaient en difficulté économique soit dans des entreprises très génératrices d'emplois. On peut évaluer qu'entre 1,2 an et 2,1 ans, c'est-à-dire entre un an ou deux, l'État provincial a récupéré l'investissement, c'est-à-dire le manque à gagner qu'il avait fait dans le Fonds; et l'État fédéral, c'est un peu plus longtemps, ça peut être entre 1,5 année et trois années.

Donc, vous comprenez bien, M. le Président, et c'est important de le comprendre, que ce Fonds, parce qu'il a été obligé soit d'investir directement dans des secteurs de l'économie qui étaient en difficulté pour protéger des emplois existants soit de soutenir la création d'emplois, a bien sûr été aidé par d'énormes déductions sur le plan fiscal. Mais, si on prend strictement sur le plan des finances publiques, il a permis, à ce moment-là, de générer de nouvelles rentrées fiscales qui font que, entre un an et deux ans, on récupère en quelque sorte, c'est-à-dire l'État récupère en rentrées d'impôts ce qu'il avait investi ou ce qu'il n'avait pas obtenu par des déductions d'impôts de ceux qui avaient investi dans le Fonds de solidarité.

C'est bien important de comprendre cette mécanique, M. le Président, parce que c'est celle qui sous-tend complètement le Fonds de solidarité. On peut donner quelques chiffres, si vous voulez. Le député de Laporte a parlé tout à l'heure de l'étude qui avait été faite par le groupe SECOR. On estime entre 30 000 et 50 000 – évidemment, il faut le voir parce qu'il faut compter les emplois directs et les emplois indirects, les emplois qui ont été sauvegardés, les emplois qui ont été créés – depuis la création du Fonds, les emplois qui ont été soit créés soit protégés par le Fonds de solidarité. Donc, M. le Président, c'est un énorme succès. Et, de la part des parlementaires de l'opposition, il n'était aucunement question de ralentir le développement du Fonds.

Le Fonds, néanmoins, se trouve face à un certain nombre de problèmes. C'est les problèmes qui sont liés à son succès. Il a – ce qu'on pourrait dire en mots un peu banals – trop d'argent à investir. C'est-à-dire qu'il a besoin de trouver de nouveaux moyens pour pouvoir investir ces fonds qui représentent une partie de l'épargne des Québécoises et des Québécois et qui sont à investir. Alors, qu'est-ce que demande le Fonds aujourd'hui à l'Assemblée nationale, et je comprends – et le député de Laporte l'a rappelé – qu'on le fait en dehors des délais normaux? Il demande de permettre d'élargir, en quelque sorte, les champs d'investissement où il peut intervenir.

Vous comprenez bien que les parlementaires de l'opposition du moins, je suis sûr que les parlementaires gouvernementaux aussi, lorsqu'on nous demande de modifier, en quelque sorte, les endroits où le Fonds peut investir, on va s'assurer et on veut s'assurer que ça a le même effet sur l'emploi que les investissements précédents. Vous comprenez bien que c'est parce que les investissements du Fonds ont eu un effet direct sur l'emploi que les finances publiques, en un an ou deux, récupèrent, en quelque sorte, les avantages fiscaux qui avaient été concédés aux personnes qui contribuaient au Fonds.

Alors, si on regarde pratiquement, M. le Président, ce que demande le Fonds, il demande de pouvoir investir, de suivre ses partenaires; autrement dit, faire en sorte que, quand il a investi dans une entreprise qui a grossi, qui a dépassé les limites, qui n'est plus une petite ou moyenne entreprise, bien de pouvoir continuer à avoir le droit d'investir dans ces entreprises-là. Ça ne peut être que logique, M. le Président.

Il demande aussi de pouvoir étendre le concept d'une entreprise québécoise, alors on l'étend maintenant à un actif inférieur à 50 000 000 $ et un avoir net d'au plus 20 000 000 $. C'est évidemment passé de la petite au concept de moyenne entreprise, mais c'est suivre aussi la possibilité d'investir dans des entreprises qui ont grossi et qui ont suivi le marché.

Donc, ces remarques-là ne posent, au préalable, aucun problème aux parlementaires de l'opposition parce qu'on est à peu près conscients et assez conscients que ça aura aussi le même effet générateur sur la création d'emplois. Ce qui nous gênait, c'était les investissements dans l'immobilier – parce que les investissements dans l'immobilier sont beaucoup moins créateurs d'emplois, c'est-à-dire, si vous achetez une bâtisse, ce n'est pas nécessairement générateur d'emplois – et les investissements étrangers.

Le projet de loi initial permettait une ouverture à l'ensemble des investissements immobiliers, ce qui a été, suite aux interventions du ministère des Finances, limité à 5 % de l'actif, les investissements dans le domaine immobilier. Et il y a quelque chose sur lequel nous sommes d'accord. Il reste important néanmoins, parce que c'est le dernier point qui nous pose problème, les investissements à l'étranger.

Il est clair que les investissements à l'étranger ne peuvent être justifiés dans la mécanique du Fonds où, chaque fois qu'on investit 1 $, il y a 0,80 $ qui viennent des fonds publics. Mais je rappellerai bien que cette mécanique est profitable dans la mesure où on génère de l'emploi et qu'au bout d'un an ou de deux ans les impôts payés par les emplois générés vont récupérer en quelque sorte ces 0,80 $ qui ont été consentis en termes d'avantages fiscaux. Si on s'en va, on ouvre complètement sur les investissements à l'étranger, on n'a pas nécessairement ce retour sur la création d'emplois en milieu québécois, c'est-à-dire le retour qui justifie en quelque sorte l'équilibre qui est derrière le Fonds.

C'est ce que nous allons nous astreindre, comme parlementaires, au moment où on aura les échanges article par article, c'est de faire en sorte... Déjà, dans le projet de loi, on utilise des mots comme «tangible», mais je trouve que ce n'est pas assez clair. Il est clair que, si on autorise un investissement étranger, et je pense qu'il est sain qu'on puisse le faire, il est sain à l'heure actuelle... Il faut savoir que la croissance économique, tant au Canada que pour Québec, a été principalement soutenue par les exportations, donc il est sain aussi qu'on puisse soutenir les investissements étrangers. Mais, pour que les finances publiques retrouvent ce qui a été à la base du succès du Fonds, c'est-à-dire que le 0,80 $ que nous contribuons au 1 $ qui est investi par le Fonds – c'est-à-dire le 0,80 $ qui vient du secteur public sur chaque 1 $ investi – pour que nous puissions le récupérer ou que les finances publiques, entre guillemets, puissent le récupérer, il faut qu'il y ait une création d'emplois au Québec même.

Et c'est sur cet élément-là qu'on va essayer de bien comprendre que, oui, on peut être d'accord avec les investissements étrangers, mais dans la mesure où ils sont liés directement à une augmentation du niveau d'emploi au Québec et une augmentation de l'activité au Québec. C'est-à-dire qu'on comprend qu'il y a un lien direct entre les exportations et le niveau d'activité au Québec, mais il faut que ce soit mieux précisé à l'intérieur du projet de loi.

Pour ce qui touche les questions de la conversion de certaines actions en séries, c'est un élément technique, M. le Président. Il faut bien comprendre que, même si la majeure partie des actionnaires du Fonds de solidarité ont investi leur argent à la fois dans le Fonds de solidarité et dans un REER, il en reste un 3 % qui n'ont pas investi leur argent à l'intérieur d'un REER et qui seraient pénalisés si on ne mettait pas cet élément de conversion. Et c'est donc absolument naturel et juste qu'au plus rapidement, pour des fins fiscales, on vote l'article 1.

(12 h 30)

Donc, pour terminer, M. le Président, notre questionnement est réellement lié, lié au fait que la mécanique, la justification des avantages fiscaux qui sont consentis au Fonds et qui sont énormes se justifie pleinement dans la mesure où, dans un délai relativement bref, qui varie entre un an et trois ans, les gouvernements récupèrent les avantages fiscaux parce qu'il y a eu création d'emplois et parce que cette création d'emplois a ramené, à ce moment-là, des rentrées fiscales. Ça, c'était la mécanique du Fonds, qui justifiait pleinement et qui a été à l'origine du succès du Fonds de solidarité.

Si on oublie cette question, si on n'a plus ce retour sur la création d'emplois au Québec, la justification des avantages fiscaux qui ont été à l'origine du Fonds me semble moins logique. Alors, nous, les parlementaires de l'opposition, bien sûr, nous sommes en faveur de faciliter les champs d'investissement et le développement du Fonds de solidarité, nous pensons que ça a été un énorme succès et nous allons le soutenir. Mais nous voulons, parce que c'est à la base même du Fonds, être en mesure de lier la justification, pourquoi on donne ces avantages fiscaux au Fonds de solidarité, au fait que ça a un effet direct sur la croissance économique et sur l'emploi, parce que, à la fin, nous en sommes tous, entre guillemets, gagnants. Gagnants, parce que, si l'État consent des déductions fiscales de l'ordre de 0,80 $ pour chaque dollar investi, au bout de deux ans, l'activité économique qui a été générée par cet investissement compense bien supérieurement l'effet de la déduction fiscale qui a été accordée.

Alors, M. le Président, si on peut nous garantir cet élément, cet effet sur l'emploi et sur le fait aussi que les investissements immobiliers doivent être limités au Québec – et, moi, je souhaiterais qu'ils ne se fassent pas à l'étranger, parce que là ils sont clairement non créateurs d'emplois – dans ce cadre-là, vous pouvez être sûr de l'appui et du concours des parlementaires de l'opposition pour faire passer ce projet de loi. Et je terminerai en rappelant que c'est une des belles réussites de solidarité à l'intérieur du Québec dont nous pouvons tous être fiers. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le député de Verdun. Est-ce qu'il y a d'autres interventions, à ce moment-ci? Est-ce que le principe du projet de loi n° 196, Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.), est adopté? Adopté. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Mme Caron: Adopté.

Le Président: Adopté. Oui?

Mme Caron: Je vais demander une petite suspension de nos travaux.

Le Président: Alors, nous allons suspendre quelques instants pour préparer la commission plénière.

(Suspension de la séance à 12 h 34)

(Reprise à 12 h 35)

Le Président: Très bien. Veuillez vous asseoir.

Nous allons reprendre la séance. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, compte tenu de l'heure et que les membres de la plénière devront examiner les amendements du projet de loi, je vous demande de suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

Le Président: Alors, très bien. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Alors, les travaux de l'Assemblée nationale sont suspendus jusqu'à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 36)

(Reprise à 15 h 2)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, nous étions toujours sur l'article 18, le projet de loi n° 196, et je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 196, Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.). Nous suspendons pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 3)

(Reprise à 15 h 6)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion que nous venons d'adopter, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 196, Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.). Nous pouvons nous permettre quelques remarques préliminaires de votre part, non pas de la mienne, mais de votre part. Si le M. le ministre avait quelques remarques préliminaires avant de passer article par article, ou si vous êtes prêt à passer article par article, comme vous l'entendez.

M. Baril (Berthier): Bien, tout simplement pour souligner la présence avec nous du président du Fonds de solidarité, M. Raymond Bachand, qui est accompagné aussi du responsable du contentieux au ministère des Finances, M. Roberge, et des gens à la fois du Fonds et du ministère des Finances.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie.

M. Bourbeau: ...d'exprimer notre point de vue sur le principe du projet de loi. Alors, quant à nous, on serait prêts à procéder immédiatement à l'étude article par article.


Étude détaillée

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, l'article 1. Y a-t-il des interventions sur l'article 1? M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Attendez un instant. Moi, j'ai une question sur l'article 1. Essentiellement, dans l'article 1, vous essayez de couvrir le 3 % de vos actionnaires qui n'ont pas mis leurs fonds à l'intérieur d'un REER. Est-ce que c'est bien cela?

M. Bachand (Raymond): Tout à fait, M. le ministre. Ce qu'on tente de faire par l'article 1, c'est juste de donner un pouvoir, comme toute compagnie normale, de pouvoir émettre des actions en séries. Une des hypothèses sur lesquelles on travaille pour des fins administratives, c'est de pouvoir mettre des séries pour les REER et les non-REER, de pouvoir distinguer les deux.

M. Gautrin: ...entre les gens qui sont dans les REER et ceux qui ne sont pas dans les REER, pour fins fiscales, particulièrement.

M. Bachand (Raymond): C'est exact.

M. Gautrin: Merci.

Le Président (M. Brouillet): Vous permettez... peut-être indiquer votre nom, s'il vous plaît?

M. Bachand (Raymond): Oui. M. Raymond Bachand. Je suis président du Fonds de solidarité.

Le Président (M. Brouillet): Alors, pour les fins du Journal des débats , indiquez à la personne qui enregistre le nom de la personne qui prend la parole. Alors, M. Raymond Bachand. Très bien. Alors, ça va pour l'article 1? L'article 1 est adopté?

M. Bourbeau: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): L'article 2. Pas d'intervention de la part du ministre?

M. Baril (Berthier): Non. L'article 13 de cette loi est modifié par le remplacement, dans la première ligne des paragraphes 1° et 4°, du mot... par le mot «admissibles».

M. Bourbeau: M. le Président, je ne savais pas que le député avait eu une promotion. Vous annoncez ça aujourd'hui, qu'on a un nouveau ministre au cabinet, quoi?

M. Baril (Berthier): L'adjoint parlementaire.

Le Président (M. Brouillet): Excusez. Ah! Bien, c'est peut-être... En commission plénière, habituellement... Ha, ha, ha! M. le député de Berthier. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Il y a lieu de se réjouir, M. le Président, de l'accession du député.

M. Baril (Berthier): Merci de ces mots flatteurs.

M. Gautrin: Mais c'est simplement une avance sur le remaniement ministériel qui est en cours. Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brouillet): On fait des tentatives comme ça, là. Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: Est-ce que c'est un souhait personnel que vous exprimez, M. le Président?

Le Président (M. Brouillet): C'est peut-être un lapsus. Il faudrait que je fasse l'analyse de... Ha, ha, ha!

M. Baril (Berthier): C'est le philosophe en lui qui parle, vous comprendrez.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Berthier, alors c'est tout ce que vous avez à dire sur cet article-là?

M. Baril (Berthier): C'est ça.

M. Bourbeau: L'article 2, M. le Président, je comprends que c'est l'article par lequel on modifie la description d'une société admissible. Autrefois, on avait l'expression «une entreprise québécoise», maintenant, on emploie «une entreprise admissible» de façon à élargir un peu le sens de ce qui est compris par ces mots-là. Alors, pour nous, ça va.

Le Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Donc, l'article 2 est adopté. L'article 3, nous avons reçu un amendement; l'article 3, que je m'en vais vous lire, et puis on pourra disposer de l'amendement d'abord avant de revenir à l'article.

L'article 3 est modifié par le remplacement du paragraphe 2° de l'article 14.1 par le suivant:

«une entreprise dont l'activité, à l'extérieur du Québec, a un impact sur l'augmentation ou le maintien du niveau d'emploi ou d'activité économique au Québec ou aura vraisemblablement un tel impact, dans les cas et la mesure prévus par une politique adoptée par le conseil d'administration et approuvée par le ministre des Finances.»

(15 h 10)

Alors, c'est l'amendement proposé à l'article 3.

M. Gautrin: Est-ce que je peux intervenir, M. le Président?

M. Bourbeau: Est-ce qu'il est recevable, M. le Président?

Le Président (M. Brouillet): Prima facie, il est recevable.

M. Bourbeau: Très bien.

Le Président (M. Brouillet): Je crois que... Mais ça ne veut pas dire qu'il est accepté automatiquement. C'est à vous d'en disposer, même s'il est recevable.

M. Bourbeau: On ne peut pas en discuter si vous ne déclarez pas qu'il est recevable.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je crois que l'amendement vient préciser le projet de loi et est tout à fait pertinent. Il est clair que les investissements que le Fonds de solidarité fait doivent être reliés d'une manière ou une autre à l'activité économique au Québec et à l'augmentation du niveau d'emploi au Québec. Alors, la rédaction initiale utilisait un mot comme le mot «tangible», qui était un qualificatif qui était laissé à l'interprétation: qu'est-ce qui était vraiment tangible, qu'est-ce qui ne l'était pas? Là, on a retiré ce qualificatif, «tangible», et on le remplace strictement sur le principe qu'il faut que ça ait un impact sur l'augmentation et le maintien du niveau d'emploi. Donc, c'est quelque chose que le ministère des Finances et le conseil d'administration devront prendre en considération lorsqu'ils passeront leur politique générale et qu'ils approuveront les investissements étrangers. Il est clair que dans ce cadre-là toute l'économie du Fonds est maintenue et qu'on améliore, d'après moi, le projet de loi. Nous allons être en faveur de l'amendement.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Berthier.

M. Baril (Berthier): M. le Président, je pense que le député de Verdun a tout à fait raison. Alors, la pierre angulaire de cet élément du projet de loi, c'est effectivement d'accroître la création d'emplois dans l'entreprise ou maintenir ou consolider les emplois dans l'entreprise désignée.

Le Président (M. Brouillet): Donc, l'amendement est adopté?

M. Gautrin: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. L'article 3, tel qu'amendé... Est-ce que vous avez encore des interventions? Non?

M. Gautrin: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Donc, l'article 3, tel qu'amendé, est adopté. L'article 4.

M. Bourbeau: M. le Président, je pense que, là aussi...

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: ...il y a un amendement. Il y a un amendement qui a été proposé par l'opposition, je dois le dire. Alors, si vous l'avez reçu...

Le Président (M. Brouillet): Oui, je peux vous en faire lecture, si vous voulez.

Le paragraphe 2° de l'article 4 est modifié sous les rapports suivants: en retranchant les mots «et situés au Québec», à la deuxième ligne du paragraphe 3° du texte entre guillemets; et l'autre rapport: en remplaçant l'avant-dernier alinéa du texte entre guillemets par le suivant: «Sont exclus du paragraphe 3° du troisième alinéa les investissements dans des biens immeubles situés à l'extérieur du Québec, sauf s'ils ont un impact sur l'augmentation ou le maintien du niveau d'emploi ou d'activité économique au Québec ou auront vraisemblablement un tel impact, dans les cas et la mesure prévus par une politique adoptée par le conseil d'administration et approuvée par le ministre des Finances. Sont également exclus de ce paragraphe les investissements dans des immeubles situés au Québec et destinés principalement à des fins d'habitation ou de centre commercial, si ce n'est dans le cadre d'un projet relevant du secteur récréotouristique.»

Alors, voici le texte de l'amendement proposé. Il y a quelques commentaires?

M. Bourbeau: Oui.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, comme je l'ai dit tout à l'heure, lors du discours sur l'adoption du principe, une des préoccupations principales de l'opposition officielle, c'était l'implication possible du Fonds de solidarité dans le domaine immobilier. Nous, nous pensons que les fonds dont jouit le Fonds de solidarité sont des fonds qui sont obtenus avec une faveur fiscale de la part du gouvernement, donc des fonds qui ont fait l'objet d'une certaine contribution par les contribuables québécois, puisqu'il y a un crédit d'impôt qui est attaché à la détention des actions du Fonds et que, en conséquence, le Fonds de solidarité ne devrait pas devenir un détenteur passif d'immeubles, parce que, selon nous, la détention d'immeubles n'est pas un geste, une action qui est susceptible de générer de l'activité économique.

Le fait de détenir des immeubles, ça ne génère aucune activité économique en soi, et donc ça ferait en sorte que le Fonds de solidarité deviendrait un propriétaire foncier qui compétitionnerait d'autres propriétaires fonciers qui, eux, n'auraient pas l'avantage d'avoir des fonds qui ont été mis à l'abri de l'impôt; alors, ça ferait une compétition indue. Et, selon nous, si le Fonds de solidarité a trop d'argent et doit absolument le mettre dans l'immobilier, à ce moment-là, on va se poser des questions sur le robinet, qui est peut-être trop ouvert.

Alors, moi, je pense que le Fonds de solidarité doit jouer de tous les fonds dont il a besoin pour sa mission principale, c'est-à-dire investir dans des sociétés québécoises dynamiques, des PME, prendre les risques qu'il faut avec les problèmes que ça peut causer, mais avec aussi parfois les succès que ça peut donner, mais vraiment ne pas se lancer dans la construction ou la détention d'immeubles simplement pour le fait de détenir des immeubles. Nous avons donc insisté – de notre côté, en tous les cas – pour que notre point de vue soit entendu, et je suis satisfait de voir que l'amendement qu'on nous apporte fait en sorte que...

À l'égard des immeubles situés à l'extérieur du Québec, là c'est encore pire, si je peux dire. Ha, ha, ha! Au Québec, on sait que le Fonds a déjà fait des placements. Dorénavant, ces placements-là devront se limiter aux secteurs industriel et récréotouristique. On comprend que, dans le secteur industriel, il y a des emplois de créés, dans ces immeubles-là en tous les cas. Le fait que l'immeuble existe, ça génère des emplois. Ça peut être le lieu où les emplois sont maintenus ou créés. Le récréotouristique, c'est très moteur pour l'économie, aussi, le tourisme est un élément moteur de l'économie, ça, il n'y a pas de problème. Mais, quand on arrive à l'extérieur du Québec, alors là, on ne peut certainement pas investir dans le récréotouristique dans d'autres pays. Ha, ha, ha! On attirerait des touristes ailleurs et non pas chez nous.

Deuxièmement, même chose pour l'industriel. On ne peut tout de même pas aller bâtir des immeubles industriels au États-Unis pour attirer des industries en dehors. Donc, là, on ne voit pas vraiment comment l'immobilier pourrait être utilisé par le Fonds de solidarité à l'extérieur. On ne voudrait certainement pas que le Fonds détienne des hôtels aux Caraïbes ou dans des endroits comme ça. Alors, ça a été, de notre part, un souci constant, et je vois que cette clause-là, finalement, elle dit bien que «sont exclus du paragraphe 3° [...] les [...] biens immeubles situés à l'extérieur du Québec – donc, c'est ce dont on parle – sauf – là, il y a une exception – s'ils ont un impact sur l'augmentation ou le maintien du niveau d'emploi ou d'activité économique au Québec». Donc, s'il y avait des exceptions, il faudrait que ces exceptions-là permettent le maintien ou l'augmentation du niveau d'emploi au Québec, ou d'activité économique au Québec, et, encore là, il faudrait que ça soit dans la mesure où ça se situe à l'intérieur d'une politique adoptée par le conseil d'administration et ratifiée par le ministre des Finances. Donc, il semble y avoir là des balises qui nous apparaissent suffisantes pour s'assurer que le Fonds de solidarité ne se lancera pas dans la détention d'immeubles à l'extérieur du Québec.

Maintenant, au Québec même – c'est l'objet du dernier paragraphe de cet article, enfin, de cet amendement-là – on exclut les immeubles pour fins d'habitation, pour fins commerciales. Alors, je comprends que, si on exclut l'habitation et le commercial, il ne restera à toutes fins pratiques que l'industriel et le récréotouristique. Et là j'aimerais poser une question au président. Parce qu'on procède par la négative, ici, alors on exclut des choses. Donc, il faut comprendre que ce qui n'est pas exclu va être permis. Alors, est-ce qu'il y aurait d'autres choses que le récréotouristique et l'industriel qui seraient permises en vertu de cette clause-là, au Québec?

Le Président (M. Brouillet): Oui, M. le président du Fonds.

M. Bachand (Raymond): Oui, M. le député, je pense que, si on lit bien le texte, on exclut spécifiquement, comme vous dites, les fins d'habitation et de centre commercial, donc le reste est permis. Maintenant, dans le reste, principalement, écoutez, nos activités, celles dont on est le plus fiers, sont dans le récréotouristique, comme au mont Tremblant et des projets du genre, ou dans l'industriel, comme le Parc technologique de Québec, le Parc technologique de ville Saint-Laurent. C'est ce qui est visé.

Maintenant, il y a parfois des projets qui sont difficiles à qualifier, si on investissait. Mais je regardais, Kenworth, ça a failli être par le bien immobilier, mais je pense qu'on aurait pu classifier ça dans l'industriel. Je pense que l'intention du projet, c'est d'éliminer ce qui est centre d'achats, fondamentalement, et d'éliminer ce qui est purement résidentiel.

M. Bourbeau: Il me vient une idée qui ne m'était pas venue avant. Des terrains vacants, ça, ce n'est pas commercial, ce n'est pas industriel. Ce serait le zonage du terrain qui pourrait catégoriser l'immeuble? C'est un immeuble ou un terrain vacant?

M. Bachand (Raymond): Je n'oserais pas répondre à cette question sans me retourner vers nos avocats et voir comment ils classifieraient... Probablement, un terrain vacant, ça ne serait pas des grosses sommes d'argent. Ça dépendrait probablement de l'utilisation à laquelle ils sont destinés, effectivement.

M. Bourbeau: Il ne faudrait pas que le Fonds...

M. Bachand (Raymond): Est-ce que c'est au moment où le terrain est acheté ou est-ce que c'est au moment où le projet a lieu? Parce qu'il peut y avoir des changements de zonage, bien sûr, vous êtes familier avec ça. Mais l'objectif, si c'est un terrain destiné au résidentiel...

M. Bourbeau: ...construit des bandes de terrains pour des fins de développement?

M. Bachand (Raymond): Non.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Moi, j'ai une petite question qui est liée indirectement au projet de loi et qui serait seulement de la courtoisie de la part de la direction du Fonds. Je comprends bien que vous avez approuvé des politiques quant à l'exportation, qui vont être soumises à votre conseil d'administration et approuvées par le ministère des Finances. Est-ce que vous auriez l'amabilité d'en transmettre des copies aux parlementaires de l'opposition? Parce qu'on serait intéressés à...

(15 h 20)

M. Bachand (Raymond): Tout à fait, avec plaisir. Ça nous ferait plaisir, et, comme complément d'information à votre question, ma collègue des affaires juridiques me souligne que, pour la question des terrains, bien sûr, on est dans l'exclusion, si on revient au principe où il faut que ce soit des immeubles neufs ou faisant l'objet de rénovations. Donc, un terrain ne se qualifierait pas au stade de terrain, à ce moment-là.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, l'amendement à l'article 4 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Maintenant, l'article 4 tel qu'amendé?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Il est adopté. Donc, l'article 4, tel qu'amendé, est adopté. L'article 5?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Il n'y a pas de problème. L'article 5 est adopté. Il nous reste maintenant à adopter le titre du projet de loi. Il est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, cela met fin à nos travaux de la commission plénière.

M. Gautrin: Est-ce qu'on ne doit pas adopter la loi dans son ensemble?

Le Président (M. Brouillet): Il faut revenir en Assemblée, à ce moment-là, pour pouvoir procéder à l'adoption de la loi, ce que nous allons faire très rapidement. Ça peut se faire très rapidement.

Je remercie donc ceux et celles qui ont participé à cette commission plénière. Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, j'inviterais ceux qui ont à quitter à le faire. Je vais suspendre. Un petit mot avant la suspension? Très bien.

M. Baril (Berthier): Oui, M. Bachand voudrait...


Remarques finales

M. Bachand (Raymond): Simplement, au nom des 330 000 actionnaires du Fonds de solidarité, je voudrais remercier les parlementaires des deux côtés de cette Chambre pour l'intérêt qu'ils portent à la cause du développement économique et à l'action du Fonds de solidarité. Je vous remercie de votre courtoisie et de vos suggestions.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Berthier.

M. Baril (Berthier): Oui, M. le Président. J'en profite aussi, comme parrain du projet de loi, pour remercier vivement les gens de l'opposition, particulièrement le député de Laporte et le député de Verdun, pour leur apport constructif à ce projet de loi important qui va permettre justement de répondre aux grands défis du XXIe siècle. On sait qu'il y a beaucoup de projets actuellement sur la planche à dessin du Fonds concernant de multiples projets à l'exportation, et je pense que l'adoption de ce projet de loi va permettre effectivement de donner un bon coup de pouce au développement économique puis à la création d'emplois chez nous. Merci.

Le Président (M. Brouillet): Alors, je remercie encore une fois tout le monde et je suspends les travaux pour que nous puissions poursuivre en Assemblée.

(Suspension de la séance à 15 h 23)

(Reprise à 15 h 25)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous reprenons nos travaux en Assemblée. J'inviterais Mme la députée de Prévost à présenter le rapport de la commission plénière, s'il vous plaît.

Mme Papineau (présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 196, Loi modifiant la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.), et qu'elle l'a adopté avec des amendements.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci. Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, je demande le consentement pour déroger à l'article 230 pour que nous puissions procéder à l'adoption du projet de loi n° 196.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement pour déroger à l'article 230. Je mets donc aux voix le projet de loi n° 196. Y a-t-il des interventions?


Mise aux voix

Alors, ce projet de loi n° 196 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il est adopté. Je dois aussi avoir un consentement préalable à l'article 22. On l'avait obtenu pour 230, alors je crois qu'il y a consentement, ensuite, pour l'article... Donc, nous pourrons rétroactivement inscrire les deux consentements requis. Très bien. Alors, le projet de loi est donc adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, je vais vous demander de suspendre nos travaux.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Nous suspendons nos travaux jusqu'à nouvel ordre, peut-être dans quelques heures ou... Enfin, on verra. Très bien.

(Suspension de la séance à 15 h 27)

(Reprise à 16 h 19)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous reprenons nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais Mme la leader adjointe du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 12 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 114


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 12, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur la prévention des incendies. Le prochain intervenant, M. le député de Frontenac. Alors, M. le député, je vous cède la parole.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, on est sur la prise en considération, c'est-à-dire la troisième étape d'un projet de loi qui a été déposé par le ministre de la Sécurité publique, qui décide de ne pas intervenir sur cette étape-ci. L'opposition a indiqué très rapidement au gouvernement puis à son ministre son accord à appuyer ce projet de loi. Essentiellement, ça se résume à peu de choses. Tel que son nom l'indique, le projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur la prévention des incendies, vise essentiellement à améliorer les qualifications des pompiers professionnels au Québec.

(16 h 20)

Je répète – mais très rapidement – que, lors du débat sur le principe – je l'ai dit également en commission parlementaire parce que, même s'il n'y a que deux articles, il a fallu quand même en disposer après l'adoption du principe – j'avais reproché au ministre de la Sécurité publique et à son gouvernement d'avoir retardé à s'acquitter d'un engagement qui avait été pris par le ministre de la Sécurité publique pas d'aujourd'hui, mais d'il y a deux ans, le ministre député de Laval-des-Rapides.

Alors, il y a un vieil adage qui dit: Mieux vaut tard que jamais, le député de Mercier, actuel titulaire de la Sécurité publique, décide de proposer quelque chose qui va dans le sens – et ça, pour nous autres, du côté de l'opposition, M. le Président, c'est évidemment un guide dont on tient compte au premier chef – de ce qui est souhaité par l'Association des chefs de service d'incendie du Québec. J'ai ici une lettre, qui est signée par son président, M. Brazeau, avec qui j'ai eu l'occasion d'ailleurs de discuter de l'intention du gouvernement contenue dans le projet de loi en question. Au nom de l'opposition officielle, j'ai indiqué à l'Association des chefs de service d'incendie du Québec, et en l'occurrence à son président, M. Brazeau, que l'opposition allait collaborer à l'adoption du projet de loi en question.

Au débat sur le principe, qui s'est tenu le 6 juin, tout comme au cours débat qu'on a eu en commission parlementaire, j'en ai profité pour rappeler au ministre et à son gouvernement qu'il y avait lieu que, dans les plus brefs délais, on intervienne au niveau des pompiers volontaires. Il y a des centaines et des centaines de pompiers volontaires qu'on retrouve un petit peu partout au Québec, particulièrement dans de petites municipalités, qui requièrent de la formation, qui requièrent également qu'on leur fournisse des équipements, dans certains cas, mieux adaptés aux besoins d'aujourd'hui, et j'ai invité le gouvernement à bouger là-dessus.

Autant les pompiers volontaires que les pompiers professionnels ont besoin d'être bien formés, d'avoir de la compétence, parce que, vous savez, lorsqu'on parle de pompiers, lorsqu'on parle du rôle et des responsabilités qu'ils ont de combattre les incendies, on fait référence évidemment à la sécurité des citoyens et des citoyennes du Québec, mais on fait également référence à la santé financière des municipalités qui, dans certains cas et dans certaines circonstances, parce que n'ayant pas procédé d'une façon correcte, professionnelle dans des circonstances où il y a lieu de maîtriser des incendies, bien, on le sait, ces municipalités-là s'exposent à des poursuites.

On pourrait citer plusieurs, plusieurs cas où des municipalités ont été condamnées suite à des poursuites intentées par des citoyens, suite à des poursuites intentées par des entreprises qui avaient vu leurs biens engloutis à l'occasion d'incendies majeurs. Et, sous prétexte que la municipalité aurait été négligente, sous prétexte qu'on n'aurait pas fourni l'assistance nécessaire, la protection nécessaire, bien, il y a eu dans certains cas des poursuites, et, lorsqu'il s'est avéré que c'était fondé, bien, évidemment il y a des condamnations qui ont suivi.

Je m'arrête là-dessus pour dire qu'on maintient l'engagement qu'on a pris. On a participé de façon positive à appuyer le gouvernement sur le principe en commission parlementaire. À cette troisième étape, on y va dans le même sens, et je dis tout de suite au ministre ou à Mme la leader adjointe du gouvernement: Appelez le vote, puis on va tout de suite indiquer qu'on est d'accord sur cette étape-ci du projet de loi n° 114. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Frontenac. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Une voix: Non.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 114, Loi modifiant la Loi sur la prévention des incendies, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 13 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 136


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 13, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière et la Loi de police en matière de déontologie policière. Le prochain intervenant? Je suis prêt à céder la parole... M. le député de Frontenac, je vous cède la parole.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, tout à l'heure j'ai indiqué que j'étais un peu surpris que le ministre de la Sécurité publique n'intervienne pas sur le projet de loi n° 114; là ça m'agace un peu plus. Évidemment, c'est son droit, et vous aurez compris qu'en disant qu'il n'intervient pas c'est qu'il n'est pas en Chambre. Alors, qu'on n'intervienne pas sur quelque chose...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Vraiment, le député de Frontenac sait très bien, par les postes qu'il a occupés aussi précédemment, qu'il ne peut souligner ni l'absence ni la présence d'un député en cette Chambre parce que, quand un député n'est pas là, c'est qu'il vaque à une autre occupation, qu'il a donc une autre occupation à faire. Il est très clair que le ministre a le choix d'intervenir aux étapes où il doit parler, et il va parler à l'adoption du projet de loi demain.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous connaissez les règles, M. le député de Frontenac. Effectivement, c'est une entente entre les partis pour respecter cette façon de faire. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à poursuivre, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, il y a un adage qui dit que le silence est d'or, mais, dans le cas présent, ce n'est pas le cas, là. Ce n'est pas ce à quoi on a droit. Et, en supposant par hypothèse que le ministre de la Sécurité publique aurait décidé de nous honorer de sa présence, je ne suis pas certain également qu'il serait intervenu, puisqu'il a décidé qu'à son agenda ce qui était prioritaire, c'était autre chose que d'éclairer ses collègues, comme les membres de l'opposition, comme ceux et celles qui nous écoutent, sur l'importance du projet de loi n° 136.

Le projet de loi n° 114 dont on vient de disposer n'est pas moins important, sauf que, à partir du moment où le gouvernement, et son ministre, est informé que l'opposition va concourir à son adoption, que le gouvernement n'intervienne à aucune étape, M. le Président, qui suit le principe, on peut comprendre ça. Je considère, moi, que c'est d'abord à la deuxième étape, après le dépôt du projet de loi, qu'un parrain du projet de loi – en l'occurrence, règle générale, un ministre – doit expliquer aux membres de cette Assemblée quel est l'objectif recherché par le projet de loi, quel est le contenu du projet de loi et aussi faire connaître en toute bonne foi les désavantages comme les avantages. Le ministre décide de ne pas intervenir sur 114. M. le Président, on peut vivre avec ça, je l'ai indiqué tout à l'heure, on l'a adopté.

Qu'il décide de ne pas intervenir à la troisième étape visant l'adoption du projet de loi n° 136, sachant, le ministre de la Sécurité publique, que l'opposition a des réserves, sachant que des groupes ont des réserves, puisqu'ils les ont exprimées à l'occasion de consultations qu'on a tenues, M. le Président, à deux journées différentes, le 4 juin et le 13 juin, que le ministre de la Sécurité publique décide de ne pas venir expliquer, dans un premier temps, qu'il a été attentif, dans certains cas, aux revendications, aux commentaires qu'on lui a faits, puisqu'il a proposé des amendements qui ont été acceptés, dans certains cas, par l'opposition, que le ministre décide de ne pas tenter, à nouveau, de nous convaincre, du côté de l'opposition, du bien-fondé de certaines dispositions avec lesquelles on a des réserves, moi, je vais vous avouer que ça me déçoit, parce que c'est important, la déontologie policière. Il y a au moins quelque chose sur lequel on s'entend.

La déontologie policière, M. le Président, essentiellement, c'est quoi? C'est le système qui permet à des citoyens et à des citoyennes du Québec de se plaindre, à tort ou à raison, du comportement de policiers et de policières au Québec. Que ces policiers soient de la Sûreté du Québec ou qu'ils soient des policiers à l'emploi d'une municipalité, le système de déontologie permet à un citoyen de dire à un personnage qui s'appelle le Commissaire à la déontologie policière: M. le policier Untel, Mme la policière Unetelle a posé un geste que je désapprouve, qui constitue une agression quant à mon intégrité; dans certains cas, ça peut être carrément l'intégrité physique. Et il y a une mécanique qui s'appelle autant... Il y a deux processus très, très précis, le Commissaire à la déontologie – je suis obligé d'expliquer le contenu du projet de loi, puisque le ministre n'est pas là pour le faire, M. le Président – et le Comité de déontologie disposent de la plainte qui aura été faite par un citoyen.

(16 h 30)

Ce processus de plainte a été mis en place en 1990 par le gouvernement libéral, M. le Président. L'objectif de la déontologie, comme je viens de l'indiquer, c'est de permettre à un citoyen de se plaindre de la conduite d'un policier, mais il faut bien comprendre que c'est un système, à toutes fins pratiques, de justice administrative qui est bien balancé. Il y a des règles qui protègent évidemment le plaignant qui est le citoyen ou la citoyenne et qui protègent également... Et ça doit être comme ça, puis il faut, M. le Président, qu'on maintienne cet équilibre. La justice, qu'elle soit administrée par les tribunaux de droit commun ou par des tribunaux quasi judiciaires, que ce soit de la justice telle qu'on la connaît, M. le Président, dans le quotidien: la Cour du Québec, avec ses tribunaux civils, avec ses tribunaux criminels, la Cour supérieure du Québec, qui a la responsabilité de disposer des litiges civils mais également des litiges à caractère pénal ou criminel, en tout temps, il doit y avoir un équilibre. Il faut que les droits des deux parties – parce qu'il y a toujours un défendeur et un défendeur, un requérant et un intimé – il faut qu'en tout temps, M. le Président, les droits fondamentaux de ceux et celles qui s'adressent à la justice, au système judiciaire, soient protégés. Et c'est également vrai en matière de justice administrative, comme c'est le cas à l'intérieur de ce dont on parle dans le projet de loi n° 136, la déontologie policière, il faut qu'il y ait équilibre.

Ça veut dire, en deux mots, que les droits des policiers et des policières doivent être en tout temps protégés. Je pense que c'est le cas depuis 1990. Le ministre veut, avec son projet de loi n° 136, améliorer les choses, moderniser le système. Mais, du côté de l'opposition, on a des réserves parce qu'on a l'impression que ce qui guide le gouvernement et son ministre de la Sécurité publique dans cette démarche que l'on retrouve dans 136, M. le Président, c'est essentiellement... Essentiellement, c'est l'impression qu'on a, et je dois vous avouer que le ministre, ni au moment où il a fait son intervention sur le principe, ni en commission parlementaire, ni au moment où on a procédé aux consultations – 4 et 13 juin – jamais n'a-t-il été capable de nous rassurer.

Alors, on dit, du côté de l'opposition, qu'on pense que ce qui guide d'abord le ministre de la Sécurité publique, c'est de récupérer des sous. La déontologie policière coûte plus ou moins, au Québec, une dizaine de millions, partagés entre le gouvernement et les municipalités qui supportent, évidemment, leur corps de police un petit peu partout au Québec.

L'article 58.1, ou l'article 15, je m'excuse, M. le Président... Parce que je vais tout de suite dans le coeur du débat. Moi, j'ai plus ou moins 30 minutes pour essayer d'expliquer le contenu du projet de loi, ce qui, encore une fois, aurait dû être fait par le ministre, M. le Président. Alors, moi, je demande à mes collègues, mes amis d'en face, de prendre pour acquis que ce que je leur dis est correct, que ce que je leur dis est vrai. Je leur explique le projet de loi n° 136. Ce n'est pas tellement compliqué! Et si, M. le Président, on a des doutes, ils pourront vérifier en caucus en fin de journée avec leur ministre. Le projet de loi, à l'article 15, vise à modifier l'article 58 de la Loi de police en introduisant, essentiellement, la conciliation.

La conciliation, c'est quoi? La conciliation, au moment où on se parle, n'existe pas dans notre système de déontologie. La conciliation en matière de déontologie, si on adopte le projet de loi tel qu'il est écrit – et c'est probablement ce qui risque d'arriver, parce que l'opposition, à l'Assemblée nationale, pour un certain temps encore, est moins nombreuse; on est moins de députés que les députés ministériels, et à court terme on est convaincu que ça changera, M. le Président. Ça changera.

Alors, pendant neuf ans, le Parti libéral du Québec formait le gouvernement. Dès le moment où il avait la conviction que ses projets de loi étaient bons et corrects, bien, il s'organisait pour les faire adopter. C'est ça, un Parlement. Moi, je n'ai pas de problème à vivre avec ça, M. le Président. Si le ministre de la Sécurité publique, avec son leader, Mme la leader adjointe, et son gouvernement, et le ministre des Finances, et le président du Conseil du trésor arrivent à la conclusion que, par le biais de la mise en place de la conciliation, on va refiler une facture aux municipalités, c'est bon, ça veut dire encore une fois une possibilité pour le gouvernement du Québec de récupérer quelques millions, bien, vous savez, on est en fin de session, on ne se leurre pas, de ce côté-ci, probablement que ça va passer. Hein! Probablement que 136 va être adopté.

Il n'y a pas que des mauvaises choses dans le projet de loi, M. le Président. Il n'y a pas que des mauvaises choses. Le coeur du projet de loi, je l'ai dit, c'est l'institution de la mécanique, du mécanisme de la conciliation. On se souviendra que le ministre de la Justice, en matière de médiation familiale, a lui aussi introduit la médiation – on en a parlé abondamment – sauf qu'il l'a rendue, lui aussi, obligatoire plutôt que volontaire, comme plein de gens le souhaiteraient au Québec.

Le ministre de la Sécurité publique, en créant la conciliation, la mécanique de la conciliation en matière de déontologie policière, rend cette conciliation-là obligatoire. Ça, M. le Président, ça agace du monde. Ça agace le Barreau du Québec, ça agace le Protecteur du citoyen, qui sont venus en commission parlementaire à l'occasion de consultations auxquelles j'ai fait référence tout à l'heure. Ils sont venus dire au ministre, aux membres de la commission des institutions: Il nous semble que la conciliation devrait être volontaire, pas obligatoire. Le ministre n'a pas bronché. Il continue à prétendre qu'il est correct d'imposer la conciliation.

Au début, je me souviens, lorsqu'on a débattu du principe du projet de loi, peut-être que le ministre n'avait pas tout à fait compris les tenants et les aboutissants de son projet de loi, dans sa tête, ce n'était pas de la conciliation obligatoire. Mais là il se l'est fait expliquer par ses conseillères. Il y avait deux jeunes avocates qui accompagnaient le ministre en commission, puis je dois reconnaître, M. le Président, qu'elles ont bien fait leur travail. Puis je suis convaincu qu'à l'insu des membres de l'opposition – ça s'est fait évidemment en cachette, je le comprends, ils ne sont pas pour faire ça devant les députés de l'opposition – elles ont, ces avocates compétentes, expliqué au ministre: M. le ministre, vous faites fausse route; l'opposition a raison de dire que c'est de la conciliation obligatoire. D'autant plus que le Barreau, le Protecteur du citoyen sont venus dire au ministre: M. le ministre, ne jouez pas sur les mots, vous mettez en place la conciliation obligatoire.

On s'entend là-dessus. La conciliation est obligatoire. Pourquoi elle est obligatoire, M. le Président? J'ai fini par le saisir, moi aussi, assez rapidement, peut-être plus vite que le ministre. Pour quelle raison la conciliation est obligatoire? Moi, je suis convaincu que Mme la députée de Terrebonne, leader adjointe du gouvernement, puis je le comprendrais, elle n'a pas eu la chance d'assister à nos travaux comme Mme la députée de Prévost et d'entendre nos explications... Mme la députée de Prévost a assisté de façon exemplaire, M. le Président, aux travaux de la commission et elle a compris, elle aussi, que, si on met en place la conciliation obligatoire, c'est pour être conséquent, du côté du gouvernement, avec la décision de refiler la conciliation aux municipalités.

La conciliation obligatoire. La conciliation, ça veut dire quoi, M. le Président? Plutôt que de voir le commissaire ou le comité de la déontologie disposer de tous les cas de déontologie, on va essayer d'en régler le plus possible par la conciliation. On va asseoir le plaignant ou la plaignante avec le policier ou la policière et on va essayer de régler le cas, là, hors cour. La conciliation, c'est ça: essayer d'amener un ou l'autre soit, du côté du plaignant, à retirer sa plainte ou, du côté du policier, à admettre ses torts. Après ça, bien, il y aura des sanctions. C'est ça, la conciliation. C'est moins dispendieux, peut-être. Ça, j'admets ça, c'est moins lourd, ça peut être moins éprouvant également pour les parties, sauf que son caractère obligatoire, ça, ça choque un peu de monde.

(16 h 40)

Moi, là, j'ai dit: Malgré que le Protecteur du citoyen fasse des mises en garde, malgré que le Barreau fasse des mises en garde, pourquoi le ministre refuse-t-il d'assouplir sa conciliation et de faire en sorte qu'elle soit volontaire? Bien, il s'agit de lire l'article 58.1 pour comprendre qu'il faut qu'elle soit obligatoire pour arriver à ses fins.

Le président du Conseil du trésor puis le ministre des Finances ont expliqué au ministre de la Sécurité publique ou à ses conseillers: Vous allez imposer la conciliation puis vous allez faire payer la note par les municipalités. Alors, pour que la conciliation soit utilisée au maximum, on va la rendre obligatoire. C'est ça qui s'est passé. C'est ce qu'on retrouve à l'article 58.1, c'est-à-dire à l'article 15, qui introduit un nouvel article à la Loi de police, un ajout à l'article 58, 58.1, qui se lit de la façon suivante: «Les honoraires et les dépenses de conciliation...» Les dépenses, ce n'est plus ça, maintenant, ça s'appelle «les coûts reliés à la conciliation». Alors, les coûts reliés à la conciliation. Dans le texte original, c'était «les honoraires et les dépenses». Le ministre a amendé pour en mettre encore plus. Ça se lit maintenant de la façon suivante: «Les coûts reliés à la conciliation sont remboursés par l'employeur du policier visé par la plainte selon les taux établis par le ministre.» Voyez-vous, M. le Président, tous les coûts de la conciliation vont être absorbés par les municipalités. Alors, c'est ça, l'objectif, essentiellement, du projet de loi n° 136, c'est de mettre en place la conciliation.

Je me résume, l'opposition n'a pas d'objection de principe à la conciliation. Non. Ça fait partie de cette déjudiciarisation qui est nécessaire. De plus en plus, on le reconnaît. D'ailleurs, on avait commencé à déjudiciariser dans plein de secteurs d'activité qui touchent la justice, sauf que, d'une façon plus ou moins subtile, de refiler encore une fois une facture aux municipalités en introduisant la conciliation, en la rendant obligatoire puis en disant: Maintenant, ce sont les municipalités qui vont payer, bien, évidemment que l'opposition réagit, d'autant plus que les municipalités ont indiqué au ministre qu'on était jusqu'à un certain point en accord avec le projet de loi n° 136. Mais on est loin d'être convaincu, du côté de l'Union des municipalités du Québec, que, comme l'a dit le ministre... Sauf erreur, je pense que c'est le 18 mai. Lorsqu'il a annoncé son intention d'aller de l'avant, le 13 mai, lorsque le ministre a annoncé, le 13 mai, son intention d'aller de l'avant avec une modernisation de la déontologie, le ministre avait dit: Les municipalités vont épargner 35 % des coûts annuels, qui sont de 3 100 000 $ présentement. Le ministre a dit: Avec mon nouveau système, MM. et Mmes les maires partout au Québec qui avez des corps de police municipaux, vous allez économiser 35 %. Le ministre à dit ça le 13 mai.

Il nous a déposé un savant calcul en commission. Il n'y a pas grand monde dans sa gang qui a compris le système, M. le Président, les notes. Il nous avait dit, là: On a fait des études, des études élaborées. Mme la députée de Prévost était là, elle s'en souvient. Moi, j'avais demandé au ministre de les déposer. Des études élaborées! Ça tient à une feuille de 8½ X 11! Imaginez-vous, ça a été ça, la réponse du ministre, études élaborées sur la récupération de 35 % au niveau des coûts de la déontologie par les municipalités. Alors, le ministre a dit dans son communiqué de presse du 13 mai: Les municipalités vont épargner 35 % sur ce que ça coûte aujourd'hui, à peu près 3 000 000 $.

Non. L'UMQ ne croit pas le ministre en disant – puis je résume une lettre du 3 juin: «Quant aux municipalités, l'interrogation demeure, puisque les honoraires et les dépenses...» Je vais commencer par la première phrase du troisième paragraphe de la lettre. «L'analyse du projet de loi nous enseigne qu'à l'évidence le gouvernement profitera d'économies substantielles avec le projet de loi.» Alors, les municipalités, l'UMQ, Union des municipalités du Québec, arrivent à la conclusion que, oui, le gouvernement va sauver des piastres. «Quant aux municipalités, l'interrogation demeure, puisque les honoraires et les dépenses – le coût de la conciliation, M. le Président – seront à la charge des municipalités – imaginez-vous! – selon des taux établis par le ministre de la Sécurité publique.»

Alors là, on a un nouveau personnage qui va s'appeler le conciliateur. Le conciliateur, lorsqu'il va travailler à réconcilier – on va faire de la redondance pour bien se comprendre – un plaignant puis le policier, le conciliateur, M. le Président, il va être payé par la municipalité. Il va être payé par la municipalité mais à des honoraires fixés par le gouvernement du Québec. Ça va bien, ça. Le gouvernement fixe les honoraires – supposons qu'ils seraient de 100 $ l'heure – puis il dit à la municipalité: Vous allez payer. C'est assez spécial! Sauf que les municipalités comprennent que c'est comme ça que ça fonctionne maintenant avec le gouvernement dirigé par le député de Jonquière, le premier ministre actuel. On décide qu'on fait semblant de consulter puis d'écouter les municipalités, puis on impose.

Alors, M. le Président, l'UMQ dit: Vous dites, M. le ministre, qu'on va économiser 35 %. On aurait souhaité que vous en fassiez la démonstration. On arrive à la conclusion, M. le Président, du côté de l'UMQ, que la conciliation, ce n'est pas évident que ça va permettre aux municipalités d'épargner de l'argent.

Je voudrais très rapidement indiquer à Mme la leader adjointe du gouvernement, qui va faire le message au ministre de la Sécurité publique – elle va le voir d'ici la fin de la journée – que, du côté de l'opposition, on a des réserves également sur la prescription. La prescription est ramenée de deux ans à un an. Et je vais avouer, M. le Président, que j'ai été surpris que le Barreau du Québec ne réagisse pas plus fermement à cette disposition. Lorsqu'on réduit les délais permettant à un citoyen de porter plainte – c'est ça, la prescription – de deux ans à un an, on enlève des droits. La prescription, c'est la mécanique qui nous permet de protéger ces droits. Réduire de deux ans à un an, ça diminue des droits.

Conclusion. Il y a des groupes qui sont contre, carrément contre. Les directeurs de police au Québec sont contre le projet de loi n° 136. Il y a des groupes qui sont pour. Les syndicats des policiers au Québec sont, pour l'essentiel, d'accord avec le projet de loi n° 136. Le Protecteur du citoyen a des réserves; d'accord sur certains volets, des réserves sur d'autres, entre autres la médiation obligatoire. Le Barreau du Québec, M. le Président – vous me dites qu'il me reste une minute ou deux – d'accord sur certains volets, des réserves sur d'autres, en désaccord sur d'autres volets du projet de loi.

C'est pour ça, M. le Président, que... Vous savez, en matière de justice puis de sécurité publique, il faut que l'opposition insiste chaque fois que c'est nécessaire – puis c'est presque tout le temps nécessaire – pour procéder à des consultations. Ce sont ceux et celles qui sont impliqués dans des activités aussi précises que celles-là... Ce n'est pas tout le monde qui sait c'est quoi, la déontologie policière au Québec. C'est une évidence, je comprends ça. Alors, on a insisté, du côté de l'opposition, pour qu'on puisse entendre Claude Corbo, qui est à l'origine du projet de loi n° 136, pour l'essentiel, le Barreau du Québec, l'Association des directeurs de police, la Fraternité des policiers – je conclus, M. le Président, ça ne sera pas long, là – la Communauté urbaine de Montréal, la Table de concertation des lesbiennes et des gais du Grand Montréal, le Protecteur du citoyen. Tous ces gens-là sont venus, pour l'essentiel, dire, M. le Président: Il y a quelque chose là-dedans qui mérite d'être essayé. Mais, pour plusieurs des groupes, on a des réserves et, dans certains cas, on est carrément contre certaines dispositions du projet de loi n° 136.

(16 h 50)

Je conclus en disant: On n'est pas, du côté de l'opposition, farouchement contre, mais, sur certains volets, on a des réserves majeures. Dans ce sens-là, M. le Président, on ne va pas voter avec le gouvernement, mais on va permettre au gouvernement de mettre en place sa réforme, puis on verra, avec le temps. On espère que plein de groupes ne se sont pas trompés, puis on espère que ça va être vraiment une amélioration pour les justiciables au Québec que sont les citoyens et les citoyennes puis les policiers, puis que ça ne sera pas les municipalités qui vont trop écoper, M. le Président. Merci.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière et la Loi de police en matière de déontologie policière, est-il adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 14 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 144


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 14, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 144, Loi sur les prestations familiales. Y a-t-il des intervenants? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est au nom de mon collègue le député de Jacques-Cartier, porte-parole de l'opposition officielle en matière de politique familiale, que j'interviens cet après-midi. Mon collègue le député de Jacques-Cartier est malheureusement retenu à Montréal pour un événement majeur dans son comté.

M. le Président, vous allez vous rappeler qu'il y a deux projets de loi qui forment, grosso modo, les interventions du gouvernement actuel en matière de politique familiale, le projet de loi n° 144, Loi sur les prestations familiales, et le projet de loi n° 145, Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance et sur l'organisation des services de garde à l'enfance.

M. le Président, vous allez peut-être vous rappeler également beaucoup de questionnements de mon collègue le député de Jacques-Cartier, au moment du dépôt des deux projets de loi, quant à leur impact global sur la politique familiale au Québec. Et je me rappelle de façon très claire les interventions assez répétitives de mon collègue pour tenter de convaincre le gouvernement de tenir des audiences publiques sur les deux projets de loi, de faire des consultations sur les deux projets de loi. Nous, on avait pensé que ça serait important d'entendre les groupes non pas uniquement sur un volet, le volet sur les prestations familiales, ou sur l'autre volet qui est la création du ministère de la Famille et de l'Enfance et les politiques en matière de garde de l'enfance, mais il a fallu consulter, sur les deux, de façon à voir globalement c'est quoi, les impacts des changements apportés par le gouvernement en matière de politique familiale.

Le gouvernement a hésité, a résisté jusqu'à à peu près la dernière minute. Mais on a été très contents, nous, de ce côté de la Chambre, qu'à la dernière minute le gouvernement ait accédé à nos demandes répétitives de consultations, qui ont eu lieu il y a à peu près 10 jours, si ma mémoire est bonne, pendant lesquels nous avons pu entendre une douzaine d'organismes plus directement impliqués dans les deux projets de loi.

Et je répète un peu les commentaires de mon collègue le député de Frontenac; il est toujours, quant à nous, intéressant d'entendre des groupes qui viennent nous présenter leur point de vue ici, à l'Assemblée nationale. Nous ne sommes pas les détenteurs de la vérité en tout temps, et je pense qu'il est important pour les législateurs d'être bien informés, bien renseignés sur la portée des décisions que nous sommes appelés à prendre pendant nos travaux. Alors, on est très satisfaits, enfin, après beaucoup de pressions, que le gouvernement ait accepté de faire des consultations sur ces deux projets de loi.

M. le Président, ça m'étonne un peu aussi qu'il n'y ait aucun membre du gouvernement qui veuille intervenir à ce stade-ci. Ça m'étonne un peu, parce que nous avons, je crois, sur le fond de la question sur la loi n° 144, accompli un travail positif ensemble, M. le Président.

Le projet de loi n° 144, la Loi sur les prestations familiales, soulève toute la question de l'engagement de l'État vers les familles. C'est un dossier très important, des politiques avec beaucoup, beaucoup de conséquences, M. le Président, dans nos vies quotidiennes comme Québécois et Québécoises. Et je vous rappelle simplement ce qu'on peut peut-être appeler le testament du gouvernement de feu Robert Bourassa, qui avait édicté des politiques assez importantes à l'égard des jeunes familles, des familles en général et des jeunes familles au Québec. On a juste à penser au fait, M. le Président, que notre gouvernement, dans le temps, a réservé des crédits nécessaires pour aider les familles, et en particulier des jeunes familles, pour qu'elles puissent avoir un support accru de l'État, un support qui devient de plus en plus important dans la vie de tous les jours. On a juste à penser aux allocations de naissance, que nous avons mises en vigueur, et à l'allocation pour jeunes enfants.

M. le Président, avec le projet de loi n° 144, le nouveau régime de prestations familiales, et les dispositions du budget qui a été présenté au mois d'avril, selon la ministre, avec ces réformes-là, 95 % des familles québécoises sont gagnantes, avec le nouveau régime. Je dois vous dire, M. le Président, que, nous, on a certaines hésitations à cet égard. Nous demeurons assez sceptiques à cet égard, à savoir vraiment que 95 % des familles vont sortir gagnantes par la réforme de la prestation familiale et la réforme fiscale contenue dans le budget.

On n'est pas en mesure de prouver, de démontrer notre scepticisme de façon tangible en ce moment, M. le Président, mais nous serons capables de faire une analyse un peu plus fine à un moment donné, probablement l'année prochaine, à savoir l'impact réel de la réforme de notre système de prestations familiales et l'impact fiscal du budget dans les mois et les années qui suivent. Mais nous demeurons sceptiques quant aux affirmations de la ministre que 95 % des familles sont gagnantes. Nous avons beaucoup scruté les informations fournies par les diverses autorités du gouvernement, et cette hésitation demeure, M. le Président. On n'a pas été complètement rassurés par le gouvernement.

M. le Président, le projet de loi n° 144 représente l'abandon, et c'est un changement assez dramatique dans nos politiques familiales, de l'universalité pour les allocations familiales. Je ne sais pas si les députés ministériels le savent. Parce que c'est un changement radical dans nos politiques d'aide aux familles de mettre fin au programme universel d'aide aux familles, à l'égard de l'allocation familiale. Ça veut dire, M. le Président, qu'il y a maintenant ce qu'on appelle en anglais des «means tests». Les allocations vont varier avec le revenu de la famille. À partir d'un revenu familial biparental d'à peu près 50 000 $, elles commencent à diminuer et, graduellement, les allocations familiales sont complètement éliminées avec l'augmentation du revenu familial.

(17 heures)

C'est un changement majeur, un changement de cap majeur avec lequel le Parti libéral du Québec est d'accord. Nous sommes d'accord parce que nous espérons qu'avec ces mesures-là on sera capable, comme société, d'aider les familles moins nanties. Continuer à donner des allocations universelles à des familles qui gagnent 100 000 $ par année collectivement, M. le Président, on peut s'interroger sur la pertinence de continuer à fournir des allocations familiales à ces types de familles.

Mais, si on est assuré – et c'est ça, la clé – que les changements font en sorte que les familles moins bien nanties sortent gagnantes de ce système, on peut voir les points positifs d'un tel abandon de l'universalité. Mais ça marque quand même, et je veux le soulever, un changement de cap majeur en ce qui concerne l'application des politiques familiales au Québec. Il n'en demeure pas moins que la déduction pour l'enfant à la charge reste universelle, et ça, on le reconnaît très bien. On est, nous pensons, la seule province au Canada qui maintient une déduction pour enfant à la charge de façon universelle.

Il est vrai, en grande partie... C'est d'ailleurs une politique qui a été mise en place par le Parti libéral du Québec. Alors, que le gouvernement péquiste la maintienne, pour une fois, le député de Maskinongé peut applaudir à volonté, il n'y a pas de problème.

M. le Président, l'étape de l'étude détaillée en commission parlementaire est déterminante pour un projet de loi, vous le savez fort bien, et je crois que sincèrement on peut constater que l'opposition, et surtout le député de Jacques-Cartier... Je ne suis qu'une courroie de transmission. J'étais participant aux travaux de la commission, évidemment, mais je n'ai pas d'intérêt personnel à le dire, que mon collègue le député de Jacques-Cartier a fait un excellent travail, une étude très sérieuse, détaillée, constructive. On nous reproche souvent d'être opposés à tout; ce n'est pas vrai. Quand les gestes du gouvernement ont du bon sens, on n'est pas gênés de les appuyer. Ça arrive tellement rarement que c'est ça qui explique le fait qu'on s'oppose autant, qu'on s'oppose pendant une année donnée. Mais cette fois-ci nous avons collaboré, et je crois qu'on pourrait dire que l'opposition a amélioré sensiblement le projet de loi, et on est très fiers de ça.

Je vous donne un exemple concret, M. le Président. En collaboration toujours avec la ministre responsable de la politique familiale, il y avait des difficultés avec certains articles qui touchaient l'allocation pour enfant handicapé. L'Office des personnes handicapées du Québec a émis une réserve là-dessus; la ministre a pris cet avis en considération. Nous, nous avons plaidé pour des changements dans le sens proposé par l'Office des personnes handicapées du Québec, la ministre a consenti à ces changements-là et nous sommes très contents.

Il n'en demeure pas moins qu'il y a plusieurs problèmes majeurs non résolus dans le projet de loi, et vous me permettrez de faire une petite mise en garde pour la ministre. Comme d'ailleurs mon collègue le député de Frontenac, je suis convaincu que la leader adjointe va être capable de transmettre ces mises en garde à la ministre de l'Éducation et ministre responsable de la politique familiale dès qu'elle la verra.

Alors, M. le Président, on peut constater certaines difficultés avec l'aide consentie aux familles qui sont présentement sur l'aide sociale. C'est un problème majeur, en ce qui nous concerne. L'effort consenti, l'aide consentie pour les familles de faibles revenus est beaucoup plus important pour les travailleurs, les familles de travailleurs à faibles revenus, qu'il l'est pour les familles sur l'aide sociale. Autrement dit, les familles avec des revenus de travail sortent beaucoup plus gagnantes que les familles qui sont présentement sur l'aide sociale. On peut se questionner sur ce choix de politique. D'ailleurs, un rapport du Conseil national du bien-être social, publié au printemps 1997, intitulé Prestations pour enfants: un petit pas en avant , indique l'ampleur de ce problème et encore une fois fait des mises en garde et au gouvernement fédéral mais également à n'importe quel gouvernement provincial qui embarque dans cette direction.

Je cite deux paragraphes de ce rapport: «Les membres du Conseil national du bien-être social sont préoccupés par le fait qu'il est dit implicitement dans le discours du budget que les familles avec enfants dont les parents sont des petits salariés méritent un soutien financier accru de la part des gouvernements, mais pas celles qui vivent de l'assistance sociale. En réalité, les prestataires d'assistance sociale, y compris les enfants qui sont membres de ces familles, comptent parmi les plus démunis de tous les pauvres au Canada. La grande majorité des gens qui vivent de l'assistance sociale le font en raison de circonstances contre lesquelles ils ne peuvent rien, comme la perte d'un emploi, d'un conjoint ou d'un parent ou la maladie.»

Alors, M. le Président, c'est une mise en garde du Conseil national du bien-être social en ce qui concerne cette politique de donner de l'aide accrue à des familles pauvres mais avec des revenus de travail, mais de ne pas consentir le même effort aux familles pauvres vivant de l'aide sociale, parmi les familles les plus pauvres au Québec et au Canada. Et on peut s'interroger sur la pertinence de procéder ainsi du gouvernement du Parti québécois.

Nous, on aurait souhaité un effort accru pour sortir les enfants de la pauvreté. Parce que c'est ça, semble-t-il, le but recherché par le gouvernement. Le but était de sortir des enfants de la pauvreté. Si c'est ça, le but, malheureusement, il y a un échec lamentable avec 147 000 familles vivant de l'aide sociale au Québec, parce que ces familles ne sortent pas gagnantes du système actuel. C'est le maintien du statu quo dans la plupart des cas.

Mais, pour des familles qui sont les plus pauvres au Québec, que le gouvernement du Parti québécois ait choisi de ne pas les aider davantage, on peut s'interroger sur la pertinence d'une telle politique. Et, nous, de ce côté de la Chambre, on le déplore, M. le Président, on le déplore de façon très vive. Quant à moi, ça s'inscrit à l'intérieur des politiques gouvernementales qui, jusqu'à maintenant, ont eu l'effet de diminuer les ressources disponibles aux familles les plus pauvres, ce qui n'a pas de bon sens, vraiment pas de bon sens.

On a juste à penser au système d'assurance-médicaments, à d'autres mesures de resserrement de l'aide sociale qui font en sorte que les familles les plus pauvres au Québec sont appauvries davantage par les gestes de ce gouvernement. Ça n'a pas de sens, M. le Président, et il faudrait, à un moment donné, que le gouvernement accepte que ça n'a pas de sens et corrige son tir.

Il y a aussi un effet pervers dans la proposition qui a été faite par le gouvernement du Parti québécois, et ça entoure la question des familles monoparentales avec des jeunes enfants, surtout deux jeunes enfants. Ça a été très clairement indiqué, très clairement démontré, avec tous les appuis des autorités gouvernementales, qu'une famille monoparentale avec deux jeunes enfants, qui fait une nouvelle demande d'aide sociale à partir du 1er septembre 1998, sort perdante de 726 $ par année. C'est un effet pervers, nous l'avons décrié et en Chambre et en commission parlementaire.

Je répète simplement le souhait, j'implore le gouvernement de regarder et de trouver des façons de solutionner cet effet pervers où, à partir du 1er septembre 1998, les nouvelles demandes de familles sur l'aide sociale pour les familles monoparentales avec des jeunes enfants, ces familles-là sont perdantes de 726 $ par année sur un budget qui est déjà en dessous non seulement des seuils de pauvreté, mais en dessous des seuils minimums de reconnaissance des besoins essentiels des familles et des enfants. Ça ne se peut pas que le gouvernement procède de cette façon. C'est vrai qu'ils ont jusqu'au 1er septembre 1998 pour le corriger, et il faut qu'ils le corrigent, sinon ils vont aggraver la misère de ces catégories de famille, ce qui serait complètement inacceptable pour un parti dit social-démocrate.

(17 h 10)

Il y a un autre problème que nous avons soulevé, et c'est le problème qui entoure toute la question de la mécanique très complexe autour de l'application de la présente loi et l'arrimage nécessaire avec notre système d'aide sociale. M. le Président, toutes blagues à part, cet arrimage a été tellement complexe à présenter en commission parlementaire que je suis convaincu que même beaucoup de députés ministériels avaient de la misère à le comprendre, même après les explications répétitives des autorités.

Alors, M. le Président, on cautionne le gouvernement. J'ai dit en commission parlementaire que la façon dont il propose d'arrimer notre système d'aide sociale avec le système de prestation familiale serait, quant à nous, un cauchemar administratif. La réponse de la ministre à ça a été, dans un premier temps, de dire: Bof! c'est nos troubles; on va s'arranger avec nos troubles.

Mais, M. le Président, on ne peut pas, quant à nous, partir avec ce type d'attitude. Et on sait pertinemment bien que, dans le système d'aide sociale, s'il y a des complexités dans le système, s'il y a des choses qui sont difficiles à gérer, il y a inévitablement un impact sur les prestataires, sur les bénéficiaires. Si les ennuis administratifs étaient limités uniquement à des fonctionnaires, moi, je ne dirais pas un mot, M. le Président, ni vous. Mais, en sachant fort bien que cesdits troubles administratifs, ces ennuis administratifs ont un impact direct sur l'aide essentielle consentie à des familles, à cet égard ça n'a pas de sens, ce que le gouvernement propose. C'est tellement complexe que ça va être un cauchemar, je suis convaincu, un cafouillis administratif total et complet.

On a mis le gouvernement en garde. Ils décident de procéder ainsi, ils vont vivre avec les conséquences. Tout ce qu'on peut espérer, M. le Président, c'est qu'en cours de route on sera capable de pallier les difficultés qui s'en viennent avec ce système d'arrimage de la prestation familiale avec l'aide sociale. Mais au moins le gouvernement est prévenu à cet égard.

Il y a également une difficulté avec la protection de la vie privée, un sujet qui tient à coeur à mon collègue le député de Jacques-Cartier. Semble-t-il que les mesures contenues dans le projet de loi n° 144 sont la quatorzième dérogation au secret fiscal, et on comprend pourquoi c'est nécessaire dans le projet de loi, parce que ce n'est plus une mesure universelle; c'est une mesure variable, selon le revenu. Alors, évidemment il y a la transmission des informations nominales et de nature très personnelle en ce qui concerne le revenu familial d'un ministère à l'autre, peut-être même à trois organismes, M. le Président. Alors, une autre mise en garde. On invite le gouvernement à la prudence à cet égard, et la Commission d'accès à l'information a également invité le gouvernement à la prudence.

En terminant, M. le Président – juste avant de terminer – on aimerait soulever la collaboration très positive des autorités de plusieurs organismes et ministères du gouvernement. Je parle évidemment des fonctionnaires qui étaient présents avec nous pendant plusieurs jours pour l'étude détaillée, et ce, jusqu'à des heures très tardives, au salon rouge, les autorités de la Régie des rentes du Québec qui ont expliqué à plusieurs reprises la mécanique. On a tenu deux séances de travail en dehors de notre étude détaillée pour mieux comprendre la mécanique, ce qui n'est pas facile, M. le Président. Alors, au nom de l'opposition officielle, M. le député de Jacques-Cartier m'a demandé de remercier les autorités de la Régie des rentes du Québec, du ministère de la Sécurité du revenu du Québec, qui ont expliqué longuement ce processus d'arrimage, et du ministère du Revenu du Québec.

Mr. Speaker, Bill 144, An Act respecting family benefits, is one of the two pieces of legislation that the Government is proceeding with, this session, to reform family policy here in Québec. We, in the person of my colleague the MNA for Jacques-Cartier, very early in the process asked the Government to hold public hearings, public consultations on the two pieces of legislation, Bill 144 and Bill 145, An Act respecting the Ministry of the Family and the child welfare and relating to day care, because we felt that the two pieces of legislation are a package, Mr. Speaker, that could not really be dissociated one from the other.

And I can distinctly recall, as you can, I'm sure, numerous attempts by my colleague the MNA for Jacques-Cartier to get the Government to agree to hold consultations, to question the Minister as to why she was reluctant to hold consultations.

Well, that hard work and questioning paid off, Mr. Speaker, as you well know. Consultations were held over two days, about 10 days ago, and, if my memory serves, about 12 groups appeared before the Social Affairs Commission of the National Assembly to comment on both Bill 144 and Bill 145. I think we can all benefit as parliamentarians from this type of public consultation. We don't have the answers to everything and we can, I think, all benefit, regardless of what side of the House we sit on, from the input of people who deal with these types of issues on a daily basis, whose expertise is invaluable to us in coming to enlightened decisions. So, we are very pleased that those consultations were held, after quite a bit of pressure applied from the Liberal Opposition.

Mr. Speaker, the Opposition indicated fairly early in the process that we were in favor of Bill 144, An Act respecting family benefits, principally because it was our hope and it is still our hope that the system will be reformed to increase the financial aid to poor families in the Province of Québec. That is the stated objective of Bill 144 and that is a principle with which we are entirely in accord, and so it was in that spirit that we agreed fairly early in the process to support this piece of legislation.

And it brings to mind the fact that the population very often believes that the Opposition does nothing but oppose and vote against laws. The Government certainly criticizes us for doing so on many occasions. All I can say to you, Mr. Speaker, is that in this particular case it indicates... the experience around Bill 144 indicates very clearly that when the Government brings forward good legislation, positive legislation, the Opposition will support the Government on these matters. It's just that it happens so rarely that this Government manages to bring forward good quality, positive legislation that it is why the public perception is that we're opposed to everything.

But in this case we support the principles behind Bill 144 with certain reservations, Mr. Speaker. I think one of the most serious reservations is that the reform of the family benefits system is going to advantage a certain number of categories of Quebeckers. Because we're abandoning universality, it's going to allow an increase in benefits for poor Quebeckers, a principle for which we are... in entire agreement with.

However, there is a peculiarity in Bill 144 in that the financial assistance provided to low-income families, working families is much, much more important than it is to families on welfare. And in that regard, the National Council of Welfare of Canada recently published a report called Child Benefits: A Small Step Forward , in the spring of 1997, and made the following observations – I think it's worth quoting directly from the report: «Under the budget proposals, the increased federal money – that's important too, Mr. Speaker, there is, of course, increased federal money going into this program – going into the Canada Child Tax Benefit For Families on Welfare is supposed to be offset by reductions in provincial and territorial welfare benefits, and the money saved by provinces and territories is supposed to be reinvested in other programs for low-income families.

«The Budget Speech said specifically that the money would be reinvested in programs for low-income working families as opposed to low-income families who rely on welfare or other government income-support programs. Members of the National Council of Welfare are troubled by the suggestion implicit in the Budget Speech that working poor families with children deserve additional health from governments and families with children on welfare do not. The reality is that people on welfare, including the children in families on welfare, are among the poorest of the poor in Canada. The vast majority of recipients are on welfare because of circumstances well beyond their control: the loss of a job, the loss of a spouse or parent or the loss of good health.»

(17 h 20)

Mr. Speaker, it is very clear that this Government is following these suggestions and that the financial assistance provided to low-income working families, which we applaud, is much more significant than the assistance provided to families on welfare. In fact, Mr. Speaker, by the Government's own figures, for families on welfare, amongst the poorest families in Québec, 147 000 families on welfare in this province, there is very little benefit to the new family benefits scheme, and that, we deplore, we decry. The Government should have invested greater energy and greater resources in helping the poorest of the poor in this province, namely people on welfare, in getting out of that cycle of poverty that so many children are living in, 147 000 families in Québec.

So, with that caveat, Mr. Speaker, I indicate again that the Opposition supports this bill with certain reservations that we've made in parliamentary commission and we will continue to make, certain warnings to the Government about the impact of this legislation on poor families, families on welfare, some very perverse effects that need to be corrected. And we hope that the Government will correct them in the days and weeks to come. Thank you very much, Mr. Speaker.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Il n'y a plus d'autres intervenants? Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi n° 144, Loi sur les prestations familiales, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 22)

(Reprise à 20 h 3)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour. Et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour.


Motions du gouvernement


Motion d'urgence proposant la suspension de certaines règles de l'Assemblée afin de permettre l'adoption du projet de loi n° 89


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'aimerais présenter la motion suivante intitulée: Motion de suspension en vertu des articles 182 et 183 du règlement de l'Assemblée nationale.

«Qu'en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre l'adoption du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative:

«Le premier paragraphe de l'article 19, les articles 20 à 22, les mots "ou sur un fait personnel" au quatrième paragraphe et le septième paragraphe de l'article 53, les premier, deuxième, troisième et cinquième paragraphes de l'article 54, les articles 71 à 73, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les mots "ou à la demande d'un député" au premier alinéa de l'article 86 ainsi que le deuxième alinéa du même article, les deuxième, troisième et huitième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 94, 100 et 101, 105 à 108, 110 à 114, 157, 164 et 165, 175 et 176, les mots "et, le cas échéant, de ses observations, conclusions et recommandations" à l'article 177, les article 194 et 195, 205 à 210, les articles 212, 213, 215, 216, 220, 222, 230, les articles 240 et 241, le deuxième alinéa de l'article 244, les articles 245 et 246, 247, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au deuxième alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, le premier alinéa de l'article 252 ainsi que les premier et troisième alinéas de l'article 253, l'article 254, les deuxième et troisième alinéas de l'article 256, l'article 257 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption dudit projet de loi et que;

«Il soit permis, dès l'adoption de la présente motion, de poursuivre l'étude du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des institutions mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt du rapport de la commission permanente des institutions, transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer au projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative;

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des institutions ainsi que sur les amendements transmis conformément à la présente motion soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des institutions, les amendements transmis conformément à la présente motion soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi dont la commission permanente des institutions n'aurait pas disposé, le titre et autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«Au cours du débat sur l'adoption du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse faire motion pour qu'il soit envoyé en commission plénière en vue de l'étude des amendements qu'il indique; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; en commission plénière, l'étude soit limitée aux amendements proposés; la durée du débat en commission plénière soit fixée à un maximum de 15 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes pour les députés indépendants et deux minutes de réplique au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis aux voix immédiatement et sans appel nominal, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude; après quoi le président de la commission plénière fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultées ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix immédiatement sans débat et sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse proposer que l'Assemblée se constitue en commission plénière; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse plus d'une fois au cours d'une même séance proposer de faire rapport à l'Assemblée que la commission plénière n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement du débat puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement de l'Assemblée puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Le retrait d'une motion puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal.

«Outre les dispositions prévues à la présente motion, tous les votes soient faits à main levée à moins qu'un ministre ou leader adjoint du gouvernement n'exige un vote par appel nominal;

«L'Assemblée puisse siéger tous les jours à compter de 10 heures jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux;

«Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières à la période des travaux intensifs soient appliquées;

«Les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, si vous voulez déposer la motion de suspension des règles. M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, vous aurez compris, M. le Président, que c'est devenu une habitude chez le leader du gouvernement qui, à cause de son manque de planification des travaux, fin de session après fin de session, enlève les droits aux parlementaires. Moi, je vois des gens sourire de l'autre côté, là, mais, quand on enlève des droits aux parlementaires, ce n'est pas simplement aux parlementaires de ce côté-ci de la Chambre qu'on enlève des droits. C'est à l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale. Et, comme la tradition et la coutume le veulent, parce que c'est devenu une coutume avec ce leader, M. le Président, je demanderais qu'on suspende, le temps nécessaire pour que nous puissions analyser l'ensemble des articles qui ont été suspendus, et ces articles-là consacrent chacun à leur façon les droits des membres de l'Assemblée nationale.

Donc, nous allons prendre le temps nécessaire, là, pour vérifier si, au moins dans les formes – on est convaincu sur le fond, là – M. le Président, ça respecte les autres articles qui prévalent au règlement. Puis ce n'est pas encore suspendu, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Eh bien, alors, nous allons suspendre quelques minutes pour laisser le temps à l'opposition de prendre connaissance des nouvelles règles et de la motion de suspension. Alors, nous suspendons quelques minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 10)

(Reprise à 20 h 54)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader de l'opposition a pris connaissance, avec son groupe, de la motion de suspension des règles.


Débat sur la recevabilité

Si vous aviez quelques remarques à faire avant que je délibère pour décider de la recevabilité, je peux vous entendre quelques minutes. M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Nous avons l'intention de vous démontrer très clairement l'irrecevabilité de la motion présentée par le leader du gouvernement qui, malgré son habitude de présenter des motions de clôture qui privent les parlementaires de leur droit de s'exprimer, commet coup après coup les mêmes erreurs, sans tenir compte des décisions de la présidence.

Votre rôle en cette affaire, M. le Président, est spécifié aux trois premiers articles de notre règlement. Le premier article: «Le Président de l'Assemblée nationale dirige les séances de l'Assemblée, administre ses services et la représente, notamment dans ses rapports avec d'autres Parlements.»

Vos fonctions sont stipulées à l'article 2: «Outre les pouvoirs que la loi lui confère, le président: ouvre, suspend et lève les séances de l'Assemblée; maintient l'ordre et exerce tous les pouvoirs nécessaires à cette fin; fait observer le règlement – M. le Président, c'est le troisième alinéa – met les motions en discussion, les met aux voix et proclame le résultat des votes; convoque et préside les réunions des leaders de groupes parlementaires; organise les débats restreints; détermine, lorsque l'Assemblée ne peut siéger à l'Hôtel du Parlement, l'endroit où elle se réunit – j'insiste sur 8° après avoir insisté sur 3° – exerce les autres pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres.» Et nous sommes à l'intérieur d'une de ces questions, M. le Président: le maintien des droits et des privilèges des membres de l'Assemblée. Et, pour consacrer vos décisions, M. le Président, l'article 3 parle de votre neutralité: «Tant qu'un député exerce la charge de Président, il ne fait partie d'aucun groupe parlementaire.»

C'est dans ce cadre réglementaire, M. le Président, que vous vous devez d'exercer votre juridiction, compte tenu de l'invocation par le leader du gouvernement des dispositions de l'article 182 de notre règlement.

Nous reviendrons tantôt sur les dispositions de l'article 182. Nous porterons une attention particulière aux dispositions des articles qui précèdent: 179, 180, 181. L'article 183, M. le Président, fait l'objet d'une jurisprudence qui est constante, mais vous conservez toujours, comme président de l'Assemblée nationale, le droit de modifier la jurisprudence. Et j'insiste, la jurisprudence est constante, mais ce droit vous appartient. Nous reviendrons également sur 184, M. le Président.

Le projet de loi qui est devant nous est un projet de loi du ministre de la Justice, et ça, pour ceux et celles qui pensent, comme le ministre de la Justice, qu'un ministre de la Justice, c'est un ministre comme les autres, ça ne pose pas de problèmes, mais, pour ceux et celles d'entre nous qui pensons que le ministre de la Justice doit garder une saine distance avec l'exécutif, ça peut poser des problèmes, M. le Président. Ce ministre de la Justice est le seul, moi, que j'ai connu au cours des 20 dernières années au Parlement de Québec qui n'ait pas compris ce devoir de réserve et ce devoir de distance entre la fonction de ministre de la Justice et d'organisateur politique.

Le projet de loi qui est devant nous, M. le Président, contient 916 articles. La commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi a pris connaissance de 16 des 916 articles, M. le Président, 16 des 916 articles. Le ministre ne veut pas que les autres 900 articles soient soumis à l'analyse des parlementaires. La commission parlementaire a siégé, M. le Président – et le secrétariat pourra vous éclairer si vous avez besoin de plus amples informations – un total de 25 heures et demie, et l'opposition a pu interroger la pertinence des 16 articles pendant 15 heures. Depuis un mois, M. le Président, le leader, soit consciemment, soit par négligence, n'a jamais rappelé le projet en commission parlementaire.

M. le Président, on a à vous rappeler que cette fin de session est un petit peu extraordinaire en soi: le Parlement n'a pas siégé. Hier soir, à compter de 18 heures, aucune commission parlementaire, l'Assemblée nationale, le salon bleu, où nous sommes, n'a pas siégé. Le leader disposait, au cours du dernier mois, de toute la marge de manoeuvre nécessaire pour appeler ce projet en commission parlementaire. Je ne sais pas si c'est lui ou si c'est le ministre qui a choisi de ne pas discuter entre parlementaires de son projet de loi, brimant ainsi les privilèges qui sont les plus fondamentaux des membres de l'Assemblée nationale du Québec. Je vous rappelle également, M. le Président, que cette motion n'a pas lieu d'être présentée ce soir. L'Assemblée, suivant le règlement, va siéger jusqu'au 23 juin, jusqu'à lundi prochain. Que le leader convoque au moins la commission parlementaire pour étudier article par article le projet de loi.

(21 heures)

Le projet de loi, M. le Président – et sans toucher le fond comme tel, mais simplement pour que les gens qui nous écoutent comprennent – vise à enlever des droits aux citoyens, les droits d'appel, et on ne parle pas des citoyens les plus munis dans notre société, on parle des citoyens les plus démunis. Les compagnies et ceux qui ont de l'argent peuvent aller devant les tribunaux de droit commun. Mais les plus démunis n'ont pas ces moyens-là, et le ministre de la Justice tente de créer une injustice en enlevant des droits. Et il commence. En enlevant des droits aux parlementaires, il est certain d'en enlever aux gens qu'on représente dans nos comtés. Et, tantôt, lorsqu'on fera du bureau de comté, on se demandera pourquoi nos citoyens ou nos concitoyens n'ont plus ces droits.

M. le Président, ce n'est pas surprenant. Ça arrive la même journée où le gouvernement a tenté d'intimider le Protecteur du citoyen, où le gouvernement a tenté d'intimider le Protecteur du citoyen en lui reprochant d'avoir pris position pour des citoyens. Ils n'ont même plus le droit d'appel au Protecteur du citoyen, dans l'esprit du ministre de la Justice et dans l'esprit du gouvernement qui est en face de nous; le projet de loi qui suit, également, le projet de loi n° 130, et qui vise à en assurer son application. Mais, dans l'intervalle, le ministre de la Justice a pris soin de nommer, pour échapper aux règles, son chef de cabinet à une position.

M. Bélanger: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Bélanger: Oui. Je m'en veux d'interrompre le leader de l'opposition dans son envolée oratoire, cependant, il est en train de plaider sur le débat de deux heures qui va avoir lieu si vous jugez la motion recevable. Ce n'est pas sur la recevabilité qu'il est en train de plaider mais sur l'opportunité de la motion de recevabilité. Alors, M. le Président, je crois que vous devriez peut-être, à ce moment-là, rappeler au leader de l'opposition qu'il doit plaider sur la recevabilité présentement, à ce moment-ci. Il aura tout le loisir, lors du débat restreint de deux heures, de plaider sur l'opportunité.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, effectivement, vous êtes à débattre un peu du contenu du projet de loi, et je ne crois pas que c'est le moment actuellement. Il faudrait que vous vous en teniez à la recevabilité non pas du projet de loi... C'est un peu, là... Ha, ha, ha! C'est la recevabilité de la motion de suspension que nous débattons.

M. Paradis: Oui, M. le Président, mais, vous qui êtes un philosophe de formation, allez aisément comprendre que, pour en arriver à la conclusion, il faut contexter, et je tentais simplement et brièvement de contexter. Le projet de loi n° 130 a permis au ministre de la Justice de nommer son chef de cabinet, celui qui vous conseillait quant à la recevabilité de ces motions, à un poste par pure nomination partisane, où il n'avait aucune expérience. C'est le même ministre de la Justice qui, cette semaine, tentait de répondre à une question du député de Chomedey quant à l'acquittement – je ne dirai pas «l'acquittement» – quant au défaut de prise de procédure contre un haut fonctionnaire du gouvernement du Québec suite à un ivressomètre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, M. le leader de l'opposition. Vous savez très bien que, là, vous êtes en train de faire le procès pas seulement du projet de loi, mais du ministre.

M. Paradis: Ça va ensemble.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, mais ça va justement... Ça va peut-être ensemble, mais ça ne va pas dans le contexte actuel où on discute de la recevabilité de la motion. Alors, je voudrais que vous teniez compte de cela, la recevabilité de la motion. On n'a pas à se prononcer sur la pertinence du projet de loi et du ministre. On se prononce sur la recevabilité de la motion. Alors, c'est sur ça que je veux vous entendre, puis il ne faudrait pas que ça dure très longtemps.

M. Paradis: Non, M. le Président, ça ne durera pas tellement longtemps. Mais, si vous voulez juger de la recevabilité de la motion comme telle, il faut que vous jugiez de l'ensemble du projet de loi, de son parrain et de la stratégie du leader parlementaire pour comprendre pourquoi sa motion est irrecevable. Donc, j'en étais à rappeler au ministre de la Justice ses souvenirs quant à sa nomination partisane de son chef de cabinet, quant au défaut...

Des voix: ...

M. Paradis: M. le Président, est-ce que vous pouvez demander...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, M. le leader de l'opposition, si vous nous disiez pourquoi c'est irrecevable, on pourrait peut-être juger de la pertinence de vos arguments. Mais, comme c'est là, on ne voit pas du tout. Alors, écoutez, venez en donc, si vous voulez, à la recevabilité de la motion et pourquoi elle n'est pas recevable, et avec quelques explications par la suite pour justifier vos arguments.

M. Paradis: Je ne veux pas reprendre à partir du début, mais je suis prêt à le faire, si vous insistez. Je vous ai indiqué dès le début, en vertu des articles 1, 2, 3, quels étaient les pouvoirs qui étaient les vôtres et je vous ai également indiqué à partir du début qu'en vertu des articles 179 à 184 c'était irrecevable, et je vous ai dit que, spécifiquement, vous comprendriez quels articles j'invoquerais à la fin, M. le Président, qui sont contenus dans les articles 179 à 184 quant à l'irrecevabilité. Maintenant, si vous voulez que je fasse juste conclure et ne pas expliquer pourquoi, c'est une autre chose.

Mais je pense que vous devez prendre au moins cinq minutes pour écouter le pourquoi. Et, le pourquoi, j'ai qualifié le projet de loi comme tel, et ça se place dans un contexte où l'ensemble des observateurs de la scène politique se portent maintenant à la défense des droits des parlementaires de pouvoir se prononcer sur les articles et le contenu d'un projet de loi, ce que le ministre de la Justice, par le biais du leader du gouvernement, tente d'empêcher les parlementaires de faire. Et, de l'autre côté, M. le Président, quand la députée de Rimouski, qui est en train de lire un livre puis qui ne s'intéresse pas à notre débat, grogne puis me dérange dans mon discours, je vous demanderais...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, je vous inviterais, tout le monde aussi, à être silencieux et à respecter le droit de parole. Et, si on a de quoi intervenir pour rappeler à l'ordre M. le leader, on le fera. Mais j'aimerais que les autres, autant que possible, n'interviennent pas par des propos... On vous entend en avant, ici, puis ça distrait. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, mais, M. le Président, je pense aussi que vous devez être vigilant quant à savoir qu'un député ne peut pas critiquer le comportement d'un autre député en cette Chambre. Je pense que les propos du leader relativement à la députée de Rimouski étaient tout à fait inappropriés, et je pense que ça ne devrait pas être permis.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mais, écoutez, s'il vous plaît... Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Simplement faire appliquer l'article 32, quand un député a la parole en cette Chambre; et, là-dessus, je compterais plutôt sur la collaboration du leader du gouvernement que sur certaines invectives.

M. le Président, le projet de loi tel que présenté viole une règle de justice naturelle que vous connaissez bien, la règle audi alteram partem, il faut entendre l'autre partie avant de se faire justice à soi-même et de prendre une décision, M. le Président, et vous êtes responsable de l'application des règles de justice naturelle en cette Chambre. Quand le ministre de la Justice et le leader du gouvernement vous demandent de suspendre l'ensemble des articles qui sont contenus dans sa motion en prétextant l'urgence, en invoquant sous un faux prétexte l'urgence, ils vous demandent de ne pas entendre les parlementaires au nom de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes.

Comme vous êtes en charge de l'application de la loi, du règlement de l'Assemblée nationale et des précédents qui en découlent, M. le Président, vous vous devez de vous assurer que les parlementaires auront l'occasion d'être entendus. C'est un droit fondamental que nie, par le biais du leader du gouvernement, le ministre qui se prétend le ministre de la Justice du Québec. Il a raison, il est le seul à avoir raison et il ne veut pas entendre les représentants de la population, ni de ce côté-ci de la Chambre ni de l'autre côté de la Chambre.

M. le Président, les articles qui prévoient, dans des circonstances totalement exceptionnelles et extraordinaires dont abuse l'actuel leader du gouvernement, la suspension de nos règles de procédure se retrouvent aux articles 179 et suivants, et ils se doivent d'être suivis à la lettre.

L'article 179: «La procédure de l'Assemblée nationale est régie:

«1° par la loi;

«2° par son règlement et ses règles de fonctionnement;

«3° par les ordres qu'elle adopte.»

«Au besoin, la procédure est déterminée en tenant compte des précédents et des usages de l'Assemblée» nationale», M. le Président.

Et je vais vous citer un précédent qui ne vous laissera pas grand marge de manoeuvre et que je ne comprends pas que le leader du gouvernement ait oublié dans sa motion, à moins que lui n'ait des aspirations à un autre titre et qu'il ne veuille pas être parrain de l'actuel projet de loi parce qu'il ne le trouve pas compatible avec ce qu'on appelle les règles de justice les plus élémentaires.

«Loi d'interprétation. Sauf incompatibilité, les dispositions de la Loi d'interprétation s'appliquent au règlement.»

«Suspension de certaines règles. Le leader du gouvernement ou un ministre peut proposer la suspension de toute règle de procédure prévue aux paragraphes 2° et 3° de l'article 179.» Ça, ça veut dire, M. le Président, que le règlement et les règles de fonctionnement n'existent plus à partir du moment où vous en venez à la décision que la motion présentée par le leader du gouvernement est recevable.

«La motion doit indiquer le motif de la suspension et, s'il y a lieu, la règle qui s'appliquera.

«Elle fait l'objet d'un débat restreint et ne peut être amendée ni scindée.

«La motion ne requiert pas de préavis si le motif invoqué est l'urgence.»

(21 h 10)

Je n'ai pas le goût de m'étendre longtemps, M. le Président, connaissant la jurisprudence, mais, quand même, faisant appel à votre sens de l'équité, tout le monde est conscient qu'il n'y a pas d'urgence. Elle a été invoquée par le leader du gouvernement, mais il n'y a personne de raisonnable et de conscient qui va pouvoir plaider que nous sommes dans une situation d'urgence quand l'Assemblée nationale peut siéger jusqu'à lundi prochain et que le projet de loi n'a pas été appelé depuis un mois, même si l'Assemblée nationale n'a pas siégé hier, n'a pas siégé à trois commissions pendant plusieurs jours au cours du dernier mois.

L'article 184, M. le Président, ça, je pense que c'est une erreur délibérée de la part du leader du gouvernement: «Distribution d'un projet de loi. Si la motion tend à permettre l'étude d'un projet de loi – et je pense que c'est indiscutable...»

M. le Président, voulez-vous rappeler la députée de Rimouski à l'ordre, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, j'étais occupé à penser à autre chose, là, je n'ai rien entendu. Mais je vous inviterais, s'il vous plaît, tout le monde, à respecter le droit de parole. Je ne peux pas être plus précis. Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, l'article 184 est très clair: «Distribution d'un projet de loi. Si la motion tend à permettre l'étude d'un projet de loi...» Je pense que, tous, nous allons convenir que la motion présentée par le leader du gouvernement tend à permettre l'étude – c'est un grand mot, M. le Président – d'un projet de loi, ça tend à saisir l'Assemblée d'un projet de loi et à s'en débarrasser le plus rapidement possible sans permettre aux parlementaires de pouvoir s'exprimer sur le projet de loi. Celui-ci doit être distribué au moment où la motion est présentée.

M. le Président, il y a quelques mois à peine, au moment de la présentation du projet de loi n° 104, le leader du gouvernement avait commis la même erreur. Il n'avait pas fait distribuer à l'ensemble des parlementaires, au moment de la présentation de sa motion, le projet de loi, et le président Charbonneau, si vous me permettez l'expression, qui occupait votre fauteuil à l'époque, l'a rappelé à l'ordre en insistant sur le droit des parlementaires d'obtenir copie du projet de loi amendé, non amendé, mais c'est une règle d'exception, M. le Président.

On ne sait même pas, au moment où nous nous parlons, quel est le projet de loi sur lequel – son contenu – nous avons à nous prononcer. A-t-il été amendé par le ministre depuis un mois? On ne l'a pas vu en commission parlementaire. On n'en a aucune idée. Son contenu a-t-il été modifié? On n'en a aucune idée. Et c'est pourquoi le règlement, M. le Président, est si impératif à cet endroit. Le leader du gouvernement a oublié, sciemment ou inconsciemment, de procéder à cette distribution bien que la présidence l'ait rappelé à l'ordre il y a à peine quelques mois, M. le Président.

Il s'agit d'une mesure d'exception qui vise à priver les parlementaires de leur droit de se prononcer. Le règlement, tel qu'il existe, a été conçu – et je pense, M. le Président, que vous en conviendrez, si on retourne dans les auteurs Geoffrion, etc – pour des lois spéciales, pour des lois d'exception, pas pour une utilisation que tend à en faire le gouvernement qui est en face de nous, pour des lois normales.

Et, s'il tente de le faire pour une loi qui est qualifiée de normale, qui a été déposée avant le 15 mai et qui normalement aurait dû faire l'objet d'étude détaillée en commission parlementaire, à ce moment-là, si le gouvernement décide de ne pas suivre le processus normal d'adoption d'une loi, le gouvernement se doit – et c'est l'interprétation que vous devez donner, M. le Président, à cet article – de suivre de façon très impérative toutes les exigences des articles 179 et suivants de notre règlement et de porter à la connaissance des législateurs – puis on sait que depuis les contraintes budgétaires, c'est encore plus compliqué; on ne peut même pas en avoir de copie sans la payer, maintenant, comme législateur – si on veut que les législateurs puissent se prononcer – parce que je ne pense pas que de l'autre côté il y a beaucoup de parlementaires qui puissent prétendre avoir pris connaissance de ce projet de loi là – de façon à nous permettre de discuter correctement, de façon à permettre au ministre de la Justice de nous présenter véritablement ce qu'il entend nous présenter comme projet de loi, le règlement nous impose comme obligation, ou impose au leader du gouvernement l'obligation de distribuer, au moment où il dépose sa motion, le projet de loi sur lequel on est appelé à voter dans des circonstances exceptionnelles, M. le Président.

Et le leader du gouvernement a déjà été rappelé à l'ordre quant à cet élément par le président Charbonneau. Et, ce soir, je vous demande de déclarer sa motion irrecevable compte tenu qu'il n'a pas suivi les règles impératives qui sont prescrites par le règlement de l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader de l'opposition. Je vais céder la parole maintenant à M. le leader du gouvernement pour quelques minutes.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Vous comprendrez que je ne suis pas très ébranlé par le vibrant plaidoyer de mon bon ami le leader de l'opposition. Je suis habitué à entendre ce vibrant plaidoyer qui invoque les droits des parlementaires. Ça me surprend toujours un peu, M. le Président, du discours que j'entends, parce que, après tout, la motion de suspension des règles n'est quand même pas quelque chose d'absolument extraordinaire, puisqu'en 1984, quand on a fait la réforme de notre règlement, on a prévu, les deux partis en cette Chambre, autant l'opposition que le parti ministériel, de mettre cet instrument qui est une motion de suspension des règles, donc qui existe, qui est réglementaire, qui est conforme à notre règlement.

J'écoutais le leader parler de mon abus relativement aux motions de suspension des règles. Je peux dire que je suis particulièrement fier qu'il n'y ait qu'une seule loi dans cette session qui va nécessiter une motion de suspension des règles. Je pense qu'au cours des quinze dernières années on pourra regarder combien de fois c'est arrivé où il y a eu une seule motion de suspension des règles avec une seule loi, où on a été obligé d'utiliser une telle motion de suspension des règles. Très, très rarement est-ce arrivé. Et je crois qu'on peut difficilement mettre ça sur un manque de planification des travaux.

Quand on fera le bilan de cette session, je crois que ça sera tout à l'honneur à la fois du gouvernement et aussi de l'opposition, qui, dans l'ensemble, a fait un travail au niveau législatif, je crois, qui était correct. On a fait des débats intéressants, puis je pense qu'il y a un travail législatif intéressant qui s'est fait. Et, comme je l'expliquerai plus tard dans l'argumentation sur ma motion, le problème, ce n'est pas le problème de l'opposition, c'est peut-être le problème du député de Chomedey dont on aura à parler ce soir. Parce que c'est peut-être à cause du député de Chomedey si on en est aujourd'hui – et là, sans lui mettre des motifs indignes... Mais on pourra regarder de quelle façon, à pas de tortue... Parce qu'à la vitesse où ça allait, avec le député de Chomedey, sur le projet de loi n° 89, j'ai calculé que ça prendrait trois ans de session pour arriver à l'adoption du projet de loi n° 89. Donc, quand on arrivera, lors du débat restreint de deux heures, à se demander pourquoi on en est à une motion de suspension des règles, je pense qu'assez rapidement on va arriver à cerner le problème, il va être assez facilement «cernable», le problème.

Quant à l'urgence, M. le Président, la jurisprudence est tellement constante que je n'ose même pas l'invoquer. Elle est écrasante à l'effet qu'on ne peut même pas invoquer qu'il n'y a pas urgence au niveau de la recevabilité. C'est les membres de cette Assemblée, quand ils auront à voter sur cette motion, qui détermineront s'il y a ou non urgence.

Maintenant, quant à la distribution du projet de loi en vertu de 184. Évidemment, le leader de l'opposition me rappelait les péripéties de la présentation du projet de loi n° 104. Mais il faut remettre 184 dans son contexte. L'article 184 est dans le cas spécifique où il y a une motion de suspension des règles qui vise à faire adopter un projet de loi qui n'est pas du tout au feuilleton, qui est présenté pour la première fois au moment où la motion de suspension des règles est présentée. Et, à ce moment-là, 184 dit: Les députés, évidemment, doivent avoir, au moment où la motion est présentée, une copie du projet de loi. Dans le cas présent, le projet de loi, ça fait longtemps qu'il est au feuilleton, on en a tous même une copie dans nos recueils, au niveau des projets de loi qui sont sous étude à l'Assemblée nationale. Donc, 184, la distribution ne s'applique pas. Et d'ailleurs, c'est ce qui avait été rappelé par le président Charbonneau dans sa décision du 17 décembre 1996, et c'était excessivement clair et limpide à cet effet-là.

Donc, M. le Président, je vous soumets respectueusement que cette motion est tout à fait recevable. Et, lors du débat de deux heures, nous pourrons à ce moment-là débattre, les parlementaires, pour savoir pourquoi nous sommes dans l'obligation de présenter une motion de suspension des règles.

(21 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader du gouvernement. Il faudrait que ça soit très bref, une ou deux minutes, pas plus, M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je vous soumets respectueusement que la distinction que tente de faire le leader du gouvernement quant à 184 n'apparaît aucunement dans le libellé de l'article. L'article 184 stipule: «Distribution d'un projet de loi – distribution de tout projet de loi. Si la motion tend à permettre l'étude d'un projet de loi – c'est la situation dans laquelle nous sommes – celui-ci doit être distribué au moment où la motion est présentée.» Le libellé est très clair.

Cette motion vise à permettre, entre guillemets, l'étude d'un projet de loi. La distribution n'a pas été faite au moment où la motion a été présentée. Le leader du gouvernement le sait très bien. Le leader du gouvernement tente de faire des distinctions avec des catégories de projets de loi que le règlement ne fait pas, et, à ce moment-ci, M. le Président, je vous demande d'appliquer le règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Je vous remercie pour ces observations. Nous allons suspendre quelques minutes pour délibérer. Je viendrai rendre ma décision.

(Suspension de la séance à 21 h 21)

(Reprise à 21 h 37)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Décision du président sur la recevabilité

Je vais rendre ma décision relativement à la recevabilité de la motion de suspension des règles de procédure présentée par le leader du gouvernement. Tout d'abord, le leader de l'opposition officielle a invoqué l'article 2 du règlement qui concerne les fonctions de la présidence de l'Assemblée. Le leader de l'opposition a invoqué particulièrement le paragraphe 8° de cet article qui prévoit que «le président exerce les autres pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres».

Les articles 182 et suivants du règlement, eu égard à la suspension des règles de procédure de l'Assemblée, ont été adoptés à l'unanimité des membres de cette Assemblée, d'ailleurs comme tous les autres articles du règlement. Ces articles prévoient que le leader du gouvernement peut présenter une motion en vue de suspendre n'importe quel article du règlement, et, à ce compte, le président doit respecter aussi cette règle du règlement quand il a à rendre une décision. Maintenant, eu égard à la recevabilité d'une motion de suspension des règles de procédure, le président n'a pas à se questionner sur sa pertinence; la présidence doit plutôt se demander si, sur un plan purement technique, notamment les règles suspendues coïncident avec les nouvelles règles proposées.

Le leader du gouvernement invoque également l'article 184 du règlement qui prévoit que, si la motion de suspension des règles de procédure tend à permettre l'étude d'un projet de loi, celui-ci doit être distribué au moment où la motion est présentée. L'article 184 du règlement s'applique essentiellement pour des projets de loi qui n'ont pas été présentés à l'Assemblée antérieurement. En l'espèce, le projet de loi n° 89 a été présenté le 19 décembre 1996; il a donc un caractère public depuis cette date. Il a été aussi distribué le jour même à tous les députés. Alors, pour ces différentes raisons, je décide finalement que cette motion est recevable.

Avant d'entreprendre le débat restreint de deux heures, nous allons, pour quelques minutes, nous retirer pour nous entendre sur la répartition du temps.

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rapidement, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Sans vouloir brimer d'aucune façon les dispositions de l'article 41 de notre règlement, dans votre décision, vous avez mentionné que le projet de loi avait été distribué avant, au mois de décembre 1996. Je pense que tout le monde va en convenir. Vous n'avez pas répondu – et je vous demande de le faire – à l'article qui dit: Celui-ci doit être distribué, pas avant, pas après – l'article est très clair – au moment où la motion est présentée. Est-ce qu'à votre connaissance un projet de loi a été distribué au moment où la motion a été présentée?

Le Vice-Président (M. Brouillet): On ne dit pas «redistribué», mais «distribué».

M. Paradis: Au moment.

Le Vice-Président (M. Brouillet): «Distribué au moment» et non pas «redistribué». Alors, c'est évident – ha, ha, ha! – dans le contexte, qu'on distribue une loi qui n'a pas déjà été distribuée. Si on avait voulu dire, si vous voulez, qu'un projet de loi qui a déjà été distribué devrait l'être encore à nouveau, on aurait dit «redistribué au moment». Alors, ceci dit, ça clôt, si vous voulez, la discussion sur la recevabilité.

M. Paradis: Je vous demande juste, M. le Président, là... Votre décision est claire. Le projet de loi a été distribué avant le dépôt, le projet de loi comme tel. Je ne demande pas une redistribution; je vous indique spécifiquement: Est-ce que, au moment où la motion du leader du gouvernement a été déposée – parce que c'est le règlement qui le dit, là; ce n'est pas le leader de l'opposition – à ce moment-là, au même moment, il y a eu distribution du projet de loi aux députés?

(21 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. Le sens de l'article, c'est que c'est évident qu'on doit faire la distribution au moment même pour que les gens puissent prendre connaissance, pour que les gens aient connaissance du projet au moment même où on vote la suspension des règles. Si ce projet de loi a déjà été distribué, les gens, au moment même où on se prononce sur la motion, ont déjà pris connaissance du projet. Alors, à ce moment-là, c'est évident que l'article est très clair et que ça vise les projets qui n'ont pas déjà été distribués.

M. Paradis: M. le Président, strictement dans le même sens...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rapidement, M. le leader de l'opposition, une dernière fois.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je comprendrais si le règlement me disait: Si le projet de loi a été distribué avant, il n'a plus besoin d'être distribué. Mais ce n'est pas ça que le règlement dit, et c'est là-dessus que je vous demande un éclaircissement. «Celui-ci – le projet de loi – doit être distribué au moment où la motion est présentée.» Est-ce qu'à votre connaissance, au moment où le leader a présenté sa motion, il a distribué le projet de loi ou si vous décidez que, vu que ça a été fait il y a six mois, c'est le moment, ça, de la présentation de la motion du leader du gouvernement? C'est ça que vous décidez?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce n'est pas ça que je dis. L'interprétation du texte est très claire: il signifie qu'on doit le distribuer au moment où on aborde la suspension des règles – ce qui n'est pas dit explicitement, mais c'est évident dans le contexte – pour les projets de loi qui n'ont pas déjà été distribués.

M. Paradis: Est-ce qu'à ce moment-là les amendements qui ont été adoptés en commission parlementaire ont été distribués?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ces amendements seront présentés et connus par les gens quand on fera l'étude du projet de loi, la suite du projet de loi actuellement. Vous allez les connaître en temps et lieu. Vous connaissez actuellement le projet de loi, et c'est ça qui est dit. On ne dit pas «les amendements»; on dit «le projet de loi». Le projet de loi a déjà été distribué. Alors, je suspends pour que nous nous entendions sur la répartition du temps.

(Suspension de la séance à 21 h 42)

(Reprise à 21 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, après discussion, j'en arrive à la conclusion, dans la répartition du temps, qu'il y aura 10 minutes de réservées pour les députés indépendants et le reste du temps sera réparti 50-50 entre les deux groupes parlementaires. Il n'y aura aucune limite de temps individuel dans les prises de parole et le temps non utilisé par un groupe pourra être utilisé par l'autre groupe de façon équitable, à ce moment-là. Dans le cas des indépendants, on le partagera en parts égales.

Alors, maintenant, nous sommes prêts pour le débat de deux heures, et je serais prêt à reconnaître le premier intervenant.

M. Paradis: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. En vertu des pouvoirs et fonctions qui sont dévolus à la présidence de l'Assemblée nationale et dont nous avons fait l'énumération tantôt, parmi vos fonctions, vous avez l'obligation et le devoir de protéger les droits des députés, particulièrement quand ils sont minoritaires en cette Assemblée. Est-ce que, pour rendre votre décision, vous avez avisé, contacté ou demandé aux députés indépendants quel était leur souhait quant à leurs interventions dans ce débat?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez, les députés indépendants le savent, quand il y a des débats restreints, on réserve toujours une période de temps pour eux. Mais on ne peut pas les forcer à venir s'exprimer ici. Ils ont la liberté de le faire. Deuxièmement, vous savez très bien que, quand ils ne viennent pas, c'est la coutume que nous distribuions le temps non utilisé par les indépendants entre les deux groupes parlementaires qui sont ici présents. Alors, c'est, si vous voulez, la coutume depuis toujours, ici, en cette Chambre.

M. Paradis: M. le Président, je ne peux pas m'empêcher de déplorer que la présidence n'ait pas fait ces efforts, mais, dans les circonstances et compte tenu que c'est un projet de loi qui affecte, dans la société, les plus démunis, ceux et celles que nous recevons à nos bureaux de comté les fins de semaine, je vous suggérerais, à ce moment-ci, que l'on partage la suggestion faite par le leader du gouvernement et que le temps alloué aux indépendants soit de 20 minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous pouvons très bien; c'est ce que j'avais suscité tantôt comme consentement. Alors, si vous voulez 20 minutes, moi, je suis tout à fait disposé à ce que ça soit 20 minutes qui soient réservées et que le reste soit distribué 50-50, moitié-moitié. Et le 20 minutes non utilisé pourra être redistribué à parts égales entre les deux groupes parlementaires.

M. Paradis: Question de précision, M. le Président. Compte tenu que vous avez alloué, suite à votre décision, aux indépendants 20 minutes, de quelle façon, si tous les indépendants se présentent, le temps va-t-il être partagé?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous attendons vers la fin. Ce n'est pas d'aujourd'hui que nous gérons cette situation-là, et on l'a toujours gérée de façon équitable. Alors, nous réservons, à la fin de tout, le 20 minutes pour les indépendants et on distribue de cinq à cinq et de cinq à cinq, jusqu'à temps qu'on arrive à zéro, tant que le temps ne sera pas écoulé. Et, s'il y a des indépendants qui arrivent, on partagera le reste du temps équitablement. Si les trois arrivent en même temps, on partagera équitablement le temps qui restera, à ce moment-là, à la fin, et ainsi de suite.

M. Paradis: Est-ce que je dois comprendre, M. le Président, de votre décision, que le temps des indépendants est un bloc de 20 minutes et qu'aucun des indépendants ne peut prétendre à utiliser le 20 minutes?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ça a toujours été, si vous voulez, la coutume, ici, on a toujours procédé comme ça: le temps réservé aux indépendants est distribué équitablement entre les indépendants qui sont présents.

M. Paradis: Je veux juste préciser ma question, M. le Président. J'ai demandé: S'il y a un seul indépendant qui se présente, est-ce que le temps qui lui est consacré, à ce moment-là, est de 20 minutes; s'il y en a deux, c'est 10 minutes chacun; s'il y en a trois, vous divisez par trois? Est-ce que c'est ça qu'on comprend de la décision que vous avez rendue? Parce qu'on entre dans un débat où les règles ne prévalent pas, les règles normales de division du temps; donc, il est important de les connaître, autant pour le parti ministériel que pour le parti de l'opposition, que pour les indépendants dont vous êtes le protecteur.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le 20 minutes – nous avons toujours agi de cette façon-là – sera divisé en trois, et chaque individu a droit à un tiers du 20 minutes. C'est clair, ça.

M. Paradis: Oui, oui, je comprends ça.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vous vouliez de la clarté, c'est la clarté. Alors, nous sommes prêts maintenant à commencer le débat, et je serais prêt à reconnaître le premier intervenant...

M. Paradis: M. le Président, je comprends que, s'il y en a trois, vous divisez le temps en trois. S'il y en a un seul, est-ce qu'il possède 20 minutes de droit de parole? On «peut-u» être plus clair?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, non. Ce que j'ai dit... Non, non, s'il est tout seul, il n'aura pas son 20 minutes. Il aura le tiers du 20 minutes, et le temps non utilisé, pour les autres, sera réparti équitablement.

M. Paradis: M. le Président, je veux essayer de comprendre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, écoutez, asseyez-vous, je vais vous l'expliquer. Asseyez-vous, je vais vous expliquer un peu, là. Vingt divisé par trois...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le président prend toujours une fraction de seconde pour se lever et s'asseoir entre les deux. Alors, chacun a droit à un tiers de 20. Et puis c'est ça. Ce qui n'est pas utilisé sera réparti équitablement.

Alors, je suis prêt à reconnaître le premier intervenant. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

M. Bélanger: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Quel point de règlement?

M. Paradis: Un éclaircissement sur la décision que vous venez de rendre, M. le Président, quant au temps qui est non utilisé soit par les indépendants, soit par le parti ministériel. Est-ce que ce temps-là accroît, suivant la décision que vous avez rendue, à ce moment-là, à l'opposition officielle?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ça s'accroît à qui? Pardon?

M. Paradis: Si le temps n'est pas utilisé soit par les indépendants, soit par la partie ministérielle, est-ce que le temps non utilisé accroît à l'opposition officielle?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le temps non utilisé par un parti ou l'autre et le temps non utilisé par les indépendants est distribué équitablement entre les deux partis. S'il y en a un qui ne veut rien prendre, ça va à l'autre. On a deux heures. On a le droit d'aller jusqu'à deux heures. M. le leader du gouvernement.


Débat sur la motion


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, je suis certain que les gens qui nous écoutent vont beaucoup apprécier l'effort pédagogique qu'a fait le leader de l'opposition à vraiment expliquer... Je pense que ça va être la première fois depuis que nos débats sont télévisés qu'on va aussi bien expliquer comment est réparti le temps des indépendants lors du débat restreint de deux heures sur une motion de suspension des règles. Alors, je le remercie. Je pense que ça doit faire partie de la contribution du leader de l'opposition à la réforme parlementaire, ce cours pédagogique sur la répartition du temps des indépendants, et je suis certain que l'ensemble des gens qui nous écoutent, que la population qui nous écoute actuellement va être redevable de cet effort pédagogique de mon bon ami le leader de l'opposition.

M. le Président, ce débat de deux heures commence sur cette motion de suspension des règles que j'ai présentée. Tout à l'heure, lors de la question de la recevabilité, comme je le disais, je dois l'admettre, je n'ai pas été ébranlé par le vibrant plaidoyer du leader de l'opposition qui a tenté de nous soutirer toutes les larmes de notre corps sur cette... C'est ça qui est drôle: à chaque fois que l'opposition déchire sa chemise en velcro à propos d'une motion de suspension des règles, c'est un peu comme si c'était la première fois que ça se faisait, comme si c'était un geste totalement antidémocratique qu'on sorte une loi d'exception, une loi spéciale qui nous arrive, qui nous est imposée par l'au-delà, alors que, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, M. le Président, c'est prévu essentiellement à notre règlement, cette possibilité pour le leader du gouvernement de suspendre les articles du règlement et de suspendre les articles qu'il veut bien. C'est la prérogative du gouvernement, du leader du gouvernement et de la majorité de faire adopter les projets de loi dont le gouvernement a besoin. C'est ça qui est le principe qui est consacré par cet article 182 qui prévoit la suspension de certaines règles.

M. le Président, je crois qu'il faut vraiment regarder ça dans le contexte, surtout que, dans d'autres Parlements, il existe les mêmes pouvoirs, mais ces pouvoirs sont encore plus absolus que ceux qui existent dans notre règlement actuel. À la Chambre des communes, quand le leader du gouvernement se lève, il n'y a pas, comme on le voit présentement, cette espèce d'échange, on pourrait dire, d'argumentation. Le leader du gouvernement se lève et dit: Le débat finit dans deux heures, et c'est fini. On n'insiste pas.

Quant à moi, dans notre réforme du règlement, je pense qu'il faudrait trouver un moyen pour essayer peut-être d'écourter ce genre – excusez-moi l'expression – de plaidoirie qui, quant à moi, apporte peu comme contribution à notre débat parlementaire, tout en respectant le droit d'invoquer l'irrecevabilité. C'est un droit qui existe, mais je ne crois pas que ça éclaire nos débats. Je ne pense pas que ça apporte non plus grand-chose à nos débats ou aux gens qui écoutent nos débats.

(22 heures)

Donc, j'ai présenté cette motion de suspension des règles. Le leader de l'opposition a parlé évidemment d'improvisation du leader, de malplanification des travaux. J'étais inquiet d'ailleurs, parce que, voyez-vous, ça faisait à peu près trois mois que le leader de l'opposition n'avait pas parlé. Alors, je me demandais s'il était souffrant, malade ou peut-être... J'ai dit: Ça fait trois mois qu'il n'a pas parlé de l'improvisation du leader du gouvernement, il doit être faible, il doit se passer quelque chose. Alors, ça me rassure. Je pense qu'il est en pleine forme. Il a encore parlé de l'improvisation du leader du gouvernement, de l'improvisation du gouvernement, et ça me rassure de voir que toutes les facultés du leader de l'opposition sont bien en la possession de l'individu, et je crois que ça va être rassurant pour la suite de nos travaux, M. le Président.

Maintenant, M. le Président, il faut aussi comprendre. Pourquoi nous retrouvons-nous avec une motion de suspension des règles? Alors, sans présumer de ce qui va se dire, j'imagine que la cible va être notre ministre de la Justice, oui, la cible va être notre ministre de la Justice, M. le Président, et ça serait, je crois, tout à fait en accord avec le porte-parole de l'opposition en matière de justice: lui, tout débat ne porte pas sur la justice, mais sur le ministre de la Justice. Personnaliser des débats, c'est ce qu'il fait le mieux en cette Chambre. Ce n'est pas le projet de loi qu'il critique, c'est le ministre. Même si le projet de loi est bon, ce n'est pas grave, ça ne marche pas; c'est parce que c'est le ministre qui l'a présenté.

Alors, vous comprendrez, M. le Président... quand on est dans une telle dynamique, comment peut-on arriver à ce moment-là à ce qu'un projet de loi, aussi bon soit-il – et je crois énormément, moi, au projet de loi qui est présenté par le ministre de la Justice – comment peut-on imaginer qu'un projet de loi va passer toutes les étapes en cette Chambre? Quand on fera le bilan de cette session, je pense qu'on pourra, tous les parlementaires en cette Chambre, être fiers du nombre de projets de loi qui vont avoir été passés et, en même temps, de toutes les étapes qui auront été franchies par tous les projets de loi. Je pense que c'est très important. C'est très important pour les gens qui savent de quelle façon, justement, le travail normal entre une opposition et un gouvernement...

Quand il y a un débat, on peut ne pas être d'accord sur un projet de loi, sur l'objectif d'un projet de loi, sur les moyens qu'on utilise pour faire un projet de loi ou les moyens visés par un projet de loi. Mais, à ce moment-là, M. le Président, je crois que le devoir de l'opposition, c'est de faire des débats constructifs. Et je crois que, dans la très grande majorité des projets de loi qui ont été adoptés au cours de cette session, on a eu des divergences, il y a des points sur lesquels on n'était pas d'accord, mais je crois qu'il y a eu des débats constructifs. Et la preuve, c'est que, comme je vous dis, M. le Président, 99 %, on pourrait dire, des projets de loi auront franchi toutes les étapes en cette Chambre. Il y aura eu des votes sur division, il y aura eu des votes pour et des votes contre, mais il y aura eu des débats, comme ça doit se faire dans un Parlement normal.

Et là, M. le Président, quand je regarde le député de Chomedey qui travaille... Je suis beaucoup ses travaux. On n'a pas le choix, M. le Président, parce qu'à ce moment-là, quand on ne suit pas assez ses travaux, il nous le rappelle par ses interventions en Chambre très remarquées. Je n'ai pas dit «remarquables», M. le Président, «remarquées».

Une voix: Modestes.

M. Bélanger: Non, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, je ne dirais pas «modestes», je ne dirais pas que ses interventions sont modestes. Alors, on remarquera, M. le Président, que c'est dur de dire vraiment que c'est constructif, les échanges apportés par le député de Chomedey. Et encore là, M. le Président, je ne veux prêter aucun motif indigne au député de Chomedey, parce que je respecte notre règlement, mais c'est toujours la faute du ministre de la Justice, c'est des procès d'intention. Ça, des procès d'intention, je pense que dans notre règlement, juste pour le député de Chomedey, il va falloir inclure dans notre règlement qu'il est interdit de faire des procès d'intention; ça va être l'article «député de Chomedey», je crois qu'on pourra l'appeler ainsi, parce que des procès d'intention, c'est sa spécialité: il voit partout des intentions, puis les intentions du ministre de la Justice dans ses projets de loi. Alors, je crois que ce n'est pas ça, le rôle d'une opposition, M. le Président, de chercher absolument toujours le coupable, même si coupable il n'y a pas. Je crois, au contraire, que ce qu'on doit faire en cette Chambre, c'est de débattre l'opportunité de projets de loi, les buts utilisés, les buts visés. On peut ne pas être d'accord sur les buts visés, mais, à ce moment-là, faisons des débats.

Et je vais récupérer ma petite note, M. le Président, parce que, voyez-vous, pendant la suspension de nos travaux, j'ai calculé à quelle vitesse la commission des institutions, qui faisait l'étude du projet de loi n° 89, fonctionnait. Parce que la question qu'on va nous demander, c'est: Pourquoi une motion de suspension des règles, M. le leader du gouvernement, sur ce projet de loi tellement important? Bien, c'est parce que le député de Chomedey, il ne veut pas que ce projet de loi là passe, à tout prix, il ne le veut pas; il veut absolument le bloquer à tout prix, ce projet de loi. Quand on considère qu'on a passé 27 heures pour 16 articles, que le projet de loi comporte 916 articles! Alors, on a fait un petit calcul, M. le Président: ça fait 1 620 minutes pour 16 articles, ça fait 101 minutes pour un article. Alors, 101 minutes fois 916 articles, ça fait environ 92 745 minutes dont on devrait avoir besoin. Alors donc, on a calculé à peu près que, si on suit le rythme du député de Chomedey, ça nous prendrait trois ans pour passer le projet de loi du ministre de la Justice. Trois ans, M. le Président, trois ans. Alors, est-ce qu'on va nous reprocher de faire une motion de suspension des règles pour faire avancer – oui, avant la fin du mandat, hein – le projet de loi qui est attendu depuis longtemps?

Quand j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, j'avais dénoncé le gouvernement libéral qui nous annonçait depuis des années une réforme des tribunaux administratifs. Il nous l'annonçait. Je me souviens même de Rémillard qui était à ce moment-là ministre de la Justice – Gil de son prénom – qui avait sorti une espèce de petite réformette des tribunaux administratifs. Il l'avait sortie à la toute fin de la session. Ça avait été dénoncé par tout le monde. Je pense que ça couvrait à peu près juste cinq ou six tribunaux administratifs, et ça avait dû être retiré en toute catastrophe. C'était ça, à peu près, la volonté politique du gouvernement libéral de faire une réforme de nos tribunaux administratifs.

On a un ministre qui a décidé de faire une réforme des tribunaux administratifs, et il savait, quand il a entrepris cette réforme, qu'évidemment, à partir du moment où on fait une réforme des tribunaux administratifs, ça va soulever de l'opposition, parce que, évidemment, on change des habitudes, on change des comportements. Les tribunaux administratifs, c'est excessivement important dans notre système judiciaire et dans notre système administratif. Mais ça n'a pas empêché le ministre de la Justice de, premièrement, présenter son projet de loi qui créait cette réforme des tribunaux, ce projet de loi qui a été adopté. Ce projet de loi là a été adopté, donc le projet de loi majeur, qu'on pourrait dire, de fond, lui a été adopté. Ça, c'est uniquement une loi d'application.

Alors, la loi de fond, elle a été adoptée, et là, maintenant, on est en train de faire une bataille sur la loi d'application. Moi, je n'ai jamais compris ça, pourquoi l'opposition voulait bloquer la loi d'application. Je n'ai jamais compris ça. Je n'ai jamais compris ça parce que... Est-ce que l'opposition s'imagine que le gouvernement va retirer le projet de loi qu'elle a adopté parce qu'on bloque la loi d'application? M. le Président, je ne peux supporter cette hypothèse, car on m'accuserait de porter atteinte à l'intelligence de l'opposition, je crois, si je supportais une telle hypothèse, et je ne peux le faire en vertu de notre règlement. Ce serait, à ce moment-là...

M. Fournier: ...

M. Bélanger: Ce ne serait pas gentil, comme le dit le député de Châteauguay. Donc, à ce moment-là, je ne le ferai pas, M. le Président, je ne le ferai pas.

Et je suis certain que le député de Châteauguay, d'ailleurs, va intervenir dans ce débat de deux heures. J'ai beaucoup hâte de voir... D'ailleurs, le ministre de la Justice me disait: Quand c'était le député de Châteauguay qui était critique en matière de justice, pendant quelques jours, ça a été formidable. On m'a dit que ça a été formidable, que c'était constructif, que ça avançait. Le député de Saint-Jean m'a dit exactement la même chose: Il nous a manqué, le député de Châteauguay; c'était constructif, lui, sa contribution. Et le député de Verdun aussi. Il nous a habitués, lui aussi, à des débats constructifs, le député de Verdun, en cette Chambre, un parlementaire de longue expérience. On n'est pas toujours d'accord avec ce qu'il dit, mais ce sont toujours des débats constructifs.

J'aimerais pouvoir en dire autant du député de Chomedey. J'aimerais. J'aimerais, mais je ne peux pas. Je ne peux pas. En toute honnêteté avec moi-même, M. le Président, je ne peux pas le dire. Non, le député de Chomedey, lui, a décidé de bloquer à tout prix, de faire un blocus ou de faire un barrage systématique et de dire: Ce projet de loi ne verra jamais le jour. Alors, que doit faire un gouvernement face à une telle obstruction systématique qui est, en vertu de notre règlement, légale, réglementaire? Eh bien, en vertu de notre règlement, on fait une motion de suspension des règles comme on se doit de le faire présentement. Parce que sinon ça voudrait dire quoi? Ça voudrait dire que le député de Chomedey peut bloquer tous les projets de loi du ministre de la Justice. Je le sais, si on le laissait faire, c'est probablement ce qu'il voudrait faire. Mais on ne peut pas faire ça. Je crois, à ce moment-là, que ça serait porter préjudice au Parlement, parce qu'on est 125 députés qui sommes élus en cette Assemblée. Il n'y a pas juste le député de Chomedey qui est élu en cette Chambre.

(22 h 10)

Alors donc, vous comprendrez pourquoi, M. le Président, il y a urgence. Le ministre de la Justice va intervenir un peu plus tard dans le débat pour nous expliquer pourquoi il y a urgence. Il y a urgence parce que, premièrement, le Québec a attendu beaucoup trop longtemps pour une réforme des tribunaux administratifs, beaucoup trop longtemps. Et, je crois, aussi, il y a des nominations à être faites au niveau de certaines instances qui ont été retardées plutôt que de les faire – et ça, on doit donner crédit au ministre de la Justice... Plutôt que de faire des nominations dans un genre de vide juridique, comme ça existe présentement – parce que des normes, il y en a peu – le ministre de la Justice a préféré attendre plutôt que la réforme soit adoptée afin de les faire selon les normes qui sont établies par la réforme des tribunaux administratifs. Et je crois que c'est important de le souligner, M. le Président.

Mais on comprendra aussi qu'au niveau de plusieurs instances de nos tribunaux administratifs on ne peut plus attendre. Il y a des nominations à être faites, il y a cette réforme à être entreprise. Puis, quand on connaît aussi l'ampleur de la réforme qui est envisagée par notre gouvernement, c'est plusieurs mois dont on parle pour mettre sur pied une telle administration, des nouvelles instances qui vont être créées. Et c'est pour ça qu'on en a besoin, donc, de cette réforme des tribunaux administratifs.

J'ai bien hâte, M. le Président, d'entendre,au cours de ces deux heures – un peu moins de deux heures maintenant, puisque j'ai pris quelques minutes relativement à ce débat – de voir les arguments qui vont être invoqués. Le député de Châteauguay va intervenir, je suis certain. En tout cas, j'espère que le député de Chomedey pourra s'inspirer des interventions du député de Châteauguay, surtout de l'esprit de ses interventions qui, je l'espère... En tout cas, M. le Président, vous savez, on ne peut porter de motifs indignes ou prêter d'intentions, donc je suis certain que ce seront des échanges constructifs que nous aurons. Mais, M. le Président, je crois qu'on ne pouvait plus attendre. Le débat a été fait; le débat a été fait partout – je regarde les différents intervenants – tant sur le premier projet de loi ou la première loi qui a été adoptée comme telle, sur le fond, que sur actuellement la loi d'application.

Et le député de Châteauguay me montre la lettre du Barreau du Québec. Évidemment, M. le Président, le Barreau du Québec aurait voulu probablement que certaines choses soient corrigées par rapport... Écoutez, c'est impossible de faire une réforme, je crois, où tout le monde, là, a ce qu'il veut. Je crois que c'est important. Le Barreau a toujours eu une contribution importante dans tous les projets de loi qui touchent la justice. Mais il peut arriver aussi que certaines réformes aient lieu et que le Barreau ait une opinion dissidente par rapport à une réforme. Ça, je crois qu'il faut respecter sa dissidence, en prendre compte, de sa dissidence, mais ce sont des choses qui peuvent arriver, M. le Président. Et on ne doit pas, parce qu'il y a eu à un moment donné une dissidence au niveau de la réforme des tribunaux administratifs, arrêter toute réforme, dire qu'il n'y aura pas de réforme. Ça, je pense qu'on ne peut pas faire ça, ça serait irresponsable et ça serait faire en sorte, je crois, de retarder cette réforme des tribunaux administratifs.

Et pourquoi elle était aussi tellement urgente, cette réforme? Je me souviens très bien, M. le Président, quand j'étais dans l'opposition, d'avoir dénoncé et d'avoir souligné au ministre de la Justice de l'époque, le député de Jean-Talon, que nos tribunaux administratifs étaient de plus en plus contestés quant à leur impartialité, de par leur composition, de par leur création et qu'il était urgent à ce moment-là qu'on fasse une réforme globale de notre système des tribunaux administratifs, car sinon ça allait être l'ensemble de notre système des tribunaux administratifs qui serait mis en péril par une décision d'un tribunal qui les déclarerait à ce moment-là soit inconstitutionnels ou contraires à nos Chartes. Donc il fallait agir. Nous avons agi, nous avons donc adopté le premier projet de loi. Cette loi d'application, quant à moi, était plus qu'attendue. C'est 916 articles, c'est vrai. C'est un projet, on pourrait dire, au niveau du nombre d'articles, qui est imposant, mais beaucoup de ces articles, aussi, il y a de la concordance. Il y a de la concordance relativement à ces articles-là. Une fois qu'on a fait le débat sur un certain groupe d'articles, les autres, M. le Président, ne sont que de concordance et ne font que se suivre.

Donc, moi, je crois que, s'il y avait eu vraiment une volonté, surtout de la part du député de Chomedey, à ce que cette réforme passe, mais tout en étant... Il aurait pu être dissident. Il pouvait ne pas être d'accord, essayer d'alerter l'opinion publique relativement à ce qu'il aurait voulu voir dans cette réforme. Ça, je comprends ça. Je pense que c'est le travail de l'opposition, ça, de faire en sorte d'alerter l'opinion publique sur ce que l'opposition pense qui n'est pas correct. C'est correct, ça, de faire un tel travail d'opposition. Mais ce qui, d'après moi, est moins correct, c'est de faire en sorte de bloquer systématiquement, de faire en sorte que l'étude du projet de loi ne bouge plus du tout, soit complètement paralysée. Puis, quand on dit: 16 articles sur 916 en 25 heures et demie, ça va être difficile de plaider qu'on voulait que cette réforme ou que l'étude du projet de loi avance. Parce que 16 articles sur 916 en 25 heures et demie, on comprendra, je crois, qu'un effort intellectuel peut-être plus prononcé, un effort, je dis bien, aurait permis un avancement plus progressif, à ce moment-là, de l'étude de ce projet de loi.

Donc, M. le Président, je soumets donc à cette Assemblée nationale, aux membres de cette Assemblée, d'adopter cette motion de suspension des règles. Oui, il y a urgence. Les députés, par leur vote, s'exprimeront, à savoir s'il y a urgence, et c'est ça, la portée de notre article 182. Et, moi, je suis confiant que, donc, les membres de cette Assemblée se prononceront en faveur de la motion de suspension des règles en faveur du projet de loi.

J'aurais voulu, quant à moi, qu'on prenne le temps d'étudier ces articles-là. Mais, à ce moment-là, évidemment, ça aurait pris la collaboration du député de Châteauguay, M. le Président... pas de Châteauguay, Chomedey, M. le Président. Je m'en excuse auprès du député de Châteauguay, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Anjou et leader du gouvernement. Nous cédons maintenant la parole au député de Châteauguay et leader adjoint de l'opposition.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Merci, M. le Président, et à mon collègue de Verdun aussi pour sa prestation.

M. le Président, j'écoutais le leader du gouvernement, et ça prend un certain culot pour venir nous dire qu'il plaide l'urgence, alors qu'on se souvient... Et il attendait la réplique et je vais la lui donner. Alors que, depuis un mois, la commission des institutions n'a pas siégé pour étudier le projet de loi, tout à coup il y a urgence. Depuis un mois que le ministre refuse d'aller s'asseoir à la commission des institutions pour aller étudier les articles en question, depuis un mois qu'il ne le fait pas, et là, tout à coup, il y aurait urgence, alors qu'on peut encore siéger jusqu'à lundi, il y aurait urgence, tout à coup, quand ça fait un mois que le ministre chôme à l'égard du projet de loi n° 89.

Le leader nous a parlé des 916 articles – 916 articles – concernant un projet de loi sur la justice. Ce n'est pas rien, M. le Président, la justice. C'est au coeur de nos institutions. 916 articles. Il y en a qui touchent à 111 lois du Québec, dans tous les secteurs d'intervention étatiques, 916 articles. Vingt-cinq heures, 26 heures, peut-être, à peu près deux minutes par article qu'on concède à l'opposition pour faire, dit le leader, ce qui est un travail normal de l'opposition. Il nous concède ça, M. le Président. Il nous concède que l'opposition peut alerter l'opinion publique. Avec deux minutes par article pour 916 articles, on n'aura même pas le temps de les lire, les articles. Comment pensez-vous qu'on peut alerter l'opinion publique?

Ça fait un mois que le ministre chôme, refuse de venir s'asseoir à la commission des institutions pour étudier le projet de loi. Et vous allez me dire: Qu'est-ce qui s'est passé pendant ces heures où nous avons analysé quelques articles du projet? Bien, je vais vous le dire. Parce que, tantôt, le leader disait que notre collègue de Chomedey et d'autres qui avons participé à ça faisions de l'obstruction. C'est faux, M. le Président! L'obstruction, c'est le ministre de la Justice lui-même qui la faisait. Et, pour preuve, je dois vous rappeler qu'il nous a déposé des amendements et, après ça, il a déposé des motions pour battre ses propres amendements. Il nous a plaidé des affaires sur la loi sur les stupéfiants alors qu'on était en train de parler de la deuxième loi visée, la Loi sur l'acquisition des terres agricoles par des non-résidants. Il nous a tenus comme ça, en prenant des 20 minutes; il s'est autofilibusté, M. le Président. C'est ça qu'il a fait, le ministre de la Justice. Et pourquoi? Pour la même raison qu'aujourd'hui on fait une motion pour suspendre les règles. Il a pris le temps, il a fait lui-même de l'obstruction sur son projet de loi. Encore une fois je vous rappelle qu'on avait concédé deux minutes par article; c'est ça qu'on a concédé. Et pourquoi il a utilisé le temps pour bloquer son propre projet de loi? Pourquoi il y a une motion de suspension des règles? C'est parce qu'ils ne veulent pas, du côté ministériel, que nous alertions l'opinion publique, que nous faisions écho.

(22 h 20)

Le leader disait, M. le Président: C'est juste l'opposition, tous les intervenants sont d'accord. Bien, je lui ai montré la lettre tantôt. Il a dit: Ah oui, il montre la lettre du Barreau! Et c'est celle-ci, M. le Président. Dans le domaine de la justice, il y a un groupe qui est un peu spécialiste, on pourrait appeler ça là, des gens qui suivent ça pas mal de proche. On a même créé une corporation professionnelle pour ces gens-là: le Barreau du Québec. C'est leur travail, on compte sur eux pour s'assurer que nos institutions et la façon dont elles sont menées, que les citoyens du Québec, que nous représentons tous ici en cette Chambre, lorsqu'ils ont des droits, que ces droits soient respectés et non pas réduits et non pas éliminés, comme le fait le ministre de la Justice. Et c'est pour ça qu'il s'est lui-même fait de l'obstruction, qu'il nous a empêchés de siéger depuis un mois et qu'aujourd'hui il nous arrive avec une motion de suspension des règles pour finir ça rapidement, à la fin de la soirée, en fin de session, pour éviter qu'on s'aperçoive quel est le sujet de ce projet de loi, pourquoi les spécialistes comme les avocats du Barreau ont des inquiétudes, pour éviter qu'on fasse écho à tous ces gens au Québec, tous ces travailleurs, tous ces gens impliqués dans les agences de voyages, le camionnage, la construction.

Vous allez me dire: Mais pourquoi vous me parlez de ça? Alors qu'on parle de la justice administrative, pourquoi vous me parlez de développement économique, d'emplois? Parce que, M. le Président, ce projet de loi enlève des droits à des citoyens, met en péril des entreprises, amène des gens sur le chômage. C'est ce que ça fait. Et il y a des gens qui vont dire en cette Chambre, j'en vois de l'autre côté qui se disent: Bien, de quoi il parle? Bien, justement, si on avait eu le temps d'alerter l'opinion publique, si on avait eu le temps de faire un débat, ils se seraient aperçus que, dans de nombreux secteurs d'activité, et je vais les identifier... quelques-uns, je ne peux pas tous les faire, M. le Président, il y a 111 lois. Regardez ça, lorsqu'on tourne les pages, c'est toutes des lois qui sont modifiées, toutes des lois, tous des secteurs d'activité, des gens qui, dans nos comtés, travaillent dans ces secteurs-là et où l'administration vient prendre des droits et leur enlever des droits.

Il était assez normal que le Barreau s'inquiète. Ce qui n'est pas normal, c'est que le ministre de la Justice dise: Le Barreau, ce n'est pas important; c'est un petit groupe comme ça sur le côté; moi, je suis le ministre de la Justice dans le gouvernement du premier ministre, puis, moi, là, je sais comment ça marche; ce que le monde pense, ce n'est pas important, ils vont suivre. C'est du dirigisme, M. le Président, comme dans bon nombre d'autres lois qui ont été adoptées.

Je voudrais simplement mentionner ici, dans le temps qui m'est imparti, les impacts que ça a. Les impacts de ce projet de loi qui est intimement lié au projet de loi n° 130 qui, lui-même – je ne reviendrai pas là-dessus longtemps – lui-même, le projet de loi n° 130 enlevait des droits d'appel, M. le Président, une quarantaine de droits d'appel qui ont été retirés à ceux qu'on représente... On n'est pas, de ce côté-là, en train de bâtir une société plus juste, on est en train de bâtir une société avec moins de justice. C'est ça qui se passe lorsqu'on enlève des droits. Et ce qu'il y a de pire, M. le Président, c'est que dans le programme... je ne sais pas si vous reconnaissez ce programme-là, M. le Président, le programme Pour se faire élire du Parti québécois, simplement pour se faire élire. Il y en a qui appellent ça un programme électoral, mais, dans le cas du Parti québécois, après tous les crocs-en-jambe qu'ils ont donnés à leurs engagements, c'est vraiment un programme juste pour se faire élire; au lendemain de l'élection, on ne s'en souvient plus. Or, il était bien dit, M. le Président, dans ce programme Pour se faire élire , que les droits d'appel, suite à la création d'un tribunal administratif, seraient protégés, des droits d'appel devant la chambre administrative de la Cour du Québec et de la Cour supérieure, c'est ce qui est écrit dans les engagements du ministre lui-même. Lorsqu'il arrive au gouvernement, ces engagements, M. le Président, ne valent plus rien. Quarante droits d'appel ont donc été enlevés sur le projet de loi n° 130. Mais ce n'est pas tout. Ce n'est pas tout. Ce qui suit le projet de loi n° 130, c'est le 89. Alors, à tous ceux qui sont visés par les 111 lois – ça va de ceux qui font de l'élevage d'abeilles, M. le Président, à ceux qui font de la construction, tout ce monde-là vient de perdre, avec le 130, des droits d'appel – eh bien, maintenant, avec le 89, on leur enlève le droit d'être entendu, droit fondamental, M. le Président. C'est quoi, le droit d'être entendu? Les gens peuvent se demander ce que ça veut dire, puis on va le voir tantôt comment ça s'exprime dans divers secteurs d'activité. Pensez-y, quand on vous enlève le droit d'être entendu, en matière administrative, on est en train de vous dire que l'administration peut prendre des décisions. L'administration, c'est le gouvernement. On ne se cachera pas pour dire c'est qui l'administration, ils sont en face de nous. Puis là, ils se donnent des droits, puis ils en enlèvent aux autres. C'est ça qui se passe. Le droit d'être entendu, ça veut dire que, lorsque l'administration prend des décisions, on est capable de faire des représentations, on est capable de présenter une preuve, des témoins, on est capable – et ça, c'est important – de contre-interroger, d'être informé de la preuve qu'a l'administration, de la corriger, de la réfuter. C'est ça, le droit d'être entendu. Alors, si on vous enlève ce droit-là, le ministre de la Justice va se lever tantôt et il va dire: Ah oui, mais là il va avoir le droit de présenter des observations.

Autrement dit, les citoyens que nous représentons, dans tous les champs d'activité visés, 111 champs, tout le monde est touché; tout le monde, au Québec, est touché. Non seulement ils ont perdu des droits d'appel, mais le ministre de la Justice, qui invoque la réforme de la justice administrative qui n'est rien d'autre que plus d'administration et moins de justice, leur enlève maintenant le droit de vérifier ce qu'il y a dans les cartons de l'administration. Et là on se demande comment ça se fait que l'opposition est outrée, comment ça se fait que l'opposition essaie de ramener le gouvernement à la raison. Ce n'est pas notre idée d'une société québécoise forte d'enlever des droits aux citoyens. Ce n'est pas ça, nous, notre marque de commerce. C'est peut-être la leur. Ils ont peut-être honte qu'on en parle, mais on va en parler, parce que c'est un mauvais choix, c'est un mauvais chemin. Ce n'est pas un chemin qui mène à la cohésion sociale, à la prospérité. Ce n'est pas un chemin modèle.

M. le Président, il y avait le premier ministre qui disait lorsqu'il est arrivé en fonction il n'y a pas si longtemps – il semble qu'il ait oublié les propos qu'il tenait: Seules les machines seront touchées, pas les citoyens. C'est ce que disait le premier ministre. Or, lorsqu'on regarde le débat sur le projet de loi n° 89, avec le projet de loi n° 130, c'est le contraire. Exactement le contraire. C'est du déjà vu, vous allez me dire, tous les engagements qui sont pris dans le discours du premier ministre se reflètent de façon contraire dans l'action. C'est toujours le contraire de ce qu'il dit qui est fait. Et, dans ce cas-là, c'est clair, ce sont les citoyens qui sont touchés. L'administration y gagne. Vous savez pourquoi? Le ministre de la Justice, durant les courtes heures que nous avons pu partager avec lui, nous a dit: C'est parce que c'est trop long, on a un problème. La justice administrative, elle est trop longue. Alors, on enlève la justice, on fait juste de l'administration, et ça va être beaucoup plus court. C'est une logique impeccable en termes de délai, mais tellement néfaste en termes de construction d'un Québec qu'on voudrait meilleur, M. le Président.

Je vous ai déjà dit qu'il y a 111 lois qui sont touchées, M. le Président, et j'aimerais qu'on les regarde et pas, à cette étape-ci, en fonction des droits d'appel, parce que le temps nous manque, et nous avons à regarder l'autre élément directement du projet de loi n° 89 qui est celui du droit d'être entendu. Et je voudrais qu'on prenne juste certains exemples du projet de loi lui-même, de quelques-unes; j'ai parlé de 111, je n'aurai pas le temps de faire le tour des 111 lois. Je n'aurai pas le temps. Bien que si nous avions eu la possibilité de siéger... Depuis un mois, le ministre refuse de siéger, refuse de voir comment sont affectés tous les gens qui sont soumis à ces 111 lois et il plaide l'urgence maintenant. C'est urgent qu'on n'en parle pas, M. le Président. C'est ça qui est urgent.

(22 h 30)

Lorsqu'on regarde l'ensemble... Je vais en prendre quelques-unes. La Loi sur les agents de voyages. Alors, imaginez qu'il y a un député du parti ministériel... Parce que, pour chez nous, on s'en est parlé: on a eu des caucus, on se l'est dit. Imaginons qu'il y a des députés ministériels qui ont des agences de voyages dans leur comté. À compter de l'adoption, si jamais le parti ministériel décidait d'aller à l'encontre de ses propres citoyens, décidait de voter ça, bien, les agents de voyages vont appeler à leur bureau de comté et ils vont leur dire: Votre ministre de la Justice vient de nous en passer toute une: maintenant, lorsqu'on veut, par décision de l'administration, annuler et suspendre mon permis d'agent de voyages, je n'ai même plus le droit de vérifier pourquoi, de vérifier la preuve de l'administration, je n'ai plus le droit d'être entendu. Grâce à qui? Grâce à lui, M. le Président, le ministre de la Justice, celui qui enlève la justice au Québec, celui qui enlève des droits à nos concitoyens, notamment les agences de voyages... C'est le premier cas que je cite ici. On me dit... Le ministre de l'Environnement qui est de l'autre côté et qui dit: Je pense qu'il en met... Il sent, il dit: Je pense qu'il en met. Il doit trouver que l'opposition n'est pas crédible. Il ne doit pas aimer ça. Je vais lui citer le Barreau. Je vais lui citer une lettre du Barreau du Québec. À moins qu'il n'ait pas de respect pour le Barreau du Québec, ce dont je doute. Je suis sûr qu'il respecte le Barreau du Québec. Je veux juste qu'il comprenne que, lorsque je soulève ces points-là, ce n'est pas parce qu'on a tiré ça d'un chapeau et qu'on essaie de faire du temps. Justement, on n'en a pas eu, de temps. J'essaie juste de convaincre l'autre côté. Je sais que le ministre de l'Environnement écoute quand on parle. Et je sais que parfois on peut le convaincre.

J'espère qu'il va écouter le passage que je vais lui citer. C'est le coeur de l'argumentation. C'est le Barreau du Québec, M. le Président, 28 mai 1997 – ça ne fait pas des lunes – toujours au ministre de la Justice. Je cite un passage: «La question de la déjudiciarisation du processus décisionnel pouvant mener à l'octroi ou au retrait d'un permis mérite une attention particulière. Souvent – là, je vais y aller tranquillement pour que les gens comprennent de quoi on parle – le gagne-pain d'un individu ou l'exploitation d'une entreprise dépendent de l'octroi d'un permis. L'approche retenue dans le cadre de la réforme sur la justice administrative aurait pour effet de permettre le retrait d'un permis par l'administration sans audition ni procédure contradictoire, puisqu'il s'agirait d'une décision qui relève de l'exercice d'une fonction administrative. Bien entendu, le justiciable pourrait avoir un recours en révision ou en appel au TAQ. Dans l'intervalle, cependant, il devra subir les conséquences souvent graves ou onéreuses de cette décision.»

Le ministre de l'Environnement, M. le Président, vient dire qu'il trouve ça correct que dorénavant les gens qui ont des agences de voyages et tous les autres cas, tous les citoyens, notamment ceux en vertu de l'assurance automobile qui peuvent vérifier les décisions prises par la Société de l'assurance automobile du Québec concernant leurs indemnités – c'est tous les Québécois, ça, M. le Président – ils n'aient plus le droit aujourd'hui à audition ni procédure contradictoire. Ils n'ont plus le droit de vérifier ce qu'il y a dans les cartons de l'administration. On a un ministre de l'Environnement, M. le Président, qui vient de nous dire que, lui, il est d'accord avec ça. On a un ministre de la Justice qui a comme vision de la société au Québec moins de droits pour le monde, une plus grosse administration, qui vient taper sur la tête de nos concitoyens dans tous les comtés du Québec.

Moi, M. le Président, je vous dis: Honte! Honte à ce gouvernement! Honte à ce gouvernement qui ne sait pas notre mandat. Nous avons un travail à faire ici – et je sais que je vais convaincre le ministre de l'Environnement – nous avons un travail à faire ici, c'est de bâtir le Québec, pas de le détruire. C'est d'aider, de protéger, de promouvoir les intérêts de nos concitoyens, pas de les attaquer, pas de leur enlever des droits. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le Barreau du Québec.

Est-ce que le gouvernement du Québec met de côté des opinions comme celle-là? Qu'est-ce qu'il dit aux agents de voyages? Qu'est-ce qu'il dit aux citoyens qui vont faire des réclamations d'indemnités en vertu de la Loi sur l'assurance automobile? Qu'est-ce qu'il dit aux agriculteurs, M. le Président, en vertu de la Loi sur l'assurance-récolte qui est touchée ici? Les décisions de la Régie concernant l'assurance-récolte: bien, maintenant on n'a plus le droit d'être entendu. La Régie prend ses décisions et vous n'avez même plus la possibilité d'aller vérifier les raisons de cette décision, de contre-expertiser. Impossible, M. le Président.

Des dossiers, des secteurs d'activité, c'est partout à la grandeur du Québec. Loi sur le bâtiment, révocation d'un permis de construire: on fait quoi pour les entrepreneurs de la construction? Je vois le ministre du Travail qui est là. J'espère qu'il est conscient de ce qui se passe. Les entrepreneurs de la construction, les travailleurs de la construction sont visés, là-dedans. Ils sont visés. Il n'est pas tout seul. Tous les autres ministres sont visés. Il y a 111 lois qui sont touchées. Or, les travailleurs de la construction, les entrepreneurs sont touchés, parce qu'ils perdent des droits lorsque l'administration intervient pour suspendre des permis. Ce n'est pas ça, l'idée de la justice au Québec. Faire plus vite en matière de justice administrative, ça ne veut pas dire enlever la justice pour donner toute la place à l'administration. Ça veut dire aider nos citoyens face à la machine. Pas le contraire. Ce n'est pas la machine contre le citoyen. La machine doit être au service du citoyen, pas lui taper sur la tête.

(22 h 40)

M. le Président, il y en a pour les entreprises de camionnage. Il y a du monde qui travaille là-dedans. Là aussi, on coupe chez eux. En matière de culture, M. le Président, suspension ou révocation des visas d'exploitation en vertu de la Loi sur le cinéma.

Quand vous n'avez pas la possibilité de contre-expertiser, la possibilité de faire entendre vos témoins, on est sur la voie de la censure ici, et je n'exagère pas. C'est le Barreau du Québec qui nous dit qu'en enlevant ces droits on fait à l'administration toute la place et plus aucune place au citoyen. On met le pied dans la censure, ici. Le gouvernement du Parti québécois va passer à l'histoire. Il y en a pour l'enseignement privé, il y en a pour les intermédiaires de marché, il y en a dans 111 secteurs d'activité. Et on nous a dit: Il y a urgence. Il y a urgence d'enlever ces droits.

M. le Président, je voudrais simplement rappeler que ce projet de loi, avec le projet de loi n° 130 qui enlevait des droits d'appel, contrairement aux engagements pris dans le programme pour se faire élire du Parti québécois, porte atteinte à la démocratie, est antidémocratique parce que contraire aux engagements. Ce projet de loi, qui enlève le droit de contre-expertise de l'administration, consacre le dirigisme de ce gouvernement. C'est une atteinte aux droits, atteinte à la démocratie.

Ce projet de loi qui vient même toucher au secteur de la culture, comme je le disais, par des mesures qui ouvrent la porte à la censure, est une atteinte à la liberté, atteinte à la démocratie, atteinte aux droits. Ce projet de loi porte atteinte à l'économie, surtout les petits commerçants. Évidemment, par là, on porte atteinte à l'emploi, à ceux qui travaillent pour ces petits commerçants, qu'ils soient dans les agences de voyages, dans le courtage immobilier, dans le camionnage, dans la construction, dans l'agriculture. On touche à tout le monde, M. le Président. Ce projet porte atteinte à l'agriculture et il porte atteinte à une certaine idée du Québec, où la justice était encore importante.

Aujourd'hui, on veut nous dire qu'il y a urgence. Il y a urgence à quoi? Est-ce que, nous, on va vous dire que vous avez raison, qu'il y a urgence d'enlever des droits à nos concitoyens dans le domaine économique, dans le domaine de l'emploi, à nos concitoyens qui ont des réclamations face à la Société de l'assurance automobile du Québec, que l'administration décide des indemnités mais que vous n'avez pas la possibilité de contre-expertiser, pas la possibilité de présenter votre preuve et vos témoins? Vous allez nous faire dire qu'il y a urgence pour détruire la société québécoise, pour annihiler l'idée de la justice au Québec, sous prétexte que pour faire vite il faut éliminer l'idée même de justice? Il n'y a pas d'urgence pour ça, M. le Président, il n'y aura jamais d'urgence pour ça, il n'y aura jamais d'urgence pour enlever des droits aux Québécois, jamais.

Ça prend tout un culot pour se lever ici, comme leader d'un gouvernement, et dire tout bonnement: Ils ont pris 25 heures, sans s'apercevoir que le ministre de la Justice en a parlé la moitié en s'autofilibustant. Ils ont pris 25 heures, c'est assez. Ça fait un mois que le ministre n'y va pas, ce n'est pas grave, il doit avoir d'autre chose à faire, on ne sait pas quoi vraiment, il y a encore du temps devant nous. On aurait pu être appelé en commission la semaine dernière, la semaine d'avant, il y a deux jours. Mais, non! Il y a urgence, mais urgence à quoi? Urgence à bâillonner, urgence à empêcher l'opposition de faire son travail, urgence d'empêcher l'opposition de faire comprendre...

Et je dois le dire, M. le Président – il faut que je le dise – des fois, le gouvernement nous écoute, des fois, notamment sur le 130. Je me souviens qu'on avait pu plaider, en commission, et le ministre de la Justice, sur un article du 130, nous avait donné raison. Et on avait voté, avec tous les membres de la commission, tous les parlementaires qui ont à coeur leur travail, pour un amendement. Alors, on se dit toujours, lorsqu'on fait ces débats en commission: On peut arriver à faire comprendre au gouvernement que ce n'est pas la bonne piste, que ce n'est pas un bon choix de société.

Moi, ce qui m'avait déplu, M. le Président, c'est que le ministre de la Justice, après avoir voté pour cet amendement en commission, était revenu ici, à l'adoption finale, et avait redéfait cet amendement. Mais je suis resté avec l'idée que c'était possible de convaincre le gouvernement. Parce que, au contraire de ce que dit le leader, notre travail, ce n'est pas juste d'alerter l'opinion publique. Notre travail, c'est d'alerter les gens en face, pas juste l'opinion publique. Bien sûr qu'il y a l'opinion publique, mais il y a le gouvernement en face. Notre travail, ce n'est pas juste de dire: On s'en va dehors, dans la rue, puis on appelle le monde. On parle au gouvernement. On parle au ministre de la Justice. En fait, on pourrait lui parler. Si le leader ne nous avait pas empêchés d'être en commission des institutions, on aurait pu parler au ministre, on aurait pu alerter le ministre, on aurait pu le convaincre. Mais le leader nous a empêchés de convaincre le ministre. On nous empêche de faire notre travail. Et c'est ça qui se passe. Et c'est ça qui est déplorable.

Jusqu'à un certain point, on peut toujours dire: Bien, c'est normal, il y a deux côtés dans la Chambre; ce n'est pas tout le monde qui a le même agenda; puis on n'a pas tous les mêmes idées. Mais, aujourd'hui, on s'aperçoit que c'est fondamental, sur le projet de loi n° 89, on n'a pas les mêmes idées, c'est vrai. Nous, de notre côté, on pense que les droits de nos concitoyens, c'est quelque chose qu'il ne faut pas toucher, c'est quelque chose qu'il faut protéger. Et, si on doit faire de la justice administrative, ça ne doit pas être pour avoir moins de justice et plus d'administration. C'est pour avoir une administration plus souple, qui tient compte du justiciable, de l'administré, qui fait en sorte que les services et les droits qu'il a seront reconnus entièrement, pas moins.

Alors, M. le Président, je suis obligé de dire qu'il n'y a pas d'urgence. Il n'y a pas l'urgence qu'invoque le leader. Elle n'existe pas. Son urgence, c'est celle qu'il n'ose déclarer ici, devant vous: c'est l'urgence de nous faire taire. Mais, M. le Président, je suis bien convaincu qu'avec l'aide du Barreau, avec l'aide de l'opinion publique qui, j'espère, sera alertée depuis déjà assez longtemps du comportement du ministre de la Justice, du comportement de ce gouvernement, de la direction, de la philosophie qui les anime... Philosophie. Philosophie qui les anime. Marque de commerce: enlever des droits aux Québécois. Et ça se dit, M. le Président, défenseur du Québec. Et la première chose que ça fait, ça prend son programme politique, son programme électoral, et ça fait le contraire. Ça prend les droits des Québécois et ça les met dans les poubelles. Et ça dit: C'est moi le boss ici! On m'a élu, tassez-vous, je passe!

C'est ça qu'il fait, le gouvernement du Parti québécois. Et j'espère que les collègues d'en face, peut-être pas assez avisés du projet de loi n° 89, vont se poser quelques questions d'ici à la fin de nos débats – les débats vont être très courts, malheureusement – pour savoir... Peut-être aller voir le ministre de la Justice. Peut-être en profiter pour aller s'asseoir sur la banquette d'à côté, puis lui dire: «C'est-u» vrai, ce qu'ils disent, que le droit d'être entendu, il n'y en a plus? Tu n'auras plus le droit, pour tous les gens que j'ai mentionnés, qui vont vous appeler dans vos bureaux de comté ou qui vont aller vous voir quand ils vont se faire suspendre leur permis...

C'est ce qui arrive, M. le Président. Quand on fait du bureau de comté, nos concitoyens pris avec la machine nous appellent: Est-ce que c'est normal? Qu'est-ce qui se passe? Quels sont mes droits? On est là pour les aider, les accompagner. On se dirait: Ma foi, l'administration devrait faire pareil. Mais là, l'administration, le ministre de la Justice vient dire: Ne faites pas ça. Les droits, ils n'en ont plus. Comme ça, ça ne sera pas long. Des délais d'attente dans les tribunaux administratifs, il n'y en aura pas. Il n'y en aura plus, de justice administrative, ce n'est pas compliqué. Le droit d'être entendu, c'est compliqué: il faut prendre du temps pour écouter les témoins; l'administré peut nous dire que l'administration a tort. Aïe! Tout à coup qu'il aurait raison, on passerait pour des fous. On va les empêcher de parler.

Alors, c'est bâillon sur bâillon. Ce projet de loi, ça bâillonne la collectivité québécoise. Et le leader nous bâillonne parce qu'on est outré du fait qu'on veuille bâillonner les Québécois, notre société, notre Québec. On est outré de ça. Alors, moi, j'invite les collègues d'en face à faire ce que, nous, on a fait. Nous, on a regardé le projet de loi; on en a parlé entre nous autres. On a regardé les problèmes que ça avait, puis on a consulté les gens sur le terrain, notamment le Barreau et tous ceux qui sont affectés: les agences de voyages, les camionneurs, la construction, les gens qui vont devant la Société de l'assurance automobile du Québec, qui sont touchés par ça. Et là, M. le Président, on conseille aux gens d'en face d'aller voir le ministre de la Justice pour lui dire: Quelle idée a-t-il eue de décider d'affecter tous nos concitoyens, tous les gens qu'on représente?

Je termine là-dessus, M. le Président, simplement pour dire au leader du gouvernement que, lorsqu'on a 916 articles pour lesquels on consacre deux minutes, même pas le temps de les lire, les articles, et qu'on dit: Ah, bien, l'opposition, elle a eu tout le temps qu'elle pouvait avoir pour étudier ça. Bien, deux minutes par article pour faire du travail, M. le Président, je n'appelle pas ça un Parlement qui aurait raison d'être fier. Lorsqu'on pense à la Conférence des Amériques, aux parlementaires qui vont venir ici, je ne sais s'ils vont nous trouver bien smattes quand il vont savoir que le ministre de la Justice avec le leader du gouvernement ont donné à l'opposition deux minutes par article, le temps de les lire, et à peine. C'est ça, le Parlement qu'on a, c'est ça, le modèle de gouvernement qu'on a devant nous.

Puis là on dit: C'est urgent d'enlever les droits au monde, c'est urgent de les bâillonner. M. le Président, je peux juste vous dire que le seul qualificatif, le seul terme que mérite ce gouvernement face à une action comme celle-là, c'est la honte. C'est honteux d'agir comme ça, bâillonner l'opposition sur un projet de loi qui bâillonne l'ensemble de nos concitoyens. Et vous serez tous soumis, dans vos bureaux de comté, au test de la démocratie que vous avez bafouée, bien sûr, en refusant de respecter les engagements électoraux. Mais là vous allez avoir les gens devant vous, nos concitoyens qui ont le droit d'avoir un Québec meilleur, pas un Québec qui va sur la piste descendante, un Québec où il y aurait moins de droits. Ce n'est pas notre idée du Québec, c'est peut-être la vôtre, ce n'est pas la bonne, les Québécois vont vous le dire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay. Alors, nous cédons maintenant la parole au ministre de la Justice. M. le ministre.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Pourquoi faut-il adopter le projet de loi n° 89 plutôt que d'attendre que l'on étudie article par article devant la commission parlementaire, pendant des heures, ces dispositions, en fait ces 916 articles? M. le Président, tout à l'heure le leader du gouvernement a donné trois raisons qui m'apparaissent être les raisons les plus importantes, même si on peu en ajouter d'autres. En effet, il nous disait qu'il fallait agir maintenant parce qu'on avait attendu trop longtemps, et je vous dirai pourquoi nous avons attendu trop longtemps. Deuxièmement, il faut procéder à la nomination de certaines personnes dont le mandat est expiré et qui siègent actuellement sur les organismes qui feront partie dorénavant du TAQ, et c'est important que ça soit fait rapidement. Troisièmement, il faut aussi mettre en place tous les éléments de ce futur tribunal, et ceci prend quelques mois, et il faut les personnes aptes à prendre des décisions pour rendre ce tribunal opérationnel; le plus rapidement possible est nécessaire. Finalement, j'ajouterais que les citoyens demandent depuis très longtemps qu'on adopte un tel projet de loi.

M. le Président, ça fait 25 ans qu'a été entrepris au Québec le premier effort pour changer notre façon de faire en matière de justice administrative, 25 ans qu'a eu lieu le premier rapport disant: Nous devrions procéder à une transformation de notre façon de faire, la création de nos organismes, leur composition, leur façon de faire. Il faudrait que nous le fassions. Il y a eu, depuis 25 ans, M. le Président, exactement quatre rapports, dont certains mesurent un pouce d'épaisseur, pour être capables de dire: Il faudrait changer la façon de faire.

L'avant-dernier effort date du temps de l'opposition. Ils avaient adopté ou présenté un projet qui portait le numéro 105 et qui visait à régler une partie de ces problèmes. Malheureusement, ils n'ont pas porté à terme ce projet de loi, ils l'ont laissé mourir au feuilleton pour des motifs qu'on n'a pas besoin de discuter. Cependant, le besoin était toujours là et ils ont créé, à ce moment-là, un groupe de travail, sous la présidence du professeur Garant, qui a remis un rapport un mois après que nous ayons été élus comme gouvernement, c'est-à-dire au mois d'octobre 1994. Qu'est-ce que disait ce rapport? Il reprenait, M. le Président, essentiellement ce que les autres rapports antérieurs avaient fait, mais il ajoutait un élément important, celui qui a fait la différence entre un projet qui pouvait être mené à terme et d'autres qui ne le pouvaient pas. Il a apporté cet élément fondamental qu'il fallait déjudiciariser la justice administrative.

(22 h 50)

Ça veut dire quoi, déjudiciariser? Ça veut dire que, quand une personne, comme citoyen, demande à l'État quelque chose – une subvention, le droit d'être à l'aide sociale, le droit d'avoir l'aide juridique, le droit d'avoir un permis de conduire, un permis de construire ou un permis quelconque – donc quand un citoyen est en relation avec l'État, on veut que la première relation ne soit pas une relation qui soit semblable à celle que l'on retrouve lorsque des gens vont devant les tribunaux judiciaires. Autrement dit, qu'on n'ait pas un appareil qui consiste à avoir, d'un côté, une partie, de l'autre, l'autre partie, accompagnées de leurs avocats, avec devant elles un juge qui est appelé à trancher après une enquête plus ou moins longue, après l'interrogatoire des témoins, le contre-interrogatoire des témoins, la production de documents, la production d'expertises, etc. On veut, en fait, que le premier rapport soit le plus direct, le plus simple, le plus accessible possible et que la décision qui résulte de ça soit la meilleure pour le citoyen.

Pour bien vous montrer l'esprit dans lequel il s'agit de procéder, il s'agirait de lire l'article 1 du projet de loi, non pas n° 89, qui est sous étude, mais le projet de loi n° 130, qui est la cause du projet de loi n° 89, et je reviendrai là-dessus. On dit, à 130: La présente loi a pour objet d'affirmer, un, la spécificité de la justice administrative et d'en assurer la qualité, la célérité et l'accessibilité de même que d'assurer le respect des droits fondamentaux des administrés. M. le Président, c'est de ça dont il s'agit. C'est des rapports de l'État avec ses citoyens, dans le premier contact, où il s'agit de la première décision rendue par l'État. Avez-vous droit, monsieur, madame, à l'aide sociale? Avez-vous droit, monsieur, madame, à un permis x? On ne veut pas qu'il y ait un procès pour établir ça. On veut que la personne puisse faire ses représentations, puisse déposer des documents, puisse expliquer à la personne appelée à trancher si, oui ou non, elle l'aura, de quelle manière elle devrait favoriser sa demande. Mais elle pourra même fournir une personne qui viendra dire: Voici d'autres renseignements qui sont utiles pour la prise de décision. On pourra se réunir pour discuter avec le décideur, il pourra même y avoir présence d'un avocat dans certaines circonstances.

Cependant, cette action-là ne se fera pas dans un cadre judiciarisé, un cadre judiciaire, et ça, ça change toutes les données, M. le Président. La Loi sur la justice administrative vise à faire en sorte que, partout dans nos lois qui ont été adoptées, on adapte les lois actuelles aux principes que nous avons adoptés dans le projet de loi n° 130, qui est devenu le chapitre 54 des lois de 1996.

Donc, M. le Président, l'idée était de dire: Nous voulons faire une réforme, nous voulons déjudiciariser. C'est ce que nous avons fait dans le projet de loi n° 130 qui a établi les grands principes que nous devrions suivre. Qu'est-ce que l'on fait par le projet de loi n° 89? Par le projet, on vise à faire en sorte que dans 111 lois on adapte ces lois-là aux principes qu'on a adoptés au mois de décembre 1996. C'est ça, M. le Président, qu'est le processus. C'est ça qui prend évidemment un grand volume puisque chacune des lois du Québec, les statuts refondus, a été regardée, étudiée, scrutée en fonction des principes que nous avions adoptés. Et, chaque fois qu'il y avait changement d'un mot, changement d'un principe, il fallait évidemment modifier cette loi-là. C'est ainsi que le projet de loi commence par la Loi sur les abeilles et se termine avec une Loi concernant la protection des plantes parce que, M. le Président, chacune des lois a été visitée selon l'ordre alphabétique.

Essentiellement, il y avait, dans ce projet de loi, sept types différents de modifications. Alors, compte tenu de la présence de ces modules, de ces façons de faire qui touchaient plusieurs articles, j'ai proposé à l'opposition d'étudier le projet de loi, non pas selon la formule traditionnelle, c'est-à-dire article par article, mais de regarder les concepts, de quelle manière on touchait à ces différentes lois, selon les sept modèles dont j'ai parlé. Parce que vous comprendrez que certains mots reviennent dans toutes les lois et, si on doit les changer à un endroit, on doit les changer partout. Donc, par une opération globale, on arrivait à simplifier énormément le processus. Malheureusement, M. le Président, l'opposition n'a pas voulu que nous procédions de cette façon qui aurait facilité les choses.

À titre d'exemple, actuellement, avec 16 articles, on a vu à peu près tous les cas possibles, à peu près les sept cas possibles de modifications. Ce qui veut dire qu'on aurait pu, avec une volonté de leur part, passer extrêmement rapidement chacun des articles qui suivent, les 900 autres, puisque c'est la répétition, à multiples reprises, des mêmes processus. Quand on discute – je reprends l'exemple qu'on donnait tantôt – remplacer «le droit de se faire entendre» par «le droit de faire des représentations», si vous le retrouvez 47 fois dans 47 lois différentes, une fois que vous avez fait le débat sur ce principe, il m'apparaît évident qu'on n'a pas besoin de le reprendre 47 fois.

Malheureusement, contrairement à ce que disait le député de Châteauguay tout à l'heure, ce n'est pas deux minutes par article qui étaient données. Quand il dit ça, il divise le nombre de temps qu'on a consacré au nombre d'articles. Le vrai temps que nous avons pris pour faire 16 articles, c'est 25 heures. Ça veut dire une heure et quelques minutes pour chacun des articles. Alors, on est loin du calcul du député de l'opposition.

Donc, un projet de loi qui vise à introduire dans nos lois les principes que nous avons adoptés au mois de décembre 1996. Il m'apparaît, M. le Président, qu'il aurait été facile de convenir que remplacer des mots par d'autres devait se faire de moult façons. Voici le type d'arguments auxquels nous avons eu droit: lorsqu'on a parlé de ces éléments, remplacer «faire entendre» par «le droit de faire des observations», on nous a dit que c'était quelque chose de tout à fait nouveau, qu'on n'avait jamais vu ça et que c'était réduire les droits. M. le Président, nous avons pris quelques lois au hasard qui avaient été adoptées entre les années 1986 et 1994 – donc du temps où l'opposition formait le gouvernement et adoptait des lois – or, surprise des surprises, dans au moins six lois, nous avons retrouvé l'utilisation d'exactement ce que nous proposions.

Par exemple, dans la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, on a retrouvé, à l'article 177, dernier alinéa, l'expression suivante: «Le ministre doit, avant de décider de la révocation, de la suspension ou du refus de renouveler un permis, donner à la personne intéressée l'occasion de présenter ses observations.» Curieusement, c'est exactement cette expression que nous retrouvons dans la Loi sur la justice administrative et que nous voulons introduire dans les autres lois.

Dans la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, on retrouve, à l'article 128.14 – et ça, ça a été adopté en 1988 et, à ce que je sache, c'était l'opposition qui était au pouvoir – on dit ceci: «Avant de refuser, de suspendre ou de révoquer une autorisation ou de confisquer une garantie, le ministre donne au requérant ou titulaire l'occasion de fournir ses observations dans le délai qu'il indique.» M. le Président, il me semble que, si c'était bon en 1988, ça devrait être bon en 1996. Or, ce qui a été mis dans cette loi ou dans ces lois, malheureusement, ça ne se retrouve pas dans un grand nombre de lois. Il faut donc, pour être cohérent, introduire ces mêmes concepts ailleurs.

Une autre loi, M. le Président, la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Mon collègue du ministère de l'Environnement apprécie beaucoup, puisqu'il entend chacune des lois dont il s'occupe présentement. Alors, cette loi dit, à l'article 24: «Avant de refuser, de suspendre ou de révoquer une autorisation ou de confisquer une garantie, le ministre donne au demandeur ou titulaire l'occasion de fournir ses observations dans les délais qu'il indique.» Encore une fois.

Dans la Loi sur les établissements touristiques, à l'article 12: «Le ministre doit, avant de refuser d'émettre un permis ou de prononcer la suspension, l'annulation ou le refus de renouvellement d'un permis, donner au requérant ou titulaire, selon le cas, l'occasion de faire valoir ses observations.»

(23 heures)

Dans la Loi sur l'instruction publique, à l'article 11, dernier alinéa, on lit: «Dans l'examen de la demande...» Je pense que ça ne sera pas compréhensible si je ne lis pas les autres paragraphes. Alors, je lis les autres: «Le conseil des commissaires dispose de la demande sans retard. Il peut soumettre la demande à l'examen d'une personne qu'il désigne ou d'un comité qu'il institue. Ceux-ci lui font rapport de leurs constatations, accompagnées, s'ils l'estiment opportun, de leurs recommandations.» Et là, dans l'examen de la demande, les intéressés doivent avoir l'occasion de présenter leurs observations.

M. le Président, il y a enfin un dernier projet de loi qui est extrêmement intéressant, c'est celui concernant la santé des animaux, parce que, là, on retrouve les deux principes. À 55.27, on dit: «Le ministre délivre le permis si le demandeur remplit les conditions prescrites par la présente loi et les règlements et verse les droits qui y sont déterminés. Il peut, toutefois, après avoir donné au demandeur l'occasion d'être entendu, refuser de délivrer un permis pour des motifs d'intérêt public.» Donc, dans ce cas-ci, c'est le droit d'être entendu. Mais lisons l'article 55.31. On dit: «Le ministre peut, après avoir donné au titulaire l'occasion de faire valoir ses observations, suspendre» ou annuler le permis. M. le Président, on nous dit qu'on est très surpris de voir une expression comme celle-là, que c'est neuf, que c'est du jamais vu. Or, la même opposition était au pouvoir et a adopté, dans les lois que je viens de mentionner, les mêmes principes. Et c'était un bon principe, M. le Président. Il s'agit de le réintroduire partout dans les lois.

Or, si j'ai pris le temps de donner cet exemple, c'est pour bien montrer qu'à l'égard d'une seule expression on a déjà plusieurs lois qui doivent être modifiées pour les rendre semblables, mais c'est la même chose que nous faisons dans l'ensemble du projet de loi. Nous revisitons chacune des lois pour dire: Est-ce qu'elle est correcte par rapport au principe que nous venons d'adopter? Alors, M. le Président, ceci est extrêmement important: l'uniformité dans toutes nos lois, avoir les mêmes principes, les mêmes façons de faire.

C'est au niveau du contenu, mais c'est aussi d'autres manières. Par exemple, actuellement, devant les organismes, un avocat – ou une personne – qui veut se présenter et qui veut plaider, parce que, là, il est rendu au stade de l'appel ou de la révision de la décision, s'enquiert pour savoir quelles sont les règles de procédure ou de preuve applicables devant cet organisme. Dans certains cas, il y en a. Dans certains cas, il n'y en a pas. Dans d'autres, elles ne sont pas en vigueur et, dans certains, c'est différent et là énormément différent d'un organisme à l'autre. Alors, le citoyen qui veut faire respecter ses droits se retrouve devant une situation où il est incapable de connaître l'instrument qui lui servirait à faire valoir ses droits. M. le Président, on vise par le projet de loi à s'assurer que les règles soient les mêmes partout, qu'elles soient le plus simples possible et qu'elles permettent aux parties de faire valoir leurs droits.

Le leader du gouvernement parlait, tout à l'heure, d'un des motifs d'urgence. Il parlait des nominations. M. le Président, jusqu'à aujourd'hui, les nominations des personnes au niveau des organismes pour un mandat de cinq ans, généralement, se font, actuellement et depuis toujours, selon une base tout à fait discrétionnaire, c'est-à-dire que le gouvernement adopte un décret nommant une personne à ce poste, pour une période de temps, au niveau de salaire un tel. Il n'y a aucune consultation. Il n'y a pas de prérequis. Il n'y a rien d'exigé. Il n'y a pas d'entrevue, et la personne est nommée pour cinq ans.

Je pense que, quand on demande à des gens d'occuper une fonction comme celle-là, de décider des droits des citoyens, il est important qu'on ait la plus grande confiance dans la personne qui a été nommée. Surtout que la personne que l'on nomme doit généralement trancher des litiges entre un citoyen et l'État, il est donc important que le citoyen ait confiance que la personne qui est là n'est pas, entre guillemets, une créature de la personne contre qui il plaide, mais soit quelqu'un d'impartial, d'indépendant, choisi librement.

Le projet de loi, M. le Président, introduit un mode tout à fait nouveau de nomination de ces personnes. Dorénavant, les personnes devront avoir, d'abord, un certain nombre d'années de pratique dans le domaine pertinent à celui où elles voudront se faire nommer. Par exemple, si quelqu'un veut être nommé au Bureau de révision de l'évaluation foncière, bien, il devra avoir une connaissance, avoir travaillé pendant un certain nombre d'années dans un domaine comme celui-là ou qui lui est proche, de manière à avoir acquis une expérience pertinente à ce sujet. S'il n'a pas le nombre d'années, il ne pourra pas poser sa candidature.

Deuxième chose, M. le Président, on établit que tous ces postes-là seront ouverts publiquement par concours à quiconque respecte les conditions premières du règlement. Il y aura un comité de sélection qui sera mis sur place, un comité de sélection indépendant, un comité de sélection compétent, qui recevra toutes les personnes qui seront désireuses de se présenter à ce poste ouvert et qui rencontreront les conditions imposées par la loi. Ce comité fera une recommandation d'une ou plusieurs personnes jugées aptes à être nommées au poste en question. Parmi cette liste et selon les circonstances, le gouvernement pourra nommer une de ces personnes. Mais l'on voit que ce n'est plus la discrétion dont je parlais au départ, mais bien un processus qui assure l'indépendance, l'impartialité et la distance requises, et où on s'assure véritablement d'une compétence de la personne nommée. Je pense qu'il s'agit là d'un changement majeur.

Plusieurs personnes sont aussi en période de renouvellement suite à la terminaison de leur mandat. À partir de maintenant, ces personnes devront passer devant ce comité de sélection pour vérifier leur habilité à continuer à travailler à ce niveau. Je pense qu'il s'agit là d'un exercice extrêmement important pour assurer l'impartialité et l'indépendance des personnes qui sont là, mais aussi pour assurer aux citoyens qu'ils auront justice lorsqu'ils se rendront devant le Tribunal administratif du Québec. Si nous n'adoptons pas le projet de loi n° 89, pour toutes ces personnes qui sont, pour certaines, en attente depuis plusieurs mois, nous ne pourrons pas procéder, puisque ces règles ne pourront être adoptées, le pouvoir de les adopter se retrouvant dans le projet de loi. Or, si le projet de loi n'est pas adopté, donc nous ne pouvons pas mettre ces règles en vigueur et nous sommes placés devant l'obligation ou de les nommer selon les anciennes méthodes ou de ne pas les nommer. Et ça, je pense que c'est extrêmement sérieux.

Il faut également, pour s'assurer que toutes les modifications que nous faisons aux lois, pour s'assurer que les recours vont s'exercer devant le Tribunal administratif qui est créé par la loi... Là-dessus, avant de parler des conséquences, j'aimerais peut-être parler de quoi il s'agit. Le projet de loi sur la justice administrative, le premier, le projet de loi n° 130, qui est devenu le chapitre 54 des lois de 1996, a créé ce qu'on appelle le TAQ, le Tribunal administratif du Québec. Ce Tribunal existera dans la mesure ou la loi d'application sera adoptée. Ce TAQ, il n'existe pas. Il est actuellement fractionné entre les différents organismes qui siègent.

Pour donner un exemple concret, le Bureau de révision de l'évaluation foncière siège actuellement; la Commission des affaires sociales siège également; le Bureau de révision en immigration siège également, et ainsi de suite. Ils siègent séparément les uns des autres, sans autorité supérieure pour chacun d'entre eux. À partir de l'entrée en vigueur du projet de loi, sera institué ce Tribunal où tout le monde se retrouvera sous un seul chapeau d'une présidence, d'une vice-présidence. Pour chacun des secteurs – en matière sociale, en matière économique, en matière agricole, etc. – il y aura des sections où se retrouveront ces anciens organismes, mais qui fonctionneront dorénavant selon des règles communes.

Encore une fois, et pour l'implantation du Tribunal lui-même et pour l'adoption des règles, il faut que le projet de loi n° 89 soit adopté. Il n'est pas possible de nommer le président ou la présidente du Tribunal administratif, il n'est pas possible de nommer les vice-présidents et de faire en sorte qu'ils puissent accomplir les tâches suivantes: préparer l'adoption des règlements qui vont s'appliquer, entre autres sur la preuve. Ensuite, on ne pourra pas non plus déterminer à quel endroit ce Tribunal pourra siéger; on ne pourra pas faire les aménagements physiques pour lui permettre de siéger; on ne pourra pas non plus établir de quelle manière, sur le plan de l'informatique, on pourra procéder. Alors, il faut que les personnes soient en place. Pour ça, M. le Président, il faut que le projet de loi soit adopté. Or, au rythme où procédait l'opposition pour l'adoption de ces différents articles, nous aurions eu, mon collègue le mentionnait...

Vous me permettrez, Mme la Présidente, de souligner votre présence. Bonjour, Mme la Présidente.

(23 h 10)

Alors, pour l'adoption de ces articles, il aurait fallu 1 000 heures de travail pour adopter le projet de loi. Ça vous donne une idée qu'il y a quelque chose de déraisonnable là-dedans, surtout quand on sait qu'on a des exemples dans le passé qui nous prouvent qu'on est capables d'adopter une loi d'application – et je ne parle que de loi d'application d'une autre loi – et qu'il est possible de procéder différemment.

Par exemple, le projet de loi 125, qui est le Code civil du Québec, comportait 3 168 articles et n'a nécessité que 130 heures. Faites le rapport, vous allez voir qu'on arrive à pas beaucoup d'heures pour adopter un projet de loi qui aurait 916 articles. Le projet de loi 38 comportait 719 articles et a nécessité 50 heures de travaux. Et le projet de loi 42, qui était la loi d'application du Code de procédure pénale, comportait 705 articles et a nécessité cinq heures de travaux. Cinq heures de travaux pour en adopter 705.

Et ça ne me surprend pas, Mme la Présidente, puisque, pour adopter un tel projet qui a pour finalité de mettre en application les principes qu'on a déjà adoptés, bien, c'est relativement facile. Quand ça fait 10 fois qu'on voit la même affaire, il me semble que nous avons acquis une certaine conviction et qu'il n'est plus nécessaire de reprendre pendant 20 minutes une argumentation pour redire la même chose qu'on a dite la première fois et qu'on réponde à ce 20 minutes- là en disant: Écoutez, c'est la même chose que nous avons étudiée et nous pensons que vous devriez procéder à l'adoption. Et qu'on reprenne encore le débat à deux ou trois.

Mme la Présidente, l'expression d'une opinion est tout à fait légitime, elle est même nécessaire dans un système démocratique. Elle est souhaitée dans un processus normal parce que, quand on fait une critique, généralement on va chercher les failles, les faiblesses. On fait ressortir, bien sûr, si on le veut, les forces de cette disposition-là, mais surtout les faiblesses pour être capables de les changer, de les améliorer. Parce que, dans le bout de tout notre processus législatif, qu'est-ce que nous voulons avoir? C'est une loi qui est bien rédigée, qui protège bien les droits des citoyens; pas une loi sur laquelle on a parlé pendant deux heures et à laquelle on n'a apporté rien de positif, sinon, en bout de piste, de dire: Adopté. Mme la Présidente, le processus des commissions parlementaires vise justement la bonification des projets de loi. Or, passer 26 heures pour adopter 16 articles, ce n'est pas de la bonification; c'est faire en sorte que le projet de loi ne soit pas adopté.

Alors, Mme la Présidente, nous pensons que les Québécois et les Québécoises, qui demandent depuis 25 ans qu'on modifie la façon de faire en matière de justice administrative, ont droit d'avoir rapidement ce projet de loi. Ils ont le droit d'être capables de se comprendre lorsqu'ils se présentent devant un organisme pour obtenir soit une autorisation, soit un permis, soit le droit de faire quelque chose. Mme la Présidente, ils ont le droit de le faire simplement, facilement, avec compréhension. Ils ont aussi le droit d'avoir une décision qui leur est accessible, une décision où, avant qu'elle ne soit rendue, surtout si elle est pour être négative, on donne à cette personne l'occasion de se faire entendre, de faire des observations, de dire pourquoi on ne devrait pas rendre cette décision qui est défavorable.

Parce que, quand on est devant un tribunal et qu'on demande quelque chose, il y a deux hypothèses: on gagne ou on perd. Pour avoir plaidé pendant 25 ans et avoir vécu toujours avec des clients qui ne pouvaient pas toujours gagner, l'important que j'ai retenu de leurs observations après une audition, sans savoir le contenu du jugement et, par la suite, plus tard, au moment du jugement, c'est toujours la même chose: En tout cas, c'est le fun, le juge nous a écoutés. On a été entendus. On a eu le temps de faire nos représentations.

Et, quand les gens sortaient d'une cour, d'un tribunal comme ça, même si la décision finalement ne leur était pas favorable, généralement ils n'avaient pas le goût d'aller plus loin, d'aller en appel. Par contre, si, devant un tribunal, ils sentaient qu'ils avaient été bousculés peut-être par l'avocat de l'autre partie ou que telle preuve, ils auraient bien voulu qu'elle soit faite, mais elle ne l'avait pas été par leur avocat, ils sortaient de là avec un sentiment de frustration. Généralement, s'ils perdaient, à ce moment-là, ils avaient le goût d'aller en appel parce qu'ils disaient: Je n'ai pas eu l'audition, je n'ai pas eu le procès que je voulais avoir.

Bien, avec une justice de qualité, une justice comme celle que nous voulons implanter, M. le Président, nous sommes convaincus que les décisions de premier niveau seront de meilleure qualité et qu'on s'assurera que le citoyen soit satisfait et que par ailleurs les possibilités d'appel soient moins nombreuses. M. le Président, je termine là-dessus: Nous avons besoin de cette loi-là. Les Québécois ont besoin de cette loi-là. Nous avons fait tous les efforts requis pour faire adopter raisonnablement ce projet de loi là et nous n'en avons pas été capables. Il est donc nécessaire et urgent que nous puissions le faire, et c'est ce que nous demandons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Justice. Nous allons maintenant céder la parole au député de Verdun, en lui rappelant qu'il reste un temps de 21 minutes à son groupe parlementaire. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, je vais, dans les 21 minutes que vous m'accordez, plaider sur trois points. Premièrement, il n'est pas sage, à l'heure actuelle, de procéder en urgence, et je vais vous expliquer pourquoi. Deuxièmement, il n'est pas sage d'adopter une telle loi pour deux raisons: première raison, parce qu'elle impose une vision du mur-à-mur; deuxième raison, parce qu'elle retire des droits fondamentaux aux Québécois et aux Québécoises.

Pourquoi, M. le Président, il n'est pas sage, à l'heure actuelle, de procéder en urgence? Je me permettrais de rappeler à ce gouvernement et à ce leader la loi n° 104 qu'il a fait adopter ici en urgence, qui était mal faite, qui était pleine de trous et sur laquelle on a été obligés de revenir avec la loi n° 123 que, malheureusement, ce Parlement a adoptée hier ou ce matin, M. le Président. Lorsqu'on procède par urgence, lorsqu'on procède en ne travaillant pas en commission parlementaire, on laisse des trous à l'intérieur des lois et, après, on est obligés de revenir.

Je n'ai pas une connaissance universelle des lois, mais il y en a un certain nombre que je connais mieux que d'autres. Je signalerais gentiment au ministre de la Justice que, dans son énumération des gens qu'il tire à bout portant de tous les côtés, il y en a un certain nombre qu'il oublie. Alors, je me permets de lui rappeler simplement qu'on va toucher la Loi sur le régime de rentes du Québec, la Loi sur le régime de retraite des élus municipaux, la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, la Loi sur le régime de retraite des enseignants, la Loi sur le régime de retraite des fonctionnaires, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, la Loi sur les régimes supplémentaires de rentes, M. le Président.

On oublie la Loi sur le régime de retraite de certains enseignants. Je sais qu'on les oublie, en général. Ce sont les ex-religieux – c'est une loi comme les autres – qui auraient eu le droit, si on reprend la logique du gouvernement, d'avoir des recours aux tribunaux administratifs et qu'on a oubliés à l'intérieur du projet de loi. Je ne plaide pas, M. le Président, pour qu'on les inclue, parce que je trouve qu'il faut, au contraire, exclure tout le monde du projet de loi; je plaide simplement pour vous dire: Le fait que l'on passe actuellement en mesure dérogatoire, le fait qu'on précipite l'étude d'un projet de loi fait en sorte qu'il va y avoir des trous. Il y aura des trous dans votre projet de loi et vous allez être obligés de revenir, à la session prochaine, faire perdre le temps du Parlement pour faire des corrections à votre projet de loi plein de trous que vous avez mal préparé, mal fait et que vous êtes en train de vouloir passer devant ce Parlement en toute vitesse parce que vous n'avez pas pris la peine de l'étudier sagement, correctement, comme on doit le faire en commission parlementaire, M. le Président.

Les citoyens voient souvent seulement les débats ici, au salon bleu. Le parlementarisme fait le travail le plus sérieux qu'il doit faire dans son travail de législateur lorsqu'il travaille en commission parlementaire. Combien de lois, une fois présentées par le gouvernement, lorsqu'elles sont soumises et étudiées article par article, où on fouille les implications ou le sens de chacun des articles, sont modifiées ou peuvent être modifiées, ou sont soumises à des corrections?

(23 h 20)

On l'a fait, on peut le faire même dans des lois qui comportent de nombreux articles. On le fait tous les ans dans les lois à caractère budgétaire, c'est-à-dire celles qui touchent le ministère du Revenu; elles ont à peu près le même nombre d'articles que cela. On l'a fait dans la loi n° 123 qu'on a adoptée ce matin, M. le Président, qui avait quand même une centaine d'articles et qui était relativement technique en ce qui touchait la révision des fonds de pension, et qui corrigeait les trous laissés par la loi n° 104.

Le travail en commission parlementaire, M. le Président, est fondamental si on veut faire de la bonne législation parce que, normalement – et personne n'est infaillible – lorsque les légistes du gouvernement proposent un projet de loi, bien souvent, ils n'en ont pas vu toutes les implications. Et je vous en signale un, actuellement, le Régime de retraite de certains enseignants; les ex-religieux – je sais qu'il n'y en a pas beaucoup – sont omis du pouvoir de recours aux tribunaux administratifs. De surcroît, M. le Président, je vous rappellerai un autre trou, dans un domaine que je connais un peu. Je suis sûr que les infirmières de l'Hôpital des vétérans, qui d'ailleurs a été inclus dans la loi n° 123, sont aussi oubliées dans ce projet de loi, dans la possibilité d'avoir recours aux tribunaux administratifs. Je sais que c'est l'ancien Hôpital des vétérans, qui s'appelle maintenant l'hôpital gériatrique de Côte-des-Neiges, mais elles ont une situation particulière pour des raisons historiques et on les a aussi oubliées dans le projet de loi, M. le Président.

C'est l'exemple parfait d'un projet de loi qui n'a pas subi le polissage nécessaire en commission parlementaire pour pouvoir être raffiné. Alors, je le regrette et je signale au gouvernement que sa volonté de vouloir procéder en suspension des règles, en vitesse – et je vous en ai donné deux exemples, actuellement, M. le Président – va nous amener à voter un projet de loi avec des trous, un projet de loi mal fait, mal ficelé, mal foutu, qui est en soi, indépendamment de la valeur du fond, strictement sur sa forme, mal fait, premièrement.

Donc, pour ces raisons-là, M. le Président, je crois qu'on devrait voter contre les mesures de suspension des règles et faire l'étude correctement article par article pour corriger, par exemple, les deux trous dont je viens de vous parler. Et je les ai pris seulement dans un petit champ, dans le champ des régimes de pension. Je suis sûr que, si on avait pris les autres champs... Parce que ce projet de loi couvre tout, il en tire large – et ça va être le deuxième point de mon intervention – il touche depuis la Loi sur les abeilles et il s'en va, par ordre alphabétique, si vous me permettez, M. le Président, jusqu'à la Loi sur la protection des plantes. On commence par les abeilles et on finit par les plantes. On tire large, à peu près sur tout ce qui bouge et tout ce qui existe comme lois au Québec. Je ne connais pas le détail de la majeure partie de ces lois-là. J'ai remarqué qu'il y a déjà deux trous strictement à l'intérieur des lois sur les fonds de pension. Je dois probablement en inférer que, sur les autres lois, il doit y avoir encore des trous dans ce projet de loi pour les autres secteurs d'activité.

Donc, M. le Président, un projet de loi mal ficelé dans sa forme et qu'on veut essayer de voter aujourd'hui en prenant les mesures d'urgence, c'est faire de la mauvaise législation. Une fois que j'ai dit cela, M. le Président, faire de la mauvaise législation sur sa forme, le projet de loi en soi, lui-même, est mauvais, à mon sens, sur deux points majeurs. Premier point majeur, c'est qu'il veut avoir une vision du mur-à-mur, traiter tout le monde de la même manière, quel que soit le secteur d'activité: avoir un seul tribunal administratif pour régler les différends dans des domaines aussi différents – et vous comprenez qu'il n'y a pas de jeu de mots dans ce que je viens de vous dire, M. le Président – dans des secteurs aussi divers que le secteur de l'apiculture, que les régimes des pensions, la Loi sur l'assurance automobile, la Loi sur le bâtiment, les problèmes des intermédiaires de marché, la Loi sur le ministère de l'Agriculture, la Loi sur les services de garde à l'enfance. On tire large et on dit: Voici, on va traiter tout le monde à l'intérieur d'un seul tribunal administratif.

Or, la pratique avait fait que chacun de ces secteurs avait, à l'intérieur de son propre mécanisme, développé des moyens d'appel, des mécanismes afin de régler les conflits et les différends. À titre d'exemple, l'Office des services de garde à l'enfance, pendant longtemps, a eu cette responsabilité de voir à l'application des règlements qu'il édictait, que l'OSGE édictait, parce qu'il y avait une certaine vision, une certaine approche qu'on devait avoir lorsqu'on traitait de services de garderie qui n'est pas nécessairement la même approche qu'on doit avoir lorsqu'on traite un différend chez les apiculteurs, qui n'est pas la même approche qu'on doit avoir lorsqu'on traite un problème où la Régie des rentes va refuser l'enregistrement d'un régime complémentaire de retraite. On parle de choses absolument et totalement différentes.

Alors, cette vision du gouvernement de vouloir tout réduire à sa plus simple expression, de ramener toute la diversité des champs d'activité à l'intérieur d'une seule vision monolithique, rigide, unique, cette vision du sentiment unique, c'est une vision que nous ne pouvons pas partager. Il y a une valeur à savoir respecter les diversités. Et ce projet de loi, à mon sens, l'élément le plus pervers qu'il a à l'intérieur, c'est qu'il n'est pas capable de respecter les diversités que nous avions établies à l'intérieur de différents secteurs d'activité. Que ce soit les régimes de pensions, que ce soit les mécanismes d'aide sociale, que ce soit la Régie du gaz, que ce soit l'Office des services de garde à l'enfance, que ce soit la Commission de protection du territoire agricole, chacun avait développé son propre moyen de régler ses différends. Et la vision réductrice du gouvernement veut tout ramener sous un même chapeau. Donc, ça, c'est un premier élément pourquoi, je crois, il va falloir s'opposer au projet de loi.

La deuxième raison – et je pense que le député de Châteauguay l'a clairement établi – il y avait, à l'intérieur, un droit qui était un droit fondamental pour chacun des citoyens, c'était le droit de pouvoir – et je le dis en général – se faire entendre. C'est extrêmement large, les activités de ces tribunaux administratifs. Ça peut retirer des permis, ça peut empêcher des gens de travailler, ça peut exproprier, ça peut discuter sur le montant du régime de retraite que vous allez avoir, ça a des effets dans chacun des niveaux de votre vie.

Lorsque vous deviez être jugé, vous aviez un droit fondamental, dans notre vision, de pouvoir être entendu. Alors, ça, on le supprime. Clac! Clac! Un droit fondamental d'être entendu avant d'être jugé, de pouvoir être aidé et représenté par un avocat, de pouvoir contre-interroger sur ce qui est présenté par l'autre partie, celle qui veut vous retirer, par exemple, votre permis de pratique, celle qui veut, actuellement, établir votre niveau de pension. Ça, vous n'avez plus le droit d'être entendu. On remplace ce droit d'être entendu par celui de présenter ses observations. Et, bien des fois, on va encore limiter le droit: ce n'est pas seulement présenter ses observations; c'est présenter ses observations par écrit. Autrement dit, dans certains cas, le citoyen sur lequel on va rendre des décisions judiciaires qui vont impliquer réellement son avenir, d'une part, n'a plus le droit de se faire entendre, mais pourra présenter ses observations et les présenter par écrit.

(23 h 30)

M. le Président, le député de Châteauguay, avec beaucoup d'éloquence – et c'est un juriste – a pu faire valoir qu'il y a là un déni de droits fondamentaux, un retrait de droits que, Québécois et Québécoises, on avait depuis très longtemps, depuis ce qui était issu, en quelque sorte, de la tradition britannique. Retirer ce droit, le droit de pouvoir se faire entendre avant d'être jugé, me semble, et nous semble ici, du côté de l'opposition, profondément inique, et on ne pourra pas, en aucune manière, concourir à cela.

Donc, vous comprenez mon premier point, il n'y a pas urgence parce que la loi est pleine de trous. Deuxième point, la loi, à mon sens, est viciée dans sa conception, dans la mesure où elle veut faire un mur-à-mur total sans respecter les particularismes de chacun des secteurs. Troisième point, la loi est en soi inique parce qu'elle retire des droits fondamentaux aux citoyens, aux Québécois et aux Québécoises, en particulier le droit de se faire entendre, et le remplace par celui de présenter, le cas échéant, des observations par écrit.

Mais, de surcroît – et là on tombe dans l'argutie magnifique de rédaction – le ministre, lorsqu'il était intervenu, avait dit: Oui, il existait des lois dans lesquelles le mécanisme judiciaire ne prévoyait pas le droit de se faire entendre, mais prévoyait un mécanisme plus souple. En particulier, il y avait des lois – il les a citées – où on faisait valoir son point de vue. Le texte de loi, spécifiquement, utilisait «faire valoir son point de vue». Et c'était justement une approche qui avait été beaucoup plus souple dans ce cas-là.

Je vais vous donner un exemple, si vous voulez. Je n'en prendrai qu'un, mais j'en ai plusieurs à vous faire valoir. La Loi sur les régimes complémentaires de retraite, à l'article 28, disait: «La Régie peut, après avoir donné aux intéressés l'occasion de faire valoir leur point de vue, refuser l'enregistrement de tout ou partie d'un régime...» Donc, déjà il existait, c'est vrai, dans certaines lois, une vision plus souple où on disait «faire valoir son point de vue». C'était le terme qui était utilisé. Et je peux vous dire que, M. le Président, en particulier dans les lois qui touchent le Régime de rentes du Québec ou les régimes complémentaires de retraite, il y a un certain nombre de cas où on utilise ce mot.

Et le ministre tout à l'heure a pris ça comme exemple pour dire: Oui, déjà on utilisait cette approche dans certaines lois. Et il avait raison, certaines lois le faisaient déjà. Par contre, il s'en va pousser l'aberration de dire: L'endroit où on le faisait déjà, on ne va plus le faire, on le supprime, on supprime «faire valoir son point de vue» et on le remplace par les mots «présenter leurs observations». Ça, c'est l'article 681 du projet de loi.

Alors, vous voyez comme c'est mal fichu, ce projet de loi. Déjà, ce qui était considéré par le ministre comme étant les éléments qui étaient des éléments où il y avait une certaine souplesse, des éléments où on n'avait pas la rigueur juridique, là il s'en va les retirer pour les remplacer par une autre manière d'expliquer.

Vous ne pensez pas qu'il aurait été utile, M. le Président, en commission parlementaire, de poser la question? Alors qu'on prétend avoir déjà, dans certaines lois – et je le ferais spécifiquement si c'était la Loi sur les régimes complémentaires de retraite – une approche qu'ils considéraient comme déjudiciarisée, il faut qu'on l'échange, le cas où ça l'est, qu'on la change pour le ramener... Oui?

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député de Verdun. Je tiens à vous souligner qu'il reste à votre intervention une minute. Toutefois, comme je suis actuellement en mesure de voir que les députés indépendants ne se prévaudront pas de leur temps de parole, je vous accorde soit 10 minutes additionnelles ou je voudrais aviser immédiatement votre formation politique qu'il va vous rester 10 minutes additionnelles. Alors, M. le député de Verdun, excusez-moi.

M. Gautrin: M. le Président, je suis heureux de récupérer un peu de temps pour pouvoir convaincre les ministériels de mon point de vue. Je remercie les députés indépendants de nous donner, avec gentillesse, ce temps. Nous allons essayer de vous convaincre encore plus.

Pourquoi donc, alors qu'il existe des lois qui utilisent les mots «faire valoir leur point de vue», changer ça par «présenter leurs observations»? Vous comprenez, M. le Président, qu'on a présenté ça comme étant des questions qui étaient des questions soi-disant où il existait des éléments de souplesse, mais les endroits où il existait ces éléments de souplesse, on s'en va, par une vision absolument bureaucratique, essayer déjà de les changer.

Alors, là, ça démontre clairement que ces lois auraient dû passer le filtre d'un débat en commission parlementaire. Il est bien clair que tous les parlementaires auraient posé la question au ministre. Alors que vous avez argumenté pour dire que les termes «faire valoir leur point de vue» étaient l'objectif que vous cherchiez, pourquoi donc, dans la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, lorsque ce terme existe déjà, éprouvez-vous le besoin de le changer par un autre terme? Qu'y a-t-il de différent? Qu'y a-t-il de différent, à l'heure actuelle, entre le terme «faire valoir son point de vue» et «présenter ses observations»? Qu'est-ce qu'on change, à l'heure actuelle? Moi, M. le Président, je vais vous le dire, encore une fois et une fois de plus, c'est une loi qui, dans sa forme, est absolument mal fichue, et je vous en donne encore un exemple.

Alors, c'est le genre de travail, comme je vous l'ai répété déjà, que, normalement, des parlementaires en commission traversent et améliorent, c'est-à-dire corrigent ou sont en mesure de polir ces aspérités, ces scories qui peuvent rester à l'intérieur d'un projet de loi. Mais, comme on n'a pas eu la chance de pouvoir l'étudier article par article, on reste avec ces imperfections de rédaction. Et c'est ça que ce gouvernement veut nous faire passer. Il veut nous amener à voter en suspendant les règles, cette session, ce projet de loi, alors qu'il sait – et on vient de lui donner deux exemples – qu'il y a des trous dans le projet de loi, qu'il y a des trous actuellement dans la rédaction. Et on s'amène pour vouloir nous faire voter ça en suspendant les règles. M. le Président, si on était sérieux comme législateurs, est-ce qu'on peut réellement suivre ce point de vue? Ma réponse est claire: On ne peut pas suivre ce point de vue.

Deuxièmement, M. le Président, je voudrais rerépéter, puisque vous m'avez laissé un peu de temps supplémentaire, le deuxième argument. La société est diversifiée. La société est multiple. La valeur d'une société est justement dans cette diversité. Et ne pas savoir reconnaître la diversité dans une société, vouloir uniformiser toutes les pratiques, c'est perdre énormément de valeur à l'intérieur d'une société.

Or, ce projet de loi, qu'est-ce qu'il nous dit? Il nous dit que, quel que soit le genre de conflit que vous pouvez avoir, quel que soit ce qui peut se passer, vous devez toujours régler ça à l'intérieur de la même vision, de la vision bureaucratique unique qui est celle du Tribunal administratif du Québec, le nouveau TAQ. Vous voyez, M. le Président, ce qui se passe. C'est la vision mur à mur. On traite tout, quel que soit le genre de problème... Je vous ai cité tout à l'heure – j'aurais pu vous faire la liste, hein – la Loi sur les abeilles. C'est intéressant, mais on va la traiter dans la même «batch» que la Loi sur la Régie du gaz naturel, que la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels, que la Loi sur la Commission municipale – même chose, tout le monde, mur-à-mur – la loi sur les régimes de retraite et, pour terminer, on a commencé par les abeilles, c'est amusant parce qu'on termine avec ça, la Loi sur la protection des plantes. On a commencé par les abeilles, on finit par les plantes. Mais, quand même, entre-temps, on a couvert à peu près tout ce qui existe, tout ce qui bouge au Québec. Et là, je vous dis, c'est une vision qu'on ne peut pas partager, donc, essentiellement, cette question de vision uniformisatrice.

(23 h 40)

Le dernier point, je voudrais encore, s'il me reste encore un peu de temps, réinsister sur celui-là. Il y avait un droit – et je l'ai peut-être mal présenté, je voudrais le représenter actuellement devant vous – qui était un droit fondamental, un droit fondamental de tous les citoyens, qui était celui de pouvoir se faire représenter. Autrement dit, lorsque vous devez être jugé, lorsqu'on doit rendre une décision sur une question qui va toucher votre permis, votre droit d'exercer, votre possibilité de posséder, vous faire exproprier, le montant de votre pension que vous allez obtenir, la possibilité d'avoir ou non une indemnité en cas d'accident ou d'acte criminel, la possibilité aussi que vous soyez...

Par exemple, un conflit qui est courant à l'heure actuelle: Qu'est-ce qu'on appelle un conjoint? Comme vous le savez, s'ils avaient voulu uniformiser les lois... Savez-vous qu'il y a à peu près 20 à 25 définitions différentes de «conjoint», à l'heure actuelle, dans l'ensemble du fatras de lois qu'on présente devant nous? Et cette commission va devoir dire, suivant les lois qu'on considère, qui est conjoint, par exemple. Alors, c'est très beau. Je vous signalerai que j'en ai retrouvé encore une nouvelle dans le RREGOP non syndicable, il y en a une nouvelle, et dans le décret qui vient d'être passé pour les administrateurs de cégep. Alors, vous multipliez ça. C'est exactement sur ce genre de discussion qu'on va se pencher en cas de décès, savoir si la personne aura droit ou non droit à la rente de conjoint survivant ou à la pension de conjoint survivant.

C'est fondamental. C'est fondamental. Et là vous allez dire à ces gens-là: Vous n'avez plus le droit de vous faire entendre. Bon Dieu! Bon Dieu! Mais sérieusement, là, est-ce que vous comprenez ce que vous êtes en train de faire en votant ce projet de loi? Vous n'avez pas le droit de vous faire entendre quand vous êtes en train de dire qu'il y a une possibilité de vous faire entendre.

M. le Président, je dois vous dire que c'est fondamentalement, fondamentalement inique, inacceptable, non, non, non juste. Le député de Châteauguay a utilisé le terme «honteux». Je partage son point de vue. C'est honteux de voter ce projet de loi actuellement. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous allons maintenant céder la parole au député de Saint-Jean. Alors, M. le député.


M. Roger Paquin

M. Paquin: M. le Président, le temps est venu pour nous d'adopter dans cette Chambre le projet de loi n° 89, la Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative. Depuis quatre sessions, nous travaillons à mettre en place l'ensemble des dispositions législatives qui vont rendre la justice administrative plus disponible, plus rapide, plus efficace, moins laborieuse pour nos citoyens. Nous avons passé plus d'une centaine d'heures en commission à écouter des groupes à quatre occasions pour bien cibler les changements qui étaient devenus nécessaires et faire en sorte que le monument législatif que constitue le Tribunal administratif du Québec soit le plus opportun possible compte tenu des nécessités qui étaient les nôtres.

La loi n° 89, c'est la loi d'application de cette loi du Tribunal administratif. Il faut voir qu'il y a l'ensemble des lois qui touchent de près nos citoyens, il y en a 111 dans tous les domaines qui sont touchées par cette Loi sur la justice administrative et cette loi-ci sur l'application.

Le temps, donc, est venu d'adopter ces mesures législatives là parce que, notamment, cet été, comme vous le savez, dans la fonction publique, un très grand nombre de personnes vont quitter. Il y aura des remplacements, il y aura des ajustements à faire sur le plan de la structure. Et, en même temps, le temps est venu d'appliquer cette loi-là parce qu'au 1er septembre 1997, comme le prévoit le dernier article de projet de loi qui en compte 916, il faudra que tout soit fonctionnel. Nous disposons donc de deux mois pour ce faire et rendre disponibles les dispositions de l'ensemble de ces législations. Il est important de faire en sorte que les citoyens bénéficient d'un temps de décision plus court dans l'ensemble des sujets qui sont attenants.

De plus, ce qui est assuré par le processus de la justice administrative du Québec, c'est que tous les citoyens, de façon simple, auront accès à des décisions rapides sur le plan administratif, qu'à l'occasion de ces décisions ils pourront présenter des observations; ils pourront même être accompagnés, et cela, sans judiciariser pour autant les décisions. Cependant, lorsqu'ils seront insatisfaits des décisions rendues, voire même des décisions révisées par les différents groupes d'administrateurs du Québec, ils auront recours à ce Tribunal administratif du Québec qui est en quelque sorte un appel possible des décisions rendues sur le plan administratif et, dans certains cas, quasi judiciaire.

Il faut cependant bien garder en vue que la déjudiciarisation des processus de l'administration publique va mener à une prise de décision individuelle dans l'exercice d'une fonction administrative de façon plus rapide et plus adéquate, mais cela suppose que des modifications pertinentes dans les procédures sont concordantes et, de cela, le projet de loi n° 89 s'en assure.

D'autre part, il y a des règles qui découlent de l'intégration, dans le Tribunal administratif du Québec, des organismes existants que sont la Commission des affaires sociales, le Bureau de révision en immigration, la Commission d'examen des troubles mentaux, le Bureau de révision de l'évaluation foncière et le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole. Encore une fois, il est important d'harmoniser l'ensemble des procédures dans chacun de ces domaines pour que le citoyen s'y retrouve, et c'est ce que fait aussi le projet de loi n° 89.

Il y a également des dispositions dans ce projet qui visent à confier au Tribunal administratif du Québec la compétence de certains organismes gouvernementaux comme la Commission municipale, la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec de même que la Cour du Québec dans des matières administratives et d'évaluation des indemnités à la suite d'une expropriation. Je vous soumets, M. le Président, qu'on s'est assuré que, pour l'ensemble des dispositions, tant pour le Tribunal d'appel en matières immobilières que pour le Bureau de révision de l'évaluation foncière, que pour le Tribunal d'appel en matière de protection du territoire agricole, l'appel demeure possible, et je pense que c'est important de le noter.

Nous avons également la nécessité d'adopter le projet de loi n° 89 parce qu'il nous permet de faire en sorte que certaines des dispositions qui étaient dans la Loi sur la Régie du logement soient devenues applicables aux régisseurs quant aux règles de recrutement, de sélection, de nomination, de renouvellement, de fin prématurée de mandat et de déontologie qui s'appliquent aux juges dans les tribunaux administratifs du Québec. Enfin, il est important que la nouvelle loi devienne applicable dans les meilleurs délais.

Avant de terminer, M. le Président, je voudrais rappeler que, pendant 27 heures, nous avons tenté d'étudier ce projet de loi et que nous avons obtenu la possibilité d'étudier 16 articles et de les adopter. Je porte à votre attention que ces articles ont été adoptés lorsque ça a été le député de Châteauguay ou celui de Verdun qui a agi comme critique; quand c'était celui de Chomedey, on n'a pas avancé d'un pas durant toute cette période. Et, quand on considère les 916 articles que nous aurions dû adopter, à ce rythme-là, on aurait été ici au début du prochain millénaire. C'est pourquoi, M. le Président, pour l'ensemble de ces raisons, il est important d'adopter dès maintenant, et pour le bénéfice de la population, le projet de loi n° 89.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Jean. Je tiens à rappeler au gouvernement qu'il lui reste un temps de parole de cinq minutes. Personne n'utilise le temps de parole? Est-ce que l'opposition désire se prévaloir du temps de parole? Non. O.K. Alors, à ce stade-ci, nous allons maintenant mettre la motion du leader au vote. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Une voix: Nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Un vote nominal? Que l'on appelle les députés, s'il vous plaît!

(23 h 50 – 23 h 57)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous mettons maintenant aux voix la motion de M. le leader du gouvernement.

Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Ménard (Laval-des-Rapides), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Charest (Rimouski), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

(minuit)

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:54

Contre:26

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion du leader du gouvernement est donc adoptée. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que vous pourriez indiquer à l'Assemblée à quel moment ou à quelle heure exactement le vote a été annoncé?

Le Vice-Président (M. Pinard): Le vote a été annoncé à 23 h 57. Le résultat du vote a été annoncé à 0 h 1.

Messieurs dames, à ce stade-ci, je demanderais au député de Bonaventure de bien vouloir déposer le rapport de la commission. M. le député.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 89

M. Landry (Bonaventure): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé les 15 avril, 6, 8, 13, 14, 15, 20 et 22 mai 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative. La commission n'a pas complété l'étude du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le rapport de la commission est donc déposé.

Conformément à la motion de suspension que vous venons d'adopter, nous allons maintenant suspendre les travaux de la Chambre pour une période de 30 minutes pour que tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt du rapport de la commission permanente des institutions, transmette au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer au projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative. Donc, je vous avise immédiatement que les travaux de la Chambre reprendront exactement à 0 h 33. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. De ce côté-ci, M. le Président, compte tenu qu'il s'agit d'un projet de loi qui contient plus de 900 articles et compte tenu du temps qui est mis à la disposition, on ne peut pas, là, dans la période de temps qui nous est allouée, proposer des amendements significatifs sur les 900 articles. Nous serions prêts, et je l'offre au leader du gouvernement, à renoncer à la période de 30 minutes qui fait partie de la motion si c'était fait de consentement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, il n'y a pas de problème. Nous sommes en possession des amendements qui sont soumis par le ministre de la Justice. Donc, cinq minutes de suspension, ce serait tout à fait suffisant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Cinq minutes, ça vous convient? Alors, nous suspendons donc nos travaux pour cinq minutes. Alors, je vous rappelle immédiatement... S'il vous plaît, je sais que la nuit débute, mais je tiens à vous rappeler immédiatement que nous allons débuter nos travaux à 0 h 9.

(Suspension de la séance à 0 h 5)

(Reprise à 0 h 13)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!


Prise en considération du rapport de la commission et des amendements du ministre

L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de la Justice et la motion de renumérotation du projet de loi.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur le rapport de la commission des institutions ainsi que sur les amendements proposés est de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes aux députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur ces amendements? M. le ministre.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Je pense qu'il s'agit d'un moment extrêmement important, celui où, après 25 ans d'efforts, on assiste à une transformation importante de tout le système de justice administrative au Québec. Ce n'est pas un souhait qui m'était personnel. C'était vraiment un souhait que toute la population juridique, que toute la population en général souhaitait. Les gouvernements ont demandé et obtenu des rapports, au nombre de quatre, portant sur la même chose et, il y a exactement 10 ans, en 1987, était déposé un rapport qui s'appelait L'urgence d'agir , et rédigé par M. Ouellette, portant sur la justice administrative.

M. le Président, je dépose présentement un nombre important d'amendements. Je vous avoue honnêtement que j'aurais de beaucoup préféré que nous puissions en discuter en commission, les regarder, bonifier le texte de loi. Je vois le député de Châteauguay qui dit, qui exprime un certain état d'impuissance. Je dois vous dire que, M. le Président, j'ai eu plaisir à travailler à quelques occasions avec le député de Châteauguay, avec le député de Verdun. Je dois vous dire que le climat dans lequel les choses se sont produites, même si nous n'avons pas avancé beaucoup plus rapidement, était extrêmement agréable, plaisant et permettait, je pense, de changer les choses, d'améliorer. Parce que, finalement, quand on y pense, le processus de la commission parlementaire, ce n'est pas un processus, à mon point de vue, qui est un processus d'opposition, c'est un processus de construction en commun à partir d'un projet de loi qui a été présenté par un ministre. Et quand on le fait, M. le Président, tout le monde y trouve une très grande satisfaction à le faire, que ce soit du côté ministériel ou du côté de l'opposition, et je pense que le résultat qui en sort est nettement meilleur. C'est pour ça que je déplore qu'on n'ait pas pu travailler de concert à bonifier le projet de loi. Je dépose des amendements et il aurait été bon que nous puissions en parler longuement en commission parce que ça aurait permis d'améliorer les choses.

Malheureusement, je n'ai pas pu obtenir cette collaboration de l'opposition et je le déplore. J'espère que c'est, en ce qui me concerne, et je le dis parce que je l'ai vécu à plusieurs reprises, que c'est la dernière fois qu'on assiste à de tels procédés, parce que personne n'y gagne. Personne n'y gagne. Le projet de loi est adopté ce soir. L'opposition n'a rien gagné de l'avoir retardé, puis la population en général n'a rien gagné à un travail qui n'a pu être complété de manière aussi satisfaisante qu'il aurait pu l'être si nous avions travaillé en collaboration.

M. le Président, le gouvernement peut présenter des motions. Si nous avons une opposition qui veut travailler en construction, le projet de loi devient facilement bonifiable et devient un projet commun. Je pense que c'est bon pour le parlementarisme, c'est bon pour la population en général. Mais, quand on ne peut pas faire ça, je pense que nous ne nous servons pas bien, nous nous nuisons comme collectivité. J'espérerais que, dorénavant, on soit en mesure de procéder différemment. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, j'écoutais le ministre de la Justice parler du parlementarisme, parler d'une opposition constructive. Je dois vous dire que, s'il déplorait la façon dont l'opposition a approché son projet de loi, il n'a pas donné une chance à l'opposition de manifester l'ensemble de la plaidoirie qu'elle voulait faire. On a arrêté après 25 heures, il y a un mois. Ça fait un mois que le ministre chôme, qu'il nous empêche de siéger à la commission des institutions pour lui expliquer ce qui ne va pas dans le projet de loi, pour lui rappeler ce que le Barreau dit de son projet de loi, pour lui rappeler combien il enlève des droits à nos concitoyens que nous représentons tous. Il nous empêche de faire ça. Et à quoi on assiste aujourd'hui, M. le Président? Alors qu'il parle de notre collègue de Chomedey, je vais lui dire quelque chose: Le caucus de l'opposition officielle, tous ensemble, nous sommes avec le député de Chomedey. Nous appuyons sa démarche parce que sa démarche sauve les citoyens du Québec.

Et là, ce qu'on est en train de nous dire, parce que le ministre de la Justice n'aime pas le critique de l'opposition, bien, il bâillonne l'opposition. Ce n'est pas une fleur au parlementarisme québécois, c'est une honte que ce gouvernement-là porte à son tableau de chasse. Encore une fois, une autre motion de suspension, parce que le ministre de la Justice n'aime pas le fait que le député de Chomedey trouve des trous dans ses projets de loi. Des trous, M. le Président... J'ai demandé combien d'amendements il nous dépose après la motion de suspension. Savez-vous ce qu'on m'a dit? Première réponse, 220; deuxième réponse: On ne sait pas trop vraiment combien il y en a, un pouce et demi. Regardez ça, là. Ça, c'est les amendements qu'on a aujourd'hui. Savez-vous combien de temps on a pour parler là-dessus en prise en considération du rapport? Dix minutes, pour à peu près 220 amendements. Alors, on va venir me dire que, ça, là, c'est une bonne façon de procéder, que le ministre est ouvert à une opposition constructive. C'est quoi, les outils qu'on a? C'est quoi, les moyens qu'on a pour faire en sorte de dire au gouvernement que nous avons une autre idée de la société québécoise, qu'il y a du monde au Québec qui pense qu'enlever des droits aux citoyens du Québec ce n'est pas une bonne affaire? Quels sont les moyens qui sont à notre disposition pour dire au gouvernement que ce qu'il fait, c'est simplement le contraire des promesses dans son programme Pour se faire élire ? Pas son programme électoral, son programme Pour se faire élire .

(0 h 20)

Des voix: Il n'est plus bon.

M. Fournier: Ah! Il n'est plus bon. On vient de me dire qu'il n'est plus bon, M. le Président. Imaginez-vous! C'est là qu'on est rendu. Le programme Pour faire élire ? Flushé. On a été élus, maintenant on peut tromper tout le monde. Et c'est ça qui se passe. Parce que quand on dit aux gens qu'on va les défendre, qu'on va leur donner des droits d'appel, puis qu'on leur enlève, c'est ça qui se passe, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Il y a des temps pour intervenir. Vous aurez le temps, tantôt, de répliquer. Pour le moment, j'inviterais ceux qui n'ont pas droit de parole, là, si vous voulez respecter ceux qui ont le droit de parole. M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: M. le Président, tout le monde comprendra le caractère antidémocratique de dire à la population: Nous, on veut faire une réforme de la justice administrative, puis on va protéger les droits d'appel; il n'y a pas de problème, vous allez toujours avoir le droit d'être entendus. Puis, une fois que l'élection est passée, on enlève les droits d'appel puis on enlève le droit d'être entendu.

Est-ce que c'est démocratique? Est-ce que c'est une bonne façon de faire? Il y en a de l'autre côté qui sont surpris que ce soit ça qu'ils vont faire. Il y en a qui ne sont pas au courant de ce qu'il y a dans le 89, M. le Président. Ce qu'il y a dans le 89, j'aime autant vous le dire tout de suite, on touche à peu près tous les secteurs d'activité étatiques: 111 lois sont touchées. Je dois vous le dire, avant que j'aie analysé les amendements, parce qu'on n'a pas eu le temps, avant d'analyser ça, 111 lois étaient touchées.

Alors, juste rapidement pour vous dire: C'est qui, les citoyens qui vont venir à nos bureaux de comté pour se plaindre de ce gouvernement qui leur a enlevé des droits? Parce que ce gouvernement, pour lui, «justice administrative», ça veut dire plus de pouvoirs à l'administration, moins de justice pour nos concitoyens. C'est comme ça qu'on voit la réforme de la justice administrative, de ce côté-là. Un parti, un gouvernement qui disait: Seules les machines seront affectées; les citoyens ne seront pas touchés. Exactement le contraire dans l'action, M. le Président!

C'est qui, rapidement? Les agences de voyages, tous ceux qui sont détenteurs d'un permis d'agence de voyages; dans tous nos comtés, on en a. Bien là, maintenant, l'administration prend le dessus sur eux. Si on veut leur suspendre, révoquer leur permis, ces gens-là qui sont des gens qui travaillent dans nos comtés, qui emploient du monde, bien, ils n'ont plus le moyen de se faire entendre. Ils n'ont plus le moyen d'aller vérifier ce qu'il y a dans les cartons de l'administration, dans les cartons de la machine. La machine prend le dessus, M. le Président.

En vertu de l'assurance automobile, tous nos concitoyens qui ont droit à des indemnités ne peuvent plus aller contre-expertiser, aller présenter leur preuve pour s'assurer que leurs droits sont respectés. Ça, c'est les gens qu'on représente, qui vont venir dans nos bureaux de comté. Bien, nous, on va leur dire qu'on s'est levés debout. Je ne sais pas ce que, vous, vous allez dire, M. le Président, ce que les gens d'en face vont dire quand des concitoyens vont aller les voir. J'espère qu'ils vont avoir le culot de leur dire: On a été au courant. On n'a pas eu beaucoup de temps pour être alertés, parce que notre leader avait enlevé les droits à l'opposition, mais ils nous l'ont dit dans la face quand même, que le gouvernement du Parti québécois avait enlevé des droits à nos concitoyens.

C'est vrai pour les agriculteurs, M. le Président, à plusieurs titres, notamment l'assurance-récolte. C'est vrai pour les entrepreneurs de la construction, pour les travailleurs de la construction. C'est vrai pour les entreprises de camionnage, des camionneurs. C'est même vrai, M. le Président, en matière de culture où ce qu'on ouvre, c'est finalement une piste à la censure que ce gouvernement ouvre, parce que l'administration peut décider elle-même. Il y a des gens d'en face qui trouvent ça drôle de voter pour un projet de loi où la machine va prendre des décisions, alors que les gens qui sont affectés n'ont même pas le droit d'être entendus, ce qui va à l'encontre des principes de justice naturelle qui animent, qui sont le fondement de nos institutions, le fondement de la défense des droits des gens qu'on représente. À quoi ça sert, un Parlement, si c'est pour détruire les droits de nos concitoyens? Ce n'est pas ça, construire une société québécoise qui va nous faire honneur. C'est le contraire qu'ils font, M. le Président.

Et ce n'est pas tout. Les courtiers en immeubles, les établissements d'enseignement privés, les intermédiaires de marché, les petits commerçants, les services de garde à l'enfance, et j'en passe, M. le Président, et j'en passe, tous des secteurs d'activité étatiques qui sont touchés par ce projet de loi.

Ce n'est pas un projet de loi sur la justice administrative; c'est un projet de loi qui fait mal à l'économie, qui fait mal à l'emploi, qui fait mal à nos concitoyens parce qu'on enlève des droits, parce qu'on a comme philosophie de gouvernement que la meilleure justice administrative, la plus efficace, c'est quand il ne reste que l'administration et qu'il n'y a plus de justice. C'est comme ça qu'on voit la réforme de la justice administrative. C'est comme ça que ce ministre voit les choses.

M. le Président, nous avons eu 25 heures, à peu près, 25 heures au cours desquelles, même si le leader essaie de vous dire que le député de Chomedey ou d'autres faisaient de l'obstruction, le ministre de la Justice a eu le temps de nous déposer des amendements et de plaider sur ces amendements pour nous convaincre et, ensuite, le lendemain, revenir avec un autre amendement qui défaisait l'amendement qu'il avait présenté. Il s'est autofilibusté pendant ce temps-là parce qu'il ne voulait pas qu'on lui dise que ça n'avait pas d'allure. Il ne voulait pas qu'on lui rappelle que le Barreau du Québec lui dit que c'est contre les principes mêmes qui soutiennent notre société, notre système de justice, nos institutions. Il nous a dit tantôt: Bien, le Barreau, il y a juste le Barreau qui pense ça, M. le Président. On parle de justice et ce que pense le Barreau, ce n'est pas important? M. le Président, ils sont une corporation professionnelle, dont les premiers intéressés en la matière.

Le ministre dit: Ce n'est pas important. On a eu 916 articles, 25 heures, à peu près deux minutes par article qui nous sont consacrés en commission. Et là le ministre nous dit: J'aurais aimé avoir plus de temps pour en débattre. Bien, nous autres aussi. Deux minutes par article, ce n'est pas beaucoup. Ça fait un mois qu'on attend le ministre en commission des institutions, puis il n'arrive pas. Il n'est pas là. Il chôme. Il ne vient pas.

Et puis là on nous dit: Il est bien bon, il est tellement bon, notre projet de loi, on va faire une motion de suspension des règles, comprenez-vous, on va faire ça vite, il est tellement bon. Puis là, oh! surprise, ils ne savent même pas le nombre d'amendements qu'ils nous déposent, juste un pouce et demi. Un pouce et demi d'amendements, aïe! Faut le faire. Faut le faire. C'est quelle sorte de justice? On ne parle pas de n'importe quelle loi, on parle du fondement de notre société. J'espère qu'en face ils vont se réveiller. Ils ont encore le temps. Je sais qu'il est un petit peu tard dans la nuit, c'est le but de l'affaire, d'ailleurs, pour essayer de cacher qu'on suspend les règles, mais peut-être qu'ils peuvent être encore un petit peu éveillés pour s'apercevoir que ce qu'ils font est très dommageable pour la société.

Et je veux rappeler, M. le Président, que c'est unis derrière notre collègue de Chomedey qu'on se tient debout et qu'on dit au gouvernement: Le chemin que vous avez suivi est un chemin où vous allez courir à votre perte, parce que ce n'est jamais bon pour un parti de renier les Québécois, d'aller à l'encontre de la défense de leurs droits et nous serons là lors du prochain rendez-vous pour rappeler combien vous avez été mauvais pour le Québec et pour les Québécois en enlevant des droits à nos concitoyens que nous représentons. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Y a-t-il d'autres intervenants?

Une voix: La réplique.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pas de droit de réplique. Il y a un droit de réplique, mais il n'y aura pas de réplique. Alors, ceci met donc fin à la prise en considération du rapport de la commission des institutions et des amendements de M. le ministre de la Justice.


Mise aux voix des amendements du ministre

Je mets donc aux voix une série d'éléments. Les amendements de M. le ministre de la Justice sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Mise aux voix des articles amendés

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Les articles du projet de loi ainsi amendés sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Les articles du projet de loi dont la commission des institutions n'a pas disposé sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, ainsi amendé est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Adoption

M. le ministre de la Justice propose maintenant l'adoption du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative. Je vous rappelle, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment: la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 89 est d'au plus 30 minutes, dont 10 pour le groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 pour le groupe parlementaire formant l'opposition, cinq pour les députés indépendants et un droit de réplique d'une durée de cinq minutes.

(0 h 30)

Y a-t-il des intervenants? M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, je voudrais très simplement et très rapidement remercier tous ceux et toutes celles qui, au cours des années, ont travaillé très fort pour faire en sorte qu'un jour quelqu'un puisse faire adopter un projet de loi, et c'est ce soir que ça se produit. Il y a des gens qui ont consacré des semaines, des mois, des années à préparer des documents, des rapports, d'autres ont passé des heures et des heures à écouter des personnes faire des représentations. Ils ont investi beaucoup, et je voudrais, au nom de tout le monde, les remercier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais céder la parole à M. le député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, merci, M. le Président. Peut-être un mot important à souligner dans la foulée des propos du ministre de la Justice. Tous ceux qui ont travaillé sur des projets de justice administrative, fonctionnaires, conseillers, ministres qui ont occupé les fonctions avant le ministre actuel de la Justice, n'ont jamais, avant que le ministre de la Justice que l'on connaît, le député de Louis-Hébert, occupe la fonction, jamais, M. le Président, n'ont conçu, concocté un projet de justice administrative qui enlève des droits à nos concitoyens, jamais. Et je veux bien que le ministre de la Justice essaie de faire cautionner son projet de loi en invoquant ses prédécesseurs, mais jamais, M. le Président, il n'a été dans la tête de quiconque l'idée que la réforme de la justice administrative voulait dire: La machine gagne, les citoyens perdent. Jamais. Alors, si le ministre de la Justice peut se conforter dans ses actions en se disant que d'autres avaient travaillé sur la justice administrative, je veux quand même lui rappeler qu'il est le premier, le seul qui conçoit la justice administrative comme entraînant que nos concitoyens auront moins de droits. Et pas n'importe quoi, on ne dit pas n'importe quoi quand on dit «moins de droits»; les droits d'appel que l'on avait promis ne sont plus disponibles. Je ne parle pas de la machine, là, je ne parle pas des fonctionnaires, je parle de nos concitoyens qu'on rencontre.

Moi, je me souviens de gens qui sont venus, des travailleurs à pourboire qui sont venus me voir à mon bureau puis qui parlaient de la machine du Revenu. Quelque temps après, j'avais la possibilité de voir la sous-ministre du Revenu et je lui expliquais comment les gens se sentent face au Revenu, face à la machine. Puis elle me disait: Bien, c'est simple, ils n'ont rien qu'à nous appeler, puis on fait des règlements, il n'y a pas de problème. Mais il n'y a pas de problème! Pour un de nos concitoyens, quand il appelle à Québec au ministère du Revenu, savez-vous qu'il y a une grosse machine où il place son appel, puis il est craintif, puis il a besoin d'assouplissement de la machine, pas que la machine lui tape sur la tête. Alors, c'est exactement le chemin qui est suivi ici.

Et c'est ça, le ministre peut bien dire: D'autres ont essayé avant moi, personne n'a jamais pensé que ça pouvait être ça, la réforme de la justice administrative. Il est le premier, et je souhaite qu'il soit le dernier à penser à concocter des projets comme ceux-là qui enlèvent des droits à nos concitoyens, je disais, des droits d'appel.

L'autre droit, le droit d'être entendu. Le droit d'être entendu, ça veut dire que, lorsque l'administration, sur des bases qu'elle-même peut connaître, décide de suspendre, de révoquer un permis, sur la foi de preuves qu'elle peut détenir, qui ne sont peut-être pas tout à fait vraies... Vous savez, M. le Président, lorsqu'on parle de la justice, on parle souvent de confronter deux vérités, parce que c'est des perceptions, des éléments d'information qui manquent; c'est deux vérités qui sont confrontées. Mais là, ce qu'on fait en enlevant le droit d'être entendu, c'est qu'on dit à l'administration: Tu peux le suspendre, le permis, je t'encourage à le faire parce que, de toute façon, les citoyens n'ont plus – et là je vous ai parlé tantôt de l'ensemble des secteurs d'activité, c'est tout le monde qu'on connaît qui est touché par ça – la possibilité de contre-expertiser, de présenter de la preuve, de contre-interroger les témoins, la preuve que la machine, l'administration...

Ah! c'est sûr que ça va aller beaucoup plus vite. Vous savez, quand il n'y a plus de processus pour vérifier la preuve que l'administration a, vous épargnez beaucoup, ah! c'est bien évident. Mais, à ce compte-là, M. le Président, la dictature, c'est beaucoup plus efficace que la démocratie, ça prend moins de temps, ça décide beaucoup plus vite. Dans le fond, il y en a un boss qui décide, puis tout le monde suit par là. Mais, nous, on pense, dans une société comme la nôtre, qu'une démocratie, ça vaut la peine, ça vaut la peine qu'on y consacre du temps, de l'énergie, parce qu'on croit que c'est une façon de bâtir une société. Bien, là, je vous dis, M. le Président, que ce projet-là, ce projet de loi fait le choix contraire. Il fait le choix d'enlever la possibilité pour nos concitoyens de vérifier ce que la machine a dans ses cartons.

Prenons un exemple. Je ne veux pas aller très loin, on va prendre les agences de voyages. On se tient dans les premières lois. Il y a une possibilité, on a pu en parler en commission parlementaire. Lorsque vous avez une agence de voyages, vous avez un permis. Tout à coup, avec ce projet de loi, le gouvernement, la machine du Parti québécois vient vous suspendre ce permis-là. Déjà que vous avez perdu le droit d'appel, là, vous voudriez pouvoir présenter une preuve, vérifier la preuve de la machine. Bien, le projet de loi, ces documents-là, ça vient dire: Tu fermes la shop.

Savez-vous c'est qui, ça? Ça, c'est du monde dans votre comté, M. le Président, dans mon comté. C'est du monde qui va être affecté tantôt parce que la machine va avoir dit: Tu fermes ta porte. Les gens que tu engages, ils ne travaillent plus; ils perdent leur emploi. Là, ils vont me dire: Ouais, mais ce n'est pas grave, c'est une suspension; ils vont finir par le ravoir. Quand vous fermez vos portes pendant deux mois, qu'il y a une atteinte à votre réputation, pensez-vous que c'est facile de repartir en affaires? Est-ce que les gens qui travaillent pour cette agence de voyages vont ravoir leur emploi?

En quoi ce projet de loi là... Un gouvernement devrait toujours se poser cette question-là avant même de penser à déposer un projet de loi en cette Chambre. Lorsqu'ils se réunissent au Conseil des ministres, première question que devrait se poser un gouvernement normal dans une société normale, il devrait se dire: Combien d'emplois je crée avec ce projet de loi? Il n'y a pas de réponse à cette question-là avec ce projet de loi. C'est: Combien d'emplois je perds avec le projet de loi? C'est ça la question à l'égard de ce projet de loi.

Ce gouvernement, lorsqu'il se réunit en Conseil des ministres, quelle est la priorité qu'il a à nous concocter un choix de société où la machine prend le dessus sur les individus, sur nos concitoyens? J'implore nos collègues d'en face de penser juste une fois au travail que nous avons à faire. Et je sais que, lorsqu'on emploie ces mots, ça peut peut-être faire rire ou sourire certains éléments du parti ministériel, mais il faut y penser quand même.

Je suis persuadé que, même s'ils suivront une ligne de parti, ils pourront y penser: Est-ce qu'on a vraiment bien fait de suivre le ministre de la Justice, de suivre le gouvernement et d'accepter que notre projet de société pour le Québec, c'est que la machine, l'administration, les gens que le gouvernement choisit de mettre en place vont avoir plus de pouvoirs, une plus grande portée sur les gens que nous représentons?

Moi, je ne suis pas de ce côté-là. Moi, je le dis d'avance, je ne suis pas de ce côté-là. Je n'interprète pas mon mandat comme étant, comme but de ce mandat, de taper sur la tête de nos concitoyens, de retirer des droits, de faire en sorte qu'ils seront des sujets sans droit d'être entendus, soumis à la volonté d'une bureaucratie, d'une machine anonyme, sous la bulle à Québec, qui fait ses critères, pas toujours bons, qui normalement devraient pouvoir être contestés, devraient pouvoir être vérifiés à la lumière de chaque cas d'espèce, que ce soit dans le camionnage, dans la construction, dans les agences de voyages, dans tous les domaines qui sont visés; 111 lois sont visées.

Autrement dit, tout ce que l'État fait maintenant, l'État le fera avec plus de force, avec plus de pouvoirs et avec des citoyens qui seront maintenant démunis de recours face à cette grosse machine. Moi, je peux vous dire une chose, M. le Président – et je termine là-dessus – si le ministre de la Justice croit vraiment qu'il est celui qui vient de mener à terme un processus qui a commencé il y a des années à l'égard de la justice administrative, je dois lui dire que le processus qu'il mène à terme est un détournement de l'objet qu'avaient tous ceux qui l'ont précédé, qui était de faire en sorte que l'administration ait suffisamment de souplesse pour reconnaître et accompagner les citoyens dans l'exercice de leurs droits et non pas d'avoir une administration qui prend tous les pouvoirs et peut enlever les droits, les recours de nos concitoyens.

(0 h 40)

Il a détourné, M. le Président, l'objet même de tous ceux qui l'ont précédé. Il a fait le choix d'avoir une justice administrative où il ne reste que l'administration et où il n'y a plus de justice. Il comprendra qu'avec le collègue de Chomedey, tous ensemble du côté de l'opposition, nous le dénonçons aujourd'hui, nous le dénoncerons demain et nous saurons changer sa loi quand viendra le temps. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Alors, M. le ministre, pour un droit de réplique de cinq minutes, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin (réplique)

M. Bégin: Merci, M. le Président. Je croyais qu'il y avait eu peut-être un changement de perception ou de compréhension des choses, et je me rends compte que le caractère obstiné que nous avons vu du côté de l'opposition se maintient.

Déjà, le 1er octobre 1996, le député de Chomedey déclarait au Journal de Québec: «Le Barreau est en train d'organiser, en collaboration avec tous les experts en droit administratif du Québec, un colloque pour le 18 octobre, à l'Université de Montréal. Le but du colloque est de monter une opposition formelle et stratégique contre la réforme de Bégin parce que, à leur point de vue, il y a encore des choses là-dedans qui n'ont pas de sens et on est largement d'accord avec eux là-dessus», dit-il.

M. le Président, lorsque le congrès s'est ouvert, le bâtonnier s'est dissocié totalement de cette déclaration de guerre que faisait de député de Chomedey, parce qu'il a dit: «Nous sommes ici pour travailler à construire et non pas pour chercher à démolir.» D'ailleurs, ceci était conforme au barreaugramme qui était publié au même moment et où on lit ceci – c'est un barreaugramme: «Le projet de loi n° 130 auquel il faut joindre le projet de loi d'application représente la plus importante législation de droit administratif qui ait été soumise à l'Assemblée nationale. Le Barreau estime opportun que les grandes orientations de son contenu fassent l'objet de discussions dans le cadre d'un forum public et scientifique.»

M. le Président, le Barreau a tenu un tel forum et, par la suite, a fait des propositions qui ont été acceptées par moi-même, en commission parlementaire, et il y a eu des modifications qui ont été faites.

Voilà, M. le Président, une façon de construire qui est bien différente de l'entreprise de démolition de l'opposition. Le député de Chomedey était contre, il veut être contre. Il est contre parce qu'il est contre, et c'est la seule raison qu'il a. M. le Président, je pense que ce n'est pas un travail constructif et je suis très déçu de voir que le député de Châteauguay adopte la même attitude que le député de Chomedey. Je trouve ça déplorable, M. le Président. Je pensais honnêtement qu'il était quelqu'un qui voulait construire et non pas faire ce qu'il est en train de faire, strictement sur le plan... En tout cas, j'aime autant ne pas le dire.

M. le Président, ce projet de loi et l'autre projet de loi ont été étudiés en quatre commissions parlementaires où les gens sont venus faire des représentations, où ils sont venus dire qu'ils étaient d'accord avec les principes, les orientations, les choix qui avaient été faits, mais qu'il y avait des modifications à faire. Ces modifications-là ont été faites, M. le Président, justement pour bonifier le projet de loi. Et je pense que ça, c'est du vrai travail constructif. Je suis persuadé que nous avons une pièce maîtresse dans notre législation et que les Québécois et les Québécoises vont pouvoir en bénéficier, contrairement à ce que dit le député de l'opposition.

M. le Président, je suis très fier de ce que nous avons fait et je suis convaincu que les Québécois pensent la même chose.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Ceci met fin au débat.

Le projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: On demande le vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vote par appel nominal. Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

(0 h 44 – 0 h 49)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Je mets maintenant aux voix la motion de M. le ministre de la Justice proposant l'adoption du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative.

(0 h 50)

Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bélanger (Anjou), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Charest (Rimouski), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Sainte-Anne), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

M. Boulerice: M. le Président, c'est Sainte-Marie–Saint-Jacques.

Le Secrétaire adjoint: M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la correction est faite. Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:52

Contre:23

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, est donc adopté.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ceci met fin à nos travaux et nous ajournons nos travaux à demain matin, 10 heures. C'est-à-dire à ce matin, 10 heures. Ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 54)