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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 5 juin 1998 - Vol. 35 N° 190

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures une minute)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons débuter par un moment de recueillement.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons les affaires courantes dès maintenant.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À l'étape de présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.


Projet de loi n° 436


Motion proposant qu'une nouvelle version anglaise soit présentée et que toutes les étapes de l'étude du projet de loi franchies soient considérées valides

M. Jolivet: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Considérant qu'une erreur s'est glissée au moment de l'impression de la version anglaise du projet de loi n° 436, An Act respecting...

M. Paradis: On n'est pas à la présentation de projets de loi.

M. Jolivet: ...Société Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches;

«Considérant que le projet de loi n° 436 est inscrit à l'étape de l'adoption;

«Qu'il me soit permis de présenter la version anglaise du projet de loi n° 436 telle qu'elle aurait dû être présentée à l'Assemblée par le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce le 14 mai 1998;

«Que cette nouvelle version anglaise soit considérée avoir été présentée en date du 14 mai 1998 et qu'en conséquence toutes les étapes du processus d'adoption du projet de loi n° 436 qui ont eu lieu à ce jour, soit la présentation, l'adoption du principe, l'étude détaillée en commission et la prise en considération du rapport de la commission, soient considérées valides comme si elles avaient été franchies avec cette version.»

Et, en conséquence, je dépose les deux projets de loi, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que la motion est adoptée? Adopté. Très bien.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor.


Document intitulé Les procédures d'octroi de contrats pour les services d'architectes et d'ingénieurs

M. Léonard: M. le Président, je dépose un rapport d'analyse sur les procédures d'octroi de contrats en matière de services professionnels d'architectes et d'ingénieurs au Québec, présenté par M. Claude Fluet, de l'Université du Québec à Montréal.

Le Président: Très bien. Ce document est déposé.


Rapport de mission au Parlement de la République d'Haïti

En ce qui me concerne, je dépose le rapport d'une mission que j'ai effectuée au Parlement de la République d'Haïti, à Port-au-Prince, du 1er au 5 mai dernier. J'étais alors accompagné de Mme la députée de Saint-François et de M. le député de Saint-Jean.


Entente entre le Parlement de la République d'Haïti et l'Assemblée nationale pour l'institution d'une Commission permanente interparlementaire Québec-Haïti

Je dépose également copie du texte de l'entente intervenue à cette occasion entre l'Assemblée nationale d'Haïti et l'Assemblée nationale du Québec pour l'institution d'une Commission permanente interparlementaire Québec-Haïti. Cette Commission permettra de favoriser des échanges directs entre les parlementaires haïtiens et québécois sur des sujets d'intérêt commun et de soutenir le processus d'implantation de la démocratie parlementaire en Haïti.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.

Alors, en attendant, on va demander au président de la commission de l'administration publique et député de Westmount–Saint-Louis.


Audition du Curateur public conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics

M. Chagnon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'administration publique qui a siégé le 20 mai 1998 afin d'entendre la curatrice publique en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics et, à cette fin, d'examiner le rapport spécial déposé à l'Assemblée nationale par le Vérificateur général sur le Curateur public. La commission a également tenu des séances de travail les 2 et 4 juin 1998. Le rapport de la commission contient des recommandations dont les plus importantes ont été adoptées sur division, M. le Président.

Le Président: Bien. Merci, M. le président de la commission de l'administration publique. Le rapport est déposé. M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.

M. Lachance: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le...

Le Président: Alors, reprenez votre souffle, M. le député. Ça va, là?

Des voix: Ha, ha, ha!


Consultations particulières sur le projet de loi n° 405

M. Lachance: Merci. Alors, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé les 3 et 4 juin 1998 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines.

Le Président: Vous avez un autre rapport, oui.


Étude détaillée du projet de loi n° 405

M. Lachance: Eh oui. Nous avons travaillé fort, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer également le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 4 juin 1998 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines. La commission a adopté le projet de loi sans amendement. Merci.

Le Président: Merci, M. le député de Bellechasse. Il faut s'occuper de sa santé, là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Il n'y a pas de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Nous allons immédiatement aborder la période de questions et réponses orales. M. le député de Westmount– Saint-Louis, en principale.


Demande d'enquête publique sur l'administration de la curatelle publique

M. Chagnon: M. le Président, pour la première fois depuis son histoire, le Vérificateur général nous déposait un rapport urgent concernant la curatelle publique. La commission parlementaire de l'administration a aussitôt entendu et le Vérificateur général, et le Protecteur du citoyen et la curatrice publique. Le rapport que nous avons entendu était accablant: 12 000 personnes inaptes à gérer leur santé ou à gérer leurs biens sont administrées par la curatelle publique et elles sont pratiquement abandonnées à leur sort; leur santé se dégrade; leurs biens se dilapident.

La commission que je préside a vu la majorité gouvernementale, les députés péquistes, rejeter l'idée d'une enquête publique pour entendre les victimes, leurs familles, les associations de protection des gens sous curatelle. Au lieu de cela, ils ont recommandé des audiences privées, avec uniquement un rapport au ministre des Relations avec les citoyens.

M. le Président, le ministre ne réalise-t-il pas, avec nous, nous ici, que la seule façon de faire la lumière sur les nombreuses allégations des victimes de la curatelle publique, c'est une enquête publique permettant, s'il y a lieu, le recours à la Sûreté du Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je pense que le ministre réalise parfaitement beaucoup de choses, d'ailleurs plus que celui qui pose la question, et le ministre répondra. Mais, dans l'introduction, il y avait une chose importante qui doit être soulignée, et je suis d'accord avec le député. Il y a un précédent historique, là: C'est la première fois que le Vérificateur général demande une telle chose, dit-il.

Je voudrais signaler, dans le rapport qu'on a reçu hier, aussi un autre précédent historique. Le Vérificateur général dit qu'après 20 ans de demandes de correction des états qu'il adressait à ceux qui nous ont précédés «les deux principaux reproches que je faisais au gouvernement en matière de présentation de l'information financière seront choses du passé. La réforme permet la publication d'états financiers conformes aux recommandations de l'Institut canadien des comptables agréés. Ainsi, le Québec est à la fine pointe et, à certains égards, à l'avant-garde en matière de présentation de l'information financière.» Alors, avec le grand respect qu'on doit au Vérificateur général et en remerciant le député d'avoir signalé un précédent, je voulais en signaler un autre. Mon collègue va répondre à la question, maintenant.

(10 h 10)

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. Mais je vous rappelle qu'il vous reste moins de temps, là.

M. Paradis: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce que vous auriez, à ce moment-ci, l'obligation de rappeler à l'ordre le ministre des Finances, de lui rappeler les dispositions de l'article 79 de notre règlement? Quand une question est posée, ce n'est pas le temps de faire une déclaration ministérielle. Quand on s'intéresse aux plus démunis, on ne prend pas le temps de parole du ministre qui doit répondre en faveur des plus démunis.

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, d'abord je voudrais dire que tous les membres de l'Assemblée nationale et tous les membres du gouvernement partagent le constat de stupeur qui a été repris par les membres de la commission sur l'administration publique. La question est de savoir comment on règle une situation qui perdure, dans certains cas, depuis plus de 30 ans. D'abord, M. le Président, pour moi, le diagnostic, il est posé. Le Vérificateur général a fait un travail sérieux pendant plus de 10 mois et nous a fait le constat que nous savons.

Pour corriger les choses, je veux dire à tous les membres de cette Assemblée que le Curateur public révisera l'ensemble des 12 000 cas sous curatelle publique. Nous sommes aussi à penser à un mécanisme pour faire en sorte que les tuteurs et curateurs privés puissent adresser leurs plaintes et leurs réclamations.

Tout ceci, cependant, devra se faire dans le cadre d'un mécanisme transparent, facilement accessible. Et la façon de le faire sera sans doute de créer un comité indépendant du Curateur public dont les recommandations lieront le Curateur public. C'est là, M. le Président, le premier mandat que j'ai confié à M. Thomas Boudreau, que j'ai vu vendredi dernier, que je dois revoir incessamment. Et très rapidement je serai capable d'informer les membres de cette Assemblée du mécanisme qui sera proposé.

Le Président: M. le député de Verdun, en complémentaire.

M. Gautrin: M. le Président. Est-ce que le ministre ne réalise pas qu'il faut redonner confiance en la curatelle, actuellement, qu'il y a des allégations très précises, des allégations de substitution de biens de gens qui sont sous curatelle, des allégations de disparition de biens de gens qui sont sous curatelle, des allégations de surmédication de gens qui sont sous curatelle? Et ce n'est pas par une enquête privée administrative qui lui fait rapport à lui qu'on redonnera confiance à la curatelle, mais bien par un geste public où tout le monde pourra se faire entendre. Est-ce qu'il ne comprend pas ça?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: Ce que le député devrait comprendre, M. le Président, c'est que ma première préoccupation, c'est de penser, d'abord et avant tout, aux gens et de tout faire en sorte pour que les gens qui ont besoin de cette protection, parmi les plus vulnérables de notre société, aient droit à des services de qualité auxquels ils s'attendent et auxquels ils ont droit. Voilà notre première préoccupation.

Deuxièmement, au sujet des allégations qui seraient de nature criminelle, ce document du Vérificateur général a été remis au ministre de la Justice qui est en train de l'analyser. Il est clair aussi que, s'il y a lieu, la Sûreté du Québec pourra faire enquête. Toutefois, pour avoir discuté avec le Vérificateur général pendant le déroulement de son enquête, il n'y a eu qu'une allégation de nature criminelle. Rapidement, elle a été portée à l'attention de la Sûreté du Québec qui, par écrit, a informé le Curateur public qu'il n'y avait pas lieu de poursuivre et d'aller plus loin dans l'enquête, puisque les faits avérés n'étaient pas suffisamment clairs. Donc, je tiens à redire que, au cours de l'exercice de redressement, si de nouveaux faits étaient portés à notre attention, il est clair qu'immédiatement ils seront transmis à la Sûreté du Québec.

Autre chose en terminant, M. le Président, le député devrait comprendre que la proposition qu'il a faite aussi de faire en sorte que la Sûreté du Québec aille se promener là puis interroge les gens, c'est une proposition nulle et non avenue parce qu'il est clair que la Sûreté du Québec ne peut s'en aller comme ça faire une partie de pêche et interroger les gens. Il est clair qu'elle n'aurait aucun mandat pour le faire et que ce serait impossible. Donc, sur des faits, il est clair que nous allons faire toute la lumière s'il y a ce genre d'allégations, mais rien dans le rapport du Vérificateur général ne vient confirmer les propos du député.

Le Président: M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Est-ce que le ministre ne comprend pas que, pour établir les faits, la seule manière crédible de le faire, c'est une enquête publique, et que le Vérificateur général a travaillé par échantillonnage, et c'est comme ça qu'il a établi des cas qui étaient clairement de nature criminelle? Est-ce qu'il ne comprend pas que c'est l'enquête publique qui lui permettra de connaître la réalité de ce qui se passe?

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: Nous savons que c'est là une situation qui perdure depuis longtemps. Et, peut-être qu'avant de faire une proposition comme il en fait une, est-ce que le député de Verdun pourrait s'enquérir auprès du député de Frontenac pourquoi il déclarait en commission parlementaire: «Je continue à dire ce que j'ai mentionné lors de l'étude des crédits et également lors d'autres occasions, la curatelle publique est bien administrée.»? Comment se fait-il que le député de Frontenac disait ça, alors qu'on a aujourd'hui les recommandations du Vérificateur général, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, en principale.


Suites au rapport spécial du Vérificateur général sur le Curateur public

M. Chagnon: M. le Président, nous savons maintenant, entre autres à cause du rapport du Vérificateur général, entre autres à cause du rapport du Protecteur du citoyen, qu'il y a des centaines de victimes dans le dossier de la curatelle publique, des victimes de tous les maux dont a parlé le député de Verdun. La seule façon de pouvoir savoir ce qui se passe vraiment à partir du document du Vérificateur général, en saluant l'arrivée de M. Thomas Boudreau, c'est certainement d'avoir une enquête publique pour donner la chance aux centaines de victimes de pouvoir dire pourquoi elles ont été spoliées, pourquoi elles ont vu leur vie ratée, diminuée, entre autres à cause de la surmédication, quoi qu'en dise le ministre.

M. le Président, pourquoi le gouvernement et pourquoi le ministre s'objectent-ils à faire en sorte qu'il y ait une enquête publique dans ce dossier? Qu'a-t-il à cacher?

Des voix: ...

Le Président: Bon, eh bien, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, ma mère me disait toujours que, lorsqu'on élève la voix pour faire un argument, c'est que souvent on est à court d'argument. Et je voudrais demander au député de Westmount–Saint-Louis comment il se fait que l'ancien député de Jean-Talon, ministre de la Justice, n'a jamais donné accès au Vérificateur général au Curateur public? Comment il se fait que le député de Frontenac, quand il était ministre de la Justice, n'a jamais donné accès au Vérificateur général au Curateur public? Qu'est-ce que vous aviez à cacher? Nous, on a eu le courage de faire entrer le Vérificateur général. On a un constat, on va le régler. Est-ce que le député de Westmount–Saint-Louis voulait cacher la mauvaise administration de celle qui est aujourd'hui ministre à Ottawa, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, dois-je comprendre de la réponse du ministre qu'il a enfin compris qu'il a la compassion suffisante pour faire une enquête publique sur le dossier?

Le Président: Est-ce qu'on pourrait demander à certains collègues qui, ce matin, ont de la difficulté à se retenir, de garder leurs commentaires pour eux? Les invectives personnelles, d'un côté ou de l'autre, ça n'avance à rien, là. Il y en a qui n'aiment pas tellement se faire rappeler à l'ordre. Il serait peut-être temps, avant qu'ils soient rappelés à l'ordre nommément, qu'ils se disciplinent eux-mêmes.

M. le ministre, s'il vous plaît.

(10 h 20)

M. Boisclair: M. le Président, la première préoccupation du gouvernement, c'est de rétablir le lien de confiance et faire en sorte que les gens, le monde, les gens parfois de nos familles, les gens que nous représentons ici, à l'Assemblée nationale, puissent avoir droit à des services de qualité. Effectivement, le lien de confiance, il a été rompu. Nous l'avons tous ici reconnu.

Maintenant, comment faire en sorte de corriger une situation qui perdure depuis 30 ans? Pour moi, je le répète, M. le Président, le diagnostic, il est posé. Les membres de la commission auront l'occasion de réentendre au mois d'octobre, lorsqu'une bonne partie du plan de redressement sera réalisée, d'entendre à nouveau le Curateur public, et sans doute les gens qui l'accompagneront, pour faire le point sur le redressement. J'ai confiance, M. le Président, que rapidement, avec les mesures exceptionnelles – je tiens à le rappeler – les mesures exceptionnelles que le gouvernement a mises de l'avant, on sera capable de rétablir ce lien de confiance. Je pense que, s'il y a quelque chose d'utile à faire et pour lequel nous devons tous ici nous donner la main, c'est de rapidement redresser la situation. Et les coupables, M. le Président, en temps et lieu, on s'en occupera. Est-ce qu'on peut à ce moment-ci d'abord penser aux gens et, s'il vous plaît, mettre la partisanerie de côté?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Chomedey, en principale.


Légalité de l'entente signée entre le ministère du Revenu et M. Byron Horne, propriétaire du Club Rez, à Kahnawake

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Hier matin, la ministre déléguée au Revenu s'est empressée de déposer une lettre ici, en Chambre, qui venait juste de lui être transmise et qui était censée défaire l'avis juridique des deux avocates de la Justice qui avaient conclu à l'illégalité du projet d'entente qui avait été par la suite signé. La ministre plaidait, dans un premier temps, qu'il y avait une différence entre le projet puis l'entente. Vérification faite, il n'en est rien, M. le Président. C'est pour ça qu'elle n'a jamais été capable de montrer ces distinctions ni à la presse ni ici, en Chambre. Mais il y a plus. Et d'ailleurs je tiens à souligner le courage et le professionnalisme de ces deux avocates qui ont refusé de céder aux pressions qui leur ont été faites pour changer leur avis juridique.

Mais, regardons attentivement, M. le Président, la lettre en question que la ministre a citée hier à son appui. La première phrase de cette lettre dit ceci: «L'article 17 de la Loi concernant l'impôt sur le tabac prévoit que le ministre peut, afin de faciliter la perception et la remise de l'impôt établi par la présente loi, conclure avec toute personne titulaire d'un certificat d'enregistrement les ententes écrites qu'il juge utiles.» Or, M. le Président, le tout premier article du «administrative agreement between Byron Horne [...] and the Deputy Minister of Revenue» dispose ce qui suit: «The Deputy Minister of Revenue for Québec will reissue the registration certificate...»

M. le Président, à sa face même, l'entente est illégale. Comment la ministre peut prétendre qu'on pouvait signer cette entente, alors que, selon son propre avis juridique, l'entente ne pouvait pas être signée, M. Horne n'étant pas à ce moment-là titulaire d'un certificat, tel que requis explicitement par la loi?

Le Président: Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: D'abord, je vais citer le député de Verdun. On va rétablir les faits, M. le Président. Il n'a jamais été question de défaire l'avis juridique qui avait été rédigé sur le projet d'entente.

Deuxièmement, il n'y a jamais eu de pression sur quiconque pour changer cet avis juridique. J'ai demandé et j'ai obtenu de la sous-ministre la lettre à laquelle fait référence le député, un avis juridique sur une entente signée, pas un projet d'entente. Et cet avis dit clairement que l'entente signée le 23 février diffère du projet d'entente soumis pour l'opinion juridique émise le 22 janvier 1996, que cette entente n'a pas pour effet d'exempter le contribuable en cause de ses obligations par ailleurs prévues aux lois fiscales.

Compte tenu de ce qui précède, il est inexact de prétendre que l'entente conclue le 23 février contrevient aux lois fiscales. M. le Président, je citerais d'ailleurs ce matin l'article de Michel Venne dans Le Devoir , qui dit: «L'entente est dite secrète et illégale? Est-elle secrète? Elle est certes confidentielle, ce qui est l'usage au ministère du Revenu qui signe des centaines d'ententes administratives établissant des conditions pour veiller à ce que les contribuables remplissent leurs obligations.» Est-elle illégale? Les documents produits par l'opposition n'en font pas la démonstration.

M. le Président, nous avons un officier de la justice, deux officiers qui ont signé cet avis juridique, et je pense que cet avis juridique rencontre exactement la demande que j'ai faite pour répondre à la question qui prétendait que les documents que nous avons devant nous aujourd'hui étaient illégaux.

Le Président: M. le député Chomedey.

M. Mulcair: On peut citer Le Devoir . On peut aussi citer Nuovo. On peut aussi parler du prix Bolo que la ministre a reçu de Robert Gillet ce matin. Mais ce n'est pas ma question, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre peut tenter de se concentrer, s'il vous plaît, sur la question qui lui a été posée, qui est la suivante: Comment est-ce qu'elle peut prétendre que l'entente était légale, alors que même la lettre d'une demi-page qu'elle a déposée ici, hier, pour tenter de se tirer d'affaire dans ce dossier scandaleux, dit clairement qu'en vertu de l'article 17 une telle entente ne peut être conclue qu'avec une personne titulaire d'un certificat d'enregistrement et que l'article premier du «administrative agreement» qu'elle a signé avec Byron Horne prévoit expressément qu'il n'a pas son certificat? Comment elle peut mettre ces deux choses-là ensemble?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Oui, M. le Président, je vais me concentrer sur la question et je vais d'ailleurs parler moi aussi de la mauvaise foi qu'un juge a prêtée dans un jugement, il y a un an – ça a paru dans les journaux – au député de Chomedey. Alors, encore aujourd'hui il tente d'induire la population et cette Chambre en erreur. Le député de Chomedey utilise des propos qui ne correspondent pas à la réalité. Et je vais ajouter: «N'est-il pas paradoxal...» Je cite encore cet article-là parce que je le trouve très intéressant.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Dionne-Marsolais: Et tout le monde, d'ailleurs, devrait trouver ça intéressant: «N'est-il pas paradoxal que les libéraux, qui ont cherché à faire un scandale et réclamé une enquête pour éclabousser Lucien Bouchard à la suite d'une fuite de renseignements au ministère du Revenu, l'automne dernier, dans l'affaire Lebel, utilisent aujourd'hui des documents confidentiels provenant du même ministère et obtenus on ne sait de quelle source pour embêter le gouvernement?» M. le Président, le député de Chomedey s'est vanté, hier, d'avoir des sources. Il ne les a pas qualifiées, mais il a dit qu'il avait des sources. Or, de mémoire...

Des voix: Excellentes!

Mme Dionne-Marsolais: Excellentes. Bon. Alors, de mémoire, le député de Chomedey est encore membre du Barreau et il aurait donc prêté le serment d'office. Il y a donc un code de déontologie des avocats. Or, dans ce code, à l'article 2.01...

Des voix: ...

Le Président: Alors, Mme la ministre, en terminant, s'il vous plaît.

Mme Dionne-Marsolais: En terminant, M. le Président, je cite l'article 2.01 des Devoirs généraux et obligations envers le public: «2.01. L'avocat ne doit pas prononcer des paroles ou publier des écrits contraires aux lois, ni inciter quiconque à y porter atteinte...» Alors, ce qu'il a fait, dans le présent cas: il s'est fait complice d'une diffusion d'informations confidentielles.

Le Président: M. le député de Chomedey.

(10 h 30)

M. Mulcair: Est-ce que la ministre déléguée au Revenu peut comprendre que la raison pour laquelle ses fonctionnaires ont mis cet article dans sa pile de papiers à matin, c'est parce que les supérieurs des deux avocates qui ont tenté de les influencer et de les forcer à changer d'avis, c'est eux qui avaient contrevenu et que c'était prévisible que ça soit soulevé en Chambre? Ce n'est pas l'opposition qui a fait quelque chose de pas correct, c'est son ministère qui a tenté de tordre le bras de ces deux avocates. Et ça n'a pas marché parce qu'elles avaient raison: l'entente est illégale non pas seulement selon le premier avis, mais aussi, avec une lecture attentive, selon son propre avis déposé hier. C'est pour ça qu'elle est incapable de répondre.

Alors, on essaie une dernière fois. Comment ça se fait que l'entente a été signée, alors que l'article 1 indique clairement que Byron n'avait pas son permis et que l'article 17 dit qu'un ministre ne peut signer qu'avec une personne titulaire d'un permis?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: Non seulement, M. le Président, le député se fait complice d'un bris du secret fiscal...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: ...mais, en plus, M. le Président, il prête des intentions malveillantes à de ses confrères dans la profession, deux, d'ailleurs, qui sont en plus avocats au ministère du Revenu. M. le Président, je le répète, notre gouvernement n'a rien à envier à la gestion du Parti libéral en matière...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Je répète donc: Notre gouvernement n'a pas de leçons à recevoir de la part des libéraux en matière d'évasion fiscale concernant les produits du tabac, puisque, à leur époque, c'était 532 000 000 $ en évasion fiscale, soit 60 % des ventes qui échappaient au fisc. Et, aujourd'hui, on est rendu à 25 000 000 $, 6 %. Donc, il y a quelque chose que l'on fait bien.

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Est-ce que la ministre est en train de nous démontrer, par son refus de répondre, qu'elle aurait appris au moins une chose après tout ce temps avec Byron Horne et ses acolytes, qu'elle a appris à faire de l'évasion aussi bien qu'eux autres?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai aussi appris autre chose dans cette période. J'ai appris qu'en octobre 1989 le gouvernement provincial... Et je cite ici un article de la Gazette : «The provincial Government lost $135 600 in tax revenue by mistakenly signing an agreement with a native man posing – posing – as Grand Chief of the Mohawk settlement of Kanesatake. The pact signed in 1987 let – je passe le nom – and his family deal...» Un instant, M. le Président!

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît! Un instant!

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Ce que dit l'article, donc, c'est que le précédent gouvernement a signé une entente pour permettre à la famille en question de vendre légalement «deal legally in tax free cigarettes». Et on dit, un peu plus loin: «The botched arrangement reflects how the provincial Government has failed to control the growing trade in tax-free cigarettes.»

Dans le cas de l'entente que nous avons signée, M. le Président, nous l'avons signée avec des personnes responsables et, en plus, nous avons respecté toutes les lois fiscales du Québec, incluant les lois fédérales affectant les Indiens.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Annulation d'un mandat de perquisition au Club Rez de M. Byron Horne, à Kahnawake

M. Lefebvre: M. le Président, dans le dossier de la contrebande de la cigarette, la Sûreté du Québec n'a pas de problème à faire son travail, à recueillir toute la preuve lorsqu'on est à Montréal, lorsqu'on est en région et même au ministère du Revenu du Québec, M. le Président. On en reparlera, de ce volet-là, le gouvernement du Québec est sous enquête par la SQ, M. le Président.

Une voix: C'est vrai. C'est vrai.

M. Lefebvre: Alors, la Sûreté du Québec fait bien son travail, puis on a des résultats. Hier, on a appris qu'il y avait eu une autre série de condamnations dans le dossier de la contrebande de cigarettes, des condamnations qui varient, quant aux amendes, de 2 000 $ à 43 000 $, toute une série que j'ai ici sous les yeux, M. le Président.

À Kahnawake, c'est différent. La Sûreté du Québec ne peut pas exécuter ses mandats de perquisition, particulièrement quant au Club Rez, propriété de M. Byron Horne. Le ministre de la Sécurité publique est intervenu, a bloqué l'exécution des mandats de perquisition, M. le Président. Je l'ai dit, le chef des Peacekeepers l'a dit, et ce qu'on apprend aujourd'hui, c'est que le caporal Bourdon de la Sûreté du Québec, lui aussi, le dit. Je le cite: «À cette étape de l'exécution des mandats de perquisition au Club Rez, les autorités de la Sécurité publique nous ont dit que le dossier était devenu une question politique parce que M. Bélanger, le ministre de la Sécurité publique, avait rencontré M. Norton, chef de bande de Kahnawake. Résultat: le mandat de perquisition a été bloqué, n'a pas été exécuté, à la demande du ministre de la Sécurité publique, contrôlé par Jean-Roch Boivin.»

M. le Président, ma question au ministre de la Sécurité publique: Comment le ministre de la Sécurité publique peut-il expliquer que les...

Le Président: M. le leader du gouvernement. De la même façon que ça s'est produit hier, je pense que je vous demanderais, là aussi, même si vous n'aviez pas la parole, de retirer vos propos, s'il vous plaît, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: ...

Le Président: Alors, j'apprécierais que, finalement, il n'y ait que le député de Frontenac qui intervienne à ce moment-ci, puisque c'est lui qui a la parole et uniquement lui. Mais, M. le député de Frontenac, votre temps est largement dépassé, alors concluez rapidement.

M. Lefebvre: J'étais rendu à la question, M. le Président: Comment le ministre de la Sécurité publique peut-il expliquer que les dépanneurs de Montréal sont perquisitionnés, que le gouvernement du Québec, le ministère du Revenu du Québec est perquisitionné, et que le Club Rez, protégé par une entente d'immunité secrète et illégale, ne l'est pas? Est-ce que ce n'est pas la démonstration éclatante que, au Québec, avec le gouvernement péquiste, il y a vraiment deux systèmes de justice?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, quant au syndrome Jean-Roch Boivin, je pensais que le député de Frontenac était guéri. Il existe des thérapies pour ça, mais je constate qu'il n'est pas encore guéri.

Maintenant, le député de Frontenac s'imagine que, à force de répéter des choses qui sont fausses, à force de les répéter, comme d'habitude, comme pour les combats extrêmes – je l'ai déjà dit, il a été le plus grand promoteur des combats extrêmes au Québec pendant un mois, M. le Président – alors il s'imagine que ça va devenir, à ce moment-là, vrai par pensée magique.

Je n'ai jamais bloqué des mandats de perquisition, M. le Président, c'est un ordre de la cour. L'ancien ministre de la Justice devrait savoir que c'est un ordre de la cour. À partir du moment que les mandats ont été remis aux Peacekeepers, c'est aux Peacekeepers de faire leur travail et c'est à eux de subir les conséquences, à ce moment-là, de refuser d'exécuter un mandat et un ordre de la cour. Alors, je n'ai aucune juridiction, aucune compétence pour entraver, à ce moment-là, un ordre de la cour et je ne l'ai jamais fait. Mais c'est évident que le député de Frontenac, à force de dire des choses qui sont fausses, il se dit: À un moment donné, ça va devenir vrai. Bon.

(10 h 40)

Maintenant, quant à l'enquête, je l'ai dit, cette enquête, M. le Président, tant sur le côté autochtone que sur le côté non autochtone, va être menée jusqu'à sa conclusion. Le député de Frontenac, quand il était ministre de la Justice, il n'arrêtait pas... J'ai ici des extraits de journaux, en 1994, quand il disait, quand il était ministre de la Justice: Attendons le résultat des enquêtes avant de voir exactement le résultat de la justice. Justement, qu'il attende donc le résultat de l'enquête puis il va voir qu'il n'y a pas deux justices au Québec, il va voir qu'il va y avoir des poursuites qui vont être prises contre tout le monde impliqué dans le réseau.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, ma question est simple au ministre de la Sécurité publique: Pourquoi, M. le Président, dans le même dossier, pour les mêmes offenses, les mêmes offenses aux mêmes lois, les dépanneurs de Montréal sont perquisitionnés, le ministère du Revenu du Québec est perquisitionné – on sait qu'un mandat de perquisition, M. le Président, c'est pour permettre à la Sûreté du Québec d'aller chercher toute la preuve... Pour quelle raison y a-t-il une distinction lorsqu'on parle, lorsqu'il s'agit du Club Rez à Kahnawake, que les mandats de perquisition qui avaient été émis n'ont pas pu être exécutés? C'est ça que je demande au ministre de la Sécurité publique, M. le Président, qui a l'obligation de me répondre en vertu des lois qui gouvernent sa conduite et qui l'obligent à protéger le public. Pourquoi deux façons de procéder, une pour le Club Rez puis une autre pour les dépanneurs de Montréal?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, le député de Frontenac peut bien faire le fanfaron. Pendant qu'il était ministre de la Justice, le trafic illicite des cigarettes représentait 500 000 000 $. Jamais le gouvernement libéral, ni le ministre de la Justice, ni le député de Pontiac qui était ministre de la Sécurité publique n'ont fait quoi que ce soit. Quoi que ce soit! Ils n'ont même pas essayé une intervention policière sur le territoire de Kahnawake puis là ils sont en train de nous dire, de nous reprocher de ne pas agir. Ils n'ont rien fait. 500 000 000 $ – 500 000 000 $! – de trafic illicite, M. le Président, en toute impunité.

D'un autre côté, aussi, le député de Frontenac, lui, il l'a dit, ce qu'était sa solution. On a débattu à peu près une heure l'autre fois, lors de l'étude des crédits, justement sur le problème du trafic illicite des cigarettes. Sa solution, ce n'est pas des opérations policières, c'est que le Québec renonce à tout pouvoir de taxation sur le tabac, comme ils ont fait, finalement, en 1994, en baissant les taxes sur les cigarettes. C'est ça, sa solution, ce n'est pas des opérations policières, M. le Président.

Donc, le député de Frontenac, avant de nous faire la morale, qu'il regarde donc quand il était ministre de la Justice puis que le trafic se faisait au taux de 500 000 000 $. 60 % de toutes les ventes de tabac étaient illégales au Québec, en 1994. Alors, plutôt, qu'il regarde donc ce qu'il a fait à l'époque, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique nie qu'il ait discuté avec des membres de la Sûreté du Québec, lui ou son entourage de son ministère, M. le Président, qu'il y ait eu discussion avant la non-exécution du mandat de perquisition que j'ai ici en main visant le Club Rez? Est-ce que le ministre nie qu'il y ait eu des discussions entre la Sûreté du Québec et des gens dans son ministère, ou dans son entourage immédiat, ou lui-même, M. le Président? Oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, ce que je peux dire sous mon serment de député et d'avocat, c'est que je n'ai jamais donné de directive relativement à l'exécution d'un mandat de perquisition, M. le Président. Jamais je ne suis intervenu sous mon mandat d'office, sous mon mandat d'avocat, et je l'ai déclaré en cour, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique nie les propos de M. Bourdon, de la Sûreté du Québec, à l'effet qu'il y a eu des discussions avec les hautes autorités du ministère de la Sécurité publique quant à l'exécution du mandat de perquisition visant le Club Rez à Kahnawake il y a quelques semaines à peine? Oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: Le député de Frontenac sait très bien qu'il y a eu une rencontre à mon cabinet vers la fin avril, je l'ai dit publiquement. J'ai même fait un «scrum» en sortant de cette réunion. Il y avait, à ce moment-là, plusieurs points à l'ordre du jour, dont les fameux combats extrêmes. En grand prophète, le député de Frontenac les annonçait partout, ils n'ont jamais eu lieu. Il y avait plusieurs points à l'ordre du jour. Il n'a jamais été question de savoir comment... ou de directive relativement au mandat de perquisition, jamais.

La seule chose qu'il y a eu comme entente, c'est qu'il y aurait des gens du ministère du Revenu qui demanderaient des renseignements relativement au trafic illicite. C'est tout ce qu'il y a eu. Et c'est ce qui a été fait, M. le Président, il y a eu des échanges entre le ministère du Revenu et Kahnawake. C'est tout ce qu'il y a eu, M. le Président. Ça n'a eu aucune entrave dans l'enquête policière, le député de Frontenac va le voir, la Chambre va le voir, M. le Président. Le député de Frontenac, quand il était ministre de la Justice, il disait: Attendons la conclusion des enquêtes. Justement, l'enquête va venir à une conclusion, et le député de Frontenac va voir qu'il n'y a pas deux justices au Québec.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre de la Sécurité publique se souvient de m'avoir répondu, le 28 avril 1998, lorsque j'affirmais qu'il avait bloqué le mandat de perquisition... Il m'a répondu ceci: «Ce qui a tout simplement été convenu, c'est que les documents qui étaient demandés, évidemment, dans le mandat de perquisition, vu aussi les faits que, potentiellement, il pourrait y avoir une contestation judiciaire – c'est lui qui parle – relativement aussi à la Loi sur les Indiens...»

Est-ce que le ministre ne reconnaissait pas, M. le Président, que, justement, au moment de la rencontre à laquelle il vient de faire référence, il a été question de l'exécution du mandat de perquisition, ce qui confirme les propos du caporal Bourdon, que les hautes autorités du ministère de la Sécurité publique ont bloqué l'exécution du mandat de perquisition? Est-ce que ce n'est pas vraiment ça qui s'est passé et ce que vient d'avouer au moins à moitié le ministre de la Sécurité publique?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, là, le député de Frontenac fait son avocat, mais je crois qu'il a dû couler son droit pénal n° 1, parce que le fait de faire une enquête administrative ou une démarche administrative n'invalide pas un ordre de la cour. Là, je pense que ça, ça lui a peut-être manqué, dans son cours de droit. En première année, on apprend ça, en première année de droit, M. le Président. Le député de Frontenac ne devait pas être là à ce moment-là, cette journée-là. Je comprends.

Mais, ancien ministre de la Justice libéral, moi, je m'étonne que le député de Frontenac ne soit pas outré des aveux de son collègue avocat aussi, qui, lui, se vante, avec toute la modestie et l'humilité qu'on lui reconnaît dans cette Chambre, le député de Chomedey, lui, reconnaît qu'il a accès au ministère du Revenu. Et ce qu'il a dit, même – je veux citer les propos du député de Chomedey: «M. le Président, nos sources, justement, au Revenu sont toujours aussi fiables.» Donc, le député de Chomedey, hier, a reconnu, il a fait un aveu en cette Chambre, sous l'immunité parlementaire évidemment, que, en toute illégalité – en toute illégalité! – il avait accès à tous les dossiers des contribuables québécois. Ça, je m'attendrais à ce que le député avocat de Frontenac, peut-être, s'insurge un peu contre ça.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac, dernière question, en complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, quand les poursuites pour les mêmes infractions, ou à peu près, aux mêmes lois que celles pour lesquelles ont été condamnés un nombre considérable de dépanneurs de la ville de Montréal, quand les poursuites contre le Club Rez et son propriétaire M. Byron Horne, quand ces poursuites-là seront-elles intentées? Ma question s'adresse au ministre de la Sécurité publique, M. le Président.

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, la Sûreté du Québec m'a confirmé qu'avec les volumes importants de documents saisis un peu partout lors des opérations policières on est en train de colliger présentement ces informations, et on devrait, dans quelques semaines, avant l'automne, M. le Président, je l'espère...

Une voix: ...

M. Bélanger: Oui. M. le Président, l'enquête policière, le député de Frontenac l'a répété à satiété quand il était ministre de la Justice, il faut évidemment être sûr, à ce moment-là, qu'on obtienne les condamnations contre les gens qu'on veut évidemment poursuivre. La Sûreté du Québec fait sont travail, M. le Président, je peux vous assurer qu'elle agit avec diligence. Le député de Frontenac va ravaler ses paroles puis il va voir qu'il n'y a pas deux justices au Québec, quand, justement, les résultats de l'enquête seront connus du public.

Des voix: Bravo!

M. Lefebvre: Additionnelle, M. le Président. Additionnelle, M. le Président.

Le Président: Je vous avais indiqué, M. le député de Frontenac, que c'était la dernière question en additionnelle. Je veux reconnaître le député de Saint-Hyacinthe avant la fin de la période de questions. M. le député de Saint-Hyacinthe.


Investissement dans les parcs du Québec

M. Dion: Merci, M. le Président. On sait qu'une des choses qui intéressent la population du Québec – pas seulement les questions qui ont été posées tout à l'heure, mais bien d'autres choses qui intéressent la population du Québec et à laquelle la population est de plus en plus sensible – c'est toute la question de l'environnement, M. le Président. Ce qui est très encourageant, c'est de voir, dans un sondage publié ce matin dans le journal, que les citoyens du Québec se disent de plus en plus satisfaits, c'est-à-dire que le taux de satisfaction de la population envers l'action du gouvernement augmente, M. le Président. Mais le même sondage nous dit aussi que la population en veut davantage.

Alors, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement, M. le Président: Est-ce que le ministre de l'Environnement et de la Faune peut nous dire ce qu'il compte faire pour répondre à cette attente de la population?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

(10 h 50)

M. Bégin: M. le Président, tout le monde sait qu'une des missions importantes du ministre de l'Environnement et de la Faune est la conservation. Le gouvernement du Parti libéral, dans les deux mandats qu'il a eus, a oublié cette mission. Il s'est contenté, à l'égard des parcs du Québec, de maintenir en état les choses sans jamais investir quelque argent que ce soit.

J'annonce, et j'ai annoncé, que nous allons investir dans une véritable relance des parcs au Québec que la population du Québec attend, un véritable investissement de 35 000 000 $ sur trois ans pour redonner aux parcs du Québec l'éclat qu'ils ont perdu, l'attirance qu'ils avaient, pour être en mesure de redonner, justement, à la population du Québec et à ceux de l'extérieur qui voudront venir, la chance de voir des parcs en bon état, dans un état intéressant et stimulant pour eux. Alors, j'entreprends une tournée à travers le Québec pour annoncer à la population de chacune des régions des sommes d'argent que nous investirons pour redonner la fierté dans leurs parcs, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Dion: M. le Président, est-ce que l'adhésion de la population à l'action gouvernementale n'est pas déterminante pour le résultat positif de ces actions? Aussi, je voudrais savoir, donc, ce que le ministre a fait et entend faire pour s'assurer que les gens participent à l'action gouvernementale dans ce domaine?

Le Président: M. le ministre.

M. Bégin: Alors, M. le Président, non seulement il y aura investissement important, 35 000 000 $ sur trois ans, dans les parcs du Québec, mais il y aura la création de quatre nouveaux parcs au Québec: le parc Vauréal; le parc Plaisance, dans l'Outaouais; les Hautes-Gorges du Saguenay; et le cratère du Nouveau-Québec.

C'est le désir du gouvernement, et nous pensons également que c'est celui de la population. Nous allons donc, à l'automne, entreprendre des consultations dans chacun de ces cas pour savoir ce qu'en pense cette population, et nous croyons qu'elle sera entièrement d'accord pour le faire. Non seulement il y aura ça, mais il y aura également agrandissement de certains parcs, comme celui du parc du Mont-Tremblant et d'autres. Je pense que c'est ça, travailler pour le Québec.

Le Président: Une dernière question. M. le député de Frontenac.


Vente de cigarettes sans permis par le Club Rez de M. Byron Horne, à Kahnawake

M. Lefebvre: M. le Président, ma question à Mme la ministre du Revenu: Comment la ministre du Revenu peut-elle m'expliquer que le Club Rez, dont le permis pour la vente de cigarettes est expiré depuis le 6 mars 1998, opère toujours ce commerce de vente de cigarettes au moment où on se parle?

Une voix: Illégalement! Illégalement!

Le Président: Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, vous comprendrez que le secret fiscal, je n'ai certainement pas l'intention de le briser.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Très bien. Alors, la période des questions et des réponses orales est terminée pour aujourd'hui.

Il n'y a pas de réponses différées.

Il n'y a pas de votes reportés.


Motions sans préavis

Aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 445

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'économie et du travail procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 445, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction, le jeudi 11 juin 1998, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, et, à cette fin, entende les organismes suivants: jeudi, de 11 heures à 11 h 30, remarques préliminaires; 11 h 30 à 12 h 15, la Corporation des maîtres électriciens du Québec; 12 h 15 à 13 heures, l'Association de la construction du Québec; 15 heures à 15 h 45, l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec; 15 h 45 à 16 h 30, la Fédération des associations et corporations en construction du Québec; 16 h 30 à 17 h 15, la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec; 17 h 15 à 18 heures, l'Association des constructeurs d'habitations du Québec; 20 heures à 20 h 45, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec; 20 h 45 à 21 h 30, le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction; 21 h 30 à 22 h 15, la Centrale des syndicats démocratiques; 22 h 15 à 23 heures, la Centrale des syndicats nationaux; 23 heures à 23 h 45, la Commission d'accès à l'information; et 23 h 45 à minuit, remarques finales;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 15 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 30 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que le ministre du Travail soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Président: Très bien, M. le leader du gouvernement. Est-ce qu'il y a consentement? Alors, il y a consentement. La motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, sur une motion...

Mme Delisle: Une motion sans préavis, M. le Président.

M. Filion: M. le Président, est-ce que nous sommes aux motions sans préavis?

Le Président: Oui, mais il y en a plusieurs, semble-t-il, ce matin, qui veulent intervenir. Il y a Mme la députée de Jean-Talon, il y aura M. le ministre des Affaires municipales et, par la suite, M. le député de Montmorency. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: M. le Président, il me fait plaisir de déposer la motion sans préavis suivante afin que l'on s'occupe des vrais problèmes:

«Que l'Assemblée nationale procède à des auditions publiques sur l'état du système de santé au Québec, notamment en ce qui concerne les conséquences des compressions budgétaires et de la réforme du ministre de la Santé sur l'accessibilité et la qualité des services offerts aux Québécois et Québécoises, et qu'à cette fin elle entende les individus et organismes représentant les malades, les infirmiers et infirmières, les médecins, les administrateurs, le personnel de soutien, les professionnels de la santé et les bénévoles;

«Que le gouvernement convoque donc, à compter du 10 juin prochain, la commission des affaires sociales et demande aux individus et aux organismes de transmettre au Secrétariat des commissions leur mémoire au plus tard le lundi 8 juin 1998.»

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a consentement pour présenter cette motion?

Une voix: Non.

Le Président: Alors, il n'y a pas consentement. M. le ministre des Affaires municipales.


Souligner la Semaine de la municipalité et féliciter les récipiendaires du Mérite municipal

M. Trudel: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour adopter la motion non annoncée suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Semaine de la municipalité, qui se déroulera du 7 au 13 juin 1998. Cet événement veut marquer l'attachement des Québécois et des Québécoises à leur milieu de vie et au développement de leur collectivité locale;

«Que l'Assemblée nationale félicite les 32 élus et bénévoles qui recevront, le 12 juin 1998, le prix du Mérite municipal, dans le cadre de la Semaine de la municipalité. Ce prix rend hommage à des personnes et à des organismes communautaires qui oeuvrent de façon exemplaire dans leur communauté locale ou régionale.»

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, il y a consentement. Strictement pour rappeler qu'en termes du règlement on doit résumer sur le plan de la motion et, par la suite, lorsqu'on s'exprime, on peut souligner tous les excellents éléments que contenait la motion du ministre, pour ne pas que ça dérape sur le plan de la forme, M. le Président.

Le Président: Très bien.

Une voix: M. le Président...

Le Président: Un instant! Un instant! La motion est-elle adoptée? Est-ce qu'il y avait entente pour qu'il y ait des interventions?

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Filion: M. le Président, M. le Président...

Des voix: ...

M. Filion: Un instant, là!

Le Président: Je m'excuse, M. le député de Montmorency. On va d'abord terminer la motion, le débat sur la motion en cours actuellement, et je vous reconnaîtrai. Mais sur une question de règlement?

M. Filion: Sur une question de règlement.

Le Président: Très bien. Alors, sur une question de règlement.

M. Filion: Pour présenter une motion, est-ce qu'il doit y avoir consentement?

Le Président: La règle, M. le député, c'est qu'il doit y avoir consentement pour présenter votre motion. Vous allez d'abord donner avis de votre motion, comme le ministre vient de le faire. S'il y a consentement, vous pourrez parler sur votre motion.

Des voix: ...

Le Président: C'est-à-dire, est-ce que vous... C'est oui ou non.

Une voix: Oui, sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Ça va? Très bien. Est-ce que la motion est adoptée? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien. M. le député de Montmorency.

M. Filion: Oui, M. le Président, j'aimerais présenter une motion sans préavis. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que le député de Montmorency soit nommé membre de la commission des institutions pour voter au nom des députés "non affiliés" à une formation politique, puisque la commission doit étudier article par article le projet de loi n° 450, Loi modifiant la Loi électorale, entre autres quant à l'égalité des chances d'obtenir du financement pour un député "indépendant", non affilié à une formation politique.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

(11 heures)

M. Jolivet: ...pour éviter un petit problème, je pourrais proposer au député de prendre le temps de la regarder avec les membres de l'opposition et de revenir mardi. Je lui promets de lui donner une réponse, oui ou non, d'ici mardi. Pour le moment, j'aimerais mieux qu'on tienne compte du fait qu'il y a déjà un membre votant représentant les membres de l'opposition qui ne sont pas affiliés au parti qui est le parti d'opposition, et, en conséquence, ça amène des problèmes au niveau du nombre de personnes et du quorum. Je voudrais avoir la chance de discuter, et, mardi prochain, on pourra y revenir, et je lui indiquerai quelle position nous tiendrons.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, sur cette question, tant qu'il n'y a pas préjudice aux droits ou aux privilèges des parlementaires indépendants en la matière, nous avons fait connaître notre point de vue hier à l'occasion d'une intervention. Si le député de Montmorency est d'accord avec ce qui a été proposé par le leader du gouvernement, à ce moment-là, nous n'y avons aucune objection. Au contraire, ça peut permettre... Parce que c'est une question qui touche également le règlement de l'Assemblée nationale, et, si des modifications doivent être apportées, il faut s'assurer qu'elles sont apportées correctement. C'est peut-être un début de réforme, M. le Président.

Le Président: Alors, mardi. Très bien.


Avis touchant les travaux des commissions

Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'aménagement du territoire procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 427, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les organismes municipaux, aujourd'hui, de 11 h 45 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des transports et de l'environnement procédera aux consultations particulières sur le projet de loi n° 430, Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des finances publiques procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 442, Loi sur le regroupement de certaines sociétés d'État, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Et, finalement, M. le Président, que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 404, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, le lundi 8 juin 1998, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. Je vous remercie.

Le Président: Très bien. En ce qui me concerne, je vous avise que la commission de l'économie et du travail va se réunir lundi prochain, le 8 juin, de 10 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement afin d'entendre des témoins relativement au groupe-traction–moteur-roue électrique.

Alors, s'il n'y a pas d'autres avis, nous allons aller aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

Et, puisqu'il n'y a pas d'intervention à ce moment-ci sur cette rubrique, nous passons aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Je vous prierais de bien vouloir considérer l'article 6 du règlement... du feuilleton, pardon.

Le Président: Je m'excuse, M. le leader, je n'ai pas...

M. Boulerice: Oui. Je vous réfère à l'article 6 du feuilleton et non pas du règlement.


Projet de loi n° 443


Adoption du principe

Le Président: Très bien. Alors, à cet article, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 443, Loi modifiant le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives. M. le ministre de la Justice.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 443 que j'ai présenté devant l'Assemblée nationale le 27 mai dernier et dont le principe est aujourd'hui soumis pour adoption propose, comme son titre l'indique, de modifier le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives, plus particulièrement en ce qui a trait à la présentation de certaines demandes non contentieuses qui sont soumises au contrôle judiciaire en raison de la nature de l'acte ou de la qualité du requérant.

Ces demandes concernent notamment la nomination ou le remplacement d'un tuteur au mineur, l'ouverture ou la révision d'un régime de protection ainsi que le mandat donné par une personne en prévision de son inaptitude.

Vous me permettrez de rappeler, M. le Président, que l'évolution récente du droit amène à délaisser la confrontation pour privilégier une justice consensuelle plus accessible et plus humaine. Le notaire, comme officier public et spécialiste du non-contentieux, est évidemment au coeur de cette problématique. Qu'il soit médiateur, arbitre, conseiller ou rédacteur d'actes, son devoir d'impartialité fait en effet de lui une personne de confiance susceptible, à ce titre, de jouer un rôle de premier plan.

Lors d'une rencontre des intervenants sur le notariat, les 27 et 28 octobre 1996, des représentants de la Chambre des notaires du Québec et du ministère de la Justice ont discuté ensemble de la problématique reliée au rôle du notaire dans l'administration de la justice. Les participants ont alors convenu de l'importance qu'il y avait pour l'État d'ouvrir une nouvelle perspective, celle de l'enrichissement du rôle du notaire, et de répondre ainsi aux attentes des citoyens, qui réclament une justice plus accessible et moins formaliste.

Le projet de loi n° 443 veut répondre à ces attentes qui se sont exprimées en diverses occasions, notamment lors de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi modifiant le Code civil en matière de recherche médicale, où plusieurs intervenants sont venus dire comment l'expérience de faire ouvrir un régime de protection était pénible pour les familles. On peut voir comment, dans cette situation difficile, l'approche judiciaire constitue un frein qui, en définitive, est nuisible à la personne et à ses proches. C'est pourquoi le projet de loi n° 443 vise à utiliser pleinement les compétences des notaires dans notre système judiciaire, notamment en leur confiant des responsabilités accrues dans les matières non contentieuses.

Je pense qu'il est important à ce moment-ci de souligner que le projet de loi maintient toutes les règles applicables devant le tribunal en matière non contentieuse, mais propose que certaines demandes pourront être présentées soit au tribunal compétent, suivant les règles ordinaires qui régissent actuellement ces matières, soit confiées à un notaire, suivant les règles particulières adaptées à l'exercice de sa profession.

Il convenait cependant de s'assurer que l'exercice des responsabilités confiées au notaire offre au justiciable des garanties équivalentes à celles dont il dispose aujourd'hui relativement aux exigences de preuves du droit actuel, notamment en ce qui a trait à la notification des personnes intéressées, aux interrogatoires qui doivent être faits et aux évaluations médicales et psychosociales.

Aussi, en toutes circonstances, le projet de loi prévoit que le notaire doit agir dans l'intérêt du mineur ou du majeur inapte. De même, lorsque la demande qu'on lui présente fait l'objet d'observations ou de représentations équivalant à une contestation réelle de son bien-fondé, le notaire devra se dessaisir et transférer le dossier au tribunal compétent. Dans tous les cas, sauf pour la vérification d'un testament olographe ou du testament en présence de deux témoins, le notaire sera tenu de déposer sans délai au greffe du tribunal du domicile ou de la résidence du mineur ou majeur inapte une copie authentique du procès-verbal de ses opérations, accompagnée de toutes les pièces justificatives, en vue de son homologation par le juge ou le greffier, de sorte que les décisions de nature judiciaire seront prises par le tribunal et non par le notaire.

Il est important de souligner que la procédure d'homologation consiste à vérifier la légalité et à contrôler l'opportunité d'un acte qui, sans cela, serait dépourvu de toute force obligatoire. Il appartient donc au juge ou au greffier d'approuver ou de rejeter la mesure qui lui est soumise, c'est-à-dire de rendre une décision de justice pouvant affecter les droits individuels du mineur ou du majeur inapte.

Dans ces conditions, le projet de loi précise que le juge ou le greffier peut, même en l'absence d'opposition, rejeter les conclusions du procès-verbal du notaire ou rendre toutes les ordonnances nécessaires à la sauvegarde des droits du mineur ou du majeur inapte pour le temps et aux conditions qu'il détermine. Au surplus, les décisions du greffier sur la demande d'homologation peuvent être révisées par le juge, et le jugement prononçant l'homologation constitue un jugement définitif susceptible d'appel devant la Cour d'appel.

Les responsabilités qu'on se propose de confier au notaire constituent donc la première étape d'un processus qui, ultimement, il est vrai, mènera à une décision pouvant affecter les droits individuels, sauf que cette décision n'est pas, et j'insiste, celle du notaire mais bien celle du tribunal, qui sera prise conformément aux exigences minimales applicables en matière d'indépendance et d'impartialité institutionnelles.

Par ailleurs, les responsabilités nouvelles qui seraient confiées au notaire ne concernent que des matières qui relèvent de la juridiction gracieuse du tribunal. Elles visent essentiellement des demandes dont la loi exige, en raison de l'état et de la capacité de la personne, qu'elles soient soumises au contrôle du tribunal pour qu'il autorise, approuve ou homologue une mesure susceptible d'affecter les droits d'un mineur ou d'un majeur inapte.

(11 h 10)

Dans un processus de déjudiciarisation et une nouvelle approche de la justice visant à la rendre plus accessible, le projet de loi n° 443 propose donc que les compétences et le statut d'officier public du notaire soient mis à profit et facilitent la démarche des parents et de la famille, lorsque les circonstances l'exigent, tout en maintenant les garanties procédurales et les exigences de preuves du droit actuel. Historiquement, M. le Président, le législateur a toujours reconnu la compétence du notaire pour convoquer et présider une assemblée de parents, d'alliés ou d'amis, au même titre que le greffier. D'ailleurs, l'intervention du juge ou du greffier en cette matière est moins importante, notamment depuis l'introduction au Code civil de la tutelle légale des père et mère. En effet, le recours au tribunal pour faire nommer un tuteur est devenu aujourd'hui exceptionnel. Même dans ces cas, c'est l'assemblée de parents, d'alliés ou d'amis qui est appelée à constituer un conseil de tutelle. De même, ce sont les proches parents qui proposent, sur avis du conseil de tutelle, la personne qui, à leur connaissance, serait la plus apte à exercer la tutelle.

Dans ce contexte, il serait nettement avantageux pour la famille que ces demandes puissent être confiées à un officier public proche du milieu et facilement accessible. C'est pourquoi le projet de loi n° 443 propose qu'une demande relative à la nomination d'un tuteur au mineur, d'un tuteur ad hoc ou aux biens ou à son remplacement puisse aussi être confiée à un notaire. Le notaire devra informer le mineur de la demande, s'il est âgé de 14 ans et plus, de même que les personnes mentionnées au premier alinéa de l'article 226 du Code civil, soit les ascendants et les frères et soeurs majeurs, et convoquer ces dernières à une assemblée de parents, d'alliés ou d'amis, à laquelle doivent assister au moins cinq personnes, en vue de conférer une tutelle au mineur et de constituer le conseil de tutelle.

Également, M. le Président, le projet de loi n° 443 déjudiciarise davantage le processus de nomination d'un tuteur. Il prévoit, en effet, que la tutelle au mineur pourra dorénavant être déférée soit par le conseil de tutelle, soit par le tribunal, sur avis du conseil. De plus, il apporte une modification importante à l'article 200 du Code civil, afin que le père ou la mère puisse nommer un tuteur à son enfant non seulement par testament ou par une déclaration en ce sens transmise au Curateur public, comme c'est le cas actuellement, mais aussi par un mandat donné en prévision de son inaptitude. Cette nouvelle possibilité pour le père ou la mère de nommer un tuteur à son enfant vise elle aussi à faciliter le processus de nomination d'un tuteur mais, cette fois, sans l'intervention du tribunal ni d'un officier public.

Par ailleurs, M. le Président, l'un des principaux objectifs du Code civil en matière de protection des majeurs est de permettre à tous les majeurs plus ou moins inaptes à prendre soin d'eux-mêmes ou à administrer leurs biens par suite, notamment, d'une maladie, d'une déficience ou d'un affaiblissement dû à l'âge qui altère leurs facultés mentales ou corporelles, d'être soumis au régime de protection le mieux adapté à leur inaptitude, c'est-à-dire le moins restrictif ou limitatif de leurs capacités. Cependant, il ne m'apparaît pas nécessaire de recourir systématiquement à un officier de justice pour accomplir les formalités prescrites par la loi relativement à l'ouverture ou à la révision d'un régime de protection. En effet, il serait beaucoup plus simple et plus facile pour les proches du majeur inapte qu'ils puissent entreprendre les démarches requises devant un notaire de leur choix plutôt que de se déplacer au palais de justice de leur district judiciaire.

Aussi, dans le but de faciliter la tâche des parents et de faire participer davantage le notaire à l'administration de la justice dans ce domaine de juridiction gracieuse, le projet de loi n° 443 propose de faire profiter les familles de l'expertise et de la qualité d'officier public des notaires dans les démarches à entreprendre pour l'ouverture d'un régime de protection. Dans tous les cas, M. le Président, le projet de loi n° 443 maintient l'exigence des évaluations médicales et psychosociales ainsi que la convocation d'une assemblée de parents, d'alliés ou d'amis pour délibérer sur l'opportunité d'un régime de protection. En outre, afin de mieux assurer l'intégrité des personnes, le notaire sera tenu de dresser un procès-verbal en minutes de l'interrogatoire du majeur ou des motifs pour lesquels cet interrogatoire n'a pas eu lieu.

De plus, comme je l'ai déjà mentionné, le notaire devra déposer sans délai au greffe du tribunal une copie authentique du procès-verbal de ses opérations, accompagnée de toutes les pièces justificatives. Le dépôt de ce procès-verbal tiendra alors lieu d'une requête en homologation, de sorte que le juge ou le greffier pourra confirmer ou rejeter les conclusions du notaire. En plus de déjudiciariser cette procédure non contentieuse et de la rendre plus accessible au citoyen, compte tenu du nombre d'études notariales réparties sur le territoire, le processus devant notaire, qui est proposé, contribuera assurément à simplifier l'ouverture ou la révision d'un régime de protection.

Ainsi, en matière de mandat donné en prévision de son inaptitude, le législateur n'avait pas jugé opportun, lors de l'adoption du Code civil du Québec, de déléguer à d'autres qu'au tribunal l'obligation de faire le constat d'inaptitude du mandant. Cependant, l'expérience vécue démontre que, bien qu'il soit de l'intérêt de la justice et du mandant que le mandataire désigné puisse procéder rapidement à l'exécution du mandat, l'atteinte de cet objectif se révèle souvent difficile en raison des délais inhérents à l'intervention judiciaire dans cette procédure. À cet égard, la prise d'effet de ce mandat privé pourra être accélérée par l'habilitation du notaire à recueillir la preuve de la survenance de l'inaptitude, notamment par l'obtention d'une évaluation médicale et psychosociale et par l'interrogatoire du mandant.

M. le Président, le processus entrepris devant le notaire devra aussi être homologué par le juge ou le greffier du tribunal afin d'en assurer l'intégrité par décision de justice. Outre de permettre une exécution plus simple de l'acte, d'en reconnaître la valeur et, si le mandat est notarié, son caractère d'authenticité, l'utilisation d'une procédure plus douce, plus humaine et possiblement plus rapide devrait permettre de mieux servir la personne visée d'abord, puis la famille. De la même manière, le tribunal procédera à l'homologation du mandat et interviendra si une opposition se manifeste à quelque étape du processus.

Toujours dans une perspective de simplification de la procédure civile et d'une plus grande accessibilité de la justice, le projet de loi n° 443 propose enfin de confier également au notaire, à titre d'officier public et de spécialiste des affaires successorales, une compétence concurrente pour procéder à la vérification des testaments olographes ou des testaments en présence de témoins, c'est-à-dire pour examiner l'original du testament et attester qu'il répond bien aux exigences de preuve que la loi exige. Le notaire sera, encore là, tenu de déposer une copie certifiée du testament et du procès-verbal de vérification au greffe du tribunal où le testateur avait son domicile ou, à défaut de domicile au Québec, devant celui où il a laissé des biens. Toutefois, le dépôt du procès-verbal de vérification d'un testament ne sera destiné qu'à en assurer la publicité. Nonobstant sa vérification par un notaire, un testament pourrait donc, comme c'est le cas aujourd'hui, être ultérieurement contesté par toute personne intéressée.

De même, il serait avantageux que toute personne intéressée puisse obtenir d'un notaire exerçant au Québec des lettres de vérification destinées à servir hors du Québec pour prouver sa qualité d'héritier, de légataire particulier ou de liquidateur d'une succession. L'attribution au notaire de ces compétences aurait pour effet de déjudiciariser le processus de vérification des testaments, de fournir un meilleur accès aux citoyens, compte tenu, encore une fois, du nombre d'études notariales réparties sur le territoire, tout en assurant l'authenticité des documents. Elle pourrait permettre aussi aux citoyens d'obtenir des lettres de vérification plus rapidement, puisqu'ils ne seraient plus alors tributaires des agendas des tribunaux, et de procéder aussi plus rapidement à la liquidation des successions.

Toujours en matière de succession, le projet de loi n° 443 propose une modification plutôt technique afin de permettre que la désignation ou le remplacement du liquidateur soit publié au registre des droits personnels et réels mobiliers et, le cas échéant, au registre foncier, afin de faciliter le règlement des successions.

En conclusion, M. le Président, le projet de loi n° 443 poursuit un double objectif: d'une part, il facilite notamment la mise en oeuvre des régimes de protection du mineur, du majeur et du mandat donné par une personne en prévision de son inaptitude, tout en rendant la procédure plus conviviale et moins rébarbative pour la famille; d'autre part, il maintient les garanties judiciaires prévues à l'article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne quant à la détermination des droits et obligations du mineur ou du majeur inapte. Je pense notamment au droit qu'a toute personne, en pleine égalité, à une audience publique et impartiale de sa cause par un tribunal indépendant et qui ne soit pas préjugé.

(11 h 20)

Au surplus, en confiant au notaire des responsabilités accrues concernant certaines demandes, le projet de loi n° 443 devrait permettre de rendre cette justice non contentieuse plus accessible, plus rapide et plus humaine. Plus humaine, car les mesures proposées permettront de déjudiciariser la procédure dans ces matières non contentieuses et qui se déroulent, dans la plupart des cas, en l'absence de tout litige et dans un contexte familial. Plus accessible, M. le Président, puisque les études notariales réparties sur le territoire du Québec sont plus nombreuses que les palais de justice. Plus rapide enfin, car elles permettront de réduire les délais de traitement des dossiers qui, jusqu'à la phase finale, seront traités hors du palais, tout en mettant à profit les compétences et le statut d'officier public du notaire, de manière à le faire participer davantage à l'administration de la justice dans un domaine de gracieuse. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Le prochain intervenant sera M. le député de D'Arcy-McGee. Alors, M. le député, je vous cède la parole.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'avoir l'opportunité de m'exprimer devant cette Assemblée avant l'adoption du principe du projet de loi n° 443, Loi modifiant le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives, Bill 443, An Act to amend the Code of Civil Procedure and other legislative provisions in relation to notarial matters.

Avant de commencer, M. le Président, je voudrais mettre certaines choses au clair. Oui, j'exerce la profession de notaire depuis 1965, mais, si je m'adresse à vous aujourd'hui sur le projet de loi n° 443, c'est en ma qualité de député et en ma qualité de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'application des lois professionnelles, et mes commentaires reposent sur une analyse approfondie dans le respect des divers ordres professionnels impliqués et de la population.

Ceci étant dit, ce projet de loi, comme j'en parlerai un peu plus tard, est un pas vers une justice plus humaine et davantage à l'écoute des besoins de la population québécoise. En fait, le projet de loi n° 443 offre à la population une voie nouvelle et plus simple pour procéder à l'ensemble des démarches requises lors de procédures non contentieuses comme la vérification des testaments, l'homologation des mandats donnés en prévision d'une inaptitude, la tutelle au mineur et les régimes de protection au majeur.

Avant d'argumenter cependant sur le projet de loi en tant que tel, il m'apparaît important de partager avec les membres de cette Assemblée une page de notre histoire. Le notariat, un des héritages du régime français, est présent sur le continent nord-américain depuis le tout début de la Nouvelle-France. En 1847, les notaires du Québec ont même été les premiers juristes canadiens à se doter d'une véritable organisation professionnelle vouée à la protection du public. L'histoire révèle d'ailleurs que les notaires ont toujours été associés de près au développement social, économique et culturel du Québec.

Le notariat est une profession au riche passé qui, par son dynamisme, sa façon différente d'aborder le droit, donne une valeur ajoutée au monde juridique québécois. L'histoire du notariat québécois, ce sont 150 années de présence auprès des individus, des familles et de l'ensemble de la société. C'est le résumé d'une grande complicité qui s'est développée entre les représentants de la profession et la population du Québec, une complicité basée sur le respect et sur le partage d'une expertise centrée sur les besoins de ceux qui utilisent les services offerts par les notaires de toutes les régions du Québec.

Les notaires sont des juristes appréciés par la population et des conseillers juridiques de plus en plus recherchés, notamment par le monde des affaires. En tant que professionnels du droit, les notaires sont bien placés pour prendre le pouls de la population, être à l'écoute de ses besoins et formuler aux différentes instances politiques les recommandations quant à la satisfaction de ses besoins.

Le notariat, tel que nous le connaissons au Québec, est unique en Amérique du Nord. Cependant, il ne faut pas pour autant croire que le notariat est un phénomène isolé. La profession notariale existe dans tous les pays de droit latin et elle est en développement dans plusieurs autres pays. Le notariat est une profession présente notamment en Europe, en Asie et en Amérique du Sud. Il faut donc noter que le notariat se développe partout dans le monde et, tout comme lors de sa création il y a plusieurs centaines d'années, qu'il représente toujours une solution évidente à l'engorgement des tribunaux.

Les notaires du Québec, par leur ordre professionnel, oeuvrent d'ailleurs sur la scène internationale pour soutenir le développement de leur profession. La Chambre des notaires, à l'aide d'une équipe de juristes du Québec, pilote en effet un projet voué au développement du notariat en Ukraine. Reconnu pour la rigueur de ses normes et de ses règlements, le notariat québécois sert d'exemple pour la rédaction de la loi ukrainienne sur le notariat et pour la préparation du code de déontologie des notaires ukrainiens.

As you can see, notwithstanding its history and 150 years of tradition, the Québec notarial field stays a resolutely modern profession. The notaries knew how to adapt themselves to the present social and economic context and to the new international and national environment. Aware of the challenges posed by the internationalization of markets and the increase of competition, the notaries of Québec have also understood that in a competitive market, customer service can make all the difference.

It is in this context that Québec notaries have taken to the road to decentralize in order to arrive at a more humane, accessible and convivial justice. All moderns societies are preoccupied by decentralization. Everywhere the State tries to diminish the costs related to the administration of justice. The population wants a quicker and more humane justice. Those are two reasons that explain why alternative modes of conflicts settlements, like mediation, are winning popularity. This is why the notaries should be able to effectively play their role as a jurist, as a legal advisor and as a public clerk.

Car l'État québécois a conféré au notaire, il y a longtemps déjà, le statut d'officier public. En conséquence, la Loi sur le notariat, tout comme le code de déontologie et les règlements qui prévalent dans la profession, imposent aux notaires du Québec des obligations très strictes d'indépendance et d'impartialité. Tout manquement à ces obligations est d'ailleurs sévèrement sanctionné par les instances administratives et judiciaires concernées.

Le projet de loi n° 443 est le fruit du travail réalisé au cours des deux dernières années par les juristes du ministère de la Justice du Québec. Il vise à offrir à nos concitoyens ce qu'ils demandent depuis longtemps, soit l'amélioration du système judiciaire et de l'ensemble des services offerts par le secteur de la justice, ce qui passe par la décentralisation du plus grand nombre de procédures. Les premières qui doivent être prises en considération sont sans contredit les procédures non contentieuses.

Abordons maintenant, M. le Président, le contenu du projet de loi n° 443. Il propose l'ajout au Code de procédure civile des règles applicables aux demandes relatives au conseil de tutelle, à la nomination ou au remplacement d'un tuteur, à l'ouverture et à la révision d'un régime de protection, au mandat en prévision d'une inaptitude, à la vérification des testaments et aux lettres de vérification, lorsque ces demandes sont présentées à un notaire.

(11 h 30)

Même si a priori le projet de loi apparaît innovateur, nous constatons rapidement à sa lecture qu'il n'opère aucun grand bouleversement du système actuel. En effet, le projet ne contient aucune modification fondamentale. Le Code de procédure civile fait déjà du notaire un auxiliaire de justice, notamment en lui permettant comme officier public de présider, par exemple, aux assemblées des parents, alliés et amis. Le projet de loi ne fait que lui confier, à ces titres, le droit d'effectuer des démarches additionnelles dans le cadre de dossiers qu'il mène déjà. Le pouvoir du notaire québécois d'agir en matière non contentieuse est historique. Les notaires interviennent déjà dans toutes les procédures visées par le projet de loi. Ce dernier permet à l'État de mettre à profit le statut d'officier public de notaire dans l'administration de la justice.

Soyons clair, M. le Président, le notaire ne devient pas juge. Il ne décide pas de l'existence ou l'absence d'un droit. Il ne constate plutôt que les faits, par exemple décès ou minorité, donnant ouverture aux conséquences juridiques prévues par la loi. Rappelons aussi, fait très important, que le contrôle du greffier ou du juge demeure dans tous les cas où la procédure implique une personne inapte et dans tous les cas de révision ou de contestation.

En fait, le projet de loi permettra au notaire de s'impliquer davantage dans les procédures suivantes: le notaire pourra accomplir la procédure de vérification des testaments et émettre les lettres de vérification; le notaire pourra accomplir l'essentiel des démarches requises dans certaines procédures relatives à la tutelle au mineur; et le notaire pourra accomplir l'essentiel des démarches requises aux fins d'homologation des mandats donnés en prévision d'une inaptitude et de l'ouverture des régimes de protection au majeur, assumant ainsi des tâches actuellement effectuées par le greffier.

Dans tous les cas, M. le Président, le procès-verbal du notaire sera déposé au greffe du tribunal soit pour fin de publicité soit pour homologation. Comme je le disais précédemment, un contrôle du greffier ou du juge demeure dans tous les dossiers où une personne inapte est concernée.

M. le Président, ces fonctions du notaire s'exerceront concurremment avec celles actuellement accomplies par le greffier ou par le juge. On comprend donc que la procédure actuelle demeure, de sorte que tous les justiciables se voient simplement offrir une voie nouvelle. Cette opportunité ne peut que constituer une amélioration de la situation actuelle. Nous ne doutons pas que la population s'en prévaudra, étant donné tous les avantages qui en découlent.

Pour le citoyen, ce projet de loi ne peut que faciliter ses démarches. En effet, les notaires sont présents dans toutes les régions du Québec, et il est facile pour les justifiables d'y avoir accès, tout comme il est plus facile pour les notaires de se déplacer notamment pour procéder aux interrogatoires requis.

Les notaires, nous le savons tous, ont toujours fait preuve de grande disponibilité. Contrairement aux palais de justice qui ne sont ouverts qu'à des heures précises, les études de notaires sont ouvertes du matin au soir, et les notaires sont disponibles à peu près en tout temps. Cette disponibilité se manifestera notamment lors des interrogatoires de la personne à déclarer inapte. Le notaire va systématiquement accomplir cette démarche essentielle et devra en dresser un procès-verbal.

Dans le contexte économique difficile dans lequel nous vivons, il est nécessaire que le projet ait des répercussions positives pour le gouvernement et pour la population. Du fait que le projet transfère au notaire certaines responsabilités actuellement assumées par le greffier, ceci amène une diminution des dépenses pour le gouvernement qui, par ailleurs, ne devrait pas voir ses revenus diminuer, à moins, bien entendu, qu'il ne décide de modifier son tarif.

Reprenons l'exemple de l'interrogatoire du majeur dans le cadre de l'homologation d'un mandat ou d'une ouverture d'un régime de protection. Cette démarche engendre des coûts importants en temps et en déplacement pour le greffier qui y procède. Ainsi, le projet permet d'avoir, sur ce plan, une économie pour l'État, tout en augmentant la disponibilité du greffier pour traiter d'autres dossiers qui requièrent davantage son intervention. Certes, désormais le citoyen assumera les coûts reliés à l'interrogatoire, mais la simplification apportée à l'ensemble de la procédure donnera largement ce transfert.

D'abord, M. le Président, nous l'avons déjà dit, les citoyens auront l'avantage de choisir une voie alternative à la procédure actuelle qui simplifiera considérablement leurs démarches. Prenons, à titre d'illustration, la procédure actuelle visant à faire homologuer par le tribunal un mandat donné en prévision d'une inaptitude du mandant. Actuellement, la personne qui fait cette demande doit passer à travers une multitude d'étapes qui se déroulent non seulement dans l'étude du notaire, mais également dans le bureau du greffier.

La nouvelle procédure permet que le notaire pose, en lieu et place du greffier, certains actes. La tâche du notaire sera donc facilitée, puisqu'il aura une latitude accrue pour contrôler son dossier, n'étant plus tributaire des délais liés à l'intervention du greffier. Ce dernier, nous l'aurons compris, sera disponible pour traiter d'autres dossiers.

Par ailleurs, M. le Président, on constate qu'en vertu de la procédure actuelle dans le cas de l'ouverture d'un régime de protection au majeur, sur les nombreuses étapes normales menant à l'obtention du jugement final, le greffier intervient à quatre occasions: il doit d'abord statuer sur une première requête demandant la convocation de l'assemblée des parents, il doit procéder à l'interrogatoire du majeur, il doit statuer sur une deuxième requête, soit celle en homologation, et enfin rédiger son jugement. Notons que, dans certains cas, il doit de plus présider lui-même à l'assemblée des parents.

Il va de soi qu'à chaque intervention du greffier on doit ajouter les délais qui y sont inhérents. Ajoutons à l'inconvénient des délais les frais et honoraires du notaire, qui doit au moins à deux reprises se rendre au palais de justice. Pendant les semaines et parfois les mois où se déroulent ces procédures, pas plus le notaire que le citoyen n'est en mesure de faire cheminer le dossier. Rappelons que, pendant tout ce temps, le patrimoine du majeur inapte est en quelque sorte gelé jusqu'au jugement final.

Grâce au projet de loi devant nous, M. le Président, le greffier n'interviendra qu'après l'accomplissement de toutes les procédures par le notaire afin de s'assurer que tout a été accompli conformément à la loi.

Quant au notaire, il conserve le contrôle du dossier jusqu'à son aboutissement, et ses démarches sont considérablement allégées. Dans ce domaine, l'on constate que, selon la nouvelle procédure, le notaire devra rédiger une déclaration et un procès verbal de ses opérations en plus de procéder lui-même à l'interrogatoire du majeur inapte. Par contre, il n'aura plus à rédiger la requête en convocation ni celle en homologation et les documents accessoires. En principe, la décision du greffier sera rendue 10 jours après le dépôt du procès-verbal du notaire.

Si on examine de la même façon chacune des procédures proposées par le projet, on arrive aux mêmes conclusions. Il en résulte que le grand gagnant de cette réforme sera, à notre avis, la population, et ce, pour les motifs suivants: d'abord, le dossier sera traité en totalité ou en grande partie par un notaire, un professionnel qu'il a lui-même choisi et en qui il a confiance; ensuite, le dossier sera traité plus rapidement, comme nous en avons fait la démonstration.

De plus, en aucun cas la protection des inaptes n'est affectée, puisqu'en matière de preuve les mêmes évaluations médicales et psychosociales permettront de fonder la décision. Qui plus est, le citoyen ne sera jamais, et en aucun cas, privé de son droit de s'adresser au tribunal s'il le juge à propos.

(11 h 40)

M. le Président, il convient de préciser que la nécessité d'assurer la protection du public a été un des facteurs prépondérants lors de l'examen de ce projet de loi. À l'intérieur des pouvoirs qui lui sont confirmés ou conférés par le projet de loi, le notaire n'exerce aucun pouvoir discrétionnaire. Et, élément rassurant pour ceux qui peuvent encore s'opposer au projet de loi, ce dernier, faut-il le rappeler, ne fait qu'offrir une voie additionnelle aux citoyens qui continuent à avoir le choix – un choix important – en ce qui a trait aux procédures concernées par ledit projet de loi, de consulter un notaire ou de référer, comme c'est maintenant le cas, le dossier au tribunal.

M. le Président, nous sommes convaincus de la nécessité d'adopter ce projet de loi qui répond aux impératifs d'une saine administration de la justice, et ce, dans les meilleurs délais, afin que les citoyens et citoyennes du Québec puissent bénéficier de tous ses avantages. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee.


Mise aux voix

Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, comme il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre au voix le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi n° 443, Loi modifiant le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Boulerice: L'adoption ayant été faite à l'unanimité, M. le Président, je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, dans la poursuite de nos travaux, M. le Président, je vous réfère à l'article 37 du feuilleton.


Projet de loi n° 406


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 37 du feuilleton, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles propose l'adoption du projet de loi n° 406, Loi modifiant le Code des professions. Je vais céder la parole maintenant à M. le ministre de la Justice. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Voici quelques semaines, cette Chambre adoptait le principe du projet de loi n° 406 qui, en substance, modifie le Code des professions pour doter le système professionnel d'un outil supplémentaire qui facilitera son évolution. Ce projet de loi a pour but de permettre, par décret, la fusion d'ordres professionnels à titre réservé et l'intégration de groupes externes, toujours à des ordres à titre réservé. Pour faciliter la compréhension de ce projet de loi, il faut comprendre qu'il y a deux types de professions au Québec.

Il y a les professions qui bénéficient d'un champ exclusif. C'est le cas des professions traditionnelles, entre autres, comme la médecine, où, par exemple, seuls les médecins peuvent poser un diagnostic et évidemment entreprendre des soins, comme une chirurgie ou des choses importantes de ce type, ou le Barreau qui couvre les avocats, ou les notaires qui ont, comme on vient de le voir, une spécialisation dans les domaines non contentieux de la procédure. Mais il y a aussi, à côté, les professions à titre réservé, c'est-à-dire que le champ d'activité de ces professionnels est libre. Mais, si on utilise un titre, à ce moment-là, on doit nécessairement faire partie d'un ordre professionnel, ce qui garantit au public que, lorsqu'ils veulent avoir, par exemple, un psychologue, eh bien, ils sont assurés que ce psychologue a reçu une formation universitaire, celle qui est prévue par son ordre professionnel, qu'il adhère à des principes d'éthique, que, s'il commettait une erreur professionnelle grave, le citoyen a un recours contre ce professionnel, qu'il est soumis à des critères d'inspection professionnelle également.

Donc, le public a le choix de s'adresser à qui il veut pour un soin psychologique. Il pourrait le faire, par exemple, à l'égard d'un ministre du culte ou d'un prêtre, mais s'il veut véritablement un professionnel et être assuré que, dans le cas qui le préoccupe, il a besoin d'un professionnel bien formé et qui adhère à des principes d'éthique et qui garde sa compétence, eh bien, il sait qu'en s'adressant à un psychologue il trouvera ce professionnel. C'est la même chose aussi, par exemple, pour la compatibilité. Des gens peuvent faire faire leur comptabilité simple par un ami ou par qui que ce soit, mais s'ils veulent avoir un professionnel, alors, il y a trois professions, en particulier, qui encadrent ce travail.

Donc, c'est ça. Quand il y a un champ exclusif qui est retreint, c'est un type de profession. Il ne s'agit ici, dans ce projet de loi, que là où seulement le titre est réservé.

Donc, au cours des dernières semaines, une commission parlementaire a permis d'entendre le point de vue de l'Office des professions, du Conseil interprofessionnel, de certains ordres et groupes qui désirent être intégrés au système professionnel. Finalement, une commission parlementaire s'est tenue, qui a examiné ce projet de loi article par article. Je rappellerai brièvement le contexte et les grandes lignes de ce projet de loi pour ensuite vous rendre compte des travaux de la commission et vous inviter à adopter de façon finale les dispositions qui en résultent.

Le système professionnel du Québec est en ensemble vivant et dynamique. Depuis 25 ans, il a évolué, il est passé de 38 ordres à 43. Pendant le même temps, le nombre de professionnels a augmenté considérablement. Notons plus précisément qu'entre 1973 et 1995 on a noté une augmentation de 140 % du nombre des professionnels, soit huit fois plus que l'accroissement de la population pendant la même période. Cela montre à quel point ce vaste ensemble est important pour notre population.

Je ne prendrai pas trop de temps pour rappeler que l'ensemble des règles et des institutions mises en place en 1973 l'ont été par cette Assemblée pour protéger le public dans ses rapports avec les professionnels. Ce système est dans l'ensemble un succès, mais il continue de mériter toute l'attention de l'État. Il convient en effet de lui garder les attributs d'un vaste service public, très décentralisé, qui garantit la compétence et l'intégrité d'acteurs socioéconomiques majeurs. Notre attention doit non seulement se porter sur le fonctionnement du système tel qu'il est, mais aussi sur les conditions de son développement utile. En effet, en 25 ans, notre société a changé, et, comme le rappelait récemment le président de l'Office des professions du Québec, nous devons prendre acte des changements sociaux et culturels qui, lus ensemble, annoncent des effets importants sur le monde professionnel et sur sa capacité de répondre adéquatement au public.

Depuis 1973, on a en effet assisté à une explosion des connaissances, à la multiplication des programmes de formation et à une multiplication des spécialités. On assistait également à un développement fulgurant de la technologie disponible pour l'activité professionnelle, à une croissance importante des besoins en matière de services professionnels et, enfin, à l'ouverture du public à un éventail de plus en plus large de connaissances nouvelles et se situant souvent hors du champ des disciplines classiques ou connues.

De ces phénomènes, nous pouvons tirer certains constats. D'abord, les communautés professionnelles présentes à la création du système en 1973 se sont développées, se sont rapprochées et partagent maintenant certains champs communs d'activités. Ensuite, l'offre et la demande de service sont en mutation. Il suffit de songer à la relation d'aide pour comprendre ce que cela signifie pour le public en termes de difficultés à s'orienter parmi une offre de service de plus en plus diversifiée. Par ailleurs, la logique économique nous démontre que l'offre de service finira toujours par rejoindre la demande exprimée, ce qui ne nous laisse que la question de savoir comment le système professionnel québécois continuera à apporter une réponse réaliste à la demande du public.

Je vous indiquais également, lors de l'adoption du principe du projet de loi, qu'il ne s'agissait pas là de choses subites ou inattendues. On se souviendra que l'Office des professions, en 1992, avait proposé au gouvernement, dans son avis sur les médecines douces et sur les psychothérapies, de procéder à certaines intégrations de groupes aux activités nouvelles à des ordres déjà établis. Beaucoup de travail a été fait depuis ce temps-là tant par l'Office des professions que par les ordres et les groupes pour préparer ces intégrations. Mais voilà cette solution qui a été examinée avec intérêt par le gouvernement révélait en même temps une difficulté assez paradoxale qui voulait, pour résumer, que le gouvernement peut créer des ordres par lettres patentes, mais qu'il ne peut pas utiliser un processus aussi simple pour procéder à la fusion d'ordres à titre réservé ou à l'intégration de groupes à ces ordres. Le projet de loi que cette Assemblée a adopté en principe, voilà quelques semaines, vise justement à se donner les outils pour procéder de façon simple et efficace.

Je veux ici répéter qu'il n'est pas question pour le gouvernement d'inaugurer une façon de faire plus drastique ou plus autoritaire, se substituant à la volonté des groupes ou y passant outre pour régler leur destin. Il s'agit au contraire de se donner les moyens les plus souples et les plus légers possible pour que le gouvernement soit en mesure, conseillé par l'Office des professions, entre autres de faciliter les intégrations ou les fusions là où elles seront souhaitées ou acceptées.

(11 h 50)

Partant de là, le projet de loi n° 406 a été examiné en commission parlementaire, et je dois vous dire, M. le Président, que les travaux de cette commission ont été féconds. Grâce à la bonne volonté de tous, nous sommes en mesure de bonifier le projet de loi initial principalement quant au processus de consultation. On se souviendra qu'en termes de fusion le projet de loi prévoyait que la décision gouvernementale serait informée par la consultation du Conseil interprofessionnel du Québec et de l'Office des professions. Les travaux en commission parlementaire ont permis de révéler qu'il serait opportun de prévoir également de façon explicite la consultation des ordres dont la fusion est envisagée. De la même manière, s'agissant des intégrations de groupes à des ordres existants, la consultation de l'Office et du Conseil interprofessionnel du Québec s'étendra aux ordres et aux groupes visés par le projet d'intégration.

Je dois dire qu'il n'y avait pas là de grande crainte lorsqu'on connaît la culture de l'Office des professions, qui ne manque jamais de recueillir l'avis ou les commentaires du plus grand nombre avant de prendre une décision ou avant de faire des recommandations au gouvernement. Après tout, ce qui va sans dire va encore mieux en le disant, et, s'il plaît à cette Assemblée d'adopter de façon définitive le projet de loi n° 406, ce sera une pierre supplémentaire et judicieusement posée sur l'édifice d'un système professionnel qui en gagnera d'autant pour sa souplesse et son efficacité au service de la protection du public.

Je suis certain, pour conclure, que toutes et tous dans cette Assemblée auront reconnu, dans le projet de loi n° 406, un effort du gouvernement pour permettre à la fois l'ouverture et l'évolution du système professionnel sans pour autant créer à l'infini de nouvelles institutions dont on sait ce qu'elles peuvent représenter de coûts et de poids par les structures et mécanismes que la loi leur prévoit. Je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. À titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de lois professionnelles, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre de l'adoption du projet de loi n° 406, Loi modifiant le Code des professions. Ce projet de loi, comme on le sait, permettra au gouvernement de fusionner par simple décret des ordres professionnels ou d'intégrer un groupe non constitué en ordre à un ordre déjà existant.

M. le Président, nous allons voter pour ce projet de loi. La commission parlementaire ayant pour mandat d'étudier ce projet de loi nous a permis d'entendre les commentaires d'une variété d'ordres professionnels et de groupes concernés. Tous nous ont fait part de leurs craintes quant au processus de consultation. Les groupes et les ordres pensaient, à juste titre, que la seule consultation de l'Office des professions et du Conseil interprofessionnel ne suffisait pas. Les intervenants en commission parlementaire demandaient que la loi prévoie explicitement la consultation des ordres et des groupes concernés par la fusion ou l'intégration. Nous, de l'opposition officielle, étions d'accord avec leur demande, alors que le ministre de la Justice et ministre responsable de l'application des lois professionnelles avait pour opinion que la consultation des ordres et des groupes visés allait tellement de soi qu'il n'était pas nécessaire de l'indiquer dans la loi. La commission parlementaire nous a permis de clarifier cette situation. Nous avons joué adéquatement notre rôle de législateur et convaincu le ministre d'intégrer à l'article 27.2, alinéa un cette notion de consultation auprès des ordres et des groupes visés.

M. le Président, Nous croyons que l'amendement que nous avons suggéré au ministre à l'article 27.2 du projet de loi, amendement qu'il a d'ailleurs accepté, améliore substantiellement ce projet de loi, et c'est la raison principale pour laquelle nous y donnerons notre consentement. En effet, si nous n'avions pas obtenu l'assurance que les groupes et ordres concernés seraient consultés lors d'une décision aussi importante que celle de fusionner des ordres professionnels, nous aurions voté contre. La démocratie n'est pas un concept théorique; elle se vit au jour le jour et elle implique que les gens concernés par une décision aient leur mot à dire. Je rappelle d'ailleurs au ministre que les consultations qu'il tiendra devront être sérieuses. J'ai déjà énoncé au ministre les critères retenus par la jurisprudence pour que l'on puisse parler d'une consultation adéquate. Je tiens cependant à les lui rappeler.

Premièrement, les intéressés devront être convoqués assez à l'avance pour leur permettre de préparer leur argumentation; deuxièmement, une consultation honnête implique aussi que la décision ou non de fusionner ne soit pas déjà prise. Et finalement, la consultation doit permettre aux intéressés de faire véritablement valoir leur point. On peut penser alors au dépôt de mémoires, lesquels devront posséder toute information requise pour étayer une argumentation solide.

M. le Président, il importe toutefois de conserver en mémoire que cette loi donnera un pouvoir énorme au gouvernement puisqu'elle lui permet de faire par décret ce qu'auparavant il était tenu de faire par voie législative.

En conséquence, bien que nous soutenions le gouvernement dans sa démarche et que nous voterons pour ce projet de loi, nous serons particulièrement vigilants pour nous assurer que le gouvernement respectera les ordres et groupes concernés lors de la prise du décret et qu'il prendra ce décret dans l'intérêt public et non dans son propre intérêt politique.

D'ailleurs, M. le Président, ce décret devrait prévoir le plus précisément et le plus fidèlement possible toutes les règles régissant le nouvel ordre qui pourra être ainsi créé, car il ne faut pas oublier que c'est ce décret qui régira la vie de l'ordre tant que son bureau ne sera pas constitué et que c'est aussi le gouvernement qui pourra modifier le décret si besoin est.

De plus, l'opposition officielle, s'appuyant en cela sur les commentaires des ordres professionnels, dont notamment l'Ordre des psychothérapeutes, tient à ce que les décrets qui seront pris respectent les particularités des différents groupes et ordres fusionnés ou intégrés. En effet, nous savons qu'on envisage de fusionner et d'intégrer des ordres et des groupes qui ont des formations totalement différentes, à la fois universitaires et collégiales, et des groupes qui ont des champs de pratique et des niveaux de responsabilité différents.

M. le Président, nous croyons que toute fusion serait vouée à l'échec si le décret ne respecte pas les différences de chaque groupe fusionné ou intégré dans un ordre, qu'il soit grand ou petit. Si on ne veut pas créer d'interminables chicanes internes au sein des nouveaux ordres qui seront créés par le projet de loi n° 406, il importe d'avoir cela à l'esprit. En conséquence, lorsque le consensus au sein des ordres et groupes concernés est présent, il est important que l'on procède rapidement à la fusion ou à l'intégration.

Néanmoins, agir rapidement ne veut pas dire n'importe comment. C'est pourquoi nous avons apporté cet important amendement au sujet des consultations obligatoires des ordres et groupes concernés. Avec cet amendement, le projet de loi n° 406 est maintenant capable de protéger l'intérêt du public plus adéquatement. Le public n'aura pas à souffrir d'éventuelles querelles internes amenées par une fusion trop hâtive dans laquelle tous les intéressés n'auront pas été entendus.

En conclusion, M. le Président, je dirai qu'il nous faut maintenant nous assurer que les fusions qui seront réalisées suite à l'adoption du projet de loi n° 406 seront souhaitées partout, c'est-à-dire par les ordres, les groupes et le public, et que ces fusions et ces intégrations nous donnent à long terme un système professionnel plus simple, plus accessible, plus moderne et qui réponde plus adéquatement aux besoins de la population. Et la protection du public est la première mission de l'Office des professions et de tous les ordres professionnels. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?


Mise aux voix

Comme il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre aux voix le projet de loi. Le projet de loi n° 406, Loi modifiant le Code des professions, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, le gouvernement, souhaitant procéder à l'adoption du projet de loi n° 433, je vous réfère à l'article 41 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 433


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à l'article 41 du feuilleton, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles propose l'adoption du projet de loi n° 433, Loi modifiant le Code des professions concernant le titre de psychothérapeute.

(12 heures)

Je vais céder la parole à M. le ministre de la Justice. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Dans ce cas-ci, étudiant ce projet de loi à la suite des autres, je pourrai être probablement beaucoup plus court.

Le but du projet de loi, c'est de réserver le titre de psychothérapeute aux gens qui seront formés et qui seront membres d'ordres professionnels, donc où il y aura des ordres professionnels qui s'assureront de leur adhésion à un code d'éthique, de leur intégrité, des recours, aussi, que le public pourra exercer contre ces professionnels qui seraient fautifs, de leur formation permanente, de l'inspection professionnelle et, enfin, de tout ce qu'assure le système professionnel pour maintenir la qualité de ceux qui exercent l'activité professionnelle.

Alors, je rappelle rapidement qu'il y a deux sortes de professions au Québec. Il y a des professions où un champ d'activité propre est réservé à ces professionnels: c'est le cas de la médecine, le plus classique; c'est le cas du Barreau où, par exemple, la représentation devant un tribunal est réservée uniquement aux avocats qui sont membres d'un ordre professionnel. Mais il y a aussi des ordres professionnels où tout ce qui est réservé, ce n'est pas l'activité, c'est le titre. Autrement dit, les gens peuvent parfaitement avoir recours à des gens qui prétendent être capables d'exercer cette activité en toute liberté, mais, s'ils veulent avoir recours à un professionnel bien formé et avoir les garanties du système professionnel, alors ils savent que seules certaines personnes peuvent porter ce titre. Je donne l'exemple qui s'applique bien ici, celui du psychologue. Pour s'appeler psychologue, au Québec, il faut être membre de l'Ordre des psychologues. Par contre, bien des activités qui sont faites par des psychologues ne sont pas protégées parce que les psychologues n'ont pas un champ protégé comme la médecine ou comme les avocats.

Dans le cas de la psychothérapie, je pense, M. le Président, qu'il fallait intervenir de ce côté-là. Ce titre est trop galvaudé actuellement. Je crois qu'il est utilisé dans bien des cas par des gens qui n'ont pas la compétence pour le faire, puis c'est quand même un domaine où, lorsque les gens réalisent qu'ils ont besoin de ce type de service, ils sont déjà, ils le reconnaissent eux-mêmes, dans un état de détresse qui peut affecter leur jugement et qui les rend aussi, dans bien des cas, vulnérables, vulnérables à l'exploitation de certains charlatans qui prétendraient avoir des moyens quasi magiques ou religieux de régler leurs problèmes et qui ne seraient, en fait, que des fumistes. Donc, je pense qu'il y a lieu, à cause de sa proximité peut-être avec d'autres titres, aujourd'hui, de protéger ce titre.

Maintenant, pour le protéger, nous avions un problème, c'est-à-dire que nous avions deux choix: nous avions le choix peut-être de créer un nouvel ordre des psychothérapeutes ou bien – et alors là il faut faire preuve d'imagination – de le protéger pour certaines professions déjà existantes. Quand on pense «psychothérapeute», je pense qu'il y a déjà deux professions qui nous viennent naturellement à l'esprit quand on ne connaît pas tellement ce domaine: ce sont les psychologues et les psychiatres. Les psychiatres sont des médecins, ce sont donc des professionnels, donc tout le monde reçoit la protection que donne le système professionnel quand on a recours à un psychiatre.

Mais on s'est aperçu aussi que non seulement il y avait les psychologues et les psychiatres, mais que, dans l'exercice d'autres relations d'aide, il y avait des professionnels qui avaient fait des études, qui étaient compétents à donner certains types de psychothérapie qui correspondraient vraiment à cette activité. C'est le cas, par exemple, de certains travailleurs sociaux. C'est le cas – on nous l'a fait remarquer – de certains ergothérapeutes. Les ergothérapeutes, comme vous le savez peut-être, sont ces spécialistes de la réadaptation par le travail. Ils prennent des gens qui ont été traumatisés à la suite d'un grand accident, qui ont perdu un membre, par exemple, ou dont un membre est paralysé, et ils les rééduquent à les rendre les plus fonctionnels possible. Alors, côtoyant, comme cela, des grands traumatisés physiques – ça s'accompagne souvent d'un grand traumatisme psychologique – certains ergothérapeutes ont cru bon de compléter leur formation en psychothérapie pour donner à leurs clients une aide plus complète. Bien, il serait injuste de ne pas leur permettre d'utiliser ce titre s'ils ont la formation requise. Alors, nous avons adopté ici quelque chose d'original que j'ai, en fait, noté plus précisément et que je vous expliquerai.

Alors, ce que vise ce projet de loi, ce sera de réserver, essentiellement, le titre de psychothérapeute à un certain nombre de professions où on sera convaincu qu'il s'y trouve des gens qui ont la compétence requise pour exercer cette activité et qui adhèrent, en plus, à un code d'éthique, dont on a des garanties sur leur intégrité et où le public a un recours si jamais ces professionnels étaient fautifs – donc, nous visons à réserver le titre de psychothérapeute aux détenteurs d'un permis spécifique délivré conformément à des normes de délivrance et de détention du permis – d'habiliter l'Office des professions du Québec à édicter ces normes par règlement après consultation des ordres concernés – je vous dis tout de suite que le projet de loi ne mentionne pas ces ordres, ce sera à l'Office des professions à les déterminer – d'habiliter les ordres professionnels visés au règlement à fixer par règlement des normes d'équivalence de la formation d'une personne qui ne détient pas de diplôme ou la formation requise suivant les normes de l'Office – parce qu'il y a aussi, nous l'avons constaté, dans cette profession des gens qui ont acquis l'expérience nécessaire pour exercer la psychothérapie, à la suite généralement d'études, parfois... généralement.. toujours à la suite d'études.

Mais il se pourrait que, quand nous édicterons le règlement, nous estimions que ces études devraient avoir un certain caractère et que certaines personnes se seraient donné simplement une partie de cette formation académique. Alors, nous leur donnerons nécessairement... Il serait illogique, quand elles sont compétentes, de les retirer immédiatement de la pratique, de ne pas leur permettre d'utiliser le titre lorsqu'elles exercent cette activité avec compétence et intégrité, mais on pourrait leur donner un certain délai pour compléter la formation académique que nous jugerons, pour l'avenir, essentielle. C'est ainsi que nous procédons, chaque fois d'ailleurs que nous avons formé une nouvelle profession, à l'égard des gens qui ont commencé à exercer cette activité. On leur donne toujours un délai pour rencontrer les exigences qu'auront à rencontrer les nouveaux candidats.

Nous viserons aussi à habiliter le bureau de chaque ordre visé au règlement à délivrer le permis de psychothérapeute conformément à ces normes. Alors, on comprendra que tous les membres d'un ordre ne pourront pas s'appeler psychothérapeute, seuls ceux dans cet ordre qui auront la compétence requise tel que jugé par l'ordre. Alors, tous les psychologues ne s'appelleront pas psychothérapeutes – quoique j'imagine que, dans ce cas particulier, peut-être que la majorité d'entre eux peuvent certainement rencontrer ces exigences. Tous les ergothérapeutes, par exemple, si l'Office décide que l'Ordre des ergothérapeutes peut réserver le titre de psychothérapeute, ne s'appelleront pas psychothérapeutes, seuls ceux qui en ont la formation. Et ainsi de suite. Le règlement peut aussi prévoir toute mesure de concordance ou utile à la mise en oeuvre de cette recommandation.

Finalement, je veux signaler une difficulté qu'on nous a présentée. Je veux rassurer tous ceux qui sont, par exemple, dans les traitements des toxicomanes. Il y a, ces dernières années, plusieurs types de maisons qui ont été créées pour traiter la toxicomanie. Parmi celles qui ont obtenu les meilleurs résultats avec les toxicomanes, très souvent, ce sont d'anciens toxicomanes réhabilités qui connaissent bien la problématique de la toxicomanie, les difficultés d'un toxicomane de se libérer, les moyens qu'il faut prendre, et qui gèrent dans ces institutions... Très souvent, d'ailleurs, encadrés par un personnel professionnel de médecins, de psychologues et de travailleurs sociaux, mais ce sont eux essentiellement qui aident à la thérapie du toxicomane pour le sortir de sa dépendance et l'amener à avoir une vie plus responsable.

Eh bien, ces gens pourront continuer même si, au fond, l'activité à laquelle ils se livrent pourrait correspondre à la définition de la psychothérapie. Comme seul le titre est réservé, ces gens pourront continuer à exercer l'activité qu'ils exercent actuellement avec profit pour les gens qu'ils traitent et pour la société en général. Parce que tout le monde reconnaîtra que sortir les gens de la dépendance de la toxicomanie est certainement une oeuvre sociale absolument remarquable. Et tous ceux qui s'y livrent avec dévouement ne méritent que notre admiration parce que c'est aussi très difficile.

(12 h 10)

Donc, ils n'ont absolument rien à craindre de ceci, parce que seul le titre de psychothérapeute... La seule chose, cependant, c'est que, s'ils n'ont pas la compétence académique, s'ils ne correspondent pas au règlement qui sera édicté par l'Office et par les différents ordres professionnels, ils ne pourront pas utiliser le titre de psychothérapeute, même si ce qu'ils font constitue d'une certaine façon de la psychothérapie. D'ailleurs, je ne crois pas actuellement que ces gens-là utilisent le titre de psychothérapeute. Ce n'est certainement pas la présence de ces maisons qui font une oeuvre remarquable qui nous a incités à protéger le titre de psychothérapeute. C'est plutôt d'autres types de charlatanisme qui rejoignent l'exploitation pure et simple de personnes en détresse ou de personnes en difficulté. Donc, je pense que ces gens doivent être rassurés.

J'ajoute enfin que cette législation n'a pas pour ambition de limiter la liberté du public de recourir à qui il veut en cette matière. Il sera toujours loisible au public de choisir son intervenant, réglementé ou pas. Toutefois, l'occasion aura été donnée clairement aux citoyens et aux citoyennes de s'adresser à des personnes offrant des garanties certaines de compétence et d'intégrité et des recours en cas de problème. C'est ça que vise la réserve d'un titre, par opposition à la réserve, si vous voulez, ou à la protection d'un champ d'activité.

Donc, essentiellement, ce projet de loi assurera maintenant le public que tous ceux qui publiquement utiliseront soit le titre de psychothérapeute, soit, comme le dit la loi, une abréviation pouvant laisser croire qu'il l'est... Bien, les gens pourront donc s'adresser avec confiance à un psychothérapeute, sachant que c'est un professionnel formé, compétent, intègre et, s'il ne l'était pas, contre lequel ils ont des recours s'il devait faire une certaine forme d'inconduite. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Le prochain intervenant sera M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui à l'occasion de l'adoption du principe du projet de loi n° 433, Loi modifiant le Code des professions concernant le titre de psychothérapeute; Bill 433, An Act to amend the Professional Code with respect to the title of psychotherapist. C'est à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'application des lois professionnelles que je vous apporte mes commentaires sur ce projet de loi.

M. le Président, les notes explicatives que l'on retrouve au début dudit projet de loi nous indiquent que celui-ci a pour but de faire en sorte qu'aucune personne ne puisse utiliser le titre de psychothérapeute à moins d'être un membre d'un ordre professionnel et qu'il devra être titulaire d'un permis validé à cette fin. On nous mentionne également que c'est l'Office des professions qui déterminera, par règlement approuvé par le gouvernement, quels ordres professionnels pourront délivrer ce permis et quelles seront les normes requises. Et, en dernier lieu, le projet de loi contient des dispositions relatives à la suspension et à la révocation des permis en question.

Comme j'ai mentionné tant de fois dans cette Assemblée, il est important de se rappeler que le Code des professions couvre 43 ordres professionnels qui, eux-mêmes, coordonnent les activités de 270 000 professionnels au Québec. Vous pouvez donc comprendre que chaque professionnel rencontre dans ses activités quotidiennes un très grand nombre de Québécois. Et, en conséquence, nous, comme parlementaires, avons une lourde responsabilité lorsque nous légiférons sur les dispositions du Code des professions.

Si le Code des professions est la pierre angulaire de notre système professionnel, sa raison d'être en est la protection du public. Nous devons toujours nous rappeler que la fonction principale de l'Office des professions est de s'assurer que chaque ordre professionnel respecte sa mission de protection du public. De là l'importance pour chaque ordre professionnel de voir à ce que chacun de ses membres rencontre les exigences de formation nécessaires, qu'il pratique en conformité avec les règlements de leur code de déontologie, qu'une formation continue leur est offerte et, finalement, de garantir aux usagers un droit de plainte auprès d'un ordre advenant le cas où ils ne seraient pas satisfaits avec les services rendus par le professionnel choisi.

Mr. Speaker, let us also be very clear. The main mission of the Profession Code is the protection of the public, and the first two paragraphs of the explanatory notes to the bill we are studying explain us that the bill is to regulate the use of the title of psychotherapist and that the bill provides that no person may use that title unless the person is a member of a professional order and the holder of a valid permit for that purpose.

Dans le document intitulé Le système professionnel québécois de l'an 2000 , l'Office des professions s'adresse au ministère en ces termes, et je cite: «L'Office croit à l'efficacité de la réserve du titre professionnel pour assurer la protection du public et entend veiller à ce que l'accent soit mis sur ce moyen privilégié pour que les ordres professionnels remplissent leur fonction essentielle. L'utilisation des titres professionnels par quiconque n'est pas membre de l'ordre concerné continuera donc d'être interdite et les mécanismes prévus concernant l'usurpation des titres seront maintenus. De plus, l'utilisation du titre réservé par un professionnel doit être strictement balisée. En effet, lorsqu'un professionnel utilise son titre, il annonce au public son identité et s'affiche comme appartenant au système, avec les garanties de protection que cela comporte.» Fin de citation.

And this is why, Mr. Speaker, in effect we will vote in favor of the bill before us. We must be concerned for individuals who might practice the activities of a psychotherapist whithout using the title. And the Professional Code, however, offers no protection for this, and although we would have preferred, in this Bill 433, the definition of the word «psychotherapist» and the relevant activities and functions attached to this profession, we will vote in favor of the passage of the bill, knowing that it protects the most vulnerable in our society.

Bill 433 also indicates that it is the Office des professions which will determine which professional orders can deliver the permit of psychotherapist. I question whether this is too wide a power to give to the Office without any form of consultation with the professionnal orders concerned. When we talk about consultation, of course, as I mentionned time and again, we talk about consultation in the formal sense.

M. le Président, un des principes de base de notre système professionnel est l'autonomie qui est conférée aux divers ordres professionnels agissant cependant en conformité avec les dispositions du Code des professions, sous la supervision de l'Office des professions et avec le Conseil interprofessionnel. Ils connaissent les besoins de leur profession beaucoup mieux que nous, et il faut se garder de la tentation de trop intervenir dans leurs affaires.

En fait, dans le document préparé par l'Office des professions dont je faisais mention, la première phrase du texte se lit ainsi, et je cite: «Le système professionnel québécois tel qu'on le connaît aujourd'hui s'est concrétisé en 1973 avec l'avènement du Code des professions et des institutions que cette loi créait. Le législateur confiait alors des responsabilités aux ordres professionnels par l'intermédiaire d'un système largement fondé sur le principe de l'autonomie des professionnels.» Fin de citation.

M. le Président, comme je le disais dans mon introduction, le projet de loi n° 433 prévoit également que c'est l'Office, par règlement, qui fixe les normes de délivrance d'un permis de psychothérapeute.

Il est clair que, par ce projet de loi n° 433, le ministre demande aux parlementaires de donner de vastes pouvoirs à l'Office des professions, un organisme bureaucratique qui relève de l'exécutif et non de l'Assemblée nationale. Je suis préoccupé par le fait que ce projet de loi donne beaucoup de pouvoirs à un organisme de l'exécutif sans qu'il y ait de comptes rendus sur le bien-fondé de ses décisions.

(12 h 20)

However, notwithstanding that this bill does not contain the definition of a psychotherapist and nothwithstanding that there are other deficiencies in this bill, we feel that it is a small step in the right direction to have the title of psychotherapist reserved and to provide that no person may use that title unless the person is a member of a professional order and the holder of a valid permit for that purpose, and that this bill will protect vulnerable members of our society.

La protection du public étant au coeur des préoccupations de l'opposition officielle, nous espérons que, par ce projet de loi, les personnes les plus vulnérables de notre société pourront être à l'abri de charlatans.

M. le Président, pour toutes ces raisons, malgré certaines réserves, nous voterons en faveur du projet de loi n° 433.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de D'Arcy-McGee. Je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin. Mme la députée.


Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je tenais à prendre la parole, parce que je me souviens du temps où j'étais dans l'opposition; j'étais porteuse du dossier de la toxicomanie et je me souviens qu'à ce moment nous réclamions beaucoup, nous, de l'opposition, un encadrement en ce qui concerne les psychothérapies, notamment dans le domaine de la toxicomanie. Et je me réjouis de voir qu'à ce moment-ci c'est mon propre gouvernement qui a donné lieu à un projet de loi pour favoriser un encadrement auprès de ces intervenants, et je pense qu'effectivement c'est intéressant de constater que l'opposition, qui est présentement le Parti libéral, évidemment, se rend compte de la nécessité d'un tel projet de loi et d'un tel encadrement pour le mieux-être de la population et pour le mieux-être aussi des gens qui ont besoin de services dans le domaine.

Alors, M. le Président, je tenais à souligner, en fait, le bien-fondé de ce projet de loi, mais surtout aussi à démontrer que notre gouvernement est capable de compassion et de comprendre la nécessité et l'urgence d'agir dans certains domaines. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin. Comme il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre au voix le projet de loi.


Mise aux voix

Le projet de loi n° 433, Loi modifiant le Code des professions concernant le titre de psychothérapeute, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Je me réjouis de la belle unanimité entre le ministre de la Justice et le député de D'Arcy-McGee. Comme disait Mme Bonaparte: «Pourvu que ça "doure"»!

M. le Président, nous souhaitons procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 447. Donc, je vous réfère à l'article 7 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 447


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 7 du feuilleton, M. le ministre d'État à la Métropole propose l'adoption du principe du projet de loi n° 447, Loi concernant certains équipements de la Ville de Montréal. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Merci, M. le Président. Alors, on comprendra que c'est avec beaucoup de plaisir qu'aujourd'hui je présente, au nom du gouvernement du Québec, à l'Assemblée nationale, ce projet de loi. C'est un projet de loi qui vise à régler certains des problèmes budgétaires, des problèmes financiers de la ville de Montréal et qui constitue pour la population de Montréal une excellente nouvelle, puisque, à toutes fins pratiques, par ce geste, le gouvernement du Québec va éviter que les Montréalais subissent des augmentations de taxes, en venant en aide à la ville de Montréal.

Pourquoi venir en aide à la ville de Montréal, M. le Président? On sait que, l'automne dernier, cette Assemblée a voté un projet de loi pour permettre à la ville de boucler son budget, en estimant des revenus, en escomptant des revenus ou des dépenses en moins pour tout près de 125 000 000 $. Certains pourront dire que, si on a dû faire ça, c'est parce que la ville de Montréal administre mal. Il y a une autre réalité, et le gouvernement en prend acte, qui est importante à saisir. C'est que la ville de Montréal, la métropole du Québec, un peu d'ailleurs comme la capitale – M. le Président, je pense que vous êtes de la région de la capitale – assume des rôles particuliers dans la vie sociale, économique, politique de l'ensemble du Québec et donc assume des responsabilités historiques qui, en quelque sorte, dépassent le rôle, les fonctions de ce que sont les rôles et fonctions d'une municipalité ailleurs au Québec ou même d'un municipalité régionale. Donc, ces fonctions, M. le Président, elles constituent un fardeau budgétaire important pour les contribuables, et ce que vient faire le gouvernement aujourd'hui, c'est de reconnaître cet état de fait, de donner aux contribuables montréalais un répit en attendant une réforme de la fiscalité qui est à venir – une réforme qui viendra, les discussions sont commencées entre le gouvernement du Québec et l'Union des municipalités – une réforme qui, elle, établira des règles sur une base plus permanente.

Notre gouvernement, M. le Président, avait pris un engagement au moment de la dernière campagne électorale. On se rappellera que M. Parizeau était venu à Montréal. On se rappellera également que, par la suite, le gouvernement, notamment le ministre des Finances, avait réitéré son appui à Montréal, un engagement de régler en quelque sorte un certain déficit de ressources pour Montréal, compte tenu des responsabilités, et c'est ce qu'on a appelé l'engagement à l'égard d'un pacte fiscal. Des gestes ont été posés, des gestes ponctuels, mais, aujourd'hui, le gouvernement, en créant cette société des équipements, cette Société Marie-Victorin qui va être appelée à gérer un certain nombre d'équipements montréalais, bien, le gouvernement apporte des solutions qui vont dans le temps s'inscrire particulièrement... dans un premier temps, à court terme, pour les trois prochaines années, régler des problèmes et, dans le temps, s'inscrire dans le cadre d'une réforme plus large.

Ce qu'il faut comprendre. Je pense que tous les gens qui nous écoutent, M. le Président, sont déjà allés au Jardin botanique de Montréal, probablement la plupart d'entre eux. Beaucoup de nos concitoyens, et je vois le député de Verdun, M. le Président, et je suis convaincu que certains de ses commettants de Verdun sont allés, par exemple, au Biodôme de Montréal, vont à l'occasion dans le Parc des Îles, vont sur le mont Royal, ou encore sont allés à l'Insectarium, qui est un magnifique équipement, où les jeunes des écoles de la grande région de Montréal passent. Et ce qu'on peut se dire, c'est que, à l'évidence, voici un certain nombre d'équipements, d'activités dont les coûts, historiquement, ont été assumés par les seuls contribuables montréalais mais qui desservent bien plus largement des besoins de l'ensemble de la population non seulement de Montréal, non seulement de Verdun – je vois ma collègue de Pointe-aux-Trembles, qui fait maintenant partie de Montréal – mais qui desservent aussi, je pense, dans certains cas, même les résidents de tout le Québec. Ce n'est pas rare que les gens de Québec vont aller, par exemple, au Jardin botanique. C'est un des grands jardins botaniques du monde. Donc, à l'évidence, ça a commencé il y a bien des années, ces responsabilités, à une époque où Montréal, en quelque sorte, la ville de Montréal, l'administration municipale de Montréal constituait à toutes fins pratiques l'agglomération urbaine. Et puis, avec les années, bien, on sait que ça s'est développé. L'agglomération urbaine de Montréal, ce n'est plus que la seule ville de Montréal, et, pour autant, ces grands équipements sont demeurés à la charge des seuls Montréalais.

Donc, qu'est-ce que fait le gouvernement du Québec? Il prend acte, d'une part, que les ressources de Montréal sont en quelque sorte insuffisantes pour assumer la totalité des responsabilités. Il prend acte également que certaines de ces responsabilités ont une portée supralocale. Il n'y a pas beaucoup de municipalités au Québec, par exemple, qui ont un jardin botanique. Je pense qu'il n'y a que Montréal qui a ça. Alors, ce n'est pas, à l'évidence, ce qu'on peut appeler une responsabilité municipale, une responsabilité locale. C'est dans son rôle de métropole du Québec que Montréal a eu à développer ça. C'est un équipement qui nous appartient, un peu à tout le monde. Ça fait partie de notre patrimoine, à tout le monde. Donc, le gouvernement prend acte de ça et a trouvé le moyen de combiner ces deux constats pour régler des problèmes à Montréal.

(12 h 30)

Alors, qu'est-ce qu'on fait concrètement? On se rappelle que, dans un premier temps, cette Assemblée ayant permis l'automne dernier à la ville de Montréal de boucler son budget en estimant des revenus en plus ou des dépenses en moins de l'ordre de 125 000 000 $ – on est loin d'être resté inactif depuis ce temps-là... Alors, dans un premier temps, avec l'apport et l'appui du milieu syndical, le gouvernement est venu en appui. La ville de Montréal a réglé un premier 72 000 000 $ du 125 000 000 $ qui était dans son manque à gagner. Comment elle l'a fait? Par des ententes avec les syndicats sur les conventions collectives pour les trois prochaines années, puis, en même temps, on a réussi, à travers cet exercice, à régler aussi ce fameux problème du milliard de dollars de déficit actuariel des caisses de retraite qui traînait dans le décor comme une épée de Damoclès sur les finances de la ville de Montréal. On sait que c'était à payer pour les 20, 30 prochaines années. Bien, à travers ces négociations, on a pu régler ça. Mais on avait réglé une première partie, on l'avait dit. Une partie des solutions appartient aux employés de Montréal. Il y avait un effort à faire là. Ça a été fait, ça a été négocié.

Mais il restait 53 000 000 $, M. le Président, à régler, et visiblement la ville de Montréal n'y arrivait pas seule. Quand on regarde, par exemple, le verglas qui a eu lieu au mois de janvier, c'est évident que les coûts de ce verglas ont été élevés pour Montréal. Les revenus ne rentraient pas toujours. Par exemple, pendant ce même verglas, on l'a vu dans les journaux, les contraventions ne sont pas rentrées au rythme prévu. Donc, les revenus de la ville étaient inférieurs. Il fallait donc trouver avec la ville de Montréal une solution, idéalement une solution permanente, pour tenir compte de ces difficultés puis tenir compte aussi de ces obligations particulières de la métropole.

Alors, qu'est-ce qu'on a fait, M. le Président? Aujourd'hui, le gouvernement, par le projet de loi, livre la marchandise, règle ce qu'il a dit qu'il réglerait. Rappelez-vous, l'automne dernier, je me souviens que l'opposition avait dit: Budget virtuel, ça n'a pas de bon sens. Aujourd'hui, ce qu'on constate... Ils avaient voté quand même pour, M. le Président. Il y avait des gens en avant – je pense que le député de Verdun doit être un de ceux-là – qui ne sont pas contre appuyer Montréal. Ils vivent tout près de Montréal, ils savent bien les difficultés. Leurs commettants y sont souvent, d'ailleurs tous les jours. Alors, on avait dit: Est-ce qu'on va être capable d'y arriver?

Aujourd'hui, M. le Président, ce qu'on fait par le projet de loi, c'est qu'on boucle la boucle et on conclut pour faire en sorte que les revenus et les dépenses soient en équilibre. Comment on fait ça? Ce qu'on propose, c'est ceci. C'est de créer une société de gestion qu'on appelle la Société de gestion Marie-Victorin, qui va être créée par la loi, et qui prévoit que la ville de Montréal va transférer dans cette Société l'ensemble de ces actifs que constituent le Jardin botanique de Montréal, le Biodôme, l'Insectarium, le Planétarium, qui sont de grands équipements scientifiques qui ont justement cette portée extramunicipale. On va donc les transférer à cette Société.

On va trouver un partenaire, M. le Président, qui va prendre une part des actions, pour 53 000 000 $ pendant trois ans, donc pour 160 000 000 $. C'est le montant de l'aide du gouvernement à la ville de Montréal. Et le gouvernement va se porter non seulement garant, mais va assumer le service de dette du 160 000 000 $ pour cet organisme, pour être capable d'acquérir de la ville de Montréal une partie des actifs. Par ce chemin, ce qu'on permet à la ville de Montréal, c'est d'équilibrer son budget pour les trois prochaines années.

Parallèlement à ça, pendant ce temps-là, les discussions se poursuivront entre le gouvernement et l'ensemble des municipalités, l'Union des municipalités du Québec – la ville de Montréal sera là – quant à la réforme de la fiscalité municipale. Ce qui fait qu'on fait, en quelque sorte, un pont entre la situation présente et la situation à venir où toutes ces questions seront débattues, qui sont sur la table. Justement, il y aura des arrangements, des négociations, et on peut penser que, à l'avenir, parmi les solutions plus permanentes, que ce soit pour la capitale ou que ce soit pour la métropole, à travers la réforme de la fiscalité, on sera amené éventuellement à reconnaître certains de ces éléments ou, à défaut de reconnaître ces voies-là, de trouver d'autres solutions aux problèmes budgétaires, notamment de Montréal.

Donc, on prend ces équipements-là parce que ces équipements-là ont vraiment une portée extraterritoriale à Montréal. Deuxièmement, on trouve un partenaire qui s'associe à la ville de Montréal et le gouvernement se porte garant du remboursement de l'achat des actions. Ce faisant, on permet à la ville de boucler son budget. On se donne le temps de faire la réforme et on évite aussi, c'est bien évident, par ce chemin, M. le Président, de déstabiliser les finances du Québec. Alors, dans le fond, on réussit d'une pierre non seulement deux coups, je dirais trois coups, et on règle un certain nombre de problèmes.

M. le Président, le temps passe, deux ou trois éléments supplémentaires. D'abord, il est bien clair dans l'esprit du gouvernement que ces équipements devront rester des équipements à caractère public. Il n'est pas question de transformer la vocation de ces équipements. Il font partie du patrimoine non seulement montréalais, mais du patrimoine, je l'ai dit, de toute la région et même de tout le Québec. Donc, c'est bien évident que le partenaire qui sera trouvé – le projet de loi prévoit que le gouvernement le choisira – sera un organisme sans but lucratif qui s'associera à la ville dans le sens de la promotion de ces équipements. Ça, c'est très clair dans notre esprit.

Deuxièmement, le projet de loi prévoit que c'est la ville de Montréal, ce sont ses employés qui continueront, à travers un contrat de services, à assumer la gestion quotidienne de ces équipements. La ville de Montréal y demeure majoritaire.

Troisièmement, M. le Président, le projet de loi prévoit, et là on rentre un peu plus dans la technique, que la valeur utilisée pour la transaction est de 65 000 000 $, qui est la valeur aux livres moins la valeur du Biodôme. On se rappellera, M. le Président, que le gouvernement du Québec avait fait cadeau du Biodôme à Montréal. Donc, on a exclu cette somme-là de la valeur aux livres. La valeur réelle des équipements dépasse largement ce 65 000 000 $. La valeur de remplacement, c'est plutôt 450 000 000 $, M. le Président. Mais, pour un certain nombre de raisons administratives comptables, il fallait prendre la valeur aux livres pour assurer que la ville reçoive ces revenus et que le gouvernement également puisse enregistrer tout ça sans déstabiliser son propre budget.

Ce qui est très clair, c'est que, advenant la dissolution de cette nouvelle Société de gestion, la Société Marie-Victorin, en l'honneur du fondateur du Jardin botanique... Si cette Société devait être dissoute, il est très clair qu'à ce moment-là les actifs retournent à la ville de Montréal, donc demeurent dans le patrimoine public de Montréal.

M. le Président, ce faisant, en quelque sorte, qu'est-ce qu'on fait? Et c'est en conclusion. Bien, le gouvernement respecte un engagement qu'il avait pris à l'égard des Montréalaises et des Montréalais, confirme un pacte fiscal qui, pris ensemble, permettra d'assurer des revenus annuels à la ville de Montréal pour les prochaines années de l'ordre de tout près de 85 000 000 $, 53 000 000 $, dans ce cas-là, plus un autre 30 000 000 $ récurrent, donc respecte ses engagements; permet à la ville de boucler son budget pour cette année et les prochaines années; confirme le choix que nous avions fait en faisant adopter la loi à l'automne dernier; trouve un chemin concret, un outil, un projet, à travers cette Société de gestion des équipements, pour reconnaître, et je pense que c'est un acquis important, certaines responsabilités propres à une métropole et pour trouver, pour ces responsabilités-là, des façons d'appuyer Montréal et de soulager la fiscalité de Montréal.

Il faut se le rappeler, la fiscalité de Montréal est beaucoup plus lourde que la fiscalité de ses voisins. C'est sûr, M. le Président, que parfois on dit: Il y a des gestes qui ont pu être posés dans le passé qui n'ont peut-être pas toujours été les bons. Peut-être que l'administration de Montréal a erré, à l'occasion, comme toute administration. Et c'est pourquoi aussi le gouvernement, quand il fait cette entente avec Montréal – ce n'est pas dans le projet de loi, mais ça a été dit, ça a été annoncé – a demandé également à la ville de Montréal de lui produire un plan de redressement de ses finances, de garantir, en quelque sorte, que l'équilibre budgétaire serait atteint, de telle sorte que l'action du gouvernement s'inscrive dans une dynamique qui règle vraiment des problèmes pour maintenant et pour l'avenir.

Moi, M. le Président, j'ai confiance, avec ce projet de loi – et j'espère que nous aurons l'appui de l'opposition – que non seulement on livre la marchandise, que non seulement on règle des problèmes, mais, en même temps, qu'on établit les bases d'un règlement à plus long terme et que ce règlement s'inscrira définitivement dans le cadre de la réforme fiscale.

Et donc, je souhaite, bien sûr, que nous ayons tout l'appui nécessaire de l'opposition, particulièrement du député de Verdun, puisque je sais que beaucoup de ses commettants adorent aller au Jardin botanique de Montréal, j'en rencontre régulièrement, notamment à l'Insectarium ou, par exemple, au Jardin botanique. Et je suis convaincu qu'il souhaite comme moi que ces équipements-là demeurent à la disposition de toute la population, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État à la Métropole. Je vais maintenant céder la parole – tout le monde attend – à M. le député de Verdun. Je vous cède la parole, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: M. le Président, merci. D'emblée, c'est vrai qu'il y a des résidents de ce qu'on appelle les villes de banlieue qui utilisent les équipements montréalais. Je me permets, et c'est une boutade, de lui rappeler que, par exemple, à Verdun, il y a la piste cyclable, le long des rapides, qui est le pôle touristique des rapides, qui est gérée par la ville de Verdun, la ville de LaSalle et la ville de Lachine, et qui, elle aussi, a beaucoup de cyclistes qui viennent de la ville de Montréal et que peut-être un équilibre ou une révision de la fiscalité... aurait lieu d'être révisée.

(12 h 40)

M. le Président, avant de rentrer sur le fond du projet de loi, parce qu'on pourrait longtemps se donner des exemples dans ce sens-là, lorsqu'il parle de sa volonté de réviser la fiscalité municipale, je voudrais qu'il n'oublie pas quand même le regroupement des maires de banlieue. Je lui rappellerai que l'UMQ ne représente pas les 27 maires de la banlieue de Montréal. Ils ne sont pas représentés. Je vois le député d'Anjou, son maire doit le lui avoir dit aussi. L'UMQ en aucune manière n'est habilitée à parler au nom des maires de la banlieue de Montréal et elle n'est pas le porte-parole acceptable pour pouvoir être en mesure de discuter d'une révision de la fiscalité municipale sur Montréal. Et je pense qu'il serait temps que le gouvernement puisse parler et, bien sûr, avec la ville de Montréal et avec le regroupement des maires de banlieue.

Ceci étant dit, M. le Président, l'opposition se trouve dans une situation extrêmement délicate, et je vais vous expliquer pourquoi. Nous avons été en désaccord avec le projet de loi qui créait ce qu'on appelait le «budget virtuel de Montréal», l'autorisation d'avoir un déficit de 125 000 000 $ dans le budget de la ville de Montréal, en décembre dernier. On disait – le gouvernement: Nous allons vous trouver des solutions pour régler ce problème-là. Le problème, c'est que la solution qui est mise de l'avant, d'après nous, est une solution toute bancale, toute croche, mais c'est la seule qu'il mette de l'avant.

Alors, le choix dans lequel se trouve l'opposition, c'est soit de dire aux contribuables montréalais: Assumez par une augmentation de taxes le 53 000 000 $ manquant, ou suivez le projet de loi croche et bizarre mis de l'avant par le gouvernement. Alors, devant ce choix et parce que nous sommes une opposition responsable, parce que nous ne voulons pas qu'il y ait une augmentation du fardeau fiscal des Montréalais et bien que nous ne croyions pas à la validité de la solution proposée, nous allons voter en faveur du projet de loi. Mais, et je mets tout de suite en garde le ministre ici, nous allons démontrer à quel point son projet de loi ne tient pas debout.

Vous me permettez, M. le Président? Je commence. Rappelons tout de suite qu'il y avait 125 000 000 $. Par des ententes avec la CUM et les employés de la ville de Montréal, on a réussi – bon, on peut discuter – à assumer entre 71 000 000 $ et 72 000 000 $, et il y a ce manque à gagner d'environ 53 000 000 $ par année récurrent. On aurait pu avoir un transfert de fonds, et on a trouvé – et je vais vous en parler dans un instant – cette situation d'une complexité à s'arracher les cheveux, et on verra.

Mais ce n'est pas tout. On a appris dans un article du Devoir , par exemple, du 4 juin dernier qu'il y a un trou supplémentaire de 29 000 000 $ dans la ville de Montréal, c'est-à-dire que le budget ne serait pas réglé avec ce 53 000 000 $. Je vois le ministre qui dénie cette information. On aura probablement l'occasion, en commission parlementaire, de clarifier ces choses-là, parce que l'impression, avec cette tutelle qui est imposée à la ville de Montréal, enfin virtuelle, je comprends bien – on est tout à fait dans le virtuel dans ce projet de loi – l'annonce qui nous est faite, c'est que, malgré cette injection de 53 000 000 $, parce que les rentrées n'ont pas été ce qu'on escomptait, il resterait un trou de 29 000 000 $.

Maintenant, M. le Président, il faut bien comprendre, hein? Une fois qu'on a compris qu'il y a un effort que le gouvernement du Québec va essayer de faire pour la ville de Montréal – et on s'entend que c'était nécessaire de le faire – on aurait préféré qu'on ait quand même une véritable réforme de la fiscalité municipale sur Montréal plutôt que cette affaire un peu bizarre. Et, moi, j'aime ça écouter ce que le ministre dit, puis, quand je lis dans les textes, je ne vois pas nécessairement la même chose.

D'abord, c'est bien beau de parler de Montréal dans une abstraction. Tout le monde sait que Montréal va être en élection au mois de novembre. Ça va? Tout le monde le sait, y compris les députés ministériels. M. le Président, la proposition qui est faite: on crée une société. Dans cette Société, vous remarquez bien, le comité exécutif va nommer les représentants de la ville sur le conseil d'administration de la Société, avec un mandat d'au plus trois ans. Alors, voyez-vous la situation? Cette administration municipale qui peut-être est en fin de mandat va avoir à nommer pour trois ans les gestionnaires de la Société. C'est ce que j'ai cru comprendre à la lecture du projet de loi. On me dit non, mais...

C'est bien beau qu'on me dise toujours non, mais, moi, je lis ce qui est écrit. C'est écrit là. Écoutez, monsieur... On me dit non? Bien, je vais vous le lire, l'article, si vous voulez. C'est très drôle. «Le conseil d'administration de la Société est composé de sept membres dont quatre sont nommés par le comité exécutif de la ville de Montréal.» Après, un peu plus loin, il est dit que leur mandat est d'au plus trois ans. Article 3 et article 8 du projet de loi. Je lis mes projets de loi, je vous signale. Je ne fais pas seulement qu'écouter le ministre, je les lis.

Ça, c'est déjà une situation un peu bizarre où on va se retrouver à voir... Les gens qui siègent au conseil d'administration de la Société auront été nommés par l'administration actuelle de Montréal qui peut-être risque de ne pas être la future administration de Montréal. Je ne présume pas le jugement des Montréalais. Premier truc bizarre à l'intérieur du projet de loi.

Ensuite, vous avez cette situation où vous transférez, à cette nouvelle Société qu'on crée, des actifs, et je n'en disconviens pas, les actifs scientifiques de la ville de Montréal, l'Insectarium, le Jardin Botanique, le Biodôme et le Planétarium, qui ont une valeur de remplacement importante mais qui ont aussi une valeur de terrains importante. Il ne faut pas oublier ça. Et particulièrement un terrain qui est en train de prendre énormément de valeur.

Le ministre doit savoir que le terrain du Planétarium, compte tenu des stratégies de développement au centre-ville de Montréal, va devenir un terrain de plus en plus attrayant, si je puis dire, pour les promoteurs fonciers de Montréal. Je ne veux pas qualifier, mais il est possible que ce terrain, à lui seul, vaille plus que ces 450 000 000 $. Le Planétarium, comme vous le savez, est un équipement scientifique qui n'est pas nécessairement... qui peut-être a besoin d'être remis à date, disons, qui date un peu. Alors, on me dit: La Société va continuer à gérer ces actifs. Oui, mais est-ce qu'elle ne pourra pas les vendre ou les hypothéquer? Ce n'est pas marqué à l'intérieur du projet de loi. Donc, inquiétude.

Ensuite, vous avez cette espèce de solution absolument bizarre du partenaire miracle. Alors, il faut bien être conscient comment ça va fonctionner. Et ça, c'est seulement le dernier article. C'est magnifique, dans ce projet de loi, M. le Président – vous l'avez dans les mains, je vous suggère de le lire avec moi, c'est l'article 40 – parce qu'on parle d'une personne morale à but non lucratif, non identifiée, etc., qui peut convenir avec le gouvernement du Québec de réaliser un emprunt de 160 000 000 $. Donc, on va avoir une personne morale, qu'on ne connaît pas encore, à but non lucratif – il y a beaucoup de gens à but non lucratif, je ne sais laquelle, mais enfin – qui va pouvoir acquérir de la ville les actions entièrement, et c'est la personne morale qui va redonner le 53 000 000 $. Par contre, elle empruntera le 160 000 000 $ avec la garantie gouvernementale.

En termes de gestion des finances publiques, M. le Président, et de transparence des finances publiques, c'est loin d'être évident. Il faut bien que vous compreniez. Au lieu de dire: Le gouvernement décide aujourd'hui... Et ça aurait été un choix qu'il aurait pu faire, un choix qui aurait été limpide et transparent, de dire: On s'est engagé à soutenir la ville de Montréal. Il y a un déficit de 53 000 000 $. Nous allons faire un transfert de fonds, du fonds consolidé à la ville de Montréal, de 53 000 000 $. Et, en échange, la ville de Montréal donnera en garantie les équipements scientifiques, qui, je n'en disconviens pas, sont utilisés par plusieurs personnes qui ne sont pas nécessairement des contribuables de Montréal, et ça, je comprends l'analyse qui a été faite par le ministre.

(12 h 50)

Là, on crée une société. On la crée de toutes pièces. À cette Société la ville de Montréal transfère les équipements scientifiques qu'on a énumérés tout à l'heure. Ensuite, il y a un partenaire qu'on ne connaît pas encore, mais on sait seulement qu'il est à but non lucratif. Mais le partenaire, il aura le droit d'emprunter 160 000 000 $. Il ne pourra pas évidemment emprunter lui-même. Donc, le gouvernement va dire aux institutions prêteuses: Voici, vous allez pouvoir emprunter 160 000 000 $. Je vous garantis le prêt de 160 000 000 $. Avec votre 160 000 000 $, vous allez devenir partenaire et actionnaire de la nouvelle Société, qu'on crée ici, qui est la Société Marie-Victorin.

Regardez la simplicité. Je suis sûr qu'une bonne partie des gens qui nous écoutent ont déjà perdu le fil. Ils vont devenir sociétaires de la nouvelle Société Marie-Victorin, et là ils pourront rembourser ce que la ville de Montréal a mis dans la Société sous forme d'équipements, à savoir les équipements scientifiques, Biodôme, Jardin botanique et Planétarium, à raison de 53 000 000 $ par année. Comme transparence, vous reviendrez. Je suis sûr, M. le Président, que vous voyez tout de suite une grande transparence. Je résume pour vous pour que vous compreniez bien, là.

Alors, au lieu d'avoir quelque chose de simple où on aurait dit: La ville met en garantie ses équipements scientifiques et le gouvernement, en échange, lui transfère 53 000 000 $ par année, ce n'est pas ça du tout. On crée aujourd'hui une société, la Société Marie-Victorin, dont la ville va devenir actionnaire et majoritaire, nommée par le comité exécutif, mais nommée... et majoritaire. Elle amène comme actifs dans sa Société ses équipements scientifiques. Donc, ça, c'est la contribution de la ville.

On va chercher un autre partenaire qu'on ne connaît pas encore, et j'aimerais le connaître. Ce partenaire, Bon Dieu!, arrive de bonne foi. Il arrive comme un cheveu sur la soupe. Il n'a pas une cent, mais on lui dit: Le gouvernement va vous dire: Vous allez pouvoir emprunter et je garantirai votre prêt de 160 000 000 $. Et là il redonnera, année par année, 53 000 000 $ à la ville de Montréal.

Entre-temps, je me permets de dire au ministre que, quand il a dit: La ville de Montréal continuera à gérer les équipements, ce n'est pas tout à fait ça qui est mis dans son projet de loi. Je m'excuse de vous le dire, M. le Président, ce n'est pas ça qui est dit dans le projet de loi. Il est dit: La nouvelle Société pourra conclure des ententes – si elle n'a pas le goût de conclure des ententes, elle ne conclura pas des ententes – avec la ville de Montréal quant à la gestion de cesdits équipements. C'est bien différent que de mettre dans le projet de loi: La ville de Montréal continuera à gérer les équipements, ou de dire: La nouvelle Société ou...

Je me permettrai de vous rappeler que les représentants au conseil d'administration de la nouvelle Société seront nommés: quatre qui viendront de la société fantôme, de la société miracle, enfin de la société à but non lucratif inconnue jusqu'à maintenant, qu'on ne connaît pas, qui va venir, dans un geste de gentillesse, garantir un prêt de 160 000 000 $; et, de l'autre côté, des gens qui sont nommés par l'administration actuelle, qui ne sera peut-être plus l'administration future. On ne sait jamais. Dans une période électorale, vous savez, M. le Président, il peut y avoir, des fois, des changements d'administration. Ça, c'est une possibilité. Et, dans ce cas-là, on pourrait se retrouver dans cette situation où l'administration de la Société a été nommée par le maire actuel de Montréal, qui ne sera plus le maire dans six mois ou dans huit mois.

Donc, M. le Président, un projet de loi ou une structure d'une complexité, d'une lourdeur, d'un manque de transparence, je dirais, évident. Et je vous l'ai résumé, ce n'était pas simple, vous l'avez compris vous-même, pas simple à comprendre pour le simple des mortels.

Néanmoins, M. le Président, néanmoins, parce que nous n'avons pas le choix... Et je le redis, je l'ai dit au début de mon intervention: Nous n'avons pas le choix. Nous n'avons pas le choix parce que, pour l'opposition, c'est quoi? Voter contre ce projet de loi, et elle peut le faire. En règle de procédure, nous pourrions même empêcher l'adoption du projet de loi, parce que ce projet de loi a été déposé après le 15 juin. Nous pourrions empêcher l'adoption de ce projet de loi et nous créerions à ce moment-là immédiatement, sur le dos des contribuables montréalais, un poids et une obligation de taxation que nous ne voulons pas faire.

Alors, nous sommes pris aujourd'hui, M. le Président, avec quoi? Avec le choix entre la peste et le choléra, c'est-à-dire entre devoir taxer, participer à obliger la ville de Montréal à taxer nos concitoyens, ou accepter ce projet de loi mal ficelé, tout croche, qui crée une société qui n'a pas de bon sens, non transparent. Mais, M. le Président, entre la peste et le demi-choléra, nous allons choisir le demi-choléra parce qu'il y a peut-être une cure possible, en étude article par article, qui nous permettrait de clarifier ces questions-là.

Et soyez sûr que, en commission parlementaire, l'opposition va être vigilante pour tâcher de rendre transparent ce projet de loi, de faire en sorte que la société fantôme, miracle, la société qui arrive soit clairement identifiée, par exemple, qu'on ne lie pas la future administration de Montréal dans ce projet de loi, qu'on soit clair, que la question du 29 000 000 $ soit clarifiée par le ministre, qu'on ne vienne pas refaire une deuxième transaction régulièrement comme ça, transfert des actifs à cette Société, parce qu'on pourrait continuer. Après, à la fin, ce serait l'hôtel de ville de Montréal. On pourrait aussi le confier à la Société pour le gérer, ce serait une possibilité, dans ce cadre-là.

Alors, M. le Président, vous comprenez donc, parce qu'il y a une possibilité d'améliorer le projet de loi et parce que l'opposition va être farouchement... toute augmentation de taxes pour les contribuables montréalais, nous allons voter en faveur d'un projet de loi que nous n'aimons pas, que nous n'aimons pas, que nous n'aimons pas. Mais, parce que nous allons essayer honnêtement de l'améliorer, parce qu'il en va du devenir des citoyens de la ville de Montréal, alors c'est avec beaucoup de réserves, beaucoup de difficultés que je vais voter en faveur de ce projet de loi.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Il n'y a plus d'autres intervenants?


Mise aux voix

Je mets aux voix le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi n° 447, Loi concernant certains équipements de la Ville de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Boulerice: Oui. M. le Président, M. le député de Verdun a ressuscité une phrase célèbre d'un politicien: J'étais pour, mais vous avez lu dans mes yeux que j'étais contre, ou l'inverse.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: Ceci étant dit, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, de façon à permettre à mes collègues de part et d'autre de cette Assemblée de retourner dans leur circonscription auprès de leurs concitoyens et concitoyennes, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au mardi 9 juin 1998, à 10 heures.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée. Très bien. Alors, nous ajournons nos travaux à mardi prochain, 10 heures.

(Fin de la séance à 12 h 58)


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